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Version finale

28e législature, 3e session
(20 février 1968 au 18 décembre 1968)

Le jeudi 28 novembre 1968 - Vol. 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Comité de la constitution


Journal des débats

 

Comité de la constitution

(neuf heures trente sept minutes)

M. BERTRAND (président du comité): Alors, messieurs, il est quelques minutes passé neuf heures trente. Nous devons siéger à onze heures ce matin. Comme président du comité je souhaite la bienvenue à tous les membres du comité parlementaire de la constitution. A la suite de deux réunions du comité directeur, l'une qui a eu lieu le 15 août et l'autre qui a eu lieu le 22 novembre, nous nous sommes entendus pour qu'il y ait ce matin une séance publique du comité parlementaire de la constitution. Je demande au secrétaire s'il a transmis à tous les membres du comité les documents qui devaient l'être.

M. MORIN (secrétaire du comité): J'ai transmis, M. le Président, d'abord le projet de l'ordre du jour sur lequel le comité directeur s'était arrêté vendredi dernier. Alors, c'est celui que vous avez devant vous.

Deuxièmement, j'ai envoyé ce qu'on demandait aussi, c'est-à-dire un relevé des travaux accomplis par le comité depuis son institution et de certaines questions en suspens. Vous avez déjà reçu ça. C'est un long mémoire accompagné d'un certain nombre d'annexes qui donnent la substance de ce qui est écrit dans le rapport.

On avait aussi demandé de préparer pour cette réunion d'aujourd'hui une compilation, si possible, des lois québécoises de nature constitutionnelle. Je l'ai ici. Elle n'est pas encore distribuée. Nous l'avons reçue hier.

On m'a aussi demandé de faire des copies d'un article de Jacques-Yvan Morin au sujet d'une charte des droits de l'homme pour le Québec. Je l'ai ici. Elles seront distribuées tantôt, en plus des notes qui concernent la question qui avait été posée à une réunion qui avait eu lieu le 15 août sur des divergences entre la version définitive de certains travaux de recherche et les textes qui avaient été polycopiés auparavant Et enfin, une liste des mémoires qui n'ont pas encore été présentés à ce comité. Alors j'ai deux notes là-dessus. Je demanderais maintenant à quelqu'un de bien vouloir les distribuer. C'est la documentation qu'on avait demandée pour ce matin.

M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, vous avez l'ordre du jour provisoire. Voulez-vous rapidement en prendre connaissance? Il comporterait d'abord l'adoption de l'ordre du jour qui, pour le moment, est provisoire. Cela consisterait dans: 1)le bilan des travaux accomplis par le comité depuis son institution; 2) les questions en suspens; 3) le programme de travail du comité. a) La constitution interne du Québec. i) Dispositifs de modification de cette constitution, ii) Projet de déclaration québécoise des droits de l'homme. b) La place du Québec dans la Confédération canadienne; examen du document de travail soumis par le Québec à la conférence constitutionnelle. Je devrais dire: Par les fonctionnaires qui siègent au comité permanent qui a été établi à la suite de la conférence constitutionnelle de février 1968. 4) a) Décisions à prendre quant au caractère public ou privé des prochaines réunions du comité; b) Date et ordre du jour de la prochaine réunion. 5) autres questions.

Est-ce que cet ordre du jour provisoire, qui a été préparé par le comité directeur à sa dernière réunion du 22 novembre 1968, vous agrée?

M. LESAGE: Ma seule remarque, M. le Président, a trait à troisièmement. « Programme de travail du comité: a), La constitution interne du Québec; i) Dispositifs de modification de cette constitution; ii) Projet de déclaration québécoise des droits de l'homme ». Il me semble que le I) est peut-être un peu restreint. C'est que j'avais beaucoup plus songé...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez dit restreint?

M. LESAGE: Restreint, oui. Il restreint la discussion, parce qu'on ne parle que des mécanismes de modification, alors qu'il me semble qu'il y aurait peut-être lieu...

M. LE PRESIDENT: De contrôle?

M. LESAGE: Non, c'est plus que ça. Le mécanisme de modification devrait peut-être revenir à troisièmement. Mais, il s'agit de savoir ce que devrait contenir la constitution interne du Québec. Au fond, c'est un peu le document que M. Morin nous a distribué.

Je pense que la première question à se poser est: Que doit contenir la constitution interne du Québec?

M. LAPORTE: Est-ce l'on pourrait même

dire: Ce qu'elle contient actuellement et ce qu'elle devrait contenir?

M. LESAGE: Oui: Ce qu'elle contient et ce qu'elle devrait contenir.

Avant de parler des dispositifs de modification! Je pense que cela devrait venir en troisième lieu, même après une déclaration des droits de l'homme. Surtout si cette déclaration des droits de l'homme doit faire partie de la constitution interne du Québec. On doit parler des dispositifs de modification seulement après.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je serais d'accord avec M. Lesage pour que nous nous entendions d'abord sur le contenu de la constitution, mais eu égard à un certain projet de loi qui est actuellement devant la Chambre, je me demande si nous ne pourrions pas justement commencer par cela.

M. LE PRESIDENT: Si vous me le permettez, M. Tremblay, nous avons justement un document qui renferme la compilation de toutes les lois québécoises de nature constitutionnelle et nous le faisons distribuer immédiatement aux membres du comité. Cela répondra au moins à une des questions, savoir quelles sont les lois qui seraient fondamentales quant à la constitution interne du Québec, à l'heure actuelle. Cela vous permettra, en faisant sa revue, de voir si c'est complet; s'il y a eu des oublis, nous n'aurons qu'à compléter.

C'est un travail que nous avions demandé à nos experts à la suite de la première réunion du comité directeur qui avait eu lieu en août dernier. Alors, voilà un document qui est extrêmement important parce qu'il fait la revue de toutes les lois de portée constitutionnelle au sujet du Québec.

Alors, je pense que cela répond un peu à une question formulée par le chef de l'Opposition et que le député de Chicoutimi a appuyée de ses propos.

M. LESAGE: Je suis bien d'accord, M. le Président. C'est qu'à partir de là, je pense qu'il y aurait lieu de déterminer, d'après nous et d'après les experts évidemment — il ne faut pas se fier seulement à nous, même experts en dehors du comité — quelles sont les catégories de lois fondamentales qui doivent en faire partie.

J'ai parcouru rapidement le document intitulé: « Suggestions quant à un programme de travail, en vue d'une nouvelle constitution interne pour le Québec ». Je pense bien qu'il sera intéressant de comparer ces notes avec le do- cument intitulé: « Compilation des lois québécoises de nature constitutionnelle ». Je pense que c'est la première chose que nous aurons à faire.

M. LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition me permettra de reposer la question avec la suggestion qu'il vient de faire, qui a été appuyée et qui a été adoptée, je crois. Est-ce qu'au moins l'ordre du jour provisoire peut être accepté pour ce matin? Alors, si nous adoptons l'ordre du jour avec les corrections que l'on vient d'apporter ainsi que les suggestions, pourrions-nous déclarer que l'ordre du jour est adopté?

DES VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT! Adopté. Bilan des travaux accomplis par le comité depuis son institution et questions en suspens. Si mon souvenir est juste, un mémoire ou un rapport a été envoyé, a été transmis à tous les membres du comité et vous le retrouvez dans les documents qui vous ont été transmis et qui s'intitulent: « Etude commanditée par le comité de la constitution à l'Institut de recherche en droit public del'université de Montréal. »

Premièrement, vous l'avez dans le dossier et vous avez la liste des études reçues et, deuxièmement, des études à venir. Je demanderais au secrétaire du comité de nous indiquer d'abord, quant aux études à venir, à quelle date — c'est au bas de la page deux — pourrons-nous recevoir ces études?

UNE VOIX: Pourrions-nous accepter cela?

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. LAPORTE: M. le Président, comme question préliminaire — je vois que M. le secrétaire a en main un document — parmi les documents, parmi les études qui sont terminées, quelles sont celles qui ont été distribuées aux membres du comité?

M. LE SECRETAIRE: C'est justement pour ça que je demandais qu'on sorte les documents. Trois livres ont été publiés. Nous les avons mais ils n'ont pas encore été distribués aux membres du comité; ils le seront. L'un porte sur l'immigration; il est de Jacques Brossard. Un deuxième porte sur les pouvoirs extérieurs du Québec; il est de Jacques Brossard, André Patry et Elisabeth Weiser; l'autre sur la cour Suprême et la constitution, également de Jacques Brossard. Ce sont trois des études...

