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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 4 juin 1996 - Vol. 35 N° 9

Consultation générale sur la Loi sur les valeurs mobilières


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
M. Jacques Baril, président
Mme Diane Barbeau, présidente suppléante
M. François Gendron
M. Jean Campeau
M. Rosaire Bertrand
* M. Yves Michaud, Association Trugécan
* M. Richard Pelletier, idem
* M. Pierre Viau, idem
* M. Jean Martel, Commission des valeurs mobilières du Québec
* M. Yves Millette, ACCAP
* M. Denis Savard, AIAPQ
* M. Jean Morin, ACCOVAM
* M. Luc LaRochelle, idem
* M. Mario Deschamps, ministère des Finances
* M. Claude Beauchemin, RCCAQ
* Mme Claudette Carrier, idem
* M. Pierre Thérien, idem
* M. André Bois, idem
* M. Serge Alary, Le Groupe Dubeau
* M. Pierre-A. Hébert, idem
* M. Gaétan Plante, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quatorze heures trente-six minutes)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, mesdames, messieurs. La commission du budget et de l'administration entreprend cet après-midi une consultation générale et des auditions publiques pour étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières.

Avant de procéder, je demanderais à M. le secrétaire s'il y a des remplacements qui lui ont été suggérés.

Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. L'ordre du jour, tel qu'établi après entente entre les groupes parlementaires, se lit comme suit... Il y a toutes les remarques préliminaires, après ça, chaque organisme est inscrit à l'ordre du jour. Vous ne me demanderez pas de tout répéter ça, vous l'avez vu. Je pense que c'est...

Est-ce que l'ordre du jour, tel que présenté, est adopté par les membres? Oui?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous rappelle les règles de l'audition telles que convenues entre les groupes parlementaires. La période de déclarations d'ouverture durera 30 minutes réparties de la façon suivante: 15 minutes pour le ministre d'État de l'Économie et des Finances; 15 minutes pour le porte-parole de l'opposition officielle concernant les finances.

La durée totale de l'audition des organismes entendus aujourd'hui sera répartie de la façon suivante: une heure, soit 20 minutes pour l'exposé du mémoire et 40 minutes pour les échanges avec les parlementaires, dont 20 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement et 20 minutes pour l'opposition. Bien entendu, si nos invités peuvent présenter leur mémoire en dedans de 20 minutes, il restera plus de temps pour les questions. Le temps de parole des députés sera de 10 minutes, en respectant la règle de l'alternance dans les interventions.


Remarques préliminaires

Donc, est-ce que, M. le ministre, vous avez des déclarations d'ouverture ou des remarques préliminaires à faire?


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): Oui, M. le Président, j'ai quelques remarques préliminaires, la première étant de vous dire que je suis de nouveau très heureux d'être devant votre commission que vous présidez avec talent et convivialité. J'espère, comme vos présences antérieures, avec la participation intense de l'opposition, que nous pourrons avoir une meilleure compréhension des sujets importants qui nous sont soumis dans la documentation, mais aussi dans les présentations que des citoyens et des citoyennes regroupés en associations viennent nous faire.

Alors, je procède avec ces remarques...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, M. le ministre.

M. Landry (Verchères): ...pour vous dire que la présence d'un marché financier bien organisé, structuré et crédible est essentielle au développement de toute économie. Le Québec, je le rappelle, constitue la dix-neuvième plus grande économie du monde. Le Québec est la dix-neuvième puissance économique de la terre. Vous connaissez cette classification, les États-Unis sont premiers, bien entendu, le Japon est deuxième, l'Allemagne est troisième, la France est quatrième. Il y en a toute une série et il y a le Québec au dix-neuvième rang, c'est-à-dire celui de l'Autriche, à peu près, ou de la Suède, qui sont des puissances moyennes ou petites mais non pas mineures. Le Québec se situe donc, par son marché financier dont nous allons parler maintenant, dans cette catégorie.

Il est donc impératif, si on veut que cette économie continue à progresser, que sa législation dans le domaine financier soit moderne et demeure adaptée aux moyens de notre société. Le secteur financier, dit-on, constitue le poumon d'une économie, et je crois que c'est vrai. Ainsi, l'exercice que nous entreprenons aujourd'hui est capital, puisqu'il touche un organe vital du grand appareil économique. Il nous permettra de finaliser la réflexion entreprise sur le secteur des valeurs mobilières, avec le dépôt en décembre 1993, vous vous en souviendrez, du «Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les valeurs mobilières», lequel s'est poursuivi par son document d'accompagnement d'avril 1996 qui s'intitule, lui, «Décloisonnement et globalisation: s'adapter aux nouveaux enjeux».

Je remercie tous les intervenants qui ont produit des mémoires, particulièrement ceux qui participent à cette commission et ceux qui sont là avec nous. Nous aurons l'occasion de discuter avec eux dans les heures qui viennent. Les commentaires que nous recevrons et les échanges que nous aurons permettront, je l'espère, de passer à l'étape suivante, c'est-à-dire de traduire en termes d'action et de législation le fruit des réflexions que nous mènerons ici.

La Loi sur les valeurs mobilières, comme, du reste, les autres lois québécoises applicables au secteur financier, constitue un instrument permettant d'assurer la stabilité et l'efficacité du secteur financier québécois, deux conditions essentielles pour que ce dernier constitue un outil de développement adapté aux besoins d'une économie moderne. Nous devons donc profiter de l'occasion qui s'offre à nous pour discuter de thèmes fort importants pour le Québec, dont celui de la compétence exclusive des provinces en matière de valeurs mobilières et, considérant la forte intégration de nos marchés avec ceux de l'espace économique canadien, celui de l'harmonisation de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec avec celles des autres provinces du Canada, dans le contexte plus global de l'ensemble des marchés organisés de capitaux dans le monde.

(14 h 40)

Quant à la compétence exclusive des provinces, M. le Président, j'indiquerai d'entrée de jeu que, si le système actuel de réglementation en valeurs mobilières n'est pas parfait, la concurrence constructive des différentes juridictions permet une grande souplesse et une meilleure réponse aux besoins ainsi qu'aux changements. Ces avantages déjà démontrés risqueraient de disparaître avec un organisme central. Le modèle actuel misant sur l'harmonisation et la coopération des provinces constitue un modèle qui pourrait être d'ailleurs reproduit dans plusieurs secteurs, au Canada. En effet, ce système démontre que, lorsque des partenaires discutent d'égal à égal, le bon sens prévaut et les résultats sont probants. D'ailleurs, l'opposition officielle et nous, ce matin même, en notre Assemblée nationale, avons voté une motion en ce sens. Déjà, l'opposition, quand elle formait le gouvernement, avait mis des positions sur cette question, qui ne divergent pas des nôtres.

Nous aurons également l'occasion, M. le Président, d'entendre des intervenants qui souhaitent une cohérence dans le contenu et dans l'application des lois québécoises qui gouvernent un intermédiaire de marché en valeurs mobilières lorsqu'il intervient dans d'autres domaines de distribution de produits et services financiers. À ceux-là, je dis immédiatement que le sujet est important, mais qu'il déborde un peu le cadre de la présente commission parlementaire. En effet, il intéresse également la problématique qui sera abordée par le rapport quinquennal portant sur la Loi sur les intermédiaires de marché que je déposerai d'ici peu à l'Assemblée nationale et pour lequel une date sera bientôt annoncée pour la tenue d'une autre consultation.

Nous aurons, de plus, au cours des trois prochains jours, l'occasion d'aborder avec le même intérêt la question de la divulgation d'informations aux investisseurs, tant au niveau du prospectus que de l'information continue, notamment en matière de rémunération des principaux dirigeants.

M. le Président, il ne faut pas oublier que la législation en valeurs mobilières vise non seulement à permettre aux entreprises d'avoir accès à des capitaux au moindre coût, mais aussi à protéger les investisseurs. C'est pourquoi il nous faut constamment s'assurer que la loi et la réglementation leur accordent une protection adéquate, d'où notre préoccupation pour la représentativité des consommateurs et investisseurs au sein des organismes d'autoréglementation. Non seulement leur nombre doit-il être important, mais leurs rôle et indépendance doivent être aussi préservés et renforcés. Je crois aux vertus de l'autoréglementation, je crois aussi à sa transparence et au fait qu'il faut s'assurer que ces organismes prennent réellement en compte l'intérêt des petits et que les représentants du public dans ces organismes reflètent leurs préoccupations.

La présence de la technologie dans le domaine du commerce des valeurs mobilières est également un aspect dont il faut discuter, car, d'une part, elle peut constituer un précieux atout pour accroître l'efficacité des marchés et réduire les coûts. D'autre part, elle peut, à l'inverse, devenir également un facteur d'affaiblissement des moyens de contrôle et du niveau de protection des investisseurs. De la même façon que la technologie a apporté une grande souplesse et une rapidité de réaction aux marchés financiers, elle nécessite que nos modes de réglementation s'adaptent à ces changements.

C'est ainsi qu'il y aurait lieu de discuter, lors de cette commission parlementaire, de l'octroi à la Commission des valeurs mobilières d'un pouvoir réglementaire, de façon à la doter de moyens plus efficaces pour agir encore plus promptement et adéquatement dans l'exercice de ses responsabilités d'application et d'administration de la Loi sur les valeurs mobilières, notamment à l'égard des matières où le Québec a un avantage à réglementer ses marchés de façon similaire aux autres provinces du Canada.

M. le Président, parmi les autres sujets sur lesquels nous aurons à nous pencher au cours de cette commission, il y en a qui sont plus susceptibles de soulever certaines passions, telles que les exigences de résidence et de présence sur le territoire québécois pour les courtiers, les conseillers et leurs représentants et le financement même de la Commission des valeurs mobilières du Québec. C'est avec sérénité que j'entends en aborder la considération avec vous, M. le Président, et écouter toutes les suggestions qui pourraient nous être faites à ce sujet.

Enfin, nous nous préoccupons d'un sujet qui m'est particulièrement cher, celui des petites et moyennes entreprises du Québec. Lors des deux budgets du présent gouvernement, M. le Président, celui du député de Crémazie et celui que j'ai eu l'honneur de déposer il y a quelques semaines, une série de mesures ont été mises en place pour favoriser l'émergence des petites et moyennes entreprises et les aider dans leur gestion. Le Québec dispose d'importants bassins de capitaux pour supporter ces entreprises à divers stades de leur croissance, que ce soit par l'entremise des fonds de travailleurs ou d'autres sociétés de capital de risque.

Toutefois, ces entreprises grandiront et, parfois, les investisseurs du départ voudront encaisser leur mise de fonds pour les réinvestir ailleurs. Par contre, d'autres investisseurs désirent y investir, mais pour des périodes plus courtes ou à un autre stade de leur développement. Souvent, ces petites entreprises ne sont pas suffisamment importantes pour leur permettre de devenir des sociétés publiques et que leurs titres se négocient sur le même marché que les titres des grandes sociétés par actions.

Il y a donc lieu de se pencher sur divers mécanismes pour accroître la liquidité des titres de ces sociétés et ainsi intéresser un plus grand nombre d'investisseurs. Il faut leur permettre d'y investir une partie de leurs capitaux et leur donner la possibilité de revendre avec une certaine facilité leurs participations sur un marché secondaire. C'est dans cet esprit, M. le Président, qu'il faut considérer la recommandation 32 du rapport quinquennal qui est reprise dans le document d'accompagnement.

J'ai mentionné le budget qu'avait présenté le député de Crémazie. Je veux parler un peu du député de Crémazie, qui siège à notre commission et qui va nous rendre de grands services, d'abord, parce que – un détail de sa vie que je ne connaissais pas – il a déjà été courtier lui-même et, deuxièmement, il a été très impliqué dans la vie du ministère des Finances du Québec comme fonctionnaire, mais aussi dans d'autres grandes institutions comme la Caisse de dépôt et placement, une grande société papetière, et il a occupé les fonctions de ministre des Finances. Il devrait, M. le Président, jouer à cette commission un rôle extrêmement positif et intéressant, d'autant plus qu'il a eu la bonne grâce d'accepter de me remplacer demain soir – enfin, assumer un peu les fonctions que j'assume à la commission – parce que le premier ministre est absent, comme vous le savez, et que mes fonctions vont me retenir au Conseil des ministres que je devrai présider demain soir. Alors, je vous en avertis d'avance et je suis sûr que vous ne perdrez rien au change, avec l'expérience et la connaissance du dossier du député de Crémazie.

Donc, ce sont ces dossiers que nous allons regarder. Toutefois, comme l'exercice que nous tenons aujourd'hui est en retard de plusieurs mois... Le rapport quinquennal ayant été déposé en décembre 1993, cette commission parlementaire aurait dû se tenir au plus tard en décembre 1994. J'ai presque le goût, M. le Président, de remercier nos prédécesseurs de ne pas avoir tenu cette commission parlementaire, car cela me donne l'occasion de rencontrer et d'échanger directement avec les principaux intéressés.

Comme vous l'avez constaté, j'ai ajouté au rapport quinquennal préparé par l'ancien gouvernement un document d'accompagnement qui fait ressortir de nouveaux enjeux ou qui met l'accent sur des situations que je considère plus névralgiques et importantes que d'autres pour l'économie et l'autonomie du Québec. De plus, comme vous le savez, M. le Président, mon intérêt pour le secteur financier ne s'est jamais démenti, au fil des ans. Considérant, par ailleurs, que je désire que Montréal devienne une place financière internationale et que je suis déterminé à faire tout en mon pouvoir pour cela, je serai tout particulièrement réceptif aux propositions de modifications législatives concernant la Loi sur les valeurs mobilières et qui iront dans ce sens.

Je suis également conscient de la situation assez particulière dans laquelle je me retrouve aujourd'hui, en participant activement à une consultation sur un document écrit par le gouvernement précédent et pour lequel j'ai procédé à une mise à jour. C'est avec beaucoup d'ardeur que je m'acquitterai de ce rôle, car je suis conscient qu'en pareille circonstance, mes collègues députés de l'opposition se joindront à moi pour faire primer les intérêts supérieurs du Québec, d'autant plus que certains d'entre eux, dont le député de Westmount–Saint-Louis, ont été, j'imagine, par les fonctions qu'ils occupaient, au coeur de la rédaction du document principal que nous allons étudier aujourd'hui.

Alors, des fois, la confrontation est utile pour le bien général, mais là, sur bien des sujets, puisque nos vis-à-vis sont les auteurs du document, la confrontation devrait être assez mince sauf, évidemment, si les intérêts ont changé entre-temps. C'est pour ça, d'ailleurs, que j'ai publié un document supplémentaire, parce que des choses ont changé entre-temps. L'attaque du gouvernement du Canada qui était peut-être possible n'était pas prévue à l'époque où votre document a été rédigé. Aujourd'hui, c'est devenu plus clair parce qu'ils sont passés à l'acte, comme on dit.

(14 h 50)

Avant de terminer, je me permettrai une remarque supplémentaire. Il y déjà plus de 50 ans que la Commission des valeurs mobilières existe et qu'elle remplit son mandat d'administration de la Loi sur les valeurs mobilières. Cette dernière a été édictée pour la première fois en 1924 – ça devait être Louis-Alexandre Taschereau qui était le premier ministre du Québec, à l'époque, j'imagine – sous l'appellation de Loi concernant l'émission et la vente d'actions, d'obligations et autres valeurs. Cette loi a été plusieurs fois amendée, modifiée et refondue. Les dernières modifications importantes datent de 1990.

Tout au long de ces années, le Québec a su par des mesures progressives être un leader dans le domaine des valeurs mobilières, et cela, tant au Canada qu'au plan international. Ce n'est donc pas le fruit du hasard qui a fait en sorte que le secrétariat général de l'Organisation internationale des commissions de valeurs soit à Montréal depuis déjà 10 ans et que c'est également à Montréal que cette Organisation a choisi de célébrer son dixième anniversaire, en septembre prochain, lors de sa réunion annuelle où plus de 150 pays participants enverront leurs délégués.

Si j'évoque cette situation, c'est que je veux faire ressortir l'importance de la reconnaissance dont jouit le Québec dans le domaine des valeurs mobilières et souligner qu'il faut bien mal connaître ce milieu et ne pas vouloir reconnaître l'apport du Québec ainsi que celui des autres provinces en matière de réglementation et d'efficacité pour préconiser la centralisation de la réglementation des valeurs mobilières dans les mains du gouvernement fédéral.

M. le Président, si la concurrence a ses vertus au niveau de l'entreprise privée, elle en a aussi au niveau de la réglementation. La preuve en est faite dans l'environnement canadien où une saine émulation a permis la mise en place de mesures qui ont bien servi l'efficacité de nos marchés financiers, tel, par exemple, le prospectus simplifié.

J'invite donc les participants de la commission fédérale à bien lire les mémoires qui nous sont présentés ici avant de prendre une décision sur le sujet, car les opinions qui y sont exprimées sont unanimes à vouloir maintenir le régime actuel et la souveraineté du Québec en cette matière. On y retrouve également un support à la volonté du Québec de continuer à améliorer et à travailler à une meilleure harmonisation de la réglementation.

Voilà donc les grands thèmes dont nous aurons à débattre. Je réitère, et mes collègues du gouvernement qui m'accompagnent, que nous sommes ici principalement pour écouter. Ces comparutions de citoyens et de citoyennes, de contribuables, devant une commission de l'Assemblée nationale sont une belle illustration du fonctionnement d'une démocratie qui, pour être bien équilibrée, doit toujours tendre l'oreille à ce qui vient des citoyens et des citoyennes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. le ministre, d'avoir fait connaître vos intentions, aux membres de la commission ainsi qu'à nos invités, qui sont déjà tous prêts à se faire entendre, d'abord de les écouter, de les entendre et de voir à aménager la Loi sur les valeurs mobilières et également de nous faire connaître vos intentions sur une autre loi qui sera déposée prochainement, sur les intermédiaires de marché.

Vous avez dit également que cette commission-ci aurait dû se tenir déjà depuis – on a du retard – un an et demi et plus. Si, comme président, je n'ai pas convoqué cette commission, c'était d'abord par respect pour nos invités, qui, sachant qu'il y avait eu changement de gouvernement, possiblement auraient des amendements, des ajouts, des améliorations au rapport quinquennal et pour ne pas faire déplacer les gens inutilement, les faire travailler sur un document qui, possiblement, pouvait être changé. C'est pour ça que le comité directeur de la commission a convenu de retarder à votre convenance le report de cette commission parlementaire. Donc, je vous inviterais, M. le député de Westmount–Saint-Louis, à faire vos remarques préliminaires également.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Évidemment, à l'avance, je souhaite la bienvenue à tous ceux et celles qui ont présenté des mémoires et qui vont venir représenter leur organisme ou eux-mêmes en cette commission.

Au départ, je souligne, comme le vice-premier ministre et ministre des Finances l'a fait précédemment, que cette commission voit le jour suite au dépôt du «Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les valeurs mobilières», en décembre 1993. Mais c'était la deuxième évaluation quinquennale de la Loi sur les valeurs mobilières qui, elle, datait de 1983, l'avant-dernière modification. Et c'est depuis ce temps-là qu'il y a une espèce de clause crépusculaire qui fait que, tous les cinq ans, en principe – même si on a débordé le cadre de cinq ans – nous nous retrouvons pour discuter de ces questions qui sont fondamentales pour l'organisation des marchés financiers dans une place comme Montréal et le Québec en entier.

Le ministre disait: Le Québec est le dix-septième marché financier. Je veux corriger le ministre là-dessus. Peut-être qu'il a commis un lapsus ou peut-être l'ai-je mal compris, mais le Québec, effectivement, pris hors Canada, devient, sur l'ensemble des pays de la planète, le dix-septième acteur, en termes de PIB.

M. Landry (Verchères): Dix-neuvième.

M. Chagnon: Dix-neuvième pour le PIB. Alors, s'il est dix-neuvième pour le PIB, il est assuré d'être septième à l'intérieur du Canada, puisque l'espace économique canadien lui permet de, justement, jouir d'une grande place à l'intérieur du septième.

M. Landry (Verchères): Ça ne contredit pas ce que j'ai dit.

M. Chagnon: Non. Par contre, c'est une vision un peu féerique des choses, parce que, si on commençait à démanteler la moitié des pays du G 7, entre autres, on ne serait peut-être pas dix-neuvième, mais vingt-troisième, vingt-cinquième ou vingt-sixième, si je prenais la Bavière, la Californie, l'État de New York, l'État de... Alors, c'est un peu féerique, comme vision de notre placement à l'intérieur de la mosaïque des nations, comme dirait le ministre.

Une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas étudié ce document, M. le Président, vous l'avez noté: évidemment, des changements de gouvernement. Il y en a eu quelques-uns depuis trois ans. Mais je note que, s'il y a eu trois changements de gouvernement, il y a eu six ministres des Finances qui ont passé là-dessus. De Gérard D. Levesque, en passant par Monique Gagnon-Tremblay, par André Bourbeau, en passant par le député de Crémazie, la députée de Taillon et, finalement, le député de Verchères. Mais ça nous rend heureux aujourd'hui, évidemment, de regarder ce qui s'est fait, malgré le fait que ces documents...

Dans le rapport quinquennal de décembre 1993 – ce n'est pas si loin, dans le fond, ça nous amène à un peu moins de deux ans et demi – il y a déjà des objets qui sont anachroniques, qui ont été dépassés. Le marché financier a grandement évolué, les marchés financiers ont grandement évolué, depuis décembre 1993. Malheureusement, on est obligé de constater que la Bourse de Montréal est une bourse qui est en déclin. La Bourse de Montréal, actuellement, transige à peu près 14 % – ça varie de 13 % à 15 % – de l'ensemble des valeurs mobilières canadiennes. La Bourse de Montréal risque d'être rattrapée, d'ici la fin de la décennie, ou du millénaire, ou du centenaire – appelez ça comme vous voudrez – par la Bourse de Vancouver.

Il y a des objets dont ni le rapport quinquennal ni le document du ministre – je ne sais pas comment il s'appelle, il est là, quelque part, le document que le ministre a publié par la suite, le document d'accompagnement du rapport quinquennal – ne tiennent compte. On ne parle pas et on ne mentionne nulle part l'effet qu'a la concentration des banques sur la propriété des maisons de valeurs mobilières. Nulle part. On n'en parle pas. Or, il y a un effet immédiat et évident pour quiconque est près du milieu des valeurs mobilières; il y a un effet de déplacement de l'autoréglementation. L'autoréglementation s'est déplacée là où se situent les banques, et les banques se situent, ont leurs sièges sociaux, en général, à Toronto. Alors, le mouvement d'acquisition par les banques du marché des valeurs mobilières ou des maisons de valeurs mobilières fait qu'il y a un déplacement de l'autoréglementation et des prises de décisions, directement de Montréal vers Toronto. On n'en traite pas, ni dans le rapport quinquennal ni dans le nouveau rapport du ministre d'avril 1996.

L'évolution technologique, on en parle dans le rapport quinquennal, le ministre en rajoute un peu dans son document d'accompagnement, mais on ne fait qu'effleurer le sujet, on ne fait que passer à côté des réalités les plus ordinaires aujourd'hui, je dirais. Pas plus tard que dimanche, je me suis fait sortir sur Internet, à la maison, NASDAQ: comment traiter et comment être capable d'acheter sur l'une des 5 000 compagnies qui sont sur NASDAQ, ouvrir un compte sur NASDAQ. Il y a, au moment où on se parle, 600 000 comptes ouverts sur NASDAQ, via Internet. Et, ça, ça amène une modification, je dirais, un chamboulement majeur de toute l'organisation, de la vision même des marchés financiers et du financement régulier ou du financement comme on le connaît.

(15 heures)

J'ajouterais, troisièmement, la sophistication des marchés. Pas un mot, évidemment, dans le rapport d'accompagnement ou, du moins, je n'ai pas senti cette vision d'avenir sur toutes les nouvelles formes de marchés dérivés, marchés secondaires et de tout ce qui s'est bâti et développé comme nouveaux marchés. La sophistication des marchés m'apparaît être un acteur... pas un acteur, mais être des moyens extrêmement importants que le ministère des Finances doit regarder et avec lesquels il doit composer pour s'assurer que sa législation ne puisse pas être périmée avant d'être adoptée.

La désintermédiation m'apparaît, à cause de la technologie, de l'avancement technologique, être un questionnement qui aurait dû faire l'objet, entre autres, et du rapport quinquennal et du document d'accompagnement, et sans compter le fait que la population et les clients vieillissent, changent d'habitudes, ils ont plus de moyens qu'ils en avaient il y a 10 ans, 15 ans ou 20 ans. Les clients des marchés de valeurs mobilières, aujourd'hui, si on regarde, même au Québec, il y a une augmentation, une augmentation relativement limitée, mais il y a peut-être 15 % des gens qui ont un portefeuille en valeurs mobilières, au moment où on se parle, mais c'est quand même plus que jamais. Pourquoi? Parce que, avec le vieillissement de la population, il y a des gens qui ont un peu plus de moyens et qui sont prêts à faire des risques dans leurs choix financiers. Ils font des investissements qui leur permettent de pouvoir entrer sur le marché des valeurs.

Mais il y a des risques aussi au marché tel qu'on le connaît actuellement. On s'aperçoit que l'influence du Québec se réduit sur les marchés financiers, d'une part, à cause des acquisitions bancaires et, d'autre part, à cause de la technologie. Il y a un grand risque sur lequel le ministre devra être interpellé, sûrement, il devra nous signifier ce qu'il entend, concernant les réductions de l'industrie québécoise des valeurs, un rôle strict de distribution. Plus on avance dans le temps, plus on s'aperçoit que, finalement, c'est un peu vers cela, malheureusement, que notre industrie locale se spécialise et s'organise. Et probablement qu'on pourrait soulever le problème un peu particulier de la régionalisation un peu excessive de notre marché.

Mais, si on revient au «Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les valeurs mobilières» et ce qu'on y trouve, il y a des sujets qui sont soulevés par le rapport quinquennal et dont on ne retrouve rien dans le document d'accompagnement du rapport quinquennal. Est-ce que je dois comprendre que le rapport d'accompagnement vient s'ajouter au rapport quinquennal ou vient suppléer au rapport quinquennal?

M. Landry (Verchères): S'ajouter.

M. Chagnon: S'ajoute. O.K. Alors, à ce moment-ci, dans ce cas-là, je vais modifier mon approche et suggérer au ministre de nous répondre au sujet des questions qui sont soulevées dans le rapport quinquennal, concernant, par exemple, l'assujettissement de la couronne ou de ses mandataires à l'application de la Loi sur les valeurs mobilières. S'il y a quelque chose qui m'a brûlé, dans les 11 années que j'ai passées ici, c'est un peu les quelques rares fois où l'État s'est trouvé à se mettre en retrait, à se placer en retrait de sa propre législation. Donc, on a une législation sur les valeurs mobilières qui n'inclut pas l'État ou ses mandataires.

Et je trouve qu'il y aurait certainement lieu que le ministre regarde cette question, qu'on retrouve aux pages 6 et 7 du rapport et pour laquelle on soulève qu'en 1993 «il fut jugé inopportun d'assujettir législativement la couronne et ses mandataires à l'application de la Loi sur les valeurs mobilières. Toutefois, on proposa pour le futur d'assujettir ces derniers, par voie de directives gouvernementales, à des obligations favorisant une meilleure information du public et permettant, en matière d'offres publiques d'achat et d'échange d'actions, de les placer davantage sur le même pied que les autres sociétés commerciales.»

Ça nous renvoit à un petit encadré, un petit bas de page: «Depuis lors, le gouvernement a renoncé à la mise en place de telles directives, jugeant qu'elles représentaient un mécanisme inutilement lourd. De plus, certains développements judiciaires ont créé une situation avec laquelle l'adoption de pareilles directives serait irréconciliable.» On pense au dossier d'Asbestos et ses droits des actionnaires minoritaires. Mais il n'en demeure pas moins, en tout cas, on est en 1996, qu'on devrait se requestionner sur cette chose-là, sur le rôle et l'assujettissement que la couronne, à mon avis, devrait connaître quant à la loi des valeurs mobilières.

L'harmonisation respectueuse des compétences au Canada, le ministre en a parlé, je suis tout à fait de son avis. La double réglementation d'une commission des valeurs mobilières canadienne et de celle du Québec ne ferait que nuire, finalement, à l'ensemble du marché, et la plupart des gens que nous allons rencontrer au cours de trois prochains jours vont tirer le même genre de conclusion.

Nous vivons, depuis plusieurs années, dans un mode de décloisonnement et ce mode de décloisonnement doit être regardé, et le ministre doit répondre à quelques questions concernant le mode de décloisonnement. Certains de nos invités, particulièrement dans le secteur des assurances, vont nous en parler un peu plus tard. Mais le ministre devrait aussi prendre position, prendre le leadership nécessaire pour déclarer ce qu'il pense de l'harmonisation des déclarations d'initiés. Les déclarations d'initiés sont importantes pour permettre au public de comprendre ce qui s'y passe.

La simplification de l'analyse du prospectus pour les émetteurs d'envergure est une question extrêmement importante, et probablement la question majeure qui est à la base de la volonté canadienne, et particulièrement de la nouvelle volonté de l'Ontario, de voir mise sur pied une commission des valeurs mobilières canadienne, pressée par des compagnies d'envergure, comme Alcan, Bombardier, Hollinger, et compagnies de ce genre, Irving, ce genre de sociétés qui, évidemment, trouveraient plus drôle d'avoir un endroit où faire accepter leur prospectus plutôt que d'avoir à le faire accepter par 12 endroits, 10 provinces, deux territoires. Quand on sait, par exemple, que la Commission des valeurs mobilières de la Nouvelle-Écosse ne se résume qu'à un avocat de pratique privée, qui est dans son bureau et qui fait ça à temps partiel, évidemment, il faut comprendre la problématique qu'on peut retrouver dans d'autres provinces. L'avantage de l'Ontario, évidemment, serait de reconcentrer, encore une fois, un pouvoir autoréglementaire sur Bay Street.

Mais le ministre ne nous a pas, non plus, évoqué ce qu'il entendait faire en ce qui concerne l'allégement réglementaire qui est demandé et dont on fait part dans le rapport quinquennal. Le cadre réglementaire obligeant l'adhésion à un organisme d'autoréglementation, il n'y a pas une vision précise du ministre ou du ministère quant à cet effet. Je souhaite évidemment que nous puissions en discuter avant l'adoption du projet de loi. Certains de nos invités vont soulever la question. La majorité ne le fera pas. Toutefois, il serait intéressant de savoir ce que le ministre en pense. Et cela pourrait découler sur des pénalités administratives, comme on les retrouve aux pages 48 et 49 du plan quinquennal.

On a déjà mentionné que l'ACCOVAM avec la Bourse de Montréal ont mis sur pied un centre d'arbitrage qui fonctionne. C'est une partie de l'anachronisme qu'on retrouve au rapport quinquennal, puisque cela fonctionne depuis février 1996. Mais le ministre verra aussi ou devra nous dire ce qu'il entend faire concernant la vitesse d'exécution des émissions pour tous les produits dérivés.

Finalement, je suis un petit peu resté sur ma faim quand j'ai regardé le document d'accompagnement du rapport quinquennal, qui, lui, faisait en sorte de, pour le moins, reprendre à son compte une grande partie du dossier que l'on retrouvait dans le rapport quinquennal. J'ai trouvé que c'était un bien piètre plaidoyer pour justifier un document d'accompagnement, compte tenu de ce que l'on y trouve. Il faut se rendre à la page 14, sur 19, pour commencer à apprendre quelque chose de neuf qu'on n'a pas dans le rapport quinquennal ou de très en vogue sur les marchés électroniques ou sur les valeurs mobilières.

Un questionnement, deuxièmement, sur les exigences de présence sur le territoire québécois pour les courtiers et les conseillers et leurs représentants. Ça, c'était quelque chose de neuf, puis on retrouve ça à la page 15 ou 16, sur les 19 pages du document d'accompagnement. Et, finalement, le document soulève un point nouveau concernant la représentation du public dans les organismes d'autoréglementation, sans toutefois prendre position.

Mais ce qui m'a surpris dans le document d'accompagnement: il n'y a pas un mot, pas un mot, sur la protection des petits investisseurs, pas un mot sur la protection des petits investisseurs, qu'on retrouve, par contre, amplement dans les pages 55 et 56 du rapport quinquennal, qui mentionne, aux articles 25, 26, 27, 28, 29, 30, une vision, à tout le moins, sur laquelle le ministre des Finances devrait apporter un éclairage. Et il devrait nous faire part non seulement de ses commentaires mais de sa propre vision sur la protection des petits épargnants. C'est une des raisons d'être, entre autres, de la mise sur pied de la Commission des valeurs mobilières, de l'ACCOVAM, de tous ces organismes, de plusieurs organismes que nous allons rencontrer, qui sont des organismes de réglementation. Toutefois, on n'a pas eu... le ministre n'a pas semblé vouloir rajouter ou vouloir améliorer le texte que nous avions eu il y a trois ans, deux ans et demi.

(15 h 10)

Sur ce, ça va évidemment me faire plaisir, faire plaisir au groupe parlementaire que je représente, M. le Président, de commencer les auditions le plus tôt possible. Et, je pense, un peu ironiquement, nous allons commencer par rencontrer un groupe de personnes qui sont des petits investisseurs et qui se sont sentis lésés dans une transaction du trust avec lequel ils ont fait affaire.

M. le Président, je vous remets la parole pour que vous puissiez la céder le plus tôt possible à nos invités. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Auditions

Maintenant que chaque parti représenté à la table nous a fait part de remarques préliminaires, j'inviterais le président de l'Association Trugécan et l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec, qui sont déjà en attente de se faire entendre... Je demanderais à M. le président, M. Yves Michaud, de nous présenter les personnes qui l'accompagnent, pour les fins de l'enregistrement des débats et, par la suite, de nous présenter leur mémoire. M. Michaud.


Association Trugécan et Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec (APEIQ)

M. Michaud (Yves): Volontiers, M. le Président. À ma droite, le vice-président de l'Association Trugécan – Trugécan, c'est une anagramme à la sonorité un peu barbare et fort déplaisante à l'oreille, qui signifie Trustco général du Canada, qui était la maison mère de Trust général du Canada – donc, M. Pierre Viau, ex-directeur de cabinet du maire de Laval; à mon extrême gauche, qui n'est pas la place pour un comptable, M. André Roy, qui est trésorier de l'Association; à ma gauche, Richard Pelletier, informaticien, membre du conseil d'administration; à mon extrême droite, Agathe Lacasse, de Québec, qui est en même temps membre du conseil d'administration de notre Association et de la Corporation financière Génécan, qui est le nom déguisé de Trustco général du Canada qui s'est mué et transmué en Corporation financière Génécan, et où Mme Lacasse représente les intérêts des petits porteurs; et, enfin, je dirais le Dr Réjean Belzile, docteur en administration, Ph.D., professeur agrégé aux Sciences de l'administration de l'Université du Québec à Montréal.

M. le Président, je remercie les membres de la commission de bien vouloir nous entendre. À titre personnel, puis-je faire état d'une certaine émotion de me retrouver, 30 ans après, à la barre des témoins, à un endroit qui éveille pour moi tant de souvenirs alors que, jadis, investi de la souveraineté populaire, je me retrouvais du côté des interrogateurs plutôt que du côté des interrogés. Je me souviens très bien où j'étais, à la place du porte-parole de l'opposition, le député de Westmount–Saint-Louis, à l'occasion de la vente de La Presse par M. Paul Desmarais, où l'Assemblée nationale avait largement débattu en commission parlementaire à la fois les bienfaits, les méfaits, les...

M. Chagnon: L'achat. L'achat, pas la vente.

M. Michaud (Yves): Hein?

M. Chagnon: L'achat, pas la vente.

Une voix: L'achat.

M. Michaud (Yves): L'achat, l'achat, l'achat par M. Paul Desmarais, de la famille Berthiaume...

M. Landry (Verchères): ...la succession Du Tremblay...

M. Michaud (Yves): ...de la famille Berthiaume, du journal La Presse .

M. le Président, nous préparons un mémoire conjoint, c'est-à-dire deux associations. La première, je l'ai dit, Trugécan, pour Trustco général du Canada. Cette Association est née au printemps 1993 suite au défaut de Trustco général du Canada holding – on appelle ça un holding; en fait, c'est la maison mère de Trust général du Canada, qui est le navire amiral de nos institutions financières créé par les Faribault, les Morin – de rembourser le capital et les intérêts des porteurs d'obligations, que l'on s'obstine, soit dit en passant, à qualifier de débentures. On dit des porteurs de débentures, mot inconnu dans tous les dictionnaires de la langue française, cela dit en passant. C'est comme la Loi sur les valeurs mobilières; on devrait appeler ça la loi des valeurs mobilières. C'est comme quelqu'un qui dit: J'ai rencontré quelqu'un sur l'avion. Il devait faire froid, hein.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Il ne fait pas chaud, rencontrer quelqu'un sur l'avion. Il l'a rencontré dans l'avion, de la même façon que l'on marche sur le trottoir et dans la rue, et non l'inverse. Mais, enfin, les législateurs continuent à barbariser notre langue et à appeler «la Loi sur les banques», «la Loi sur les valeurs mobilières», alors que ce sont «la loi des». Voilà. Je me permets des petites coquetteries comme ça.

M. Chagnon: Je crois que, malgré les apparences, vous êtes toujours mieux placé du côté de l'opposition.

M. Michaud (Yves): Voilà.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Ce n'est pas une tâche que je détestais, d'ailleurs.

M. Landry (Verchères): Tu n'avais pas détesté l'autre non plus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Il y a quelque chose d'indéfinissable en moi qui fait que j'ai toujours eu quelques difficultés à me retrouver du côté du pouvoir.

M. Chagnon: Vous avez refusé d'y être, d'ailleurs, si je me souviens bien.

M. Michaud (Yves): Oh! refuser, c'est un bien grand mot.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): C'est Talleyrand qui disait: «Je ne sais pas ce qui m'arrive, mais il y a quelque chose que je ne peux pas expliquer en moi qui fait que je porte malheur au gouvernement qui me néglige.» Ce qui fait que j'ai été obligé de servir les deux régimes, à la fois servir le régime libéral et le régime péquiste.

Une voix: Comme Talleyrand, d'ailleurs.

M. Michaud (Yves): Comme M. Talleyrand, oui. Je ne dirais pas ce que Napoléon a dit de lui. Mais vous me faites perdre mon temps, ma parole!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais c'est quand même amusant.

M. Chagnon: ...dans un bas de soie.

M. Michaud (Yves): Hein?

M. Chagnon: Dans un bas de soie.

M. Michaud (Yves): Oui, oui, d'autre chose. Mais il disait aussi: «Un gouvernement que l'on soutient est un gouvernement qui tombe.»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Je parlais de Talleyrand.

M. Michaud (Yves): Et il disait aussi: «Appuyez-vous sur des principes, ils finiront par céder.»

Bon. Je continue. Donc, je dis bien que notre Association est née du défaut de Trustco général du Canada de rembourser les porteurs de débentures, c'est-à-dire pas les actionnaires, pas ceux qui avaient des actions privilégiées, ceux qui avaient prêté de l'argent. Et on va faire une distinction entre les actionnaires et les prêteurs. Les actionnaires ont tout perdu. Quand on joue à la bourse et qu'on a des actions, on risque que nos actions tombent à zéro. Quand on prête de l'argent, l'on s'attend normalement à ce que l'on nous rembourse. Alors, tous les détails de cette ténébreuse affaire, pour employer un roman de Balzac, se retrouvent dans le mémoire dont vous avez sûrement reçu copie et dont probablement quelques-uns ou la plupart de vous avez pris connaissance.

En gros, le propriétaire de Trustco général, c'est-à-dire la maison mère de Trust Général du Canada, propriété de la mutuelle d'assurances L'Industrielle-Alliance de Québec, a été à la source de l'une si ce n'est la plus grande catastrophe dans l'histoire des institutions financières du Québec. Au moment où je vous parle, plus de 500 000 000 $ – c'est-à-dire un demi-milliard – ont été engloutis dans le naufrage Trustco général du Canada dans à peu près l'indifférence générale et sans que cela émeuve outre mesure la presse économique et les pouvoirs publics.

On pense à La Fontaine: «Selon que vous serez puissant ou misérable». Je dis bien 500 000 000 $, répartis comme suit: déficit de Trustco général du Canada en 1992 et en 1993, 180 000 000 $; 230 000 000 $ épongés par la Banque Nationale dans des prêts radiés, des billets à capital variable, l'argent des petits porteurs, que nous représentons ici; plus l'implication de l'Inspecteur général des institutions financières, qui est là, ici, en arrière, à la hauteur de 80 000 000 $, 90 000 000 $, après que la Banque Nationale eut épongé 230 000 000 $. On arrive à 500 000 000 $. Ça ne s'est jamais vu dans l'histoire économique et financière du Québec. Mais, ça, personne n'en parle. La presse économique béate reproduit fidèlement, d'une manière générale, comme des roquets, les communiqués des dirigeants d'entreprises faisant état, etc., et reste à peu près sourde... Je dis «à peu près», parce que, quand même, quelquefois, ils font état de nos revendications.

