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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le vendredi 15 juin 2001 - Vol. 37 N° 14

Consultations particulières sur le projet de loi n° 122 - Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures trente-six)

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, très chers amis, je constate que nous avons quorum. Vous me permettrez très brièvement de vous rappeler le mandat de notre commission qui est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives.

M. le secrétaire, y aurait-il des remplacements aujourd'hui?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Ouimet (Marquette) remplace M. Laporte (d'Outremont) et M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace Mme Beauchamp (Sauvé).

Le Président (M. Simard, Montmorency): Très bien. Alors, j'aimerais très rapidement vous faire lecture de l'ordre du jour des groupes que nous recevrons d'ici ? ma foi ? 18 heures. Nous recevrons d'abord l'Association pour la défense des personnes et biens sous curatelle publique; le groupe Equifax Canada inc.; l'Union des municipalités du Québec; le Conseil interprofessionnel du Québec ainsi que l'Institut d'histoire de l'Amérique française et nous finirons bien sûr, comme il serait de mise, par des remarques finales.

Avant d'accorder la parole à notre invité, le député de Marquette voulait intervenir.

M. Ouimet: Oui, M. le Président, concernant l'horaire et le retard que nous avons accumulé, j'ai consulté le député de D'Arcy-McGee et, de ce côté-ci de la Chambre, on serait... on ne serait pas en accord d'écourter les présentations des groupes et nos remarques respectives, nos questions respectives. Alors, on vous proposerait soit de continuer après 18 heures ou, sinon, peut-être les remarques finales, de les reporter à la semaine prochaine. Mais on se disait: Les gens se sont déplacés de Montréal et méritent amplement les quelques 45 minutes qu'on leur accorde. Alors, on a un problème au niveau de l'agencement.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Très bien, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je vous fais deux propositions, soit après 18 heures ou, les remarques finales, la semaine prochaine.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le ministre.

M. Facal: Je n'aurais pas d'objection à faire les remarques finales mardi prochain. Il est impossible pour moi, pour des raisons impérieuses, de dépasser 18 heures. Étant donné que ce débat... et ce projet de loi verra son cheminement se poursuivre encore, je n'ai pas de problème à ce qu'on fasse le dernier petit bout qui nous resterait mardi.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Bien. Alors, permettez-moi de reverbaliser l'entente qui vient de se conclure pour qu'on se comprenne bien. Nous entendrons donc tous les groupes que je venais, tout juste à l'instant, d'énumérer. Toutefois, les remarques finales seront faites ultérieurement à un jour qui reste à déterminer, d'ici la fin de la session, donc la semaine prochaine. C'est bien ce que j'en comprends. Et je demande à notre secrétaire de prendre les dispositions qui s'imposent en ce sens. Alors, voici.

Auditions

Monsieur, bienvenue parmi nous. Auriez-vous l'amabilité de vous présenter, s'il vous plaît?

Association pour la défense des personnes
et biens sous curatelle publique

M. Greenbaum (Ura): Je m'appelle M. Ura Greenbaum et je suis le directeur de l'Association pour la défense des personnes et biens sous curatelle publique.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Bienvenue parmi nous et sachez à quel point nous sommes désolés du fâcheux contre-temps que nous vous imposons et nous apprécions grandement votre collaboration.

n (14 h 40) n

M. Greenbaum (Ura): Merci. Au nom de l'Association de la défense des personnes et biens sous curatelle publique, je voudrais remercier d'abord la commission de nous avoir fourni l'opportunité de ventiler nos vues sur la question. Si l'Association n'a pas envoyé une plus grande délégation, c'est parce qu'on est connus des commissions parlementaires et on n'a plus besoin d'impressionner les membres, comme la coutume normale des visiteurs.

C'est quoi, l'Association au départ, au début, là? L'Association regroupe des gens à travers la province qui font affaires avec ou s'intéressent à la curatelle publique. Fondée en 1995, elle compte aujourd'hui... maintenant on arrive à 500 membres qui... et sa mission est d'aider les gens dans leurs rapports avec le curatelle publique et surveiller le fonctionnement de cet organisme. Elle a joué un rôle instrumental en incitant le Protecteur du citoyen et le Vérificateur général d'entamer leur enquête dont le sort... tout le monde est au courant.

Entre parenthèses, il y a un an, nous avons présenté un mémoire sur la Loi modifiant la Loi sur le conseil des aînés, à cette commission d'ailleurs, et certaines de nos recommandations ont été retenues dans le rapport final, en juin passé, ce qui nous démontre que notre présence ainsi que l'effort de nos membres ne sont pas en vain et je vous en remercie, la commission ici.

Pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui dans le cadre de cette loi? Nous sommes concernés par la façon que le mécanisme de l'accès à l'information touche les citoyens composant avec le Curateur public et l'impact sur leurs droits.

La commission est à l'étude des modifications à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics. Il y a deux approches pour changer les choses législativement: d'en haut vers le bas, ce qu'on appelle «top down» et d'en bas vers le haut, «bottom up». Il nous semble que le projet de loi reflète les préoccupations et priorités des fonctionnaires plutôt que de répondre aux difficultés rencontrées par ceux des citoyens affectés. La façon que nous voyons ce projet de loi, il ne reflète pas forcément les soucis vécus par les citoyens et c'est le message général que j'apporte ici.

De notre point de vue, nous allons partager le fruit de notre expérience afin d'alerter la commission de quelques problèmes que nous... des problèmes qui ont échappé au projet de loi qui est l'objet de l'étude ici et des problèmes qui sont une source des problèmes, des difficultés de la curatelle publique.

D'un côté, on peut dire que je sors du cadre du débat à cause de la nature restreinte du projet. De l'autre côté, on peut prendre les représentations comme un plaidoyer pour un cadre plus élargi. Le contexte particulier dans lequel se trouvent les gens qui font affaires avec la curatelle publique, ce sont des citoyens impliqués mais négligés et leurs problèmes ainsi sont marginalisés. Ce sont une population en perte d'autonomie, des gens incapables de se défendre. Donc, le groupe est invisible et silencieux et sa marginalisation sociale se traduit en exclusion législative, comme en fait preuve ce projet de loi. Il fait partie de notre mission de relever cet oubli-là.

Les problèmes du Curateur public, à notre avis, proviennent en grande mesure du manque de transparence sur ses activités. Déjà, je me rappelle, le rapport annuel du Protecteur du citoyen en 1986 a déjà dénoncé le vase clos de la curatelle publique. Les organismes publics, les autorités publiques ainsi que les particuliers que nous représentons ont un rôle de regard, mais le Curateur public a réussi à les enrayer en partie à cause des failles dans le mécanisme de l'accès à l'information. Je vous ai reproduit les lois pertinentes, les textes de lois pertinents dans le mémoire et j'ai pas besoin de perdre du temps là-dessus.

Mais quelle est la problématique? Premièrement, il y a deux lois, deux mesures. Le mécanisme législatif appert ainsi. Le Curateur public possède deux sortes de documents, deux classes de documents: ceux sur l'administration de l'organisme évidemment et ceux sur l'administration de ses protégés. D'après la loi, les documents faisant partie de la première catégorie sont accessibles au public. Cependant, la loi enlève l'application de cette Loi d'accès à l'information aux documents contenus dans les dossiers des protégés du Curateur public, des personnes inaptes, et renvoie à la Loi sur le Curateur public qui est la norme pertinente. Maintenant, d'autres ministères et organismes publics sont soumis à la confidentialité mais ils n'ont pas besoin de recourir à une loi spéciale, une loi sectorielle. Il n'y a aucune justification pour que le Curateur public profite d'un statut particulier et qu'il ne soit pas encadré de la même façon que les autres organismes publics.

Deuxième problématique, il y a l'exclusion de la Commission d'accès à l'information. Premièrement, il y a deux lois qui entrent en jeu et deuxièmement, il y a l'exclusion de la Commission. La compétence est scindée et limitée. La Commission d'accès à l'information possède une juridiction seulement sur les renseignements de l'organisme. Cependant, en ce qui concerne les documents contenus dans les dossiers des protégés du Curateur public, la loi exclut, pour toutes fins pratiques, la compétence de la Commission d'accès à l'information.

Il y a ensuite des objectifs contradictoires dans l'opération de ce système légal. Les dossiers contiennent... Les dossiers des protégés, des personnes inaptes contiennent des renseignements personnels sur eux mais ils contiennent aussi les actes administratifs du Curateur public qu'il pose... les gestes qu'il effectue dans ces dossiers. Le dossier renferme à la fois des éléments à caractère personnel et des éléments de l'organisme public dont les gestes qu'il pose. Cependant, la loi ne fait aucune distinction entre cette dualité et tout le contenu. Tout dans le dossier est considéré secret, ce qui aboutit que les activités du Curateur public échappent à la surveillance externe.

Une autre contradiction: à titre de représentant légal de ses protégés, le Curateur public doit protéger la confidentialité de leurs renseignements. Toutefois, d'après la loi, il est tenu de fournir un bilan, un compte sommaire avec des pièces justificatives de son administration à un membre de la famille, un parent, s'il y en a un. Mais la confidentialité des dossiers de ses protégés et l'obligation de rendre compte de ses activités, comme exemple, placent le Curateur public en situation contradictoire. Tout est confidentiel mais il est obligé de rendre compte.

Une autre contradiction: les usagers ont rencontré des problèmes d'accès quand ils visaient des renseignements pouvant impliquer la responsabilité du Curateur public ou avoir un effet négatif pour son image. Le Curateur public utilise le paravent de la confidentialité qui est uniquement au profit des protégés pour camoufler ses propres gestes. C'est la stratégie d'ailleurs dont le Curateur public s'est servi pour longuement empêcher le Vérificateur général d'examiner son administration avec les conséquences regrettables bien connues des dernières années.

n (14 h 50) n

Une autre contradiction dans la marche de ce mécanisme: les protégés et leurs parents ont des droits de regard et de surveillance sur l'administration du Curateur public. L'accessibilité doit leur être clairement reconnue sans dépendre de la volonté, des caprices du Curateur public parce que c'est lui qui doit donner l'autorisation malgré que, eux, ils ont le droit de consulter les dossiers de leurs parents.

Une autre problématique dans la liste que nous avons soumise à cette commission-là: il y a un conflit d'intérêts sur l'autorisation. D'après l'article 51 de la Loi sur le curateur public, la confidentialité des dossiers, il y a des principes mais il y a des exceptions. Les proches de ces administrés peuvent avoir accès au dossier de leur parent malade ou incapable, mais sujet à une condition: l'autorisation préalable du Curateur public.

La structure légale par laquelle le Curateur public seul décide s'il veut autoriser l'accès aux parents ou non permet au Curateur public de s'en servir à sa guise, ouvrant la porte aux abus qu'on a vus dans les années récentes. Quand il y a des gestes embarrassants, le Curateur public refusait l'accès et cela lui a permis de cacher l'information qui aurait pu être compromettante.

Puisque le Curateur public seul décide s'il permettra l'accès aux documents de sa gestion ? ici, c'est la problématique ? il devient l'arbitre, le juge et partie à l'encontre de tous les autres organismes qui sont sujets à la juridiction, la compétence de la Commission d'accès à l'information. Dans le cas du Curateur public, lui, il est juge et partie de l'autorisation, mais aussi, vu que ce sont ses gestes qui sont visés ou sont contenus dans le dossier, il est l'accusé qui contrôle la preuve contre lui-même, un conflit d'intérêts inacceptable.

Et les parents ou les usagers eux-mêmes peuvent pas compter sur un décideur indépendant et impartial comme ça se joue pour tous les autres bénéficiaires des ministères, des autres ministères et organismes publics.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, en conclusion, cher ami?

M. Greenbaum (Ura): En conclusion, je vous ai soumis les recommandations. J'ai pas besoin de répéter parce que ce sont des réponses aux problèmes que nous avons soulevés. Mais par contre, comme nous avons fait ressortir, une grande source des problèmes encourus par les usagers du Curateur public proviennent des failles dans le mécanisme que je viens d'énoncer, si vous voulez.

Cependant, le projet de loi ? et c'est pourquoi je suis ici ? ne tient pas compte que la problématique de cette lacune est très inquiétante à cause de ses conséquences risquées car l'expérience amère à appris à nos membres de se méfier des fonctionnaires sans attachement à l'usager ou à sa famille et sans surveillance de leurs décisions ou comportements.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, monsieur, de votre présentation. M. le ministre, à vous la parole.

M. Facal: Merci, M. le Président. Je vous souhaite la bienvenue parmi nous, M. Greenbaum. J'ai lu votre mémoire. Vous avez, pour l'essentiel, deux revendications.

La première est à l'effet de donner à la Commission d'accès à l'information le pouvoir d'autoriser l'accessibilité à un dossier en cas de refus par le Curateur et l'autre revendication qui est la vôtre est de faire en sorte que le Curateur perde ce pouvoir discrétionnaire qu'il a d'autoriser ou non les proches de la personne dont le Curateur administre les biens, à avoir accès à son dossier. Ce que vous souhaitez, si je vous ai bien compris, c'est que les proches de la personne représentée puissent avoir librement accès au dossier à chaque fois qu'ils ont à donner un avis ou à prendre une décision.

Vous évoquez à l'appui de cette demande un seul exemple concret que l'on trouve au bas de la page 9 et au haut de la page 10, et je conviens avec vous que cet exemple, s'il correspond au fait, est frappant, mais il est le seul que vous évoquez. Dans la vie de tous les jours, est-ce qu'il n'y a pas lieu de craindre qu'un accès aussi libre puisse être utilisé de manière abusive par certains proches des personnes sous curatelle, qui pourraient ne pas être animés d'intentions toujours nobles?

M. Greenbaum (Ura): Ah! ce que j'ai soumis, c'est pas un accès libre et sans contrôle. Alors, ce que nous avons suggéré dans nos recommandations, que l'accès soit soumis à la Commission d'accès à l'information si le Curateur public trouve des possibilités, des problèmes, si vous voulez, que vous reflétez ou qui vous inquiètent dans votre question. Alors, comme ça, il sera sous le même régime que tous les autres organismes publics, comme le ministère du Revenu qui aussi, lui, traite des renseignements confidentiels, comme le ministère de la Santé et des Services sociaux, comme le ministère de l'Éducation. Eux aussi, ils ont des clients, des citoyens qui veulent avoir accès aux dossiers et aux renseignements.

Quand c'est abusif, c'est la Commission d'accès à l'information qui le décide, qui prend la décision finale, et pas l'organisme lui-même qui possiblement est l'abuseur ou a d'autres motifs pour... qui sont à lui-même et pas au client ou au protégé, pour cacher des choses.

M. Facal: Votre regroupement s'appelle l'Association pour la défense des personnes et biens sous curatelle publique. Nos lois chargent le Curateur de défendre les biens des personnes sous curatelle, y a-t-il dans votre Association des gens qui sont en fait des proches de gens sous curatelle?

M. Greenbaum (Ura): ...évident que, étant donné la nature de la clientèle du Curateur public, la plupart ne peuvent pas se défendre, sont des personnes incapables. Alors, la grande majorité sont les proches justement, les parents des protégés. Mais il y en a quelques-uns qui ont été sous la curatelle publique et se sont fait libérer à cause de guérison de leur maladie ou la cause de leur incapacité. Et nous avons déjà actuellement sous la curatelle publique comme des gens qui souffrent de la sclérose en plaques, et ainsi de suite, qui ont leur tête mais sont tout de même sous la curatelle publique et sont membres et peuvent s'exprimer adéquatement ? une chance ? et nous révéler des choses.

M. Facal: Donnez-moi, donnez-moi un autre exemple concret, tiré du vécu de votre Association, des problèmes que pose l'état actuel de nos lois, un exemple autre que celui qui est là.

M. Greenbaum (Ura): Je peux vous donner... Le meilleur, les meilleurs exemples, tout ce que vous avez besoin et vous probablement sont... êtes bien au courant, vous n'avez qu'à lire le rapport du Protecteur du citoyen sur les droits des usagers de la curatelle publique ou bien le rapport du Vérificateur général de 1998 sur la même question. Et tout ce qui est là-bas provient, pas tout mais une large partie, provient de notre expérience, de notre vécu et c'est comme ça que tout a été déposé ici, publiquement, à l'Assemblée nationale.

M. Facal: Je veux bien, je veux bien mais je vous prie simplement de reconnaître avec moi, comme nous le reconnaissons des deux côtés de la Chambre, que le Curateur en 2001 est profondément différent du Curateur en 1998.

M. Greenbaum (Ura): Ah, oui.

n (15 heures) n

M. Facal: Il faut se rappeler de ce qui avait été découvert à l'époque et des correctifs, en fait, du nouveau chantier qui a été ouvert, nouvelle direction, nouveau personnel, nouveaux effectifs, nouvelle loi dans un processus de réforme qui a été appuyé vraiment des deux côtés de la Chambre. Oui, je ne nie pas qu'il y ait des problèmes et que le travail est loin d'être complété, mais reconnaissons la reprise en main vigoureuse qui a eu lieu à la curatelle depuis deux ans.

M. Greenbaum (Ura): Je suis le premier de... le premier d'ailleurs d'avouer qu'il y a un redressement en cours, qu'il y a des changements qui se font parce que... D'ailleurs, tout était incité, pas tout mais en grande partie, comme j'ai dit tout au début, des membres de notre association et avec notre collaboration. On est impliqué dedans. Mais par contre un redressement veut pas dire que tout est déjà terminé et tout est achevé, et le soleil brille sur l'organisme, premièrement. Et, deuxièmement, c'est parce que, justement... Comme je l'ai dit, terminé, conclu dans le mémoire, justement parce que le redressement est en cours, c'est le moment de saisir l'organisation de cette problématique-ci sur l'accès à l'information et régler les deux à la fois. Et c'est pourquoi je suis ici.

Je suis bien reconnaissant de ce que vous venez de dire, M. Facal, et je suis bien content que vous l'ayez soulevé d'ailleurs, parce que c'est l'opportunité, saisissons-la. On est en redressement, ça va pas arriver une autre fois, là. Faisons le travail, les problématiques, les problèmes sont tous étalés, sont noir sur blanc, là. prenez compte et faites quelque chose, parce qu'on touche pas cet aspect dans le projet de loi.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration aurait-il une autre question? Non. M. le député d'Iberville.

M. Bergeron: Merci, M. le Président. M. Greenbaum, bonjour et bienvenue à la commission. Une première question. Votre mémoire est daté du 23 août 2000, nous sommes en juin 2001. Est-ce que vous auriez écrit la même chose si vous l'aviez écrit en juin 2001?

M. Greenbaum (Ura): Les idées, on peut... Les idées qu'on vient d'évoquer, oui, plus ou moins c'est pareil. Oui, effectivement, c'est... Le même projet de loi est à l'étude, mais, étant donné ç'a jamais été adopté, on est en deuxième reprise, d'après ce que je comprends. Effectivement, les idées sont sensiblement les mêmes, oui.

M. Bergeron: Bon. Votre Association, elle défend les personnes et les biens sous curatelle publique. Donc, en quelque sorte elle défend les personnes parmi les plus fragiles de notre société, O.K., on en convient. Vous portez, sur la curatelle et sur le Curateur, un jugement très sévère. En page 10, vous dites: «Le Curateur public invoque la confidentialité pour entraver la transparence de sa gestion et l'imputabilité pour ses gestes.» Et après, en page 11, le dernier paragraphe, vous dites ? et c'est là que j'ai beaucoup de difficultés à vous suivre: «Il n'y a pas de conséquence aux violations de la confidentialité ou à l'entrave de l'accès de quelque degré ou nature, à moins qu'elles soient prouvées d'avoir été commises intentionnellement.» À tout le moins, là, je dirais que c'est vite dit, mais j'aimerais vous entendre là-dessus.

