L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation

Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 20 août 2019 - Vol. 45 N° 20

Étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l’instruction publique et d’autres dispositions à l’égard des services de l’éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures cinquante-deux minutes)

Le Président (M. Jacques) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques. Bon retour à ceux qui arrivent cette semaine à Québec. Ça fait plaisir d'être ici ce matin. Pour ceux qui étaient là, bien, bonne continuité.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président : M. Lemieux (Saint-Jean) sera remplacé par M. Jacques (Mégantic); M. Skeete (Sainte-Rose), par M. Lemay (Masson); Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), par Mme Sauvé (Fabre); Mme Melançon (Verdun), par Mme Charbonneau (Mille-Îles); et M. Tanguay (LaFontaine), par M. Kelley (Jacques-Cartier).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la secrétaire. Nous débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, vous disposez de 20 minutes. M. le ministre.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci beaucoup, M. le Président. Je veux saluer tout le monde d'abord, avant de commencer, d'abord mes collègues et amis députés gouvernementaux; vos collègues des oppositions, avec qui on a déjà travaillé soit le projet de loi sur les frais chargés aux parents ou on a fait les auditions sur le projet de loi important qu'on dépose aujourd'hui. Toute l'équipe du cabinet et du ministère, qui ont travaillé très fort sur ce projet de loi là comme sur les autres projets qu'on travaille en ce moment, mais qui nous permettent d'avancer. Donc, merci beaucoup à la grande équipe qui permet le travail qu'on est en train de faire aujourd'hui.

Aujourd'hui, c'est une rentrée, d'une façon toujours... on est toujours en train de faire une rentrée, là, ces derniers jours. Hier, c'était la rentrée collégiale. Et ça s'est très bien passé. Je pense que le réseau collégial est très, très heureux de ce qu'on a annoncé hier pour améliorer le financement de notre réseau collégial, renforcer leur mission recherche, leur mission régionale, mener des jeunes vers la réussite.

Aujourd'hui, on va dire que c'est la rentrée préscolaire, pas des enfants, mais des parlementaires. Eh bien, moi, ça fait 20 quelques années que, d'une rentrée à l'autre, je ne perds jamais mon excitation. Pour moi, il n'y a rien de plus beau qu'une rentrée parlementaire, scolaire, universitaire, collégiale. C'est comme la journée de tous les possibles, une rentrée. Donc, je suis très content.

Ce matin, c'est une étape importante, c'est le début de l'étude article par article du projet de loi n° 5, qui, j'espère, sera adopté, et, quand il sera adopté, bien, permettra le déploiement de la maternelle quatre ans partout au Québec, permettra le déploiement d'un vrai cycle du préscolaire.

D'ailleurs, quand on parle de la maternelle quatre ans, on parle souvent de comment, techniquement, logistiquement, de manière organisationnelle, on va y arriver. Dans les prochains jours, on va travailler sur comment on va y arriver de manière législative, mais j'ai le goût de vous dire, de vous parler un peu ce matin de pourquoi on veut faire ça, hein? Comment ça se fait qu'on arrive avec un projet de loi pour déployer la maternelle quatre ans? Pourquoi on y croit tant à ce programme-là, à cette opportunité qui s'offre à nous d'améliorer les services aux jeunes? Mais, d'abord, parce qu'on est en train, de notre côté, de travailler sur un programme révisé, un vrai programme, pour la première fois, d'un cycle du préscolaire. Et ce sont des gens extrêmement compétents et dévoués qui travaillent sur ce comité et qui vont nous arriver avec, j'en suis convaincu, le meilleur cycle du préscolaire au monde. Je suis convaincu qu'à la fin on va avoir un programme du préscolaire qui sera copié et qui inspirera les autres grandes nations. Donc, déjà, sachant ce qui s'en vient, vous comprenez que j'ai le goût de le rendre possible et accessible à tous.

Pourquoi on veut faire ça? Bien, parce qu'on sait que, dans nos maternelles quatre ans, ce qui se passe, c'est des apprentissages par le jeu. C'est le développement de la motricité, c'est de la socialisation, c'est aussi de la préscolarisation, mais toujours par le jeu, avec des collages, des chansons, des comptines, des siestes, tout ça dans un cadre bienveillant pour nos tout-petits.

Pourquoi on veut aller plus loin? Bien, parce qu'on sait qu'il va y avoir, dans maternelles quatre ans, quelque chose d'exceptionnel qu'on ne peut retrouver nulle part ailleurs, ce que j'appelle mon fameux duo de feu : enseignant éducateur, enseignante éducatrice, et ça, c'est quelque chose d'exceptionnel. Pourquoi aussi? Mais parce que, dans une équipe-école, il y a un chef d'orchestre, il y a une direction d'école. Et, au Québec, les directions d'écoles, ce sont des enseignants et des enseignantes. Donc, on sait que nos écoles, que nos classes de maternelles quatre ans seront dirigées et supervisées par des gens qui ont des maîtrises en administration scolaire, mais des gens qui ont enseigné d'abord, des gens qui ont à coeur le développement et la réussite des enfants, et ça, c'est quand même un élément exceptionnel puis une chance d'avoir des écoles qui sont dirigées par des enseignants qui sont devenus, par la suite, des directions d'écoles.

On veut déployer ça aussi parce qu'on veut avoir, oui, un duo de feu dans nos classes, mais, plus que ça, on a une équipe-école avec des professionnels qu'on ne peut retrouver nulle part ailleurs aussi, là. Des orthophonistes, des orthopédagogues, des psychologues, des psychoéducateurs qui vont suivre les jeunes. Et j'ai enseigné assez longtemps pour dire qu'avoir des bons services c'est bien, mais avoir des bons services en continu, c'est nécessaire. Vous savez, d'une année à l'autre, on change souvent d'éducateur, d'éducatrice, d'enseignant, d'enseignante. Des fois, les jeunes changent de maison, hein, semaine, fin de semaine, parents, parce que les parents sont séparés. Si on peut avoir un professionnel qui connaît bien les difficultés, les vulnérabilités d'un enfant qu'il suit à quatre ans, cinq ans, six ans, sept ans sans avoir de bris de service, ça vaut de l'or, ça vaut de l'or, et ça, c'est quelque chose qu'on peut offrir avec l'accessibilité à la maternelle quatre ans, puis donc au cycle du préscolaire. Puis, en ce moment, bien, on a des dizaines de milliers de jeunes qui sont privés de ça. C'est un problème, puis le projet de loi essentiellement vise à régler ce problème-là, cette barrière législative qui nous empêche de déployer ce service dont je vous parle depuis quelques minutes.

Personne n'est de mauvaise foi, personne n'a des mauvaises intentions. Mais, quand on a voté la loi au départ, en 2013, peut-être qu'on n'était pas conscients d'une chose en disant : Bien, on va le déployer en milieu défavorisé parce que c'est là qu'il faut aider les jeunes les plus vulnérables. Écoutez, ça part de la meilleure des intensions. Mais, depuis, on sait une chose. D'abord, nos jeunes arrivent à cinq ans en étant toujours plus vulnérables. On va dans la mauvaise direction, là. Si on regarde tout ce qu'on fait auprès de nos tout-petits, nos jeunes sont de plus en plus nombreux à arriver à cinq ans avec une vulnérabilité.

• (10 heures) •

Mais ce qu'on ne savait peut-être pas, c'est que c'est à peu près le même ratio d'élèves qui sont en difficultés, qui sont vulnérables, en milieu défavorisé comme ailleurs. On dit qu'il y a 27 % des enfants qui arrivent en maternelle cinq ans en étant vulnérables puis on dit : Bien, d'abord, investissons puis investissons là où c'est le plus criant, en milieu défavorisé. La moyenne québécoise, c'est 27 %, donc quelque part entre deux et trois enfants sur 10. Bien, il faut considérer qu'en milieu défavorisé c'est 32 % des enfants qui sont vulnérables puis, partout ailleurs, c'est 26 %. Donc, l'écart est infime. Il n'y a presque pas d'écart. Grosso modo, là, que les parents fassent 20 000 $ par année ou 120 000 $ par année, quand vous avez 10 enfants de cinq ans, vous en avez deux ou trois qui sont vulnérables à l'âge de cinq ans, c'est presque la même chose en milieu défavorisé comme ailleurs. On a là un argument d'autorité, un fait statistique scientifique qui nous interpelle, qu'on ne peut pas oublier et qui nous dit que, si on veut faire la différence, bien, il faut la faire partout. Puis ce n'est pas vrai que les jeunes sont vraiment plus vulnérables en milieu défavorisé qu'ailleurs, les chiffres sont sans appel.

Donc, il faut investir partout, pas juste en milieu défavorisé, et partout aussi il y a plus d'enfants que de places. Si on regarde comme un tout, là, le réseau de la famille puis le réseau de l'éducation, bien, on va constater qu'il y a juste plus d'enfants que de places. Il faut déployer nos services. Il faut donner accès aux jeunes, il faut donner accès aux familles. Dans le réseau de garde éducatif à l'enfance, il y a 150 000 enfants qui sont dans aucun service. Juste à quatre ans, il y a 18 000 enfants qui sont dans aucun service. Donc, ça, ça nous interpelle à déployer des services, des services dans notre réseau éducatif de garde éducatif à l'enfance, puis mon collègue Mathieu Lacombe, le ministre de la Famille, travaille là-dessus, il a annoncé 12 500 places. Puis il ne va pas annoncer des places, il va créer des places, c'est... comme je le dis souvent, je n'ai jamais vu un enfant fréquenter une place annoncée. Alors, se vanter d'avoir annoncé des places, ça ne change pas grand-chose, il faut ouvrir des places. Donc, on va en ouvrir, des places de qualité dans notre réseau de services de garde éducatifs à l'enfance dans nos CPE, on va les déployer, on y croit, mais on va en ouvrir ailleurs aussi, on va en ouvrir aussi en maternelle quatre ans dans le cycle du préscolaire.

Et il faut investir tôt, il faut agir tôt, il faut le faire de manière concertée, c'est ce qu'on fait, santé, famille, éducation, des places en milieu de garde éducatif, des places en maternelle quatre ans, un programme extrêmement ambitieux. Et l'argent est là, ce n'est pas des communiqués de presse, c'est des investissements de fonds publics, c'est les ressources qui vont s'en aller dans les familles, dans les garderies, dans les écoles, puis on le fait vraiment à trois : santé, famille, éducation. Puis il faut le faire, parce que santé, famille, éducation amènent le développement, puis ça, ça amène aussi du développement économique, il faut se le dire, hein? Quand on lit le journal à tous les jours, on voit la nouvelle, la pénurie de main-d'oeuvre. Moi, je vous pose la question : Si on diplômait 9 000, 10 000 enfants de plus par année depuis 10 ans, est-ce qu'on vivrait avec la même acuité la pénurie de main-d'oeuvre si on avait 100 000 travailleurs diplômés de plus? C'est évident que non. Mais, pour arriver à ça, bien, il faut investir tout de suite. Et chaque fois qu'on investit en éducation, on investit à moyen et à long terme.

Donc, investissons tout de suite dans un des domaines les plus prometteurs pour favoriser la réussite scolaire, mais éducative aussi des jeunes, mais il faut investir tout de suite au secondaire, il ne faut pas sacrifier le secondaire pour le préscolaire, il faut investir tout de suite au secondaire, comme on l'a fait, en ajoutant des services professionnels en formation générale des adultes, en formation professionnelle. Ça, c'est tout de suite, c'est cette année. Il faut investir tout de suite au primaire puis il faut investir tout de suite au préscolaire pour récolter, dans 10 ans, dans 15 ans, les fruits de cet investissement-là. Il ne faut pas opposer le présent et l'avenir. Et, quand on fait ça, bien, on suit le consensus international tout simplement, en ne le faisant pas, on serait tout simplement les cancres.

J'ai lu un rapport de l'UNESCO au printemps dernier qui nous disait qu'une des clés de la réussite scolaire, de la persévérance scolaire, de la diplomation, c'était l'investissement dans le cycle du préscolaire. Début juillet, j'étais à Paris, au G7, et nous étions ensemble autour de la table, tous les ministres de l'Éducation du G7. Que dit la déclaration finale? Que, pour augmenter la diplomation, pour favoriser la persévérance, les États ont l'obligation d'investir dans du préscolaire de qualité. Alors, c'est la déclaration finale des ministres du Government, juillet 2019. Donc, en travaillant ce projet de loi là, on est tout simplement dans le consensus international. Puis, quand on regarde chez nous concrètement, il ne s'agit pas de faire un copier-coller bêtement de ce qu'il se dit à l'international chez nous, mais on regarde qu'on manque de place, on le constate, on regarde qu'on a de la place dans nos écoles, on peut ouvrir 250 classes tout de suite et on regarde ce qu'on peut faire en améliorant le programme.

Donc, moi, je vous invite à travailler à bonifier nos lois pour permettre le déploiement de ce service-là, pour offrir le choix aux parents. Parce que, quand on leur offre le choix, eh bien, ils sont très nombreux à faire le choix de cette offre de service de la maternelle quatre ans.

Vous savez, janvier-février 2019, on avait l'objectif d'ouvrir 200 classes, 200 classes, en septembre, de plus. Finalement, la mobilisation était telle, dans les commissions scolaires, qu'on a augmenté notre propre objectif, ce n'est plus 200, c'est 250, et, je vous le dis aujourd'hui, c'est atteint. Les 250 classes de plus, c'est une hausse de 60 quelque pour cent par rapport à l'an passé. Quels services augmentent de 60 % par année? Je vous demande de faire une revue, là, vous n'en trouverez pas beaucoup, hein, une hausse de 60 % en une seule année, et les parents sont au rendez-vous. Il y a plus de 7 000 parents, à ce jour, qui ont fait le choix d'inscrire leurs enfants en maternelle quatre ans, j'ai dit «fait le choix», parce qu'ils ont le choix, mais juste en milieu défavorisé. Si les parents ont le malheur de vivre dans un quartier où le code postal n'est pas assez défavorisé, bien, la loi actuelle les empêche de faire ce choix. Donc, 7 000 par an ont fait ce choix, mais, si vraiment, là, l'offre avait été ouverte, moi, je suis convaincu que c'est 25 000, 30 000, 40 000 par an qui auraient fait ce choix-là, parce que, quand on leur offre l'opportunité, ils le font. Ils le font pour le bien de leurs enfants.

Faisons confiance à l'intelligence des parents, considérons le fait qu'il y a autant d'enfants qui sont vulnérables en milieu défavorisé qu'ailleurs et ensemble levons cette barrière-là. On va le faire dans un souci d'équité, dans un souci de justice sociale, de justice régionale, pourquoi on pénaliserait des régions plutôt que d'autres? On va le faire pour le développement économique futur, dans 10 ans, dans 15 ans, je vous invite à vous projeter dans l'avenir. Puis, tout au long de l'étude du projet de loi, je vous invite à être en mode solution, en mode écoute pour régler ce problème-là, pour améliorer la loi, pour améliorer les services aux enfants, puis offrir la liberté de choix. Moi, j'ai l'intention de bonifier ce projet de loi là, on l'a fait avec beaucoup d'attention, avec toute l'équipe qui est là, mais, évidemment, je suis certain que l'intelligence collective nous permettra de bonifier le projet de loi avec l'objectif de donner davantage accès aux parents, et surtout aux enfants qui vont en bénéficier. Merci.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation et d'enseignement supérieur et députée de Saint-Laurent à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes. La parole est à vous, Mme la députée.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Très contente de vous retrouver tous, mes collègues qui sont sont avec moi, la députée de Fabre, la députée de... bien là, le député de... pardon, de Jacques-Cartier et la députée de Fabre. Mais j'aimerais aussi souligner ici la présence... Mille-Îles, pardon, de Mille-Îles, désolée. J'aimerais aussi souligner la présence... très contente évidemment de retrouver l'équipe du ministre, le ministre lui-même et tous les autres députés du gouvernement, des autres oppositions.

J'aimerais aussi souligner la présence de la directrice générale de l'Association québécoise des CPE, Mme Geneviève Bélisle, qui est avec nous, qui a suivi nos travaux, disons, de façon très, très importante tout au long... depuis qu'on a commencé l'annonce du projet des maternelles quatre ans mur à mur à Québec. Je sais que c'est très important, leur présence, car il y a encore beaucoup de questions. Eh oui, on attend toujours un plan d'action pour les maternelles quatre ans. On sait que l'AQCPE est ici avec nous. J'imagine que, quelque part, peut-être qu'il va y avoir quelqu'un de l'équipe du ministère de la Famille qui se joindra quelque part dans nos travaux, à cette discussion, car on veut... travaillons, évidemment, en complémentarité. Alors, ce serait important qu'évidemment une personne de l'équipe ministérielle de la Famille soit présente éventuellement dans ce magnifique projet de loi de la maternelle quatre ans, car nous, on est pour la maternelle quatre ans temps plein en milieu défavorisé, de façon intelligente, avec un plan d'action bien évidemment.

• (10 h 10) •

Beaucoup de choses. Bien, d'abord, je partage l'enthousiasme du ministre, qui a un immense sourire, car je sais qu'il a été enseignant, puis moi, j'ai été professeure, alors on sait que c'est la rentrée des classes, c'est l'effervescence, et lui, non seulement il était enseignant, mais c'est aussi un papa, donc c'est aussi la rentrée des classes pour les enfants la semaine prochaine. Je comprends parfaitement, l'année passée, moi-même, je n'étais pas ici, c'était la rentrée des classes à titre de professeur.

Et, à titre de professeur, c'est sûr qu'on a aussi le volet chercheur, et j'aimerais me pencher là-dessus, la recherche, car on a eu la chance d'avoir des experts. Et aujourd'hui on dirait que le terme expert est donné à peu près à tous et chacun, alors qu'un expert, M. le Président, ça fait de la recherche. Moi, j'ai été, par exemple, à la chaire en fiscalité puis en finances publiques. Et, lorsqu'on fait des travaux, on regarde l'ensemble d'un projet. Oui, on regarde aussi à l'international. Et, juste, juste avant le début de nos travaux, on a eu l'occasion d'entendre le ministre de l'Éducation, dans la salle du... communément appelée le «hot room», parler des experts et répondait qu'il a fait venir des experts de l'international. On sait que ça a coûté environ 10 000 $ pour faire venir des gens de New York et de Toronto. Mais je cherche encore c'est quoi, leur expertise, parce que même la personne de New York, lorsqu'on l'a interrogée à savoir si elle connaissait le réseau québécois, ne connaissait pas du tout notre réseau québécois, en fait, ne savait même pas qu'on avait, nous, ici, au Québec, des CPE et, en plus, des services de garde dès lors qu'on terminait le congé parental, par exemple. Alors, pour des experts... Habituellement, des experts savent au moins qu'est-ce qu'il se passe sur le terrain étranger auquel ils veulent prendre part au débat et font leurs études avant de venir nous donner des leçons sur leur système à eux. Et, d'autre part, ces personnes qui sont venues nous parler, clairement, ce n'est pas le même milieu de vie, New York versus le Québec. J'entends bien que le ministre est très content d'avoir eu l'occasion d'avoir des gens qui sont venus dire ce qu'il aurait bien aimé entendre, et c'est ça qu'il est arrivé, hein? Ils ont dit que, oui, oui, ils ont été capables de le faire, ça a été difficile, mais ils l'ont fait. Mais ils l'ont fait. Vous savez c'est quoi ici? C'est vraiment de cocher la case «réussi, c'est fait».

Mais c'est surtout le comment. Puis tantôt le ministre a dit aussi, là, c'est le comment. Et là-dessus, là, on le rejoint, on est d'accord, le comment. Alors, j'attends le plan d'action, j'imagine qu'il va être déposé aujourd'hui. On a beaucoup d'espoir là-dedans. Le comment est très important parce que... Dans ces experts-là, il y en a que nous, on aurait aimé entendre. Et je vais vous dire c'est qui qu'on aurait vraiment aimé entendre, on le répète, on voulait entendre le Dr Chicoine, c'est un expert du Québec. Ça a été refusé. On aurait aimé, évidemment, entendre Mme Drouin, la Dre Mylène Drouin.

Parce que vous savez que la Dre Mylène Drouin, elle est à la direction régionale de la santé publique de Montréal. Et, en février dernier, ça ne fait pas si longtemps, ça, M. le Président, en février dernier, il y a eu un rapport qui est sorti sur les maternelles cinq ans. Et, vous savez, dès février, là, le chiffre magique de 250 classes de maternelle quatre ans existait déjà. Il ne sortait pas de ma bouche à moi, mais il sortait même de la bouche du ministre de l'Éducation. Alors, je ne sais pas qu'est-ce qu'il est arrivé durant l'été pour qu'on dise de 200 à 250. Depuis février, là, c'est 250, le chiffre magique. Alors, le 250 de classes de maternelle quatre ans... on peut lire, dans ce rapport... je n'en ferai pas la lecture complète, mais je me suis permis de prendre l'extrait qui a été écrit par Ariane Lacoursière de La Presse. Alors : «Plus de 5 600 enfants vulnérables dans les maternelles. La classe de maternelle cinq ans de Montréal compte 28,5 % d'élèves vulnérables, soit environ 5 630 enfants, révèle le rapport de la direction régionale de la santé publique obtenu par La Presse, qui sera dévoilé aujourd'hui. Loin d'y voir une preuve de la nécessité de développer plus de classes de maternelle quatre ans, comme le souhaite le gouvernement du Québec, la directrice régionale de la santé publique de Montréal, la Dre Mylène Drouin, estime qu'il faut intervenir précocement, notamment en continuant de développer des services de garde de qualité chez les tout-petits.» La question se pose, M. le Président : Est-ce qu'on nous a refusé la présence de Mme Drouin parce qu'au fond on ne voulait pas entendre ce qu'elle avait à dire, parce qu'elle n'était pas la personne qui allait applaudir devant les maternelles quatre ans? Continuons un peu la lecture : «Il s'agit d'un avis partagé par la chercheuse en éducation Chrita Japel, qui témoigne avoir souligné vainement — vainement — au gouvernement caquiste qu'implanter largement des maternelles quatre ans n'était pas une panacée.»

Aujourd'hui, M. le Président, le ministre de l'Éducation, juste avant l'étude détaillée, toujours dans le «hot room», parlait de pourcentages. J'adore les pourcentages, j'aime ça. Il parlait de moyennes. Savez-vous c'est quoi, le problème avec les moyennes, M. le Président? C'est qu'on ne sait pas c'est quoi, la limite, puis on ne sait pas c'est quoi, l'autre limite. Alors, parlons-en, des moyennes. Il parlait d'un chiffre de 28 % pour les enfants qui peuvent avoir des risques de vulnérabilité. Et il disait que, dans d'autres milieux défavorisés, c'est autour de 33 %.

Moi, je ne nie pas les chiffres qu'il a avancés, le ministre, mais j'aimerais nuancer. Donc, prenons une étude, celle de la Direction de la santé publique, par exemple, de Montréal. C'est vrai qu'à Montréal c'est 28,5 %. Mais allons détailler Montréal parce que vous savez qu'un enfant qui grandit à Outremont puis un enfant qui grandit à Montréal-Nord, ce n'est peut-être pas nécessairement la même capacité de payer pour les parents. Saint-Michel, 40,7 %, proportion d'enfants vulnérables dans au moins un domaine pour certains territoires du CLSC de Montréal. 40,7 %, là... Vous comprenez qu'il y a un écart assez important avec le 28 % de la moyenne du ministre et 40,7 % à Saint-Michel. Pointe-Saint-Charles, 39,3 %. Ça frôle le 40 %. Vous me permettez d'arrondir, M. le Président? 40 %. On est encore loin du 28 %. LaSalle, 36 %. Des Faubourgs, 35,9 %. Dorval—Lachine, 33,7 %.

Hochelaga-Maisonneuve... vous me voyez sourire, hein, parce que je connais bien Hochelaga-Maisonneuve... 33,5 %. Vous savez que moi-même, j'ai fréquenté la prématernelle quatre ans dans l'est de Montréal en milieu défavorisé. Et c'est quoi, l'objectif des maternelles quatre ans lorsque ça a été déployé à l'époque? De s'assurer que les jeunes enfants issus de milieux défavorisés arrivent à l'école et puissent avoir ce petit rattrapage avant de commencer la grande école. Moi, j'en ai bénéficié. Ma mère ne parlait même pas le français. Donc, vous comprenez que c'était assez important que j'aie droit à ce rattrapage.

Mais continuons encore dans les chiffres. Verdun, c'est 31 %. Mercier, on tombe à 30 %. Saint-Laurent, 29,9 %. Mais savez-vous quoi? Je vais descendre vraiment plus bas. Plateau-Mont-Royal, là, une différence notoire, 18,7 %. Donc, vous comprendrez, M. le Président, les moyennes, là, c'est bien, mais les chiffres détaillés, c'est mieux.

Alors, quand tout le monde devient prioritaire, comment qu'on s'assure qu'un enfant de Saint-Michel a tous les services? Parce qu'on le sait, hein, les besoins sont illimités, mais les ressources, M. le Président, elles sont limitées, par définition. Alors, nous, aujourd'hui, c'est pour ça qu'on demande un plan d'action puis qu'on respecte aussi l'objectif, qui est d'assurer qu'un enfant qui n'a pas eu nécessairement accès à un service de garde, à un CPE avant l'âge de quatre ans soit, lui, prioritaire, notamment dans un milieu défavorisé. C'est ça, l'objectif. Et, vous savez, dans la liste, là, je n'ai même pas Outremont, là, je n'ai même pas Westmount. On pourrait continuer, mais je suis pas mal certaine que, si le dernier chiffre qu'il nous a avancé, Plateau-Mont-Royal, 18,7 %, bien, Outremont puis Westmount, ça risque d'être un peu en dessous de cela.

Mais savez-vous quoi? Le ministre préfère parler des moyennes. Les moyennes, ce n'est pas la réalité sur le terrain. La réalité sur le terrain, bien, c'est justement des Dr Drouin qui font ça, de la recherche, une experte qui va, avec des vraies données, en partenariat avec les différents secteurs, comme les CLSC... qui va chercher nos données, et que ça, c'est le genre d'experts que nous, on veut entendre. Pas parce qu'on a la meilleure réponse. C'est qu'on veut connaître la réalité pour donner les meilleurs outils à nos enfants. Et ça, M. le Président, c'est sûr qu'on n'a pas le luxe, c'est d'ignorer les experts québécois. Ça, on n'a pas le luxe de faire ça. Parce que c'est bien beau avoir des gens de New York puis de Toronto, mais c'est bien mieux d'avoir des Québécois qui connaissent exactement ce qui se passe sur notre terrain québécois. Et ça, on y tient.

Et j'espère que la prochaine fois qu'on aura l'occasion d'entendre des experts, qu'on va d'abord prioriser des gens de chez nous avant de commencer à payer pour des gens de l'extérieur pour faire... puis qui sont clairement... On va se le dire franchement, là, c'est des cheerleaders qui sont venues ici applaudir pour le projet de loi de maternelle quatre ans. Ils ne connaissaient strictement rien à la réalité québécoise, et ça, on trouve ça très déplorable.

Mais continuons. On parle beaucoup, beaucoup, beaucoup de choix pour les parents, mais de quels choix, M. le Président? Tantôt, le ministre de l'Éducation — vous comprendrez que j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt son point de presse dans le «hot room» — parlait qu'il y avait environ 7 000 parents qui ont consulté pour les maternelles quatre ans, puis qu'il y en a 2 500 qui se sont inscrits, finalement. Alors, c'est ce que j'ai entendu. Alors, si c'est 7 000 qui ont consulté, puis qu'il y en a 2 500 qui se sont inscrits, c'est qu'on parle encore d'un, quoi, d'un parent sur trois qui fait le choix, environ, pour son enfant. O.K.

• (10 h 20) •

Puis, quand on parle de choix, en ce moment, là, on met énormément d'argent dans du béton, concrètement, là, et très peu pour les services. Et, dites-moi, la liste d'attente, là, bien, il n'y en a pas vraiment, là. Il n'y a pas de liste d'attente pour les maternelles quatre ans. Bien, savez-vous quoi? Il y a une liste d'attente pour les services de garde puis les CPE, là. 42 000. Je suis contente d'entendre que le ministère de la Famille va accélérer le déploiement, mais j'aimerais ça voir la même énergie puis dire : Le véritable choix... On va y aller pour le véritable choix. En ce moment, on prend un congé parental, disons, d'un an. Il y a une liste d'attente pour placer leur enfant. Est-ce qu'on peut commencer avec les véritables priorités des Québécois? Ce n'est pas à quatre ans qu'ils veulent avoir une place. C'est dès la fin du congé parental, pour permettre, justement, aux gens de retourner travailler, de retourner à leurs occupations, d'avoir le véritable choix. Mais on ne peut pas parler de choix dès lors que les gens n'ont pas nécessairement un choix entre services de garde, CPE et d'écoles. Alors, là-dessus, j'espère que le ministre va entendre éventuellement raison puis qu'on va aussi entendre le ministre de la Famille sur ce dossier.

Aussi, l'argent. Je sais que le premier ministre a dit : Ça coûtera ce que ça coûtera. Mais, soyons réalistes, à un moment donné, là, ça coûtera ce que ça coûtera, c'est le slogan de M. Legault... pardon, le premier ministre, en matière de maternelle quatre ans, mais... Nous, l'objectif, là, on le partage, celui, là, d'agir tôt, on veut agir tôt. Là, inquiétez-vous pas, je vais vous le distribuer, M. le ministre, je sais que vous regardez attentivement mon tableau, puis je le sais, que vous vous êtes ennuyé de mes tableaux, quand même, là.

Alors, Agir tôt, là, c'est 88 millions. Moi, j'aimerais ça, que le ministre délégué à la Santé ait un peu plus, parce qu'Agir tôt, c'est important, on est d'accord avec ça. Mais, d'autre part, vous, là, vous en avez beaucoup, d'argent, on trouve, là. Initialement, les classes, là, c'est budgété à 153 millions. Après ça, c'est monté... on est rendu à pas loin de 2 milliards si on y va dans le mur-à-mur universel. Mais là, maintenant, c'est qu'on ne sait plus combien ça coûte.

Est-ce que vous avez un plan détaillé, combien ça va coûter, ou c'est vraiment point d'interrogation, ça coûtera ce que ça coûtera? Parce que, si c'est le cas, je commence à être inquiète, parce qu'on va avoir des classes de luxe, mais on va aussi avoir des enfants dans des roulottes, puis ça, c'est n'est pas équitable. Alors, c'est pour ça qu'on veut un plan d'action pour voir exactement d'où viennent les enfants, où est-ce qu'on est capable d'investir immédiatement, vraiment, là, pour Agir tôt. Puis Agir tôt, là, tout le monde qui est venu, là, nous l'a dit, ça commence avant quatre ans. Alors, on aimerait juste que le budget, là, soit mieux réparti. Pas qu'on veut créer de la division entre le ministre de l'Éducation, puis le ministre de la Famille, puis le ministre délégué à la Santé, on aimerait avoir une cohésion dans le message. Parce qu'effectivement on veut des services, puis les parents, c'est ça qu'ils demandent toujours, c'est des services.

Puis, en parlant de services, là, ça prend, là, des enseignants. Je sais que vous en parlez, vous en parlez, puis c'est une priorité pour vous, mais il commence à être minuit moins une. La semaine prochaine, c'est la rentrée scolaire. On sait qu'il y a des commissions scolaires qui manquent d'enseignants. On sait que, durant une année normale, il peut avoir six, sept... on a même déjà vu des classes où est-ce qu'il y a eu 10 différents enseignants. On sait que présentement, dans certaines écoles, il n'y aura pas assez d'enseignants pour les maternelles quatre ans, alors que... et, je vous le dis, là, l'AQCPE nous l'a dit, l'Association québécoise des CPE, eux autres aussi, là, ils vivent ça. On peut l'appeler comme vous voulez, rareté ou pénurie de main-d'oeuvre, moi, je n'ai pas envie de m'obstiner sur les mots, mais il nous manque des ressources, même dans les réseaux des CPE.

Et, avec votre projet de règlement, d'aller dépouiller des professionnels de la petite enfance, dans le réseau de la famille, pour venir remplir votre promesse, ça fait en sorte que vous créez un problème au lieu d'en régler un. Et ça, c'est très, très dangereux, parce que les gens que vous visez dans les CPE, on parle, oui, d'éducatrices qui ont complété 3 000 heures, donc on parle des gens de l'expérience. On l'a vu même ici à Lévis, des réseaux de garde qui ont dû fermer, qui étaient menacés de fermer parce qu'ils n'étaient pas assez qualifiés, parce qu'il y a un ratio à maintenir en CPE. Alors, si on commence à dépouiller un service pour remplir un engagement électoral, vous comprendrez qu'on vient de faire mal au réseau de CPE, qui fonctionne déjà très bien. C'est un réseau, là, qui fonctionne super bien, tellement bien qu'il y a une liste d'attente. Oui, là, là, les gens, les parents veulent des services. Il n'y a personne qui se précipite aux maternelles quatre ans, mais il y a beaucoup de parents qui veulent, depuis des années, puis on veut l'avoir, plus de places.

Et j'ajouterais, M. le Président, que l'engagement, c'était, à un moment donné, de le faire en complémentarité, pas en opposition. Mais cet engagement, M. le ministre, vous semblez l'avoir perdu de vue avec votre projet de règlement. Parce que dire qu'on va prendre les éducatrices dans les réseaux des CPE pour les mettre dans les écoles après avoir complété 3 000 heures et être inscrites à une formation en éducation, et d'avoir suivi trois cours, mais vous dépouillez un service qui existe, un service qui est déjà bien établi.

Et j'ajouterais, M. le Président, en somme, si le gouvernement veut juste avoir un chiffre magique de 250 classes... aujourd'hui, là, on apprenait, grâce à un courriel qui était envoyé par le ministère de l'Éducation, qu'ils vont même pouvoir subdiviser les classes à partir de 12 élèves inscrits dans les maternelles quatre ans. Donc, on va avoir des classes de luxe à 1 million de dollars pour six enfants. Et on ne sait toujours pas : Est-ce que c'est un enseignant ou c'est deux? Parce que, si c'est deux, ça commence à être un ratio d'un pour trois, là. Ça, c'est vraiment... puis, je comprends, là, tous les parents vont être super contents d'avoir un ratio d'un pour trois, là, il n'y a personne qui va être déçu d'avoir un ratio d'un pour trois.

Mais, d'autre part, on va avoir d'autres enfants de deuxième année, troisième année, quatrième année, dans d'autres régions, qui n'ont pas le même service. Donc, on va avoir un service dans le réseau de l'éducation à géométrie variable. Tout ça pour quoi? Pour un engagement électoral, un chiffre magique, maternelles... 5 000 classes, mais c'était ça, le chiffre initial, là. Maintenant, on ne sait pas, il y a toujours un point d'interrogation.

Mais, vous comprendrez, M. le Président, grosso modo, on peut résumer le projet de loi : c'est des CPE dans les écoles. Aussi simple que ça. Qu'est-ce qu'il arrive? On va commencer à respecter le même ratio que le CPE, c'est correct. On prend les éducatrices des CPE, on les envoie dans les écoles. C'est exactement, là, les CPE dans les écoles. Alors, si c'est ça, l'engagement qu'aujourd'hui le ministre veut faire, bien, qu'il dise clairement puis qu'il nous explique aussi pourquoi la priorité est donnée aux quatre ans et pas au reste de l'ensemble du réseau de l'éducation. L'éducation, là, j'en conviens, l'UNESCO dit que c'est important de mettre ça dans le préscolaire.

On est tous d'accord, mais tous les experts qu'on a entendus ici, là, disent qu'agir tôt, là, c'est avant quatre ans. Alors, ceux qui sont en bas de quatre ans, on fait quoi avec eux? Comment qu'on va investir l'argent judicieusement des Québécois? Nous, on a hâte d'entendre le ministre de l'Éducation sur ça. Il dit qu'il est en mode solution; moi, j'aimerais ça qu'il soit aussi, comme qu'il nous a demandé, d'être à l'écoute. J'espère que lui aussi sera à l'écoute, parce que, lorsqu'on a fait le projet de loi sur les frais chargés aux parents, on l'a clairement dit, que nous, on était contre privatiser le réseau de l'éducation. Puis on a eu vraiment un discours de sourds, là. Il ne nous a pas vraiment écoutés, parce que tous les partis d'opposition étaient d'accord, sauf lui.

Alors aujourd'hui, les maternelles quatre ans, on lui demande clairement, là, de ralentir, de garder le cap en milieu défavorisé pour le déploiement des maternelles quatre ans à temps plein. La véritable priorité, c'est de trouver des enseignants; l'autre priorité, M. le Président, c'est aussi de s'assurer de faire un suivi.

Je vais terminer là-dessus. J'espère que le ministre va pouvoir nous répondre. Il dit qu'il y a eu 2 500 inscriptions. Est-ce que, dans ces 2 500 inscriptions, on sait d'où viennent les enfants? Est-ce que ces enfants viennent d'un réseau de garde ou pas? Et ça, j'espère qu'il connaît la réponse, parce qu'on est supposés de faire un suivi rigoureux pour les enfants. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'éducation et députée de Sherbrooke à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes. Mme la députée.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci. Bien, d'abord, j'aimerais aussi saluer mes collègues, qu'on n'a pas vus depuis un bon moment. J'étais contente de me remettre au travail avec vous aujourd'hui, pour améliorer les services offerts aux familles et aux enfants. Je suis certaine que vous partagez aussi mon bonheur d'être avec vous, parce qu'il y a une très belle ambiance dans cette commission-là quand même, il faut le dire, là. Je pense que certains d'entre vous qui siégez parfois sur d'autres commissions l'avez remarqué. L'ambiance est agréable ici, donc je voudrais vous remercier de ça et souligner l'importance de préserver cette belle ambiance-là.

Par contre, j'ai quand même un malaise par rapport à ce qu'il s'est passé ici pendant les auditions, le fait qu'il y a des experts de New York, dont les dépenses ont été remboursées. Moi, j'ai vraiment un profond malaise avec ça; ce n'est pas une pratique habituelle de rembourser les dépenses de groupes qui viennent ici. Je ne comprends pas pourquoi ça a été fait puis je pense qu'il y a vraiment un problème éthique. On a aussi su que les intervenants de Toronto se sont fait offrir un remboursement de frais. Ça crée deux catégories d'intervenants, hein? Il y a ceux qui se font rembourser des dépenses — le hasard fait que, curieusement, ils partagent l'opinion du gouvernement — et il y a ceux qui ne se font pas rembourser leurs dépenses.

Donc, le fait qu'il y ait une disparité de traitement, disons, entre les différents groupes qui viennent en commission, moi, ça me pose problème. Donc, on a envoyé une lettre à la Commissaire à l'éthique pour lui demander de se prononcer là-dessus. On est assez mal à l'aise avec ça et, franchement, on espère que ça ne se reproduira plus jamais. Ça ne s'est pas vu dans d'autres commissions, d'ailleurs. Donc, j'espère que c'est entendu.

• (10 h 30) •

Par rapport au projet de loi à l'étude, on a consacré beaucoup de temps, dans les derniers mois, à préparer l'étude article par article, qu'on est impatients de commencer. On comprend l'intention du ministre d'offrir davantage de choix aux parents et on comprend aussi que la loi actuelle limite l'implantation de maternelles quatre ans en milieux défavorisés, et que ça pénalise certaines familles, d'autant plus que l'indice de défavorisation, on le sait, il est désuet.

Nous, on vous le dit ça fait longtemps. On en a parlé, notamment, quand le calcul a été actualisé et qu'il y a des écoles qui ont perdu certaines mesures, notamment d'aide alimentaire, à cause de ça. Donc, on vous demandait de mettre à jour le calcul de l'indice de défavorisation.

J'étais déçue à l'étude des crédits quand j'en ai parlé au ministre et qu'il ne s'était pas montré ouvert du tout à réviser la formule de calcul, parce que c'est inadapté aux réalités d'aujourd'hui. Par exemple, la formule considère la scolarité des mères, mais elle ne tient pas compte si l'emploi des mères correspond à leur niveau de scolarité, puis on sait que beaucoup de mères immigrantes, notamment, ont une scolarité assez élevée et, parfois, elles n'ont même pas d'emploi ou elles ont un emploi qui est bien en deçà de leur niveau de scolarité. Donc, ce que ça fait, c'est que ça fausse la donnée, finalement, puis on a un calcul d'indice de défavorisation qui est très déficient.

Donc, compte tenu de ça, même si on pense que les maternelles quatre ans devraient être ouvertes en priorité en milieu défavorisé parce que c'est là que les besoins sont les plus grands, comme on sait que le calcul de l'indice de défavorisation est déficient en ce moment, on est ouverts à ce que des maternelles quatre ans puissent être ouvertes dans des milieux qui ne correspondent pas à ces critères-là actuellement. Et j'espère que le ministre l'entend comme un signe d'ouverture important de notre part. On comprend aussi que, dans certains milieux, notamment ruraux, l'ouverture d'une classe peut permettre à une communauté de préserver une école. Donc, dans certaines circonstances, on est ouverts à ça, et j'estime que c'est quand même un pas important qu'on fait en ce moment.

Par contre, pour offrir un choix réel aux parents, les mêmes moyens devraient vraiment être consacrés à déployer des services en CPE pour que tous les parents aient vraiment accès aux différents services... puis qu'il puisse faire son choix sans qu'il y ait de barrière d'entrée à certains milieux, comme des listes d'attente le sont, par exemple. Donc, pour dire qu'un parent a vraiment le choix, il faut qu'il puisse inscrire son enfant réellement dans un milieu ou dans l'autre, et ce qui... ce n'est vraiment pas le cas en ce moment. Il faut y penser cinq ans d'avance, là, quasiment, si on veut inscrire son enfant en CPE. Il y a des listes d'attente de centaines de noms de certains CPE. Donc, on ne peut pas me dire, en ce moment, que, s'il y a un CPE et une classe de maternelle quatre ans dans un milieu, le parent a vraiment le choix. Ce n'est pas le cas. Donc, j'estime que, si on veut répondre à votre ambition, en tant que gouvernement, d'offrir le choix, il faut déployer des ressources davantage que ce qui est annoncé en ce moment pour améliorer l'offre de services en CPE. Je parle d'un point de vue quantitatif.

Aussi, je l'ai déjà dit puis je le répète, comme vous... le gouvernement souhaite agir tôt et qu'il est prêt à inscrire, dans une loi, le droit à la maternelle quatre ans, je pense qu'on doit aussi inscrire, dans une loi, le droit à un service de garde éducatif dès la naissance parce qu'agir tôt, c'est dès la naissance, et certains nous ont même dit : Avant la conception. Donc, ça me semble indispensable. Donc, le déploiement des maternelles quatre ans doit se faire en complémentarité avec les autres services de garde éducatifs, dont les CPE et les milieux régis subventionnés. Autrement, si le gouvernement donne l'impression de privilégier un réseau sur l'autre, s'il envoie le message qu'un milieu est de meilleure qualité ou si, par exemple, il concentre ses services dans un seul réseau, c'est vraiment problématique, et ça ne donne pas vraiment un choix aux parents. Et c'est une crainte réelle en ce moment, y compris de certains parents qui nous l'ont dit, que les services professionnels ne soient pas accessibles aux familles qui font d'autres choix que la maternelle quatre ans. Donc, si on consacre toutes nos ressources professionnelles pour offrir du soutien aux enfants qui ont des difficultés dans le réseau scolaire, il y a des parents qui craignent de ne pas y avoir accès pour leurs enfants en... s'ils ne font pas le choix de la maternelle quatre ans.

On a aussi une crainte par rapport au programme Passe-Partout, qui est un choix apprécié des parents. On veut savoir c'est quoi, les intentions du ministre par rapport à ce programme-là, qui correspond aux besoins de certaines familles et qui devrait être maintenu, à notre sens.

On a d'autres craintes, la stabilité, notamment. On a parlé beaucoup de continuité de services auprès du gouvernement. On sait que la stabilité, c'est quelque chose qui joue beaucoup sur les facteurs de vulnérabilité des enfants. Et, en ce moment, moi, j'ai beaucoup de craintes, parce qu'on a vu ou entendu parler de certains projets d'avoir des écoles qui sont seulement constituées de classes de maternelle quatre ans. Et, pour moi, quand on fait ça, on impose à l'enfant d'avoir deux changements de milieu, donc un pour entrer dans ce milieu-là, un pour quitter la maternelle quatre ans vers la maternelle cinq ans dans un autre bâtiment avec une autre équipe-école. Et, à ce moment-là, pour moi, il y a une rupture de stabilité qui est très problématique. Donc, pour moi, c'est clair qu'il ne faut pas permettre des milieux comme ça.

