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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le lundi 14 juin 1993 - Vol. 32 N° 36

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 86, Loi modifiant la Charte de la langue française


Journal des débats

 

(Quinze heures douze minutes)

Le Président (M. Doyon): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de la culture commence ses travaux, et la séance est ouverte. Le mandat est celui que nous poursuivons depuis quelques semaines maintenant. Il s'agit pour nous de continuer l'étude détaillée du projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française. Je demande à M. le secrétaire de nous indiquer les remplacements.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Fradet (Vimont) sera remplacé par M. Maltais (Saguenay); M. Leclerc (Taschereau) par Mme Boucher Bacon (Bourget); M. Boisclair (Gouin) par M. Jolivet (Laviolette); M. Boulerice (Sainte-Marie—Saint-Jacques) par M. Brassard (Lac-Saint-Jean); M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles) par M. Bélanger (Anjou); M. Libman (D'Arcy-McGee) par M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Président (M. Doyon): Très bien. Donc, quand nous avons ajourné nos travaux vendredi, nous en étions, M. le ministre, à l'article 11. Vous nous aviez fait part de certaines réflexions ou hésitations à ce sujet-là, et nous sommes prêts à reprendre nos travaux là où nous les avions laissés après que les membres eurent été saisis des projets de réglementation que vous avez déposés à cette commission. M. le ministre, vous avez la parole.

La langue des organismes parapublics (suite)

M. Ryan: M. le Président, essentiellement, les modifications qui sont proposées dans le projet de loi visent à remplacer les mots «L'Office» par les mots «Le gouvernement» ou «du gouvernement» quand il s'agit d'un règlement. Ça fait partie de l'économie générale de la Charte, ça. Nous parlons de règlement du gouvernement et non plus de règlement de l'Office. Ça, c'est une première partie.

Autre partie. J'avais indiqué la semaine dernière, avant que nous ne nous laissions, que le quatrième alinéa, dans sa formule actuelle, pouvait donner lieu à certaines imprécisions étant donné qu'on change, la paternité du règlement devant revenir au gouvernement plutôt qu'à l'Office. La difficulté se présentait à compter de la deuxième ou troisième ligne qui disait: Le gouvernement «peut, par règlement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation, pourvoir à la constitution d'un comité d'examen et à son mode de fonctionnement et établir des critères et un mode d'évaluation de la connaissance du français appropriée»; là, j'avais indiqué que, comme le texte se lisait, on pourrait interpréter que c'est le gouvernement qui formerait le comité d'examen. Finalement, ce n'est pas le cas. En lisant le texte attentivement, je pense que le règlement peut très bien prévoir que ce comité d'examen sera formé par l'Office. Et, par conséquent, tout le reste pourra demeurer tel quel, même cet article-là. Je n'éprouve pas le besoin de faire une proposition de modification, finalement.

Le Président (M. Doyon): Très bien. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Mais, à ce moment-là, si le ministre a raison, ce n'est pas parce que l'Office peut le faire en vertu de l'article, c'est parce qu'il peut le faire parce que le gouvernement pourra estimer qu'il peut le faire.

M. Ryan: C'est ça.

Mme Blackburn: Mais il n'y a pas l'obligation de le faire faire par l'Office.

M. Ryan: Comme c'est formulé là, si c'est le gouvernement, non. Non.

(Consultation)

M. Ryan: Je crois que c'est mieux de le laisser comme ça. En ce qui nous touche, je pense que c'est mieux de le laisser comme ça, finalement. Actuellement, il y a un comité d'examen qui est composé de 3 personnes, d'après le règlement. Il y en 1 qui est nommée par l'Office, 1 par l'Office des professions et 1 par le ministre. Donc, ce n'est pas un comité qui est formé par l'Office, c'est un comité qui est formé en vertu d'un règlement. Je pense que c'est mieux de le laisser comme ça. Et je n'ai pas l'intention que ça soit un comité formé autrement que ce n'est mentionné dans le règlement actuel.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, la compréhension que j'ai de l'article 35, tel qu'il va être modifié, ça va être uniquement le gouvernement qui va pourvoir à la constitution d'un comité.

M. Ryan: II peut, par règlement.

M. Bélanger (Anjou): II peut, par règlement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation, pourvoir à la constitution d'un comité

d'examen. Mais l'Office n'aura plus ce pouvoir-là. Il faudrait, à ce moment-là, par un amendement, dire que l'Office pourra pourvoir. Parce que, là, c'est clair que, dans cet amendement-là, c'est uniquement le gouvernement qui va pouvoir pourvoir, par règlement, justement, à la constitution d'un comité d'examen. Je pense que, ça, en tout cas, selon la compréhension que j'en ai, c'est assez évident.

Mme Blackburn: Bien, oui, c'est évident. Parce que, si on veut que ce soit...

M. Bélanger (Anjou): Si on veut que l'Office puisse avoir un tel pouvoir, il faudrait, je pense, faire un amendement pour pouvoir mettre «L'Office» dedans.

M. Ryan: Regardez, nous autres, ici, ce n'est pas dans ces choses-là qu'on va s'enfarger bien, bien longtemps. On pourrait envisager quelque chose comme ceci, M. le Président: Le gouvernement peut, par règlement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation — la suite, là, je le dis à titre «tentatif» ou «tentatoire»; je le déposerai par écrit, au besoin, ensuite — pourvoir à la composition et au mode de fonctionnement d'un comité d'examen constitué par l'Office. Et ensuite: établir des critères et un mode d'évaluation de la connaissance du français appropriée... Si ça convenait aux gens, on le déposerait derechef. Ça va?

M. Bélanger (Anjou): Oui, ça, ça irait.

M. Ryan: Est-ce que je pourrais demander à nos collaborateurs juristes de préparer un projet de modification que je vais relire pour que ce soit sûr qu'on se comprenne?

Une voix: Oui. Vous dites de pourvoir...

M. Ryan: Le titre de commissaire... Ha, ha, ha! Pardon? Le gouvernement peut, par règlement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation. Ça, ça demeure tel quel. Ensuite, pourvoir à la composition et au mode de fonctionnement d'un comité d'examen constitué par l'Office et établir des critères et un mode d'évaluation de la connaissance du français... Le reste demeure tel quel. Les 3 dernières lignes demeurent telles quelles... Non, il y a d'autres mots qui tombent après. Les mots «et à son mode de fonctionnement», ça tombe, ici.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): Juste pour être certain qu'on ne se trompe pas. Quand on dit: «constitué par l'Office», ça ne va pas être formé par l'Office. C'est ça? C'est-à-dire formé par les membres de l'Office?

M. Ryan: Non, non, non. Constitué par l'Office.

Mme Blackburn: Non, non.

M. Bélanger (Anjou): Ça veut dire que l'Office va désigner les membres de ce...

Mme Blackburn: Pourvoir. (15 h 20)

M. Bélanger (Anjou): ...pourvoir à ce que les gens soient nommés sur ce comité-là.

M. Ryan: Mais, dans le règlement, pour l'immédiat, en tout cas, il va être prévu que le comité va demeurer comme il est actuellement: 1 personne désignée par l'Office...

M. Bélanger (Anjou): Oui.

M. Ryan: ...1 personne désignée par l'Office des professions, 1 personne désignée par le ministre.

M. Bélanger (Anjou): Ah, d'accord!

M. Ryan: O.K.? C'est le règlement qui va pourvoir à ça. Ensuite, c'est l'Office qui va constituer le comité.

M. Bélanger (Anjou): Ça va.

Le Président (M. Doyon): Est-ce que, en attendant qu'on l'ait, on peut suspendre 2 minutes...

M. Bélanger (Anjou): Est-ce qu'on a besoin de suspendre?

Le Président (M. Doyon): ...pour avoir le texte, ou si vous voulez suspendre cet article-là et qu'on y revienne dans quelques instants?

M. Ryan: J'aimerais peut-être mieux qu'on suspende l'article, M. le Président, pour y revenir dès que l'amendement sera disponible.

Le Président (M. Doyon): D'accord. Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Doyon): Alors, l'article 11 est suspendu.

Mme Blackburn: Peut-être vous rappeler également qu'on avait annoncé un amendement à cet article-là. Alors, on va y revenir.

Le Président (M. Doyon): Quand on y reviendra. D'accord.

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Doyon): En même temps.

Mme Blackburn: Oui.

M. Ryan: Vous êtes mieux, peut-être, de nous le communiquer tout de suite, M. le Président, qu'au moins on soit averti.

Le Président (M. Doyon): Oui, bien sûr. Mme Blackburn: II a été déposé. M. Jolivet: II a été déposé vendredi. M. Ryan: Oui?

M. Jolivet: C'est comme vos règlements sur les autres parties, si on les avait reçus, ça irait mieux.

Mme Blackburn: Alors... M. Ryan: Pardon?

M. Jolivet: C'est comme vos règlements sur les autres parties, si on les avait reçus, ça irait mieux.

M. Ryan: Vous approchez, là. On approche de 17.

M. Jolivet: O.K.

M. Ryan: II n'en tient qu'à vous.

Mme Blackburn: Nous avions déposé...

M. Jolivet: Non, c'est la réciproque qu'on voulait.

Mme Blackburn: ...un amendement...

M. Ryan: Mais admettez qu'il y a plus de viande dans nos communications.

Mme Blackburn: ...à l'article 11.

M. Jolivet: C'est intéressant de les avoir avant.

Mme Blackburn: L'article 11 du projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française, est modifié par l'ajout, au deuxième paragraphe, après le mot «gouvernement», des mots «, après consultation de l'Office,».

M. Ryan: O.K. Ça, on va le discuter tantôt, par conséquent.

Mme Blackburn: Oui. Alors, on passe à l'article 12, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Oui, l'article 12. Si je comprends bien, il y a un amendement de la part du gouvernement à l'article 12.

L'amendement est le suivant: Remplacer le paragraphe 1 ° de l'article 12 par le suivant: 1 ° le remplacement, dans la première ligne, du mot «deux» par le mot «trois». Fin de l'amendement.

(Consultation)

Le Président (M. Doyon): M. le ministre, je viens de faire lecture de l'amendement que vous proposez à l'article 12, c'est-à-dire remplacer le mot «deux» par le mot «trois». Est-ce que vous avez...

M. Ryan: Oui, l'explication. Dans la modification que proposait le gouvernement, on remplaçait les mots «ne sont renouvelables que deux fois» par les mots «sont renouvelables», ce qui pouvait signifier que le permis pour la pratique de la profession pendant une période d'au plus 1 an pouvait être attribué à titre temporaire, de manière à répéter sans limite. L'amendement aura pour effet de porter le nombre de renouvellements possibles de 2 à 3.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Est-ce que le ministre pourrait nous dire ce qui a fait problème pour qu'on ajoute 1 année?

M. Ryan: Ce sont des cas qui ont été portés à mon attention.

Mme Blackburn: Est-ce qu'il y a plusieurs cas? Est-ce qu'il y a un rapport là-dessus?

M. Ryan: II y en a eu quelques-uns, des cas pénibles. Je n'ai pas de précisions.

Mme Blackburn: Est-ce qu'on pourrait prendre connaissance de ce...

M. Ryan: Non.

Mme Blackburn: ...rapport-là...

M. Ryan: Non.

Mme Blackburn: ...les personnes impliquées?

M. Ryan: Non, je ne donnerai pas connaissance ici.

Mme Blackburn: C'est du domaine public.

M. Ryan: Je ne donnerai pas connaissance ici. Ce sont des cas de gens qui sont partis depuis, et on n'a plus d'affaire à s'adresser à eux autres. Ils sont partis.

Mme Blackburn: Oui, mais, à ce moment-là... Bon, s'ils sont partis, vous ne pouvez pas corriger le fait qu'ils soient partis...

M. Ryan: Non.

Mme Blackburn: ...ça ne les ramènera pas que vous ajoutiez 1 année. Alors, ce qu'on se demande, nous: Vous pensez sincèrement qu'en ajoutant 1 année les personnes qui sont parties seraient restées?

M. Ryan: c'est mieux 3 fois que 2. je pense que ça saute aux yeux, c'est 50 % plus de chances.

Mme Blackburn: C'est mieux 3 échecs que 2.

M. Ryan: Oui, 3 chances que 2. Trois chances! On ne sait pas si la troisième se soldera par un échec.

Mme Blackburn: Sur quel argument le ministre se fonde-t-il pour dire qu'il refuse de porter à notre connaissance et à celle de la commission le nombre de cas impliqués et ce qu'étaient ces cas?

M. Ryan: J'ai déjà donné, dans des échanges antérieurs à cette commission, un exemple élaboré. Je l'ai donné à plusieurs reprises et je n'entends pas le répéter aujourd'hui.

Mme Blackburn: Ce n'est pas ce qu'on vous demande, des exemples élaborés. Je pense que la commission est en droit d'avoir des informations précises là-dessus. J'imagine que le ministre... Il nous a répondu ce matin en Chambre que c'était sur la foi d'un professeur qui avait dit qu'il ne fallait pas faire confiance aux syndicats. J'imagine que toute sa thèse ne se bâtit pas exclusivement sur: j'ai entendu parler, on m'a dit que et, après ça, je passe une toi. J'imagine que vous avez des fondements plus rigoureux.

M. Ryan: À peu près toutes les personnes qui sont dans l'enseignement de l'anglais langue seconde vont vous dire la même chose que ce professeur-là. Ce n'est pas une chose inusitée. C'est une rencontre fortuite. J'ai fait allusion à ça au début de ma rencontre. J'en ai rencontré plusieurs autres qui m'ont dit la même chose. Mais ce n'est pas le sujet que nous discutons présentement. Le sujet que nous discutons présentement, c'est de porter de 2 à 3 les possibilités de renouvellement. ..

Mme Blackburn: Non, non. Le sujet que...

M. Ryan: ...et le gouvernement le propose au nom d'un réalisme élémentaire qui lui est enseigné par l'expérience.

Mme Blackburn: Est-ce qu'il pourrait nous laisser juger du réalisme élémentaire sur la base de rapports concrets ou juste sur la base de rumeurs?

M. Ryan: Non. Je n'ai pas autre chose à ajouter là-dessus.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous expliquer pourquoi son intention première était de ne pas mettre de nombre de répétitions, à savoir combien de fois on pourrait renouveler, et là, tout à coup, il nous arrive avec 3, avec un amendement pour 3? Écoutez, on ne dit pas qu'on est contre l'amendement mais on voudrait le comprendre. En tant que membres de la commission...

M. Ryan: Je vous ai donné le... Si vous lisez...

M. Bélanger (Anjou): Non. Est-ce que je peux finir mon intervention, s'il vous plaît?

M. Ryan: Oui. Très bien.

M. Bélanger (Anjou): Merci.

Le Président (M. Doyon): Oui, M. le député.

M. Bélanger (Anjou): C'est que le ministre doit comprendre que, nous, en tant que membres de la commission parlementaire, on se doit d'essayer de comprendre les principes ou les articles qu'on adopte, savoir c'est quoi l'intention du législateur. Vous savez que les tribunaux, régulièrement, se posent cette question-là. On est aussi, je pense, les membres de la commission, un peu le législateur. Donc, je pense qu'on a besoin de savoir c'est quoi notre intention là-dedans. Alors, moi, j'aimerais comprendre pourquoi le ministre, au début, voulait ne pas mettre de limites quant au nombre de fois que ça pouvait être renouvelé et en faire, finalement, quelque chose qui serait renouvelable ad vitam aeter-nam, pour reprendre une expression qu'il aime bien, et puis, maintenant, on met une limite de 3. Est-ce que c'est une forme de pression de la part de certaines personnes qui trouvaient ça abusif de pouvoir rendre ça renouvelable indéfiniment ou... Pourquoi de 2 à 3, alors qu'au début... Pourquoi il a changé d'idée, le ministre? Pourquoi il voulait ne mettre aucune limite quant au renouvellement puis, maintenant, on arrive avec un amendement? Puisque le ministre ne veut pas nous faire part de ses expériences vécues...

M. Ryan: Non. Parce qu'il en a déjà fait part. Il en a déjà fait part à cette commission.

M. Bélanger (Anjou): Quand?

M. Ryan: À 2 ou 3 reprises, à tout le moins.

Mme Blackburn: Sur parole, il faut le croire. Tu

n'as pas compris le système?

M. Bélanger (Anjou): Je n'étais pas sur cette commission-là, mais ça pourrait...

M. Ryan: Regardez... Non, non. Laissez-moi finir. Tantôt, je vous ai laissé parler.

Tout d'abord, nous avons un nombre de cas, chaque année, très limité. On a déjà distribué des statistiques là-dessus. Pour la deuxième année cette année, le deuxième renouvellement, je pense que c'est entre 15 et 20. Alors, on a été saisi de cas, dans ces catégories-là, qui posaient des problèmes. On se dit: Bien, si on donne une chance qu'ils reviennent... Le permis n'est pas distribué obligatoirement. C'est distribué sur décision de l'Office, sans ingérence politique d'aucune manière. On disait: Vu le très faible nombre de cas qu'il y a, qu'on leur laisse donc la latitude; ils sont capables de prendre ces responsabilités-là. C'est ça qui était le sens de la première formulation.

Maintenant, il y a eu des représentations qui ont été faites, en particulier du côté de l'Opposition. On a dit: Très bien. Ils ne sont pas prêts à prendre ça maintenant; on va mettre 1 année de plus, un renouvellement de plus. C'est ça qui est arrivé.

Et c'est inutile de préciser que cette disposition s'applique particulièrement aux ressources hautement spécialisées qu'on veut aller chercher dans d'autres pays afin de les mettre à contribution au Québec même. Vous savez que, dans les résolutions adoptées par le Conseil général du Parti libéral en avril, l'une de ces résolutions disait qu'il fallait prévoir une attention spéciale pour les cas de personnes possédant une compétence élevée mais qui peuvent avoir des difficultés au point de vue de la langue officielle. Ça ne devrait pas être une raison pour les exclure du Québec, ça. Alors, c'est ça qui est la provenance de cette modification-là. Ce n'est pas une chose inventée dans le cerveau du ministre, pas du tout. (15 h 30)

Maintenant, je donne une autre considération qui influence le gouvernement. Aux États-Unis, ils ont enrichi énormément le milieu scientifique, d'abord dans les années trente, en faisant venir des savants des pays qui étaient sous domination nazie. Ils les ont admis dans des universités et des collèges. Ils ne leur ont pas fait passer le test d'anglais. Ils ont dit: Vous allez venir, vous avez une discipline dont vous êtes les maîtres. Le reste, vous vous arrangerez avec ça. Vous l'apprendrez sur les lieux. Ça a été la même chose au lendemain de la guerre. Ça continue maintenant avec des spécialistes et des experts qui viennent des pays qui étaient sous la domination soviétique. Ça enrichit une culture. Ça la diversifie beaucoup. Il y a des scientifiques de grand renom aux États-Unis qui n'auraient pas été capables de passer l'examen de l'Office en anglais pendant plusieurs années.

On se dit: On met les chances du côté du Québec plutôt que du côté d'une règle d'airain. C'est ça qu'on fait, et il semble que l'opinion ne soit pas prête à accepter plus qu'un troisième renouvellement. C'est mieux que rien. C'est pour ça qu'on en a 3. Il me semblait que, dans l'ordre de grandeur où on était, il n'y avait aucun risque pour l'avenir de la nation à laisser un peu plus de latitude là-dessus. Je continue d'avoir cette opinion.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Laviolette, vous m'avez demandé la parole; préférez-vous que votre confrère continue?

M. Jolivet: II peut continuer. Je parlerai après. Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, le ministre comprendra, dans l'exemple qu'il m'a donné, que je sais qu'il y a eu des cas de savants allemands, pendant la guerre, parce qu'ils avaient été persécutés par le régime nazi, qui sont venus travailler aux États-Unis et qui sont devenus citoyens américains. Mais le ministre comprendra certainement qu'il y a des dispositions qui ont été prises, au moins, pour qu'ils apprennent l'anglais. C'est certain. On ne ferait pas enseigner dans une université américaine des professeurs qui parlent uniquement l'allemand à des étudiants qui ne parlent pas un mot d'allemand. Alors, ce n'est peut-être pas... Soit qu'ils connaissaient déjà l'anglais ou il y a des dispositions qui ont été prises. Je pense quand même que c'est un principe que, quand on a un professionnel ou un professeur qui enseigne dans un pays, on s'arrange pour qu'il ait une connaissance appropriée de la langue nationale pour pouvoir passer son enseignement. Je pense, en tout cas. L'exemple... Je comprends...

M. Ryan: Mais ce n'est pas...

M. Bélanger (Anjou): Moi aussi, je suis pour l'enrichissement de quelqu'un qui provient d'un autre pays et qui vient nous enseigner. C'est un principe fondamental, ça. D'ailleurs, c'est pour ça que les universités encouragent leurs étudiants à aller dans des pays étrangers pour faire leur thèse de doctorat, parce qu'il y a des échanges culturels incroyables à pouvoir, comme ça, s'échanger des étudiants ou des cerveaux entre pays. Mais je pense que l'exemple du ministre, en tout cas, n'est peut-être pas tout à fait adéquat.

M. Joiivet: M. le Président...

Le Président (M. Doyon): Un instant! M. le ministre, est-ce que vous voulez...

M. Ryan: Juste une réponse à cette intervention. Il en est venu plusieurs au lendemain de la guerre, au Québec, et pendant les années de la guerre aussi. Il en est venu de pays slaves en particulier, qui parlaient un français barbare, qui ont été admis à enseigner les

sciences, même dans nos universités francophones et anglophones, qui ont offert une très grande contribution, qui sont parvenus à une maîtrise convenable de la langue française. Ça leur a peut-être pris 5, 10, 15 ans. Si on avait eu une règle d'airain comme celle-ci — il n'y en avait pas, à ce moment-là, fort heureusement — il y en a peut-être plusieurs qui auraient été obligés de repartir. Et là on a pu les garder. Leurs enfants se sont francisés. Ils font partie du paysage maintenant. C'est un enrichissement pour le Québec. C'est ça qu'on vise. On vise à avoir une loi qui, tout en affirmant des principes fondamentaux, ne sera pas un carcan.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Laviolette.

M. Joli vet: M. le Président, là, je vais essayer de comprendre. C'est un permis temporaire. Actuellement, en vertu de la loi, il ne serait renouvelable que 2 fois. Le ministre nous indique qu'en ajoutant 3 il donne 1 chance de plus. Est-ce que je comprends?

M. Ryan: Oui.

M. Jolivet: Bon! Ça, c'est votre raisonnement, là, que j'ai bien compris jusqu'à maintenant. Là, vous faites un amendement en mettant «trois» au lieu de «deux». Mais, si je prends votre texte initial, dans votre texte initial, c'est marqué: le remplacement, dans les première et deuxième lignes, de ce qui suit: «ne sont renouvelables que deux fois,» par les mots «sont renouvelables». Si je relis le texte, les permis visés à l'article 37, qui sont des permis temporaires, sont renouvelables — c'est ce que je comprends, là — avec l'autorisation de l'Office de la langue française. S'ils sont renouvelables par l'Office de la langue française, si je suis votre raisonnement, dans ma tête à moi, s'ils sont renouvelables, n'indiquant pas le nombre de fois, c'est qu'ils deviennent renouvelables automatiquement, indéfiniment. Donc, si je suis votre raisonnement, pourquoi vous mettez 3? Pourquoi mettre 3? Avant, c'était indéfi-nement, dans ma tête à moi. Est-ce que je comprends bien?

M. Ryan: Regardez, avant ça, là, il faut lire le texte si on veut se comprendre. Le texte se serait lu comme suit: «Les permis visés à l'article 37 sont renouvelables, avec l'autorisation de l'Office de la langue française, si l'intérêt public le justifie.»

M. Jolivet: J'ai bien compris. M. Ryan: C'était très bien.

M. Jolivet: Oui, oui, mais ce que je veux dire, là, c'est que vous, vous aviez proposé cet amendement-là par l'article 12 qui amende l'article 38, et vous nous dites qu'ils sont renouvelables si l'intérêt public le justifie.

M. Ryan: Oui, mais, là...

M. Jolivet: Bon! Si l'intérêt public le justifie, ne mettant pas le nombre de fois, ça veut dire que c'était renouvelable 5 fois, c'était renouvelable 6 fois, 7 fois.

M. Ryan: Oui.

M. Jolivet: Oui. Mais, là, là, ce que vous venez de me dire, c'est que vous l'enlevez, ça, en mettant «trois» au lieu de «deux». Vous venez de le restreindre alors que vous nous donniez comme argumentation tout à l'heure que vous l'augmentiez. Je ne comprends plus rien, moi, là.

M. Ryan: C'est à cause de vous autres. Regardez, je vais vous dire franchement...

M. Jolivet: Dans le premier, il aurait été mieux de le laisser, d'abord, même si j'étais contre.

M. Ryan: Non, mais c'est ça. C'est à cause de vous autres, c'est à cause de vos protestations.

M. Jolivet: Ah!

M. Ryan: Ce n'est pas d'autre chose que ça. Si vous êtes prêts à accepter la formulation initiale, on va y revenir en courant.

M. Jolivet: Qu'est-ce que vous voulez avoir? L'initiale, c'est 2 fois?

M. Ryan: Non, non. Le texte que nous avons dans le projet de loi, c'est une concession que nous vous faisons. J'espère au moins que vous allez l'accepter.

M. Jolivet: À nous autres? Vous nous faites une concession à nous autres?

M. Ryan: On en fait souvent, et vous ne les comptez pas. Mais c'est pour vous autres, ça.

M. Jolivet: Bon. Moi, j'aimerais savoir quels sont les genres. Parce que, là, vous ne voulez pas parler des cas individuellement, mais j'aimerais bien entendre les genres de cas qu'on a eus. À la demande de qui vous avez eu ça? De la Fédération des travailleurs du Québec, FTQ, autrement dit? De la part de qui?

M. Ryan: Ici, ça, c'est pour l'admission à des professions...

M. Jolivet: Je sais.

M. Ryan: ...qui sont comprises dans la législation sur les professions. Je ne sais pas combien il y en a; il doit y avoir une soixantaine de corps professionnels, en tout. L'an dernier, les premières autorisations de

renouvellement, il y en a eu 75, à peu près. On va avoir des chiffres plus détaillés tantôt, je pense, hein. M. Rondeau est-il là?

Une voix: Son messager s'en vient.

M. Jolivet: On ne visera pas le messager.

M. Ryan: O.K. Les deuxièmes autorisations, il y en a eu une quinzaine.

M. Jolivet: Mais quel genre? Quels sont les genres?

M. Ryan: Moi, je ne peux pas vous dire. Je ne peux pas vous dire. Je n'ai pas regardé ça en détail.

M. Jolivet: Mais, écoutez, vous nous demandez, à nous autres, de nous prononcer sur quelque chose, et vous dites...

M. Ryan: Oui, oui, oui. Je demande ça, 3 au lieu de 2; 3 fois au lieu de 2. Il me semble que c'est assez simple. On est dans un ordre de grandeur. On veut ouvrir le Québec et non pas le fermer. Il n'y a aucune espèce de risque pour le Québec à mettre 3 au lieu de 2. On aime l'ouverture plus large que celle plus étroite.

M. Jolivet; Mais, là, je ne comprends plus rien. C'est que tout à l'heure vous aviez l'ouverture ad vitam aeternam, selon le bien public, si le bien public l'exige. Là, vous venez nous dire que vous nous traitez de n'importe quoi. On ne vous a pas demandé ça, là. On vous demande de nous dire la vérité. Pourquoi vous voulez passer de 2 à 3 alors que vous étiez ad vitam aeternam avant? Et vous venez nous dire que, de passer de 2 à 3, c'est à notre demande et c'est mieux. Voyons donc! Je ne suis pas niaiseux, moi, cet après-midi. Je veux juste savoir pourquoi.

M. Ryan: C'est ça.

M. Jolivet: Nous autres, on était contre le fait que ça soit renouvelable ad vitam aeternam.

M. Ryan: M. le Président, je pense qu'on tourne en rond et on n'avancera à rien comme on est partis là. On n'avancera à rien. Nous avons écouté ce qui s'est dit. Nous sommes convaincus que la proposition initiale était une proposition bonne pour le Québec. On a répandu toutes sortes de légendes à travers le Québec voulant laisser croire que le gouvernement voulait ouvrir toute grande la porte des professions à n'importe qui qui ne parlait pas le français au Québec. Ça, c'est votre langage. J'espère que vous le reconnaîtrez.

M. Jolivet: Non! Non! Non!

M. Ryan: Eh bien! franchement, là, c'est ce que nous avons entendu. C'est ce que nous avons entendu à maintes reprises...

M. Jolivet: Vous ne visez pas le bon messager, là, vous.

M. Ryan: ...à maintes reprises, à maintes reprises. Et là nous disons, pour calmer ces appréhensions, nous allons mettre 3 fois au lieu de 2. C'est tout.

M. Jolivet: Dites donc de la part de qui vous avez eu des pressions et quels en sont les genres. Dites-le donc au lieu de dire n'importe quelle baliverne. Je suis tanné, moi, de me faire dire un tas de balivernes. Je n'ai jamais dit ça.

M. Ryan: C'est ça qui a été dit.

M. Jolivet: Mon parti n'a jamais dit ça. Non, ce n'est pas vrai, ça.

Mme Blackburn: M. le Président, je pense que...

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: ...la vérité a ses droits. Le ministre se plaît souvent à rappeler ça. On doit à la vérité et il doit à la vérité de rappeler correctement ce que nous avons dit sur cette question. C'est qu'il envoyait un message qui était confus et qui créerait de la confusion, particulièrement chez les immigrants, en leur disant: Vous pouvez venir travailler au Québec, et un permis... Évidemment, ils avaient un permis temporaire pour travailler au Québec, même s'ils ne connaissaient pas le français, et ce n'est plus important que vous appreniez la langue. C'est ça que nous avons dit, essentiellement. Et c'était par rapport au message qui était véhiculé. Alors, on ne peut pas dire n'importe quoi.

M. Ryan: C'est ça qu'on a compris.

Mme Blackburn: Alors, là-dessus, M. le Président, j'appellerais le vote sur l'amendement.

M. Ryan: M. le Président, c'est ça que nous avons compris qu'ils avaient dit.

Mme Blackburn: Le vote est appelé.

Le Président (M. Doyon): Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention sur l'amendement dont j'ai fait lecture tout à l'heure, je demanderais à ceux qui sont...

M. Brassard: M. le Président, cependant, je souhaite que, pour la suite des choses, nous réussissions, comme dans ce cas-là, semble-t-il, à convaincre le ministre à d'autres amendements, à d'autres suggestions. Là, il me surprend...

M. Jolivet: ...le convaincre.

M. Brassard: ...le ministre m'étonne.

Une voix: II plie sous l'Opposition.

M. Brassard: On a réussi à le convaincre, sem-ble-t-il, et je ne m'en doutais pas. C'est une surprise, là. Je suis complètement surpris aujourd'hui. On a réussi à convaincre le ministre de changer des choses dans son projet de loi.

M. Jolivet: Pourtant, la députée de Terrebonne n'est pas ici. (15 h 40)

M. Brassard: Je suis vraiment étonné, et j'espère que ça va continuer comme ça.

M. Jolivet: M. le ministre, la députée de Terre-bonne n'est pas là, en plus.

Le Président (M. Doyon): Alors, les membres sont prêts à voter?

Une voix: Oui.

M. Ryan: Tu sais, on peut bien dire toutes sortes de choses à la légère, ça va bien, mais, si le député suivait un peu plus le travail de la commission, il se souviendrait que cet amendement est parmi ceux que nous avons déposés dès le début de la semaine dernière, au tout début des travaux de la commission.

Mme Blackburn: Ce n'est pas l'Opposition.

M. Brassard: Ce n'est pas ça, la nouveauté. La nouveauté, c'est que vous avez changé ça parce qu'on vous aurait convaincu.

M. Ryan: Laissez-moi terminer. Non, laissez-moi terminer. Je l'ai dit, justement. Quand nous avons expliqué ces amendements au tout début des travaux relatifs à l'examen détaillé du projet de loi, j'ai dit que nous tenions compte des représentations qui avaient été faites. C'est pour ça que nous mettions 3 au lieu de 2, surtout 3 au lieu de renouvelable un nombre indéfini de fois. Il y a toujours eu, dans les dispositions que nous avons recommandées, le maintien de la disposition voulant que ce soit fait sur autorisation, parce que le permis est accordé par le corps dirigeant d'une profession mais sur autorisation de l'Office de la langue française, si l'intérêt public le justifie. Il y a toujours eu 2 clés qui étaient là, dans la formule initiale du projet de loi, et qui demeurent aussi.

Le Président (M. Doyon): Donc...

M. Jolivet: ...M. le Président, aujourd'hui, là, c'est de nous faire dire que c'est nous autres qui avions dit des choses qu'on n'avait pas dites.

M. Ryan: Mais ça a été confirmé...

M. Jolivet: II y a des gens qui représentent la population qui sont venus le dire ici. Je comprends, la FTQ l'a demandé. Elle a dit que c'était trop, les mots «renouvelables ad vitam aeternam». Ne venez pas nous dire que c'est nous autres qui avons tout dit ça. Nous autres, ce qu'on a dit, on voulait revenir à 2 reprises.

M. Ryan: Ça a été confirmé par la députée de Chicoutimi.

M. Jolivet: Non, monsieur!

Mme Blackburn: Non, M. le Président.

M. Ryan: Je regrette, ça signifie la même chose.

M. Jolivet: Vous interprétez. Moi, je ne ferai pas de dogme de foi ici; je m'appelle saint Thomas, moi... Thomas, pas saint Thomas. Pas encore.

Mme Blackburn: Du moment que ce n'est pas lui qui le dit, c'est des balivernes. Le vote...

Le Président (M. Doyon): À l'ordre! Donc, que ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien l'indiquer, s'il vous plaît. M. le ministre.

M. Ryan: En faveur.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix.

M. Bradet: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Messier: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: Pour.

Le Président (M. Doyon): Que ceux qui sont contre...

Des voix: Non, non.

Le Président (M. Doyon): Vous êtes pour? M. Jolivet: Bien oui! À défaut d'avoir 2... Le Président (M. Doyon): Alors, Mme...

M. Brassard: On a réussi à convaincre le ministre et on va être contre? Voyons donc!

M. Jolivet: C'est une victoire décisive.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Pour.

Le Président (M. Doyon): Alors, tout le monde est d'accord. C'est unanime. L'amendement est adopté. Je m'abstiens, comme président. M. le député de Lavio-lette!

M. Jolivet: Excusez-moi.

Le Président (M. Doyon): Donc, nous revenons à l'article, tel qu'indiqué au projet de loi lui-même, 86. Cet article est le suivant. J'en fais la lecture. L'article 38 de cette Charte est modifié par: 1° le remplacement, dans les première et deuxième lignes, de ce qui suit: «ne sont renouvelables que deux fois» par les mots «sont renouvelables» — et on a eu 3 au lieu de 2. Alors, ce premier alinéa a été changé.

Le deuxième alinéa est le suivant, tel qu'il apparaît: 2° le remplacement, dans les quatrième et cinquième lignes, des mots «de l'Office de la langue française» par les mots «du gouvernement». Fin de l'article 12. M. le ministre.

