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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le vendredi 9 novembre 1990 - Vol. 31 N° 14

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation : Les politiques gouvernementales en matière d'immigration


Journal des débats

 

(Neuf heures trois minutes)

Le Président (M. Doyon): Bienvenue, tout le monde. Je déclare donc la séance de la commission de la culture ouverte. Vous me permettrez de rappeler le mandat de la commission. C'est de procéder à l'interpellation du député de Mercier, adressée à la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, sur le sujet suivant: Les politiques gouvernementales en matière d'immigration. C'est donc le mandat de cette commission pour ce matin.

Je demanderais à Mme la secrétaire s'il y a des remplacements annoncés.

La Secrétaire: Oui. M. Biais (Masson) est remplacé par Mme Blackburn (Chicoutimi); M. Charbonneau (Saint-Jean) est remplacé par M. Gobé (LaFontaine) et M. Lemire (Saint-Maurice) est remplacé par M. Bordeleau (Acadie).

Le Président (M. Doyon): Merci. Un bref rappel des règles qui président à cette séance. Dans un premier temps, le député qui a demandé l'interpellation, c'est-à-dire le député de Mercier, aura un temps de parole de 10 minutes, suivi de la ministre pour également 10 minutes. Par la suite, pour des périodes de cinq minutes, chacun pourra parler selon la séquence suivante: un député de l'Opposition officielle, cinq minutes; la ministre, cinq minutes; un député du groupe ministériel, cinq minutes. Vingt minutes avant 11 heures, j'accorderai donc 10 minutes de conclusion à la ministre et un temps équivalent au député de Mercier.

Je vous signale également que, si un intervenant ne prend pas ou n'écoule pas totalement les périodes de 5 minutes ou de 10 minutes qui lui sont allouées, cela ne réduit pas pour autant la durée de l'interpellation. Et, finalement, le débat ne peut, à moins d'un consentement, dépasser 11 heures, quelle que soit l'heure du début des travaux. Donc, il est maintenant 9 h 5.

Là-dessus, j'accorde la parole, pour 10 minutes, à M. le député de Mercier. M. le député.

Exposé du sujet M. Gérald Godin

M. Godin: M. le Président, je vous en remercie. Nous allons tenter de nous conformer le plus possible aux règles que vous venez de nous faire connaître. Alors, M. le Président, Mme la ministre, s'il y a un sujet qui a ému les Québécois depuis quelques années, c'est bien celui de l'immigration et on peut penser - et je crois personnellement - que tout commence avec la question de ceux qu'on a appelés les "boat people", en fait, les réfugiés de la mer. À l'occasion du départ des Vietnamiens de leur pays et de leurs difficultés dans le golfe du Tonkin, qui était littéralement un désert, comme un désert marin si vous voulez, les Québécois se sont ému de la situation, et à l'instigation de leur curé ont voulu faire leur part pour venir en aide à ces gens qui étaient les damnés de la terre. Et c'est de cette époque que commence l'intérêt réel des Québécois et des Québécoises pour cette question-là. En fait, il y a eu - si on s'en souvient - 1000 paroisses et organismes qui ont voulu parrainer des réfugiés de la mer. Et, dans tout le Québec, de Dolbeau jusqu'à l'une des paroisses de Montréal, des gens se sont précipités pour parrainer et venir en aide à ces réfugiés de la mer. Le Québec a ainsi découvert qu'il y avait là un pouvoir que la Confédération lui confiait, mais qui n'est pas utilisé jusqu'à maintenant, et a suivi l'entente Cullen-Couture qui permettait au Québec de faire encore davantage pour venir en aide à ces personnes, à ces réfugiés.

Le résultat, maintenant, on s'en rend compte quand on voyage dans le Québec, c'est que, partout au Québec, il y a des communautés vietnamiennes, à Sherbrooke, dans la région de Mme la ministre, aussi bien que dans mon comté. Il y a des familles...

Une voix: À Chicoutimi.

M. Godin: Et à Chicoutimi aussi. À Dolbeau, je ne sais pas s'il y en encore, madame...

Une voix: Oui...

M. Godin: Et on a aussi constaté qu'il y a une tendance des réfugiés et des immigrants de se rabattre sur Montréal dès qu'ils en avaient l'occasion, parce qu'il y avait là des institutions qui parlaient leur langue et une communauté suffisamment nombreuse pour justifier la création de centres communautaires, de caisses populaires et d'une masse critique, autrement dit, qui formait une communauté réelle et donnait de la vie vietnamienne dans les régions où ils étaient installés.

Et on peut dire que cette migration de population illustre encore aujourd'hui la tendance profonde et naturelle des gens qu'on accueille ici et qui va à rencontre de ce qu'on appelle la démétropolisation. On a beau vouloir les déplacer de Montréal vers des régions extérieures, on ne réussit pas si certaines règles ne sont pas

respectées et dont on a pu se rendre compte à l'occasion des migrations intérieures, en fait, intraquébécoises, si vous voulez, des réfugiés de la mer.

Et, dans ce contexte-là, le ministre Jacques Couture qui, je dirais, est le plus remarquable des ministres de l'Immigration depuis une quinzaine d'années, incluant nos deux ministres ici présents, a décidé de signer avec le fédéral une entente qui s'appelle l'entente Cullen-Couture, parce que le ministre Cullen s'était bien rendu compte que pour que cette campagne d'aide aux réfugiés de la mer fonctionne, il fallait que le Québec ait des pouvoirs supplémentaires. Là, ce qui nous inquiète, M. le Président, et ce sur quoi on demandera à la ministre de s'expliquer, c'est qu'il semble que l'entente Cullen-Couture est maintenant au congélateur et que si on en croit les rapports de presse qu'on lit dans Le Devoir ou dans La Presse, les deux journalistes sont formels, tout est bloqué au niveau du gouvernement fédéral. Il n'y a plus rien qui fonctionne. Pourtant, la ministre nous a promis, ainsi que le premier ministre du Canada et le premier ministre du Québec, que l'immigration serait le premier dossier à être réglé après l'échec de l'accord du lac Meech. Évidemment, on attend encore. C'est malheureusement le rôle du Québec en attendant le fédéral, comme dans la pièce de Samuel Beckett "En attendant Godot". On attend et rien ne bouge. Les ministres sont dans l'impossibilité de donner des réponses parce qu'ils et elles n'en ont pas. Le gouvernement fédéral joue avec les nerfs du Québec, si on peut dire, et des ministères et des ministres, parce qu'il promet de grands changements positifs et que rien ne vient. Donc, il n'y a rien de plus désespérant pour un ministre ou une ministre qui attend des pouvoirs pour agir que d'attendre en vain et de rester sur sa faim, si on peut dire.

Le truc - parce que je pense qu'après tant d'années c'est un truc - du gouvernement fédéral est simple: il nous promet telle chose, on s'en contente parce que ça semble formel, mais à mesure que le temps passe, on se rend compte que c'était de la foutaise. Je pense qu'on doit s'unir, et l'Opposition et le gouvernement, dans une telle situation pour brasser un peu les fonctionnaires et les autorités fédérales pour que ce qui est promis aboutisse et surtout que nous puissions, comme gouvernement du Québec, faire et poursuivre notre action auprès des réfugiés de la mer et des autres réfugiés - on sait qu'il y en a beaucoup dans le monde, je pense qu'il y en a 12 000 000 - car sans ces pouvoirs qui étaient dans l'entente Cullen-Couture qui semble pour l'instant au congélateur, nous sommes moins en mesure d'aider les gens qui ont besoin de nous. Si le Canada a remporté il y a quelques années, un prix émanant de l'ONU et du Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés, un prix soulignant sa générosité et son intervention d'ouverture et d'hospitalité, c'est grâce à l'action du Québec qui, à l'époque, per capita, accueillait plus de réfugiés que n'importe quelle autre partie du Canada.

Donc, je pense qu'il est temps que la ministre nous dise où en sont rendues les négociations entre elle at le fédéral pour que nous nous joignions à elle pour amener le fédéral à redonner au Québec les pouvoirs qu'il avait sous l'entente Cullen-Couture et que les promesses, presque formelles, du premier ministre du Québec et de la ministre que le dossier de l'immigration serait le plus urgent après l'échec de l'accord du lac Meech, pour que nous puissions faire les pressions qui s'imposent au-delà des lettres aux députés conservateurs du Québec afin que le fédéral bouge. Nous savons très bien, par expérience, que le fédéral ne bouge pas tant qu'il n'a pas peur et, comme le disait, je ne me souviens plus qui, les seuls gouvernements qui sont bons sont ceux qui ont peur. Je pense qu'il faudrait que nous nous réunissions, les communautés culturelles de Montréal et du reste du Québec, pour forcer le gouvernement fédéral à livrer la marchandise et à faire passer l'immigration au premier rang de ses préoccupations dans ses rapports avec le Québec après l'échec de l'accord du lac Meech. Mme la ministre, nous attendons de vous des réponses à ces questions parce que nous avons eu des déclarations, bien sûr, presque des promesses.

La ministre prévoit une entente avec Ottawa d'ici la fin de l'été. Nous en sommes rendus déjà aux premières neiges que l'entente n'a pas encore tombé de l'arbre. Par conséquent, nous comptons sur elle, et c'est l'objectif de cette interpellation, pour nous informer où en sont les négociations et si elle croit encore et toujours que l'entente interviendra enfin. Quand elle parle de l'été, on aimerait avoir une année. Est-ce que c'est 1989, 1990 ou 1991? C'est la raison pour laquelle on a une interpellation. Nous voulons avoir des précisions quant aux dates qu'elle prévoit pour l'aboutissement de cette entente-là. (9 h 15)

Par ailleurs, le Québec avait mis sur pied, grâce à ses politiques, sous le parapluie de Cullen-Couture, une politique pour garder nos immigrants au Québec, de telle manière qu'en 1985, pour une première fois depuis 20 ans, le solde migratoire du Québec était positif. Donc, ça a été le fruit d'un travail de plusieurs années et de plusieurs ministres, évidemment, sous l'empire de l'entente Cullen-Couture. On avait réussi enfin à convaincre nos nouveaux Québécois de rester chez nous et non pas d'aller ailleurs, ce qui, en fait, était très coûteux parce que nous avions couvert les frais de transport, souvent de leur pays d'origine jusqu'ici, des cours de français en plus, à Bangkok ou ailleurs. Et nous souhaitions que ces nouveaux citoyens du Québec restent chez nous et maintiennent un solde migratoire positif. De plus, il y avait au Québec

un déficit démographique important et l'immigration contribuait légèrement à ie rétablir positivement.

Pour toutes ces raisons, l'immigration au Québec est un facteur extrêmement important de stabilité démographique culturelle et économique. Et nous craignons de voir s'effriter, avec le temps, ou s'effondrer cette architecture de règlements et de lois qui nous permettait d'espérer pour l'avenir que nous maintiendrions ce solde migratoire positif, et que nous pourrions enfin cesser de craindre que le poids du Québec dans le Canada ne diminue sous une barre dangereuse.

Le Président (M. Doyon): M. le député, je constate que le temps est écoulé, même de deux minutes. Alors, avec votre permission, je permettrai à la ministre d'intervenir pour 10 minutes. Vous pourrez revenir et continuer votre propos. Alors, Mme la ministre, pour 10 minutes.

Réponse de la ministre Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. J'aurai l'occasion, dans les deux heures qui suivront, de répondre plus directement au député de Mercier sur les sujets précis qu'il a abordés lors de son intervention, c'est-à-dire l'entente Canada-Québec, de même que la question de la rétention des immigrants. Vous me permettrez de consacrer cette première intervention au thème même inscrit au feuilleton, soit la politique d'immigration.

Donc, l'interpellation de ce matin est particulièrement à propos et significative. Dans le contexte des audiences publiques de la Commission parlementaire élargie sur l'avenir du Québec, la question de l'immigration devient, comme le disait le député de Mercier, centrale. En effet, au moment où les Québécois et Québécoises de toutes origines s'interrogent sur leur avenir et sur le genre de société dans laquelle ils veulent vivre, l'immigration et l'intégration deviennent des questions qu'il est essentiel d'aborder avec franchise, lucidité et courage.

Disons, au départ, qu'il importe de porter cette question sur le terrain du rationnel. C'est un sujet émotif entre tous. La légitime recherche de la survie pour un peuple peut mener aux pires excès si nous nous laissons guider par des réactions instinctives. L'histoire du monde a malheureusement été trop souvent parsemée de ce genre d'attitude téméraire aux effets aussi imprévisibles que désastreux. S'il importe de traiter le sujet avec mesure, l'immigration ne se limite pas pour autant à la définition d'obscurs modèles économiques ou au tracé de quelques graphiques sans âme.

Nous avons d'abord ici affaire à des personnes, des hommes, des femmes, des parents et des enfants, des gens en situation de détresse, à des manières d'être, à des façons de vivre et, ultimement, de mourir. Le député de Mercier, j'en suis convaincue, sera d'accord avec moi là-dessus. Le corridor à l'intérieur duquel nous devons définir nos politiques est donc étroit, raison de premier plan, s'il en est une, qui justifie la participation de tous au départ. Les citoyens, les corporations professionnelles, les institutions publiques et privées, les Québécois de souches ancienne et récente, bref tous les corps constitués de notre société doivent allier le dire à l'agir.