Et on est vraiment dans le flou, puis c'est pour ça qu'on a autant de craintes en ce moment. Moi, je l'ai dit, j'étais vraiment déçue, au moment de l'étude du p.l. n° 12, de me retrouver à étudier un projet de loi qui n'était pas basé sur des données. Puis moi, là, ça me scandalise comme citoyenne, pas seulement comme députée, de penser qu'il y a des décisions majeures qui sont prises, ici, à l'Assemblée nationale, sans que ça repose sur une connaissance vraiment fine de tous les impacts potentiels de ces décisions-là.

Donc, je m'attends à mieux. Et là ça fait six mois que le projet de loi a été déposé. Il n'y a pas de date butoir comme il y en avait une pour le p.l. n° 12. Je pense qu'on a l'obligation morale, ici, là, de prendre notre temps et de baser notre décision sur... ou toutes nos décisions sur un plan de déploiement qui va être détaillé, pas seulement à cause de l'incidence financière du projet de loi, mais aussi parce qu'on parle de milieux éducatifs pour des enfants qui sont à un stade vraiment critique de leur développement. Et c'est des décisions qu'on prend qui vont avoir un impact vraiment important sur leur développement. Et ce plan-là, bien, on l'attendait avec impatience. On s'est même pris à l'attendre ce matin quand des annonces du ministre ont été annoncées. Puis, finalement, bien, il n'y en avait pas. On nous a répété les mêmes choses qu'on nous répète depuis des mois. Je ne comprends pas comment ça se fait qu'il n'y a pas de plan encore par rapport à ça. Il y a des enjeux majeurs pour lesquels moi, je veux être éclairée. Je pense au ratio, je pense au ratio dans la classe, mais aussi le ratio sur l'heure du dîner, le ratio au service de garde, il y a la sécurité dans le transport. Moi, je veux savoir c'est quoi, les solutions du ministre, parce que, là, en ce moment, la sécurité est déjà problématique près des écoles, on ne peut pas demander aux parents d'aller reconduire leurs enfants individuellement, ça va seulement envenimer la situation.

Il y a l'enjeu des services de garde aussi. Depuis un an, les familles prestataires de solidarité sociale ont accès aux CPE gratuitement. Est-ce qu'ils vont aussi avoir accès aux services de garde en milieu scolaire? Parce que, selon les experts qui sont venus nous voir ici, en commission, l'impact de la maternelle quatre ans, il était significativement plus positif si l'enfant fréquentait aussi le service de garde en milieu scolaire. Donc, c'est une question que je me pose.

Je m'inquiète du recrutement des éducatrices pour enseigner en maternelle quatre ans, je pense que ça reconnaît là leur compétence, mais mon inquiétude, c'est plutôt sur les impacts sur les services de garde éducatifs, où il y a déjà une pénurie d'éducatrices. Donc, si celles qui ont le plus d'expérience vont vers le milieu scolaire, parce que l'expérience, c'est un critère, l'impact va être encore plus grand sur nos services de garde éducatifs. Donc, ça fait quand même pas mal de préoccupations pour un projet de loi qui devrait être le fleuron du gouvernement, hein, qui est le projet de loi que le gouvernement a le plus moussé. Normalement, on devrait être face à un gouvernement qui est fier de présenter son plan à tous les Québécois pour implanter son projet, mais, jusqu'à maintenant, on ne l'a pas vu, ce plan-là, on n'a aucune idée de comment ça va se passer, ni en termes d'échéancier, ni en termes de budget, ni en termes de toutes les modalités techniques de qu'est-ce qu'il va se passer pour les enfants au quotidien dans ces classes-là.

Nous, on passe notre temps à faire des demandes d'accès à l'information, on trouve nos informations petit peu par petit peu dans les médias, on se fait reprocher par le gouvernement de ne pas utiliser les bons chiffres. On serait ravis d'utiliser les bonnes informations, mais on n'y a pas accès, en ce moment, puis on se demande même si elles existent, ces bonnes informations là. Donc, j'invite vraiment le ministre à dévoiler tous les détails de son plan, pas seulement à nous, mais aux Québécois, pour qu'on puisse savoir de quoi on parle, en ce moment. Donc, moi, j'aurais besoin de ça, là, pour pouvoir étudier le projet de loi adéquatement puis être certaine qu'on va faire les bons choix pour les enfants de quatre ans, ici, parce que, là, dans le projet de loi, on n'a pas de prise sur tous les détails techniques qui vont faire vraiment la différence dans le service qu'on va offrir aux enfants. Donc, on a besoin de savoir qu'est-ce que le ministère veut faire. Je vous remercie.

• (10 h 40) •

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. J'invite maintenant la porte-parole du troisième groupe d'opposition en éducation et députée de Joliette à faire ses remarques préliminaires. La parole est à vous, Mme la députée.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de dire que je suis heureuse de reprendre les travaux en cette commission avec l'ensemble de mes collègues, le ministre et les collègues de la partie gouvernementale ministérielle, et toute son équipe, de son cabinet et du ministère, qui nous accompagne depuis plusieurs mois dans plusieurs projets. Donc, merci beaucoup d'autant de disponibilité, évidemment, et de travail. Et, bien sûr, je veux saluer mes collègues des autres partis d'opposition ainsi que mon recherchiste, Étienne Richer, qui est toujours fidèle au poste et qui travaille très bien pour m'accompagner, et le personnel de la commission, qui ne chôme pas, hein, parce que cette commission siège beaucoup.

Alors, justement, vu qu'on siège beaucoup et qu'on parle beaucoup de ce projet-là et d'éducation, ce qui est une fort bonne chose, nous l'avons dit à de multiples reprises, bien, on se serait attendus à ce que le ministre ait entendu notre message que nous répétons depuis des mois, depuis maintenant six mois, que le projet de loi n° 5 sur les maternelles quatre ans a été déposé, à savoir qu'avant de s'aventurer dans un projet aussi majeur, qui restructure complètement l'offre éducative pour les tout-petits au Québec, qu'on ait un plan de match, qu'on sache vraiment, pour les cinq prochaines années, où le gouvernement va aller, comment il va réussir à implanter ce qu'il prétend pouvoir implanter.

Et donc, je dois vous dire qu'hier j'ai eu une lueur d'espoir quand j'ai vu, en après-midi, que le ministre nous annonçait un point de presse ce matin, à 9 h 15, juste avant le début de la commission. J'aurais aimé qu'il soit plus tôt, parce que j'étais convaincue qu'il allait enfin nous déposer le plan de déploiement des maternelles quatre ans et de complémentarité avec les CPE et les services de garde à la petite enfance. Or, j'ai, comme vous pouvez l'imaginer, été plutôt déçue et très surprise de voir que, ce matin, en fait, le ministre n'avait rien de nouveau à nous annoncer pour le début de l'étude détaillée du projet de loi et qu'il n'avait toujours pas de plan détaillé à présenter, et ce n'est pas faute d'avoir essayé, ce n'est pas faute d'avoir déposé des motions en Chambre à plusieurs reprises, d'avoir fait, nous aussi, des demandes d'accès à l'information, comme plusieurs journalistes l'ont fait.

Alors, de deux choses, l'une, ou bien il y a un plan, mais il est tellement difficile de s'assurer qu'il va pouvoir être implanté que le gouvernement ne veut pas rendre public, ou bien il n'y a tout simplement pas de plan. Et je dois vous dire qu'on tend vers cette deuxième hypothèse de plus en plus, parce qu'avec l'insistance que nous mettons, depuis des mois, à obtenir le plan, et que tout le monde fait des demandes en ce sens, et qu'on n'ait toujours pas le début d'un tel plan, bien, on en vient à la conclusion qu'il y a énormément d'improvisation dans ce dossier-là, qui est pourtant fondamental.

Et c'est là-dessus que je veux insister, parce que, des fois, le ministre dit que l'opposition est là pour s'opposer. Ce n'est pas ça du tout. On veut le mieux pour ce qui est de nos tout-petits au Québec, on veut le meilleur départ possible en termes de services éducatifs, on veut réduire, nous aussi, les vulnérabilités au maximum, on veut faire en sorte que la plus grande majorité de nos enfants vont pouvoir se développer, s'épanouir, aller au bout de leur plein potentiel et de pouvoir persévérer à l'école. Et c'est pour ça que c'est si important de savoir où le gouvernement s'en va. Parce qu'on nous demande un chèque en blanc, c'est ça qu'on nous demande. On nous demande de commencer l'étude de ce projet de loi là en signant un chèque en blanc. Mais nous, notre responsabilité d'opposition, ce n'est pas de signer un chèque en blanc puis de dire : Ah! oui, on peut avoir une confiance aveugle. Non, on ne peut pas faire ça. Parce que, jusqu'à ce jour, les preuves ne sont pas au rendez-vous, qu'on va pouvoir aller de l'avant, que ça va pouvoir se concrétiser et se faire correctement.

Et on a eu encore, dans les dernières semaines, des exemples d'improvisation. Comment on peut expliquer qu'alors que le ministre faisait de la fréquentation des maternelles quatre ans un enjeu très important et qu'un des éléments sur lequel reposait toute sa logique... évidemment, on n'est pas en accord avec cette logique-là, mais toute cette logique, c'était de dire : En milieu scolaire, les enfants vont être accompagnés par des enseignants et des enseignantes qualifiés, qui ont un bac universitaire. Nous, on a toujours réfuté cet argument-là parce qu'on pense que les éducatrices à la petite enfance, avec trois ans dédiés spécifiquement à la petite enfance, sont très bien formées et on en a la preuve dans nos CPE. Mais ça, c'était un des arguments du gouvernement.

Qu'est-ce qu'on apprend dans les dernières semaines? Bien, faute d'enseignants et d'enseignantes — ce n'est pas une nouvelle, ça fait des mois, ça aussi, qu'on le dit, que tout le monde le dit — on va se tourner vers les éducatrices, et, dès lors qu'ils vont être inscrits dans un parcours et qu'ils vont avoir fait trois cours, ils vont pouvoir aller enseigner. Donc, elle est où, la logique? Comment nous, on peut penser que le gouvernement sait où il s'en va quand il nous dit : Inquiétez-vous pas, le plan, on ne le dépose pas, mais les choses vont se faire dans l'ordre, alors que lui-même, à quelques semaines de l'entrée du début de l'étude du projet de loi, il nous dépose un règlement puis il nous dit : Bien, finalement, c'est vrai que la pénurie est vraiment énorme, donc on va aller déshabiller ce qu'il se passe dans les CPE, les services de garde éducatifs à la petite enfance pour essayer de renchausser notre préscolaire parce qu'on est pris avec cet engagement-là puis on doit le combler. Donc il arrivera ce qu'il arrivera aux autres services, où il y a évidemment déjà des pénuries, notamment parce qu'on dévalorise ou on ne valorise pas minimalement suffisamment la profession d'éducatrice à la petite enfance. Et donc là on se ramasse avec ça.

Donc, imaginez comment on se sent, nous, dans l'opposition. On pense qu'on va avancer pour que les choses soient de plus en plus claires, qu'il y ait un plan de match de plus en plus étoffé. Or, c'est l'inverse qu'on vit. On a des nouveaux signaux d'improvisation qui nous font craindre le pire, parce que, si on décide de s'en aller sur cette voie-là, bien, minimalement, il faut être sûr que ça va pouvoir se faire, se concrétiser, parce que ce qu'on investit là-dedans, on ne l'investit justement pas ailleurs, on ne l'investit pas dans tout ce qu'on pourrait faire pour les 0-4 ans, on ne l'investit pas dans tout le rehaussement de la qualité. On ne le réinvestit pas en disant : Vous savez quoi? Les services de garde non régis au Québec, qu'il y a des dizaines de milliers d'enfants qui fréquentent, faute d'autres services ou par choix, bien, on va mettre fin à ça parce qu'on va créer suffisamment de places en CPE. Au contraire, le gouvernement, même s'il mise... et qu'il dit que l'agir tôt est fondamental, que la qualité est fondamentale et que c'est pour ça qu'il amène les maternelles quatre ans, il continue à tolérer, pour nos tout-petits, des services complètement non régis, où il n'y a aucun contrôle de l'État, aucune obligation de formation, de programme éducatif. Ça ne tient pas la route.

Donc, c'est pour ça qu'on est si inquiets, c'est pour ça qu'on demande de voir où le gouvernement s'en va, parce qu'on ne peut pas se mettre le bras dans le tordeur puis dire : Bien, il arrivera ce qu'il arrivera, alors que, quand on fait un choix x, ça veut dire qu'on ne fait pas le choix y, ça veut dire qu'on ne fait pas le choix z.

Donc, nous, on pense que d'autres choix devraient être faits, mais, surtout, on pense que, si ce choix-là est maintenu par le gouvernement, bien, il faut être certain qu'il va pouvoir se déployer correctement puis qu'on ne se retrouvera pas, dans deux ans, à dire : On a tout mis nos oeufs dans ce panier-là, puis là, finalement, on ne peut plus avancer, parce que, vous avez bien raison, on aurait dû faire un plan détaillé, puis les ressources, on n'en a pas, puis, non, on est en train de tout déployer ou d'essayer d'aller chercher des éducatrices, mais ce n'est pas suffisant, puis les locaux, on ne les a pas puis on ne peut pas les aménager, puis, ah! l'économie va un petit peu moins bien, donc on n'a plus les mêmes rentrées d'argent puis on ne peut plus investir. C'est ça qui nous inquiète quand on voit qu'il n'y a toujours pas de plan détaillé. Puis il me semble que, si le gouvernement était si fier de son engagement, que c'était si important, que c'était la promesse-phare, l'engagement-phare en éducation, on aurait mis les énergies, au cours des derniers mois, pour nous présenter un plan qui tienne la route. Donc, oui, grande déception et grande surprise ce matin.

Pour revenir à la question des inquiétudes par rapport au déploiement, bien, j'ai fait un petit calcul, puis, quand je l'ai évoqué en Chambre, le ministre disait qu'il était surpris, parce que j'ai dit que ça prendrait au moins 4 000 nouvelles ressources humaines pour pouvoir aller au bout de l'engagement. Alors, je veux juste rappeler ça, là. Pourquoi 4 000 ressources humaines de plus? Bien, parce qu'il faut 2 600 nouvelles classes de maternelles quatre ans pour arriver au chiffre de 3 000 du ministre, et donc 1 300, en plus, éducatrices. Parce que le ministre nous parle toujours de son duo de feu, ça veut dire 2 600 enseignantes, 1 300 éducatrices qui vont collaborer dans les classes. 1 300, parce qu'ils sont à demi-temps. Alors, on arrive à 4 000 nouvelles ressources, quand on est dans un grave, grave manque, en ce moment, de ressources dans le milieu scolaire et dans le milieu de la petite enfance. Et ça, c'est sans compter le flux supplémentaire de demandes pour les services de garde à l'école, combien de nouvelles ressources en services de garde dans nos écoles pour pouvoir accueillir ces enfants-là, ces dizaines de milliers de nouveaux enfants de quatre ans qui vont faire leur entrée. Donc, quand on dit qu'on a besoin d'un plan, là, ce n'est pas de l'obstination, c'est parce qu'on est face à une réalité comme celle-là puis on se demande sincèrement comment on va pouvoir y arriver.

Puis moi, je ne suis pas rassurée quand je vois que, là, on a créé 250 classes... vous savez, l'objectif, c'est d'arriver à 3 000. Là, c'est 250, uniquement pour la rentrée, très petit chiffre par rapport à l'objectif global, et on a fait des pieds et des mains, on est allés écrire aux parents dont les enfants fréquentaient des services de garde, on est en train de faire du recrutement tous azimuts, des publicités sur Facebook, et on arrive à peine à réussir à mettre sur pied ces 250 classes là, avec pas 17 enfants, comme ce qui est prévu comme le maximum, mais 11 enfants, en moyenne, dans les classes existantes à l'heure actuelle. Donc, je pense que ça démontre juste à quel point on est dans l'improvisation et que, oui, nous, comme représentants de la population, on a besoin de savoir où le gouvernement s'en va.

• (10 h 50) •

L'autre élément, c'est quand le ministre nous dit : On ne peut pas discriminer entre milieu favorisé, milieu défavorisé, il faut absolument mettre fin à ça. Bien, ça, c'est un argument qui pourrait se tenir dans un univers où les ressources sont illimitées et où on donnerait le choix complet à tous les parents, tous les enfants du Québec de fréquenter ou bien la maternelle quatre ans ou bien le CPE de son choix. Or, aux dernières nouvelles, on n'est pas encore dans cet univers-là magique, où les ressources sont illimitées et qu'on peut faire tous les choix en même temps, et que ça ne brime pas un ou l'autre des services.

Alors, c'est évident que pourquoi le choix d'y aller en priorité dans les milieux défavorisés a été fait, bien, c'était pour répondre à des vulnérabilités qui sont plus grandes en milieux défavorisés. Est-ce que ça veut dire qu'il n'y a aucune vulnérabilité en milieu favorisé? Bien sûr que non, mais, dans un univers où les ressources ne sont pas illimitées, puis là on le voit bien, il y a 250 classes qui se déploient sur un objectif de 3 000, c'est évident qu'on doit privilégier, puis qu'on doit hiérarchiser, et les besoins sont beaucoup plus grands en milieux défavorisés, parce que la vulnérabilité est plus grande et aussi parce qu'il y a une moins grande fréquentation des services de garde éducatifs.

Alors, oui, ça milite pour dire que, dans le plan de déploiement, si jamais, le gouvernement, il se dit : Tout va être parfait, on va pouvoir être capable de déployer ça, là, partout — même si aujourd'hui, ça semble impensable — tout en offrant toutes les places voulues en CPE, bien, est-ce qu'on pourrait au moins, par étapes, y aller en privilégiant les milieux où les besoins sont les plus grands à l'heure actuelle?

Puis là ce n'est pas juste moi qui dit ça, représentante du Parti québécois. C'est des experts sur lesquels le ministre lui-même se fie. Mme Monique Brodeur, qui est une des rares expertes qui appuie le projet du gouvernement, elle-même est venue nous dire en commission qu'il fallait débuter et qu'il fallait favoriser les milieux défavorisés dans le déploiement. À peu près tout le monde nous a dit ça. En ce moment, ce n'est pas ça qu'il se passe. On ne priorise pas les milieux où les enfants qui ont le plus de vulnérabilités, et, la preuve, le ministre n'a pas été capable de dire, ce matin, d'où proviennent les enfants, là, qui sont inscrits dans les maternelles quatre ans. Est-ce que c'étaient des enfants qui ne fréquentaient aucun service de garde? Est-ce que c'est des enfants qui étaient particulièrement vulnérables? On ne l'a pas, l'information.

Mais là ce n'est pas ça qui dicte les choix. Ce qui dicte les choix, c'est qu'on doit arriver à un nombre de 250 maintenant, et donc on les ouvre en ce moment, parce qu'on a la loi actuelle, encore dans les milieux défavorisés, heureusement, mais, ultimement, on veut changer la loi pour pouvoir les ouvrir n'importe où et, on a bien peur, où il y a des classes libres, parce que le ministre nous dit beaucoup ça : On va y aller où il y a des classes libres. Est-ce que c'est ça qui devrait dicter nos choix, la priorisation puis l'endroit où il y a des classes libres au Québec et non pas de partir des besoins des enfants?

Donc, c'est ça, l'inquiétude. En ce moment, on ne part pas des besoins des enfants, on part des classes libres, parce qu'il faut atteindre cet objectif-là de cet engagement-là, qui a été pris dans le feu de l'action, dans un débat télévisé, et je ne pense pas que c'est comme ça qu'on devrait faire des politiques publiques solides et pérennes au Québec.

Deux derniers éléments. L'argument comme quoi les maternelles quatre ans vont permettre d'avoir un accès à des ressources spécialisées en orthophonie et en orthopédagogie dès le plus jeune âge, c'est vrai que, dans les milieux scolaires, il y a ces ressources-là. Encore une fois, elles sont en nombre grandement insuffisant. Les enfants qui fréquentent déjà de la maternelle à la sixième année et au secondaire ont d'énormes difficultés d'accès à ces ressources. Donc là, on va venir mettre une pression. Est-ce que ça veut dire que c'est les enfants de quatre ans et de cinq ans qui vont avoir priorité et que donc, on va délaisser, pour les enfants plus vieux? Je ne sais pas. Mais, encore une fois, là, il n'y a absolument rien qui empêche de faire les passerelles avec les CPE, avec les milieux de garde éducatifs au Québec. D'ailleurs, c'est supposé être la philosophie derrière le plan de match du ministre délégué aux Services sociaux, avec le programme Agir tôt, de pouvoir agir pas juste à quatre ans ou à cinq ans, mais à deux ans, à trois ans, en orthophonie, notamment, et avec des services spécialisés.

Donc, pourquoi on nous sort cet argument-là, alors que, si on le souhaitait, et de l'aveu même du ministre des Services sociaux, c'est essentiel de pouvoir dépister et accompagner dès le plus jeune âge? Donc, pourquoi on ne se dit pas : On va avoir des équipes qui vont se déplacer puis qui vont pouvoir faire le lien avec les services de garde éducatifs, plutôt que de sortir ça comme un des arguments pour la fréquentation du milieu scolaire, alors qu'encore une fois les ressources sont manquantes?

Puis je veux terminer avec cet enjeu-là de la complémentarité. C'est une inquiétude très grande que nous avons, notamment du fait de l'inexistence d'un plan de déploiement et de complémentarité avec les centres de la petite enfance, de savoir comment on va réussir à vraiment donner ce qu'il y a de mieux au Québec à nos tout-petits, pas juste à quatre ans, mais dès leur plus jeune âge, comme tous les experts qu'on a entendus sont venus nous dire qu'il était fondamental de le faire, parce que la vie et les vulnérabilités ne commencent pas à quatre ans. Justement, si on est capable de les mesurer à l'entrée à l'école à cinq ans ou à quatre ans, c'est parce qu'elles se sont développées avant.

Alors, je pense que c'est essentiel de se dire où elle va être, cette complémentarité-là, comment on va s'assurer que tous les parents qui veulent faire le choix de fréquenter un centre de la petite enfance dès qu'ils retournent travailler quand leur enfant a un an en ayant la plus grande qualité possible de services puissent avoir une réponse positive, quand ce n'est pas le message qui est envoyé par le gouvernement et que même il est en train d'envoyer un signal inverse en disant qu'il va tenter d'aller appâter ou chercher des éducatrices dans le milieu des services de garde à la petite enfance pour les amener dans le milieu préscolaire. Il y a une très grande inquiétude et qui est accentuée par le fait que, dans le projet de loi tel qu'il nous est présenté, il y a une disposition qui vient même enlever la référence à la complémentarité dans le projet de loi.

Donc, vous vous imaginez comment ça crée de l'inquiétude. C'est beau, d'avoir des beaux discours puis de dire : Inquiétez-vous pas, il y a 42 000 enfants en ce moment qui n'ont aucun accès à un service des gardes éducatif à la petite enfance, mais on va répondre à ça puis, en plus, on va offrir tous les services pour tous les enfants qui le souhaitent en maternelle quatre ans... C'est beau, la pensée magique, mais, dans les faits, la magie, ça n'existe pas en politique puis ça n'existe pas quand on élabore des politiques publiques.

Alors, ça, c'est une très grande inquiétude qu'on a, sur laquelle on va beaucoup insister. On est heureux de voir aujourd'hui que les représentants de l'Association des centres de la petite enfance du Québec qui sont là pour nous rappeler l'importance de cette complémentarité... Il n'y a personne ici qui remet en question que des maternelles quatre ans, ça peut être une bonne chose pour certains enfants, à certains égards, si on sait où on s'en va puis si on sait comment on veut déployer ça de manière complémentaire.

Donc, en terminant, je réitère au ministre toute notre collaboration. Évidemment, on va essayer de faire de ce projet de loi là le meilleur projet de loi, mais je pense qu'il comprend qu'on a beaucoup de réserves, beaucoup de questionnements, et surtout que, s'il veut nous rassurer pour débuter les travaux, la chose à faire, c'est de nous déposer son plan de match concret de déploiement et de complémentarité. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Je reconnais la députée de Mille-Îles.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. J'avais peur de changer de comté, là, mais...

Le Président (M. Jacques) : La parole est à vous.

Mme Charbonneau : Merci. C'est un plaisir de me retrouver parmi vous. Je vous dirais que c'est la rentrée pour moi aussi. Alors, bonjour, M. le Président. Bonjour à tous les gens qui nous accompagnent aujourd'hui. C'est un plaisir de me retrouver ici.

Je dis, c'est un plaisir, parce que la rentrée, moi, c'est quelque chose que j'ai fait pendant plusieurs années. Je l'ai faite minimalement, de façon officielle comme parent, pendant plus de 20 ans. Avec trois enfants, c'est plus facile. Mais je l'ai faite aussi de façon officielle pendant 10 ans comme commissaire scolaire, puis de façon encore plus ardue, comme présidente de commission scolaire pendant six ans. Ce que ça voulait dire, la rentrée, pour nous, c'était vraiment la rentrée, en premier lieu, de la direction générale, puis, après ça, des équipes-écoles, puis, après ça, de ce que moi, je vais appeler nos vedettes, les enfants, les jeunes, de la petite enfance jusqu'aux adultes. Puis, par la suite, les gens oublient cet aspect-là, par la suite, c'était la rentrée des parents. Pourquoi? Bien, c'était à ce moment-là que nous, on prenait notre sac à dos, nos crayons, nos papiers, puis qu'on allait faire les comités d'école, les différents paliers où le parent peut s'impliquer puis prendre des décisions pour son jeune. Alors, la rentrée, pour moi, ça a une signification extraordinaire.

Puis, je vous dirais, sortir des vacances, ça a été difficile cette année. Vous comme moi, M. le Président, on n'a pas eu beaucoup de vacances l'été passé. On était plutôt en campagne électorale, comme la plupart des gens alentour de cette table. Donc, cette année, pouvoir profiter de l'été, ça a fait du bien. Mais rentrer pour parler de l'éducation, c'est un plaisir.

• (11 heures) •

Un peu comme ma collègue de Joliette, quand j'ai vu l'annonce hier qu'aujourd'hui il y aurait une annonce, il y avait une partie de moi qui était... je n'ose pas dire soulagée, mais qui était un peu en attente, qui était un peu encouragée du fait que, vu que c'était juste avant la commission, qu'on était pour débuter cette commission sur des nouvelles franchement très intéressantes. Parce que, veux veux pas, tu te dis : Le ministre va faire une rentrée, puis on va avoir réglé une couple de questions qui restent en suspens dans notre tête.

Bien, malheureusement, ce n'est pas ce qu'il est arrivé. Je reprends un peu les paroles : Pas de plan national, pas de plan régional, je vous dirais, même pas un plan local. Parce qu'une commission scolaire ça a l'air de rien, hein? Il y en a qui pensent que ça peut se transformer, comme ça, en centre de service, mais une commission scolaire, c'est plus qu'un centre service, c'est une proximité avec les parents puis avec les élèves qui est importante. Donc, pas de plan, non plus, local.

Pas plus de places ou des places un peu différentes, parce que, si j'ai bien compris, on va prendre un local qu'on utiliserait pour une classe officielle puis on va le séparer en deux. C'est à peu près ce que j'ai compris. Mais, vu que l'annonce se faisait comme moi je me rendais dans cette salle, parce que, moi, on m'avait convoqué pour 9 h 30, bien, je n'ai pas complètement tout entendu. Le ministre aura l'opportunité de nous en parler un peu plus. Mais, si c'est vraiment un local divisé en deux pour faire deux groupes, ça m'inquiète encore plus. Parce que rappelons-nous, M. le Président, que, pour ouvrir un CPE, pour ouvrir une garderie, les places... le pied carré est bien important. Puis, si jamais vous ne le savez pas, je suis sûre que vous allez vous faire interpeler par des gens qui veulent avoir ou qui veulent offrir des services pour vous dire comment c'est important, le pied carré, pour ouvrir un CPE ou un service de garde. Donc, une école, habituellement, a les mêmes obligations. Là, on a l'air à vouloir s'empresser à faire les choses. Et faire les choses de façon rapide, ce n'est pas toujours la bonne façon.

Je reviens à l'annonce, je pensais aussi que le ministre était pour nous annoncer plusieurs choses par rapport à la consolidation du réseau qui est déjà en place, parce que le ministre a raison quand il nous rappelle, hein, la maternelle quatre ans, ce n'est pas d'hier. Non seulement ce n'est pas d'hier, mais le Parti libéral y a consacré de l'argent, et du temps, et une volonté qui était sur les enfants vulnérables.

Mais avant ça, M. le Président, avant même ce plan-là, je vous le dis, on regardait et on avait... le ministre avait le droit, un peu discrétionnaire, je vous dirais, le mot est peut-être mal choisi, d'accepter des recommandations de parents qui trouvaient que leur enfant était soit suffisamment mature, souvent ça arrivait proche de la date de rentrée, là, parce qu'on a quatre ans, cinq ans, c'est un peu proche en septembre, ou un enfant qui avait un handicap marqué. À la commission scolaire de Laval, on avait des classes spécifiques pour les enfants de quatre ans avec handicap pour pouvoir avoir une stimulation plus importante, pour pouvoir avoir une intégration plus souple au moment d'intégrer le préscolaire.

Je m'amuse un peu avec vous puisque j'ai du temps pour le faire. Je vous dirais que je fais une différence entre la maternelle et le préscolaire. Pour moi, la maternelle, c'est quatre ans. Parce qu'à quatre ans on materne encore un peu. Le préscolaire, c'est avant l'école, c'est où, là, on fait un classement, on dépiste, on fait des choses plus concrètes pour aider l'enfant à comprendre son autonomie puis son environnement pédagogique. Alors, dans ma tête à moi, je vais continuer à appeler les quatre ans : maternelle.

Quand on a un enfant de quatre ans, mes collègues disaient, tantôt : Il faut faire un choix, des fois, même avant même d'avoir eu un enfant. Ma collègue de Sherbrooke le disait : Il faut même l'inscrire en CPE quelquefois plus tôt. Pour un parent, c'est déjà un stress assez concret de trouver la bonne place, faire le bon choix. Au Québec, la loi dit qu'un parent peut choisir son école, c'est ce que la loi dit. Et, en même temps, les commissions scolaires, eux, concrètement, dans leurs services, ils ont, pour chacune des écoles, une circonscription, et le parent est rattaché à cette circonscription-là. Si l'enfant... si le parent choisit une autre école, soit une école à vocation alternative, internationale ou autre chose, le parent fait une démarche auprès de la commission scolaire et doit voir comment ça se passe.

Les stress commencent à partir du moment où on comprend que l'école, c'est 180 jours de l'année. Un CPE, c'est tous les jours, presque toute l'année. Il y a des vacances à Noël et les jours fériés comme tout le monde, mais l'école, c'est 180 jours, M. le Président, 180 jours où je vais décider s'il va aller à l'école dans ma voiture ou en autobus. S'il embarque dans un autobus, bien, il faut qu'il soit parmi ses amis qui sont à 72 dans un autobus. Je vous le dis. Puis, souvent, les gens nous sollicitaient en disant : J'ai suivi un autobus, elle n'était pas tout à fait pleine, mon enfant n'a pas le droit au transport, parce que, parce que. Mais je me souviens des petites pattes dans le vide dans un autobus jaune, des enfants de quatre ans. À la commission scolaire de Laval — puis vous allez voir, je vais vous en parler quelques fois, parce que c'est celle que je connais le plus, j'aime mieux parler de ce que je sais — on avait mis en place un transport adéquat, c'est-à-dire des berlines, un véhicule un peu plus petit, qui fait en sorte que les enfants de quatre ans étaient réunis, puisqu'ils n'allaient pas à leur école de quartier, c'était une école... une classe qui était faite pour les enfants... pas à vocation, mais qui étaient reconnus comme vulnérables. Donc, l'école était située à un endroit, puis on récupérait les enfants d'un peu partout. Alors, ils n'étaient pas dans un gros autobus jaune, ils étaient dans un autobus tout à fait adapté, dans la mesure des moyens, à eux.

Malheureusement, cet été, on a vu que ça arrive, des accidents, avec les autobus. Et, je vous le dis, il y a des études qui ont été faites, année après année, on ne mettra pas de ceintures dans les autobus. Quelquefois, c'est plus dangereux que sécuritaire. Malheureusement, un enfant de quatre ans qui ne touche pas le plancher, qui ne peut pas se soutenir par le plancher, qui est parmi ses pairs, plus souvent qu'autrement, bien... Pour avoir eu ce dossier-là puis le partager avec quelques-uns d'entre vous depuis quelques années, l'intimidation, ça commence avec la fratrie, mais ça continue ailleurs, et ça ne se passe pas que dans la classe, ça se passe à l'école, mais ça se passe aussi dans l'autobus, dans les jeux. Donc, l'enfant de quatre ans qui se retrouve dans un environnement avec des enfants de sixième année, de quatrième année... ce n'est pas des monstres, là, ce n'est pas des enfants qui vont les cibler, mais c'est des petits.

Alors, dans l'inquiétude puis dans le stress du parent, il faut le prendre en compte, et je pense que, quand un gouvernement, avec toutes les bonnes intentions... parce que je le crois sincèrement, je pense qu'on est un gouvernement... puis je dis «un» parce qu'on est 125 députés qui gouvernent le Québec, pas 75, 125. Et, de ce fait, on veut prendre les meilleures décisions, on veut se parler des vraies affaires, parce que, demain matin, dans votre bureau de comté, le parent qui va vous appeler, il ne veut pas parler au premier ministre, il ne veut pas parler au ministre de l'Éducation, il veut vous parler à vous, à nous, pour nous dire : Aïe! Ça ne marche pas, là. Ça ne marche pas, j'ai appelé à la commission scolaire, ça ne marche pas. Et, de ce fait, on se doit d'avoir ces réponses-là pour eux.

Donc, 180 jours d'école, le transport scolaire, et là j'en arrive aux places. J'appelle à ma commission scolaire ou je fais ma démarche sur Internet, maintenant, on rentre son code postal, puis ça nous dit : Tiens, toi, tu vas à l'école Val-des-Arbres. Alors, je fais ma démarche, je vais faire mon inscription à Val-des-Arbres, on m'apprend que les classes sont pleines, il n'y a pas de place à Val-des-Arbres, la commission scolaire va communiquer avec moi pour me dire à quelle école je devrai aller. Déjà, mon stress, il vient de clencher jusqu'à 10. Pourquoi? Bien, parce que j'avais choisi mon école, j'ai passé l'été à passer devant l'école avec mon jeune, à lui dire : C'est là que tu vas aller, regarde ça va être ta nouvelle école, tu vas aller là, ça va être vraiment chouette. Pour apprendre que ce n'est pas à cette école-là que je vais aller, et ce n'est pas de la faute, ni au ministre, ni au député, ni au commissaire scolaire, c'est qu'il n'y a plus de place à cette école-là. Et nous, on disait, avec un petit sourire : Si on pouvait mettre les écoles sur roulettes, ça serait très pratique, parce qu'on pourrait les aménager où les quartiers se déplacent. Parce qu'un nouveau quartier... Ça ne dure pas 20 ans, la place-élève, ça dure un certain temps. Malheureusement, les écoles ne sont pas sur roulettes, et le parent doit recevoir la nouvelle qui dit : Bien, malheureusement, pour toutes sortes de raisons qui appartiennent à la commission scolaire, puis au niveau de la densité de la population alentour de cette école, vous n'aurez pas de place disponible dans cet endroit. Alors, je rajoute un stress supplémentaire à la volonté que j'ai de rentrer mon jeune à l'école. Parce que peut-être qu'il est en CPE puis je n'aurais pas choisi cet aspect-là si ça ne s'était pas présenté à moi. Puis je suis d'accord avec le ministre, qui dit : Vous savez, il y a des parents qui veulent aller... ils veulent rentrer leur jeune de quatre ans à l'école. Et j'y crois. Sauf que, pour ça, il faut avoir l'ensemble des aménagements pour pouvoir le faire.

À partir du moment où j'ai peut-être les disponibilités, puis je l'avais fait en Chambre, mais je vais le refaire avec vous juste pour le plaisir de faire le calcul, à la commission scolaire de Laval, cette année, c'est 3 800 enfants de quatre ans qu'il y a sur l'île, approximatif, là, ceux qu'on est capable de compter. Ça ne compte pas l'immigration, ça ne compte pas les surprises, les déménagements, ça compte ceux qu'on croit que nous avons. Mettons que 50 % de ces parents-là choisissent d'aller à l'école. Ça me demande, comme commission scolaire, 135 classes supplémentaires. Alors là, j'ai un calcul mathématique à faire sur le nombre de bâtiments que j'ai, puis me dire : Bon, comment je vais répartir mon monde, comment je vais faire ça? Jusqu'ici, bien, jusqu'à avant 9 h 30, il y avait six classes de disponibilité, six locaux disponibles pour faire des maternelles quatre ans supplémentaires. Depuis 9 h 30, il y en a 12, parce que je vais diviser ma classe en deux, je vais en avoir 12. C'est un peu simpliste, là, mais c'est un peu ça.

• (11 h 10) •

Alors, tous les autres parents, tous les parents, là, je vous ai réduit ça tantôt, je suis passée de 3 800 en me disant : Bon, il y en a la moitié qui n'iront pas à l'école, ils vont aller en CPE, en garderie. Ils vont rester à la maison, parce que c'est un choix que je suis capable de faire, de garder... comme parent, de garder mon jeune à la maison si j'ai le goût de l'avoir avec moi, parce que je suis en congé de maternité ou bien parce que c'est un choix de société que j'ai fait. Alors, 50 % y vont, mais 50 % n'auront pas ce choix-là. Comment on va faire pour les choisir, M. le Président? Ça va-tu être la proximité de l'école? Ça va-tu être son adresse de maison, sa fratrie? Il y a des règles pour ça. Chaque commission scolaire se donne une politique d'inscription, mais elle est gérée par des commissaires scolaires.

Puis, si j'ai bien compris le plan de match, puis ça doit être un maudit bon plan de match, parce que la démarche devrait être commencée auprès du DGEQ, puis elle n'est pas commencée... Ça fait que, le plan du ministre d'abolir le principe des commissions scolaires puis d'envoyer ça en services scolaires, en centres de services, il est déjà enclenché, là. Puis je comprends, parce que ce n'est pas quelque chose qui nous... Je ne l'apprends pas un ministre puis il ne me l'apprend pas non plus, je suis rentrée en politique scolaire puis on parlait déjà de l'abolition des commissions scolaires. Mais savez-vous quoi, M. le Président? Quand mes collègues députés vont recommencer à recevoir des appels que les commissaires reçoivent et qu'ils gèrent avec les politiques qu'ils votent parce qu'ils sont la première proximité du parent et plus souvent qu'autrement parce qu'ils sont les parents de cette commission scolaire là, on va avoir du plaisir. Parce que le comité de parents, il n'est pas imputable des décisions. Il est décisionnel, mais il n'est pas imputable. Le député va devenir imputable des décisions qu'on va prendre. Ça fait que, quand les gens m'interpellent parce qu'ils n'ont pas de place en CPE, j'ai hâte de voir comment on va réagir collectivement contre le manque de places en maternelle quatre ans. Et, comme le disait le ministre, ce n'est pas tout le monde qui va y aller. Ce n'est pas tout le monde qui va y aller. Il y a des gens qui vont choisir de ne pas y aller. Et il y a peut-être des gens qui vont choisir de ne pas y aller parce que ce n'est pas un bon choix pour eux par le principe de places, le principe d'où est l'adresse de l'établissement, l'enseignant.

J'aurais pensé que, ce matin, dans le discours du ministre, il y aurait eu la volonté de consolider le réseau qu'on a en ce moment. Il y aurait eu une volonté d'un plan puis d'un programme qui nous donne le goût d'avoir ces maternelles quatre ans là. En ce moment, à chaque fois qu'on ouvre la bouche pour parler des maternelles quatre ans, il y a plus d'inquiétude que de volonté puis de, comment je vous dirais ça, de bonheur à les voir arriver.

Les enseignants, bien, le ministre l'a un peu dit cet été, hein? Il n'y a pas de souci, on va piger dans une banque de gens qui sont, en ce moment, dans les CPE puis on va les mettre au niveau des écoles, deux réalités complètement différentes.

Par contre, ils ont un souci semblable : l'évolution de l'apprentissage d'un enfant de quatre ans. Ils ont la capacité, d'un côté ou de l'autre, de dépister un enfant qui a des difficultés d'apprentissage. Qu'il soit à l'école ou en CPE, cette capacité-là est là. Alors, pourquoi ne pas consolider deux réseaux qui pourraient être, je dis «pourraient» parce qu'on en a toujours parlé, de la complémentarité entre les deux réseaux... l'effort qu'on pourrait faire pour faire en sorte que les services de un peuvent parler à l'autre et que l'enfant soit entouré de gens qui ne veulent que son bien, pas juste le changer de côté puis voir s'il est mieux à l'école, ou en CPE, ou en garderie, non, non, ces gens qui pourraient lever la main puis dire : Cet enfant-là, où qu'il soit, a besoin d'orthophonie. Il a besoin de francisation. Il a besoin d'un service puis il pourrait le recevoir dans son CPE, dans sa garderie ou à l'école.

Quand je vous dis ça, M. le Président, je suis consciente que je ne vais pas à l'encontre de l'idée du ministre. La maternelle quatre ans, j'y crois profondément. Mais le déplacement de clientèle juste parce qu'on a promis quelque chose? À la limite, c'est malsain. Le manque de personnel qu'on va avoir et de professionnels qu'on va avoir va avoir un impact pas juste sur les quatre ans, M. le Président. Ça va avoir un impact de la maternelle quatre ans jusqu'au secondaire. On a un réseau scolaire qui scolarise et amène au cégep et à l'université des gens qui ont des troubles et des défis dans nos écoles. Les cégeps ont sûrement parlé au ministre de la volonté de mettre un service en place pour les enfants qui souffrent d'autisme. Et on a la capacité de le faire. Mais là on se concentre puis on ne parle que des quatre ans. Je comprends que le ministre dit : Il faut travailler sur la réussite. Puis, oui, à quatre ans, on commence déjà à travailler sur la réussite, à trois ans, à deux ans... je vous dirais, dès la petite, petite enfance. C'est la capacité qu'on a. Mais on n'a pas le droit de tout mettre nos billes dans le même panier puis d'oublier les autres.

Puis hier la belle annonce pour les cégeps, je la salue, mais il faut aller aussi au niveau des services au secondaire, il faut aller aussi au niveau des professionnels, qu'on veut avoir partout dans le réseau. Parce qu'être équitable, à l'éducation, ce n'est pas juste les quatre ans, c'est dans tout le circuit scolaire. On a l'obligation, comme gouvernement, d'aller jusqu'au bout de cette volonté-là de faire réussir.

Et je ne vous parlerai pas des enfants de la DPJ, on va me dire que je ne suis pas dans la bonne table avec le bon ministre, mais les enfants de la DPJ, il y a eu une étude qui a été déposée, c'est aussi des jeunes qui ont besoin de réussir, qui ont besoin d'aller plus loin.

M. le Président, la maternelle quatre ans, j'y crois. Elle aura le temps d'arriver. Il faut prendre notre temps puis le faire doucement parce qu'il faut adapter les écoles, les lieux, les professionnels puis avoir tout ça ensemble.

Et là je ne vous parlerai pas des écoles qui n'atterrissent pas. Je vous donne un comté, M. le Président, Chomedey. Pourquoi Chomedey? Parce que la densité de Chomedey est impressionnante à Laval. C'est comme le coeur de Laval, c'est comme notre centre-ville, Chomedey. Bien, à Chomedey, on n'est pas capable de faire atterrir une école, et pourtant le financement est là, le ministre a signé une lettre : oui, vous avez droit à votre école, vous, commission scolaire de Laval, pour les élèves de Laval. Mais l'école, elle n'atterrit pas. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas de terrain. Il n'y a rien qui fait en sorte qu'on peut l'atterrir.

Peut-on travailler concrètement sur un réseau consolidé plutôt que s'évader un peu dans cette idée-là d'un engagement qui a été pris peut-être un peu rapidement, peut-être un peu trop vite pour dire que tous les enfants de quatre ans auront une place? Faisons en sorte que tous les enfants réussissent, pas juste la rentrée scolaire quatre ans, mais tous les enfants de toutes les commissions scolaires. À Laval comme au Québec, je pense que c'est l'obligation qu'on a.