Et j'aimerais vous dire que j'ai reçu, il y a quelques mois, à mon bureau, une personne, dont les biens sont sous la curatelle, qui en avait bien épais sur le coeur et qui croyait avoir une fortune administrée par la curatelle publique, ce qui n'était pas le cas, et cette personne-là a été spoliée par ses proches. Et, vous savez, on dit que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Et quand on dit: «À moins qu'elles soient prouvées d'avoir été commises intentionnellement», vous savez, la preuve, il faut la faire. Alors, cette assertion-là, les conséquences aux violations, j'aimerais vous entendre un peu là-dessus.

M. Greenbaum (Ura): Je parle de notre expérience dans le quotidien, la face... ce que nous avons vu quand nous avons effectivement trouvé qu'il y avait des abus de confidentialité ou, le contraire, quand on empêchait, on faisait entrave à l'accès à l'information. Notre expérience, ce que nous avons vu, c'est que, au pire, au pire, les employés, qui sont des fonctionnaires, tout ce qui peut arriver, ils sont réaffectés à un autre organisme ou un autre ministère. Ils sont changés de poste, on change leur poste, c'est tout. Mais il n'y a aucune responsabilisation personnelle pour leurs gestes inacceptables. Nous avons vu quelques cas, là, comme ça. Je veux pas les nommer, évidemment, en ce forum ici. Mais c'est ce qui est arrivé, et nous l'avons vécu.

Et évidemment ça amène à l'insouciance ou à l'arrogance, comme j'ai dit dans le mémoire. Mais le pire qui est arrivé, dans les faits, dans le concret, c'est que les employés sont réaffectés quand ça arrive, quand on fait la preuve, mais rien d'autre. On n'a jamais vu rien de pire que ça, et évidemment, quand on sait que rien va arriver, on est moins soucieux, mettons, de ses responsabilités. C'est normal.

Je peux vous donner des cas, des exemples concrets, mais je peux pas aller donner des noms évidemment et pointer des personnes. Mais on en a vécu, on l'a vu. D'ailleurs, le meilleur exemple, le Vérificateur général lui-même, pendant des années, quand il frappait à la porte de la curatelle publique, ce sont les employés du département juridique qui, physiquement, ont barré la porte à l'équipe du Vérificateur et les défendait d'entrer. Alors, voilà un exemple qui est connu, parce que ça a été rendu public, où c'est arrivé, où le Vérificateur général, pendant des années, était physiquement entravé d'entrer par la porte principale du Curateur public, jusqu'à ce qu'on ait fait tellement de pressions qu'il a reçu l'accord, ici d'ailleurs, à l'Assemblée nationale. C'est un bon exemple qui est connu et public, auquel je peux référer.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, M. le député d'Iberville. D'autres interventions du côté ministériel? Ça va. M. le député de D'Arcy-McGee, à vous la parole.

M. Bergman: Merci beaucoup, M. le Président. M. Greenbaum, merci pour votre présentation ici, devant cette commission. Je vous félicite, car c'est un exemple dans notre démocratie: quand quelqu'un a une cause et veut l'exprimer, il peut l'exprimer. Je sais que, dans ce domaine, pour beaucoup d'années, vous avez maintenu cette cause pour les personnes démunies, les personnes sous curatelle, et je vous félicite pour votre bon ouvrage pour beaucoup d'années.

J'ai été frappé par votre présentation, quelques phrases où vous dites que, «au lieu de protéger la personne inapte, le Curateur public s'approprie pour lui-même le droit à la confidentialité appartenant exclusivement au protégé et le détourne à son avantage quand cela lui convient». Vous parlez du fait que «le Curateur public n'est pas seulement juge et partie, mais aussi l'accusé qui contrôle la preuve contre lui-même». C'est tellement frappant!

Mais, pour le comprendre et pour le bénéfice de... mon bénéfice, vous parlez des personnes qui sont sous le Curateur public, les biens et les personnes sont sous le contrôle du Curateur public, et vous plaidez pour accès aux parents. Mais, ce que je comprends pas, s'ils ont des parents qui ont des aptitudes, habilités, pourquoi est-ce que les personnes sous le Curateur public ne deviennent pas des personnes sous un curateur privé, sous les règles qui sont établies par le Code civil du Québec? Il me semble que, au lieu... si la famille et les parents ont la volonté pour avoir accès au dossier, veulent régler le dossier, veulent surveiller l'administration, ce serait plus efficace d'avoir une curatelle privée au lieu d'avoir une curatelle publique. Alors, c'était ma première question, M. Greenbaum. Encore félicitations, merci pour le temps que vous prenez de venir devant nous, devant cette commission parlementaire.

n (15 h 10) n

M. Greenbaum (Ura): Il y a deux réponses complémentaires à votre question: Pourquoi on n'a pas comme solution simplement privatiser le régime de protection et ainsi régler les problèmes?

Premièrement, l'article 15 de la Loi sur le curateur public prévoit une obligation impérative: le Curateur public lui-même est obligé, doit faire remplacer, se faire remplacer quand il y a quelqu'un de disponible, mais nous n'avons jamais vu un tel exemple arriver. Quand le Curateur public s'empare d'une personne inapte ou protégée, nous n'avons jamais vu le Curateur public prendre l'initiative, en vertu de cette obligation d'une loi d'ordre public, et sortir du cas, premièrement.

Deuxième réponse, le changement de régime de protection se fait par la cour et pas par le Curateur public. Il doit entamer le processus, mais c'est un processus judiciaire, et le Curateur public lui-même est partie encore à cette procédure, obligatoirement. Il soumet un rapport lui-même et, deuxièmement il fait partie de la procédure. Alors, c'est à la cour de faire prendre la dernière décision, et le Curateur public peut s'objecter, peut intervenir, peut faire obstacle. Et évidemment, s'il y a des motifs ou des documents ? c'est pourquoi on vient ici ? des documents à cacher, des gestes qu'il a posés qui sont douteux, mais évidemment il sera motivé à résister justement et se battre contre la famille et faire un litige quand il y a une obligation impérative dans l'article 15.

Alors, il y a deux problèmes. D'abord, il a jamais, dans notre expérience, exercé l'article 15, qui lui oblige de le faire, et, deuxièmement, c'est un processus judiciaire où lui-même il peut se battre et créer des problèmes pour la famille.

M. Bergman: Si vous n'avez pas accès aux documentations du Curateur public, comment est-ce que vous êtes au courant que l'administration est mal faite? En fait, vous parlez des actes, des actes illégaux rendant possible la protection des protégés contre ces abus ou erreurs, comment est-ce que vous êtes au courant? Est-ce que vous pouvez donner des exemples à cette commission parlementaire?

M. Greenbaum (Ura): Comme tout le public en ce moment, on est... C'est confirmé plutôt par les rapports du Vérificateur général et du Protecteur du citoyen, qui sont devenus publics, déposés ici, à l'Assemblée nationale. Mais nos membres eux-mêmes savaient qu'il y avaient des problèmes, et nous avons suivi une stratégie particulière en regroupant et formant l'Association. Chacun a apporté des informations, des documents de son propre dossier, et comme ça on a regroupé le monde et on a pu comparer ce qui se passait dans un dossier et ce qui se passait dans un autre dossier. Et, par cette stratégie de comparaison et de ramassage d'une archive, là, on a pu voir toute l'ampleur des ravages, l'ampleur des ratés.

Alors, c'est cette stratégie politique, si vous voulez, de notre organisme, de notre action sociale qui nous a permis d'avoir une bonne idée de ce qui se passe là. On n'a pas voulu constater tous les ratés, tous les dérapages, mais par contre ça nous a donné assez de cas, assez de spécimens pour constater qu'il y avait un énorme problème. Et là on s'est mis en contact avec le Protecteur du citoyen et le Vérificateur général. Mais cette stratégie, en ramassant le monde, chacun apportant quelques documents de son propre dossier, et avec quelques centaines de membres, ça nous a fait un bon portrait de ce qui se passait là.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Cinq minutes.

M. Ouimet: Cinq minutes. Merci. Bienvenue, M. Greenbaum. Dans le fond, le principe que vous soulevez est un principe très important, c'est toute la recherche de l'efficacité administrative, c'est ce que vous soulevez dans votre mémoire, et que la transparence conduit à une efficacité administrative grande. Moi, je me demande, M. le Président, à ce moment-ci, compte tenu que nous allons nous réunir en commission mardi, pour les remarques finales, je me demande s'il ne serait pas opportun d'entendre la curatelle publique sur les propositions de M. Greenbaum, parce que la transparence contribue à la rigueur et à l'efficacité de l'action administrative.

Ce que vous soulevez dans votre mémoire, c'est que tous les actes administratifs du Curateur public sont sous le sceau de la confidentialité. Ce qui vous importe, c'est pas tellement les renseignements personnels et confidentiels mais davantage les actes administratifs afin de pouvoir surveiller l'administration de la curatelle publique. Je sais que ça place le ministre dans une situation délicate, puisqu'il est ministre responsable à la fois de la Commission d'accès à l'information mais à la fois également de la curatelle publique, mais je pense qu'on aurait intérêt, les parlementaires des deux côtés de la Chambre, d'entendre la curatelle publique pour que la curatelle puisse réagir à la proposition que nous fait M. Greenbaum, qui me semble remplie de bon sens.

C'est un principe bien reconnu d'ailleurs dans les volumes qui parlent des bienfaits de la transparence. Je vous en cite un extrait: «La pratique du secret peut, en effet, entrer en contradiction avec les impératifs du bon fonctionnement de l'administration. Elle peut permettre notamment aux agents de couvrir leurs erreurs ou leur incompétence et de continuer à mener souvent, sans que leur responsabilité puisse être engagée, des actions illégales ou erronées.» Le cas que soulève M. Greenbaum au niveau de la curatelle publique est précisément celui-là si j'ai bien compris.

M. Greenbaum (Ura): Ce que je peux ajouter, vous avez toutes... Si vous voulez, ces dénonciations-là ont été confirmées déjà dans le rapport du Vérificateur général, alors il n'y a rien de nouveau dedans. Mais j'entends bien votre suggestion d'inviter et obtenir réponse de la curatelle publique. Certainement, c'est pas à moi de décider, mais c'est une excellente suggestion. Ce sont des problèmes systémiques, comme je vous l'ai dit, dans le mécanisme de l'accès à l'information vis-à-vis la curatelle publique. C'est construit comme ça en ce moment, tout le système.

M. Ouimet: Parce que vos propos rejoignent exactement ce qu'on retrouve dans la littérature au niveau de la notion d'accès à l'information, du droit à l'information. Vous dites, à la page 7: «Le Curateur public utilise le paravent de la confidentialité pour camoufler ses propres gestes à titre de fiduciaire à l'encontre des principes fondamentaux d'une saine administration publique tels que l'ouverture, la transparence et l'imputabilité.» C'est la raison d'être... une des raisons d'être du droit à l'information, du droit du public à savoir ce qui se passe au niveau des actes posés par une administration, et, moi, je pense que ça tombe tout à fait sous le sens. Et de tout englober et de placer ça sous le sceau du secret et de la confidentialité dessert les intérêts et des administrés mais également de l'État parce qu'on n'arrive pas à avoir ce contrepoids de vérification par rapport à ce qui se passe.

Et ça place peut-être le ministre dans une situation délicate, mais je pense, M. le Président, et je réitère, compte tenu que nous allons nous réunir mardi, selon l'entente que nous avons convenue ensemble, je pense qu'on pourrait inviter la curatelle publique, leur accorder 45 minutes avant nos remarques finales de part et d'autre, puis par la suite ça donnerait l'éclairage voulu aux parlementaires pour savoir ce qu'il adviendra de la proposition que fait M. Greenbaum.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...le temps ici, j'aimerais intervenir par rapport à la demande du député de Marquette. Pour ce qui est du temps où nous allons faire nos remarques préliminaires, nous n'avions pas statué du jour bien précis. Nous avions envisagé la semaine dernière sans arrêter un jour en particulier. Nous faisons des recherches pour savoir si cette requête est opérationnelle, mais, comme nous avons convenu en dehors des micros, après l'intervention de monsieur, nous allons pouvoir peut-être essayer de clarifier la situation.

n (15 h 20) n

Mais je referme aussitôt la parenthèse pour revenir à votre demande en particulier. J'ai devant moi l'ordre de la Chambre, que je me permets de vous relire très brièvement parce qu'elle pourra peut-être répondre à... donc aux propos que vous soulevez, qui se lit comme suit: «Que la commission de la culture procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives, les 12, 13, 14 et 15 juin 2001, et, à cette fin, entende les organismes suivants...» Et, comme vous le savez, il y a les 43 organismes qui étaient...

Donc, de deux choses l'une à ce stade-ci, ou, par consentement unanime, on accepte que le Curateur, comme vous le suggérez, vienne, et, à ce moment-là, ça prendrait, à mon sens, consentement ? il faudrait que je vérifie plus amplement dans les règlements, mais ça me semblerait plausible ? ou encore qu'on en discute, qu'on reçoive la curatelle par... lors d'un mandat d'initiative, ce qui pourrait être le cas aussi. Mais, si on envisageait cette façon de faire, il faudrait d'abord qu'on ait une séance de travail, là, ensemble, avec l'ensemble des membres de la commission de la culture, comme c'est toujours le cas pour procéder à un mandat d'initiative. Je peux pas seul, moi, comme président, décider ça, ça prend l'appui du vice-président, qui est le député de Viau, votre collègue, et puis celui de tous les collègues de la commission.

Donc, pour ce qui est de votre demande, je voulais donc peut-être baliser davantage, parce que c'est une demande qui est faite correctement, mais c'est seulement avec, comment dire, le consentement des deux côtés de la Chambre qu'on peut procéder. Voilà. Alors, M. le ministre, en quelque sorte la balle est dans votre camp, dans une certaine mesure.

M. Facal: Bien, M. le Président, nous avons déjà accumulé du retard en raison de toute une série de circonstances sur lesquelles je ne souhaite pas revenir. Nous essayons, je pense, de bonne foi, de part et d'autre de rentrer dans les délais sans amoindrir le temps d'écoute de nos invités. Nous savons à quel point les fins de session intensive sont imprévisibles. Nous savons aussi, nous savons aussi que, par ailleurs, c'est le bon sens même, si les points soulevés par M. Greenbaum sont pertinents, absolument rien ne nous empêche de contacter le Curateur et de lui demander son avis sur les points fort pertinents soulevés. Cela ne nécessite pas une comparution en bonne et due forme. Si nous invitions le Curateur, je soupçonne que l'on pourrait avoir envie de faire défiler d'autres groupes qui n'étaient pas parmi les 43 inclus dans l'ordre de la Chambre. Je m'étonne enfin que cette idée surgisse après que l'on ait fait reproche au gouvernement d'avoir donné trop peu de temps de préavis à certains organismes pour venir. Et là on voudrait les prévenir, un vendredi après-midi, de venir ici quelque part la semaine prochaine.

Alors, de ce côté-ci, je ne pense pas que nous allons donner notre consentement, d'autant que, comme je le dis, si ce sont vraiment des points précis à examiner, absolument rien ne nous empêche de contacter le Curateur et de lui demander son opinion là-dessus. Et, à cet égard, je serais même ravi d'acheminer au Curateur toutes les interrogations précises que l'opposition pourra avoir.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Je comprends qu'il n'y a pas de consentement. Donc, ce faisant... Oui, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Me permettez-vous, M. le Président...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Oui, volontiers.

M. Ouimet: ...compte tenu, là, des propos du ministre, là, juste quatre points très courts, là. Les fins des sessions sont imprévisibles, nous vous l'avions dit il y a une semaine et demie. Nous vous avions spécifiquement demandé à deux ou à trois reprises de tenir les audiences de la commission au mois d'août pour éviter ces choses-là. Mais je ne souhaite pas non plus revenir sur les événements de cette semaine, mais c'était prévu et prévisible.

Deuxièmement, quant à nous, de recevoir la curatelle publique, il faut les recevoir publiquement, il est pas question que ça se fasse au sein de votre cabinet politique. Nous, il faut que ça soit fait publiquement, en toute transparence, devant une commission parlementaire.

Lorsque vous nous dites que l'opposition risque de demander d'autres groupes, vous nous prêtez là des intentions, M. le ministre, là. Nous en avons reçu une quarantaine, on est rendus, je pense, au quarantième ou au quarante et unième, c'est la première demande que nous formulons, à la lumière des représentations faites par M. Greenbaum. Et, ultimement, la curatelle publique n'est pas comme un autre organisme, ils ont leur siège à Québec, ce serait très facile pour eux, compte tenu que c'est un organisme qui relève du gouvernement, de se déplacer...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Là-dessus, M. le député de Marquette, votre demande est, je pense, très claire, très explicite, mais, à moins d'un consentement, je ne peux pas ajouter à l'ordre de la Chambre, à moins d'un consentement que je n'ai pas vu du côté ministériel.

Ce faisant, nous allons poursuivre nos travaux, et nous étions rendus à 11 min 44 s sur un grand total de 15, et la parole était au député de Marquette.

M. Ouimet: Alors, trouveriez-vous opportun, M. Greenbaum, et je ne veux pas vous immiscer dans nos débats, mais que nous puissions entendre le Curateur public, de façon publique, en toute transparence, pour écouter ce qu'il a à dire par rapport aux propos que vous tenez dans votre mémoire?

M. Greenbaum (Ura): Bien, ça me ravit premièrement d'entendre une telle demande. D'ailleurs, c'est pourquoi je suis ici, comme j'ai dit au début, de faire élargir le projet de loi et profiter de l'occasion. On est en plein redressement, faisons le travail. Moi, je suis ici, et notre organisme, sa mission, son objectif, c'est d'améliorer la curatelle publique. Si ça peut aider, allons-y, certainement. Ce sera certainement dans l'intérêt public, ce qui doit être la primauté, la considération principale de votre commission ici.

M. Ouimet: Lorsque...

M. Greenbaum (Ura): ...public et, si on peut l'améliorer, si on peut rendre des comptes, si on peut perfectionner le système, tant mieux, c'est dans l'intérêt public. Les citoyens vont en profiter, et c'est la première principale considération.

M. Ouimet: Tantôt, vous nous avez indiqué, M. Greenbaum, qu'à plusieurs reprises, lorsque le Protecteur du citoyen se présentait aux portes du bureau du Curateur public, il était accueilli par les aviseurs légaux qui refusaient tout accès, est-ce que ce que vous nous dites là est public, a été documenté ou est-ce que c'est à...

M. Greenbaum (Ura): Oui, j'ai dit, c'est arrivé à l'équipe du Vérificateur général quand il essayait d'y entrer, il se battait. Et il l'a d'ailleurs rapporté à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, en 1997, parce que c'était des années il essayait de percer la porte fermée, là, et, en fin de compte, il l'a rendu public en commission parlementaire. Et, avec cette pression-là et tout ce que nous avons sorti, il a obtenu l'aval, en fin de compte, la permission d'y entrer, et les conséquences, les résultats, tout le monde connaît.