À ce chapitre, le rôle du gouvernement du Québec peut être qualifié de moteur. Non seulement doit-il innover, mais il doit également être le gardien du respect envers autrui, de l'équité et des droits de chacun. Dans la relève du défi de l'immigration, il est aussi de sa responsabilité de présenter clairement et sans détour les véritables enjeux qui nous interpellent. Phénomène international largement provoqué par l'éclatement des technologies nouvelles, les personnes sont de plus en plus mobiles; les médias nous montrent instantanément la chute du mur de Berlin; la libération de Nelson Mandela; les capitaux ne connaissent plus les frontières; on entend Charles Dutoit à Montréal ce soir, à New York samedi et à Paris lundi. Le Québec ne peut échapper à ce mouvement. La chute des frontières ne peut être sans ces corollaires: les mouvements de population et l'augmentation considérable des flux migratoires. Ces flux ont beaucoup changé au cours des 20 dernières années. La polarisation des richesses universelles en est certainement, et malheureusement, à l'origine. Alors que nous avions l'habitude de recevoir de l'immigration presque exclusivement européenne par le passé, de plus en plus, les migrations internationales se font du sud au nord et non plus de l'est vers l'ouest. Cette migration nous invitera à définir davantage notre identité collective, nos valeurs profondes. En effet, ces immigrants seront encore plus différents de nous, tant par leur couleur, leur façon de vivre que par leur manière d'être. Nous aurons, tant comme individus que comme société, à affronter des différences sur une base quotidienne, au travail, dans nos immeubles d'habitation et dans nos loisirs.

Voilà le portrait, si superficiel sort-il, des tendances lourdes en cours sur la planète et la situation à laquelle la plupart des pays industrialisés sont confrontés actuellement. Certains d'entre eux ont choisi de fermer leurs frontières, d'autres de les ouvrir toutes grandes. Mais où donc doit se situer le Québec et quel choix doit-il faire? Pour répondre à ces interrogations, il faut prendre en compte la situation particulière du Québec et envisager sérieusement certains enjeux spécifiques à notre société.

Ils sont, à mon avis, de quatre ordres. Premièrement, le Québec fait face à un déficit

démographique important. Le nombre de naissances au Québec depuis plusieurs années ne suffit plus à maintenir le niveau actuel de notre population. Avec un indice de fécondité se situant autour de 1,5% tel qu'il l'est actuellement, le Québec, à long terme, ne pourra survivre et ainsi assurer sa pérennité. Au rythme actuel, les démographes prédisent que la population commencera a chuter dans une trentaine d'années. Qu'adviendra-t-il de notre avenir collectif si, par manque d'enfants, nous diminuions tellement que nous étions menacés d'assimilation dans un ensemble nord-américain qui a pour lui ia force du nombre? Sans être une panacée, l'immigration peut nous aider à retarder une échéance inquiétante, le temps de redresser notre taux de natalité. Cette immigration permet de plus de ralentir quelque peu le renversement de la pyramide d'âge où là, on constate le vieillissement de la population active. Ce vieillissement a des conséquences graves sur notre capacité, comme société, à nous offrir les soins de santé et les régimes de retraite auxquels nous sommes habitués.

Deuxièmement, l'immigration est aussi un stimulant important de l'économie. Les travailleurs immigrants comblent nos besoins immédiats de main-d'oeuvre. Ils jouent ainsi un rôle important puisqu'ils constituent une force de travail qualifiée capable immédiatement de répondre aux nouveaux défis que veulent relever nos entreprises.

De plus, tout comme les investisseurs, les travailleurs amènent avec eux un savoir-faire et des idées nouvelles qui dynamisent notre économie. L'ensemble de la population immigrante augmente notre marché intérieur et favorise tant l'émergence de nouvelles entreprises que le développement des corporations existantes. Ainsi, le mythe de l'immigrant voleur de jobs a déjà trop fait de chemin. Il est faux, il est sans fondement. Et disons-le, xénophobe.

Troisièmement, l'ouverture d'une société c'est aussi l'enrichissement culturel. En participant à la vie collective, les nouveaux arrivants apportent à la société d'accueil des idées, des projets qui la font progresser. C'est là un facteur à ne pas négliger. Enfin, le Québec comme le Canada, d'ailleurs, a également un rôle humanitaire à jouer. Notre coin de pays est l'un des plus privilégiés de cette planète. Avec un des niveaux de vie élevé du monde occidental, nous avons une responsabilité vis-à-vis les plus démunis de ce monde.

Nous n'entendons pas nous soustraire à ces devoirs. Québec a déjà largement contribué à l'acceptation de réfugiés, comme en faisait mention le député de Mercier, sur son territoire, et nous entendons continuer à le faire. Voilà donc quatre bonnes raisons d'ouvrir les portes du Québec: démographie, prospérité, générosité et enrichissement culturel. Ces avantages, le Québec doit les faire comprendre à la société d'accueil afin qu'elle participe pleinement au processus d'insertion des immigrants et des communautés culturelles.

Voilà, M. le Président, les quatre piliers de notre politique d'immigration. À cela se greffe bon nombre d'actions cans plusieurs domaines. Nous aurons l'occasion, au cours des minutes qui viennent, d'en faire état et ce qu'il faut retenir, à ce stade-ci de la discussion, c'est que l'immigration est maintenant un enjeu de premier ordre pour assurer l'avenir du Québec. Soyez assuré, M. le Président, que le gouvernement libéral en est fort conscient et est déterminé à continuer d'agir comme il le fait depuis maintenant cinq ans. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Je vais maintenant donner la parole à M. le député de Mercier pour la continuation de l'interpellation. M. le député.

Argumentation M. Gerald Godin

M. Godin: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de la ministre, d'autant plus qu'elle commence à peine à répondre aux questions que nous lui posons et que nous nous posons. J'aimerais savoir de la ministre, M. le Président, dans ses négociations avec le fédéral, quelles étaient ses demandes et sur lesquelles de ces demandes elle croit avoir marqué des points? Elle parlait des compensations financières, qui est une des cassettes, en fait, du ministère depuis des années, et que nous ne pouvons pas jouer le rôle à nous imparti par nos négociations avec le fédéral depuis des années si on n'a pas les montants dont on a besoin pour appliquer vraiment dans la réalité les programmes dont nous sommes dépositaires depuis l'entente Cullen-Couture.

Alors, nous aimerions savoir de la ministre, dans les négociations qu'elles a eues avec le fédéral, sur quels points elle pense avoir marqué des points, d'une part? Et d'autre part, si elle croit que la promesse formelle de M. le premier ministre du Canada au premier ministre du Québec - de Mulroney à Bourassa en fait... Sur quels points elle croit que le fédéral va céder vraiment des morceaux importants, parce que nous avons remarqué que dans l'accord du lac Meech l'immigration était un point très important. Nous nous en sommes réjouis à l'époque parce que ça confirmait l'importance de l'immigration pour deux gouvernements successifs, et leur intention de constitutionnaliser l'entente Cullen-Couture ne faisait que démontrer à quel point cette entente était importante pour le Québec, et à quel point elle répondait aux besoins et aux attentes du Québec dans le domaine de l'immigration. Nous aimerions savoir comment elle peut s'y prendre pour convaincre le

fédéral de donner suite aux engagements - verbaux, évidemment, et pas autre chose - pris par le premier ministre du Canada face au premier ministre du Québec suite à l'échec de l'accord du lac Meech.

M. le Président, si on ne dépasse pas le niveau des promesses verbales, comme on dit, et le niveau des déclarations de bonnes intentions qui sont comme des incantations, en fait, à un dieu qu'on ne connaît pas, comment peut-on espérer vraiment marquer des points et aller chercher des morceaux importants de législation, de budget, ou de transferts monétaires qui permettraient au Québec de continuer à appliquer l'entente Cullen-Couture dans sa totalité et de façon de plus en plus efficace? Alors, M. le Président, c'est ma question à la ministre de l'Immigration.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député de Mercier. Mme la ministre.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, vous vous souviendrez que l'accord du lac Meech donnait au Québec les outils constitutionnels pour mieux planifier et contrôler notre immigration. Entre autres, ça permettait à l'entente administrative Cullen-Couture d'avoir une valeur constitutionnelle. Ça permettait également d'étendre des pouvoirs de sélection. Ça permettait également de transférer tous les services de réception et d'intégration dont le Québec a absolument besoin pour être le maître d'oeuvre de l'intégration de ses immigrants. Ça permettait aussi des garanties quant au niveau d'immigration. Je pense que, suite à l'échec de Meech, on peut quand même affirmer que le caractère raisonnable de nos demandes était, et est tout à fait légitime en matière de sélection et d'intégration des immigrants. Ça, c'était admis par tous. Et même le fédéral, vous vous en souviendrez, avait accepté et voté à la Chambre des communes l'accord du lac Meech. (9 h 30)

Tout comme le député de Mercier, je dois vous dire que je suis très déçue de constater que cette entente n'est pas encore signée et je suis déçue aussi de constater que la réunion de l'aile conservatrice québécoise, au mont Sainte-Anne, en fin de semaine dernière, n'a pas donné lieu à un véritable débat sur le sujet. Vous vous souviendrez que quelques jours avant la réunion des progressistes conservateurs, la fin de semaine dernière, j'avais sollicité le concours des députés ministériels, demandant à chacun de contacter leur vis-à-vis progressiste conservateur pour leur faire prendre conscience de l'importance pour le Québec de signer cette entente Canada-Québec. J'avais, moi-même, aussi écrit à l'ensemble des députés conservateurs qui avaient renouvelé leur engagement après l'échec de Meech pour qu'ils puissent intervenir et puissent essayer de faire infléchir la décision du premier ministre. J'ose espérer aussi que le comité parlementaire sur l'immigration, qui se réunira à Ottawa le 22 novembre prochain, afin d'entendre la ministre fédérale, Mme Barbara McDougall. Ils pourront réussir, à ce moment-là, à expliquer la valse hésitation d'Ottawa dans un dossier qui comporte des enjeux aussi fondamentaux pour le Québec. Dans un dossier aussi déterminant pour l'avenir collectif et pour la préservation du caractère distinct de la société québécoise.

Je pense qu'il est temps que les Québécois aient l'heure juste au moment où on se parle. Et je suis même très heureuse ce matin qu'on puisse avoir cette interpellation et qu'on puisse parler de cette entente.

Je suis tout à fait d'accord pour dire que les Québécois s'attendent à avoir l'heure juste et qu'on le signifie aussi à la population, qu'on nous signifie si, oui ou non, on consent à la demande du Québec en vue d'obtenir des outils absolument essentiels pour accroître sa capacité et son efficacité d'action en matière de sélection et d'intégration des immigrants.

Je pense qu'avec une bonne dose de bonne volonté de la part du gouvernement fédéral, il nous apparaît encore possible de régler ce dossier. Pour le moment, je n'entends pas encore lancer la serviette. Je pense que les enjeux sont trop importants pour lancer la serviette au moment où on se parle.

Le projet d'entente Canada-Québec en matière d'immigration doit être ratifié dans les meilleurs délais. Et j'invite encore, à ce moment-ci, les autorités fédérales à émettre le signal de la conclusion prochaine de cette entente et je compte toujours sur le concours des députés et sénateurs conservateurs du Québec à cet effet.

Est-ce vraiment trop attendre de la part des députés progressistes conservateurs du Québec que de leur demander de se faire le reflet de la très grande majorité des Québécois qui souhaitent que, tel que révélé par le sondage que j'ai rendu public la semaine dernière, le Québec dispose de pouvoirs accrus en matière d'immigration? Est-ce trop exiger de nos élus progressistes-conservateurs québécois de travailler activement à persuader leur premier ministre de satisfaire les objectifs légitimes du Québec pour faire de l'immigration un atout en faveur du développement sur le plan démographique, économique, linguistique et socioculturel?

Je ne pense pas que ce soit se bercer d'illusions que d'espérer que ces élus québécois de la formation politique ministérielle sur la scène fédérale reconnaissent que le suspense dans lequel se trouve le projet d'entente cause des préjudices aux clientèles immigrantes de même que des problèmes administratifs au gouvernement du Québec. Le retard apporté au financement des cours de langue française de même qu'à l'implantation d'une structure d'ac-

cueil de notre ministère à Dorval et à Mirabel, le traitement du dossier immigrant investisseur, voilà autant d'exemples concrets et explicites qui devraient avoir pour effet de confirmer la légitimité des préoccupations québécoises auprès des députés québécois progressistes-conservateurs dans la capitale fédérale.

