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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 26 février 2004 - Vol. 38 N° 22

Consultation générale sur le document intitulé La planification des niveaux d'immigration 2005-2007


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la culture ouverte. Je rappelle aux membres de la commission que le mandat est de tenir une consultation générale à l'égard du document intitulé La planification des niveaux d'immigration 2005-2007.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements pour cette journée?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Pierre Moreau, député de Marguerite-D'Youville, est remplacé par M. Norbert Morin, député de Montmagny-L'Islet, et M. Alexandre Bourdeau, député de Berthier, est remplacé, pour la durée du mandat, par M. Dion, député de Saint-Hyacinthe.

Le Président (M. Cusano): Bienvenue à M. le député de Saint-Hyacinthe. L'ordre du jour aujourd'hui est le suivant. Cet avant-midi, nous entendrons la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes; par la suite, la Chambre de commerce de Québec et le Conseil régional des partenaires du marché du travail du Centre-du-Québec. Cet après-midi, nous entendrons le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour personnes immigrantes; le Conseil interprofessionnel du Québec; et la municipalité de Rawdon et la MRC de la Matawinie; ainsi qu'Accès Canada.

Auditions (suite)

Je constate que nos premiers invités sont déjà à la table. Alors, pour les fins du Journal des débats, je vous demanderais de vous identifier, s'il vous plaît.

Table de concertation des organismes au service
des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)

Mme Augenfeld (Rivka): Oui. Merci, M. le Président. Merci de nous accueillir ici. Mon nom est Rivka Augenfeld, je suis la présidente de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. C'est un regroupement national qui comprend maintenant 135 organismes membres. Je suis accompagnée de M. Stephan Reichhold, qui est notre directeur général; de Mme Karine Verreault, qui est la trésorière du conseil d'administration de la table; et de Mme Nathalie Blais, de l'archevêché de Montréal, qui est aussi membre de la table.

Le Président (M. Cusano): Merci. J'aimerais vous rappeler les règles qui nous guident ce matin. C'est-à-dire que vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire la présentation, le résumé de votre mémoire. Il suivra une période d'échange avec les parlementaires pour une période maximale de 40 minutes. Alors, la parole est à vous, Mme la présidente.

Mme Augenfeld (Rivka): Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, merci de nous avoir accueillis ce matin. Je vais prendre pour acquis que vous avez lu notre mémoire. On ne va pas le redire, mais on va quand même... on va partager la présentation entre les quatre personnes pour parler des aspects spécifiques. Je pense que vous avez déjà entendu d'autres présentateurs, différents aspects des défis, si vous voulez, et les problèmes en ce qui concerne l'accueil et l'intégration des immigrants. Nous, on va s'attarder plus sur la question des réfugiés, sans oublier que nos organismes membres s'occupent des deux, et des immigrants et des réfugiés. Ce n'est peut-être pas des organismes communautaires qui ont beaucoup de candidats, disons, investisseurs ? ça, il y a peut-être d'autres intervenants qui vont venir vous en parler ? mais, nous, on va parler d'immigrants et de réfugiés.

Alors, pour commencer, je pense que ce que je voudrais vraiment souligner, c'est que les organismes membres de la table sont là, une grande partie, ils font l'accueil établissement, d'autres ne font pas de travail direct avec les réfugiés, les immigrants, mais qui sont membres de la table parce qu'ils adhèrent à la mission de la table, et ça nous permet d'avoir des organismes, des institutions de la société d'accueil un peu plus larges, comme les centres de francisation, le YMCA, l'archevêché de Montréal, qui est un acteur primaire dans tout ce qui est le parrainage. Et tout le monde est là pas pour défendre les organismes en soi, ça veut dire que ce n'est pas la vie des organismes qui est le but ultime, mais les organismes qui voient et qui travaillent auprès de la clientèle sur le terrain et se soucient des besoins et des droits des personnes.

Alors, si on a des choses à dire, ça va être avec cette fin-là, de dire: On est là pour défendre les besoins, et on espère que vous allez accueillir ce qu'on a à dire dans cet esprit. Et, si on critique certains programmes ou certaines prises de position, c'est toujours en pensant à notre responsabilité première, qui est cette défense des droits des gens.

En lisant notre mémoire, je suis sûre que vous avez vu qu'on était un peu déçus de voir qu'il n'y a pas beaucoup d'emphase, dans le document de consultation, sur l'accueil des réfugiés dans le sens comme un projet de société. Nous, on est convaincus qu'on peut, avec l'accueil et l'installation des réfugiés, faire beaucoup pour emmener la société québécoise à un projet, un beau projet social, ce qui est l'accueil. Parce que notre geste humanitaire, qui commence à la sélection, et faire venir les réfugiés ici, au Québec, il faut que ce soit... il faut, c'est absolument primordial que ce soit accompagné par une sensibilité une fois arrivés. Ce n'est pas parce que quelqu'un a vécu dans un camp en Afrique qu'il peut continuer de vivre dans ces conditions ici. Si on veut que ça ait un sens, il faut qu'on fasse tout ce qu'il faut pour comprendre que les besoins des réfugiés ne sont pas les mêmes que les besoins des immigrants, même si certains se recoupent, et qu'on fasse tout ce qu'il faut pour mettre en place les programmes et les ressources. Parce que, oui, les organismes, on est là pour la clientèle, mais on a aussi besoin de ressources pour pouvoir travailler comme il faut.

n (9 h 40) n

Alors, vous avez vu, dans notre mémoire ? et M. Reichhold va vraiment plus élargir ? que nous croyons que ça nous prend un autre grand événement, plus que cette commission, même si on est contents d'être ici. Et on vous lance la proposition qu'au-delà de cet exercice concret il y ait vraiment une commission spéciale qui implique l'ensemble des acteurs gouvernementaux, institutionnels et socioéconomiques pour qu'on puisse se pencher plus en profondeur sur l'avenir et les enjeux de l'immigration et l'intégration au Québec. Et on espère que cette commission aura comme tâche de mobiliser toutes les forces vives du Québec et de faire de l'immigration et de l'intégration un projet collectif de société.

Mme la ministre et MM. et Mmes les députés, je pense que certaines parties de notre mémoire, si vous regardez tous les mémoires qu'on a présentés depuis 1990, depuis l'énoncé de politique de Mme Gagnon-Tremblay ? qui était un énoncé de politique qui a été adopté et par le parti au pouvoir et par l'opposition, à l'époque, c'était un vrai projet qui a été adopté par tout le monde ? si vous regardez nos mémoires, vous allez voir qu'il y a des choses qui se répètent, et on va revenir répéter souvent les mêmes choses parce qu'on ne voit pas que nos recommandations ont déjà été accomplies. Alors, il ne faut pas être étonné qu'on revient avec des choses. Vous allez voir... Vous avez vu nos recommandations, et on est convaincus plus que jamais... Si on croyait qu'on savait de quoi on parle en 1990, en 2004 on est convaincus que c'est encore plus important que jamais de faire suite à certaines de ces recommandations pour qu'on puisse aller de l'avant.

Alors, je pense, avec ça, je vais m'arrêter et je vais passer la parole à mon collègue, Stephan Reichhold.

Le Président (M. Cusano): M. Reichhold.

M. Reichhold (Stephan): Alors, M. le Président, Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, merci beaucoup de nous avoir invités. Moi, je voulais dire quelques mots en fait sur les questions de l'intégration, du défi que pose l'intégration. Je pense qu'il est bien documenté, dans le document de consultation, qu'il va falloir réfléchir sérieusement au niveau des capacités qu'on a pour justement accueillir un nombre croissant d'immigrants.

Moi, je pense que nous avons, au Québec, un réseau tant gouvernemental que non gouvernemental assez... plutôt performant au niveau de l'accueil et de l'intégration des nouveaux arrivants. On peut se comparer au reste du Canada, je pense, avec pas mal de fierté. Aussi, je pense qu'il y a une bonne symbiose actuellement entre les services publics et les services communautaires, qui reste malgré tout assez remarquable si on se compare avec d'autres pays, malgré toutes les difficultés que nous vivons de part et d'autre et des irritants que nous ramenons régulièrement, comme par exemple le délai de carence pour les nouveaux arrivants, ou la loi n° 67 de la Société de l'assurance automobile du Québec, qui nous pend sur la tête comme une épée de Damoclès ? heureusement, elle n'a pas encore été appliquée, mais ? ou bien, récemment, bon, on a soulevé toute la question de l'aide financière pour les études pour les réfugiés. Bon. Ce type d'irritant, je veux dire, ne nous facilite pas vraiment le travail.

Nous voulons aujourd'hui souligner en fait que nous aurions beaucoup à perdre, au Québec, si on ne se penche pas sérieusement et on ne pèse avec précaution l'impact d'une croissance de l'immigration au niveau des services qu'on est capable de leur offrir et de l'accompagnement. Je pense que l'équation est simple, on s'entend tous ? je pense que tout le monde est d'accord ? que le Québec a besoin d'immigration. Nous croyons, je pense, tous aussi aux bénéfices qu'apporte l'immigration. Donc, nous nous entendons aussi au niveau des besoins, au niveau de la nécessité du support, du soutien, de l'aide au niveau de l'intégration. Et je pense qu'on s'entend aussi sur le fait que le réseau communautaire, qui est un acteur privilégié au niveau de tout ce qui touche la première ligne, dont l'accueil et l'établissement, possède une expertise assez reconnue.

Là où on ne s'entend peut-être plus, tout le monde, c'est qu'on constate actuellement, et surtout aussi dans les réseaux communautaires, qu'on a atteint un seuil de saturation, un problème de capacité d'absorption qui pose un énorme problème, surtout depuis deux, trois ans, depuis la croissance de l'immigration. On note des problèmes qui s'amplifient, que ce soit au niveau du logement, que ce soit au niveau de l'emploi, que ce soit au niveau de tous les problèmes avec Immigration Canada qu'on vit actuellement au niveau de leur réduction de services. Bon. Tout ça se répercute sur les organismes communautaires de manière assez massive, sans de rajout de ressources.

Donc, les contraintes, les besoins au niveau des nouveaux arrivants sont énormes, je pense, sont importants, mais les contraintes budgétaires aussi et la pression sur les intervenants dans les organismes ont pris des proportions vraiment très inquiétantes. Et c'est dans ce sens qu'on voudrait que la commission se penche sur... Qu'allons-nous faire, si on augmente les niveaux d'immigration pour lesquels... ce que nous appuyons? Comment allons-nous faire pour répondre à tous ces besoins? Ce qu'on oublie souvent aussi en fixant les niveaux d'immigration, c'est qu'il y a un effet cumulatif. C'est-à-dire, on parle, bon, chaque année de tel ordre, mais, en trois ans, il faut quand même... Bon. Il faut être conscient qu'on va avoir entre 120 000, 150 000 personnes qui vont se rajouter à la population québécoise, plus tous ceux qui sont déjà ici, au niveau des nouveaux arrivants. Donc, la pression augmente.

Alors, je vais finir et... Oui, peut-être une chose aussi dont on a très peu parlé, c'est la grande faiblesse dans notre capacité d'accueil, c'est toute la question de la tranche, ce qu'on appelle plus, là, la phase d'intégration des personnes qui sont ici depuis quatre, cinq ans qui ont encore besoin d'un certain accompagnement, d'un soutien, de ressources, donc dans leur phase d'intégration plus ancrée. Actuellement, il n'y a aucun programme, il n'y a aucune ressource. C'est sûr que, nous, notre réseau, on est beaucoup sur l'accueil, le premier accueil, mais après... Et les institutions, que ce soit l'éducation, santé et services sociaux, Emploi-Québec, ne sont pas équipées pour faire face à ces besoins d'intégration de ces personnes.

Alors, je vais finir sur... Donc, ce que nous demandons, en fait, c'est... Ça prend absolument des ressources additionnelles si on veut continuer à maintenir le niveau de services que nous avons actuellement. Et vous savez, Mme la ministre, que, jusqu'à preuve du contraire et au risque de me répéter, nous comprenons mal en fait les restrictions budgétaires actuelles et anticipées. Lorsqu'on suit l'évolution du transfert de la compensation du gouvernement fédéral, on a des gros questionnements par rapport à ça. Alors, merci beaucoup. Et je vais passer la parole à ma collègue Mme Verreault.

Le Président (M. Cusano): Mme Verreault.

Mme Verreault (Karine): Bonjour, Mme la ministre, M. le Président. Pour faire la suite sur ce qu'il vient de dire, je vais parler particulièrement de l'accueil des réfugiés, l'accueil des réfugiés qui habituellement, pour la grande majorité, sont destinés dans les régions. La Table de concertation a aussi pris position là-dessus, a toujours soutenu l'immigration en région. Par contre, au niveau des réfugiés, on demeure vigilants face aux capacités.

Ce qui devrait être pris en compte, au niveau de l'établissement des réfugiés, c'est les capacités d'accueil, c'est les ressources disponibles en région. Il est faux de prétendre que les réfugiés et les immigrants, après quelque temps, ont besoin des mêmes services. Ils n'ont absolument pas les mêmes besoins. Les réfugiés ont été victimes de violence organisée, dans nombre de cas ont été des victimes de tortures. On ne peut pas prétendre qu'ils sont au même point que les immigrants qui ont choisi de venir s'établir au Québec et de refaire leur vie ici. Alors, c'est important qu'on tienne compte de ça parce que, pour l'instant, dans les programmes, on n'en tient absolument pas compte.

Les interventions qui sont faites auprès des réfugiés, auprès des immigrants sont au même niveau, au même financement et tiennent compte du même type d'intervention. Il n'y a pas d'intervention psychosociale qui est faite auprès des réfugiés, qui est financée. Ce qui est la volonté gouvernementale, et avec laquelle on est très en accord, c'est de référer aux services publics. La majorité des organismes travaillent de concert et en harmonie avec les services publics. Mais, dès les premières semaines, dès les premières arrivées, ce n'est pas toujours évident de référer des personnes, qui ont été victimes de violence organisée, dans les services publics. Il y a un lien de confiance qui s'est établi dès l'établissement, dès l'accueil, et qui doit être pris en compte.

De plus, dans les services publics, comme les réfugiés sont souvent dans les régions, c'est quand même une population marginalisée et on ne peut pas s'attendre, dans une région où on établit 50, 60, 100 réfugiés, que les intervenants des services publics soient tout à fait aptes et outillés à intervenir auprès des réfugiés. Dans nombre de cas d'ailleurs, quand on les réfère dans les services publics, les services publics rappellent les organisations communautaires, parce qu'ils ont besoin d'un soutien et d'un coup de main des groupes communautaires. Ça non plus, ce n'est pas reconnu, toute l'expertise qu'on transfère dans les services publics.

n (9 h 50) n

Au niveau des réfugiés, l'un des programmes importants est le programme PAIR, qui permet d'offrir le minimum ? et j'insiste sur «le minimum» ? aux réfugiés lors de l'établissement. Le programme PAIR n'a jamais été indexé, je pense, depuis six ou sept ans. On offre... 10 ans?

Une voix: 10 ans.

Mme Verreault (Karine): Depuis 10 ans; c'est encore pire. C'est vraiment le minimum. Sur le comité PAIR conjoint qu'il y avait entre les ONG et le MRCI, on en était même à calculer le nombre de fourchettes, de cuillères qu'on allait donner. C'est indécent. Quand les gens arrivent et qu'ils ont tout perdu, qu'ils ont subi des traitements inhumains, on devrait leur offrir le minimum mais au moins dans le respect de la dignité. Pour l'instant, ce n'est pas ce qu'on fait. On est conscient des difficultés et du peu de ressources et de fonds publics, mais jamais ça ne devrait porter atteinte à la dignité des gens.

Au niveau du programme PAIR aussi, c'est très compliqué de travailler avec ce programme-là parce que le même programme sert, d'une part, à payer des services ? par exemple l'hôtel, certains transports ? auxquels ont accès les réfugiés et, d'autre part, sert à payer ce dont ils ont besoin pour démarrer ? donc, les premiers meubles, vêtements. Alors, ce devrait être géré de façon à ce que les réfugiés, par exemple en période de crise de logement, ne soient pas ? comment dire? ? pénalisés sous prétexte qu'ils restent plus longtemps à l'hôtel. La majorité n'ont pas les sous, même une fois qu'ils ont le minimum, n'ont pas l'argent par la suite pour acquérir les petites choses dont ils ont besoin. Ils sont souvent accablés, pour les grosses familles, notamment, avec des prêts de transport qui peuvent atteindre 15 000 $. Tu arrives, tu es réfugié, tu n'a plus rien dans la vie, tu as un prêt de transport de 10 000 $, 15 000 $, et en plus tu n'as même pas accès au minimum. On calcule les chaudrons... Les familles de 10 n'ont même pas accès à un chaudron de capacité pour 10. Vous voyez le ridicule de la situation.

C'est un peu décevant qu'on en soit effectivement, après autant d'années, à discuter encore de ces choses-là. C'est dommage qu'on en soit encore là dans une société qui se dit ouverte à l'immigration humanitaire, où il semble aussi qu'on ait un discours commun sur l'immigration humanitaire. Le discours n'est pas toujours le même quant au niveau. Nous, on favorise que la proportion de l'immigration humanitaire respecte la proportion d'immigration économique, que l'augmentation du nombre d'immigrants ne soit jamais faite au détriment des réfugiés demandeurs d'asile.

Parlant des demandeurs d'asile, je vais vous faire mon petit laïus. Depuis le décret de 1996, les demandeurs d'asile n'ont accès à aucun service, sauf une première recherche de logement. C'est aussi de l'immigration humanitaire. La majorité des demandeurs d'asile vont demeurer sur le territoire. C'est aberrant qu'on ne leur offre aucun service, qu'on les laisse dans une situation où ils sont complètement démunis, laissés à eux-mêmes, quand on prend en considération que, pour une majorité, on va quand même considérer que leur demande était justifiée, donc qu'ils étaient en situation de détresse et, pour les premiers mois, voire les premières années, qu'ils n'ont reçu aucun service. Nathalie?

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Verreault. En vous rappelant que vous disposez maintenant d'une période de trois minutes pour votre conclusion. Madame Blais.

Mme Blais (Nathalie): C'est très bien, M. le Président. Mme la ministre, M. et Mmes les députés. Je vais vous parler très brièvement d'un programme spécifique qui est mentionné, dans notre mémoire, au point 5, qui concerne le parrainage collectif de réfugiés.

Je suis responsable du programme de parrainage de l'archevêché de Montréal, et malheureusement on avait beaucoup d'espoirs pour ce programme-là, lorsqu'il a été rapatrié dans les années 1997-1998, par le ministre Boisclair. Donc, c'était une compétence fédérale qui a été rapatriée au Québec. Mais depuis très, très peu a été fait avec ce programme. Vous pouvez voir, à la page 9 de notre mémoire, qu'en 2002 on a accueilli, sous ce programme-là, 279 personnes, alors que, dans le reste du Canada, c'est 3 045 personnes. Donc, ça ne représente même pas le dixième du nombre de personnes accueillies dans l'ensemble du Canada, et pourtant, normalement, dans nos autres niveaux d'immigration, on essaie de respecter une proportion qui est plus importante par rapport à notre population générale.

Et c'est bien dommage, parce que ce programme-là aurait eu un bel avenir. Je pense que ce serait un programme formidable pour inciter les gens, dans la population, à apprendre à ouvrir les yeux sur la réalité des réfugiés. L'idée de créer ce programme-là était de permettre à la population de s'impliquer, comme le gouvernement s'implique au niveau des réfugiés qu'on dit publics, là, ici, mais c'était de dire à la population: Nous, on fait notre part, et, vous, qu'est-ce que vous pouvez faire? Malheureusement, la population ne sait pas que ce programme-là existe. Et je pense qu'il serait très bien adapté aux différentes régions du Québec, où il y a des gens qui sont très sensibles à ce qui se passe à l'étranger, mais ils ont l'impression que, dans leur région, ils ne peuvent rien faire. Alors, s'ils savaient que ce programme-là existe, ils pourraient former différents groupes pour pouvoir parrainer à leur tour des réfugiés.

Et en plus, pour le gouvernement, ce programme-là permet l'économie de ce que Karine vient d'expliquer, parce qu'à ce moment-là c'est les personnes dans la population qui vont prendre en charge les besoins des réfugiés lors de leur arrivée, c'est-à-dire les vêtements, la nourriture, et tout ça. Ce n'est pas aux frais du gouvernement, pour la première année, c'est aux frais des parrains. Donc, c'est un programme qui est fort intéressant et je pense qu'il est sous-utilisé. Je vous remercie.

Le Président (M. Cusano): Merci, madame. Votre temps étant écoulé, je cède maintenant la parole à la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, je réitère ce matin d'emblée l'importance d'une commission parlementaire. Je réitère d'emblée l'importance que les choses soient dites comme elles sont dites. Et je veux sincèrement vous remercier de vous être déplacés, mais surtout vous remercier pour la qualité de votre mémoire. J'ai toujours cru que, dans la vie, appeler un chat un chat, c'est toujours bien important. Donc, c'est important qu'on puisse dire clairement ce qui va, mais aussi ce qui ne va pas. Je crois que vous le faites, ce matin, de façon constructive, et vous nous faites prendre conscience non seulement de l'importance du rôle que nous avons à jouer en matière d'immigration humanitaire, mais vous nous faites prendre conscience effectivement que... et il faut l'admettre, il faut l'admettre, là, qu'autour de table nous sommes malgré tout des néophytes en matière d'immigration. Il faut se le dire.

Par contre, je peux vous assurer que ce que je constate, c'est que tous les parlementaires, de chaque côté, depuis que nous avons commencé cette commission, ont démontré beaucoup d'intérêt mais ont démontré une sensibilité par rapport aux enjeux que nous devons rencontrer de plus en plus en matière d'immigration. Puis je pense que des fois il faut se le dire. Il ne faut pas prendre ça négativement, quand nous disons que nous sommes néophytes. Par contre, nous sommes aussi des élus, nous sommes des élus avec des mandats et avec des responsabilités, et nous avons certainement la responsabilité de représenter ceux et celles que nous accueillons. Et vous êtes un organisme qui est bien sûr bien connu, bien implanté, qui avez toujours joué ce rôle de nous sensibiliser mais d'essayer de faire bouger les choses. Et je peux vous assurer que ce que vous nous avez écrit... parce que 20 minutes, c'est très court, c'est trop court, mais ce que nous avez écrit ne tombe pas dans l'oreille de sourdes et d'un sourd, ce matin.

Le Président (M. Cusano): ...Mme la ministre.

Mme Courchesne: M. le Président, je vous oublie! Mais c'est parce que je reconnais en vous votre rôle de neutralité.

Le Président (M. Cusano): Ah bon!

Mme Courchesne: Donc, vous dire que c'est important de dire qu'on a peut-être tendance à... Et je crois qu'on a bien compris que les besoins des réfugiés et des autres immigrants n'étaient pas nécessairement les mêmes, et on l'a partagé souvent. Mais, en même temps, vous avez l'avantage d'être beaucoup plus pointus et beaucoup plus précis dans vos remarques et de nous dire que, dans le plan d'action qui s'en vient, effectivement il faut aborder la question des réfugiés sous un angle plus ciblé.

Parce que ce que vous relatez, je ne le conteste pas, d'aucune façon; non seulement je ne le conteste pas, je m'y associe. Je voudrais vous dire que le parrainage collectif, vous avez raison, on ne connaît pas, on n'est pas sensibilisé, comme population. Et, comme gouvernement, on a des choses à faire, et je vous assure qu'il y aura des correctifs qui seront apportés à cet égard-là. Dans les services sociaux, dans les services en région, dans les organismes, vous avez raison, il n'y a pas de formation précise pour nos employés, pour notre personnel pour aborder ces questions-là sous l'angle de la détresse, sous l'angle plus psychologique.

n (10 heures) n

Moi, je vous dirais que, par rapport à ce que vous nous soumettez, je vais aborder quand même... parce que je veux vous écouter, donc je ne veux pas que parler, mais vous abordez la question des exceptions. Quand on devient ministre de ce ministère, effectivement on a toujours pensé que la discrétion d'un ministre devrait être employée sur une base plus discrétionnaire, plus exceptionnelle ? la discrétion, discrétionnaire, je me répète, mais plus exceptionnelle. Vous, vous dites, dans votre mémoire, à la page 10, vous dites: Peut-être que c'est une notion qui est mal comprise puis peut-être que vous devriez l'élargir. Mais le problème dans ça ? puis on le vit en ce moment puis je ne parlerai pas de cas particuliers ? mais c'est toujours la réaction d'avoir peur de créer un précédent qui va devenir inéquitable. Parce que j'imagine que vous conviendrez avec moi que ça prend des règles. On ne peut pas amnistier tout le monde, on ne peut pas accueillir tout le monde, on ne peut pas recevoir tout le monde. Il y a des règles qui doivent être faites.

Comment vous voyez ça, vous, cette capacité? Est-ce que ce sont les règles de base qui ne sont pas adéquates? Est-ce que ça veut dire... Parce que je comprends qu'il faut ouvrir davantage, mais comment on arrive à ce fil ténu de différencier ce qui devrait être un réfugié, ce qui devrait être accepté ou pas? Puis, en passant, sur les demandeurs d'asile...

Le Président (M. Cusano): Mme Verreault. On me dit que c'est Mme Verreault qui veut intervenir.

Mme Verreault (Karine): Bien, je peux commencer. Dans le cas du discrétionnaire, je vais vous donner un exemple qui est arrivé il y a quelques mois. Ça fait 10 mois qu'on travaille sur ce dossier-là. Un enfant mineur en Colombie, dont les parents sont tuteurs légaux, sont ici, les parents légaux ? les parents biologiques l'ont abandonné là-bas ? puis qui, sous prétexte de ne pas avoir de papiers d'adoption ? parce que ce n'est pas quelque chose qui se fait en Colombie ? n'est pas venu avec les parents. Il est resté là-bas, poursuivi par les paramilitaires, et on le faisait... Parce qu'on a dû participer à aider à le déplacer pendant 10 mois, à le déplacer d'une ville à une autre.

Dans un cas comme ça, des discrétionnaires, où dans le fond on n'a pas des documents officiels mais où on sait... où on a une lettre des parents là-bas qui disent: Oui, je lui donne le tutorat légal, des discrétionnaires peuvent être utilisés. Évidemment, on ne s'attend pas, et on ne voudrait pas non plus que ce soit utilisé à tout vent, et ça, c'est effectivement le fait d'un discrétionnaire, c'est que ça doit être utilisé aussi judicieusement. Mais il y a de nombreux cas de réunification où le discrétionnaire pourrait être utilisé, où les gens sont en situation de détresse, où les gens, sous prétexte... parce qu'ils n'ont pas reçu un papier, un visa est échu, des demandes médicales... Il y a plein de dossiers comme ça, on en a.

Mme Courchesne: Ce que je comprends, c'est que vous rencontrez des obstacles au niveau des personnes avec qui vous transigez, hein?

Mme Verreault (Karine): Bien, ce n'est pas tant au niveau des personnes, c'est dans la mesure où la législation fait en sorte que ce n'est pas possible, si, par exemple, tu n'as pas tel document ou tel papier. Tout ce qui peut...

Mme Courchesne: C'est difficile de contourner.

Mme Verreault (Karine): C'est ça. Donc, dans le fond on est pris, mais, je veux dire, les fonctionnaires sont pris avec les mêmes choses que nous. Ils nous disent: Oui, je comprends, je suis d'accord, ça n'a pas de sens. Tout ce qui peut faire bouger ça, c'est un discrétionnaire ou, dans le cas du fédéral, un permis de ministre qui dit: Écoute, regarde, on le sort de là. Mais c'est très complexe, c'est très dur à obtenir.

Mme Courchesne: Donc, ce que vous dites, c'est qu'au fond ces aspects législatifs ou de règles de procédure devraient être revus. Au fond, ce que vous dites, c'est qu'il y a des situations... C'est là le véritable sens du mot «humanitaire».

Mme Verreault (Karine): Oui. Par exemple, il y a des vérifications familiales. La considération canadienne d'une entité familiale, d'une unité familiale n'est pas la même que dans certains autres pays. Alors, notre vision de la réunification familiale, c'est une famille nucléaire, alors que, dans le cas de conflits armés, par exemple encore la Colombie, la famille nucléaire, ce n'est pas celle nécessairement la seule qui est en danger. Parce que, une fois que tu as quitté le pays, on s'en prend à tes frères, à tes soeurs, à tes parents. Ça peut aller jusqu'à des neveux. C'est ça, la famille. Et c'est ça, la famille qui est en danger. Puis on n'a aucune possibilité pour ça. Les seules possibilités qu'il y aurait, c'est le parrainage, mais, comme les gens sur l'aide sociale ne peuvent plus parrainer, bien là on est comme pris. Vous comprenez?

Mme Courchesne: Oui. Ça, c'est...

Mme Verreault (Karine): On est comme pris dans un cercle vicieux où on s'enfonce et où ce n'est pas un, deux, trois, mais c'est des dizaines et des centaines de cas comme ça.

Mme Courchesne: J'apprécie ça. Le temps passe. Je voudrais qu'on parle des demandeurs d'asile, parce que vous avez dit... Puis, moi, je vous avoue que c'est la chose qui me renverse le plus depuis que j'occupe cette fonction-là. Vous savez, les demandeurs d'asile, c'est quand même une responsabilité fédérale. Ils arrivent ici, ils demandent leur statut, les délais sont incroyables. Je compte sur vous et sur nous pour qu'on règle cette question-là. Il faut continuer à mettre énormément de pression sur le fédéral, parce que là il faut bien se rendre compte que, quand ils arrivent chez nous, nous les prenons quand même en charge. Je ne comprends pas. De la façon que vous dites, vous avez raison, ils sont beaucoup laissés à eux-mêmes. Mais il n'en demeure pas moins qu'au niveau des coûts sociaux on les prend quand même en charge, et ça, c'est de l'argent de l'Accord Canada-Québec, indirectement... Non, c'est de l'argent que le Québec assume, mais c'est de l'argent de moins. C'est 88 millions par année que le Québec met, à peu près, dans tous les coûts confondus, en plus de l'accord.

Mais ce que je veux juste vous dire, c'est que je pense qu'effectivement vous avez raison de dire que cette façon de faire doit être revue et corrigée, parce que ce que je trouve épouvantable, c'est qu'après trois ans d'une situation de demandeurs d'asile là ils sont refusés à titre de réfugiés. Puis là on leur dit, après trois ans qu'ils ont vécu ici: Vous retournez chez vous. Et c'est là que prend toute l'ampleur des délais, toute l'ampleur de la détresse des délais.

Avez-vous d'autres solutions que de faire... Je comprends que faire pression sur le fédéral, c'en est une, là, mais ma compréhension, c'est: Bien, moi, j'essaie depuis 10 mois, là, puis je n'en ai aucun, résultat. Bien sûr, il y a eu beaucoup de changements au gouvernement fédéral, mais je ne sens pas, là, je ne sens pas cette volonté-là d'améliorer la situation. Qu'est-ce qu'on peut faire?

Mme Augenfeld (Rivka): Mme la Présidente...

Le Président (M. Cusano): Mme Augenfeld, brièvement, s'il vous plaît.

Mme Augenfeld (Rivka): Pardon?

Le Président (M. Cusano): Brièvement, parce que le temps court.

Mme Augenfeld (Rivka): Oui, oui, oui. Écoutez, la Table de concertation, comme table, et beaucoup d'organismes individuellement sont membres du Conseil canadien pour les réfugiés, et ce conseil travaille depuis qu'il se connaît ? disons, plus que 25 ans ? sur ces questions. Récemment, à chaque occasion... et même on force les occasions de parler au fédéral en ce qui concerne la question des demandeurs d'asile et les besoins, et aussi on est les premiers à dire: Oui, il faut que ce soit efficace, mais pas au détriment de la justice.

Il y a quelques années, le Québec a émis... le ministère a émis une prise de position à laquelle on a adhéré pour dire: Une balance entre, tu sais, efficacité et justice... On continue de travailler auprès du fédéral. Écoutez, juste ça, ça peut prendre toute une journée, mais pour vous dire que, oui, c'est une responsabilité fédérale, mais les gens sont sur le territoire, et, si on ne fait pas ce qu'il faut pour les personnes quand elles arrivent, comme a dit Karine ? parce qu'une grande partie vont rester, une partie importante sont des réfugiés ou des personnes victimes de différentes sortes d'oppression ? si on ne les prend pas au début, le coût initial peut être plus positif, parce que après, si on ne le fait pas, le rapport de Jean Renaud qui a été commandité par le ministère démontre que, si les gens ne peuvent pas s'établir comme il faut, c'est parce que la première partie de leur séjour ici n'a pas marché. Alors, c'est un investissement positif et pour les personnes et pour la société, Mme la ministre, de donner plus de services.

Oui, le gouvernement offre certains services très limités, mais les organismes qui voient tout ce monde-là jour après jour pleurant dans nos bureaux... Nous, tout ce qu'on fait pour cette clientèle, c'est du bénévolat, sauf, comme a dit Karine Verreault, la recherche de logements, et ça, c'est presque impossible, la recherche de logements, parce qu'il n'y en a pas. Alors, quand il n'y a pas de logement pour les personnes ici, imaginez, les immigrants, c'est difficile, et les demandeurs d'asile, c'est très, très difficile. Alors, on fait ce qu'on peut, mais on croit que l'État aussi à un rôle, parce que, si on permet aux gens... Et, moi, je crois que, si c'était au Québec de dire qui entre...

Le Président (M. Cusano): S'il vous plaît, madame.

Mme Augenfeld (Rivka): On n'enlèvera pas notre signature de la Convention de Genève. Alors, le Québec aussi, je pense, se voit dans la communauté internationale et se voit comme un endroit qui respecte tous les droits internationaux. Alors, comment faire mieux? On peut s'asseoir avec vous, Mme la ministre, avec n'importe qui pour voir comment faire mieux, mais il faut commencer avec l'idée que c'est des personnes qui ont des droits et à qui on a une obligation.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Papineau... de Prévost.

Mme Papineau: ...trompé. Alors, merci, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cusano): C'est bien. Excusez-moi, madame. Mme la députée de Prévost.

Mme Papineau: Ça va.

Une voix: Tu n'as pas le physique du député de Papineau, toi.

Mme Papineau: Bonjour, monsieur. Bonjour, mesdames. Ça me fait plaisir de vous rencontrer ce matin. Je vais rester sur l'aspect des réfugiés. Hier, on a reçu la visite de la Table régionale de concertation à l'immigration du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui nous disait essentiellement que c'était plus facile ? et je reprends un peu vos mots ? pour un réfugié parce qu'il a tout perdu au départ et il est prêt à recommencer à zéro. Et ils avaient, dans cette région, de beaux succès, de très beaux succès à l'intégration des réfugiés. Par contre, on a plusieurs mémoires qui tentent de nous inciter à privilégier l'immigration économique. Quelle serait selon vous la ? comment je vais dire ça, donc? ? ...

Une voix: L'équilibre?

n (10 h 10) n

Mme Papineau: ...l'équilibre, voilà, l'équilibre à faire entre l'immigration de réfugiés et l'immigration indépendante, ce qu'ils appellent les immigrants indépendants?

Le Président (M. Cusano): M. Reichhold.

M. Reichhold (Stephan): Disons, c'est un peu un faux débat, parce que le contexte canadien fait en sorte que le Québec n'a pas beaucoup le choix. Je veux dire, le Québec a une obligation de prendre un certain pourcentage de l'immigration humanitaire canadienne, hein, l'équivalent de sa population, donc à peu près 24 %. Donc on ne peut pas y toucher, à ce chiffre, on ne peut pas aller en deçà, sauf si on veut réouvrir l'Accord Canada-Québec. Je pense que personne n'est intéressé à ça. Donc, il faut qu'on les prenne, là. Je veux dire, on n'a pas...

Après, une fois qu'ils sont ici effectivement, là on peut se poser la question: Est-ce que c'est mieux de les envoyer plutôt dans des plus petites localités ou est-ce qu'il vaut mieux qu'ils viennent à Montréal? Bon. Ça, je pense, la base de ça, ça va être au réfugié de... qu'on lui explique bien et qu'on lui demande... Il y a certainement des familles de réfugiés qui privilégient des plus petites villes ou d'être proches de leur communauté. Mais on ne peut pas, je ne pense pas... il n'y a pas une réponse générale à ça. Et toujours ça revient aussi au niveau du réseau de services, parce que ? ce qu'on disait tout à l'heure ? ces gens-là ont besoin de certains services spécifiques qu'il faut assurer. Et donc, oui, je pense qu'il y a une certaine expertise qui a été développée dans la région de Jonquière et dans d'autres régions aussi, mais, moi, de ce que j'en sais, ça reste quand même très, très réduit en fait au niveau de l'offre.

Le Président (M. Cusano): Mme Augenfeld.

Mme Augenfeld (Rivka): Pour compléter ce que dit mon collègue, le problème, c'est que, quand on fait un plan de régionalisation ou quand... on ne peut pas envoyer les gens avant et créer les services et les ressources après. C'est très... ça ne marche pas, parce que souvent, comme j'ai dit, les réfugiés, ils sont arrivés ici, oui, ils ont tout perdu, oui, ils veulent recommencer, mais quelque part ils ont aussi des backgrounds, des professions, des métiers qu'ils voudraient exercer. Ils ont des besoins, comme êtres humains, de bien intégrer leurs enfants, parce que souvent vous allez toujours... les immigrants et les réfugiés surtout: C'est toujours pour mes enfants que je suis venu, n'est-ce pas, c'est ça, pour une vie de paix, pour une vie de sécurité, mais il faut vivre. Et, s'il n'y a pas de services et s'il n'y a pas de travail et s'il n'y a pas de sensibilité... auxquels on pense après, c'est un peu trop tard.

Et on a vu des cas, peut-être, des cas où les gens ont beaucoup aimé la ville où on les a envoyés, mais ils sont partis parce qu'il n'y avait rien pour eux pour vraiment pouvoir s'établir. Parce qu'ils voulaient quand même être avec d'autres personnes de leur communauté, et pas pour trouver des ghettos mais pour vraiment être, tu sais... C'est naturel. Et on a eu des cas où les écoles ne veulent pas prendre les enfants et vraiment répondre à leurs besoins. Les gens disent: Écoutez, là, je ne suis pas venu pour ça, même si j'aime beaucoup cette ville. On ne peut pas envoyer des gens dans une ville simplement parce qu'il y a quelques logements de vides. Ce n'est pas assez, de dire: Ah! on regarde, où y a-t-il des logements, et envoyer les gens juste pour ça, sans voir: Est-ce qu'il y a d'autre chose qui est là pour faire l'accueil comme il faut? Et, comme vous le savez, souvent il y a des logements là où il n'y a pas de travail, alors c'est un cercle vicieux. Mais je pense que...

C'est pour ça qu'on a dit: On veut faire une commission plus large pour que tous les acteurs s'assoient ensemble. C'est vrai que quelqu'un a dit tout à l'heure: L'équité entre les immigrants et les réfugiés et la population. Quand il n'y a pas de place de garderie pour personne, les immigrants sont encore moins capables d'y accéder. Une femme qui n'a pas placé son enfant dès la date de la conception sur la liste d'attente arrive ici, elle a besoin d'aller aux cours de français, mais elle ne peut pas y aller s'il n'y a pas de place pour la garderie. Alors, il y a des besoins spécifiques des immigrants et des réfugiés qui doivent être... qu'il faut regarder de proche et dans tous les domaines, à travers tout le gouvernement, tous les services, tous les ministères, pour que ça, ça devienne un projet de tout le monde. Ça ne peut pas être éternellement un ministère qui essaie de parler aux autres. On voudrait impliquer tout le monde. Et, nous, on est prêts à faire notre part, mais ça prend... On ne peut pas, nous, tout seuls, tu sais, aller faire tout ce travail, ça prend comme un engagement beaucoup plus important.

Le Président (M. Cusano): Merci. Vous pouvez continuer, Mme la députée de Prévost.

Mme Papineau: Merci, M. le Président. Mon point, madame, c'était de dire que les régions sont ouvertes à l'immigration. Bon. On parle de Montréal et de la Capitale-Nationale, mais je dois vous dire qu'il y a des régions qui sont très ouvertes et qui auraient une facilité d'accueillir les immigrants. Et je me demande, si, par exemple, les municipalités, si elles avaient une politique d'accueil des immigrants, comment vous...

Mme Verreault (Karine): Oui. Tout d'abord, le fait qu'un milieu soit ouvert et intéressé... Il faut aussi se questionner sur l'intérêt des milieux. De nombreuses régions sont intéressées parce qu'elles ont des pénuries de main-d'oeuvre ou parce que la population a quitté. Donc, je pense qu'on ne remplace pas nécessairement la population qui a quitté par des immigrants. Ce n'est pas nécessairement une façon de faire. Il y a des régions où c'est le sous-emploi, c'est des régions qui sont en difficulté, les régions ressources par exemple. Alors, on ne remplace pas la population par l'immigration, d'une part.

Pour les réfugiés, effectivement il y a des régions où ça va très bien. La difficulté, c'est quand on ne prend pas en considération le profil des réfugiés qui arrivent, mais plutôt le besoin de la région ou les disponibilités ? comme le disait Rivka ? par exemple locatives. Alors, on n'envoie pas, dans une région, une famille en disant: Elle va être bien là-bas à cause de son profil, à cause du contexte dans lequel elle arrive, à cause de l'expertise de tel ou tel organisme, mais on l'envoie parce que là-bas, en ce moment, ils ont de la place, ils ont un logement et il y aurait justement un peu de place en francisation. La gestion des réfugiés ne devrait pas être faite à notre avis de cette façon-là.

Au niveau des municipalités, s'il y a un intérêt manifeste? Oui. Mais la question derrière ça, c'est pourquoi ils veulent de l'immigration, donc pourquoi tu veux de l'immigration, et ce que tu es prêt à faire pour accueillir les immigrants, et jusqu'où tu es prêt à t'impliquer. Parce que de dire qu'on veut de l'immigration, c'est une chose, mais d'être prêt à s'investir dans cette démarche-là, c'en est une autre aussi.

Mme Augenfeld (Rivka): Et il faut aussi dire... Il faut que je dise ça.

Une voix: J'ai un peu de difficultés à suivre, là.

Mme Augenfeld (Rivka): Il y a des municipalités qui veulent avoir des immigrants, mais juste certaines sortes. Et, sans nommer la municipalité, je dois vous dire que, il y a quelques années, il y avait une municipalité qui avait un fort besoin de main-d'oeuvre qui a appelé un organisme pour lui référer des gens, mais ils disent: Envoyez-nous pas des Noirs. Alors, qu'est-ce que vous faites avec ça exactement? Est-ce qu'on fait un scandale public? Est-ce qu'on l'avale? Est-ce qu'on parle? À qui? Voyez-vous? Est-ce qu'on accuse publiquement toute la municipalité d'être raciste? Mais, nous, on y réfléchit, et comment on va réagir à des projets de cette municipalité va dépendre un peu des vraies motivations.

Mme Papineau: Vas-y donc.

Le Président (M. Cusano): Oui, madame...

Mme Papineau: Je vais laisser mon collègue qui veut intervenir...

Le Président (M. Cusano): Vous disposez d'une minute pour votre...

M. Dion: Une minute?

Le Président (M. Cusano): ...une minute pour votre question et réponse.

M. Dion: Merci, M. le Président. Je vais la prendre rapidement. Je suis un petit peu déconcerté par vos projets, même si je trouve très intéressants votre rapport et tout ce que vous avez lu. Mais je suis un peu déconcerté. Je trouve que vous noircissez beaucoup la réalité régionale. Excusez-moi si je vous le dis, là, mais c'est pour avoir votre réaction. Comme si, à Montréal, on attendait les immigrés les bras ouverts, et qu'on avait des emplois pour tout le monde, et des logements pour tout le monde, et de la francisation pour tout le monde dans l'immédiat, et que, dans les régions, toutes, c'était plein de difficultés. Il me semble qu'il y a une distorsion. En tout cas, dans ma perception, il y a une distorsion, et j'aimerais que vous la corrigiez.

Le Président (M. Cusano): Mme Verreault.

Mme Verreault (Karine): Ce n'est pas tout à fait... Je pense que ce n'est pas tout à fait le propos qu'on tient. Mais une chose qui est présente à Montréal ? et de toute façon mon discours n'est pas du tout montréalais, parce que je dirige un organisme d'accueil à Québec, donc j'ai un discours très Capitale-Nationale mais pas à tout prix ? une des choses, par exemple, que n'a pas la Capitale-Nationale comme Montréal, c'est des communautés.

Au niveau de l'accueil de l'établissement, quand les groupes communautaires habituellement ? et c'est la même chose en région, les groupes sont débordés ? quand les groupes communautaires ne sont plus en mesure, par exemple, d'offrir des services, tout ce qui reste habituellement aux personnes réfugiées et immigrantes, c'est le trottoir, il n'y a plus rien au bout de la ligne, alors qu'à Montréal il y a au moins une autre chance, qui peut être la communauté, si tu as des contacts, si tu connais des gens. Et ça ne devrait pas être normalement la communauté ni les associations qui s'occupent des compatriotes. C'est un service qui doit être offert, parce que c'est comme ça qu'on le vend aussi à l'étranger, en disant qu'on a une structure d'accueil. Une structure d'accueil, ce n'est pas ton voisin qui s'occupe de toi quand tu as un besoin particulier.

Je pense qu'on ne noircit pas les régions, mais on est très réalistes. À peu près, sinon la majorité, sinon tous les organismes d'accueil dans les régions sont membres de la table. On les représente aussi. Ils sont là, Joliette, Granby et Trois-Rivières, les Laurentides, tout le monde... Hein?

Une voix: Saint-Jérôme.

Mme Verreault (Karine): Saint-Jérôme, c'est dans les Laurentides.

Mme Papineau: Si vous saviez comment on les aime, chez nous, nos immigrants, hein!

Une voix: Ah! nous aussi, hein!

Mme Verreault (Karine): On les aime, nous aussi.

Mme Papineau: Je vous le dis. On les choie, à part ça.

Mme Verreault (Karine): Et les régions sont très présentes au niveau de la table, très, très présentes, très actives, et veulent vraiment justement travailler sur le développement de l'immigration dans leur région, mais pas à tout prix. Parce que, quand quotidiennement on est avec des personnes réfugiées et immigrantes qui sont en détresse, qui sont en situation de besoin, qui sont complètement découragées parce que ce qu'ils essaient de se construire comme vie, ça ne fonctionne pas, bien, nous, on est face à ça, et entre, pour moi, une volonté démographique puis le bien-être d'individus ? parce que ce ne sont pas des travailleurs, ce sont des individus, des familles ? pour moi, le bien-être des personnes passe avant.

Le Président (M. Cusano): Merci, madame. Je cède maintenant la parole à la députée de Chambly.

n (10 h 20) n

Mme Legault: Merci, M. le Président. Bienvenue. Quand j'ai lu votre mémoire, j'ai été interpellée parce que, dans vos recommandations, à trois endroits, là, vous recommandez... à trois moments vous recommandez qu'il y ait des campagnes de sensibilisation qui soient mises en place et puis qui soient destinées au public, aux employeurs, etc. Et puis, moi, je pense qu'à ce moment-là on est devant un enjeu, là, qui comme société nous amène à réfléchir sur nos valeurs fondamentales d'accueil et d'humanité, et tout ça. Et puis je me demande qu'est-ce que vous aviez comme pistes relativement, là... peut-être pistes plus concrètes d'action vis-à-vis, là, ces campagnes, et quelle en serait la teneur, et comment on pourrait s'y prendre, au fond, là.

Mme Augenfeld (Rivka): Oui. Mme la députée, je pense que Nathalie Blais pourrait répondre.

Mme Blais (Nathalie): ...question, parce que, par rapport au parrainage collectif, ça fait des années que c'est une demande que l'on a. Parce que, si le programme n'est pas connu, comment les régions... Justement, dans les régions, c'est un des programmes qui pourraient être très bien appliqués, parce que ça pourrait recréer ce que les gens... Comme Karine disait, à Montréal, si les services sociaux... s'il y a des carences, les gens vont se tourner vers leur communauté. Mais, dans les régions où est-ce qu'il n'y a pas cette présence-là, bien il faudrait qu'il y ait des gens de la société d'accueil qui fassent ce rôle-là, d'être un peu comme les membres de la communauté vers qui les gens vont se tourner, que ce soit un voisin qui ait pris part au parrainage de la personne qui est venue dans la ville...

