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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 26 septembre 2001 - Vol. 37 N° 17

Auditions sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Société du Grand Théâtre de Québec dans le cadre du mandat de surveillance des organismes publics


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Simard, Montmorency): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je constate que nous avons un quorum, et vous me permettrez donc de déclarer cette séance de travail officiellement ouverte. Notre mandat aujourd'hui est donc de compléter les auditions publiques dans le cadre du mandat de surveillance d'organismes sur la Place des Arts de Montréal et le Grand Théâtre de Québec.

Auditions

Nous débuterons ces audiences par... en écoutant les représentants des Grands Ballets canadiens. Alors, madame, monsieur, bienvenue parmi nous. Auriez-vous l'amabilité de vous présenter?

Les Grands Ballets canadiens
de Montréal

Mme Pathy (Constance V.): Merci bien, merci. Mmes, MM. membres de la commission de la culture, tout d'abord, je tiens à vous remercier de l'invitation de se présenter ici ce matin, et déposer notre mémoire devant votre commission.

La première page de notre mémoire essaie d'écrire le développement artistique de la compagnie qui est fondée en 1958 par Ludmilla Chiriaeff. Par la suite, quand elle a laissé la direction artistique, j'aimerais souligner le travail de Fernand Nault, bien connu de vous autres et le créateur de Casse-Noisettes, de Carmina Burana et Tommy, entre autres.

Le directeur artistique actuel, c'est Gradimir Pankov qui est entré dans sa fonction, il y a deux ans. Deux années passées, il a ouvert la saison avec le spectacle de Carmen qui était un très, très beau succès, et cette année s'ouvre avec le premier ballet intégral depuis Casse-noisettes; c'est La dame de pique. Alors, j'ai le plaisir de vous inviter à la première qui a lieu le 18 octobre prochain.

Alors, les Grands Ballets canadiens de Montréal se classent parmi les plus grandes compagnies de ballet, en Amérique du Nord. Et, s'il y en a un parmi vous qui pose la question là-dessus, vous n'avez qu'à vous renseigner auprès du premier ministre Bernard Landry, qui a dernièrement vu la compagnie à quelques reprises, et qui ne cesse pas de s'exprimer dans les termes les plus élogieux.

Constituée de 35 danseurs salariés engagés annuellement pour une période de 40 semaines, la compagnie présente 80 spectacles par an dont la moitié à la Place des Arts, dans la salle Wilfrid-Pelletier, et le théâtre Maisonneuve. Je dois souligner ici que Casse-noisettes peut seulement être présenté à la salle Wilfrid-Pelletier; il n'y a pas une autre salle dans la région de Montréal qui peut l'accommoder. Alors, ça veut dire, comme c'est notre gagne-pain, que la Place des Arts est de grande importance pour nous.

Les tournées au Québec, au Canada et sur la scène internationale constituent de facto une part importante de son activité. Les Grands Ballets canadiens de Montréal sont ainsi, pour le Québec, des ambassadeurs de premier plan. La compagnie, par ailleurs, est fortement ancrée auprès de sa communauté par ses spectacles gratuits annuels au Théâtre de la Verdure du parc Lafontaine, par ses matinées éducatives dédiées aux écoles primaires et secondaires et par ses projets développés de concert avec les organismes ethnoculturels, associatifs et caritatifs de la région de Montréal.

Un autre volet de nos activités, les Grands Ballets canadiens de Montréal se caractérisent également par leurs activités de diffusion. En effet, la compagnie est la seule compagnie de ballet au monde à diffuser, de manière systématique et structurée depuis 1997, les plus grandes compagnies de ballet internationales.

Les Grands Ballets canadiens de Montréal attirent plus de 120 000 personnes par saison dont 36 000 pour les spectacles de Casse-noisettes. Le budget annuel de la compagnie est d'autour de 8 millions. Depuis 1996, le déficit accumulé de la compagnie fut entièrement éradiqué. Cependant, l'année financière 2000-2001 s'est soldée par un déficit d'opération représentant une partie des pertes encourues par la compagnie engendrées par le conflit de travail entre la Place des Arts et IATSE. Entre parenthèses, je dois souligner que la plupart des théâtres nord-américains sont accrédités IATSE.

n (9 h 40) n

La Place des Arts occupe une place prépondérante au sein de la vie culturelle au Québec, autant au plan de la vision originelle qui a engendré sa création qu'au niveau de son envergure physique, sa localisation et la nature de son financement. Cette société d'État se doit ainsi de refléter la société québécoise dans ses valeurs et ses ambitions. Plus encore, elle se doit de traduire une raison d'être de la culture au Québec, d'en favoriser son appréciation et son rayonnement, et de contribuer à sa juste mesure au soutien des artistes. Elle doit ainsi jouer un rôle de chef de file sur les scènes culturelles au Québec, au Canada et au plan international.

Aussi, dans ce contexte, on comprend donc que les liens entre cette société d'État et les grandes institutions du Québec, tels Les Grands Ballets canadiens de Montréal, doivent être étroits et complices dans l'accomplissement d'une mission au service des arts et des artistes. Ce qui est reflété dans l'article 20 de la Loi sur la Société de la Place des Arts, et je cite: «Ces activités ont particulièrement pour but de procurer un lieu de résidence aux organismes majeurs, de favoriser l'accessibilité aux diverses formes d'art de la scène et de promouvoir la vie artistique et culturelle au Québec.»

La culture, au même titre que les autres secteurs d'activité, est un domaine dans lequel le Québec peut s'illustrer et briller par son originalité, sa créativité et son dynamisme. L'importance que le Québec accorde au domaine des arts et le foisonnement des activités culturelles sont bien connus. Nous pouvons cependant aller plus loin afin d'assurer que la culture soit un des fers de lance d'un processus identitaire qui nous caractérise, et nous distingue, et valorise sur la scène québécoise, canadienne et internationale. Le soutien à la création est ainsi fondamental.

La création est la voie royale idoine pour les artistes comme pour une société en quête d'une expression originale et distinctive. Même si la création est, administrativement parlant, la responsabilité du Conseil des arts et des lettres du Québec pour les arts de la scène, elle doit faire l'objet d'un ralliement de toutes les forces actives de notre communauté afin de soutenir, susciter et encourager toute initiative en la matière. En quelque sorte, nous devons promouvoir une manière de faire où la création sera en ébullition constante.

Au-delà d'une image forte et distinctive que ce soutien conférerait au Québec, il est aussi évident que ce soutien contribuerait à rehausser notre compétitivité aux plans canadien et international. Il n'est pas anodin de remarquer que le Centre national des arts à Ottawa et le Centre Banff en Alberta coproduisent des créations de l'ensemble du Canada et du Québec, et dans certains cas, au niveau international, alors que la Place des Arts a mis fin à cette pratique depuis plusieurs années, pour des raisons budgétaires.

Alors, Les Grands Ballets canadiens de Montréal recommande que la Place des Arts coproduise les créations avec les compagnies résidentes, et inscrive cet objectif en priorité à son plan d'affaires, tel que prévu dans la loi, et je cite: «La Société de la Place des Arts peut, notamment pour la réalisation de ces objets, produire, coproduire ou accueillir des oeuvres artistiques du Québec et de l'étranger.»

La globalité des marchés est une réalité qui touche également le monde culturel. Elle engendre de multiples opportunités de renforcer le leadership du Québec en matière d'échanges et de liens de réciprocité entre les institutions, les compagnies et les artistes du monde entier. Comme exemple, Les Grands Ballets canadiens de Montréal sont actuellement l'unique compagnie de ballet au monde qui diffuse, au sein même de leur saison à Montréal, d'autres compagnies internationales de ballet de grande envergure, virage stratégique que la compagnie a amorcé, il y a quatre ans. Alors, on cherche de répandre les horizons de notre public, sachant en même temps que Les Grands Ballets sont à la hauteur eux-mêmes.

Alors, notre recommandation, c'est que la Place des Arts codiffuse et cofinance les activités de diffusion des Grands Ballets canadiens de Montréal pour accueillir des compagnies inédites de grande envergure, par exemple, le Ballet de l'Opéra de Paris et tel que prévu dans la loi.

La promotion de la vie culturelle et artistique au Québec ne peut se dissocier de l'importance de développer le sentiment d'appartenance des Québécois envers nos institutions. Ce sentiment d'appartenance est fondamental si nous cherchons à accroître la consommation des produits culturels, mais aussi à renforcer la fierté associée à nos réalisations culturelles auprès des différentes couches de notre société. Un effort important doit se porter sur les milieux ethnoculturels, principalement à Montréal, afin de valoriser leur apport, et favoriser leur participation active.

Et nous recommandons que la Place des Arts incorpore au sein de son plan d'affaires les stratégies des compagnies résidentes dans ce domaine pour élaborer un plan d'action soutenu et cohérent; que la Place des Arts crée une structure de communication étroite avec les compagnies résidentes. En effet, on ne veut pas seulement être locataire, on cherche un partenariat avec la Place des Arts, au service des arts.

Je cite, de la Loi sur la Place des Arts: «La Société de la Place des Arts peut notamment, pour la réalisation de ses objets, organiser des activités visant la sensibilisation et l'accroissement du public, et deuxièmement, former un comité consultatif composé d'organismes artistiques résidents et tout autre comité consultatif qu'elle juge nécessaire.»

Il est clair que cette vision nécessite un apport, une continuité et une stabilité des ressources humaines et financières, en vue de sa réalisation.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Mme la présidente, je voulais simplement vous souligner qu'il vous reste trois minutes, donc... même moins de trois minutes. Si vous voulez peut-être commencer à...

Mme Pathy (Constance V.): Bon.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...penser à l'atterrissage.

Mme Pathy (Constance V.): Alors, la paix sociale avec les organisations syndicales à l'interne est une condition sine qua non. Alors, tout le monde doit se réunir au service de l'avancement des arts et du soutien aux artistes, prenant en considération l'environnement économique spécifique dans lequel nous évoluons.

Alors, vous pouvez lire vous-mêmes ce que le conflit à la Place des Arts et l'Union ont fait à notre activité. On a annulé deux saisons, et... alors, je vous laisse lire à votre aise. Le bilan à court terme est lourd et significatif.

La conclusion, c'est que le Québec s'est taillé une place importante dans le monde culturel international par l'envergure de ses artistes et de ses institutions. Les compagnies résidentes et les sociétés d'État constituent la vitrine principale du Québec, qui se doit d'être étincelante de mille feux. Il est temps que nous nous donnions mutuellement les moyens de réaliser nos ambitions, et de faire partager la passion des arts auprès de nos concitoyens.

En bref et plus concrètement, on doit mettre fin à l'insécurité créée par le conflit entre la Place des Arts et l'Union aussitôt que possible, et accorder à la Place des Arts les outils et le financement nécessaires pour qu'elle puisse vraiment remplir son mandat.

Un dernier point. Suite aux événements du 11 septembre à New York, la situation des organismes culturels devient encore plus fragile. Les corporations ? nos commanditaires ? coupent des postes, font démissionner leur personnel. Le monde artistique, le milieu des arts et tous ses intervenants doivent s'unifier et s'entraider, et ça, aujourd'hui même. Alors, je vous remercie de votre attention et l'attention que vous porterez à notre mémoire. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci à vous, Mme la présidente. Alors, je cède la parole au député de Frontenac.

M. Boulianne: Alors, merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme la présidente et M. le directeur général, à cette commission. Je veux vous féliciter aussi, en profiter pour vous féliciter pour la qualité de vos oeuvres, je pense, vos spectacles. C'est connu, il y a pas juste le premier ministre; plusieurs autres aussi sont d'accord, à ce chapitre-là.

Je voudrais revenir sur le rôle... Vous parlez du rôle de la Place des Arts évidemment et du Grand Théâtre. Ces institutions ont un rôle à jouer au niveau du développement des arts de la scène et aussi par rapport à votre discipline très spécifique. Alors, de quelle façon, comment évaluez-vous le rôle actuellement de ces institutions face au développement général des arts et face à votre discipline?

n(9 h 50)n

Mme Pathy (Constance V.): Alors, je vais commencer, et laisser la parole à M. Dancyger, après.

Alors, dans la Loi sur la Place des Arts, c'est bien évident qu'on a envisagé un rôle qui est beaucoup plus important que le rôle que la Place des Arts joue à ce moment. Alors, on a pensé à un centre culturel qui développe et pousse, qui est le moteur du milieu des arts à Montréal. Et, malheureusement, la Place des Arts est devenue en effet un loueur de salles, et on aimerait... je m'excuse, M. Richard, mais... Alors, en effet, on aimerait voir que la vision originale réentre dans le rôle de la Place des Arts. Est-ce que tu as quelque chose à ajouter?

M. Dancyger (Alain): Non, pas vraiment. Je pense que, effectivement, la Place des Arts a le potentiel légalement à travers son mandat et légalement... Malheureusement, je pense qu'il manque certains moyens, notamment financiers, mais également au niveau des ressources humaines.

La Place des Arts a le potentiel de jouer son véritable rôle de chef de file, et ce qu'on recherche avant tout ? je pense que c'est une volonté commune ? c'est de développer un véritable partenariat étroit qui va nous permettre de réaliser nos ambitions, et de faire tout ça au service des arts et de la culture. Mais, pour ça évidemment, il faut que la Place des Arts bénéficie de moyens. Et, d'ailleurs, je pense qu'il y a quelques années la Place des Arts était producteur, avec les forces et faiblesses justement de supporter la création. Mais je pense qu'il est temps maintenant de se donner ensemble les moyens pour soutenir la création, en particulier.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Mais, actuellement, la Place des Arts offre des services à votre organisme artistique?

M. Dancyger (Alain): Oui. Ce sont, je dirais, plutôt des services de locateur de salles, particulièrement. Mais, ce qu'on recherche avant tout, c'est un véritable partenariat où on va pouvoir, par exemple, mettre en commun nos stratégies d'affaires réciproquement, identifier des pistes, des opportunités d'avenir, et ensemble, construire un ensemble de... mettre en place un ensemble de stratégies qui vont vraiment faire rayonner les arts d'une manière plus dynamique.

M. Boulianne: Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Bienvenue. M. le député d'Iberville.

M. Bergeron: Merci, M. le Président. Bienvenue à cette commission. C'est un peu à la suite des réponses que vous avez données. Vos deux premières recommandations, vous demandez que la Place des Arts coproduise, ensuite, codiffuse et cofinance.

Dans un premier temps, j'aimerais vous demander: Est-ce que vous avez des exemples à travers le monde où l'institution qui accueille des compagnies résidentes telle la vôtre fournit de tels partenariats?

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. Dancyger.

M. Dancyger (Alain): Je pense qu'il y a certains organismes, bon, notamment le Centre national des arts et Banff qui, au niveau de la création, vont coproduire des créations avec différentes entreprises culturelles. De par le monde... évidemment, là, on rentre dans les différents modèles de financement des différents organismes. Donc, vous savez qu'en Europe les arts sont principalement financés par le gouvernement. Donc, en fait, la structure n'est pas véritablement comparable. Mais, si on reste, je dirais, dans l'environnement dans lequel on est capable de faire des comparaisons, notamment en Amérique du Nord, je dirais certains exemples, notamment au niveau du cofinancement des créations, qu'on peut nommer effectivement.

M. Bergeron: Vous recevez... je lisais que vous recevez 39 % de votre budget en subventions; donc, vous recevez une part importante. Est-ce que c'est assez? Vous aimeriez en avoir plus?

Mme Pathy (Constance V.): Est-ce que vous blaguez? Ha, ha, ha!

M. Bergeron: Ha, ha, ha! J'imagine que votre réponse est suffisamment éloquente.

Ma dernière question, c'est le conflit de travail. Vous avez parlé des répercussions avec le syndicat. J'aimerais que vous me détailliez un peu ce que vous vivez. Donc, hier, le président... le directeur général de Place des Arts est venu dire que tout n'est pas rose à la Place des Arts, et je présume que, pour vous, tout n'est pas rose, comme Grands Ballets canadiens.

J'aimerais que vous soyez explicites, face à la situation. Et vous avez parlé de spectacles annulés; vous avez eu un manque à gagner qui a été partiellement comblé par le CALQ. Vous avez eu 160 000 $ de manque à gagner, dont près de 500 000 ont été compensés par le CALQ.

Mais, dans le quotidien, là, qu'est-ce que c'est que d'être une compagnie résidente, comme les Grands Ballets à la Place des Arts, et de vivre la situation, de façon assez succincte, madame?

Mme Pathy (Constance V.): Alors, ce conflit de travail perdure deux ans, et on a vécu plusieurs étapes de ce conflit. Alors, au début, on a dû annuler des spectacles; on a dû déplacer des spectacles avec des pertes énormes. Maintenant, on est dans une situation d'un compromis, disons. Alors, l'union fonctionne à la Place des Arts, et à ce moment même, on ne subit pas des inconvénients énormes, sauf qu'il y a toujours l'insécurité et l'incertitude de ce qui va se passer. Alors, d'une minute à l'autre, l'Union pourrait dire: Alors, on ne revient pas à la Place des Arts. Et qu'est-ce que nous faisons, à ce moment même?

Alors, comme le temps de Casse-Noisette s'approche, alors... et c'est arrivé il y a deux ans, quand il y avait la menace que la Place des Arts se fermerait. Alors, qu'est-ce qu'on fait avec le Casse-Noisette qui ne peut, comme je viens de dire, qui ne peut pas être accommodé ailleurs, qui est notre gagne-pain, qui veille... manger les danseurs à l'année longue? Alors, c'est un désastre, et en effet, ça sera... ça aura comme résultat que les Grands Ballets se ferme.

Alors, c'est ça, ma réponse. Est-ce que tu veux... Alain?

M. Dancyger (Alain): Oui, j'irai par un... La vie de tous les jours pendant la durée du conflit était, pour résumer, l'enfer en fait, aussi bien au niveau de l'impact humain, au niveau du personnel, l'impact financier, donc comme vous le voyez, mais surtout, c'est cette insécurité. Et l'impact qui se fait à tous niveaux, je vous donne juste un exemple, essayer de relocaliser le spectacle Giselle au Théâtre Denise-Pelletier, avec l'orchestre derrière les décors qui jouait en maillot de bain parce qu'il faisait 40 degrés Celcius, avec des abonnés qu'on a dû faire venir en bus du centre-ville jusque dans l'est de Montréal. Ça, c'est qu'un seul exemple.

L'impact aussi au niveau des compagnies invitées. Ça fait quatre ans qu'on essaie de bâtir une structure de diffusion des plus grandes compagnies internationales. Lorsque le conflit a eu lieu, évidemment, l'ensemble des compagnies de ballet IATSE, dont sont la plupart des grandes compagnies de ballet en Amérique du Nord, n'ont pu venir, ce qui a mis en danger en fait nos campagnes d'abonnement.

Donc, en fait, il y a eu des... un ensemble de répercussions, et je dirais, ces répercussions étaient quasi exponentielles, c'est-à-dire elles faisaient que s'accumuler et s'accumuler. Et le public, à un moment donné, autant pouvait dire: Je vous donne le bénéfice du doute pendant quelques mois, autant par la suite ils ont dit: Bien, finalement, on a un choix dans notre comportement d'achat d'aller à la Place des Arts ou de ne pas y aller. Et on a vu l'impact au niveau des abonnés, au niveau de l'achat de billets individuels...

Mme Pathy (Constance V.): Alors...

M. Dancyger (Alain): Et je parle même pas ? pardon ? de l'image évidemment des Grands Ballets qui a été hypothéquée non seulement au Québec et au Canada, mais également sur la scène internationale. On a reçu de nombreux appels de différentes compagnies de ballet au monde qui disaient: Qu'est-ce qui se passe? Et, je dirais, par extension, c'est... ça dépasse la Place des Arts, ça dépasse Les Grands Ballets canadiens, c'est l'image du Québec au niveau de sa gestion de la culture qui est en jeu.

Mme Pathy (Constance V.): ...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Vous souhaitiez ajouter quelque chose, Mme la présidente.

Mme Pathy (Constance V.): Enfin, oui, j'aimerais ajouter un point. Des compagnies résidentes à la Place des Arts, Les Grands Ballets, en effet, sont, je pense, à peu près la seule qui font des tournées. Et ce conflit a des répercussions, on n'y pense pas, mais a des répercussions quand on va en tournée. Par exemple, quand on est allé à Saint-Louis, avec Casse-Noisette, il y avait une ambiance très... très difficile à vivre et... parce que, comme je viens de dire aussi, que la plupart des salles en Amérique du Nord sont accréditées IATSE. Alors, si on a des conflits ici, chez nous à Montréal, alors, il y en a des retombées, des répercussions ailleurs.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de Saint-Hyacinthe, à vous la parole.

n(10 heures)n

M. Dion: Merci, M. le Président. Bonjour, Mme la présidente, bonjour, M. le directeur. Votre témoignage est très important pour nous parce que, vous savez, nous avons une tâche particulièrement délicate à remplir. Vous venez de décrire assez bien... en tout cas, d'une façon assez claire, les conséquences de ce que vous vivez à travers le conflit qu'il y a actuellement à la Place des Arts. C'est bien sûr qu'on aimerait bien parler d'autre chose que du conflit, mais c'est au coeur de nos préoccupations actuellement, pour toutes sortes de raisons, d'abord pour les raisons économiques parce que vous parliez tout à l'heure de pertes énormes au début. Des pertes énormes, on imagine que c'est le trésor public qui les assume, à la limite. J'imagine. À moins que je me trompe. Alors, c'est sûr que votre collaboration est très importante. Et quand on...

Notre objectif n'est pas de chercher qui est coupable pour ces pertes-là, mais bien quelle est la cause. Mais quand on cherche la cause, parfois on risque de se rapprocher de certaines institutions qui ne semblent pas fonctionner à 100 % et qu'il y ait un sentiment de culpabilité qui se dégage, mais ce n'est pas notre objectif. L'objectif, c'est de trouver les causes afin de pouvoir y remédier si possible, parce que ce qu'on souhaiterait bien, c'est qu'il y ait à la Place des Arts un fonctionnement harmonieux et que vous puissiez faire rayonner la culture québécoise et pas seulement être obligés de confesser les difficultés qu'on a pour... les difficultés de fonctionnement qu'on a.

Alors, dans ce contexte-là, on a parfois l'impression que ceux qui savent ce qui se passe sur les planches, c'est ceux qui sont sur les planches. Donc, c'est les compagnies elles-mêmes qui sont les mieux à même de juger ce dont elles ont besoin comme support technique. Est-ce que l'idéal ne serait pas que les ententes soient toujours entre les institutions qui travaillent sur les planches plutôt que... et les syndicats de techniciens plutôt que la Place des Arts?

Mme Pathy (Constance V.): Alors, en effet, vous soulevez un point qui nous a frappés ces deux ans déjà alors que, oui, on est impactés par le résultat, mais en effet on n'est pas engagés dans la discussion entre les deux partenaires, la Place des Arts et l'Union. En effet, on est la victime et l'otage de cette discussion. Alors, je ne sais pas où trouver la solution idéale, mais c'est sûr qu'on aimerait participer beaucoup plus dans les négociations qui ont lieu à la Place des Arts, avec tous les intervenants.

M. Dion: Actuellement, est-ce que vous avez des ententes avec le Syndicat des techniciens?.

Mme Pathy (Constance V.): Oui. Oui, il en reste...

M. Dancyger (Alain): En fait, quelques mois après le début du conflit, les Grands Ballets canadiens ont reçu une requête en accréditation du syndicat IATSE et nous avons signé donc une première convention collective avec IATSE, ce qui est nouveau pour notre organisme. Donc, nous avons passé à peu près... plusieurs mois à négocier cette première convention collective. Donc, les Grands Ballets canadiens maintenant sont officiellement cartés ou officiellement accrédités IATSE.

M. Dion: O.K. Donc, vous avez une première convention signée avec IATSE.

M. Dancyger (Alain): Oui.

M. Dion: Est-ce que ce serait possible qu'elle soit déposée parce que, pour nous, ça pourrait être un éclairage très important pour essayer de voir dans quelle direction il faut aller pour améliorer la situation pour le futur?

M. Dancyger (Alain): Oui.

M. Dion: Est-ce que ce serait possible qu'elle soit déposée, cette convention-là?

Mme Pathy (Constance V.): Oui.

M. Dancyger (Alain): Oui. Tout à fait. Alors...

Mme Pathy (Constance V.): Alors, je dois souligner que c'était pas la volonté à nous, mais qu'on était en effet forcés. On a vécu avec l'Union de façon très harmonieuse au sein de la compagnie même, mais avec toutes ces difficultés. Alors, l'Union a pris une autre attitude.

M. Dancyger (Alain): Oui.

Mme Pathy (Constance V.): Et ça impacte aussi nos prêts, c'est certain.

M. Dion: Oui. Écoutez, je comprends très bien aussi que c'est toujours difficile parce que, quand vous venez témoigner ici, devant la commission, vous pouvez avoir une certaine inquiétude en vous disant: Bien, est-ce que ça peut pas nuire à nos relations futures? Évidemment, c'est pas notre objectif, hein. Notre objectif, c'est plutôt d'aider.

Mais j'irais un peu plus loin et je dirais... Vous avez eu connaissance du rapport du médiateur qui a été déposé. Croyez-vous que ce rapport mériterait d'être essayé sur le terrain, que les recommandations de ce rapport-là mériteraient d'être essayées?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, très rapidement, s'il vous plaît, Mme la présidente.

M. Dion: Quelle est votre position par rapport au rapport du médiateur?

Le Président (M. Simard, Montmorency): Très, très rapidement, s'il vous plaît!

Mme Pathy (Constance V.): Absolument. Alors, est-ce que c'est suffisamment rapide? Ha, ha, ha! Oui, parce que, là, on a trouvé que le rapport du médiateur était très raisonnable et...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup.

Mme Pathy (Constance V.): Bon. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci.

Mme Beauchamp: Bien, écoutez, je vais vous laisser poursuivre sur le même sujet, là. Je pense que c'est d'intérêt pour nous de savoir quelle est votre réaction au rapport du médiateur que, nous, on a eu hier, là, mais...

Mme Pathy (Constance V.): Oui.

Mme Beauchamp: Donc, je comprends que vous en avez pris connaissance.

Mme Pathy (Constance V.): Oui. Alors, est-ce que tu peux élaborer un peu plus?

M. Dancyger (Alain): Oui. Je pense que le rapport du médiateur est tout à fait raisonnable et on le soutient, je dirais, à 100 %. Le seul commentaire que j'aimerais faire, mon dernier commentaire peut-être, c'est que je pense qu'il y a un besoin qui est une prise en compte un peu d'un certain réalisme de la situation dans le monde des arts et particulièrement dans le secteur; nous sommes un organisme à but non lucratif. Lorsqu'on regarde... lorsqu'on fait... lorsqu'on veut faire une comparaison entre le salaire qui est payé à nos artistes et les salaires qui sont payés avec les différents intervenants qui oeuvrent dans le monde du spectacle et notamment à la Place des Arts au niveau des syndicats, je pense que cette comparaison est assez éloquente. Vous savez qu'un danseur de ballet, d'un corps de ballet, c'est à peu près 25 000 $ par an, et ce sont des contrats annuels de 40 semaines uniquement, qui sont renouvelables ou non. Donc, il y a une certaine... Tout ça pour vous dire qu'il y a une certaine précarité non seulement au niveau de la vie de nos artistes, mais également au niveau de l'environnement, ce qui, comme vous savez, avec les événements du 11 septembre, à un moment donné va créer tout à coup une certaine mouvance d'instabilité.

Alors, les institutions culturelles, notamment la nôtre, ont eu à se battre notamment avec déjà des conditions difficiles, des conditions aux artistes qui sont extrêmement difficiles et qu'on aimerait améliorer. On est même pas capable de leur donner les services de santé nécessaires et, d'un autre côté, on voit certains conflits qui sont déclenchés à partir de peut-être certaines demandes ou revendications. Donc, je pense qu'à un moment donné il faut qu'on regarde peut-être d'une manière plus globale quelle est un peu la situation des arts et des différents intervenants et que finalement on garde ce focus de dire qu'on oeuvre tous pour le développement du monde des arts et le soutien de nos artistes. Et je pense que ce focus peut-être on l'a perdu ces dernières années pour différentes considérations, mais je pense qu'il est temps maintenant ? c'est une des conditions sine qua non ? de dire qu'en fait on est tous... on oeuvre tous pour le développement des arts et le soutien de nos artistes.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Mme la députée de Sauvé.

Mme Beauchamp: Merci. Moi, j'aimerais que vous réexpliquiez dans la... concrètement qu'est-ce que ça signifie que votre propre... que vous êtes accrédités IATSE comme compagnie, c'est-à-dire que j'aimerais que ... C'est parce que je pense que, pour les gens qui peuvent nous écouter, c'est pas toujours évident de comprendre qu'à la fois la Place des Arts est accréditée et à la fois qu'une compagnie résidente à la Place des Arts est accréditée avec le même syndicat. Donc, comment ça se traduit concrètement cette situation-là? Et, corrigez-moi si j'ai tort, mais je me dis... Ça veut dire que... Émettons l'hypothèse qu'au bout d'un peu la saga juridique qu'on connaît, la Cour suprême du Canada devait donner, par exemple, raison à la Place des Arts qui a mis fin à l'offre de services techniques et qui dit: Je n'offre plus ce type de service. Comme compagnie, vous devez embaucher vos propres techniciens, si je me trompe pas, vous devriez donc embaucher, vous, des techniciens IATSE. Vous y avez obligation. C'est entre autres ça, l'implication de votre accréditation?

M. Dancyger (Alain): C'est ça, c'est l'implication principale. C'est que maintenant étant accrédité, on a l'obligation partout où on se produit, globalement, d'embaucher donc des techniciens du syndicat IATSE. Il y a différentes clauses évidemment et certaines clauses normatives aussi auxquelles on est tenu. C'est certain qu'avant la différence, lorsqu'on n'était pas accrédité, c'est qu'on avait beaucoup plus de flexibilité tandis que maintenant la flexibilité, pratiquement, est réduite. On n'a pratiquement aucune flexibilité. On est lié maintenant par une entente collective et l'obligation d'embaucher dans les techniciens IATSE partout où on se produit.

Mme Beauchamp: Vous disiez... vous dites que vous aviez plus de flexibilité, mais par ailleurs, concrètement, est-ce que vous engagiez la plupart du temps des techniciens IATSE? Même si vous aviez la flexibilité de ne pas le faire auparavant, dans les faits, est-ce que vous engagiez des techniciens IATSE?

M. Dancyger (Alain): Bien, avant, lorsqu'on se produisait dans des théâtres... Tous les théâtres ne sont pas forcément accrédités IATSE. Dans les grandes villes en Amérique du Nord, ils le sont, mais il y a des théâtres notamment dans l'Est du Canada qui ne le sont pas. Donc, lorsqu'on n'était pas accrédité, on pouvait embaucher des techniciens non IATSE. Maintenant qu'on est accrédité, c'est certain qu'on a l'obligation... on ne peut pas... on va prendre l'équipe de base dans ces théâtres, mais si on a besoin de techniciens additionnels, ces techniciens devront faire partie du syndicat IATSE.

Mme Beauchamp: Puis j'aimerais aussi... parce que, un peu plus tôt, Mme la Présidente, vous avez fait part de votre inquiétude quant à, un peu, l'incertitude, je pourrais même dire la grande incertitude qui règne présentement. On sait donc qu'il y avait une forme, je vais appeler ça, de moratoire par rapport au conflit de travail. Il y a des retours des techniciens à la Place des Arts, médiation. On sait maintenant, et on n'a pas tant discuté plus en détail avec les représentants syndicaux, que le rapport de médiation a été rejeté par la partie syndicale, et je peux comprendre, je me suis sentie interpellée un peu plus tôt quand vous avez mentionné la situation de grande incertitude dans laquelle ça vous place.

Est-ce que vous pouvez nous dresser le portrait de qu'est-ce qui peut se passer si, par exemple, les techniciens IATSE devaient se retirer de nouveau de la Place des Arts? Qu'est-ce que ça signifie pour vous? On est le 26 septembre. Qu'est-ce que ça signifie pour vous à court terme et à long terme?

n(10 h 10)n

Mme Pathy (Constance V.): Alors, je pense que la première chose à laquelle on doit penser, c'est que la Place des Arts ne se ferme pas. Alors, n'importe quand, les unions, si elles sont en grève ou quittent la Place des Arts d'une façon ou l'autre, je pense que c'est vraiment nécessaire que la Place des Arts reste ouverte et que les compagnies résidentes et autres puissent se produire là-bas.

Alors, à part ça, c'est une pure spéculation, n'est-ce pas. On ne sait pas ce qui va arriver et quelles solutions on va trouver à la dernière minute. La chose qu'on craint le plus, c'est que la Place des Arts se ferme.

Mme Beauchamp: Ce qui empêcherait les représentations, par exemple, de Casse-Noisettes en décembre. Vous dites que c'est une source importante, pour vous, de votre autofinancement comme compagnie.

Mme Pathy (Constance V.): Oui, oui. Alors, si on perd les représentations de Casse-Noisettes, alors on perd la compagnie. C'est très clair.

Mme Beauchamp: Je veux aussi juste vous entendre sur un autre aspect des choses parce que le conflit dure depuis deux ans. Mais auparavant vous étiez déjà à la Place des Arts et un partenaire de la Place des Arts. Vous demandez comme recommandation que la Place des Arts joue un peu plus le rôle qui lui est permis, prévu dans la loi, un rôle de coproduction, par exemple, et tout ça.

Moi, j'ai pris connaissance du plan stratégique de la Place des Arts 1999-2002 et, dans son plan stratégique, il y a un objectif qui est d'accueillir plus de représentation, puis on y parle de coprésenter des spectacles et nommément de créer un comité artistique qui privilégie les compagnies résidentes.

On peut toujours dire que le conflit de travail a perturbé l'application du plan stratégique, mais je veux juste savoir: Est-ce que ce plan stratégique vous avait été présenté? Est-ce que vous avez entendu parler de la possibilité de créer un comité artistique? Est-ce qu'il y a eu des efforts ou des démarches de faites en ce sens? Qu'en est-il?

Vous plaidez, vous, pour un... entre autres une meilleure concertation avec les compagnies résidentes. La loi prévoit la mise en place de comités qu'on appelle des comités consultatifs, mais vous êtes là, vous, dans la vie de tous les jours. Donc, comment ça se passe? Puis avez-vous entendu parler de la possibilité de créer un comité artistique ou est-ce qu'il existe déjà, selon vous?

Mme Pathy (Constance V.): Alors, en effet, je ne suis pas au courant du plan stratégique de la Place des Arts. Mais ce que vous dites me plaît énormément et les Grands Ballets seraient tout à fait prêts d'en parler et de discuter avec la Place des Arts. Et je trouve que les bonnes nouvelles que vous apportez font briller le soleil dehors.

Mme Beauchamp: Mais la moins bonne nouvelle, c'est qu'un plan stratégique soit élaboré sans que vous en ayez été complice ou entendu parler. C'est ça qui est la moins bonne nouvelle.

Mme Pathy (Constance V.): Oui.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Oui. J'en aurais plusieurs, en fait. La première, c'est juste pour revenir à ce que vous disiez parce qu'hier, lors de la présentation de M. Richard, j'avais compris que les producteurs pouvaient engager leurs propres techniciens maintenant. Et vous nous dites qu'une fois que vous êtes accrédités par IATSE cette alternative, cette option-là ne vous est plus offerte. Vous ne pouvez pas engager vos propres techniciens.

Mme Pathy (Constance V.): Alors, en effet, comme le conflit perdure si longtemps, on est passé à travers plusieurs phases, et il y avait une phase où nous pouvions engager nos propres techniciens. Mais, avec le retour de l'Union à la Place des Arts, on ne peut pas, on ne peut plus engager nos propres techniciens. Est-ce que tu veux élaborer?

M. Laporte: Ça, c'est à cause de l'accréditation que vous mentionniez tantôt.

M. Dancyger (Alain): De toute manière, du fait qu'il y a l'accréditation entre... la relation entre Place des Arts et IATSE, lorsqu'on se produit à la Place des Arts, on a l'obligation donc d'utiliser... de respecter la convention collective entre la Place des Arts et le local IATSE.

Le fait qu'on soit accrédité maintenant, c'est lorsqu'on va se produire dans des théâtres en dehors de la Place des Arts, on va maintenant avoir l'obligation de n'embaucher que des techniciens IATSE et l'équipe permanente des différents théâtres dans lesquels on se produit.

M. Laporte: Pour vous, ça crée de l'incertitude. Actuellement, il y a un moratoire, il y a un modus vivendi, si on veut. Et là, à l'intérieur de ce modus vivendi, vous pouvez fonctionner. Et évidemment tout peut être remis en question dépendamment de l'humeur des parties. Donc, à ce moment-là, un spectacle comme Casse-Noisettes, pour vous, ça pourrait être annulé en bout de piste. Mais, comme vous dites, ça, pour vous, ça serait la faillite.

Mme Pathy (Constance V.): Oui. Alors, en effet, on ne fait pas démissionner notre avocat.

M. Laporte: Vous ne pouvez pas?

Mme Pathy (Constance V.): Ha, ha, ha! On ne fait pas démissionner notre avocat. On est en contact avec notre... disons, notre aide, le bureau d'avocats tout le temps, et alors... pour être prêt pour chaque éventualité qui peut se produire.

M. Dancyger (Alain): Il est clair que Casse-noisettes, comme la plupart des compagnies de ballet au monde, représente notre épine dorsale. Sans Casse-noisettes, il y a aucune survie de compagnies de ballet, notamment en Amérique du Nord. Je suis sûr que vous vous rappelez vous-mêmes, il y a deux ans, lorsque nous avons fait certaines interventions médiatiques lorsque planait le danger d'annuler tous les spectacles de Casse-noisettes. En dehors de l'impact que, évidemment, ça aurait auprès de la population ? parce que Casse-noisettes, c'est évidemment le spectacle de la tradition des Fêtes ? l'impact financier, il est pas énorme, il est désastreux, c'est-à-dire qu'on parlait à l'époque véritablement et encore maintenant, si ça devait se reproduire, de la survie des Grands Ballets canadiens. Casse-noisettes, c'est 1,2 million de chiffre d'affaires, c'est pas rien. C'est donc 36 000 personnes qui viennent voir Casse-noisettes chaque année, c'est presque un phénomène de génération.

Le deuxième point, c'est que Casse-noisettes, on ne peut le relocaliser nulle part. Donc, c'est aussi un point important, c'est-à-dire qu'on n'a pas le luxe de pouvoir se produire dans d'autres salles de spectacle à Montréal. Alors, d'où le sentiment de dire: Il y a un certain nombre de facteurs qui font qu'on devient victime, otage. C'est une situation, vous comprendrez, qui devient à un moment donné très intenable. Lorsqu'on parle de survie d'un organisme alors que l'organisme a été créé en 1958 et qu'on a fait d'énormes efforts, notamment ces dernières années, pour éliminer un déficit accumulé, de se retrouver avec un déficit pour lequel on n'est d'une certaine manière pas responsable directement, et les efforts qu'on a consentis dans les années passées, c'est quelque chose qui est très difficile à accepter aussi bien au niveau financier qu'au niveau, je dirais, du moral de l'ensemble des intervenants, que ce soit le conseil d'administration, le secteur privé et les autres partenaires.

M. Laporte: Mme la présidente, vous avez fait allusion à la paix sociale avec le syndicat. Ça, évidemment, c'est... Mais est-ce que vous avez des... Puisqu'on est, nous, ici pour essayer de trouver... enfin, peut-être pas trouver des solutions, mais écouter les gens qui en auraient à nous proposer, est-ce que vous avez des précisions à apporter sur les conditions qui, selon vous, assureraient une paix sociale avec les syndicats à la Place des Arts?

Mme Pathy (Constance V.): Alors, vous parlez de planchers, de décloisonnement et de ces sujets semblables? C'est ça?

M. Laporte: C'est vous qui...

Mme Pathy (Constance V.): Oui.

M. Laporte: ...parliez de paix sociale. Alors, je vous laisse...

Mme Pathy (Constance V.): Alors, ce qu'on cherche d'abord, c'est la stabilité. C'est très important. Vous n'avez aucune idée combien d'efforts, combien d'énergie, combien de temps est perdu avec toutes ces affaires-là. Alors, c'est les efforts et le temps qui doivent être employés ailleurs pour bâtir la compagnie. Alors, on aimerait avoir surtout la stabilité. Alors, nos propres opinions au sujet de l'état de l'Union, alors peut-être qu'on peut en discuter d'une... Alors, on est dans une position un peu délicate, je dois dire. On a publiquement dit qu'on soutient le rapport du médiateur, alors ça doit dire tout ce que vous voulez savoir.

Mme Beauchamp: Je veux juste revenir sur un sujet qu'on a abordé très rapidement tantôt. Mais, dans votre mémoire, votre dernière recommandation, vous plaidez pour que la PDA crée une structure de communication étroite avec les compagnies résidentes. Je dois vous dire que, comme le soulignait mon collègue de Saint-Hyacinthe, on n'est pas là pour chercher des coupables, mais, à la lumière de ce qu'on entend, le conflit de travail et tout ça, moi, je commence à avoir l'impression qu'il y a quand même un problème de communication à la Place des Arts.

Donc, j'aimerais vous entendre... Entre autres, même avant le conflit qui a commencé en 1999, même avant ça, comment vous évaluez les communications de la Place des Arts à l'interne avec ses employés, mais bien sûr avec ses principaux partenaires qui sont, par exemple, les compagnies résidentes? Est-ce qu'il y a communication? Est-ce qu'il y a des structures de communication? Moi, je suis étonnée de voir que vous me dites que vous avez pas été interpellés ou participé ou émis des commentaires sur le plan stratégique de la Place des Arts, je suis un peu étonnée de ça. Je me dis: Donc, il y a un problème de communication à l'intérieur de ça. Mais peut-être que je me trompe. C'est une impression qui se dégage en ce moment. J'aimerais que vous commentiez ça.

n(10 h 20)n

Mme Pathy (Constance V.): Qu'est-ce que je dirais? Alors, il y a une communication; ça, c'est sûr, il y a une communication, mais je pense qu'on aimerait avoir une communication beaucoup plus étroite. En effet, le fait que vous m'annonciez qu'il y a un plan stratégique, alors ça me semble évident qu'on parle avec les compagnies résidentes avant, ou durant, ou après, ou... Alors, je pense que la communication doit être améliorée de façon inouïe.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, Mme la présidente, M. le directeur général également. Alors, au plaisir de vous revoir parmi nous; c'est toujours agréable que de vous entendre. Et j'invite tout de suite L'Équipe Spectra à se joindre à nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Montmorency): Mme Rico, M. Ménard, bienvenue. On vous laisse le temps de remplir votre verre. Voilà. Chers amis, nous vous écoutons.

L'Équipe Spectra

M. Ménard (André): Merci, M. le Président. Mme et MM. les députés, je veux vous remercier de nous accueillir ce matin et de nous permettre de pouvoir apporter certains commentaires et certaines visions qu'on peut avoir sur la gestion de la Place des Arts, avec qui on a un lien d'affaires soutenu depuis maintenant près de 25 ans dans le cas de L'Équipe Spectra. À ma gauche, Mme Roseline Rico, qui représente le département des affaires gouvernementales, elle est directrice adjointe à L'Équipe Spectra, et moi-même, André Ménard, cofondateur et vice-président de L'Équipe Spectra.

L'Équipe Spectra est présente au sein de l'industrie culturelle québécoise depuis bientôt 25 ans, reconnue comme une entreprise chef de file dans ce secteur. Multidisciplinaires, ses activités englobent la production de spectacles et d'événements majeurs, la gérance d'artistes, la gestion de salles de spectacles et d'un studio d'enregistrement à Morin Heights, la création et la mise en marché de produits dérivés, de même que la production et la distribution internationale d'émissions télévisées. Récipiendaire de nombreux prix et distinctions, L'Équipe Spectra fut la première entreprise culturelle à figurer, en 1995, parmi les 50 sociétés privées les mieux gérées au Canada, selon le Financial Post et la firme comptable Arthur Anderson ? qui n'est pas la firme comptable qui, soit dit en passant, fait nos vérifications.

L'Équipe Spectra organise chaque année, sur le site de la Place des Arts, le Festival international de jazz de Montréal, le plus important du genre au monde en raison de son budget et de son assistance, et les Francofolies de Montréal, deux événements dont la notoriété a depuis longtemps débordé les frontières et où convergent chaque année plus de 2 millions de visiteurs. L'Équipe Spectra est également le maître d'oeuvre du nouveau Festival Montréal en lumière qui vise à contribuer de façon marquée à la relance économique et touristique du centre-ville durant la période hivernale. L'entreprise emploie de 200 à 300 personnes sur une base régulière, son effectif passe à plus de 2 000 personnes durant l'effervescence festivalière.

Les principaux points qu'on va soulever dans ce mémoire sont, premièrement, l'utilisation de la salle de spectacles et les conséquences de la présence du syndicat IATSE, l'utilisation des installations extérieures, la gestion de la billetterie et les redevances appliquées aux billets de faveur, les partenariats de la Place des Arts avec ses commanditaires, et quelques conclusions et des éléments de recommandation. On veut pas s'en tenir seulement à la problématique qui est développée par la présence de IATSE, mais c'est quand même un des points majeurs qu'on se doit d'aborder en premier lieu.

Alors, la mise en situation. Nos trois festivals représentent l'équivalent de quelque 50 jours d'occupation à la Place des Arts. Durant l'été, une période où les équipements culturels sont utilisés dans une moindre mesure, et depuis plus de 15 ans, le plus important festival de jazz au monde occupe les salles de l'institution de façon intensive, utilisant généralement plusieurs salles simultanément durant toute la durée de l'événement. Et c'est la même chose pour les Francofolies depuis maintenant sept ans.