M. LE PRESIDENT: Nous avions demandé, je me rappelle, à une des dernières séances, il y a déjà assez longtemps, que tous les volumes publiés soient transmis à tous les membres du comité parlementaire. Alors je sais qu'il y en a qui en ont acheté mais je crois qu'étant donné que ces volumes, que ces publications ont été rendues possibles grâce aux travaux que nous avions demandés à ces auteurs, je suggérerais que ces volumes soient transmis à tous les membres du comité parlementaire de la constitution, au fur et à mesure qu'ils seront publiés.

M. LAPORTE: Est-ce qu'il y a un certain nombre de travaux qui ne vont exister que sous forme de polycopies?

M. LE SECRETAIRE: Eventuellement ils vont tous prendre cette forme-là. Mais pendant une période X, ils vont être sous forme de polycopiés. Réponse: oui.

M. LAPORTE: Pour les fins de l'étude que nous entreprenons, peut-être une deuxième étape, est-ce que même les travaux polycopiés ne pourraient pas être distribués aux membres du comité?

M. MORIN: Oui.

M. LAPORTE : Ceux qui sont arrivés pourraient l'être dans un délai assez court, j'imagine?

M. LE SECRETAIRE : Nous avons un problème en ce qui concerne les études - je l'ai mentionné l'autre jour au comité directeur — c'est qu'elles ont toutes, au fur et à mesure que nous les avons reçues sauf peut-être une exception, été distribuées dès leur réception aux membres. Seulement les membres ont changé plusieurs fois, avec pour résultat qu'il ne nous reste pas suffisammsnt d'études polycopiées. Tout de même, on est en train de corriger la situation: en effet, à Montréal on les édite sous forme de volumes. Alors cela va être transmis à chaque personne. En plus de ça, tout ce qui sera sous forme de polycopies, bien sûr va être transmis immédiatement. Troisièmement, il faudra demander à chaque membre les études que nous pourrons transmettre à ceux qui ne les auraient pas reçues parce qu'ils sont des nouveaux membres. Mais là, tout de suite, il y aura un problème parce qu'il y a des cas où il faudra refaire une impression. Remarquez que ce n'est pas la fin du monde mais l'idée évidemment est automatiquement, quand c'est reçu, de les distribuer, deuxièmement quand c'est sous for- me de volumes, de les envoyer aux membres du comité à même le budget du comité. C'est ce qui arrivera d'ailleurs...

M. LE PRESIDENT: On avait posé une question: quelqu'un avait noté qu'entre le volume publié et le rapport, ou l'étude faite qui nous avait été remise au comité il y avait des différences. L'on a posé cette question: S'agit-il de différences substantielles ou seulement d'une formulation différente entre le rapport transmis au comité parlementaire et entre le livre? Avez-vous une réponse à apporter à cette question qui avait été posée, je pense, par M. Laporte ou M. Gérin-Lajoie, à ce moment-là?

M. LE SECRETAIRE: Oui, il y a une réponse, M. le Président. Elle vient d'être distribuée aux membres du comité sous cette forme-ci: il s'agit d'une petite note qui explique pourquoi les divergences de rédaction; on dit là-dedans qu'il y a certainement des divergences de rédaction et on signale où dans le cas de deux volumes — deux des trois que j'ai ici, l'un qui concerne l'immigration et l'autre, les pouvoirs extérieurs du Québec. En tout cas, ça ne change pas les conclusions essentielles de chacun de ces volumes ou de chacune de ces études. Alors, ça constituerait en somme la réponse à la question qui avait été posée antérieurement. Est-ce qu'il y a des divergences fondamentales? Il n'y a pas de divergences fondamentales; il y a des divergences d'expression, de rédaction.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Du reste, M. Morin, on indique que les divergences sont signalées par un astérique dans les ouvrages.

M. LE SECRETAIRE: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: D'ailleurs, vous noterez dans ce document qui vient de nous être remis que l'on analyse entre autres le volume sur l'immigration de Jacques Brossard; on y réfère à certaines pages. Alors, il y a eu un examen méticuleux et du livre et du rapport qui nous avaient été transmis. On nous indique qu'il n'y a pas de différences substantielles.

Maintenant, est-ce que nous pouvons dire que, quant aux études reçues, le rapport qui nous est présenté par le secrétaire répond aux questions qui avaient été posées?

M. LAPORTE: Cela répond à toutes les questions posées quant à la partie reçue des documents qui y sont déjà.

M. LE SECRETAIRE: Dya peut-être d'autres détails de la part de M. Roblchaud. Je ne sais pas si vous savez si d'autres études vont nous arriver incessamment.

M. LE PRESIDENT: Aux études à venir, à la page 2. Est-ce que nous sommes en état de dire à quelle date l'étude sur la constitution et la réglementation des corporations, de M. Ouellette, devrait nous parvenir?

M. ROBICHAUD: Non, M. le Président, pas encore, mais elle nous a été promise dans un avenir prochain.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que cela veut dire d'ici un mois?

M. ROBICHAUD: Moi, je pense que ce serait plus prudent de dire d'ici à trois mois.

M. LE PRESIDENT: L'étude d'Henriette Immarigeon: « Les frontières terrestres du Québec. »

M. ROBICHAUD: Cette étude a été rédigée et elle est entre les mains de l'Institut de recherche en droit public depuis au-delà d'un an et demi. Mais je crois qu'il y a des questions d'édition, des points de détails qui ont été entrepris et qui devront être complétés avant que l'étude nous soit envoyée.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on a tenu compte, à ce moment-là, d'une des remarques qui avaient été formulées?

M. CHOQUETTE: M. le Président, j'attire l'attention sur le fait que, quand M. Robichaud parle, on n'enregistre pas ce qu'il dit parce qu'il n'est pas assez près des micros.

UNE VOIX: Qu'on lui confie un micro ou encore...

M. LAPORTE: Ne peut-il pas prendre la place de M. Bousquet au bout, là?

UNE VOIX: Pardon?

M. BOUSQUET: Que ce soit plutôt celle de M. Laporte parce qu'il invite...

M. PROULX: M. Laporte, on l'entend partout mais on entend rien...

M. LE PRESIDENT: M. Robichaud, voulez-vous enregistrer la réponse que vous venez de donner.

M. ROBICHAUD: On nous a laissé entendre que l'étude du professeur Yves Ouellet nous parviendrait dans un avenir prochain et nous interprétons cet « avenir prochain » comme signifiant un délai d'environ trois mois.

Quant à l'étude de Me Henriette Immarigeon, elle est déjà entre les mains de l'Institut de recherche en droit public depuis au-delà d'un an. Nous croyons comprendre qu'il y a des points d'édition — de travail pour l'édition — de revision sur les questions de détails techniques qui ont été entrepris assez lentement, ces travaux de revision devront être complétés avant que l'étude ne nous parvienne.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on a tenu compte d'une note, qui avait été formulée à la première réunion du comité directeur au mois d'août, disant de ne pas faire faire d'études qui pourraient être similaires à celles qui sont déjà entreprises par la Commission Dorion, ou aux études qui sont déjà faites...

M. ROBICHAUD: Oui, monsieur...

M. LE PRESIDENT: ... au sujet de ce problème des frontières du Québec?

M. ROBICHAUD: Oui, M. le Président. L'étude du professeur Immarigeon a été entreprise — si ma mémoire est bonne — vers 1963, 1964 ou 1965. Par conséquent, avant la création de la Commission d'études sur l'intégrité du territoire.

Nous avons tenu compte de cette directive du comité directeur. Elle a été portée à la connaissance du directeur de l'Institut de recherches en droit public, Me Pierre Carignan, qui a reçu à cet effet une lettre du secrétaire du comité au cours des jours qui ont suivi la dernière réunion du comité directeur. Nous n'avons cependant reçu aucun accusé de réception, jusqu'à présent, de cette lettre. Mais nous savons, après avoir été en contact téléphonique avec Me Carignan, qu'il en a pris connaissance.

Il y a une petite question technique qui se pose. Il semble que certains membres, certains commissaires de la commission Dorion aient exprimé des réserves quant à l'opportunité de faire distribuer les études, commanditées par la commission Dorion à l'Institut de recherche en droit public, aux membres du comité parlementaire bien que le secrétaire de la commission nous ait indiqué verbalement qu'il n'y voyait aucune objection. Alors, il resterait à clarifier ce point qui m'apparaît avoir un caractère purement technique.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que j'ai bien compris que cette étude devrait nous parvenir incessamment?