M. Jolivet: M. le Président, justement, c'est parce que vous avez dit, je crois, «ne sont renouvelables que deux fois» remplacé par «sont renouvelables»; vous avez dit 3. Je pense qu'on revient au texte initial, «ne sont renouvelables que trois fois».

Le Président (M. Doyon): On s'est entendus sur l'amendement. Ne fendons pas les cheveux en 4, je pense qu'on se comprend.

M. Jolivet: C'est bien important.

Le Président (M. Doyon): Le secrétaire est capable de faire sa job, et il n'a pas besoin de vos conseils. On va se débrouiller très bien, vous allez voir. M. le ministre, sur l'article... Non, c'est que chacun son métier, les... les... seront bien gardés.

M. Brassard: Les chefs.

Le Président (M. Doyon): Les chefs, oui. M. le ministre, sur l'article 12.

M. Ryan: Le deuxième paragraphe, là, consiste à remplacer les mots «de l'Office de la langue française», à la fin de l'article 38, par les mots «du gouvernement», conformément à la logique générale du projet de loi.

Mme Blackburn: M. le Président...

Le Président (M. Doyon): Oui, Mme la députée.

Mme Blackburn: Oui. Nous avions songé à apporter un amendement pour ramener cette responsabilité à l'Office parce que, je pense qu'il faut le dire, en ce qui a trait à l'appropriation par le gouvernement des pouvoirs réglementaires de l'Office, ça a été estimé injustifiable et injustifié par la très grande majorité des organismes qui sont venus en commission parlementaire, et y compris le Conseil du patronat et le Centre de linguistique de l'entreprise qui a rappelé au gouvernement que, dans cette matière, il était important de conserver le pouvoir réglementaire, j'allais dire à une portée de bras du gouvernement, pour éviter toute tentation de partisanerie.

Évidemment, le ministre utilise une espèce d'euphémisme pour prétendre que, du moment où, de toute façon, c'est le gouvernement qui adopte les règlements, c'est du pareil au même. Ça n'est pas vrai que c'est du pareil au même que de faire concevoir les règlements par l'Office, qui les soumet au gouvernement, qui, lui, généralement, les approuve. Il faut qu'il y ait, à ce moment-là, une très bonne raison pour demander des modifications à un règlement. Généralement, lorsqu'un règlement est conçu, pensé par des organismes extérieurs au gouvernement, les seules raisons qui amènent un gouvernement à inviter l'organisme à modifier son règlement, c'est lorsque c'est contraire à une loi, lorsque ça vient contredire des dispositions législatives, lorsque ça peut porter atteinte aux droits et libertés de la personne. Il y a des raisons claires qui indiquent les moments où un gouvernement peut inviter un organisme à revoir son projet de règlement.

Le ministre sait très bien que ce n'est pas ça qu'il fait actuellement. Ce qu'il fait actuellement, il décide que les règlements, dorénavant, seront ceux du gouvernement. Les organismes l'ont mis en garde contre cette pratique qui créait une espèce de confusion, mais également une certaine forme d'insécurité chez les organismes

qui sont soumis à ces différentes dispositions.

Moi, je n'apporterai pas le prochain amendement parce que, d'évidence, il va être considéré comme étant irrecevable. Comme on veut progresser d'ans l'examen de cet article et dans les suivants, cependant, on aurait un autre amendement.

Une voix: Avant d'adopter l'article 12?

Mme Blackburn: Oui, alors, allez-y.

Le Président (M. Doyon): Oui...

M. Brassard: Juste une petite remarque...

Le Président (M. Doyon): Oui...

M. Brassard:... c'est parce que...

Le Président (M. Doyon):... M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard:... j'écoutais, tout à l'heure, le ministre qui nous indiquait que l'Office avait, justement, un rôle essentiel à jouer dans l'autorisation, qu'il y avait une double clé dans l'octroi du permis: il y avait la corporation et il y avait l'Office qui venait confirmer ou autoriser. Et j'ai cru comprendre que l'Office jouait bien son rôle, remplissait bien sa fonction. Et j'ai cru déceler, dans les propos du ministre, une sorte d'approbation du travail effectué par l'Office dans ce domaine-là.

Je suis un peu étonné de voir que le ministre, cependant, dans le même article, une ligne plus loin, décide de retirer à l'Office son pouvoir réglementaire en cette matière; j'ai de la misère à comprendre la logique ou la cohérence de ce raisonnement-là. Si l'Office assume bien sa fonction en ce qui à trait à l'autorisation ou au renouvellement du permis pour ce qui est des ordres professionnels, pourquoi n'est-il pas fiable ni crédible, pourquoi ne lui fait-on pas confiance en ce qui a trait à l'élaboration des règlements régissant cette fonction-là? J'ai de la misère à comprendre. Il y a comme un illogisme, là, à ce point de vue là, qui me saute aux yeux.

M. Ryan: C'est bien simple à comprendre, là... Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: On a décidé, à propos de l'article 35 de la Charte, que les règlements concernant l'admission à l'exercice d'une profession seraient confiés au gouvernement. Ici, c'est un corollaire de ce que nous avons fait, là, à 11, à propos de 35. Nous agissons de manière logique avec nous-mêmes; c'est la même chose.

Mme Blackburn: C'est ça, là...

M. Ryan: On n'est pas pour avoir 2 sortes de règlements. C'est justement ça qu'on veut terminer. On veut avoir une sorte de règlements, qui vont être des règlements du gouvernement, comme c'est tout à fait normal. Il n'y a rien d'extraordinaire là-dedans; on vient de le faire à l'article précédent.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Laviolette. (15 h 50)

M. Jolivet: M. le Président, j'aimerais savoir, parce que, dans le texte, là, initial, avant l'amendement, on dit: Le permis visé à l'article 37 ne sera renouvelable — là, on vient de faire un changement — que 3 fois, avec l'autorisation de l'Office de la langue française, si l'intérêt public le justifie. Et, après ça, on dit que le renouvellement se fait en vertu des règlements édictés par le gouvernement. Si je comprends bien, l'autorisation de l'Office va être en vertu des règlements que le gouvernement va avoir déterminés. Ce n'est pas le gouvernement, donc, qui donne l'autorisation?

M. Ryan: Bien non. Le règlement, lui, le règlement, on en a un actuellement, il y en a un qui existe. Là, c'était un règlement de l'Office, il devient un règlement du gouvernement. C'est le même règlement. Il y a une disposition transitoire à la fin du projet de loi, qui établit que ces règlements-là demeurent. Ça devient des règlements du gouvernement. Tant qu'ils n'ont pas été modifiés, ils demeurent les mêmes. Et l'Office doit procéder à la tenue des examens en conformité avec les règlements, ce qui est normal.

M. Jolivet: C'est juste le mot «autorisation», parce que l'autorisation, ça veut dire que c'est l'Office qui l'autorise, mais il l'autorise en vertu du règlement indiqué par le gouvernement.

M. Ryan: Oui, oui, c'est l'Office qui organise les séances d'examen. C'est l'Office qui organise les séances d'examen, et là il y a un comité qui établit des examens normalisés...

M. Jolivet: C'est parce que j'essaie de voir. Le règlement va-t-il prévoir l'intérêt public? Parce que, là, on dit: II n'est renouvelable que 3 fois, avec l'autorisation de l'Office, si l'intérêt public le justifie.

M. Ryan: Le règlement, qu'il dise ce qu'il voudra, ne pourra jamais effacer ce qui est dans la loi. La loi a toujours antériorité sur le règlement.

M. Jolivet: Ça, vous avez raison.

M. Ryan: Et, quand c'est dit expressément dans la loi, en général, on évite de le répéter dans le règlement.

Ici, je veux juste terminer. Là, c'est prévu qu'il y a un comité qui établit les examens normalisés concernant la compréhension du français oral, la compréhension du

français écrit, l'expression orale en français, l'expression écrite en français, la connaissance, la capacité d'utilisation de la terminologie française de la profession. Alors, pour un renouvellement, ça va être la même chose. Il va falloir que la personne se soumette à un examen qui va être établi par ce comité-là. C'est ça qu'on dit, là; ce comité-là, dont la formation est prévue à l'article 11,35.

M. Jolivet: En fait, c'est l'Office qui, si l'intérêt public le justifie, détermine s'il doit y avoir 1 fois, 2 fois ou 3 fois.

M. Ryan: C'est ça, exactement.

M. Jolivet: Et, à côté de ça, on dit, pour le renouvellement, par exemple, que les intéressés vont devoir se présenter à des examens qui, eux autres, vont avoir été déterminés par l'État, par les règlements, là, du gouvernement.

M. Ryan: Oui, c'est ça. M. Jolivet: O.K.

M. Ryan: Je donne juste une précision, si vous me permettez; tantôt, je ne l'avais pas. L'année dernière, en 1992-1993, il y a eu 76 renouvellements, 61 premiers et 15 seconds renouvellements, et, là-dessus, il y en a 60 qui portaient sur des cas d'infirmières ou d'infirmières auxiliaires. Je crois que, si vous allez dans les hôpitaux anglophones, vous constatez qu'il y a beaucoup d'infirmières ou d'infirmières auxiliaires qui viennent de pays jamaïcains, par exemple, les Antilles, les Antilles anglaises, et, des fois, ça leur prend un peu de temps avant d'acquérir la maîtrise complète du français. Ça fait qu'il y a cette possibilité-là qui leur est offerte ici, qui permet à nos établissements hospitaliers de garder du personnel qui est, en général, d'excellente qualité. Alors, si on enlève ces catégories-là que je viens de mentionner, il ne reste pas grand-chose; il resterait de la place pour le cas dont j'ai déjà parlé.

Le Président (M. Doyon): Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Je pense que le ministre doit comprendre quand même qu'il s'agit d'infirmières, effectivement, qui peuvent prendre un peu plus de temps, avoir un petit peu plus de difficultés à maîtriser le français. Mais, comme elles travaillent dans des établissements de santé au Québec — et je pense à l'hôpital Royal Victoria qui a une clientèle importante de francophones — c'est d'autant plus important qu'elles maîtrisent correctement le français parce que, s'il y a un moment dans la vie où vous avez besoin d'être compris, je pense bien que c'est quand vous êtes malade. Alors, moi, ça va.

Le Président (M. Doyon): Est-ce que le deuxième paragraphe de l'article 12 est adopté? Mme Blackburn: Sur division.

Le Président (M. Doyon): Est-ce que la totalité de l'article 12, tel qu'amendé, est adoptée? Sommes-nous prêts à revenir à l'article 11? Non?

Mme Blackburn: II y a un amendement.

Le Président (M. Doyon): Un amendement sur... On s'en vient à l'article 13, parce qu'on n'est pas prêts.

La langue du travail

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, j'aurais un amendement à proposer, qui serait à l'effet de rajouter un article 12.1. Alors, je suis certain que le ministre va l'entendre et je pense qu'il ne peut pas faire autrement qu'être d'accord avec cet article-là. Mon amendement se lit ainsi: Le projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française, est modifié par l'insertion, après l'article 12, de l'article suivant: 12.1 L'article 41 de la Charte est remplacé par le suivant: «L'employeur rédige dans la langue officielle les communications qu'il adresse à l'ensemble de son personnel, à une partie de son personnel, à un employé en particulier ou à une association de salariés représentant son personnel ou une partie de son personnel. Cependant, dans le cas d'une communication adressée à un employé en particulier, il lui est loisible, avec l'accord de celui-ci, d'utiliser la langue de son interlocuteur. «La signification d'une mesure disciplinaire doit ête rédigée en français ou à la fois en français et dans la langue de l'employé à qui elle s'adresse, à défaut de quoi elle est nulle et de nul effet.»

Alors, M. le Président, je pense que cet amendement a pour effet de bonifier, justement, une disposition que le ministre n'avait pas l'intention de toucher. Et je pense que ça vient tout simplement s'inscrire dans le respect des droits...

Le Président (M. Doyon): Un instant! Un instant, M. le député! Je devrai tout d'abord vous entendre sur la recevabilité, vous-même de même qu'un représentant du parti ministériel, sur le caractère de recevabilité de l'amendement 12.1, tel que vous venez d'en faire la lecture. Alors, sur la recevabilité, strictement parlant, M. le député de Laviolette, vous avez la parole.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je pense qu'à sa face même, prima facie, cet article-là est un ajout à la loi 86, qui a pour but de modifier, puisqu'on est toujours dans la Loi modifiant la Charte de la langue française, de modifier l'article existant, 41, pour le bonifier. Alors, dans ce sens-là, M. le Président, il est recevable, à mon avis.

Mme Blackburn: Je voudrais ajouter également...

Le Président (M. Doyon): Oui, rapidement.

Mme Blackburn: ...comme les notes explicatives indiquent déjà qu'il y a des modifications au chapitre de la langue de travail, il est, à ce double titre, recevable.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a des représentations qui sont faites par les représentants ministériels?

M. Ryan: On va s'en remettre au jugement du président de la commission.

Le Président (M. Doyon): Alors, suspension pour 2 minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 58)

(Reprise à 15 h 59)

Le Président (M. Doyon): On me présente un amendement au projet de loi 86, un nouvel article, l'article 12.1, qui vise à remplacer, en fait, l'article 41. Si on regarde ce que contient l'article 41, il porte sur les communications entre un employeur et son personnel. L'article qui nous est proposé comme amendement élabore sur le même sujet. 11 ne vient pas en contradiction. Il précise certaines données et oblige à certaines choses. Et, dans les circonstances, je suis prêt à considérer que cet amendement est recevable. Donc, sur le fond. (16 heures)

M. Bélanger (Anjou): Oui. Sur le fond, M. le Président, j'aimerais peut-être que le ministre puisse entendre mes arguments. On peut suspendre, peut-être, quelques... Je pense que le ministre...

Le Président (M. Doyon): Suspension. (Suspension de la séance à 16 h 1)

(Reprise à 16 h 3)

Le Président (M. Doyon): Nous sommes prêts à reprendre nos travaux. M. le ministre, juste pour vous situer, l'amendement qui a été proposé par le député d'Anjou, et dont lecture a été faite, a été jugé recevable par la présidence. Nous en sommes maintenant à regarder le fond, et la parole est au député d'Anjou, sur le fond de cet article.

M. Bélanger (Anjou): Bien, M. le Président, je regardais l'article 41, tel qu'il est présentement, qui dit: «L'employeur rédige dans la langue officielle les communications qu'il adresse à son personnel. Il rédige et publie en français les offres d'emploi ou de promotion.»

Alors, je pense qu'on veut bonifier, justement, cet article 41, soucieux que nous sommes des droits des minorités et des gens qui ne parlent pas nécessairement le français, un peu dans la même lignée de ce que, plusieurs fois, le ministre nous a dit. Alors, nous, ce qu'on prévoit dans cet amendement, c'est la possibilité, à ce moment-là, d'utiliser la langue de l'interlocuteur, qui peut être une autre langue que le français, afin, justement, que cette communication soit mieux comprise par l'employé.

Alors, c'est la même chose à propos d'une mesure disciplinaire. À ce moment-là, la signification d'une mesure disciplinaire doit être rédigée en français, ou à la fois en français et dans la langue de l'employé à qui elle s'adresse. Ça, ce n'était pas prévu. Dans l'article 41, tel qu'il est, c'est en français seulement. Nous, on prévoit, avec cet amendement, le français et une autre langue.

Alors, je considère que cet amendement est tout à fait souhaitable. Finalement, on bonifie le projet de loi, et c'est dans le sens, c'est tout à fait dans le sens, même, indiqué à maintes reprises par le ministre responsable de l'application de la Charte. Alors, je vois difficilement comment le ministre pourrait refuser un tel amendement qui, finalement, je pense, répond tout à fait à ses critères.

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: Le texte actuel de la Charte stipule que l'employeur rédige dans la langue officielle les communications qu'il adresse à son personnel. Il y a eu un certain nombre de cas qui ont été portés à l'attention d'arbitres, même des tribunaux. Et je crois comprendre que l'interprétation qui a été retenue, c'est que ces communications sont, en l'occurrence, des communications à caractère collectif, destinées à l'ensemble du personnel. Et ça va être sujet à vérification. On ne peut pas donner une interprétation sûre maintenant. Il faudrait que nous le vérifiions.

Deuxièmement, si la proposition de modification du député d'Anjou était retenue, là, ça voudrait dire que toute communication adressée à l'ensemble du personnel, à une partie du personnel, à un employé en particulier, à un employé en particulier, devrait être rédigée dans la langue officielle. Là, je vais vous dire franchement, je crois que ça va trop loin, «à un employé en particulier». Parce que ça veut dire que vous avez une petite entreprise de 5 employés, qui est dirigée, là, par une personne qui a beaucoup d'initiative mais qui a des problèmes. Et des communications, il peut y en avoir. Ça dépend des entreprises; il y en a où il n'y a pratiquement pas de communications écrites, d'autres où il y en a beaucoup. Là, il s'agit de communications écrites, si je comprends bien. Là, faire une obligation de faire la communication en français partout, dans toutes les entreprises, le législateur n'était pas allé jusque-là parce qu'il avait des motifs de le faire, parce qu'il avait des motifs de le faire.

Il y a peut-être lieu de regarder de près des améliorations possibles, mais je crois que, comme c'est

formulé là, là, ça crée des problèmes d'application auxquels il aurait fallu penser sérieusement. Nous sommes prêts à retenir cette proposition pour étude, mais je ne peux pas l'accepter derechef. Et, s'il y a des améliorations qu'on peut apporter, qui n'iront pas jusqu'à créer une obligation absolue à tous les échelons du fonctionnement de la moindre petite entreprise, je pense qu'à ce moment-là on va se comprendre.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, je ferai remarquer au ministre que, dans le premier paragraphe, on dit «il lui est loisible». C'est que, par rapport à l'employeur, il lui est loisible, avec l'accord de celui-ci, d'utiliser la langue de son interlocuteur. Donc, on ne crée pas ici une obligation. C'est une opportunité qu'on donne à l'employeur. Il n'est pas obligé, à ce moment-là, de la saisir. Alors, c'est une porte, je pense, qu'on ouvre. Et puis, à ce moment-là, justement, dans une petite entreprise où les relations sont très proches entre les employés et l'employeur, à ce moment-là, je pense que c'est tout simplement une certaine souplesse qu'on donne à la loi, et. en tout cas, quant au premier paragraphe, ça ne crée aucune obligation.

M. Ryan: Vous croyez qu'on ne crée aucune obligation?

M. Bélanger (Anjou): Non. La première... «il lui est loisible».

M. Ryan: Franchement, ça... Non, non, mais la première partie du paragraphe crée des obligations additionnelles qui vont bien au-delà de tout ce qu'a imaginé le législateur jusqu'à maintenant, qu'il faut mesurer. «Rédige dans la langue officielle les communications qu'il adresse [...] à un employé en particulier».

Mme Blackburn: Cependant. M. Bélanger (Anjou): Cependant.

M. Joli vet: Cependant. Dans le cas des communications...

M. Ryan: Mais le problème n'est pas là. Ce n'est pas ça qui est le problème. Le problème, c'est qu'il peut y avoir une petite entreprise dont le propriétaire n'est pas capable de rédiger des communications en français; il n'a pas la connaissance de la langue qu'il faut, et il y a des communications qu'il faut faire de manière très rapide, des fois. Il est peut-être capable de les donner oralement en français, mais il n'est peut-être pas capable de les écrire. Et là, si vous l'obligez à mettre de l'écriture partout pour conduire une entreprise...

M. Bélanger (Anjou): Mais, en vertu de 41, il a déjà l'obligation de le faire rien qu'en français. L'article 41 lui donne l'obligation, déjà, de le faire en français. Là, on lui donne la possibilité de le faire dans une autre langue.

M. Ryan: Très bien. On va le laisser comme ça. Si l'obligation est déjà là, on va la laisser comme ça.

M. Bélanger (Anjou): On veut être plus généreux, on va l'améliorer.

M. Ryan: Non, non, je pense que... M. Bélanger (Anjou): On est généreux.

M. Ryan: Jusqu'à maintenant, l'article 41, si vous me disiez: On garde la première partie de l'article 41, on garde l'article 41 comme il est, il n'y a pas de problème là-dessus... Mais, ici, là, je pense qu'on va beaucoup plus loin, à certains égards, que la loi actuelle. Et, par ailleurs, on crée une faculté qui, de toute manière, existe déjà dans les faits. Je ne suis pas opposé à l'idée qui est proposée ici, mais je doute de l'opportunité de modifier l'article 41 à cause de ça. (16 h 10)

M. Bélanger (Anjou): Ce n'est pas évident.

M. Ryan: Pardon?

M. Bélanger (Anjou): Je voudrais juste faire remarquer au ministre que, finalement, on reprend 41 tout simplement en ajoutant une possibilité; et c'est une possibilité. Il lui est loisible, à l'employeur, d'utiliser une autre langue, il n'est pas obligé. «Loisible», ça ne crée pas d'obligation.

M. Ryan: Oui, oui.

M. Bélanger (Anjou): Ce n'est pas marqué «il doit». Donc, c'est pour ça que je ne comprends pas. À ce moment-là...

M. Ryan: Regardez...

M. Bélanger (Anjou): C'est pour ça que je ne comprends pas.

M. Ryan: Tout d'abord, là, il rédige dans la langue officielle. Comme c'est écrit, il peut rédiger ça dans une autre langue également. Ça y est déjà, parce que toute disposition de la loi où il n'est pas prescrit qu'on utilise exclusivement la langue officielle doit être interprétée, en vertu de l'article 89, comme signifiant qu'on peut également utiliser une autre langue. Donc, comme l'article est formulé ici, il permet à l'employeur d'utiliser une autre langue pour communiquer avec un employé. Il n'y a pas... Ça y est déjà, c'est pregnant dans l'article, ça.

M. Bélanger (Anjou): Mais, M. le Président, je

ferai remarquer au ministre qu'on conserve la même façon dans notre amendement. On dit encore «L'employeur rédige dans la langue officielle», on ne dit pas exclusivement, là, on dit encore, on prend la même formulation qu'il y a de prévue dans le 41 original. Donc, encore là, si on prend le même article d'interprétation, ça va être interprété comme quoi il pourrait le faire dans une autre langue, sauf que là on dit qu'il peut en plus prendre la langue de l'interlocuteur. On vient apporter une précision. Je veux dire, on ne vient pas, je pense, d'exclure quoi que ce soit, là.

M. Ryan: Moi, je trouve que la proposition n'ajoute pratiquement rien à ce que nous avons déjà dans l'article 41, plus je la regarde. Si vous voulez me dire exactement ce que ça ajoute puis pourquoi il y a lieu de faire des améliorations, c'est très bien, mais, jusqu'à maintenant, je n'ai pas compris.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Oui, M. le Président, je vois qu'on a plus de misère à convaincre le ministre; les difficultés croissent. J'avais eu quelque espoir tout à l'heure, mais, là, ça se complique.

Quand on regarde 41, tel qu'il est présentement, on dit: «L'employeur rédige dans la langue officielle les communications qu'il adresse à son personnel.» Ça ajoute quoi, ce qu'on a dans notre amendement? Ça évite, je pense, qu'on ait recours à des échappatoires. Parce que, là, 41 dit: «qu'il adresse à son personnel». Nous, on dit aussi «à une partie de son personnel». Donc, ça veut dire, je ne sais pas, un service quelconque de l'entreprise. Parce qu'un employeur pourrait dire: Je rédige dans la langue officielle mes communications à l'ensemble de mon personnel, mais je ne suis pas obligé de le faire pour m'adresser à tel service, le service des ventes ou le service de production; je ne suis pas obligé à ça. Il pourrait, à ce moment-là, ne pas respecter la loi. Donc, on veut éviter ça. On précise aussi «à une partie de son personnel».

Même chose, qu'il faut préciser aussi: les associations de salariés, c'est-à-dire les syndicats, soit représentant l'ensemble du personnel ou une partie du personnel, parce qu'il arrive que, dans les entreprises, il y ait plusieurs syndicats... Bon. Dans les grosses entreprises, parfois, tu as plusieurs syndicats qui représentent le personnel. On veut s'assurer que les communications écrites avec les syndicats, avec les organisations de travailleurs, les associations de salariés se fassent dans la langue officielle. Donc, ça vient préciser, en quelque sorte, clarifier la disposition qu'on retrouve à 41.

Pour ce qui est de l'employé en particulier, encore là, je ne répéterai pas ce que mon collègue d'Anjou a dit. Il y a là un caractère facultatif. Si l'employé, non seulement est un anglophone, mais ça pourrait être aussi un hispanophone, bon, un immigrant qui parle espagnol, on pourrait peut-être utiliser également la langue espagnole, si c'est possible, pour se faire comprendre de cet interlocuteur. Mais, à ce moment-là, pour la personne, pour l'individu, il y a une possibilité qu'on communique dans sa propre langue, autre que la langue officielle. Ça m'apparaît une mesure, comme dit souvent le ministre, une mesure humanitaire.

Et le dernier paragraphe m'apparaît important puisque, dans 41 actuellement, on dit: Les offres d'emploi et de promotion, c'est rédigé et publié en français. Mais il arrive aussi qu'il ne soit pas juste question d'offre d'emploi et de promotion pour un travailleur. Parfois aussi, il est l'objet de mesures disciplinaires. Il est même l'objet aussi de congédiement, peut-être, de mise à pied. Et il n'y a rien qui oblige, dans la loi, à ce que la mesure disciplinaire ou la signification de la mesure disciplinaire soit rédigée dans la langue officielle ou dans la langue de l'employé si ce dernier a eu recours à la possibilité qu'on communique avec lui dans une autre langue que la langue officielle.

Moi, il me semble que ça vient compléter, préciser, clarifier 41 en même temps que ça permet à un individu de demander qu'on communique avec lui dans une autre langue que la langue officielle. Vous savez, c'est un article qu'on retrouvait déjà dans un projet de loi que mon ex-collège de Taillon, M. Filion, avait déposé à l'Assemblée nationale, et un projet de loi que le ministre avait reconnu à l'époque comme étant intéressant, comportant des éléments qui méritaient un examen attentif. Je ne vous le cache pas, c'en est un qui vient de ce projet de loi là puis qui m'apparaît un enrichissement, un approfondissement de l'article 41, tel qu'il est rédigé, tel qu'on le retrouve dans la loi.

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: J'en suis encore à me demander exactement ce que cette modification apporte à ce que nous avons déjà. Je pense que nous avons déjà dans le texte actuel tout ce qu'on voudrait ajouter de manière plus détaillée. Maintenant, je peux faire une chose, M. le Président, je peux retenir cet article-là, avec le consentement de la commission, le faire examiner par nos services spécialisés en relations du travail, voir toutes les implications du projet d'amendement et arriver à une séance suivante avec une position claire là-dessus. Mais je ne peux pas souscrire à une proposition aussi complexe quand on sait combien les relations du travail sont chargées de jurisprudence de toutes sortes. On peut employer un mot dans le langage courant, ici, qui revêt une tout autre signification dans la langue des relations du travail. Il faut absolument consulter des personnes versées en relations du travail pour mesurer les implications précises de formules comme celle qu'on nous propose.

Un homme de bonne volonté peut dire — moi-même, je l'ai déjà dit à propos de cet article-là, et le député le souligne avec raison, et j'en suis tout à fait conscient — ça mérite un examen attentif, mais, à première vue, c'est intéressant. Mais il faut voir tout ce

que ça signifie concrètement pour la vie quotidienne de l'entreprise et se demander si c'est une chose que nous sommes prêts à imposer partout, dans toutes les entreprises, sans nuance, sans distinction. Là, il faut se poser la question.

C'est dans un moment où le gouvernement n'est pas spécialement prêt, enclin à multiplier les contraintes de toutes sortes pour les entreprises qui écrasent présentement sous le fardeau de contraintes réglementaires de toutes sortes. Alors, dans ce sens-là, je suis prêt, M. le Président, à prendre la proposition en considération, à l'examiner et à vous faire rapport à la prochaine séance.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Peut-être rappeler un certain nombre de choses, puis insister... Je suis certaine que le ministre se rappelle, d'abord, le projet de loi 191. Sur ses articles en particulier, nous avions consulté, nous avions consulté pour savoir vraiment l'état de la situation. Et ce que ça nous avait appris, la rédaction de 41, ça avait généré des interprétations différentes pour ne pas dire divergentes. Et selon que le propriétaire ou le patron s'adressait à tout son personnel, il estimait l'avoir fait à tout son personnel, il n'avait pas à le faire par département. S'il y avait 3 unités syndicales et s'il s'adressait à tout son personnel, il n'avait pas à le faire lorsqu'il s'adressait à une unité syndicale de façon particulière.

Alors, on avait constaté que, dans les faits, l'application de cet article-là était rendue extrêmement difficile parce qu'il y avait toute une série d'interprétations extrêmement limitatives dans certains cas, qui avaient, dans les faits, comme effet de brimer totalement ou de contrevenir à l'esprit de ce qu'on voulait de cet article-là. C'était la base de l'amendement qui avait été apporté à 191.

Et en ce qui a trait au deuxième paragraphe, là-dessus, mon collègue a raison. On a au Québec des travailleurs immigrants qui... Bon. On pourra accuser n'importe qui de ne pas leur apprendre suffisamment, ne pas leur donner le moyen de maîtriser le français, mais on sait très bien qu'ils ne maîtrisent, des fois, ni le français ni l'anglais, et ils ne sont même pas bien informés de ce que sont leurs droits. Ils sont incapables de lire les notes les concernant. Alors, on dit que, lorsque ça les concerne de façon particulière, ça devrait pouvoir se faire. Ces travailleurs-là ont des droits que, souvent, ils ignorent et qui sont bafoués parce qu'on ne les connaît pas. (16 h 20)

Par ailleurs, il y a un troisième argument. Le ministre, on a déjà un amendement qu'il a pris en considération et sur lequel on attend toujours que le ministre nous revienne; c'était à l'article 1 du projet de loi. On n'a toujours pas eu de retour du ministre. Là, le ministre dit: Mettez-m'en un autre. Alors, je commence à trouver que c'est peut-être un peu beaucoup.

Et, par ailleurs, quand le ministre avait annoncé qu'il apporterait des modifications mineures à la loi 101, surtout en matière d'affichage, il avait un peu annoncé son intention d'améliorer les articles touchant la langue de travail, le français langue de travail. Je dois dire qu'à ma grande déception on n'en a pas trouvé beaucoup. Alors, comme on a ouvert la loi, nous, et que, déjà, le préambule prévoit qu'il y aura des améliorations en ce sens, on pense que c'est l'occasion d'aider le ministre à faire un travail un peu plus correct et peut-être un peu plus acceptable dans l'opinion publique. Alors, voilà les raisons pour lesquelles il faut militer en faveur du dépôt de l'amendement que vous avez en main. Et j'espère très sincèrement que le ministre va l'accepter.

M. Jolivet: M. le Président?

Le Président (M. Doyon): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui, M. le ministre... Je vais l'attendre, parce qu'il... M. le ministre demandait, par rapport à la loi actuelle, ce que ça apportait de plus, et il ne voyait rien de plus. Je regarde la loi actuelle. On dit, à l'article 41: «L'employeur rédige dans la langue officielle — donc, c'est en français, vu que c'est la langue française, c'est la loi sur la langue française — les communications qu'il adresse à son personnel.» Donc, ça veut dire à tout son personnel, que ce soit une partie ou la totalité, en tout cas, à tout son personnel. Il rédige et publie en français les offres d'emploi ou de promotion. Ce que l'amendement apporte, c'est qu'il dit que les communications s'adressent à l'ensemble de son personnel, à une partie de son personnel, à un employé en particulier, à une association de salariés qui représente soit son personnel au complet ou une partie de son personnel. En français, donc, les communications. C'est ce qu'il dit.

Cependant, ce qu'il ajoute à tout ça, c'est qu'il dit que, dans le cas d'une communication adressée à un particulier, à un individu, par rapport au texte... Parce que, dans le texte initial, s'il s'adresse à son personnel, s'il s'adresse à un individu, c'est son personnel, c'est une partie de son personnel, donc il s'adresse juste en français. Ce qu'ajoute la proposition de mon collègue, c'est qu'on dit qu'avec l'accord de celui-ci, de cet individu-là, il est loisible à l'entreprise, à l'entrepreneur de pouvoir utiliser le français, mais aussi la langue de l'individu.

Dans le cas où on a une mesure disciplinaire, où on y va plus précisément, dans le contexte où il peut être mis en suspension ou qu'une mesure disciplinaire lui est donnée, on dit qu'elle est d'abord rédigée en français, puisque c'est la langue officielle, ou à la fois en français et dans la langue de l'employé à qui elle s'adresse, de façon, justement, à ce que l'individu sache très bien, s'il est d'une autre langue que le français ou l'anglais... Qu'il soit capable de comprendre ce que veut dire la lettre qui lui est envoyée. Donc, ça ajoute

beaucoup, ça personnifie au niveau de l'individu. Ce que le ministre a dit: On va au niveau de l'individu. Et c'est dans ce sens-là qu'on est capable, avec l'amendement proposé, d'y arriver par rapport à la loi actuelle.

Alors, je pense que ça ajoute énormément pour permettre d'aller individuellement chez chaque individu pour essayer de lui faire comprendre, et même dans sa langue si nécessaire.

Mme Blackburn: M. le Président?

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Alors, nous acceptons la proposition du ministre à l'effet de suspendre l'examen de cet amendement. Il a pris l'engagement de nous revenir dès la prochaine séance, c'est-à-dire ce soir, alors, ça irait. Peut-être, en même temps, lui rappeler qu'il serait intéressant qu'il nous ramène l'amendement qui a également été suspendu, à l'article 1. Alors, ça m'irait, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Donc, l'amendement, tel que proposé, qui devait devenir l'article 12.1, est suspendu pour le moment. Nous sommes prêts soit à revenir à l'article 11 ou à passer à l'article 13.

Mme Blackburn: On peut revenir à 11 si le ministre est prêt.

Le Président (M. Doyon): Oui, s'il est prêt, sinon, nous irons à 13. M. le ministre, est-ce que vous êtes prêt à revenir à 11 ou si vous préférez qu'on continue?

M. Ryan: Oui, je serais prêt à vous remettre une proposition d'amendement pour 11, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Très bien. Alors, nous revenons à l'article 11. M. le ministre.

La langue des organismes parapublics (suite)

M. Ryan: Si vous me permettez de présenter la proposition...

Le Président (M. Doyon): Oui.

M. Ryan: ...elle se lirait comme suit: Ajouter, après le paragraphe 3° de l'article 11, le paragraphe suivant: 4° le remplacement, dans les deuxième et troisième lignes du quatrième alinéa, des mots «pourvoir à la constitution d'un comité d'examen et» par les mots «établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office, pourvoir». Le reste demeurerait tel quel. Ce qui veut dire que l'article se lirait comme suit, là:

Le gouvernement peut, par règlement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation...

Une voix: Par l'Office.

M. Ryan: Par l'Office? Non, pas par l'Office. ...d'une attestation. Ensuite, «pourvoir à la constitution d'un comité d'examen», ça, ça serait remplacé par «établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office, pourvoir» à son mode de fonctionnement et établir des critères et un mode d'évaluation de la connaissance du français appropriée à l'exercice d'une profession ou d'une catégorie de professions.

Le Président (M. Doyon): Donc, est-ce qu'on peut avoir votre amendement, M. le ministre, s'il vous plaît? Je le remets au secrétaire. Qui veut s'exprimer sur l'amendement? On veut des photocopies? D'accord. Suspension, le temps qu'on fasse des photocopies.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

(Reprise à 16 h 39)

Le Président (M. Doyon): La commission reprend ses travaux. Nous sommes à étudier un amendement à l'article 11, auquel nous sommes revenus, dont lecture a été faite par le ministre. Et je pense que, M. le ministre...