Les spectacles des grandes séries de prestige des trois événements, de même que leurs spectacles d'ouverture et de clôture, sont généralement présentés dans l'une des grandes salles de l'institution, soit la salle Wilfrid-Pelletier ou le Théâtre Maisonneuve.

En règle générale, les équipements scéniques et les salles de la Place des Arts répondent adéquatement aux besoins de la plupart des productions qui y sont présentées. Cependant, le Festival international de jazz de Montréal et les Francofolies de Montréal doivent chaque année compléter ces équipements par des locations ponctuelles, par exemple des systèmes de moniteurs pour la scène. Des acquisitions sont souhaitables à court terme en ce qui a trait aux systèmes d'éclairage afin de doter l'institution d'équipements d'éclairage robotisés et ainsi moderniser ses équipements pour répondre plus adéquatement aux besoins du marché.

De façon générale, les techniciens membres du syndicat IATSE sont compétents et les tarifs locatifs des salles de la Place des Arts sont compétitifs. Néanmoins, principalement en raison des clauses normatives de la convention collective entre la Place des Arts et son syndicat des techniciens IATSE, les coûts afférents au personnel technique engendrent des déboursés supplémentaires considérables. En plus d'accroître les coûts, la convention collective complexifie la production et la présentation des spectacles à la Place des Arts par une organisation et des méthodes de travail trop rigides et fortement codifiées. Par exemple, dans le cadre de cette convention collective, seuls les techniciens membres du syndicat IATSE sont autorisés à manipuler les équipements techniques sur la Place.

De même, la convention collective impose au producteur les techniciens IATSE pour son spectacle, lui laissant très peu de latitude sur la composition de son équipe technique; le producteur pouvant difficilement effectuer, même à l'intérieur du bassin des syndiqués, un choix artistique ou d'affinité dans plusieurs cas. Une des conséquences de cet état de fait est une grande difficulté d'exercer un contrôle sur la qualité de la dimension technique d'une production, ce qui peut malheureusement se traduire par des mauvaises critiques dans les médias portant préjudice à toutes les parties: le spectateur, les producteurs, les techniciens et la Place des Arts elle-même.

L'assignation obligatoire de IATSE, principalement pour les postes des techniciens qui opèrent les consoles de son et d'éclairage, postes-clés qui ont une incidence artistique fondamentale sur une production, n'a pas sa raison d'être. Le choix de ces artisans essentiels au spectacle devrait nécessairement revenir au producteur ou, dans certains cas, à l'artiste.

À noter, lorsque toute la banque des techniciens syndiqués de la Place des Arts est épuisée ? techniciens assignés sur des productions, en vacances, malades ou déclinant l'assignation ? le syndicat choisit des permissionnaires pour compléter l'équipe technique, qu'il s'agisse d'un spectacle ou même d'un montage de structures extérieures ? qu'on voit dans le cas du Festival de jazz et des Francofolies ? ce à quoi le producteur ne peut s'opposer.

En plus de fragiliser davantage la qualité d'un spectacle, cette pratique de montage sur le site extérieur, par exemple, lequel requiert notamment de nombreux accrochages aériens... Il est impératif que les opérateurs soient expérimentés et agissent selon des normes de sécurité reconnues. Par ailleurs, bien qu'il n'ait aucun droit de regard sur le choix des techniciens, le producteur conserve son imputabilité en regard des lois, comme celles de la CSST, régissant la sécurité sur son site.

On peut affirmer que les techniciens qui sont imposés par la convention collective sont généralement plus nombreux, voire inutilement nombreux, que le nécessite réellement une production donnée.

On va maintenant passer sur l'utilisation des aires extérieures à la Place des Arts. En combinant les festivaliers des trois événements, plus de 2,5 millions de personnes sont susceptibles de circuler chaque année dans cet espace situé au coeur du centre-ville culturel montréalais. Au fil des années, grâce à une collaboration exemplaire de la Place des Arts, les festivals ont favorisé l'appropriation par le public, national et étranger, de cet espace extérieur, en consacrant implicitement sa vocation populaire. Désormais, cette place publique culturelle constitue l'un des symboles de la qualité de vie urbaine montréalaise et l'un des éléments-clés du positionnement favorable de la métropole sur la scène internationale.

Lors des événements, l'esplanade de la Place des Arts est devenue synonyme d'aire de repos, de restauration et d'activités destinées à la famille, soit une partie intégrante de l'expérience d'animation urbaine pour tous les segments de festivaliers. Il est impératif, à la fois pour les événements qui y ont élu domicile et pour le positionnement de Montréal, que la vocation de place publique de l'esplanade de la Place des Arts soit maintenue. Selon les responsables des aménagements extérieurs de nos trois festivals ? Festival international de jazz, je répète, Francofolies et Festival Montréal en lumière ? il apparaît que, et je cite, «chaque pied carré de l'esplanade est essentiel à la bonne marche des événements», tant pour la tenue des activités gratuites, l'aménagement d'aires de repos et de restauration pour les festivaliers, qu'afin d'y entreposer le matériel technique requis en cours d'événement et qui doit nécessairement être disposé directement sur les lieux.

n(10 h 30)n

Pour les événements qui tiennent leurs activités sur l'esplanade de la Place des Arts, une transformation importante de ce site engendrerait une problématique financière des plus menaçantes. En effet, principalement pour le Festival international de jazz de Montréal, un organisme sans but lucratif, ce site extérieur représente une source de revenus autonome non négligeable. C'est sur l'esplanade de la Place des Arts que sont installés les bistrots, bars et autres commerces alimentaires exploités par le Festival, dont la totalité des revenus est réinvestie dans la présentation des activités gratuites offertes au grand public, puisque, contrairement à d'autres manifestations culturelles d'envergure, aucun concessionnaire n'y exploite de tels commerces.

Nous croyons que la notion d'un espace vital urbain sur ce site devrait être définie en concertation avec les utilisateurs principaux du lieu en vue d'en assurer la pérennité de son usage collectif. Même que cet espace pourrait être aménagé afin d'en rendre l'usage festivalier encore plus accessible: aménagement d'entrées d'eau, points d'ancrage facilitant les montages, sources électriques, etc. À noter aussi, le Festival Juste pour Rire a fait récemment connaître son intention d'utiliser ces espaces dans un avenir proche, ses activités d'animation urbaine se déroulant sur un site de plus en plus inadéquat.

Au niveau de la gestion de la billetterie, qui est un point qui peut apparaître un peu plus mineur au regard des enjeux qui sont posés par IATSE et par les espaces extérieurs... Mais, quand même, on insiste pour en parler aujourd'hui. Depuis quelques années, la Place des Arts accepte d'offrir aux événements un aménagement privilégié en regard de la gestion des billets de spectacles présentés dans le cadre des festivals organisés par L'Équipe Spectra. Une partie des billets des représentations données à la Place des Arts est offerte sur un réseau reconnu, que les festivals peuvent administrer eux-mêmes, et une autre partie est disponible par l'entremise du système de billetterie de la Place des Arts. C'est donc un système à deux inventaires, et les inventaires sont partagés, pour chacun des spectacles, entre les deux systèmes.

Les festivals, en raison de leur nature même, sont obligés d'offrir un nombre important de billets de faveur à leur clientèle: les médias locaux, nationaux, internationaux, commanditaires, représentants des divers bailleurs de fonds publics, etc. Actuellement, la politique de la Place des Arts en regard des redevances perçues sur les billets de faveur consent gratuitement, pour les soirs de première, les 60 premiers billets de faveur. Ça, ça veut dire que, sur une représentation donnée, la Place des Arts va prendre sa redevance comme si elle vendait ces billets au box office, elle ne va nous donner une franchise que sur les 60 premiers. Il y a des représentations où, dans la réalité d'un festival tel qu'on le vit ? on peut aller jusqu'à 400 invités certains soirs ? on est obligés de payer, en surplus du loyer, des redevances pour des billets qui ne sont pas payés par le public qui s'assoit sur ces places-là. Pour les autres représentations, seuls les 20 premiers billets sont exempts de ces frais de redevance. Tous les autres billets gratuits ou offerts à prix symbolique sont assujettis à des frais de redevance, ce qui se traduit nécessairement par une perte financière pour les festivals.

Le fonctionnement bimodal de la gestion de la billetterie engendre un risque d'erreur accru, notamment en raison du nombre d'intervenants, duplication des manipulations de l'un et l'autre des systèmes et aux fréquentes transactions et échanges entre les deux systèmes de billetterie, un processus incontournable au cours d'une mise en vente. Il serait approprié que toute la billetterie des spectacles présentés par nos festivals à la Place des Arts soit centralisée et gérée par les événements, ceci afin d'exercer un meilleur contrôle de la qualité du service au public et d'éviter les risques d'erreur inhérents à une double gestion de la billetterie.

Lors des soirées d'ouverture des festivals, jusqu'à 400 billets de faveur peuvent être ainsi requis. De façon générale, les spectateurs invités gracieusement apportent autant de revenus à la Place des Arts en stationnement, vestiaire et bar, alors qu'ils constituent une perte pour le locataire. Dans cette optique, nous souhaitons vivement que l'institution révise sa politique de redevance en concertation avec les festivals et exempte ceux-ci des frais perçus sur les billets gratuits ou vendus à moins de 10 $.

Les partenariats avec les commanditaires, maintenant. La mise en situation, c'est que le Festival international de jazz de Montréal, les Francofolies et le Festival Montréal en lumière ont des engagements contractuels avec des commanditaires de l'ordre de plusieurs centaines de milliers de dollars, lesquels garantissent la tenue de ces événements festivaliers chaque année. Les trois festivals ont toujours refusé d'octroyer à leurs commanditaires la possibilité de solliciter de quelque façon que ce soit leur clientèle sur leur site, notamment en refusant systématiquement toute possibilité d'échantillonnage. Ce faisant, les festivals se sont bâti une réputation irréprochable auprès de leur public qui apprécie justement de pouvoir participer aux événements sans avoir à subir aucune pression commerciale inappropriée.

Si elle le juge nécessaire et souhaitable, la Place des Arts est en droit de conclure des partenariats avec des commanditaires commerciaux. Toutefois, pour nos trois festivals, qui occupent de façon quasi résidente la Place des Arts, cette nouvelle pratique comporte plusieurs risques sérieux si elle se fait sans concertation. En agissant sans consulter au préalable les locataires des salles, la Place des Arts induit un risque accru d'incompatibilité entre ses commanditaires et ceux de ses propres clients. Dans un souci d'harmoniser ses pratiques commerciales et celles de ses principaux clients, dont le Festival de jazz de Montréal, les Francofolies et le Festival Montréal en lumière, nous estimons indispensable d'obtenir l'assurance que la Place des Arts effectuera les consultations requises avant de contracter toute forme de commandite pouvant avoir quelque incidence sur nos événements et leur clientèle. On parle pas ici d'éliminer, mais bien d'harmoniser les pratiques.

En conclusion, les problématiques soulevées dans le présent mémoire convergent vers le besoin d'une plus grande concertation entre la Place des Arts et ses principaux clients, ceci dans un objectif d'optimiser les activités, le fonctionnement et le positionnement de la Place des Arts. De même, l'actuel mémoire s'inscrit dans un contexte où la Place des Arts occupe en priorité un rôle d'administrateur d'un des hauts lieux culturels de Montréal, un marché géographique où l'offre artistique est très abondante et dont les divers producteurs remplissent plus qu'adéquatement leur rôle de fournisseurs d'activités artistiques de qualité. Aussi, le présent document souhaite contribuer à l'un des principaux mandats de la Place des Arts, de procurer un lieu de résidence aux organismes majeurs, de favoriser l'accessibilité aux diverses formes d'arts de la scène et de promouvoir la vie artistique et culturelle au Québec, et ce, en offrant des installations professionnelles aptes à la meilleure présentation des productions et non en se substituant aux producteurs.

Dans ce contexte, les organismes résidents tels l'Orchestre symphonique de Montréal, La compagnie Jean-Duceppe, Les Grands Ballets canadiens, L'Opéra de Montréal de même que des compagnies partenaires, telle L'Équipe Spectra qui devrait être reconnue comme une compagnie résidence, puisqu'elle utilise les... comme une compagnie résidente, puisqu'elle utilise les installations de la Place des Arts de façon récurrente et régulière, devrait être partie prenante des décisions et orientations de la Place des Arts en étant représentée au conseil d'administration. L'expérience de ces organisations contribuerait certes à une plus grande adéquation entre les objectifs de la Place des Arts et les besoins spécifiques du marché. En ce sens, la présence au sein du conseil d'administration des compagnies résidentes et des compagnies au statut équivalent aurait certes été utile et bénéfique au moment des négociations syndicales, notamment en raison de l'expertise factuelle de ces dernières.

À notre connaissance, aucun membre du présent conseil d'administration n'est issu de ces milieux. Dans la loi constitutive de la Société de la Place des Arts de Montréal, il est en effet mentionné que les neuf membres du conseil d'administration sont nommés par le gouvernement; trois de ces membres, autres que le président, sont nommés sur recommandation de la Communauté urbaine de Montréal. Dans ce contexte, il apparaît souhaitable d'élaborer un mécanisme administratif ou législatif pour donner accès à une partie des sièges au conseil d'administration aux utilisateurs, soit les compagnies résidentes.

En ce sens, L'Équipe Spectra souhaiterait pouvoir mettre à jour son expertise au service de la Place des Arts, une expertise spécifique étendue aux multiples facettes de la pratique culturelle, et ainsi contribuer à sa mesure au rôle tenu par l'institution dans la diffusion et la promotion des arts de la scène au Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup à vous, M. Ménard. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Oui. Merci, M. le Président. Je vais commencer par où vous nous avez quittés. Vous dites que vous souhaitez que les compagnies résidentes soient représentées au conseil d'administration de la Place des Arts. Est-ce que vous avez été consultés par la direction de la Place des Arts dans les négociations... au travers de la saga, là, des négociations concernant le conflit de travail qui perdure à la Place des Arts depuis un certain temps?

M. Ménard (André): D'une façon formelle, non. C'est sûr qu'on se tient au courant de ce qui se passe à la veille d'un événement, quand il y a une grève qui s'apprête à être déclenchée, mais on n'est pas partie prenante à cette négociation-là. Et, vu le statut qu'on a aussi, on n'a pas voulu, à l'aube du dernier conflit, mettre de pression ni sur le syndicat ni sur la Place des Arts. Alors, je pense que ça aurait été mal venu à ce moment-là. Par le passé, la Place des Arts a été soumise à des pressions pour pouvoir régler au plus vite, puis on pensait pas que, pour l'avenir de la Place des Arts, c'était une bonne idée.

Ceci dit, c'est sûr qu'on en a aussi payé le prix et subi les conséquences en 1999, quand nos spectacles ont tous dû être déménagés. Les spectacles qui devaient se tenir à la Place des Arts ont tous été déménagés dans des salles soit plus petites, soit de standard moindre, par accommodement, mais c'est sûr que le public n'a pas suivi dans tous les cas et que le coût a été considérable. Ces déménagements-là nous ont procuré beaucoup de frustrations aussi. C'était le 20e anniversaire du festival de jazz, il y avait beaucoup d'événements spéciaux qui avaient été montés, et on s'est retrouvé à les faire dans des conditions qui étaient pas celles qui étaient prévues.

M. Beaulne: Avez-vous pris connaissance du rapport du médiateur?

M. Ménard (André): J'en ai pas pris connaissance personnellement, on en a entendu parler. Ce qui est sûr, c'est que toute logique de médiation suppose que, si une des deux parties demande l'impossible, elle peut peut-être, à la fin de la négociation, en obtenir la moitié. La moitié de l'impossible, ça reste quand même dans le domaine de l'impossible, à notre avis.

M. Beaulne: Donc, vous pouvez pas vous prononcer sur le rapport du médiateur.

M. Ménard (André): Je ne peux pas le récuser ou l'accepter. Comme je vous dis, de toute façon, on n'est pas habilités à le faire et c'est pas à nous qu'on demande de commenter ça.

M. Beaulne: Dernière petite question: Si rien ne change, si le statu quo perdure, quelles peuvent être, pour le Festival de jazz, les conséquences financières?

n(10 h 40)n

M. Ménard (André): Bien, les conséquences financières, c'est que déjà le pourcentage dans notre budget de main-d'oeuvre ? le pourcentage qui est alloué aux spectacles de la Place des Arts ? est très considérable, et ça va approcher la moitié, alors que ce n'est pas la moitié des événements qui se tiennent dans les salles de la Place des Arts. On a aussi neuf scènes extérieures, et il y a aussi plusieurs autres salles qui servent, dans le quartier des théâtres, pour les festivals. C'est sûr que l'impact, à chaque fois, est majeur sur le budget. Et, quand j'entendais, hier, M. Richard dire que, dans le rapport de médiation, il y avait entre autres, comme accommodement pour le syndicat, des augmentations de 20 % sur quatre ans, je peux vous dire que ça, ça nous donne des frissons. Si je peux me permettre de commenter le rapport du médiateur de ce que j'en sais, 20 % sur quatre ans, c'est considérable. Quand on connaît le taux réel d'augmentation du coût de la vie ces années-ci et les progrès que peuvent obtenir les syndicats en négociation, 20 %, c'est pas mal.

M. Beaulne: Recevez-vous des contributions importantes de la part du gouvernement du Québec?

M. Ménard (André): On reçoit des contributions... Bien, c'est-à-dire que, dans un budget pour un événement, toutes les contributions sont importantes. Le budget d'un événement, c'est un puzzle. Tant que tous les morceaux sont pas en place, il y a des trous. Dans le cas du gouvernement du Québec, on reçoit des contributions importantes, oui. Ç'a été le premier palier de gouvernement à s'intéresser au Festival de jazz.

M. Beaulne: Et, si vous aviez des coûts supérieurs qui relèvent des augmentations de frais d'opération à la Place des Arts, auriez-vous tendance, dans vos demandes au gouvernement du Québec, de les mentionner?

M. Ménard (André): C'est sûr que ça met une pression à la hausse sur tout, sur le prix des billets, sur nos demandes auprès des paliers de gouvernement. Ça, c'est certain. Ça crée un déséquilibre avec lequel on vit difficilement. C'est pas quelque chose qui est souhaitable. Et aussi, en rapport avec le reste de la main-d'oeuvre qui est présente au Festival de jazz, qui est bien rémunérée, le problème, ça n'est pas tellement le niveau des salaires commandés par IATSE, qui est déjà quand même supérieur, mais c'est aussi le nombre d'employés que ça prend pour effectuer la même tâche.

M. Beaulne: Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci. M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Oui. Bienvenue à la commission. Juste pour continuer dans le sens de mon collègue de Marguerite-D'Youville, surtout la première question. Vous demandez d'être intégrés au conseil d'administration, mais, tout au long de votre rapport, vous avez une constante qu'on retrouve, vous parlez de consultation, de concertation, représentativité, intégration. Est-ce que ça veut dire que ça, ça existe pas aujourd'hui? Quelles sont vos relations actuellement avec les administrateurs de la Place des Arts?

M. Ménard (André): Bien, comme je vous dis, en cours d'opération, on parle avec les administrateurs de la Place des Arts. On a toujours eu une bonne ouverture d'esprit de la part des directeurs généraux à la Place des Arts, que ce soit avec M. Guy Morin, qui a accueilli le festival en 1986, avec France Fortin par la suite, avec M. Richard. De ce point de vue-là, il n'y a pas de problème, mais, au niveau structurel, on n'estime pas que, quand les vraies décisions doivent se prendre, on est représentés au bon moment parfois. Donc, de ce point de vue-là, on pense qu'on aurait une meilleure garantie de représentation si le conseil d'administration avait à son bord certaines sensibilités qui vont dans le sens des nôtres. Mais, quand on parle des nôtres, on parle pas juste des festivals, on parle aussi des compagnies résidentes.

M. Boulianne: Alors, ça pourrait aller jusqu'à une nouvelle répartition des redevances, des choses comme ça ou...

M. Ménard (André): Bien, il y a certaines politiques qui se doivent, je pense, d'être entérinées par le conseil d'administration de la Place des Arts, les grands enjeux aussi. Une présence des organismes résidents, je pense, augmenterait le niveau de réalisme avec lequel les décisions peuvent être prises. C'est pas au mépris de ceux qui sont déjà là, parce que ceux qui sont déjà là font déjà un travail considérable, et le font bénévolement, et tout. C'est une chose qu'on considère quand même très valable, mais rien n'est parfait, tout est perfectible dans ce monde, et, de ce point de vue-là, on pense que le conseil d'administration de la Place des Arts pourrait profiter d'autres lumières que celles qui sont en présence.

M. Boulianne: Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député d'Iberville.

M. Bergeron: Oui, une question brève. L'intervenant avant vous ? merci, madame, bonjour ? dans ses recommandations, parlait d'un partenariat du style coproduction, codiffusion, cofinancement. Vous, est-ce que vous pourriez abonder dans le même sens que Les Grands Ballets canadiens, qu'au niveau d'une plus grande concertation... que vous aimeriez avoir un partenariat de cette forme-là?

M. Ménard (André): Oui. En effet, les coproductions peuvent prendre plusieurs formes, de toute façon. Il peut y avoir une mise de fonds, il peut y avoir une mise à contribution de la salle elle-même dans un bordereau de production où est-ce que les frais de la salle sont remboursés en dernier, puis, en premier, les coûts afférents au spectacle et les coûts directs sont payés, des choses comme ça. Ça, oui, il y a plusieurs patterns, si je peux me permettre l'expression, qui peuvent être envisagés pour faire des coproductions avec la Place des Arts qui, je pense, de toute façon, seraient sains et raisonnables. Ça s'est déjà fait et ça peut encore se faire. Sur une base plus permanente, c'est une chose qu'on aimerait pouvoir regarder. Dans le cas de certains événements, certainement, oui.

M. Bergeron: Peut-être une dernière question. Dans le cas d'un événement ponctuel, je ne sais pas, moi, disons à Wilfrid-Pelletier durant le Festival de jazz, vous avez parlé des coûts reliés à la présence du syndicat IATSE. Est-ce qu'on pourrait fixer un pourcentage des coûts, dans l'ensemble de tout ce que ça va vous coûter, la présence et la présentation d'un événement ponctuel à Wilfrid-Pelletier?

M. Ménard (André): Le pourcentage de la présence... L'impact des coûts de la IATSE?

M. Bergeron: De IATSE dans l'ensemble de votre facture.

M. Ménard (André): Ça peut être très variable d'un spectacle à l'autre, mais si, par exemple, pour une certaine opération, on va estimer que, par exemple, le sonorisateur à Wilfrid-Pelletier est pas compétent pour le spectacle qu'on amène, par expérience, on sait que cette personne-là ne peut pas vraiment livrer la marchandise, on peut toujours en choisir un autre dans le syndicat IATSE, mais il va falloir payer celui qu'on laisse de côté à rien faire. Donc, on en paie deux alors que le travail n'est fait qu'une seule fois. Donc, comme je vous dis, ça peut varier beaucoup d'un spectacle à l'autre, mais la présence de IATSE sur la scène de Wilfrid va coûter n'importe où entre 10 000 et 30 000 $ pour une journée de représentation. C'est quand même... C'est un impact réel. Quand vous parlez d'une recette de 150 000 $, c'est le cinquième, déjà, qui va juste pour les 10 ou 15 personnes qui vont oeuvrer sur la scène. C'est beaucoup d'argent, c'est disproportionné par rapport à tous les autres coûts qui sont engendrés par la présentation d'un spectacle.

J'entendais hier que le... bien, et ce matin aussi que le salaire des danseurs est de 25 000 par année. Considérant le nombre de représentations qu'ils peuvent aller présenter dans une année à Wilfrid-Pelletier, je trouve ça horrible en rapport avec ce que peuvent recevoir comme... Mais l'idée, c'est pas de faire le procès de la IATSE, vous savez. Il y a, à l'intérieur de la IATSE, beaucoup de techniciens compétents, des gens qui ont pris beaucoup d'expérience avec les années et qui sont devenus des maîtres dans leur domaine. Ça n'est pas ça qui est... Vraiment, le problème, c'est le normatif. C'est la façon dont les choses sont appliquées, les départements rigides, le cloisonnement, aucune espèce de collaboration possible, de ce point de vue là, et parfois aussi certains pratiques de travail qui vont consister à allonger un appel de travail pour aller en surtemps et là payer du temps supplémentaire à temps et demi, à temps double, etc. On a vu ça aussi, donc. On a vécu certaines histoires d'horreur à travers les années. On peut pas dire que c'est la réalité quotidienne qui est comme ça, mais on se la fait quand même assez fréquemment rappeler par certains incidents ou certaines pratiques.

Et j'ai parlé tantôt aussi des appels de surnuméraires de la IATSE quand ils ont plus assez d'inventaire pour nous fournir, et parfois on va voir arriver des techniciens qui sont assez néophytes et qui ne connaissent pas vraiment les tâches à accomplir, et ça, c'est dommageable. Ça, ça peut avoir des conséquences graves sur la qualité du spectacle et aussi sur la sécurité de ceux qui y travaillent et de ceux qui y assistent. C'est une chose qui, pour nous autres, est inacceptable. On peut pas protéger comme ça l'incompétence. Mais, dans IATSE, des éléments compétents, il y en a, puis il y en a plusieurs quand même, là. Je dirais même que c'est la majorité des techniciens IATSE qui sait ce qu'il fait.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup. Mme la députée de Sauvé.

Mme Beauchamp: Merci. Bonjour.

M. Ménard (André): Bonjour.

Mme Beauchamp: Vous êtes un intervenant important non seulement parce que vous êtes un partenaire de la Place des Arts, vous utilisez ses installations, mais, comme entreprise, vous êtes un producteur de spectacles. Mais vous êtes aussi un propriétaire de salle de spectacles. Donc, je pense que vous êtes un partenaire avec une vision stratégique, et c'est important que vous nous éclairiez. Il y a quelque chose qu'on entend, que je veux que vous commentiez, quelque chose qu'on entend couramment, c'est de dire que des producteurs de spectacles de Montréal ou étrangers n'iront pas à la Place des Arts à cause des coûts de IATSE, vont choisir d'aller dans une autre salle et que la raison directe, c'est la présence de IATSE. Par ailleurs, si on lit le mémoire déposé par la partie syndicale, elle va dire: C'est faux, regardez il y a d'autres salles IATSE qui ont une bonne performance. Regardez le Grand Théâtre de Québec qui a une bonne performance. Donc, ce n'est pas vrai, la baisse de présentation de spectacles, la baisse de fréquentation à la Place des Arts n'est pas liée à IATSE, mais bien au type de gestion de la Place des Arts.

Vous êtes à la fois un producteur et un détenteur de salle de spectacles, je veux que vous commentiez ça. Est-ce que la performance... Parce qu'elle est en baisse la performance de la Place des Arts. C'est pas juste depuis le début du conflit, là, c'est vrai depuis 1993, 1994, il y a eu les coupures budgétaires importantes, et tout ça. Mais comment est-ce qu'on doit analyser cette baisse de la performance de la Place des Arts, baisse de spectacles, baisse de spectateurs? Est-ce que c'est à cause de IATSE ou pas, selon vous?

n(10 h 50)n

M. Ménard (André): Bon. La Place des Arts vit dans le monde réel, tout comme les salles privées, et nos compétiteurs ne sont pas que les autres spectacles. Par exemple, il y a aussi d'autres formes de loisirs qui sollicitent maintenant le dollar de loisirs, et forcément que ça a un impact. Ceci dit, la présentation d'un spectacle d'un soir à la Place des Arts, que ce soit au Théâtre Maisonneuve ou à la salle Wilfrid-Pelletier, est difficilement rentabilisable à cause des coûts de la scène. Par exemple, je peux vous dire que ce qui a présidé à la création du Spectrum dans les années quatre-vingt, c'est que c'était devenu virtuellement impossible pour des artistes de la chanson québécoise de faire un court passage à la scène sans perdre une fortune à cause des coûts que représentait la présentation d'un ou deux soirs à la Place des Arts. Ils ont opté pour faire plusieurs soirs au Spectrum où les équipes étaient plus réduites, où les coûts étaient moins importants, et ça a un peu fait la vocation du Spectrum à l'époque. Mais ce que la profession appelle le «one nighter» a presque complètement évacué la Place des Arts parce que les coûts de présentation pour un seul soir sont trop importants.

Quand on peut présenter plusieurs mois un spectacle comme Le Fantôme de l'Opéra, il faut voir... Il faut pas se nier que la Place des Arts est un théâtre de prestige avec des facilités qui sont formidables, le parking souterrain, etc. Il y a beaucoup de Montréalais qui ne veulent sortir qu'à la Place des Arts. Ça existe. Le Fantôme de l'Opéra, j'avais commencé à citer, un spectacle qui a tenu l'affiche pendant quatre mois, dont on suppose que l'équipe de montage et de démontage a dû être considérable, mais qu'après ça l'appel de spectacles devait être assez raisonnable pour pouvoir durer tous ces mois-là, et le prix des billets était fort élevé, et tout... Ces spectacles-là sont pas des exemples, sont des exceptions.

Mais, par contre, le spectacle de variétés d'un soir à la Place des Arts est de plus en plus difficile. C'est une équation qui est de plus en plus difficile à réaliser, à moins d'y aller dans des prix de billets qui sont considérables. On a vu ces dernières années les prix de billets connaître une hausse assez vertigineuse dans beaucoup de spectacles, les spectacles de prestige, entre autres, mais le spectacle plus normal... J'appellerais pas ça le spectacle de routine, mais celui qui fait partie du décor normal du show-business québécois, celui-là ne peut pas se permettre ce genre d'augmentation.

Madonna prend la route une fois tous les 10 ans. Les chanteurs québécois, eux, font une opération à tous les deux, trois ans et ils peuvent pas arriver en multipliant le prix de leurs billets à chaque fois par deux ou trois, chose qui se fait pas. Et, à ce moment-là, ces équations-là sont très difficiles à réaliser pour un spectacle de courte durée à la Place des Arts. Ça, c'est sûr.

Mme Beauchamp: Un autre volet, maintenant, que je veux aborder, c'est dans la suite de mon collègue d'Iberville qui vous posait des questions sur la notion de coproduction... de production et de coproduction par la Place des Arts. Vous avez dit: Oui, ça nous intéresse, ça serait intéressant de pouvoir discuter de ça puis d'en... Mais, dans votre mémoire, dans la dernière version de votre mémoire, ce que vous dites, c'est plutôt que ce à quoi vous vous attendez, là, c'est que la Place des Arts offre des installations professionnelles aptes à la meilleure présentation des productions et non en se substituant au producteur. Moi, j'ai lu dans cette phrase-là que vous aviez des réticences parce que vous êtes producteur de spectacles, que... Moi, j'avais lu là-dedans un signal que vous nous envoyez en disant: On n'est peut-être pas si à l'aise que ça avec le fait que la Place des Arts se mette à produire ou coproduire des spectacles.

M. Ménard (André): Que la Place des Arts en...

Mme Beauchamp: Peut-être que j'ai mal interprété la petite phrase qui... Puis, c'est une nouvelle phrase, là, c'est dans votre nouvelle version de mémoire.

M. Ménard (André): Oui. Je peux nuancer ça.

Mme Beauchamp: Ça fait que je me disais: C'est quoi? C'est quoi, votre position, comme producteur de spectacles quant à cette mission qui est prévue dans la loi, là, par ailleurs? Je tiens à le préciser. Mais elle le fait pas en ce moment, la Place des Arts. Mais c'est quoi, votre position comme producteur par rapport à ça?

M. Ménard (André): Je peux nuancer ça. Que la Place des Arts mette à contribution son savoir-faire, ses services et ses équipements, c'est une chose. Qu'elle engage les fonds publics dans de nouvelles productions, on pense pas que ça serait bienvenu à ce moment-ci. Il y a à Montréal un ensemble d'organismes et de producteurs privés ? il y a beaucoup d'organismes sans but lucratif, il y a aussi les producteurs privés ? qui sont déjà responsables d'une offre culturelle considérable, qui sont en prise directe avec le marché, qui en connaissent les envies et les besoins et qu'il y a aussi un certain élément de risque qu'ils sont habitués de gérer. On croit pas que ces éléments de risque là devraient être le fait d'un organisme public. Ces choix-là se doivent, je crois, d'être faits avec ceux qui sont, comme je dis, en prise avec le marché, et la Place des Arts, de par sa nature, n'a pas à être en prise avec le marché. Elle a à maintenir ouvertes, dans des normes qui sont celles de 2001, des salles professionnelles disponibles et opérables. Opérables, ça veut dire, entre autres, qu'il y a pas les grèves aussi fréquentes que celles qu'elle a connues.

Mme Beauchamp: Oui. Je vais vous taquiner en disant que j'ai l'impression que vous êtes d'accord avec le fait que la Place des Arts prenne des risques et investisse quand c'est avec vous, mais pas avec les autres.

M. Ménard (André): Non, non, j'ai...

Mme Beauchamp: Ça ressemblait à ça, là, entre la réponse que vous avez donnée à mon collègue et la réponse que vous me faites maintenant.

M. Ménard (André): Vous m'avez pas compris. Ce que je dis, c'est que la Place des Arts peut engager dans une coproduction, en retardant ses revenus, son savoir-faire qui est déjà en place, son personnel, ses services et ses équipements sans pour autant aller chercher des fonds publics pour participer aux risques mêmes du spectacle en question.

Mme Beauchamp: O.K. Je comprends.

M. Ménard (André): Je sais pas si vous voyez ce que je veux dire

Mme Beauchamp: Oui.

M. Ménard (André): À l'achat du spectacle en question. Donc...

Mme Beauchamp: J'aurai, pour ma part, une dernière question puis, compte tenu que le temps est serré... Mais je vous ai bien compris dans votre réponse.

Dernière chose, c'est par rapport à l'esplanade. Moi, ça m'interpelle beaucoup. Je crois qu'effectivement puis avec votre... votre dynamisme puis avec la collaboration de la Place des Arts, c'est devenu un lieu public, je pense, d'importance dans une métropole qui se positionne comme une métropole de festivals. On sait que c'est un projet qui, je crois, est maintenant caduc, mais qu'il était question d'installation d'un cinéma sur cette esplanade par une compagnie qui a par ailleurs fait faillite depuis ce temps, mais j'aimerais savoir, si ce projet-là s'était réalisé, est-ce que c'est un... En fait, dans le fond, je veux savoir c'est quoi, la marge de manoeuvre par rapport à cette esplanade?

On sait que... On s'attend à ce que des institutions publiques comme la RIO, même, là, utilisent au maximum et peut-être même rentabilisent certains espaces publics qui sont d'importance et entre autres par de nouvelles constructions. Il y a cette esplanade-là. Est-ce qu'il y a une marge de manoeuvre pour la Place des Arts dans l'utilisation de cette esplanade en permettant de nouveaux bâtiments sur cette place ou si vous considérez que, non, il y a pas de marge de manoeuvre et qu'il faut plutôt qu'il y ait, je dirais, un plan concerté pour une utilisation de cette esplanade?

M. Ménard (André): À notre avis, la densité des édifices qui se trouvent dans le carré de la Place des Arts est déjà considérable. Il y a des salles, même, qui sont en sous-sol de l'esplanade ou d'un théâtre. De ce point de vue là, il nous semble que la Place des Arts est déjà fort bien équipée.

Le bout d'esplanade dont on parlait, qui a risqué de recevoir des cinémas à un moment donné, celui-là, en ce moment, est un terrain assez neutre, c'est une plateforme en asphalte qui surplombe les stationnements en dessous. On croit qu'il devrait faire l'objet d'un aménagement qui facilite la présentation des événements là-dessus, mais que, si on voyait une autre salle montée là-dessus ou un autre édifice, ça serait problématique, parce que, en ce moment, les espaces pour la tenue des festivals dans le coeur culturel de Montréal qu'est la Place des Arts et son giron se réduisent comme peau de chagrin. On a vu l'UQAM se dresser derrière avec son paquebot jaune, là. On sait aussi que la salle de l'orchestre, potentiellement, s'en va dans le terrain où actuellement se tiennent une partie des festivals aussi, avec le Parc des festivals que la ville de Montréal avait légèrement aménagé pour la tenue de ces événements-là. Alors, face à tous ces aménagements-là, il va devenir difficile d'accueillir des 100 à 200 000 personnes par jour si des édifices se dressent partout. D'un côté, l'esplanade de la Place des Arts, on croit, n'est pas finie d'aménager. Effectivement, ce grand carré là, qui n'a pas de service d'eau, d'électricité, ni rien, pourrait faire l'objet d'aménagements légers, pas très coûteux, mais qui rendraient à cette place-là une utilité plus grande, une fonctionnabilité, en tout cas, qui serait plus grande. C'est l'opinion qu'on a là-dessus.

Mais effectivement que, si la Place des Arts avait dressé des cinémas là-dessus... Bien, premièrement, on trouvait étrange, avec la multiplication des cinémas à Montréal, qu'il y en ait encore d'autres qui viennent à la Place des Arts et aussi que l'espace se rétrécisse à ce point-là alors qu'il est déjà assez densément aménagé, il nous semble, au niveau des édifices qui sortent du sol, en tout cas. On croyait pas que c'était un choix stratégique qui était bon pour ce que nous, on en fait et que d'autres aussi se proposent de faire.

Mme Beauchamp: O.K. Moi, j'aurai une dernière question, et c'est plus sur votre proposition de faire partie du conseil d'administration. Je dis «vous», mais, en fait, vous dites, là...

M. Ménard (André): Que des organismes opérant...

Mme Beauchamp: La notion de compagnie résidente, et tout ça, j'ai pas d'opinion tranchée là-dessus, je vous écoute, mais j'ai le goût de vous poser la question... Quand je regarde, là, les points très précis que vous avez amenés par rapport aux redevances sur les billets, par rapport aux relations avec les commanditaires de la Place des Arts, etc., je me pose comme question: Est-ce que la solution est bel et bien une place au conseil d'administration ou si la notion de comité consultatif, telle que contenue dans la loi, ce que prévoit la loi, ne serait pas suffisante pour assurer, là, une bonne concertation? Puis je vous informe aussi, peut-être que dans le plan stratégique de la Place des Arts, qui me semble pas très appliqué... Mais il avait même, là, comme objectif de définir ce que c'est qu'une compagnie résidente et d'avoir une politique par rapport aux avantages avec les compagnies résidentes. Il me semble que la mise en place d'un comité consultatif permettrait à tout le moins de définir ça, puis je pense que c'est ça dont vous avez besoin. Est-ce qu'on est une compagnie résidente ou pas? Puis c'est quoi, nos avantages et nos relations?

M. Ménard (André): Bien, les points qui...

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. Ménard, s'il vous plaît.

M. Ménard (André): ...ont été soulevés au niveau de la billetterie et des commanditaires peuvent apparaître assez triviaux par rapport aux grands enjeux qui ont été aussi débattus à cette table depuis deux jours. Ceci dit, ils découlent quand même de choix stratégiques et de grands enjeux auxquels la Place des Arts a à faire face, et ces choses-là sont définitivement adressées au conseil d'administration à un moment donné ou l'autre. Et c'est là que les grandes décisions se font et que les plus petites décisions peuvent en découler après aussi. C'est sûr que, au niveau du quotidien, il y a des choses avec lesquelles on peut discuter à un autre forum qu'au conseil d'administration, mais, au conseil d'administration, là où les décisions finales et les grands enjeux sont entérinés, je pense qu'une présence des compagnies résidentes serait bienvenue.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, merci beaucoup à vous, Mme Rico, M. Ménard, pour votre présence parmi nous cet avant-midi, et au plaisir de vous revoir.

M. Ménard (André): Je vous remercie de nous avoir laissés s'exprimer.

n(11 heures)n

Le Président (M. Simard, Montmorency): J'invite d'ores et déjà La Compagnie Jean-Duceppe à se joindre à nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, Mme Duceppe, M. Dumont, soyez les bienvenus parmi nous. Nous vous écoutons.

La Compagnie Jean-Duceppe

M. Dumont (Michel): Alors, M. le Président, mesdames et messieurs, je me présente, Michel Dumont, directeur artistique de La Compagnie Jean-Duceppe. En mon nom et au nom de Mme Louise Duceppe, qui est ici, directrice générale de La Compagnie Jean-Duceppe, je tiens à vous remercier de nous permettre aujourd'hui de vous faire part de nos sentiments par rapport à la situation qui prévaut à la Place des Arts. On vous présente donc notre mémoire.

Fondée en 1973 par le regretté Jean Duceppe, la compagnie qui porte son nom s'est taillée, au fil des années, une place solide et enviée dans le monde culturel, au point de devenir l'une des compagnies de théâtre les plus importantes au Québec. Dans la foulée de Jean Vilar, fondateur du Théâtre national populaire en France, Jean Duceppe rêvait de mettre sur pied un théâtre destiné au plus grand nombre, «théâtre populaire» au sens le plus noble du terme, un théâtre qui, comme le prône si justement le dramaturge Arthur Miller, serait le lieu de rassemblement de très différents niveaux d'âge, de culture, d'éducation, d'approche intellectuelle, un théâtre basé sur l'émotion et l'identification, un théâtre qui part du coeur pour aller au coeur, un théâtre qui parle aux gens, qui les touche et qui les grandit, et ce rêve s'est réalisé. La Compagnie va fêter ses 30 années d'existence pendant la saison 2002-2003, 30 années de travail acharné pendant lesquelles notre principal souci a été de maintenir, souvent à bout de bras et malgré les difficultés de toutes sortes inhérentes à la réalisation théâtrale elle-même, de maintenir, disons-nous, une qualité artistique de tous les instants qui a fini, en bout de ligne, par donner à cette compagnie de théâtre sa réputation exceptionnelle.

Encore aujourd'hui, La Compagnie Jean-Duceppe jouit de la fidélité de près de 14 000 abonnés, ce qui constitue une performance unique et inégalée. Nous produisons et réalisons en moyenne cinq spectacles par année depuis les débuts de La Compagnie, des spectacles choisis pour leur capacité à rejoindre, à intéresser et à émouvoir le plus grand nombre possible de spectateurs assidus et exigeants sur le plan de la qualité et de la performance artistiques. Et personne ne peut nier cette réalité, le public nous suit, et cela, depuis des années. En 28 ans d'existence, La Compagnie produit 143 pièces originales, dont 42 oeuvres québécoises et canadiennes, dont 24 créations. Au total, nous avons donné plus de 6 600 représentations à Montréal et en tournée, près de 1 300 comédiens ont joué devant 4,5 millions de spectateurs.

Notre répertoire est ouvert à toutes les formes de théâtre, car nous sommes convaincus que le théâtre est le reflet vivant et palpitant du monde dans lequel nous vivons, le miroir de nos préoccupations les plus fondamentales. Il est donc essentiel que le public s'y reconnaisse. D'énormes succès, comme Charbonneau et le Chef, La mort d'un commis voyageur, Soudain l'été dernier, Les voisins, Mambo Italiano, Ivanov, Sainte-Jeanne, Les belles-soeurs, Médium saignant, Le prix, Les gars, Oublier, Le Sea Horse, Pygmalion, Haute fidélité, Vol au-dessus d'un nid de coucou et Douze hommes en colère, pour ne citer que ceux-là, sont la preuve irréfutable que le rêve de Jean Duceppe se fondait sur une réalité incontournable et que la compagnie théâtrale qu'il a fondée répond à un besoin vital de notre société québécoise. Grâce à la performance d'une équipe administrative audacieuse et réfléchie, grâce au souci continuel de qualité d'une équipe technique enthousiaste et entièrement dévouée à la cause du théâtre, grâce à des concepteurs, des metteurs en scène et des interprètes triés sur le plus brillant des volets québécois, La Compagnie Jean-Duceppe a réussi à s'imposer comme une constituante indispensable du paysage théâtral d'ici.

Or, vous le savez, La Compagnie Jean-Duceppe est installée à résidence à la Place des Arts depuis ses premiers moments d'existence. Il y a plusieurs avantages à cet état de fait bien sûr: la présence au coeur même de la ville de Montréal, une vie communautaire et artistique regroupée sous un même toit, la proximité de nombreux restaurants, librairies et commerces de toutes sortes qui créent un environnement privilégié, la billetterie, les facilités de stationnement, des locaux confortables, des disponibilités techniques avantageuses et, en ce qui concerne La Compagnie Jean-Duceppe, une salle de théâtre qui, au cours des années, est devenue une adresse que le public connaît et où il aime se rendre. En un mot, la Place des Arts est devenue pour nous un lieu de résidence et de création, que beaucoup nous envient d'ailleurs.

Le mémoire que nous présentons devant cette commission aujourd'hui n'a pas pour but de discréditer à vos yeux l'existence et la légitimité du Syndicat des techniciens de scène, connu sous le nom de IATSE. Nous convenons sans aucune restriction qu'il est légitime que des travailleurs se regroupent pour former un syndicat qui va leur permettre de s'assurer des conditions de travail raisonnables et sécuritaires. Le but de notre intervention d'aujourd'hui n'est pas de contester cette réalité. Au contraire, elle est à nos yeux normale et, nous le répétons, légitime. Ce que nous voulons faire grâce à ce mémoire, c'est attirer votre attention sur un état de fait qui, au cours des années, petit à petit, de légitime et nécessaire qu'il était, est devenu sur le plan de la pratique un carcan étouffant et à ce point restrictif que la création, qui, nous le répétons, est un aspect indissociable d'une activité artistique comme celle à laquelle nous nous adonnons, cette création artistique, disons-nous, est à proprement parler mise en péril.

À l'heure actuelle, à la Place des Arts, l'organisation du travail est à ce point rigide et réglementée par le Syndicat que les volontés et les nécessités artistiques inhérentes à l'activité théâtrale elle-même doivent sans cesse céder le pas face à des exigences déraisonnables, qui ont tendance à réduire l'ampleur des productions et menacent la qualité de nos spectacles. Chaque pièce de théâtre a ses exigences propres, ses exigences voulues par l'auteur et nécessaires sur le plan artistique pour que le spectacle prenne son envol, atteigne sa vitesse de croisière et réussisse à toucher les spectateurs. Sinon, la réalisation d'un spectacle, se butant sans cesse à des contraintes techniques qui en restreignent l'ampleur, devient une sorte d'exercice stérile et sans envergure, n'ayant pour but que de contourner et même souvent d'abandonner ce qui constitue l'âme et l'esprit même d'une création théâtrale.

