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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 30 mai 2018 - Vol. 44 N° 114

Audition du Directeur général des élections du Québec sur le projet de loi n° 185, Loi reportant la prochaine élection scolaire générale et permettant au gouvernement d’y prévoir l’utilisation d’un mode de votation à distance


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures vingt-cinq minutes)

La Présidente (Mme de Santis) : Bonjour, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin d'entendre le Directeur général des élections du Québec sur le projet de loi n° 185, la Loi reportant la prochaine élection scolaire générale et permettant au gouvernement d'y prévoir l'utilisation d'un mode de votation à distance.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Non, Mme la Présidente, il n'y a aucun remplacement.

Remarques préliminaires

La Présidente (Mme de Santis) : Nous débutons donc avec les remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je ne sais pas si je prendrai six minutes, mais je suis très heureux d'être ici avec vous. D'abord, vous saluer, Mme la Présidente, votre équipe, de votre présence ici, en commission. Bien sûr, saluer les représentants du Directeur général des élections, M. le Directeur général des élections lui-même. Merci d'être ici avec vous... avec nous, pardon, et avec les collègues ici présents des deux côtés de la table, donc les collègues de l'équipe ministérielle, les gens de l'opposition officielle et de la deuxième opposition, des collègues avec qui j'ai le plaisir de partager les dossiers éducation ici, à l'Assemblée. Écoutez, on tient une consultation particulière. Je veux saluer également, Mme la Présidente, les gens du milieu scolaire, qui sont derrière, que j'ai salués tout à l'heure mais que je fais officiellement ici, la Fédération des commissions scolaires, notamment, que je vois derrière vous et derrière M. le Directeur général des élections et son équipe.

Alors, Mme la Présidente, on est réunis ici pour mener les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 185 dans le but de reporter la prochaine élection scolaire générale et permettre ainsi au gouvernement de prévoir l'utilisation d'un mode de votation à distance. Vous le savez, je n'ai pas besoin de vous l'expliquer longtemps, Mme la Présidente, l'élection scolaire générale a lieu tous les quatre ans. Le prochain scrutin est prévu le 4 novembre 2018. Ça, c'est un mois après la tenue du scrutin provincial de l'automne.

Le projet de loi que j'ai déposé — que, je dois dire, Mme la Présidente, s'est fait aussi de manière très consensuelle, parce que j'ai eu l'occasion d'en discuter avec les collègues avant — propose de reporter, au 1er novembre 2020, les prochaines élections scolaires. Ça fait suite à des demandes, oui, du milieu scolaire, autant francophone qu'anglophone, mais aussi des discussions que nous avons eues ici, à l'Assemblée nationale.

L'objectif du report, Mme la Présidente, c'est de permettre d'éviter la tenue de l'élection scolaire de manière concomitante à celle d'un autre palier électoral. J'ai parlé de la difficulté et de la situation à l'automne 2018. Alors, vous savez peut-être le calendrier des scrutins, Mme la Présidente, parce que nous votons presque à toutes les années. D'abord, il y aura, cet automne, élection provinciale, mais aussi élection scolaire, si elle n'était pas reportée, le palier fédéral, qui vient en élection en 2019, et le palier municipal, qui revient en élection en 2021. Voilà l'opportunité de reporter nos élections scolaires générales à 2020, d'abord, parce qu'il n'y a pas d'autre élection à la même période, mais aussi parce qu'on considère, puis on aura la chance d'en discuter, ce laps de temps nécessaire pour pouvoir initier certaines choses à l'égard du mode de votation à distance.

Bien entendu, ce qu'on souhaite, c'est que le Directeur général des élections puisse étudier la possibilité d'un nouveau mécanisme de votation. On le sait, ça s'est fait déjà ailleurs. Il y a un virage qui est entamé. Deux provinces, à ma connaissance, Nouvelle-Écosse et Ontario, ont déjà entamé ce virage. Peut-être vous rappeler, Mme la Présidente, que ça vise l'ensemble des commissions scolaires, tant francophones qu'anglophones. Ça fait partie des mesures qui peuvent être prises pour améliorer, oui, le taux de participation, de faciliter cette participation aux élections scolaires.

Je veux remercier, bien sûr, le Directeur général des élections d'être présent pour discuter de cette question-là avec nous. J'ai déjà eu l'occasion d'entendre certaines de vos orientations ou propos à cet égard dans l'espace public. Je pense que la prochaine heure nous permettra d'en apprendre davantage. Alors, écoutez, j'espère qu'on aura la chance, comme on l'a fait jusqu'à maintenant, Mme la Présidente, lorsqu'on est en commission, d'échanger librement, de pouvoir faire avancer les choses, de proposer des solutions, ayant tous en tête que l'objectif, ce n'est pas de reporter pour reporter, mais c'est de faire ce report pour qu'on puisse y inclure un nouveau mode de votation pour ensuite et surtout faire en sorte d'améliorer la participation aux élections et aussi éviter ce qui, je pense, serait probable, vu la proximité des scrutins : des défis, tant au niveau de l'organisation, peut-être même de la part du Directeur général des élections, mais pour tout l'ensemble des citoyens et ceux qui font de l'organisation politique dans les circonstances. Voilà, Mme la Présidente, mes propos en entrée de jeu.

• (11 h 30) •

La Présidente (Mme de Santis) : Merci, beaucoup, M. le ministre. J'invite maintenant... (Interruption) Excusez-moi. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle et députée d'Hochelaga-Maisonneuve à faire ses remarques préliminaires pour un maximum de 3 min 30 s.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de saluer le ministre ainsi que l'équipe ministérielle qui l'accompagne, ainsi que mes collègues du gouvernement, vous, Mme la Présidente, avec toute l'équipe de la commission, mon collègue de la deuxième opposition, M. le Directeur général des élections et votre équipe, et aussi tous les membres des diverses instances scolaires qui sont présents parmi nous aujourd'hui.

Mme la Présidente, d'entrée de jeu, il est particulier que nous nous retrouvions aujourd'hui, à cette date, pour prendre une décision, en tout cas, entendre le DGE en vue de prendre une décision pour le report des élections. On le sait, les élections à date fixe ont été réglées avant les élections que nous-mêmes avons procédé en 2014. Et on aurait pu, depuis 2014, commencer à réfléchir, parce que ce calendrier-là n'est pas un nouveau calendrier. Nous savions, dès l'adoption de la loi, qu'il faudrait procéder à une modification législative sur la date des élections scolaires, particulièrement parce qu'effectivement il arrive un conflit, un conflit de date entre l'élection du Québec et l'élection scolaire. Et la date de l'élection scolaire étant connue elle aussi, nous aurions pu statuer bien à l'avance et peut-être, justement, commencer des travaux avec le Directeur général des élections bien des années en avance pour pouvoir faire ce qu'on veut faire maintenant, qui est de proposer éventuellement un vote électronique.

Alors, malheureusement, nous sommes là devant un fait à la dernière minute, et nous devons prendre une décision. Nous avons eu des discussions préalables avec le ministre, avec les collègues. Et le but de la décision aujourd'hui, c'est de regarder, en face, une situation qui n'est pas souhaitable, Mme la Présidente. Tenir deux scrutins au même moment, avoir des pancartes électorales qui vont justement mêler tout le monde, on a beau dénoncer la faible participation aux élections scolaire, bien, on va seulement qu'accroître le phénomène en tenant ça à un mois de délai des deux. Alors, aujourd'hui, on se voit confronté à cette dynamique-là, et nous devons agir puisqu'il faut agir. La proposition du gouvernement est là, sur la table. J'ai hâte d'entendre le Directeur général des élections, qui nous fait une autre proposition que nous avions déjà discutée entre nous. Alors, Mme la Présidente, ça va être intéressant, nos discussions de ce matin. Merci.

La Présidente (Mme de Santis) : Merci, Mme la députée. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Chambly à faire ses remarques préliminaires pour un maximum de 2 min 30 s.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, Mme la Présidente. Je veux saluer le ministre, la collègue, toute l'équipe, M. Reid et tous ceux qui l'accompagnent. J'ai 2 min 30 s, donc je ne prendrai pas trop de temps. Vous savez bien, dans la formation politique, on pense qu'il faut revoir la gouvernance des commissions scolaires et les transformer en centres de services. On ne pense pas que ça soit nécessaire d'avoir un palier de gouvernement élu. On a besoin évidemment d'une administration régionale pour faire une coordination du soutien et du support. On ne pense pas que ça doit être un palier de gouvernement élu.

Ceci étant dit, dans l'état des choses, en ce moment, c'est ce qu'on a. Et, tant qu'à faire les choses, faisons-les bien. Nous ne sommes pas partisans de tenir des prochaines élections scolaires, mais, si elles doivent avoir lieu, il faut les réussir. Tout ce qui est fait mérite d'être bien fait.