Le Président (M. Doyon): Mme la ministre, je dois vous signaler que les cinq minutes sont écoulées. Vous pourrez revenir. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. La ministre a bien fait état des problèmes que pose le blocage actuel entre les négociations fédérale et québécoise sur l'immigration; nous les partageons et c'est ce qui appelle l'interpellation de ce matin. Je le disais tout à l'heure; nous partageons ces préoccupations touchant les effets particulièrement négatifs de la capacité du Québec à intégrer les immigrants et lorsqu'elle parle des défis du Québec, nous les partageons également. Je voudrais en rappeler deux sur lesquels le blocage actuel a des effets particulièrement négatifs. D'abord, il y a le dossier des immigrants investisseurs sur lequel reviendra le porte-parole officiel tout à l'heure, mais il y a également le rôle d'enrichissement culturel et économique que pourront jouer les immigrants qui s'installent chez nous à condition d'abord -je le rappelle - que l'immigration ne soit pas exclusivement montréalaise et qu'elle puisse aussi être un peu régionalisée.

J'ai un certain nombre de questions à poser et je suis très préoccupée, parce que, au-delà de toutes les démarches que la ministre a faites et que j'ai faites personnellement je dois dire auprès du président de la table de l'Immigration à Ottawa, Jean-Pierre Blackburn, il n'y a rien qui débloque et je pense que le premier ministre Mulroney a été très clair là-dessus, il a dit: Ça ira. Ottawa reporterait l'entente sur l'immigration après la conclusion des débats constitutionnels du Québec et s'il advenait que nous concluions ces débats constitutionnels seulement dans une année, il n'y a rien qui dit que ça pourra se faire quelque part au mois de juin l'an prochain. Ça veut dire que ce serait reporté d'une année.

Ce qui est plus grave encore, c'est la déclaration de M. Benoît Bouchard qui disait, et je le cite: la déclaration de M. Mulroney "n'a rien à voir avec le fait qu'on veuille signifier quoi que ce soit au Québec, insiste Benoît Bouchard, n'essayons pas d'y voir encore un élément de soumission au Canada. Il y a des problèmes financiers, révèle-t-il, plutôt il y a des dizaines de millions en cause et le Canada n'a pas d'argent..."

Non seulement il y a ce problème qui fait que les autres provinces canadiennes refusent les négociations à caractère administratif entre le Québec et le Canada, contrairement à ce qui avait été déclaré au lendemain de l'échec de Meech, mais, ensuite, le Canada nous dit: On n'a pas de sou. Je suis porté à le croire, c'est un gouvernement de cassés et ça pose un problème, vous le savez, et on le sait tous ici, c'est-à-dire que l'endettement est galopant et on n'a aucun contrôle là-dessus au Québec. Alors, je dis: II y a quatre ou cinq questions qui se posent, au-delà de toutes les pressions que vous avez faites. Est-ce que vous voyez un peu la lumière au bout du tunnel? Qu'est-ce qu'on peut dire à ceux et celles qui, actuellement, essaient, de façon désespérée, particulièrement dans la région de Montréal, de donner aux nouveaux immigrants un minimum de services qui leur permettent d'abord de s'intégrer à la communauté française et de s'intégrer au marché du travail? Est-ce que vous voyez la lumière au bout du tunnel? Et est-ce que vous pourriez nous dire, de manière qu'on puisse peut-être intervenir, sur quoi l'entente bloque? Est-ce que, comme M. Bouchard dit, on ne signe pas d'entente parce qu'on n'a pas d'argent? Et ce n'est pas parce qu'on cède à la pression des autres provinces qui refusent qu'on négocie, Québec-Ottawa. Je voudrais savoir sur quoi ça bloque. Je voudrais savoir aussi: on prétend que les exigences, qui avaient été posées dans l'entente de 1987 sur l'immigration, seraient moins basses. Qu'est-ce qui se négocie actuellement avec Ottawa? Qu'est-ce qui se négocie avec Ottawa? L'entente 1987 prévoyait, entre autres, la sélection à l'étranger et au pays des immigrants et des réfugiés: une garantie de 5 % plus élevée que le pourcentage de la population québécoise et que le Canada se retire des services de réception, d'intégration et de compensation financière. Alors, je voudrais savoir dans ces trois éléments-là ce qui est encore sur la table des négociations, ce qui bloque et quel est le montant de la compensation financière que vous demandez? Bon, ça va. Moi, je n'irai pas plus loin parce que je pense, M. le Président, vous me le dites, qu'on peut reprendre.

Le Président (M. Doyon): Oui. Mme Blackburn: Très bien.

Le Président (M. Doyon): Oui, évidemment. Merci, Mme la députée. Alors, j'ai interverti l'ordre, tout à l'heure, c'était, normalement, un député ministériel qui devait prendre la parole avant vous, Mme la députée. Alors, je vais lui permettre de le faire; la ministre pourra revenir tout de suite après. M. le député de Richelieu.

M. Albert Khelfa

M. Khelfa: Merci, M. le Président. Depuis 1985, la ministre a réorienté le ministère avec

deux objectifs en créant deux secteurs: le premier secteur chargé du développement des politiques et des programmes, et un deuxième secteur, le secteur des opérations responsables de dispenser des services à la clientèle. Nous avons constaté que le gouvernement du Québec, par l'entremise de la ministre, a posé plusieurs gestes significatifs démontrant l'importance qu'il attache à l'apprentissage du français par les immigrants, lequel constitue sans contredit le moteur de leur intégration à la société québécoise.

Jusqu'à 1987, le Programme national de formation en établissement, défrayé par le gouvernement fédéral, constituait, pour ainsi dire, la seule source de financement pour la francisation des immigrants. Depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral, le financement québécois s'est accru significativement, passant de 5 % à 14 % en cinq ans, donc, triplant depuis 1986. En 1989-1990, environ 5 300 000 $ ont été consacrés à la francisation dans le cadre des deux nouveaux programmes que nous avons créés, à savoir le Programme québécois de francisation des immigrants et le deuxième programme, le Programme d'aide à la francisation des immigrants, ce qu'on appelle le PQFI et le PAFI et ce, afin de rejoindre les clientèles non desservies jusqu'alors, particulièrement les femmes ne se destinant pas au marché du travail et les revendicateurs du statut de réfugié qui ne sont pas admissibles au Programme national de formation en établissement du gouvernement fédéral.

La mise en oeuvre, depuis quelques années, de formules variées de cours à temps partiel dans les COFI ou en collaboration avec les commissions scolaires et les organismes communautaires, a, par ailleurs, augmenté l'accessibilité des services. À titre d'exemple, une nouvelle formule de cours de français en milieu scolaire, principalement destinés aux femmes des communautés culturelles, a été élaborée et mise en place dans trois commissions scolaires jusqu'à maintenant. En vertu des ententes avec ces commissions scolaires, des parents, dont les enfants fréquentent déjà l'école, ont commencé leur apprentissage du français et de la vie québécoise à la même école que leurs enfants et ce, pendant que ces derniers sont en classe.

En définitive, M. le Président, c'est plus de 50 % du budget du ministère qui est consacré, en 1990-1991, à des activités de francisation. C'est des mesures concrètes, madame. Le ministère a aussi entrepris une opération de redéfinition et de consolidation des activités de francisation en élaborant un régime de formation officiel et un plan de développement pédagogique qui serviront de cadre à l'ensemble de nos activités de francisation. Quant à l'effort de formation linguistique initial des nouveaux arrivants d'âge scolaire qui représentent environ 20 % de l'immigration totale, il a été largement soutenu par le gouvernement libéral. L'engagement de notre gouverne- ment, à cet égard, dépasse 18 000 000 $ par année. Par ailleurs, la bonification récente du budget des mesures d'accueil spéciales a permis d'assurer une meilleure insertion des élèves immigrants en régions.

De plus, face à l'accroissement du nombre d'élèves sous-scolarisés ou appartenant à des communautés linguistiques éloignées du français, le ministère de l'Éducation du Québec autorise le prolongement de la durée de séjour à l'accueil dans plus de 30 % des cas et expérimente diverses formules répondant à des besoins particuliers. Le ministère de l'Éducation a également consenti des efforts importants sur le plan du développement pédagogique. (9 h 45)

Afin d'épauler les écoles à haute densité ethnique en matière d'intégration linguistique, le gouvernement appuie l'initiative mise en oeuvre sur le plan local par des commissions scolaires ou des cégeps. De plus, dans le cadre du plan de développement du français, il a consacré, en 1989, des budgets spéciaux totalisant près de 8 000 000 $ pour le seul ministère de l'Éducation. Ces budgets servent au soutien linguistique, en français, des élèves des communautés culturelles. L'instauration de diverses mesures permettra de répondre aux besoins des écoles à forte concentration ethnique. Faire du français la langue du travail au Québec constitue l'objectif du gouvernement libéral ainsi qu'une condition essentielle à l'intégration linguistique des Québécois des communautés culturelles.

En terminant, M. le Président, j'aimerais souligner que le gouvernement a aussi annoncé des mesures de 3 000 000 $ qui seront disponibles pour aider ces commissions scolaires. Et, en terminant, ce qui est très important pour nous, la ministre l'a mentionné tout à l'heure, c'est l'entente Canada-Québec. Elle est importante pour la survie du Québec et nous devons la signer.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député de Richelieu. Nous allons revenir à l'ordre original, tel que prévu à cette interpellation. Mme la ministre, pour revenir aux questions qui vous ont été posées par la députée de Chicouti-mi.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je dois dire que, suite à cette attitude du fédéral, ce qu'on pourrait penser être une volte-face, de ne pas vouloir signer immédiatement l'entente Canada-Québec, mais ce que j'ai compris, moi aussi, c'est qu'on voulait attendre après le rapport de la commission Bélanger-Campeau. J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de dire qu'il m'apparaissait qu'on faisait une très mauvaise lecture de la réalité politique québécoise et que, s'il s'agissait d'une stratégie, elle aurait un coût

politique. Je voudrais, bien sûr, pour répondre à la question de la députée de Chicoutimi, lui dire que je ne peux pas entrer nécessairement dans le détail de l'entente parce que les demandes et les propositions des parties sont encore sur la table, elles ne sont pas publiques, elles ne sont pas connues.

Cependant, je voudrais lui rappeler les trois grands principes qui étaient d'ailleurs dans Meech, les trois principes et ce qu'on revendiquait, ce qu'on demandait. Ce qui était important pour le Québec, c'était de garantir le nombre d'immigrants équivalant, . par exemple, au poids démographique, c'est-à-dire 25 %, plus 5 % en cas de besoin démographique. C'était aussi, pour le Québec, d'avoir la sélection exclusive de ses immigrants. Et c'était aussi le transfert avec compensation financière de tous les pouvoirs de francisation et d'intégration.

Et ce qui est nouveau par rapport à l'entente de 1987, c'est qu'en rapatriant l'argent pour pouvoir intégrer nos immigrants, ça permettrait au Québec de pouvoir franciser les immigrants qui ne parlent que l'anglais. Comme vous le savez, actuellement, le programme national d'emploi, le PNFE, qui se donne dans les COFI, est un programme qui s'adresse aux gens qui se destinent au marché du travail. Et, sont éligibies, seulement les immigrants qui ne parlent ni le français, ni l'anglais. Alors, pour nous, au Québec, comme nous sommes une société distincte, il est important que nous puissions aussi donner des cours de français aux immigrants qui parlent anglais. Il faut absolument qu'on soit capables de leur donner des cours de français pour qu'ils puissent aussi s'intégrer au marché du travail.

Alors, je reviens toujours à cette entente Canada-Québec. Comme je le disais tout à l'heure, les enjeux sont trop grands pour pouvoir lancer la serviette immédiatement. Et j'interpelle toujours les députés conservateurs, et je suis très heureuse de voir, Mme la députée de Chicoutimi, que, vous aussi, vous avez parlé à votre vis-à-vis. Je pense que c'est important qu'on le fasse et qu'on leur fasse prendre conscience aussi de cette importance pour le Québec de signer immédiatement cette entente. Parce que, comme je le mentionnais, et je le redis, ce n'est pas au Québec à payer l'échec de Meech; je pense que ce n'est pas au Québec. Et actuellement, on a l'impression qu'en ne signant pas cette entente, il y a un coût à payer pour le Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Alors, toujours suivant l'ordre, maintenant, un député ministériel. Si quelqu'un veut intervenir... M. le député de LaFontaine?

M. Jean-Claude Gobé M. Gobé: M. le Président, je vous remercie de m'accorder la parole en ce moment. Alors, comme le faisaient valoir, d'ailleurs à juste titre, la députée de Chicoutimi ainsi que la ministre de l'Immigration, un des problèmes importants de l'immigration que nous allons connaître et certainement devoir relever comme défi, va être l'intégration des immigrants. C'est certainement, peut-être là, l'un des effets les plus importants de cette grande opération de l'immigration qui a pour but, comme on le sait, comme on le découvre, de combler les déficits démographiques engendrés par le faible taux de fécondité que nous connaissons au Québec, 1,4 % ou 1,5 %. El pour ce faire, c'est important de prendre des mesures, non seulement à l'arrivée de ces immigrants, en termes de francisation, il est vrai, mais au départ, je crois qu'il est important de prendre des mesures préparatoires qui doivent commencer avec la sélection des immigrants. Et pour ce faire, notre gouvernement, depuis quelques années, a commencé à prendre un certain nombre de mesures. On voit que depuis 1986, alors que la ministre Louise Robic accédait à ce ministère, ensuite l'actuelle ministre, un certain nombre de mesures ont été prises. Et, parmi les 33 600 et quelques immigrants que nous avons accueillis au Québec en 1989, on peut voir que 58 % provenaient de la catégorie des indépendants, c'est-à-dire des personnes que l'on évalue peut-être être capables, être en mesure de subvenir à leurs besoins et de devenir assez rapidement autonomes grâce à leur compétence, leur formation et leur capacité d'adaptation, bien entendu.