Bien avant le déclenchement de la grève des techniciens de IATSE à la Place des Arts, les conditions de travail étaient devenues extrêmement difficiles, régies par une convention intransigeante, appliquée à la lettre, de façon rigide et butée qui rend impossibles la souplesse et la générosité sur lesquelles doit reposer tout environnement artistique. Le climat ainsi créé est devenu absolument irrespirable, aggravé année après année par des exigences et des réclamations de privilèges de plus en plus insensées. L'atmosphère de travail s'est détériorée petit à petit, pris que nous étions tous dans un carcan impitoyable, carcan qui, depuis des années, a comme conséquence grave de faire fuir de la Place des Arts la plupart des producteurs qui, par leurs activités nombreuses, concourent à faire de ce complexe un lieu de création effervescent.

Le mur infranchissable que la convention des techniciens de scène IATSE a érigé face aux compagnies résidentes de la Place des Arts, les frustrations et les affrontements qui en sont le résultat suscitent nombre de problèmes qu'il faut d'abord régler, et cela, au détriment d'une atmosphère de travail et d'une efficacité sans lesquelles le quotidien d'une compagnie de théâtre comme la nôtre devient pénible et démotivant. Nous préférerions, bien entendu, appliquer toutes nos énergies à la réalisation de notre mandat artistique plutôt que de la gaspiller à essayer de contourner des situations de conflit absurdes jour après jour. Pourtant, il n'est pas rare que nous devions demander aux metteurs en scènes et aux concepteurs de modifier leur vision d'un spectacle parce que cela exigerait un nombre encore plus important de techniciens de scène, même si, dans bien des cas, nous payons des techniciens à ne rien faire, même si, dans la plupart des cas, ceux-ci auraient d'abord été d'accord pour effectuer les tâches nécessaires au bon déroulement du spectacle plutôt que de rester à ne rien faire, mais leur convention le leur interdisant.

Un exemple récent parle éloquemment de cet état de fait. Ainsi, pour le déroulement technique de notre production Mambo Italiano, nous avons eu recours à une équipe de quatre techniciens, des techniciens choisis et engagés par La Compagnie Jean-Duceppe. Suite à l'obtention de l'injonction permanente par IATSE, trois cadres de la Place des Arts et un bénévole ont alors accompli ces tâches. Au retour des techniciens IATSE à la Place des Arts, suite à la trêve intervenue entre les parties, nous avons dû retirer deux effets spéciaux pourtant nécessaires au spectacle, un mouvement de cintre et la mise en marche de la deuxième machine à effet de fumée, car le maintien de ces effets aurait alors entraîné la présence de six techniciens IATSE pour effectuer les tâches jusque-là effectuées par une équipe de quatre personnes.

Il faut savoir qu'à l'heure actuelle, en raison de la convention IATSE, la rémunération des techniciens est inconditionnelle aux besoins réels d'une production déterminée, que ces techniciens remplissent ou non une fonction effective et réelle lors du spectacle en question. Cela occasionne des coûts supplémentaires inacceptables pour une compagnie comme la nôtre dont les budgets sont serrés et soumis à des impératifs pécuniaires sans cesse grandissants et scrupuleusement administrés. La rigidité de la convention, le cloisonnement des fonctions de même que le climat de travail sont incompatibles avec la création, empêchant la liberté et la spontanéité pourtant essentielles à celle-ci. De plus, pour cela... Tout cela a pour résultat de faire grimper les coûts de façon vertigineuse. Il est donc pas surprenant de constater que, sur une base horaire, le technicien gagne plus qu'un comédien ou qu'un metteur en scène. Il y a une annexe d'ajoutée, Mme Duceppe se fera un plaisir de vous commenter ça tout à l'heure.

n(11 h 10)n

Suite à la décision de la Place des Arts, en date du 8 novembre 1999, à l'effet de ne plus fournir les services des techniciens IATSE à ses locataires, nous avons été en mesure d'offrir à nos équipes une liberté de création jusqu'alors impensable à la Place des Arts. De plus, nous avons pu réaliser nos spectacles avec l'aide d'un nombre réduit de techniciens, puisqu'il n'y avait plus de rigidité dans la répartition du travail, sans oublier l'atmosphère maintenant faite de collaboration, d'implication et de générosité, ce qui devrait normalement exister en tout temps et ce qui est le cas avec nos équipes de tournée et dans nos ateliers, où nous n'avons jamais recours à des techniciens IATSE. Avec nos équipes, non seulement nous bénéficions d'un climat propice à la création, d'une liberté grandement appréciée par nos concepteurs, nos interprètes et nos équipes de production, d'une équipe technique impliquée dans la réussite du spectacle, mais nous réalisons des économies importantes. Ainsi, pour cinq productions présentées de décembre 1999 à décembre 2000, avec nos équipes, tout en leur consentant de très bonnes conditions de travail, l'économie réalisée s'élève à 130 180 $.

Il faut savoir, de plus, qu'en raison du fameux atelier fermé c'est le syndicat IATSE qui choisit à notre place, de façon arbitraire, les techniciens qui vont travailler à nos spectacles sans que nous n'ayons dans ce domaine quelque recours que ce soit, même en cas d'abus évident ou de dérapage. Mais il y a pire: l'atelier fermé qu'est IATSE, où le syndicat est à la fois le syndicat et le fournisseur d'emplois, vient pervertir tout le processus. La Compagnie Jean-Duceppe est une compagnie résidente de la Place des Arts, c'est-à-dire un locataire. En vertu de l'atelier fermé, la Place des Arts, contrairement à tout réel employeur, n'a aucun droit de gérance sur les techniciens IATSE. Elle ne peut décider de l'embauche des techniciens, ne peut évaluer leur compétence et ne peut réellement sévir, même dans les cas d'une extrême gravité. Ainsi, des postes ont souvent été attribués à des personnes qui n'avaient aucunement les compétences nécessaires pour les remplir, mais qui, en vertu de leur ancienneté, y avaient droit. D'autres techniciens ont volontairement saboté des spectacles sans recevoir le moindre blâme. Certains ont même été promus, après avoir eu des comportements répréhensibles. Quand parfois le syndicat a accepté de sévir, le technicien, suspendu pour quelques jours à la Place des Arts, grâce à l'atelier fermé de IATSE, a pu, pendant cette suspension à la Place des Arts, aller travailler ailleurs, dans un autre lieu, sous juridiction IATSE. Toute une réprimande.

L'atelier fermé constitue à nos yeux une aberration qui fait en sorte que IATSE peut déclencher la grève à 10 heures à la Place des Arts, tout en affectant ses techniciens à un montage au Centre Molson à midi de la même journée. Nous sommes bien loin de l'esprit et de la lettre de la loi antibriseurs de grève. Il faut savoir aussi qu'en raison d'une aberration qui est installée au cours des années, la direction de la Place des Arts n'a aucun pouvoir sur ce qui se passe en ce lieu qu'elle est censée, selon toute vraisemblance, diriger. Le syndicat IATSE est aujourd'hui omniprésent à la Place des Arts et décide de tout, les salles semblent lui appartenir, personne ne peut pratiquement y mettre les pieds sans l'assentiment du syndicat. Tout y est réglementé par IATSE. Aucun comédien, par exemple, ne peut monter sur scène avant 19 heures, quels que soient les besoins et les obligations inhérents à son métier, à sa façon de le faire. La chasse est gardée avec intransigeance.

Un autre exemple d'intransigeance. Les appels des techniciens de IATSE sont de quatre heures, par exemple de 19 heures à 23 heures, puisque chez Duceppe, les représentations débutent à 20 heures. Si, comme il arrive souvent, le spectacle est plus long de quelques minutes et dépasse l'appel prévu, nous devons soit payer un surplus, soit nous arranger au détriment de la qualité artistique pour couper de façon à terminer dans le temps prévu. Non, rien n'est laissé à la spontanéité, rien, syndicalement parlant, n'est sacrifié aux exigences de la convention, pas de quartier.

Un dernier exemple qui illustre bien les conditions draconiennes dans lesquelles nous sommes obligés de travailler. La Compagnie Jean-Duceppe organise pour chaque série de spectacles des rencontres publiques. Ces rencontres ont lieu cinq fois par année, immédiatement après la représentation de la pièce. Le public qui le désire reste en salle et se voit offrir l'occasion de passer une demi-heure avec les comédiens et les artisans du spectacle. Or, les techniciens de IATSE, ne l'oublions pas, ont des appels de quatre heures, et cet appel n'est valable que pour la pièce présentée. La soirée-rencontre, même si elle ne dépasse pas l'appel de quatre heures, est considérée par le syndicat comme une deuxième activité. Par conséquent, elle nécessite un nouvel appel, soit une heure à tarif et demi. Nous en sommes là. Nous pourrions multiplier les exemples afin d'illustrer de façon concrète l'insupportable carcan dans lequel nous nous voyons enfermés, mais nous ne voulons pas abuser de votre patience.

En conclusion, nous tenons à répéter que nous ne sommes pas venus ici pour mettre en doute la légitimité du syndicat. Nous voulons attirer votre attention sur un état de fait qui, à notre avis, doit à tout prix être corrigé, c'est-à-dire le carcan idéologique d'un syndicat qui, abusant de sa légitimité, se pose en roi et maître absolu d'une institution culturelle publique, grâce à un plancher d'emploi déraisonnable et à un atelier fermé à double tour qui, à notre avis, n'a pas sa raison d'être dans un lieu de création comme la Place des Arts. Nous nous adressons à vous aujourd'hui afin de vous éclairer le plus nettement possible sur une situation étouffante qui prévaut depuis de nombreuses années et qui vient empêcher l'harmonie et la spontanéité qui sont absolument primordiales pour une compagnie comme la nôtre, tant sur le plan artistique que sur le plan administratif.

Nous choisissons de regarder vers l'avenir. Nous sommes convaincus que, sans l'abolition de l'atelier fermé, sans le décloisonnement de fonctions et sans l'obtention par la Place des Arts d'un véritable droit de gérance, la situation ne pourra pas être redressée. Nous avons besoin de respirer plus librement. La Place des Arts a besoin de retrouver son énergie vitale afin de recréer, en collaboration avec les compagnies résidentes, ce lieu privilégié où les Montréalais et les Québécois aiment se retrouver en toute liberté, car, avant toute chose, avant tout privilège, c'est l'âme qui compte dans la culture d'un peuple. Nous croyons qu'avec la situation qui perdure à la Place des Arts c'est une part importante de cette âme qui est menacée. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci à vous, M. Dumont. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. M. Dumont, Mme Duceppe, merci d'être là. C'est... Vous nous avez soumis un rapport très explicite, très éloquent et qui évidemment nous bouscule un peu parce que, je vais vous dire pourquoi, c'est que normalement on est porté à croire que, quand il y a des difficultés entre différents groupes, bien, peut-être que... on cherche les causes et on dit: Il doit bien... ça doit bien être partagé à certains moments. Mais là les causes que vous attribuez à IATSE sont quand même assez importantes, là. Alors, ça nous oblige à jeter un regard plus attentif de ce côté-là, et je suis convaincu d'ailleurs que ce que vous souhaitez c'est trop... c'est dit et redit de toutes sortes de façons de telle sorte qu'on ne peut pas douter que votre intention soit non pas de faire le procès de qui que ce soit, mais bien de trouver un moment donné un point d'équilibre où vous allez pouvoir travailler comme artistes et que vous allez pouvoir faire des vocalises sans nécessairement exiger 10 techniciens pour vous regarder.

Alors, évidemment j'exagère peut-être, et vous me corrigerez si je le fais, parce que l'objectif n'est pas là. L'objectif est d'essayer de comprendre ce qui se passe et surtout que vous nous suggériez des solutions. Évidemment, vous réclamez, je dirais à cor et à cri, de la souplesse. Évidemment, on sait qu'une convention collective c'est une convention collective n'importe où, et l'objectif des conventions collectives, c'est de fixer sur le papier ce qui sera les droits des uns et des autres pour l'avenir et c'est difficile de fixer de la souplesse sur le papier. Alors, on fait quoi en pratique?

M. Dumont (Michel): On en met dans notre comportement, on en met dans la façon de faire les choses, on en met dans le rapport avec les gens. Évidemment qu'une convention c'est une convention, il y a des lois, il y a... Je comprends bien qu'à un moment donné... que ce soit... il faut peut-être que ça soit inscrit qu'un technicien ne puisse faire dans son appel que trois mouvements de scène. Mais, à mon avis, il faut quand même comprendre que, si on en a besoin de quatre, faudrait pouvoir les faire, sinon, moi, je vais aller m'asseoir avec le syndicat avec de choisir mes pièces, puis je vais leur demander si je peux monter ça dans le temps prévu, et si je peux réussir à avoir tous les éléments qui me sont nécessaires pour monter cette pièce-là sans que ça devienne à l'autre bout un coût exorbitant.

Donc, à un moment donné... la souplesse pour moi, c'est qu'on est tous conscients des lois qui nous régissent, des cadres qu'on s'est donnés, mais que là-dedans on puisse fonctionner plus librement, un peu comme on le fait à l'heure actuelle. À l'heure actuelle, ça roule quand même assez bien. Il y a une trêve et ça... et comme... en tout cas, en ce qui concerne 24 poses, qu'on joue en ce moment, au niveau du théâtre et les techniciens de IATSE qui sont autour de nous, tout est très, très, très bien fait, tout est poli, tout est... et tout... Il y a une grande, grande collaboration de tout le monde, ça roule très, très, très, très bien.

M. Dion: Bon, alors, dans ce contexte-là, croyez-vous qu'afin de perpétuer cette trêve, et c'est ça que vous souhaitez au fond, que cette trêve devienne un peu la loi, et qu'en plus que vous puissiez travailler, et que tout le monde puisse bénéficier des investissements publics qui sont consentis dans ces institutions-là, croyez-vous... Oui, allez-y, madame.

Mme Duceppe (Louise): Je vous arrête. Non, on cherche pas à...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Mme Duceppe.

n(11 h 20)n

Mme Duceppe (Louise): ...à faire en sorte que la trêve devienne la réalité, là. La trêve, elle est... elle a été déclarée en février, il y a eu un médiateur qui a fait une médiation avec Place des Arts et puis IATSE. Il y a un rapport de médiation qui a été produit, qui a pas été rendu public, en tout cas, jusqu'à aujourd'hui par le ministre, je sais pas pourquoi. Ce médiateur-là trouve des solutions, suggère des pistes qui, compte tenu de la situation, en tout cas, nous conviennent. Mais la trêve, je vous rappelle, ça... Là, actuellement, ce qui s'applique, c'est la convention qui est devenue échue, là, au déclenchement de la grève, en 1999, et qui fait pas notre bonheur.

M. Dion: Alors, je pense que vous avez anticipé ma deuxième question, et peut-être vous pourriez le dire plus explicitement pour être sûr qu'on a bien compris, que vous considérez qu'une application du rapport du médiateur serait une bonne base pour créer un nouveau climat.

Mme Duceppe (Louise): Oui, tout à fait. Tout à fait. Ce que... Encore une fois, IATSE les a obtenues ces conditions-là. Ils l'ont pas volée la convention qui existe. Il y a une autre partie qui leur a accordé ça, souvent en cédant au chantage parce qu'il y avait menace de grève puis, bon. Mais là c'est devenu abusif, et puis, nous, comme plusieurs l'ont dit ici, ce qu'on déplore, c'est la rigidité de cette convention-là, le manque du droit de gestion de Place des Arts, l'organisation du travail de IATSE, le climat de travail que ça fait, cet atelier fermé là, et ainsi de suite. Aussi le fait, on l'a dit, on doit parfois demander à des metteurs en scène de modifier leur mise en scène parce que, là, ça demanderait l'apport de un, ou deux, ou trois autres techniciens. Même s'ils ont le temps de faire, l'équipe présente a le temps de le faire, leur convention fait en sorte qu'ils peuvent pas le faire. Souvent, on va avoir des spectacles, on va avoir des gens qui n'ont rien à faire, mais la convention nous oblige à les avoir. Alors, ce qu'on dit... qu'il y ait plus de souplesse aussi dans l'organisation du travail. Quand on a fonctionné avec nos équipes, bien, on a eu un fonctionnement qui est plus semblable à ce qui se retrouve dans d'autres théâtres au Québec, qui étaient respectueux des gens à notre emploi, mais qui avaient la souplesse de faire plus de choses et à la grande satisfaction des concepteurs, des interprètes aussi. C'est un climat en tout cas plus naturel à la création d'un spectacle.

M. Dion: Je vous remercie, madame.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Merci de votre présentation. Je dois dire que ça nous a un peu ébranlés comme probablement ceux qui suivent les échanges de cette commission. Votre troupe de théâtre est une des plus reconnues au Québec, nous tenons à sa survivance, à sa survie, et à son épanouissement.

Les représentants de Spectra tout à l'heure et puis plus particulièrement ceux des Grands Ballets canadiens ont juxtaposé la rémunération des danseurs dans le cas des Grands Ballets canadiens par rapport au traitement des techniciens. Vous l'avez effleuré un peu dans votre présentation tout à l'heure... pouvez-vous nous donner une indication de ce que peut représenter le traitement annuel d'un comédien par rapport au technicien?

Mme Duceppe (Louise): Moi, je l'ai pas présenté sur un traitement annuel parce que les comédiens qui ont des pigistes, certains travaillent pendant une production chez nous. J'ai voulu plutôt faire un tableau qui démontrait pour la somme de travail qui était consentie par chacun et les conditions monétaires qu'on pouvait offrir à chacun. J'ai fait un tableau montrant... comme, par exemple, si vous allez... ou si je dis, pour un technicien, je détaille au taux en vigueur, c'était en 1999, ça, que, pour 221 heures de travail avec toute l'application de la convention, le temps et demi, les appels... ça fait, pour 221 heures réellement travaillées, ça fait un salaire moyen de 35,16. Et pour un comédien... mais encore là je dis 354 heures, mais c'est des heures estimées parce qu'on tient pas compte du temps réel de préparation personnelle, on tient pas compte de la renommée, du talent, et tout ça. Alors, un comédien, en moyenne, un comédien premier rôle qui avait à cette époque-là 280 $, qui était un salaire qui était payé dans les théâtres comme chez nous, ou au TNM, ou au Trident, ça revenait à 32,17 de l'heure. Mais ça, c'est parce qu'à La Compagnie Jean-Duceppe, on joue beaucoup plus de représentations que dans les autres théâtres. Si on descendait ça sur une base comme au Trident, à 20 représentations, ou au TNM, aux alentours de 25 représentations, ça baisse encore plus.

Ce qu'on a dit souvent quand on a fait nos demandes de subventions... parce que, quand même, la convention de la Place... des techniciens de la Place des Arts, elle est acceptée par le Conseil du trésor. Alors, ce qu'on dit, c'est que, s'il trouvait que c'était juste et raisonnable cette rémunération-là, on s'étonne et on s'étonne toujours des cachets, de la rémunération qu'on peut donner aux artistes, danseurs, interprètes, metteurs en scène, et tout ça. Il y a une disproportion quelque part. Puis, avec les demandes encore plus grandes de IATSE... parce que, la convention qui est tombée en 1999, IATSE avait quand même fait un minuscule bout de chemin pour essayer d'assouplir un peu la convention, et puis là leur demande avant la grève était, au contraire, de revenir en arrière. Alors, tu sais, ça marche pas ça.

Le Président (M. Simard, Montmorency): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Oui, merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Duceppe, M. Dumont. Moi aussi... D'abord, je veux vous féliciter évidemment pour votre compagnie et pour la qualité aussi des spectacles que vous donnez. Moi, j'ai été un peu surpris aussi par le ton de votre mémoire. C'est pas une attaque, disons, contre le syndicat, je pense que vous faites une distinction très nette, mais vous y allez à fond de train contre IATSE. Vous allez même à dire qu'à un moment donné, quand ils sont pas là, ça va bien, vous avez de la création durant le... vous laissez libre cours à votre création.

À la page 6, vous affirmez que, dans plusieurs domaines, il y a des cas d'abus évidents et de dérapage. Est-ce que vous pouvez me donner des exemples concrets quand vous parlez d'abus parce que je pense que c'est quand même grave de...

Mme Duceppe (Louise): Là, vous disiez un peu, avant de demander les abus, vous dites: Une charge contre IATSE. Là, vous comprendrez que, depuis 1999, il y a eu une grève qui met en péril la vie même de notre compagnie. Alors, c'est... Et, depuis qu'on est là, nous, on n'a jamais caché qu'on n'a jamais été en accord avec cette façon d'organiser le travail, et c'est pour ça que, lorsqu'on produit nos spectacles hors de la Place des Arts, on n'a pas recours à IATSE parce qu'on est en désaccord avec cette façon-là, pas avec des individus. Actuellement, au Théâtre Jean-Duceppe, depuis la trêve qui a été convenue, on a une excellente équipe, des gens qui s'investissent, et tout ça, qui travaillent par contre dans les paramètres de la convention, qui font pas toujours notre affaire, mais il y a des gens compétents chez IATSE. C'est pas là qu'est le problème.

Le problème qui venait des dérapages, c'est qu'un atelier fermé, le syndicat y est à la fois l'employeur puis le syndicat. Alors, quand on fait une plainte et puis que... à la Place des Arts... parce que IATSE sont pas nos employés. Quand on se plaint de comportements inacceptables, Place des Arts, qu'est-ce qu'elle fait? Elle transmet ça au syndicat... Ça, ils ont saisi dans des cas extrêmes puis quand on a monté des dossiers ça d'épais. Alors là je vous avoue que je pense pas que ça aiderait le débat qu'on les étale, ces cas-là. Si vous y tenez, on peut, mais je pense pas que ça aiderait le débat. Le problème, c'est qu'à la fois... parfois c'est arrivé que les personnes qui ont commis ces actes-là se trouvaient être des personnes aussi en postes importants dans le syndicat. Alors, si c'est...

M. Boulianne: C'est bien. Vous avez répondu. Juste une dernière question. Supposons que le rapport donc du médiateur est pas accepté, qu'est-ce que vous attendez de nous autres, la commission? Quelle sorte de recommandations que vous voudriez qu'on fasse? Qu'est-ce que vous attendez de nous autres?

n(11 h 30)n

Mme Duceppe (Louise): Bien là je vous avoue, nous, ça nous désespère parce que tout est tenté, les parties ont accepté une médiation, ont accepté les conditions préalables qui avaient été soumises par le médiateur à la... préalables à la poursuite et à la reprise des négociations. Le rapport sort, on l'a lu, on est prêt à vivre avec même si, encore une fois, je vous le dis, ça fait pas notre plein bonheur, mais, dans la vie, on en prend et on en laisse aussi. Mais là, si ce rapport-là s'applique pas, bien, là, je le sais pas. Nous, c'est très inquiétant pour nous. On peut pas se reloger ailleurs.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Vous êtes bien aimable. Merci. Mme la députée de Sauvé.

Mme Beauchamp: Merci. Merci de votre présentation, Mme Duceppe, M. Dumont. Parce qu'on est conscient aussi ? quelqu'un y faisait allusion un peu plus tôt ? mais que la situation est délicate, hein?

Vous l'avez mentionné à plusieurs reprises, vous travaillez en ce moment avec les gens de qui on parle. En fait, vous faites bien de dire qu'on parle pas des individus, on parle bien de la structure, de l'organisation du travail à la Place des Arts. Mais je veux juste souligner qu'on va recevoir votre mémoire avec d'autant plus d'attention qu'on sait que c'est pas facile la situation dans laquelle vous vous retrouvez.

Moi, je veux revenir sur le fait que, vous, vous parlez carrément de l'abolition du modèle de l'atelier fermé. Lors de notre première journée hier, il y a eu un peu de distinction de faite entre ce qui appartient à... les problèmes, les irritants qui appartiennent à la convention collective et les irritants qui découlent vraiment du modèle de l'atelier fermé. Ce que je veux dire par là, c'est que par exemple les irritants qui font en sorte qu'un comédien peut pas monter sur la scène à 7 heures; le fait qu'il y ait du doublement de personnel, des choses comme ça, ça, ça relève vraiment purement de la convention collective que vous avez soulignée, qui a été négociée un jour entre la partie patronale et la partie syndicale, signée, acceptée par le Conseil du trésor, etc.

Mais il y a d'autres irritants qui relèvent plus, selon vous, de l'atelier fermé. Or, hier, les intervenants qui se sont présentés en sont venus à dire que l'atelier fermé comme modèle était peut-être un modèle pas idéal mais compréhensible, explicable dans un contexte où des techniciens de scène sont des pigistes comme le sont d'ailleurs par exemple les artistes, les artisans qui sont aussi réunis dans une unité syndicale.

Ça fait que j'aimerais vous entendre, vous, sur pourquoi ? parce que ça semble être très clair dans votre mémoire ? pourquoi, vous, vous dites: C'est aussi le modèle de l'atelier fermé qui... dont vous souhaitez l'abolition et non pas seulement des considérations d'organisation du travail qui relèvent purement de la convention collective. J'aimerais ça que vous m'expliquiez pourquoi vous revendiquez, vous, l'abolition de l'atelier fermé.

Mme Duceppe (Louise): Bien, nous, ce qu'on vit depuis plusieurs années à la Place des Arts, là, dans une période qui est difficile parce qu'il y avait ce conflit-là, c'est que Place des Arts a aucun droit de gestion. Et, quand un employeur a aucun droit de gestion, bien, c'est très difficile de faire régner une discipline; c'est très difficile aussi... Il peut pas, il peut pas sélectionner les gens.

Donc, on l'a dit dans le rapport, on s'est retrouvé à plusieurs occasions avec des gens qui avaient aucunement la compétence pour les tâches. Et, encore là, il a fallu monter des dossiers et des dossiers.

Et, d'ailleurs, on a été les seuls, la Compagnie Jean Duceppe, à le faire parce que bien d'autres producteurs ont leurs petites histoires d'horreur, mais personne a jugé bon de se plaindre parce que peut-être qu'est-ce que ça va faire si on se plaint?

Bien, nous autres, on aime ça dire les choses clairement. Alors, on a tout le temps protesté quand ça faisait pas notre affaire. Moi, il me semble que, si Place des Arts a pas la gestion du personnel, bien, elle est pas un employeur.

Mme Beauchamp: Mais est-ce que vous êtes capables d'imaginer un autre modèle syndical réaliste et réalisable dans le contexte de la Place des Arts que l'atelier fermé?

Mme Duceppe (Louise): Bien, il y avait un peu de ça dans le rapport du médiateur, où à la fois, il y a l'atelier fermé qui subsiste. Mais il y a aussi une équipe permanente qui est embauchée par Place des Arts. Donc, Place des Arts à ce moment-là peut exercer un droit de gestion plus grand que présentement.

Mme Beauchamp: Vous me corrigerez si je me trompe. Est-ce que ça signifie que c'est un modèle... Dans le rapport du médiateur qui a été déposé pour nous seulement hier, moi, j'ai pas pu en prendre connaissance de façon appropriée, je dirais, à ce moment-ci de nos travaux.

Mais, la façon dont vous en parlez, est-ce que je peux déduire que le modèle proposé par le médiateur est un modèle qui se rapprochait de ce qui se passe, par exemple, au Grand Théâtre où on dit qu'il y a des chefs d'équipe qui sont... qu'on peut considérer comme un peu plus permanents et qui... Le président de la... du Grand Théâtre hier nous disait carrément que, selon lui, ça développait un esprit de famille, un esprit de collaboration. Est-ce que c'est un peu le modèle, vous pensez? Est-ce qu'on peut faire cette comparaison-là?

Mme Duceppe (Louise): Non. Non, parce que, moi, à ma connaissance, le Grand Théâtre a un fonctionnement qui est très semblable à la Place des Arts. Place des Arts, ses équipes permanentes, certains membres de l'équipe permanente de salles sont là depuis très longtemps.

Alors... Mais ça reste que le corporatisme de IATSE, leur rigidité, leurs façons de faire font en sorte que c'est très difficile de... d'avoir un contrôle sur ce qui est fait. Alors, moi, je trouve que dans son rapport l'atelier fermé existe plus pour les équipes qui viendront en surnombre mais il recommande l'embauche de permanents, une équipe permanente, qui est polyvalente, qui serait dans les salles selon les besoins des spectacles. Donc, si, par exemple, au Théâtre Jean-Duceppe, un spectacle requiert trois techniciens, ça sera trois techniciens au lieu de quatre, puis d'en payer un à rien faire, puis si c'est huit, ça sera huit, et...

Mme Beauchamp: Vous avez mentionné un peu plus tôt... parce que, là, vous me mentionnez le rapport du médiateur, en disant: Bien, vous voyez, il y avait une piste de solution là-dedans qui était acceptable. Vous disiez en même temps que, pour vous, c'était pas... ça rencontrait pas l'ensemble de vos souhaits. Qu'est-ce qui manque dans le rapport du médiateur pour vous pour que vous soyez totalement satisfaite?

Mme Duceppe (Louise): Bien, ce que je vous dis, c'est que la convention quand même continue de s'appliquer, avec des modifications. Si vous me dites: Dans l'idéal, moi, je veux la liberté totale, alors... mais ça existe pas vraiment, ça. On est prêt à vivre... c'est un bouleversement, là, ce qu'on a vécu depuis 1999 ? important. Alors, on a hâte que ça se règle, et on pense... nous, on croyait que les gens entraient dans ce processus de médiation là de bonne foi, et accepteraient, quelles qu'en soient les conclusions, accepteraient ce rapport-là. Mais ce n'est pas le cas, là.

Mme Beauchamp: Le groupe Spectra qui est venu juste avant vous... parce que je veux juste qu'on sorte un peu. Je sais que l'irritant principal pour vous est l'organisation du travail à la Place des Arts, mais je veux juste terminer sur vos commentaires, sur un peu la mission, les activités de la Place des Arts.

Le groupe Spectra faisait référence à la possible présence des compagnies résidentes ou de représentants des compagnies résidentes au conseil d'administration. Je voudrais vous entendre là-dessus. Si je... si on écarte le dossier des relations de travail et de l'organisation du travail à la Place des Arts, par ailleurs, comme partenaire... comme partenaire au développement de vos activités, quels seraient vos commentaires sur la Place des Arts? Puis est-ce que vous pouvez commenter la proposition du groupe Spectra sur une présence des compagnies résidentes au conseil d'administration de la Place des Arts?

Mme Duceppe (Louise): Bien, moi, je trouve que c'est une bonne suggestion, en effet, pour voir venir les choses aussi, pour pouvoir planifier, pour être plus impliqués aussi dans le développement de Place des Arts. Je trouve que c'est une bonne suggestion. On est tenu au courant des choses. Mais, être tenu au courant, c'est pas comme de participer à la mise en place des choses.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Madame?

Mme Beauchamp: Puis... mais je voudrais juste que vous alliez un peu plus... si vous voulez, commenter la situation actuelle de votre partenariat avec la Place des Arts. On... la Loi constitutive de la Place des Arts prévoit qu'elle a un rôle à jouer auprès des compagnies majeures, des compagnies résidentes, et j'aimerais ça que vous... peut-être que vous nous fassiez part de vos attentes ou de votre vision des choses sur ce rôle-là que doit jouer la Place des Arts auprès des compagnies résidentes; si vous avez des suggestions, des commentaires à faire à cette commission par rapport au rôle possible de la Place des Arts comme partenaire?

Mme Duceppe (Louise): Bien, nous, on souhaiterait que Place des Arts retrouve les moyens financiers d'aider les compagnies, de développer la Place des Arts, d'en faire un lieu animé aussi, ce qui, encore une fois, je vous dirais, l'est pas. Ils ont eu... ils ont dû couper beaucoup parce qu'il y avait un déficit à effacer. Là où on pensait que ça prendrait un essor est arrivée cette grève-là.

Nous, dans des ententes d'entraide, de coproduction, ils peuvent nous aider, pas nécessairement, comme je disais, pour que Place des Arts produise de nouveaux spectacles, mais qu'ils nous aident dans des risques, parfois dans certaines opérations, pour que Place des Arts devienne vraiment le lieu animé qu'il a déjà été.

Mme Beauchamp: Merci. Je vais céder la parole à mon collègue d'Outremont.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Très bien. Je vais céder, Mme la députée...

Mme Beauchamp: Oui.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ... la parole à votre collègue. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

n(11 h 40)n

M. Laporte: C'est une précision, parce que j'essaie de comprendre tout ce dont il est question depuis hier, là. Quand vous dites que depuis qu'il y a cette trêve vous êtes arrivés à une entente, à un accord, à des arrangements qui semblent vous satisfaire pleinement, vous satisfont, disons, suffisamment ? n'est-ce pas? ? qu'est-ce qui a fait que cette trêve a changé les rapports à la Place des Arts au point où maintenant ça vous apparaît... vous faites de la... vous êtes satisfaite de ce qui se passe?

Mme Duceppe (Louise): Encore une fois, je vous dirais qu'on est satisfaits du climat de travail, de l'implication des gens qui sont actuellement au Théâtre Jean-Duceppe, mais ce n'est pas une situation qui nous satisfait. C'est, encore une fois, une trêve, et cette trêve-là, elle a été convenue entre les parties pour faire place à la médiation. Mais là, cette médiation-là, elle échoue. Alors, qu'est-ce qui va... sur quoi ça va déboucher? Là, on le sait pas. Elle peut tomber, cette trêve-là, aussi, il y a rien de sûr, et il y aura des conséquences terribles entre autres pour La Compagnie Jean-Duceppe, parce que, nous, on ne peut pas se reloger ailleurs.

M. Dumont (Michel): Non. C'est ça, le piège. Nous, il y a beaucoup d'avantages d'être à la Place des Arts. Mais quand on y est comme nous, et que, si on n'y était pas, et que ça fermait ou qu'il y avait... on n'a nulle part où aller. Donc, au fond, pour nous, c'est la débandade totale, je veux dire; il y a pas de solution. Si la Place des Arts ferme ou si ça s'arrête, nous ? pour le moment, en tout cas ? La Compagnie Jean-Duceppe n'a pas de lieu, elle n'existe pas, elle n'a pas de salle, elle a...

Mme Duceppe (Louise): Puis il y a aucune salle à Montréal qui est disponible pour des périodes de temps aussi longues que celles dont on a besoin pour présenter nos productions.

M. Dumont (Michel): Puis, quand on pense à l'abonnement puis à tout ce qui s'ensuit au début d'une année, tout ça, ce serait complètement inutile, tout à refaire. Donc, une fermeture de la Place des Arts, pour nous, c'est... Vu comme ça, en premier coup d'oeil, c'est une faillite. Je veux dire, il faut s'arrêter, il faut qu'on repense tout, il faut qu'on se construise un lieu ou pas. Donc, c'est très pessimiste. Voilà.

M. Laporte: Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, Mme Duceppe, M. Dumont, merci beaucoup d'être venus parmi nous, cet avant-midi. J'appelle maintenant l'Association des musiciens de l'Orchestre symphonique de Montréal à bien vouloir se présenter.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Montmorency): À l'ordre, s'il vous plaît! MM. Béliveau et Leclerc, bienvenue parmi nous.

Une voix: Leblanc.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ah bon! Très bien. Je crois comprendre qu'il y a un remplacement? C'est plutôt M. Leblanc? Voilà. Soyez le bienvenu, M. Leblanc. Alors, nous vous écoutons.

Association des musiciens de l'Orchestre
symphonique de Montréal

M. Leclerc (Jean-Marc): Merci, M. le Président. Je me présente: Jean-Marc Leclerc. Je suis violoniste à l'Orchestre symphonique de Montréal et trésorier sortant de l'Association des musiciens de l'OSM. À ma gauche, Jean-Marc Leblanc, violoniste à l'OSM et directeur de l'Association des musiciens de l'OSM.

Notre Association a été fondée à la fin des années cinquante, et elle regroupe les musiciens qui oeuvrent au sein de l'Orchestre symphonique de Montréal. Les musiciens de l'OSM sont membres de la Guilde des musiciens du Québec et de l'American Federation of Musicians.

MM. et Mmes les députés de l'Assemblée nationale, au nom des membres de l'Association des musiciens de l'Orchestre symphonique de Montréal, nous sommes heureux d'avoir été invités à participer aux auditions publiques de la commission de la culture, dans le cadre du mandat de surveillance d'organismes, et qui porte entre autres sur la Société de la Place des Arts de Montréal. Nous croyons que c'est une occasion très importante pour nous d'exprimer notre point de vue sur la Place des Arts, puisque nous y travaillons, nous travaillons en ces lieux depuis 38 ans, c'est-à-dire depuis son ouverture en 1963.

Nous voulons aussi profiter de cette tribune pour proposer une alternative à nos besoins. Notre démarche a pour but de promouvoir, de renforcer vos convictions et votre volonté politique sur la nécessité de mener à terme un projet qui existe depuis plus de 25 ans, c'est-à-dire la construction d'une salle de concert pour l'OSM.

Nous voulons vous démontrer la pertinence et l'importance d'un tel projet qui s'inscrit dans le soutien pour l'institution qu'est l'OSM. Cette nécessité a pour but d'assurer son développement et son rayonnement, tant au niveau artistique que celui de maintenir et de renouveler son public.

L'inauguration de la Place des Arts en septembre 1963 correspondait certainement à un progrès considérable à cette époque. Elle devenait ainsi un lieu de rencontre pour tous les milieux artistiques et le public dans sa diversité. Elle venait combler les attentes du monde artistique dans leur multiplicité. On avait conçu la Place des Arts avec des salles multifonctionnelles. Ces salles correspondaient plus aux critères de salles de spectacles qu'à ceux de salles de concert. La nuance entre les deux types de salles est considérable. La salle de spectacles se prête très bien à l'amplification, et la salle de concert est conçue pour favoriser une résonance naturelle du son.

Il faut bien situer l'OSM à cette époque. Durant les années soixante, l'OSM avait un rayonnement provincial. Il avait quelques enregistrements à son actif en format vinyle et avec la technologie du temps. Le public, tout autant, avait des critères d'écoute qui correspondaient à son évolution. Un choix s'imposait certainement dans les critères de la conception de la salle Wilfrid-Pelletier, soit d'accorder la priorité aux qualités acoustiques naturelles d'une salle de concert ou choisir d'en faire une salle polyvalente qui répondait ainsi à la diversité des besoins du monde artistique.

Mais, voilà, tout a évolué rapidement. Depuis 25 ans, l'OSM est passé du statut provincial à celui d'international. L'univers de la haute technologie est apparu, changeant du même coup les critères d'excellence de l'auditeur. Nous sommes passés de l'ère du gramophone à celle du monde numérique. L'OSM a été parmi les premiers orchestres symphoniques à faire le saut dans ces nouvelles technologies. Et, ainsi, le public a suivi cette évolution, et conséquemment, ses références ont évolué. Les critères d'audition musicale des nouvelles générations, tous styles confondus, sont maintenant basés non seulement sur la qualité des artistes et leur interprétation, mais également sur les progrès liés à la technologie numérique, ce qui fait que nous avons affaire à un public beaucoup plus exigeant.

À l'heure actuelle, les amateurs de musique classique délaissent les concerts de l'OSM parce qu'ils en ressortent souvent déçus. L'Orchestre leur semblait meilleur sur disque. Pourtant, il s'agit du bien... il s'agit bien du même orchestre, mais l'environnement sonore actuel ne favorise nullement une écoute satisfaisante.

Les installations de la salle Wilfrid-Pelletier pouvaient répondre à l'époque aux demandes de la communauté artistique et aux exigences du public, et correspondaient certes à un progrès. Cependant, à l'ère des enregistrements numériques et des systèmes de son haute fidélité, les critères de l'un et de l'autre ayant évolué, la salle Wilfrid-Pelletier ne peut plus répondre aux attentes du milieu musical et du public.

La qualité fondamentale d'une salle de concert, c'est son acoustique. Une bonne salle met en évidence et favorise ce qui fait l'acuité d'un artiste, c'est-à-dire sa clarté sonore, sa précision, ses multiples nuances, ses timbres variés, ainsi que la définition et la richesse du son de chacun des instruments. Elle doit permettre à tous ces éléments d'être retransmis au public, sans aucune altération. Les mélomanes peuvent ainsi percevoir toutes les subtilités de la musique, et se sentir enveloppés par elle, partageant ainsi toute l'énergie qui se dégage du travail collectif des musiciens. Assister à un concert devient alors une expérience unique.

Il faut comprendre que la salle de concert est la caisse de résonance pour l'orchestre, tout comme l'est celle du violon pour le musicien. Une des préoccupations majeures des musiciens est justement la qualité de leur instrument. Certains musiciens, parmi les cordes entre autres, ont investi jusqu'à 350 000 $ dans l'achat d'un instrument justement dans le but de pouvoir transmettre toutes les subtilités sonores de la musique. En faisant le parallèle entre l'instrument du musicien et celui de l'orchestre qui est la salle de concert, nous sommes à même de constater qu'actuellement les qualités de l'un sont neutralisées par les défauts de l'autre.

n(11 h 50)n

Malheureusement, la salle Wilfrid-Pelletier ne permet pas au public d'ici de vivre ces instants magiques. Cette salle multifonctionnelle a été conçue avant tout pour la présentation de spectacles qui requièrent une amplification. La configuration de celle-ci et les matériaux utilisés lors de sa construction absorbent le son au lieu d'assurer sa projection, ce qui est contraire aux besoins d'une formation symphonique.

Lorsque l'on assiste à un concert de musique classique à la salle Wilfrid-Pelletier, nous avons l'impression qu'un mur invisible sépare l'orchestre du public, que le volume sonore n'est jamais suffisant et qu'un filtre permanent agit sur les subtilités de la musique. Toutes les qualités qui font la notoriété de l'OSM sont perdues. Il est triste et regrettable de constater que le public montréalais n'a jamais vraiment entendu leur orchestre dans des conditions favorables. Quiconque a eu la chance d'entendre l'OSM dans une bonne salle a été impressionné par la différence du résultat sonore.

Lorsqu'on parle de bonnes salles de concert, on pense au Sontory Hall de Tokyo, le Symphony Hall d'Osaka, le Concertgebouw d'Amsterdam, au Carnegie Hall de New York ou bien au Symphony Hall de Boston. Ces salles où l'OSM s'est produit en concert à plusieurs reprises permettent aux auditeurs d'apprécier pleinement les qualités exceptionnelles d'un ensemble comme le nôtre.

Aussi, il est important de mentionner ici le problème de la préparation des concerts en rapport avec le lieu de travail. Très souvent, nous devons faire nos répétitions dans le troisième sous-sol, dans une pièce portant le nom de Salle D. C'est un endroit inadéquat pour ajuster l'équilibre sonore des différentes sections de l'orchestre, créer des timbres, les contrastes et les nuances qui sont tous des composantes majeures dans la conception de l'interprétation d'une oeuvre.

La réaction des chefs d'orchestre invités est unanime face à cet environnement sonore. Pour eux, tout comme les musiciens, il est impossible d'établir une référence pour l'équilibre sonore entre la salle des répétitions et la salle de concert. Mentionnons aussi le problème du volume sonore déployé par l'Orchestre. L'environnement devient alors extrêmement bruyant et même au-delà des normes de sécurité pour la santé des musiciens.

Ayant à concilier les horaires de la salle Wilfrid-Pelletier avec d'autres locataires, un autre avantage pour l'Orchestre d'avoir sa propre salle serait la possibilité de s'y produire aux moments qu'il le juge les plus appropriés. Cette plus grande flexibilité permettrait à l'Orchestre de répondre aux demandes de sa clientèle, et de développer de nouveaux publics.

À l'époque, M. Zubin Mehta, directeur général de l'OSM, dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, et maintenant directeur général de la Philharmonic de New York, affirmait, au sujet de la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, à l'époque, que la situation de l'OSM était loin d'être acceptable, notamment en raison de la multiplicité des concerts qui ne peuvent être présentés les meilleurs soirs de la semaine, les difficultés de trouver du temps propice pour les répétitions et d'un système acoustique déficient. Nous portons aussi votre attention sur quelques éléments plus secondaires comme la salle de repos et la musicothèque, tous les deux situés au sous-sol, où la fenestration est absente. Mentionnons aussi l'exiguïté de la musicothèque ainsi que des vestiaires.

Alors, la conception de la future salle de l'OSM devrait être constituée des éléments suivants: l'acoustique devrait être une priorité constante dans l'élaboration architecturale, le choix des matériaux, de la disposition scénique, etc.; la salle de concerts étant la caisse de résonance de l'Orchestre, sa configuration ainsi que le choix des matériaux sont d'une importance capitale, ceux-ci ayant une influence directe sur le résultat sonore final.

Faire appel à une expertise étrangère dans le domaine de l'acoustique devrait être une solution ou une perspective envisageable. Nous mentionnons ici les Japonais, puisque nous retrouvons au Japon les meilleures salles de concert modernes, au monde. La capacité maximale d'une bonne salle de concerts se limite généralement à 2 000 sièges. La disposition des fauteuils doit être conçue de façon à favoriser le rapprochement entre les musiciens et le public. Le spectateur peut ainsi apprécier pleinement toutes les précisions d'exécution et l'énergie dégagée par l'Orchestre. La scène devrait comporter un orgue à tuyaux. Actuellement, de nombreuses oeuvres symphoniques font appel à l'orgue, et nous devons composer avec un orgue électronique amplifiant.

Nous sommes convaincus qu'une nouvelle salle de concert à Montréal permettrait aux mélomanes de redécouvrir leur Orchestre, et susciterait dans la population un engouement pour la musique classique. Ce serait un investissement, qui profiterait au grand public, et qui aiderait à assurer l'avenir de l'OSM. Elle permettrait aussi d'offrir à d'autres ensembles musicaux, d'ici ou d'ailleurs, l'occasion de s'y produire. Une salle avec une bonne qualité acoustique attirerait nécessairement les grands de la musique, et confirmerait à Montréal sa position unique, sur les plans culturel et touristique, parmi les grandes villes internationales.