Et, dans les circonstances actuelles, on travaille et on collabore certainement avec le ministre et les collègues pour reporter ces élections-là, parce que, dans la situation actuelle, on voit bien qu'on se dirige vers un autre échec, les élections scolaires étant prévues beaucoup trop proches des élections provinciales. Ça voudrait dire deux campagnes pratiquement en même temps. Ça voudrait dire, sur des mêmes poteaux, des mêmes pancartes qui se chevauchent. Ça voudrait dire encore plus de confusion pour les citoyens. Et c'est une situation où tout le monde perd, autant ceux qui veulent que les élections scolaires aient lieu que ceux qui pensent qu'il faut faire autrement. Et, dans cette situation-là, bien, on accepte cette main tendue du ministre. On veut collaborer pour améliorer les choses. Et je vais réserver ma suite des commentaires par la suite pour les échanges avec les gens qui sont présents. Merci.

La Présidente (Mme de Santis) : Merci, M. le député. Alors, nous allons maintenant débuter l'audition. Je souhaite la bienvenue au Directeur général des élections et à ses accompagnateurs. Je vous rappelle que vous disposissez de 10 minutes pour votre exposé, ensuite nous allons procéder à la période d'échange avec les membres de la commission. D'abord, merci de vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent, et vous pouvez procéder immédiatement à votre exposé.

Exposé du directeur général des élections, M. Pierre Reid

M. Reid (Pierre) : Merci, Mme la Présidente. Mmes, MM. les membres de la commission, d'abord, je tiens à vous remercier de m'accueillir aujourd'hui. Je suis accompagné de Mme Dominique Drouin, directrice du service de recherche, de la planification et de la coopération internationale, et de M. Sébastien Allard, directeur des ressources informationnelles.

Au cours des minutes qui me sont allouées, je me propose d'émettre certaines recommandations concernant la possibilité, évoquée à l'article 5 du projet de loi n° 185, de permettre, par règlement, l'utilisation d'un mode de votation à distance pour les prochaines élections scolaires.

Je tiens à rappeler brièvement que le rôle du Directeur général des élections en matière de scrutin scolaire en est un de soutien. La Loi sur les élections scolaires prévoit en effet que chaque commission scolaire demeure responsable de l'organisation de ses élections.

À la lecture du projet de loi, nous comprenons que le délai de report des élections scolaires a notamment pour objectif de permettre l'évaluation et, éventuellement, le déploiement d'un mode de votation à distance en 2020. Ceci laisse entrevoir trois options : le vote par correspondance, le vote par téléphone et le vote par Internet. Les déclarations publiques du ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport laissent cependant croire qu'il penche davantage vers une évaluation des possibilités qu'offre le vote par Internet. Je constate, comme vous, tout l'intérêt que suscite cette idée. C'est dans cet esprit que j'ai proposé, lors de mon passage devant la Commission des institutions, en octobre dernier, de procéder à une analyse globale du vote par Internet à distance, et ce, pour l'ensemble des paliers électifs : provincial, municipal et scolaire.

Plusieurs voient des avantages au vote par Internet. Parmi ceux-ci, mentionnons : la possibilité d'éliminer la barrière de la distance pour des électeurs qui sont en déplacement, qui habitent en région éloignée ou qui vivent en milieu rural; une plus grande accessibilité pour ceux et celles qui souffrent d'un handicap ou d'une condition de santé qui rend les déplacements difficiles; une plus grande commodité pour les électeurs qui, pour une raison ou pour une autre, ont du mal à trouver le temps nécessaire pour se rendre au bureau de vote; et, enfin, une alternative qui s'inscrit dans les habitudes d'utilisation des technologies par bon nombre d'électeurs.

Le vote par Internet s'accompagne aussi fréquemment de l'espoir de revitaliser la démocratie en augmentant le taux de participation et de pouvoir tenir des élections à moindres coûts. Toutefois, si le législateur souhaite s'engager dans cette voie, nous croyons qu'il doit le faire en sachant qu'il n'existe pas, à ce jour, de garantie que ces avantages se concrétiseront.

Nous tenons ainsi à préciser d'ores et déjà ce qui suit. L'augmentation de la participation électorale est souvent mentionnée comme un objectif de l'implantation du vote par Internet. Nous avons porté une attention particulière aux expériences menées lors d'élections municipales dans les villes canadiennes de Markham, de Peterborough et de Halifax. Bien que des enseignements utiles peuvent en être tirés, à notre connaissance, aucune de ces expériences n'a permis de conclure que l'adoption du vote par Internet a eu pour effet d'augmenter la participation électorale de façon soutenue et significative. Les données recueillies à l'occasion de ces expériences montrent que l'incidence sur les jeunes électrices et électeurs n'est pas nécessairement celle qui était anticipée. Ailleurs dans le monde, l'expérience de l'Estonie, de la Suisse et de la province de New South Wales, en Australie, ne permet pas non plus de conclure que le vote par Internet augmente la participation électorale.

Les électeurs se rendent aux urnes pour différentes raisons. Le mode de votation, et donc le niveau de commodité, n'est que l'un des facteurs qui peuvent l'expliquer. La connaissance des enjeux ainsi que des personnes candidates et de leurs propositions doit aussi être promue et facilitée lorsqu'on désire augmenter la participation électorale. Au chapitre des coûts, rien n'indique que l'implantation de cette modalité de vote mènera à des économies. Un examen rigoureux reste encore à faire pour bien comprendre les effets financiers des options qui pourraient être retenues. L'expérience montre cependant que, là où une forme de vote par Internet est offerte, le vote papier demeure, en général, possible.

Certains pourraient soutenir qu'il serait simple et peu coûteux de faire appel à des solutions de vote en ligne déjà existantes. Nous croyons, en revanche, que le maintien des standards de sécurité, de confidentialité et d'intégrité habituellement associés au vote papier requiert une analyse plus poussée si nous souhaitons obtenir une estimation réaliste des coûts.

• (11 h 40) •

Je tiens à souligner que nous adhérons aux objectifs de modernisation qui sous-tendent la proposition d'utiliser, lors des prochaines élections scolaires, un mode de votation à distance. C'est ainsi que, conformément à notre mission, qui est de veiller à l'intégrité, à la transparence et à l'équité du système électoral, nous souhaitons proposer au législateur un éclairage complet et objectif sur les avantages et les défis de l'introduction partielle ou complète du vote par Internet à distance, et quel que soit le palier électif, bien sûr, sous réserve de l'approbation du projet par l'Assemblée nationale, conformément aux dispositions de l'article 485 de la Loi électorale.

Cette étude aborderait les aspects suivants : sur la base des expériences de vote par Internet, au Canada et ailleurs dans le monde, dégager et préciser les enjeux liés à l'adoption de cette technologie dans le contexte québécois; évaluer l'effet de l'introduction de cette technologie de vote sur les exigences de notre système électoral en matière de transparence, d'intégrité et d'équité; analyser les risques technologiques liés au vote par Internet à distance et les mesures et mécanismes disponibles à ce jour pour les encadrer, les limiter ou les éviter; au regard des changements que pourrait introduire l'adoption de cette technologie de vote, préciser les attentes des électeurs, évaluer l'acceptabilité sociale de cette technologie ainsi que le niveau de tolérance au risque des électeurs, des candidats et des partis politiques; évaluer la possibilité de recourir au vote par Internet à distance dans différents contextes électoraux, que ce soit lors d'essais aux paliers provincial, municipal ou scolaire, d'une consultation, du vote par anticipation ou auprès de certaines catégories d'électeurs; enfin, évaluer les coûts et les bénéfices du développement, de la mise en oeuvre et de l'entretien de cette technologie.

Toutefois, pour être en mesure de faire des propositions éclairées, en phase avec la réalité québécoise, nous avons besoin d'un délai de réalisation qui est supérieur à ce que le projet de loi implique.

Dans le scénario proposé dans le projet de loi n° 185, deux ans environ nous séparent des prochaines élections scolaires. Ceci laisse peu de temps pour consulter la population et les experts, mener l'étude souhaitée, présenter des propositions au législateur et, le cas échéant, modifier le cadre législatif pour permettre l'implantation de la solution retenue dans le respect des normes et des règles qui auront été déterminées, et sans oublier qu'un tel changement doit aussi inclure la mise en place d'une stratégie d'information à l'intention des électrices et des électeurs.

Enfin, si certaines des modalités choisies au terme de la réflexion annoncée à l'article 5 du projet de loi n° 185 impliquent de confier au Directeur général des élections un rôle différent dans l'organisation des scrutins scolaires, nous croyons qu'il sera nécessaire de procéder par voie législative, de manière à préserver son indépendance.

D'un point de vue logistique, nous sommes en mesure d'accompagner les commissions scolaires en vue d'élections qui se tiendraient à l'automne 2018. Nous concédons toutefois que la succession de deux événements électoraux à un mois d'intervalle pourrait avoir un effet négatif sur la participation électorale, et il faut admettre que l'effervescence des élections provinciales risque de détourner l'attention de l'électorat et des médias du rendez-vous électoral scolaire.

Je me permets donc de proposer la possibilité de reporter les élections scolaires au printemps 2019. Ceci amènerait les élections scolaires suivantes en 2023, nous offrant le temps requis pour mener à bien les analyses et, le cas échéant, la mise en application de la solution retenue.

En terminant, je tiens à affirmer de nouveau les principes qui orientent notre intervention d'aujourd'hui : la tenue d'une élection doit répondre à certaines obligations qui permettent d'en assurer l'intégrité, la transparence et l'équité, peu importe qu'elle se situe au palier scolaire, municipal ou provincial. Ce sont ces principes qui nous guident dans notre volonté d'innover, et de mettre la technologie au profit du système électoral québécois, et d'encourager la participation électorale.

