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Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le mardi 30 avril 2013 - Vol. 43 N° 27

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur l’instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans


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Table des matières

Auditions (suite)

Association québécoise du personnel de direction des écoles (AQPDE)

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

École Saint-Zotique

Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ)

Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ)

Conseil supérieur de l'éducation (CSE)

Autres intervenants

Mme Lorraine Richard, présidente

Mme Marie Malavoy

Mme Francine Charbonneau

Mme Nathalie Roy

M. Daniel Breton

M. Émilien Pelletier

Mme Jeannine Richard

M. Daniel Ratthé

*          Mme Danielle Boucher, AQPDE

*          M. Gaétan Neault, idem

*          Mme Denise Boucher, CSN

*          Mme Julie Audet, idem

*          Mme Yolande Brunelle, école Saint-Zotique

*          Mme Caroline Boyer-Laquerre, idem

*          M. Alain Provost. idem

*          Mme Josée Crépeau, idem

*          M. Gaston Rioux, FCPQ

*          M. Ian Renaud-Lauzé, idem

*          M. Marc Charland, idem

*          Mme Josée Bouchard, FCSQ

*          Mme Pâquerette Gagnon, idem

*          M. Bernard Tremblay. idem

*          M. Claude Lessard, CSE

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures deux minutes)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour, chers collègues. Mesdames, messieurs, bonjour. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Roy (Bonaventure) sera remplacé par Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) et M. Sklavounos (Laurier-Dorion), par Mme St-Amand (Trois-Rivières).

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. À l'ordre du jour cet avant-midi, nous recevrons l'Association québécoise du personnel de direction des écoles et la Confédération des syndicats nationaux. Cet après-midi, nous entendrons Mme Yolande Brunelle, ex-directrice de l'école Saint-Zotique, ainsi que la Fédération des établissements d'enseignement privés et la fédération des commissions de parents du Québec. Finalement, ce soir, nous accueillerons la Fédération des commissions scolaires du Québec et le Conseil supérieur de l'éducation.

Auditions (suite)

Nous allons, sans plus tarder, débuter nos auditions. J'invite maintenant les représentants de l'Association québécoise du personnel de direction des écoles à présenter leur mémoire. Vous allez avoir 10 minutes pour faire votre exposé. Je tiens à vous souhaiter la bienvenue à l'Assemblée nationale. Mme Boucher, je pense que c'est vous qui allez prendre la parole. Donc, je vous invite à nous présenter la personne qui vous accompagne. Par la suite, suivra un échange avec les parlementaires. La parole est à vous, Mme Boucher.

Association québécoise du personnel
de direction des écoles (AQPDE)

Mme Boucher (Danielle) : Alors, bonjour. Ça me fait très plaisir d'être ici ce matin. Le collègue qui m'accompagne, je vais lui laisser le soin de se présenter parce qu'on a décidé, ensemble, de faire les choses ensemble. Alors, comme on travaille beaucoup en équipe… Alors, effectivement, je suis présidente de l'Association québécoise du personnel de direction des écoles, et les membres sont principalement regroupés dans les 10 commissions scolaires dans la grande région de Québec. Alors, pour nous, c'est important, ce matin, de venir donner notre opinion sur ce projet de loi qui... Je le souligne, d'emblée nous l'accueillons très favorablement. Alors, je vais laisser M. Neault se présenter maintenant.

M. Neault (Gaétan) : Gaétan Neault, président de l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire. Je pense qu'au départ on devait présenter conjointement le mémoire, ça n'apparaît pas comme tel sur la programmation. On travaille énormément ensemble de part et d'autre. Maintenant, on n'est pas encore fusionnés, alors c'est un mémoire conjoint qu'on vous présente aujourd'hui.

Effectivement, on appuie la décision de la ministre d'instaurer le service pour les élèves de milieux défavorisés, de quatre ans, maternelle quatre ans à temps plein. Ça va dans le sens de l'avis du Conseil supérieur de l'éducation. Nous croyons aussi que c'est un moyen qui est porteur pour mettre à niveau nos jeunes qui arrivent à la maternelle cinq ans, donc possibilité pour les enfants qui peuvent être possiblement sous-stimulés d'arriver avec une petite longueur d'avance, et on croit que ça va se répercuter sur les taux de réussite et de persévérance tout le long du primaire et du secondaire aussi.

Alors, rapidement, premier petit point peut-être un peu plus technique, au niveau du projet de loi il y a un questionnement autour de l'article 1 de la Loi sur l'instruction publique, puisqu'on mentionne que le service s'adresse aux élèves de quatre ans. Or, au niveau de la Loi sur l'instruction publique, on précise que l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est fixé à cinq ans. Donc, il y aurait peut-être un ajustement à faire là, donc modifier l'article 1 de la Loi sur l'instruction publique pour porter l'âge de fréquentation scolaire à quatre ans. Il nous semble y avoir un petit problème légal, là.

Au niveau de l'organisation des services, ce qu'on souhaite faire ressortir, c'est l'importance du rôle du conseil d'établissement, qui nous semble un peu occulté dans le présent projet de loi. On est d'accord, évidemment, que la commission scolaire mette en place un service pour les élèves, mais on aimerait voir ajouter la petite phrase «suite à l'approbation du conseil d'établissement» pour respecter ses devoirs et pouvoirs.

Troisièmement — je suis à la page 4 — au niveau de l'identification de la clientèle, on perçoit certaines limites quant à l'identification claire des élèves qui doivent être touchés par le service. On parle des unités de peuplement où on a un niveau de défavorisation 9 et 10. Or, il n'est pas assuré que les enfants qui proviennent de cette circonscription géographique, si on veut, soient tous des jeunes qui sont sous-stimulés ou qui n'ont pas fréquenté le CPE. Donc, on pense qu'il faudrait davantage clarifier les balises au niveau de la définition de la clientèle visée.

D'autre part, même si les jeunes sont clairement identifiés, comment s'assurer qu'ils soient dirigés et qu'ils se rendent jusqu'au service? À ce moment-ci, ce qu'on pense, c'est qu'on a grand besoin de nos partenaires du milieu de l'éducation, les partenaires des services sociaux, les organismes communautaires pour nous appuyer, là, pour encourager, dans le fond, les parents à se prévaloir du service qui va être mis en place.

À cet égard-là, toute bonne idée a peut-être un envers à la médaille. On ne veut pas non plus voir une classe de 18 jeunes qui arrivent tous avec d'importants problèmes de sous-stimulation regroupés ensemble. Alors, ici, on parle de l'effet ghettoïsation, qu'il faut éviter. Alors, comment le faire? Bien, d'une part, si on identifie clairement la clientèle, le pendant de ça plus négatif, c'est qu'on ne veut pas non plus les marginaliser. Alors, on pense qu'il va falloir qu'il y ait une adaptation des politiques d'admission des commissions scolaires avec une prise en compte du jugement et du discernement des directions d'établissement, notamment, et de la commission scolaire quant à la formation des groupes parce qu'on croit qu'un niveau d'hétérogénéité est quand même important. On ne s'avance pas jusqu'à proposer une, je dirais, répartition en pourcentage d'élèves clairement défavorisés et sous-stimulés versus des élèves qu'on pourrait appeler réguliers, mais il faut quand même avoir en tête cette préoccupation-là.

L'autre élément qui nous questionne, c'est… Dans le cas du projet, on comprend bien que c'est un projet pilote. Mais, dans le cas du projet, qui prévoit une classe par commission scolaire, est-ce qu'on doit comprendre que des élèves devront prendre l'autobus pour aller fréquenter le service maternelle quatre ans qui ne se retrouve pas dans leur école de quartier? Alors, bon, dans la mesure du possible, évidemment, on souhaite que le service soit donné à l'intérieur du quartier où se trouvent la majorité des enfants ciblés. Dans le cas contraire, il faudra prévoir des mécanismes de passage ou de retour à l'école d'origine pour que le sentiment d'appartenance du jeune ne soit pas trop, je dirais, touché parce qu'on pense que c'est un facteur important pour ce qui est de la réussite et de la persévérance.

C'est à peu près ça pour les six premières recommandations, propositions qu'on vous fait dans le document. Maintenant, je passerais la parole à Mme Boucher pour la suite des choses. Merci.

• (10 h 10) •

Mme Boucher (Danielle) : Alors, à la page 6, on parle de l'accompagnement des parents. Alors, pour nous, c'est une très, très bonne idée. On pense qu'effectivement il faut voir le projet de façon plus systémique. Donc, de penser l'organisation d'activités ou de services qui sont destinés aux parents, c'est gagnant. Et, en même temps qu'on dit ça, on pense aussi que c'est important que ça ne soit pas seulement le milieu scolaire qui ait la responsabilité. Peut-être, la coordination, ça va, mais, la responsabilité de faire une offre de service de ce type-là, on pense que les partenariats sont fort importants, d'autant plus que les organismes sociocommunautaires du milieu peuvent aussi apporter une contribution essentielle, ainsi que les services de santé et d'autres ministères tels le ministère de la Famille.

Dans le même ordre d'idées, on trouve important aussi que le maintien des services qui sont donnés aux enfants en bas de cinq ans par les services de santé puisse perdurer lorsqu'un enfant va entrer en maternelle quatre ans en milieu défavorisé parce que souvent, quand l'enfant arrive à l'école, il y a comme une passation, là, tu sais, qui se fait du dossier, donc l'école prend en charge le service. Là, ce qui pourrait être intéressant, c'est qu'on le maintienne puis qu'on puisse travailler en partenariat pour éviter les silos. Alors, on aime bien l'idée de travailler ensemble, en équipe, la communauté, autour de ce service-là.

Alors donc, la préoccupation qu'on a, c'est comment aller chercher la participation des parents à l'ensemble des activités qui y seront offertes. Une des façons, probablement, qui pourrait être gagnante, c'est que les partenaires du milieu soient mis à contribution. Mais je pense toujours au conseil d'établissement… Mais on en a parlé tout à l'heure, là, mais on pense que, dans l'école, c'est là qu'il faut que ça se passe le plus. Donc, s'il y a un service à offrir, il faut que l'ensemble des partenaires et le milieu, l'école soient impliqués, dont la direction d'école. Donc, la planification qu'on va avoir des activités-écoles, bien, à la limite, là, si je vais plus loin, mon raisonnement, ce serait bien de pouvoir prévoir une place pour les parents dans la planification concrète d'activités.

Les conditions d'application gagnantes, bien, écoutez, en fin de compte, après plusieurs discussions, ce qu'on trouve, c'est que c'est très variable d'un milieu à l'autre parce que les besoins vont probablement être différents aussi. Mais un élément qui, pour nous, est très important, c'est, quand on a déterminé le groupe-classe, bien, de voir les besoins associés autour de ce groupe-là et, dépendamment du nombre d'élèves, de voir s'il n'y a pas lieu d'ajouter une personne-ressource parce qu'on trouve que le ratio, qui est, bon, normé — on va dire ça comme ça, là — bien, peut-être que ça peut poser un certain défi, et le fait de pouvoir avoir une marge de manoeuvre, pouvoir ajouter une ressource auprès de ce groupe-là pourrait être plus gagnant.

Maintenant, l'autre élément qui nous apparaît très important, c'est la formation des enseignants qui vont oeuvrer dans ces classes-là. On pense que, présentement, la formation universitaire a peu de cours au niveau du préscolaire. Si on en fait vraiment un enjeu — puis je pense qu'on doit aussi le traiter de cette façon — il faut repenser la formation ou il faut la bonifier et il faut aussi s'assurer qu'il y ait un suivi avec la maternelle cinq ans.

Puis, là j'ouvre une parenthèse, moi-même étant jadis une enseignante du préscolaire, c'est extrêmement positif de voir que le service quatre ans va être offert à la maternelle. Donc, ça, là, je ne doute aucunement de ça et je pense qu'il y a lieu de donner la formation continue. Et je ne vois pas de souci, là, dans le sens où, si on a des bonnes enseignantes du préscolaire cinq ans, elles vont être tout aussi habilitées à faire du maternelle quatre ans, mais en ayant une approche qui tient en compte ce que la recherche... les pratiques gagnantes.

Ceci étant dit — donc, j'ai passé quelques propositions, là — une préoccupation que l'on a dans les milieux défavorisés, c'est d'essayer d'avoir une certaine stabilité au niveau du personnel. Donc, ça, ça serait quand même un élément important. Et, bien sûr… Ça, je ne suis pas sûre que ça va être si bien accueilli par les syndicats des enseignants, mais on pense que, si vraiment on veut en faire un programme porteur pour nos enfants de quatre ans, ce ne serait pas mauvais qu'on le traite en ayant des exigences particulières pour les enseignants qui vont oeuvrer dans ces classes-là parce que ça prend une approche particulière, une ouverture à la formation continue, et je pense qu'il faut avoir ce souci-là.

Et, pour conclure, je vous dirais que, comme c'est l'année 1, si on était capable d'en faire un projet pilote cette année et qu'on donne au comité de suivi le rôle de suivre l'implantation des maternelles quatre ans et de pouvoir apporter des recommandations, ce serait fort gagnant.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Excusez. Excusez-moi, Mme Boucher, j'ai quand même empiété sur...

Mme Boucher (Danielle) : J'ai terminé.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait, parce que j'avais empiété un petit peu sur le temps du gouvernement. Nous allons débuter les échanges sans plus tarder. Mme la ministre, pour le premier bloc d'échange, vous avez la parole.

Mme Malavoy : Bonjour, Mme Boucher, M. Neault. Je suis bien heureuse de vous voir ici. Et merci de venir partager, donc, votre opinion, mais aussi votre expertise dans ce dossier-là. Avant d'entrer plus dans des recommandations précises que vous faites… Il y en a beaucoup, on n'aura pas le temps de tout revoir. Mais, quand même, avant d'en reprendre quelques-unes, j'aimerais vous entendre sur le fond de la question. Si vous avez suivi un peu les débats de la première journée — puis on peut anticiper qu'il y en aura encore jusqu'à la fin — vous voyez qu'il y a des gens qui sont sceptiques sur l'intérêt d'avoir des enfants de quatre ans à l'intérieur d'un cadre scolaire, même si on précise bien qu'il s'agit de services éducatifs adaptés à leur âge. Et, par ailleurs, il y a des expériences qui se font actuellement dans un cadre de maternelle à demi-temps, plus certaines expériences pilotes à plein temps dont nous nous inspirons. Donc, il y a comme deux visions des choses. Vous voyez bien qu'avec notre projet de loi on penche, nous, d'un côté, on pense ajouter quelque chose de plus à ce qui est offert aux enfants de milieux défavorisés. Mais, en même temps, j'aimerais vous entendre sur le fond de la question, j'aimerais avoir votre opinion là-dessus, puis, ensuite, on pourra parler peut-être de certaines modalités ou de certaines considérations plus pointues que vous apportez.

Mme Boucher (Danielle) : Alors, écoutez, pour nous, là, le questionnement n'a pas été très long parce qu'on s'est beaucoup appuyés sur la recherche et sur aussi l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, et déjà il y a, justement, vous l'avez dit, des maternelles quatre ans à demi-temps qui sont déjà implantées dans les milieux défavorisés et qui sont porteuses, là, dans le sens où les enfants sont stimulés différemment.

On ne remettra pas en question les centres de petite enfance, on pense que c'est nécessaire. Puis on s'est dotés de ça au Québec, et c'est merveilleux. Mais c'est un pas de plus, un pas de plus pour aller chercher une clientèle qui n'avait pas accès ni aux centres… qui ne fréquentait pas les centres de petite enfance et qui, avec ce service-là, va préparer les enfants en vue de la scolarisation. Donc, les pratiques gagnantes, on va parler de la littératie, de la numératie, les habiletés sociales, etc. Donc, pour nous, c'est clair que l'ajout d'une maternelle quatre ans temps plein en milieu défavorisé — puis je pense que le milieu défavorisé, c'est bien important ici, dans le projet — ça ne peut pas faire autrement qu'être porteur pour cette clientèle-là. Donc, on ne remet pas en doute, là, ce projet-là, pas du tout. Pour nous, c'est clair, là, puis on n'a pas... Je ne sais pas si c'est de cet ordre-là que vous vouliez entendre un commentaire. Je ne sais pas si mon collègue veut ajouter quelque chose.

• (10 h 20) •

M. Neault (Gaétan) : Bien, dans le fond, l'objectif, je pense, Mme Malavoy, Mme la ministre, c'est de donner une chance égale à tous les enfants de deux façons : par une mise à niveau au niveau de l'assimilation, au niveau des capacités, de l'éveil de l'enfant lorsqu'il arrive à la maternelle cinq ans — donc, on prend pour acquis qu'un enfant qui est sous-stimulé a un retard, est un pas en arrière par rapport au reste du groupe; la deuxième chose, donc, on veut travailler au niveau de la numératie, de la littératie, préparer l'enfant à être accueilli à l'école.

L'autre chose, c'est lui donner le goût aussi de l'école, qu'il ne connaît pas. Donc, il y a un élément qui est beaucoup plus ludique, qui est plus intéressant, qui va l'amener à développer un intérêt pour ce nouveau milieu là. J'ajouterais aussi que, pour un bon nombre de ces enfants-là, même les parents ont eu de mauvaises expériences antérieures à l'école. Donc, c'est pour eux aussi une façon d'apprivoiser une réalité peut-être autre que ce qu'ils ont connu. Ça fait que, pour nous, pour ces raisons-là, ça nous semble extrêmement important d'aller de l'avant.

Mme Malavoy : J'aimerais reprendre vos derniers propos, qui sont fort intéressants, parce qu'il y a un certain paradoxe. Je m'explique. Vous dites : Des parents qui ont eu une mauvaise expérience de l'école, donc pour qui l'école n'est pas un lieu... certainement pas de plaisir, en tout cas, mais c'est un lieu qui suscite une certaine méfiance. Et, pourtant, ces parents-là vont envoyer actuellement, là, dans des maternelles à demi-temps, vont envoyer leurs enfants là plutôt que de les envoyer dans des centres de la petite enfance, où, dans beaucoup de cas, ils auraient des places et gratuites. Ça fait que j'essaie de comprendre ce phénomène-là parce que, derrière notre idée d'ajouter quelque chose de plus que ce qui s'offre actuellement, il y a l'idée que... Mais j'aimerais que vous me l'expliquiez avec votre expérience à vous, mais que certains parents vont faire le choix de l'école, qu'ils ne feront pas un autre choix, et qu'on doit offrir à ces enfants-là quelque chose, donc, de plus. Mais expliquez-moi ça, ce raisonnement qui fait que le parent va adhérer actuellement, donc, au modèle à demi-temps.

M. Neault (Gaétan) : Je pense que, même pour un parent qui n'a pas eu une expérience valorisante à l'école… tout parent est conscient que l'éducation ou que la santé financière, physique, émotive de l'enfant qu'il est en train d'accompagner passe par une éducation de qualité. Alors, même un parent qui a vécu des difficultés à l'école ou des expériences négatives est conscient que c'est une source de réussite pour le jeune. D'ailleurs, beaucoup de parents vont vouloir donner à l'enfant ce qu'ils considèrent qu'ils n'ont jamais eu.

Maintenant, un certain nombre de parents ont des réserves importantes, voire des craintes face à l'établissement scolaire. Je pense qu'un certain nombre de parents... J'en connais, là, en milieu défavorisé, à Montréal, là, qui attendent, je dirais, à la dernière minute avant d'inscrire un enfant à l'école. Ce sont les parents qu'on doit rejoindre, les parents qui sont les plus difficiles à convaincre, qu'il faut accompagner, qu'il faut soutenir, et c'est là où je disais tout à l'heure qu'on a besoin, à ce moment-là, de nos partenaires du milieu communautaire. Je pense à une organisation comme celle du Dr Julien qui vient beaucoup en aide aux écoles en expliquant aux parents l'importance de... Donc, non, la bataille n'est pas gagnée à cet égard-là, mais je pense que, foncièrement, l'ensemble des parents jugent que c'est important d'amener l'enfant vers le milieu scolaire.

Mme Malavoy : On a, bien sûr, le défi de constituer ces premiers groupes, puisqu'on a dit : Une classe de maternelle par commission scolaire, l'implantation très progressive. Donc, on a le défi, à la fois, d'identifier les enfants dont il s'agit parce que c'est clair que c'est un projet qui s'adresse à des enfants de milieux défavorisés qui, actuellement, ne vont pas en service de garde et qui — je crois que ça doit être votre expérience aussi — sont à la maison… Donc, c'est quelque chose qu'on offre pour ces enfants-là particulièrement. Donc, comment on constitue les groupes pour, à la fois, répondre à notre objectif et éviter — parce que c'est une critique qu'on a eue de la part de certaines personnes, une crainte, tout au moins, qu'ils expriment — éviter que ces enfants-là soient ghettoïsés, qu'ils soient comme étiquetés, qu'ils soient mis à part? Là encore, comme vous avez une expérience qui n'est pas exactement celle des maternelles plein temps, mais qui est quand même une expérience réelle, j'aimerais vous entendre là-dessus. Comment on peut constituer les groupes et éviter cet étiquetage négatif?

Mme Boucher (Danielle) : Dans un premier temps, je pense qu'il faut s'associer le milieu, les organismes communautaires entre autres, puis il faut avoir une ouverture à accueillir des enfants qui ne sont pas nécessairement ciblés, mais qui peuvent compléter le groupe. Alors, dépendamment du milieu ou, par exemple, si la cohorte est moins nombreuse, bien, je peux avoir une ouverture à pouvoir accueillir d'autres enfants dans ce groupe de maternelle quatre ans. Mais je pense qu'on ne peut pas, le milieu scolaire, faire ça seul. Il faut s'associer les partenaires parce que le défi, c'est de bien présenter le service et de le rendre accueillant et intéressant et que le parent ait le goût d'inscrire son jeune à ce nouveau service là. Donc, il faut s'associer d'autres partenaires.

Moi, je crois beaucoup à la communauté qui entoure l'école, et je pense qu'il faut non seulement... Quand on parle, là, que la commission scolaire doit offrir les services, là, bien, il faut qu'elle s'associe les autres partenaires parce qu'à partir du moment où on détermine dans quelle école on va offrir le service, puis que le conseil d'établissement approuve ce choix-là, puis il est à l'aise avec ça, bien là, à ce moment-là, c'est là que le travail commence. C'est là que le travail commence à dire, bon, maintenant, comment on va faire pour aller rejoindre ces jeunes-là puis la meilleure façon de le faire, et là on doit travailler en... On ne doit pas travailler en silos, on doit travailler en partenariat avec le milieu. Et il y a une ouverture. En tout cas, de notre côté, il y a une ouverture à dire : Pourquoi ne pas accueillir aussi, si la place le permet, d'autres enfants? On n'a pas de restriction par rapport à ça, là, au contraire.

Mme Malavoy : Mais là on comprend qu'on réserve les maternelles plein temps pour les enfants de quatre ans de milieux défavorisés. Il faut que l'enfant soit d'une... On appelle ça une unité de peuplement, mais, en tout cas, d'un milieu économiquement défavorisé, avec les indices qu'on utilise actuellement, qui combinent une donnée sur la scolarisation de la mère et une donnée sur le revenu familial. Donc, ces enfants-là, ils sont, je dirais... il y a déjà des paramètres pour les cibler.

Après ça, votre démarche, dans votre esprit, se fait comment? C'est une offre que l'on fait directement à la famille? C'est une démarche très, très, je dirais, personnalisée pour susciter un intérêt? Parce que je suppose que, dans plusieurs cas, ce sont des familles un peu loin de toute, même, connaissance des services qui sont offerts. Expliquez-moi un petit peu comment vous vous y prenez ou comment vous pensez qu'on pourrait s'y prendre.

M. Neault (Gaétan) : Je pense que c'est clair qu'il va y avoir une démarche de recrutement… — je n'aime pas le mot, mais... — ou de promotion du service, et, encore là, nos partenaires vont jouer un rôle crucial à ce niveau-là.

Au niveau de la formation des groupes, pour compléter les commentaires de Mme Boucher, à la page 5 de notre mémoire, on mentionne qu'il est important de laisser une grande place au jugement et au discernement dans l'élaboration d'une telle classe. Deuxième paragraphe. Donc, la direction de l'établissement, avec l'équipe-école, a un rôle important à jouer. Comme on disait tout à l'heure, on ne veut pas créer un groupe qui va être marginalisé, un groupe ghetto.

Par ailleurs, on veut que les élèves qui se retrouvent dans ce groupe-là soient ceux pour lesquels le service a été élaboré. Parce que la question de l'unité de peuplement présente certaines limites. C'est la moyenne des parents qui se retrouvent à l'intérieur du secteur qui est considérée 9, 10. On sait pertinemment que beaucoup de nos parents favorisés qui demeurent dans ces unités-là peuvent être très intéressés par un service de maternelle quatre ans. Encore là, il y aura discernement, jugement. Et, là-dessus, il faut faire confiance à l'école, je pense, parce que, comme on dit, elle connaît son monde, même si ce sont de nouveaux élèves. Il y a toute la question de la fratrie aussi, mais on est en mesure de porter un jugement là-dessus.

Donc, il y a un élément de promotion du service, il y a un élément de collaboration étroite avec les organismes sociocommunautaires du secteur pour non seulement identifier les vrais bénéficiaires du service, mais aussi de les amener jusqu'au service, encourager les parents à... Et là, bon, évidemment, il y aura des activités à mettre en place, comme on le fait dans nos écoles publiques, pour présenter aux parents la nature du service, les avantages, le fonctionnement, etc.

• (10 h 30) •

Mme Malavoy : Je comprends bien qu'il y aura quelque chose, comme vous dites, de voir avec discernement… Parce que les enfants n'ont pas eux-mêmes une étiquette de défavorisation, c'est le quartier dans lequel ils sont, et, donc, il faut être sûr, comme vous dites, que les enfants qui vont avoir accès aux services soient vraiment ceux qui en ont besoin et pour lesquels on fait toute cette démarche.

M. Neault (Gaétan) : L'autre chose, il faut tenir compte des politiques d'admission de la commission scolaire. Le service n'est pas installé dans un vacuum. Il y a une commission scolaire où on a une politique d'admission, à titre d'exemple, où c'est les enfants du secteur qui sont priorisés. C'est premier arrivé, premier servi. Alors, il va falloir, encore là, voir comment on peut ajuster ces éléments-là tout en respectant les pouvoirs et fonctions de chacun, là. Mais je pense que ce qui est intéressant ici, c'est qu'on parle d'un projet pilote. Et, comme mentionnait Mme Boucher, si on a un comité de vigie, un comité de mise en place qui est à même d'évaluer le déploiement de tout ça et de faire des recommandations d'ajustement, on est dans une solution qui est gagnante, quand même.

Mme Malavoy : ...d'ailleurs, c'est pour ça qu'on y va de façon progressive. Ce n'est pas pilote, en fait. «Pilote», ce sont les expériences qui existent actuellement, mais nous, c'est «implantation progressive» parce que, quand on est rendus à offrir une classe pour chaque commission scolaire, c'est comme déjà une autre étape. Mais c'est vrai qu'on va voir au fur et à mesure comment ça marche, comment on cible les groupes. Il y a des commissions scolaires qui me disent déjà qu'elles veulent plus qu'un groupe, d'autres qui ne sont pas sûres d'avoir de quoi en constituer un.

Ce qui m'amène à parler des ratios, puis je trouve important de le préciser auprès de vous. Actuellement, pour des quatre ans, la moyenne, c'est 15, ce n'est pas 18. O.K.? La moyenne, c'est 15. 18 serait un maximum. Mais ce dont on se rend compte déjà avec les échos que nous avons des commissions scolaires, c'est qu'il peut y avoir des territoires où on veut vraiment implanter une maternelle quatre ans en milieu défavorisé, mais on n'est pas sûr de remplir une classe. Et, donc, je redis ce que j'ai évoqué hier, on va fixer une borne à partir de laquelle un groupe pourrait être financé. Et ce qu'on a à l'esprit pour l'instant, ça pourrait être six, quelque chose comme ça. En deçà de six, on trouverait d'autres moyens. Mais, à partir de six, on pourrait avoir un groupe, de sorte que cette moyenne générale ne soit pas un objectif à atteindre pour une autorisation. Et ça, je pense que ça pourrait déjà aider.

Je sais que mon collègue a une question, mais avant je veux vous entretenir sur une autre dimension. J'ai été, hier, un peu stupéfaite d'entendre l'association du préscolaire, puis, bon, on s'est expliqués, on a discuté, on a échangé. Vous, vous abordez la question de l'amélioration de la formation universitaire, et je retrouve dans vos propos une des dimensions que nous expliquaient les représentants de cette association qui est que la formation universitaire n'est pas adaptée suffisamment au préscolaire. Parce que, dans mon esprit, quand on a une formation universitaire de préscolaire et primaire, dans mon esprit, à l'évidence, on devait être capable, avec un bac de quatre ans, de savoir quoi faire avec des enfants de préscolaire, hein? Il y a cinq ans, c'est le modèle qu'on connaît. Mais, quatre ans, il y a des adaptations, bien entendu, l'enfant n'est pas au même stade de développement. Mais on est quand même dans l'univers du préscolaire, et, franchement, les personnes qui sont venues hier étaient extrêmement critiques de la formation qu'elles ont reçue, tellement critiques qu'elles disaient : Bien, on n'est pas les plus en mesure d'offrir des bons services à ces enfants à quatre ans à l'école, donc, autrement dit, on n'est pas compétentes.

J'aimerais revenir sur l'importance de la formation universitaire. Qu'est-ce que vous voyez? Parce que vous, vous pensez que c'est faisable et que c'est souhaitable pour les enfants en milieu défavorisé. Qu'est-ce qu'il faudrait ajouter? Qu'est-ce qu'il faudrait faire? Est-ce qu'il y a là une chose sur laquelle on devrait se pencher avec plus de précision?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Neault, moins d'une minute pour répondre.

M. Neault (Gaétan) : Rapidement, un des éléments, je pense, qui peut être inquiétant pour des enseignants qui vont avoir à prendre en charge ces groupes-là, c'est toute la question de la sous-stimulation et du dépistage hâtif. Les jeunes, souvent, arrivent et sont en contact pour une première fois avec des professionnels autres que ceux de la santé. On connaît l'importance du dépistage hâtif, que ça soit en dysphasie, problème de littératie ou de numératie quelconque. Alors, ces enseignants-là se voient quand même un rôle important à cet égard-là.

Donc, pour répondre à votre question, je pense qu'un des aménagements qui devrait être apporté au niveau de la formation universitaire initiale — parce qu'il ne faut pas oublier qu'on a parlé de formation continue aussi — c'est toute la question de l'habilité à évaluer : évaluer les jeunes, évaluer réellement leurs besoins, leurs... et être capable de diagnostiquer aussi, dans une certaine mesure, des problèmes. On avait même, à un moment donné, contemplé l'idée qu'il faudrait qu'il y ait des services d'orthopédagogie d'offerts à ces jeunes-là en termes d'évaluation puis de dépistage, mais on pense qu'avec un aménagement de...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je vous remercie, M. Neault. Je suis désolée, c'était tout le temps qui était alloué du côté du gouvernement. Nous devons aller maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Mille-Îles, vous avez la parole.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Et bonjour, Mme la Présidente. Mme la ministre, chers collègues, aujourd'hui, on va être encore toute la journée ensemble dans un sujet fort intéressant. Madame, monsieur des directions d'école, bonjour. On va continuer dans le même sujet parce que je pense qu'on... Vous allez voir qu'il y a beaucoup de complémentarité de ce côté-ci, là, du salon aussi, puisqu'on est fort intéressés à vos propos.

Dans la volonté de mettre en place le meilleur programme chez la formation de nos enseignants, vous parlez du dépistage. Il y a le principe de dépistage, mais il y a le principe de la petite enfance. On dit : Quatre ans, cinq ans, c'est vrai que c'est... Comme je dis, 50, 51, il n'y a pas grand différence, mais, au niveau du zéro à six ans, chaque âge, chacun, de zéro à un, de un à deux, il y a des grandes différences, il y a des grands pas qui sont faits par ces petites personnes qui évoluent rapidement et qui viennent chercher leurs valeurs. Il y avait un livre qui avait été écrit qui disait, hein : «Tout se joue avant six ans», que la plupart des enseignants du préscolaire ont tous lu avec beaucoup d'attention parce qu'il y avait beaucoup de guides par rapport à où tu es supposé d'être rendu dans ton évaluation de personne.

Donc, au niveau de mes enseignants et de la formation des maîtres, qu'est-ce que je peux apporter de plus qui pourrait donner à mes enseignants une compétence plus forte, axée sur le préscolaire, un peu comme on le fait pour le secondaire? On sait qu'il y a une formation qui se donne pour l'enseignement, la ministre le disait, il y a un bac, hein? Après quatre ans, j'en sors, puis... Mais je sais que, si je veux être un enseignant au secondaire, oups! là, j'ai une formation de plus à aller chercher, j'ai des choses... Donc, est-ce qu'il serait opportun de voir peut-être quelque chose au niveau du préscolaire si la volonté fait en sorte que, d'ici cinq ans, bien, la plupart de ma clientèle, défavorisée ou pas, sera dans le milieu scolaire parce que c'est à quatre ans qu'on va arriver à l'école plutôt qu'à cinq ans?

Mme Boucher (Danielle) : Bien, effectivement, c'est en plein ça. Dans le fond, c'est qu'il faut, si on veut vraiment traiter le préscolaire comme… — voyons, je vais-tu le dire? — un champ spécifique, bien, moi, je pense qu'il faut apporter une attention particulière dans la formation. Présentement, il y a très peu de crédits qui sont dédiés uniquement au préscolaire. Je pense qu'il faut le revoir, il faut avoir une réflexion à ce niveau-là. Et je peux comprendre l'insécurité. Mais, dans le fond, l'insécurité, on peut aussi l'avoir au niveau des maternelles cinq ans, là. Tu sais, il n'y a pas plus de crédits pour les maternelles cinq ans.

Moi, je pense que, là, c'est une opportunité. En mettant en place ce projet-là d'implantation de maternelle quatre ans temps plein, on a peut-être là une opportunité d'aller revoir le curriculum au niveau de la formation universitaire et, à ce moment-là, même, on pourrait, en même temps, revoir celui de cinq ans parce qu'à la limite, là, c'est cousin, là, tu sais, c'est... Donc, je ne sais pas si je réponds à votre question, mais nous, là, on ne voit pas de contradiction, là, à ce niveau-là.

• (10 h 40) •

Mme Charbonneau : Et, vous avez raison, il y a là une opportunité de revoir quelque chose... un milieu de vie différent, puisqu'on pourrait parler de la petite enfance plutôt que de parler du préscolaire, du primaire et du secondaire. On pourrait peut-être faire une belle mixité sur l'apprentissage au niveau de la petite enfance chez nos enseignants qui cible spécifiquement le préscolaire.

Par contre, on va citer les gens qu'on a entendus hier parce qu'ils ont suscité chez nous des questions. On nous a parlé de la stabilité, hein, de nos enseignants auprès de nos jeunes, de cette nécessaire stabilité là, puisque, si je suis en CPE, je vais avoir une intervenante toute ma journée. Au mieux, j'en ai deux, hein? Je vais avoir une intervenante qui va arriver vers l'heure du dîner, qui va être au service des dîneurs, mais mon intervenante, mon éducatrice en CPE, elle est toute la journée en relation avec mon jeune.

Dans les écoles du Québec, en ce moment — j'en connais un peu — je sais qu'il y a le service de garde, il y a l'école — je vais appeler ça l'école parce que c'est le temps de classe — j'ai mon service de dîneurs, j'ai l'école, et puis, après, j'ai le service de garde qui reprend le rôle à la fin des classes. Puis, plus souvent qu'autrement, je vais avoir des gens qui vont venir faire de l'aide aux devoirs parce que, maintenant, c'est un service que vous offrez dans nos écoles. Donc, si je suis en troisième année, j'ai plusieurs personnes qui passent dans la vie de mon jeune. Puis c'est correct en troisième année, j'ai l'habitude, j'ai une maturité. Mais, si j'ai quatre ans, habituellement j'ai besoin d'une forme de stabilité, une relation enfant-adulte, et, dans un CPE, je l'ai, maximum, deux personnes. Donc, comment je fais pour adapter un programme quatre ans qui peut ressembler, sans l'être tout à fait, à un programme CPE et qui fait en sorte que ma relation jeune-adulte, elle est stable et fixe?

Mme Boucher (Danielle) : Bien, présentement, il existe préscolaire cinq ans, et on fait déjà cette... Cette façon de faire là, elle existe déjà, c'est-à-dire que les enfants de cinq ans qui fréquentent le préscolaire temps plein, ils ont une éducatrice du service de garde attitrée au groupe, et c'est toujours la même personne, peu importe si c'est le matin, en arrivant, l'heure du dîner. Parce qu'ils finissent plus tôt, là, ils terminent vers 10 heures, donc ils terminent plus tôt, ils ont une partie avant le dîner. Le dîner puis le soir aussi, c'est la même personne. Donc, dans le fond, ils ont deux visages significatifs.

Moi, je ne vois pas de contre-indication qu'on applique la même logique aux maternelles quatre ans, d'autant plus que, s'il advenait qu'on ajoute une personne-ressource dans la classe de maternelle quatre ans, ce serait tout à fait approprié de pouvoir utiliser la personne qui est éducatrice au service de garde, qui pourrait être là, donc, de façon plus continue. Donc, je pense que la direction d'établissement dans l'école où on va implanter le service, elle va être à même de regarder qu'est-ce qu'il est possible de faire pour mettre en place des conditions gagnantes, et ça, ça fait partie des conditions gagnantes d'avoir toujours les mêmes personnes qui travaillent auprès de cette clientèle-là.

Mme Charbonneau : Merci. J'ai beaucoup apprécié le fait que vous êtes revenus sur le système de l'école dans son milieu, c'est-à-dire le conseil d'établissement, hein, vos partenaires du quotidien, les gens avec qui vous travaillez. Minimalement une fois par mois, le conseil s'assoit, jase, discute de différentes choses puis prend des décisions pour l'école. Par contre, si je suis un parent qui est accueilli dans une école qui n'est pas nécessairement de mon quartier, puisque c'est une école par commission scolaire, je suis accueilli dans, disons, une école qui est dans le quartier d'à côté — je vais le dire comme ça pour ne pas faire trop l'image trop grosse — est-ce que, parmi l'implication parentale que vous y voyez, il y a une place pour ce parent-là? Mais il n'est pas de l'aire de desserte. Il est desservi quatre ans parce que c'est un endroit où on a décidé de donner le service, mais c'est un parent qui va être inclus dans le monde scolaire. Parce que, rendu en préscolaire cinq ans, peut-être qu'il va s'en retourner dans son aire de desserte. Donc, j'ai un déplacement d'élève, mais je n'irai pas sur le sentiment d'appartenance avec vous, je vais aller plus sur la place du parent parce que vous en avez parlé en bien, de cette place-là.

Ça fait qu'en premier sa place au conseil d'établissement puis après, puisque vous allez être parti sur votre élan, après, la place que vous voyez ou le partenariat entre le parent et la classe maternelle quatre ans, puisque, quand je suis en préscolaire cinq ans, bien, ma place est la même que si j'étais en première année, c'est-à-dire que j'ai des rencontres pour les étapes, puis, des fois, certains milieux font des fêtes, là, l'Halloween, Noël, le parent est invité à y participer, mais, autrement, la place du parent n'est pas plus que si j'étais en première année, deuxième année, troisième année, puis je peux me rendre de même jusqu'en six, la place du parent change rendu en secondaire. Donc, la place de ce parent, puisqu'on parle d'une comparaison Passe-Partout, CPE, puis la relation du parent est différente dans chacun de ces endroits-là. Alors, un, sa place au conseil d'établissement, comment vous voyez l'accueil. Puis, deux, la place du parent comme tel dans le système maternelle quatre ans.

M. Neault (Gaétan) : D'abord, au niveau du conseil d'établissement, le rôle du conseil d'établissement, c'est de décider de mettre en place le service et puis de voir les modalités selon lesquelles on va le faire. À ce moment-là, ce sont les parents élus au conseil d'établissement qui prennent la décision. À partir du moment où le service est offert dans cette école-là, à mon avis ça transcende le quartier d'appartenance, là, autant de l'élève que du parent. C'est la raison pour laquelle on disait que, dans un deuxième temps, il faut même prévoir dans le curriculum, dans ce qui va être proposé comme services à ces enfants-là, qu'il y ait des activités qui s'adressent aux parents ou qui impliquent le parent dans l'école, et ça, quelle que soit son adresse de provenance, là. À partir du moment où le jeune fréquente le service, le parent a les mêmes droits, a les mêmes obligations que le parent qui appartient à l'aire de desserte de l'école, à mon sens...

Mme Charbonneau : Je vous arrête.

M. Neault (Gaétan) : Oui.

Mme Charbonneau : Je vous arrête parce que je suis d'accord avec vous. Je le connais, ce système-là. On est à l'aube de mettre en place un système différent, puisqu'à l'extérieur de Montréal il existe un programme qui s'appelle Passe-Partout, et mon parent est impliqué de façon différente, il y a même de la formation pour le parent. Parce qu'être parent, ce n'est pas juste avoir un enfant, il y a une interaction qui est importante et il y a une relation — vous le disiez plus tôt à Mme la ministre — il y a une relation importante parce que le parent a probablement vécu des échecs à l'école, et il voit là un... il y a encore un doute, un aspect négatif, une relation de méfiance. Donc, il ne faut pas juste que j'apprivoise le jeune de quatre ans. Parce que, si je ne veux pas qu'il décroche, là, ce n'est pas juste sur lui qu'il faut que je mette toute mon attention, c'est aussi sur son parent. Parce que, si, rendu en deuxième année, le parent est décroché parce qu'il est tanné de faire des devoirs — ça arrive — bien, mon jeune, en troisième année, il est déjà décroché parce que son parent ne met aucune valeur ajoutée à cette école. Donc, comment je fais pour mettre en place — puis je vous pose la question parce que je n'ai pas la réponse, là — une relation parent-enseignant, parent-école forte et confiante qui fait en sorte que j'ai, à la fin de l'année scolaire, un élève qui a le goût d'aller en préscolaire cinq ans, mais un parent qui a le goût aussi de le suivre encore pour les années à suivre?