Et je serai très attentive, parce que le projet de loi, je l'ai lu, il m'inquiète un petit peu. Mais on pourra le modifier et le rendre meilleur. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres membres qui souhaitent intervenir? Je reconnais la députée de Fabre. La parole est à vous.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de vous dire que je suis heureuse d'être ici avec mes collègues, que je salue, la chère porte-parole qui porte les préoccupations avec beaucoup de passion, alors je l'en remercie d'ailleurs. Alors, mes collègues de Mille-Îles, mon cher collègue ici, à ma droite, je veux vous saluer, saluer le ministre, les différents collègues du gouvernement et, bien sûr, les collègues des oppositions. Alors, très heureuse d'être ici avec vous aujourd'hui.

Vous savez, c'est la date du 20 août 2019, une date qu'on doit mettre à l'agenda, qui est importante parce que c'est ce début de l'étude détaillée du projet de loi n° 5 pour le déploiement mur à mur universel des maternelles quatre ans. On l'a dit tellement souvent, mais il faut le dire et le redire : C'est du mur à mur improvisé, du mur à mur et un manque de vision, sans respect de ce que les parents ont à dire — j'y reviendrai — sans respect pour les CPE et les commissions scolaires. Quand j'entends, tantôt, la députée de Joliette qui rappelle que, dans le projet de loi, la notion de complémentarité est mise de côté, évidemment, ça m'inquiète beaucoup.

C'est un bien triste jour pour nos tout-petits de quatre ans du Québec, un bien triste jour pour leur futur succès scolaire. Parce que ma collègue de Mille-Îles, avec toute l'expertise qu'elle a, elle nomme bien tout le parcours scolaire de la première étape jusqu'au secondaire, jusqu'au collège, jusqu'à l'université. À chaque étape, on doit se préoccuper de la réalité des difficultés, des défis du jeune. Et, si on n'a pas cette vision-là d'un bout à l'autre, on manque clairement la chance d'assurer la réussite scolaire des enfants jusqu'à, bien sûr, leur adolescence et leur âge adulte.

Alors, oui, nous sommes dans cette étape d'une grande saga, je dirais, d'entêtement et d'improvisation du gouvernement de la CAQ. D'ailleurs, ce n'est pas moi qui le dis, le premier ministre lui-même l'a dit, non seulement il aura mis son siège en jeu sur la question du déploiement des maternelles quatre ans, mais il a dit : Je serai têtu. Alors, il l'est et son ministre aussi.

• (11 h 20) •

L'encre a bien coulé dans les médias et les tribunes à dénoncer toute la réforme qui ne possède, on l'a dit encore ce matin, ni plan ni rigueur budgétaire. C'est à la miette qu'on découvre, au fil des semaines, l'ampleur du dépassement de coûts et l'anémie du taux d'inscription. Pourtant, le ministre persiste et signe avec ses commentaires : Mais c'est très encourageant. Pourtant, ils sont peu nombreux, ceux qui portent les mêmes lunettes roses et partagent son optimisme. Soyons bien clairs, on le dit et on va le redire avec les collègues de l'opposition officielle et à l'ancien gouvernement, avec l'excellent ex-ministre de l'Éducation, qui croyait au déploiement des maternelles quatre ans, il y a eu cette stratégie très ciblée pour nos tout-petits en milieu défavorisé. D'ailleurs, le député de Jean-Talon a contribué à l'actualité des 400 classes de maternelle quatre ans, qui sont présentes dans toutes les régions du Québec. Ces maternelles, elles existent, elles portent fruit auprès des enfants dans un environnement carencé, défavorisé, à haut taux au niveau de l'indice de défavorisation.

Et puis il y a, bien sûr, les CPE. D'ailleurs, je salue madame qui est avec nous. Alors, ce modèle québécois tant salué, apprécié par tous les parents du Québec, ces services de garde, ils existent et ils portent fruit auprès des enfants d'âge préscolaire. Alors, pourquoi la réforme? Qui a levé la main pour dire : Moi, j'en veux? À part le premier ministre et son ministre, évidemment, qui a levé la main? Les parents? Non. Peut-être un sur trois. Les commissions scolaires non plus. Alors, pourquoi le changement? Winston Churchill disait : «Il n'y a rien de négatif dans le changement si c'est dans la bonne direction.» Or, nous ne sommes pas ici dans la bonne direction. Steve Fortin écrivait dans LeJournal de Québec : «L'entêtement idéologique du gouvernement dans le dossier des maternelles quatre ans, c'est tout simplement inquiétant», M. le Président.

Alors, aujourd'hui, je suis avec mes collègues, avec la porte-parole, bien sûr, et nous allons continuer de porter des inquiétudes qui sont celles des parents, celles de nos citoyens, celles pour les enfants du Québec face à ce déploiement mur à mur des maternelles.

Durant ma présence à cette commission, c'est comme députée que je réagirai. J'ai, en tête, les gens que je rencontre dans mon comté sur le terrain, les nombreux parents dans le plus beau comté du Québec, celui de Fabre — un instant — à parler aux parents, à parler aux familles, à rencontrer les directions d'école primaire, à parler aux jeunes.

Mais c'est aussi comme maman qui se rappelle la petite enfance de son grand garçon que je réagirai. J'ai, près de mon coeur, le souvenir de son éducatrice en CPE, à quel point elle a joué un rôle déterminant dans ses premières étapes, ses premières étapes hors de la maison. Il y a quelques années, il est même retourné pour la revoir, elle était toujours là, un moment d'émotion magique. Alors, oui, c'est à ce titre-là aussi que je réagirai.

C'est aussi comme actrice communautaire pendant 18 ans de ma vie professionnelle à travailler au succès scolaire que je réagirai, parce que, quand je pense à tout ça, bien, je pense aux milliers de jeunes que j'ai vus, pendant ces 18 années, franchir avec courage les portes du carrefour jeunesse-emploi avec leur vécu d'embûches. Mais, quand on leur demandait : Malgré votre difficulté à l'école, est-ce que vous voulez aller vers l'emploi ou vous voulez retourner aux études?, et à chaque fois ils me disaient : Je veux aller chercher mon diplôme. Aidez-moi, j'ai besoin d'aide, mais je veux mon diplôme.

Je réagirai enfin comme porte-parole de l'opposition officielle pour l'emploi, qui ne veut surtout pas qu'on oublie que la pénurie de main-d'oeuvre existe, qu'elle est réelle, qu'elle est criante et qu'il est grand temps que le gouvernement de la CAQ adresse des solutions.

Oui, c'est une bien, bien triste journée. Je veux même peut-être prendre une petite gorgée d'eau pour calmer mon émotion.

Nous sommes en train d'accepter l'improvisation pour l'avenir de nos enfants. Pourquoi? Par orgueil, pour une promesse de campagne électorale. Et puis, on en a parlé, il y a la notion d'urgence, l'urgence du gouvernement : démarrer le déploiement avec la rentrée scolaire, les maternelles quatre ans à tout prix, on ne recule surtout pas. Encore une fois l'orgueil, l'orgueil de la promesse électorale. On verra si on a suffisamment d'inscriptions, on verra après si on a les ressources nécessaires. Tant pis pour l'insécurité de nos tout-petits dans leur première étape, tant pis pour le manque de ressources, tant pis si l'implantation se fait dans une école de plus de 100 élèves, tant pis si personne n'en a véritablement voulu.

Ce qui m'amène au premier des trois thèmes de mon propos : Pourquoi? Une notion essentielle, le pourquoi. Pourquoi les maternelles quatre ans mur à mur? Le gouvernement nous dit : Pour un dépistage précoce. J'ai bien écouté le ministre tantôt. Écoutez, quand j'entends que la raison du pourquoi, c'est qu'il faut voir ce qu'il s'en vient, je trouve ça un peu aberrant, là, comme logique. Alors, on déploie, on y va, pas de plan, un budget qui est défoncé, mais on lance ça parce que vous allez voir qu'est-ce qu'il s'en vient, il y aura un programme révisé, il y aura les duos de feu et il y aura les services en continu, alors que la complémentarité n'est même pas possible. Alors donc, c'est assez questionnant. Pourquoi?

Vous savez, les experts qui ont pu être présents, qu'on a accepté d'inviter en consultations, nous ont dit, puis c'est à juste titre : Le dépistage, ça se fait bien avant quatre ans, il faut considérer, bien sûr, la réalité des tout-petits, il faut agir tôt, il faut regarder tout cela. Mais, bien sûr, aussi, d'autres experts ne sont pas venus, puisqu'ils n'ont pas été invités.

M. le Président, dans mon ancienne vie et dans mon rôle auprès de mon réseau national, j'ai eu plusieurs occasions de travailler avec les différents gouvernements à la persévérance scolaire des jeunes, je me suis investie, pendant plusieurs années, à définir un programme, entre autres, pour les jeunes qui étaient en difficulté, l'accompagnement en persévérance scolaire, j'ai développé des projets locaux, j'ai travaillé avec toutes les écoles secondaires de Laval, et je sais c'est quoi, la qualité de la réussite des enfants quand on travaille en complémentarité, sur la base de bonnes pratiques qui ont fait vraiment la différence. Alors, je sais ce que c'est.

Et, à travers ces expériences de plusieurs années, j'ai retenu une grande leçon de vie, en toute humilité, M. le Président : toute idée, même celle qui peut nous paraître bonne, ne vaut rien si elle ne repose pas sur des besoins exprimés. Dans mes premières années en intervention, j'en ai fait, des erreurs. Je me levais le matin puis je disais : Ça, c'est une bonne idée pour les jeunes. Ça ne partait pas de ce qu'ils m'avaient exprimé et c'était une erreur, ça ne marchait pas. Plus jamais, M. le Président. On ne fait pas ça.

Le gouvernement de la CAQ improvise sans même vérifier si les besoins sont là. Or, quel est le besoin? Oui, c'était nécessaire, on l'a dit, que ce soit implanté dans les milieux défavorisés. Et, quand je parlais tantôt du dépistage qui doit se faire même avant quatre ans, il y a de nombreuses études qui ont démontré la corrélation significative, au niveau de l'éveil à la lecture, qu'un enfant même de deux ans a déjà le goût de toucher un livre, d'entendre son papa, sa maman lui lire une histoire. Quand il a un contact avec le livre, quand on est dans cette corrélation significative dans un milieu plus favorisé, qu'on retrouve évidemment davantage, bien, on vient de diminuer le risque de décrochage scolaire. Alors, il y a des études qui le montrent, mais, encore là, ça a été fait, on y a cru, dans des milieux défavorisés.

Alors, pourquoi, pourquoi étendre? Qui a levé la main pour dire : Moi, j'ai besoin, pour mon enfant, d'une maternelle quatre ans dans mon quartier favorisé, parce que je ne veux pas l'envoyer dans un CPE ou une garderie privée subventionnée? Qui? Qui a dit ça? Je cherche encore.

Certainement pas les parents lavallois, certainement pas les parents lavallois, à qui on a posé la question directement. Le sondage, on en a déjà parlé, 61 % des parents ont dit, clairement, à Laval, qu'ils n'étaient pas en faveur de la maternelle quatre ans. Quand on demande concrètement aux parents lavallois : Quels sont vos choix pour vos enfants, ils choisissent l'ensemble des services de garde à 57 %. Alors, c'est ça que les parents nous disent. Quand on va au sondage Léger paru dans La Presse, la même chose, un constat excessivement important. Quand on pose la question : Quel est le service éducatif à l'enfance qui représente ou incarne le mieux la qualité? 51 % pour les CPE, 6 % pour la maternelle quatre ans. Alors, je suis encore dans le : Pourquoi? Ce n'est pas compliqué, là, les parents préfèrent les CPE. Alors, pourquoi ne pas écouter le besoin des parents?

Et, quand on entend, de la part du ministre de la Famille, qui est pas mal absent, honnêtement, qui brille par son absence dans le dossier, il nous dit : C'est le choix des parents. Bien, le choix des parents, il est clair, là, il ne peut pas être plus clair que ça, le choix des parents, le choix de la population. Non, on ne priorise pas les maternelles quatre ans.

Alors, il n'y a pas trop de mains levées, là, et la réponse du ministre à la question : Pourquoi?, on l'attend... Bien, on a eu des réponses, mais c'est : Voyons voir dans l'avenir. Chose certaine, c'est que, s'il y avait eu beaucoup de mains levées, bien, il y aurait peut-être beaucoup d'inscriptions dans les maternelles quatre ans. Or, la CSQ, la Centrale des syndicats du Québec, constate que ça stagne, qu'il n'y a pas de ruée, malgré le grand blitz publicitaire du gouvernement. Chose certaine, le gouvernement ne nous a pas donné de réponse. Pas de réponse sur les besoins exprimés par rapport à la maternelle quatre ans universelle.

• (11 h 30) •

Mon deuxième thème : la pénurie. Alors, vous vous doutez que je parlerai de la pénurie, parce qu'on est dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre et on lit dans les journaux le manque d'enseignants, le manque d'éducatrices à l'enfance. Et, quand on est sur le terrain, on le constate aussi. D'ailleurs, encore une fois, la CSQ recommandait qu'on s'assure qu'on ait le nombre suffisant de personnel professionnel et de soutien pour agir tôt et de façon concertée. Mais, il y a pénurie. Je le sais, nous le savons, le ministre le sait. D'ailleurs, la preuve qu'il le sait, ce n'est pas pour rien qu'il a déposé son règlement pour aller chercher des éducatrices dans le réseau des services de garde. Parce qu'il faut être capable d'ouvrir ses classes de maternelle quatre ans dans l'urgence. Déshabiller un pour habiller l'autre, on connaît, ou, comme le titre Le Devoir : Les CPE crient au pillage de ressources. Des régions comme l'Outaouais, L'Estrie, la Côte-Nord et Québec ont déjà, M. le Président, de la difficulté à maintenir les ratios à cause des problèmes de recrutement.

En passant, M. le Président, j'espère que vous allez me permettre de vivre un petit moment thérapeutique ici avec vous et un message au gouvernement. J'ai développé une allergie à un mot, le mot «rareté». Arrêtez, s'il vous plaît, de nous dire qu'il ne s'agit pas d'une pénurie mais d'une simple rareté de main-d'oeuvre. Parce que la CAQ ne trouve pas de solution, elle devient Luc Langevin et transforme l'ampleur de la réalité avec la magie d'un autre mot, un mot moins dramatique en pensant diminuer le problème.

Il y a une pénurie de main-d'oeuvre au Québec, pas une rareté. S'il vous plaît, arrêtez. Merci, M. le Président, de me l'avoir permis, ça m'a fait du bien.

Il y a donc le manque de ressources mais il y a aussi le développement des compétences. Les compétences, les éducatrices en services de garde au CPE les ont, ça a été nommé, mais pensons aux nouveaux enseignants, là, qui terminent leurs études en éducation. Il y a eu un article dans LeJournal de Montréal, Dominique Scali, qui a écrit que les futurs profs ne sont pas prêts pour les quatre ans. Danie Poulin-Bérard, qui est étudiante en enseignement à l'Université de Sherbrooke, dit : «Beaucoup de jeunes enseignants sans expérience vont se ramasser en maternelle quatre ans. Certains ont l'impression de ne pas être outillés. Sur les 98 étudiants qui ont répondu à un sondage, 87 considèrent qu'ils n'ont pas suffisamment d'heures de cours et de stages consacrées aux enfants de quatre et cinq ans.» Il faut se soucier de ça également, M. le Président.

Avant d'aborder mon troisième thème, le plus important, le thème du tout-petit, une petite parenthèse qui est nécessaire afin de parler du cadre financier ou l'explosion des coûts. Beaucoup a été dit, beaucoup a été écrit sur la question, mais je pense que les propos de Brigitte Breton dans Le Soleil résument assez bien : Maternelles : au diable la dépense! «Un entêtement coûteux qui ne fournit pas pour autant ce qu'il y a de mieux aux petits Québécois. Si un gouvernement veut ce qu'il y a de mieux pour les jeunes, il ne dilapide pas des fonds publics pour pouvoir dire qu'il a rempli un engagement électoral.»

Alors, parlons maintenant du tout-petit. Pensons à nos coeurs de parents et aux premières étapes du parcours de nos enfants à l'extérieur de la maison. Le gouvernement veut améliorer le dépistage précoce pour nos enfants. Est-ce le ministre s'est posé la question? La maternelle quatre ans est-elle le meilleur moyen pour dépister? On l'a dit tantôt, la réponse, c'est non. Alors, il y a des experts qui sont venus nous le dire... et nous avons aussi un réseau de service de garde qui ne demande pas mieux que de faire partie de la solution avec l'expertise qu'ils ont déjà depuis fort longtemps, une expertise qui est reconnue, qui est enviée.

Alors donc, nos tout-petits, on a parlé tantôt d'agir tôt, bien, il y a les facteurs de protection. Et, quand on regarde ça, les facteurs de protection, bien, on regarde, entre autres, pour l'enfant de quatre ans, c'est très important, ce sont les premières étapes de sa socialisation. Et la relation avec les pairs est importante, mais, je dirais, le lien significatif avec l'adulte, l'adulte qui est l'enseignant, l'adulte qui est l'éducateur, excessivement important. C'est par ce lien-là que commence la construction identitaire du tout-petit. C'est très, très, très important à cet âge-là. Alors, si le lien est signifiant parce qu'il y a un petit ratio, parce qu'il y a un milieu, un environnement qui ressemble un peu à la maison, bien, on est en train de travailler dans un environnement de sécurité pour le tout-petit à lui permettre de tester son lien avec l'autorité de l'enseignant ou l'éducateur et de développer tranquillement sa confiance sa confiance en soi. Ça fait que, quand on parle de réussite éducative à la fin du secondaire, là, puis l'estime de soi, là, ça commence là. Alors, c'est excessivement important.

Et, quand je parle de ça, bien, je parle du ratio, du ratio qui peut aller jusqu'à 17 avec les maternelles, puis je parle aussi évidemment de la grande école, là. Parce que moi, j'ai une dizaine d'écoles primaires, là, dans mon comté. Puis c'est... Il y en a qui sont plus petites que d'autres, mais ce sont des bâtiments imposants, ce sont... Pour des tout-petits, là, c'est toute une adaptation, que de penser qu'ils vont franchir ces portes-là.

Si le Dr Chicoine, et on pourra en reparler, mais, si le Dr Chicoine avait pu s'exprimer lors des consultations, il aurait certainement parlé de l'importance du jeu, du jeu libre pour nos enfants de quatre ans. C'est excessivement important, au coeur, encore une fois, de leur développement. Parce qu'il ne faut pas les empêcher de jouer avec un projet... parce qu'il y a un projet éducatif autour d'eux. C'est beaucoup trop tôt, quatre ans, pour amener cette imposition. C'est ce qu'il nous dirait. Les enfants de quatre ans ont besoin, au besoin, de jouer. Et il n'y a rien dans le développement de l'enfant qui justifie un programme pédagogique si tôt. Alors, ça, c'est très important.

On parle beaucoup aussi de développement cognitif, de développement social. Mais moi, je crois beaucoup aussi au développement moral de l'enfant, parce qu'à l'âge de quatre ans, Kohlbergle dit, dans le développement moral de l'enfant, l'enfant va développer toute sa confiance en soi et toute son identité par rapport à est-ce qu'il est dans une punition par rapport à l'adulte, est-ce qu'il va obéir à l'adulte. Tout ce lien-là d'autorité passe par la définition de ses valeurs, du bon et du mauvais. Et c'est excessivement important. C'est à quatre ans que ça se passe. Et, encore là, je reviens sur le lien significatif avec l'adulte.

Imaginez votre tout-petit de quatre ans, imaginez le choix du parent, le parent qui connaît son quartier, qui parle aux autres parents, qui connaît et entend parler de ses CPE et les milieux de garde de son secteur. Alors, pour les tout-petits, je suis inquiète pour cette journée du 20 août 2019, parce que deux parents sur trois disent non. Moi, je visite les écoles de mon quartier, de mon comté à chaque année. Et, cette année, j'ai fait l'exercice suivant. Je me suis ramenée à il y a quelques années avec mon tout petit garçon et je l'ai imaginé franchir la porte de cette grande école primaire. Et j'ai vécu quelque chose de très difficile, parce qu'il y a la grande bâtisse, il y a le tourbillon dans les corridors, il n'y a aucun point de repère pour lui. Alors, je n'ai pas aimé ce sentiment. Et je me demande comment le ministre, un enseignant, pourrait mettre de côté complètement cette image de nos tout-petits de quatre ans. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres... Oui. Je reconnais le député de Jacques-Cartier. À vous la parole.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci beaucoup, M. le Président. Je partage les réserves de ma collègue de Joliette concernant un plan d'action. Je pense que plusieurs de mes autres collègues ont soulevé le même enjeu. Pourquoi je dis ça? Le ministre, dans ses remarques préliminaires, a parlé d'un meilleur suivi pour les enfants, si c'est pour une «psychologe» ou une «orthologe», les différents services de première ligne d'intervention. Puis on pourrait avoir un projet de loi, mais, sans un plan d'action, c'est difficile, pour moi, de comprendre comment on va être capable de livrer sur ces engagements-là.

Et moi, je pense plus dans des régions. On a déjà beaucoup de trouble dans certaines régions du Québec, des fois à cause de notre géographie. Nous ne sommes pas la ville de New York. Nous sommes plus une province tellement énorme. Je pense que les défis, particulièrement pour la communauté anglophone dans les régions, les gens à Baie-Comeau, sur les Îles-de-la-Madeleine, dans la Gaspésie, sont partie de la même commission scolaire. Quand même si on change une commission scolaire pour un centre de services, c'est des écoles qui sont sur un territoire qui est plus large que la Belgique. C'est vraiment vaste, c'est énorme. Ça présente des défis majeurs.

Et présentement il y a des différentes solutions en place. Je sais, le ministère est là pour essayer d'avoir un meilleur suivi pour les enfants, mais les réalités, il n'y a pas beaucoup des gens et des «psychologes» qui sont hautement bilingues ou quand même unilingues anglophones pour servir certains enfants. Ça prend beaucoup de temps. Des fois, une intervention, ça peut prendre au minimum un an après que quelqu'un a vu un spécialiste. Et ça, c'est juste une réalité pour les anglophones, mais quand même pour les francophones aussi. Et avec un changement d'un projet de loi, ça ne répond pas nécessairement à des défis comme ça. Et ça, c'est pourquoi je suis un petit peu déçu. J'imagine que le ministre puis le ministère travaillent présentement sur un plan d'action. Mais moi, je suis ici pour partager des solutions, parler des solutions, présenter ça dans un projet de loi, quand même.

Mais, pour moi, c'est très important, parce que c'est une réalité de ma communauté puis de la communauté anglophone partout au Québec. On peut quand même regarder sur notre frontière avec Ontario. Des gens aiment d'aller travailler à Ottawa mais de vivre à Wakefield. Et pourquoi pas? C'est une bonne solution pour beaucoup des gens, des fois parce qu'ils sont mieux payés en Ontario, c'est une réalité pour beaucoup de différentes professions, et je parle aussi des francophones qui cherchent aussi de travailler à l'autre côté de la frontière. Mais, des fois, ça met beaucoup de pression sur notre réseau pour certains services parce que c'est juste difficile, des fois, de garder notre talent ici. Mais, quand même, ça va être la même chose pour la maternelle quatre ans, quand même, des interventions, zéro à quatre ans, alors, c'est une préoccupation pour moi.

• (11 h 40) •

Un autre élément, c'est juste, qu'est-ce qu'il va arriver avec le système de CPE? C'est une fierté du Québec. J'ai beaucoup des amis qui ont décidé de déménager, de retourner au Québec, parce qu'ils ont dit : Bien, première chose, des services comme ça n'existent pas dans leur propre province. Ou c'est tellement cher d'avoir ça, alors peut-être c'est mieux de retourner au Québec. C'est sûr, on parle d'une pénurie de main-d'oeuvre, mais il y a aussi beaucoup des emplois qui sont maintenant disponibles pour les gens. Alors, j'ai beaucoup des amis qui ont habité à Toronto, Edmonton, Calgary, Vancouver, qui ont dit : Ah! maintenant, peut-être, c'est le moment de retourner chez moi, plus proche de ma famille. Alors, ça, c'est un côté intéressant. Mais ils sont ici pour les CPE, ils n'ont pas retourné parce qu'on avoir un système de maternelle quatre ans, c'est non, parce que la maternelle... le CPE, le réseau qui existe au Québec est bien connu par les autres Canadiens, par les autres provinces. C'est quand même un système que certains partis au niveau fédéral veulent dupliquer puis peut-être trouver une façon de payer chaque province d'avoir un système comme ça. Alors, c'est vraiment une fierté de notre province, et c'est la raison, les CPE.

Je veux aussi juste parler, c'est intéressant, le ministre a parlé qu'il a visité l'UNESCO, le G7. C'est intéressant qu'on va chercher l'information, les Nations unies. Mais, la semaine dernière, quand les Nations unies étaient ici pour visiter le gouvernement, il était moins chaud et content avec la visite des Nations unies. Alors, juste un petit commentaire là-dessus. Mais, quand même, toutes les visites à l'extérieur, chercher plus d'informations, c'est bien correct.

Mais d'avoir une intervention ici pendant une commission parlementaire où le ministère a payé pour certaines gens de New York qui est, entre guillemets, promaternelles... Mais, quand même, sur notre côté, on est pour les maternelles qui existent, le système existe déjà au Québec. On est contre un système qui est mur à mur, c'est important de rappeler ça. Mais, pour moi, c'est... Juste avoir une visite de quelqu'un de New York... On a quelque chose qui s'appelle Google puis on est capables de faire des recherches pour trouver des études qui sont bien intéressantes. Parce que, oui, New York est pour. New York a quelque chose très intéressant qui se passe là. C'est une ville d'environ 10 millions de personnes. Bien sûr, on veut savoir comment ils ont faire ça, comment ils ont décidé de partager, de trouver plus d'espace.

Mais je peux aussi regarder un État comme Tennessee, puis l'Université de Vanderbilt, parce que, quand même, en Tennessee, il y a présentement un système qui existe de maternelle quatre ans qui est en place depuis plusieurs années. Puis, si je regarde une étude qui a été faite par des professeurs à Vanderbilt, qui est une université bien reconnue partout dans le monde, particulièrement sur le dossier de l'éducation : «Spending more on pre-k doesn't guarantee success. Report...» Pourquoi nous n'avons pas invité des gens de Vanderbilt de présenter leur point de vue? Ça ne dit pas, dans l'étude, que ce n'est pas une bonne idée. Mais la conclusion, c'est un petit peu que, par la première année ou troisième année, les gains qui étaient faits par des enfants dans le système public, bien, après ça, les étudiants sont un petit peu sur le même niveau. Alors, est-ce qu'il y a vraiment un gain pour des enfants à plus long terme? Leur conclusion, c'est : Probablement non. Mais, peut-être, au début, c'est une bonne chose. Mais, quand même, c'est juste un point de vue qui est très intéressant. C'est fait par des chercheurs avec un système qui existe. Mais on peut regarder aussi des exemples qui existent en Texas, qui peut-être dire quelque chose différent. Mais ce n'est pas tout le monde a le même avis.

Alors, je trouve ça, dans une commission parlementaire, de faire... un moment comme ça, devant des caméras, dire : New York a fait ça, alors nous sommes capables de faire la même chose... Mais, quand même, si on regarde des autres exemples qui existent partout dans le monde, des gens peut-être... on a un différent avis. Puis c'est important pour un gouvernement de comprendre pourquoi en Tennessee ça n'a pas fonctionné.

Alors, pour moi, c'est juste important d'avoir toujours un point de vue du monde pour former une bonne décision puis de créer un plan d'action, parce que c'est sûr, quand même, si, avec les autres partis d'opposition, on vote contre le projet de loi, je pense qu'on va perdre le vote, c'est comment ça marche, malheureusement, mais ça, c'est la réalité. Mais, quand même, on est ici pour vraiment participer à des autres discussions pour améliorer le projet de loi puis de présenter notre point de vue, puis d'avoir une meilleure réflexion.

Mais, pour nous, la réussite des enfants, c'est l'objectif qui rejoint, évidemment, l'ensemble des parlementaires, on est tous là pour ça. Mais la question demeure quant à savoir quel est le meilleur moyen pour nous d'arriver là.

Bien, c'est sûr que le projet de loi va modifier la Loi sur l'instruction publique, d'une part, puis la Loi sur l'enseignement privé, d'autre part, et on va parler des autres enjeux, de modifier pour permettre au ministre de l'Éducation, à compter de l'année scolaire de cette année, 2020‑2021, l'organisation, par la commission scolaire, des classes de maternelle quatre ans, peu importe le milieu socioéconomique, alors on va créer vraiment le système mur à mur. De plus, le projet de loi prévoit qu'à une date ultérieure, qui sera déterminée par le gouvernement, l'ensemble de commissions scolaires aura l'obligation d'offrir la maternelle quatre ans. Alors, ça revient un petit peu à tous les arguments de ma collègue de Mille-Îles sur... Ça va mettre beaucoup de pression sur nos commissions scolaires.

Et, quand même, oui, on a vu beaucoup des nouvelles, dans les médias, que certaines écoles francophones ont pris des espaces dans les écoles anglophones. C'est fait. Mais il y a quand même des écoles partout au Québec, des écoles anglophones, qui manquent d'espace aussi. Dans mon comté, l'école primaire de Dorset, quand j'ai visité là, c'était la journée de «storytime» avec des enfants puis j'ai parlé avec la directrice de l'école. Elle m'a dit : Greg, si je dois mettre une autre classe pour les maternelles quatre ans, je vais faire ça où? Dans la bibliothèque, qui est maintenant utilisée pour des autres raisons? On va avoir des périodes où on va faire du «storytime» avec des élèves, avec les enfants. C'est vraiment un espace qui n'est pas... peut-être quand une commission scolaire fait un compte, quelle classe est libre que la bibliothèque, il n'y a pas de classe dedans, mais, quand même, c'est bien utilisé. Ce n'est pas une place où on peut mettre une classe de maternelle quatre ans. Ce n'est pas possible, c'est un espace qui est très important pour nos élèves.

Puis c'est la même chose dans mon comté, pour la commission scolaire francophone. Toutes les écoles francophones sont de plus en plus populaires. Oui, c'est sûr, quand même, dans le West Island de Montréal, il y a beaucoup de francophones, mais il y a beaucoup des parents anglophones qui préfèrent d'envoyer leurs enfants à des écoles francophones. Alors, quand même, j'ai des élus qui disent : Greg, je ne peux pas ajouter des maternelles quatre ans ici, il n'y a pas de place. Désolé, là, peut-être, c'est une bonne idée, mais ce n'est pas possible, pour moi, présentement.

Alors, ça a mis beaucoup de pression sur les différentes commissions scolaires dans mon comté, mais je sais que c'est probablement la même chose sur l'île de Montréal, où, c'est vrai, il y a un manque des espaces, il y a une explosion dans certaines de nos écoles, dans certaines régions de Montréal, où des municipalités ont décidé de bâtir des condos. Il y a une explosion, juste à aller visiter Montréal, différence entre 2008 puis 2018. Le «skyline» de Montréal a vraiment changé et, quand même, des différentes municipalités ont vraiment changé aussi. Les démographiques ont changé. Alors, maintenant, on arrive avec des défis, c'est sûr, mais, en ajoutant un système comme ça, mur à mur, juste pour répéter, c'est beaucoup de pression et je sais que les commissions scolaires vont être créatives, ils vont essayer de trouver des solutions. Ils vont répondre à des demandes... le ministère. Mais, pour moi, ça présente plusieurs inquiétudes, parce qu'il y a beaucoup des besoins dans notre réseau. Puis le ministre a mentionné que, peut-être, si on était capable de diplômer 8 000 personnes de plus, quelque chose comme ça, 6 000 à 10 000... Entre les dernières années, on était capable d'avoir plus des profs, plus des personnes dans le réseau de santé et des services sociaux, c'est toujours possible, mais...

• (11 h 50) •

Oui, c'est un début, la maternelle quatre ans, les zéro à quatre ans, c'est important, mais il y a tout le reste de la vie d'un enfant, d'un élève dans notre réseau. Puis, c'est sûr, au niveau, l'école secondaire, pas tout le monde veut aller au cégep et l'université aussi, ça, c'est juste un autre point à ajouter. J'ai beaucoup des amis qui ont dit : Greg, je sais que tu penses que l'éducation, c'est très important, mais, pour moi, je suis terminé après l'école secondaire, moi, je vais aller travailler directement, là. C'est correct, là. Dans l'industrie de la construction, j'ai beaucoup des amis qui ont créé et formé leurs propres entreprises, puis ils aiment ça, ils adorent ça, ils aiment le travail comme ça, c'est... Leurs parents ont... peut-être un petit peu déçus... mais ils ont dit : Non, ça, c'est pour moi. OK, «fine». Pour moi, pour mes parents, l'éducation, c'était une priorité, pour toutes mes soeurs et pour moi. Mais, quand même, juste sur le point-là, pour moi, quand moi, j'étais plus jeune, c'était vraiment à l'école secondaire que j'ai décidé : Ah! peut-être l'histoire et la politique, c'est quelque chose d'intéressant. Et c'était vraiment là que j'ai décidé que je veux faire quelque chose avec ça, je veux être... Si c'est dans la fonction publique, un politicien, n'importe quoi, je dois commencer de prendre mes études de sérieux, parce que je n'étais pas le meilleur étudiant dans le monde. Mais c'est juste de rappeler que, quand même, il y a beaucoup des défis, puis la réussite scolaire, c'est sûr que ça commence quand même à quatre ans, mais il faut avoir un bon accompagnement des enfants jusqu'à la fin de l'école secondaire, et quand même dans le niveau de cégep, ou si c'est une formation professionnelle, etc.

Alors, je ne suis pas sûr si c'est juste avec la maternelle quatre ans qu'on est capable de bouger ce taux de diplomation de niveau du secondaire des élèves du Québec. Ça va prendre plusieurs autres solutions, c'est un gros défi pour Québec. Mais, en même temps, ça ne dit pas que c'est 6 000 à 10 000 personnes... ne travaillent pas présentement au Québec non plus. J'imagine que, quand même, si tu n'as pas un diplôme, vous êtes capables de travailler dans le marché présentement, ou quand même d'être un bon entrepreneur. Alors, c'était juste un petit ajout.

Il y a quelque chose qui est très intéressant, et ça revient un petit peu... Ce n'est pas juste pour les anglophones, mais pour les gens qui habitent en région, c'est la transportation. Et, quand même, pour un petit enfant de quatre ans, est-ce que d'avoir un enfant de quatre ans sur un autobus, c'est légal? Est-ce que c'est une bonne chose? On parle des enfants qui sont des différentes grandeurs, tailles, et tout ça, alors c'est certain juste... préoccupation. J'espère qu'on va avoir une bonne chimie entre les lois qui existent au Québec au niveau le transport, puis, avec le projet de loi, pour s'assurer que nos enfants sont bien protégés, puis il n'y a pas de pression pour les parents de mettre leurs enfants sur des autobus.

Mais c'est un petit peu sur les coûts. Je sais, avec la communauté anglophone, pour certaines communautés, c'est une heure ou deux sur l'autobus par jour pour aller à l'école puis de retourner chez eux, et ça, ce n'est pas encore quand on parle de défis pour garder nos enfants dans le réseau. Pas chaque ado veut vraiment rester sur un autobus pour deux heures par jour, ils vont trouver quelque chose plus intéressant. Ça, c'est un gros défi qui est énorme, qui est représenté par le fait que la communauté est vraiment un petit peu peu partout sur le territoire du Québec. Mais, quand même, est-ce qu'on va envoyer des élèves de quatre ans sur les autobus, ils vont rester là pour deux heures? C'est des questions à poser, parce que, si c'est lié avec des commissions scolaires, je ne vois pas vraiment des autres autres solutions. Si c'est O.K., bien, choisir un CPE qui est francophone pour les anglophones, est-ce que tous les parents sont... Est-ce que mon enfant est vraiment prêt pour ça?

Alors, encore, je soulève juste des enjeux. Parce qu'il y a ça, puis, quand même, on a vu un communiqué de presse sur les coûts additionnels. Excusez-moi, c'est juste ici. C'était la Fédération des transporteurs par autobus, et, quand même, eux autres ont estimé que ça coûtait environ 27,5 millions de dollars supplémentaires pour le réseau de transport pour les élèves, pour les maternelles quatre ans, d'envoyer nos enfants là. Alors, ça, c'est une préoccupation pour moi, c'est un coût additionnel de 27,5 millions de dollars annuel. Et, peut-être, ça, c'est mieux dépensé dans des programmes de formation professionnelle, je ne sais pas, on est ici pour discuter ça.

Alors, pour moi, M. le Président, je n'ai pas des autres commentaires, je vais continuer de collaborer puis discuter, présenter des amendements dans une façon positive cette semaine, mais j'ai beaucoup des réserves et préoccupations avec le projet de loi dans sa présente forme. Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le député. S'il n'y a pas de motion préliminaire, nous allons immédiatement... Donc, Mme la députée de Saint-Laurent, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation et d'éducation supérieure, la parole est à vous.

Motion proposant d'entendre M. Jean-François Chicoine,
pédiatre à l'Hôpital Sainte-Justine

Mme Rizqy : Il y a certainement... Merci beaucoup, M. le Président. Il y a certainement une motion préliminaire. Alors, M. le Président, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission de la culture et de l'éducation tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans, des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende Dr Jean-François Chicoine, pédiatre à l'Hôpital Sainte-Justine.

Le Président (M. Jacques) : Je vais suspendre les travaux.

(Suspension de la séance à 11 h 56)

(Reprise à 12 h 2)

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Saint-Laurent et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'Éducation supérieure, la parole est à vous pour une durée maximale de 30 minutes.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Je suis étonnée déjà que ce soit moi qui reprenne le temps de parole dans les motions préliminaires, étant donné qu'on parle du projet de loi qui semble être le projet de loi le plus important du gouvernement. Et il y a présentement six députés de la partie gouvernementale, et pas un n'a eu des remarques préliminaires sur le projet de loi le plus important, qui a un impact dans chacun de leurs comtés, qui a un impact dans chacune de leurs écoles, qui a un impact dans chacun de leurs services de garde, dans chacun de leurs CPE sur leur territoire. Et pas un n'a cru bon de nous répondre, alors que tant moi que mes collègues ainsi que ceux des partis des autres oppositions ont émis énormément de questions, de préoccupations. Puis pas un là-dedans n'est capable de dire : Oui, oui, on a une réponse. Oui, on a des solutions. Oui, nous autres aussi, on a fait notre devoir cet été. Donc, je prends acte que, malgré tous nos questionnements, il n'y a pas de solution de la partie gouvernementale. Puis ça, je trouve ça un peu décevant.

Ce matin, comme tout le monde, le «hot room», on l'a suivi et on voyait le ministre qui parlait du déploiement des maternelles quatre ans, qui disait à quel point que tout allait bien aller. J'avais vraiment l'impression d'avoir quelqu'un devant nous qui voulait nous vendre un projet puis qui, évidemment, balayait du revers tout questionnement, comme si un questionnement était une opposition, alors que, lorsqu'on veut bonifier quelque chose, évidemment, il faut poser des questions, puis, évidemment, on veut entendre les bonnes personnes.

Ce matin, je ne peux pas répéter exactement ce que le ministre de l'Éducation a dit, mais, lorsqu'on lui a posé la question à savoir pourquoi il a fait venir, à grands frais, des experts de New York, il a regardé sa montre puis il a dit : Ah! il faut je retourne en commission, là, l'étude détaillée, l'étude article par article va débuter, il faut je retourne en commission. Et les journalistes se sont montrés insistants, avec raison, ils ont dit : Non, non, c'est une question importante. Vous n'avez pas un problème à faire venir ici des experts internationaux à grands frais? Et là la réponse, et je paraphrase, c'était : On n'a pas le luxe de ne pas entendre des experts internationaux. Donc : On n'a pas le luxe de ne pas entendre des experts internationaux. Je répète ce que j'ai dit tantôt, le terme «experts», ici, moi, je le mettrais entre guillemets. Les gens qu'on a entendus ne connaissaient même pas notre réseau de petite enfance. CPE, là, quand on leur en a parlé, ils ont regardé, là, ils froncé les sourcils, de même, ils ont dit : Pardon? De quoi vous parlez? Et on leur a expliqué. CPE, centre de la petite enfance. C'est très évocateur. Centre de la petite enfance.

Alors, ces experts-là ne connaissaient pas notre réseau québécois, alors que, nous, pendant des semaines, on a martelé qu'il y avait des experts qu'on voulait entendre. On nous a dit non pour Dr Drouin puis on nous a surtout dit non pour Dr Chicoine. Pourtant, M. le Président, Dr Chicoine, là, ce n'est pas n'importe qui, hein? «Jean-François Chicoine, pédiatre, professeur agrégé de clinique, département de pédiatrie de l'Université de Montréal. Jean-François Chicoine est pédiatre au CHU Sainte-Justine.» Ça, M. le Président, c'est l'hôpital où le ministre délégué de la Santé travaillait. Donc, c'est des ex-collègues. J'aurais cru bon que le ministre délégué de la Santé aurait plaidé en faveur d'entendre son ex-collègue, ils travaillaient au même endroit. «Et professeur agrégé au département de pédiatrie de l'Université de Montréal.» Ça, M. le Président, l'Université de Montréal, c'est la plus grande école universitaire au monde dans le réseau francophone. Ce n'est pas n'importe quelle université, hein, c'est la nôtre, on a de quoi être fiers. «Tout en pratiquant la pédiatrie d'urgence, notamment dans la sphère des évacuations sanitaires, il débute une carrière de communicateur scientifique.» Communicateur scientifique. Ça, M. le Président, c'est exactement ça qu'on a envie d'entendre, des experts. Et, en plus, ceux qui savent vulgariser... J'y reviendrai tantôt, là, mais, vous savez, Jean-François Chicoine, le docteur... M. Chicoine est très souvent appelé à commenter à la radio, parce qu'effectivement il y en a qui sont super bons dans la recherche, mais ce n'est pas nécessairement les meilleurs pour venir vulgariser, à sa forme la plus simple, des notions importantes et beaucoup plus complexes. Mais lui, là, il a cette facilité.

Alors, «dans les médias écrits et électroniques le conduisant à apprivoiser nombre de sujets concernant l'enfance et l'adolescence», exactement ce que nous, aujourd'hui, on veut parler. L'éducation, hein, on sait, notre 0-21 ans, voire le doctorat, pour nous, ça nous préoccupe, puis ça commence tôt. Alors, «il s'intéresse de très près à la santé des enfants du monde. Il initie ensuite différents projets de santé internationaux dans plusieurs orphelinats du monde, notamment au Vietnam, avec des Terre des hommes Canada.» Donc, pour le côté expert international, non seulement on a un expert ici, de chez nous, M. le Président, bien de chez nous, au Québec, en plus de ça, il parle français, pas de problème de traduction. Mais, plus que ça, ce matin, le ministre de l'Éducation disait : On n'a pas le luxe de ne pas entendre les experts internationaux. Bien, ça tombe bien, Dr Chicoine, il a même un volet international. C'est un tout-inclus, un clé en main. Un expert du Québec, là, qui non seulement comprend les particularités du Québec, mais, en plus de ça, il est tellement bon qu'à l'international ils le veulent. C'est peut-être, au fond, notre Yoshua Bengio de la petite enfance. Alors, ce serait intéressant de l'entendre.

Continuons, parce que son CV, M. le Président, est tellement long, parce que, justement, ça fait longtemps qu'il s'intéresse à l'enfance, la petite enfance puis l'adolescence. «Signataire de plusieurs publications, plus récemment dans le domaine de l'attachement — tantôt, ma collègue la députée de Fabre en parlait de l'attachement puis à quel point qu'il faut développer ça le plus tôt possible chez les jeunes enfants — de la famille, des services de garde à l'enfance, de l'abandon, de l'adoption et de la médecine de voyage.» Je reviens là-dessus : de la famille, des services de garde à l'enfance, et de l'abandon, puis de l'adoption. Vous voyez comment tout est dans tout? Ça, c'est de la complémentarité. Donc, on a quelqu'un qui peut nous parler autant de la maternelle quatre ans, du préscolaire ainsi que de la famille et des services de garde. Il connaît les deux, c'est intéressant.