M. ROBICHAUD: Je crains que l'étude du professeur Immarigeon pourrait encore prendre quelque temps à venir, parce qu'il existe des questions de détail qui doivent être mises au point.

M. LAPORTE: Nous ne pouvons pas savoir! Il existe depuis un an des questions d'édition, qu'est-ce que ça signifie?

M. ROBICHAUD: Je ne sais pas.

M. LE PRESIDENT: Oui, mais pourriez-vous vous enquérir pour que nous le sachions?

M. ROBICHAUD: Oui, M. le Président. UNE VOIX: D'accord?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il arrive, M. Robichaud, que certaines de ces études soient des thèses de doctorat ou de maîtrise?

M. ROBICHAUD: Je ne saurais, je ne crois pas. A ma connaissance ce sont des travaux autonomes.

UNE VOIX: Bien plus complexe que l'on imagine!

M. LE PRESIDENT: Tâchez donc de leur dire que nous ne sommes pas ici comme jurés pour accorder un doctorat ou une maîtrise. Ce que nous voulons, c'est l'étude. Et ces études-là qui ont été demandées il y a déjà assez longtemps, nous aimerions au moins qu'elles soient complétées d'une manière aussi parfaite que possible et dans le plus court délai, étant donné qu'elles ont été demandées — je pense qu'ici, ça remonte à 1964, 1965 —? Si elles sont prêtes, qu'on nous les envoie polycopiées! Quant à la publication future, vous pourrez y voir à ce moment-là.

Gilles Pepin: « Les obstacles constitutionnels à la création de tribunaux administratifs québécois ».

M. LAPORTE: Pourquoi cela n'a-t-il pas été confié à Bona?

M. LE PRESIDENT: Bona?

M. CHOQUETTE: Malgré les obstacles!

M. LAPORTE: Malgré les obstacles.

M. LE PRESIDENT: Non, il s'en va en Louisiane!

A quand l'étude: « Les obstacles constitutionnels à la création de tribunaux administratifs québécois »?

M. ROBICHAUD: M. le Président, je crois que cette étude devrait aussi nous parvenir prochainement mais je n'ai pas de délai précis à vous communiquer.

M.LE PRESIDENT: Elle a été demandée également à Me Carignan par le ministère de la Justice — nous n'en voulions pas deux mais nous voulions au moins celle-là — en vue des négociations qui ont été commencées quant à la revision de la constitution canadienne.

Cela nous intéresse fortement au ministère de la Justice. Voudriez-vous vous enquérir de manière que nous ayons une réponse plus précise quant à la date où cette étude pourra nous parvenir?

L'étude no 23: M. Jacques-Yvan Morin: « Le statut particulier ».

M. ROBICHAUD: Cette étude a maintenant été remise au secrétariat et devrait être distribuée ce matin, dans le cours de la matinée.

M. LE PRESIDENT: Distribuée ce matin.

M. LAPORTE: Elle sera distribuée ce matin?

M. LE PRESIDENT: Oui. Au moins, nous pourrons connaître ce que pourrait être le statut particulier!

UNE VOIX: Un statut particulier, parce qu'il y en a plusieurs.

M. BOUSQUET: C'est sa spécialité!

M. PROULX: Le chef de l'Opposition, c'est de la sémantique pour lui. Particulier, spécial, c'est le concept qui m'intéresse.

M. BOUSQUET: Il est moins dramatique là-dedans qu'à la télévision!

M. LAPORTE: Vous avez retrouvé l'usage de la parole au dernier caucus, vous?

M. BOUSQUET: Nous l'avions depuis longtemps.

M. PROULX: Non, nous avons toujours gardé notre sourire, M. le député de Chambly!

M. CHOQUETTE: Avez-vous le sourire triomphant, ce matin?

M. PROULX: Non, le sourire chrétien!

M. BOUSQUET: Le chef de l'Opposition a retrouvé son usage de la démagogie hier soir à la télévision?

M. LAPORTE: Voilà le fait d'une minorité qui se prend pour la majorité!

M. CHOQUETTE: C'est ça.

M. PINARD: Vous avez l'air d'avoir un statut particulier vous-même, M. le député de Saint-Jean!

M. BOUSQUET: Mais vous, vous êtes bien particulier!

M. LE PRESIDENT: Les membres n'ont pas besoin de se lever; ils peuvent rester assis!

M. PROULX: Nous voulons faire mal! Nous avons l'impression que cela fait plus mal debout.

M. LESAGE: Peut-être bien que non. Arrêtez donc de nous faire mal!

M. LE PRESIDENT: L'étude no 24, M. Yves Ouellet: « Le comportement de la cour Suprême dans l'interprétation de la constitution canadienne ».

M. ROBICHAUD: Je crois, M. le Président, que cette étude qui avait été commanditée n'a pas été entreprise parce qu'on a jugé que d'autres études couvraient le même sujet.

M. LE PRESIDENT: M. Brossard a fait une étude. Je crois qu'à la suite de la première réunion du comité directeur, nous vous avons dit: Point n'est besoin de continuer cette étude puisque Jacques Brossard a publié — il nous a été transmis, d'ailleurs — un rapport.

Pourquoi deux études sur le même sujet?

Alors, l'étude no 24 est mise de côté?

C'est le voeu des membres?

Nous l'avions décidé, d'ailleurs, au comité directeur, mais je tenais à en faire rapport aux membres du comité. Il ne s'agit pas d'avoir deux ou trois études sur le même sujet.

M. Jacques Brossard: « L'organisation judiciaire ».

M. ROBICHAUD: Je crois, M. le Président, que votre remarque au sujet de l'étude du professeur Yves Ouellette s'applique aussi à celle de M. Jacques Brossard sur l'organisation judiciaire, de même qu'à son introduction sur les études relatives au pouvoir judiciaire qui devaient au début faire partie du projet de commandite d'un ensemble.

Vu les études qui ont été entreprises, pour la commission Prévost notamment, il a été jugé inopportun de faire double emploi.

M. LE PRESIDENT: Alors, le mandat est retiré quant aux études numéros 24, 25 et 26. C'est bien?

M. ROBICHAUD: Oui, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Les études, nous les aurons ailleurs et elles pourront servir au comité parlementaire de la constitution.

L'étude numéro 27. Nous venons de distribuer le travail de Luce Patenaude: « La compilation des lois se rapportant à la constitution interne du Québec ».

L'étude numéro 28. M. Raymond Lachapelle! « Les relations ouvrières ».

M. ROBICHAUD: Oui. Alors, M. le Président, pour ce qui a trait à l'étude 28, Raymond Lachapelle: « Les relations ouvrières », à l'étude 29, Raymond Lachapelleî « Le commerce local et interprovincial », il a été entendu, entre l'Institut de droit public et le secrétariat du comité que ces études ne seraient pas entreprises. De même, l'étude du professeur Paul-André Crépeau: « Considération sur l'organisation judiciaire », ne sera pas entreprise.

M. LE PRESIDENT: Elles sont reliées aux études 24, 25 et 26.

M. ROBICHAUD: Justement. Pour les raisons mentionnées au sujet des études du professeur Jacques Brossard.

M. CHOQUETTE: M. Robichaud, la question « le commerce local et interprovincial » est extrêmement importante au point de vue constitutionnel. Enfin, selon la constitution telle que vous l'avons aujourd'hui! Entre autres, une cause que j'ai brillamment perdue.

Est-ce que vous pouvez me dire pourquoi cette étude-là a été annulée?

M. DOZOIS: C'est-à-dire que vous l'avez perdue.

M. CHOQUETTE: J'ai dit que je l'ai brillamment perdue!

M. LE PRESIDENT: II a lamentablement échoué!

M. CHOQUETTE: Non, non, Je ne dirais pas ça. DJailleurs je ne Pai pas perdue à la cour Suprême; f ai donné la cause à un autre qui l'a perdue à la cour Suprême.

M. TREMBLAY: Vous l'avez probablement « brillamment perdue » à cause du savon.,.

M. LE PRESIDENT: Voici, nous attirons l'attention...

M. CHOQUETTE: Pourquoi cette étude-là a-t-elle été annulée? C'est extrêmement important. C'est important au Canada, c'est important aux Etats-Unis. Dans tous les Etats fédéraux, cette question-là comporte des points fondamentaux.

