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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 22 février 1990 - Vol. 31 N° 9

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi n° 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants


Journal des débats

 

(Dix heures dix-neuf minutes)

La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais aux membres de la commission de prendre place. La commission de l'éducation va donc commencer ses travaux. Je déclare la séance ouverte. Et je voudrais, ici, rappeler le mandat de la commission de l'éducation qui est de procéder à une consultation générale et tenir des auditions publiques sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Non, Mme la Présidente. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Je voudrais, ici, donner lecture de l'ordre du jour. Alors, ce matin, à 10 heures, c'est l'Association nationale des étudiants et étudiantes du Québec; à 11 h 30, fa Fédération des étudiants et étudiantes du Québec; à 15 heures, la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal; à 16 heures, la Conférence des associations étudiantes de l'Université Laval; à 17 heures, l'Union des gradués inscrits à Laval; à 20 heures, ce soir, l'Association générale des étudiants et étudiantes de la faculté d'éducation permanente de l'Université de Montréal et enfin, à 21 heures, l'Association des étudiants québécois en France. Alors, c'est vraiment la journée des étudiants, aujourd'hui.

J'inviterais, dès maintenant, le premier groupe, l'Association nationale des étudiants et étudiantes du Québec, à venir prendre place. Alors, il y a M. Jean-Pierre Paquet et Mme Josette Côté, secrétaire générale. Bienvenue à cette commission parlementaire. Je vous rappelle le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échanges. Pour l'ANEEQ, l'Association nationale des étudiants et étudiantes du Québec, il y a aura 30 minutes pour la présentation de votre mémoire et 60 minutes pour les échanges. Vous pouvez y aller, Mme Côté, on vous écoute.

Vous pouvez parler. Ça va, le micro s'ouvre automatiquement.

Association nationale des étudiants et étudiantes du Québec

Mme Côté (Josette): Bon, alors, on est très déçus de se retrouver encore ici aujourd'hui devant des politiques qui vont nuire à l'accessibilité à l'éducation. On est déçus également parce qu'on a bien hâte de voir le jour où on va enfin pouvoir, soit critiquer, soit aider à élaborer une véritable politique globale de démocratisation de l'éducation. On est convaincus qu'au Québec, on a encore besoin de ça et on est convaincus qu'au Québec le niveau d'éducation n'est pas encore assez suffisant pour se dire qu'on arrête ce processus-là et qu'on va vers moins d'accessibilité vers un niveau d'éducation inférieur pour la population québécoise.

Évidemment, quand on parle de démocratisation, je pense que le gel des frais de scolarité universitaire a été une mesure qui a très largement favorisé l'accessibilité à l'éducation et on est convaincus de la nécessité de maintenir le gel des frais de scolarité universitaire. Nos propos contrastent évidemment totalement avec ceux du gouvernement qui tente de convaincre la population qu'un dégel ne serait pas grave, parce que ça ne serait pas dramatique de connaître une baisse marginale de 5 %, 10 % ou 15 % de la fréquentation universitaire; 5 %, 10 % ou 15 % c'est aussi 5000, 10 000, 15 000 ou 20 000 personnes pour nous. Et c'est ça qui est important. Ce serait des personnes de moins dans les universités. Alors qu'il est évident que le niveau de scolarité est insuffisant au Québec; encore au Québec, c'est seulement 11 % de la proportion des plus scolarisés, les 25-44 ans, qui ont un baccalauréat, seulement 2 % ont une maîtrise et seulement autour de 0,5 % ont un doctorat, et on considère que c'est largement insuffisant.

De 1975 à 1985, la proportion des jeunes qui ont accédé à l'université a augmenté de 50 %. En Ontario, proportionnellement avec la hausse des frais de scolarité, on a connu une augmentation de seulement 9 %. Le gouvernement nous dit: C'est assez, c'est suffisant, on est satisfaits. Maintenant, il faut mettre un terme à cette croissance. C'est ça que ça veut dire, les politiques qu'on a sur la table en ce moment, mettre un terme à la croissance et connaître une certaine décroissance. Cette croissance, tout le monde l'admet et même le ministre, découle en grande partie du maintien du gel des frais de scolarité. Le 19 décembre, quand M. Ryan a annoncé le dégel des frais de scolarité et le régime de l'aide financière, il a lui-même dit, et c'est à la page 11 de notre mémoire: "La politique de gel observée par tous les gouvernements qui se sont succédé à Québec a contribué à une hausse importante du taux de fréquentation universitaire au Québec. "La politique des années passées avait pour objet de favoriser le rattrapage du Québec en matière de fréquentation universitaire et d'ouvrir les portes de l'université à toute personne apte à poursuivre des études supérieures sans égard à sa fortune ou à celle de ses parents. Nous avons certes accompli des pas majeurs dans cette double direction. En contrepartie, des études

montrent que les politiques d'accessibilité pratiquées jusqu'à maintenant au Québec et dans d'autres sociétés n'ont exercé qu'un impact mineur sur l'accès des personnes de condition modeste à l'université."