L'Orchestre symphonique de Montréal constitue l'une des plus importantes institutions culturelles du Québec. Il est aussi l'un des plus extraordinaires ambassadeurs sur lesquels nous puissions compter à l'échelle internationale. Acclamé à l'étranger comme chez nous, il est reconnu par tous que Montréal possède le meilleur orchestre symphonique francophone au monde, et que, contrairement aux autres villes américaines ou européennes comparables, Montréal n'a toujours pas une salle de concert pour mettre en valeur et favoriser le développement de son orchestre.

La renommée sans cesse grandissante de l'Orchestre au cours des 25 dernières années confirme l'urgence de le doter d'une salle à sa mesure afin d'assurer son avenir, et de permettre enfin à la population d'apprécier pleinement cette institution. L'OSM est un symbole dans la société québécoise. Nous croyons que l'évolution d'une société est reliée aux soins qu'elle apporte à préserver ses institutions. En conséquence, nous vous demandons de recommander au gouvernement du Québec la mise en marche, dans les meilleurs délais, du processus menant à la construction d'une salle de concert pour l'Orchestre symphonique de Montréal. Je vous remercie.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci à vous. Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe, nous vous écoutons avec attention.

M. Dion: Merci, M. le Président. MM. Leclerc et Leblanc, bonjour. Merci pour le plaidoyer fort éloquent que vous avez fait pour une salle de concert à Montréal. Je pense qu'il serait difficile d'en faire un meilleur, et soyez bien assurés qu'il est reçu en bonne part. Et, dans la mesure où nous pouvons y contribuer, c'est sûr que nous sommes particulièrement sympathiques à votre demande, connaissant votre grande réputation absolument incroyable. Aussi, je pense que vous faites rayonner partout dans le monde la culture d'où est issu l'Orchestre symphonique. Alors, je vous remercie.

Cependant, vous comprendrez qu'on a quand même certaines questions qui se présentent, dans le contexte actuel dans lequel se tiennent ces audiences. Vous comprendrez que la plus belle salle de concert à Montréal, grevée d'une hypothèque de relations de travail... qui serait grevée d'une hypothèque de relations de travail comme celle que nous connaissons maintenant, on aurait l'impression d'avoir mis beaucoup de fonds publics dans une situation qui ne serait pas très rentable pour la collectivité ni pour le rayonnement du Québec. Alors, ça m'amène donc à vous poser des questions sur la situation actuelle que vous vivez, comme d'autres organismes.

À entendre ce qui s'est dit depuis le début ? on a entendu Les Grands Ballets, on a entendu le groupe... la troupe Gilles-Duceppe, vous et d'autres personnes ? l'impression que je garde toujours, c'est qu'il y a une condition sine qua non au fonctionnement ou à la réalisation d'un spectacle dans la meilleure des conditions, c'est qu'il y ait de bonnes relations entre les artistes et ceux qui forment le support technique; dans le cas présent, tous les gens qui sont représentés par IATSE.

Alors, je pense que, s'il y a pas de bonnes relations entre les deux, il est difficile de donner 100 %. Et, dans la mesure où on peut y arriver, les coûts sont... risquent de faire gonfler le prix du billet, et on sait que chacun a des limites dans son budget, et qu'il décide à un moment donné qu'à partir de tel prix il peut plus y aller; alors, il se prive.

Alors, dans ce contexte-là, croyez-vous que la solution idéale ne serait pas que les ententes se signent et se fassent entre les producteurs eux-mêmes ou les troupes elles-mêmes et les techniciens, plutôt qu'entre la Place des Arts?

n(12 heures)n

Le Président (M. Simard, Montmorency): Monsieur?

M. Leclerc (Jean-Marc): Bien, nous, pour la gestion des compagnies, nous voyons aucune... Le point de vue de l'Association, c'est que nous voyons aucune objection à ce que les compagnies fassent affaire avec la Place des Arts ou bien... Si, éventuellement, la Place des Arts... Si, éventuellement, il y avait une salle de concert qui s'ajoutait au complexe de la Place des Arts, on voit aucun inconvénient à ce que la Place des Arts soit le gestionnaire de l'ensemble.

En ce qui a trait à la relation avec nos techniciens, nous, on est un petit peu éloignés de ces conflits de travail. Ça nous touche pas directement. Il y a eu quelques demandes de la part des musiciens qui ont été exaucées, si vous voulez dire... si on peut dire. Et puis, concernant les percussions, à un moment donné, les percussionnistes avaient besoin d'une aide supplémentaire, ça, ça a été renégocié avec l'OSM et ses techniciens, puis ils en sont venus à une entente, puis le tout est rentré dans l'ordre. Mais à savoir les coûts et les coûts qu'actuellement que génèrent les techniciens, tout ça, ce sont des préoccupations... Je parle de l'Association des musiciens de l'OSM, nous, on est plus ou moins concernés, on est concernés de loin par ces préoccupations-là. Je dirais, c'est plus l'administration de l'OSM qui est concernée par ces problèmes-là.

M. Dion: Alors, ce que je comprends, c'est que vous avez donc une entente avec IATSE, l'Orchestre symphonique de Montréal?

M. Leblanc (Jean-Marc): Cet après-midi, les représentants de l'administration de l'OSM vont être ici pour... Je pense qu'ils vont être plus aptes que nous à vous en parler plus clairement. Parce que nous comme musiciens, je veux dire, on n'a pas énormément de contacts avec eux parce qu'on n'est pas amplifiés. C'est tout... Ça se fait naturellement, c'est juste une question d'éclairage ou de fonctionnement de chaises et de lutrins. Alors, c'est assez rudimentaire, puis disons que, pour ce qui est de tout le reste, là, ils vont être plus en mesure que nous de vous en... de vous expliquer.

M. Leclerc (Jean-Marc): Si c'est pour parler de la qualité du service reçu, nous, directement les musiciens, on n'a pas de... Comme je vous dis, à part la section des percussionnistes, qui avait des demandes... Les demandes ont été satisfaites l'an dernier, puis tout est rentré dans l'ordre. Mais, le climat entre les techniciens et les musiciens est excellent, il y a aucun problème à ce niveau-là.

Mais, pour la question des budgets puis toute la gestion de... Je pense que, comme mentionnait mon collègue Jean-Marc, il faudrait insister sur la question avec l'administration de l'OSM, et nous, on est l'Association des musiciens de l'OSM.

M. Dion: J'apprécie beaucoup votre témoignage. Je pense que ça nous permet de voir qu'il y a quand même un soleil à l'horizon qui est possible, hein, à travers les difficultés qu'on considère aujourd'hui. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, M. le député d'Iberville.

M. Bergeron: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue à la commission de la culture. Vous avez fait un vibrant plaidoyer pour la construction d'une salle. Vous déplorez l'acoustique de Wilfrid-Pelletier et certains détails ou certaines formes qui puissent vous incommoder. S'il y avait... Et vous avez dit aussi que vous aviez pas le choix des dates, disons, les bons soirs où il pourrait y avoir des spectacles. S'il y avait construction d'une salle, que ce soit une sixième salle... Est-ce que vous verriez sous le grand chapeau de la Place des Arts ou vous préféreriez que ce soit indépendant?

M. Leblanc (Jean-Marc): Ça se peut, tout est possible. On n'a pas de... Ça pourrait être géré par la Place des Arts aussi ou être indépendant. En fait...

M. Leclerc (Jean-Marc): Pour vous donner un exemple, actuellement l'OSM participe au Festival de Lanaudière, et l'amphithéâtre Lanaudière est géré par la Place des Arts. Alors, pour nous, en tant que musiciens, là, puis en tant que membres de l'Association... Encore là, c'est une question qu'il faudrait poser plus à l'administration de l'OSM qu'à l'exécutif de l'Association.

M. Bergeron: Parce que, éventuellement, la construction d'une salle de spectacle va demander une injection massive de fonds publics. Présentement, est-ce que vous pouvez me chiffrer à combien de soirs, disons, dans une année... S'il y avait une maison de l'Orchestre symphonique de Montréal, combien de soirs par année seraient occupés par l'OSM?

M. Leblanc (Jean-Marc): Vous voulez parler seulement de concerts ou de répétitions? Seulement de...

M. Bergeron: Mais, en fin de compte, tout cet ensemble-là, c'est que... Ce que, moi, je comprends, c'est que vous voulez avoir une salle qui serait à votre usage exclusif. Exclusif, j'entends, c'est que vous seriez le premier propriétaire, et vous pourriez, disons, la laisser à d'autres, disons, certains soirs où vous en avez pas besoin. Puis il faut toujours tenir compte du fait qu'il y a beaucoup de salles de spectacle à Montréal. Si on... En fin de compte, j'anticipe un peu de la réponse, mais, s'il y a une maison de l'Orchestre symphonique de Montréal, qu'on pourrait louer d'autres soirs, est-ce qu'il y a une demande suffisante dans une ville de la taille, de la grandeur de Montréal?

M. Leblanc (Jean-Marc): Bien, nous, on croit que oui, parce que, évidemment... Bon, premièrement, on aimerait ça que les gens entendent l'OSM. Quand ils viennent à la salle Wilfrid-Pelletier, ils ne l'entendent pas. Si vous avez eu la chance d'entendre l'Orchestre symphonique dans une bonne salle en tournée ou à l'extérieur, vous verrez l'immense différence que ça crée. Alors, pour nous, là, c'est tellement évident, tout ça, que disons qu'on pourrait jouer plusieurs soirs par semaine. C'est sûr que, nous, la demande, on trouve qu'elle est là, parce que les gens, ce qu'ils vont avoir, c'est qu'ils vont entendre, ils vont vivre une expérience musicale qui est totalement différente de ce qu'ils ont présentement, tu sais. Ça fait que c'est... Pour nous, c'est comme deux mondes, là, deux... Ça fait qu'on dit que, oui, il va avoir un engouement pour la salle de concert et pour entendre l'orchestre, des concerts sans amplification, tout ca. Ça peut être du récital en passant par des versions d'opéra, versions concert ou, bon, une multitude d'événements musicaux sans amplification. Ce serait un atout majeur pour Montréal autant au niveau culturel... Les gens qui viennent de partout, une visibilité aussi.

M. Leclerc (Jean-Marc): Vous avez mentionné aussi une expression, là, intéressante, c'est que vous dites qu'il y a beaucoup de salles de spectacle. Et combien de salles de concert? C'est ça, la question majeure dans cette... Combien de salles de concert à Montréal? Pour recevoir l'OSM, il y en a pas. Il y a des salles de spectacle pour recevoir des formations comme l'OSM, il y a des salles de spectacle pour recevoir I Musici, recevoir l'Orchestre métropolitain, les Violons du Roy, je pense, toutes les formations au Québec, là, mais de salles de concert pour recevoir ces formations-là, il y en a pratiquement pas.

M. Leblanc (Jean-Marc): Moi, j'en connais, il y a Lanaudière. Lanaudière a un acoustique qui est très, très bon, mais malheureusement, c'est ouvert juste l'été. Alors... Mais c'est pas Montréal.

M. Bergeron: Mais ma question de tantôt: Combien de soirs dans une année sur les 365 soirs qu'une année nous procure?

M. Leblanc (Jean-Marc): ...trois à quatre soirs par semaine.

M. Bergeron: Pendant combien de semaines?

M. Leblanc (Jean-Marc): Bien, on a un contrat de 46 semaines par année, mais nous, on aimerait bien qu'il soit de 50, là, ou de 52, mais ça... Mais on fait beaucoup aussi de concerts l'après-midi. Il y a des séries le matin aussi pour les Matins Métro. C'est très populaire aussi. On fait des concerts éducatifs pour les enfants aussi en journée. Mais, disons qu'il y a plusieurs concerts, on en a différents types, là.

M. Leclerc (Jean-Marc): Le maximum de concerts dans une semaine peut être cinq concerts, et le temps que l'OSM occupe... que les musiciens occupent la Place, c'est 20 heures par semaines, incluant les répétitions et concerts.

M. Bergeron: Et, vous savez, tantôt vous m'avez répondu de façon plus évasive, oui, on croit... les gens viendraient de l'extérieur, mais est-ce qu'il y a une étude ou des études ont été faites sur une éventuelle rentabilité d'une salle de concert à Montréal?

n(12 h 10)n

M. Leblanc (Jean-Marc): Bien, il y a eu beaucoup, beaucoup de projets de salle de concert pour l'OSM depuis... Moi, ça fait 18 ans que je suis là, puis depuis que je suis là qu'il y en a tout le temps eu puis... parce qu'il y avait vraiment un besoin, parce qu'il y a des gens qui sont pas satisfaits, évidemment, de la salle Wilfrid-Pelletier. Mais il y a sûrement eu des études de faites. Vous voulez dire de rentabilité, et tout ça, là? Alors, oui, mais... Il y en a eu.

M. Leclerc (Jean-Marc): C'est que, vous savez, les musiciens sont pas des économistes, et on laisse l'expertise aux gens de faire ces... qui ont la fonction ou qui ont l'expertise pour le faire.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...que la musique et l'économique ont des affinités.

M. Leblanc (Jean-Marc): Nous, on connaît... Bien, comme tout le monde, vous avez déjà entendu de la musique classique sur un petit radio puis sur un système de son haute-fidélité, bien, évidemment, la différence, c'est la même chose. Quand on va partout en tournée en Europe, ou aux États-Unis, ou au Japon puis qu'on joue dans des bonnes salles, juste notre instrument, on a l'impression qu'il vaut le triple, là. Tu sais, je veux dire, c'est comme, tout d'un coup, ah, il y a des résonances, les harmoniques, tout sort, on entend jouer tout le monde, on s'entend tous très bien et on arrive à un résultat qui est deux fois ce qu'on obtient à Wilfrid-Pelletier. Fait que c'est sûr qu'on a une grande frustration de jouer ici.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, Mme la députée de Sauvé, à vous la parole.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Bonjour. Entre le moment où vous avez déposé ce mémoire ? on était en mars 2000... 2001 ? et aujourd'hui, on sait qu'on a réentendu parler plus spécifiquement de ce projet-là. Entre autres, le journal Les Affaires a annoncé que la SIQ, la Société immobilière du Québec, examinait de près l'établissement d'un nouvel immeuble avec des planchers de bureaux, mais qui comprendrait une salle pour l'OSM et qui serait à proximité de la Place des Arts. Je sais que mes questions pourraient aussi s'adresser à l'administration de l'Orchestre symphonique, mais je pense que vous, comme musiciens... Si je ne me trompe pas, M. Béliveau, vous êtes violoniste, si je me souviens bien.

M. Béliveau (Marc): Oui.

Mme Beauchamp: Oui, c'est ça. Je me dis que, comme musiciens, vous devez suivre de près le dossier, selon moi, ou vous tenir au courant. C'est pas pour rien que vous êtes devant nous aujourd'hui, je pense que vous êtes parmi les premiers intéressés par ce projet-là. Donc, à votre connaissance, avez-vous eu des nouvelles? On est au printemps, on voit cet article-là où on mentionne que la Société immobilière du Québec réalise des études pour un projet au centre-ville de Montréal. Vous êtes les premiers concernés, depuis ce temps, vous, avez-vous eu un son de cloche? Avez-vous eu des nouvelles plus fraîches qui nous permettraient de nous éclairer sur l'avancement de ce projet-là mené en ce moment par la Société immobilière du Québec?

M. Béliveau (Marc): Moi, les nouvelles, c'est les mêmes que vous, que j'ai lues dans les journaux. Ça va plus loin que ça.

Mme Beauchamp: Donc, ça signifie que, dans l'élaboration des études... Parce qu'on disait qu'on faisait des plans de faisabilité, etc., vous êtes ici en train de me dire qu'il n'y a pas eu de contact direct avec l'Association des musiciens pour, par exemple, aller voir quelles étaient vos attentes, vos préoccupations, vos exigences, si je puis dire, par exemple, du point de vue acoustique, du point de vue dimensions, etc. Il n'y a pas eu de contact direct soit avec la SIQ ou avec une firme qui réaliserait ces études-là en ce moment ou qui serait censée les avoir réalisées.

M. Béliveau (Marc): Non, mais on trouve l'idée excellente.

Mme Beauchamp: ...

M. Béliveau (Marc): Pardon?

Mme Beauchamp: Quelle idée vous trouvez excellente?

M. Béliveau (Marc): Excellent qu'ils viennent consulter l'Association des musiciens pour avoir le point de vue puis connaître priorités que l'Association accorderait, là, à l'élaboration d'une salle de concert.

Mme Beauchamp: Oui, c'est ça. C'est parce que cette nouvelle-là a paru, elle n'a pas été démentie, et je vous rappelle qu'on traité de ça en Chambre, au salon bleu, lors d'une période de questions de façon détournée. Je m'explique, c'est que lié à ce projet-là, il y avait aussi le déménagement du Conservatoire de théâtre, de ses installations actuelles, vers des installations qu'il déplorait, mais qui étaient temporaires. Le président du Conseil du trésor... Parce que ça a entraîné, entre autres, la démission de Normand Chouinard, comédien réputé, qui était le directeur du Conservatoire et qui a démissionné parce qu'il déplorait de ne pas avoir l'assurance que son déménagement était temporaire, était bel et bien temporaire, alors que, dans le fond, ce qui était dans l'air, c'est que le Conservatoire pourrait éventuellement aller s'établir dans la même tour où il y aurait la salle pour l'OSM.

Donc, ce que je comprends, c'est qu'il y avait un climat de très forte incertitude quant à la réalité, si je puis dire, et la réelle intention de procéder à cette salle-là. Et, à cette époque-là, on était en juin, on avait contacté par voix téléphonique des représentants de l'Orchestre qui nous disaient également ne pas être en contact avec la Société immobilière du Québec. Donc, moi, je prends note, et on fera les représentations nécessaires pour dire: Si on parle de ce projet-là vraiment, c'est étrange qu'il n'y ait pas encore de contact avec l'Association des musiciens, pas pour avoir, cet après-midi, s'il y a eu contact depuis ce temps avec l'Orchestre symphonique.

De votre point de vue à vous ou à votre connaissance, par le passé, les projets... Vous-même, vous le dites dans votre mémoire, vous nous en faites l'historique de ce projet-là de salle de concert, et c'est apprécié, à chaque fois il y avait un partenaire... En fait, vous parlez de compagnies, vous parlez de Cadillac Fairview, vous parlez de la compagnie Sofati, si je me trompe pas. À votre connaissance, parce que ça, c'étaient des partenaires privés qui investissaient financièrement dans ces projets-là... Et ma question, donc, c'est: À votre connaissance ou... Est-ce que vous pensez qu'il peut y avoir un partenaire privé qui serait joueur dans ce projet-là de mettre en place une nouvelle salle de concert ou si, vous, vous croyez qu'un tel projet doit reposer uniquement sur les épaules du gouvernement du Québec?

M. Leclerc (Jean-Marc): Eh bien, nous, on a tout simplement fait l'historique, dans notre mémoire, de ce qu'il y avait eu dans le passé, là, comme études, et puis on... C'est basé surtout sur l'historique, et puis à savoir tout le financement et tous les milieux qui pourraient être impliqués dans une salle de concert, je trouve que ça dépasse un peu nos compétences.

Mme Beauchamp: ...pas regarder ça de plus près ou des contacts vous-mêmes...

M. Leclerc (Jean-Marc): Non.

Mme Beauchamp: ...pour voir à la possibilité de faire avancer tangiblement ce projet-là?

M. Leblanc (Jean-Marc): Bien, là, je voudrais pas vous induire en erreur, là. Je me souviens de ces projets-là, mais c'est il y a longtemps, là, puis je voudrais pas m'avancer outre mesure.

Mme Beauchamp: O.K. On pourra en reparler peut-être cet après-midi. J'ai peut-être une dernière question pour vous. Je disais que vous êtes les... au premier rang des intéressés par une nouvelle salle de concert qui serait performante, je dirais, là, du point de vue acoustique, et tout ça, mais, selon vous, il y a d'autres compagnies qui utilisent les services d'orchestres qui se produisent... Je cherche l'expression française presque, mais «live», hein? Je pense à L'Opéra de Montréal, je pense aux Grands Ballets. Il faut pas oublier que, lorsque la salle Wilfrid-Pelletier a été construite, c'était dans... on parlait d'une salle de concert à l'époque. Le projet, c'était entre autres qu'une corporation mettre en place une salle de concert, mais effectivement elle est devenue une salle plus polyvalente. Mais, à votre connaissance, une nouvelle salle de concert avec une acoustique de qualité, est-ce que ça ferait en sorte, dans votre vision à vous, que des compagnies utilisant les services d'un orchestre comme, par exemple, L'Opéra de Montréal ou Les Grands Ballets... Ça serait dans une logique artistique, là, ça serait logique qu'ils aillent plutôt vers une salle de concert? Est-ce qu'il faut s'attendre à ce que ces compagnies-là, éventuellement, aillent vers la salle de concert plutôt que la salle Wilfrid-Pelletier?

M. Leblanc (Jean-Marc): ...je veux dire, il peut y avoir des collaborations, c'est sûr et certain, pour des événements spécifiques. On peut penser, mettons, à un opéra version concert, on peut penser à des danseurs de ballet qui viendraient danser devant un orchestre, tout ça. Mais, si on parle d'une salle avec plus de fonctions, ça veut dire qu'il y ait une fosse pour l'orchestre ou des éléments de décor importants pour produire des productions de ballet, ou tout ça, là, c'est... On rentre dans une autre gamme de salles, dans un autre ordre, là. Mais il peut y avoir, à l'occasion ou souvent, des collaborations entre les organismes, c'est sûr.

Mme Beauchamp: Si vous appreniez que le projet fait en sorte que la salle est pas uniquement une salle de concert, mais une salle étant principalement une salle de concert, mais ayant une certaine polyvalence permettant, par exemple, la présence de grands décors, fosse d'orchestre, etc., êtes-vous déçus ou réjouis?

M. Leblanc (Jean-Marc): Ça dépend de l'acoustique. Nous, c'est l'acoustique. On compte... Comme Wilfrid-Pelletier, le grand problème, c'est qu'au-dessus de nous il y a une élévation de 50 pieds dans les airs, puis après ça il y a des rideaux, après ça il y a les gens. Alors, tout le son monte, là, se perd dans les rideaux puis dans les hauteurs. C'est pas conçu pour projeter le son, tu sais, comme un...

M. Leclerc (Jean-Marc): Tu sais, essayer de faire le ménage... la fusion entre la polyvalence puis une salle de concert, tout ça, il y a un point d'interrogation, là, puis je pense que c'est ça qui est... Pour nous, dans toutes les salles de concert qu'on... de véritables salles de concert où on s'est produit, il y a pas de... C'est pas des salles qui sont faites pour des spectacles autres que la musique classique, là.

M. Leblanc (Jean-Marc): C'est libre. Comme au-dessus de l'orchestre, l'espace, là, c'est... Tu sais, c'est comme... Ça va être un mur en plâtre ou en bois, mais, je veux dire, c'est conçu que les gens reçoivent tout le son.

Mme Beauchamp: ...tantôt du principe de la caisse de résonance, là, carrément.

M. Leblanc (Jean-Marc): Oui.

n(12 h 20)n

Mme Beauchamp: On parle... Quand on parle de ce projet-là, on parle de la salle de L'OSM, mais, moi, je me pose des questions, là. C'est qui, les autres clients possibles? Je dis clients, c'est peut-être pas la bonne expression, là, mais les autres utilisateurs possibles d'une telle salle? Puis est-ce qu'ils y auraient vraiment de la place? Tantôt, vous répondiez à la question sur l'utilisation possible qu'en ferait l'Orchestre symphonique, est-ce qu'on est en train de parler vraiment de la salle de l'OSM ou on est en train de parler plus largement d'une salle de concert qui pourrait faire place à d'autres utilisateurs?

M. Leblanc (Jean-Marc): Bien sûr, elle pourrait faire place à d'autres utilisateurs, c'est certain, parce que...

M. Leclerc (Jean-Marc): À l'époque, ça s'appelait la Maison de la musique. Alors, c'était pas la Maison de l'OSM, ça s'appelait... Dans les projets, là, ça s'appelait la Maison de la musique, alors ce qui sous-entendait qu'il y avait pas juste l'OSM qui pouvait se produire là, là, puis les formations comme I Musici, Métropolitain, puis tout ça, même les récitals, comme... Si on prend le Carnegie Hall, Carnegie Hall produit des récitals dans cette salle symphonique, là. Puis, si on regarde aussi Lanaudière, Lanaudière a plein de spectacles autres que des productions symphoniques ou... Il y a des récitals, il y a toutes sortes de formations qui se produisent à Lanaudière. Mais, ça se prête bien à ça, Lanaudière a une acoustique assez formidable.

M. Leblanc (Jean-Marc): Ça attire beaucoup aussi d'artistes internationaux de partout qui veulent jouer dans des salles qui ont une acoustique favorable, tu sais, à leur performance. On parle à des chanteurs, on parle à des pianistes de réputation mondiale, tu sais, qui vont sûrement être intéressés de passer par Montréal. Déjà que le nom de la ville circule partout, là, tu sais, avec tous les artistes qu'on a ici qui sont reconnus mondialement, alors...

Mme Beauchamp: M. le Président, moi, j'aurais une dernière question. C'est que comme musiciens, comme membres de l'Association des musiciens, vous avez, là, à maintes reprises exprimé le fait que votre principal intérêt était la qualité acoustique d'une nouvelle salle. Or, dans votre présentation, vous avez fait allusion à l'expertise étrangère pour assurer cette qualité d'acoustique. Vous savez fort bien que vous touchez une corde sensible. On aime bien, nous, penser qu'on a ici, par exemple, au Québec des personnes aptes à réaliser ça. Quand vous plaidez pour une expertise étrangère ? vous avez mentionné l'expertise japonaise ? est-ce qu'il faut comprendre que selon vous, comme musiciens de l'OSM, vous considérez qu'il n'y a pas en ce moment au Québec ou au Canada l'expertise requise pour réaliser la salle de concert dont vous rêvez? Est-ce que c'est ça qu'il faut comprendre?

M. Leblanc (Jean-Marc): C'est fort possible qu'on puisse trouver ici quelqu'un qui peut concevoir une salle de concert, c'est juste qu'on n'a pas l'exemple ici pour dire: On veut ça. Tu sais, on peut pas regarder à Toronto non plus, ils ont fait une salle en béton, tu sais, d'ailleurs, qu'ils investissent pour la changer. Mais, en tout cas, on a le bois puis on a les matériaux, les gens. Probablement qu'il y a des architectes qui... Mais, de toute façon, ce qu'on veut dire, nous, c'est qu'ils vont s'inspirer de salles modernes qui ont déjà été construites ailleurs qui ont eu des résultats fantastiques, là, tu sais, c'est ça qu'on veut promouvoir. C'est pas nécessairement les gens, directement, qui vont concevoir, mais qui vont connaître d'autres produits.

Mme Beauchamp: D'être sûr qu'on aura été consulter les concepteurs des salles que vous, vous considérez comme les meilleures au monde?

M. Leblanc (Jean-Marc): Bien, c'est ça, oui. C'est ça que...

Mme Beauchamp: C'est ça que vous souhaitez avant tout et non pas qu'on confie carrément la réalisation de la salle à une compétence étrangère. C'est ça, la nuance. C'est-à-dire peut-être que ça serait le cas, mais à tout le moins s'assurer qu'on est allé bel et bien voir...

M. Leblanc (Jean-Marc): Voir ici avant, évidemment, oui.

Mme Beauchamp: O.K.

M. Leclerc (Jean-Marc): Puis, j'aimerais répondre plus directement à votre question, c'est qu'on ne s'est pas produits encore au Canada dans une salle équivalente aux salles japonaises. Alors, vraiment, c'est les salles les plus ? comment dire? ? «high tech» qu'on a pu expérimenter. Le son, là-dedans, c'est un son digital, c'est incroyable. Puis le niveau, le standard, c'est le même dans toutes les petites banlieues ou petites villes, c'est comme... On retrouve une constante chez les Japonais. Alors, pour nous, c'est comme une référence. Mais on envisage... Je veux dire, si on avait vécu la même expérience au Canada, bien on dirait: C'est ici que ça se passe au niveau de l'expertise. Mais on propose peut-être une collaboration ou bien peut-être que les... C'est une référence plus qu'autre chose. C'est pas pour diminuer non plus la compétence au Québec, là, mais disons qu'on s'est basés sur du vécu, là, puis...

M. Leblanc (Jean-Marc): Ils se sont inspirés des salles européennes aussi, tu sais, quand même beaucoup.

Mme Beauchamp: ...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci, Mme la députée. Alors, MM. Leclerc et Leblanc, merci de votre apport à nos travaux. Sur ce, je suspends nos travaux jusqu'à 14 heures et j'invite les membres de la commission à laisser leurs documents sur cette table, nous allons barrer les portes. Au plaisir de vous revoir.

(Suspension de la séance à 12 h 25)

 

(Reprise à 14 h 9)

Le Président (M. Boulianne): Alors, la commission ayant quorum, nous allons débuter nos travaux. Alors, nous recevons aujourd'hui, cet après-midi, l'Opéra de Montréal. Il est représenté par M. André Laurin et Kim Gaynor. Alors, bienvenue. Alors, vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire et nous présenter aussi la personne qui vous accompagne.

L'Opéra de Montréal (L'ODM)

M. Laurin (André): Alors, juste quelques secondes. Kim Gaynor est notre nouvelle directrice générale depuis le mois de mars. C'est une personne qui a oeuvré dans le milieu artistique à différents endroits et à Montréal avant aux Grands Ballets canadiens et elle a été près de six ans même à Londres, où elle a travaillé entre autres au Opera House là-bas, à Covent Garden, et elle a également travaillé au Centre national des arts à Ottawa et avec d'autres organisations. Donc, elle a une connaissance assez large du milieu de l'opéra et du milieu des institutions culturelles et artistiques dans notre environnement particulier.

n(14 h 10)n

Alors, nous vous remercions de nous avoir invités à vous soumettre un mémoire ? je suis ici présent à tire de président du conseil de l'Opéra ? et à vous présenter nos réflexions sur la Société de la Place des Arts dans le cadre de cette commission.

On voudrait souligner au départ l'importance que revêt la Société de la Place des Arts pour la vie culturelle montréalaise et, plus généralement, québécoise. Pour nous, la Société de la Place des Arts est d'autant plus importante qu'elle est ? et il faut bien le souligner ? le seul lieu de diffusion capable d'accueillir nos productions, compte tenu des exigences techniques que celles-ci requièrent et la capacité des salles. On peut pas produire un spectacle d'opéra dans une autre place au Québec... On pourrait le faire à Québec, au Grand Théâtre, mais, à Montréal, c'est le seul endroit où on peut le faire. On peut pas parler du Centre Molson, par exemple.

Les relations entre L'Opéra de Montréal et la Société de la Place des Arts peuvent être considérées comme très bonnes. Cependant, les dernières années ont été marquées par une situation exceptionnelle reliée à la grève des techniciens. À cela s'ajoutent de profondes transformations des habitudes de consommation de l'art par le public québécois qui nous forcent à revoir les modalités traditionnelles de notre fonctionnement. Ces éléments nous portent à réfléchir sur les relations qu'il serait souhaitable de voir s'installer entre L'Opéra de Montréal et la Société de la Place des Arts.

Après vous avoir présenté en quelques mots L'Opéra de Montréal, nous analyserons, à la lumière du mandat de la Place des Arts, notre situation et nos attentes à titre de compagnie en résidence. La problématique reliée aux services techniques fera l'objet d'une réflexion complémentaire. Nous terminerons notre intervention par une série de recommandations et ajouterons quelques commentaires sur le texte écrit que vous avez. Je vais sauter la partie L'Opéra de Montréal. Qui sommes-nous?, que je vous invite néanmoins à lire, mais pour peut-être aller avec des figures ou des expressions plus précises.

L'Opéra de Montréal, si on s'en tient aux propos que nous tient le président de la Place des Arts, est le locataire le plus important de la Place des Arts par le montant des loyers qu'il verse à la Place des Arts. C'est un organisme qui utilise, à chaque année, les services d'environ 325 à 350 personnes, certains à temps plein, d'autres à temps partiel. C'est une masse salariale qui représente près de 4 millions de dollars. Tous les artistes et artisans qui oeuvrent pour L'Opéra de Montréal sont en très grande majorité des gens locaux, qui viennent du Québec. Que ce soient les artisans qui fabriquent nos décors, nous avons, comme certaines institutions comme les Céline Dion, les Cirque du Soleil, créé un marché pour nos artisans, nos créateurs de décors ? ceux d'entre vous qui avez pu voir certains de nos spectacles ont pu constater la qualité de certaines productions que font nos artisans d'ici ? les techniciens, dont on parle beaucoup dans le cadre de cette commission, les musiciens, les chanteurs qui font partie de notre choeur et également les chanteurs solistes.

Nous avons, à quelques occasions, entendu parler des gens nous disant que, parce que, évidemment, l'opéra est un spectacle qui fait appel à des artistes beaucoup sur la scène internationale pour avoir une variété de talents, que finalement c'étaient pas tellement des gens d'ici que nous invitions mais beaucoup plus des Américains. Permettez-moi de préciser simplement que, par exemple, au cours de l'année 1999-2000, où nous avons fait le calcul à cette époque-là, que plus de 70 % des chanteurs solistes étaient des gens qui venaient du Canada et plus de 53... 55 étaient des gens qui sont des chanteurs résidant au Québec. Alors donc, il faut corriger cette impression-là que certaines personnes peuvent avoir. Ceci étant dit, je laisse la parole maintenant à Kim sur la situation actuelle de L'Opéra de Montréal.

Mme Gaynor (Kim): Merci. Il est évident que L'Opéra de Montréal a mis sur pied de nombreuses activités qui lui assurent un rôle primordial au Québec en matière d'art vocal. Mais le coeur de ces activités est constitué de sa série régulière présentée à la Place des Arts. Pour la saison 2001-2002, L'Opéra de Montréal présentera six opéras, dont une création et trois nouvelles productions, totalisant 34 représentations. À cette série s'ajoute le gala annuel qui aura lieu également à la salle Wilfrid-Pelletier en décembre. Ces activités permettront à la Société de la Place des Arts de compter plus de 70 000 entrées.

Le budget de L'Opéra de Montréal est de 7,5 millions de dollars. Il est autofinancé à 61 %, subventionné à 31 %, et les contributions du secteur privé représentent 8 %. Pour la première fois depuis 10 ans, L'Opéra de Montréal connaît un déficit de l'ordre de 670 000 $. Tout indique que, pour l'année en cours, il enregistrera un déficit dont l'ordre de grandeur est encore indéterminé. Largement tributaire de ses revenus de guichet, le moindre écart défavorable à ce titre a un effet désastreux sur les résultats financiers. L'Opéra de Montréal compte à l'heure actuelle 6 600 abonnés, ce qui correspond à une baisse de 13 % par rapport à l'année dernière. Plusieurs facteurs ont contribué à cette baisse d'assistance, mais le principal reste le conflit que la Place des Arts a connu avec ses techniciens, entraînant des changements dans la programmation et même l'annulation de représentations. Le sentiment de déstabilisation ainsi créé a profondément affecté la confiance des abonnés de L'Opéra de Montréal. Nous croyons que plusieurs années seront nécessaires pour rétablir un climat de confiance.

Il est évident que L'Opéra de Montréal doit envisager de mettre en oeuvre de nouvelles stratégies de financement, notamment en élaborant, de concert avec le milieu des affaires et le gouvernement du Québec, une stratégie à long terme qui lui permettra d'assurer la pérennité de son institution. Dans cette optique, il apparaît également nécessaire de revoir les modalités de partenariat qui nous lient à la Place des Arts.

M. Laurin (André): En regardant ce contexte de notre relation avec la Place des Arts, permettez-moi d'attirer votre attention sur l'article 20 de la Loi sur la Société de la Place des Arts, que vous connaissez bien, qui définit le mandat de la Société ainsi:

«La Société a pour objet d'exploiter une entreprise de diffusion des arts de la scène et d'administrer la Place des Arts ou tout autre établissement dont le gouvernement lui confie la gestion. Ces activités ont particulièrement pour but de procurer un lieu de résidence aux organismes artistiques majeurs, de favoriser l'accessibilité aux diverses formes d'art de la scène et de promouvoir la vie artistique et culturelle au Québec.»

À la lecture de cette définition, on se rend compte de l'étendue du mandat de la Société de la Place des Arts qui, à toutes fins pratiques, lui permet d'être un intervenant de première ligne en matière de diffusion artistique. En ce qui concerne L'Opéra de Montréal, force est de constater que la Place des Arts ne semble pas avoir tous les moyens nécessaires pour remplir son mandat comme nous le souhaiterions.

Le statut de compagnie en résidence. Compagnie en résidence à la Place des Arts, L'Opéra verse la plus importante contribution annuelle à titre de loyer et redevances, soit environ 560 000 $ par année. Bien que les relations entre L'Opéra et la Place des Arts soient très bonnes, on peut penser que, dotée de ressources nécessaires, la Place des Arts pourra jouer un rôle de premier plan dans le développement des arts de la scène en contribuant de façon plus étroite au succès des compagnies résidentes, par exemple en accordant des tarifs préférentiels sur la location des salles ? par rapport aux spectacles qui se produisent sur des bases irrégulières ? ou encore en aménageant les lieux de façon à améliorer l'accueil réservé à leur public, à leurs commanditaires et à leurs donateurs. Nous reviendrons sur cet aspect plus tard.

Mme Gaynor (Kim): Favoriser l'accessibilité aux diverses formes d'art de la scène. D'autre part, afin de favoriser l'accessibilité aux diverses formes d'art de la scène, il serait souhaitable que la Société de la Place des Arts contribue aux productions de ses compagnies en résidence. Il existe à ce titre plusieurs axes d'intervention ainsi que plusieurs modèles. Il ne nous appartient pas ici de définir en détail les règles de tels engagements, mais nous pouvons néanmoins évoquer certains grands principes.

À l'instar d'autres lieux de diffusion ailleurs dans le monde, ou encore ici même ? pensons au Centre Pierre-Péladeau ? la Place des Arts devrait être en mesure de participer à titre de coproducteur minoritaire. Il s'agit d'un moyen efficace pour élargir le répertoire ou tenter de nouvelles expériences tout en partageant le risque lié aux revenus de guichet. La participation de la Place des Arts pourrait se traduire par une intervention directe dans le financement de la production, par l'attribution de tarifs préférentiels pour la location de ses installations ou encore par une participation au plan de la promotion. Ces mesures favorisent l'accessibilité en permettant de présenter au public les oeuvres qui ne pourraient être produites autrement et à moindre coût.

Promouvoir la vie artistique et culturelle au Québec. En ce qui concerne le rôle de la Place des Arts en matière de promotion, il serait souhaitable qu'une telle infrastructure devienne un lieu culturel dont la mission dépasse un simple rôle de locateur. La Place des Arts doit pouvoir jouir d'une réputation à titre de structure d'accueil pour des projets d'animation, d'échange et d'initiation aux arts de la scène. C'est dans cette perspective que nous souhaitons que la Société puisse avoir les moyens de réaliser un tel programme, car il est évident que les compagnies en résidence ne peuvent assumer seules un tel rôle. Un premier pas a été franchi à l'occasion des Journées de la culture, pour lesquelles la Société coordonne une série d'activités promotionnelles mettant en valeur certaines des compagnies résidentes.

n(14 h 20)n

Problématique reliée à l'équipe technique. Après avoir analysé nos besoins et nos attentes en rapport avec le mandat de la Place des Arts, nous souhaitons porter un regard particulier sur la problématique que posent les services techniques.

La complexité et le type de productions que met en scène L'Opéra de Montréal requièrent une main-d'oeuvre qualifiée. De plus, la taille de ces productions nécessite l'embauche d'équipes nombreuses ainsi qu'une grande disponibilité pour répondre aux besoins des concepteurs. Actuellement, les coûts en équipe technique IATSE pour une production normale s'élèvent à 100 000 $ pour un total de 3 000 heures travaillées. De tels coûts sont plus élevés que ce que l'on rencontre généralement dans d'autres salles non régies par les exigences IATSE. Les conditions de travail des techniciens IATSE rendent pratiquement impossible pour nous la captation radio ou télé de nos productions en raison des coûts exorbitants que cela entraîne. Il suffit de penser que tout travail effectué après 18 heures est rémunéré au tarif des heures supplémentaires. Une telle clause nous apparaît fondamentalement inadéquate lorsqu'il s'agit du milieu des arts de la scène dont les activités ont généralement lieu en soirée.

Outre cela, les conditions de travail IATSE sont particulièrement contraignantes et vont à l'encontre d'une structure de production souple, efficace et rentable. Ainsi, les tâches sont totalement compartimentées, ce qui nous oblige souvent à constituer des équipes plus nombreuses que nécessaires. De plus, il nous est impossible de choisir les chefs d'équipes et ainsi d'avoir un contrôle approprié sur les équipes qui travaillent pour nous.

L'allégement des conditions de travail et le fait de les rendre comparables aux autres salles de spectacle auraient pour effet direct de réduire les coûts de production de L'Opéra de Montréal. D'une part, il serait bon d'étudier attentivement les cas de figure où l'on retrouve des techniciens affiliés au syndicat IATSE et qui travaillent dans d'autres salles de spectacle à des conditions de travail différentes. D'autre part, il faudrait se questionner sur la pertinence de maintenir un régime de privilèges exceptionnels qui défavorise considérablement la Place des Arts. La concurrence au sein du milieu est de plus en plus forte et permet aux producteurs de trouver de meilleures conditions de location pour leurs activités auprès de lieux de diffusion dont les services techniques ne sont pas sous contrôle IATSE.

À tous ces éléments s'ajoutent les préjudices considérables causés par la grève des techniciens à la Place des Arts. Au-delà des pertes financières, il y a la perte de la crédibilité auprès du public d'abonnés. Des opéras ont dû être présentés en version concert, sans décors ni costumes, des représentations ont dû être déplacées ou carrément annulées. Il faudra plusieurs années et des efforts considérables pour rebâtir la confiance de notre public, sur laquelle repose la survie de L'Opéra de Montréal.

M. Laurin (André): Avant de traiter des recommandations, permettez-moi de souligner que loin de nous l'idée de mettre en doute la compétence et la qualité des travailleurs d'IATSE, qui nous ont toujours fourni un service de haute qualité et spécialisé, et, même dans les périodes de remplacement, on ne pouvait pas avoir cette formation spécialisée. C'est le cadre... la façon dont les services nous sont offerts qui posent plus problème. Pour terminer sur les recommandations, nous voulons souligner, d'une part, qu'il est important de revoir les modalités de financement de la Société de la Place des Arts afin de mieux lui permettre de remplir sa mission: renforcer le financement public pour que la Société puisse mettre en oeuvre des actions concrètes de partenariat dans la production, la diffusion et la promotion des activités qui ont lieu dans ces salles. Permettez-moi d'ouvrir une petite parenthèse pour, par exemple...

Le Président (M. Boulianne): Vous avez une minute, là, encore pour conclure. Alors, vous pouvez... recommandations.

M. Laurin (André): Je vais finir avec les recommandations... D'accord. Donner à la Place des Arts un statut de centre culturel lui permettant d'élaborer des programmes d'animation, d'échanges et d'éducation et finalement modifier les conditions de travail des techniciens embauchés par la Place des Arts afin de lui permettre d'être concurrentielle et de favoriser les projets de coproduction, de captation radio et télé.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Laurin, merci, Mme Gaynor. Alors, nous allons procéder immédiatement à la période de questions. Alors, M. le député de Marguerite-D'Youville, vous avez demandé la parole.

M. Beaulne: Merci. Bienvenue à notre commission. Au fond, l'appel que vous nous lancez commence à ressembler étrangement à celui qu'ont lancé avant vous les autres groupes qui se produisent à la Place des Arts ou qui souhaiteraient s'y produire. Vous avez fait des recommandations qui nous semblent intéressantes. Maintenant, comme compagnie résidente, avez-vous été consultée ou impliquée dans le processus de négociations du conflit par la direction de la Place des Arts?

Le Président (M. Boulianne): M. Laurin? Madame?

Mme Gaynor (Kim): Comme moi je n'étais pas là pendant la majorité de la période du conflit, je peux peut-être demander à Me Laurin de répondre à cette question. Mais, depuis mon arrivée, depuis le mois de mars, on est en consultation sur cette question, oui.

M. Laurin (André): M. Richard a régulièrement tenu des rencontres avec les compagnies résidentes pour les informer des actions qui se prenaient et demander des commentaires.

M. Beaulne: Donc, je présume que vous devez être au courant du rapport que le médiateur a soumis, M. Michel Décary.

M. Laurin (André): Nous n'avons pas reçu formellement le rapport final, mais nous avions reçu le rapport préliminaire. Le rapport final, je comprends qu'il a été rendu public hier. Mais on me confirme que les conclusions, de façon générale, sont identiques à celles du rapport préliminaire.

M. Beaulne: Alors, la question que je vous pose, c'est que: Par rapport aux recommandations que vous nous faites à la page 8 du rapport... trouvez-vous que les recommandations du médiateur iraient dans le sens de vous accommoder au chapitre des recommandations que vous faites? Si oui, pourquoi et, sinon, pourquoi?

Mme Gaynor (Kim): Je peux vous dire que, étant donné que nos spectacles sont toujours de grande envergure, on travaille toujours avec une équipe qui est beaucoup plus grande que l'équipe de base des techniciens, on a parfois une vingtaine ou une trentaine de techniciens sur la scène, donc on serait moins touché, par exemple, par l'abolition des planchers d'emploi, sauf pendant les périodes de montage où on pourrait possiblement bénéficier de la flexibilité... d'une plus grande flexibilité par rapport au choix de personnes qui travaillent avec nous. Admettons qu'on fait un montage dans une salle, puis on travaille, puis on n'a pas besoin de sonorisation pendant cette période de montage, on serait peut-être pas à ce moment-là obligé d'avoir un sonorisateur sur la scène. Mais ça, c'est presque uniquement pendant la période de montage.