Alors, l'amendement, d'après ce que je comprends des quelques mots qui se sont rendus à mes oreilles, est un petit peu changé dans le sens que, dans la dernière ligne de l'amendement, au lieu de la virgule qui suit «Office», cette virgule serait remplacée par le mot «et» de façon à... M. le ministre donnera les explications. Ce n'est pas à moi à les donner. C'est pour que l'idée, d'après ce que j'ai compris, qu'on veut avoir dans l'amendement soit atteinte. Donc, au lieu de la virgule qui suit «Office», dans la dernière ligne de l'amendement, remplacer cette virgule par le mot «et», le reste restant pareil. M. le ministre.

M. Jolivet: Mais il y a un autre «et» ailleurs.

M. Ryan: Oui, il y a un «et» qui suit. C'est pour ça que celui-ci avait été mis de côté, mais les rédacteurs considèrent que, si on enlève le mot «et» avant «pourvoir», le passage pourrait être interprété pour signifier que ça s'applique à l'Office et non pas au comité d'examen, que le «et» garantit que son mode de fonctionnement s'applique au comité d'examen plutôt qu'à l'Office. Je pense que c'est une explication qui est plausible. C'est toujours des choses discutables, évidemment, les questions de rédaction, mais je pense qu'il faut porter respect aux auteurs du texte. (16 h 40)

M. Jolivet: Je doute. Je doute, parce que j'ai de la misère... M. le Président, là, avec les amendements qu'on a adoptés, c'est marqué: Le gouvernement peut, par règlement, premièrement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation...

M. Ryan: Et, tantôt, on va ajouter...

M. Jolivet: ...deuxièmement, établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office...

M. Ryan: ...et pourvoir à son mode de fonctionnement.

M. Jolivet: Oui, mais c'est parce que vous avez un autre «et» après ça, avant établir, là.

M. Ryan: On me souffle dans le dos que c'est une autre idée, après le deuxième «et». Oui, on le sait. On le sait, mais c'est lourd quand même.

Mme Lapierre (Lorraine): C'est lourd, mais c'est vraiment «et pourvoir...»

M. Ryan: Oui, en tout cas, on ne fera pas de...

M. Jolivet: Est-ce qu'elle pourrait nous l'expliquer?

M. Ryan: Oui, voulez-vous donner une explication?

M. Jolivet: Oui.

M. Ryan: Je pense qu'on est dans les... En tout cas, donnez les explications, Mme Lapierre. Mme Lapierre, du ministère de la Justice.

Le Président (M. Doyon): Mme Leclerc?

Mme Lapierre: Lapierre.

Le Président (M. Doyon): Lapierre?

Mme Lapierre: Oui. Quand on lit la constitution du comité d'examen et son mode de financement, c'est un tout. O.K.? Ce qui fait que ça fait: «établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office et pourvoir à son mode de fonctionnement et établir des critères et un mode d'évaluation de la connaissance du français.» C'est un tout par rapport à «fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation.» Ensuite, c'est l'établissement d'un comité d'examen et son mode de fonctionnement. C'est qu'il y a 3 réalités différentes.

M. Jolivet: Oui, je sais. Le gouvernement peut, par règlement, fixer les modalités, établir les règles de composition d'un comité d'examen; c'est encore le gouvernement qui doit pourvoir à la suite, pourvoir à...

Une voix: À la composition.

Mme Lapierre: Établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office, pourvoir à son mode de fonctionnement, sans mettre le «et», on a l'impression que le «son» peut se rattacher à l'Office au lieu du comité, si on met une virgule.

M. Jolivet: Puis, après ça, l'autre idée, c'est: établir des critères et des modes...

Mme Lapierre: C'est ça.

M. Jolivet: Tabarouette! Ça va être très lourd, ça. Le gouvernement peut, par règlement, fixer... On va laisser la nuit...

M. Brassard: Pourquoi vous ne faites pas plusieurs phrases...

M. Ryan: Regardez, on va vous proposer une formulation.

M. Brassard: ...avec des points? Faites des points, puis...

M. Ryan: Non, non, regardez, on va vous proposer une formulation. On ne peut pas tout réécrire; on n'est pas ici juste pour faire de la grammaire non plus, hein. Je vais vous proposer...

M. Brassard: C'est important, c'est la Charte de la langue française.

M. Jolivet: Mais, les juges, par exemple...

M. Ryan: Regardez, je vais vous proposer une formulation qui tient compte de tout, je pense.

M. Jolivet: O.K. Parfait.

M. Ryan: Le gouvernement peut, par règlement, fixer les modalités et les conditions de délivrance d'une attestation, établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office, pourvoir au mode de fonctionnement de ce comité et établir des critères et un mode d'évaluation de la connaissance du français appropriée à l'exercice d'une profession ou d'une catégorie de professions. On l'a actuellement dans le texte; on l'a déjà dans le texte de la loi. Je pense qu'avec ces 4 points-là on a tout ce qu'il faut, M. le Président, et ça réglerait le problème.

Le Président (M. Doyon): Alors, pour qu'on puisse avoir le bon texte, on va tout simplement suspendre, avec votre permission, cet article, de façon à ce

que nous ayons des écritures qui correspondent. M. Brassard: Avant...

Le Président (M. Doyon): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: ...M. le Président, j'aurais, quant à moi, à 11.1, un amendement à faire.

Le Président (M. Doyon): O.K. Alors, suspendons l'article 11...

M. Brassard: Suspendons 11.

Le Président (M. Doyon): ...et prenons l'amendement 11.1. On suspend l'article 11, le temps que nous puissions avoir une proposition écrite qui corresponde à ce que le ministre vient de nous suggérer.

M. Brassard: Bien non. Bien non. Bien non. C'est très court. Je suis convaincu que ça va passer comme du beurre dans la poêle; le ministre va accepter ça, ce ne sera pas long. Le projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française, est modifié par l'ajout de l'article suivant: 11.1 L'article 37 est modifié par l'ajout de l'alinéa suivant: «L'Office doit, dans son rapport annuel, faire mention du nombre de permis temporaires délivrés au cours de l'exercice financier ainsi que des renouvellements accordés conformément à l'article 38.»

Le Président (M. Doyon): Voulez-vous faire la distribution, s'il vous plaît?

M. Ryan: Je crois que ce serait mieux après l'article 38. Je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Doyon): Tout d'abord, nous allons décider de la recevabilité de l'article, quitte à le mettre ailleurs si la chose est jugée...

M. Ryan: On devrait le mettre après 38, si vous n'avez pas d'objection.

M. Jolivet: Hein?

Mme Blackburn: Après 38?

M. Ryan: Au lieu de 37, mettre 38; 38.1. Ça serait: 11.1 L'article 38.

M. Brassard: Est modifié.

Mme Blackburn: Oui, ça irait. Il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Doyon): Bon, alors sur la recevabilité...

M. Jolivet: Si on s'entend sur...

Le Président (M. Doyon): Tout le monde est d'accord? Alors...

Mme Blackburn: Alors, ça serait l'article 38.

Le Président (M. Doyon): La proposition d'amendement est donc jugée recevable et, si je comprends bien cet amendement, maintenant, au lieu d'avoir, à 11.1: L'article 37 est modifié, ça serait: L'article 38 est modifié par, etc.

M. Jolivet: On va faire penser à la députée de Terrebonne quand elle réussit à en faire passer un.

Mme Blackburn: Ça va.

M. Brassard: Alors, si le ministre est d'accord, je ne plaiderai pas plus longtemps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: C'est simplement pour avoir des données.

Le Président (M. Doyon): Alors, 37 est remplacé par 38. Le reste demeure pareil. C'est ça?

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Doyon): Sur le fond, M. le ministre.

M. Ryan: Pas de commentaire.

Le Président (M. Doyon): Pas d'objection? Est-ce que l'amendement proposé par le député de Lac-Saint-Jean est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Doyon): Alors, ça dispose de cet amendement.

Mme Blackburn: On va pouvoir dire ça en Chambre, tantôt. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): Nous sommes donc à l'article 13, qui est le suivant... Est-ce qu'on a des amendements à l'article 13, proposés par le gouvernement? Non?

La langue du travail (suite)

M. Ryan: M. le Président, l'article 13, là, est un article qui devrait être examiné plus tard, quand nous aurons disposé des articles relatifs au processus de francisation des entreprises. Je pense qu'il serait prématuré

de l'aborder maintenant, parce qu'il repose sur des modifications qui devront être l'objet d'une décision plus tard.

Le Président (M. Doyon): L'article 13 est suspendu. L'article 14. Il y a un amendement.

M. Ryan: II y a un amendement.

Le Président (M. Doyon): L'amendement proposé par le M. ministre est le suivant. Remplacer l'article 14 par le suivant: 14. L'article 44 de cette Charte est remplacé par le suivant: «44. Toute sentence arbitrale faisant suite à l'arbitrage d'un grief ou d'un différend relatif à la négociation, au renouvellement ou à la révision d'une convention collective est, à la demande d'une partie, traduite en français ou en anglais, selon le cas, aux frais des parties.» Fin de l'amendement proposé. M. le ministre. (16 h 50)

M. Ryan: Selon les avis de nos services, l'arbitrage d'un grief ou d'un différend relatif à l'application ou à la révision d'une convention collective, c'est assimilable à une action de nature judiciaire ou quasi judiciaire et tombe, en conséquence, sous le coup de l'article 133 dont nous avons vu les contraintes qui en découlent en matière d'usage linguistique lors de l'examen de l'article 1 du projet de loi. Alors, il s'agit d'un acte logique par rapport à ce que nous avons déjà étudié. En vertu de l'article 133, la personne qui agit comme juge dans un différend dont sont saisis les tribunaux ou l'organisme quasi judiciaire appelé à intervenir dans un dossier... La personne qui agit comme juge ou arbitre est libre d'utiliser la langue de son choix, l'une des 2 langues officielles du pays. Et, par conséquent, on ne peut pas lui prescrire d'autorité qu'elle utilisera seulement la langue officielle ou qu'elle utilisera obligatoirement la langue officielle.

En conséquence, l'article est rédigé de telle manière que chaque partie concernée puisse avoir accès au texte de la sentence en français, si elle le désire. Elle n'aura qu'à le demander, et l'instance concernée devra s'exécuter. S'il s'agit d'une cour municipale, la version française devra être fournie aux frais de l'administration qui a la charge du tribunal municipal, c'est-à-dire la municipalité, ou les municipalités concernées dans le cas d'une cour qui dessert plusieurs municipalités. S'il s'agit de la Cour du Québec, la responsabilité en incombera au gouvernement du Québec. S'il s'agit de la Cour supérieure et de la Cour d'appel, le gouvernement du Québec étant chargé d'assurer le fonctionnement de ces cours, la responsabilité de fournir la version française lui reviendra. Et ça se termine là.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Avant de passer à l'examen de la proposition d'amendement du ministre, moi, j'aurais une question. À l'article 14, il était prévu au projet de loi, tel qu'il a été présenté en Chambre, que l'article 44 de cette Charte était abrogé. Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui on se retrouve avec une proposition d'amendement? Avant de commencer à se prononcer sur le fond, je voudrais savoir qu'est-ce qui a amené le ministre à un virage aussi important.

M. Ryan: Ce n'est pas un virage majeur, puis la députée se souvient très bien que, quand la Fédération des travailleurs du Québec est venue rencontrer la commission parlementaire, elle a fait part de ses appréhensions à propos de cet article-ci, et j'ai déclaré, à ce moment-là, au président de la Fédération des travailleurs du Québec et à la délégation qui l'accompagnait que nous verrions à maintenir cet article dans des termes, cependant, compatibles avec les dispositions de l'article 1 du projet de loi. C'est ce que poursuit le gouvernement avec le projet de modification dont nous sommes saisis.

Mme Blackburn: Est-ce que la FTQ a été saisie du projet d'amendement, puis est-ce qu'elle s'est dit d'accord avec le sens et la portée de la modification?

M. Ryan: Non. Non. Les propositions d'amendement ont été déposées, si mes souvenirs sont bons, il y a déjà environ 1 semaine à la commission parlementaire. Je pense que tout le monde a eu le loisir d'en prendre connaissance. Et nous maintenons l'essentiel des droits des travailleurs là-dedans, en compatibilité avec les dispositions de l'article 1.

Mme Blackburn: Mais je voudrais savoir quand même. Le ministre nous dit: Ce n'est pas un virage important. Ce n'est quand même pas rien, là. Je veux dire, il estimait qu'on n'en avait plus besoin, de cette disposition-là. Et là il nous dit: Ce n'est pas vrai, on en a besoin d'une. Bon, il faut vraiment la modeler au nouveau pattern que s'est donné le gouvernement, c'est-à-dire qu'il faut rentrer dans 133, en accepter toutes les conséquences dans le sens le plus large et dans l'acception la plus large du terme. Et là on accepte ce qui avait été refusé par les Québécois et les Québécoises. Là, on accepte ces conditions-là et on accepte 133 en son entier. Et, évidemment, non seulement il dit: II faudrait peut-être réajuster ça, mais il faut le mettre dans le nouveau modèle. Je veux juste savoir, au-delà de la remarque de la FTQ, qui était, là-dessus, assez claire, qu'est-ce qui a amené le gouvernement à dire: On n'en avait pas besoin; là, on en a besoin. On en a besoin, mais rentrons ça dans le nouveau modèle québécois, c'est-à-dire le bilinguisme.

M. Ryan: Regardez, M. le Président, à la rigueur, si vous lisez l'article 9 retouché à la suite de la décision qui a été prise ici, on dit dans cet article: «Tout jugement rendu par un tribunal judiciaire et

toute décision rendue par un organisme exerçant des fonctions quasi judiciaires sont traduits en français ou en anglais, selon le cas, à la demande d'une partie, par l'administration tenue d'assumer les coûts nécessaires au fonctionnement de ce tribunal ou de cet organisme.»

Là, ici, dans la modification, nous disons: «Toute sentence arbitrale faisant suite à l'arbitrage d'un grief ou d'un différend relatif à la négociation, au renouvellement ou à la révision d'une convention collective est, à la demande d'une partie, traduite en français ou en anglais, selon le cas, aux frais des parties.»

Alors, ici, la différence qui peut justifier l'inclusion d'une disposition spéciale s'explique par 2 facteurs. D'abord, il y avait eu des interprétations malicieuses ou ignorantes qui ont été diffusées à travers tout le Québec, disant que le gouvernement voulait supprimer des droits des travailleurs. Et nous voulons faire la preuve clairement que c'est une affirmation fausse.

Deuxièmement, il y a cette affaire. On disait: aux frais de l'administration qui est chargée d'assumer les coûts nécessaires au fonctionnement de ce tribunal. Dans le cas des relations du travail, les frais d'arbitrage sont à la charge des parties, non pas du gouvernement, non pas de l'administration mais aux frais des parties. La modification que nous proposons tient compte de cette différence. Mais, substantiellement, il n'y a pas de différence de nature entre les 2 dispositions.

Mme Blackburn: La seule différence, ça vise à bien clarifier la responsabilité reliée aux coûts de la traduction. Je veux dire, si ce n'est pas le gouvernement, ce sont les parties.

M. Ryan: C'est ça.

Mme Blackburn: C'est la seule raison qui vous a amené à introduire ça. Mais ça ne répond pas à la demande et aux inquiétudes de la FTQ.

M. Ryan: II y a d'autres raisons. Nous avons dit clairement à la FTQ, quand elle est venue, que nous avions adopté une règle de conduite qui consiste à légiférer constitutionnellement. Puis nous entendons nous conformer à cette règle et nous en fournissons l'application claire ici.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

Mme Blackburn: Alors, il ne faudrait pas laisser croire... Parce que, là, votre intervention, c'est que vous rappeliez les remarques de la FTQ...

M. Ryan: C'est vrai.

Mme Blackburn: ...en disant: C'est pour se conformer. Ça n'a rien à voir avec les remarques de la FTQ.

M. Ryan: J'ai indiqué clairement à M. Daoust, quand il est venu — puis on sortira les galées, si on le veut — que nous verrions à maintenir cet article-là en conformité avec ce qui est dit à l'article 1. C'est ce que nous faisons.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Oui, je comprends la démarche du ministre. Ça ne veut pas dire que je suis en accord avec lui, mais je la comprends dans le sens où, depuis le début, le ministre a une volonté arrêtée de se conformer, comme il dit, à la Constitution. Et, dans le cas présent, c'est l'article 133 auquel il fait référence formellement.

Ce qui fait problème dans l'article 44, tel qu'il est rédigé dans la loi, ce qui fait problème relativement à l'article 133, c'est uniquement, à mon avis — je me trompe peut-être, mais je ne pense pas me tromper — c'est uniquement la dernière phrase du premier alinéa, qui dit: «Seule la version française de la sentence est officielle.»

C'est ça qui fait problème avec l'article 133. Parce que l'article 133 stipule qu'il y a égalité des 2 langues et que les jugements, les décisions, les sentences dans une langue ou dans l'autre ont valeur légale égale. C'est ça qui fait problème. Si on enlève «Seule la version française de la sentence est officielle», la conformité avec 133 apparaît immédiatement. Et si c'est ça, là, remarquez bien... Si la volonté du ministre, c'est ça, son objectif, c'est ça, c'est la conformité avec 133, moi, il me semble qu'en enlevant seulement la dernière phrase du premier alinéa, «Seule la version française de la sentence est officielle», à ce moment-là, ça indique qu'il y ajuste la version française qui a valeur légale, et là, ça, ça peut être considéré comme une violation de l'article 133. Si on enlève ça, tout le reste est parfaitement conforme, même, à 133: «la sentence arbitrale doit être rédigée dans la langue officielle ou être accompagnée d'une version française dûment authentifiée». Ça veut dire, dans le cas où la décision ou la sentence est rendue en anglais, qu'elle doit être accompagnée d'une version française authentifiée. (17 heures)

Et le deuxième alinéa m'apparaît aussi important: «II en est de même des décisions rendues en vertu du Code du travail par les agents d'accréditation, les commissaires du travail et le Tribunal du travail.» Pourquoi fait-on sauter cela, entre guillemets, cette phrase-là, qui avait quand même son utilité, dans la loi actuelle? Il me semble que l'objectif de se conformer à 133 pourrait être atteint en supprimant seulement la dernière phrase du premier alinéa.

(Consultation)

M. Ryan: C'est plus que ce que souligne le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: J'aimerais savoir ce qu'il y a de plus.

M. Ryan: Quand on écrit «la sentence arbitrale doit être rédigée dans la langue officielle», s'il y avait seulement ça, ça ne pourrait pas fonctionner parce que, justement, l'objet même de la décision de la Cour suprême, c'est de prévoir que la sentence peut être rédigée dans l'une ou l'autre langue, au choix de l'auteur.

Deuxièmement, «être accompagnée d'une version française dûment authentifiée», ça veut dire qu'on obligerait le juge à authentifier la version française de son jugement alors que, lui, ce qui authentifie son jugement, c'est le texte qu'il a rendu lui-même.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, j'ai peine à suivre le raisonnement du ministre parce que, encore là, si on doit appliquer le raisonnement, l'interprétation de 89, le fait, justement, de faire comme mon collègue l'a dit, de laisser 44 tel qu'il est sauf enlever «Seule la version française de la sentence est officielle»... Si on prend l'article 44 en coupant cette phrase-là... D'accord, ça n'empêche pas l'utilisation de l'anglais, parce que 89 dit: «Dans les cas où la présente loi n'exige pas l'usage exclusif de la langue officielle, on peut continuer à employer à la fois la langue officielle et une autre langue.» Donc, on permet quand même l'utilisation de l'anglais et on ne dit pas que c'est uniquement la version en français qui va avoir préséance.

Alors, je pense que le raisonnement de mon collègue de Lac-Saint-Jean est tout à fait cohérent. L'article 44, en enlevant la phrase qui porte problème, je pense que ça permet, à ce moment-là, de rédiger en langue anglaise, et puis il va être officiel quand même.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Oui, M. le ministre.

M. Ryan: J'aimerais peut-être suggérer que notre conseiller juridique, Me Gosselin, fournisse quelques...

M. Brassard: Qu'on connaît bien. Qu'on connaît bien.

M. Ryan: .. .précisions additionnelles à ce sujet.

M. Gosselin (Jacques): À 44, comme on est dans le domaine quasi judiciaire, il faut quand même laisser à celui qui rédige la décision le choix d'opter pour l'une ou l'autre des langues.

M. Brassard: II fa.

M. Gosselin: Si vous voulez, c'est l'arrêt Blaikie, dont on a discuté l'autre jour, qui a été entériné par la Société des Acadiens et par MacDonald contre la ville de Montréal. Donc, il faut que les 2 langues soient sur un pied d'égalité pour que lui puisse choisir celle qu'il va utiliser.

M. Brassard: Mais, dans 44, si vous enlevez la dernière phrase dont je parlais tantôt, il y a liberté de choix. Il peut choisir la langue de sa sentence. Si c'est un juge ou un arbitre anglophone, il va rédiger sa sentence en anglais. Il a le choix.

M. Gosselin: Mais on ne peut pas forcer un juge à authentifier la version de son jugement, parce que ce serait l'inciter à la rédiger en français.

M. Brassard: Ça, ce n'est pas pousser un peu loin l'interprétation des jugements des tribunaux et de la Cour suprême sur 133? Il me semble que, là, on est, comme me souffle mon collègue, plus catholiques que le pape.

Une voix: C'est incroyable.

M. Brassard: Là, on pousse très loin l'interprétation des jugements de la Cour suprême concernant 133. On «pourrait-u» se garder une petite marge de manoeuvre? C'est incroyable. D'autant plus que la faculté de choisir sa langue, la langue du jugement, est parfaitement respectée. Parfaitement respectée. L'arbitre, s'il veut rendre sa sentence en anglais, il le fait. Est-ce que vraiment on va à rencontre des jugements des tribunaux en demandant qu'il y ait une version française?

M. Gosselin: L'article 44 reprend la formulation de l'article 13 de la Charte, pour l'essentiel, qui a été déclaré inconstitutionnel dans Blaikie. Nous autres, c'est notre...

M. Brassard: L'article 13 sur la langue de la législation et des tribunaux?

M. Gosselin: Oui.

M. Brassard: Oui, je sais bien. Je sais bien.

Le Président (M. Doyon): M. le ministre, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Ryan: Je pense que l'objet que nous visons, c'est que la sentence arbitrale soit disponible dans la langue officielle. Je pense que l'effet de la modification proposée serait précisément celui-là. Alors, je pense qu'à la lumière des explications qui viennent de nous être fournies... On peut bien essayer de contourner la difficulté, elle est là, elle n'est pas inventée par nous. Elle est une donnée du réel avec lequel nous devons composer pour légiférer. Je pense que ce qu'il importe d'assurer, c'est que la sentence, encore une fois, sera disponible en français pour celui qui veut l'avoir en français. Pardon?

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi, si le ministre a fini.

M. Ryan: C'est vrai.

Le Président (M. Doyon): À ses frais.

M. Ryan: Aux frais de qui?

Mme Blackburn: À ses frais.

M. Jolivet: À ses frais. Bien, vous dites...

Mme Blackburn: Des syndicats des employés. Oui.

M. Ryan: Non, non, des parties. C'est la règle générale qui s'applique. En général, dans les conventions, les frais d'arbitrage sont partagés par les 2 parties.

M. Jolivet: Est-ce que j'ai mal compris? Tout à l'heure, maître disait ceci. Il disait: On ne peut pas mettre une version française dûment authentifiée. On ne peut pas obliger le juge à authentifier la version française parce que, dans le fond, ça l'oblige à faire sa sentence, à l'écrire en français. C'est ce que j'ai compris. J'ai bien compris. Donc, vous me dites...

M. Gosselin: Ça peut l'induire.

M. Jolivet: J'ai compris ça. Ce que je veux juste bien comprendre, là, c'est que le ministre, d'une part, nous dit: La sentence, elle est en français. C'est ça que j'ai compris, là? Si les parties, les 2 parties... Disons qu'il y a une partie française et une partie anglaise et qu'elles sont devant les juges, le juge va rédiger la sentence en français ou en anglais?

M. Ryan: C'est lui qui va décider.

M. Jolivet: Bon!

M. Ryan: C'est lui qui va décider.

M. Jolivet: Au moment où il décide, s'il est anglophone, admettons, il décide que ça va être en anglais. Moi, ce que je suis en train de dire: Moi, je suis la partie française. O.K.? Admettons. Je veux avoir une version française de la sentence anglaise. Je vais être obligé de payer pour?

M. Ryan: L'idée, c'est que ça va être partagé suivant les règles d'arbitrage...

M. Brassard: En plus, ça ne sera pas authentifié. C'est juste une traduction qu'il va y avoir.

M. Jolivet: Oui, je sais.

M. Ryan: ...suivant les règles de financement de l'arbitrage.

M. Jolivet: Non, je sais. Je comprends, là, mais ce que je veux juste dire, là, c'est que je vais être obligé de la payer moi-même et, en plus, elle ne sera pas authentique. L'authentique va être l'anglaise.

M. Ryan: Vous allez participer au coût. Vous ne payez pas vous-même. Vous allez participer au coût, avec l'employeur. C'est le syndicat, là, ce n'est pas vous.

M. Brassard: M. le Président, ça, c'est une chose, le coût, là, mais ce qui est important, ce que dit mon collègue, c'est qu'elle n'est pas authentique. Si la sentence est rendue par un juge anglophone, il a le droit de le faire. Pas de problème, il a le droit de le faire. Il a le droit de rendre sa sentence en anglais. Là, la partie française dit: Écoutez, moi, là, je voudrais avoir une version française de la sentence. Il va y avoir une traduction. Elle va participer au coût de la traduction. Il va y avoir une traduction, mais ça ne sera pas une version authentifiée, ça va être juste une traduction. C'est un peu curieux, là. Moi, je pense que, là, on pousse la soumission à 133 et au jugement qui porte là-dessus un peu loin, un peu trop loin. Ça devient quasiment de la servilité, à 133, là. Bien, là, écoutez! À partir du moment où le juge a le droit, parfaitement...

M. Ryan: Regardez! Regardez!

M. Brassard: ...a parfaitement la liberté de choisir la langue dans laquelle il va rendre son jugement et il va le rédiger, à partir du moment où cette liberté-là est pleinement respectée, il me semble que, là, on va trop loin.

M. Ryan: Non, mais, ici, là... Regardez, on peut dramatiser à l'infini. Ça, c'est facile. Il n'y a rien de plus facile que ça. Mais, en matière d'arbitrage, si mes informations sont correctes, de manière très générale, l'arbitre est choisi sur accord des 2 parties. C'est là que le syndicat doit exercer son pouvoir de pression. On veut avoir un arbitre qui va être capable de rendre une sentence en français. Il n'y a absolument rien qui l'empêche d'exiger ça au moment du choix de l'arbitre. Et tout le monde sait que ceux que choisit le gouvernement pour les cas où ils doivent être désignés d'autorité... Je prends, par exemple, pour l'arbitrage des premières conventions collectives, à ma connaissance, à 98 %, ce sont des juges français, des arbitres français. On peut bien dramatiser puis monter dans les rideaux à tout propos, mais dans ce cas-ci...

M. Brassard: Moi, je ne monte pas dans les rideaux. Il n'y a pas de rideaux ici, là.

M. Ryan: Non, vous avez parlé de servilité

excessive. Vous, ça ne vous humilie pas? M. Brassard: Oui, oui.

M. Ryan: Ça ne vous humilie pas. Vous projetez les insultes dans toutes les directions, à l'année longue, pratiquement.

M. Brassard: Oui, servilité excessive. Je maintiens mes termes. (17 h 10)

M. Ryan: Mais, nous autres, nous n'acceptons pas ces choses-là. Nous voulons agir de manière responsable, en conformité avec la Constitution du pays, dans le respect des droits des personnes...

M. Brassard: Vous allez trop loin.

M. Ryan: ...dans le respect des droits des personnes. Puis, ce que nous proposons... Encore une fois, au point de vue pratique, je pense avoir établi clairement que ça ne comporte aucunement les risques, encore moins les déviations dont a parlé le député de Lac-Saint-Jean dans son intervention. Tous les moyens sont là. L'arbitre n'est pas choisi par Ottawa, n'est pas choisi par Québec; dans 95 % des cas, il est choisi par les parties elles-mêmes. Qu'elles exercent leur pouvoir de marchandage à ce niveau-là. Il y a tout ce qu'il faut.

M. Brassard: Vous marchandez le français.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, je voudrais rappeler l'opinion de la FTQ là-dessus et les raisons qu'invoquait la FTQ pour demander au gouvernement le maintien de l'article 44 de la Charte de la langue française. Que disait la FTQ? Ils rappelaient que, s'il y a un aspect de la loi sur lequel les travailleurs et les travailleuses sont pointilleux, c'est celui de la francisation des relations de travail, parce qu'ils savent ce que ça veut dire d'avoir une convention collective rédigée en anglais alors que 80 % des travailleurs québécois sont francophones. On n'a pas à vous rappeler encore une fois quelles furent les luttes que nous avons menées pour obtenir le droit de négocier en français. On l'a oublié, mais ce n'était pas évident et ce n'est pas quelque chose qui est figé dans le béton dès que vous lâchez un peu de lest là-dessus.

Alors, ils disent: Le projet de loi 86 ne s'attaque heureusement pas à ce droit mais, dans quelques milieux de travail, encore actuellement, nous dit-on, à la table de négociation, des employeurs imposent — alors, je voudrais bien que le ministre écoute — encore des négociations en anglais, sans traduction simultanée. Encore aujourd'hui, au Québec. Alors, ils ajoutent qu'il faut cependant que le gouvernement comprenne que les relations de travail sont bien plus que celles du droit de négocier. C'est aussi tout le droit quotidien des relations de travail qui est en jeu.

Ils disent: Donc, en abolissant l'article 44 de la Charte, qui, lui, concerne les décisions arbitrales, et ce, au nom de l'uniformité du processus judiciaire — nouveaux articles 7, 8 et 9 proposés par le projet de loi — on met ainsi en péril la francisation des relations de travail. Ce n'est pas l'Opposition qui dit ça, c'est une association syndicale majeure au Québec. Ils disent: Donc, ainsi, on peut en déduire que toute traduction n'aura pas de valeur légale. Dans un Québec francophone, un texte français rédigé à grands frais perdra de sa valeur pour les travailleurs et les travailleuses. Ils disent: Un texte comme ça, est-ce que ça vaudra la peine qu'on le paie alors qu'on ne pourra pas plaider avec parce qu'il n'a pas de valeur légale? Il n'a pas de valeur légale.

De plus, l'application du nouvel article 9 pourra entraîner des coûts substantiels pour les travailleurs et les travailleuses. Et ce qu'ils expliquaient, eux, non seulement ça va coûter plus cher mais ça n'a pas de valeur légale. Et la tentation va être grande, finalement, d'abandonner ce droit-là, parce qu'il ne vous permettra pas de défendre votre dossier sur la base du texte qui n'est pas légal.

Alors, c'est ça que nous disait la FTQ. Et l'arbitre ne manquera pas de porter au compte des parties tous les frais de traduction qu'on lui imposerait. Et les syndicats, travailleurs et travailleuses, devront assumer la moitié sinon la totalité des coûts, ce que les employeurs ne manqueront pas de tenter d'obtenir en négociation. Parce que l'employeur va dire: Écoutez, on partage les frais de l'arbitrage. Ne nous demandez pas en plus de partager les frais d'une traduction qui n'a pas de valeur légale, qui ne permettra pas à l'employé de me dire si j'ai raison ou de plaider sur cette base-là. Voulez-vous me dire ça va être quoi, la valeur? Quel va être l'intérêt pour le syndicat de demander une traduction si elle n'a pas de valeur légale et si elle ne permet pas à l'employé de l'utiliser pour défendre son droit?

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: On peut bien soutenir tout ça, mais, si les...

Mme Blackburn: C'est la FTQ.

M. Ryan: ...conseillers juridiques du gouvernement, qui sont nos conseillers attitrés, nous disent qu'une disposition comme celle-là, pour être constitutionnelle, doit répondre à telle et telle exigence, qu'est-ce qu'on va faire? On peut bien se donner un baroud d'honneur...

Mme Blackburn: Le ministre se rappelle, quand on lisait dans...

M. Ryan: M. le Président, est-ce que je pourrais continuer?

Le Président (M. Doyon): Mme la députée! M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: On peut bien se donner un baroud d'honneur, puis dire: Nous autres, on s'en va...

Mme Blackburn: Dans le doute, on s'abstient. Le Président (M. Doyon): Mme la députée!

M. Ryan: ...avec le drapeau, puis c'est nous autres qui avons raison. Mais, si on induit des groupes à entrer dans cette voie-là, puis qu'ensuite ils se voient frustrés dans leurs attentes par les jugements des tribunaux, serons-nous plus avancés? Encore une fois, si des dispositions constitutionnelles ne nous satisfont point, nous pouvons travailler à les modifier par toutes sortes de moyens légitimes, y compris le moyen majeur que préconise le parti de l'Opposition, c'est-à-dire le changement radical de l'ordre constitutionnel. C'est permis en vertu de notre ordre démocratique. Mais, la condition qui sous-tend ce droit-là, c'est l'engagement de tous à respecter la Constitution comme elle existe. Autrement, tout le reste ne vaut rien. Si l'autre règle devait prévaloir, d'autres éléments pourraient s'en servir pour nous empêcher d'exercer des droits constitutionnels.

Je pense que ça va de soi qu'on ne peut pas prendre dans une constitution seulement la partie qui fait notre affaire. Il faut prendre l'ensemble et en tirer le meilleur parti possible, agir avec la plus grande sagesse possible. Ce n'est pas du tout faire acte de démission ou de servilité que d'agir ainsi. C'est faire acte de réalisme politique, de loyauté envers les institutions qui nous régissent.

On peut bien, encore une fois, décider arbitrairement, ici, le petit groupe que nous sommes: ça, ça ne marche pas, on ne voudrait pas l'avoir comme ça, ça va être comme ça, ce n'est pas comme ça qu'on légifère. Nous l'avons dit souvent, la règle du gouvernement, c'est de chercher le plus honnêtement possible à légiférer dans le respect de la Constitution et, en conséquence, dans le respect des avis fermes que nous donnent les services compétents du gouvernement en cette matière. Puis je tiens à souligner, M. le Président, ayant transigé beaucoup avec les conseillers du ministère de la Justice au cours des 8 dernières années, qu'ils ne sont pas infaillibles. Personne n'est infaillible. Mais je tiens à souligner que, de manière très générale, les avis qu'ils nous donnent sont des avis soigneusement étudiés, appuyés sur un examen attentif de tout ce qui peut être trouvé comme jurisprudence ou comme opinion comparable, contraire, assimilable ou apparentée. Nous voulons agir dans le meilleur intérêt du peuple québécois; je pense qu'ils vont en tenir compte. Nous les payons pour nous donner ces avis-là, ils sont engagés à cette fin-là.