On aimerait bien répondre à ça parce que c'est bien évident que simplement un gel ou simplement une gratuité, sans politique globale de démocratisation de l'éducation, sans action concrète, que ce soit pédagogique, que ce soit sous forme d'accentuer la motivation des différentes couches de la population et sous forme d'aide financière concrète également qui tient compte de la situation réelle des étudiants et étudiantes, c'est sûr que ce n'est pas suffisant, sauf que ce sont des pas qu'on a faits et on n'acceptera pas de reculer de ce côté-là. Donc pour nous, c'est clair que le gel des frais de scolarité universitaire, c'était une politique de démocratisation.

Pour justifier le dégel, on nous dit que ça va régler le sous-financement des universités, que ça va améliorer la qualité de notre formation et que c'est la solution qu'on propose au sous-financement des universités. Il ne faut pas oublier que les universités, quand on compare il y a dix ans à aujourd'hui, ont environ le tiers de moins de budget en termes relatifs qu'elles avaient il y a dix ans. Le sous-financement des universités n'est pas dû au gel, mais bien à des choix de société qui se sont effectués par le passé, à des coupures et à trop peu d'ajouts pour compenser l'augmentation des clientèles.

Le sous-financement des universités nous apparaît donc plutôt comme un prétexte dont se sert le gouvernement pour justifier la hausse des frais de scolarité universitaire parce qu'il faut voir, de plus, que des 104 000 000 $ supplémentaires qu'on va aller chercher dans deux ans en augmentant les frais de scolarité, il y en a au moins 21 000 000 $ qui vont être réinjectés dans l'aide financière et, de plus, c'est largement insuffisant pour combler le sous-financement actuel des universités.

Pour justifier le dégel aussi, on nous dit que les prêts et bourses vont compenser - à la page 4 de notre mémoire - de toute façon ces derniers temps, on a quand même assez bien démontré que les prêts et bourses ne pourront pas compenser une hausse des frais de scolarité, d'autant plus que le projet de réforme que le gouvernement nous présente, quoique c'est 20 % de plus de bénéficiaires, proportionnellement au nombre de bénéficiaires, proportionnellement au nombre d'étudiants et d'étudiantes à temps plein et à temps partiel... Les 4900 personnes de plus, par exemple, qui seraient touchées par la réduction de la contribution des parents, c'est seulement 4 % des inscriptions à temps complet et 2 % de la population universitaire totale. Quant à l'accès des étudiants à temps partiel au régime, c'était censé toucher 13 200 personnes. Ça représentait 11 % des inscriptions à temps partiel et 5 % de la population universitaire totale. Le ministre nous a fait savoir que c'était reporté à une date indéterminée.

Donc, quant à l'impact pour compenser véritablement la hausse des frais de scolarité, la réforme actuelle est largement insatisfaisante concernant ça et ne compensera pas du tout. D'autant plus que pour véritablement compenser une hausse des frais de scolarité, il faudrait que la réforme connaisse de profonds changements qui régleraient des problèmes déjà existants, à savoir l'abolition de l'endettement, la révision des critères d'autonomie qui posent des gros problèmes d'accès au régime, l'élargissement de la période d'admissibilité, la réduction des contributions, etc. On sait pertinemment que les dépenses qui seraient entraînées par une véritable ou une minime compensation du dégel des frais de scolarité seraient largement supérieures à ce que le gouvernement voudrait récupérer par la hausse des frais de scolarité, ce qui nous fait dire qu'il n'y a pas de volonté politique non plus de compenser par les prêts et bourses la hausse des frais de scolarité, puisque l'argument du sous-financement et l'argument des finances publiques qui dit qu'on n'a pas d'argent ne tiendraient plus, puisque ça coûterait plus cher de compenser de façon plus concrète que ce que ça rapporterait en augmentation de frais de scolarité. Donc, à ce niveau, pour nous, c'est clair que la réforme que le gouvernement présente ne représente pas du tout une compensation.