Alors, Trugécan est une association à but non lucratif reportant les porteurs individuels d'obligations. Les porteurs individuels d'obligations ou de débentures – appelez ça comme vous voudrez – vous les retrouvez dans le mémoire, à l'annexe II, à la partie Témoignages. Je vais vous en citer seulement quelques-uns pour mémoire, des témoignages de nos membres qui nous écrivent.

(15 h 20)

«L'argent qui est retenu, je l'ai gagné sou par sou à laver des planchers et des murs et à subir les sautes d'humeur de patronnes parvenues. Je trouve injuste que des maisons comme Trustco général, Lévesque Beaubien et la Banque nationale retiennent notre dû.»

«Je suis une vieille dame de 83 ans – elle a écrit ça en 1993 – malade en plus, qui songeait à la résidence pour juillet 1994, mais maintenant le pourrais-je? Ce 50 000 $ provenait de la vente de ma maison.» M.B. Montréal. L'autre est de E.G.B. Contrecoeur. Jamais que les initiales, pour ne pas donner les noms.

«Un sentiment d'impuissance nous envahit tous, simples épargnants, face aux banques, trusts, qui permettent à leurs dirigeants de rouler carrosse doré grâce à notre argent si durement économisé.» S.L. Joliette.

«Notre corporation, caisse de retraite d'un clergé détenait 25 000 $ de ces débentures et nous serions heureux de récupérer le maximum possible.» D.B., prêtre.

«Je ne travaille plus et je suis malade. Je pourrai vous envoyer ma cotisation plus tard. Je comptais sur ces 10 000 $ d'obligations pour mes vieux jours mais je commence à désespérer.»

Et enfin, la plus belle: «Voici quelques dollars pour surveiller ces gens qui veulent tellement notre bien qu'ils finissent par partir avec!»

Voilà nos membres, des humbles, des sans-grades, des petites gens, qui ont fait confiance à ce navire amiral de nos institutions financières qui s'appelait Trustco général du Canada ou Trust général du Canada.

Je dis bien que notre Association comporte des gens à but non lucratif, aucune personne morale. C'est drôle que le Code civil, la Loi sur les compagnies appelle «personnes morales» surtout des gens qui n'en n'ont pas, c'est-à-dire des institutions financières, qui sont généralement peu préoccupées de la conscience sociale et de la morale et de l'éthique des affaires. Aucune personne morale n'est membre de Trugécan, de Trustco général du Canada.

Le but poursuivi par notre Association est le remboursement des sommes dues aux petits prêteurs en priorité sur les personnes dites morales, suite à la liquidation des actifs de Trustco général du Canada et des mauvais prêts de Trust général du Canada, dont la Banque Nationale du Canada s'est portée acquéreur quelques semaines après que l'on nous eut mis le couteau sur la gorge, à une assemblée burlesque, où le modèle stalinien des procurations existait et où on nous a dit: Bien, prenez 0,30 $, parce que vous êtes mieux... si vous vous mettez en faillite, vous aurez un peu moins. Et, finalement, on a eu 0,30 $ sur 100 $. Et, pour le reste, on a dit: Attendez, patientez pendant quatre ans, on vous versera peut-être des intérêts si la liquidation des actifs à la fois de Trustco général et de Trust général du Canada...

C'est là que ça intervient. Parce qu'il y a bien deux mécanismes d'intervention. Il y a Trustco général du Canada, qui est la maison mère... Nous avons fait des interventions auprès de l'Inspecteur général des institutions financières, qui s'appelait M. Bouchard à l'époque, et qui me répond ceci: Cher M. Michaud, moi, je n'ai autorité qu'auprès des institutions qui font affaire avec le public, c'est-à-dire Trust général, où il y a des dépôts, les gens font affaire avec le public. Il a dit: Hélas! le poisson pourrit toujours par la tête. Venant de l'Inspecteur général des institutions financières, M. Bouchard, en parlant des holdings, je restai pour le moins médusé, si vous me passez cette expression un peu vieillotte et archaïque, que l'on n'entend plus guère dans ces murs mais où, naguère...

Une voix: ...c'est rare.

M. Michaud (Yves): Hein? Ça arrive à l'occasion?

M. Chagnon: ...

M. Michaud (Yves): Très bien. Donc, petits porteurs, pas de personnes morales, demandant que l'on nous rembourse les prêts que nous avons faits à Trustco général du Canada. Il faut dire qu'au mois de juillet 1993 il y a eu une sorte d'entente – bon, vous savez comment ça procède – et on nous a dit: Bon, prenez quatre ans, etc. Et les institutions, les personnes morales se sont retirées pour nous permettre, soi-disant, d'avoir notre premier 0,30 $ sur chaque dollar qui restait, bien que, à un deuxième versement éventuel, suite à la liquidation des actifs, elles se soient mises, les personnes dites morales, prioritaires, et non pas en termes, dans le langage juridique, pari passu, c'est-à-dire sur le même pied que les porteurs de débentures.

Or, suite à la liquidation des actifs qui est en cours, à ce jour, alors que la Banque Nationale, alors que Lévesque, Beaubien, alors que la Caisse de dépôt... À ce jour, seule L'Industrielle-Alliance n'a pas fait connaître son intention de se subordonner, c'est-à-dire de passer son tour et passer son tour au bénéfice des porteurs individuels, au cas où il resterait un solde recouvrable d'actifs. Et, tout cela, malgré la déclaration du président de L'Industrielle-Alliance, M. Raymond Garneau, dans La Presse du 2 février 1993, qui dit en toutes lettres que Trustco général pourra respecter tous ses engagements, y compris le remboursement des débentures.

On peut retrouver, dans La Presse du 2 février 1993, sous la signature de Miville Tremblay: «L'Industrielle-Alliance devient partenaire de la Banque Nationale.» Ce n'est pas un document que vous avez, ça. «Mais M. Garneau estime que Trustco général pourra respecter tous ses engagements, y compris le remboursement des débentures.» Les petits porteurs que nous sommes, en représentant environ les 2 000, attendent toujours le respect de la parole donnée. On pourrait peut-être faire des parallèles avec la TPS d'une certaine dame, mais enfin.

Depuis trois ans, les représentations de notre Association: demande d'enquête par la Commission des valeurs mobilières du Québec sur l'administration de Trustco général des cinq dernières années; nos représentations auprès de l'Inspecteur général des institutions financières sur le versement d'un dividende versé par Trustco général à, c'est-à-dire, L'Industrielle-Alliance, propriétaire, à elle-même, alors que la compagnie était techniquement insolvable, ce qui, devant un des avocats qui ont témoigné devant notre Association... a dit que cela pouvait prima facie être objet d'une matière à procès et en poursuite; les rencontres avec les représentants de la Banque Nationale, avec les acquéreurs de Trust général du Canada; l'intervention à l'assemblée des actionnaires de cette institution; les démarches auprès de l'émetteur des obligations de Lévesque, Beaubien, Geoffrion, qui a vendu les obligations de Trustco général du Canada à environ 2 000 de ses clients alors que le président de Lévesque, Beaubien, M. Pierre Brunet, était membre du conseil d'administration de L'Industrielle-Alliance, suivait, mois par mois, ou semaine après semaine, la déconfiture de l'institution – vous retrouvez ça dans l'historique préparé par M. Belzile – la déconfiture progressive... À la fois le Canadian Bond Rating Service et le Dominion Bond Rating Service parlaient de «lousy management practices» de Trustco général, alors que personne n'était tenu au courant...

Il y a un manquement grave du devoir de conseil d'un courtier. Un courtier a d'autres tâches à faire que de prendre ses commissions et ne plus s'intéresser à des clients. On pense à Victor Hugo, où l'infant d'Espagne, qui regarde les administrateurs, dit: Bon appétit, messieurs, ministres intègres, ô conseillers vertueux, donc vous n'avez pas ici d'autres intérêts que de remplir votre poche et de vous enfuir après. Soyez flétris devant votre pays qui tombe, tout s'en va, etc. Nous avons... perdu le Portugal, le Brésil sans combat, et comme si votre roi n'était plus qu'un fantôme, la Hollande et l'Anglais partagent ce royaume.

(15 h 30)

Mais c'est intéressant, les courtiers ont d'autres intérêts que de remplir leur poche et de s'enfuir après. Le devoir de conseil d'un courtier, après qu'il eut touché sa commission... Si mon courtier m'avait dit, s'il avait dit à tous ceux qui m'entourent: Les obligations de Trustco général s'en vont en quenouille... Nous avons le rapport de 1990. Si mon courtier m'avait dit: Vends à 50 %, bien, j'aurais dit tout de suite: Je vends. Vends à 60 %. Mais non. Aucun. Silence! Ô mortel ennui! Rien ne nous est communiqué. Et là je pense que le législateur...

Vous parliez, M. le représentant de l'opposition – je ne dis pas le chef de l'opposition, parce que vous l'êtes presque ici, à cette commission – de l'absence de l'État. C'est là que l'État doit intervenir. L'État ne doit pas gérer. Il doit policer les moeurs. Pas gérer, laisser faire le fonctionnement du libre-marché et tout ça, mais il doit policer. Et l'un des drames que nous vivons est une conséquence néfaste, un, de la déréglementation des institutions financières, qui est une chose valable en soi, mais, deux, de la carence et de l'ineptie des pouvoirs publics, quels qu'ils soient, d'assortir cette déréglementation... Qui est une anarchie complète et qui donne la liberté totale. Les banques achètent des courtiers. Les banques achètent des compagnies d'assurances ou en achèteront. Les banques sont rendues avec des trusts, des sociétés de fiducie. Elles veulent venir dans les locations d'automobiles. Elles seront bientôt dans la ferraille. Elles achèteront des magasins de prêt-à-porter.

Mais il faut que l'État prévoie un système de contrepoids. Aucune démocratie ne peut survivre sans un système de «check and balance», c'est-à-dire de poids et de contrepoids, et c'est là que les législateurs, c'est là que, vous, investis de la souveraineté populaire, vous avez le plus grand rôle à jouer. Donc, ça, c'est pour l'Association Trugécan.

Trustco général du Canada, finalement, l'enfant, a donné naissance au père, si j'ose ainsi dire, ou à la mère, ce qui est une plus grande association qui est maintenant en voie de formation, qui s'appelle l'APEIQ, l'Association de protection des épargnants et des investisseurs du Québec, de création récente, dont l'assemblée générale aura lieu à l'automne. Elle est née justement pour opposer à la déréglementation des institutions financières un début de contrepoids des pouvoirs à peu près sans limite et sans contrôle des dirigeants d'entreprises qui gèrent les épargnes du grand public.

Les buts poursuivis par l'Association... qui entend exercer son action sur l'ensemble du territoire québécois, d'une part, d'autre part, qui entend trouver des alliés et des correspondants en Ontario, avec des nouvelles associations: une qui s'appelle Democracy Watch; une autre, qui est née à Toronto et qui s'appelle...

M. Pelletier (Richard): ...

M. Michaud (Yves): ...une autre qui est née à Toronto et qui remplit à peu près les mêmes fonctions que les nôtres; d'autres en Allemagne; une autre...

M. Pelletier (Richard): Association pour la protection de l'investisseur.

M. Michaud (Yves): Voilà, à Toronto. Et nous allons éventuellement nous diriger vers la création d'une association mondiale, dont le siège, je l'espère, sera au Centre de commerce mondial et qui visera à revoir toutes les lois à la fois du fonctionnement des Bourses... Je pense aux actionnaires de l'Eurotunnel, les petits actionnaires de l'Eurotunnel qui se sont faits littéralement flouer, pour ne pas employer une expression plus grossière...

Une voix: C'est une des grosses.

M. Michaud (Yves): C'est une des grosses, ça, hein! Et je pense à un regroupement mondial de tous ces petits actionnaires, justement pour exercer ce contrepoids.

On voit que notre nouvelle Association, que ce projet est ambitieux, en même temps d'une impérieuse nécessité. Aucune démocratie digne de ce nom ne peut fonctionner sans un système de poids et de contrepoids, sans cela on va glisser vers les abus de pouvoir, l'exploitation des humbles, la création de castes privilégiées, le copinage institutionnel, le parasitage des conseils d'administration des grandes entreprises et par une poignée de notables – il y a 100 personnes qui sont les maîtres du Québec, pas plus que ça; 100 personnes dans le monde financier – la multiplication des conflits d'intérêts, l'enrichissement sans cause, qui sont autant de verrues qui défigurent le visage d'une saine démocratie.

Ces questions, j'imagine, M. le ministre, M. le Président, MM. les députés, sont de nature à préoccuper les élus du suffrage universel en qui réside la souveraineté du peuple. Vous êtes les derniers, l'ultime rempart au développement anarchique d'une mondialisation des marchés dans laquelle les risques d'une dérive et d'un dérapage vers une inconscience sociale et l'exclusion de millions de citoyens des bénéfices du progrès constituent, en cette fin de siècle, les plus graves menaces, et j'en suis fort convaincu, à la paix des peuples et des nations. Merci de votre bonne attention.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. le président, de cet exposé aussi emballant, je dois dire, et qui est articulé à partir de faits quotidiens que vos membres ont vécus. J'ai permis que vous dépassiez un peu vos limites, je pense que les membres de la commission ne m'en voudront pas. Maintenant, je vais laisser la parole au ministre pour vous faire ses commentaires ou vous questionner sur votre mémoire.

M. Landry (Verchères): M. Michaud, que j'appelle exceptionnellement «monsieur» – ce n'est un secret pour personne, nous sommes de vieux amis – votre retour dans cette enceinte, pour une cause aussi vitale, je le crois, est un événement intéressant pour notre commission. Vous avez siégé à l'Assemblée nationale, vous en avez même très courageusement traversé le parquet, comme on dit, comme l'ont fait un certain nombre de grands en politique dans l'histoire pour des questions de principe et qui comportaient, comme je crois dans ce que vous nous dites aujourd'hui, une vision d'avenir extraordinaire. Parce que vous avez été peu à traverser ce parquet, mais bien d'autres ont traversé bien des frontières idéologiques à votre suite, dans les années qui ont suivi, au point de devenir pratiquement la majorité des Québécois et des Québécoises. Donc, vous revenez ici en innovateur, comme lorsque vous y étiez comme élu du peuple.

Ce n'est pas sans intérêt non plus que quelques références littéraires viennent adoucir les travaux de notre commission, qui est assez austère et qui, souvent, se concentre plus sur les chiffres et les équations que sur les citations littéraires. Vous avez parlé, sans qualifier le personnage, de Talleyrand – de son vrai nom Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord – sans dire que c'est un des hommes politiques les plus corrompus de l'histoire humaine et qu'il eût mieux valu qu'il ne soit pas au conseil d'administration du Trust général du Canada!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): En effet...

M. Michaud (Yves): Quand il demandait ses pots-de-vin, il disait: Est-ce que l'on a prévu mes douceurs?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Mais, à l'époque de Talleyrand comme à la nôtre, avec cette grande différence que nous ne sommes plus dans l'ancien régime, nous sommes en démocratie... Et, la démocratie, elle doit s'exercer dans tous les aspects de la vie en société, y compris dans l'aspect financier des choses. Et vous avez eu raison de rappeler que les fameux contrepoids dont les Américains parlent en parlant de «checks and balances» – mais déjà Montesquieu faisait les mêmes références – sont essentiels à tous les aspects de la vie démocratique.

Or, l'économie québécoise contemporaine, dans ses aspects significatifs en volume et en valeur, est un phénomène assez récent. Avant 1960, il n'y en avait pas beaucoup, d'institutions financières; il y avait le Trust général du Canada, justement, et quelques autres. Les caisses populaires étaient nées, mais n'étaient pas ce qu'elles sont devenues aujourd'hui. Notre société s'est portée en solidarité avec ces institutions naissantes, a souhaité tellement faire naître une économie québécoise francophone et locale qu'elle en est devenue complaisante. Il s'agissait que quiconque se réclame de l'univers des affaires ou de l'univers de la finance pour avoir droit à un préjugé de sympathie et avoir droit à l'estime automatiquement acquise. Des sociétés capitalistes plus vieilles et plus purement capitalistes – je ne veux pas dire que c'est l'idéal – comme les États-Unis d'Amérique, sont beaucoup plus dures et comportent des contrepoids beaucoup plus agressifs et beaucoup plus efficaces.

Notre capitalisme, qui a maturé, maintenant, au Québec, depuis la Révolution tranquille, je crois, était mûr pour que des épargnants et des petits épargnants s'organisent et décident – sans entrer dans le fond du litige de ma part – de faire entendre leur voix, mettent un cran d'arrêt à ce qui pourrait constituer des abus, le fassent dans ce cas-ci et d'une manière préventive dans d'autres cas qui pourraient survenir.

J'imagine que notre commission va aussi se pencher sur ces questions de démocratie préventive en matière financière. C'était déjà en germe dans le rapport – et le document que nous déposons vient en complément du rapport mais non pas pour s'y opposer d'aucune manière – et je pense qu'il y avait une bonne intuition dans le premier rapport. Comme il y a plus qu'une intuition aujourd'hui, vous êtes passés à l'action. Vous êtes passés à l'acte, et je vous en félicite.

D'ailleurs, le gouvernement vous a modestement soutenus, et je crois que c'était son devoir de le faire. Et il est encore prêt à le faire au nom, justement, de l'équilibre nécessaire entre certaines très grandes puissances financières et l'individu.

(15 h 40)

Vous êtes allés plus loin que ça, et je pense que, là aussi, vous avez eu une intuition fondamentale. Comme l'économie du Québec a crû de façon spectaculaire et a donné naissance maintenant à de très grandes corporations et de très grands mouvements financiers, l'économie mondiale, durant les mêmes années, s'est globalisée et les capitaux, en particulier, sont devenus d'une mobilité presque instantanée, appuyée sur la révolution technologique de l'électronique. On sait qu'il y a des courtiers, dans le Vieux-Montréal, qui commencent à travailler à 1 heure du matin pour suivre l'ouverture du Nikkei à l'autre bout du monde.

Dans ces conditions, ce qui s'est produit dans les circonstances que vous nous avez exprimées peut prendre des proportions planétaires catastrophiques. Alors, je crois aussi que c'est une excellente intuition que vous avez de regrouper au-delà des frontières mêmes des pays. Puisque l'argent n'a plus de frontières, la protection des épargnants ne doit plus avoir de frontières non plus.

On sait que la Commission des valeurs mobilières du Québec a compris ça avant les autres. La Commission des valeurs mobilières du Québec, je l'ai dit dans mes remarques initiales, est à l'origine déjà d'un début d'internationalisation de la protection des épargnants et de régulation des marchés. Mais c'est encore l'intervention étatique. Ce que vous proposez, c'est les citoyens et les citoyennes regroupés qui font contrepoids au système financier et éventuellement à l'État lui-même. Si l'État allait ne pas être suffisamment vigilant, ne pas avoir...

M. Michaud (Yves): Les citoyens, avec l'appui des pouvoirs publics.

M. Landry (Verchères): Oui, oui, d'accord, mais ce n'est pas parce que les pouvoirs publics vous appuient que vous devez ménager les pouvoirs publics s'ils vous apparaissent complaisants en matière de protection, ça va de soi.

M. Michaud (Yves): Non, non, absolument pas. Faites-nous confiance.

M. Landry (Verchères): Ça va de soi. Alors, mes collègues auront sans doute des questions, l'opposition aussi, mais je vous redis l'estime du gouvernement pour votre action. Je vous redis que nous allons vous écouter très attentivement, parce que c'est une des premières fois dans l'histoire du Québec et dans l'histoire de cette Assemblée que des gens dans votre condition viennent parler les yeux dans les yeux, si je puis dire, à la puissance publique, pour lui dire: Il y a des choses à corriger, il y a des institutions qui méritent d'être dépoussiérées.

Il y a des épargnants qui sont venus au marché des capitaux; on a considéré ça comme une évolution dans notre société. Vous vous souvenez, par exemple, du REA, Régime d'épargne-actions, dont le nom a été attaché à celui d'un très grand ministre des Finances. Bien, c'était une pédagogie. C'est beau, mais il ne faut pas que cette pédagogie se défasse à la suite de mésaventures découlant de risques inconsidérés et non régulés d'une manière acceptable par les pouvoirs publics. Alors, c'est dans cet esprit que nous écoutons vos suggestions concrètes et vos propositions d'initiatives.

La Présidente (Mme Barbeau): Alors, si vous n'avez pas de commentaires là-dessus, je vais passer la parole à M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, Mme la Présidente. Si je concours avec le député de Verchères pour signaler le sens de l'innovation et trouver innovateur notre invité aujourd'hui, je dois avouer que le ministre des Finances a une mémoire qui, elle, est plutôt générique. Notre invité n'a pas traversé le parquet, parce que, si je me souviens bien, le député de Gouin en 1969-1970 a plutôt refusé d'aller en appel ou, du moins – comment on dit? – ...

M. Landry (Verchères): En recomptage.

M. Chagnon: ...en recomptage, pour permettre à l'opposition d'avoir un siège de plus à l'époque.

M. Landry (Verchères): Je ne parle pas de cette fois-là, là. La carrière de notre invité est fleurie, vous savez. Il en a fait, des choses.

M. Chagnon: Mais, vous savez, pour traverser le parquet, il faut y être.

M. Michaud (Yves): L'humilité n'étant pas une vertu que je pratique souvent...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): ...je jugeais alors que l'on pouvait me succéder et non me remplacer. Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Voilà, voilà! Ceci étant dit, Mme la Présidente, j'aurais aimé entendre du député de Verchères, du ministre des Finances, ce qu'il entend... non pas un discours un peu gentil, douillet, rondouillard, disant à nos invités, évidemment: Je vous ai entendus. On a déjà entendu ça ailleurs.

M. Michaud (Yves): Je vous ai compris.

M. Chagnon: Je vous ai compris. Voilà. Malheureusement, les gouvernements et ce gouvernement-ci semblent avoir une propension pour le double langage. On l'a vu en fin de semaine dernière: vouloir attirer une clientèle qui, après s'être fait dire n'importe quoi, s'être fait promettre n'importe quoi, se voit retirer un peu les raisons qui l'ont amenée, entre autres, à marcher sur Québec l'an dernier. C'est un peu le problème qui peut vous arriver aussi.

J'aurais préféré, de la part du ministre des Finances, qu'il réponde directement aux questions que vous soulevez dans votre mémoire. Lorsque vous dites que vous souscrivez aux recommandations du rapport Robic d'instituer un régime particulier applicable aux petits investisseurs, j'aurais aimé entendre le ministre nous dire: Oui, je trouve que ça a raison, ça a de l'allure, et que les articles 25, 26, 27, 28, 29, 30 qu'on retrouve...

M. Gendron: Adopté.

M. Chagnon: Adopté, comme dit le député d'Abitibi-Ouest. Et 56, 57. Moi, je vais faire ça. Puis, d'autre part, je vais donner à l'Inspecteur général des institutions financières, qui n'est pas en arrière de vous mais qui est à côté du ministre, je vais...

M. Michaud (Yves): Tout à l'heure, il était en arrière.

M. Chagnon: Je ne l'ai pas vu.

M. Michaud (Yves): Tout à l'heure, l'Inspecteur général... Il est là.

M. Chagnon: Ah! Je le vois là. Je pensais qu'il était ici, en arrière. Alors, j'aurais aimé qu'il dise: L'Inspecteur général aura des pouvoirs pour vous aider, s'il le juge à propos. Mais, pour l'instant, ce que j'ai, c'est un silence. À part de vous dire: Oui, bien sûr, je vais vous aider financièrement à partir votre Association, puis on va essayer de vous donner une tape dans le dos, puis bonne chance! Je dirais, M. Michaud, bon, vous risquez de vous en retourner d'ici pas beaucoup plus avancé, en ayant une reconsidération des amitiés du ministre à votre endroit, ça j'en conviens et tant mieux, mais, après ça, ça risque d'être un peu plat.

J'aimerais entendre le ministre nous dire ce qu'il entend faire pour corriger des problèmes comme ceux que vous avez vécus, s'il juge à propos de le faire. Mais qu'est-ce qu'il entend faire pour souscrire aux recommandations que, vous-mêmes, vous avez soulevées dans votre rapport, en page 12, entre autres, dans le bas de la page 12, et qui concernent ce que nous devons étudier ici, c'est-à-dire les recommandations du rapport Robic, les articles 25 à 30?

M. Michaud (Yves): Monsieur, je voulais terminer précisément avec la lecture des recommandations dans les cinq minutes qui nous seront imparties à la fin, alors que j'étais – et mes collègues – prêt à répondre aux interrogations. Mais vous avez raison de souligner que ces recommandations sont d'une extrême importance, et nous allons attendre une réponse que j'espère positive de la part de l'État.

M. Landry (Verchères): Je pense que M. Michaud a compris peut-être mieux que le député de Westmount–Saint-Louis lui-même la mécanique de notre commission.

M. Michaud (Yves): Ah! Bien, ne me mêlez pas à vos querelles partisanes, pour une fois que je suis non partisan là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Je fais un effort épouvantable pour ne pas l'être. Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Et l'esprit de cette commission, c'est d'écouter le monde, justement.

M. Michaud (Yves): Voilà!

M. Landry (Verchères): Et c'est d'écouter les demandes et faire nos remarques après. On aura tout le temps voulu, nous, pour faire les lois et les revoir ici, article par article, en commission. On a le privilège rare d'avoir des invités de cette qualité avec nous, alors... M. Michaud n'a pas encore fait ses recommandations.

M. Chagnon: Vous avez lu son document, comme moi, j'imagine.

M. Landry (Verchères): Ah! c'est bien sûr que je les ai lues. Mais je veux qu'ils les disent et je veux que le Journal des débats comporte ce qu'il a à dire et ses remarques. Et, s'il y a des sous-questions à lui poser, nous les lui poserons.

M. Michaud (Yves): Nos recommandations, et le porte-parole de l'opposition a raison de le soulever, ont été inspirées, d'une part, très largement par le rapport Robic, de 1993, et avec l'ajout du ministre actuel d'État de l'Économie et des Finances.

Première recommandation, que le gouvernement adopte une loi du protecteur des épargnants et investisseurs constituant pour ces derniers un recours dans les cas où ils estimeraient que leurs intérêts ont été sérieusement lésés par des intermédiaires de marché.

Avant que l'ACCOVAM décide de créer un tribunal dont les effets, vous l'avez souligné tout à l'heure, ont commencé vers le 1er janvier 1996, il n'y avait absolument aucun recours. Quelqu'un qui se sentait lésé parce que son courtier avait acheté des titres qu'il n'avait pas commandés, etc., faisait une plainte à la Commission des valeurs mobilières du Québec. La Commission l'envoyait à la Bourse de Montréal, qui est financée par les courtiers, et c'étaient les employés de la Bourse de Montréal qui enquêtaient sur leurs patrons. Résultat, il n'y a jamais eu un citoyen qui a eu raison devant une plainte, à moins d'engager dans des tribunaux de juridiction normale des milliers, des milliers et des milliers, des dizaines et des vingtaines de milliers de dollars.

Alors, nous, nous disons: Entre la déréglementation, les lois du marché et le pouvoir public, il faudrait peut-être une loi de protection des épargnants. Il y en a pour les citoyens qui ont maille à partir avec l'administration publique; il y a des ombudsmans maintenant dans les banques, et qui ne concernent que les PME – vous savez que ça existe – mais l'épargnant, l'investisseur n'a actuellement aucun recours, si ce n'est un début avec l'ACCOVAM. Mais il faudra que l'investisseur débourse de 500 $ à 1 000 $ s'il a une cause, s'il s'estime lésé dans une cause.

(15 h 50)

M. Chagnon: On parle de 1 200 $.

M. Michaud (Yves): Bien, ça peut aller de 500 $ à 1 200 $. Et ce n'est pas rien pour des gens dont je viens de vous parler, qui sont sans ressources, payer déjà 1 200 $, c'est... Là, il y a ce qu'on appellerais en américain un «gap» qu'il faudrait peut-être combler.

Deuxièmement, que l'Inspecteur général des institutions financières soit doté de pouvoirs d'enquête, d'intervention et de sanctions sévères dans le cas de sociétés où il y aurait des motifs raisonnables de croire que les intérêts des actionnaires ou des porteurs d'obligations sont désservis par des pratiques administratives douteuses.

Troisièmement, afin d'éviter les conflits d'intérêts – ça, c'est extrêmement important, je reprends une recommandation du rapport Robic – qu'il soit interdit à un dirigeant ou à un membre d'une maison de courtage de siéger au conseil d'administration d'une société dont il est vendeur de titres. Il me semble que ça tombe sous le coup de la raison. Cette recommandation est formulée justement à la page 48 du rapport Robic.

Quatrièmement, nous souscrivons également à la recommandation du rapport Robic d'instituer un régime particulier applicable au petit investisseur. Nous estimons cependant que le montant maximal prévu pour la créance, de 5 000 $, et le capital impliqué, 20 000 $, sont des limites trop restrictives. On pourrait améliorer cette recommandation en partant de sommes de 25 000 $ à 75 000 $, qui répondraient mieux aux besoins des petits investisseurs.

Cinquièmement, la recommandation 14 du même rapport Robic: de modifier le règlement afin d'exiger des émetteurs, tout comme les banques – on la retrouve dans la suggestion «Décloisonnement et globalisation» du ministre – la divulgation globale sous toutes ses formes des cinq dirigeants les mieux rémunérés. Tout le monde fait ça. C'est le Toronto Stock Exchange, c'est le Vancouver Stock Exchange. Je ne vois pas pourquoi ici les dirigeants d'entreprises ne donnent pas les cinq dirigeants les mieux rémunérés. On me dit que les Caisses populaires Desjardins, il y aurait peut-être des problèmes. Mais qu'ils prennent donc l'initiative. Je suis certain que ça n'ira pas dans des sommets aussi himalayens que les P.D.G. des banques.

Sixièmement, que les actionnaires d'une société par actions ou les détenteurs de débentures ou d'obligations aient le droit de consulter chez le fiduciaire des institutions les titres des journaux de transferts.

Ça, les titres des journaux de transferts, quand est arrivée la débandade de Trustco général, on a dit: On voudrait voir les journaux de transferts, c'est-à-dire ceux qui ont joué avec les obligations de Trustco général, parce qu'il y avait des délis d'initiés, en disant: Toi, tu peux peut-être vendre, je vais te donner 50 %, 60 %. Ça nous a été cavalièrement refusé. Un actionnaire n'a pas le droit de regarder les journaux de transferts, par le Trust général du Canada, qui nous a refusé en disant: Nous croyons que les journaux de transferts ne peuvent être consultés par les détenteurs de débentures, en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, loi 68.

Là, il y a peut-être un défaut. Les journaux de transferts, c'est là où peut se faire la magouille. C'est là, justement, où une société de fiducie ou une compagnie, est en déliquescence, avant les quelques semaines qui précèdent l'hécatombe. Il en est comme des rats qui quittent le navire et qui tirent les marrons du feu. Et, ça, on va le retrouver dans les journaux de transferts. Mais, ça, pour l'instant, ça nous est interdit. Mais que l'État voie donc à donner à un citoyen la consultation des journaux de transferts, et on verra si on a raison ou pas.

Septièmement, que le fardeau de la preuve, dans le cas d'un courtier qui aurait acheté des titres sans le consentement explicite ou implicite de son client, soit inversé. En d'autres termes, qu'il appartienne au courtier de faire la preuve qu'il a rigoureusement suivi les instructions de son client et géré ses titres au meilleur de ses intérêts.

À l'heure actuelle, dans le Code civil, c'est le plaignant qui doit faire la preuve que le courtier... Bien, alors, le courtier arrive, puis il a une batterie d'avocats. Ils sont à peu près 150, etc. Finalement, bien, le plaignant est toujours débouté, puis il n'a jamais raison. Alors, on dit que le fardeau de la preuve soit donc inversé dans le cas d'une plainte d'un client auprès d'un courtier.

Que dans le cas des maisons de courtage – article 8, recommandation 8 – devenues propriété de banques ou d'autres institutions financières, des mécanismes de contrôle ou de surveillance appropriés soient établis afin d'éviter toute possibilité de conflits d'intérêts et de favoritisme à l'égard de l'institution propriétaire.

Là, bien, c'est bien simple. Si une banque est propriétaire d'un courtier, bien le courtier va dire: Ah! bien, moi, j'aurais peut-être envie d'acheter – c'est une hypothèse d'école que je fais – Trust général du Canada, mais Trustco général est presque déliquescent, va donc me chercher 28 000 000 $ dans la poche de tes clients, mets-moi donc ça, puis, comme ça, la transaction pourra mieux se faire. Cette transaction-là – l'Inspecteur général pourra vous l'expliquer mieux que moi – est probablement la plus complexe, la plus bâtarde, la moins explicable.

Mais ce qu'on sait, nous aussi, c'est que la transaction de l'acquisition par la Banque Nationale de Trust général du Canada sans qu'il y ait eu d'appel d'offres alors que Desjardins était intéressé, alors que La Laurentienne était intéressée... Ç'a tombé dans l'escarcelle, dans la sébile de la Banque Nationale, comme sur un plateau d'argent, avec la bénédiction des pouvoirs publics et la caution de l'Inspecteur général des institutions financières, à la hauteur de 114 000 000 $, de la Régie de l'assurance-dépôts.

Nous, on essaie de se débrouiller là-dedans. Mais on sait une chose, maintenant, c'est que tout ce montage extrêmement compliqué a été fait dans un seul but, c'est de détrousser les petits porteurs, les petits épargnants et les petits investisseurs de débentures. C'est de les détrousser complètement. On sait à peu près qu'on n'aura rien à la suite de la liquidation des actifs. Et ils vont légalement dire: Ah! tout ça, c'est légal. Moi, quand j'entends parler de légalité, je soupçonne toujours que l'on veut mettre une chape de plomb sur la justice et sur l'équité. La légalité, c'est rarement la justice. Enfin, c'est ça. Mais cette mécanique-là est tellement compliquée. Vous pourrez poser à l'Inspecteur général des institutions financières.

M. Chagnon: Qu'est-ce qu'ils vous disent, à la Banque Nationale, quand vous leur dites ça?

M. Michaud (Yves): Ils ne nous disent rien. Ils nous renvoient avec un mépris, avec – je ne dirais pas une arrogance – une sorte de condescendance et de paternalisme en disant: Écoutez, on verra. La Banque Nationale est...

Mais c'est curieux comme les institutions financières ont adopté, suite à l'effondrement du communisme, toutes les verrues du socialisme. C'est-à-dire, il y a la pensée unique. Avant, c'était la dictature du prolétariat. Non, mais c'est vrai! Il y a des modèles staliniens d'assemblées d'actionnaires. Ça vote à 99 %. C'est des votes à l'irakienne, des votes à l'iranienne, avec le système absolument aberrant des procurations. C'est un système régalien; ça vient des monarques, tout ça, ces systèmes de procurations. On donne à des dirigeants, à nos employés qui sont les dirigeants de banque, des procurations. Eux ont le droit de solliciter, mais pas nous.

Si, moi, je veux être élu membre du conseil d'administration de la Banque Nationale, il me faut 5 % de tout le capital-actions, c'est-à-dire 8 000 000 $ de procurations pour me présenter. Je vais me présenter probablement, je vais aller solliciter les procurations, mais je vais verser les jetons de présence dans l'association que nous avons fondée. On va essayer de voir si ça va marcher. Mais, en tout cas, j'espère que, si le gouvernement a des actions dans la Banque Nationale du Canada, il m'enverra ses procurations pour m'aider à me faire élire! Avec la bénédiction de l'opposition, j'espère!

M. Chagnon: Le gouvernement est très près du président de la Banque Nationale. Je pense qu'il est directeur de chantier. Vous pourriez lui en parler un peu.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'aimerais, pour le bénéfice des membres de la commission... Il resterait six minutes au maximum, trois minutes de chaque bord. Je sais que le député d'Abitibi-Ouest aurait une question à poser. Je ne sais pas, de ce côté-ci...

M. Gendron: M. le Président, si vous le permettez, puisqu'on a la chance d'avoir des invités très agréables, une phrase, pour ne pas être accusé de rondouillard ou d'autres titres du même genre: J'ai aimé votre présentation, M. Michaud.

Mais, au-delà de ça, dans vos propositions, les recommandations que vous faites, j'aurais une question par rapport à la recommandation n° 7, quand vous suggérez d'inverser le fardeau de la preuve. On l'a lue, on n'a pas besoin de la reprendre. Vous n'avez pas peur – parce que je veux que ma question soit précise – qu'il pourrait être un peu dangereux, dans certains cas, de faire face à des règlements de compte?

Un individu qui prétend que son courtier l'a fait souffrir passablement avec de mauvais rendements ou de mauvais placements, qui décide, comme je vous le dis, d'essayer de faire ce qu'on appelle communément un règlement de compte et, effectivement, le poursuit pour qu'il ait, lui, à justifier qu'il a toujours écouté les recommandations qu'il lui a faites.... Parce que vous admettrez que, dans plusieurs des cas, il y a quand même des petits épargnants qui disent à leur courtier: Je te fais confiance. Alors, ils ne suivent pas ça plus que ça. Ce serait quoi, votre réaction, par rapport à la recommandation que vous faites pour essayer de contrer cette alternative?

(16 heures)

M. Michaud (Yves): Cette recommandation-là est assortie d'une autre qui est une loi du protecteur du citoyen. Il faut bien qu'il y ait un organisme quelconque qui juge prima facie s'il y a matière à, justement, porter plainte et que le fardeau de la preuve soit inversé. Pour défendre les petits épargnants, il y a deux solutions: une, que l'État s'en occupe, qu'il fasse une loi de protection des épargnants; ou bien qu'il confie ce mandat à une association du genre de la nôtre ou à une autre, en lui fournissant les moyens de ce faire, pour séparer le bon grain de l'ivraie. Alors, autrement dit, là il y aurait une chambre de compensation pour éviter que les courtiers soient sans cesse l'objet de demandes folichonnes de la part de ceux qui s'estimeraient lésés alors qu'ils ne le sont pas réellement.

M. Gendron: Mais, juste pour compléter...

M. Michaud (Yves): Oui.

M. Gendron: Puisque, vous avez raison, le préalable de votre première recommandation... Vous souhaitez qu'il y ait une loi concernant la protection des épargnants. C'est déjà un mandat à la Commission des valeurs mobilières. Vous dites...

M. Michaud (Yves): Ah non! Non, non.

M. Gendron: ...elle ne peut le jouer... Non, mais, si vous recommandez ça, c'est parce que vous croyez que ce mandat-là qui est dévolu à la Commission des valeurs mobilières, elle ne le joue pas quand il s'agit de la protection des petits épargnants. C'est ça, votre conclusion?

M. Michaud (Yves): Oui, tout ce qu'on a demandé à la Commission des valeurs mobilières, on a eu une fin de non-recevoir.

M. Gendron: Voilà.

M. Michaud (Yves): Les administrateurs de Trustco général votent 12 000 000 $ de dividendes, alors que la compagnie était insolvable, ce qui est illégal. On dit à la Commission des valeurs mobilières: Voulez-vous faire enquête là-dessus? Ça, c'est punissable par les tribunaux, de... Ils sont obligés de rembourser. On a une réponse de la Commission: On a vu ça, tout va très bien et il n'y a pas lieu de poursuivre, ils ont tous suivi les procédures légales. Zéro! On a eu des fins de non-recevoir partout. Donc, la Commission des valeurs mobilières... ou d'augmenter ses pouvoirs d'enquête à la suite d'interventions de membres comme du genre de celle que nous avons faite.

M. Gendron: Mais c'est ça. Si vous me permettez, je termine là-dessus, M. le Président. C'est évident qu'on sent que la trame de fond de votre présentation, et elle revient à plusieurs endroits, c'est que vous souhaitez que les dirigeants, au sens large, de ceux qui jouent avec des titres ou des placements aient plus de soucis ou de préoccupations concernant l'intérêt des actionnaires plutôt que leur propre intérêt. Ça, c'est évident. Vous nous dites: Même si cette responsabilité est dévolue à la Commission des valeurs mobilières, elle ne la joue pas du tout, cette responsabilité, quand il y va d'essayer d'être soucieuse du respect des épargnes des petits contribuables. Entre renforcer – renforcer? – ...

M. Michaud (Yves): Renforcer, oui.

M. Gendron: ...renforcer les pouvoirs de la Commission des valeurs mobilières et votre proposition n° 1, c'est quoi votre choix?