Mme Boucher (Danielle) : C'est un beau défi, hein? C'est un excellent défi. Bien, je vous dirais, on a aussi à apprivoiser le parent. Une des activités qu'on met en place pour les maternelles cinq ans, c'est toute la visite de l'école et la présentation des lieux, la présentation des personnels, vivre une activité avec l'enfant. On fait toute une activité d'accueil, qu'on appelle, là. Moi, je pense qu'elle va être nécessaire, là, en maternelle quatre ans d'autant plus, hein? Ça, c'est certain. Déjà là, en partant, là, je pense qu'on a du personnel qui sont accueillants, qui vont mettre ce qu'il faut pour que le parent se sente confortable, à l'aise quand ils vont venir visiter l'école, mais avec leur enfant. Parce que l'idée, c'est qu'il faut que l'enfant soit là, il faut que l'enfant participe à des activités, il faut que le parent le voie faire. Donc, ça, c'est une chose.

La deuxième chose, moi, je pense qu'il faut prévoir des activités parentales carrément dans la classe même. Mais là je m'avance parce que, là, je parle comme direction d'école, là, moi, c'est... Puis là je vous dis ça, puis peut-être qu'un autre milieu, ça va être autre chose. C'est pour ça que le jugement de la direction d'école puis du personnel, là, est très important, parce que c'est certain qu'il faut qu'on s'assoie puis qu'on regarde comment on peut faire pour amener le parent à venir à l'école. Parce que c'est un défi, hein? C'est un défi même pour les maternelles cinq ans en milieu défavorisé, là, ce n'est pas un nouveau défi, puis on se pose la question encore.

Mais l'idée de travailler en partenariat avec les services autour, les services communautaires, puis d'ouvrir, là… de ne pas travailler en silo, d'ouvrir avec d'autres ministères, moi, je crois plus à ça parce que je me dis : Si on est capables de travailler ensemble, bien, on va pouvoir mettre en commun les connaissances que l'on a de la famille. Donc, c'est peut-être un voeu pieux, vous allez dire, là, mais je pense que, si on veut travailler seuls, on va passer à côté. Il faut vraiment s'assurer de pouvoir travailler ensemble.

M. Neault (Gaétan) : Si je peux me permettre un autre élément, je pense, oui, la structure, tout ça, l'accueil… Parfois, on le sait, les portes sont difficiles à ouvrir de l'école, même de l'intérieur parfois, mais... Il y a la structure, mais ça n'enlèvera jamais l'importance de la relation entre l'enseignant et le parent. Donc, je pense qu'il va falloir prévoir pour ce service-là des mécanismes particuliers ou des dispositions qui vont faire que l'enseignant va avoir le temps, la possibilité, les outils pour communiquer régulièrement avec le parent.

Parce que le défi, là, il est énorme, effectivement. Il est même d'amener un parent à changer parfois sa perception qu'il a de l'école. Puis ça, ça va nécessairement passer par la relation de personne à personne, et la personne significative pour le parent, bien, veux veux pas, c'est l'enseignant de son enfant. Donc, d'où donner les moyens à l'enseignant aussi.

• (10 h 50) •

Mme Charbonneau : Donc, le partenariat possible avec un CLSC pour s'assurer que j'ai de la formation continue parentale, que je développe ma compétence de parent — parce que ça se développe — pourrait être quelque chose d'intéressant.

Par contre, vous parlez beaucoup du partenariat, puis vous êtes quand même des directeurs d'école, vous devez — et rassurez-moi tout de suite — déjà avoir des partenariats parce que votre clientèle est diversifiée, là, vous avez des élèves handicapés, vous avez des élèves à besoins spéciaux, vous avez des élèves dits réguliers, des élèves non identifiés, mais à risque. Donc, rassurez-moi, juste me dire, oui, vous avez déjà des partenariats avec les CLSC, les centres de services au niveau de la santé dans vos environnements.

Mme Boucher (Danielle) : Oui, je vous rassure tout de suite, c'est certain. Mais je voudrais voir quelque chose de supplémentaire inscrit dans les mandats de ces ministères-là pour qu'on soit ensemble pour le même objectif. C'est dans ce sens-là que je dis que, quand on parle de partenariat, c'est bien évident qu'on travaille en partenariat, mais ça serait tout à fait approprié que, l'objectif de réussite de l'implantation des maternelles quatre ans, qu'on ne soit pas les seuls à le porter puis que ça soit vraiment clairement nommé.

Mme Charbonneau : Je suis heureuse de vous entendre, puisque, quand la ministre a fait l'annonce pour la maternelle quatre ans, elle était assise à côté de la ministre de la Famille, et j'ai compris, là, qu'il y avait un partenariat plausible et possible. On a, malheureusement, et de tout temps... Je me souviens, il y a très, très longtemps, je ne faisais pas de politique du tout puis je trouvais donc qu'il y avait des gros silos épais entre chaque ministère puis que de traverser pour aller dans l'autre silo, c'était excessivement difficile. Donc, je sais que la dame assise en face de moi a cette volonté-là.

Maintenant, si, effectivement, ça a été inscrit et bien identifié, bien, peut-être qu'il y aura une obligation qui va dépasser les personnes qui vont le voter et qui va se poursuivre à l'intérieur des milieux, et là je trouve qu'on a quelque chose de bien gagnant plutôt que juste un voeu.Parce que le paradis est pavé de bonnes intentions, mais, en même temps, si on ne l'écrit pas, si on ne l'inscrit pas dans une loi, bien dit et bien fait, on va passer à côté d'une occasion de mettre quelque chose de fort important.

Il me reste une minute, je vous laisse ce temps-là pour me parler du transport scolaire, puisque le quatre ans, dans un transport scolaire, je ne touche pas à terre, quand je suis en voiture, je suis attaché. Parlez-m'en dans l'accueil que vous avez à l'école puis dans le dépôt de l'enfant chez lui.

Mme Boucher (Danielle) : Veux-tu en parler, du transport scolaire?

Bien, écoutez, je vais être bien honnête avec vous, on n'a pas réfléchi longtemps sur ça, c'est... Je suis très honnête. Par contre, écoutez, les maternelles cinq ans sont déjà transportés, là, donc j'imagine que c'est réaliste de penser qu'on peut aussi... à moins que... une heure... On s'entend qu'il faut aussi faire preuve de jugement, là, il ne faut pas que ça prenne une heure pour l'amener à son école, là. Je pense, par exemple, dans les régions, il faut peut-être réfléchir, en région, comment on peut implanter la maternelle quatre ans pour que ça soit réalistement, là, vivable. Ça, c'est une chose. Mais je ne vois pas de problème, moi, à transporter des petits de quatre ans en autobus scolaire, là, à moins qu'il m'échappe des choses. Mais on le fait déjà avec les petits de cinq ans qui, des fois, viennent d'avoir cinq ans, là, hein? Ça fait que c'est presque quatre ans, ça, dans le fond, là. Ça fait que je ne vois pas de problème avec ça, là. Ce qu'il faut plutôt se préoccuper, c'est la distance, tu sais, jusqu'où on va, là, pour aller chercher cette clientèle-là. Moi, je pense que c'est plus ça qu'il faut regarder.

Mme Charbonneau : …dans la réflexion que la commission scolaire aura à faire sur son choix de suggérer à des parents de profiter de ce service.Parce qu'on reste sur le principe de volontaire : Oui ou non, je participe au service quatre ans. Le parent pourrait dire non. Mais, dans le fond, le bon jugement de chacun pour s'assurer que le bassin d'alimentation de cette classe-là, de ce groupe-là va rester suffisamment proche pour ne pas que je fasse deux heures d'autobus pour aller en classe, même si, au Québec, ça arrive que des élèves fassent deux heures d'autobus pour aller en classe.

Mme Boucher (Danielle) : Ça, il faut éviter ça, on s'entend, ils ont quatre ans, hein?

Mme Charbonneau : Oui, je suis d'accord avec vous. Merci infiniment pour votre intervention.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Je pense que je vais utiliser mon privilège, moi, pour vous poser une question, Mme Boucher. Quand vous avez dit que les enfants de quatre ans pourraient faire du transport par autobus scolaire avec les cinq ans, si je comprends bien, les cinq ans, présentement, qui prennent les autobus scolaires sont aussi avec des enfants qui fréquentent le niveau primaire, première, deuxième, troisième année. Est-ce que vous voyez d'un bon oeil que des enfants de quatre ans pourraient prendre du transport scolaire avec des enfants du primaire pouvant aller jusqu'à la troisième année?

Mme Boucher (Danielle) : Je vais clarifier l'intervention que j'ai faite, ce n'était pas dans cet ordre-là. Je disais que les maternelles cinq ans, déjà, utilisaient le transport scolaire. Non, je ne vois pas que les quatre ans fréquentent l'autobus scolaire avec des plus grands, là, on s'entend. Quoique, tu sais, je dis ça, puis, en même temps, je pense à des projets qui ont été mis en place où les cinq ans ont utilisé un autobus scolaire avec des plus grands, puis ça a donné quelque chose defort intéressant. Mais il faut comme s'ajuster avec le milieu dans lequel on travaille, on s'entend? Mais, idéalement, les quatre ans, s'ils peuvent avoir leur propre transport scolaire… De toute façon, ils n'ont pas le même horaire que le primaire. Alors, on s'entend que, déjà là, il y a une différence.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. C'était pour ma compréhension personnelle. Merci. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 4 min 45 s. La parole est à vous, Mme la députée.

Mme Roy (Montarville) : Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, gens du gouvernement, collègues de la première opposition, soyez salués. Madame, monsieur, merci.Merci pour votre mémoire, je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt. Et, vous mettez en lumière une problématique particulière,j'aimerais qu'on s'y intéresse. Naturellement, nous avons, tout comme vous, le meilleur intérêt de l'enfant à coeur. Et là je vous ramène à la page 5 de votre mémoire, où vous soulevez quelque chose d'intéressant, et je vais vous citer le dernier paragraphe avant la proposition 5, vous écrivez : «…nous souhaitons que, dans l'éventualité où l'élève fréquente une autre école que celle de son quartier, des modalités soient prévues afin de faciliter son retour dans son école d'appartenance dès que son année en maternelle quatre ans sera terminée», et là vous mettez en lumière quelque chose de particulier.

On sait que ce projet pilote ne touchera qu'une classe dans une grande commission scolaire, et la question qu'on se pose, c'est qu'il peut y avoir des enfants qui seront déracinés, des petits enfants de quatre ans qui seront — et pardonnez-moi l'expression — barouettés à quatre ans, sortis de leur quartier, envoyés plus loin, peut-être même dans une autre ville, et qui, à cinq ans, reviendront dans leur quartier, et moi, je me demande quel sera, selon vous, l'impact sur un tout-petit de quatre ans de vivre ce changement-là, ce déracinement-là en l'espace d'un an, puisque vous soulevez le fait qu'il faudrait, justement, qu'on mette en place des modalités pour leur retour. Alors, quelle est, selon vous, la crainte à l'effet qu'on puisse déplacer ces enfants comme ça en l'espace d'une seule année?

M. Neault (Gaétan) : D'abord, a priori, mentionnons que ce qu'on privilégie, évidemment, c'est que le service soit mis en place dans le quartier naturel de l'enfant. Donc, si on a une unité de peuplement où on retrouve suffisamment de jeunes qui rencontrent les exigences pour être acceptés au service, si on veut, là, il serait intéressant de penser qu'il va se retrouver dans une école où il va aussi fréquenter maternelle cinq ans puis première année, ainsi de suite. Alors, ça, ça serait dans un monde idéal.

Maintenant, à partir du moment où on a à travailler à distance, on est, évidemment, préoccupés. C'est toute la question, l'enjeu du transport, qui a été soulevée tout à l'heure parce qu'à partir du moment où l'enfant est intégré dans un groupe, on peut penser qu'après la période d'adaptation, lorsque les adultes qui sont là, qui sont relativement stables, deviennent significatifs, l'enfant va s'installer, va prendre sa place, va bien répondre.

Là où on a une préoccupation, c'est, encore là, la question du passage, au même titre qu'éventuellement cet enfant-là aura à passer du primaire au secondaire.Si, entre quatre ans et cinq ans, il a à passer d'un service qu'il a fréquenté toute la journée à une autre école, il faut qu'il y ait en place, encore là, des mesures, je dirais, exceptionnelles ou qui sont propres à cette situation-là, des mesures administratives où on va s'assurer que l'information, que les diagnostics, le cheminement de l'enfant est bien connu de sa nouvelle école, mais aussi une mesure d'accueil, là, un peu comme on fait pour les enfants qui s'en vont vers le secondaire pour qu'ils puissent s'acclimater à. Idéalement, ils retrouveraient dans cette nouvelle école là aussi leur grand frère ou leur grande soeur, le cas échéant. Ça, c'est énormément aidant.Ça pourrait peut-être même être pris en compte lorsqu'on va penser à l'admission des enfants.

Mme Boucher (Danielle) : L'autre élément que j'ajouterais au questionnement que vous avez, aux inquiétudes, c'est qu'on met déjà en place un service passage maternelle cinq ans vers la première année. Alors, je pense qu'on devrait s'inspirer de ce qu'on a déjà mis en place pour pouvoir le faire avec quatre ans versus cinq ans. Moi, c'est drôle, je ne suis pas très inquiète, dans le sens aussi où le parent va inscrire son enfant sur une base volontaire. Ça fait que, si, pour lui, l'école est trop loin ou il... Bon, regardez, là, je pense qu'il y a quand même beaucoup de choses qui existent déjà, qui sont déjà en place, qui vont faciliter ce passage-là.

• (11 heures) •

Mme Roy (Montarville) : …si, pour lui, le parent, l'école est trop loin, si je poursuis dans votre pensée, alliez-vous dire qu'il n'y enverra pas son enfant? Est-ce que vous craignez ça?

Mme Boucher (Danielle) : Bien là, cette année, on est à l'an 1. Nous, ce qu'on a compris, c'est qu'il y aura peut-être un an 2. Ça fait que c'est certain qu'il y a un choix d'école à faire. Donc, le choix qu'on va faire, que la commission scolaire va faire de l'école en partenariat, nous, on pense qu'il faut le faire en partenariat avec les autres ministères et les... les autres ministères, effectivement. Donc, l'école qui sera choisie, on pense qu'il y aura assez de clientèle autour de cette école-là pour combler le besoin d'ouvrir une classe en maternelle quatre ans. Maintenant...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mme Boucher. Merci beaucoup.

Mme Boucher (Danielle) : Excusez-moi. Merci, de votre...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Malheureusement, c'est tout le temps dont nous disposions. Donc, Mme Boucher, M. Neault, merci beaucoup.

Et j'invite les représentants de la Confédération des syndicats nationaux à prendre place. Nous allons suspendre les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

(Reprise à 11 h 3)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Bonjour, mesdames. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Mme Boucher, je pense que c'est vous qui allez prendre la parole. Parfait. Peut-être nous présenter, dans un premier temps, la personne qui vous accompagne. Vous allez disposer d'un temps de 10 minutes pour nous parler de votre mémoire. Une minute avant la fin de votre exposé, je vais vous rappeler qu'il vous reste une minute parce que le temps est extrêmement compté ici, à l'Assemblée nationale, et nous ne pouvons pas aller au-delà de midi. Donc, afin de maximiser les échanges le plus possible, je vais intervenir également le moins possible. Donc, Mme Boucher, la parole est à vous. Par la suite suivront les échanges avec les parlementaires.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme Boucher (Denise) : Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la ministre, membres députés, alors, excusez-moi, j'ai un petit problème de santé — mineur, quand même — mais ça ne m'a pas empêchée de venir vous voir.

Alors, c'est assez curieux qu'on soit assis ici. D'ailleurs, on n'aurait jamais pensé y être, mais, il y a trois ans, à la Confédération des syndicats nationaux, nous avons organisé une rencontre dans laquelle il y avait 150 personnes, composée de représentantes de CPE, mais aussi composée de représentantes des services de garde en milieu éducatif et de professeurs qui font de l'enseignement et nous nous sommes posé la question sur les maternelles quatre ans parce qu'on savait déjà qu'il y en avait déjà d'implantées, particulièrement dans la région de Montréal, des maternelles à temps partiel, mais il y avait beaucoup de rumeurs dans l'air qui appelaient peut-être à ce qu'un jour il y ait des maternelles quatre ans à temps plein. Il y avait même aussi une rumeur qui parlait de maternelles pour des enfants de trois ans. Alors, j'ose espérer qu'on n'ira pas jusque-là dans une prochaine commission parlementaire, mais ça nous a amenés à déposer un document qui s'appelle Des services de garde éducatifs de qualité : Un droit pour chaque enfant, et ça nous a permis aussi d'asseoir des personnes des CPE et des services de garde éducatifs et de voir avec elles qu'est-ce qui serait le meilleur modèle pour les enfants de quatre ans.

Alors, vous comprendrez, Mme la ministre, que devant les défis... Parce que c'était exactement autour des mêmes questions, qu'on soulevait des questions… Comment on rejoint des familles en milieu défavorisé? Comment on assure aussi une qualité de services éducatifs? Et lesquels on veut offrir aux enfants de quatre ans en milieu défavorisé? Donc, toute notre réflexion d'il y a trois ans, on la retrouve encore parce que nous considérons qu'elle est encore d'actualité. On en vient donc à vous dire que nous croyons que le projet de loi devrait être rejeté, mais sur des bases qui sont celles aussi, je dirais, qui nous rappellent qu'il y avait en 1997 une politique familiale qui préconisait des CPE pour le développement des enfants. Aussi parce que le Conseil supérieur de l'éducation en est venu tout dernièrement, hein, à un rapport qui vous a été déposé à peine quelques semaines avant que l'annonce soit faite des maternelles quatre ans en milieu défavorisé où lui disait : On pense que c'est par les CPE que ça doit se passer. Enfin, quand on regarde votre projet de loi, on considère qu'il vous donne un pouvoir discrétionnaire assez élevé et dans lequel rien ne nous indique, d'ailleurs, que c'est pour les enfants en milieu défavorisé, rien n'est indiqué.

Donc, il est clair que, pour nous, dans notre première recommandation, c'est le rejet. En même temps, on considère et nous préconisons qu'il faut qu'il y ait un développement de places de CPE, particulièrement dans les milieux défavorisés. Il y a eu des annonces qui ont été faites tout dernièrement par Mme Léger, mais il faut qu'on soit capable de développer plus, il faut être capable de mieux travailler, aller chercher ces familles, peut-être mettre plus près des services de garde auprès de ces familles en milieu défavorisé.

D'ailleurs, dans la politique familiale de 1997, il y avait deux objectifs qui étaient visés. Le premier, c'était de faciliter la conciliation des responsabilités parentales et professionnelles et aussi favoriser — et, à notre avis, c'est peut-être le sens le plus important — le développement des enfants et l'égalité des chances. D'ailleurs — et plusieurs recherches ont été faites à cet égard-là — les chercheuses qui sont venues dans nos rencontres nous ont dit qu'il fallait que ce soit une réussite quand on décide d'amener des petits bouts de chou en milieu de services éducatifs, et il faut les aider dans leur développement. C'est pour ça, d'ailleurs, que, dans nos recommandations... qui n'est pas là, mais, dans les recommandations de notre cahier à l'époque, on était contre une scolarisation précoce. D'ailleurs, c'est revenu, d'ailleurs, dans le document du rapport du Conseil supérieur de l'éducation, et il faut aussi porter, je dirais, une attention particulière à la qualité des services en milieu défavorisé. D'ailleurs, on se rend compte... Et c'est revenu à plusieurs égards, la question des quotas, la question des lieux, la question des espaces physiques. Donc, il faut qu'on puisse bien y voir.

Notre deuxième recommandation — bien, vous allez voir que ça suit — c'est de poursuivre le développement de places et de nouvelles installations dans les CPE en milieu défavorisé. Alors, on pense qu'il y a là un travail à faire. Généralement, quand les gens regardent comment ils vont déplacer, hein, mettre... installer les nouvelles installations, ils regardent par rapport à des bassins particuliers, bassins de jeunes familles, de quartiers qui se développent, mais ça veut dire aussi que, dans les quartiers défavorisés, il faut avoir une attention plus particulière. Souvent, on les voit moins. Les CLSC voient ces gens-là. Donc, il faut les poursuivre et... Et, souvent, ce qu'on se rend compte, c'est… pourquoi les enfants vont moins dans ces services éducatifs qui sont régis, ils ont le problème de culture, souvent. Souvent, peut-être, une question de coûts, hein? On sait qu'il y a des coûts à amener les enfants dans un service de garde régi, même s'il y a certaines aides. Et il y a des familles aussi qui ont des appréhensions en regard des services de garde. Elles ont souvent peur qu'on porte un jugement : Sont-ils de bons ou de mauvais parents? Parce que, souvent, on a cette idée, parce qu'ils sont dans des milieux défavorisés, que les parents sont moins bons. La raison, ce n'est pas toujours pour celle-là, bien au contraire.

• (11 h 10) •

Notre troisième proposition, c'est de pouvoir adopter des pratiques afin d'assurer des places aux enfants de milieux défavorisés telles que des protocoles d'entente entre les CPE, les organismes de santé et de services sociaux, des organismes communautaires et peut-être voir à ce qu'il y ait une priorisation sur la liste d'attente. On sait qu'il y a plusieurs de nos CPE qui ont des ententes-cadres avec des CSSS de leur quartier qui sont destinées à assurer un certain quota de places pour des enfants référés, d'ailleurs, par l'organisme de santé. On dit cela parce que ça demeure quand même important. On sait que les places sont rares, elles sont convoitées, mais, en même temps, c'est vrai qu'il y a des parents qui l'ont plus facilement, font des demandes souvent au moment où… l'annonce de la grossesse parce qu'ils veulent être sûrs d'avoir une place. On peut penser que peut-être que, dans les milieux défavorisés, ce réflexe-là ne fait peut-être pas partie de la culture, et, quand ils en viennent à vouloir aller chercher un service, bien là ils se retrouvent — l'expression — le bec à l'eau. Donc, pour nous, il nous semble qu'on a un effort à faire de ce côté-là.

Et, vous savez, les obstacles, ils demeurent. Il faut donc aussi qu'on y ait une réflexion beaucoup plus vaste. Est-ce que les services de garde régis actuellement sont adaptés aux contraintes de l'emploi des personnes en milieu défavorisé? Est-ce que, souvent, ces gens vont avoir des emplois à temps partiel? Est-ce qu'on tient compte aussi de places qui pourraient leur être attribuées? Souvent, ce sont des femmes, si on prend des femmes monoparentales, qui sont sur des listes d'appel, hein, dans un service de soins de longue durée, peu importe. Alors, il faudrait qu'on soit capable aussi, et aussi par des mécanismes qui les amènent à se trouver un emploi pour se sortir du milieu défavorisé, de se sortir de la pauvreté… mais aussi d'être capable d'avoir une réflexion beaucoup plus large, mais aussi de regarder la question des déterminants sociaux. Alors, on pense qu'il y a un travail à faire autour de ces questions-là, de lutte à la pauvreté, de support et de soutien dès la naissance.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Boucher, je vous inviterais à conclure, il vous reste moins d'une minute.

Mme Boucher (Denise) : Très bien, on pourra... dans les questions après sans problème.

Quatrièmement, d'instaurer la gratuité des services de garde éducatifs pour les familles à faibles revenus. Je pense que c'est clair.

La cinquième recommandation, c'est d'allouer les ressources financières publiques nécessaires pour assurer la qualité de l'ensemble des services éducatifs. Ce qu'on entend… Et on a vu des expériences… On est sur le comité, nous, qui a été mis en place par la ministre, mais les expériences où il y a eu des maternelles quatre ans, c'est parce qu'il n'y a pas un prof tout seul, c'est qu'il y a de l'aide avec cette personne-là. Et ça, c'est la commission scolaire qui a décidé de mettre cette aide-là. Il faut qu'on aménage aussi les locaux dans les classes, ce qui est contraire à ce qu'on retrouve dans les CPE régis, hein? Il faut que... Il y a toutes sortes de mécanismes.

Enfin — après, on pourra répondre aux questions, Mme la Présidente — d'intensifier les efforts puis le travail en partenariat pour rejoindre et soutenir les familles, les enfants vivant en milieu défavorisé. Voilà, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Boucher. Nous allons débuter les échanges. Mme la ministre, vous avez la parole pour le premier bloc d'échange.

Mme Malavoy : Merci. Bonjour, Mme Boucher, Mme Audet. Merci d'être là. Je sais fort bien, parce qu'on a déjà eu l'occasion de se parler il y a déjà plusieurs mois, que...

Mme Boucher (Denise) : ...voix.

Mme Malavoy : Pardon?

Mme Boucher (Denise) : J'en ai perdu la voix.

Mme Malavoy : Bien oui. Alors, j'espère que ce n'est pas notre influence. Parce que c'est un fait que je connais vos idées, mais je suis habituée à les entendre avec une voix plus vigoureuse que ça. Alors, ne vous inquiétez pas, je connais la vigueur de vos propos et je connais, bien entendu, aussi votre approche. J'apprécie d'autant — d'ailleurs, vous l'avez évoqué — que vous participiez à ce comité de travail qui regarde comment on peut dessiner le premier programme et cette première implantation progressive de maternelle quatre ans. Donc, je sais qu'on touche à des choses qui vous concernent, qui vous interpellent.

Je vais vous poser une première question, enfin, simple, pour moi, à poser, mais peut-être que la réponse est plus complexe : Pourquoi devrions-nous avoir un modèle unique? Je pars du principe qu'il y a des enfants de quatre ans qui, actuellement, au Québec, en nombre assez important, plus du quart, ne vont pas dans les services que vous représentez. Tout en sachant la qualité de ce que vous offrez, mais n'y vont pas. Et, sans vouloir faire un lien absolument direct, mais bon nombre de ces enfants-là arrivent en maternelle cinq ans avec des difficultés — ça, c'est documenté — avec des carences, avec des problèmes tels que, souvent, ils démarrent mal ensuite leur parcours scolaire.

Et donc, tout en sachant que les CPE font un travail remarquable… Puis on a voulu les créer, puis on a voulu, récemment, dire : On va compléter les classes. Donc, tout ça n'est pas mis en question. Tout en sachant cela, nous, on dit : Écoutez, il y a des enfants qu'on ne rejoint pas comme ça. On ne les rejoint pas pour différentes raisons. Et ce n'est pas un jugement de valeur sur les parents, c'est une admission qu'il y a des milieux dans lesquels on voit les choses différemment de ce que notre modèle CPE a introduit. Les parents peuvent être totalement des parents aimants de leurs enfants, mais ils ne les font pas garder, et, donc, est-ce qu'on ne peut pas travailler en complémentarité, vous, avec le modèle qui est le modèle, je dirais, principal, et avec une autre porte d'entrée pour certains enfants dont on veut que, comme les autres, ils arrivent à avoir des chances tout au moins similaires? J'aimerais vraiment vous entendre développer un peu ce point de vue là parce que je crois que c'est fondamental dans ce qui nous oppose dans notre perception du projet de loi. Parce que vous demandez le retrait, et, donc, je vois bien qu'il y a quelque chose de fondamental. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Boucher (Denise) : Ça va être Mme Audet, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Audet.

Mme Audet (Julie) : Alors, bien, vous parliez d'un modèle unique. Je crois qu'au Québec c'est peut-être unique dans la diversité des services de garde éducatifs qui existent. On a le milieu familial régi, on a les CPE, on a le programme Passe-Partout, on a les maternelles… Il y en a quelques projets temps plein, mais le demi-temps aussi. Souvent, c'est un demi-temps avec un professeur complété avec un demi-temps avec une éducatrice de service de garde. Donc, il y a déjà une variété.

Et, lorsqu'on avait fait notre réflexion vraiment en profondeur, on avait fait venir nos membres qu'on a aussi dans tous ces milieux, en milieu scolaire, qui font la maternelle quatre ans, qui accueillent aussi les enfants dans les services de garde, en milieu familial et en CPE, et on s'était dit : Qu'est-ce qu'on doit promouvoir pour rejoindre spécifiquement les enfants de quatre ans d'un milieu défavorisé? Et c'était ça, notre questionnement, parce que, de façon globale, on veut maintenir les maternelles et on veut développer dans les CPE et milieu familial régi. Mais, quand on parle d'enfants qui ont des difficultés ou qui sont plus vulnérables, qu'est-ce qui est mieux? Et là on a regardé avec des chercheurs aussi quels sont les critères qui assurent qu'un service va être de qualité, qu'est-ce qui fait que l'encadrement est bon. Et là la première chose qu'on a regardée, c'est la formation. Après ça, on a comparé les ratios, la taille des groupes, l'aménagement aussi, la mixité et la proximité des services. Et c'est en faisant cette analyse-là que tout le monde en était venu à la conclusion que c'étaient les CPE qu'on devait favoriser si on avait des ressources supplémentaires à mettre, si on avait des efforts de plus. Mais, bien entendu, on veut maintenir la diversité des services.

Mme Malavoy : Mais ça m'amène quand même à vous poser une question peut-être un peu plus précise. C'est dur pour moi de comprendre que vous soyez à l'aise avec des maternelles mi-temps et que vous ne soyez pas à l'aise qu'on ajoute des maternelles plein temps pour des enfants de milieux défavorisés. Ce n'est pas une... je dirais, ce n'est pas un modèle qu'on est en train d'implanter absolument pour tout le monde, mais il existe actuellement, effectivement, le programme Passe-Partout et les maternelles mi-temps. Ce que, nous, on nous dit, c'est que, si on veut vraiment que les chances de ces enfants soient poussées au maximum, il est préférable d'offrir un modèle de maternelle plein temps. Alors, qu'est-ce que ça dérange dans la diversité que vous exprimez? Qu'est-ce que ça vient perturber? Quel est — je ne sais pas — le changement, je dirais, qui a l'air si majeur que vous disiez : Bien non, mi-temps, ça va, mais, au-delà de ça, on ne veut rien savoir?

• (11 h 20) •

Mme Audet (Julie) : En fait, ce n'est pas que ça soit mi-temps ou temps plein. C'est plutôt de dire : Si on a des ressources présentement à mettre de l'avant, à intensifier nos efforts, on pense que ce n'est pas en développant davantage de maternelles, qu'elles soient demi-temps ou temps plein, mais c'est de rechercher et de développer davantage les CPE. Donc, c'est vraiment plus là-dedans, et, je ne sais pas, on pourra parler des projets pilotes aussi.

Mme Boucher (Denise) : Bien, vous savez, quand on a entendu lors du comité… C'est très riche d'aller à ce comité-là, d'ailleurs. Je trouve que c'est assez près des discussions qu'on avait eues. Les professeurs qui sont venus nous présenter leurs expériences, leurs projets pilotes nous ont tous dit qu'il ne faudrait pas que ça soit 18 enfants, c'est impossible. 16, là, ça semblait même assez problématique. Donc, il y a un problème de quotas.

Après ça, ils nous ont parlé de la question de l'aménagement des locaux. Ça aussi, ça pose un problème, rien n'est adapté pour les jeunes. Et je n'utiliserai pas le mot «clientèle» tel qu'il a été utilisé tout à l'heure. Pour moi, ce sont des enfants, ce n'est pas des clients. Ils n'achètent rien, eux, ils viennent recevoir, et rien n'est aménagé. Ils parlaient même... Bon, on va parler des trucs sanitaires, hein? Quand c'est à l'autre bout du monde, aller à la toilette, ça pose un certain problème.

Dans la question des maternelles demi-temps... Et aussi parce qu'il faut qu'il y ait quelqu'un. Elles se sont rendu compte que, quand il y a une technicienne en service de garde ou une éducatrice en service de garde qui… ils sont capables de compléter les modèles pédagogiques, tout ça. Mais, dans la maternelle à demi-temps, le service de garde joue une importance… il a son importance avec l'éducatrice parce que l'éducatrice perçoit ou voit autre chose que, nécessairement, le professeur ne voit pas nécessairement. Pas parce qu'il ne veut pas le voir, mais, en même temps, il n'a pas tout à fait la formation. Et ça, ça a été dit à plusieurs occasions. Je ne dis pas que ce n'est pas des bons professeurs, loin de là. Je pense que les jeunes que nous avons vus dans ces projets pilotes là sont des jeunes femmes — c'étaient des femmes — passionnées qui ont à coeur de faire en sorte qu'elles veulent bien réussir ce qu'elles font avec les petits bouts de chou.

Donc, si on avait un modèle, c'est... Nous, on se place dans le sens… Il peut bien y en avoir une multiplicité, mais, si, au bout du compte, ça fait en sorte qu'on s'est tout éparpillés puis on a tout mis les ressources un peu partout, on ne les a pas concentrées vers la meilleure place, c'est une chose. L'autre chose, c'est qu'il faut faire le démarchage avec ces enfants-là, avec les parents, les amener… Tout à l'heure, on entendait : Vous savez, ils ne viennent même pas non plus à la maternelle cinq ans. Pourtant, celle-là est obligatoire.

Une voix :

Mme Boucher (Denise) : Non? Ah bon!

Mme Malavoy : Permettez-moi juste de… Juste un instant, je ne prendrai pas de votre temps, mais, curieusement, les gens croient que la maternelle cinq ans est obligatoire parce que 98 % des enfants y vont. Mais elle est sur une base volontaire. Je ferme la parenthèse.

Mme Boucher (Denise) : Merci de m'avoir corrigée. Vous savez, moi, j'accepte toutes les corrections, mais les bonnes. Alors, vous voyez, alors, on peut faire des choses. Alors, c'est comme ça que nous, on les voit. Mais là il faut qu'on fasse du... qu'on travaille, qu'on aille voir... C'est sûr que des parents qui sont dans la zone du code postal défavorisé qui sont en bonne situation, puis qui savent qu'ils n'ont pas de place au CPE, puis qu'ils pourraient avoir une occasion de faire en sorte que leur petit puisse aller à la maternelle quatre ans, puis qu'il connaît déjà tout son alphabet, puis qu'il n'a pas de problème de littératie, mais il est dans un milieu défavorisé, il va être super content… Mais, le problème, il faut faire tout un démarchage auprès de chacune de ces familles. Et ça, si on avait des investissements à faire, à notre avis c'est par là que ça doit se faire, et en complémentarité avec un CPE à cause de la formation qu'ont reçue les éducatrices dans les CPE.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme la ministre.

Mme Malavoy : Je vais faire un commentaire. Mais je sais que mon collègue souhaite poser aussi une question, alors je ne vais pas faire comme tout à l'heure, je vais lui donner du temps pendant qu'il en reste, Après, c'est trop tard. Mais je voudrais faire le commentaire suivant. D'abord, rappeler qu'il y a actuellement des places pour des enfants de milieux défavorisés dans les CPE. O.K.? Ils sont déjà financés, ce qui fait que des familles peuvent y avoir accès gratuitement. Je pense que c'est important de le rappeler.

Je comprends aussi que vous abordez un certain nombre de questions que je partage : comment aménager les lieux; comment s'assurer que les enseignants, qui ne sont pas habitués pour le moment, qui n'ont pas d'expérience d'enseignementde quatre ans, soient adaptés à cet âge-là; comment également s'assurer qu'on ait, je dirais, tout un encadrement qui soit tout à fait conforme au développement de l'enfant à cet âge-là. Je comprends parfaitement. Et, la question des ratios, je vais le redire parce que je l'ai évoqué un peu plus tôt, la moyenne pour quatre ans, c'est 15. La moyenne pour cinq ans, c'est 18. Mais la moyenne pour quatre ans, c'est 15. Et nous avons déjà admis qu'on pourrait ouvrir des groupes plus petits. Donc, il y a un certain nombre d'aménagements qui devront se faire.

Notre point de vue, c'est toujours que, même si les CPE existent, même s'il y a des places pour des enfants en milieu défavorisé, même si on vient de dire, il y a quelques mois : On va ajouter 28 000 places, même s'il y a tout ça et que tout ça fonctionne, nous pensons malgré tout qu'il y a quelque chose qu'on doit ajouter. Pas au nom de notre modèle ou, je dirais, de nos principes, au nom de la réalité que des enfants n'ont pas accès à des services.

Et, je termine avant de donner la parole à mon collègue, moi aussi, je me fie sur le dossier du Conseil supérieur de l'éducation, sur son avis, mais je me permets juste de citer, à mon avis, à la page 77, en bas de la page, un paragraphe qui, me semble-t-il, devrait permettre de conjuguer les efforts que vous faites et ceux que nous voulons ajouter. «Le conseil croit […] que, pour assurer rapidement l'accès de 90 % des enfants de quatre ans à des services éducatifs de qualité réglementés par l'État, il faut créer en CPE les places qui manquent.» Ils disent ça, on est d'accord. Il poursuit : «Il faut aussi maintenir les services qui desservent déjà des enfants de quatre ans, de manière à atteindre le plus rapidement possible un taux de fréquentation de 90 %, tout en améliorant la qualité dans tous les types de services éducatifs. Et nous pensons que cela veut dire que, si on croit qu'il faut ajouter des classes de maternelle quatre ans à plein temps pour des enfants de milieux défavorisés, c'est un ajout. Ça n'est pas la première chose que l'on fait, on a commencé par compléter les classes, mais on veut ajouter cela aussi.

Cela étant, si vous permettez, Mme la Présidente, la prochaine fois qu'il y aura du temps, je le laisserai à mon collègue.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Est-ce que vous acceptez que Mme Boucher puisse répondre?

Mme Malavoy : Bien entendu.

Mme Boucher (Denise) : Si vous me permettez, c'est que votre projet de loi ne dit pas que c'est pour les enfants en milieu défavorisé. Moi, je pense que vous avez à corriger parce que ce n'est pas ça que ça dit, le projet de loi. Et ça, on a posé la question, d'ailleurs, déjà. On nous dit : Oui, c'est ça, c'est ça. Ça doit être la pensée du législateur. Souvent, c'est l'expression qui est utilisée. Mais il me semble que ça doit être mis.

L'autre chose, tout à l'heure, vous avez aussi parlé de la question que vous étiez prêts à baisser les ratios, mais la perception que j'en ai eue… Peut-être parce que j'étais assise loin, mais la perception que j'en ai eue, c'était comme, bien, s'assurer qu'il y ait une classe, tu sais, comme si ça, là, c'était l'important. Il y a six enfants, on va assurer qu'il y ait une classe parce que c'est ça. Est-ce que c'est ça, ou on ne devrait pas... et non pas la question de l'encadrement. Pour moi, la question, c'est aussi l'encadrement qu'on donne. Ce n'est pas de faire une classe pour faire une classe. Et ça, à mon avis, ça demeure quelque chose qui reste encore un peu nébuleux.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Boucher. Nous allons maintenant avec le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques. M. le député.

M. Breton : Il me reste combien de temps?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Il vous reste un bon sept minutes.

• (11 h 30) •

M. Breton : O.K. Merci, Mme la Présidente. Je vais en profiter pour saluer les élus de l'opposition officielle, de la deuxième opposition et mes collègues, Mme la ministre. Écoutez, moi, j'aimerais commencer un peu par vous parler d'une réalité de milieu défavorisé. Moi, je peux vous dire que je suis né dans Hochelaga-Maisonneuve, et ma mère a passé la majeure partie de son enfance dans ce qu'on appelait à l'époque le parc Frontenac. Je ne sais pas si vous savez c'est où, le parc Frontenac, c'est à deux coins de rue de la CSN. Et je peux vous dire que, pour y avoir passé ma jeunesse là, même à l'époque où ça s'appelait le parc Frontenac — je parle de ça, il y a 60, 70 ans — c'était, à cette époque-là déjà, un milieu défavorisé. Donc, ce n'est pas d'hier.

Et, dans la circonscription de Sainte-Marie—Saint-Jacques, où je suis député, il y a, juste derrière la CSN, une école qui s'appelle l'école Champlain, dont vous avez certainement entendu parler. L'école Champlain est considérée comme l'école la plus défavorisée à Montréal. Sur 170 élèves, il y en a 90 qui ont droit au repas du midi à 1 $. Ça vous donne une petite idée du niveau de défavorisation de cette école-là. Et puis, je suis allé visiter cette école-là à quelques reprises, la directrice, Mme Julie Simard... Et, on a parlé tout à l'heure du Dr Julien, il y a le Dr Harper, là, qui fait du travail à l'école Champlain. Moi, je vais vous dire, honnêtement, j'ai été impressionné, vraiment impressionné par le travail qui est fait dans cette école-là, où, justement, il y a une maternelle quatre ans à temps partiel, où je vois que les impacts, ils sont réels, ils sont concrets.

Il y a dans cette école-là, je dirais... Alors qu'il y a à peu près 15 ans, dans Hochelaga-Maisonneuve, la très grande majorité des gens qui allaient à l'école là, qui allaient dans les CPE là, il y a 15 ans, c'était, je dirais, au moins à 75 %, des petits enfants québécois francophones, aujourd'hui on en est rendu à peu près à 75 % des enfants d'origine immigrante. Donc, le portrait a considérablement changé depuis 15 ans. On parle d'enfants du Vietnam, du Bangladesh, d'Amérique latine, d'Afrique et d'Haïti. Et moi, j'ai vu, de mes yeux vu, pour y être allé à quelques reprises, l'impact positif de ce qu'a eu l'implantation de maternelles quatre ans à l'école Champlain, d'une c'est-à-dire… oui, c'est ça, maternelle quatre ans, et cette espèce de sentiment d'appartenance qui est en train de se créer au sein de l'école.

Et ça m'amène à une question... En fait, il y a deux questions que je voulais vous poser. D'abord, est-ce qu'il y a une meilleure complémentarité entre les services éducatifs à la petite enfance et l'éducation préscolaire? Pourrait-elle lever les obstacles que vous évoquez dans votre mémoire?

Et mon autre question, c'est : Pour bien connaître plusieurs personnes depuis très longtemps des communautés du Bangladesh, d'Haïti et d'Amérique latine, les discussions que j'ai eues avec eux au fil des ans, c'était que, pour eux, ils attachaient une plus grande importance à l'école, et, donc, je me demande si ce n'est pas à cause du fait de l'importance qu'ils reconnaissent à l'école qu'il semblerait qu'ils soient plus prêts à envoyer leurs enfants à la maternelle quatre ans que de les envoyer dans des CPE. Et c'est peut-être une partie de la réponse qui fait que, dans ces milieux-là, les enfants vont moins dans les CPE. Donc, j'aimerais ça, vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

Mme Boucher (Denise) : Je vais demander à Mme Audet de répondre.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Audet.