En effet, l'exercice d'une saine démocratie, peu importe le palier électif et la technologie employée, doit pouvoir s'appuyer sur l'édiction de règles claires et d'un processus intègre et transparent. Or, le vote par Internet est plus qu'une simple mécanique électorale. Il s'accompagne d'enjeux liés à la sécurité des systèmes, à la transparence du processus et à la confidentialité du vote, sans oublier les enjeux liés à l'imputabilité des acteurs, à l'identification des électeurs et aux recours en cas de contestation.

Il en va de la confiance des électeurs envers le processus démocratique. Sans cette confiance, l'exercice même du vote perd son sens. Par ailleurs, il faut retenir que des changements relatifs aux modalités de vote ne peuvent, à eux seuls, compenser les causes profondes d'un faible taux de participation.

Si le vote par Internet doit être implanté au Québec, il doit d'abord être pensé de façon globale pour tous les paliers électifs, où les standards doivent être les mêmes, tout en tenant compte de l'ensemble des enjeux. Nous désirons prendre part à cette recherche de solutions. Et, pour ce faire, nous prônons une approche réfléchie, qui commencerait par une analyse d'opportunité pour bien cerner les enjeux au Québec et éclairer la prise de décision publique quant aux objectifs poursuivis. Je vous remercie.

Discussion générale

La Présidente (Mme de Santis) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour 24 minutes.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Je veux remercier le Directeur général des élections de sa présentation. Peut-être vous annoncer, Mme la Présidente, je vais partager avec le collègue de D'Arcy-McGee certaines questions qui... lui aussi s'intéresse de très près à ce dossier.

D'abord, deux, trois commentaires. C'est clair que notre souhait, c'est d'instaurer un mode de votation à distance. Ça peut dépasser certaines particularités, comme serait le vote par Internet, ou par téléphone, ou... vous aurez compris que c'est un autre moyen ou des autres moyens, mais, à mon avis, il y a moyen de réfléchir à des déclinaisons autres qu'on le fait de manière traditionnelle. Je suis d'accord avec vous que c'est un des moyens pour améliorer la participation; ce n'est pas le seul. Je suis... et concède avec vous qu'il n'y a pas de garantie. Il y en a très peu, des garanties, dans ce domaine-là, comme dans bien d'autres.

En même temps, lorsqu'on regarde les taux de participation actuellement, dans le cadre des élections scolaires, je pense que quelques points seraient déjà perçus par certains comme une amélioration par rapport du passé et une pente ascendante ou, en tout cas, un début de revalorisation plus importante de ce palier électif et de ces élections. Je suis d'accord avec vous qu'il faut aussi parler de valorisation de la démocratie et des élections, de valorisation et d'une meilleure connaissance des candidats et des enjeux, j'en suis. On est, je pense, tous et toutes bien d'accord avec vous.

Là où moi, j'ai des questions... puis je vous remercie également que vous ayez fait une proposition, qu'on soit d'accord ou pas, ou que ce soit, bien, un point de ralliement ou non, c'est une occasion d'échanger, puis ça permet de mettre la table à différentes propositions. De notre côté, tous, et vous, je pense, reconnaissons que 2018, 4 novembre, avec le 2018, 1er octobre, il y a un enjeu, là, il y a du trafic en masse dans ce mois-là, et que ça va amener des situations, comme vous l'avez dit. Et tous, ici présents, avons eu cette discussion-là puis avons dit la même chose. Alors, là-dessus, on est d'accord avec vous.

Notre proposition pour 2020, elle a deux objets. Un objet important, c'est ne pas se retrouver dans un contexte où il y a plusieurs élections en même temps. Votre proposition, à ma connaissance ou selon ma compréhension, nous amène à revivre un cycle d'élections successives ou à peu près en même temps, qu'on soit au printemps ou à l'automne, ça peut différer, mais on se retrouve dans une année électorale ou dans une année où il y aurait plus d'une élection. Point d'interrogation pour nous à cet égard-là. Vous parlez de février 2019 pour faire le report, dans le fond, pour nous libérer de la période de l'automne.

Le milieu scolaire a souvent dit, puis je pense qu'ils le répéteraient s'ils étaient autour de la table, sans vouloir leur mettre des mots dans la bouche, que cette période-là du printemps n'est pas une bonne période pour tenir des élections pour toutes sortes de raisons en lien avec l'organisation : l'organisation de leurs budgets, l'organisation scolaire, mais aussi du fait... et là je fais une réflexion politique, non pas partisane mais politique, pour l'Assemblée nationale, c'est aussi la période où, habituellement, pour tous les gouvernements, il y a des budgets. Alors, ça peut se retrouver également dans une période où ce n'est pas facile pour pouvoir tenir ces élections alors qu'il y a des enjeux viennent puis pourraient mettre de côté, là, la participation.

Alors, si j'essaie de bien comprendre, ce que vous dites, c'est : Reportons le scrutin général à février 2019 de la façon traditionnelle, alors, tel que nous le faisons maintenant, donc sans aucune modification. Moi, je dirais «amélioration», mais je vais dire «modification» de la façon de voter. Et, pour 2023, parce qu'on nous aurions un cycle de quatre ans, ayons la possibilité d'introduire des projets pilotes. Donc, ne pas amener un mode de votation à distance pour tout le monde ou en toute circonstance, mais introduisons, par étapes, ce qui nous amènerait à peut-être plus loin pour une introduction uniforme du modèle.

Ma question pour vous, c'est la suivante, c'est : Est-ce qu'on ne pourrait pas travailler à l'intérieur de notre calendrier puis faire un peu la même chose plutôt que de reporter à février 2019, pour les raisons que j'ai évoquées, la proximité d'un autre scrutin pour l'organisation scolaire? Aller là où on veut aller à l'automne 2020, mais vous permettre de faire suffisamment de travaux, comme vous le souhaitez, pour que, si on n'a pas à instaurer, de manière uniforme et complète, un mode de votation à distance à l'automne 2020, on soit capables déjà de tenir certains projets. Ça, c'est mon premier point d'interrogation.

Le deuxième, c'était pour répondre à votre préoccupation à l'égard de la voie réglementaire plutôt que la loi. Je fais juste expliquer ce qu'est mon point de vue, puis, après ça, vous me direz ce que vous en pensez. L'idée derrière la loi ou dans la loi de nous permettre, comme gouvernement, quel qu'il soit, d'instaurer ou non le moyen, ce n'est pas pour outrepasser ce pouvoir et/ou pour diminuer cette indépendance entre vous et nous, c'est, à mon avis, tout simplement pour se donner l'agilité nécessaire pour pouvoir agir si vous nous proposez un modèle. Parce que, sinon, ça veut dire revenir en session parlementaire, déposer un nouveau projet qui amende la loi, et ma courte expérience de la vie parlementaire, qui s'allonge, là, mais qui est assez intense, m'amène à penser que, des fois, si tu n'es pas dans la bonne fenêtre, c'est difficile de réussir tes affaires.

Alors, dans ce contexte-là, je me dis : C'est un bon constat. Dans ce contexte-là, c'est la raison pour laquelle, pour moi, la voie réglementaire était à privilégier, surtout que nous avions une séquence qui, je le concède, n'est pas du temps inépuisable, là. Il y a une fenêtre. Mais je voudrais vous entendre sur les deux choses. Est-ce qu'on pourrait faire ce que vous souhaitez? Parce que vous semblez dire : Deux ans, c'est trop court pour arriver avec la solution complète... le faire à l'intérieur de notre calendrier pour vous donner le délai. Et, deuxièmement, est-ce que vous pensez que, si on était capable de le faire… est-ce que j'ai besoin de venir amender la loi pour instaurer des projets pilotes dans les circonstances comme celles-là?

• (11 h 50) •

La Présidente (Mme de Santis) : M. le Directeur général des élections, M. Reid.

M. Reid (Pierre) : En fait, le deux ans ne... si on devait travailler dans une période de deux ans, et là, encore, dans des délais serrés, il faudrait se mettre immédiatement à l'implantation même, là, du mode de votation à distance par Internet. Ce que je trouverais regrettable, c'est que, pour un changement quand même majeur, nous serions obligés, dans le fond, de passer outre à une analyse d'opportunité, à une consultation auprès des électeurs. Je suis de ceux qui, dans le fond, pour les modèles... le processus électoral, on se doit d'associer l'électorat, les électeurs, les électrices aux réflexions et qui amènent des changements à la Loi électorale, aux trois lois électorales.

Et c'est dans ce sens-là que, pour nous, l'étude d'opportunité était quasiment une condition essentielle pour mener à terme un projet d'implantation de vote par Internet. C'est d'ailleurs... en Colombie-Britannique, il y a cinq ans, on a entrepris le même processus, dans le fond, de travailler avec des experts et aussi de consulter les citoyens. Et, déjà là, juste d'arriver au rapport, il en était, je pense, un peu plus de deux ans.