Les efforts du gouvernement ont permis d'augmenter de façon significative la part de ce mouvement qui contribue, à n'en pas douter, au dynamisme économique du Québec. Rappelons-nous qu'il n'était qu'à 35 % en 1985 et c'est là qu'on voit l'importance des mesures qui ont été prises. Ce succès se reflète plus particulièrement dans la sous-catégorie des gens d'affaires et des travailleurs immigrants et c'est là une réalisation concrète du ministère, ces dernières années. On se souvient des efforts déployés par la ministre Louise Robic, députée de l'est de Montréal, d'ailleurs, très au fait de tous ces problèmes d'immigration qui, bien entendu, comme on le sait, s'installent majoritairement dans cette région de Montréal. Donc, je disais, on voit les résultats de ces politiques qui ont été mises de l'avant depuis maintenant cinq ans par notre gouvernement. Car depuis 1986, le gouvernement s'est donné quand même une orientation économique en matière d'immigration et on voit que l'accroissement des gens d'affaires admis au Québec atteint 500 %. Depuis 1988, le Québec reçoit en moyenne plus de 40 % des gens d'affaires ayant obtenu un visa canadien et ces chiffres démontrent, encore une fois, ce que je disais, c'est la conscience et l'importance que notre gouvernement attache à ce genre d'immigration et à l'apport que ces immigrants

amènent au Québec. Leur arrivée représente certainement un des facteurs les plus enrichissants de notre société, et ça, à double point, par leur connaissance des affaires, les marchés extérieurs internationaux et les réseaux commerciaux déjà bien souvent concrétisés de part et d'autre du continent.

On considère en général que l'actif d'un immigrant investisseur, l'actif moyen, est d'environ de 500 000 $. Je crois que, dernièrement, la ministre effectuait une mission en Orient et dès son retour, suite à la lumière, à la perception de ce voyage, elle a annoncé un certain nombre de mesures qui sont en voie d'implantation au ministère et on voit que cela aura pour tâche, comme raison, de faciliter la sélection et l'accueil et certainement l'intégration de cette clientèle. Dans le futur, le ministère accordera aussi beaucoup plus d'importance, et il le faudrait, je le souhaite, à l'accueil des investisseurs en leur accordant un service personnalisé. Car je crois qu'il est important de préparer ces gens-là par des séances d'information collective qui devraient porter non seulement sur l'immigration, mais sur les caractéristiques de l'économie québécoise, sur les attentes et les besoins économiques du Québec et sur l'ensemble des services, bien entendu, que l'on met à leur disposition afin de faciliter leur établissement au Québec. Et je crois que c'est là aussi un genre de réalisation à venir dont l'Opposition devrait être capable de se réjouir et de trouver positive dans nos politiques gouvernementales.

Maintenant, il y a la sous-catégorie des travailleurs et c'est la mise en oeuvre dès 1987... On voit, encore là, la vision du gouvernement libéral. Quand nous sommes arrivés à la fin de 1985 - et on le voit dès 1986 avec les immigrants investisseurs dès 1987 avec les travailleurs - un certain nombre de programmes spéciaux ont été mis en matière de recrutement et c'a augmenté le nombre de candidats indépendants d'une manière assez substantielle ainsi que le nombre d'immigrants qui parlent français. En effet, les travailleurs sélectionnés en vertu du Guide d'emploi du Québec et du Programme de l'emploi attesté sont à plus de 65 % des francophones. Le nombre d'immigrants qui déclarent connaître le français est passé de 5300 en 1984 à plus de 9500 en 1989 et je dois, là encore, je crois, avec l'Opposition, concevoir qu'il y a là matière à réjouissance.

Alors, en terminant, M. le Président, car je crois que le temps est maintenant compté, si vous le permettez, l'immigration est vitale pour l'avenir du Québec, pour l'avenir économique et démographique, mais je crois qu'il ne faut pas perdre de vue que cette politique d'immigration ne saurait être bénéfique pour notre société qu'à condition d'être capable d'intégrer ces immigrants, de les intégrer sans heurt, et d'éviter que nous ayons de trop grands problèmes d'intégration, autant au niveau de la langue parlée que de l'emploi. Lorsqu'on sait qu'au Québec, actuellement, et dans la région de Montréal où les gens s'installent...

Le Président (M. Doyon): ...M. le député.

M. Gobé: ...on a des quartiers à 20 % de chômage, je crois qu'il y a des mesures importantes à prendre afin de faciliter l'intégration de ces gens-là au marché du travail et donc à notre société.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député. M. le député de Mercier, vous avez maintenant la parole.

M. Gérald Godin

M. Godin: M. le Président, je vous remercie à mon tour. Je pense qu'on peut s'attarder longuement sur la question des investisseurs immigrants parce que voilà un programme où le Québec était en avant ce sur toutes les provinces en concurrences avec lui. Il faut se rappeler qu'à l'extérieur, nommément à Hong Kong et en Allemagne, le Québec n'est pas seul en piste. Ottawa y est et également les provinces telles la Colombie-Britannique et l'Ontario.

Le Québec avait réussi, en imaginant un programme très original et très généreux, à battre toutes les autres provinces et les autres villes importantes, dont Vancouver et Toronto, avec le résultat que le fédéral a modifié les règles que le Québec avait établies et ses normes à lui aussi et qui avaient rapporté au Québec le plus grand nombre d'immigrants investisseurs de toutes les provinces canadiennes et également 50 000 000 $ d'investissements par année. Le résultat est simple. C'est à Montréal que l'on trouve, et non pas à Vancouver ni à Toronto, la Banque de Hong Kong et ce n'est pas, non plus, à Vancouver ou à Toronto, qu'on retrouve l'édifice aménagé au-dessus de la Banque de Hong Kong et qui est un édifice de condos de luxe réservé aux immigrants de Hong Kong. Et, pour des raisons qui n'ont pas été expliquées par la ministre, le fédéral a forcé le Québec à modifier ses règles de manière à réduire l'afflux d'immigrants investisseurs qui venaient de Hong Kong surtout.

J'aimerais demander à la ministre comment les choses se sont passées et si elle a l'intention de protester d'une façon ou d'une autre contre le fait que le fédéral a imposé au Québec des normes différentes de ce qu'il avait inventé lui-même, de manière à ce que le Québec perde son avantage comparatif par rapport à d'autres provinces et villes canadiennes. On a été frappés par le silence de la ministre dans ce dossier-là d'autant plus que voilà un groupe d'immigrants qui était extrêmement rentable pour le Québec et qui créait de l'emploi dans le Québec. Alors, est-ce que la ministre peut nous dire pourquoi elle

n'a pas dit un mot? Et, deuxièmement, comment se sont faites les tractations qui ont amené Ottawa à prêter l'oreille à ce que demandaient Vancouver et Toronto et à ne pas écouter Montréal ou Québec si Québec ou Montréal ont dit quelque chose que nous, on n'a pas entendu, en tout cas, de ce côté-ci de la Chambre?

Le Président (M. Khelfa): Merci, M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, c'est ma note sur les immigrants investisseurs, programmes mis au point par le gouvernement précédent et qui ont rapporté au Québec un nombre important d'immigrants avec des moyens, d'une part, avec des enfants, d'autre part, et qui ont donc contribué au solde positif du Québec dans ces années-là. M. le Président, c'est ma notule pour la ministre.

Le Président (M. Khelfa): Merci, M. le député de Mercier. Mme la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Comme le disait le député de Mercier, notre programme a connu de grands succès. Cependant, je constate qu'il aurait été important qu'on me pose la question à l'Assemblée nationale justement sur ce programme d'immigrants investisseurs au moment où le gouvernement fédéral a décidé de changer sa réglementation, parce que ça m'aurait permis de faire part au député de Mercier de toutes les interventions que j'ai faites pour que le Québec puisse conserver son programme dans son entier. (10 heures)

Je dois vous dire, au départ, que le Québec a souscrit, au tout début aux objectifs visés par le projet de règlement du fédéral. Je pense qu'on ne peut pas dire qu'on est contre le fait qu'on veut maximiser au plus haut point les retombées économiques de ces programmes d'immigrants investisseurs.

On est d'accord aussi pour que chaque province puisse avoir sa part dans ces différents programmes. On est d'accord aussi pour que les investissements soient de plus en plus sécuritaires. Cependant, il m'apparaît que le fédéral a voulu, par ces modifications, corriger certaines lacunes observées dans le programme en vigueur dans le reste du Canada parce que, comme vous le savez, notre programme québécois est très différent du programme appliqué dans le reste du Canada.

Avant de rencontrer mon homologue pour discuter du dossier, parce que j'ai eu l'occasion de rencontrer Mme McDougall à cet effet, mon cabinet a consulté la majorité des courtiers en valeurs mobilières qui oeuvraient dans ce domai- ne. J'ai d'ailleurs obtenu l'appui de la presque totalité de ces gens et vous vous souviendrez qu'ils ont même émis un communiqué de presse et ils ont fart aussi des recommandations auprès de Mme McDougall concernant les modifications à ce programme.

Je pense que ce qui préoccupait davantage le milieu financier, c'était l'injustice créée envers le Québec avec l'entrée en vigueur dudit règlement. On se trouvait à pénaliser le Québec face aux autres provinces à cause, justement, comme je le mentionnais tout à l'heure, de la spécificité de notre programme qui est très différent de tous les autres programmes. Et aussi l'intervention du Québec. Le Québec disait: qu'on ne peut pas modifier le programme d'immigrants investisseurs à tous les six mois. Les investisseurs ont besoin d'un peu plus de stabilité et d'un peu plus de prévisibilité aussi.

Quand on veut investir, il faut savoir d'avance combien de temps notre investissement sera investi. Il faut avoir plus de sécurité et de stabilité. Il y avait aussi une crainte. La crainte du gouvernement du Québec était au fait qu'en changeant les modalités de notre programme, il pourrait y avoir un déversement de clientèle vers d'autres programmes et aussi vers d'autres pays, entre autres, ce qui aurait pour effet de priver les PME québécoises d'une bonne source de financement. Comme on le mentionnait, lorsque je suis allée à Hong Kong récemment, je me suis rendue compte que l'Australie entre autres et la Nouvelle-Zélande sont très agressifs et veulent avoir des immigrants investisseurs.

Donc, avec toutes ces préoccupations en tête, on a négocié avec le gouvernement fédéral, comme je le mentionnais. J'ai rencontré mon homologue Barbara McDougall. Les courtiers en valeurs mobilières sont également intervenus. Et j'ai obtenu récemment une lettre de Mme McDougall, qui était datée du 26 octobre. Le règlement fédéral s'appliquera au Québec 18 mois après son entrée en vigueur dans le reste du Canada, et c'est ce qui faisait problème auprès des courtiers en valeurs mobilières et des immigrants investisseurs parce que, comme l'argent - lorsque nous sélectionnons un immigrant investisseur - est transféré immédiatement au Québec, que la période de trois ans commençait à courir seulement lorsque l'immigrant investisseur arrivait au Québec et que les délais pour l'émission des visas, entre autres à Hong Kong, sont de deux ans et même au-delà de deux ans, à ce moment-là, il peut arriver, dans certains cas, que la somme investie le soit pour une période de sept ans au lieu de cinq ans.

Alors, nous sommes intervenus. J'ai obtenu cette période transitoire pour que notre programme puisse demeurer aussi compétitif que le reste du Canada, pour les 18 premiers mois de la mise en vigueur de la réglementation, à compter du 7 décembre prochain. Je dois vous dire, cependant, qu'en ce qui concerne les 250 000 $ à 350 000 $,

c'est-à-dire le niveau d'investissement, il semblerait, d'après les courtiers en valeurs mobilières, que la clientèle aura suffisamment de temps pour s'ajuster, compte tenu de la période transitoire que nous avons obtenue de 18 mois, et qu'à ce moment-là, malgré que nous sommes intervenus et qu'on aurait préféré que cette augmentation sort plutôt graduelle au lieu de passer de 250 000 $ à 350 000 $, il semblerait que la clientèle pourrait s'ajuster.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Maintenant, pour cinq minutes, M. le député de l'Acadie et, ensuite, M. le député de Mercier.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. D'abord, je dois dire qu'à titre de député du comté de l'Acadie je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le cadre de cette interpellation sur les politiques d'immigration puisque j'ai le privilège de vivre dans un comté où il y a une proportion de l'ordre de 33 % d'allophones. Je suis donc très honoré de pouvoir témoigner que ces néo-Québécois, venus de culture et de tradition très différentes des nôtres, constituent pour le Québec un apport extraordinaire. Si, dans un des salons voisins, on discute de l'avenir constitutionnel et politique du Québec, je crois que nous sommes tous d'accord, ce matin - le gouvernement et l'Opposition - pour dire que nous discutons, peut-être plus essentiellement, de la survie de notre société.