M. Michaud (Yves): La proposition n° 1, d'avoir une véritable loi de protection des épargnants.

M. Gendron: Merci.

M. Viau (Pierre): M. le Président...

M. Landry (Verchères): M. le Président...

M. Viau (Pierre): M. le ministre, je veux juste vous dire...

M. Landry (Verchères): Excusez-moi, on vous revient tout de suite, M. Viau. On a avec nous le président actuel de la Commission des valeurs mobilières. Je pense qu'il pourrait donner un éclairage intéressant sur le passé, sur l'avenir et sur les pouvoirs que la Commission n'a pas et qu'elle devrait avoir pour faire face à une situation comme ça.

M. Martel (Jean): Merci, M. le vice-premier ministre. Jean Martel, président de Commission des valeurs mobilières. M. Michaud et vos collaborateurs, bonjour. Effectivement, on a pris connaissance, avec beaucoup d'intérêt de votre mémoire. Dans le fond, moi, je n'étais pas là quand les faits se sont produits. Par ailleurs, on s'est assuré, finalement, de vérifier les faits. Évidemment, je pense qu'il y a une réalité avec laquelle la Commission est aux prises quotidiennement, c'est celle des paramètres qui lui sont fixés par sa loi. On peut avoir une mission extrêmement empathique, sympathique à l'investisseur, être désireux d'assurer un niveau de protection tout à fait optimal au profit de l'investisseur, par contre, on est également administrateur d'une législation et d'une réglementation.

Ce qu'on me rapporte, relativement aux faits qui ont entouré votre dossier, c'est que toutes les prescriptions de légalité, toutes les exigences législatives et réglementaires avaient été respectées. Dans le fond, il n'y en avait pas, d'illégalité. Et, à cet égard-là, c'est sûr que la distribution d'un dividende, lorsqu'une compagnie encourt des pertes, ce n'est pas quelque chose qui est illégal; c'est quelque chose qui peut faire encourir une responsabilité lorsque ça s'effectue dans certaines conditions.

Comme j'ai eu l'occasion de le déclarer relativement à votre dossier et à d'autres dossiers qui participent un peu de sa nature, c'est que tout le cadre réglementaire des opérations en valeurs mobilières, ça s'est axé sur la contribution, l'action, la prudence et la diligence d'un investisseur qui prend une décision d'investissement en connaissance de cause. Lorsque vous disiez tout à l'heure: Policez le secteur ou policez les activités en valeurs mobilières, je dirais qu'on supervise une participation éclairée dans les activités de marché parce que, dans le fond, la commission n'est pas là pour prendre les décisions d'investissement à la place, justement, des investisseurs eux-mêmes.

Dans ce cas-ci, par contre, je crois comprendre, finalement, de vos recommandations, et en particulier celles qui touchent le régime applicable au petit investisseur, qu'il y a quand même certaines promesses qui présentent du potentiel pour le traitement futur de dossiers, de votre dossier ou de dossiers qui peuvent lui ressembler dans le futur, en ce sens qu'on facilite l'exercice des recours, l'exercice des droits qui peuvent être détenus par des gens qui se retrouvent dans des situations comme celle que vous avez vécue. En tout cas, à cet égard-là, du moins, je trouve qu'il y a quand même matière à une réflexion extrêmement fructueuse, je pense. Et je crois comprendre que le ministre n'est pas en désaccord avec ça.

M. Landry (Verchères): Il y a M. Viau qui voulait parler.

M. Viau (Pierre): On a découvert tout ça, ce que vous nous dites, à travers notre expérience. Mais, vous savez, nous, on est des petits investisseurs. Moi, j'avais un REER. On a investi de l'argent dans un REER. Alors, on à confiance au gouvernement, on à confiance à l'Inspecteur des institutions financières et on a confiance qu'on est protégé par les valeurs mobilières. Mais, lorsqu'on fait enquête, puis là qu'on découvre que M. Brunet, qui est le président de Lévesque, Beaubien, siège sur le conseil d'administration de l'Alliance, qu'il achète le 50 000 000 $ avec une offre ferme, qu'il vend à ses clients et puis que Lévesque, Beaubien est propriétaire de la Banque Nationale, puis que la Banque Nationale achète la faillite, j'ai un petit peu de difficultés à accepter ça. Vous savez, c'est ce cercle vicieux qu'on tente de vous souligner. Alors, il est là, le problème. Mais, nous, on ne peut rien faire contre ça. C'est vrai, tout est légal. Vous savez, c'était un montage assez complexe, vous avez vu la transaction. Alors, tout est légal. Et là on nous dit: Si vous pensez... poursuivez-nous. Ça va nous coûter 500 000 $ pour les poursuivre.

Ce qui est anormal, c'est qu'on permette ça à l'intérieur de nos lois et qu'on n'aie pas d'article de loi qui définisse clairement le droit des gens à l'information, les droits des gens qui ont investi dans les débentures ou dans les obligations. Et là qu'on retrouve ce cercle vicieux: le président siège sur le conseil; il achète le 50 000 000 $; il le vend à ses clients; on fait faillite; la Banque qui est propriétaire de Lévesque, Beaubien achète la faillite, moi, je trouve ça un petit peu difficile à accepter. Vous savez, si c'était étalé entre plusieurs institutions financières, je l'accepterais peut-être. Mais on sent, vous savez, dans notre recherche, chez les gens, on sent que c'est un petit cercle vicieux. Alors, c'est ça qu'on ne peut pas accepter. Puis nous faire accroire que ces gens-là ne se parlent pas...

On a le même problème, M. le ministre, avec la gestion des portefeuilles. Je siège sur un conseil d'administration, moi, du fonds de pension des employés retraités de la ville de Laval. Alors, la Banque Nationale a parti une compagnie de gestion qui s'appelle Gestion de portefeuille Natcan. Et là notre gestionnaire achète des actions de la Banque Nationale. Moi, en tant qu'administrateur, je me pose la question: Est-ce qu'il satisfait aux exigences d'augmenter les revenus du fonds de pension ou s'il satisfait aux exigences de la corporation pour laquelle il travaille, si ça appartient à 100 %... Et, légalement... Vous savez, j'ai écrit au président, qui m'a dit: Bien, écoutez, il n'y a rien, c'est légal; maintenant, si vous ne voulez pas, vous avez rien qu'à ne pas nous donner un mandat et dire de ne pas acheter. Mais il faut que ces gens-là s'autodisciplinent. C'est une question de confiance, ils ont accès aux marchés financiers. Moi, en tout cas, j'ai de la difficulté à comprendre ce cercle vicieux. Et puis c'est serré, c'est tricoté serré.

Vous savez, M. le ministre, j'ai appris une expérience. Je me souviens, moi, quand on disait que, les Canadiens français, on mettait l'argent dans les bas de soie parce qu'on ne «trustait» pas les Anglais, parce que les institutions financières étaient contrôlées par les Anglais. Mais se faire avoir par les Français, ce n'est pas plus intéressant. Alors, je reviens à ce que vous disiez tout à l'heure. On est arrivé, puis on a donné confiance, puis on a supporté, puis je pense qu'on a fait la preuve en tant que Québécois... Mais je vous dis, moi, que se faire avoir par les Français, ce n'est pas plus intéressant.

Alors, on vous demande de renforcer les lois sur les conflits d'intérêts. C'est vous autres qui avez la réponse à ces problèmes-là. Nous, on l'a découvert par après. Moi, je vous dis, en tant que petit investisseur, j'avais mon REER, j'ai investi ça: Lévesque, Beaubien, confiance... Lévesque, Beaubien vend des actions du gouvernement, ça doit être une grosse patente; l'Inspecteur des institutions financières qu'on paie grassement, toute la structure, les valeurs mobilières... Et là on se réveille avec un problème. On ne peut rien faire, tout est légal: Si vous voulez, poursuivez-nous. Alors, c'est le problème, c'est le dilemme dans lequel on se trouve, et on vous demande de nous aider.

M. Michaud (Yves): Moi, là-dessus, M. le Président, ce que je pourrais ajouter, 30 secondes, M. le Président...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est parce qu'il reste une minute sur l'ensemble du temps qui vous est alloué. Puis il y avait le député de Crémazie aussi qui avait une question à poser.

(16 h 10)

M. Michaud (Yves): Très bien. Je termine là-dessus. J'ai ici un propectus de L'Industrielle-Alliance, un prospectus provisoire – ça n'a rien à faire avec la Commission des valeurs mobilières, qui n'a pas endossé ça – qui, pour la première fois, après avoir englouti 500 000 000 $, je le répète, en la plus grande catastrophe financière dans quelques mois, veut aller chercher 50 000 000 $ dans le public... Et je m'aperçois que, ça... Vous lisez les manuscrits de la mer Morte et vous les comprenez mieux que ça. C'est en volapuk ou c'est en hébreux, ça. Alors, je vois qu'il n'est aucunement fait mention, ou à peine ou en des termes tellement voilés, que L'Industrielle-Alliance, propriétaire de sa filiale Trustco général est à l'origine de la déconfiture de 500 000 000 $. Puis ils vont aller chercher 50 000 000 $ et ils vont passer ça à la Commission des valeurs mobilières qui, elle, un jour, va être obligée d'accepter ça. Sans dire que Génécan, qui était anciennement Trustco général, a fait défaut de rembourser ses porteurs d'obligations. C'est ça qu'on voudrait, un peu plus de transparence. C'est ça qu'on voudrait, que la Commission des valeurs mobilières soit plus rigoureuse puis qu'elle soit plus dure devant ces choses-là, ce prospectus provisoire, qui, à mon avis, est une honte, des faux en écriture – tel qu'il est là, ce n'est pas votre faute, la Commission – une imposture.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Voilà. Le temps qui était alloué ou qui était réservé pour l'Association Trugécan est terminé. Par respect pour les autres invités, à moins que les membres en fassent le voeu autrement...

M. Chagnon: Moi, je voudrais remercier nos invités, M. le Président. Évidemment, le sujet qu'ils nous ont soulevé est un sujet extrêmement important, qui est au coeur d'une grande partie du rapport Robic, comme ils l'ont mentionné dans les recommandations de leur mémoire. L'exemple qu'a soulevé M. Viau, en ce qui concerne le fonds de pension, est au coeur de ce qui pourrait être modifié ultérieurement. Parce que, si j'ai bien compris M. Martel, le président de la Commission des valeurs mobilières, c'est un peu tard pour ce qui est de votre cause. En fait, il vous dit: Meilleure chance la prochaine fois. Mais je pense que, la meilleure chance la prochaine fois, vaut mieux y voir tout de suite, et c'est ce que vous faites. Et, dans ce sens-là, je vous félicite, tout en regardant ce que vous allez faire avec votre capacité de vouloir aller chercher 5 % des actions de la Banque Nationale pour y devenir administrateurs; j'ai hâte de voir ça.

M. Michaud (Yves): Envoyez-moi vos procurations, M. le député.

M. Chagnon: Oui, oui, promis, promis.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: J'ai vendu mes actions là-dedans depuis un bout de temps.

M. Landry (Verchères): J'ai déjà dit tout le bien que je pensais du mouvement qui a comparu devant nous aujourd'hui. Je voudrais quand même ne pas les laisser partir avec l'impression que tout ça sera lettre morte. Déjà, le rapport que nous avons soumis préconise une plus grande transparence. C'est un des mots clés, je crois, de votre présentation: transparence, connaissance. Ce qui était proposé dans le premier rapport consacrait une espèce de statu quo quant à l'accessibilité. Je crois que ce statu quo, après ce que vous nous avez dit, est insoutenable. Il faut ventiler tout cela et mettre un peu plus de lumière et d'exigence de divulgation.

Le deuxième maître mot, je crois, de votre présentation, c'est l'accessibilité aux recours pour des petits épargnants. C'est beau de dire: Allez à la Cour supérieure. Mais qui peut se permettre d'aller à la Cour supérieure et d'embaucher les avocats spécialisés nécessaires pour mener une telle poursuite? Alors, au moins deux choses sont acquises. Nous ferons tout en notre pouvoir, avec la collaboration de l'opposition, pour rendre ces choses plus transparentes, avant que les malheurs n'arrivent. Comme ça, les épargnants et les épargnantes pourront se faire une idée en tout état de cause. Et, deuxièmement, nous allons tenter de concevoir un mécanisme qui permettrait un recours efficace, simple et peu coûteux pour la catégorie de gens que vous représentez. Merci encore une fois du service que vous rendez à l'ensemble de la population du Québec.

M. Michaud (Yves): M. le ministre, MM. les députés, merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Michaud, ainsi que les personnes qui vous accompagnent de cet excellent mémoire et de cette excellente présentation. Maintenant j'inviterais l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc.

À l'ordre! J'inviterais les membres de la commission à reprendre leur place. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Crémazie, M. le député de Westmount–Saint-Louis... À l'ordre! J'inviterais les membres de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. à prendre place. J'inviterais M. Yves Millette à présenter les personnes qui l'accompagnent.


Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. (ACCAP)

M. Millette (Yves): Merci, M. le Président. M. le vice-premier ministre, merci. Messieurs et mesdames de la commission. M'accompagnent aujourd'hui, à titre de président du comité juridique des affaires québécoises, Me Jacques Taché, qui est directeur juridique de L'Industrielle-Alliance, et Me Robert Lebeau, qui est ici aujourd'hui à titre de membre du Groupe de réflexion sur l'autoréglementation de l'industrie des assurances de personnes, au Québec, et qui est vice-directeur juridique de la Sun Life.

Alors, l'ACCAP est une association qui représente la grande majorité des compagnies d'assurances de personnes à charte, canadiennes et étrangères. L'ACCAP fournit différents services qui sont axés vers les compagnies, mais aussi vers les consommateurs. Notamment, elle fournit de l'information au public à travers son centre d'information ainsi que le traitement des plaintes des consommateurs et elle développe des initiatives auprès des consommateurs et des médias, comme des brochures, des guides, des manuels, des feuillets d'information. De plus, l'ACCAP élabore des lignes directrices qui sont applicables à divers situations ou produits, comme on vous en a donné un exemple avec les «Lignes directrices applicables aux contrats individuels à capital variable afférents aux fonds distincts».

(16 h 20)

L'ACCAP n'est pas un organisme d'autoréglementation. Les règlements ou les lignes directrices de ses membres n'ont pas d'application légale, à moins, et c'est la plupart du temps ce qui se produit, que l'organisme de réglementation de la province – du Québec, en l'occurrence – intègre à sa réglementation les lignes directrices de l'Association. C'est le cas, à l'heure actuelle, d'un bon nombre des lignes directrices de l'Association, qui ont été intégrées au règlement d'application de la Loi sur les assurances, avec ou sans modifications, pour tenir compte du contexte particulier au Québec.

L'autre forme d'autoréglementation qu'on peut exercer, c'est lorsque la réglementation du Québec reconnaît spécifiquement qu'un organisme est chargé d'autoréglementation. Dans ce cas précis, on retrouve la SIAP, la Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes. La Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes a été mise sur pied par l'industrie pour subvenir aux besoins ou aux pertes que pourraient subir éventuellement les assurés des compagnies d'assurances de personnes qui feraient faillite, chose qui est arrivée à trois reprises au cours des dernières années. Vous vous souviendrez sans doute qu'au Québec il y avait eu la faillite des Coopérants qui a été indemnisée à hauteur de 100 % par la Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes.

Si on passe directement à notre mémoire... Le modèle québécois de surveillance des institutions financières est la méthode dite «des quatre piliers», où chacun des secteurs est réglementé selon son activité. Et, lorsque ses activités dans un autre secteur dépassent un certain seuil, à ce moment-là, elle est obligée de faire affaire via des filiales. On compte beaucoup, à ce moment-là, sur l'harmonisation entre les différents organismes de réglementation pour éviter que les compagnies aient affaire à des réglementations divergentes. L'industrie des assurances de personnes, qui fait affaire un peu partout à travers le monde... En fait, 47 % du volume de primes des compagnies d'assurances de personnes, maintenant, viennent d'affaires à l'extérieur du pays.

Donc, les compagnies d'assurances de personnes sont habituées de travailler avec un grand nombre de juridictions. Par exemple, on sait qu'aux États-Unis l'assurance relève de 50 juridictions différentes; et la même chose au Canada, la réglementation des assurances relève des provinces et non du fédéral. Donc, à ce moment-là, on est habitué de travailler avec un grand nombre de réglementations et on n'a pas vraiment de problème avec ça, dans la mesure où une certaine harmonisation existe entre les organisations. Il y un conseil des organismes de réglementation en valeurs mobilières. Il y a un organisme un peu semblable en matière d'assurance aussi, où les organismes de réglementation des assurances de chacune des provinces se réunissent régulièrement pour essayer de coordonner les réglementations.

À cet égard, on peut dire que la loi 134 a peut-être représenté le plus grand problème d'harmonisation entre le milieu des assurances et le milieu des valeurs mobilières. La loi 134 sur les intermédiaires a été adoptée en 1989, et, en fait, on s'est rendu compte qu'il n'y a jamais eu réellement d'entente entre la Commission des valeurs mobilières et l'Inspecteur général ou les conseils d'assurances de personnes, à ce niveau-là.

Pour nous, il est très important qu'on tienne compte de nos différences parce que, en matière d'assurance, c'est probablement le seul secteur des institutions financières où on réglemente séparément dans des législations différentes – ici, au Québec, à tout le moins – le fabricant du produit et le distributeur du produit. Alors que, on le voit avec des fiducies ou les institutions de dépôt, généralement, le distributeur du produit étant un employé de l'institution, il n'y a pas de réglementation particulière qui s'applique. Et, dans le cas des valeurs mobilières, la distribution est beaucoup plus largement réglementée que l'aspect du manufacturier.

Quant à la réglementation des valeurs mobilières, traditionnellement, elle a été composée de trois volets: la communication des informations pertinentes au consommateur; l'inscription des professionnels autorisés afin d'assurer l'intégrité et la qualité des services offerts; la définition des recours pénaux et civils. Au Québec, la Loi sur les intermédiaires de marché se limite à l'inscription des professionnels et à leur formation, et à leur éthique, il faut ajouter. Les autres volets relèvent de la Loi sur les assurances, puisque, ultimement, c'est l'assureur qui a la responsabilité des produits, comme pilier financier.

Comme nous l'avons vu précédemment, la réglementation de l'assurance s'est développée particulièrement autour de la solvabilité de l'assureur. Quant à la réglementation des contrats d'assurance, elle a été élaborée au Code civil où la protection des consommateurs est assurée plutôt par des stipulations obligatoires que par la communication d'informations pertinentes au consommateur.

Nous croyons qu'il faut préserver ces différences entre la réglementation des assurances et celle des valeurs mobilières. Lorsque l'évolution des fonctions fait en sorte qu'il y a chevauchement des produits, comme on le reconnaît en matière de fonds distincts, on pense que la réglementation par fonction doit évoluer, mais rester à l'intérieur des assurances, un peu à la façon dont le tribunal, la Cour d'appel du Québec, a interprété, dans l'affaire des Coopérants, qu'un produit d'assurance, même s'il a perdu plusieurs de ses caractéristiques au fil des ans, demeure toujours un produit d'assurance, et, dans le cas qui nous occupe, il avait été sujet à la protection de la SIAP, qui avait indemnisé tous les titulaires de ces contrats.

On pense qu'on peut arriver avec la même chose dans d'autres domaines, notamment les fonds variables. Et c'est ce qu'on a essayé de faire au cours de la dernière année en mettant à jour toute la réglementation concernant les fonds distincts qui s'appliquait aux compagnies d'assurances à travers le Canada. Ça a donné des lignes directrices applicables aux contrats individuels variables, qui ont été soumises aux autorités de réglementation en matière d'assurance et qui pourraient devenir une règle uniforme à l'ensemble du Canada pour tous les fonds variables distincts, un peu à la manière dont le fait la Commission des valeurs mobilières pour les fonds mutuels. Nous ne croyons donc pas que ces produits devraient être éventuellement réglementés par la Commission des valeurs mobilières.

Une des choses qui nous préoccupent aussi, c'est qu'on ne voudrait pas que nos distributeurs soient forcés de se constituer en filiales pour distribuer des produits, lorsque les produits distribués peuvent toucher plusieurs juridictions, que ce soient valeurs mobilières ou assurances, et particulièrement lorsqu'ils agissent comme planificateurs financiers. Ça reviendrait à dire qu'il faut séparer manufacturier et distributeur, et nous croyons que ça ne devrait pas se faire, à moins de circonstances particulières.

Nous vous rappelons que le système de réglementation actuel répond en grande partie aux besoins, puisque les assureurs sont responsables des produits qu'ils mettent en marché et que les assureurs sont membres de la société d'indemnisation en assurances de personnes qui va rembourser tous les assurés dans une grande proportion, si jamais un assureur fait faillite.

Par ailleurs, au niveau des intermédiaires, les intermédiaires sont réglementés par le Conseil des assurances de personnes, l'AIAPQ et possèdent leur propre fonds d'indemnisation pour indemniser en cas de fraude. Donc, nous croyons que le modèle de réglementation utilisé par la loi 134, en matière d'assurances de personnes à tout le moins, est une boucle qui est relativement complète qui permet dans chacun des cas de trouver une source d'indemnisation pour les consommateurs et qui est évidemment perfectible, mais qui répond adéquatement aux besoins pour l'instant, à tout le moins dans la perspective où la mise en marché des produits financiers a évolué à un rythme très rapide, au cours des dernières années, tant au Canada qu'aux États-Unis, et où toutes les règles changent presque aussi vite qu'on pourrait les écrire.

Alors, je suis disponible pour répondre à vos questions, avec les membres de notre délégation.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. Millette. Maintenant, je laisserai la parole au ministre. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Je voudrais peut-être vous poser quelques questions. D'abord, je vous remercie pour votre présentation. Je sais quelle catégorie d'intervenants vous représentez; ils sont généralement importants, de grande taille et ils ont une grande expérience. Et les lumières que vous nous apportez sont sûrement les bienvenues. Je voudrais vous dire que ce que nous avons comme position, c'est surtout la préoccupation d'assurer le même niveau de protection aux consommateurs pour des produits équivalents et non pas de soumettre tous les produits équivalents à une même autorité. Ce qui nous importe, et j'imagine que c'est compatible avec vos vues, c'est que la protection soit assurée, que ce soit à un endroit où à l'autre. Là, on choisit ce qui est le plus commode et ce qui implique le moins de bouleversements législatifs ou réglementaires. Êtes-vous, en gros, d'accord avec ça?

(16 h 30)

M. Millette (Yves): Effectivement, ce qu'on veut arriver à faire, c'est faire notre métier, tout en s'assurant que l'ensemble de nos clients ait le meilleur niveau de protection possible. Et vous pouvez être certains qu'on a mis tous les efforts, à venir jusqu'à aujourd'hui, pour protéger les clients en matière d'assurance, que ce soit avec la Société d'indemnisation pour les assurances de personnes ou avec, au Québec, la Loi sur les intermédiaires, qui a permis, je pense, d'avoir des intermédiaires qui sont à la fine pointe de la formation et de la déontologie dans le milieu.

M. Landry (Verchères): Est-ce que l'autoréglementation, comme doctrine et comme méthode, dans le domaine de la finance, des assurances comme des courtiers en valeurs, vous apparaît une attitude qui doit être maintenue et renforcée ou si ça comporte des exceptions? Parce que, dans votre mémoire, ce n'est pas tout à fait limpide.

M. Millette (Yves): Je présentais tantôt un des membres de notre délégation, M. Lebeau. On a mis en place un groupe de réflexion sur l'autoréglementation. On est bien conscients que l'autoréglementation... On pense que le modèle d'autoréglementation tel qu'il existe pour les manufacturiers de produits financiers – je vais parler plutôt pour eux-autres – tel qu'il existe à l'heure actuelle, rejoint quand même une grande partie des préoccupations. Mais on est tout à fait d'accord, quand on regarde toute la vague de poursuites concernant les pratiques commerciales de certains assureurs dans des pays comme les États-Unis... Il est bien évident qu'il y a place à amélioration. Et c'est la raison pour laquelle on a mis en place un groupe de réflexion, pour cerner ces questions-là. Mais on pense qu'avec l'Inspecteur général la réglementation en matière d'assurance... qui pourrait, comme on l'a fait jusqu'à aujourd'hui, mettre en place une réglementation basée sur les lignes directrices de l'industrie, on pense qu'on peut arriver à un système mixte de réglementation, d'autoréglementation qui soit intéressant.

On a vécu l'expérience de la Société d'indemnisation pour les assurances de personnes, quand il y a eu des faillites comme celle des Coopérants ou comme celle de La Confédération vie, qui sont des faillites importantes et qui mettent à l'épreuve, jusqu'à un certain point, le consensus de l'industrie, parce qu'il y a des sommes importantes à débourser. On s'est aperçu que ça avait fonctionné. Pas toujours sans tiraillements, mais, finalement, ça a fonctionné, et, dans le cas des assurés des Coopérants, ils ont tous été indemnisés. Dans le cas des assurés de Confédération, on est ralenti par les tribunaux américains, à l'heure actuelle, qui n'ont pas encore rendu leur décision sur leur part de la faillite des Coopérants, mais il s'agit d'un mécanisme qui semble fonctionner et résister aux pressions, aux épreuves du temps. On pense que, oui, c'est finalement un bon mécanisme ou un bon partenariat entre l'État et l'industrie privée.

M. Landry (Verchères): Vos derniers documents ne nous sont parvenus qu'il y a quelques jours, donc on n'a pas eu le temps de faire une analyse en profondeur. Peut-être que ça a été évoqué, mais, surtout le groupe de réflexion dont vous parlez, est-ce que vous voudriez bien nous envoyer le résultat de ces travaux quand il sera disponible?

M. Millette (Yves): Bien sûr.

M. Landry (Verchères): Ah, oui! On me fait remarquer – je ne suis pas un expert pointu de ce domaine – qu'aux États-Unis les commissions de valeurs mobilières réglementent certains produits d'assurance, comme les polices universelles. Alors, là, on a l'autorité des commissions de valeurs mobilières sur ces polices universelles.

M. Millette (Yves): Il faut se rappeler la façon dont fonctionne la réglementation des institutions financières aux États-Unis, où l'assurance est sous juridiction des États, alors que...

M. Landry (Verchères): ...d'ailleurs. Une compagnie d'assurances canadienne qui va opérer aux États-Unis a la surprise de sa vie avec 50 législations et réglementations.

M. Millette (Yves): Beaucoup moins coordonnées que ce qu'on peut voir au Canada.

M. Landry (Verchères): Ah oui!

M. Millette (Yves): Et la SEC, la Securities Exchange Commission, est un organisme fédéral qui essaie d'étendre sa juridiction, et, en bonne partie, ça explique pourquoi un certain nombre de produits d'assurance sont gérés par la commission des valeurs mobilières aux États-Unis, alors que ce n'est pas le cas au Canada. Je pense qu'il faut faire attention lorsqu'on importe la réglementation américaine à ce niveau-là.

M. Landry (Verchères): Mais vous me mettez ma prochaine question dans la bouche: Qu'est-ce que vous pensez du désir du gouvernement du Canada, contrairement, d'ailleurs, à la Constitution, de former une commission nationale des valeurs mobilières, alors que ces juridictions, on le sait bien, dans le système fédéral, sont dévolues aux provinces?

M. Millette (Yves): Le plus qu'on puisse dire à ce niveau-là, c'est que, en matière d'assurance, la réglementation a toujours été provinciale, dans chacune des provinces, et qu'on ne s'en est jamais plaint.

M. Landry (Verchères): Très bien. Est-ce que vous avez quelque chose à nous dire sur la divulgation de la rémunération des dirigeants? Je vous dis ça en toute franchise, parce que certains milieux de l'assurance nous ont fait des remarques et je me demandais si vous en aviez aussi.

M. Millette (Yves): Le milieu de l'assurance n'est pas nécessairement régi par les règles. Il y a énormément de mutuelles, donc de compagnies qui n'ont pas de capital-actions, qui ne sont pas soumises aux règles...

M. Landry (Verchères): C'est ça.

M. Millette (Yves): ...des marchés à l'heure actuelle. Donc, il existe un certain nombre de situations où on ne pense pas que ça pourrait être nécessaire. D'ailleurs, la divulgation des salaires des hauts dirigeants n'a pas eu toujours pour effet uniquement d'informer, mais on a vu souvent, à plusieurs endroits, qu'elle a eu pour effet de permettre aux hauts dirigeants de se comparer et de demander des augmentations. Donc, ce n'est pas nécessairement...

M. Landry (Verchères): Il n'y a jamais eu de diminution?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Millette (Yves): Pas à ma connaissance.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce que ça complète, M. le ministre?

M. Landry (Verchères): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui. M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. D'abord, tout de go, je voudrais remercier les membres de l'ACCAP de leur présentation, de leur mémoire, des recommandations de leur mémoire, et j'aurais quelques questions. On a parlé, tout à l'heure, d'autoréglementation. Il y a un thème qui revient à plusieurs reprises dans le rapport quinquennal, à savoir que chaque individu qui fait affaire avec le public, qui a des clients, comme c'est le cas dans le secteur des assurances, comme c'est le cas dans d'autres secteurs, entre autres dans les valeurs mobilières, devrait être membre d'une corporation qui fait l'autoréglementation et qui protège le public. Comment vous réagissez à ça, vous?

M. Millette (Yves): C'est un système de corporations professionnelles, si vous voulez, qui ne s'applique pas nécessairement...

M. Chagnon: Non, mais qui est un peu à côté des corporations professionnelles.

M. Millette (Yves): Pardon?

M. Chagnon: Qui est à côté de l'ordre, des ordres professionnels.

M. Millette (Yves): C'est vrai, mais qui est d'inspiration...

M. Chagnon: ...d'inspiration.

M. Millette (Yves): ...je ne voudrais pas dire corporatiste, parce que c'est péjoratif, là, mais qui n'est pas d'inspiration des compagnies. C'est-à-dire que la réglementation des compagnies ou l'autoréglementation des compagnies ne se fait pas sur la responsabilité personnelle ou professionnelle, mais beaucoup plus sur la capacité d'informer et d'indemniser les clients lorsqu'il y a des problèmes. Donc, la façon de faire de l'autoréglementation pour un intermédiaire et la façon de faire de l'autoréglementation pour une entreprise ou un manufacturier va différer, je pense.

M. Chagnon: Et, secundo, est-ce que vous êtes d'accord avec la définition du planificateur financier à qui on donnerait le titre de planificateur financier, le titre qu'on retrouve en bas de la page 12 de votre mémoire, dans la recommandation 4, et qui permettrait à ces planificateurs financiers d'eux-mêmes faire la vente d'un produit? Est-ce que vous êtes d'accord avec cette vision-là des choses, cette formulation de la vision d'un planificateur financier?

M. Millette (Yves): Il y a deux écoles de pensée à ce niveau-là...

M. Chagnon: Oui, je l'admets, c'est pour ça que je veux savoir dans quelle école vous êtes.

(16 h 40)

M. Millette (Yves): ...et nous nous situons d'emblée dans celle qui voudrait que le professionnel, que le planificateur financier puisse distribuer des produits, à condition d'identifier ce fait-là, et, s'il reçoit des commissions ou des paiements, qu'il doive dénoncer les institutions avec lesquelles il travaille. C'est d'ailleurs le contenu, en gros, ou l'orientation de la loi 134. Je comprends que ce n'est pas nécessairement celle de la Loi sur les valeurs mobilières.

M. Chagnon: C'est une interprétation qui va à l'encontre de la majorité des mémoires que nous avons eus. Le planificateur financier, selon l'école majoritaire, je dirais, ne devrait pas vendre de titres, ne devrait pas vendre de produits, de façon à être capable d'être un planificateur financier objectif et de pouvoir offrir l'un ou l'autre des besoins ou des services, plutôt des services dans la gamme des besoins du client.

M. Millette (Yves): À ce moment-là, le planificateur financier devient très élitiste et ne peut s'adresser finalement qu'à des gens qui ont des portefeuilles de plusieurs centaines de milliers de dollars. Autrement, le consommateur moyen n'est habituellement pas prêt à verser 2 000 $, 3 000 $, 4 000 $, 5 000 $ pour se faire faire une planification financière qui ne lui apporterait pas de produit en bout de piste.

M. Chagnon: Alors, il y a d'autres formulations qui sont, par exemple, celle de l'ACCOVAM, où on ne parlerait plus d'un planificateur financier, mais on parlerait d'un conseiller, d'un conseiller financier, un conseiller comme vous pourriez en avoir un pour n'importe quel besoin. Mais on ne peut pas parler de planificateur financier si on est un vendeur d'un produit déjà. Il y a un risque de conflit d'intérêts qui est énorme, selon la vision de la majorité des gens.

M. Millette (Yves): La divulgation du conflit d'intérêts devrait normalement permettre d'amoindrir le problème. Mais je suis bien...

M. Chagnon: Vous me permettrez une image: la divulgation du montant du vol ne fait pas que le vol est plus honnête.

M. Millette (Yves): Bien, là, je pense que vous mettez en doute la qualité des intermédiaires qui font ces choses-là. Je ne pense pas que les intermédiaires...

M. Chagnon: Vous comprendrez l'image que je voulais faire. Je ne cherche pas à faire un jugement d'intention, un procès d'intention à quiconque.

M. Millette (Yves): Il est évident que, dans une situation... Que ce soit dans une situation ou dans l'autre, dans une situation où le planificateur financier serait absolument indépendant de tous les produits qu'il vend, rien n'empêche qu'il pourrait avoir des commissions ou des frais quelconques qui pourraient lui être payés pour vendre un produit ou pour mousser un produit plutôt qu'un autre. On l'a vu à plusieurs occasions.

Donc, je pense, finalement, que la véritable façon de procéder là-dedans, c'est par la dénonciation des conflits d'intérêts, beaucoup plus que par la pureté ou non du planificateur financier.

M. Chagnon: La recommandation 4, en bas de la page 12: «La société d'assurances ne devrait pas être tenue de constituer ses agences ou son système de vente directe en filiales, même lorsque ses intermédiaires peuvent agir comme planificateurs financiers.»

Pourriez-vous me l'expliquer tout simplement, ce que vous voulez dire avec ça?

M. Millette (Yves): D'abord, si on parle d'une agence, à l'intérieur d'une agence, ce sont des représentants qui sont liés à une exclusivité avec la compagnie qu'ils représentent et ils ne peuvent vendre de produits financiers pour d'autres compagnies, à moins d'avoir une autorisation de leur compagnie en question. Et cette personne-là est obligée de s'identifier comme intermédiaire et elle peut s'identifier comme planificateur financier si elle a la formation requise. Mais on ne pense pas que ça changerait quoi que ce soit d'être obligé d'incorporer l'agence et d'en faire une agence de planificateurs financiers, alors que cette agence-là continuerait à vendre des produits financiers pour une personne.

M. Chagnon: Comment le client va s'y retrouver, si son planificateur financier est représentant d'une société d'assurances et qu'il est représentant d'une agence de cette souveraineté? Comment on fait pour s'y retrouver, quand on est simple client, dans une formule comme celle que vous évoquez en bas de la page 12?

M. Millette (Yves): Planificateur financier, écoutez, c'est... La philosophie de la loi 134 jusqu'à aujourd'hui, c'est que la planification financière est une suite ou une conséquence logique du produit que vous vendez. On exige de l'intermédiaire qui va vendre un produit d'analyser la situation financière de son client et de lui faire la meilleure recommandation en lui divulguant le fait qu'il est le représentant d'une entreprise ou un courtier et qu'il représente plusieurs compagnies.

M. Chagnon: Ou de ses agences ou de ses filiales.

M. Millette (Yves): Bien, tous les intermédiaires, finalement, ont cette obligation-là. Qu'ils soient des courtiers ou qu'ils soient des agents, des représentants à l'intérieur d'une agence, ils sont obligés d'identifier leur statut, et leur statut est, d'abord, celui d'intermédiaire et, ensuite, celui de planificateur financier.

M. Chagnon: M. le président, je vous remercie. Je voudrais remercier les membres de l'ACCAP. Je n'ai pas d'autres questions, en ce qui me concerne.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui auraient des questions? Sinon, M. Millette, vous aviez quelque chose à ajouter?

M. Millette (Yves): Non, ça va, merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Non.

M. Landry (Verchères): Merci pour votre présence, merci de votre mémoire.

M. Millette (Yves): Merci beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci beaucoup. J'inviterais l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec à se présenter.

Bienvenue, mesdames, monsieur. J'inviterais M. Denis Savard à nous présenter les personnes qui l'accompagnent et à nous présenter son mémoire par la suite.


Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec (AIAPQ)

M. Savard (Denis): M. le Président, M. le ministre, distingués membres de la commission, je vous remercie, d'abord, de nous entendre à cette commission. Je voudrais vous présenter les personnes qui m'accompagnent: Mme Lucie Granger, qui est directrice générale de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, et Me Anne-Marie Beaudoin, qui est directrice des services professionnels.

L'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, qui a été créée le 1er octobre 1989, est une association à adhésion obligatoire qui regroupe 13 000 membres actifs au Québec. La mission de l'Association est de protéger le patrimoine financier du consommateur québécois par l'intermédiaire de conseillers professionnels accrédités, qualifiés pour lui offrir des services financiers intégrant l'assurance de personnes, répondant ainsi à l'ensemble de ses besoins.

Conformément aux responsabilités et aux prérogatives que lui a confiées le législateur, l'AIAPQ vise principalement deux objectifs: la protection du public; le dynamisme, l'efficacité et l'intégrité de ses membres et de la profession qu'ils exercent.

Les principes, maintenant, que défend l'AIAPQ. Les principes qui sous-tendent l'action de l'AIAPQ et la présente intervention sont simples et ils correspondent à sa mission. Ces principes sont les suivants.

Premièrement, le contrôle de notre secteur financier doit être exercé aussi largement que possible à l'échelle du Québec, et il doit être exercé avec rigueur, efficacité et à des coûts raisonnables.

L'AIAPQ croit que pour atteindre ces objectifs, il serait utile de créer une seule instance gouvernementale responsable de l'ensemble de la discipline et du contrôle des professions d'intermédiation financière.

L'AIAPQ estime que le moment est propice à une simplification de la structure de contrôle et d'encadrement de tout le secteur de la distribution de produits financiers dans un but d'efficacité et de protection des intérêts des consommateurs.

(16 h 50)

L'AIAPQ croit utile que, symétriquement, les professions d'intermédiation amorcent rapidement un regroupement de services et en viennent à offrir aux consommateurs et intermédiaires un guichet unique, d'accès facile, traitant l'ensemble des demandes et des plaintes des consommateurs.

L'AIAPQ est convaincue que seule une ou des associations à adhésion obligatoire peuvent garantir à l'État québécois un contrôle réel et substantiel sur le secteur financier québécois, et aux consommateurs un accès direct aux mécanismes d'encadrement qui protègent leur sécurité.

Le contrôle de notre secteur financier. Nous croyons que le Québec a un contrôle indiscutable sur la distribution des produits financiers. Le Québec exerce, pour des motifs historiques familiers à tous ceux qui oeuvrent dans le secteur, une influence limitée sur les institutions financières qui y sont accréditées.

Traditionnellement, les grandes banques à charte canadiennes sont sous contrôle fédéral. Les plus importantes sociétés d'assurances ont majoritairement leur siège social hors du Québec. De leur côté, les grandes sociétés de fiducie sont essentiellement pancanadiennes et ontariennes. Quant aux sociétés de courtage en valeurs, il n'en reste qu'une ou deux qui soient à ce jour indépendantes. Pratiquement toutes les grandes maisons de courtage canadiennes sont aujourd'hui contrôlées par des banques à charte. Quant au marché boursier, il glisse dramatiquement vers Toronto.

Au plan institutionnel, le Québec n'exerce d'influence réelle que sur le Mouvement Desjardins, quelques sociétés d'assurance-vie de bonne taille et les institutions des secteurs des assurances, du secteur fiduciaire et du secteur des valeurs mobilières que les grandes banques à charte n'ont pas encore convoitées.

Sans vouloir minimiser pour autant l'importance sectorielle ou régionale de certaines institutions québécoises des secteurs de l'assurance et de la fiducie ou des petites sociétés de courtage de type boutique offrant un service institutionnel limité, on se doit cependant de conclure que le gouvernement du Québec ne dispose, à part celui de leur interdire éventuellement certaines activités au Québec, que d'un pouvoir très limité sur les institutions financières majeures, qui sont fédérales.

Au contraire, le gouvernement du Québec possède toujours une influence directe et une emprise solide sur la majorité des professions de distribution et d'intermédiation en services financiers.

L'AIAPQ est d'avis que le gouvernement du Québec, après avoir exercé un leadership législatif et réglementaire au Canada au cours des dernières décennies, doit maintenir le cap en améliorant son mode de contrôle de même que l'efficacité et la force de son encadrement des professions financières.