Et je répète que, dans le fond, le vote par Internet pose de grands défis, que ça soit la question de sécurité, fiabilité des résultats, puis aussi la transparence du processus. Et, de ces défis-là, nous, on se dit : Bien, il faut vraiment les regarder avec toute l'expertise nécessaire. Et c'est là que le temps risque de manquer pour rentrer dans le délai de deux ans, en considérant l'importance de consulter la population.

M. Proulx : Bien, de mon côté, la préoccupation, puis c'est celle que je pense partager avec les collègues, puis ils vous le diront, puis... en passant, s'il n'y en a pas, de consensus, il n'y en aura pas, là, d'adoption de projet de loi. Et, dans ce contexte-là, on va faire autre chose de ces journées et ces plages disponibles là, malheureusement. Il faut trouver ces points de consensus, nous, pour être capables d'adopter un projet de loi comme celui-là. Mais il faut entendre ce que vous avez à dire parce qu'il faut que ce soit utile, ce qu'on fait. Ça, là-dessus, c'est, pour moi, et, je suis convaincu, pour les collègues, une préoccupation.

Là où j'ai aussi une préoccupation, c'est qu'à un moment donné il faut se mettre aussi en action et je pense que l'élection scolaire est... et je vais le dire, là, le plus positivement possible, je pense que cette opportunité, qui pourrait être ce banc d'essai avec lequel on pourrait travailler si un jour vous êtes d'avis et nous sommes d'avis qu'il est possible d'aller vers ça dans les autres lois électorales et peut-être même y changer notre façon de voter au Québec, puis éventuellement même au Canada, qui pourrait décider de faire autrement en parallèle ou en concomitance ou de le faire avant ou après... Alors, tu sais... Il y a, pour moi, là, une opportunité à prendre dans le contexte où on se retrouve avec les faits que vous connaissez puis qu'on a déjà évoqués, avec les difficultés dans lesquelles on se retrouve aujourd'hui, mais surtout avec l'opportunité de replacer le scrutin là où il devrait être si on ne veut pas avoir des élections qui se chevauchent.

La collègue disait tout à l'heure : On aurait pu travailler avant là-dessus, parce que la loi sur les élections et l'élection à date fixe telle qu'on la connaîtra pour le scrutin provincial existent déjà depuis un mandat, parce que c'est le cas. D'abord, ça prend l'intérêt puis cette unanimité qu'on recherche autour des collègues.

Deuxièmement, moi, je n'étais pas là, mais on aurait pu y penser aussi à ce moment-là, hein? Tu sais, quand on en a adopté une, on aurait pu s'assurer de ne pas se retrouver à trois semaines d'avis avec l'autre. Je pense que ça aurait pu être le cas. Alors, je ne m'excuserai pas pour ce que je n'ai pas fait, mais je pense que, collectivement, la prochaine fois, peut-être qu'on pourrait y penser. Mais, actuellement, on est placés devant le fait accompli. Alors, pourquoi ne pas nous-mêmes se dire : Bon, on n'a peut-être pas fait tout le travail jusqu'au bout, faisons-le maintenant, il y a une opportunité?

Ce que vous me dites, là, c'est que vous souhaitez faire une analyse ou faire une consultation puis une réflexion. Vous dites : J'aimerais avoir un mandat de l'Assemblée nationale pour le faire. Est-ce que vous avez besoin d'un mandat de l'Assemblée nationale pour consulter les gens? Moi, je ne suis pas certain, mais c'est possible que oui. Est-ce que, pour pouvoir aller au-delà de l'élection scolaire, vous n'avez pas déjà l'opportunité, dans votre organisation, de faire certains travaux ou analyses qui, j'imagine, sont débutés? Parce que moi, j'ai commencé ma vie de député la première fois en 2007, il me semble qu'on parlait de ça. Ce n'était peut-être pas aussi avancé, évolué ou clair qu'aujourd'hui, mais il y a une réalité, ce n'est pas d'hier qu'on parle de modes de votation qui sont différents que celui qu'on connaît ici avec le crayon, l'isoloir et le papier.

Alors, dans ce contexte-là, est-ce qu'on ne peut pas avoir des démarches qui sont une en même temps que l'autre, mais qui ne viennent pas nous créer ce qui va être notre enjeu principal si on donnait suite à votre proposition? C'est d'être capable d'obtenir un consensus pour faire ce qu'on veut faire pour, je vais dire, renforcer une démocratie pour être capable de s'assurer, comme l'a dit le collègue de Chambly, que, si on les fait, on les fait correctement. Moi, elle est là, ma préoccupation. Je cherche, avec vous, l'opportunité de se dire : Oui, vous avez vos préoccupations, il faut vous donner du temps pour travailler. Moi, je vous dis : J'aimerais ça qu'on travaille puis qu'on travaille plus vite. Mais ça, c'est ma lecture des choses, mais on doit bien faire les choses. Est-ce qu'on est capables, plutôt que d'aller par étapes... maintenant, qui nous amène à avoir de la difficulté à rencontrer notre objectif d'adopter cette loi, ce projet de loi là... Est-ce qu'on ne peut pas faire ce que voulez faire, mais à l'intérieur du calendrier qu'on propose?

M. Reid (Pierre) : Écoutez, je concours, je pense, à l'ensemble, là, des commentaires qui ont été exprimés par rapport au chevauchement des élections. Je pense qu'on s'entend que ce n'est pas la meilleure façon. Il faut éviter ça. Puis c'est pour ça que, par rapport au vote par Internet, est-ce que je peux entreprendre des études? Je vais avouer, la façon dont j'avais posé la question l'automne dernier à la Commission des institutions, c'est que j'interpelais l'intérêt des parlementaires pour entreprendre cette étude-là, parce que, vous le savez, si le Directeur général des élections entreprend de telles études, il y a un coût derrière ça, un coût important.

Et, si, au bout de la ligne... j'aurais beau consulter la population, mais, si les parlementaires, au point de départ, disent : Nous autres, on n'est pas intéressés par ça... Et moi, je l'ai entendu il n'y a pas si longtemps, où il n'y avait pas d'ouverture de la part de certains parlementaires. Donc, je me dis : Pourquoi j'entreprendrais quelque chose, de dépenser des fonds publics, à un moment donné, alors que la technologie évolue? Donc, si on disait : Dans cinq ans ou dans six ans, bien, ça serait peut-être intéressant de regarder ça, bien, je veux dire, j'aime autant que je le sache tout de suite que les parlementaires seraient d'accord pour qu'on fasse cette étude globale.

Parce que moi, je suis persuadé, je ne suis pas le seul, ça viendra, le vote par Internet. Mes deux derniers prédécesseurs l'ont dit. Je l'ai dit il y a deux ans lors de l'étude du projet de loi n° 86. Mais ce n'est pas facile parce que, si c'était si facile que ça, bien, on l'aurait partout dans le monde. Et, quand je regarde les expériences, je pense, entre autres, à la Norvège, qui a comme reculé par rapport à l'implantation de vote par Internet même au niveau municipal, la même chose aussi au niveau du Royaume-Uni, et dans... Si je prends les expériences de la Suisse, ils sont allés de façon progressive dans l'implantation de... mais après avoir, à un moment donné, analysé les choses, mais avec une technologie qui même, à l'époque, était peut-être encore plus risquée que celles qui peuvent exister et que celles qui s'en viennent.

Donc, nous, on se dit : Oui, on a fait, depuis quelques années, une veille sur ce qu'il se fait ailleurs, mais on n'est pas allés plus loin que ça. Et c'est pour ça que je me dis : Le temps est peut-être venu d'entreprendre ce mandat-là, mais de prendre le temps nécessaire pour bien le faire et d'associer la population à cette réflexion-là. Comme je l'ai dit plus tôt, moi, dans le fond, quand je suis arrivé, quand j'ai été nommé Directeur général des élections, c'est une des premières choses que j'ai dite à l'équipe : Pour moi, la participation électorale, elle est importante. Si les gens ne participent pas, et, si on s'en va vers des taux de participation de 50 %, on a un problème de démocratie et même de légitimité de la part des parlementaires.

Donc, pour qu'on puisse parler de l'implantation du vote par Internet, j'en suis, mais, en même temps, comme je l'ai souligné, il faut, à un moment donné, trouver des façons d'augmenter la participation, d'impliquer les électeurs. Et moi, je trouve que cet exercice-là de consultation pour le vote par Internet pourrait nous amener à entendre les électeurs peut-être sur des points de vue concernant la participation électorale.

• (12 heures) •

La Présidente (Mme de Santis) : M. le ministre.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Moi, j'entends bien ce que vous dites puis je salue la réflexion plus grand-angle que ce que nous avons ce matin. Puis, avant de passer la parole à mon collègue, dans le fond, deux choses qui, pour moi, sont importantes, c'est que... Vous dites, aujourd'hui, bien, d'abord que vous n'êtes pas contre l'idée de voir cette élection reportée, pour les raisons qu'on a évoquées. Ça, d'abord... mais c'est aussi important de vous l'entendre dire, parce que vous êtes cette organisation qui avez la responsabilité d'encadrer et de voir la légitimité du processus électoral, et vous nous dites : Ce n'est pas illégitime de faire ça, pour les raisons que vous évoquez. C'est important. Ce que vous dites, c'est que, si vous le faites pour les raisons que vous évoquez et qu'en plus vous avez une opportunité d'améliorer la participation en utilisant de nouveaux modes de votation à distance, et prenant, par exemple, celui par Internet, vous dites : J'ai besoin de temps, et on ne peut pas aller sans réfléchir et même sans consulter pour pouvoir voir comment on peut améliorer réellement les choses, et apprendre des erreurs d'ailleurs, puis d'utiliser les moyens d'aujourd'hui.