Si l'apprentissage du français demeure, pour les membres des communautés culturelles qui ne connaissent pas déjà cette langue, la principale voie d'intégration à la société québécoise, le gouvernement libéral a, par contre, mis en oeuvre tout un ensemble de mesures pour leur assurer une place égale dans tous les domaines de la vie de notre société. En décembre 1986, le gouvernement libéral adoptait la Déclaration du Québec sur les relations interethniques et interraciales. Cette Déclaration, garantissant l'égalité des chances pour tous les citoyens, a été suivie de mesures concrètes dont l'une des plus importantes est le Programme d'accès à légalité dans la fonction publique pour les minorités visibles et les membres des communautés culturelles de langue maternelle autre que française ou anglaise. Le gouvernement libéral entend réserver 12 % de toutes les embauches permanentes aux Québécois et Québécoises issus des communautés culturelles; l'objectif ultime étant d'assurer une représentantion de l'ordre de 9 % des Québécois des communautés culturelles dans toutes les catégories d'emploi de la fonction publique, ce qui correspond, de fait, à leur disponibilité sur le marché du travail. Pour ce qui est des entreprises privées, il est important de signaler qu'en avril 1989 le gouvernement libéral a mis en place un programme d'obligation contractuelle. Ce programme oblige les entreprises privées de 100 employés et plus, à but lucratif, qui obtiennent des contrats ou des subventions gouvernementales de 100 000 $ et plus, à établir un programme d'accès à l'égalité pour les minorités visibles. Dans le même esprit, le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, de même que la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, ont mis en place un programme novateur appelé Nouveaux Visages. Partant du constat d'une sous-représentation des membres des communautés culturelles et plus particulièrement des minorités visibles dans les médias francophones du Québec, ce programme vise à assurer aux journalistes issus des communautés culturelles une possibilité de stage professionnel dans les médias québécois.

L'intégration harmonieuse des membres des communautés culturelles interpelle non seulement le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration mais tout le gouvernement. Afin de jouer son rôle horizontal, le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration a mis en place, au printemps 1989, un réseau de répondants dans les cabinets politiques, dans les ministères et les organismes gouvernementaux, et ce dans le but de sensibiliser tous les intervenants administratifs et politiques à la réalité continue de l'immigration et des communautés culturelles. Comme l'intégration est un processus de réciprocité, il faut également que la société québécoise et ses institutions acceptent de s'ouvrir à cette diversité. Dans cette optique, le 30 octobre dernier, l'Assemblée nationale a adopté une motion sur la Semaine interculturelle nationale qui sera désormais soulignée annuellement au Québec. Cette semaine aura pour but de signaler plus particulièrement les réalisations méritoires accomplies par des Québécois et des Québécoises de communautés culturelles et de reconnaître l'effort d'ouverture dont font preuve différents secteurs d'activité de la société d'accueil.

Il serait important, M. le Président, de signaler que le gouvernement libéral a également mis en place toute une série de mesures ou d'interventions plus spécifiques à certains ministères. Pensons seulement aux Services de santé et services sociaux où, découlant du rapport Sirros, un nombre important de projets sont maintenant en voie de réalisation. Ce rapport vise à prendre en considération la dimension interculturelle dans tous les programmes du ministère de la Santé et des Services sociaux. Sur le pian scolaire, plusieurs mesures ont été mises en place pour soutenir l'intégration des élèves des communautés culturelles et assurer l'éducation interculturelle de l'ensemble de la clientèle scolaire. Au niveau de la sécurité publique, le ministère a créé un comité consultatif sur les relations interculturelles et sociales qui doit conseiller le ministre sur les actions à

entreprendre dans ce domaine. Enfin, soulignons qu'au ministère des Communications, et plus particulièrement à Montréal, on a fait des efforts énormes pour faciliter un meilleur accès à l'information concernant les divers services et programmes gouvernementaux et ce, dans le but de mieux répondre aux membres des communautés culturelles.

Je pourrais citer beaucoup d'autres exemples, M. le Président, mais je crois que ces exemples démontrent clairement la volonté du gouvernement libéral d'agir en vue d'appuyer ce cheminement des Québécois et des différentes communautés culturelles vers leur pleine participation à la société québécoise et de leur permettre d'apporter toute la contribution dont ils sont capables à la vie de notre société.

Je suis tout à fait confiant que le gouvernement continuera d'accentuer sa priorité et ses efforts dans ce domaine. Merci.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. le député de l'Acadie. M. le député de Mercier, je crois.

M. Gérald Godin

M. Godin: Oui, M. le Président, une question à la ministre qui contredit un peu ses propos de tout à l'heure, ses propos lénifiants, ainsi que ceux de son collègue, le député de Richelieu. On a reçu un communiqué de gens, qui souhaitent, les investisseurs immobiliers du Québec, qu'il y ait un afflux supplémentaire d'investisseurs de Hong Kong ou de n'importe où dans le monde. Et, là, ils nous apprennent que le ministère ou la ministre a réduit le quota d'entrevues par mois à 65 entrevues par mois à Hong Kong et à 160 à Montréal. Donc, voilà une décision de la ministre et du ministère qui contredit carrément ses propos et qui laisse croire qu'au fond, maigre qu'elle dise qu'elle tient beaucoup à avoir des immigrants investisseurs, le comportement du ministère est à l'effet contraire.

Alors, j'aimerais bien, M. le Président, que la ministre nous dise quelle est la logique derrière une telle décision et qu'elle s'en justifie, puisque l'interpellation a lieu uniquement pour ça, qu'elle justifie ses comportements que le milieu trouve injustifiables, inqualifiables ou comme ne devant pas exister. C'est ma question à la ministre, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député. Mme la ministre.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je pense que le député de Mercier fait référence à un communiqué de presse qui a été émis par l'Association des consultants. Je dois tout simplement souligner, au départ, que, nous, du ministère, nous faisons de l'immigration, tandis que les consultants font des affaires. Je dois vous souligner que, contrairement à ce qui est mentionné, le gouvernement a finalement ajouté, a porté de 8 à 12 le nombre de conseillers économiques qui sont attachés à la Direction des services aux gens d'affaires. Notre bureau, entre autres, à Hong Kong, est un des plus gros bureaux pour recruter, justement, les immigrants investisseurs qui veulent venir au Québec, parce que, comme vous le savez, en 1997, Hong Kong sera rétrocédée à la Chine et, à ce moment-là, ces immigrants investisseurs veulent quitter Hong Kong le plus rapidement.

Je dois aussi vous dire que nous avons restructuré les services offerts actuellement à la clientèle et que nous n'aurons pas moins d'immigrants investisseurs, c'est-à-dire que nous n'aurons pas moins de clientèle cette année comparativement à l'année dernière. Notre clientèle sera stable.

Cependant, ce qui est arrivé à Hong Kong, c'est que nos conseillers ont fait, au cours des six premiers mois, les trois quarts des niveaux de sélection qui leur étaient alloués et, en plus de ça, c'est que le gouvernement fédéral, actuellement, prend, à Hong Kong, tout près de deux ans à émettre les visas. Et il semblerait, au moment où on se parle, que ces 24 mois seraient maintenant rendus à 30 mois. Donc, le Québec a dû ralentir, pour un certain temps, d'ici à la fin de l'année, ses entrevues de sélection pour ne pas, non plus, alourdir et ne pas créer de faux espoirs à ces gens étant donné que ça prend maintenant tout près de 30 mois avant que l'on puisse émettre les visas à Hong Kong.

Je dois vous dire que nous faisons tout pour que ces gens puissent venir s'établir au Québec et non seulement s'établir, mais investir au Québec. J'ai eu aussi l'occasion, lorsque je suis allée à Hong Kong, de passer un message très important afin que ces immigrants investisseurs ne se servent pas du Québec comme un tremplin, mais bien investissent au Québec et demeurent au Québec, puisque nous faisons de l'immigration. (10 h 15)

A mon retour, j'ai aussi annoncé une quantité de mesures pour aider ces immigrants investisseurs à s'établir au Québec et j'ai aussi, pour répondre... Peut-être, tout à l'heure, je n'ai pas terminé ma réponse, M. le Président, sur la question des immigrants investisseurs. Je dois vous dire qu'en plus de la période transitoire que le Québec a réussi à obtenir, et comme je le mentionnais tout à l'heure, c'est sûr que j'aurais préféré obtenir gain de cause sur tous les points, mais nous avons obtenu cette période transitoire de 18 mois qui est absolument essentielle pour les immigrants investisseurs, pour conserver notre programme d'immigrants investis-

seurs. Aussi, le gouvernement fédéral, conscient de la possibilité qu'en modifiant la réglementation sur le programme d'immigrants investisseurs, il y ait déversement de la clientèle vers le programme entrepreneur, a accepté, à notre suggestion, de créer un comité mixte pour étudier plus sérieusement les conséquences de cette nouvelle réglementation sur le mouvement des investisseurs et des entrepreneurs.

Donc, dans un certain sens, M. le Président, bien sûr que j'aurais préféré avoir gain de cause sur tous les points, mais je suis satisfaite parce que nous avons pu préserver l'essentiel de notre programme. Les intérêts économiques supérieurs du Québec étaient importants et c'est ça qui a guidé finalement notre action. Dans ce sens, je pense qu'en préservant l'essentiel, ça nous permet de préserver notre programme d'immigrants investisseurs et on ose espérer que nous pourrons aussi avoir autant de succès qu'on en a eu dans les années antérieures. Et je peux assurer le député de Mercier que nous ne sélectionnerons pas moins, cette année, d'immigrants investisseurs que nous ne l'avons fait l'année dernière.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le député de LaFontaine.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, lorsque malheureusement mon temps fut écoulé et que vous m'avez interrompu, un des principaux défis qui attendent la société québécoise, le Québec, dans les prochaines années, c'est bien entendu l'intégration de ces immigrants dans notre société. Lorsqu'on regarde le profil du nouvel immigrant qui arrive au Québec, force est de constater que ce n'est plus le même profil de l'immigrant qui venait chez nous, - j'en suis un d'ailleurs moi-même - il y a une quinzaine, une vingtaine ou une trentaine d'années. On voit que ce sont des gens qui viennent de régions ou de pays totalement différents. Ils peuvent venir du Sud-Est asiatique, des Antilles, de l'Amérique centrale, et cela nous amène et nous oblige à réfléchir sur une nouvelle réalité, de nouvelles manières de vivre de ces gens-là, de les intégrer avec nous et de faire en sorte qu'ils deviennent des citoyens québécois, canadiens à part entière.

Je crois que le ministère a, bien entendu, deux choses à faire: d'abord, je le disais et je le répète, il a un rôle très important au niveau de la sélection. Je crois que les critères de sélection doivent correspondre à une réalité économique et sociale du Québec, parce que je crois qu'il serait illusoire de penser régler les problèmes que nous connaissons au niveau démographique d'une manière harmonieuse et intéressante pour les Québécois, mais aussi pour ces immigrants-là qui vont venir chez nous, parce qu'une fois qu'ils sont là, on les accueille pour qu'ils soient heureux et non pas pour les rendre malheureux. Je crois qui! serait illusoire de penser que cela va se faire sans heurt si nous ne prenons pas un certain nombre de mesures.

Alors, je crois qu'on devrait, pour le maintien de l'identité culturelle francophone, française du Québec, mettre là aussi un certain nombre de mesures - et je crois que le ministère, de ce côté-là, fait quand même certains gestes, il y a certainement des améliorations à apporter, des choses à bonifier - entre autres, mettre l'accent sur le recrutement des immigrants francophones, autant que possible des pays de la communauté francophone. On voit qu'on a déjà signé avec la France une entente qui vise à favoriser l'établissement au Québec de ressortissants français dont la formation et l'expérience correspondent aux besoins et aux moyens de notre société, ça, à court, à moyen et à long terme, bien entendu.

De notre côté, si on veut attirer cette qualité d'immigrants, nous aurions peut-être quelques autres gestes à faire. Dans trop de domaines encore, il y a des chasses gardées au niveau de l'emploi, au niveau de certaines professions dites libérales, les médecins, les avocats, des employés de la construction où l'on voit qu'un certain nombre d'immigrants... Je me souviens du cas de ce médecin vietnamien qui lavait la vaisselle dans un restaurant du centre-ville alors qu'il avait une quinzaine d'années d'expérience de médecine chez nous. Je crois qu'il y aurait peut-être là une manière de favoriser l'immigration et d'aider les régions en même temps. Peut-être que nous pourrions recruter un certain nombre de professionnels qui, désirant venir s'établir au Québec, accepteraient d'aller s'établir en régions et pourraient exercer leur profession, car ça correspond à une réalité, nous manquons en effet dans certaines régions de médecins québécois ou montréalais. Les jeunes, en particulier, ont beaucoup de difficultés, les jeunes en particulier, à vouloir aller s'établir en périphérie, du moins, plus qu'en périphérie, dans les régions un peu plus éloignées des grands centres. Je crois qu'il y a là peut-être moyen d'harmoniser une immigration de qualité et les besoins des régions car, ne nous leurrons pas, l'immigration, en grande partie, va s'établir dans la région de Montréal.