Alors, moi, je pense que, si on veut bonifier l'accueil des réfugiés, ça pourrait être un formidable moyen de le faire, parce que ça permettrait non seulement aux gens de rester en région... Parce qu'il ne faut pas penser, parce que, nous, on veut les envoyer, que ça va fonctionner sur une période à long terme. Si les gens, après deux, trois ans, ils sentent qu'ils n'ont pas réussi à créer un réseau d'amis, qu'ils se sentent très isolés, ils vont chercher ailleurs. On ne peut pas forcer les gens à rester. Alors, même si on met beaucoup d'efforts pour la première année, on ne pourra pas maintenir les gens là s'ils n'arrivent pas à créer un réseau de vie normal.

Donc, le parrainage sert justement à démarrer ce réseau social là, parce que après ça ne veut pas dire que, si un groupe, par exemple, de trois... Bien, en ce moment, c'est cinq personnes. Le ministère, depuis fort longtemps, parle de changer la réglementation pour essayer de réduire le nombre, parce que c'est très difficile d'arriver à maintenir cinq personnes. Si on arrivait à avoir, par exemple, un groupe de trois personnes qui parraineraient, ce seraient ces personnes-là qui en premier lieu soutiendraient les gens dans leur milieu, les aideraient à se diriger vers les services sociaux appropriés, vers le réseau de santé. Donc, si on pouvait faire cet arrimage-là...

Et, pour ça, bien il faut que le programme soit connu, il faut qu'on arrive à sensibiliser, que ce soient des syndicats, que ce soient des commissions scolaires, des municipalités. Bon. En fait, on peut penser à n'importe... Ça peut être des Chevaliers de Colomb, ça peut être n'importe quel groupe, dans une ville, qui serait prêt à prendre en charge les gens. Mais encore faut-il que ce soit connu, et le seul organisme qui peut faire ça, c'est le gouvernement, de faire un programme pour publiciser... Alors, je pense que ça, c'est une piste de solution qui est simple et qui répondrait à plusieurs besoins que l'on a mutuellement pour aider les réfugiés à s'installer en région et à Montréal.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Je veux poursuivre sur cette lancée-là. Ça m'intéresse beaucoup, parce qu'au fond actuellement on va chercher à peu près 1 800, 2 000 réfugiés sélectionnés à l'étranger. Ce que vous dites, c'est que, si on donnait plus d'importance à ce programme, on pourrait peut-être monter à 3 000. Ce que vous dites aussi, c'est, si je comprends bien: Puis, si on dirige... Vous comprenez ce que je veux dire, entre diriger... Mais, si on encourage le parrainage collectif, peut-être que ça peut être une façon d'aller plus en profondeur dans les régions. Au fond, c'est un peu ça que vous dites. Si on avait un parrainage collectif mieux articulé, mieux structuré, mieux connu, on pourrait peut-être en attirer 1 000 de plus puis là on pourrait peut-être faire la promotion des régions du Québec, c'est-à-dire faire connaître les régions du Québec et intéresser, quand on va sélectionner à l'étranger les réfugiés, les intéresser à aller davantage vers les régions. Ça peut même être du parrainage d'entreprise. Est-ce que vous allez... Est-ce que c'est réaliste, de penser à du parrainage d'entreprise au-delà du parrainage collectif qui est la famille ou je ne sais pas quoi?

M. Reichhold (Stephan): La caisse populaire.

Une voix: Oui.

Mme Courchesne: Pardon?

M. Reichhold (Stephan): La caisse populaire. Je veux dire, il n'y a rien qui empêche...

Mme Courchesne: Tout à fait. Je trouve qu'il y a là des pistes très, très, très intéressantes.

Mme Augenfeld (Rivka): À condition, à condition qu'on fasse le soutien nécessaire, parce que là aussi on ne peut pas trop s'imposer. Et là je vais vous parler comme une des personnes qui étaient là, à la fondation, à la création de cette Table de concertation qui est née au moment de l'arrivée des boat people du Sud-Est asiatique. Et je pense qu'on a peut-être une ou deux personnes, ici, assez âgées pour s'en rappeler. C'était un moment... disons que c'était un moment de souffrance pour les réfugiés là-bas, mais c'était un moment glorieux, je pense, pour nous, comme société, ici, au Québec, parce qu'on était des exemples vraiment incroyables de toute une population qui a ouvert son coeur à ces gens-là, mais parce qu'il y a eu publicité. Il y avait une publicité positive. C'étaient des gens qu'on nous a présentés en détresse, de l'autre bout du monde. Ils avaient besoin d'aide, mais pas juste n'importe... la nôtre. Et le défi du gouvernement à la population, et fédéral et du Québec, était: Aidez-nous à aider plus de personnes. Nous, au gouvernement, on s'engage à prendre x et on lance le défi à vous, ce qu'on appelle en anglais «additionality». Ça veut dire ? et c'était ça, le mot: Vous pouvez augmenter le nombre. Ils ont même dit: Deux pour un. Vous faites un autre parrainage, et, nous, on en prend encore un autre. C'était un moment... Et tout le monde s'est lancé là-dedans. L'archevêché de Montréal a été un des pionniers là-dedans. On a lancé le mot d'ordre à toutes les paroisses du Québec, mais on en parlait.

Un autre moment a été le moment des Kosovars. On en parlait. Mais ce que je veux dire: On n'a pas... Vous avez dit, Mme la ministre: On est des néophytes. Oui, ce gouvernement vient juste d'être élu, mais vous avez, dans vos rangs, des personnes avec beaucoup d'expérience. Il y a aussi l'expérience qui s'est accumulée au ministère, mais il y a des gens, des députés qui ont de l'expérience. On peut faire des choses. Exemple, la ville de Winnipeg ? je veux juste finir là-dessus ? la ville de Winnipeg a décidé de s'engager en créant un fonds de soutien. Ils ont mis de côté 250 000 $ pour soutenir au besoin les parrainages collectifs. Alors, ça permet à un organisme d'aller chercher plus de parrainage en sachant que, si jamais il y a un problème, il y a ce fonds. Mais aussi on ne pourra pas, Mme la ministre, aller beaucoup plus loin si on ne réduit pas les attentes. On ne peut pas mobiliser la population si on ne réduit pas les délais du côté fédéral. Dire à un groupe: Mobilisez-vous, mais votre famille arrive dans quatre, cinq ans, là, ça ne marche pas. Alors, travaillons ensemble pour réduire les délais.

Mme Courchesne: Je veux juste vous dire...

Le Président (M. Cusano): Une très courte question, madame.

Mme Courchesne: ...que, si nous sommes néophytes, nous ne sommes pas dépourvus de jugement et de sensibilité.

Le Président (M. Cusano): Merci. C'était très court, ça. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Alors, ça me fait plaisir de prendre la parole. Et puis j'ai écouté attentivement vos propos et je suis un petit peu ambiguë par rapport à votre prestation. Là, je ne sais pas où je dois me situer. D'une part, j'avais comme l'impression, à un certain moment donné, que c'était difficile de voir différemment les choses, qu'il fallait les garder un petit peu... qu'il n'y avait pas de possibilité de changement, ou en tout cas on ne croit pas qu'il y aurait des possibilités de changement, et j'avais l'impression, moi aussi... Puis après ça je vous ai écouté puis je me suis dit: Non, ils ont une ouverture. Je pense qu'ils sont en train de nous dire que ce qu'il manque, dans le fond, dans la population, c'est un peu plus d'information par rapport à ce qui se passe dans le monde. Et là j'ai dit: Oui, c'est ça. Pour eux, en fait, le changement doit d'abord et avant tout passer par l'information si on veut arriver à des changements de comportement. Et vous avez l'impression de dire: Bien là vous allez trop vite, parce que vous avez bien beau avoir un beau plan d'action, si la population n'est pas suffisamment informée, il n'y aura pas de changement. C'est un peu le message que vous essayez de nous faire passer. C'est ça?

Mme Augenfeld (Rivka): Ça prend les deux.

Mme Vermette: Bon. Alors, j'ai compris votre message. Maintenant, je vais revenir à mon autre partie où je me suis dit: En fait, voilà, la consultation que nous avons ici, aujourd'hui, favorise une plus grande compréhension de la problématique, et, aujourd'hui, c'est télévisé. Donc, il y a plus de gens qui participent ou qui pourraient avoir en tout cas un intérêt davantage.

Moi, je vais vous dire honnêtement, quand j'ai commencé ici, sur la commission, je savais qu'il y avait de l'immigration dans mon comté. J'en ai, je fais attention à ces gens-là, mais là j'ai une dimension complètement différente du fait d'avoir participé à cette commission-là, et je suis sûre que je n'aurai plus jamais la même vision, puis, quand je vais retourner chez moi, je vais complètement différemment travailler avec ces gens-là et avec les organismes communautaires de mon comté. Ça, c'est clair. Et je vais faire de la propagande par rapport à ça aussi. Voyez-vous? Donc, on a atteint un objectif par cette commission-là. En tout cas, je pense que déjà là c'est un bon pas dans une bonne direction. Et là, écoutez, je suis de l'opposition, puis dire ça, c'est beaucoup, mais je pense que c'est collectivement que nous allons tous être gagnants. Et on cherche des solutions collectives, en fin de compte. Alors, moi, je veux arriver...

n (10 h 30) n

Actuellement, c'est parce que ce que j'ai compris de tout l'ensemble... Écoutez, ça fait quelques jours qu'on est assis ici, à cette table, et tout ce que j'ai compris, au niveau autant que ce soit des grandes villes, que ce soit des régions, c'est qu'ils ne cherchent pas du «cheap labor». Ce n'est pas ce que j'ai compris. Ce que j'ai compris, c'est qu'il y a des sociétés d'accueil qui sont prêtes à faire du parrainage, elles sont prêtes à faire du parrainage civique, elles sont prêtes à intégrer les gens en emploi, elles sont prêtes en fait... et que ce soit de... un peu partout, ce qu'on a entendu dire, mais, en fin de compte, oui, ils ont besoin de support, ils ont besoin de budget, ils ont besoin de tout ça.

Mais il semblait qu'ils cherchaient un leader. Et, moi, je vous pose la question: Qui devrait assumer le leadership dans une telle démarche, que ce soit au niveau de la grande ville de Montréal, que ce soit au niveau de la Capitale ou dans les régions? Comment doit-on entreprendre, en fin de compte, cette problématique-là et comment, si on veut, au niveau régional, faire en sorte qu'il y ait un équilibre finalement de ces gens-là, au niveau de l'intégration citoyenne au Québec, comment on arrive à faire ça et qui doit assumer le leadership, puis quels sont les outils qu'on doit se donner pour arriver à ça? Parce que c'est plus qu'une table de concertation, à mon avis. Donc, c'est ce que je vous pose comme question.

M. Reichhold (Stephan): Très, très rapidement. Je pense qu'on adhère tout à fait à vos propos et je pense que ça illustre bien en fait ce qu'on essaie de dire. Le message, c'est que ce qui se passe ici à un très petit niveau ? faites votre expérience ? en fait à très petite échelle, nous, ce qu'on propose, c'est de faire la même chose, exactement le même exercice qu'on est en train de faire aujourd'hui, mais à grande échelle au Québec, et avec les résultats que vous dites, positifs, là, je veux dire, ça ne peut qu'être positif.

Mme Vermette: Donc, vous seriez pour qu'on aille faire des commissions un peu partout, à l'ensemble du Québec?

M. Reichhold (Stephan): Il faudrait discuter de la forme, oui. Et ce qu'on demande, c'est... et surtout que, bon, je pense...

Mme Vermette: Mais je comprends, pour sensibiliser les gens. Mais, moi, ce que je vous ai dit tantôt, ce que j'ai compris, c'est qu'il y a beaucoup de gens qui sont sensibilisés. En tout cas, j'ai compris qu'il y avait beaucoup, beaucoup de gens, et, surtout dans les différentes régions, il y a des villes qui ont pris toutes sortes d'initiatives avec des groupes communautaires, avec des villes, avec... Bon. Écoutez, on a entendu toutes les formes. Donc, c'est déjà fait, il y a une sensibilité. Il y a le besoin de support, on a besoin... Mais, pour arriver à faire tout ça, pour avoir un objectif puis arriver à des résultats, il faut un leader quelque part, il faut que quelqu'un prenne l'initiative en quelque part pour dire: Bien là on coordonne l'ensemble des actions pour que ça aille dans un sens. Et, moi, ma question, et je la répète, à savoir: Qui doit assumer, en fin de compte, ce leadership-là? Et comment doit-on... Quels sont les outils qu'on doit développer pour arriver à atteindre des objectifs intéressants dans un sens et dans l'autre?

Le Président (M. Cusano): Mme Augenfeld.

Mme Augenfeld (Rivka): Je pense que, si on commence avec un leadership du gouvernement... Et, si j'ose interpréter ce que vous dites, c'est parce que, à l'époque, quand l'énoncé de politique a été adopté, ça a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale. C'est devenu un projet auquel tout le monde a adhéré. Même avec un changement de gouvernement, le gouvernement de votre parti, après avoir énoncé cet énoncé, il a continué.

Si ça prend maintenant une certaine unanimité sur un objectif... Ensemble, si on pouvait avoir ? et là je rêve peut-être un peu ? une déclaration commune qui dit: On veut se lancer sur une certaine voie, et le gouvernement et l'opposition, pour le... «for the greater goodness» de tout le monde, on pourrait embarquer aussi, mais aussi avec... Ça prend toujours des ressources parce que, tu sais, le bénévolat, il y a des limites. Mais, avec un leadership du gouvernement, on peut embarquer d'autres facteurs de la société, mais que ce ne soit pas juste un projet du MRCI. Le MRCI peut, à l'intérieur du gouvernement, faire du leadership, vous étant de l'autre côté, mais il faut que d'autres ministres embarquent, il faut que ce soit vu comme un projet de tout le monde. Ensuite, on pourrait voir, en s'assoyant ensemble, qui fait quoi exactement. Mais ça prend un leadership, comme il faut avoir un leadership en ce qui concerne...

Depuis le 11 septembre, le climat a changé, vous savez? À l'époque, au moment... juste après, tous les leaders ont dit tout ce qu'il fallait dire, que ce soit le côté du gouvernement à l'époque, M. Landry, et l'opposition, tout le monde a dit ce qu'il fallait dire, mais il faut que ça continue parce que les dégâts du 11 septembre continuent, vous savez, et il y a un discours négatif parfois autour de certaines communautés, et ça n'aide pas à l'intégration. Les gens qui arrivent ici, parce que le Québec les a sélectionnés pour leurs compétences, pour leur connaissance du français, pour leur professionnalisme, mais qui font face à des gens qui les voient comme Arabes et musulmans et en plus, disons, douteux, ça ne marche pas. Et, dans le quotidien, nous, on le vit, tout ça, parce qu'on voit nos clients pris avec tout ça. Il y a beaucoup de bonnes choses qui ont été faites, je ne dis pas... Il y a beaucoup de «success stories». Pour chaque histoire, qu'on peut vous raconter, de détresse, vous allez nous sortir aussi un «success story». C'est mieux comme ça.

Mais le 11 septembre continue de... pas juste... mais ce que ça représente, un discours négatif autour de certaines communautés, un discours... «Operation thread», à Toronto, qui a arrêté, je ne sais pas, 20 et quelques personnes sur des accusations qui se sont avérées complètement pas fondées, ça a eu des dégâts importants. Alors, nous aussi, on le vit ici. Quand les citoyens ne se sentent pas complètement égaux à d'autres citoyens parce qu'ils voient qu'un citoyen canadien peut être maltraité quelque part, si vous êtes d'un certain pays, ça a un impact sur le sens de sécurité que ces citoyens ont ici. Je pense «citoyen» dans le sens légal. Un citoyen canadien, qui est un citoyen, doit se sentir complètement protégé, mais il ne l'est pas. Alors, ne pensez-vous pas que d'autres personnes reçoivent un certain message?

Alors, nous, comme message d'inclusion, de support total... et d'aller vers le gouvernement fédéral pour dire: Certains discours, ça ne marche pas, il faut que ça arrête parce que ça a un impact très négatif sur l'intégration, sur le sentiment d'appartenance des gens. Et faire une campagne de sensibilisation de la population en ce qui concerne, tu sais, le droit de l'égalité pour tout le monde.

Le Président (M. Cusano): Brièvement, Mme la députée.

Mme Vermette: Oui. Alors, j'ai vraiment bien compris votre message, mais il semblerait que d'autres gens qui sont venus nous ont dit exactement la même chose que vous, là, dans différentes façons, là, mais on sait très bien... À part de ça, surtout tous ceux qui viennent du Maghreb ont beaucoup plus de difficultés, en fin de compte, que tous les autres. Ça, on est au courant de ça. Mais en fait, indépendamment de cette situation-là, parce qu'on le sait... Bon. Le fédéral, c'est un autre niveau de gouvernement qui a ses conséquences, mais, quant à nous, on a une action concrète à faire. Il y a certains endroits, c'est le CLD; d'autres endroits, c'est le SEMO; d'autres endroits vont nous dire que c'est le CAMO; d'autres endroits vont nous dire que c'est la municipalité. Dans une grande ville, dans la Capitale ou dans les régions, il y a du monde qui doivent assumer, en tout cas en dehors du MRCI, un leadership. Et d'où doit partir ce leadership-là?

Le Président (M. Cusano): Brièvement, s'il vous plaît.

Mme Verreault (Karine): Oui. Je pense qu'il n'y a pas de mesure mur à mur, peu importe que ce soit une municipalité ou une région. Je pense que c'est à chacun des milieux de déterminer qui doit prendre le leadership. Et le leadership, ça ne se prend pas en le soustrayant à d'autres personnes, ça se prend par la concertation et par la discussion. Ce n'est pas parce qu'on décide de devenir un leader qu'on est un leader. Ce n'est pas comme ça qu'on fait du leadership en démocratie. Donc, c'est vraiment en concertation.

Et, au niveau de la sensibilisation, je pense que ce qui est important, c'est effectivement... Il y a beaucoup de gens qui sont passés ici, en consultation, mais, au total, ça va représenter quoi? 100 personnes? Probablement même pas. Il y a, quoi, 7 millions de Québécois. La sensibilisation, c'est auprès de la population qu'il faut la faire. Même si cinq personnes, dans une région, sont convaincues que la région a besoin de l'immigration, si les 250 000, les 600 000, les millions de... la population qui sont là ne sont pas convaincus, on n'arrivera à rien. Et je vais vous sortir la même phrase que je sers toujours à tout le monde: C'est très joli, une chanson d'Yves Duteil, mais ce n'est pas parce qu'on y accole quelques faces d'immigrants qui chantent cette chanson-là que c'est une campagne de sensibilisation.

Le Président (M. Cusano): Je vous remercie beaucoup. Mme Augenfeld, Mme Verreault, Mme Blais, M. Reichhold, au nom des membres de la commission, je vous remercie pour votre présence et pour un échange extrêmement intéressant.

Alors, je vais suspendre pour quelques minutes afin de permettre aux représentants de la Chambre de commerce de Québec de se présenter.

(Suspension de la séance à 10 h 38)

 

(Reprise à 10 h 43)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture reprend ses travaux. J'aimerais vous rappeler que le mandat de la commission est d'étudier le document intitulé La planification des niveaux d'immigration 2005-2007.

Nos prochains invités sont les représentants de la Chambre de commerce de Québec. Alors, pour les fins du Journal des débats, je demanderais à nos invités de bien vouloir s'identifier, s'il vous plaît.

Chambre de commerce de Québec (CCQ)

M. Simard (Patrick): Merci, M. le Président. Alors, je suis Patrick Simard, président de la Chambre de commerce de Québec. Je suis accompagné, à ma gauche, de l'attaché de direction, responsable des communications à la chambre, et plus particulièrement responsable des partenariats à l'international et de l'immigration, Paul-Christian Nolin; et, à ma droite, du vice-président exécutif et directeur général de la Chambre de commerce, M. Alain Kirouac.

Le Président (M. Cusano): Merci. J'aimerais vous rappeler quelques règles de procédure pour la séance qui va suivre. Vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire l'exposé de votre mémoire. Ce sera suivi par un échange entre vous et les membres de la commission pour une durée maximale de 40 minutes. Alors, M. le président, la parole est à vous.

M. Simard (Patrick): Alors, M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, bon matin. Il nous fait plaisir d'être là, puisque c'est avec beaucoup de plaisir, oui, que nous présentons, devant vous, aujourd'hui, nos préoccupations alors que vous entendez différents intervenants vous exposer leur position quant au document de consultation sur la planification des niveaux d'immigration pour 2005 à 2007.

Ça fait maintenant près de 10 ans que la Chambre de commerce de Québec se préoccupe de la question immigrante et multiplie année après année les actions pour sensibiliser les milieux d'affaires à l'immense richesse que nous reconnaissons que constituent les immigrants et les immigrantes qui ont choisi de s'établir à Québec, dans la Capitale. Je sais par ailleurs que c'est une préoccupation partagée aussi tant par le parti au pouvoir que par l'opposition officielle. Il y a donc là au moins unanimité sur les objectifs. C'est rassurant pour nous.

En 1996, la Chambre de commerce de Québec s'est mérité le Prix du rapprochement interculturel pour le milieu des affaires et, il y a plus d'un an, elle recevait une deuxième récompense, puisqu'elle s'est mérité le Prix pour les entreprises et les organismes publics remis dans le cadre des Prix québécois de la citoyenneté en l'année 2002.

Ces actions concrètes entreprises par la chambre en faveur de l'intégration des immigrants, ce sont notamment nos petits-déjeuners de réseautage, où les immigrants et les gens d'affaires fraternisent entre eux. Ce sont nos conférences mensuelles qui visent à augmenter l'employabilité des immigrants et des immigrantes qui arrivent sur le marché du travail. Parce que, vous le verrez, pour nous, l'intégration passe par l'emploi. C'est aussi notre programme de jumeaux pour les affaires qui permet un échange de connaissances et de façons de faire entre un entrepreneur immigrant et quelqu'un du monde des affaires déjà établi dans la région. C'est aussi notre Soirée Un monde à faire, où d'ailleurs, Mme la ministre, vous avez pu avoir l'occasion de voir les actions de la chambre, où nous saluons, à cette occasion, les contributions des entrepreneurs immigrants ainsi que les entreprises qui favorisent l'embauche des travailleurs immigrants. Et c'est enfin aussi, une autre de nos actions, notre programme d'immigration proactive qui vise à combler, par l'immigration, la pénurie de main-d'oeuvre que connaissent certains secteurs de notre économie. C'est d'ailleurs là-dessus que je vais m'attarder au cours des prochains instants, puisque la chambre a reçu confirmation du financement pour la réalisation d'une première phase de notre projet d'immigration proactive, justement.

Vous le savez, il ne se passe guère de semaines sans qu'un article ou une étude ne vienne confirmer qu'il existe actuellement une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée, et les différentes études démographiques qui ont été publiées au cours des dernières années et encore récemment nous démontrent que ce problème ne se réglera pas de lui-même et surtout qu'il ne se réglera pas nécessairement de si tôt.

Cette inadéquation entre les besoins des entreprises et l'offre de la main-d'oeuvre locale a été dénoncée à plusieurs occasions, à plusieurs reprises par les gens d'affaires de la région, soit lors de nos différents forums économiques ou lors des précédentes éditions de la Foire de l'emploi, qui est un grand happening qui fait la démonstration des emplois disponibles pour les mettre justement en réseau avec ceux et celles qui sont à la recherche d'emploi. En moyenne, au cours des quatre dernières années, environ 30 % des emplois offerts à ce happening, qui est la Foire de l'emploi, n'ont pu être comblés. Et la principale raison, c'est parce que certains emplois sont très spécialisés, les employeurs ne réussissent pas à trouver les profils d'employés pour les combler. Et ça constitue, vous l'aurez évidemment compris, un frein à l'économie régionale, une entrave au développement de notre région.

Le programme consiste donc à pallier à cette pénurie de main-d'oeuvre que nous connaissons. Le projet, qui pourrait s'étaler sur une période de trois ans, aurait pour objectif d'accueillir plus de 300 immigrants et leurs familles. Il est important de préciser que ces travailleurs immigrants viendraient combler des emplois ou des occupations reconnus en demande par Emploi-Québec pour la région de la Capitale-Nationale et qu'ils posséderaient ? ça nous apparaît important ? déjà les qualifications nécessaires pour effectuer ces emplois.

La première phase pour laquelle nous avons reçu du financement nous permettra l'identification des secteurs d'activité en pénurie hautement probable à court et à moyen terme et puis, par la suite, d'élaborer un outil de consultation auprès des entreprises que nous aurons préalablement identifiées, permettant de déterminer concrètement les emplois à combler à court et à moyen terme et pour lesquels les entreprises auront exprimé leur volonté de participer à du recrutement à l'étranger. Dans une deuxième phase, nous pourrions élaborer, en concertation avec les partenaires, soit le MRCI, Emploi-Québec, le Bureau de la Capitale-Nationale, un processus de recrutement à l'étranger en lien avec les stratégies de recrutement des entreprises et aussi en tenant compte des différentes contraintes que nous connaissons. Mais ça viendrait vraiment dans une deuxième phase. Voilà des façons de faire qui nous apparaissent concrètes, et c'est par la concrétisation des actions que nous sommes d'avis que nous pourrons réussir les objectifs que nous nous fixons tous de concert.

La chambre est particulièrement sensible au facteur d'accueil et d'intégration qu'elle considère comme étant le facteur clé de la réussite de toute politique d'immigration. Cet élément particulier conditionne non seulement le choix de la terre d'accueil, mais aussi la capacité de la région à retenir ses immigrants. Il semble justement qu'en cette matière il reste encore beaucoup à faire, dans la région de Québec, pour retenir les immigrants qui viennent s'y établir. Les principaux facteurs qui influencent l'intégration demeurent toujours les mêmes: c'est le travail, la famille, mais aussi la réussite de l'intégration du conjoint et des enfants.

n (10 h 50) n

On apprécie particulièrement l'appui de la Direction régionale de la Capitale-Nationale et de l'Est-du-Québec dans les efforts de la chambre pour faciliter l'intégration sociale des immigrants et pour sensibiliser aussi les chefs d'entreprise à la richesse que constituent les immigrants et les minorités culturelles pour la région, et Dieu sait que nous avons encore beaucoup de travail à y faire!

Nous croyons aussi qu'un programme de stages, de stages en entreprise permettrait d'assurer la reconnaissance des acquis et nous permettrait aussi de lever les différents obstacles à l'emploi, notamment par l'entremise d'un accompagnement plus personnalisé du nouvel immigrant, du nouvel arrivant dans son parcours d'intégration économique. Et évidemment nous serions à l'aise, disposés et bien heureux de pouvoir contribuer à un tel engagement ou à un tel programme, particulièrement compte tenu des réseaux que nous avons, des réseaux d'emploi, des réseaux d'entrepreneurs que nous avons développés au fil des ans.

Nous souhaitons que le MRCI, en collaboration avec ses partenaires, trouve des solutions concrètes à la reconnaissance des formations et des expériences professionnelles étrangères afin que celle-ci cesse d'être un frein à l'intégration des immigrants au marché du travail, donc la reconnaissance des expériences et aussi de la formation étrangère.

Enfin, la chambre entend continuer les efforts qu'elle déploie depuis déjà 1996 pour augmenter les capacités de réseautage des nouveaux immigrants, des nouveaux arrivants dans le monde des affaires et publiciser aussi les témoignages d'insertions réussies d'immigrants dans les entreprises de la région. Parce que ça passe aussi par une valorisation des expériences réussies. D'ailleurs, une nouvelle demande a été déposée auprès du MRCI pour que la chambre puisse poursuivre le travail accompli depuis ces dernières huit années. Enfin, on continue de croire que c'est au travail, au coeur des usines, au coeur des entreprises, dans les laboratoires et dans les bureaux de direction des entreprises, que l'immigrant doit se sentir le bienvenu afin de souhaiter par la suite prendre souche avec sa famille en terre de Québec, et on souhaite continuer notre travail pour y parvenir.

Quant à nous, l'intégration de nos arrivants doit se faire par l'emploi et de faire en sorte de mettre à profit l'expertise des gens d'affaires de Québec, l'expertise détenue par la Chambre de commerce de Québec comme partenaire pour permettre cette intégration de nos nouveaux arrivants et s'assurer que ces gens choisissent Québec particulièrement pour s'établir, et tout cela, en fonction d'un principe qui nous apparaît clair, c'est que l'immigration, son intégration passe par l'employabilité, passe par le fait de bien se sentir chez nous, de bien se sentir chez eux. Et c'est par l'emploi qu'on réussit à gagner le coeur de ceux et celles qui veulent venir s'établir et aussi c'est par l'emploi que nous allons réaliser les grands succès de notre région quant aux problèmes de pénurie de main-d'oeuvre, de spécialisation de nos marchés de plus en plus forte, et permettre que ces gens, dont on a fort besoin, puissent trouver une terre d'accueil ici et s'assurer que nous ayons, ensemble, tous les moyens dont nous disposons, en concertation, pour leur permettre de s'établir ici et de bien se sentir tant au niveau social qu'au niveau de leur employabilité, au niveau économique, que l'ensemble des autres préoccupations qui constituent une personne humaine. Voilà l'objet de notre présentation. Je ne suis pas entré dans le détail du mémoire qui va bien au-delà de la simple présentation que je vous fais aujourd'hui.

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, merci. Bienvenue. Je suis heureuse que vous soyez parmi nous ce matin.

Ma collègue en face de moi me faisait remarquer tout à l'heure à quel point la région de Québec était bien représentée à cette commission parlementaire. Moi, je vous dirai que c'est une bonne nouvelle. Je pense que c'est conséquent avec les objectifs que nous partageons, de faire en sorte que la grande région de Québec, celle de la Capitale-Nationale, soit en mesure non seulement d'accueillir plus de nouveaux arrivants en termes de nombre, mais certainement ait tous les moyens requis pour s'assurer du succès de l'intégration et donc augmenter aussi par le fait même le niveau de rétention.

Cela dit, il y a beaucoup de chiffres qui ont circulé au sujet de cette rétention dans la Capitale-Nationale. Les miens m'indiquent que la moyenne retenue est aussi favorable ici qu'elle l'est dans le reste du Québec ou même à Montréal. Je croirais que l'enjeu principal à ce stade-ci, c'est certainement probablement d'augmenter le volume, puisque la rareté de main-d'oeuvre, celle qui est actuelle et celle qui est anticipée, pourrait largement justifier cette augmentation de volume. En fait, c'est la compréhension que j'en ai. Vous me direz si... À la lecture du mémoire, je crois comprendre que vous partagez un peu ce même point de vue.

Ma question est: Vous, qui êtes une chambre de commerce, avez donc plusieurs centaines de membres dans votre organisation, je crois. Est-ce que selon vous les entreprises que vous représentez, les employeurs sont aussi prêts que vous le dites, ou que vous le croyez, ou que vous l'espérez à ouvrir leurs portes à l'embauche de nouveaux arrivants? Est-ce que c'est une position que vous ressentez? Parce que je sais que vous avez des activités auprès de vos employeurs, je suis consciente de ça. Et, si oui, est-ce que... quelles sont les catégories d'entreprises auxquelles il faudrait s'adresser plus directement qui sont peut-être moins sensibilisées ou moins ouvertes pour de bonnes raisons? Quel est le portrait exact ou le plus exact possible de votre région par rapport à cette ouverture qu'auraient les entreprises à l'intégration de nouveaux arrivants?

La Présidente (Mme Hamel): M. Simard.

M. Simard (Patrick): Alors, d'entrée de jeu, Mme la ministre, la Chambre de commerce représente plus de 4 000 membres dans la région de Québec. Elle a été créée en 1809 par des marchands venus s'établir ici. Nous sommes une création d'immigrants, alors d'où notre préoccupation particulière, elle remonte à bien loin. Et nous avons fait plusieurs exercices, plusieurs activités pour justement s'assurer de cette ouverture d'esprit de l'ensemble de notre clientèle qui est le milieu des affaires. Mais, quant à nous, et je vais laisser la parole à mon directeur général, on n'en fera jamais suffisamment, il faut continuer dans le même sens. Parce que, effectivement, on note une pénurie de main-d'oeuvre, mais, une fois qu'on dit cela, il faut quand même passer à travers cette barrière qu'est l'immigration, la peur de l'étranger, la peur de vivre des problèmes culturels au sein d'une entreprise.

Alors, ça nous semble encore être une préoccupation sur laquelle le ministère devra se pencher au cours des prochains mois, puisqu'il y a encore beaucoup de chemin à faire. Et c'est par, justement, des activités de réseautage, de mise en réseau, de stages en entreprise pour justement permettre d'abattre ces barrières, d'abattre ces grands murs que nous réussirons l'intégration, et surtout nous nous permettrons d'avoir cette ouverture que nous recherchons dans nos entreprises particulièrement. Mais, quant aux faits précis, je vais laisser répondre Alain Kirouac.

La Présidente (Mme Hamel): M. Kirouac.

M. Kirouac (Alain): Oui. Mme la ministre, pour répondre à votre question, la région de Québec, on le sait, on y retrouve, sur le plan des entreprises, je dirais, deux types d'entreprises. Il y a des entreprises en émergence, qui sont reliées presque toutes au niveau, et on le sait, de la nouvelle économie, il y a des entreprises de biotech, bon, des technologies de l'information, qui bien souvent sont dirigées par des jeunes qui ont effectivement une vision mondiale de leur entreprise, de leur développement. Et je vous dirai qu'à partir de ce constat-là les entreprises qui oeuvrent dans les secteurs de haute technologie sont évidemment très ouvertes, on y côtoie de façon régulière et constante des gens provenant des milieux d'immigration.

Quand on est par contre dans l'entreprise traditionnelle ou plus traditionnelle, celle qu'on connaît en périphérie, dans la région, par exemple, de Québec?Chaudière-Appalaches, oui, effectivement il y a du travail à faire, il y a un travail de sensibilisation important à faire. Nous nous y consacrons depuis plusieurs années, on l'a mentionné en préambule tout à l'heure. On aimerait vous dire ce matin que le travail est accompli. On aimerait vous dire effectivement que nos entrepreneurs sont tout à fait sensibilisés à cette problématique-là. Mais, dans la vie de tous les jours, on constate malheureusement qu'il y a énormément de travail à faire, pas uniquement au niveau des entrepreneurs, donc propriétaires d'entreprises, mais également aussi des travailleurs qui y oeuvrent. Et ça, évidemment, plus on s'éloigne ? et c'est un constat, ce n'est pas un jugement que je porte ? plus on va s'éloigner du coeur de la ville, de l'université, de ses centres de recherche, plus évidemment on retrouve effectivement un travail constant de sensibilisation à opérer. Mais les gens, compte tenu effectivement qu'ils comprennent très rapidement que l'expansion de leur entreprise passe par la main-d'oeuvre et par une main-d'oeuvre qualifiée, je pense, moi, que cette ouverture-là, cette sensibilisation-là va devenir une nécessité, et il faut continuer à y travailler.

La Présidente (Mme Hamel): Mme la ministre.

n (11 heures) n

Mme Courchesne: L'ensemble des organismes de la région de Québec qui sont venus devant nous ont souligné la difficulté de la concertation du milieu, pour toutes sortes de raisons. Parce que, vous savez, l'immigration ou la réussite de l'intégration, en fait ma croyance, c'est que c'est une responsabilité partagée, qui doit être partagée, et c'est une volonté aussi qui doit être partagée. Est-ce que vous ressentez la même difficulté ? là, je dirais vraiment spécifiquement par rapport à ce dossier de l'immigration ? est-ce que vous ressentez cette même difficulté de concertation? Puis, si oui, à quoi l'attribuez-vous?

La Présidente (Mme Hamel): M. Simard

M. Simard (Patrick): Oui, alors je vais tenter une réponse, puisque ce dossier est fort complexe: la concertation. Et on le retrouve, ce problème de concertation, dans la région, à plusieurs niveaux. L'exercice de ce matin nous permettra d'en témoigner au niveau justement de ces objectifs d'immigration de la région. Il est difficile d'observer une concertation dans ce milieu-là, parce qu'on n'a pas senti, au cours des dernières années, un grand leadership qui s'était pris relativement à ce dossier-là.

Et, là-dessus, nous avons une recommandation à faire au niveau du leadership de ces dossiers immigration. Nous sommes d'avis que le ministère doit prendre le leadership de cette amorce que nous faisons dans la région pour réussir l'intégration. Mais ce leadership, c'est au niveau d'une concertation des actions, donc d'être le point de chute de l'ensemble des actions, de les coordonner, mais de le faire en partenariat avec des leaders sectoriels. Et nous croyons qu'il s'agit là de la meilleure façon de réussir. Chacun des groupes qui se sont présentés devant vous ont des secteurs d'activité privilégiés, dans lesquels ils oeuvrent particulièrement, où ils sont leurs leaders dans leurs propres secteurs.

Quant à nous, nous identifions le secteur de l'employabilité des entreprises comme étant un secteur privilégié pour la Chambre de commerce de Québec. Nous sommes disposés à être leader dans ce secteur d'activité, mais en partenariat avec l'ensemble des autres leaders, particulièrement au niveau social, pour l'intégration, au niveau de l'éducation, de la formation, de l'ensemble des préoccupations de la personne humaine, finalement. Alors, notre position là-dessus: la concertation doit s'établir, parce qu'elle est difficile, parce que personne n'a pris le bâton du pèlerin, et elle doit s'établir par une action concrète du MRCI qui coordonnera l'ensemble des actions des partenaires qui sont leaders dans leurs propres secteurs d'activité.

M. Kirouac (Alain): J'aimerais ajouter un complément...

La Présidente (Mme Hamel): Mme la ministre, 1 min 30 s.

Mme Courchesne: 1 min 30 s? Ah! bien, je vais y aller.

M. Kirouac (Alain): Est-ce que je pourrais apporter un complément, Mme la ministre?

Mme Courchesne: Oui.

La Présidente (Mme Hamel): M. Kirouac.

M. Kirouac (Alain): J'aimerais faire un parallèle avec ce qu'on a connu récemment dans la région de Québec, en termes de développement économique, concernant toutes les organisations de terrain qui avaient comme mandat spécifique le développement économique. Et on a connu un leadership effectivement politique il y a quelques années et qui a dit: On va regarder effectivement, on va dresser le portrait des acteurs du terrain. Et, sur le développement économique, on a créé un organisme qui s'appelle PÔLE Québec?Chaudière-Appalaches, qui a regroupé l'ensemble des acteurs et qui les fait travailler effectivement dans le même sens, avec un intérêt et des objectifs communs. Le leadership est venu du gouvernement. L'organisation a été mise sur pied, mais elle est confiée au milieu maintenant. Donc, c'est un peu le parallèle que je voulais faire avec le développement économique pur.

La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Prévost.

Mme Papineau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Messieurs, bonjour. Dans votre mémoire, vous semblez dire que le premier critère de sélection, quand on sélectionne les immigrants, devrait être la compétence. C'est un peu ce que vous écrivez dans votre mémoire. Comme entrepreneur, si, par exemple, quelqu'un de très compétent arrive chez vous mais qu'il ne comprend pas un mot de français ni de l'anglais, est-ce que l'employeur, lui, va être favorable à embaucher d'abord cet immigrant-là? Quand on pense, quand on parle surtout ? et c'est le sujet de l'heure ? de l'efficacité des entreprises, comment réagirait un employeur à qui on présente, par exemple, un immigrant qui ne parle ni français ni anglais, je parle d'un Roumain, je parle d'un Ukrainien, je parle... et qui est compétent mais qui ne peut pas échanger avec ses compagnons de travail et même son patron? Ne pensez-vous pas, de plus, que ça demanderait énormément de ressources en francisation si on allait dans le sens que vous dites?

La Présidente (Mme Hamel): M. Simard.

M. Simard (Patrick): Oui. Nous sommes d'avis là-dessus que les énergies que nous pourrions y mettre afin de permettre l'intégration, au niveau de la langue, des gens dont on a bien besoin sont beaucoup inférieures aux énergies que nous devrons mettre pour aller justement chercher la qualification de ces gens-là. Nous sommes d'avis que la préoccupation première est la qualification au niveau de l'employabilité, d'aller chercher des leaders dans leurs propres secteurs d'activité. Former quelqu'un dans une compétence particulière d'une industrie est beaucoup plus difficile, beaucoup plus préoccupant que de s'assurer que cette personne puisse communiquer dans un langage qui est la langue de travail. Et Dieu sait que maintenant, dans un contexte de globalisation des marchés, nous avons besoin de gens évidemment qui sont capables de s'exprimer en français, puisqu'ils vivent dans une région qui parle français, mais aussi de s'exprimer dans une autre langue, tel l'anglais, tel ? de plus en plus ? l'espagnol, voire même bientôt le chinois.

Alors, ça nous apparaît fondamental, comme premier critère, d'exercer un choix au niveau de la formation, l'employabilité de ces gens, et par la suite nous allons nous assurer, parce que nous sommes plus ouverts à faire cette formation, que ces gens-là puissent oeuvrer dans la langue française ou la langue anglaise, parce qu'il faut répondre avant tout à un besoin de main-d'oeuvre, et l'intégration par la langue suivra, et ce sera beaucoup moins harassant que de le faire de cette façon-là.

Mme Papineau: Mais vous admettez avec moi qu'il va falloir qu'il y ait une francisation de faite au départ? Et qui devra assumer cette francisation? Est-ce que ce serait l'employeur qui assumerait les frais de franciser justement l'immigrant qui arrive, ou si vous voyez une autre instance qui pourrait le franciser? Moi, je reviens toujours avec... je reviens... le 1 % que l'entreprise avait pour former un employé, par exemple, qui n'existe plus, qui n'existe plus. Alors, est-ce que l'employeur prendrait en charge la francisation de l'immigrant dont il a besoin?

La Présidente (Mme Hamel): M. Kirouac.

M. Kirouac (Alain): Le programme d'immigration proactive dont on vous parlait tout à l'heure, qui va s'établir par phases, là, prévoit et prévoyait effectivement tous ces éléments-là d'intégration du nouvel arrivant. Je suis d'accord avec vous, madame, qu'on ne peut pas prendre quelqu'un, le mettre dans un groupe de travail sans être capable de s'exprimer. Ça ne se fait pas comme ça. Mais ce n'est pas ça qu'on dit, nous. Nous, ce qu'on dit, c'est que l'entreprise a des besoins en termes de main-d'oeuvre. On pense effectivement que c'est la compétence qui doit primer au-delà du choix de la langue, mais là il y a tout un mécanisme effectivement à mettre en place. Il y a des groupes ici, au Québec, qui ont cette compétence-là, d'aider et de s'harmoniser avec nous pour faire en sorte que le nouvel arrivant et sa famille puissent s'intégrer très rapidement dans la langue qui est celle de la région de Québec, mais également dans leur environnement. Ce n'est pas désarticulé de l'environnement, ce qu'on vous propose. Ça se fait en collaboration avec des acteurs de terrain, avec les acteurs du terrain.

Donc, ce qu'on dit, c'est que, oui, effectivement, à compétence égale, il est probablement préférable que l'immigrant soit... ou ait des connaissances en français, mais ça ne peut pas être le critère principal. Une fois que l'immigrant sera choisi, nous ferons tout, en région, pour effectivement l'intégrer dans sa communauté, et il s'avère que, dans notre région, c'est une communauté de langue française, donc le travail devra se faire dans ce sens-là.

La Présidente (Mme Hamel): M. Simard, vous vouliez ajouter quelque chose? Non?

M. Simard (Patrick): Oui, bien, simplement parce que le 1 %, là, il faut partir d'un postulat, là, il existe encore bien des moyens que celui-là. Il existe encore, ce 1 % là, alors voilà... pour certaines entreprises, mais elles sont particulièrement nombreuses aussi à pouvoir en bénéficier et elles font partie de celles qui justement sont en pleine expansion et qui ont besoin de combler ces besoins de main-d'oeuvre. Alors, le postulat de base, là, il faut être prudent.

La Présidente (Mme Hamel): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais continuer sur le même sujet qu'on a déjà commencé. Je pense que c'est une question qui a beaucoup de répercussions et qui a beaucoup... qu'on peut regarder sous des aspects bien différents, et je vais l'aborder à partir de votre document, à la page 4, en bas de la page, quand vous dites... D'abord, de quoi il s'agit, je vais mettre un peu dans le contexte pour qu'on comprenne votre question, il s'agit de l'augmentation du nombre d'immigrants: Est-ce qu'on doit augmenter ou pas augmenter?

Alors, vous dites, en parlant du document de consultation émis par le ministère: «La Chambre de commerce s'interroge toujours sur le fait de faire reposer l'essentiel de cette augmentation sur un accroissement du nombre et de la proportion des immigrants connaissant le français afin qu'à moyen terme la majorité des immigrants admis connaissent le français.» Et vous continuez évidemment en développant cette idée-là. Mais j'aimerais que vous repreniez cette idée-là et que vous m'expliquiez en quoi vous vous interrogez, exactement?

La Présidente (Mme Hamel): M. Simard.

M. Simard (Patrick): Oui, alors, compte tenu d'une préoccupation qui est vécue au jour le jour, je vais laisser la parole à Paul-Christian Nolin, qui administre justement ce programme d'immigration proactive, pour vous témoigner des difficultés que ça représente.

La Présidente (Mme Hamel): M. Nolin.

M. Nolin (Paul-Christian): Je trouve un peu pessimiste la façon dont vous voyez la chose, parce que je vois, par exemple, des exemples de... je pense, entre autres...

M. Dion: J'ai posé une question, seulement.

n (11 h 10) n

M. Nolin (Paul-Christian): Non, non, non, effectivement. Mais je pense aussi à la question précédente. Alors, je pense, entre autres, à un travailleur roumain que j'ai connu parce qu'il est venu nous voir à la chambre et qui avait un problème linguistique et qui a réussi, avec les cours de francisation, à s'intégrer dans son entreprise, parce que justement il avait une des professions qu'on recherchait. S'il avait eu une profession... une compétence qui n'était pas nécessaire pour la région, il aurait eu beaucoup plus de difficultés à s'intégrer. Et c'est justement l'intégration en entreprise qui l'a aidé à se faire un réseau d'amis et à améliorer la qualité de son français.

M. Dion: Je pense que votre réponse est très claire et elle situe très bien le problème. Mais, la réalité étant complexe, et les immigrants, en plus d'avoir des professions différentes, se réfèrent... proviennent de deux sources différentes: les uns qui ont choisi de venir ici et d'autres qui sont des réfugiés. Bon. La question que je me pose, c'est la suivante, elle est très vaste, j'essaie de la circonscrire de façon très précise. C'est que, d'un côté, il y a des gens qui parlent français mais qui n'ont pas nécessairement la profession qu'on veut avoir ou le métier dont on a besoin, d'autres qui ne parlent pas français mais qui ont le métier, et il y a des gens qui n'ont ni l'un ni l'autre. Alors, c'est tous ces gens-là qu'on accueille, dans la réalité, là.

Alors, est-ce que... Pensez-vous que ce serait un élément dynamique, pour l'intégration de ces immigrants-là, de structurer une approche de formation linguistique, donc de connaissance de la langue, en fonction de ce que l'immigrant a, mais de connaissance aussi des coutumes du milieu? Parce qu'un travailleur qui arrive avec toutes sortes d'autres manières de vivre ne travaille pas nécessairement de la même façon et ne s'intègre pas de la même façon aux autres travailleurs. Donc, c'est une question importante pour l'entreprise, donc intégrer à la formation linguistique et culturelle, de façon concomitante ou consécutive, une formation technique pour faire en sorte que la formation qu'ils ont à l'origine s'adapte à l'organisme dans lequel... ou à la façon de travailler qui est celle d'ici.

La Présidente (Mme Hamel): M. Nolin, s'il vous plaît, en une minute.