Ce que moi, j'entends de ce que vous me dites, c'est qu'il faut trouver ce compromis, pour être capables, nous, de réaliser ce qu'on veut réaliser à l'égard de la légitimité de l'élection et de l'opportunité de la tenir puis de vous donner ce mandat-là. Parce qu'il y a ici un appétit des parlementaires de faire cela. Sur le mandat proprement dit, je ne veux pas m'engager au nom de ma formation politique, mais je pense que les collègues diraient la même chose que moi... parler de mon côté : c'est clair que je pense qu'il faut avoir cette discussion-là, pour voir s'il y a opportunité de vous donner, dans l'avenir, les moyens de faire ce que vous demandez. Mais je veux juste nous assurer, ici, que, pour les parlementaires qui auront à prendre la décision, si j'associe cette démarche-là et le mandat que vous recherchez à l'adoption du projet de loi, je risque d'avoir beaucoup de difficultés à réaliser ce pour quoi nous sommes ici aujourd'hui. Mais j'entends que, pour vous, il faut lier les opportunités si on est pour changer notre façon de voter.

J'ajoute, avant de terminer, que, pour moi, l'opportunité de faire autrement, maintenant, pour l'élection de 2020, c'est une occasion de vous faire travailler dans le film de l'acceptabilité sociale, de la réflexion à l'égard du nouveau mode de votation. Avant de proposer d'implanter ça à un niveau où c'est encore peut-être plus complexe, pour toutes sortes de raisons évidentes d'organisation électorale au Parlement, à l'Assemblée nationale, alors... ou dans 1 000 et plus municipalités... Alors, moi, je le vois aussi comme une opportunité de travailler. Alors, si on était capable... et si vous me disiez : Ce n'est pas ce que je souhaite, mais je suis capable de penser que, si vous travaillez dans votre calendrier, je pourrais, au moins, avancer les travaux pour les élections scolaires et peut-être être en mesure... et je pense être en mesure de vous proposer un projet ou des projets pour tenter des choses, je pense qu'on sort tous gagnants de tout ça. C'était mon commentaire à cet égard-là. Je nous invite, en tout cas, à travailler en ce sens, puis je voulais vous remercier personnellement de votre participation et permettre à mon collègue de D'Arcy-McGee de vous poser quelques questions.

La Présidente (Mme de Santis) : Peut-être, M. le Directeur général des élections voudrait faire une remarque.

M. Reid (Pierre) : Je réitère, effectivement, que, pour le chevauchement des élections, je suis d'accord avec vous. D'ailleurs, juste à titre d'information, le problème que ça pourrait poser pour des électeurs, au niveau des élections scolaires, c'est que la révision qui va être faite lors des élections provinciales, vous comprendrez que nous ne pourrons pas, à ce moment-là, transmettre au président d'élections des listes électorales à jour, révisées par le provincial. Donc, ça va obliger aux électeurs de faire une révision lors des élections provinciales, dans le cours de la période des élections provinciales... et également de leur dire : Bien, écoutez, n'oubliez pas de faire une révision. Donc, si vous voulez, dans le fond, décourager les gens à venir voter, c'est un bon exemple.

Je réitère l'importance du vote par Internet, parce que, comme vous dites, si on nous demande, là, de dire : Bien, écoutez, oubliez la consultation puis clenchez sur la faisabilité de l'implantation du vote par Internet, moi, je pense que nous ratons une occasion, parce que l'exercice qu'on peut faire pour le scolaire, on se doit de le faire pour le municipal. C'est parce que, déjà, j'entends, j'ai entendu, je suis allé sur le terrain, on me dit : Pourquoi pas au niveau municipal? Parce qu'aussi au niveau municipal on déplore le taux de participation.

Et je vous dirais qu'au niveau provincial... la même chose pour les électeurs qui sont à l'extérieur du pays. Moi, je veux éviter que des électeurs ne puissent pas transmettre leur vote par correspondance dans les délais requis pour que leur voix puisse être comptabilisée. Je sais qu'aux dernières élections fédérales Élections Canada a eu ce problème-là, où beaucoup de votes hors Canada sont parvenus en retard.

Moi, je pense aussi qu'à un moment donné le vote par Internet, dans les régions éloignées, pourrait être une façon d'être utilisé, ce qui permettrait peut-être d'améliorer aussi le lien Internet dans certaines régions éloignées par le fait même. Mais moi, je réitère que la proposition que nous faisons de faire une étude globale de l'implantation d'un vote par Internet, nous devons associer les électeurs à cet exercice. C'est une condition qui m'apparaît essentielle.

La Présidente (Mme de Santis) : Merci. M. le député de D'Arcy-McGee, vous avez 2 min 55 s.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Je salue le ministre, la présidente, nos collègues. Je tiens aussi, en mon nom, à reconnaître les formations de l'opposition pour avoir participé au consensus. Je crois que c'est dans l'intérêt de tous les Québécois et Québécoises.

Écoutez, j'aurais besoin de... j'aurais aimé avoir plus de temps. Pour avoir chapeauté l'exercice, en quelque part, à trois reprises comme directeur général de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, je suis sensible à la complexité de l'affaire.

Je me suis permis, en tant que parlementaire — on parlait du projet de loi n° 86 — à partager, sur le plan confidentiel, avec l'ancien ministre de l'Éducation, quelques petites recherches, admettons, très modestes sur la faisabilité d'un vote par voie électronique. Et vous allez convenir avec moi, M. le directeur général, que l'exemple de la Suisse ainsi que l'Estonie, en Europe, même quelques exemples au Canada s'annonçaient probants, en même temps qu'il y avait beaucoup de problèmes.

Compte tenu du temps qu'il me reste, qui est très limité, j'aimerais juste comprendre pourquoi… j'ai l'impression qu'on insiste sur l'analyse, une étude de faisabilité sur la possibilité d'instaurer une méthode par voie électronique à travers les paliers d'élections municipales, fédérales ainsi.

Dans un premier temps, je suis très reconnaissant du fait qu'on parle de suffrage universel au niveau des commissions scolaires, mais le secteur s'est exprimé sur le plan public, est très prêt à embarquer dans un exercice, admettons-le, peut-être pas parfait, mais crédible et transparent.

Est-ce que vous écartez la possibilité de faire ces études d'opportunité uniquement sur les élections scolaires?

M. Reid (Pierre) : En fait, l'étude d'opportunité porterait à l'égard des trois paliers électifs.

M. Birnbaum : Pourquoi? ...question.

M. Reid (Pierre) : Bien, parce que les réalités sont différentes, les attentes des électeurs peuvent être différentes par rapport à une élection municipale, l'élection scolaire ou une élection provinciale. Et je pense qu'on se doit, dans le fond, de voir quelles sont les attentes, je vous dirais même, peut-être, la tolérance au risque, de la part des électeurs, tout dépendant des paliers électifs. Mais là moi, je vous dis ça, mais moi, j'aimerais bien entendre la population nous dire est-ce qu'effectivement les attentes sont les mêmes selon les paliers électifs.

M. Birnbaum : Et, avec respect, ça n'appartient pas au législateur, l'opportunité de proposer des élections d'un mode dans un des trois paliers qui n'est pas parallèle aux autres deux.

M. Reid (Pierre) : Je vous dirais qu'actuellement dans la loi scolaire, à l'article 282.1, une commission scolaire peut conclure une entente avec le Directeur général des élections pour prévoir un nouveau mode de votation.

Moi, je vous dirais, puis en tout respect, ce que j'ai dit aux parlementaires, dans le cadre du projet de loi n° 101, qui donnait suite à des recommandations de la commission Charbonneau, au printemps 2016, et là on discutait de la composition du comité consultatif, que vous connaissez… j'avais dit : La Loi électorale, ce n'est pas seulement la loi des parlementaires, c'est la loi de l'ensemble des électeurs, des électrices du Québec, ce qui m'a amené à composer une table citoyenne pour entendre les citoyens. En fait, c'était un peu le volet citoyen du comité consultatif que vous connaissez.

La Présidente (Mme de Santis) : Merci beaucoup. Maintenant, la parole est à la porte-parole de l'opposition officielle pour 14 min 30 s.

• (12 h 10) •

Mme Poirier : Merci, Mme la Présidente. Je vais continuer sur l'élan du ministre. Je vais faire référence à un article qui a été publié le 28 novembre 2017 : Le DGE invite les élus à considérer le vote électronique. Alors, lors des élections municipales, vous aviez, justement, été déçu du taux de participation et vous aviez dit que vous invitiez les parlementaires québécois à envisager sérieusement l'implantation du vote par Internet. Donc, vous aviez déjà, à ce moment-là, une certaine réflexion, en disant qu'il pourrait peut-être...

Et ce que j'en comprends, c'est que, si ce n'est pas dans votre loi, vous ne pouvez pas prendre l'initiative de faire des démarches ou d'aller vers un mode alternatif de vote. C'est ce que j'en comprends, je vais vous demander de le confirmer.