Lorsqu'on voit les chiffres qui ont été dernièrement annoncés par le gouvernement fédéral, on parle d'à peu près 250 000 immigrants au Canada; on va dire un quart pour le Québec. Disons que 50 000 personnes par année ne serait pas un chiffre jeté en l'air. Je m'inquiète, à juste titre, des moyens que nous allons mettre en oeuvre pour intégrer ces 50 000 personnes dans la région de Montréal et on sait que, là encore, ils ne vont pas à Westmount, ils ne vont pas à ville Mont-Royal; ils vont dans l'est de Montréal,

dans Saint-Henri car un immigrant, en général, n'arrive pas avec des moyens pour aller habiter dans ces villes comme Outremont ou ailleurs. Ils vont dans les endroits les moins chers où le logement est accessible et où les politiques d'habitation de la ville font que ces logements sont là. Je crois que le ministère a un énorme défi car on se rend compte que si ces immigrants vivent en trop fortes concentrations, l'intégration va se faire à rebours et je ne vois pas comment 75 % ou 60 % d'immigrants dans un même quartier pourraient s'intégrer à la société québécoise. Je crois que c'est plutôt un peu le contraire qui pourrait se réaliser.

Je crois que nous avons là une énorme responsabilité, comme gouvernement, dans ce domaine car nous pourrions nous réveiller, dans quelques années, avec des problèmes qui auraient été engendrés, avec bonne volonté, pour régler une situation démographique, pour venir en aide à des gens qui sont mal pris dans leur pays, qui sont des réfugiés et que nous devons aider, comme démocrates et comme citoyens. Nous pourrions créer des situations qui engendreraient, pour la société québécoise et pour ces gens-là aussi, d'autres difficultés et d'autres problèmes, comme on peut le voir dans d'autres pays du monde où les gens n'ont pas prévu ou n'ont pas planifié ce genre de phénomène.

Alors, je crois que c'est là un des grands défis du ministère. À ce titre, d'ailleurs...

Le Président (M. Doyon): Je dois vous interrompre, M. le député.

M. Gobé: Oui, je termine, M. le Président. Deux mots en terminant...

Le Président (M. Doyon): Oui, vous avez dépassé votre temps.

M. Gobé:... parce que mon intervention n'aurait pas de sens si je ne pouvais pas terminer.

Le Président (M. Doyon): Oui, mais il fallait y penser avant.

M. Gobé: Je crois que ça ferait manquer aux auditeurs qui nous écoutent nombreux, probablement, maintenant, et pour l'Opposition, le but de mon intervention. Le gouvernement va présenter, bientôt, un énoncé de politique sur l'immigration. Celui-ci permettra de définir de manière plus précise non seulement les orientations que devrait prendre le gouvernement à l'égard de l'immigration et des immigrants, mais aussi de l'intégration. Je souhaite que l'Opposition puisse prendre connaissance de cet énoncé très rapidement et que cet énoncé, aussi, contienne des mesures qui vont dans le sens...

Le Président (M. Doyon): Très bien.

M. Gobé:... de ce que j'ai énoncé auparavant.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Bien, merci, M. le Président. D'abord, j'aurais trois commentaires et quelques questions, mais j'en aurais peut-être une toute première à la suite de l'énoncé des propos du député de...

Le Président (M. Doyon): LaFontaine.

Mme Blackburn:... Lafontaine. Quand sortira cet énoncé de politique et est-ce que cet énoncé de politique contiendra des mesures visant à régionaliser l'immigration? Si c'est un enrichissement pour le Québec, ce n'est pas encore évident pour les régions parce qu'on ne les a pas souvent et, quand on les a, on ne les conserve pas beaucoup. Il faudrait voir également si vous avez des données sur le taux de rétention des immigrants parce qu'il ne s'agit pas juste d'en recevoir 5 % de plus que notre pourcentage relatif de la population canadienne, mais encore faut-il les retenir. Ça, ça ne me semble pas évident et j'aimerais savoir si vous avez des données sur la capacité de rétention des immigrants lorsqu'ils s'installent en régions. Souvent, après quelques années, quelques mois, ils s'en viennent à Montréal, mais j'ai la conviction que ceux qui ont commencé à connaître le Québec par les régions s'y attachent plus facilement.

La ministre nous disait tout à l'heure... Je veux revenir brièvement sur les négociations Québec-Ottawa. La ministre nous dit, et je la crois: Je n'ai pas encore jeté la serviette. Je lui dis bravo, mais j'ai deux questions. Elle va la tenir encore combien de temps et, dans l'hypothèse ou elle devra jeter la serviette, est-ce qu'elle a envisagé des alternatives? Parce qu'on a une situation, remarquons-le, je dirais, quasiment catastrophique. Je ne veux pas jouer aux oiseaux de malheur, mais vous le savez. On manque de budget et on est incapables d'assurer l'intégration des immigrants à la majorité francophone. Si le déclin démographique doit nous inquiéter, le glissement trop grand des immigrants vers la minorité anglophone au Québec est presque aussi inquiétant que le déclin démographique par rapport à l'avenir et à l'identité québécoise. Je pense que vous le savez ça aussi et, ça, ça ne m'apparaît pas évident.

À présent, brièvement, sur le Programme des investisseurs immigrants, vous nous dites: Les conseillers font des affaires et le ministère fait

de l'immigration. Et vous avez augmenté de 8 à 12 le nombre de consultants économiques. J'ai toujours entendu dire que le Parti libéral favorisait la libre entreprise. Et s'il y avait là quelque chose de particulièrement intéressant et, me semble-t-il, efficace, c'était ces entreprises privées de conseillers qui, effectivement, allaient chercher des investisseurs. Par ailleurs, les directives, les nouvelles règles d'Ottawa en matière de soutien ou d'encouragement aux immigrants investisseurs viennent pénaliser le Québec parce que moins compétitives. Et, je pense que vous le savez également, du fait qu'on a augmenté le niveau d'investissements de 250 000 $ à 350 000 $, il y a des investisseurs qui vont glisser davantage vers l'Australie et la Nouvelle-Zélande; je pense que la ministre, également, le faisait remarquer. On finit toujours par constater que, quand ça va bien, quand le Québec a le génie de mettre en place des mesures intéressantes, le fédéral vient toujours, mais toujours les contrer. Il va falloir qu'à un moment donné on finisse par en tirer les conclusions qui s'imposent.

Par rapport a l'intégration des immigrants, je fais juste relire brièvement un paragraphe d'un editorial paru dans Le Soleil du 29 octobre 1990, sous la signature de M. Raymond Giroux qui disait, parlant d'immigration: "Les francophones doivent aussi changer leur attitude, souvent xénophobe. Si la loi 101 francise les nouveaux immigrants, elle n'a pas rendu la majorité plus perméable aux nouvelles influences." Et il disait: "L'intégration, elle, sera réussie le jour où les habitudes électorales des allopho-nes suivront celles des francophones, partageant leurs votes également entre les deux grands partis." Ce que je partage, parce que c'est une mesure d'évaluation de l'intégration à la majorité francophone qui est particulièrement intéressante. Et on constate que même les Français d'origine ne sont pas nécessairement intégrés, çn ce sens-là, aux grandes tendances. Mais, peu importe, je ferme là-dessus.

Je voudrais aborder deux questions très particulières, celles des revendicateurs de statut et des programmes COFI, leur capacité d'accueil. Les revendicateurs en attente de statut de réfugiés, au Québec, au 1er mars 1990, représentaient 52 237, en incluant leurs dépendants - ça fait cinq minutes? Alors, la question est simple. Comme il y a seulement 1 900 000 $ du fédéral, destinés aux revendicateurs de statut, comment va ce dossier? Combien de dossiers auront été réglés cette année? Et comment ces revendicateurs de statut s'intègrent-ils à la majorité?

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Mme...

Mme Blackburn: Je reviendrai, M. le Président, avec d'autres questions touchant les COFI et la francisation.

Le Président (M. Doyon): Oui, si le temps nous le permet, Mme la députée, puisqu'il est déjà 10 h 30. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Vous comprendrez, M. le Président, que je ne pourrai pas répondre en cinq minutes à toutes les questions qui m'ont été adressées par la députée de Chicoutimi. Entre autres, elle est revenue sur la question des immigrants investisseurs, les revendicateurs de statut, l'entente Canada-Québec et, rapidement, sur les COFI. Je vais répondre à sa première question concernant les immigrants investisseurs, pour compléter cette réponse. Je dois vous dire que les consultants, ce sont des gens qui font du recrutement d'immigrants investisseurs; et nous n'avons rien contre ça, au contraire. Sauf que ce qui est important pour nous, c'est que ce recrutement soit fait d'une façon que ça puisse répondre aux besoins économiques du Québec, mais aussi aux besoins démographiques du Québec. Et il faut absolument, aussi, que ces consultants-là travaillent dans un encadrement, qu'il y ait certaines balises. Il ne faut pas, non plus, que ces personnes qui viennent au Québec perdent confiance envers les Québécois et le gouvernement du Québec. Donc, pour nous, ce qui est important, c'est qu'il faut sélectionner, bien sûr, en fonction de nos critères. Il faut aussi que les investisseurs investissent au Québec, qu'ils demeurent au Québec, qu'on les retienne au Québec. (10 h 30)

Alors, ce sont les grands objectifs que nous voulons atteindre, en termes d'immigrants investisseurs. C'est pourquoi j'ai annoncé, lorsque je suis revenue de mon voyage, certaines mesures, entre autres, leur permettant de mieux s'intégrer, des nouveaux services qu'on pourra leur offrir afin qu'ils puissent mieux s'intégrer, entre autres, des séances d'information, des séminaires traitant des aspects techniques, juridiques, réglementaires et fiscaux, entre autres, en marketing, en collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, et aussi faire en sorte que ces personnes puissent travailler avec les leaders économiques du Québec, soit les chambres de commerce, les commissaires industriels des différentes régions, pour être capables de développer un réseau et non seulement de les accueillir, mais de voir à ce qu'ils investissent véritablement au Québec.

En ce qui concerne l'entente Canada-Québec, je dois dire à la députée de Chicoutimi que - je le mentionnais - les enjeux sont trop grands et que dans l'intérêt du Québec, dans l'intérêt de l'ensemble de la population du

Québec, je n'ai pas le goût de lancer la serviette immédiatement. C'est trop important. Et j'interpelle à nouveau les personnes qui peuvent nous donner le coup de main, entre autres, les députés conservateurs qui peuvent encore intervenir auprès du premier ministre pour faire infléchir sa décision afin que l'on puisse signer le plus rapidement possible l'entente Canada-Québec. Je dois quand même rassurer la députée de Chicou-timi que, quoiqu'il advienne, le Québec va prendre ses responsabilités. J'aurai à annoncer prochainement une politique d'immigration et d'intégration et, à ce moment-là, vous serez en mesure de constater les différentes orientations du gouvernement en matière d'immigration et d'intégration. Mais je dois vous dire que, quoiqu'il advienne, nous allons prendre nos responsabilités et on sera en mesure de faire connaître cette politique d'immigration et d'intégration.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le député de l'Acadie.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Je dois dire que je suis un peu surpris ce matin de voir que l'Opposition a demandé une interpellation sur la politique d'immigration au Québec, d'autant plus que ce dossier, comme on l'a déjà accepté de part et d'autre, est un dossier prioritaire pour le gouvernement libéral actuel et ce, depuis que ce gouvernement a pris les rênes du pouvoir en 1985. Il est important de signaler un certain nombre de chiffres qui vont nous permettre peut-être de mieux comprendre l'importance qu'accorde le gouvernement actuel à toute la problématique de l'immigration.

D'abord, il est important de signaler que les crédits budgétaires du ministère ont, au cours des trois dernières années, augmenté de 83 %. Pour ce qui est du niveau d'immigration, si on compare la situation en 1985 où le niveau était de l'ordre de 15 000, il faut constater qu'en 1989 celui-ci se situe à 34 000, ce qui manifeste clairement l'ouverture qu'a toujours eue le gouvernement libéral face à l'apport de l'immigration dans l'avenir de notre société. Mais, pour bien accueillir ces nouveaux arrivants et leur permettre de s'intégrer, il a fallu mettre de l'avant aussi un certain nombre de mesures d'intégration, et ici je me réfère à plusieurs engagements électoraux de 1985 et de 1989 qui ont été, en bonne partie, réalisés.