M. ROBICHAUD: Nous sommes tout à fait d'accord avec les remarques de M. Choquette. La raison pour laquelle cette étude n'a pas été fournie, c'est que M. Lachapelle n'était plus disponible pour l'entreprendre. Cependant, nous avons discuté cette question avec le professeur Carignan, directeur de l'institut, qui serait prêt à confier le travail à un autre chercheur si le comité en faisait la demande expresse.

M. CHOQUETTE: Si vous voulez, moi, je ne pense pas qu'il y ait lieu de commanditer une étude spéciale à l'heure actuelle sur la question « le commerce local et interprovincial » parce qu'à bien y penser il y a déjà un livre qui existe — que vous connaissez peut-être M. Robichaud — dont l'auteur est un professeur d'une université de Pouest, « Interprovincial Trade ». Est-ce que vous connaissez ce livre-là? Il me semble que c'est MacDonald? Je trouverai le volume. Il a étudié toute la question au Canada et aux Etats-Unis.

M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous nous procurer le nom de l'auteur du volume...

M. CHOQUETTE: Justement

M. LE PRESIDENT: ... et le transmettre à M. Robichaud qui verra si ça répond aux questions que nous nous posions?

M. ROBICHAUD: Oui.

M. CHOQUETTE: Oui, c'est très bien, M. le Premier ministre. Je vais le chercher.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pourriez avoir là le factum de la cause que vous avez perdue.

M. CHOQUETTE: Oui, bien oui. Sûrement.

M. LE PRESIDENT: Cela nous permettrait peut-être, ce jugement-là étant porté en appel au comité parlementaire de la constitution, de savoir...

M. LAPORTE: Maintenant qu'il a perdu il va faire le contraire.

M. LE PRESIDENT: ... pourquoi il prétend que cela a été brillamment plaidé.

M. PROULX: M. le Président, est-ce que je pourrais vous suggérer une recherche qui pourrait être intéressante; celle de l'évolution de la pensée constitutionnelle du chef de l'Opposition depuis deux ans? Du mois de juin 1966 au 25 juin 1968. Je pense que ce serait intéressant. Comme plaquette, là nous aurions quelque chose de bon!

M. LE PRESIDENT: Nous pourrions peut-être tous nous poser la même question.

M. LAPORTE: Nous pourrions ajouter un chapitre: Pourquoi le député de Saint-Jean a-t-il retrouvé P usage de la parole?

M. PROULX: Ah! je l'ai retrouvé depuis longtemps. Je Pai depuis le 5 juin 1966.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): De l'influence des caucus!

M. LAPORTE: De l'influence d'habitudes sur la pensée!

M. LE PRESIDENT: Mais, pourrions-nous, à ce moment-là, faire témoigner les membres des caucus étant donné que les caucus ont pour règle la discrétion absolue? Pourrions-nous les relever de ce... ?

M. LAPORTE: Est-ce que ce serait nécessaire de les relever, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Pourquoi?

M. LAPORTE: Parce qu'ayant été journaliste je connais fort bien le secret des caucus.

M. LE PRESIDENT: Etude 31, Claude-Armand Sheppard: « Analyse comparative et pra-

tique des difficultés techniques et juridictionnelles posées par les différentes modifications proposées à la structure de la cour Suprême ».

M. ROBICHAUD: Cette étude n'a pas été entreprise parce que Me Claude-Armand Sheppard n'a pas pu trouver le temps d'entreprendre un travail supplémentaire, à cause de ses nombreuses occupations. Si le sujet avait porté sur un autre point, M. Carignan aurait confié l'étude à un autre chercheur.

Mais il a jugé que les études de M. Jacques Brossard et du professeur Beaudoin, notamment sur la cour Suprême, couvraient l'aspect que le professeur Sheppard avait l'intention de développer plus en détail.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous le demander à Me Antonio Dubé — il y a une ou deux études que le ministre de la Justice a confiées, l'une à Me Antonio Lamer et l'autre, le nom m'échappe là, au sujet de l'organisation judiciaire au Québec — et vous procurer le mandat qui a été confié. En communiquant avec Me Dubé, il pourra vous le dire. Ces travaux-là seront certainement bénéfiques au comité parlementaire de la constitution en vue de la réforme dont j'ai quelquefois parlé, de la réforme qui s'impose: la réforme judiciaire au Québec. Je pense qu'il sera à propos que ces travaux-là parviennent jusqu'ici.

M. PINARD: La commission Prévost a-t-elle entrepris des études sur le même sujet?

M. LE PRESIDENT: La commission Prévost a entrepris des études, surtout, dans le domaine de l'organisation de nos cours criminelles et de toutes les matières qui relèvent de l'application du droit criminel et pénal. Mais, en ce qui a trait aux tribunaux civils, non.

M. PINARD: Est-ce que la commission Prévost aura déposé dans un avenir rapproché les principales recommandations des travaux qu'elle a complétés?

M. LE PRESIDENT: J'ai demandé à la commission Prévost de faire comme l'on a fait pour le rapport sur les évasions, soit qu'au fur et à mesure que les travaux seront complétés, il ne fallait pas attendre pour nous présenter, dans un an, la bible complète. Et c'est mieux, dès que les travaux sont complétés, de faire rapport et de les transmettre au ministère. A ce moment-là, il y a certainement des choses qui devront arriver ici au comité parlementaire. J'ai demandé de nous transmettre le résultat de ces tra- vaux de manière que, si nous le pouvons à ce moment-là, suivant les recommandations faites, appliquer immédiatement lesdites recommandations. Mieux vaut que nous agissions plutôt que d'attendre un an, un an et demi. Je serai en mesure de vous donner un rapport là-dessus dès la prochaine réunion.

M. PINARD: Est-ce que la commission Prévost a vu son mandat élargi à cause des événements que nous vivons depuis quelques mois, et à cause dubesoin de plus en plus pressant de modifications dans le domaine constitutionnel? De la constitution interne surtout?

M. LE PRESIDENT: Le mandat est demeuré le même! Excepté que pour éviter que des études soient faites à la fois par l'Institut de recherche en droit public et par la commission Prévost, j'ai demandé à Me Carignan de rencontrer la commission Prévost et de s'entendre afin de bien délimiter les mandats quipourraient leur être confiés; ainsi, l'Institut de recherche en droit public n'entreprendra pas des travaux qui sont déjà entrepris par la commission Prévost.

M. DOZOIS: M. le Président, peut-être dans un domaine autre que cette étude de M. Sheppard, pourrions-nous nous procurer — le comité et chacun des membres — copie des études qui ont été faites par la chambre de commerce sur les conditions économiques? Je pense que ce serait intéressant d'en avoir une copie officielle.

M. LE PRESIDENT: Oui, cela serait intéressant pour tous.

M. LAPORTE: Oui, il y a un mois ou deux...

M. LE PRESIDENT: Voudriez-vous M. le secrétaire — répondant au voeu exprimé par le député de Saint-Jacques — demander que l'on transmette cette étude à tous les membres du comité.

M. CHOQUETTE: Dans le même sens, M. le Premier ministre, vous savez que le rapport de la chambre de commerce est fondé sur un certain nombre d'études — que j'ai vues n'est-ce pas — de différents travaux. Il y a des annexes très importantes.

M. DOZOIS: Oui, je veux qu'on demande, si possible, copie de toutes les études qui ont servi à l'élaboration du mémoire de la chambre de commerce.

M. CHOQUETTE: D'accord.

M. DOZOIS: Si c'est possible.

M. LE PRESIDENT: Voici à l'ordre du jour: bilan des travaux accomplis par le comité depuis son institution et questions en suspens. Est-ce que les membres du comité ont d'autres questions à poser?

M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, comme travaux pratiques que nous avons actuellement, il y a trois volumes, les volumes de Me Brossard qui se ressemblent.

M. LE PRESIDENT: Vous avez l'étude commanditée par le comité de la constitution à l'institut de recherche en droit public de Montréal. Vous avez cela. Vous avez d'abord: études reçues, études à venir. Quant aux études reçues, je n'en ai pas fait la revue. Excepté ceci: depuis nos dernières séances — il y a déjà longtemps — des membres ont reçu des études. Alors, nous avons demandé au secrétaire du comité de transmettre à tous les membres actuels les études déjà reçues, et de bien vouloir transmettre les autres dès qu'elles seront publiées.