Mais ce que je comprends aussi, dans le même article, c'est qu'en Ontario tout ça existe et que ça fonctionne, et que ça fonctionne aussi au niveau des élections municipales en Nouvelle-Écosse et en Ontario, et plus du tiers des villes ontariennes offriront cette possibilité en 2018. Donc, ça existe, hein? On n'a pas besoin de recréer les choses, là, ça existe, on peut s'appuyer sur les gens qui l'ont déjà fait.

Alors, je vais aller exactement dans la même ligne de mon collègue de D'Arcy-McGee. Puisque ça existe, puisque vous souhaitez, suite aux élections municipales, aller vers un mode de vote électronique... Puis je ne sais pas pourquoi, là, dans notre Parlement, ça ne s'est pas plus discuté, là, je ne suis pas de cette commission-là. Mais est-ce que vous avez adressé aux membres de la Commission des institutions, par exemple, une demande de mandat pour aller étudier le vote électronique, que vous, vous voulez une étude globale? Moi, je vous dis, il y a actuellement une demande qui vous est faite, à l'effet de dire : Est-ce qu'on peut au moins le regarder pour le scolaire, qui pourra peut-être être témoin, justement, servir de témoin pour les autres paliers de gouvernement par la... les autres paliers, oui, de gouvernement par la suite?

Et je vais vous exprimer ma surprise. On est en 2018, là. Ça, ça existe, là, puis, regardez, tout le monde ont des portables devant eux, ont des ordinateurs. Et que le DGE, de lui-même, n'ait pas, à ce jour, une réflexion sur le vote électronique, de lui-même, je trouve ça un peu étrange. Vous allez me dire : Je n'ai pas eu le mandat. Mais, quand je pense qu'on regarde une politique numérique — le ministre va annoncer la sienne aujourd'hui — l'ensemble du gouvernement regarde une politique numérique, comme institution, que vous n'ayez pas de vous-même été voir ce qu'il se passe quand les autres provinces le font déjà, j'ai un petit peu de misère. Je vous le dis, j'ai un peu de misère à vous suivre. Et je pense qu'on est tous, en 2018... Moi, je regarde même... On a fait des courses à la chefferie dans nos partis, on a tous voté sur notre téléphone puis par Internet, puis il n'y a personne qui a remis en question les résultats des élections dans chacun de nos partis. Puis ça a fonctionné.

Alors, je pense, la technologie est là, là, puis je pense que le monde est rendu là, au Québec, là. Il n'y a que le DGEQ qui n'est pas rendu là, on dirait.

Alors, moi, je ne vous mets pas en accusation, mais, je vous dis, je trouve ça étrange qu'aujourd'hui, dans un document, vous nous dites : Mais on n'est pas prêts, on ne sera pas prêts dans deux ans, puis, tant que l'Assemblée nationale ne nous donne pas un mandat, bien, on ne se mettra pas au travail. Excusez-moi, là, mais je trouve ça décevant.

La Présidente (Mme de Santis) : M. Reid.

M. Reid (Pierre) : Mme la Présidente, je pourrais vous dire que, depuis plusieurs années, même avant mon arrivée, il y a toujours une veille qui a été faite, on a toujours vérifié ce qui a pu se faire ailleurs, que ce soit en Ontario, à Halifax. J'ai envoyé des gens lors des dernières élections à Halifax, parce qu'ils ont des élections simultanées, donc scolaires et municipales. Et également on a regardé les exemples qu'il y a en Europe.

Mais, dans le fond, tout ce qu'on peut constater, c'est que, d'entreprendre une étude sur le vote par Internet... Je veux dire, de la part du Directeur général des élections, moi, en sachant que, déjà, les parlementaires ont une réticence par rapport à l'utilisation du vote par Internet, bien, je me dis : D'engager des fonds publics sans avoir, dans le fond, l'aval des parlementaires pour entreprendre cette étude-là, je vais vous avouer que je suis très mal à l'aise. On fait les travaux dans la mesure du possible pour éviter... et d'être prêts à entreprendre cette étude-là. Et d'ailleurs c'était pour ça, mon intervention d'octobre dernier. J'ai dit : Est-ce qu'il y a l'intérêt, de la part des parlementaires, à ce qu'on puisse entreprendre... Et là je n'ai pas eu de réponse. Et l'occasion se présentait aujourd'hui pour renouveler ma demande de l'automne dernier.

Mme Poirier : Mme la Présidente, vous me dites qu'il y a de réticence de la part des parlementaires. Moi, j'aimerais ça que vous m'expliquiez ça, là. Est-ce que c'est le fait de ne pas avoir eu la commande qui vous fait exprimer qu'il y a de la réticence ou avez-vous entendu de la réticence? Moi, je... pour ça, là...

M. Reid (Pierre) : Bien, en fait, dans le fond, de ne pas avoir eu de réponse, effectivement, que... Si on voulait mettre, disons, à la page le Directeur général des élections, je me serais attendu d'avoir une réponse dans les semaines qui ont suivi ma demande. Et on est en fin mai, et je n'ai pas eu d'indication pour poursuivre. Parce que c'est quand même des fonds publics importants à investir.

Et puis je dois vous dire que ça ne fait pas l'unanimité, le vote par Internet, ici comme ailleurs, parce que, comme je l'ai dit tantôt dans mon... comme je l'ai dit tantôt, je pense, c'est la réponse à une question du ministre, si c'était aussi évident et aussi facile, on l'aurait partout dans le monde. Et c'est là que, dans le fond, c'est... on tient une élection — en tout respect pour les campagnes à la chefferie, au vote qui peut se faire chez les ordres professionnels — mais on parle quand même d'un bassin de population, quand on parle des partis ou des professionnels, c'est... on peut parler... Le Barreau, je pense qu'on est 27 000 ou 28 000. Bon. Puis, pour les partis, ça peut varier, allez-y à 100 000. Mais là on parle quand même de s'adresser à 6 200 000 électeurs et électrices au Québec sur tout le territoire.

Mme Poirier : J'irais sur d'autres aspects qu'ont porté à notre connaissance particulièrement l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, à l'effet que, entre autres, tout ce qui est le financement du processus scolaire est assumé par les commissions scolaires, et ça, ces règles-là n'ont pas encore été modifiées, le fait que la correction de la liste électorale a des problèmes suite, justement, au redécoupage. Et on nous dit que, entre autres, dans le secteur anglophone, les électeurs doivent parcourir de grandes distances pour se rendre au bureau de scrutin, parce qu'il y a une commission scolaire pour la moitié du territoire du Québec.

Alors, dans une dynamique où il y a des problématiques comme cela, est-ce que vous, pour vous, tenir le vote au printemps 2019, ça vous permet de dire : Moi, je vais régler les listes électorales des anglophones, j'ai une solution pour rapprocher les bureaux de vote de l'électeur anglophone, puis j'ai aussi une solution pour le financement, entre autres, du processus électoral? Est-ce qu'on a des solutions court terme aujourd'hui qui nous permettraient de s'assurer qu'au niveau des commissions scolaires anglophones on a des réponses à donner pour une élection qui pourrait se tenir au printemps 2019, comme vous le proposez?

M. Reid (Pierre) : En fait, je suis très sensible au... D'ailleurs, pour les commissions scolaires anglophones, par rapport aux grandes distances, là, que des gens peuvent avoir à parcourir, moi, je vous dirais : Si, dans le fond... soit pour 2019, le printemps 2019 ou pour 2020, je pense qu'on pourrait, à ce moment-là, explorer le vote par correspondance, dans un premier temps. Le temps aussi, pour nous, de finaliser une étude globale sur le vote par Internet. Le vote par correspondance a déjà eu lieu dans une commission scolaire, je pense, en 2003, et effectivement... mais là c'est une élection. Donc, on avait utilisé le vote par correspondance, je pense, c'est la commission scolaire des Navigateurs, de mémoire. Et effectivement, au niveau de la région, la commission scolaire avait eu un meilleur score pour le taux de participation. On pouvait l'expliquer en disant : Bien, est-ce que les gens qui ont voté par correspondance seraient allés voter au bureau de vote? Peut-être pas, c'est peut-être, là... Ça, c'était dans le rapport, la conclusion, c'était effectivement qu'en ayant l'opportunité de voter par courrier, par correspondance, ça a pu permettre à des gens de voter, alors qu'autrement ils ne se seraient pas déplacés. Donc, peut-être que, dans un premier temps, le vote par correspondance pourrait répondre, là, à l'accessibilité d'électeurs qui désirent voter aux élections scolaires.

Mme Poirier : Au niveau des listes électorales, la correction des listes électorales, est-ce qu'on serait capable, pour le printemps, d'avoir cette correction des listes là, telle que demandée par les commissions scolaires anglophones?

M. Reid (Pierre) : Oui. En fait, les ajustements, c'est de s'assurer que, dans le fond, les électeurs anglophones puissent être sur les listes des commissions scolaires. Je dois vous dire — puis d'ailleurs j'ai demandé, avant mon entrée ici, en commission parlementaire — les liens se font avec les commissions scolaires pour s'assurer que les... parce que c'est eux qui nous envoient des listes, de s'assurer... nous, on doit faire, à ce moment-là, l'adéquation avec la liste électorale permanente. Et on dit, dans les cas où il n'y a pas d'adéquation : Ça a pu varier d'une commission scolaire à l'autre de 5 % à 30 %, mais il y a toujours une rétroaction qui se fait auprès des commissions scolaires pour corriger la situation et en arriver à bien identifier l'électeur sur les listes anglophones.