• (12 h 10) •

«Auteur de livres, de scénarios, d'éditoriaux radio, de séries télévisées ou sur le Web, ses sujets de prédilection touchent à l'interface entre la culture et la médecine, à l'éducation pour la santé, au développement, aux comportements, à la scolarisation des enfants, à l'impact des NTIC sur le cerveau, aux anti-vaccinaux, au trafic de bébés — intéressant — aux migrations ainsi qu'aux droits des enfants et des ados de la planète.» Vous comprendrez qu'ici, là, il y a des affaires qui nous importent, là : au développement et aux comportements, à la scolarisation des enfants. Développement, comportements. On sait que dans le programme Agir tôt, là... on est d'accord, on veut davantage d'Agir tôt. Agir tôt dans quoi, exactement? Troubles d'apprentissage, troubles de comportement. C'est pas mal son domaine, là, il nous le dit.

«En 2002, il devient d'ailleurs le cofondateur de la société Le Monde est d'ailleurs, qui se porte à la défense de la santé des droits des 0-18 ans.» Il se porte à la défense des 0-18 ans. Et ça, je le répète, puis savez-vous pourquoi, M. le Président? Parce qu'on n'arrête pas de parler des quatre ans. Mais la vie ne commence pas à quatre ans. À quatre ans, là, il y en a plein, des experts, qui ont dit que ça commence à être tard, là, quatre ans, pour commencer à s'intéresser aux enfants. 0-18 ans. Alors là, ici, c'est important. Parce qu'agir tôt, pas à quatre ans. On va y revenir tantôt, parce qu'il a fait, d'ailleurs, une entrevue là-dessus, là. À partir de quand qu'on peut vraiment dépister et venir en aide à un enfant? On va y revenir, M. le Président, mais j'apporte ça à votre attention, quand même, dès maintenant. Alors, à la défense de la santé des droits des enfants de 0-18 ans et de leurs familles. Ma collègue, la députée de Fabre, elle l'a dit : On pense beaucoup, beaucoup aux enfants, mais il faut aussi se rappeler qu'il y a des parents.

Ma collègue de Mille-Îles, maman de trois enfants, commissaire et présidente de commissions scolaires, elle-même, elle a quand même de l'expérience. Elle dit : N'oubliez pas, c'est la rentrée des classes pour les enfants, mais c'est aussi la rentrée des classes pour les parents. Alors, quand on parle de choix, là, pour les enfants, il faut aussi se rappeler que c'est d'abord le choix aussi des parents. Et, pour parler de véritables choix, il faut avoir exactement l'heure juste. Plus tard, on va vous présenter, M. le Président, un tableau, hein, qui, vraiment, vulgarise les différentes options pour les parents dans le choix de maternelles quatre ans, services de garde ou CPE. Mais revenons toujours à notre expert.

Ici, «au travers de publications, de formations professionnelles et de conférences interdisciplinaires au public qui, au Québec et en Europe, font d'office d'écoles de parents...» Au Québec, en Europe. Ça tombe bien, M. le Président, le premier ministre a vanté le système de la France. Même s'il n'a jamais mis les pieds dans une école française, il l'a quand même vantée. Mais on a un expert, Dr Chicoine, bien, qui est allé voir aussi ce qu'il se passe en Europe. Puis, d'ailleurs, dans ses écrits, il en parle. Parce qu'en France... c'est vrai qu'en France, il y a ce qu'ils appellent la maternelle trois ans, mais il y a aussi... regardez ce qui se passe ailleurs. La Finlande, école à sept ans. Et il en parle dans une autre entrevue, de ces deux modèles bien différents mais propres à leur réalité à eux, pas nécessairement propres à la réalité québécoise. Ça aussi, j'y reviendrai, M. le Président. «Au service de maladies infectieuses et de la pédiatrie, il travaille à l'étage des maladies infectieuses à la clinique de consultation en adoption et en santé internationale, très certainement la plus grande expertise de la francophonie en adoption nationale et internationale, au département de pédiatrie. Il se passionne pour l'histoire de l'enfance de la pédiatrie, pour celle de Sainte-Justine, comme institution.»      Savez-vous, moi, plus que je lis, là, sa biographie, puis je n'ai même pas terminé, non seulement je trouve qu'il a l'air d'un expert, mais j'ai même de l'affection pour cet homme qui consacre toutes ses études pour nos enfants et qui a clairement long à dire. Alors, j'aimerais ça avoir les lumières du Dr Chicoine. Et, d'ailleurs, M. le Président, c'est un expert qu'on voulait avoir, un expert de la santé.

Tout ce qu'on fait aujourd'hui... Tantôt, on l'a dit, le pourquoi... C'est quoi, l'objectif de tout ça, là? Bon, on connaît l'objectif de la partie gouvernementale, le chiffre magique. On veut, cette année, 250 classes, puis, à la fin de la journée, quelque part dans quatre ans, on va avoir nos 5 000 classes, n'importe où, n'importe comment, mais on va y arriver, là, c'est un chiffre. Mais, sous-jacent à ça, là, il y a un ministre de la Santé, là, un ministre délégué à la Santé qui a dit : Moi, là, ma préoccupation, c'est agir tôt. Puis ça, là-dessus, là, on le croit, on sait, on ne doute pas de sa sincérité lorsqu'il dit qu'il veut agir tôt.

M. le Président, mon tableau va vous rappeler, le ministre délégué, lui, son budget est très mince, là. On parle de 88 millions, alors que le ministre de l'Éducation, lui, pour les maternelles quatre ans, juste pour le béton, là, on est rendu à 2 milliards, puis, pour le reste, on ne sait pas, il y a un gros point d'interrogation. Puis ce n'est pas de l'humour que je fais, le gros point d'interrogation, c'est réel. Il y a un gros point d'interrogation parce qu'on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va. Alors là, ça suffit. Est-ce qu'on peut avoir de l'aide pour nous éclairer, pour savoir comment on peut déployer non seulement des maternelles quatre ans, où est-ce qu'on devrait les déployer, comment on fait pour bien identifier des besoins, comment aussi on fait pour améliorer l'indice de défavorisation pour voir exactement comment qu'on peut avoir un indice de défavorisation qui est un reflet juste de la réalité terrain?

Par la suite, on aimerait ça que, dans le programme Agir tôt, bien, il y ait un volet santé. Puis le volet santé, bien, je pense que Dr Chicoine peut être la personne tout à fait pertinente pour venir nous éclairer.

Puis, M. le Président, Dr Chicoine, vous comprendrez qu'il a quelques années de service. Hommage 30 ans du service du CMPD Sainte-Justine en 2016. Là, je sais que, CMPD, on ne sait pas trop c'est quoi, mais c'est association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens. Donc, il a déjà 30 ans de service, plus de 30 ans. Il a eu aussi le Prix d'excellence David Kirk, Le Monde est d'ailleurs, Conseil d'adoption du Canada, hommage de l'Unicef Canada 2002. Et là je pourrais continuer, mais, écoutez, il en a, hein, des médailles, médaille du 150e anniversaire de l'Université de Montréal, hommage d'Unicef Québec en 1990. Bref, écoutez, il a même eu un prix Gémeaux, là. En plus de ça, je ne sais pas quel argument que je peux donner davantage pour faire entendre le Dr Chicoine. Je me dis que, s'il est assez bon pour Deux hommes en or, Radio-Canada, il doit être assez bon pour nous, les députés. Mais j'aimerais continuer, parce que la liste de ses publications sur son site... il en a plus d'une trentaine, puis il ne les a pas toutes mises, M. le Président, parce qu'il en a écrit beaucoup, des textes, puis il a écrit aussi des textes scientifiques.

Mais il y a une réalité qui nous rattrape énormément au Québec. Et, là-dessus, c'est pour ça qu'on a aussi de son aide. Vous savez, il parle beaucoup d'enfants, d'adoption. Mais vous savez qu'on a connu une crise de migrants. On a eu... Puis planétaire, hein? On a reçu énormément de réfugiés. Moi, je peux vous dire qu'à Saint-Laurent des réfugiés syriens, on en a accueilli énormément. Et ça a beaucoup changé la donne dans nos écoles. Le portrait a changé. Et c'est important d'avoir, justement, un expert qui peut nous faire un meilleur reflet de la société actuelle du Québec. Comment qu'on fait aussi pour avoir les meilleurs soins, les meilleurs services pour les nouveaux arrivants, ceux qui ont aussi connu la guerre dans leur pays d'origine? Ça, c'est important d'avoir ça aussi comme expertise, parce que les maternelles quatre ans, ça ne sera pas uniquement, là, pour ceux qui sont nés ici, au Québec. Il va avoir là-dedans beaucoup de jeunes enfants qui vont arriver, qui sont issus de l'immigration, qui ont connu d'autres réalités bien différentes de celle du Québec. Et ça aussi ça demande une adaptation puis fort probablement d'autres outils. Alors, c'est pour ça qu'on a besoin des lumières du Dr Chicoine, entre autres choses.

Mais Dr Chicoine a aussi écrit TDAH : réflexions et conseils. Bien, il me semble que ça, c'est important, le TDAH. On en parle partout. Il a aussi écrit Reconstruire le cerveau des enfants blessés par la vie quotidienne. Tantôt, là, ma collègue en parlait, toute la question des enfants de la DPJ. Ça, c'est... On sait qu'il y va avoir une commission. Ça ne sera pas ici. On sait tout ça, mais Agir tôt, ça fait partie du thème de cette commission, la maternelle quatre ans. Donc, on est ici, à l'étude détaillée article par article. Puis, avant de commencer à faire ça, je pense qu'on a besoin d'avoir un portrait global de la situation et on a besoin d'avoir au moins, là... Puis j'ai d'autres docteurs, évidemment. Si vous voulez entendre Dr Drouin, je vais être contente, là. Si vous voulez que je dépose une autre motion préliminaire pour Dr Drouin, ça va me faire plaisir, mais, si on est capable de s'entendre avec le ministre de l'Éducation pour avoir au moins Dr Chicoine venir nous éclairer, je serais très contente, puis ça montrerait une certaine forme d'ouverture de la part du ministre, parce qu'on considère que Dr Chicoine, notre expert en santé, on parle beaucoup de neuroscience, et tout ça, il est primordial, pour nous, avant d'aller de l'avant d'avoir au moins un seul expert en santé qui soit entendu. Parce que, là, on n'en a pas eu. Et tout, tout ce qu'on fait, c'est pour aider nos enfants, outiller aussi des enseignants, outiller aussi les éducatrices, outiller tout le personnel de soutien et les professionnels de soutien. Et, pour faire cela, il faut savoir de quoi qu'on parle, de quoi qu'on jase, nous autres. Et là, ici, on ne sait toujours pas.

• (12 h 20) •

Je me permets quand même de lire quelques passages de ses moments à la télévision ou à la radio, parce qu'il en a fait énormément, M. le Président. Je vous rassure tout de suite. Je vous regarde. Je ne vais pas tout les faire quand même, mais des passages que je pense qu'ils pourraient au moins nous éclairer. Il dit la chose suivante : «"La maternelle quatre ans : il faut plutôt investir dans les CPE", dit le pédiatre Jean-François Chicoine.» Ça, ça date du 27 novembre 2018, donc avant même le dépôt du projet de loi actuel, qui a été déposé, on se rappelle, en février dernier. «"Les enfants aiment jouer. Il ne faut surtout pas les empêcher avec un projet trop éducatif ou, je dirais, trop scolaire", affirme le pédiatre Jean-François Chicoine, qui s'interroge sur la pertinence de généraliser la maternelle à tous les enfants de quatre ans dès 2020, comme le veut le gouvernement caquiste. "Rien, pour ce qui est du développement de l'enfant, ne justifie un programme pédagogique si tôt", dit le spécialiste, qui penche plutôt en faveur d'un investissement majeur dans les centres de la petite enfance. Selon Jean-François Chicoine, les CPE, bien qu'imparfaits, font déjà le travail en matière d'apprentissage auprès des enfants de quatre ans. Le gouvernement caquiste devrait donc dédier les cordons de la bourse et mettre ça dans ses structures déjà existantes plutôt que de vouloir étendre la maternelle à tous les enfants de quatre ans. "À cet âge, l'éducation devrait être axée sur l'imagination et le jeu", fait savoir le pédiatre au CHU de Sainte-Justine et professeur agrégé. Selon lui, un enfant n'a pas besoin de savoir calculer à l'âge de quatre ans. Il a plutôt besoin de créer, de s'échapper, car c'est par l'émotion que se construit la cognition. "Des groupes d'enfants, à cet âge-là, vont hyperbien se développer à partir du moment où ils ont des jouets, à partir du moment où ils sortent en excursion en forêt ou ils voient des gens dans la rue qu'ils vont apprendre à imiter. Tout ça, c'est du matériel d'émerveillement pour les enfants, et c'est avec ça qu'ils vont faire grandir leur intelligence. Ça se fait actuellement dans les CPE et ça se fait dans les CPE d'excellente qualité."»

M. le Président, c'est un court passage. Je pourrais continuer, mais je n'aurai malheureusement pas le temps de tout, tout, tout répéter ce qu'il a dit. Mais j'aimerais juste terminer dans cette entrevue. Il dit aussi la chose suivante : «Le Dr Chicoine n'épouse pas non plus l'argument employé par le gouvernement selon lequel le dépistage des enfants en difficulté d'apprentissage s'effectuera plus tôt, compte tenu du fait qu'ils fréquenteront la maternelle dès l'âge de quatre ans. "La plupart de ces troubles sont soit détectables avant l'âge de quatre ans, soit un peu plus tard", souligne le spécialiste de l'enfance.» Donc, on a un docteur, M. le Président, qui dit la chose suivante : En d'autres mots, le dépistage, généralement, il se fait bien avant quatre ans, mais, par la suite, là, c'est tout le temps. Puis ça, c'est important, là, de le répéter, ce n'est pas juste à quatre ans.

Et là pourquoi je le répète puis je le martèle? C'est parce qu'on met tellement d'énergie, en ce moment, sur un objectif du gouvernement, sur une promesse électorale du gouvernement qu'on perd de vue le véritable objectif que tout le monde ici partage: le dépistage précoce le plus tôt possible. Et, je le répète, c'est là le problème, c'est exactement sur ce tableau-là qu'on voit, de façon éloquente, tout le problème. Le budget, là, du ministre délégué à la Santé, là, mérite d'être revu à la hausse, et, on s'entend, là, les cordons peuvent être déliés, il y a énormément d'argent, on le sait. Mais le ministre de la Famille doit avoir les mêmes moyens. En ce moment, c'est que le premier ministre a dit au ministre de l'Éducation, puis je comprends, là, pourquoi il est content, il a dit : Ça coûtera ce que ça coûtera. En d'autres mots, il a signé le chèque en blanc puis il a dit : Vous pouvez aller... Au diable la dépense, allez-y. Mais nous, on ne veut pas que ça soit fait n'importe où, n'importe comment. Alors, c'est pour ça qu'on a besoin d'éclairage d'un vrai spécialiste, d'un vrai expert et, en plus, un professionnel de la santé.

Dessine-moi un dimanche, 17 février. Là, on tombe juste, juste après le dépôt du projet de loi sur les maternelles quatre ans. «"Dr Chicoine", l'animateur pose d'entrée de jeu — j'imagine que la personne qui a son cellulaire allumé va pouvoir l'éteindre — "juste une vérification rapide, Jean-François. En France, la maternelle est obligatoire dès l'automne 2019 à l'âge de trois ans. En Finlande, qui est supposément un modèle éducatif d'école obligatoire... commence à sept ans, et les enfants peuvent fréquenter la maternelle à six ans. C'est vraiment deux extrêmes. De votre point de vue de pédiatre, est-ce qu'il y a un modèle idéal? Parce qu'il y a quelqu'un... Parce qu'il y a un des deux qui est un modèle idéal."» Donc, au fond, il demande : Entre la Finlande puis la France, lequel est meilleur? Le Dr Chicoine répond là-dessus : «Je ne vais pas toujours vous citer la Scandinavie, mais c'est sûr qu'on s'en rapproche. Un enfant, jusqu'à l'âge de sept ans, il a besoin de jouer, de jouer, de jouer. Alors, vous voyez un peu de quel côté je me situe.» Donc, en d'autres mots, le Dr Chicoine, il n'est pas un fan de la scolarisation hâtive. «Un enfant a besoin d'abord de se faire ou de se refaire, selon les cas, émotivement pour développer une estime de lui-même, l'estime de soi.»

Ma collègue, qui est la députée des Mille-Îles, est aussi porte-parole en matière d'intimidation. Tantôt, elle vous l'a dit, dans un autobus, par exemple, nos tout-petits... Puis là, M. le Président, là, ça vaut la peine que je me lève. Moi, je fais 5 pi 9 po, hein, puis savez-vous quoi? En sixième année, je faisais déjà 5 pi 7 po. Un enfant, là, de quatre ans, nos petits bouts de chou, là, ça arrive là. Alors, imaginez, 5 pi 7 po, à peine, là... c'est petit, là. C'est très petit. Donc, même si... un enfant comme moi, en sixième année, qui fait déjà 5 pi 7 po, de par ma posture, en partant, là, je peux intimider, sans le vouloir, un enfant. Puis il y en a avait déjà, là, plus grands que moi, là. Moi, je jouais au basketball, donc vous comprenez que tous mes amis étaient déjà très grands. Donc, c'est sûr qu'on peut, juste par le physique, intimider un enfant.

Tantôt, ma collègue de Fabre parlait de la grande école puis elle s'est remise dans la peau d'un parent qui va conduire son enfant à l'école avec un petit bout de chou de quatre ans. Puis, c'est vrai, il y a des écoles qui ont plus de 100 élèves. Moi, j'en connais qui ont 1 000 élèves à l'école primaire, M. le Président, 1 000. Ça, là, ce n'est pas une grande école, c'est une maxiécole. C'est grand, c'est vraiment grand. Mais, dans l'autobus, pensez-y. L'intimidation, ça peut été n'importe où puis ça peut être direct ou indirect.

Alors, c'est pour ça, là, que, quand on parle des milieux de vie de ces enfants, oui, on ne parle pas juste de la classe, on parle du milieu au complet. Et, on le sait, on a un tableau qui compare les maternelles versus les CPE puis les services de garde. En CPE, c'est maximum 80, donc vous comprenez que le milieu de vie, il est totalement adapté. Pas juste la classe, le milieu de vie au complet.

Mais je vais continuer à parler de l'entrevue. «Ensuite, le besoin d'apprendre, surtout vers l'âge d'à partir de trois ans, trois ans et demi, quatre ans, à bien dire, je dirais, se comporter avec les autres en situation de conflit, en situation d'interaction dans le jeu, et tous, donc, tous ces éléments de sociabilité, et tout commence... à les apprendre là ou les réapprendre autrement lorsqu'il y a des mauvaises... dans sa famille.

«Ensuite, il doit avoir du temps, mais au moins trois heures par jour de jeu libre. Trois heures par jour, c'est beaucoup. Et c'est de voir à quel point c'est beaucoup de temps, on a l'impression qu'il ne fait rien, et où l'adulte doit parfois initier les jeux, surveiller de près ou de loin, mais accompagner simplement l'enfant dans la découverte de son imaginaire.» En fait, il est en train de dire : Laissez les enfants être des enfants.

«Ce n'est qu'à partir de ces éléments-là que l'enfant va se construire une imagination puis une capacité de se sortir éventuellement de ces adversités de la vie. Deuxièmement, il va se construire ce qu'on appelle une intrasubjectivité, c'est-à-dire une capacité de penser, de mettre et ses émotions et ses compétences cognitives ensemble. Et, troisièmement, et ça, c'est très important, c'est aussi là qu'il va développer ce qu'on appelle son intersubjectivité, donc sa capacité non seulement d'avoir des mots pour le dire, mais aussi d'avoir une manière d'adresser son langage à quelqu'un d'autre, une pragmatique du langage, et les éléments qui sont effectivement très importants à développer, surtout rendu en quatrième année.

«Mais il n'y a absolument rien de ce que j'ai lu, de ce que mes confrères, la plupart des confrères pourraient me suivre là-dessus, là-dedans, qui dit qu'une maternelle quatre ans pourrait faire une différence par rapport — et là c'est très important, ce n'est pas moi qui parle, hein, c'est toujours le Dr Chicoine — à un CPE de bonne qualité, précoce dans les écoles des enfants vulnérables et sur du long terme. Donc, c'est une approche développementale qu'il faut voir à long terme pour la société québécoise, c'est-à-dire un enfant qui, dans le besoin... mais c'est à partir de l'âge d'un an, sur trois ans au moins, qu'il faut l'accompagner, sinon deux à trois ans, et non pas avec un coup de baguette magique, tout d'un coup, là, à quatre ans.»

M. le Président, oui, il y avait la conférence de presse ce matin, dans le «hot room», du ministre. Mais, juste avant, moi, j'y étais avec un courriel qui a été envoyé par le ministère de l'Éducation... pardon, le cabinet du ministre, qui a été envoyé le 13 août dernier. Et on posait la question : Est-ce qu'on peut mélanger des enfants de quatre ans avec des enfants de cinq ans? Donc, la maternelle quatre ans, maternelle cinq ans, faire une seule classe. Puis la réponse était oui.

Alors, la question suivante de l'animateur, elle est directement en lien avec ça. L'animateur posait la question suivante : Quelle est la différence entre un enfant né en septembre, qui est au seuil de ses quatre ans au moment d'entrer à la maternelle, et un enfant qui aura presque cinq ans, par exemple? Là, on n'est même pas dans le mélange, là. On est dans la même classe où est-ce que, par exemple, il y en a un, là, qui est né plus tôt dans l'année, puis l'autre qui va avoir son quatre ans juste après, là. Donc, ils ont environ 11 mois et demi de différence, donc presque un an de différence. Dr Chicoine, sa réponse : «Elle est catastrophique pour les normes. À l'âge de six ans, un petit garçon a à peu près facilement entre six mois et un an de moins de maturité qu'une petite.» Ça, c'est en général, là. Et cette...

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Saint-Laurent, je dois vous interrompre.

Mme Rizqy : Ah! il ne me restait pas 2 min 34 s? M. le Président... Ah!

Le Président (M. Jacques) : On suspend les travaux jusqu'à...

Mme Rizqy : Bien, le consentement avait si bien parti, on pourrait finir mon deux minutes.

Le Président (M. Jacques) : La commission va suspendre les travaux jusqu'à 14 heures précisément. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 14 heures)

Le Président (M. Jacques) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture et de l'éducation reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans.

Je demande le consentement pour que le député de Saint-Jean remplace le député de Vanier-Les Rivières. Consentement?

Mme Rizqy : ...évidemment consentement, et on espère que le député se porte bien. Puis évidemment, on pourra toujours compter sur l'opposition officielle pour bien collaborer de part et d'autre.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée de Saint-Laurent. Lors de la suspension de nos travaux, nous étions rendus à une motion préliminaire présentée par la députée de Saint-Laurent. Mme la députée, il vous reste 2 min 25 s.

Mme Rizqy : Quel plaisir de vous retrouver, M. le Président. Alors, j'espère que la période du lunch a porté fruit et que le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur a l'intention, évidemment, de donner suite à cette demande, à notre remarque, car, évidemment, le Dr Chicoine, pour nous, c'est un expert. Et ce n'est pas juste un expert pour les partis d'opposition, hein? C'est un expert reconnu de par ses pairs. Et on croit sincèrement qu'avant d'aller de l'avant à toute vitesse dans un projet aussi important, important parce qu'il est question ici de la santé de nos enfants, et aussi question de dépister le plus tôt possible et de se doter des meilleurs outils, des meilleures ressources... Et, quand j'entends le ministre de l'Éducation qui dit qu'on n'a pas le luxe de se priver d'experts internationaux, j'en suis, mais on n'a pas non plus le luxe de se priver d'experts locaux. Alors, avant d'aller à l'international, toujours mieux de regarder qu'est-ce qu'il se passe, ici, chez nous, au Québec. Des gens, comme Dr Chicoine, qui ont passé leur carrière à vraiment étudier au niveau de la santé des jeunes et des tout-petits, je crois que c'est très pertinent pour continuer l'avancement de nos travaux. Et peut-être qu'aussi... et on aura des éclairages, car on dirait qu'ici il y a une bataille de chiffres. Des moyennes, pas de moyenne, 33 % versus 28 %, milieux défavorisés, pas de milieu défavorisé. Je crois qu'ici, là, la priorité, c'est de savoir qu'est-ce que la science dit, savoir comment qu'on peut agir tôt puis de se donner tous les outils.

Alors, M. le Président, vous comprendrez que, si on a un expert qui a étudié de façon très terrain tout ce qu'il se passe ici au Québec, il serait peut-être en mesure de nous dire si, oui ou non : Est-ce qu'on doit continuer à investir le plan qui était déjà établi par le gouvernement libéral, c'est-à-dire d'y aller en milieu défavorisé à temps plein, le plan qui est d'ailleurs même partagé par les différents syndicats d'enseignement, qui disaient : Allons-y à temps plein mais en milieu défavorisé, ce même plan-là qui a été salué par la CSDM, les différentes autres commissions scolaires et qui est aussi partagé par le Dr Chicoine. Je comprends qu'on a entendu des experts de New York venir nous dire d'autres choses, mais ces pseudo-experts ne connaissent pas du tout la réalité québécoise. Et là ils sont dans l'occasion d'avoir un docteur bien de chez nous qui est capable de nous parler de notre réalité québécoise. Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Maintenant, la parole est à M. le ministre pour une période de 30 minutes maximum.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Alors, concernant les auditions de personnes qui pourraient venir présenter leur point de vue, bien, on a déjà fait nos auditions particulières. On a entendu plus de 30 personnes ou groupes, et ça avait été sur consentement, il y avait eu une entente sur le choix des personnes. Ceci dit, les gens qui ne sont pas venus présenter avaient tout le loisir de soumettre un mémoire. Ça a été fait pour plusieurs. Plusieurs groupes, là, qui ne sont pas venus présenter nous ont fait parvenir un mémoire. Donc, il y a d'autres façons de se faire entendre.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants, d'autres membres de la commission qui désirent prendre la parole? Je reconnais la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci. Bien, écoutez, j'ai entendu ma collègue de Saint-Laurent, tout à l'heure, parler du point de presse de ce matin du ministre en disant que c'était comme s'il voulait encore nous vendre un projet. Ça a mis des mots sur ce que j'ai ressenti aussi en écoutant le ministre ce matin. Il a plus l'air d'essayer de nous vendre un projet, une idée même, honnêtement, d'essayer de nous vendre une idée que d'être en train de mettre en oeuvre un nouveau service public. Et, dans les circonstances, moi, je trouve ça très problématique, parce que c'est un projet qui est à très court terme, et le plan, il n'est encore pas là.

Donc, moi, je ressens le besoin qu'on prenne notre temps pour étudier un projet de loi aussi gros et je ressens le besoin qu'on entende plus d'intervenants aussi. Donc, certainement que j'appuie la motion préliminaire de ma collègue et... pour que le Dr Chicoine puisse être entendu. Et j'encourage le gouvernement à aller de l'avant aussi pour entendre le Dr Chicoine, d'autant plus que ça lui permettrait peut-être d'avoir un petit peu plus de temps devant lui pour nous présenter, ainsi qu'aux citoyens québécois, un plan de déploiement des maternelles quatre ans qui se tient. Merci.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je reconnais la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureuse de prendre la parole, évidemment, suite à ma collègue de Saint-Laurent, qui a, bien sûr, parlé de toute cette expertise extraordinaire du Dr Chicoine, qui est reconnu, évidemment, pour toute son oeuvre, je dirais, et pour son éloquence et son expertise auprès des tout-petits, que ce soit à vulgariser l'information pour nous, mais d'amener, bien sûr, la réflexion accessible pour tous dans l'analyse qu'il fait et l'expertise qu'il a comme pédiatre au CHU de Sainte-Justine.

Alors, je ne reprendrai pas, évidemment, les différents articles qui ont pu mettre de l'avant son point de vue, mais je vais mettre l'accent sur un aspect très, très, très particulier, très précis, qui est l'importance du jeu. C'est un des arguments principaux qu'il invoque pour dire qu'il favorise vraiment l'environnement des CPE pour les tout-petits de quatre ans versus les maternelles quatre ans.

Alors, moi, je vais vous parler d'une expérience vécue quand j'étais étudiante en psychologie à McGill. J'ai travaillé avec... On a fait un travail avec des étudiants en psychoéducation à l'Université de Montréal, et j'ai fait le choix de faire un stage auprès des tout-petits de quatre ans au CLSC de Rivière-des-Prairies. Et on a travaillé ensemble, les deux universités, à regarder comment on peut, justement, travailler à faire l'évaluation des premiers signes des troubles d'apprentissage, comment on peut regarder l'avant... la qualité de la socialisation chez les jeunes, leur développement, et tout ça. Et le choix qu'on a fait entre les deux universités, c'était vraiment d'axer sur le jeu libre. Et le jeu libre, pourquoi? Parce que les enfants de quatre ans ont besoin de cet imaginaire. Ils ont besoin d'explorer, ils ont besoin de socialiser. Et c'est l'étape de la petite enfance où il faut leur permettre de faire ça.

Alors, quand le Dr Chicoine nous dit à quel point, pour développer cette exploration, pour développer cette imagination, qu'on n'est pas du tout à l'étape où c'est nécessaire d'entrer dans un programme pédagogique, académique, mais qu'il faut laisser, pour l'équilibre de l'enfant, le laisser être dans cet environnement de jeu, seul ou avec d'autres... Et le stage, quand je l'ai fait, bien, ça nous a permis, entre nous, étudiants, de vraiment pouvoir se donner, effectivement, le libre cours à évaluer, à observer, mais à regarder les enfants agir dans leur propre développement entre eux.

Alors, moi, quand je regarde dans, par exemple, Naître et grandir, Les bienfaits du jeu, bien, les effets positifs, entre autres, c'est, d'abord, au niveau moteur. Le jeune, l'enfant de quatre ans, il a besoin du jeu pour son équilibre, pour sa motricité, sa motricité fine, bouger, courir, alors donc comment il se déplace dans l'espace. Et ça, c'est excessivement important, le jeu permet cela, au lieu d'être assis sur une chaise ou assis sans trop bouger.

Évidemment, il y a toute la notion cognitive, le développement cognitif des enfants de quatre ans et leur développement intellectuel, la résolution des problèmes. Encore là, le Dr Chicoine met ça de l'avant, l'importance du jeu. Quand on travaille avec... que ce soit avec les LEGO, avec les cubes, il faut absolument que l'enfant soit dans cette imagination, mais aussi dans la possibilité, donc, de travailler à la résolution des problèmes.

• (14 h 10) •

Et là, évidemment, il y a tout le développement social, j'en ai parlé plus tôt, cet aspect du jeu qui est possible bien davantage dans le contexte des CPE, où on apprend à vivre avec les autres dans un environnement qui ressemble, encore une fois, à la maison, où on apprend à partager, où on joue à des jeux et on apprend c'est quoi, perdre. Et puis ça, c'est très important aussi dans le développement de l'enfant, attendre son tour, faire des compromis, même les balbutiements de la négociation à quatre ans, mais ça fait partie, quand même, des avantages et de la réalité. Et là, évidemment, j'arrive au niveau du comportement et de la compétence langagière, où les enfants de quatre ans apprennent à tester les premiers éléments du langage avec les autres et entendre la réponse des autres.

Alors, c'est essentiel, cet espace-là, cette liberté de jeu, cette liberté... que ce soit seul, avec des jouets et aussi avec d'autres enfants. Et là je ne parle pas nécessairement des jouets éducatifs, le jouet en soi, qui permet vraiment au jeune d'explorer, d'imaginer, de bouger.

Il faut un temps de jeu, il faut un temps de jeu quotidien. Le Dr Chicoine avance le chiffre de trois heures par jour. Alors, moi, je n'y crois pas. Je n'y crois vraiment pas, que le jeu va avoir la même place dans l'environnement de la maternelle quatre ans que dans l'environnement du CPE. Alors, j'aurais tellement souhaité, M. le Président, que le Dr Chicoine puisse venir nous en parler, de cette importance du jeu.

Et moi, ça fait trois ans et demi que je suis députée, et j'ai été membre de différentes commissions, et j'ai toujours cru — mais j'apprends aussi, parce qu'il semble que ça ne soit pas le cas — j'ai toujours cru que les consultations en commission parlementaire, c'était de permettre aux gens d'amener la diversité des opinions et d'être reconnus experts pour la contribution qu'ils puissent faire à l'enjeu et au dossier, mais il semblerait que je me sois trompée. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres interventions? Je reconnais la députée de Mille-Îles.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Mille-Îles, M. le Président, oui. Merci, c'est gentil.

M. le Président, je reviens à la motion qui a été déposée. J'aurais aimé entendre Dr Chicoine, et voici pourquoi. Je crois qu'il aurait été important de comprendre la signification d'une clientèle vulnérable. Le Dr Chicoine a longtemps prôné sur le principe de la complémentarité entre la famille, la santé et l'éducation. On l'a mentionné un petit peu plus tôt, la famille nous manque un peu. On pense... Et j'espère qu'en arrière il y a quelqu'un qui vient du ministère de la Famille... Mais on a aussi souligné l'aspect de la santé, et, de ce fait, dans un milieu où on veut donner le plus de chances aux enfants, où on a mis des stratégies en place, puis vous l'avez entendu depuis ce matin, il y a Agir tôt, il y a Passe-Partout. Chez nous, il y avait 1, 2, 3, Go!, qui passait des CPE puis qui allait jusqu'au préscolaire. Il y a Agir autrement, qui était mis en place pour des élèves plus âgés que la maternelle.

Mais tout ça revenait à la même chose, c'est-à-dire comment on décèle et on accompagne un enfant qui est dans un milieu pas valorisé, qui manque de valorisation ou qui est défavorisé. On a, à Montréal, une école qui s'appelle la commission scolaire de Montréal, mais qui a aussi l'école montréalaise, qui inclut les cinq commissions scolaires de Montréal. Celle-ci a essayé de déceler, mettre en place différentes stratégies pour pouvoir avoir des recherches très ciblées par rapport à des poches de pauvreté qu'on a à Montréal, qui sont importantes, mais vous venez de Mégantic, M. le Président, et, à Mégantic aussi, il y a de la pauvreté. Donc, on se doit, je crois, d'entendre les spécialistes qui nous disent c'est quoi, être un enfant vulnérable, mais c'est quoi aussi... parce que je pense que le ministre l'a déjà dit, il y a une différence entre être un enfant vulnérable puis venir d'une famille en situation de vulnérabilité. C'est deux aspects différents. Je peux venir d'une famille très bien nantie et être un enfant vulnérable dans mes apprentissages puis dans ma façon d'aborder les choses, comme je peux être dans un milieu qui manque, ou qui est vulnérable et qui fait en sorte que, malgré tout, je m'en sors très bien ou j'ai des difficultés et des défis que je dois combattre.

Je crois que d'avoir eu la présence d'un médecin qui s'adonne et qui écoute, puis qui fait des recherches depuis des années sur ce sujet-là, ça aurait été intéressant. Et j'entends le ministre, quand il dit : Vous savez, il y a eu une négociation... Oui, mais nos gens à nous ont été refusés. C'est pour ça qu'on se retrouve dans cette situation-là. C'est pour ça qu'on vous dit : On a le goût de les entendre, parce que ça nous a été refusé puis le moment privilégié dans la démocratie qu'on a, puis on sait qu'en ce moment notre démocratie est fragile puis le gouvernement a réagi par rapport à ça dans les médias puis des choses comme ça. Mais, dans la démocratie qui nous appartient, on se doit d'avoir un endroit où on peut dire : On devrait avoir ce droit-là d'entendre des gens qui peuvent nous amener sur des pistes de réflexion et, comme le disait la députée de Sherbrooke, sur des choses qui vont changer la venue d'un programme ou d'une façon de faire. L'école va changer. Elle est en perpétuel mouvement, mais elle va changer parce que cette clientèle va apporter des changements, que ça soit dans les aménagements, que ça soit dans les installations, que ça soit dans la cour d'école puis dans le transport. Je pense qu'on a l'obligation d'entendre des spécialistes qui peuvent nous parler des différents aspects de l'évolution d'un enfant, que ce soit affectif, social, langagier, cognitif, physique et moteur. Si ça fait le tour, là, c'est à peu près tous les endroits où on peut identifier une vulnérabilité chez l'enfant et le défi des intervenants, quels qu'ils soient, du CPE ou de l'école, pour pouvoir intervenir auprès de ces enfants-là.

Donc, on n'a pas... Je crois, bien sincèrement... puis le ministre de la Famille le disait tantôt à LCN, là, il n'y a pas de prix à mettre là-dessus, là. La volonté, c'est de vraiment prendre soin des enfants. Bien, pour prendre soin des enfants, il faut entendre non seulement beaucoup de partenaires, mais il faut entendre aussi des très bons partenaires qui sont dans leur spécificité puis dans les aspects de la recherche qui vont pouvoir nous guider dans nos décisions qu'on va prendre ici.

Parce qu'il y a peu d'articles dans l'article de loi, mais il y en a suffisamment pour changer tout l'aspect de la vulnérabilité. Puis vous ferez l'exercice, M. le Président, dans les articles que le ministre nous a déposés, le mot «vulnérable» fout le camp. Puis il y a quelque chose là-dedans qui me fait peur, parce qu'il faut être capable, malgré tout, comme bon père de famille, parce que le gouvernement, c'est comme un bon père de famille, l'exemple... les féministes pourront me taper dessus, mais j'appelle ça comme ça... il faut être capable de dire qu'il y a une clientèle qui a besoin de plus, comme on est capable de dire qu'il y a une clientèle handicapée, qu'elle a besoin de plus, comme on a le devoir de regarder comment mieux aménager pour ces élèves qui ont défi supplémentaire. Puis la vulnérabilité, là, c'est un défi supplémentaire. Vous en parlerez aux gens qui servent les petits-déjeuners dans les écoles. C'est un défi supplémentaire. On a l'obligation, je crois sincèrement, d'entendre l'ensemble des partenaires pour pouvoir dire : On prend la meilleure décision. Malgré qu'elle sera discutée entre nous puis qu'on va parler de quelle est la meilleure décision, c'est en se mettant en mode écoute avec les spécialistes qu'on est capable d'y arriver.

Donc, pour cette raison-là, je suis tout à fait en accord, vous n'avez pas de doute là-dessus, sur la motion qui a été déposée. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour que M. le ministre s'adresse... M. le ministre.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Oui. Je voudrais simplement revenir sur un élément qui a été mentionné par ma collègue la députée de Fabre, qui s'inquiétait beaucoup du temps de jeu dans les maternelles quatre ans. Elle est beaucoup allée sur ce sujet-là. Écoutez, son gouvernement a déployé quelque chose comme 250, 300 classes. Bon, ça a été long, en quatre ans. C'était bien en deçà de notre cadence, mais quand même, j'imagine qu'elle savait et que les gens du Parti libéral savaient qu'on ne bafouait pas le droit des enfants de jouer, alors qu'ils déployaient des classes de maternelle quatre ans il y a quelques mois à peine. Je veux la rassurer sur ce qu'elle a fait elle-même. Les classes de maternelle quatre ans ouvertes précédemment par le gouvernement libéral il y a quelques mois à peine sont des classes où les enfants jouent, où les enfants sont des enfants, où les enfants développent leur motricité fine, socialisent, chantent des comptines. Et ils ont un moment pour faire la sieste quand c'est nécessaire. Donc, je la rassure sur les choses qui ont été déployées sous son propre gouvernement. Elle semble s'en inquiéter. Voilà.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres intervenants? Je reconnais le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Oui. Bien, c'est sûr que j'appuie la motion de ma collègue de Saint-Laurent. On a souvent entendu le gouvernement répéter haut et fort qu'on est fier de la nation québécoise qui... On est vraiment nationaliste. Mais, quand nous avons des experts du Québec qui veulent présenter sur un projet de loi, et ils sont contre le projet de loi, c'est non. C'est mieux d'entendre des gens de New York et Ontario. «Make Québec Ontario again». Hein? Un petit peu comme ça?

Alors, je suis déçu, parce que c'est un expert. C'est quelqu'un de bien connu, c'est un expert dans le réseau qui travaille à une institution québécoise. On est tellement fier de son travail, mais le ministère de l'Éducation a préféré d'acter comme une agence de voyages et de payer environ 5 000 $ pour des gens de New York qui viennent ici présenter devant l'Assemblée nationale, devant une commission ici, au Québec, à Québec. On a fermé la porte à un Québécois, quelqu'un qui a fait les études ici, qui connaît nos enfants, pour entendre quelqu'un qui vient de New York. Je trouve ça tellement plate et j'espère que le ministre va accepter notre motion, puis on va donner, le monsieur en question, le temps de venir ici et de présenter ses arguments et ses décisions sur le projet de loi. Merci, M. le Président.

• (14 h 20) •

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui désirent intervenir? Je reconnais Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Moi, je veux simplement dire que j'appuie cette demande, donc, cette motion, parce que je pense que ce serait un expert qui aurait un point de vue, pour toutes les raisons qui ont été évoquées, très, très pertinent. Alors, je ne comprends pas pourquoi on ne l'a pas entendu, dans un premier temps, et donc je ne vois pas pourquoi on s'en priverait non plus aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Jacques) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mme Rizqy : ...bien évidemment, on va demander, nous, un vote nominal sur cette motion.

Mise aux voix

Le Président (M. Jacques) : Parfait. Donc, je demande le vote nominal, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Oui. Je vais commencer par le groupe parlementaire qui a proposé la motion, ensuite le gouvernement et les deux autres groupes d'opposition. Donc, veuillez répondre pour, contre ou abstention.

Mme Rizqy (Saint-Laurent)?

Mme Rizqy : Pour.

La Secrétaire : M. Kelley (Jacques-Cartier)?

M. Kelley : Pour.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Pour.

La Secrétaire : Mme Charbonneau (Mille-Îles)?

Mme Charbonneau : Pour.

La Secrétaire : M. Roberge (Chambly)?

M. Roberge : Contre.

La Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

La Secrétaire : M. Émond (Richelieu)?

M. Émond : Contre.

La Secrétaire : M. Chassin (Saint-Jérôme)?

M. Chassin : Contre.

La Secrétaire : Mme Grondin (Argenteuil)?

Mme Grondin : Contre.

La Secrétaire : M. Lemay (Masson)?

M. Lemay : Contre.

La Secrétaire : M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Jacques (Mégantic)?

Le Président (M. Jacques) : Abstention.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Le Président (M. Jacques) : Nous allons maintenant passer à l'étude détaillée.

Une voix : ...

Le Président (M. Jacques) : Non? Est-ce qu'il y a d'autres... Excusez-moi, excusez-moi. Désolé. Est-ce qu'il y a d'autres motions préliminaires? Je reconnais Mme la députée de Mille-Îles. À vous la parole.

Motion proposant d'entendre la commission scolaire de Montréal,
la commission scolaire de Laval, la commission scolaire
Marie-Victorin et la commission
scolaire Marguerite-Bourgeoys

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. Conformément à à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin:

«Que la Commission de la culture et de l'éducation tienne[...], avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende les groupes suivants — vous allez comprendre, M. le Président : la commission scolaire de Montréal, la commission scolaire de Laval, la commission scolaire de Marie-Victorin et la commission scolaire [...] Marguerite-Bourgeoys».

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Nous allons suspendre nos travaux.

(Suspension de la séance à 14 h 23)

(Reprise à 14 h 26)

Le Président (M. Jacques) : Nous reprenons nos travaux. Mme la députée de Mille-Îles, la parole est à vous pour une période de 29 min 25 s

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. C'est gentil. M. le Président, un peu plus tôt, le ministre réagissait en disant : Vous savez, ceux qu'on avait à recevoir, on les a reçus, c'était une entente. Malheureusement, dans les gens qui ont été entendus, il y a des gens qui ont levé la main, levé la main pour se faire entendre. Et les commissions scolaires, je crois, malgré la représentation de la Fédération des commissions scolaires... parce que le ministre pourrait répondre ça aussi : On a vu la fédération, donc on n'a pas besoin de se soucier du fait qu'on veut rencontrer les commissions scolaires, ils sont des représentants. Puis il n'aurait pas tort de le dire ainsi. Par contre, je pense qu'il y a une grande différence entre des gens qui font de la gestion au quotidien et les gens qui les représentent un petit peu plus haut. Sans enlever le devoir de la fédération, parce que la fédération, je crois qu'elle fait un très bon travail, pour y avoir siégé quand même assez longtemps, elle est reconnue à des endroits puis elle ne l'est pas dans d'autres, parce que, pour le ministre des Finances, la Fédération des commissions scolaires, ça ne valait pas la peine de les rencontrer. Là, pour le dossier des maternelles, c'était correct, mais pas les commissions scolaires.