Une seule instance gouvernementale. L'AIAPQ privilégie, pour atteindre un résultat optimal, le rapprochement dans une structure fonctionnelle de la Commission des valeurs mobilières et de l'Inspecteur général des institutions financières, l'IGIF. La condition sine qua non d'un tel rapprochement est toutefois que la nouvelle entité procède à une dévolution de pouvoirs aux intermédiaires et non aux institutions, comme le fait actuellement la CVMQ, une solution inapplicable et nocive dans le secteur représenté par l'AIAPQ. Ce faisant, le Québec agira puissamment sur la composante la plus précieuse des institutions financières: leur réseau de distribution.

Pour avoir une influence déterminante sur la distribution de produits et services financiers, le gouvernement du Québec doit être certain de pouvoir trouver et rejoindre directement et massivement ces intermédiaires. Seul un encadrement global et massif par une ou plusieurs organisations responsables, telle l'AIAPQ, offre cette possibilité. Sans adhésion obligatoire, la concentration dynamique des intermédiaires s'effritera et le pouvoir d'intervention du Québec sera dilué.

Déléguer l'encadrement des intermédiaires aux institutions, c'est le déléguer au fédéral. Si l'encadrement est laissé aux institutions sur lesquelles le Québec a peu d'influence, le contrôle de la distribution se trouvera fortement déplacé vers les autorités fédérales et celles de l'Ontario. Un contrôle clair dans une structure très simplifiée favorisera la délégation de pouvoir et la cohérence des lois et règlements. C'est ce qui offre la seule garantie que le secteur financier québécois ne croulera pas sous une surréglementation et qu'il accroîtra son efficacité et son caractère concurrentiel, et qu'il évoluera en conformité avec les objectifs de la société québécoise.

Moderniser un système d'encadrement complexe et coûteux. Le secteur financier québécois est régi par une foule d'institutions dont le nombre, aux yeux de l'AIAPQ, est excessif. Idéalement, l'Association croit que le secteur financier, nécessitant le recours à de véritables intermédiaires formés et encadrés pour offrir des services comportant un rôle conseil et des produits variés et complexes, devrait être regroupé autour de deux pôles bien identifiés, soit celui de l'État et celui des professionnels eux-mêmes.

Les institutions de dépôt peuvent peut-être offrir des services de dépôt et de retrait efficaces grâce à un encadrement institutionnel fort. Il en va tout autrement de l'analyse des besoins financiers et du conseil quant aux produits propres à favoriser l'établissement et la protection d'un patrimoine individuel. Le gouvernement du Québec doit assurer un encadrement étanche des actes professionnels rendus par les intermédiaires de marché et les intermédiaires financiers.

L'encadrement des nombreuses professions financières relève actuellement de l'Inspecteur général des institutions financières, soit l'IGIF, et de la Commission des valeurs mobilières. Ces organismes possèdent des responsabilités à l'endroit des institutions et à l'égard des intermédiaires. Tous deux délèguent une bonne partie de ces pouvoirs à des organismes exerçant le contrôle professionnel, la surveillance des intermédiaires et la discipline qui est le complément naturel de tout encadrement rigoureux.

L'AIAPQ exerce des prérogatives auprès des intermédiaires en assurance de personnes. L'Association des courtiers d'assurances du Québec fait de même auprès des courtiers en assurance de dommages. L'Institut québécois de planification financière décerne, de son côté, le titre de planificateur financier mais n'en assume pas l'encadrement. Les représentants de maisons de courtage et certains courtiers d'exercice restreint, autorisés à vendre des fonds d'investissement et divers fonds de placement et fonds communs, sont régis par la CVMQ et encadrés soit par la Bourse de Montréal ou l'ACCOVAM.

L'AIAPQ a déploré à maintes reprises la multiplicité des organismes gouvernementaux, quasi gouvernementaux ou intermédiaires qui contribuent à créer une grande confusion chez le consommateur lorsque celui-ci veut faire valoir ses droits.

Le Conseil des assurances de personnes et le Conseil des assurances de dommages contribuent implicitement à alourdir notre système financier. La même complexité et la même confusion entravent les intermédiaires eux-mêmes lorsqu'ils doivent recueillir les permis nécessaires à exercer, dans le marché actuel, leur rôle de conseillers financiers ou de planificateurs d'avenir.

Un objectif qui sous-tend notre action: simplifier les structures d'encadrement. L'AIAPQ estime que la structure d'encadrement de notre secteur financier pourrait être fortement simplifiée et à l'avantage de tous: d'abord, les consommateurs, qui sauraient plus facilement à qui confier leurs problèmes; les intermédiaires eux-mêmes, qui ne seraient plus tenus de remplir de multiples formulaires et de s'adresser à de multiples organismes ni de cotiser à de multiples guichets professionnels; les gouvernements, qui n'auraient pas à entretenir des structures lourdes et coûteuses uniquement pour encadrer des mécanismes d'encadrement; les institutions financières, qui contribuent, elles aussi, au maintien de ces organismes.

Des intermédiaires regroupés. Autant l'AIAPQ considérerait positivement le regroupement sous un même toit des organismes gouvernementaux de contrôle, de surveillance et ultimement de développement harmonieux du secteur financier québécois, autant elle entrevoit positivement les rapprochements et les regroupements susceptibles de rendre les intermédiaires plus efficaces.

(17 heures)

À la mi-septembre, l'AIAPQ et l'ACAPQ, donc tous les intermédiaires en assurance du Québec, emménageront dans des locaux contigus et il est possible même que l'IQPF, l'Institut québécois de planification financière, en fasse autant à l'échéance de son bail. Ces organismes envisagent ainsi la mise en commun de services toujours onéreux, tels les services de registrariat, informatique, inspection professionnelle, dans le but d'en optimiser les coûts.

Notre objectif: un guichet unique. L'AIAPQ est d'avis que, dans un avenir proche, la majorité des associations à adhésion obligatoire du secteur financier québécois pourraient ainsi se rapprocher, mettre en commun des services et même créer un guichet unique en intermédiation financière, guidant à la fois les intermédiaires professionnels au sein d'une structure ouverte et d'accès plus facile. Il serait intéressant, productif et significatif, en termes de contrôle des services financiers au Québec, qu'un guichet gouvernemental unique réponde à un guichet unique d'intermédiaires, mettant leurs ressources en commun pour gérer plus efficacement leur encadrement.

Bien qu'historiquement attachée à la structure de l'Inspecteur général des institutions financières, l'AIAPQ pense que cette structure, actuellement fort comprimée, pourrait bénéficier d'un rapprochement avec la Commission des valeurs mobilières, formant un organisme d'encadrement plus polyvalent dont le nom refléterait le rôle diversifié. Rejetant d'emblée la création d'un nouvel organisme, nous croyons plus indiqué d'envisager le rapprochement des organismes actuels. Nous croyons qu'à tout le moins le rôle disciplinaire ultime exercé par l'IGIF, avec des pouvoirs qui nous apparaissent insuffisants, pourrait s'associer à celui qu'exerce la CVMQ dans son domaine.

L'AIAPQ a déploré à maintes reprises dans le passé la compétence inégale des tribunaux réguliers, sur le plan régional notamment, pour juger des causes de responsabilité dans le secteur financier. Peut-être qu'un organisme regroupant l'IGIF et la CVMQ pourrait jouer un rôle judiciaire accru en matière de litige découlant de la vente de produits et de services financiers.

Maintenant, pour un seul fonds d'indemnisation pour tout le secteur des intermédiaires. Dans cette même veine et aussi par souci de simplification, de cohérence et d'efficacité des structures de contrôle, d'encadrement et de développement des intermédiaires financiers, l'AIAPQ propose que tous les fonds sectoriels actuellement maintenus ou accumulés afin d'indemniser les victimes d'actes répréhensibles de la part des intermédiaires soient réunis en un seul fonds à gestion unique et centralisée. Un tel fonds devrait toutefois recueillir des groupes d'intermédiaires des contributions entièrement proportionnelles aux déboursés propres à chaque groupe. En d'autres termes, chacun contribuerait selon les risques de son champ d'activité, mais la gestion du fonds et de ses mécanismes d'attribution serait centralisée pour fins de cohérence et d'efficacité.

Nous voulons une seule règle pour la vente des fonds de placement. Il existe cependant des dispenses spécifiques pour certains produits, mais aussi des échappatoires possibles dans la structure actuelle. Plusieurs intermédiaires, notamment des courtiers et des représentants dotés de permis d'exercice restreints, sont dispensés de l'obligation d'obtenir des permis réguliers et ne sont encadrés par aucun organisme sectoriel. L'AIAPQ estime qu'il s'agit là d'un anachronisme. Le rapport quinquennal sur la Loi sur les valeurs mobilières de 1993 mentionnait cette disparité des permis et de l'encadrement des représentants en fonds de placement, d'investissements, fonds spéciaux ou fonds distincts, ou fonds communs.

L'AIAPQ trouverait approprié, pour des motifs de cohésion disciplinaire, que chaque professionnel désirant vendre l'un ou l'autre de ces produits se voie assujetti aux mêmes règles et obligations et détienne un permis décerné uniquement sur reconnaissance de la formation et de l'expertise acquise par l'intermédiaire postulant. Il ne devrait exister au Québec aucune échappatoire à cette règle, seule garante de la protection intégrale des consommateurs.

Un institut de formation unique pour tous les professionnels de l'intermédiation. Toujours dans le même esprit, l'AIAPQ estime qu'il est souhaitable, dans l'établissement d'une structure de beaucoup simplifiée, comportant la mise en commun de services, voire le regroupement d'associations d'intermédiaires sur une base totalement volontaire, de regrouper les activités de formation en intermédiation financière.

Nous proposons donc la création d'un seul institut des services financiers offrant toute la gamme des spécialités d'intermédiation. Cette formation devrait reposer sur un tronc commun de connaissances déjà largement assemblées dans certains des programmes de cours offerts aux intermédiaires actuellement. Des spécialisations offertes à l'intérieur d'une même institution de calibre mondial pourraient même mener à l'obtention de titres soit de niveau D.E.C., baccalauréats spécialisés ou même maîtrise. L'AIAPQ estime, en outre, que la formation continue devrait être érigée en système obligatoire afin de s'assurer que les intermédiaires de marchés au Québec demeurent toujours à la fine pointe de tous les professionnels de ce secteur en Amérique du Nord.

Quelques autres remarques, en terminant, à l'égard de la surveillance et du contrôle de la vente sans intermédiaire. Le formidable boom des inforoutes et des outils de communication, de télémarketing et de télévente, lorsqu'il agit dans le secteur financier, constitue pour le consommateur une menace bien réelle. La multiplication des offres directes de services, y compris des services d'assurance, telles l'assurance-voyage, l'assurance-vie pour personnes âgées, l'assurance hypothécaire, par des personnes insuffisamment formées entraîne une consommation irrationnelle et malsaine de plusieurs produits financiers. Le consommateur est particulièrement fragile à cet égard et exposé à des abus réels que nous croyons urgent d'enrayer.

Rappelons à ce sujet les cas de nombreux emprunteurs croyant avoir contracté des assurances-prêts hypothécaires auprès d'institutions bancaires et dont les héritiers ont été frustrés. L'enquête que nous avons menée et qui a conduit à la publication d'un dossier noir sur l'assurance-hypothèque en a révélé l'ampleur.

En matière d'assurance notamment, des consommateurs peuvent souffrir de surassurance en acquérant, sous pression, tel au moment d'un départ pour un voyage quelconque, une assurance qu'ils possèdent sur leur assurance collective, des protections que leur offre leur police courante. Et, à l'opposé, on peut voir de la sous-assurance, au moment où ils abandonnent des produits qui les couvraient de façon universelle pour des garanties limitées.

De plus, des produits financiers vendus par télémarketing ou sous le couvert de contrats collectifs, telle l'assurance-hypothèque dans les banques, amènent souvent le consommateur à acquérir des services d'un manufacturier dont il ne connaît même pas l'identité et encore moins la solvabilité. En outre, le consommateur ne possède pas l'assurance formelle que le produit acheté correspond à ses besoins, ni celle d'avoir droit aux prestations qu'il acquiert.

Aussi reconnaissons-nous l'utilité de mettre en place un service étudiant et surveillant les produits et services offerts sur ce marché, au sein même de l'institution multiréglementaire proposée, afin de les approuver et, si nécessaire, de les refuser.

Surveillance et approbation des produits. Une proportion croissante des nouveaux marchés, des nouveaux produits et services financiers offerts sur le marché comporte des caractéristiques chevauchant plus d'un secteur financier. À titre d'exemple, les polices d'assurance-vie universelle comportent une part d'investissements ou de placements intégrant des valeurs mobilières. Les représentants de maisons de courtage, de leur côté, offrent de plus en plus de produits comportant de l'assurance. Ces produits mixtes doivent être examinés et autorisés, ou refusés, par la même instance gouvernementale.

L'AIAPQ croit qu'un organisme gouvernemental unique de contrôle et de surveillance des marchés serait en mesure de s'acquitter de cette tâche en faisant appel de manière consultative à des représentants, des manufacturiers de produits, des intermédiaires et du public.

(17 h 10)

Il faut limiter le port du titre de planificateur financier aux seuls individus. L'AIAPQ croit, par ailleurs, que l'attribution à des cabinets multidisciplinaires, y compris les maisons de courtage dont s'occupe à l'heure actuelle la CVMQ, du droit de porter le titre de cabinet en planification financière est abusif. Seuls les cabinets ne comprenant que des planificateurs financiers agréés devraient avoir droit à ce nom. Ils pourraient d'ailleurs simplement faire partie d'une filiale ou d'une société distincte reliée à un cabinet d'intermédiation d'une autre nature, représentants en valeurs ou en assurance-vie.

À titre de conclusion, l'AIAPQ estime que le moment est propice à une simplification de la structure de contrôle et d'encadrement de tout le secteur de la distribution des produits financiers, dans un but d'efficacité et de protection des intérêts des consommateurs.

L'AIAPQ croit que pour atteindre ces objectifs il serait utile de créer une seule instance gouvernementale responsable de l'ensemble de la discipline et du contrôle des professions d'intermédiation financière.

L'AIAPQ croit utile que, symétriquement, les professions d'intermédiation amorcent rapidement un regroupement de services et en viennent à offrir aux consommateurs et aux intermédiaires un guichet unique, d'accès facile, traitant l'ensemble des demandes et des plaintes des consommateurs.

L'AIAPQ est convaincue que seules des associations à adhésion obligatoire assurent à l'État québécois un contrôle réel et substantiel sur le secteur financier québécois et aux consommateurs un accès direct aux mécanismes d'encadrement qui peuvent seuls protéger leur sécurité. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. Savard, pour la présentation de votre mémoire. Je vais céder la parole au député de Crémazie, pour ses commentaires ou des questions à adresser à nos invités.

M. Campeau: Merci, M. le Président. Je vous remercie, M. Savard, et merci aux deux dames qui vous accompagnent, aussi, pour avoir pris le temps de venir réfléchir avec nous et de nous faire des suggestions. Une bonne partie de votre exposé va être couvert aussi par le nouveau projet de loi que le ministre Landry doit déposer incessamment, dans les jours qui viennent, sur les intermédiaires de marché. Ça va se recouper, ça, un peu. Et votre exposé, votre mémoire que vous avez si bien rédigé va servir à ça aussi, à améliorer ce projet de loi là.

Dans les questions, c'est clair que vous soulevez un problème de vulgarisation. Vous dites: Les gens ont de l'assurance; à l'occasion, ils vont la perdre; des fois, ils se pensent assurés et ils ne le sont pas; des fois, ils sont assurés et ils ne le savent même pas. Il y a un problème de vulgarisation, et ça se retrouve partout, la vulgarisation. Dans la vie, quand les choses sont mal expliquées, elles sont toujours mal comprises.

Alors, je pense qu'il y a chez tous ces intermédiaires-là un effort, d'abord, de bien comprendre le produit qu'ils veulent offrir. Après ça, ils sont mieux capables de l'expliquer. Là, ce n'était pas ma question, c'étaient mes commentaires.

Et, vous, est-ce que vous suggérez que le gouvernement devrait réglementer, par exemple, tous les distributeurs de produits et services financiers et pas seulement les intermédiaires de marché?

M. Savard (Denis): C'est votre question?

M. Campeau: Oui.

M. Savard (Denis): Je vais commencer d'abord sur l'entrée en matière à l'égard de la vulgarisation. Au-delà de la vulgarisation, il y a toute la dimension de responsabilité des individus qui interviennent qui est un élément majeur. Et, aussi, ce qui est associé à cette responsabilité, c'est l'ouverture aux recours. Je pense que le consommateur qui se voit en présence d'un intermédiaire certifié qui est encadré et régi par une autorité disciplinaire, par ses pairs, est supporté dans sa démarche pour obtenir justice. Et, au-delà de la vulgarisation, je pense qu'il y a toute la notion d'obtenir justice, pour le consommateur, sans avoir nécessairement besoin de se tourner vers des tribunaux. Avoir une instance qui fait partie du système d'encadrement par les pairs est essentiel pour le consommateur.

Maintenant, à l'égard de la distribution des produits eux-mêmes, sur la question: Est-ce que le gouvernement devrait avoir un seul organisme responsable de l'ensemble de l'encadrement? nous croyons que, pour ce qui est de tous les distributeurs de produits financiers, il devrait y avoir un organisme unique. Pour ce qui est des concepteurs de produits, pour ce qui est des compagnies d'assurances, d'un côté, ou des cabinets de courtage, je pense que les rôles sont actuellement très différents. Et le rôle exercé par l'Inspecteur à l'égard de la surveillance, de la solvabilité des compagnies, c'est un rôle qui est tout à fait différent du rôle, en tout cas dans notre perception, que joue la Commission des valeurs mobilières au niveau de la surveillance de la protection des épargnants.

Donc, les forces, les axes sont placés à des endroits différents. Je pense que, dans ce secteur d'activité, à l'égard à la fois des compagnies d'assurances et des entités qui offrent des produits d'épargne, ces rôles-là sont très bien joués par chacun des organismes. Quand on parle d'un regroupement fonctionnel, c'est à l'égard d'un regroupement au niveau de l'encadrement de tout ce qui est intermédiation de marché au Québec.

M. Campeau: Vous ne pensez pas... Je reviens à la vulgarisation. On rencontre quelqu'un, on lui parle d'assurances, quelqu'un qui n'entend pas parler de ça tous les jours. Il peut être très intelligent, mais il n'est pas dans ce métier-là. Il ne sait jamais de quoi il parle. Il ne sait pas s'il est assuré pour 20 ans, sur une vie entière... Vous avez des mécanismes... Alors, vous n'êtes pas vulgarisé dans ce genre de métier là. Je dirais la même chose dans le domaine financier. Est-ce qu'il y a un moyen pour vous autres, pour votre Association, de simplifier les choses? Et puis, d'abord, quand quelqu'un fait affaire avec vous, il veut être bien servi. Il ne veut pas penser qu'il va être obligé de vous poursuivre un jour.

M. Savard (Denis): Ce moyen existe et il s'appelle formation. Et c'est à cet égard qu'une des recommandations que nous faisons est d'intégrer dans un institut de formation unique, au Québec, toute la formation à l'égard de tout ce qui s'appelle intermédiation de produits financiers au Québec. Parce que, pour être en mesure de vulgariser, il n'y a que ce qui se conçoit bien qui s'énonce clairement. Et je pense que, si l'ensemble des intermédiaires de marché sont bien formés, au Québec, ce qu'ils sont si on les compare à ceux de l'extérieur du Québec... À l'égard, d'abord, des exigences pour entrer en carrière, nous sommes bien avant, au niveau de la formation, au Québec, au niveau des exigences de formation. Donc, au Québec, nous avons déjà des pas qui sont faits. Il en reste quelques-uns à faire, et un de ceux-là est vraiment de permettre que le consommateur puisse compter sur un niveau de compétence de l'intermédiaire de marché qui se trouve devant lui.

M. Campeau: Aussi, il y a la compétence, mais il veut d'abord être capable de savoir ce qu'il achète. S'il achète un bien de consommation, il le voit, parce qu'il y a une consommation. Mais un produit d'assurance, c'est juste un morceau de papier. Puis, bien souvent, après un mois ou deux, votre client, il ne le sait pas, ce qu'il a acheté. Alors, je dis: Vous, est-ce que vous avez un moyen de faire que ça va être simplifié et puis que les gens vont comprendre exactement ce qu'ils achètent?

M. Savard (Denis): Principalement, en assurance de personnes, le client n'achète pas un morceau de papier. Ce qu'il achète, c'est essentiellement sa sécurité financière et la sécurité financière des siens. Le morceau de papier n'est que le témoignage qu'il a cette couverture et cette garantie. Et ce qui est important pour lui, c'est de savoir que, cette sécurité, il la paye pour ses héritiers et pour sa famille. Et le morceau de papier n'est qu'une attestation.

Il est bien évident que la complexité des produits financiers est un élément qui ne facilite pas la tâche de compréhension des consommateurs. Mais le rôle essentiel joué par les intermédiaires dans la simplification ou la vulgarisation est un rôle excessivement important. Et c'est ce rôle que les intermédiaires jouent et doivent jouer de plus en plus, parce que les produits deviennent de plus en plus compliqués et les consommateurs ont de plus en plus besoin d'être supportés dans leur démarche d'acquisition de produits. Justement, ces produits sont, d'une part, compliqués. Et, d'autre part, ils doivent s'assumer de plus en plus comme consommateurs à l'égard de leurs responsabilités familiales, parce que, évidemment, le rôle de protecteur de l'État est amené à diminuer...

M. Campeau: Juste un commentaire avant de vous poser une autre question. N'étant pas un expert de l'assurance, quand on rencontre quelqu'un en assurance, on a toujours l'impression qu'il a des produits compliqués pour mieux t'embourber et finalement dont tu sens le besoin. Puis, finalement, tu signes et tu ne sais pas ce que tu signes. J'ai un autre commentaire, je ne sais pas...

M. Savard (Denis): C'est pour ça que le rôle essentiel de l'intermédiaire est d'abord de procéder à une analyse de besoins et de recommander le produit qui est en accord avec la réponse aux attentes de ces besoins-là.

M. Campeau: Mon collègue me dit que le projet 134, ça va simplifier ça. Alors, bravo!

M. Savard (Denis): Et nous le souhaitons aussi.

M. Bertrand (Charlevoix): C'était à votre demande, comme ex-ministre, monsieur.

M. Campeau: Je comprends que vous affirmez, vous, que...

M. Chagnon: Je suis estomaqué d'apprendre que vous signez des choses que vous ne comprenez pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

(17 h 20)

M. Chagnon: Comme ancien ministre des Finances, comme ancien président de la Caisse de dépôt, comme ancien... On a dit tout à l'heure que vous étiez...

M. Campeau: Est-ce que je pourrais reprendre la parole?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Comme ancien courtier...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous pouvez essayer de vous racheter, M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Je comprends que vous affirmez que, tous les intermédiaires qui offrent des fonds communs de placement, des fonds distincts puis d'autres fonds, ils devraient tous être soumis à la réglementation sur les valeurs mobilières?

M. Savard (Denis): Ce que nous proposons, effectivement, et ce que nous encourageons, c'est de ne pas avoir d'encadrement parallèle pour distribuer des produits similaires. Ce que nous pensons, c'est que, effectivement, il existe une formule d'encadrement pour la distribution des produits, soit des fonds distincts ou des fonds mutuels, et qu'il n'est pas nécessaire de créer un autre organisme pour surveiller la distribution d'un produit, qui, à tous égards, est tout à fait similaire...

M. Campeau: Merci, M. le président.

M. Savard (Denis): Et nous encourageons nos membres à avoir le double permis. Et, dans la dernière année, les détenteurs de ce permis parmi nos membres ont doublé.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Crémazie. La parole est au député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. Je remercie, salue et souhaite la bienvenue à l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec qui nous a fourni un mémoire intéressant. Quelques questions concernant les planifications financières. Je les ai posées à vos prédécesseurs, je peux difficilement vous oublier. Vous me voyez évidemment venir, puisque vous étiez présents dans la salle lorsque je posais la question à vos prédécesseurs. Est-ce qu'on peut faire de la planification financière ou s'incorporer du titre de planificateur financier et vendre un produit, selon vous?

M. Savard (Denis): Les intermédiaires en assurance de personne ont toujours fait de la planification financière.

M. Chagnon: Oui, oui, ça...

M. Savard (Denis): Le titre...

M. Chagnon: Oui.

M. Savard (Denis): Ce que régit actuellement l'Institut québécois de planification financière est essentiellement le titre de planificateur financier. Personnellement, en tant qu'assureur-vie agréé et planificateur financier, je peux vous dire qu'il est possible d'exercer au Québec en planification financière et de porter ce titre et de distribuer des produits.

Évidemment, ce que nous dénonçons à l'intérieur de notre mémoire est la possibilité pour un cabinet, qu'il soit un cabinet en assurance de personne ou en assurance, ou n'importe quel service financier, que ce soit en valeurs mobilières, pour ce cabinet, où il peut y avoir aussi peu qu'un seul planificateur financier... Et que ce cabinet porte le nom de cabinet en planification financière, ça, c'est abusif et trompeur pour le consommateur qui, lui, parce qu'il fait affaire avec le cabinet peut croire qu'il fait affaire avec un ensemble de planificateurs financiers, alors qu'un seul en est porteur.

M. Chagnon: M. le Président, j'ai lu le document, je l'ai entendu de la bouche de M. Savard, je l'entends le répéter, mais ma question, c'est l'individu. L'individu qui s'appelle, qui se donne le titre ou à qui on a donné le titre de planificateur financier, est-ce que c'est un titre qui vous apparaît cohérent avec la possibilité pour ce planificateur financier de recevoir des honoraires?

M. Savard (Denis): Le planificateur financier... Si vous saviez le nombre de professions que regroupe l'Institut québécois de planification financière. Effectivement, la très large majorité des planificateurs financiers sont des personnes qui travaillent à honoraires et tous peuvent réclamer des honoraires pour leur planification financière.

M. Chagnon: Alors, qu'est-ce que vous pensez...

M. Savard (Denis): Certains d'entre eux...

M. Chagnon: Alors, qu'est-ce que vous pensez de deux choses? D'abord, dans le domaine de la planification financière, dans un mémoire qui va suivre le vôtre – vous avez entendu le précédent; vous pourrez entendre le prochain, après le dîner – l'un des problèmes soulevés par le cumul possible du titre de planificateur financier avec d'autres titres, dans le domaine de l'intermédiation financière, est que très peu de planificateurs financiers rendent ce service de façon isolée, moyennant des honoraires. Autrement dit, tous les planificateurs financiers ou presque vendent des produits financiers. On s'entend. Nous sommes fermement convaincus qu'aucun d'eux ne peut, dans un tel contexte, prétendre à l'objectivité. En effet, selon le produit financier que vend le planificateur financier, la planification financière sera nécessairement orientée dans le sens de ce produit financier. Est-ce que ça a du sens pour vous ou pas?

M. Savard (Denis): Je pense que ce qu'il est important de distinguer, c'est l'exercice ou la pratique de la planification financière du titre de planificateur financier. L'IQPF ne régit que le titre. Et ce que nous avons recommandé, nous, pour que le consommateur s'y retrouve de façon très claire, c'est que les personnes qui distribuent des produits financiers en assurance de personnes s'appellent conseillers en assurance, et conseillers en placement quand ils distribuent des fonds distincts. Et, à ce moment-là, le consommateur va savoir qu'en s'adressant à un conseiller financier, il s'adresse à quelqu'un qui reçoit des commissions pour distribuer le produit. Et, quand il s'adresse à un planificateur financier, il a un champ d'expertise différent.

M. Chagnon: On s'entend. Finalement, j'ai eu mon morceau. Surtout après, finalement, si je me réfère à votre propre document, en page 14, où, en haut de la page, on dit: «L'Institut québécois de planification financière – en haut de votre mémoire, vous devez vous rappeler de cela – décerne de son côté le titre de planificateur financier, mais n'en assume pas l'encadrement.» Alors, il y a un problème quelque part.

M. Savard (Denis): Chacune des professions réunit, encadre les personnes qui décident de porter le titre. Nous encadrons les planificateurs financiers qui sont intermédiaires en assurance de personnes.

M. Chagnon: Je note, M. le président, que vous avez, dans votre mémoire, à la page 28, dans le bas de la page, soulevé une question particulière concernant les droits du petit épargnant. Et vous semblez être pleinement d'accord avec la section dont j'ai parlé un peu plus tôt, les articles 25 à 30 du rapport quinquennal, qui amèneraient des modifications à la Loi sur les valeurs immobilières. J'imagine que vous les souhaitez, puisque c'est comme cela que j'interprète votre mémoire.

M. Savard (Denis): Votre interprétation est tout à fait juste.

M. Chagnon: Et, en conclusion, M. le président, j'aimerais que vous me précisiez... Lorsque vous pensez à une seule structure pour protéger ou du moins pour encadrer l'ensemble – l'avant-dernière question, je devrais dire – des intermédiaires de marché, est-ce que vous pensez à la Commission des valeurs mobilières ou est-ce que vous pensez à une autre structure?

M. Savard (Denis): Ce que nous pensons... Effectivement, c'est au gouvernement à faire ce choix, à savoir: Est-ce qu'il va privilégier un encadrement...

M. Chagnon: Le gouvernement, il vous a demandé votre opinion.

M. Savard (Denis): Notre opinion, à cet égard, est que peu importe... Nous avons toujours dit, et nous l'avons dit dans notre mémoire, que l'attachement que nous avons, du côté de l'Inspecteur, du côté de l'IGIF, parce que nous relevons de l'IGIF depuis le début... Il y a certains avantages, pour le consommateur, que nous relevions de l'IGIF, parce que la façon qu'a l'IGIF de... Ce n'est pas de la délégation de pouvoir. Au niveau de l'encadrement, quand elle relève de la CVMQ, c'est par une délégation de la CVMQ alors que, du côté de l'IGIF, c'est directement dans la loi que les pouvoirs que nous avons nous ont été conférés. Donc, nous ne voudrions pas, demain matin, relever directement de la Commission des valeurs mobilières. Ce qu'on veut, c'est qu'on aille chercher le meilleur des deux mondes et qu'on fasse, avec ça, une entité fonctionnelle en gardant à la fois l'IGIF, pour ce qui est de la solvabilité des compagnies d'assurances, et la CVMQ, à l'égard de la protection au niveau des épargnants, mais qu'un regroupement fonctionnel se fasse. On n'a pas à nommer ce regroupement et on laisse au gouvernement le soin de le faire.

M. Chagnon: Merci. M. le Président, une dernière... Le meilleur des deux mondes. C'est souvent difficile à concevoir ou, du moins, à obtenir, le meilleur des deux mondes.

M. Savard (Denis): On nous a dit qu'au gouvernement on allait oser et innover.

M. Chagnon: Le meilleur des deux mondes, le gouvernement vous l'a proposé en vous offrant, par exemple, la souveraineté avec le passeport canadien. Personne n'en a voulu.

La dernière question, concernant la désintermédiation... La désintermédiation, en page 19 de votre...

Une voix: Vous vulgarisez.

M. Chagnon: Oui, j'ai coupé le coin rond un peu.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: La désintermédiation, qui vous hante, à la page 19, m'apparaît difficilement contrôlable. Comment, à partir du moment où vous laissez entendre que l'individu n'est pas capable de se raisonner et de pouvoir acheter une police d'assurance ou d'acheter un service financier quelconque seul, sans avoir le bénéfice d'un intermédiaire à son choix, comment pouvez-vous imaginer qu'on pourrait encadrer cette capacité de l'individu, aujourd'hui, de ne pas pouvoir acheter un produit financier de son choix, avec les moyens technologiques que nous possédons?

(17 h 30)

M. Savard (Denis): C'est une question très importante que vous posez là. Effectivement, ce qu'il faut qu'il soit permis au Québec, c'est que l'offre de produits financiers soit encadrée et que la nécessité de la vulgarisation dont faisait état tantôt M. Campeau, elle s'impose pour tous les produits financiers. On a vu les abus que cause la vente ou la distribution de produits financiers par des employés d'institutions financières, des préposés au comptoir d'une caisse populaire ou de banques, dans le dossier noir de l'assurance hypothécaire.

Le gouvernement doit protéger le consommateur québécois dans la mesure où il accepte que l'offre de produits se fasse. Si je suis dans l'avion entre New York et... peu importe l'autre destination américaine, et que je décide d'acheter des fonds ou des actions de telle compagnie, c'est mon choix. Mais l'offre de produits ne s'est pas faite sur le territoire québécois, et, ça, le gouvernement a le pouvoir d'encadrer l'offre de produits financiers sur le territoire.

M. Chagnon: Voyons donc! Je rentre sur NASDAQ, moi, ce matin, puis j'achète ce que je veux. Puis je voudrais bien voir qui pourrait me contrôler.

M. Savard (Denis): C'est vous qui faites la démarche d'achat. O.K.

M. Chagnon: Oui, oui. C'est ça. Mais au Québec. Je ne suis pas sur la planète Mars, je suis au Québec. Je suis devant mon ordinateur, je rentre sur NASDAQ. Je l'ai fait dimanche. Je peux rentrer aujourd'hui.

M. Savard (Denis): Ce que nous demandons au gouvernement, c'est d'encadrer l'offre de produits financiers pour la protection des consommateurs. Si vous faites, vous, par choix, puis on veut vous respecter dans ce choix-là... Vous dites: Je fais fi de la protection que m'offre l'État québécois en encadrant l'offre de produits financiers, vous êtes responsable comme individu des problèmes qui pourront survenir, si problèmes il y a. Vous n'êtes pas obligé d'en avoir, des problèmes. Je ne vous en souhaite pas.

M. Chagnon: Non, non. Moi non plus.

M. Savard (Denis): Mais, évidemment, le consommateur québécois moyen a besoin de se faire recommander, a besoin d'une analyse de besoins et a besoin d'avoir des intermédiaires qui sont responsables des gestes qu'ils posent et responsables des produits qu'ils recommandent.

M. Chagnon: Vous devriez faire de la politique. Je vous répète ma question.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Comment voulez-vous que le gouvernement puisse encadrer la vente de produits financiers sans intermédiaire lorsque le client, la citoyenne ou le citoyen, veut acheter sans intermédiaire?

M. Savard (Denis): Dans la mesure où le client – c'est ce que je viens de vous dire – reconnaît qu'il n'a aucun recours en vertu de ce choix-là, on n'est pas pour l'empêcher. Il y a une différence entre la vente d'un produit et l'offre d'un produit. Ce qu'on dit: Le gouvernement est en mesure de réglementer l'offre de produits financiers au Québec. On ne peut pas empêcher quelqu'un de faire une démarche d'achat partout à travers le monde, y compris sur le territoire du Québec. Mais que l'offre soit réglementée pour la protection des consommateurs, ça, c'est possible et ça peut être très efficace.

M. Chagnon: Par contre, évidemment, l'offre, M. le Président, on reconnaîtra qu'elle prend de multiples formes cette année, puis je peux l'avoir sur Internet, je peux l'avoir sur d'autres moyens technologiques, via Netscape ou via n'importe quoi, puis là je l'ai. Évidemment...

M. Savard (Denis): C'est de l'information que vous avez sur les produits disponibles.

M. Chagnon: C'est là, je peux acheter. Je peux acheter un prêt hypothécaire sur mon appareil, je peux acheter des actions en bourse, je peux acheter des obligations, je peux acheter...

M. Savard (Denis): On ne prétend pas que ça va être une démarche facile avec toutes les nouvelles formes, mais nous croyons qu'il est possible pour le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour au moins contrer les abus.

M. Chagnon: Je ne suis pas sûr. Je ne suis pas sûr de la possibilité, même à moyen ou long terme. Si on regardait le dossier des valeurs mobilières, il y a un article... Peut-être que, M. Martel, vous l'avez vu, c'est dans le Life de cette semaine: «Investors rush the net», page 40. Aujourd'hui, il y a 650 000 personnes qui sont acheteurs directement sur le marché NASDAQ, le marché américain en fait, la plus grosse bourse. On s'attend à ce qu'il y en ait 1 500 000 en l'an 2000. Ça, c'est tout du monde qui se passe d'un intermédiaire. À tort ou à raison. Moi, je ne juge pas. Mais c'est tout du monde qui va se passer d'un intermédiaire aux États-Unis.

Mais imaginez-vous que, le phénomène américain, il n'attendra pas 15 ans avant de traverser la frontière. Il est rendu. Alors, c'est la difficulté que je comprends ou que je conçois dans votre vision de la protection de la désintermédiation, requise ou demandée de la part du gouvernement. Ça m'apparaît bien difficile de mettre ça dans une loi, en tout cas, et d'essayer que la loi ne soit pas désuète au bout de trois mois.

M. Savard (Denis): On ne prétend pas que c'est facile, mais on pense qu'il y a déjà, au sein de la Commission, un comité consultatif sur les transactions informatisées. Donc, c'est une préoccupation qui n'est pas uniquement nôtre, cette préoccupation que vous avez à l'égard de comment protéger le consommateur. C'est la seule préoccupation que nous avons à l'intérieur de cette problématique de l'achat par des moyens directs de télémarketing, la préoccupation de la protection du consommateur. En fait, c'est deux droits qui s'affrontent, à savoir: le droit, la liberté d'acquisition et la protection que le gouvernement doit assurer à ce consommateur.

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais remercier les membres de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec d'avoir répondu à mes questions. Moi, j'ai terminé.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Il y avait le député de Charlevoix qui m'avait demandé la parole.

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, je comprends qu'on ait certaines difficultés, de part et d'autre, à se comprendre, parce qu'on parle de choses, quand même, jusqu'à un certain point, assez différentes. On est sur l'analyse du rapport quinquennal des valeurs mobilières et, en même temps, on parle du rapport qui va sortir dans les prochains jours, du moins le plus rapidement possible, on l'espère, concernant la 134. Juste une parenthèse pour souhaiter à mon ami le député de Westmount... J'espère qu'il n'a pas acheté d'assurance sur ordinateur sans preuve d'assurabilité, et c'est le danger qui nous guette. Mais, quand on reviendra avec la 134, on aura l'occasion, je pense, de creuser beaucoup plus cet élément-là.

Ce que je voudrais préciser davantage, parce que je vous avoue, là... puis je m'excuse, je préside une autre commission, je m'excuse d'avoir perdu une première partie. Mais, depuis que je suis arrivé, je n'ai pas senti que c'était suffisamment précis, à savoir: par rapport au rapport quinquennal des valeurs mobilières, les recommandations qu'on fait sont en fonction des valeurs mobilières traditionnelles qui touchent la Commission des valeurs mobilières et, quand je vous écoute, il y a une espèce de chevauchement à quelque part dans ce que vous voulez, et j'aimerais que ce soit très, très précis.

Si je comprends bien, certains produits que vous vendez, les intermédiaires, il y en a qui sont très près de la Commission des valeurs mobilières, et quand vous parlez... Votre intervention, aujourd'hui, n'est pas en fonction de l'assurance-vie traditionnelle ou des produits d'assurance-personnes traditionnels ou d'assurance-dommages traditionnels. Ça ne m'est pas apparu, jusqu'à maintenant, suffisamment clair. Alors, j'aimerais que vous précisiez ça de façon le plus... qu'il n'y ait pas d'équivoque quand on va sortir d'ici.

Les recommandations concernent la Commission des valeurs mobilières, les recommandations que vous faites sur la petite partie qui concerne vos membres qui vendent... qui concernent les valeurs mobilières, c'est vers ça que c'est orienté, et je ne pense pas – si oui, vous me le spécifierez... Mais, quand vous parlez d'un organisme ou de deux organismes, je n'ai pas compris ou je ne pense pas savoir que tout le monde des intermédiaires veut s'en aller sous l'égide de la Commission des valeurs mobilières. Mais, de la façon dont vous l'exprimez, je ne pense pas que ce soit aussi clair que ça. Alors, j'aimerais ça, M. le Président, que M. Savard précise exactement en fonction de ce qu'on fait maintenant, qui est la Commission des valeurs mobilières.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Savard.

M. Savard (Denis): Il est bien évident que, pour ce qui est de notre présentation à l'égard de la réouverture de 134, elle va être quand même cohérente avec celle-ci, mais elle va être différente à plusieurs égards, et que, évidemment, notre préoccupation aujourd'hui, c'est à l'égard des produits qui touchent ou qui concernent la Commission des valeurs mobilières. Et, pour ce qui est de l'encadrement, la façon de faire l'encadrement pour les produits en assurance de personnes, bien, nous le verrons à l'intérieur de notre présentation, à ce moment-là.

M. Bertrand (Charlevoix): Donc, si je comprends bien, il n'est pas question d'inclure dans la Commission des valeurs mobilières tous les autres intermédiaires de personnes ou autres.