Ce n'est pas tel organisme extérieur ou tel autre qui a été engagé pour servir de conseiller au gouvernement, ce sont les conseillers juridiques du ministère de la Justice. Puis, dans tout ce que nous discutons, tous ceux qui avaient à être consultés l'ont été à maintes reprises, ont formulé des opinions nettes. Puis, quand on essaie de répandre qu'il y a seulement 1 commissaire qui présiderait à tout ça du haut de son trône, c'est absolument faux. Ce n'est pas comme ça du tout que ce projet de loi là a été préparé. Ce n'est pas comme ça que nous discutons actuellement.

Puis, quand l'Opposition nous apporte des suggestions constructives, on est très intéressés à les accueillir, comme nous l'avons fait envers nos services qui nous ont conseillé au cours des mois précédents. Plus on va avancer dans le projet de loi... Mais, d'après ce que je constate, on n'avance pas vite. Plus on va avancer, plus on va s'apercevoir que c'est ça qui est l'économie véritable du projet de loi.

Alors, ici, on peut dire qu'on n'accepte pas la Constitution actuelle et qu'on décide qu'on demande la séparation du Québec. Très bien. Mais, en attendant que la population se soit prononcée majoritairement en faveur de cette option, nous plaidons qu'il faut loyalement respecter la Constitution, surtout quand elle prescrit des droits fondamentaux qui ne portent aucunement atteinte aux nôtres.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le ministre. M. le député...

Mme Blackburn: M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui. M. le Président, tout à l'heure, le ministre nous disait: Si nos conseillers juridiques pensent que cette question d'arbitrage peut aussi être assujettie à 133, on a le devoir de procéder dans l'intérêt supérieur du Québec. Je me dis qu'il y a une autre règle qui dit: Dans le doute, on s'abstient. Pourquoi faudrait-il prendre toujours l'interprétation la plus contraignante, qui va peut-être, et on ne l'a même pas vérifié, au-delà de la portée même de 133? Et ce que dit à cet égard la FTQ: Vous risquez ainsi de miner un processus qui voulait que, les négociations, ça se fasse en français, qu'il y ait une version officielle en français, ce qui permettait aux travailleurs francophones, majoritaires, faut-il le rappeler au ministre, en territoire du Québec, d'avoir un texte légal sur lequel s'appuyer en cas de conflit d'interprétation. C'est ça que la FTQ nous dit. Elle ne nous dit pas autre chose.

Et vos conseillers, ce que je sens dans la remarque du ministre, ils n'ont pas la certitude absolue que ça pourrait échapper à 133. Pourquoi est-ce qu'il faut que le ministre prenne toujours l'acception la plus large et la plus soumise à 133? Peut-être qu'il va au-delà de ce que 133 voudrait. Il faudrait même voir si le gouvernement canadien, qui a 2 langues officielles, a des dispositions similaires dans ses règles. (17 h 20)

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: Je n'ai plus de remarque à faire là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou. M. Bélanger (Anjou): Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Juste une petite question, parce que le ministre doit certainement savoir, dans le secteur du textile, ceux qui négocient... Parce que le principe de base, c'était de permettre à l'individu qui travaille dans l'usine, homme ou femme, de pouvoir savoir ce qui lui arrive. Mais, dans bien des conventions collectives au niveau du textile, en termes de sentence comme celle-là, vous avez des patrons qui sont de tendance anglophone plutôt que de tendance francophone, dans bien des cas, à cause du secteur dans lequel on est, et aussi des syndi-, cats. Moi, je le sais, là. Je peux vous dire qu'à Grand-Mère, chez moi, à un moment donné, il a fallu qu'on se batte, parce que dans la salle Bastarache, sur la 13e rue, à Grand-Mère, il est arrivé un événement où le syndicat parlait en anglais aux employés. Ça n'avait pas de bon sens, parce que c'était une agence internationale. Je vous dis, M. le Président, que l'article, tel qu'il était là, était celui qui permettait de convenir qu'il fallait que ce soit en français. Puis c'est ça que je crains. Alors, c'est pour ça que je dis: Ça ne va pas suffisamment loin par rapport au texte actuel.

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: Dans le texte actuel de la loi, l'article 43 prescrit: «Les conventions collectives et leurs annexes doivent être rédigées dans la langue officielle.»

M. Jolivet: Je parle des griefs, de l'arbitrage et ces choses-là. Je parle de ça, là. Cette partie-là aussi.

M. Ryan: Oui. Là, on arrive à l'intervention d'un individu qui agit comme arbitre au bout de la ligne. C'est là que le lien avec l'article 133 doit être fait.

M. Jolivet: Oui, je sais. C'est pour ça qu'il y avait une authentification d'une version française que l'individu, après ça, pouvait avoir, sachant qu'il pouvait se fier sur ça pour faire valoir ses points de vue futurs. Je connais ces milieux-là.

M. Ryan: Là, vous avez entendu ce que le conseiller du gouvernement nous a dit tantôt à ce sujet.

M. Jolivet: J'ai compris, j'ai compris. Parce que, ce que j'ai compris, ça l'obligeait quasiment, par induction, à aller donner un texte français plutôt qu'un texte anglais et que, à ce moment-là, il avait tendance plutôt à rédiger en français qu'en anglais. Je trouve ça un peu normal, dans le fond, vu que, la majorité des gens à Grand-Mère, c'est des francophones.

M. Ryan: M. le Président, je demanderais qu'on se prononce là-dessus.

Le Président (M. Doyon): Bon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement, tel que présenté par M. le ministre, et dont j'ai fait lecture tout à l'heure? D'autres interventions?

Des voix: Non.

Le Président (M. Doyon): Non. Que ceux qui sont en faveur de l'amendement à l'article 14, qui remplace l'article 44 par un autre, que ceux qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien l'indiquer. M. le ministre.

M. Ryan: En faveur.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix?

M. Bradet: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Richelieu?

M. Khelfa: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Messier: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier?

M. Cameron: Pour.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a d'autres pour? Que ceux qui sont contre cet amendement veuillent bien l'indiquer. Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Laviolette?

M. Jolivet: Contre.

Le Président (M. Doyon): Abstention de la part de la présidence. le secrétaire: pour: 6 contre: 3

Abstentions: 1

Le Président (M. Doyon): L'amendement est adopté. Nous allons revenir, tel qu'il avait été entendu, à l'article 11.

Mme Blackburn: Oui. Pourquoi est-ce que vous n'adoptez pas l'article 14?

Le Président (M. Doyon): On vient d'adopter l'amendement. L'article 14, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Ryan: II est remplacé par le nouveau. Mme Blackburn: Même vote. La langue des organismes parapublics (suite)

Le Président (M. Doyon): Même vote, très bien.

Alors, nous avons un nouveau texte, qui remplace celui qu'on nous avait distribué précédemment et qui reprend les termes qui avaient été utilisés par M. le ministre. Alors, j'en fais la lecture pour qu'on sache exactement où on en est.

À l'article 11, il s'agit d'ajouter, après le paragraphe 3° de l'article 11, le paragraphe suivant, un quatrième paragraphe qui est le suivant: 4° le remplacement, dans les deuxième et troisième lignes du quatrième alinéa, des mots «pourvoir à la constitution d'un comité d'examen et à son mode de fonctionnement» par les mots «établir les règles de composition d'un comité d'examen devant être formé par l'Office, pourvoir au mode de fonctionnement de ce comité». Fin de l'amendement. Alors, compte tenu que... Oui, M. le ministre.

M. Ryan: Non, je n'ai rien à dire là-dessus.

Le Président (M. Doyon): Que ceux qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien l'indiquer. M. le ministre.

M. Ryan: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix.

M. Bradet: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Messier: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: Pour.

Le Président (M. Doyon): Oui?

Mme Blackburn: Ça me tenterait de prendre le vote sur cet amendement, mais on a quand même un amendement sur cette...

Le Président (M. Doyon): Oui, oui, on va... Je sais que vous avez un amendement.

Mme Blackburn: Mais, là, je suis obligée de vous dire que, comme on n'a pas de notre amendement à l'intérieur, c'est contre.

Le Président (M. Doyon): Donc, contre, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Contre.

Le Président (M. Doyon): Abstention de la part de la présidence.

Le Secrétaire: pour: 5 contre: 3

Abstentions: 1

Le Président (M. Doyon): Donc, l'amendement est adopté. Vous aviez un amendement, que vous m'annonciez, sur l'article 11.

Mme Blackburn: Qui a été présenté...

Le Président (M. Doyon): II a été présenté.

Mme Blackburn: ...même 2 fois, si je ne m'abuse: vendredi, à la fin de la séance, et aujourd'hui.

Le Président (M. Doyon): Alors...

M. Ryan: Pendant qu'on cherche ça, M. le Président, je voudrais faire une observation. Tantôt, nous avons adopté un article 11. 1. Il a été adopté, hein?

Une voix: Oui, oui.

M. Ryan: Maintenant, là, on me signale qu'il y a une difficulté. Je vous la signale. C'est qu'on donne à l'Office la responsabilité de faire mention dans son rapport annuel du nombre de permis temporaires délivrés au cours de l'exercice financier ainsi que des renouvellements accordés conformément à l'article 38. Mais, en fait, l'Office n'est pas responsable de la délivrance des permis temporaires, ce sont les ordres professionnels.

M. Brassard: II autorise.

M. Ryan: Pardon?

M. Brassard: II autorise. Il donne l'autorisation.

M. Ryan: Seulement les renouvellements. C'est seulement les renouvellements.

M. Brassard: Pardon?

M. Ryan: C'est seulement les renouvellements qui sont autorisés par l'Office. Mais, pour le reste, il y a des examens...

M. Brassard: Mais, vous parliez, vous disiez qu'il y avait 2 clés. Vous avez utilisé l'expression «2 clés».

M. Ryan: Pardon?

M. Brassard: Le permis est délivré par la corporation, mais avec autorisation de l'Office.

M. Ryan: Oui. Après que la personne a subi un examen institué par un comité. Mais, une fois que la personne a subi l'examen avec succès, là, la corporation délivre le permis. L'Office n'intervient pas là-dedans.

M. Rondeau (Jean-Claude): La première année...

Le Président (M. Doyon): Monsieur, monsieur... Un instant! M. Rondeau, si vous voulez prendre place pour...

M. Rondeau: Jean-Claude Rondeau.

Le Président (M. Doyon): M. Rondeau, vous avez la parole.

M. Rondeau: C'est que, la première année, l'ordre professionnel délivre le permis. L'ordre peut le faire et, pour le renouvellement, l'ordre a besoin de l'autorisation de l'Office; et il peut y avoir 2 renouvellements. Et, si je comprends la portée de l'amendement qui a été adopté tout à l'heure, on est passé de 2 à 3 renouvellements. Mais l'Office intervient simplement sur le renouvellement. C'est l'ordre professionnel qui accorde le permis temporaire, donc pour une possibilité de 1 année. Donc, c'est pour ça que le texte, tel qu'il était proposé, pose difficulté, parce qu'il amènerait, il créerait une obligation pour l'Office de faire rapport de données que l'Office ne possède pas, tandis que l'Office peut évidemment faire rapport des renouvellements parce que chaque renouvellement est décidé par le conseil de l'Office.

Le Président (M. Doyon): Alors, on peut rouvrir l'article 11. 1, si vous voulez, pour tenir compte de ces renseignements supplémentaires, et y revenir quand vous aurez eu le temps d'y repenser, peut-être.

M. Ryan: Excusez-moi. Voulez-vous répéter, s'il vous plaît? J'ai manqué ce que vous avez dit. Quelqu'un me parlait.

Le Président (M. Doyon): Compte tenu des explications de M. Rondeau, ce que je demande...

Mme Blackburn: On pourrait l'amender en conséquence.

M. Brassard: On va l'amender en conséquence.

M. Ryan: Maintenant, il y a un texte, ici, qui vous sera proposé pour fins de brièveté. Il faudrait qu'on modifie plutôt l'article 12 en ajoutant un troisième alinéa qui pourrait se lire comme suit...

Le Président (M. Doyon): Là, M. le ministre, je suis obligé de vous interrompre tout de suite...

M. Ryan: Juste à titre indicatif...

Le Président (M. Doyon): Oui. Ah! à titre indicatif, d'accord. Sans saisir le...

M. Ryan: Non, non, pas du tout. C'est à titre indicatif pour qu'on puisse se comprendre.

Le Président (M. Doyon): D'accord, juste qu'on puisse s'y retrouver. M. le secrétaire est en train d'y perdre son latin.

Une voix:...

Le Président (M. Doyon): Oui, d'accord. M. le ministre, on vous écoute.

M. Ryan: Ce serait quelque chose comme ceci qui viendrait s'ajouter à l'article 38: «L'Office indique,

dans le rapport annuel de ses activités, le nombre de permis dont il a autorisé le renouvellement en vertu du présent article.»

Le Président (M. Doyon): On y arrivera tout à l'heure et...

M. Ryan: Parce qu'on va le faire circuler, si vous me permettez.

Le Président (M. Doyon): Oui, bien sûr. M. Ryan: Ça irait, ça?

Le Président (M. Doyon): Alors, on va en faire faire des photocopies.

M. Brassard: Parce que ça reste dans les limites des pouvoirs de l'Office.

M. Rondeau: C'est normal. (17 h 30)

Le Président (M. Doyon): donc, nous avions un amendement proposé par mme la députée de chicouti-mi, qui était le suivant. j'en fais lecture: l'article 11 du projet de loi 86, loi modifiant la charte de la langue française, est modifié par l'ajout, au deuxième paragraphe, après le mot «gouvernement» des mots «, après consultation de l'office,». fin de l'amendement.

Alors, sur la recevabilité. Est-ce que quelqu'un veut s'exprimer ou si vous laissez la présidence en disposer?

M. Brassard: Ça tombe tellement sous le sens!

Mme Blackburn: Oui, ça tombe sous le sens. Je ne pense pas que...

Le Président (M. Doyon): Est-ce que, du côté ministériel, il y a des interventions? Pas d'intervention, du côté ministériel, sur la recevabilité? Alors, je déclare l'amendement recevable.

Mme Blackburn: Alors, brièvement, sur le fond, c'est que nous croyons que l'Office ne peut pas être complètement évincé du processus d'élaboration des règlements sur cette question. Alors, l'objectif, c'est de dire: le gouvernement, après consultation de l'Office, peut, par règlement. On parle toujours de 2 clés, là; on en a une qu'on ajoute comme garantie pour éviter qu'il y ait du dérapage.

M. Ryan: Est-ce que vous avez expliqué l'amendement? On a déjà disposé d'une proposition semblable à un stade antérieur de nos travaux, puis nous avons invoqué, à ce moment-là, la proposition d'amendement déjà déposée par le gouvernement concernant l'article 42 du projet de loi. Dans cette proposition d'amendement, le gouvernement prévoit que l'Office pourra donner son avis au ministre sur les projets de règlement du gouvernement. Alors, tout est compris là-dedans. Il n'est pas question, dans notre esprit, d'insérer où que ce soit dans le projet de loi une obligation du type de celle que préconise l'amendement de la députée de Chicoutimi. Il faudrait le faire 25, 50 fois. Avec ce qui est prévu là, l'Office pourra donner son avis en tout temps, sur tout projet de règlement, y compris ce que nous discutons à l'article 11.

Mme Blackburn: M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Oui, Mme la députée.

Mme Blackburn: Je pense qu'il faut revenir sur cette argumentation. Le ministre sait très bien que, même si ça donne la possibilité à l'Office de se prononcer sur les règlements, les projets de règlement au moment de la prépublication, le ministre sait très bien que, pour des raisons urgentes, par exemple, il pourrait même ne pas être obligé de prépublier. C'est-à-dire qu'ils entreraient en vigueur dès leur publication, parce que c'est indiqué... Parce que, dans la loi, ailleurs, on retrouve que c'est la nouvelle Loi sur les règlements qui va s'appliquer aussi dans le cas de la Charte — je ne pense pas avoir erré là-dessus — avec le résultat, donc, qu'il pourrait y avoir, en invoquant des raisons d'urgence, entrée en vigueur d'un règlement dès sa publication. Première chose.

La seconde: qu'est-ce que le ministre craint de vouloir associer l'Office à la préparation des règlements? Qu'est-ce qu'il craint? Plusieurs pensent à des règlements touchant particulièrement le Régime pédagogique. C'est qu'il y a une obligation de consulter le Conseil supérieur de l'éducation. Je veux dire, ça n'a pas empêché que les choses se fassent et ça assure une certaine critique de l'extérieur, qui oblige le gouvernement, quel qu'il soit, à faire preuve d'un peu de prudence en ces matières.

Faut-il ajouter que ça a été la critique unanime? S'il y a une chose sur laquelle le gouvernement s'est fait critiquer, c'est sur son approche réglementaire. Ça, ça a fait l'objet des critiques qui sont venues de tous les organismes. Trop de pouvoirs réglementaires au gouvernement, et au gouvernement, précisément, une loi-cadre dans laquelle on définit l'essentiel des dispositions dans les projets de règlement. Je ne pense pas que ça soit demander énormément que de dire, sur ces questions... Comme c'est l'Office qui en réglera une partie, qui gérera une partie de l'activité, pourquoi ne serait-il pas consulté sur cette question? Évidemment, ça ne s'étend pas à toutes les autres dispositions.

M. Ryan: J'ai donné mes explications sur... Une voix: On passe au vote.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet amendement proposé par Mme

la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Non, on prend acte que le gouvernement refuse de se soumettre, de soumettre ses règlements à l'examen de l'Office... Dieu en la personne...

Le Président (M. Doyon): Alors, êtes-vous prêts à prendre le vote? Que ceux qui sont en faveur de l'amendement proposé par Mme la députée de Chicoutimi veuillent bien me l'indiquer. Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou?

M. Bélanger (Anjou): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Pour.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a d'autres personnes, d'autres membres de la commission qui sont pour? Que ceux qui sont contre cet amendement veuillent bien me l'indiquer. M. le ministre.

M. Ryan: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix.

M. Bradet: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Messier: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: Contre.

Le Président (M. Doyon): Abstention de la part de la présidence. le secrétaire: pour: 3 contre: 6

Abstentions: 1

Le Président (M. Doyon): Trois pour, 6 contre, l'amendement est rejeté. L'article 11 lui-même est-il adopté tel qu'amendé?

M. Brassard: Adopté sur division.

Le Président (M. Doyon): Alors, l'article 11.est adopté sur division. Nous en sommes à l'article 15.

M. Brassard: Est-ce que l'amendement de 12...

Le Président (M. Doyon): En effet, oui. Alors, passons à l'amendement de 12. Oui, d'accord.

M. Brassard: Ça va. Revenons sur l'amendement déjà adopté.

Le Président (M. Doyon): Alors, il y avait un amendement qui avait été adopté, qui était de façon... On revient sur cet amendement et on...

M. Brassard: ...de l'Opposition.

M. Ryan: On sait très bien ce que vous visez.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): L'article...

M. Brassard: Que signifient ces propos? Cessez ce procès d'intention, ces propos teintés d'ironie.

Mme Blackburn: Est-ce que le ministre pourrait nous faire part des rapports du caucus, tout à l'heure, quant à l'avenir de cette commission? Et je sens que dans sa petite remarque il y a comme quelque chose qui ressemblerait à un pendant...

M. Ryan: Non. Je vais vous dire ce que je signifiais dans ce cas-ci, pour vous prouver une fois de plus comment vous êtes enclins aux mauvaises interprétations. Je vois que vous vous hâtez pour arriver à l'article 17...

M. Brassard: Oui.

M. Ryan: ...pour avoir enfin connaissance du projet de règlement.

Mme Blackburn: Ah! Là-dessus...

M. Ryan: Alors, est-ce que j'étais injuste?

M. Brassard: Pas vraiment.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): Alors, est-ce qu'il y a encore des membres de la commission pour retirer l'amendement qui avait été proposé précédemment et qui visait à ajouter l'article 11.1?

M. Brassard: M. le Président, dans un esprit de collaboration, pour que nos travaux avancent et progressent, oui, on retire notre amendement.

Mme Blackburn: D'accord. C'est ça.

Le Président (M. Doyon): Donc, cet amendement est retiré.

M. Ryan: Ils veulent l'avoir avant le souper!

Le Président (M. Doyon): Et, à l'article 12, il s'agit maintenant d'amender l'article 12 de la façon suivante. Ajouter, à la fin de l'article 12, le paragraphe suivant: «L'Office indique, dans le rapport annuel de ses activités, le nombre de permis dont il a autorisé le renouvellement en vertu du présent article.» Et fin de l'amendement. C'est bien compris? Est-ce adopté?

Des voix: Adopté.

La langue du commerce et des affaires

Le Président (M. Doyon): L'article 15, maintenant. J'en fais la lecture: L'article 53 de cette Charte est modifié par le remplacement, dans la première ligne, des mots «L'Office de la langue française» par les mots «Le gouvernement». Fin de l'article 15. M. le ministre.

M. Ryan: On avait un amendement 14.1, M. le Président. Je ne sais pas si vous l'avez noté.

Le Président (M. Doyon): Ah! Vous aviez un amendement, oui. Alors, 14.1. On revient à 14.1, plutôt. J'en fais la lecture. Insérer, après l'article 14, l'article suivant: 14.1 L'article 52 de cette Charte est modifié par l'insertion, dans la première ligne et après le mot «dépliants», de ce qui suit: «, les annuaires commerciaux». Fin de l'amendement proposé. M. le ministre, sur cet amendement en particulier, sur 14.1. M. le ministre.

M. Ryan: Ça, c'est une modification qui répond en particulier au cas de l'annuaire, le bottin téléphonique dont nous avons déjà parlé, le bottin des pages jaunes. Il avait été compris pendant un certain nombre d'années que ce genre de publication tombait sous le coup de l'article 58. Il a été compris par la suite qu'il devait plutôt tomber dans le champ de l'article 52. Mais, comme il n'y a pas de mention explicite, nous avons jugé qu'il serait bon de clarifier cette situation qui a donné lieu à des complications sérieuses. À la suite de la modification que nous proposons, les annuaires commerciaux seraient ajoutés aux catalogues, brochures, dépliants et autres publications de même nature, ce qui veut dire qu'ils seraient soumis à l'obligation d'être publiés, rédigés en français, et sans que soit exclu l'usage d'une autre langue. (17 h 40)

M. Brassard: Mais...

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: ...quand vous dites qu'il y a eu des contestations ou des litiges à ce sujet-là, vous faites référence à quoi? Est-ce que ça s'est retrouvé devant les tribunaux ou...

M. Ryan: Ça n'a pas été jusque devant les tribunaux mais ça a donné lieu à des transactions qui ont duré longtemps et qui ont abouti à une solution particulière.

M. Brassard: Entre l'Office et certains...

M. Ryan: Oui. Si vous êtes intéressé à ce qu'on ait quelques explications supplémentaires, peut-être que le président de l'Office pourrait les fournir.

Le Président (M. Doyon): M. Rondeau, si vous voulez bien vous approcher, s'il vous plaît.

M. Rondeau: Alors, M. le Président, c'est le dossier de Télé-Direct, pour parler concrètement, et l'interprétation qui avait été donnée depuis l'adoption de la Charte, et qui s'est traduite, d'ailleurs, dans le programme de francisation de Télé-Direct, c'était de considérer que cette forme de publicité relevait plutôt de l'article 58. Il faut se rappeler qu'il y a eu des modifications, en 1988, à l'article 58, et, à partir de ce moment-là, l'interprétation donnée à la fois à l'Office et à la Justice, c'était à l'effet qu'il faudrait plutôt considérer les annuaires commerciaux sous l'angle de l'article 52 et non 58. Mais, entre-temps, évidemment, Télé-Direct avait développé des pratiques commerciales avec ses clients depuis le tout début. Et ce qui est venu dans les médias, c'était notamment des demandes de commerçants anglophones qui regrettaient de devoir payer une double publicité pour mettre leur annonce à la fois dans la partie française et la partie anglaise. Le sens de l'article: en mettant «annuaires commerciaux» dans l'article 52, pour dire les choses simplement, ça ne répond pas à la demande des commerçants. Ils vont devoir continuer à faire leur publicité à la fois en français et en anglais, mais, pour Télé-Direct, ça rend les choses plus claires quant au fondement législatif à partir duquel ils peuvent appuyer leur pratique.

Mme Blackburn: Ça peut éviter la contestation, et de voir la clientèle glisser ailleurs.

M. Rondeau: Je ne sais pas si ça peut éviter la contestation, mais, en tout cas, ça rend la relation entre l'Office et Télé-Direct ou d'autres organismes qui auraient ce genre de publicité, ça rend les choses plus claires, pensons-nous.

Mme Blackburn: Adopté.

Le Président (M. Doyon): Donc, cet article est adopté.

M. Cameron: Sur division.

Le Président (M. Doyon): Sur division?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Vous vous relayez. Vous vous relayez. Une voix: C'est de la collaboration.

Mme Blackburn: C'est ça. C'est parce qu'il ne faut pas...

Le Président (M. Doyon): Alors, l'article 15, maintenant.

Une voix: Je n'ai pas d'alliance.

Le Président (M. Doyon): On m'exemptera d'en faire lecture à nouveau.

Une voix: On en prend note. Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): M. le ministre, sur l'article 15.

M. Ryan: L'article 15, là, nous renvoie...

Mme Blackburn: L'article 14...

M. Ryan: L'article 14 est fini depuis longtemps.

Le Président (M. Doyon): L'article 14, on l'a adopté. L'article 14 a été adopté, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui. On a voté contre.

Mme Blackburn: Oui, on a inversé le vote, je pense. C'est-à-dire, on a eu le même vote. Ça va. On va trop vite.

Le Président (M. Doyon): Alors, sur 15, M. le ministre, nous vous écoutons.

M. Ryan: L'article 53 de la Charte se lit présentement comme suit: «L'Office de la langue française peut, par règlement, prévoir, suivant les conditions qu'il fixe, des dérogations à l'article 51 ou à l'article 52.» Et les mots «L'Office de la langue française» sont remplacés, en vertu de l'article 15 du projet de loi, par les mots «Le gouvernement», et ce, en conformité avec de nombreux articles déjà adoptés.

M. Brassard: Les règlements adoptés par l'Office vont prévaloir jusqu'à modification par le gouvernement.

M. Ryan: C'est ça. Il y a une disposition, là, vers la fin du projet de loi, qui nous indique clairement que tous les règlements existants — l'article 63 — de l'Office de la langue française en vigueur à l'entrée en vigueur du présent article «sont réputés être des règlements du gouvernement adoptés en vertu de la Charte de la langue française, dans la mesure où ils demeurent habilités en vertu de cette Charte telle que modifiée par la présente loi.»

Le Président (M. Doyon): On m'indique, M. le ministre...

Mme Blackburn: Un projet d'amendement.

Le Président (M. Doyon): Je regrette de vous interrompre, mais, étant donné qu'on me dit qu'il y a un amendement sur 15, on devrait peut-être commencer par l'amendement avant de passer à l'article proprement dit.

Mme Blackburn: Oui, en fait, c'est: L'article 15 du projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française, est modifié par l'ajout, dans la troisième ligne et après le mot «gouvernement», des mots «après consultation de l'Office».

Le Président (M. Doyon): L'amendement est déclaré recevable.

Mme Blackburn: II faut savoir. Quand on parle des règlements, le gouvernement peut penser que, dans certaines matières, il peut procéder sans consultation. Mais on pense que, dans d'autres matières, il pourrait peut-être changer d'avis éventuellement et penser que l'avis de l'Office pourrait être un précieux concours lorsqu'il s'agit, soit d'adopter, soit de modifier un règlement. C'est dans le chapitre sur la langue du commerce et des affaires. Ce n'est pas simple à gérer, ce n'est pas simple à administrer, ça soulève les débats qu'on connaît. Et on pense que, là, en cette matière, le ministre pourrait se laisser convaincre qu'avant de procéder il serait plus prudent de consulter obligatoirement l'Office. Même s'il n'accepte pas dans d'autres dispositions, on pense que, sous ce chapitre, il devrait pouvoir le faire. C'est une question de prudence.

Également, c'est que, lorsqu'il y a une consultation de l'Office, que l'Office se dit d'accord, j'imagine que c'est plus facile de passer un règlement sans

soulever trop de vagues. Puis le ministre ne prend pas trop de chances et de risques avec une telle obligation puisque, généralement, il a su, à certaines occasions plutôt difficiles de l'Office, mettre l'Office au pas. Alors, j'imagine que ça ne devrait pas trop l'inquiéter qu'il soit consulté.

Le Président (M. Doyon): M. le ministre, là-dessus.

M. Ryan: Est-ce que je pourrais entendre la répétition de la dernière phrase? De «mettre l'Office au pas»; je n'ai pas compris.

Mme Blackburn: Je dis que ça ne devrait pas l'inquiéter d'avoir une obligation de consulter l'Office sur un projet de règlement parce que, de toute façon, il a su, dans certaines situations, influencer les décisions de l'Office; et l'Office était plus ou moins en tutelle, au moins dans le cas de Rosemère. C'est ce que je disais, et que je répète. Alors, je me dis que, compte tenu de l'influence qu'il exerce sur l'Office, ça ne devrait pas être trop dérangeant de le consulter avant d'adopter des règlements au chapitre de la langue du commerce et des affaires. Je le rappelle, parce que le ministre n'écoutait pas tout à l'heure; il était en train d'échanger, certainement pour de bonnes raisons, avec ses conseillers. Mais, ce que je dis, c'est une question sensible, il le sait...

Une voix: ...au Conseil des ministres. M. Ryan: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): M. le député, on savait tous ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: II n'y avait que la députée de Chicoutimi, semble-t-il... C'est ça. Mais, s'il n'est pas conseiller, c'est un fidèle allié, en matière constitutionnelle surtout.

M. Gautrin: En toute matière, madame.

Mme Blackburn: Donc, au chapitre de la langue du commerce et des affaires, c'est sensible, c'est délicat. On dit: Pourquoi est-ce que le ministre et les prochains gouvernements ne se créeraient pas l'obligation, pour éviter de perturber inutilement le climat social, de consulter l'Office sur les projets de règlement?

Le ministre m'a dit non de façon générale. Peut-être que, là-dessus, il va céder. On pense, 4es fois, que ça prend... La pédagogie, c'est l'art de répéter. Peut-être que d'ici quelques chapitres il va comprendre l'utilité.

M. Ryan: M. le Président, je maintiens les considérations dont j'ai déjà fait part à la commission. Ceci nous ramène à une question maintes fois discutée et résolue dans le sens contraire par cette commission.

Mme Blackburn: Vraiment, pas smatte! M. Ryan: Refusé.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet amendement?

M. Ryan: Je voudrais l'être. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'on est prêts à passer au vote?

Mme Blackburn: Oui. Il n'y a personne qui appuie son projet de loi à peu près dans tout le Québec, sauf, évidemment, et avec raison — et je pense que, là-dessus, il faut respecter leur avis — quelques membres de la communauté anglophone, quelques représentants. Pour le reste, moi, je cherche encore les appuis de ce gouvernement-là. Il n'y en a pas. Ce n'est pas moi, ici, qui vais le faire changer d'avis, mais il ne sera pas dit qu'on n'aura pas essayé.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée, sur l'amendement que vous proposez, que ceux qui sont en faveur de cet amendement proposé par vous veuillent bien me l'indiquer. Vous-même, Mme la députée?

Mme Blackburn: Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou?

M. Bélanger (Anjou): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Évidemment, pour.

Le Président (M. Doyon): D'autres membres sont-ils pour? Que ceux qui sont contre... M. le ministre?

M. Ryan: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski?

M. Tremblay (Rimouski): Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix?

M. Bradet: Contre.

Le Président (M. Doyen): M. le député de Richelieu?

M. Khelfa: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe?

Une voix: Aïe! Pierre, voyons! Voyons! M. Messier: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe, je ne vous ai pas entendu.

M. Messier: Parce que vous parliez, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Non, non, je ne parlais pas. Je regrette, non, je ne parlais pas.

Une voix: II pensait tout haut.

Le Président (M. Doyon): Non, je ne pensais même pas haut. Votre réponse, c'est quoi, à l'appel?

M. Messier: Contre. (17 h 50)

Le Président (M. Doyon): Contre. Bon.

M. Cameron: Contre.

Le Président (M. Doyon): Contre, M. le député de Jacques-Cartier. Abstention de la part de la présidence. le secrétaire: pour: 3 contre: 6

Abstentions: 1

Le Président (M. Doyon): L'amendement est rejeté. Nous revenons à l'article 15. L'article 15, adopté sur division.

L'article 16, dont je fais lecture. Est-ce qu'on a des amendements là-dessus, de la part du ministre, M. le secrétaire? Est-ce que vous avez des amendements à proposer, Mme la députée? De toute façon, je fais lecture de l'article 16:

L'article 54 de cette Charte est modifié par le remplacement, dans les première et deuxième lignes, des mots «de l'Office de la langue française» par les mots «du gouvernement».

C'est la fin de l'article. Est-ce qu'il y a des amendements sur l'article 16?

M. Bélanger (Anjou): Oui.

Le Président (M. Doyon): Un amendement?

M. Bélanger (Anjou): Oui, un amendement qui va dans le même sens que l'amendement précédent. Alors, vous comprendrez, je ne ferai pas un long débat dessus; tout simplement pour le soumettre à cette commission. Cet amendement se lirait ainsi: L'article 16 du projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française, est modifié par l'ajout, à la fin, après le mot «gouvernement», des mots «édicté après consultation de l'Office de la langue française».

Alors, c'est dans le même sens que l'amendement précédent. Nous pensons que c'est important, à ce moment-là, qu'il y ait consultation avec l'Office de la langue française.

Le Président (M. Doyon): La première chose à faire, c'est que je considère cet amendement re-cevable. Alors, maintenant, sur le fond, si vous voulez bien y aller. Alors, aucune autre intervention? Que ceux qui sont en faveur de l'amendement proposé par M. le député d'Anjou à l'effet d'ajouter, après le mot «gouvernement», à l'article 16, les mots «édicté après consultation de l'Office de la langue française», que ceux en faveur de cet amendement veuillent bien me l'indiquer. Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Pour.

Le Président (M. Doyon): Le député d'Anjou?

M. Bélanger (Anjou): Pour.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Pour.

Le Président (M, Doyon): D'autres personnes sont pour? Que ceux qui sont contre cet amendement veuillent bien me l'indiquer. M. le ministre?

M. Ryan: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski?

M. Tremblay (Rimouski): Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix?

M. Bradet: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Messier: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques... M. le député de Richelieu?

M. Khelfa: Contre.

Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Doyon): Quand on n'est pas à la table, on risque de passer en dessous.

M. Khelfa: Moi, je suis à la table, l'extension de la table.

Le Président (M. Doyon): Ha, ha, ha! L'extension de la table. Donc, le député de Richelieu est contre. M. le député de Jacques-Cartier, vous êtes contre aussi?

M. Cameron: Oui.

Le Président (M. Doyon): Alors, abstention de la part de la présidence.

Le Secrétaire: pour: 3 contre: 6

Abstentions: 1

Le Président (M. Doyon): L'amendement est rejeté. Nous arrivons à l'article 16. Sur cet article proprement dit, M. le ministre, avez-vous quelque chose à nous dire?

M. Ryan: Le 17?

Le Président (M. Doyon): Non, 16 n'a pas été voté. Nous venons de... Alors, l'article 16 est adopté sur division.