M. Ouimet: Et, s'il y a un organisme qui est soucieux de la protection des renseignements personnels, c'est bien le Vérificateur général du Québec. Il n'allait pas là pour obtenir des renseignements personnels mais pour vérifier la qualité de la gestion de la curatelle publique, n'est-ce pas?

M. Greenbaum (Ura): Effectivement, c'était justement le fondement, l'objectif de son rapport qu'il a... rapport spécial sur la curatelle publique qu'il a rendu en 1998.

Le Président (M. Simard, Montmorency): En conclusion, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Alors, il ne me reste qu'à souhaiter que le ministre revienne sur sa décision, bien que ça le place dans une position délicate parce que les deux organismes relèvent du même ministre. Alors... Mais je lui demande, là, de penser aux intérêts supérieurs de protéger le droit à l'information et de pouvoir modifier son attitude par rapport aux auditions concernant le Curateur public pour que les parlementaires des deux côtés puissions en avoir le coeur net.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci, M. le député. Alors, M. Greenbaum, merci beaucoup de votre présence parmi nous et bon retour.

Je suspends nos travaux deux minutes pour qu'on puisse discuter ensemble.

(Suspension de la séance à 15 h 29)

 

(Reprise à 15 h 31)

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, à l'ordre s'il vous plaît, chers amis. Nous reprenons nos travaux, et nous avons parmi nous des représentants d'Equifax Canada inc. Messieurs, auriez-vous l'amabilité de vous présenter?

M. Ouimet: M. le Président, question de directive.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je veux bien m'assurer ? parce qu'il y a eu une discussion hors caméra ? je veux bien m'assurer que nous allons terminer l'audition des groupes aujourd'hui, et les remarques finales seront, tel qu'entendu antérieurement, seront tenues à quelque part mardi de la semaine prochaine.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ça va? M. le ministre, aviez-vous quelque chose à dire?

M. Facal: M. le Président, je vous laisse décider.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Bien. Alors, chers amis, à vous la parole.

Equifax Canada inc.

M. Globensky (Michel C.): Merci, M. le Président, et bonjour. Bonjour, messieurs. Je me présente, Michel Globensky. J'agis à titre de conseiller en matière de renseignements personnels chez Equifax avec qui je suis depuis 44 ans. J'ai occupé différentes fonctions au cours de ces années-là. J'ai le plaisir d'être accompagné par Me Raymond Doray, conseiller juridique.

Equifax désire en premier lieu remercier la commission de la culture de l'Assemblée nationale de l'occasion qui lui est offerte d'échanger avec ses membres au sujet du projet de loi n° 122. Pour emprunter une expression courante dans notre industrie, ce projet de loi vise à faire la mise à jour des lois dans ce domaine afin de maintenir l'équilibre qui se doit d'exister entre, d'une part, le droit des citoyens à leur vie privée et, d'autre part, le droit à l'utilisation des renseignements personnels par les organismes publics et les entreprises privées. Il s'agit là d'un objectif qui, dans le contexte de nos activités, a depuis toujours fait partie des préoccupations d'Equifax.

L'activité principale d'Equifax consiste à recueillir, détenir et communiquer des renseignements de crédit concernant des entreprises ou des individus afin d'aider les institutions financières, les prêteurs, les commerçants, et notamment les petites et moyennes entreprises, à prendre les décisions d'affaires les plus éclairées. L'information que nous fournissons aux entreprises leur permet certes de réduire le risque de pertes, les mauvaises créances mais ça leur permet également de limiter le sur-endettement des consommateurs.

Permettez-moi par ailleurs d'ouvrir une parenthèse afin d'apporter une correction au mémoire qui vous a été présenté en août dernier. Depuis lors, Equifax a vendu son service de recouvrement de créances mais compte toujours au Québec quelque 175 employés, y incluant 59 personnes rattachées à son Centre national de relations avec les consommateurs où l'on traite les demandes d'informations générales ainsi que les appels et les communications écrites de consommateurs au sujet de l'information détenue à leur sujet. D'autre part, nos préposés traitent environ 1 000 appels par mois en provenance de personnes qui, craignant d'être victimes de fraude suite à la perte ou au vol de pièces d'identité, sollicitent notre aide.

Ceci dit et souhaitant consacrer le plus de temps possible à répondre à vos questions, nous désirons brièvement mentionner certaines de nos préoccupations en ce qui a trait aux amendements proposés ou aux amendements que nous souhaitons voir apportés à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et à la Loi sur l'accès.

Les articles 67 et 89 du projet de loi proposent d'abroger l'article 12 de la loi sur le secteur privé ainsi que son article 90.3. Cette double abrogation aurait pour conséquence de forcer les entreprises à détruire les renseignements dont l'objet est accompli et de laisser à la Commission d'accès à l'information le soin de décider au cas par cas les périodes de conservation des renseignements personnels.

Nous sommes d'avis que, à l'intérieur des contraintes déjà prévues par la loi quant à l'utilisation des renseignements personnels, les entreprises ne devraient pas être tenues de détruire les dossiers ou les renseignements personnels qu'elles détiennent lorsque leur objet est accompli. Si dans le passé un consommateur s'est bien acquitté de ses obligations envers un commerçant et qu'il se présente de nouveau chez ce commerçant l'année suivante, l'accès accéléré au dossier antérieur permettra d'attester rapidement de cette bonne relation. Cela représente un avantage marqué, tant pour le consommateur que pour le commerçant. Si, à l'inverse, au cours de la relation d'affaires, le consommateur a fait défaut de respecter ses obligations, le commerçant pourra-t-il se prémunir contre un mauvais payeur ou un fraudeur s'il a dû détruire son dossier au terme de cette relation d'affaires? Les retards ou défauts de paiement communiqués antérieurement par le commerçant à Equifax pourront, dès la fermeture du compte, être contestés par la personne concernée. Si le commerçant n'a plus les détails lui permettant de confirmer leur exactitude, Equifax n'aura d'autre choix que de retirer ces informations du dossier de crédit, privant alors les autres commerçants d'une information vitale à leur processus décisionnel. En somme, nous croyons qu'il est essentiel de conserver l'article 12 et que cet article serait d'autant plus pertinent si le gouvernement exerçait le droit qu'il s'était réservé à l'article 90.3 d'établir des règles de conservation.

Il faut souligner à ce sujet que, dans toutes les législations provinciales réglementant nos activités, des règles de conservation de dossiers de crédit ont été adoptées, ce qui a pour effet d'éliminer les contestations au cas par cas. Autrement dit, nous considérons que la détermination des périodes de conservation des renseignements personnels ne devrait pas continuer de faire l'objet d'une adjudication au cas par cas mais devrait plutôt être établie à partir de normes législatives ou réglementaires qui pourraient très bien avoir, comme point de référence, les règles en vigueur ailleurs, après concertation de toutes les entreprises, personnes et organismes concernés.

D'autre part, l'article 85 du projet de loi n° 122 vise à modifier l'article 78 de la loi sur le secteur privé en ce qui a trait à l'accès du consommateur aux renseignements le concernant. En raison de son volume d'activités dans ce secteur, Equifax compte sans doute parmi les entreprises du secteur privé qui sont les plus sollicitées par les consommateurs qui désirent prendre connaissance de leur dossier. Or, l'accès sur place ou par téléphone pose de sérieux problèmes de confidentialité et, pour obvier à ces difficultés, nous souhaiterions que cette commission abroge cet article de loi de manière à ce que les agents de renseignements personnels soient soumis aux mêmes règles de consultation que les autres entreprises. Ainsi, toute telle demande d'accès au dossier de crédit devrait être formulée par écrit, de façon à ce que la personne concernée reçoive son dossier par la poste, qu'elle puisse l'étudier à tête reposée, avoir à la portée de la main ses dossiers personnels d'achats et de paiements et, s'il y a lieu, qu'elle puisse compléter le formulaire que nous mettons à sa disposition pour soumettre toute question ou demande relative au contenu du dossier. Il faut souligner également que, lorsqu'un consommateur désire voir à la rectification de son dossier, il s'agit à ce moment-là de faire une enquête, et la réponse, évidemment, ne peut pas être donnée sur le champ.

Enfin, l'article 14 de la loi sur le secteur privé devrait être modifié afin d'indiquer que le consentement à la communication ou à l'utilisation de renseignements personnels peut constituer l'une des obligations essentielles du contrat, auquel cas sa révocation pourrait entraîner une violation du contrat ainsi que la déchéance du terme.

Pour ce qui est de la loi du secteur public, les articles 126.2 et 126.3 de la Loi sur l'accès, proposés par l'article 45 du projet de loi n° 122, devraient, croyons-nous, être modifiés de manière à prévoir que, avant d'émettre une recommandation ou une ordonnance, la Commission d'accès à l'information doit également fournir aux tiers directement affectés l'occasion de présenter leurs observations, et ce, afin d'avoir à sa disposition l'ensemble des données lui permettant d'arriver à la conclusion la mieux éclairée qui soit. L'expérience antérieure dont Equifax a été victime ainsi que les règles d'équité militent en faveur d'une telle modification.

Notre mémoire fait aussi référence à un certain nombre d'autres amendements ou suggestions sur lesquels il nous fera plaisir de revenir durant la période des questions.

Je termine donc sur cette note, M. le Président, et il nous fera maintenant plaisir d'échanger avec les membres de la commission sur l'ensemble des questions soulevées dans notre mémoire.

Le Président (M. Beaulne): Merci. M. le ministre.

n (15 h 40) n

M. Facal: Bonjour, messieurs. Je vous souhaite la bienvenue et vous remercie pour votre contribution à nos travaux. Curieusement, à une époque où il semblerait que la plupart des gens demandent de la déréglementation, vous, vous dites que ? si je vous ai bien compris ? sur la question précise des modalités de conservation ou de destruction des documents contenant des renseignements personnels, si le législateur ne se dote pas de règles, le Québec serait l'un des rares endroits en Amérique du Nord à ne pas avoir ces règles. Bon. J'ignore tout de cela. Comment ça se passe ailleurs? Donnez-moi des exemples de règles qui existent ailleurs et qui pourraient nous inspirer. Par exemple, en Ontario, ça se passe comment?

M. Globensky (Michel C.): En Ontario comme dans la plupart des autres provinces canadiennes, sauf notamment pour l'Alberta qui s'est dotée d'une loi seulement récemment et du Nouveau-Brunswick qui n'a pas de législation encore, toutes les autres provinces canadiennes se sont dotées d'une loi dans les années soixante-dix et, si on consulte leurs lois, elles sont calquées, à toutes fins pratiques, les unes sur les autres. Alors, dans chacune des lois, on retrouve des règles très précises sur la conservation des renseignements, qu'il s'agisse de renseignements de crédit, renseignements d'archives publiques, une faillite, une poursuite, un jugement, tout est très clair, très précis. Alors, il n'y a pas de nécessité d'adjudication au mérite, c'est la même chose pour tout le monde. Alors, les problèmes sont éliminés de cette façon-là.

M. Facal: Votre mémoire est rempli de remarques concrètes qui méritent réflexion. Entre autres, je prends bonne note de ce que vous dites relativement au risque élevé de fraude lorsque des demandes sont faites par téléphone.

Vous abordez aussi une question ? en page 2 ? qui m'intrigue: Le législateur songe à accorder aux gens le droit d'aller consulter sur place leur dossier de crédit. Vous nous dites: L'intention est bonne mais, dans la vie de tous les jours, cela peut donner lieu à des situations extrêmement tendues. Et je l'imagine aisément. Quand quelqu'un qui souhaite obtenir quelque chose, qui est souvent dans une situation difficile, se bute à une réponse qui n'est pas celle qu'il souhaiterait avoir, je conçois aisément que, pour vos employés, des fois, ça peut ne pas être drôle. Vous dites d'ailleurs assez justement que, en ces matières, il faut parfois quelques heures ou quelques jours avant que les gens digèrent la réalité de leur situation et en viennent à devoir reconnaître qu'en effet leur historique de crédit n'est peut-être pas ce qu'ils souhaiteraient qu'il soit.

Comment le législateur pourrait-il parvenir à ses fins en contournant ce scénario dont je conçois qu'il peut être réel et problématique? Donnez-moi une suggestion concrète pour donner aux gens le droit de consulter, le droit de faire rectifier, tout en évitant le plus possible cette confrontation, ce face-à-face qui, dans le contexte de la situation en cause et dans la situation de détresse qui peut être celle du client, peut en effet parfois déraper, j'imagine. Concrètement, comment pourrions-nous parvenir à nos fins en vous évitant ce trouble-là?

M. Globensky (Michel C.): Bien, écoutez, la technologie nous permet de plus en plus des facilités qu'on n'avait pas autrefois: tout simplement le télécopieur, par exemple. La personne qui désire avoir accès à son dossier de crédit peut nous faire parvenir sa demande par télécopieur. La personne peut consulter notre site Equifax.ca sur l'Internet pour avoir toute l'information possible sur qu'est-ce que c'est, les dossiers de crédit, avoir tiré le formulaire qui lui permet de faire une demande d'accès à son dossier, nous la faire parvenir, et la réponse, le dossier de crédit, sous format convivial tout à fait facile à comprendre lui est expédiée par la poste dans les quatre, cinq jours suivants. La personne, à ce moment-là, comme on mentionne, à tête reposée... Parce que souvent le scénario est que... Et j'en ai vu souvent moi-même ? les gens se disent: Bien, écoutez, j'ai été refusé pour un prêt, j'ai été refusé pour telle chose, telle chose, et la seule chose qu'on m'a dite, bien, c'est Equifax, bon, alors Equifax qui est... ? tirer sur le messager, si on peut dire. Alors, c'est ça qui est le problème, les gens peuvent arriver assez énervés, frustrés parce qu'ils n'ont pas pu avoir ce qu'ils désiraient. Souvent, ils pensent que c'est à cause d'Equifax, c'est la décision d'Equifax, quand c'est pas le cas. Alors, il y a des points de friction qui pourraient être évités et nous pensons et... En fait, on vit l'expérience parce qu'il y a de plus en plus de gens qui nous font des demandes par la poste. Nous transmettons leur dossier par la poste et, comme on dit dans le mémoire, bien, ils peuvent se référer à ce moment-là à l'information qui est au dossier, la comparer avec leurs notes personnelles, leurs états de compte, leurs factures et, s'ils ont des questions à ce moment-là, bien simplement, compléter le formulaire qu'on met à leur disposition, nous le retourner. S'il y a enquête à faire, on la fait, évidemment, et on retourne au consommateur avec une réponse, soit une mise à jour, soit une modification, soit de dire: Écoutez, vous n'êtes pas d'accord mais, en autant que notre source d'informations est concernée, l'information est tout à fait exacte et vous pouvez, à ce moment-là, faire rajouter une déclaration personnelle au dossier.

Alors, ça fonctionne très bien dans ce sens-là, et c'est dans ce contexte-là qu'on voit éventuellement la possibilité qui s'offrirait de permettre aux consommateurs d'avoir accès à leur dossier par Internet. C'est pas demain que ça va se faire mais, une fois qu'on va être satisfaits, que toutes les balises de sécurité sont en place, c'est quelque chose qui va être très réalisable.

M. Facal: Mais pensez-vous que... Non, je vais reformuler ma question autrement. Quel est, quels sont les profils de votre clientèle? À quoi ressemblent vos clients? Je soupçonne qu'ils ne sont probablement pas de très gros utilisateurs de l'Internet.

M. Globensky (Michel C.): C'est-à-dire que, quand on parle de l'Internet, là, c'est en fonction des consommateurs. Les consommateurs qui désirent avoir accès à leur propre dossier dans le moment peuvent tirer de l'Internet le formulaire qu'ils doivent compléter et nous retourner par télécopieur ou par la poste en nous demandant, avec preuve d'identité évidemment, en nous demandant l'accès à l'information qu'on détient à leur sujet. Alors, c'est dans ce contexte-là que je vois l'Internet dans le moment, comme étant un outil pour faciliter le processus de demande d'accès à l'information. Et, une fois la demande reçue, la demande est remplie et le rapport est transmis au consommateur; c'est une question de quelques jours.

M. Facal: Pour l'instant, ça va. Merci.

M. Globensky (Michel C): Les clients d'Equifax évidemment, les utilisateurs, les banques, les institutions financières, les grands magasins ont accès à nos services évidemment par l'Internet, par ordinateur, très peu, exceptionnellement, par téléphone.

M. Facal: En fait, vos clients, ce ne sont pas tant des individus comme des... Qui sont vos clients? Faites-moi un portrait de votre clientèle.

M. Globensky (Michel C): Nos clients sont les prêteurs, les entreprises qui veulent faire affaires avec des consommateurs et qui, pour ce faire, ont besoin d'informations sur les antécédents de crédit, la réputation du consommateur dans le respect de ses obligations, pour prendre une décision. Alors, ça, ce sont nos clients: les banques, les compagnies de finance, les magasins, les petites et moyennes entreprises.

M. Facal: Alors, prenez-moi par la main. Comment vous les recueillez ces renseignements? Donnez-moi un cas concret.

n (15 h 50) n

M. Globensky (Michel C.): Nous les recueillons presque exclusivement maintenant par bandes magnétiques. Les grandes banques, les grands magasins, les compagnies émettrices de cartes de crédit nous transmettent leurs informations, tous leurs comptes à recevoir par bandes magnétiques, mensuellement pour la plupart mais, de plus en plus, on cherche à ce que ce soit hebdomadairement, même dans certains cas quotidiennement éventuellement, tout ça pour que le dossier de la personne concernée soit le plus à jour possible lorsqu'il y a une demande de consultation. Alors, l'information qu'on reçoit évidemment ne concerne pas qu'est-ce qui a été acheté, à quel endroit, pour qui, et on n'a aucune information à ce sujet-là. L'information que nous avons, c'est la date d'ouverture du compte, le montant qui a été financé, combien la personne est censée payer mensuellement, quel est son solde à la date du rapport de notre client, de notre source, et quelle est la cote que le fournisseur attribue sur la qualité de remboursement, la cote de 1 à 9 qui indique si la personne paie bien ou pas. Cet accès-là, évidemment, est autorisé à partir du consentement que le consommateur aura donné lors de sa demande de crédit.

M. Facal: Je suis très, très peu familier avec cette question, avec ce phénomène, et je voudrais vous poser une question en vous assurant que je ne veux d'aucune façon vous mettre sur la sellette mais, vraiment,je vous la pose en toute candeur. Avez-vous déjà fait l'objet de plaintes à la Commission d'accès à l'information? Avez-vous déjà eu des démêlés avec cet organisme?

M. Globensky (Michel C.): En fait, personnellement, de tous les dossiers à la Commission d'accès à l'information ? d'ailleurs, la Commission me réfère assez régulièrement des gens qui ne comprennent pas du tout le rôle qu'Equifax a joué dans leur affaire ? mon dossier montre que, en moyenne depuis 1994, on peut dire: Une demande d'examen de mésentente pas mois et, si on compare ça au fait que, quotidiennement au Québec, Equifax répond à quelque 10 000 interrogations de la part de ses clients désirant s'informer au sujet de consommateurs qui veulent faire affaires avec eux, alors, le ratio est quand même significatif. Et, dans 95 % des cas ou même plus, les demandes d'examen de mésentente se règlent par médiation avec le bon concours de la Commission. Habituellement, les plaintes sont dans le contexte que la personne dit: Bien, écoutez, ce compte-là, je ne l'ai pas payé pour telle ou telle raison et je pense pas que c'est justifié que ce soit conservé dans mes antécédents de crédit. Ce compte-là, ça m'a pris bien du temps, j'ai été terriblement en retard mais, finalement, je l'ai payé et je ne pense pas que ça devrait me suivre pendant x années, comme vous le dites.