Si les députés du Parti québécois parlent souvent de la francisation, c'est peut-être, au fond, pour essayer de rattraper le temps perdu. Si on regarde avant 1987, il n'y avait pas au Québec de programmes québécois de francisation. C'est en 1987, avec le gouvernement du Parti libéral, que les premiers programmes québécois de francisation ont été mis en place et les budgets n'ont cessé d'augmenter depuis ce moment. Tout à l'heure, on parlait des COFI. Il faut peut-être souligner aussi que c'est en 1981 que le COFI de Trois-Rivières a été fermé, sous le règne du Parti québécois. En 1981 également, le Parti québécois publiait un volume qui s'intitulait: "Autant de façons d'être Québécois" et, dans cet écrit, on mettait un accent sur la nécessité d'ouvrir la fonction publique aux Québécois des communautés culturelles. C'était évidemment une belle promesse, mais comme, souvent, les moyens n'ont pas accompagné cette promesse. Comme la pensée magique n'a pas agi, il faut constater qu'en 1985 les résultats étaient assez faibles au moment où le Parti libéral est arrivé au pouvoir. Alors, on s'est engagé, en 1985, à appliquer la section 3 de la Charte des droits de la personne et on l'a fait. On s'est engagé à créer en 1989 un véritable programme d'accès à l'égalité. On n'a pas tardé à réaliser cet engagement; l'hiver dernier, le programme était lancé. Pour réussir l'intégration des immigrants, il ne faut pas juste faire des discours, il faut aussi poser des gestes et je pense que le gouvernement libéral l'a fait de façon très éloquente au cours des dernières années.

Une autre comparaison. En 1981, le gouvernement du Parti québécois avait modifié la loi du ministère pour lui confier la responsabilité de planifier et de coordonner les politiques relatives à la participation des communautés culturelles à la vie nationale. Encore là, un objectif intéressant, mais peu de moyens mis en place pour le réaliser. Les groupes des communautés culturelles ont eu souvent à se plaindre, et avec raison, que le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration était devenu une espèce de ghetto. Chaque fois que ces groupes allaient frapper à la porte d'autres ministères, on les référait automatiquement au ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, comme si c'était le seul ministère qui pouvait s'occuper d'eux. D'ailleurs, lors du colloque du Parti québécois dans les dernières semaines, ce fait a été mentionné par les membres des communautés culturelles.

Le gouvernement, comme je l'ai mentionné tout à l'heure dans une intervention précédente, a mis en place une série de moyens pour assurer cette coordination gouvernementale et on en voit maintenant les résultats. Par exemple, aux Affaires culturelles, à la Régie du logement, à la Régie de l'assurance automobile et au Tourisme, l'appareil gouvernemental commence à peine à découvrir la réalité des communautés culturelles. Il aura fallu attendre 10 ans après que le mandat ait été donné au Parti québécois. Le gouvernement du Parti québécois a peut-être beaucoup parlé à ce moment-là, mais il a relativement peu agi.

En 1989, nous nous sommes engagés également à rendre plus souples les programmes de francisation de façon à les rendre plus accès-

sibles aux immigrants qui ont des horaires chargés. Soulignons ici les ententes qui ont été signées dans les dernières années avec certaines commissions scolaires pour que celles-ci offrent en sous-traitance des cours de français aux parents des enfants allophones qui fréquentent déjà leur école.

M. le Président, on aurait pu continuer et parler également de l'augmentation des certificats de sélection émis à Paris qui étaient, en 1985, de 1613 et, en 1989, de 5050. Il y a eu un accroissement de 313 %. Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire sur ce sujet, mais je pense que le bilan du Parti libéral et du gouvernement libéral est un bilan très positif et, dans ce sens-là, l'énoncé de politique qui sera présenté dans les prochaines semaines, va confirmer ces orientations et cette ouverture du gouvernement libéral vers l'apport de l'immigration et des communautés culturelles.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député de l'Acadie. Mme la députée de Chicou-timi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Oui, M. le Président, je ne commencerai pas une guerre de chiffres non plus qu'une guerre de statistiques, qui ne sont pas toutes justes, il faut le rappeler. Rappelons au moins une chose. La très grande majorité des programmes de soutien aux immigrants ont été créés et mis sur pied par le gouvernement du Parti québécois. Je pense que la vérité a ses droits, comme le dirait un de vos collègues, et je pense que ça, il fallait le dire. Par ailleurs, quant à l'intégration des immigrants à la fonction publique, ça fait cinq ans que ce gouvernement est là, il ne peut quand même pas toujours se retourner en arrière pour savoir ce qu'on faisait. Il faudrait peut-être que vous fassiez quelque chose.

Mais cela dit, parce que je ne veux pas m'en aller dans cette direction-là, je voudrais ramener une question que j'ai posée. Il y a 52 237 personnes en attente de statut de réfugié au Québec. Où sont-elles, ces personnes, dans la machine et combien de dossiers aura-t-on traités cette, année et depuis le 1er mars 1990 en particulier?

L'autre remarque, parce que la francisation constitue l'élément fondamental d'intégration à la communauté, alors vous reconnaissez ça et nous reconnaissons ça. Que faites-vous avec la situation suivante: les centres d'orientation et de formation des immigrants couvrent 40 % des besoins de la clientèle. Alors, 20 000 immigrants. Vous en avez 8000 qui ont effectivement accès à ces programmes, donc que faites-vous des 12 000 autres? La ministre soulevait tout à l'heure, avec beaucoup d'à-propos et de justesse, le problème que posent les immigrants qui parlent anglais, parce qu'on ne peut pas non plus les recevoir, alors il ne faut pas se poser trop longtemps la question pour savoir à quelle communauté ils s'intègrent.

Par ailleurs, il y a des données touchant les transferts linguistiques. Ceux qui ne parlent ni le français ni l'anglais continuent à parler leur langue maternelle à la maison. On constate que, parmi ceux qui font le transfert linguistique et qui adoptent une des deux langues, le français ou l'anglais, à la maison, il y a deux fois plus de personnes qui choisissent l'anglais. Ça, ce sont des chiffres, des réalités. Là, on ne parie pas de discours, on parie de vraies données. Je me dis: Qu'est-ce qu'on fait avec ça? Qu'est-ce qu'on fait avec les personnes qui sont en attente d'un statut de réfugié? La ministre peut-elle nous dire - parce que là, je prends une de ses déclarations qui a paru dans La Presse du mercredi, 26 septembre 1990, touchant l'affaire Vesselin Petkov, qui est un biologiste, je pense, un docteur en biologie, qui ne trouvait pas de place pour avoir des cours. Et la ministre disait, à l'époque: "Voilà quatre mois que nous adressons vainement des demandes au fédéral. Cela illustre bien la nécessité pour le Québec de contrôler l'ensemble du dossier de l'intégration des immigrants, ressources comprises", ce que je partage avec elle, mais j'irais plus loin.

Et elle ajoutait, et ça, ça m'a préoccupée parce que ça ne vient pas de n'importe qui, ça vient de la ministre, que cette situation entraîne une déperdition de 50 % des gens inscrits sur la liste des PNFE. "Après six mois d'attente, ils disent avoir perdu le goût d'apprendre le français". Moi, je voudrais savoir combien on en a perdu de façon définitive? Est-ce qu'il y a des suivis là-dessus qui nous permettent de confirmer les données de la ministre, ce qui serait totalement, parfaitement catastrophique? Vous l'admettez avec moi parce que là, on ne parie plus de petites données. Ça se parie par dizaines de milliers de personnes.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Je signale que cette interpellation tire à sa fin. Il reste 10 minutes à la ministre pour donner la réplique, suivi d'un dernier 10 minutes par le représentant de l'Opposition officielle, de façon à ce que nous terminions à 11 heures. Mme la ministre, pour 10 minutes.

Conclusions Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: J'aurais aimé pouvoir répondre plus spécifiquement, mais étant donné que c'est la conclusion, je vais essayer de faire un tour assez rapide. Au départ, M. le Président, je voudrais, bien sûr, remercier l'Opposition qui a donné l'occasion de démontrer

à la population tout le travail accompli par le gouvernement libéral depuis 1985, en matière d'immigration. Je pense que les actions ne manquent pas. Deux heures, bien sûr, on se rend compte que ce n'est pas suffisant pour pouvoir aborder tous les sujets en profondeur. On y va de façon très superficielle, parce que c'est difficile d'entrer; c'est tellement technique et tellement important, ce sujet, ce dossier, qu'on ne peut pas, dans deux heures, toucher tous les points en profondeur.

Alors, pour résumer, j'essaierai de regrouper en trois blocs nos principales actions. Entre autres, en matière de sélection, je dois vous dire que l'augmentation des indépendants est passée de 35 % en 1985, à 58 % en 1989. Et je dois vous dire, pour répondre à la question sur la rétention, que la proportion des immigrants toujours présents cinq ans après leur admission, si je me fie, par exemple, au recensement de 1971, au Québec, cette proportion était de 63 %, et au Canada de 72 %. Ce qui signifie un écart d'environ neuf points. En 1986, au Québec, cette proportion était de 70 % par rapport à 82 % au Canada, donc 12 points.

On voit quand même que de plus en plus, maintenant, nous retenons, depuis 1970, entre autres, nos immigrants. Et quant aux transferts linguistiques, chez les immigrés de souche plus récente, c'est-à-dire ceux qui sont arrivés après 1971, les transferts favorisent désormais le français à plus de 50 %. La plupart de ces jeunes immigrés ont commencé leur scolarisation après 1976. Et ceux d'entre eux qui ont effectué un transfert linguistique, l'ont fait vers le français à 69 %. Or, on voit que, de plus en plus, la loi 101 fait ses effets, donne ses effets, et bien sûr que lorsque nous arrivent des immigrants, lorsque nous arrivent des personnes qui ne parient ni le français ni l'anglais, c'est toujours plus difficile d'imposer à une première génération, c'est toujours un peu plus difficile... Cependant, nous comptons énormément et nous mettons beaucoup d'espoir quant à la deuxième et à la troisième génération et nous allons tout faire pour que ces personnes puissent s'intégrer à la société francophone.

D'ailleurs, je dois dire qu'au niveau de la francisation, comme mes collègues l'ont mentionné, on a créé quand même depuis 1987 deux programmes qui sont des programmes à temps partiel, qui étaient pour une clientèle un peu spécifique. Ça vise, entre autres, les femmes qui sont à la maison. Ça concerne également les revendicateurs de statut de réfugié qui n'avaient pas accès et qui n'ont pas accès aux cours dans les... au PNFE. Mais, finalement, par le truchement de nos cours à temps partiel, ces personnes peuvent maintenant suivre des cours de français. Il faut admettre aussi que 51 % des budgets du ministère sont alloués a des activités de francisation et que, par rapport à 1985, il y a eu quand même une augmentation de 400 % de nos budgets quant à la francisation. (10 h 45)

Bien sûr, je n'aborde pas tous les budgets qui sont alloués au ministère de l'Éducation pour les jeunes enfants et aussi pour l'éducation aux adultes. Vous vous souvenez que la semaine dernière mon collègue du ministère de l'Éducation a annoncé un montant supplémentaire de 3 000 000 $ pour, justement, répondre à la clientèle qui était en attente de cours de français. Je dois aussi vous dire que nous avons signé des ententes avec certaines commissions scolaires pour permettre aux immigrants de suivre des cours de français dans les écoles de leurs enfants et ça vise davantage les femmes, par exemple, qui sont à la maison et qui peuvent venir suivre des cours de français au moment où leurs enfants sont à l'école. Nous avons aussi créé un nouveau programme pédagogique dans les COFI pour mieux encadrer l'enseignement.

Bien sûr que plus d'argent est nécessaire et, comme je le mentionnais, c'est inadmissible que des listes d'attente soient prolongées comme on le connaît actuellement. Et je dois vous dire que le budget du gouvernement fédéral a été diminué de 17 % par rapport à une augmentation de la clientèle de 12 %. Alors, bien sûr, on se rend compte qu'il y a un transfert vers les programmes québécois parce que, compte tenu que ces personnes ne peuvent pas avoir accès à des cours de français dans ce cours qui est payé entièrement par le gouvernement fédéral mais administré par le gouvernement du Québec, ces personnes n'ont pas accès. Elles vont vers d'autres cours offerts par le Québec. Je suis intervenue auprès de mon homologue et je dois vous dire que j'ai quand même senti une certaine ouverture de sa part. Je pense qu'elle connaît bien les besoins du Québec à ce niveau et j'ose espérer que je devrais normalement avoir une réponse incessamment et possiblement cet après-midi à ce sujet-là, concernant un budget supplémentaire pour l'enseignement des cours de français dans le programme PNFE donné dans les COFI.

Je dois vous dire aussi que, depuis 1985, nous avons créé le Programme d'accès à l'égalité qui a été annoncé à plusieurs reprises sous l'ancien gouvernement mais, finalement, qu'on n'a pu réaliser. Je parle aussi de la Déclaration du gouvernement sur les relations interethniques et interraciales, le programme Nouveaux Visages pour donner une chance aux minorités visibles de s'implanter dans les médias du Québec, les réseaux des répondants aux niveaux politique et administratif parce que nous pensons que l'immigration ce n'est pas uniquement l'affaire du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, mais bien de l'ensemble de tous les ministères du gouvernement.