Article 17. Il y a un amendement à l'article 17, un amendement proposé par M. le ministre. Il s'agit d'insérer, dans la première ligne du troisième alinéa de l'article 58 proposé par l'article 17 et avant le mots «les», ce qui suit: «les lieux,». Fin de l'amendement. Sur l'amendement, M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je constate qu'il est 17 h 55.

Le Président (M. Doyon): Oui.

M. Ryan: Cet article introduit un des éléments les plus importants du projet de loi et, avec le consentement des membres de la commission, je suggérerais que nous entreprenions l'examen de cet article à compter de 20 heures.

Mme Blackburn: M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Oui, Mme la députée.

Mme Blackburn: II pourrait y avoir consentement si le ministre consent à déposer tout de suite le projet de règlement.

M. Ryan: Non, je le déposerai ce soir, à 20 heures.

M. Bélanger (Anjou): Je ne comprends pas pourquoi. Je pense que ça faciliterait les travaux de la commission d'avoir ces projets de règlement. Ça nous permetterait, pendant l'heure du souper, de les étudier, de les regarder. Là, je ne comprends pas pourquoi le ministre ne montre pas sa...

M. Ryan: Non, je veux avoir une chance de les expliquer en même temps. Je veux avoir la chance raisonnable de les expliquer en même temps que je les déposerai, et 20 heures se prêtera mieux à cet exercice que l'heure actuelle. Déjà, nous accomplissons beaucoup, nous tenons les engagements...

Mme Blackburn: Parce qu'il y a des chances qu'on les lise mal.

M. Brassard: Est-ce que le leader du gouvernement va poser un geste regrettable, regrettable ou déplorable, avant que vous ne procédiez au dépôt?

M. Ryan: Je n'en ai aucune indication. Et, selon les pouvoirs que vous m'attribuez, je serais normalement informé. Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Ce que j'ai dit, c'est ça. C'est ce qu'on avait compris.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'on est d'accord pour suspendre jusqu'à 20 heures?

M. Brassard: Ça me rassure un peu, parce que c'est évident que, si le premier ministre de facto nous garantit que le leader du gouvernement ne procédera pas...

M. Ryan: Mais, cependant, M. le Président, j'ai senti, dans la question du député de Lac-Saint-Jean, une certaine latitude que je n'ai pas trop de mal à comprendre. .. une certaine lassitude...

M. Brassard: Non, non, non, non, non, au contraire.

M. Ryan: ...que je n'ai pas trop de mal à comprendre. Je comprends très bien qu'il ait été habité par ces pensées.

M. Brassard: Au contraire, je suis extrêmement intéressé, M. le Président. D'ailleurs, j'ai été très assidu depuis le début de l'étude détaillée. Ça m'intéresse beaucoup.

M. Ryan: Oui. Nous n'avons aucune critique à faire sur la contribution du député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Bon. Alors, je ne suis pas las. Je ne suis pas las du tout. Il n'y a pas de lassitude.

Le Président (M. Doyon): Nous allons suspendre nos travaux et nous allons le faire étant entendu que nous allons commencer par l'amendement proposé par M. le ministre. Et, si M. le ministre a des documents à déposer, on pourra le faire à ce moment-là. Suspension jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise à 20 h 19)

Le Président (M. Doyon): La commission de la culture reprend ses travaux. Nous en étions à l'étude de l'article 17 et, sur l'article 17, M. le ministre nous a annoncé un certain nombre de choses. Mais, avant qu'il ne le fasse, nous avions été saisis d'un amendement de sa part qui visait à remplacer dans l'article 17, dans la première ligne du troisième alinéa de l'article 58 qui était proposé par l'article 17 justement, le mot «les» par les mots «les lieux,». S'il y a consentement de la commission, compte tenu de ce pourquoi nous sommes en attente de la part du ministre, on peut mettre cet amendement-là en suspens, M. le ministre, si vous le souhaitez, mais on peui en disposer aussi, comme vous voudrez. Je suis au service de la commission. On peut commencer dès le dépôt des règlements, si vous ne voyez pas d'inconvénients. (20 h 20)

Dépôt de l'avant-projet de règlement sur la langue du commerce et des affaires

Alors, donc, on va garder notre amendement à l'article 17 en suspens pour le moment. Nous allons procéder au dépôt et à la distribution du projet de règlement, tel qu'annoncé précédemment par M. le ministre, et je demande à M. le secrétaire de bien vouloir en faire la distribution. Je pense qu'il y a des gens ici dans la salle qui sont peut-être désireux d'en avoir des copies. Il n'y a pas d'objection, il y en a des copies qui ont été faites de façon à ce que vous puissiez les avoir en votre possession. Je demanderais à ceux qui peuvent le faire, d'en remettre à ceux qui sont intéressés.

Maintenant que la distribution a été faite, je suis prêt à écouter M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, la Charte de la langue française comprend un chapitre septième intitulé: «La langue du commerce et des affaires», dans lequel on trouve les articles qui vont de 51 jusqu'à 71. Ce chapitre traite essentiellement de 3 sujets principaux: la langue des inscriptions sur les produits; deuxièmement, la langue des catalogues, des brochures, des dépliants et autres publications de même nature; et, en troisième lieu, la langue de l'affichage public et de la publicité commerciale. Pour chacune de ces trois grandes catégories d'objets, la Charte prévoit la possibilité de règlements permettant d'établir des dérogations à l'un ou l'autre article.

Le législateur avait prévu — des modifications furent faites à quelques reprises depuis l'adoption de la Charte en 1977 — la probabilité de cas qui ne pourraient pas se prêter à une application littérale de la Charte. Et, en conséquence, il avait prévu que l'Office ou le gouvernement, selon les cas, pourrait, par règlement, prévoir des situations où des dérogations — j'emploie l'expression à dessein — seraient autorisées.

Il existe déjà, dans le recueil des règlements relatifs à la Charte, un règlement qui traite précisément de la langue du commerce et des affaires. Ce règlement existe depuis plusieurs années, au moins une dizaine d'années, parce qu'il existait lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en 1985. Il a été modifié en juillet 1989, à la suite, oui... Non, ce n'est pas celui-là. Ça, c'est celui sur la prédominance. On en a déjà parlé. En tout cas, celui-là existe depuis avant l'arrivée du gouvernement actuel au pouvoir, c'est-à-dire depuis bien avant...

Une voix: ...

M. Ryan: Non, le règlement sur la langue du commerce et des affaires. C'est dans cette brochure-ci. Alors, il y a déjà un règlement qui existe. Et le projet de règlement, que je vais porter à la connaissance des membres de la commission parlementaire ce soir, apporte un certain nombre de modifications au règlement existant. Ça, il faut s'entendre bien clairement. Nous apportons un certain nombre de modifications au règlement existant.

Maintenant, avant de préciser la nature de ces modifications, je voudrais apporter 2 éléments d'information très importants. Le règlement actuel existe depuis 1979. Il a été question, à plusieurs reprises, d'y apporter des modifications. Le premier projet majeur de modification fut mis de l'avant par celui qui était responsable de l'application de la Charte sous le gouvernement du Parti québécois, vers la deuxième partie du séjour du Parti québécois au pouvoir, le député de Mercier, M. Gérald Godin.

Le gouvernement de l'époque avait même fait publier, dans la Gazette officielle du Québec, en juin ou juillet 1985 — juillet 1985 — un nouveau projet de règlement dont nous mettrons des copies à la disposition des membres ce soir. Je pense que si vous voulez les faire distribuer, M. le Président, ce sera très utile.

Le Président (M. Doyon): ...

M. Ryan: Et peut-être qu'il y aurait lieu d'en faire tirer des copies pour les représentants de la presse qui sont ici. Je ne sais pas si M. Grenon est ici?

Le Président (M. Doyon): Pour les membres de la commission...

M. Ryan: Ceci est important. Puis, plus tard, ce règlement n'a pas pu être confirmé par le gouvernement. Il avait fait l'objet d'une publication dans la Gazette officielle du Québec en juillet 1985, mais il ne fut pas proclamé par le gouvernement. Et, à l'automne de la même année, on se souvient tous des événements qui se produisirent au début de décembre — le 2 décembre, si mes souvenirs sont bons. Il y avait un balayage à travers le Québec et le Parti québécois était chassé du pouvoir et remplacé par le Parti libéral et nous héritâmes de ce dossier non terminé.

Le Président (M. Doyon): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Ryan: Ensuite, les ministres qui se sont succédé à cette responsabilité, je pense, en particulier, à la députée de Chomedey, vice-première ministre et ministre actuelle de l'Énergie et des Ressources, le ministre délégué à la Fancophonie internationale, le député de Rosemont, ont oeuvré sur toutes sortes de textes qui étaient en circulation à ce moment-là et étaient prêts à proposer des modifications aux règlements, mais ils en furent empêchés par le cheminement du dossier relatif à la constitutionnalité des dispositions relatives à l'affichage. Ce dossier avait été porté devant les tribunaux. Il a subi différentes étapes et, lorsqu'est arrivé le jugement de la Cour suprême, en décembre 1988, ce n'était pas le temps d'agir sur ces règlements. Il fallait plutôt aviser à une solution aux problèmes immédiats qui avaient surgi.

Ensuite, en 1991, l'Office de la langue française s'est remis au travail sur le projet de modification aux règlements et m'a soumis un projet de nouveaux règlements. J'avais, à l'époque, sollicité l'avis du Conseil de la langue française. Celui-ci avait déconseillé, à l'époque, l'adoption du projet parce que, déjà, d'autres questions avaient pris l'avant-scène et, déjà, il était question de modifications à la Charte de la langue française — je l'avais laissé entrevoir, moi-même, à l'occasion du dossier de Rosemère. Et l'échéance qui devait marquer l'expiration de la période de 5 ans prévue pour l'application de la clause dérogatoire invoquée par le gouvernement en décembre 1988 se faisait plus prochaine. Il fut décidé de prendre tout ce problème-là ensemble, au lieu d'attendre et de toujours chercher à régler par petits morceaux particuliers. C'est ce qui explique l'approche plus large qu'a épousée le gouvernement dans son projet de loi. L'Opposition aurait voulu nous réduire à ne traiter strictement, étroitement, que d'affichage. Mais il y avait beaucoup d'autres questions qui avaient mûri, en cours de route. Et il nous est apparu qu'au terme de cette période il serait normal que nous faisions également progresser le dossier sur tous les fronts où c'était possible.

Nous avons déjà déposé 2 projets de règlement, 2 avant-projets de règlement que nous avons soumis à la discussion des membres de la commission et de nos concitoyens. Nous déposons, ce soir, un troisième projet, le projet de règlement sur la langue du commerce et des affaires. Celui-ci est attendu avec un intérêt spécial parce qu'on se dit: C'est peut-être ici qu'on va enfin trouver la brèche que l'on cherche depuis le début dans la programmation gouvernementale. On cherche, avec une curiosité très avide, les points faibles qu'il y aurait, dans ce projet de loi là. On n'a pas réussi à les identifier jusqu'à maintenant parce que, tout ce qu'on a offert comme commentaires, ce sont des suppositions fondées sur des frayeurs qu'on peut comprendre, mais qui sont absolument indémontrables et non démontrées. (20 h 30)

Dans ce projet sur la langue du commerce et des affaires, je procéderai brièvement à la présentation, M. le Président, quitte à solliciter tantôt peut-être une brève période de répit afin de pouvoir répondre aux questions que les membres de la presse voudront sans doute m'adresser.

Il y a 3 sections. Je les prends une après l'autre. Il y a d'abord la section qui traite des inscriptions sur les produits. De manière générale, dans cette section, on va comprendre pourquoi nous avons mis dans la loi, à un moment donné, à propos de l'affichage, certaines affiches pouvant être affichées uniquement dans l'autre langue. Il y en a qui sont partis en peur puis qui ont dit: C'est effrayant, tout le bateau va s'écrouler. Ce n'est pas le cas du tout.

En matière d'inscription, nous prévoyons plusieurs cas où l'inscription pourrait être inscrite sur un produit uniquement dans une langue autre que la langue officielle. Ces cas, par exemple, embrassent les produits culturels, les livres, les messages relatifs à des films ou à des oeuvres culturelles, par exemple, les inscriptions qui peuvent être portées sur l'emballage de produits alimentaires périssables provenant de l'extérieur du Québec, les inscriptions qui peuvent être fixées sur des produits destinés à l'exportation, etc. Il y en a toute une série qui sont mentionnées ici, mais j'ajoute tout de suite une précision: la plupart de ces exceptions sont déjà présentes dans le règlement actuel et celles qui sont nouvelles étaient prévues soit dans le projet de règlement de M. Godin, soit dans le projet de règlement de l'Office de la langue française.

En ce qui touche les inscriptions, en conséquence, il n'y a pas vraiment de nouveaux sentiers qui sont ouverts ici. Toutes les personnes qui sont le moindrement informées du travail accompli dans le passé, et tout ça a déjà été rendu public, le projet Godin, le projet de l'Office de la langue française également... Par conséquent, ici, nous codifions de manière peut-être un petit peu plus claire, nous apportons une précision ici ou là, mais, de manière très générale, nous suivons de très près l'économie des modifications ou des ajustements proposés antérieurement, soit par le ministre Godin, soit par l'Office de la langue française.

Et je puis affirmer sans crainte d'être contredit que, dans l'ensemble de ce règlement, 90 % de la matière est en parfaite harmonie avec les dispositions du projet Godin. Puis un peu plus, peut-être 95 % en parfaite harmonie avec les dispositions du projet soumis par

l'Office de la langue française, sauf les questions relatives à l'affichage qui, évidemment, devront être définies en conformité avec le projet de loi 86. Alors, pour les inscriptions, M. le Président, je n'ai pas d'autres commentaires à faire pour l'instant.

Le deuxième sujet porte sur les dérogations à l'article 52, lequel traite des catalogues, des brochures, des dépliants et autres publications de même nature. Là, nous réglons différents cas. Il y avait le cas du fameux annuaire des pages jaunes. Il avait été résolu jusqu'à maintenant, de manière à obliger l'entreprise éditrice à publier distinctement une édition française et, ensuite, une édition anglaise... Mais on s'est aperçu que c'était une interprétation abusive de la loi comme elle existe actuellement. Et, dans le projet de règlement, nous prévoyons qu'une publication pourrait être faite en 2 éditions distinctes, mais il n'y a pas d'obligation de ce côté-là. Si un éditeur veut publier un message dans lequel il y aura des textes français et des textes dans une autre langue, il pourra le faire, puis, déjà, la loi actuelle lui permet de le faire suivant toutes les interprétations autorisées qui en ont été données.

Les catalogues, brochures, dépliants, annuaires et autres publications de même nature concernant un produit culturel ou éducatif, un spectacle, un récital, un discours, une conférence, un cours, une émission de radio, de télévision ou faisant la promotion d'un organe d'information pourront être rédigés uniquement dans une autre langue que le français si, selon le cas, le contenu culturel ou l'activité se déroule dans cette autre langue ou si l'organe d'information diffuse dans cette autre langue. Les catalogues, brochures, dépliants relatifs à un congrès, un colloque, une foire ou une exposition destinés uniquement à un public spécialisé ou restreint pourront être rédigés uniquement dans une langue autre que le français. Dans des catalogues, brochures, dépliants, annuaires commerciaux et toute autre publication de même nature pourront être rédigés uniquement dans une autre langue que le français: la raison sociale d'une entreprise établie exclusivement hors du Québec, une appellation d'origine, la dénomination d'un produit exotique ou d'une spécialité étrangère, un toponyme, un patronyme, un prénom ou nom de personnage, une marque de commerce reconnue au sens de la loi des marques de commerce, à condition, dans ce dernier cas, qu'une version française en ait été déposée. Voilà. Ça, ça traite de toute la section relative aux catalogues, aux annuaires. Il y a bien des clarifications qui sont apportées, une plus grande souplesse, mais déjà cette souplesse était prévue dans les projets de modification antérieurement soumis, tantôt par l'ancien ministre Gérald Godin, tantôt par l'Office de la langue française.

En ce qui touche la troisième section maintenant, l'affichage public et la publicité commerciale, l'article 15 prévoit que la publicité commerciale d'une entreprise, présentée sur des panneaux-réclame, affiches ou tout autre support d'une superficie minimale devant être déterminée ultérieurement et visible de tout chemin public au sens de l'article 4 du Code de la sécurité routière, devra être faite uniquement en français, à moins que cette publicité ne soit située sur les lieux mêmes des établissements de cette entreprise. On prévoit également — ce qui est déjà dans la loi 178 — que la publicité commerciale d'une entreprise devra être faite uniquement en français dans tout moyen de transport public. Là, on ajoute: dans ses accès et dans les abribus.

On prévoit plus loin que l'affichage public sur ou dans un véhicule servant régulièrement au transport de voyageurs ou de marchandises à la fois au Québec et hors du Québec pourra être fait à la fois en français et dans une autre langue, pourvu que le français figure de façon au moins aussi évidente. L'affichage relatif à la santé ou à la sécurité publique pourra se faire à la fois en français et dans une autre langue pourvu que le français y figure de façon au moins aussi évidente. L'affichage public d'un musée, d'un jardin botanique ou zoologique, d'une exposition culturelle ou scientifique pourra être fait à la fois en français et dans une autre langue, pourvu que le français y figure de façon au moins aussi évidente. L'affichage public relatif à un événement destiné à un public international ou à un événement dont les participants viennent en majorité de l'extérieur du Québec pourra se faire, lorsqu'il est relié directement à la nature et au but de l'événement, à la fois en français et dans une autre langue, pourvu que le français figure de manière au moins aussi évidente.

Encore ici, si on relit le projet Godin, toutes ces dispositions étaient déjà comprises dans le projet Godin. On pourrait facilement faire des gorges chaudes à l'heure actuelle en extrayant un article particulier de son contexte et en disant: Ça y est, nouveau glissement, nouveau déraillement, nouvelle érosion de la pureté de la Charte. Mais, quand vous situez ça dans le contexte concret d'où ça vient, on s'aperçoit que toutes les personnes de bon sens qui se sont penchées sur ces questions, qui ont eu l'occasion de les approfondir sérieusement en étant un petit peu impliquées dans l'application de la Charte en sont venues à des conclusions semblables à celles que nous présentons dans le projet de règlement. Et tous ces documents sont publics. Je pense qu'on pourra les examiner à loisir et nous faire part de toutes les réserves que l'on voudra nous communiquer.

De même, l'affichage public et la publicité commerciale d'un produit culturel ou éducatif qui ne serait qu'en langue anglaise ou dans une autre langue pourrait être fait uniquement dans cette langue, pour des raisons qui relèvent du sens commun. L'affichage public par une personne physique à des fins non professionnelles ou non commerciales pourra être fait dans la langue de son choix. Si elle est chez elle, sur sa propriété, la personne pourra faire de l'affichage dans la langue de son choix. Ce n'est l'affaire ni du gouvernement ni des censeurs de la langue. L'affichage public du mode d'utilisation d'un appareil installé en permanence dans un lieu public... Je pense à une loterie vidéo ou des appareils de nettoyage automatique ou de service automatique de timbres, etc. Tous ces appareils installés en permanence pourront avoir un affichage en français et

dans une autre langue, pourvu que le français y figure de façon nettement aussi évidente. Encore là, on avait la même chose dans le projet de règlement de M. Godin. C'est toutes des choses qui étaient dans le règlement de M. Godin. (20 h 40)

Un affichage relatif à un congrès, un colloque, une foire ou une exposition destinés uniquement à un public spécialisé ou restreint, même chose. Il pourrait être fait dans une autre langue à condition que le français... Il pourrait être fait uniquement dans une autre langue que le français, dans ce cas-ci. Il peut arriver que ce soit un congrès de scientifiques qui sont tous d'une langue étrangère. S'ils veulent venir se réunir ici, ils ne sont pas obligés de passer par cette disposition-là et même le projet Godin traitait également de cette question dans le même sens que le projet de règlement actuel. Pardon?

Une voix: Même affaire.

M. Ryan: Même chose. Alors, M. le Président, j'en suis rendu au terme de la présentation de ce projet de règlement. Comme on pourra le constater, sauf les dispositions relatives à l'affichage, qui sont nettement dérivées en ligne directe du projet de loi 86, pour des raisons que tout le monde saisira, l'ensemble des dispositions de cet avant-projet que nous communiquons aujourd'hui se situe dans la continuité des préoccupations des ministres qui se sont succédé à la responsabilité de l'application de la Charte de la langue française. Il comporte des ouvertures appréciables. Il n'y a pas de changements radicaux, pas de trahison, pas de démission, seulement des adaptations de bon aloi à une réalité que nous avons le devoir de percevoir, de comprendre dans sa vérité propre, dans sa vérité objective, et non pas d'essayer à tout prix de modeler sur nos propres conceptions des choses.

Je communique cet avant-projet pour qu'il donne lieu à des réactions, autant de la part des députés que de la part de nos concitoyens de tous les milieux. Le gouvernement ne sera pas invité à procéder à l'adoption de cet avant-projet de règlement avant la fin de l'été. Il n'est pas question que je fasse des propositions au gouvernement à ce sujet avant un stade avancé de l'été. Par conséquent, tous ceux, toutes celles qui voudront se pencher sur le projet de règlement et soumettre des observations sont assurés que leurs représentations seront l'objet d'une étude attentive et respectueuse.

Je souhaite vivement que l'on voie le lien très important entre cet avant-projet de règlement et tous les articles de la Charte qui sont compris au chapitre VII, c'est-à-dire les articles qui vont de 51 à 71. Je pense que ça règle une grosse partie du problème auquel nous étions affrontés. Si cet avant-projet de règlement peut voir le jour, avec les autres que nous avons déjà communiqués à la connaissance de la commission et d'autres qui viendront s'ajouter un peu plus tard, je pense que nous serons fort avancés sur la route de l'aggiornamento, c'est-à-dire de la mise à jour honnête et réaliste de la Charte.

Je rappelle les règlements. Le premier que j'ai déposé, il y a une semaine, traitait de la langue de l'administration, c'est-à-dire des organismes publics, le gouvernement, les ministères, les sociétés d'État, les municipalités, les commissions scolaires, les collèges aussi. Le deuxième traitait du concept de nette prédominance, de l'application de la règle de la nette prédominance. Nous ajoutons ce soir le règlement sur la langue du commerce et des affaires. Je crois qu'on aura... Ceux qui pensaient que le gouvernement n'avait pas soigneusement examiné tous les aspects de cet exercice d'aggiornamento pourront constater, à tout le moins, que nous avons fait un effort consciencieux, que la meilleure contribution que chacun et chacune puisse apporter, c'est de répondre à cet effort en examinant loyalement et objectivement les textes, et en essayant de les améliorer avec nous. Nous sommes toujours disponibles à cette fin. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre.

Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Avant de faire une lecture plus approfondie, quelques questions. Ensuite, nous demanderions un ajournement, pas un ajournement, mais de suspendre, pendant au moins...

Une voix: Une demi-heure, une heure.

Mme Blackburn: ...trois quarts d'heure, sûrement, le temps de faire la lecture du projet, mais pour en faire une lecture plus conforme à la présentation que le ministre a voulu faire. Dans l'affichage public de la publicité commerciale, je ne vois nulle part la règle de la prédominance. Est-ce qu'elle a été abandonnée?

M. Ryan: Non, non. Elle est dans la loi. Elle est dans la loi, par conséquent, ce n'est pas nécessaire de la répéter explicitement dans le règlement. C'est dans la loi.

Mme Blackburn: Elle est dans la loi, mais elle n'est pas dans les règlements, d'aucune manière.

M. Ryan: Ce n'est pas nécessaire. Ce n'est pas nécessaire. On écrit là où ça doit être «au moins aussi évident que...»

Le Président (M. LeSage): À l'ordre, s'il vous plaît! La parole est à la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui. Je vois à plusieurs endroits «de façon au moins aussi évidente» et ça apparaît un peu partout. Je regarde partout. C'est toujours la même règle que je vois, «de façon au moins aussi évidente» à...

Le Président (M. LeSage): M. le député de Charlevoix, s'il vous plaît!

Mme Blackburn: ...l'article 17, à l'article 18, à l'article 19, à l'article 20, 23. Alors, évidemment, ce qu'on retrouve là-dedans, c'est vraiment que c'est bilingue. C'est anglais-français partout, partout, mur à mur, et il s'agirait que votre grand panneau-réclame soit sur le commerce ou à proximité pour qu'il soit également permis de le faire dans les 2 langues. Alors, tout est en... Alors, vouloir faire passer le règlement comme étant une copie assez proche, pour ne pas dire conforme à celle du député-ministre Godin... Je l'ai lu, je l'ai relu rapidement. Il y a effectivement un certain nombre de dispositions, mais ce n'est pas à une différence énorme, et le ministre le sait et, la partie ministérielle, vous le savez également, c'est celle de l'affichage public commercial. Ce que M. Godin visait, c'étaient des activités à caractère plus privé, des colloques. C'était également par rapport aux produits culturels, un certain nombre de règles que j'avais lues et que je me suis remémorées rapidement. Ce n'est pas vrai cependant d'aller dire et affirmer que, pour l'essentiel, on a respecté le règlement de M. Godin parce que c'est essayer d'induire la population en erreur en s'abriant avec la crédibilité de quelqu'un qui a fait un travail remarquable et qui s'appelle l'ex-ministre des Affaires culturelles.

À présent, le ministre disait tout à l'heure que c'était un peu par laxisme ou presque si on n'avait pas été plus rapidement dans l'adoption des règlements. Ce n'est pas juste à cause des événements que le ministre relatait, à savoir l'élection générale qui s'est tenue en décembre 1985, mais, si le ministre veut faire preuve un peu d'humanisme, il va se rappeler qu'à l'époque M. Godin également avait subi une intervention chirurgicale majeure. Je ne sais pas si quelqu'un se le rappelle, mais on se le rappelle. Évidemment, si on ne veut pas en tenir compte, on en tient compte pour quelques personnes et pas pour les autres, mais je voudrais bien qu'on fasse la même chose pour tout le monde.

Ça veut donc dire que la notion de nette prédominance dans les règlements disparaît totalement. On ne la voit pas dans les règlements.

M. Ryan: Avez-vous terminé?

Mme Blackburn: Oui.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Ryan: D'abord, je voudrais corriger une chose. Ce n'est pas nous qui avons affirmé à maintes reprises, pendant un mois de temps, que le gouvernement précédent avait déposé des règlements en même temps qu'un projet de loi. C'est la députée de Chicouti-mi. C'est nous qui avons dû faire la preuve que c'était faux. Je ne blâme pas... Je n'ai pas porté de blâme à l'endroit de l'ancien ministre. Je rapporte les faits comme ils se sont produits et comme il a eu l'honnêteté de les confirmer auprès de moi et, sans doute, auprès de la députée de Chicoutimi. Les raisons, c'est une autre affaire, ça. Mais il y a eu une affirmation de faite, que la députée de Chicoutimi a déjà retirée, d'ailleurs, et je ne vois pas pourquoi elle revient là-dessus ce soir.

Mais je souligne encore une fois que nous, je pense que c'est mon droit strict de le souligner, nous déposons les avant-projets de règlement en même temps que nous faisons l'étude des articles pertinents du projet de loi.

J'ajoute une deuxième précision à propos du concept de nette prédominance. D'abord, là, il y a 3 aspects dans le projet de règlement. Il y a les inscriptions, il y a les catalogues, les brochures, les dépliants et il y a finalement l'affichage. Si la députée de Chicoutimi lit le texte de la loi attentivement, elle constatera qu'en matière d'inscription la règle qui était inscrite dans la loi actuelle, c'est celle de la place au moins aussi évidente du français. C'est celle-là. Ce n'est pas la règle de la nette prédominance. Et nous n'en voulons pas dans les inscriptions. Nous maintenons la loi actuelle là-dessus. (20 h 50)

En ce qui touche les catalogues, les brochures, les dépliants, ils doivent être rédigés en français. Ils peuvent, en vertu de l'article 89, être rédigés dans une autre langue. Il n'y a pas de règle de nette prédominance qui est là. La règle de nette prédominance est dans l'article 58, à propos de l'affichage public et de la publicité commerciale. Il n'est pas nécessaire de la répéter à chaque article du projet de règlement qui traite de l'affichage commercial. C'est fondamental, c'est essentiel. C'est la règle qui est inscrite en tête du chapitre et pour laquelle nous donnons d'ailleurs une règle d'application qui fait l'objet d'un règlement distinct. Il ne faut pas déplacer les choses. On a décidé de maintenir, et j'en fais la preuve encore, bon nombre de dispositions de la Charte. Il y avait quand même des dispositions qui pouvaient donner lieu à une application raisonnable, mais le concept de nette prédominance, lui, de manière très habituelle dans la Charte, il vaut surtout au chapitre de l'affichage.

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Le ministre doit reconnaître que la différence majeure, capitale se trouve dans l'affichage commercial et que sur ce chapitre, de façon particulière, on a dénoncé cette loi comme étant une loi-cadre qui, finalement, portait beaucoup plus dans les règlements que ce qu'on ne pouvait trouver dans la loi avec les effets un peu pernicieux, les dangers de travers, tels que dénoncés par le Conseil du patronat et d'autres organismes. En ce

qui a trait... Curieusement — moi, je veux suivre le raisonnement du ministre — il me dit: Écoutez, c'est dans la loi. Si c'est dans la loi, on n'a pas à indiquer à tous les paragraphes du règlement dans le règlement que c'est une nette prédominance. Pourtant, le ministre devra m'expliquer pourquoi il a cru utile de le faire lorsqu'il s'est agi de l'affichage dans l'administration où on parle, là, vraiment de la règle du tiers, deux tiers. Alors, pourquoi le fait-il dans l'administration et qu'il ne le fait pas dans l'affichage public privé? Il l'a placé dans le règlement.

M. Ryan: Justement, parce que c'est... À cause de l'obligation particulière qui incombe à l'administration de donner une place plus forte au français.

Mme Blackburn: Ça veut donc dire que vous, dans votre esprit, on ferait preuve d'un peu plus de souplesse, pour utiliser votre terme, s'il s'agit de l'affichage public privé.

M. Ryan: Dans une certaine mesure, évidemment, évidemment. C'est l'objet même...

Mme Blackburn: Ça veut donc dire que la règle du tiers, deux tiers, vous ne voulez pas la réaffirmer dans le règlement parce que vous croyez qu'il faudrait leur laisser un petit peu plus de place?

M. Ryan: Non. M. le Président...

Mme Blackburn: Vous avez dit: Ils ont plus de responsabilités de promouvoir le français.

M. Ryan: .. .en matière d'affichage, la règle de la nette prédominance est clairement inscrite dans l'article 17 du projet de loi et je vais le lire, là, pour ne pas qu'il y ait d'équivoque à ce sujet-là: «L'affichage public et la publicité commerciale doivent se faire en français. «Ils peuvent également être faits à la fois en français et dans une autre langue pourvu que le français y figure de façon nettement prédominante.» alors, ça, c'est antérieur à tout règlement. et tout règlement doit être basé sur ce principe-là qui est affirmé clairement dans la loi. il n'y a aucun danger de ce point de vue là. et j'affirme, encore une fois, m. le président, qu'exception faite, là, des quelques articles qui traitent plus immédiatement de l'affichage public et de la publicité commerciale, 90 % du projet de règlement que j'ai dévoilé ce soir est très proche des propositions qui étaient contenues dans le projet de m. godin en 1985 et je défie qui que ce soit de faire la démonstration du contraire. je donnerai le temps voulu à la députée de chicoutimi pour faire son examen, et tout examen loyal conduit à cette conclusion.

Mme Blackburn: M. le Président.

M. Ryan: Je sais que c'est embarrassant.

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, il n'y a rien d'embarrassant là-dedans...

M. Ryan: Ha! tant mieux.

Mme Blackburn: ...pour une raison extrêmement simple, parce qu'il y a des choses qui peuvent tomber sous le sens commun. Mais si vous prenez ce qui apparaît l'essentiel, c'est-à-dire l'affichage public privé et l'affichage de l'administration, ça commence à faire le morceau le plus important. Ça ne représenterait que 5 % des règlements et ça serait déjà trop. Ce n'est pas ça, la question. Que vous compariez ça en disant: Ça fait 90 %, bien, bravo! vous avez reconnu un certain nombre de règles qui tombaient sous le sens.

M. Ryan: On va faire tomber ces frayeurs-là.

Mme Blackburn: Mais, si les 10 % sont en train de trahir l'esprit et l'essentiel de ce que constituait la loi 101, évidemment que c'est facile. Le ministre, et c'est de bonne guerre, est en train d'essayer de se donner de la crédibilité en utilisant celle de son prédécesseur. Alors, moi, je pense que...

Une voix: Ah! Ah! Ah! Allez le lire. M. Ryan: Je n'en ai pas besoin.

Mme Blackburn: Moi, je pense que, quand on manque de crédibilité...

Une voix: Allez le lire.

M. Ryan: Je n'en ai pas besoin.

Mme Blackburn: ...on essaie de s'abrier dans celle des autres.

Une voix: Allez le lire, d'abord. M. Ryan: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Ce que je... Ça va. Quand on est silencieux comme vous, on se tait aussi, à ce moment-là.

M. Ryan: C'est par politesse...

Le Président (M. LeSage): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Blackburn: Quand on joue les «rubber stamps», on continue.

Une voix: II vaut mieux se taire.

Le Président (M. LeSage): Vous avez terminé, Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Non, M. le Président. Le Président (M. LeSage): Allez-y.

Mme Blackburn: Je relis, dans la langue de l'administration, l'article 4 qui vient modifier l'article 22. Je rappelle ma question: Pourquoi est-ce qu'on ne retrouve pas, dans les règlements sur l'administration publique, la règle de la prédominance? Et le ministre m'a répondu, dans un premier mouvement: On a plus d'exigences pour l'administration publique, parce qu'ils ont plus de responsabilités de promouvoir le français. C'est sa réponse. On peut faire sortir les gal-lées.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Ryan: Un élément qu'il faut apporter en complément de cette réponse, c'est que la langue de l'administration est traitée dans un autre chapitre de la Charte. Et la langue de l'affichage dont nous parlons à 58 s'applique pour les entreprises privées. Ça fait partie du chapitre qui s'intitule: «La langue du commerce et des affaires». Il y a un autre chapitre sur la langue de l'administration. C'est pour ça que nous avons fait un règlement distinct pour la langue de l'administration. C'est en application de l'article 22, je pense, de la Charte. C'est ça?

Mme Blackburn: Oui, c'est 22. Le 4 qui modifie 22.

M. Ryan: Là, nous avons fait un article distinct et nous disons: La règle habituelle pour l'administration, dans son affichage, sera le français, le français exclusivement. C'est ça qui est la règle de base. On prévoit 3 exceptions. C'est tout, ça. La première exception porte sur les inscriptions qu'on pourra trouver à l'entrée des frontières ou dans les régions immédiatement proches des frontières. Il y a, deuxièmement, la faculté qui sera donnée aux sociétés ayant des activités assimilables à des activités commerciales, là, de se prévaloir de l'article 58. En somme, c'est normal, c'est des activités de même nature. On peut être en désaccord, mais j'explique la position. Je pense qu'il y a une logique là-dedans aussi. Troisièmement, on parle des musées, on parle des jardins botaniques, des jardins zoologiques, et vous remarquez qu'il y a la même disposition dans l'article relatif à la langue du commerce et des affaires. Ici, on parle des musées et des centres touristiques à caractère privé, et dans le règlement sur l'affichage de l'administration, là, on parle des institutions de même nature qui sont de caractère public. Dans ce cas-là, vous remarquerez que c'est la règle voulant que le français figure de façon au moins aussi évidente, dans les 2 cas.