Ce qui nous amène à conclure, ce qui nous amène à déduire que les véritables objectifs d'un dégel des frais de scolarité, ce ne sont pas des objectifs financiers, ce ne sont pas des objectifs de régler le sous-financement des universités et ce ne sont pas des objectifs non plus d'accessibilité nouvelle à l'éducation en lien avec un régime d'aide financière. Ce sont des objectifs de réorientation du système d'éducation. Ce sont des objectifs élrtistes. Ce sont des objectifs qu'on a déduits par les propos mêmes du ministre Ryan alors qu'il dit qu'on a atteint un niveau suffisant d'éducation, c'est important de se rabaisser. Des objectifs qui sont clairement définis par le Conseil du patronat et par des documents de certains milieux des affaires; des objectifs qui vont dans le sens de dire que l'éducation devrait non seulement devenir un endroit où c'est la loi du marché qui prime. Par exemple, dans les universités on parle d'instaurer la compétition entre les universités. On a même ouvert la porte à une certaine déréglementation. 10 % de plus que chaque université pourrait instaurer, selon qu'elle est performante ou moins performante Nous autres, on évalue que c'est une porte ouverte, mais que ça va se poursuivre. Et cette loi du marché, le Conseil du patronat ne se gêne pas pour dire que ça va entraîner des fermetures de certains programmes, ça va entraîner une spécialisation pour les universités en région, par exemple, qui vont être incapables d'être compé-

titives et d'offrir un éventail large de programmes et ça va entraîner aussi une baisse notoire des inscriptions dans les programmes de secteurs dits plus mous, les secteurs des sciences humaines, certaines sciences pures, par exemple, où les gens vont être fortement désincités, à cause du haut taux des frais de scolarité, à cause du niveau d'endettement, à s'inscrire dans ces secteurs-là.

Donc, ce qu'on pense, c'est que le dégel des frais de scolarité, c'est aussi une réorientation du système d'éducation. On remet en question les objectifs qu'on s'était donnés il y a 20 ans et on ne semble pas se soucier du tout de l'impact que ça va avoir sur l'accessibilité à l'éducation. C'est ce qu'on conclut parce que, quand on regarde le sous-financement des universités, quand] on regarde l'argument des prêts et bourses, on se rend compte que ça ne rime à rien et que ça ne nous amène à aucun résultat.

Sur le sous-financement, ce que j'ai oublié de dire également, c'est ce qu'on a remarqué dans les autres provinces, c'est qu'au fur et à mesure que les frais de scolarité augmentent, les gouvernements réduisent leurs subventions d'autant. Donc, ça ne règle pas le problème de sous-financement et ça n'améliore pas du tout la qualité de la formation. Et on sait qu'au Québec, à l'heure actuelle, le gouvernement va sûrement utiliser le prétexte de la réforme de M. Wilson qui vient d'exercer des coupures dans l'éducation: pour lui aussi, réduire ces subventions d'autant. Donc, où est l'augmentation de la qualité? Où est le règlement du sous-financement des universités?

Là, je vais laisser la parole à Jean-Pierre Paquet qui va nous exposer, de façon plus exhaustive, chacune des mesures du projet de réforme et quelles sont nos positions face à ça.

M. Paquet (Jean-Pierre): C'est ça. Je viens donc, pour ma part, me pencher sur le contenu du projet de réforme, en faire une évaluation et essayer de présenter une comparaison, à savoir: Jusqu'à quel point ce projet de réforme répond aux revendications étudiantes ou quelles sont les revendications étudiantes qui sont laissées de côté. Par la suite, Josette reviendra pour aborder la question de la condition économique des jeunes et, également, la question du financement de l'éducation dans notre société. D'abord, on tient à faire un rapide bilan des cinq dernières années sous le gouvernement libéral et de révolution du régime des prêts et bourses, depuis 1985. Rapidement, on observe que le volume des bourses, comme il a été mentionné hier, a diminué de façon importante, de 23 %, et que le volume des prêts, quant à lui, a augmenté de 18 % au cours de ces années-là. On remarque également, et c'est un phénomène et un facteur très importants, que la proportion des étudiantes et étudiants à temps complet qui bénéficient d'une aide financière a connu une chute très importante. La proportion des temps complets des réseaux collégial et universitaire qui disposent d'un prêt a augmenté de 2,5 % durant toute cette période-là. La proportion des temps complets qui bénéficient d'une bourse a chuté de 28,3 %. Et ça, ce n'est pas une chute du nombre absolu de bénéficiaires, comme il a été présenté hier dans l'exposé de M. Ryan, qui pourrait s'expliquer par le fait qu'il y a moins de demandes ou patati, patata. C'est le nombre de bénéficiaires par rapport à la population étudiante à temps complet et c'est donc une donnée extrêmement importante. Alors, au total, depuis 1985-1986, il y a une chute de 17,3 % de bénéficiaires en proportion des temps complets et, à l'université, c'est une chute, 21 % de moins de bénéficiaires en proportion des temps complets; cela, c'est énorme.