M. Savard (Denis): Essentiellement, ceux qui vendent des produits sous la juridiction de la Commission des valeurs mobilières actuellement ou ceux qui sont mixtes, qui se rapprochent ou qui, actuellement, sont entre les deux.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci.

(17 h 40)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Charlevoix.

À mon tour, je tiens à vous remercier, M. Savard, Mme Granger, Mme Beaudoin, pour le mémoire que vous nous avez présenté et qui servira sans doute à enrichir la réflexion des parlementaires et des personnes qui verront à améliorer, à rédiger nos lois.

Donc, je vous remercie et je suspends les travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 17 h 41)

(Reprise à 19 h 44)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, messieurs! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux sur une consultation générale et des audiences publiques pour étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières. J'inviterais, et, déjà, ils sont tout prêts à se faire entendre, l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, et j'inviterais son président à nous présenter ses collaborateurs et collaboratrices. M. Morin?


Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières (ACCOVAM)

M. Morin (Jean): C'est exact. Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais vous présenter, à ma droite, Mme Fernande Lanoix, qui est directrice générale de l'ACCOVAM, et M. Claude Michaud, qui est vice-président du Conseil de la Section du Québec de l'ACCOVAM et membre de ScotiaMcLeod; à ma gauche, Me Luc LaRochelle, qui est notre conseiller juridique, chez MacKenzie Gervais; et moi-même, Jean Morin, qui suis président du Conseil de la Section du Québec de l'ACCOVAM et employé chez Midland Walwyn.

M. le Président, la Section du Québec de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières remercie la commission du budget et de l'administration de l'occasion qui lui est donnée de présenter son point de vue sur le contenu du rapport quinquennal déposé en décembre 1993 par la ministre déléguée aux Finances de l'époque, Mme Louise Robic, et intitulé «Bilan et propositions pour le secteur financier québécois».

S'il est un contexte qui évolue rapidement, c'est bien celui des valeurs mobilières. On ne peut donc pas se surprendre si, depuis décembre 1993, certains problèmes soulevés par le rapport Robic se posent différemment et si de nouvelles problématiques sont apparues.

À l'aide du canevas qui nous est fourni par le document d'accompagnement, nous comptons profiter de ce mémoire non seulement pour réexaminer certaines propositions du rapport Robic auxquelles on n'a pas encore donné suite mais également pour faire ressortir la nécessité, à ce stade-ci, d'intégrer le cadre réglementaire régissant les intermédiaires financiers, entre autres par un meilleur arrimage de la Loi sur les intermédiaires de marché avec la Loi sur les valeurs mobilières.

Mais, avant de procéder, M. le Président, qu'est-ce que l'ACCOVAM? Pour l'édification des membres de la commission, j'aimerais prendre une minute pour vous la décrire. L'ACCOVAM-Québec est le chapitre québécois d'un organisme d'autoréglementation national qui s'appelle aussi l'ACCOVAM, ou l'IDA pour nos confrères anglo-saxons. Au Québec, nous avons une présence permanente avec un bureau de 13 individus, dont cinq professionnels des sciences comptables, une directrice et du personnel de soutien. Nous sommes régis par un conseil d'administration de 21 membres, lesquels membres appartiennent tous à des sociétés établies au Québec. Les membres que l'ACCOVAM-Québec réglemente, si on veut, et supervise, constituent essentiellement 95 % de l'activité des valeurs mobilières que nous connaissons en province. Et, au niveau de cette activité, je ne nommerai ici que quelques comités qui font part de nos activités, soit le comité d'admission des membres, de la réglementation, des opérations internes, d'étude sur la fiscalité, des conseillers en placement, et j'en passe. Pour fins de détails, j'ajouterai, en terminant, que le budget annuel que nous consacrons au Québec à la réglementation de nos membres est de l'ordre de 2 800 000 $ et, de ce montant, au-delà de 1 500 000 $ est consacré à la réglementation des membres comme telle.

En ce qui a trait à la compétence du Québec relativement au secteur des valeurs mobilières, d'entrée de jeu, nous souhaitons faire le point sur la position de l'ACCOVAM-Québec – et j'insiste – quant à la recommandation 3, reprise au paragraphe 1.1 du document d'accompagnement, concernant la nécessité de réaffirmer la compétence du Québec relativement au secteur des valeurs mobilières. Nous craignons clairement qu'une commission des valeurs mobilières canadienne – à laquelle je référerai, si vous permettez, dans le futur, par «CVMC» – devienne un second niveau de réglementation plutôt qu'un partenaire collaborant d'égal à égal avec les commissions provinciales qui, elles, n'auraient pas adhéré à la CVMC.

Deux niveaux de réglementation pourraient créer une situation qui ne favoriserait pas le principal objectif visé, à savoir l'harmonisation de la réglementation, et c'est essentiellement là où on se trouve. Il sera difficile pour les commissions provinciales de ne pas subir l'ascendant d'un organisme parrainé par le gouvernement fédéral. En outre, le pouvoir de négociation des commissions provinciales face à la CVMC serait compromis par le fait que la CVMC se prononcerait d'office au nom d'un certain nombre de provinces alors que les commissions provinciales non participantes ne se prononceraient qu'en leur nom. À moins qu'on nous démontre clairement les avantages tangibles qu'une CVMC produirait pour tous les intervenants, il ne nous apparaît pas souhaitable de bouleverser les structures et l'équilibre actuels.

En ce qui a trait à un marché organisé de capitaux pour les petites entreprises, le rapport Robic contenait des propositions fort intéressantes à l'égard d'un certain nombre de mesures, législatives et autres. Ces mesures visaient à favoriser l'émergence d'un marché organisé de capitaux pour les titres d'entreprises à petite ou moyenne capitalisation. Nous encourageons toutes les initiatives, y compris celles reprises dans le document d'accompagnement, que pourrait prendre le gouvernement du Québec dans le but de permettre aux entrepreneurs de se procurer les capitaux dont ils ont besoin pour mener à bien leurs projets. Nous croyons donc qu'il est essentiel de relever ce défi et offrons au gouvernement toute notre collaboration. À cet égard, M. le Président, nous comptons être conviés à participer au groupe de travail mentionné dans la recommandation 32.

(19 h 50)

En ce qui a trait au pouvoir réglementaire, le rapport Robic proposait que la Loi sur les valeurs mobilières soit amendée afin d'introduire un pouvoir réglementaire analogue à celui de la Loi sur la Banque du Canada. La Loi sur les valeurs mobilières de l'Ontario a, depuis, été modifiée en ce sens et donne à cet organisme un avantage, selon nous, concurrentiel important en regard du temps de réaction requis pour faire face à l'évolution du marché des valeurs mobilières.

En effet, le pouvoir réglementaire réclamé pour la Commission des valeurs mobilières du Québec – et, à nouveau, si vous permettez, je référerai à cette Commission des valeurs mobilières par «la Commission», dans le futur – serait beaucoup plus flexible que l'exercice par le gouvernement de son propre pouvoir réglementaire dans le contexte législatif actuel. Nous sommes d'avis que, sous la surveillance compétente du ministre responsable, l'exercice d'un pouvoir réglementaire permettrait à la Commission d'accomplir ses fonctions de façon plus efficace. Il était donc important, quant à nous, que le document d'accompagnement remette ce point à l'ordre du jour, et nous espérons que le gouvernement modifiera sans tarder la Loi sur les valeurs mobilières en ce sens.

L'ACCOVAM-Québec reconnaît que des mesures d'harmonisation ont été prises depuis le dépôt du rapport Robic et, à cet égard, souhaite exprimer sa satisfaction. Cependant, et à titre d'exemple, la Commission tarde à se joindre à certaines initiatives prises par d'autres provinces, comme celle de l'examen accéléré des prospectus simplifiés par une seule commission de valeurs mobilières, et ce, pour le compte de toutes les autres. Nous croyons fermement que le contexte des valeurs mobilières dicte aux intervenants une attitude de collaboration et des objectifs où l'efficacité, en tout temps, domine. Nous encourageons donc la Commission à participer avec les autres commission des valeurs mobilières aux mesures qui ont pour but d'accélérer le processus d'octroi des visas.

En ce qui a trait à l'égalité de traitement, le principal problème que nous souhaitons porter à votre attention est l'absence d'équité ou d'égalité entre les exigences qui s'appliquent à nos membres pour exercer des activités dans d'autres secteurs et celles qui s'appliquent aux autres intermédiaires de marché pour exercer des activités de courtage en valeurs mobilières. Par exemple, les articles 44 à 46 de la Loi sur les intermédiaires de marché énoncent les conditions selon lesquelles ceux-ci peuvent partager les commissions. Par ailleurs, en vertu de la section VI de la partie III de l'Instruction générale québécoise n° Q-9, un courtier en valeurs qui veut partager sa commission avec un autre intermédiaire de marché doit auparavant obtenir l'approbation préalable de la Commission. Deux poids, deux mesures.

Le résultat de cette inégalité de traitement est qu'il est désormais beaucoup plus facile pour les intermédiaires de marché autres que les courtiers en valeurs d'exercer des activités relevant de notre domaine que l'inverse. Par ailleurs, les autres intermédiaires de marché, notamment dans le domaine de l'assurance, sont en mesure d'offrir un certain nombre de produits, tels les fonds communs de placement, qui relèvent du domaine des valeurs mobilières sans pour autant être assujettis à la Loi sur les valeurs mobilières. Cette situation résulte notamment des dispenses prévues à l'article 3 de la Loi sur les valeurs mobilières. De façon globale, M. le Président, nous croyons qu'un régime équitable ferait en sorte qu'un produit financier donné soit assujetti aux mêmes exigences et sans égard au fait qu'il soit offert par les intervenants d'un secteur financier ou d'un autre, eux-mêmes, d'ailleurs, régis par des lois différentes. Autrement dit, il nous apparaît extrêmement important que les règles du jeu soient les mêmes pour tous et que chacune des lois pertinentes soit compatible et équivalente.

L'industrie du courtage en valeurs mobilières s'est dotée d'un organisme d'autoréglementation dont la compétence est reconnue de tous et qui collabore étroitement avec la Commission des valeurs mobilières et la Bourse de Montréal pour assurer l'intégrité du marché financier québécois. Par ailleurs, d'autres intervenants sont assujettis à des normes beaucoup moins sévères quand à l'offre et à la vente de produits semblables, tels, encore une fois, les fonds communs de placement. Ils peuvent, dans certains cas, carrément accéder à une partie des activités de courtage en valeurs mobilières, sans toutefois être assujettis à toutes les exigences auxquelles notre industrie doit constamment se plier.

Comme vous le savez, la Loi sur les valeurs mobilières du Québec encadre de façon très précise l'activité des courtiers et des conseillers en valeurs. Présentement, la Loi sur les intermédiaires de marché comporte quelques articles qui s'appliquent également à notre industrie. Nous sommes d'avis qu'à l'égard de l'exercice même de ces activités de courtage et de conseil en valeurs mobilières, la totalité du cadre législatif et réglementaire devrait relever uniquement de la Loi sur les valeurs mobilières. En conséquence, notre industrie ne serait assujettie à la Loi sur les intermédiaires de marché que dans la mesure où il y aurait un cumul d'activités de courtage en valeurs mobilières, bien sûr, et d'autres activités régies par la Loi sur les intermédiaires de marché.

Sur la question du cumul de diverses activités, notre industrie a vécu une expérience pour le moins difficile, onéreuse et fatigante pour tenter de réconcilier les exigences de la Commission et celles du Conseil des assurances de personnes. La plupart des grandes maisons de courtage sont maintenant dotées des permis nécessaires pour offrir de l'assurance de personnes, mais les règles de cumul relèvent toujours, en partie, de la discrétion de la Commission, et ce, même depuis l'entrée en vigueur de la dernière version de l'Instruction générale québécoise n° Q-9, ainsi que de celle du Conseil des assurances de personnes. Il nous semble qu'à l'occasion de la révision des deux lois mentionnées ci-dessus toutes les règles de cumul devraient être clarifiées pour le bénéfice de tous.

Sur ce même thème de l'égalité de traitement, l'ACCOVAM-Québec tient à exprimer son accord complet et sans équivoque avec les recommandations 19 et 20 reprises au paragraphe 1.3 du document d'accompagnement. En effet, un certain nombre de courtiers ne sont chapeautés par aucun organisme d'autoréglementation, de sorte qu'ils n'adhèrent pas au Fonds canadien de protection des épargnants. La seule protection ainsi fournie à leurs clients est le recours au fonds mis sur pied par la Commission des valeurs mobilières du Québec, et, de plus, ces courtiers ne participent d'aucune façon aux coûts, qui sont, eux, assez élevés, de l'autoréglementation. Bien sûr, ces courtiers sont assujettis à un régime d'inscription auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec, mais cet assujettissement ne constitue pas un cadre réglementaire suffisant, dans la mesure où il est maintenant généralement accepté qu'une délégation de ces activités de surveillance aux organismes d'autoréglementation constitue une méthode d'encadrement plus efficace. Nous offrons à la Commission notre entière collaboration pour la mise en oeuvre des recommandations 19 et 20.

De plus, M. le Président, il existe une autre catégorie de courtiers qui, en plus de n'être rattachés à aucun organisme d'autoréglementation et de ne pas participer au Fonds de protection des épargnants, ne sont même pas inscrits auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Ils en sont dispensés par l'alinéa 3° de l'article 155.1 de la Loi sur les valeurs mobilières. Ce sont les intermédiaires qui ne transigent qu'avec des «acquéreurs – et je cite – avertis», au sens de la loi, à savoir: les institutions financières, les régimes de retraite, et ainsi de suite. Bien que ces acquéreurs avertis n'aient pas besoin de la protection offerte aux autres épargnants par les dispositions de la Loi sur les valeurs mobilières, cela ne signifie pas que les courtiers en question ne doivent pas être encadrés. Leur insolvabilité ou un comportement frauduleux de leur part pourrait compromettre la situation financière des courtiers membres d'organismes d'autoréglementation, et ce, avec des répercussions inévitables sur le Fonds canadien de protection des épargnants et, éventuellement, compromettre l'intégrité et la fiabilité du système.

Ce phénomène des courtiers non inscrits est d'autant plus paradoxal que les transactions qu'ils effectuent sont d'une importance considérable en raison même de la clientèle qu'ils desservent. L'ACCOVAM-Québec se prononce donc en faveur d'un système d'enregistrement universel qui ferait en sorte que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, à tous égards, par exemple: l'enregistrement de la maison et de ses représentants auprès de la Commission, donc inspections régulières; l'assujettissement à un organisme d'autoréglementation, donc adhésion à un code de déontologie. Une participation au Fonds canadien de protection des épargnants est, selon nous, aussi, essentielle et importante. Car il ne faut pas oublier que les fonds de ces acquéreurs avertis, dans la grande majorité des cas, proviennent de petits épargnants sous forme de primes d'assurance, de dépôts, de contributions à leur caisse de retraite ou autrement. Ce sont ces épargnants qu'un système d'enregistrement universel vise à protéger, de même que les autres intermédiaires de marché, qui, eux, sont enregistrés, et dont se servent les courtiers exemptés pour exercer leurs activités, en se procurant auprès d'eux divers services dont ils ne disposent pas. Deux poids, deux mesures, cette fois-ci, sur une grande échelle.

Il en va d'ailleurs de même pour la recommandation 24, reprise au paragraphe 1.6 du document d'accompagnement. En effet, l'ACCOVAM-Québec est d'avis que tous les courtiers devraient être assujettis au système d'arbitrage récemment mis sur pied par l'ACCOVAM-Québec, la Bourse de Montréal et le Centre d'arbitrage commercial national et international du Québec.

Une consultation publique sur l'efficacité de ce système est évidemment prématurée – cet arbitrage a été introduit dans les mois qui précèdent – puisque, bien sûr, aucune cause n'a été entendue à ce jour dans le cadre de ce même système. Mais l'ACCOVAM-Québec est disposée à partager avec la Commission toute évaluation qu'elle fera en temps utile de l'efficacité de ce système.

(20 heures)

Un point qui nous est cher, M. le Président, le financement de la Commission des valeurs mobilières. Depuis un certain temps déjà, l'ACCOVAM-Québec se prononce contre le surfinancement de la Commission et le versement des surplus annuels au fonds consolidé du revenu, ce qui constitue, selon nous, une taxation de l'industrie des valeurs mobilières et des sociétés émettrices. Le ministre ne peut pas, d'une part, se préoccuper de la diminution de l'importance que joue Montréal comme place financière, tel qu'énoncé dans le document d'accompagnement, et, d'autre part, ne pas se préoccuper du fardeau des coûts très élevés de la réglementation pour les intervenants, auxquels ils sont assujettis. Il faut absolument éviter de faire en sorte que, parmi ses spécificités, la place financière montréalaise soit plus coûteuse, compte tenu de son importance relative sur le grand marché nord-américain.

L'ACCOVAM-Québec recommande fermement que la Commission des valeurs mobilières du Québec n'ait plus à acheminer ses surplus annuels au fonds consolidé du revenu mais qu'elle conserve plutôt ses ressources pour acquérir l'expertise nécessaire à la réglementation d'un contexte qui, lui, est en constante évolution et à garder ainsi le respect des milieux financiers nord-américains et voire même internationaux.

Le pouvoir habilitant de la Commission de récupérer auprès des personnes concernées les frais payés à un tiers, et ce, mentionné au paragraphe 2.6 du document d'accompagnement, ne serait évidemment pas nécessaire dans la mesure où elle dispose des ressources dont elle a besoin. Ce pouvoir nous pose, d'ailleurs, un problème et pour d'autres raisons. En effet, plusieurs intervenants s'abstiendront de s'adresser à la Commission si la Commission a le pouvoir d'engager, et sans l'accord de cet intervenant, des frais que celui-ci devra acquitter sans avoir eu quelque mesure de contrôle que ce soit. Il est, quant à nous, M. le Président, totalement inacceptable que la Commission se voit concéder un tel pouvoir et nous croyons qu'il s'agit là d'une manière erronée d'aborder le problème du financement de la Commission des valeurs mobilières. Il nous semble que le recours à un pouvoir discrétionnaire de récupération n'est certainement pas de nature à inviter les gens à s'assujettir à la juridiction de la Commission. Il s'agirait plutôt d'un irritant considérable que nous demandons au gouvernement d'éviter.

En ce qui a trait à la désignation professionnelle de conseiller en placement, depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les intermédiaires de marché, qui consacre le titre de planificateur financier, et compte tenu de la catégorie de permis prévue à la Loi sur les valeurs mobilières pour les conseillers en valeurs, il nous semble exister au sein du public une confusion de plus en plus grande à l'égard de ce qu'est un conseiller en placement. Les intervenants de notre industrie insistent depuis longtemps pour obtenir l'exclusivité de ce titre – et je parle ici de conseiller en placement – pour désigner les représentants des maisons de courtage. L'ACCOVAM-Québec se joint d'ailleurs dans cet effort aux mesures prises partout au Canada pour consacrer l'utilisation de cette désignation. Pour éviter toute confusion avec le «conseiller en valeurs», que la Loi sur les valeurs mobilières suggère, nous suggérons, nous, que celui-ci soit redésigné «gestionnaire de portefeuille», qui décrit beaucoup plus adéquatement ses fonctions.

En fait, M. le Président, l'un des problèmes soulevés par le cumul possible du titre de planificateur financier avec d'autres titres dans le domaine de l'intermédiation financière est que très peu de planificateurs financiers rendent ce service de façon isolée et moyennant des honoraires. Je peux continuer, monsieur?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien, je faisais juste signaler... Je demandais l'accord des membres parce que vous allez dépasser largement votre temps de présentation de 20 minutes. Mais, avec l'accord des membres de la commission, on va vous entendre et, après, le questionnement viendra.

M. Landry (Verchères): C'est une des organisations les plus importantes à se présenter devant notre commission, alors...

M. Chagnon: Prenez votre temps.

M. Morin (Jean): Je vous remercie sincèrement et je vais tenter d'être le plus bref possible, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est parce que vous comprendrez que je dois... Mon devoir est de faire respecter le temps. C'est pour ça que j'ai convenu si on était d'accord.

M. Chagnon: On a trouvé que... Continuez.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais on ne veut pas vous presser.

M. Morin (Jean): Nous apprécions grandement. Merci.

M. le Président, l'un des problèmes soulevés par le cumul possible du titre de planificateur financier avec d'autres titres dans le domaine de l'intermédiation financière est que très peu de planificateurs financiers rendent ce service de façon isolée, moyennant des honoraires. Autrement dit, tous les planificateurs financiers ou presque vendent des produits financiers, c'est bien connu. Nous sommes fermement convaincus qu'aucun d'entre eux ne peut, dans un tel contexte, prétendre à l'objectivité. En effet, selon le produit financier que vend un planificateur financier, la planification financière sera nécessairement orientée dans le sens de ses produits, que ce soit le courtage en valeurs mobilières, l'assurance de personnes, les services juridiques ou toute autre activité compatible: fiscalité, comptabilité et ainsi de suite.

Par ailleurs, un grand nombre d'intermédiaires de marché ont déjà obtenu la désignation de planificateur financier au sens de la Loi sur les intermédiaires de marché. Le conseiller en valeurs, le représentant d'une maison de courtage en valeurs mobilières, le courtier en assurance de personnes rendent inévitablement des services de planification financière fort valables, qui touchent un aspect de la planification financière globale d'un individu.

Nous croyons qu'il y a nécessité de distinguer entre les planificateurs financiers qui sont des intermédiaires de marché et ceux qui rendent ce service moyennant des honoraires. Nous croyons que ce dernier se doit de procéder à une analyse plus complète de la situation financière du client et maîtriser davantage de connaissances, par exemple d'ordre juridique et d'ordre fiscal. Nous recommandons donc la création d'une catégorie distincte pour désigner ces planificateurs financiers indépendants, que l'on pourrait désigner, par exemple, de planificateurs-conseils. Pour accéder à cette désignation, une formation plus approfondie serait exigée. La distinction entre les deux catégories de planificateurs aurait aussi pour avantage de prévenir le client quant au degré d'objectivité de son conseiller. Nous croyons que cette réforme s'impose, et ce, dans les plus brefs délais.

Parallèlement à la Commission des valeurs mobilières et à son mandat en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières, un certain nombre d'organismes ont été créés en vertu de la Loi sur les intermédiaires de marché, comme, par exemple, le Conseil des assurances de personnes. Comme nous l'avons mentionné plus haut, et en raison du cumul des permis, certains individus courtiers en valeurs mobilières sont également qualifiés pour vendre de l'assurance de personnes, et de nombreux individus courtiers en assurance de personnes vendent des fonds communs de placement.

L'argument que nous faisions valoir plus haut voulait que des exigences semblables s'appliquent aux intermédiaires financiers qui vendent des produits équivalents. Nous croyons que cela serait grandement facilité si le décloisonnement qui prévaut depuis plusieurs années au niveau des intermédiaires financiers était reflété au niveau de la structure des organismes de réglementation. Si un seul organisme central était responsable de tous les organismes sectoriels chargés d'encadrer les intermédiaires de marché et financiers au Québec, il nous semble qu'il serait plus facile d'harmoniser les règles et les exigences qui s'appliquent à eux, en raison de la vue d'ensemble qu'il en aurait.

Quant à la Commission des valeurs mobilières du Québec, il est évident qu'elle doit garder une certaine autonomie dans la mesure où elle exerce des fonctions quasi judiciaires. Mais une grande partie de ses activités ne sont pas nécessairement d'ordre judiciaire et pourraient relever directement ou indirectement de l'Inspecteur général des institutions financières. Nous nous prononçons donc en faveur d'une structure des organismes de surveillance, qui serait un meilleur reflet du décloisonnement que nous vivons quotidiennement dans les activités des intermédiaires financiers au Québec.

En ce qui a trait à l'internationalisation des marchés et au rôle de la Commission, M. le Président, il nous semble que plusieurs des exigences actuelles de la Loi sur les valeurs mobilières vont devenir périmées dans un avenir rapproché. Prenons, par exemple, l'exigence que maintient toujours la Commission à l'effet qu'une maison de courtage doit avoir une place d'affaires au Québec pour obtenir un permis et qu'un individu doit être domicilié au Québec pour y exercer le métier de représentant. Dans un monde où l'on pourra accéder à son compte de banque et à son compte auprès de son courtier par le biais du réseau Internet ou, au sens large, de l'autoroute de l'information, l'emplacement physique de la place d'affaires du courtier ne sera plus pertinent. Il faudra reconsidérer l'essentiel de chaque fonction et réduire les exigences législatives et réglementaires de façon à faire que l'essence de la fonction soit exercée de façon intègre. Nous croyons que l'un des rôles qui devraient désormais être confiés à la Commission est celui de regarder vers l'avant et de préparer le terrain réglementaire pour l'avènement des changements fondamentaux que nous entrevoyons pour les prochaines années.

En ce qui a trait au marché électronique des valeurs mobilières, les préoccupations qui entourent l'avènement des marchés électroniques des valeurs mobilières doivent être placées dans un contexte global, sinon certainement planétaire, qui, fondamentalement, n'est pas très différent de celui du libre-échange. Les moyens de communication font et feront en sorte qu'il sera de plus en plus facile pour l'épargnant d'effectuer des opérations sur des valeurs mobilières sans l'intervention d'un courtier établi au Québec. Des marchés parallèles aux bourses ont commencé déjà à voir le jour aux États-Unis et permettent aux institutions financières de transiger entre elles des blocs importants de titres en évitant complètement le parquet des bourses, ce qui leur permet des économies importantes. D'autres développements de cet ordre voient le jour à un rythme accéléré. L'ACCOVAM-Québec croit qu'il est impossible de légiférer pour retenir au Québec un certain niveau d'activités en matière de valeurs mobilières. Selon nous, la stratégie du ghetto législatif, à savoir le maintien en vigueur de certaines exigences spécifiques au Québec, serait l'équivalent, en matière de commerce international, de maintenir des barrières tarifaires. Nous n'en sommes plus là.

Il faut entrevoir l'avenir de façon plus proactive et créer un contexte qui privilégie des solutions commerciales, des solutions compétitives plutôt que des solutions législatives. Le groupe de travail de la Commission des valeurs mobilières du Québec se penche déjà sur ces enjeux, mais l'ACCOVAM-Québec veut s'assurer que ce travail sera fait dans un esprit d'innovation plutôt que dans un esprit défensif. À la limite, à moins d'avoir un contrôle absolu sur les gestes que pose l'épargnant, il est difficile de continuer à encadrer le marché des valeurs mobilières de la même façon qu'auparavant. Certains développements technologiques rendent le cadre réglementaire en matière de valeurs mobilières partiellement, et bientôt totalement, désuet.

Ce problème n'est pas spécifique au domaine des valeurs mobilières. En effet, il s'étend à toutes les questions que posent les transactions commerciales sur l'Internet, aux problèmes d'application de certaines mesures de censure aux communications par l'Internet, et ainsi de suite. Autrement dit, ces changements profonds doivent affecter le cadre réglementaire des valeurs mobilières de la même façon qu'ils affecteront les cadres réglementaires des autres activités commerciales et humaines. C'est par l'innovation, M. le Président, par l'avènement de solutions commerciales que nous garderons au Québec une place financière active et vivante.

(20 h 10)

Dans l'optique d'une reconnaissance éventuelle de l'ACCOVAM comme organisme d'autoréglementation, nous tenons à commenter sur la représentation du public dans les organismes d'autoréglementation, évoquée au paragraphe 2.5 du document d'accompagnement. Il nous semble d'abord opportun de souligner que des membres du public siègent déjà, présentement, au Comité des gouverneurs de la Bourse de Montréal et au conseil d'administration de l'ACCOVAM. Les exemples de la Bourse et de l'ACCOVAM constituent, selon nous, des modèles valables. Ces organismes jouissent aujourd'hui d'une réputation qui fait foi de l'intégrité et de la compétence avec lesquelles ils se sont acquittés de leurs fonctions de surveillance.

L'essence même de l'autoréglementation est de confier à l'industrie la responsabilité d'encadrer les activités de ses membres sans pour autant qu'il y ait ingérence de l'extérieur, sauf quant au pouvoir de surveillance de la Commission des valeurs mobilières déjà enchâssé dans la Loi sur les valeurs mobilières. Jusqu'à ce que les circonstances démontrent le contraire, il n'y a pas nécessité, selon nous, d'une intervention de la Commission pour agréer ces nominations, non plus qu'une intervention du gouvernement pour légiférer en matière de représentation du public.

En terminant, M. le Président, nous ne pouvons passer sous silence devant cette commission parlementaire un événement récent qui nous inquiète profondément, à savoir la mise sur pied par le gouvernement, sans consultation appropriée, selon nous, de Placements Québec. Bien sûr, l'ACCOVAM-Québec adhère sans réserve aux mesures de dématérialisation des obligations d'épargne du Québec. Mais l'intention avouée du gouvernement d'offrir éventuellement, par l'entreprise de Placements Québec, d'autres produits financiers directement aux épargnants constitue, à notre avis, une ingérence injustifiée de la part de l'État dans le commerce des valeurs mobilières. La création de Placements Québec s'inscrit, en fait, à contre-courant de toutes les tendances récentes de restreindre les initiatives de l'État au profit du secteur privé. D'autre part, cette initiative nous étonne, compte tenu des préoccupations du gouvernement à l'égard de la santé de l'industrie des valeurs mobilières au Québec.

Il nous semble pour le moins paradoxal qu'au moment où se tient devant cette commission parlementaire un débat sur l'égalité de traitement des intermédiaires de marché commencent les activités de Placements Québec, un intervenant privilégié, non assujetti à la Loi sur les valeurs mobilières, donc échappant à tout cadre réglementaire, et qui fera désormais concurrence aux courtiers comme intermédiaires à l'égard des obligations d'épargne du Québec et des autres produits financiers que le ministère des Finances pourra éventuellement mettre au point. Cet organisme offrira également un RER qui, à l'égard des titres à revenu, fera directement concurrence aux REER autogérés offerts par nos membres.

Il existe, dans notre industrie, des règles fondamentales, comme le devoir du courtier de ne conseiller à un client que l'acquisition de titres qui lui conviennent. Compte tenu de ce que nous savons à l'heure actuelle de la façon dont Placements Québec exercera ses activités, il lui sera impossible d'adhérer à de telles normes.

En conclusion, M. le Président, nous tenons à souligner que l'ACCOVAM-Québec a déployé des efforts considérables pour mettre en oeuvre les propositions du rapport Robic qui la touchaient de façon plus spécifique et que, de la même manière, nous comptons collaborer à toute réforme qui pourrait résulter des audiences de cette commission.

Je tiens à remercier la commission, M. le Président, de la patience et de la tolérance dont vous avez fait preuve dans notre abus de votre temps. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, M. Morin, d'avoir présenté le mémoire au nom de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. Maintenant, la parole est au ministre de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Oui. M. le Président, je voudrais qu'on commence par un détail... Bien, pour vous, ça n'a pas l'air d'être un détail, c'est Placements Québec. Votre mémoire est très fondamental. Il y a des choses d'une très grande importance liées à l'activité même de l'industrie de la finance, mais il y a cet accessoire sur Placements Québec. J'aimerais qu'on le liquide maintenant, puis je ferai des remarques plus substantielles après. Et, pour le liquider, bien, je voudrais... Pourquoi je veux le faire maintenant? Parce qu'on a un technicien avec nous, de Placements Québec, M. Mario Deschamps, qui va donner toutes les indications techniques que vous pourriez requérir.

Mais je voudrais d'abord vous faire remarquer – vous le savez sans doute, c'est votre métier – que la commercialisation des produits de l'épargne par les gouvernements est une pratique généralisée dans le monde industrialisé. Le gouvernement du Québec était singulier en ne le faisant pas. En Amérique du Nord, les États-Unis, le Canada, l'Ontario le font déjà. Alors, le Québec fait simplement se mettre à jour. Cette opération a été confiée à un spécialiste financier du secteur privé. Ce n'est pas une structure gouvernementale qui fait ça. On est allé par appel d'offres et c'est une grande institution financière privée qui s'est qualifiée.

Les produits offerts par Placements Québec visent à desservir une clientèle épargnante qui dispose généralement de sommes modestes – les institutionnels ne sont pas là, évidemment – qui recherchent des produits sécuritaires et qui préfèrent réaliser ses placements sans l'intervention de spécialistes du marché financier. Il s'agit de chercher à atteindre une clientèle autre que celle des courtiers en valeurs mobilières, qui, par ailleurs, pourront continuer à offrir des produits d'épargne du gouvernement aux épargnants.

Encore une fois, M. Deschamps, qui a vécu l'histoire de la naissance de cette nouvelle bannière, car c'est plus une bannière qu'une institution, va vous en parler plus abondamment et répondra à vos questions éventuellement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Deschamps.

M. Deschamps (Mario): Je voudrais d'abord commencer en disant que les consultations relativement à la mise à jour, justement, des produits d'épargne, ça s'est fait depuis maintenant plusieurs années. Je me souviens, en 1989-1990, les courtiers en valeurs mobilières ont été consultés pour essayer de remodeler ou redonner des caractéristiques nouvelles aux produits d'épargne, pour essayer de les rendre plus attrayants aux épargnants. Suite à ça, on a eu aussi des consultations auprès des institutions financières et des sociétés informatiques pour voir s'il n'y avait pas possibilité, en ajoutant à la fois aux caractéristiques, aussi d'améliorer le réseau de distribution, les formules de distribution qui pouvaient être possibles, pour éventuellement rendre, encore une fois, le produit plus facilement accessible aux épargnants. Ce processus s'est déroulé aux alentours des années 1992, 1993.

Le résultat de cette consultation-là a donné lieu à l'appel d'offres dont vous avez probablement eu vent, dont vous avez eu probablement connaissance, à l'été 1995, avec M. Campeau, qui a donné lieu à un appel d'offres formel et qui a débouché vers le contrat qu'on connaît aujourd'hui. Donc, je crois qu'il y a eu un minimum, au moins un minimum de consultations depuis les années pour essayer de retaper ce produit qui, graduellement, perdait des parts de marché.

M. Landry (Verchères): On était parti de 10 %, on était rendu à 3 %. Alors, avant d'être effacé complètement du marché, on a décidé, sans faire de vagues, de remonter la côte. Parce que notre objectif est relativement modeste: on veut 15 % non pas du marché, mais de l'augmentation annuelle du marché, pour aller se repositionner à ce qu'on était autrefois.

Mais le député de Crémazie connaît très bien la question aussi. Je pense que ça pourrait être intéressant de l'entendre, puisque c'est lui qui a présidé, sur le plan intellectuel, à la conception de cette chose-là et à l'envoi des appels d'offres.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, M. le Président. Je suis un peu surpris de votre commentaire, parce que, sur les ventes totales d'obligations d'épargne du Québec, qui, disons-le tout de suite, sont plutôt un outil de placement favorable au prêteur qu'à l'emprunteur, parce que l'emprunteur fait toujours face à un titre qui peut être encaissé en n'importe quel temps, alors l'avantage est vraiment du côté de l'investisseur... Mais je reviens à l'outil de l'obligation d'épargne du Québec. Il y a à peu près un tiers de toutes les ventes d'obligations d'épargne du Québec qui sont faites par les courtiers. Les deux tiers sont faites par d'autres institutions financières. En plus de ça, après un an ou après 11 mois, ou le jour de l'encaissement, c'est drôle comme c'est ce tiers-là qui est encaissé le plus rapidement. Donc, c'est ce tiers-là qui nous coûte le plus cher au Québec à émettre. Alors, on dit aux courtiers... Je suis tout à fait surpris que vous disiez qu'on va dans votre champ d'activité. Puis je ne peux pas vous blâmer, j'ai déjà été courtier, je l'ai dit tout à l'heure, je vais vous dire ce qu'on faisait, probablement que vous faites encore la même chose.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Quand arrivait l'obligation d'épargne du Canada ou du Québec, on vendait à nos clients, parce qu'on avait une liste de clients qui avaient de l'argent à investir puis on ne savait pas quoi leur offrir. On leur vendait des obligations d'épargne. Puis là on attendait les belles émissions. On rappelait notre client, on disait à notre client: Voyez-vous, vous avez acheté une obligation d'épargne, il faut l'encaisser tout de suite, et vous allez placer dans un titre qui vous rapporte plus. Puis là, pendant ce temps-là, on avait encaissé notre commission pour la vente d'obligations d'épargne, légère par rapport à l'autre, puis on encaissait l'autre commission. Ça nous faisait deux commissions sur le dos du Québec. Moi, dans ce temps-là, je me pensais brillant.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin (Jean): Mais, dans votre temps, c'était payant, M. Campeau.

M. Campeau: C'était payant... En tout cas. Mais je continue...

M. Landry (Verchères): Vous voyez l'avantage d'avoir d'anciens courtiers au gouvernement. Alors, avis aux intéressés.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Alors, je continue là-dessus. Placements Québec, ce qu'il veut faire, ce n'est pas nécessairement une compétition aux courtiers. D'abord, il veut limiter son montant par année et, en plus de ça, il va arriver en septembre avec d'autres produits, à un an, deux ans, trois ans, quatre ans ou cinq ans, peut-être plus, mais il y a un genre de certificat de dépôt garanti. Ça va plutôt être une concurrence aux banques. Il ne faudra pas dépasser nos limites. Il faudra être...

Une voix: ...

(20 h 20)

M. Campeau: Pas trop gourmand, modéré. Mais en aucun temps on va se trouver à compétitionner avec les courtiers. Ou bien je me trompe. Mais c'est évident qu'on va vous enlever, éventuellement, un outil agréable. C'est ma vision à moi, là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y a M. Deschamps qui semble vouloir compléter.

M. Landry (Verchères): Vous pouvez continuer à en vendre, même après Placements Québec, mais, après ce qu'a dit le député de Crémazie, on ne le souhaite pas tellement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin (Jean): M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Morin.

M. Morin (Jean): D'abord, je reçois très bien les commentaires des membres de la commission et je veux clarifier ici que la mise au point de l'ACCOVAM n'a pas pour intention de douter de la bonne foi du gouvernement. Cependant, si je peux me permettre de clarifier, en deux volets. Si on s'en tient aux obligations d'épargne du Québec, et sans entrer dans les technicalités peut-être lourdes pour les membres de l'Assemblée, et si je mets mon chapeau de représentant en placement, techniquement, c'était tellement compliqué de vendre des obligations d'épargne du Québec cette année, hors REER, que nos clients refusaient systématiquement de les acheter de nous. Est-ce que je me trompe, monsieur? Vous riez, hein!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Deschamps.

M. Landry (Verchères): Moi, je ne ris pas.

M. Morin (Jean): Non, non, non, votre confrère.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin (Jean): Mais j'aimerais poursuivre. Donc, on a été, pratiquement parlant, limités à les vendre dans des REER, et je ne vais pas ici faire l'absolution ou nier ce que M. Campeau avance en disant qu'à une certaine époque et peut-être encore de nos jours certains de nos confrères n'utilisent pas les obligations de la façon peut-être la plus utile possible aux fins gouvernementales.

Ceci étant dit, notre principale préoccupation, M. le Président, n'est pas au niveau des obligations d'épargne du Québec mais bien plus au niveau d'autres instruments financiers: coupons détachés, instruments plus volatiles, plus complexes, ayant plus de risques. On ne se sent pas, à ce jour, très bien informés sur les intentions à moyen et long terme de Placements Québec et c'est ce qui nous cause de l'inquiétude.

M. Landry (Verchères): Je pense qu'on peut vous rassurer dès ce soir que ce n'est pas notre intention de vous exclure de ce marché et que vous pourrez vendre des nouveaux produits, comme vous pouvez vendre des obligations d'épargne du Québec, et on fera tout ce qu'il faut pour vous faciliter les choses en termes de formalités. Ça, je vous le garantis, c'est un engagement. On a intérêt, nous, à rapatrier chez nos contribuables une partie de la dette qu'ils doivent payer. Et, encore une fois, on le fait modestement. Vous vous souvenez de l'expression de Ross Perot. Il combattait le libre-échange avec le Mexique en disant que ça allait faire un «huge shocking sound», vous vous rappelez de l'expression. Ce n'est pas du tout ça qu'on veut faire avec notre Placements Québec. On veut prendre une juste proportion annuelle de la croissance, du «croît» du marché. Et, encore une fois, vous avez notre engagement que, de concert avec vous, on s'arrangera pour que les nouveaux produits soient disponibles à travers vos réseaux.

Je pense que ça va pour Placements Québec. Ce n'était pas le coeur de votre mémoire...

M. Morin (Jean): Non, mais merci pour les clarifications.

M. Landry (Verchères): D'ailleurs, votre mémoire, il est vraiment très profond. On voit que vous avez réfléchi, que vous connaissez votre métier et que vous voulez améliorer le marché, ça transpire à toutes les pages, et nous sommes largement d'accord avec plusieurs des principes que vous émettez et des recommandations que vous faites. Alors, je n'insisterai pas lourdement sur les points d'accord. Je vais vous poser peut-être quelques sous-questions et évoquer quelques désaccords.