M. Facal: Je vous pose des questions que vous trouverez peut-être d'une banalité ou d'une naïveté désarmantes, mais je veux mieux comprendre. Vous avez dit que les entreprises vous transmettent des renseignements sur bande magnétique. À quoi ça ressemble, une bande magnétique, et quelles sont les garanties qu'il y a dans la bande magnétique qui protègent les renseignements auxquels vous ne devez pas avoir accès? Quels sont les garde-fous qu'il y a dans la bande magnétique et à quoi ça ressemble? Moi, j'ai jamais vu ça.

M. Globensky (Michel C.): Bien, écoutez, les bandes magnétiques autrefois, en 1976-1977, lorsqu'on a commencé l'automatisation, c'étaient des grosses bobines, là, et c'est maintenant des cassettes comme on met dans une radio. Et ça ne contient que l'information qui intéresse Equifax. Il n'y a pas d'informations sur ce qui a été acheté, à quel endroit puis ainsi de suite. Ça, ça ne nous intéresse pas de toute façon, alors ce n'est pas dans cette cassette-là.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci, M. Globensky. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. M. Globensky, bonjour et bienvenue. Est-ce que le gouvernement du Québec fait partie de vos clients?

M. Globensky (Michel C.): Oui, certains ministères sont clients.

M. Ouimet: Lesquels?

M. Globensky (Michel C.): Écoutez, dans le moment, je ne saurais dire avec certitude. Je sais qu'on a fait affaires avec le ministère du Revenu, on a fait affaires avec la Société de l'assurance automobile du Québec, avec d'autres ministères, mais, malheureusement, j'ai pas la liste à jour des ministères.

M. Ouimet: Lorsque vous évoquez dans votre mémoire les problèmes que vous occasionneraient entre autres le fait que des personnes se déplacent et viennent physiquement consulter leur dossier de crédit à votre entreprise, j'ai regardé les solutions que vous proposez et vous proposez de le faire par écrit. Est-ce que ça se fait présentement par écrit?

M. Globensky (Michel C.): Ça se fait beaucoup par écrit dans le moment.

M. Ouimet: ...les délais de réponse? Si aujourd'hui j'écris une lettre à Equifax pour connaître mon dossier, je reçois des réponses dans un délai de combien de temps?

M. Globensky (Michel C.): En moyenne 10 jours maximum.

M. Ouimet: Dix jours? Puis un processus de correction à mon dossier de crédit prendrait combien de temps dès le moment où vous m'écrivez et puis... Avez-vous des moyennes, à savoir ça prend combien de temps pour corriger un dossier de crédit si vous reconnaissez que la personne a raison dans ses prétentions?

M. Globensky (Michel C.): Sur réception du formulaire que le consommateur nous a retourné indiquant sa contestation, l'enquête se fait dans les meilleurs délais et la réponse de la source d'informations va soit modifier l'information telle qu'elle paraît au dossier ou l'information va rester telle quelle. Nous allons retourner au consommateur. Maintenant, combien de temps ça prend...

M. Ouimet: En moyenne? Est-ce que vous tenez des moyennes?

M. Globensky (Michel C.): Bien écoutez, habituellement on est... C'est surtout une question qu'on est à la merci de notre source d'informations parce qu'on leur demande de faire une vérification et on attend leur réponse. Si ça tarde trop, on va retourner à eux.

La loi évidemment prévoit qu'on doit répondre dans les 30 jours, mais c'est... Ça prend sûrement pas 30 jours.

M. Ouimet: Ça répond. Moi, j'étais sous l'impression que la préoccupation du législateur était d'accélérer la possibilité pour le consommateur de corriger ou l'entreprise quelconque de corriger son dossier de crédit, mais vous me dites: La loi prévoit déjà que ça doit se faire à l'intérieur d'un délai de 30 jours qui n'est pas remis en question, ce délai.

M. Globensky (Michel C.): Exact.

M. Ouimet: Deuxième question: Au niveau de la destruction des renseignements, la loi prévoit: «Celles-ci auraient désormais l'obligation de détruire les renseignements personnels qu'elles détiennent lorsque l'objet du dossier est accompli.» À quel moment est-ce que l'objet du dossier est accompli?

M. Globensky (Michel C.): Bien, lorsque le solde a été acquitté, lorsque le compte est à zéro ou lorsque la personne est disparue, impossible de la retracer, et que le compte est transféré aux profits et pertes.

M. Ouimet: Votre intérêt, à vous, n'est-ce pas, j'imagine, est de quand même conserver les données pour des demandes ultérieures. Vous avez au moins le profil d'un consommateur ? j'essaie de comprendre un petit peu ? dans vos banques de données sur les différents clients que vous avez, les différentes personnes.

M. Globensky (Michel C.): Je demanderais à Me Doray d'élaborer là-dessus.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Oui, Me Doray.

M. Doray (Raymond): Alors, M. le député... Merci, M. le Président. Cette notion d'objet du dossier est au coeur de la Loi sur l'accès, de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, mais elle n'a pas donné lieu à beaucoup de jurisprudence.

Mais on peut grosso modo tirer comme conclusion que, lorsque la finalité pour laquelle un dossier a été constitué est accomplie, l'objet de ce dossier est accompli. Si l'article 12, comme le prévoit le projet de loi, était abrogé, cela ferait en sorte que c'est l'article 40 du Code civil qui s'appliquerait aux entreprises privées. Et, dès que la relation d'affaires entre un consommateur et une entreprise serait terminée, par exemple au terme d'un contrat d'assurance vous décidez de ne pas renouveler votre police, l'objet du dossier est accompli.

Chez Equifax, l'objet du dossier n'est pas le même. Le dossier que tient Equifax, c'est un dossier dont l'objet est de garder un portrait de l'expérience de crédit du consommateur. Donc, Equifax ne serait pas automatiquement tenue, si l'article 12 était abrogé, de détruire ses dossiers. Mais là où le bât blesse, c'est que Equifax, lorsqu'un consommateur conteste l'exactitude d'une inscription au dossier de crédit, est obligée de consulter la source de l'information, l'institution financière, la compagnie émettrice de cartes de crédit, l'assureur qui, lui, ayant terminé sa relation d'affaires avec le consommateur, serait obligé de détruire son dossier.

n(16 heures)n

Donc, Equifax se retournerait vers sa source et la source dirait: J'ai détruit le dossier parce que la loi m'oblige à détruire le dossier lorsque l'objet est accompli. Equifax ne pourrait plus s'assurer que l'inscription dans son dossier est valide et devrait par le fait même l'épurer. Et c'est cette dynamique... Je pense que le législateur n'y a manifestement pas pensé en proposant l'abrogation de l'article 12 parce que ça donne lieu à, je pense, une situation, pour l'ensemble des entreprises du Québec, qui est ingérable. Et c'est presque obliger les entreprises à l'amnésie collective.

M. Ouimet: Très bien. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président, M. Globensky, pouvez-vous m'expliquer un peu en quoi... Sur la page 15 de votre mémoire, vous dites que l'article 78 n'a plus sa raison d'être et qu'il devrait être abrogé. C'est pas clair pourquoi vous suggérez que l'article doit être abrogé, l'article 78.

M. Globensky (Michel C.): ...l'accès au dossier par le consommateur. Ce qu'on dit, c'est que, avec les facilités qui s'offrent au consommateur aujourd'hui d'avoir accès à son information de façon sécuritaire, tant pour lui que pour notre personnel, c'est beaucoup plus facile pour le consommateur de compléter un formulaire, y inclure une photocopie de pièces d'identité satisfaisant qu'il est bien ou qu'elle est bien qui elle prétend et de nous faire parvenir sa demande. Le dossier est transmis sous format convivial à la personne concernée à son adresse, et la personne, à ce moment-là, peut à tête reposée en prendre connaissance.

S'il y a des interrogations sur tel ou tel renseignement qui peut aller au dossier, elle peut à ce moment-là consulter ses factures, ses états de comptes pour voir si effectivement l'information est bien ce qu'elle devrait être, et, s'il y a lieu, elle remplit un formulaire nous indiquant où est sa contestation, nous le fait parvenir, et on fait enquête et on lui revient avec soit une modification ou l'opportunité de faire ajouter une déclaration à son dossier expliquant sa version des faits, pourquoi le compte a été... il y a eu des retards dans le paiement ou pourquoi la personne a refusé de payer son compte.

M. Bergman: Mais, M. Globensky, dans ces circonstances, il y aurait pas de contact entre le consommateur et Equifax ? personnel.

M. Globensky (Michel C.): Mais le contact personnel... À ce moment-là, si un consommateur, exemple, s'est vu refuser ou se voit refuser un prêt ? exemple: un financement important ? à cause de son dossier de crédit, il conserve la possibilité... Même avec l'amendement ou la modification qu'on suggère, le consommateur va conserver sa capacité de communiquer avec nous par téléphone, de bien s'identifier, qu'une préposée sorte son dossier sur l'écran afin d'en discuter sur-le-champ avec le consommateur sur un point précis ou des points avec lesquels le consommateur n'est pas d'accord, et, s'il y a lieu à ce moment-là, le processus d'enquête, de vérification va se faire au même titre. C'est surtout au niveau des consommateurs qui sont simplement curieux et qui veulent avoir accès à leur information, et, nous, on dit: Utilisons la technologie qui se développe pour faciliter à tout le monde la possibilité d'accès à l'information.

M. Bergman: Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Juste... Tantôt, je vous ai posé la question: Est-ce que vous avez des ministères qui sont vos clients? Vous avez répondu: Oui. Vous en avez nommé quelques-uns. À l'inverse, est-ce qu'il arrive que des ministères ou des organismes dépendant du gouvernement du Québec vous transmettent des renseignements?

M. Globensky (Michel C.): Les ministères avec qui on fait affaire, traditionnellement, il y a une entente contractuelle qui est préparée par les conseillers juridiques du ministère. Cette entente-là est soumise à la Commission d'accès à l'information pour consultation et pour approbation avant qu'elle soit concrétisée. Alors, l'entente, habituellement, va indiquer de façon très claire quelles informations doivent être communiquées par le client, par qui, les protocoles d'accès, qui au ministère aura ces protocoles d'accès là, et, de notre côté, l'information qui est utilisée par le ministère pour interroger notre banque de données ne sert pas à enrichir notre banque de données.

M. Ouimet: Pourriez-vous me donner quelques exemples typiques de renseignements qui vous seraient fournis par un ministère?

M. Globensky (Michel C.): Bien, la...

M. Ouimet: Typiquement, dans une des relations que vous avez, mettons, avec le ministère du Revenu ou le ministère de la Sécurité du revenu?

M. Globensky (Michel C.): L'interrogation typique, à ce moment-là, va être les nom, adresse, date de naissance, numéro d'assurance sociale de la personne concernée. Ces éléments-là sont suffisants pour faire une bonne recherche du fichier. Si l'information utilisée par le ministère ne nous était pas connue, elle ne sera pas conservée par Equifax pour le bénéfice de ses autres clients. Alors, la réponse d'Equifax va être en fonction de ce qui a été entendu par entente contractuelle. Si le ministère ne veut savoir que l'adresse actuelle de la personne qui est disparue de l'adresse connue, bien, ce n'est que l'adresse la plus récente que nous connaissons qui sera transmise au ministère. Si, par contre, le ministère, l'entente prévoit que le dossier au complet du consommateur doit lui être transmis, bien c'est ce que nous transmettons.

M. Ouimet: ...une question concernant l'interprétation de l'article 67.2, c'est peut-être une question pour Me Doray là, c'est une question légale: «Un organisme public peut sans le consentement de la personne concernée communiquer un renseignement personnel à toute personne ou organisme ? est-ce qu'"organisme" pourrait être Equifax ? si cette communication est nécessaire à l'exercice d'un mandat ou à l'exécution d'un contrat de services ou d'entreprises confié par l'organisme publique à cette personne ou à cet organisme» ? dans la mesure où vous êtes dans une relation là contractuelle avec un des ministères?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Me Doray.

M. Doray (Raymond): La question est intéressante, M. le député, parce que j'ai toujours pensé que l'article 67.2 permettait effectivement à un organisme public de confier un mandat à Equifax, de fournir certaines informations ou de rechercher pour elle à obtenir certaines informations lui permettant, à cet organisme ou à ce ministère, éventuellement de retracer un citoyen en défaut de paiements ou qui a obtenu une prestation illégalement. Mais, néanmoins, dans la pratique des 10 dernières années, plutôt que de recourir à cet article 67.2, Equifax et les ministères concernés ont toujours préféré soumettre les ententes de communication ou d'échange de renseignements entre eux à la Commission d'accès à l'information, bien que strictement... d'un point de vue strictement légal, ce n'était pas nécessaire. Mais afin d'éviter toute controverse, on a mis les bretelles avec la ceinture.

M. Ouimet: Et dernière question, au niveau de la destruction de données, une fois que les fins sont atteintes, quelle assurance est-ce que le ministère peut avoir que les données sont effectivement disparues de vos banques de données, que l'information disparaît ou l'information est détruite? Ça repose sur la bonne foi de vos employés, de votre entreprise, j'imagine, ou est-ce qu'il y a des mesures de suivi, de surveillance qui se font par la suite?

M. Globensky (Michel C.): Non, il y a eu notamment... Le meilleur exemple qu'on peut donner, c'est lorsque la Commission d'accès à l'information a scruté de fond en comble la structure qu'on avait mise en place pour le fichier central des sinistres automobiles. Il y a également eu des vérifications qui ont été faites, des vérifications ponctuelles qui ont été faites par des vérificateurs du gouvernement relativement à d'autres échanges d'informations ou contrats avec l'un ou l'autre des ministères.

J'aimerais préciser, j'ai mentionné tantôt le ministère du Revenu, ministère, la Société de l'assurance automobile du Québec, je ne voudrais pas laisser entendre que, dans le moment... je ne sais pas, peut-être qu'ils sont encore client, mais je ne le sais pas. Je sais qu'ils l'ont été.

M. Ouimet: Dernière question, juste...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, monsieur... Non, le temps est révolu, je m'excuse, M. le député de Marquette. Alors, M. Globensky et M. Me Doray...

M. Ouimet: Trente secondes, M. le Président là. Dernière question, 30 secondes, si vous me permettez.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Non, je m'excuse...

M. Ouimet: On empiétera sur l'autre, je vais écourter.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Non, je m'excuse, c'est 15 minutes chaque et puis vous avez votre temps de... Oui.

M. Bergman: Il semble qu'on a commencé cette audition à 3 h 30, avec Equifax, c'est seulement 4 h 10, alors...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Oui, je sais mais c'est que le parti ministériel a pris moins de temps que ses 15 minutes.

M. Ouimet: Alors, on peut prendre le temps de la partie ministérielle?

Le Président (M. Simard, Montmorency): C'est pas transférable.

M. Ouimet: C'est pas transférable? De consentement?

Le Président (M. Simard, Montmorency): S'il y a consentement. Y a-t-il consentement? Il semble qu'il y ait consentement. Non?

M. Facal: Ah! non.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ah! non? Je sais pas? Bon.

M. Facal: Je suis la personne normalement la mieux disposée à l'octroi des consentements mais, tout à l'heure, on m'a un petit peu échauffé. Alors, je vais davantage réfléchir avant de consentir à l'avenir.

M. Ouimet: Alors, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Petite correction, le secrétaire m'indique que c'était l'organisme qui avait pris un peu moins de temps, c'était pas l'opposition.

M. Ouimet: Ah! bon. Ah! il nous reste du temps dans ce cas-là?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Non, ça revient au même de toute manière. Très bien. Ha, ha, ha!

n(16 h 10)n

Alors, M. Globensky, M. Doray, merci beaucoup de votre présence parmi nous et bon retour.

J'invite d'ores et déjà l'Union des municipalités du Québec à se joindre à nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, M. le maire, M. Gagnon, soyez le bienvenu. M. le maire, donc, de Saint-Basile-le-Grand, auriez-vous l'amabilité de nous présenter les personnes qui vous accompagnent?

Union des municipalités du Québec (UMQ)

M. Gagnon (Bernard): Certainement. Celui qui est à ma droite, votre gauche, l'intervenant de l'Union des municipalités du Québec, M. Jean Langevin; et également à ma gauche, votre droite, Me Richard Grondin, avocat à la Communauté urbaine de Québec, qui a gentiment accepté, un vendredi après-midi, là, d'être présent avec nous pour nous aider à bien présenter le mémoire que...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Nous vous écoutons avec grand plaisir.

M. Gagnon (Bernard): Alors, merci beaucoup. Je vais sauter certaines parties d'introduction qui se retrouvent à la plupart des mémoires qui sont déposés par l'Union, tout simplement pour vous dire qu'un des défis du législateur consiste toutefois, dans ce cas-ci en particulier, à harmoniser les deux principes dont on va faire référence tout à l'heure visant à favoriser la démocratie tout en protégeant le droit à la vie privée. Et, dans un tel contexte, notre attention particulière a été attirée sur six points: champ d'application de la loi; procédure d'accès à l'information; renseignements à caractère public; utilisation de renseignements nominatifs; pouvoirs de la Commission; et frais exigibles de la Commission. Alors, je vous les présente comme tels.

Le premier: champs d'application de la loi. Alors, le projet de loi n° 122 vise à étendre le champ d'application de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

L'article 3 du projet de loi assujettit expressément à la loi les centres locaux de développement et les conseils régionaux de développement, CRD. L'UMQ, à cet égard, tient à donner son appui à cette disposition. Par contre, l'Union s'oppose vivement à tout autre élargissement de la notion d'organismes municipaux couverts par la loi. Effectivement, l'article 5 de la loi actuelle mentionne que les organismes municipaux assujettis comprennent, entre autres, une municipalité ainsi que tout organisme que la loi déclare mandataire ou agent d'une municipalité et tout organisme dont le conseil d'administration est composé majoritairement de membres du conseil d'une municipalité, de même que tout organisme relevant autrement de l'autorité municipale. C'est la loi actuelle.

À l'article 3 du projet de loi n° 122, les organismes municipaux seraient dorénavant décrits comme suit: «tout organisme que la loi déclare mandataire ou agent d'une municipalité ou tout organisme dont conseil d'administration est formé majoritairement de membres du conseil d'au moins une municipalité, à l'exclusion de l'Union des municipalités du Québec, de la Fédération québécoise et de l'Union des municipalités de banlieue de l'île de Montréal, ainsi que tout organisme dont le conseil d'administration est formé d'au moins un élu municipal désigné à ce titre et dont une municipalité ou une communauté urbaine adopte ou approuve le budget ou contribue à plus de la moitié au financement...»