M. Morin, est-ce que cela peut prendre un délai long?

M. LE SECRETAIRE: Non, court.

M. LE PRESIDENT; Pour que les études reçues soient transmises aux membres du comité.

M. DOZOIS: Bien, transmises à ceux qui ne les ont pas encore.

M. LE PRESIDENT: Ceux qui les ont déjà voudraient-ils faire la revue des documents reçus de manière que le secrétariat ne soit pas obligé de préparer toute une série d'autres volumes?

M. LE SECRETAIRE: De toute façon, ce matin ou aujourd'hui, nous allons envoyer les trois volumes que j'ai montrés tantôt; ils sont déjà disponibles. Nous en avons reçu une quantité suffisante pour tout le monde. Que les études aient été déjà transmises ou non, achetées ou non, nous envoyons quand même à tout le monde celles qui sont sous forme de volumes. Ce sont celles qui sont polycopiées qui nous créent des problèmes parce qu'il y a eu des changements parmi les membres. Nous ne savons pas très bien qui a quoi actuellement parce que des personnes ont été membres pendant quelque temps et après cela... Nous avions en- voyé des copies et elles ont été remplacées par d'autres. Nous ne savons pas trop où nous retrouver. Nous allons peut-être être obligés d'appeler chacun pour le savoir.

M. LE PRESIDENT: M. Maltais, est-ce que cela répond à votre question?

M. MALTAIS (Limoilou): Parfait.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que les membres ont d'autres questions à poser?... A l'ordre du jour, article 2? Sinon, nous allons passer à l'article 3: Programme de travail du comité: La constitution interne du Québec I) Dispositifs de modification de cette constitution.

M. Lesage, chef de l'Opposition, a fait une remarque tantôt.

M. LESAGE: Je me renseignais sur les enseignants.

M. LE PRESIDENT: Ah! sur quoi? M. LESAGE: Sur les enseignants.

M. LE PRESIDENT: L'éducation d'ailleurs, cela ne...

M. LESAGE: Parce que j'ai des problèmes à Sainte-Foy.

M. LE PRESIDENT: Comment cela se fait-il?

Alors, programme de travail de la constitution interne; dispositifs de modification de cette constitution.

Pour amorcer la discussion sur ce problème disons qu'à l'occasion de l'étude — pour ne pas aller plus loin — des bills 90 concernant le Conseil législatif, nous sommes des deux côtés d'accord au sujet de son abolition. J'ai, avec le chef de l'Opposition et quelques autres collègues, indiqué que lorsqu'il s'agit d'amendements de la constitution, étant donné la disparition prochaine du conseil, il y aurait peut-être lieu d'établir des mécanismes afin que l'Assemblée du Québec ne puisse pas, par une majorité simple, apporter des projets de loi destinés à changer fondamentalement la constitution interne du Québec, seulement par le jeu d'une majorité simple. Je crois que c'est là le problème.

Il y en a qui ont suggéré que, si nous n'avons qu'une Chambre, il y ait, par exemple, une majorité des deux tiers ou des trois quarts, qu'il y ait une deuxième Chambre ou un conseil d'Etat ou un conseil constitutionnel qui aurait compétence en matière constitutionnelle — j'ap-

pule sur ces mots: un conseil d'Etat ou un conseil constitutionnel, et l'on saisit bien la portée du mot conseil — laissant la décision finale en dernier ressort à l'assemblée des parlementaires élus.

On a indiqué, également, qu'en certains cas -et aucun doute quant à moi dans mon esprit — s'il s'agissait de changements profonds, il faudrait que nous ayons une loi - nous en avons parlé à quelques reprises des deux côtés -une loi du référendum.

Alors, vous avez là un résumé. J'aimerais que nos collègues, de part et d'autre, exposent une opinion pour le moment, non pas sur le fond du problème mais sur certains autres mécanismes qui pourraient être prévus.

M. LESAGE: J'en ai mentionné quelques-uns. A la Chambre, j'ai mentionné la majorité des deux tiers comme aux Nations unies. J'ai parlé de la possibilité d'avoir une espèce de conseil constitutionnel qui n'aurait pas le droit de veto. Il y a des dispositions auxquelles nous pourrions songer.

On me dit qu'il existe, par exemple, dans certains cas, des dispositions à l'effet qu'un changement à la constitution d'un pays, sur des points précis, ne vaut que si la modification est votée de nouveau par le Parlement après une élection générale.

M. LAPORTE: Il faut que ce soit voté deux fois et ensuite qu'il y ait des élections.

M. LESAGE: Deux fois, et qu'entre les deux il y ait une élection. C'est un mécanisme qui, me dit-on, existe. Je pense que ça vaut la peine de le faire explorer par nos experts.

M. LE PRESIDENT: Monsieur, j'aimerais l'apporter justement, au chef de l'Opposition, je n'ai aucune objection à le faire polycopier et distribuer. Je n'entrerai pas dans les détails.

J'ai fait préparer un travail sur le problème suivant; Une Législature peut-elle par une loi se lier elle-même et lier une Législature future en affirmant qu'aucune modification ne pourrait être apportée à une loi sans une majorité autre qu'une majorité simple?

M. LESAGE: M. le Président, si vous le permettez, je voudrais vous dire que ce matin j'ai discuté assez longuement cette question avec mes collègues, le député de Chambly et le député d'Outremont. C'était une question qui nous inquiétait beaucoup. Nous nous demandions si, justement, une des garanties possibles n'était pas de faire approuver la constitution interne pour pouvoir la geler avec ses mécanismes de modification par la population, par un référendum.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la solution...

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous que je vous lise, tout simplement, quelques paragraphes sans référer aux auteurs.

A la suite d'un examen de la constitution par certains auteurs en droits constitutionnel ont dit ceci; — « Une loi du Parlement du Québec qu'elle soit déclarée ou non constitutionnelle, demeure une loi ordinaire. Ellen'a pas et ne peut pas avoir la force d'une constitution du genre de celle de la France, ou des Etats Unis, qui existe en dehors de toute atteinte possible du Parlement sans une procédure spéciale d'amendement. En conséquence, toute loi d'une Législature provinciale peut être amendée ou abrogée quelle que soit sa nature. Aucune procédure spéciale, aucune majorité qualifiée ne peut être exigée.

On peut noter à cet effet l'article 49 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique: « Les questions à la Chambre des communes seront décidées à la majorité des voix. Le président ne votera pas à moins qu'il y ait partage des voix, mais, dans ce cas, il devra voter ».

En vertu de l'article 87, cette disposition s'applique aussi aux Législatures provinciales. Beauchesne explique comme suit cette disposition: « Le principe voulant que ce soit la majorité qui gouverne a été reconnu par l'article 49 — et ça remonte loin — de la Grande Charte de 1215 ».

Ce principe de la majorité simple est fortement incarné dans le droit constitutionnel du Canada. Il procède d'une conception fondamentale de la démocratie parlementaire telle qu'instituée dans les pays de tradition britannique. Un précédent, créant une règle contraire dans une loi, pourrait induire en erreur les Parlements subséquents et être à l'origine d'une multitude de discussions et d'appels aux tribunaux. Il nous apparaît donc préférable, dans le but d'éviter des débats stériles et inutiles, de ne pas inclure une telle disposition dans un projet de loi.

Je ne dis pas que c'est parole d'évangile, c'est une opinion, une opinion qui, à première vue, paraît très respectable et qui reposerait sur des études assez complètes faites par certains auteurs; mais, à ce moment-ci, disons que je pourrai transmettre à tous les membres du comité... Je n'en ai qu'une copie, ça m'est arrivé hier. J'avais demandé qu'on examine ce problème-là qui est, je crois, très important au

moment où nous voudrons essayer d'établir un mécanisme qui soit au moins valable et qui puisse permettre un certain contrôle. Le chef de l'Opposition vient de parler d'un référendum en pareil cas. En fait si nous changeons d'une manière fondamentale une constitution, je pense bien que le maître, c'est celui qui nous élit, et le maître, c'est le peuple.