M. Nolin (Paul-Christian): Si vous me permettez, c'est justement dans cet esprit-là qu'on propose la question des stages. Alors, le stage permet l'intégration graduelle en emploi et soutenue par quelqu'un. Alors, souvent les entreprises hésitent en disant: Bon, bien, les ressources sont déjà limitées, est-ce que je vais mettre quelqu'un spécifiquement à l'intégration? Alors, c'est pour ça qu'on se dit: Des stages qui seraient, entre autres, rémunérés permettraient d'abord cette intégration-là, et puis c'est aussi, pour l'immigrant, de mettre le pied dans la porte de l'entreprise et puis de s'y intégrer le plus harmonieusement possible. Et puis, en même temps, ça permet aux travailleurs qui sont déjà, par exemple, dans cette usine-là, dans cette entreprise, de se rendre compte à quel point l'immigration peut être une richesse.

M. Dion: Je vous remercie.

La Présidente (Mme Hamel): Merci. Il ne reste plus de temps dans ce bloc-là.

M. Dion: Tout à l'heure? Merci.

La Présidente (Mme Hamel): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Un peu sur la même foulée, mais sous un angle différent, je sais que la ville de Québec a, à l'automne dernier, organisé une mission à l'étranger. Je crois qu'il y avait des employeurs qui accompagnaient cette mission. La Chambre de commerce n'y était pas, mais je crois qu'il y avait des employeurs. Donc, si vous accordez beaucoup d'importance justement au choix des compétences, c'est-à-dire s'assurer que nous avons les bonnes personnes pour remplir les bons postes, c'est un peu ça que je comprends, l'arrimage des expériences, des compétences pour les besoins de main-d'oeuvre, est-ce que ces missions à l'étranger sont d'après vous un bon moyen? Est-ce qu'on devrait encourager ça davantage? Est-ce qu'on devrait soutenir les entreprises pour le faire? Est-ce que les entrepreneurs d'après vous seraient intéressés à une plus grande échelle? Si oui, qu'est-ce que ça prend pour que... Moi, ce qui... Je suis assez favorable dans l'ensemble, mais ma question, c'est tout le temps: Oui, mais est-ce qu'ils sont allés pour rien? Puis comment on travaille ça? Puis qui doit travailler ça pour s'assurer toujours cette obligation de résultat ? parce que c'est très coûteux quand même, aller faire ces missions-là ? pour que ce ne soit pas un coup d'épée dans l'eau, là?

La Présidente (Mme Hamel): M. Nolin.

M. Nolin (Paul-Christian): Oui, madame. Concrètement, l'automne dernier, j'ai eu la chance de participer à une des sessions d'information qui sont données par les services d'immigration de la Délégation du Québec à Paris. Il y avait, dans la salle, 80 quelques personnes, et on m'a proposé, étant donné que j'étais de la région de Québec, de vendre la région de Québec aux participants qui étaient là. Ça m'a permis d'une part de voir la présentation qu'on fait aux immigrants du Québec, de m'apercevoir à quel point elle devrait peut-être être un peu mieux adaptée aux réalités des différentes régions.

Souvent, le point de référence, c'est Montréal. Alors donc... Et ce n'est pas fait de façon méchante, c'est que c'est certain que c'est une référence plus facile. Alors donc, on parle de la différence de loyer entre Montréal, Paris, on parle de la différence de température entre Montréal, Paris, mais, quand arrive le temps de vendre les régions, on parle des deux ou trois secteurs d'activité économique qui sont plus favorables ? et encore, il y a un certain décalage ? et c'est tout. Et je trouve qu'on ne vend pas les régions du Québec quand on ne fait que parler de ça. Et j'ai parlé pendant une quinzaine de minutes là-bas, et, dans les mois qui ont suivi, les deux mois qui ont suivi, il y a cinq participants de ces rencontres d'information qui sont venus à nos bureaux, parce qu'ils avaient pris la carte, et qui ont dit: Si vous n'étiez pas venus nous parler de la région de Québec, on ne serait jamais passés par Québec, on serait restés à Montréal.

Et c'est pour ça que je pense que des missions ciblées, avec des... Là, on a proposé une deuxième mission, mais cette fois-ci ? et je pense que c'est ça qui va être la clé ? de rencontrer les gens qui ont leurs certificats de sélection du Québec, avec des véritables emplois alors au bout. Parce qu'il y a la Foire de l'emploi qui se tiendra bientôt, je pense que, si on arrive avec une liste d'emplois disponibles, des profils recherchés, avec des gens qui ont déjà leurs certificats et qui sont sur le point de quitter, on a beaucoup plus de chance de succès que d'y aller en prospection, comme ça a été fait du côté de la Roumanie et des pays de l'Est. Si on n'a pas de véritables emplois à offrir, si jamais les procédures d'immigration ne sont pas faites, alors donc c'est utopique, parce que les besoins des entreprises dans un an et demi ne seront pas les mêmes qu'ils le sont aujourd'hui, et je pense que c'est le miroir aux alouettes pour les immigrants qu'on va rencontrer là-bas.

La Présidente (Mme Hamel): M. Simard.

M. Simard (Patrick): Oui. J'ajouterai à ça un élément. Connaissant la dynamique de l'employabilité, et de l'importance qu'elle a, et de la sélection qu'on doit faire, connaissant l'importance de la préoccupation aussi que peut être une langue étrangère, si on y va avec des actions plus ciblées, par des missions bien concrètes, ça nous apparaît être une façon encore plus efficace.

Je vous donne un exemple. Si je vais, demain, chercher quelqu'un dont j'ai besoin et que j'ai identifié, parce qu'il a son certificat et qu'il a la main-d'oeuvre qualifiée, dans une ville comme Fécamp, en France, c'est une petite bourgade au bord de mer, dans un petit village où vous vous promenez jour et nuit puis où vous rencontrez à peine 15 ou 20 personnes sur le bord de la rue, si on fait une propagande «at large» du Québec pour ne pas cibler encore de région, cet individu-là risque de faire le choix peut-être de s'établir dans la région... mais dans la région de Montréal, parce qu'on vend surtout Montréal, mais peut-être dans la région de Québec.

Mais prenons le cas où il vient s'établir dans la région de Montréal, puisqu'il a entendu parler de la région de Montréal. Il se retrouve, lui, dans une petite communauté, dans un contexte différent, dans un marché d'emploi peut-être un peu différent mais conforme à ses orientations, mais dans une ville où est-ce qu'il se sent absolument perdu. Parce que, s'il avait su que Montréal était telle que Montréal est, s'il n'avait pas été ciblé comme étant justement un immigrant, un prospect, d'une petite région ? dont on a besoin justement dans une région un peu similaire à la sienne ? ça viendrait nous aider en fait d'intégration de ces gens-là pour permettre justement d'abattre certains murs que sont aussi ce désenracinement et de se retrouver dans un contexte, dans une grande métropole, alors qu'on a vécu tout à fait autre chose pendant 15, 20, 30, 40 ans de sa vie.

Alors, de bien cibler nos missions, ça nous apparaît être un facteur de réussite d'autant plus important compte tenu notamment de cet aspect d'intégration.

La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée de Bellechasse.

Mme Vien: Bonjour, messieurs. Bienvenue à cette consultation en commission parlementaire. Vous parlez beaucoup du rôle de l'entreprise, de l'employabilité, des besoins d'entreprise, bon, les langues aussi, de plus en plus il va falloir s'ouvrir évidemment à différentes langues de travail, dans un contexte de mondialisation, donc beaucoup l'accent mis sur l'entreprise. J'aurais envie de vous poser une question concernant justement cette entreprise-là, vous parliez aussi d'intégration: Outre le fait que l'entreprise a des emplois à pourvoir, a des emplois à offrir, est-ce que vous voyez le rôle de l'entreprise beaucoup plus grand qu'il ne l'est actuellement, donc qui dépasserait l'offre d'emploi? Je vous donne un exemple. Souvent, les entreprises, pour aller chercher un candidat ou une candidate, vont mettre de belles, belles, belles conditions sur la table: déménagement, plein de conditions. Est-ce que, par exemple, au niveau de l'intégration, l'entreprise devrait jouer un rôle plus grand?

La Présidente (Mme Hamel): M. Nolin.

n (11 h 20) n

M. Nolin (Paul-Christian): Je pense qu'il y a de la place effectivement pour le faire, et c'est ce sur quoi on a tablé quand on a fait la présentation de notre projet d'immigration proactive. Parce que souvent la clé de l'intégration, ça peut être l'emploi, mais le problème, ça peut être aussi le conjoint qui, lui, n'en a pas, qui est à la maison, ou encore les enfants qui ont de la difficulté à s'intégrer à l'école. Alors, c'est pour ça qu'on trouve que c'est important que l'intégration se fasse sur tous les plans. Et c'est pour ça que: Est-ce que ça doit être l'entreprise?, ça peut. Mais ça peut être aussi des organismes communautaires.

Je sais que la chambre a soutenu un projet, il y a peut-être deux ans, qui n'a malheureusement pas vu le jour mais qui était une forme de cuisine communautaire. Alors donc, on souhaitait inviter des conjointes qui restaient dans... de travailleurs qui étaient intégrés dans les entreprises pour leur donner parfois de la francisation quand c'était le cas, mais parfois juste de l'intégration, de les sortir de la maison, parce qu'elles n'ont pas toujours les mêmes compétences requises que le conjoint. Alors, c'était l'idée de les mettre ensemble dans une cuisine, de s'enrichir les unes les autres sur le plan linguistique, de faire connaître davantage leurs cultures, et aussi de les faire appartenir à un cercle et d'agrandir ce cercle-là. Donc, il y a des initiatives comme celles-là qui peuvent...

Alors, est-ce qu'elles vont venir de l'entreprise? Parfois oui. Alors... parce qu'il y a parfois des grandes entreprises qui peuvent se permettre de faire ça. Mais, dans des entreprises qui sont plus petites, peut-être est-ce qu'on doit davantage tabler sur des projets comme ceux-là, de cuisine, ça peut être aussi... Je suis, dans une autre vie, aussi bénévole au Carnaval de Québec et, depuis quelques années, j'intègre de plus en plus des immigrants aux activités du Carnaval, et ils viennent comme bénévoles, ils assurent l'accueil. Et tout ça est très bien vu et en même temps ça leur permet de sortir de chez eux, d'apprivoiser l'hiver, de connaître des gens, de se faire un réseau d'amis. Et c'est comme ça qu'on assure le fait qu'ils restent, bien davantage que si on ne fait qu'y aller avec des voeux pieux et pas d'action concrète.

M. Kirouac (Alain): J'aimerais rajouter, si vous me permettez, que...

La Présidente (Mme Hamel): M. Kirouac.

M. Kirouac (Alain): ...l'action principale d'une entreprise, c'est de créer de la richesse, créer des emplois et les maintenir. Donc, je pense qu'il faut faire aussi, chacun... Il faut bien cibler le rôle de chacun dans cette problématique-là, qui est importante et majeure. Si l'entreprise effectivement, par la sensibilisation de son employeur, est ouverte à l'embauche d'immigrants parce que ça répond à des besoins de l'entreprise, on pense effectivement que l'entreprise a déjà un rôle important et majeur dans l'intégration, parce qu'elle offre un emploi. Il y a d'autres acteurs. Nous, ce qu'on dit dans le fond: C'est un travail intégré. L'entreprise offre l'emploi, va offrir le maintien de l'emploi, va permettre l'intégration économique de l'employé, de l'immigrant, mais ça ne se fait pas seul, ça se fait avec effectivement les organismes de terrain qui existent. Et ça, dans notre projet d'immigration proactive, c'est global, ça englobe toutes ces facettes-là. Ce n'est pas seulement que l'entreprise qui a la responsabilité de faire venir l'employé, de l'intégrer puis d'en faire un citoyen qu'on souhaite pour notre société. Mais, oui, elle a un rôle majeur. Et je vous citerai des entreprises de la région de Québec qui le font très bien. Je n'ai... J'ai à l'esprit Bains Ultra, par exemple...

La Présidente (Mme Hamel): M. Kirouac.

M. Kirouac (Alain): Oui?

La Présidente (Mme Hamel): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Kirouac (Alain): Bains Ultra fait énormément d'intégration de ses employés, ils viennent de partout, et, à toutes les semaines, à tous les midis, il y a un repas qui est préparé par un immigrant et qui fait connaître les us et coutumes.

Une voix: ...

M. Kirouac (Alain): Bains Ultra.

Une voix: Ah! O.K.

M. Nolin (Paul-Christian): Le Centre de Recherche du CHUL, aussi. Alors, ils ont des chercheurs qui sont d'origine chinoise et ils se sont mis à chercher à travers la communauté où il y avait d'autres Chinois donc pour faciliter l'intégration. Alors donc, on en a trouvé qui travaillaient dans une usine de transformation de poisson. Alors donc, on a recréé une espèce de petite communauté chinoise pour faciliter l'intégration. Donc, il se fait des choses, entre autres par les entreprises.

La Présidente (Mme Hamel): Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, Mme la Présidente. C'est très intéressant, c'est un échange qui est très enrichissant. Tout à l'heure, vous m'avez répondu: La meilleure façon de franciser ou enfin d'ajuster la formation professionnelle des immigrants, c'est des stages en entreprise. Alors, c'est très intéressant, sauf qu'on sait que, depuis une vingtaine d'années, beaucoup d'écoles professionnelles essaient de trouver des stages pour les étudiants, et c'est un gros problème. On sait qu'on a une université au Québec, celle de Sherbrooke, qui a instauré le stage comme partie intégrante de la formation, puis c'est la seule qui réussit, puis elle a un peu de difficultés.

Alors, la question que je me pose: Y a-t-il des entreprises suffisamment pour pouvoir offrir les stages dont on a besoin? Première question. Et la deuxième question: Quel est le niveau de connaissance du français que l'entreprise exige pour offrir un stage? Parce que offrir un stage à quelqu'un avec qui on n'est pas capable de communiquer, c'est assez hasardeux pour une entreprise. Alors, j'aimerais que vous répondiez à ces deux questions-là.

La Présidente (Mme Hamel): M. Kirouac.

M. Kirouac (Alain): ...à votre première question, je vais prendre l'exemple de la Chambre de commerce, nous gérons, depuis maintenant 10 ans, avec Développement ressources humaines Canada, des programmes de stages en entreprise. Bon an, mal an, avec ces programmes, nous plaçons une centaine de jeunes finissants et, dans certains cas, même des cas qu'on appelle lourds et en difficulté. Et, au travers des 100 jeunes que nous plaçons, année après année, dans nos entreprises de la région de Québec, il y a effectivement de jeunes immigrants, immigrantes que nous plaçons, mais pas dans le cadre où ils sont des immigrants, où c'est un programme spécial, c'est tout simplement qu'ils se qualifient à l'intérieur du programme. Et les entreprises embarquent là-dedans, je vous le dis, et le taux de succès de rétention de ces jeunes stagiaires dépasse les 60 %, ce qui est absolument, pour nous en tout cas, signifiant. On peut facilement effectivement mettre en place.

Là où le bât blesse, et je ne veux pas partir nécessairement un autre débat, c'est que, quand on passe effectivement par les commissions scolaires et qu'on dit que c'est la commission scolaire qui va entrer en contact avec l'entreprise, il y a un vice dans le message qui part versus le client qui le reçoit. Vous demandez à une chambre de commerce de sensibiliser ses entreprises, ses membres. Comprenons-nous bien, les entreprises adhèrent volontairement à des organisations comme la nôtre. On peut présumer qu'ils croient à notre mission, qu'ils croient aux services qu'on leur offre. Et, dans ces cas-là, quand on utilise les organismes qui représentent des clientèles spécifiques, le message passe beaucoup mieux que lorsque c'était un parti tiers qui essaie de passer le même message.

Le deuxième élément, je suis malheureusement, moi, en difficulté de vous répondre sur l'aspect de la francisation en entreprise, mais on peut penser que nos jeunes actuellement immigrants, immigrantes, dans la région de Québec, en tout cas ceux qui vivent chez nous, ont une connaissance du français adéquate pour occuper les emplois qu'ils occupent.

La Présidente (Mme Hamel): M. Nolin.

M. Nolin (Paul-Christian): Bien, la proportion de gens qui ne parlent pas le français et qui arrivent à Québec, elle n'est pas si grande que ça, là. Ça donne l'impression qu'il y a 80 % des gens qui arrivent qui ne parlent pas français et ce n'est vraiment pas le cas. Je pense que c'est autour de 24 %, 25 %, au maximum, alors donc, qui passent par la francisation. Ce n'est quand même pas un nombre... Et ça, ce n'est pas nécessairement des gens aussi qui se retrouvent complètement désarmés et sans compétence. Il y a des gens qui effectivement arrivent ici et ne parlent pas nécessairement le français ou l'anglais mais qui sont des chercheurs et qui réussissent quand même à travailler assez facilement. Alors, c'est pour ça qu'on ne peut pas établir de grands... Alors donc, il y a moyen et pour les uns et pour les autres de travailler.

Et la francisation fonctionne bien. Je prends pour exemple la petite fête de Noël que le Centre multiethnique donne depuis quelques années. Alors donc, j'y vais comme bénévole. J'ai pu voir arriver les premiers réfugiés afghans, avec lesquels il était impossible d'avoir une conversation et qui... après deux Noël, après deux fêtes de Noël, on est capable maintenant. Ils ont réussi à se trouver du travail, ils réussissent à communiquer. Ma foi, c'est un bel exemple d'intégration réussie, et on ne parle pas, là, d'une langue... on ne parle pas de l'espagnol, là.

M. Dion: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, c'est intéressant et instructif. Je vois que vous êtes de jeunes... à la Chambre de commerce, je veux dire, qui apportent une vision différente aussi dans une société. Parce qu'une société évolue, donc nous sommes dans une période de mutation, tout le monde est en train de se repenser en fin de compte, et je pense que c'est important. Et on arrive justement à se rendre compte que, bien, on a besoin de l'immigration au Québec, et il faut s'ouvrir davantage à cette immigration-là. Bon.

Ceci étant, ça veut dire que même votre rôle évolue aussi en tant que chambre de commerce, inévitablement il doit changer. Vous avez un rôle social aussi, malgré votre rôle premier qui est de faire fonctionner l'économie via les entreprises. Et vous avez un rôle social. Alors, ce qui m'amène à vous dire: Tantôt, ce que je comprenais, c'est que vous êtes plus orientés vers l'élite des travailleurs, en fin de compte. Parce que vous me sembliez en tout cas dire: La bonne personne au bon endroit, qui est le plus rentable possible. En fait, c'est un peu... Bon. Et je ne vous en veux pas pour ça, je pense qu'une entreprise cherche à peu près toute la même chose. Avec un immigrant ou un Québécois, c'est à peu près du pareil au même.

n (11 h 30) n

Ceci étant, par contre, c'est qu'ici, au Québec, on est comme confronté... Quand on a de l'immigration, on a aussi des réfugiés, puis il faut faire quelque chose avec. On ne peut pas juste les envoyer sur l'aide sociale, il faut les intégrer sur le marché du travail. Qui va s'occuper de cette intégration-là de ces gens-là? Parce que c'est important. On a vu, par différents mémoires, que plus on s'en occupe, plus rapidement... C'est des gens qui ont une très forte volonté d'intégration. Ça peut être un ingénieur qui est même prêt à devenir technicien, ça peut être un médecin qui est même prêt à devenir infirmière, veut être dans différents secteurs d'activité, en fin de compte. Mais ils veulent travailler et gagner leur vie correctement et honorablement.

Donc, comment on arrive à faire qu'on ne fait pas juste de la sélection élitiste puis un peu... Tiens, ça me fait penser un peu à la génétique aujourd'hui. On choisit l'enfant qu'on veut, on va voir un bon généticien puis on dit: Je veux qu'il ait les yeux bleus, les cheveux telle couleur, grand, fort, intelligent et beau. Tu sais, ça me fait un peu penser à ça. Il faut faire attention un peu parce que ça peut être dangereux, à un certain moment donné. Donc, je me pose et je vous pose la question, dans le fond: Comment on fait pour que ces immigrants-là ne soient pas dans un Québec cassé en deux?

La Présidente (Mme Hamel): M. Nolin.

M. Nolin (Paul-Christian): Oui. Alors, ce n'est pas de l'eugénisme d'immigration qu'on fait, hein? C'est vrai qu'on essaie de les choisir, mais en fonction des besoins, et ces besoins-là ne sont pas nécessairement toujours en haute technologie. Alors, il y a des besoins de soudeurs, d'ébénistes, et ce ne sont pas nécessairement des professions qui demandent 17 ans de scolarité. Alors, c'est pour ça que je pense qu'il y a moyen de trouver des professions qui conviennent, entre autres, aux réfugiés, parce que ceux qui nous arrivent ne sont pas tous des gens qui n'ont pas de profession.

La seule chose qu'il faut faire, c'est essayer de trouver des façons d'adapter rapidement leurs compétences à nos besoins. Et ça, je pense que ça commence à se faire, il y a de la sensibilité qui se fait. On a, entre autres, des expériences avec les ingénieurs, alors qu'après... C'est vrai que ça a tardé un peu, mais là ça semble donner de bons résultats. Et je pense que c'est dans cet esprit-là qu'il faut qu'on travaille.

M. Kirouac (Alain): J'aimerais rajouter, si vous me permettez, que, si on vous a donné l'impression qu'on recherchait un certain niveau ou calibre d'immigrant, je vous dis non. Il faut revenir tout simplement aux besoins: quels sont... C'est l'adéquation effectivement entre la compétence de l'immigrant puis le besoin que l'entreprise a.

Et je vous dirai que... On parlait tout à l'heure de la Foire de l'emploi; c'est notre cinquième ou sixième année. À chaque année, on ne réussit pas à combler à peu près entre 30 % et 35 % des emplois, et ce type d'emplois là ne sont pas ingénieurs, Ph.D., etc., c'est ce qu'on peut appeler des travailleurs manuels, qui ont effectivement une connaissance technique, une expertise technique. Mais c'est à ce niveau-là effectivement que, nous, on pense qu'il faut travailler.

Et on part... Et peut-être que la réponse à la question qu'on s'est posée est discutable, mais on se dit: Est-ce que c'est mieux de faire entrer un immigrant qui a un emploi qu'un immigrant qui n'en aura pas? Donc, on pense qu'il y a moyen. Vous avez parlé des réfugiés, je suis tout à fait d'accord avec vous. Mais ça, ça relève d'une compétence autre évidemment qu'une compétence de la Chambre de commerce, de savoir combien de réfugiés politiques on reçoit ou des choses du genre.

Mme Vermette: Oui, mais ceci étant, le problème n'est pas vous dire que...

La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée, s'il vous plaît. En 1 min 30 s, Mme la députée.

Mme Vermette: Oui. Le problème, c'était votre engagement social, à savoir: le réfugié va faire partie de notre collectivité, dans notre ensemble, et puis il faut qu'il travaille, il faut qu'il gagne sa vie, sinon on va le supporter différemment.

M. Kirouac (Alain): C'est un tout, madame, et vous avez raison.

M. Nolin (Paul-Christian): Peut-être ajouter...

La Présidente (Mme Hamel): Oui, M. Nolin.

M. Nolin (Paul-Christian): Je ne sais pas si vous êtes au courant de l'expérience qui est vécue à l'île d'Orléans, où on fait venir des travailleurs saisonniers du Mexique. Alors donc, parmi les critères, alors on souhaite que ce soient des gens qui aient une famille, alors donc pour éviter justement qu'ils viennent... Mais ces gens-là sont en train de transformer... D'abord, un, on les aide à augmenter leur niveau de vie. Ce sont de beaux candidats un jour à l'immigration, peut-être. Et en même temps ils viennent combler des besoins, parce qu'il n'y a plus grand monde pour aller cueillir les fraises, les asperges et les pommes de terre dans les champs. Et c'est en train de transformer la société, parce que les producteurs, les fermiers sont en train de prendre des cours d'espagnol pour pouvoir apprendre... Mais, en même temps, on transforme, tranquillement pas vite.

Mme Vermette: Je n'aime pas votre dernier commentaire, honnêtement...

La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée, en conclusion, s'il vous plaît.

Mme Vermette: ...pour vous dire tout simplement que ces gens-là ne rêvent pas uniquement de faire de la cueillette, mais ils rêvent de vrais emplois qui leur permettent de vivre correctement.

M. Nolin (Paul-Christian): Mais ils ont cet emploi-là qui leur permet de vivre, et c'est pour ça qu'ils sont contents de venir ici. Et c'est pour ça qu'on leur accorde justement... On les aide, là, de cette façon-là. Et il y a des possibilités pour tout le monde.

La Présidente (Mme Hamel): Alors, je vous remercie, M. Simard, M. Kirouac, M. Nolin, de la présentation que vous nous avez faite. C'était un point de vue très moderne.

Alors, je suspends pour quelques minutes, avant d'accueillir nos prochains invités.

(Suspension de la séance à 11 h 34)

 

(Reprise à 11 h 42)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. À ce moment-ci, j'aimerais inviter les représentants du Conseil régional des partenaires du marché du travail du Centre-du-Québec à bien vouloir prendre place.

J'aimerais rappeler aux membres de la commission que le mandat de la commission est en fait de tenir une consultation générale à l'égard du document intitulé La planification des niveaux d'immigration 2005-2007. Alors, pour les fins du Journal des débats, je demanderais à nos invités de bien vouloir s'identifier, s'il vous plaît.

Conseil régional des partenaires du marché
du travail du Centre-du-Québec

M. Boily (Denis): Je suis Denis Boily, président du Conseil régional des partenaires du marché du travail Centre-du-Québec.

M. Morin (Marc): Marc Morin, membre du Conseil régional des partenaires du marché du travail du Centre-du-Québec. Je suis également directeur d'un centre de formation professionnelle, c'est tout nouveau, au Centre Paul-Rousseau à Drummondville, et j'étais directeur d'un centre de formation professionnelle et d'un centre de formation générale pour les adultes.

Le Président (M. Cusano): Merci.

M. Bédard (François): Oui, bonjour. Moi, c'est François Bédard, analyste du marché du travail pour Emploi-Québec, Centre-du-Québec.

Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. J'aimerais vous rappeler quelques règles de procédure qui sont extrêmement simples: vous disposez d'une période maximale de 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire; suivra une période d'échange avec les membres de la commission pour une durée de 40 minutes. Alors, la parole est à vous.

M. Boily (Denis): Merci beaucoup. Si vous voulez bien, on va développer notre présentation en trois volets: le premier volet va être le rôle des conseils régionaux; le deuxième volet, un portrait socioéconomique de notre région; et, finalement, le troisième volet, on va reprendre les grands points de notre mémoire.

Donc, le Conseil régional est un lieu de concertation privilégié des partenaires sur un plan régional. Le Conseil régional analyse les problématiques de la région et recommande à la Commission des partenaires du marché du travail un plan d'action qui prend en compte les besoins locaux. Il est aussi responsable de l'adaptation des mesures et services d'Emploi-Québec aux besoins de la région.

Le Conseil régional des partenaires du marché du travail se compose des personnes suivantes: il y a six représentants des entreprises, six représentants de la main-d'oeuvre, quatre représentants des réseaux de l'éducation, deux représentants des organismes communautaires et, finalement, la direction régionale, trois représentants sans droit de vote, donc le ministère de l'Éducation du Québec et le ministère du Développement économique et régional.

Sur notre territoire, j'aimerais vous spécifier que nous avons développé une stratégie d'attraction de la main-d'oeuvre et on a signé aussi avec le ministère, on a signé une entente spécifique sur l'attraction et l'établissement durable des personnes immigrantes dans la région du Centre-du-Québec. Cette entente était d'une durée de trois ans: elle a débuté en 2001 et se termine en 2004. Les buts de cette entente sont notamment d'augmenter le nombre d'immigrants et d'immigrantes qui s'établissent au Centre-du-Québec, de favoriser leur intégration sociale et professionnelle et leur impact économique et social, de répondre aux besoins des employeurs et d'assurer une relève aux secteurs en émergence.

Concrètement, deux projets ont été acceptés. Le premier a été soumis par l'organisme Regroupement interculturel de Drummond, pour le territoire de la MRC de Drummondville, de Nicolet et de Yamaska, qui vise l'intégration professionnelle de 100 personnes immigrantes sur une période de trois ans, prioritairement des travailleurs spécialisés et semi-spécialisés et des immigrants d'affaires. L'autre projet, qui a été déposé par Accès-Travail pour le territoire de la MRC d'Arthabaska, de L'Érable et de Bécancour, vise l'intégration professionnelle de 120 personnes immigrantes, toujours pour la même période de trois ans.

Au niveau de notre région, j'aimerais en débutant mettre en contexte la réalité économique du territoire du Centre-du-Québec. Bien que la population centricoise totalise 3 % de la population totale du Québec, le marché du travail de la région Centre-du-Québec se démarque tant par son dynamisme économique que par la diversité des entreprises qu'on y retrouve.

Cependant, certains secteurs d'activité manufacturiers de la région ont connu récemment quelques difficultés face à la compétitivité mondiale. Une des raisons est que le dollar canadien s'est apprécié de plus de 20 % en un an face à la devise américaine. Cette hausse a provoqué un stress important pour les entreprises de production qui exportent vers le marché du travail ? et beaucoup de nos entreprises exportent vers le marché américain. De plus, dans la région, certaines entreprises oeuvrant dans des secteurs de vêtement et du textile ont subi, depuis quelques années, un ralentissement important de leurs activités économiques. Cela est attribuable au fait que le Canada a éliminé, depuis le 1er janvier 2003, les tarifs et quotas à l'importation de vêtements de 48 pays, dont 38 africains, diminuant ainsi le coût des vêtements fabriqués dans ces pays et vendus au Canada.

La modification de l'emploi manufacturier n'est pas un phénomène aussi immuable que les changements démographiques. Toutefois, étant donné l'importance de ce secteur dans l'économie de la région, il mérite une attention particulière. Le secteur manufacturier sur notre territoire compte environ 27 % des emplois, comparativement à 17 % pour l'ensemble du Québec. Il est fort probable que les emplois dans le secteur manufacturier ne progresseront pas dans les prochaines années comme cela s'est produit dernièrement. Il est même possible que le nombre d'emplois manufacturiers, dans la région, soit légèrement à la baisse dans les prochaines années, tout comme ce qui est observé dans la majorité des pays développés. Ainsi, dans le secteur manufacturier, c'est davantage la hausse de la productivité qu'une hausse d'emplois qui est prévue.

Je tiens à rappeler que ce possible ralentissement du secteur manufacturier ne signifie pas pour autant que les besoins de main-d'oeuvre n'y seront plus. En effet, selon le document des Perspectives professionnelles 2003-2007 d'Emploi-Québec, qui va être rendu public sous peu, on prévoit 18 250 nouveaux emplois dans la région. Le remplacement du personnel quittant pour la retraite justifie une part importante de ces besoins de main-d'oeuvre dans les prochaines années, soit 54 % des nouveaux emplois dans la région. De plus, cette tendance potentielle ne peut pas être généralisée à l'ensemble des secteurs manufacturiers ou à l'ensemble des entreprises.

La hausse du dollar, comparativement à la devise américaine, et la concurrence étrangère, notamment dans des pays ayant des coûts de main-d'oeuvre inférieurs, ont des effets variables en fonction des secteurs et des entreprises. Ainsi, certains secteurs manufacturiers comme le secteur du meuble et certains sous-secteurs de l'alimentation sont faiblement affectés ou bénéficient même de la conjoncture actuelle. À titre d'exemples: les entreprises qui achètent leurs matières premières aux États-Unis, les entreprises dont les produits sont destinés davantage au marché intérieur.

n (11 h 50) n

Au-delà de cette tendance, des entreprises se démarquent toujours positivement, notamment celles qui innovent et qui se distinguent de leur concurrence. Par exemple, l'industrie québécoise du meuble, dont plusieurs prévoyaient, là, un déclin constant au début des années quatre-vingt-dix, s'est révélée être un des secteurs manufacturiers qui ont présentement le plus fort taux de croissance de l'emploi, au cours des dernières années. L'industrie de la transformation agroalimentaire en général a un développement économique constant, dans la région.

Ainsi, malgré les pertes d'emploi recensées dernièrement dans le secteur manufacturier ? vous avez dû en entendre parler, avec des mises à pied chez Swift textiles, entre autres ? donc des secteurs pour lesquels plusieurs des ex-travailleurs sont peu scolarisés, on remarque que bon nombre d'entreprises de la région ont des besoins constants de main-d'oeuvre qualifiée pour demeurer compétitives face au marché du travail qui se mondialise de plus en plus.

Permettez-moi maintenant, dans cette deuxième partie, de vous présenter la réalité démographique du Centre-du-Québec. Les phénomènes démographiques ont une influence marquée sur le marché du travail, notamment sur la disponibilité de la main-d'oeuvre ainsi que sur la nature de la demande en produits et services.

Depuis une trentaine d'années, l'intégration massive et durable des femmes sur le marché du travail et l'arrivée d'une population en âge de travailler ont été constamment à la hausse. Cela a eu pour effet d'augmenter de façon considérable le bassin de main-d'oeuvre disponible. Toutefois, au Centre-du-Québec, comme à l'échelle provinciale, la population est vieillissante: les plus jeunes sont moins nombreux et les plus âgés augmentent. Ce phénomène fait en sorte que la population en âge de travailler, soit de 15 à 64 ans, ralentit son rythme de croissance et commencera à décliner dans cinq à six ans, au Centre-du-Québec. Ce déclin démographique a déjà débuté dans trois de nos MRC, soit L'Érable, Bécancour et Nicolet-Yamaska.

Cette tendance démographique ne peut pas être modifiée radicalement. Elle repose principalement sur la natalité, et des changements sur le marché de l'emploi ne pourraient se faire sentir que dans quelques années, bien évidemment. À l'échelle régionale, une modification de l'immigration et de la migration interrégionale pourrait devancer et retarder légèrement le déclin des 15-64 mais ne pourrait pas en modifier la tendance. Le marché de l'emploi au Centre-du-Québec aura donc à composer sous peu avec une baisse de la population en âge de travailler.

Diverses solutions sont possibles pour palier, du moins en partie, cette baisse de la population en âge de travailler, notamment en augmentant le bassin de la population participant au marché de l'emploi. Toutefois, à moins d'une baisse importante de l'emploi dans la région, ce qui serait contraire aux prévisions, les changements démographiques impliquent, entre autres, que la main-d'oeuvre ne sera plus disponible en abondance, comme dans les années passées, et le recrutement de cette main-d'oeuvre sera de plus en plus difficile.

C'est ainsi que les partenaires du marché du travail de la région ont élaboré une stratégie de rétention et d'attraction de la main-d'oeuvre, au Centre-du-Québec, qui permet à la région, en fonction des grandes tendances du marché de l'emploi, de demeurer proactive et de continuer à se démarquer positivement. Bien entendu, des phénomènes ponctuels et conjoncturels influencent toujours le marché du travail. Ceux-ci n'invalident toutefois pas les grandes tendances dictant la stratégie ni la pertinence, mais peuvent toutefois influencer les actions concrètes qui découlent de cette stratégie.

Dans cette autre partie, donc, au niveau de notre mémoire, j'aborde de façon plus explicite les quatre éléments proposés en regard du mémoire.

Dans un premier temps, au prorata de la population totale, nous retrouvons moins d'immigrants dans notre région qu'au Québec. Selon le dernier recensement de la population, en 2001, au Centre-du-Québec, 1,9 % de la population est née à l'extérieur du Canada, en comparaison à... 10,8 % de la population québécoise est immigrée, et ce pourcentage est de 29 % pour la région administrative de Montréal. Cependant, comme je l'indiquerai plus tard, malgré de faibles nombres d'immigrants dans la région Centre-du-Québec, ils ont une participation très active au marché du travail.

Le Conseil régional des partenaires du marché du travail du Centre-du-Québec propose d'augmenter le nombre de nouveaux arrivants qualifiés, d'abord parce que la population en âge de travailler devrait diminuer dans les prochaines années et aussi parce que le marché du travail, pour les immigrants, est particulièrement favorable en région.

Le taux de chômage des immigrants est particulièrement bas dans les MRC de la région par rapport à l'ensemble du Québec. Toujours selon le recensement de 2001, le taux de chômage oscille entre 0 % et 9 % dans la région, tandis que la province montre un taux de chômage des immigrants de l'ordre de 12 %. En moyenne, la région du Centre-du-Québec montre un taux de chômage de ses immigrants de 6,3 %, soit presque deux fois plus bas que celui de la province. En outre, le taux de chômage des immigrants de la région est plus bas que le taux de chômage de l'ensemble de la population du Centre-du-Québec. Et, à l'inverse, le taux de chômage des immigrants au Québec est supérieur à celui de l'ensemble de la population. Ainsi, l'intégration des immigrants sur le marché du travail est excellente dans notre région.

Le taux d'activité des 15-64 ans est toujours intéressant à regarder afin de mesurer la contribution de la population au marché du travail. En 2001, la population immigrante du Centre-du-Québec âgée entre 15 et 64 ans avait un taux d'activité de 78,5 %, par rapport à 70 % pour la province. La population de la MRC de L'Érable est la plus active, avec un taux d'activité de 83 % de sa population immigrante. De plus, la plupart des MRC, sauf Bécancour, montrent que le taux d'activité de leurs immigrants est supérieur à celui de l'ensemble de la population du territoire.

Ainsi, toutes choses étant égales par ailleurs, l'augmentation de la population immigrante dans la région serait positive pour ces individus et ces familles, pour le développement du marché du travail et pour les entreprises de la région.

La majorité des immigrants ont tendance à se rassembler ? c'est le volet qu'on avait développé, le volet 2 ? dans les grandes villes, et ce, partout dans le monde. Le Conseil régional des partenaires du marché du travail propose d'effectuer de la recherche de candidats non seulement dans les grandes villes et les métropoles, mais également dans les régions où l'on retrouve des villes et des habitudes de vie semblables aux nôtres. Cette façon de faire pourrait améliorer la rétention des immigrants en région.

Nous savons que plusieurs des emplois en demande sur le territoire requièrent des diplômes d'études professionnelles. Le Conseil propose de tenir compte de la réalité économique du territoire et des besoins de main-d'oeuvre en modifiant la notation dans la grille de sélection des candidats. Ainsi, il serait intéressant de tenir compte des emplois en demande à l'échelle régionale et de hausser le pointage des candidats possédant un D.E.P. Présentement, trois points sont alloués à une personne détenant un diplôme secondaire, comparativement à sept points pour un diplôme d'études collégiales ou équivalent et à huit points pour un bac ou équivalent.

Je veux vous rappeler que, dans la région Centre-du-Québec, les emplois en demande requérant un D.E.P. sont des soudeurs, des mouleurs de plastique ? et on n'a pas de formation dans ce domaine-là, au Centre-du-Québec ? électro-mécaniciens, machinistes, monteurs de meubles et d'accessoires, conducteurs de machines d'usinage, ouvriers agricoles, infirmières auxiliaires. Le taux de placement des finissants, dans la région, est excellent pour les formations reliées à ces emplois. Il se retrouve entre 80 % et 100 %, au Centre-du-Québec. Cet indice peut nous indiquer qu'il y a encore de la demande pour ce type de finissants spécialisés. De plus, pour ces professions, la reconnaissance des diplômes pourrait se faire plus facilement que pour certaines professions exigeant des diplômes universitaires.

n (12 heures) n

Le dernier volet, c'est: Le rôle des municipalités face à l'intégration de nouvelles cultures est primordial pour la réalisation... pour la réussite de la régionalisation. Ainsi, en dernier lieu, le Conseil régional des partenaires du marché du travail propose de mettre l'accent sur le rôle des municipalités et des entreprises locales en termes d'accueil des nouveaux arrivants. En plus de la valorisation de leur territoire, les municipalités et les entreprises devraient supporter la venue des nouveaux arrivants en fournissant des services adaptés à leurs besoins. Par exemple: inviter les nouveaux arrivants aux réunions des conseils municipaux, les inviter à partager leurs traditions lors de festival et autres activités culturelles; organiser, lorsque possible, des voyages d'approvisionnement de produits exotiques dans les grandes villes comme Montréal et Québec; développer de l'accompagnement afin d'intégrer les nouveaux arrivants à la vie sociale, notamment pour les activités de soirées ? par exemple, sous des thèmes.

Pour conclure, la planification des nouveaux immigrants entre 2005 et 2007 est une étape importante pour le développement économique de la collectivité du Centre-du-Québec. Ainsi, en tenant compte du développement, des enjeux, des besoins de main-d'oeuvre de la région, nous croyons que quelques modifications devraient être apportées afin d'attirer et de retenir plus d'immigrants sur notre territoire. Merci.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole à la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue. Merci d'être devant nous. J'apprécie que le Centre-du-Québec, à travers vous, soit présent à nos débats et à cette commission parlementaire. Je me rappelle la consultation qu'on avait eue, et je trouve que vous apportez un point de vue, aujourd'hui, qui est très pratico-pratique. Je vais vous expliquer pourquoi.

D'abord, vous avez signé une entente, en 2002, avec... une entente spécifique qui s'appelle Attraction et établissement durable des personnes immigrantes au Centre-du-Québec. Juste avant qu'on aborde le coeur du sujet, j'aimerais connaître votre évaluation de cette entente-là. C'est sûr qu'elle est encore jeune, mais est-ce que vous y sentez des résultats? Quel est le constat que vous pouvez faire? Est-ce que c'est positif? Quels sont les obstacles que vous rencontrez? Qu'est-ce qu'on devrait améliorer? Quelle est l'utilité en fait de cette entente-là pour vous qui êtes des partenaires du marché du travail?

Le Président (M. Cusano): M. Boily.

M. Boily (Denis): Bien, ce qu'on peut dire, c'est qu'on a, je pense, à travers cette entente-là, un taux de rétention sur notre territoire qui est fort intéressant. Ça, c'est le premier côté positif. Dans la dernière année... Dans le dernier trois ans, c'est 600 personnes qui sont venues s'établir sur notre territoire, et, contrairement à ce qu'on vivait antérieurement ? les gens venaient s'établir sur notre territoire et, quelques années après, quittaient pour Montréal ou pour Toronto ? là, il semblerait que la rétention est de beaucoup meilleure.

Mme Courchesne: Vous avez dit justement, dans votre présentation, que vous aviez une stratégie de rétention, et j'imagine qu'on la retrouve à l'intérieur de l'entente. Est-ce que vous pouvez nous donner les principaux éléments de cette stratégie-là? En fait, 600 sur trois ans, c'est quand même très bon. Est-ce que vous pouvez nous expliquer les raisons de ce succès-là de façon plus concrète, précise?

M. Morin (Marc): Ce que je pourrais vous dire là-dessus, Mme la ministre, c'est que l'entente a permis de travailler en partenariat véritable. Ça veut dire que toutes les instances régionales travaillent au niveau de l'attraction et de la rétention. Notre programme d'attraction et de rétention, ça s'adresse, je dirais, à tous employés confondus, là. Ce qu'on essaie de faire avec ce programme-là, c'est de réveiller les entreprises pour qu'ils puissent voir ce qui s'en vient. C'est beaucoup centré autour de ça. L'immigration, ça fait partie de... c'est un des volets.

Mme Courchesne: Mais, quand vous dites «voir ce qui s'en vient», concrètement, est-ce qu'il y a des mesures plus particulières qui s'adressent à ces gens-là? Est-ce qu'il y a des actions, des activités plus concrètes? Ce n'est pas uniquement de la sensibilisation, que vous faites, ou...

M. Boily (Denis): Dans la stratégie, c'est pour toute la population en âge de travailler, je vous dirais. Le grand problème, au Centre-du-Québec...

Mme Courchesne:...c'est de la sensibilisation?

M. Boily (Denis): Ah! c'est plus que de la sensibilisation. Il y a eu un colloque où on a invité et des travailleurs et des employeurs pour, par exemple, les sensibiliser au fait qu'il y a beaucoup de personnes en entreprise qui vont prendre leur retraite. Et, aussi incroyable que ça puisse paraître, il y a beaucoup d'entreprises qui n'avaient pas fait ce constat-là ? on appelle ça les têtes blanches, en usine, là ? où ils ne voyaient pas que, dans les cinq dernière années, ils étaient pour perdre une partie importante de leurs travailleurs. Ça, c'est une chose.

On veut aussi les sensibiliser, et on a développé des outils, on a développé un site Internet pour permettre aux entreprises d'améliorer leur sélection. Il y a une étude, entre autres, sur le territoire de Plessis, qui montrait que ? on s'éloigne un peu de l'immigration, mais ça fait aussi partie de ça ? que le remplacement d'une personne, d'un travailleur, ça peut représenter entre une demi-fois le salaire à deux fois le salaire de la personne. Donc, si on n'a pas de bons outils de sélection et que les personnes quittent, bien c'est bien évident que c'est des coûts très importants. Et, sur notre territoire, comme on vous disait, 27 % de nos entreprises sont dans le manufacturier. Avec la montée du dollar, c'est bien sûr que d'être compétitif, ça devient de plus en plus difficile. Ça, c'est une part.

On veut aussi sensibiliser les entreprises au potentiel de main-d'oeuvre, mais... bon: les personnes immigrantes, les personnes handicapées, les femmes dans des métiers non traditionnels. Donc, c'est un ensemble de moyens qu'on met en place pour répondre aux besoins de nos entreprises en main-d'oeuvre.

M. Morin (Marc): Ce qu'on... Pardon.

Mme Courchesne: Oui, allez-y.

M. Morin (Marc): O.K. Ce qu'on dit dans ça aussi, c'est que, malgré nos efforts, ce n'est pas suffisant. Quand on prévoit 18 250 nouveaux emplois, déjà on dit qu'il y a 54 % des ces 18 250 emplois là qui sont du remplacement de travailleurs qui partent à la retraite, c'est déjà important. On dit aussi dans notre stratégie: Ce n'est pas juste de la sensibilisation, c'est de la formation. Comme ce dont M. Boily parlait, on a donné de la formation à des entrepreneurs sur le calcul du taux de roulement dans une entreprise: Ça te coûte combien de remplacer un joueur qui s'en va?

Mme Courchesne: À ce moment-là, vous leur dites: Si ça coûte si cher, on vous conseille de remplacer par un immigrant?

M. Morin (Marc): Non, pas nécessairement. Ce qu'on dit, c'est: Il faut absolument que tu travailles à garder tes emplois, à garder tes employés. Puis ce qu'on leur dit aussi, c'est: Prévois, parce que plus ça va, plus tu as de la difficulté à t'approvisionner en main-d'oeuvre. C'est...

Mme Courchesne: Donc, de garder des immigrants si jamais tu en as?

M. Morin (Marc): Oui, oui.

Mme Courchesne: J'essaie de faire le lien avec l'immigration, là.

M. Morin (Marc): Oui, oui. Tout à fait.

Mme Courchesne: O.K. D'accord. Si vous me permettez, parce que le temps presse, j'aimerais aborder un autre sujet. Surtout en région, on le sait qu'il y a une pénurie de métiers spécialisés. Là, je fais référence aux soudeurs, aux opérateurs, etc. On sait qu'il y a des difficultés pour reconnaître l'expérience de ces gens-là, et même la formation. Ce n'est pas évident que la formation d'un soudeur en Algérie est la même que celle ici. Mais, au-delà de la reconnaissance de ces expériences-là, on sait aussi, là, que, dans le secteur de la construction ou tous les métiers qui sont gérés par le secteur de la construction, c'est très difficile ? corrigez-moi si je me trompe, je ne suis pas une spécialiste de ça ? d'obtenir des cartes de compétence. Alors, qu'est-ce qu'on fait? Comment on va régler ça, cette question-là, par rapport aux nouveaux arrivants qui auraient ces compétences-là, ces métiers-là, qui veulent travailler dans votre région, mais on ne peut pas avoir la carte de... Est-ce qu'il y a des solutions? Comment vous voyez ça?

M. Morin (Marc): C'est très délicat.

Mme Courchesne: C'est pour ça que je pose la question.

M. Morin (Marc): O.K. Parce que vous savez que, dans le secteur de la construction, on ne peut même pas envoyer des finissants de centres de formation professionnelle faire des stages. Je vous dirais, là, au risque de ne pas me faire aimer: Les syndicats ne veulent pas, O.K., ça s'arrête là, ce n'est pas discutable. À toutes les fois que, moi, j'ai abordé cet élément-là avec les syndicats avec lesquels je travaillais, la porte se fermait très vite.