C'est intéressant que vous ne vouliez pas, vous non plus, d'une commission dite nationale des valeurs mobilières, pas tout à fait pour les mêmes raisons que nous, mais, peu importent les raisons, nous pensons qu'il s'agit là d'une mauvaise idée. Et nos amis de l'autre côté de cette table, maintenant et quand ils étaient au gouvernement, partagent notre opinion. Cependant, je vous pose une petite question qui pourrait nous être utile dans nos discussions avec les fédéraux. Le gouvernement fédéral a affirmé qu'il proposait le projet de commission canadienne des valeurs mobilières pour répondre, entre autres, aux attentes du milieu financier québécois. Alors, quand vous reprendrez la parole, j'aimerais que vous m'éclaircissiez: Puisque l'ACCOVAM n'est pas favorable, ça devient une grosse affirmation de prétendre que le milieu financier québécois est favorable, n'est-ce pas?

M. Morin (Jean): M. le Président, au Téléjournal, ce soir, à 22 heures, je vais articuler exactement la réponse à la même question qui m'a été posée...

M. Landry (Verchères): Est-ce qu'on pourrait avoir la primeur?

M. Morin (Jean): On va vous donner la primeur.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin (Jean): Les attentes du milieu, je ne suis pas certain que je comprenne à quel milieu on fait allusion, parce qu'il n'y a pas eu de membres parmi les 62 membres de l'industrie qui se sont adressés à quiconque à l'ACCOVAM pour nous faire part de ça. Notre position est très simple, c'est clair: on ne veut pas réinventer la roue, on a une situation qui, sans être parfaite, semble s'adresser aux problèmes de façon raisonnablement adéquate. Il y a du «fine tuning» – si vous me permettez, en cette salle, d'utiliser cette expression-là – à faire, des ajustements, mais je pense qu'on s'est déjà adressé grandement aux problèmes, aux inefficiences ou aux faiblesses du système, en préservant les intérêts régionaux. Et les attentes du milieu qui voudrait une commission fédérale, moi, je ne les connais pas. Dans le milieu québécois, j'entends. On ne parle pas de Bay Street. Je ne sais pas à qui on fait allusion ici.

M. Landry (Verchères): On ne les connaît pas non plus, mais on voulait vérifier quand même auprès de vous.

Vous êtes intéressés à la naissance d'un marché spécialisé pour les petites et moyennes entreprises. Vous voulez participer au groupe de travail que nous avons l'intention de créer. Nous acceptons volontiers votre offre et avec joie et nous vous ferons signe en temps opportun. On ne peut pas refuser une offre de service aussi intéressante que la vôtre.

Je voudrais dès maintenant vous poser une question: Est-ce que vous avez déjà une idée de ce que pourrait être ce marché pour les titres des PME? Est-ce qu'il devrait être étroitement lié à la Bourse de Montréal, par exemple? Est-ce qu'il devrait avoir un autre réceptacle? Avez-vous commencé votre réflexion?

M. Morin (Jean): On a une ébauche de réflexion là-dessus, parce que tous nos membres, petits et gros, ont leur vision des choses. Jusqu'à date, on a cru bon, aux spécialistes des marchés boursiers, soit la Bourse de Montréal, de prendre le leadership là-dessus. Mais ce qu'on a articulé à ce jour, c'est que tout ça, si on doit avoir un marché spécialisé qui soit ouvert, global et Internet, devrait se faire dans un contexte de réciprocité. Et, à nouveau, je parle un petit peu avec mon chapeau de représentant, il est fort difficile pour un représentant inscrit au Québec de faire des affaires dans le marché américain, et je ne reçois pas très bien, marché spécialisé ou non, que ces gens-là, nos voisins du Sud, viennent faire des affaires chez nous sans une réciprocité de procédures, de réglementations et d'accès de marché. Mais, ceci étant dit, c'est là où on en est. On n'a pas une réflexion approfondie de faite et je ne peux pas en improviser une ici sur place.

M. Landry (Verchères): Bien. Mais, puisque vous voulez participer à notre groupe de travail, bien, vous aurez le temps d'y réfléchir davantage.

M. Morin (Jean): On est prêt à y consacrer beaucoup de ressources.

M. Landry (Verchères): Oui. Bon. Parce que, si vous faites aussi bien que pour la préparation de votre mémoire, on n'a aucune inquiétude là-dessus.

Encore une fois, ne vous offusquez pas si je ne reprends pas tout, là. Tout sera analysé et pesé à son mérite. C'est simplement quelques éclaircissements sur les points majeurs, et je vais céder la parole à nos amis, puisque le temps file.

Sur les exigences de résidence, vous êtes assez sévères. Vous employez des expressions fortes, bien choisies par ailleurs, comme «ghetto législatif». Là, j'y vois un paradoxe et j'aimerais vous entendre sur ce paradoxe, c'est le suivant. Vous êtes pour l'autoréglementation, vous êtes pour le contrôle, vous êtes pour que cette activité se déroule, cette activité qui est la vôtre, dans des règles d'éthique élevées. Donc, ça suppose, évidemment, autoréglementation, oui, mais lois, règlements, commissions d'application, toutes choses liées à des juridictions étatiques territoriales.

On pourrait souhaiter, et ça viendra peut-être un jour, qu'une organisation comme l'Organisation mondiale du commerce, par exemple, crée une législation internationale et une réglementation de votre métier. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres, hein. Et je ne vois pas qu'avant plusieurs années, peut-être même décennies, on puisse arriver à une chose telle qu'un droit international des valeurs mobilières applicable aux citoyens de chaque pays et les protégeant. Et c'est là qu'est le paradoxe. Si vous voulez qu'on ouvre complètement et si tout peut se faire par Internet et par 1-800, et ceci et cela, quelle sera la juridiction étatique?

Une voix: ...

M. Landry (Verchères): D'accord. Mais qui, à ce moment-là, dans ce contexte, va protéger vos clients et nos contribuables? Quelles seront les instances dans lesquelles les infractions seront poursuivies? Quelles seront les instances qui donneront des avis favorables ou défavorables à telle ou telle pratique? En d'autres termes, en attendant l'avènement d'un droit international consistant en cette matière, comment peut-on échapper au droit national?

(20 h 30)

M. Morin (Jean): Selon moi, on ne peut pas y échapper, dans un premier temps. Je vois deux éléments à votre question. Il y a l'aspect contrôle, réglementation et, d'ici à ce qu'on ait une commission des valeurs mobilières planétaire, du droit international établi, une jurisprudence solide, je ne peux qu'un peu abonder dans votre sens.

Ceci étant dit, on parle de l'aspect contrôle. Est-ce qu'on parle d'harmonisation plus grande entre certaines provinces, entre commissions de valeurs mobilières? Et de quelle façon ça s'articulera? Je ne le sais pas tellement.

Là où on est assez préoccupé, par exemple, c'est si des règles voulant protéger les marchés sont érigées... Et on pense à Internet régulièrement, on pense aux courtiers comme Schwab aux États-Unis, avec lesquels nos clients font un coup de téléphone, puis bang! on ouvre un compte là, et ils font leurs transactions là. Mon expérience personnelle, c'est l'opinion de notre comité, de notre Association, mais c'est mon vécu personnel, dans mon métier de représentant de tous les jours, c'est que ce n'est que par des solutions commerciales, en étant compétitif, innovateur et, sans être faussement modeste, brillant plus que mon compétiteur que je vais réussir à rapatrier ce commerce, ce chiffre d'affaires. Maintenant, s'il y a des cas où il y a fraude ou geste répréhensible, là je vous rejoins entièrement, il faut qu'il y ait une forme de contrôle. Et je crois que je vais laisser aux juristes de la Commission des valeurs mobilières, avec, peut-être, nos conseillers qu'ils voudront consulter, la façon d'articuler ça. Peut-être que M. LaRochelle, ici, a un commentaire.

M. Landry (Verchères): On vous a trouvé, quand vous faisiez ces remarques, le président de la Commission et moi-même, un peu idéaliste. Remarquez que c'est une belle qualité, hein, et, moi aussi, je suis un fervent du commerce international, vous connaissez mes doctrines, mes écrits, etc. Mais, cela dit, je n'ai jamais pensé que le commerce international était l'univers de la naïveté. Il faut faire attention.

Et, aussi, vous parlez de barrières assimilables à des barrières tarifaires. Mais il y a des barrières entre pays qui sont légitimes, qui sont acceptées par les règles du commerce international et qui sont louables. Exemple: les pays, généralement, protègent leurs consommateurs et exigent que les produits vendus dans leurs marchés soient étiquetés dans la langue du lieu. C'est vrai que, si ton produit n'est pas étiqueté dans la langue du lieu, il peut être bloqué à la frontière. C'est une barrière, mais c'est une barrière légitime, louable et recommandable pour que le consommateur puisse lire l'étiquette sur la bouteille.

Je ne veux pas réduire votre métier à quelque contenant physique que ce soit, c'est plus intellectuel que ça, surtout que les titres sont en train de se dématérialiser. Mais vous voyez bien qu'on peut mettre des barrières légitimes pour un objectif supérieur qui est la protection de l'épargnant, qui est l'éthique de l'industrie, etc. C'est ça que je veux dire.

M. Morin (Jean): Je pense, M. le Président, qu'entre les deux extrêmes du ghetto législatif et de l'absence de barrières il y aura une transition qui prendra peut-être 20 ans, comme vous le suggérez. Mais on peut regarder des exemples très simples qu'on pourrait améliorer: le cas de représentants inscrits, de gens qui font affaire ici, au Québec, ou en Ontario, où les gens déménagent, sont transférés, et on doit accumuler des permis, aller chercher des cours, des enregistrements, payer des frais. On ne parle pas de grosses barrières, mais des barrières qui existent quand même. Je pense qu'il y a une progression normale qui pourra se faire là-dedans.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. LaRochelle avait un complément de réponse à donner. Est-ce qu'il est encore opportun?

M. LaRochelle (Luc): Je pense qu'on vit, justement, une période où le plus gros défi de la Commission des valeurs mobilières, ça va être de s'ajuster aux nouvelles réalités qu'on est en train de vivre. Il y a un membre de la Commission, cet après-midi, qui évoquait un article dans le Time , qui démontre, chiffres à l'appui, combien la réalité est en train d'échapper au cadre réglementaire, même aux États-Unis. Autrement dit, on ne peut pas contrôler ce que l'individu fait chez lui et où il achète ses valeurs mobilières. Comment, dans ce contexte-là, va-t-on réglementer le marché des valeurs mobilières? C'est une question énorme et, d'ailleurs, il y a un comité de travail qui a été créé au sein de la Commission, surtout à l'occasion de l'arrivée de NASDAQ sur le marché québécois.

Et je pense que c'est le principal défi, parce que, si on ne suit pas, la réalité échappe, qu'on le veuille ou non, puis la réalité est en train d'échapper grandement au cadre réglementaire. Et c'est un défi qu'on partage, nous, avec vous, parce qu'on tient à ce que ça se fasse ici, parce qu'on gagne notre vie ici, puis la Commission tient à continuer à encadrer ces choses-là. Mais la réalité nous échappe. Donc, c'est là qu'on en est, et il va y avoir une période de flottement qui ne sera pas... Ce ne sera pas évident, je pense, au cours des prochaines années, de concilier l'émergence de ces nouvelles technologies et l'émergence de ces nouvelles façons de transiger des valeurs mobilières avec un cadre réglementaire existant. Et, même avec la souplesse qu'on reconnaît à la Commission, il y a un boulot qui n'est pas évident. Pour nous, c'est le défi des prochaines années.

M. Landry (Verchères): Il faut trouver l'équilibre, en d'autres termes. M. Martel connaît bien ces questions-là, puisqu'il a été confronté, lui, très pratiquement, à la question de NASDAQ. Peut-être qu'on pourrait l'entendre un peu, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Martel.

M. Martel (Jean): Tout à fait. En fait, je pense que je voudrais certainement renchérir un peu sur les propos qui viennent d'être tenus. Il est très, très clair qu'à l'échelle internationale il va nous falloir mettre les bouchées doubles, autant au niveau de notre propre Commission que des plus grandes commissions au monde, d'ailleurs, qui se retrouvent, bien souvent, dépassées par l'évolution technologique qu'on connaît, dans la capacité, finalement... Le fait que la capacité de distribution des valeurs mobilières en utilisant les systèmes comme Internet ou des systèmes de négociation du genre... comment cette capacité-là est décuplée et même, je dirais, multipliée par 100.

Le problème qu'on a, c'est que, évidemment, faire évoluer les cadres réglementaires à un rythme qui est proportionnel, finalement, à l'accélération qu'on connaît dans le développement de ces systèmes-là et de leur utilisation pour les opérations en valeurs mobilières, c'est effectivement tout un défi. Par contre, comme le disait Me LaRochelle tout à l'heure, on a créé, au sein de notre Commission, un groupe qui se penche, justement, et qui a saisi l'occasion, la demande de la NASDAQ de venir implanter des terminaux à Montréal, demande qui a été retirée, mais on est convaincu que c'est sauf à se pourvoir à un certain moment donné, dans un certain avenir prévisible. Mais on a saisi cette occasion-là pour mettre sur pied un groupe de travail au sein de notre Commission, qui va procéder à des consultations publiques de l'industrie québécoise, de tous les intéressés. Parce qu'on s'est aperçu, finalement, lors de la demande de la NASDAQ, qu'il y avait un très, très grand intérêt à l'échelle même nationale pour cette question-là. Il y avait beaucoup de gens qui voulaient être entendus et faire valoir leurs prétentions.

Sur le plan national, on a également un sous-groupe des autorités canadiennes en valeurs mobilières qui se penche sur cette question-là, mais je pense que c'est sur le plan international, considérant la nature même des choses, qu'on va voir probablement le travail le plus substantiel se réaliser sur ces questions-là. On a, d'ailleurs, un groupe de travail de l'Organisation internationale des commissions de valeurs qui, justement, a obtenu un mandat additionnel de se pencher sur la négociation sur Internet, la capacité d'assurer l'application des lois, d'assurer le renforcement de l'encadrement qu'on essaie de mettre sur pied, de développer pour ces opérations-là. Il est éminemment, il est même fascinant de voir que même dans les plus grandes juridictions au monde... Je parlais, il y a quelques semaines, avec un commissaire de la Securities and Exchange Commission qui disait: On est un petit peu dépassé par ça; franchement, on est bien, bien perdu... pas perdu, mais on ne sait pas trop quoi faire, on ne sait pas trop dans quelle direction s'orienter.

C'est assez rassérénant de voir que, finalement, l'internationalisation des opérations en valeurs mobilières, en utilisant des réseaux comme ça, appelle une internationalisation des efforts aussi de surveillance. Ça nous rapproche et je pense que ça va créer un effet multiplicateur sur des efforts qui, auparavant, étaient isolés. Maintenant, on combine nos ressources, on combine les expériences qu'on connaît dans les plus grands marchés et, finalement, en tout cas, on essaie de mettre toutes les chances de notre côté de développer un produit qui va être capable de faire face à ces défis-là.

M. Landry (Verchères): Deux dernières petites questions, s'il vous plaît. Est-ce qu'on peut?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est parce que c'est pour permettre l'alternance et on pourra revenir après, si vous permettez.

M. Landry (Verchères): Ah oui! d'accord.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Parce que là le parti ministériel a dépassé...

M. Landry (Verchères): De bonne grâce.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...largement son temps aussi.

M. Chagnon: Je m'ennuie, moi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez.

M. Landry (Verchères): Mais on ne peut pas s'ennuyer en compagnie de l'ACCOVAM...

M. Chagnon: Non, non, non.

M. Landry (Verchères): ...M. le député.

M. Chagnon: Je m'ennuie en compagnie de vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez, prenez le temps.

M. Landry (Verchères): J'aime mieux que ça tombe sur moi que sur vous. Moi, je suis habitué!

Des voix: Ha, ha, ha!

(20 h 40)

M. Chagnon: M. le Président, plus sérieusement, je voudrais, d'abord, remercier l'ACCOVAM d'être venue ici, ce soir, présenter son mémoire. C'est une pièce maîtresse parmi les mémoires que nous avons reçus, c'est une des pièces majeures, parce qu'elle englobe l'ensemble du dossier du plan quinquennal, du rapport quinquennal, dis-je, et aussi du texte, document d'accompagnement que le ministre a produit au mois d'avril. Je vais vous poser quelques questions rapides avant de tomber sur des sujets peut-être un peu plus pointus, c'est-à-dire moins pointus puis un peu plus contentieux.

Vous avez soulevé, par le biais de Placements Québec, le problème du non-assujettissement de la couronne à la loi des valeurs mobilières. Est-ce que, selon vous, la couronne devrait être, oui ou non, assujettie à la loi des valeurs mobilières?

M. Morin (Jean): Selon nous, nonobstant le statut de l'intermédiaire de marché, si on partage ensemble la vision de l'égalité de traitement et du meilleur intérêt du public, on croit que, lorsque vient le temps – on dit toujours dans notre métier: connaître son client et respecter ses objectifs – de servir ce public, on croit simplement que tout le monde doit passer par le même moule.

M. Chagnon: Je ne veux pas, vous comprenez mal... que la loi fasse en sorte de ne pas inclure l'État ou la couronne pour un dossier comme Placements Québec, mais ça pourrait être aussi le cas. Souvenez-vous d'une couple d'années, là, quand on a eu le dossier de l'amiante, c'était un problème.

M. Morin (Jean): À ce stade-ci, il n'est pas question de mettre en doute la bonne foi ou l'intégrité de l'État. Ce n'est pas de ça qu'on parle. Mais on est dans une industrie qui, fondamentalement, repose sur la crédibilité, la confiance et la transparence.

M. Chagnon: Alors, la réponse, c'est oui. Vous seriez d'avis que l'État devrait s'assujettir à la loi des valeurs mobilières.

M. Morin (Jean): Les mêmes règles pour tous, essentiellement.

M. Landry (Verchères): Les obligations d'épargne étaient déjà exemptées, je crois. Le gouvernement antérieur, en tout cas, il a eu 10 belles années d'interventions possibles pour les assujettir à la Commission.

M. Chagnon: L'avenir est entre vos mains, M. le ministre...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: ...parce que la modification de cette loi sera...

M. Landry (Verchères): L'avenir est entre nos mains et l'avenir dure longtemps, comme on dit.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y a M. LaRochelle qui aurait peut-être un complément de réponse.

M. Chagnon: Jusqu'à temps que le temps change.

M. LaRochelle (Luc): Les obligations d'épargne du Québec sont exemptées de la loi des valeurs mobilières depuis toujours. Ce dont on parle ici, c'est l'assujettissement de Placements Québec comme organisme de distribution. Notamment les individus qui vont répondre au téléphone, qui vont répondre par courrier aux demandes de placement, ces gens-là ne seront présumément pas des courtiers inscrits. Or, dans notre industrie, la règle qui prévaut, c'est la «Know-your-client rule», en anglais, c'est-à-dire «Connaissez bien votre client». Il nous appert que les gens de Placements Québec ne seront pas liés par cette règle fondamentale qui régit toute notre industrie. Assez paradoxalement, ça peut ne pas être une bonne idée pour un investisseur donné d'acheter ce type de placements là. Ça peut ne pas être une bonne idée.

M. Chagnon: M. LaRochelle.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous ai passé la parole, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. LaRochelle (Luc): Pour un, à cause des...

M. Chagnon: Mais la question de fond...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...on reviendra après.

M. Chagnon: ...c'était: Êtes-vous d'accord, oui ou non, avec le principe de l'assujettissement de la couronne ou de ses mandataires à l'application de la Loi sur les valeurs mobilières?

Une voix: Oui.

M. Chagnon: La réponse, c'est oui.

M. LaRochelle (Luc): Au niveau de la distribution...

M. Chagnon: La réponse, c'est oui. O.K.

M. LaRochelle (Luc): ...la réponse est claire, on...

M. Chagnon: O.K. On a parlé un peu plus tard ou vous avez parlé un peu plus tard dans votre mémoire de l'harmonisation respectueuse que vous souhaitiez des compétences au Canada – puis tout le monde en convient – de l'harmonisation de la réglementation, et ça implique... Puis vous l'avez soulevé aussi comme question, vous êtes d'accord, je crois, avec la simplification de l'analyse des prospectus pour les émetteurs d'envergure. Vous avez dit ça. Êtes-vous aussi d'accord avec l'harmonisation des déclarations d'initiés?

M. Morin (Jean): L'harmonisation des déclarations d'initiés?

M. Chagnon: ...

M. Morin (Jean): On ne peut pas être contre la vertu.

M. Chagnon: Et, évidemment, cela va ensemble. Je comprends que vous n'êtes pas contre la vertu, mais vous auriez pu le dire. L'harmonisation des déclarations d'initiés et la simplification de l'analyse des prospectus pour les émetteurs d'envergure, la mise sur pied de SEDAR sont des outils nécessaires à l'harmonisation dont on parle, là, de la réglementation intercommissions. Et, dans ce cadre-là, tout ce que vous pouvez souhaiter après ça, c'est un allégement de la réglementation. Maintenant, quand vous avez mis sur pied votre Centre d'arbitrage, dont je vous félicite, de concert avec la Bourse de Montréal, vous avez pris sur vous-même de faire une réglementation spéciale pour vos membres, à ce moment-là, n'est-ce pas?

M. Morin (Jean): Je vais vous situer brièvement l'esprit dans lequel on se situe et je vous ramène à la notion de base. Et, comme j'ai déjà discuté de ce sujet brièvement avec M. Landry dans un autre forum, je remets mon chapeau de représentant. La vraie vie, lorsqu'on sert les clients dans cette industrie-ci, c'est que, lorsque M. Client se sent lésé, il a l'impression de faire face à ce monstre qui est une maison de courtage avec ses milliards. Et, dans le cas qui serait...

M. Chagnon: Ce n'est pas juste une impression.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin (Jean): Ce n'est pas juste une impression... Ha, ha, ha! Je vous parle de perception. Et, dans les cas où le client a un dommage qui lui a été causé, un préjudice, et qu'il veut se défendre... Dans plusieurs cas, il ne le fera pas, si on parle d'un montant de 5 000 $, 10 000 $, 20 000 $, parce qu'il pense, et probablement à raison dans certains cas, qu'il ne pourra jamais y arriver, faute de ressources financières. Ça, ça a un effet multiplicateur sur... L'inverse de la crédibilité, autrement dit, c'est le manque de confiance qui se développe envers l'industrie.

Ce qu'on a décidé de faire, et c'est vraiment l'esprit dans lequel ça nous animait, c'est, sur une base volontaire – et 97 %, ou à peu près, de nos membres ont suivi, à l'exception des petites boîtes institutionnelles – de proposer un tribunal externe – on a amené cette initiative-là – et qui aurait pour but d'offrir l'arbitrage dans toutes les causes allant jusqu'à 50 000 $. Et, dans cette situation-là, c'est le client qui amène la maison de courtage en arbitrage et non pas l'inverse. Le client a toujours le privilège de dire: Je vous amène en arbitrage. Et, nous, on a tous signé, en disant: On se soumet à ça de bonne foi. Et c'est pour enlever l'apparence, encore, d'un rapport de force inégal.

M. Chagnon: Je vous félicite de l'initiative. C'est une initiative qui va permettre d'éviter des choses comme ce qu'on peut lire dans les journaux, dans les chroniques de Girard et compagnie, depuis quelques semaines.

Troisième question dans les rapides et courtes. La protection du petit investisseur, il y a ce modèle-là, mais il y a aussi ce que vous avez apporté, c'est-à-dire le Centre d'arbitrage, mais aussi les recommandations du rapport quinquennal, les recommandations 25 à 30. Qu'est-ce que vous avez à dire là-dessus?

M. LaRochelle (Luc): Pouvez-vous nous rafraîchir la mémoire sur ces recommandations-là?

M. Morin (Jean): Voulez-vous nous rafraîchir la mémoire sur 25 à 30?

M. LaRochelle (Luc): On s'est plus concentré sur le document d'accompagnement que sur le rapport Robic pour des raisons évidentes de...

M. Chagnon: Vous aviez tort. Vous aviez tort. Le ministre prétendait que le document d'accompagnement ne faisait que compléter le document principal.

M. Landry (Verchères): Ah! c'est tout à fait exact. Je ne prétends pas. C'est ça, la réalité. Parce que, comme les gens de l'ACCOVAM, d'une façon très sage, l'ont bien dit, les conditions ont changé rapidement.

M. Chagnon: Oui, mais il y a plusieurs éléments concernant la protection des petits investisseurs qui, eux, n'ont pas changé.

M. Landry (Verchères): Ah! il y a plusieurs éléments classiques et éternels, mais le monde est mobile, monsieur, et change, et l'ACCOVAM l'a bien saisi.

M. Chagnon: Le monde est mobile, mais la protection des petits investisseurs n'a pas changé. Et les articles 25 à 30 sont ceux que vous retrouvez aux pages 56 et 57.

M. Landry (Verchères): La protection des petits investisseurs, elle pourrait être révolutionnée par les transactions électroniques et l'Internet. C'est peut-être eux qui s'en serviraient le plus.

M. Chagnon: Nous allons y revenir plus tard. Mais, puisque le ministre insiste, de toute façon, pour avoir une législation locale sur ces questions, il serait intéressant d'avoir vos remarques. Tout à l'heure, on parlera des juridictions virtuelles sur lesquelles le ministre aimerait avoir un certain pouvoir mais sur lesquelles, évidemment...

M. LaRochelle (Luc): C'est en grande partie réglé par le système d'arbitrage qu'on a mis en fonction, ça. Quand on parle des paramètres financiers dont vous parlez, ça règle une grande partie de ce dont on parle ici. Je ne peux pas voir, là, ce qui est couvert dans 25 à 30 et qui ne serait pas couvert par le système d'arbitrage qu'on a mis en place, sauf quand on parle, peut-être, des fonds de garantie. Et puis 3 000 $ et moins, bon... Si on est pour se lancer dans une cour de petites créances en matière de valeurs mobilières, là, je ne peux pas voir quelle est la pertinence de ça.

M. Chagnon: C'est ça. Qu'est-ce que vous en pensez, des propositions qui sont ici?

M. Morin (Jean): Écoutez, on ne va pas vous donner une réponse sur le flail, là.

M. Chagnon: Parfait.

M. Morin (Jean): Les recommandations 25 à 30, on n'a pas eu le temps de s'arrêter dessus.

M. Chagnon: Parfait. Ça marche.

M. Morin (Jean): Ce qu'on a fait, cependant...

M. Chagnon: On continue.

M. Morin (Jean): ...c'est que les causes de 3 000 $ et plus, qui sont 95 % des problèmes, on les a adressées avec le tribunal d'arbitrage. L'expérience de nos confrères en Colombie-Britannique, après l'introduction de ce processus-là, ils ont eu huit plaintes. Alors, la réalité, c'est que les maisons de courtage, face à un processus d'arbitrage, deviennent rapidement très conciliantes et règlent.

M. Chagnon: Et, vous, vous en avez eu combien depuis le mois de février?

M. Morin (Jean): À date, on n'en a eu aucune.

M. LaRochelle (Luc): Aucune.

M. Morin (Jean): Et, M. le Président, s'il plaît à la commission, je pourrais vous décrire, dans ma vie de directeur de bureau, quotidiennement, comment ça se passe, le mécanisme de traitement des plaintes. Ça pourrait être amusant ou démystifiant.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est le temps qui va probablement nous manquer parce que le député de Westmount–Saint-Louis... On dépasse déjà le temps qui vous est alloué, mais on avait convenu... Pas votre temps à vous, je parle, le temps qui avait été alloué à l'organisme.

(20 h 50)

M. Chagnon: C'est parfait. M. le Président, on a parlé, on va revenir au domaine de la planification financière. Vous avez soulevé et vous avez été très clair en ce qui concernait l'appellation «planificateur financier». Vous la rejetez tout de go, particulièrement pour les gens qui, selon vous, ne pourraient pas prétendre à l'objectivité n'ayant... La planification financière sera nécessairement orientée dans le sens du produit financier que ces gens-là pourraient vendre. On parle des gens qui seraient susceptibles de vendre un produit. Est-ce que c'est vrai pour tout le domaine non seulement des valeurs mobilières, mais aussi des marchés dérivés?

M. Morin (Jean): Ce que l'on dit au niveau de la planification financière ou du titre de planificateur financier, c'est que, de la planification financière, encore là, au-delà de la philosophie et de la sémantique, tout le monde en fait: le notaire, le comptable, le conseiller en valeurs, le fiscaliste, et j'en passe. On touche chacun notre sphère.

Vous savez tous que, dans notre industrie, on vit de commissions et de produits qu'on va offrir et, dépendant du type de licence que l'on a, un permis restreint, une pleine licence, des licences supérieures de produits dérivés, contrats à terme et autres, on peut offrir soit une gamme de produits limitée ou une gamme très élaborée. Ceci étant dit, il est inévitable que, compte tenu du type de produits auxquels on a accès, on va porter des verres qui vont être colorés ou un peu teintés dans la solution du problème avec les produits qu'on a à offrir, sinon je parle dans le vide puis je ne mangerais pas, je ne vendrais pas de produits.

Alors, je n'ai rien contre les planificateurs financiers. L'ACCOVAM ne pense pas que les planificateurs financiers qui vendent des produits sont mauvais ou moins bons que d'autres. Ce que l'on dit, cependant, c'est que, le public, qui cherche à avoir une planification financière au-dessus de tout doute, non teintée d'une approche de produits, il devrait être en mesure de distinguer ce professionnel-là qui, lui, ne fonctionne qu'à honoraires, sans vendre des produits. On a suggéré «planificateur-conseil». On laisse libre aux juristes, au gouvernement de choisir un titre, ce n'est qu'un titre qu'on a choisi. Mais la distinction, et c'est le coeur de notre commentaire, devrait être facile à faire pour l'épargnant.

M. Chagnon: Oui, je partage ce point de vue là aussi.

Un autre point que vous avez soulevé, vous avez soulevé que la loi des valeurs mobilières est devenue périmée ou deviendrait rapidement périmée, et toute la question de la place d'affaires au Québec, selon vous, doit être remise en question pour un courtier. Voulez-vous nous en parler un peu plus, s'il vous plaît?

M. LaRochelle (Luc): Je pense qu'on vient, avec le ministre Landry, de discuter de ce point-là, je pense qu'on a élaboré là-dessus, sur l'interaction entre ces exigences-là et l'évolution rapide du marché. Je pense qu'on revient, là, sur...

M. Chagnon: Ce que vous suggérez, c'est que, désormais, on ne tienne plus compte de la place d'affaires pour un courtier, point.

M. LaRochelle (Luc): En Ontario, ils ont décidé de ne plus le faire, on pense... Et ça crée un désavantage concurrentiel, d'ailleurs, aux courtiers établis ici. On a dépassé ce point-là. Je crois qu'il y a des problèmes beaucoup plus importants.

M. Chagnon: Je n'ai pas d'objection avec vous, je vous pose la question, mais dites-moi oui ou non.

M. LaRochelle (Luc): Bien, c'est ça. D'ailleurs, même au sein de la Commission, je pense que cette question est à l'étude, de déterminer si on va maintenir les exigences de résidence chez les courtiers individus et chez les firmes de courtage. Je pense que c'est à l'étude au sein de la Commission, à moins que... Autrement dit, on ne peut pas retenir la business avec des règlements, point final. C'est tout ce qu'on veut dire, nous. Il faut la retenir autrement.

M. Chagnon: Peut-être qu'on ne peut pas retenir non plus, puis je suis encore d'accord avec vous, on ne peut pas avoir une juridiction, comme je l'appelais tout à l'heure, virtuelle, sur des phénomènes de communication qui permettent des transactions au moment où on se parle, qui sont tout à fait dépassés et qui dépassent les événements, les législations et les cadres législatifs des sociétés souveraines, point à la ligne. L'exemple que le président de la Commission des valeurs mobilières mentionnait est exact. Ce que je lis, moi, la SEC s'arrache les cheveux avec les nouveaux phénomènes de technologie, tout simplement. Le ministre n'a pas l'air d'être d'accord?

M. Landry (Verchères): Bien, ce n'est pas une question d'être d'accord ou pas d'accord. Comme l'a dit le conseiller juridique, on avait déjà abordé cette discussion-là, peut-être étiez-vous distrait.

C'est une chose extrêmement complexe, il faut trouver un moyen terme. Prenons un cas très concret d'un de nos concitoyens ou concitoyennes qui fait affaire avec un courtier de Dallas–Fort Worth par téléphone. Quid de l'arbitrage et des plaintes et de l'éthique professionnelle. Est-ce que c'est la loi de l'État du Texas qui s'applique? Est-ce que c'est une loi fédérale américaine? Est-ce que c'est la loi du Québec? Ou si c'est l'ensemble canadien qui répond au plan international? Je crois qu'il y a un beau travail de réflexion à faire, comme vous le dites vous-même.

M. LaRochelle (Luc): Quid de l'achat de n'importe quel autre bien où tout le Code civil et l'encadrement dans un autre domaine est tout aussi désuet et non adapté, hein, parce qu'on commande aussi sur l'Internet d'autres biens. Donc, c'est un problème qui n'est pas propre aux valeurs mobilières. Il est propre à tout l'environnement économique.

M. Landry (Verchères): Admettez que c'est plus facile d'acheter des actions par téléphone à Dallas–Fort Worth qu'un camion de 10 tonnes.

M. LaRochelle (Luc): Oui, mais des livres ou beaucoup d'autres biens...

M. Landry (Verchères): Bien, là, ils vont passer par le système des douanes du Canada. Il va y avoir un régime juridique qui va évoluer avec la géographie. Mais là on parle de l'immatérialité surtout avec dématérialisation des titres. On est dans l'immatérialité absolue des impulsions électroniques dans des banques de données aux contours juridiques incertains. Moi, je pense sincèrement qu'il y a un problème. Je pense, modestement même, qu'il y a un problème mais qu'il faut réfléchir davantage.

M. Chagnon: Le ministre était probablement dans la lune quand vous en avez parlé parce qu'il n'a pas réagi. Là, au moins, on sait ce qu'il pense.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ceci dit, la balle est retournée chacun...

M. Landry (Verchères): C'est parce que j'ai cru qu'avec eux je n'avais pas besoin de mettre les points sur les i comme avec vous. Ils avaient l'air à comprendre, eux autres.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): La balle a été retournée des deux côtés. Il y a M. Morin qui semble avoir un complément de réponse. Peut-être qu'il va éclaircir les deux ensemble.

M. Morin (Jean): Simplement un commentaire de fermeture sur ce sujet. Parce que je ne suis pas politicien, donc j'essaie de me concentrer sur le problème. Comme M. Landry l'a dit, c'est fort complexe. On pourrait ici argumenter de 20 petits cas particuliers qui semblent insignifiants sur une grande échelle mais qui sont du cas par cas. C'est vrai qu'on peut intercepter un camion aux douanes, on peut commander du vin, avec sa machine Bloomberg dans son bureau, à New York chez Morrell, on peut acheter des actions au Texas. Alors, il n'y a pas de réponse simple et évidente à ça. Ça va demander beaucoup de travail de réflexion.

Mais ce qu'on dit cependant, et c'est l'opinion de l'ACCOVAM, c'est que le cadre présent, même dans notre cour arrière du Québec et de nos concitoyens dans les autres provinces a besoin d'évoluer pour faciliter le commerce, nous rendre compétitifs. Je pense que c'est l'esprit dans lequel on se situe.

M. Chagnon: C'est que, de toute façon, on n'a pas beaucoup le choix. Puis, quoi qu'en pense le ministre ou, même, on l'a expliqué ici aujourd'hui, même ici, sur Internet, tu peux faire des transactions aux États-Unis. Je comprends qu'il y a un problème qui se pose sur la protection de l'échange...

M. Landry (Verchères): Voilà.

M. Chagnon: Ça, je le comprends. Mais celui qui le fait doit être un peu responsable aussi. On peut lui imputer un peu de jarnigoine et de responsabilité lorsqu'il prend son appareil et qu'il fait affaire avec un courtier à New York ou un courtier sur la bourse. On parlait de NASDAQ, tout à l'heure. NASDAQ est aussi une des solutions pour le financement de la petite et moyenne entreprise. M. le ministre, vous en êtes sûrement conscient. Et, pour arriver à travailler et rentrer sur NASDAQ, on savait, je le disais tout à l'heure... Il y a 650 000 comptes directs électroniques au moment où on se parle, et il y en aura 1 500 000 en l'an 2000. Alors, ça commence à faire pas mal de monde, ça, qui peuvent se promener d'une bourse à l'autre et puis qui peuvent se promener d'un État à l'autre, qui peuvent se promener d'un pays à l'autre, mais qui peuvent se promener, évidemment, en toute... faire des transactions sans avoir la protection d'une des commissions des valeurs mobilières ou d'une des Securities and Exchange Commission à quelque part dans le monde.

Mais, effectivement, vous me demanderiez: Avez-vous une solution ce soir? et je ne serais pas capable de vous dire: Oui, j'en ai une. Je n'en ai pas. Mais je sais qu'il y a un problème majeur, puis je sais qu'il faut avoir aussi en même temps la modestie de penser qu'on ne réglera pas le problème avec une législation locale qui pourrait faire le tour de cette question-là puis protéger tout le monde.

Ceci étant dit, lorsque vous avez parlé, entre autres... Vous avez parlé de Placements Québec, mais, avant Placements Québec, vous avez fait mention des coûts qui sont rattachés à l'ACCOVAM, mais que vous payez par vos émissions. Le financement de la Commission des valeurs mobilières est une chose importante, vous en convenez tous. Évidemment, le ministre des Finances doit y retirer quelques millions, sûrement, des émissions qui sont faites. La demande qui est faite au ministre des Finances, c'est d'en faire une espèce de fonds spécial qui permettrait, d'abord, à l'ACCOVAM de pouvoir avoir un programme ou des programmes qui sont ceux demandés par... c'est-à-dire la... J'ai dit l'ACCOVAM, mais je dis la Commission des valeurs mobilières pourrait avoir des programmes demandés par l'ACCOVAM et financés par les émissions même des membres de l'ACCOVAM. Ça ne m'apparaît pas injustifié comme hypothèse. De deux choses l'une: ou bien on devrait baisser le prix des émissions, ou bien on devrait au moins laisser l'argent à l'ACCOVAM.

M. Landry (Verchères): Si vous nous aidez à ramener notre déficit à zéro en l'an 1999-2000, on pourrait penser à se priver de revenus.

(21 heures)

M. Chagnon: Nous, on vous aide tout le temps. Chose certaine, c'est que, si la Commission des valeurs mobilières n'est plus compétitive, dit le document, on se retrouverait... il s'agirait d'un irritant considérable et on prétend ici que la Commission des valeurs mobilières... «Il nous semble qu'un recours à un pouvoir discrétionnaire de récupération n'est certainement pas de nature à inviter les gens à s'assujettir à la juridiction de la Commission des valeurs mobilières du Québec.»

M. Landry (Verchères): Je ne pense pas, là, que la concurrentialité se pose, parce que, dans l'ensemble du Canada, les commissions rapportent 50 000 000 $, et au Québec, 8 000 000 $. Alors, ça veut dire qu'on est dans les prix, comme on dit.

M. Chagnon: Bien, c'est un point de vue. La Bourse de Montréal représente 14 % des transactions des valeurs mobilières au Canada. Alors, on est peut-être dans les prix... On est à peu près dans les prix, effectivement, sauf que...

M. Landry (Verchères): C'est ça que je dis.

M. Chagnon: Sauf qu'il y a moyen d'être concurrentiel.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'inviterais...

M. Landry (Verchères): Quand on est dans les prix, on est concurrentiel, d'habitude.

M. Chagnon: Non, non.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'inviterais les membres...

M. Landry (Verchères): À condition que la qualité s'y trouve.

M. Chagnon: C'est quand on est en bas des prix qu'on est concurrentiel.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'inviterais les membres de la commission à questionner nos invités, ils sont ici pour ça. Et l'heure court. Il vous reste, en toute équité...

M. Chagnon: Quelques minutes.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...envers les deux partis, cinq minutes, environ, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Alors, je vais conclure rapidement en soulignant que la Commission des valeurs mobilières est sûrement un des organismes avec lesquels vous travaillez souvent et régulièrement. Vous n'êtes pas inscrit à la Commission des valeurs mobilières comme organisme d'autoréglementation?