Mme Audet (Julie) : Bien, je vais peut-être commencer avec le dernier bout de votre intervention où vous dites : Les gens d'origine immigrante qui connaissent peu, en fait, les services de garde éducatifs de modèle québécois, où on ne parle pas d'un service de garde, mais, vraiment, il y a un volet éducatif, vont moins être portés, peut-être, à aller s'inscrire dans un CPE ou un milieu familial. Et peut-être partir de l'idée aussi qu'on disait : Les gens croient que la maternelle cinq ans est obligatoire, tout le monde y a été. À l'époque, c'était soit l'avant-midi ou l'après-midi. Mais c'est ancré, les gens y ont été, donc ils envoient leurs enfants naturellement à la maternelle.

Mais plus on va voir aussi les gens, les parents qui ont fréquenté des CPE, qui ont fréquenté un milieu familial régi, qui ont participé au programme Passe-Partout avec leurs parents… bien, vont probablement aussi être plus enclins à envoyer leurs enfants. Donc, moi, je crois qu'on va voir aussi une fréquentation augmentée des services de garde éducatifs par le fait que ça avait rentré dans la culture. Donc, moi, je pense qu'il y a quelque chose de positif là-dessus. Et, pour nous, que des enfants de milieux défavorisés puissent avoir accès à des services éducatifs, que ce soit à la maternelle, que ça soit à un service éducatif régi, pour nous, c'est important.

Mais la question qu'on se posait aujourd'hui, c'est à savoir : Parmi tout ce qu'on a... Et nous, on pense que la qualité, elle est bonne, mais on veut rehausser la qualité partout soit par la formation, soit, des fois, c'est l'ajustement des ratios. Chaque service a son avantage. Le milieu familial, ils sont six. C'est parfait… établir aussi la relation, aussi, d'attachement à l'enfant. Il va passer souvent trois, quatre années avec la même éducatrice. On va avoir d'autres avantages en CPE. Ça va être au niveau de la formation, au niveau aussi du ratio. Au milieu scolaire, il y a aussi… souvent, c'est la fréquentation, c'est d'amener aussi les enfants à aimer l'école. Donc, chacun a ses avantages, mais, aujourd'hui, on se dit : Qu'est-ce qui est mieux? Qu'est-ce qu'on doit choisir? On a le choix. On est chanceux, on a le choix de voir qu'est-ce qui pourrait être le mieux pour les enfants, qu'est-ce qui est plus adapté aux enfants de milieux défavorisés, et c'est comme ça qu'on en est venus à se dire : C'est les CPE.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Quelques secondes, Mme la ministre, oui.

Mme Malavoy : Vraiment juste quelques secondes pour qu'on se comprenne bien. Moi, je ne me demande pas qu'est-ce qui est le mieux, je me demande comment faire pour rejoindre les enfants de quatre ans qu'on ne rejoint pas actuellement. Sans questionner la qualité de votre modèle, mais je me rends compte qu'il y a des enfants aujourd'hui qui ne vont pas dans vos services et je ne veux pas attendre, je veux leur offrir quelque chose dès septembre prochain pour un bon nombre d'entre eux.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Malheureusement, c'est tout le temps dont le gouvernement disposait. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée des Mille-Îles, vous avez la parole pour un temps de 19 minutes.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Mesdames — avec voix et sans voix — bonjour. J'ai compris que ce n'est pas le ton qui donnait la fermeté aux propos, c'est plutôt la fermeté des propos qui vient renchérir le ton.

J'ai apprécié votre mémoire, d'autant plus qu'à la fin vous avez touché tout l'aspect législatif, puisqu'on en convient, le projet de loi a cinq articles qui donnent un peu l'envergure de ce qu'on veut. Mais, en même temps, vous avez fait un travail exceptionnel — ou les gens de chez vous l'ont fait — pour aller dans le pointu de cette loi qui donne des orientations puis qui donne des volontés à la ministre et au milieu scolaire. Donc, merci infiniment.

On a parlé de l'égalité des chances. On parle d'une clientèle défavorisée, qui n'est pas nécessairement mentionnée dans la loi, mais les premiers pas seront faits pour cette clientèle. Ce que, de notre côté, on a compris, c'est qu'en premier c'est les défavorisés, et, éventuellement, on voit une maternelle quatre ans s'installer dans le milieu scolaire de façon plus aisée.

Hier, on avait des gens qui... Et je me suis amusée tantôt quand vous l'avez dit parce qu'il y a des gens quisont venus nous dire : Le syndicat, il veut absolument qu'ils commencent à trois ans. Et, tantôt, votre propos n'allait pas du tout dans ce sens-là. Donc, c'est tellement le fun de pouvoir se rencontrer puis pouvoir mettre les choses au clair comme ça.

Un peu comme vous, je ne trouve pas que le modèle est parfait partout, mais je ne trouve surtout pas qu'il est pareil, puisque j'ai un modèle… Vous les avez énumérés, mais j'ai un modèle CPE, j'ai une garderie privée et, quelquefois, dite pédagogique, j'ai un milieu familial, où mon ratio est différent, mais où ma relation avec le jeune est différente aussi, et là je cherche à développer… on cherche à développer un service particulier pour le préscolaire quatre ans, du moins un essai temps plein. On parle beaucoup du temps partiel, mais je nous rappelle que le temps partiel est mis en place pour une clientèle à défi particulier. Ce n'est pas pour une clientèle nécessairement défavorisée. Par contre, il y a certains endroits qui y touchent un peu, et les pauvres, les gens défavorisés, les gens qui n'ont pas l'égalité des chances, il y en a partout. Il n'y en a pas juste dans Hochelaga-Maisonneuve, il y en a partout. Je suis une députée de Laval, et, malgré toute la richesse qu'on peut attribuer à cette île, il y a des gens en milieu défavorisé dans ce milieu-là aussi.

Vous avez dit une phrase tantôt que j'ai accroché, puis je me suis dit : Je vais aller regarder ça avec vous. Vous avez dit : C'est un problème de culture. Quand vous approchez ça avec un principe de problème de culture… Qu'est-ce que vous nous dites quand vous nous dites : C'est un problème de culture quand le parent ne participe pas, quand il ne cherche pas à avoir ce service-là, soit en milieu familial, en CPE ou... Est-ce que c'est une culture, vu le milieu défavorisé? Est-ce que vous visez autre chose? Je veux vous entendre sur le principe de problème de culture.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Allez-y, Mme Boucher.

• (11 h 40) •

Mme Boucher (Denise) : Bien, il y a eu des recherches qui ont été faites, entre autres par la Santé publique de Montréal, qui indiquaient — puis je pense que Julie pourra aller un peu plus loin — que, souvent, les parents ne veulent pas prendre la place d'un autre parent qui en aurait peut-être besoin. Et, ils ont peur du jugement, je l'ai dit tout à l'heure. Peut-être que j'ai utilisé le terme «culture», mais, en fait, des fois, c'est la culture... Il y a de la culture de l'institution aussi, hein, quand même. Il y a des cultures d'entreprise, il y a des... C'est dans la façon de voir les choses et comment elles sont.

D'ailleurs, je pense que le Dr Julien, à cet égard-là, a saisi les difficultés que ces familles-là avaient, et lui a développé une culture d'approche auprès d'elles et d'eux pour, justement, faire en sorte qu'il y ait un lien de confiance entre lui et les familles. Bien, c'est ça qu'il faut être capable de développer, puis ça ne peut pas... Un petit ne peut pas être juste, je ne sais pas, un petit qu'on assit sur un banc d'école parce que c'est le temps qu'il soit assis sur le banc d'école. Je ne dis pas ça dans... Je ne place pas ça de façon péjorative, mais... Donc, il y a des gens qui ont peur du jugement.

La question du déplacement fait en sorte que pour... Et ça, d'ailleurs, je me rappelle, c'est même Dr Julien, dans une rencontre que j'ai eue avec lui, qui me disait : Il faut que ça soit encore plus près pour eux que pour tout autre. Ils n'ont pas de véhicule automobile, il faut qu'ils se déplacent. Les conditions climatiques, ils en sont victimes au même titre que tous ceux et celles qui... Tu sais, on est au Québec, hein, donc il y a ça. Donc, c'est là que tout se place, et c'est à ça qu'il faut travailler.

Moi, j'ai parlé de déterminants sociaux, mais il faut qu'on puisse travailler déjà sur ces volets-là. Donc, c'était dans ce sens-là que je le parlais parce qu'elles sont ensemble, elles sont... Bon, tantôt, on parlait des personnes immigrantes. Bon, on sait très bien que les personnes immigrantes ont l'habitude... surtout les femmes d'Amérique latine, hein, eux autres, ils gardent leurs enfants collés sur eux, ils leur tiennent la main jusqu'à l'âge de 18 ans. Mais c'est une mauvaise expression, mais quand même... Mais il reste qu'elles sont près… Puis, souvent, elles vont faire affaire avec la voisine, hein, tu sais, c'est la voisine qui va garder puis qui va faire... puis qui devient... ou la famille ou les parents. Donc, c'est tout ça qu'il faut rebrasser, et il faut le faire correctement pour ne pas offusquer et faire en sorte qu'on pointe des gens plus que d'autres. C'était dans ce sens-là que je l'avais dit. Julie, peut-être.

Mme Audet (Julie) : Je crois que ça complète bien. Puis il ne faut pas oublier aussi le désir des parents aussi d'élever leurs enfants et de... Et ça peut être aussi une source de valorisation pour des gens de milieux défavorisés ou des gens qui sont sans emploi que de pouvoir passer du temps avec leurs enfants. À ce moment-là, c'est là où des programmes, peut-être, comme Passe-Partout peuvent être intéressants parce que c'est plus ponctuel et ça implique les parents. Mais, disons, certains ont la chance, en fait, de rester avec leur enfant.

Mme Charbonneau : Je posais la question à des gens de CPE… D'ailleurs, j'en ai visité un dans mon comté pour poser la question de façon plus pointue : Mais est-il plausible d'imaginer un service CPE… Je vais l'appeler comme ça, là, parce que, des fois, de bien identifier avec les bons mots, ce n'est pas toujours facile, mais un service CPE quatre ans, mais dans une école où il y a de l'espace… Parce qu'on aura toujours ce défi-là. En milieu urbain comme Montréal, l'espace est compté, puis vous avez fait le tour, un peu, des aménagements. Par contre, dans un espace moins urbain, donc plus rural, mes espaces scolaires sont peut-être plus accommodants, hein, parce que ma clientèle s'éparpille et me quitte un peu, donc j'ai un peu plus de place, je peux aménager une classe de façon plus favorable.

Mais est-ce que je peux imaginer une complémentarité plus proche? Parce qu'on parle toujours du principe de mettre en lien les CPE avec les écoles, et j'en suis. Ma difficulté, par contre, c'est, après ça, mon école avec mon milieu familial, mon école avec la garderie privée, mon école avec la garderie pédagogique, bon, tous ces liens-là à qui on demande à l'école d'avoir des partenariats. Est-ce qu'on peut imaginer qu'un CPE, les petits bouts de chou de matante, a un groupe, disons, de 10 — parce que, dans les CPE, le ratio, c'est 1-10 pour les quatre ans — serait localisé à l'intérieur de l'école... Je ne règle pas mon problème d'aménagement, là, je ne règle pas mon problème de me rendre parce que, si je me rends à l'école, peut-être qu'il faut que je sois dans le système scolaire, donc dans l'autobus, mais j'y apporte une complémentarité plus où j'ai des gens qui ont une formation petite enfance 100 %, avec des gens qui vont les reprendre en maternelle cinq ans puis qui vont poursuivre dans le milieu scolaire, et, de ce fait, j'ai un sentiment d'appartenance, je suis déjà à l'école. Mon regard sur l'école plutôt que sur «je fais garder mon enfant» est différent parce que, s'il est dans l'école, même s'il y a le principe de CPE, il est dans l'école. Donc, pour le parent, il y a peut-être une vision qui est différente, une perception de… plutôt que de l'envoyer garder, je l'ai envoyé à l'école.

Par contre, mon système à l'intérieur, est-ce que… Puis là je m'adresse à vous avec énormément d'ouverture, je vous connais franche et directe, mais est-ce que je peux mixer mes syndicats? Est-ce que je dois regarder à l'intérieur même de ma convention collective sur mon temps école, mon temps CPE? Est-ce que je dois aménager bien des plages, puisque, dans une école, j'ai déjà à peu près cinq sortes de syndicats, cinq sortes de conventions collectives si je vais à mes professionnels, mes enseignants? Je ne vous les nomme pas, vous les connaissez tous. Donc, est-ce que ça peut être plausible, imaginable ou est-ce que j'ai la berlue?

Mme Boucher (Denise) : Je vais demander à Julie puis je ferai un autre petit bout après.

Mme Audet (Julie) : Bien, je crois qu'au niveau de... ça pourrait être un projet pilote. Au niveau des CPE, l'idée de l'amener plus près de l'école, bon, là où j'ai peut-être un problème, c'est de dire : Si c'est exclusif juste aux quatre ans… Parce que ce qui est bien aussi avec les CPE, c'est que l'intervention se fait plus tôt. Et, dans le modèle que vous montrez, ça ressemble beaucoup à celui de l'école Saint-Zotique, où on a une maternelle temps plein avec le professeur, où l'éducatrice de service de garde — et nous, on revendique qu'elle soit qualifiée par un D.E.C. en technique éducation à l'enfance — vient compléter, c'est un tandem. Et, quand ils ont fait le projet, c'était bien réfléchi, il y a eu la formation spécifique pour le professeur, pour l'éducatrice. Et même, au début, l'éducatrice était en tandem l'après-midi, et ils se sont rendu compte, en discutant avec les chercheurs, que ce serait préférable que ce soit le matin, alors que les enfants sont plus en mode d'apprentissage, que l'après-midi, où il y a la période de la sieste. Donc, oui, c'est possible d'avoir différents groupes de travailleurs en même temps qui viennent, justement, amener une complémentarité dans leur intervention au niveau des enfants, et je crois que c'est souhaitable aussi qu'on ait ça.

Mme Boucher (Denise) : Mais moi, je vous dirais...

Mme Charbonneau : Mais, dans l'image que je vous faisais, là, il n'y avait pas d'enseignante, il n'y avait qu'une éducatrice en éducation. Il n'y avait pas une enseignante, il y avait vraiment un principe CPE à l'intérieur d'une structure scolaire. Je fais juste le modifier parce qu'effectivement j'aurais pu vous citer Saint-Zotique, mais ce n'était pas là que je m'en allais.

Mme Boucher (Denise) : Mais, si vous me permettez, être syndiqué, ce n'est pas un virus, hein? Ce n'est pas quelque chose qui...

Mme Charbonneau : Pour le patronat, peut-être. Non, je vous fais une blague, là.

Mme Boucher (Denise) : Non, non, mais ce que je veux vous dire, c'est que tout se rattache à la question de l'organisation du travail, et, dans toutes les conventions collectives, il est question d'organisation du travail. Les gens, il faut qu'ils se parlent. On s'est rendu compte, même dans la question des maternelles demi-temps, que... Et, quand il y a des liens — d'ailleurs, on va beaucoup plus loin dans notre truc — quand il y a des liens entre l'éducatrice et le professeur et qu'ils se parlent, il y a un suivi qui se fait avec l'enfant, et c'est encore mieux, et quand il y a des liens aussi avec le parent. Ça, là, c'est dans la nature humaine, ce n'est pas une convention collective. Si le prof, il ne l'aime pas, la fille ou le... puis qu'il ne fait pas de soutien ou de rapport de ce qui s'est passé dans la classe le matin avec… je dis n'importe… avec Denise… Ça n'existe plus, des Denise, maintenant, tu sais, c'est un vieux nom, mais...

Mme Charbonneau : Ça va revenir.

Mme Boucher (Denise) : ...avec Denise, là, bien... Mais, s'il aime l'autre puis qu'il dit : Aïe! là, il fait tout le rapport, ce n'est pas une question de convention collective, ça. Dans les relations entre individus, est-ce que, parce que vous êtes libérale, vous, ça vous empêche de parler à Mme Malavoy? Ah non! je ne croirais pas. C'est dans ce sens-là. Donc, il n'y a pas de difficulté à faire en sorte que les gens se parlent puis qu'on... Moi, je pense qu'il faut toujours avoir un objectif, c'est comment on regarde les enfants puis qu'est-ce qu'on leur donne comme droits à eux, ces enfants-là. C'est ça qui doit être le centre de notre préoccupation.

Mme Charbonneau : Mais je vous arrête parce qu'il y en a déjà eu, des problèmes au niveau du préscolaire cinq ans, puis des enseignantes de l'année primaire. Puis là je ne vous parle pas de la relation parent-enseignant, j'y crois. Je ne vous parle pas du temps qu'on y met puis de l'affection qu'on peut... je vous parle du battement, je vous parle du temps du dîner, je vous parle du temps de la sieste, je vous parle plus de cet aspect-là. Et c'est sans méchanceté parce que je pense que le syndicat, ce n'est pas un virus, c'est une nécessité. C'est un regroupement, et, quand vous ne le faites pas sous le signe syndical, les gens le font sous le signe d'une association, d'une fédération, donc... Mais c'est plus dans ce principe-là où, vous l'avez bien dit, je définis une tâche. Et moi, comme représentant, je la défends, et je l'annonce, et je l'encadre, cette tâche-là. Mais, si j'apporte un principe différent dans mon monde scolaire, si j'apporte un principe CPE à l'intérieur d'un monde scolaire, est-ce que ça peut s'imaginer ou vous me dites : Écoutez, Mme Charbonneau, il n'y a pas de souci?

• (11 h 50) •

Mme Boucher (Denise) : Madame, ça peut s'imaginer, ça s'est fait dans d'autres commissions scolaires. On a eu des modèles. Des Navigateurs, il y a eu des choses extraordinaires qui ont été faites. Il y a même des techniciens en service de garde qui ont décidé d'aller faire l'aide aux devoirs pas à l'école, non... même pas dans le service de garde, directement où sont les parents, en milieu défavorisé. Ils sont allés directement dans les blocs où il y avait des familles, puis ils se sont fait un petit local, puis ils ont organisé les affaires proches. Il y a des gens qui ont de l'imagination, vous n'avez pas à vous inquiéter, et ce n'est pas les conventions collectives qui empêchent ça. Souvent, c'est peut-être les ressources financières, c'est peut-être aussi les ressources de personnes parce qu'il manque de personnel. C'est peut-être aussi... Puis là il faudra voir, là, parce que, là, on est dans un projet... Si on regarde ça, ça serait le modèle parfait, ce qui est déposé par Mme Malavoy, on peut l'espérer.

Mais, avec les compressions qu'on fait dans les commissions scolaires actuellement, comment on va faire pour aménager ces classes-là? Comment on va organiser... comment on va faire en sorte que... Est-ce qu'on va avoir un prof? Est-ce qu'on va être capable de mettre un éducateur, ou une éducatrice, ou quelqu'un du service de garde en lien avec ce professeur-là? C'est les commissions scolaires qui ont décidé de le faire. Probablement qu'ils l'ont fait parce qu'ils avaient des surplus. Qu'est-ce qu'ils vont faire quand ils vont avoir vidé leur bas de laine? La question, on peut se la poser. Alors, c'est clair que souvent, ça, ça limite l'imagination et ça permet, souvent, de faire en sorte de faire moins parce qu'on a moins.

Mme Charbonneau : Le principe de faire plus avec moins est résolu depuis quelques années, puisque, maintenant, on fait moins avec moins, vous avez raison, et l'imagination des commissions scolaires et des écoles mêmes, des milieux — parce que chaque milieu est différent, hein — est extraordinaire pour mettre en place des liens et des façons de faire qui répondent aux milieux.

Ma dernière question, elle est plus dans un souci de mettre en place, peut-être, de la meilleure façon et pour les meilleures raisons… Est-ce que je le fais... Est-ce que, tant qu'à mettre un service en place pour la clientèle défavorisée, je fais un groupe par école avec une rentrée scolaire cette année ou si je le regarde d'une façon différente... Et, la ministre le disait, elle a déjà des demandes pour avoir plus de groupes par commission scolaire parce que leur ouverture est très grande. D'autres commissions scolaires disent : Bien, les distances nous posent des difficultés. Est-ce que je regarde mon modèle de façon mur à mur ou est-ce que... Est-ce qu'on peut proposer un modèle qui s'ajuste à chaque milieu en s'assurant qu'on ne part pas avec des chevaux à grande vitesse, mais qu'on y va tranquillement dans l'implantation?

Mme Boucher (Denise) : Moi, j'ose espérer qu'on n'ira pas dans le mur-à-mur. Je pense qu'il faut prendre acte des travaux qui sont après se faire, où la question a été souvent soulevée. Il y a des commissions scolaires, ça a l'air, qui sont prêtes, eux autres, à en avoir, là, tiens... Mais est-ce que c'est vraiment des enfants en difficulté? Parce qu'il reste que... Je suis contente de voir que monsieur, il s'en est bien tiré, hein, il est rendu député, hein, d'un quartier dit défavorisé. Non, mais c'est heureux. C'est ça qu'on aimerait, c'est que... Mais, en même temps, il y a des enfants qui ont plus de difficultés parce qu'ils proviennent de milieux qui ont eu plus de difficultés. Il y a des parents qui ont des problèmes de littératie. Au Québec, il y a 46 % de la population qui ont des problèmes de littératie. Ce n'est pas rien, ça, c'est presque 50 % de la population.

Donc, il faut qu'on puisse le faire, et pas... Moi, je pense qu'il faut y aller graduellement. On nous a dit que ça serait cela, il faut regarder. Si ça ne marche pas, on change. À mon avis, il faut être prudent, il faut avoir les bonnes ressources et ne pas créer, je dirais, ne pas créer de fausses illusions.

Mme Charbonneau : Vous nous croyez prêts pour la rentrée scolaire de cette année, puisque c'est la rentrée scolaire 2013‑2014?

Mme Boucher (Denise) : Bien, j'ose espérer qu'ils auront des locaux, qu'ils auront des classes, qu'ils auront adapté ces classes-là, qu'ils auront fait les aménagements, qu'ils auront réfléchi à… pas juste une personne. Il faudra aussi que les professeurs soient en bonnes conditions, je dirais, pédagogiques pour pouvoir le faire. Je pense qu'il y a beaucoup à faire puis...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Boucher. Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions du côté de l'opposition officielle. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de cinq minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, mesdames. Merci pour votre mémoire. Je trouve ça très intéressant parce que j'étais surprise de votre position. Cela dit, j'aime les arguments que vous avancez. Du moins, vous nous expliquez des choses, et ça rejoint ce qu'on a entendu hier, d'ailleurs, des enseignantes, à l'effet, entre autres, que les techniciennes en CPE ont une formation de loin, de loin supérieure en ce qui a trait à la toute petite enfance.

Cela dit, j'aimerais vous entendre sur un point qu'on n'a pas discuté ce matin, mais qui fait partie de votre mémoire. C'est à la page 18. Entre autres, ce sont les considérations légales. Vous avez étudié le projet de loi et vous avez des préoccupations... je vais appeler ça des préoccupations légales, des inquiétudes que vous soulevez. Entre autres, vous considérez que le libellé du p.l. n° 23, bien, il donnerait, selon vous, selon votre étude, trop de pouvoirs au ministre. Pourriez-vous élaborer un petit peu?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Audet.

Mme Audet (Julie) : Je ne suis pas experte juridique, mais, en fait, ce qu'on regardait... Des fois, dans les projets de loi, il va y avoir un préambule qui explique les objectifs des changements qui sont amenés à la législation. Des fois, on va l'avoir. Dans ce cas-ci, on ne l'a pas. Mais on a aussi... On a regardé avec la Loi sur l'instruction publique et comment les conditions... Parce que, dans la loi aussi, on avait une liberté au ministre pour déterminer certaines conditions, mais ça devait passer par règlement et beaucoup par le régime pédagogique. Et, ici, on dit, dans le projet de loi, que l'on n'aura plus nécessairement à être conforme au régime pédagogique, et il n'y a rien qui détermine que les conditions, les modalités devront être fixées par règlement et que ce règlement devra être soumis à un avis du conseil supérieur. C'est ce qu'il y avait avant dans la Loi sur l'instruction publique et avec le régime pédagogique. Alors, on a l'impression qu'il y a vraiment une ouverture au niveau des conditions, qui ne vont pas… être déterminées beaucoup plus largement sans avis et sans être soumises…

Mme Roy (Montarville) : Dans quelle mesure considérez-vous que, tel que libellé, la ministre ou le ministre s'approprierait trop de pouvoirs?

Mme Boucher (Denise) : Bien, c'est des pouvoirs discrétionnaires. D'ailleurs, il pourrait décider d'ouvrir la maternelle quatre ans à toutes et à tous parce qu'il n'y a rien qui indique que c'est pour les milieux défavorisés, entre autres.

Mme Roy (Montarville) : Et que pensez-vous aussi...

Mme Boucher (Denise) : On n'en traite nulle part dans le projet de loi, de toute façon. C'est parce que nous, on le sait parce qu'on en parle, mais il n'y a rien qui le dit.

Mme Roy (Montarville) : Et également le fait, entre autres, qu'il y aura différents acteurs du milieu scolaire qui devront être interpellés pour que nous puissions...

Mme Boucher (Denise) : ...on dit : Qui vise-t-on? Qu'entend-on par acteurs du milieu scolaire? Alors là, on est complètement dans le vide. Alors, ça serait à la ministre de pouvoir vous répondre. Je pense que vous êtes près d'elle toute la journée. Alors, je vous invite à poser la question auprès de la ministre.

Mme Roy (Montarville) : Nous avions tout à l'heure les directions d'école, justement, qui étaient ici. Elles aimeraient avoir une plus grande implication dans le processus. Un peu comme vous, ils soulevaient cette remarque à l'effet qu'ils n'étaient pas inscrits dans le projet de loi tel quel. Souhaiteriez-vous également avoir plus d'implication de la part des différents intervenants et, entre autres, par exemple, les directions d'école, comme ils en ont fait le souhait?

Mme Boucher (Denise) : Bien, moi, je pense qu'il faut qu'on sache quels sont les acteurs. On pourra voir après, mais je pense que les directions d'école sont... où va se placer un... j'allais dire un CPE, vous voyez... où on va instaurer une maternelle quatre ans, je pense qu'ils doivent voir comment ils vont travailler en collaboration avec les acteurs, dont on ne sait qui ils sont.

Mme Roy (Montarville) : Et, en terminant, parce que le temps est très court, en réponse à ma collègue de la première opposition, on se demandait : Est-ce que vous pensez être physiquement prêtes pour septembre? Le temps presse, il est minuit moins cinq. Est-ce que c'est faisable? Auprès de vos membres, les gens de la CSN et ces enseignantes qui sont déjà là, à l'école, pensez-vous que c'est faisable et réaliste de penser qu'on peut ouvrir ces classes pour septembre prochain?

Mme Boucher (Denise) : Moi, je pense que, là, le mot «acteur» devient important. Il faudrait voir avec ces gens-là dans le milieu si cela est possible. Il ne faut pas forcer, et, si ce n'est pas possible dans une commission scolaire, qu'ils ne le fassent pas. Il faut que tout le monde soit prêt, il faut que tout soit aménagé et que tout soit en place pour, effectivement, que ça se fasse bien correctement et que ça ne devienne pas un échec.

Mme Roy (Montarville) : Avez-vous des échos à cet égard qu'il y a des endroits où ça ne serait pas possible?

Mme Boucher (Denise) : Non, pas du tout.

Mme Roy (Montarville) : Je vous remercie infiniment, mesdames. Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mmes Boucher et Audet. Ceci met fin à nos travaux pour cet avant-midi. Donc, je vous souhaite un bon appétit. Je vous signale également que la salle sera sécurisée, donc vous pouvez laisser vos documents sur place.

Et la commission suspend ses travaux jusqu'à après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 15 h 45)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Et nous allons poursuivre sans plus tarder les auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans.

Donc, dans un premier temps, nous recevons les gens de la Fédération des comités de parents du Québec. Bonjour.

Une voix : L'école Saint-Zotique.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oh! désolée. Désolée. Je me disais que ce n'était pas les... C'est les gens, les représentants de l'école Saint-Zotique. Donc, bienvenue à l'Assemblée nationale. Mme Brunelle, je pense que c'est vous qui allez être la porte-parole, donc je vais vous demander, dans un premier temps, de présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous allez disposer d'un temps de 10 minutes pour nous faire part de votre exposé, c'est-à-dire votre mémoire, si vous en avez déposé un. Par la suite, suivra un échange avec les membres de la commission. Donc, la parole est à vous, Mme Brunelle.

École Saint-Zotique

Mme Brunelle (Yolande) : Alors, qui m'accompagne? Alain Provost, M. Alain Provost, qui est le directeur de l'école Saint-Zotique actuellement, puisque j'étais directrice de l'école Saint-Zotique de 2007 à 2012 et que je suis moi-même, là, actuellement, superviseure de stages au préscolaire à l'UQAM; il y a Mme Caroline Boyer-Laquerre, qui est parent d'une élève de l'école Saint-Zotique et d'une élève de quatre ans de l'école Saint-Zotique; et, à ma droite, Mme Josée Crépeau, qui est adjointe au directeur général — Josée Crépeau, oui, c'est ce que j'ai dit — à la pédagogie et ressources informatiques à la CSDM. On devait avoir Mme Josée Prénoveau, une travailleuse sociale de l'école, qui a eu une urgence de dernière minute. Voilà.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait.

Mme Brunelle (Yolande) : Alors, j'y vais pour la présentation du mémoire. Donc, l'école Saint-Zotique, l'école primaire Saint-Zotique, est située à Saint-Henri, un milieu défavorisé de Montréal. C'est une école de quartier qui reçoit 200 élèves et qui offre des services aux élèves de la maternelle quatre ans à la sixième année. L'équipe est composée de 11 enseignants, de trois spécialistes et de services complémentaires. Et, de plus, il y a les services de CLSC, donc une infirmière, une travailleuse sociale et une hygiéniste dentaire qui soutiennent l'équipe.

Donc, on a d'autres services qui sont offerts par l'école, entre autres le Club des petits déjeuners, mesures alimentaires, collations et lait gratuits, Ateliers cinq épices, aide aux devoirs, étude dirigée, des cours de ballon-panier, des cours de psychomotricité pour les petits, chorale, et — c'est un service qui est offert par la caisse Desjardins — l'uniforme scolaire, et de plus, évidemment, le projet pilote de la maternelle quatre ans à temps plein, qui est financé en partie par la commission scolaire de Montréal, et le projet Coopéra.

Donc, depuis quatre ans, l'école Saint-Zotique expérimente un projet pilote de maternelle quatre ans à temps plein auprès des tout-petits de cet âge. Ce projet a été mis sur pied en septembre 2009 grâce au soutien financier de la commission scolaire de Montréal. C'est en collaboration avec une équipe de chercheurs de l'UQAM que nous avons implanté des programmes plus spécifiques, là, dans le cadre de projets et dont le but était d'offrir un service de grande qualité aux élèves qui en avaient besoin.

Il est nécessaire de le rappeler, là, qu'avant l'arrivée des services à la petite enfance, des centres de la petite enfance, les CPE, en 1998, le service de maternelle à demi-temps existait déjà. Alors, à partir de ce moment, aucune nouvelle maternelle quatre ans n'a ouvert ses portes. On croyait alors que tous les petits allaient fréquenter les CPE. Malheureusement, 14 ans plus tard, force est de constater que très peu d'enfants de milieux défavorisés fréquentent les CPE. En conséquence, l'équipe de l'école Saint-Zotique est d'accord avec l'article 461.1, qui stipule que «[la] ministre peut établir des conditions et modalités visant l'organisation, par les commissions scolaires, de services éducatifs de l'éducation préscolaire destinés à des élèves ou des catégories d'élèves âgés de moins de cinq ans». Évidemment, nous sommes d'accord avec ça.

• (15 h 50) •

Quand nous avons mis sur pied notre projet pilote d'une maternelle quatre ans à temps plein à notre école en septembre 2009, c'est parce que nous avions constaté sur le terrain que plusieurs de nos élèves n'étaient pas prêts pour l'école. Nous offrions déjà un service de maternelle à demi-temps, mais cela n'était pas suffisant pour répondre aux besoins grandissants de nos tout-petits de quatre ans. Parallèlement à notre démarche, une enquête de la Direction de santé publique démontrait la grande vulnérabilité de plus de 45 % de nos élèves quant à leur développement dans au moins un des domaines de maturité scolaire.

Rappelons que le Conseil supérieur de l'éducation s'est penché sur la question de la fréquentation des services préscolaires en 2012 et il a émis des données, il a fait des propositions que voici. Donc, propositions d'accès de qualité et de continuité des services pour les enfants en milieu défavorisé. Données du Conseil supérieur de l'éducation : il y aurait moins de 73 % des enfants de quatre ans qui fréquentent un service de garde régi ou l'école. Proposition du conseil : il estime que le gouvernement du Québec devrait se donner pour objectif que, dans cinq ans, 90 % des enfants de quatre ans du Québec fréquentent les services d'éducation et d'accueil réglementés par l'État; proposition de mesures en ce sens en insistant sur l'importance de joindre en priorité les enfants de milieux défavorisés.

Le projet de loi n° 23 est une initiative du gouvernement qui va dans le sens des recommandations du Conseil supérieur de l'éducation. En 2007, l'équipe de l'école Saint-Zotique, consciente des lacunes de son service préscolaire quatre ans, décide de l'améliorer. L'équipe agit d'abord sur la qualité structurelle en augmentant le temps de fréquentation, le faisant passer de mi-temps à temps plein. De plus, elle maintient le poste de l'éducatrice du service de garde attitrée au bloc éducatif de façon à lui permettre de travailler en classe avec l'enseignant à raison de cinq demi-journées par semaine. Cette façon de faire a pour but d'offrir un meilleur encadrement à nos élèves.

Première recommandation à la commission : l'équipe considère qu'il est essentiel de réduire le ratio, comme cela a été fait lors de la mise en place du projet pilote de l'école. Nous recommandons que le rapport adulte-enfants soit de 18 élèves pour deux adultes et qu'idéalement ceux-ci puissent prendre en charge le groupe toute la journée. C'est une formule gagnante qui a fait ses preuves à notre école.

Voulant tirer profit au maximum des 12 heures additionnelles de temps d'apprentissage hebdomadaire, l'équipe sollicite la contribution de chercheurs de l'UQAM. Ces chercheurs proposent d'implanter, en complément au programme de préscolaire de l'école québécoise, les activités éducatives dont l'efficacité est probable ou démontrée. Nous voulions agir sur la qualité du processus. C'est ainsi que, tout en continuant de privilégier l'activité spontanée et l'apprentissage par le jeu symbolique, des programmes de prévention sont mis en place pour favoriser le développement de compétences d'ordre psychomoteur, affectif, social, langagier, cognitif et méthodologique.

De plus, avec l'aide d'une spécialiste, l'équipe bonifie la qualité de l'aménagement de la salle de classe. Après quatre ans de mise en oeuvre du projet pilote — de 2009 à 2013 — l'équipe observe des progrès chez les élèves, et les résultats sont encourageants. Des évaluations régulières ont été effectuées tout au long du projet et elles ont clairement démontré les effets bénéfiques des programmes auprès de nos élèves.

Deuxième recommandation à la commission : l'équipe de l'école de Saint-Zotique considère qu'il est essentiel d'enrichir le curriculum de la maternelle quatre ans temps plein avec des programmes dont l'efficacité a fait l'objet d'une démonstration scientifique rigoureuse afin que les élèves puissent bénéficier au maximum de cette nouvelle mesure.

Enfin, à l'école Saint-Zotique, la clientèle qui fréquente notre service de la maternelle quatre ans estmajoritairement composée d'enfants n'ayant jamais fréquenté de service à la petite enfance. Toutefois, nous accueillons sans aucune discrimination tous les enfants du quartier qui viennent s'inscrire à notre école. À la maternelle quatre ans comme pour toutes les autres classes de l'école, c'est la politique d'admission de la CSDM qui s'applique. Cette façon de procéder permet une certaine mixité de la clientèle. Nous considérons que c'est une bonne façon de faire l'inscription. Donc, nous recommandons qu'il est essentiel d'appliquer la politique d'admission… Ici, on dit de la commission scolaire de Montréal, mais, de façon générale, des commissions scolaires afin d'éviter toute forme de discrimination et ainsi s'assurer de recevoir une clientèle mixte. Toutefois, cette mesure étant réservée aux quartiers défavorisés, seuls les élèves desdits quartiers pourront s'inscrire.

Le financement du projet de l'école Saint-Zotique. Finalement, l'équipe recommande que son projet pilote de maternelle quatre ans à temps plein soit reconnu officiellement et soit financé entièrement par le MELS au même titre que les six autres projets pilotes de la FAE.

Pour conclure, précisons que, depuis plusieurs années, la tendance au Québec était de promouvoir une approche axée sur la découverte et le jeu symbolique. Or, il a été démontré qu'une approche misant sur des activités explicites, systématiques tout en étant ludiques permet de réduire de façon significative le nombre d'élèves ayant des difficultés d'apprentissage ou de comportement. L'avis que vient de publier le Conseil supérieur de l'éducation, tout en réaffirmant la place du jeu, souligne que favoriser l'apprentissage actif en engageant les enfants dans l'expérimentation et le jeu n'implique pas de renoncer aux activités suggérées par l'éducatrice ou les enseignants ni à un enseignement plus explicite de certaines habiletés. Des méthodes variées doivent être mises à profit pour soutenir les différents enfants.

Compte tenu des grands besoins des élèves de milieux défavorisés et du fait que les premières années sont déterminantes pour agir sur les trajectoires de développement conduisant à la réussite éducative, il est donc gagnant de combiner les deux approches. En effet, les élèves de milieux défavorisés ont besoin des meilleures ressources disponibles afin de réussir à l'école. Il faut donc agir sur la qualité du processus. Et, finalement, il faut agir sur l'aspect structurel de la qualité, qui permettra un meilleur encadrement de ces tout-petits, et l'enseignant doit être accompagné d'une autre personne dont le rôle de soutien est primordial pour former une équipe pédagogique solide. Alors, voilà. Et, en résumé, vous avez les quatre recommandations.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mme Brunelle. Nous allons débuter leséchanges. Nous allons maintenant du côté du gouvernement. Mme la ministre, la parole est à vous pour le premier bloc d'échange. Vous avez une période de temps qui vous est allouée de 24 minutes.

Mme Malavoy : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Brunelle. Je vous salue, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. On est très heureux de vous avoir avec nous parce que vous représentez un projet qui existe bel et bien, on n'est pas dans la théorie. On peut être aussi un peu dans la théorie, mais on est d'abord et avant tout devant un projet qui existe, qui fonctionne, qui donne des résultats, donc qui peut être vu comme un modèle type de ce qu'on pourrait éventuellement vouloir implanter ailleurs. Alors, c'est très, très intéressant et important de vous avoir avec nous cet après-midi.

J'aimerais peut-être commencer par une question parce que vous voyez bien qu'il y a un débat autour de l'intérêt d'offrir ou non à des enfants de quatre ans de milieux défavorisés une maternelle à plein temps. Vous avez entendu certainement les centres de la petite enfance, qui disent : Il faudrait tout faire pour que cela se fasse à l'intérieur de notre propre cadre, nos centres de la petite enfance. Vous, vous dites : C'est une expérience qui est probante et qui se fait, donc, à l'école Saint-Zotique. Dites-moi d'abord pourquoi la maternelle mi-temps qui existe, pourquoi juge-t-on que ça n'est pas suffisant? Qu'est-ce qui fait que l'on passe du mi-temps qui existe, puis que tout le monde a l'air de… Même les centres de la petite enfance ont l'air de l'accepter, que le mi-temps existe. Qu'est-ce qui fait qu'il faut passer à du plein temps? Qu'est-ce que ça change? Qu'est-ce que ça ajoute?

• (16 heures) •

Mme Brunelle (Yolande) : D'abord, ça ajoute beaucoup de stabilité au niveau du personnel. Donc, l'enseignant, actuellement, il est accompagné de l'éducatrice du service de garde, qui... Au moment où l'école offrait un service de mi-temps, il y avait une personne, d'un côté, qui faisait le bloc éducatif, notamment l'éducatrice en service de garde, et l'enseignant, qui se promenait entre deux écoles pour venir offrir un service à un groupe a le matin et à un groupe b dans une autre école l'après-midi. Donc, cela faisait en sorte que l'enseignant se retrouvait avec un ratio de 30 enfants, finalement, au même titre que l'éducatrice, à suivre. Donc, en ramenant la maternelle quatre ans à temps plein, on se retrouve avec un intervenant, comme on le retrouve à la maternelle cinq ans. Alors, on demandait à des tout-petits de quatre ans de s'adapter, d'avoir une plus grande capacité d'adaptation que d'autres élèves à qui on ne demande pas de s'adapter à plusieurs intervenants.

Donc, on a stabilisé cet aspect-là, et ils ont fait une équipe ensemble. Donc, on a maintenant deux intervenants, puisqu'on a conservé, évidemment, le poste de l'éducatrice du service de garde. Donc, ils font une très, très belle équipe et, maintenant, ils travaillent en collaboration. Avant, ils travaillaient en silo, et, maintenant, on a une équipe formidable, là, qui offre un service de qualité et un meilleur encadrement à nos élèves. Donc, il est clair que le service à demi-temps ne répondait plus aux besoins de nos tout-petits. Et, quand on s'est vu ajouter du temps additionnel, on a voulu également profiter de ces 12 heures additionnelles par semaine pour enrichir notre programme, les activités qu'on offrait à nos tout-petits de quatre ans.

Mme Malavoy : Alors, vous introduisez tout à fait bien ma deuxième question parce que le premier volet de votre réponse, c'était au plan de l'organisation et de la référence à la stabilité que procure le modèle, donc, du plein temps. Mais, au plan du contenu, qu'est-ce que ça ajoute? Parce que ce que je comprends… enfin, que je commence à comprendre de votre intervention, c'est que ce n'est pas seulement du temps, c'est qu'aussi, ayant ce temps, on fait des choses qu'on ne peut pas faire à l'intérieur du demi-temps. J'aimerais que vous me précisiez ce que c'est que ce temps additionnel, à quoi il sert, qu'est-ce que vous appelez aussi curriculum enrichi.