Mme Courchesne: Et, je m'excuse, ils répondent quoi aux pénuries de main-d'oeuvre pour les soudeurs? C'est quoi, les réponses? C'est quoi, les solutions, pour eux?

M. Morin (Marc): O.K. En soudage, c'est relié aussi à la construction, mais il y a aussi la partie soudage qui n'est pas reliée à la construction. Présentement, le taux de placement des soudeurs est très bon, très, très bon. Les centres de formation professionnelle commencent à avoir de la difficulté, par exemple, à avoir des clients. Ça, c'est une autre chose qui s'en vient dramatique, là. Moi, je le vis directement, là. Ça touche des emplois, ça touche plein de monde, puis on ne fournit pas le marché du travail. Ça fait que, nous autres, ce qu'on dit, c'est: Oui, ça nous prend des immigrants. S'ils sont formés, tant mieux. Puis les mieux placés pour évaluer si quelqu'un a les compétences professionnelles, je pense que c'est les centres de formation professionnelle.

n (12 h 10) n

Moi, dans mon petit patelin de L'Érable, là, quand j'étais là, je travaillais beaucoup avec les entreprises. Quand on recevait un immigrant, toujours en partenariat avec les centres locaux de développement, bien on pouvait faire une certaine analyse des compétences. On le faisait soit à l'école soit en entreprise. Je pense que c'est dans les centres de formation professionnelle où on est les mieux placés.

On a tout un travail à faire aussi au niveau des entreprises. Les entreprises ont de la difficulté à intégrer convenablement les finissants en formation professionnelle, ça fait que, quand on parle d'un immigrant, on a un travail à faire aussi. Mais, quand tu n'as plus le choix, quand tu ramasses... Je vous donne un exemple. Il y a une entreprise, chez nous, où il y avait quelqu'un qui faisait du pouce en face de son entreprise. L'employeur avait besoin de quelqu'un, il est allé le chercher, il lui a dit: Veux-tu une job? Il dit: O.K. Viens-t'en, tu commences tout de suite. Ça s'appelle CBR Laser, chez nous. Le besoin est comme ça, là. Ça fait qu'ils sont prêts à investir pour former du monde.

Moi, les entreprises, il y en a qui me disent: Former un soudeur, ça me prend deux semaines. Bien, moi, ça me prend 1 800 heures, former un soudeur, mais c'est un soudeur qui va être capable de travailler sur tous les procédés de soudage, pas sur un seul. Ça fait que ça prend des immigrants absolument. Puis les centres de formation professionnelle, on est capables de les former s'ils manquent de compétences.

J'entendais tout à l'heure... On parlait de stages en entreprise. C'est vrai que ce n'est pas toujours évident, de placer tous nos stagiaires. Mais je dirais que ça va de mieux en mieux, parce que les entreprises, souvent elles les veulent même avant qu'ils finissent. Ça fait que, là, si on parle d'immigrants, ils vont être prêts à accueillir ces immigrants-là.

On a déjà... Vous voyez, dans L'Érable, au niveau des statistiques, ils se placent très, très bien. Puis les derniers immigrants qu'on a accueillis, c'étaient des Serbo-Croates, mais ça fait des années qu'on n'en a pas eus dans le secteur de Plessisville. On devait en avoir cette année. Malheureusement, avec l'argent qu'on n'a pas nécessairement au niveau gouvernemental, bien c'est déplacé. Mais ça, pour le secteur de L'Érable, c'est un coup très dur, parce qu'on a des entreprises qui manquent de main-d'oeuvre. Quand tu manques de main-d'oeuvre, tu penses à quoi? À aller t'installer où il y en a. Tu ne penses plus à l'agrandissement. Ça fait que ça a toute une influence au niveau économique.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la ministre, votre temps est écoulé.

Mme Courchesne: Merci.

Le Président (M. Cusano): Alors, je dois céder la parole à la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui. Alors, merci, M. le Président. Moi, je vais aller dans la continuité, en fait, que la ministre vous questionnait, en ce sens... pour la formation de ces gens-là. D'abord, d'une part, vous nous avez dit qu'il y a énormément de besoins. Les gens sont même prêts à les prendre sur le bord de la route pour qu'ils viennent travailler. Donc, des emplois, il y en a, il n'en manque pas.

Par contre, est-ce que c'est parce que l'immigrant... J'essaie de comprendre à quel niveau, à un moment donné, il y a une faille, hein ? parce qu'il n'y a pas d'effet d'attraction, même s'il y a de l'emploi, chez certains immigrants ? où il y a la faille exactement. Et vous avez apporté des choses assez particulières en fin de compte, dans votre mémoire, en leur disant: Allez donc chercher des immigrants qui sont habitués de vivre dans des régions éloignées dans leur pays. Ça, c'est une des premières qu'on entend, puis je trouve ça intéressant. C'est assez particulier en fin de compte, puis là je me dis: Bien, c'est peut-être une expérience qu'on pourrait vivre, quand on fait la sélection: au lieu d'aller chercher toujours les gens dans les grands centres, on pourrait peut-être aller chercher des gens qui sont habitués à vivre déjà en région, avec peu de moyens, mais qu'il y a de l'emploi puis qui sont heureux de vivre de cette façon-là. Ça, j'ai trouvé ça très intéressant et rafraîchissant, dans votre mémoire, parce que vous êtes un des premiers à parler de cet aspect-là des choses.

Le deuxième point que j'aurais à vous dire: au niveau de leur formation. Parce qu'on s'est fait dire qu'il y en a plusieurs qui sont formés d'une chose mais qui aimeraient peut-être apprendre d'autres choses, en autant qu'il y a du monde prêt à leur donner une formation, par exemple. Alors, là aussi, j'essaie de savoir où est la faille. Qu'est-ce qui fait... Parce que vous avez l'air... une bonne expérience dans le milieu du travail, là. Où est la faille? Qu'est-ce qui fait que, finalement... C'est parce qu'on ne donne pas la bonne information au bon moment ou, quand on les sélectionne, on ne leur parle pas suffisamment du Québec, des besoins de notre main-d'oeuvre? Bon. Est-ce qu'on leur donne seulement l'orientation comme quoi... un peu comme la chambre de commerce, tantôt, c'est une forme d'élitisme, en fin de compte, ce que j'ai compris.

Et, vous, par rapport à ça, vous nous dites: Bien, il faut réveiller les entreprises. Il y en a qui sont plus réveillées que d'autres, mais il y en a d'autres encore qui sont un peu... Et vous avez beaucoup insisté sur le rôle social des entreprises. Alors, moi, j'aimerais que vous alliez un peu dans ce sens-là et que vous nous apportiez un peu plus d'éclairage par rapport à ça.

M. Boily (Denis): Je vais répondre en partie et M. Morin pourrait répondre plus au niveau de la formation, parce que c'est notre grand spécialiste, là. Moi, je pense... Et je regarde aller le marché de l'emploi sur notre territoire depuis plusieurs années, et je suis dans ce domaine-là, je suis directeur d'un bureau de placement pour personnes handicapées. Ce que je me dis, c'est que le besoin de main-d'oeuvre, et on l'a décrit tantôt, va être extrêmement important sur notre territoire, même si l'économie ne progresse pas. Même si, demain matin, on garde les jobs qu'on a là, on va être dans le trouble. Ça, pour moi, c'est évident.

Un des constats, et il va falloir regarder comment ça se fait, c'est que présentement on a de la difficulté à trouver des personnes qui veulent aller en formation dans les métiers spécialisés et semi-spécialisés. Il y a des cours, on a les sous, on a les formateurs, on a les maisons d'enseignement; on n'a plus les gens. Donc, il y a un problème, là. Quand on ne peut plus partir un cours de machiniste parce qu'on n'a pas les gens pour les partir, puis on a encore des gens qui sont à la sécurité du revenu, on se comprend, là, je pense qu'il y a un travail en profondeur à faire là-dedans. Mais on a aussi une obligation comme conseils régionaux: c'est de répondre aux besoins de nos entreprises. Parce que, comme on disait tantôt, si on ne leur trouve pas de monde, ils vont s'établir ailleurs.

Et très rapidement ? parce que je ne sais pas comment qu'on a de temps ? et on est au Centre-du-Québec. On a ce nom-là, mais on l'a aussi géographiquement parlant. Si on fait le tour, la région de l'Estrie, eux aussi, ils n'ont pas tant de main-d'oeuvre que ça. Bon. Montérégie, on n'en parle même pas, etc. Donc, on ne peut pas par ? c'est quoi ton beau mot? ? de la migration interrégionale, on ne peut pas, là, combler nos besoins. Je pense très profondément qu'il nous reste l'immigration, O.K.? Contrairement à ce que les gens de Québec disaient tantôt, nous, ce n'est pas des gens ultraspécialisés qu'on a besoin, c'est des gens qui ont des métiers. De toute façon, au niveau de la haute technologie, on est une des régions où il y a le moins de haute technologie.

M. Bédard (François): Bien, juste rajouter quelque chose. C'est que, lorsqu'on parle de 27 % des emplois dans le secteur manufacturier puis on parle de 8 % à 9 % dans le secteur primaire ? l'agriculture ? il n'en demeure pas moins, là, qu'il y en a au moins... Plus de 60 % d'emplois, c'est le secteur tertiaire et des services. Donc, les entreprises et les petites et moyennes entreprises, c'est assez diversifié sur le territoire, d'où, là, les besoins sont assez divers également. Donc, oui, on parlait des semi-spécialisés et spécialisés, mais haute technologie également, le Carrefour de la nouvelle économie est présent sur le territoire, et il y a différents secteurs. Donc, les besoins sont assez divers également.

M. Boily (Denis): Juste pour revenir: Pourquoi on dit qu'il faut arrêter d'aller chercher dans les grands centres? C'est tout simplement qu'on croit... On n'a pas d'étude scientifique, mais on croit que ? puis tantôt les gens de Québec l'ont dit aussi ? que, si on va chercher quelqu'un qui a un territoire qui a une ville d'une grosseur similaire, et tout ça, qu'on a beaucoup plus de chances de les garder sur notre territoire que si on va les chercher dans des grandes villes. Ça, je pense que ce serait facile à prouver, d'une part. Et il faut aussi aller en chercher suffisamment, pas pour qu'ils se créent un ghetto, mais que les gens ne se sentent pas non plus complètement isolés. Au niveau social, Mario va développer.

M. Morin (Marc): Marc.

M. Boily (Denis): Marc ? Mario! ? Marc.

M. Morin (Marc): Il est en train de me baptiser. Vous parliez du rôle des entreprises, du rôle social des entreprises. C'est évident. Puis, moi, j'essaie de vendre ça non seulement pour les immigrants, mais pour tout le monde. Parce qu'on a fait des tentatives, dans L'Érable, pour aller chercher des gens de l'extérieur. Au Lac-Saint-Jean, il y a un gros taux de chômage, on a embauché des gens pour aller chercher du monde, des soudeurs entre autres, au Lac-Saint-Jean, puis les ramener. Bien, il faut que tu t'en occupes, une fois qu'ils sont arrivés. Là-bas, tu jouais à la balle? Bien, c'est possible de jouer à la balle. Dans telle municipalité, il y a des ligues de balle, c'est organisé à outrance. Tu veux jouer au hockey? C'est possible. Tu aimes la pêche? Il y a des lacs, je vais te faire visiter. C'est jusqu'à participer à l'intégration sociale des gens.

On parlait du rôle des municipalités tout à l'heure. Moi, j'ai vu, dans une belle ville de notre région qui est très forte en soccer, en football européen, un paquet de Colombiens, sur les lignes de côté, à regarder les gens jouer puis à se passer le ballon. Excellent. Je les aurais pris tout de suite dans mon équipe. Comment ça se fait qu'ils ne sont pas intégrés tout de suite, même s'ils arrivent au mois d'août? Bien, je pense que les municipalités ont un rôle extrêmement important, dans ça. Il ne faut pas les laisser attendre, parce qu'ils ne veulent pas attendre, ils veulent travailler.

n (12 h 20) n

On travaille en francisation dans les commissions scolaires puis maintenant dans les cégeps. Ça, ça complique les choses un peu. Ce bout-là, on le fait, puis après ça on essaie de travailler aussi à les intégrer au niveau du travail. Quand on a reçu les Serbo-Croates chez nous, bien on voulait faire un SIS après, un service d'insertion socioprofessionnelle, c'est un programme qu'on a à l'éducation des adultes pour insérer des gens sur le marché du travail. Bien, heureusement, on n'a pas été obligé de le faire: à peu près tout le monde travaillait. Ça fait que le rôle social, il faut le jouer absolument. Puis ça, c'est collectif, ce n'est pas... c'est les entreprises, c'est les écoles, c'est les commissions scolaires, les municipalités, c'est tout le monde.

Mme Vermette: Alors, il semblerait que tout le monde fait le même constat: peu importe, il va y avoir une pénurie de main-d'oeuvre à tous égards, tout le monde doit s'impliquer, tout le monde doit trouver la façon de faire les choses. En tout cas, c'est un peu ce qui relève de tout l'ensemble des gens qu'on entend. Puis ce qui est très important, ce que vous avez relevé, c'est qu'on fasse la bonne sélection avec les bonnes personnes et qu'on ait un très bon relevé de la situation de l'emploi au Québec, selon les régions.

Et là je regarde votre table conseil régional, vous me semblez en tout cas avoir un bel éventail de gens. Il vous manque peut-être les maires puis il vous manque peut-être quelques... les maires, et puis je ne sais pas lesquels, là, qui sont très importants. Mais vous semblez avoir une belle représentation au niveau d'une région, des différents partenaires, en tout cas, qui pourraient jouer un rôle important au niveau de la planification, ou en tout cas d'intérêts, ou d'apporter, de mettre en commun certaines expertises, certaines expériences. Alors, ce qui m'amène à vous demander: Au niveau régional, qui devrait être, en fin de compte, le leader? Une fois que la ministre va mettre son plan d'action, qui devrait l'actualiser et de quelle façon devrait-on finalement... par qui devrait-on passer, et comment? Est-ce qu'il y a un modèle unique, ou plusieurs modèles, ou...

M. Boily (Denis): Il y a deux... Puis je pense que c'est à la ministre à prendre la décision. Moi, je pense qu'il y a un ensemble d'intervenants. Qu'est-ce qu'on retrouve au niveau de l'emploi? On retrouve deux grandes structures: on retrouve la structure qui était les... pas les CLD, mais les... mais maintenant qui vont être les CRE, là, on s'entend...

Une voix: CRCD.

M. Boily (Denis): ... ? oui, c'est ça, et maintenant ça va être les CRE ? et il y a les conseils régionaux. Et ça, c'est sur l'ensemble du territoire du Québec, là. Moi, je pense que c'est ensemble qu'on va devoir travailler. On a des rôles différents, hein: il y en a un que c'est un rôle beaucoup plus économique, et, nous, on a un rôle beaucoup plus de préparer et de trouver la main-d'oeuvre. C'est ça, le rôle des conseils régionaux. Et, comme vous avez dit tantôt, il est représenté de l'ensemble des gens qui... bon, autant la formation que le milieu syndical, le milieu patronal, etc. Qui devrait chapeauter? Moi, je pense que ce n'est pas un organisme, c'est un ensemble d'organismes qui devraient travailler pour que les immigrants viennent en région et demeurent en région.

M. Morin (Marc): Si je peux me permettre, quand on sait, parce qu'on nous avertit tout le temps un petit peu d'avance, qu'on va avoir des immigrants sur notre territoire, ça nous donne le temps de préparer à trouver des logements, des choses comme ça, bien ça donne le temps aussi aux différents partenaires de s'asseoir puis dire: Bon, comment... D'où ils viennent? C'est quoi, les problématiques rencontrées? Tout ça, là. Là, je parle surtout des réfugiés, là. Ça fait que ça nous donne le temps de se préparer puis de travailler en concertation.

C'est important, par exemple, parce que ce n'est pas partout pareil, dans les régions, là ? chez nous, il y a beaucoup de partenariat, ailleurs c'est peut-être moins vrai ? c'est important qu'il y ait un organisme, par exemple, qui prenne le leadership de ça. Dans L'Érable, quand on a eu des immigrants, c'est beaucoup le CLSC qui a pris le leadership. La municipalité est venue appuyer, puis la commission scolaire. On a travaillé tous les trois de concertation, on a formé un organisme dans le milieu pour qu'ils puissent... des familles qu'on a jumelées. Ça fait que ça, c'est aidant, c'est facilitant. Mais il faut vraiment qu'il y ait quelque chose de créé pour que ces gens-là se parlent. Parce que, quand il y a un problème, il faut qu'il se règle tout de suite, parce que, si on ne règle pas tout de suite, c'est là qu'on risque de les voir partir.

Le Président (M. Cusano): Merci. Excusez-moi, votre temps étant écoulé, Mme la députée, je cède maintenant la parole à la députée de Chambly.

Mme Legault: Merci, M. le Président. Avec la connaissance que vous avez, là, qui est très approfondie, de votre milieu puis des relations, le dialogue que vous avez avec les employeurs, et tout ça, avez-vous une idée un peu plus précise du nombre d'immigrants travailleurs qui pourraient être accueillis chez vous annuellement, au cours des prochaines années?

M. Bédard (François): Peut-être juste... Ce que je pourrais vous dire, c'est qu'entre 1996 et 2001 il est arrivé un nombre record d'immigrants dans les régions: on parle d'autour de 730 immigrants, 725, puis, au total, on en a à peu près 4 040. Donc, c'est vraiment un nombre important. Et, lorsqu'on regarde les données économiques et est-ce que ces gens-là qui sont arrivés, est-ce qu'ils se sont placés, on a des taux de chômage de 7,7 %, comparativement à au-dessus de 21 % au Québec. Donc, les gens qui arrivent ici, si on parle de nombre... C'est près de dire, aussi: Les immigrants qui arrivent ici, ils se placent. Les données également le prouvent. Les entreprises donc, du fait, se sont également, là... veulent avoir des immigrants également, pour l'emploi. Donc, les chiffres parlent un peu d'eux-mêmes. Puis, si on parle des trois dernières années, on est déjà rendu à peu près à 600, c'est une information que le MRCI nous a donnée, nous a confiée, donc à peu près 600, et, si je ne m'abuse, le taux de placement est également très intéressant.

Donc, le chiffrer en chiffres, c'est sûr que là on n'a peut-être pas les outils pour le chiffrer, mais, dans les dernières années, on se rend compte qu'il en arrive plusieurs et ces gens-là se placent, se trouvent un emploi. C'est un peu ça.

Mme Legault: Alors, il y a une capacité de la région de les accueillir, puis cette capacité-là, là, n'est pas saturée, pas du tout, pas du tout. Puis vous sentez que le leadership puis la concertation des organismes est présente pour continuer dans le même sens?

M. Bédard (François): Tout à fait.

M. Morin (Marc): Ce qu'on essaie de vous dire aujourd'hui, c'est: On en a besoin. On en a besoin puis ils vont travailler. Puis, quand on parle d'adéquation, là, l'emploi qu'ils occupaient là-bas, les compétences professionnelles qu'ils ont, bien c'est une intégration beaucoup plus rapide. J'entendais les gens de la chambre de commerce dire: Des stages. Moi, j'en envoie, des élèves, en stage à toutes sortes de moments parce qu'il y a des entreprises qui ont des grands besoins. Puis, moi, ma philosophie, c'est: que tu apprennes à souder sur l'aluminium à l'école ou en entreprise, tu vas l'apprendre. Ça fait que des stages comme ça, ça facilite l'intégration, c'est évident. Ça fait qu'il y a de la place. Ce qu'on dit, c'est: On en a besoin et vite.

Mme Legault: Une question complémentaire...

Le Président (M. Cusano): Oui, certainement, madame.

Mme Legault: ...sur justement la reconnaissance de la formation, puis des acquis, puis des métiers. Tantôt, vous l'avez abordée, tout à l'heure, là, mais j'aimerais ça pousser un petit peu la réflexion. Est-ce que vous pensez qu'à la limite, dans une région donnée, il pourrait y avoir des mécanisme de reconnaissance de certains métiers parce que répondant à certains besoins plus précis? Est-ce que c'est une approche qu'on pourrait retenir ou avez-vous...

M. Morin (Marc): Permettez-moi. Les commissions scolaires, on est déjà en train de s'équiper comme il faut. On a la politique d'éducation des adultes et de formation continue puis, dans la politique, il y a un chapitre complet sur la reconnaissance des acquis. Ça fait que ça fait l'objet de travail. On le fait déjà, là, mais pas à grande échelle, je vous dirais.

M. Boily (Denis): Il y a aussi Emploi-Québec, avec toute la reconnaissance des acquis, là, où les gens vont pouvoir se former. Non seulement ? pour répondre à votre question ? moi, je pense que c'est obligatoire, de le faire. Il faut trouver une façon d'y arriver, de reconnaître ces acquis-là, parce que souvent la passerelle ne se fait pas... Quand Mme la ministre est venue à Victoriaville, il y avait une personne qui était en agriculture et on ne reconnaissait absolument pas, au Québec, ses acquis, qui étaient fort importants. Et ça, je pense qu'il va falloir, je ne sais pas par quelle structure... Puis il y a un bout qui appartient au milieu de l'éducation et un bout qui appartient à Emploi-Québec, mais il va falloir coordonner des choses là-dedans, il va falloir attacher des choses.

Le Président (M. Cusano): Oui, il vous reste du temps. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Si vous me permettez, je voudrais poursuivre là-dessus parce que je trouve ça bien important. C'est vrai que: éducation, Emploi-Québec, nous. Mais, vous, dans le fond vous êtes aussi beaucoup plus près des situations concrètes. Vous venez de parler de cette dame, dont je me rappelle très, très bien, c'était une Suisse, hein, c'était une agricultrice suisse, dans la région des Bois-Francs. Mais, vous, vous êtes confrontés à ces exemples plus quotidiens, est-ce que vous n'êtes pas aussi des partenaires, là, qui pourraient nous aider à, moi, je veux dire, là, dénouer le noeud gordien?

n (12 h 30) n

Parce que c'est sûr que... Puis Emploi-Québec, je suis contente que vous soyez là aujourd'hui, vous êtes le premier de toute la commission qui êtes venu à titre d'intervenant. Cela dit, je ne veux pas vous mettre en porte-à-faux non plus, mais, si vous saviez comment ça semble ardu et compliqué de nous mettre ensemble, parce que, même quand on se met ensemble, il y a comme des résistances qui à mon sens vont au-delà même des ministères proprement dits. Est-ce que c'est des résistances d'individus? Je ne penserais pas. Je pense que tout le monde reconnaît l'enjeu. Mais je suis obligée de dire le mot «corporatif», là, il y a des résistances corporatives. Puis ça, c'est comme un savon que tu essaies d'attraper puis tu n'es jamais capable de l'attraper. Parce que ça veut dire quoi, ça, «une résistance corporative»? Il n'y a personne qui veut... C'est comme un préjugé, ça, hein: personne n'a des préjugés, mais tout le monde a des préjugés finalement, hein? On n'arrive jamais à savoir par quel morceau... ou à qui il faut vraiment s'adresser pour que ça bouge et ça change. Je comprends que j'ai un leadership à exercer là-dedans. Mais, vous autres qui avez ces exemples-là, vous êtes une bonne source de pression aussi, parce que c'est vos membres, c'est vos employeurs, vos employés. Alors, comment réagissez-vous à ça?

M. Boily (Denis): Moi, je pense que... Je dirais que la vie va nous rattraper...

Mme Courchesne: La quoi?

M. Boily (Denis): La vie va nous rattraper, dans le sens que...

Mme Courchesne: Ah! la vie. Ah, mon Dieu! Mais là il ne faudrait pas qu'elle soit trop longue, la vie, elle est mieux d'être courte.

M. Boily (Denis): Non, mais je pense qu'il y a effectivement des problèmes corporatifs, des problèmes structurels. Il y a toutes sortes de problèmes. Mais la journée où, sur notre territoire, on va voir fermer une entreprise parce qu'il n'y a pas la main-d'oeuvre, je pense qu'on va attacher des choses. J'espère qu'on va le faire avant.

Mme Courchesne: C'est triste, j'espère qu'on va le faire avant. C'est triste parce que toutes les régions ont des problèmes, des difficultés de main-d'oeuvre. Il faut faire ça avant. Moi, je ne peux pas attendre, je ne serai plus là.

M. Boily (Denis): Je ne veux pas dire qu'il faut attendre ça, Mme la ministre, mais je pense qu'à partir de situations où... O.K. On ne la ferme pas, on résout le problème avant, là. Mais je pense que la journée où on va avoir des menaces comme celles-là, on va trouver les moyens de reconnaître les acquis.

Le Président (M. Cusano): Excusez-moi, je me dois de céder la parole au député de Saint-Hyacinthe. M. le député.

M. Dion: Merci, M. le Président. C'est un échange extrêmement intéressant et rafraîchissant, parce que c'est à fleur de pâquerette, hein? C'est vraiment... On parle de choses très concrètes.

J'ai plusieurs questions à poser, mais ça va tout porter sur le même sujet, c'est toute la question de l'intégration et la rétention des immigrants. Vous en avez beaucoup parlé et d'une façon très éloquente. C'est peut-être ce qui m'amène à vous poser encore des questions. C'est que, je pense, et corrigez-moi si je me trompe, une des conditions essentielles à la rétention des immigrants dans un milieu, c'est que l'immigrant soit capable de communiquer avec son milieu. Or, en région, c'est le français qu'on parle. Alors, dans vos régions, avez-vous des problèmes de francisation des immigrants? Comment ça fonctionne?

Le Président (M. Cusano): La question est posée.

M. Morin (Marc): Bon. En région, bon, normalement ce sont les centres d'éducation des adultes qui s'occupent de francisation. Les centres d'éducation des adultes, c'est des gens qui sont très, très, très débrouillards. Quand tu reçois, dans une région comme Plessisville, huit personnes à franciser... Il y a du travail qu'on fait avec le MRCI. Mais, quand la partie francisation n'est pas terminée, on peut récupérer ces gens-là pour leur donner une seconde formation, on les intègre dans d'autres groupes. Ça, ça va. Mais, je dirais, normalement après 1 000 à 1 200 heures, les gens sont quand même capables de se débrouiller. Puis, quand tu vis entouré de gens qui parlent français, tu vas à l'épicerie, ça parle français, tu vas chez le nettoyeur, il parle français, veux veux pas, ça rentre. Cette partie-là, moi, c'est la partie qui m'inquiète le moins en région. La partie qui m'inquiète le plus, c'est toujours l'intégration, comment elle va se faire, cette intégration-là.

Une voix: Sociale.

M. Morin (Marc): Sociale. Sociale et professionnelle. Quand ça, c'est bien géré, ça va aller bien. Si c'est mal géré, ça n'ira pas bien. Même s'ils apprennent le français, s'ils ne sont pas intégrés socialement, c'est: Bye, on est partis! On a essayé d'aller chercher des immigrants, dans L'Érable, aller les chercher à Montréal. On avait un partenariat avec les organismes d'accueil à Montréal. Les gens qui sont sans emploi, on les amenait en autobus ? ça, c'est toujours un projet avec le MRCI ? on leur faisait visiter la MRC. Des gens comme moi allaient leur vendre la MRC: au niveau éducation, quels services tu peux avoir ici, qu'est-ce que tu peux retrouver; au niveau emploi, qu'est-ce que tu peux retrouver. Bien, notre taux de réussite, là, je peux vous dire qu'il est très, très, très bas avec ça, parce qu'ils sont déjà établis là-bas, ils ont leurs communautés là-bas. Ce qu'on ne peut pas offrir, nous autres. Ça fait qu'il y a ce bout-là.

Là, présentement il y a les cégeps qui commencent à faire de la francisation, parce qu'on dit: Les plus scolarisés, vous allez aller au cégep; les moins scolarisés, vous allez aller dans les centres d'éducation des adultes pour vous faire franciser. Bien là on déchire les familles tout de suite en arrivant. Au lieu de les garder ensemble, on les déchire: Toi ? je donne un exemple comme ça ? l'épouse, tu vas aller à l'éducation des adultes, toi qui as un bac dans ton pays, tu t'en vas au cégep pour la francisation. Bien, la francisation, là, ça peut se faire à un seul endroit pour ces deux-là, l'entraide qu'ils peuvent se donner au début, l'encouragement, le support qu'ils peuvent avoir. Imaginez-vous, juste en transport le matin, là, on te déchire, quelques semaines après ton arrivée, là: Toi, tu t'en vas là, toi, tu t'en vas là-bas, on ne dîne pas ensemble nécessairement, c'est déjà une grosse déchirure. C'est très humain, l'immigration. C'est des êtres humains. Puis ça, il faut y penser beaucoup.

Ça fait que, pour me répéter, la francisation, pour nous, ça va, sauf que j'ai cette crainte-là. Puis, pour l'intégration des gens, bien on a un travail à faire, on a un travail de formation ? c'est mon domaine ? puis je pense qu'on est capables de le faire.

M. Dion: Excusez, mais il y a une contradiction, je pense, dans ce que vous dites. Vous dites: Ça va, chez nous, il n'y a pas de problème, mais il faut déchirer les gens pour ça, déchirer les familles, tout ça.

M. Morin (Marc): Ce n'est pas tout à fait ça que je disais. C'est que, aller jusqu'à tout dernièrement, il n'y avait qu'une place où on avait la francisation, c'étaient les commissions scolaires. Depuis, je dirais, le début de l'année, il y a deux places pour faire de la francisation: pour les plus scolarisés, au cégep; pour les moins scolarisés, dans les commissions scolaires. C'est là où je dis qu'il y a un déchirement. Tu dis à l'épouse: Toi, tu vas aller au secondaire, puis tu dis au mari: Toi, tu es plus scolarisé que ta femme, tu t'en vas au collégial. Puis en plus il y a les enfants qui s'en vont dans des écoles. Ça fait que c'est ça que je dis que ça fait un élément négatif dans la francisation, quand on sépare les familles comme ça. Ça fait qu'il n'y a pas de contradiction dans ce que je dis, là.

M. Dion: On va continuer sur ce thème-là, mais je pense que ma collègue a une question urgente à vous poser.

Le Président (M. Cusano): Mme la députée de Prévost.

Mme Papineau: Oui, urgente et en fait sur l'éducation des enfants, l'apprentissage des enfants. Dans votre région, une famille arrive avec deux jeunes enfants, neuf ans, 11 ans, qu'est-ce qui arrive avec ces... Ils ne parlent pas français, il faut les franciser. Qu'est-ce qui arrive dans votre région?

M. Morin (Marc): C'est très rapide, la francisation au niveau des enfants, ils s'intègrent beaucoup plus facilement que les parents.

Mme Papineau: Je ne parle pas d'intégration, je parle de francisation. On les met où? Ils arrivent sur votre territoire, ils vont à l'école, on les met à l'école, mais on les met où?

M. Morin (Marc): O.K. S'ils arrivent l'été, il y a quelqu'un qui les prend en charge tout de suite, là, par la commission scolaire, O.K.? Ça fait qu'on les intègre... Il y a une petite formation de base, après ça il y a intégration dans des classes. Ça va vite comme ça.

Mme Papineau: Dans des classes...

M. Morin (Marc): Dans des classes régulières.

Mme Papineau: Régulières.

M. Morin (Marc): J'ai un petit milieu.

Mme Papineau: Parfait.

M. Morin (Marc): Parce que, dans les classes régulières, c'est phénoménal comme ces jeunes-là apprennent rapidement.

M. Dion: Juste sur la question...

Le Président (M. Cusano): Vous disposez de deux minutes, M. le député de Saint-Hyacinthe, deux minutes, brièvement, là.

M. Dion: Merci, M. le Président. Il y a tellement de choses à discuter, mais ça ne fait rien, on profite au moins du temps que vous êtes là.

Sur la question des déchirements des familles, et tout ça, vous me permettrez de mettre un bémol sur ce que vous avez dit, parce qu'il arrive que, dans certaines cultures, il y ait une certaine domination de quelqu'un, dans la famille, par rapport à l'autre. Et le fait d'être ensemble dans le même cours, ça fait qu'il y en a un qui apprend puis l'autre n'apprend pas. Alors, c'est assez complexe quand même.

n (12 h 40) n

Un autre phénomène qu'on remarque, dans les écoles, chez nous, c'est que les enfants sont intégrés beaucoup trop tôt dans les classes régulières et ce qui fait qu'ils prennent des retards et accusent des échecs pédagogiques, des échecs de matière, parce qu'ils n'ont pas le minimum, et ça crée des problèmes importants et de l'angoisse, de la difficulté de s'intégrer, parce qu'ils se sentent un peu rejetés, étant déjà des gens de l'extérieur dans la société. C'est un problème important, ça, je me demande s'il n'y a pas des choses à réfléchir là-dessus.

M. Morin (Marc): En tout cas, je ne suis pas tellement bien placé pour vous dire que, chez nous, ça a été un problème important. J'ai eu connaissance d'un cas qu'il y a eu un retard d'un an. Mais je vous dirais que, dans certains cas, il y a comme une espèce de normalité, là, tu arrives dans un nouveau milieu. Mais je vous dirais que maintenant ce jeune-là, il est très performant, en mathématiques entre autres. C'était un Serbe. En mathématiques, ça a été très rapide, lui. Ça, ça n'a pas été un problème. C'est dans les autres matières où il a eu des difficultés, parce qu'il a tout un bagage à rattraper. On essaie de le pénaliser le moins possible, mais il y a tout un bagage qui se rattrape en cours de route. Mais ça, c'est une question d'accompagnement avec l'élève.

Dans tout ce que je dis, là, il ne faut pas oublier qu'il y a comme la question de partenariat puis d'accompagnement. Parce que c'est sûr que, si tu lui dis, à ce jeune-là, en partant: Ça va être facile, tu vas apprendre comme ça, ce n'est pas nécessairement vrai, là. C'est sûr qu'il y a des difficultés, mais tu as du temps, tu es jeune, tu as du temps, tu vas t'adapter, puis ce ne sera pas long que tu peux reprendre du temps, effectivement. Parce que ces jeunes-là, ils arrivent au début de l'année, ils ont de la difficulté; rendus en décembre, c'est pas mal moins pire; puis, à la fin de l'année, parfois ils sont dans les meilleurs. Parce qu'ils apprennent très vite la langue, ils sont baignés dans cette langue-là.

Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Avant d'ajourner nos travaux, j'aimerais, avec la permission de mes collègues, donner la parole à la députée de Chambly pour une brève intervention.

Mme Legault: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Il y a consentement. Mme la députée.

Mme Legault: Merci. M. Boily, M. Morin, M. Bédard, je veux vous remercier, au nom de Mme Courchesne, de votre présence parmi nous aujourd'hui. Mme la ministre a dû s'absenter parce qu'elle a un point de presse, mais nous sommes tout à fait ravis, puis on reconnaît votre travail absolument positif dans votre milieu, puis soyez assurés de notre collaboration.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée. Moi aussi, j'aimerais vous remercier, M. Boily, M. Morin et M. Bédard, pour votre collaboration et l'échange extrêmement intéressant. Pardon?

Une voix: ...

Le Président (M. Cusano): Oui, effectivement les documents peuvent rester ici pour les membres de la commission, l'endroit sera barré. Alors, je suspends les travaux à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 43)

 

(Reprise à 14 h 5)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture reprend ses travaux. À ce moment-ci, nos invités sont les membres du Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour personnes immigrantes. Alors, messieurs les invités, pour les fins du Journal des débats, voulez-vous bien vous identifier, s'il vous plaît.

Comité d'adaptation de la main-d'œuvre
pour personnes immigrantes (CAMO-PI)

M. Hains (François): Oui, bonjour. François Hains, directeur général du CAMO-Personnes immigrantes.

M. Diop (Mamadou): Bonjour. Mamadou Diop, je suis agent de développement pour les régions. Je suis de la région de la Capitale-Nationale. CAMO-Personnes immigrantes, aussi.

Le Président (M. Cusano): Merci. Pour le déroulement de nos travaux, j'aimerais vous expliquer brièvement les règles qui nous guident. Vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, les députés auront la possibilité de faire leurs commentaires pour une période maximale de 40 minutes, partagées entre le côté ministériel et le côté de l'opposition. Alors, la parole est à vous.

M. Hains (François): Merci. Alors, le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour personnes issues de l'immigration, le CAMO-PI, est heureux de participer à la présente consultation publique sur la planification des niveaux d'immigration. Tout en saluant une telle initiative, nous espérons qu'elle nous permettra de mieux planifier l'immigration de manière à favoriser une meilleure intégration des nouveaux venus et ainsi bâtir une société de plus en plus inclusive.

Je vais procéder à une brève description du CAMO. Le CAMO-PI a pour mission d'élaborer et de mettre en oeuvre, en étroite collaboration avec les secteurs privé et parapublic, le milieu communautaire et le mouvement syndical, une stratégie d'intervention pour accroître l'intégration au marché du travail et assurer le maintien en emploi des personnes issues de l'immigration. Cette stratégie accorde une attention particulière aux groupes qui ont le plus de difficultés à s'intégrer, notamment les femmes, les nouveaux arrivants et les allophones.

Depuis 1996, le CAMO-PI s'est vu confier des mandats afin de réaliser cette mission. Les principaux mandats sont de: favoriser l'accès à l'emploi des personnes immigrantes en préconisant des mesures, des programmes et des outils d'intervention adaptés, notamment en matière d'information sur le marché du travail, de formation de la main-d'oeuvre et d'acquisition d'expérience de travail; élaborer et proposer des solutions potentielles, des approches et des pratiques d'intervention appropriées et adaptées s'adressant tant aux entreprises et aux employeurs qu'aux intervenants des services d'emploi, selon les besoins et les problématiques particulières d'intégration au marché du travail et de maintien en emploi des personnes immigrantes; déterminer et analyser les obstacles qui subsistent toujours quant à l'intégration au marché du travail et au maintien en emploi; élaborer et mettre en oeuvre, en collaboration avec les secteurs public, privé, le milieu communautaire et le mouvement syndical, des stratégies d'intervention favorisant l'accès au marché du travail; et enfin notre dernier mandat est de coordonner la mise en oeuvre de certaines mesures ou initiatives retenues par le comité en vue de favoriser l'accès et le maintien en emploi des personnes immigrantes. Le CAMO-PI a élaboré et mis en oeuvre une série de projets visant à contrer les obstacles reliés à l'intégration en emploi des personnes issues de l'immigration, entre autres ? vous avez quelques exemples: au niveau de la recherche, une étude exploratoire sur la situation des salariés immigrants du Québec; une mise à jour du recensement en 1996; un projet d'accès rapide à l'Ordre des ingénieurs du Québec; un projet d'intégration à la profession d'infirmière au Québec; un projet d'intégration à la profession d'infirmière auxiliaire au Québec; et un projet d'activités d'immersion professionnelle à Montréal et en région. Ce sont quelques-unes des réalisations du CAMO au cours de ces dernières années.

n (14 h 10) n

Le CAMO a présenté un plan triennal stratégique ces derniers mois, et nous présentons à chaque année un plan d'action. Le plan d'action 2004-2005 du CAMO s'est essentiellement inspiré d'une journée de consultation que nous avons faite auprès de nos partenaires gouvernementaux, privés, publics et communautaires, et de notre planification stratégique 2004-2007. De cela est sorti quelques objectifs stratégiques, dont: procéder à un diagnostic sur les besoins de la clientèle issue de l'immigration; développer une stratégie pour insérer le secteur des entreprises au mandat du CAMO-PI pour mieux les intégrer; élaborer et réaliser une stratégie d'information et de communication; et préparer une stratégie d'intervention concertée en région. Ce sont des axes stratégiques que l'on entend développer dans les trois prochaines années.

Un bref état de la situation d'après nous. L'immigration constitue un enjeu majeur pour le développement économique et social du Québec. Le déclin démographique, le vieillissement de la population et les prévisions de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée sont autant de raisons qui poussent les gouvernements à recourir à l'immigration comme solution. Cependant, il convient de rappeler que nous ne pouvons pas compter que sur cette ressource pour corriger la situation. Encore faut-il que la société québécoise intègre les personnes qu'elle invite à venir s'établir chez elle. Très important. L'intégration des personnes immigrantes ne pourra se faire sans l'adoption de mesures actives, comme la mise en place de mécanismes et de programmes de formation de courte durée visant la mise à niveau plutôt qu'une reprise complète des études dans certains cas.

Pour suivre, je vais vous énumérer brièvement quelques exemples de difficultés que les personnes immigrantes vont rencontrer au niveau de l'intégration sur le marché du travail, entre autres quelques-unes qu'on a relevées. La présence de frontières géographiques dans la configuration de l'offre de service. Il arrive, par exemple, qu'un centre local d'emploi d'une région donnée refuse d'admettre un candidat dans un programme d'insertion parce que cette personne-là vient d'une autre région. Que faire lorsqu'on habite dans une région qui ne dispose pas d'un tel programme ou qui n'est desservie par aucun organisme?

Il y a aussi la confusion des concepts de pauvreté et de sous-scolarisation. De nombreux intervenants ne veulent pas offrir de formation aux universitaires issus de l'immigration. Du fait de leur plus haut niveau de scolarité, ces candidats ne sont pas considérés comme formant une clientèle démunie. Là, on se trouve ainsi à exclure des personnes possédant justement un atout de taille, qui, combiné à une offre de formation d'appoint, leur permettrait d'échapper rapidement et avec une économie de moyens à leur état de précarité.

La source de revenu. Du fait des conditions d'accès à l'aide sociale et à l'assurance-emploi, un nombre significatif de personnes issues de l'immigration ne reçoivent pas d'allocation, ce qui compromet leur admission dans les programmes soumis à des quotas, par exemple les programmes dont un des paramètres est l'obligation d'admettre une majorité de prestataires de l'assurance-emploi.

Il y a aussi l'obligation de ne pas avoir déjà bénéficié d'une formation subventionnée. Il s'agit ici d'un frein important pour le parcours vers l'emploi de certains candidats. Il arrive fréquemment en effet qu'une personne issue de l'immigration ait des besoins de formation successifs et complémentaires. C'est le cas, par exemple, d'un certain nombre d'ingénieurs issus de l'immigration qui sont allophones. Avant d'intégrer leur profession, ils auront sans doute besoin de francisation, de préparation aux examens de l'ordre et de formation d'appoint en informatique.

Il y a la trop courte durée aussi des projets pour les personnes immigrantes qui sont éloignées du marché de l'emploi, l'impossibilité de tenir compte de la triple vision préventive, curative et de maintien dans laquelle doivent s'inscrire nos interventions. En effet, pour rentabiliser davantage des projets tels que celui d'immersion professionnelle pour les membres des minorités visibles ? ce projet n'a pas été renouvelé ? il faudrait, dans le cas de certains candidats, aménager une aide à long terme, comportant notamment des étapes de préparation, d'insertion et de maintien, donc une intervention à plus long terme que quelques mois. Et il y a aussi le manque de ressources dans plusieurs cas.

Malgré ces difficultés ? il y en a bien d'autres, ce ne sont que des exemples ? on revient un peu au succès des projets que le CAMO a menés lors de ces dernières années et qu'il mène encore dans plusieurs cas, entre autres les projets d'accès rapide à l'Ordre des ingénieurs du Québec. Nous avons un projet à Montréal, qui est en cours, et un aussi à Québec, qui est nouveau cette année, avec l'Université Laval. Le projet à Montréal, jusqu'à présent il y a 125 personnes qui en ont bénéficié. Il y en a 85 en moyenne qui ont réussi les examens donc pour devenir membre de l'Ordre des ingénieurs du Québec, et là-dessus il y en a 64 % qui ont trouvé un emploi dans leur domaine de compétence.

Au niveau du projet Infirmières, en 2002-2003, il y a 100 % de réussite à la formation et aux examens, 100 %, et le taux de placement est de 83 % en date de janvier 2004. Le projet Infirmières auxiliaires: 100 % de réussite à la formation et à l'examen, et un taux de placement de 85 %, qui sont de très bons résultats, quant à nous. Et le projet d'immersion professionnelle, à Montréal, il y a plus de 1 467 personnes issues de l'immigration qui ont réalisé des stages sur cinq ans. La rétention en emploi suite à ces stages est de plus de 85 % en moyenne. Ces stages d'immersion là, le principe, c'est de permettre à une personne issue de l'immigration d'avoir une première expérience de travail au Québec. C'est très important dans un parcours.

Après ce bref aperçu ? le temps file ? je vais vous entretenir de notre réflexion sur les trois scénarios, les avantages et les inconvénients des trois scénarios au niveau du taux d'immigration. Le scénario au niveau de la réduction du volume global est quant à nous une stratégie de régression non viable à court terme. Une réduction du volume global des admissions se traduirait par un déficit sur le sol migratoire net, avec des conséquences sur la croissance démographique et économique du Québec.

Le scénario sur la croissance des volumes d'admission est selon nous une stratégie prématurée et incomplète, dans le sens qu'elle apparaît comme une solution à envisager immédiatement à cause des enjeux démographiques, cependant elle ne propose pas de moyen pour atténuer les difficultés d'intégration déjà observées: plus de 11,7 % du chômage chez les immigrants. Elle ne semble pas prendre en considération que ce sont les nouveaux immigrants qui vivent de sérieux problèmes de chômage: 20,5 % pour la population admise entre 1996 et 2000. Et elle tient pour acquis qu'en s'adaptant l'offre de service pourra faire face à la demande liée à une forte croissance des flux migratoires et la tendance du marché, alors que celles-ci peuvent fluctuer pour diverses raisons. Elle est davantage axée sur les gains migratoires comme panacée pour contrer la décroissance démographique du Québec.

Le scénario que nous favorisons à l'heure où on se parle, c'est celui de la stabilisation des volumes d'admission, qui pour nous est une stratégie prudente à maintenir pour améliorer et pour évaluer une période de consolidation, si l'on veut. Les avantages sont de faire le point sur la situation réelle des personnes déjà admises, de mettre sur pied un programme national d'intégration des personnes immigrantes au marché de l'emploi, qui réunirait la population active et les ressources d'intégration autour d'objectifs quantifiables, telles que les ministères, les organismes communautaires, les syndicats.

Ça nous permettrait d'évaluer, après un exercice triennal de ce programme de stabilisation, les retombées des nouveaux efforts déployés. Ça nous permettrait d'ajuster les ressources financières pour une meilleure intégration des personnes immigrantes, d'offrir un financement adéquat aux organisations qui travaillent auprès des personnes immigrantes, entre autres et principalement les organismes communautaires, qui travaillent très fort sur le terrain. Ça nous permettrait de mieux planifier et coordonner les stratégies d'intégration actuelles, de mettre davantage l'accent sur la réussite de l'intégration des personnes immigrantes et de favoriser la contribution positive des immigrants à la croissance économique.

Enfin, ça pourrait préparer le terrain à l'adhésion de la population native à une éventuelle augmentation des volumes d'admission. Ça pourrait nous permettre d'accroître la capacité d'accueil et d'intégration en région et de cibler les candidats à l'immigration en fonction des besoins réels des employeurs et du marché de l'emploi au Québec, et enfin mettre l'accent sur la contribution économique de la catégorie regroupement familial et composante familiale.

n (14 h 20) n

Ce que nous recommandons globalement, c'est une stabilisation pour faire une consolidation. D'après le CAMO-Personnes immigrantes, qui est un organisme de recherche et de développement de nouvelles stratégies et de nouvelles solutions, pour nous, les ressources qui sont maintenant en place sont nettement insuffisantes, et il y a certainement une consolidation à faire au niveau de la cohérence entre les différents acteurs au niveau de l'immigration, de l'accueil, du recrutement à l'extérieur, à l'accueil et à l'intégration à l'emploi ici, au Québec.

Alors, on recommande la mise sur pied d'une table interministérielle, quelque chose lui ressemblant, permettant l'articulation d'un programme national d'intégration à l'emploi des personnes issues de l'immigration, qui nous permettrait d'évaluer, après un exercice triennal de ce programme, les retombées des nouveaux efforts déployés, qui pourrait offrir les ressources financières adéquates pour l'articulation d'un programme national d'intégration des personnes immigrantes et qui impliquerait l'ensemble des acteurs de la société ? les gouvernements, les organismes communautaires, les entreprises, les syndicats ? pour la mise en place et le suivi de ce programme d'interrelation.