C'est une économie qui est soigneusement établie, après mûre considération de chaque objet. Il n'y a pas d'improvisation là-dedans et il n'y a pas d'à-peu-près, non plus. C'est tout précis et ça répond à une conception qui se tient.

Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires, madame... Alors, à la demande du ministre et des parlementaires de cette commission, je suspends les travaux pour environ 45 minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 59)

(Reprise à 22 h 2)

Le Président (M. Doyon): La commission de la culture reprend ses travaux. Nous en étions à l'étude, ou, en tout cas, à la discussion sur le projet de réglementation soumis par le ministre. Comme c'est quelqu'un d'autre qui y présidait, M. le secrétaire, qui avait demandé la parole à ce moment? C'est vous, Mme la députée?

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Une lecture rapide du projet de règlement confirme l'impression qui s'était déjà dégagée de la loi: l'unilinguisme français en matière d'affichage public et de publicité commerciale, c'est l'exception; exception pour Media-com, pour les transports en commun et les abribus — exception. Tout le reste et sans exception, c'est le bilinguisme. Curieusement, l'article introductif, c'est: «L'affichage public et la publicité commerciale doivent se faire en français.» Il est étonnant qu'on ait conservé cet article-là parce qu'on aurait pu dire: doivent se faire en français et en anglais, sauf exceptions françaises. Parce qu'en matière d'affichage public et de publicité commerciale, que ça soit à l'intérieur des commerces, les grandes surfaces, ce qui n'était pas vrai avec la loi 158... à l'extérieur, évidemment, à moins que le ministre nous dise qu'il y a peut-être quelques autres petites exceptions cachées, mais, pour l'heure et pour le moment, on dit: l'unilinguisme français, une exception, et la règle de prédominance difficilement applicable, pour ne pas dire inapplicable. À un point tel qu'on se demande comment il se fait qu'il ait conservé l'idée des Mediacom, des grands panneaux-réclame? Et, si on parle d'un nombre de mètres donnés, comment va-t-il administrer cette règle-là? On dit 18 m2, mais n'importe qui, le moindrement avisé, s'il veut compétitionner Mediacom, va le faire à 17,5 m et, là, il ne sera plus soumis aux mêmes règles. Comment est-ce que ça va se

gérer? Donc, ce qu'on dit dans l'affichage public et la publicité commerciale en français, c'est devenu l'exception, la règle étant: ça se fait en anglais et ça se fait en français. Et y compris — ce qui est grave — en matière d'affichage public et de publicité commerciale pour l'administration. Et tout ça, particulièrement pour l'administration, sans que ça ait été vraiment demandé.

Est-ce que le président d'Hydro-Québec est venu demander au ministre d'afficher bilingue? Est-ce que la Société d'habitation du Québec est venue demander au ministre d'afficher bilingue? Est-ce que la Société des alcools est venue demander d'afficher bilingue? Est-ce qu'il y a eu des démarches? Est-ce qu'ils sont venus ici, en commission parlementaire, nous dire que ça nuisait à leur chiffre d'affaires, plus que la taxe, de ne pas afficher bilingue? Alors, c'est ça le problème avec ce projet de loi et le projet de règlement qui l'accompagne. C'est qu'on a complètement renversé le sens de la Charte qui était la charte du français et, en matière d'affichage public et de publicité commerciale, c'est devenu l'exception et c'est confirmé dans ce projet de règlement.

Moi, j'aurais besoin de quelques éclaircissements, puis on pourrait commencer avec un point parce que ça m'a un peu — peut-être qu'on a une mauvaise compréhension; le ministre nous en accuse quotidiennement. Alors on va vérifier avec lui comment est-ce qu'on doit interpréter le règlement en ce qui touche l'affichage, dans les moyens de transports, dans les abribus et dans ces accès.

Est-ce à dire, par exemple, que l'affichage à l'intérieur d'un autobus, c'est uniligue, et, à l'extérieur, c'est bilingue? Parce que c'est bien marqué «dans». Est-ce à dire que dans les abribus, à l'intérieur, c'est unilin-gue et, à l'extérieur, c'est bilingue? Parce que le règlement est un diktat. Peut-être que le ministre pourrait commencer par nous éclairer là-dessus.

M. Ryan: ...qu'on est ici pour discuter les détails du projet de règlement mais on vous a donné l'ensemble, à titre d'information. Ce n'est pas ça que nous sommes appelés à prouver ce soir; c'est le texte du projet de loi. Le texte du projet de loi est bien clair puis dit le contraire de ce qu'affirme la députée de Chicouti-mi. Elle dit: le projet de loi proclame le bilinguisme partout. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai. Le projet de loi dit ceci: «L'affichage public et la publicité commerciale doivent se faire en français. «Ils peuvent également être faits à la fois en français et dans une autre langue pourvu que le français y figure de façon nettement prédominante.»

On ne dit pas «ça doit». Si c'était le bilinguisme généralisé, on dirait: ça doit être fait dans les 2 langues, comme on l'a fait à propos de 133. À propos de 133, on a parlé de bilinguisme. On ne peut pas nier, c'est ça qui est la réalité dans des cours de justice; «l'une ou l'autre langue» et, dans certains cas, «l'une et l'autre langue». Certains document doivent être dans les deux. Mais, ici, on n'a jamais prétendu le contraire. Là, on vient de faire la découverte d'une grosse évidence.

Pourquoi est-ce qu'on fait des changements à la loi 101 en matière d'affichage, M. le Président, sinon pour modifier les dispositions selon lesquelles le français devait être employé moyennant l'interdiction d'une autre langue? C'est l'objet même des modifications que nous apportons à l'article 58. Ne nous demandons pas de reproduire ce qui existait. Nous n'aurions pas présenté de projet de loi. Nous avons expliqué, à combien de reprises, pourquoi nous procédions ainsi. C'est évident qu'une autre langue sera permise en général dans l'affichage public et la publicité commerciale. C'est un des principes du projet de loi. Les règlements ne peuvent pas être différents du principe du projet de loi. Sauf, au troisième alinéa, le projet de loi dit: «Toutefois, le gouvernement peut déterminer, par règlement, les lieux, les cas, les conditions ou les circonstances où l'affichage public et la publicité commerciale doivent se faire uniquement en français ou peuvent se faire sans prédominance du français ou uniquement dans une autre langue.» C'est ça que fait le projet de règlement. C'est évident que le texte de la loi étant rédigé ainsi, si on était arrivé puis qu'on avait inverti la règle, puis dire: ça va être le français exclusivement partout, sauf dans quelques exceptions, on n'aurait jamais rédigé l'article 17 du projet de loi comme il a été rédigé. Encore une fois, soutenir que nous instituons le biliguisme généralisé partout, c'est faux. Parce que tout dépendra de la manière dont agiront les entreprises qui ont des messages à véhiculer et nous demeurons d'avis, de ce côté-ci, que, dans un grand nombre de cas, un très grand nombre de cas, les entreprises choisiront de véhiculer leur messages commerciaux uniquement dans la langue officielle du Québec, puis ça sera tout à fait légitime. Si on proclamait le bilinguisme, elles ne pourraient pas faire ça. Il devrait y avoir une version anglaise. Ce n'est pas ça que dit le projet de loi du tout, du tout.

Alors, peut-être que c'est des termes imprécis dont la portée a échappé à la députée de Chicoutimi dans son intervention mais, franchement, je pense que c'est important de discuter ces choses avec précision et rigueur; autrement, on risque de créer de fausses impressions, ou de donner lieu à des polémiques inutiles. (22 h 10)

Mme Blackburn: M. le Président, le ministre a, avec beaucoup de justesse, attiré notre attention sur l'article 58. Peut-il m'expliquer: «L'affichage public et la publicité commerciale doivent se faire en français.» Ça, ça va bien jusque-là; et, dans le troisième paragraphe, il prévoit les exceptions, où ça se fera uniquement en français, pour bien faire comprendre que l'unilin-guisme français, c'est une exception. C'est ça que ça vient dire, son projet de loi. L'unilinguisme français, c'est une exception, la règle générale étant le bilinguisme. Le ministre nous dit: Ah, évidemment, les notions ont échappé à la députée de Chicoutimi, c'est compris, elle ne comprend jamais rien. Bien, ça, on le savait; il y en a d'autres aussi qui ne...

M. Ryan: On le constate tous les jours.

Mme Blackburn: ...comprennent rien. Tous les jours, effectivement, depuis déjà huit ans. C'est déjà passablement... Et curieusement, il y a de moins en moins de gens qui le croient. Heureusement, heureusement, parce qu'il y en a pas mal d'autres qui sont rentrés dans la même barque que moi, selon le ministre. Alors, ce que je demande au ministre: Est-ce qu'il est exact que les 3 exceptions dont on parle, c'est les Mediacom, les grands panneaux, — il nous a suggéré, comme dimension, 18 m, la semaine dernière; il nous a suggéré que c'était généralement ce qui était standard, 18 m, peut-être et plus, là, mais je... — et l'autre, les transports en commun, transports publics, et les abribus? Est-ce que ce n'est pas là les trois seules exceptions qu'on retrouve dans son règlement et dans son projet de loi? Est-ce que c'est exact?

M. Ryan: La seule réserve que j'ai là-dessus, c'est que la députée a encore commencé son intervention en disant: Ici, on a quelques exceptions sur l'unilin-guisme français, et le reste, c'est le bilinguisme: Ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai; c'est ça que je veux essayer de vous faire comprendre. Si c'était le bilinguisme, ce serait écrit en toutes lettres: Les messages doivent être en français; ils doivent également être en anglais. Ça, ça serait du bilinguisme. Mais, quand on dit: Les messages doivent être en français, ils peuvent également être faits à la fois en français et dans une autre langue, on ne peut pas tirer cette conclusion-là, c'est inexact, c'est inexact. Ça étant dit, encore une fois, nous l'avons dit — toute la controverse des 6 derniers mois a eu lieu autour de cette idée-là — qu'en matière d'affichage public et de publicité commerciale, nous ne pouvions pas, pour des raisons maintes fois expliquées, maintenir la règle de Punilinguisme français exclusif.

Alors, si vous ne maintenez pas cette règle-là, vous maintenez une règle de prédominance du français, avec possibilité d'usage d'une autre langue, qui ne signifie pas qu'elle sera nécessairement utilisée. C'est ça qu'on dit ici, excepté qu'on prévoit quelques exceptions. Franchement, quand on a conçu le projet de loi, on ne voulait pas que les exceptions soient trop nombreuses. S'il y en a d'autres cas qu'on veut souligner au cours des 2 prochains mois, là, pendant lesquels on aura des échanges publics sur le projet de règlement, la section III, on les donnera; et, si la députée a des cas qu'elle veut fournir, soumettre à notre réflexion, nous allons les écouter. Mais les affirmations générales là-dessus, on est passé ce stade-là; on est dans le stade de l'étude fonctionnelle.

Mme Blackburn: Dans ce que le ministre nous dit, est-ce que j'ai bien compris? Il dit: Les exceptions unilingues françaises, on les voulait les moins nombreuses possible.

M. Ryan: Dans ceci, si on affirme... Mme Blackburn: C'est bien ce que j'ai compris. M. Ryan: ...le principe que vous avez... Mme Blackburn: Alors, c'est vraiment...

M. Ryan: ...le français — non — obligatoire partout, avec possibilité d'utilisation d'une autre langue, allez-vous venir dire, dans un article suivant: Impossibilité d'utilisation d'une autre langue dans la majorité des situations? C'est absolument contradictoire.

Mme Blackburn: C'est pour ça qu'il aurait été plus cohérent de dire que c'était également l'anglais et le français qui étaient permis.

M. Ryan: Non, c'est faux, c'est faux; ce n'est pas ça que le projet de loi dit, et toutes les déformations que la députée cherchera à diffuser n'atterriront nulle part, parce que, quand les gens verront le texte, ils vont s'apercevoir que ce n'est pas ça que ça dit.

Mme Blackburn: Si...

M. Ryan: Ce n'est pas ça que ça dit.

Mme Blackburn: Si le passé est garant de l'avenir, on se rappelle un passé plutôt récent — ce n'est pas très vieux — le début des années soixante-dix, où tout se passait majoritairement, ou unilingue anglais, ou bilingue, et y compris dans ma Gaspésie natale. Ça veut dire que, pour utiliser l'expression du Conseil de la langue, qui recommandait au gouvernement de ne pas aller dans cette direction, parce qu'il estimait que permettre le bilinguisme dans l'affichage public et la publicité commerciale, c'était prendre un risque de propagation du bilinguisme, de propagation de l'anglais sur tout le territoire du Québec... Ce n'est pas moi qui dit ça. C'est le Conseil de la langue et, le Conseil de la langue, c'est le ministre qui l'a consulté. Je sais que, par après, il a créé son petit comité parallèle, sa manière à lui. Quand les avis ne font pas son affaire, on les arrange, mais il y a un avis là qui n'est pas l'avis du Parti québécois, qui est l'avis de l'organisme officiel chargé de conseiller le gouvernement et, par voie de conséquence, la population, de façon générale. Puis, ce qu'ils vous ont dit: Si vous vous en allez dans cette direction, attendez-vous à ce qu'on beurre le Québec. Propagation de l'anglais sur tout le territoire du Québec, ce n'est pas mon expression, c'est celle du Conseil de la langue. Et pour des raisons extrêmement simples, de la même manière qu'Hydro-Québec, tantôt, voudra le faire aussi. Est-ce qu'Hydro-Québec aura 2 types d'affichage destinés au public? Est-ce qu'elle va dire: Pour Montréal-Ouest, pour les informer de ce que j'ai à faire, je vais faire ça, puis, après ça, un petit bout en Estrie, puis un autre petit bout à quelque part, en Gaspésie, puis, tout

le reste, ça va être unilingue français? Vous savez bien qu'à sa face même ça n'a pas de bon sens. Vous savez, très rapidement, que la Société des alcools va utiliser son pouvoir pour le faire le plus largement possible dans les 2 langues, parce que c'est une question d'économie. Puis, là, vous allez invoquer l'économie en disant: Mais oui, c'est vrai que ça coûte plus cher faire faire ça un petit peu en bilingue, puis un petit peu en unilingue, puis un petit peu... Et le résultat va être ce que prévoit le Conseil de la langue, c'est-à-dire la propagation de l'anglais sur tout le territoire du Québec. Alors, je le rappelle, ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est le Conseil de la langue.

Et supposément... Moi, je me trompe souvent, là. C'est connu, aux yeux du ministre, mais, le Conseil de la langue, il doit y avoir un peu de sérieux, là-dedans, d'autant qu'il a d'excellents amis à lui, des gens que je respecte aussi, M. Taylor, en particulier, qui n'est pas non plus tombé de la dernière pluie. Il a quand même un passé, il a une crédibilité, puis cette personne-là, associée avec d'autres, vous a dit: Ça n'a pas de bon sens. Là, vous êtes en train de nous dire que ça a du bon sens. Alors, voulez-vous me dire sur la foi de quoi?

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: Je pense que la partie des propos de la députée de Chicoutimi, relative à Hydro-Québec puis ces choses-là, ça, c'est impertinent, à ce moment-ci, parce qu'on a adopté l'article... je pense que c'est l'article 4 du projet de loi. On l'a adopté la semaine dernière.

Une voix: Sur division. Mme Blackburn: Sur division.

M. Ryan: Oui, oui, mais il a été adopté. Maintenant, c'est adopté. On n'est pas supposé revenir là-dessus. Là, on discute de la langue du commerce et des affaires, la langue dans le monde du commerce et des affaires. Dans ce monde-là...

Mme Blackburn: Je reconnais... M. Ryan: O.K?

Mme Blackburn: ...que le ministre a raison là-dessus, sauf que ce que j'aurais dû lui dire, ce que je m'apprêtais à lui dire, c'est qu'avec l'administration publique, le fait qu'il autorise le bilinguisme dans la publicité, il donne un mauvais exemple. Il donne un exemple qu'il n'aurait pas...

M. Ryan: Je soulève la question de pertinence, là.

Une voix: Oui, oui.

M. Ryan: Là, je soulève la question de pertinence.

Franchement, vous dites que j'ai raison et vous continuez.

Mme Blackburn: Bien oui, parce qu'on parle de l'affichage public...

Le Président (M. Doyon): Mme la députée, je vous demande de vous référer à l'article 17, s'il vous plaît.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Et je dis tout simplement que dans l'article 17, touchant l'affichage public et la publicité commerciale, le ministre... Il va y avoir une tendance forte à la bilinguisation, du fait que le gouvernement autorise l'administration et ses sociétés d'État à afficher bilingue. Voulez-vous me dire sur quel principe le privé s'en priverait? Pourquoi est-ce qu'il se gênerait?

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Oui, M. le ministre.

M. Ryan: Le privé, il y a une loi qui le gouverne qui est bien plus importante que toutes nos considérations savantes autour de la table. C'est la loi du commerce.

Une voix: C'est ça.

Mme Blackburn: Ça les a gênés, encore.

M. Ryan: Un commerçant de Rimouski, qui veut annoncer à la devanture de son magasin, sait très bien ce qu'il a à faire. Il n'a pas besoin d'avoir les conseils du ministre responsable de l'application de la langue, ni de tel ou tel député. Lui, son guide, c'est sa clientèle.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée. Oui, oui, je sais, mais le ministre est en train de...

M. Ryan: Et il va concevoir ses messages dans la langue qui pourra le mieux atteindre sa clientèle. Mais, où la clientèle est à 98 % française, il n'y aura aucun problème qui va se poser là. J'en suis convaincu, parce que tout le monde est devenu davantage conscient, au cours des dernières années, de l'importance qu'il convient d'accorder à la langue française au Québec. Il y en a qui en étaient peut-être moins conscients. Ça n'a jamais été la moitié aussi pire que le prétendent des prophètes de malheur de l'autre côté. Je me rappelle, moi, dès le temps de la commission Gendron. Dans le rapport de la commission Gendron, il y avait un passage que j'ai cité combien de fois et qu'on n'a jamais écouté, de l'autre côté. Il disait que 87 % du temps de travail des francophones était consacré au travail en français, dès ce moment-là — dès ce moment-là. L'évolution qui s'est produite, depuis, ne pouvait pas être considérable, parce que, quand tu es rendu à 87 % dans un continent

comme le continent nord-américain, tu ne peux pas frapper la barrière de 100 %, c'est impossible; c'est impossible, c'est impensable, étant donné le caractère international des échanges, et tout, là, franchement, c'est impensable. (22 h 20)

Alors, on a fait certains progrès, mais, tu sais, il ne faut pas partir en peur, et le Québec des profondeurs, c'est lui qui a survécu au cours des années; toutes nos lois l'aident, mais finalement il survit par ce qu'il est, d'abord, fondamentalement. Nous autres, ce que nous faisons ici, c'est un acte de foi un peu plus grand là-dedans, et pas parce que nous le faisons d'une manière spontanée et joyeuse, mais parce que l'évolution des 5 dernières années nous a convaincus, d'abord, qu'il n'y avait pas d'issue dans la voie que nous avions choisie. Nous n'étions pas capables de l'expliquer de manière à satisfaire les critiques sérieux et honnêtes. Et, deuxièmement, l'opinion a évolué, chez nous, les valeurs ont évolué, aussi, au point que nos concitoyens et nos concitoyennes sont plus conscients que jamais de l'importance qu'il convient d'apporter aux valeurs de responsabilité personnelle, sans détriment des valeurs de responsabilité collective, mais en subordonnant les secondes aux premières de manière très habituelle.

C'est ça qui est l'essence de l'article 58, c'est le fond. On peut discuter. Même sur les modalités, je m'aperçois qu'il n'y a pas beaucoup de critiques vraiment fonctionnelles qu'on peut faire entendre. Et j'ai dit à la députée: S'il y a d'autres exceptions que vous pensez vraiment nécessaires et indispensables, on serait intéressé à les entendre, on serait intéressé à en discuter, on est prêt à le faire. Mais, sur le principe de fond, on ne peut pas revenir là-dessus. C'est un des points fondamentaux du projet de loi.

Mme Blackburn: M. le Président, le ministre est un homme...

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: ...cultivé, on le lui reconnaît, et c'est de commune renommée. Il a lu beaucoup. Il s'est intéressé à toutes sortes de questions. Je sais qu'il s'est intéressé aussi à ce qu'on appelle l'extinction des langues dans le monde et dans l'histoire de l'humanité. J'imagine qu'il l'a fait; on ne peut pas être porteur du dossier linguistique, au Québec, sans s'être intéressé à cette question. Et, d'ailleurs, il s'est intéressé, puisqu'il nous rappelait, la semaine dernière, au moment où on commençait à examiner le projet de loi, que, dans le fond, il en va un peu des langues comme des modes. Le latin avait déjà été la langue de la diplomatie, du commerce, des affaires. Le latin, en tout cas, a disparu comme langue première du commerce et des affaires. Il en reste à peu près deux, trois qui parlent le latin, dont le ministre, et probablement le pape, encore — quoique, celui-là, il est Polonais; je ne le sais pas trop, trop - mais bref, bref, ce que ça laissait entendre, c'est qu'il ne faut pas trop s'apitoyer sur la disparition possible — c'est ce que ça pouvait contenir — du français au Québec, puisqu'il y en a d'autres langues qui ont disparu.

On connaît le sort du français actuellement. Le français a déjà été la langue de la diplomatie, la langue des relations internationales et la langue des affaires; et, sur le continent européen, c'était la langue seconde dans toute une partie des pays de l'Europe de l'Ouest; ça n'est plus vrai, ça n'est plus vrai. Il connaît la fragilité du français. Il ne peut pas faire semblant qu'il ne sait pas. Il prend des risques avec l'avenir du français au Québec. C'est ça qu'il fait, parce que nous, nous, les petits 6 000 000, là, il pense qu'on va résister à la vague d'américanisation. Je ne sais pas où il prend cette idée-là, mais je ne suis pas certaine qu'il soit sérieux lorsqu'il essaie de nous l'avancer. Ça ne tient pas. Ça ne tient pas, ça ne tient pas à un minimum de rigueur.

Alors, je dis que, ça, c'est le commencement du glissement. Et on abordera le dossier des écoles, tantôt, et ça va être le commencement de la fin, aussi, dans ce secteur-là. Là-dessus, par rapport aux dispositions particulières du règlement, c'est qu'on ne voit pas, à l'exception des règles d'égale importance — je vais réutiliser les expressions — «le français y figure de façon au moins aussi évidente», on ne parle pas de la prédominance, mais je présume qu'il faut se rapporter au règlement sur l'évaluation de ce qui s'appelle le règlement touchant l'appréciation de la nette prédominance. Mais on pourra y revenir. La nette prédominance, vous n'avez pas eu une seule plainte pour la nette prédominance à l'intérieur des commerces. Demandez-moi donc ce que ça va donner à l'extérieur. D'autant qu'on a aboli l'Office, en tout cas les moyens que l'Office avait à l'époque. Pas l'Office mais la Commission. On a aboli la Commission. Ce n'est pas sûr que ça va nous donner grand résultats.

Là-dessus, je vais terminer. Je résume en disant que, dans le fond, l'article est mal appelé quand on dit: Le français, la langue du commerce et des affaires. Puis, ensuite, le ministre nous dit: J'ai voulu limiter à quelques cas le plus possible la possibilité de l'unilin-guisme français de la publicité commerciale. Bien, je me dis: C'est là la réponse que... la réponse qui était... et l'évaluation qu'on en faisait.

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, sur la question de la prédominance des langues dans le monde, c'est un fait contre lequel nous ne pouvons rien. Selon les époques de l'histoire de l'humanité, il y a certaines langues qui ont prédominé par rapport à d'autres. Longtemps ce fut le latin. Après ça, l'espagnol a connu une grande domination, le français. Là, depuis un siècle, c'est l'anglais qui n'a cessé de monter, qui semble promis à une prédominance qui va durer encore au moins, au moins, quelques générations. Ça c'est un fait. Ça n'a rien à

voir avec les langues particulières sur chaque territoire. Il peut y avoir une langue internationale: la lingua franca. Puis, dans notre cas, c'est l'anglais aujourd'hui, ça, personne ne conteste ça, personne ne conteste ça. S'il y a quelqu'un qui connaît un meilleur journal que le New York Times dans le monde, je le défie de le nommer. C'est le journal le plus complet, le mieux équipé, c'est lui qui donne le plus de matière à chaque jour. On a beau avoir 10 Devoir ici, puis 50 Presse, ça ne vaudra jamais, au point de vue qualité... Quand on dit ça, je pense que ce n'est pas du tout faire injure à nos journaux qui sont honorables, étant donné les moyens très limités dont ils disposent. Et j'en sais quelque chose pour avoir été là-dedans.

Je sais que quand je mettais les pieds au New York Times à New York, bien, j'étais obligé, dans une bâtisse d'une quinzaine d'étages, dans le temps, de me rendre compte que la boutique où j'oeuvrais était une boutique infiniment modeste. Le New York Times vient de se procurer le Boston Globe. Savez-vous combien est-ce qu'il paie pour ça? Un milliard — un milliard. On n'est pas du tout dans cette ligue-là. Il y a ça. Nous devons tenir compte de ça, puis nous ne pouvons pas refuser à nos concitoyens l'accès à cette lingua franca de l'époque moderne. C'est une autre raison pour laquelle nous insistons sur la nécessité de l'apprentissage de la langue seconde.

Ça étant dit, j'en reviens au projet de règlement lui-même. Je constate que sur la partie qui traite des inscriptions, de la section I, pas de remarque là-dessus. Ça m'a l'air que ça suscite l'adhésion, ça, de l'Opposition. Je ne veux pas l'emporter avant le temps, mais je pense que la députée conviendra qu'on est très proche de ce qui a été travaillé avant nous dans le passé. Que les mesures qui sont là sont des mesures de caractère fort raisonnable.

Sur les catalogues, les brochures, les dépliants, les annuaires commerciaux et autres publications de même nature, je ferais la même observation. Je n'ai pas entendu de critique là-dessus. Je pense que la députée avait demandé trois quarts d'heure pour examiner l'ensemble du règlement. Je suis enclin à penser — je ne veux pas le conclure avant que... la conclusion appartient uniquement à la députée puis à ses collègues, pas à moi — que ça ne soulève pas trop de difficultés dans leur esprit parce qu'ils nous l'auraient dit — ils nous l'auraient dit. Alors, ça fait une deuxième section qui est réglée.

Nous arrivons à la troisième section. Là, il y a un point qui fait difficulté. On conteste le principe inscrit dans le projet de loi, d'où émane le projet de loi. Ça, je le conçois très bien. Je le sais que l'Opposition va voter contre le projet de loi. Mais elle ne peut pas s'attendre à ce que, nous autres, nous lui présentions un projet de règlement qui soit le contraire de ce que dit le projet de loi. Nous essayons d'être honnêtes avec nous-mêmes. Puis, là, nous alignons un certain nombre d'exemples où l'affichage devra être fait en français, pourra être fait dans une autre langue mais d'une manière qui ne sera pas la nette prédominance mais qui sera plutôt aussi évidente — aussi évidente. C'est ça qu'est le principe à peu près général qu'on trouve là dans les dérogations qu'on prévoit. Puis, je regarde chacun des cas. Je pense que ce sont des cas très nettement circonscrits. Dans plusieurs de ces cas-là, il y a concordance avec ce qu'on propose pour les inscriptions, les catalogues et les autres publications de même nature. Puis, c'est à peu près tout ça, ce dont traite le règlement. (22 h 30)

Celui-là, moi, je vais en être assez heureux parce que ce n'est pas l'ouvrage de M. Godin, ce n'est pas l'ouvrage de l'OLF, ce n'est pas l'ouvrage du Conseil, ce n'est pas l'ouvrage du ministre actuel. C'est l'ouvrage de tout ce monde-là. Ça illustre ce que j'ai dit dès le début de nos travaux: On peut se chicaner entre nous, on peut s'alimenter de critiques de part et d'autre, c'est de bonne guerre, mais au fond, en vertu de l'économie de notre régime, chacun apporte sa pierre à l'édifice. Quand la pierre est bien posée, elle reste et elle peut être améliorée, elle peut être renforcée. Quand elle a besoin d'ajustements, elle les a et, si les ajustements vont trop loin, il arrive un changement, à un moment donné, qui permet d'établir l'équilibre, mais je crois que ce règlement est à l'enseigne de la continuité.

En ce qui touche la publicité commerciale et l'affichage public, l'orientation du projet de règlement est en ligne avec le projet de loi, et, là-dessus, je ne prétends pas trouver une ressemblance avec le projet de M. Godin, pour des raisons évidentes, parce que le principe de base en matière d'affichage était différent, mais, sauf cette exception, tout le reste est absolument de même inspiration, et je serais fort heureux que l'Opposition voulût le reconnaîre en toute loyauté.

Mme Blackburn: Est-ce que la question...

Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le ministre?

Mme Blackburn: Le ministre ne veut pas s'en aller sur ce genre de détail, mais, quand même, ça nous donnera l'esprit. Dans les moyens de transport, ses accès et dans les abribus, est-ce à dire qu'à l'intérieur c'est unilingue français et, à l'extérieur, ça pourra être bilingue? Les grands panneaux qu'on voit sur tous les autobus qui circulent dans les villes où il y a des autobus — il n'y en a pas partout — est-ce que ça veut dire que, dans les transports en commun, à l'intérieur, c'est unilingue et à l'extérieur... La même chose pour les camions de livraison.

M. Ryan: Pardon. A priori, je penserais que ça va être en français uniquement à l'intérieur et à l'extérieur.

Mme Blackburn: Pourquoi c'est marqué «dans»? M. Ryan: Bien, «dans», c'est le moyen qui a été

employé. Si c'est mieux d'employer une autre préposition, on le fera, mais c'est évident que c'est ça.

M. Bélanger (Anjou): II faudrait peut-être marquer «dans» et «sur», à ce moment-là.

M. Ryan: Oui, c'est ça. Ça, ça pourrait être corrigé, on a 2 mois pour faire ça, mais je prends note de cette observation-là, avec intérêt. Toute observation constructive nous édifie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger (Anjou): Nous ne cesserons de vous édifier.

M. Blais: C'est parce qu'il ne nous croit pas capables de quelque chose de constructif. C'est tellement. ..

M. Ryan: Mais je vois que vos collègues font un effort appréciable.

Mme Blackburn: Ah! je sais. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Vous savez, j'ai un défaut majeur, je suis une femme, en plus.

Une voix: Ah non! Ah non!

M. Ryan: On peut descendre dans toutes sortes de considérations, mais c'est complètement étranger à nos préoccupations.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Lac-Saint-Jean.

Mme Blackburn: Vous m'en direz tant!

M. Ryan: Nous, nous avons des femmes de très grande qualité de notre côté, et elles ne nous tiennent jamais ce language-là. C'est pour ça que nous respectons leurs interventions.

M. Brassard: J'aurais d'abord, au préalable, une question à poser au ministre concernant la dimension des panneaux-réclame, la dimension des panneaux-réclame. Est-ce que... Excusez...

M. Ryan: Oui, je vous écoute, M. le Président, et le député de Lac-Saint-Jean aussi.

M. Brassard: Sur la question des panneaux-réclame, vous allez indiquer la dimension, la superficie. Là, elle n'est pas indiquée, mais vous allez, évidemment, l'indiquer. La superficie générale des panneaux-réclame, actuellement, c'est de quel ordre?

M. Ryan: Les informations qu'on nous a données indiquent que c'est 20 x 10, 20 pieds par 10 pieds, ce qui fait 18 m2, 18,3 m2.

M. Brassard: Donc, vous allez indiquer, probablement... Ça va être à peu près ça, une superficie de tant de pieds carrés.

M. Ryan: Je ne sais pas, je ne sais pas. Nous allons écouter, nous allons continuer d'étudier au cours des 2 prochains mois. C'est un...

M. Brassard: Parce qu'à partir du moment où vous indiquez une superficie, un chiffre précis, c'est évident qu'à ce moment-là ça devient facile de se soustraire à cette règle-là. Il suffit de rapetisser les panneaux-réclame et de se considérer comme pouvant utiliser plus d'une langue, une autre langue que la langue officielle. Alors, si vous ne choisissez pas d'indiquer une superficie précise, vous allez faire quoi?

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Ryan: ...ça, ce sont des choses que nous avons déjà commencé à travailler avec les entreprises concernées. Il n'y en a pas beaucoup d'entreprises de panneaux-réclame au Québec. En tout, je pense qu'il y en a 5. On a vite fait le tour, c'est une industrie extrêmement spécialisée, dont les possibilités de marché sont loin d'être illimitées et les entreprises qui sont là occupent à peu près tout le terrain actuellement. Si nous avons, avec elles, des rapports empreints de compréhension et que, selon les renseignements qu'elles nous donnent, la dimension standard, c'est celle que nous inscrirons dans le projet de règlement, je pense bien qu'elles le respecteront et, si elles doivent envisager des changements, elles viendront nous en parler. Si on nous parle de changements qui sont à envisager dans un avenir rapproché, nous en tiendrons compte dans le libellé définitif. Pour le moment, c'est le point où nous en sommes rendus. Je l'ai donné en toute transparence, je pense bien, mais nous compléterons les petits points qui restent à remplir d'ici la présentation de mes recommandations au gouvernement. Quand il va nous rester seulement ça à remplir...

M. Brassard: Est-ce que je dois comprendre que vous songez à une sorte d'entente? Étant donné le nombre réduit des entreprises dans ce secteur-là, vous songez à une sorte de négociation d'entente, une entente avec les entreprises concernées?

M. Ryan: Une entente, nous n'en avons pas besoin réellement. Ce que nous voulons obtenir d'elles, c'est une information fiable quant aux tendances prévisibles de l'industrie. Une fois que nous aurons ça, nous n'avons pas besoin d'entente. D'abord, ces entreprises

n'ont pas de contrôle sur les commandes qu'elles recevront des commanditaires. Elles, ce que nous leur demandons, ce sont des indications techniques: Quelles sont les tendances de l'industrie? Vers quel format de panneaux-réclame on s'oriente, étant donné l'évolution des techniques et tout ça? Et c'est à la lumière de ces considérations que nous arrêterons, d'une manière définitive, le texte du paragraphe 15.

M. Brassard: C'est justement. Ces entreprises obéissent, en quelque sorte, aux commandes de leurs commanditaires qui leur réclament tel genre de publicité. Une firme de publicité a conçu un projet de réclame, des slogans, des trucs du genre, qu'on retrouve généralement sur les panneaux-réclame. Comme ils sont soumis à leurs commanditaires, un commanditaire qui voudrait outrepasser le règlement et utiliser une autre langue, en plus de la langue officielle, pourrait fort bien dire à l'entreprise: Vous réduisez les panneaux-réclame, la dimension des panneaux-réclame, de telle sorte que vous ne serez plus soumis à la réglementation. Donc, vous pourrez utiliser ou recourir à la règle générale prévue à l'article 58.