Mme Brunelle (Yolande) : D'accord, Alors, quand on s'est associés à une équipe de chercheurs pour pouvoir davantage faire bénéficier les élèves de ce service, on a regardé, entre autres, les programmes qui avaient été appuyés, qui sont appuyés par la recherche, entre autres, un exemple, le programme Fluppy. Et je pourrais même céder la parole, si vous le permettez, à une maman qui nous accompagne et qui… Elle, finalement, sa petite fille, elle vit présentement les programmes qu'on a mis en place à la maternelle quatre ans, et je pense qu'elle est mieux placée que moi encore pour en parler. Alors, je lui passe la parole.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Allez-y, Mme Boyer-Laquerre.

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : O.K. Merci. Bien, en réalité, moi, ce que j'ai remarqué de Mégan, c'était l'augmentation de son autonomie et de ses compétences, puis aussi le fait qu'avec le programme Fluppy elle exprimait beaucoup mieux ses sentiments. Moi, premièrement, pour expliquer, Mégan, je l'ai gardée à la maison de sa naissance jusqu'à temps qu'elle rentre à l'école puis... C'est ça, je le sais qu'elle n'aurait pas après... Tu sais, après réflexion, je le sais qu'elle n'aurait pas été prête à faire sa maternelle cinq ans. Puis, vraiment, tu sais, des fois, elle trouve ça difficile de faire une journée complète, mais, à quelque part, tu sais, ça la prépare vraiment bien à peut-être être plus à l'écoute lorsqu'elle va commencer sa maternelle cinq ans puis être plus apte à assimiler comme toute l'information, et tout ça, là. Je pense que ça la prépare beaucoup puis, en même temps, bien, je pense que... Tu sais, après la relaxation de l'après-midi, ils ont également aussi beaucoup de stimuli. Tu sais, ils sont reposés un petit peu, puis, en même temps, bien, ils acquièrent de nouvelles compétences puis une nouvelle connaissance, là.

Mme Malavoy : Si vous permettez, je vais en profiter, puisque vous êtes là. Je trouve ça fort pertinent d'avoir un témoignage d'une maman. Les gens des centres de la petite enfance nous disent que c'est chez eux qu'une enfant comme la vôtre devrait aller, et vous, vous avez fait un autre choix. Est-ce que vous pouvez me l'expliquer?

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Bien, à vrai dire, moi, je ne voulais pas que... C'est un choix, tu sais, j'avais choisi de faire en sorte d'éduquer ma fille à la maison, tu sais, je veux dire, de lui montrer les valeurs. Je trouvais que c'était moi… c'était mon travail à moi. Ça fait que ça, c'était mon choix. C'est sûr que, par la suite, c'est difficile d'intégrer une enfant de quatre ans en service de garde lorsqu'elle n'y a jamais été puis que c'est déjà un groupe qui est déjà un petit peu… qu'ils se connaissent déjà beaucoup, tandis que, là, la maternelle quatre ans faisait en sorte qu'il y avait des enfants qui n'avaient jamais fréquenté de service de garde, donc ils vivaient un petit peu la même chose. Donc, ça leur permettait peut-être d'avoir un plus grand sentiment d'appartenance au groupe, puis je sentais que Mégan, aussi, n'était pas seule dans cette aventure-là. Donc, c'est ça. Donc, je pense que, si je l'aurais incluse à quatre ans dans un service de garde, bien, personnellement, elle se serait peut-être sentie un peu plus délaissée. Puis, tu sais, le fait qu'elle n'ait pas commencé peut-être dès l'entrée, un an à 18 mois, avec les enfants qui, eux, tu sais, sont déjà dans la routine puis dans le moule de cette éducation-là, là…

Mme Malavoy : O.K. Donc, pour vous, le fait qu'il y ait ce choix nouveau, là, autre, ça convenait tout à fait à votre situation?

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : …exact.

Mme Malavoy : Je trouve que vous l'expliquez de façon très, très intéressante. Oui?

Mme Brunelle (Yolande) : J'aimerais ajouter que les enfants qui fréquentent la maternelle — tantôt, je le disais dans le mémoire — pour la plupart, à 75 %, 80 %, depuis qu'on a mis la maternelle temps plein, même avant, sont des enfants qui n'ont jamais fréquenté les CPE. Et c'est une clientèle que l'on cible parce que ces enfants-là, effectivement, ils n'ont pas eu l'occasion de développer certaines habilités sociales en groupe ou au niveau du langage.

Je l'ai dit tantôt aussi, Direction de santé publique avait fait un portrait de nos élèves où on retrouvait des élèves qui étaient vraiment vulnérables, à 45 %, dans certains volets de la maturité scolaire. Donc, c'est aussi très important de pouvoir répondre à ces besoins-là, et l'école devient alors un facteur de protection pour ces enfants-là, puisqu'ils arrivent à l'école sans avoir fréquenté d'autres ressources qui pourraient alors développer des compétences chez les enfants ou certaines habilités, là, en tout cas. Voilà.

Mme Malavoy : Dans votre modèle, il y a deux adultes par groupe. D'abord, je vais préciser une chose, ce que je fais depuis hier, mais la moyenne pour les quatre ans, dans notre esprit, c'est 15; 18 étant un maximum, 15 étant la moyenne. Et j'ai déjà indiqué aussi qu'on pourrait autoriser des groupes de plus petit nombre, c'est-à-dire les financer comme s'ils étaient 15, O.K., pour ne pas être là à calculer est-ce qu'il en manque pour démarrer un groupe si, dans une commission scolaire, on veut pouvoir le faire.

Mais je reviens aux deux adultes par groupe. Ils ont quelle formation, ceux que vous avez? Et vous voyez ça comment pour éventuellement, donc, un modèle qui s'étendrait à plus d'enfants dans des milieux défavorisés?

Mme Brunelle (Yolande) : Bien, il est vrai que le ratio est un facteur aussi de protection pour les petits, dans le sens où si... Actuellement, on a deux adultes... Nous, actuellement, à l'école Saint-Zotique… Je dis encore nous, je ne peux pas couper le cordon. Mais, à l'école Saint-Zotique, il y a 16 élèves actuellement qui sont inscrits pour deux adultes et il y a un enseignant qui est accompagné de l'éducatrice du service de garde. Alors, pour une éducatrice de service de garde, c'est sûr qu'au niveau de la formation ce qui est demandé, c'est un secondaire V. Et on a un enseignant qui a une formation universitaire, évidemment. Donc, voilà l'équipe qui compose le groupe actuellement. Et voilà. Alors, vous me demandiez quelle était la formation des adultes, il ne s'agit pas ici de nécessairement avoir deux enseignants, mais un agent d'éducation qui peut venir soutenir l'enseignant nous apparaît une bonne chose.

Maintenant, on sait que, dans les CPE, par exemple, on a un ratio de un pour 10 enfants, un adulte pour 10 enfants. Alors, il est raisonnable de penser qu'avec 16 ou 18 enfants, si on a une équipe de deux adultes, bien, on vient de réduire également le ratio.

Mme Malavoy : Je comprends donc que ça marche bien chez vous comme ça. Je ne veux pas vous demander forcément d'extrapoler, mais je suis restée assez perplexe face au jugement que portaient les représentantes de l'association des enseignants du préscolaire, qui sont venues dire hier : On pense qu'on n'a pas la formation qu'il faut pour s'occuper d'enfants de quatre ans, et, donc, vous feriez mieux de les laisser dans les CPE.

Je sais que votre expérience n'est pas universelle, c'est une expérience… Mais, toutefois, vous avez certainement réfléchi à ça, est-ce que, pour vous, des enseignantes du préscolaire, donc qui ont une formation universitaire de préscolaire, ont une formation qui convient ou est-ce qu'on peut adapter la formation qu'elles ont à des petits enfants, donc, de quatre ans?

• (16 h 10) •

Mme Brunelle (Yolande) : Alors, écoutez, l'enseignant qui est en poste actuellement a eu un support, a eu une formation. On l'appelle la formation continue. Je pense que ça existe partout, dans toutes les commissions scolaires. Les enseignants peuvent avoir de la formation continue. Nous, avec les programmes qu'on a mis en place, les chercheurs... et l'équipe a été soutenue par ces chercheurs, donc ont eu de la formation.

Maintenant, écoutez, une formation universitaire de quatre ans... Je supervise actuellement des stages au préscolaire dans les maternelles cinq ans, et les enseignants du préscolaire font un travail exceptionnel, extraordinaire. Qu'il y ait de la place pour l'amélioration, il n'y a pas personne qui en doute, il n'y a pas personne qui est contre la vertu. Donc, écoutez, vous me voyez absolument — comment dire? — étonnée de tels propos, puisque les enseignants sont des personnes professionnelles qui reçoivent une formation.

Qu'on veuille améliorer la formation universitaire, j'en conviens, je n'ai aucun problème avec ça, il y a toujours place pour l'amélioration. Mais, si on veut comparer d'une formation dans un CPE, par exemple, où on demande une formation de… deux éducatrices qui possèdent un D.E.C. sur trois, par exemple, bien là on demande qu'il y ait deux éducatrices qui aient leur formation de technicienne, je crois, sur trois. Donc, ce n'est pas tout le monde non plus. On ne retrouve pas là une formation qui, finalement, touche l'ensemble des intervenants de la petite enfance en CPE. Donc, je pense que l'amélioration, elle peut se faire partout. Mais qu'on me dise que les enseignants... Il faudrait venir voir dans nos écoles travailler les enseignants pour comprendre qu'ils font un travail tout à fait exceptionnel et extraordinaire. Donc, écoutez, je ne comprends absolument pas la tenue de ces propos-là.

Mme Malavoy : Mon collègue a envie de participer à la discussion.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

M. Breton : Merci, Mme la Présidente. Je trouve très intéressant ce que vous amenez comme expertise, comme compétence, comme expérience. Et, ce matin, je parlais, comme député de Sainte-Marie—Saint-Jacques, de l'école Champlain, qui, à certains égards, me semble ressembler à votre réalité, et puis on parlait justement des propos tenus par des gens qui disaient : Vous savez, on pense que ce n'est pas une bonne idée, maternelle quatre ans, on serait mieux d'envoyer les enfants dans les CPE. Et puis je parlais du fait que, dans les 15 dernières années, le profil démographique des gens autour de l'école Champlain dans Sainte-Marie—Saint-Jacques est passé d'à peu près 75 % de petits enfants d'origine québécoise, blanche, francophone à 75 % de gens venant de familles immigrantes, et je parlais ce matin de familles qui viennent beaucoup du Bangladesh, d'Amérique latine, d'Afrique, d'Haïti et du Vietnam.

Et je disais aussi, d'entrée de jeu, que j'ai des amis depuis de nombreuses années originaires du Bangladesh, d'Haïti, d'Afrique et qu'il y a un aspect plus traditionnel dans la façon dont ces familles-là me semblent élever leurs enfants qui fait qu'ils veulent les garder à la maison plus longtemps. Et j'entends ce que vous avez dit et... En tout cas, corrigez-moi si je me trompe, je ne pense pas que vous veniez du Bangladesh. Non? Mais, là où je veux en venir, c'est que est-ce que, dans votre réalité, dans ce que vous avez vu comme expériences, est-ce que vous pourriez refléter un peu ce que je semble constater de ce qu'on voit à l'école Champlain, de la réalité de l'école Champlain?

M. Provost (Alain) : Regardez, moi, je peux en témoigner. Je suis à la direction de l'école Saint-Zotique depuis juillet dernier, donc je peux regarder la situation d'un oeil nouveau, et, puis, effectivement, chez nous, il y a un changement aussi au niveau de la clientèle. Bon, pour connaître un peu le milieu de l'école dont vous parlez, bon, ce n'est pas nécessairement, là, peut-être autant multiethnique chez nous, mais il y a quand même un changement, là, qui s'opère chez nous aussi. Il est évident que ces jeunes-là bénéficient beaucoup du projet qui est mis en place, là, à notre école. Si je regarde, là, uniquement, là, au niveau... Bon, vous avez noté, là, que ces familles-là ont tendance à garder les enfants peut-être un petit peu plus longtemps à la maison. Donc, on voit ces jeunes-là nous arriver, donc, avec des vulnérabilités, si je peux m'exprimer ainsi, ou des difficultés au niveau des habiletés sociales et aussi, bien sûr, au niveau des habiletés langagières. Donc, le fait qu'ils soient avec nous dès quatre ans à temps plein offre la possibilité d'un certain tampon entre le quatre ans et le cinq ans. Donc, on vise, avec cette clientèle-là dont vous parlez, mais l'ensemble, bien sûr, de notre clientèle, une certaine mise à niveau si je peux m'exprimer, là, de la sorte. Donc, c'est vraiment de préparer ces jeunes-là au fait, là, d'être vraiment, là, prêts à débuter la maternelle cinq ans, et je vous dirais que cette clientèle-là dont vous parlez est une clientèle que nous visons, là, de plus en plus. Donc, nous tentons, là, d'aller, là, chercher, là, cette clientèle-là pour qu'ils puissent, là, fréquenter, là, le service qui est offert, là, dans notre établissement.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. Provost. M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

M. Breton : Très rapidement, c'est juste... Dans le fond, est-ce que j'entends bien que, dans le fond, l'idée de la maternelle quatre ans, pour des gens issus de communautés immigrantes, d'après ce que je constate, ça semble être une chose avec laquelle ils seraient plus à l'aise qu'avec des CPE, vu la façon dont ils semblent voir l'importance de l'école?

M. Provost (Alain) : Effectivement, pour avoir travaillé en milieu défavorisé, bon, dans d'autres secteurs, là, depuis quelques...

M. Breton : …on parle d'immigrants, là.

M. Provost (Alain) : … — effectivement, milieux défavorisés, multiethniques en plus — depuis quelques années, pour eux, l'école est un symbole, là. Donc, l'école, si je peux m'exprimer, c'est important. Donc, dans leur culture, les jeunes doivent fréquenter l'école le plus rapidement possible. Souvent, ces communautés-là ont immigré au pays pour améliorer leur sort propre et améliorer le sort de leurs enfants aussi. Et, je vous dirais, moi, comme je vous dis, avec ma jeune expérience à la direction de l'école, je constate, cette année et l'an prochain, qu'il y a de plus en plus de familles qui viennent s'inscrire chez nous, de familles issues, là, de milieux multiethniques.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. Provost. Je vais céder la parole à la ministre.

Mme Malavoy : C'est une sous-question, mais que j'ai à l'esprit depuis un petit moment : Est-ce que vous pensez que cela peut également faciliter l'apprentissage de la langue française auprès de ces enfants-là? Puisque ceux qui ne fréquentent pas les centres de la petite enfance, ils arrivent en maternelle cinq ans en ayant parlé beaucoup plus leur langue maternelle avant ça, ils peuvent avoir des difficultés d'adaptation.

Mme Crépeau (Josée) : En effet. Et je vous dirais que la maternelle quatre ans, lorsqu'on est dans un milieu multiethnique, comme le mentionnait M. le député, c'est essentiellement les premières semaines, l'apprentissage du français, ce qui ne se fait pas nécessairement à la maison. Mais c'est aussi un apprentissage social pour la famille d'être dans une institution québécoise qui est formelle, là, comme l'école, alors que, parfois, ils ne sont pas en contact avec plusieurs de ces institutions-là. Donc, c'est une façon de les amener à la société québécoise.

Mais, vous avez raison, au niveau de la langue, plusieurs milieux travaillent d'abord cet aspect-là à travers le jeu, bien sûr, mais à travers certaines activités plus structurées d'apprentissage de la langue. Et je vous dirais également que ces enfants-là vont continuer à parler leur langue d'origine à la maison, et c'est fort important. Même, si les parents peuvent leur lire des contes dans leur langue d'origine, cela favorise l'apprentissage d'une deuxième langue. Et vous seriez surpris de constater, à l'école Saint-Zotique, des petits enfants qui, au mois de novembre, parlent assez couramment le français, s'expriment très, très bien et ont un vocabulaire assez riche. Parce que c'est une forme d'immersion jusqu'à un certain point d'être à plein temps avec un enseignant et une éducatrice pour travailler le français. Alors, oui, c'est un modèle extrêmement puissant pour cet aspect de la question.

Mme Malavoy : Ça va.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Crépeau. Oui, M. le député de Saint-Hyacinthe. Il vous reste environ 1 min 30 s.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Une minute? La question va être courte.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : 1 min 30 s.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Je vais poser une question courte. Bonjour, mesdames messieurs. C'est un modèle, je pense, qui est intéressant, puis je vois qu'il y a beaucoup... les gens ont été très bien encadrés ou sont très bien encadrés, avec des professionnels universitaires, et tout ça.

• (16 h 20) •

Mais ma question, c'est plus sur la sélection des étudiants. À la recommandation 3, vous mentionnez, vous autres, une mesure réservée aux quartiers défavorisés : «…seuls les élèves desdits quartiers pourront s'inscrire.» Ça veut dire, ça, qu'à l'intérieur même du quartier il n'y a pas de sélection. Ça veut dire que tu peux avoir un enfant qui est favorisé, mais qui va aller dans cette maternelle quatre ans là, alors que le projet qui est proposé, le projet de loi n° 14, c'est plus réservé aux gens qui sont dans un milieu défavorisé puis qui ne fréquentent pas les jeunes maternelles.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Brunelle, peut-être, en quelques secondes.

Mme Brunelle (Yolande) : Oui. Alors, écoutez, on a eu le témoignage de madame ici tantôt, il y a des gens qui habitent dans un quartier défavorisé qui viennent inscrire leur enfant à l'école du quartier, et nous les recevons au même titre que nous recevons tous ceux qui viennent s'inscrire. Mais, pour la plupart, il doit y avoir 80 % des élèves qui n'ont jamais fréquenté de CPE, donc…

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Merci. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée des Mille-Îles, vous avez la parole.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, cette fois-ci, de façon plus officielle. Tantôt, j'ai été taquinée un peu et je vous ai dit que j'étais payée pour critiquer. Vous avez vu que je donne l'exemple, quand je me suis assise, j'ai, tout de suite, critiqué, puis vous avez été témoin d'une démonstration peu éloquente. Je m'en excuse, Mme Brunelle, M. Provost, Mme Crépeau, Mme Caroline Laquerre.

Mme Brunelle, je vous rassure, j'ai été, pendant 10 ans de temps, commissaire scolaire, six ans de temps, présidente de commission scolaire, et je crois qu'il y a encore du sang de présidente dans mes veines. Donc, qu'il y ait encore du sang de directrice d'école dans les vôtres, ça me rassure. L'éducation, quand ça nous habite, ça ne nous lâche plus, on reste là-dedans, on aime ça. Le sujet d'aujourd'hui est fort intéressant pour ça.

Mme Boyer-Laquerre, je veux vous remercier. Je vous remercie parce que, depuis le début de cette commission, on parle d'une clientèle très ciblée, hein, on dit la clientèle défavorisée, puis le cas de l'école Saint-Zotique est ciblé. On aurait pu croire qu'il aurait été refusé facilement par les parents, dire : Non, non, je n'irai pas témoigner parce que c'est évident qu'on va me cibler avec l'image. Donc, je vous remercie d'être assise avec nous aujourd'hui. Un, vous êtes chez vous. Puis, deux, un témoignage d'un parent qui a participé au projet, je pense que ça vaut de l'or, ça vaut cher. Parce qu'on peut avoir les professionnels, on veut avoir les chercheurs, on veut avoir les commissions scolaires, on veut avoir tous les autres, mais la personne qui reçoit un service, qui a choisi d'y aller, de foncer un petit peu, j'apprécie énormément.

Donc, je prends un peu de mon temps pour pas une question, mais vous dire merci, surtout, et vous rassurer. J'ai pris sur moi d'investir dans trois REER, Joanie, Vincent et Marie-Pier, et, quand le temps de la maternelle est arrivé — cinq ans — j'ai trouvé ça dur parce que j'avais le goût de les garder encore. Et, puisque je n'étais pas au courant, comme la plupart des parents du Québec, que le préscolaire cinq ans, c'est facultatif, ce n'est pas obligatoire, bien, ils sont rentrés à l'école à cinq ans. Et je n'ai pas profité d'une maternelle quatre ans, mais pour vous dire que j'ai choisi de rester à la maison pour rester avec eux. Je comprends votre désir de ce lien-là avec votre fille.

Je vais revenir à Mme Brunelle. Votre mémoire était fort intéressant. Il l'était d'autant plus que vous avez fait un lien, une approche et un partenariat avec un système de recherche fort intéressant. Ils ont eu du financement pour le faire, et je sais que vous avez été tenace pour avoir le projet pilote. Je ne sais pas pourquoi, c'est le vent, là, les branches m'ont soufflé que vous avez été très tenace pour avoir le projet pilote. Et, en 2009, ça vous a été accordé, et c'est tant mieux parce qu'aujourd'hui ça nous permet d'avoir des gens qui l'ont vécu de façon concrète. Par contre, vous étiez aussi accompagnée par un service de recherche. De ce fait, la complicité entre les uns et les autres a été très aidante.

Ce matin, hier, on a parlé de la formation, et, vous avez raison, nos enseignants, qu'ils soient au préscolaire ou à n'importe quel niveau de l'école, publique comme privée, ils sont extraordinaires, ils sont inventifs, ils font... Avant, on disait : Ils font plus avec moins. À cette heure, ils font plus avec moins, moins, puis on est capables d'en mettre là-dessus. Comment je fais pour améliorer la formation de mes enseignants à la base — puis vous disiez un petit peu plus tôt, là, que vous aviez des groupes que vous suiviez, là, au niveau du préscolaire cinq ans — sans bousculer, sans défaire la formation que j'ai présentement? Même si j'ai une formation de quatre ans à l'université, elle est basée du cinq ans à, je vais dire, 12 ans, là, puis, après ça, je vais me chercher un peu de spécificité pour aller au secondaire. Est-il plausible d'imaginer d'aller chercher une spécificité pour le préscolaire? Parce que, là, je ne vais pas juste traiter du cinq ans, je vais traiter de ce que moi, j'appelle la petite enfance. À quatre ans, on est plus petit. Il y a une grande marge entre quatre puis cinq.

Alors, vu que vous l'avez vécu depuis 2009, puisque, maintenant, vous suivez des groupes d'enseignants au préscolaire cinq ans, quelle recommandation feriez-vous pour améliorer la formation de nos enseignants à la base pour un préscolaire ciblé quatre ans puis, je vous dirais, au mieux, quatre ans, cinq ans, puisque c'est deux préscolaires qui sont juste apposés? Puis je rajoute à ça : Comment je fais pour mieux faire mon passage — puisque vous le faites maintenant, puis on en a parlé à d'autres intervenants — le passage de préscolaire quatre ans à préscolaire cinq ans? Parce que ça va être un passage. Même si je suis toujours dans le principe de préscolaire, il y a quand même là... si j'ai un projet pilote dans une école, je vais retourner dans mon école de quartier pour mon cinq ans, il va y avoir un passage. Donc, un, sur la formation; deux, sur le passage.

Mme Brunelle (Yolande) : Bien, sur la formation, il est clair que les portes sont ouvertes, là, pour, je dirais, peaufiner ou raffiner le cours de formation initiale, là, à l'université. Bien sûr, il y a de la place et de l'ouverture pour offrir d'autres cours pour le préscolaire, et je pense que les universités sont très conscientes de ce besoin-là. Mais, un n'empêchant pas l'autre, je pense qu'il y a toute la question de la formation continue sur le terrain qui continue de s'opérer. Et, évidemment, plus on va intervenir dans la formation initiale en formation continue, mieux seront formés nos professionnels enseignants, c'est très clair. Donc, en termes de recommandation, je ne me mettrai pas à la place des universités, mais je pense qu'il y a toujours place à amélioration au niveau des cours de formation initiale, ça, bien sûr.

Maintenant, je pense, si je regarde l'Université du Québec, il y a certaines universités où le stage n'est pas obligatoire, mais, maintenant, le stage II au préscolaire est obligatoire, et c'est une formule gagnante actuellement, vous pouvez en parler à toutes les stagiaires qui doivent faire le cours, le stage. Il y en a, parfois, qui sont insécures, je dirais, ou, en tout cas, qui se sentent déstabilisées par le préscolaire et, une fois qu'elles y ont fait leur stage, vraiment, elles en tirent vraiment une grande énergie et une grande satisfaction. C'est le commentaire que je reçois de plusieurs stagiaires. Donc, ça, c'est de un.

Maintenant, il y a aussi notre équipe pédagogique du projet pilote de l'école Saint-Zotique. L'équipe a été accompagnée de chercheurs, et les chercheurs leur ont donné des formations. Je pense, par exemple, à des activités... favoriser le développement des fonctions exécutives chez les élèves, sachant que ces fonctions exécutives se développent à l'âge de quatre ans. Là, je rentre un petit peu dans les détails de formation, mais c'est tellement intéressant d'avoir l'intention pédagogique qui va amener et favoriser le développement de ces compétences-là chez nos tout-petits. Donc, ça, c'est une formation intéressante, entre autres, et la formation sur les habiletés sociales, les programmes d'habileté sociale que les intervenants ont reçue, les formations sur le développement du vocabulaire. Écoutez, c'est riche, riche, riche en formation, ce qu'ils ont reçu, et, aujourd'hui, cette équipe-là vole de ses propres ailes. Mais, évidemment, au début, elle devait s'approprier cette formation-là, mais, maintenant, ça va très, très bien, et ce sont les petits qui en bénéficient.

Maintenant, pour vous parler du passage maternelle quatre ans à cinq ans, bien, évidemment, on en parlait justement, chemin faisant vers Québec, et on se disait : Mon Dieu, les enfants qui nous arrivent directement de la maison, qui arrivent à l'école, à la maternelle quatre ans, qui sont déjà à l'école, qui se familiarisent avec le milieu, qui connaissent le service de garde, pour la plupart, l'extérieur, donc qui s'approprient le milieu et qui font des activités avec nos petits de maternelle cinq ans, on en fait même... On fait même le pont avec les amis des CPE du quartier pour la maternelle cinq ans. Donc, vraiment, on fait les passages de plusieurs façons, comme les petits de maternelle cinq ans le font vers la première année. Alors, à cet égard-là, je pense que c'est assez complet, on fait le tour du jardin.

• (16 h 30) •

Mme Charbonneau : Oui, vous avez raison, vous faites le tour pas mal complet. Au directeur d'école actuel, je me demande, est-ce que vous recevez une somme du budget de L'École montréalaise ou peut-être... Je ne sais pas si je m'adresse à la directrice adjointe dans des services ou au directeur. Je sais que Montréal a un budget tout à fait particulier. Je le sais que, cette année, il l'est tout encore plus, particulier, mais je vais plus adresser le principe d'argent reçu, et non d'argent manquant. Mais, il y a un budget qui s'appelle L'École montréalaise, vous recevez, puisque vous êtes dans un milieu défavorisé?

M. Provost (Alain) : Effectivement, nous recevons une somme, là, en lien avec L'École montréalaise. Cette somme-là n'est pas dédiée, là, exclusivement, bien sûr, là, au projet de maternelle quatre ans. Donc, il permet, là, évidemment, le financement de certains services complémentaires. Donc, si je parle de psychoéducation, d'éducation spécialisée, il est évident que nos petits de maternelle quatre ans qui sont à notre école peuvent bénéficier, là, de ces services complémentaires là. Donc, de façon indirecte, ils peuvent en bénéficier, mais on n'a pas un financement, là, exclusif, lié, là...

Mme Charbonneau : J'avais compris que c'était un choix de la commission scolaire en partenariat avec l'école de mettre en place le projet pilote, puisque le financement vient en grande partie de la commission scolaire, et vous m'avez fait découvrir quelque chose parce que le Coopéra…

Mme Brunelle (Yolande) : Oui, le projet Coopéra.

Mme Charbonneau : Je ne connaissais pas du tout, donc on a magiquement fait une recherche sur le iPad et on a vu c'était quoi. Donc, merci, puisque c'était un projet que je ne connaissais pas du tout. Et, si j'ai bien compris, il dédie des sommes à différentes écoles, et vous êtes un des bénéficiaires de ce programme-là.

M. Provost (Alain) : Effectivement.

Mme Charbonneau : Bien, bravo! Vous dites que le budget de L'École montréalaise vous permet d'avoir peut-être un peu plus de services et d'encadrement. Dites-moi si les enfants de quatre ans reçoivent des services qu'on appellera complémentaires — hein, on se comprend, c'est un vocabulaire scolaire, là — les services complémentaires se rendent jusqu'aux quatre ans ou ils commencent à cinq ans, à la première année? Ça se situe où dans le cheminement scolaire chez vous?

M. Provost (Alain) : Les services, là, se rendent, là, de quatre ans jusqu'à la sixième année. Donc, selon les...

Mme Charbonneau : C'est déjà fini?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : ...parce que, des fois, il faut que je nomme les intervenants. C'est juste pour les fins d'enregistrement.

Mme Charbonneau : Je pensais que mon temps était fini, mon coeur venait d'arrêter de battre.

M. Provost (Alain) : Non, chez nous, pour répondre à votre question, Mme Charbonneau, donc, les services sont offerts, là, bien sûr, selon les besoins des élèves, donc sont offerts du préscolaire quatre ans à la sixième année. Donc, nos élèves bénéficient des mêmes services que nos autres élèves, que ce soit en maternelle cinq ans ou au primaire. Et, aussi, on a la chance d'avoir, aussi, dans notre milieu un partenariat, là, très, très important avec le CSSS. Donc, on a la chance — il faut le dire, c'est une chance — d'avoir, là, la présence d'une infirmière à l'école, d'une hygiéniste dentaire et aussi, là, d'une travailleuse sociale, donc des intervenantes qui peuvent couvrir l'aspect — je vous dirais, un aspect qui est complémentaire — l'aspect, bon, santé, si on peut dire, hygiène, et tout ça. Donc, c'est très, très, très important.

Et on développe aussi de plus en plus, je vous dirais, là, peut-être en un service indirect, mais des partenariats avec la communauté, donc on travaille avec les organismes communautaires. Donc, ils viennent dans notre milieu pour offrir des activités à nos tout-petits. Je pense, entre autres, à un exemple, là, à chaque vendredi — c'est un exemple très, très concret — nos tout-petits vivent des activités de psychomotricité, donc, au gymnase grâce au partenariat qu'on a avec la communauté.

Mme Charbonneau : J'ai l'impression que, sur les 200 000 personnes qui nous écoutent en ce moment sur le Canal de l'Assemblée nationale — j'aime ça, en rajouter à chaque fois que je les nomme parce que... — il y a énormément de gens jaloux des annonces que vous venez de faire. Le budget que vous recevez pour l'école, est-ce que vous le connaissez par coeur, de la notion de L'École montréalaise, juste pour votre école? Est-ce que vous...

M. Provost (Alain) : Il faudrait que je vérifie les chiffres, là...

Mme Charbonneau : Il n'y a pas de souci.

M. Provost (Alain) : ...je ne voudrais pas m'avancer sur des...

Mme Charbonneau : Non, il n'y a pas de souci, il n'y a pas de souci. Ce n'était pas un piège, c'était vraiment une curiosité. Parce que ce n'est pas quelque chose qui existe partout au Québec, c'est vraiment ciblé à Montréal, et il y a eu une belle défense de faite pour cette clientèle-là, défavorisée. Par contre, il y a toujours un regard qui est porté sur les gens défavorisés de Montréal et le reste du Québec. Mais, en même temps, je comprends que vous en bénéficiez et que ça profite à l'ensemble des enfants de la circonscription de votre école.

Madame, tantôt, on vous a demandé pourquoi. Moi, je veux savoir comment. Vous étiez à la maison, vous aviez une belle relation, vous étiez... Il y avait une belle stabilité entre vous et votre fille, et là, tout d'un coup, l'idée de l'école. Comment elle est venue? Est-ce qu'on vous a approchée? Est-ce que c'est un truc dans le journal? Comment ça s'est passé?

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Non, en réalité, simplement, j'ai vérifié à l'école de mon quartier, puis, finalement, on m'a dit qu'il y avait la maternelle quatre ans.

Mme Charbonneau : Ah! O.K.

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Je veux dire, je me préparais pour la maternelle cinq ans, mais j'avais toujours un doute à l'idée de garder Mégan à la maison. Je me disais : Tu sais, les enfants vont tous en milieu de service de garde, pratiquement. Donc, tu sais, ça serait peut-être un cadeau que je lui ferais de l'inscrire à l'école en maternelle quatre ans pour lui permettre, justement, d'être plus à l'aise lors de son entrée scolaire. Puis, finalement, j'ai remarqué que c'est un vrai cadeau que je lui avais fait parce que, veux veux pas, à la maison c'est un ratio — j'ai deux enfants — donc, un pour deux, tu sais. Mais, veux veux pas, Mégan, elle n'était pas habituée avec l'attente, elle n'était pas habituée, tu sais, elle avait tout tout de suite. Aussi, moi, j'étais... Tu sais, on est parent, ça ne vient pas avec un guide, là. Donc, veux veux pas, tu sais, il y avait des états d'âme, des fois qu'elle répondait avec beaucoup de frustration, puis j'essayais de la comprendre, et tout ça.

Puis, réellement, vraiment, à l'école Saint-Zotique, j'ai eu les ressources pour m'aider, justement, à travers ça, pour l'aider, elle aussi, pour qu'elle soit bien dans sa peau, et tout, puis, vraiment, je peux juste dire un gros merci. Puis aussi je trouve que son professeur actuel, il laisse la place aux parents aussi. Quand on a des inquiétudes, bien, j'ai juste à lui demander, puis il va me céduler un temps pour qu'on ait une discussion sur différents aspects. Puis, finalement, au départ, j'avais un doute, puis aujourd'hui, pour mon garçon de deux ans, c'est clair que la maternelle quatre ans...

Mme Charbonneau : C'est ça. Il est inscrit depuis ce temps-là, c'est ça.

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Exact, c'est ça.

Mme Charbonneau : Je trouve ça intéressant que c'est vous qui avez fait les premiers pas, et non le contraire, puis, en même temps, d'autant plus intéressant que… Ce n'est pas parce qu'on est dans un milieu défavorisé que les choix qu'on fait sont rattachés à ça, les choix qu'on fait sont des valeurs qui nous sont personnelles. Et je trouve ça d'autant plus intéressant que vous nous parlez plus de la faiblesse, peut-être, sur l'aspect social, hein? Elle n'était pas habituée d'attendre, elle avait juste un frère ou une soeur. Tu sais, elle n'avait pas une grosse gang, comme on dirait chez nous, une grosse gang alentour d'elle. Donc, le choix que vous avez fait est venu... a fait un complément, dans le fond, dans tout le travail que vous avez fait de votre côté.

Il y a eu des réactions chez Mégan au niveau de l'école ou... Attendez, j'en ai une autre. Parce que mon temps file à une vitesse incroyable, je veux savoir votre implication. Parce que Saint-Zotique, c'est notre modèle, hein, c'est le modèle qu'on a en tête en ce moment, et on a aussi Passe-Partout. Passe-Partout, ça se passe à l'extérieur de Montréal, c'est un autre contexte. La place du parent dans Passe-Partout, je la connais bien. Je la connais puis je trouve que c'est extraordinaire. Je connais moins la place du parent dans le programme de Saint-Zotique, et vous êtes notre parent. Donc, allez-y, dites-moi la place que vous aviez puis comment elle était organisée.

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Bien, parfait. Donc, c'est sûr qu'avec le programme Fluppy, c'est sûr que ça intègre avec des ateliers parents-enfants, tout ça. Puis également, aussi, Mégan nous ramène son Duo-Tang aux deux, trois semaines avec des nouvelles règles qu'elle a apprises, et tout ça. Donc, ça nous permet, nous, en tant que parents, de vraiment voir un peu son apprentissage puis d'appliquer aussi ces règles-là qu'elle a apprises.

Puis je dirais que, vraiment, je reste vraiment surprise de voir à quel point les tout-petits de quatre ans sont très, très autonomes, puis, je veux dire, ce n'est pas un fardeau, là, pour eux d'aller à l'école, là. Ils apprennent par le jeu également. Donc, ça, c'est sûr que...

Une voix :

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Exact. Donc, ça, pour moi, c'était super important de... parce que j'avais peur. À quelque part, c'est sûr qu'au début ma réticence, en l'inscrivant à la maternelle quatre ans, c'était ça, c'est que j'avais peur que ce soit peut-être un peu rigide. Puis finalement, au contraire, là, moi, je l'ai vue évoluer. Justement, j'ai vu des petits bouts d'un petit court métrage qui a été fait dans la classe, puis je vois vraiment Mégan en pleine action, en pleine capacité de ses moyens, puis, vraiment, j'en suis juste fière. Puis, je veux dire, c'est sûr, je ne dis pas… Elle a quatre ans, c'est sûr qu'elle vit des moments où c'est que, des fois, c'est plus difficile, tu sais, mais je pense que nous-mêmes, en tant que travailleurs, des fois on trouve ça difficile. Donc, c'est ça. Mais, non, vraiment, c'est un beau cadeau, je trouve. Puis moi, je suis juste favorable envers ça.

• (16 h 40) •

Mme Charbonneau : Je vous rassure, s'il y avait des guides... D'ailleurs, il y a plein de gens qui ont écrit des livres, hein, sur les enfants, l'apprentissage, puis, à chaque fois qu'on les lit, comme parents à la maison, on réalise que, ah! elle n'est pas rendue là, puis, ah! elle a dépassé ça, puis... Alors, je sais, pour vous avoir rencontrée aujourd'hui, que Mégan va avoir un parent fier d'elle toute sa vie. Juste dans votre regard, on le sait. Quand vous dites son nom, il y a quelque chose qui s'allume. Donc, bravo! Mais votre relation avec l'école, elle ne passe pas juste par le Duo-Tang, rassurez-moi.

Mme Boyer-Laquerre (Caroline) : Non, non, non, pas du tout. Je veux dire, ça passe également par le fait qu'on a une bonne communication avec le personnel de l'école. On a également une bonne communication avec le professeur. Tu sais, je veux dire, le professeur, là, il nous dit, à toutes les fois que les petits enfants sortent de l'école : Bon, bien, bye, Mégan. Bye, Mathis. Oui, ça a super bien été. Ah! non, ça, ça a été un petit peu plus difficile. Puis, en même temps, je sais que, dans les services de garde, ils ont l'agenda avec les communications, et tout ça. Bien, c'est la même chose en milieu scolaire, je veux dire, moi puis le professeur, on se fait des échanges par l'entremise de ça, mais beaucoup aussi par le verbal, là, M. Philippe est très présent.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 5 min 30 s.

Mme Roy (Montarville) : Merci, Mme la Présidente. Avant d'aller plus loin, j'aurais une demande particulière, si je peux dire, à faire à cette commission. Vous savez, Mme la Présidente, qu'il y a un débat actuellement qui se déroule sur le projet de loi n° 14 au salon bleu, je devrai m'y rendre à mon tour, le moment venu. Alors, je demande le consentement de cette commission parlementaire pour que mon collègue le député de Blainville, M. Daniel Ratthé, puisse se joindre à la séance, le moment venu, et, si c'est le temps de poser les questions, qu'il puisse le faire.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : D'accord. Ce que nous allons faire, Mme la députée de Montarville, c'est que... On a suspendu le temps qui vous était alloué. Vous allez pouvoir utiliser votre temps de 5 min 30 s. Par la suite, vous pourrez vaquer à vos occupations, et, quand le député de Blainville se joindra ici, à la commission, nous demanderons consentement pour qu'il puisse participer.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Puis c'est pour vous avertir que ça peut survenir à tout moment aux alentours de 5 h 15.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait.

Mme Roy (Montarville) : Je vous remercie beaucoup. Cela dit, bonjour. Excusez-moi pour ce petit aparté. Mesdames, monsieur, merci. Merci pour votre mémoire. On entend parler de vous depuis hier. Alors, vous êtes l'école modèle. J'aimerais vous entendre sur votre mémoire. À la page 10, vous dites : «…à l'école Saint-Zotique, la clientèle qui fréquente notre service de [...] maternelle quatre ans est [en majorité] composée — essentiellement — d'enfants n'ayant jamais fréquenté de service à la petite enfance — ce que souhaite la ministre. Toutefois, nous accueillons sans aucune discrimination tous les enfants du quartier qui viennent s'inscrire à [l'école].» Alors, si je comprends bien, ce n'est pas uniquement que des enfants qui viennent de milieux défavorisés si on dit qu'on accueille tous les enfants. Il y a peut-être des enfants qui ne viennent pas de milieux défavorisés que vous accueillez, peut-être. Je pose la question. Et croyez-vous que cette mixité-là est, justement, importante au succès de votre maternelle quatre ans?

Mme Brunelle (Yolande) : Alors, pour la première question, en ce qui concerne la première question, nous sommes... c'est-à-dire que l'école Saint-Zotique est située dans un milieu défavorisé. Donc, l'école Saint-Zotique a un indice de défavorisation 10, ce qui est le plus haut indice de défavorisation. Donc, tous les enfants qui habitent le quartier, que ce soit Mme Goyer-Laquerre, que ce soit madame X, Y ou monsieur X, Y ou Z, tous ces gens-là ont accès à une école de quartier qui s'appelle l'école Saint-Zotique. Le quartier est défavorisé, et l'école est défavorisée. Mais tout le monde peut venir s'inscrire à son école de quartier, ce qui fait que oui, on a une clientèle qui, parfois, est mixte, dans la mesure où il peut y avoir des parents plus, je dirais... Comment dire? On a des parents...

Une voix : ...

Mme Brunelle (Yolande) : Pardon?

Une voix : Qui ont un meilleur revenu.

Mme Brunelle (Yolande) : Oui, qui ont un meilleur revenu, par exemple, ou qui ont plus d'instruction, ou ont... et d'autres parents qui ont un moindre revenu, un revenu inférieur, ou on peut avoir une maman monoparentale, ou... Et ces gens-là se retrouvent à leur école de quartier, bien sûr. Donc, on ne va pas cibler un enfant particulier. Est-ce que mon enfant a droit à la maternelle quatre ans? Votre enfant a droit à la maternelle quatre ans s'il habite dans le quartier défavorisé. Par contre…

Mme Roy (Montarville) : Parfait.

Mme Brunelle (Yolande) : Excusez-moi.

Mme Roy (Montarville) : Oui, allez-y, poursuivez.