Je compléterais en donnant peut-être quelques idées qui seraient avancées, qu'on pourrait avancer dans le cadre de cette table interministérielle, brièvement. Au niveau de la sélection des candidats à l'étranger, on pourrait disposer d'un mécanisme de sélection capable d'assurer l'adéquation entre les besoins économiques et démographiques et les bassins de candidats disponibles.

Au niveau de l'accueil, on pourrait mettre en place un mécanisme pour offrir de l'information aux personnes présélectionnées par l'immigration dans les bureaux à l'étranger, dès leur sélection à l'étranger. On pourrait aussi, c'est important à notre sens, élargir l'offre de francisation en y associant davantage les employeurs, les syndicats, les comités sectoriels et les organismes communautaires. Organiser une campagne d'information à l'intention de la société d'accueil, ça fait partie, je pense, d'une formule gagnante.

Au niveau de la formation, je crois qu'on préconise plus de souplesse, des formations de courte durée qui viennent compléter le manque, des fois, à l'ajustement qui doit se faire. Au-delà du soutien financier qu'il accorde à des programmes spécifiques, le gouvernement doit se soucier de leur appropriation par les systèmes en place. Il y a là un champ de collaboration entre le MEQ et le MESS, entre autres. On peut parler globalement du ministère de l'Éducation et d'Emploi-Québec qui sont deux grands interlocuteurs dans ce dossier.

J'aimerais y aller rapidement. Au niveau de l'accès à l'emploi, que le gouvernement développe une vision d'ensemble des besoins des personnes immigrantes et mette en place des mesures correctives. Je vous dirais grosso modo qu'au niveau du CAMO-Personnes immigrantes nous voyons les difficultés d'intégration au marché de l'emploi des personnes immigrantes sur le terrain. Cependant, pour nous, il est clair qu'on devrait agir au niveau décisionnel. Le CAMO-Personnes immigrantes, sur le terrain, ne peut pas apporter de rectificatifs à lui seul, ne peut pas apporter de rectificatifs importants au niveau des incohérences entre certains services, certains ministères, un manque de souplesse. C'est des choses qui peuvent se régler un petit peu plus haut que sur le terrain. Alors, c'est un peu ça qu'on préconise, c'est qu'il y ait une table interministérielle qui s'occupe de l'intégration des personnes immigrantes en emploi. Et, pour ce faire, je crois qu'on doit avoir un moment de réflexion et une période de consolidation.

Dernière intervention rapide. Au niveau de la fonction publique, nous avons comme partenaires, au niveau de l'insertion des personnes immigrantes...

Le Président (M. Cusano): Conclusion, M. Hains, vous ne disposez plus que d'une minute, maintenant.

M. Hains (François): Ah! j'avais à peu près prévu ça, une minute. Au niveau de la fonction publique, nos partenaires sont, bon, le Conseil du trésor, le MRCI, le Conseil des relations interculturelles et la TCRI. Le CAMO-PI est membre de plusieurs comités. Nous intervenons auprès de la clientèle et des organisations. Nous avons élaboré un programme de préparation aux examens. Plusieurs organismes ont été formés à son utilisation. Nous aimerions être soutenus maintenant pour l'utilisation du programme auprès des clientèles, à l'échelle provinciale. L'outil est là, mais on n'a pas les ressources pour l'appliquer. Nous travaillons présentement à l'élaboration d'un cadre de référence pour le maintien en emploi des communautés culturelles par la gestion de la diversité culturelle au travail. Et nous aimerions proposer, dans le cadre de notre prochain plan d'action, un programme national de stages, pour les nouveaux immigrants, dans la fonction publique. J'ai terminé.

Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue. Merci d'être avec nous. Vous savez, partout au Québec ? je n'exagère pas beaucoup, là, parce que des fois je peux exagérer, mais là je n'exagère pas beaucoup ? on entend parler du CAMO, puis, hein, vous le savez, ça, hein? Moi, je vous dirais que je respecte beaucoup votre expertise en emploi, dans l'intégration en emploi. Je sais ce que vous avez fait, je connais un peu certaines de vos réalisations ou la façon dont vous travaillez.

Puis je vous avoue qu'à cette commission-ci on peut dire que, de façon quasi unanime, là... Honnêtement, je pense qu'il n'y a pas un mémoire, un groupe qui est venu devant nous et qui ne nous a pas dit qu'un des principaux enjeux était l'emploi. Bien sûr, aussi la francisation, ça va de soi, mais la francisation... Nous sommes très conscients qu'il y a des choses à améliorer en francisation, il y a des façons de faire à adapter en francisation, mais nous en faisons déjà. Tandis que l'intégration en emploi, tout le monde en parle, certains en font, puis certains en font très bien, particulièrement en région.

Mais, moi, ce que je voudrais savoir de vous, c'est... Et vous savez qu'il y a un plan d'action qui s'en vient, qui est en cours, avec un chapitre important sur l'emploi. J'écoute puis je me dis: Bien, je pense que nous sommes dans la bonne direction sur le type de mesures à proposer. Mais je vous dirai franchement qu'à chaque fois que j'ai des séances de travail avec mes gens puis à chaque fois que j'écoute des groupes je me dis: Est-ce qu'on rêve en couleurs? Est-ce que, quand on parle de l'arrimage entre les personnes que nous accueillons et les pénuries ou les raretés de main-d'oeuvre dans les régions, cette nécessité d'interrelier davantage ceux et celles que nous sélectionnons avec les besoins, est-ce que c'est idéaliste ou utopique de penser que, par exemple, une approche plus personnalisée peut apporter de réels résultats? Et, si votre réponse, c'est non, ce n'est pas trop idéaliste ? je pose la question même si on a entendu plusieurs réponses ? je veux savoir: Au-delà d'une table interministérielle ? j'y reviendrai dans une autre question, là ? sur le terrain, là, concrètement, comment et qui seront les plus efficaces pour donner un résultat, je dirais, aussi significatif?

M. Hains (François): Je vous répondrais: Sur le terrain, de la façon dont on fonctionne, le CAMO, je pense que c'est une des solutions, là, qu'on doit mettre de l'avant. Nos actions sont basées sur le partenariat sur le terrain, dans le sens où la personne immigrante doit souvent faire face à plusieurs normes de plusieurs systèmes différents: le ministère de l'Éducation pour son diplôme, le marché de l'emploi pour son expérience. Il y a d'autres normes, les normes professionnelles. Alors, nous, ce que nous essayons de faire, c'est d'asseoir tous ces partenaires-là, potentiels, ensemble pour s'entendre, pour faciliter le parcours de la personne.

Mme Courchesne: Oui, mais là vous suscitez une bonne question, parce qu'une des questions... Puis je sais que vous travaillez beaucoup avec Emploi-Québec, hein, je sais ça.

M. Hains (François): Oui, nous sommes en comité sectoriel d'emploi.

Mme Courchesne: Oui, sectoriel. Mais est-ce qu'à ce moment-là c'est la formule du guichet unique? Moi, je vous avoue que j'ai fait pas mal le tour du Québec, là, puis j'ai trouvé ça inégal d'une région à l'autre. Et je vous dirais que le succès d'Emploi-Québec dans certaines régions, en tout cas ma constatation, c'est que ça dépend beaucoup des individus qui en ont la charge et qui y croient et certains qui y mettent une énergie, un dynamisme différent des autres.

n (14 h 30) n

Cela dit, là, je ne suis pas en train de faire... Je reconnais d'emblée le progrès immense accompli par Emploi-Québec, depuis quelques années, sur le dossier de l'immigration. Mais il n'en demeure pas moins que ça fait... même si vous reliez des partenaires, tu sais, c'est long, c'est ardu, c'est lourd de faire en sorte... Parce que l'immigrant, là, lui, il ne veut pas savoir le nombre de partenaires qui vont lui trouver un emploi, lui, il veut l'emploi. Alors, j'ai de la misère à trouver véritablement la bonne façon pour m'assurer que l'employeur, l'immigrant, ça va bien ensemble. D'autant plus que tous ces intervenants-là, ils sont comme un peu dispersés. Puis la tendance, là, ma tendance, depuis 10 mois, c'est de dire et de faire que je vais là où je ressens des volontés, les organismes qui manifestent des volontés, les gens qui manifestent le désir, l'intention, qui ont l'expertise. Tu sais, j'ai tendance à aller là où la volonté, pour ne pas... parce que, sinon, on ne s'en sort pas. Est-ce que j'ai raison? Est-ce que j'ai tort? Est-ce que c'est la bonne façon? Tout en sachant que c'est presque du cas-par-cas puis en sachant que, d'une région à l'autre, bien on va aller...

Puis la députée de Marie-Victorin, elle l'a dit plusieurs fois, au cours des derniers jours, elle a dit: Dans le fond, ce n'est jamais les mêmes, il n'y a jamais de fil conducteur. Ça fait que je suis un peu rendue... Elle m'a influencée, je suis rendue comme elle, je dis: Bien, dans le fond c'est qui... Est-ce que c'est ça, la bonne approche, ou s'il faut standardiser davantage?

M. Hains (François): Il y a deux choses, je crois, là, qui sont déjà, là, dans les directions que le CAMO a prises. Premièrement, nous, quand on met un parcours, quand on facilite le parcours des ingénieurs venus de l'étranger à la Polytechnique, le but de ce nouveau parcours là, c'est que ça devienne une mesure permanente, ce n'est pas de recommencer l'expérience à chaque fois, O.K.? Dans ce sens-là, on atténue les difficultés du candidat. Et, une fois qu'on a créé un parcours qui peut devenir permanent, c'est-à-dire, dans le cas de la Polytechnique, qui devient un certificat officiel de la Polytechnique et qui... où Emploi-Québec et le MRCI vont participer au financement de ce programme-là, pour nous, c'est une réussite. Ça, c'est une chose.

Ce programme-là de certificat pourra éventuellement, comme celui de tutorat au niveau des ingénieurs, être exporté dans une région. Le programme de tutorat, le premier volet de notre programme d'intégration à l'Ordre des ingénieurs, à Montréal, est rendu à Québec, ici, avec la couleur locale. Mais, une fois qu'on a trouvé une solution et qu'elle est autoportante, entre guillemets, elle peut s'exporter dans les régions. Ça, c'est une chose.

L'autre chose, ce qu'on disait tantôt par rapport au mémoire, c'est que c'est évident que ça ne suffit pas. Ça doit... En fin de compte, les difficultés que l'on rencontre, nous, sur le terrain, et qu'on atténue, et à travers lesquelles on réussit à faire un parcours facilitant pour les personnes immigrantes, ces difficultés-là à un moment donné devaient être traitées un peu plus haut, devaient être traitées justement au niveau d'une table où il y a des gens qui ont le pouvoir décisionnel, qui peuvent décider d'atténuer certaines difficultés ou certaines incohérences soit entre deux programmes d'Emploi-Québec soit entre un programme du ministère de l'Éducation et d'Emploi-Québec au niveau de l'accessibilité, au niveau de la durée, des choses comme ça.

Mme Courchesne: Maintenant, je connais très, très bien les programmes des ingénieurs et des infirmières, mais ce que je comprends aussi, c'est qu'il faudrait faire ça dans tous les ordres. C'est-u réaliste de penser qu'on va le faire dans tous les ordres et puis...

M. Hains (François): Je vous dirais que, nous, en fin de compte, l'idée à travers tout ça, c'est de répondre à un besoin. Je ne connais pas tous les ordres professionnels ? je pense que M. Gariépy, qui vient après moi, va pouvoir vous en parler pas mal mieux que moi ? mais je ne crois pas qu'il y ait une pénurie, la même pénurie au niveau de tous les ordres professionnels. Je ne crois pas qu'il y ait...

Mme Courchesne: Non, ça, je suis d'accord.

M. Hains (François): O.K. Alors, nous, quand on arrive dans une région, quand on veut faciliter le parcours à un ordre professionnel dans une région donnée, c'est toujours suite à un besoin. On doit avoir besoin, exemple, d'ingénieurs dans cette région-là, on doit pouvoir lui donner un service dans une université de cette région-là et il doit y avoir un bassin suffisant de personnes issues de l'immigration qui veulent faire le parcours. Alors, dans ce sens-là, le faire pour tous les ordres professionnels, je ne crois pas qu'il y ait un besoin pour ça.

Mme Courchesne: Est-ce que, vous, vous travaillez beaucoup avec le ministère de l'Éducation?

M. Diop (Mamadou): On a déjà fait une étude, dans la région de la Capitale-Nationale, avec le ministère de l'Éducation sur le profil de la clientèle immigrante de la région. C'est la seule étude qu'on a faite avec eux. C'est sûr que c'est un partenaire essentiel pour nous, mais il n'y a pas eu de projet concret à part cette étude qu'on a menée.

Mme Courchesne: C'est parce que vous avez dit, dans votre présentation, qu'il faudrait encourager des formations courtes, puis, moi, je suis très d'accord... D'ailleurs, la raison pour laquelle, là, le programme d'infirmière fonctionne à 100 %, là, c'est bien simple, c'est parce que c'est juste trois mois ou à peu près, la formation, là, hein? C'est une formation qui est très courte évidemment pour des infirmières qui viennent majoritairement des pays européens ? majoritairement, on n'est pas, là, dans des pays où on ne connaît pas nécessairement toute l'équivalence de la formation ou du diplôme ? donc de pays où il y a déjà une certaine forme d'entente de réciprocité, là. Donc, c'est plus facile.

Et c'est là, j'ai le sentiment que, que ce soit au niveau des ordres ou des universités... et des universités, je dirais ? bon, ça va ensemble ? ce n'est pas vraiment des tenants de formations courtes. Moi, ce que j'entends, c'est qu'ils sont tous tenants de formations longues, qui sont décourageantes pour la personne qui arrive. Et ça, est-ce que vous avez, vous, à partir de vos expériences concrètes, est-ce qu'on aurait une capacité... Parce que, nous, le gouvernement, on ne peut pas se mêler des standards de qualité d'une pratique, d'un métier ou d'une profession parce qu'on ne peut pas, comme gouvernement, décider qu'est-ce que ça prend pour être un bon ingénieur ou une bonne infirmière, ce sont les ordres qui font ça. Mais est-ce qu'il y a des exemples concrets... ou des arguments, plutôt ? pas des exemples, des arguments ? qui pourraient nous aider à convaincre et le ministère de l'Éducation et les universités de rendre ça plus facile?

M. Hains (François): Bien, moi, je vous dirais, il y a un argument démographique certain, dans le sens où la force de travail, au Québec, va devenir majoritairement et de plus en plus issue de l'immigration. Alors, comme l'a fait, quand on s'est assis avec la Polytechnique, cette année... Les universités, pour demeurer concurrentielles au niveau de la clientèle étudiante qu'elles reçoivent, vont devoir s'adapter jusqu'à un certain point, là, à cette clientèle-là, ça, c'est certain. Au niveau des ordres professionnels, je crois aussi qu'il va y avoir une certaine tendance à, dépendamment de l'ordre professionnel à ce niveau-là. Mais c'est certain qu'il va y avoir une certaine pression, à un moment donné.

Le Président (M. Cusano): Je m'excuse, le temps de la ministre est écoulé. Je passe maintenant la parole à la députée de Prévost.

Mme Papineau: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour, merci d'être là. Ça fait déjà trois semaines, presque, qu'on est en auditions, et vous êtes le premier groupe qui venez nous dire qu'il faudrait stabiliser, et vous dites: Stabiliser les admissions. C'est la première fois ? c'est pour ça que c'est bon, on veut aller jusqu'au bout de nos réflexions ? vous êtes le premier groupe à le mentionner. Puis vous dites: Cette stabilisation-là ferait en sorte de préparer la population du Québec à une éventuelle augmentation, afin de susciter l'adhésion à cette... Donc, d'après vous, la population du Québec n'adhère pas à l'arrivée ou...

M. Hains (François): Je vais reprendre ma phrase dans le sens de ce que j'avais dit un petit peu avant. Cette stabilisation-là, en fin de compte, pour nous, est une consolidation, dans le sens que, à l'heure où on se parle, pour le CAMO-PI, O.K., il n'y a pas... La préoccupation première, là, notre position première, ce n'est pas le taux d'immigration comme tel, c'est le service que l'on peut rendre et l'efficacité avec laquelle on peut intégrer les nouvelles personnes qui viennent ici.

Pour nous, c'est clair, sur le terrain, à l'heure où on se parle, les ressources sont insuffisantes, les difficultés sont trop grandes pour intégrer suffisamment les personnes qui sont déjà ici, qui continuent à arriver ici. Alors, augmenter le taux d'immigration ou le baisser, pour nous, ce n'est pas la question primordiale. Pour nous, la question primordiale, c'est qu'on doit s'asseoir et réfléchir de quelle façon on peut donner de meilleurs services et de quelle façon on peut intégrer à notre société québécoise les personnes venues de l'étranger.

Ce qu'il est important, là-dedans, de comprendre... Nous, en tout cas, notre compréhension un peu de ça, c'est une question à la limite de concurrence planétaire, ça va presque jusque-là, dans le sens où, si l'État du Vermont est capable d'intégrer efficacement un ingénieur, ou un diplômé, ou un technicien compétent en un mois dans son marché du travail et qu'au Québec on continue à prendre deux ans à intégrer cette personne-là, on va avoir des problèmes à un moment donné, on va avoir des problèmes. L'efficacité avec laquelle on peut intégrer les compétences et les gens qui ont du talent et qui ont de la volonté, qui viennent de l'extérieur, va devenir quelque chose de très important.

n (14 h 40) n

M. Diop (Mamadou): Pour aller dans le même sens, on peut schématiser en disant: Pourquoi augmenter le volume de l'admission, alors qu'on sait déjà qu'il y a assez d'immigrants sur place qui ont des difficultés d'insertion comme ils ont toujours eues? C'est sûr que les immigrants accèdent de plus en plus au marché du travail, davantage, mais ils demeurent toujours les plus pauvres de la société aussi.

L'adhésion de la population native, si elle est acquise maintenant, ça ne veut pas dire qu'elle va être acquise quand les volumes d'admission vont augmenter. Personne ne peut prédire ça. Les gens, dans le document de réflexion, document de consultation, on a compris que l'adhésion de la population native est là, pour le moment, avec le nombre de personnes qui est là, supposément. Mais on n'a jamais dit que l'adhésion de la population va suivre lorsque le volume va augmenter.

Notre argumentaire est le suivant: Déjà, avec le monde que nous avons, est-ce qu'on a fait tout ce qu'on pouvait faire pour que ces gens soient intégrés? Et, une fois qu'on aura fait tous ces efforts-là ? ce sont nos recommandations, les propositions qu'on a ? après, on va voir, après un exercice triennal, on va voir maintenant: Ah bien! ça a bien été, ou: Non, ça n'a pas bien été. Donc, on va peut-être dire qu'il faut augmenter ou diminuer. Au moins, si c'est pour augmenter, on va préparer la population à cette augmentation-là dans ce sens.

Alors, comme François l'a dit, nous, en fait il fallait qu'on se prononce là-dessus, mais que ce soit l'augmentation, la diminution ou le maintien des taux actuels, toujours est-il que les propositions qu'on donne demeurent d'actualité, et, sur le terrain, les difficultés demeurent aussi.

Mme Papineau: Parfait. Aussi, dans votre mémoire ? c'est la première fois, en tout cas je pense, depuis le début de la commission, qu'on quantifie ? vous dites: 80 %... presque 80 % des employeurs n'ont pas essayé d'embaucher des nouveaux immigrants. C'est beaucoup, c'est 80 % des...

M. Hains (François): Ça, je pense que ce chiffre-là, il faut le prendre dans le contexte de la pratique du CAMO.

M. Diop (Mamadou): Du CAMO et de la Fédération de l'entreprise indépendante...

Mme Papineau: Parce que je voudrais vous entendre, parce qu'il y a beaucoup de groupes qui sont venus nous voir, des chambres de commerce qui s'ouvrent les bras, qui disent: Nous, on veut puis... Non, mais c'est vrai, hein, il y a une très grande volonté des employeurs. Depuis le début de la commission, il semblerait qu'on a juste à leur amener des personnes immigrantes et que tout va se faire, bon, on les prend en charge, tout ça. Ce qui n'est pas la réalité, en tout cas à ce que je regarde ceux dans votre document. Mais j'aimerais que vous commentiez.

Puis aussi ma deuxième question serait: Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour aider les employeurs à réfléchir et aussi à adhérer au fait qu'une personne immigrante pourrait rapporter beaucoup socialement, culturellement et économiquement à l'entreprise?

M. Hains (François): Dans notre pratique, une chose qui revient régulièrement: effectivement, les employeurs sont tous de bonne foi, sont tous prêts à intégrer les personnes immigrantes dans leur organisation, cependant il y a des constances qui reviennent, comme le manque d'appui et de soutien. De nombreux employeurs seraient plus facilement volontaires pour intégrer les personnes immigrantes dans leur organisation s'ils avaient plus de soutien soit d'un organisme communautaire qui encadre déjà ces personnes immigrantes soit d'un service. Autrement dit, le directeur des ressources humaines qui n'a pas d'expertise au niveau de la gestion de la diversité pourrait avoir un support, une personne-ressource, une personne-contact, un service support pour l'aider à gérer cette diversité-là. Ça, c'est quelque chose qui revient souvent. C'est une chose à laquelle on travaille, c'est un des aspects de notre travail.

On travaille beaucoup à la préparation des candidats, des personnes immigrantes. On travaille dans presque tous nos programmes d'accès aux ordres professionnels. Il y a une partie formation: comment faire un C.V., comment se présenter en entrevue, les biais culturels, des choses comme ça. On prépare les candidats. Mais on travaille aussi, à l'autre bout, de plus en plus à préparer les employeurs. Il faut les sensibiliser évidemment, il faut les sensibiliser, mais il faut aussi leur donner un certain support au niveau de la formation mais, je pense, aussi au niveau de l'encadrement, pour qu'un grand employeur... Si on prend l'exemple d'un grand employeur, en Estrie, qui serait prêt à prendre 30 candidats de notre programme dans l'industrie du caoutchouc, bien son directeur des ressources humaines aurait accès à une consultation, à un appui d'un spécialiste qui pourrait l'aider au niveau de la diversité. Ça, c'est clair que c'est un besoin.

M. Diop (Mamadou): Au niveau des 80 %, c'est que c'est... On tire ça d'une étude qui a été faite par la Fédération de l'entreprise indépendante, qui... Ce n'est pas parce que les employeurs ne veulent pas, ce n'est pas ça; ils n'y ont pas pensé. Avez-vous pensé à embaucher une personne immigrante? Non, on n'a pas pensé. C'est la sensibilisation des employeurs par rapport à ça. Il faut des sensibilisations.

Autrement dit, si, au moment de la sélection des immigrants, on pouvait faire une correspondance entre les pénuries d'emplois, les caractéristiques des régions, les pénuries dans les régions et les profils des candidats dès le départ, il y a beaucoup de problèmes qui seraient réglés, là.

L'adhésion des employeurs, ce n'est pas difficile. Si la concurrence est là, l'employeur, qu'est-ce que, lui, il veut? lui, il veut être compétitif. Si la personne est là, elle fait bien le travail, il n'y a pas de problème, ça passe. Mais c'est pourquoi le projet d'immersion a eu beaucoup de succès ? on ne l'a pas, on l'avait avec le Fonds de lutte. Ça avait beaucoup de succès parce que ça permettait aux employeurs de se faire une idée par eux-mêmes sur la compétence des personnes immigrantes. Parce qu'il y a des employeurs qui n'y pensent pas du tout. Des fois, ce n'est pas les employeurs, des fois, c'est les employés qui ne veulent pas travailler avec des personnes d'origines autres.

Alors, l'adhésion des employeurs, c'est la sensibilisation. C'est faire aussi des arrimages entre les compétences des personnes immigrantes et les besoins dans les régions. C'est faire des adaptations aussi, adapter les compétences de ces personnes-là aux emplois. Parce que l'adéquation n'est pas faite au départ, mais, si la personne est là déjà, on ne va pas la retourner dans son pays. Elle veut travailler, donc on va faire en sorte qu'elle puisse fitter avec l'entreprise. Et c'est vous aussi, les tenants du pouvoir, qui pourriez justement davantage faire de la sensibilisation auprès des employeurs.

Mme Papineau: Merci beaucoup.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Chambly.

Mme Legault: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): En vous rappelant que vous disposez d'une période de...

Mme Legault: ...six minutes?

Le Président (M. Cusano): Huit minutes.

Mme Legault: Huit minutes? Messieurs, bonjour. À la page 10 de votre mémoire, en lien avec évidemment ce qui précède sur le maintien des volumes actuels, vous nous dites qu'on pourrait mettre davantage «l'accent sur la contribution économique de la catégorie "regroupement familial et composante familiale"». Pouvez-vous élaborer un petit peu puis nous dire le fond de votre pensée?

M. Diop (Mamadou): Autrement dit, une personne qui a été recrutée parce qu'elle est compétente, parce qu'elle est ingénieur, parce qu'elle a un profil d'employabilité au Québec vient. Si la personne doit faire venir sa famille, le cousin ou d'autres personnes qui n'ont pas été sélectionnées selon leurs compétences professionnelles, ces gens arrivent ici, on peut en faire des gens qui vont contribuer à l'économie aussi. Autrement dit, ce n'est pas parce qu'ils ne sont pas dans la catégorie économique qu'ils ne vont pas contribuer à l'économie. Autrement dit, une personne qui vient, qui n'a pas de scolarité ou qui a une scolarité moyenne, on peut faire en sorte qu'on puisse la mettre sur la catégorie des gens qui vont produire. En fait, en arrivant, il arrive comme quelqu'un qui ne contribuerait pas, humanitaire, familial, mais en fait on peut récupérer la personne, une fois rendue ici, avec des formations d'appoint, avec de la formation, avec des stages en entreprise.

Mme Legault: Et, à ce moment-ci, quelle est votre lecture des ressources qui sont disponibles pour mettre de l'avant ce que vous proposez? Est-ce qu'elles sont suffisantes, insuffisantes? D'après, vous, là, quel est l'état de la situation sur notre capacité à, de fait, permettre à quelqu'un de contribuer économiquement, plus activement à la société dans laquelle il se développe?

M. Diop (Mamadou): Bien là on va toucher la problématique générale de l'immigration, parce que ces personnes ont besoin des services, comme tous les immigrants ont besoin de services. Tout ce qu'on dit, du début à la fin de notre mémoire, c'est que les services existent mais ont besoin d'être bonifiés davantage; les ressources existent, ont besoins d'être... plus de coordination entre les différents intervenants. Les ressources existent, il faudrait qu'on puisse...

Nous, par exemple, lorsqu'on regarde... On s'en va dans le Centre-du-Québec, par exemple, on regarde qu'il y a des emplois dans le Centre-du-Québec. On s'en va dans le Saguenay, on voit des immigrants qui sont au Saguenay, qui correspondent très bien avec les emplois qui se trouvent dans le Centre-du-Québec. Normalement, de façon transversale, on pourrait faire venir ces gens-là là-bas. Mais, non, ça ne rentre pas dans le sens de la régionalisation de l'immigration, ça. Nous, on va dans le sens de la régionalisation de l'immigration: on quitte Montréal vers les régions. Mais, de région à région, ça ne fait pas partie... Je vois la ministre qui fait une moue, mais à date ce que j'ai compris, nous, c'est que la MRC ne va pas dans ce sens-là. Et ça, c'est un point très important à signaler parce que ça peut résoudre beaucoup de problèmes.

Mais, pour ce qui est des ressources, c'est sûr qu'on peut en mettre davantage. C'est sûr que les organismes, sur le terrain, travaillent d'arrache-pied, mais ils manquent de ressources, effectivement. Tout le monde doit y mettre un peu son grain de sel, là-dedans, je pense.

n (14 h 50) n

M. Hains (François): Mais, juste pour compléter, je dirais qu'au niveau surtout des organismes terrains, communautaires, il y a un net manque de ressources. Dans certains projets, on a de la difficulté parce que ces organismes-là n'ont pas assez de ressources pour maintenir leur expertise. Étant donné que, nous, pour nous, ce sont des projets pilotes, alors nos activités sont prévues de cette façon-là. Mais, pour eux, pour participer à un de nos projets pilotes, ils doivent engager un conseiller à temps plein. Mais, après le projet pilote, nous, on passe à d'autres projets; pas eux. Alors, le conseiller qui a développé son expertise pendant un an, deux ans, qui ne sait pas si son contrat va être renouvelé, pouf! ils peuvent le perdre deux, trois mois, le temps que, nous, on monte un autre projet, puis le conseiller n'est plus là. Ça fait qu'il y a un maintien de l'expertise dans ces ressources-là qui fait mal, des fois, là, à cause d'un manque de ressources.

Mme Legault: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Mme la députée de La Peltrie.

Mme Hamel: Merci, M. le Président. Une courte question. Lorsque vous avez élaboré tout à l'heure, là, votre série de projets, le projet Accès rapide à l'Ordre des ingénieurs du Québec, vous avez dit que c'était bien établi à l'École polytechnique de Montréal, que vous l'aviez exporté à l'Université Laval en phase I, mais ce qui m'intrigue, là, c'est «avec la couleur locale». J'aimerais ça vous entendre élaborer là-dessus, parce qu'on a grandement parlé, là, tu sais, région par région, là, il n'y a pas de mur-à-mur, ça fait que je me dis qu'il doit y avoir quelque chose qui ressemble à ça là-dedans.

M. Hains (François): Quand on parle de couleur locale, c'est vraiment d'adapter aux façons de faire qui peuvent être différentes un petit peu d'une région à l'autre, on ne parle pas de rien de majeur. Entre autres, tout le monde sait que, d'une université à l'autre, il peut y avoir des façons de faire différentes quelquefois, ne serait-ce qu'au niveau de la façon d'administrer le corps enseignant, de financer leur tutorat. Quand on parle de couleur locale, c'est que souvent on développe notre expertise dans la région de Montréal, parce que notre clientèle est là et nos principaux bureaux sont là ? bien qu'on ait un bureau à Québec, avec M. Diop ? mais on est conscient que, quand on sort de Montréal et qu'on vient dans la Capitale ou qu'on va en Estrie, il faut tenir compte de la couleur locale, dans le sens positif du terme, pour essayer d'adapter tous nos projets. On n'essaie pas de prendre une boîte, de partir avec et de l'imposer nulle part, là. C'est dans ce sens-là qu'on parle de...

Mme Hamel: Je ne l'ai pas pris d'une façon négative non plus, là, pas du tout.

M. Hains (François): Mais il y a certaines petites différences, puis on s'adapte.

M. Diop (Mamadou): Oui, il y a des différences. C'est sûr que le projet a été initié à Montréal d'abord, mais on l'applique ici. Tout ce qu'on veut amener ici, à Québec, on veut l'appliquer aux réalités de Québec, et de la ville de Québec, et de la région de la Capitale. Mais notre projet ici, Ingénieurs, à Québec, est différent de celui de Montréal sur le point suivant, c'est que l'intégration à l'emploi et l'accès à l'Ordre des ingénieurs, les deux se font de façon concomitantes. Autrement dit, on n'attend pas que la personne ait accès à l'ordre pour commencer à se chercher un emploi. On veut faire en sorte qu'au moment où il accède à l'ordre ça puisse lui donner tout de suite un emploi. Donc, ça, c'est une différence et c'est une première. Ça, on ne l'a pas fait à Montréal.

L'autre chose, c'est sur les...

Mme Courchesne: ...

M. Diop (Mamadou): Pardon?

Mme Courchesne: C'est intéressant, ça.

M. Diop (Mamadou): Oui? Ah! merci.

M. Hains (François): C'est une amélioration.

M. Diop (Mamadou): C'est une amélioration parce que accéder à l'Ordre, ça ne suffit pas, il va falloir se chercher un emploi par la suite, et ça, ce n'est pas de la tarte non plus. Donc, on essaie de les mettre en lien dès le départ avec des entreprises, des firmes d'ingénierie qui participent à nos 5 à 7, qu'on met en lien avec l'Université Laval, aussi.

Alors, il y a des spécificités, quand même, de la région. On essaie de trouver une couleur locale. Et je pense que les responsables, au CAMO, ils jouent beaucoup là-dessus, ils savent qu'à Québec, ici, on ne veut pas que tout nous soit donné comme ça, comme ça se passe à Montréal.

Le Président (M. Cusano): Merci. Merci. Je comprends que Mme la ministre veut poser une très, très courte question.

Mme Courchesne: Très, très courte, je la laisse pour réflexion. C'est que, vous savez, quand on parle d'arrimage, on essaie d'avoir: ingénieur dans un poste ingénieur dans une entreprise. Mais vous avez dit quelque chose, vous avez dit: Nous, on a un programme caoutchouc. Là, ce que ça me fait penser, c'est: Est-ce que, au lieu d'aborder ça selon les fonctions, on ne devrait pas avoir un organisme comme le vôtre qui aborde le marché du travail par secteurs d'activité? Puis là, habituellement, dans une région, il y a un secteur d'activité qui est prédominant. Puis là faire l'analyse puis dire: Là, on fait un blitz dans cette région-là, parce que, dans le secteur du caoutchouc, il manque 15 emplois. Et là on partirait... Parce que... En tout cas, je vous dis juste ça, c'est que vous venez... Je veux juste vous dire, là, que vous venez de m'apporter une idée possiblement nouvelle dans la façon de l'arrimer ou de le travailler. Et mon temps est écoulé.

Le Président (M. Cusano): Et c'est pour ça qu'il est très important d'avoir des commissions parlementaires, Mme la ministre. Alors...

M. Hains (François): Brièvement, juste brièvement, pour caoutchouc justement, c'est un partenariat avec le comité sectoriel du domaine du caoutchouc, le projet.

Le Président (M. Cusano): Alors, je cède maintenant la parole à la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Alors, merci. Ça me fait plaisir de prendre la parole. Je m'aperçois que vous nous avez brossé un très bon portrait de la situation, un peu pessimiste quelque part, en notre capacité d'accueil par rapport aux besoins des personnes immigrantes et aussi sur notre capacité de comprendre l'urgence, en fin de compte. Est-ce que vous croyez que, bon, il faut qu'on soit mis devant un choc brutal pour faire en sorte qu'on commence à réagir par rapport à tout ça? Est-ce que vous croyez qu'à l'heure actuelle ce que nous sommes en train de faire ici, autour de la table, sera suffisant pour améliorer et apporter les effets escomptés en ce qui concerne l'intégration de ces personnes-là? Et j'aimerais en tout dernier que vous nous disiez aussi quelle différence faites-vous entre un programme national d'intégration des personnes immigrantes avec un plan d'action national d'un gouvernement?

M. Hains (François): En fait, pour notre suggestion... Bien, première des choses, je crois déjà aujourd'hui qu'être ici, pouvoir vous exposer ce que le CAMO fait, pouvoir vous informer là-dessus... Je ne crois pas qu'on soit pessimistes, je crois qu'on doit commencer... On a déjà commencé une réflexion très intéressante, ici et à d'autres tables interministérielles, des tables de concertation, des comités. Je crois qu'on peut être très optimiste. Cependant, ce qu'on dit, c'est qu'on doit maintenir les efforts qu'on a et on doit augmenter les efforts qu'on a. Augmenter les efforts qu'on y met, ça ne veut pas dire que ça va mal, ça veut dire qu'on aimerait ça que ça aille encore mieux.

Pour ce qui est de notre suggestion au niveau d'une table au niveau de l'insertion, sur l'insertion en emploi des personnes immigrantes, nous siégeons déjà à plusieurs tables et comités qui ne s'occupent pas spécifiquement de l'intégration des personnes immigrantes à l'emploi, qui peuvent parler de reconnaissance des acquis, des compétences au sens large, pour toute la population du Québec, avec des fois... bifurquer ou... souvent, là, sur les personnes immigrantes, on peut avoir des comités de travail qui vont parler d'immigration en général. Nous, dans notre réalité, avec les difficultés, comme je disais, qu'on rencontre sur le terrain, on s'aperçoit que, si on pouvait réunir les décideurs pour ne discuter que des difficultés d'intégration à l'emploi, on pourrait assez tôt aplanir plusieurs difficultés.

Mme Vermette: Il est venu plusieurs groupes... Mais c'est parce que, aussi, vous avez parlé... Est-ce que ça ferait partie, ça, d'un programme national d'intégration? C'est vous-mêmes qui avez parlé d'un programme national d'intégration, c'est pour ça que je vous ai demandé de faire la nuance entre un programme national ou un plan d'action.

M. Diop (Mamadou): Mais en fait...

Mme Vermette: Alors, y a-t-il une nuance ou si c'est la même chose?

M. Diop (Mamadou): Non, en fait c'est la même chose. On dit «programme», un programme suivi d'une politique. C'est dans ce sens-là. Ça peut être un plan d'action.

Mme Vermette: Bon, parfait. Bon. Alors, ça va, ça fait qu'on s'entend là-dessus, donc on tend vers ça, là, actuellement. O.K., on travaille tous ensemble à ça. Donc, moi, j'aimerais vous entendre, à ce moment-là, parce que vous avez parlé, à un certain moment donné: Il y a des services à donner, il y a des gens qui sont compétents, qui sont prêts à donner des services; par contre, il y a des gens qui prennent des décisions, hein, et ces gens décisionnels là ne sont pas toujours en contact avec les gens qui donnent les services, et ce serait important que les gens décisionnels soient plus au courant des besoins et des demandes avant de prendre des décisions. C'est un peu le résumé que vous avez apporté. Et là vous apportez... tantôt, oui, c'est vrai, à la ministre, vous lui avez apporté une nouvelle suggestion en dehors de la table, qui est intéressante, les secteurs en fin de compte, et ça, je pense que c'est intéressant.

Mais, en dehors de tout ça... Parce qu'on a vu tantôt, moi, j'ai trouvé ça intéressant, c'étaient les partenaires... le conseil régional des partenaires du marché du travail. Là, il y a plusieurs composantes, qui sont sur cette table-là, qui sont les gens que vous voulez rejoindre. Et ces gens-là, il y a un effet multiplicateur, ils rejoignent encore leur base, qui sont exactement ces gens-là. Donc, est-ce que c'est possible ou envisageable qu'ensemble... Parce que, si on dit que tout est là, il y a un côté décisionnel, côté services, on les met ensemble puis ils travaillent ensemble. De quelle façon ça devrait être bâti, ça, en dehors d'une table intersectorielle, évidemment, là?

n (15 heures) n

M. Hains (François): C'est une excellente question. Je crois que... Bien, déjà, en partant, je vous dirais qu'aux endroits où je siège déjà on est déjà plusieurs qui siègent au même endroit. On se rencontre dans le corridor, entre deux meetings. Je pense que ce n'est pas tellement... bien, ce n'est pas tellement... ce n'est pas tellement de savoir où on va siéger, qui va siéger, c'est surtout sur quelle problématique plus aiguë. Nous, on ne remet pas en question les tables qui existent déjà, la qualité du travail et ce qu'ils font. Ce qu'on vous suggère, c'est de travailler sur plus précisément la problématique des personnes immigrantes, de leur intégration à l'emploi. C'est plutôt ça, le sens de notre intervention.

Mme Vermette: Donc, vous êtes en train de nous dire que finalement le problème serait beaucoup plus... On est capable de faire les choix, ça, ce n'est pas trop compliqué. D'aller à la sélection, ce n'est pas trop compliqué. En fin de compte, il semblerait qu'on pourrait trouver facilement, bon, suffisamment de main-d'oeuvre. Mais, indépendamment de la capacité qu'on serait capable d'aller en chercher, le problème ne se situe pas là. Le problème se situe ailleurs. Ce n'est pas une compétence de main-d'oeuvre ou de capacité de main-d'oeuvre, mais c'est l'intégration qui est la plus difficile, et elle semble encore là être pleine d'obstacles, et principalement, en fin de compte, ce n'est pas seulement que des structures d'accueil, mais c'est particulièrement dans le niveau de l'emploi avec les gens, des employeurs, et les industries ou les entrepreneurs.

M. Diop (Mamadou): Oui, mais c'est, entre autres, les décideurs politiques, à ne pas oublier, ceux qui prennent les décisions aussi. Parce que, sur le terrain, il y a des choses sur lesquelles on bute tout le temps, et c'est des problématiques qui sont récurrentes, que, chaque année, ça revient à la même chose. On a parlé de certains irritants tantôt, mais ça, c'est des éléments que, nous, en tant qu'experts du terrain, on ne peut que constater. Mais les décisions pour les changer, pour les modifier, pour les adapter aux difficultés, ce n'est pas nous qui pouvons prendre ces décisions-là. Ces décisions viennent d'ailleurs.

C'est pourquoi, nous, on s'est dit que toutes les intentions sont là maintenant pour intégrer les immigrants au Québec. Les gens, tous les acteurs économiques, tout le monde, on est unanimes là-dessus qu'on a besoin d'immigration, qu'il faut les intégrer, et tout. Mais comment ça se fait que les difficultés persistent encore au niveau de l'intégration des immigrants? C'est ça, la question. Comment se fait-il qu'avec tous ces efforts-là, ces bonnes intentions, on en est encore à un taux de chômage élevé au niveau des immigrants, on en est encore à un taux de chômage encore plus élevé chez les minorités visibles et encore plus élevé chez les gens de race noire parmi ces minorités visibles là? Alors, on s'est dit: Peut-être qu'il y a des choses qui ne marchent pas.

Nous, on travaille dans le dossier de la fonction publique, on travaille à différents comités de la fonction publique pour l'accès des personnes ici, de l'immigration, dans la fonction publique. On voit qu'on a des bonnes intentions. On a des documents ici. Parce qu'on sait que les immigrants ne réussissent pas le concours d'entrée à la fonction publique, on a fait un document juste pour les aider à passer le concours. Et là on ne travaille pas sur l'organisation, là. Ce n'est pas un programme d'équité en emploi qu'on travaille, on travaille sur les difficultés intrinsèques aux clientèles. Comment les aider à? Ce n'est pas les faire passer parce que c'est des clientèles qu'il faut faire passer. Non. Il faut les outiller pour qu'ils puissent. Mais, nous, on ne peut pas les embaucher. C'est les gestionnaires qui les embauchent. Il va falloir que, eux...

On parle, on dit: Embauchez-les, embauchez-les, embauchez-les. Nous, on les prépare. Ils réussissent le concours. Le problème qu'on a maintenant, c'est qu'il y en a beaucoup qui ont réussi le concours, qui sont sur la liste des déclarations d'aptitudes qui n'ont pas encore été embauchés. Ils sont plus de 1 000 personnes. Ce n'est pas nous qui pouvons les embaucher. Ça, c'est des décisions qu'il faut prendre, là, au niveau... Nous, on peut les former. On peut former les organismes pour les former, eux. Mais on ne peut pas obliger les employeurs à les embaucher. C'est ça, là, où la question se joue.

M. Hains (François): Mais je vous dirais qu'on a des outils intéressants. Tout le monde est prêt à faire un effort. Tous les gens sont bien intentionnés, mais les statistiques, au niveau de l'emploi, nous disent qu'il y a encore un effort à faire. C'est un peu le but de notre intervention. On n'est pas pessimiste. On pense qu'il y a des choses très intéressantes qui se font. Il y a beaucoup de gens qui y travaillent. Sauf que, quand on regarde les statistiques du chômage, des gens sans emploi, au niveau des minorités visibles, on peut en conclure qu'on pourrait faire plus d'efforts.

Mme Vermette: Et, dans la planification d'un plan d'action, qu'est-ce qui est le plus prioritaire: commencer à faire de l'information, de la formation au niveau de l'ensemble de la population, prendre un groupe cible, des employeurs? Par où on commence finalement, l'action la plus importante, là, par rapport à ça? Parce que ce que vous dites, c'est des changements de mentalité. Donc, ce n'est pas évident. Et il manque une main-d'oeuvre d'un côté, puis il faut changer les mentalités de l'autre bord. Comment on arrive à faire qu'en sorte qu'il y a suffisamment de monde sensible pour qu'on puisse remplir nos besoins?

M. Hains (François): Bien, je pense qu'en premier lieu il y aurait lieu de faire un bilan, un bilan de tout ce qu'on fait. Nous, le CAMO, il y a plein de trucs qu'on fait. Le MRCI en fait beaucoup. Emploi-Québec en fait beaucoup. Je pense que, sur plusieurs tables où on siège, on est en train de faire un bilan, un bilan de nos pratiques. Parce que tout le monde travaille, les statistiques ne donnent pas les résultats qu'on voudrait. Alors là je pense que l'idée qu'on apporte, c'est une idée de consolidation. C'est de prendre le temps de s'asseoir et regarder le bilan: qu'est-ce qu'il reste à faire? C'est d'ailleurs une de nos actions stratégiques, dans notre plan stratégique triennal, qui est propre au CAMO: une étude des besoins de notre clientèle et de nos partenaires. Je pense qu'il y a un bilan qui est à faire. Suite à ce bilan-là, je pense qu'il va y avoir des priorisations à faire. Parce que c'est un domaine qui est assez vaste, hein, il y a une priorisation qui va être à faire.

M. Diop (Mamadou): Et l'adhésion de la population. Je pense que l'adhésion de la population native est très importante là-dedans, parce que, en fait, c'est la population native qui les intègre. Pour le logement, pour l'école, pour l'emploi, c'est les employeurs, c'est la population native. Si les Québécois d'origine, les Québécois natifs sont conscientisés de l'importance de l'immigration et de la difficulté des immigrants à accéder au marché du travail, qu'ils soient sensibilisés...

Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui sont de bonne foi, mais, des immigrants, ils n'en voient pas, que dans l'autobus ou au centre d'achats. Ils ne sont pas préoccupés par la problématique. Ce n'est pas parce qu'ils ne veulent pas, des fois c'est parce qu'ils ne connaissent pas c'est quoi. Ils ne savent pas c'est quoi, c'est loin de leurs préoccupations de tous les jours. Ils connaissent l'immigrant qu'il y a à côté d'eux et ses enfants, c'est tout. Alors, si la population native est sensibilisée, les employeurs sont là-dedans, les parents sont là-dedans, les locataires sont là-dedans, donc cela va permettre justement d'abord de donner un premier tremplin à ces gens-là qui, s'ils s'en tirent, dans un contexte où l'adhésion totale... l'adhésion des gens, pas totale, l'adhésion de la population forme un bloc pour que l'intégration puisse se faire de façon harmonieuse.

Le Président (M. Cusano): S'il vous plaît, en conclusion. Je sais, c'est extrêmement intéressant, mais je suis obligé d'appliquer la règle.

M. Diop (Mamadou): Oui. Parce que, nous, il ne faut pas nous donner la parole, après on n'arrête plus!

M. Hains (François): En conclusion.

Le Président (M. Cusano): En conclusion, très court.

M. Hains (François): O.K., une courte conclusion. Grosso modo, je crois que c'est l'art de consolider ce qu'on fait déjà et de prioriser ce qu'on voudrait faire dans l'avenir. Nous en tout cas, au CAMO, on veut se positionner de cette façon-là. Il faut continuer à travailler en partenariat. Ce n'est pas toujours évident entre grands ministères, organisations, groupes communautaires. Je crois que c'est primordial de travailler en partenariat. C'est comme ça que, nous en tout cas, on arrive à faire des choses intéressantes.

Et je dirais que tout le dossier de l'immigration... On ne peut pas revenir en arrière, hein? Je ne crois pas que le taux de natalité va recommencer à remonter. Alors, il n'y a pas de retour en arrière, il faut regarder en avant, il faut regarder vers l'avenir, et l'avenir, c'est une population immigrante de plus en plus intéressée et intéressante qui s'en vient ici. Il faut trouver une façon de les accueillir et faciliter l'efficacité avec laquelle on va être capable de l'intégrer dans notre société pour qu'elle soit heureuse. Ça va créer, je pense, généralement une société où il va y avoir beaucoup d'harmonie et, sur une base plus économique, une société concurrentielle.

Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup, M. Hains, M. Diop, pour un échange extrêmement intéressant, mais malheureusement j'ai le rôle de vous couper la parole. Alors, sur ce, j'aimerais vous remercier au nom de mes collègues et je vais suspendre pour quelques minutes afin de permettre à notre prochain groupe de prendre place. Ce serait le Conseil... Excusez, c'est la municipalité de Rawdon et la MRC de la Matawinie.