Par rapport au décloisonnement, c'est évident que ça pourrait nous aider parce qu'on aurait la possibilité, à ce moment-là, de travailler d'une façon plus flexible dans l'engagement du personnel et la planification d'utilisation de leurs services. Et on a essayé d'évaluer l'économie qu'il est allé chercher là-dedans puis on a évalué ça à 10 à 15 % de la facture totale, qui est une somme assez importante. Mais, s'il y a une augmentation, en contrepartie, de 10 à 15 % dans les tarifs horaires des techniciens, on arrive kif-kif à la fin.

M. Beaulne: Maintenant, quand il y a des augmentations au niveau des coûts de production, en particulier des frais afférents à l'équipe technique, aux techniciens syndiqués, comment l'absorbez-vous dans votre budget et comment cela se reflète-t-il au niveau des demandes de subventions que vous faites au gouvernement du Québec, puisque vous recevez des montants quand même assez importants de la part du gouvernement?

Mme Gaynor (Kim): Bien, ils sont reflétés dans nos états financiers évidemment quand il y a une augmentation de coûts, puis le gouvernement nous demande la présentation de nos états financiers quand on fait une demande de subvention. Mais, à ma connaissance, l'attribution des subventions n'est pas déterminée par rapport à l'augmentation des coûts directs. Il y a pas un lien direct de toute façon entre l'attribution des subventions.

On souligne toujours le fait que nos frais ont augmenté d'une façon importante et pourquoi, quand c'est le cas, mais je ne pense pas que le gouvernement réponde directement avec une augmentation des subventions parce que nos dépenses ont augmenté.

Le Président (M. Boulianne): M. le député.

M. Beaulne: Mais, quand vous dites que vous avez 670 000 $ de déficit et que vous trouvez... vous avez de la difficulté à prévoir le déficit de cette année, est-ce essentiellement dû au conflit?

Mme Gaynor (Kim): Pour l'année 2001-2002, parce qu'on parle de l'année fiscale 2001-2002, je dirais que non. Je dirais que c'est essentiellement à cause du fait qu'on a perdu du revenu des guichets, et peut-être que c'est une retombée du conflit, le fait que les abonnés nous ont quittés un petit peu, qu'ils ont perdu la confiance, donc ils ne reviennent pas tout de suite. Mais, pour l'année 2001-2002, non parce que les techniciens travaillent avec nous depuis le mois de février, et on n'a pas eu de problème à travailler avec eux depuis ce temps-là.

n(14 h 30)n

M. Laurin (André): Ajoutons à ceci, pour répondre à la question si vous me le permettez, que, nous, le dommage a été causé dans les premiers mois et les premières années, et c'est ça qu'il faut récupérer. Alors, pour nous, dans notre déficit actuellement, une bonne partie vient du fait que nos abonnements sont moindres, et donc on vous répond directement: Non, c'est pas la raison de notre déficit. Mais, par ailleurs, la baisse de l'abonnement, elle, est directement reliée à ce conflit-là dans une très large mesure, parce que notre public ne sait pas à quoi s'attendre, et quelqu'un qui ne sait pas si des spectacles vont être annulés ou vont être donnés en version concert va préférer prendre des billets à la pièce, au spectacle, plutôt que de prendre un abonnement. Et on sait ce que ça veut dire, ça, c'est que souvent, bien, là, ça leur tente pas, ça convient pas. Donc, on n'a pas les mêmes entrées de fonds.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Merci beaucoup, madame, monsieur, de venir nous présenter votre point de vue sur la situation actuelle, et j'aimerais continuer là où vous avez laissé.

Donc, ce que j'ai compris, c'est que les premiers mois du conflit ont fait énormément mal à la crédibilité de L'Opéra de Montréal et, en conséquence, ont amené des pertes financières qui n'existaient pas avant. Donc, c'est nouveau depuis... c'est-à-dire entre 2000-2001... 1999-2000, 2000-2001, des pertes financières, et vous les attribuez au conflit de travail.

M. Laurin (André): On les attribue en bonne partie, pas exclusivement.

M. Dion: En bonne partie.

M. Laurin (André): On a nous-mêmes du travail à aller faire pour renouveler des abonnements, mais on considère que c'est une bonne partie... une des causes principales, sinon la cause principale.

M. Dion: O.K. Alors, qu'est-ce qui risque d'arriver si la situation non seulement ne se corrige pas, mais qu'elle continue de s'envenimer, que la confiance continue de baisser et que les revenus des guichets, évidemment, soient limités?

M. Laurin (André): Si la situation ne devait pas se régler rapidement, O.K., et devait même empirer sous forme de reprise des genres d'actions qu'on a connus à un moment donné, c'est très clair qu'on viendrait encore affecter notre clientèle et réduire notre base d'abonnements. Et là on arriverait à un point où c'est finalement la survie même de L'Opéra de Montréal qui serait remise en question, parce qu'on peut pas se permettre des déficits du genre de celui qu'on connaît, 2001-2002, et qu'on a connu.

M. Dion: Êtes-vous en train de m'expliquer que, si la situation ne se règle pas, il pourrait arriver qu'on en conclue que les techniciens sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis?

M. Laurin (André): Ce que je vous dis, par rapport à nous, si on devait voir une reprise des genres d'actions de boycottage et pas avoir la situation de calme et de coopération que nous avons et s'il devait pas y avoir de règlement du conflit, c'est très clair que je répondrais oui à votre question, c'est-à-dire: Est-ce qu'ils scient la branche sur laquelle ils reposent?

M. Dion: Je vous remercie. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Alors, on a du temps pour le député d'Iberville. M. le député, vous avez la parole.

M. Bergeron: Merci, M. le Président. Bonjour et bienvenue. Votre première recommandation: revoir les modalités de financement de la Société de la Place des Arts afin de lui permettre de mieux remplir sa mission. J'aimerais que vous soyez plus explicites par rapport à ça. Vous demandez une augmentation du financement? Quand on dit «revoir», je présume que c'est «augmenter»?

M. Laurin (André): Je vais peut-être juste amorcer la réponse en disant simplement ceci: Nous considérons... la Place des Arts, ça fait quand même un bon bout de temps que ça existe, il y a déjà certains rafraîchissements qui ont été planifiés, mais j'aimerais que Kim nous parle un petit peu de ce qui se fait dans d'autres maisons d'opéra et qui nous permettrait, nous, d'améliorer notre sort, par exemple. Et donc, quand on parle de revoir les modalités de financement, c'est de donner des moyens à la Place des Arts pour permettre de fournir certains services additionnels.

Mme Gaynor (Kim): Oui. D'accord. Bien, il y a plusieurs recommandations à l'intérieur de cette recommandation. On aimerait voir que la Place des Arts soit vraiment un lieu culturel, un lieu... un centre culturel, puis on a donné l'exemple des Journées de la culture ? c'est un très bon exemple ? où la Place des Arts a joué un rôle organisationnel dans cet événement et a regroupé plusieurs compagnies résidentes et d'autres organismes culturels, de telle sorte qu'on va avoir trois journées, à la Place des Arts, d'animation, d'activités culturelles qui seraient très profitables et qui vont avoir probablement des retombées importantes pour chacune des compagnies en termes d'achat de billets et autres. Ça, c'est une chose.

Deuxièmement, on a... moi, je constate qu'à la Place des Arts on est limité, jusqu'à un certain point, dans les lieux, la façon qu'on peut accueillir, mettons, nos commanditaires, nos donateurs et les gens qui nous soutiennent, parce qu'il y a très peu de lieux d'accueil. Si on prend, par exemple, ce qui se fait dans le domaine du sport, on peut donner un meilleur service aux donateurs et aux commanditaires parce qu'on sait que ces gens-là cherchent des soirées de... être en mesure de vraiment inviter leurs clients puis offrir une soirée complète, disons, à leur clientèle. On aimerait voir ce genre de services améliorés.

On aimerait également voir les services qui sont offerts au grand public, que ça soit dans la question de restauration, les places de repos et tout cela, qu'ils soient améliorés pour que les gens... Quand les gens viennent à la Place des Arts, on sait qu'ils viennent pour le spectacle, mais ils viennent également pour s'amuser pendant la longueur de la soirée, puis on est limité présentement dans ce qu'on peut offrir à notre clientèle à la Place des Arts. C'est dans ce sens-là.

Le Président (M. Boulianne): Vous avez une minute pour une question puis une minute, en même temps, pour la réponse.

M. Bergeron: C'est parce que, dans cette révision du financement, vous dites que ça mettrait en oeuvre des actions concrètes de partenariat.

Mme Gaynor (Kim): Oui.

M. Bergeron: Écoutez, là, vous avez parlé de donateurs, de commanditaires et des lieux d'accueil, mais quel partenariat verriez-vous, vous, l'Opéra de Montréal, avec la Place des Arts?

Mme Gaynor (Kim): Quand on parle de partenariat, là, on parle surtout de partenariat en termes de production ou coproduction. On aimerait être en mesure de discuter avec la Place des Arts la possibilité de coproduire les spectacles, c'est-à-dire partager le risque financier dans la présentation des spectacles. Pour ce faire, il faut que la Place des Arts ait des budgets à mettre à risque dans la présentation de spectacles. Ça, c'est un exemple de partenariat dans la production.

Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme Gaynor; merci, M. le député. Alors, Mme la députée de Sauvé, vous avez la parole.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je veux continuer sur vos souhaits que la Place des Arts soit un partenaire dans le développement culturel et tout ça. Dans le fond, vous plaidez pour une augmentation du financement de la Place des Arts. On vous écoute et on peut se dire: Oui, c'est peut-être rendu à leur tour, il y a eu d'importantes coupures budgétaires en 1993-1994 et tout ça. Mais il y a un élément dans le décor qu'on peut pas nier et que je vous demanderais de commenter, c'est que, donc, la Place des Arts a connu une baisse de clientèle, une baisse du nombre de spectacles dans à peu près toutes ses salles, à part quelques exceptions, depuis au moins 1993-1994.

La réponse la plus simple et la plus évidente ? je vais plutôt dire ça ? c'est de dire: C'est à cause entre autres de la baisse de la subvention à la Place des Arts, des difficultés d'exploitation, etc. Mais, pendant ce temps-là, il y a un frère jumeau qui est le Grand Théâtre de Québec qui a connu la même sorte de coupures budgétaires, et, lorsqu'on regarde les résultats en termes d'assistance et d'occupation de salles, même en termes de résultats financiers et tout ça, ils ont pas semblé s'être butés aux mêmes problèmes pour exercer leur rôle de partenaire culturel dans leur région, dans leur milieu.

Est-ce que, vous, vous avez une explication à cela? Parce que nous, de notre côté, la question qui se pose, à laquelle je n'ai pas de réponse, c'est: Est-ce que la situation de la Place des Arts, elle est en plus explicable par la très forte concurrence à Montréal ou si la réponse, ce n'est pas que, en termes de modalités de gestion, il y ait une marge de manoeuvre possible à la Place des Arts pour jouer un rôle accentué, un rôle de partenaire culturel accentué?

Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la députée.

M. Laurin (André): ...des éléments de réponse, là.

Le Président (M. Boulianne): Oui.

M. Laurin (André): Un, je pense qu'il faut regarder, à la Place des Arts, si sa concurrence vient de la production de spectacles qui ne sont pas les spectacles des compagnies résidentes. O.K. Nous, on est là, on est présents, on peut pas aller ailleurs. Mais, pour les autres types de spectacles, je crois que la Place des Arts a plus de concurrence que le Grand Théâtre de Québec peut en avoir. Deuxièmement, il y a l'évolution historique. La Place des Arts est quand même d'une naissance nettement antérieure, elle n'a pas été renouvelée, n'a pas été réorganisée.

Nous, quand on parle de moyens, ce qu'on veut, c'est que... Finalement, il y a lieu de rafraîchir, de fournir des locaux. On peut aller par exemple au Metropolitan Opera. Je sais qu'on parle d'une grosse boîte, mais quiconque veut se restaurer pendant une pause, quelqu'un qui veut, par exemple, vendre des billets corporatifs ? puis nous autres, c'est important de tenter de développer le marché privé... Nous, ce qu'on demande en pratique ? vous me permettrez la parenthèse ? c'est de dire: On a besoin d'outils ou de moyens pour aller chercher une part de financement privé plus importante, puis, avec les contraintes qu'on a, les lieux, on a une difficulté à le faire actuellement. On peut améliorer notre sort, puis la Place des Arts peut nous aider à cet égard-là. Donc, elle n'a pas nécessairement tous les outils pour répondre à tous les besoins, et ça, ça complique singulièrement sa tâche dans le contexte montréalais.

n(14 h 40)n

Mme Beauchamp: Vous me direz si je vous ai bien compris. Dans le fond, vous me dites à peu près que vous plaidez pas nécessairement pour une hausse majeure de son budget de fonctionnement récurrent annuel, ce que vous dites, c'est: Dans un premier temps, mais de façon majeure, il y a des problèmes d'aménagement, il y a des problèmes d'organisation physique, il y a des problèmes pour nous faciliter la vie avec nos clients, etc., etc., nous sommes devant un équipement qui a déjà plus de 30 ans. Effectivement, habituellement, on commence déjà à parler de rénovation, d'entretien, etc. J'ai l'impression que vous êtes en train de dire: Il y a effectivement besoin de budgets qu'on pourrait qualifier de spéciaux en termes plus d'immobilisation, de renouvellement d'équipements techniques, d'espaces d'accueil, etc., etc. Est-ce que je traduis bien ce que vous m'avez dit essentiellement?

M. Laurin (André): On vous dit les deux, qu'il y ait des budgets récurrents et un...

Mme Gaynor (Kim): Oui, mais...

Le Président (M. Boulianne): Mme Gaynor.

Mme Gaynor (Kim): ...je voulais juste ajouter qu'il y a également des projets comme, par exemple, les lieux de restauration qui pourraient être considérés comme des projets entrepreneuriaux qui ont la possibilité de faire de l'argent pour la Place des Arts, et c'est des centres de profit. C'est aussi parce que...

M. Laurin (André): Fonds spéciaux veut dire améliorer le cadre et l'environnement. Budget régulier veut dire plus participer en coproduction et animation, tel qu'on l'a souligné dans le rapport. C'est pour ça qu'on vous parle des deux, même si j'ai, dans ma réponse, insisté sur un des volets plus que l'autre.

Le Président (M. Boulianne): Mme la députée.

Mme Beauchamp: Merci. Juste pour mon information. Lorsque vous parlez du déficit que vous avez connu suite au déclenchement de la grève, là, peu importe d'ailleurs... Bien, je dis peu importe, mais vous dites, là, que c'est... essentiellement, c'est sûrement l'élément majeur qui explique ce déficit-là, bien que vous reconnaissiez qu'il n'était pas totalement attribuable à cela, il y a... On sait que les Grands Ballets ont eu une somme en compensation, et je veux juste être bien précise. Donc, quand vous nous dites ça, est-ce que vous pourriez préciser si vous avez obtenu également une compensation de la part du gouvernement du Québec suite à ce conflit de travail? Et peut-être nous dire... Compte tenu que vous appréhendez de nouveau un déficit, la somme va commencer à devenir très imposante pour un organisme comme L'Opéra, j'imagine qu'on va parler d'un déficit total d'au moins 1 million de dollars ou quelque chose qui s'y rapproche beaucoup. Est-ce que de nouveau vous êtes en discussion pour parler de compensation du fait que vous dites que cet effet-là semble perdurer, puisque ça a miné la confiance de votre clientèle vis-à-vis vos productions?

Le Président (M. Boulianne): Merci.

Mme Gaynor (Kim): Nous avons eu également une somme compensatoire pour les pertes, sauf que le CALQ a considéré uniquement les dépenses directes, si je peux dire, là, pas les pertes aux guichets qui sont, entre guillemets, très difficiles à évaluer. Ce n'était pas considérer comme des pertes pour fins de déterminer la compensation, mais uniquement les frais directs, les frais légaux, par exemple.

Mme Beauchamp: Est-ce que vous pouvez nous dire combien... à combien montait cette compensation, juste pour qu'on ait la même information que les Grands Ballets nous ont donnée?

M. Laurin (André): Sur le dernier exercice financier, j'ai pas le chiffre, mais l'exercice antérieur, c'était environ 340 000 $.

Mme Gaynor (Kim): C'est ça, avant mon arrivée, c'était 350, 370 000 $.

M. Laurin (André): Notre exercice commence le 1er septembre et se termine à la fin août. Et donc, ce dont on vous parle, là, le dernier exercice, le chiffre n'est pas encore déterminé...

Mme Gaynor (Kim): C'est ça, c'est ça, la fin de l'exercice...

M. Laurin (André): C'était l'exercice terminé en 2000, où on avait eu une somme de 350, 360...

Mme Gaynor (Kim): Pour la saison 2000-2001 qui vient de se terminer, on a fait également une demande, mais on n'a pas eu de réponse encore.

Le Président (M. Boulianne): Merci.

Mme Beauchamp: O.K. Je comprends.

Le Président (M. Boulianne): Vous continuez, Mme la députée?

Mme Beauchamp: Oui, merci. Je voulais peut-être aussi vous entendre dire bien concrètement... Lorsqu'on parle du rôle ou même du mandat, puisque c'est prévu dans la loi constitutive de la Place des Arts, ce rôle possible de coproducteur ou de participation à titre de coproducteur, pour votre clientèle, pour vos spectateurs, qu'est-ce que ça permettrait de faire au juste? Je vous avoue que, quand on parle de ça, on a plus l'impression que ça veut juste dire: Bien, dans les projets dont on n'est vraiment pas sûrs, on aimerait mieux que ça soit la Place des Arts qui assume le risque que nous autres, hein. Ça pourrait ressembler à ça. J'aimerais ça que vous nous expliquiez qu'est-ce que ça veut dire au juste comme apport artistique, comme... qu'est-ce que ça veut dire, pour vous, que la Place des Arts se mette de nouveau ? parce qu'elle l'a déjà fait ? mais se mette de nouveau à jouer un rôle de coproducteur.

Mme Gaynor (Kim): Il n'y a pas de règle, hein, dans ce jeu de coproduction. Nous, L'Opéra de Montréal, on est presque toujours en coproduction, quand on présente nos spectacles, avec d'autres maisons d'opéra qui partagent avec nous les frais de production, finalement, les frais de création de décors, costumes et autres. On partage donc les frais du projet, mais quand on présente le spectacle, ils ne partagent pas avec nous les frais de présentation de ce spectacle dans la salle. Donc, ça peut être soit au niveau des frais de production soit au niveau des frais de présentation. Il y a toutes sortes de formes que ça pourrait prendre finalement.

M. Laurin (André): Mais ce que ça permettrait, c'est probablement de procéder encore à plus de créations locales, par exemple, au niveau des décors, d'avoir... peut-être même de monter la qualité donc de... C'est pas juste une question de dire on va essayer des affaires qu'on n'essayait pas, là, c'est également d'assurer une hausse dans un partage de risques plus élargi.

Mme Gaynor (Kim): Bien, moi, je ne limiterai pas à des projets qui sont très rustiques, si on veut. Je peux, par exemple, penser à un projet comme de faire un opéra de Noël, Hansel et Gretel, qui est très populaire ailleurs, peut-être qu'on pourrait le faire en coproduction avec la Place des Arts. Ça peut même être rentable.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Vous avez encore une question, Mme la députée?

Mme Beauchamp: Bon, bien, je vais en poser deux en vous en posant une. Deux volets à ma question. Premièrement, est-ce que vous pouvez commenter la situation au niveau de l'équipement technique à la Place des Arts? C'est un sujet qu'on n'a pas beaucoup abordé jusqu'à maintenant. Or, dans certains mémoires, on effleure cette question-là, la situation de l'équipement technique. Je pense que vous seriez bien placés pour nous répondre là-dessus.

Et l'autre volet, très rapidement. Ce matin, L'Équipe Spectra qui plaidait pour être reconnue comme une compagnie résidente, mais en tout cas plaidait surtout pour qu'il y ait place au conseil d'administration pour les compagnies résidentes, au conseil d'administration de la Place des Arts. Or, ce qui est plus prévu à la loi, c'est un comité consultatif. Dans le plan stratégique, on parle de comité artistique. J'aimerais ça connaître votre avis sur cette proposition-là également.

Mme Gaynor (Kim): Moi, je ne suis pas une directrice de production, mais je peux répondre donc partiellement à votre question. Ce que je peux vous dire, c'est qu'au niveau des exigences techniques les spectacles d'opéra deviennent de plus en plus exigeants et la technologie est souvent impliquée. Et, comme vous le savez, la technologie change extrêmement rapidement. Et puis, si on veut, nous, continuer à travailler avec d'autres maisons d'opéra, on est déjà très limités par rapport au... à l'équipement technique qui est disponible à la Place des Arts. Donc, ce qui arrive souvent, c'est qu'on est obligés de louer l'équipement qui n'est pas disponible pour nos fins, pour un certain spectacle. Je sais que ça nous arrive parce que c'est moi qui vois les factures. Donc, ça nous arrive.

Mais par rapport à l'équipement général, je n'ai pas entendu, de la part de mon équipe technique, qu'il y a vraiment un grand problème.

M. Laurin (André): Du côté de la présence au conseil d'administration, c'est une idée, là, qui nous a déjà été suggérée, qu'on aimerait peut-être regarder un peu plus, mais, à première vue, on n'est pas convaincus que c'est nécessairement une bonne formule comme telle. On croit cependant que l'établissement de la structure de consultation permanente, avec une connaissance par les membres du conseil d'administration de l'Opéra de ce que pensent les compagnies résidentes, sur une base régulière serait probablement suffisant.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup, Mme Gaynor, merci beaucoup, M. Laurin, pour ce mémoire.

M. Laurin (André): Merci à vous de nous avoir invités.

Le Président (M. Boulianne): Alors, je demanderais maintenant aux représentants de l'Orchestre symphonique de Montréal de s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Alors, Mme Madeleine Careau, directrice générale, bienvenue à cette commission. Alors, je vous demanderais donc de présenter votre équipe et de présenter votre mémoire.

Orchestre symphonique de Montréal (OSM)

Mme Careau (Madeleine): Alors, bonjour. Je suis Madeleine Careau, directrice générale de l'OSM. À ma droite, il y a Julie-Anne Leclerc qui est directrice des services administratifs et des finances à l'OSM, et Benoît Bilodeau, qui est le producteur délégué de tous nos concerts.

Le Président (M. Boulianne): Vous avez 15 minutes, madame, pour...

Mme Careau (Madeleine): Bon, alors, je vais donc vous faire grâce de l'historique de l'OSM que vous pourrez lire de toute façon avec beaucoup d'intérêt, mais comme on a été fondé en 1934, ça pourrait être long.

n(14 h 50)n

Je vous dirai d'entrée de jeu, comme vous le constaterez à la lecture de cet historique, que l'OSM a atteint, au fil des années, un statut international. L'administration et les artistes mettent toutes les énergies nécessaires pour maintenir ce positionnement. L'OSM est le seul organisme musical qui a un budget et une capacité d'accueillir des artistes de stature internationale pendant presque toute l'année. Les activités de l'OSM s'étendent sur 46 semaines, c'est la durée du contrat de travail que nous avons avec nos musiciens, 46 semaines de travail pour répondre à la convention collective de ces musiciens.

L'Orchestre se produit à la Place des Arts depuis la construction de celle-ci, faisant ainsi de l'OSM la plus vieille compagnie résidente de cet endroit. Les bureaux administratifs de l'OSM ont déjà été à la Place des Arts dans les années soixante-dix. Les années quatre-vingt étant les plus fructueuses sur le plan artistique pour l'Orchestre, les effectifs administratifs augmentent et l'espace à bureaux devient contigu; un déménagement s'impose. Donc, l'OSM a déménagé ses bureaux de l'autre côté de la rue.

Et, en 1995, suite à un agrandissement du côté boulevard Maisonneuve de la Place des Arts et afin de mieux servir l'aspect artistique de notre organisme et avoir une meilleure synergie d'équipe entre les musiciens et les employés de l'administration, les bureaux administratifs reviennent à la Place des Arts. Trente-cinq personnes travaillent maintenant à temps complet à l'administration de l'OSM.

La salle Wilfrid-Pelletier, où nous nous produisons en moyenne 80 fois par année, n'est certes pas l'endroit idéal pour l'OSM ? je crois que nos musiciens vous l'ont dit ce matin. Les tournées effectuées dans les plus grandes capitales du monde, avec des salles absolument fantastiques, nous font réaliser que cette salle ne présente pas les attributs qui répondent aux critères d'excellence artistique de l'OSM; elle présente des défauts acoustiques, elle est trop grande, ne possède pas les atouts d'une vraie salle de concert de musique classique. Pour le moment, cette salle est la seule qui réponde le mieux à nos besoins: une scène assez grande pour accueillir plus de 100 musiciens, une salle d'au moins 2 000 places (l'OSM a plus... ? je corrige parce qu'on est très fiers de le dire ? a plus de 15 000 abonnés cette année et reçoit en moyenne 2 100 spectateurs par concert), des facilités de stationnement, de métro, de vestiaire et de restauration à proximité.

Les relations avec notre locateur qu'est la Place des Arts sont harmonieuses. Nos demandes face à des besoins administratifs ou artistiques sont traitées dans les meilleurs délais. Les résultats que nous obtenons suite à nos requêtes nous permettent de constater que nous sommes écoutés et respectés.

Bien que nous régissions tous les aspects de l'administration d'un orchestre, un seul nous échappe et c'est celui du travail des techniciens de scène. La tâche des techniciens de scène, en répétition ou en concert, est un travail essentiel à la vie de l'OSM. Or, il nous apparaît aberrant que nous n'ayons aucun contrôle sur le travail des techniciens. En effet, même la Place des Arts n'a pas le droit de gérance, puisque ce syndicat est protégé par le régime de l'atelier fermé.

Nous ne contestons pas le droit à des employés de se regrouper pour obtenir de meilleures conditions d'emploi. Le contrôle de la qualité du travail des membres du IATSE ne relève pas de ceux qui paient et les embauchent.

Depuis maintes années, nous réclamons haut et fort que des modifications soient apportées à la grille tarifaire de ces employés et à certaines clauses normatives de leur entente. Nous devons vivre avec des clauses qui ne respectent plus les conditions du marché tant pour la musique symphonique et l'industrie du spectacle en général.

Voilà maintenant plus de deux ans que nous réalisons l'importance des coûts reliés à des clauses normatives, puisque nous avons embauché nos propres techniciens pendant plus d'un an. Voici donc quelques exemples.

Le plancher d'emploi. La convention actuelle des techniciens de scène prévoit une équipe de travail de quatre personnes pour un minimum de quatre heures de travail. Depuis plus d'un an, nous fonctionnons la plupart du temps avec des équipes de deux personnes pour le même nombre d'heures. Ceci entraîne pour l'OSM des économies substantielles.

Ce mémoire, on l'avait rédigé avant la réintégration, au 1er février, des techniciens IATSE; on devrait plutôt comprendre que, pendant la période où nous avons embauché nos propres techniciens, nous avons fonctionné avec deux techniciens de scène, où nous devons aujourd'hui fonctionner avec quatre depuis la réintégration d'IATSE au 1er février de cette année. Je m'excuse, on aurait dû corriger notre mémoire avant de vous l'envoyer.

Examinons maintenant l'ambiance générale du travail. Est-il acceptable qu'un piano de concert soit immobilisé au bord de la scène sous prétexte que ce n'est pas le boulot des machinistes ou chef machiniste sur place mais plutôt des accessoiristes?

L'OSM organise souvent des activités pré ou postconcert. Il faut donc dans ces circonstances embaucher deux équipes de travail différentes même si ces activités ne durent, en moyenne, qu'une heure et n'allongent pas la durée de la prestation de travail au-delà des quatre heures supplémentaires. Et puis, pendant plus d'un an, nos propres techniciens nous ont prouvé qu'il était possible pour la même équipe de travail de servir les deux événements sans pour autant affecter la qualité du travail à fournir. Il est donc possible de préparer le Piano Nobile et, parallèlement, de s'assurer que la scène soit prête pour le concert sans que l'équipe ne soit augmentée en effectif et sans temps supplémentaire.

Je vous explique un peu. C'est que, nous, nous avons... Tous nos concerts sont commandités, à l'OSM, et les entreprises qui commanditent les concerts tiennent souvent des événements sociaux: réceptions préconcerts ou postconcerts, ou même reçoivent leurs invités à l'entracte. Et si le président de l'entreprise, ou moi, peu importe, on veut prendre la parole, leur souhaiter la bienvenue, les remercier de soutenir l'OSM, dans un lieu autre que la scène, soit dans un salon ? comme le Piano Nobile ? ça requiert une autre équipe parce que les techniciens qui sont affectés à la scène sont exclusivement affectés à la scène.

Donc, quand nous avons eu l'opportunité d'embaucher nos propres techniciens pendant le conflit, nos techniciens préparaient la scène pour le concert. Une fois le concert commencé ? vous savez comment ça se passe, on n'arrête pas ça, il se passe plus rien ? alors, ils pouvaient aller préparer le Piano Nobile pour l'entracte et revenir, et tout ça, sans allonger leur quart de travail et sans pour autant que nous ayons besoin d'embaucher une équipe supplémentaire. Donc, la convention collective actuelle qui régit les techniciens de scène ne nous permet pas ça, et on souhaiterait évidemment que ça change.

La Société Radio-Canada vient capter en moyenne 12 concerts de l'OSM par saison. Lorsque Radio-Canada se présente, elle amène ses propres techniciens qui tirent les micros et calibrent le son. Est-il normal que l'OSM ait à payer un supplément aux techniciens de la Place des Arts qui sont alors des spectateurs muets devant Radio-Canada et qui ne font rien de plus que leur travail normal de scène, sous prétexte qu'il y a une captation radio? Ils n'interviennent pas du tout techniquement dans les captations. Ceci vaut pour la radio et la télévision; télévision que les diffuseurs télé ne peuvent plus faire à cause des coûts encore plus exorbitants.

Tout temps supplémentaire est rémunéré, comme c'est le cas de la plupart des conventions collectives. La durée normale des services des musiciens de l'OSM est de deux heures et demie. Il arrive à l'occasion que certains chefs décident de ne pas utiliser en entier ces deux heures et demie. Est-il normal alors qu'un technicien, qui voit là la chance de rentrer chez lui plus tôt, ferme les lumières sur scène dès la fin de la répétition alors que des musiciens sont encore sur scène, sur le simple prétexte que le chef a terminé sa répétition?

Le doublage. Il arrive à l'occasion que nous embauchions des artistes qui se déplacent avec leur propre équipe technique de production. Ces artistes requièrent alors un cachet plus élevé pour compenser les cachets de déplacement de toute l'équipe. Or, à la Place des Arts, ces techniciens sont doublés par des membres d'IATSE, ce qui, pour nous, double les coûts de la technique. Autrement dit, si un artiste pop amène son sonorisateur, on doit payer, nous, un sonorisateur à la Place des Arts qui ne travaille pas forcément à la sonorisation du spectacle.

Pendant plus d'un an, le fait de recourir à nos propres ressources techniques nous a permis de faire des comparaisons de coûts éclairantes. Le cloisonnement des fonctions, les planchers d'emplois, le taux horaire majoré, les conditions d'appel minimum et le doublage de tout autre technicien par les techniciens de l'IATSE coûtent cher, très cher. Les coûts de techniciens pour la saison 1999-2000 ont été de 83 691 $ moins élevés qu'en 1998-1999. Alors qu'on sait que tout augmente, là, ça vous donne une idée de la différence de coûts.

Mais au-delà des coûts, parlons de l'aspect humain. Nous avons mentionné plus haut que les membres de l'équipe technique sont des atouts importants pour la production de concerts. Avec les membres de l'IATSE, pas question de parler de sentiment d'appartenance ou de fierté vis-à-vis l'institution lorsque des concerts remportent un succès inespéré ou lors d'événements artistiques exceptionnels. Ils ne veulent en aucun temps se rapprocher de l'équipe de gestion.

Avec les techniciens embauchés depuis plus d'un an, nous avons réussi à créer cette synergie tant importante dans le domaine artistique. Les techniciens font partie intégrante de l'équipe, apportent leur coopération, deviennent à l'occasion des conseillers, échangent avec les musiciens et le personnel administratif sur l'aspect technique. Nous ne craignons pas de leur demander des efforts supplémentaires lorsque requis ou même de leur poser des questions quand nous sommes dans le doute. Nous savons que les réponses qu'ils nous donneront seront toujours à l'avantage de l'OSM, pour le bien-être de l'OSM, ou encore plus, dans le respect de notre mission artistique. Voilà un sentiment d'appartenance qui va plus loin qu'un simple lien administratif d'emploi.

Évidemment, il ne faut pas confondre sentiment d'appartenance et compétence. Nous réclamons le droit de choisir ceux qui veulent travailler avec nous et qui possèdent les prérequis nécessaires.

Ce que nous voulons démontrer avant tout par ces exemples, c'est que ce sont les compagnies résidentes qui vivent avec les techniciens de scène dans une sorte de relation d'emploi mais sans y avoir négocié les conditions ni même avoir eu l'occasion d'échanger nos points de vue avec le syndicat. La Place des Arts est leur employeur mais ne les utilise pas à ses propres fins pour la production. Les compagnies résidentes deviennent ainsi les otages d'une convention qu'elles n'ont pas le loisir de négocier et qui s'avère un frein à notre développement. Depuis un an, nous avions un peu d'air. S'il vous plaît, permettez-nous de continuer.

n(15 heures)n

Et puis vous avez en annexe les coûts comparatifs dont je faisais mention tout à l'heure et vous serez à même de constater l'écart entre l'année où nous avons embauché nos propres techniciens et la situation actuelle avec les membres de IATSE.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup, Mme Carreau, Mme Leclerc et M. Bilodeau. Alors, nous allons procéder à une période d'échange, d'abord avec les ministériels. M. le député d'Iberville a demandé la parole.

M. Bergeron: Merci, M. le Président. Bonjour et bienvenue. En matinée, l'Association des musiciens de l'Orchestre symphonique de Montréal est venue parler de la construction d'une nouvelle salle de concert. Dans leur mémoire, d'entrée de jeu, il dit que, depuis 1930, on en parle; ça fait 71 ans. On dit un peu plus tard dans le mémoire que le progrès de la musique est lié à la salle de concert. À quelques questions posées, ils nous ont dit qu'ils n'étaient pas des économistes et que c'étaient vous qui alliez répondre là-dessus.

Concernant éventuellement la construction d'une salle de concert, il y a eu des projets Cadillac Fairview, Sofati. Est-ce qu'il y a des études qui ont été faites concernant la rentabilité d'une telle construction?

Mme Careau (Madeleine): Écoutez, la rentabilité financière, je ne la connais pas. Je crois qu'il y a pas un équipement culturel, artistique au Québec qui se mesure en termes de rentabilité financière. Je pense que ces équipements se construisent pour permettre à la culture d'être diffusée. À mon avis, là, mis à part certains théâtres privés à Montréal, comme le théâtre Saint-Denis ou autres salles, Spectrum ou Centre Molson, qui appartiennent à des entreprises privées, quand on parle d'un équipement culturel de haut niveau, je pense pas qu'il soit question de rentabilité financière. Je pense qu'il s'agit de donner à une compagnie artistique, que ce soit une compagnie de théâtre, ou un orchestre symphonique, ou une compagnie de danse, un lieu lui permettant de développer son art, et d'améliorer les prestations techniques, et de s'épanouir dans un théâtre qui soit adéquat. Mais, bien honnêtement, moi, j'étais très proche des projets Cadillac Fairview et Sofati en 1984, 1985 et je ne me souviens pas qu'on parlait de rentabilité financière. Je pense qu'on parlait de diffusion artistique, d'épanouissement artistique et culturel, permettre à des entreprises culturelles d'avoir un lieu adéquat pour devenir meilleures et ensuite s'exporter. Mais je ne pense pas qu'on parlait de rentabilité économique, je pense pas que ce soit la raison majeure de la construction d'une salle de concert. J'espère que non en tout cas.

Le Président (M. Boulianne): M. le député.

M. Bergeron: Alors, si «rentabilité» est un mot qu'il ne faut pas utiliser, si je comprends bien... Dites-moi, il y a plusieurs salles de spectacle à Montréal... la construction d'une nouvelle salle de 2 000 places avec les qualités acoustiques et, disons, l'usage qu'en ferait l'Orchestre symphonique, vous l'utiliseriez quelque chose comme à peu près la moitié du temps, là, regardez, 46 semaines, quatre soirs par semaine, là. Est-ce que... Je vais poser ma question d'une autre façon: Est-ce qu'il y aurait éventuellement des locateurs, disons, dans le milieu montréalais pour pouvoir, disons, occuper le reste du temps?

Mme Careau (Madeleine): Bien, d'abord il faut pas évaluer l'occupation d'une salle par le taux d'occupation que nous avons actuellement à Wilfrid-Pelletier. Le fait que nous occupons pas Wilfrid-Pelletier davantage actuellement, c'est pas parce qu'on en a pas besoin, c'est parce que nous n'en avons pas le loisir. Quand L'Opéra de Montréal joue, par exemple, à la salle Wilfrid-Pelletier, nous, nous sommes dans le couloir à attendre que les représentations de L'Opéra se terminent pour pouvoir donner nos concerts, quand nous n'accompagnons pas L'Opéra de Montréal, parce qu'il arrive à certains opéras que ce n'est pas l'OSM qui soit l'orchestre accompagnateur, donc nous répétons dans une autre salle de la Place des Arts. Ce qui nous cause des problèmes assez considérables dans une salle de répétition, c'est que cette salle n'ayant pas été construite pour la musique classique, le volume de la salle de répétition n'a rien à voir avec le volume de la scène, et, quand on répète un concert acoustique, il y a une question de calibration de l'orchestre. Et, quand vous calibrez un orchestre lors d'une répétition dans un certain volume, quand vous arrivez dans la salle Wilfrid-Pelletier sur la scène, le volume... bon, il faut tout réajuster, faire jouer les violons plus fort, les cuivres moins fort ou l'inverse.

Donc, actuellement, nous n'occupons pas la salle de concert comme on pourrait l'occuper, faute de disponibilité de cette salle. On répartirait... Par exemple, je donnais toujours comme exemple... il y a des saisons comme le mois de mai dernier où nous avons dû donner 11 concerts pendant le mois de mai, 11 concerts de l'OSM, et c'est mission impossible d'aller chercher... On reçoit 2 800 personnes à Montréal dans un mois pour des concerts quand il y a I Musici, quand il y a l'Orchestre métropolitain, quand il y a Pro Musica et toutes les sociétés de concerts que vous connaissez. Mais pourquoi? Parce qu'on est obligé de condenser nos présences parce qu'on peut pas répartir nos prestations comme on le souhaiterait, puis il y a beaucoup de choses qu'on ne fait pas, de répétitions publiques, de concerts commentés, de matinées jeunesse pour les enfants, faute de disponibilité, en fait. Alors, c'est pour ça que c'est difficile d'évaluer actuellement le taux d'occupation d'une salle de concert par rapport à celui que nous avons maintenant, parce qu'on n'a pas de salle de concert maintenant.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député, je reviendrais peut-être parce les deux autres ont demandé la parole. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci...

Le Président (M. Boulianne): Puis votre collègue tout à l'heure aussi a demandé la parole, alors...

M. Dion: Merci. Alors, je vais essayer de pas prendre trop de temps. Bonjour mesdames. Bonjour, monsieur. Merci de votre présentation. J'ai évidemment depuis... C'est la deuxième journée qu'on parle de ces questions. On est toujours un peu impressionné par une partie des choses qui nous semblent des histoires d'horreur, un peu ce que vous racontez à la page 6 et 7; elles nous semblent manifestement déraisonnables comme situations.

Cependant, j'aimerais quand même... j'ai quand même des choses qui me préoccupent. Je me dis... Parlons en particulier du doublage. Alors, les techniciens, on ne peut pas les blâmer de s'organiser en syndicat pour protéger leur travail et leur qualité de travail. Bon. Ça, tout le monde s'entend là-dessus. Alors, on serait porté à croire que c'est normal que, lors de conventions collectives, ils veuillent s'assurer que le fait qu'ils soient syndiqués ne les expulse pas du milieu du travail et que donc, pour toutes sortes de prétextes, on n'engage pas quelqu'un d'autre alors qu'eux resteraient chez eux parce qu'ils sont syndiqués; ce serait une façon, en fin de compte, d'attaquer l'existence même du syndicat. Je pense qu'on peut faire ce raisonnement-là. Alors, la question est la suivante: Comment est-ce qu'on peut gérer ça en acceptant le fait qu'il est raisonnable que les techniciens gagnent raisonnablement leur vie, sans arriver à des abus manifestes comme ceux que vous nous avez expliqués?

Mme Carreau (Madeleine): Je suis sûre qu'on vous a expliqué ça dans les jours précédents, nous n'y étions pas malheureusement, mais vous savez que IATSE est un syndicat très particulier qui a juridiction sur quelques théâtres à Montréal, et il faut quand même savoir... Moi, j'ai passé une grande partie de ma vie dans l'entreprise privée du spectacle. Là, maintenant, je suis à l'OSM mais j'avais été aussi à l'OSQ plus tôt, il y a plusieurs années. Il faut savoir que les techniciens se promènent, travaillent dans plusieurs théâtres. Quand il y a eu la grève à la Place des Arts, ces techniciens-là ont travaillé ailleurs, au Centre Molson, au TNM, dans d'autres salles accréditées IATSE à Montréal. Donc, ça explique peut-être d'ailleurs la durée du conflit, c'est qu'il n'y a pas eu vraiment de baisse de revenus pour une partie d'entre eux.

Mais, quand vous dites: Question de protéger leur travail, moi je veux bien, mais encore faudrait-il que ces gens-là soient eux-mêmes conséquents avec eux-mêmes. Parce que, moi, j'étais dans l'entreprise privée il y a quelques années, je produisais des spectacles au théâtre Saint-Denis et j'embauchais les techniciens d'IATSE au Théâtre Saint-Denis mais au tarif horaire des autres techniciens parce que, moi, j'étais pas liée avec aucune convention collective au théâtre Saint-Denis. Et comment se fait-il que des gens acceptent de travailler au théâtre Saint-Denis à un tarif horaire de 14 $ de l'heure et, quand ils arrivent à la Place des Arts, ça coûte... Vous savez, moi, je veux bien protéger le travail des gens, là, mais ces gens-là ont pas d'état d'âme de venir prendre le boulot d'autres techniciens dans d'autres théâtres non syndiqués, à des tarifs compétitifs à ces gens-là. Alors, pourquoi des syndiqués... des travailleurs culturels non syndiqués auraient-ils des états d'âme de venir travailler à la Place des Arts, eux, à des tarifs compétitifs pour les producteurs? Je pose la question, là. J'ai pas la...

n(15 h 10)n

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. On donne la parole au député de Marguerite-D'Youville puis, s'il reste deux minutes... M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Oui, merci. Vous nous avez décrit très bien dans votre mémoire ainsi que dans vos interventions les contraintes que vous impose le régime de travail actuel à la Place des Arts. Par contre, l'Orchestre symphonique de Montréal étant, comme vous l'avez bien indiqué, un organisme culturel qui voyage à travers le monde et qui a colligé différentes expériences, je suppose, également dans les accords, les ententes que vous signez un peu partout dans les villes où vous vous produisez, par rapport à la situation qui prévaut à la Place des Arts et au régime de travail qui prévaut, comment ça se passe dans d'autres salles où vous vous présentez?

Mme Careau (Madeleine): Bien, quand ce sont des salles accréditées IATSE, monsieur, ça se passe de la même façon, c'est un syndicat nord-américain qui a... Donc, quand nous allons à New York, nous allons... nous y allons à la fin du mois d'octobre comme à chaque année, et puis on va travailler à Carnegie Hall avec des techniciens IATSE, dans les mêmes conditions qui sont, pour nous, tout aussi inacceptables, mais c'est comme ça. On veut aller jouer à Carnegie Hall, on est fier d'y aller, on est heureux, mais on n'a pas le choix, on y va. Alors, ça se passe comme ça. C'est pas une situation unique ici, là, c'est pas ça, je pense que personne a pu dire ça, c'est pas du tout une situation unique. On a le droit pour autant de la dénoncer, mais c'est pas une situation unique, c'est pas un cas unique, non, non. À Montréal, c'est pas un cas unique non plus, je vous expliquais qu'au Théâtre du Nouveau Monde, bon, ou au Centre Molson, ou tout ça... Mais, par contre, quand vous allez dans d'autres théâtres privés, c'est comme ici. Je sais pas si, à la salle Albert-Rousseau, IATSE a juridiction? Je crois pas. Non? Alors donc, il y a deux poids, deux mesures.

Nous, nous ne pouvons pas aller jouer dans d'autres théâtres à Montréal, il n'y a pas de scènes assez grandes pour nous accueillir, alors... un peu comme L'Opéra. Donc, on vit avec. C'est pas un conflit quotidien, là, je veux pas dramatiser les choses, et je dois dire, surtout depuis la réintégration le 1er février, ça se passe très, très bien. Et, nous-mêmes, nous travaillons avec IATSE en dehors de Place des Arts, parce que nous donnons des concerts à l'église Notre-Dame, nous allons à New York, nous allons enregistrer à l'église Saint-Eustache, nous jouons dans des parcs, nous jouons à l'extérieur de Place des Arts régulièrement, nous avons un contrat de travail avec IATSE qui est, je crois, beaucoup plus adéquat avec ce que nous faisons que celui qui prévalait à la Place des Arts. Celui qui prévaut actuellement, depuis la réintégration, est proche de ça. Mais, quand je vous dis: Nous, on peut faire des concerts avec deux techniciens ? on l'a prouvé pendant plus d'un an ? pourquoi faut-il en payer quatre? On comprend toujours pas.