Mme Brunelle (Yolande) : Je voulais juste ajouter que, par contre, si un parent d'un autre quartier plus favorisé, par exemple, qui habite à Westmount, qui aimerait venir s'inscrire à l'école Saint-Zotique, il ne pourrait pas, puisque ce service-là n'est pas offert dans un milieu plus favorisé. Voilà.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Pour que votre projet pilote réussisse, puisque vous êtes la démonstration que ça réussit, est-ce que vous avez dû être mieux équipés, mieux organisés, arranger de façon particulière ou aménager de façon particulière ces locaux pour les maternelles quatre ans?

Mme Brunelle (Yolande) : En fait, on a été accompagnés d'une spécialiste de l'aménagement au niveau de la qualité de l'aménagement du local. On avait déjà un local qui correspond aux normes habituelles d'un local de classe de maternelle, soit quatre ans ou cinq ans. Alors, déjà, on avait des petites installations sanitaires ou des lavabos à la hauteur des enfants qui correspondent aux normes ministérielles, d'ailleurs, et un vestiaire attenant, une sortie... même une sortie unique ou, en tout cas, qui appartient au préscolaire, à la maternelle. Et, pour ce qui est de l'achat, eh bien, là, oui, on eu un soutien spécial, je dirais, de la commission scolaire de Montréal pour pouvoir acheter, disons, des jeux nouveaux, ou aménager, ou améliorer la qualité des jeux qu'on offrait à nos élèves.

Mme Roy (Montarville) : Et vous croyez que ces ajouts et cet équipement, cet ajout et aussi ce personnel, puisque vous aviez des chercheurs avec vous, ont fait le succès du projet pilote en question?

Mme Brunelle (Yolande) : Absolument. C'est ce qui a permis, je dirais, d'avoir un service de qualité, parce qu'on est intervenus autant sur le ratio, autant sur l'aménagement que sur le contenu des activités pédagogiques qu'on offre à nos tout-petits.

Mme Roy (Montarville) : ...l'Association de l'éducation préscolaire, qui rendait à César ce qui appartient à César et qui disait que votre succès, également, était dû en partie à toutes ces mesures que vous avez mises en place pour réussir. Mais, maintenant, je vais extrapoler, pensez-vous que les autres écoles, les commissions scolaires pourront atteindre votre niveau de qualité sur une si courte période? On a un quatre mois — il est minuit moins cinq — pour pouvoir ouvrir ce...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Désolée, Mme la députée de Montarville, je vais peut-être vous permettre...

Mme Roy (Montarville) : Elle était bonne, cette question.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je vais peut-être permettre quelques secondes. Peut-être que, Mme Brunelle, si vous voulez répondre par oui ou par non à la question de la députée. Malheureusement, le temps file.

Mme Brunelle (Yolande) : Bien, je veux juste ajouter que, oui, ce sont des conditions qui permettent une réussite d'un projet.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mesdames, monsieur, merci beaucoup.

Et je demande présentement à la Fédération des comités de parents du Québec de prendre place, et nous allons suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 48)

(Reprise à 16 h 51)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Madame messieurs, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je présume que ce sera M. Rioux, qui est président, qui va être le porte-parole de la Fédération des comités de parents du Québec. Vous allez disposer d'un temps de 10 minutes pour nous faire part de votre mémoire.Par la suite, il y aura un échange qui suivra avec les parlementaires. Donc, sans plus tarder, M. Rioux, la parole est à vous.

Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ)

M. Rioux (Gaston) : Tout d'abord, je vais présenter les personnes qui m'accompagnent. J'ai, à droite, M. Marc Charland, qui est notre directeur général; à mon extrême droite, M. Ian Renaud-Lauzé, et, à ma droite,Mme Nathalie Chabot, nos deux professionnels en recherche et développement à la Fédération des comités de parents. On a presque la moitié de notre équipe ici aujourd'hui, une équipe extraordinaire, je vous dirais, en passant.

Mme la ministre, Mme la Présidente, mesdames et messieurs, élus de l'Assemblée nationale, d'abord un court rappel. La Fédération des comités de parents du Québec, qui existe depuis 1974, défend les droits et intérêts des parents des élèves des écoles publiques, préscolaires, primaires et secondaires. C'est plus de 18 000 parents engagés dans les structures scolaires.

D'entrée de jeu, la fédération salue la volonté gouvernementale de mettre en place des maternelles quatre ans en milieu défavorisé. Nous jugeons que ce développement s'inscrit en parfait accord avec le récent avis du Conseil supérieur de l'éducation. De plus, nous estimons que la création de groupes de maternelle, parallèlement avec les annonces gouvernementales récentes au sujet de l'ajout de nouvelles places dans le réseau des centres de la petite enfance et des services de garde subventionnés, vient améliorer l'offre de services éducatifs de qualité destinés aux enfants de quatre ans. La diversité et la complémentarité des services éducatifs de qualité permettent de répondre aux besoins variés des familles québécoises. Toutefois, nous sommes conscients que le nouveau service mis en place s'adresse à une population qui, actuellement, utilise très peu les services éducatifs. Il est donc important de faire preuve de souplesse, de tact et de bonne volonté pour le rendre attrayant et rassurant aux yeux des parents. Nous espérons sincèrement que ces nouvelles classes donneront le goût de l'école à ces enfants en leur faisant vivre des réussites et en leur permettant de développer un bagage d'expériences positives. De plus, les activités prévues pour les parents devraient permettre de tisser des liens de confiance avec leur école et le système d'éducation en général.

Notre exposé se divise en quatre points ou aspects du projet de loi. Premier point. Actuellement, l'enfant de quatre ans qui reçoit des services d'éducation préscolaire n'est pas reconnu comme étant un élève en vertu de l'article 1 de la Loi d'instruction publique, puisque l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est fixé à cinq ans à la date déterminée dans le régime pédagogique. Ainsi, son droit de recevoir des services éducatifs, tout comme des services complémentaires et particuliers, n'est pas reconnu. Cette situation inquiète les parents. On pourrait, par exemple, imaginer que, dans certains cas, l'école pourrait prendre la décision de retourner chez lui un enfant ou de cesser de lui offrir les services d'éducation préscolaire s'il est jugé représenter une charge trop grande en raison de certaines difficultés.

Il apparaît donc primordial de préciser, avant toute chose, le statut de l'enfant de quatre ans afin qu'il devienne un élève au même titre que les autres lorsqu'il est admis à l'éducation préscolaire et qu'il acquière ainsi le droit à l'éducation et à tous les services qui s'y rattachent en modifiant en ce sens l'article 1 de la loi. Il semble important de préciser que nous ne parlons pas ici d'un droit accordé a priori aux enfants de quatre ans, mais plutôt d'un droit qui découle de l'admission à l'éducation préscolaire d'un enfant de quatre ans. Ce faisant, l'obtention d'un statut d'élève reconnu à l'enfant entraînera, naturellement, pour le parent un statut de parent d'élève, ce qui lui permettra d'acquérir les droits et les responsabilités dévolues aux parents par la loi.

Deuxième point. Le conseil d'établissement s'avère au centre des décisions de l'école sur nombre d'aspects, qu'ils soient reliés aux services éducatifs, extrascolaires ou aux ressources matérielles et budgétaires. Depuis la création des conseils d'établissement en 1998, on retrouve la volonté que le développement de l'école et l'atteinte des objectifs de réussite soient une responsabilité collective. En ajoutant de la manière prévue ce nouveau service éducatif à l'école, les trois nouveaux articles du projet de loi respectent-ils cette volonté? À notre avis, on a oublié les conseils d'établissement. Les parents considèrent comme essentiel que la mise en place des classes de maternelle quatre ans s'effectue en assurant le respect et l'autonomie des milieux. Le conseil d'établissement doit être mis à contribution, et ce, dès le début du processus, ce qui ne peut que favoriser la mobilisation de tous autour de ce projet et augmenter les chances de succès. Le conseil d'établissement pourrait être appelé à se prononcer sur les modalités de mise en place de maternelles pour les enfants de quatre ans, notamment sur les approbations de partenariat avec des organismes de la communauté pour divers aspects de développement et de services destinés aux enfants et aux parents.

Par ailleurs, parmi les rôles et responsabilités du conseil d'établissement, plusieurs concernent l'application de dispositions du régime pédagogique. Dans la mesure où les conditions d'admission des élèves de moins de cinq ans à des services d'éducation préscolaire ainsi que la définition de ces services sont précisées dans le régime pédagogique, la fédération n'adhère pas a priori à l'idée d'inclure un pouvoir d'exception permanent au ministre en lui permettant d'établir des conditions et modalités différentes de celles prévues par le régime pédagogique. En fait, cette réticence de la fédération découle d'un double questionnement : Est-ce que l'établissement de conditions et modalités différentes de celles prévues au régime pédagogique pourrait faire en sorte que ce service éducatif demeure une exception et, par conséquent,ne soit pas reconnu et traité au même titre que les autres services éducatifs de l'école? Cela peut-il avoir pour effet de priver le conseil d'établissement de la possibilité d'exercer les fonctions et pouvoirs qui lui sont dévolus par la loi?

Troisième point. Les nouveaux articles 224.1 et 461.1 donnent à la commission scolaire la responsabilité d'organiser, selon les conditions et modalités fixées par le ministre, des activités ou des services destinés aux parents des enfants ou des catégories d'enfants âgés de moins de cinq ans. Cet accompagnement représente une belle innovation de ce projet. La fédération s'en réjouit et va même jusqu'à proposer que le ministre dispose d'un pouvoir discrétionnaire plus large afin qu'éventuellement ces dispositions puissent s'appliquer à d'autres parents que ceux d'enfants âgés de quatre ans. À ce titre, la fédération estime que des ponts importants avec les parents doivent être créés et entretenus en portant une attention particulière à l'approche utilisée, qui doit être appropriée, positive et non stigmatisante. On peut, en effet, raisonnablement penser que le rapport du parent à l'école est teinté de sa propre expérience scolaire, qui, elle, peut s'être avérée négative. De plus, ces ponts doivent favoriser la concertation avec les pairs et la communauté en diversifiant les moyens utilisés pour les créer et les entretenir. En ce sens, il apparaît tout à fait pertinent que les membres des comités de parents puissent être consultés à propos de ces activités et services. Le comité de parents est, en effet, le lieu central de consultation des parents au sein de la commission scolaire, et l'expertise développée en son sein a tout avantage à être mise à profit.

Quatrième point. La fédération est consciente que ce projet de loi ne peut inclure toutes les modalités entourant ce qui se vivra effectivement dans les écoles qui accueilleront ces maternelles mais ne saurait terminer son avis sans exprimer les besoins et souhaits des parents à cet égard. Pour les parents, il est important de s'assurer que les nouvelles ressources nécessaires soient présentes pour assurer un encadrement et un soutien adéquat aux enfants afin qu'ils puissent se développer sur tous les plans. Il faut, notamment, assurer une stabilité des relations avec les adultes significatifs de l'école et les choisir avec grand soin, assurer un niveau de sécurité adéquat tout au long de la journée de l'enfant, s'assurer que les coûts associés à la fréquentation de la maternelle ne soient pas un frein à leur accessibilité pour les familles, s'assurer que les coûts d'infrastructures et de fonctionnement associés à la mise en oeuvre des maternelles n'affectent pas les services déjà existants, assurer une équité dans les choix des milieux et des enfants qui auront accès à ce service éducatif et, enfin, s'assurer que des aménagements soient possibles pour répondre aux demandes des familles.

C'était là l'ensemble de nos commentaires. Nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions, et j'aimerais aussi remercier la commission de nous avoir invités pour pouvoir exposer le point de vue des parents. Merci.

• (17 heures) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Rioux. Nous allons débuter les échanges. Mme la ministre, vous avez la parole pour un temps de 24 minutes.

Mme Malavoy : Merci, Mme la Présidente. M. Rioux, bonjour. Je salue également les personnes qui vous accompagnent, et merci d'être fidèlement au rendez-vous quand on parle de projets concernant nos enfants.

Je comprends donc que vous êtes absolument à l'aise avec l'idée que nous allions de l'avant avec ce projet de loi. Je voudrais préciser un aspect puis vous entendre sur cet aspect-là. On comprend bien qu'il s'agit de services offerts, dans notre esprit, là, à des enfants de quatre ans de milieux défavorisés et dont nous pensons qu'ils ne font pas affaire avec les services de garde, généralement pour des questions de choix de parents. Ce n'est pas absolument tranché, mais, de façon générale, on pense, nous, au 27 % d'enfants de quatre ans qui ne bénéficient pas en ce moment, d'après l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, de services d'accueil ou d'intégration et, donc, on pense à des enfants pour lesquels c'est comme la porte d'entrée parce qu'ils n'utiliseront pas l'autre. Je voudrais avoir votre avis là-dessus et si vous percevez bien qu'on ajoute quelque chose pour ces enfants-là particulièrement.

M. Rioux (Gaston) : Oui, effectivement, pour nous, il s'agit d'un outil supplémentaire qui s'ajoute aux CPE, qui s'ajoute au programme Passe-Partout, qui s'ajoute aux maternelles quatre ans. Ce qu'on veut, finalement, c'est d'être en mesure d'aller chercher ces 27 % d'enfants là qui n'ont pas accès présentement ou qui n'ont pas pu prendre accès présentement à ce qui leur est offert. Puis je pense que c'est là le défi, un défi majeur et important, parce que ces familles-là ont sans doute des raisons, des bonnes raisons, qui sont différentes d'une famille à l'autre, d'un milieu à l'autre, pour ne pas avoir déjà utilisé ces services-là. Donc, le défi pour nous, les parents, c'est d'avoir les mesures, d'avoir les moyens nécessaires pour aller chercher ce 27 % là ou 90 %, comme dirait le Conseil supérieur de l'éducation, au niveau de l'ensemble des familles québécoises. Je pense que c'est un défi important, et nous croyons que, justement, la maternelle quatre ans peut être un de ces outils-là.

Mme Malavoy : En même temps, vous dites, M. Rioux, que vous voulez qu'on fasse attention pour avoir des groupes qui ne soient pas trop homogènes. Alors, j'essaie de concilier, là, des enfants, donc, provenant de milieux défavorisés… On comprend bien que «défavorisés», c'est un indice, hein, c'est un indice qui combine la scolarisation de la mère et le revenu familial. Ils peuvent être favorisés de bien d'autres points de vue, mais, de ces points de vue là, de cet indice-là, selon cet indice, on considère que ces enfants sont de milieux défavorisés. Donc, obligatoirement, si on vise les enfants de cette nature, il y a une certaine homogénéité par rapport, mettons, à un centre de la petite enfance, qui, lui, n'a pas à se préoccuper d'indices de telle manière. Est-ce que vous pensez que c'est quand même faisable? Ou, en tout cas, quelle précision vous mettriez par rapport à cette question d'homogénéité pour que je comprenne bien votre point de vue?

M. Rioux (Gaston) : Je vais peut-être mentionner deux points, mais mes partenaires ici pourront compléter au besoin. Je pense que ce qui base notre préoccupation, c'est qu'entre autres il est reconnu par la recherche que l'hétérogénéitédes classes est un facteur améliorant la réussite scolaire de l'ensemble des groupes. Ça, je pense que c'est un point important.

Et puis ce qu'on veut éviter, c'est la stigmatisation aussi des enfants, de dire : Bon, c'est des enfants de milieux défavorisés, ou des enfants pauvres, ou qui ont des difficultés déjà. On veut, dans le fond, qu'à l'intérieur d'un milieu coté 9 et 10… Il y a quand même des familles plus ou moins défavorisées. C'est, dans le fond, de ne pas exclure d'enfants de ce milieu-là qui voudraient avoir accès à la maternelle quatre ans.

Mme Malavoy : Reprenez ça. Vous dites de ne pas exclure...

M. Rioux (Gaston) : Des enfants du milieu 9, 10, si vous voulez, de défavorisation 9, 10, qui n'ont pas nécessairement des problèmes particuliers, qui n'ont pas des problèmes, entre guillemets, de pauvreté ou tout autre problème sociétal, mais… dans le fond, qu'on ne doit pas discriminer ces enfants-là pour les entrer dans un groupe donné de maternelle quatre ans.

Mme Malavoy : Il y a là un exercice, là, je le dis tout de suite, là, qui n'est pas simple pour nous, mais je pense qu'on est là pour accueillir les questionnements puis, ensuite, trouver les réponses, là. Parce que le projet de loi, on en convient, c'est un projet de loi pour donner les pouvoirs de faire cela, mais le projet de loi ne s'appelle pas «mise sur pied de maternelles quatre ans pour les enfants de milieux défavorisés», il est beaucoup plus, je dirais… C'est un cadre beaucoup plus large. Donc, il faudra qu'on puisse répondre à toutes ces questions-là tout en gardant le cap sur le fait qu'il s'agit d'une approche qui est spécialement conçue pour des enfants de milieux défavorisés et en complémentarité avec les centres de la petite enfance. Je comprends que vous les voyez aussi comme ça, et non pas en concurrence, vous voyez aussi en complémentarité…

M. Rioux (Gaston) : Oui. Puis je vais laisser M. Ian...

M. Renaud-Lauzé (Ian) : Pour préciser, je crois que l'important, c'est que la classe représente le milieu. Il ne faut pas que ce soit une classe qui représente les plus… d'un bord ou de l'autre du milieu. Le danger, justement, c'est de faire une classe spécialisée — on a des classes spécialisées à d'autres niveaux — dès la maternelle quatre ans temps plein. Il faut vraiment représenter l'ensemble du milieu. Et, si on cible bien les milieux prioritaires, je crois que vous allez atteindre vos objectifs. Donc, pour nous, c'est vraiment… l'important, c'est que c'est une classe hétérogène par rapport au milieu ciblé.

Mme Malavoy : Le milieu ciblé étant un milieu défavorisé.

M. Renaud-Lauzé (Ian) : C'est cela.

Mme Malavoy : O.K. Parce qu'on se comprend bien qu'il ne s'agit pas, contrairement à ce qu'était le cas de la maternelle cinq ans, qui, elle, tout en restant sur une base volontaire, a quand même eu comme résultat que tout le monde y va, à peu près, presque tous les enfants y vont… Mais, dans ce cas-ci, moi, je le redis encore, on souhaite que les CPE continuent leur vocation, continuent d'accueillir beaucoup d'enfants, comme ils le font, jusqu'à l'âge de la maternelle cinq ans puis, en même temps, on veut ajouter quelque chose pour les enfants qui ne suivent pas ce cheminement-là et dont les parents ne font pas ce choix pour un grand nombre de raisons. Mais je comprends votre préoccupation, et elle répond à ce danger, qu'on nous a manifesté déjà hier, de dire : Attention à ne pas faire un ghetto, que des enfants ne portent pas eux-mêmes personnellement une étiquette un peu avec l'image des classes spéciales, là, dont vous parlez. Je comprends bien votre point de vue de ce point de vue là. O.K.

Autre question, vous parlez des ressources qui sont nécessaires, vous évoquez les ressources nécessaires pour l'encadrement et le soutien. Je rappelle que, dans notre esprit, ce sont des groupes, en moyenne, de 15 enfants; maximum, 18. Et on pourra en autoriser à moins de 15, c'est-à-dire on pourra financer un groupe pour une école, même s'ils n'atteignent pas 15. Mais, quand vous parlez de ressources nécessaires pour l'encadrement et le soutien, vous pensez à quoi plus précisément? Vous souhaitez qu'on offre quoi? Ou est-ce que vous avez détaillé... Pouvez-vous détailler un peu plus vos préoccupations de ce point de vue là?

M. Rioux (Gaston) : Je vais laisser M. Charland répondre à la question.

• (17 h 10) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Charland, allez-y.

M. Charland (Marc) : Lorsqu'il est question de ressources, particulièrement de ressources humaines, je pense qu'il y a des expériences qui ont été faites en Ontario, il y a des expériences qui sont actuellement réalisées — et l'école Saint-Zotique en était un autre exemple — il y a des projets pilotes qui sont effectués au sein d'écoles avec des enseignants de la FAE où on démontre toute une grande diversité de personnes qui peuvent accompagner. Mais le point principal, c'est bien de se rappeler que deux adultes, c'est une force. Et les projets de la FAE montrent — en tout cas, de ce que moi, j'en ai compris jusqu'à maintenant — que, lorsqu'il y a un deuxième adulte, c'est une force, c'est un plus. Et non pas juste un plus additif, mais on tombe dans la synergie des approches, et c'est un grand plus. L'Ontario, nos voisins immédiats, ont aussi deux adultes en classe pour les maternelles quatre ans. Donc, c'est aussi un point.

Maintenant, quelle est l'identité de cette personne-là? Est-ce que c'est quelqu'un qui est un travailleur social? Est-ce que c'est quelqu'un qui vient du service de garde? Est-ce que c'est quelqu'un qui provient d'ailleurs? Je pense que la diversité des approches à l'heure actuelle, particulièrement dans les projets pilotes de la FAE, montre qu'il y a bien des choses qui sont possibles et qui sont positives.

Mme Malavoy : D'accord. Donc, là encore, il y a des choses auxquelles on devra répondre. Je dis juste, en passant, qu'en Ontario, c'est vrai, ils sont deux, mais, en fait, ils ont comme deux classes, ils ont 26 enfants. Donc, ils sont deux, mais pas deux pour 15, ils sont deux pour 26... C'est bien 26? Ils sont deux pour 26. Mais ce sera à nous d'adapter les modalités avec, évidemment, les ressources financières qui iront avec, et je me permets de rappeler que c'est de l'argent neuf qui va aller pour le financement de ces classes de maternelle quatre ans en milieu défavorisé.

Vous souhaitez... J'ai entendu, là, j'ai bien vu que vous dites : Bien, tant qu'à y être — vous ne dites pas ça comme ça, moi, je le traduis comme ça — est-ce qu'on ne pourrait pas, dans la loi, élargir ça en ce qui concerne les parents? O.K.? Parce que vous avez une réflexion autour d'un libellé de la loi, l'article 461.1, qui dit que le ministre peut préciser les activités ou services destinés aux parents de ces élèves. Alors, ces élèves dont on parle ici, ce sont ceux de nos maternelles quatre ans, et, vous, vous en profitez — mais dans le bon sens du terme, là, ce n'est pas une critique — pour dire : Est-ce qu'on pourrait élargir ça pour d'autres catégories de parents? J'aimerais vous entendre là-dessus et pourquoi vous dites ça. Qu'est-ce que vous avez à l'esprit? Qu'est-ce que vous souhaiteriez qu'on ajoute comme type de services?

M. Rioux (Gaston) : C'est certain que... Vous comprendrez que la place des parents est signifiante pour les jeunes et signifiante aussi pour l'éducation, puis leur présence, leur place à l'intérieur de l'école est quand même excessivement importante. On comprend que c'est aussi important au niveau des maternelles quatre ans. Il faut quand même faire le lien entre le milieu familial et le milieu de l'école. Dans des milieux difficiles, c'est encore plus important, mais je pense que profiter de cette occasion où on change la Loi de l'instruction publique pour apporter la possibilité de services offerts aux parents, je pense qu'on ne peut faire autrement que d'en saisir l'opportunité. Je pense que d'ouvrir l'école dans le principe toujours famille-école-communauté, de se servir des maternelles quatre ans comme un tremplin pour faire l'union entre l'école, la famille et la communauté, de se servir des vases communicants entre les différents services qu'on peut avoir au niveau d'une communauté, au niveau de la santé et des services sociaux, au niveau du ministère de la Famille, au niveau du ministère de l'Éducation, je pense que c'est une belle occasion de propulser à l'avant l'implication des parents à l'intérieur de l'école. Je vais laisser M. Charland continuer là-dessus.

M. Charland (Marc) : Et, de manière peut-être plus précise encore, ce qu'on a derrière la tête quand on vous dit ça, Mme la ministre, quand on vous écrit ça, c'est de penser qu'effectivement l'entrée en maternelle cinq ans est aussi une transition très importante entre la famille et l'école. Je pense que c'est un autre exemple de... Il y a eu des efforts au cours des dernières années au sein de votre ministère, en collaboration avec divers partenaires, y compris la fédération, pour outiller les parents de mieux en mieux à cette transition maison-maternelle ou CPE-maternelle. Bien, il y a ces transitions-là et il y a aussi la transition primaire-secondaire. Donc, il y a une pensée qu'on peut développer. Et, comme vous êtes ministre et du primaire et du secondaire, je ne vous embarquerai pas sur le collégial, mais, de plus en plus, on entend que cette transition-là est aussi importante, secondaire-collégial.

Donc, il y a peut-être une réflexion à développer en termes non seulement d'outils… Et, à ce titre-là, le projet Passe-Partout est un très bel exemple qui se vit au niveau des maternelles dans plusieurs commissions scolaires, mais il y a peut-être quelque chose encore à réfléchir pour l'ensemble des parents, pour l'ensemble des commissions scolaires dans diverses transitions qui peuvent être importantes dans la vie de l'enfant et de la famille.

Mme Malavoy : Je vous rejoins tout à fait sur un aspect qui m'apparaît comme étant de plus en plus mis en évidence, c'est l'importance des transitions comme étant une étape qu'il faut réussir dans la lutte au décrochage scolaire. Parce que, quand on parle de petits enfants de quatre ans, en fait ce qu'on vise, c'est qu'ils commencent sur le bon pied leur parcours scolaire et, donc, qu'ils aillent jusqu'au bout. Parce que c'est sûr que ce n'est pas à cinq ans qu'ils vont dire : Je quitte l'école, mais ils peuvent avoir un comportement à l'interne qui fera que, finalement, ils décrochent intérieurement. Mais le vrai décrochage, il va se voir plus tard. Et, effectivement, de bien réussir les transitions, pas juste bien réussir le morceau, là, qui s'appelle maternelle, ou primaire, ou secondaire, mais réussir les passages de l'un à l'autre, je trouve intéressant que vous notiez cela. Et ce que vous me dites, c'est que vous souhaitez que les parents soient mis à contribution pour accompagner ce passage.

M. Charland (Marc) : Les encourager à accompagner ce passage.

Mme Malavoy : D'accord. Ma collègue aurait envie de prendre le relais.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, vous avez la parole.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Merci, Mme la Présidente. Je voulais revenir peut-être sur le côté conseil d'établissement, rôle du conseil d'établissement. C'est un milieu que je connais bien, j'ai été longtemps au conseil d'établissement de... avec ma fille et présidente, même, pendant quelques années, et j'aimerais savoir quel rôle vous voyez par rapport au projet de loi qu'on a ici, qui suppose qu'il y aura une classe par commission scolaire pour le début. Comment vous voyez le rôle… Et quelle place va prendre le conseil d'établissement… ou les conseils d'établissement à ce moment-là et…

M. Rioux (Gaston) : Oui. Je pense que le conseil d'établissement, dont les parents font partie, c'est un acteur important dans la réussite de tout projet au niveau de l'école. Dans le fond, d'être mis ou pris à partie dès le début d'un projet, ça permet de transcender la réalité du milieu, d'y mettre la couleur locale, de faire en sorte que le projet fonctionne. Parce que les milieux sont différents. Que ce soit aux Îles-de-la-Madeleine ou à Montréal, vous comprendrez que c'est différent comme approche. Donc, de se servir de la réalité du milieu, de se servir des compétences locales pour être capable d'établir un programme qui corresponde aux enfants qui vont être dans la classe de maternelle quatre ans. Ce qu'on se dit aussi, ça doit être imbriqué, tout ça, les maternelles quatre ans, dans le projet éducatif global de l'école, dans le plan de réussite. Donc, ça doit faire un tout, en partant de quatre ans vers les autres années. Ça fait que c'est pour ça que nous croyons fortement que le conseil d'établissement doit être partie prenante de ce projet-là.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Il peut avoir un rôle important à jouer à ce moment-là. Puis vous avez parlé aussi du statut d'élève, qu'on reconnaisse que l'élève de quatre ans a le même statut que... Présentement, c'est cinq ans. J'aimerais vous entendre aussi sur les conséquences de ce que ça peut donner aussi.

M. Rioux (Gaston) : Dans le fond, ce qui a déjà été rapporté pour les maternelles quatre ans à mi-temps, en n'ayant pas le statut d'élève, bien, ces enfants-là peuvent être mis de côté s'ils sont trop perturbateurs ou s'ils ont trop de problèmes. Ce qu'on veut, dans le fond, c'est que l'élève, il soit vraiment pris comme un élève à part entière comme les autres puis qu'il soit reconnu comme les autres, et ce qui donne par ricochet la place aux parents comme pouvant faire partie des structures de participation parentale. Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci.

Mme Malavoy : ...juste, puisqu'on a encore quelques instants...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Vous avez encore quelques minutes, Mme la ministre.

• (17 h 20) •

Mme Malavoy : Oui. En fait, j'essaie de concilier... Là, je vous entends parler du statut d'élève. En fait, ce que j'essaie de concilier, c'est à la fois offrir à ces enfants-là tout ce qu'il faut — vous parlez de statut d'élève, de ressources, de lien avec les parents, et tout ça — et, en même temps, rester, pour nous, dans le cadre de ce que nous avons annoncé, c'est-à-dire d'offrir des maternelles plein temps pour des enfants de milieux défavorisés et, donc, de ne pas mettre sur pied un système qui ait l'air de dire : Bien, finalement, la maternelle peut commencer à quatre ans, et, donc on commence petit peu par petit peu, mais, finalement, on va l'étendre à tout le monde, et tous les enfants de quatre ans pourraient avoir, un jour, le statut d'élève.

J'exagère en disant ça, mais, sachant particulièrement que les centres de la petite enfance craignent qu'on aille là, on leur dit : Ce n'est pas ce qu'on vise, on vise un service complémentaire. J'aimerais vous entendre pour, justement, le maintien de cet équilibre parce que, quand vous parlez de statut d'élève, l'image que ça projette pour moi, c'est carrément de faire qu'à quatre ans on puisse être bel et bien un élève dans une école, au même titre qu'un enfant de cinq ans, et là que ça devienne peut-être une généralisation. Éclairez-moi là-dessus, peut-être.

M. Rioux (Gaston) : Ce n'est pas ce qu'on veut nécessairement, mais je vais laisser M. Ian continuer.

M. Renaud-Lauzé (Ian) : En fait, ici, ce n'est vraiment pas notre intention. Notre intention, c'est vraiment dans la pluralité des services qui sont présentement en place. Sauf que, présentement, à l'article 1 de la loi, l'enfant de quatre ans n'a pas de statut d'élève. Et on comprend que, si on met un statut de l'élève à l'article 1, ça pourrait vouloir dire que tous les enfants de quatre ans ont le droit. La chose qu'on propose ici, c'est dire que, du moment qu'il est admis... Autrement dit, il y a une école, on admet un enfant, il acquiert les droits prévus à l'article 1. Autrement dit, ce n'est pas un droit qui est basé sur l'âge, c'est un droit qui est basé sur l'admission.

Autrement dit, cet enfant, une fois qu'il est entré dans le système, ne peut plus être exclu et traité comme un enfant, un élève de seconde zone qu'on pourrait facilement exclure pour multiples raisons. Puis ça, c'est une chose qui s'est passée avec les maternelles quatre ans à temps partiel. Moi, je réponds à des questions de parents au téléphone, et je ne nommerai pas de noms de commissions scolaires, mais c'est des choses qui se sont déjà produites, des élèves qui se sont fait exclure parce qu'ils n'étaient pas assez matures pour l'école. Mais c'est l'objectif du programme d'aider la maturité scolaire. Donc, enlevons ce risque, donnons un plein statut…

Et une question qu'on pourrait se poser : Est-ce qu'un parent d'un élève, d'un enfant de quatre ans, si l'enfant n'est pas un élève, a le droit d'être sur le conseil d'établissement? Pour nous, c'est une évidence, puis je crois que, pour bien des milieux, ce l'était, une évidence, mais sauf qu'étant donné l'absence dans la loi ça a été interprété de façon différente dans certains milieux.

Mme Malavoy : Ce que vous voulez, dans le fond, c'est qu'on se sente responsable de l'enfant entièrement, et non pas comme si c'était plus ou moins facultatif que de lui offrir des services. C'est ce que vous dites. Je ne sais pas s'il faut aller jusqu'à statut, là, peu importe, on fera la réflexion, mais, si je veux comprendre le sens de vos propos, c'est vraiment : Assurons-nous que, si un enfant entre à l'intérieur de ce cadre-là, qu'on lui offre des services et qu'on se sente responsable jusqu'au bout, qu'il réussisse, et non pas qu'on dise : À la limite, s'il décroche, ce n'est pas grave parce qu'on n'est pas responsable, alors qu'on le serait, mettons, en première année, à l'évidence.

M. Rioux (Gaston) : Puis force est d'admettre que, comme on disait, il y a des exemples négatifs à cet effet-là au niveau des maternelles quatre ans à mi-temps, puis on ne voudrait pas que ça se reproduise au niveau de celles à plein temps en milieu défavorisé, justement, particulièrement pour des enfants qui ont des besoins importants.

M. Renaud-Lauzé (Ian) : Et je compléterais, tout simplement, en disant aussi que cette modification viendrait régulariser aussi le statut des enfants en maternelle quatre ans à demi-temps.

Mme Malavoy : D'accord. Ça va pour moi.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Mille-Îles, vous avez la parole.

Mme Charbonneau : Merci. M. le président, vous avez tenu parole, il y a une femme avec vous. La semaine passée, je vous taquinais un peu, et vous m'avez dit : La semaine prochaine, j'aurai une femme avec moi.

Madame, messieurs, j'ai eu plaisir à vous lire et à regarder les documents, puisque je sais... Je vous dirais, comme à l'habitude, le comité de parents a toujours un peu la vision du scolaire d'une lunette différente, puisqu'il est impliqué, et vous en êtes. Mais je sais qu'au mois de février 2013 vous aviez des ateliers et plénières sur bien préparer la vie de nos enfants de quatre ans et vous aviez des réflexions fort intéressantes. Donc, je vais vous ramener à vos réflexions et ce que vous en avez conclu, puisque ça a sûrement alimenté votre mémoire, et de la volonté que vous avez d'y voir des changements ou des améliorations sur ce projet de loi là de cinq articles, qui, nécessairement, en aura plus à la fin de l'exercice article par article, puisqu'il y a des choses à ajuster.

Je vous annonce d'emblée que vous êtes les deuxièmes à nous parler du conseil d'établissement. Et, avec bonheur, j'ai entendu les directions d'école, les représentants des directions d'école en parler, et en parler avec fierté, de partenariat, hein, le... Et, pour moi, ça m'a fait bien plaisir, puisque j'ai vu ce programme… cette façon de faire s'instaurer, les conseils d'établissement. Puis ce n'était pas toujours facile au début, et c'était un plaisir d'entendre les directions d'école d'en parler de cette façon-là.

Dans le document de travail que vous aviez au mois de février, vous citez beaucoup le programme Passe-Partout, et avec raison. J'en ai parlé presque à tous les groupes parce que je veux vraiment qu'on le regarde avec une grande attention. Ce n'est pas un programme qui existe à Montréal, il existe beaucoup plus en périphérie, ailleurs qu'à Montréal. Et la relation du parent à l'intérieur de ce programme-là, elle est exceptionnelle. Je le dis comme ça parce qu'on ne l'a pas vu dans aucun programme autre que dans celui de Passe-Partout, l'intégration du parent, je dirais, tout le temps en formation continue, hein?

Un petit peu plus tôt, on avait un parent qui nous faisait un témoignage puis qui disait : Il n'y a pas vraiment de guide. Dans le fond, il y a plein de livres qui ont été écrits, mais ça ne nous guide pas toujours parce que, des fois, on se sent à côté de la track comme parent puis, des fois, on se sent beaucoup plus avancé que ce qui est écrit dans le livre. Dans le programme Passe-Partout, on donne de la formation au parent pour ses compétences parentales. Dans vos recommandations, vous dites faire de la place aux parents dans le conseil d'établissement, mais qu'en est-il de sa place en partenariat avec le programme quatre ans? Je voulais savoir si, au sein de votre plénière puis de vos discussions, ça a ressorti un peu.

M. Rioux (Gaston) : Très certainement, parce qu'on... Moi, j'ai l'opportunité aussi, dans ma commission scolaire, d'avoir sept écoles qui ont des programmes Passe-Partout, puis d'entendre fréquemment les parents en vanter les bienfaits, puis de dire : Oui, c'est intéressant. Et puis, dans nos discussions, très certainement, ça a rentré en ligne de compte parce que, oui, la place des parents... Puis je pense qu'il est d'autant plus important de lui faire une place aux maternelles quatre ans dans le milieu défavorisé pour essayer de donner des images signifiantes à l'école, de revaloriser l'école pour, souvent, des familles où l'école a peut-être été dévalorisée, où les parents ont eu souvent des expériences négatives au niveau de l'école. Ça fait qu'on croit fortement que le fait d'y inclure les parents, le fait d'amener les parents aussi, si vous voulez, à se former ou à accompagner leur enfant, ça donne une expérience hautement signifiante.

Mme Charbonneau : Vous disiez un petit peu plus tôt, la place du parent au conseil d'établissement, vous l'avez signifié… Voici ce que j'ai entendu, vous me corrigerez si jamais je suis à côté de la track. On s'est dit que le projet pourrait avoir lieu dans une école de la commission scolaire. Chacune des commissions scolaires aurait un groupe classe quatre ans temps plein. Donc, entre, je vais dire... Je vais accorder un parent par enfant. Je m'en excuse d'avance parce que certains enfants viennent avec quatre parents, là, mais là je vais dire : Un enfant, un parent. À ce moment-ci, on dit un groupe classe — donc, peut-être entre six et 15 parents — qui se joint à l'école et les parents des autres enfants. Mais ce n'est peut-être pas mon école de quartier. C'est peut-être une école à côté, pas très loin, mais qui offre le service quatre ans parce qu'il va y en avoir juste une.

Comment j'intègre mon parent dans mon principe de conseil d'établissement? Est-ce que je le garde juste en communication ou est-ce que mon conseil d'établissement devrait lui offrir une place au sein de son conseil d'établissement pour avoir un retour, puisqu'il aura accordé ou demandé à la commission scolaire de recevoir ce projet-là? Donc, le lien du parent qui est accueilli dans le milieu... Parce que, l'année d'après, on se comprend, M. Rioux, l'année d'après, il ne sera pas à cette école-là, il va retourner à son école d'aire de desserte où, là, il va commencer son préscolaire cinq ans, ce qui est tout à fait normal, puis il va s'adapter parce qu'ils sont incroyables à cet âge-là. Mais comment vous voyez l'implication de ce parent-là au sein du conseil d'établissement?

M. Rioux (Gaston) : Je pense qu'on a une belle structure aussi à l'intérieur de l'école. C'est les OPP, les organismes de participation parentale. Je pense que ça serait aussi une excellente façon d'intégrer ce parent-là pour lui faire découvrir la vie de l'école, puis il pourrait aussi s'intégrer au conseil d'établissement pendant un an. Ce n'est pas impossible parce qu'on voit même des écoles qui sont strictement préscolaires. Donc, les parents qui sont dans ces conseils d'établissement là n'y siègent que durant un an. Mais, à tout le moins, si ça peut donner une expérience signifiante puis donner le goût de continuer... Parce que ce qu'on veut, nous, aussi, c'est dynamiser les conseils d'établissement puis les rendre encore plus utiles puis intéressants. Puis on pense qu'aussi la part que les parents pourraient emprunter en travaillant sur les maternelles quatre ans, ça aussi stimule le goût de participer à la vie de l'école.

Mme Charbonneau : Je pense que votre directeur général a le goût…

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui, allez-y, M. Charland.

• (17 h 30) •

M. Charland (Marc) : Dans un autre ordre d'idées, mais en complément, c'est vrai qu'en septembre 2013 on parlera d'une classe dans une commission scolaire. Mais j'ai compris de Mme la ministre que l'idée, c'était que, dans cinq ans, on en ait huit fois plus, hein, on passe de 1 000 à 8 000. C'est l'idée de base. Donc, à ce moment-là, il y aura plus d'une école dans chacune des commissions scolaires ciblées selon les principes et les modalités déjà émis. Donc, il faut voir ça pas seulement pour septembre 2013, il faut le voir jusqu'en septembre 2018, où, là, il y aura plus d'une école, ce qui permettra probablement d'aller plus dans le niveau de l'école de quartier que l'école, entre guillemets, régionale qu'on aurait en septembre prochain. Et nous, c'est plus dans cette optique-là de l'école de quartier, de se rapprocher de l'école de quartier, de son milieu, qu'on voit les choses.

Mme Charbonneau : Et ça vient attacher un peu ce pour quoi vous regardez la Loi de l'instruction publique avec un regard plus élevé, puisque, pour vous, la vision est beaucoup plus loin que juste la rentrée scolaire de cette année. Donc, tant qu'à modifier une loi de l'instruction publique, faisons-le pour les années à venir et correctement.

 À la page 8 de votre mémoire, L'importance de rendre attrayant et rassurant ce nouveau service éducatif — qui est le service quatre ans : des réflexions de parents. Au troisième picot, troisième point, vous touchez un point qui vient me chercher, moi, beaucoup. Et je l'ai relevé dans mon discours d'ouverture, et je le fais... Je ne l'ai pas dit de façon négative, je le dis parce que ça existe : À l'école, il y a une facture insidieuse. On n'en parle pas souvent parce qu'on s'est adaptés comme parents à cette facture-là, hein? Il y a le service de garde, il y a le service des dîneurs. Des fois, il y a des activités parascolaires qui se rajoutent à la facture. Des fois, je n'ai pas le droit d'avoir des souliers de course d'une telle façon parce que le gymnase est... C'est sûr que, quand je vous parle du plateau sportif, le quatre ans, il peut faire ses activités dans une classe. Ça a déjà été démontré, je ne suis pas obligé de l'amener au gymnase, donc je ne suis pas obligé de m'accaparer le plateau sportif de l'école, qui est très complet. Mais vous dites : «Assurer que les coûts associés à la fréquentation de la maternelle ne soient pas un frein à leur accessibilité pour les familles.» D'autant plus qu'on se le dit, on vise vraiment les familles en milieu défavorisé.