Pourquoi j'amène cette motion pour les commissions scolaires? Bien, parce que la réalité de chacune des commissions scolaires, elle est différente. Puis je vous parlais, un petit peu plus tôt, de l'école montréalaise, je pense qu'on ne peut pas faire fi des différentes réalités des commissions scolaires. Et leur devoir, c'est de venir nous sensibiliser au fait que ces différences viennent changer non seulement leur quotidien, mais même la main tendue au ministre par rapport à l'aspect budgétaire. L'école montréalaise demande un peu plus.

La commission scolaire de Montréal, c'est plus de 113 700 quelques élèves, commission scolaire de Laval, c'est 56 000, Marie-Victorin, 33 000, commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, 72 000. Donc, imaginez-vous juste ce que ça représente. Puis, si je reviens à mes chiffres un peu plus tôt, ça veut dire que Montréal, c'est 100... j'essaie de ne pas faire de liaison, hein, 100 écoles primaires, commission scolaire de Laval, 56, commission Marie-Victorin, 33 et, celle de Marguerite-Bourgeoys... non, 51 pour Marie-Victorin puis 74 pour Marguerite-Bourgeoys. Chacune d'elles a une réalité différente mais chacune d'elles a des situations face à la décision qu'on avait prise en 2013 de mettre en place une école quatre ans pour les enfants en situation de vulnérabilité. Chacune d'elles ont eu des défis, et, si on pouvait rajouter une école anglophone, puis je ne la prendrais pas dans la région de Montréal, mais plus Sir-Wilfrid-Laurier, c'est-à-dire Laval, Laurentides, Lanaudière, juste leur territoire, M. le Président, là, c'est la Belgique. On le dit, parce que ça fait une image. Et, de ce fait, j'aurais aussi rajouté une commission scolaire, peut-être, Pays-des-Bleuets ou dans cette région-là. Pourquoi? Parce que la vulnérabilité n'est pas la même si je suis à Montréal et si je suis en région. Donc, de pouvoir entendre le quotidien de ces commissions scolaires, ce pourquoi la maternelle quatre ans, pour eux, vient les interpeler par rapport à... les activités qu'ils ont à mettre en place, les dispositions qu'ils ont à mettre en place pour être sûrs que tout se passe bien.

• (14 h 30) •

Puis les nouveaux services... Parce qu'on a parlé beaucoup des enseignants, on a dit qu'il va manquer de professionnels, mais ils auraient pu nous expliquer... du moins, j'aimerais ça les entendre sur les autres services. Ce matin, je vous ai parlé des autobus. Je pense que je vous en ai assez parlé. Mais on pourrait parler de tous les autres services qu'il y a dans l'école à partir du moment où j'arrive à l'école. Il y a le service de garde, le service de dîneur. C'est sûr qu'au préscolaire puis à la maternelle, je n'ai pas besoin de l'aide aux devoirs, mais j'ai quand même un environnement qui crée cette possibilité-là, puis il y a le programme Lis avec moi, qui fait en sorte qu'entre fratries il peut y avoir beaucoup de beaucoup de discipline, mais beaucoup d'accessibilité à la bibliothèque.

Mais tous les aménagements quand j'ai quatre ans ne seront pas les mêmes que quand je suis en sixième année. Ma collègue, plus tôt, s'est levée debout pour vous montrer sa grandeur, qu'elle avait déjà quand elle était au primaire. Je suis sûr que le ministre avait aussi une grandeur assez importante, parce qu'il est toujours aussi grand. Mais, de ce fait, l'aménagement de l'école se fait de façon différente si j'ai quatre ans puis si j'ai l'âge d'être en sixième année. Ça varie, puisqu'il peut y avoir des redoublements, ça fait que je ne vous donnerai pas l'âge des sixième année. Mais de pouvoir entendre les commissions scolaires dans l'aménagement, la possibilité, le manque de personnel et tout ce qui gravite alentour d'une journée scolaire... Il pourrait aussi nous expliquer comment on aménage un calendrier pour un jeune de quatre ans quand j'ai 180 jours d'école, mais qu'il y a 360 jours dans une année.

Quand je passe du service CPE ou garderie et que je m'en vais à l'école, ma vie vient de changer, ma relation avec un adulte significatif, elle est différente, parce que, quand j'arrive en PCE, j'en ai une, éducatrice, des fois deux. Mais, quand j'arrive à l'école, j'ai différentes personnes qui sont dans mon environnement, qui fait que je dois m'adapter à chacune de ces personnes. Donc, mon enseignante devient mon lien direct avec l'école, celui que mon parent reconnaît, celui de qui j'ai des nouvelles qui passent de moi, comme enfant, à différents intervenants, mais j'ai aussi les surveillants, hein, ceux qui surveillent à l'heure du dîner, les éducatrices qui sont là quand j'arrive à l'école parce que mon parent commence peut-être plus tôt que l'école à travailler. Et je dois m'adapter à toute cette fonction-là.

Je crois que de pouvoir entendre les commissions scolaires nous rappeler les différents degrés d'implantation, les différents services que je me dois d'avoir et quelle est la relation entre l'orthopédagogie et l'orthophonie quand j'ai quatre puis quand je suis en sixième année, c'est différent... Parce que, oui, des fois, les services aux élèves vont jusqu'à la sixième année. C'est ce qu'on souhaite, mais, plus souvent qu'autrement, ce n'est pas ce qu'on voit dans la possibilité des élèves dans nos écoles. Plus souvent, on se concentre sur la petite enfance, puis, aussitôt qu'on arrive après le deuxième cycle, bien là, il n'y a plus de service. On dit aux parents : Bien, on a essayé d'aménager quelque chose, mais on n'a pas assez de monde, donc on va concentrer aux plus jeunes.

J'aurais aimé entendre l'école montréalaise m'expliquer comment la fusion de cinq commissions scolaires à Montréal peut partager ses fonds par le biais de la récolte des taxes scolaires. Et l'impact que ça a, à partir du moment où le gouvernement décide de changer cette taxe et faire en sorte que les parents reçoivent les mêmes services, mais surtout que les jeunes ont la même accessibilité à ces services-là...

Je vous le disais plus tôt, M. le Président, manger, ça peut être un élément d'apprentissage, manger en groupe, avoir de quoi se mettre sous la dent et faire en sorte que j'apprends mieux, je joue mieux à mes jeux ludiques si je suis en forme puis que j'ai bien été alimenté. L'école montréalaise avait un souci pour ça. Je crois qu'elle l'a encore, mais j'aurais aimé ça, l'entendre sur la différence que ça fait chez elle, comparé à Marie-Victorin, qui est sur la rive sud, qui, elle, va jusque dans les... je le dis avec un peu d'amusement, mais j'ai déjà eu de longues conversations avec eux, mais, jusque dans les rangs sur la rive sud, où on se doit d'être alerte à ces familles qui sont un petit peu plus isolées, un petit peu plus dans la pauvreté, un petit peu plus vulnérables... On n'a pas le luxe, comme société, de lâcher prise sur la vulnérabilité de nos jeunes.

Puis j'entends, avec satisfaction, la volonté du gouvernement de mettre en place un système quatre ans qui répond à tous les élèves. Mais, à partir du moment où je lis, dans un projet de loi, qu'on élimine le mot «vulnérable», j'aimerais entendre quatre commissions scolaires, sinon cinq, que je n'ai pas nommé... une anglophone, mais j'aurais dû vous en écrire une, mais des commissions scolaires pour venir me parler, ça veut dire quoi, la vulnérabilité chez nos jeunes, ça veut dire quoi si je ne priorise pas. Ça veut-u dire que, dans des milieux où j'ai une nouvelle école, parce que c'est des nouveaux quartiers, puis que l'école sera neuve et aménagée avec des préscolaires puis des maternelles quatre ans, mes enfants qui sont dans un milieu plus favorisé vont avoir plus accès que les enfants qui déménagent dans des quartiers qui ne sont pas encore embourgeoisés, comme le dit les gens de Montréal, et qui fait en sorte qu'ils n'ont pas accès à une école adéquate parce que son milieu n'a pas pu s'agrandir par l'intérieur, là? On peut agrandir jusqu'à un certain niveau, M. le Président. On l'a dit un peu plus tôt, hein, on peut éliminer des bibliothèques. Il y a des écoles qui ont des bibliothèques sur roues parce qu'il n'y a pas de place pour avoir une bibliothèque. J'ai connu le temps où il y avait des laboratoires informatiques. Ça n'existe plus. En tout cas, si ça existe, ils sont très, très choyés puis ils sont mieux de barrer la porte puis de mettre des rideaux dans la fenêtre, parce qu'à partir du moment où on va passer on va délimiter que c'est un local accessible et utilisable. Et, croyez-moi, j'ai connu des gens qui étaient capables de dénicher des garde-robes pour faire des bureaux avec. Donc, des fois, c'est des problématiques pour dire qu'il y a des endroits qui peuvent être utilisés puis récupérés.

J'aurais aimé entendre l'effet que ça a sur la vulnérabilité des élèves puis la maternelle quatre ans, le manque de locaux et de places pour construire à Montréal. Ce n'est pas la même chose à Marie-Victorin. Marie-Victorin, il y a des villes qui se chicanent entre elles pour pouvoir avoir la nouvelle école. Montréal, c'est un peu comme Laval, c'est-à-dire que l'espace de construction, elle est limitée. Et, de ce fait, bien, je ne peux pas grandir trop, trop par en dedans. Je peux essayer, mais probablement qu'il nous aurait expliqué. Il nous aurait expliqué comment faire mieux, comment faire plus puis comment répartir la maternelle quatre ans dans des délais plus raisonnables.

Parce que c'est juste ça qu'on vous dit, M. le Président. Ce qu'on dit au ministre, c'est qu'on entend sa volonté puis on n'est pas en désaccord avec sa volonté de faire du quatre ans. Ce qu'on dit, c'est : Le pied sur l'accélérateur, c'est ça qui est dangereux, c'est ça qui fait qu'on va entasser des enfants, c'est ça qui fait qu'il y a des endroits qui vont être surutilisés. Puis il y a des gens qui vont probablement — parce que c'est déjà commencé depuis un an entre les anglophones puis les francophones — se regarder plutôt que d'être complémentaires, ils vont se regarder avec des colères un peu dans les yeux en se disant : Tu ne viendras pas chercher mon école, parce qu'elle n'est pas tout à fait complète. Puis les francophones vont dire : Tu ne m'empêcheras pas d'avoir de l'espace parce que, toi, tu prends la tienne puis tu ne m'en laisses pas.

On a l'obligation d'entendre les commissions scolaires de grandes tailles, parce qu'il y a vraiment une différence dans l'occupation du territoire comparé à des commissions scolaires qui sont peut-être moins en manque de place, qui ont plus la capacité de pouvoir bâtir, grandir puis faire des aménagements de cours et de locaux qui sont plus adéquats pour les quatre ans. On a l'obligation d'écouter ces quatre commissions scolaires là parce que leur réalité va venir changer l'application qu'ils peuvent mettre en place pour pouvoir accueillir des quatre ans. Puis, je vous le dis, je n'ai pas la berlue, les quatre ans ont été développés par l'école montréalaise, des enseignantes, deux, tout à fait en particulier, qui ont fait la démonstration que l'élève vulnérable se doit d'avoir un suivi plus attentif, un suivi plus proche pour s'assurer que, malgré que ses parents n'ont pas de scolarité, qu'il y a de la pauvreté chez lui puis que la valeur de l'école, elle n'a pas d'importance dans sa maison, je suis capable de l'amener à sa réussite. Et, si ce n'est pas le cégep et l'université, bien, ça sera la formation professionnelle, et on aura du monde de plus pour travailler sur le marché du travail. Il n'y a rien de pire que de ne pas avoir de plombier, M. le Président, je vous le dis.

Je crois qu'on a l'obligation d'entendre les commissions scolaires, parce que leur réalité, elle est convaincante dans l'application qu'ils ont à faire. Et je vous dirai, M. le Président: Ce n'est pas en les transformant en centres de service, où ça sera géré par des gens qui font de l'administration plutôt que de vivre les émotions des parents que d'être un parent sur place, que d'être capable d'échanger avec les gens dans leurs rues, à l'épicerie puis dans les endroits publics, qu'on va réussir à faire une école sensible à l'élève, sensible au jeune, qui veut l'accompagner jusqu'à sa réussite.

M. le Président, je suis convaincue que la motion que je vais déposer sera défaite, parce que le gouvernement nous a fait la démonstration que le nombre vient jouer dans notre démocratie. Mais je reste convaincue que, si on prenait le temps de bien entendre et de partager avec ces commissions scolaires là, on arriverait peut-être même à entendre un cheminement progressif, intelligent, intéressant de la maternelle quatre ans au Québec qui serait beaucoup plus valorisant pour les gens qui enseignent, les gens qui la fréquentent et les parents qui essaient d'accompagner leurs jeunes. Merci, M. le Président.

• (14 h 40) •

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui désirent intervenir sur la motion de la députée de Mille-Îles? M. le ministre.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci, M. le Président. Je veux simplement dire que la CSDM nous avait fait parvenir un mémoire, qui a été lu et analysé avec beaucoup d'attention. Il y avait 21 recommandations sur la bonne façon de déployer la maternelle quatre ans, des points, peut-être, à éviter, des choses auxquelles il faut faire attention, des choses dans lesquelles il faut tenir compte pour s'assurer de bien aménager les locaux. Donc, je remercie encore la CSDM pour sa contribution aux travaux de la commission.

Ceci dit, il y avait eu une motion sans préavis qui avait obtenu le consentement unanime sur les groupes qui allaient être entendus. Je pense qu'il faut s'y tenir.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres membres de la commission qui désirent intervenir? Je reconnais Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Vous comprendrez que je vais me répéter, on a parlé qu'il n'y avait pas de plan jusqu'à maintenant. Le ministre vient de nous dire qu'il a lu avec attention le mémoire de la CSDM, qui comportait des recommandations sur la bonne façon de déployer les maternelles quatre ans. Je suis ravie de savoir que le mémoire a été lu par le ministère, mais, nous, comment on fait pour savoir, dans l'opposition, si ces recommandations-là vont être mises en application par le gouvernement, dans la mesure où on ne l'a pas, le plan, en ce moment? Comment on fait pour le savoir si ça va être mis en application? Sur la base de quoi on prend nos décisions, en ce moment, là? Je ne le sais pas.

Donc, moi, j'appuie la motion pour faire venir différentes commissions scolaires, parce que je pense qu'effectivement on a besoin d'avoir plus d'informations sur comment ça a été fait dans les dernières années, déployer des classes de maternelle quatre ans, comment ça s'est passé sur le terrain, dans la classe, dans la cour, sur la route vers l'école, au service de garde, dans le transport, comment ça s'est passé pour la transmission de dossiers pour les élèves qui fréquentaient un autre milieu avant, comment ça se passe, les interactions avec le ministère de la... bien, avec les services de santé quand l'enfant était suivi avant par un professionnel auprès d'un CIUSSS, par exemple. On a besoin de savoir comment ça s'est passé concrètement sur le terrain. Et ça, c'est les commissions scolaires qui l'ont, cette expérience de terrain là. C'est pour ça que je pense que ça vient compléter adéquatement, effectivement, la présence de la Fédération des commissions scolaires. Ce sont les commissions scolaires elles-mêmes qui sont le plus près du terrain et qui sont le plus capables de nous faire des recommandations. Et non seulement on veut qu'ils viennent, on veut qu'ils viennent nous en parler puis on veut aussi savoir comment le ministère va tenir compte de ces recommandations-là pour améliorer le projet.

Moi, j'ai besoin de savoir ça va être quoi, les modalités de déploiement des maternelles quatre ans. Je vous remercie.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres membres de la commission qui désirent intervenir? Je reconnais la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Merci, M. le Président. Alors, évidemment, vous comprendrez que je suis en appui pour cette motion, après l'éloquence de ma collègue de Mille-Îles.

Moi, ce que j'aimerais d'abord dire, dans un premier temps, je voudrais réagir un peu sur l'intervention du ministre, qui nous dit que, finalement, la commission scolaire de Montréal a déposé un mémoire et que ça a été analysé, ça a été pris en compte. Moi, franchement, là, puis en tout respect pour le ministre, qui est un parlementaire expérimenté, en commission parlementaire, là, c'est une chose de lire les mémoires et d'analyser, c'est une autre chose de respecter la démocratie et de permettre à l'ensemble des parlementaires de débattre, et de poser des questions, et d'avoir les éclairages qui contribuent à nourrir la réflexion. Alors donc, je voulais simplement...

M. Poulin : M. le Président, question de règlement. Parler qu'on nie la démocratie ici, là...

Mme Sauvé : D'accord.

M. Poulin : ...qu'on ne respecte pas la démocratie... Je pense qu'on peut être de bonne foi, tout le monde. Oui.

Mme Sauvé : Alors, je vais continuer. Parfait, merci.

Le Président (M. Jacques) : Merci.

Mme Sauvé : Je voulais... L'image que j'ai un peu quand on oublie d'inviter ou d'accueillir les commissions scolaires, qui effectivement ont des réalités... comme ma collègue l'a dit, des réalités très particulières de territoires, de clientèles, et tout ça, et c'est fort important, et ça aurait été tellement intéressant de les entendre... mais l'image que j'ai, là, c'est un peu comme si, finalement, moi, je décidais d'organiser une soirée chez un ami, dans sa maison, mais je ne l'invite pas.

Alors, comment on peut faire en sorte que, finalement, on est capable de dire: On fait le plein déploiement avec ces acteurs-là de premier plan que sont les commissions scolaires, et, finalement, on ne leur laisse pas l'espace pour permettre vraiment une complémentarité, vraiment un partenariat et une condition de réussite pour le déploiement? Moi, je ne comprends pas, là. Je cherche les arguments. On dit qu'il faut un village pour élever un enfant, alors le partenariat, il est au coeur du succès du déploiement qui est prévu pour les maternelles quatre ans. Et de ne pas permettre leur venue en commission parlementaire, pour moi, bien, c'est un élément qui est très, très, très préoccupant.

Parce que la dynamique territoriale, elle est très importante. Oui, la commission scolaire de Montréal, celle de Laval, géographiquement, il y a cette proximité-là, mais, en même temps, la dynamique de Laval, elle est très particulière aussi. Alors, je pense, par exemple, à la clientèle étudiante issue de l'immigration : on a eu beaucoup l'arrivée des Syriens à Laval il y a quelques années. Il y a une réalité aussi de problématiques diverses et aussi un tissu social partenarial qui est différent de celui, en termes d'historique et de liens qui sont créés... qui sont différents de ceux de la commission scolaire de Laval. Il faut entendre ça, il faut être capable d'être dans cette pleine écoute d'une géométrie variable pour être capable d'adapter le déploiement région par région, localité par localité en lien avec les commissions scolaires.

En entrée de jeu, dans les premiers commentaires, le ministre, ce matin, nous a dit que, bien sûr, les services continus étaient à l'agenda. Mais comment est-ce que la définition peut se faire, alors qu'on n'a pas daigné entendre les commissions scolaires être au coeur de cette réflexion-là, comme cela devrait se faire si on veut vraiment une définition qui se tient dans un continuum de services pour l'ensemble des tout-petits jusqu'à leur réussite scolaire? Alors, écoutez, je suis un peu abasourdie d'entendre... Je vais me permettre quand même de dire, devant les commentaires que j'entends — ça, je pense que ça va... Alors... Mais je suis vraiment abasourdie de voir et de pouvoir présumer qu'on n'acceptera pas d'entendre les quatre commissions scolaires. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Je reconnais le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci, M. le Président. Quand je regarde... Bien, c'est sûr que j'appuie la motion de ma collègue. Mais, quand je regarde les quatre commissions scolaires, j'imagine que c'est probablement une forte majorité des enfants qui sont présentement dans le réseau au Québec, Montréal, Laval, quand même, Marguerite-Bourgeoys, Marie-Victorin, et un grand nombre des parents aussi. Mais alors, je pense, ça, c'est un autre élément à ajouter: c'est des commissions scolaires qui représentent, oui, des parents dans le réseau, mais aussi des parents qui ont eu des enfants ou ont des petits-enfants dans le système, mais c'est un grand nombre des... pourcentage de notre population. Alors, c'est quatre commissions scolaires très importantes pour la province. Puis c'est sûr que mes collègues qui viennent de Laval sont mieux placés de parler un petit peu des réalités géographiques, mais, quand même, il y a certains défis pour des parents et, quand même, pour toutes les commissions scolaires, mais moi, je veux parler un petit peu pour Marguerite-Bourgeoys.

J'ai participé, juste en juin, à... Finalement, le projet de rénovation de l'école secondaire de Pointe-Claire a été terminé dans mon comté, c'était un projet d'environ deux ans. Alors, c'était finalement complet, un excellent ajout pour la commission scolaire de Marguerite-Bourgeoys dans mon territoire, dans un coin où il y a vraiment un changement générationnel, il y a beaucoup des personnes qui vendent leur maison présentement puis des jeunes familles qui installent dans le coin de Pointe-Claire, le village Valois, dans cette partie de mon comté. Alors, c'était une annonce très, très intéressante. Mais, quand même, avec l'ajout d'un gymnase puis environ huit salles de classe, il y a toujours une explosion dans l'inscription des enfants, un petit peu comme j'ai expliqué ce matin, à cause pas juste des francophones, mais des parents des élèves anglophones, mais, bref, quand même, avec cet ajout-là, il n'y a pas beaucoup d'espace pour une maternelle quatre ans. C'était quelque chose que j'ai parlé avec l'élu de la commission scolaire sur le sujet que, quand même, si c'est au nord de la commission scolaire, c'est très, très difficile pour eux autres de trouver des espaces. Alors, pour moi, quand je parle juste de ça sur mon territoire, là, dans mon comté, c'est un gros enjeu puis c'est encore... je pense que c'est plus une perte pour nous autres de ne pas... apprendre qu'on n'a pas eu la chance de prendre le temps avec les commissions scolaires de discuter des enjeux de transport, d'espace dans les écoles, et juste les défis d'un projet de loi comme ça, et comment on peut améliorer ça aussi, parce que les commissions scolaires, souvent, ont beaucoup de solutions pour nous. Alors, ça, c'est tout pour moi, M. le Président. Merci beaucoup.

• (14 h 50) •

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le député. Je reconnais la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Quand j'entends le ministre dire que, par exemple, la CSDM, la commission scolaire de Montréal, a déposé un mémoire et que, puisqu'elle a déposé un mémoire, c'est comme si elle avait été entendue... On est loin de la réalité. Autrement dit, si on écoute le ministre, tous ceux qui ont déposé des mémoires, plus besoin de venir ici. C'est fait, déposez un mémoire et le devoir que nous, les parlementaires, que nous avons, hein... parce que le travail qu'on fait est excessivement important. On a un rôle pas juste d'opposition, mais aussi de critique, de poser des questions.

Moi-même, j'ai déjà été invitée, à titre d'experte, dans la Commission des finances publiques pour parler des paradis fiscaux. Oui, j'ai rédigé un rapport, mais savez-vous quoi? J'ai été reçue par l'ensemble de la députation, tout le monde avait des questions. J'ai pu répondre, même si ça va vite, une heure, hein, on sait. Mais, nous, ça nous donne l'occasion de faire un travail qui est rigoureux. Je suis convaincue, puis je regarde la députée de Sherbrooke, je pense qu'elle aussi, elle avait des questions, parce qu'on... tu sais, on regarde... Oui, on sait que c'est la commission scolaire de Montréal, on sait que c'est la commission scolaire de Laval, Marie-Victorin, donc on a la rive nord, la rive sud puis c'est des gens, là, qui gèrent les plus grandes concentrations d'élèves.

Parlons de la commission scolaire de Montréal. La commission scolaire de Montréal, en chiffres, M. le Président. Qu'est-ce que c'est, la commission scolaire de Montréal? 113 700 élèves, dont 76 212 au secteur des jeunes, répartis dans 189 établissements scolaires. Ça en fait, monsieur, des établissements scolaires, M. le Président. 120 écoles primaires, plus cinq écoles primaires pour les élèves avec un handicap ou un trouble d'apprentissage, 24 écoles secondaires ordinaires, trois écoles primaires et secondaires ordinaires et là, je continue, là, 15 centres de formation, 10 écoles de métiers. «Nous offrons des services de 5 656 élèves au secteur de l'accueil...» L'accueil, M. le Président, depuis tantôt, on vous en parle, des nouveaux arrivants.

Vous savez, un mémoire, ça ne dit pas tout. Un mémoire que la CSDM a écrit, en plus du travail qu'ils font déjà, hein... puis je peux vous dire, en ce moment, là, ils cherchent des enseignants. Alors, eux, sur leur temps, aussi, préparent des mémoires. Ce n'est pas des gens qui ne font que ça, faire des mémoires. Donc, souvent, un mémoire va être concis. On va à l'essentiel puis, après ça, on ose vouloir s'exprimer ici. Alors, eux, ils se déplacent... c'est eux, là, ils ont dit : Nous, là, on veut se déplacer, on veut venir à Montréal... pardon, on veut venir à Québec. Puis, en plus de ça, là, savez-vous quoi, M. le Président? Ils n'ont même pas demandé des frais de déplacement. Donc, heureusement, le ministère de l'Éducation n'a pas besoin de se transformer en agence de voyages, comme il l'a fait pour les experts de New York.

Inquiétez-vous pas, la CSDM voulait juste être entendue. Pourquoi que la CSDM tenait à être entendue? Pourquoi que nous, on voulait aussi l'entendre, la CSDM? C'est que, premièrement, la CSDM regroupe le plus grand nombre d'élèves. En termes d'employés, on parle de 16 350 employés, M. le Président. C'est plus d'employés à la CSDM qu'à la ville de Montréal. C'est quand même important, ça, de le souligner. D'autre part, les maternelles quatre ans, maternelles cinq ans, ça a été déployé où en premier? La CSDM. Avant, ça s'appelait la Commission des écoles catholiques de Montréal. Je pense qu'il y a de l'expertise et aussi de l'histoire là-dedans. Puis savez-vous quoi? On voulait l'entendre.

Alors, si, pour le ministre, déposer un mémoire, ça signifie être entendu, nous aussi — je pense que je peux parler pour l'ensemble de mes collègues de tous les groupes d'opposition — ce n'est pas là où est-ce que nous, on loge. Déposer un mémoire, c'est la première étape pour être entendu. Par la suite, notre travail de parlementaire, c'est de poser des questions, pour comprendre exactement quel est l'état de la situation. Comme... Et, en plus, c'est fort utile, même pour le ministre lui-même.

On dit qu'on a tous à coeur la réussite éducative de nos enfants. Alors, comment se fait-il qu'on n'est pas en mesure de rencontrer aujourd'hui et d'entendre commission scolaire de Montréal, commission scolaire de Laval, la commission scolaire de Marie-Victorin et celle de Marguerite-Bourgeoys? Pourquoi qu'on refuse de les entendre? Est-ce qu'on a peur d'entendre qu'en ce moment ce n'est pas ça, la priorité des maternelles quatre ans? Est-ce qu'on a peur d'entendre qu'en ce moment il manque des profs puis qu'il manque énormément d'enseignants? Est-ce qu'on a peur d'entendre la réalité, qu'il y a aussi une pénurie de locaux? Est-ce qu'on a peur d'entendre la commissaire de... la présidente de la commission scolaire de Laval, qui a déjà dit en entrevue, au mois de février, ce n'est pas ça du tout, sa priorité en ce moment, les maternelles quatre ans, mais qu'il y a pas mal plus besoin d'une école secondaire? Qu'ils ont pas mal plus besoin d'espace pour les cinquièmes années puis les sixièmes années? Qu'ils ont pas mal plus besoin d'un laboratoire informatique? Ils ont pas mal plus besoin d'une bibliothèque pour tous les élèves, puis qu'en ce moment, de refaire des travaux, ça ne marche pas.

Est-ce qu'on a peur d'entendre la présidente de la commission scolaire de Marie-Victorin, qui a répondu à une lettre qui a été envoyée par le ministère... bien, par le cabinet du ministre puis... en fait, par le... non, pardon, la sous-ministre, en matière de dépassement de coûts, puis de dire : Oui, oui, on va vous suivre dans votre projet de maternelles quatre ans, mais sachez, sachez, là, qu'en ce moment ce que vous nous demandez de faire, c'est de réouvrir des contrats, des contrats qui ont été attribués en suivant les règles qu'on s'est tous dotés ici, à l'Assemblée nationale, des contrats publics qui ont été attribués en suivant les règles d'appel d'offres, qu'on demande, à la demande du cabinet du ministre, de réouvrir ces ententes-là puis de négocier de gré à gré pour ajouter des maternelles quatre ans...

Et, dans la lettre qui a été écrite par la présidente de la commission scolaire Marie-Victorin, on dit : Aïe! Vous allez nous accorder jusqu'à 30 % des dépassements de coûts? C'est quand même énorme, là, 30 %. Puis, M. le Président, 30 %, c'est peut-être juste le début, parce qu'on sait tous, tous, tous qu'il y a une pénurie de main-d'oeuvre. La pénurie de main-d'oeuvre, là, elle n'est pas seulement vraie au niveau des enseignants, des psychologues, des psychoéducateurs, des orthopédagogues, elle est aussi vraie dans le domaine de la construction. Ça coûte beaucoup plus cher.

Alors, quand j'entends le premier ministre dire : Ça coûtera ce que ça coûtera, quand j'entends le cabinet du ministre qui dit : Parfait, retournez dans vos contrats qui sont déjà attribués, voyez si on peut ajouter des maternelles quatre ans, puis revenez nous voir pour nous dire combien ça vous coûtera... Bien, j'entends que, par la suite, la commission scolaire de Laval dit : Bien, il y a potentiellement, ici, une explosion de coûts, pour ajouter des maternelles quatre ans, de 80 millions de dollars. Puis, malgré ça, ils nous disent : Ce n'est pas vraiment ça, notre priorité. Et là j'ajoute des classes, là, on ajoute des classes. Est-ce qu'on a peur d'entendre qu'ils nous disent : Même si on ajoute vos classes de maternelle quatre ans, puis qu'on dit qu'on a une classe, on n'a pas plus d'enseignants.

Savez-vous quoi? Moi, j'ai parlé, là, dernièrement, avec plusieurs présidents et présidentes de commissions scolaires. La semaine prochaine, la rentrée scolaire, les enfants sont super excités, vraiment, puis nous autres aussi, on est excités, on le sait tous, puis je vois ma collègue qui sourit, parce qu'il y en a une aussi que c'est la rentrée pour ses enfants, et, aujourd'hui, moi, ma collègue de Westmount—Saint-Louis, c'est la rentrée pour son enfant à elle aussi, et elle aussi, on voit cette fébrilité. Mais, derrière la fébrilité des enfants, bien, il se cache aussi peut-être de l'anxiété auprès de ceux qui gèrent les écoles, ceux qui gèrent nos commissions scolaires, parce que ça fait des mois et des mois... en fait, il faut le faire, ça fait depuis l'année dernière qu'ils disent : Attention, nous avons une pénurie d'enseignants. Tellement, là, que M. Maltais, qui est rendu au cabinet du ministre, bien, même lui, il le dit, il l'a écrit dans un journal, LeJournal de Montréal, pour bien le citer : «Juste au réseau de l'éducation, il va manquer 3 000 enseignants d'ici cinq ans.»

La semaine prochaine, M. le Président, moi, j'ai des commissions scolaires qui ne sont pas certaines d'être en mesure de dire si, oui ou non, ils vont avoir un enseignant dans la classe pour les besoins actuels, pas les besoins du premier ministre, là, de maternelles quatre ans, les besoins actuels où est-ce qu'il y a de véritables enfants, on n'est pas certains si, oui ou non, on va avoir un enseignant. Une fois qu'on est capable de trouver un enseignant, la réalité, c'est la suivante : les commissions scolaires me confirment que voir six différents enseignants dans une classe, c'est assez normal, c'est rendu normal, mais ça ne devrait pas être normal, M. le Président. Quand je me fais dire qu'on voit un roulement de 10 enseignants, là, je peux vous dire que, oui, je suis inquiète, parce que nous, on est tous inquiets puis on a tous compris qu'effectivement on a besoin de prendre un immense pas de recul puis dire : Une seconde! Avant d'ajouter de la pression au système de l'éducation, pouvons-nous réfléchir à savoir si, oui ou non, c'est la bonne solution? Pouvons-nous réellement réfléchir à un plan d'action pour parler de complémentarité, pour s'assurer qu'en ce moment, là, les commissions scolaires sont en mesure d'accueillir les maternelles quatre ans? Surtout, est-ce que c'est un besoin réel? Est-ce qu'on répond à une problématique ou on crée un problème? Ici, M. le Président, j'ai envie de dire qu'on crée un immense problème.

• (15 heures) •

La lettre du 6 février 2019 de la commission scolaire Marie-Victorin, à laquelle aussi on a demandé d'être entendue, là, la lettre est assez importante, là, donc : «M. Jean-François Roberge, ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, maternelles quatre ans.

«Aidez-nous à vous aider — ça, c'est le titre.

«M. le ministre, au nom des commissaires de la commission scolaire Marie-Victorin, la présente est pour vous demander de quelle façon nous pourrions contribuer à l'atteinte de vos objectifs ministériels concernant l'implantation des classes de maternelle quatre ans.» M. le ministre, vous devriez être content, là, ils vous offrent de l'aide. «La commission scolaire Marie-Victorin offre des services éducatifs à la population des villes de Brossard, de Saint-Lambert, de Longueuil, donc, arrondissements de Greenfield Park, de Saint-Hubert et du Vieux-Longueuil. Elle scolarise annuellement plus de 41 000 élèves, ce qui la positionne parmi les plus importantes commissions scolaires au Québec. La clientèle issue de l'immigration représente 53 % de la population scolaire et provient de 80 pays.»

M. le Président, je fais une petite pause ici, là. 80 pays, 53 %, c'est énorme, là. Vous comprendrez que le défi n'est peut-être pas le même qu'à Mégantic, on est d'accord là-dessus, je vous vois sourire. «31,1 % des élèves n'ont pas le français comme langue maternelle.» Un autre défi, M. le Président, la francisation.

«Par ailleurs, la commission scolaire Marie-Victorin est l'un des plus importants employeurs de la Rive-Sud avec plus de 4 500 employés réguliers qui contribuent à sa mission éducative. Elle gère un budget de 450 millions de dollars.»

Je continue, M. le Président. «Deux lettres nous ont été acheminées à cinq jours d'intervalle — il y avait un petit peu de pression, là, hein — le 23 janvier et 28 janvier 2019, pour mettre en place le plus rapidement possible des maternelles à temps plein pour tous les jeunes de quatre ans. Ce que vous demandez semble précipité.» Ça, ce n'est pas moi qui le dis, là, hein? Je cite une lettre. «Ce que vous nous demandez semble précipité, mais pas impossible.» Donc, vous voyez, il y a de l'optimisme, M. le ministre. «Quoique nous ayons des questionnements sur l'élargissement de la mission des maternelles quatre ans, nous voulons, ici, insister sur la concrétisation logistique.» Donc, ici, je divise la phrase en deux. On a des questionnements, là... la commission scolaire Marie-Victorin veut comprendre : C'est quoi, la mission des maternelles quatre ans, là? On va l'élargir? O.K. Pourquoi? Pour qui? Ici, il y a un questionnement. Mais, aussi, on veut insister sur la concrétisation logistique. Donc, on va les mettre où, en d'autres mots?

«Nous avons besoin de comprendre l'urgence, la planification, la démarche, l'échéancier et le budget.» Ici, M. le Président, savez-vous ce qui est fort intéressant quand que les groupes... quand on reçoit des experts et des invités, nos partenaires, ici, à Québec? C'est que, souvent, avant qu'ils quittent, nous, on se lève, on va les remercier. On échange nos cartes, on continue à discuter puis, des fois, on continue à marcher avec eux à l'extérieur puis on continue, nous aussi, à discuter. Alors, oui, c'est vrai que, nous, on leur pose des questions, mais, des fois, eux autres aussi nous répondre avec une question qui nous amène à réfléchir davantage. Cette réflexion, elle est commune de part et d'autre. On apprend aussi avec ceux qu'on invite. Parce que, des fois, leurs questions à eux sont tout aussi pertinentes que les nôtres, puis, je vous dirais, des fois, pas juste des fois, très souvent.

Je continue. «Nous avons besoin de connaître le plan national — nous autres aussi, M. le Président, on a vraiment besoin de le connaître, puis il est dû depuis très, très longtemps — et le plan régional pour, à notre tour, planifier des travaux à exécuter et les budgets qui leur seront dévolus dans les années à venir. Il nous faut aussi planifier les besoins d'espace, qui sont grandissants, et la main-d'oeuvre qui n'est déjà pas facile à trouver.»

Puis là une parenthèse qui me fait sourire, et je sais qu'elle va vraiment faire pas juste sourire, mais rire ma collègue la députée de Fabre, entre parenthèses : Qu'on parle de pénurie ou de rareté, choisissez le mot, là, mais il y a problème, puis on veut le régler. On a besoin de monde. Je vais faire moi-même une parenthèse. Il y a quelques mois, lorsqu'on était ici, j'avais amené une pile, M. le Président, une pile. M. le Président, savez-vous c'est quoi, ça? Ça, juste dans la dernière année, juste dans la dernière année, des affichages de postes. Éducateurs, psychoéducateurs, psychologues, orthopédagogues, orthophonistes. Il n'y a même pas les enseignants là-dedans, là. J'ai juste des professionnels. Je n'ai même pas le personnel de soutien, j'ai les professionnels. C'est à pourvoir. Les gens, on n'en a pas. Puis savez-vous qu'est-ce qui est le plus difficile à trouver, M. le Président? En région. Puis ça, en passant, là, M. le Président, c'est pour les commissions scolaires francophones. Anglophones, je peux vous le dire, on les a reçus ici, là, mais ils nous l'ont dit, la réalité. C'est pire. C'est beaucoup plus difficile, en plus, de trouver une personne bilingue qui veut aussi aller s'installer en région. Alors, on a tout un défi. Alors, on peut arrêter de jouer sur les mots puis parler de notre réalité, la pénurie de main-d'oeuvre, la main-d'oeuvre qualifiée, pour offrir les services.

Alors, je ferme ma parenthèse puis je reviens sur la parenthèse de la présidente de la commission scolaire Marie-Victorin : «Qu'on parle de pénurie ou de rareté, il est actuellement difficile de trouver des entrepreneurs et des fournisseurs en tout genre.» Savez-vous quoi? Je vais faire une autre parenthèse. Je vous regarde puis je sens que vous aimez mes parenthèses.

Vous vous rappelez qu'on a vécu une situation où est-ce que le ministre avait dit, à la blague : N'appelez pas l'ébéniste... N'appelez pas le ministre, appelez l'ébéniste. Vous vous rappelez de cela. La réalité, c'est que, même trouver un ébéniste, c'est rendu difficile. En fait, que ça soit un plombier, un électricien, ça devient difficile, on le sait. Alors, vous comprendrez, M. le Président, que ça, ici, c'est hyperimportant. Parce qu'une explosion de coûts, c'est une chose, mais des ententes de gré à gré, ça peut nous amener dans un terrain excessivement glissant puis à un film que personne ici, autour de la table, n'a envie de rejouer. On ne veut pas d'ententes négociées de gré à gré. Des appels d'offres, il y a des règles là-dessus qui ont été adoptées à l'Assemblée nationale. Il faut les respecter.

Alors : «Les derniers contracteurs ont répondu à notre appel d'offres pour construire une école par des soumissions qui dépassaient de 30 % les prix autorisés par votre ministère. Très heureusement, devant l'urgence de la situation, le ministère a bien voulu rencontrer ces frais.» Donc, devant l'urgence imposée par le premier ministre... parce qu'il a fait un débat lors de la campagne électorale puis il a dit : Moi, là, s'il y a une affaire que je suis prêt à mettre mon siège en jeu, c'est les maternelles quatre ans. Bien, pour répondre à cet engagement électoral, à cette promesse électorale, bien, O.K., il n'y en a pas, de problème, on dépasse de plus de 30 %. En fait, aussi bien dire : Voici le chèque, là, moi, je vais signer, le Conseil du trésor signe, vous mettrez le montant que vous voudrez. Puis, en plus de ça, vous pouvez le faire de gré à gré, M. le Président. C'est carrément ce qu'on appelle, en bon jargon, un bar ouvert.

M. le Président : «Qui plus est, dans cinq ans, si la commission scolaire Marie-Victorin avait à offrir le service de maternelle quatre ans à tous les enfants de quatre ans, il faudrait compter au moins 3 400 enfants de plus, selon les prévisions de croissance du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, en appliquant le même ratio que pour les maternelles cinq ans, soit 19 — mais là ça, c'est entre parenthèses, le "soit 19", aujourd'hui, on ne sait pas si c'est 17, le ratio, ou si c'est du un pour 12, ou si c'est du un pour six, il va falloir qu'on nous éclaire là-dessus — il faudrait à la commission scolaire Marie-Victorin au minimum 180 classes de plus, donc 180 enseignants et 180 éducatrices de plus, loi n° 23, deux adultes par classe.»

Donc, quand on entend notre collègue la députée de Joliette nous parler de 4 000... 4 000, le défi est grand. «Théoriquement, cela équivaudrait à environ 6,5 écoles qui seraient complètement dédiées aux maternelles pour les jeunes de quatre ans.» Pleins feux sur les maternelles quatre ans. Ça, c'est ma parenthèse, ce n'est pas écrit, hein, pleins feux, c'est moi. «Ces 6,5 écoles sont évaluées, au prix d'aujourd'hui, de 20 millions chacune, pour un total de 130 millions de dollars. Il faudrait peut-être ajouter une surcharge de 30 % due à la rareté de la main-d'oeuvre du milieu de la construction.» Donc, prenez 130 millions, M. le Président. On ajoute 30 %. Ça commence à coûter cher le pied carré pour avoir des maternelles quatre ans. Surtout qu'on sait, hein, au final, là, il ne faut pas se leurrer, c'est des CPE dans des écoles, là. Ça commence à coûter cher.

Puis vous vous rappelez... Ah! non, peut que vous, vous n'étiez pas là, mais, lorsqu'on a fait les études de crédits détaillées, on a posé des questions. Combien ça coûte, un enfant dans les CPE versus à l'école? Ça, c'était avant de savoir que le ratio va être réduit, réduit, réduit. On pouvait dire qu'approximativement, dans un CPE, c'est 5 500 $, puis, à la maternelle quatre ans, ça va coûter 10 400 $. Puis ça, c'est juste au niveau des chiffres, puis ça, c'est sans compter la construction, là. C'est sans compter le béton, là. Donc, ça en fait, là. Ça va commencer à coûter pas mal cher, surtout qu'on sait : Il n'y en a pas, de problème, on peut dépenser comme on veut.

• (15 h 10) •

En ce... «ne tient pas compte des nouveaux élèves issus de l'immigration, dont le nombre est croissant dans notre commission scolaire.» Donc, la commission scolaire Marie-Victorin, M. le Président — pour situer tous ceux qui nous écoutent, on parle de la rive sud de Montréal — a une augmentation assez importante de nouveaux arrivants. Mais je peux vous dire une chose, M. Miville, président de la commission scolaire Pointe-de-l'Île, lui aussi connaît une explosion d'inscriptions. Une explosion. Quand on est rendus à accueillir 3 000 nouveaux élèves, ça en fait, du monde. Là, on ne parle pas de quatre ans, là, on parle de tous les... cinq ans, six ans, sept ans, partout. Là, c'est rendu, M. le Président, là, que, quand on a des jeunes qui mangent leur lunch dans le corridor, mais que la priorité, c'est maternelle quatre ans, moi, je me demande comment ça se fait qu'on n'est pas capable de, d'abord, dire : Nous allons prioriser les élèves actuels avant d'en ajouter d'autres, élèves, dans le réseau de l'éducation. Il me semble que la logique voudrait qu'on avance intelligemment dans ce projet puis qu'on dise : Effectivement, on va s'assurer que tous les élèves qui sont déjà dans le réseau de l'éducation, bien, on va les sortir des roulottes, on va les sortir des corridors, on va les mettre dans les belles classes. Après ça, quand on va arriver avec des belles écoles, on va pouvoir ajouter, en milieu défavorisé, davantage de ressources et des classes pour les maternelles quatre ans. Mais savez-vous quoi, M. le Président? Même sur le site Web du projet, là, qu'on avait instauré les lab-écoles... parce que ça, ça a porté fruit, le lab-école, puis on est très contents de voir que le nouveau gouvernement veut continuer là-dessus. Le problème, c'est que sur le site Web des lab-écoles, c'est marqué «le projet est suspendu à cause des maternelles quatre ans». Mais là on l'a relancé cette semaine, on est contents, alors j'espère que ça va pouvoir continuer, ce projet.