Et, en même temps, comme je disais tantôt, le fait que des électeurs doivent aller en révision pour les élections provinciales, bien, ça va nous donner aussi le temps, en reportant l'élection de 2018, que les présidents des élections aient en main des listes électorales qui soient plus à jour que celles qu'ils recevraient cet automne.

• (12 h 20) •

La Présidente (Mme de Santis) : Vous avez encore quatre minutes.

Mme Poirier : Je vais revenir sur le début de notre conversation. Ce que j'en comprends, c'est que, tant et aussi longtemps que les parlementaires ne vous donnent pas un mandat clair sur le fait d'aller fouiller ce que ça voudrait dire, le vote électronique au Québec, donc, tous paliers confondus, vous, vous ne faites qu'une veille, vous n'explorez pas les solutions. À partir du moment où, par exemple, avec la décision qui serait prise ici, il y aurait justement un mandat de donné par le gouvernement, l'Assemblée nationale — en tout cas, je ne sais pas trop qui est-ce qu'il faut qu'il donne le go, là — la solution de dire : Au moins explorer, dans un projet pilote, le vote électronique au niveau scolaire serait-il, selon vous, puis se basant sur le fait que ça existe dans des municipalités, on l'a vu en Ontario... Fort de cette expérience-là, l'implantation dans le scolaire serait-il possible pour 2020 selon vous?

M. Reid (Pierre) : Moi, je pense qu'effectivement, dans la mesure où on aurait un mandat d'une étude globale sur le vote par Internet, ce que vous me demandez : Est-ce qu'on pourrait, en prévision de 2020, travailler à une solution pour le vote par Internet... C'est sûr que, si on regarde... Dans le fond, c'est que, pour le vote par Internet, c'est sûr qu'on devrait commencer à travailler sur une solution, mais, ce que je comprends... ne nous empêcherait pas quand même d'entreprendre une étude globale à l'égard des trois niveaux, des trois paliers électifs. On peut comprendre que, dans le fond, l'expérience pilote scolaire qui pourrait avoir lieu en 2020 — probablement que je prendrais toutes les réserves possibles pour dire tout dépendant de la façon dont ça se déroule — qu'il ne faudra pas en tirer des conclusions s'il y avait certains problèmes d'application, mais que ce serait, dans le fond, une expérience pour bonifier, dans le fond, l'étude globale qui serait en cours.

Mme Poirier : Oui, en vue peut-être de renouveler cette expérience-là avec le municipal l'année suivante, là. Je veux dire, si, en 2020, on a une expérience intéressante pour laquelle il y a peut-être eu des petites lacunes, mais qui pourrait servir à l'élection municipale suivante et éventuellement l'élection québécoise, bien, ça pourrait être, dans le fond, une façon de mise en place d'un vote électronique pour l'avenir.

M. Reid (Pierre) : Oui, puis je vous dirais... Écoutez, je pense qu'à un moment donné, en ayant le mandat de l'Assemblée nationale, et particulièrement pour le volet élections scolaires 2020 dans le mandat de l'étude globale, je pense qu'à certains moments je pourrais faire rapport à l'Assemblée nationale pour recevoir, là, la proposition. Là, est-ce qu'on peut y aller par une application générale au niveau de l'ensemble des commissions scolaires ou si on réalise des projets pilotes dans certaines commissions scolaires? Ça sera à déterminer.

Mais je me permettrais juste, dans le fond, que... Vous allez me trouver, peut-être, tenace, mais l'analyse, là, d'opportunité et une analyse globale concernant le vote par Internet, je pense qu'elle doit se faire, le moment est opportun. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas l'intention, la volonté de le faire, mais, quant à moi, ça engage des fonds publics assez importants, et, sur ça, je suis très prudent.

Mme Poirier : Bien, justement, on parle de combien?

M. Reid (Pierre) : Écoutez, si je prends juste... La Colombie-Britannique a fait un exercice, il y a cinq ans déjà, de... C'était à peu près de 400 000 $, 500 000 $, juste... dans le fond, pas de l'implantation. Déjà, de faire l'étude, là, puis ils ont fait vraiment une étude assez large, là, c'était entre 400 000 $ et 500 000 $... 400 000 $. Et là il faudra voir après ça si on veut aller plus loin et de tester des solutions, mais c'est des coûts qui s'ajoutent.

La Présidente (Mme de Santis) : Merci beaucoup, M. Reid. Maintenant, la parole est au porte-parole du deuxième groupe d'opposition pour 9 min 30 s.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Je ne veux pas banaliser l'utilisation des fonds publics, mais, si vous nous parlez d'une étude exhaustive sur le vote électronique pour 400 000 $, 500 000 $, je ne me souviens pas des chiffres exacts, mais je pense qu'on a englouti plus que ça pour une fausse commission sur le racisme systémique. Donc, j'ai comme l'impression que ce n'était peut-être pas si cher payé, finalement.

Mais je vais revenir sur une autre de vos déclarations. Vous avez mentionné que, si on va vers un taux de 50 %, ça voudra dire qu'on a un problème dans la démocratie, que les élus auront un problème de légitimité. Que dire des élus qui sont élus avec 4,87 % de taux de participation dans le réseau scolaire francophone?

M. Reid (Pierre) : En fait, ce n'est pas de remettre que je... Je ne remets pas en question la légitimité de son élection et de ce taux-là, mais ça préoccupe les gens. Et la question est posée à ce moment-là. Et de dire : Écoutez, si on s'en va vers des taux de 50 %, de 40 %, est-ce qu'à un moment donné, comme parlementaire, on se sent légitimé ou appuyé par l'électorat? C'est un peu dans ce sens-là que je voulais... Et de là ma préoccupation puis, je pense, la préoccupation des gens qui sont ici, de voir à éviter que le taux de participation... Et, je dois vous dire, le taux de participation chez les jeunes, les 18-24 ans... et, en 2018, ce sera plus de 300 000 jeunes électeurs dont ce sera la première occasion pour voter. Il faut les amener dans les bureaux de vote.

Et je sais qu'il y a différentes mesures qui doivent être prises. Des fois, je les... Ils sont démunis. Moi, je vous dis, je l'entends. J'ai parcouru des régions dans le Québec. Et ils sont démunis dans le sens où on dit : On a 18 ans, où on nous dit qu'on peut aller voter? Excusez l'expression, on fait quoi avec ça? Donc, il n'y a aucune préparation pour les amener à aller voter, et de là le défi de l'information. Nous allons insister, nous, pour une campagne de publicité qui va cibler seulement les 18-24 ans pour vraiment aller les atteindre, aller les chercher. Et donc c'est un peu dans ce sens-là. Quand je parle de légitimité, je me dis, ça devrait... Bien, je pense que ça doit vous inquiéter également, vous tous ici, si on allait vers des taux de participation de plus en plus faibles.

M. Roberge : Mais vous ouvrez un débat qui m'intéresse, là, celui du taux de participation des jeunes, du taux de participation au complet, là. C'est sûr que le Directeur général des élections a une responsabilité d'informer puis d'amener des gens à s'intéresser aux élections provinciales, et etc., puis aux autres paliers. Mais, d'après vous, puisque sans doute que vous vous intéressez à cette question-là particulière, là, parce que c'est dans votre mandat, qu'est-ce qui explique le si bas taux de votation, vous dites, chez les 18-25? Parce qu'on peut dire : Ah! on n'en parle pas assez à l'école. Mais, quand moi, j'étais au secondaire, là, le cours ECR n'existait pas, puis on en parle un peu là-dedans. Le cours Géographie, histoire et éducation à la citoyenneté, il n'existait pas. Tu avais un cours de géo, tu avais un cours d'histoire. Ça n'existait pas, l'éducation à la citoyenneté. Donc, il n'y en avait ni en ECR, le cours d'éducation à la citoyenneté n'existait juste pas, le taux de décrochage était un petit peu, même plus haut qu'aujourd'hui, il n'y avait pas de taux de... Il n'y avait pas de bureau de vote dans les cégeps et les universités, et, pourtant, les jeunes votaient davantage qu'aujourd'hui. Donc, on a plus de mesures qu'avant, on a plus de mesures facilitatrices qu'avant, le bureau du DGE est plus proactif, on en fait plus dans les écoles, puis les jeunes votent moins. D'après vous, qu'est-ce qu'il se passe?

M. Reid (Pierre) : Bien, je vous dirais que cette baisse de participation chez les jeunes, elle est commencée il y a déjà plus de 30 ans. Déjà, en 1985, à la suite d'une étude de la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires de l'Université Laval, on avait observé cet écart-là. Donc, ce n'est pas récent. Et vous me direz : C'est partout dans le monde, dans le monde occidental, je pense, que le taux de participation... Et je comprends qu'on me donne ça, on me dit : Écoutez, mais c'est quasiment quelque chose d'inévitable.