Ce matin... Pas ce matin, un peu plus tôt, l'école Saint-Zotique nous a présenté son projet. Et ils sont très choyés, ils ont même le Club des petits déjeuners à l'école. Donc, on sait que, si l'enfant n'a pas son lunch, il aura au moins déjeuné, hein? Puis vous savez ce qu'on dit : Un estomac vide, ça ne réfléchit pas bien, là. Donc, comment je fais pour mettre en place quelque chose pour le milieu défavorisé dans un milieu peut-être général? Parce que, dans le fond, la clientèle est ciblée défavorisée, mais l'école, elle ne sera pas obligée d'être dans un milieu défavorisé. Puis, c'est correct, là, il faut la mettre, cette classe-là, dans une école qui a la place. Si je n'ai pas de place dans un certain milieu, elle va être dans un autre milieu, mais elle va quand même attirer une clientèle de milieu défavorisé. Mais elle va quand même dîner, elle va peut-être utiliser le service de garde. Parce que ce n'est pas parce que je suis dans un milieu défavorisé que je ne travaille pas. Peut-être que je n'ai pas un emploi qui me procure une aisance, mais peut-être que je travaille puis j'aurai besoin du service de garde. Peut-être que j'aurai besoin de l'habiller un peu plus l'hiver parce que, là, je vais le sortir, puis il va aller jouer dehors dans la cour d'école, puis... Donc, pour moi — et, je le dis, ce n'est pas malsain, là — il y a une facture insidieuse, qu'on ne voit pas nécessairement quand on est à l'extérieur du système scolaire. Vous le mentionnez, vous aviez des inquiétudes. Je vous écoute là-dessus.

M. Rioux (Gaston) : Bien, je suis content de partager les inquiétudes avec vous parce que c'est sûr que ça repose sur plusieurs facteurs. Parce que, quand on a eu des enfants qui rentrent à l'école, on sait qu'on a trois paires d'espadrilles à acheter, hein? C'est important, c'est l'habillement, c'est les lunchs, c'est tout ça, c'est tous les frais qui vont autour de tout ça. Ça fait que, malheureusement, ce qui nous inquiétait, ça pourrait être un frein à l'utilisation de la maternelle quatre ans pour des enfants qui en ont réellement besoin. Ça fait qu'il y aurait certainement des mesures à y voir là-dedans, c'est certain.

On sait aussi que, malheureusement, le réseau d'éducation public a à subir des compressions, puis il y a un ensemble de petits frais aussi qui se rajoutent. Ça fait que ça aussi, c'est inquiétant, puis ça aussi, ça peut diminuer l'accessibilité de l'école puis de ce service-là pour les enfants. C'est certain qu'on peut regarder au niveau des organismes communautaires qui peuvent aider à ces familles-là, mais, oui, je vous avouerai que c'est préoccupant, puis il ne faudrait pas que ce soit cette chose-là, cet état de fait là qui empêche ces enfants-là d'avoir le service, effectivement.

Mme Charbonneau : Je surveille tout le temps de chacun de vos côtés pour voir s'il y a un doigt qui se lève ou un oeil qui titille pour rajouter à vos propos.

Vous avez soulevé un point important, puis la ministre vous a questionné aussi là-dessus. Mais, pour avoir été un parent impliqué, je vous dirais que ce qui n'est pas écrit nous inquiète toujours. C'est un peu ce que vous disiez : Si on ne reconnaît pas une clientèle par écrit, si on n'écrit pas dans la loi une reconnaissance pour l'objectif qu'on a, on peut peut-être passer à côté. Dans vos recommandations, vous nous dites : Il faut les identifier. Puis c'est la première fois qu'on a cet échange-là, mais j'écoutais ma collègue qui disait : Bien, si je les reconnais, je peux avoir une inquiétude par rapport au CPE qui dit : Bien, vous êtes en train de l'étaler partout plutôt que… D'après vous, y a-t-il une façon de l'instaurer dans cette Loi de l'instruction publique qui fait en sorte que je maintiens mon assurance dans mon milieu pour implanter le meilleur système pour les élèves de quatre ans en milieu défavorisé et je n'attaque pas et je ne me... je ne compétitionne pas avec les CPE de l'ensemble des milieux du Québec? Est-ce que vous avez regardé cet aspect-là ou vous avez juste dit : On encadre ça de cette façon-là et...

M. Rioux (Gaston) : C'est certain qu'on ne veut pas… Écoutez, j'ai mentionné dès le départ que les maternelles quatre ans, c'était un outil supplémentaire, donc, si vous voulez, complémentaire, appelez-le de toutes les façons, on ne veut surtout pas déshabiller l'un pour habiller l'autre. Ça, c'est entendu, puis on reconnaît l'importance énorme des CPE à l'intérieur des milieux. Mais, la question fondamentale, il y a 27 % des enfants qui n'en ont pas accès présentement, et ça, c'est le côté dramatique de la chose. Ça fait que, si les maternelles quatre ans peuvent offrir l'opportunité à ces familles-là, à ces enfants-là d'avoir le service, bien, tant mieux, mais vraiment pas au détriment des autres. Ça, c'est un fait acquis pour nous.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Charland.

M. Charland (Marc) : Nous ne sommes pas des juristes. Cependant, ce qu'on se dit, c'est qu'il y a sûrement moyen de travailler le texte de l'article 1 pour faire en sorte que ce droit à l'éducation là devienne un acquis à partir du moment où on est accepté au sein d'un programme tel que celui-là. Et là je ne veux pas comprimer le programme, mais aux conditions et modalités définies par la ministre, etc. Et je suis convaincu qu'il y a plusieurs personnes qui ont des capacités et de la créativité suffisamment grandes pour nous permettre d'accrocher ces termes-là en tout respect de toute la Charte des droits et libertés, d'ailleurs.

Mme Charbonneau : Je vous dirais que le défaut d'une loi et sa qualité, c'est qu'elle est écrite par des avocats et elle est comprise par des avocats. Je le dis comme ça en tout respect, mais je me souviens d'avoir été à un conseil d'établissement et d'avoir passé deux heures sur «adopte» et «approuve». Et, oui, c'est ça. Je vous le dis parce que je savais que c'était pour vous faire sourire, parce que vous, vous dites «approuve», vous ne dites pas «adopte». Donc, vous ne retournez pas aux devoirs l'équipe-école ou la commission scolaire si jamais les modalités ne font pas l'affaire, vous dites : On approuve ou on n'approuve pas.

M. Charland (Marc) : Attention, «approuver», ça veut dire… En tout cas, de la façon dont on interprète la loi à l'heure actuelle, «approuver», c'est de dire : On n'est pas d'accord et on vous retourne à vos devoirs. Donc, à l'intérieur de tous les pouvoirs que possède la commission scolaire et que possède la ministre, donc on approuve comme conseil d'établissement. Et, si on n'approuve pas, bien, on dit : Bien, ça veut dire qu'il y a quelque chose qui manque. Alors que, si on adoptait, on aurait même le droit de modifier la chose.

Mme Charbonneau : Tout à fait. Tout à fait, mais…

M. Rioux (Gaston) : Le chemin est un peu différent, mais on arrive au même résultat.

Mme Charbonneau : Oui, vous avez raison. Des fois, c'est juste le temps qui change la chose. Parce que, quand il est rendu 10 h 30, puis tout le monde a le goût de rentrer chez eux parce qu'ils sont là depuis 7 h 30, entre «approuve» puis «adopte», ça peut aller bien, bien vite dans la volonté de finir cette réunion-là qui dure depuis trop longtemps, puis que tout le monde arrive à épuisement.

Vous n'avez pas beaucoup parlé de ce que moi, j'appellerais des services complémentaires, qui ne sont pas du tout les services professionnels, mais plus le transport, la politique de transport, donc les marcheurs, la politique des dîneurs, l'espèce de couloir périphérique alentour du service scolaire qui fait en sorte que mon élève est en sécurité, bien encadré. Je parlais à un transporteur ce week-end qui me disait : Vous savez, les pieds ne touchent pas à terre dans un autobus. On ne voyage pas un quatre ans comme on voyage un sixième année. Donc, est-ce qu'au niveau des parents vous avez soulevé des petites choses comme ça qui pourraient faire en sorte que, dans les modalités ou dans les façons de faire, on met un meilleur projet de loi en place?

• (17 h 40) •

M. Rioux (Gaston) : Bien, on veut, hors de tout doute, que nos enfants soient dans un milieu sécuritaire, c'est certain. Mais je pense qu'il faut aussi se servir de nos expériences, de ce qu'on a déjà fait parce que les maternelles à mi-temps de quatre ans, elles existent déjà depuis plusieurs années, puis le service de transport est déjà assuré, la sécurité est déjà assurée. Mais je pense que c'est aussi un questionnement qui sera à faire, oui, effectivement, au niveau du conseil d'établissement, puis, oui, effectivement, de s'assurer qu'entre le moment où ils quittent la maison puis qu'ils arrivent à l'école… Les heures du midi, l'après, les récréations, je pense que ça doit se faire en toute sécurité. Que ça soit avec le transport, parfois, dans certains milieux, avec des enfants du secondaire, est-ce que c'est questionnant aussi? Est-ce que c'est questionnable? Est-ce qu'on a des choses à améliorer là-dessus? Effectivement, c'est des discussions intéressantes à avoir. Mais, généralement, ce qu'on pourrait vous dire, c'est : Oui, nos enfants, on veut qu'ils soient en sécurité, nos jeunes enfants surtout.

Mme Charbonneau : Je n'avais pas de doute sur votre principe de sécurité, c'était plus sur... Parce qu'au sein des conseils d'établissement vous gérez plusieurs petites politiques... Bien, c'est des grandes politiques, là, mais c'est des politiques qui viennent du conseil des commissaires, donc la politique du transport, la politique d'inscription. Et le conseil d'établissement a toujours voix au chapitre, c'est-à-dire qu'il y a toujours une consultation, et, de ce fait, on fait une politique qui touche la clientèle qui fréquente notre école parce que c'est...

M. Rioux (Gaston) : C'est ça. Le comité de parents a toujours un représentant au niveau du comité de transport. Ça fait que c'est important, effectivement, de regarder ces choses-là.

Mme Charbonneau : Vous avez parlé de l'homogénéité du groupe. Je termine avec ça parce que c'est un souci qu'on avait de notre côté aussi. Est-ce que vous voyez favorable… J'ouvre la porte bien, bien grande, là, mais est-ce que vous voyez favorable… Si jamais je n'arrive pas à faire un groupe de 15 enfants, la ministre disait : On peut descendre jusqu'à six, mais est-il plus favorable de regarder de descendre jusqu'à sept en défavorisation plutôt que de ne pas créer le groupe à plus que six?

Je vous pose la question parce que ça pourrait donner une mixité intéressante au sein du groupe plutôt que d'être que des enfants de, je veux dire, 9, 10, là. Parce que le taux de défavorisation le plus proche de la clientèle qu'on veut aller chercher, c'est 10. Mais, si je n'arrive pas à combler dans un milieu donné, est-ce que vous trouvez que c'est favorable, plutôt que de faire un plus petit groupe, d'aller chercher des élèves ou des enfants de milieu 7 ou est-ce que vous voulez qu'on reste la vision 9, 10 puis qu'on fasse un groupe plus petit pour accommoder la commission scolaire plutôt qu'autrement?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Rioux, en une minute.

M. Rioux (Gaston) : C'est des questionnements intéressants. Je pense que c'est une bonne question, au même titre qu'on voit un autre problème. Si j'ai 25 inscriptions dans un milieu défavorisé, qu'est-ce que je fais? Est-ce que je fais deux groupes? Mais on n'a peut-être pas les financements pour deux groupes. C'est des questionnements importants.

Déjà aussi, dans certains milieux, avec les maternelles quatre ans à mi-temps, on jumelle avec la maternelle cinq ans. Est-ce que c'est des possibilités aussi? Est-ce que c'est des possibilités pour garder un service de proximité à ces enfants-là de leur milieu? Je pense que ça peut être des avenues intéressantes à faire, puis ça apporte ce qu'on veut aussi, de l'hétérogénéité à nos classes, et ça permet de rendre une classe plus vivante et meilleure, je crois, pour les jeunes. Au niveau de la sociabilisation, au niveau de l'intégration de ces jeunes-là, je pense que ce serait vraiment super d'aller dans ces avenues-là, effectivement.

Mme Charbonneau : Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. À ce moment-ci, j'aurais besoin de votre consentement. Y a-t-il consentement pour permettre au député de Blainville de participer à nos travaux et de prendre la parole?

Des voix : ...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Il y a consentement. Donc, M. le député de Blainville, vous avez la parole pour un temps de 5 min 30 s.

M. Ratthé : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bien, évidemment, je voudrais saluer mes collègues et vous saluer également. La politesse exige devant les titres. Mme Chabot d'abord, M. Rioux, M. Charland et M. Lauzé, merci d'être là. Écoutez, je n'ai pas beaucoup de temps, je vais essayer de faire ça brièvement pour vous entendre.

Je voudrais revenir un peu sur, évidemment, le comité de parents, sur la recommandation, entre autres, que vous faites, la recommandation n° 2. Et j'ai encerclé un terme, moi, qui m'apparaît important, le mot «approuver». Et c'est intéressant parce que la recommandation que vous faites, c'est dire : Bien, le conseil d'établissement devrait approuver les modalités de mise en place. L'association montréalaise des directeurs d'établissement scolaire et l'Association québécoise du personnel de direction d'écoles ont fait sensiblement la même recommandation que vous. En fait, eux, ils disent : Reconnaissant la responsabilité du conseil d'établissement…

Et, ma question, je voudrais, d'ailleurs, vous entendre... On a beaucoup parlé de partenariat, je pense, autant la ministre que ma collègue, mais moi, je veux qu'on aille un peu plus loin. On parle de conditions particulières, quand même, quand on a des enfants de quatre ans. On parlait, par exemple, de la période de lunch, la cohabitation avec les autres, les conditions particulières en termes d'équipement, le ratio, le nombre de personnes. Est-ce que vous ne croyez pas — ou, du moins, c'est ce que je crois, et, si je me trompe, vous me le direz — que le conseil d'établissement devrait, d'ailleurs, être celui qui va se porter garant que ces conditions-là sont remplies? Parce que, peut-être, chacune des écoles aussi a certaines particularités, est-ce qu'on ne devrait pas, donc, aller un petit peu plus loin que le partenariat et donner une responsabilité, tel que peut-être que vous l'entendez, là, de venir approuver que les conditions sont là, qu'on respecte effectivement, là, ce qui sera dans la loi? Parce que je pense que, malgré toute la bonne volonté que je connais à la ministre, elle ne pourra pas être dans chaque école pour s'assurer que ça va bien se faire. Alors, je voulais vous entendre là-dessus, là. On a à peu près trois minutes, là, pour votre réponse.

M. Rioux (Gaston) : Bien, c'est certain que ce qu'on veut par rapport à ça, que le conseil d'établissement soit l'organisme qui permette de respecter le milieu, de permettre au milieu de s'exprimer. Il y a des gens de la communauté aussi dans le milieu. Est-ce qu'on peut aller chercher des aides, des supports pour l'intégration de ces enfants-là? Je pense que c'est important d'y apporter une suite. C'est que le conseil d'établissement ne doit pas être refermé sur lui-même, mais ouvert sur la communauté justement pour que l'implantation des maternelles quatre ans dans le milieu donné défavorisé corresponde à la réalité, y corresponde aussi. Parce qu'on ne peut pas rater notre coup, hein, là-dessus. On ne peut vraiment pas rater notre coup parce que le défi est grand d'aller chercher ces familles-là, d'aller chercher ces enfants-là pour qu'ils soient prêts pour l'école. C'est ce qu'on veut, qu'ils soient prêts pour l'école, qu'il y ait au moins dans leur vie, au départ, une image de réussite, une image, je dirais, entre guillemets, de plaisir d'aller à l'école, puis je pense que c'est toute une responsabilité que le conseil d'établissement peut prendre de concert avec la direction, de concert avec les enseignants, les professionnels pour dynamiser le milieu puis faire en sorte de rendre le plus possible l'école accueillante.

M. Charland (Marc) : Et l'école vit au sein d'une commission scolaire qui permet un partage d'idées, d'effectifs. Certains des aspects d'encadrement, que ce soit pour les enfants ou pour les parents, requièrent forcément des personnes, des individus, des gens spécialisés. Si on a cette capacité de partager les ressources humaines, les ressources financières, les ressources informationnelles, le partage d'information, c'est aussi important. Donc, ce n'est pas juste… Le CE, oui, face à son milieu et face à son travail, mais aussi c'est le CE face à un réseau scolaire, et le partage d'information devient aussi important à ce niveau-là. En fait, finalement, c'est, comme le disait M. le président il y a deux instants, c'est de faire en sorte que l'enfant soit prêt pour l'école, mais que l'école soit prête aussi pour l'enfant.

M. Ratthé : Oui, puis de faire en sorte qu'il y ait quelqu'un au sein de l'école qui s'assure que — bon, on va appeler ça… — les conditions qu'on exige soient bien là. On nous parlait même… les deux groupes avant vous, là, que je vous mentionnais, parlaient même au niveau de la formation universitaire des enseignants, peut-être d'avoir un regard sur, bon, le personnel qu'on va engager, donc de faire jouer vraiment un rôle actif au conseil d'établissement. C'est quelque chose avec lequel je comprends que vous seriez, en tout cas, du moins, à tout le moins, favorable?

M. Rioux (Gaston) : C'est les conditions gagnantes pour l'implantation harmonieuse d'un projet comme ça. C'est d'avoir les ressources matérielles, financières, humaines, d'avoir le personnel adéquat, l'encadrement adéquat d'un milieu sain et sécuritaire. Je pense que c'est tout le portrait de l'école qu'on veut avoir aussi, que ce soit pour les maternelles quatre ans ou tous les autres niveaux, primaire et secondaire.

M. Ratthé : …bien fait ça, hein, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Vous avez très bien fait ça, vous avez respecté le temps. Merci. Merci beaucoup, madame, messieurs. Je veux dire aux membres de la commission que la salle va être sécurisée, donc vous pouvez laisser vos choses ici.

Sur ce, une bonne fin de journée à tous, et la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 17 h 50)

(Reprise à 19 h 31)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux, et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Nous allons poursuivre sans plus tarder les auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans.

Donc, je reconnais à nouveau les gens de la Fédération des commissions scolaires du Québec. Mesdames monsieur, bonsoir. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Mme Bouchard, vous connaissez très bien les règles qui régissent nos travaux. Donc, je vous demande de vous présenter et de présenter également les personnes qui vous accompagnent. Vous allez disposer d'un temps de 10 minutes pour nous faire part de votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les membres de la commission. Donc, la parole est à vous, Mme Bouchard.

Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ)

Mme Bouchard (Josée) : Merci. Et, avec plaisir, je vous présente les personnes qui m'accompagnent : Mme Pâquerette Gagnon, la directrice générale de la fédération; Mme Isabelle Tremblay, qui est à sa gauche, donc, qui est conseillère au dossier; et Me Bernard Tremblay, qui est secrétaire général et directeur des relations de travail à la fédération.

Alors, effectivement, troisième fois en deux semaines. Bonne performance, mais ça veut dire que vous aussi, vous travaillez fort. Alors, je vous remercie de permettre à la Fédération des commissions scolaires du Québec de s'exprimer sur ce projet de loi n° 23 concernant les services éducatifs aux élèves de moins de cinq ans. Je vous rappelle que je représente quand même l'intérêt de 60 commissions scolaires francophones et la commission scolaire du Littoral.

Mme la Présidente, je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour vous rappeler que l'élève est au coeur des préoccupations de la Fédération des commissions scolaires du Québec, et ce, dès son plus jeune âge. Les commissions scolaires du Québec, en tant que responsables de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire et secondaire, se sentent directement interpellées par les services offerts aux enfants de quatre ans qui amorcent leur parcours scolaire. Un ajout de services destinés aux élèves de quatre ans provenant de milieux défavorisés s'inscrit dans la triple mission de l'école québécoise, soit instruire, socialiser et qualifier. Il s'agit d'un pas de plus dans la foulée de toutes les actions mises en oeuvre, notamment, par notre réseau scolaire pour améliorer la persévérance et la réussite scolaire des élèves.

Concernant le financement — et j'ai envie de dire le financement adéquat — comme je l'ai souligné il y a quelques instants, la fédération trouve important de préciser que l'implantation des maternelles quatre ans à temps plein en milieu défavorisé, en complémentarité avec les services déjà offerts aux enfants de quatre ans, rejoint la volonté des commissions scolaires du Québec de placer la réussite des jeunes au coeur du projet éducatif québécois.

Par contre, Mme la Présidente, les commissions scolaires devront disposer de ressources humaines, matérielles et financières nécessaires pour offrir le service dans les meilleures conditions possible. Je suis certaine que vous n'êtes pas surprise de ça. Nul besoin de vous rappeler que, dans le contexte des compressions budgétaires, qui totalisent près de 500 millions de dollars en trois ans, la fédération s'inquiète du financement de ces nouvelles classes, qui engendreront de nouvelles dépenses. Nous sommes particulièrement inquiets des dépenses engendrées par les ressources humaines supplémentaires et par les ressources matérielles nécessaires à l'adaptation de l'environnement pour convenir à la réalité des enfants de quatre ans. Il va de soi que, pour bien accueillir ces enfants, le personnel enseignant devra être formé et accompagné. Il devra disposer non seulement de ressources pédagogiques, mais aussi de ressources humaines pour soutenir le développement global des enfants de quatre ans. Plus précisément, je tiens à vous faire part de la préoccupation des commissions scolaires quant au soutien offert au personnel enseignant aux enfants de quatre ans.

Ce que j'entends par soutien, bien, c'est la présence en classe d'un ou d'une technicienne ou éducatrice, notamment pour assurer la sécurité des enfants. Ainsi, l'enseignant aura davantage de temps pour planifier et réaliser ses interventions auprès des élèves en plus de diminuer le ratio maître-élèves, ce qui sera favorable à un meilleur encadrement.

Par ailleurs, beaucoup de ressources matérielles ainsi que l'environnement physique des enfants devront être adaptés à leur âge et à leur petite taille. À l'instar des maternelles cinq ans, une attention particulière devra être portée aux petits de quatre ans pour assurer leur transport scolaire en toute sécurité.

Avant de terminer ce point, je trouve important de vous rappeler quelques données. Pour mettre en place le projet pilote des six groupes de maternelle quatre ans à temps plein dans des commissions scolaires dont le syndicat est affilié à la FAE, une somme de 1,3 million de dollars a été nécessaire, et il serait donc normal d'avoir l'équivalent juste par souci d'équité. La fédération tient à s'assurer que le financement annoncé soit défini clairement dans les règles budgétaires des années à venir en tenant compte des besoins des commissions scolaires, qu'il s'agisse de ressources humaines, matérielles ou financières, afin d'assurer la réussite de cette implantation.

Maintenant, concernant l'organisation des services, la fédération salue l'ajout d'un article qui précise qu'à la demande de la commission scolaire l'école peut dispenser les services éducatifs de l'éducation préscolaire. Toutefois, Mme la Présidente, nous nous questionnons sur la portée de l'article qui permet à la ministre de préciser les activités ou les services destinés aux parents de ces élèves qu'une commission scolaire doit organiser. Est-ce dire que la ministre ou le ministre pourra décider si une commission scolaire offre ou non un ou des services tel le programme Passe-Partout? Est-ce que la ministre pourrait décider de ne plus financer ce service, par exemple? La fédération estime qu'il faut laisser ce choix aux commissions scolaires, qui connaissent bien les besoins des élèves ainsi que ceux des parents. La fédération demande de ne pas porter atteinte à l'autonomie des commissions scolaires quant à l'organisation de services éducatifs destinés aux enfants de moins de cinq ans.

Concernant la formation des groupes de maternelle quatre ans, la fédération estime que cette tâche revient aux commissions scolaires. Toutefois, elle croit que, dans certains milieux, la tâche sera complexe à réaliser. Effectivement, Mme la Présidente, certains milieux auront de la difficulté à sélectionner les élèves parmi un grand nombre, alors que d'autres auront de la difficulté à former un seul groupe, comme c'est le cas de certaines écoles en région. La fédération demande au ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport que les modalités d'implantation progressive soient flexibles et respectueuses des réalités de chaque commission scolaire. Comme je l'ai indiqué un peu plus tôt, ce sont les commissions scolaires qui sont les mieux placées pour mettre en place les services répondant aux besoins du milieu, et la fédération, bien, s'inquiète du sort réservé au programme Passe-Partout et à la maternelle quatre ans à demi-temps. Il ne faut pas oublier que certaines écoles auront de la difficulté à offrir tous les services, étant donné le nombre restreint d'élèves dans les petits milieux.

Et, finalement, la fédération demande au MELS de confirmer la pérennité des services existants, soit le programme Passe-Partout et la maternelle quatre ans à demi-temps. En disposant des ressources nécessaires et en respectant l'autonomie des commissions scolaires, bien, la Fédération des commissions scolaires du Québec réitère son appui à l'implantation progressive de la maternelle quatre ans à temps plein en milieu défavorisé. Voilà. Je vous remercie de votre attention.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mme Bouchard. On va débuter les échanges dès maintenant. Donc, Mme la ministre, vous avez la parole pour un temps de 23 minutes.

Mme Malavoy : Merci beaucoup. Écoutez, merci d'être là parce qu'honnêtement vous êtes des partenaires absolument essentiels dans ce nouveau chapitre qui s'ouvre concernant les services éducatifs pour les enfants de milieux défavorisés. D'abord, peut-être, une première question un peu large. Parce que vous avez suivi, comme nous, un peu le débat qui entoure l'implantation de ces maternelles quatre ans à plein temps, de votre expérience, sachant qu'il y a actuellement et des maternelles à demi-temps et ce programme Passe-Partout dont on dit beaucoup de bien, quel est l'avantage d'introduire de façon claire et prévue par la loi une maternelle plein temps? J'aimerais vous entendre de votre point de vue, puisqu'il y a des gens qui disent : Oui, c'est tout à fait approprié et tout à fait pertinent, et d'autres, vous avez bien compris, particulièrement les centres de la petite enfance, qui disent : Ce n'est pas à l'école que ça devrait se passer, c'est plus à travers nos services à nous.

Alors, qu'est-ce qui vous fait pencher de ce côté-là? Puis on abordera après d'autres questions que vous évoquez, mais, sur le fond, moi, j'aimerais quand même avoir votre opinion parce que je pense que vous êtes très bien placée pour la donner.

• (19 h 40) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Allez-y, Mme Bouchard.

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, la question de Mme la ministre, elle est fondamentale parce qu'elle est au coeur, dans le fond, d'une réflexion de société, hein? Quand on en arrive à vouloir implanter un programme comme celui-là, c'est qu'on a à coeur, ça veut dire, au Québec, puis qu'importe le parti qu'on représente, on a à coeur, je dirais, l'avenir puis l'avenir scolaire, donc, de petits enfants qui... en tout cas, pour ceux qui sont visés dans ce programme-là, qui ne vont même pas en CPE, hein, qui n'ont pas de services, puis qui, en tout cas, souvent, sont sous-stimulés. Alors, la question fondamentale qu'on a à se poser, c'est : Quel objectif on vise? Et, une fois qu'on a répondu à ça... Puis on pourrait se poser la même, même question si on était dans un projet aussi crucial, fondamental dans le domaine de la santé, par exemple, ou dans le domaine de l'environnement. Et je pense que la réponse qui est liée, dans le fond, à la réalisation de l'objectif, là — qui doit faire ça, est-ce que c'est les CPE, est-ce que c'est le milieu scolaire, quel avantage on a — bien, moi, je pense qu'il faut le rattacher, dans le fond, à la mission qui est rattachée aux organisations ou aux réseaux qui vont donner ce service-là par la suite.

La mission des commissions scolaires, je l'ai décrite en début de présentation, elle est reliée, donc, à la socialisation, l'instruction et la qualification. La recherche supportée, entre autres, par le Conseil supérieur de l'éducation et par nombre de chercheurs — puis vous savez qu'on évolue, nous autres, en tout cas, dans ce monde-là, dans le dossier de la persévérance, depuis plusieurs années — démontre avec éloquence que c'est vraiment en agissant tôt qu'on va pouvoir avoir des résultats puis qu'on va faire baisser le taux de décrochage chez ces jeunes-là. De les rattacher tout de suite en partant, à quatre ans, au réseau scolaire, bien, c'est tout de suite de les… en fait, de les faire cheminer, tout de suite, de les introduire dans le réseau scolaire, où, là, tous les services vont être pensés en fonction de cet objectif-là, en fonction de la mission qui est desservie. Je ne suis pas certaine qu'on rendrait service à ces petits-là en les faisant entrer en CPE à quatre ans puis, après ça, en les ramenant, là, dans le réseau scolaire par la suite. Alors, je ne sais pas si ma directrice générale veut ajouter quelque chose à ça.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette) : Merci, Mme la Présidente. Ce que j'ajouterai à ce que Mme Bouchard vient de dire, c'est que les analyses qu'on est en train de faire… Je fais partie, pour représenter la fédération, du comité-conseil qui a été formé par la ministre pour regarder toute l'implantation de ce programme, et une première réflexion qu'on a faite, c'est que ce programme sera en complémentarité avec les autres programmes, et non pas en remplacement de. Alors, on ne fera pas... on ajoute deux fois le temps de la maternelle demi-temps, ce sont d'autres objectifs, d'autres compétences à développer.

Alors, on croit beaucoup que ce service, en complémentarité avec les autres services… C'est une des raisons pour lesquelles on insiste pour le maintien des autres services. Alors, s'il fallait que, dans quelques années, on abandonne, exemple, un service comme Passe-Partout, probablement qu'on passerait à côté, on n'a pas les mêmes objectifs, et nous croyons, selon les discussions qu'on a eues avec plusieurs, que ça ne rejoint pas la même clientèle non plus. Alors, c'est un service de plus pour la petite enfance. C'est fouillé, c'est... Je pense qu'il y a des assises assez fermes là-dessus. Alors, pour nous, c'est une intégration dans la mesure où on le fait correctement, avec des ressources aussi humaines et financières, là, qui vont venir appuyer les équipes-écoles qui vont recevoir ces enfants-là.

Mme Malavoy : Je veux peut-être en profiter pour aborder la question des ressources. Je ne répondrai peut-être pas à tout, mais au moins à certaines choses. D'abord, je sais que vous le savez, mais je pense que c'est important que tout le monde l'ait bien à l'esprit, nonobstant les efforts budgétaires que doivent faire les commissions scolaires, dont je suis parfaitement consciente, il reste que ce projet-là a un financement d'un peu plus de 8 millions de dollars spécifiquement l'an prochain. Donc, il y a de l'argent qui vient avec.

Il y a également — je pense que ça vaut la peine de l'indiquer — par enfant, par élève, en même temps en se disant que la norme, la moyenne d'élèves par groupe, c'est 15 pour quatre ans… Le maximum sera 18, mais la moyenne, c'est 15. Donc, si on finance un groupe, on finance 15 enfants. Et, je pense, c'est intéressant que vous sachiez précisément, là — pour mes collègues également — ce que cela veut dire. Pour ce qui est des services d'enseignement pour un enfant, donc, de quatre ans, ce sera 4 347 $, auxquels s'ajoutent — puis je vais attirer votre attention là-dessus — pour des services complémentaires et le matériel didactique, 593 $. Pourquoi je veux attirer votre attention? Parce que ce 593 $ pour les enfants de quatre ans, il est de 218 $ pour un enfant de cinq ans.

Donc, il y a l'idée qu'offrir des services à un enfant de quatre ans, ça va coûter… ça va demander même plus que ce que ça demande pour un enfant de cinq ans. Et donc, au total, c'est près de 5 000 $ par enfant, plus de l'argent pour le service de garde en milieu scolaire. Le total, là, pour une subvention pour la maternelle quatre ans à plein temps en milieu défavorisé, c'est 6 526 $ par enfant, étant entendu qu'on finance un groupe de 15. Puis, s'il y en a 18, on rajoute... Mais, même si on avait huit, on financerait pour 15, O.K., pour que ça puisse fonctionner, je veux vous rassurer là-dessus, parce que, sinon, ça n'aurait pas de sens d'avoir un financement avec une base par élève.Mais vous m'avez peut-être entendue le dire également, la moyenne, c'est donc 15, mais on envisage de pouvoir financer un groupe complet à partir de six. On ne l'a pas encore parfaitement ajusté, là, mais, comme ça fait plusieurs fois que je le dis, ça va finir par être ça. Et, donc...

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Malavoy : Répéter, c'est pédagogique, mais, même pour moi-même, là, je veux dire, ça finit par être un engagement. Répéter trois fois... La première fois, je pouvais dire : On pense que… Mais là, rendu à trois, quatre fois... Donc, je veux quand même vous rassurer là-dessus, qu'on a dit : Un groupe par commission scolaire, mais il va être financé, donc, à hauteur d'un groupe complet pour accompagner les enfants, bien entendu.

À ça, on ajoute également des journées de formation. Parce qu'il y a une chose qui a été évoquée, bon, avec un peu de... — quant à moi, ça a provoqué un peu de désarroi de mon côté — concernant les éducatrices... les professionnels, en fait, qui ont un baccalauréat en enseignement préscolaire. J'ai été un peu stupéfaite de leur déclaration parce que je sentais plus, honnêtement, de la tristesse qu'autre chose. Parce que des gens formés à enseigner au préscolaire, normalement ils devraient être heureux qu'on leur élargisse, même, leur champ d'action. J'ai compris qu'ils avaient des critiques à faire par rapport à leur formation. Quoi qu'il en soit, on sait bien que des gens, même formés pour le préscolaire, ont besoin, pour une implantation, de quelque chose de nouveau, de journées de formation. Il y en a déjà au moins six journées qui sont prévues, et, éventuellement, il pourrait s'en ajouter si nécessaire. Et le déplacement pour ces formations est également inclus. Alors, je ne dis pas que ça répond à toutes vos questions, mais il y a déjà, donc, des points de repère pour dire : Écoutez, c'est vrai qu'on vous remet de l'argent puis c'est vrai qu'on va accompagner la démarche. Ça, je tenais à le préciser.

Il y a une chose que vous abordez qui est assez fondamentale. Et là on n'est pas dans l'exercice de l'étude article par article, on est encore en train de regarder l'ensemble, mais vous questionnez notre projet, vous dites : Ça porte atteinte à l'autonomie des commissions scolaires. Moi, je vais vous dire ce que j'essaie de concilier. Là, il y a un projet de loi, mais, comme je vous dis, on réécrira ce qu'il faudra réécrire. Ce que j'essaie de concilier, c'est la chose suivante. Bien sûr, les commissions scolaires ont une autonomie et les écoles ont une autonomie, et, dans leur approche… Et, vous le savez, je ne suis pas une tenante du mur-à-mur absolu. Toutefois, il faut qu'il y ait un texte législatif qui me permette d'introduire quelque chose pour des élèves de quatre ans à plein temps de milieux défavorisés. Je ne suis pas en train d'instaurer une maternelle quatre ans, comme on a fait pour le cinq ans, qui était universelle, en disant : Tous les enfants de cinq ans — enfin, leurs parents — tous ceux qui veulent y auront accès. Ça a tellement bien marché qu'il y en a 98 %, je pense, qui y vont. Là, je suis dans un service — vous l'avez dit vous-même — complémentaire. Il y a ce que les CPE offrent, qu'on respecte parfaitement, qui est une voie tout à fait intéressante pour que des enfants aient une formation avant d'arriver en maternelle, puis il y a une nouvelle porte pour des enfants qui ne sont rejoints nulle part et auxquels on veut offrir des chances, les mêmes chances que les autres.

Donc, c'est limité. Il faudra que je puisse définir des modalités, des conditions, des particularités. Si je vais simplement avec une déclaration plus large, je risque de ne pas pouvoir être capable ensuite de limiter les choses. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus parce que l'objectif, comprenez bien, n'est pas de limiter l'autonomie des commissions scolaires, mais de permettre une implantation ciblée et aussi progressive. Là, j'ai une classe par commission scolaire en septembre prochain. Je ne répondrai peut-être pas à toutes les demandes, et je limite dès le début, et donc ça, ce n'est pas habituel. Normalement, quand vous avez une loi de l'instruction publique qui prescrit des droits à des enfants, c'est pour tout le monde. Donc, c'est pour ça qu'on a un projet de loi d'une nature un peu particulière. Ça fait que j'aimerais vous entendre là-dessus, et nous, on fera les ajustements qu'il faut après.

• (19 h 50) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Bouchard.

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, les précisions de la ministre, je pense, sont très éclairantes, dans le sens où on est d'accord avec ce qu'elle émet. En fait, nous, on ne voudrait pas se retrouver avec un texte législatif qui ferait en sorte que ça sèmerait le doute sur l'organisation des activités comme telles, là, le choix des activités parce que les situations sont différentes, là, d'un endroit à l'autre. Je pense que, là-dessus, en tout cas, on fait confiance, là, il va y avoir une façon de l'exprimer, là, très clairement, mais c'est vraiment dans ce sens-là qu'on émettait, là, ce commentaire. Permettez que Mme Gagnon complète là-dessus, peut-être.

Mme Gagnon (Pâquerette) : C'est tout à fait dans le même sens. Il y a, selon nous, des éléments très, très précis dans l'article de loi qui pourraient être insérés à l'instruction annuelle, qui pourraient venir préciser des activités ou certaines balises qui ne nous mettraient pas dans un carcan juridique au cas où, pour toutes sortes de raisons, des projets doivent être modifiés ou que ça ne conviendrait pas à certains milieux. C'est le sens de notre intervention.

Et, puisque j'ai la parole, Mme la Présidente, je voudrais juste relever un élément de ce que Mme la ministre a dit tantôt sur le financement. Vous avez l'habitude de répéter à plusieurs reprises, et nous, on a l'habitude de le faire aussi. Vous allez nous réentendre dans le cadre des règles budgétaires, puisqu'on n'avait pas saisi exactement ce que vous venez de repréciser. Et, dans la règle budgétaire, ça nous paraissait beaucoup plus limité en termes de financement global, là, pour la règle budgétaire, là, qui est en consultations actuellement. Ceci étant dit, elle n'est pas approuvée, elle est en consultations, comme le projet de loi l'est ici. Alors donc, l'instruction annuelle nous paraîtrait, nous, convenable pour que la ministre puisse utiliser son pouvoir de baliser l'implantation de la maternelle quatre ans.

Mme Bouchard (Josée) : ...peut-être un petit...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui, Mme Bouchard.

Mme Bouchard (Josée) : Vous savez, déjà il y a deux présidents qui m'ont témoigné, par exemple, de la difficulté d'implantation, là, pour septembre prochain. Tu sais, compte tenu que, bon, le texte de loi pourrait faire en sorte qu'on dit : On exige des commissions scolaires qu'elles implantent vraiment, là, dans chaque endroit, il ne faudrait pas se retrouver dans une situation où on serait comme en défaut avec la loi. Je vous donne un exemple. À la commission scolaire juste derrière celle de Rivière-du-Loup... des Fleuves-et-des-Lacs, des Fleuves-et-des-Lacs, le président me racontait la semaine dernière que... Bien, vous savez que, de toute façon, il y a toutes sortes d'étapes de consultation qui sont prévues à la Loi sur l'instruction publique à toutes les fois qu'on veut former, de toute façon, un groupe, ou ouvrir une école, ou quoi que ce soit, et, écoutez, dans le cadre de la consultation, ils ont donc... ils se sont tournés vers les parents d'un village où, déjà, ils avaient un groupe… suffisamment d'élèves dans un village, qui est très défavorisé, pour,donc, démarrer ça l'an prochain, les parents sont contre. Alors là, il dit : Qu'est-ce qu'on fait, là? Tu sais, c'est... Alors, on peut se retrouver aussi devant des situations, là, comme celle-là. Voilà. Ça, c'est le terrain, ça.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme la ministre.

Mme Malavoy : Bien, j'attrape ça au vol. Vous dites : Les parents sont contre. Ils sont contre quoi? Ou plutôt quels sont les éléments qui les inquiètent ou sur lesquels ils l'interrogent?

Mme Bouchard (Josée) : Je dois préciser, Mme la Présidente, qu'à toutes les fois que... Vous savez, on est tenus, en fait, à bon nombre de consultations, hein, lorsqu'on se dirige vers des projets comme ceux-là, donc, auprès de notre base, nos parents. Il y a des assemblées publiques qui sont faites, des rencontres avec les parents pour bien expliquer tout ça. Mais ce qu'on me rapportait tout simplement, c'est que ces parents-là, bien, disent : Ils sont trop petits pour aller à l'école. Il faut aussi se dire que, souvent, il y a plusieurs parents de... bien, en fait, qui se retrouvent dans ce groupe-là qui n'ont pas aimé l'école, qui ont vécu une mauvaise expérience avec l'école puis qui ont tendance à penser que leur enfant va vivre quelque chose de négatif aussi.

Alors, ça, il faut être conscient aussi que ça, ça va être un défi. Puis, à toutes les fois qu'on se parle de la petite enfance dans nos groupes de travail, là, avec les partenaires autour de la persévérance, on est toujours, toujours conscients de cette réalité-là puis du fait que c'est important aussi de travailler en partenariat avec le milieu de la santé et des services sociaux, et tout ça, pour qu'on puisse trouver des solutions ensemble. Il ne faut pas baisser les bras devant ça, il faut trouver une façon de les convaincre, de... en fait, de les convaincre du bien-fondé de tout ça.

Mme Malavoy : Par ailleurs, parmi les échos que moi, j'ai… Et vous devez en avoir encore plus précisément, vous êtes encore plus près des écoles. Mais, parmi les échos que j'ai, c'est qu'à certains endroits ils vont avoir du mal à choisir parce qu'il va y avoir plus de demandes que de places. Moi, c'est pour différentes raisons que j'autorise un groupe par commission scolaire. Il y a des raisons financières, vous le comprenez, puis il y a des raisons aussi de vouloir implanter cela de façon progressive et puis, au fur et à mesure, de suivre l'évolution. Mais votre expérience à vous à ce moment-ci, c'est... vous diriez quoi? On est à quelques mois, quand même, du démarrage de ce projet, si tant est que le projet de loi soit voté, bien sûr. Qu'est-ce que vous entendez, vous? C'est quoi, les échos que vous avez?