Et puis c'est le gouvernement qui paie tout ça, hein, il faut le savoir, nous, on est subventionnés, et puis c'est le gouvernement qui paie tout ça, là.

M. Beaulne: Oui, c'est ce que je commence à comprendre. Mais pourriez-vous, pour le bénéfice des députés, déposer à la commission la convention de travail que vous avez avec IATSE?

Mme Careau (Madeleine): Oui, nous l'avons apportée, alors nous... oui, nous le savons, nous l'avons avec nous, là, on vous le déposera.

M. Beaulne: Merci.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Merci, M. le député. Peut-être deux minutes, rapidement.

M. Dion: Bon. Alors, vous avez eu connaissance du rapport du médiateur évidemment et qui propose...

Mme Careau (Madeleine): Intérimaire.

M. Dion: Pardon?

Mme Careau (Madeleine): Le rapport intérimaire.

M. Dion: ...le rapport intérimaire, et qui propose des avenues de solution pour améliorer la situation. Croyez-vous que les propositions sont réalistes? Et êtes-vous d'accord avec l'application de ça comme solution aux problèmes que nous vivons?

Mme Careau (Madeleine): Étant donné que la perfection n'est pas de ce monde... oui... Non, non, ça améliorerait beaucoup, effectivement, nos finances, parce que les coûts seraient moins élevés, ça serait beaucoup plus proche des services dont nous avons vraiment besoin. Et puis il faut aussi tenir compte du passé, on peut pas balayer le passé de la main, ces conventions collectives là ont été signées de part et d'autre, je pense qu'il y a pas eu de menace de bombe. Alors, je pense qu'il faut pas balayer le passé, mais on peut l'améliorer, et puis ce rapport le fait.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup. Merci, M. le député. Alors, je passe la parole maintenant à Mme la députée de Sauvé, qui est la porte-parole officielle de l'opposition officielle en matière de culture et communications.

Mme Beauchamp: Merci. Hier, le président de la Place des Arts, M. Clément Richard, a fait allusion au fait qu'il y avait des ententes secrètes entre l'OSM et le syndicat IATSE.

Mme Careau (Madeleine): Non, l'entente qu'on va vous déposer là, elle est pas du tout secrète, elle a été signée officiellement, négociée officiellement. Elle est secrète dans le sens qu'on l'a pas publiée dans les journaux, on n'était pas tenu de le faire non plus, là, c'est un contrat de travail entre nous et les gens qui travaillent pour nous, c'est comme les contrats qu'on a avec d'autres employés à l'OSM. Mais elle est là, on va vous la déposer.

Mme Beauchamp: O.K. Non, mais je me posais la question, parce que...

Mme Careau (Madeleine): C'est la seule.

Mme Beauchamp: ...c'est l'expression qui a été utilisée. Donc, je me demandais...

Mme Careau (Madeleine): Ah, bien, c'est parce qu'on l'a tout simplement pas déposée publiquement, et cette entente n'a pas servi aux négociations entre la Place des Arts et le syndicat tout au long du conflit, là. Mais elle est très récente, on l'a signée il y a un an... à peine un an, un peu plus d'un an donc. Mais elle est pas secrète. Enfin, elle était pas publiée, mais on l'a apportée avec nous parce qu'on se doutait bien que vous alliez la demander et puis on veut bien la déposer.

Mme Beauchamp: Donc, il y a pas d'autres ententes qui prendraient pas une forme écrite, qui existeraient, ou quoi que ce soit?

Mme Careau (Madeleine): Non, non, non, non.

Mme Beauchamp: Pouvez-vous m'expliquer comment vous en êtes arrivés à signer cette entente? Parce que je dois vous dire que, quand on lit votre document, c'est quand même une... Ce matin, quelqu'un employait le mot une «charge», j'emploierais le même mot. Or, vous dénoncez les questions de dédoublement, de cloisonnement, le manque de souplesse et vous dites même qu'ils ne sont pas intéressés à se rapprocher de l'équipe de gestion. En tout cas, il y a plusieurs éléments là-dedans que, moi, j'appelle... Quand tu lis ça, tu dis: C'est une charge...

Mme Careau (Madeleine): Oui. Oui, tout à fait, tout à fait.

Mme Beauchamp: ...c'est une plainte importante. Et là on sait que par ailleurs vous venez nous dire: On va signer une entente avec IATSE. Ça fait que je veux comprendre un peu l'historique de cette entente. Qu'est-ce qui vous a amenés à signer une entente avec un syndicat avec lequel par ailleurs vous dites: Il ne crée pas de bonnes conditions de travail, un bon climat de travail pour l'OSM? Donc, je veux comprendre qu'est-ce qui vous a amenés à la signer.

Mme Careau (Madeleine): Je vais vous répondre. Nous y avons été forcés par le Tribunal du travail, parce que, là, nous avions embauché pendant un certain temps d'autres techniciens pour la Place des Arts et nous avions décidé d'utiliser pendant le conflit ces techniciens pour nos concerts hors Place des Arts ? puis il y avait une certaine logique à ça ? et les gens qui travaillaient traditionnellement pour l'OSM depuis près de 20 ans antérieurs au débrayage de IATSE ont porté plainte au Tribunal du travail en disant: Licenciement pour activités syndicales ? article 15, vous connaissez ça ? et le Tribunal du travail leur a donné raison. Donc, nous avons dû les réintégrer, nous avons été obligés de les réintégrer, et la réintégration s'est faite en négociant avec eux une entente pour les réintégrer. Mais on nous a ordonné de le faire.

Mme Beauchamp: Et cette entente que vous avez donc avec IATSE, ça veut donc dire que, si vous vous produisez, comme vous disiez, dans un parc ou quoi que ce soit, vous employez des techniciens IATSE. Est-ce que vous pouvez nous indiquer, nous donner des indications sur des éléments de cette convention qui nous permettraient de comparer ensuite la convention qui a été signée entre la Place des Arts et IATSE? Ce que je veux dire par là, c'est: Est-ce que vous avez un plancher d'emploi, par exemple? Est-ce qu'il est question de dédoublements, etc.? Parce qu'il y a toujours ça à distinguer, là, il y a des conventions qui se signent entre la partie patronale et la partie syndicale. Pouvez-vous nous dire quand... Parce que tantôt vous disiez: Il y a IATSE partout, mais c'est pas les mêmes conditions partout.

Mme Careau (Madeleine): Non.

Mme Beauchamp: Donc, j'aimerais ça, vous entendre sur, vous, les conditions que vous avez obtenues ou enfin négociées, plutôt, avec ce syndicat.

Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Bilodeau, je pense que vous voulez répondre. Allez-y.

Mme Careau (Madeleine): Oui, je vais laisser M. Bilodeau répondre.

M. Bilodeau (Benoît): Or donc, cette... Bon. Pour faire, effectivement, l'historique, d'abord le contrat de travail qui a été signé n'affecte que les tâches de machinistes. Quand on parle de machinistes, c'est les gens qui manipulent les instruments, les plantations d'orchestre, et tout ça. Donc, cette convention-là qui a été signée ne s'applique pas à d'autres aspects techniques. Par exemple, une sortie à l'extérieur, un parc, ça n'implique pas de la sonorisation, de l'éclairage, et tout ça, où est-ce qu'on est encore libres de choisir nos équipes techniques.

Les machinistes, en termes de flexibilité... On est revenu avec cette entente-là sur un peu ce qu'était l'entente antérieure non signée, c'est-à-dire que ces machinistes-là, qui sont avec l'Orchestre depuis, dans certains cas, 30 ans et même plus, travaillaient selon des conditions qui étaient négociées à l'amiable, c'est-à-dire un tarif horaire pour certaines tâches et un tarif quotidien pour d'autres tâches. Par exemple, à la basilique Notre-Dame, qui demande souvent une répétition le matin et un concert le soir, au lieu d'appliquer un tarif horaire pour une répétition et ce qu'on appelle un tarif spectacle en soirée, on en fait un tarif quotidien, ce qui est avantageux pour nous et ce qui devient aussi avantageux pour les machinistes en quelque part, parce qu'on n'est pas cloisonné en nombre d'heures de travail, en tâches de travail, et tout ça, et on n'a pas non plus de plancher d'emploi qui... C'est une entente, entre autres, à mon niveau comme producteur, avec le chef machiniste sur le nombre de personnes, par exemple, pour aller à Lanaudière, à la basilique Notre-Dame, sur l'ampleur du travail à accomplir selon le cas. Donc, on gère beaucoup en cas par cas dans ce contrat-là.

Le Président (M. Boulianne): Oui, Mme la députée.

n(15 h 20)n

Mme Beauchamp: Oui, merci. Je vais aborder un autre sujet, la question de la salle de l'OSM. Effectivement, ce matin, on a eu un plaidoyer, j'ai envie de dire vibrant, qui a résonné, c'est le cas de le dire, là, de la part des membres musiciens de votre orchestre, et je leur indiquais que, depuis le dépôt de leur mémoire, en février, il y avait eu une nouvelle qui avait entre autres été publiée dans le journal Les Affaires concernant un projet sur lequel travaillait la Société immobilière du Québec pour une salle pour l'OSM qui serait accompagnée d'une tour à bureaux, et tout ça, et je me demandais si, en date d'aujourd'hui, vous étiez en mesure de nous donner des indications, si vous aviez des nouvelles sur l'avancement de ce projet-là, si vous étiez... si vous étiez vraiment... membres, là, enfin participants à l'élaboration de ce projet-là. Selon vous, où est-ce qu'on en est rendu par rapport à ce projet-là?

Mme Careau (Madeleine): Bien, je dois vous dire qu'on lit les journaux comme vous et on apprend les choses dans les journaux tout comme vous. Très honnêtement, je me dis toujours, moi, le vieux principe: Il y a pas de fumée sans feu. Donc, oui, on entend parler de ce projet; oui, on nous en parle un peu partout; oui, on lit dans les journaux que ça va se faire; non, il n'y a pas eu d'annonce officielle. Vous le savez, il n'y en a pas eu plus pour nous que pour vous. On sait que c'est dans l'air, on sait que le projet existe. Surtout, je pense, ç'a été ravivé par le déplacement des conservatoires. Cet été, les conservatoires ont dû déménager dans d'autres locaux temporaires pour récupérer l'immeuble pour la Cour d'appel. Alors, pour calmer, et puis avec raison d'ailleurs, les conservatoires, on a dit: Vous allez pas avoir une situation temporaire qui va durer 10 ans, là, on va vous construire des lieux, des locaux, et puis il va y avoir une salle de concert, et tout ça.

Mais je pense que, dans tout ce processus décisionnel là qui, honnêtement, au niveau de la décision de le faire, ça ne nous regarde pas, là, nous, on va recevoir ça comme un beau cadeau. Mais je suis certaine, pour en avoir malgré tout parlé avec des gens, qu'au niveau... si ça s'annonce, et si ça se fait, et si ça se décide, c'est bien entendu que nous serons consultés au niveau de ce qu'on appelle le programme des besoins, et le programme des besoins étant justement ce qui constituera la salle elle-même, peut-être pas son architecture, je le sais pas, est-ce qu'ils feront un concours ou quoi, je... mais qu'est-ce qu'on veut comme acoustique, comme locaux, quels sont nos besoins, comment doit-on aménager les lieux, quel nombre de places, la salle, ça, on nous a toujours dit, bien avant tout ce remue-ménage des derniers mois, là, mais, au fil des ans, on nous a toujours dit que l'OSM serait plus que consulté, l'OSM ferait le programme des besoins. Eux s'assureront que, nous, nous consultons les experts compétents, mais le programme des besoins sera fait par l'OSM.

Donc, pour l'annonce officielle, je suis comme vous, là, je... nous attendons. Nous espérons qu'il y aura une annonce et qu'elle se fera, mais, honnêtement, on n'a pas d'annonce officielle encore.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Oui, Mme la députée.

Mme Beauchamp: Oui. Dans l'article publié dans le journal Les Affaires, on parlait que la SIQ étant en train de faire des études de faisabilité. Moi, à mon sens, sans parler d'un programme précis, là, des besoins, à mon sens... je m'attendrais honnêtement à ce que, au moment où on se parle, dans le cadre d'une étude de faisabilité, ce qui est plus large que strictement la salle de concert, ça, on s'entend bien, je me serais attendue à ce que, au moment où on se parle, qu'il y ait eu au moins un contact entre la SIQ et l'OSM.

Mme Careau (Madeleine): Oui! Oui! Oui! Il y a eu un contact entre la SIQ et l'OSM.

Mme Beauchamp: O.K.

Mme Careau (Madeleine): On nous a dit que l'Îlot Balmoral, tout comme Alain Simard d'ailleurs, hein, qui utilise cet espace, l'été, pour le Festival de jazz, on l'a consulté, parce que lui, si on construit, là, là, qu'est-ce qu'il va faire de ses spectacles qu'il présentait là? Alors, nous, on est venu nous voir bien sûr. On nous a dit: Voici, votre salle sera à peu près là, là, sur le boulevard de Maisonneuve, puis il y aurait les conservatoires là. Mais c'est pas ça que j'appelle une consultation.

Je pense pas que M. Vézina, qui est le président de la SIQ, je pense... attend lui aussi la décision politique. Je pense pas qu'il puisse dépenser de l'argent et aller très, très loin dans des études et dans des plans d'architecture sans que la décision soit prise. Moi, je suis pas une spécialiste de la décision gouvernementale, là, mais il me semble qu'on est un peu en attente. Mais j'ai vu M. Vézina bien sûr. Il est venu nous consulter...

Mme Beauchamp: O.K. Parce qu'on s'était mal compris. Au tout départ, le fait que vous avez commencé votre réponse en me disant: J'ai lu les journaux, je croyais que dans votre réponse...

Mme Careau (Madeleine): Oui, oui, mais c'est antérieur même à sa publication, l'article dans le journal Les Affaires. Et depuis, je n'ai lu que les journaux. Et je sais, pour avoir parlé à M. Vézina il y a un certain temps, au mois de novembre dernier, je sais qu'il voyait, là, puisqu'il y a des immeubles aussi sur ce terrain-là, là, puis il y avait toute la discussion avec la Place des Arts aussi, hein, qui... ce qui allait se passer à la Place des Arts si éventuellement on déménageait, et tout. Alors...

Le Président (M. Boulianne): Mme la députée.

Mme Beauchamp: Merci. Dans votre mémoire, vous abordez essentiellement la question des irritants que sont pour vous le contexte de travail avec, entre autres, les techniciens à la Place des Arts, mais je me demandais si par ailleurs vous aviez d'autres commentaires à nous faire, puisque cette commission parlementaire porte aussi sur la mission, les activités, le mode de gestion de la Place des Arts et du Grand Théâtre, mais bien sûr, vous, on vous interpelle plus sur la Place des Arts. Donc, je me demandais si vous aviez un certain éclairage à nous faire sur votre partenariat avec la Place des Arts, nonobstant, là, la question du conflit de travail qui y sévit.

Mme Careau (Madeleine): Bien, nous, on a une très bonne entente, on l'a dit dans notre mémoire. C'est sûr qu'on est passé vite là-dessus, puisqu'on a une très bonne entente. On considère qu'on a un bon propriétaire. On croit qu'on a des bons locataires aussi. Et, écoutez, il faut toujours ramener tout ça dans le contexte actuel. Nous ne sommes pas chez nous. Alors, cette salle a pas été construite pour nous, alors on essaie tous, de part et d'autre, de rendre notre vie plus agréable. Quand on demande à la Place des Arts de nous faciliter la tâche pour certaines choses, moi, j'ai pas de souvenir que ça nous a été refusé. Quand ç'a été possible, ç'a été fait assez rapidement. Quant au coût des loyers, il est fortement compétitif avec l'entreprise privée à Montréal. Vous voyez que la Place des Arts n'est pas chère... c'est les coûts reliés à tout le reste, mais le loyer en tant que tel à la Place des Arts, c'est pas un loyer qui est cher si on compare au marché. D'ailleurs, je pense qu'ils se sont même privés d'augmentation de loyer depuis certaines années pour pouvoir permettre aux organismes d'absorber les augmentations des autres coûts, et c'est bien géré. C'est sûr qu'elle est pas adéquate, la salle, je suis tout à fait d'accord avec nos prédécesseurs de L'Opéra, mais ç'a pas été fait pour nous. Alors, on essaie de s'accommoder dans une maison qui a pas été construite pour nous, puis je dois dire que les relations sont plutôt bonnes, voire même excellentes.

Le Président (M. Boulianne): Merci...

Mme Beauchamp: Très bien, merci.

Le Président (M. Boulianne): C'est bien. Alors...

Mme Careau (Madeleine): Je voulais revenir sur ma convention. Il faut... J'ai un projet ici de mon contrat d'IATSE pour les concerts à la Place des Arts. Et là je vais vous faire sourire, j'ai une clause, 7.8, que la directrice générale me rappelle... «Les parties s'entendent pour garder le contenu strictement confidentiel, sauf pour en demander l'exécution.» Alors là, madame et messieurs, je suis très embêtée. Il faut que je consulte mes conseillers juridiques avant de pouvoir déposer mon projet de convention. Je suis désolée. J'avais oublié cette clause, pour vous dire à quel point, nous, on n'a pas... on n'a pas fait ça... Mais je ne peux pas le déposer aujourd'hui...

Le Président (M. Boulianne): Madame, il y a rien qui vous oblige à le déposer...

Mme Careau (Madeleine): Je l'aurais fait volontiers, comme je vous l'ai dit...

Le Président (M. Boulianne): Le député de...

Mme Careau (Madeleine): ...spontanément, mais je peux pas là. Je veux pas contrevenir à mon propre contrat. J'ai signé, là, alors...

Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, le député de Marguerite-D'Youville a demandé la parole. Est-ce que c'est sur ça, M. le député?

M. Beaulne: Oui. On peut pas vous forcer à dévoiler quelque chose que vous ne pouvez pas dévoiler, mais vous confirmez du fait même ce que disait le président de la Place des Arts, c'est...

Mme Careau (Madeleine): Bien, oui.

M. Beaulne: ...une entente secrète. Voilà.

Mme Careau (Madeleine): Le président est bien informé, oui. Il est venu me demander déjà, puis on a dit ne pas la donner, mais...

n(15 h 30)n

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, Mme Careau, Mme Leclerc et M. Bilodeau pour ce mémoire. Alors, je demanderais maintenant à la Guilde des musiciens du Québec de s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Alors, bienvenue à la commission, M. le président Subirana. Alors, il nous fait plaisir de vous accueillir. Alors, vous pouvez présenter la personne qui vous accompagne et présenter votre mémoire.

Guilde des musiciens du Québec

M. Subirana (Émile): Bon. Alors, à ma droite, ici, il y a M. Gérard Masse, vice-président de la Guilde des musiciens du Québec, qui m'accompagne et qui pourra peut-être répondre à vos questions au sujet du Grand Théâtre de Québec. Et, si vous voulez, je peux lire ce que je vous ai envoyé il y a déjà quelques mois si vous permettez.

Alors, les relations qu'entretient la Guilde des musiciens du Québec avec la direction de la Place des Arts n'ont pas toujours été au beau fixe. Au début et au cours des 20 premières années, environ, elles étaient excellentes. Les musiciens du Québec se sentaient bien accueillis par une direction qui valorisait les artistes et reconnaissait que la raison d'être de la Place des Arts était essentiellement de présenter au public les meilleurs artistes du Québec. Toutefois, depuis une quinzaine d'années, l'atmosphère a changé au point d'être marquée par la confrontation ainsi que le mépris envers les musiciens en général et ceux du Québec en particulier. Les conditions qui ont favorisé l'épanouissement de la musique sur scène durant 20 ans ont fait place à une attitude antisyndicale et anti-Guilde aussi agressive que celle qu'on retrouve dans le secteur privé. Cette attitude s'est même aggravée depuis quelques années.

Comme les relations avec les autorités de la Place des Arts sont difficiles, il n'est pas étonnant que la Guilde remette en question le rôle de cette dernière et se demande si ceux qui la dirigent le connaissent bien. Si son rôle est de donner aux musiciens du Québec le sentiment qu'ils sont importants et qu'ils font partie intégrante du processus de production, alors on peut dire que c'est un échec lamentable. Depuis 15 ans, nous avons pu voir que les musiciens étrangers sont engagés au détriment des musiciens du Québec et qu'un magnétophone remplace désormais de plus en plus souvent les musiciens dans la fosse. Peut-être le rôle de la Place des Arts consiste-t-il à offrir aux producteurs une façon d'être rentable? Si c'est le cas, eh bien elle a échoué là aussi. À la Place des Arts, nous avons le pire des deux mondes, c'est-à-dire le rejet agressif des artistes qui prévaut dans le secteur privé et l'onéreuse bureaucratie qui sévit dans les sphères gouvernementales. La Guilde estime que la Place des Arts doit, en qualité d'organisme gouvernemental, au moins promouvoir le recours au millier de musiciens québécois qui sont sous-employés et aux centaines de musiciens professionnels que nos conservatoires forment chaque année. Si l'entreprise privée est peu encline à appuyer nos musiciens, la Place des Arts devrait, de par sa mission même, faire autrement.

Le climat des relations de travail à la Place des Arts est une véritable honte. Toute entreprise publique qui a recours à des tactiques fascistes comme celles que nous avons récemment vues... pu voir dans le conflit de l'Alliance internationale des employés de la scène et des projectionnistes des États-Unis et du Canada serait universellement condamnée par son déplorable sens civique... pour son déplorable sens civique. Pourtant, le gouvernement semble voir d'un bon oeil ces outrageantes manoeuvres qui ne respectent ni l'esprit ni la lettre de la loi. Il est clairement temps que la philosophie de gestion change.

Le comportement des autorités de la Place des Arts envers les syndicats a également laissé un goût amer dans la bouche des représentants de la Guilde. Il y a 15 ans, la Place des Arts et la Guilde ont conclu une entente semblable à celle qui existe dans les salles de spectacles partout dans le monde. L'entente interdisait l'embauche de musiciens étrangers si on pouvait engager des musiciens du Québec. Elle faisait également la promotion du recours à des musiciens sur scène plutôt qu'à des enregistrements. À présent, Montréal a joint les rangs des petites municipalités dont les compagnies de ballet utilisent des enregistrements plutôt que d'embaucher des musiciens en chair et en os. Et, si d'aventure les producteurs font bel et bien appel à des musiciens, ils en engagent quatre pour accompagner un enregistrement plutôt que d'embaucher un orchestre complet, comme on fait à New York ou à Londres.

L'entente empêchait également les producteurs improvisés de quitter la ville sans payer les musiciens. La Place des Arts retenait toujours le cachet des musiciens à même les recettes au guichet afin d'en garantir le paiement. Cette protection est maintenant chose du passé. Aujourd'hui, lorsque les producteurs pensent à New York ou à Londres, ils pensent à des villes d'envergure internationale. Lorsqu'ils pensent à Montréal, ils se demandent combien d'argent de plus ils pourront se mettre dans les poches s'ils n'ont pas à embaucher tous ces musiciens superflus.

Au cours des 15 dernières années, la direction de la Place des Arts a préféré avoir recours aux tribunaux et à des injonctions contre la Guilde plutôt que de favoriser les musiciens du Québec. Elle a suivi l'exemple de France Film qui, afin d'épargner le coût de nos musiciens, a joint les rangs du secteur privé qui privilégie toujours le producteur au détriment des artistes. Depuis lors, la direction de la Place des Arts n'a jamais plus communiqué avec la Guilde afin de s'informer de ce qu'on pourrait faire pour élargir les débouchés de nos artistes. La Place des Arts n'a jamais même évalué les répercussions du remplacement de nos artistes par des enregistrements musicaux sur la vitalité culturelle de notre ville. Pourtant, elle devrait sûrement être le meilleur allié de la Guilde dans la lutte contre une technologie qui ne joue pas de musique et qui reproduit simplement des enregistrements de musiciens en chair et en os sans qu'il y ait rémunération.

Ce piratage musical, dont la production Notre-Dame de Paris de M. Plamondon est l'exemple le plus patent, a été condamné par les musiciens du monde entier. En 1999, la Fédération internationale des musiciens, dont la Guilde est membre, a condamné à l'unanimité les pratiques déloyales des producteurs de Notre-Dame de Paris et le recours aux enregistrements en général qu'elle estime contraires aux dispositions de la Convention de Rome. Pourquoi le bien-être des artistes n'est-il pas une préoccupation pour la Place des Arts? Les grandes salles du monde refusent de présenter des productions de second ordre et insistent pour engager des artistes en chair et en os. Pourquoi la Place des Arts ne fait-elle pas de même? Pourquoi les gouvernements, qu'ils soient péquistes ou libéraux, se mettent-ils systématiquement du côté des gens qui exploitent sans scrupule les artistes plutôt que de privilégier ceux-ci et la vitalité culturelle dont ils sont si fiers en temps d'élection?

En ce qui concerne l'Orchestre symphonique de Montréal, le Québec a la chance de pouvoir compter sur un des meilleurs orchestres au monde, l'Orchestre symphonique de Montréal. Ses nombreux enregistrements sont parmi les plus célèbres au monde. Malheureusement, la plupart des Montréalais n'ont jamais eu le bonheur d'entendre le véritable son de ce prodigieux orchestre, en tout cas certainement pas ceux qui sont allés l'entendre à la salle Wilfrid-Pelletier. N'est-il pas ironique de penser que le nom de ce célèbre Québécois, qu'on a longtemps associé à l'OSM et à la musique au Québec, désigne l'une des salles du monde symphonique dont l'acoustique est le plus déplorable? Malgré les nombreuses tentatives qui ont été faites pour transformer cette salle qui sert à tout et à n'importe quoi en lieu digne de notre orchestre de renom, la pire place pour entendre l'OSM demeure Montréal. Quiconque l'a entendu au Carnegie Hall, à New York, ou au Symphony Hall, à Boston, vous le dira: Cet orchestre est véritablement transfiguré par la superbe acoustique qui y règne.

Contrairement aux instruments électriques, qui doivent être amplifiés, le son des instruments d'un orchestre symphonique dépend totalement de l'acoustique de la salle. Si l'orchestre enregistre à Saint-Eustache, le son est magnifique. S'il évolue à la salle Wilfrid-Pelletier, l'affreuse acoustique a tôt fait de littéralement étouffer le son. Cette déplorable situation a deux graves conséquences. Tout d'abord, elle empêche l'orchestre de se développer et d'enregistrer dans un environnement adéquat. Ensuite, elle empêche les musiciens de s'entendre comme ils le devraient et comme ils le font lorsqu'ils s'exécutent dans d'autres salles. Ainsi, l'orchestre doit évoluer tour à tour dans des conditions différentes. Aucun autre grand orchestre du monde n'a à vivre une telle situation. C'est une source constante de frustration pour les artistes. C'est une situation inéquitable et décourageante, même pour les plus grands virtuoses. Je le répète, aucun autre orchestre au monde n'a évolué dans des conditions aussi défavorables.

Le public est, lui aussi, frustré. Il connaît les enregistrements de l'OSM et est très déçu lorsqu'il vient entendre l'Orchestre sur place. Ça devrait être le contraire, le spectacle sur scène devrait être beaucoup plus gratifiant qu'un enregistrement. Quiconque a entendu l'Orchestre en Europe ou à New York sait à quel point est électrisante la sensation d'entendre un orchestre complet jouer à pleine puissance dans une salle de renommée internationale. Pourtant, ceux qui ont déjà entendu l'Orchestre à la salle Wilfrid-Pelletier se demanderont pourquoi on parle tant de l'OSM. Il est proprement incroyable que l'Orchestre puisse même attirer le public avec une acoustique aussi déprimante. C'est comme si nous avions l'une des plus belles collections d'oeuvres d'art au monde et que nous nous contentions de l'exposer dans un entrepôt décrépit de façon à tout rendre le plus laid possible.

C'était bien encourageant d'entendre le premier ministre Bouchard dire qu'il comprend le problème et qu'il est prêt à bâtir une salle digne de notre orchestre. Malheureusement, c'est ce qu'on nous promet depuis des lustres. Toutes les études ont été faites à maintes reprises, il est temps de veiller à ce que l'une des plus célèbres... l'un des plus célèbres ambassadeurs culturels du Québec puisse évoluer dans une salle digne de sa renommée mondiale.

n(15 h 40)n

La Place des Arts ne saurait avoir un avenir sans d'abord renouveler ce qui aurait toujours dû être sa mission: offrir aux meilleurs artistes de spectacle du Québec le meilleur environnement où évoluer. Pour y arriver, il faudra faire deux constats d'échec: les relations de travail et l'acoustique. Le climat de respect envers les artistes qui existait à l'origine doit être rétabli. Il faut aussi réévaluer les installations de façon réaliste pour que le départ de l'OSM soit une occasion d'aller de l'avant et non pas un recul. Merci.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le Président. Alors, nous allons précéder à une période d'échange, d'abord avec le député d'Iberville. M. le député, vous avez la parole.

M. Bergeron: Merci. Écoutez, à la lecture de votre mémoire, je comprends que tout n'est pas rose. Vous parlez d'une attitude de confrontation, de mépris et, à la fin, quand vous parlez d'avenir, «il faudra faire deux constats d'échec: les relations de travail et l'acoustique», j'ai comme l'impression que vous avez nuancé vos prémisses de départ, mais... En tout cas, vous pourrez m'en parler tantôt, mais, au tout début, à la page 2, vous avez dit: À la Place des Arts, nous avons le pire de deux mondes, et c'est le rejet agressif des artistes qui prévaut dans le secteur privé. J'aimerais que vous soyez plus explicite. Et qu'est-ce que vous entendez par cette affirmation-là, «le rejet agressif des artistes qui prévaut dans le secteur privé»?

M. Subirana (Émile): J'entends par là les manoeuvres auxquelles on pourrait s'attendre dans le secteur privé, par exemple, avec la compagnie Spectra à Montréal et le Festival de jazz international qui refusent de signer une entente avec la Guilde maintenant depuis trois ans sous prétexte qu'ils ne sont pas producteurs. Et c'est toutes sortes de manoeuvres, avec la loi sur le statut de l'artiste, pour contourner la loi, pour ne pas respecter leurs obligations. Alors, dans le secteur privé, on peut s'y attendre un petit peu, parce que les producteurs, c'est quand même une question de profit et des manoeuvres pour essayer de minimiser l'influence des syndicats, mais qu'on s'attende... on s'entendrait pas... ou on devrait pas s'attendre à ça dans un organisme paragouvernemental qui, à peine quelques rues plus loin, forme des musiciens et que, dans la Place des Arts, leur attitude est telle qu'on ne favorise pas ces musiciens québécois. Alors, c'est ça que je veux dire, que l'attitude de la Place des Arts est pire encore ou au moins équivalente à... les attitudes plus antisyndicales que je vois dans le milieu privé.

Le Président (M. Boulianne): M. le député.

M. Bergeron: Oui. Et, concernant la construction d'une nouvelle salle, pour vous, ce serait la panacée, disons, le remède à bien des problèmes.

M. Subirana (Émile): Eh bien, le remède à bien des problèmes, aux problèmes de l'Orchestre symphonique et peut-être aux problèmes de la salle Wilfrid-Pelletier, dans le sens que beaucoup d'imprésarios s'inquiètent que, pour programmer quelque chose convenable, on n'a pas l'horaire à notre disposition... À leur disposition, ils n'ont pas leur horaire, parce que l'OSM prend tellement de temps et empêche des productions de longue durée. Alors, ça, ça pourrait peut-être régler ce problème-là pour les imprésarios. Mais, pour l'Orchestre symphonique de Montréal, c'est un besoin absolument urgent, mais... Je dirais urgent, sauf que ça fait 20 ans qu'on en parle. L'acoustique est un des éléments les plus importants quand vous avez un orchestre qui joue extrêmement bien comme l'Orchestre symphonique de Montréal.

Si on peut comparer cet orchestre à Chicago, à New York, à Berlin, à Londres, c'est parce que les musiciens qui jouent dans cet orchestre-là jouent un calibre international, parmi les plus élevés au monde. Mais l'acoustique, c'est ça qui nous fait percevoir le son. Et, si l'acoustique n'est pas favorable, on sait pas que c'est l'Orchestre symphonique de Montréal qui joue parce qu'il sonne pire à cause de l'environnement. Et ça, peut-être, c'est difficile pour quelqu'un qui n'a pas entendu le même orchestre dans deux salles différentes, mais c'est vraiment quelque chose de très important. Je sais que M. Dutoit ne cesse d'en parler depuis des années, et c'est une de ses préoccupations principales.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député, ça va? Alors, M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Oui. Je suis d'accord avec vous, avec un point, lorsqu'il y a des grands spectacles comme Notre-Dame-de-Paris, c'est beaucoup plus excitant d'avoir des musiciens qui accompagnent le spectacle plutôt que d'entendre ça sur des bandes enregistrées. J'ai pu comparer les deux représentations. Ceci étant dit, les groupes auparavant, y compris les représentants de l'Orchestre symphonique de Montréal qui viennent de vous précéder, ont déploré la rigidité qui existe dans les conventions collectives, et même les différents rapports qu'ils nous ont soumis, autant l'Orchestre symphonique de Montréal que d'autres groupes qui l'ont précédé, ont illustré factuellement quelles étaient les implications de ces rigidités. Vous, comme musiciens, comment vivez-vous cette situation?

M. Subirana (Émile): La rigidité dans quel sens?

M. Beaulne: La rigidité dans le sens, par exemple, où on nous disait que, pour les équipes techniques, parfois il faut seulement trois personnes, alors que les conventions collectives exigent qu'il y en ait plus. D'autre part, on nous donnait l'exemple des lumières qui s'éteignaient lorsque les musiciens ont pas fini de pratiquer. Enfin, vous voyez le genre d'exemples qui nous ont été donnés. Mais vous, comme vous êtes les musiciens, c'est vous qui êtes sur le plancher, comment vivez-vous cette situation au jour le jour? Comment avez-vous vécu ça, vous, au-delà... Nous, on a reçu ici des représentations beaucoup des directions des grands groupes, mais vous, comme musiciens, comme artistes, comment avez-vous vécu cette situation? Comment avez-vous vécu les conflits de travail à la Place des Arts?

M. Subirana (Émile): Eh bien, nous, ce qu'on a vécu comme musiciens... Moi, étant président de la Guilde, bien sûr, je ne joue pas à la Place des Arts comme je jouais avant, mais je peux vous dire que, quand j'étais musicien, des techniciens professionnels, on s'en rendait même pas compte parce que les choses marchaient sans qu'on les voie fonctionner, c'est-à-dire que c'était fait d'une façon professionnelle. Les lutrins sont là, les chaises sont là, le piano se déplace, tout se fait dans... L'éclairage, le son, la qualité de son, tout se fait sans qu'on s'en aperçoive parce que c'est fait de façon tellement professionnelle.

Maintenant, je ne peux pas vous dire, en tant que président de la Guilde, comment les choses se passent maintenant et si on devrait avoir trois techniciens plutôt que cinq. Moi, mes seuls commentaires au sujet des relations de travail à la Place des Arts, c'était la nature... la façon agressive de faire affaire avec notre syndicat en particulier et surtout les syndicats des techniciens. Et je ne dis pas qu'il devrait y en avoir trois plutôt que cinq ou cinq plutôt que trois, mais simplement qu'on devrait négocier des ententes dans la loi avec les façons de négocier qu'on connaît au Québec dans les relations de travail et non pas essayer de faire le cow-boy, style relations de travail américaines, comme on fait actuellement à la Place des Arts.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député.

M. Beaulne: Quand vous parlez de style cow-boy, vous voulez dire quoi exactement?

M. Subirana (Émile): Je parle de M. Richard et de la façon dont il fait affaire avec nos syndicats et les syndicats à la Place des Arts en particulier. Même si les tribunaux, à maintes reprises, tous les arbitres, tous les juges disent que c'est illégal, qu'ils ont tort, même malgré tout ça, il n'est pas prêt à négocier comme il devrait, et je ne comprends pas cette attitude du tout. On voit pas ça ailleurs dans le secteur privé au Québec, et c'est absolument aberrant que le pire exemple des relations de travail au Québec soit dans un organisme paragouvernemental.

M. Beaulne: Mais avez-vous pris connaissance du rapport du médiateur qui a été nommé pour rapprocher les parties dans le conflit?

M. Subirana (Émile): Non. Du rapport au complet, non. J'ai lu les articles dans les journaux et j'ai eu des conversations avec, bien sûr, les techniciens qui sont nos collègues syndicaux, et j'ai certaines connaissances, mais j'ai pas lu le rapport du médiateur.

M. Beaulne: Trouvez-vous normal que la direction de la Place des Arts ait accepté le mémoire, mais que... ait accepté le rapport du médiateur, mais que le syndicat IATSE l'ait refusé alors qu'il avait accepté le rapport préliminaire?

n(15 h 50)n

M. Subirana (Émile): Je ne pourrais pas vous dire parce que j'ai pas eu la chance de discuter ça avec le syndicat et, ne connaissant pas le rapport, je ne pourrais vous dire. Je veux pas me mettre à la place du syndicat des techniciens, je veux simplement vous dire l'impression que j'ai des relations de travail à la Place des Arts avec mon expérience personnelle d'il y a une quinzaine d'années.

Le Président (M. Boulianne): ...M. le député, vous avez encore un peu de temps.

M. Beaulne: Oui? Bon, parce qu'il y a un autre élément, vous représentez la Guilde des musiciens. On est venu nous dire à quelques reprises et on a fait également des comparaisons entre la rémunération que recevaient, par exemple, les danseurs des Grands Ballets canadiens, les comédiens du groupe Jean-Duceppe en particulier et où il y avait un écart quand même avec la rémunération que recevaient les techniciens par rapport au nombre d'heures consenti, ainsi de suite. Êtes-vous d'accord avec ces affirmations-là? Et vous, comme représentant des musiciens, trouvez-vous que ceux qui sont venus nous parler exagèrent lorsqu'ils affirment que les artistes, que les comédiens, que les danseurs sont sous-payés par rapport aux techniciens?

M. Subirana (Émile): Écoutez, je ne peux pas vous dire qui est sous-payé par rapport à qui. Je sais que les danseurs, normalement, sont sous-payés par rapport aux musiciens, que certains musiciens, sinon la plupart, sont sous-payés par rapport aux avocats et que les musiciens sont sous-payés par rapport aux chauffeurs d'autobus, par rapport à n'importe qui. Mais que, là, qu'on essaie de mettre les danseurs, les comédiens et les musiciens contre les techniciens simplement parce qu'il y a un écart de rémunération, ça, j'ai pas de réponse à vous donner. Tout le monde est sous-payé dans les arts. Tout le monde subventionne les arts ici, en partant par les musiciens et les artistes.

M. Beaulne: Vous prêchez ici pour une autre salle de concert pour l'Orchestre symphonique de Montréal, comme d'ailleurs d'autres l'ont préconisé avant, ce qui... Un des aspects qui ressort de nos échanges, qu'on devra évidemment évaluer un peu plus, c'est le fait que le climat de travail qui prévaut à la Place des Arts se traduit par des ponctions importantes qui, dans le cas de certains groupes culturels qui sont internationalement reconnus au Québec... Ça met leur survie en danger. Ça nous a été confirmé par différents groupes. Alors, je comprends que vous représentez la Guilde des musiciens, mais, à un moment donné, ne pensez-vous pas que ces montants qui sont investis par le gouvernement au niveau des subventions d'à peu près tous les groupes culturels importants au Québec... Parce qu'il faut bien le dire, ce sont tous des groupes subventionnés et hautement subventionnés... Que le gouvernement, au lieu d'éponger les résultats de conflits de travail qui perdurent via les subventions qu'il donne à ces organismes, pourrait l'investir à meilleur escient pour améliorer la qualité de vie et les possibilités d'emploi des artistes dans quelque secteur qu'ils soient?

M. Subirana (Émile): Encore une fois, je suis pas sûr que je comprends votre question.

M. Beaulne: La question est simple: Si le gouvernement, au lieu d'éponger les déficits ou une partie des déficits des grands groupes culturels qui découlent du fait qu'il existe certaines conditions préjudiciables dans le domaine des relations de travail et qui minent la flexibilité que peuvent avoir les groupes dans la production de leurs spectacles... Moi, ce que je dis, puis je vous pose la question: Si j'étais un artiste, si j'étais un comédien, si j'étais quelqu'un qui est sur la scène, dans la danse, je préférerais que le gouvernement... ou que l'argent que le gouvernement donne à ces groupes-là aille pour la multiplication des productions, pour augmenter la possibilité d'emploi ou les occasions d'emploi des artistes plutôt que d'éponger des déficits qui relèvent bien souvent de l'augmentation des coûts de production techniques.

M. Subirana (Émile): Écoutez, si vous dites qu'il y a des méchants grévistes qui ont gagné à maintes reprises leur cause devant les tribunaux ou les arbitres, etc., qui causent des problèmes monétaires à la Place des Arts et que nos artistes souffrent parce que les techniciens exercent des moyens de pression ou essaient d'exercer leur recours légal et normal de syndicat, je ne sais pas quoi vous répondre. C'est possiblement que les... Il y a de l'argent qui pourrait aller aux artistes, mais ça devrait pas venir seulement des techniciens. Je ne vois pas pourquoi on va choisir un groupe qui essaie de faire valoir ses droits, des droits fondamentaux au Québec, de syndicat et pourquoi les... On dirait aux autres groupes... On essaie encore de diviser le secteur des arts en disant: On va prendre l'argent des techniciens. Laissez tomber vos collègues là-bas, on va prendre leur argent, puis vous allez mieux vivre.

Je ne pense pas que c'est une solution. Réglons donc le problème des relations de travail à la Place des Arts et qui n'existait pas avant. Dans le sens que l'Orchestre symphonique existe depuis assez longtemps, la Place des Arts aussi, c'est seulement depuis deux, trois ans qu'on a ces problèmes-là. Alors, je ne vois pas pourquoi on devrait accepter de diviser le monde syndical et artistique simplement pour régler un problème de mauvaises relations de travail qui ne vient pas des syndicats.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, le temps est terminé. Mme la députée de Sauvé.

Mme Beauchamp: Oui, merci. Votre mémoire est important, parce qu'on est ici pour examiner les activités, la mission, mais aussi les modes de gestion du Grand Théâtre et de la Place des Arts. Un sujet a passablement accaparé nos travaux, c'étaient les relations de travail entre la Place des Arts et IATSE, mais vous venez de nous faire des commentaires comme... Vous êtes des gens, j'ai envie de dire, en relation également avec la Place des Arts, et vous venez également déplorer le mode de gestion qu'a la Place des Arts à votre égard. Sauf qu'il y a quelque chose que je comprends pas, que j'aimerais que vous m'éclairiez, c'est: Quel est votre statut par rapport à la Place des Arts? C'est-à-dire que, dans votre document, vous faites référence à des ententes, vous faites référence à des recours devant les tribunaux qu'a exercés la Place des Arts contre la Guilde des musiciens, mais, par ailleurs, j'ai de la difficulté à saisir quel est le lien entre la Guilde et la Place des Arts. C'est-à-dire l'entente à laquelle vous faites allusion, et tout ça, est-ce que c'est une entente de type convention collective? Ça me surprendrait, la Place des Arts ne produit plus de spectacles depuis au moins 1993. Tout ça, donc, je voudrais que vous m'éclairiez. Vous venez déplorer le mode de gestion qu'a la Place des Arts, son mode de relations qu'elle entretient avec vous, mais quelle est la nature de cette relation que vous entretenez avec la Place des Arts?

M. Subirana (Émile): Eh bien, vous avez entièrement raison, il y a aucun lien entre la Guilde et la Place des Arts actuellement. Il y en a eu un pendant au moins, quoi, presque 20 ans... ou un peu plus que 20 ans où on avait une entente. C'était pas une convention collective, c'était une entente qui protégeait les musiciens au cas où un producteur ne payait pas les cachets puis c'était une production qui durait seulement une couple de jours. C'était une entente qui interdisait la musique enregistrée à moins que les musiciens soient compensés qui... ou ont été remplacés par la musique ou qui ont fait la bande enregistrée. Il y avait un certain nombre de musiciens minimum qu'on devait engager s'il y avait des musiciens étrangers pour que ça soit pas les musiciens étrangers qui prennent leur place. C'est le type d'entente qu'on avait.

Alors, ces ententes-là, comme j'ai dit dans mon mémoire, existent partout à travers l'Amérique du Nord. Je parle de l'Amérique du Nord, parce que, en Europe, on s'y attend. Mais, en Amérique du Nord, ça existe. Alors, ces salles-là, qui sont parfois producteurs mais pas toujours, garantissent que les conditions de travail des musiciens seront respectées par tous les producteurs. Et on peut aller dans un pays comme l'Argentine, où j'étais il y a deux semaines, et les syndicats des musiciens nous disent: Mais, comment, vous n'avez pas d'entente avec votre théâtre le plus important? Ici, on a une entente qui protège tous les musiciens, peu importe qui est le producteur, parce que le lieu de travail est le plus important.

Alors, pour nous, ça a été une perte énorme et ça a été un geste que la Place des Arts n'avait pas besoin de poser, d'après moi, pour défendre ses intérêts. On aurait pu négocier quelque chose, mais il y avait à ce moment-là aucune négociation non plus, il y a eu simplement injonction contre la Guilde en disant que cette entente n'existe plus. Alors, pour nous et pour les musiciens du Québec, ça a été une perte. Les compagnies de ballet, qui engageaient des musiciens, des orchestres de 20, 30, 50 musiciens, sont venues avec des bandes sonores la prochaine fois... la fois suivante, et ça, je l'ai vécu moi-même.