(Suspension de la séance à 15 h 8)

 

(Reprise à 15 h 17)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. J'aimerais faire une correction. J'avais annoncé que c'était la municipalité de Rawdon, excusez-moi, c'est le Conseil interprofessionnel du Québec. Et, pour les fins du Journal des débats, je demanderais à nos invités de bien vouloir s'identifier.

Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

M. Dutrisac (Jean Paul): Oui, bien sûr. Alors, Jean Paul Dutrisac, président du Conseil interprofessionnel du Québec.

M. Gariépy (André): André Gariépy, directeur général du Conseil interprofessionnel du Québec.

Le Président (M. Cusano): Bienvenue, messieurs, à la commission. Je veux seulement vous rappeler brièvement les règles générales qui nous guident. Vous avez une période de 20 minutes pour faire votre présentation. Elle sera suivie d'un échange avec les parlementaires pour une période maximale de 40 minutes. Alors, la parole est à vous.

M. Dutrisac (Jean Paul): Merci. Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, alors comme je le disais, je suis Jean Paul Dutrisac. Je suis notaire en pratique privée et président du Conseil interprofessionnel du Québec et je suis accompagné de Me André Gariépy, avocat et directeur général du CIQ.

Alors, je vous remercie de nous recevoir et de nous permettre d'échanger avec vous sur le contenu de notre mémoire. Je souligne à nouveau aux membres de la commission que nous sommes désolés du délai dans la production de notre mémoire. Les délais de consultation, les exigences de validation interne de nos 45 organismes membres et la présence de plusieurs consultations concomitantes ont entraîné cette situation qui n'est ni notre coutume ni notre souhait.

Le Conseil interprofessionnel du Québec regroupe les 45 ordres professionnels. Il est le forum d'échange et de concertation de même que la voix collective des ordres sur des sujets d'intérêt commun. Le Code des professions lui octroie un mandat d'organisme-conseil auprès de l'autorité publique.

Comme en fait état le document de consultation, les tendances démographiques au Québec se précisent et font craindre une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée dans certains domaines. La réponse aux besoins du marché du travail peut provenir du système d'éducation, d'Emploi-Québec et de l'immigration. Malgré la bonne volonté, chacun des intervenants rencontre certaines difficultés, que nous évoquons dans notre mémoire.

n (15 h 20) n

Les professions réglementées sont également traversées par les enjeux démographiques et économiques de la société québécoise. Les ordres professionnels sont des délégataires de puissance publique, constitués par l'État pour assurer la surveillance d'une pratique à risque. En matière d'immigration, les ordres interviennent afin d'évaluer et de reconnaître les acquis d'environ 1 000 personnes immigrantes par année. Ils appliquent alors un référentiel de formation approuvé par le gouvernement et auquel tous les candidats à la profession doivent se soumettre. Une bonne part des personnes immigrantes qui formulent une demande aux ordres voient ces acquis reconnus et un certain nombre voient cette reconnaissance refusée.

Les ordres professionnels sont soucieux non seulement de la qualité, mais de la suffisance des services à la population, les pénuries constituant par elles-mêmes des problèmes de protection du public. Les ordres ont été particulièrement actifs, ces dernières années, en ce qui a trait à l'adaptation de leurs pratiques à la réalité changeante de l'immigration. En matière d'immigration, les défis et difficultés doivent s'analyser dans la perspective du cheminement de la personne immigrante. Ce cheminement fait intervenir différents acteurs à chaque étape, chacun étant responsable du succès de l'ensemble de la démarche. Malgré les actions entreprises par ces acteurs, des problématiques systémiques demeurent, minant d'autant l'impact positif de l'immigration. Les défis et difficultés de chaque étape sont par ailleurs connus et documentés. Nous les rappelons dans notre mémoire.

À ce sujet, une étape qui nous apparaît importante est celle de la sélection. C'est à ce moment que la personne immigrante peut connaître les conditions de son projet de vie au Québec et en évaluer la faisabilité et le potentiel de réussite. L'information reçue et surtout comprise est alors cruciale. L'étape de la sélection est aussi le moment où le Québec peut déterminer si le profil du candidat répond à ses besoins de main-d'oeuvre, par une grille de sélection adaptée. Il est donc important que le consensus sur les besoins s'établisse au Québec et que le processus de sélection en tienne compte. Pour cela, il nous apparaît nécessaire d'établir un arrimage dans l'identification des besoins qu'effectuent divers intervenants.

Une autre étape importante est bien entendu celle de l'intégration, pour laquelle des ressources d'accompagnement et de soutien aux personnes immigrantes doivent être densifiées et stabilisées. Il en va de même des outils et mécanismes susceptibles de favoriser l'intégration, notamment en matière de reconnaissance des acquis et de son corollaire: l'accès à la formation d'appoint. À cette étape, là encore l'arrimage entre les intervenants doit être assuré pour l'efficacité et la fluidité des actions.

Pour le conseil, les enjeux démographiques et économiques auxquels fait face le Québec ainsi que les problèmes rencontrés par plusieurs intervenants nécessitent maintenant des décisions conséquentes, des décisions aussi sur les moyens. Les ordres entendent poursuivre leurs efforts en collaboration avec le MRCI, mais la sélection et l'intégration des personnes immigrantes est affaire de société et nous concerne tous. Il faut donc mobiliser plusieurs acteurs, gouvernementaux et autres, et il nous faut les moyens de notre ambition. Voilà pourquoi nous appelons à un leadership qui touche l'ensemble des acteurs et à un investissement de ressources à la hauteur des enjeux. D'ailleurs, nous soutiendrons la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration dans ses efforts pour convaincre ses collègues de l'Éducation et de l'Emploi de joindre l'épaule à la roue de notre réussite collective en immigration. Nous la soutiendrons aussi dans ses démarches auprès du ministre des Finances afin que des moyens suffisants donnent impact et crédibilité à son action.

Alors, je vais m'arrêter ici pour nous laisser le plus de temps possible pour les échanges. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole à la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, merci d'être là. C'est très apprécié, parce que, vous savez, vous couvrez un sujet d'actualité. Je ne pense pas qu'il y ait un seul groupe qui soit venu devant nous depuis trois semaines qui n'ait pas abordé cette question-là par rapport à... Puis vous le savez à part ça, je n'ai même pas besoin de vous le dire, on a déjà échangé souvent là-dessus, sur le fait que c'est un obstacle plus que majeur, là. Parce que, malgré toutes les volontés, les plans d'action, les politiques, l'écoute, les commissions parlementaires, si on ne règle pas ce problème de reconnaissance des diplômes, mais je dirais surtout de forte participation et de volonté de la part des ordres professionnels, on aura beau mettre même certains moyens en place, on s'aperçoit que c'est majeur, comme frein, et ça crée énormément de déception et une déception très profonde.

Je me mets dans la peau de ces candidats... Parce que, vous savez, on entend toutes sortes d'histoires, puis les histoires qu'on entend, là, ne sont pas fausses, là, elles sont véritables. Et j'ai l'impression que souvent on ne prend pas la peine de se mettre dans la peau de celui ou de celle qui a étudié pendant des années dans son pays et qui arrive ici, souvent pas nécessairement par choix, souvent par obligation, et qui ne demande pas mieux que de contribuer. C'est une situation, honnêtement, là, je vous dirai même, comme ministre là, qui est très frustrante. Puis vous le savez, je vous l'ai déjà dit.

Et, quand je lis votre mémoire puis je lis vos recommandations... Puis j'aimerais ça que vous me répondiez à nouveau à cette question-là: Est-ce que c'est uniquement ou principalement une affaire de moyens? Parce que vous nous recommandez bien sûr de... vous ne dites pas le mot «investir», mais ça revient à ça, là. Parce que, si on parle de programme de formation, si on parle de ressources additionnelles, si on parle de soutien aux ordres professionnels, parce que c'est ce que vous dites dans votre mémoire, est-ce qu'on doit résumer cette situation-là essentiellement à une question de moyens de la part des ordres professionnels?

M. Dutrisac (Jean Paul): Mme la ministre, d'abord, avant de répondre peut-être et de permettre à mon collègue d'y répondre aussi, à la question, je voudrais juste rappeler, parce que vous parliez tantôt de volonté de participation des ordres à résoudre la problématique dont vous faites état, et je pense que, dans notre mémoire, on y fait état aussi, rappeler que la volonté et la participation des ordres, quant à nous, est quand même au rendez-vous, rappeler qu'en décembre 2001 le Conseil interprofessionnel, les 45 ordres ont adopté de façon unanime un plan d'action important, ambitieux, justement pour aider à régler les problématiques qui étaient identifiées dans le passé. Et ce plan d'action a voulu être... montrer toute la sensibilité que les ordres pouvaient ressentir à l'égard de cette problématique-là. Mais la problématique n'est pas uniquement l'affaire des ordres. Quand on parle, dans nos recommandations, d'un arrimage, il y a un arrimage entre les différents acteurs dans ce dossier-là, autant au niveau de l'éducation, autant au niveau d'Emploi-Québec, le MRCI, les employeurs privés. Alors, il y a un arrimage à faire entre tous ces gens-là.

Et je veux juste aussi poursuivre en montrant qu'on a une série de recommandations, mais ça se termine aussi par un engagement, l'engagement des ordres à poursuivre le travail qu'ils font actuellement dans ce secteur. Les ordres ont déjà mis sur pied des actions très concrètes, le conseil, pour aider les personnes responsables des admissions aux ordres pour être plus sensibles et aider les responsables pour être capables de permettre de solutionner cette problématique-là que vous évoquez, alors des formations au niveau de la reconnaissance des acquis, comment mieux s'y prendre à ce niveau-là et aussi des formations sur les relations interculturelles pour rendre les gens un petit peu plus sensibles aux différences, quand quelqu'un vient demander de pouvoir avoir un permis d'un ordre.

Alors, maintenant c'est sûr qu'il y a une question de moyens. Il y a une question de moyens, que ce n'est pas uniquement aux ordres à assumer ces coûts-là. Quand on parle de formation d'appoint, alors il y a beaucoup de problématiques à ce niveau-là et il y a une question de moyens aussi.

n (15 h 30) n

Mme Courchesne: Si vous me permettez, et j'apprécie le commentaire que vous faites, là, et je ne le conteste pas, probablement que vous avez raison, mais, s'il y a eu un plan d'action en 2001, on est rendus à 2004, les résultats tardent à venir, franchement. Parce que, au fond, sur le terrain, il faut que ça se traduise par une facilitation réelle. Mais il n'en demeure pas moins, là, que je ne conteste pas les aspects que vous êtes en train de nous dire par rapport à ça. Mais, quand on parle de formation d'appoint, puis vous le savez, j'insiste toujours, quand c'est moi qui en parle, pour dire que le gouvernement, en vertu des lois, n'a pas à décider quel type de formation ça prend pour pratiquer le génie, le droit, la médecine, je ne sais plus trop quelle profession, là. Ce n'est pas, en tout cas certainement pas, au MRCI ou à la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration de décider ou d'évaluer le type de formation. Cela dit, il n'en demeure pas moins que parfois il y a des candidats d'universités reconnues dans le monde qui se font dire qu'ils doivent pratiquement tout recommencer, là.

Ma question, c'est que, à partir du moment où les législateurs, les ministres, tous confondus, ne peuvent pas intervenir dans le type de formation, que ces formations-là sont déterminées à la fois par les ordres et souvent par les universités et que tous les intervenants nous disent: Écoutez, il faut que ce soient des formations courtes, sinon l'immigrant, le nouvel arrivant, il n'a pas les moyens, lui, d'étudier pendant trois ans, il n'a pas les moyens de subvenir à ses besoins pendant trois ans, il n'a pas cette capacité-là... Puis c'est très décourageant, surtout s'il a une famille, c'est... Alors, comment on peut développer justement des formations qui peuvent être aussi facilitantes? Ou comment on peut adapter cette formation à la réalité de ceux et celles qui nous arrivent et qui souvent ont pratiqué, ont de l'expérience? Peut-être pas, j'admets, tout à fait les standards québécois, c'est possible, puis je ne dis pas qu'ils n'ont pas besoin d'avoir cette formation d'appoint. Mais, si c'est le mot «d'appoint», le mot «d'appoint» devrait signifier ce qu'il a à signifier et non pas nécessairement tout recommencer.

Alors, j'aimerais ça connaître votre réflexion par rapport à cet aspect-là de la question. Parce que, nous, on peut se faire dire n'importe quoi, comme parlementaires, comme législateurs, puis on ne peut pas s'obstiner longtemps là-dessus, là.

M. Gariépy (André): Bien, Mme la ministre, effectivement vous pouvez vous faire dire n'importe quoi, mais on peut vous rappeler ce que vos prédécesseurs ont dit, en votant le Code des professions. Et malheureusement, malgré l'information qu'on vous a donnée, le gouvernement a les pouvoirs de fixer des exigences, parce que les diplômes qui sont désignés comme donnant ouverture aux ordres professionnels, aux permis des ordres professionnels, sont désignés par un règlement adopté par le gouvernement, après avis de l'Office des professions et des ordres concernés, et qui peut le modifier comme il le veut. Par contre...

Mme Courchesne: Après avis, justement, après avis des ordres. Écoutez, là...

M. Gariépy (André): Oui. Mais j'ai déjà vu, Mme la ministre, des règlements proposés par les ordres professionnels être modifiés en cours de route, suivant avis de l'Office des professions et des comités ministériels que vous avez au Conseil exécutif.

Mme Courchesne: Oui, mais...

M. Gariépy (André): Alors, c'est donc faisable. Et cet arbitrage... Et c'est pour ça que l'État... ou l'Assemblée nationale, lorsqu'elle a adopté le Code des professions, en 1974, s'est dit: Oui, je vais donner une autonomie aux ordres professionnels, mais je vais me garder un pouvoir d'arbitrage dans le processus, à la dernière minute.

Mme Courchesne: Mais, M. Gariépy, je vais prendre un exemple très concret. Le Barreau du Québec, cette semaine, nous a dit, hein, nous a dit clairement que, rarement en bas de 30 mois... 30 crédits, je m'excuse, rarement en bas de 30 crédits, un universitaire qui a appris le droit ailleurs peut pratiquer le droit, et rarement en bas de 30 crédits, et plus souvent 75 crédits. Ça, c'est ce qu'ils nous ont dit: 75 crédits, là, plus le Barreau. Ça fait que ça, dans ma tête, là, c'est trois ans plus l'année de Barreau: c'est reprendre à zéro.

Et là vous me dites que... Je vois ça d'ici que, nous, les législateurs, on va dire au Barreau: Ah! non... Puis là, en plus de ça, le Barreau nous dit: Écoutez, là, vous, législateurs, vous nous avez... Il ont utilisé un ton un peu plus doux que le vôtre, mais ils ont dit: Écoutez, vous, le législateur, là, vous, le législateur, avant tout, n'oubliez jamais que vous avez entre les mains la protection du public. Et ils ont raison, ils ont raison. C'est vrai. C'est pour ça que les ordres professionnels existent. Mais comprenez, là, que ça nous met dans une situation... Moi, je me sens, franchement, là, avec la suggestion que vous nous faites, je me sens un peu comme au milieu du sandwich, là.

Moi, je voudrais... Parce que c'est facile de nous dire qu'on a tous les pouvoirs, mais je pense qu'il faut être réaliste aussi, hein, je pense qu'on vit dans un contexte de société où il faut être réaliste par rapport aux intervenants avec qui on travaille. Ça fait que c'est pour ça que j'essaie de voir, là: Est-ce que c'est 30 crédits? 75 crédits? Qui sommes-nous pour en décider?

M. Gariépy (André): Alors, quelques commentaires, Mme la ministre. Ce que je vous disais, là, et...

Le Président (M. Cusano): Brièvement, s'il vous plaît.

M. Gariépy (André): ... ? oui ? c'est un commentaire très technique, sur le plan technique, là, il est clair que le gouvernement, pour s'éclairer de la chose, a besoin d'avis spécialisés. Et malheureusement, lorsque vous servez l'exemple du Barreau, c'est un très mauvais exemple. Pourquoi? Parce que le droit est une construction sociologique pure. Il n'y a pas de... Il y a des grandes familles juridiques universelles, où on peut s'abreuver, mais le droit est une construction sociologique, et chaque pays a un système qui est différent, au point où ça fait en sorte qu'il faut... Moi, je suis allé en France, je suis allé étudier en France, j'ai terminé mes études de droit en France. Je me perdais dans leur contexte juridique. Alors...

Mme Courchesne: M. Gariépy, vous allez me dire la même chose pour les médecins...

M. Gariépy (André): Non.

Mme Courchesne: Oui, je m'excuse ? j'achève ? vous allez me dire la même chose pour les médecins, la même chose pour les ingénieurs.

M. Gariépy (André): Non, pas tout à fait, pas tout à fait.

Le Président (M. Cusano): Oui. Posez votre question, Mme la ministre, là. Je pense qu'il y a collaboration des deux côtés.

Mme Courchesne: Non, mais en fait ce que je veux dire, c'est que peut-être que j'utilise le même exemple, mais, M. Gariépy, vous savez très bien qu'on peut donner ce même exemple pour bien des professions au Québec. C'est ce que je vous disais: On pourrait tous les passer. Et la réaction qu'on a: Ce n'est quand même pas une formation d'appoint, qu'on nous recommande, c'est une longue formation. Et effectivement mon temps est écoulé. Merci, M. le Président, de votre compréhension.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je vais vous permettre un commentaire de pas plus de 30 secondes.

M. Gariépy (André): Oui. Alors, c'est parce qu'il faut me permettre de continuer. C'est parce que, lorsqu'on fait face à des professions qui ont une base scientifique, là arrivent les connaissances générales, disciplinaires, universelles, où là ça prend... c'est supposé de prendre en tout cas moins de temps. Et, lorsqu'il y a des formations d'appoint, c'est, la plupart du temps, pour des mises à niveau sur le contexte de pratiques, ici, et non pas sur la question de connaissances. Mais le contexte de pratiques, ici, l'organisation des services, la relation avec le patient ou les contextes varient. Mais le fondement disciplinaire des connaissances fondamentales devient universel: un cancer du pancréas, c'est le même partout au monde. Par contre, le contexte juridique, c'est différent.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Prévost, merci pour votre générosité.

Mme Papineau: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, bonjour. Tout d'abord, dans votre mémoire, ça m'a un petit peu rassuré parce que vous dites que les ordres professionnels sont soucieux non seulement de la qualité, mais de la suffisance des services. Ça m'a rassurée jusqu'à un certain point parce que, comme disait la ministre... Et malheureusement, peut-être, les ordres sont comme pointés du doigt parce que justement il n'y a pas... vous n'êtes pas assez ouverts... en tout cas, c'est ce qui se véhicule, que vous n'êtes pas assez ouverts à la venue de professionnels. Puis je vais prendre celui de la santé puis je vais vous poser une question bien plate, que vous allez peut-être trouver bien plate à répondre, mais un médecin, en France, qui opère à la journée longue, pourquoi est-ce qu'il ne pourrait pas venir opérer l'appendice au Québec? Si le corps humain, c'est un corps humain... Vous savez, l'appendice, en France, c'est le même appendice au Québec.

Une voix: J'espère!

Mme Papineau: Pourquoi c'est si compliqué, pour les médecins? Puis on le sait, nous, au Québec, on voudrait bien en avoir, des médecins en surplus, même, parce qu'il nous en manque beaucoup. Mais pourquoi c'est si compliqué? Puis je prends juste cet exemple-là, le médecin qui opère en France puis qui ne peut pas venir ici. Puis, moi, chez nous, là, je sais que la ministre, elle s'en occupe, mais j'ai un médecin qui est chauffeur de taxi. Ça n'a pas de bon sens! Parce que ce médecin-là, il doit avoir des compétences, il a travaillé dans son pays. Qu'est-ce que vous pouvez répondre à ça?

M. Dutrisac (Jean Paul): D'abord, je voudrais permettre à mon collègue de répondre plus spécifiquement à cette question-là. Mais, peut-être juste pour mettre les choses en perspective, parce que là on est en train de dresser un tableau un peu d'horreur, nous, on a fait...

Mme Papineau: Non! Non! Bien, attendez!

M. Dutrisac (Jean Paul): ...on a fait...

Mme Papineau: Non, remarquez... Non, non, non!

Le Président (M. Cusano): Un instant! Un instant! Un instant, s'il vous plaît!

Mme Papineau: Je veux reprendre le micro, M. le...

Le Président (M. Cusano): Vous avez la parole.

Mme Papineau: Ah, M. le Président! Ce n'est pas un film d'horreur que je veux faire, là. C'est la réalité qu'on pense, ici, à l'heure actuelle.

Le Président (M. Cusano): Non, non. Un instant! Un instant!

M. Dutrisac (Jean Paul): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Oui, vous avez la parole.

n (15 h 40) n

M. Dutrisac (Jean Paul): Oui. Alors, je veux juste remettre les choses en perspective parce qu'on a fait quand même certaines études statistiques, auprès de nos membres, sur la demande et sur les résultats suite aux demandes qui ont été faites. Et, si je regarde les données de 2001-2002, le nombre total de demandes de reconnaissance au niveau des équivalences de diplôme et de formation pour l'ensemble des ordres, c'est de 1 990, pour 2002, alors que les quatre années... Parce qu'il y a eu une augmentation, parce que les quatre années avant, c'était à peu près 700 demandes par année. 2001-2002, là, il y a un «peak» un peu, et là on s'en va à 1 990. Sur 1 990 demandes, 1 650 sont reconnues à 100 %; 667 sont reconnues partiellement, donc ça prend une formation d'appoint; et il y en a 240 qui sont refusées. C'est quand même des chiffres qui parlent, aussi. Donc, il ne faut pas voir les ordres comme étant un frein majeur à l'intégration des personnes immigrantes dans la pratique professionnelle au Québec.

C'est sûr que des fois on a à exiger des formations d'appoint, mais c'est la loi qui oblige les ordres d'assurer leur mission de protection du public et de s'assurer que la clientèle va être servie de la même façon, et avec la même compétence, et la même qualité, et la même intégrité que si c'est un professionnel formé au Québec. C'est l'obligation que le législateur nous donne.

Maintenant, pour répondre plus spécifiquement au niveau de la médecine, moi, je suis notaire, je suis un petit peu loin de ça, mais je vais laisser mon collègue...

M. Gariépy (André): Je suis avocat, mais quand même... Justement, c'est sous l'angle juridique que je vais l'aborder. Malheureusement, je dois vous donner des réponses qui, dans la froideur de la technicité... Il faut regarder au-delà de la froideur de la technicité.

Les médecins, c'est un cas très particulier parmi les 45 professions au Québec. Il y a un contrôle de l'effectif des médecins qui a historiquement été effectué par la RAMQ et le ministre de la Santé. Pourquoi? Parce que, dès qu'on envoie un médecin avec un permis, il se branche sur la RAMQ, et il y a des limites au budget qu'on donne à la RAMQ. Alors, il y a des places de stage qui ont été fixées, il y a un certain nombre de places de stage qui ont été fixées, et ça fait en sorte que les médecins étrangers... ce n'est pas tous les médecins étrangers qui pouvaient avoir accès à ces places de stage là et donc aller présenter leurs dossiers au Collège des médecins.

Et, jusqu'à il y a quelques années, le règlement sur la sélection des immigrants incluait une liste de professions qu'on disait inadmissibles. Dès qu'une personne immigrante envisageait aller au Québec, on lui disait: Tu peux venir, mais tu vas signer un engagement à l'effet que tu ne pratiqueras pas la médecine. Parce qu'à l'époque on se disait qu'on n'avait pas besoin de médecins. Encore une fois, je reviens à notre mémoire, il va falloir s'arrimer sur l'identification des besoins, parce que je pense qu'on s'est coupés, à un moment donné, d'une vue réaliste, parce qu'une personne a décrété quelque chose mais n'a pas demandé le point de vue de tous les autres qui ont le regard sur le marché du travail ou sur le système de santé.

Alors donc, les médecins, c'est un cas très, très, très particulier. Et souvent les médecins qui ont fini par passer et donc venir au Québec, c'est parce que soit ils ont signé l'engagement, à l'époque, de ne pas exercer la médecine au Québec, ou soit ils sont arrivés comme conjoints de quelqu'un, ou soit ils sont arrivés comme réfugiés, avec toutes les difficultés que ça implique de pouvoir apporter leurs dossiers, documenter les choses, et tout, et tout. Alors, les médecins, là, moi, ça m'embête à chaque fois parce que c'est le cas le plus émotif, le cas le plus sensible, parce que c'est la santé des individus.

Puis, quand... Vous avez relevé une de nos phrases dans notre mémoire, puis vous avez raison: l'absence de professionnels sur le terrain. Quand on sait que, quand on réglemente une profession, c'est parce qu'il y a des risques de préjudices, c'est parce qu'il y a une absence de services sur des choses fondamentales. Et c'est pour ça que plusieurs ordres professionnels ont eux-mêmes, en l'absence même du gouvernement, du réseau de la santé et du réseau de l'éducation, qui ne voulaient rien entendre d'investir là-dedans ? sauf le MRCI qui nous a accompagnés ? les orthophonistes-audiologistes, les technologues en radiologie et les infirmières sont allés à l'étranger aller recruter des gens. Pourquoi? Parce que personne ne s'en occupait dans les grands employeurs de services publics comme l'éducation puis la santé. Nous avons pris l'initiative. On s'est dit: Ça suffit, alors on y va parce que là le public ne sera pas servi. Déjà qu'être servi par un orthophoniste, par exemple, est potentiellement à risque, il faut le surveiller; imaginez-vous, sans orthophoniste, la perte de potentiel de l'individu, la dégradation de sa santé.

Alors, c'est le genre de choses sur lesquelles, nous, nous sommes très sensibles. Puis à un moment donné il y a des ordres professionnels qui ont décidé d'agir. Mais, je vous le rappelle, le cas des médecins est vraiment particulier, puisqu'il y a une dimension historique de décision administrative du gouvernement qui a limité l'effectif là-dessus.

Mme Papineau: Donc, ce que vous êtes en train de me dire, c'est qu'il faut que je fasse pression sur la RAMQ?

M. Gariépy (André): Bien là, il y a quelques années, Mme la députée, il y a quelques années, il y a deux choses qui se sont passées: ils ont fait sauter cette limitation des places de stage, le ministre de la Santé s'est dit: Écoute, je m'en vais dans la... oui, l'impasse, là-dedans; et, deuxièmement, le MRCI, le ministre de l'époque a fait modifier le règlement sur la sélection des personnes immigrantes et a fait sauter toutes les professions en demande, sauf les enseignants et les médecins, mais, les médecins, il y a eu une évolution là-dedans, là, pour d'autres aspects. Voilà.

Alors, il faut être juste sur la réalité de l'histoire et du contexte juridique des choses. Parce que je vais vous le dire, là, comme citoyen, ça ne me tente pas, moi, d'être associé à un système qui est perçu comme corporatiste, qui est perçu comme fermant son esprit, parce que ce n'est pas ma réalité personnelle. J'ai des amis, j'ai des proches qui vivent des situations de déracinement, puisqu'ils viennent de France, ils viennent d'Afrique, ils viennent d'Amérique centrale. J'ai des proches comme ça, et, moi, ça ne me tente pas d'être associé à des choses comme ça, et je n'en vois pas, au sein du système professionnel, qui ont le goût d'être traités de cette façon-là.

Mais ce que je peux vous dire, c'est que nous avons des difficultés réelles. Parce que la ministre a touché à plusieurs points. On parle des résultats. Notre plan d'action, là, nous avons des résultats, nous nous sommes commis à plusieurs engagements, plusieurs actions, et nous les avons réalisés, depuis 2001, et nous continuons à les réaliser, parce qu'il y a une certaine évolution dans certains dossiers. Nous nous sommes engagés à trois journées...

Le Président (M. Cusano): S'il vous plaît, en conclusion.

M. Gariépy (André): Oui. Nous nous sommes engagés à trois journées de travail sur des outils de reconnaissance des acquis, avec le MRCI, avec d'autres partenaires: nous en avons tenu deux, nous en tiendrons une troisième à l'automne. Les ordres professionnels ressortent outillés, ressortent regaillardis et se disent: Ah! là, j'ai un outil adapté à la situation changeante de l'immigration. Parce que, à chaque vague migratoire, à chaque situation particulière, un outil, presque, doit être développé. Et, sur la question des outils, il y a une question de financement, et c'est pour ça que nous posons la question de financement.

Le Président (M. Cusano): Merci. Alors, avant de céder la parole au côté ministériel, vous allez me permettre de souligner la présence, dans la salle, d'une délégation de la Chambre des représentants du Royaume du Maroc, présidée par M. Driss Lachgar. Bienvenue chez nous, M. Lachgar ainsi que les membres de votre délégation. Merci beaucoup de votre visite. Et j'ai appris l'autre soir, avec intérêt, que c'était plutôt une visite d'étude que d'autre chose. Alors, vous êtes maintenant témoins d'une commission parlementaire où le public, les membres du public... est consulté au niveau de certains aspects. Sans aller dans les détails, alors ça, c'est une de nos procédures parlementaires ici, au Québec. Et, si par après vous avez besoin d'autres explications, il me fera un plaisir de vous les donner. Merci beaucoup d'être ici, chez nous. J'aimerais également souligner la présence d'un ex-collègue de l'Assemblée nationale, ancien parlementaire, M. Gérard Latulippe, qui est actuellement directeur des affaires parlementaires du National Democratic Institute, qui accompagne les membres de la délégation. Salut, Gérard. Alors, merci.

Je cède maintenant la parole au côté ministériel, et c'est Mme la ministre.

Mme Courchesne: Alors, M. le Président, merci. Alors, messieurs, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue parmi nous.

Revenons à notre sujet. En fait, M. Gariépy, je pense que... Et c'est correct qu'on se parle un peu virilement. Et pour vous dire qu'une chose que j'apprécie, c'est que vous remettiez le contexte historique des décisions en perspective. Parce que, là, là, ce que j'entends, et vous le dites avec force, c'est qu'au fond tout ça, c'est une espèce de roue d'engrenage, aussi, qui fait que, à un moment donné, si tu mets... tu dis: Oups! c'est fermé, on ne rentre plus, on ne veut pas, bien ça prend des années pour essayer de ramener ça effectivement dans une perspective d'ouverture. Moi, c'est ce que j'ai compris de ce que vous m'avez dit. C'est la première fois que vous le dites avec autant de force publiquement. Mais je comprends là que c'est majeur, comme phénomène, parce que la députée de Prévost a raison, écoutez, vous êtes franchement beaucoup pointés du doigt.

Cela dit, puis je vous le dis, là, il faut s'asseoir ici, parce que les gens qui viennent devant nous, là, ce n'est pas à vous qu'ils parlent, c'est à nous, les élus, puis ils disent: Vous, les élus, puis, vous, le gouvernement, puis, vous, la ministre, là, réglez-la, cette situation-là, parce que, nous autres, on n'en peut plus. Puis, moi, tous les samedis soirs, tous les dimanches midi, là, hein, quand je vais serrer des mains puis je vais dans les événements des communautés culturelles, je me fais franchement très fortement interpeller. Cela dit, regardons l'avenir, soyons positifs puis admettons... Puis tant mieux si vous sentez qu'il y a du progrès. Et ma collègue ? je vais lui laisser la parole ? la députée de Chambly me dit la même chose, parce qu'elle a vécu ça, elle, dans sa carrière professionnelle.

n (15 h 50) n

À ce moment-là, est-ce que ça se peut que ce soit pour arriver à faire cette demande d'équivalence que ça, c'est très compliqué aussi? Moi, ce que je pense, c'est que je me dis: Est-ce que ça se peut que... Est-ce qu'il y a encore place pour améliorer toutes les procédures administratives juste pour faire la demande, juste pour ramasser tous les papiers? Est-ce qu'il n'y a pas des façons de faire qui soient facilitantes, puis pas nécessairement dans des procédures québécoises, mais en se mettant dans la peau justement du réfugié qui a perdu ses papiers? Il n'y a pas quelque chose qu'on peut faire pour ce pauvre monsieur ou cette pauvre dame, qu'elle ne soit pas obligée de tout recommencer parce que, dans son pays, elle n'a plus ses papiers? Je comprends que c'est grave, ce que je dis, là, toujours dans cette perspective de protection du public, je fais exprès pour exagérer, là, pour dire: Est-ce qu'il n'y a pas une voie mitoyenne facilitante?

M. Gariépy (André): Mme la ministre, vous tombez carrément dans le schéma de notre mémoire où on demande de regarder le cheminement de la personne immigrante. Pourquoi? Parce que, dans l'approche, il est vrai que, dans ce dossier, pour paraître pertinents, souvent beaucoup de gens sortent les préjugés et focalisent sur les ordres professionnels.

On vous l'a démontré que c'est environ 1 000 personnes par année que les ordres professionnels traitent, sur les 40 000 personnes immigrantes sélectionnées au Québec ? 1 000 personnes. Vous allez me dire: Bien là chaque personne est un drame qu'il faut éviter. Effectivement, je pense qu'on a cette sensibilité-là. Mais il faut regarder le cheminement de cette personne immigrante. Vous reparlez de l'étape de avant le dépôt de la demande. Effectivement, il faut travailler là-dessus. Mais, quand la décision de l'ordre est rendue, il faut regarder, après, ce qu'il faut pour compléter le profil de la personne immigrante. Beaucoup d'intervenants vous ont dit: Le problème de la formation d'appoint.

Mme la ministre, je vous rappelle ? et on l'a rappelé dans notre mémoire ? qu'une personne immigrante, ça part du désir dans son pays d'origine, et ça arrive enfin à son premier jour d'emploi au Québec, et entre les deux il y a tout un processus. Et la première table de concertation, de 1995 à 1997, a tout modélisé chacune de ces étapes-là, a tout indiqué, et ce sont les mêmes problèmes qui subsistent. Les mêmes problèmes qu'on vous a évoqués devant cette commission, on peut les replacer dans le tableau. Et chacun des intervenants doit maintenant agir, maintenant qu'il sait, depuis plusieurs années, ce qu'il en est de sa responsabilité.

Nous, on a pris acte de ces travaux-là. Nous avons adopté un plan de travail, en 2001. Pourquoi? Parce que, nous, on s'est dit: Bien, on ne va pas attendre les autres, on va commencer notre bout. Parce que les ordres professionnels ne contrôlent ni l'offre ni la demande, mais ils ont un effet sur le résultat parce qu'ils contrôlent un processus. Assurons-nous que ce processus soit équitable, transparent, performant et bien adapté à la situation des personnes immigrantes. Et, lorsque vous regardez l'essence des actions que nous avons déjà commencé à mettre en place, on touche justement aux outils de reconnaissance des acquis.

Et, pour ceux qui pensent qu'il y a un problème d'attitude, nous avons tenu deux journées ? et il y en aura une troisième ? de formation sur les relations interculturelles, développées à partir d'un programme que le gouvernement avait instauré à Emploi-Québec pour ses propres employés, en lien avec une clientèle de communautés culturelles, et je peux vous dire que les ordres professionnels ont apprécié cet outil pour voir la communication interculturelle d'une autre façon et éviter de mettre en péril le dossier d'une personne immigrante pour le seul fait du fossé culturel. Alors, nous agissons.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Chambly, en vous rappelant que vous disposez de 2 min 30 s.

Mme Legault: 2 min 30 s?

Le Président (M. Cusano): Pour la question et la réponse.

Mme Legault: Merci, M. le Président. Messieurs. Alors, au moment où on se parle, le plan d'action, là, est en oeuvre. Quels sont, là, d'après vous, les enjeux, là, concrets que vivent les ordres, au moment où on se parle, pour reconnaître les compétences des candidats, là? Qu'est-ce qui manque exactement? Est-ce que c'est des cartes routières de compétence? Qu'est-ce qui manque?

M. Gariépy (André): Une série de choses, mais on va les cibler par grands groupes. Premièrement, au niveau des outils de reconnaissance des acquis. À chaque vague migratoire sa difficulté. Quand arrive une vague migratoire des pays de l'Est, parce qu'il y a eu une transformation politique et ils règlent toutes sortes de choses dans certains pays, alors une vague migratoire arrive, nous sommes particulièrement interpellés par cette nouvelle communauté qui nous arrive avec des profils tout à fait différents, d'un système d'éducation et de pratiques professionnelles tout à fait différents. Il faut savoir l'apprécier. Donc, les outils d'information sur la formation à l'étranger.

Nous avons tenu une journée de travail là-dessus, et il faut pousser plus loin. Et, Mme la ministre, peut-être qu'on ne vous l'a pas fait cheminer encore, mais, à la demande du conseil, nous avons entrepris des négociations pour que les ordres professionnels et votre service d'évaluation comparative des études établissent des liens fonctionnels quotidiens. Parce que deux expertises en parallèle sur à peu près les mêmes choses, il faut qu'ils se parlent pour s'alimenter l'un et l'autre, et ça, ça sauve du temps. C'est de l'efficacité et surtout de la complémentarité et de la cohérence dans les décisions qui sont rendues.

L'autre élément, c'est lorsque l'ordre professionnel, avec des bons outils d'information et des bons outils d'évaluation ? parce qu'il faut construire aussi des outils d'évaluation, dans certains cas ? lorsqu'il rend sa décision et que, en toute transparence et équité et en comparabilité avec les exigences de compétence au Québec, l'ordre décide: Bien, il lui manque, à cette personne, tel ou tel cours, eh bien, là se pose l'enjeu de: A-t-on accès à ces cours-là? Est-ce que les institutions d'enseignement nous fournissent ces cours-là?

Vous étiez, Mme la députée, à l'Ordre des dentistes, vous savez que former un dentiste sur un aspect pour compléter son cadre de pratique selon la plate-forme technologique qu'il y a au Québec et non pas dans certains pays, bien ça prend des sous. Les universités nous disent: Regarde, là, s'il ne s'inscrit pas dans tout le programme, je ne veux rien savoir. Le cégep nous dit la même chose, et je peux vous donner et j'ai transmis à certaines personnes le scandale qu'il y a actuellement pour les thérapeutes en réadaptation physique, au cégep de Rosemont, où quelqu'un a décidé que: Non, non, non, non, on ne va pas financer des formations courtes, ça ne rentre pas dans nos régimes pédagogiques, et de sanctions, et de financement des études, on arrête ça. On a une liste d'attente qui se crée pour des technologistes médicaux, alors qu'on en a besoin.

L'enjeu de la formation d'appoint, c'est crucial et il faut que le système d'éducation réponde à la commande. Et, s'il n'y a pas l'argent, Emploi-Québec pourrait intervenir pour soutenir la personne immigrante pour financer sa formation manquante pour enfin qu'elle livre au marché du travail québécois ce qu'on attend d'elle.

Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. C'est une question très vaste qui a été soulevée, et je vous remercie beaucoup de votre présentation et de la clarté de vos propos.

Je reviens sur le tableau de la page 9, où, dans votre document, vous parlez des équivalences refusées, acceptées, partiellement reconnues ou reconnues, et vous arrivez avec un total de 1 133 sur 5 577. Je pense que c'est intéressant à regarder. Ça veut dire qu'à peu près le quart ou... pas tout à fait ? oui ? sont refusées. C'est sûr qu'un tableau qui regroupe, dans un même tableau, la médecine, le droit, le génie, tout ça, bon, ça ne dit pas beaucoup, beaucoup de choses. Bien, ça dit toujours quelque chose, mais c'est limité, ce que ça peut vouloir dire.

Alors, est-ce que vous seriez en mesure de m'éclairer s'il y a des secteurs où il y a un problème chronique, où la plupart du temps les gens ne peuvent pas, pour toutes sortes de raisons qui sont peut-être explicables, dans des... Est-ce qu'il y a des professions particulières où il est vraiment très difficile de reconnaître les diplômes obtenus ailleurs, ou sinon?

M. Dutrisac (Jean Paul): Quand on regarde le tableau... Puis, pour aller dans le détail, peut-être que le directeur général pourra le faire. Mais, quand on regarde le tableau, vous voyez que c'est essentiellement dans le secteur santé, relations humaines où il y a un problème de difficultés... des difficultés au niveau de refus, pas en proportion, mais par rapport à l'ensemble des demandes comme telles. Alors, maintenant est-ce qu'il y a des professions en particulier? Là, peut-être qu'André pourrait...

M. Gariépy (André): Moi, je vais vous dire, là, je sais, avec la rigueur statistique... Parce que je ne suis pas seulement avocat, j'ai ma formation en économie, en économétrie, alors j'essaie, avec ma rigueur statistique, de voir comment on peut décoder ça, et il sera toujours difficile de dire: Il y a un problème avec tel ordre. Pourquoi? Parce que, d'une année à l'autre, ce qu'on appelle en anglais l'«intake» n'est pas du tout le même. Donc, quand la donnée fondamentale n'est pas comparable, quand le niveau ? parce que ça dépend des vagues migratoires ? n'est pas comparable, comment voulez-vous faire des liens d'année en année et, en plus de ça, de faire des liens entre ordres professionnels, de faire des comparaisons et des évaluations entre ordres professionnels?

Chaque domaine a sa situation particulière. Chaque domaine a ses enjeux de compétences particuliers et chaque domaine, d'année en année, reçoit quelque chose d'irrégulier en termes de nombre, et de provenance, et de profil de demandeurs d'équivalences. Alors, il peut y avoir des recoupements et, lorsqu'il y a des recoupements, les ordres professionnels font des groupes pour se donner un outil plus efficace. Ça a été le cas des orthophonistes, pour les logopèdes, ce qu'on appelle les logopèdes, en Belgique; ça a été le cas des médecins, qui ont regroupé dernièrement, avec le groupe de travail avec le MRCI, certains médecins présentant un même profil pour les aborder en bloc, pour se donner un outil pour les aborder en bloc.

Mais il est très difficile de dire: Il y a un problème. Parce que ce n'est pas par les statistiques qu'on peut le prendre, c'est par l'analyse du processus. Et nous faisons... Et nous l'avouons, dans le sens que, s'il peut y avoir un problème, nous allons le regarder, et nous travaillons là-dessus avec nos journées de travail sur les outils de reconnaissance des acquis.

M. Dion: Dans le même...

Le Président (M. Cusano): Oui, M. le député.

n (16 heures) n

M. Dion: Merci, M. le Président. Dans le même ordre d'idées, dans le domaine de la santé, c'est sûr que c'est le domaine où c'est le plus sensible pour la population. C'est peut-être le domaine aussi où, les gens, évidemment, la question culturelle peut jouer beaucoup, parce que c'est certain que faire une intervention chirurgicale, qu'elle soit en japonais ou en chinois, ça peut être la même chose. Mais, avant d'arriver à l'intervention, il y a tout le processus à suivre pour identifier et poser un diagnostic, et là il y a beaucoup de phénomènes culturels qui peuvent jouer. Alors, c'est sûr que ce n'est pas si simple. Je suis particulièrement heureux des clarifications que vous avez faites. Et vous avez dit, entre autres, que le virage maintenant est pris. Il a été pris en 2001, après des années douloureuses, je pense, des années douloureuses où, tous, on a eu à recevoir des gens qui se sont plaints de difficultés particulières.

Je voudrais cependant toucher un point particulier qui est la question de la langue de travail. Les services professionnels, ce n'est pas tous des services aux personnes, mais, en santé, c'est des services aux personnes, et dans beaucoup d'autres domaines aussi. Alors, quelles sont les exigences, du point de vue de la langue, pour pouvoir avoir son permis de travail dans un domaine... dans un ordre professionnel? Est-ce qu'elles sont variées selon les ordres ou s'il y a une exigence qui est la même pour tous?

M. Gariépy (André): Ah! M. le Président, le député de Saint-Hyacinthe pose une question très importante. La langue, c'est l'essence de la communication avec le client pour cibler son problème mais aussi intervenir auprès de lui, lui formuler un conseil adapté. Mais c'est aussi la langue qui est l'outil pour communiquer avec d'autres ressources pour les mobiliser au service du client. Le Québec est une société française. Si on ne parle pas français, nous ne sommes pas en mesure d'intervenir auprès de la clientèle principale, ni de mobiliser les ressources spécialisées au service de ces clientèles, ni de communiquer avec les institutions dont on s'abreuve, en termes d'expertise. Ce que je vous dis, c'est un fait sociologique, ce n'est pas une déclaration politique. C'est un fait sociologique. Et c'est à ce point un fait sociologique que ça fait depuis 1972 que la Charte de la langue... la loi 22 à l'époque, là... M. Cusano a certainement quelques souvenirs là-dessus.

Le Président (M. Cusano): Quelques souvenirs.

M. Gariépy (André): Certains se plaisent à vous le rappeler. Depuis la loi 22, il y a des dispositions qui font en sorte que toute personne qui veut obtenir un permis d'un ordre professionnel doit avoir une connaissance suffisante de la langue française.

Maintenant, cette connaissance suffisante, elle est établie à quel niveau? À un niveau secondaire. Je regrette, mais ce n'est pas suffisant. Pour exercer une profession, il faut, dans certains cas, maîtriser le langage disciplinaire parce qu'on discute avec des médecins spécialistes, des collègues, et tout, et tout. Nous faisons partie d'un grand tout, que ce soit le système d'éducation, le système de santé. Il faut être capable de communiquer de façon professionnelle, et non pas communiquer au simple niveau secondaire, comme la Charte de la langue française et son règlement d'équivalence, là, l'exigent de la part des professionnels.

Je peux vous le dire, nous sommes en mesure de reconnaître beaucoup de professionnels, mais ils ne peuvent pas passer les tests de l'office, qui sont déjà assez bas, au niveau secondaire, en termes de maîtrise de la langue française. Mais, en plus de ça, lorsqu'ils arrivent, lorsqu'ils passent ce test-là, ils ne peuvent pas subir l'examen de l'ordre professionnel en français. Ça vous dit tout de suite qu'il y a un grave problème là. On va envoyer des personnes incapables de communiquer avec la clientèle majoritairement francophone et on va avoir des problèmes de communication et donc d'efficacité, de pertinence et de qualité du service professionnel.

Certains me diront: Mais, si la personne vient de Hong Kong et elle veut exercer seulement auprès de la communauté chinoise de Montréal? Soit! Mais, dès qu'elle va sortir de sa communauté pour communiquer avec des spécialistes dans le réseau de la santé et pour mobiliser des ressources, pour s'abreuver des nouvelles avancées dans son domaine, ça va se faire certainement, en tout cas pour le Québec, en français, et la personne sera incapable. Le Québec a fait un choix. Encore là, c'est un fait sociologique, il n'y a rien de politique là-dedans. À preuve, c'est le Parti libéral qui avait adopté ça en... La loi 22, M. Cusano?

Le Président (M. Cusano): En 1976.

M. Gariépy (André): Merci.

Le Président (M. Cusano): Au mois de juin, en 1976.

M. Gariépy (André): Ah! bien là, dans ce cas-là, c'est avant ça.

Le Président (M. Cusano): En 1974.

M. Gariépy (André): Bon. Voilà. 1974.

Une voix: 22.

Le Président (M. Cusano): 22. La loi 22.

M. Gariépy (André): ...

M. Dion: Oui. Je voudrais pousser un peu plus loin la question: Est-ce qu'actuellement les services actuels offerts aux immigrants professionnels, du point de vue de la francisation, sont suffisants? Sinon, qu'est-ce qu'il faudrait faire?

M. Gariépy (André): Moi, je peux parler comme citoyen qui entend beaucoup de choses à l'effet que c'est insuffisant. On avait ça dans les journaux il n'y a pas longtemps. Nous avons communiqué avec des gens qui oeuvrent à réformer le cadre commun de francisation. Nous sommes intervenus auprès du Conseil supérieur de la langue française qui tenait une consultation récemment. Pour nous, clairement, c'est insuffisant. Et, pour nous, je dois vous le dire, les institutions d'enseignement qui détiennent justement ce langage disciplinaire, parce qu'elles enseignent en français, doivent être au rendez-vous. Elles n'y sont pas. Déjà qu'on a un problème avec les institutions anglophones qui en quelque sorte diplôment des gens que, nous, on est peut-être un petit peu obligés d'accepter parce qu'ils sont diplômés du Québec et qui n'ont pas la connaissance du français adéquate, imaginez-vous!