Alors, le projet de loi n° 122 aura donc pour résultat d'assimiler à des organismes municipaux des associations qui ont, à notre point de vue, un caractère et une nature plutôt mixte telles que des organismes sans but lucratif dans les secteurs des loisirs et de la culture. Une partie du financement de ces organismes est tout autant privé que public et leurs véritables dirigeants sont principalement des citoyens agissant bénévolement et non des élus locaux. Le projet de loi n° 122 appliquera à ces organismes un régime d'abord... pardon, un régime d'accès lourd et coûteux qui n'est pas conçu pour eux. Or, ce sont les municipalités qui subiront les conséquences de cette application au quotidien. En effet, certains de ces organismes opérant avec aucun ou très peu d'employés permanents ou avec des moyens matériels souvent limités, les demandes d'accès pourraient bien se retrouver sur le bureau du responsable de l'accès aux documents de la municipalité qui finance l'organisme ou sur lequel un élu y siège. Pourtant, il est faux de prétendre que cette municipalité joue un rôle dans le fonctionnement de l'organisme ou même dans sa gestion quotidienne.

Alors, les élus municipaux souhaitent être transparents. Cette transparence a cependant ses limites. Elle ne doit pas conduire à des situations incongrues dans le milieu municipal en multipliant par milliers les organismes assujettis à la loi. À cet égard donc, l'UMQ tient à réitérer son opposition sur cette question.

Au niveau des procédures d'accès, deuxième point, l'article 8 du projet de loi prolonge les délais d'un organisme public pour répondre à une demande d'accès. Ce délai est prorogé de 20 à 30 jours. Cette modification correspond effectivement aux demandes du milieu municipal à l'effet de donner plus de temps aux gardiens des archives pour répondre adéquatement aux demandes d'accès. Il ne faut pas oublier que certaines demandes exigent des recherches d'envergure et, dans cette perspective, un délai de réponse de 30 jours est tout à fait justifié.

Dans le cas où la demande d'accès concerne un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical fourni par un tiers et que l'organisme public doit aviser ce tiers avant de donner le renseignement, l'article 9 du projet de loi précise que l'organisme pourra procéder par avis public pour rejoindre ce tiers lorsque, après avoir pris des moyens raisonnables pour l'aviser par courrier, il n'a pu y parvenir. L'UMQ considère que cette procédure permettra de résoudre des situations particulières auxquelles était confronté le gardien des archives lorsque le tiers ne pouvait être rejoint par courrier.

Au niveau du troisième point sur lequel des commentaires de l'Union vont être inscrits, les renseignements à caractère public, l'article 12 du projet de loi précise des renseignements à caractère public relatifs aux dépenses des élus municipaux. Ces renseignements sont les suivants: le nom de la personne qui bénéficie du remboursement de la dépense; le type de dépense; la date et le montant de la dépense; le nombre de personnes visées par celle-ci de même que la région où elle a été faite. Selon le libellé de la disposition du projet de loi, l'UMQ considère que les pièces justificatives, les motifs de la dépense, le nom de l'établissement fréquenté et le nom de la ou des personnes qui accompagnent l'élu ? pardon ? le cas échéant, sont exclus des renseignements publics.

Dans ce contexte, l'UMQ est d'accord avec cette orientation. En encadrant ainsi la divulgation des comptes de dépenses des élus, le législateur tranche en faveur, bien sûr, de la transparence, tout en protégeant certains renseignements nominatifs de nature confidentielle relatifs aux tiers également. L'UMQ considère que le législateur a démontré un effort pour ainsi viser un équilibre entre l'accès à l'information et l'obligation d'un élu à justifier chacun de ses gestes dans les moindres détails, d'autant plus que l'obligation de divulguer les motifs de la dépense et le nom des personnes accompagnant un élu pourraient violer le droit à la vie privée du tiers, de tiers, pardon, et même compromettre à certains égards des investissements municipaux importants. La discrétion peut paraître parfois nécessaire. La gestion des fonds publics doit être transparente mais il faut aussi lui accoler certaines limites.

Point 4 au niveau de l'utilisation des renseignements nominatifs. Alors, on parle principalement, là, des articles 17 de la loi, en fait, qui ajoutent... qui ajoutent... des articles 66.1, comme tels, qui nous apparaissent particuliers et sur lesquels on aurait certains commentaires à y placer. Alors, l'article 17 du projet de loi sous étude modifie la loi par l'insertion après l'article 66, de l'article 66.1 qui se lit comme suit: «Un organisme public ne peut utiliser un renseignement personnel à une fin non pertinente à celle pour laquelle il est recueilli, à moins que la personne concernée n'y consente ou que cette utilisation ne soit nécessaire à l'application d'une loi au Québec. Dans ce dernier cas, l'organisme doit en aviser la Commission.»

Commentaires. Globalement, au niveau des mots «à une fin non pertinente». Alors, «un organisme public ne peut utiliser un renseignement personnel à une fin non pertinente», encore faut-il savoir par rapport à quel objectif on définira le terme «à une fin non pertinente». Et, à cet égard-là, toutes les interprétations sont probablement possibles, pensables, non souhaitables. Et c'est les commentaires que l'on fait puisque ce segment de phrase n'est pas un segment de phrase dont on retrouve une interprétation juridique classique, une interprétation juridique constante dans ces textes de loi là ou dans d'autres textes de loi comme tels et pourra conduire, donc, à toutes sortes d'interprétation.

Deuxième paragraphe de 66.1: «Toutefois la Commission peut autoriser un organisme public à utiliser, dans le cadre des attributions de l'organisme ou de la mise en oeuvre d'un programme dont il a la gestion, un renseignement personnel à une fin autre que celle pour laquelle il est recueilli.» Et dans ce cas-là, on ne fait même plus référence à une fin pertinente ou non, ça pourrait, à la limite même, à une fin non pertinente. Alors, c'est un commentaire que l'on se devait de mentionner, d'autant plus que c'est un article qui semble aller à l'encontre d'un principe global au niveau de la loi, qu'un renseignement personnel ne peut pas être utilisé à une fin autre que pour laquelle il est recueilli. Et à cet égard-là, cet article-là permettrait, en allant à l'encontre de ce principe-là, de donner une juridiction à la Commission pour que cette dernière judiciarise cet élément-là et prenne une décision, si un renseignement personnel peut être communiqué, même s'il est communiqué pour une fin autre que pour laquelle il a été recueilli.

n(16 h 20)n

Alors, à cet égard-là, je pense que le commentaire est que les principes de la loi sont bien campés, bien établis. Il serait regrettable que l'on puisse retrouver un article suffisamment large, même pour que des renseignements personnels à des fins non pertinentes ou pertinentes puissent être autorisés d'être donnés à des fins autres que pour lesquelles ils sont recueillis et que cette discrétion-là soit judiciarisée, c'est-à-dire à la Commission. Alors, globalement, le commentaire à ce niveau-là.

Point numéro 5, pouvoirs de la Commission. L'article 44 du projet de loi ajoute un nouveau motif en vertu duquel un organisme public peut ne pas tenir compte de certaines demandes d'accès. Ainsi, sur autorisation de la Commission d'accès à l'information, un organisme public pourra ne pas tenir compte d'une demande dont le traitement serait susceptible de nuire sérieusement aux activités de l'organisme. L'UMQ, bien sûr, accueille favorablement l'introduction de cette disposition, car il arrive occasionnellement que des demandes exigent des recherches tellement importantes qu'elles neutralisent pendant une longue période de temps le temps de plusieurs employés au détriment des activités régulières d'un service et de l'ensemble des citoyens de la municipalité. Cet article permettra sans aucun doute d'éviter ce genre de situation.

Frais exigibles par la Commission. Alors, l'article 155 du projet de loi ajoute une nouvelle disposition permettant au gouvernement d'adopter un règlement qui fixerait des frais pour tout acte accompli par la Commission. Alors, bien sûr, l'UMQ s'oppose à l'adoption d'une réglementation qui permettrait à la Commission d'accès de charger des frais aux organismes publics, puisqu'il s'agirait, dans le cas qui concerne les municipalités, indubitablement d'une nouvelle charge financière qui devrait être supportée par l'ensemble des municipalités. L'UMQ le répète: La recherche de sources de financement par le gouvernement ne doit pas se faire au détriment des municipalités. Plus que jamais, les élus locaux doivent opérer avec des budgets réduits ? on le sait ? et les municipalités n'accepteront plus que, de façon détournée, le gouvernement impose à cet égard-là le financement de ses organismes aux contribuables municipaux. Alors, l'UMQ s'oppose donc à l'introduction de cette disposition de l'article 155 dans le projet de loi n° 122.

En conclusion, le projet de loi n° 122 propose des modifications à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels qui s'inscrivent dans une démarche de révision nécessaire pour garantir aux citoyens et citoyennes du Québec un régime adapté aux changements de la société québécoise. L'UMQ appuie cette démarche de révision du règlement et souhaite que les particularités du monde municipal soient reconnues dans les modifications qui seront apportées, tout comme certaines suggestions ont déjà été retenues, je crois bien, au moment du dépôt de notre précédent mémoire comme tel.

Comme nous le mentionnions précédemment, les municipalités représentent les principaux organismes publics concernés par les demandes d'accès aux documents et aux renseignements personnels. Elles sont la clientèle la plus nombreuse de la Commission, et, à ce titre, les commentaires méritent à notre point de vue toute l'attention... que celle dont vous avez fait preuve aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, M. le maire, merci beaucoup pour la concision de vos propos et votre esprit de synthèse. Je cède maintenant la parole à M. le ministre.

M. Facal: Merci...

M. Ouimet: ...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Oui, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je vous ai signalé il y a plusieurs minutes que nous n'avions pas quorum. Je ne voulais pas interrompre la présentation des représentants de l'UMQ, mais...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Très bien. Alors, nous suspendons les travaux, le temps d'avoir quorum.

(Suspension de la séance à 16 h 24)

 

(Reprise à 16 h 31)

Le Président (M. Simard, Montmorency): À l'ordre, s'il vous plaît, très chers amis! Je constate que nous avons de nouveau quorum. Comme le veut le vieil adage: Tout vient à point à qui sait attendre. M. le maire, merci de votre patience et, de nouveau, je vous cède la parole. Il vous reste approximativement trois minutes, M. le maire.

M. Gagnon (Bernard): J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Superbe. Alors, M. le ministre.

M. Facal: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue, messieurs. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux. Vous représentez une institution qui n'a pas besoin de présentation, et votre mémoire, comme tout ce que vous présentez, est très clair. Je note assez plaisir que vous-mêmes notez que le projet de loi n° 122 reprend plusieurs des suggestions que vous avez faites dans le passé. Je note aussi que vous appuyez l'assujettissement à la Loi sur l'accès des CLD et des CRD tout en nous disant: Pas plus, par exemple, là. Mais, au moins pour les CLD et les CRD, vous reconnaissez le bien-fondé de les assujettir.

Vous nous dites cependant: Attention, la définition d'organisme municipal que vous donnez aurait aussi pour effet d'assujettir des organismes sans but lucratif dans les domaines du loisir et de la culture. Or, dites-vous, une partie du financement de ces organismes est souvent privée, et puis, dans le fond, leurs dirigeants sont généralement des bénévoles. Il reste que ces organismes sans but lucratif dans le secteur des loisirs et de la culture ont tout de même, je crois, des budgets qui, pour plus de la moitié, proviennent des fonds publics. Est-ce qu'il ne serait pas donc normal, légitime, de s'attendre à ce qu'ils soient eux aussi assujettis à une obligation de transparence? D'autant que, comme ils sont déjà, me dit-on, assujettis à la loi sur le secteur privé, je ne suis pas sûr de comprendre en quoi l'assujettissement à la Loi sur l'accès changerait vraiment grand chose dans le concret.

M. Gagnon (Bernard): Pour reprendre ce que vous dites... Et vous indiquez clairement que, dans certains cas même, plus de la moitié du financement provient de sources publiques. C'est exact, mais la loi qui est devant nous va beaucoup plus loin que ça, et c'est ça, l'objet de notre commentaire. On dit: Un élu municipal siège et est «désigné à ce titre et dont une municipalité ou une communauté urbaine adopte ou approuve le budget ? c'est-à-dire sans nécessairement fournir ? ou contribue à plus de la moitié».

On peut se retrouver dans une situation où effectivement un seul élu municipal siège sans nécessairement que la municipalité mette un seul sou et se retrouver, à ma compréhension, dans un contexte où la loi s'appliquerait à tel organisme et imposerait un fardeau important et très lourd aux municipalités à cet égard-là.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le ministre.

M. Facal: Oui. Vous exprimez aussi des craintes à l'endroit de la notion, introduite par l'article 17, de «fins non pertinentes». En effet, l'intention du législateur est de s'assurer que des renseignements ne sont utilisés que pour les fins auxquelles... pour lesquelles ils ont été recueillis. Vous avez des problèmes avec ce choix de mots: «à une fin non pertinente». Pourtant, cette notion est déjà présente dans le Code civil. Il y a pas de nouveauté là. L'article 37 du Code civil dit, je cite: «Toute personne qui constitue un dossier sur une autre personne doit avoir un intérêt sérieux et légitime à le faire. Elle ne peut recueillir que les renseignements pertinents à l'objet déclaré du dossier», etc.

D'une part, je suis pas sûr donc de comprendre sur quoi reposent vos craintes et, d'autre part, j'aimerais que vous me donniez une suggestion pour, dans l'éventualité où un autre libellé serait possible, que nous puissions parvenir à la même fin avec des mots différents.

M. Gagnon (Bernard): D'abord, M. le ministre, j'ai pas, là, l'article 34 ou 37 du Code civil devant moi, là, mais ce que je veux mentionner ici est à l'effet... Ce que l'on retrouve à 66.1, introduit par l'article 17 du présent projet de loi, c'est le terme «utiliser un renseignement personnel à une fin non pertinente à celle pour laquelle il est recueilli». Donc, on parle de l'utilisation d'un renseignement à une fin non pertinente à celle pour laquelle il est recueilli. Non pertinente par rapport à quoi? Par rapport à la fin à laquelle il est recueilli comme tel. C'est une utilisation qui donnera toute la possibilité de l'interprétation: qu'est-ce qu'une fin non pertinente, si elle est non pertinente au sens large, au sens strict, au sens littérale, au sens composé. Ça apparaît pas, d'aucune façon, ici. Et bien sûr une suggestion à cet égard-là, c'est qu'un organisme public ne peut utiliser un renseignement personnel à une fin autre que celle pour laquelle il est recueilli.

M. Facal: Je vous entends bien, mais il m'apparaît, sans être un expert de ces questions, que c'est une formulation qui n'est ni plus large ni plus vague que ce que l'on retrouve déjà ailleurs.

M. Gagnon (Bernard): Mais qui est beaucoup plus directe et qui empêche le lien obligatoire à la définition du terme «une fin non pertinente». Ça m'apparaît être une addition, respectueusement, non nécessaire dans le contexte et qui va donner lieu à des interprétations.

M. Facal: Par exemple, l'autre grande loi dans le domaine qui nous intéresse, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, contient un article 13 qui dit déjà, je cite: «Nul ne peut communiquer à un tiers les renseignements personnels contenus dans un dossier qu'il détient sur autrui ni les utiliser à des fins non pertinentes à l'objet du dossier, à moins que la personne concernée n'y consente ou que la présente loi le prévoit.» Je ne suis pas un expert de ces questions qui sont un peu neuves pour moi et avec lesquelles je commence à me familiariser, il est donc possible que vous ayez raison, je vais le regarder, mais, à première vue, je ne suis pas sûr de voir en quoi nous introduirions quelque chose de nouveau qui serait davantage préjudiciable pour vous que ce qui se trouve déjà dans nos lois. Mais, à tout hasard, je vais le regarder. Pour l'instant, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, M. le ministre.

M. Gagnon (Bernard): Peut-être juste ajouter un élément.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Oui, volontiers, M. le maire, volontiers.

M. Gagnon (Bernard): C'est parce que vous l'avez cité, mais je suis pas au courant moi-même. Est-ce qu'on a procédé à faire certaines interprétation effectivement de l'article 37 du nouveau Code civil, ça, je l'ignore, et est-ce qu'on l'a fait sur ces termes-là comme tels, je...

M. Facal: On me dit que oui, il y a eu des interprétations, mais je ne saurais rentrer davantage dans les détails, là.

M. Gagnon (Bernard): Ça va.

M. Facal: Je sens bien que, vous et moi, c'est pas notre premier domaine de compétence, là, hein.

M. Gagnon (Bernard): À tout événement, si la question est soulevée, c'est déjà ça.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...M. le maire. M. le député de Marquette.

n(16 h 40)n

M. Ouimet: Bonjour, messieurs, et bienvenue aux travaux de la commission. Je vais vous poser une question de philosophie, une question d'orientation par rapport à vos membres. Nous avons reçu de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec qui nous ont donné à peu près une dizaine d'exemples de difficultés d'avoir accès a des documents qui sont clairement et manifestement publics. Je vous demande pas de répondre par rapport aux villes qui ont été identifiées, mais il y a un procédé qui pourrait être appliqué si le gouvernement décidait de donner un coup d'envoi, de donner une directive, de donner un signal, c'est la procédure appelée de «divulgation automatique et systématique de documents qui seraient à caractère public».

Je vous donne l'exemple de la ville de Mississauga, qui a une pratique optimale de divulgation systématique et de diffusion automatique de tous les documents qui sont d'ordre public. Par exemple, au niveau du service d'urbanisme et du bâtiment, la ville de Mississauga rédige des rapports mensuels qui énumèrent tous les permis de construire délivrés pendant le mois, y compris les permis de construire des bâtiments industriels, commerciaux et résidentiels. Tous les rapports qui sont afférents sont également divulgués publiquement et... de telle sorte qu'on évite de surcharger les personnes qui sont responsables de l'accès à l'information. Ce n'est qu'un exemple. Il y a d'autre exemples, par exemple, au niveau des services financiers et services administratifs. Les budgets annuels, les dépenses spécifiques engagées par la mairesse et les conseillers élus, les états financiers, les certificats d'impôts qui indiquent l'état de paiement touchant des propriétés individuelles, tout ça est divulgué et tout ça est rendu public. Je me demandais si votre Union des municipalités du Québec serait favorable à une telle position.

M. Gagnon (Bernard): Écoutez, globalement, on n'a pas eu l'occasion de se pencher sur ces cas-là auxquels vous faites référence, manifestement une autre juridiction avec des contraintes législatives probablement tout à fait différentes de celles que l'on a ici à plusieurs égards. On sait bien que, dès qu'on parle de divulgation de renseignements, on parle de toutes sortes de conséquences à tous les niveaux comme tels, et, pas familier étant avec le système des lois ontariennes comme tel, il serait difficile pour moi maintenant de vous donner, de vous donner une opinion sur ces questions-là. Il y a des conséquences dans tous les systèmes juridiques, j'ai l'impression, à ces questions-là comme telles.

Actuellement, nous, tout ce qui, comme question de principe, vise à harmoniser les deux principes que l'on retrouve à la loi sont des éléments qui sont importants et qu'on va supporter comme tels. Bien sûr, chacun des éléments se doit d'être vu et regardé au niveau précis comme tel et dans ses tenants et aboutissants pour voir effectivement quels sont les effets à tous les niveaux relativement à la divulgation de l'ensemble des éléments auxquels vous faites référence. Aujourd'hui, je serais pas en mesure d'apporter une réponse mais c'est clair qu'en tant qu'Union on poursuit les deux objectifs importants, supportés et mis de l'avant par la loi telle qu'elle existe maintenant.

M. Ouimet: Est-ce que, de façon générale, vos responsables d'accès aux documents des différentes municipalités sont très chargés? Est-ce qu'elles ont énormément de demandes sur une base quotidienne ou sur une base hebdomadaire? Avez-vous des chiffres à nous donner à cet égard-là?