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, l'exemple que je vous ai donné, en fait, se rapportait, comme je vous ai dit, à deux commentaires, donc, de présidents. Donc, vous avez bien compris, tout le monde, qu'on n'est pas devant une majorité, et ça, c'est fort heureux. C'est fort heureux parce qu'effectivement, lorsque ça a été annoncé, en fait, la réaction, autant des commissaires que des directions générales, et tout ça, dans les commissions scolaires, ça a été de dire : Ah, mon Dieu! mais qui on va choisir? Parce qu'effectivement il y a des territoires où il y a beaucoup de besoins. Alors, ce qu'on entend sur le terrain, là, essentiellement, c'est... Comme je vous l'ai dit, on est en fort appui, on est des gens habitués de livrer la marchandise. Rappelons-nous quand on a instauré la maternelle cinq ans à temps plein. On a eu, je pense, six mois pour agir, se tourner de bord, aménager les locaux, écoutez, on est rentrés au poste, comme on dit, puis avec succès. Puis ça, il faut être fier de ça.

Alors, ça, là-dessus, je vais vous dire qu'on est dans des délais très serrés. Soyons réalistes, les gens, ils sont d'accord avec ça, ils reconnaissent le besoin, le besoin pressant, mais, en même temps, ils reconnaissent qu'il faut être prudent, il faut être vigilant, il faut être sage, il faut être rigoureux surtout pour faire en sorte qu'effectivement on puisse... On n'est pas devant des projets pilotes, on commence une intégration, puis il faut qu'on fasse bien ça. On est devant, on l'a compris, un défi de finances publiques actuellement au Québec. On le voit, ça demande un bon investissement. Si on veut le faire, il ne faut pas rater notre coup. Et, dans ce sens-là, les gens disent : Oui, prêt, on y va. Mais — il y a un «mais» — il faut… Écoutez, vous le savez, le temps des inscriptions, c'était février. Le temps presse. Une décision doit être imminente parce que, écoutez, déjà les plans d'affectation sont votés, là, dans les commissions scolaires, là. On est, écoutez, dans la grosse organisation scolaire actuellement, les délais sont courts. Alors, c'est pour ça qu'il faut ça. Puis, évidemment, il va falloir que les sous soient là, il va falloir que l'argent soit au rendez-vous parce que, c'est ça, on ne pourra pas financer ça.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Bouchard, je pense que la ministre voulait peut-être conclure, il reste à peine quelques minutes. Mme la ministre.

• (20 heures) •

Mme Malavoy : Oui. Bien, je vais essayer de poser une question, je ne sais pas si vous aurez le temps de détailler. Mais une des choses aussi qu'on doit ajuster de notre côté, c'est : On s'adresse à des enfants de milieux défavorisés, et là il y a donc... et on ne veut pas que l'enfant, personnellement, ait cette étiquette. Donc, on travaille pour le moment avec ce qu'on appelle les indices de peuplement, c'est-à-dire, en gros, qu'un enfant soit d'un quartier défavorisé. Est-ce que vous avez des recommandations à nous faire par rapport à ça, pour la façon de choisir et d'identifier les enfants auxquels s'adresseraient ces services?

Mme Bouchard (Josée) : Absolument, Mme la Présidente, dans le sens où il faut éviter de faire en sorte qu'on étiquette ces jeunes-là, qu'on se dise, bien, parce qu'on a créé une maternelle quatre ans dans l'école, bien, que ça, c'est, hein, nos petits défavorisés, là, dans l'école. Ça, c'est porter atteinte à leur petite personne puis à leurs parents aussi, qui n'ont souvent pas choisi leur condition aussi.

Donc, écoutez, dans le fond, on vise, vous savez, la fameuse cote 9, 10, mais je crois qu'en fait l'idéal sera de se diriger vers, effectivement, un secteur où on a, bon, quand même un degré de défavorisation qui est relativement élevé, mais où on pourra se permettre de se diriger aussi vers, par exemple, ce qu'on appelle nos cotes, là, nos codes 6, 7 ou des choses comme ça. Mme Gagnon, peut-être, pourrait compléter.

Mme Gagnon (Pâquerette) : C'est le territoire d'appartenance, dans le fond. Ce qu'on veut dire, là, clairement, c'est d'éviter à tout prix d'identifier un enfant. On a travaillé dans le cadre d'Agir autrement, dans d'autres mesures sur plus des territoires d'appartenance, qui nous apparaissent, en tout cas, plus justifiés pour identifier une clientèle potentielle parce que, dans certains endroits… Tantôt, Mme la ministre, vous posiez la question sur la difficulté pour des endroits où on aura plus de 18 élèves, et, effectivement, il va falloir que les commissions scolaires se donnent, et rapidement, des critères d'inscription. Il y aura des centaines et des centaines — pour certaines commissions scolaires — d'enfants susceptibles d'aller dans ce groupe-là. Il y en a beaucoup. Alors, est-ce que les commissions scolaires vont devoir travailler avec une consultation en vertu de l'article 239 sur les critères d'inscription? On a quand même un processus à mettre en place, et, demain, c'est le 1er mai. Alors, ça crée quand même une difficulté.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. C'est malheureusement tout le temps que nous avions du côté du gouvernement. Je vais maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Mille-Îles...

Mme Charbonneau : Il y en a 1 000, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : ...vous avez la parole pour un temps de 19 min 30 s.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Bonsoir. À cette heure-ci, c'est ce qu'on dit : Bonsoir. Mme la présidente, Mme la directrice générale, gens qui vous accompagnent, je vous avoue que je cherche encore ma question pour M. Tremblay, mais je vais y arriver. Je vais y arriver, je suis sûre.

On a reçu différents groupes au sein... Depuis lundi après-midi, on a reçu différents groupes qui nous ont sensibilisés sur différents aspects de ce qu'on donne présentement puis ce qu'on cherche à donner dans le futur, donc le préscolaire quatre ans temps plein. On a beaucoup parlé du mi-temps. On a parlé du mi-temps pour les élèves à défis particuliers parce qu'on le sait que ça se passe dans nos écoles. On a parlé de Passe-Partout. Je pense qu'on n'en a pas assez parlé, puisque, quand on en parle... J'imagine que les gens qui nous écoutent pensent au personnage qu'on a vu dans l'émission, mais le principe de Passe-Partout et le rôle du parent à l'intérieur du mode d'apprentissage puisd'apprivoiser l'école et le monde éducatif sont fort intéressants. En lisant le projet de loi puis en échangeant, je n'ai pas entendu ça encore, l'implication du parent à l'intérieur même d'un programme, du quotidien dans nos écoles. J'ai entendu des explications que mon parent va avoir la même responsabilité puis le même contact qu'au préscolaire cinq ans ou en première année, donc un bilan à tous les tant de mois, une rencontre, peut-être un party d'Halloween puis un party de Noël, là, mais pas plus que ça. Puis on se souviendra que Passe-Partout, il y a vraiment une relation d'apprentissage pour le parent, puisqu'il va suivre des cours quasiment sur sa compétence parentale.

Dans vos recommandations, je n'ai pas vu non plus le mot «conseil d'établissement». Ça m'inquiète un peu parce qu'habituellement vous êtes bien habiles pour défendre cet organisme-là qui est dans chacune de vos écoles et qui cherche à prendre sa place. Donc, ma première question sera une question qui vient de la fédération du comité de parents. Je vous la soumets parce que je pense que votre opinion est importante aussi sur celle-là. Leur deuxième recommandation, c'était : «Reconnaître la capacité du conseil d'établissement d'approuver — c'est écrit en gras, ce mot-là — les modalités de mise en place des maternelles pour les enfants âgés de quatre ans au sein d'une école et le type de services offerts aux parents et modifier en ce sens l'article 37.2 prévu.» Je voulais vous entendre là-dessus.

Mme Bouchard (Josée) : Alors, d'abord, concernant le conseil d'établissement, si on n'en a pas parlé, ce n'est pas parce qu'on les sous-estime, au contraire, Mme la Présidente.

Mme Charbonneau : ...que j'avais.

Mme Bouchard (Josée) : Non, vraiment. Parce qu'on s'est penchés vraiment sur les responsabilités qui, déjà, nous sont dévolues dans la Loi sur l'instruction publique. Puis je vais vous dire bien... en tout cas, bien humblement, là, qu'au fond, tout comme on a agi dans le cadre de l'implantation des maternelles cinq ans à temps plein, je pense qu'en termes de responsabilités puis de ce qui est bien décrit dans la loi, bien, en tout cas, on le perçoit de la même façon pour les services, là, qui seraient dévolus aux enfants de quatre ans. C'est aussi simple que ça. Voilà.

Maintenant, Mme Gagnon pourrait peut-être ajouter quelque chose là-dessus.

Mme Gagnon (Pâquerette) : Merci, Mme la Présidente. Deux éléments. Effectivement, si la maternelle quatre ans, après quelques années, devient un service éducatif presque au même titre que la maternelle cinq ans, mais avec des balises, là, pour une clientèle défavorisée, il n'y a aucun motif raisonnable de croire que le conseil d'établissement n'aura pas à convenir des modalités, puisque ce sont leurs responsabilités. Aucun problème là-dessus, c'est dévolu au conseil d'établissement.

Je voudrais dire quelques mots sur Passe-Partout. Passe-Partout est un service très, très apprécié, très bien implanté au Québec depuis de longues années et il met en scène, effectivement, les parents, tellement qu'un parent qui ne voudrait pas s'impliquer dans Passe-Partout, son enfant n'aurait pas accès aux services. Alors, ce qu'on dit dans notre mémoire, la pérennité de ces services-là, j'insiste… C'est peut-être un peu, un peu, Mme la Présidente, hors d'ordre, mais si peu. Dans la règle budgétaire de la prochaine année, on voit apparaître une base de financement pour Passe-Partout et maternelle demi-temps sur la clientèle du 30 septembre 2012. Ça veut dire qu'on gèle le financement sur la base de la clientèle, même si elle croît. Alors, nous, ce qu'on dit : Si on veut assurer une pérennité, il faut avoir… sur la base de la clientèle existante inscrite au 30 septembre de l'année en cours. Alors, c'est un peu notre discours, on croit beaucoup à cette complémentarité de services. Et Passe-Partout est un service remarquable et si bien implanté au Québec, il faut qu'il demeure.

Mme Charbonneau : Vous avez tout à fait raison…

Mme Bouchard (Josée) : Peut-être un petit ajout si vous le permettez, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Certainement, Mme Bouchard.

Mme Bouchard (Josée) : Vous savez, justement, l'implication des parents, dans le cadre de l'implantation de ce programme-là, sera assurément très importante. Ces gens-là, de toute façon, je pense qu'une fois qu'ils auront vu, je dirais, tout le bien-être, tous les bénéfices que ça procure, je pense que ça va être très rassurant pour eux de savoir qu'ils ont du support.

Il y a une chose, par ailleurs, qu'il faut toujours avoir en tête, toujours avoir en tête, puis c'est quelque chose qu'on partage, encore une fois, dans les équipes de partenaires sur la persévérance scolaire et qui a été rappelée hier au cours d'une entrevue à Radio-Canada par Dr Julien, qui disait, justement, sur l'implantation de ce programme-là, qu'il trouve... qu'il applaudit, il disait : Écoutez, ça ne peut pas être la seule solution, hein, il y a... Bon. Puis c'est pour ça que nous, on dit : Il ne faut pas échapper Passe-Partout, il ne faut pas échapper tout ce qui peut aussi être desservi par les organismes communautaires, qui sont tellement importants dans ces milieux-là, parce que la persévérance scolaire, la réussite vers la diplomation, bien, ça se fait avec la communauté, ce n'est pas la responsabilité unique de l'école. Voilà.

Mme Charbonneau : Je suis d'accord avec vous. Habituellement, d'ailleurs, nos communautés autour de nos écoles ont pris leur place, et nos directions d'école, comme nos conseils d'établissement, ont établi des partenariats fort intéressants au niveau de nos communautés, vous avez raison. Il y a la norme aussi pour Agir autrement qu'il ne faut surtout pas échapper parce que ça aussi, depuis le temps que c'est implanté, il y a des systèmes qui se sont développés puis des façons de faire qui sont vraiment extraordinaires. Donc, j'en suis avec vous.

Mais, je le disais plus tôt, on peut avoir toutes les meilleures volontés et toute la confiance qu'on veut avoir, ce qui n'est pas écrit, ce n'est pas écrit. Puis, quand ce n'est pas écrit, je ne suis pas obligée. Je le dis tout simplement. Et, pour avoir vécu plusieurs situations, puis quelques fois avec vous, ce qui n'est pas écrit, ce n'est pas écrit. Donc, si j'écris quelque chose… Je le disais ce matin, un projet peut être un projet extraordinaire. S'il est mal ficelé, ça devient un projet mal ficelé malgré toute l'exception et l'aspect extraordinaire qu'il peut avoir. Donc, sur cet aspect-là, quand vous me dites : Oui, on fait confiance, je vous entends puis je comprends que vous faisiez confiance. Je me garderai, moi, de mon côté, une inquiétude par rapport à ce qui n'est pas écrit. Mais l'écriture du projet de loi, la ministre le disait, c'est un autre tantôt. Donc, je vais m'en tenir à ça.

Votre troisième recommandation dit : «La fédération demande au [ministère] que les modalités d'implantation progressive soient flexibles et respectueuses des réalités des commissions scolaires.» On a soumis quelques inquiétudes, le principe du mur-à-mur m'inquiète. Il m'inquiète parce qu'il a été dénoncé sous d'autres tribunes pour d'autres raisons. Je pense à l'anglais intensif, je pense aux tableaux blancs. Je suis capable de penser à ça parce que je faisais partie du gouvernement qui a pris ces décisions-là. Mais implanter quelque chose, même si c'est progressif, si je l'implante de façon rigide, j'ai une problématique, j'ai un regard qui est porté de façon systématique sur... La ministre le soulignait, on ne veut pas faire de ghettos, on ne veut pas faire... Vous avez soumis une idée que j'ai jasé un peu plus tôt, c'est-à-dire est-ce qu'on est obligé de rester à 9, 10 dans la cote de défavorisation? C'est une question qui se pose. Si, dans les milieux, ils ne sont pas capables d'avoir un groupe à 15, peuvent-ils aller piger dans... Y a-t-il d'autres endroits dans la façon de faire des commissions scolaires qui feraient en sorte qu'il faut se trouver une flexibilité entre chacun des milieux pour l'adapter de la meilleure façon ou si le seul endroit, c'est vraiment dans la formation des groupes, puis il n'y a rien d'autre ailleurs?

• (20 h 10) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette) : C'est certain que la formation des groupes, c'est la base, hein? C'est la base de l'organisation scolaire, c'est avec elle qu'on va réussir souvent ou non, hein, l'organisation d'une classe. Quand on parle de flexibilité, tantôt Mme Bouchard donnait un exemple, il y en a des dizaines, peut-être, au Québec… Lorsque la loi sera passée et qu'on sera en mode organisation, il va sortir des problématiques où une commission scolaire va peut-être dire : Moi, pour toutes sortes de raisons, j'ai besoin de former une multiâge. On l'a dit déjà, je pense qu'il y a une certaine ouverture. Mais c'est important, la multiâge a fait ses démonstrations au Québec. Pas quatre, cinq ans, on ne l'avait pas, le quatre ans, mais elle l'a fait dans d'autres niveaux. C'est peut-être intéressant de voir une formation de groupe qui sera moins nombreuse, bien financée, mais multiâge, qui va permettre à un village de donner ce service-là, alors qu'il ne pourrait pas le faire parce qu'on n'aurait pas suffisamment d'élèves.

Il y a peut-être des commissions scolaires qui vont appeler au ministère en disant : Nous, on a des problématiques de formation de groupes parce qu'on a trop d'élèves dans telle municipalité, puis c'est dans l'autre qu'on le demande. Ils vont peut-être vous faire des propositions qu'on ne connaît pas, on ne les a pas analysées actuellement. Ce qu'on demande au ministère, c'est une flexibilité dans l'organisation des maternelles et dans le financement de celles-ci. Que la règle budgétaire soit claire, mais flexible. Qu'on n'y pointe pas exactement le coût du transport, le coût du service de garde pour que la commission scolaire puisse, avec l'école choisie, déterminer les besoins de l'école pour bien servir cette clientèle-là. C'est de ça qu'on parle. On ne parle pas de donner la marge de manoeuvre pour que la commission scolaire fasse autre chose avec cet argent-là, ce n'est pas de ça qu'on parle. Ce qu'on dit : Assez flexible pour qu'on soit capable de rentabiliser l'argent qu'on aura et de dire : Si ça fonctionne bien, on sait pourquoi que ça a bien fonctionné, et, si c'est le contraire, on le sait aussi. C'est de ça qu'on parle.

Mme Charbonneau : Vous rappeliez un peu plus tôt, Mme la présidente, l'implantation du préscolaire cinq ans temps plein. Je m'en souviens, c'était une bonne idée. À partir du moment où on avait le financement pour ouvrir les groupes, c'était correct. Mais, après ça, il y a eu le manque à gagner pour avoir les locaux puis les aménagements. Donc, j'étais heureuse d'entendre la ministre parler du financement par élève. Et j'ai bien entendu le double à quatre ans qu'à cinq ans, et je le comprends parce qu'il n'y a rien en ce moment, hein, pour une classe temps plein quatre ans. Il y a du mi-temps, mais ce n'est pas temps plein. Donc, j'entends quand vous dites : On se souvient. Et, moi aussi, je m'en souviens, c'est ce qui me rend un peu sceptique sur l'aménagement et les possibilités.

Septembre 2013, c'est demain, hein? Les inscriptions dans les commissions scolaires sont faites. Les budgets ne sont pas tous votés pour des raisons qu'on sait toutes les deux, mais il y a des décisions à prendre puis il y a des choses à regarder, hein, à l'intérieur de notre commission scolaire, puis, entre autres, les services complémentaires parce que j'ai des décisions budgétaires à passer, là, avant le mois de juin puis j'ai une décision entre la facture élève, la facture de taxes puis la coupure. Ça, c'est à peu près mon choix, comme commissaire, qui s'en vient, là, dans quelques semaines.

Si j'implante une préscolaire quatre ans en amont pour la persévérance scolaire puis pour donner le goût à l'école, qu'est-ce qui arrive si je n'ai plus de services en troisième année parce que je n'ai pas remplacé l'orthophoniste qui est partie en congé de maternité parce que c'est mieux de ne pas la remplacer, ça coûte moins cher, puis j'ai une économie importante, parce que, le module de ma cour, j'avais mis mon argent comme école à la commission scolaire, dans ce que j'appellerai le compte de banque de la commission scolaire, puis là, bien, elle a décidé d'aller piger dans ses surplus, ça fait que mon module, ça ne sera peut-être pas cette année dans ma cour? Comment je fais pour assurer la réussite et la persévérance de mes élèves si j'implante quelque chose à quatre ans, mais je le laisse tomber en troisième année?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Bouchard.

Mme Bouchard (Josée) : Excellente question, n'est-ce pas? Écoutez, j'ai envie de dire : De là l'importance, en fait, d'avoir fait le choix d'y aller de façon progressive parce qu'on est capable de voir venir les choses, de faire de la planification financière, de convaincre le gouvernement, et notamment le ministre des Finances, que c'est uninvestissement, et non une dépense, et nous donner le temps, bien sûr, d'aménager, effectivement, les écoles pour recevoir cette jeune clientèle. Parce qu'effectivement, lorsqu'on a fait l'implantation massive, là, de... comme on dit, plein temps des maternelles cinq ans, il a fallu aussi agir de ce côté-là, puis, à l'époque, le gouvernement a, effectivement, investi, là, là-dedans. Parce que, quand on tombe... Je vous disais qu'on est sur le terrain, là, ça va jusque dans le détail, par exemple, de la petite toilette, là, qui ne sera pas loin parce qu'on est avec des petits de quatre ans, puis, effectivement, tu sais, ça se pourrait qu'ils ne soient pas encore tout à fait entraînés à la propreté. Il y a toutes sortes d'affaires qui arrivent, là, hein? Il faut être prêt à réagir, puis c'est pour ça qu'on a peut-être besoin… et sûrement besoin d'une autre personne qui nous accompagne dans la classe pour ne pas laisser les élèves seuls, puis tout ça, et donc ça demande de l'aménagement.

Pour septembre prochain, c'est évident que les commissions scolaires, bien, elles vont choisir, là, un endroit où il y a une place de libre, là, tu sais. Ce n'est pas vrai qu'on va les mettre, là, dans le fond, tu sais, d'un corridor puis… On a assez de rigueur puis de professionnalisme, là, pour bien agir, mais il faut être aussi conscient de ça, qu'effectivement, à l'heure où je sais qu'on est beaucoup interpellés par l'état des bâtiments, par aussi le besoin de nouvelles écoles au Québec en raison des déplacements démographiques, bien, qu'il va falloir aussi être capable, là, de répondre à ça. Donc, je pense que, dans ce sens-là, Mme la députée Charbonneau a une préoccupation qui rejoint la nôtre puis qui doit être, comme on dit, prise en compte par l'ensemble des parlementaires dans la projection, justement, de cette implantation-là.

Mme Charbonneau : Merci. Je regarde le temps qu'il me reste. C'est toujours la partie riche des échanges, le temps qu'il reste. Vous me dites : Oui, c'est vite, puis, oui, on va s'ajuster. Puis, ne craignez rien, Mme Bouchard, vous savez — si vous ne le savez pas, je le répète — j'ai une confiance aveugle dans les commissions scolaires. Ça fait partie de mes qualités puis de mes défauts, j'ai une confiance aveugle et je sais qu'on se revire de bord sur un dix cennes bien assez vite. Des fois, pas par choix, par obligation, parce qu'en bout de ligne la personne qui reçoit, c'est un jeune. Des fois, il n'a pas quatre ans, là. Des fois, il a 17 ans, il est handicapé puis il est dans une classe fermée. Mais c'est quand même quelqu'un qui reçoit un service, et, plus souvent qu'autrement, la commission scolaire répond rapidement à cette volonté-là.

Malgré la volonté de répondre rapidement, il y a quand même un ajustement d'un paquet de politiques, hein, la politique du transport, la politique d'inscription, il y a maintenant une politique pour les saines habitudes alimentaires. Je suis capable d'en nommer au moins une main, au moins une main; avec un peu d'effort, deux mains. Vous avez l'obligation, chaque commission scolaire, de consulter, d'aller voir le milieu, d'interpeller vos conseils d'établissement, le comité de parents.

Est-ce que — puis je le répète de façon très ouverte parce que c'est une opportunité que vous avez, mais, en même temps, si vous me dites oui, c'est tout à fait correct, là, il n'y a pas de blâme là-dessus — 2013, c'est trop tôt ou il n'y a pas de souci, vu que c'est progressif, puis que c'est juste une classe par commission scolaire, puis je n'ai pas à me presser? Puis, effectivement, vous avez raison, je suis sûre qu'ils vont tout faire pour trouver le meilleur endroit avec le meilleur équipement. Malgré le fait que j'ai un problème à Montréal de places-élèves puis un problème de distance dans mes commissions scolaires anglophones, je le sais que les efforts vont être faits pour trouver la meilleure place, le meilleur moment, le meilleur endroit. Maintenant, est-ce que 2013, on est trop proches?

• (20 h 20) •

Mme Bouchard (Josée) : Alors, la réponse, elle est très claire, c'est : Oui, on est prêts, mais, je l'ai bien dit tout à l'heure, à certaines conditions. Il faut que les décisions se prennent rapidement, puis il faut que l'argent soit au rendez-vous, puis, oui, on va être capables d'organiser ça, compte tenu qu'on est dans une classe, là, par commission scolaire. Tout comme le transport aussi. Je le sais que le transport scolaire, c'est une question aussi qui a été relevée pendant cette commission, et, là aussi, pour nous, vous savez, c'est avec... Moi, en tout cas, moi, c'est avec beaucoup de fierté que je peux affirmer qu'on a un système, un réseau de transport scolaire des plus performants dans le monde, hein, il faut le dire. On est membres de l'association internationale du transport scolaire, je vais vous dire qu'il y a beaucoup de gens qui nous envient. Et surtout, je vais vous le dire, au Québec on est très forts aussi dans le domaine de la sécurité. Il y a très peu d'accidents ici, au Québec — on croise les doigts — mais c'est parce que ce n'est pas venu tout seul. Il y a un travail extraordinaire de partenariat qui se fait entre les transporteurs, les commissions scolaires, la Sûreté du Québec, les corps policiers, et tout ça, et je peux vous assurer que nos petits de quatre ans aussi seront en sécurité.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 5 min 15 s.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mesdames, rebonsoir, monsieur. Je vous écoutais avec beaucoup d'attention parce qu'effectivement ce n'est pas une question de partisanerie, mais vraiment, dans un dossier comme celui-ci, ce que nous avons à coeur, c'est le meilleur intérêt de l'enfant, puis on veut vraiment essayer de comprendre ce qui est le mieux pour lui. Et, je le disais cet après-midi, il est minuit moins cinq, et là vous me réconfortez si je peux dire, mais, enfin, vous venez confirmer mon appréhension, puisque vous dites : Déjà, les inscriptions sont passées, déjà… et là on est dans la préparation, vraiment, de septembre pour ce qui est des enseignants, et des ressources, et tout ça.

Et, là-dessus, je dois revenir. Cet après-midi, nous avions la direction de l'école et les partenaires qui... Vous connaissez sûrement cette école, l'école Saint-Zotique à Montréal, l'expérience qui s'y vit là-bas avec la maternelle quatre ans dans un milieu défavorisé, c'est l'exemple de réussite ayant réuni toutes les conditions gagnantes, si je peux m'exprimer ainsi. Alors, ma question est la suivante. Compte tenu du fait que c'est peut-être l'exemple qui nous anime, ce qui s'est passé à Saint-Zotique, et avec tout ce qu'ils nous ont expliqué qu'ils avaient comme ajouts, comme encadrement, vraiment on a bichonné les enfants de quatre ans pour y arriver, ma question est la suivante : Est-ce que vous pensez que vous pourriez, avec le court laps de temps que nous avons, arriver au même résultat et à la même performance que l'école Saint-Zotique pour septembre prochain? Parce qu'ils avaient, là, là, tout ce qui était optimal pour réussir.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette) : Je peux faire un bout, si vous permettez, Mme la Présidente. L'école Saint-Zotique n'est pas arrivée là en deux mois, hein? Alors, ce n'est pas possible de penser que, dans les 69 commissions scolaires qui vont implanter en septembre, ce sera un si beau résultat. Tant mieux. Et la directrice, qui est venue témoigner, je crois, ici, est aussi interpellée par le ministère pour la belle expertise qu'elle a, et elle est autour de notre table, là, pour voir les pratiques gagnantes, les conditions. Alors, on se fie beaucoup sur les expériences de la sorte pour dire qu'au Québec, dans quelques mois, on aura déjà amélioré probablement le service qui sera en septembre.

Ce qui est certain, Mme la députée, c'est qu'il n'y a pas d'enfants, au Québec, de quatre ans qui seront en situation de non-sécurité, non sécuritaire ou d'incompétence, mais ils n'auront probablement pas tout le soutien et l'expertise d'une école comme Saint-Zotique, qui n'est pas arrivée du jour au lendemain où elle est actuellement. Mais on puise de l'expérience parce que c'est fort intéressant.

Et j'ajouterai que, si, d'une façon téméraire, le gouvernement avait souhaité implanter partout au Québec autant de groupes que l'on souhaitait, on aurait été probablement à risque. Mais, un groupe par commission scolaire, j'ai confiance. J'ai confiance en l'expertise du réseau pour mener à bien ces expériences-là.

Mme Roy (Montarville) : Et, selon vous, pour mener à bien cette expérience-là, comme vous dites, selon vous, il faudrait combien de mois pour arriver à la finalité? Parce que c'est vraiment pour contrer le décrochage et puis aller chercher ces petits qui n'ont pas accès aux CPE, qui ne vont en nulle part avant l'âge de cinq ans, ça prendrait combien de temps pour que ça, cet objectif-là, soit réalisé?

Mme Gagnon (Pâquerette) : Vous savez, déjà, le gouvernement... Et je suis très heureuse d'entendre... Et on a déjà été consultés là-dessus pour mettre en place ce processus. Ça n'a pas commencé hier, hein, c'est sûr. On a hâte que ça aboutisse, évidemment, mais ça n'a pas commencé hier, et on parle de formation, hein? On parle de formation, on ne parle pas de laisser les écoles à elles-mêmes. On ne parle pas juste de formation avec les enseignants, on parle de formation en duo, l'enseignant et la direction de l'école. Alors, on parle de quelques mois.

Évidemment, ça n'arrivera pas tout seul, mais c'est comme toute réforme ou tout changement qu'on implante, hein? Si on veut faire un changement au Québec avec la petite enfance, je pense que ça va demander de l'énergie puis ça va demander un peu de temps. Mais il faut commencer, et nous, on est d'avis que c'est une bonne idée de commencer en 2013 doucement, progressivement, en ayant le courage de faire un temps d'arrêt, d'évaluer, peut-être faire un recul aussi, ce qu'on n'a pas fait dans d'autres domaines, avoir le courage de dire : Ça, ça ne fonctionne pas, revenons, essayons autre chose.

Mme Roy (Montarville) : Là, je vais vous poser une question bien plate, vous ne m'aimerez pas. On avait les gens de la CSN, si je ne m'abuse… les syndicats, qui étaient contre, contre l'implantation. Alors, dans le pratico-pratique, dans la vie de tous les jours, avec vos enseignantes, comment pensez-vous que ça va être, cette implantation-là, quand on n'a pas le syndicat avec nous?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Bernard) : Bien, écoutez, vous me permettrez de vous dire que, bon, comme directeurs des relations de travail, évidemment, on a des relations constantes avec les organisations syndicales. Vous savez, on y a fait référence, on a d'abord un projet pilote présentement avec la FAE, qu'on a convenu dans le cadre des dernières négociations. Donc, c'est vraiment une entente négociée ministère de l'Éducation, Fédération des commissions scolaires, FAE qui a cours présentement et qui, jusqu'à preuve du contraire, est un succès et témoigne d'une collaboration, donc, importante, là, avec une organisation syndicale.

Mais je pense qu'on peut témoigner qu'on aura le même type de collaboration, je crois, avec les autres groupes syndiqués. La CSN est présente dans les commissions scolaires pour le personnel de soutien exclusivement, et je comprends que la position véhiculée par la centrale, évidemment, dépasse, évidemment, le contexte des membres, là, du secteur de l'éducation et couvre aussi, là, la réalité de l'ensemble, là, de leur membership. Mais donc, pour ce qui est de notre collaboration avec les organisations syndicales, je pense qu'on peut témoigner qu'on a rarement vu au Québec une si grande harmonie avec les organisations syndicales que dans le monde scolaire présentement, et on continue de travailler très fort pour faire en sorte que ça soit en partenaires qu'on implante, donc, les réformes.

Mme Roy (Montarville) : Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Mesdames messieurs, merci pour votre présentation, et j'invite maintenant les représentants du Conseil supérieur de l'éducation à prendre place.

Nous allons suspendre nos travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 28)

(Reprise à 20 h 30)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons reprendre nos travaux. Mesdames, monsieur, bonsoir. Bienvenue à l'Assemblée nationale. M. Lessard, je suppose que c'est vous qui allez être le porte-parole. Donc, vous allez avoir un temps de 10 minutes pour nous faire part de votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les membres de la commission. Donc, sans plus tarder, M. Lessard, je vous cède la parole, et bien vouloir nous présenter les personnes qui vous accompagnent.

Conseil supérieur de l'éducation (CSE)

M. Lessard (Claude) : Merci, Mme la Présidente. Et merci de nous accueillir ce soir à cette commission parlementaire. Je suis accompagné de Lucie Bouchard, qui est la secrétaire générale du conseil supérieur, et d'Hélène Gaudreau, qui est la coordonnatrice de la Commission de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire.

Vous savez peut-être que le conseil est structuré en cinq commissions, une par ordre d'enseignement, et l'avis dont je vais résumer à grands tirets le contenu a été produit par la Commission de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire et approuvé après délibération par la table du conseil.

Alors, le conseil a produit un avis qui est intitulé Mieux accueillir et éduquer les enfants d'âge préscolaire, une triple question d'accès, de qualité et de continuité des services. Et l'avis est organisé autour de trois enjeux majeurs : l'accessibilité des services offerts aux enfants de quatre et cinq ans, la qualité de ces services et des approches pédagogiques et la continuité de l'expérience éducative des jeunes enfants. Je vais rapidement dire quelques mots sur chacun de ces enjeux-là.

Sur l'enjeu de l'accessibilité, le conseil tient à célébrer les progrès remarquables que le Québec a faits au cours des 15 dernières années en matière de services éducatifs aux jeunes enfants et de mesures favorables aux familles. On a tendance à oublier d'où on vient. On trouve que le temps passe vite, mais, en 15 ans, c'est assez phénoménal que 98 % des enfants se retrouvent dans des maternelles cinq ans non obligatoires, mais qui sont vécues comme un... j'allais dire comme un service essentiel, comme un ingrédient de base de la socialisation et de la scolarisation de l'ensemble des jeunes du Québec. Et ce n'est pas rien non plus qu'en 15 ans nous soyons rendus à entre 65 % ou 73 % — ça dépend des calculs — de services offerts aux enfants de quatre ans, encore une fois sur une base strictement volontaire, comme si l'État, depuis 15 ans, à la hauteur de ses capacités financières, répond à une demande qui se maintient et qui ne se dément pas.

Et l'État l'a fait en accordant une place dans ce champ à une diversité de fournisseurs de services. Il y a des garderies en milieu familial, il y a des garderies privées, il y a des CPE, il y a des services de garde en milieu scolaire, il y a des maternelles quatre ans à demi-temps, il y a des maternelles cinq ans. Il n'y a pas un fournisseur unique, il n'y a pas une seule voie pour répondre aux besoins des familles et des enfants. À cet égard, pour autant que le conseil a regardé ce qui se passait dans quelques pays étrangers, nous sommes tout à fait dans la mouvance du modèle suédois.

Des difficultés subsistent cependant sur le plan de l'accessibilité, à la fois au plan de l'offre de places, notamment en milieu défavorisé, et aussi de l'expression de la demande, dans le sens où on a effectivement une certaine difficulté à aller rejoindre certaines familles, notamment en milieu défavorisé. Cela tient à plusieurs facteurs : le manque de places, le parcours du combattant que bien des mères de famille connaissent pour trouver une place, le coût. Ce n'est peut-être pas beaucoup, sept dollars, mais, quand vous avez deux enfants et que vous multipliez ça par des mois et des années, ça finit par faire une somme.

Et puis une hypothèse que le conseil a formulée et qui, je crois, a été reprise ici même par un intervenant, il est possible que les services de garde soient perçus par une certaine partie de la population comme un mécanisme, d'abord et avant tout, de conciliation famille-travail. Et la perception serait parfaitement fondée parce que c'est pour ça qu'on les a d'abord créés, pour permettre aux femmes de retourner sur le marché du travail. Ce qui peut vouloir dire chez certaines mères de famille que, si je ne travaille pas, mon devoir de mère, c'est de s'occuper de mes enfants puis de les garder à la maison, car une garderie ou un CPE, dans la représentation peut-être populaire, ce n'est pas l'école, ce n'est pas une institution d'instruction et d'éducation des enfants, c'est un lieu de conciliation famille-travail. À volet éducatif, certes, mais ce n'est pas la même chose.

L'hypothèse qu'on a, c'est que probablement, en milieu défavorisé, il y a bien des mères de famille qui n'hésitent pas ou n'hésiteront pas à envoyer leur enfant dans une maternelle quatre ans parce que c'est l'école et que l'école, c'est pour le bien de leur enfant, alors que le CPE ou la garderie, c'est autre chose. C'est l'hypothèse qu'on a. Je suis obligé de dire que c'est une hypothèse parce qu'on n'a pas de données de recherche qui le confirment, mais je crois qu'elle…

Une voix : ...

M. Lessard (Claude) : Pardon?

Une voix : ...

M. Lessard (Claude) : Bon, je tiens à dire que ce n'est pas confirmé par la recherche. D'où notre objectif de dire que, d'ici cinq ans, si on y met l'effort, si on y met l'énergie, il ne devrait pas être si difficile que ça que d'atteindre un objectif de 90 %. Et, en ce sens-là, le conseil souhaite que l'État accorde la priorité des nouvelles places aux enfants de milieux défavorisés et que ces places soient gratuites, ce qui impliquerait de revoir la carte de la défavorisation parce qu'elle n'a pas été revue depuis la fin des années 90 et qu'en ce sens-là on se retrouve avec... La pauvreté change, hein, les gens se déplacent. La pauvreté, elle n'est plus ce qu'elle était il y a 40 ou 50 ans, dans le sens où elle est souvent liée à la précarité, elle est temporaire, on y rentre et on en ressort, elle se déplace dans différents quartiers. Je reviendrai, si vous le souhaitez, sur la notion de ghettoïsation, mais c'est tout à fait contradictoire par... Ça n'a rien à voiravec la ghettoïsation. Donc, il faut revoir la carte de la défavorisation si on veut, effectivement, bien cibler les besoins et les populations auxquelles on veut s'adresser.

En ce faisant, en mettant l'accent sur la petite enfance, en mettant l'accent sur des services pour les enfants de quatre ans, je crois que nous participons — et l'avis du conseil le montre assez clairement — qu'on participe d'une mouvance internationale qui est assez forte et qui accorde de plus en plus d'importance à la prévention, à l'intervention précoce et, pour le dire comme j'aime le dire, à une première chance pour tous les enfants, et une vraie première chance. Le Québec est champion pour donner une deuxième chance. On est bons pour faire du raccrochage, pour transformer le secteur des adultes pour que les jeunes puissent s'y raccrocher. On fait même l'envie de bien des gens dans d'autres sociétés parce qu'ils viennent voir comment on rattrape. Et, d'ailleurs, la manière dont on présente nos statistiques éducatives le montre clairement, on distingue toujours et on ajoute toujours le 10 % ou 12 % qu'on va chercher à l'éducation des adultes. On est bons là-dedans, mais peut-être qu'on pourrait se simplifier bien des choses et peut-être aussi faire des économies si, au départ, dès les premières années, des efforts sérieux étaient faits du côté de la prévention et de l'intervention précoce.

Dans cette mouvance internationale, le conseil a regardé ce qui se passait en France, en Suède et en Ontario, et, dans les trois cas, les services de la petite enfance sont sous l'autorité de l'éducation nationale, même en Suède où, pendant longtemps, ils ont été sous l'autorité du secteur de la santé. Mais il y a plusieurs cas de figure, même si c'est... Si vous voulez, les enfants de zéro à huit ans relèvent de l'éducation nationale, mais il y a plusieurs cas de figure, dans le sens où il peut y avoir plusieurs fournisseurs. Comme en Suède, il y a au moins cinq ou six institutions différentes en Suède. Vous connaissez le système français et le système ontarien, qui ressemblera bientôt au nôtre et qui couvrira l'ensemble des enfants de quatre ans et de cinq ans dans un réseau scolaire gratuit.

Cela ne veut pas dire... Ce que je viens de dire n'est pas un jugement anti-CPE. Toutes les discussions que vous avez eues, nous les avons eues au conseil. J'ai écouté hier soir une partie des témoignages que vous avez entendus et je revivais des discussions que nous avons eues à la fois à la commission, et la fois à la table du conseil, et avec les acteurs que nous avons consultés. Les CPE, c'est une belle réussite sur le plan de la qualité. Ça me permet de faire la transition avec le deuxième thème, celui de la qualité. Les CPE, c'est une belle réussite, et il n'y a pas lieu de remettre cela en cause. Le problème, c'est qu'il y a une partie des familles qui ne sont pas rejointes par les CPE, et c'est à ça qu'il faut s'adresser, dit le conseil. Bon.

Alors, les critères de qualité. Ou dit autrement, à la limite, la position du conseil est de dire : Peu importe le fournisseur, pourvu que la qualité y soit. Peu importe le fournisseur, pourvu que la qualité y soit. Et la qualité, d'après les études et la recherche que nous avons consultées...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je vous inviterais à conclure parce qu'il vous reste quelques secondes.

• (20 h 40) •

M. Lessard (Claude) : C'est beau. Le ratio adulte-enfants, la qualité des relations adulte-enfants, le programme d'activités, la formation initiale et continue des éducatrices et, en milieu défavorisé plus qu'ailleurs, un véritable et nécessaire partenariat avec les familles. Arrangez-vous pour que cela se fasse, peu importe le fournisseur, vous aurez des services à la petite enfance de qualité.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant débuter les échanges et nous allons du côté du gouvernement. Mme la ministre, vous avez la parole pour un temps de 23 minutes.

Mme Malavoy : Bonjour, M. Lessard. Je salue également les personnes qui vous accompagnent. Je vous remercie d'être là. Et je dirais que, bon, tous nos intervenants sont précieux, mais vous, vous avez, je crois, un grand avantage qui est d'être dédié à la réflexion sur les services que nous offrons en matière d'éducation au Québec et, donc, d'être vraiment à un niveau de réflexion, je dirais, qui est global et qui essaie d'avoir une vision d'ensemble, et je trouve que vos propos dénotent bien le poste d'observation et de réflexion que vous occupez.

Je comprends bien, donc, que, pour vous, il y a un ensemble de services variés et que c'est bien comme ça. Autrement dit, qu'on n'a pas besoin d'un modèle unique, qu'on a des modèles… Moi, j'appelle ça des portes d'entrée, en fait, différentes portes d'entrée pour faire que nos petits enfants grandissent bien et, puisque moi, je suis ministre de l'Éducation, soient correctement préparés à réussir un parcours scolaire, donc arrivent au début de ce parcours scolaire avec toutes les cartes en main pour se sentir à l'aise, heureux et acquérir les connaissances que l'on souhaite qu'ils acquièrent. Donc, je trouve rassurant d'entendre aussi clairement de votre part que l'idée d'ajouter des maternelles quatre ans à temps plein, ça ne présume pas de la qualité de ce qui se fait ailleurs. Ce qui se fait ailleurs est excellent, mais on ajoute quelque chose parce qu'il y a des enfants qu'on ne rejoint pas.