M. LaRochelle (Luc): Non.

M. Chagnon: Pourquoi?

M. LaRochelle (Luc): Ce dossier-là a été, dans le passé, abordé à deux reprises.

M. Chagnon: Oui.

M. LaRochelle (Luc): L'ACCOVAM y a consacré des ressources considérables, pas mal d'énergie et, à deux reprises, ça n'a pas abouti à cause de questions qui avaient trait à la structure de l'ACCOVAM, personnalité juridique séparée pour le Québec versus ACCOVAM nationale.

Dernièrement, au sein de la Commission des valeurs mobilières, il y a eu un changement d'attitude, lors de notre dernière rencontre, qui nous laisse entrevoir que, dans un avenir immédiat, on va pouvoir arriver à une reconnaissance officielle. Parce qu'il faut bien comprendre que, de facto, on exerce quand même un rôle, là, d'ailleurs, le président de la Commission peut en témoigner. Mais tout nous laisse croire que ce changement d'attitude récent au sein de la Commission à l'égard de la structure de l'ACCOVAM va nous permettre d'arriver à une reconnaissance dans un avenir immédiat.

M. Chagnon: Ça fait longtemps que ce contentieux dure?

M. LaRochelle (Luc): La première demande a été faite en quelle année, Mme Laroche? Une bonne dizaine d'années. Mais là on pense que, cette fois-ci, ça y est.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Qu'est-ce qui vous permet de croire que, cette année, là, ça va être mieux?

M. LaRochelle (Luc): Ce qui nous permet de croire ça, c'est des rencontres récentes, des rencontres qui datent d'il y a moins d'un mois.

M. Morin (Jean): On a noté, depuis les six à huit derniers mois, suite à un changement de direction à la tête de la Commission, un changement de climat, tant philosophiquement que dans ce qui semble être les opérations, qui fait que le dialogue est plus facile, est plus souvent... M. Martel, bouchez vos oreilles, là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin (Jean): Le fait est que, c'est ça, on va dans ce sens-là. Ça semble plus ouvert. On est prêt à s'écouter, voir ce qu'on a en commun au lieu de voir ce qu'on a de différent. On est aussi peut-être plus conscient, de part et d'autre, de l'urgence des défis qui nous attendent. J'aimerais, si M. le Président me donne 30 secondes, nous ramener tout à l'heure, lorsque des confrères des deux côtés de la table discutaient du financement de la Commission. Notre but, dans notre mémoire, ce n'est pas de critiquer le ministre des Finances du moment sur la façon de gérer le trésor de l'État, mais on pense qu'un faible changement dans le mode de financement de la Commission des valeurs mobilières, en lui donnant les ressources nécessaires pour faire face à l'Internet et compagnie... Ça prend des Pentium 100 MHz, pas des petites machines grosses comme ça.

M. Chagnon: Oui, 166, maintenant.

M. Morin (Jean): Ça pourrait avoir un effet exponentiel sur l'impact qu'ils peuvent avoir dans notre marché.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce qu'on peut conclure...

M. Chagnon: Bien, je vous remercie beaucoup, M. le président...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, bon, c'est gentil, ça.

M. Chagnon: ...et je voudrais remercier aussi tous les membres de l'ACCOVAM de leur présentation ce soir. C'était très bien.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre, vous voulez faire vos...

M. Landry (Verchères): Merci. Notre seule frustration, c'est de ne pas avoir plus...

M. Chagnon: Plus de temps, oui.

M. Landry (Verchères): ...de temps, parce que c'est un entretien passionnant, sauf que votre mémoire est tellement bien fait que les quelques questions qu'il me restait, je vais essayer de les approfondir à l'aide de votre écrit, et merci d'être venus.

M. Morin (Jean): On vous remercie infiniment de toute votre disponibilité.

(21 h 10)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Madame, messieurs, on vous remercie beaucoup d'avoir présenté votre mémoire et, maintenant, j'invite le Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec à se présenter à la table.

(Consultation)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'inviterais les membres de la commission à prendre place, s'il vous plaît. Bienvenue, messieurs.

Madame, messieurs, bienvenue aux représentants du Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec après cette courte suspension. J'inviterais son président à présenter les gens qui l'accompagnent et, ensuite, à présenter son mémoire. Et je vous informe que, selon les règles de procédure, vous avez 20 minutes de présentation, et chaque parti a 20 minutes également pour échanger avec vous.

Comme vous avez pu le voir probablement avec l'autre, le président est assez flexible sur le temps, hein. Mais il ne faudrait pas se retrouver à 2 heures du matin avec les derniers, aussi. Donc, allez, M. Beauchemin?


Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec (RCCAQ)

M. Beauchemin (Claude): C'est ça. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. À ma droite, Mme Claudette Carrier, qui est notre directrice générale; à gauche, M. Pierre Thérien, secrétaire-trésorier responsable du dossier des affaires financières; et Me André Bois, notre conseiller juridique.

Alors, si vous permettez, je vais demander à Mme Carrier de vous présenter ce qu'est le RCCAQ, le Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec. Mme Carrier.

Mme Carrier (Claudette): Merci. M. le Président, M. le ministre, membres de cette commission, notre intervention comportera les trois points suivants: une brève présentation du Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec, quelques exemples des principaux dossiers de représentation du Regroupement au cours des dernières années et, finalement, les thèmes que le Regroupement désire développer dans le cadre de cette commission, soit la réglementation de la présentation au public des produits financiers et de la prestation des services-conseils en matière de produits financiers, et, deuxièmement, le choix du type d'organisme d'autoréglementation.

Alors, qui est le Regroupement? Le Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec constitue le seul organisme représentant les propriétaires de cabinets de courtage au Québec; donc les entreprises et non uniquement les individus. Créé il y a plus de 20 ans, le Regroupement est un organisme sans but lucratif regroupant plus de 2 700 courtiers d'assurances de 850 cabinets de courtage québécois. Il est à noter que l'adhésion au Regroupement est volontaire.

La mission du Regroupement. Le Regroupement s'est donné comme mission de promouvoir les intérêts économiques de ses membres et de valoriser la profession de courtier d'assurances, et ce, par le biais de représentations auprès des pouvoirs publics et des compagnies d'assurances, par la prestation des services adaptés aux besoins de ses membres et par la transmission d'informations de pointe pour l'évolution de leur pratique.

La structure du Regroupement. Un conseil d'administration formé de 17 personnes représentatives de l'ensemble des membres, déléguées pour chacune des régions du Québec.

Les cabinets de courtage d'assurance: des PME québécoises. Les 1 600 cabinets de courtage créent 12 000 emplois répartis dans toutes les régions du Québec. Les primes d'assurance générale souscrites au Québec représentent 3 900 000 000 $. 70 % de ces primes, soit 2 800 000 000 $, sont souscrites par des courtiers québécois. Les commissions générées sont de 448 000 000 $. M. Thérien.

M. Thérien (Pierre): Oui. Moi, je veux juste vous mentionner des représentations que le Regroupement a faites au cours des dernières années. Et celle qui nous a tenus le plus actifs, en 1995 et au début 1996: c'est sous l'égide du Regroupement que les courtiers d'assurances se sont impliqués dans le cadre de la banque assurance. À ce moment-là, on a fait appel à la base, aux courtiers, aux propriétaires de cabinets de courtage pour visiter, pour rencontrer et sensibiliser, entre autres, leurs députés au niveau fédéral, pour mentionner que nous n'étions pas en accord avec le fait que les banques viennent vendre de l'assurance générale, vendent ça en succursale.

Je pense qu'il n'y a pas un député, au niveau fédéral, que ce soit au Québec ou au Canada – d'ailleurs, ça a été fait en collaboration avec l'Association des courtiers d'assurances du Canada – qui n'a pas été visité pour faire valoir le point de vue. Évidemment, c'est sûr qu'on faisait valoir le point de vue de nos membres en tant que propriétaires de cabinets de courtage, le côté financier, l'aspect que ça pouvait nous amener là-dessus, le tort que ça pouvait nous causer. Mais, aussi, on le regardait au niveau des consommateurs.

On a sensibilisé nos députés au fait, entre autres, des ventes liées. Qu'on pense juste à l'hypothèque qui peut être consentie, mais: En attendant qu'on finisse de signer les derniers papiers, pourquoi vous n'allez pas vous faire donner une cotation par notre agent d'assurances à la porte voisine? Sur cet aspect-là, je pense qu'on a bien réussi à sensibiliser les gens.

Aussi, il y avait l'aspect que, dans ce domaine-là, ça créait une concentration de nouveaux emplois, si on peut dire, qui étaient à l'extérieur du Québec, et c'est quelque chose auquel on est quand même assez sensible. Comme vous le mentionnait Claudette tout à l'heure, il y a beaucoup d'emplois qui sont créés par des courtiers au Québec.

Évidemment, toujours dans le cadre des représentations, évidemment, il y a la révision de la loi 134, dans laquelle on est impliqué, et sur laquelle on a des contacts, entre autres, avec le ministère. Évidemment, en 1993, on s'est aussi impliqué, on a fait des représentations dans le cadre de la loi 68, sur les renseignements personnels dans le cadre du secteur privé.

Le Regroupement était aussi intervenu à une commission parlementaire qui examinait un projet de loi pour les affaires municipales, qui devait autoriser les municipalités à créer des mutuelles. Évidemment, la loi qui est sortie de ça a été atténuée considérablement dans les conséquences que ça pouvait amener. Alors, ça vous résume un petit peu ce qu'on a fait comme représentations au cours des dernières années, et je demanderais à mon président, Claude, de continuer pour vous donner l'essence de ce qu'on a, parce qu'il faut faire attention au temps.

M. Beauchemin (Claude): Merci, M. Thérien. Alors, M. le Président, M. le ministre, en tant que professionnels de la distribution de produits financiers, nous avons une vaste et longue expérience de la distribution et de conseils en matière de produits financiers auprès du public. Notre motivation à faire connaître notre position vient du fait que nous n'ignorons pas que toutes les modifications à la Loi sur les valeurs mobilières vont toucher la loi 134, et cela nous préoccupe.

À la lecture de notre mémoire, vous avez remarqué ou vous remarquerez que notre présentation ne se limitera qu'à un seul sujet, soit celui de la distribution des produits financiers. Alors, ça devrait être bref.

Nous développerons deux thèmes: Premièrement, la réglementation auprès du public de la présentation du produit; nous voulons faire ressortir sur cet aspect le rôle de conseiller. Deuxièmement, nous parlerons du choix du type d'organisme d'autoréglementation.

En matière de services financiers, le gouvernement a toujours reçu le point de vue du manufacturier. La position privilégiée des intermédiaires, dont nous sommes, devrait faire contrepoids aux visées des manufacturiers de produits financiers. Comme nous le mentionnait notre directrice générale, nous n'avons aucune structure à protéger, de là notre neutralité et notre impartialité.

M. le Président, nous croyons d'abord qu'il y a un inconvénient à une révision sectorielle. Depuis 20 ans, les réformes législatives – je fais allusion, bien sûr, à la révision de la Loi sur les banques, au décloisonnement des institutions financières, à la loi 134 – ont relaxé les exigences de spécialisation, ont aboli la prohibition de lien de propriété entre institutions financières distinctes. Dans le fond, chaque institution est régie par une loi distincte. Cependant, les lois ne se rejoignent pas. Il y a multiplicité de lois. Il y a trop de lois, en fait.

Prenons, par exemple, les planificateurs financiers. Les courtiers en valeurs mobilières et les sociétés de fiducie peuvent faire du conseil en placement et de la gestion de portefeuille, ils sont régis par trois lois différentes. Pour résumer, disons qu'il y a multiplicité de lois là où il y a communauté de principes et unité de matière.

En conséquence, nous proposons, premièrement, une réforme de la Loi sur les valeurs mobilières qui traite de sujets régis par d'autres lois. Deuxièmement, il faudra également revoir le rôle du conseiller en valeurs mobilières.

(21 h 20)

Vu de l'institution financière, il y a d'abord préoccupation de mise en marché et, deuxièmement, une préoccupation de croissance de chiffre d'affaires. Vu du consommateur, c'est tout autrement. Premièrement, le consommateur n'achète pas un bien tangible quand il achète un produit financier, et ce n'est pas une décision résultant d'un jugement impulsif qu'il doit faire. Deuxièmement, il a besoin de certaines informations. Il doit contrôler les informations relatives à la nature de ses besoins, à l'aptitude du produit à répondre aux besoins et aux conseils qu'il a reçus. La question d'Internet et des nouvelles technologies nous préoccupe aussi.

Qu'est-ce que le RCCAQ propose? Nous proposons un régime législatif englobant les activités de présentation au public, c'est-à-dire que nous voulons faire ressortir le rôle de conseiller dans les activités d'opérations financières. Les normes de compétence et de conduite pourraient varier selon les produits présentés. Ce n'est pas parce qu'un produit est simple à mettre en marché qu'il doit être soumis à un processus de réflexion et de conseil.

Il devrait y avoir deux catégories de présentateurs. Premièrement, ceux qui doivent être loyaux à l'institution financière; deuxièmement, ceux qui doivent être loyaux à l'institution financière et aux clients ou bien aux clients seulement.

Nous suggérons un code unique pour tous les présentateurs de produits financiers, deuxièmement, un seul organisme d'autoréglementation pouvant régir le comportement, pouvant régir la formation de toutes les personnes qui fournissent des conseils et informations.

Ainsi, un seul organisme serait investi du pouvoir de surveiller, de réglementer la conduite des planificateurs financiers, des courtiers en valeurs mobilières dans l'exercice de leurs activités conseils en valeurs mobilières, des courtiers en assurance de dommages et en assurance de personnes, des agents dans les deux branches d'assurance, des experts en sinistres et des préposés d'institutions de dépôt présentant au public des opérations d'épargne et de crédit et d'assurance au moyen de ventes distinctes ou de ventes couplées.

Pour que le principe d'autoréglementation soit respecté, les membres de l'organisme seraient majoritairement des personnes assujetties aux exigences de formation professionnelle ainsi qu'aux sanctions disciplinaires en cas de manquement à la réglementation. Ce principe d'autoréglementation commande donc que les institutions financières elles-mêmes n'aient pas une voix prépondérante au sein de l'organisme de surveillance et de réglementation.

Ce regroupement de fonctions de régulation et de surveillance au sein d'un organisme unique résout plusieurs difficultés, notamment celle du cumul de permis délivrés par des organismes différents ainsi que le coût de ce cumul pour ceux qui supportent le paiement des droits.

En conclusion, nous disons que le décloisonnement des institutions financières et la diversification de leurs activités doivent s'accompagner d'un décloisonnement correspondant de la réglementation du comportement des personnes qui, pour le compte de ces institutions, offrent au public les produits, les informations pertinentes sur ceux-ci et, le cas échéant, des conseils pour orienter le choix du produit en fonction des besoins clairement identifiés.

Le temps est donc venu de regrouper en un code cohérent les règles de conduite professionnelle applicables aux personnes chargées de la représentation ou des opérations financières. Pour appuyer correctement cette recommandation, nous proposons l'exemple suivant: Un conseiller en investissement, tel qu'on le désigne dans la Loi sur les banques, agit-il comme courtier en valeurs mobilières ou comme courtier en assurance-vie lorsqu'il propose à une personne, à l'orée de sa retraite, de convertir une partie de son portefeuille de valeurs mobilières en contrat de rentes, ou, inversement, un courtier en assurance de personnes agit-il comme conseiller en valeurs lorsqu'il propose à sa cliente de convertir un portefeuille de valeurs mobilières en un contrat d'assurance-vie comportant une opération de capitalisation?

Ce sont, M. le Président, de telles questions non résolues qui préparent un terrain très fertile pour la culture de la réglementation fédérale dans un jardin provincial. Il ne faut pas oublier qu'il y a 1 000 000 000 $ de commissions qui sont réparties dans toutes les régions du Québec, uniquement en assurance-vie et en assurances générales. Il y a 80 000 emplois à Toronto dans le domaine financier, dont 60 000 uniquement dans le domaine bancaire.

Le RCCAQ n'ignore pas que ces propositions peuvent bousculer certaines organisations, mais la mission particulière du RCCAQ lui commande de promouvoir l'équité concurrentielle en faisant en sorte que toutes les personnes présentant au public des opérations financières soient assujetties à un régime de régulation et de surveillance. Messieurs, je vous remercie de m'avoir écouté si attentivement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, M. Beauchemin, d'avoir présenté votre mémoire. Maintenant, la parole est au ministre.

M. Landry (Verchères): Votre mémoire est intéressant, bien qu'il déborde sur d'autres travaux. Mais, puisque votre thèse, c'est qu'on doit intégrer les choses, ce qu'on va se redire au mois d'août, à la commission parlementaire sur la loi 134, devra avoir déjà été influencé par ce que vous venez de nous dire ce soir. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens d'assurance qui sont avec nous maintenant, sachant pertinemment que cette commission est moins pointue quant à l'assurance. Mais, puisque la thèse générale, c'est l'intégration des marchés financiers, ça justifie, je crois, votre participation, qui est déjà très utile à ce stade-ci.

Vos réflexions vont un peu dans le sens des nôtres. Vous êtes parfois plus audacieux que nous ne le sommes, par ailleurs, mais ça ne veut pas dire qu'on ne veut pas se laisser pousser un peu dans le sens que vous évoquez. Nous allons analyser en profondeur vos remarques et surtout essayer de faire le lien entre l'opération d'aujourd'hui et celle des mois à venir, pour arriver au plus grand degré d'intégration possible.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous avez fini, M. le ministre?

M. Landry (Verchères): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y avait le député de Charlevoix qui avait demandé la parole également.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci, M. le Président. Avant de parler du mémoire lui-même, j'aimerais que le Regroupement nous donne des commentaires sur un des éléments qui sont soulevés dans le document accompagnant le rapport quinquennal – j'imagine que vous l'avez lu – et qui se lit: L'harmonisation et la coopération. Recommandation 3: réaffirmer par tous les moyens appropriés la compétence du Québec relativement au secteur des valeurs mobilières. Je sais que c'est une préoccupation importante que vous avez et j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Beauchemin (Claude): Je pense que Me Bois a une information à vous donner là-dessus.

M. Bois (André): Vous savez que, en vertu de l'article 409.2 de la loi des banques, les banques ont dorénavant comme pouvoir additionnel celui d'agir comme conseiller en investissement et gestionnaire de portefeuille. Et cette fonction conseil, elles peuvent la faire directement par la banque ou par une filiale qui est incorporée en vertu de l'article 468.

L'appréhension, c'est qu'on va avoir deux régulations de la fonction conseil: une réglementation de la fonction conseil par le fédéral, pour les conseils donnés par des institutions, des entreprises fédérales; et une réglementation de la fonction des planificateurs et autres types de conseillers au provincial. Ce n'est pas théorique, ça, et je peux vous donner, à titre de témoin même, devant la commission, comme investisseur...

Les courtiers en valeurs mobilières contrôlés par des banques visitent dorénavant les succursales bancaires au moins une fois par semaine et rencontrent les clients de la banque qui commencent à songer à retirer leurs dépôts parce qu'ils ne donnent pas un rendement suffisant. Ce courtier-là est placé devant le conflit d'intérêts suivant: ou bien il cannibalise la banque ou encore il recycle les activités financières de la banque dans des instruments de la banque, c'est-à-dire des fonds mutuels de la banque. Alors, quand ce courtier-là fait ça à l'intérieur de la banque, il agit de façon différente si c'est un mercredi. Le jeudi, si je demande le conseil au même courtier alors qu'il retourne à sa succursale, il ne me recommandera pas des fonds mutuels de la banque, il va me recommander des débentures convertibles d'Air Canada ou il va me recommander un titre québécois, mais il ne me recommandera plus des fonds mutuels de la banque. Alors, c'est le problème de la réglementation du conseil financier par des entreprises fédérales. Et il y a une menace importante à cet égard-là.

(21 h 30)

La deuxième menace, c'est la réglementation du risque systémique. C'est un mot passe-partout qui est utilisé par les penseurs au Comité sénatorial des banques, notamment le sénateur Kirby, et ça va servir d'assises à un pouvoir déclaratoire du Parlement fédéral pour dire que tout ce qui est financier, incluant les valeurs mobilières, doit être réglementé par le fédéral. Et c'est pour ça que le Regroupement, vis-à-vis de ce risque-là, qui ne se matérialise pas pour le moment, propose de détacher de la Commission des valeurs mobilières du Québec la réglementation de la fonction conseil, qui est une fonction professionnelle et qui est clairement provinciale, dans le contexte juridictionnel actuel, évidemment, et de laisser la partie plus risquée du risque constitutionnel ou la partie plus contentieuse, c'est-à-dire l'appel public à l'épargne, l'information aux investisseurs, de la laisser aux valeurs mobilières. Alors, donc, la Commission des valeurs mobilières conserverait sa fonction pour l'appel public à l'épargne, et la partie réglementation du conseil en placement serait confiée à l'organisme unique dont M. le président Beauchemin vient de parler.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci. J'aimerais que vous nous parliez aussi... Dans le même document, il y a une recommandation 1.5, la divulgation d'informations sur la rémunération des dirigeants. On parle de divulguer les salaires des cinq principaux dirigeants dans les entreprises. J'aimerais ça avoir votre commentaire là-dessus.

M. Bois (André): Bien, c'est une question d'équité. J'imagine que, s'il y a des dirigeants d'entreprises qui sont cotés à une bourse qui sont obligés de déclarer leurs revenus, je ne vois pas pourquoi les dirigeants de nos entreprises ne feraient pas de même, même si c'est des entreprises inspirées d'une philosophie coopératiste. Les renseignements financiers, ça vaut pour la coopération comme ça vaut pour les entreprises dites capitalistes.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci. Vous avez parlé d'un organisme unique, vous avez dit: On est conscient que ça va faire de la vague, etc. J'aimerais ça vous entendre beaucoup plus en fonction de la Commission des valeurs mobilières, parce qu'on est sur l'analyse du rapport quinquennal de la Commission des valeurs mobilières. Quand on va arriver sur la 134, c'est une chose. Comment vous percevez le fait qu'on peut mettre tout ça ensemble, la Commission des valeurs mobilières, les intermédiaires, etc.? J'aimerais ça que vous élaboriez davantage sur cet élément-là.

M. Beauchemin (Claude): D'abord, nous préconisons qu'il y ait, si vous voulez, une seule porte d'entrée pour tous les intermédiaires de marché, une seule porte d'entrée. Alors, ce serait l'organisme d'autoréglementation dont on parle ici. Alors, que vous soyez courtier en assurance générale, courtier en assurance-vie, en valeurs mobilières, vous avez une seule porte d'entrée.

Maintenant, c'est bien sûr que cet organisme-là pourrait recevoir de la part de... On appellerait ça, mettons, des commissaires en assurance générale, un commissaire en assurance-vie, un commissaire à la Commission des valeurs mobilières. Alors, ces sous-organismes-là, eux, édicteraient à l'organisme d'autoréglementation les normes en ce qui concerne la déontologie, en ce qui concerne la formation de tous ces intermédiaires-là. Alors, il y aurait un conseil d'administration formé des membres de chacun des organismes en bas. On pense que ce serait peut-être une grosse boîte, mais je pense qu'aujourd'hui, avec l'informatique, il y a des grosses compagnies un peu partout, puis ça s'administre très bien. Puis le gouvernement lui-même, je pense qu'il s'administre bien. Celui-ci en tout cas.

M. Bertrand (Charlevoix): Ça, on est d'accord.

M. Beauchemin (Claude): Ha, ha, ha! Alors, on ne voit pas pourquoi un gros organisme comme ça ne pourrait pas, avec les moyens et les méthodes d'administration d'aujourd'hui, très, très, très bien administrer cet organisme d'autoréglementation.

M. Bertrand (Charlevoix): Et cet organisme, si je comprends bien, serait sous la tutelle, la supervision, le chapeau de la Commission des valeurs mobilières?

M. Beauchemin (Claude): Sous la tutelle... Nous autres, on dit dans notre mémoire...

M. Bertrand (Charlevoix): Actuellement, on s'entend bien que les valeurs mobilières dépendent de la Commission des valeurs mobilières.

M. Beauchemin (Claude): Oui. D'accord.

M. Bertrand (Charlevoix): L'industrie de l'assurance, entre guillemets, courtiers, assureurs-vie, etc., dépend de l'Inspecteur général.

M. Beauchemin (Claude): C'est ça.

M. Bertrand (Charlevoix): Là, si je comprends bien, tout ce beau monde là se retrouverait sous le chapeau de la Commission des valeurs mobilières.

Une voix: Non.

M. Bertrand (Charlevoix): Non?

M. Beauchemin (Claude): Non, pas nécessairement.

M. Bertrand (Charlevoix): Pas nécessairement.

M. Beauchemin (Claude): On dit, nous, que l'organisme d'autoréglementation en question serait soumis à la supervision de l'Office des professions. Or, l'organisme serait soumis à l'Office des professions et non pas les membres.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que vous faites disparaître la Commission des valeurs mobilières, à ce moment-là?

M. Beauchemin (Claude): Écoutez, c'est une question que... Nous autres, on pense que c'est un choix politique, puis on laisse ça entre les mains des politiciens.

M. Bois (André): Si je peux compléter la réponse de M. Beauchemin, je répète...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bois (André): C'est que M. Beauchemin a mis une distinction. C'est que la Commission des valeurs mobilières conserve sa juridiction pour viser les nouvelles émissions, pour viser le produit lui-même. Mais la fonction conseil... Parce qu'on sait que les conseils en valeurs sont assujettis à la Commission des valeurs mobilières. C'est la fonction conseil et de planification qui est détachée de la Commission, parce que c'est incompatible que le régulateur du produit réglemente en même temps le conseil. Alors, la Commission des valeurs mobilières continue d'exercer juridiction mais uniquement sur le produit et sur l'information donnée sur le produit par les émetteurs de titres et ceux qui sont leurs mandataires. Alors, ce n'est pas la même chose, parce que...

M. Beauchemin vous donnait l'exemple, tout à l'heure, de l'incongruité du courtier en assurance-vie qui, sur une police d'assurance-vie avec des fonds distincts qui comprennent des fonds mutuels, est régi par l'organisme qui est le Conseil des assurances de personnes et l'Association des intermédiaires en assurance de personnes. Et, sur probablement le même bouquet de fonds mutuels qui composent les fonds distincts, on peut avoir, si ces fonds distincts là sont achetés uniquement comme fonds distincts et sans être couplés avec une assurance-vie... Là le conseiller va être régi par la Commission des valeurs mobilières. Pourtant, sauf l'assurance, c'est le même produit.

M. le ministre Landry parlait d'intégration de certaines fonctions. Alors, la fonction conseil et le regroupement choisi, présentateurs d'opérations financières... C'est la mère patrie... En France, quand on parle des gens qui présentent directement au public une opération au comptoir d'une banque, dans un bureau d'assurances, on les appelle les présentateurs d'opérations financières et non pas des intermédiaires. Et, soit dit en passant, un courtier en valeurs mobilières... On parlait beaucoup d'intermédiation tout à l'heure. Il semble y avoir une confusion dans les termes. Les banques sont des intermédiaires financiers. Je ne suis pas certain que les courtiers en valeurs mobilières soient des intermédiaires financiers.

Alors, qu'on se console, la Commission des valeurs mobilières demeure mais pour sa véritable vocation qui est le produit financier.

M. Bertrand (Charlevoix): Si je comprends bien, elle demeure mais avec des pouvoirs réduits de beaucoup.

M. Bois (André): Bien, je ne sais pas si elle fait beaucoup de discipline sur les mauvais conseils en valeurs. Ça, c'est à voir. Je ne sais pas si son activité disciplinaire, quant à la qualité des conseils qui sont donnés par les conseillers en valeurs, est énorme. Alors, j'ignore si on leur enlève beaucoup d'activités.

M. Bertrand (Charlevoix): Je vous avoue que, s'il y en a un qui veut qu'on ose dans ce domaine-là, c'est votre humble serviteur. Je pense que la volonté du gouvernement, qui est de simplifier tout le système, de le vulgariser, comme disait mon ami M. Campeau cet après-midi, davantage, de diminuer les coûts, de le rendre plus fonctionnel, j'en suis. Mais je vous avoue que j'ai de la misère à suivre comment on peut, dans un organisme, avoir à la fois des vendeurs de valeurs mobilières, des courtiers d'assurances, des assureurs-vie, des ajusteurs d'assurances, couvrir tous les domaines, etc., prendre soin du côté professionnel, parce qu'on parle de l'Office des professions, en même temps de PME. J'ai moins de difficultés à le voir dans deux domaines: les valeurs mobilières d'un bord, puis la partie plus assurance de l'autre côté.

Mais là, de tout voir ça, j'aimerais ça que vous m'expliquiez davantage comment ça pourrait se faire. Quels seraient les avantages réels que les consommateurs pourraient y trouver, d'une part? Quels seraient, au niveau de l'industrie, dans le sens le plus général du mot, les avantages qu'on pourrait y retrouver? Et quel serait, au niveau du gouvernement... Est-ce qu'il y aurait diminution d'employés? Bon. J'aimerais ça que vous élaboriez davantage sur ces trois éléments-là.

M. Thérien (Pierre): Je peux peut-être vous répondre à ça. C'est peut-être le vivre, vivre les situations que ça représente, en tant que courtier, à un moment donné, d'aller chercher – quand on parle de cumul de permis – les différents permis à différents organismes. Ces organismes-là existent aujourd'hui. Il s'agit juste d'avoir la volonté, et je pense qu'on commence à l'avoir à certains endroits, qu'à un moment donné ça se refasse. On est, à l'heure actuelle, dans notre société, en réengineering de toutes sortes de choses. Bien, pourquoi est-ce que ça ne peut pas s'appliquer à ça?

Et, si on est capable de faire vivre – parce que ces organismes-là, il faut les faire vivre – si on est capable d'en faire vivre 15 ou 20, pourquoi est-ce qu'on n'en ferait pas vivre un, le faire adéquatement et le faire avec les particularités de chacun? Et aujourd'hui, justement, avec un lot de facilités qu'on peut avoir – tout à l'heure, je vous entendais parler d'Internet, de ces choses-là – quand on parle d'informatique, il y a des choses qui peuvent se faire relativement facilement et des coûts qui peuvent se sauver là-dessus. À mon sens, il est indéniable que, des coûts, on va en sauver dans l'ensemble de tout ça.

(21 h 40)

Que ça se fasse comme ça, c'est peut-être une vision qu'on a pour dans quelque temps d'ici. Mais, si la volonté du gouvernement est que des gens qui sont impliqués, qui sont avec nous dans le milieu... on se dit: Oui, on veut arriver à ça, je suis convaincu que ça va se faire.

Et pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas faire fonctionner une structure peut-être un petit peu plus grosse mais qui, dans le fond, va être joliment moins complexe que celle qu'on a à vivre à l'intérieur? Si on pense au niveau du public, les gens vont savoir où s'adresser; ils ne s'adresseront pas à différents endroits en pensant: Je vais régler mon problème là. Mais se faire passer de l'un à l'autre... À ce moment-là, ça va être quelque chose de clair. En tout cas, pour nous autres, ça devient quelque chose de clair, en disant: Si on a décloisonné, il faut, à un moment donné, être capable de décloisonner ailleurs aussi. On a décloisonné un bout, puis, l'autre bout, là, il y a des manques dans ça. C'est un travail de longue haleine que vous avez à faire dans ça, mais je pense qu'on peut y arriver.

M. Bertrand (Charlevoix): Vous avez touché certains domaines mais pas, à mon goût à moi, suffisamment pointus. Qu'est-ce que le consommateur peut gagner de tout ça? Ça, c'est la première question, je pense, qu'on se pose tous. Qu'est-ce que le consommateur...

M. Thérien (Pierre): ...qui s'adresser...

M. Bertrand (Charlevoix): Vous avez parlé de diminution de coûts. J'imagine que vous voulez dire diminution de coûts pour les intermédiaires. Si tu regroupes tout ça, évidemment, ça peut coûter un peu moins cher, ça, probablement, d'une part.

M. Thérien (Pierre): Entre autres.

M. Bertrand (Charlevoix): Mais particulièrement le consommateur. Et le député de Westmount parlait cet après-midi que, lui, en fin de semaine, il s'était amusé sur son ordinateur, il pouvait acheter des valeurs mobilières. J'ai cru comprendre qu'il pouvait acheter de l'assurance. Je l'ai mis en garde d'être très prudent parce qu'il y a une question d'assurabilité. Mais on a cette préoccupation-là. Le député de Westmount comme chacun de nous, on a cette préoccupation-là de produits qui, actuellement, échappent aux lois. La première préoccupation qu'on a tous, c'est d'abord et avant tout le consommateur, je répète, diminution au niveau des coûts pour l'État et, évidemment, que ce soit plus...

La question de la protection de petites et moyennes entreprises, je pense que, des deux côtés du Parlement, c'est la volonté très ferme que l'industrie soit protégée alentour de la petite et moyenne entreprise. Mais je sais, par contre, que la situation fait qu'on est semi-professionnel, PME; dans certains cas, les gens dépendent directement de compagnies; dans d'autres cas, ils emploient, ils n'emploient pas, ils sont employés par des compagnies. J'ai de la misère à concevoir tout ça dans un système total. Puis Dieu sait comment je suis avant-gardiste et Dieu sait comment je veux qu'on aille loin dans ce domaine-là!

Alors, de joindre les valeurs mobilières, qui sont pour moi un domaine vraiment différent de l'assurance, et c'est peut-être là qu'est ma plus grande différence dans la discussion qu'on est en train de faire là, c'est peut-être pour ça que j'ai de la misère à le voir, mais je pense que, pour éclairer le ministre, qui, lui, aura à prendre les décisions finales à la suite de la commission... Je pense qu'il doit en savoir davantage.

M. Beauchemin (Claude): Mme Carrier voudrait s'exprimer là-dessus, monsieur.

Mme Carrier (Claudette): Alors, M. Bertrand, comme nous le disions tout à l'heure, c'est de vraiment détacher... Ou, du moins, tous les présentateurs de produits financiers ou tous les conseillers financiers – alors ça englobe autant les produits des valeurs mobilières que les produits d'assurance – finalement, doivent être réglementés par les mêmes normes, les mêmes lois. Alors, nous, avec les principes, en voulant avoir un organisme plus efficace, moins coûteux, simplifié, à ce moment-là, c'est là qu'on en est arrivés à un organisme avec un tronc commun, avec trois divisions qui sont: vie, dommages et volet conseils financiers, qui englobe, finalement, les courtiers en valeurs mobilières.

M. Bertrand (Charlevoix): Si le gouvernement osait... Parce que là c'est oser pas ordinaire. Moi, je connais le milieu de l'assurance comme un des milieux les plus conservateurs qu'il peut y avoir dans toutes sortes d'industries. Si le gouvernement osait... Vous disiez tout à l'heure: Bon, on sait que ça ne se fait pas tout de suite. Oui, mais c'est quoi, là? C'est quoi la proposition ou la suggestion que vous faites au ministre dans le temps? On sait qu'à l'heure actuelle il y a la Commission des valeurs mobilières, il y a des conseils des assurances de dommages, de personnes, il y a deux, trois, quatre associations, même plus que ça. Le ministre, qui, lui – parce qu'on est déjà un an en retard, je pense, sur le rapport quinquennal, puis on arrive avec la 134 – a à prendre la décision... Moi, je pense que vous devez aller encore plus pointu dans vos recommandations.

M. Beauchemin (Claude): Nous autres, il n'y a pas d'erreur là-dessus, on souhaite que cet organisme d'autoréglementation là soit créé le plus vite possible. On veut que ça fonctionne dès que le ministre sera prêt.

M. Bertrand (Charlevoix): Quel serait...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix, votre temps... Brièvement, votre temps est écoulé, là.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que vous me permettez, M. le député? Deux petites questions.

M. Chagnon: Comment pourrais-je vous le refuser?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est beaucoup mieux que si le président vous l'avait accordé, hein.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): J'aimerais savoir comment les consommateurs – je reviens encore une fois aux consommateurs – et les associés qui existent dans ce domaine-là, qu'on le veuille ou non, qui sont des compagnies d'assurances, pourraient s'y retrouver dans une telle structure, à court terme et à moyen terme?

M. Beauchemin (Claude): O.K. Là, il ne faut pas oublier une chose, que, nous, comme je disais au début, en ce qui concerne la Commission des valeurs mobilières, on s'en tient uniquement à la distribution de produits financiers. Alors, quand on va arriver, nous autres, à la loi 134, on va élaborer là-dessus. Il n'y a pas d'erreur, comme on vous l'a dit au début, on s'occupe uniquement, ici, de distribution de produits financiers. On n'ira pas plus loin. Et, quand on reviendra à la commission parlementaire sur la loi 134, on ira plus loin que ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Westmount–Saint-Louis, c'est à votre tour.

M. Chagnon: As-tu d'autres questions?

M. Bertrand (Charlevoix): Vas-y.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est assez. C'est assez. N'insiste pas.

M. Chagnon: Ha, ha, ha! M. le Président, je souhaite la bienvenue au Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec. C'est un organisme, évidemment, qui est disséminé sur tout le territoire des cabinets de courtage. Qui ne connaît pas, qui ne fait pas affaire avec un cabinet de courtage? Il y en a quelques-uns qui ne font pas affaire... J'imagine que vous le regrettez.

M. Beauchemin (Claude): Merci de vous l'entendre dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Mais la plupart des gens font affaire avec un cabinet de courtage à quelque part, en matière d'assurance, vie ou de biens.

Votre mémoire, comme l'a souligné le député de Charlevoix, est évidemment orienté en fonction du marché que vous représentez plus spécifiquement, le marché des assurances. Mais il y a quelques questions que je voulais vous poser quand j'ai étudié votre mémoire. Lorsque vous dites qu'«un courtier en assurance de personnes est soumis à une stricte obligation d'étude des besoins de l'assuré alors que le préposé au crédit hypothécaire – je présume que vous aviez en tête le secteur des caisses populaires, des choses comme ça – qui offre l'assurance complémentaire à un contrat de crédit est dispensé de toute obligation d'information et de conseil», jusqu'à un certain point, c'est vrai. Mais je présume que le préposé en question va vous demander si vous voulez une assurance-vie sur votre contrat hypothécaire. C'est à ça que vous faites référence?

M. Beauchemin (Claude): Oui, oui, définitivement. Alors, nous... Excusez.

M. Chagnon: Mais là la personne qui dit oui ou qui dit non, elle doit savoir ce qu'elle a comme portefeuille d'assurances. Elle dit oui ou elle dit non en fonction de sa connaissance de son portefeuille. Le monde n'est pas innocent. Ils doivent savoir ce qu'ils ont. Non?

M. Beauchemin (Claude): Nous, on dit que ces personnes-là, que ce soient des courtiers en assurance... Exemple, nous autres, on représente l'assurance générale. Que ce soit un courtier en assurance générale ou que ce soit un préposé dans une banque ou une caisse populaire qui vante une police d'assurance générale, pourquoi est-ce qu'il serait soumis à un code de déontologie différent de nous, puisqu'il vend le même produit?

M. Chagnon: Le paragraphe suivant, de la page 3, vous posez la question vous-même.

M. Beauchemin (Claude): Oui.

M. Chagnon: «Qui réprime la négligence du préposé bancaire dans la fourniture de l'information ou du conseil?» La question que je me posais: Y «a-tu» beaucoup de plaintes? La question que je posais: Est-ce qu'il y a beaucoup de plaintes? La question que, vous, vous posez, vous soulevez tout haut, tout haut, vous écrivez, dans votre mémoire: «Qui réprime la négligence du préposé bancaire dans la fourniture de l'information ou du conseil?» Point d'interrogation. Ma question à moi – point d'interrogation: Y a-t-il beaucoup de plaintes?

M. Beauchemin (Claude): Le problème, c'est que, s'il n'y avait pas de plaintes du tout, il y aurait probablement un problème là. Moi, je présume... Nous, on a des organismes d'autoréglementation qui...

M. Chagnon: Je n'avais jamais entendu parler qu'il y avait des plaintes. Vous me dites qu'il y en a beaucoup? Il y en a... Vous avez entendu parler des gens qui se sont plaints parce qu'ils ont reçu ou ils ont acheté ou pas acheté une assurance-vie sur leur hypothèque à la banque? Vous avez eu des plaintes de ça beaucoup?

M. Beauchemin (Claude): Non. Nous autres, on n'insiste pas là-dessus. Ce qu'on dit, c'est: Pourquoi est-ce que, en vendant le même produit, on doit être régi par des organismes différents et avoir des codes de déontologie différents? C'est la question qu'on pose.

M. Chagnon: À la page 5, vous faites référence à l'Office des professions comme... «L'organisme d'autoréglementation en question serait soumis à la supervision de l'Office des professions.» Ce n'est pas exactement son rôle, ça, à l'Office des professions.