La réforme en tant que telle. On analyse la réforme sous trois angles: d'abord, les améliorations qu'elle contient, ensuite, les coupures qu'elle contient et les lacunes qu'elle présente. Au niveau des améliorations, on tient tout de suite à le préciser, il y a 17 des 24 mesures gouvernementales que l'ANEEQ appuie. On les appuie tout simplement parce qu'elles répondent en partie ou entièrement à des revendications de l'ANEEQ et que ces améliorations-là, finalement, correspondent pratiquement mot à mot aux revendications qu'on formule depuis des années. Alors, ce sont des gains pour nous, ce sont des acquis et c'est pour ça qu'on les appuie, puisque nous considérons que ce sont des concessions de la part du gouvernement.

Au niveau des coupures, la réforme présente contient 12 000 000 $ de coupures supplémentaires. Pour nous, chacune de ces coupures-là est totalement inacceptable et on demande leur retrait immédiat. On reviendra plus en détail sur ces coupures-là.

Il y a également des lacunes dans la réforme qu'on veut voir combler par le biais de cette commission, par le biais d'ajouts, par la suite, au projet de réforme. On veut qu'elles soient comblées, ces lacunes-là, parce qu'on estime que le gouvernement peut faire beaucoup plus, en termes d'efforts financiers, pour améliorer le régime des prêts et bourses.

Alors, on va maintenant présenter une évaluation de l'effort financier réel que représente cette réforme-ci. Il y a 43 000 000 $ d'améliorations dans la réforme, mais il y a également 12 000 000 $ de coupures, ce qui fait en tout et pour tout 31 000 000 $ de déboursés supplémentaires que cette réforme-là vue ou analysée, à elle seule, ou isolément, représente. Ça représente 10 % d'ajout aux dépenses d'aide financière. Sauf que nous, c'est bien dommage pour le gouvernement, le petit calcul, on ne le fait pas seulement en considérant la réforme. On a, je dirais, l'intelligence de regarder tout ce que le gouvernement a fait depuis cinq ans. Et

on remarque que depuis 1985, le gouvernement a peut-être fait des améliorations de 9 000 000 $ aux prêts et bourses mais il a aussi fait des coupures de 26 000 000 $ annuellement, ce qui fait en sorte qu'on se retrouve avec 15 000 000 $ de moins annuellement dans les prêts et bourses.

Nous, c'est bien dommage pour le gouvernement, mais l'évaluation de fa réforme, on l'étalé aussi sur une période de cinq ans. On compare le régime tel qu'il était avant la prise du pouvoir des libéraux en 1985-1986 et ce qu'il serait quand la réforme de prêts et bourses serait ce qu'on appelle en croisière, c'est-à-dire que l'entièreté des dépenses de 31 000 000 $ vont être absorbées, que tous les bénéficiaires vont profiter des nouvelles mesures et que les 31 000 000 $ seraient une dépense réelle. Ça, ce sera seulement en 1993. Or donc, en 1993, neuf ans après 1985-1986, le régime des prêts et bourses aura été accru, le budget, de 16 000 000 $, une énorme croissance de 5 % en neuf ans. C'est ce que représente, selon les données qui ne sont pas exclusivement les nôtres mais qui sont partagées ici, l'effort financier réel de ce gouvernement qui prétend faire de cela une énorme réforme, 5 % de plus en neuf ans. On estime qu'il est possible de faire énormément plus pour compléter cette réforme-là.