On continue dans la lettre de Marie-Victorin : «Il y a aussi des développements domiciliaires qui s'en viennent à grands pas. Les plans d'urbanisme de la ville de Longueuil et de la ville de Brossard nous indiquent qu'il faut s'attendre à plus de 32 500 nouveaux logements résidentiels d'ici quelques années. Nous sommes déjà en pénurie d'espace. Une forte proportion des locaux polyvalents ainsi que des locaux spécialisés comme les bibliothèques servent déjà de salle de classe, près d'une centaine de locaux. Nous accueillons en moyenne, depuis quelques années, plus de 1 200 nouveaux élèves par année, l'équivalent de deux écoles primaires.» Donc, M. le Président, en ce moment, la commission scolaire Marie-Victorin, c'est l'équivalent, juste pour les besoins actuels, de deux nouvelles écoles, qu'ils ont de besoin. «Il y a actuellement 53 classes dans les unités modulaires temporaires.» Quand on parle d'unité modulaire temporaire, M. le Président, ça veut dire roulotte. «Nous sommes à planifier d'en acheter près de 70, en septembre prochain, pour un total de 135 unités modulaires temporaires, parce que nous manquons d'espace pour asseoir nos jeunes dans une salle de classe.»

Moi, il me semble que je serais vraiment troublée de recevoir cette lettre, puis que, oui, je dirais : Je veux vous voir, je veux vous entendre, vous allez venir en commission. Puis, s'il faut qu'on recule sur le projet de loi de maternelles quatre ans, on le fera, parce qu'on veut être vos partenaires. Et que ce n'est pas vrai que les décisions viennent juste d'en haut, souvent, les décisions doivent venir d'en bas, ceux qui sont au premier, premier échelon avec les parents puis la réalité, au quotidien, des élèves. «Il y a actuellement 53 classes...» Pardon, ça, je l'ai déjà dit.

«Depuis, la commission scolaire Marie-Victorin a déjà demandé, dans le cadre de la mesure ajout d'espace pour la formation générale, les montants nécessaires pour construire deux écoles et cinq agrandissements. Il faut compter 18 mois pour la construction d'une école.» Ça, c'est si tout va bien puis qu'on n'a pas de dépassement de coûts puis qu'on n'a pas de dépassement d'horaire, hein? «Ajouter des locaux supplémentaires à des plans veut également dire que nous devons utiliser plus de terrain, alors qu'il nous en manque déjà. Le prix des terrains sur la rive sud s'élève à des millions, entre 5 et 10 millions, selon l'emplacement. Et les villes, contrairement à la directive du ministre de l'Éducation, ne veulent pas nous les donner à titre gracieux.»

Ah oui! M. le Président, ça, c'est vraiment, là, mal connaître comment ça fonctionne au Québec. Les villes ont des terrains. Pas parce que le premier ministre dit : Bien, c'est correct, vous, les villes, vous allez donner les terrains aux commissions scolaires, que... Les commissions scolaires, eux, vont être supercontents de les avoir à titre gracieux, à titre gratuit, c'est sûr. Les villes, pensez-vous qu'ils vont vouloir assumer ou éponger, en d'autres termes, une perte? Bien non, ils vont dire : Bien non, ils ont refusé. Montréal a refusé, puis, évidemment, Longueuil ont dit : Bien non, vous devez le payer. Donc, en quelque part, de deux choses l'une, soit que la ville est compensée par la commission scolaire, soit que la ville est compensée par le ministère de l'Éducation, mais il va falloir qu'on les paie, ces terrains-là, il n'y en a pas, de terrain gratuit. Alors, malheureusement, il va falloir que le gouvernement comprenne rapidement que, oui, il y a des terrains, il y en a quelques-uns de disponibles, puis il faut immédiatement allonger l'argent pour être en mesure, pour les commissions scolaires, de les réserver et de pouvoir ajouter des écoles. Ça, il faut que ce soit ajouté dans le cadre du budget, là, qui leur est alloué, ce n'est pas juste la construction, c'est le terrain qu'il faut acheter aussi, M. le Président.

«Également — je continue toujours la lettre, hein — nous tenons à vous signifier qu'il nous apparaît primordial de travailler de concert avec les CPE du milieu et de renforcir les liens, ce qui nous demande du temps et des ressources.» Cette phrase-là, M. le Président, est probablement une des plus importantes, la complémentarité. Moi, je me mets à la place des CPE. Depuis le début, je pense qu'ils sont... puis je ne veux pas mettre des mots dans leur bouche, ils sont présents, ils pourront parler par la suite si jamais on leur donne l'occasion après, on pourra nous le dire davantage... je pense qu'ils sont venus ici en toute bonne foi puis ils ont toujours dit oui, ils veulent travailler. Ils n'ont jamais dit : Non, non, non, on n'en veut pas, des maternelles quatre ans. Ils ont dit : Oui, O.K. vous voulez travailler en complémentarité, on embarque en complémentarité. Mais, quand on voit un projet de règlement qui dit : Bien, savez-vous quoi? On sait que vous avez déjà... vous faites face, vous aussi, à une pénurie puis que vous aussi, vous avez le ratio d'avoir deux éducatrices qualifiées sur trois, puis que ce n'est pas tous les endroits qui sont en mesure de le faire. Mais d'apprendre, par projet de règlement: Bien, savez-vous quoi, vos éducatrices les plus expérimentées, là, on va venir les prendre puis on va pouvoir les mettre dans le réseau de l'éducation... Parce qu'on le sait bien, le premier ministre l'a dit en février, lors de l'annonce des maternelles quatre ans, c'est tellement meilleur à l'école.

Il a dénigré tout ce qui se faisait en centre de la petite enfance, parce qu'il qualifiait ça, là, de technique de garde. Ce sont des gens, là, M. le Président, qui prennent soin des enfants à longueur de l'année. Tous ceux qui pensent qu'ils ne font qu'une formation technique collégiale de trois ans se trompent. D'ailleurs, à cet effet, il y a une vidéo, sur Facebook, d'une éducatrice fort émotive qui est devenue virale, qui explique, elle. Elle dit : Non, non. Oui, c'est vrai, j'ai une technique, mais je fais, et j'ai fait, et je ferai toujours de la formation continue, qui passe sa journée avec l'enfant, qui passe... On parle, là, de huit à 10 heures, puis même, malheureusement, des fois, dans des cas, 12 heures. Puis l'été, ça n'arrête pas.

Alors, le sentiment qui a été développé, le lien d'attachement qui est développé est très important. Puis la qualité de nos CPE, M. le Président, là, elle est remarquable. Or, ça, pour ne pas... Il faudrait peut-être que, même le langage du ministre, quand il parle des équipes de travail, bien, les CPE aussi sont des équipes de travail. Ils sont venus même le dire, qu'ils travaillaient en collaboration avec les CLSC, les différents professionnels. Alors, ça, c'est hyper important.

Alors, je termine la lettre : «La commission scolaire Marie-Victorin est administrée par 16 commissaires, qui participent au conseil, à la définition des orientations et de ses priorités. Ensemble, les commissaires se sont engagés à représenter la population, à faire des bons choix dans les dossiers visant à l'éducation des jeunes et des adultes.» Donc, ça, ici, on parle d'une demande de représentation. En d'autres mots, on parle devoir d'imputabilité, M. le Président. «Comme nous avons des réflexions sérieuses sur la mission et sur l'implantation des maternelles quatre ans, il nous ferait un grand plaisir de les partager avec vous avant que vous ne terminiez votre planification, ce qui nous permettrait de vous aider à vous aider.»

Ça, c'est la main tendue de la commission scolaire Marie-Victorin, qui ne demande qu'une chose : aider le ministre dans son déploiement des maternelles quatre ans.

M. le Président, en terminant, nous avons entendu plusieurs experts. Mme Brodeur, j'aimerais revenir sur Mme Brodeur, car elle est venue... elle avait préparé une présentation PowerPoint, La maternelle quatre ans pour le bien des enfants, qui a été préparée avec Yolande Brunelle. Et ils parlent, là-dedans... Puis juste pour situer Mme Brodeur... Qui est-elle? On parle d'une professeure, titulaire d'un Ph. D., qui a été doyenne de la faculté de sciences de l'éducation de 2009 à 2019, donc un mandat de 10 ans. Elle a déjà été... bien, elle est toujours orthopédagogue, psychoéducatrice, mais elle a participé, avec Yolande Brunelle, à l'implantation de maternelles quatre ans à l'école Saint-Zotique. Quand elle est venue, elle nous a dit : C'est extraordinaire, ce qu'on a fait, on l'a fait en partenariat avec la CSDM. Et, pour que ça fonctionne bien, bien, ça nous prenait un partenaire, puis c'était la CSDM.

Ils ont choisi quelle école? L'école Saint-Zotique. Savez-vous c'est quoi, l'indice de défavorisation de l'école Saint-Zotique, M. le Président? 10 sur 10. C'est pas mal le top, ça. Puis savez-vous quoi? Dans sa présentation, elle a dit... on lui a posé la question : Est-ce qu'on a besoin des commissaires scolaires, des commissions scolaires, pour réaliser ce projet des maternelles quatre ans? La réponse était affirmative, c'était : Oui, ça vous prend des partenaires. C'est un projet ambitieux, c'est un gros, gros projet. Ce n'est pas le temps de jouer dans les structures, ce n'est pas le temps d'embarquer dans les chicanes avec les commissions scolaires. Si vous voulez que votre projet fonctionne, vous devez être tendre la main avec les commissions scolaires puis devez travailler avec vos partenaires.

Présentement, ce n'est pas ça qu'on voit. Le refus d'entendre les différentes commissions scolaires m'indispose grandement. Et j'ajouterais que, oui, on entendu la Fédération des commissions scolaires, mais moi, dans mon comté, j'ai Marguerite-Bourgeoys, qui ne fait pas partie de la fédé, et, lorsque la commission scolaire qui s'est retirée... des Navigateurs s'est retirée, le ministre dit : Bien, moi, je suis prêt à entendre toutes les différentes commissions scolaires... Bien, s'il est prêt à entendre les Navigateurs, bien moi, je pense qu'il devrait entendre les quatre autres commissions que nous, on propose. Merci, M. le Président.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres membres qui désirent intervenir? Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Oui. Bien, évidemment, j'abonde dans le sens de mes collègues. Je dis «évidemment», parce que je pense que d'avoir une occasion d'échanger sur vraiment les aspects les plus concrets de l'implantation des maternelles quatre ans dans les commissions scolaires où il y a la plus grande fréquentation, où il y a le bassin d'enfants et la démographie la plus importante, je pense que ce serait essentiel, d'autant plus qu'on ne l'a pas, cette information-là de première main, de comment le ministre, son ministère, le gouvernement va réussir à répondre à cet énorme défi là de ressources, qui est lié à la question de l'implantation.

Alors, ma collègue y a fait référence, donc je ne reprendrai pas tout le détail, mais je veux juste qu'on soit conscient que, quand une commission scolaire comme celle de Marie-Victorin nous dit : Dans les prochaines années, la démographie et ce qui est planifié par les gens de la ville nous indiquent qu'il va y avoir 32 000 nouveaux logements, ce qui vient avec des enfants, vous vous imaginez ce que ça veut dire en termes d'infrastructure?

Et là on ne parle pas de tout le bassin des enfants de quatre ans, qui va devoir être intégré. Quand eux nous disent : On n'y arrivera juste pas, il me semble que c'est un point de vue qu'on devrait entendre, puis, minimalement, on devrait pouvoir échanger avec eux, puis voir quelles sont les réponses du ministre à ce cri du coeur qui est lancé par cette commission scolaire là mais par les autres commissions scolaires. Donc, c'est pourquoi j'appuie la motion de ma collègue de l'opposition officielle.

Mise aux voix

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Étant donné qu'il n'y a plus d'intervenant sur cette motion de la députée de Mille-Îles, nous allons mettre la motion aux voix.

Mme Rizqy : ...s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Je vais vous demander un vote nominal, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Donc, Mme Charbonneau (Mille-Îles)?

Mme Charbonneau : Pour.

La Secrétaire : Mme Rizqy (Saint-Laurent)?

Mme Rizqy : Pour.

La Secrétaire : M. Kelley (Jacques-Cartier)?

M. Kelley : Pour.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Pour.

La Secrétaire : M. Roberge (Chambly)?

M. Roberge : Contre.

La Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

La Secrétaire : M. Émond (Richelieu)?

M. Émond : Contre.

La Secrétaire : M. Chassin (Saint-Jérôme)?

M. Chassin : Contre.

La Secrétaire : Mme Grondin (Argenteuil)?

Mme Grondin : Contre.

La Secrétaire : M. Lemay (Masson)?

M. Lemay : Contre.

La Secrétaire : M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Jacques (Mégantic)?

Le Président (M. Jacques) : Abstention.

La Secrétaire : Alors, c'est rejeté.

Le Président (M. Jacques) : Est-ce qu'il y a d'autres motions préliminaires?

Mme Rizqy : J'aurais une autre motion préliminaire à déposer.

Le Président (M. Jacques) : Je reconnais la députée de Saint-Laurent, pour une troisième motion préliminaire.

Motion proposant d'entendre le Rassemblement
des garderies privées du Québec

Mme Rizqy : Je suis très contente que le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur soit en forme et qu'il vient de vacances.

Alors, M. le Président, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin :

«Que la Commission de la culture et de l'éducation tienne[...], avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende le Rassemblement des garderies privées du Québec.»

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 24)

(Reprise à 15 h 27)

Le Président (M. Jacques) : Nous reprenons nos travaux. Mme la députée de Saint-Laurent, vous disposez de 29 min 25 s. La parole est à vous.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, comme vous savez, on a entendu différents groupes, notamment l'Association québécoise des CPE, les services de garde subventionnés, mais les garderies privées non subventionnées, eux, on ne les a pas entendus. Est-ce qu'eux leur voix compte? Alors, je pense que c'est important d'entendre les garderies privées non subventionnées, parce qu'on a quand même entendu les garderies privées subventionnées, mais... a un impact pour les garderies privées non subventionnées.

D'ailleurs, il y a une analyse d'impact qui a été faite, analyse d'impact réglementaire, qui a été préparée par le ministère de l'Éducation. Lorsqu'on regarde à la page 4, M. le Président : «Impact. Dans un premier temps, les modifications proposées permettaient aux établissements d'enseignement privés qui le désirent, dès la sanction de la loi et en vue des années scolaires 2020‑2021, d'offrir la maternelle quatre ans à temps plein. Ainsi, elle n'impliquerait aucune nouvelle obligation ni aucun coût supplémentaire pour ces établissements-là.

«Dans un second temps, il est possible que le libre choix accordé aux parents en fait de maternelles à temps plein et les services de garde éducatifs à l'enfance pourrait entraîner une perte de clientèle pour le réseau des services de garde éducatifs à l'enfance — donc, ici, il y a une admission qui peut entraîner une perte de clientèle — et ce, principalement pour les garderies non subventionnées et pour les personnes responsables d'un service de garde en milieu familial.

«Deux scénarios sont analysés, soit une fréquentation de maternelle à temps plein, par 50 %, ou 80 % des enfants de quatre ans à compter de 2023‑2024. Les garderies non subventionnées pourraient avoir à composer avec un manque à gagner de 88,3 millions de dollars, scénario à 50 %, ou 182 millions de dollars de manque à gagner, scénario à 80 %.» Ce manque à gagner, M. le Président, c'est une perte annuelle récurrente. «La perte de clientèle dans les garderies non subventionnées pourrait entraîner un besoin d'environ 59 postes, un scénario 50 %, ou l'abolition d'environ 910 postes d'éducatrices ou d'éducateurs à l'enfance, scénario avec 80 %. Moyenne de 10 enfants par éducatrice ou éducateur.»

M. le Président, quand on lit ces chiffres, là, ça a l'air abstrait. Alors, prenons une réalité. Les trois garderies de Lévis, suite à l'analyse d'impact, là, quelques jours après, il y a trois garderies ici qui ont fermé puis que les parents, là, ont appris ça, là, dans les médias. Ils sont arrivés chercher leur enfant, il y avait une belle petite lettre sur la porte, là : Demain, on est fermé. C'est fini. Bien, chaque garderie privée qui ferme, bien, c'est 80 enfants, c'est 160 parents inquiets. Alors, c'est important.

• (15 h 30) •

Les garderies privées, c'est aussi des entrepreneurs, c'est des gens qui ont investi, qui ont mis de l'argent, qui ont des attentes, que le gouvernement les a accrédités, qui rencontrent toutes les normes, toutes les conditions. Puis là on est en train de leur dire : Bien, vous, là, on n'a pas envie de vous entendre. On ne veut pas savoir c'est quoi, votre impact. On ne veut pas entendre comment vous, là, on va vous procéder chez vous. On ne veut pas entendre comment que votre garderie privée, vous faites du dépistage. On ne veut pas entendre comment vous êtes en mesure de travailler en collaboration avec tout le réseau. On ne veut pas vous entendre.

Vous comprendrez, M. le Président, qu'à défaut de pouvoir les entendre ici, bien, il y a des journalistes qui sont allés voir qu'est-ce qu'il se passait sur le terrain. Maternelles quatre ans, c'est la panique, dans les garderies. Article du 20 février, écrit par Tommy Chouinard : «Québec, c'est la panique, dans les garderies privées, et la peur gagne les éducatrices en milieu familial devant les résultats de l'analyse d'impact réalisée par Québec sur le déploiement des maternelles quatre ans.» Cette analyse d'impact à laquelle je faisais référence, M. le Président. Selon cette analyse publiée dans La Presse mercredi, «l'implantation de ce nouveau programme partout au Québec causerait des pertes de 187 à 385 millions de dollars par année, en 2023‑2024, aux éducatrices en milieu familial, aux garderies privées non subventionnées en raison d'une baisse de la clientèle. De nombreuses fermetures sont à prévoir.» On parle, oui, des enfants, on parle aussi des gens qui ont investi là-dedans, qui se sont dit : Bien... Oui, parce qu'évidemment, là, quand on se lance en affaires, habituellement, on choisit un projet qu'on aime, puis ça, ici, c'est la petite enfance.

«Des représentants de la Fédération des intervenants en petite enfance du Québec, la FIPEQ, qui représente les éducatrices en milieu familial notamment, ont interrompu leur rencontre à Montréal pour manifester leur mécontentement devant les bureaux du ministère de la Famille. "C'est inquiétant, ce qu'il se passe. On représente des femmes qui adorent leur métier, et elles ont peur de perdre leurs enfants, parce que le gouvernement fait la promotion de la maternelle quatre ans au détriment de notre service, et dénigre notre métier, et justifie la maternelle quatre ans en nous rabaissant."» Ça, c'était la présidente FIPEQ-CSQ, Valérie Grenon. Elle fait allusion aux propos tenus la semaine dernière... «Elle faisait, en fait, allusion aux propos tenus par le ministre à l'effet que les parents d'enfants en difficulté auront bientôt le choix entre une garderie avec deux tiers des employés qui sont des techniciennes de garde ou une maternelle quatre ans avec des enseignantes et toute l'équipe des spécialistes de l'école primaire. Elle ajoutait que c'est une évidence que la seconde option est préférable.»

M. le Président, je vous rappelle que, dernièrement, on a appris par projet de règlement que finalement c'est les éducatrices qu'on sort du réseau des services de garde qu'on envoie à l'école. Bon, entre guillemets, «"on capote", réagit, de son côté, la présidente de la Coalition des garderies privées non subventionnées de Québec, Marie-Claude Collin. Elle accuse la Coalition avenir Québec de se contredire en rappelant que le parti vantait le modèle d'affaires des garderies privées il n'y a pas si longtemps. Elle craint maintenant que certaines soient acculées à la faillite.»

Moi, je vais vous dire, M. le Président, parenthèse personnelle, pour un gouvernement qui se dit entrepreneur, il cause un petit peu de panique dans le réseau des entrepreneurs. «Il faut être conscient qu'on peut perdre nos maisons là-dedans. Ça va être l'enfer.» Ça, c'est réel, là, M. le Président, là. On a des entrepreneurs, plusieurs femmes entrepreneures, que, depuis qu'il y a eu le projet maternelles quatre ans, ont des craintes légitimes. Elles demandent aussi à être entendues. Je ne vois pas pourquoi qu'on ne pourrait pas les entendre. Il va y avoir un impact, du propre aveu du ministère de l'Éducation avec son analyse d'impact. Ils sont probablement ceux qui sont les plus touchés.

On continue. Même son de cloche au regroupement des garderies privées du Québec, qui représente des établissements subventionnés ou non. C'est la panique. «"On a vraiment que nos enfants restent dans nos services de garde", a soutenu sa vice-présidente, Julie Plamondon. Selon cette ex-enseignante au primaire, "des enfants de quatre ans, ça ne va pas dans les écoles, ils ont besoin d'un endroit structuré dans un petit milieu." Mme Plamondon s'oppose à l'annonce de mercredi du ministre de la Famille : "L'ajout de 2 500 places subventionnées, surtout en centres de la petite enfance, à l'exception du déploiement de 11 000 autres places promises dans le passé, je pense qu'on n'a pas besoin de ça", a-t-elle dit, en soulignant que certains de ses membres ont de la difficulté à combler toutes leurs places. Le ministre fait valoir, quant à lui : 42 000 enfants attendent une place et qu'ils sont inscrits au guichet unique.»

On aurait aimé ça, les entendre, justement, les garderies privées non subventionnées, pour voir comment on fait aussi... Eux, est-ce qu'ils peuvent rentrer dans le réseau? Est-ce qu'on peut les convertir? On a bien des questions à leur poser. Est-ce qu'ils veulent rester non subventionnés ou est-ce qu'ils voudraient prendre part puis devenir des garderies subventionnées? Bien, toutes ces questions-là, M. le Président, on n'a pas de réponse, parce qu'on ne veut pas les entendre, sauf si, aujourd'hui, le ministre nous fait une grande surprise puis dit : Bien, on va les entendre.

Alors, vous comprendrez qu'aujourd'hui, quand on lit autant d'articles, il y en a quand même d'autres, là, parce qu'il y a une grogne chez les maternelles quatre ans, on peut lire ça dans... pardon, Maternelles quatre ans cause la grogne chez les garderies privées, ça, c'est un article de 2018 aussi. On a l'autre : Maternelles quatre ans : les garderies perdraient des centaines de millions.

Je ne ferai pas état de toutes les lectures qu'on pourrait faire à ce sujet, je pense que c'est clair qu'il y a une crainte, et c'est pour ça que c'est pertinent de les entendre pour trouver des solutions. Parce que l'exemple que je vous ai donné des trois garderies privées, à Lévis, qui ont fermé, bien, il est important, parce qu'on se rappelle, ça, ça a fait les manchettes, et, rapidement, le gouvernement a voulu agir pour sauver ces trois garderies-là, pour trouver une solution. Le ministre de la Famille est intervenu, ils ont dit : Bien, on essayer d'aménager quelque chose rapidement, là, on ne peut pas faire ça à la pièce.

Puis là, écoutez, là, on ne veut pas non plus que le gouvernement réagisse comme il a réagi avec la fermeture de Capitales Médias. C'est une mort qui arrivait, annoncée, mais personne ne le savait. Bien, non. Ça faisait des mois, des mois, là, qu'on savait qu'il y avait un problème puis qu'on voulait agir dans le dossier des médias régionaux.

Là, on sait qu'il va y avoir un problème assez important avec les garderies privées non subventionnées, on le sait. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire en amont? Parce que, clairement, c'est eux qui subissent un impact important. Et, lorsqu'on parle de pertes de centaines de millions de dollars, là, je pense qu'on ne peut pas attendre que d'autres garderies comme Lévis ferment pour réagir. Ça prend un plan de match, un plan d'action, puis la meilleure façon de le faire, c'est d'abord de les rencontrer ici pour que, tous les parlementaires, on puisse leur poser des questions, comprendre leur réalité puis voir comment que, maintenant, on peut faire pour faire mieux. Faire plus, faire mieux, ça, je pense, c'était votre slogan, mais peut-être le temps de le faire puis de l'appliquer. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je veux juste corriger certains faits. Ma collègue a dit que, peu de temps après la publication de documents d'analyse d'impact réglementaire, il y a des garderies qui ont fermé, spécifiquement à Lévis, a fait, peut-être, une espèce de lien de cause à effet. Or, il n'y a pas de lien de cause à effet absolument, il y a un problème de ressources professionnelles. Il n'y a aucun lien avec le déploiement des maternelles quatre ans et la fermeture de ces trois garderies. Ceci dit, je me souviens avoir rencontré ce regroupement en présence du ministre de la Famille, et, oui, on travaille en équipe. Et je répète que nous avions adopté la liste des groupes que nous avons entendus en auditions particulières.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission? Je reconnais la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : ...Président. Bon, évidemment, mes collègues, ici, savent que, Québec solidaire, on préférait que tous les milieux de garde soient publics et soient régis, mais, quand même, je pense que c'est important d'entendre autant d'intervenants que possible pour éclairer nos décisions, et surtout qu'on ne devrait pas choisir d'entendre seulement des intervenants qui partagent notre opinion politique. Donc, comme c'est clair qu'on s'attend à un impact important sur les garderies privées non subventionnées en particulier, c'est le ministère lui-même qui le dit, j'appuie la motion de ma collègue.

Mise aux voix

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui désirent intervenir? Il n'y a pas d'autre intervenant. Nous allons mettre la motion aux voix.

Mme Rizqy : Par appel nominal, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Jacques) : Mme la secrétaire, si vous pouvez procéder à l'appel nominal.

La Secrétaire : Mme Rizqy (Saint-Laurent)?

Mme Rizqy : Pour.

La Secrétaire : M. Kelley (Jacques-Cartier)?... Pardon. Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Pour.

La Secrétaire : Mme Charbonneau (Mille-Îles)?

Mme Charbonneau : Pour.

La Secrétaire : M. Roberge (Chambly)?

M. Roberge : Contre.

La Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

La Secrétaire : M. Émond (Richelieu)?

M. Émond : Contre.

La Secrétaire : M. Chassin (Saint-Jérôme)?

M. Chassin : Contre.

La Secrétaire : Mme Grondin (Argenteuil)?

Mme Grondin : Contre.

La Secrétaire : M. Lemay (Masson)?

M. Lemay : Contre.

La Secrétaire : M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Jacques (Mégantic)?

Le Président (M. Jacques) : Abstention.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Mme Rizqy : Avec consentement, j'aimerais inscrire le vote du député de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Jacques) : Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement.

M. Kelley : Pour.

Le Président (M. Jacques) : La motion est rejetée. Est-ce qu'il y a d'autres motions préliminaires qui seront présentées?

Mme Rizqy : Bien, M. le Président, je n'ai pas d'autre motion préliminaire.

Étude détaillée

Le Président (M. Jacques) : Bien, merci. Nous allons, donc, procéder à l'étude article par article du projet de loi. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Roberge : M. le Président, j'ai une petite émotion, là. On commence. Non, mais c'est bien. On est content. Ça va bien. Et je suis content. Sincèrement, au-delà des discussions, je suis content de l'ambiance dans laquelle on mène nos travaux. Je pense qu'il faut préserver ça. Donc, voilà : L'article 1 de la Loi sur l'instruction publique serait modifié par le remplacement, dans le troisième alinéa, de «5 ans» par «4 ans».

Et j'explique brièvement. Donc, l'article 1 du projet de loi modifie l'article 1 de la Loi sur l'instruction publique afin d'y reconnaître le droit au service de l'éducation préscolaire pour tout enfant ayant atteint l'âge de quatre ans à la date déterminée dans le régime pédagogique. À cette fin, l'article 1 de la Loi sur l'instruction publique est modifié pour que l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire y soit fixé à quatre ans plutôt que cinq ans.

• (15 h 40) •

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 1?

Des voix : ...

Le Président (M. Jacques) : Bon. Je reconnais la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. J'aurais peut-être une petite question. Dans le texte actuel, M. le ministre de... avec consentement, là, habituellement on se parle de façon très cordiale ou bien on se regarde.

Une voix : ...

Mme Rizqy : Alors, parfait. Alors, j'aimerais savoir, lorsqu'on lit le texte actuel, on parle d'éducation préscolaire qui est fixée à cinq ans. On passe maintenant à l'éducation préscolaire qui est fixée à quatre ans. Est-ce que vous préférez, peut-être, changer le terme puis de parler de maternelle, on vous voulez garder encore le terme «éducation préscolaire» puis ça... est quatre ans?

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Oui. Bien je préfère qu'on...

Le Président (M. Jacques) : Est-ce que vous voulez que j'intervienne à chaque reprise ou vous voulez avoir un discours...

M. Roberge : Sincèrement, je préfère. Oui. Puis ça dépersonnalise, des fois, pour éviter des dérapages.

Le Président (M. Jacques) : Parfait.

M. Roberge : Mais ce n'est pas qu'il y en ait à ce jour. Puis je ne pense pas qu'il va y en avoir, mais c'est peut-être un gardien de la bonne façon de procéder.

Bien, écoutez, je pense qu'il faut le laisser comme ça. Quand on parle de la maternelle quatre ans, la maternelle cinq ans, d'ailleurs, c'est le cycle du préscolaire. Donc, il faut appeler les choses davantage de cette façon-là. Donc, je pense qu'il faut garder le terme «préscolaire», un peu comme, maintenant, au primaire, on ne dit plus première année, deuxième année, on dit le premier cycle du primaire, le deuxième cycle du primaire, etc. Donc, je pense que le vocable est correct. C'est simplement de changer cinq ans pour quatre ans.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Ça va aller, j'ai ma réponse. Merci.

Le Président (M. Jacques) : Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : Merci. Je devance peut-être un peu, mais le ministre va pouvoir m'éclairer. Dans la loi précédente, avant modification, le cinq ans et le quatre ans permettaient au ministre un discrétionnaire qui faisait en sorte que les quatre ans pouvaient quelquefois embarquer plus vite dans le système. Est-ce que ça veut dire que, là... Puis là je vous le dis d'avance, M. le ministre, je devance un peu, là, mais, pour moi, c'est une réflexion. Est-ce que ça veut dire que, maintenant, le trois ans va être considéré si le parent trouve que son autonomie est assez grande pour rentrer au préscolaire, préscolaire, préscolaire quatre ans? Je ne sais pas si vous me suivez dans le principe. Parce que vous avez cette discrétion-là, d'embarquer quelqu'un plus jeune.

M. Roberge : Je vous suis sur le principe. Je vais y répondre très brièvement, parce qu'il y a un article spécifiquement là-dessus. Si on veut en débattre, on en débattra en long, en large et en travers.

Mme Charbonneau : À ce moment-là. O.K.

M. Roberge : À ce moment-là. Mais votre question, je comprends pourquoi elle survient à ce moment-ci. Et, plus tard, on va se positionner précisément là-dessus. Puis je comprends que ça fasse un enjeu. Il y a quand même une différence d'admission plus tôt quand on a cinq ans puis quand on a quatre ans, là. Un an, à cet âge-là, c'est beaucoup, beaucoup de temps. Mais il y a un article précisément là-dessus, l'article 5, où on pourra en débattre, de cette pertinence, ou pas.

Mme Charbonneau : On va y arriver. Parfait. Merci.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : ...nous éclairer globalement. Puisque c'était déjà possible pour des enfants de quatre ans, dans certains milieux, de fréquenter la maternelle, pourquoi, à l'époque, cette modification-là n'était pas nécessaire, donc, d'inscrire le quatre ans dans la loi comme vous le faites et que, maintenant, c'est nécessaire?

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : C'est que, là, ça devient la norme. Maintenant, le préscolaire... L'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire serait quatre ans, mais ce n'est pas obligatoire, pas plus que c'est obligatoire d'envoyer son enfant à cinq ans en ce moment, là. On ne rend pas obligatoire ni la maternelle quatre ans ni la maternelle cinq ans. Donc, le préscolaire n'est pas obligatoire, mais, de manière générale, dans la mesure où, éventuellement, là, le temps qu'on se rende, l'accès sera universel non obligatoire. Des fois, il y a une nuance, hein? Quand on dit «accès universel», les gens pensent, ça veut dire obligatoire pour tous, là. L'accès est universel, mais il n'y a rien d'obligatoire. Bien, de manière générale, maintenant, ça serait quatre ans qu'on entre au préscolaire. On peut entrer à cinq ans, mais ça serait quatre ans, l'âge d'entrée.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Bien, c'est ça, je pense que c'est important de faire ressortir ça, parce que ça expose vraiment ce qu'est la volonté du gouvernement, la philosophie du gouvernement, qui est vraiment d'amener les enfants de quatre ans à la fréquentation scolaire. C'est son choix.

Mais c'est que, depuis que cette espèce d'engagement là et d'orientation ont été prises, on a vu beaucoup de modulations dans le discours public du gouvernement, qui en est venu à dire, dans les derniers temps, que c'était en fait un choix, qu'on donnait juste une option supplémentaire et que les parents allaient continuer librement à décider ce qui était bon pour leurs enfants. Est-ce qu'on veut les envoyer en CPE, en service de garde à la petite enfance ou en maternelle quatre ans? Or, je pense que c'est très clair que, malgré ce discours-là, qui a beaucoup évolué et auquel on est rendu, parce que le gouvernement, j'imagine, a fait la même lecture que nous et il a vu que les parents n'embarquaient pas dans l'idée de rendre universel et de favoriser, pour tous, la maternelle quatre ans, possiblement au détriment d'autres services éducatifs, il a modulé son discours. Mais l'intention du gouvernement, ce n'est pas simplement de faire cohabiter deux systèmes éducatifs parallèles. De toute façon, nous, on le dit, qu'on trouve que c'est assez particulier, parce que le vrai libre choix, il n'est pas là, et c'est quelque chose à quoi revient souvent ma collègue de Sherbrooke, il n'est pas là tant qu'on n'offre pas cette même garantie-là pour la fréquentation des CPE.

Mais je veux juste le faire ressortir, parce que je pense que c'est important, comme le ministre l'a dit, de manière transparente, je pense que c'est effectivement ça, l'orientation du gouvernement. Mais, si c'est ça, l'orientation du gouvernement, il ne faut pas que le discours du gouvernement devienne édulcoré et qu'on essaie de dire aux parents : Nous, tout nous est égal, toutes choses étant, par ailleurs, constantes, puis les parents vont avoir le libre choix. Ce n'est pas ça. Le choix du gouvernement, c'est d'amener, le plus possible, le plus rapidement possible, les enfants de quatre ans à fréquenter l'école. Je pense juste que c'est clair, puis il faut se le dire clairement, ici, que, si on amorce les travaux, il faut que les bases soient les mêmes pour tout le monde, et je comprends que c'est ça, l'enlignement du gouvernement.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Bien là, je m'inscris en faux, là, c'est le gouvernement qui va dire quel est le discours du gouvernement. Et l'article a été... on l'a rédigé quelque part en janvier, on l'a rendu public, il me semble, en février, il n'y a pas eu de changement là-dedans. Ce qu'on précise, puis...

Puis, depuis le début, il a toujours été question d'un choix pour les parents, et ça reste un choix. Quand on parle de changer ce qu'on appelle l'âge d'admissibilité, c'est qu'on crée le droit à l'éducation des quatre ans.

En ce moment, dans le réseau, les parents ont le droit à l'éducation pour leurs enfants dès cinq ans. Un parent qui veut inscrire son enfant à cinq ans ne peut pas se faire dire : Bah! Désolé, on n'a pas de classe, bien, on a une pénurie de locaux, on a une pénurie de ci, on n'a pas prévu ça, on n'a pas agrandi l'école en fonction de ça. Donc, on voyait arriver les enfants, mais on n'a pas d'obligation de vous accueillir à cinq ans. Puis, n'ayant pas d'obligation, bien, on n'a pas construit de classe, ça fait qu'on n'a pas de place. Ce ne serait pas légal, en ce moment, de faire ça. En ce moment, hein, on dit : L'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est fixé à cinq ans. La maternelle cinq ans n'est pas obligatoire, mais il y a universalité d'accès. On ne peut pas imaginer qu'une commission scolaire dise : Je n'ai pas de place pour votre enfant à cinq ans, gardez-le chez vous, on n'a pas de place. Donc, elle est là, la nuance.

Il ne s'agit pas de dire : La vision du gouvernement, c'est que tous les enfants de quatre ans doivent aller en maternelle. La vision du gouvernement, c'est que l'âge d'admissibilité... c'est qu'on se crée, à nous, État, une obligation d'accueillir tous les enfants dont les parents feraient ce choix-là, et c'est là, la nuance. Parce qu'à cinq ans il y a le droit à l'éducation, en ce moment. Elle n'est pas obligatoire, mais il a le droit, à cinq ans, dans l'État de droit actuel, puis on souhaite qu'avec l'adoption du projet de loi et la sanction plus tard, bien, il y ait ce même droit plus tard pour les quatre ans.

Mais, le jour où on le votera, l'article 1 ne s'appliquera pas tout de suite, parce qu'on sait bien que, supposons qu'on l'adopte, je ne sais pas, moi, en septembre, le réseau n'est pas prêt tout de suite, là, on le sait bien. Voilà.

Le Président (M. Jacques) : ...M. le ministre. Mme la députée de Joliette.

• (15 h 50) •

Mme Hivon : Bien, je veux juste faire ressortir quelque chose qu'on fait ressortir depuis un bon moment, c'est qu'évidemment, à partir du moment où le gouvernement se contraint lui-même parce qu'il en fait un droit dans sa loi, oui, à terme, donc d'ici quelques années, ça va devoir être disponible pour tout enfant, qu'importe l'endroit au Québec, qu'importe le milieu, dont les parents vont lever la main pour dire : Je veux qu'il fréquente la maternelle quatre ans. Donc, on comprend que c'est l'orientation du gouvernement.

Mais ça, ça se peut très bien que ça ne soit pas sans conséquence, parce qu'à partir du moment où le gouvernement crée ce droit-là il va devoir livrer l'accès à ce droit-là, donc mettre toutes les ressources nécessaires pour que tout enfant, n'importe où au Québec, puisse y avoir accès, qu'importe ce que ça veut dire en termes de territoire, de transport scolaire, de nouvelles classes, de nouvelles ressources. On n'a pas du tout le même pendant pour un parent qui lèverait la main puis qui dirait : Moi, je veux que mon enfant puisse avoir accès à une place en CPE.

Donc, je veux juste faire ressortir, à travers cet échange-là, le fait que ce n'est pas sans conséquence. Parce qu'à un moment donné, avec des ressources limitées, des aléas économiques et sur les revenus de l'État qui peuvent arriver, bien, le gouvernement va être obligé de livrer cet engagement-là et l'accès à ce droit-là, alors qu'il n'aura aucune obligation de livrer des nouvelles places en CPE, même si, aujourd'hui, il nous dit : Je vais en livrer à peu près 10 000 nouvelles. Je rappelle qu'il y a 42 000 enfants au guichet unique qui n'ont aucune place. Il n'y en a pas, d'obligation, puis, même, il pourrait y avoir des reculs au nom de ce nouveau droit qu'il crée. Donc, ce n'est pas sans conséquence.

Ça fait que je veux juste qu'on soit clair ici qu'il y a une orientation très, très limpide qui est prise par le gouvernement, et que, quand on l'enrobe, en disant : Il y a un libre choix des parents, bien, il y a un libre choix, mais on choisit pas mal pour eux qu'à terme c'est la maternelle quatre ans, parce qu'on va s'assurer qu'on développe ça, alors qu'on n'a aucune garantie que les autres services vont être développés.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Roberge : Sauf qu'on développe les autres options pour qu'il y ait une liberté de choix, là. On a déjà dit qu'on allait ouvrir davantage de places, qu'il y avait des millions qui étaient au rendez-vous pour construire, agrandir nos CPE et offrir ces choix-là aux parents.

Et, la dernière fois que c'est arrivé... Quand on a mis cet article 1 là à cinq ans, c'était un gouvernement du Parti québécois, sous Lucien Bouchard, et, quand il a mis ça, il a créé exactement ce qu'on fait aujourd'hui pour les quatre ans, cette obligation pour le gouvernement de répondre aux besoins des parents qui allaient dire : Oui, mon enfant va aller en maternelle cinq ans temps plein.

Au départ, ça n'existait... ça n'a pas toujours existé, la maternelle cinq ans. On l'oublie, là. Ça fait un peu plus de 20 ans, puis personne ne reculerait derrière.

Une voix : ...

M. Roberge : Bien, je m'excuse, vous demanderez la parole puis vous regarderez, mais la maternelle cinq ans temps plein accessible et universelle, ça a 20 quelques années. C'est sous le gouvernement de M. Bouchard en 1997 et c'est là que le gouvernement s'est donné comme obligation : bien là, le parent qui veut inscrire son enfant en maternelle cinq ans doit avoir une place.

Et ça va, bien sûr, avoir des conséquences, mais je crois bien qu'elles seront positives. Je crois bien qu'elles seront positives, parce que, d'abord, on... le ministère de l'Éducation, le ministère de la Famille vont déployer, des deux côtés, les deux réseaux, et aussi, bien, parce qu'évidemment des enfants de quatre ans, quand il y en a qui vont dans un réseau, ça peut libérer des places en milieu familial, ça peut libérer des places en milieu privé ou ailleurs.

Le Président (M. Jacques) : Merci. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : ...sur ce point-là, vous allez me permettre, M. le Président, juste d'amener quand même une précision qui est importante, une nuance importante. Quand on a créé les maternelles cinq ans à temps plein, on n'entrait pas en dédoublement de services. On créait un nouveau service, une nouvelle fréquentation scolaire pour les enfants de cinq ans, alors qu'il y avait des services de garde éducatifs, puis que la politique familiale est venue pour la question des enfants, ensuite, de 0-5 ans avec les CPE. Donc, ce n'est pas du tout la même réalité, là. Je comprends ce que le ministre nous dit, mais, quand il fait cette comparaison-là, ça, ça ne peut pas tenir la route.

Ce qui fait qu'en ce moment l'inquiétude est là, et qu'on remet en question le discours du libre choix du gouvernement, c'est qu'on veut nous faire croire que les parents, comme bon leur semble, vont avoir accès à l'un ou l'autre des services, alors qu'il y a une superposition des services pour un groupe d'âge, pour les enfants de quatre ans, alors que, dans les faits, le droit, il n'est créé que pour la fréquentation des maternelles quatre ans et non pas pour les services de garde éducatifs.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : M. le Président, je veux aller dans le même sens que ma collègue. Ça me fait vraiment grincer des dents aussi quand j'entends le gouvernement parler de libre choix, parce que le libre choix, en ce moment, il n'existe pas même dans les milieux où il y a déjà des classes de maternelle quatre ans et il n'existera pas non plus avec cette loi-là qu'on nous propose.

En ce moment, là, le parent d'un enfant de quatre ans qui dit : Je veux... qui a un enfant de quatre ans qui est à la maison et qui dit : Je veux mettre mon enfant de quatre ans dans un milieu éducatif l'année prochaine, réalistement, est-ce que le ministre pense que ce parent-là peut avoir une place en CPE pour son enfant? La réponse, c'est non. La réponse, c'est que ce n'est pas possible, à quelques mois d'avis comme ça, d'avoir une place pour un enfant de cinq ans en CPE simplement parce qu'on a décidé de faire ce choix-là pour son enfant... de quatre ans, pardon, alors qu'en ce moment, dans certaines régions, dans certaines commissions scolaires, c'est possible pour un enfant de quatre ans, dans certains milieux, c'est possible.

Et le ministre souhaite que ce soit possible dans toutes les commissions scolaires dans un horizon, bien, on ne sait pas trop lequel exactement, là, disons, cinq, 10 ans, cinq ans. Bon. Dans cinq ans, le ministre souhaite que ce soit possible qu'un parent, là, qui, au mois de juillet, dit : Je veux inscrire mon enfant de quatre ans dans une maternelle quatre ans, qu'il puisse le faire. Mais c'est tant mieux, sauf que ce parent-là, il n'aura pas le choix parce qu'il ne pourra pas décider, au même mois de juillet, d'inscrire son enfant dans un CPE ou dans n'importe quel autre service de garde, il n'y en aura pas, de place, c'est ça, la réalité. Même avec les annonces qui ont été faites pour déployer des places dans le réseau de CPE, en ce moment, la différence, c'est que le réseau de CPE n'a pas l'obligation, en ce moment, d'accueillir tous les enfants. Ce réseau-là n'a pas l'obligation de le faire, il peut tout à fait dire : Écoutez, on n'a pas de place, mettez-vous sur la liste. Si on a une place au mois d'avril prochain, là, par hasard, là, on vous appellera.