Alors, c'est cette entente-là qui favorisait les musiciens. C'est ça qu'on critique aujourd'hui, c'est la même attitude antisyndicale qui continue aujourd'hui. Maintenant, c'est nos collègues de IATSE qui en subissent les conséquences, mais ça a déjà été les musiciens québécois.

n(16 heures)n

Mme Beauchamp: Est-ce que... M. le Président, j'ai une autre question. Est-ce que vous êtes en mesure de me dire... Quand vous me dites: Les salles, en Amérique du Nord, ont ce genre d'entente, j'aurais besoin d'un certain éclairage, là. Selon vous, quelle est la proportion de salles qui ont ce genre d'entente? Puis, quand on parle de salles, est-ce que vous faites référence à des salles qui sont la propriété de l'État? Mais, par ailleurs, aux États-Unis, c'est pas ce modèle-là qu'ils ont de développement. Ça fait que est-ce que vous me parlez de salles privées qui ont ce genre d'entente? J'aimerais que vous soyez un peu plus explicite quand vous... Parce que là j'ai l'impression que vous me dites que la Place des Arts est la seule à pas avoir ce genre d'entente là, je me dis: Ça doit pas être ça tout à fait, la réalité. Ça fait que pouvez-vous être plus précis sur qui a ce genre d'entente là et qui en a pas en ce moment, là, dans les Amériques, par exemple?

M. Subirana (Émile): Non, non, non, je ne dis pas que la Place des Arts est le seul endroit comme ça, je dis que c'est lamentable qu'au Québec, quand c'est un organisme paragouvernemental... que ce soit des relations de travail qui sont aussi aberrantes, c'est ça que je disais. Mais, sinon, on a par exemple à Vancouver, à Calgary, on a des salles à Toronto avec lesquelles les syndicats ont des ententes. On a des endroits comme Madison Square Garden, on a Lincoln Center qui ont des ententes. Maintenant, les ententes varient, elles ne sont pas toutes pareilles. Mais il y a des ententes dans des endroits où les climats de relations de travail sont normalement perçus comme moins favorables, comme aux États-Unis. Alors, je ne vois pas pourquoi... Et, comme je dis, dans les pays européens, les syndicats ont des ententes avec les salles qui parlent de musique enregistrée. Qu'est-ce qu'on fait dans le cas de musique enregistrée, de musiciens étrangers et de conditions de sécurité, etc.?

Mme Beauchamp: O.K. C'est un éclairage extrêmement intéressant. Pouvez-vous me dire à quel moment l'entente est devenue caduque? Bon, pour la rendre caduque, il a fallu que la Place des Arts prenne une injonction. Mais est-ce que vous pouvez me situer dans le temps, là? Vous dites qu'il y a une quinzaine d'années une telle entente existait. Est-ce que... Quand la Place des Arts a-t-elle décidé de mettre fin à cette entente? Quelle explication a-t-elle fournie? Mais, par ailleurs, ce que je comprends, c'est qu'elle s'est adressée à des tribunaux...

M. Subirana (Émile): Oui. Il y a eu une injonction...

Mme Beauchamp: ...et qu'elle a gagné.

M. Subirana (Émile): C'est ça, une injonction en Cour supérieure, vers 1985 ? je me souviens pas si c'est 1985 ou 1984, en tout cas, 1985 à peu près ? et la Place des Arts prétendait qu'elle n'était pas producteur. Nous, on prétendait qu'elle était au moins en coproduction avec tout le monde, parce qu'elle fournissait les placeurs, elle fournissait les programmes, elle partageait les revenus, les risques. En tout cas, nos avocats ont préparé une cause qui nous semblait assez bien préparée. Le juge a dit que, puisqu'ils ne produisaient pas ? et c'est ça que la Place des Arts prétendait à l'époque ? on ne pouvait pas les rendre responsables de l'entente qu'ils avaient... Mais ça, c'était une entente, bien sûr, qui dépendait de leur bonne volonté aussi. Alors, il y a pas eu de bonne volonté.

Mme Beauchamp: Juste par souci d'équité, j'imagine que vos propos... peut-être que je m'adresse plus à M. Masse. Ces propos-là s'adressent aussi au Grand Théâtre de Québec ou si le Grand Théâtre a une telle entente en ce moment?

M. Masse (Gérard): Pas du tout. On n'a pas d'entente avec le Grand Théâtre de Québec et la problématique, dont je voulais vous faire part aujourd'hui, a rien à voir avec une entente quelconque. Nous, au Québec, on vise la Loi sur le statut de l'artiste et, dans cette loi-là même, il y a certaines lacunes qui nous permettent pas de part et d'autre ? et les producteurs et les associations d'artistes, dont la nôtre ? de définir et de comprendre à un moment donné qui est producteur et qui est artiste. À toutes fins pratiques, la loi, au moment où on se parle, avec les quelques trous qu'il y a dedans, il n'y a qu'un chapeau de producteur et un chapeau d'artiste et, malheureusement, c'est l'artiste qui porte le même chapeau. Mais ce dont je veux vous entretenir sur le Grand Théâtre, c'est quelque chose de complètement différent.

Mme Beauchamp: Bien, peut-être... Vous avez quelques minutes. Si vous voulez tout de suite aborder la question. Quels sont vos commentaires sur le Grand Théâtre de Québec?

M. Masse (Gérard): Je vous remercie de m'offrir l'opportunité. Au Grand Théâtre de Québec, quant à nous, la réalité est un peu différente. Sur le fond, évidemment, il y a toujours cette notion-là de qui est producteur, qui est artiste, mais la commission ici n'est pas désignée pour entendre ça, plus précisément, ce qui se passe à la Place des Arts et au Grand Théâtre. Nous, ce qu'on maintient, à la Guilde des musiciens, c'est que le Grand Théâtre de Québec devrait être la maison de l'Orchestre symphonique de Québec pour plusieurs raisons.

Premièrement, l'Orchestre symphonique de Québec... Et là je vais faire un détour dans le sport, mais vous allez comprendre pourquoi ensuite. Il y a quelques années, tout près de 10 ans, on a perdu un club de hockey qui était une espèce de... un genre d'élite dans les lignes nationales, qui nous donnait une certaine représentativité. Un petit peu après ça, pour soutenir une équipe de hockey ici, on a essayé à un moment donné de penser qu'on pourrait créer un casino. Et tout ça, ç'a été rejeté, ce qui fait que dans nos études à nous, à l'interne ? et on peut trouver des chiffres, je vous donnerai des commentaires là-dessus tantôt ? la ville de Québec même est devenue une ville très, très culturelle, peut-être plus que la ville de Montréal parce que la ville de Montréal est plus diluée et dans le sport, et dans la culture, et dans bien d'autres affaires. Ce qui m'amène à vous dire qu'une maison comme le Grand Théâtre abrite, entre autres, temporairement l'Orchestre symphonique de Québec qui y tiennent leurs concerts ? une partie, en tout cas ? et leurs répétitions; quasiment la majorité, je crois.

Cela étant dit, le Grand Théâtre, à moins que mes chiffres soient faux, a investi une somme d'argent importante en ce qui a trait à la construction de la conque d'orchestre. Ça a dépassé le million de dollars. Et, pour être musicien professionnel, pour avoir travaillé, professé pendant 30 ans, puisque musicien, c'est une profession, c'est pas un métier, lorsqu'on entend l'Orchestre symphonique de Québec se produire au Grand Théâtre, et qu'on l'entend au Palais Montcalm, et qu'on l'entend à la salle Albert-Rousseau, on entend trois orchestres différents. Cela rejoint le propos de mon président. Lorsqu'on parle d'acoustique, on peut pas déplacer un orchestre comme ça d'instruments acoustiques d'une salle à l'autre sans qu'il y ait des conséquences. Je suis obligé de vous dire que l'Orchestre symphonique de Québec sonne le meilleur de son rendement lorsqu'il se trouve au Grand Théâtre de Québec.

Deuxième des choses, ils encourent des frais de transport et de déplacement importants puisque le Grand Théâtre n'est pas toujours disponible. Donc, ils doivent parfois aller répéter ailleurs, pas tellement répéter comme surtout produire des concerts à la salle Albert-Rousseau et au Palais Montcalm. Les gens et le public qui vont entendre un orchestre symphonique, notamment à Québec, qui vont entendre l'Orchestre symphonique de Québec, ils veulent le reconnaître. Et vu que ce n'est pas une sonorisation contrôlée artificiellement, ils veulent l'entendre dans un milieu acoustique où l'orchestre va rendre le maximum de ses capacités.

Si on tient compte de ce dont je vous parlais tout à l'heure, la disparition d'un club de hockey a fait niveler par en haut le côté culturel à Québec. C'est sûr que les gens qui avaient 1 000, 2 000 ou 5 000 $ à dépenser là-dedans, ils l'ont envoyé ailleurs. Je vous dis pas qu'ils l'ont envoyé juste là. Mais, si on regarde les chiffres dans le domaine de la culture, pas seulement dans le domaine de la musique classique, mais dans le domaine de la musique populaire, il y a une augmentation substantielle, assez importante là-dessus.

En ce qui a trait précisément à l'Orchestre symphonique de Québec, c'est extrêmement important pour eux, compte tenu des avantages financiers qu'ils ont obtenus au cours des dernières années... ils ont eu quand même une augmentation de salaire pour permettre aux musiciens, aux meilleurs, de garder leur poste puis d'être capables de gagner honorablement leur vie. Vous vous rappellerez que, à l'échelon 1, un musicien de l'Orchestre symphonique gagne 25 000 $ par année. Alors, ils seront pas millionnaires avec ça, mais ils sont quand même très heureux d'avoir une production de 31 semaines. Et ça sonne bien au Grand Théâtre.

Je comprends, avant que vous me posiez la question, que le Grand Théâtre va perdre des revenus parce que le Grand Théâtre fait de la location à d'autres genres de productions, que ce soit dans le domaine de l'humour, etc. Je fais simplement poser la question. Ça vaudrait peut-être la peine de faire l'exercice. C'est sûr que, si on réservait ou on favorisait le Grand Théâtre comme la maison de l'Orchestre symphonique de Québec, au niveau de la clientèle, ça va avoir un effet important, c'est certain, de par tout le contexte, à la fois le prestige et à la fois la qualité musicale qui y sera toujours, qui va être constante.

Deuxièmement, en ce qui a trait à la perte de revenus que le Grand Théâtre pourrait encourir puisque, de plus en plus, la programmation de l'Orchestre va vers la fin de semaine, je comprends qu'il devra y avoir une compensation quelque part. Mais, compte tenu du fait que l'Orchestre ne se produit que 31 semaines sur 52, je m'interroge à l'effet que, peut-être, la corporation du Grand Théâtre pourrait utiliser d'autres dates disponibles, puisque l'Orchestre, depuis six mois ? et je ne sais pas si vous me suivez ? l'Orchestre, depuis six mois, négocie une nouvelle convention collective pour avoir une convention qui prévoit une programmation sur deux ans. Donc, je pense que ça pourrait donner le temps peut-être à l'institution qu'est le Grand Théâtre de voir où est-ce que sont les trous là-dedans, si vous me permettez l'expression, pour produire d'autres spectacles qui pourraient leur amener des fonds. Je comprends que l'argent tombe pas du ciel. Il faut qu'elle vienne de quelque part. Mais ce qui est préjudiciable à l'Orchestre, c'est de se faire entendre dans trois milieux différents. Ç'a pas de bon sens. Le son du Palais Montcalm, du Grand Théâtre, de la salle Albert-Rousseau, ç'a rien à voir.

Compte tenu, en résumé, de ces éléments-là, que la notion culturelle prend de plus en plus d'importance, que ce qu'offre comme équipement le Grand Théâtre est tout à fait compatible aux opérations d'un orchestre symphonique... Et j'extrapolerais même en vous disant que, même sur le plan bureaucratique ? je parle sans le savoir ? peut-être que même la direction de l'Orchestre pourrait payer un loyer au Grand Théâtre pour s'installer plus intrinsèquement à l'intérieur des murs mêmes, comme la maison de la musique est en devenir au Palais Montcalm, qui loge les Violons du Roy 365 jours par année. Alors, nous, notre requête, si je peux dire, c'est qu'on verrait d'un oeil très intéressé que la maison du Grand Théâtre deviendrait la maison de l'Orchestre.

Le Président (M. Boulianne): Oui. Juste très rapidement.

Mme Beauchamp: Bien, très rapidement, M. Subirana, est-ce que vous pouvez me dire... Vous faites allusion dans votre mémoire au fait qu'il arrive que des producteurs viennent à Montréal et quittent sans verser de cachet aux musiciens. Je me pose juste la question. Et vous dites que ce genre de situation était couvert par l'entente que vous aviez avec la Place des Arts. Mais je pose simplement la question: Est-ce que ça arrive souvent ou si on parle de faits tout à fait exceptionnels?

n(16 h 10)n

M. Subirana (Émile): Ça arrive pas souvent parce que, malheureusement, il y a moins de productions comme on avait à l'époque, à la Place des Arts. Mais nous, ce qu'on fait, quand on peut, c'est qu'on demande un dépôt qui est équivalent au cachet des musiciens, si on connaît pas le producteur. Si on connaît le producteur, il y a normalement aucun problème.

Mme Beauchamp: Donc, je veux juste terminer en disant que vous êtes en train de me dire que vous avez trouvé une solution alternative où l'entente avec la Place des Arts n'est plus nécessaire, par exemple, sous cet aspect-là des choses.

M. Subirana (Émile): Non. Quelquefois, même un producteur qui était connu, si les ventes vont très mal, on sait jamais, parce que, quelquefois, il y a des corporations créées pour une production et elles font faillite avant de verser les paiements à tout le monde. Alors, nous, notre garantie avec la Place des Arts, qui coûtait rien à la Place des Arts, c'était beaucoup mieux que n'importe quelle entente.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup, M. Subirana et M. Masse, pour votre mémoire.

Alors, je demanderais maintenant à l'Orchestre symphonique de Québec de s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Alors, la commission reprend donc... continue ses travaux. Je demanderais à M. Jean-Louis Dugré, donc, vice-président, et M. Moisan, directeur général, de nous présenter ou de se présenter et de présenter le mémoire. Bienvenue.

Orchestre symphonique de Québec (OSQ)

M. Dugré (Jean-Louis): M. le Président, madame, messieurs. Alors, veuillez prendre note d'abord que le mémoire déposé aujourd'hui ne modifie en rien le fond et le contenu de celui daté du 31 janvier 2001. Les modifications apportées portent seulement sur quelques corrections linguistiques et plus particulièrement sur des pourcentages qui ont pu être révisés grâce au délai survenu par la présente audition.

Alors, suite à l'invitation de M. Matthias Rioux, en date du 29 novembre 2000, la Corporation de l'Orchestre symphonique de Québec, l'OSQ, est heureuse de formuler des commentaires et quelques observations sur les orientations qu'elle suggère pour le Grand Théâtre de Québec en fonction de la mission de l'OSQ dans la région de Québec.

Permettez-moi de vous rappeler brièvement la mission et les activités de l'OSQ. L'OSQ s'est donné comme mission d'interpréter le répertoire symphonique et d'être le principal moteur de l'activité musicale dans la région. Les objectifs poursuivis sont d'être le chef de file de la tradition symphonique dans la région de Québec, de contribuer au développement d'un public sensible et critique, de contribuer au développement de la culture musicale de la région et d'être l'ambassadeur de Québec, la capitale nationale.

Le Président (M. Boulianne): Juste une précision. Vous êtes M. Dugré. C'est ça?

M. Dugré (Jean-Louis): C'est exact.

Le Président (M. Boulianne): Oui, Jean-Louis Dugré. Alors, c'est bien pour démêler. M. Moisan, tout à l'heure, O.K., merci. Alors, continuez.

M. Dugré (Jean-Louis): Au cours de la saison 1999-2000, l'OSQ a présenté 31 concerts excluant les matinées symphoniques. Ces concerts ont attiré environ 44 000 spectateurs. Vingt-sept de ces concerts ont été présentés à la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec et quatre à la salle Albert-Rousseau, à Sainte-Foy. La majorité de ces concerts ont lieu les mardis et mercredis. Cependant, pour la première fois lors de la saison 2000-2001, l'OSQ a présenté au Grand Théâtre de Québec cinq programmes doublés au cours de la fin de semaine, soit le vendredi et le samedi.

De 1994 à 1998, les assistances aux concerts de l'OSQ ont eu tendance à diminuer. Heureusement, grâce à la venue d'un nouveau directeur artistique en la personne de maestro Yoav Talmi, à une programmation améliorée et à un programme de marketing plus agressif, les assistances ont augmenté de 17 % en 1999-2000 et de 7 % en 2000-2001.

Une saison régulière de l'OSQ couvre 31 semaines, ce qui est inférieur à la saison régulière des autres orchestres canadiens comparables. Nos concerts sont présentés la semaine à l'exception des 10 concerts populaires Hydro-Québec et trois concerts famille.

Concernant les orientations de l'OSQ. L'OSQ doit accentuer sa présence dans le milieu musical en augmentant le nombre de ses concerts et en attirant un public plus jeune. La moyenne d'âge des spectateurs à nos concerts est supérieure à 50 ans.

Il convient de souligner qu'en Amérique du Nord la presque totalité des orchestres symphoniques présentent leurs concerts la fin de semaine. Dans ce contexte, la direction de l'OSQ s'est interrogée sur l'opportunité de présenter ses concerts les vendredis et samedis en soirée.

En janvier 1999, l'OSQ a réalisé un sondage Léger & Léger qui avait pour objectif de connaître la réaction du public québécois advenant le déplacement des concerts de l'OSQ aux vendredis et samedis. Ce sondage a donné les indications suivantes. La moitié des répondants ont affirmé que des concerts en fin de semaine les inciteraient assez ou très fortement à y assister. Cet intérêt s'est manifesté davantage auprès d'une clientèle qui ne fréquente pas les concerts de l'OSQ. La moitié des répondants se sont déclarés favorables à la tenue des concerts durant la semaine. Ce pourcentage était encore plus fort chez les 55 ans et plus.

n(16 h 20)n

Suite à l'analyse de ces résultats, l'OSQ a déplacé les concerts populaires Hydro-Québec aux vendredis et samedis, et ce, pour la saison 2000-2001. Nous avons également lancé en 1999-2000 une série de concerts famille présentés le dimanche en matinée. Les concerts populaires de fin de semaine donnent des résultats encourageants avec une croissance de l'assistance de 35 % comparée à 1999-2000. Il est vrai que l'offre a doublé et les ventes aux guichets presque triplé, ce qui nous porte à croire qu'à moyen terme cette décision pourrait s'avérer être la bonne. Quant à la série Concerts Famille, elle continue à donner d'excellents résultats.

Dans ce contexte, la direction de l'OSQ n'est pas en mesure de décider du déplacement de tous ses concerts vers la fin de semaine. Il s'avère nécessaire de parfaire notre analyse. Cependant, nous sommes convaincus, si nous voulons attirer une clientèle plus jeune, qu'il faudra envisager, à court terme, de déplacer nos concerts vers la fin de semaine.

Au regard des relations OSQ-Grand Théâtre. Les relations entre la direction de l'OSQ et celle du Grand Théâtre de Québec sont excellentes. Le Grand Théâtre nous fournit une assistance matérielle et technique généreuse et de qualité supérieure. De plus, le Grand Théâtre collabore financièrement avec nous à la présentation de certaines activités, tel Casse-Noisettes des Grands Ballets canadiens.

Nous ne pouvons cependant ignorer que le coût des services de techniciens dicté par la convention collective impose des contraintes qui génèrent des frais élevés. À titre d'information, il en coûte environ 1 000 $ de moins, soit près de 30 % par concert, pour des services techniques dans une salle dont les activités ne sont pas couvertes par cette convention collective.

Par ailleurs, nous avons examiné, avec la direction du Grand Théâtre, la possibilité de présenter tous nos concerts les vendredis et samedis. En réponse, la direction du Grand Théâtre nous a fait part qu'il en résulterait une diminution considérable de revenus. Dans l'éventualité où l'OSQ formaliserait sa demande, il appartiendrait alors au gouvernement de décider si la vocation du Grand Théâtre doit privilégier les activités musicales classiques même si une telle décision entraîne un déficit d'opérations pour le Grand Théâtre.

En conclusion. Les relations de l'OSQ avec la direction du Grand Théâtre sont excellentes. Nous croyons que la mission du Grand Théâtre devrait privilégier encore plus des activités susceptibles d'encourager le développement de la musique classique. Nous désirons évidemment que la mission du Grand Théâtre accorde un traitement privilégié à l'OSQ. Dans l'éventualité où il s'avérerait nécessaire, pour le maintien et le développement de l'OSQ, de déplacer ses activités vers la fin de semaine, le gouvernement devrait accorder au Grand Théâtre le budget nécessaire pour pallier au manque à gagner de celui-ci. L'OSQ souhaite poursuivre ses bonnes relations avec le Grand Théâtre pour qu'il s'affirme davantage comme étant le foyer de la culture à Québec. Merci.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup, M. Jean-Louis Dugré et M. Gilles Moisan. Alors, nous allons procéder immédiatement à la période d'échanges. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.

Des voix: Bonjour.

M. Dion: Je pense... On voit bien, en écoutant ce que vous avez dit, que vous avez un organisme qui ne manque pas de dynamisme et qui a le vent dans les voiles et qui fait vibrer, au sens... ? je sais pas si c'est une bonne image ? qui fait vibrer le coeur des Québécoises et des Québécois de la capitale.

De façon générale, vous vous plaignez pas de situations particulièrement difficiles au Grand Théâtre ou autrement, c'est plutôt la collaboration entre les différentes institutions. Vous parlez cependant... À la page 3, vous dites: «Nous ne pouvons cependant ignorer que le coût des services de techniciens dicté par la convention collective impose des contraintes qui génèrent des frais élevés.» Bon, c'est bien sûr que tout le monde s'entend pour dire qu'en soi c'est pas... On peut pas dire: Bien, il faut éviter les conventions collectives parce que ça génère des frais plus élevés, parce que c'est bien évident que les conventions collectives, une des... la raison d'être des conventions collectives, c'est d'assurer que ceux qui les signent gagnent mieux leur vie, hein. Alors, c'est normal que ça entraîne des coûts plus élevés. Quand ça reste dans le domaine du raisonnable, je pense qu'il y a pas personne qui peut s'en plaindre, sinon je pense qu'on peut plutôt s'en féliciter. Parce qu'une situation où les gens gagnent bien leur vie, normalement, ça devrait favoriser des meilleures relations et assurer des meilleurs concerts.

Cependant, vous me dites... vous dites: «À titre d'information, il en coûte environ 1 000 $ de moins, [...] 30 %, par concert pour des services techniques dans une salle dont les activités ne sont pas couvertes par cette convention collective.» Alors, là, quand on passe du simple au triple, on se pose des questions, parce qu'est-il possible que les gens qui n'ont pas de convention collective soient si mal traités et si mal payés qu'ils travaillent pratiquement pour rien? Je comprends pas qu'il y ait une telle réduction de frais.

M. Dugré (Jean-Louis): Alors, pour répondre à cette question technique, je vais céder la parole à notre directeur général, M. Gilles Moisan.

Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Moisan, on vous écoute.

M. Moisan (Gilles): Merci. En fait, la différence entre les coûts qui sont les coûts finalement de la salle Albert-Rousseau ? c'est assez facile d'en déduire, nous ne jouons qu'à deux endroits ? les coûts sont de 1 000 $ de moins qu'au Grand Théâtre. Donc, c'est pas du simple au triple, c'est que ça coûte, disons, 3 000 $, les services de techniciens au Grand Théâtre; ça en coûte 2 000 à la salle Albert-Rousseau. En fait, je ne pense pas... je n'oserais pas dire que les gens sont plus mal payés, je pense que c'est plutôt ce qu'on mentionnait à l'effet qu'il y a des obligations au niveau de la convention avec IATSE, ce qui fait qu'il peut y avoir besoin de plus de techniciens pour un concert que les exigences qui sont demandées par les techniciens de la salle Albert-Rousseau. Ça ne veut pas dire qu'un gagne beaucoup moins cher que l'autre; il y a peut-être moins de gens qui travaillent durant la production d'un concert à une place ou à l'autre.

Mais en ce qui nous concerne, nous sommes toujours en discussion avec les autorités du Grand Théâtre lorsque vient le temps de négocier la convention collective avec les techniciens de scène. La direction générale du Grand Théâtre nous rencontre, nous faisons part de nos demandes et, bon, de façon ou d'une autre, c'est pas nous qui négocions avec eux, avec IATSE, mais le Grand Théâtre essaie finalement de répondre à nos attentes et de voir à améliorer finalement ces conditions dans la convention collective qu'il signe avec leurs techniciens de scène.

Le Président (M. Boulianne): M. le député.

M. Dion: Oui, merci beaucoup. En fait, on a beaucoup discuté, depuis deux jours, des relations entre la Place des Arts et le syndicat IATSE. Au fond, la perception qui semble ressortir parfois, c'est que la relation ne devrait peut-être pas être entre la Place des Arts, mais entre ceux qui utilisent les services directement, donc les différentes troupes, et les fournisseurs et les techniciens de telle sorte... parce que... Est-ce que c'est pas les troupes elles-mêmes ou les organismes eux-mêmes, comme l'Orchestre symphonique, qui savent quel type de technicien ils ont besoin et en quel nombre et beaucoup mieux que ceux qui gèrent... qui ont comme mission de gérer la salle en général?

M. Moisan (Gilles): Je ne voudrais pas trop m'avancer sur ce sujet parce que la Place des Arts, je ne la connais pas sauf pour avoir été entendre des concerts. Quand même, le Grand Théâtre, je connais tout l'équipement qu'ils ont à gérer lorsque nous produisons un concert et je pense que ce serait difficile pour nous, ou pour n'importe quelle troupe qui viendrait se présenter au Grand Théâtre, de décider exactement combien de techniciens ils ont besoin pour une activité sans pour autant connaître tout l'équipement qui est là, sur place. Donc, je pense que c'est un service qu'une salle comme le Grand Théâtre fournit et qu'elle devrait possiblement continuer à fournir parce qu'on n'a pas tout le personnel technique chez nous pour juger. Ce qu'on fait, c'est des comparaisons actuellement. Quand on vous dit: Mais ça nous coûte moins cher à une salle qu'à l'autre, c'est une situation de fait; on l'a vécue comme ça ou on la vit toujours comme ça, cette situation-là. De là à dire: Je pourrais m'en aller au Grand Théâtre engager moi-même ou négocier moi-même avec IATSE, il faudrait que j'y réfléchisse encore plus longtemps. Je ne peux pas vous répondre comme ça.

M. Dion: Donc, vous ne partagez pas nécessairement le point de vue d'autres orchestres symphoniques qui ont négocié des ententes particulières avec IATSE.

M. Moisan (Gilles): Pour le moment, je ne connais pas toutes ces conditions qu'ils ont négociées. Il faudrait que je voie et que j'y réfléchisse avant de vous répondre.

M. Dion: Ce qui semble ressortir de votre document, c'est que, somme toute... évidemment, il y a des contraintes un peu particulières, mais, somme toute, ça va relativement bien. Et si les conditions se maintiennent, vous allez pouvoir continuer votre développement.

n(16 h 30)n

M. Moisan (Gilles): Oui. Notre seul point, et c'est pour ça que nous sommes quand même assez... nous y allons en douceur, c'est que nous, on pense fondamentalement qu'on devrait aller vers la fin de semaine. On a une étude de marché qui vient nous donner un résultat qui est à peu près le pire résultat qu'on aurait pu penser: la moitié de notre clientèle nous dit qu'ils sont satisfaits de la semaine; ceux qui ne viennent pas à l'Orchestre qui viendraient nous disent que, oui, ils viendraient si on allait en fin de semaine. Et on a fait l'expérience avec la série populaire, qui était la série où on jugeait qu'on avait le plus de chances d'avoir des résultats, et cette série-là, qu'on appelle série populaire Hydro-Québec, finalement, a fait que, sur un an, on a connu 35 % d'augmentation de clientèle, autant à abonnement que billetterie, là. Parce qu'on vend au guichet, mais on vend aussi de l'abonnement. La billetterie avait triplé, mais globalement on a une augmentation de 35 %, ce qui est un signal finalement que, oui, la fin de semaine pourrait être vraiment la solution, et c'est pour ça que nous continuons à essayer vivre de cette expérience-là, mais on se dit: La journée qu'on en sera convaincus, on aimerait, étant donné que vous parlez de la mission autant de Place des Arts que du Grand Théâtre... On aimerait que ce soit considéré que la mission du Grand Théâtre soit prioritaire au développement de la musique classique et que, la journée qu'on aurait besoin du Grand Théâtre pour la fin de semaine, le gouvernement aurait pris cette décision-là.

Et nous, on ne demande pas de construire une salle pour l'Orchestre symphonique à Québec, mais on demande de consacrer le Grand Théâtre dans sa mission en donnant une priorité à l'Orchestre symphonique de Québec si nos besoins sont d'aller vers la fin de semaine. Ça représente de l'argent, et je pense pas que ce soit... En tout cas, sans être le directeur général du Grand Théâtre, mais en ayant discuté suffisamment avec le directeur général du Grand Théâtre, je ne pense pas qu'elle ait les moyens de nous recevoir les fins de semaine sans qu'il y ait une compensation qui vienne d'ailleurs, et c'est... Ailleurs, c'est le gouvernement en ce qui nous concerne.

M. Dion: Je vous remercie, monsieur.

Le Président (M. Boulianne): Est-ce qu'il y a d'autres questions? J'en aurais peut-être une, moi, d'abord. Vous avez comme objectif d'augmenter... d'attirer, c'est-à-dire, un public plus jeune, puis c'est dans ce cadre-là que vous pensez déplacer vers les fins de semaine. Mais est-ce que vous avez prévu un programme ou encore des activités de sensibilisation auprès des jeunes, à part d'un événement comme ça, pour les attirer?

M. Moisan (Gilles): En fait, on a tout un programme d'établi. On rejoint déjà les jeunes au niveau des matinées scolaires. Donc, tous les jeunes de l'élémentaire, nous présentons huit à 10 matinées, deux programmes de matinées répétées quatre à cinq fois: un à l'automne et un durant l'hiver. Nous avons, l'année passée, reçu 7 500 jeunes à ces matinées. Nous avons développé, comme mentionné au rapport, des concerts famille où c'est finalement la famille avec les jeunes le dimanche. Nous touchons une salle d'environ 80 % d'assistance et nous voulons continuer à développer à ce niveau-là, surtout au niveau élémentaire et secondaire. Et nous allons à l'Université Laval présenter des concerts pour vraiment être plus présents. Nous avons un comptoir de vente à Place Sainte-Foy qui est tout près de l'Université Laval, ce qui a eu pour résultat d'augmenter et de beaucoup, multiplié par au-delà de deux fois le nombre de passeports étudiants que nous vendons. Donc, nous faisons beaucoup d'efforts pour nous rapprocher.

Nous réalisons aussi que les gens qui sont dans 30, 35, 40 ans, le couple travaille, ils ont des enfants, la journée terminée, aller chercher les enfants à la garderie puis penser venir au concert le mardi soir ou le mercredi soir, on a beaucoup de problèmes à les convaincre de se trouver une gardienne, puis tout ça, et on pense que le vendredi ou le samedi, ce seraient deux soirs plus propices à ce que cette clientèle jeune là qui est jeune moyen, si on veut, puisse venir nous fréquenter.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, Mme la députée de Sauvé, vous avez la parole.

Mme Beauchamp: Merci. Je veux qu'on s'entende bien, dans votre mémoire, vous nous dites bien qu'au moment où on se parle vous n'en faites pas la demande de la fin de semaine. Là, vous dites: Nous continuons à analyser la situation, puis vous demandez presque à ce que le gouvernement vous dise d'avance: Si vous preniez une telle décision, ce serait O.K. de notre part pour compenser le Grand Théâtre. C'est à peu près ça, la situation? Mais je veux qu'on... Parce qu'on est quand même en commission parlementaire, vous prenez le temps de déposer un mémoire qui, essentiellement... C'est la demande principale de votre mémoire. Ça fait un peu étrange, parce que c'est la demande principale de votre mémoire, puis, en même temps, quand je le lis bien comme il faut, je me dis: Vous en faites pas la demande, vous précisez que vous en faites pas encore la demande. Où est-ce qu'on est rendu? Concrètement, vous en êtes rendus où dans vos analyses? Vous avez vu votre sondage, vous avez fait un test cette année, mais on en est où concrètement? Parce que aussi votre mémoire, vous l'avez préparé déjà il y a plusieurs mois, là.

Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Moisan.

M. Moisan (Gilles): En fait, il est vrai que nous sommes prudents et que nous n'en faisons pas la demande, tout simplement parce que nous ne voulons pas, au moment où on se parle, demander au gouvernement d'investir peut-être un demi-million de dollars au niveau du Grand Théâtre pour nous recevoir la fin de semaine et, finalement, peut-être ne pas donner les résultats anticipés, parce que nous ne sommes pas encore assez sûrs de ces résultats. Et c'est tout simplement, finalement, un sentiment, là, d'être correct aussi avec le gouvernement, parce qu'on peut demander, demander: Donnez-nous, donnez-nous, mais, finalement, on a tout fait ça, puis, au bout de la ligne, ç'a pas donné nécessairement les résultats. Sauf que l'expérience d'une série de concerts en fin de semaine commence à concrétiser plus l'idée que, si on était en fin de semaine tout le temps, ça pourrait vraiment peut-être apporter les résultats. Mais on voudrait avoir encore un peu de temps.

Sauf qu'on a... Si on n'a pas fait la demande, c'est qu'on n'a pas non plus décidé de la date ou de la formation de votre commission, et, étant donné que votre commission est là et qu'on a été invités à présenter un mémoire, c'est comme si on faisait un avant-projet de loi en vous disant: Bien, en fait, dans nos intentions, d'ici peut-être un an, deux ans, ça serait d'aller vers ça. Donc, si vous êtes à repenser la mission du Grand Théâtre, on pense que ça vaudrait la peine vraiment de mettre ça à l'ordre du jour que le Grand Théâtre soit une institution qui privilégierait l'Orchestre symphonique de Québec ou le développement de la musique classique en général.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Mme la députée.

Mme Beauchamp: Oui. Vous avez fait allusion à un montant, vous venez de parler d'un demi-million de dollars de compensation. Est-ce que c'est un montant qui ressort de vos discussions que vous avez eues jusqu'à maintenant, qui sont préliminaires, je le comprends bien, mais des discussions que vous avez eues jusqu'à maintenant avec l'administration du Grand Théâtre?

M. Moisan (Gilles): Oui.

Mme Beauchamp: O.K. Vous réalisez que ce que vous demandez, c'est presque un changement législatif? Ce que je veux dire par là, c'est que la mission actuelle du Grand Théâtre, j'ai pas la définition devant moi, mais c'est une mission où on lui demande d'assurer la diffusion des arts, l'accessibilité aux arts, la production de spectacles, et j'ai l'impression qu'on revit un peu la dynamique de Montréal, à savoir la différence qu'il peut y avoir entre une salle qui est une salle de spectacle et une salle de concert. Et la question, c'était que vous, pour vous, elle vous convient, comme salle de concert, la salle du Grand Théâtre, mais, néanmoins, je pense qu'on est devant, clairement, des missions différentes entre un équipement qui est un équipement de type salle de spectacle qui est là pour assurer la démocratisation de la culture, l'accessibilité à la culture, la production de spectacles, etc., et une salle qui aurait pour mission d'être une salle de concert. Et je me dis donc: Vous réalisez que ce que vous demandez est un changement presque de type législatif? Parce que être une salle de concert, pour moi, ce n'est pas la même chose que la mission prévue dans la loi pour le Grand Théâtre de Québec.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. Moisan.

M. Moisan (Gilles): En fait, je ne peux pas vous dire, parce que je ne n'ai pas la connaissance de la loi au niveau de la charte du Grand Théâtre, dans le sens quelle est sa mission, est-ce que, pour faire une priorité sur la mission qu'elle a, en nous disant: Bien, on devrait prioriser la musique classique dans l'éventail des événements que l'on va présenter au Grand Théâtre... Est-ce que ça prend un changement législatif, je ne le sais pas, parce que, moi, je considère...

Mme Beauchamp: Sûrement... On s'entend sûrement pas.

n(16 h 40)n

M. Moisan (Gilles): ...que c'est plus... C'est plus une priorisation des activités où on dit: On va donner plus d'importance au développement ou on va prioriser le développement de l'Orchestre au Grand Théâtre. C'est plus dans ce sens-là. Maintenant, bien, là, qu'est-ce que ça prendrait comme geste légal pour y arriver, je suis pas en mesure de répondre à ça.

Mme Beauchamp: Non, mais je veux préciser ma pensée, je suis consciente que, lorsqu'on présente ça sous cet angle-là, priorisation donnée à la musique classique et donc à l'Orchestre symphonique de Québec, honnêtement, ça prend pas un changement législatif. Mais dans sa... Je voulais juste vous dire que, du point de vue législatif, il est clair que le Grand Théâtre n'a pas été conçu vraiment pour être une salle de concert. C'est plus dans ce sens-là, la différenciation que les invités qu'on a reçus jusqu'à maintenant nous ont amenés à faire entre la notion de salle de concert et salle de spectacle, et j'ai l'impression... Vous me corrigerez, mais que vous demandez: Est-ce que le Grand Théâtre priorise... Il soit plus vu comme une salle de concert, et c'est ça aussi qu'on a entendu de la part de M. Masse, un peu plus tôt, de la Guilde des musiciens. C'est dans ce sens-là que je disais qu'il y avait une tendance qui s'éloignait de la mission prévue, selon moi, au Grand Théâtre. Mais je l'amène sous l'angle de la différence entre la salle de concert et la salle de spectacle. Quand vous me dites: Tout ce qu'on demande, c'est d'être là le vendredi soir, le samedi soir, je comprends que ça, ça demande pas un changement législatif, là.

Mais ma question, c'est... Ça veut dire des pertes financières pour le Grand Théâtre et ça peut vouloir dire aussi une perte de perspective de développement pour le Grand Théâtre, hein? Parce que c'est la perte qui serait couverte... c'est une perte minimale. Mais le Grand Théâtre, on le voit, a des activités qui, d'année en année, sont plutôt en hausse.

Donc, ma question ? et, honnêtement, je ne le sais pas ? c'est: Votre projet, vous nous en faites part publiquement aujourd'hui, et tout ça, amène quelle sorte de réaction de la part de d'autres partenaires du Grand Théâtre ou d'autres utilisateurs? Est-ce qu'ils vous ont fait part jusqu'à maintenant de leurs commentaires ou de leurs réactions à votre demande?

M. Moisan (Gilles): Non, parce que notre demande n'a pas été publicisée. En fait, on avait rencontré les autorités gouvernementales pour leur en parler, discuter de l'importance qu'on mettait au fait que, pour le développement à long terme de l'Orchestre symphonique de Québec, il fallait penser à aller vers la fin de semaine, si on compare avec les autres orchestres au Canada et aux États-Unis. Et, finalement, par la suite, la demande a été logée au Grand Théâtre en leur demandant s'il y avait possibilité de nous donner des jours de fin de semaine, et, bon, il y en a certains que l'on a eus, on a été capables de transférer la série Hydro-Québec, qui représente quand même cinq fins de semaine sur l'année. Et, pour aller plus loin, bien là ça donnait quand même des... Ça créait des difficultés au niveau du Grand Théâtre, parce que, contrairement, peut-être, un peu à ce que M. Masse mentionnait tout à l'heure, les 31 semaines où l'on joue, c'est à partir du début septembre à aller à la fin mai. Et, même si c'est juste 31 semaines sur 52, toutes les activités qu'on appelle populaires ? les spectacles populaires que le Grand Théâtre va présenter ? il les présentera pas du mois de juin à aller au mois de septembre, il va les présenter aussi durant ces mêmes 31 semaines là, principalement. Donc, finalement on se retrouve où on est en conflit d'horaire toujours dans à peu près les mêmes 37, 38 semaines qu'il peut y avoir entre septembre et juin.

Mme Beauchamp: Par ailleurs, dans votre mémoire, vous faites part que cette saison de 31 semaines, elle est inférieure à la saison régulière des autres orchestres. Donc, est-ce qu'il y a pas là pour vous... Et, enfin, je ne sais pas comment expliquer cette situation, est-ce que c'est, j'allais dire, à cause... J'aime pas beaucoup l'expression, mais à cause du Grand Théâtre, la disponibilité du Grand Théâtre? Est-ce que c'est plus un facteur qui est relié à votre propre situation comme orchestre? Mais est-ce qu'il y a pas là pour vous une possibilité d'occuper d'autres semaines, plus la fin de semaine? Je veux dire, si les autres orchestres ont une saison supérieure à 31 semaines, finalement pourquoi pas vous? Puis est-ce qu'il y a pas là une ouverture pour négocier plus de fins de semaine avec le Grand Théâtre?

M. Moisan (Gilles): En fait, si nous avons 31 semaines de saison comparé à d'autres qui en ont 36, 38 et 45, 46 semaines, je pense que c'est pas dû au Grand Théâtre, là, c'est pas à cause du fait que le Grand Théâtre est pas disponible. Aussi, si on est à la salle Albert-Rousseau, c'est pas parce que le Grand Théâtre ne pouvait pas nous recevoir, c'est un choix qui a été fait de couvrir le territoire de Sainte-Foy. Je pense que le fait qu'on a 31 semaines, c'est plus une question qui relève de nous.

Nous avons à développer notre clientèle et nous avons à finalement faire en sorte d'aller chercher le volume de clientèle qui va nous permettre d'augmenter notre nombre de semaines de travail. Parce qu'on pourrait toujours dire: Bon, bien, ça coûte, je sais pas quoi, 150 000 $ par semaine, le gouvernement va nous donner 1 million de plus, on va faire sept semaines de plus. Mais il faut qu'on ait un produit à vendre et surtout qu'il y ait le public qui y vienne. Donc, je pense que c'est là qu'on est, et c'est un peu ça aussi sur lequel on réfléchit quand on pense qu'aller vers la fin de semaine nous permettrait peut-être d'avoir une meilleure pénétration du taux de notre clientèle, et c'est tout ça que l'on mijote. Mais, pour le moment, on est encore à faire notre réflexion là-dessus et on est contents que la commission soit là, parce que ça nous permet à l'avance de poser certains jalons au niveau de changement de la mission ou, en tout cas, de la priorisation de la mission du Grand Théâtre.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup, M. Jean-Louis Dugré, M. Gilles Moisan, pour cette présentation. Alors, je demanderais maintenant à M. François Guy, directeur général de la Société pour l'avancement de la chanson d'expression française, de s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Bienvenue, M. Guy, à la commission. Alors, vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire. Par la suite, il y a un échange. Alors, vous pouvez y aller.

Société pour l'avancement de la chanson
d'expression française (SACEF)

M. Guy (François): Merci beaucoup. Je vais vous parler de la SACEF, la Société pour l'avancement de la chanson d'expression française. La SACEF est née d'un besoin. À la recherche d'une vocation pour la plus petite salle de la Place des Arts. France Fortin, alors directrice générale de la Place des Arts, et Jean-Claude Lespérance, président d'Avanti Plus, ont eu l'idée d'en confier la destinée à Robert Maltais, qui avait dirigé la boîte à chansons La Butte St-Jacques pendant deux ans avec un modeste, mais réel succès. Ainsi mise sur pied pour promouvoir la chanson francophone et aider les jeunes interprètes et auteurs-compositeurs-interprètes à percer dans le milieu du spectacle, la Société pour l'avancement de la chanson d'expression française, la SACEF, prit son envol le 6 février 1995.

Sous la gouverne de Robert Maltais, on monta la programmation des Week-ends de la chanson et l'on organisa le concours Ma Première Place des Arts qui compta parmi ses lauréats Nicola Ciccone, Mario Peluso et Linda Racine, qui font carrière au Québec, et Renée-Claude Gaumont qui vit et chante en France présentement.

La SACEF occupe la très belle et intime salle de la Place des Arts qui a déjà porté les noms de Café de la Place et de Studio-théâtre Du Maurier ltée et qui porte maintenant le nom de Studio-théâtre Stella Artois. Cette petite salle de 138 places convient merveilleusement à tout chanteur voulant revenir à l'essentiel, le contact immédiat avec le public. Y chanter, c'est offrir l'intimité de son salon avec les moyens techniques les plus avancés. Depuis février 1995, en plus du concours Ma Première Place des Arts, le Studio-théâtre a accueilli un bon nombre de chanteuses et chanteurs québécois dans le cadre des Week-ends de la chanson ou d'événements spéciaux. Parmi eux, Dan Bigras, Renée Claude, Lara Fabian, Stephen Faulkner, Pierre Flynn, Claude Gauthier, Lynda Lemay, Michel Rivard, Sylvain Lelièvre, Daniel Bélanger, Richard Séguin, Marie-Denise Pelletier, Marie-jo Thério, Bruno Pelletier, Isabelle Boulay, Claire Pelletier, Térez Montcalm, Patrick Normand, Claude Léveillé, Jorane et Louise Forestier, pour ne nommer que les plus connus.

Malheureusement, la plupart d'entre eux n'y sont pas revenus. Pourquoi?

Mais, tout d'abord, pourquoi y sont-ils venus? Toutes les réponses tendent vers les mêmes raisons: le prestige de la salle et sa situation géographique, la qualité de ses moyens techniques de sonorisation et d'éclairage, la reconnaissance des médias, le stationnement attenant et une billetterie structurée.