M. Gagnon (Bernard): Des chiffres, des chiffres, non. C'est cyclique et c'est variable d'une municipalité à une autre, d'un temps de l'année à l'autre aussi, il faut bien le comprendre, il faut bien le voir. Il s'agit d'une responsabilité quand même très importante de ceux qui ont ces responsabilités-là au niveau local, les greffiers. Donc, c'est une partie de leur travail très importante.

M. Ouimet: Ça, c'est sûr, sans l'ombre d'un doute, mais au niveau de la quantité de travail?

M. Gagnon (Bernard): J'ai pas d'informations claires sur ça, pour répondre à cette question-là.

M. Ouimet: O.K. Parce que dans votre mémoire, à la page 6, pages 5 et 6, là, vous faisiez le lien avec certains organismes qui ont du financement privé et public, et par la suite, à la page 6, ce que vous craignez, c'est d'hériter un petit peu de leurs responsabilités. Vous dites: «Le projet de loi n° 122 appliquera à ces organismes un régime d'accès lourd et coûteux qui n'est pas conçu pour eux. Or, ce sont les municipalités qui subiront les conséquences de cette application au quotidien.» Mais je me demandais dans quelle mesure est-ce que l'application au quotidien serait si lourde que ça si les municipalités ne sont pas si sollicitées que ça.

M. Gagnon (Bernard): En fait, ce que j'ai dit tout simplement, c'est que je pouvais pas répondre en termes de statistiques comme telles. Les municipalités sont, à ce que j'ai dit, utilisées énormément. Il y a un temps important du travail de ceux qui ont la responsabilité des archives qui est attribué à ces demandes-là. Ce qu'on dit dans le mémoire, c'est que, si, de surcroît, on ajoute à ces responsabilités-là, déjà très importantes et qui occupent une partie très importante du travail de ceux qui ont la responsabilité des archives, on ajoute des organismes additionnels qui ont pas nécessairement tout le mécanisme d'archivage que l'on connaît au niveau municipal, on doit conclure immédiatement à une surcharge de travail additionnelle importante et, plus que ça, à une augmentation de la charge de maintien à jour de l'ensemble des archives. Parce que, si on est pour donner, si on est pour avoir une obligation de donner un renseignement, encore faut-il être en mesure, capable d'avoir le système qui peut produire ce renseignement-là, par ailleurs admissible.

Alors, c'est clair, dans un tel contexte, qu'on se retrouve dans une situation d'une surcharge très importante. En termes de temps, d'heures, de statistiques, ce serait difficile pour moi de vous le dire, mais déjà, sur une base cyclique, l'ensemble des municipalités ont des responsabilités très importantes en ces matières-là. Et, si on ajoute, en organisant plus d'organismes ou en rendant plus d'organismes admissibles, c'est clair qu'on aura non seulement la responsabilité additionnelle de fournir cette information additionnelle là, mais on aura des obligations de maintien d'archivage beaucoup plus étendues, et ça encore, ça va augmenter la charge qui est déjà très lourde.

M. Ouimet: Et est-ce que vous diriez que c'est la principale raison pour laquelle l'UMQ semble un peu contre l'idée d'assujettir les sociétés mixtes à la Loi sur l'accès?

M. Gagnon (Bernard): C'est une des raisons. L'autre raison bien sûr on l'a mentionnée tout à l'heure: À partir du moment où les municipalités ont un représentant sur un organisme qu'il ne finance pas ou qu'il finance à hauteur symbolique dans une année, on voit pas comment, pourquoi et sur quels motifs on devrait avoir cette responsabilité-là comme telle, avec tout ce que ça comporte comme conséquences.

M. Ouimet: Ça, je comprends moins, là.

M. Gagnon (Bernard): C'est l'autre commentaire que l'on a mentionné. À la page...

M. Ouimet: Vous pouvez élaborer davantage, je le comprends moins, celui-là?

M. Gagnon (Bernard): 5 et 6, oui.

M. Ouimet: Mais, non, je le comprends moins, celui-là. Pourriez-vous me l'expliciter davantage?

M. Gagnon (Bernard): Écoutez, actuellement, la loi prévoit que les organismes admissibles, c'est dont le conseil d'administration est composé majoritairement de membres du conseil d'une municipalité de même que tout organisme relevant autrement de l'autorité municipale. La loi actuelle.

La loi qui est proposée ajoute «ainsi que tout organisme dont le conseil d'administration est formé d'au moins un élu municipal désigné à ce titre et dont une municipalité ou une communauté urbaine adopte ou approuve le budget ou contribue à plus de la moitié du financement». Alors, dans le contexte où on retient «et contribue à plus de la moitié du financement», je suis d'accord avec votre raisonnement. Dans le contexte où on dit: Il y a un élu qui siège à titre d'élu, et la municipalité ne fait que recevoir, adopter ou approuver un budget sans pour autant contribuer ou, s'il contribue, d'une façon tout à fait symbolique, on indique clairement qu'on ne voit pas la pertinence, puisqu'il y a pas de contrôle, il n'y a pas, à aucuns égards, tant en termes de décision, tant en termes de financement comme tel... Alors, c'est le commentaire que j'ai fait tout à l'heure.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, M. le maire. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Pour ma compréhension, est-ce que les fonds publics seraient contribués à plus de 50 % ou à moins de 50 %?

M. Gagnon (Bernard): En fait, c'est... ça fait partie de... Il faut absolument qu'on ait un élu municipal siégeant à ce titre; la municipalité adopte ou approuve ou contribue à plus de la moitié. Donc, ça prend deux éléments, deux éléments. Alors, conseiller municipal désigné à ce titre, la municipalité approuve ou adopte ? alors, c'est un des deux mais c'est inclusif ? ou contribue à plus de la moitié. Donc, il y a seulement un «et» et deux «ou». Alors, c'est l'objet du commentaire, on se trouve à élargir énormément sans nécessité à l'intérieur, puisqu'il y a pas de contrôle décisionnel et pas de contrôle financier non plus.

M. Ouimet: Alors, je comprends. Au niveau de la question, je le sais pas si... Une recommandation nous a été faite, et j'oublie l'organisme, mais, dans la mesure où un citoyen va devant la Commission d'accès à l'information et obtient gain de cause, et la Commission d'accès à l'information oblige l'organisme public, admettons, ou la municipalité à divulguer l'information qui est demandée, dans la mesure où l'organisme, en l'occurrence la municipalité, décide d'aller en appel devant la Cour du Québec, seriez-vous d'accord à ce que ce soit la municipalité qui demande d'aller devant la Cour du Québec en révision de la décision de la Commission d'accès à l'information qui doit payer les frais?

n(16 h 50)n

La recommandation nous a été faite parce qu'il semble y avoir un certain abus de la part d'organismes. Et là je ne veux pas blâmer les municipalités mais tout organisme, des ministères qui vont systématiquement, lorsqu'ils perdent devant la Commission d'accès à l'information, tenter un recours devant la Cour du Québec en révision, ce qui fait en sorte que le citoyen ne peut pas lutter à armes égales, puisque, assez souvent, le citoyen n'arrive pas à absorber les frais d'un avocat pour aller devant la Cour du Québec pour tenter de conserver la reconnaissance que lui aurait accordée la Commission d'accès à l'information. Auriez-vous des objections à ce que nous inscrivions ce droit-là pour le citoyen dans la loi?

M. Gagnon (Bernard): Le contexte, à mon point de vue, demeure le même. Il s'agit de faire valider par une source, un tribunal, une commission, un droit qu'on préfère avoir en vertu d'une loi comme telle, et, dans un tel contexte, bien sûr on prévoit les mécanismes d'appel qui font partie de l'exercice légal auquel autant les requérants que les intimés doivent s'y soumettre, et, dans un tel contexte, faire en sorte de faire supporter à une instance plutôt qu'à une autre l'assumation de coûts ne m'apparaît répondre à une certaine logique comme telle.

M. Ouimet: Parce que, voyez-vous, lorsque le citoyen obtient gain de cause devant une première instance, la Commission d'accès à l'information, si on veut empêcher l'abus de la part d'organismes publics bien nantis qui refusent de divulguer l'information et qui vont devant la Cour du Québec, ce qui a été recommandé, je pense, par la Commission des droits de la personne ou la Commission d'accès à l'information ? j'oublie l'organisme ? c'est que les frais soient supportés par l'organisme public en question, ce qui éviterait des mesures soit dilatoires ou des mesures qui font perdre des droits au citoyen.

M. Gagnon (Bernard): Écoutez, toutes ces questions-là sont bien sûr à examiner. Il y a un élément qui est important aussi. Il ne faut pas oublier que la partie, à la toute fin, qui succombe bien sûr va supporter les frais ? je ne sais pas si c'est ces frais-là auxquels vous faites référence dans votre question. La partie qui va succomber à la fin des appels supportera les frais comme tels. Quant aux autres, bien sûr, il y a des éléments qui peuvent ou qui pourraient être envisagés à cet égard-là, de voir comment, de quelle façon, si la municipalité avait à succomber en dernière instance, par exemple... mais, si elle avait à triompher, on ne voit pas pourquoi, d'aucune façon, on devrait supporter ces frais-là.

M. Ouimet: Je vous donne un exemple, les journalistes nous disent: Des petites municipalités de la MRC de Deux-Montagnes hésitent à fournir aux journalistes les procès-verbaux du conseil municipal. Admettons qu'ils sont obligés d'aller devant la Commission d'accès à l'information, ils obtiennent accès, c'est-à-dire la Commission d'accès à l'information tranche qu'un procès-verbal, c'est un document qui est éminemment public. Prenons le scénario, ce n'est peut-être pas le meilleur exemple là, mais ç'a été vécu, parce que les journalistes nous le rapportent, prenons l'exemple où la municipalité va devant la Cour du Québec pour tenter de réviser la décision de la Commission d'accès à l'information. Voyez-vous la difficulté que ça place pour le citoyen quel qu'il soit? Là, on parle de procès-verbaux, mais ç'a pourrait être des contrats.

M. Gagnon (Bernard): Mais aussi... Juste un élément additionnel ici. Je ne suis pas un familier, mais je ne croirais pas que l'appel, dans ces questions-là et ces matières-là, est automatique. Il doit probablement être autorisé bien sûr. Alors, il n'y a pas nécessairement le fardeau dans tous les cas. Il peut y avoir des appels qui ne sont pas autorisés comme tel. Alors, pour répondre à la première partie de votre interrogation...

Le Président (M. Simard, Montmorency): S'il vous plaît!

M. Gagnon (Bernard): ...ce sont pas tous les appels qui vont donner lieu à ces possibilités-là, puisqu'elles seront pas toutes acceptées.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, M. le maire, merci beaucoup pour votre présence, merci également aux personnes qui vous accompagnaient. Je vous souhaite une belle fin de journée.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, merci de votre patience. J'appelle le Conseil interprofessionnel du Québec à se joindre à nous, M. Beaulieu. Soyez le bienvenu parmi nous, M. Beaulieu. Alors, bien que vous ayez des habitués avec vous, auriez-vous tout de même l'amabilité de nous présenter les personnes qui vous accompagnent ce soir?

Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

M. Beaulieu (Louis): Tout à fait. Alors, merci, M. le Président, Mmes et MM. les députés, M. le ministre. Alors, je suis le vice-président du Conseil interprofessionnel du Québec et je suis aussi le président de l'Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec. Je sais qu'on parle beaucoup d'orthophonie et d'audiologie, mais ce sera bien sûr pas mon propos ce soir même si nous sommes intéressés par les informations et la communication en général. Je vous présente, immédiatement à ma droite, Me André Gariépy, directeur général du Conseil...

Une voix: Gauche.

M. Beaulieu (Louis): ...à ma gauche bien sûr, et Me Raymond Doray, juriste expert auprès du Conseil interprofessionnel. Je vous remercie de nous recevoir... Excusez-moi.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...notamment.

M. Beaulieu (Louis): Pardon?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Spécialiste chez vous, mais notamment chez vous.

Une voix: Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Beaulieu (Louis): D'accord. Alors, je vous remercie de nous recevoir et de nous permettre d'échanger avec vous sur le contenu de notre mémoire. Je ne vous en ferai pas lecture en présentation cet après-midi, vous-mêmes et vos collaborateurs ont certainement eu l'occasion d'en prendre connaissance, je n'en dresserai ici que les grandes lignes.

Le Conseil interprofessionnel du Québec a été créé en 1965. Il regroupe aujourd'hui les 45 ordres professionnels régis par le Code des professions. Ces ordres comptent collectivement plus de 265 000 membres.

n(17 heures)n

Dans son rapport d'avril 1998 sur le sujet, votre commission parlementaire a identifié deux voies possibles pour l'établissement du régime applicable au système professionnel: l'assujettissement au régime du secteur public et l'assujettissement à un régime dans le Code des professions. Vous avez pu lire dans notre mémoire l'historique de nos échanges avec le gouvernement sur la question. Le gouvernement a reconnu la légitimité juridique et pratique des représentations du Conseil interprofessionnel et de l'Office des professions quant aux inconvénients qui pourraient découler d'une application sans nuance de la Loi sur l'accès aux institutions du système professionnel.

Par ailleurs, certains intervenants craignent l'effet de précédent et souhaitent préserver une cohérence par l'uniformité. Nous comprenons cette façon de concevoir la législation, mais nous sommes d'avis que les lois doivent trouver leur cohérence avant tout par rapport au domaine qu'elles entendent régir. Elles y trouveront ainsi une plus grande pertinence et une meilleure applicabilité.

Le CIQ agit comme forum d'échange et de concertation, unité de services et voix collective des ordres. Le Code des professions lui octroie un mandat d'organisme conseil auprès de l'autorité publique. Depuis huit ans, le gouvernement et les partenaires du système professionnel cherchent la formule la plus simple et la plus adéquate pour assujettir les ordres professionnels à un régime de protection des renseignements personnels. Au cours des dernières années, on a ajouté la nécessité de l'assujettissement à un régime de transparence dans l'exécution du mandat de protection du public.

Comme nous l'avons souligné en 1998, lors des auditions sur le projet de loi n° 451, les ordres professionnels souscrivent au principe de la protection des renseignements personnels et de la transparence dans l'exécution du mandat de protection du public. La question est de savoir comment seront prises en compte les particularités institutionnelles et législatives du système professionnel. C'est cette philosophie qui a admis...

Une voix: ...

M. Beaulieu (Louis): Excusez-moi. Il faut éviter qu'une loi, bien que générale et prépondérante vienne perturber de façon incidente les institutions et les objectifs d'une autre loi de portée générale. C'est cette philosophie qui a animé le Conseil dans ce dossier et qui se transpose par les quatre principes suivants: Régime particulier dans le Code des professions; distinction entre les aspects publics et privés des activités d'un ordre professionnel; préservation de l'intégrité et de l'efficacité des mécanismes de protection du public et régime simple à appliquer tant pour le public que pour les ordres.

Le projet de loi qui fait l'objet de la présente consultation indique les caractéristiques intéressantes qui, dans l'ensemble, nous rassurent au regard des principes que je viens d'énumérer. Nous savons gré de l'esprit d'ouverture des légistes, analystes et décideurs qui ont oeuvré dans le dossier avec nous. Il reste toutefois quelques points pour lesquels nous avons des représentations à vous faire, il s'agit du traitement des dossiers du syndic d'un ordre et d'un problème de succession de lois qui pourraient porter atteinte à des droits de justiciables en matière de dossiers disciplinaires. Ces questions sont de nature technique et mes collaborateurs qui ont suivi le dossier depuis quelques... plusieurs années ? je m'excuse ? sont disponibles pour fournir les éclaircissements requis.

Je vais m'arrêter ici pour nous laisser le plus de temps possible pour les échanges. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Bien, merci à vous, cher ami, pour la concision de vos propos. Je cède maintenant la parole au ministre.

M. Facal: Merci beaucoup, M. le Président. Je vous souhaite la bienvenue, messieurs, et je vous remercie pour votre contribution à nos travaux. Votre mémoire est très clair et nous allons l'examiner avec ouverture d'esprit.

Sur la question générale du type de régime d'accès qui doit encadrer les ordres professionnels, je prends acte du fait que la proposition d'un régime hybride tel que nous la mettons de l'avant vous convient moins que la proposition que vous aviez vous-même faite. Je dois vous dire en toute humilité, sans présumer de rien et sans m'appesantir, que notre point de vue est que ce qui est proposé reflète ou, à tout le moins, tente de refléter la nature particulière des ordres qui, à la fois, s'apparentent au secteur public par leur mission fondamentale de protection des intérêts du public mais que, d'un autre côté, ont aussi des aspects, par leur nature associative, corporative, qui s'apparentent au secteur privé.

Plus particulièrement, vous souhaitez également que le projet de loi contienne une disposition énonçant que le dossier d'enquête d'un syndic doit demeurer confidentiel. Je crois savoir que des entités, comme les corps policiers, comme la Sûreté du Québec, sont assujetties à des dispositions similaires à celles prévues dans le projet de loi.

Le projet de loi, par exemple, dit que les syndics pourront bien entendu refuser de transmettre leurs dossiers d'enquête en se prévalant de l'une ou l'autre des restrictions mentionnées dans le Code des professions. Dans le fond, vous seriez... vos syndics seraient placés dans la même situation que les corps policiers, que la Sûreté du Québec qui, eux, ne semblent pas plus mal se porter d'être encadrés par le genre de régime que nous proposons.

Pourquoi est-ce que vos ordres ne pourraient pas, sur cette question précise, composer, eux, avec ce que nous leur proposons si d'autres semblent s'en accommoder?

M. Beaulieu (Louis): Je vais demander...

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...

M. Beaulieu (Louis): Excusez-moi. Je vais demander à Me André Gariépy de répondre s'il vous plaît.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, Me Gariépy.

M. Gariépy (André): Bonjour.

Une voix: ...

M. Gariépy (André): Oui, bonsoir, oui.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Gariépy (André): Effectivement, quand on parle d'enquête, il y a toutes sortes de références qui peuvent se faire avec d'autres individus ou personnes qui ont des statuts particuliers pour effectuer des enquêtes.

La différence qu'on peut faire avec le corps policier est la suivante: la police peut toujours dire que le dossier est en suspens et sous enquête, l'enquête n'est pas terminée, etc. Le policier n'est pas... on ne lui indique pas, de par l'économie générale de la loi et même des dispositions très précises de la loi, qu'il doit aboutir à une décision face à l'enquête qu'il mène, ce qui fait que le policier pourra toujours invoquer les dispositions de la Loi sur l'accès, disant que «bien, l'enquête n'est pas terminée, il reste des choses à fouiller, etc.», alors que le syndic d'un ordre professionnel, depuis 1994, se voit imposer, dans le cadre de son enquête, un devoir d'information de la personne qui a demandé qu'on procède à l'enquête, un devoir d'information qui doit se marquer par des correspondances, par une communication à tous les... le premier 90 jours et par la suite à tous les 60 jours. On pourra pas garder un dossier de façon crédible comme ça pendant des années, ce que pourrait faire par ailleurs la police, et on le voit dans certains dossiers.