M. LESAGE: J'avais pensé d'abord à l'adoption de la constitution interne y compris la charte des droits de l'homme, ce qui est une possibilité, ça n'exclut rien d'autre. Que ce soit adopté par référendum pour lui donner la force de la volonté populaire et, par la suite, peut-être à des dispositions comme celles que je mentionnais tantôt qu'une loi doit être adoptée deux fois... S'il y a des dispositions restrictives dans la constitution quant aux possibilités d'amender une constitution qui aurait été approuvée par référendum, il y aurait moyen, je crois, dans la constitution elle-même qui serait adoptée par référendum, de prévoir les restrictions du genre de celles que j'ai mentionnées tantôt et encore peut-être les deux, quelque chose comme suit: Que si un Parlement ou une Assemblée législative allait, par une décision, à l'encontre des dispositions de la constitution en ce qui concerne le mécanisme de modification, n'importe quel citoyen pourrait immédiatement en appeler soit à un tribunal constitutionnel ou à la cour d'Appel, si on veut en faire un tribunal constitutionnel. La question est que ce tribunal aurait le droit de déclarer d'une façon finale la loi « ultra vires ». Evidemment, ce sont toutes des choses auxquelles nous pouvons songer et bien d'autres encore. Mais je pense que si nous avions des travaux d'experts sur l'éventail des possibilités en nous basant sur l'expérience acquise ailleurs, cela pourrait nous aider grandement, parce que je considère que cette question est fondamentale et qu'il faut être d'une prudence extrême. Et une des raisons, c'est le mémoire que vient de lire le premier ministre.

M. BOUSQUET: Est-ce qu'il y a une expérience acquise dans les autres provinces à votre connaissance?

M. LESAGE: Pas dans les autres provinces. Dans d'autres pays, oui. Mais pas dans les autres provinces.

M. LE PRESIDENT: C'est à M. Choquette.

M. CHOQUETTE: M. le Président, l'opinion que vous avez lue a en sa faveur le principe fondamental, qu'on reconnaît en droit britanni- que, la suprématie du Parlement. Un Parlement ne peut pas lier son successeur. A ce point de vue-là, je pense bien que cette opinion mérite d'être respectée malgré qu'il y ait des auteurs qui disent qu'on puisse lier un Parlement futur par une certaine procédure. C'est-à-dire obliger en quelque sorte les Parlements successeurs à suivre une certaine procédure pour abroger la constitution ou abroger certaines modifications qu'on considère particulièrement importantes.

Plus particulièrement, je me rappelle avoir lu des articles de Jenning sur la question. Mais, de toute façon, comme dit le chef de l'Opposition, je ne pense pas qu'à l'heure actuelle, la question se pose d'une façon vraiment urgente. Je pense qu'il faut penser en termes de la constitution que nous voulons avoir et dont nous voulons doter le Québec et dans cette constitution, voir quels sont les mécanismes d'amendements que nous devons insérer. Par conséquent, je trouve que c'est un peu mettre la charrue devant les boeufs que de parler de limites à l'action parlementaire ou de procédures d'amendement à la constitution avant d'avoir parlé de la question fondamentale: la constitution que nous voulons avoir. Pardon?

M. DOZOIS: Nous ne prenons pas comme finale cette loi-là.

M. CHOQUETTE: Elle n'est pas finale, mais je dis que la question qui se pose vraiment est: Quelle constitution voulons-nous avoir? Après ça, comment allons-nous l'amender?

UNE VOIX: C'est ça.

M. CHOQUETTE: C'est une question qui arrive en deuxième lieu, la procédure d'amendement. La première question à se poser: Est-ce que, par exemple, nous voulons un régime parlementaire ou un régime présidentiel ou un régime entre les deux? Puis viennent après ça toutes les institutions 1

M. DOZOIS: II est quand même bon que nous nous penchions sur ce problème des dispositifs d'amendements. S'il y a des études à faire faire, que nous les commandions...

M. LE PRESIDENT: Prenez, par exemple, ce que l'on appelle les comtés protégés au Québec. A ce moment-là, il faut un vote de l'Assemblée législative, auquel vote doivent participer les députés représentant ces circonscriptions électorales.

M. LESAGE: Oui, mais il suffit d'un vote simple de l'Assemblée dite nationale pour biffer ça maintenant. C'est tout. Il n'y a qu'à dire que ça ne s'applique plus, et il suffit d'une majorité simple, et plouf! c'en est fait de cet article. Nous pouvons le changer, je soutiens que nous pouvons le changer.

M. LE PRESIDENT: Mais, je pose ce problème parce qu'à ce moment-là, c'est un exemple que nous avons dans la...

UNE VOIX: On ne peut pas le changer. M. LESAGE: Ah oui!

M. CHOQUETTE: Indubitablement, je pense que le fait que nous voulions promulguer une constitution interne du Québec va impliquer des amendements à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique» Nous devons être prêts à aller jusque là, parce que la constitution, je pense qu'il faut la construire non pas en fonction de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, il faut construire ce que nous, nous pensons être l'idéal d'une constitution interne pour le Québec. Après ça, on demandera les changements nécessaires à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

M. DOZOIS: Pas pour la constitution interne.

M. CHOQUETTE: Le premier ministre vient de donner l'exemple des comtés protégés..,,

M. DOZOIS: Nous pouvons changer nous-mêmes, apparemment...

M. CHOQUETTE: Non, nous ne pouvons changer... Eh bien ça peut présenter certaine...

M. LE PRESIDENT: Votre chef prétend que ça peut être...

UNE VOIX: Chef de l'Opposition.

M. LE PRESIDENT: ... changé par le Parlement du Québec.

M. LAPORTE: Pendant que la Chambre haute existait, si elle existe encore, le vote pris à l'Assemblée législative pourrait être rejeté par le Conseil législatif. Comme nous n'avons plus qu'une Chambre — l'Assemblée nationale — je crois également que nous pourrons modifier cette partie de notre constitution interne par le seul vote de l'assemblée législative.

M. MALTAIS (Limoilou): Dans la conjoncture actuelle — ici, je voudrais répondre à Me Cho-quette — en ce qui concerne la priorité à donner à l'étude de cette question de la constitution, je dis ceci que — évidemment c'est très intéressant — le point de vue qu'il a soulevé est un des points de vue sur lequel nous avons à nous pencher.

Quelle sera la substance de la constitution? En d'autres termes, de quoi se composera la constitution du Québec?

Seulement, au départ, je crois qu'il y a une question fondamentale, dans la conjoncture actuelle, c'est qu'on fait disparaître quand même un mécanisme! Et ici, je ne discute pas de la valeur du mécanisme. Mais qu'importe! On fait disparaître par une loi — le bill 90 — un mécanisme qui existait.

Et nous allons du jour au lendemain, dès la sanction de cette loi, nous trouver en présence d'une assemblée qui, par majorité simple, pourra faire un amendement à la constitution.

Alors, j'estime que dans les circonstances et dans la conjoncture actuelle, il est d'une souveraine importance — pour apaiser l'inquiétude du public qui se posera des questions — que nous tentions de trouver, non pas nécessairement le meilleur mécanisme qui n'aboutirait qu'après une étude assez poussée, et que le chef de l'Opposition a demandée à nos experts, mais je crois qu'il serait très important quand même que nous nous penchions sur ce problème, et l'étudions immédiatement afin de trouver une solution ne serait-ce que temporaire.

M. LESAGE: II n'y a aucun doute qu'à l'heure actuelle une majorité simple de l'Assemblée nationale pourrait, par exemple, dire que l'article 80 de la constitution ne s'applique plus —il s'agit des comtés protégés — de la même façon, que nous pouvons, à l'heure actuelle, abolir le Conseil législatif, c'est-à-dire modifier les articles 71 et 72. C'est dans la constitution interne du Québec.

La question que je me pose est la suivante: Ne serait-il pas possible, à l'heure actuelle, à l'Assemblée nationale, de modifier l'article 85 de la constitution qui concerne l'étendue, la période de temps, l'étendue du mandat d'une Législature? C'est grave, cela.

M. LE PRESIDENT: A l'heure actuelle, c'est quatre ans?

M. LESAGE: C'est cinq ans, cela a été modifié.

M. LE PRESIDENT: Mais cela n'a jamais...

M. LAPORTE: Il est dit dans la constitution que la province peut modifier sa constitution à terme sauf sur deux points: la charge du lieutenant-gouverneur et la durée. Ce sera cinq ans quand même!

M. LESAGE: N'empêche qu'Ottawa, avec l'approbation de Londres, a déjà étendu son mandat! En 1917.

M. LE PRESIDENT: M. Tremblay.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je crois, M. le Président, que ce que viens de faire observer notre collègue, M. Maltais, est extrêmement important.

Nous serons bientôt rendus au point où nous allons abolir le Conseil législatif qui, indépendamment de ce que nous en pensons et de ce qu'il a pu faire dans le passé, constituait une sorte de protection justement contre ces dangers d'amendements soumis aux voix d'une majorité simple.