Je vais donc présenter maintenant une évaluation aussi de l'impact du projet de réforme. C'est sûr que cette réforme-là bénéficiera d'abord et avant tout aux gens qui reçoivent déjà des prêts et bourses. Il y a près de 30 % des bénéficiaires actuels qui recevraient une amélioration de leur aide. Mais il faut voir... C'est donc un élément important. Mais comme il a été dit tantôt, quelles sont maintenant les personnes qui, pour la première fois, vont bénéficier d'une aide? Ça va être quoi la proportion des étudiants et étudiantes dans les cégeps et universités qui vont recevoir une aide pour la première fois? Et bien, il n'y a pratiquement que deux mesures dans ce projet de réforme qui en contient 24, il y a seulement deux mesures qui permettraient d'accroître le nombre de bénéficiaires. C'est, d'un côté, la réduction de la contribution des parents. Au niveau universitaire, ça permettrait à 4900 universitaires de recevoir une aide pour la première fois. Ça vous donne 4 % des gens à temps complet mais 2 % de la population étudiante totale. Très grosse compensation, ça, pour le dégel des frais de scolarité. Ce qui ferait donc qu'en bout de ligne... On va parler aussi, on va faire un cadeau, on va faire une ouverture. Les mesures pour les gens à temps partiel, ce serait 10 % de plus des temps partiels qui en auraient, 10 % au total, et 5 % de la population étudiante totale.

Au terme de la réforme, en calculant le nombre de personnes qui présentement reçoivent des prêts et bourses et en ajoutant les gens qui en recevraient suite à la réforme, il y aurait toujours dans les universités, comme bénéficiaires dans les universités, 28 % des universitaires qui recevraient des prêts et bourses, au terme de la réforme ou 22 %, si on exclut les mesures sur les temps partiels dont l'application est plus qu'incertaine. Alors, il resterait, si on exclut la mesure sur les temps partiels qui s'applique on ne sait pas quand, 72 % des universitaires sans prêts et bourses même après la réforme. Ça va faire toute une compensation, ça, pour le dégel des frais de scolarité.

Au niveau collégial, la mesure de réduction de la contribution des parents ferait en sorte qu'environ 7000 personnes de plus auraient accès à une aide. Ça représente 6 % des étudiants et étudiantes à temps complet dans les cégeps qui recevraient une aide avec la réforme. Comme on le voit, ce n'est pas énorme. C'est ce qu'on appelle très timide.

Ensuite, au chapitre des coupures dans la réforme qu'on veut voir toutes retirées, il y a d'abord une mesure très grave, c'est la réduction de la période d'admissibilité à la bourse, ce qui entraînerait un accroissement important de l'endettement puisqu'il y aurait un nombre important de personnes qui, par la suite, n'auraient accès qu'à un prêt. Ce qui ferait encore que ça s'inscrirait dans la tendance du gouvernement d'augmenter l'endettement.

Le gouvernement nous dit: Les étudiants et les étudiantes se traînent les pieds dans les universités et les cégeps et il faut absolument une mesure pour qu'ils étudient plus vite, pour leur couper l'aide financière. Mais je ferai remarquer une chose. C'est que la mesure prévue de réduire la période d'admissibilité, ça toucherait 4 % des bénéficiaires. Ça veut dire que selon la mesure gouvernementale, il y a seulement 4 % des bénéficiaires des prêts et bourses qui se traîneraient les pieds. Mais nous, on considère plutôt que ces gens-là, ces phénomènes-là de prolongement des études sont tous explicables et que la plupart de ces gens-là sont des exceptions qu'il faut continuer à couvrir. Ce sont des gens qui, effectivement, soit vivent des difficultés d'apprentissage, des gens qui ont fait des réorientations de programmes, des gens, qui ont soit des charges familiales ou qui doivent travailler en même temps que leurs études ou encore des gens qui ont des occupations à l'extérieur. Et ça peut être des phénomènes explicables. Il faut continuer, on considère, à supporter ces gens-là, à leur assurer un meilleur encadrement pour qu'ils puissent terminer et assurer la poursuite de leurs études et non pas tout simplement leur couper les vivres.

Une autre coupure qui est plutôt un recul et qu'on considère tout à fait inacceptable, qui est d'après nous une mesure tout à fait élitiste, c'est la remise de 25 % de la dette pour les personnes des deuxième et troisième cycles qui seraient très performantes et performants et qui termineraient leurs études dans les délais mini-

mums, moyens, requis ou normaux, selon l'expression utilisée pour le moment.