Ce qui fait en sorte que, pour le syndic, il est un peu dans un entonnoir décisionnel; c'est ce que lui fixe le Code des professions. Il doit conclure à un moment donné et, dès qu'il conclurait, du fait qu'il a pas toutes les informations ou pas encore toutes les informations, le dossier deviendrait disponible, alors qu'on sait très bien ? et j'ai travaillé quelques années à l'Ordre des psychologues au début des années quatre-vingt-dix ? on sait très bien qu'il y a des dossiers qui peuvent prendre beaucoup de temps et donc les témoins, les informations et, même à l'occasion d'une autre plainte, ou, par l'inspection professionnelle, par d'autres moyens, on arrive à obtenir d'autres informations qui relancent la chose.

Mais entre-temps le professionnel aura eu droit à son dossier, le dossier d'enquête du syndic, et aura su ce qui manque pour compléter la preuve et donc contournera l'objectif du système professionnel. Le syndic est dans un entonnoir décisionnel, ce que n'a pas le policier, et donc on a moins de marge de manoeuvre.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, Me Gariépy. M. le ministre.

M. Facal: Pour l'instant, ça va.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ça va? M. le député de Marquette. Pardon, M. le député de D'Arcy-McGee.

n(17 h 10)n

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Beaulieu, Me Gariépy et Me Doray, merci pour votre présentation. M. Beaulieu, je vous remercie pour le bon ouvrage que vous faites comme président d'un ordre professionnel. Me Gariépy, vous êtes toujours disponible pour les questions et les appels et on apprécie votre support.

Vous dites, dans la deuxième page de votre présentation, qu'il y a une difficulté qui vient du fait que les ordres professionnels sont de nature hybride, ni complètement publics, ni complètement privés. Et le ton que vous mentionnez dans votre mémoire fait que, si le projet de loi n° 122 reste dans sa forme actuelle, il y aurait des atteintes graves aux questions de la protection du public. Et, comme on le sait, le Code des professions ou la base de ce Code des professions mise sur la protection du public. C'est la base essentielle de notre régime, du Code des professions ou notre régime professionnel à Québec... au Québec.

Et, à la page 4, vous mentionnez que le projet de loi entend assujettir le régime au secteur public, les documents détenus par les ordres professionnels relatifs au contrôle de l'exercice de la profession et les renseignements personnels détenus pas les autres professionnels sont du secteur privé et ils ne sont pas assujettis aux provisions de ce projet de loi.

Alors, j'aimerais que vous détailliez complètement pour cette commission les menaces contre la protection du public car, pour moi, c'est essentiel. La base de notre système professionnel étant la protection du public, c'est important que vous détailliez complètement quelles seraient les difficultés en ce qui concerne la protection du public après, si ce projet de loi est adopté, et quelles seront les difficultés.

Et peut-être aussi pour expliquer à cette commission les différences entre les secteurs, les documents détenus par les autres professionnels en ce qui concerne le secteur public et le secteur privé et aussi les problèmes du syndic et les problèmes des professionnels devant le syndic pour essayer de protéger leurs clients et le fait que les professionnels, membres des ordres professionnels, qui vont comparaître devant un syndic auraient des difficultés, ou ils acquiescent au syndic ou ils essaient de protéger leur client, et ils ne sont pas totalement francs avec le syndic, même dans une audition, pour la seule et bonne raison qu'ils veulent protéger leur client.

M. Beaulieu (Louis): Je vais commencer par un commentaire bien général puis je vais demander à Me Gariépy de poursuivre. On parle abondamment du rôle du syndic, bien sûr, parce que le syndic est un officier important dans l'ordre pour la protection du public. S'assurer de conserver l'information confidentielle ? on en a parlé au dossier du syndic ? est une façon très importante de protéger le public parce que les processus... au bureau du syndic ? comment je pourrais dire? ? on pourrait souhaiter toujours que ça aille plus vite et il faut s'assurer qu'on ne viendra pas créer de difficultés à l'intérieur de ce processus-là. Il y a d'autres dimensions qui peuvent toucher aussi également les démarches d'inspection professionnelle.

Me Gariépy, voulez-vous poursuivre?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Me Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui. Alors, le premier point qu'évoquait Me Bergman, la distinction privée et publique. Je pense qu'on retrouve dans ce projet de loi les nuances, la délicatesse, et il y a un bel effort d'adaptation à la réalité institutionnelle et juridique des ordres professionnels. Je pense que, là-dessus, on comprendra que le Conseil interprofessionnel se déclare généralement satisfait.

Pour ce qui est du deuxième aspect concernant l'impact d'une loi sur les mécanismes de protection du public, on a fait, là aussi, un grand bout de chemin. De par trois lignes dans le projet de loi n° 451, on arrive avec quelque chose qui est plus adapté. Les restrictions qui sont habituellement ou actuellement contenues dans la Loi sur l'accès étaient mal conçues pour les ordres professionnels, étaient conçues en vue d'une nature politique d'organismes gouvernementaux et, nous, il était très important que l'on fasse en sorte que les mécanismes de protection du public que sont l'inspection professionnelle, le syndic et les autres mécanismes plus administratifs, qu'ils ne soient pas perturbés par l'avènement d'un régime de transparence. La transparence doit s'ajouter et doit pas venir perturber des choses. Ça s'ajoute à des mécanismes et pour l'atteinte des objectifs d'une loi. Nous considérons qu'il y a beaucoup de choses dans cette loi-là qui ont fait un grand bout de chemin pour venir apporter de la transparence, mais sans perturber l'efficacité des outils de protection du public.

Maintenant, il reste le syndic, et le syndic, là-dessus, effectivement, on a encore, comme je le disais tout à l'heure, là, des préoccupations. Parce que, vous savez, quand on fait affaire avec une question, là, contentieuse comme celle-là, qu'un syndic débarque chez un professionnel pour dire: Écoute, il y a eu un problème, je dois enquêter, il y a habituellement d'autres théâtres où cet aspect contentieux, cette insatisfaction du client face à son professionnel, il y a d'autres lieux, d'autres forums dans lesquels ça va s'exprimer, et il y a risque de perturbation croisée des différents processus, au niveau civil et au niveau disciplinaire. Le problème, c'est qu'au niveau disciplinaire, le syndic, il a le droit d'aller chercher ce qu'il veut. Le professionnel est contraignable. Alors, si on permet malheureusement un accès inapproprié à l'une des deux parties à toutes sortes d'informations que le syndic recueille de par son pouvoir qui est immense d'aller chercher de l'information, parce que le professionnel est contraignable à l'égard des documents d'information qu'il détient, eh bien, si le syndic, on peut aller chercher ces diverses informations, ça risque d'avantager indûment, en plus de pervertir le processus de l'enquête disciplinaire et l'objectif du comité de discipline et de la démarche disciplinaire.

Le syndic, non seulement il va chercher des informations chez le professionnel qui est contraignable, mais il va chercher aussi des informations à côté. Il va chercher des expertises de part et d'autre, l'expert dans le domaine: Qu'est-ce que t'en penses? J'ai tel dossier. Moi, comme syndic, ça dépasse un peu mon expertise mais comme c'est moi, le syndic, je dois prendre une décision. Je te demande de m'éclairer. Eh bien, ce personnage, cet autre professionnel membre de l'Ordre, si son expertise se voit faire l'objet d'une demande d'accès et que les restrictions ne sont pas adéquates à cet égard-là, bien, on risquerait d'avoir des petits problèmes et de nouveaux théâtres contentieux se créer entre professionnels, et là, là, la ribambelle de contentieux va s'en suivre.

Alors, il ne faut pas pervertir ce qu'est l'enquête du syndic. Il ne faut pas en arriver à ce que les professionnels résistent et que, même, les gens qui pourraient aider le syndic soient réticents à l'aider du fait que tout ce qui arrivera sur le bureau du syndic risque, en dehors d'une plainte disciplinaire, risque d'être accessible et utilisé à des fins qui sont pas prévues lors de la cueillette de ces informations-là. On parlait de fins pertinentes tout à l'heure, qui est le grand principe des diverses lois, eh bien, j'ai l'impression que là, il y a des gens qui auraient accès à des choses qui ont été recueillies pour d'autres fins et ils les utiliseraient dans un déséquilibre de prestation entre deux parties dans le cadre d'un contentieux.

M. Bergman: Vous marchez dans la même veine que le projet de loi est susceptible de créer des fausses atteintes et de jeter des confusions au sein du public, et pour mener à des litiges; c'est dans la même veine. Pouvez-vous vous expliquer?

M. Gariépy (André): ...commentaire général. Écoutez, en 1998, nous avions proposé un régime qui était beaucoup plus simple, c'est-à-dire: Voici la liste des documents accessibles, et le reste ne l'est pas. Pour tout le monde, c'est plus simple.

Mais on comprend que le gouvernement veut pas changer toute la loi d'accès pour l'ensemble du gouvernement pour le simple assujettissement des ordres professionnels. C'est la mécanique actuelle de la Loi sur l'accès de déclarer un droit général et de prévoir toutes sortes de restrictions qui peuvent être par ailleurs légitimes, mais tout ça fait en sorte qu'on s'amène dans un lieu d'interprétation où tout le monde, nourri peut-être de leurs frustrations à l'égard du dossier qui les occupe avec l'autorité gouvernementale, fait en sorte qu'il y a des crispations et que, oui, lorsqu'on a un recours, on l'utilise. Et là arrive une structure jurisprudentielle qui se construit au fil des années, et là, finalement, on... ça se complique de plus en plus. D'année en année, ça se complique et ça devient une bataille d'initiés, alors que c'était tout simplement l'exercice d'un droit démocratique pour un citoyen de surveiller son administration et surtout ses droits.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Vous mentionnez la question de délégation des pouvoirs par le président de l'Ordre et vous suggérez un amendement au projet de loi n° 122. Est-ce que vous pouvez expliquer votre raisonnement derrière cette question de délégation de pouvoirs du président de l'Ordre?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Me Gariépy.

n(17 h 20)n

M. Gariépy (André): Oui, merci. En fait, vous voyez, le syndic, c'est quelqu'un qui doit bénéficier... Je sais qu'il y a un abus de langage dans le Code des professions, on dit l'indépendance. Ça, ça s'est fait vite en 1994, cette modification-là. C'est plutôt de l'autonomie décisionnelle c'est-à-dire, dans le cadre de ses fonctions, c'est-à-dire décider ou non de faire une enquête, décider des choix de cibles et de méthodes pour ces enquêtes, décider ou non de porter plainte, décider ou non de porter ça en conciliation. Ça, c'est son travail, le syndic. Il y a une autonomie décisionnelle dans le cadre de ce travail-là. Et comme ce travail peut viser des membres de l'Ordre notamment parce qu'ils sont membres de l'Ordre, des décideurs de cet Ordre, les employeurs du syndic, donc le bureau qui nomme le syndic, bien, il fallait préserver l'autonomie décisionnelle du syndic.

Il y a la notion de confidentialité associée au travail du syndic, à l'enquête du syndic et il serait inconvenant que toutes sortes d'autorités politiques ou administratives viennent, par toutes sortes de mécanismes, à avoir l'information contenue dans les dossiers du syndic: 1° pour préserver son autonomie décisionnelle; 2° pour prévenir les pertes de confidentialité ou les atteintes à la confidentialité qu'entourent habituellement ces enquêtes-là. C'est pour ça qu'il tombe dans l'économie générale du Code des professions que, si on nomme un responsable de l'accès ? et dans les habitudes et culture de la Loi sur l'accès, le responsable de l'accès, il n'y en a qu'un, il est en haut, c'est le premier responsable ? et donc, si on transpose ça aveuglément dans le cadre du système professionnel, c'est le président de l'Ordre. Or, le président de l'Ordre, c'est une autorité politique, administrative au sein de l'Ordre. C'est aussi un membre de l'Ordre. Il pourrait faire l'objet de l'enquête d'un syndic éventuellement. Ça s'est déjà vu.

Alors, ce serait un peu inconvenant qu'un représentant administratif et politique se trouve à être celui qui, pour les fins de gérer une demande d'accès, va effectivement avoir accès aux dossiers du syndic pour voir si, effectivement, il y a lieu ou non de donner accès à tout, ou partie. Alors, ça risquerait de prêter flanc à quelques inconforts, voire quelques inconvenances dans la gestion 1uotidienne, politique, administrative et surtout disciplinaire. Alors, il est préférable de prévoir clairement que les dossiers du syndic et les demandes d'accès aux dossiers du syndic soient gérés par le syndic.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de Marquette, il vous reste approximativement deux minutes.

M. Ouimet: Deux minutes. Une question: Le Collège des médecins est venu devant nous: plaidoyer presque identique que le vôtre par rapport au fait que le rapport du syndic ne devrait pas être accessible. Le Barreau du Québec: ils ne l'ont pas évoqué mais ils ont une position quand même différente, le Barreau du Québec et le Collège des médecins par rapport aux ordres professionnels que vous représentez. Leur seule préoccupation principalement c'était d'éviter que les rapports de syndic soient soumis à la Loi sur l'accès mais, pour le reste, c'était une approche de conformité à peu près absolue alors que votre approche est quelque peu différente. Vous dites: Nous serions disposés à rendre accessibles certains documents qu'on voudrait bien identifier. Pour le reste, ça se limiterait à cela.

La question qui me vient à l'esprit: Pourquoi y a-t-il une distinction entre, par exemple, l'Ordre professionnel des psychologues et le Collège des médecins par rapport à cette orientation sur l'assujettissement de la Loi sur l'accès?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, M. Beaulieu. en moins d'une minute, s'il vous plaît.

M. Beaulieu (Louis): Oui, un commentaire très général. Tous les ordres sont représentés au sein du Conseil interprofessionnel y compris le Collège des médecins et le Barreau et tous les autres. Bien sûr, chaque ordre est aussi autonome dans ses représentations.

M. Gariépy (André): Là-dessus, je vous dirais que, en ce qui a trait au Barreau, à l'interne, au sein du Conseil interprofessionnel, il y avait un juriste du Barreau avec nous dans toutes ces discussions et le mémoire du Conseil a été adopté à l'unanimité des ordres.

M. Ouimet: ...Barreau du Québec est différent du vôtre là. L'approche est différente et le mémoire du Collège des médecins est différent du vôtre.

M. Gariépy (André): Sur certains aspects...

Le Président (M. Simard, Montmorency): En conclusion, Me Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui. Bien, sur certains aspects mais, en fait, ce qu'on comprend des autorités des deux ordres, c'est qu'ils adhèrent aux propos du Conseil. C'est des nuances qu'ils apportent sur certains aspects qui ont été ressortis dans leurs mémoires mais ça ne dit pas que ça va à l'encontre du mémoire du Conseil, loin de là. On est en contact constant avec eux, ils étaient même avec nous...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, Me Gariépy. Vous êtes bien aimable. Alors, notre temps est malheureusement complété. Alors, M. Beaulieu, Me Gariépy, Me Doray, merci beaucoup de votre présence parmi nous ce soir et au plaisir de vous retrouver.

Et j'appelle d'ores et déjà l'Institut d'histoire de l'Amérique française à venir parmi nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Montmorency): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, s'il vous plaît, à l'ordre! M. Laperrière, bienvenue parmi nous, bien heureux de vous retrouver.

Et on s'excuse mille fois, M. Laperrière, du contretemps fâcheux que nous vous avons causé. On vous a déplacé de plusieurs jours: vous deviez venir la première fois mardi, vous avez eu l'amabilité d'être des nôtres ce soir. Alors, merci encore pour votre précieuse collaboration. Auriez-vous l'amabilité de nous présenter ceux qui vous accompagnent?

Institut d'histoire
de l'Amérique française (IHAF)

M. Laperrière (Guy): Oui, certainement. C'est M. Donald Fyson qui est professeur à l'Université Laval et qui est le responsable de notre comité des archives qui a particulièrement préparé le mémoire que vous avez sous les yeux.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Très bien, alors nous vous écoutons, cher monsieur.

M. Laperrière (Guy): Alors, je suis très heureux d'être parmi vous. Je comprends la semaine agitée et complexe que vous avez eue. On va essayer de présenter le plus simplement possible notre mémoire.

L'Institut d'histoire de l'Amérique française que nous représentons a été fondée en 1947 par Lionel Groulx. C'est donc un institut qui regroupe les historiens, historiennes professionnels du Québec et du Canada français. C'est le principal organisme qui les représente et qui compte environ 900 membres.

Nous sommes très heureux d'être ici cet après-midi parce que les amendements... le projet de loi n° 122 qui est présenté maintenant est attendu depuis longtemps par les historiens. Le régime actuel qui gouverne l'accès aux documents nous crée de nombreuses difficultés et nous avions extrêmement hâte que ce projet de loi n° 122 soit présenté et que les amendements que nous souhaitons depuis longtemps puissent être apportés. Et nous souhaiterons même, puisque je vois le ministre se réjouir énormément, nous souhaitons même que des améliorations puissent y être apportées pour quand même faire plaisir à tout le monde dans cette salle.

Alors, pour vous présenter le détail de ces amendements et de ces réflexions que nous avons sur le projet de loi, je vais demander à M. Fyson qui les a travaillés abondamment et qui possède à fond la question, de vous présenter notre mémoire et d'ajouter également les quelques progrès que nous aimerions voir apportés au projet de loi.

M. Fyson (Donald): Merci, M. Laperrière. Alors, permettez-moi de commencer en vous rappelant certains des principes de base qui ont guidé l'Institut face à l'accès à l'information et à la protection des renseignements personnels.

Depuis longtemps, depuis les débuts des années 1980, nous avons toujours plaidé la nécessité de trouver un juste équilibre entre le droit de l'individu à la vie privée et le droit à la mémoire, donc le droit d'accéder aux traces laissées par les générations antérieures. Nous avons affirmé que la connaissance du passé est importante pour la collectivité, même qu'elle est essentielle à l'épanouissement de toute société libre et démocratique. L'Institut croit que le cadre législatif actuel porte atteinte à la constitution dans la mémoire collective québécoise et sous-estime notamment la contribution de la pratique professionnelle de l'histoire à cette mémoire. Il introduit des entraves sérieuses à la pratique historienne, notamment parce qu'elle ne distingue pas suffisamment entre les activités à vocation économique et les activités de recherche scientifique. De plus, pour l'Institut, la liberté d'expression est essentielle pour la réflexion critique et éthique sur le passé qui caractérise à fond le travail d'un historien. Nous croyons que les lois actuelles, en soumettant l'historien à la censure du présent, limitent trop sévèrement cette liberté d'expression scientifique et académique.

Enfin, nous avons insisté sur l'importance sociale et mémorielle des archives qui renferment des renseignements à caractère personnel, et la destruction systématique et automatique de ces renseignements, une fois atteintes les fins spécifiques visées par leur collecte, appauvrirait le patrimoine archivistique du Québec. Essentiellement, la mémoire collective serait amputée des multiples histoires individuelles qui sont à la base même de l'histoire. Voilà donc les principes de base qui ont guidé l'Institut.

Sans remettre en cause l'importance du respect de la vie privée, nous croyons donc que le cadre législatif actuel doit être ajusté pour mieux concilier le droit des individus à leur vie privée avec le droit d'une société d'accéder à son passé.

n(17 h 30)n

J'aimerais maintenant aborder sommairement nos réactions spécifiques au projet de loi n° 122, telles que présentées dans notre mémoire, qui a été préparé à l'été dernier, avec aussi quelques commentaires additionnels.

Selon nous, ce projet de loi est un pas très important vers la conciliation de ces différents droits. Dans notre mémoire, nous nous réjouissons en particulier de trois modifications qui touchent directement la pratique de l'histoire et qui sont contenues dans les articles 72, 103 et 104 du projet de loi.