Donc là, on développe, on l'a dit, il y a une dizaine de milliers de places qui vont être développées, mais il n'y a pas de cible, en ce moment, d'offrir les services de CPE à 50 % des enfants de quatre ans, il n'y a pas de cible pour ça, ou à 50 % des enfants en général, comme on en a une, pourtant, pour les maternelles quatre ans. Il n'y a pas de plan pour reconnaître, non plus, ce droit-là à un service éducatif de qualité pour les enfants de quatre ans ou moins. Donc, c'est clair que l'accès ne sera pas le même en ce moment. Je trouve qu'on ment aux parents quand on leur dit qu'ils auront le libre choix avec ça. Ça, c'est une option de plus, mais ce n'est pas un libre choix. Donc, je trouve ça important de le préciser.

Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme la députée de Sherbrooke. M. le ministre.

M. Roberge : Plus il y aura de places, plus il y aura de parents qui ont un choix, évidemment. Alors, en ce moment, on est encore plus loin du libre choix, on prend la place qu'on peut, si on réussit à avoir une place. En ajoutant des places dans un réseau, on va permettre davantage aux parents d'offrir ce choix-là. Quand on parle de libre choix, c'est dans le sens qu'on n'oblige pas la fréquentation du préscolaire ni quatre ans ni cinq ans, et qu'on crée des places, et c'est quand même quelque chose. Les gens vont nous dire : Bien oui, mais il faudrait aller plus loin, il faudrait faire plus. C'est correct, mais on fait plus que ce que personne n'a jamais fait. Alors, c'est quand même quelque chose d'avoir cette ambition de développer un réseau public universel dans notre réseau d'écoles publiques accessible et gratuit. Ah! des gens disent: Bon, on pourrait faire plus, on pourrait déployer l'autre encore plus. On déploie les deux, mais on peut toujours, toujours, toujours faire plus, puis on a énormément d'ambitions pour nos enfants puis pour les réseaux, les réseaux. Mais, sincèrement, on met quelque chose qui n'a jamais été mis sur la table, et on ne le met pas au détriment, parce qu'on fait avancer les deux réseaux. Voilà.

Mais je pense que c'est quand même exceptionnel, pour les parents, de voir que le gouvernement veut leur offrir cette liberté de choix. Je comprends que vous dites : Bon, il pourrait y en avoir encore plus pour avoir plus de liberté. Mais, en ce moment, il y a quelque chose comme autour de 25 000, je ne veux pas me tromper dans les chiffres, là, mais entre 20 000 et 25 000 places en CPE pour des quatre ans, quelque chose comme entre 4 000 et 5 000 places pour les quatre ans en maternelle quatre ans. Donc, évidemment, qu'en ce moment, si on veut se rapprocher de l'équité et s'il y a un réseau à développer, c'est le réseau des maternelles, on va quand même rajouter 12 000 places à contribution réduite dans un service qui est vraiment de grande qualité. Donc, on va augmenter les deux réseaux, mais il y en a un qui est vraiment sous-développé par rapport à l'autre. Alors, voilà.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Sherbrooke.

• (16 heures) •

Mme Labrie : ...quand même important de préciser que les 12 000 places qui vont être déployées dans le réseau de CPE, c'est des places de zéro à quatre ans. Donc, on s'entend que, quand même, on pourrait minimalement diviser ça par quatre, pour essayer d'évaluer peut-être combien il y aura de places pour des enfants de quatre ans parmi celles qui seront déployées, mais c'est hypothétique, là, on ne connaît pas la répartition exacte, peut-être même qu'il y a plus de places pour poupons là-dedans, et c'est fort probable, d'ailleurs. Donc, je pense qu'il faut être prudent avec ça.

Et, je le répète, là, j'en ai vraiment contre le discours qui laisse croire aux parents qu'ils auront le choix. Ces parents-là n'ont pas le choix. Les parents doivent prendre ce qui est disponible en ce moment. Ils n'ont pas le choix pour leur enfant de neuf, 10 mois, 11 mois, un an quand le congé parental se termine, et ils ont... moins le choix à quatre ans. C'est extrêmement difficile, peu importe le milieu, peu importe. C'est impossible ou presque d'avoir son premier choix, peu importe c'est quoi, le premier choix du parent, que ce soit le milieu familial, le milieu privé, subventionné ou pas, ou le CPE, ou la maternelle quatre ans. C'est pratiquement impossible pour un parent d'avoir accès à son premier choix en ce moment, peu importe l'âge des enfants, et c'est encore pire plus l'enfant est rendu grand. Et, même, c'est encore pire pour certains parents selon le mois de naissance de leur enfant, tellement que le système n'est pas optimal en ce moment.

Donc, vraiment, je pense que le gouvernement et le ministère devraient faire attention quand ils laissent entendre aux parents qu'ils auront le choix. Ce n'est pas vrai. Le ministère peut faire une campagne de publicité pour comparer les réseaux, montrer les options qui s'offrent aux parents, mais la réalité, c'est qu'un parent qui regarde cette documentation-là puis qui dit : Ah! moi, je pense que ça, ça serait mieux pour moi... il a toutes les chances que, peu importe c'était quoi, son choix, il n'y en aura pas, de place, pour lui, en ce moment.

Donc, on a un gros problème ici quand on laisse entendre aux parents qu'ils auront le choix, ce n'est pas vrai, et ça ne sera pas vrai non plus dans cinq ans, au terme du déploiement de ce qui nous est proposé en ce moment, si ça survient dans cinq ans.

Le Président (M. Jacques) : Merci. M. le ministre.

M. Roberge : Je pense que la question de l'article 1 précisément, c'est de savoir : Est-ce qu'on veut offrir aux parents l'opportunité d'inscrire leur enfant dès quatre ans ou on ne veut pas? En ce moment, la loi ne nous le permet pas. Si on ne change pas la loi, si on ne change pas l'article 1, bien, dans un an, dans deux ans, dans trois ans, dans cinq ans, dans 10 ans, bien, on ne pourra toujours pas offrir aux parents du Québec l'opportunité de dire : Est-ce que j'inscris mon enfant au préscolaire à quatre ans ou pas? Est-ce que je veux le faire ou pas? La loi actuelle ne nous permet pas d'offrir ce choix-là. Ce n'est juste pas possible. Si tu n'habites pas dans le bon code postal, il n'y en aura pas, de place, en maternelle quatre ans. Ça, c'est l'état de droit actuel.

Est-ce qu'on trouve ça correct de ne pas permettre aux commissions scolaires d'ouvrir des classes pour des enfants qui habitent en milieu de classe moyenne ou on ne trouve ça pas correct? Moi, je pense que ce n'est pas correct que, dans des endroits où on pourrait le faire, ce n'est pas possible, là où il y a de la place, il y a des profs, il y a des classes, il y a des parents, il y a des enfants, les enfants veulent fréquenter la maternelle quatre ans, les parents veulent les inscrire, la loi nous empêche d'aller là.

La question ici, ce n'est pas de savoir est-ce qu'on ouvre 12 000 places en CPE ou 22 000 places en CPE. L'article 1, ici, c'est la Loi sur l'instruction publique, on ne peut pas l'amender pour changer quelque chose qui n'est pas là. Est-ce qu'on veut le statu quo, qui discrimine les enfants selon le revenu de leurs parents, ou on veut permettre à tous les parents d'inscrire leurs enfants de quatre ans en maternelle puis de donner cette possibilité-là? Moi, je pense qu'on veut leur permettre. Je pense qu'il faut enlever cette barrière législative qui nous empêche de déployer le service. Je ne vois pas de bonne raison de garder une barrière législative qui nous bloque, qui limite les possibilités, qui nous empêche d'offrir des opportunités aux enfants. Et cet article 1 vient nous enlever cette barrière législative.

Le Président (M. Jacques) : Merci. Je reconnais la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. J'entends mes collègues et j'entends le ministre. Voici ma problématique. Quand vous comparez le projet de loi auparavant, il n'y avait nécessairement aucun service offert aux cinq ans à l'extérieur du système scolaire. Donc, la commission scolaire a l'obligation de donner le service. En ce moment, le dilemme qu'on a... Puis je vous entends, dans votre volonté de dire : Je ne veux pas empêcher que... on veut plutôt ouvrir pour que toutes les familles aient accès. La difficulté, c'est qu'en ce moment il y a un autre réseau qui offre un service quatre ans.

Et je vous entends quand vous dites que vous êtes de bonne foi puis que vous voulez écrire et inscrire dans la loi la possibilité aux parents d'avoir cette place-là avec le temps. La difficulté, c'est qu'on met deux réseaux, même si on le dit, là, puis je vous entends quand vous me dites : On ne les met pas en compétitivité, mais on le fait par le biais d'une inscription dans l'instruction publique, pour un réseau et l'abandon dans aucun écrit dans un autre réseau.

Alors, c'est important de pouvoir bien orienter le parent qui se dit : Quelles sont mes possibilités? Puis j'entends mes collègues qui disent : Bien, le quatre ans, puis vous avez tout à fait raison — c'est un réseau que je connais un petit peu, le quatre ans — il n'y en a pas, de rentrée, il y en a très, très peu de rentrées. Donc, de ce fait, il faudrait trouver un moyen de bien annoncer les choses, puisque, là, ce qu'on dit, c'est que les parents ont du quatre ans au préscolaire, et on n'annonce pas l'autre aspect du réseau.

M. Roberge : Bien, c'est juste, des fois, quand on pense un réseau, l'autre réseau, je ne pense pas que c'est... il faut voir ça comme ça. Écoutez, comme parent, en ce moment, là, si votre enfant a quatre ans, il peut être en milieu familial non régi, en milieu familial régi, en privé non subventionné, en privé subventionné, en CPE, puis nous autres, on rajoute en maternelle quatre ans. Ce n'est pas comme s'il y avait un réseau uniforme, en réalité, puis la maternelle quatre ans. Je pense que ce sont plusieurs options qui sont là pour les parents en ce moment. Des fois, on va dire : Ah! c'est une option, mais il n'y a pas de place de disponible. Bon. Je pense que le ministère de la Famille travaille pour améliorer la qualité des services puis augmenter le nombre de places. Mais le débat, ici, n'est pas de savoir : On rajoute combien de places en privé non subventionné, ou en CPE, ou en familial non régi? La question, c'est : Est-ce qu'on garde ou pas cette barrière qui nous empêche d'offrir la maternelle quatre ans, d'offrir le préscolaire? Moi, je pense qu'on devrait lever cette barrière, et c'est pour ça que je pense qu'il faut voter en faveur de l'article 1.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : ...

Le Président (M. Jacques) : Sherbrooke?

Mme Charbonneau : Allez-y, j'irai après, si jamais ce n'est pas complet.

Mme Labrie : Je comprends ce que le ministre nous dit puis je dirais que moi, en fait, en ce moment, je suis assez confrontée, parce qu'en général, là, a priori, là, je serais en faveur d'inscrire, dans des lois, davantage de droits à l'éducation, d'élargir le droit à des services éducatifs, a priori, là, je suis en faveur de ça. Donc, c'est sûr que j'ai de la difficulté à être contre cet article-là du projet de loi.

Mais, par contre, le projet, tel qu'il nous l'est présenté en ce moment, je n'ai tellement pas confiance, parce qu'il ne se fait pas avec l'écoute de ce qu'il se passe sur le terrain, il se fait dans un contexte où il y a d'autres défis dans le milieu de l'éducation, il se fait dans un contexte où on n'a pas le plan. Je n'ai pas confiance que ça va bien se passer. J'ai énormément de craintes en ce moment.

Donc, si, a priori, je serais d'accord avec le concept qu'il y a derrière cet article-là, dans les circonstances, moi, je n'ai tellement pas confiance que ça va bien se passer que je pense que ce n'est pas le bon moment ou, en tout cas, on n'a pas réussi à me convaincre, dans les six derniers mois où le ministère a tenté de proposer son projet, on n'a pas du tout réussi à me convaincre que c'était une bonne idée.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Bien, moi, je pense que, dans les prochaines semaines on va avoir une rentrée réussie pour plus de 7 000 enfants, quand même, 7 000 parents qui auront fait le choix de la maternelle quatre ans, puis on va améliorer toujours le réseau d'une année à l'autre. Et je pense qu'on pourrait avoir confiance dans notre capacité puis je pense que la preuve de cette rentrée réussie dans les prochaines semaines viendra redonner confiance. Puis, manifestement, il y a toujours bien eu 7 000 parents qui font confiance au préscolaire quatre ans tout de suite, cette année, pour y confier ce qu'ils ont de plus précieux, leurs enfants.

Le Président (M. Jacques) : Merci. Nous allons suspendre quelques minutes, et, au retour...

Mme Rizqy : ...avant une suspension, peut-être juste une petite remarque, c'est que j'aurais aimé juste préciser qu'on va entreprendre l'étude détaillée article par article, alinéa par alinéa, paragraphe par paragraphe, conformément à l'article 245, puis là... suspendre.

Le Président (M. Jacques) : C'est correct, on peut... Est-ce qu'il y a consentement? ...peut faire article par article.

M. Roberge : ...comprendre, là, quelle est... on est en train de faire l'article 1, je ne comprends pas... (panne de son) ...qu'il faut étudier article par article. Ce n'est pas ce qu'on fait?

Mme Rizqy : ...alinéa par alinéa, paragraphe par paragraphe.

Le Président (M. Jacques) : Paragraphe par paragraphe.

M. Roberge : Bien, je pense que, par consentement, on peut se dire tout de suite qu'on va y aller comme ça. Si, à un moment donné, on veut aller plus vite, on pourra y aller par consentement, mais moi, je ne veux pas bâcler les travaux.

Le Président (M. Jacques) : Parfait. On peut suspendre les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 10)

(Reprise à 16 h 22)

Le Président (M. Jacques) : Nous sommes de retour en ondes. Et la parole est à la députée de Saint-Laurent. Mme la députée.

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. J'ai entendu, évidemment, les préoccupations qui ont été exposées par différents de mes collègues ici par rapport au fait que, lorsqu'on lit le texte «Toute personne a droit au service de l'éducation préscolaire» et que, par la suite, on marque, juste en bas, à l'article 1 de la Loi sur l'instruction publique, «l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est désormais fixé à 4 ans», quand on lit les deux, le premier paragraphe et le dernier paragraphe, évidemment, ce que ma collègue la députée de Joliette mentionnait, c'est qu'au fond, maintenant, le gouvernement se crée une obligation de résultat d'offrir à tout le monde, universel, la maternelle quatre ans partout au Québec, mur à mur.

Elle mentionne, à juste titre, ça veut dire aussi, d'autre part, que les ressources tant monétaires qu'humaines et physiques devront être allouées, consacrées à ce vaste projet et fort probablement au détriment des services de garde et des CPE.

Alors, ici, c'est important de tenir compte de ces préoccupations qui ont été partagées par l'ensemble des députés de l'opposition, mais aussi ça a été soulevé, le libre choix. Comment on peut parler de libre choix quand c'est plein feu sur les maternelles quatre ans et qu'on parle très, très, très peu de nos services de garde et de CPE? Comment on peut dire que c'est libre choix quand, d'une part, venant dans un texte de loi, dans la Loi sur l'instruction publique, qu'on vient dire que c'est un droit au service?

Il y a une grande différence dans les mots qu'on choisit, notamment, là, on parle d'un cahier de loi ici, c'est le cahier du député, là, notre cahier de loi, quand on parle de choix, on parle d'options. Quand on parle de droit, on parle d'obligation. Alors, ici, le ministre se donne l'obligation, pour tout le gouvernement, de mettre toutes les ressources disponibles pour le projet des maternelles quatre ans, mais il n'a pas le même corollaire pour les places en services de garde, les CPE. Donc, on ne peut pas parler, ici, de véritable choix.

Alors, c'est pour ça que je propose un amendement, M. le Président. J'aimerais ajouter, à l'article 1, que «toute personne a droit au service de l'éducation préscolaire à 5 ans.»

Comme ça, ici, on comprend que ce droit-là commence à cinq ans, mais ce n'est pas un droit absolu à partir de quatre ans. Donc là, on se donnerait les coudées franches, puis on pourrait être en mesure de déployer les maternelles quatre ans à un rythme qui ne sera pas effréné. Alors ça, ça nous permettrait, là, de vraiment de se donner davantage de temps pour bien déployer les maternelles quatre ans et ça ne deviendrait pas une obligation absolue de résultat de la part du gouvernement, puis que, oui, on va faire les études d'impacts puis de faisabilité pour s'assurer que tout soit bien respecté.

Le Président (M. Jacques) : Nous allons suspendre... M. le ministre.

M. Roberge : Excusez-moi, M. le Président, c'est une question de procédure. Peut-être le secrétariat pourra nous aider. Il me semble que ce n'est pas un amendement à l'article, puisque c'est... il va purement à l'envers de l'article. Il me semble que ma collègue propose seulement de voter contre l'article, c'est déjà cinq ans. Le projet de loi... l'article 1, c'est de remplacer «5 ans» par «4 ans», et là elle propose d'amender pour aller à l'envers de l'article. Je ne suis pas sûr qu'on peut faire ça, là.

Mme Rizqy : M. le Président, au contraire. Le projet de loi, on garde le dernier alinéa, qui dit que c'est fixé à cinq ans, ça devient quatre ans. Ça, ça ne change pas. Je comprends que vous, c'est que l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire, donc on peut être admis à partir de quatre ans... Ça n'enlève aucun sens à votre projet de loi. Mais, au niveau du premier paragraphe, on tient compte de préoccupations qui ont été soulevées tant par la députée de Sherbrooke que la députée de Joliette, qui dit : Là, est-ce que c'est un droit qui commence à quatre ans? Donc, c'est pleins feux sur les maternelles quatre ans, toutes les ressources pour les maternelles quatre ans, parce que c'est un droit, donc vous avez une obligation légale de la part du gouvernement de l'offrir, peu importe combien ça coûte.

Alors, donc, si on veut faire ça, bien peut-être qu'on aura une porte de sortie pour dire : O.K. ce n'est pas un droit universel, mais c'est une option. Parce que, si vous parlez de libre choix, un choix, ça devient une option.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Je vais attendre de lire l'article. Je vous laisser une minute, là, parce que... On va prendre le temps de comprendre.

Le Président (M. Jacques) : Donc, nous allons suspendre pour avoir l'article imprimé. Suspension.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

(Reprise à 16 h 31)

Le Président (M. Jacques) : Donc, c'est la reprise des travaux. Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci, M. le Président. Donc, juste pour faire un résumé rapidement, la députée de Joliette a commencé avec le texte actuel de la Loi sur l'instruction publique. Alors, tous ceux qui ont le cahier de député peuvent nous suivre. Sinon, il est aussi disponible en ligne. «Toute personne a droit au service de l'éducation préscolaire...» Ça, c'est la première phrase de l'article 1. Elle rappelle, à juste titre, si c'est un droit, ça devient une obligation légale. En changeant l'article 1 avec le projet de loi, le dernier paragraphe de l'article 1, l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est désormais — bien, il sera une fois qu'il sera adopté — quatre ans. Elle dit, à juste titre, si on parle de libre choix puis qu'on vient de se mettre une obligation légale, dans la Loi sur l'instruction publique, qu'à partir de quatre ans c'est un droit, bien, il va falloir que le gouvernement, dès lors de l'adoption de ce projet de loi, qui modifie la Loi sur l'instruction publique, bien, émette toutes les ressources possibles pour le déploiement des maternelles quatre ans sur l'ensemble du réseau, mur à mur, peu importe comment ça va coûter. Il vient de se mettre une obligation légale.

Puis je sais qu'il y a quelques mois on avait déjà eu la peur d'avoir un recours collectif dans un autre dossier, les frais facturés aux parents. Là, ici, on va se prémunir quand même, parce que, quand il y a des recours collectifs contre le gouvernement, bien, c'est les Québécois qui paient. Alors, ici, on a une belle porte de sortie pour le ministre, qui dit : On va y aller de façon intelligente, on va déployer les maternelles quatre ans, mais ce ne sera pas un droit absolu immédiatement, là, alors faisons ici la catégorie droit aux services de l'éducation préscolaire. Oui, c'est un droit, mais à partir de cinq ans, pas à quatre ans.

Et, M. le Président, j'aimerais, par la suite... je vais laisser évidemment le ministre répondre, mais, tantôt, je vais revenir sur des dates par rapport aux quatre ans puis cinq ans, là, juste pour qu'on ait, tout le monde, la même histoire, là, au Québec, de comment ça a été déployé, les maternelles quatre ans puis maternelles cinq ans. Mais là, ici, on va se concentrer sur «toute personne a droit au service de l'éducation préscolaire à 5 ans».

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Merci bien. D'abord, je veux préciser une chose. Il y a des éléments qu'on partage là-dedans, là, de permettre de déployer à quatre ans, de ne pas se mettre une obligation qu'on ne peut pas répondre tout de suite... se placer en infraction, de faire une loi qui est tellement contraignante qu'on ne peut pas y répondre, puis qu'on donne aux citoyens des droits, puis que le gouvernement n'est pas capable de répondre. Donc, ça, il ne faut pas faire ça. Je suis d'accord avec vous.

Cependant, je ne suis pas d'accord quand vous dites : Toutes les ressources vont y aller. Moi, je dis : Les ressources nécessaires vont y aller. Mais il ne faut pas penser qu'on va arrêter d'investir dans nos écoles primaires, dans une école secondaire, puis dans le réseau de la famille, dans le réseau de la santé, dans nos routes parce qu'on fait les maternelles quatre ans, là. Il ne faut pas penser ça non plus. On est capable de faire plusieurs choses.

Je veux préciser que, quand vous regardez votre petit cahier article par article, dans le haut des pages, vous avez toujours quelques éléments entre parenthèses qui sont comme des aide-mémoire, un peu didactiques, pédagogiques pour expliquer où est-ce qu'on est. Dans ce cas-ci, on parle d'accès universel. Donc, l'article 1 vise l'accès universel. Il s'applique au régime permanent quand le régime sera permanent. Il s'applique quand? C'est écrit : «décret». Donc, il ne s'appliquerait pas... Cet article 1 là va être suspendu par un article qui va venir ultérieurement. Il va dire : Bien oui, l'accès universel à quatre ans qui est à l'article 1 s'applique, mais va s'appliquer quand le gouvernement passera un décret, il ne s'appliquera pas nécessairement à la sanction de la loi. Si on vote cette loi-là, on va dire, le 20 septembre, ce n'est pas le 21 septembre que les parents peuvent dire : Bon, bien, mon enfant a quatre ans, maintenant, il y a l'accès universel, j'ai le droit d'inscrire mon enfant de quatre ans, et là, à la grandeur du Québec, les parents vont voir les écoles puis disent : Bien là, je regarde la loi, là, vous êtes obligés d'accepter mon enfant. On s'est donné un délai, et il y a des articles dont l'application est suspendue, et c'est écrit un peu plus loin dans le projet de loi : tel article s'applique à tel moment, tel article s'applique à tel moment. C'est l'article 18 qui est l'article qui parle du décret, qui va dire le moment où les articles d'accès universel s'appliquent.

Donc, il faut se démêler un peu, hein? En ce moment, on est sur la loi précédente. Donc, on déploie, là... On est presque en septembre 2019, on est au mois d'août 2019, les classes qui se déploient, en ce moment, sont sur la loi, là, qui a été votée en 2013. Une fois que cette loi-là sera sanctionnée, on pourrait, en 2020, dans le régime transitoire, ouvrir des classes de maternelle quatre ans en milieux défavorisés, mais aussi ailleurs, en milieux qui ne sont pas défavorisés — ça, c'est ce qu'on appelle le régime transitoire — jusqu'à ce qu'on ait assez de classes ouvertes pour qu'un décret survienne, et qu'on arrive au régime permanent, et qu'à ce moment-là le droit à la maternelle quatre ans s'applique, et cette partie-là de l'article 1 s'applique. Donc, il faut comprendre, là, qu'on se projette en avant et que ce n'est pas tout de suite. On ne se place pas dans une situation où on ne pourrait pas répondre à tout ça. Donc, c'est pour ça qu'il y a, en haut, quand vous regardez dans votre cahier, plus loin... Des fois, c'est écrit autre chose, là. Des fois, c'est écrit «accès universel», «régime permanent», ou, des fois, ça va être écrit «régime transitoire», etc. ...comme ça qu'on se démêle.

Maintenant que j'ai expliqué comment ça fonctionne, je dois vous dire que, tel que rédigé, l'amendement de ma collègue ne fonctionne pas, parce que ça ferait un article qui se contredit à l'intérieur du même article. Si je le lis avec votre modification, ça dirait... et supposons que l'article 1 reste là, là, qu'on laisse le quatre ans au dernier paragraphe, ça ferait : «Toute personne a droit au service de l'éducation préscolaire à 5 ans et aux services d'enseignement primaire et secondaire prévus par la présente loi et le régime pédagogique établi par le gouvernement en vertu de l'article 447», et là on arrive : «à compter du premier jour du calendrier scolaire de l'année scolaire où elle a atteint l'âge d'admissibilité», et, au dernier paragraphe, on dit que l'âge d'admissibilité au préscolaire, c'est quatre ans. Donc, on dit : Tu as droit au service préscolaire à cinq ans au moment où tu as l'âge d'admissibilité, lequel est quatre ans. Donc, voyez-vous, c'est pour ça que je dis que cet article-là ne peut pas être accepté, M. le Président, parce que ça se contredit, on dit : Tu as cinq ans au moment où ton âge d'admissibilité est quatre ans. Donc là, on ne peut pas l'accepter, et il doit être rejeté pour cette raison-là. Mais je ne voulais pas juste dire : Ah! on le rejette, je voulais qu'on comprenne pourquoi.

Puis, à ce moment-là, vous pourrez redéposer... Je comprends votre intention de le déposer, mais, dans ce cas-ci, on ne peut pas le faire comme ça. Je pense que ce que vous souhaitez, c'est tout simplement laisser cinq ans plutôt que quatre ans, et non pas écrire cinq ans et quatre ans, puis les deux s'opposent dans le même article.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Plusieurs choses ont été dites, M. le Président. Première des choses, j'aurai des petites questions courtes juste pour bien comprendre et faire suite aux propos du ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. Je comprends qu'entre parenthèses c'est... en dessous des articles, il y a des parenthèses qui... Au fond, c'est un guide pour nous autres, à savoir où est-ce qu'on s'en va avec nos skis. «Décret» : Est-ce que, vous, vous pensez que le décret va être déposé cette année ou en 2023 pour l'article 1?

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

• (16 h 40) •

M. Roberge : Ce qu'on prévoit, ce qu'on a toujours dit, c'était qu'on allait atteindre cet accès universel dans un délai de cinq ans.

Mme Rizqy : Ma question, je la repose: L'article 1, pensez-vous que le décret va être déposé rapidement, par exemple en 2019, ou en 2023? Le plus de probabilité.

M. Roberge : 2023. C'est le plan gouvernemental, c'est l'annonce qu'on a faite lors de la campagne électorale, puis c'est le plan qu'on suit.

Mme Rizqy : Donc, l'article 1, qui permet de modifier la Loi sur l'instruction publique, qui va remplacer le dernier paragraphe, l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est fixé à quatre ans, vous, votre intention, c'est, en 2023, de déposer cet article... ce décret.

M. Roberge : C'est notre intention, tout à fait.

Mme Rizqy : O.K. 2023. Dans les règles transitoires, où quand vous avez fait référence à l'article 18, est-ce qu'il y a quelque part que j'ai manqué l'article 1?

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Juste pour... je comprends qu'on ne peut pas étudier tous les articles à la fois, mais c'est une question de bonne foi, puis on veut se comprendre, ça fait que je vais jeter un coup d'oeil à l'article 18 pour juste... pour qu'on comprenne, à ce moment-ci, mais on ne pourra pas toujours étudier tous les articles à la fois. Mais je comprends très bien que vous êtes là, là, pour comprendre. Alors, à l'article 18, ça dit :

La présente loi entre en vigueur à la date déterminée par le gouvernement, à l'exception des articles 3 et 6, du paragraphe n° 1 de l'article 7, des articles 8, 9, 16 et 17, qui entrent en vigueur... ici, c'est la sanction.

Toutefois, malgré l'entrée en vigueur des articles 3 et 6, les articles 224.1 et 466.1 de la Loi sur l'instruction publique continuent de s'appliquer, tels qu'ils se lisaient avant leur modification, aux fins des années 2018‑2019, 2019‑2020.

Si vous me permettez de consulter les légistes pour bien répondre à votre question... Est-ce qu'on peut suspendre une minute?

Le Président (M. Jacques) : Oui. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 42)

(Reprise à 16 h 43)

Le Président (M. Jacques) : Nous reprenons nos travaux. M. le ministre.

M. Roberge : ...exactement. Quand on dit, à l'article 18 : La présente loi — la présente loi inclut l'article 1, hein — entre en vigueur à la date déterminée par le règlement, c'est-à-dire à la date du décret, sauf les autres articles... Donc, l'ensemble de la loi s'appliquera au moment du décret, vraisemblablement quelque part en 2023, dont l'article 1, à l'exception de quelques autres articles, donc le 3, le 6, le 8, le 9. Ceux-là, le 3, le 6, le 8, le 9, vont s'appliquer à la date de sanction. Donc, supposons qu'on vote ça le 20 septembre, bien, le 3, le 6, le 8, le 9 s'appliquent à la sanction, les autres sont votés, mais suspendus jusqu'à la date déterminée par le gouvernement, jusqu'à la sanction. Donc, l'article 1 fait partie des articles du projet de loi votés, mais dont l'application serait suspendue jusqu'à la date déterminée, tel que précisé à l'article 18. Et... bien, voilà.

Le Président (M. Jacques) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Merci beaucoup pour les explications. Donc, la présente loi entre en vigueur la date déterminée par le gouvernement. Là, vous nous indiquez, aujourd'hui, que votre intention, c'est d'inscrire ce décret-là pour l'article 1... bien, en fait, la présente loi, parce que l'article 1 est dans la présente loi. Est-ce que la présente loi, vous pensez... 2023, ou vous êtes plus enclin... à plutôt... à agir tôt ou pas?

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Roberge : Mais elle n'est pas Agir tôt, là. Agir tôt, c'est le programme de mon collègue Lionel Carmant.

Non, mais, écoutez, l'objectif, là, notre objectif, notre plan de déploiement, c'est de le faire dans un horizon de cinq ans, l'an 1 étant cette année, l'an 2 étant septembre 2020, l'an 3, etc., jusqu'à la cinquième année. On pense qu'à la cinquième année on aura déployé suffisamment de classes et aux bons endroits répondant aux besoins, en collaboration avec Famille, je le précise, et le réseau sera déployé de telle façon qu'il y aura une adéquation entre l'offre et la demande, et, donc, quand il y aura adéquation offre et demande, on pourra, en 2023, vraisemblablement, passer le décret puis dire : Bien, voilà, maintenant, il y a l'accès universel, le droit d'inscrire son enfant n'est plus seulement à cinq ans, mais donc à quatre ans. Les parents... c'est ce qu'on appelle l'accès universel qui est non obligatoire. Donc, exactement, on souhaite avoir, en 2023, pour la maternelle quatre ans, ce qu'on a pour la maternelle cinq ans. Voilà. Et c'est le plan. Et, législativement, on s'arrange pour s'y rendre. Mais il faut quand même adopter ce projet de loi là tout de suite parce que le projet de loi va nous permettre de le déployer aussi dans des milieux qui ne sont pas défavorisés. Sinon, bien, on ne pourra jamais donner l'universalité d'accès. S'il y a 60 % des places au Québec, on ne peut pas ouvrir des maternelles quatre ans pour 70 %. Je ne sais pas quelle est la proportion de codes postaux, là. Ça, c'est clair.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée.

Mme Rizqy : Là, vous me faites sourire, M. le ministre de l'Éducation, parce que, juste bien comprendre, parce que, là, l'objectif, là, c'est aussi se prémunir, hein, de s'assurer qu'on a un projet de loi bien écrit, bien établi. Puis je pense qu'il y a une préoccupation assez importante au fait qu'on crée un droit dès l'âge de quatre ans, donc on va mettre énormément de ressources, puis que, là, le libre choix dont on parle depuis plusieurs mois... D'une part, on va avoir une loi sur l'instruction publique, qui est fort importante dans notre système au Québec. C'est une des lois les plus importantes qu'on s'est dotées pour faire un rattrapage colossal en matière d'éducation. On va venir la modifier, c'est-à-dire créer un droit, mais on ne crée pas ce même droit dans le réseau des services de garde et CPE.

Mais, moi, ce qui me préoccupe, c'est que... j'ai de la misère à concilier que, ce décret, vous l'envisagez en 2023, puis que moi, je suis convoquée ici avec mes collègues, 20 août 2019, pour parler d'un projet de loi qui va entrer en vigueur en 2023 puis qu'en plus de ça vous êtes convaincu d'être au gouvernement. Parce que ça a pris une élection, là. 2022, il y a une élection, hein? 2023, le gouvernement, on ne sait pas c'est qui. Donc là, honnêtement, j'ai des points d'interrogation pour de vrai. J'en ai quelques-uns, là, puis vous les voyez, en plus.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Bien, on peut les prendre un à la fois. On ne peut pas présumer de l'élection de 2022. Sincèrement, on respecte trop les électeurs pour ça, là. Vous nous dites, et on entend: Coudon, avez-vous un plan? Avez-vous un plan? Je pense que vous le voyez, il y en a un, plan. Il est clair, hein, un plan législatif. On se projette en avant, on regarde l'an 1, l'an 2, l'an 3 : régime actuel, régime transitoire, régime permanent. Ça s'appelle avoir un plan législatif, puis de savoir où est-ce qu'on s'en va, puis lever les contraintes actuelles de manière à déployer la maternelle quatre ans.

Nous, on pense que, sur cinq ans, avec les actions qu'on fait, on va avoir déployé suffisamment de services, qu'on va être capable de répondre aux besoins des parents et des enfants. Évidemment, on pense surtout aux enfants, mais le libre choix, on le dit aux parents. Je sais qu'il y en a qui n'aiment pas ce terme. Ceci dit, il appartiendra au gouvernement en place d'adopter le décret ou pas, hein? À un moment donné, le gouvernement en place à ce moment-là pourra l'adopter.

• (16 h 50) •

Mme Rizqy : O.K. Puis, vu qu'on a aussi... j'imagine que la personne à côté de vous, c'est la juriste de l'État. Si on a consentement, j'aurais peut-être des questions au niveau aussi d'un point de vue juridique, parce que j'aimerais vraiment... Je comprends que vous, là, c'est peut-être... parce que c'est quand même à la discrétion du gouvernement. Là, une fois qu'on a terminé l'étude détaillée, là, il n'y a rien qui va empêcher le gouvernement de déposer son décret, il n'y a rien qui va empêcher aussi une exposition à un risque de recours contre le gouvernement. Puis, quand je dis «le gouvernement», là, on parle des Québécois. «Toute personne a droit [à un] service de l'éducation...» Je comprends qu'on peut aussi améliorer le texte puis venir ajouter encore plus de précision dans l'amendement puis dire : O.K., parfait, atteint un âge d'admissibilité de cinq ans, pour qu'il y ait une concordance parfaite au paragraphe 1 de l'article 1. J'en suis.

Mais j'imagine que vous comprenez mon inquiétude en matière de venir inscrire, ici, un droit, surtout qu'on ne sait pas quand est-ce que le décret va être déposé. Et on ne sait pas, là... je suis très contente de vous avoir en face de moi à titre de ministre de l'Éducation, puis je suis très, très, très contente, mais je ne sais pas si vous allez toujours être ministre de l'Éducation. Alors là, on prend votre parole à vous, mais la réalité, c'est la suivante : C'est qu'une fois qu'on a un texte de loi puis que le décret est déposé, bien, là, on a vraiment un gouvernement qui est lié à une obligation. Et c'est pour ça que je suis en train de réfléchir avec vous juste pour qu'on ait... quelque part, ici, quelque part, là, juste qu'on l'inscrive, là. C'est quoi, notre objectif? Si c'est un déploiement, vous dites que c'est un plan qui est clair, bien, inscrivons-le, le déploiement, puis parfait, allons-y, dire : Bien, le droit, bien, il ne commence pas à quatre ans, il va commencer à cinq ans, puis ça va nous donner aussi la latitude pour faire des affaires dans l'ordre puis d'avancer tranquillement avec les rythmes et surtout les ressources que nous avons. Puis là je ne parle pas juste des ressources au niveau financier, je parle vraiment aussi des ressources humaines que nous avons au Québec.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Mais supposons que le projet de loi est adopté tel quel, ou, enfin, avec l'article 1 tel quel, l'article 1 ne s'appliquant pas tout de suite, bien, ça reste cinq ans dans l'intervalle. Le droit à l'éducation, en fait, le droit à inscrire nos enfants au préscolaire reste cinq ans dans l'intervalle. L'âge d'admissibilité reste cinq ans tant que le gouvernement n'adopte pas le décret, donc ça reste cinq ans, même si cet article-là est voté, jusqu'au décret.

Écoutez, comprenez que le gouvernement, le nôtre ou le prochain de 2022, n'a pas avantage à adopter le décret trop tôt. Adopter le décret trop tôt, c'est se mettre en situation de vulnérabilité. Vous comprenez qu'on adopte ce décret-là quand on sait qu'il y a suffisamment de classes d'ouvertes puis qu'on sait qu'on est capable d'accueillir tous les enfants dont les parents font le choix. Comprenez bien que c'est assez évident qu'on ne va pas mettre... aucun gouvernement, aucun ministre, aucun premier ministre ne va vouloir adopter le décret s'il n'y a pas suffisamment de places qui sont créées puis réparties régionalement pour répondre aux besoins.

Mme Rizqy : M. le...

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Puis merci aussi, M. le ministre, parce que vous faites preuve d'une grande honnêteté intellectuelle aussi, parce que vous mentionnez, à juste titre, qu'on ne peut pas, maintenant, faire un décret, parce qu'automatiquement on serait en situation de vulnérabilité. Et, là-dessus, je vous renvoie la balle en réflexion. Si on est déjà en situation de vulnérabilité, et c'est pour ça qu'au fond, qu'on ne peut pas adopter ce décret après l'adoption du projet de loi, c'est que, clairement, c'est qu'on n'a pas les ressources maintenant. Et, si M. Maltais, qui est rendu à votre cabinet, a déjà dit, l'an dernier, que, juste pour le réseau d'éducation scolaire en éducation secondaire, il va manquer 3 000 enseignants, est-ce que c'est aussi probable que, dans cinq ans encore, on va être en situation de vulnérabilité? Je dis ça, puis je pose la question à guise de réflexion.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Pour sortir de cette position-là, il faut penser qu'on met plusieurs moyens en place pour attirer, retenir aussi, les enseignants qui sont en fonction, en attirer du reste du Canada, en attirer de l'étranger, faire des passerelles, tout ça. Il y a quand même 4 000 personnes, 4 000 diplômés en science d'éducation à chaque année, hein, qui sortent de nos facultés. Je sais qu'il y a des gens qui prennent leur retraite, je sais qu'il y a des gens qui ont des épuisements professionnels, ce n'est pas comme s'il n'y avait personne non plus. Il y a 4 000 profs qui sortent de nos facultés à chaque année. Il y a possibilité de garder ceux qui sont là, parce qu'on sait qu'il y en a, dans les conditions actuelles puis dans les conditions des dernières années, qui, des fois, quittaient la profession. Moi, je pense qu'il y a une grosse partie à la pénurie qui consiste à prendre soin de notre monde puis à leur donner le goût de rester.

Donc, on va mettre en place un bouquet de mesures, graduellement. On a déjà commencé, on va continuer de le faire puis on a confiance qu'on va passer à travers cette pénurie qu'on a dans plusieurs régions.

Mme Rizqy : Juste en terminant là-dessus, je prends la balle au bond. M. le ministre, oui, il y a 4 000... plus ou moins 4 000 gradués du réseau de l'éducation. Et la pénurie qu'on vit au Québec n'est pas un fait unique à nous, hein? Même l'Ontario, vous avez sûrement vu les publicités de l'Ontario, qui viennent chercher nos jeunes gradués québécois. Ils ont fait des publicités que je trouve assez agressives, sur Facebook, M. le Président, qui montraient nos bancs de neige, alors qu'on n'a pas tout le temps des bancs de neige, mais bon. Donc, on a aussi d'autres provinces qui ont à coeur d'avoir la mainmise sur nos gradués. C'est une réalité.

Tantôt, vous avez dit: C'est comme... quand vous parlez du manque d'enseignants, comme si on n'avait pas vu venir, comme s'il y avait un manque de planification et aussi des imprévus... Quand il y a eu... par exemple, prenons les réfugiés qu'on a accueillis, les Syriens... après aussi le tremblement de terre en Haïti, plusieurs nouveaux arrivants sont venus et, oui, ça a ajouté une pression. Et, quand, tantôt, j'ai lu la lettre de Marie Victorin, la présidente de la commission scolaire, elle parlait aussi de ces nouveaux arrivants, mais ces nouveaux arrivants...

Moi, j'ai vécu aussi à Sherbrooke environ 10 ans, étudiante puis, par la suite, professeure. À Sherbrooke, ma collègue de Sherbrooke peut vous en parler, on a accueilli, à Sherbrooke, plusieurs réfugiés syriens, puis pas juste de Syrie, il y a eu, là, énormément de nouveaux arrivants. Puis Sherbrooke est très, très fière de sa diversité. Mais vous savez que, pour chaque classe de nouveaux arrivants, le ratio est réduit parce qu'on veut évidemment franciser, et ça demande d'avoir plus d'enseignants. Alors, ce n'est pas parce que toutes les commissions scolaires se sont fermé les yeux, ont dit : On ne sait pas comment planifier les naissances au Québec. On est tous capables d'aller voir Statistique Québec et voir les naissances. Mais, malheureusement, on ne sait pas c'est quand, la prochaine crise d'immigrants, il n'y a personne qui a une boule de cristal, puis les commissions scolaires ont fait de leur mieux, puis je peux vous dire une chose, non seulement les commissions scolaires, mais toutes les petites communautés à l'intérieur... que ce soit à ville Saint-Laurent ou à Sherbrooke, à Laval, à Laval, on a accueilli... et c'est vraiment un travail qui s'est fait de pair. Alors, c'est sûr que ce n'est pas une mauvaise planification, au contraire, c'est parce qu'au Québec on avait vraiment le coeur sur la main.

Je comprends que, maintenant, le nouveau gouvernement veut réduire le nombre de réfugiés, mais ça n'a pas été la politique du Québec. Et je sais que, par la suite, vous allez revenir... vous allez réouvrir le nombre d'immigrants reçus. Mais vous comprendrez qu'il y a une réalité, c'est qu'on a toujours été accueillants au Québec, puis j'espère qu'on va continuer de l'être, très sincèrement, et que ça, c'est une réalité à laquelle on doit composer. La commission scolaire Pointe-de-l'Île, où est-ce qu'on a dû... vous vous êtes intervenu aussi d'urgence dans ce dossier-là, mais eux autres aussi, c'est parce qu'il y avait beaucoup, beaucoup de nouveaux arrivants et que le ratio était réduit. Alors, on comprend que, oui, il y a une pénurie d'enseignants, mais aussi c'est qu'on a aussi une plus grande croissance au niveau des natalités au Québec, mais aussi des nouveaux arrivants et beaucoup de jeunes enfants, il faut en prendre soin.

Le Président (M. Jacques) : Merci. Je reconnais la députée de Joliette.

Mme Hivon : Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais juste comprendre pourquoi le ministre n'écrit pas, tout de suite, dans son article, d'entrée en vigueur, parce que, là, il y a un lien avec ce qu'on débat, qui est à dire la création d'un droit 2023. Puisque c'est son horizon, pourquoi il ne l'écrit pas dans la loi, plutôt que de dire, par décret, que ça va être en 2023?

M. Roberge : Je pense, ce ne serait pas responsable, justement, pour ce que ma collègue vient de dire. Il peut y avoir des impondérables, il y a des choses qu'on prévoit, on peut compter les enfants qui naissent cette année, donc, qui auront quatre ans dans quatre ans, c'est assez simple, ça, ça va bien, c'est prévisible.

Cependant, ce qui est moins prévisible, c'est des crises comme a décrit ma collègue, c'est des arrivées massives de réfugiés dans un secteur particulier. On peut réagir, des fois, sur six mois, sur un an, mais, à ce moment-ci, de l'avoir avec une certitude absolue au point de l'écrire, de se donner une obligation de résultat, de se mettre peut-être dans une situation très confortable où tout arrive comme prévu, puis on remplit tous nos objectifs, tout va bien, c'est correct, mais de faire semblant qu'il n'existe pas d'impondérable et... je pense que ce ne serait pas responsable à ce moment-ci.