Il serait important — comme l'a dit M. Maltais — de prévoir dis maintenant, avant même que de se pencher sur le contenu de la constitution interne du Québec, de prévoir, ne serait-ce que pour un moment donné, pour une période temporaire, un mécanisme qui nous permettrait de nous protéger nous-mêmes contre la liberté que nous aurons de changer notre constitution.

Alors, évidemment, là, il s'agit de savoir si c'est la poule ou l'oeuf, ou l'oeuf et la poule. Il est important de définir d'abord de quoi sera faite la constitution du Québec, mais il reste que la suppression du Conseil législatif nous met dans cette situation où pourrait survenir quelque chose qui ferait qu'on puisse changer la constitution du jour au lendemain sans être protégés contre nous-mêmes.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, M. Tremblay, je ne veux pas, comme président, je m'excuse, mais j'aurais une question à poser. Est-ce que, dans ce mécanisme, vous verriez l'exercice d'un pouvoir absolu ou d'un pouvoir qui permet... Exemple, aujourd'hui nous votons un amendement à la constitution, au Parlement, à l'Assemblée. Majorité, cinq. A ce moment-là, ce projet de loi irait à un conseil, quel qu'il soit. Est-ce que ce conseil, d'après vous, aurait un droit de veto absolu? Il ne faut pas oublier que le vote, en Chambre, sera un vote des élus. Est-ce que vous verriez, à première vue — je n'ai pas d'opinion préconçue là-dessus — un pouvoir absolu de veto ou, comme le suggérait tantôt le chef de l'Opposition, que ça puis- se être soumis à un tribunal, conseil ou cour constitutionnelle qui pourrait dire: C'est ultra vires.

M. LESAGE: Ultra vires seulement dans l'hypothèse où le Parlement ne s'en serait pas tenu à la procédure de modification prévue. Ce serait le seul cas où un tribunal pourrait intervenir. Je ne voudrais pas, quant à moi, donner à un tribunal un pouvoir de veto sur la volonté populaire exprimée par une majorité des représentants du peuple. Sur le fait que la procédure a été suivie ou non suivie, d'accord. Mais seulement sur ce point-là. Peut-être que le délai, c'est le meilleur moyen dans les circonstances.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour répondre à la question de M. le premier ministre qui demande enfin quels pourraient être les pouvoirs de cet éventuel conseil qui servirait, en somme, de barrière pendant une période de x mois. Je pense bien qu'il faudrait donner à ce conseil une sorte de pouvoir de rétention afin que nous ne soyons pas mis dans cette situation, comme je l'indiquais tout à l'heure, de prendre des initiatives qui pourraient aller contre l'intérêt des citoyens. Je le disais tantôt, il faut se protéger absolument contre nous-mêmes parce qu'à partir du moment où l'on ferait tomber cette barrière du Conseil législatif, même si c'est une barrière à claire-voie, il reste que nous sommes sans protection et qu'il peut survenir des choses qui changent complètement, si vous voulez, la constitution du Québec, et nous mettent dans une situation telle que nous soyons obligés de prendre des décisions capitales en matière de changements constitutionnels.

M. LE PRESIDENT: Vous verriez, à ce moment-là, M. Tremblay, un mécanisme ou un délai permettant à l'opinion publique d'être mieux informée, mieux renseignée, d'être en état d'alerte durant une certaine période, afin de permettre à ce conseil de faire des recommandations à l'Assemblée nationale. C'est un peu dans ce sens-là que vous envisageriez le rôle d'un tel conseil ou l'établissement d'un tel mécanisme.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, qui aurait une valeur temporaire, si vous voulez, une durée temporaire pour le moment.

M. LESAGE: C'est un peu dans le sens du bill 3 que j'avais présenté lorsque je proposais de donner au Conseil législatif...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est comme le voyage d'Ulysse.

M. LESAGE: Sur le fond, oui. Lorsque je proposais de diminuer les pouvoirs du Conseil législatif, l'idée c'était le délai: délai d'un mois dans les cas des bills de nature budgétaire ou financière et d'un an dans le cas des autres. Alors c'est un peu la même idée, mais encore faudrait-il, étant donné que je suis bien de l'opinion exprimée tout à l'heure par le premier ministre,lorsqu'il a lu un document et étant donné que l'Assemblée demeure toujours souveraine, c'est là qu'il faudrait dire: Si le délai n'est pas observé, là, la cour d'Appel peut déclarer la loi ultra vires, et le jugement est final.

M. LE PRESIDENT: Un instant. Si vous me permettez, le député de Drummond m'avait demandé la parole.

M. PINARD: Je ne veux pas que mes remarques soient interprétées comme étant à caractère mesquin ou partisan, mais il y a quand même quelque chose que je trouve très étrange dans la conduite des travaux auxquels nous participons ce matin. Je prends tout simplement un paragraphe dans un mémoire confidentiel qui nous a été remis, au chapitre II, intitulé: Réunions: « Entre le 7 juin 1963 et le mois de février 1966, le comité parlementaire a tenu une quinzaine de réunions publiques d'une demi-journée au cours desquelles il a entendu et interrogé les personnes et organismes qui lui avaient soumis des mémoires. Le comité n'a pas siégé depuis février 1966. »

Nous sommes réunis ce matin et, si nous étudions attentivement l'ordre du jour provisoire qui a été rédigé, eh bien nous en sommes rendus à discuter des procédures d'amendement, des mécanismes d'amendement de la constitution interne du Québec sans avoir en aucune façon travaillé sur le genre de modifications qui devraient être apportées à notre constitution interne. C'est la question qui a été soulevée tantôt par mon collègue, M. Jérôme Choquette, et je pense qu'il l'a fait à bon droit et avec à propos.

Tantôt le ministre des Affaires culturelles, le député de Chicoutimi, s'est inquiété des conséquences de l'abolition du Conseil législatif, bill portant le numéro 90. Je trouve, pour ma part — je n'engage pas mon parti en l'affirmant — mais je le dis à titre personnel, et je pense que mon opinion est peut-être partagée par d'autres collègues qui m'entourent, je trouve tout à fait étrange que le gouvernement n'ait pas jugé bon de venir devant le comité parlementaire de la constitution pour dire aux membres de ce comité l'intention qu'il avait de proposer un bill tel que le bill 90 proposant l'abolition du Conseil législatif, pour étudier les conséquences que cela pouvait amener et aussi les organismes qui auraient pu être suggérés comme solution de remplacement pour en venir peut-être à une discussion non partisane, comme nous le faisons ce matin, des mécanismes de protection avec certains pouvoirs de rétention, dont a parlé tantôt le député de Chicoutimi...

M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas interrompre le député de Drummond, mais ce problème-là a fait l'objet, d'abord de discussions en Chambre. Il n'était pas présent, et nous savons pourquoi. Je tiens à lui réitérer au nom de tous nos collègues, nos sympathies à l'occasion du décès de son père.

Nous avons parlé de tout cela lors de l'étude du bill 90.

M. PINARD: En Chambre?

M. LE PRESIDENT: Oui. De plus, je tiens à dire que le chef de l'Opposition avait, comme on le sait, déposé un projet de loi. Mon prédécesseur en avait annoncé un. A un moment donné — le chef de l'Opposition est au courant — je lui ai dit que c' était mon intention, au nom de tous mes collègues, membres du gouvernement, de déposer un projet de loi qui abolirait le Conseil.

Quant à l'autre problème, celui du mécanisme, nous nous sommes entendus également pour que ce deuxième problème soit référé au comité parlementaire. Alors, le député de Drummond, je ne le blâme pas du tout, ne pouvait pas être présent, il n'a pas suivi les débats en Chambre, et c'est pourquoi, peut-être, ce matin il fait cette remarque.

M. PINARD: Je comprends très bien les remarques du premier ministre, mais mon propos était de savoir pourquoi il n'y avait pas eu de réunion préliminaire avant le dépôt du bill 90 pour discuter de ce dont nous discutons ce matin. Voyez-vous?

M. LE PRESIDENT: Voici, à un moment donné...

M. PINARD: Avant que le problème ne remonte devant la Chambre.

M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas que nous reprenions cette discussion. Quant à moi,

elle appartient au passé. Il y avait eu d'abord un premier bill 3 présenté. A ce moment-là, nous avions suggéré qu'il soit référé au comité parlementaire. Nous avons été battus. Nous avions accepté le principe de la loi, à l'époque mais quant aux modalités, nous avions suggéré qu'il revienne ici. Je ne voudrais pas reprendre toute cette discussion car tout le problème a été discuté en Chambre, sur le bill 90, et, à ce moment-là, j'ai déclaré que, quant au problème d'un mécanisme qui pourrait être utilisé comme frein aux actes du Parlement par une majorité simple sur des changements profonds à la constitution, que c'est ici que nous examinerions ce problème.