La première modification est celle qui permet le transfert de documents contenant des renseignements personnels d'une entreprise à un service d'archives. Cette mesure évite ainsi la destruction automatique de ces documents tout en assurant un contrôle sur l'accès. Nous ne pouvons qu'applaudir cette modification, qui fera beaucoup pour préserver le patrimoine archivistique du Québec.

La deuxième modification est celle qui grosso modo réduit le délai d'accès à des documents contenant des renseignements personnels dans le secteur privée et dans le secteur public à 100 ans après la production d'un document ou 30 ans après le décès de la personne concernée plutôt que le 150 ans qui existe actuellement ou le régime à perpétuité qui existe dans le secteur privé. C'est un changement qui est aussi essentiel. Il place la plupart des documents provenant du secteur privé sur un même pied que ceux provenant du secteur public. Il abolit donc ce régime de confidentialité perpétuelle au privé qui était, en tout cas, souvent, très souvent contourné. Il rectifie la situation anormale qui limitait l'accès des historiens aux sources de la deuxième moitié du XIXe siècle. Enfin, il normalise la pratique québécoise avec celles d'autres juridictions, tout cela en assurant la protection de la vie privée de l'individu pour une période raisonnable. Nous devons préciser toutefois que nous voyons la proposition des 100 ans-30 ans comme étant un maximum, en particulier pour ce qui est des 30 ans après le décès. Selon nous, cela pourrait même être réduit, par exemple, à 20 ans. De plus, nous devons noter que ces délais d'accès ne s'appliquent pas à tous les documents historiques, il y a certaines exceptions.

Enfin, la troisième modification qu'on approuve est celle qui permet l'accès aux documents contenant des renseignements personnels à l'intérieur de ces délais, à l'intérieur des délais de 100 ans ou de 30 ans, pour des fins de recherche si les documents ne permettent pas de retracer des individus par leur nom et bien sûr si aussi la confidentialité est respectée par le chercheur. Ceci permet des recherches générales sur la période plus récente de l'histoire québécoise sans passer par la démarche très lourde d'une demande auprès de la Commission d'accès et encore tout en respectant le droit à la vie privée des individus. Toutefois, il y a peut-être quelques petits problèmes potentiels dans la mise en application de cette règle, notamment la définition précise de la structuration nominative. De plus, il est évident que cette mesure ne facilite pas vraiment la recherche biographique sur les personnages historiques récents.

Dans l'ensemble, donc, nous appuyons ces trois changements positifs, qui aideront à réduire les incertitudes de la recherche historique et à assurer la préservation du patrimoine archivistique du Québec. Nous reconnaissons toutefois qu'ils pourraient être raffinés davantage. En dépit de ces modifications substantielles et importantes, dans notre mémoire, nous souhaitons aussi d'autres modifications aux lois concernant l'accès à l'information et la protection de la vie privée, car il y a plusieurs inconvénients qui persistent et qui pourraient nuire à la pratique critique de l'histoire du Québec. Dans notre mémoire, nous en avons soulevé trois que je reprendrai très rapidement ici.

D'abord, nous réclamons encore, comme nous l'avons fait depuis longtemps, une reconnaissance explicite et élargie du statut spécial des activités de nature scientifique, artistique ou littéraire. D'une part, dans le cadre de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, nous cherchons les mêmes dérogations que les journalistes par rapport à la collecte des données sur des personnages historiques, par exemple le droit de constituer un dossier sur un personnage historique sans son consentement ? ce qui est bien sûr impossible si cette personne est morte ? et le droit de communiquer cette information par la publication.

C'est dans ce sens que nous proposons une modification du premier article de la loi pour placer les historiens et autres chercheurs sur le même pied que les journalistes, toujours bien sûr dans les limites des autres mesures pour le respect de la vie privée et la réputation. Sans cette autorisation, la recherche biographique en particulier devient très difficile pour l'historien qui est soucieux de respecter la loi, même si ça se fait quand même. D'autre part, nous souhaitons aussi qu'il soit explicitement permis aux entreprises d'envisager de préserver leurs propres bases documentaires contenant des renseignements personnels pour une utilisation ultérieure à des fins historiques, statistiques ou scientifiques, ce qui ne serait qu'une extension logique de leur droit de les transférer déjà à des centres d'archives et aussi une reconnaissance de la valeur sociale et mémorielle plus large de ces documents, au-delà de leur utilité ponctuelle pour l'organisme. Ces changements, je dois le souligner, sont inspirés par le cadre législatif d'autres juridictions notamment en Europe et au niveau fédéral, et nous semblent encore bien équilibrer le droit à la vie privée et le droit à l'histoire.

Par ailleurs, dans la foulée des réflexions récentes sur le patrimoine, qui sont vraiment fréquentes au Québec de nos jours, et notamment dans le cadre des travaux du groupe conseil Arpin, notre mémoire recommande d'harmoniser les législations sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels avec celles sur le patrimoine. D'ailleurs, cette harmonisation de législation est l'une des recommandations du rapport Arpin publié l'automne dernier. Donc, nous invitons le gouvernement à donner suite à cette recommandation.

Un exemple d'harmonisation pourrait être des modalités d'accès plus souples à des fonds d'archives jugés d'une valeur patrimoniale importante et qui contiennent accessoirement des renseignements personnels, ou encore une souplesse accrue dans l'application du droit à la vie privée, par rapport aux images, dans le cadre d'expositions de mise en valeur patrimoniale qui utilisent des images provenant, par exemple, du XXe siècle.

Enfin, dans le contexte de la révision des lois concernant l'accès à l'information et la protection de la vie privée, nous demandons une clarification de la portée de la disposition du Code civil qui concerne la transmissibilité du droit à la vie privée aux héritiers, dans l'article 35 du Code. Les effets du Code civil sur les recherches et la communication historiques ne sont pas clairs. Certains historiens et généalogistes dans les médias, entre autres, ont souvent soulevé la crainte d'un droit de regard perpétuel des descendants d'un personnage historique. Par contre, certains juristes affirment que le droit à la vie privée est transmis uniquement aux héritiers immédiats et donc d'une durée limitée.

La Commission d'accès à l'information elle-même semble incertaine à ce sujet car, dans son rapport quinquennal de 1997, elle évoquait la possibilité de la transmissibilité de ce droit aux descendants et pas juste aux héritiers. Mise à part la définition précise d'héritiers, qu'en est-il des héritiers qui sont des personnes morales, dont le droit de regard pourrait être quasi perpétuel? Pensons, par exemple, à un ordre religieux qui pourrait bloquer à perpétuité la publication de documents concernant une personne qui a fait de l'ordre son héritier. Ou, sur un autre plan, il serait très difficile, voire même impossible, d'écrire la biographie d'un personnage historique qui avait doté un hôpital, un collège, etc., comme légataire universel sans obtenir l'assentiment de cette institution. Est-ce cela que visait le législateur? Est-ce que la jurisprudence actuelle, qui semble être en grande partie française, accorde suffisamment de protection aux chercheurs québécois?

Ce sont des questions qui restent en suspens dans l'absence de décision des tribunaux québécois. Sans remettre en cause l'article 35, nous demandons simplement une réflexion sur comment tout cela pourrait être clarifié, peut-être par un avis de la part de la Commission d'accès à l'information.

Pour conclure, j'aimerais vous laisser avec cette affirmation fondamentale: Le droit à l'oubli ne doit pas primer sur le droit à la mémoire. Toutes les propositions que nous faisons dans notre mémoire s'orientent en ce sens. Si le droit à la vie privée des individus est essentiel, il ne devrait pas mener à la destruction irrévocable des traces du présent qui, au fil des ans, devient le passé. Et le plus qu'on remonte dans le temps, le plus le droit à la mémoire doit être pris en compte. Une application stricte des standards appropriés pour la protection à la vie privée aujourd'hui à un passé de plus en plus lointain n'est pas souhaitable.

Ce projet de loi est un pas important vers la conciliation de ces différents droits, et nous pensons qu'il aurait des retombées très positives non seulement pour la pratique professionnelle de l'histoire, mais aussi pour toutes les activités de nature historique et patrimoniale, mais ce n'est qu'un pas. Le projet de loi peut être bonifié, et nous espérons aussi voir la poursuite de cette reconnaissance législative de l'importance des activités historiques et patrimoniales pour la société québécoise.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Eh bien, M. Fyson, M. Laperrière, merci beaucoup pour la concision de vos propos. Je demanderais d'ores et déjà le consentement pour que nous puissions dépasser 18 heures, pour que nous puissions prendre chacun 15 minutes. Il y a pas consentement?

M. Facal: M. le Président, de ce côté-ci, nous n'allons pas utiliser...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ah bon! Très bien.

M. Facal: ...la totalité du temps qui nous est imparti. Et, quand vous me donnerez la parole, vous comprendrez pourquoi.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, voilà, très bien. Donc, M. le ministre, à vous la parole.

n(17 h 40)n

M. Facal: Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie pour votre contribution à nos travaux. C'est votre troisième visite en commission parlementaire sur ce chantier, je comprends donc que vous ayez, je vous cite, «extrêmement hâte que cet exercice aboutisse». Vous appuyez quasiment dans sa totalité le projet de loi n° 122; vous nous faites donc finir en beauté. Je prends bonne note, cela dit, parce que je ne suis pas complaisant, du fait qu'il est encore perfectible sur certains points.

En fait ? M. le Président, vous allez comprendre ? votre position est à peu près identique à celle des archivistes et des généalogistes. Il est clair que, dans cette commission, tous ceux dont le dénominateur commun est la recherche historique et patrimoniale sont exactement sur la même longueur d'ondes. Vous appuyez le transfert des documents des services d'archives plutôt que leur destruction, vous appuyez le raccourcissement du délai de 150 ans à 100 ans. En revanche, ici, vous êtes dans le camp des éditeurs, vous me demandez de faire en sorte que la loi sur le secteur privé ne s'applique pas à la collecte, détention, utilisation ou communication à des fins d'expressions scientifique, artistique ou littéraire, et vous évoquez à cet égard-là le cas de la biographie.

Ce que je peux vous dire, c'est que nous allons examiner cela tout en gardant cependant présent à l'esprit que, dans l'état actuel de nos lois, dans le cas, par exemple, d'une biographie rédigée sans le consentement de la personne, dans l'état actuel de nos droits, nous aurions un écueil de taille, qui est tout simplement la Charte des droits et libertés du Québec. Donc, c'est une question qui semble anodine mais qui, en fait, pose un vaste... ouvre un vaste chantier de réflexion éthique, que je voudrais pas que vous minimisiez.

Pour le reste, je salue ce mémoire qui est absolument rafraîchissant, et soyez assurés que tout ce qui va dans le sens d'une facilitation du travail historique trouve en moi une oreille sympathique. Je ne voudrais pas être mal compris, mais tous ces débats-là sont souvent très, très juridiques. Moi, je ne suis pas avocat et je me sens en communion d'esprit avec mes frères issus des sciences humaines et sociales.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Désolé du contretemps, de ce côté-ci, nous aurions grandement préféré vous accueillir au mois d'août où là on aurait eu tout le temps et tout le loisir de vous entendre, et le ministre aurait pu prendre tout son temps également, mais malheureusement...

Une voix: ...

M. Ouimet: ...mais malheureusement, malheureusement, le ministre a dû écourter ses questions. Je vous pose quelques questions par rapport à la page 20, au bas de la page, lorsque vous faites un lien entre le droit à la vie privée et une personne qui décède. Vous dites: «Cela découle de l'extension du droit à la vie privée non seulement à une personne, mais aussi à ses héritiers.» Et là vous ne souhaitez pas lancer un débat à cet égard-là, mais les thanatologues sont venus devant nous hier et ils ont à peu près le même problème que vous avez, c'est-à-dire que, dès le moment où la personne décède, on se pose la question: Qui a le droit d'avoir accès à son dossier?

Vous souhaitez avoir accès au dossier d'une personne qui meurt, pour des fins historiques, pour des fins de l'histoire; les thanatologues, eux, c'est pour les fins d'obtenir des renseignements de nature financière pour pouvoir mettre à la disposition de la famille éprouvée les informations en relation avec la Régie des rentes du Québec, à savoir est-ce que le défunt aurait droit aux frais d'un service funèbre aux frais de l'État. C'est quand même intéressant, là. Je ne voulais pas faire un parallèle entre les historiens et les thanatologues, mais, je veux dire, le même problème se pose. Et, lorsque vous dites de lancer un débat, il n'y a pas que les sociétés d'histoire qui seraient préoccupées par cela, il y a les thanatologues également hier pour tout à fait d'autres raisons.

Mais vous soulevez une question fort intéressante parce que, lorsque la personne meurt, son droit d'accéder à son propre dossier meurt avec elle. Qui devient l'héritier de ce droit? Est-ce que c'est un droit qui est transmissible?

M. Fyson (Donald): Pour répondre... Deux éléments d'abord. Je pense qu'il faut distinguer entre le droit d'accès à un dossier et le droit de protéger la vie privée d'une personne, c'est-à-dire que... Moi, je ne suis pas juriste du tout, comme ça a été bien indiqué, mais il me semble que la protection dans la question d'accès aux dossiers, les héritiers même sont spécifiquement exclus, sauf dans le cas où ça touche leurs intérêts directement.

Ici, ce que nous soulevons ici, c'est plutôt le droit plus général à la vie privée où, par exemple, quelqu'un pourrait dire: Vous ne pouvez pas avoir accès à des documents d'archives concernant une personne, vous ne pourrez pas publier une biographie sur une personne, on va vous empêcher. Un peu comme c'était dans le plaidoyer, pas dans le jugement, mais le plaidoyer bien sûr de l'affaire Turgeon où la question était: Les héritiers de la personne pouvaient empêcher la publication de la biographie pour défendre la vie privée.

Pour nous, on ne voulait pas rentrer dans cette question: Est-ce que ça devrait être transmissible aux héritiers? Parce que là-dedans, il y a toutes sortes de questions: C'est quoi, un héritier; est-ce qu'un descendant, c'est un héritier, etc.? Pour nous, c'était de voir plutôt: Est-ce que ça arrête au niveau des héritiers directs ou est-ce que ça va plus loin? Parce que plusieurs historiens ont dit: Bon, pour faire une biographie sur Frontenac, il va falloir aller retracer tous les descendants de Frontenac. Bon. Gil Rémillard bien sûr a dit: Non, pas du tout, c'est les héritiers directs ou plutôt immédiats qui comptent, mais, comme on soulève... comme j'ai soulevé dans ma présentation, qu'est-ce qui se passe dans le cas d'un héritier qui est une personne morale? Ça arrive assez fréquemment que des personnes vont faire d'un ordre religieux ou un hôpital ou quelque chose, leur légataire universel. Et, dans ce cas-là, le droit de regard, le droit de protéger la vie privée de cette personne-là pourrait s'étendre à perpétuité.

Donc, pour nous, on n'a pas de réponse vraiment. Bien, on aimerait quand même que ça soit soulevé, qu'il y ait une réflexion amorcée auprès du gouvernement, peut-être dans la Commission d'accès, sur cette question, parce que, tel que rédigé, cet article, et la définition d'héritier, est tellement imprécis pour nous que nous avons de la difficulté à voir quels seront ses effets sur la recherche historique. Et le problème se pose, en particulier, quand, par exemple, un archiviste vient et dit: Bon, vous devez consulter les héritiers pour avoir accès à ce dossier, parce que c'est pas vraiment les poursuites judiciaires qui nous concernent, c'est l'accès aux documents qui est contrôlé, par exemple, par les archivistes. Alors, voilà quelques éléments de réponse.

M. Ouimet: On constate, dans le projet de loi n° 122, qu'on modifie le Code civil du Québec, mais, j'imagine, c'est pas une modification de fond, une modification de fond relèverait du ministre de la Justice. Dans les lois qui sont modifiées par le projet de loi n° 122, on y retrouve en premier lieu le Code civil du Québec, et je pense qu'on retrouve la modification à l'article 119, l'alinéa 8°: L'article 542 du Code civil du Québec est modifié. Le mot «nominatif» ou «nominatifs» est remplacé par le mot «personnel» ou «personnels».

Ça m'apparaît pas être une modification de fond, parce que j'allais vous proposer, si le gouvernement donne suite à votre recommandation à la page 22, que d'engager une réflexion sur la meilleure manière de clarifier la portée de la transmissibilité du droit à la vie privée aux héritiers d'une personne, ça nous permettrait peut-être de vous réinviter à l'automne ou, à tout le moins, de recevoir vos commentaires, mais là je ne sais pas si le ministre a l'intention d'engager une réflexion, tel que c'est recommandé par les gens qui sont devant nous, pour revenir à l'automne et peut-être d'apporter des précisions eu égard à l'article 35 du Code civil.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Je comprends que c'est une réflexion générale. C'est ça.

M. Ouimet: Nos invités sont ici.

Le Président (M. Simard, Montmorency): C'est une réflexion générale. Je crois...

M. Facal: Je m'exprimerai là-dessus au moment des remarques finales. Si nous avions pu les faire aujourd'hui, j'aurais pu vous donner un préavis de réponse.

Le Président (M. Simard, Montmorency): S'il vous plaît, M. le ministre. Oui, mais, à l'ordre, M. le ministre! Là, on en est dans le temps de M. le député. M. le député de Marquette, je vous prie de continuer vos réflexions à voix haute, quoi. Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Écoutez, non, ça va. Ça répond à l'ensemble de nos questions. Nous prenons acte de l'appui que vous accordez au projet de loi n° 122 par rapport aux fins et à vos intérêts, mais je vous signale que, sur les 43 organismes, vous faites partie de la minorité et non pas de la majorité. Il y a plusieurs lacunes qui ont été identifiées. Le ministre a un énorme travail à faire, et on verra à quel moment il aboutira.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. Fyson.

M. Fyson (Donald): Je n'aimerais pas nécessairement partir avec l'impression qu'on appuie à 100 % tout le projet. On a quand même fait certaines recommandations de modification et de précision. Donc, j'aimerais quand même que ce soit clair: on pense que ce sera peut-être bonifié. Donc, on l'appuie, parce qu'on trouve que c'est un bon pas, mais on pourrait faire mieux, et il y a d'autres choses qu'on pourrait suggérer aussi.

M. Ouimet: Je suis heureux de vous l'entendre dire. Merci.

n(17 h 50)n

Le Président (M. Simard, Montmorency): Eh bien, alors, chers messieurs, merci beaucoup de votre présence parmi ce soir. Cela donc vient mettre fin à l'ensemble de nos consultations, et je tiendrais à remercier... la collaboration de tous les membres de cette commission. Bien sûr, il nous reste la dernière étape, celle des remarques préliminaires...

Une voix: Finales.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...des remarques finales, oui ? Ha, ha, ha! Je ne voudrais pas reprendre tout le processus au départ ? que nous tenterons, autant que faire se peut, de faire mardi ou mercredi. En tout cas, autant que faire se peut, moi, je... Vous savez que la collaboration des deux leaders des deux côtés est toujours appréciable dans...

Une voix: ...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Pardon!

Une voix: ...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ha, ha, ha! Mais, enfin donc, autant que faire se peut, là, on fait notre maximum pour faire ces remarques finales la semaine prochaine, évidemment si c'est possible. Merci beaucoup et bonne fin de soirée.

Une voix: Au Conseil national.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Simard, Montmorency): Et, chers amis, j'ajourne donc nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 51)



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