M. Dion: Merci beaucoup.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe, et merci à nos invités de faire un rappel historique qui démontre que ça fait plusieurs années ici. Mais je n'étais pas ici en 1974. Je suis arrivé ici en 1981. Je veux juste passer un commentaire: de faire bien attention avec les statistiques, lorsqu'on prend ça de façon globale. Parce que ça me fait toujours penser à un de mes professeurs, à l'université, qui nous disait que, si on regarde les statistiques de façon trop globale, on doit constater que la température moyenne, au Québec, est de 22 °C. Alors, il ne devrait pas y avoir de neige dehors au moment où on se parle. Alors, sur ce, je vous remercie et je vais suspendre pour quelques minutes pour permettre aux représentants de la municipalité de Rawdon et de la MRC de la Matawinie de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

 

(Reprise à 16 h 11)

Le Président (M. Cusano): S'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. À ce moment-ci, nous invitons les représentants de la municipalité de Rawdon et de la MRC de la Matawinie à bien vouloir ? parce qu'ils sont déjà en place ? s'identifier pour les fins du Journal des débats.

Municipalité de Rawdon et MRC de Matawinie

Mme Major (Louise): Merci bien. Donc, M. le Président, je vais présenter tout d'abord, à la table, qui est avec moi aujourd'hui: alors, à ma droite, vous avez le préfet de la MRC Matawinie, M. Daniel Brazeau, qui est aussi maire de Chertsey; ensuite, M. André Asselin, maire de Saint-Félix-de-Valois, municipalité aussi de la Matawinie; à ma gauche, M. Roger Dominguez, président du Conseil interculturel de Rawdon; et, qui nous accompagnent aussi, M. Marek Pysik, président du Centre d'interprétation multiethnique de Rawdon, Mme Sasha Arleninow, conseillère municipale à la municipalité de Rawdon, et M. Alain Jean-Bart, qui est notre expert-conseil, qui siège au niveau du Conseil interculturel et qui accompagne le conseil municipal de la municipalité de Rawdon. D'ailleurs, de toute façon, dans le mémoire, je vais vous parler justement de notre Conseil interculturel et du Centre d'interprétation multiethnique.

Le Président (M. Cusano): Merci. Avant de procéder à votre présentation, j'aimerais vous rappeler quelques règles qui nous gouvernent, très brièvement. Vous disposez d'une période maximale de 20 minutes pour faire votre présentation, et elle sera suivie par un échange d'une durée maximale de 40 minutes avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous.

Mme Major (Louise): Merci. Donc, M. le Président de la commission, Mme la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, mesdames et messieurs, c'est avec enthousiasme et espoir que la municipalité de Rawdon et le Conseil interculturel de Rawdon ont préparé ce mémoire. Comme vous le voyez, accompagnée du préfet de la MRC et d'un maire de la municipalité voisine, vous comprendrez l'importance de la présentation de ce mémoire et l'intérêt que la Matawinie a envers l'immigration et l'intégration des nouvelles communautés.

Pourquoi Rawdon? Probablement à cause de notre historique en matière de relations interculturelles. Naturellement, dans le mémoire, nous n'approchons pas spécifiquement toutes les sphères de l'immigration, malgré que les enjeux démographiques et les enjeux économiques naturellement sont directement reliés au développement municipal et au développement régional. L'enjeu linguistique, l'enjeu régionalisation... Et vous comprendrez que l'enjeu régionalisation est celui qui nous interpelle particulièrement, puisque les petites et moyennes municipalités ont aussi leur mot à dire dans l'intégration des nouvelles communautés.

Tout comme vous, nous voulons trouver un équilibre entre nos besoins démographiques, économiques et sociaux et notre capacité d'intégrer harmonieusement les nouveaux arrivants qui, eux aussi, recherchent du dynamisme économique et une qualité de vie.

Donc, comme je vous mentionnais, pourquoi Rawdon? Probablement parce que Rawdon, depuis plus de quatre générations, a un historique en matière d'intégration des communautés. Les nouveaux... les premiers arrivants, disons, étaient des Irlandais, mais, suite aux révolutions et aux grandes guerres, nous avons vu des vagues d'immigration d'Europe de l'Est venir s'installer à Rawdon. Donc, les thèmes sociocommunautaires, les thèmes multiculturels, les thèmes multireligieux sont des thèmes souvent abordés dans la municipalité. Donc, Rawdon a modestement préparé la démarche et initié la démarche du mémoire.

Les façons de faire et les façons d'être à Rawdon sont tellement naturelles que, pour nous, l'immigration, ce n'est pas une problématique mais bien quelque chose qui se vit quotidiennement. Donc, pour une population de 9 046 habitants, plus de 35 % de notre population a des origines multiples. 25 groupes ethnoculturels, à Rawdon, se côtoient. D'origines russe, polonaise, roumaine, ukrainienne, yougoslave, allemande, suisse, italienne et plusieurs autres, ils font partie du tissu social de Rawdon. Des arrivées récentes, chinoises, latino-américaines, cambodgiennes et italiennes, sont venues ajouter au tableau de Rawdon. D'ailleurs, lors de la première édition de la Semaine québécoise des relations interculturelles, qui a eu lieu du 23 au 29 novembre, la municipalité de Rawdon inaugurait sa première édition des Hommages interculturels de Rawdon et justement a rendu hommage à des familles nouvellement arrivées qui contribuent à l'essor économique de notre municipalité.

Des rencontres oecuméniques aussi, puisque, depuis 1964, différentes communautés religieuses ont des rencontres de façon régulière. Donc, sept dénominations religieuses différentes sur le territoire de Rawdon et un cimetière oecuménique peuvent vous démontrer justement notre caractère multiculturel.

Les organismes communautaires: 32 organismes communautaires à vocation multiple. Donc, missions diverses, mais, vous comprendrez sûrement, compositions ethnoculturelles aussi diverses, puisque les gens de ces communautés, de ces groupes communautaires, sont des gens de chez nous. Donc, les facteurs de proximité justement qui sont un fait dans nos petites municipalités font en sorte que cette communauté multiculturelle vit naturellement en bons termes et que le respect réciproque fait de Rawdon une mosaïque humaine harmonieuse, telle que décrite par nombre d'écrivains de notre municipalité.

Naturellement, dans nos petites municipalités aussi, la vitalité des relations communautaires est une marque de commerce. En Matawinie, les relations communautaires, c'est ce qui assure notre vitalité et ce que vous retrouvez autant à Rawdon que dans les municipalités environnantes. Donc, nous pensons que l'intégration est facilitante quand il y a des facteurs de proximité tels que nos petites municipalités.

Suite à l'Énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration, en 1990, nous croyons que ça a été un facteur déterminant dans le renforcement d'un consensus autour de l'immigration au Québec. Mais, après ces 15 ans, doit-on se poser certaines questions? Nous le croyons. Doit-on tirer des leçons des résultats obtenus en matière d'intégration et d'immigration en région? Je crois que c'est un problème qui a été soulevé. Peut-on explorer des modèles en région mieux connectés aux réalités sous-régionales? Peut-on développer, à partir de municipalités à taille petite ou moyenne et bien arrimées à leur sous-région, des modèles de régionalisation? Nous croyons en être un exemple. L'attraction et la rétention surtout en région, c'est des facteurs que l'on veut retenir dans la MRC Matawinie, et nous voulons rechercher justement des nouvelles voies pour étendre l'intégration des communautés dans notre sous-région.

D'autres constats présents et favorables à l'accueil dans Rawdon: le Centre d'interprétation multiethnique qui existe depuis 1988. C'est un projet qui a vu le jour grâce à l'implication financière de la municipalité et de bénévoles. C'est une vitrine des relations ethnoculturelles dans Rawdon. C'est un organisme à but non lucratif dont l'autonomie de gestion est assurée par les bénévoles et une conseillère municipale qui siègent au conseil d'administration. Des centaines d'immigrants ont passé par le Centre d'interprétation multiethnique et ont pu, grâce à cet organisme justement, s'intégrer à la vie communautaire de la municipalité. Donc, partenariat municipalité-société civile qui se traduit par un investissement de 10 800 $ par la municipalité annuellement, et ça, ce n'est que financièrement, puisque nous assurons aussi une aide technique auprès du Centre d'interprétation. Donc, volonté politique qui suit en plus avec des actions concrètes.

Le Centre d'interprétation multiethnique assure des relations intercommunautaires, que ce soit via des concerts, des expositions de façon permanente, des visites, de l'aide alimentaire, du soutien entre les groupes, et, peu importe l'origine, le Centre d'interprétation multiculturel accueille tous ces groupes. Donc, en 2003 justement, lors de notre première édition des Hommages interculturels de Rawdon, le CIM aussi a reçu le premier prix pour 15 ans de bénévolat auprès des communautés ethnoculturelles. Le multiculturalisme est à ce point important dans notre municipalité que la municipalité de Rawdon, l'an dernier, a fait une étude de planification stratégique et a soulevé le caractère multiculturel comme étant un axe de notre plan de développement dans le volet économique. Donc, des actions, naturellement, si on veut donner suite à notre planification stratégique.

n (16 h 20) n

Logement et habitat. Nous souhaitons voir arriver plus de logements multifamiliaux à des prix abordables, ce que nous pouvons encore offrir dans nos petites municipalités, des logements à prix abordables et des terrains à prix abordables, donc accès à la propriété qui peut être intéressant pour des nouveaux arrivants. Nous souhaitons d'ailleurs des partenariats avec le secteur privé dans cette opération de construction de logements et nous croyons que le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration du Québec pourra jouer un rôle de coordonnateur pour faciliter l'implication des autres ministères ou organismes publics.

Autre caractère de Rawdon: des espaces. C'est la première chose que certains immigrants nous disent, qu'ils retrouvent les paysages qu'ils ont quittés. Ce sont parfois des gens qui viennent de régions peu ou pas urbanisées, et ils retrouvent un caractère champêtre et un caractère, on le rappelle encore, de proximité avec les autres citoyens dans notre municipalité, une toponymie et aussi des aires récréotouristiques qui sont mises à la disponibilité de ces gens, et beaucoup de loisirs. La toponymie est représentative aussi du caractère multiculturel. Des noms comme Varsovie, Petrograd, Koch, Romanov, Hoffmann pour nos noms de rues reflètent justement la présence de ces communautés.

En mars 2004, nous allons présenter la Charte municipale de la diversité ethnoculturelle, que nous voulons inclusive, non négative, tournée vers l'avenir, pour justement, au même titre qu'une politique familiale pourrait s'implanter dans une municipalité, qu'elle reflète la préoccupation des actions municipales qui doivent nous guider dans les modes de communication et d'intervention auprès des communautés ethnoculturelles et des immigrants et immigrantes qui viendront s'installer dans Rawdon.

Autre aspect aussi qui démontre que Rawdon prend en considération l'intégration: le Conseil interculturel de Rawdon, qui a été créé le 11 mars 2003, qui a comme mission de faire des propositions concrètes pour adapter les services municipaux à une population diversifiée. Il doit aussi développer des liens avec les organismes communautaires qui naturellement offrent des services à ces groupes et créer des liens avec les autres conseils interculturels existants. Mais on doit quand même mentionner que Rawdon est la plus petite municipalité, au Québec, qui s'est dotée d'un conseil interculturel. C'est une structure à notre avis qui est innovante, avec un président, deux membres de l'externe, une conseillère municipale qui est aussi membre du conseil d'administration du Centre d'interprétation multiethnique.

Donc, vous voyez le lien entre le conseil municipal, le Conseil interculturel et le Centre d'interprétation multiethnique. Et la mairesse de Rawdon y siège aussi. Un expert-conseil sur la diversité ethnoculturelle assiste aux réunions du conseil. Et cette structure, pour le conseil municipal, est fort importante, puisqu'elle permet de créer des liens avec le Conseil interculturel, d'avoir une collaboration et un partenariat avec les organismes communautaires. Elle permet justement à des structures-conseils d'interagir entre elles. De plus en plus, nous souhaitons en créer dans d'autres municipalités, que ça donne l'idée à d'autres municipalités d'en créer et d'avoir un conseil interculturel qui est branché sur les réalités interculturelles dans Rawdon.

Donc, Rawdon a une capacité d'accueil et surtout une volonté d'accueil. Capacité, puisque son histoire est basée sur cette capacité, et la volonté, je pense que c'est là-dessus qu'on doit tabler. Et il n'y a pas seulement la municipalité de Rawdon dans la MRC de Matawinie, mais bien la même volonté au niveau des autres municipalités et de la préfecture de la MRC Matawinie. Et nous voulons une intégration justement à l'image et à la mesure de ce que nous pouvons offrir. Et je laisserai la parole maintenant au préfet de la MRC Matawinie, qui va vous démontrer que c'est plus large que Rawdon.

M. Brazeau (Daniel): Alors, Mme la Présidente, écoutez, au niveau de la MRC de Matawinie, la municipalité régionale de comté regroupe 15 municipalités, une population qui a eu, lors du dernier recensement de 2001, 42 580 habitants. Alors, ce qu'il faut dénoter au niveau de la MRC de Matawinie, c'est son grand espace et c'est son grand territoire.

Les municipalités aujourd'hui, vous le savez, dans des milieux ruraux, sont souvent tricotées serré. Chez nous, on ne fait pas exception, on est tricotés encore plus serré. On croit que ces municipalités, on est certains que ces municipalités ont développé un accueil pour les nouveaux résidents et ont toutes des histoires de solidarité et d'accueil à raconter. Moi, j'ai une façon d'exprimer ça, je parle souvent de la force vive du milieu, de la force vive qui représente bien les milieux ruraux où, depuis des années, on a appris à se prendre en main et à se développer.

Alors, le rôle vital des municipalités dans l'attraction et la rétention de l'immigration. Vous comprendrez que nous croyons qu'à partir d'un noyau central comme Rawdon nous pouvons développer, en partenariat avec différentes municipalités, en partant du noyau central de Rawdon, nous pouvons amener des gens à venir séjourner, et pas juste séjourner, mais résider dans la Matawinie, dans nos différentes municipalités, mais toujours en ayant le point central qui est Rawdon.

Il y a un point important qu'il faut mentionner aussi. Vous le savez, la décentralisation doit se faire vers les municipalités. Alors, on croit qu'aussi l'immigration doit se faire vers les municipalités qui sont les plus aptes présentement à réussir l'adaptation des nouveaux arrivants. Il y a beaucoup de petits irritants qui ne facilitent pas l'adaptation et éventuellement l'intégration. On peut trouver leurs solutions, les réponses au niveau du monde municipal. On sait que la porte d'entrée pour aider ces gens, c'est bien sûr le monde municipal. Alors, écoutez, je crois que, pour nous, la MRC Matawinie avec la municipalité de Rawdon, on croit que cette approche municipalité-MRC est porteuse d'avenir et qu'elle tient compte de deux volets d'égale valeur de l'immigration en région: l'attraction et la rétention.

Vous allez voir... Je vais laisser la parole à mon collègue M. Asselin, qui va vous parler de l'intégration économique. J'ai avec moi bien sûr Rawdon, qui est un pôle de services, mais j'ai aussi, à ma droite, un autre pôle de services ? ce n'est pas juste un maire, c'est un pôle de services ? alors les pôles de services, dans la MRC Matawinie, qui sont importants. Et, quand on parle d'immigration... justement de faire ces liens et de pouvoir amener des gens, des nouveaux arrivants qui vont pouvoir travailler dans la MRC Matawinie, parce qu'on veut aussi bien sûr offrir des emplois à ces gens pour qu'ils, vraiment, puissent s'adapter à notre milieu, travailler, y vivre et rester dans nos milieux. Alors, M. Asselin, je vous laisserais la parole.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. Asselin.

M. Asselin (André): Merci beaucoup, madame. Tout d'abord, chez nous, c'est une question d'intégration économique. Puis on se dit toujours: Bien, qu'est-ce qu'on va faire? Est-ce qu'ils vont prendre nos emplois? Est-ce qu'on est capables de les intégrer économiquement? Le problème, c'est de les recruter et de les amener en région. Là, tout le monde pense, à chaque fois qu'on parle de les amener en région, que les immigrants, ils s'installent dans des quartiers des grandes villes, Toronto, Montréal, etc., enfin qu'ils n'aiment pas ça s'en aller en campagne. Ce n'est pas tout à fait vrai. Puis on n'était pas très sensibilisés à l'affaire, et je dois rendre hommage à ma collègue de Rawdon parce qu'elle a éveillé pas mal tout le monde à la réalité, puis on s'est aperçus...

Chez nous, on avait une vieille église anglicane, qui est plus que centenaire, avec un cimetière, au début dans les Ramsay, et elle a été, depuis le temps... Un groupe s'est mis ensemble, de ces descendants-là qui ont commencé à travailler ensemble ? descendants irlandais ? et ils ont commencé à refaire le parc, le cimetière et l'église, et soudain ils s'aperçoivent qu'il y a une vie, une existence.

Chez nous, pour vous donner une idée, au point de vue économique, c'est quoi, Rawdon, c'est 260 entreprises, avec à peu près 9 000 habitants aujourd'hui. Saint-Félix-de-Valois, du côté est de la Matawinie, là, sur la 131, c'est à peu près 6 000 habitants. Il y a 430 entreprises, chez nous, qui apparaissent, là, au niveau de la Matawinie. Ce n'est pas nous qui décidons comment est-ce qu'on en a, c'est fait par la MRC. Il y en a 430 chez nous. Il y a 113 des 430, je vous le dirai tout de suite, qui sont des fermes. On produit au-delà de 20 % des poulets qui sont produits ici. Alors, évidemment c'est d'énormes fermes, et les gens se cherchent de la main-d'oeuvre, et il y a certainement de la main-d'oeuvre chez les immigrants qui devrait normalement combler...

Il y a, dans nos municipalités à nous, Rawdon et Saint-Félix... Saint-Félix n'a pas l'intention de mettre sur pied un comité interculturel puis un centre d'accueil. Non. Il y en a un dans la Matawinie, il est à Rawdon, il est à 15 minutes de chez moi, et ce qu'on essaie de faire ensemble maintenant, c'est une entente de façon à ce que les gens qui sont chez nous... Et il y a de tout. Il y a des usines d'acier, des usines... À Saint-Félix, maintenant il y a des usines de plastique comme il y en a beaucoup à Rawdon, mais il y en a à Saint-Félix aussi. Il y en a une qui emploie 150 personnes à peu près, et on fabrique même nos propres moules dans cette usine-là maintenant, et elle va doubler de... Cette année, les demandes sont faites pour procéder à doubler cet énorme endroit. Donc, beaucoup d'emplois.

n (16 h 30) n

Il y a 1 600 emplois locaux chez nous. Il y en a quelque chose comme 2 500, 3 000 à Rawdon. Donc, les gens qui demeurent dans nos petits villages travaillent déjà chez nous, et c'est très, très diversifié, là. Ça va de l'agriculture, au départ, de l'agriculture très spécialisée... Parce qu'il y a beaucoup de gens avec des professions qui doivent travailler pour... à tous les niveaux dans l'agriculture, puis il y en a aussi dans les autres niveaux de nos usines et de tout ce qu'il y a chez nous, dans nos municipalités.

Alors, évidemment on essaie de les... et on s'est aperçu aussi... de les intégrer. On voudrait en avoir plus, puis on voudrait les intégrer. Puis on a un besoin de population en région, la population nous quitte. Chez nous, vous donner la tragédie qu'on voit venir... on était à présent au plan stratégique de la commission scolaire des Samares, pour notre territoire à nous... dans 10 ans, c'est 10 millions qui va partir, de subventions, parce que 40 % des enfants vont avoir quitté l'école, puis il n'y en aura pas assez pour remplir les écoles.

Ce n'est pas mon drame à Saint-Félix, il y a deux écoles primaires, il y a des centaines d'enfants dedans, on a une bonne... nous autres, ce n'est pas... C'est vraiment mêlé, les deux. Ce n'est pas le problème à Rawdon, on a même une école secondaire, il y a des services pour les familles, il y a beaucoup de choses dans ces deux municipalités-là qui sont au sud. Mais il reste qu'il y a un appauvrissement vers le nord, chez nous, 40 % des enfants arrivent au secondaire avec déjà un an de retard et on est deuxième, dans le Québec, pour le décrochage à la fin. Ce n'est pas drôle, mais on est rendus à la queue, là.

Alors, pour nous, c'est important qu'il y ait cet apport, ce qu'on souhaite, et c'est pour ça que, quand on parle de sociocommunautaire et de tissus qui se créent actuellement, d'un maillage, ce qu'on essaie de faire, c'est de garder le centre des activités à Rawdon, d'avoir des sections pour mettre nos gens, chez nous, qui sont de descendance ou qui voudraient s'en venir à Saint-Félix, leur dire: Bien, vous venez de telle région ou vous descendez de tel type de population, de telle ethnie, bien il y en a tout près, et on les met en contact, de façon à ce qu'ils se sentent chez eux quand ils arrivent en région. Ça peut être difficile pour quelqu'un qui vient d'Ukraine de s'installer à Saint-Félix ? il y en a sur nos terres, des producteurs, qui sont d'autres nationalités ? mais il y a déjà des Ukrainiens à Rawdon, et, s'ils sont mis en contact, parfois, de retrouver des gens... Vous savez, il y a un «Petit Québec» en Floride, ça n'a pas été pour rien. Je n'y ai pas été, mais j'en entends parler dans le Journal de Montréal. J'imagine que ça doit être un peu pareil au Québec, on voit que les communautés culturelles ont une tendance à retrouver des membres de leur communauté, de s'installer et de créer des liens entre eux.

Donc, c'est une MRC comme ça, c'est une MRC à multiples facettes, et, chez nous, on voit de la place dans l'économie, mais on voudrait continuer à développer les méthodes qui nous permettent d'avoir beaucoup de souplesse, d'entente intermunicipale, de façon à les intégrer à notre économie, et surtout remplir nos écoles et continuer à faire du travail. Ce n'est pas des médecins qu'on a... Dans notre région, on est chanceux, j'en ai huit chez nous. Ça va très bien. Excusez, mais il y en a qui n'ont pas été aussi chanceux, mais c'est d'autre chose qui manque.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, quel plaisir de vous revoir tous, vraiment, toutes les personnes qui sont ici présentes, je vous remercie d'être venues et d'avoir pris la peine surtout de rédiger ce mémoire. Effectivement, je garde un excellent souvenir de mon séjour chez vous. Je peux témoigner très certainement non seulement des efforts, mais du dynamisme et de la conviction. Et je crois que ce qu'on doit saluer entre vous, c'est certainement cette volonté commune et partagée dans une région. Vous êtes devant nous quand même trois élus ? je ne me trompe pas, hein, c'est ça? ? et trois élus qui avez décidé de prendre en main et surtout de vous donner toutes ces structures d'accueil.

Moi, j'ai le sentiment, quand je vous écoute... et c'est comme la troisième fois que je vous écoute, parce que j'ai écouté Mme Major, un soir, dans un événement où elle a été grandement honorée par plein de communautés culturelles ici, à Montréal. Je suis allée chez vous, et plusieurs d'entre vous avez pris la parole, donc j'ai pu entendre encore, et j'ai vu, dans la salle du Conseil, des représentants des communautés. Et ma compréhension, c'est que vous avez décidé de vraiment... Et vous avez un souci du détail très prononcé, quand on dit que même les noms de rues, dans la municipalité de Rawdon, évoquent ou sont... la toponymie est définie en fonction... pour que les gens se sentent un peu plus chez eux. Ça va loin, ça, là. Ça va très, très loin dans le souci du détail. Et ce qu'on sent, c'est que vous mettez donc beaucoup d'amour, je dirais, à faire en sorte que votre organisme, vos organismes... et toute cette intégration soit faite en profondeur. Ça, je comprends ça, et c'est probablement une clé de succès, hein? Quand on écoute tout ce qu'on entend depuis trois semaines, certainement que ça contribue favorablement à faire en sorte que les gens se sentent bien chez vous mais surtout qu'ils veuillent rester.

M. Asselin, je suis quand même impressionnée d'avoir le portrait socioéconomique de la MRC de la Matawinie. M. le préfet, j'ai eu l'occasion d'échanger brièvement avec lui à ce moment-là et j'ai senti le même enthousiasme. Donc, ce que vous nous dites, c'est que, lorsque des municipalités, une MRC s'impliquent autant, on croit que ? puis là on va revenir à l'emploi ? qu'on peut offrir cet emploi-là à des gens qui veulent s'installer en région. Ce que je comprends par ailleurs, c'est que vous en avez beaucoup, d'emplois à offrir, donc il y a un dynamisme. Ce que je comprends, c'est que, si ça vous intéresse, l'immigration, c'est que vous avez quand même une crainte face un peu à un certain exode, j'imagine, des plus jeunes et à un certain vieillissement de la population, et vous dites: C'est une réponse intéressante pour nous.

En même temps, on a manifesté une ouverture pour signer une entente avec vous. On est aux premiers balbutiements, là. Moi, j'aimerais ça que vous nous disiez, et pour le bénéfice de mes collègues: Quand des villes comme les vôtres s'impliquent autant, qu'est-ce que vous avez besoin de nous et qu'est-ce que devrait comprendre une entente comme celle-là? Puis, si vous êtes devant moi, c'est parce que ce serait plus une entente régionale, est-ce que je me trompe? Ou si ce serait une entente avec chacune des municipalités? Mais ça, ce serait plus compliqué. Je comprends que, si vous êtes devant nous, c'est une entente MRC Matawinie. Donc, qu'est-ce que des municipalités comme les vôtres ont besoin pour qu'on ait ce partenariat entre nous?

Mme Major (Louise): Merci, Mme la ministre, de vos commentaires du début, et justement vous dressez la table sur le projet pilote qu'on voudrait présenter. Naturellement que la MRC Matawinie serait impliquée. Ce qu'on a pensé, c'est justement une entente entre le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, la MRC, la municipalité de Rawdon et les organismes communautaires, parce que, comme l'a mentionné M. Asselin, Rawdon étant un peu comme... ayant déjà une expérience en la matière, serait celui qui pourrait être le maître d'oeuvre. L'entente proposée ferait en sorte que la municipalité serait maître d'oeuvre des opérations concrètes reliées à des services d'adaptation, mais il faudrait spécifier, dans l'entente, que le projet serait aussi avec les organismes communautaires.

On pourrait y aller sur une entente de trois ans avec un premier arrivage d'immigrants à la première année, qui serait restreint, pour justement pouvoir voir les expériences et se trouver des indices d'adaptabilité, parce que c'est bien de les faire arriver dans nos municipalités, mais ce qui est important, c'est de les suivre. Parce qu'on s'est aperçu, là, avec les statistiques qu'on a vues dans d'autres mémoires, que la rétention, c'est ça qui est la problématique. Ils peuvent arriver... ils arrivent en région, mais de les y retenir, c'est là la problématique. Ce qu'on veut, c'est avoir un indice qui fasse qu'on puisse les suivre avec les années ou avec le temps.

Mme Courchesne: Vous, Mme Major, un indice d'adaptabilité, c'est quoi, concrètement?

Mme Major (Louise): Là, concrètement, on est à l'étudier, au niveau du Conseil interculturel, avec la municipalité. C'est sûr que, comme on le dit, historiquement, chez nous, qu'il n'y ait pas justement de ghettos, c'en était déjà un, indice, parce qu'il n'y a pas de groupes, là, qui sont refermés, c'est vraiment une interpénétration, là, des groupes, ils sont installés un peu partout dans la municipalité. C'en était peut-être un, indice.

On va en regarder d'autres, au niveau du suivi de la famille. Quand une famille arrive puis qu'il y a de jeunes enfants, est-ce qu'il y a justement un accompagnement qui ferait en sorte que les enfants sont à l'école et que, pendant ce temps-là, les parents peuvent se chercher un emploi, qu'ils sont accompagnés? Est-ce que justement les enfants à l'école, ça se passe bien? Il faudrait aller les suivre jusque dans ces moindres détails là.

Ce qu'on aimerait, ce seraient des ressources financières pour avoir une ressource au niveau de la municipalité. Vous comprendrez qu'avec les services que nous pouvons offrir à toute une municipalité, qui sont de tous les ordres chez nous, on ne peut pas nécessairement avoir une ressource aussi dédiée de façon particulière à ce projet pilote, mais on aurait quelqu'un qui justement aurait le goût de s'impliquer dans la chose, le goût de suivre et d'accompagner, le goût de déceler qu'est-ce qui fait que ces gens-là, au bout d'un certain temps, retournent dans des grands centres. Est-ce que c'est le fait justement qu'ils n'ont pas été suffisamment accompagnés?

n (16 h 40) n

On le voit maintenant par les personnes un petit peu plus âgées de nos premiers arrivants qui ont besoin d'accompagnement quand ils vont dans les services médicaux, parce que... Bon. À l'époque, il n'y en avait pas, de francisation. Parfois, il y avait un des conjoints du couple qui parlait le français, mais l'autre conjoint ne le parlait pas. Quand le premier conjoint décède, le suivant doit être accompagné pour aller dans les services de santé. Ça aussi, on voudrait développer un petit peu cet accompagnement-là pour ces gens-là, plus les nouveaux arrivants.

Mais je pense que M. Dominguez aussi pourrait vous parler des indices d'adaptabilité qu'on veut élaborer.

M. Dominguez (Roger): Au niveau des indices d'adaptabilité, je pense qu'il y a le nombre de personnes qui va jouer, le nombre de personnes de même culture ou de même région, et ça, actuellement, nous en avons. Nous avons actuellement des gens qui viennent... des nouveaux arrivants, nous avons des Chinois et nous avons des Laotiens.

C'est aussi au niveau de l'emploi. Je pense que, lorsqu'un immigrant arrive, ce qu'il veut, c'est de l'emploi. Ça, pour moi, c'est clair. Ayant été moi-même immigrant, je sais que, trois jours après, il fallait que je travaille. Au niveau de l'emploi, si je prends dans la Matawinie, nous avons actuellement... le commissaire industriel de la Matawinie recherche des emplois dans la transformation du bois: gestionnaire, opérateur; usinage et métaux: gestionnaire, ingénieur, contremaître, opérateur de machines; tourisme: cuisinier, femme de chambre, serveur; plastique: ingénieur, chargé de projet, concepteur, contremaître, opérateur. Actuellement, ce sont des emplois qui sont offerts et qui ne trouvent pas preneurs.

Mme Courchesne: Est-ce que vous me permettez rapidement? Alors, une fois que vous savez ça, là, vous faites quoi pour aller chercher ces postes-là? Qui fait quoi, là?

M. Dominguez (Roger): Voilà. Nous avons été, avec Mme Major, à une rencontre qui était organisée par le MRCI, et là on découvre des choses, O.K.? Normalement, il y avait une vingtaine d'invités, on était tous les deux, et nous avons eu droit à une formation par quelqu'un du MRCI, une vraie formation personnelle. Là, on a appris des choses. On a appris que ce monsieur-là allait dans les COFI demander aux gens ou démontrer aux gens où est-ce qu'ils pouvaient s'installer. Nous avons appris que la ville de Sherbrooke allait dans les COFI avec lui parler de Sherbrooke. Et, nous, nous lui avons dit: Bien, nous, on aimerait ça. Bien oui, bien là il nous dit: Mais vous ne le demandez pas. Encore aurait-il fallu que l'on soit au courant de ces choses-là. Alors, vous voyez, oui, il y a déjà... et on se rend compte qu'il y a déjà des moyens, mais, comme on ne les connaît pas, on ne pouvait pas y aller. Là, nous avons demandé, la prochaine fois, d'aller faire ces rencontres-là.

Je pense que le deuxième problème, c'est la langue. Nous avons pris aussi... et c'est la MRC qui a pris contact avec la commission scolaire pour les cours de francisation. J'espère qu'on va rentrer à ce moment-là dans les enveloppes, parce que, au niveau de la francisation, la commission scolaire donne aussi des cours de francisation.

Et je pense que, pour l'immigrant, c'est le logement qui est aussi très important. Et le logement, Rawdon... Comment Rawdon s'est construit? Comment ça se fait qu'on a 33 % ou 30 % de gens d'ethnies différentes? L'accès à la propriété s'est fait de façon, je dirais, incroyable. Les gens ont acheté des terrains, ont payé 4 $ ou 5 $ par mois pendant cinq ans et, après, ils construisaient. Ça existe encore, ça. Ces façons de faire existent encore. Alors, oui, il y a moyen d'attirer du monde, il y a moyen d'intéresser les gens à rester là. La preuve, ils restent. Et ce que l'on retrouve comme phénomène... Mme la ministre, vous avez dit tout à l'heure que les jeunes partaient. Ce que l'on constate aujourd'hui, c'est que les enfants des immigrants reviennent à Rawdon. Alors, non seulement on retient les premières générations, mais aussi les deuxièmes générations.

Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Je dois maintenant céder la parole à la députée de Prévost.

Mme Papineau: Bonjour, Mme Major, messieurs. Je suis très contente de vous voir ici parce que j'ai fait mes études à Rawdon, ma soeur demeure à Rawdon depuis 21 ans, alors je connais bien. Je connais bien Rawdon pour ses chutes Dorwin, pour sa «beach» et aussi, puis je vais vous le dire parce que... le restaurant Kenny. Y est-u encore là?

Des voix: ...

Mme Papineau: Il est encore là. Écoutez, oui, c'est vrai, dans votre municipalité... Et vous dites une petite municipalité, mais c'est une très belle municipalité, et je pense... Parce que, si certains immigrants vont s'installer chez vous, c'est que peut-être ils étaient déjà dans une région semblable à la vôtre puis ils choisissent chez vous.

Je veux juste entendre encore ? je n'ai pas très bien saisi ? le rôle que joue le Centre d'interprétation multiethnique. Est-ce que c'est un rôle d'accueil des immigrants?

Mme Major (Louise): Entre autres. Entre autres. Parce que, dans le fond, c'est un centre qui, peu importe l'origine des communautés, regroupe ces gens-là. Il y a des expositions permanentes qui s'effectuent là, mais c'est aussi un regroupement... Ils font des conférences ou des assemblées pour se rencontrer puis offrir aussi des services. Que ce soit de l'accompagnement, que ce soit de l'information, c'est aussi un rôle qu'ils jouent. Mais, naturellement, ça a toujours été par des bénévoles. Ça aussi, ça aurait peut-être besoin d'un soutien permanent, qu'il puisse les accompagner. Et il y a autant des gens des communautés que des Québécois et des Québécoises qui en font partie. On ne peut pas dire que... Encore là, ce n'est pas seulement des communautés, mais c'est aussi des gens, des Québécois et des Québécoises de chez nous, là, qui sont avec eux et qui les accompagnent autant au conseil d'administration que les bénévoles qui oeuvrent pour les expositions ou les conférences. C'est des gens de partout.

Mme Papineau: Les services d'appoint, comme, par exemple, une personne immigrante arrive chez vous, a besoin d'aller s'ouvrir un compte de banque, ou quelque chose comme ça, est-ce que ce sont des services que vous...

Mme Major (Louise): Ça s'est passé historiquement un peu par les groupes communautaires et par les églises, parce qu'il y avait des petits groupes, et par les groupes communautaires qui les accompagnaient. Et c'était toujours sous une forme de bénévolat, là. Il n'y avait pas de centrale où les gens pouvaient dire: Bon, j'arrive là, puis c'est certain là que je vais avoir toute la gamme de services. C'était aussi par contacts. Bon. Un connaît un autre connaît un autre, puis les gens réussissaient comme ça à faire un réseautage pour aider les gens, que ce soit de l'aide alimentaire, de l'information pour les différents services, pour les écoles, pour les services de santé, parce que les services de santé, on a des cliniques médicales sur place, on a un centre hospitalier de soins de longue durée, mais on n'a pas... l'hôpital est dans une municipalité voisine. Donc, c'était aussi les diriger vers ces services-là.

C'est des tas de choses qui se sont faites au gré des besoins, mais on n'a pas non plus de structure permanente, là. Ça a besoin aussi d'un second souffle, là. Le Centre d'interprétation multiethnique essaie aussi d'aller chercher des bénévoles de plus jeune âge pour les amener à faire le même travail qu'ils ont effectué pendant nombre d'années. Bon. Il y a un renouvellement aussi. On sent déjà que la préoccupation renaît justement de se doter de vraiment un service d'accueil, que ce soit via le CIM, et c'est pour ça que la municipalité le propose aussi, ce projet pilote, que le CIM aussi soit mis à contribution, le Conseil interculturel, la MRC, les organismes, en plus des organismes gouvernementaux. La commission scolaire aussi a cette même préoccupation. Tantôt, M. Asselin vous parlait justement de notre préoccupation de la démographie qui fait en sorte que, dans quelques années, les écoles vont se dépeupler.

Mme Papineau: En fait, ça pourrait être la municipalité qui serait le leader en s'accrochant des organismes et, même, je serais prête à dire, des églises parce que souvent les gens de l'église sont les premiers à accorder leur appui aux nouveaux arrivants, puis je sais que, chez vous en tout cas, il y en a quelques-unes, hein?

Mme Major (Louise): Oui, comme on l'a mentionné, il y en a sept, églises de dénominations différentes.

Mme Papineau: Il y en a sept.

Mme Major (Louise): Mais c'est déjà quelque chose qui est existant. Ce serait déjà comme l'officialiser, parce qu'on a déjà des contacts très étroits avec les communautés religieuses. Bon. Il y a un événement, il y a une foire familiale, l'été, qui est montée par une des églises, la municipalité y participe. Il y a la fête de la Saint-Patrick qu'on va fêter au mois de mars, qui est un événement plutôt particulier, là, qu'on ne voit pas dans d'autres municipalités, mais, chez nous, ça prend une importance. Et tous ces groupes-là... il y a une interrelation entre tous ces groupes-là. Ce n'est pas quelque chose à bâtir, c'est quelque chose qui est là, qu'il suffirait d'officialiser, puis d'avoir des ententes, puis une ressource... On n'a pas les sous. C'est ce qu'on n'a pas, là. On n'a pas les sous nécessairement. On aurait besoin de quelqu'un qui vienne chez nous pour le faire et qui ait le goût de le faire. Mais tout est là, tout est prêt.

Mme Papineau: Vous avez parlé que vous pourriez élaborer une charte municipale de la diversité culturelle. Étant donné que déjà vous avez tout ce dynamisme et puis que vous avez plusieurs communautés, tout ça... Pourquoi? D'abord, qu'est-ce que ça va contenir, qu'est-ce que ça contiendrait, cette charte-là? Et pourquoi une charte quand vous avez déjà cette...

Mme Major (Louise): M. Dominguez va répondre à la question.

n (16 h 50) n

M. Dominguez (Roger): La charte, c'est le document officiel qui va reconnaître, un, que Rawdon est une ville ou un village, une petite ville multiethnique, et, deux, ça va reconnaître que, à Rawdon, les nouveaux arrivants seront toujours les bienvenus. Et, même si Rawdon vit déjà... il faut toujours que l'on se rappelle que l'on est dans un contexte multiculturel et qu'on doit accueillir les nouveaux arrivants. Vous savez, même lorsqu'on est immigrant, au bout d'un certain temps je pense qu'on oublie qu'on est immigrant, et il faut qu'on se le rappelle. Mais c'est aussi pour les employés de la ville, c'est aussi pour les employés de la MRC, qu'ils doivent toujours se rappeler qu'il y a un accueil, que cet accueil-là... Les nouveaux arrivants doivent être accueillis avec dignité, et on doit faire en sorte qu'ils soient les bienvenus.

Alors, oui, c'est pour ça que ce ne sera pas une charte qui va interdire des choses. Ce qu'on va vouloir, c'est être proactif. Et on ne vous la donnera pas aujourd'hui parce que cette charte-là doit être adoptée par le conseil municipal. Et, une fois qu'elle sera adoptée par le conseil municipal, nous, ça nous fera plaisir de vous faire parvenir l'exemplaire de la charte.

Mme Papineau: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Chambly.

Mme Legault: Merci, M. le Président. Mme Major, messieurs, je dois dire que je suis tout à fait impressionnée par ce que vous avez mis en place et puis votre démarche, là, qui se poursuit, relativement à l'intégration de nos nouveaux immigrants. Je vais vous dire, je suis allée dans votre région une fois dans ma vie, pour des vacances familiales, ça a été de magnifiques vacances, probablement les plus piquantes qu'on n'a jamais vécues. C'est à Saint-Zénon, je n'ai jamais vu autant de maringouins.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Legault: Ceci étant dit, vous dites, à la page 13 de votre mémoire, au point 8.3... Bon. Vous abordez la question de la reconnaissance des acquis, des diplômes et puis des professions, et évidemment c'est un sujet qui nous touche beaucoup, on en a beaucoup entendu parler, ici, pendant nos auditions. Et vous dites: Bien, il y a des freins systémiques, puis, à des freins systémiques, ça prend des remèdes systémiques aussi. Alors, j'aimerais vous entendre et sur les freins et sur les remèdes, s'il vous plaît.

Mme Major (Louise): Naturellement, je... en plus, nous avons assisté à la présentation du mémoire précédent, on a vu que c'était un sujet assez corsé. Mais c'est aussi une préoccupation qu'on a constatée, et c'est pour ça qu'on dit: Nous, il faut grandement s'y consacrer, là, et c'est pour ça qu'on voulait vous le soulever. Mais M. Dominguez aussi peut élaborer, là, sur ce qu'on a soulevé, le conseil municipal et le Conseil interculturel.

M. Dominguez (Roger): Au niveau des biais, il y en a chez les professionnels. Et tout à l'heure j'étais... je pense que j'ai entendu des statistiques. Vous savez, je suis enseignant, et on nous dit à un moment donné: Il faudrait que 60 % des étudiants passent chez vous, ou 75 % ou 80 %. Pour nous, c'est bizarre, hein, une statistique, ça n'existe pas. Moi, j'ai des élèves que je peux dire comment ils s'appellent et qui ils sont. C'est la même chose que j'entendais... J'entendais: On a 1 000 personnes, 80 % passent. Moi, je connais des médecins français qui ont travaillé à la Santé qui ne peuvent pas... à l'Hôpital de la santé à Paris, qui ne sont pas reconnus ici, quelle que soit la raison, et c'est la même chose pour tous les ordres professionnels. Je pense qu'il y a des ordres professionnels qui ont quand même tenté et fait ce qu'on appelle de la mise à niveau. De la mise à niveau, ce n'est pas empêcher les gens de rentrer.

Mais je vais toucher un point aussi, moi, que je trouve beaucoup plus crucial. Les professionnels, règle générale, ils vont avoir de la misère, mais, à un moment donné, ils vont arriver à rentrer. Moi, je suis arrivé ici, au Québec, en 1965. Où est-ce que j'ai travaillé, vous pensez, en 1965? Dans la construction. Aujourd'hui, qui veut rentrer dans la construction et qui peut rentrer dans la construction? Le problème, ce n'est pas juste les professionnels. Le problème, c'est les ouvriers. Quand on arrive et qu'on a besoin de travailler, il n'y a personne qui va nous nourrir, on n'a pas de réseau. Ce n'est pas compliqué, là. On arrive, il faut travailler. Qu'est-ce qu'on fait? On va prendre un travail qui est disponible. Aujourd'hui, même les jeunes Québécois, et j'en connais ? j'ai été à la CECM un bout de temps ? qui travaillent et qui suivent des cours ne peuvent pas rentrer dans la construction, ils ont encore trois ans d'apprentissage à faire. Imaginez-vous pour un immigrant qui arrive, il n'y en a pas, de porte.

Alors, c'est tous ces biais systémiques qui sont mis, et souvent aussi par des lois et des règlements, qui font en sorte qu'il y a des corporations professionnelles à un moment donné et/ou qui se protègent et/ou qui font certains règlements. Et nous avons aussi les syndicats. Les syndicats sont interpellés aussi là-dedans. Vous savez, les syndicats, qu'est-ce qu'ils doivent faire comme opération, qu'est-ce qu'ils font comme opération? D'abord, même pour avoir une place de stagiaire dans une entreprise quand elle est syndiquée, c'est difficile.

Alors, oui, il faut des correctifs. Il faut des correctifs réglementaires, il faut des correctifs législatifs. Et ça, c'est votre pouvoir, Mmes et MM. les députés. C'est votre pouvoir, de changer ces choses-là et de faire en sorte que cela change. Les lois et les règlements de l'OCQ, vous avez des pouvoirs à ce niveau-là, et vous avez des pouvoirs à beaucoup de niveaux, même au niveau des corporations professionnelles, parce qu'il y a quand même une loi des ordres professionnels.

Alors, je pense que, si autant les intervenants, corporations, syndicats, etc., ne veulent pas ou ne peuvent pas, pour x raison, et je ne veux pas mettre de responsabilité sur personne, c'est à ce moment-là au niveau de l'Assemblée nationale d'agir. Il va falloir que quelqu'un agisse. On ne peut pas rester comme ça. On ne peut pas faire en sorte que des gens arrivent... Par exemple, à Montréal, nous avons des classes d'accueil. Les gens arrivent, rentrent dans une classe d'accueil; trois mois après, la moitié de la classe d'accueil est partie, ils sont partis à Toronto. Pourquoi? Bien, et on le sait maintenant, au Québec, il y a de plus en plus d'immigrants qui ne se trouvent pas de travail. Et une des constantes qu'il y avait dans l'immigration, c'était que l'immigrant, dès qu'il arrivait, il travaillait. Et, aujourd'hui, ce n'est pas qu'il ne veut pas, c'est que souvent il ne peut pas.

Mme Legault: Merci beaucoup.

Le Président (M. Cusano): Merci. Vous voulez ajouter? Oui.

M. Brazeau (Daniel): Juste en complémentaire, là, de ce que vient de dire... Vous savez, les MRC, depuis leur institution, ce sont des boîtes de recherche. On travaille sur l'aménagement de territoire. Maintenant, on va travailler sur le développement économique. Donc, vous comprendrez que, dans des situations où... Dans l'avenir, on va travailler aussi pour comment on place nos gens sur le territoire, les gens au travail, ainsi de suite. Donc, se servir des MRC pour amener de nouveaux immigrants dans de nouveaux... dans des territoires, bien, je pense que c'est l'entrée de base.

Alors, nous, on pense que l'entente qu'il pourrait y avoir, c'est une entente MRC... mais la municipalité de Rawdon est le point central, bien sûr, et c'est le point où il est installé présentement. Et on croit qu'on peut, pour beaucoup de régions au Québec, démontrer ce qu'on peut faire avec une municipalité, une MRC, un CLD, un centre local de développement et, au niveau de toute la situation économique dans une région comme la MRC Matawinie, développer, avec les nouveaux arrivants, le travail.

J'ai aussi avec moi deux membres de la Commission d'aménagement du territoire de la MRC de Matawinie, donc vous comprendrez que ça aussi, c'est important parce que, quand on parle de nouveaux arrivants... M. Asselin, on en a discuté, on parle de fermes, on a des gens, des nouveaux arrivants qui ont d'autres principes de voir des fermes, et présentement les lois, au Québec, sont assez fermées là-dessus. Et peut-être que la MRC peut développer, en partenariat avec le gouvernement du Québec, de nouvelles façons de faire des fermes et d'amener des gens, des nouveaux arrivants à travailler sur ces fermes-là, de nouvelles façons de faire.

Et, moi, je vous le dis, les régions du Québec, présentement... les gens quittent nos régions. Nous, on a besoin de gens, de nouveaux arrivants, mais on veut aussi les installer comme il faut, et je pense que c'est pour ça que la MRC Matawinie veut travailler de concert avec la ville de Rawdon pour développer ce nouveau moyen qu'on a de maintenir des populations dans notre MRC.

Le Président (M. Cusano): Merci. Vous avez terminé, Mme la députée de Chambly?

Mme Legault: Oui, merci.

Le Président (M. Cusano): Je passe maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Brièvement, s'il vous plaît.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Oui. Chez nous, on a ça, des beaux paysages, on a des immenses territoires, mais ce qu'il nous manque, c'est Rawdon.

Une voix: ...