M. PINARD: Me permettez-vous de vous remercier, M. le Président, et tous et chacun d'entre vous, pour les témoignages d'amitié et de sympathies que vous avez bien voulu faire parvenir à l'occasion de la mort de mon père, à moi-même ainsi qu'à tous les membres de ma famille. C'est une marque d'amitié et d'affection qui m'a été très chère et que j'apprécie très hautement. Merci.

M. BOUSQUET: M. le Président, il y aurait peut-être lieu de se demander quel sera le mécanisme de vote d'une constitution. Nous parlons d'amendement à la constitution interne du Québec.

Je pense que nous allons nous doter d'une constitution autre que les fragments que nous avons dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Alors, est-ce que les mécanismes de vote de la constitution seront les mêmes que les mécanismes d'amendements de cette constitution-là?

M. LESAGE: Je pense que le député de Saint-Hyacinthe n'a pas saisi exactement quel était le point qu'a soulevé le député de Chicoutimi. Il faut tout de même, avant d'en arriver à élaborer une constitution interne avec une charte des droits de l'homme et avec tout ce que ça comporte de difficultés comme prévision de procédure de modification, eh bien, il faudrait tout de même qu'autant que les dispositions de ce qu'on est convenu d'appeler maintenant la constitution interne du Québec - et ça comprend l'article 85 que je mentionnais tantôt quant à la durée de la Législature... — il faudrait tout de même, dès maintenant, pendant que nous faisons ce travail, qu'il y ait certaines garanties.

C'était le sujet de la discussion, si je comprends bien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est en deux mots ce que j'ai dit tout à l'heure, M. le Président. J'ai fait observer que nous devions nous interroger sur la question de savoir de quoi serait faite la constitution. Mais, entre-temps, vu l'abolition du Conseil législatif, nous nous interrogeons ce matin sur les mécanismes de protection contre des amendements éventuels qui seraient soumis à la majorité simple de la Chambre.

M. LE PRESIDENT: M. Bousquet, avez-vous saisi le...

M. PINARD: Vous rappelez-vous quand vous avez décidé de proposer le bill 96?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien, c'est justement la raison pour laquelle je me demande pourquoi, lorsque vous avez proposé d'amender le Conseil législatif en inscrivant un projet de loi au feuilleton, vous n'avez pas proposé de faire siéger le comité de la constitution sur ce sujet-là.

UNE VOIX: Vous êtes au gouvernement; nous sommes dans l'Opposition.

M. DOZOIS: Vous avez pris l'initiative d'un projet de loi.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. le député d'Outremont.

M. CHOQUETTE: M. le Président, d'après ce que je comprends, il y a une question à court terme et il y a une question à long terme.

M. LE PRESIDENT: Exactement.

M. CHOQUETTE: Alors, ce que le chef de l'Opposition discutait avec le député de Chicoutimi et le député de Limoilou, c'est la question à court terme...

M. LE PRESIDENT: A court terme.

M. CHOQUETTE: ... et l'opinion que vous avez donnée, c'est sur la question à court terme et des observations particulièrement intelligentes ont été faites de part et d'autre sur cette question-là. Mais sur la question à long terme, au point de vue du programme d'étude qui nous est suggéré et qui a été très bien fait, d'ailleurs, je trouve que les principales questions sont soulevées dans ça.

Je voudrais faire une suggestion au comité. Il me semble que la première chose à déterminer, c'est le genre de constitution que nous

voudrons avoir. Je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est soit parlementaire ou présidentiel. Enfin, j'ai une opinion sur la question. Je ne suis pas obligé de l'étaler aujourd'hui.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que tout le monde a reçu ce travail: « Comité de la constitution; Suggestions quant à un programme de travail en vue d'une nouvelle constitution interne pour le Québec ». L'avez-vous?

Est-ce que ce document a été distribué à tous les membres du comité? Il est supposé l'avoir été! L'avez-vous, M. Bousquet?

M. BOUSQUET: Oui, je l'ai eu. Maintenant, je voudrais préciser que j'avais très bien saisi le sujet de la discussion tout à l'heure, mais je voulais quand même que l'on se préoccupe du problème à long terme.

M. CHOQUETTE: Ecoutez, c'est justement dans ce sens-là que je voulais faire des observations, M. le Président. Actuellement, évidemment par des interventions de divers hommes politiques — je n'ai pas besoin de les mentionner, nous les connaissons bien — ces questions-là ont été soulevées. Est-ce qu'on ne devrait pas aller vers un régime présidentiel, ou est-ce qu'on devrait garder le système parlementaire tel que nous l'avons, ou le modifier?

Moi, je pense que, pour éclairer vraiment les membres du comité, il serait particulièrement important qu'à une séance ultérieure nous demandions aux autorités en la matière — quand je veux dire les autorités en la matière, je veux dire par exemple, un homme comme le doyen Baetz de la faculté de droit de l'université de Montréal qui a rédigé des constitutions, ou au moins une constitution, pour des Etats africains. Le professeur Frank Scott qui est un constitu-tionnaliste réputé. A l'université Laval également, il y a des experts en la matière. Que nous demandions à ces messieurs-là de comparaître devant le comité, enfin d'une manière qui ne serait pas formelle sans soumettre un mémoire écrit, pour nous exposer les avantages et les désavantages du système parlementaire et du système présidentiel.

M. LE PRESIDENT: D'une manière théorique.

M. CHOQUETTE: D'une façon théorique. Je pense que, pour l'intelligence et les décisions ultérieures du comité, ce serait particulièrement important parcs que c'est la décision fondamentale, je pense, qu'il faut adopter.

M. LE PRESIDENT: C'est un problème à long terme.

M. CHOQUETTE: A long terme. C'est une suggestion que je fais au comité pour le travail à long terme.

M. LE PRESIDENT: Ni plus ni moins une réponse aux questions qui peuvent être posées suivant les documents de travail que nous avons devant nous.

M. CHOQUETTE: C'est ça, surtout la question no 2, le mode de gouvernement: Analyse comparative des différents modes de gouvernement à partir du parlementarisme de type britannique jusqu'au système présidentiel de type américain, étude de leur plus ou moins grande compatibilité avec les réalités sociologiques du Québec La question no 2 me paraît à la base de tout.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous me permettez, M. le Président, la suggestion de M.

Choquette est excellente. Maintenant je me demande s'il serait opportun de convoquer ces gens-là pour la prochaine réunion. Je pense bien qu'auparavant il faudrait faire un examen de notre propre ignorance en le matière et ensuite voir exactement quels sont les problèmes qui se posent et pour quelle raison nous devons faire appel à telle personne en particulier pour nous expliquer ces questions-là.

Je crois que la prochaine réunion pourrait porter sur le mécanisme dont nous avons parlé pour protéger la Chambre eu égard à l'abolition du Conseil législatif.

M. CHOQUETTE: Est-ce que nous aurons une réunion subséquente?

M. DOZOIS: Est-ce qu'on ne pourra pas, à la prochaine réunion, faire des suggestions quant au choix de ces personnes.

M. CHOQUETTE: Oui, oui.

M. DOZOIS: Je crois que vous en avez mentionné deux, il peut y en avoir dix...

M. CHOQUETTE: Sûrement, sûrement.

M. DOZOIS: Et puis là, il faudra quand même leur donner un avis pour que ces gens-là se préparent à donner une opinion.

M. CHOQUETTE: Sûrement, je suis tout à fait d'accord.

M. DOZOIS: Alors peut-être à la prochaine réunion, d'Ici là on peut y penser: quels seraient les gens susceptibles de venir ici?

M. CHOQUETTE: Sûrement.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, étant donné l'heure, nous devons aller en Chambre pour onze heures, est-ce que nous pourrions ajourner les travaux du comité, ce matin, à mercredi prochain, à dix heures?

M. LESAGE: Neuf heures et demie parce que, si j'ai bien compris, la Chambre siégerait à onze heures mercredi prochain. D'après les conversations entre les leaders, c'est que l'on va être placé au rythme des fins de session.

M. BERTRAND: Mercredi prochain, à neuf heures trente, nous continuerons l'examen de notre ordre du jour.

(10 h 58)

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