Il faut dire que le Studio-théâtre possède une qualité rare malgré sa petitesse. C'est une salle de concert, donc pas de tintement de verres ou de bruits de chaises qui dansent.

n(16 h 50)n

Si cette salle est si extraordinaire, pourquoi la plupart de ceux qui s'y sont produits n'y sont-ils donc pas revenus? Bien, majoritairement pour les raisons suivantes: les coûts s'y rattachant et le fait de ne pouvoir y intégrer sa propre équipe technique. Dans la réalité de la chanson, le sonorisateur-éclairagiste fait partie intégrante du spectacle. Certains artistes ont le même depuis des années. La raison en est simple, il connaît à fond le répertoire de l'artiste et les musiciens qui l'accompagnent. Il est à même de faire briller toutes les nuances de leur jeu et d'en colorer les humeurs. Il est impossible pour un nouveau technicien d'arriver à ce degré d'harmonie en un après-midi. Or, dans cette salle, où l'artiste fait corps avec son public, il est capital d'offrir ce choix.

Pour ce qui est des coûts, la problématique découle de la petitesse de la salle. Les tarifs des techniciens au Studio-théâtre, dont le taux horaire, soit dit en passant, est supérieur à celui des techniciens qui s'exécutent dans les plus grandes salles de la Place des Arts, malgré le ratio siège-profit, ne reflètent d'aucune façon la réalité du milieu. Cela coûte beaucoup trop cher. Par exemple, dans le cas du concours Ma Première Place des Arts, la SACEF, qui en est le producteur, n'arrive jamais à faire ses frais même si elle affiche complet et qu'elle ne débourse pas un sou pour la publicité. Les émoluments du technicien de service équivalent, à quelques dollars près, aux cachets réunis des trois artistes de la soirée. Ajoutons à cela que nous n'entrons dans la salle qu'à partir de 15 heures et que nous devons nous arrêter une heure pour nous sustenter, ce qui est bien naturel, mais qui peut faire mal à voir lorsque de jeunes artistes regardent avec envie le piano de concert sans pouvoir y toucher à cause d'une clause syndicale dont je ne parviens toujours pas à comprendre la raison, c'est-à-dire l'arrêt total des activités scéniques pendant la pause des techniciens. Donc, le piano dort.

Autre problème, au Studio-théâtre comme dans les autres salles de la Place des Arts, c'est le syndicat qui choisit le technicien qui travaillera les soirs de spectacle. En toute logique, pour la durée du concours Ma première Place des Arts, qui s'étend sur 17 lundis, on aurait cru évident que les services du même technicien soient retenus. Or, nous avons eu droit à deux techniciens différents pour les quatre derniers spectacles dans la série de spectacles de l'année dernière. Et, différentes oreilles, donc différentes perceptions qui peuvent avoir une incidence.

Il est évident que ni le principe syndical ni la compétence des techniciens ne sont mis en cause ici. Seulement, la dynamique de cette salle commande une réforme qui permettrait aux artistes de s'exprimer librement dans un principe créatif. La chose est impossible ? enlevons «impossible», qui n'est pas français, disons difficilement exécutable ? dans les conditions actuelles. Par exemple, dans le cadre du mandat de développement de la chanson d'expression française qui est le nôtre, nous offrons la possibilité d'utiliser gratuitement le Studio-théâtre pour ceux qui commencent. Eh bien, même à ce prix, on me dit souvent: Non, merci, c'est trop cher ou trop compliqué. En ce moment, les artistes sont les derniers sur la liste des priorités, c'est évident. On leur construit une salle extraordinaire, mais ils doivent en payer le prix plutôt que d'en récolter les fruits. La chanson a sa place à la Place des Arts ? c'est évident ? dans cette magnifique petite salle qu'est le Studio-théâtre pour autant que l'on permette aux artistes de l'utiliser pleinement.

Je vais terminer en citant le fondateur de la SACEF, M. Robert Maltais: «La chanson d'expression française mérite qu'on s'occupe d'elle. Elle est merveilleuse et fragile. Notre façon d'écrire des chansons est inimitable et irremplaçable. Cela doit se savoir. La chanson d'expression française, c'est l'âme d'un peuple qui s'entend déjà dans la douche le matin. Notre travail, c'est de lui permettre de se rendre jusqu'au soir pour qu'elle nous chante une berceuse.» Merci de votre attention.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. François Guy. Alors, nous allons commencer la période d'échange avec le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Merci. Merci de votre présentation. Je commencerai là où vous terminez, avec la citation que vous avez inscrite dans votre mémoire, à laquelle nous souscrivons tous. Et ma première réaction personnelle quand je vois les difficultés que vous nous exposez ici, c'est de compatir, d'autant plus qu'on connaît déjà les problèmes auxquels fait face la chanson française en termes de distribution, en termes d'occuper sa place dans les postes de radio, à la télévision, et ainsi de suite. Au fond, c'est même un combat d'arrière-garde, puisqu'on a périclité, on a décliné, on a reculé depuis les différentes concessions qu'a faites le CRTC.

Ceci étant dit, évidemment ça nous préoccupe de voir que les jeunes de la relève, les jeunes de la chanson française à laquelle nous tenons aient des possibilités limitées suite aux contraintes que vous exposez ici. Je veux pas élaborer sur ces contraintes-là, je pense qu'elles rejoignent pas mal ce qu'on a entendu d'autres groupes qui sont venus nous parler de l'inflexibilité, de la rigidité des conventions collectives à laquelle vous faites allusion ici. Il y a simplement un petit point sur lequel j'aimerais que vous élaboriez. Lorsque vous dites que... Vous mentionniez à la page... C'est pas numéroté, c'est la dernière page, le premier paragraphe en haut, que c'est le syndicat qui choisit le technicien qui travaillera le soir, et vous dites sur le... En ce qui concerne le «concours Ma Première Place des Arts, qui s'étend sur 17 lundis, on aurait cru évident que les services du même technicien soient retenus. Or, nous avons eu droit à deux techniciens différents pour les quatre derniers spectacles. Différentes oreilles, différentes perceptions.»

Nous, ici, on n'est pas des experts pour juger de ces choses-là, mais est-ce que le fait de ne pas avoir toujours le même technicien ou le fait d'avoir cette situation affecte la qualité de la prestation? Qu'il y en ait deux, trois, vous savez, nous, là, le nombre... La

question des techniciens, c'est quelque chose, mais c'est la qualité. Est-ce que ça affecte la qualité, ça?

M. Guy (François): Je vais vous répondre comme ça, il y a personne qui perçoit le son de la même façon. Il y en a que c'est les hautes fréquences, les basses fréquences, etc. Les techniciens, ils ont tous leur paire d'oreilles et ils entendent d'une certaine façon. Et il y en a qui vont privilégier tel type d'instruments par rapport à un autre puis ils vont égaliser d'une certaine façon. Évidemment, les techniciens professionnels en arrivent tous à une qualité, à une certaine qualité qui peut être comparable.

Mais, par contre, ça prend un certain temps à apprendre un spectacle, parce que, sans ça, on va être sur ses gardes. On est le nouveau technicien ce soir, nouveau spectacle, on met ça... On met ce qu'on appelle les fréquences à peu près dans le milieu, on se tient dans le milieu, comme on dirait. On n'est ni à droite ni à gauche, on est au centre et on va pas chercher les nuances parce qu'on les connaît pas, parce qu'on ne l'a pas vu. Si on est là pendant 17 semaines, c'est sensiblement le même spectacle qui revient à tous les lundis, c'est-à-dire des guitaristes ou un piano avec tel type d'orchestration. Ce sont les mêmes choses, donc, et on connaît les musiciens et on sait que, dans tel type de chanson, ils ont tendance à pianoter plus fort ou à pianoter moins fort. Ils connaissent la dynamique du spectacle et peuvent travailler avec. Et je suis... Je peux même dire que des techniciens, il y en a, c'est des vrais artistes. Mais, moi, je voudrais avoir le même tout le temps parce qu'il va grandir avec le spectacle. Ce sont des jeunes qui, en plus... Il y en a là-dedans qui ne connaissent rien à la technique. Ils arrivent, bon... Il y en a, sur des micros, ils sont gênés, les réflecteurs... Il faut les aider, ils ont besoin d'un environnement parfait. C'est ce que je pense, moi. Et, l'année dernière, on a changé en plein milieu. Il y en a un nouveau: Ah, bon, le premier soir, il s'est trompé. Oups! Bon, je ne crois pas que les jeunes devraient être pénalisés, là, parce qu'on décide de changer de technicien soudain. Moi, je suis pas d'accord avec ça.

Et, quand je parle de certains techniciens, certains artistes, je pense à Luc de Larochelière, ça fait 11 ans qu'il a le même. Il a le même technicien, il l'amène partout avec lui parce qu'il connaît ses chansons, il connaît ses intentions, il connaît ses humeurs. Il sait quand il se retient, quand il avance, quand il bouge. Il le sait, il connaît les chansons, il pourrait les chanter. Si jamais il tombe malade, je pense qu'il va aller chanter, lui aussi. Ce que je veux dire, c'est qu'il fait partie du spectacle.

Le Président (M. Boulianne): M. le député, est-ce que ça va? Ça va. M. le député de Saint-Hyacinthe, c'est à votre tour.

M. Dion: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Guy. Très heureux d'avoir votre témoignage aujourd'hui. Moi, en particulier, je le suis parce que je suis très amateur de la chanson française, française au sens de francophone. J'aime la chanson québécoise encore plus et je trouve que cette chanson-là est inimitable. J'en connais pas d'autre qui a cette façon de s'exprimer, d'exprimer la vie d'un peuple, et puis elle est particulièrement vulnérable. Quand les jeunes chanteurs essaient de se produire avec des textes intéressants et des choses nouvelles, ils se font souvent dire par des producteurs: Laisse donc ça. C'est pas bon, ça, ça nous prend quelque chose qui bouge, qui fait du bruit un peu. Et, en fait, il semblerait qu'il y a une espèce d'opposition entre la musique de type les bands américains, avec beaucoup, beaucoup de bruit, et parfois il y a même de la musique dedans, et la musique qui est un peu plus expressive et où on privilégie non pas les décibels, mais bien la signification, le signifiant, qu'il soit sonore ou qu'il soit du point de vue musical ou du point de vue poétique.

n(17 heures)n

Alors, c'est difficile pour les jeunes de commencer, et il me semble que ce serait une mission normale pour des organismes comme le Grand Théâtre ou comme la Place des Arts ? et là, on a une belle salle à la Place des Arts qui a été organisée spécialement pour eux ? de pouvoir jouer ce rôle-là, et elle ne pourra pas le jouer. Elle le joue un peu mais de façon limitée, à cause de ce que vous venez de raconter. Et beaucoup de jeunes abandonnent. Peut-être qu'ils n'abandonneraient pas si on leur faisait des conditions moins difficiles.

Alors, la question que je me pose est la suivante: Est-ce qu'il y aurait pas possibilité, tout en respectant le fait que... Moi, je comprends qu'il est un peu normal, et il est normal, que des techniciens s'organisent en syndicat pour protéger leurs droits et leurs conditions de travail, et tout ça, mais est-ce qu'il n'y aurait... est-ce que ce ne serait pas une avenue de solution que les ententes se fassent non pas avec... entre la Place des Arts et les techniciens, mais entre l'artiste ou le producteur de l'artiste et les techniciens, quitte à ce qu'il y ait un contrat type qui puisse encadrer tout ça pour qu'il y ait une régularité quand même dans le travail des techniciens?

M. Guy (François): Tout d'abord, évidemment, je ne suis pas contre la légitimité du syndicat; moi-même, j'ai été administrateur à l'Union des artistes pendant sept ans. Je sais qu'est-ce que ça vaut et que c'est important. Il est évident... Où j'en ai peut-être des fois sur ce que vous dites particulièrement, c'est qu'il est évident que, quand la Place des Arts négocie un contrat avec IATSE pour toutes ses salles, je ne peux pas être d'accord avec ça parce que la petite salle de 138 places n'a aucun rapport avec les autres salles, elle en a pas de rapport. C'est une salle qui est si petite, où le ratio est si petit, il faudrait charger des prix exorbitants si on veut mettre plusieurs musiciens. C'est pas rentable. À partir du moment où vous prenez une annonce dans La Presse à 800 $, c'est fini, vous êtes dans le rouge. Les gens viennent pas chanter.

Moi, mon mandat, ça fait un an que je suis à la SACEF. On est venu me chercher parce que, bon, j'écris beaucoup de chansons, j'ai été dans la chanson pendant très longtemps, après je suis allé dans le théâtre avec ma femme, et je suis revenu dans la chanson. Je suis content, j'aime ça, j'en connais les moindres recoins et je me suis aperçu très vite que, bon, pour le concours, ça tiraille, mais j'ai plein de projets, et ça fonctionne bien parce que je garde ça pas cher. Je suis le concours le moins cher au Québec, à 25 $, et je leur en donne pour leur argent.

Bon, cela dit, il reste quand même que mes bâilleurs de fonds, que sont la SODEQ, et Hydro-Québec, et quelques autres partenaires, me permettent d'offrir aux jeunes la possibilité d'utiliser une salle avec une technique extraordinaire, sauf que, pour certains d'entre eux, c'est trop cher. Je suis obligé de leur dire: Bien, viens jouer juste pour le plaisir, là. Tu vas faire tes frais. Tu vas payer ton technicien, et tout. Amène pas trop de musiciens. Tu vas te faire plaisir puis tu vas jouer dans une belle salle. Mais là je trouve pas ça très équitable. Sans être contre le principe que tout le monde doit faire son argent là-dedans, je trouve pas ça très équitable. Est-ce qu'on doit se dire, bon, qu'on va être les bâilleurs de fonds de tout le monde sur pattes, de tous les chanteurs? Non.

C'est parce que, dans la réalité des faits, un technicien dans la chanson actuellement, on peut avoir ça pour des prix assez minimes, vraiment très minimes. Ce matin, j'ai parlé à quelqu'un, parce que je savais que je venais ici, au Trio Boris qui chante des chansons de Prévert, ceux qui ont donné un spectacle, qui sont venus chanter l'année dernière. Je leur ai demandé pourquoi ils ne revenaient pas cette année, parce que j'avais vu leur annonce qu'ils allaient chanter au Petit Medley, à Montréal, qui est une autre petite salle de spectacle qui a le même nombre de sièges. Ils leur faisaient un marché où je... moi, j'offre de le faire gratis, je suis même pas en compétition contre eux autres. Je ne veux même pas être proche de ce qu'eux proposent, où ils leur offrent la salle gratuitement et ils leur chargent 75 $ pour un technicien pour la journée.

Mais ce qui me fait le plus mal quand on parle de technicien ici, là, c'est quand je vois la jeune chanteuse qui vient, là, et quand le technicien s'en va manger, elle regarde le piano de 17 pieds, là, qu'elle rêverait d'avoir dans son salon et qu'elle ne doit pas toucher, il est là, il dort. Ça, c'est difficile à prendre. Moi, si j'étais jeune puis que je joue sur mon vieux réguine à la maison, là, je vois un beau piano de même... Puis évidemment, quand on répète, il y a toute sorte de monde, donc ils ont pas le temps, ils ont leurs petits 15 minutes, ils ont une demi-heure, il faut qu'ils apprennent leurs chansons. Ils aimeraient ça le découvrir, là, puis il dort là, là, puis là il y a une petite toile d'araignée qui se fait tranquillement. Je trouve ça difficile. Moi, il faudrait que quelqu'un m'explique ça comme faut, là. Je veux dire, je suis pas contre le fait que les gens aillent manger, là, mais je suis contre le fait qu'on paie un instrument avec l'argent des contribuables puis on le laisse dormir là. Ça, je suis contre ça.

Alors, dans ce sens-là, je sais pas si j'ai répondu à votre question, mais j'ai un peu dérivé, un peu, hein.

M. Dion: Vous avez fait un bon bout, vous avez fait un bon bout.

M. Guy (François): Non, non, je veux dire, je suis un artiste, je dérive très souvent.

M. Dion: Je vais vous permettre d'en faire un autre.

M. Guy (François): ...de la politique, vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Guy (François): Non, je pense à ça, je comprendrais, je serais rendu trop loin. Non.

M. Dion: Alors, à la page... Ah, il y a pas de pages, mais ça fait rien.

M. Guy (François): Il y a pas de pages, mais finalement il y en a trois. Il y en a pas beaucoup, mais...

M. Dion: Oui. Enfin...

M. Guy (François): ...vous avez des choses...

M. Dion: Alors, c'est la deuxième, la deuxième.

M. Guy (François): La deuxième, oui.

M. Dion: Vous parlez des tarifs des techniciens dont le taux horaire est supérieur à celui, dans la petite salle... est supérieur à celui des techniciens qui s'exécutent dans les plus grandes salles de la Place des Arts. Pouvez-vous nous expliquer ça?

M. Guy (François): Oui, c'est facile à expliquer, parce qu'il y a une raison valable. C'est parce que le technicien qui est dans la petite salle, dans le Studio-théâtre, fait l'éclairage aussi. Par contre, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il fait un éclairage assez rudimentaire et que la technique, au début d'année, nous faisons une plantation d'éclairage. On le paie, il fait une plantation, et, après ça, on peut mélanger à...

Évidemment, c'est complexe. C'est sûr que les gens paieraient pour la complexité et engageraient même un deuxième technicien s'il s'avérait que c'est complexe. Mais, dans la chanson... Et ici je ne parle pas du Centre Molson pour 18 000 personnes avec les effets, etc., les ballons qui tombent, nous parlons d'une petite salle où il y a quelques humeurs, et ce n'est pas si compliqué que ça. Alors, on les paie plus cher parce qu'ils font deux choses.

Tous les techniciens dans le monde de la chanson font à peu près éclairage et son en tout temps. Quand j'ai commencé, j'avais 17 ans, à faire de la chanson, on avait le même technicien pendant longtemps, et tout le monde apprenait un peu sur le tas, et tout le monde travaillait un peu sur le tas, et tout le monde a appris à faire les deux un peu, parce que c'est pas complexe, parce que je ne parle pas ici d'une salle qui demande une technique épouvantable. D'ailleurs, la beauté de cette salle, c'est que c'est une salle intime. C'est pas un technicien qui doit faire 48 pitons en même temps puis huit... Non, c'est pas ça. C'est une petite salle. C'est le coeur qui parle, c'est l'âme. C'est ça, la beauté de la salle.

Il y a des techniciens qui sont venus pendant la grève, ils voulaient me payer pour venir faire la technique, pour aider les jeunes, et beaucoup des jeunes qui sont venus, ils amènent un technicien qui sont leurs amis.

Le Président (M. Simard, Montmorency): En conclusion.

M. Guy (François): En conclusion?

Le Président (M. Simard, Montmorency): S'il vous plaît.

M. Guy (François): Bien, c'est ça. Je pense que j'ai tout dit, me semble.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci. Alors, Mme la députée de Sauvé, à vous la parole.

Mme Beauchamp: Ça sera pas tellement long. Vous venez de dire vous-même que vous avez sûrement tout dit. Votre discours est extrêmement clair. Je partage votre opinion sur le fait que cette petite salle est une salle extrêmement charmante. J'ai des souvenirs d'avoir vu Louise Forestier, entre autres, et c'est un souvenir...

M. Guy (François): Oui, très beau souvenir.

Mme Beauchamp: ...impérissable. Et je pense que votre mémoire témoigne du fait qu'il y a assurément un problème. Lorsqu'un équipement collectif payé par vos taxes, par les miennes fait en sorte qu'il n'atteint pas sa mission dans le sens que les personnes qui devraient y aller choisissent délibérément de ne plus y aller, on se dit: Bon, il y a un problème à quelque part, il y a un gâchis à quelque part.

n(17 h 10)n

Puis, en même temps, j'avais certaines réactions à quelque chose que vous avez dit, parce que je me dis: La solution, elle est aussi dans la vraie recherche d'un équilibre. Parce que, quand vous avez mentionné que, dans d'autres salles, on propose à des artistes, à des producteurs, un technicien pour toute la journée, à 75 $, ma réaction, c'est de me dire: Est-ce que c'est aussi raisonnable? Est-ce que c'est quelque chose de souhaitable? Un technicien suit aussi des cours, a une certaine expérience, hein, etc., etc. Je vous avoue que, pour moi, si sa journée de travail est de huit heures puis qu'il gagne 75 $, tu sais, je trouve pas ça édifiant non plus, là. Et on a souvent dit autour de cette table qu'un syndicat, notre société les permet. Jusqu'à un certain point, nous avons des lois qui permettent leur existence et même encouragent leur existence, parce qu'il y a aussi une notion de défense des droits des travailleurs derrière nos lois.

Donc, je vous écoute et j'ai juste envie de dire que... je sais que je prêche un peu pour quelque chose d'idéal, mais je tiens quand même à dire que la vraie solution est dans un équilibre. Pour moi, des situations comme vous les avez décrites sont sûrement trop extrêmes... qu'un jeune qui est dans la salle puisse pas, pendant que les autres mangent, aller pianoter, ça m'apparaît pas souhaitable, ça m'apparaît pas vraiment explicable, ou enfin je souhaiterais des explications à ça... bon, ce genre de situation là, mais qui relève très clairement d'une convention collective négociée signée par deux parties. Dans le fond, vous souhaitez qu'elle soit renégociée, c'est que j'entends, c'est ce que je comprends.

Mais je voulais juste... Donc, c'est pas... c'est plus un commentaire à vos propos, parce que je pense que vos propos sont limpides, mais je me devais de faire ce commentaire-là en disant que, pour moi, ce que vous avez décrit dans d'autres salles n'est pas nécessairement la situation rêvée et souhaitable pour les travailleurs du milieu de la culture.

M. Guy (François): Je suis tout à fait d'accord avec vous.

Mme Beauchamp: O.K.

M. Guy (François): J'ai peut-être dit quelque chose... Il faudrait que je rappelle sur le téléphone c'est combien, c'est 75, c'est peut-être juste pour le spectacle le soir, il fait peut-être ça...

Mme Beauchamp: Je le sais pas non plus.

M. Guy (François): ...il fait peut-être ça à... Mais vous avez tout à fait raison, il vient pas là à huit heures le matin pour partir à minuit le soir à 75 $. Ça, c'est si imbécile, ce sont deux extrêmes pour moi, là, et c'est sûr qu'il y a un juste milieu à atteindre. C'est ça qui est important, c'est que... Moi, je veux qu'on me dise ici, j'aimerais bien... Je viens dire ici: On me donne un mandat, on a une salle fabuleuse, et j'arrive pas. Je comprends pas. Je ne comprends pas que ça dorme. Je comprends pas. Ça fait un an que je suis là, puis je vois cette salle-là magnifique, puis je comprends pas! Ça me déroute.

Mme Beauchamp: Parce que je veux juste... pour peut-être, concrètement aussi, pour bien vous comprendre, je pense, dans votre mémoire, à un moment donné, vous dites que vous proposez parfois la salle gratuitement puis qu'elle est tout de même trop chère. Quand on dit ça, est-ce que l'explication qu'elle est trop chère, ça s'explique uniquement par le tarif des techniciens...

M. Guy (François): C'est une figure de style.

Mme Beauchamp: ...ou s'il y a autre... d'autres éléments qu'on devrait savoir, là, qu'on devrait connaître?

M. Guy (François): C'est une figure de style. C'est sûr que c'est trop cher dans l'ensemble, parce que ces gens-là souvent... c'est trop cher. Si je la prends ? moi, j'allais chanter là ? et que je dois prendre une annonce, et tout ça, et avoir trois, quatre musiciens, c'est impossible. Parce que, là, la question, c'est: Est-ce que je privilégie un musicien ? c'est la Place des arts, là, hein, on s'entend ? ou le tarif que ça me coûte, je suis obligé d'enlever un musicien ou un choriste? C'est dans cette optique-là. Pour les jeunes qui commencent, je leur... c'est parce que j'essaie de vous faire comprendre ici que la salle est assez extraordinaire, hein, c'est une salle de concert. Donc, les gens sont captifs, sont rivés à la personne qui donne le spectacle. Vous y avez été, vous l'avez vu. Donc, pour certains de ces jeunes là, c'est assez fabuleux comme salle. Par contre, seulement le salaire du technicien, on peut avoir autre chose dans d'autres salles.

Mme Beauchamp: Dans le différentiel, là.

M. Guy (François): Dans le différentiel, tout de suite. C'est sûr que ce n'est pas le seul à avoir une incidence, ce n'est qu'une façon de dire que c'est un des... une... C'est parce que c'est drôle... comment est-ce que vous devriez... Les gens m'appellent: Ah, j'ai entendu dire que la salle... Oui, grâce à mes... à nos partenaires, à la SACEF, oui, la salle, ça vous coûte qu'un dollar de location, mais vous devez... Oui, mais j'ai déjà un technicien. Il peut pas rien faire, il a pas le droit de toucher aux pitons, tu l'assis à côté du gars, puis il fait rien. Bien, oui, mais c'est parce que lui... J'ai dit: Non, t'as pas compris ce que je dis ici, là, il y a un technicien qui coûte tant, variant de 300 $ à... En fait, dans la réalité, si tu t'en sers pas juste pour le spectacle, là, puis le démontage... c'est qu'après six heures c'est en temps double. Il faut comprendre, celui qui choisit de faire du son, particulièrement dans la chanson, il a des grosses chances de travailler le soir, mais c'est en temps double. Là, il y a des... Ça fait me rire aussi. Cela dit, s'il prend juste ça, ça varie entre 250 $... et, si tu rentres à midi pour monter ton équipement, ça peut aller jusqu'à 500, 600 $, ce qui est beaucoup, là.

Mme Beauchamp: Je veux juste, moi, terminer en disant que...

M. Guy (François): Je sais pas si...

Mme Beauchamp: Oui, oui.

M. Guy (François): Est-ce qu'on se comprend là un peu?

Mme Beauchamp: On se comprend, on se comprend bien. Je veux juste terminer, moi, en disant qu'effectivement vous en parlez avec beaucoup d'éloquence et de sincérité de cette fameuse salle, et je pense que ce serait important d'atteindre les objectifs qui ont été fixés pour cette salle-là, parce que je suis consciente également que, dans le développement de la carrière d'un jeune artiste, la notion de la Place des Arts... la notoriété de la Place des Arts fait en sorte qu'il y a une différence entre faire une salle, même si elle est seulement de 130 places à la Place des Arts... et faire le même genre de spectacle ailleurs. Il y a un effet de notoriété qui, je pense, peut avoir un impact certain sur à la fois le plaisir de l'artiste à performer là mais à la fois sur sa notoriété, sa carrière. Donc, effectivement, il faut trouver une solution.

M. Guy (François): C'est une salle qui se prête au développement, mais aussi nous avons plein de projets. Je veux faire des rencontres SACEF avec les grands artistes qui viennent. Tu sais, la beauté de voir Louise Forestier seule dans cette petite salle-là, c'est magnifique. Qui n'irait pas voir Robert Charlebois, tout seul au piano, 130 personnes? Ça serait extraordinaire. Mais peut-être que Robert, lui, il veut venir avec son technicien... par coeur aussi. Tu sais, il y a des petites nuances à apporter. Je sais pas, moi, je l'ai dit: Il y a des irritants, ce que je me suis aperçu cette année dans cette salle-là, qui ont fait que, lorsque j'ai entendu parler de la commission, j'ai dit: Je vais y aller, moi, j'ai des choses à dire dans cette salle. On a une magnifique petite salle, j'aimerais ça qu'on puisse s'en servir pleinement. Je déteste voir le patrimoine québécois dormir comme ça.

Mme Beauchamp: Je vous remercie bien.

M. Guy (François): C'est moi qui vous remercie.

Mme Beauchamp: J'ai terminé.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, merci beaucoup, cher ami, de votre présence et de votre contribution à nos travaux.

Remarques finales

Alors, très bien, chers amis, nous en sommes rendus à l'étape des remarques finales, et, comme le veut la tradition, je laisserai d'abord la parole à la porte-parole officielle de l'opposition, la députée de Sauvé.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: C'est pas tout à fait ça la tradition, selon moi.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Ah oui! C'est ça.

Mme Beauchamp: Habituellement, c'est la partie ministérielle qui commence...

Le Président (M. Simard, Montmorency): Non, non, c'est le gouvernement qui a le dernier mot.

Mme Beauchamp: Ah oui?

Le Président (M. Simard, Montmorency): C'est le gouvernement qui a le premier mot lors des remarques préliminaires...

Mme Beauchamp: Je m'excuse, je m'excuse.

Le Président (M. Simard, Montmorency): ...et c'est lui qui a le dernier mot lors de remarques finales.

Mme Beauchamp: Désolée, désolée, désolée. J'y vais.

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Oui. J'y vais. Écoutez, je pense, dans un premier temps, qu'on peut dire que ce mandat de surveillance pour le Grand Théâtre de Québec et la Place des Arts a été un mandat important parce que je pense qu'à l'intérieur des processus habituels qu'on se donne, c'est-à-dire étude des crédits ou engagements financiers, il est... c'est rare pour des parlementaires d'avoir un éclairage aussi précis sur les activités de ces institutions-là qui, tel que je l'indiquais dans mes remarques préliminaires hier matin, sont pour moi des institutions culturelles d'importance, vraiment des jalons au niveau du développement culturel du Québec.

Je pense qu'il faut admettre que la question des relations de travail entre le syndicat IATSE et particulièrement la Place des Arts a pris énormément de place au cours de nos débats. C'est une situation qui était, je crois, inévitable, compréhensible, compte tenu du conflit de travail qui sévit depuis 1999, puis à la fois je le déplore un peu, puisque je pense qu'il y avait d'autres sujets qui... si cette dimension-là n'avait pas pris tant de place, d'autres sujets de tout autant d'importance, je crois, dans le développement de la mission de ces deux organismes qui auraient pu être abordés et qu'on a peut-être malheureusement raté une opportunité d'avoir un éclairage encore plus complet sur l'avenir de ces deux institutions.

n(17 h 20)n

Je disais que les questions de relations de travail ont été au coeur de nos échanges et, pour ma part, en remarques finales, je pense que je me dois de faire un appel à la responsabilité de chacun des partenaires dans ce dossier. Quand je plaide pour la responsabilité, je parle de la responsabilité de chacun quant au développement de la culture au Québec, parce que, ultimement, c'est de ça qu'il s'agit, c'est les impacts d'un conflit de travail à la Place des Arts, c'est des impacts quant au développement culturel du Québec. Et c'est dans ce sens-là que je plaide pour la responsabilité de chacun.

Je me dois de dire, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et de communications, que je ne suis pas très fière de voir qu'une société d'État privilégie la voie des tribunaux et perd en quatre occasions devant les tribunaux par rapport, dans le fond, au respect de lois du Québec. Ce n'est pas pour moi une source de fierté que de voir qu'on a fait un tel choix. Je déplore également, puis vivement, je tiens à le souligner, le choix qui a été fait par le syndicat IATSE, par les représentants de la FTQ, de ne pas se faire entendre hier lors de nos travaux. Je pense que ça nous a... Il y a eu un éclairage qui a manqué au cours de ces travaux, que je déplore. Et, entre autres, je déplore qu'on n'ait pas pu avoir publiquement des réponses à nos questions, entre autres sur la question des irritants pour eux du rapport du médiateur qui a été déposé et qui nous a été rendu public hier.

J'en appelle donc à la responsabilité publique de tous. Comme citoyenne du Québec et comme contribuable québécoise, je plaide pour qu'on ait une utilisation maximale de nos équipements culturels du Québec, que nous payons tous. Et, à voir l'attitude des deux parties, telle que je l'ai vue lors de ces audiences, j'ai l'impression qu'on n'est pas sorti de l'auberge, on n'est pas sorti du bois sur cette question-là. Et pourtant, ce que j'ai retenu de la part de ceux qui se sont présentés ici et qu'on a parfois qualifié des premiers touchés, c'est-à-dire, par exemple, les compagnies résidentes, je crois que le message avant tout que j'ai entendu, c'est le fait que le pire scénario pour eux et le plus dommageable pour ces compagnies artistiques, qui sont parmi les plus importantes du Québec, c'était le climat d'incertitude qui régnait maintenant.

Et autant j'ai déjà indiqué que, pour ma part, la saga juridique n'était pas souhaitable et n'est toujours pas une voie souhaitable, selon moi, il y a quand même une situation à court terme qui personnellement me préoccupe: c'est ce climat d'incertitude qui est maintenant créé. Et, de nouveau, je dois plaider pour la responsabilité de chacune des parties. J'ai envie de dire que... enfin je plaide pour une reprise des négociations, peut-être pour une reprise du processus de médiation. Mais, si la voie judiciaire était la voie privilégiée par les deux parties, je plaide minimalement quant au maintien du moratoire actuel. Si chacune des parties choisit la voie des tribunaux et avec les délais que cela impose, que ça ne soit pas dommageable et sur le dos des compagnies résidentes de cette institution.

Je terminerai là-dessus pour ce qui est de la question des relations de travail, mais j'ai toujours indiqué que, pour moi, il y avait d'autres sujets d'importance. Et, si j'examine ce qu'on a entendu par rapport à la mission et les activités de la Place des Arts, je crois qu'il est important, et qu'il est important dans le développement de la métropole, qui se positionne de plus en plus comme une ville de festivals... Et d'ailleurs, je souligne que le Conseil régional de développement de l'île de Montréal a appuyé l'initiative montréalaise, qui s'appelle maintenant Culture Montréal, et a également appuyé un comité qui regroupe les principaux festivals. Tout ça pour dire que je crois qu'il faut s'entendre sur le fait que la Place des Arts, en termes immobiliers, est un actif extrêmement important pour le milieu culturel montréalais. Et, dans ce sens-là, je crois qu'il faut inviter la Place des Arts à une action extrêmement concertée pour tout ce qui concernerait le développement ou enfin l'établissement de nouveaux bâtiments, par exemple, sur son esplanade, parce que je suis sensible au fait que c'est maintenant un milieu public qui est devenu un lieu public d'importance par rapport à l'activité culturelle montréalaise.

Je plaide également pour que la Place des Arts, dans sa gestion, prenne peut-être les devants, soit un peu plus proactive et, entre autres, dans l'établissement de processus plus formels, je les appellerais comme ça, mais de communication et de discussion avec ses principaux partenaires. Ça peut être bien sûr avec ses travailleurs, travailleuses, mais également avec ses partenaires, comme les compagnies résidentes. La loi lui permet de mettre en place des comités consultatifs. Dans son plan stratégique, la Place des Arts parlait, elle, de comités artistiques. À tout le moins, je crois que, même si on a entendu les compagnies résidentes mentionner qu'elles considéraient qu'elles avaient de bonnes relations avec la Place des Arts, je crois qu'il y a de nombreux enjeux qui pourraient être encore mieux appréciés et discutés au travers d'instances un peu plus formelles qui permettraient à tout le monde d'être autour de la table.

Quant au Grand Théâtre de Québec, moi, je terminerai... et je pense que c'est rare et qu'il faut noter le moment... C'est parce que j'ai vraiment le goût de féliciter les administrateurs et aussi les membres du conseil d'administration. Ce que j'ai entendu ici, à travers les personnes qui sont venues nous parler du Grand Théâtre de Québec, a été plutôt des éloges, et, à travers la démonstration que les différents intervenants en ont faite, il m'a semblé que le Grand Théâtre de Québec était une corporation qui, malgré des coupures budgétaires extrêmement importantes, a déployé des efforts pour rencontrer de près la mission qu'on a confiée à cette institution.

Maintenant, j'ai l'impression... On a entendu aujourd'hui des intervenants du milieu culturel québécois, de Québec, venir nous interpeller sur les priorités pour le Grand Théâtre de Québec. Je crois tout simplement qu'il faudra étudier de près la dynamique du développement culturel à Québec avant de prendre quelque décision que ce soit quant à une priorisation dans la mission du Grand Théâtre de Québec. Peut-être qu'il serait une bonne chose que la musique classique soit privilégiée, mais, au moment où on se parle, pour moi en tout cas, à titre de parlementaire, il y a pas eu une information suffisante et complète pour vraiment évaluer tous les impacts d'une telle décision. Mais je crois qu'on peut faire confiance aux administrateurs membres du conseil d'administration et aux gestionnaires du Grand Théâtre de Québec pour nous guider dans cette réflexion.

Je terminerai en vous remerciant, chers collègues, en remerciant également nos gens du Secrétariat des commissions pour leur collaboration. Merci également à tous ceux qui ont présenté des mémoires.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci beaucoup, Mme la députée de Sauvé. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Comme ma collègue de Sauvé... il est regrettable que nous n'ayons pu couvrir l'ensemble du portrait de la Place des Arts ainsi que du Grand Théâtre. Je pense bien que nous aurions aimé aborder d'autres sujets, mais les circonstances étant ce qu'elles sont, la plupart de nos échanges ont porté sur le conflit de travail qui perdure à la Place des Arts depuis 1999. Au début de ces échanges, nous nous étions fixé, en tout cas en ce qui concerne le conflit de la Place des Arts, trois objectifs, qui étaient de connaître les causes de ce conflit, d'en connaître également les enjeux et également des pistes de solution possibles. Certaines observations sont revenues au cours de nos audiences, et j'aimerais en mentionner quelques-unes ici qui m'ont semblé revenir le plus souvent.

D'abord, le conflit qui perdure à la Place des Arts et le régime de travail qui prédomine affectent de manière importante les groupes résidents et affiliés. Ensuite, certains de ces groupes se sentent même menacés dans leur existence même, se sentent même en danger quant à leur pérennité et à leur survie. Troisièmement, la plupart des groupes pourraient vivre avec le rapport du médiateur même si, idéalement, ils souhaitent des modifications législatives au régime des ateliers fermés pour que la Place des Arts ait le droit de gérance de ses employés. Quatrièmement, nous avons noté que l'augmentation des coûts de production, et en particulier des coûts de techniciens, puisque nous nous sommes penchés plus spécifiquement sur cette dimension-là, est d'une façon ou d'une autre éventuellement repassée, refilée aux organismes subventionnaires du gouvernement dans l'établissement des budgets globaux des organismes qui demandent, qui sollicitent l'aide de l'État. Ensuite, les groupes résidents souhaitent être représentés au conseil d'administration de la Place des Arts même si, comme l'a souligné ma collègue, la plupart d'entre eux entretiennent des relations de bon aloi avec la direction. Tous ont dénoncé le carcan et la rigidité qu'entraîne à leurs yeux l'inflexibilité des conventions de travail avec IATSE.

n(17 h 30)n

Dans ce contexte, il aurait été souhaitable et important pour nous, les députés, d'échanger avec la FTQ comme représentant d'IATSE dans cette démarche. Je déplore l'attitude préorchestrée, préorchestrée avec photographes à l'appui, qu'a décidé d'emprunter la FTQ en se retirant de nos échanges, en nous accusant, en accusant la commission d'être pipée et les députés d'être complaisants. Ce n'est certainement pas une marque de respect ni pour les députés ni pour les populations qu'ils représentent.

C'est d'autant plus regrettable que la FTQ avait un mémoire intéressant et qu'on aurait pu savoir, entre autres par nos échanges, pourquoi IATSE avait gagné ses différentes représentations judiciaires contre la direction de la Place des Arts, pourquoi la FTQ avait des réticences à accepter le rapport du médiateur. Le régime d'atelier fermé et les dispositions de la convention collective sont-ils aussi rigides et contraignants qu'on nous l'a exposé? Voilà autant de questions sur lesquelles on aurait pu échanger avec la FTQ et, comme l'a souligné ma collègue, nous aurions pu avoir un éclairage beaucoup plus complet sur cette malheureuse situation que nous espérons régler le plus vite possible.

Ceci étant dit, j'aimerais à mon tour remercier tous les groupes qui ont pris la peine de nous déposer des mémoires, qui ont pris la peine de se déplacer pour venir échanger avec nous. Je remercie mes collègues également de l'opposition officielle et j'espère à mon tour que les parties en cause feront preuve de responsabilité dans le plus grand intérêt de nos groupes culturels et du rayonnement de la culture québécoise non seulement chez nous, mais à l'étranger également. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, merci beaucoup, M. le député de Marguerite-D'Youville. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Nous sommes placés, évidemment, dans... Je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit par mes deux collègues antérieurement. Je pense qu'on est tous d'accord sur le fait que c'est à notre corps défendant qu'on a été obligés de mettre le focus sur une situation de conflit de travail qui a pris tout le temps.

Je pense qu'au milieu de ça tout le monde reconnaîtra le droit des travailleurs de se syndiquer et de se faire représenter, de se faire représenter correctement pour défendre leurs intérêts. Tout le monde reconnaîtra le droit du public aussi à avoir des spectacles de qualité dans des salles qu'il paie. Tout le monde reconnaîtra le droit des artistes de pouvoir travailler dans des conditions normales. Mais tous ces droits emportent une responsabilité, et la responsabilité, eh bien, elle est envers... à la limite, envers le public. C'est le public qui, avec ses impôts, paie des montants considérables pour maintenir ces institutions culturelles dont nous avons besoin. Donc, il y a une responsabilité envers le public de lui donner un petit peu pour son argent, et nous, c'est notre rôle d'y voir. C'est pour ça qu'on a fait cette commission-là; autrement, on s'en serait passé peut-être. Et l'objectif, en tout cas, que je poursuis, moi, et que je poursuivais, c'est de faire en sorte que la création artistique puisse vraiment se développer dans des conditions normales et que le public puisse bénéficier de spectacles et de représentations tel qu'il le désire et qui sont possibles parce que la vie culturelle, à Montréal et au Québec, elle est très développée.

On a vu décrire devant nous des situations de travail discutables et d'autres qui, à première vue, sont totalement... moi, m'apparaissent totalement abusives, totalement déraisonnables. Peut-être que je me trompe. Peut-être que je me trompe, mais les représentants qui auraient pu me corriger ont décidé de ne pas parler, et de s'en aller, et de nous faire un pied de nez. Bon, enfin, c'est leur choix, c'est leur stratégie, mais je pense qu'en le faisant ils ne le faisaient pas à M. ou à Mme Unetelle, ils le faisaient au peuple du Québec qu'on représente ici.

Moi, je pense qu'il faut revenir à des choses un peu plus raisonnables. C'est sûr qu'il y a des mécanismes qui sont en place, il y a un rapport de médiateur. C'est peut-être une voie à privilégier. En ce qui nous concerne, nous, les membres de la commission, nous allons discuter entre nous. On n'a pas pris de position formelle, mais chacun donne un peu son orientation, mais on va discuter entre nous quelle suite on va donner à cette commission-là. Quoi qu'il en soit, quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, personne ne pourra remplacer le bon sens par des règlements ou des conventions et personne ne pourra remplacer non plus la bonne volonté. J'appelle donc les parties à faire preuve de bonne volonté et de bon sens.

Et je remercie très sincèrement tous ceux qui ont accepté de nous informer afin que nous puissions remplir notre rôle comme représentants de la population. Merci.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député d'Iberville.

M. Jean-Paul Bergeron

M. Bergeron: Merci. La société québécoise s'est dotée, au cours des dernières années, disons, des 30, 40 dernières années, de deux ensembles qui font l'envie de bien des sociétés: la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec. On se rend compte que tout n'est pas rose, pour reprendre quelque chose qui a été dit. Mais c'est que nous vivons dans une société où nous avons tous des droits. Où finissent les uns et où commencent les autres? C'est que nous avons deux institutions où doit s'exprimer l'âme d'un peuple, où doit s'exprimer notre culture, et c'est qu'on se rend compte que la démocratie en prend un coup, en ce sens qu'il y a des droits qui sont brimés et, en même temps, ces grands ensembles, qui sont payés avec l'argent des contribuables, ne peuvent pas profiter au plus grand nombre possible.

À l'énoncé de certaines situations lors de la présentation de certains mémoires, je me serais pensé dans un roman de Kafka, où l'éclairage était cru, sans fard, et il y avait des situations qui tendaient vers une certaine forme d'illogisme et quasi vers l'absurde. Quelques-unes de nos plus grandes institutions, que ce soit Les Grands Ballets canadiens, Jean-Duceppe, l'Orchestre symphonique, sont venues nous dire, avec une rare unanimité, que la situation actuelle, elle est déplorable et qu'elle s'est dégradée et qu'en même temps il faut trouver un moyen de vivre ensemble. Cette grève-là, il va falloir qu'elle se termine un jour. Le professeur de l'Université Laval disait: Bien, on attend la décision de la Cour d'appel; ça ira probablement en Cour suprême en 2002.

Et je citais, lors d'une intervention, le livre de Jacques Grandmaison, Quand le jugement fout le camp; c'est que, entre gens de bonne volonté, il y aurait sûrement moyen de s'entendre. Et je pense que c'est à cette bonne volonté là que nous sommes tous conviés. Notre débat, nos échanges ont glissé sur cet épineux problème que sont les relations de travail alors qu'une société qui s'affirme, qui se bâtit, telle la nôtre, aurait eu probablement beaucoup d'autres sujets à entreprendre pour voir ce qu'on peut faire, ce qu'on peut entreprendre pour optimiser de tels équipements qui coûtent quand même cher aux deniers publics. En fin de compte, la situation, elle est déplorable, et je pense que, tous ensemble, tous ici, dans cette salle, nous la déplorons. Je ne suis pas un juriste, mais c'est qu'il va falloir qu'à un moment donné on s'assoie tous ensemble pour voir de quelle façon on peut régler ça dans le meilleur intérêt de la population.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Merci, M. le député d'Iberville. M. le député de Frontenac.

M. Marc Boulianne

M. Boulianne: Bon, très rapidement. Je pense que tout a été dit. Je veux tout simplement féliciter et remercier les groupes pour avoir présenté des mémoires. C'est important. On a fait un bon tour de table concernant ce conflit. Et je pense que, tout comme mes collègues, les personnes concernées doivent prendre leurs responsabilités; et, nous autres aussi, je pense qu'on aura des décisions à prendre et à prendre nos responsabilités. Alors, encore une fois, félicitation et merci à tous ceux qui ont présenté des rapports.

Le Président (M. Simard, Montmorency): Alors, voilà, ceci met donc fin aux consultations particulières et aux auditions publiques dans le cadre du mandat de surveillance d'organismes sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Société du Grand Théâtre de Québec. J'aimerais remercier tous les groupes qui ont daigné participer à nos travaux et j'ajourne donc sine die cette consultation.

(Fin de la séance à 17 h 40)



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