Des voix: Rawdon.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Non, je sais, mais, M. le préfet... J'ai deux préfets, moi, dans mon comté. Vous avez quasiment répondu à ma question, mais, quand même, vous pouvez en rajouter. Qu'est-ce qu'il faut que je leur dise pour trouver des moyens pour sensibiliser les immigrants à venir chez nous? On n'en a pas, chez nous. On n'en a pas. On en veut, parce que, nous aussi, on a le même problème: population vieillissante, nos jeunes quittent après leurs études. Et chez vous, c'est trop facile. Chez nous, on a des difficultés, on n'a pas d'immigrants, on n'a pas de Rawdon.

n (17 heures) n

M. Brazeau (Daniel): Vous savez, le monde municipal est en plein changement, hein, on est dans une nouvelle gouvernance, et puis, bon... Mais il faut laisser le temps aussi au monde municipal de s'adapter à cette tangente. Et je pense, moi, que, chez nous, grâce à ce que la municipalité de Rawdon était là, ça nous a ouvert les yeux, et on a trouvé qu'on avait là un moyen de renforcer notre MRC et renforcer nos municipalités. Je vous l'ai dit tout à l'heure, les pôles de croissance, on a deux pôles de croissance de services au sud, on a deux pôles de croissance touristique au nord et on pense qu'avec l'immigration on va renforcer.

Maintenant, je suis certain que, si vous acceptez le projet pilote, bien, écoutez, toutes les régions, même votre MRC va venir voir, puis ils vont vouloir suivre notre exemple, je suis sûr de ça.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je m'excuse, M. le député, votre temps est écoulé. Alors, je passe maintenant la parole à la député de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui. Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Alors, c'était très intéressant. Et d'ailleurs, effectivement, je considérais... je vous écoutais puis je me disais: Mon Dou! c'est un beau modèle que vous avez développé, en fait qui pourrait être inspirant pour d'autres, j'en suis convaincue.

Mais ce qui m'amène à vous dire, par contre: Depuis que nous sommes ici, on entend qu'il n'y a pas de modèle unique, il y a plusieurs modèles, et ça dépend du dynamisme des régions, ça dépend des dynamismes des localités, ça dépend des dynamismes des personnes qui composent ces localités et ces régions-là, en fait. Et c'est ça qui est difficile, dans le fond, de dire: Bien, est-ce que, nous, on est exportables? Est-ce que d'autres pourraient vivre... peuvent s'inspirer? Mais ils vont toujours le faire selon leur dynamisme, en fin de compte, et tu n'as pas toujours les composantes nécessaires pour le faire, aussi, à ce niveau-là. Donc, je vous trouve très chanceux d'avoir autant d'entreprises qui permettent d'avoir de l'emploi aussi et que les gens puissent se trouver facilement... En tout cas, il me semblait que les gens avaient l'air de se trouver facilement de l'emploi, si j'ai bien compris, aussi.

Alors, l'emploi est bien. Et par contre j'aimerais savoir: Est-ce que c'est parce que la sélection a bien été faite avant qu'ils arrivent chez vous? Est-ce que c'est à cause de l'accueil? En fin de compte, vous avez une politique d'accueil qui est très importante et comme... il y a un genre de parrainage civique qui se fait d'une façon tout à fait volontaire. Est-ce que c'est parce que, au niveau des employeurs, ils comprennent très bien la culture des immigrants et sont beaucoup plus ouverts qu'ailleurs à intégrer dans leurs milieux de travail d'autres façons de faire, en fait, au niveau du travail? Avez-vous eu des problèmes au niveau de la formation? Est-ce que les entreprises sont moins performantes parce qu'elles ont utilisé des gens qui venaient avec d'autres diplômes, peut-être, ou avec des équivalences ou des choses comme ça, ou c'est parce que le genre d'emplois que vous offrez, ce sont des emplois non spécialisés? Alors, j'aimerais que vous nous expliquiez tout ça parce que dans le fond ce serait intéressant.

Le Président (M. Cusano): M. Asselin.

M. Asselin (André): Merci. Je vais vous donner... J'étais là quand on a fondé la Matawinie, il y a... J'étais le premier préfet, donc on remonte à 20 ans en arrière, et, quand on a commencé cette MRC, quand on l'a partie... Et à l'époque, là, il n'y avait rien de structuré, ni aménagement ni rien. On a découvert pendant 20 ans notre milieu, avec le système des MRC puis le travail qui avait été fait à l'époque du ministre Léonard. Il ne faut quand même pas se le cacher, quand on a mis en place cette réforme-là, pour nous... Moi, j'étais préfet d'un ancien conseil de comté, il y a 20 ans, et puis je me rappelle ce qu'on faisait là, puis je regarde aujourd'hui, c'est tout à fait délirant de voir qu'un préfet comme lui peut passer à peu près sept jours par semaine partout. Ce n'est pas ce que je faisais quand j'étais préfet d'un ancien conseil de comté, je peux vous dire ça. Sauf qu'aujourd'hui, dans les MRC, il y a des dossiers, il y a des choses et on a appris notre milieu, on a appris à le connaître. Ça, ça a été la première chose. Donc, quand vous faites affaire avec une MRC, habituellement, là, vous avez là des gens qui connaissent bien leur milieu. On a des données, on connaît nos statistiques.

Deuxièmement, il y a eu des immigrants, ce qui est très important, il y a eu une bonne période d'immigrants investisseurs, soit qu'ils ont acheté des fermes en milieu agricole ? bon, il y a de l'agriculture chez nous, il y en a à Rawdon ? ils ont acheté des fermes et ils ont amené leurs techniques, ils se sont intégrés à notre économie. Il faut faire attention parce qu'on parle d'intégration, mais, au Québec, en région, c'est beaucoup plus difficile, d'intégrer des immigrants aussi, parce que l'intégration, ils frappent une résistance. Parce que le Québécois de souche, comme certains l'appellent, là, a une espèce de tendance. Et je vous le dis, écoutez, on est sept, chez nous, dans la famille, on se connaît, là, on va arrêter de se conter des peurs. À un moment donné, il y a un phénomène qui est assez particulier, ce n'est pas un phénomène de rejet, mais en tout cas on les regarde comme des drôles de gens. Ils arrivent chez nous, ils font quoi? Il arrive quoi? C'est quoi? Ils viennent prendre nos jobs. Et on commence à les baptiser de toutes sortes de noms, de toutes sortes de choses.

Puis l'immigration, vous savez, actuellement, nous autres, dans les régions, on fait affaire à des terriens, à des gens qui sont installés solides, là, et puis ça ne se brasse pas comme tu veux, ça. Non, non, non, les maires le savent à leurs dépens. On se fait souvent planter parce que, si on veut changer trop vite, bien on est obligé de revenir puis de recommencer à zéro, c'est aussi simple que ça.

Mais, dans le véritable problème qu'on a, on a aussi le problème d'intégrer aussi des jeunes Québécois qui sortent des écoles puis qui veulent s'en venir chez nous. La semaine passée, il y avait des missions, dans Matawinie, de jeunes, des équipes qui allaient dans nos municipalités pour voir quels étaient les emplois, qu'est-ce qu'il y avait de disponible, puis on veut les intégrer, eux aussi, puis on veut qu'ils s'en viennent, avec leurs familles, s'installer chez nous. Alors, c'est un dosage, en région. Mais la région, est-elle prête à recevoir l'immigration?

Et ce qui a été souligné, chez eux, c'est ça. Dans le Bas-du-Fleuve, il y a une vieille tradition, mais il s'agissait que quelques investisseurs, comme chez nous, sont arrivés... La famille Syri par exemple, je vous donnais ça, c'est une aciérie, qui s'appelle M. Syri, alors ça adonne bien. Et il y a aujourd'hui une quarantaine d'employés là-dedans, tous spécialisés, ils ne font que de la spécialisation en acier inoxydable, ce sont des gens qualifiés qui sont là-dedans. Et soudainement on s'est aperçu que Syri engage des gens qui ne sont pas des Québécois qu'on est habitués de voir chez nous, mais c'est des gens spécialisés qui connaissent très bien le métier, puis ils se sont intégrés dans sa boutique. Puis M. Syri, c'est lui-même un immigrant. Donc, il y a de la place pour les intégrer, il y a des façons de le faire, il y a des façons de les amener.

Puis, quand vous nous disiez: Bien, comment vous les avez attirés? On ne les attire pas, ce n'est pas La Grande Séduction. Ça s'est fait simplement, ça s'est fait d'une façon simple: les ouvertures étaient là, les gens pouvaient travailler, ils sont arrivés, c'était leur métier. Puis ce n'est pas, dans ces entreprises-là, comme dans les entreprises chez GPL, dans les entreprises de plastique qu'on a, tout ça, ce n'est pas comme la construction. Traditionnellement, les Italiens rentraient, ils faisaient du terrazzo, ils faisaient du ciment, l'autre faisait d'autre chose, tout le monde avait son métier, on aurait dit par famille, tout le monde faisait... Bon. On connaît ça. Mais là, quand on arrive dans ces usines-là, c'est du nouveau travail. Des gens arrivent là, ce n'est pas réglementé, ce n'est pas régi, parfois ce n'est pas syndiqué encore. Donc, ils se sont plantés là-dedans...

Non, non, mais c'est toute une mentalité. Là, on est loin de la ville. Puis ce n'est pas drôle... Allez syndiquer cinq employés à Saint-Félix-de-Valois: ça ne les intéresse pas personne. Ils commencent, là, les municipalités, à nous syndiquer, puis on est contents de ça, ça marche au coton. Moi, ma convention est signée. La tienne aussi, hein? Bon. Elle en a deux, moi, j'en ai une, puis on marche. Mais seulement on vit avec ça, mais, dans nos usines, il n'y en a pas comme ça qui le sont encore, à Saint-Félix, mais il y a de l'ouvrage au bout. Puis vous avez deux usines de PEL international, ils font des meubles et ils exportent 100 % de leur production, et il y a une pancarte à la porte à l'année: «Emplois disponibles».

Mme Major (Louise): Oui. Si je peux ajouter. Tantôt, vous avez demandé: Est-ce que notre produit est exportable? C'est sûr que l'historique de Rawdon n'est pas nécessairement exportable. Bon. Mais notre expertise pourrait peut-être l'être, dans ce sens qu'avec le Conseil interculturel il y a des méthodes, là, qu'on est en train d'instaurer pour les nouveaux arrivants, pour ceux qui vont venir s'installer, pas seulement pour ceux qui sont présents. Ça, ça peut être exportable. Peut-être que notre projet pilote, en plus avec les indices d'adaptabilité, ça, ce le sera, exportable ? on vous fera signe à ce moment-là. Mais c'est certain que ce ne sera pas nécessairement exportable dans son entier. C'est selon la réalité de chacun des milieux, ça, on va toujours le soutenir.

Ce qui se passe chez nous, en Matawinie, ce n'est peut-être pas ce qui se passe ailleurs. Nos industries sont particulières. On le mentionnait, des industries de plastique, ce n'est pas nécessairement des emplois spécialisés, c'est des emplois peut-être qui ont besoin de formation, mais c'est une formation sur mesure dans l'entreprise elle-même. Ça, les commissions scolaires peuvent offrir des formations de la main-d'oeuvre en entreprise, particulièrement à l'entreprise sur place. Donc l'intégration est d'autant plus facilitée. Que ce soient des immigrants ou que ce soient des gens de chez nous, c'est la même formation qui se donne, là. L'intégration est différente peut-être, de par la langue, mais encore là la francisation, on peut l'obtenir, là, via la commission scolaire et via les étapes de francisation que les immigrants peuvent passer.

Ce qu'on souhaite, c'est vous transmettre notre expertise. L'expérience qu'on a, bon, c'est sur plusieurs années, là, que ça s'est installé, à Rawdon. Vous voyez, le Centre d'interprétation multiethnique a déjà une vie de 15 ans. Pour certaines municipalités, l'expérience en immigration n'est pas vraiment longue, là, surtout en région, hein. Nous, chez nous, c'est particulier. Avec les années, on pourra justement vous transférer ce qui s'est passé chez nous, ce qui va se passer à partir de maintenant avec ce qu'on met comme structure d'accompagnement, aussi: le Conseil interculturel, le Centre d'interprétation multiethnique, qu'on souhaite donner encore un arrimage encore plus particulier entre le conseil municipal et le Conseil interculturel. C'est tout ça qu'à un moment donné on pourra vous livrer, comme expertise.

n (17 h 10) n

Mme Vermette: Bien, en fait votre témoignage est très encourageant, parce qu'il nous fait... il nous démontre hors de tout doute en tout cas que l'immigration en région, c'est possible, en autant qu'on lui donne de bonnes conditions, qu'on s'ajuste en fonction des besoins de part et d'autre des arrivants et des accueillants, en fin de compte, et qu'on prépare le terrain en conséquence. Et, à ce moment-là, ça pourrait être très enrichissant autant pour la communauté d'accueil que pour les immigrants qui viennent chez nous, en fin de compte.

Et, oui, je voudrais juste vérifier au niveau de l'intégration. Tout ça se fait sans heurt, sans problème, les différents mélanges interculturels, chacun s'accepte mutuellement. Et finalement est-ce qu'ils se considèrent comme Québécois ou ils maintiennent toujours leurs racines comme étant autre chose que québécois?

Mme Major (Louise): Ils se considèrent comme Québécois, mais c'est certain qu'ils valorisent encore leurs origines. Bon. Il y a, comme je vous le mentionnais...

Mme Vermette: Non, non, je n'ai rien contre. Je voulais juste vous demander, par rapport... Parce que, vous savez, antérieurement il y avait des ghettos puis les gens restaient...

Mme Major (Louise): Non.

Mme Vermette: Alors, ce qui n'est pas tout à fait... ce qui est loin de là le cas chez vous? Il n'y a aucune commune mesure?

Mme Major (Louise): Pas du tout. Ils se sentent très bien intégrés dans la communauté québécoise, très bien intégrés.

Mme Vermette: Alors, c'est très... Non, je trouve ça très intéressant, parce qu'il n'y a pas si longtemps, on n'imaginait pas que c'était possible, l'immigration ou l'intégration dans les régions, et ça, je trouve ça tout à fait heureux que votre témoignage fait hors de tout doute complètement taire tous ceux qui ne croyaient pas à ce genre d'intégration. Je vous remercie.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée. Et j'aimerais, Mme Major, M. Brazeau, M. Dominguez et M. Asselin, vous remercier pour votre mémoire ainsi que votre participation à cette séance cet après-midi. Alors, merci beaucoup et bon retour dans votre belle région.

Je vais suspendre pour quelques minutes afin de permettre à nos prochains invités, des représentants d'Accès Canada, de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 17 h 12)

 

(Reprise à 17 h 16)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre! À ce moment-ci, nous sommes prêts à entendre les représentants d'Accès Canada. Et, pour les fins du Journal des débats, j'aimerais bien demander à nos invités de bien vouloir s'identifier.

Accès Canada G.&G.

M. Guerrero (Alain): Bonjour. Mon nom est Alain Guerrero, je suis le président de la firme Accès Canada.

Mme Guerrero (Sophie Patricia): Bonjour. Mon nom est Sophie Patricia Guerrero, je suis consultante pour la firme Accès Canada.

Le Président (M. Cusano): Merci. Avant de débuter nos travaux, j'aimerais bien rappeler quelques règles qui nous gouvernent. C'est que vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire votre présentation, et cette période sera suivie d'un échange avec les membres de la commission.

J'aimerais aussi vous informer qu'on m'a signalé que le groupe devant nous, Accès Canada, les consultants Accès Canada, sous le nom de deux de leurs clients, ont intenté un recours judiciaire contre le Procureur du Québec. Je voudrais rappeler aux membres de la commission qu'un «député [...] ne peut: 3° parler d'une affaire qui est devant les tribunaux [...] si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit».

Lorsqu'il s'agit d'un litige civil, selon Richard Guay ? le 20 mars 1984 ? «on peut s'y référer de manière générale, mais on ne peut, lorsqu'on approche le coeur du sujet, faire des remarques qui pourraient être de nature à porter préjudice à qui que ce soit». Par conséquent, je vous invite à la prudence dans vos propos et j'insiste pour que vous évitiez toute remarque qui pourrait avoir pour effet de nuire à qui que ce soit. Dans le cas contraire, vous allez comprendre que je me réserve le droit d'intervenir.

Cette prudence est aussi suggérée à nos invités, parce que, en tant que président, je ne peux d'aucune façon accepter qu'une activité du Parlement du Québec, de l'Assemblée nationale ou une de ses commissions ait pour effet de faire avorter un processus judiciaire.

Mme Guerrero (Sophie Patricia): Est-ce que je peux me permettre une toute petite remarque, s'il vous plaît, M. le Président? Premièrement, ce n'est pas Accès Canada qui a intenté une procédure devant les tribunaux, mais deux personnes bien distinctes. C'est la première des choses.

Le Président (M. Cusano): Madame, excusez-moi, là, je n'irai pas au niveau de l'argumentation. Je vous ai informés de ce qu'on m'a informé, O.K. Alors, on va procéder. Vous possédez un temps de parole de 20 minutes pour pouvoir faire votre présentation, et par la suite il y aura un échange avec des membres de la commission.

J'ai souligné l'article 35, paragraphe 3°, pour que les députés en soient bien conscients, et je l'ai souligné aussi et je l'étends à vous aussi parce que je ne peux pas permettre... C'est une invitation à la prudence. Je ne peux pas permettre qu'une activité qui se tient ici, dans une commission parlementaire, puisse avoir un préjudice à qui que ce soit. Alors, vous avez le droit de parole pour faire la présentation de votre mémoire.

M. Guerrero (Alain): Merci, M. le Président. Donc, je vais commencer en vous présentant Accès Canada. Accès Canada est une firme de consultants spécialisés en immigration francophone opérant des bureaux dans les principaux bassins francophones d'immigration.

Accès Canada a déposé un mémoire dans le cadre de cette commission pour donner son opinion sur la planification des niveaux d'immigration, mais aussi pour soulever certains problèmes que nous pensons important de faire connaître dans ce forum public. Afin de ne pas excéder le 20 minutes de présentation maximum, j'ai préparé un texte regroupant les points dont je voudrais vous faire part. En effet, il m'est difficile de résumer plus de 100 pages de textes et de preuves en 20 minutes, et j'avoue que mon engouement pour ce sujet et l'argumentation abondante que j'ai à vous soumettre me permettraient de vous entretenir pendant des heures.

n (17 h 20) n

Comme je vous le mentionnais, Accès Canada a déposé un mémoire en trois parties. La première partie sur les scénarios des volumes proposés. Évidemment, et comme la majorité des intervenants devant cette commission, nous sommes pour le scénario n° 3 qui propose le plus grand volume de sélection des trois scénarios proposés.

Comme nous sommes pour un Québec fort, nous pensons que le Québec ne devrait jamais recruter moins de candidats que le prorata de son poids démographique au sein du Canada, donc versus les admissions totales canadiennes, surtout que le Québec a un déficit en matière de migration interprovinciale, notamment au niveau des immigrants investisseurs. À long terme, cela affectera non seulement son poids démographique, mais aussi son poids politique. Quant à l'accueil et à l'intégration, ils doivent s'ajuster au volume d'immigration et non l'inverse. Lorsqu'un train passe il faut savoir le prendre et ne pas dire: Attendez, on n'est pas prêts, repassez plus tard.

Pour la section sur l'intégration, de notre mémoire, nous préférons vous référer à notre texte, car bien des organismes ont défilé devant cette commission et ont soulevé les mêmes problématiques que nous avons évoquées dans notre mémoire. Nous préférons nous concentrer sur le troisième volet de notre mémoire, qui est la transparence des actes du ministère.

Nous avons remarqué que, lors de la présentation de certains mémoires, des membres de cette commission ont posé des questions notamment sur le thème des délais de traitement pour le Maghreb, sur le volume des dossiers déposés et celui en attente, des comparaisons entre les différentes régions du monde quant à leur traitement. Comme, de par notre étalement géographique, nous pouvons comparer les actes de sélection du ministère entre les différentes régions du monde, nous sommes parmi les mieux placés pour apporter un regard éclairé à cette commission, et c'est à cette fin que nous avons soumis ce complément de mémoire qui traite exclusivement de cet aspect: la transparence des actes du ministère.

Actuellement, la transparence des actes du ministère vis-à-vis de l'Assemblée nationale se limite au dépôt, une fois par année, d'un rapport qui fait état de l'atteinte ou non de l'objectif annuel total initialement prévu dans le plan triennal élaboré par cette commission tous les trois ou quatre ans. L'Assemblée nationale sait que le volume fixé se divise en trois catégories: les réfugiés, la catégorie de la famille et les immigrants dits économiques; que, pour les immigrants économiques, la même grille de sélection s'applique à tous les candidats; et que normalement les dossiers doivent être traités de façon équitable avec une approche de premier arrivé premier servi, tenant compte bien sûr de la logistique en place qui peut avoir besoin d'ajustements sur une base trimestrielle.

L'Assemblée nationale croit aussi, tel qu'expliqué dans le document du MRCI servant de base à cette commission, que, nous, au Québec, contrairement aux États-Unis, nous n'établissons pas de quotas, mais seulement des objectifs, dans nos intentions de recrutement. Eh bien, les membres de cette commission doivent savoir que cela est faux. Ils doivent savoir que non seulement le ministère fonctionne avec un système de quotas limitant l'accès à l'immigration à certaines communautés, mais en plus ils l'appliquent à l'insu de l'Assemblée nationale sous le beau qualificatif de «gestion de la diversité». Ce terme n'est ni plus ni moins, comme nous l'avons démontré dans notre mémoire avec preuve à l'appui, qu'une discrimination systémique de certains groupes ethniques.

Ainsi, la répartition du nombre de candidats à sélectionner dans la catégorie des immigrants économiques est faite non pas dans l'arbitraire ou avec une incompétence manifeste, mais avec une stratégie élaborée menant à une discrimination systémique des communautés qu'il considère indésirables. Nous en avons expliqué le modus operandi avec preuves à l'appui dans notre mémoire et nous le résumerons dans les prochaines minutes.

En fait, en lisant le mémoire et en écoutant la présentation du Conseil des relations interculturelles, il est clair que le ministère a déjà trouvé des solutions aux craintes et constatations évoquées par cet organisme: problèmes de religion comme facteur de risque de perturbation sociale; nouveaux immigrants avec un taux de chômage plus élevé; communautés visibles immigrantes ou nées ici avec un taux de chômage plus élevé, etc. Le ministère agit par anticipation. Si, pour les communautés visibles, le taux de chômage est plus élevé, eh bien, on met l'échec de l'intégration sur leur dos et on n'en laisse pas rentrer d'autres en quantité normale; même chose pour les candidats d'autres religions.

Une chose qui m'a fait particulièrement sursauter en lisant la recommandation 10, page 35, du mémoire de cet organisme, c'est la chose suivante: «...assurer une gestion encore plus efficace de la diversité ? ce qui confirme qu'il y a déjà une gestion qui se fait au niveau de la diversité ? qui tienne compte [...] des intérêts du Québec et de la communauté internationale sur le plan de la sécurité.» Eh bien, là, permettez-moi de vous dire, membres de la commission, que là on nage en plein délire. Non seulement c'est le fédéral qui est en charge de l'aspect sécuritaire relié aux nouveaux arrivants, mais en plus on fait quoi? On bannit toute une communauté pour les événements auxquels nous sommes tous en mesure de faire référence? Quelquefois, on dit que, lorsqu'un groupe de personnes se réunit, le niveau collectif intellectuel baisse. Eh bien, là, je pense que c'en est un exemple. L'histoire de l'humanité nous a donné plusieurs fois des exemples sur les conséquences que peuvent entraîner les certitudes que l'on porte sur des minorités et on sait à quoi cela peut mener.

Les hauts fonctionnaires... Pardon. Bien sûr, le ministère s'est défendu à plusieurs reprises sur le fait que le Québec n'a jamais utilisé de quotas en immigration. En fait, cela se fait directement par l'attribution des budgets, comme nous allons le démontrer et comme c'est démontré dans notre mémoire avec des preuves à l'appui, notamment, bon, les documents... Comme vous allez le voir dans notre mémoire et comme vous l'avez vu, toutes les preuves que nous avons soumises proviennent du ministère, par la loi de l'accès à l'information, donc la loi... aux documents des organismes publics.

Les hauts fonctionnaires du ministère établissent des quotas pour les personnes qu'ils ne veulent pas accueillir et des objectifs pour les autres. Ainsi, les services d'immigration du Québec s'occupant des candidats non désirés se retrouvent avec des budgets qui ne leur permettent pas de traiter un nombre de dossiers suffisant en regard des dossiers en attente. C'est le cas notamment du SIQ-Afrique ? quand on dit le SIQ, c'est le Service d'immigration du Québec ? le SIQ-Afrique qui ne pourra recruter que 330 personnes, en 2004, pour un bassin de plus de 18 pays francophones. Et ça, c'est un quota parce qu'on limite, on donne un chiffre précis que ce SIQ ne pourra pas dépasser.

Pour les SIQ desservant les clientèles préférées, les budgets attribués iront bien au-delà du nombre de dossiers en attente, et ça, c'est un objectif, parce qu'on espère traiter des dossiers qui ne sont pas encore en attente. Lorsque des dizaines de juristes et d'intervenants identifient qu'il s'agit bel et bien de quotas, la ministre devrait peut-être se demander et se poser la question avant de réfuter le terme de façon mécanique. Le Québec est en train d'écrire une page d'histoire dont il ne sera pas fier, et j'espère que ce débat servira à l'éviter.

Je passe maintenant la parole à ma collègue, qui va vous détailler le modus operandi de cette discrimination systémique institutionnalisée.

Le Président (M. Cusano): Mme Guerrero.

Mme Guerrero (Sophie Patricia): Merci, M. le Président. Qu'est-ce que la discrimination? La discrimination, c'est lorsque deux personnes n'ont plus accès à une égalité de traitement devant la loi, conformément aux articles 1, 2 et 7 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et à l'article 10 de notre charte. Malheureusement, tous les êtres humains ne naissent pas égaux, on le sait, mais nous avons tous une profonde aspiration, un profond idéal à ce qu'ils soient au moins égaux en droits. Nous sommes convaincus que ces valeurs ne sont plus en place au sein du ministère, et nous allons exposer neuf moyens que le MRCI a mis sur pied pour briser cette harmonie de traitement entre les différents candidats à l'immigration. L'histoire de l'humanité nous a démontré que ce genre d'agissement n'a jamais eu d'effets favorables et n'a jamais reposé sur aucun motif valable. En fait, les neuf moyens dont nous allons parler ne sont pas exhaustifs, et il peut en exister... il en existe sûrement d'autres, mais nous nous sommes limités à neuf moyens démontrables au soutien de preuves précises, par respect pour nos parlementaires, afin de ne pas vous faire perdre votre temps sur la base de simples allégations.

Le premier moyen utilisé est l'attribution des budgets. Le MRCI, comme nous l'avons démontré par la pièce cotée M-2, se sert des ressources à dispenser pour favoriser certaines sommes préférentielles. Or, comme l'assiette budgétaire n'est pas infinie, il faut forcément prendre l'argent d'un côté et le retirer à d'autres. Pourtant, tous les candidats paient exactement les mêmes frais de traitement.

Le second, c'est la manipulation des objectifs en conséquence. Étant donné que les ressources sont affectées en fonction des objectifs, il faut donc attribuer des objectifs qui vont permettre à certains services d'immigration de traiter les dossiers au fur et à mesure, même s'il n'y a pas le nombre de dossiers pour. L'exemple le plus évident, c'est le SIQ de Buenos Aires. Ce SIQ a reçu en 2003 ? et je fais référence à la pièce M-5 ? 579 demandes. Il gère cinq pays non francophones. Le SIQ-Buenos Aires s'est vu octroyer un objectif de 2 620 personnes en 2003. Le SIQ-Paris-Afrique, qui gère tous les pays hors Maghreb, tous les pays d'Afrique hors Maghreb, dont un bon bassin d'au moins 18 pays francophones ? dont la Côte-d'Ivoire, le Sénégal, le Mali, etc. ? a reçu 585 dossiers en 2002. L'année 2002 n'est pas terminée au niveau du traitement. En 2003, le quota à atteindre était de 350 personnes. En 2003, le nombre de dossiers reçus a été de 845 dossiers. Donc, on parle d'une accumulation évidente. Le quota pour 2004 a été baissé à 330 personnes ? veuillez référer à la pièce cotée M-4. À ce rythme-là, les délais seront de six ou sept ans. Le SIQ-Bruxelles, qui ne gère qu'un seul pays, soit la Belgique, et qui a reçu 293 dossiers en 2003, donc rien de comparable avec le SIQ-Afrique, se voit attribuer un objectif de 490 personnes, soit 50 % de plus que pour toute l'Afrique. Où est la logique?

La dissuasion. Les délais, c'est le jeu du MRCI. La preuve, c'est que le blocage n'est pas généralisé. Les accumulations ont été provoquées et il y a eu des délais. Maintenant, lorsqu'on ne souhaite pas quelqu'un, on lui met des délais de sorte à l'écoeurer et lui faire abandonner la procédure ou à ne jamais s'y engager. Ce n'est qu'une façon de décourager les gens.

n (17 h 30) n

Les méthodes indirectes. Qu'est-ce que nous entendons par «méthodes indirectes»? C'est de placer un maximum d'obstacles sur la route des candidats moins désirés. J'en veux pour preuve les candidats d'Afrique de l'Ouest. Tous les candidats d'Afrique de l'Ouest doivent se rendre en mission d'entrevue au Ghana, ce qui signifie pour un candidat sénégalais, qui vit à plus de 2 000 km du Ghana, l'achat d'un billet d'avion pour lui, pour son conjoint et pour ses enfants majeurs, le cas échéant. C'est également le fait de défrayer les nuits d'hôtel au Ghana.

Par opposition, tous les Européens reçoivent des missions d'entrevue dans leur propre capitale. Et l'opposition que je voulais faire, qui est quand même assez flagrante, c'est par rapport à Quito, en Équateur. En 2002, nous avons accueilli 51 Équatoriens, ce qui signifie à peu près entre 25 et 30 dossiers. Les Équatoriens ont eu une mission d'entrevue à Quito. Donc, ça signifie que, si le MRCI veut de vous, il va faire une mission d'entrevue chez vous, sinon, pour toute l'Afrique, vous vous déplacerez vers le Ghana.

Les privilèges. Qu'est-ce qu'on entend comme privilèges? C'est les cas acceptés en vertu d'une dérogation, parce que les candidats ne se qualifient pas sur la base des critères de la grille de sélection. Par exemple, le SIQ-Buenos Aires a un taux de 10 % de cas dérogatoires; le SIQ-France, 6 %; Hong Kong, 5 %, etc. Tous les SIQ ont un petit pourcentage d'acceptation discrétionnaire. Pour l'Algérie, la Tunisie et le Maroc, ce chiffre est de 0 %. Quoi dire de plus?

La souplesse dans le traitement des dossiers. Nous avons un candidat marocain qui a reçu une note à l'entrevue, pour son français, de neuf points sur 16. Il avait 65 points sur 68, son dossier a été rejeté pour trois points. Une candidate romaine reçoit une note de cinq points sur 16 pour le français. Elle avait 54 points sur 60 en tant que célibataire, il lui manquait six points pour être acceptée à l'entrevue. Malgré une note plus faible pour le français, la candidate romaine se voit accorder un sursis de 12 mois pour améliorer son français avant que ses certificats de sélection ne lui soient émis; le candidat marocain est rejeté du premier coup.

Ce qu'on appelle maintenant les efforts adaptés. On nous dit: Il y a beaucoup de dossiers en provenance du Maghreb, nous y reviendrons. Maintenant, il y a également beaucoup de dossiers en provenance de Hong Kong, du SIQ-Vienne ou de France. Beaucoup de SIQ reçoivent des milliers de demandes, par exemple Hong Kong, en 2003, en a reçu 4 471; New York, 4 033; SIQ-Paris, France, 4 513; Mexico, 3 543; Vienne, 3 487; Rabat, 4 455; Alger-Tunis, 3 427. Donc, on voit que c'est à peu près des chiffres qui se valent.

Maintenant, au niveau des objectifs quotas, quels sont les nombres? Hong Kong, 6 405 personnes; New York, 4 025; SIQ-Paris, France, 6 480; Mexico, 2 945; Vienne, 6 180; Rabat, 2 200; Alger-Tunis, où il y a la pire accumulation, 1 920 personnes seulement.

Si on prend maintenant la pièce M-10, le tableau des délais, je fais référence au troisième tableau, donc celui des délais les plus récents: les délais de Hong Kong, cinq à 12 mois; Mexico, trois à huit mois; France, trois à cinq mois; Vienne, quatre à huit mois, avec 537 jours de mission à Bucarest seulement ? alors, quand on veut, on peut; New York, trois à six mois; Rabat, les délais officiels, 60 mois; Alger-Tunis, 84 mois. Si on compare maintenant au niveau de ce que j'appelle les petits SIQ: Bruxelles, quatre à cinq mois et demi; Buenos Aires, trois à six mois; l'Afrique de l'Ouest, qui a reçu le plus petit quota de tous les SIQ, pour 330 personnes, 24 mois, et, avec des quotas comme ça, on se dirige sur des délais de sept ans. Attention, dérapage sur Damas, avec 21 à 29 mois, et également sur Tel-Aviv, avec les minorités juives, pour 31 mois.

Ce que j'appelle maintenant Agir en amont au niveau des demandes préliminaires d'immigration. Les demandes préliminaires, c'est ce qu'un candidat va déposer pour vérifier s'il peut finalement entreprendre la procédure au système d'immigration et payer ses frais de traitement. Si, au bout de trois mois, il n'a pas de réponse, ça veut dire que le ministère a jugé que son dossier ne serait pas bon et donc qu'il ne doit pas aborder les stades de la demande officielle. Entre 2001 et 2003, le taux de succès est passé, pour les Maghrébins, de 49 % à 5 %. L'autre taux le plus bas d'acceptation est 28 % pour Buenos Aires; 41 % pour Hong Kong; 61 % pour Mexico, et ce ne sont pas des francophones. Je trouve que ces chiffres sont très, très étranges, compte tenu que le bassin est francophone et que ça va à contre-tendance. Comment ce chiffre est-il possible? À mon avis, ce chiffre devrait être mis sous enquête, car, en ne donnant pas suite au DPI, le MRCI s'assure que le candidat laissera tomber les démarches pour la demande officielle.

Finalement, le neuvième point: Boucler la boucle en agissant aussi en aval. Vous pensez peut-être que les candidats qui attendront cinq ans seront protégés au niveau des droits acquis? Eh bien, détrompez-vous! En plus de les faire attendre plus longtemps, le MRCI a le culot de rejeter leurs demandes en cours de route si une liste a changé, par exemple. Ce que nous craignons, c'est que les populations mises à l'écart actuellement soient victimes d'un processus de rétroactivité sauvage, qui leur fera perdre tous leurs droits. Le MRCI en est capable. Il le fait déjà.

La conclusion à tous ces faits, c'est que quelque chose de grave se passe en ce moment au MRCI, et tout se sait au niveau des communautés. Les communautés locales se sentent stigmatisées parce qu'elles se demandent ce qu'elles ont bien pu faire pour qu'on agisse comme ça avec leurs peuples. Les gens à l'étranger se disent qu'ils ne sont plus les bienvenus au Québec et que peut-être le Québec a perdu l'auréole qu'il avait. Même si, en bout de ligne, elles sont sélectionnées, qu'elles arrivent au Québec, cette sensation de mise à l'écart aura brisé quelque chose en elles que vous ne pourrez plus recoller. Je cède à présent la parole à Alain Guerrero.

M. Guerrero (Alain): Alors, moi, je vais aborder la section du plan qui s'appelle la propagande du ministère, parce que, évidemment, pour organiser quelque chose d'aussi précis en matière de discrimination, il faut s'attendre à ce que ça fasse des remous, et le ministère a développé une autodéfense propagandiste pour dire que tous ces faits sont faux.

La première des choses, c'est que le ministère invoque qu'il y a trop de dossiers déposés et que la demande est très, très, très forte. C'est faux. La demande n'est pas très, très, très forte. Comme vous pouvez le constater à la pièce M-5, le nombre déposé de dossiers, par exemple, par le SIQ Alger-Tunis, en 2003, n'a été que de 3 427 personnes, ce qui est inférieur au SIQ de Rabat, au SIQ évidemment de Hong Kong, qui est le plus élevé, au SIQ de New York, au SIQ de Paris, et qui est inférieur aussi au SIQ de Vienne, c'est-à-dire qu'Alger-Tunis est pénalisé de façon marquée et ce n'est pas par son fort volume, c'est faux. C'est de la propagande quand on dit que le volume est fort. Si vous regardez les documents qu'on a déposés au dossier, vous voyez qu'en 2001, 2002 et 2003 les chiffres ne sont pas excessifs. Donc ça, c'est faux.

Ensuite, on a obtenu un document, que vous avez sous la pièce M-14, qui fait état de toutes les demandes qui sont actuellement en attente de traitement, donc les arriérés. On voit que, pour l'ensemble du Maghreb, malgré une discrimination avec l'attribution de quota, on parle de 17 500 dossiers sur 35 000 dossiers en attente. Donc, c'est moins de 50 %, même si on parle d'un traitement discriminatoire pour cette région du monde. Et aussi, dans une lettre du cabinet de la ministre, on voit qu'elle a émis un chiffre précis. Elle dit qu'en mars 2003 il y avait 4 515 dossiers en attente de traitement pour les Algériens-Tunisiens. 4 515 dossiers, c'est très peu. C'est à peu près ce que reçoit le SIQ-Hong Kong en un an. Pourquoi ces gens-là devraient attendre sept ans avec un chiffre de 4 515, Mme la ministre? On attend vos réponses.

Le deuxième point, c'est: le ministère allègue qu'il ne peut consacrer toutes ses ressources à une même région. Bon. Ça, c'est intéressant parce qu'on voit que, pour l'Afrique, c'est une propagande qui est ridicule. Les budgets attribués sont de 0,74 % de tout le nombre de candidats qui vont être sélectionnés. Donc, c'est un argument qui ne tient pas du tout. Pour ce qui est du Maghreb...

Le Président (M. Cusano): Conclusion, s'il vous plaît, il vous reste une minute.

M. Guerrero (Alain): Oui, avec plaisir. Pour ce qui est du Maghreb, en 2003, on voit que c'est 10,74 % de tous les CSQ émis, donc 10 %, qui seront émis aux candidats du Maghreb, alors que, quand le ministère parle de toutes les ressources, il se moque de l'Assemblée nationale, il se moque de ses citoyens.

Et le troisième point, c'est quand le ministère dit que les Marocains constituaient le premier pays source en 2002, bien c'est vrai. En 2002, il y a eu 3 600 Marocains qui sont arrivés, mais les gens qui sont arrivés en 2002, ce sont des gens qui ont été acceptés en 2000 et 2001. La discrimination a commencé fin 2001. Les effets vont commencer à se faire sentir, car, de 3 600 personnes qui sont arrivées en 2002, on voit que les personnes qui seront recrutées au Maroc en 2004, c'est seulement 2 100 personnes. Donc, c'est une coupure de près de 50 %.

Maintenant, est-ce qu'on peut dire que l'augmentation des volumes décidée à travers cette commission va permettre d'améliorer les choses? Eh bien, sachez que non, puisque, entre 2001 et 2003, le nombre d'immigrants sélectionnés a été augmenté de 21 %, le nombre de Maghrébins sélectionnés a été réduit de 35 %. Et ça, ce sont des faits. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. Guerrero. Je cède maintenant la parole à la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Je vous dirai d'emblée que je n'ai pas l'intention, d'aucune façon, de commenter vos accusations de discrimination à l'égard du ministère que je dirige, c'est-à-dire le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, certainement par déférence pour le tribunal et en suivant les recommandations nécessaires et sages de notre président, étant donné la cause qui est actuellement entendue en Cour supérieure.

Une voix: ...

Mme Courchesne: Non, je m'excuse, la parole est à moi. Nous vous avons écoutés...

n (17 h 40) n

Le Président (M. Cusano): La parole est à la ministre. Vous disposez d'une période de temps de 10 minutes. Allez-y Madame.

Mme Courchesne: Il reste donc... Donc, ça, d'emblée, d'aucune façon, je n'aborderai ces sujets-là.

Par contre, vous apportez quand même, à l'égard des parlementaires qui sont devant vous, à l'égard du ministère que je dirige, des intentions et des jugements de valeur à l'effet que nous nous moquons de l'Assemblée nationale. Je ne peux très certainement, en tant qu'élue, accepter d'aucune façon que quiconque ici présent, que ce soient les fonctionnaires présents, les membres de mon cabinet ou les parlementaires... accepter qu'on nous porte l'intention de se moquer d'une institution démocratique non seulement dont nous sommes fiers, mais dont nous avons la responsabilité de représenter l'ensemble des citoyens qui nous ont dûment élus par voie démocratique.

Je ne peux que déplorer le fait que ça fait maintenant trois semaines que nous sommes en commission parlementaire et, sans exception, ceux et celles qui se sont présentés devant nous ont certes évoqué des souhaits, énoncé des revendications, demandé des améliorations, fait état de cause de situations vécues... Et toujours ces groupes l'ont fait dans le respect, la dignité, mais toujours ces groupes l'ont fait dans un esprit constructif, et, je dirais, fiers de pouvoir être devant nous.

Moi, j'ai relevé une publicité en fait qui a paru dans plusieurs journaux du Maghreb. Cette publicité, elle est faite par Accès Canada et elle dit qu'Accès Canada a déposé un mémoire à l'Assemblée nationale, et je cite: «Même si peu de mémoires sont présentés en personne, la commission parlementaire a demandé aux dirigeants de la firme Accès Canada de venir commenter leur mémoire afin d'en débattre devant les députés siégeant sur cette commission et la ministre.» Or, je désire vous informer que cette commission a reçu 80 mémoires. Sur 80 mémoires, nous en écoutons au moins 55. À mon avis, ce n'est pas «peu de mémoires», c'est la très grande majorité des mémoires. Et la raison pour laquelle la majorité des autres ne sont pas entendus, c'est parce que les organismes ont demandé à ne pas être entendus. Et c'est pour ça que les autres représentants ne sont pas devant nous en très grande majorité, sur la différence entre le 80 et le 55. Or, déjà je trouve ça étonnant que vous puissiez faire une telle affirmation dans une publicité qui est diffusée dans les pays du Maghreb.

Par ailleurs ? vous me permettrez de retrouver mes papiers... Parce que vous comprendrez que, si dans certains pays du Maghreb l'offre d'immigration récente est fortement amplifiée, certainement qu'il y a une question de contexte social, économique et politique. Et ça, c'est normal. Mais d'autre part il faut le dire que c'est aussi influencé fortement par des consultants en immigration, qui y travaillent et qui y forment une industrie. Et je vous dirai que, dans ce contexte particulier, les activités et les publicités que vous y faites génèrent effectivement des milliers de demandes d'immigration. Et, moi, je vais vous affirmer une chose: que jamais, que ce soit n'importe quel gouvernement, puisque vos plaintes datent du gouvernement précédent, datent du présent gouvernement, donc ça n'a rien à voir avec qui exerce et qui forme ce gouvernement, mais je vous dirais que jamais nous n'accepterons que la planification de l'immigration au Québec soit dictée par des intérêts d'affaires des consultants en immigration.

Et la raison pour laquelle je dis ça, c'est que j'ai en main plusieurs des publicités que vous, Accès Canada, faites à l'étranger: «Seul... c'est bien, à deux... c'est mieux, mais à plusieurs... c'est meilleur», «Plus le nombre est haut... plus les honoraires sont bas», «100 % de réduction». Ce qu'on dit, c'est: «Pour chaque référence: 4 % de ses honoraires de demande officielle seront déduits de votre facture et un [autre] 4 % sera offert grâce à vous à titre de Bienvenue à votre parent ou ami. Multipliez 4 % par le nombre de vos références jusqu'à 100 % de vos honoraires. De plus, vos parents ou amis peuvent faire la même chose!!!»«Le Québec vient de réduire son quota de 50 % pour le Maghreb. N'attendez pas que les portes se ferment complètement pour vous décider.» Et des publicités comme ça, là, il y en a régulièrement: «Qu'attendez-vous pour agir? Une promotion? Elle est en cours actuellement chez Accès Canada avec des réductions jusqu'à 70 %.»

Moi, je vous avoue, quand je lis ça, que je vois ces publicités, j'essaie de comprendre effectivement dans quelle mesure on peut bien situer ce que vous nous dites aujourd'hui. Moi, ça m'ébranle beaucoup, monsieur et madame. Je vais vous dire honnêtement: Vous portez des intentions à des gens qui prennent très au sérieux les hommes et les femmes qui, en toute bonne foi, toute bonne volonté, veulent venir s'installer chez nous. Et je crois qu'on a beaucoup de sensibilité à ceux et celles qui quittent tout pour espérer une vie meilleure chez nous.

Mais je ne peux pas considérer l'immigration comme un commerce. Je ne peux pas considérer les demandes d'immigration par le biais d'un tel volet commercial. Pour moi, c'est une question qui est infiniment sérieuse et qui doit être abordée avec réserve, qui doit être abordée en fonction de critères, je dirais, qui doivent certainement contribuer, de part et d'autre, à réaliser que le Québec ne peut pas accueillir tous ceux et celles qui veulent s'en venir chez nous. C'est impossible. Et ce n'est pas notre mandat, ce n'est pas ça, le sens de l'accord Canada-Québec. Et, malheureusement, effectivement, les règles, les lois sont claires. Il y a au Québec des façons d'indiquer notre sélection pour le Québec.

Vous avez dit, dans votre présentation... Et je tiens à vous préciser que le Conseil des relations interculturelles n'est pas le ministère. Le Conseil des relations interculturelles est un organisme indépendant, avec des membres, qui a droit à son opinion et à sa liberté d'expression, tout comme, vous, aujourd'hui, vous exercez votre liberté d'expression.

Mais je vous dirais que le Québec... Et encore une fois que ce soit le gouvernement précédent ou celui-ci, moi, je n'entends que des parlementaires qui sont fiers de la diversité culturelle au Québec, qui sont fiers d'accueillir des gens de toutes origines, avec leur bagage de vie, d'expériences, avec ce qu'ils ont à offrir et que, oui, cette diversité culturelle présente des défis. Mais jamais on n'a pensé ou cru que ces défis étaient d'ordre négatif, au contraire. Nous sommes une société inclusive et nous allons continuer d'être une société inclusive. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Prévost.

Mme Papineau: Merci, M. le Président. Je vais suivre... je vais aller dans la suite des propos de la ministre. L'État du Québec, tous gouvernements confondus, a toujours fait le choix de tirer au maximum des bienfaits de la diversité culturelle liée à l'accueil et à l'intégration des nouveaux arrivants, de toutes les provenances.

n(17 h 50)n

Vous déclarez, dans votre mémoire, à la page 8, que «cette province ? l'Ontario ? a tout simplement créé une véritable société multiculturelle en incorporant, année après année, une quantité d'immigrants à sa population locale, à un point tel que les nouveaux arrivants passent tout à fait inaperçus». Moi, j'aurai juste une chose à dire: J'ai la profonde conviction qu'aucun nouvel arrivant au Québec ne doit passer inaperçu. Rien n'est parfait.

Mais je mets de côté toute partisanerie, Mme la ministre, que j'encourage de continuer dans la voie que vous tracez pour que vous continuiez, par vos actions, à faire du Québec une nation multiculturelle et diversifiée, madame. Je n'ai pas d'autre commentaire.

Le Président (M. Cusano): Merci. Alors, il n'y a pas de questions? Est-ce qu'il y a d'autres intervenants du côté... Non? Merci. Alors, je cède la parole à Mme la ministre.

Une voix: ...

Le Président (M. Cusano): Un instant.

Mme Courchesne: Je veux simplement vous remercier de vos commentaires et je pense que, M. le Président... Je veux juste signifier encore une fois toute ma croyance en cette institution démocratique qu'est l'Assemblée nationale, et qui est la teneur d'une commission parlementaire. M. le Président, je n'ai pas de question.

Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Alors, puisque je n'ai pas d'autre question, à ce moment-ci, M. Guerrero... Me Guerrero, je vous remercie de votre participation. Et, sur cela, j'ajourne nos travaux à... Mme la secrétaire?

La Secrétaire: ...

Le Président (M. Cusano): Oui, lundi le 2 mars, ici même, à l'Assemblée nationale. Alors, nos travaux sont ajournés.

(Fin de la séance à 17 h 52)


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