Vous avez abordé — mais il y a quelque chose là d'assez fondamental — vous avez abordé la question de la vocation des services de garde et, donc, de l'image qui est réelle, là… Quand on a commencé à implanter des services de garde au Québec, c'est parce qu'on voulait, effectivement, une conciliation famille-travail, et on pensait particulièrement aux femmes qui étaient massivement sur le marché du travail et qui, donc, partageaient avec les hommes la volonté de travailler et d'apporter des revenus à la famille. Donc, c'est vrai qu'il y a eu cet angle-là, et j'aimerais juste que vous repreniez un peu cet élément-là. Parce que ce que je comprends, c'est que cela a donné une connotation qui expliquerait, pour une part, que, pour certains parents, ce n'est pas un milieu qu'ils vont choisir pour leurs enfants, puis, s'ils font un choix, ils vont le faire plus tard, ils vont le faire plus rattaché à l'école. J'aimerais que vous repreniez peut-être un peu cet aspect-là.

M. Lessard (Claude) : Vous aurez compris que je ne voulais pas, d'aucune manière, dire que, dans les CPE, il n'y a pas de programme éducatif. Il y en a un. Le Québec a mis sur pied un ensemble de services dans le cadre d'une politique familiale pour permettre aux femmes de retourner rapidement après la... enfin, au moment où elles le souhaitaient, après la naissance de leur enfant, pour retourner sur le marché du travail, et c'est comme ça qu'on a, entre guillemets, qu'on a présenté ou qu'on a vendu le réseau des CPE, ou le réseau des garderies en milieu familial, ou ailleurs. C'est comme ça qu'on les a présentés. C'est ce dont nous nous dotons comme société pour permettre aux femmes de retourner sur le marché du travail.

L'école, c'est autre chose. L'école n'est pas là pour garder les enfants pendant que les parents travaillent. L'école est là pour, d'abord et avant tout, le bien des enfants, pour les instruire, et les socialiser, et les qualifier. C'est les trois termes de la loi, et je crois que, dans la représentation des gens... Et je crois que ça explique le succès des maternelles cinq ans, soit dit en passant, le fait qu'on n'a pas eu besoin de dire aux parents : C'est obligatoire. Je crois que ça explique le succès des maternelles cinq ans, tout simplement parce que, dans la tête des gens, l'école, c'est pour le bien de mon enfant. Alors, si la société commence à juger que c'est normal qu'il commence à cinq ans, bien, il va y aller, et je serai un bon parent, et je le soutiendrai dans cette démarche-là.

Oui, je crois que cette différence de mission entre les deux institutions explique peut-être à la fois le succès des maternelles cinq ans et serait peut-être aussi une promesse de succès pour les maternelles quatre ans, notamment en milieu défavorisé et auprès des clientèles allophones pour qui l'école, c'est la voie d'avenir de leurs enfants, ils n'en ont pas d'autre. Je parierais là-dessus.

Mme Malavoy : Non, c'est éclairant, ce que vous dites. Nous visons des maternelles quatre ans à plein temps pour des enfants de milieux défavorisés précisément parce que c'est une autre porte d'entrée pour des enfants qui ne sont pas rejoints. Puis nous connaissons fort bien, vous et moi, les études qui ont montré à quel point il y a un pourcentage beaucoup trop important de petits enfants qui arrivent en maternelle avec des carences telles qu'on peut prédire qu'ils auront des difficultés. Donc, c'est pour ça qu'on fait ça. Une des critiques qu'on nous adresse, c'est de dire : Ces enfants-là, vous les étiquetez, vous allez créer des ghettos d'enfants de quatre ans de milieux défavorisés. Et donc, au lieu de les intégrer à un milieu plus hétérogène, vous les mettez de côté puis vous offrez quelque chose juste pour... J'aimerais vous entendre là-dessus parce que c'est une critique assez sévère qu'on a entendue de la part de quelques intervenants, et avez-vous une réflexion là-dessus?

M. Lessard (Claude) : Ce n'est pas l'école qui crée les catégories sociales de riches, ou de pauvres, ou de défavorisés, ou de favorisés. Ce n'est pas l'école qui crée cela, ou les CPE, ou les garderies. Ce sont des catégories sociales qui renvoient à des réalités de quartiers. J'avoue être personnellement étonné de cette critique-là. Le conseil n'en a même pas parlé parce que les politiques éducatives au Québec qui visent l'égalité des chances depuis 50 ans fonctionnent avec une approche dite écologique, c'est-à-dire qu'on identifie des zones de peuplement scolaire, on identifie des quartiers. Le ministère produit, depuis de nombreuses années, une carte de la défavorisation qui est l'outil qu'on s'est donné au Québec pour être équitables, c'est-à-dire en donner un petit peu plus à certains parce qu'ils en ont besoin de plus que d'autres.

Oui, bien sûr, ça veut dire que tel quartier sera étiqueté défavorisé. Cela n'est pas nouveau, et je ne crois pas qu'il y ait là un véritable problème, éthique ou autre. Les programmes de lutte aux inégalités scolaires et axés sur la petite enfance existent en Amérique du Nord depuis 50 ans. Les Américains ont développé Head Start dans les années 60, et, à ce que je sache, on n'a jamais reproché au gouvernement américain, parce qu'il avait des programmes qui ciblaient des quartiers et des écoles particulières et qu'il les soutenait financièrement... Je ne crois pas que la Cour suprême américaine ait déclaré qu'il y avait là une atteinte à la dignité des personnes. Je comprends mal l'accusation de ghettoïsation si on entend «ghettoïsation», là, au sens strict. «Ghettoïsation», c'est que vous enfermez quelqu'un, vous enfermez un groupe. Au nom d'une catégorie qui le définit, vous l'enfermez et vous lui dites : Il n'y a rien d'autre pour vous, vous restez là. Le ghetto de Varsovie, c'est ça, c'est une prison. Ici, ce n'est pas ça dont on parle. On parle d'offrir un service ciblé pour une population qu'on a toute la misère du monde à rejoindre. Moi, personnellement, je n'appelle pas ça de la ghettoïsation.

Là où il y a peut-être un petit problème, c'est dans la mesure où, dans certains endroits, il sera difficile… Parce qu'il n'y a pas suffisamment de zones 8, 9, 10, il y a des commissions scolaires qui ont de la difficulté, bon, et qui, là, sont obligées de dire : Sur le boulevard Taschereau, l'adresse 1275, oui, ça, c'est un code postal défavorisé. Là, on est dans de l'étiquetage, et là c'est dangereux, effectivement. Je crois que c'est dangereux.

• (20 h 50) •

Mais le milieu scolaire, depuis 50 ans, ne fonctionne pas comme ça. Le milieu scolaire fonctionne en fonction de... pardon, il se base sur des indices de défavorisation qui définissent un quartier et qui ne permettent pas d'identifier précisément telle ou telle famille ou telle ou telle adresse. Bon. L'école Saint-Zotique, que vous avez entendue, le problème ne se pose même pas parce qu'elle est au niveau 10, et là, que la maternelle quatre ans soit noyautée par des enfants favorisés, c'est peu probable. Vous comprenez, c'est peu probable que ça arrive. Mais il est possible que, dans d'autres endroits, on ait de la difficulté, effectivement, parce que, dans telle ou telle commission scolaire, la carte de la défavorisation — Dieu soit loué, tant mieux pour elle — n'est pas si grande que ça, il n'y en a pas tant que ça. J'en connais une qui est dans cette situation-là, où ils s'arrachent les cheveux pour remplir une classe. Peut-être faudra-t-il être souple dans des cas comme ceux-là. Mais, pour moi, ce n'est pas de la ghettoïsation. La ghettoïsation, ça voudrait dire qu'on enferme des enfants dans une solution qui n'est pas de leur choix et qui n'est pas dans leur intérêt. Oui.

Mme Malavoy : C'est très clair, ce que vous dites. Et je trouve cela rassurant comme analyse, et, donc, je suis heureuse d'avoir pu vous demander de préciser cela.

Tout à l'heure, vous vous étiez lancé dans le résumé de votre avis et vous aviez eu le temps de parlerd'accessibilité, de qualité. Il y a un autre chapitre qui porte sur la transition, puis j'aimerais que vous y reveniez parce que, moi, une des choses que je comprends de mieux en mieux quand on parle de lutte au décrochage scolaire très en amont, c'est qu'il faut faire très attention aux transitions. Il ne faut pas juste regarder les blocs comme étant des blocs en eux-mêmes, mais il faut aussi se poser la question du passage d'un bloc à l'autre, d'une étape à l'autre. Alors, puisque, tout à l'heure, vous n'avez pas pu exprimer votre pensée beaucoup là-dessus, j'aimerais vous entendre.

M. Lessard (Claude) : Oui. Bien, le conseil a consacré la troisième partie de son avis à cette problématique-là en l'analysant, si vous voulez, du terrain des familles et de l'école jusqu'au palier ministériel, en passant par les commissions scolaires. L'idée de base, c'est la continuité de l'expérience de l'enfant de la maison à la garderie, de la garderie au CPE — c'est souvent le profil — à la maternelle, au service de garde à l'école, à l'école primaire. Si on prend juste le microcosme de l'enfance et de ce réseau d'institutions, l'enfant va être mis en contact avec toutes sortes d'adultes, une variété d'adultes, plusieurs adultes qui ont des métiers différents, qui ont des cultures professionnelles différentes, qui ont des façons de concevoir la socialisation au métier d'élève ou au métier d'enfant différentes et qui se parleront ou ne se parleront pas.

En 2006, le conseil a fait un avis sur les services de garde en milieu scolaire, et, à l'époque, en tout cas... J'espère que ça a changé, mais, à l'époque, entre le service de garde en milieu scolaire, et la direction de l'école, et les enseignantes, il y avait des silos. Il y avait des silos, et c'était clair que ce n'était pas dans l'intérêt de l'enfant qu'il y ait des silos comme ça. Sur des choses, je sais que ça a beaucoup progressé, notamment sur les allergies alimentaires et les choses comme ça, là, parce qu'il faut quand même prévoir des choses. Mais il arrive que des enfants rentrent en maternelle avec de sérieuses difficultés qui ont été dépistées ou repérées en garderie ou en CPE, mais sans que nécessairement l'école ne le sache. Bon.

La continuité de l'expérience, c'est, oui, bien sûr, des adultes qui ont une culture commune, si je puis dire ça comme ça, qui partagent un certain nombre de choses fondamentales et qui sont cohérentes dans leurs interventions par rapport aux enfants. Ça, oui, mais aussi c'est un réseau d'intervenants qui sont capables de collaborer les uns avec les autres de telle sorte qu'ils maximisent leurs effets au lieu de travailler en silo. Cela est vrai, Mme la ministre, au ras des pâquerettes, si vous voulez, de la première ligne de services, mais on peut monter comme ça jusqu'au ministère de l'Éducation puis au ministère de la Famille. C'est important. C'est important parce que nos enfants, beaucoup plus qu'autrefois, sont confrontés très tôt à des univers sociaux qui sont plus larges que celui de la famille, et, en ce faisant, ils sont exposés à une diversité de situations, de schèmes de référence. Il faut assurer une certaine cohérence là-dedans si on ne veut pas qu'ils soient un peu emmêlés.

Cela est vrai lorsqu'ils passent d'un endroit à l'autre, mais cela est vrai aussi à l'intérieur de chacun. Parce que, oui, on peut dire : C'est bien s'ils passent… de trois ans à cinq ans, s'ils restent au même CPE. Mais moi, je peux vous dire qu'il y a des CPE où le personnel roule beaucoup. Il y a des garderies aussi où congés de maternité, changements d'emploi, déménagements… Il y a, à l'intérieur des fournisseurs de services — c'est normal, c'est la vie — il y a aussi un certain roulement, et pas seulement d'une place à l'autre. Il faut travailler cela, il faut soigner cela, et cela suppose, dans le respect d'une certaine confidentialité sur les enfants, ça suppose que les professionnels aient l'information requise pour intervenir de manière compétente, et, j'allais dire, sur mesure, et au bon moment auprès des enfants. C'est notamment important pour des enfants qui ont des problèmes.

Dans le champ de la petite enfance, il y a un débat assez vif entre les tenants du jeu libre, d'une approche développement intégral, et les tenants d'une approche, entre guillemets, un peu plus préscolaire, et vous avez entendu des témoignages où on anticipe, chez les tenants du jeu libre et du développement intégral, vous avez entendu des témoignages qui nous laissent envisager une catastrophe épouvantable avec le développement... Franchement, j'entendais ça quand on parlait des maternelles cinq ans, bon, et la catastrophe n'est pas arrivée. Mais ce que je veux dire, c'est que la recherche montre que, par rapport au développement linguistique, si un enfant, en deuxième année, ne commence pas à maîtriser la lecture, il est mal barré. Il est mal barré, ce qui veut dire qu'on a intérêt à la fois à le repérer assez vite et à intervenir assez vite, y compris en maternelle. Je n'ai pas dit : Lui faire apprendre à écrire et lui faire passer un examen, là. Je dis, et le conseil dit : Il y a des activités de stimulation langagière qui font toute la différence et qui, si on les fait tôt, vont nous éviter des problèmes en secondaire III, IV ou V lorsqu'ils décrochent parce qu'ils ne sont pas capables de maîtriser le français de sixième année. Bon. Cela n'est pas nier l'importance du jeu, c'est autre chose.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

M. Breton : Merci, Mme la Présidente. Bonsoir, mesdames et monsieur du Conseil supérieur de l'éducation. Vous êtes de bon conseil, il faut le dire. Vous avez parlé de ghettoïsation, et j'ai beaucoup, beaucoup apprécié votre comparaison. Dans le fond, ce qu'on dit, c'est que la ghettoïsation, c'est l'antithèse de choix. Avoir le choix, tu ne peux pas être en ghettoïsation, c'est ça.

Moi, comme député de la circonscription de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je vais vous faire part d'un fait que vous ignorez peut-être. C'est que, dans à peu près toutes les régions du Québec, là où il y a des gens qui souffrent de problèmes de santé mentale sérieux, d'itinérance, etc., souvent ces gens-là se font payer par les autorités un billet d'autobus aller simple pour qu'ils débarquent à l'îlot Voyageur parce qu'ils disent : Quand tu vas arriver là, tu vas avoir de l'aide. Il y a le Old Brewery Mission, l'Accueil Bonneau, La Maison du Père. Donc, ces gens-là sortent de l'îlot Voyageur et s'en vont au parc Émilie-Gamelin, qui s'adonne à être juste devant mon bureau. Ça, c'est une situation que je trouve absolument révoltante.

Et, dans un ordre d'idées un peu différent, il y a l'école Champlain dans ma circonscription, que vous connaissez certainement, qui est l'école considérée comme la plus défavorisée à Montréal, où, ce que je disais cet après-midi, c'est que, sur 170 élèves, il y en a 90 qui ont droit aux repas à 1 $ à cause, justement, que les parents n'ont pas les moyens.

Et il y avait la notion — parce qu'on a parlé de ça tout à l'heure — par rapport aux gens qui font la promotion des CPE versus les maternelles quatre ans, la notion d'appartenance. Et, pour avoir eu des discussions avec les gens de l'école Champlain, avec les gens de l'école Pierre-Dupuy aussi, qui est une école secondaire dans le même registre, vous savez, la notion d'appartenance, c'est une chose que, je dois vous avouer, moi qui suis né dans Hochelaga-Maisonneuve, dont la mère a grandi dans le parc Frontenac, ce qu'on appelait le parc Frontenac à l'époque… L'appartenance, c'est une chose. Mais, tu sais, tu peux avoir un sentiment d'appartenance à un quartier et ne pas être fier d'habiter ce quartier-là. Moi, je vais vous dire, là, je ne connais pas grand monde dans ce coin-là qui sont fiers de ce quartier-là, ils ont néanmoins un sentiment d'appartenance.

Moi, ce qui a rapport avec... Quand on parle de ghettoïsation et de mettre les enfants de ces quartiers-là ensemble dans des maternelles quatre ans, moi, je pense que la notion de fierté d'envoyer son enfant à la maternelle quatre ans pour pouvoir l'éduquer de façon précoce devrait faire partie de l'équation, devrait faire partie de la réflexion, devrait faire partie du message qui doit être lancé aux parents. Parce que vous avez parlé de partenariat avec les familles, vous avez parlé de prévention…

• (21 heures) •

Une voix :

M. Breton : Oui, je sais. Bref, il y a ça dans l'équation, mais vous avez dit aussi… Parce que moi, j'ai constaté que, dans les 15 dernières années, à l'école Champlain, on était passé d'à peu près 25 % d'enfants issus de familles immigrantes à à peu près 75 %. Et, vous avez dit que la pauvreté change, j'aimerais ça, vous entendre sur tout ce qui a rapport avec, justement, cette notion d'appartenance et le fait que la pauvreté change.

M. Lessard (Claude) : Je crois que les gens des CPE, lorsqu'ils parlent d'appartenance, ils réfèrent à... Enfin, ce que je comprends, c'est l'espèce d'attachement de l'enfant à une éducatrice avec laquelle il se retrouverait tout le temps ou presque. C'est ce que j'avais compris. Les études indiquent — et c'est des études qui ont été faites auprès des mères — que les mères de milieux défavorisés valorisent l'éducation pour leurs enfants autant que les mères de milieux favorisés, autant. Il n'y a aucune différence statistique, elles veulent que leurs enfants soient instruits. Bien sûr, plusieurs d'entre elles ont un parcours scolaire pas très heureux, interrompu précocement, elles ont... Ça n'a pas été une expérience nécessairement heureuse, mais elles sont assez mères pour réaliser qu'il faut quand même que leurs enfants profitent au maximum de l'école.

Ce qui veut dire que, si on prend le temps... Parce que ça ne se fera pas en criant ciseau, développer des partenariats solides et durables avec des familles de milieux défavorisés qui ont un rapport difficile avec l'école. Si ça se faisait en criant ciseau, on l'aurait fait, là, depuis longtemps parce que ça fait longtemps qu'on y travaille. Mais on peut penser que, si on part de cette valeur partagée entre les acteurs scolaires et les mères à l'effet que l'école, c'est important pour leurs enfants, et si on les convainc qu'on va s'en occuper convenablement, de leurs enfants, et si on travaille avec elles pour qu'elles se sentent chez elles à l'école, que même on les utilise pour certaines activités en maternelle, qu'on les... enfin, entre guillemets, qu'on les utilise, là, qu'on leur demande, mais qu'elles puissent apprivoiser d'une manière plus positive le monde scolaire, je crois qu'on aura une meilleure chance de construire, dès les quatre ans, un partenariat solide avec certaines familles qui pourra probablement, si on s'en occupe comme il faut, durer tout le reste de la scolarité.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Mille-Îles, la parole est à vous.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Bonsoir, mesdames, monsieur. Je corrige le tir. Je le corrige parce que moi, je l'ai utilisé plus souvent. le principe de ghetto. Je corrige le tir aussi parce que c'est important de comprendre qu'entre un mot défini dans un dictionnaire et une pratique ou un regard qu'on porte dans la pratique sur un mot, ça peut être différent. Je vous donne l'exemple des élèves handicapés. Il fut un temps où on les mettait tous dans la même classe, hein, et on les identifiait — moi, je me souviens, là — c'est la classe des enfants handicapés. Moyens, lourds ou légers, j'avais une classe de handicapés. Je sortais de cette classe-là... Même si j'avais été faire une commission, si je sortais de cette classe-là, j'étais identifiée comme une élève handicapée, j'étais pointée, j'étais identifiée. Vous allez me dire que ce n'est pas un principe de ghetto. Quand on utilise en éducation le principe de ghetto, peut-être qu'on l'utilise de la mauvaise façon, mais c'est pour dire qu'un groupe peut être identifié.

Donc, je vous entends quand vous me dites : Écoutez, c'est... Vous l'associez à un regard qu'on porte sur l'histoire de principe de ghetto qui… On ne la rappellera pas parce que c'est un principe qui est très triste de ce qui s'est passé. Mais, quand on l'utilise en éducation, c'est plus pour dire qu'on est capable d'identifier facilement une clientèle par rapport à où on choisit de mettre l'étiquette. Donc, je dis : Je corrige le tir parce que j'ai utilisé le mot et, malheureusement, je vais probablement continuer à l'utiliser parce que les gens de l'éducation qui nous écoutent l'entendent d'une autre façon. Donc, merci pour la correction. Je vais essayer d'en trouver un meilleur, mais je vais probablement m'enfarger dans mon propre vocabulaire et utiliser «ghetto» encore.

J'ai apprécié énormément que vous nous disiez que les parents des enfants en milieu défavorisé ont un jugement juste et que chacun des parents veut que son enfant ait le meilleur. Qu'il choisisse de ne pas aller au CPE, de le garder... Des fois, juste de le garder à la maison, c'est son meilleur choix parce qu'il croit que c'est comme ça qu'il va transmettre toutes ses valeurs.

J'ai apprécié aussi que vous dites que ça ne s'est pas fait en criant ciseau que le préscolaire cinq ans soit apprivoisé à 98 %. Mais, maintenant, j'apprends même à mes collègues qui ont des craintes par rapport au préscolaire quatre ans que le cinq ans n'est toujours pas obligatoire, c'est un choix qu'on fait. Mais, en même temps, comme parents, on dit : Tu vas aller à la grande école quand tu vas rentrer au préscolaire cinq ans. Donc, c'est intégré dans notre notion. Puis, la ministre le rappelait avec justesse, le préscolaire quatre ans mi-temps est aussi intégré. Personnellement, je le connais plus pour les élèves à défis, donc surdité, TED ou... Mais, en même temps, je sais que, dans certains milieux, il est aussi approprié d'y voir là une approche pour... Je suis d'accord aussi avec le principe de mixité des services parce qu'effectivement il y a certaines communautés ou il y a certaines personnes qui trouvent que l'école, ça porte un jugement plus favorable que la garderie. Qu'on appelle ça un CPE, un milieu familial ou... c'est une garderie, puis le parent, il dit : J'en perds ma valeur si je l'envoie faire garder par quelqu'un d'autre.

Dans votre mémoire, j'ai aussi beaucoup apprécié le fait que vous parlez du ministère de la Famille. Je le disais plus tôt, la ministre a fait son annonce en même temps... assise à côté de la ministre de la Famille, et c'était important comme message qu'on donnait à la communauté, c'est-à-dire qu'on ne parle pas que d'un seul ministère, puisque notre volonté, c'est de ne pas travailler en silo puis d'avoir un regard différent.

J'ai lu et annoté — vous ne seriez pas surpris de voir toutes mes petites étiquettes ici — partout où je trouvais quelque chose d'intéressant dans le rapport que vous avez fait parce que ça nous parle énormément, même si, au départ, je n'étais pas sûre que vous étiez pour parce que je comprenais plus que vous étiez pour : On ouvre plus aux CPE qu'on ouvre en milieu scolaire. Mais je comprends maintenant votre propos quand vous dites : La diversité des services.

Mon prologue est un peu long, mais vous allez voir qu'avant de vous emmener sur la question je veux, au moins, vous passer l'ensemble de mes messages. Et je suis heureuse et surprise à la fois que ça soit vous qui nous parliez de revoir la carte de défavorisation. Perplexe à la fois parce que la ministre, hier, nous a dit que ça va marcher par adresse, pas par milieu. Ça fait que, là, moi, plus ça avance, plus j'ai des questions. Mais, en même temps, il y aura un lieu pour un échange avec la ministre et un lieu pour vous. Mais merci de nous rediriger vers un regard sur la liste de défavorisation parce que le monopole de la défavorisation n'est pas dans Hochelaga-Maisonneuve. Des écoles à 10, là, il y en a partout au Québec. Il n'y en a pas juste à un seul endroit, et la pauvreté, la défavorisation, ça existe partout. Malheureusement, elle n'est pas vue partout. On ne voit pas derrière la porte, on ne voit que la porte. Donc, je suis heureuse que vous avez posé cette question-là et j'ai même vu des gens, avec intérêt, écrire. Donc, je me suis dit : Je ne suis pas la seule qui l'ai pris en intérêt, ce questionnement-là sur la carte de défavorisation.

Mais on n'a pas eu la chance de vous entendre parler sur la formation. Parce qu'on peut parler de la théorie puis... mais, en pratique, ça part de la formation des maîtres. Et, en ce moment, l'inquiétude qui peut sortir, c'est le fait qu'au niveau des CPE j'ai des... en tout cas, j'en ai deux sur trois qui sont formés 100 % pour la petite enfance. Et, quand j'arrive au scolaire, la difficulté, c'est… Je n'ai pas quelqu'un d'incompétent, là, mais j'ai quelqu'un qui a une formation qui est beaucoup plus large que la petite enfance. Je sais que vous faites des recommandations, vous en faites… Moi, je l'ai à mon point 7 parce qu'on a essayé de recentrer certaines choses, mais vous faites une recommandation et vous parlez au niveau de la faculté, la formation des programmes et de l'enseignant. Donc, j'aimerais vous entendre sur la formation.

• (21 h 10) •

M. Lessard (Claude) : Les baccalauréats... Bon, la formation collégiale pour les CPE, nous n'en avons entendu que du bien pour les raisons que vous mentionnez, Mme la députée, parce qu'il s'agit d'une formation spécialisée, bien branchée sur la réalité des CPE, avec des stages bien encadrés, etc. Personne ne nous a fait un procès de la technique d'éducation petite enfance. Au contraire, tout le monde nous dit : Bon, bien, il est temps que toutes les éducatrices… et non pas seulement deux sur trois, mais que toutes les éducatrices détiennent ce diplôme-là.

La formation universitaire, le problème est un petit peu différent. Les baccalauréats en éducation préscolaire et enseignement primaire ont pour fonction de former une généraliste, c'est-à-dire une enseignante capable d'enseigner de la maternelle cinq ans à la fin de la sixième année à tous les types de population d'élèves toutes les matières… enfin, presque. Bref, c'est une généraliste. Alors, le baccalauréat a les défauts de ses qualités. Il permet de couvrir de la maternelle jusqu'à la sixième année, mais, sur un aspect particulier, il n'est jamais suffisamment complet parce que ce n'est pas un diplôme spécialisé. Alors, cette fois-ci, on peut dire qu'il manque de la formation pour le préscolaire. Dans trois mois, je pourrai dire : Il en manque pour l'enseignement des sciences. Vous savez, c'est presque la quadrature du cercle, comment faire une formation d'un généraliste et, en même temps, qu'il soit suffisamment spécialisé.

Ceci dit, je crois que l'avis du conseil est à l'effet que les facultés d'éducation pourraient revoir leurs programmes parce que, par exemple, dans certains cas, on peut très bien diplômer sans avoir fait un stage dans une maternelle, ce n'est pas obligatoire. Le cours de didactique du préscolaire, c'est un petit cours. Ce n'est pas beaucoup sur 120 crédits. Bref, on peut penser que, dans plusieurs programmes, le préscolaire n'a pas été vraiment considéré à sa juste valeur ou à son importance et que peut-être l'arrivée graduelle de maternelles quatre ans pourrait être l'occasion pour les facultés de revoir leurs programmes, d'autant plus que, là, on peut penser à un programme intégré, maternelles quatre, maternelles cinq. Ça commence à faire quelque chose de substantiel, si vous voulez, et qu'il y aurait donc lieu que les facultés y accordent une place un peu plus importante et substantielle. Je crois que l'occasion est bonne. Pour ce faire, il suffirait que la direction de la titularisation du ministère dise aux comités d'agrément des programmes de formation de s'assurer que les universités répondent à un développement de compétences plus...

Mme Charbonneau : Pointu.

M. Lessard (Claude) : ...plus complet, plus pointu. Mais c'est vrai qu'il y a une carence de formation spécialisée. Mais c'est un problème extrêmement difficile dans le cadre d'un bac qui se veut généraliste.

Ceci dit, la formation continue est importante. Il y a des limites à ce qu'on peut ajouter dans une formation initiale. On ne sortira jamais de l'université, à la limite, et je crois qu'il faut tabler sur la formation continue, mais une formation continue, dans l'esprit du conseil, assumée, pour une bonne part, par les professeurs de maternelle eux-mêmes.

Vous avez entendu l'association des éducatrices de maternelle, il n'y a pas de raison que ces gens-là qui ont 20, 30... Enfin, la dame que vous avez entendue hier soir à 37 ans de métier. Bon, il n'y a pas de raison qu'elle et ses collègues ne soient pas à même de penser et de mettre en place des formations continues pour les jeunes qui commencent, disons. Le conseil croit beaucoup à l'«empowerment» des enseignants eux-mêmes dans la formation continue. Qu'ils la prennent en charge et qu'ils la fassent eux-mêmes. Parce qu'ils sont capables de la faire avec l'expérience. Cette dame-là pouvait vous dire hier qu'elle se jugeait incompétente, mais c'est faux.

Mme Charbonneau : Oui, je ne pense pas que c'est ce qu'elle disait.

M. Lessard (Claude) : Ce n'est pas ça qu'elle a dit...

Mme Charbonneau : Mais ce qu'elle disait, par contre, c'est qu'il y avait une transmission des connaissances qui était importante entre les gens d'expérience, dont cette personne et les gens qui arrivaient en poste. Mais on se souviendra, tout le monde, là, qu'il y avait un souci par rapport à l'accueil à quatre ans dans les écoles pour toutes sortes de raisons.

M. Lessard (Claude) : Tout à fait.

Mme Charbonneau : Puis on a signifié, chacun du côté de cette table, notre surprise, hein, de ces gens qui disaient... Et la ministre a même posé la question : Est-ce que vous portez un jugement sur votre compétence? Et ce n'était pas vraiment dans cet aspect-là, mais, oui, je vous entends.

Par contre, entre la formation continue… Puis j'allais vous faire un clin d'oeil puis dire : On pourrait peut-être faire un autre cycle, hein? Parce qu'on sait qu'au primaire il y a comme trois cycles. On pourrait faire un quatrième cycle, mais qui est le préscolaire. Donc, le premier cycle, préscolaire, deuxième cycle… parce qu'on aime bien se donner des façons de faire.

Je reviens sur le principe du ratio parce que vous l'expliquez bien, la différence dans la diversité des services, des ratios qu'on a dépendamment d'où je suis. Si je suis dans un CPE et je suis dans un groupe quatre ans ou dans un groupe mixte, je suis avec neuf amis, hein? Ils sont 10 avec une éducatrice et une autre personne qui s'occupe avec eux au niveau des dîners puis de la cour. Si je suis en milieu familial, par contre, on est six. Puis, s'il y en a un peu plus, bien, il y a une deuxième intervenante qui rentre en ligne de jeu. Si je suis en préscolaire cinq ans, on est 18 amis dans la classe. La ministre nous disait 1-15, je trouve ça intéressant. Par contre, si je suis un parent qui n'y vais pas pour ma notion de valeurs, mais plus pour ma notion de service, je vais aller en CPE parce que, là, mon groupe est plus petit. Mais, si vous aviez une recommandation par rapport à la notion de ratio, est-ce que vous avez le goût de nous guider un peu ou vous trouvez que 1-15, c'est le bonheur?

M. Lessard (Claude) : Les analyses comparatives qu'on a faites — ça va être comme ça, moi, que je vais vous répondre — dans les trois cas, que ce soit l'Ontario, la France ou la Suède, il y a toujours deux adultes, quel que soit le nombre. Et ce n'est pas la même chose. 1-10, ce n'est pas la même chose que 2-18. Avoir deux adultes qui interagissent quotidiennement et qui se concertent pour gérer un groupe, ce n'est pas la même chose qu'une seule personne. Vous comprenez? Il y a une qualité, il y a une coordination possible. Il y a quatre paires d'yeux, on peut dire ça comme ça. Et j'avoue que, si j'avais... Le conseil dit que le ratio, c'est important et que, d'une certaine façon, un adulte pour une vingtaine d'enfants de quatre ans, ce n'est pas un critère de qualité. On va dire ça comme ça.

Mme Charbonneau : Oui, c'est bien dit.

M. Lessard (Claude) : Bon, sans compter que j'ai hâte de la voir au mois de novembre, cette éducatrice-là, si elle se rend au mois de novembre. Mais, si nous avions... On ne l'a pas fait, mais, personnellement, si j'avais à faire une recommandation, je dirais deux adultes. Quel que soit le ratio, qu'il soit à 15, ou à 14, ou à 18, là, deux adultes pour les raisons que j'indique. Et peut-être de compétence différente. Le scénario Saint-Zotique est extrêmement, extrêmement intéressant. Une éducatrice de garderie formée au cégep et une enseignante, je crois qu'on aurait un scénario gagnant, là. Je crois.

• (21 h 20) •

Mme Charbonneau : Non seulement je vous donne raison, mais je vous dirais qu'ils viennent se compléter pour la compétence en petite enfance, ce qui est fort intéressant. Donc, oui, vous avez, là, quelque chose de fort, fort intéressant.

On parle des familles défavorisées, on parle... on a porté un peu un jugement sur pourquoi ils ne choisissent pas le CPE, pourquoi ils ne vont pas en milieu familial. Dans la possibilité des choix qu'ils ont, peut-être qu'ils ne choisissent pas le CPE parce qu'il y a une facture. Je le dis maladroitement, mais je vous le dis comme ça, dans un CPE, je suis logée, nourrie. À l'école, je suis logée, je ne suis pas nourrie. Par contre, je sais le service que je vais avoir en CPE. À l'école, si je suis un parent d'un milieu défavorisé puis que c'est mon premier enfant qui rentre à l'école, je ne sais pas toutes les factures qui m'attendent. Parce qu'il y en a, des factures, il y a des façons de faire, puis il y a… Si je ne veux pas que mon enfant soit identifié, bien, je veux qu'il ait un sac d'école, je veux qu'il soit habillé adéquatement pour ne pas qu'il soit identifié dans la cour d'école. Parce que des enfants, c'est extraordinaire, mais ça peut être méchant. Et, de ce fait, souvent, ils s'identifient entre eux en se pointant, en se taquinant. Ce qui peut commencer par une taquinerie peut finir un peu poche, mais, ceci dit, ça arrive.

Donc, j'appelle ça à ma façon la facture insidieuse. J'ai ma facture du dîner, j'ai ma boîte à lunch, j'ai le lunch à faire, il faut que je mette de la nourriture dans ma boîte à lunch. Peut-être que je vais arriver à l'école et je n'aurai pas déjeuné, mais peut-être que, par bonheur, mon école va avoir le Club des petits déjeuners. Donc, ce côté-là, il est réglé. Et peut-être que ma famille est reconnue comme défavorisée pas parce que maman puis papa sont à la maison, mais parce que leur revenu familial est très faible. Et, de ce fait, bien, ils ne sont pas plus à la maison quand l'école finit, à 2 h 30, et je devrai aller au service de garde.

Quelle serait la meilleure recommandation pour assurer à ma famille de milieu défavorisé que non seulement je ne suis pas capable de l'identifier quand je rentre mon élève… je dis souvent mon kid, là, mais mon élève à l'école, pour ne pas être capable de l'identifier, mais, en même temps, pour l'aider dans une intégration sans jugement dans un milieu qui pourrait en avoir?

M. Lessard (Claude) : Ce n'est pas évident, ça.

Mme Charbonneau : Je le sais.

M. Lessard (Claude) : Ce n'est pas évident.

Mme Charbonneau : On se disait plus tôt : Utiliser le mot «ghetto», c'est peut-être malhabile. Mais, en même temps, vous avez compris qu'à partir du moment où je pratique… Hein, en théorie, c'est... Mais, dans la pratique, là, je peux non seulement le trouver dans la cour de l'école, là, pour toutes sortes de raisons...

M. Lessard (Claude) : Oui. Puis on peut souhaiter que les éducateurs, les enseignants, les directionsd'établissement soient sensibles à ces réalités-là et interviennent pour, entre guillemets, éduquer les enfants quand ils sont méchants. Mais c'est sûr qu'il va… ils ne pourront pas tout empêcher.

Mme Charbonneau : Non. Ça fait partie du apprendre à vivre ensemble, hein? Vous avez raison, ça s'apprend dans la cour d'école, ça s'apprend dans la classe. Mais comment je fais pour mettre un meilleur système, moins insidieux, puisqu'il y a dans ce principe scolaire là… Même si on dit que l'école est gratuite, trois enfants qui ont passé à travers l'ensemble du système, là, l'école n'est pas gratuite.

M. Lessard (Claude) : Non.

Mme Charbonneau : Le système scolaire est gratuit, mais tout ce qui va avec ne l'est pas.

M. Lessard (Claude) : Je ne le sais pas, madame. Je ne sais pas quoi vous répondre.

Mme Charbonneau : Puis c'est correct. C'est correct de ne pas le savoir. C'est correct de ne pas le savoir, mais c'est une sensibilité que...

M. Lessard (Claude) : Tout à fait. Que je crois que bien des éducateurs ont, mais ça ne veut pas dire qu'on a les stratégies. Bon, je crois qu'il y a des programmes, il y a des... Tiens, O.K., je retombe sur mes pattes. Il y a des programmes, Pacifique…

Mme Charbonneau : Oui, Vers le pacifique. Vers le pacifique, par contre, c'est pour la relation humaine.

M. Lessard (Claude) : Il y a des pédagogues qui ont développé des programmes pour que les enfants apprennent à régler leurs…

Mme Charbonneau : Oui, c'est ça. Je vais vous aider. Les centres de bénévolat donnent des sacs d'école. Il y a des organismes comme la Fondation maman Dion, qui fait des efforts extraordinaires.

M. Lessard (Claude) : Oui, mais ça, ça reste que, ça aussi, ça peut avoir un effet pervers.

Mme Charbonneau : Tout à fait. Vous avez tout à fait raison.

M. Lessard (Claude) : Mais, si on veut que les enfants se respectent mutuellement — bien, c'est à ça que je m'adressais — pour qu'ils ne se stigmatisent pas les uns les autres, ça, c'est compliqué. Et c'est pour ça que ça, ça m'est venu, là, je sais qu'il y a des pédagogues qui ont développé un truc qui s'appelle...

Mme Charbonneau : Oui, Vers le pacifique, vous avez tout à fait raison, c'est un programme qui existe.

M. Lessard (Claude) : Mais je ne sais pas si ça fonctionne ou si c'est...

Mme Charbonneau : Je vous le dis, ça fonctionne.

M. Lessard (Claude) : Bon, parfait. Parfait, merci.

Mme Charbonneau : C'est moi qui vous remercie.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 5 min 30 s.

Mme Roy (Montarville) : Vous avez dit sept minutes?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Cinq.

Mme Roy (Montarville) : Ah! merci, Mme la Présidente. M. Lessard, bonsoir. Merci pour cet avis. Mesdames, bonsoir. Merci également.

Ce n'est pas un mémoire, c'est un avis. Et, quand le conseil parle, on l'écoute. Il y a beaucoup de choses dans cet avis qui sont très intéressantes. Compte tenu du temps imparti qui m'est alloué et qui est très court, je vais aller directement à cette question, cette question qui nous tracasse parce que c'est vraiment l'enjeu ici. On parle de ce projet de loi pour avoir des maternelles quatre ans dès septembre. Alors, moi, je me demande dans quelle mesure est-il réaliste de penser qu'on pourra implanter de façon adéquate ces maternelles quatre ans, tel que souhaité par la ministre, pour septembre.

M. Lessard (Claude) : Formellement, le conseil ne s'est pas penché là-dessus. D'une certaine manière, l'avis ne portait pas ou n'allait pas jusqu'à comment faire atterrir tout cela. Il aurait pu, les préoccupations d'organisation et d'implantation ne sont pas insignifiantes, mais nous ne l'avons pas fait. Déjà, de travailler entre nous à démêler ce qu'on a démêlé dans les délais que nous avions, c'est à peu près ce que nous pouvions raisonnablement faire. Mais, dans d'autres avis d'implantation de changements, le conseil a beaucoup insisté sur le soin qu'il faut donner à l'implantation. Pour dire les choses simplement, le diable est dans le détail. Une implantation prématurée ou trop rapide crée plus de problèmes qu'elle n'en règle. Il y a des moments qu'il ne faut pas rater, d'une certaine façon, parce qu'ils ne repasseront pas ou ça va être difficile. Et, si on rate le démarrage, bien, on nourrit l'opposition. Je crois que le conseil prépare un avis sur l'implantation du curriculum, et on va beaucoup discuter de ces choses-là.

Ceci dit, les informations que nous avons n'indiquent pas — comment dirais-je? — une implantation rapide, partout — on parle d'une classe par commission scolaire — graduelle, avec un comité pour monitorer et suivre l'évolution. Je crois qu'il y a, d'après ce que j'entends, il y a un certain nombre d'éléments qui peuvent être rassurants.

À l'inverse, on peut faire des comités ministériels qui peuvent travailler pendant trois ans sur l'implantation d'un changement, et leur plan sera merveilleux, mais il ne durera pas deux mois quand on va arriver sur le terrain parce qu'il n'y a que dans l'implantation que, entre guillemets, de vraies questions se posent et dans l'ordre qui est important pour les acteurs. On peut discuter longtemps du lavabo, du local, de l'espace, de l'endroit, il y a un moment où il faut se mettre à l'eau, même s'il faut se soucier de ce qui va se passer. Je crois que vous avez raison, il faut s'en soucier, mais il ne sert à... Enfin, oui, c'est mon opinion, il ne sert à rien de se dire : On va prendre encore deux ans pour préparer ça comme il faut. Ça ne sera jamais comme il faut parce qu'on est dans des systèmes complexes, avec différents paliers, des structures d'autorité, des conseils d'établissement, des parents, des enseignants, des syndicats. Enfin, vous les avez tous vus, les acteurs. Où seront-ils dans deux ans? Là, vous savez où ils sont. Mais où seront-ils dans deux ans? Ça peut être une tout autre réalité.

Moi, je suis partisan de se dire : On y va avec un souci de monitoring, un monitoring efficace, là, et de répondre aux questions au fur et à mesure qu'elles se posent. Si, effectivement, il y a des choses qui sont problématiques, il faudra y voir. Et, à ce niveau-là, les conseils d'établissement, les commissions scolaires et Mme la ministre sont imputables à partir du moment où on y va, là. C'est comme ça que notre démocratie fonctionne.

Mme Roy (Montarville) : Donc, si je résume, vous considérez qu'il est réaliste de penser que nous puissions les mettre sur pied pour la date impartie?

M. Lessard (Claude) : Si, les commissions scolaires, vous dites qu'elles sont prêtes à le faire, j'imagine qu'elles savent ce qu'elles font.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, mesdames, monsieur.

Donc, la commission ajourne ses travaux jusqu'au mercredi 1er mai 2013, après les affaires courantes. Bonne fin de soirée, mesdames messieurs.

(Fin de la séance à 21 h 30)

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