Il pourrait y avoir plus de parents aussi. On prévoit, en ce moment, là, que c'est autour de 50 % des parents qui feront ce choix-là. Écoutez, si c'est 60 % des parents qui font le choix, c'est 65 % des parents qui font le choix, il faut être capable, hein? On met un nouveau service, je n'aime pas dire «nouveau produit», mais on met un nouveau service, là, en place, c'est un peu dur de savoir, avec une grande précision... On a des estimations, on sait où on s'en va, on a un plan, on le voit bien, mais c'est un peu dur de savoir, précisément, combien de parents feront ce choix-là dans quatre ans, dans cinq ans. Pour vrai, là, on pouvait dire la même chose, supposons, quand on a déployé à peu près n'importe quel autre service, on peut parler des services de garde éducatifs aussi. Donc, on se fixe un objectif qui est ambitieux mais qui est réaliste, mais on ne se met pas dans une situation de vulnérabilité tout de suite pour se créer une obligation de résultat avec des impondérables. Je ne pense pas que ce serait responsable.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Joliette.

• (17 heures) •

Mme Hivon : Mais je pense, justement, que la réponse du ministre illustre à quel point on est dans un domaine où on ne sait absolument pas où on s'en va, puis vous allez trouver que je me répète, là, mais vous allez m'entendre souvent le dire. Comment voulez-vous qu'on travaille sérieusement quand... puis je le comprends, qu'il nous donne cette réponse-là, c'est ce qu'on dit depuis le départ, pourquoi, pourquoi c'est si complexe? C'est parce qu'il y a une offre de service concomitante CPE, services de garde éducatifs, maternelle quatre ans. Ça fait qu'on ne le sait pas, il y en a combien, de parents. On ne le sait pas, la demande, elle va être comment.

La crainte qu'on a, c'est qu'évidemment, comme on l'a mentionné tout à l'heure, à partir du moment où ça devient un droit, puis que le gouvernement doit répondre à son obligation, bien, à un moment donné, il peut être amené à délaisser un certain service, où il n'y a pas de droit et d'obligation, pour un autre.

Puis là, quand on lui dit : C'est quoi, votre plan de match, puis ça va être quoi, le rythme de développement de ces places-là avec les ressources, puis tout ça?, on n'en a pas, de réponse. Puis, entre vous et moi, est-ce que je pense que c'est réaliste qu'en 2023 on puisse y arriver, alors que ça requérait au moins 4 000 nouveaux enseignants et éducatrices dans le réseau de l'éducation? La réponse, c'est non. Je ne pense pas que c'est réaliste. Puis je pense que c'est pour ça qu'on n'a toujours pas de plan de déploiement puis de complémentarité qui nous est déposé.

Mais je veux juste faire ressortir... puis je pense qu'on le voit de manière très claire, encore une fois, le ministre, il ne peut pas s'engager à une date, parce qu'on ne le sait pas. Ça fait que ça se peut bien que, finalement, ça s'échelonne sur 15 ans. Ça se peut qu'il y ait deux changements de gouvernement, puis qu'il y ait des gouvernements qui aient d'autres orientations, puis qui décident qu'il faut compléter le réseau des CPE avant de faire ça.

Donc, aujourd'hui, on travaille sans balise, sans boussole, sur quelque chose qui risque de ne pas se concrétiser. Donc, on met toutes nos énergies là puis on crée un droit mais sans application, parce que la mise en vigueur, elle va peut-être être dans cinq ans comme elle va peut-être être dans 10 ans ou dans 15 ans, puis peut-être que le décret, il n'arrivera jamais pour concrétiser ce droit-là. Donc, je ne sais pas si vous suivez, M. le Président, l'espèce d'inconfort qu'on a de travailler dans un contexte comme ça.

Puis, je le réitère, ce qui serait l'élément de départ pour nous rassurer puis donner un cadre pour faire nos travaux, c'est de voir comment le ministre, face à tous, je dirais, les questionnements qu'on a, répond avec un plan déploiement. Comment il voit, comment il va y arriver, à ces 4 000 ressources-là?

Puis, s'il dit : Bien là, finalement, en ayant fait nos devoirs, ça ne sera pas sur cinq ans, ça va être sur huit ans ou sur 10 ans, bien, on va comprendre puis on va être rassurés de savoir qu'il a cette logique-là, plutôt que de se faire dire : Bien, oui, ça va être 2023, mais, vous comprenez, ça se peut qu'il y ait des impondérables, puis c'est pour ça qu'on ne peut pas le mettre dans le projet de loi. On comprend tout ça, mais tout ça, ça montre, justement, qu'on est sur des bases extrêmement fragiles et qu'on ne sait pas où on s'en va.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Bien, je... quelques réponses. Je comprends les préoccupations de ma collègue, ça fait quelques fois qu'elle les exprime, mais.. c'est correct.

D'abord, il y a juste... puis des choses que l'on sait, sur lesquelles on peut répondre, là, le chiffre de 4 000, je m'excuse, mais il ne repose pas sur quelque chose de solide. Il y a des choses qui sont claires...

Mme Hivon : ...son chiffre.

M. Roberge : ...notre objectif, c'est : On pense, là, que, sur cinq ans, c'est 2 600 classes au total. C'est un chiffre que j'ai répété, il n'y a personne qui fait le saut aujourd'hui, là, 2 600, 2 600, 2 600. Il y aura, dans quelques semaines, 644 classes d'ouvertes. Juste pour faire des gros chiffres, on va dire : 600 classes. Mais je suis fier de chacune des 44 classes de plus, d'accord? À chaque fois, c'est des parents qui font le choix.

Donc, si on veut 2 600 classes, puis qu'il y en a 600 qui sont ouvertes, bon, il faudrait en ouvrir, dans les quatre années qui suivent, quelque chose comme 2 000. Ça veut dire 2 000 enseignantes ou enseignants. Si on a des techniciennes d'éducation à l'enfance à demi-temps, bien, ça fait 3 000, pas 4 000. Donc, déjà, ça... Ah! 1 000... Non, non. 1 000, c'est du monde puis c'est quand même une erreur de 33 %.

Mme Hivon : ...je vais revenir, par exemple, là-dessus.

M. Roberge : Allez-y.

Mme Hivon : Premièrement, quand j'ai évoqué ce chiffre-là, ça comprend les nouvelles entrées de l'automne, là, parce que c'est à partir de quand vous êtes là...

M. Roberge : Bien là, ils sont déjà là.

Mme Hivon : ...donc là, vous en avez créé 250. Donc, petite nuance, ça inclut les personnes... On dirait que vous faites complètement abstraction de la donnée des services de garde à l'école le midi, les enfants qui vont rester dîner, les gens qui vont être au service de garde. Moi, je pense même que je suis conservatrice avec mon chiffre, mais ça, on ne peut pas l'évaluer avec une exactitude complète, parce qu'il y en a combien, de ces dizaines de milliers d'enfants, qui vont rester à l'école? Donc, c'est pour ça que j'arrive à ce chiffre-là.

Alors, je veux bien. Moi, tout ce que je demande, c'est qu'on les ait, les chiffres du ministre. Ça va être combien qu'on va avoir besoin? C'est quoi, les estimés? Service de garde, ça va être combien? 500, 700, 1 000, 250? C'est tout ça que je demande, mais on ne les a pas, ça fait que, oui, on fait des extrapolations. Je n'ai jamais dit que mon chiffre de 4 000, il était parfaitement exact, mais, pour moi, c'est l'horizon, puis là le ministre, il ne me convainc pas que je suis loin de la vérité. Je voulais juste faire cette précision-là.

M. Roberge : Bien, je veux quand même revenir, là, 2 600 classes... C'est parce que les 644 classes qui seront ouvertes dans quelques semaines, le personnel est déjà embauché, autant les enseignantes que les éducatrices. Donc, il en manquerait 2 000 à rajouter dans les quatre prochaines années, 2 000 enseignants, enseignantes, et l'éducatrice. Là, vous me dites : Bien, ça donne 3 000 personnes. Vous remontez à 1 000 de plus pour les gens qui sont aux services de garde. Mais pour, 2 000 enfants... je ne pense pas, là, en tout cas, j'ai comme l'impression qu'il y a trop de monde dans le calcul.

Maintenant... mon Dieu, j'ai perdu le début, je suis rendu... j'ai juste seulement répondu sur les chiffres, j'ai oublié sur quel sujet vous nous aviez...

Mme Hivon : Sur le 2023, sur le fait...

M. Roberge : Ah oui! Bon, très bien. Alors, vous dites que c'est un objectif... On ne peut pas se donner cet objectif-là puis le mettre dans... Vous comprenez pourquoi il n'est pas dans la loi, précisément, même si c'est un objectif politique... puis, quand même, quand on met un chiffre, on peut s'attendre à se faire juger là-dessus, politiquement. Mais, vous savez, si on ne se donne pas un objectif, on ne l'atteindra pas.

Tout à coup, vous dites : En tout, ce serait cinq ans, tout à coup, c'est six ans, tout à coup, c'est sept ans. Moi, je pense que ça va être cinq ans, puis on fait tout ce qu'il faut pour que ça fonctionne, puis on a confiance que ça va fonctionner. Mais il faut se donner un objectif pour l'atteindre. Ce n'est pas parce qu'on ne l'écrit pas dans la loi que l'objectif n'existe pas.

En politique, vous le savez très bien, quand on se donne un objectif, quand on se donne une date, quand on donne un nombre, que ce soit dans n'importe quel service public, il y a un jugement. Après on peut bien justifier. S'il arrive des événements impondérables, je pense que les gens peuvent comprendre, mais, en même temps, les gens s'attendent à ce qu'on remplisse nos engagements. Puis c'est pas mal notre couleur, à date, de gouvernement, si vous regardez, depuis qu'on a été élus, on a pas mal cet intérêt de livrer.

Et, vous savez, les CPE que mes filles ont fréquentés puis pour lesquels ils ont eu d'excellents services, je le dis, quand ils ont été déployés, au départ, il n'y en avait pas, d'objectif, de dire, bon, bien, dans combien de temps, là, on répondra aux besoins des familles? Je ne suis pas en train de dire que c'est un mauvais réseau, je suis en train de dire que le gouvernement de l'époque a créé ce réseau intéressant puis il a dit : Bon, bien, ça va se développer, là, au fil des ressources budgétaires. Puis ça a fait que, plus de 20 ans plus tard, bien, on a encore quoi, 150 000 personnes qui n'ont pas de place, 46 000 qui sont sur une liste d'attente. Ce n'est pas un modèle de déploiement politique, ce n'est pas arrivé encore. Je ne suis pas en train de dire la qualité des services, mais je suis en train de dire, côté déploiement, là, pour moi, c'est un contre-exemple. Quand tu ne te donnes pas d'objectif, tu ne les atteins pas. Mais, à un moment donné, il faut se donner un objectif.

Donc, politiquement, on l'a donné, budgétairement, on est là. En termes de programmes pédagogiques, le comité est formé, le programme sera là. En termes de PQI, il n'y a jamais eu un PQI, depuis 1608, quand Champlain a fondé l'Habitation, qui a eu autant d'ambition en éducation, on a un PQI qui nous donne les moyens de nos ambitions. Donc, le PQI est là, les ressources professionnelles s'en viennent, le programme pédagogique s'en vient, le projet de loi est là. Moi, je pense qu'on a quelque chose comme un plan très clair.

Le Président (M. Jacques) : Merci. Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Je trouve que mes collègues ont posé des questions vraiment intéressantes, ont soulevé des enjeux pertinents là-dessus. Moi, je vais vous dire, sincèrement, là, je pense que la cible de cinq ans, c'est une décision qui a été prise sur le coin d'une table, dans une séance de brainstorming électoral — c'était une très bonne stratégie de marketing électoral — mais je ne pense pas que ce chiffre-là émane d'analyses sérieuses de la part du ministère sur le temps que ça va prendre exactement pour implanter les maternelles quatre ans partout à l'échelle du Québec. Parce que c'est un chiffre qui a été donné au moment où le gouvernement n'était pas encore élu, donc c'est un chiffre qui a été déterminé par un parti en campagne électorale, et non par un ministère. Donc, ce chiffre-là est resté depuis, je pense qu'on force un objectif qui était électoral à un ministère, en ce moment. Et ça me pose problème, mais, bon, on va laisser l'optimisme du ministre... puis on va faire comme si c'était possible qu'en 2023 le décret puisse être adopté, puisque son plan se serait réalisé. Je ne pense même pas que c'est probable, mais disons que ce l'était. En ce moment, à ma connaissance, on parle de 50 %, on parle d'une cible de 50 % pour 2023. Est-ce que je me trompe?

M. Roberge : On est autour de ça.

• (17 h 10) •

Mme Labrie : Parfait. Donc, ce que ça veut dire, c'est que, admettons que ça fonctionne, et qu'en 2023 vous avez atteint cette cible, et que vous adoptez votre décret, à partir de ce moment-là, dans la loi, ça va être inscrit que tous les enfants de quatre ans vont avoir le droit. Mais tous les enfants de quatre ans, ça, c'est 100 % des enfants de quatre ans. Ça fait qu'au moment où le décret va faire en sorte que la loi va entrer en vigueur on va reconnaître le droit à 100 % des enfants, mais on va avoir des places pour 50 % des enfants. Ça fait que c'est sûr qu'on ne le sait pas, combien vont s'inscrire ou pas. On ne le sait pas si, d'une année à l'autre, ça va passer de 50 % à 60 % d'inscrits, ou à 85 %, ou si ça va rebaisser à 30 %, on ne le sait pas. Mais, du moment où on passe le décret, il faut qu'on soit capable d'offrir la place à potentiellement 100 % des enfants. Donc, moi, j'ai une inquiétude qu'on va y arriver. Donc, j'aimerais ça que le gouvernement pense à ça.

Puis, moi, sincèrement, là, je vais être vraiment très transparente avec vous puis je ne sais même pas si je devrais dire ça, mais je vais le dire pareil, personnellement, si le gouvernement reconnaît, dans la loi, le droit à la maternelle quatre ans, ça fait quasiment mon affaire, parce que ça me donne un levier pour demander qu'on reconnaisse aussi le droit au service de garde éducatif. Donc, c'est ce que je compte faire. Je vous le dis, puis ça fait des mois que je vous le dis, ça fait que ça me donnerait un levier.

Si vous adoptez un amendement qui va dans le sens de ce que propose ma collègue puis qui serait peut-être modifié pour des raisons de concordance, je pense que ça serait vraiment à votre avantage, parce que ça vous donnerait une sortie de secours, en tant que gouvernement, de pouvoir faire quand même ce que vous voulez, d'obliger à offrir le service, mais, si jamais vous n'êtes pas capable de l'offrir à 100 % des enfants, bien, à ce moment-là, il n'y aurait pas de recours possible contre vous.

Donc, si j'étais à votre place, sincèrement, je proposerais moi-même un amendement qui va dans ce sens-là pour vous garder une sortie de secours. Maintenant, je vais vous laisser gérer ça, mais pensez-y.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Ah! non, c'est correct.

Des voix : ...

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Saint-Laurent, qui avait demandé la parole avant...

Mme Rizqy : ... ma collègue la députée de Fabre veut vraiment intervenir, puis elle est sur une...

Une voix : Non, de Mille-Îles.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Rizqy : De Mille-Îles... Aïe! Je n'arrête pas, là, aujourd'hui. C'est...

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : ...vous avez le droit, mais, effectivement, ça éveille, en moi, un paquet de trucs.

Dans le fond, M. le ministre, les quatre ans, ça devrait être une catégorie à part. Je vous réexplique pourquoi. En ce moment, le cinq ans n'a pas d'option. Dans le fond, il en a une, option, il reste à la maison ou il va à l'école. Le quatre ans a trois options. Il reste à la maison, il va en service de garde ou il va à l'école. Il faut qu'un parent, dans un conseil d'établissement, il faut qu'une direction générale d'une commission scolaire soit capable de reconnaître, dans sa loi, cette perspective-là. Je ne sais pas comment l'écrire, je ne suis pas légiste, je n'ai pas les capacités de mes collègues, je n'ai pas cette reconnaissance-là. Mais ce que je sais, c'est que, quand un conseil d'établissement, un comité de parents où des gens s'assoient ensemble pour bien comprendre la loi pour soit l'obstiner, comme on dit chez nous, ou soit la mettre en application, il se doit de comprendre quel est son droit et son obligation. En ce moment, dans le projet de loi, de la façon que vous le modifiez, le quatre ans prend toute la place et on oublie le choix parental. Je ne le sais pas, comment l'écrire. Vous êtes sûrement superbien entouré.

Mais je pense que la parenthèse que ma collègue de Sherbrooke vous offre, c'est d'être capable de le regarder pour faire une proposition... Moi, je ne vous dis même pas de faire un plan puis de mettre une date, là. Je vous dis juste que la catégorie quatre ans ne peut pas être reconnue comme celle de cinq ans, et puis, après, la suite, dans l'obligation de l'éducation. Un peu comme on reconnaît un élève que son parent donne l'éducation à la maison, un peu comme on reconnaît les élèves qui sont en besoins particuliers, je crois que le quatre ans, parce qu'on a ces options-là devant le parent, parce que vous voulez être transparent avec les familles puis leur dire : Voici les opportunités que vous avez, puis nous, le réseau de l'éducation, savez-vous quoi?, on va s'ajuster pour qu'en 2023 — je prends votre date — on soit capable d'offrir à 50 % des parents de Laval cette opportunité-là.

Mais il faut qu'on soit capable de lire la loi et voir dans votre volonté, dans la volonté de cette loi-là, ce choix-là, sans... j'ai le goût de vous dire: Sans être obligé de nommer les autres silos, parce que moi, je sais que ça marche en silo. Mais, en même temps, le défi est là. Le quatre ans n'est pas la même catégorie que le cinq ans puisque j'ai plus d'options, comme parent et comme société, envers ce jeune-là.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

M. Roberge : Je pense que le quatre ans ressemble moins au cinq ans en ce moment, mais, si on recule, quand on a créé la maternelle cinq ans accessible, les enfants de cinq ans étaient quelque part, ils n'étaient pas tous chez eux, à la maison, avec leur maman, il y en avait, des garderies en milieu familial qui accueillaient des cinq ans, il y en avait, un système. Les enfants n'étaient pas tous à la maison en 1996, là, je veux dire, il y avait pas mal de femmes et d'hommes sur le marché du travail, les enfants étaient ailleurs, et pourtant le gouvernement s'est donné cette obligation-là. C'est sûr qu'avant que le fasse on dit : Bien oui, mais on ne peut pas le faire, ça ne s'est pas fait. Mais il faut innover, il ne faut pas que le Québec de 2030 soit une copie du Québec de 1990, ou de 2005, ou de 2010. Ce n'est pas parce que ça ne s'est pas fait qu'on ne peut pas le faire. On peut le faire, on est capable d'avoir cette ambition-là sur quatre ans, sur cinq ans, de déployer quelque chose puis d'offrir un service qui n'existait pas il y a quatre ans, il y a cinq ans. Moi, je... on l'a déjà fait dans d'autres réseaux, il y a 10 ans, il y a 15 ans, on l'a fait pour... il y a presque 20 ans, on l'a fait pour la maternelle cinq ans, on l'a fait pour d'autres choses, je veux dire, on a créé un réseau des cégeps, il n'existait pas. Bon.

Alors, j'ai un peu de misère avec cette idée-là qu'on n'est pas capable, c'est trop compliqué, ça coûte trop cher, c'est... On est capable de faire des grandes choses, il suffit de décider de le faire, d'avoir la volonté politique, de mettre les ressources, pas toutes les ressources en disant qu'on ne fera rien d'autre, mais d'y mettre les ressources. Une priorité gouvernementale, c'est ça. Puis ce n'est pas vrai qu'on n'a pas de plan : on a un horizon, on a un PQI et on a une loi pour y arriver. On va y arriver.

Le Président (M. Jacques) : Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : M. le ministre, très clairement, là, je vous crois, je pense que vous êtes capable, j'y crois, mais je pense aussi que, dans 20 ans, il y a encore des parents qui vont choisir le réseau de CPE. Il faut qu'ils soient capables de voir, dans votre projet de loi sur l'éducation, la possibilité qu'il a. De la façon que le projet de loi est écrit, en ce moment, je n'ai pas le choix, ça ne parle pas de mon choix, ça me dit : Tu vas à l'école à quatre ans, l'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est fixé à quatre ans, à la date déterminée dans le régime pédagogique.

Alors, je comprends ce que vous me dites, quand vous me dites : On n'a pas d'ambition. Oui, je vous crois, quand vous me dites qu'on peut faire ce projet-là, je le crois, mais je crois aussi à votre intention de garder un réseau qui répond à un autre choix qui s'appelle les CPE, ou les garderies, ou le milieu familial. Je vous crois aussi, quand vous me dites ça, mais je ne le vois pas.

Et, de ce fait, c'est pour ça que je vous dis qu'il y a deux catégories d'élèves quand on parle du préscolaire : il y a le quatre ans, qui lui a des choix, puis il y a le cinq ans, qui, maintenant, depuis les années que la pratique a été mise en place, bien, maintenant, le cinq ans, c'est pour tout le monde.

Mais, si vous êtes sincère quand vous nous dites, vous croyez au réseau de CPE puis vous pensez qu'il faut continuer à le déployer, puis que le parent aura toujours ce choix-là, bien, dites-moi pas que vous allez l'insérer dans la loi, puis que, finalement, dans 20 ans, il n'y aura plus de quatre ans dans les CPE. Parce que ce n'est pas ça que vous me dites, vous me dites : Nous, à la CAQ, ce qu'on croit, c'est qu'on peut développer le choix du parent, puis c'est ça, votre engagement que vous avez pris en élection. Bien, pour maintenir cet engagement-là, il faut que ce soit lisible dans une loi que, comme parent, j'ai fait un choix, puis le gouvernement s'engage à cette opportunité-là que j'ai comme parent d'aller dans le réseau de CPE, garderie, milieu familial ou à l'école. Puis le choix qui me sera offert, j'aurai une place pour mettre mon jeune à moi.

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre.

• (17 h 20) •

M. Roberge : Bien, je comprends très, très bien votre préoccupation et je pense qu'il faut lire le texte proposé, l'article dans sa totalité, dans les trois paragraphes, pour voir que le parent aura toujours ce choix-là. Puis je suis sûr que, dans 20 ans, il y aura encore des quatre ans dans le réseau des services de garde éducatifs, j'en suis convaincu.

Mais, vous comprenez, on écrit en créant un droit, pas une obligation. Quand on fait juste lire le dernier paragraphe... s'il n'y avait que le dernier paragraphe... puis c'est un terme légal aussi, hein, ce n'est pas une publication Facebook ou Twitter, quand on lit, il faut mettre nos lunettes légales, puis, des fois, on dit : Oui, mais moi, je ne l'interprète pas de cette façon-là, mais il faut l'interpréter comme l'interprètent les légistes, là. Si on lit juste le dernier paragraphe, on dit : «L'âge d'admissibilité à l'éducation préscolaire est fixé à 4 ans». Là, on va dire : Bien, donc, ils sont obligés d'être admis à quatre ans. Bien, ce n'est pas ça que ça dit, puis surtout, si on lit juste ça, ça ne marche pas. Il faut lire à partir du premier paragraphe, quand on dit : «Toute personne a droit au service», donc on crée un droit, comme... je reviens, les personnes ont droit au service en fonction de la date d'admissibilité, puis la date d'admissibilité, c'est quand l'enfant a quatre ans. Donc, on crée un droit, pas une obligation et c'est ce qu'on dit depuis le début. Puis vous dites : Oui, mais écrivez que c'est un choix. Bien, ce n'est pas parce qu'on crée...

Une voix : ...

M. Roberge : Alors, ici, à l'article 12 du régime pédagogique, bon, parce que... Bon, il y a la Loi sur l'instruction publique... Je m'excuse, mais j'essaie de répondre, alors, en toute honnêteté, à la question puis à la préoccupation. Il y a la Loi sur l'instruction publique, il y a le régime pédagogique. L'article 12 du régime pédagogique dit :«L'élève qui a atteint l'âge [...] avant le 1er octobre de l'année scolaire [au] cours et dont les parents ont fait la demande est admis à l'éducation préscolaire.»

Donc, dans le régime pédagogique, c'est clair, c'est: «dont les parents font la demande». On ne va pas aller le chercher chez eux, et la loi s'interprète en fonction du régime pédagogique.

Oui, je vais vous laisser intervenir, chère collègue.

Mme Rizqy : Je pense que vous avez peut-être fait un lapsus ici, puis que vous voulez peut-être corriger immédiatement, parce que c'est sûr que, quand on met un droit dans une loi, on crée une obligation. Ça, il faut que ça soit clair, là, parce que les gens qui nous écoutent — puis je pense que vous avez aussi le bénéfice d'avoir votre juriste juste à côté de vous — si on indique, dans la loi, «toute personne a [un] droit au service de l'éducation préscolaire», et là, maintenant, on vient d'indiquer qu'effectivement, avec le dernier paragraphe, que ce droit commence à partir de l'âge de quatre ans, il y a une obligation qui découle de ce droit-là. Et je crois aussi qu'on est signataires de traités internationaux en matière de droit à l'éducation, donc, c'est non seulement...

Ici, l'exposition, là, puis je remets les lunettes... Vous dites : On va mettre les lunettes légales, je les mets, là, les lunettes légales. Puis la raison de son intervention puis de celles de tous mes collègues, c'est aussi de se prémunir nous autres aussi, parce que, si on commence à créer un droit qui commence dès quatre ans, on peut aussi, à titre de gouvernement, s'exposer à des poursuites. Alors, c'est pour ça qu'on veut mettre des balises.

Puis je comprends que peut-être qu'on peut améliorer puis on pourrait travailler ensemble, juste pour s'assurer qu'effectivement, si le plan de déploiement est étalé... Vous, vous voyez... Écoutez, vous, vous êtes assis sur la chaise, vous êtes aux commandes, c'est vous, le ministre. Donc, vous, quand vous parlez de votre horizon, vous le voyez, c'est à travers vos yeux à vous. Mais les autres personnes, là, ne seront pas assises à votre chaise. Eux, qu'est-ce qu'ils vont prendre, c'est ce texte de loi. Et ce texte de loi, tant et aussi longtemps qu'on n'a pas nuancé comme il se doit, noir sur blanc, à l'écrit, on peut avoir une exposition à un risque légal. Et c'est ça qu'on essaie de minimiser. Oui, on est totalement d'accord avec vous. Moi, là, les maternelles quatre ans, moi-même, j'en ai bénéficié, vous savez, en milieu défavorisé, puis vous l'avez dit tantôt : On veut le déployer... que vous avez un plan de match. Je l'attends, mais je le sais, que vous avez un plan de match, je comprends.

Mais, maintenant, ce que ma collègue de Mille-Îles dit : Est-ce qu'on peut mettre noir sur blanc qu'on a deux catégories : les quatre ans, qui ne seront jamais comme les cinq ans? Puis ce n'est pas juste elle qui le dit, il y a aussi M. Chicoine qui l'a dit. Ce n'est pas la même maturité, là. Ça paraît minime, un an de différence, mais il y a une grande différence. Parce qu'aussi, par les quatre ans... Tantôt, elle vous a parlé, elle vous a posé une question, parce qu'elle a cette expertise, elle sort elle-même du réseau de l'éducation, tout comme vous. Quand elle parlait, par exemple, de la prérogative du ministre de pouvoir admettre un jeune qui a... un enfant de trois ans et quelques... plusieurs mois, qui atteint presque quatre ans, est-ce qu'on pourrait avoir le discrétionnaire du ministre? Il y a des questions qu'on se pose.

Puis, tantôt, là, il y a plusieurs, plusieurs affaires. Moi, je vous réinvite qu'on reste concentrés ici sur «toute personne a [un] droit au service». Est-ce qu'on peut venir l'encadrer, ce droit, pour se prémunir et vraiment se concentrer vraiment sur l'essentiel? Parce que, si c'est le libre choix qui est tel que prôné non seulement par vous, mais aussi par votre collègue le ministre de la Famille, si c'est vraiment ça, le libre choix que vous prenez... que vous voulez, bien, faisons-le, qu'on est capable de le lire dans la loi, ce libre choix, parce que, présentement, quand on le lit, là, ce n'est pas tant le libre choix que vraiment on va vers les quatre ans.

Puis, tantôt, je vous ai dit, j'allais revenir au niveau juste historique, puis j'avais parlé de le faire maintenant. La complémentarité des services. Quand on a dit... tantôt, vous avez mentionné des maternelles cinq ans, là, on avait eu la présentation de Mme Brodeur, qui était sa présentation qui a été faite avec Yolande Brunelle. Elle avait fait un historique, qui est... bien, ce n'est pas moi l'ai fait, c'est elle qui l'a fait puis il est très bien fait, on parle de maternelles cinq ans à demi-temps qui ont été réalisées dès les années 70. Après ça, maternelles cinq ans à temps plein en 1997‑1998. Donc, il y a vraiment eu... on l'a vu, là, combien de temps ça a pris. Donc, ça a vraiment été sur plus de 20 ans. Maternelles quatre ans, dans les années 70, 1973‑1974 qu'on a commencé à demi-temps, à temps partiel, en milieu défavorisé, puis ça a pris plusieurs années avant qu'on soit capable de le déployer à temps complet... C'est vrai, parce qu'effectivement il y a une différence entre les maternelles cinq ans au niveau du service. Mais, en même temps, là, quand on a déployé les maternelles cinq ans à temps plein en 1997-1998, bien, il y a eu aussi la création des CPE. Donc, on voyait qu'il y avait deux régimes qui fonctionnaient puis qu'on mettait sur place. Par la suite, on est arrivés avec l'étude de l'école Saint-Zotique. C'était un projet pilote de la commission scolaire de Montréal pour regarder les maternelles temps plein en milieu défavorisé. Et, par la suite, 2012-2013, c'est là qu'on est arrivés avec les 50 premières maternelles de quatre ans à temps plein en milieu défavorisé.

Pourquoi que je prends la peine de... Puis, par la suite, 2014-2018, sous le gouvernement précédent, libéral, mise en place de presque 400 maternelles quatre ans, temps plein, milieu défavorisé. Là, votre annonce, à vous, en 2018, lors de la campagne, bien, c'étaient les maternelles universelles.

Si je prends la peine de donner toutes ces dates, ce n'est pas juste pour montrer, là, la ligne de temps que ça nous a pris à nous rendre quelque part. Et ce n'est pas parce que les gouvernements précédents manquaient de volonté, c'est qu'il y a aussi une réalité à laquelle qu'on est tous confrontés, puis vous aussi, vous allez l'être. Ça va nous rattraper tôt ou tard. C'est les ressources. Puis là je ne parle pas uniquement financières. Je parle effectivement des ressources, aussi, humaines.

Si on revient... Tantôt, la députée de Sherbrooke disait : Oui, mais, en campagne électorale, en campagne électorale... Moi, là, j'ai tout suivi, puis, vous le savez, j'aime ça, faire des tableaux. Ça fait que c'est sûr qu'en campagne électorale là, c'était 5 000. C'était ça, le plan de match. Après ça, au budget, on était rendus à 3 400 classes. Là, maintenant, on est rendus à 2 600 classes. Il n'y a personne qui sursaute, évidemment, parce que... Moi, je comprends, là. Même, je vais vous dire bien franchement, là, je suis très contente qu'on ait passé de 5 000 à 2 600 classes. Je trouve que c'est déjà légèrement plus réaliste. Pas plus réaliste totalement. Légèrement. Parce que, même si vous n'aimez pas le chiffre qui est avancé par la députée de Joliette, à propos des 4 000, moi, je l'ai regardé, ce chiffre, parce que j'ai voulu voir : Est-ce que c'est réaliste, son 4 000? Puis, oui, j'arrive à la même conclusion qu'elle. C'est 4 000 ressources additionnelles. Parce qu'on peut prendre votre chiffre à vous, mais, quand on regarde, concrètement, le nombre de nouvelles classes avec le nombre d'éducateurs et d'enseignants qu'on a besoin...

Et, si on considère une autre donnée, qui est tout aussi importante, le roulement du personnel... Parce que, oui, il y a de l'épuisement. Donc, quand on a une enseignante, il faut aussi prévoir la suppléance, parce qu'elle arrive très souvent, vous le savez. Alors, ce n'est pas juste de dire : On a une enseignante, puis elle est bonne pour toute l'année. Si c'était ça, M. le Président puis M. le ministre, je peux vous dire que toutes les commissions scolaires diraient : Enfin, ça va bien. Mais on a aussi une réalité qu'on doit aussi prévoir même les suppléants. Et, en ce moment, nos banques de suppléances sont pratiquement vides dans l'ensemble du réseau. Donc, on a vraiment un grand défi de taille.

Alors, c'est pour ça qu'ici, comme l'a si bien dit la députée de Sherbrooke, c'est une porte de sortie pour se prémunir. Prémunir contre quoi? Bien, contre une action... Puis une action collective, on le sait, ça peut arriver assez vite. Qu'elle soit valide ou pas, il faut quand même dépenser de l'argent pour aller devant les tribunaux pour ça. Alors, si on est capable dès maintenant d'avoir un langage... Puis on peut le travailler avec la juriste, le langage, pour vraiment s'assurer que ce droit, bien, oui, on le met pour les cinq ans, mais ce n'est pas un droit qui devient absolu pour les quatre ans. Un décret qui serait adopté, qu'il le soit en 2023 ou... de 2020, 2022, 2023, 2025, on n'a pas de garantie quand est-ce que le gouvernement, à l'article 18, qui sera étudié plus tard, sera décrété. Donc, ici, là, on a une façon, au moins, de se protéger.

En terminant, tantôt, vous avez fait référence, à plusieurs reprises, au PQI. Le PQI, là, vous avez mentionné qu'effectivement il y a des budgets importants. Ma préoccupation, puis je vous l'expose — puis ça n'a pas rapport avec mon amendement, mais je vous l'expose quand même — c'est qu'il y a quand même des lumières qui sortent rouges, rouges, rouges des commissions scolaires, qui disent : Attention, il y a des dépassements de coûts importants. Alors, ça, je vous le répète, je vais le répéter encore, ça, pour moi, ça me préoccupe, parce que, là, on parle d'appels de contrats qui ont été... où est-ce que les gens ont soumissionné suite à des appels d'offres et qu'il y a des ententes de gré à gré qui peuvent avoir lieu. Et ça, c'est très dangereux, parce qu'on sait que, dès lors qu'on peut négocier, bien là, on peut vraiment dire: Au diable les dépenses, puis augmenter de façon substantielle le prix de... pour ajouter des nouvelles classes. Puis on l'a vu, là-dessus, où est-ce qu'on a eu des classes qui étaient budgétées initialement par vous autour de 122 800 $ qui sont rendues, en moyenne, à 800 000 $. Ça, c'est la moyenne. Puis on a vu même des classes que ça revenait pratiquement à 1 million de dollars la nouvelle classe.

Ça, je le mentionne, parce que le PQI, je suis très contente que les sommes additionnelles soient là. Le budget, de toute façon, est très, très, très disponible, vous avez plein de surplus. Mais ce n'est pas une raison pour dépenser, sans regarder, de façon vraiment structurée, de façon intelligente, l'argent des Québécois, durement gagné, et qu'ils paient en impôts pour des services, et pas nécessairement pour le mettre dans la poche d'entrepreneurs, dans du béton. Alors, ça, c'est une petite parenthèse.

Mais, je vous le répète, on peut travailler avec la juriste, voir comment qu'on peut améliorer le langage pour vraiment avoir une protection pour le gouvernement.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Jacques) : M. le ministre... Juste pour vous dire, c'est important que je donne les droits de parole, entre autres pour l'écriture du Journal des débats. M. le ministre.

M. Roberge : Merci, M. le Président. Bien, bon, je pense qu'on a fait une partie du débat. Il ne m'appartient pas de dire quand le débat est terminé, mais on a quand même suffisamment avancé. Puis je ne voulais pas faire de la procédurite, mais, maintenant qu'on a quand même jasé un certain temps, je pense quand même, M. le Président, que l'amendement, tel qu'il est, puis je ne voulais pas le dire pour qu'on... tuer le débat quand... Je ne pense pas qu'il soit recevable. Je pense qu'il contredit... Dans le texte, là, on dit que c'est cinq ans et quatre ans, l'âge d'admissibilité. C'est comme deux dates qui s'opposent l'une, l'autre. Ma collègue pourra voter contre l'article. Si elle veut que ça soit cinq ans, on va en déposer un autre. Mais, en tout cas, ce que je vous soumets, c'est à vous de l'analyser, c'est à vous de juger, mais, d'après moi, il n'est pas recevable. Je vous demande de vous pencher sur la question, s'il vous plaît.

Le Président (M. Jacques) : Bon, est-ce que vous... Est-ce qu'il y a des commentaires?

Mme Rizqy : ...pour bien comprendre, est-ce que vous invoquez que l'amendement est irrecevable?

Le Président (M. Jacques) : Bien, oui.

M. Roberge : Oui. Puis c'est ce que je comprends malheureusement. Puis ça va être au président de juger. Puis, après, s'il est recevable, bien, on votera ou on débattra. S'il n'est pas recevable, bien, vous pourrez en déposer un autre. Mais, à ma lecture, il n'est pas recevable. C'est mon humble avis, mais ce n'est pas à moi à trancher. Donc, je demande au président de statuer sur cette question, s'il vous plaît.

Mme Rizqy : M. le Président, si vous permettez, avant que vous tranchez sur cette question, j'aimerais rappeler que le projet de loi modifie le dernier le paragraphe pour fixer l'âge à quatre ans et que moi, j'ajoute un amendement où est-ce que je dis que le droit au service commence à cinq ans. L'un parle d'admissibilité. Puis je suis d'accord qu'on peut améliorer le langage pour dire que toute personne a droit au service de l'éducation préscolaire dès l'âge de cinq ans et, par la suite, revenir préciser, dans le même paragraphe, l'admissibilité à cinq ans jusqu'au dernier jour. Mais ça ne vient pas dénaturer le projet de loi... l'article 1 du projet de loi. Alors, à moins que mon amendement dénature l'article 1 du projet de loi, il demeure recevable.

Le Président (M. Jacques) : Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

Donc, étant donné l'heure, on peut suspendre jusqu'à quelques instants, quelques moments, et on verra si on revient en ondes plus tard.

(Suspension de la séance à 17 h 33)

(Reprise à 17 h 49)

Le Président (M. Jacques) : ...ondes. Mme la députée de Saint-Laurent, vous avez quelques... vous désirez retirer votre amendement.

Mme Rizqy : Oui. J'ai eu des discussions avec le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, qui comprend, au fond, c'était quoi, la crainte exprimée en matière de potentiel de poursuite. Parce que, lorsqu'on indique un droit versus admissibilité, il y a un immense potentiel, mais il a lui-même dit au micro ouvert qu'il n'y a pas de décret qui sera adopté avant que les recettes et tous les éléments pour s'assurer que ça soit une option envisageable pour l'ensemble du Québec... pas avant un horizon d'au moins 2023.

Donc, il sait à ce stade-ci. Je comprends l'intention du ministre. Et, pour ma part, effectivement, j'aurais dû inscrire : Toute personne a le droit au service d'éducation préscolaire cinq ans et, par la suite, d'admissibilité à l'âge de cinq ans, pour rester cohérent au niveau du paragraphe un.

Alors, ici, M. le Président, puisqu'on a évidemment le ministre qui comprend cette... qu'il n'y aura pas de décret adopté avant qu'on ait suffisamment de ressources, il n'y aura pas de... Ma crainte, au niveau de poursuites, est ici dissipée avec l'engagement du ministre.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Jacques) : Est-ce qu'il y a consentement pour retirer l'amendement à l'article 1? Il y a consentement. Merci. Donc, on revient à l'article 1. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut intervenir sur l'article 1? Pas de personne qui veut intervenir, donc est-ce que... l'article 1 est mis aux voix. Est-ce que c'est adopté?

Des voix : ...

Le Président (M. Jacques) : Adopté. Article 1, adopté sur division. Article 2, M. le ministre.

M. Roberge : M. le Président, je mets, sur la table, une proposition, que j'explique avec une feuille que je vais passer. Je vais l'expliquer, puis, après ça, on pourra suspendre, puis, le temps qu'on se l'explique, probablement qu'on pourra repartir demain sur de nouvelles bases. Si mes collègues sont d'accord. C'est une proposition, évidemment.

Et on a fait ça avec les juristes en se souvenant du dernier projet de loi, que j'ai eu le plaisir de travailler, dans la dernière législature, avec le précédent ministre de l'Éducation, qui est le leader actuel, Sébastien Proulx, qui avait fait ça pour le dernier projet de loi n° 105. Donc, le projet de loi a été écrit article par article, dans l'ordre dans lequel on modifie la Loi sur l'instruction publique. On est obligé d'avoir un projet de loi qui suit précisément la Loi sur l'instruction publique dans la liste des articles.

Cependant, ce n'est pas nécessairement la façon la plus intelligible, ce n'est pas l'ordre le plus intelligible pour adopter les articles, parce que, des fois, on va se promener. Comme là, pour comprendre l'article 1, il fallait lire ensemble l'article 18, et, des fois, ça va même être plus complexe que ça, si on procède encore dans l'ordre, des fois, il va falloir, supposons, pour l'article 3, comprendre le 16 et le 17, puis on risque de se promener pas mal, de papillonner comme ça dans le projet de loi. Donc, si vous permettez, M. le Président, je vais proposer un ordre différent, pour que ce soit plus facilement compréhensible puis qu'on se promène moins dans le projet de loi, puis vous en jugerez la pertinence.

L'idée, c'est d'avoir, dans un premier temps, le réseau public, dans un deuxième temps, les articles qui touchent le réseau privé, dans un troisième temps, l'admissibilité exceptionnelle, dans un quatrième temps, le régime pédagogique, dans un cinquième temps, l'entrée en vigueur dont on parlait tout à l'heure, les articles qui disent : Bien, tel article entre en vigueur à telle date, tel article entre en vigueur à telle date, à tel moment, pour que la séquence de planification soit cohérente. Donc, je propose qu'on suspende, qu'on photocopie cette feuille, qu'on en prenne connaissance, puis, bon, probablement qu'on pourrait reprendre demain selon cet ordre, ou pas, à la convenance des membres. C'est la proposition.

Le Président (M. Jacques) : Consentement? Donc, on va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 53)

(Reprise à 17 h 58)

Le Président (M. Jacques) : Nous sommes de retour en ondes. M. le ministre.

M. Roberge : Oui. Donc, j'ai tellement passé des documents que je n'en ai plus copie moi-même. Est-ce que... Merci. Donc, je fais proposition à la commission, ici, dans le simple but de faciliter les travaux et de nous aider à une meilleure compréhension à tous.

Donc, dans un premier temps, de voir les articles qui touchent directement le réseau public, articles 1, 6, 3, 2 et 7. J'en fais la lecture pour les gens qui nous écoutent. Ils ne sont pas nombreux, mais ils sont là. Dans un deuxième temps, le réseau privé, articles 8 et 9. Dans un troisième temps, l'admissibilité exceptionnelle, articles 4, 10 et 11. Dans un quatrième temps, le régime pédagogique, articles 5, 12, 13, 14 et 15. Et, dans un cinquième et dernier temps, l'entrée en vigueur, les articles 16, 17 et 18.

Donc, ici, on aura fait le tour de tous les articles, mais d'une façon qui sera plus facile à comprendre. Je ne vous promets pas qu'on n'aura pas, des fois, à se promener dans le projet de loi, mais le moins possible. Ça nous aidera à faire nos travaux. Ce n'est pas la façon habituelle, mais ce n'est pas la première fois non plus, comme je dis. Dans le précédent gouvernement, ça avait déjà été fait, ça nous avait aidés à suivre les travaux. Donc, j'en fais la proposition.

Le Président (M. Jacques) : ...M. le ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour étudier le projet de loi n° 5 avec l'ordre proposé?

Mme Rizqy : Pour l'opposition officielle, oui, il y a consentement, il y a un ordre logique, on arrive à suivre parfaitement. Merci.

Le Président (M. Jacques) : Consentement. Donc, il y a consentement. Donc, l'ordre proposé par le ministre sera adopté à partir de demain matin. Étant donné l'heure, je vous remercie de votre collaboration.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à demain, mercredi le 21, à 9 h 30. Merci.

(Fin de la séance à 18 heures)

Document(s) associé(s) à la séance