M. Ryan: Oui, c'est tout de l'ordre du possible, mais je ne pense pas vraiment que les choses vont se passer comme ceci. Si ça devait se passer de cette manière-là, à ce moment-là, comme je l'ai déjà indiqué, le gouvernement aurait tout le loisir voulu pour ajuster son règlement, à supposer qu'il revêtirait cette forme, dans sa version définitive, ce que nous ne savons pas encore. Nous allons accueillir toutes les réactions qui nous seront données et c'est seulement après avoir étudié tous les avis dont nous aurons été saisis que nous serons en mesure de tirer une conclusion quant à la forme que revêtira finalement le règlement. Mais déjà, que nous puissions communiquer toute cette matière à la population, à ce stade encore très peu avancé de l'expérience, je pense que c'est quand même un bon signe. Mais, celui-ci, il présente une difficulté et c'est un des rares qui présentent une difficulté, de tous les articles que nous avons soumis, nous en convenons. Si vous pouvez nous aider, je suis très intéressé à entendre les suggestions.

Le Président (M. LeSage): M. le député de... M. Brassard: M. le Président.

Le Président (M. LeSage): Avez-vous terminé, M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Non, je n'ai pas terminé parce que je voudrais en venir à l'essentiel...

Le Président (M. LeSage): Allez-y! (22 h 40)

M. Brassard: ...quant à moi, c'est-à-dire à la disposition générale de l'article 58, deuxième alinéa. On dit que l'affichage public et la publicité commerciale «peuvent être faits à la fois en français et dans une autre langue pourvu que le français y figure de façon nettement prédominante». Ce qui nous réfère à un projet de règlement déposé la semaine dernière en commission. C'est le règlement précisant la portée de l'expression «de façon nettement prédominante». Forcément, il a été déposé la semaine dernière quand vous avez déposé le règlement sur l'administration, mais il est clair qu'il s'applique aussi à l'article 58. La notion de prédominance, c'est la même. C'est la même notion. Donc, c'est, si je comprends bien, le même règlement.

Moi, je vous avoue bien honnêtement, M. le ministre, j'ai beau lire et relire ce règlement sur la portée de l'expression «de façon nettement prédominante», je me demande concrètement comment vous allez pouvoir appliquer ça. D'abord, c'est une notion qui n'est pas nouvelle, une notion qui est apparue avec la loi 178, il y a 5 ans, bientôt 5 ans, presque 5 ans, lorsque le gouvernement a décidé de recourir à la clause dérogatoire, on s'en rappellera, pour rendre possible l'affichage bilingue à l'intérieur des commerces, mais à la condition que la langue officielle, le français, soit prédominant, et le maintien de Funilinguisme français à l'extérieur des commerces.

Ça fait 5 ans qu'une telle notion existe dans nos lois et doit s'appliquer. La députée de Chicoutimi signalait, à juste titre, qu'il n'y a pas eu de plaintes. Il n'y en a jamais eu, parce que, pour porter plainte sur une violation d'une loi, il faut que ce soit évident, et il faut que la violation soit relativement simple à constater.

Quand c'est trop compliqué, c'est clair qu'il n'y a pas grand monde qui porte plainte. Il n'y a pas grand monde qui prend la peine et le temps pour essayer d'identifier une violation, de sorte qu'on arrive, après 5 ans... C'est 5 ans; ce n'est pas rien. Ce n'est pas quelques mois. Ça fait 5 ans que le concept de prédominance est dans nos lois et s'applique à l'intérieur des commerces. Et il n'y a pas eu une seule plainte, pour une raison évidente, c'est que, quand je regarde le règlement qu'on a sous les yeux, qui a été déposé la semaine dernière, il y a non seulement le concept de prédominance qui est là, mais, en plus, on ajoute un autre concept, qui est le concept de l'impact visuel. Ce n'est pas rien, ça. C'est aussi nébuleux que le concept de prédominance. Lorsque le texte rédigé en français a un impact visuel beaucoup plus important que le texte rédigé dans l'autre langue... ça nous avance beaucoup. l'article 2, là, il est question de conditions pour déterminer si l'impact visuel est plus important. là, il y a l'espace. si l'espace consacré au texte français est deux fois plus grand que celui consacré au texte rédigé dans l'autre langue, là, oui, il y a un impact visuel plus important. là, il y a une troisième notion qui intervient, qui est aussi très questionnable, c'est la notion du un tiers, deux tiers. pourquoi pas 25 %, 75 %? pourquoi pas 60 %, 40 %? non, c'est un tiers, deux tiers. on a choisi ça, là. je ne sais pas par quel méandre on en est arrivé à ce choix-là. et, les caractères, il faut qu'ils

soient 2 fois plus grands que ceux utilisés dans le texte, dans l'autre langue. Deux fois plus grands. Toujours le concept, la notion un tiers, deux tiers, et les autres caractéristiques de cet affichage.

Après ça, là, c'est quand les affiches sont distinctes. Quand les affiches sont distinctes, une affiche distincte en français, une affiche distincte en anglais, là, le nombre des affiches est important. Là, le nombre des affiches, il faut qu'il y en ait plus en français qu'il y en a en anglais. Combien plus? Deux fois plus. Il faut qu'il y en ait 2 fois plus en français qu'en anglais, quand les affiches sont distinctes. Là, pour décider s'il y a une violation, vous entrez dans un magasin — c'est pour ça qu'il n'y a pas eu de plaintes — d'alimentation, par exemple, où on a des affiches pour des bananes, des jus de tomate, quelque chose du genre. Là, pour déterminer s'il y a une violation, il faut quasiment avoir un fauteuil roulant et se promener dans les allées, et là il faut les compter.

Là, tu les comptes tout autour, tu les notes, et là, si c'est 2 fois plus, c'est correct, la loi est respectée. Mais si ce n'est pas 2 fois plus, il y a une violation. Mais qui va prendre la peine de faire ça? Quand tu fais ton marché, tu fais ton marché. Tu embarques les affaires dans ton panier et tu ne te soucies pas de compter les affiches. C'est pour ça qu'après 5 ans il n'y a personne qui a porté plainte. Voyons donc! Ce n'est pas applicable, cette affaire-là.

Deuxièmement, les caractères utilisés dans le texte rédigé en français sont au moins aussi grands que ceux utilisés dans le texte rédigé dans l'autre langue. Là, il faudrait avoir une règle, un gallon à mesurer pour aller mesurer, et un pied-de-roi, comme on disait autrefois. Ça aussi c'est absurde. Il n'y a personne qui va faire ça. Et puis, le troisième — écoutez bien ça — la distance entre les affiches et la répartition de ces dernières ne doivent pas avoir pour effet de réduire l'impact visuel. Toujours cette notion pour le moins ambiguë du texte rédigé en français.

La distance entre les affiches et la répartition de ces dernières. Alors, les affiches en français, si elles sont en arrière du magasin et non pas devant, j'imagine que c'a peut-être pour effet de réduire l'impact visuel. Y a-t-il violation? Peut-être. Et, quatrièmement, les autres caractéristiques de cet affichage... C'est quoi, les autres caractéristiques? Un autre concept ambigu et nébuleux, flou. Les autres caractéristiques. Les couleurs, par exemple, peut-être, est-ce que ça rentre là-dedans, les autres caractéristiques? Peut-être. Si c'est fluo, probablement.

Quatrièmement, les textes rédigés à la fois en français et dans une autre langue qui sont sur des affiches distinctes, mais de différentes dimensions. Le texte rédigé en français est réputé avoir un impact visuel beaucoup plus important si les conditions suivantes sont réunies. Toujours la question du nombre. Donc, il faut les compter. Les affiches sont au moins 2 fois plus grandes en français que celles sur lesquelles figure le texte rédigé dans l'autre langue. Là, c'est le concept un tiers, deux tiers qui revient. Deux fois plus grand. Deux pour un.

Les caractères utilisés dans le texte rédigé en français sont au moins 2 fois plus grands — toujours la même notion du 2 fois pour 1 — que ceux utilisés dans le texte de français. Mais, là, il faut avoir un instrument de mesure. Il faut se promener avec son pied-de-roi, comme les ouvriers de la construction. Vous savez, les ouvriers de la construction, ils ont leur gallon à mesurer dans leur ceinture. Quand on va faire notre marché, si on veut surveiller les violations de la loi Sur la prédominance, on va se promener avec notre gallon à mesurer dans la ceinture, un escabeau, parce que, des fois, les affiches sont hautes, et une petite calculatrice pour compter les affiches.

C'est pour ça qu'il n'y a pas de plaintes. Le ministre dit: II n'y a pas eu de plaintes, et conclut, parce qu'il n'y a pas eu de plaintes, que c'a été respecté. Pas du tout! Pas du tout! C'est parce que ce n'est pas applicable. Je ne comprends pas qu'il dise: Ce n'est pas difficilement gérable, tout ça. Voyons donc! Ce n'est pas gérable. Ce n'est pas applicable. De sorte que la notion, le concept de prédominance, moi, je suis convaincu que c'est une supercherie. C'est de la poudre aux yeux. C'est un écran de fumée tout simplement parce qu'il n'y a personne qui est en mesure d'appliquer ça correctement et convenablement. Ce règlement-là, voyons donc, il n'y a personne... Pensez-vous qu'ils vont être capables d'appliquer ça, ce règlement-là? C'est plein de notions nébuleuses, floues, de conditions absolument inapplicables. (22 h 50)

Donc, la réalité, ça va être quoi? La réalité ça va être le bilinguisme, ça va être les 2 langues sur un pied d'égalité dans l'affichage public et commercial. Ça va être ça, la réalité. C'est déjà la réalité. Écoutez, à l'intérieur des commerces où c'est permis maintenant, c'est déjà ça, la réalité. Il ne faut pas se le cacher, là, la prédominance, il n'y a personne qui se soucie de ça. C'est le cadet des soucis d'à peu près tout le monde. Moi, j'aimerais ça, parce que ça, là, le règlement sur la prédominance, sur la notion de prédominance, c'est capital pour ce qui est de l'article 58, deuxième alinéa. C'est capital, c'est là le coeur de la loi. Les autres règlements que le ministre a déposés tout à l'heure ont leur importance, et je pense qu'il faut les regarder attentivement, mais c'est des exceptions. La règle générale est là, et la règle générale fait appel à une notion qui est définie, encadrée ou qu'on veut encadrer ou définir dans le règlement qui a été déposé vendredi dernier. Et ça, vous avez beau lire, relire, apprendre par coeur ce règlement-là, ce n'est pas applicable. Ce n'est pas applicable. Il n'y a personne qui va appliquer ça, personne ne va appliquer ça, et personne ne va se soucier du respect de ce règlement-là. D'autant plus que l'organisme qui aurait pu s'intéresser à son application et à son respect va disparaître. On le supprime. La Commission de protection de la langue française est «kaput», disparue, finie, il n'y en a plus. Alors...

Mme Blackburn: II n'y avait pas de plaintes.

M. Brassard: Bien je comprends qu'il n'y avait pas de plaintes. Sur un concept pareil il n'y avait sûrement pas de plaintes, c'est évident. Il n'y en aura pas plus non plus, mais, au moins, on aurait peut-être pu supposer que la seule institution intéressée peut-être à faire un peu respecter ça, ou à faire un effort pour faire respecter ça, un petit effort, c'est la Commission de protection de la langue française, mais elle ne sera plus, là. Elle est disparue. Alors, qui va avoir intérêt? Les citoyens, il ne faut pas trop leur en demander, là. Moi-même, quand je vais faire mon marché avec ma femme, je fais mon marché avec ma femme et je jase avec le monde. Alors, je n'ai pas le temps de regarder les affiches. Et je suis convaincu que le ministre, c'est ça qu'il fait aussi, il jase avec le monde. Il n'y a personne qui va avoir le souci de faire ces calculs, ces vérifications compliquées pour voir si la nette prédominance est vraiment respectée. Alors, moi, j'aimerais mieux que le ministre nous dise carrément: Oui, c'est vrai, vous avez raison, ce n'est pas applicable, et c'est pour la forme, c'est pour la galerie, c'est pour faire semblant qu'on s'attache à ça. Il faut faire semblant qu'on est attaché à la prédominance du français dans l'affichage. Mais, dans la réalité, vous avez raison. J'aimerais ça qu'il nous dise: Vous avez raison, il n'y a personne qui va appliquer ça et c'est carrément inapplicable, ce n'est pas gérable. Au fond, ce qui va arriver, c'est le bilinguisme, les 2 langues sur le même pied. Très souvent, probablement, peut-être à l'occasion l'anglais prédominant; et personne ne va s'en soucier. Et 58, dans le fond, c'est ça, c'est ça qui arrive à 58.

Et le ministre s'offusque et s'indigne quand on dit ça et quand les adversaires de la loi, les opposants à la loi 86 affirment qu'en matière d'affichage public et commercial on va se retrouver avec, comme règle générale, le bilinguisme généralisé, et que le prétendu concept de prédominance ne verra jamais le jour. Il va demeurer dans les limbes. Jamais il ne verra le jour. C'est un enfant législatif mort-né, le concept de prédominance. C'est en enfant législatif mort-né. Jamais il ne verra le jour sur les murs des commerces ou sur les façades des commerces. C'est déjà un concept avorté. Donc, qu'on ait la franchise de nous dire que c'est vers ça qu'on veut aller, c'est vers le bilinguisme général dans l'affichage, et sans plus. Qu'on ait cette honnêteté de nous le dire, de nous l'annoncer. Qu'on fasse tout cela en toute transparence. Au moins on va savoir où on va. Qu'on n'essaie pas de nous berner, de nous tromper, de nous conter fleurette, de nous conter des histoires sur la prétendue prédominance du français qui va apparaître soudainement dans l'affichage. Il n'est pas apparu depuis 5 ans. Ce concept-là est apparu en 1987 puis on ne l'a pas vu sur les murs de nos commerces, il n'a pas vu le jour. Alors, il ne verra pas plus le jour à partir du projet de loi 86.

Moi, j'aimerais ça que le gouvernement fasse preuve d'une franchise qu'on pourrait qualifier de brutale, mais de saine, au fond, dans le débat actuel. Ce serait sain qu'il affiche carrément ses couleurs et qu'il n'essaie pas de prétendre que le français va occuper une place plus importante dans l'affichage. Ce n'est pas faisable, ce n'est pas gérable, ce n'est pas applicable, quels que soient les règlements tortueux et compliqués qu'on va concocter dans les officines du gouvernement. On aura beau faire tous les efforts, je pense que...

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député. M. Brassard: Oui, M. le Président?

Le Président (M. Doyon): En terminant. Vingt minutes.

M. Brassard: J'ai déjà parlé 20 minutes? Le Président (M. Doyon): Ah! oui.

M. Brassard: Extraordinaire! Vraiment! Alors, voilà, c'est que je voulais dire. Un peu de franchise et, finalement, un peu d'honnêteté, puis que le gouvernement affiche clairement ses couleurs. On n'est pas dupe. Voilà ce que je voulais dire.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier. Oui, M. le ministre, oui, en vertu de la règle de l'alternance.

M. Ryan: Ah, mais, non, je suis bien prêt à...

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier a demandé la parole.

M. Ryan: Oui. On va entendre le député de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Doyon): Oui, il n'a pas abusé jusqu'à maintenant.

M. Ryan: Non, non.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: Merci, M. le Président. I should explain that my colleague for D'Arcy-McGee was called urgently to Montréal and he left me with two amendments to article 17...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cameron: ...the idea being that, if the first one was not real receivable or was real receivable but was then rejected, then I would move on to the second one.

But the hour grows late and, in fact, the first amendment involves the change of wording over an

issue that we have already heard analyzed in exhaustive detail by the Minister and the Deputy for Chicoutimi, so I do not really think that it needs to be entirely gone over again. Allow me to just read it before it is buried, just to make clear what the purpose of the amendment was and then I will go on to the second one if you bear with me.

The original amendment that I tought I was going to get in somewhere around 6 o'clock this evening...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cameron: ...was one that said: retrancher, dans la troisième ligne du troisième alinéa de l'article 58 de la Charte de la langue française, remplacé par l'article 17 du projet de loi 86, les mots «doivent se faire uniquement en français ou». As you will recall, this has already been given some extended discussion. But I would like to just very briefly explain the purpose and then read the second amendment and then I hope I will not take much more of your time.

The purpose of this amendment, as I understand it, was to try to make sure that the regulation in the law could not be expanded in the future by a future government to require the use of unilingual French in broader and broader areas without a debate in the National Assembly. In other words, the law itself could remain on the books, but the use of article 17 in a certain way might mean that what had previously been accepted as a matter of bilingual usage or as Enghish or French, or French and another language or something like that would now be again restricted to an exclusive use of French, and not only restricted to an exclusive use of French but done so without new legislation or without a new debate but purely by regulation. (23 heures)

That was the purpose of the amendment, to address that. Now, given the hour, let us assume that we have already gone through everything that would happen as the result of that and it died. Had it died? The alternative amendment that my colleague from D'Arcy-McGee proposed was this, and I think this is not a bad one. As a matter of fact, this is: Ajouter, dans la deuxième ligne du troisième alinéa de l'article 58 de la Charte de la langue française, remplacé par l'article 17 du projet de loi 86, après le mot «circonstances» le mot «exceptionnelles». C'est tout.

Le Président (M. Doyon): Est-ce que je pourrais avoir votre... M. le député...

M. Cameron: Oh yes, copies, if you want.

Le Président (M. Doyon): Alors, cet amendement est déclaré recevable.

Une voix: Vous êtes vite, M. le Président. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): II est tard. Alors, sur le fond... Non, non. On parle de l'amendement, mais c'est juste pour se situer. C'est l'amendement qui ajoute un mot, c'est-à-dire le mot «exceptionnelles» après le mot « circonstances». C'est celui-là. Alors, sur...

M. Brassard: Vous avez raison. Il est recevable.

Le Président (M. Doyon): Sur le fond, M. le député de Jacques-Cartier, je suis prêt à vous entendre.

M. Cameron: So, it is agreed that it is receivable.

Le Président (M. Doyon): Non, sur le fait que pourquoi on devrait voter pour.

M. Brassard: II faudrait le mettre au féminin.

Le Président (M. Doyon): Circonstances exceptionnelles, avec un s. Deux 1, un s.

M. Cameron: What follows next? Le Président (M. Doyon): Alors...

M. Cameron: Why I would like the word «exceptional» added.

Le Président (M. Doyon): Yes.

M. Cameron: Partly, I have to use the thoughts of the Member for D'Arcy-McGee, but I think that, in fact, the intention is that, if the word «exceptionnelles» came in after «circonstances», it would mean that these conditions ou circonstances où l'affichage public et la publicité commerciale doivent se faire uniquement en français would not happen too often. If «exceptionnelles» is clearly defined, then, the power of the State would not be exercised that often. I suppose I would argue that in the most general sense the concern of the community that voted us in is to some extent that this power has existed at all, irrespective of whether it has been applied with justice or fairly or reasonably or moderately or by the Office or by the Minister, or by règlement or by the law. The point is that the power is still there. If there is a word like «exceptional» or «exceptionnelles» describing the conditions or circumstances, it suggests that at least the power will be used sparingly. I think that it is probably all I need to say on the subject.

Une voix: Oh! go on, go on, you have half an hour.

M. Cameron: I may have, but I do not want to use it.

Le Président (M. Doyon): You have 20 minutes if you want to use it.

M. Cameron: Well, if there are responses from the Minister or from other Members, I would like, maybe, a right of reply but, beyond that, I am willing to let stand the original explanation.

Le Président (M. Doyon): You will have the occasion to come back if you want to.

M. le ministre, sur l'amendement proposé par M. le député de Jacques-Cartier.

M. Ryan: Regardez, je vais essayer d'assimiler cette idée-là que véhicule le projet de modification. Il y a 2 possibilités. Soit que ça ajoute vraiment quelque chose à ce que nous voulons faire ici, et ça serait quelque chose dans le sens de restreindre. Puis, là, nous avons 3 catégories de situations qui peuvent arriver, des cas, des lieux ou des circonstances où l'affichage devrait se faire uniquement en français; d'autres cas où il peut se faire sans prédominance du français, en français et dans une autre langue, et d'autres cas uniquement dans une autre langue. C'est évident qu'il s'agit d'exceptions par rapport à la règle générale. Je crois que la formulation du texte indique clairement, avec le «Toutefois», «Cependant», «However», que le gouvernement peut déterminer les lieux où l'affichage doit se faire uniquement en français, ou peut se faire sans prédominance du français ou uniquement dans une autre langue. Où la modification proposée ajoute quelque chose, c'est pour réduire; où elle n'ajoute rien, à ce moment-là, nous n'en avons pas réellement besoin. Alors, je crois qu'elle n'ajoute rien et que, mettre le mot «exceptionnellement», on indiquerait une volonté de restreindre qui n'est pas manifeste dans ce texte-ci. Il peut arriver, il y a des cas, là, sans prédominance du français, et on en a énuméré pas mal, dans le projet de règlement. Dans le projet de règlement, là, vous voyez qu'on a une bonne douzaine de cas, hein. Mais, là, ce n'est pas à titre exceptionnel; c'est plus en raison de la nature de ces objets-là: Quand on parle des musées, des jardins botaniques, zoologiques, où l'affichage pourra être fait d'une manière équivalente, en français et dans une autre langue, ce n'est pas une exception, c'est parce que c'est un objet qui a sa nature propre. J'ai expliqué pourquoi, moi, dans le cas d'un musée, dans le cas d'un jardin zoologique. On n'est pas pour mettre un «Cheval» deux fois plus gros en français qu'en anglais, tu sais; on se dit: Tu mets «Horse», «Cheval». Il faut garder un peu d'esthétique, un peu d'équilibre là-dedans. Ça fait que c'est une troisième règle, en somme, qui est formulée ici, dans le paragraphe, qui est plus que pour des situations, là, très, très restreintes; et la preuve est fournie par le projet de règlement que nous avons déposé, O.K.? Alors, j'opte plutôt pour le maintien du statu quo, mais je comprends le souci du député de Jacques-Cartier, et j'y souscris; j'y souscris, et j'espère que cette partie-là du projet de loi sera utilisée de manière rationnelle, par voie de réglementation, comme on essaie de le faire.

Je pense qu'il conviendra lui-même que ce qu'on a inscrit ici est très, très proche de ce que veut signifier le troisième alinéa, vu dans une perspective plus large qu'à titre rigoureusement exceptionnel. C'est un autre régime, c'est une autre modalité que revêt le régime de l'affichage, et, de ce point de vue là, ce que je dis contredit également ce que j'ai entendu de la députée de Chicoutimi, auparavant, ce qui me déplaît plus particulièrement. J'aimerais bien lui être agréable.

Mme Blackburn: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Not sure. Ha, ha, ha! Non, mais dans ce cas-ci, c'est ça. Je pense que c'est une troisième règle qui vient s'introduire. C'est plus large que strictement par exception.

Maintenant, M. le Président, j'allais apporter des éléments de réflexion, là, à la suite de l'intervention du député de Lac-Saint-Jean, tantôt, mais je vais...

Le Président (M. Doyon): Oui...

M. Ryan: ...vous laisser disposer d'abord...

Le Président (M. Doyon): ...on va disposer de l'amendement.

M. Ryan: ...de la proposition faite par le député de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Doyon): m. le député de jacques-cartier, si vous voulez utiliser votre droit de réplique, là, vous avez encore quelques minutes. vous souhaitez...

M. Cameron: I will not take the full time. I will admit that I find the answer of the Minister quite reasonable reasonable, and I, of course, did not have the regulations when we came in with these amendments, so that I think to some extent they may be made ultra vires anyway, just by the arrival of the actual regulations. I am not entirely certain that it is the case, but I am also not, by training, a lawyer. So, I do not think that I could argue with total assurance that the use of a particular word in either the English or French text is necessarily an advantage, either to the Government or to the citizens who are affected by the things the Government does. So I will leave it at that.

Le President (M. Doyon): Alors, sur l'amendement, Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Doyon): Oui.

Mme Blackburn: Oui, brièvement, là, c'est parce que je pense que l'amendement qui est proposé là est inutile. Il n'ajoute rien — c'est ce que le ministre essayait de vous expliquer — parce que vouloir le limiter

plus qu'il ne l'a limité, actuellement, là, à des circonstances exceptionnelles, là, il ne resterait rien. Il a admis, tout à l'heure, qu'il a limité au maximum les circonstances où il y aurait unilinguisme français, 3: transports en commun... Bien, 3, en fait, 2: c'est les panneaux, les grands panneaux Mediacom, les transports en commun, les abribus. Ça commence à ressembler à ce qui ressemble aux accès aux transports en commun. Et c'est tout, et c'est tout, c'est tout, c'est fini, ça arrête là. (23 h 10)

Alors, moins que ça, là, il n'osera pas le faire. Moi, je pense que, à essayer de réduire... Je ne comprends pas la logique, cependant. Pourquoi le bilinguisme au zoo, puis pas dans le transport en commun? Il doit y aller plus de touristes au zoo qu'il en va dans le transport en commun et dans le métro de Montréal. Je ne le sais pas. La logique, c'est sa logique à lui, une logique que j'ai de la difficulté à comprendre. Mais votre proposition, je devrai voter contre parce que, déjà, il n'y a même pas besoin d'avoir «exceptionnelles» dedans pour qu'il ait estimé que c'était exceptionnel, l'unilinguisme. C'est fini, on n'en parle plus. Alors, c'est pour ça que je voterai contre.

Le Président (M. Doyon): D'accord. Alors, sur l'amendement... À moins que M. le député de Jacques-Cartier veuille répliquer? Sur l'amendement proposé par M. le député de Jacques-Cartier, dont il a fait lecture tout à l'heure, il s'agit d'ajouter, après le mot «circonstances», le mot «exceptionnelles» à la fin de l'article 17. Que ceux qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien me l'indiquer.

M. Cameron: Pour.

Le Président (M. Doyon): Le député de Jacques-Cartier est pour. Est-ce que d'autres membres de la commission sont pour, sont en faveur? Je n'en vois pas. Contre? M. le ministre?

M. Ryan: À propos de l'intervention précédente.

Le Président (M. Doyon): Non, mais là je veux savoir de quelle façon vous votez sur l'amendement de M. le député de Jacques-Cartier.

M. Ryan: Je serais tenté de m'abstenir, mais je vote contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Rimouski?

M. Tremblay (Rimouski): Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Charlevoix?

M. Bradet: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Messier: Contre.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Contre.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou?

M. Bélanger (Anjou): Contre.

Le Président (M. Doyon): Abstention de la part de la présidence.

Le Secrétaire: 1 pour, 6 contre, 1 abstention.

Le Président (M. Doyon): Alors, l'amendement est rejeté. M. le ministre, je reviendrai à vous pour votre droit de parole suite à l'intervention de Mme la députée de Chicoutimi. Le secrétaire m'indique que nous avons entre les mains un amendement proposé par le ministre, qui est un amendement à l'article 17 — et je le lis pour qu'on se situe — dont on n'a pas encore disposé. Il est suivant: II s'agit d'insérer dans la première ligne du troisième alinéa de l'article 58 proposé par l'article 17... Pardon?

M. Bélanger (Anjou): Je n'ai pas encore parlé, moi, sur les règlements sur...

Le Président (M. Doyon): Oui, vous allez pouvoir le faire. Non, je veux juste disposer... On a disposé d'un amendement, on va disposer d'un deuxième, et après ça... Alors, insérer, dans la première ligne du troisième alinéa de l'article 58 proposé par l'article 17 et avant le mot «les», ce qui suit: «les lieux,». Fin de l'amendement. Est-ce qu'il y a des interventions sur cet amendement proprement dit?

Mme Blackburn: Est-ce qu'on dispose de l'amendement avant de... Je pensais...

Le Président (M. Doyon): Parce qu'on avait été...

Mme Blackburn: ...qu'on poursuivait la discussion.

Le Président (M. Doyon): Bien, c'est parce que M. le secrétaire me signalait qu'on avait été saisi de cet amendement. Il fallait, parce qu'on était pas mal sur le fond de l'article, et on...

Mme Blackburn: Alors, là, on aborde l'étude de l'article sur le fond.

Le Président (M. Doyon): Oui, puis on va pouvoir revenir si... Oui, là, on est sur l'amendement. L'amendement, il s'agit, comme je vous dis, d'ajouter «les lieux,» à la...

M. Ryan: Peut-être qu'on pourrait s'entendre sur l'amendement rapidement pour revenir au fond.

Le Président (M. Doyon): Oui.

M. Ryan: ...«les lieux,». Ça fait une précision de plus qui pourrait être très utile.

Le Président (M. Doyon): Vous êtes d'accord?

M. Tremblay (Rimouski): Sur l'amendement, on est d'accord.

M. Ryan: L'autre a été réglé. Là, c'est un amendement gouvernemental, une modification proposée par le ministre.

Mme Blackburn: C'est «les lieux,». M. Ryan: II s'agit d'ajouter «les lieux,». Une voix: D'accord avec l'amendement? Mme Blackburn: Oui, «les lieux,».

Une voix: Le règlement fait référence aux lieux, les musées.

M. Ryan: Oui, c'est ça.

M. Tremblay (Rimouski): L'Opposition est d'accord.

Le Président (M. Doyon): Les conditions et les circonstances.

Mme Blackburn: Oui. Ça va donner un peu plus de critères pour resserrer.

M. Ryan: C'est toujours resserrer. Nous autres, chaque fois qu'on peut raisonnablement...

Mme Blackburn: Le moins possible. Adopté sur division.

Le Président (M. Doyon): Alors, l'amendement est adopté sur division. Donc, M. le ministre, et je reviendrai au député d'Anjou après. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Je voudrais revenir brièvement sur le concept de nette prédominance. En écoutant le député de Lac-Saint-Jean, je me souvenais des séances que nous avons tenues en 1989, un groupe de travail qui avait reçu le mandat de préciser, sous forme réglementaire, le concept de nette prédominance. Nous avons travaillé pendant plusieurs semaines — je pense qu'il a fallu tenir des réunions hebdomadaires pendant 3 mois — pour en arriver au texte du règlement qui demeure pratiquement celui que nous sommes appelés à considérer au cours des prochaines semaines. Nous avons ajouté un élément dans le texte qui existait déjà, et le facteur distance dans le cas où il y a plusieurs affiches, de dimensions égales ou différentes.

On peut voir des difficultés dans ce concept-là, et je conçois ça, aussi. Moi, je me mets dans une position de critique impartial, et je pourrais écrire une couple d'articles qui feraient rigoler le public, tu sais. Non, je comprends ça, mais on avait essayé... Je me rappelle, les journalistes nous interpellaient dans le temps. La réponse que nous leur apportions: Est-ce que vous avez un concept plus simple, vous autres, pour exprimer la nette prédominance, que 2 pour 1? On avait cherché loyalement et en étant soucieux de simplicité ce qui peut être plus simple que le concept de 2 pour 1 pour exprimer l'idée de prédominance. On n'en a pas trouvé qui étaient plus collé au ras du sol que celui-là: 2 pour 1.

On l'a formulé dans un règlement, qui a donné lieu à une brochure dans le temps, que je vous présente encore aujourd'hui, parce que je pense qu'il n'est pas déraisonnable dans sa teneur, et très, très modeste. Quand il s'agit de caractères... Disons que vous avez une affiche unique, caractères 2 fois plus gros, ça donne ceci, M. le Président. C'est bien simple, ça peut être disposé de 50 manières, et c'est là qu'il y a beaucoup de place pour la créativité de ceux qui font la présentation et tout. Quand il y a 2 affiches, l'affiche en français est au moins 2 fois plus grande que celle dans l'autre langue, les caractères français au moins 2 fois plus grands. Ce n'est pas difficile, pas difficile. On est bien proche des règles de base, des règles de base en calcul. Quand il y a plusieurs affiches, il y a au moins 2 fois plus d'affiches en français, les caractères français sont au moins aussi grands, les autres caractéristiques, comme la couleur — le député a parlé de ça tantôt — l'éclairage, ne doivent pas réduire l'impact visuel du texte rédigé en français.

Je vais en laisser une copie au député de Lac-Saint-Jean, vu l'intérêt particulier qu'il porte à cette question. Il pourra nous revenir avec...

M. Brassard: Pour les autres membres aussi.

M. Ryan: Bien, là, je ne sais pas si j'en ai des copies pour tout le monde. Moi, le secrétaire du Secrétariat à la politique linguistique m'a passé sa copie. Je vous avoue que je ne l'apporte pas dans mes poches de complet à tous les jours, parce que je n'ai pas eu assez de questions pour ça. Mais, ça étant dit, je crois que ça sera un instrument dont disposera l'Office dans son travail d'édification. J'ai employé le mot «édification» à plusieurs reprises à dessein, délibérément, parce que, ce que nous voulons, c'est que se construise un ordre

linguistique où cette règle-là aura une présence importante. Puis, comme vous le savez, les pratiques d'affichage figureront dorénavant, en vertu d'un article que nous adopterons bientôt, j'espère bien, dans l'ordre du jour des négociations qu'une entreprise devra conduire avec l'Office, en vue de l'obtention d'un certificat de francisation et des rapports qu'elle devra soumettre ensuite quant aux progrès de l'utilisation généralisée du français dans l'entreprise. Ce sera l'un...

Une voix: ...

M. Ryan: Là, franchement, vous allez apporter un immense soulagement à notre débat.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: M. le Président, en avez-vous d'autres copies?

M. Brassard: Est-ce que le ministre me permettrait une question? À moins qu'il n'ait pas terminé.

M. Ryan: On va envoyer nos 2 protagonistes principaux. Oui?

M. Brassard: Est-ce que le ministre me permettrait une question? À moins qu'il n'ait pas terminé?

M. Ryan: Non, je n'ai pas terminé. M. Brassard: D'accord.

M. Ryan: Alors, l'Office, comme on peut le voir, par un article qui est.,. Je pense que tout le monde est au courant de cet article qui vient plus loin dans le projet de loi, à la page 14, à l'article 47.142, je pense, 47.141. Voyez-vous, on dit: «Les programmes...

Le Président (M. Doyon): M. le ministre, le document que vous venez de distribuer, est-ce que vous voulez qu'on en fasse un dépôt à cette commission pour qu'il fasse partie de nos...

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Doyon): Alors, très bien.

M. Ryan: Avec votre consentement.

Le Président (M. Doyon): II sera déposé. (23 h 20)

M. Ryan: Merci. Alors, on dit, à l'article 47.141: «Les programmes de francisation ont pour but la généralisation de l'utilisation du français à tous les niveaux de l'entreprise, par:» et là on énumère une série de moyens. On dit bien, dans 7°: «l'utilisation du français dans l'affichage public et la publicité commerciale.»

Ces programmes de francisation doivent être approuvés par l'Office. Donc, l'Office a un pouvoir de négociation très important ici parce que, si l'entreprise n'est pas passée par l'étape du programme de francisation, elle ne peut pas avoir accès au certificat de francisation. Alors, l'Office tient un rôle important. On lui donne un instrument. Les gens vont dire: Qu'est-ce que ça veut dire, ça, nette prédominance? Ça veut dire approximativement 2 pour 1. Ce n'est pas une règle arithmétique, mais toute formule qui équivaudra à 2 pour 1 ou s'en rapprochera sensiblement sera jugée, j'en suis sûr, avec la compréhension nécessaire par l'Office en matière d'octroi de certificats de francisation.