M. Beauchemin (Claude): Sur cette question, Me Bois est plus spécialisé que moi.

(21 h 50)

M. Bois (André): C'est qu'on parle encore de la fonction conseil, et l'Office des professions, comme organisme de tutelle des corporations professionnelles, a une longue expérience de la surveillance des organismes qui réglementent le comportement professionnel. Et, en ce sens-là, même si le Code des professions n'est pas, pour l'instant, adapté à cette fonction de tutelle, il me semble que ce serait plus compatible, à moyen ou long terme, de confier à l'Office la surveillance d'un organisme des conseillers.

M. Chagnon: Mais vous ne réclamez pas, non plus, le statut de corporation professionnelle.

M. Bois (André): Pas du tout.

M. Chagnon: Bon!

M. Bois (André): Pas du tout, mais ça demanderait simplement un amendement à la loi qui régit l'Office pour prévoir que, en son sein, elle peut avoir une direction qui va s'occuper de quasi-profession. C'est qu'en matière de déontologie, quand vous regardez le code de déontologie de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec et que vous regardez le code de déontologie d'autres professions, il y a des ressemblances frappantes.

C'est un peu incongru de voir que, même s'il y a un travail qui est très bien fait chez l'Inspecteur général, c'est l'Inspecteur général, qui n'a pas une longue tradition en matière d'autorité de tutelle sur des règlements de déontologie, des comportements professionnels, qui est obligé de revoir ça, sans avoir l'ensemble de la réglementation de déontologie. Et la même chose pour les intermédiaires en assurance-vie, ils ont également un code de déontologie. Et vous examinerez la partie qui concerne l'obligation d'information envers les clients. Ça ressemble beaucoup à ce qu'on voit dans d'autres corporations professionnelles. Alors, c'est plutôt une question de compatibilité de fonctions, alors que la spécialité de l'Inspecteur en est une de vérification de solvabilité et de liquidité et d'information financière.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Mes autres questions ont déjà été soulevées et concernaient la fusion entre l'Inspecteur... la partie du rôle qu'on voyait attribuer à l'Inspecteur et celle qui pouvait être attribuée à la Commission des valeurs mobilières, et cela a déjà été répondu. Je vous remercie. Je remercie encore une fois le Regroupement des réponses qu'il a fournies aux questions que j'ai posées.

M. Landry (Verchères): Bien, je pense que vous nous avez préparé de beaux devoirs de vacances et qu'on va devoir réfléchir en profondeur à ce que vous nous avez soumis, et je présume qu'on vous reverra encore avec plus d'ardeur au mois d'août.

M. Beauchemin (Claude): Bien sûr.

M. Chagnon: Au mois d'août sûrement, avec plus d'ardeur, on va être encore plus dans votre...

M. Beauchemin (Claude): Ça va nous faire plaisir, les vacances vont être passées, on va être reposés.

M. Landry (Verchères): Merci beaucoup de votre présence et de votre présentation.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je remercie les représentants du Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec pour la présentation de leur mémoire. Je vais suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 53)

(Reprise à 21 h 56)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! J'inviterais les représentants du Groupe Dubeau, d'abord, à s'identifier et, dans un deuxième temps, à nous présenter leur mémoire.


Le Groupe Dubeau

M. Alary (Serge): Bonsoir. Mon nom est Serge Alary. Je suis le directeur général du Groupe Dubeau. Je suis, ce soir, accompagné, à ma gauche, de M. Pierre-A. Hébert, qui est le directeur de notre département de planification financière, et, à ma droite, de M. Gaétan Plante, qui est le président de Valeurs Mobilières Dubeau.

Notre présence ici ce soir, c'est pour vous parler des problèmes pratiques avec lesquels nous avons à vivre dans le contexte de la réglementation des valeurs mobilières pour l'exercice de la planification financière.

Dans un premier temps, j'aimerais peut-être vous situer un peu notre organisation. Ça fait 35 ans que Le Groupe Dubeau opère à partir de Québec, ici, dans le domaine des services financiers. Nous avons d'abord été avant tout dans l'assurance-vie, puis nous avons commencé à ajouter des secteurs d'activité additionnels qui ont été les fonds mutuels et les valeurs mobilières. Dernièrement, nous avons créé un département de planification financière et, lors de la mise en place du département de planification financière, parce que nous avions des corporations qui opéraient dans plusieurs champs d'activité, nous avons dû essayer de mettre en place une façon d'opérer qui respecte toutes les normes, et ce sont un peu les problèmes que nous voulons vous mentionner.

Alors, les divers problèmes que nous avons eus après avoir obtenu le permis d'opérer en tant qu'organisation de fonds mutuels ou de valeurs mobilières, il y a des différences... Un individu peut, s'il a un permis d'assurance-vie et un permis de planificateur financier, procéder à l'exercice de la planification financière en étant régi par l'IQPF et l'Association des intermédiaires en assurance de personnes. Si le même individu a un deuxième permis, qui est un permis de fonds mutuels, il doit opérer la planification financière sous la supervision de la corporation qui a le permis d'épargne collective qui recommande son permis, doit opérer, comme planificateur financier, sur une base exclusive avec cet organisme-là, et le directeur de la compagnie ou du courtier en épargne collective devient responsable de tout le contenu de la planification financière.

Alors, avant de développer peut-être un peu plus sur les responsabilités qu'une firme en épargne collective ou en valeurs mobilières... sur les responsabilités additionnelles qu'elle doit prendre lorsqu'elle prend le titre de planificateur financier, j'aimerais demander à M. Pierre-A. Hébert de parler un peu de ce que fait le département de planification financière au Groupe Dubeau et des diverses recommandations que ce département-là peut faire.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Hébert.

(22 heures)

M. Hébert (Pierre-A.): M. le Président, M. le ministre, je dois, en guise de préambule, souligner un fait: que nous vivons une situation qui est tout de même privilégiée au Québec, le Québec étant, à date, la seule province qui a d'abord légiféré sur le titre de planificateur financier et, par la suite, évidemment, sur cette profession qui est, avouons-le, naissante. Le titre est octroyé par l'Institut québécois de planification financière, mais, ensuite, il doit être régi par six organismes, dont des ordres professionnels. On peut mentionner les comptables agréés, les comptables généraux agréés, le Barreau, la Chambre des notaires et les administrateurs agréés.

C'est très facile de parler de planification financière et on peut facilement définir ce qu'est la planification financière, mais ce avec quoi nous pouvons avoir quelques problèmes, c'est ce qu'est un planificateur financier. C'est un domaine qui est très vaste. Le planificateur financier doit suivre des normes et des guides de pratique qui sont pour certains assez vagues, mais pour d'autres assez précis. C'est une analyse qui est multidisciplinaire, parce qu'elle doit impliquer des intervenants qui sont externes dans diverses disciplines, qui sont soit d'ordre légal, fiscal ou purement financier.

On pourrait mentionner, si vous le voulez bien, la définition... Et j'attire votre attention sur la page 3 du document où on trouve la définition que l'Ordre des administrateurs agréés s'est octroyée à l'égard de l'exercice de la planification financière. C'est un processus. C'est un processus qui est structuré, qui vise l'atteinte des objectifs financiers personnels d'un individu, mais qui doit tenir compte aussi des ressources, de sa situation financière, de sa personnalité et qui va permettre l'élaboration d'un plan qui va être intégré – et je pourrai peut-être un peu plus tard élaborer sur le concept d'«intégré» – ou encore partiel, mais qui va lui recommander des stratégies, qui va lui recommander des actions qui vont l'aider à prévoir et à organiser la gestion de ses finances personnelles dans l'optique de protéger et d'accroître le patrimoine de l'individu, mais – et j'attire votre attention là-dessus – en excluant les recommandations relatives à l'achat ou à la vente de produits financiers spécifiques.

C'est-à-dire que l'exercice de la planification financière se termine au moment où les recommandations d'ordre générique sont faites auprès du consommateur. Le consommateur, ensuite, doit se retourner vers son intermédiaire de marché. Et je conviendrai avec vous, M. le Président, qu'il se peut que, dans certains cas, l'intermédiaire de marché soit simplement un échange de chapeaux.

Mais il est pertinent de noter que les différentes couvertures qui devront être touchées, les différents sujets qui devront être abordés... Et vous en avez une liste qu'on a voulue aussi exhaustive que possible, toujours à la page 3, où on parle, c'est bien sûr, de couvertures d'assurance-vie, d'assurance-invalidité, de produits d'épargne en vue d'arriver à la retraite, de convention entre actionnaires, de convention entre associés, de testament, de mandat en cas d'inaptitude, de fiducie entre vifs ou de fiducie testamentaire, de création de compagnies de gestion, de régime de revenu différé, de régime enregistré d'épargne-études, d'incorporation proprement dite, de mise en place ou encore même de modification de bénéfices marginaux et de recommandation pour fins de régime d'assurance collective ainsi que la constitution d'un portefeuille de placements ou la modification de celui-ci.

Vous conviendrez que les éléments que je viens de mentionner sont très exhaustifs et qu'il est quasiment impossible pour un individu d'en avoir le contrôle total, d'où vient la nécessité de la multidisciplinarité et la nécessité d'avoir une synergie entre les intervenants. Ce que la Commission des valeurs mobilières désire atteindre se fait en complémentarité avec la définition dont j'ai fait lecture il y a un instant.

Nous vivons dans le quotidien, dans le vécu, comme le disait M. Morin un peu plus tôt dans son intervention. J'aimerais que M. Alary puisse peut-être nous en faire l'élaboration.

M. Alary (Serge): Lorsque nous avons demandé, pour nos firmes en épargne collective et en valeurs mobilières, de pouvoir procéder à l'activité de planification financière, la Commission nous a émis des règles que nous devons suivre, qui sont en page 1 du mémoire. La règle n° 2, si on parle un petit peu des contradictions avec lesquelles nous devons vivre, impose une couverture d'assurance-responsabilité de 500 000 $. Une personne qui a un permis en épargne collective ou en valeurs mobilières seulement ne peut obtenir une couverture d'assurance-responsabilité de cet ordre-là sur le marché à des prix qui soient corrects; ce seraient des prix qui sont tout à fait hors d'atteinte. Les gens qui sont en assurance-responsabilité n'offrent pas d'assurance pour les gens de valeurs mobilières, pour faire de la planification financière.

D'un autre côté, si la même personne a un permis d'assurance-vie, elle peut obtenir une couverture d'assurance... Elle doit d'abord avoir une couverture d'assurance-responsabilité et la couverture d'assurance-responsabilité imposée par son permis d'assurance-vie lui coûte 163 $ par année et lui permet de faire de la planification financière. Elle a donc sa couverture de 500 000 $ qui est requise pour pouvoir opérer sous les règles de la Commission des valeurs mobilières.

Alors, il y a une règle ici qui fait que, au sein de notre organisation, ceux qui veulent faire de la planification financière et qui ont des permis de fonds mutuels ou de valeurs mobilières ne peuvent le faire que s'ils ont un permis d'assurance-vie. Sinon, ils sont incapables d'avoir de l'assurance-responsabilité et de se conformer aux normes de la Commission. Alors, je pense que c'est un premier obstacle, une première contradiction qui est difficile.

La deuxième, au niveau du point 3, de faire approuver par un dirigeant le rapport de planification financière. M. Hébert vous a fait la liste des différents points que contient le rapport de planification financière que nous préparons en tant qu'organisation. Et nos gens, aussi bien de notre corporation de valeur mobilière que de l'épargne collective, n'ont pas la compétence pour approuver, dans le rapport de planification financière, les sujets autres que ceux des placements. Alors, je pense qu'il va falloir revenir à restreindre l'approbation et les responsabilités des dirigeants réellement aux produits de placements qui découlent de la planification financière.

Il y a un peu également la condition 9, au niveau de l'exclusivité, qui restreint également les activités des individus. Alors, c'est ce qu'on voulait vous présenter. Ce sont les difficultés pour une personne qui veut opérer et faire de la planification financière, qui a le titre de planificateur financier et qui a un titre d'épargne collective ou de valeurs mobilières. C'est excessivement difficile de pouvoir se conformer aux normes et aux directives qui ont été émises par la Commission des valeurs mobilières dans les derniers mois.

Alors, j'aimerais peut-être que Pierre puisse parler un peu de l'opération, maintenant, du département chez Dubeau, de quelle façon ça opère.

M. Hébert (Pierre-A.): Le Groupe Dubeau prépare un document qui est un seul rapport de planification financière, qui est exhaustif et qui couvre toutes les facettes qui sont mentionnées dans la liste que j'ai donnée antérieurement. Et on pourrait l'appeler notre dossier type. Et chacune des recommandations qui s'y trouvent, dépendant évidemment de la nature de la recommandation, il y a un professionnel, soit du côté des intermédiaires de marché ou ça peut être un juriste, ça peut être un notaire ou ça peut être un comptable, qui va assister par la suite l'individu dans la démarche ou dans la mise en place de la planification elle-même.

Au moment où on arrive à la mise en place, évidemment, il ne peut pas y avoir de mise en place sans transactions. Et c'est à ce moment-là que la Commission des valeurs mobilières doit devenir un chien de garde. Les recommandations sont génériques. Mais, lorsqu'elles deviennent spécifiques et qu'un individu s'implique dans la mise en place, à ce moment-là nous croyons que c'est à la juridiction de la Commission des valeurs mobilières de s'y impliquer.

Je trouve que c'est assez pénible pour un directeur de notre bureau de devoir approuver et endosser une recommandation, par exemple à l'égard d'une convention entre actionnaires, ou encore de juger de la valeur d'une recommandation ou d'un organigramme testamentaire.

La planification peut, bien sûr, être modulaire. Peut-être il est des intervenants qui viendront ou qui sont venus à cette table qui pratiquent la planification modulaire. La planification modulaire, elle, s'adresse à un domaine bien particulier. Et elle peut être faite, en bonne partie, par un individu qui cumulerait, par exemple, un permis d'intermédiaire en assurance ou encore d'intermédiaire en épargne collective, ou plutôt en valeurs mobilières.

(22 h 10)

Mais, dès qu'on entre dans quelque chose qui est plus complexe que le modulaire... Je donne un exemple de modulaire. Par exemple, quelqu'un qui viendrait nous voir et qui dirait: Comment dois-je structurer mon portefeuille pour atteindre mes objectifs de retraite? Quel est le revenu anticipé que je peux m'attendre d'obtenir, compte tenu de mes REER et des bénéfices sociaux auxquels j'ai droit? Ça, c'est très modulaire. Mais, si, par contre, on m'arrive, et on me dit: J'ai 45 ans. J'ai une compagnie de gestion, j'ai ma propre compagnie opérante, est-ce que je peux pratiquer un gel successoral? J'aimerais voir à la continuité de mon entreprise. J'aimerais être sûr que mon testament est bien structuré. J'aimerais voir au don planifié pour être en mesure de pouvoir participer à la charité autour de moi. Bien, là, à ce moment-là, je trouve difficile pour le directeur de notre département, soit du côté fonds mutuels ou valeurs mobilières, de venir endosser la totalité de ces recommandations-là, parce que ça requiert l'intervention de plusieurs spécialistes.

Ce que nous vous demandons de considérer, messieurs, c'est de faire la distinction, lorsqu'on parle de planification financière, entre la mise en place proprement dite et la planification dans son aspect de processus. Donc, séparons l'aspect transactionnel de son processus, et voyons-y, à cette complémentarité.

Le cheminement, qui est analytique, que nous suivons est celui qui est conforme aux recommandations qu'on trouve dans, à date, au Canada, je dois dire, le seul organisme qui est l'Ordre des administrateurs agréés, qui s'est doté d'un guide et de normes de pratique en planification financière et qui, de plus, est en train de mettre sur pied un mécanisme de surveillance par une inspection professionnelle.

Alors, nous vous demandons d'apporter les modifications nécessaires au règlement actuel pour que cela permette plus facilement à la CVMQ de voir à ces préoccupations qui se limitent à l'étape de la planification financière qui concerne le champ d'activité propre des courtiers, soit en épargne collective ou de plein exercice.

Vous avez sans doute reçu, dans le document qui vous a été envoyé par notre organisme, une copie d'une lettre-mandat. Nous ne croyons pas que nous puissions aborder avec un client un processus de planification financière sans qu'il y ait de sa part un mandat pleinement agréé, avec une pleine divulgation de toutes les sources de revenus dont jouira soit l'individu qui fait la planification financière ou encore les intervenants qui pourraient être membres de notre groupe.

Et je crois que les mandats actuellement remplis par Le Groupe Dubeau dépassent même l'esprit de la réglementation de la CVMQ, même si nous trouvons qu'il est en soi difficile qu'ils en rencontrent la lettre. Merci beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci pour votre présentation, et j'accorde la parole au ministre pour ses commentaires ou son questionnement.

M. Landry (Verchères): Votre mémoire est intéressant, votre présentation aussi. Je pense qu'on a une chance assez exceptionnelle, avec votre comparution devant notre commission, de voir, dans la pratique, comment se vivent l'intégration et l'interdisciplinarité, et ce serait intéressant que vous alliez même dans des détails un peu plus poussés. Parce que, si votre formule est la bonne, et elle a l'air vraiment très intéressante et passionnante, ça simplifie la vie du client, du consommateur. C'est une espèce de guichet unique, si je comprends bien.

Deuxièmement, si elle se répand, cette formule, et devient un modèle, ça simplifie la vie des régulateurs et des agences de régulation, parce que eux aussi voient leur travail simplifié dans la crédibilité d'une firme et l'examen des activités d'une firme.

Dans la pratique, quand un client arrive chez vous, est-ce que, dans un même lieu physique, il y a tous les services que vous avez évoqués? Puisque votre firme s'appelle Le Groupe, est-ce que c'est le regroupement de plusieurs firmes interconnectées ou si c'en est une? Est-ce qu'il y a une seule personnalité morale? Est-ce qu'il y a une personnalité morale au moins pour le soutien et le support? Parce que j'imagine que certaines corporations professionnelles interdisent une personnalité morale unique. Les juristes, comme les notaires et les avocats, par exemple, ne peuvent pas, je crois, partager pleinement la personnalité morale avec des experts d'autres disciplines. Comment est-ce que vous réglez tous ces problèmes-là? Quel est le cheminement du client qui arrive chez vous et vers qui le conduisez-vous?

M. Hébert (Pierre-A.): Peut-être avant que M. Alary puisse nous donner, puisqu'il en est l'administrateur, la structure du Groupe comme tel, puis-je m'adresser au cheminement, M. le ministre, le cheminement d'un client qui arrive?

M. Landry (Verchères): Absolument. C'est peut-être ce qu'il y a de plus descriptif.

M. Hébert (Pierre-A.): Le premier élément sera ce que nous appellerons – et j'espère que la connotation n'en sera pas une d'un élément de vente – la qualification du client, c'est-à-dire déterminer si ce monsieur a réellement besoin d'une planification financière.

La structure de notre groupe permet que notre département fonctionne sur une base d'honoraires, de sorte que le client, dans le mandat qu'il reçoit, reçoit une pleine divulgation des différentes sources de revenus advenant le cas où il opterait pour faire la mise en place avec notre groupe, mais il n'en a pas la nécessité. Il n'a aucune obligation morale de mettre en place avec nous.

Une fois la qualification obtenue, cette dernière est suivie par une prise de données, c'est-à-dire recueillir tous les éléments nécessaires à la planification à partir de documents, que ce soit contrat de mariage ou autres. Ensuite, l'analyse et l'entrée informatique sont faites par notre équipe, qui est constituée de gens qui sont formés surtout dans le domaine de la comptabilité, donc des comptables agréés.

Cela étant fait, deuxième rencontre avec le client, et cette dernière est une piste de vérification, d'abord, pour vérifier si les objectifs ont été bien compris par l'interlocuteur qui les écoutait; deuxièmement, pour vérifier l'exactitude des chiffres et aussi essayer de découvrir et de plutôt cerner la zone de confort du client face à des choix qu'il aura à faire vis-à-vis des choix financiers. Une fois ces choses-là ayant été déterminées, on revient – comme le dirait Boileau: Sur notre atelier, vingt fois remettons l'ouvrage – et on finit par arriver avec un document où, là, le planificateur va rédiger les recommandations. Et, à l'aide de tous les chiffres ou les chiffriers qu'on aura utilisés, nous pourrons appuyer ces recommandations avec un graphique et surtout d'une manière conceptuelle pour essayer de démystifier, justement, la complexité du monde financier.

Et une troisième rencontre avec le client, qui, là, est la livraison du document écrit avec lecture presque mot à mot de la section des recommandations, et explication de tous les graphiques et calculs qui viennent le supporter.

Au moment où cette présentation-là est faite, je dois vous dire que, suite à la piste de vérification, le client se sent confortable, puisque les recommandations reflètent ses objectifs, ses désirs et sa zone de confort. Une fois cette dernière ayant été livrée, la dernière page de notre document en est une qui est un échéancier avec lequel il va choisir ses intermédiaires: ça peut être son notaire, ça peut être notre notaire; ça peut être son avocat, ça peut être notre avocat; ça peut être notre comptable, ça peut être son comptable; ça peut être nos gens de valeurs mobilières ou les siens.

Alors, voici le cheminement. Il a donc pleine liberté d'agir par la suite. Je ne vous cacherai pas, toutefois, que nous considérons que notre département, à cause de l'intégrité qu'on veut y apporter, sert de pièce tournante pour créer la fidélisation du client, c'est bien sûr, mais il a cette entière liberté à lui. Maintenant, quant à la structure, M. Alary, c'est à vous.

M. Alary (Serge): Dans un premier temps, on avait notre corporation au niveau de l'assurance-vie, et, par la suite, on a procédé à la mise en place de deux nouvelles corporations: une qui a un permis de courtier en épargne collective et une qui a un permis de plein exercice en valeurs mobilières. Ce sont deux corporations différentes. Et, d'avoir deux corporations différentes, entre autres, il y avait le problème que, si tous nos gens à l'épargne collective avaient été dans la corporation de valeurs mobilières...

Il y a des normes qui demandent, dès qu'il y a plus de trois personnes dans un bureau, d'avoir une personne avec un permis de plein exercice, un diplôme de directeur pour demeurer concurrentiel dans le domaine de l'épargne collective au Québec par rapport aux autres firmes avec plusieurs représentants qui n'avaient pas à se plier à ces normes-là. Il était plus facile pour nous d'avoir une corporation d'épargne collective et de valeurs mobilières plutôt que d'avoir tout ça sous la corporation de valeurs mobilières, ce qui aurait été plus simple, mais beaucoup trop dispendieux pour des gens qui ne vendent que de l'épargne collective.

On a trois corporations qui opèrent au sein de l'organisation, plus une quatrième qui sert à la préparation des planifications comme telles: tout le secteur administratif, supervision. C'est une quatrième corporation pour ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre, ça complète l'information que vous désiriez?

(22 h 20)

M. Landry (Verchères): Oui, oui, ça donne une vue beaucoup plus percutante. Le circuit de rémunération, comment ça se passe? Est-ce qu'il y a un déboursé global du client qui est ensuite réparti à travers les divers intervenants ou si chaque intervenant présente sa propre facturation?

M. Hébert (Pierre-A.): Le dossier lui-même, les honoraires, plutôt, vont être déterminés lors de la deuxième rencontre, lors de la piste de vérification. C'est à ce moment-là que le client pourrait nous dire: Bien, merci, messieurs, ça m'a fait plaisir de vous connaître. Nous aurions donc fait une bonne partie de la mise en place dans le vide. Mais nous sommes prêts à assumer ce risque-là pour que le client soit, d'une part, parfaitement confortable mais, d'autre part, que les honoraires soient justes. Et les honoraires sont chargés au client et demeurent à l'intérieur du département de planification financière. Ils ne sont pas répartis avec les autres intermédiaires.

Le représentant qui, lui, nous amènera un de ses clients pour une planification financière ne recevra pas, de notre part, une compensation. Mais, au contraire, nous allons demander une répartition de l'ordre de 20 % de son commissionnement en guise de rémunération. La raison étant que, si on fait un plan d'affaires, M. le ministre, sur le coût d'opération d'une pratique en planification financière, nous allons arriver – et que les avocats ne m'en veuillent point, ni les comptables – à des honoraires qui seront très près des leurs. C'est absolument inaccessible pour M. Tout-le-Monde. Alors, on a voulu démocratiser la profession, et nous ne sommes pas sans savoir que la loi 134 permet la rémunération par honoraires, mixte: par honoraires et commissions, ou par commissions seulement. Donc, la nôtre, de manière indirecte, est par honoraires d'abord, mais, deuxièmement, pour simplement s'assurer que le département est viable, par une répartition du côté commissions. Et cela est divulgué dans la lettre-mandat que nous donnons au client.

M. Landry (Verchères): En termes de responsabilité, un client qui ne serait pas satisfait – il est impossible de toujours y arriver...

M. Hébert (Pierre-A.): C'est bien sûr.

M. Landry (Verchères): ...il se retournerait contre qui, contre quelle constituante du Groupe? Contre Le Groupe au complet ou contre les divers intervenants qu'il devrait retracer à l'intérieur du Groupe? D'abord, ce n'est sûrement pas théorique, il y a peut-être des gens qui ne sont pas contents. À qui se plaignent-ils?

M. Hébert (Pierre-A.): C'est un peu comme un comptable, à ce moment-là. Est-ce qu'on va se retourner vers la firme comptable ou vers l'individu? Il y a toujours, évidemment, recours auprès de l'Ordre des administrateurs agréés, puisque nous en sommes professionnels et membres. Et, à ce moment-là, le comité de discipline est là aussi pour voir. Il y a un comité d'arbitrage, sans doute.

M. Landry (Verchères): Et ce que vous appelez la deuxième rencontre, il y a déjà un document qui est prêt?

M. Hébert (Pierre-A.): La période de vérification.

M. Landry (Verchères): Là, il y a déjà plusieurs intervenants qui ont travaillé à la confection de ce document.

M. Hébert (Pierre-A.): À ce stade-là, pas nécessairement. À ce stade-là, il y aura eu le juriste, qui aura fait la lecture des documents légaux, et il y aura eu l'élément comptable, l'élément bilan, l'élément début de projection, le planificateur étant un futuriste.

M. Landry (Verchères): Bon, d'accord. C'est ce que je veux dire. Mais, le client, lui, il ne sait pas qui est le juriste ou qui est le comptable. On lui présente un document intégré.

M. Hébert (Pierre-A.): On lui présente un document intégré. On va lui recommander un geste ou un autre. Par exemple, une création d'une fiducie testamentaire. Mais les détails de cette création de fiducie testamentaire vont être faits lors de la mise en place par le notaire de son choix.

M. Landry (Verchères): Bon, d'accord. Mais, si on parle de régulation – parce que c'est au centre de la question: contrôle, régulation, intégration des contrôles et des régulations – devant ce document intégré, qui est le régulateur? Le Barreau, si le juriste est membre du Barreau, ou le comptable, si le...

M. Hébert (Pierre-A.): Le régulateur, M. le ministre, devrait être l'Ordre des administrateurs agréés, à ce moment-là, puisque c'est le praticien qui doit toucher à tous ces domaines-là. Ça fait partie...

M. Landry (Verchères): Oui. Mais ça veut dire que l'Ordre des administrateurs agréés est obligé d'avoir une certaine juridiction sur un juriste qui, lui, est membre d'une autre corporation professionnelle.

M. Hébert (Pierre-A.): Je ne crois pas, parce qu'il n'y a pas eu, à ce moment-là, un geste qui a été posé pour la mise en place de la planification financière. C'est la même chose face aux valeurs mobilières.

M. Landry (Verchères): Ah! bien, poussons un peu le raisonnement plus loin, puis allons à l'autre étape où, là, des gestes vont être posés, puis une série de gestes par divers intervenants.

M. Hébert (Pierre-A.): Oui.

M. Landry (Verchères): Et là notre problème va être encore démultiplié. Je ne dis pas que c'est insoluble. La formule est tellement bonne, d'ailleurs, que ça vaut la peine de chercher des solutions. Mais...

M. Hébert (Pierre-A.): C'est qu'on arrive à la mise en place, M. le ministre, et on décide que, oui, on veut faire une convention d'actionnaires. On veut faire notre testament. On veut faire faire notre rapport d'impôts pour les années antérieures, qu'on n'a pas fait.

M. Landry (Verchères): C'est pas beau, ça.

M. Hébert (Pierre-A.): C'est pas beau, mais c'est une recommandation. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: C'est bien plus beau de le faire que de ne pas le faire.

M. Hébert (Pierre-A.): Et on veut faire un investissement pour consolider notre REER, parce qu'il y a des déductions non-utilisées, qu'on n'a pas utilisées. Et puis on est sous-assuré ou on est surassuré. Ou encore nos assurances nous coûtent trop cher pour la protection que nous avons. Alors, à ce moment-là, c'est là que l'individu va choisir ses intermédiaires et le planificateur va agir un peu comme un parasol, un peu comme un pivot, va agir un peu comme une personne-ressource, comme un généraliste. Ce serait la meilleure définition que je puisse trouver. Le généraliste va être en mesure d'identifier que, peut-être, vous souffrez d'une maladie hépatique et va vous diriger vers un hépatologue.

M. Landry (Verchères): Bien. Quelques questions un peu plus pointues. Est-ce que vous avez une opinion sur la divulgation de la rémunération des dirigeants des entreprises? Vous savez que c'est un des thèmes qui sont évoqués devant notre commission et que nous aurons à nous prononcer là-dessus. Est-ce que votre clientèle vous a communiqué des réactions? Est-ce que vous en avez vous-mêmes?

M. Alary (Serge): Non. À ce...

M. Landry (Verchères): Vous n'êtes pas obligés d'avoir une opinion, remarquez.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Alary (Serge): Non, non, non. À ce stade-ci, je dois dire que ce n'est pas un sujet qui fait...

M. Landry (Verchères): Ce n'est pas un sujet qui vous a...

M. Alary (Serge): ...l'objet d'aucune discussion.

M. Landry (Verchères): D'accord.

M. Alary (Serge): Maintenant, en tout cas, personnellement, moi, que ce soit divulgué et que l'approche soit la même pour tout le monde, à tous les niveaux ou dans toutes les sphères d'activité, je pense que ça...

M. Landry (Verchères): Vous n'y voyez pas d'inconvénient.

M. Alary (Serge): D'aucune façon.

M. Landry (Verchères): Maintenant, en ce qui a trait... Pour aller plus vite, vous étiez là, à l'intervention précédente, vous étiez dans la salle. Toute cette problématique des intervenants à travers des médias électroniques qui n'ont pas d'assises juridiques dans le périmètre québécois, qu'est-ce qu'on fait avec ça? S'il y avait un Groupe Dubeau à Fort Worth qui se mettait, par l'Internet, à aller travailler votre clientèle et, au lieu que les entrevues soient physiques, que ça soit un rendez-vous Internet deux jours après, qu'est-ce qu'on fait?

M. Hébert (Pierre-A.): C'est très intéressant. Ce que vous touchez là, c'est en fait la globalisation des marchés, mais en même temps aussi l'internationalisation des communications. Je crois qu'il va devoir y avoir éventuellement, si la chose est pour continuer à proliférer... J'étais dans une conférence à Halifax, pas plus tard que la semaine dernière, où on nous a affirmé que l'Internet était déjà une chose du passé. Alors, qu'est-ce qu'on va avoir comme chose prochaine?

M. Landry (Verchères): Il ne faut pas exagérer.

M. Hébert (Pierre-A.): Ça va être terrible. Donc, il devra y avoir sans doute un consortium d'autorégulation ou d'autoréglementation, devrais-je dire, à travers tout le réseau Internet. Là, on parle international. Vous me posez une problématique que j'aime autant vous retourner. Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Oui.

M. Hébert (Pierre-A.): Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): C'est un peu ce que tout le monde fait, remarquez. Ha, ha, ha!

M. Hébert (Pierre-A.): Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): On va passer un bel été!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre, je vous remercie de vos questionnements. Si vous avez terminé, je laisserais la parole au député de Westmount–Saint-Louis, et, après, le député de Crémazie m'a demandé aussi la parole.

M. Chagnon: Oui. Brièvement, M. le Président. D'abord, je voudrais remercier et féliciter Le Groupe Dubeau. C'est intéressant, leur démonstration. Vous avez parlé beaucoup de planification financière, puisque c'est là votre rôle, c'est ce que vous faites quotidiennement. On a eu quelques échanges concernant le titre de planificateur financier. Vous avez peut-être été ici lorsque l'ACCOVAM en a parlé; et même cet après-midi, on a soulevé la question. Le titre de planificateur financier, dit-on, a deux écoles. Il y a l'école qui prétend qu'on doit porter le titre de planificateur financier et l'autre école qui dit: Mais non, le planificateur financier ne peut pas en même temps prétendre être planificateur financier et avoir l'objectivité que requiert le planificateur financier qui ne vendrait pas, lui, un outil financier ou un véhicule financier quelconque. Qu'est-ce que vous pensez de ce débat?

(22 h 30)

M. Hébert (Pierre-A.): Je pense que ça rejoint peut-être une remarque que j'ai dite antérieurement, où c'est facile de décrire la planification financière, mais c'est beaucoup plus difficile de décrire un planificateur financier, ce que c'est et ce que ça mange en hiver. Il reste que, dans le contexte auquel M. Morin faisait allusion dans sa présentation, il faisait allusion à quelqu'un qui faisait des recommandations spécifiques et il disait que chacun d'entre nous, du notaire en passant par le courtier en valeurs mobilières, était un planificateur financier.

Comment répondre à votre question, sinon de vous dire que je pense qu'on a probablement trouvé la solution en travaillant sur une base d'honoraires et en laissant au client la liberté du choix avec qui il voudra faire sa mise en place. Ma réponse rejoint donc en partie ce que M. Morin disait, c'est-à-dire que la perception de l'intégrité et de l'absence de conflit d'intérêts est sans doute importante pour certains, mais, par contre, vous me permettrez d'ajouter aussi que l'intégrité d'un individu n'a rien à voir avec la façon dont il est rémunéré.

M. Chagnon: En fin de compte, s'il a un outil ou un véhicule financier à vendre, la prétention d'être un planificateur financier risque d'orienter le client vers le véhicule financier que la personne a à vendre. C'est dans ce sens-là que l'objectivité est remise en question par, entre autres, l'ACCOVAM.

M. Hébert (Pierre-A.): Si la personne utilise effectivement le titre de planificateur financier dans un but...

M. Chagnon: Voilà, bien sûr.

M. Hébert (Pierre-A.): ...qui est purement mercantile, purement axé vers une transaction.

M. Chagnon: Généralement, les gens qui utilisent le titre de planificateur financier ne le font pas par pur idéal.

M. Hébert (Pierre-A.): Non, mais le titre de planificateur financier devrait rejoindre un idéal dans le processus décisionnel de l'individu.

M. Chagnon: O.K., je veux bien. Je vous remercie.

M. Hébert (Pierre-A.): Ha, ha, ha!

M. Alary (Serge): Peut-être pour compléter, ce serait d'ajouter, comme on l'a expliqué un petit peu plus tôt, que la planification, lorsqu'on la fait plus globale et que ça regroupe des recommandations dans quatre, cinq ou six champs d'activité plutôt qu'elle soit limitée à un seul champ d'activité... On a justement un organisme, qu'on a créé au sein de notre organisation, qui est le département de planification. Pierre en est le responsable. Pierre ne s'occupe pas de la vente, lui. Ce qu'il fait, c'est qu'il s'occupe de ramasser tous les éléments d'une situation, d'un client, et, par la suite, il va s'asseoir, il va discuter avec le client et va lui dire: Voici, c'est ta situation, ce sont divers éléments que tu devrais considérer de corriger. Et, s'il y a des besoins, il y a des intermédiaires financiers qui peuvent intervenir qui sont de notre organisation.

De toute façon, ce client-là, il nous a déjà été référé dans la quasi-totalité des cas par une personne, un intermédiaire de marché qui fait des affaires chez nous et qui dit: Moi, j'ai un permis d'assurance-vie. Mon client, je lui ai déjà vendu trois polices d'assurance, mais il a des fonds, il a des placements et ses affaires sont toutes mêlées. Il ne sait pas où il va et il veut, à un moment donné, être capable de voir clair. Alors, ce qu'on lui offre, on lui offre de faire une analyse complète, de lui donner un rapport qui soit intégré, et on lui offre également de faire un suivi annuel par la suite pour qu'il continue à savoir où il s'en va et s'il réussit à atteindre les objectifs qu'il s'est fixés ou qu'on s'est fixés ensemble, avec lui.

Alors, oui, il peut y avoir, il y a toujours des ventes qui vont en découler, mais on essaie d'avoir un processus qui soit plus ordonné et qui ne soit pas axé sur la vente seulement, mais qu'il y ait également un suivi qui soit fait.

M. Chagnon: Merci beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Je vais y aller rapidement, là, sur honoraires et commissions. Quel est le pourcentage de votre clientèle qui vous paie des honoraires puis qu'en même temps vous faites des commissions sur les transactions?

M. Hébert (Pierre-A.): Je dois vous dire que 95 % des gens qui vont embrayer le processus de la planification financière vont devenir, s'ils ne le sont pas déjà, des clients du Groupe Dubeau. Alors...

M. Campeau: Ce n'est pas méchant en soi.

M. Hébert (Pierre-A.): ...c'est 95 %. Non, non, ce n'est pas méchant.

M. Campeau: Quel est le pourcentage des revenus, maintenant, de votre chiffre d'affaires en honoraires puis le pourcentage en commissions?

M. Hébert (Pierre-A.): C'est à peu près 20 % en commissions.

M. Campeau: Ce n'est pas exagéré. Puis le client le sait toujours?

M. Hébert (Pierre-A.): Oui.

M. Campeau: Puis payez-vous des commissions à quelqu'un qui va vous amener un client?

M. Hébert (Pierre-A.): Non.

M. Campeau: Ça va, M. le Président, ça répond à mes questions. C'est parfait.

M. Alary (Serge): Mais, quand on dit «payer des commissions à quelqu'un», vous parlez d'un intermédiaire. Si un assureur-vie nous amène un client et qu'il y a des ventes qui en découlent, il y aura définitivement une portion des commissions qui en découlent qui va lui être versée. Si...

M. Plante (Gaétan): Si les valeurs mobilières interviennent dans cette planification financière et qu'on lui vend... que le client achète des valeurs mobilières de nous autres et que ce client-là est venu de par la planification financière, celui qui a référé à l'origine va toucher des commissions de référence, tout comme s'il nous l'avait référé directement.

M. Campeau: Finalement, c'est le client qui paie la commission.

M. Hébert (Pierre-A.): Ce ne sont pas des commissions de référence.

M. Plante (Gaétan): De transaction.

M. Hébert (Pierre-A.): Des commissions de transaction. Mais il n'y a pas de commission...

M. Campeau: Qui fixe les...

M. Hébert (Pierre-A.): Ma réponse, quand j'ai dit non, M. Campeau, avait trait à dire...

M. Campeau: À la transaction. Mais qui fixe la commission sur la transaction?

M. Hébert (Pierre-A.): C'est l'industrie.

M. Alary (Serge): On parle d'une transaction d'assurance, une transaction de valeurs mobilières?

M. Campeau: Un achat d'obligations.

M. Alary (Serge): C'est selon les taux du marché. Le même taux que le marché. Ce que j'aimerais mentionner, peut-être pour un éclaircissement également, c'est que les honoraires moyens qui peuvent être chargés par client vont varier peut-être entre 750 $ et 1 000 $, alors que, si vous vous adressez à une firme qui ne procède qu'à honoraires, vous allez multiplier votre facture par quatre ou par cinq et vous aurez, de toute façon, avec cette firme-là, à faire des achats de produits financiers.

Alors, quand Pierre parlait, un peu plus tôt, de démocratisation de la planification, c'est pour permettre à quelqu'un, en faisant un déboursé qui va peut-être monter, maximum, à 1 000 $, d'avoir une planification qui soit bien faite et complète et de procéder à l'achat de ses produits financiers de toute façon, comparé à une indépendance totale qu'il n'a pas les moyens de se payer.

M. Campeau: Ça va. Dernière question, M. le Président, si vous me permettez. Est-ce que le client le sait exactement, les commissions qui lui sont chargées et à qui vous les payez?

M. Alary (Serge): Si on parle de valeurs mobilières, c'est inscrit sur les feuillets qu'il reçoit.

M. Campeau: Oui, mais est-ce qu'il va savoir que celui qui l'a référé chez vous reçoit une commission?

M. Alary (Serge): Oui. La loi oblige à faire la divulgation par écrit...

M. Campeau: Il va le savoir?

M. Alary (Serge): ...et le pourcentage.

M. Campeau: Ça va. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je remercie les représentants du Groupe Dubeau de nous avoir présenté leur mémoire et d'avoir répondu à nos questions pour fins d'éclaircissement.

Et, sur ce, j'ajourne les travaux à demain, après les affaires courantes, soit vers 11 heures, au même endroit.

(Fin de la séance à 22 h 37)


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