Mon collègue, le ministre délégué aux Communautés culturelles, a annoncé récemment la

Semaine interculturelle nationale qui aura lieu le printemps prochain, et je dois vous dire que le ministère a l'intention de jouer son rôle horizontal - commme je le mentionnais, ce n'est pas uniquement l'affaire du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, mais bien de l'ensemble des autres ministères - a l'intention, aussi, avec la réorganisation du ministère, de vraiment jouer son rôle horizontal avec tous les autres ministères.

Donc, bref, nous avons tenu nos engagements. La population nous a marqué son appréciation en nous faisant confiance à nouveau en 1989. Notre travail est loin d'être terminé. Il nous faut obtenir, comme on l'a mentionné à plusieurs reprises au cours de cette interpellation, la signature de l'entente Canada-Québec. C'est important pour le Québec. Nous déposerons bientôt un énoncé de politique qui proposera une nouvelle route à suivre pour les années à venir. Avec l'augmentation du nombre d'immigrants et le défi de l'intégration, nous avons besoin de la collaboration de tous, de la collaboration des autres ministères, de la collaboration des différentes villes, de la collaboration des leaders économiques, socio-économiques, et aussi de toutes les villes qui sont impliquées dans le processus de régionalisation.

Je n'ai pas eu le temps de l'aborder, mais la question de la régionalisation fera partie de la politique, mais elle est déjà... Le processus, comment pourrais-je dire, le suivi fera, bien sûr, partie de la politique, mais nous avons déjà annoncé l'ouverture de différentes directions régionales, entre autres, dans la région de Sherbrooke, à Hull et à Québec. Et il y aura aussi deux régions dans Montréal même.

Alors, le but de l'ouverture de ces différentes régions, c'est, bien sûr, de préparer la population, mais aussi de préparer le terrain pour la venue de nouveaux immigrants. Nous voulons travailler avec l'OPDQ, avec le ministère de l'industrie et du Commerce. Nous voulons travailler avec les gens du milieu pour qu'ils puissent faire aussi le portrait des besoins régionaux en termes de main-d'oeuvre qualifiée, en termes d'investissements, en termes de sous-traitance, pour être capables de faire la relation entre les besoins économiques du Québec et la sélection que nous faisons à l'étranger.

M. le Président, je ne sais pas s'il me reste encore un peu de temps.

Le Président (M. Gobé): II vous reste une quarantaine de secondes, Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Bon. Compte tenu de l'augmentation du nombre d'immigrants, comme je le mentionnais, le défi de l'intégration est très important. Nous avons besoin de collaboration; y compris, bien sûr, celle de l'Opposition et je suis sûre que nous pourrons l'obtenir, je sais, entre autres, que nous avons toujours obtenu la collaboration du député de Mercier qui est le responsable du dossier de l'immigration et je dois vous dire que, suite à mes nombreuses visites dans les communautés, les communautés ont beaucoup d'estime pour le député de Mercier.

En terminant, M. le Président, je dois vous dire que l'enjeu est trop grand et que le défi est emballant et je pense qu'il faut le relever ensemble. Merci.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme la ministre. Et, sur ces bonnes paroles à l'égard du député de Mercier que j'aperçois maintenant, si, M. le député, vous voulez prendre la parole pour une période de 10 minutes qui clôturera la fin de cette commission.

M. Gérald Godin

M. Godin: Oui, M. le Président. Je me rends compte que, malgré les promesses verbales de M. Mulroney et de M.Bourassa, les projets, pour ne pas dire les rêves en couleur de la ministre, ce qui est bien normal, parce qu'à ce ministère-là on ne peut qu'espérer que le fédéral bouge dans la bonne direction et on peut en fin de compte qu'attendre.

M. le Président, je peux vous dire que c'est désespérant, quand on voit les besoins du Québec et la lenteur du gouvernement fédéral, de continuer à vivre dans ce système-là. C'est la raison pour laquelle il y a dans le salon rouge une commission qui siège et qui ne fait que reprendre en d'autres termes ce que je viens de dire. Alors qu'on avait annoncé que l'immigration serait le prochain dossier réglé par Ottawa et Québec, sur une base bilatérale après l'échec de l'accord du lac Meech, je me rends compte que le Québec est en pénitence dans le coin et que loin de vouloir lui faire des concessions, on le punit, on l'écarté des ententes positives pour nos immigrants futurs et actuels. Donc, on tourne en rond, Mme la ministre. Pour avoir été dans ce ministère-là quelques années, je peux vous dire qu'il n'y a rien de plus désespérant que ce qui se passe avec les fonctionnaires du gouvernement fédéral dans le ministère, parce que, effectivement, on a l'impression qu'ils sont sourds, aveugles et qu'ils ne comprennent rien à ce qu'on leur demande.

L'autre jour, je vous ai vue à la télévision vous plaindre vous-même et invoquer peut-être même un peu le bon Dieu. Vous avez dit: Mon Dieu, qu'ils ne comprennent rien! Effectivement. Donc, le seul moyen, c'est de changer d'école, M. le Président. Quand la direction de l'école dans laquelle on est ne comprend rien et nous met en pénitence dans le coin parce qu'elle n'est pas contente de nous, on change d'école. Ça m'est arrivé plusieurs fois dans ma carrière d'étudiant. Mes collègues diraient: Vous voyez le résultat aussi.

Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: C'est bon.

M. Godin: Je déplore quand même que les efforts que le Québec met pour trouver des solutions à ces problèmes dans le domaine de l'immigration et des immigrants investisseurs risquent d'être perdus. Souvent, d'ailleurs, le Québec fait des expériences que d'autres provinces viennent chercher ici et appliquent à leurs candidats. Elles viennent nous chercher non seulement nos idées, mais notre nombre, notre quota de personnes que nous pourrions recruter. Là, il s'agit pour la ministre et le ministère d'être rapides pour compenser les pertes que nous font subir les autres provinces. Mais je dois dire, par ailleurs, que la diminution du nombre d'entrevues, par mois, décidée par le ministère et la ministre ne peut pas contribuer à faire augmenter de façon satisfaisante le nombre d'investisseurs venant des pays où il y a beaucoup de fric, beaucoup de peurs aussi de fuite de capitaux, nommément à Hong Kong et dans d'autres parties du monde que la ministre connaît aussi bien que moi.

Donc, je suggère à la ministre de se battre pour que nous revenions au même montant de dollars à investir que nous avions avant, ce qui a rapporté au Québec 50 000 000 $ par année, en moyenne, depuis quelques années, si je me souviens bien, parce que si elle se laisse piler sur les pieds, tôt ou tard, ils vont lui piler sur le corps. Et, ça, ce n'est pas un cadeau. Avec les fonctionnaires fédéraux que je connais, ce n'est pas un cadeau. Je ne parle pas de votre sous-ministre qui a une expérience, je pense, dans plusieurs niveaux de gouvernement et qui, mieux que personne, connaît les trucs et les triques de ces fonctionnaires qui, malheureusement, ne travaillent pas pour le Québec, mais travaillent pour le Canada. Quand on aura, nous aussi, notre école, on mettra tous nos efforts, tout notre monde, tous nos cerveaux au service de l'immigration au Québec. Les résultats seront, j'en suis sûr, meilleurs que ce qu'on a vu au fédéral depuis quelques années.

Également, les quotas d'entrevues par mois - 65 par mois à Hong Kong, et 160 à Montréal - je pense que c'est des chiffres trop bas. Effectivement, les investisseurs, c'est-à-dire les conseillers en immigration se plaignent, pas seulement parce que ça leur rapporte moins par année, par mois ou par semaine, mais parce qu'ils croient que ça nuit au Québec que nous diminuions tellement le nombre de personnes que votre ministère et vos agents, vos conseillers voient chaque semaine ou chaque mois. Mme la ministre, un conseil de la part d'un vieux en terminant: Augmentez donc le nombre d'entrevues par mois des candidats qui veulent immigrer ici. Comme on sait qu'il y a une liste d'attente - j'en ai été informé - on ne pourra que récolter plus d'immigrants investisseurs, plus de retombées économiques pour le Québec, plus de clients pour la Banque de Hong Kong qui s'est établie à Montréal et non pas, comme je l'ai dit tout à l'heure, ni à Vancouver ni à Toronto, ce qui est surprenant, à première vue, parce qu'on prétendait toujours que Toronto était la ville en pleine expansion tandis que Montréal était en train de s'effondrer tranquillement, alors que les Chinois, eux, choisissent Montréal comme lieu d'implantation de leur banque au Canada. La Banque de Hong Kong est à Montréal, juste en face d'Hydro-Québec, d'ailleurs. Peut-être qu'un jour Hydro-Québec empruntera de l'argent à la Banque de Hong Kong.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Godin: Nous comptons sur vous, Mme la ministre, pour que, si elle traverse la rue pour emprunter, il y ait assez de "cash" dans les coffres de la Banque de Hong Kong, grâce aux investisseurs chinois, pour qu'ils puissent le faire rapidement et développer enfin la Grande Baleine, le petit esturgeon et tout ce que vous voulez, sur la Côte-Nord. Mais encore faut-il vouloir se battre et pas seulement attendre que le fédéral daigne - je dis bien daigne parce qu'ils se prennent pour l'impératrice de Russie ou d'Angleterre, je ne le sais pas... Mais ils bougent très lentement quand il s'agit du Québec. Comme je l'ai déjà dit au début, le Québec est en pénitence dans le coin, et il faudra beaucoup de patience et surtout d'entêtement pour sortir du petit coin et convaincre ceux qui décident. Parce que le problème du Québec, c'est qu'il ne décide pas. Il est à la merci de fonctionnaires qui, souvent, ne parlent pas notre langue, ne nous comprennent pas, n'endossent pas nos projets, n'endossent pas, non plus, nos projets à long terme ni même nos rêves. Au contraire, ils espèrent que ça ne marche pas pour mieux venir nous aider après, comme si on était sur le BS.

Donc, il faut, pour y parvenir, que la ministre se batte, je dirais à chaque seconde, millimètre par millimètre, pour garder au moins ce qu'elle a, qui est dans l'entente Cullen-Couture et qui est la base du pouvoir du Québec dans le domaine de l'immigration; qui a été obtenu, d'ailleurs, M. le député de l'Acadie, par un ministre péquiste, et qui est la base de ce que les libéraux maintenant utilisent comme outil pour arriver à leurs propres fins. Et d'ailleurs, que ce même gouvernement libéral veuille faire de cette entente-là, signée par un ministre "péquisse", comme on dit de l'autre bord, en fasse une partie de la Constitution canadienne est bien la preuve qu'on ne fait pas, de ce côté-ci, que des erreurs et que, au contraire, l'expérience des deux peut servir. Quand on sera de l'autre bord, peut-être un jour éventuellement, je rendrai hommage à ma prédécesseure, dans une interpellation comme celle-ci, j'ima-

gine - tôt ou tard, on en aura une - pour ses bons coups. Je dirai, Mme la ministre, nous vous remercions de ce que vous avez fait pour le Québec, tout simplement. Et donc, je souhaite que, dans l'avenir, on rende à César ce qui est à César et à la Femme de César ce qui est à la Femme de César, en l'occurrence vous, Mme la ministre, parce que au fond, que faisons-nous ici, sinon appliquer une politique de continuité? Parce que nous savons tous que l'immigration pour le Québec c'est bon, et pour le Québec et pour les immigrants aussi si nous savons les accueillir avec respect, dans l'honneur et l'enthousiasme, si le besoin en est.

M. le Président, je pense que j'ai terminé mon lyrisme hebdomadaire. Comme je parle peu souvent ici, j'en profite quand j'ai la chance. Et je souhaite à la ministre, donc, qu'elle continue à se battre pouce par pouce pour garder au moins ce qu'on a et qu'elle compte sur nous et pas seulement sur les députés conservateurs de son coin ou du nôtre pour réveiller le gouvernement fédéral parce qu'en principe, le gouvernement fédéral est en hibernation. On peut conclure ça de son inaction depuis des années, sinon des décennies, que ce gouvernement-là est en hibernation et ne se réveille, quand le Québec demande quelque chose, que si on fait très mal et qu'on crie très très très fort. Autrement, ils dorment et ils disent: Ne nous en occupons pas; tôt ou tard, ils vont disparaître. Mme la ministre, c'est mon message que je vous fais dans cette interpellation qui se termine sur un message d'amitié et de travail commun. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le député de Mercier. Je tiens à remercier tous les membres de cette commission qui ont participé ce matin à cette interpellation, MM. les fonctionnaires qui accompagnaient la ministre, les gens du Secrétariat ainsi que tous les collègues. Alors, la commission ayant maintenant accompli son mandat, je vais ajourner les travaux sine die.

(Fin de la séance à 11 h 3)

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