Et, en matière d'affichage plus large, il y aura des recours ordinaires que prévoit la loi. C'est évident que ça demandera de la compréhension et de la souplesse de la part de l'Office quand il sera saisi de plaintes à ce sujet-là ou qu'il voudra se saisir d'une situation, mais, nous autres, nous considérons que, dans le stade actuel d'évolution des mentalités, le concept de nette prédominance s'impose. Il avait été retenu par la Cour suprême du Canada. Il a fait l'objet de nombreuses protestations d'adhésion de la part des milieux anglophones. Que de fois j'ai entendu des milieux anglophones «give us 10 to 1. We will be pleased provided the principle safe.» Et nous avons fait plus que 10, 1 pour 10. Ça, ça aurait été la proportion des anglophones dans la population québécoise. Nous disons: 2 pour 1. Puis je pense qu'en général les gens vont être satisfaits de ça.

Il faut croire en la loyauté des gens envers la loi et envers les prescriptions réglementaires qui en découlent. Nous autres, nous fonctionnons dans ceci avec une confiance raisonnable que les résultats seront convenables et nous ne rechercherons pas, et nous n'anticipons point la perfection arithmétique en ces choses. C'est la nette prédominance du français que nous voulons obtenir sur les moyens. Il se peut très bien que nous arrivions, dans 5 ou 10 ans, à des constatations différentes de nos prévisions actuelles, mais dans le sens que la prédominance se sera peut-être réalisée par d'autres manières que celles que nous avions envisagées. Puis, en temps utile, il y aura lieu d'ajuster le règlement s'il le faut mais, pour le moment, nous agissons en continuité de ce qui s'est fait déjà. Je suis convaincu que n'importe quel lecteur va comprendre ça à la première lecture. Mais je comprends que le député de Lac-Saint-Jean avait des difficultés, parce qu'il n'avait pas vu ce magnifique illustré.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: M. le Président.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: J'aurais une question bien simple à poser au ministre, parce que, juste en terminant, il vient de nous dire: On verra dans 10 ans, dans quelques années, comment ça s'est appliqué et, s'il le faut, on

apportera les ajustements qui s'imposent au règlement. Mais, dans le cas de la nette prédominance, ça fait déjà 5 ans presque et ça s'applique à l'intérieur des commerces. Et, moi, je lui pose la question suivante: Est-ce que la Commission de protection de la langue française ou l'Office ont fait une évaluation de l'application de la mise en vigueur de la nettre prédominance à l'intérieur des commerces permise depuis 1987, depuis l'adoption de la loi 178?

On ne peut pas se baser sur les plaintes, tout le monde sait qu'il n'y en a pas de plaintes, il n'y a pas eu de plaintes. Je comprends pourquoi, là. Il n'y a personne au Québec qui va avoir l'esprit assez tordu pour se promener — même avec le joli petit dépliant — dans les commerces avec son gallon à mesurer pour essayer de voir s'il y a des violations. Mais le Commission de protection, peut-être qu'elle a fait, elle, une évaluation de l'application de cette notion-là. Est-ce qu'on serait en mesure de connaître... Je pense que ce serait important pour les membres de cette commission parlementaire, de savoir comment ça s'est appliqué dans les commerces, puisque ce n'est pas une notion nouvelle. C'est une notion qui existait dans la loi 178 et qu'on élargit avec la loi 86.

M. Ryan: La loi 178 avait maintenu la règle de l'unilinguisme pour l'affichage extérieur...

M. Brassard: .Oui

M. Ryan: ...et avait instauré la règle du français nettement prédominant et de l'usage facultatif d'une autre langue pour l'affichage intérieur.

M. Brassard: Oui.

M. Ryan: Étant donné le contexte dans lequel est née la loi 178, étant donné que le débat s'était bien davantage fait autour de l'affichage extérieur et que comme nous maintenions cette règle-là de l'unilinguisme français dans l'affichage extérieur, l'attention de la Commission de protection s'est portée de manière nettement prédominante...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: ...vers la surveillance de l'affichage extérieur, avec les résultats que nous avons produits régulièrement d'année en année à l'étude des crédits. Mme de Fougerolles, la présidente de la Commission, a toujours produit des rapports détaillés sur le nombre, la nature et la provenance des plaintes dont elle était saisie. Puis peut-être... Pardon?

M. Brassard: Vous dites bien pour l'affichage extérieur?

M. Ryan: Oui, oui, oui, l'affichage extérieur. Maintenant, si Mme de Fougerolles veut ajouter un complément d'information quant à l'autre volet de la question du député de Lac-Saint-Jean, elle est à côté de moi, et, avec le consentement du président et des membres, je pense bien qu'elle se fera plaisir de nous répondre.

M. Brassard: Sûrement.

Le Président (M. Doyon): Mme de Fougerolles.

Mme de Fougerolles (Ludmila): Merci, M. le Président. J'aimerais tout simplement confirmer une chose. La loi 178 prévoyait l'unilinguisme français à l'extérieur et à l'intérieur d'une grande proportion de commerces. Tous les commerces employant plus de 50 employés, c'était unilingue français. Les commerces franchisés, c'était unilingue français. Donc, en fait, ce qui restait, c'étaient les entreprises indépendantes de 50 et moins ou les non-franchisées de 5 et moins; les 50 dans tous les cas et les 5 et moins non franchisées.

De plus, ce que la loi disait, c'est qu'était considéré comme affichage extérieur l'affichage qui était destiné aux gens se trouvant à l'extérieur. Donc, tout ce qui était dirigé vers l'extérieur qui se trouvait à l'extérieur d'un commerce était considéré comme de l'affichage extérieur.

M. Brassard: Les vitrines, par exemple.

mme de fougerolles: les vitrines, exactement. alors, si vous regardez le décompte du type de commerces qui avaient droit à faire de l'affichage nettement prédominant à l'intérieur, c'étaient les petits commerces genre dépanneur, genre indépendant. ce n'étaient pas les grandes surface comme chez métro, iga, etc. et ces commerces — je le sais par expérience — mettent tout leur affichage en vitrine. pourquoi ils mettent le genre d'affichage qu'ils mettent? c'est pour annoncer leurs spéciaux de la semaine, les pommes de terre, enfin, les ventes, etc. si vous allez chez un dépanneur, lui, il met tous ses spéciaux à l'extérieur et, à l'intérieur, il n'y a pratiquement pas d'affichage. il y a très, très peu d'affichage. il met ses produits sur les comptoirs. mais ce n'est pas comme dans les pharmacies ou comme pour diriger les clients, c'est trop petit. et je vous dirais que, lorsque nos inspecteurs allaient dans ces commerces, 99 % de l'affichage qui existait était considéré selon les règles actuelles de l'affichage extérieur. donc, on a eu très peu de cas d'affichage intérieur où la nette prédominance était permise.

En fin de compte, je peux vous dire qu'on a eu 4 cas, et on les a réglés, et on leur a montré comment faire la nette prédominance. On arrivait avec le dépliant. Ils comprenaient, ils l'ont fait. Et je dois vous dire aussi, pour complément d'information, qu'un des 4 cas était un franchisé qui avait 2 établissements. Étant donné qu'il était prospère et qu'il a pu ouvrir un troisième établissement sous la même bannière, là, il a dû enlever son affichage nettement prédominant puis le faire unilingue

français, parce qu'il n'y avait plus droit.

Donc, en fin de compte, je peux vous dire qu'il reste peut-être 3 commerces à Montréal où il y a de l'affichage nettement prédominant, à ma connaissance. (23 h 30)

M. Brassard: Sauf que, là, c'est clair qu'avec le projet de loi 86, cependant, les entreprises qui, actuellement, ne sont pas soumises à l'affichage intérieur avec nette prédominance vont l'être, c'est-à-dire les entreprises de 50 employés et plus, les entreprises de 6 à 49 employés qui utilisent la même raison sociale ou la même marque de commerce et qu'au moins 2 autres entreprises vont l'être également.

Donc, par conséquent, ce que vous dites, finalement: L'affichage intérieur avec nette prédominance ne s'est pas vraiment généralisé à cause du type d'entreprises qui y avait droit. Mais, là, ce ne sera plus le cas avec le projet de loi 86, ça va s'élargir. Et, là, forcément, les magasins à grande surface vont pouvoir le faire et donc, à ce moment-là, ça va devenir pas mal plus compliqué et, donc, une plus grande surveillance va être requise et, malheureusement, votre organisme n'existera plus.

M. Ryan: Oui, mais l'Office va exister pour faire le même travail.

M. Brassard: Oui...

M. Ryan: Mais oui. Il y a une chose qu'on peut se dire aussi, on hypothétise, cependant. Il n'y a personne qui n'a de certitude là-dedans: la règle de nette prédominance pourrait très bien — j'ai dit tantôt qu'on ne peut pas prévoir tout ce qui va arriver — avoir un effet dissuasif aussi par rapport au bilinguisme. Si c'est vrai que c'est compliqué, comme le dit le député de Lac-Saint-Jean, il y en a beaucoup qui vont se dire: on est aussi bien de rester uniquement en français comme on était là. C'est très bien. Ça, c'est un autre effet que peut produire la loi, dont on ne saurait minimiser l'éventuelle portée actuellement.

Une voix: C'est ça.

M. Ryan: Ce ne serait pas contraire à l'intention du législateur, malgré les motifs qu'on lui prête. Il y a beaucoup, beaucoup de potentiel dans cette... Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, si j'ai bien compris la réponse de Mme de Fougerolles, c'est qu'il y avait uniquement 3 entreprises qui se sont prévalues de... Je n'ai pas très bien compris.

Mme de Fougerolles: C'est que nous avons eu des dossiers sur 3 entreprises. Nous avons reçu des plaintes sur 3 entreprises.

M. Bélanger (Anjou): Oui, d'accord. Mme de Fougerolles: À l'intérieur.

M. Bélanger (Anjou): Et, ces dossiers-là, il n'y en a aucun, si je comprends bien, qui a été transmis au Procureur général pour qu'il y ait poursuite. C'est ça?

Mme de Fougerolles: Non.

M. Bélanger (Anjou): Est-ce que vous avez fait une évaluation d'à peu près... Ça représentait combien d'entreprises potentielles à peu près qui pouvaient se prévaloir, on va dire à Montréal, de cette... Quelques centaines? Quelques milliers?

Mme de Fougerolles: Je ne sais pas. Je n'ai aucune idée.

M. Bélanger (Anjou): Vous n'avez aucune idée?

Mme de Fougerolles: Non, je n'ai aucune idée combien d'entreprises...

M. Bélanger (Anjou): Je regardais, M. le Président, la petite brochure, merveilleuse, qui est supposée être évidente maintenant, pour rendre évident à tout le monde le principe de la nette prédominance. Puis je remarquais, M. le Président, que, justement, c'était du papier quadrillé, comme un peu une règle à mesurer. Je pense que c'est assez indicatif, justement, de ce que ça prend comme instrument pour pouvoir justement évaluer la nette prédominance.

Je me demandais: est-ce que le ministre a demandé des avis juridiques sur l'applicabilité de son critère tel que défini? Parce que j'écoutais tout à l'heure l'exposé de mon collègue de Lac-Saint-Jean relativement, je pense, à un cas que tout le monde peut assez facilement identifier ou penser probable: la personne qui va faire son épicerie. Puis je me demande, moi, de quelle façon le ministre peut considérer justement ces critères-là? Comment peut-on les évaluer? Comment peut-on vraiment penser que ce sont des critères vérifia-bles qui peuvent donner lieu à des poursuites ou à des plaintes? Est-ce qu'il y a eu... Est-ce qu'il a demandé des avis juridiques là-dessus?

M. Ryan: Ça a été préparé avec la participation des officiers du ministère de la Justice. Us étaient là même quand on a fait — je peux dire ça après coup parce que ça remonte à 4 ans. Quand on a préparé le règlement sur la nette prédominance, le sous-ministre de la Justice, M. Chamberland, était présent. Le sous-ministre adjoint, M. Jean-K. Samson dont tout le monde connaît l'expertise exceptionnelle en matière constitutionnelle et juridique était présent également. Il y avait d'autres conseillers du ministère qui étaient là. Il y avait

Me Blanchet, qui a été longtemps chef du contentieux au ministère de l'Éducation, et qui est maintenant sous-ministre adjoint aux affaires juridiques au ministère des Affaires municipales. Il était présent là, tout le temps. On avait des conseillers de l'Office. Il y en avait de la Commission de protection de la langue qui ont été consultés également. Ça fait que, ça, il y a eu d'abondantes consultations. Puis, ces textes-là n'ont été arrêtés qu'après de très longues discussions, des échanges approfondis entre des personnes de ce calibre-là, en plus des personnes, évidemment, qui étaient au coeur de l'application de la Charte. M. Rondeau était présent à ce moment-là, Mme de Fougerolles était présente également; M. Laporte faisait partie du groupe. Vous vous souvenez, hein? Il y avait toutes les meilleures ressources qu'on pouvait mobiliser. Tout ce monde-là s'est mis d'accord là-dessus.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, je comprends qu'il y a de nombreux avocats qui ont pu participer à l'élaboration de ce principe-là, mais je pense que c'est différent de participer à l'élaboration d'un principe et le fait justement, une fois que ce principe est arrêté, de le soumettre à une étude juridique approfondie. C'est complètement différent. Je pense que le ministre en conviendra avec moi.

M. Ryan: Non, parce que quand on a les meilleures autorités du ministère de la Justice, avant de venir à table mettre une idée de l'avant, elles consultent leurs collaborateurs. Et, moi, j'ai un principe, pas un principe, une règle de conduite, comme membre du gouvernement; je ne commande à peu près jamais d'études juridiques à l'extérieur, parce que j'ai bien confiance aux conseillers juridiques du gouvernement. Ils m'ont très bien servi depuis sept ans et demi dans toutes les fonctions que j'ai occupées et je n'aurais pas pu trouver de meilleurs avis à l'extérieur, M. le Président. Ça sauve de l'argent au gouvernement en même temps, parce que ce sont des gens qui sont payés pour nous servir et je suis fier d'eux. Moi, dans les ministères dont je m'occupe, nous gagnons pratiquement toutes nos causes grâce à l'excellente défense qu'ils font des décisions prises par le ministre.

Mme Blackburn: ...avec les Nations unies. M. Ryan: Pardon? Mais celle-là, là... Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Remarquez que vous avez eu une grosse influence dans l'affaire. Vous avez au moins 50 % de responsabilité.

Mme Blackburn: À moins que vous ayez gagné en perdant.

M. Brassard: C'est parce qu'il l'a donnée au Procureur.

Mme Blackburn: C'est la cerise sur le gâteau.

M. Ryan: Avec la décision que nous prenons maintenant, nous aurons une bien meilleure défense, de bien meilleures chances de succès.

M. Brassard: Je pense que c'est Rémillard qui l'a défendue, celle-là.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président...

M. Ryan: C'est le gouvernement, là. On ne peut pas isoler un ministre en particulier et je pense qu'encore là il y eut un travail d'équipe. Je pense que les services du ministère responsable de la langue furent étroitement associés à la préparation du plaidoyer. Je me souviens, en particulier, que M. Rondeau a été consulté de très près. Je pense que ce n'est pas une indiscrétion de le dire. Moi-même, on m'a soumis les textes avant de les envoyer. J'ai donné mon avis. Je ne m'en cache pas.

Le Président (M. Doyon): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président. Mais le ministre ne trouve pas ça quand même un peu spécial qu'un règlement existe depuis 1989, qui reprend cette même notion de prédominance, de nette prédominance et qu'il n'y a jamais eu de plaintes relativement à ce règlement-là? Pour lui, là, est-ce qu'il interprète ça comme voulant dire que c'est la paix linguistique, que tout le monde est content, qu'il n'y a jamais eu de plaintes ou il ne reconnaît pas qu'il y a peut-être un problème d'applicabilité du critère?

M. Ryan: Regardez, non... C'est parce que les gens, vous savez... D'abord, Mme de Fougerolles a énuméré toutes les exceptions qui existaient à ce moment-là. Vous alliez chez Eaton à Montréal, à La Baie, dans ces grands magasins là, il n'y avait pas de problème, tout l'affichage était en français. Vous arrivez dans un petit commerce de rien, l'affichage, il n'y en a pas tellement d'abord, et, ce qu'ils ont, ce sont des affiches qui leur viennent de fabricants, ces choses-là. Ils n'ont pas les moyens de se donner beaucoup d'affichage permanent et cet affichage-là, en général, est bilingue. Ils marchent avec ça et il n'y a personne qui passe de remarque. Vous allez dans une pharmacie, un petit dépanneur et tout... Je comprends que le député de Lac-Saint-Jean n'ait pas été embarrassé dans son magasin, son marché d'alimentation, c'était uniquement en français. Il n'était même pas obligé de regarder.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, c'est parce que, moi, il y a une chose qui me préoccupe un peu et, là, je n'ai pas la prétention d'être un expert là-dedans, du tout, c'est quand le ministre parlait tout à l'heure que, justement, si c'est difficilement évaluable, l'infraction, ce qui constitue une infraction, ce qui

constitue justement une nette prédominance, lui, il interprète ça comme voulant dire, comme étant un frein peut-être pour les commerçants qui, dans le doute, vont dire tout simplement: Moi, je ne prends pas de chance, je reste unilingue français, je suis correct. Moi, je serais plutôt porté à penser que, le fait, justement, que le test à subir est tellement flou, tellement difficile à préciser, ça constitue un très bon moyen de défense, justement, à n'importe quelle poursuite. Ça, c'est un principe fondamental qu'on appelle «the vagueness». Quand il y a une infraction qui est définie de façon très vague, très floue, à ce moment-là, c'est très difficile pour un Procureur général de porter une plainte, parce que très facilement, la personne qui est poursuivie peut soulever un doute, peut se défendre en disant: Écoutez, c'est difficile pour un homme raisonnable de définir c'est quoi, l'infraction, c'est quoi le caractère prédominant, qu'est-ce qui ne l'est pas. Et je pense, moi... Si, depuis 1989, il n'y a jamais eu de poursuite sur le règlement tel qu'existant depuis 1989, c'est assez évident que c'est dû au fait que les critères qui étaient retenus, de nette prédominance, ce sont des critères qui sont difficilement évaluables pour l'homme moyen. On ne peut pas demander à l'homme moyen, à M. Tout-le-Monde de se promener avec la petite brochure du ministre ou encore avec l'article de loi pour voir les 4 critères et vérifier si les 4 critères sont respectés pour savoir: est-ce que je porte une plainte ou si je ne porte pas une plainte? La couleur, le nombre des affiches, la dimension, la distance. Je pense qu'il faut quand même se rendre à l'évidence. Je comprends que nulle personne n'est censée ignorer la loi, mais il ne faut pas demander à n'importe qui, non plus, d'être un juriste pour pouvoir être en mesure de déterminer s'il a commis ou s'il va commettre une infraction. Je pense que le ministre doit être sensible à ce genre d'argument là.

M. Ryan: Oui, mais il ne faut pas aborder ces choses-là avec l'idée d'instituer d'abord des procédures judiciaires. Je pense que c'est une approche qui est contraire à celle du gouvernement. Et il y a un but pédagogique dans ceci. L'approche fondamentale que nous épousons, c'est l'approche de l'accompagnement, du soutien. C'est ça que nous voulons faire. Nous ne tenons pas à ce que la menace de la police soit toujours là-dedans. J'ai répété à maintes reprises que je voulais que ça s'éloigne du portrait linguistique — ce n'est pas la place — à cause du lien immédiat qui existe entre langue et liberté. Il ne faut jamais oublier ça, et c'est à cause de ça qu'il faut y aller de manière prudente. Ce concept-là, avec le règlement qui l'exprime, fournit un instrument très pertinent et dont je suis assuré que l'on se servira dans la pratique avec le discernement et la compréhension qui s'imposent. Il n'y a pas d'autre voie dans ces choses-là. On a obtenu de bons résultats ces dernières années, mais, là, il y a un ajustement qui s'impose et je pense que nous sommes capables de le faire. (23 h 40)

M. Bélanger (Anjou): Je voudrais faire référence à un échange qui a eu lieu au tout début, quand on a procédé à l'étude de ces dispositions. Quand ma collègue de Chicoutimi parlait de bilinguisme, à chaque fois je voyais le ministre réagir: Ce n'est pas du bilinguisme, ce n'est pas du bilinguisme. On dirait que pour le ministre — je ne sais pas si on a la même conception de la réalité montréalaise — il suffit de dire que le français est la langue d'affichage pour que ça constitue de l'unilin-guisme français. Il semble prendre ça pour acquis. Il ne semble pas reconnaître que le fait de ne pas interdire la langue anglaise de facto, ce que ça représente à Montréal, ce que c'a toujours représenté historiquement à Montréal, c'est le bilinguisme — c'est le bilinguisme. C'est sûr que ce n'est pas du bilinguisme... Je suis le ministre quand il dit que ce n'est pas du bilinguisme obligatoire qu'il y a dans cette loi. C'est vrai. On ne dit pas dans cette loi: ça doit être dans les 2 langues. Mais la force des 2 langues, l'attraction des 2 langues, la situation qu'on a à Montréal, fait en sorte que, si on n'empêche pas la langue anglaise, automatiquement elle arrive, même si elle n'est pas obligatoire. Le ministre, chaque fois qu'on lui parle de bilinguisme, il rue dans les brancards parce qu'il nous dit: Écoutez, ce n'est pas du bilinguisme parce qu'on n'impose pas l'anglais. C'est vrai que vous n'imposez pas l'anglais, mais vous ne le défendez pas et, de facto, le résultat est le même à Montréal. Vous ne le défendez pas et il va revenir au grand galop. Et, comme le disait la députée de Chicoutimi, les cas où l'unilinguisme français est obligatoire, il n'y en a pas beaucoup. J'attends toujours une correction. Elle a énuméré les 2, 3 exemples dans lesquels l'unilinguisme français va vraiment prévaloir, où ça va être la règle absolue. Le ministre n'en a pas nommé d'autres, là. Je ne pense pas que ma collègue se soit trompée. Ce sont vraiment les cas qu'elle a cités, les seuls cas où l'unilinguisme va prévaloir. Le reste, c'est... D'accord, on peut affirmer le principe que ça va être le français. On peut l'affirmer, mais, avec tous les principes d'interprétation qui disent que, quand l'anglais n'est pas défendu, l'anglais est permis, le ministre conviendra avec moi que ça équivaut de facto à du bilinguisme. C'est ça. Qu'on parle de nette prédominance ou pas de nette prédominance, à partir du moment où il y a 2 langues, peu importent les proportions, c'est du bilinguisme.

M. Ryan: Ça, je ne suis pas d'accord sur les conclusions que tire le député d'Anjou. J'ai mentionné à plusieurs reprises ce soir mon intérêt à connaître d'autres situations où, selon l'Opposition, il serait impérieux que l'on maintienne la règle du français exclusivement obligatoire. Là, il y a 3 situations qui sont mentionnées dans le projet de règlement que j'ai rendu public ce soir, c'est vrai. S'il y en a d'autres, qu'on les mentionne et on verra, mais pour le moment, nous autres, ce sont les cas que nous avons retenus. Les autres nous semblent devoir tomber sous la règle générale. C'est vrai que nous modifions la règle générale. C'est un des principes

fondamentaux du projet de loi. Je ne peux pas le cacher, mais on doit tenir à ce principe-là dans la mesure la plus large possible. Il me semble qu'autrement ce serait tromper la population que d'énoncer ce principe pour ensuite dire: Ne vous inquiétez pas, on va continuer à faire le contraire en pratique. Ce n'est pas ça qu'est l'intention du gouvernement. Mais, s'il y a d'autres situations qui requièrent le régime défini au troisième alinéa de l'article 17, nous sommes intéressés à en prendre connaissance.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, je pense que je peux donner un cas particulier où l'unilinguisme français serait, je pense, souhaité et souhaitable par tout le monde, c'est les magasins de grande surface. Moi, je n'ai pas vu un intervenant qui est venu devant cette commission et qui a réclamé ça. Moi, je ne sais pas d'où ça vient, cette commande. Et j'attends encore une réponse de la part du ministre, à savoir pourquoi, dans les grandes surfaces, l'unilinguisme français ne prévaut pas. Pourquoi on n'a pas pensé à une disposition qui permettrait de limiter l'usage de l'anglais pour ça? On semble prendre pour acquis qu'il faut absolument, là-dessus, laisser tomber. Et je ne pense pas qu'on brime aucun droit individuel. Quand une multinationale ou une grande compagnie, avec je ne sais pas trop combien de milliers d'actionnaires et d'administrateurs... Dire qu'on brime les droits individuels de tous ces individus-là, en restreignant l'usage de l'anglais, je pense, en tout cas, que la démonstration, à date, lors de cette commission, n'en a pas été faite d'une façon éloquente. Elle reste peut-être à faire. Peut-être que le ministre va nous en faire la démonstration. Mais je ne sais pas quelle est la justification de ça. Je pense que ça serait un bon exemple, ça, où on pourrait, je pense, faire marche arrière, dans le projet de loi qui nous est présenté, pour qu'on reste où on est présentement. Je pense que c'est une situation qui est souhaitable et qui est souhaitée par tout le monde.

Le Président (M. Doyon): M. le ministre.

M. Ryan: Là-dessus, je pense que ce sont des activités directement reliées au commerce. Nous l'avons examiné, et ça nous est apparu contraire à l'esprit des décisions dont nous avons parlé à maintes reprises pour maintenir l'interdiction de l'usage d'une autre langue dans les magasins de grande surface. Si on le faisait là, il faudrait revenir à la notion de très petits magasins, en contrepartie. Et nous n'avons pas retenu ce concept-là, parce qu'il nous apparaissait inapte à répondre de manière satisfaisante aux exigences que faisaient peser sur le gouvernement les décisions rendues dans le passé. Et, là, il fallait décider si on revenait à la clause «nonobstant» ou non.

Il y a un autre facteur aussi. Dans la décision rendue par le comité des Nations unies sur les droits humains, on dit bien qu'il y a 2 dimensions à la liberté du discours commercial. Il y a la liberté de l'émetteur et il y a la liberté du récepteur aussi. Le droit d'émettre des messages dans la langue qu'on veut et le droit de les recevoir dans la langue que l'on parle. Ils ont mentionné ça dans le jugement. La Cour suprême en avait parlé également dans son arrêt de 1988. Et, tôt ou tard, si nous ne tenions pas compte de ce facteur, nous étions susceptibles d'être rejoints par le même argument des chartes de droits, mais par une autre porte. Avec les dispositions que nous avons arrêtées dans le projet de loi, nous évitons ces difficultés, sauf, possiblement, en ce qui touche les panneaux-réclame. De ce côté-là, nous avons confiance que notre cause, si jamais elle devait être portée devant les tribunaux, serait une cause fortement défendable. Mais nous ne pouvons pas entretenir de certitude absolue à ces choses, évidemment. Il n'y a personne qui peut donner ça.

Dans des questions juridiques qui n'ont pas fait l'objet de tests dans les tribunaux, on le sait une fois que la décision a été rendue. Mais je prends note quand même de l'observation du député d'Anjou. Je la trouve éminemment constructive. Et on va la regarder, dans l'examen qu'on va faire du projet, au cours des prochaines semaines. On est capable de réexaminer une conclusion déjà arrêtée. Ça, ce n'est pas une chose qu'on s'est interdit de faire, loin de là.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, juste pour terminer sur ce point. C'est parce que l'extrait de jugement auquel fait référence le ministre, à ma souvenance, c'était dans un obiter dictum du juge. Ce n'était pas le ratio decidendi là-dessus, c'était uniquement une considération. Mais il ne s'est pas prononcé d'une façon décisive sur ce point. C'est peut-être un petit peu ce que je reproche à l'esprit de ce projet de loi, c'est que dans le doute, chaque fois qu'il y a un doute, à savoir s'il pouvait y avoir une interprétation défavorable ou pas, on recule en disant: Bon, on va permettre l'anglais. Chaque fois. Plutôt que de... On ne prend aucune chance. On ne prend aucune chance. On fait le projet de loi le plus bilingue possible, sans que ce soit bilingue, aux dires du ministre, mais il ne faut pas prendre de chance pour ne pas qu'il y ait de contestation. Moi, je me demande pourquoi on abdicte si facilement devant un risque de contestation. (23 h 50)

M. Ryan: Mais regardez...

M. Bélanger (Anjou): Je comprends qu'on n'aime pas nous non plus les contestations. On s'est toujours dit qu'on voulait nous aussi la paix linguistique. Mais, nous, on a toujours pensé qu'on l'avait vu, le nombre très peu élevé de plaintes qu'il y a depuis quand même quelques années. Puis, là, on dirait, tout à coup, que le gouvernement semble tellement préoccupé, obnubilé par le risque, aussi infime soit-il, de poursuites, qu'il fait machine arrière à chaque fois et on dit: Bon, on va permettre l'anglais. Ah! il peut y avoir une petite interprétation douteuse, on va permettre l'anglais. Il peut y avoir un petit doute, on va permettre l'anglais.

Puis là, finalement, on se retrouve devant une situation qui est inconfortable pour le français comme langue officielle.

M. Ryan: Mais, dans la langue du commerce, le gouvernement, en principe, n'a pas à s'ingérer trop. Ça, ça fait partie d'une philosophie libérale. On n'est pas obligé d'être grand clerc pour comprendre ça. Le gouvernement doit réglementer la marche générale du commerce, mais la langue dans laquelle les échanges se font habituellement doit être celle des parties contractantes. On s'est aperçu qu'historiquement il y avait eu des situations inadmissibles. C'est corrigé par l'obligation d'employer le français partout. Mais la responsabilité d'un gouvernement démocratique ne va pas plus loin, sauf exception, que de pouvoir prescrire le respect de la langue de la communauté, à tout le moins de la très grande majorité. Mais, de là à s'attribuer le pouvoir d'interdire l'usage d'une autre langue, il faut y penser comme il le faut. Et c'est là-dessus qu'on est invité à réfléchir depuis quelques années, depuis S ans.

Nous autres avons tiré la conclusion que définit le projet de loi. Vous autres, vous trouvez que nous allons trop loin, qu'il aurait fallu évoluer dans le doute. Tout ce qu'on a essayé de répandre comme doute sur le rapport du comité des droits de l'homme m'impressionne assez peu, moi. Je regarde la substance, l'essentiel. Que le juge vienne d'Arabie ou bien d'Egypte, ça ne fait rien, ça. Il y en a 20, là. Ça a l'air des gens qui ont de l'allure, qui sont saisis de la situation des droits humains à travers le monde beaucoup mieux que moi. Je me dis: Ils ont tiré une conclusion qui est presque unanime sur le fond. Il y a des divergences sur un point ou l'autre, mais, sur la question de fond, les divergences sont très peu nombreuses. Je me dis: J'aime mieux prendre ça encore une fois. Eux autres, ils voient peut-être des liens entre le discours commercial et la liberté d'expression dans des pays où les libertés fondamentales sont joliment moins protégées qu'au Québec et au Canada. Peut-être l'exemple qu'on aurait donné ici aurait pu avoir des répercussions dans d'autres pays et c'était ça qu'ils ont visé aussi, c'est à ça qu'ils ont pensé aussi. Mais je pense qu'on doit prendre a priori comme postulat que leur vision de la liberté des droits de la personne dans le monde a des chances d'être plus large que la nôtre à cause de la mission qui leur a été donnée de former ce comité des droits de la personne des Nations unies qui travaille maintenant depuis, à ma connaissance, au-delà d'une trentaine d'années. D'ailleurs, moi, j'ai du respect. Comme quand les tribunaux canadiens, à tous les échelons — tous les échelons — établissent ce lien-là aussi, je me dis: Ce sont quand même de bons juristes.

Nos nominations judiciaires au Canada, dans l'ensemble, sont assez bonnes. Et je me dis: Ils ne sont pas commissionnés par le gouvernement pour tirer cette conclusion-là. Je pense que nos juges agissent avec liberté. Moi, j'ai l'honneur d'avoir un frère qui a été membre de la Cour supérieure longtemps et je ne connais personne qui aurait pu influencer ses jugements d'aucune manière, surtout pas des politiciens et pas davantage son frère. Mais ils ont leur conscience. Je pense qu'ils font... Je parlais avec une personne qui a été nommée juge aujourd'hui, récemment là. J'ai essayé d'aborder un sujet avec elle; c'était fini. Il dit: Je suis en fonction depuis ma nomination. Finie, la liberté de conversation avec lui. Mais on a ça, et ces juges-là sont tous arrivés... Le juge Boudreault de la Cour supérieure, les juges de la Cour d'appel, à l'unanimité, les juges de la Cour suprême, à l'unanimité aussi, à ma connaissance, il y a peut-être une chance que leur point de vue ne soit pas aussi bête qu'il en a l'air. C'est ça qui est le postulat du gouvernement. On donne une chance à cette sagesse accumulée qui s'est exprimée par la voix de tous ces organismes qui ont étudié notre document législatif de manière approfondie. Je ne pense pas qu'on aille plus loin que ce que une honnête loyauté intellectuelle... Quand on dit: on accepte ces institutions-là et on fonctionne constitutionnellement, on donne une chance. On a pris la clause dérogatoire pendant 5 ans. À cause même de sa durée limitée, c'est une clause qu'on ne peut pas invoquer 3, 4 fois de suite à propos du même objet, à moins de s'inscrire en faux contre le régime. Je pense bien que, dans la nature même de la clause dérogatoire, à moins de situations bien, bien exceptionnelles... et je peux parler d'une. La question des droits religieux qu'on a invoquée souvent dans des critiques du projet de loi, ça n'a rien à voir avec ça. Là, il s'agissait de protéger contre des interprétations laïcisantes abusives le droit à l'enseignement religieux dans les écoles. On avait eu le point de vue exprimé en commission parlementaire — je pense que c'était dans cette salle — par le président de la Commission des droits de la personne du Québec, qui était venu nous dire: Au nom de ma conception des droits de la personne, vous n'avez pas d'affaire à mettre de garantie concernant l'enseignement de la religion dans les écoles. Mais là, madame s'en souvient, on était présents ensemble, je lui ai dit: Je regrette infiniment, si vous voulez venir vous présenter dans Argenteuil, venez, mais vous ne viendrez pas faire la leçon au gouvernement jusque-là. Je lui ai dit franchement et, 10 ans après, je lui dirais la même chose. Il outrepassait son domaine joliment.

Là j'ai compris qu'il fallait mettre une clause «nonobstant». Je l'ai compris parce que je me suis dit: Si ces gens-là deviennent juges à un moment donné, on va en voir des belles. Et je ne voulais pas imposer ma religion à personne. Je veux simplement que les enfants dont les parents croient qu'elle devrait leur être enseignée dans les écoles puissent avoir cette garantie-là. Et, dans la loi, comme vous le savez, le droit d'être exempté de cet enseignement-là et le droit d'avoir accès à l'enseignement d'une autre confession religieuse sont également garantis. Tu ne peux pas demander mieux. Quand je vois des gens qui agitent ça comme symbole d'une étroitesse d'esprit et d'un autoritarisme... Ils n'ont même pas lu la Loi sur l'instruction publique et ils en parlent pareil.

Alors, je comprends les préoccupations du député et je ne suis pas loin de penser comme lui sur ces choses-là, excepté que les conclusions ne sont pas tout à fait les mêmes.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le ministre.

Compte tenu de l'heure, à moins que les membres de cette commission soient prêts à voter sur l'article 17... Ça n'a pas l'air d'être le cas. Donc, j'ajourne nos travaux jusqu'à demain ou à un autre jour, jusqu'à ce que la Chambre nous convoque et nous confie de nouveau le mandat de poursuivre cette étude. Donc, ajournement.

(Fin de la séance à 23 h 57)

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