Moi, je réponds à ça : Bon, ce qu'il se passe ailleurs dans le monde, c'est leur affaire. Moi, j'ai un mandat pour le Québec. Et c'est là que, dans le fond, ma préoccupation de travailler à améliorer ce taux de participation... Et c'est sûr que ce n'est pas seulement le Directeur général des élections qui peut faire ça, puis même avec les publicités qu'on peut faire. Mais, je pense, ça interpelle, puis je l'ai déjà dit, ça interpelle les médias, ça interpelle les parlementaires, ça interpelle, on va dire, les professeurs, même les chefs d'entreprise. Il faut qu'à un moment donné qu'il y ait, dans le fond, une responsabilité collective pour amener les jeunes, dans le fond, à l'importance d'aller voter.

Mais le vote, c'est un peu l'aboutissement. C'est de s'intéresser aux affaires publiques. Et ça, ça commence beaucoup plus tôt. C'est sûr qu'on déplore, dans le fond, ce que j'ai entendu, dans le fond, qu'au niveau secondaire il n'y ait pas cette... dans certaines écoles, oui, il y en a... de ne pas avoir cette préparation, ce cours d'éducation civique pour permettre aux gens, aux jeunes déjà de faire la distinction entre les niveaux électoraux.

Mais moi, je pense qu'il faut poursuivre. Puis c'est mon intention aussi, comme Directeur général des élections, et de mon équipe, de ne pas seulement, comme on va dire, sortir sur la place publique à tous les quatre ans et de remballer nos urnes. Et là on se dit : Bon, on attend quatre ans. C'est d'être présents sur la place publique, même  entre les élections, pour susciter cet intérêt, puis avec la collaboration de tout le monde, y compris des parlementaires.

• (12 h 30) •

M. Roberge : Donc, je comprends que le taux de votation, ce n'est pas la maladie, c'est le symptôme. Puis, si je poursuis mon analogie, j'ai l'impression que ce ne sera pas le bon médicament qu'on ferait si on fait juste aller vers le vote électronique, parce que, dans votre allocution, ce que vous avez dit, c'est que, bon, là où ça a été fait, à Markham, à Peterborough, à Halifax, en Estonie, en Suisse, à South Wales, toutes ces expériences-là, selon votre analyse, ne permettent pas de conclure que le vote par Internet augmente la participation électorale. Donc, ce que je comprends, c'est que c'est peut-être intéressant, c'est peut-être pratique de voter avec ce bidule-là, mais, d'après votre analyse, il n'y a pas de lien, de ce qui s'est fait ailleurs, entre une hausse du taux de participation et le vote par Internet.

M. Reid (Pierre) : En fait, oui, il y a eu une augmentation du vote par Internet... En fait, c'est un déplacement. Les gens qui pouvaient voter soit par correspondance ou papier se sont déplacés vers le vote par Internet, et, dans le fond, une catégorie d'âge qui n'est pas jeune, là. C'est dans les 40 ans, 50 ans, où les gens ont utilisé, là... les gens qui étaient déjà convaincus d'aller voter. Mais, quand on parle de technologie, oui, les jeunes sont sur les technologies. J'entends : trop d'information, c'est comme pas assez d'information. Et c'est vrai que le vote par Internet pourrait être un outil pour les jeunes, mais je ne l'ai pas entendu beaucoup de la part des jeunes.

Mais ce que j'entends, par exemple — et ça me permet de faire une publicité sur une des recommandations que j'ai dans mon dernier rapport annuel — c'est d'instaurer une plateforme numérique sur le site Web du Directeur général des élections, où les gens pourraient voir l'ensemble, dans chaque circonscription provinciale — mais on pourrait peut-être le décliner aux niveaux municipal et scolaire — dans le fond, les candidats qui se présentent dans chaque circonscription, avec les enjeux que les candidats et candidates présentent. Et moi, je dois dire, même sans que j'en parle à des jeunes, les jeunes vont dire : Pourquoi qu'on ne pourrait pas se retrouver à un endroit neutre, où on pourrait, à un moment donné, prendre connaissance... connaître les candidats? Parce qu'au niveau scolaire et au niveau municipal, c'est une des choses, le désintérêt, mais le désintérêt vient... On ne connaît pas les candidats et candidates, on ne les connaît pas, malgré le fait qu'au niveau scolaire... Parce qu'on est passés au niveau municipal, mais, au niveau scolaire, il y a un envoi qui est fait avec le programme, si on peut dire, des candidats et des candidates. Ça, la loi prévoit cet envoi-là. Donc, déjà là, il y a un minimum. Est-ce que c'est fait dans... Est-ce que la majorité des candidats le font? Je l'ignore. Il faut savoir que, au niveau scolaire, écoutez, près de la moitié des candidats sont élus sans opposition. Donc, déjà, vous voyez, il y a des élections qui ne se tiennent même pas.

M. Roberge : Il me reste quelques secondes?

La Présidente (Mme de Santis) : 1 min 10 s.

M. Roberge : Oui. Bien, j'ai comme l'impression que, si le taux de participation, ce n'est pas la maladie, c'est le symptôme. Aux élections scolaires, la maladie, c'est que... je pense que les citoyens ne croient pas que ce soit nécessaire d'avoir un palier de gouvernance élue. Puis j'ai l'impression que le vote électronique, ça serait quasiment de l'acharnement thérapeutique dans ce cas-ci, parce qu'on est rendus là. Mais je vais conclure là-dessus, puis je vais laisser mes quelques secondes à mon collègue.

La Présidente (Mme de Santis) : Alors, merci beaucoup, M. le député. Le député de Gouin voudrait aussi prendre la parole pour trois minutes. Pour ce faire, il faudra siéger au-delà de l'heure prévue. Et j'ai besoin du consentement des membres, et j'aurais aussi besoin du consentement pour lui permettre la période d'échange de trois minutes. Est-ce que j'ai le consentement?

Des voix : ...

La Présidente (Mme de Santis) : Merci. M. le député de Gouin, pour trois minutes.

M. Nadeau-Dubois : Merci beaucoup. Bonjour, monsieur. J'aurais une question très simple pour vous. Dans la mesure où ce projet de loi est adopté, est-ce que vous êtes en mesure de garantir que le vote électronique aux élections scolaires, donc, de 2020, serait opérationnel, fiable et prêt à fonctionner?

M. Reid (Pierre) : Aujourd'hui, je ne peux pas vous le garantir.

M. Nadeau-Dubois : Donc, le projet de loi, d'un côté, reporte les élections. En même temps, on nous dit, du côté du ministre, que ça viendrait avec un avantage, celui d'un vote électronique. Or, vous, aujourd'hui, vous n'êtes pas en mesure de donner cette garantie-là aux parlementaires, qu'advenant l'adoption du projet de loi tout soit prêt et en place pour un vote électronique aux élections scolaires du 1er novembre 2020.

M. Reid (Pierre) : En fait, ce que je peux vous dire, c'est qu'on mettra tous les efforts nécessaires dans cette hypothèse pour être en mesure de proposer une solution. Mais, en même temps, s'il y a des risques auxquels on n'a pas pu pallier, bien, ça, en fait, les gens, au moins, auront la connaissance. C'est pour ça que, quand je parlais tantôt… dans cette étude globale, quand on parle de la tolérance au risque, est-ce qu'à un moment donné on est prêts à tolérer certains risques par l'application de cette technologie?

M. Nadeau-Dubois : Donc, vous aurez certainement le temps d'explorer la possibilité, mais le mettre en place puis qu'il soit opérationnel et fiable, le 1er novembre 2020, vous n'êtes pas en mesure de donner cette garantie-là aux parlementaires aujourd'hui.

M. Reid (Pierre) : Bien, aujourd'hui, comme je n'ai rien exploré encore, c'est difficile de dire : Oui, oui, oui, il n'y a pas de problème. Ce serait très imprudent de ma part de vous dire ça. Mais, comme je vous le dis, à partir du moment où le mandat est donné, nous mettrons tous les efforts nécessaires pour en arriver à une solution applicable pour les élections de 2020, mais sous réserve, là, des risques que la solution pourrait présenter, compte tenu des délais serrés pour trouver la bonne solution.

M. Nadeau-Dubois : Donc, est-ce que je comprends bien vos propos si je dis que vous allez essayer, que vous allez travailler même très fort pour y arriver, mais que vous ne pouvez pas garantir que ce sera prêt et opérationnel le 1er novembre 2020?

M. Reid (Pierre) : Non.

M. Nadeau-Dubois : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme de Santis) : Merci beaucoup. M. le député, j'aimerais expliquer que le temps accordé est réparti au tout début de la session et, quand le député de Gouin est arrivé, on avait déjà alloué 24 minutes au gouvernement. Il est arrivé après cette période-là, et donc c'était impossible de prendre du temps du côté des autres partis pour qu'on l'alloue au député de Gouin. Mais merci beaucoup.

Mémoires déposés

Alors, en terminant, je veux déposer les mémoires suivants : du Protecteur du citoyen, le mémoire conjoint de la Fédération des commissions scolaires du Québec et de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, et le mémoire de M. Chris Eustace.

M. Reid, Mme Drouin, M. Allard, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux. Je remercie tous les autres participants ici aujourd'hui avec nous.

La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 37)

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