D'abord, ce qui est clair dans le document gouvernemental, ce n'est pas une mesure pour réduire l'endettement. Ce qui est marqué noir sur blanc dans le document gouvernemental, c'est une mesure pour réduire les dépenses de fonctionnement des universités et pour réduire le budget des prêts et bourses. C'est écrit comme ça et c'est ça l'objectif de la mesure. Ce n'est pas de réduire l'endettement. Pour nous, ça crée un précédent extrêmement dangereux qu'on n'accepte pas parce que ça revient à faire varier le niveau d'aide ou le niveau d'endettement selon la performance scolaire. Et par la suite, qu'est-ce qu'on va voir apparaître? Ça va être de faire varier l'endettement selon qu'on provient ou non d'une région éloignée comme on l'a vu hier, par exemple. Ça va être de faire varier l'endettement ou l'aide financière selon qu'on étudie dans le bon programme, dans un programme jugé prioritaire pour le développement économique, par exemple. Il faut se rappeler que le gouvernement fédéral, il n'y a pas longtemps, a créé un programme de bourses, et exclusivement de bourses pour les gens en génie pour favoriser les inscriptions là-dedans. On se rappelle que le Conseil du trésor, en 1984, proposait de couper les bourses entièrement pour les gens qui n'étaient pas inscrits dans les programmes jugés prioritaires et ne donner que des prêts aux autres. Pour nous, la voie est toute tracée, c'est de créer un précédent pour faire varier l'aide selon le programme, la performance etc.

Cette mesure-là de réduction de 25 % de la dette, c'est comme une carotte, si on peut dire, mais qui va évidemment avec le gros bâton, et le gros bâton, c'est le phénomène de l'endettement. On augmente l'endettement tout le temps, tout le temps, tout le temps et on vient dire aux gens par la suite: Peut-être qu'on pourrait réduire votre endettement, mais si vous répondez à certaines conditions. Alors on n'est pas dupes de ce piège-là. D'autant plus qu'avec une éventuelle augmentation des frais de scolarité universitaire, ce que cela entraînerait, c'est une dépendance accrue en face du régime des prêts et bourses. C'est-à-dire que, de plus en plus, pour étudier, il faudrait recevoir de l'aide financière, ce qui fait en sorte que ce qu'on prévoit et ce qu'on observe ailleurs, c'est que de plus en plus, lorsque les frais de scolarité sont élevés, le régime des prêts et bourses devient le moyen privilégié pour les gouvernements pour faire des pressions sur le choix et l'orientation des études en rendant l'aide financière de plus en plus conditionnelle à certains critères de performance ou de choix des études. Et ça, ça s'applique dans la mesure où tu as une forte proportion des étudiantes et étudiants qui dépendent du régime des prêts et bourses. Pour ça, il faut augmenter les frais de scolarité.

Donc, nous, ce qu'on dit, c'est: Comme ce n'est pas une mesure pour régler l'endettement, la remise de dettes de 25 %, puisque c'est là pour réduire les dépenses de fonctionnement, on veut quand même, on identifie qu'il y a un problème important d'endettement, surtout au niveau des deuxième et troisième cycles, et on demande des mesures réelles pour réduire cet endettement-là, mais pour tout le monde, de façon uniforme et non pas selon la performance. Ce qu'on pense, par exemple, il y a des moyens très simples qu'on donne à titre d'exemple, c'est de réduire le prêt maximum aux deuxième et troisième cycles qui, présentement, est de 3500 $ presque. Si on le réduisait au montant du prêt maximal au niveau du premier cycle, eh bien, ça ferait en sorte que les gens s'endetteraient d'environ 700 $ de moins par année pour tout le monde plutôt que de 700 $ seulement pour les personnes qui finissent leur diplôme dans les bons délais.

Rapidement, deux autres coupures dont on demande le retrait, la réduction des frais de transport pour les gens qui vivent dans les régions éloignées et qui sont résidents chez leurs parents, la coupure est absolument draconienne, ça viendrait faire en sorte que les gens qui n'ont pas de transport en commun dans la région auraient droit à 22 $ par semaine pour faire environ dix voyages. Alors ça fait quoi, ça? Ça fait un gros 2 $ par transport, quand tu as 20 kilomètres à franchir. C'est absolument inacceptable comme coupure et ce que ça risque d'avoir comme effet, c'est de forcer les gens tout simplement à quitter la maison familiale.

Deux autres coupures également qui viennent complètement abolir les deux seules mesures qui existaient dans le régime pour favoriser le retour aux études des gens qui étaient sur le marché du travail. On sait que ce n'est pas facile d'abandonner son emploi et d'aller étudier à temps complet. Ça implique souvent une chute de revenu et il y a donc un phénomène de transition extrêmement difficile. Le gouvernement abolit les deux seules mesures dans le régime qui permettaient et qui facilitaient cette transition. On en exige le maintien. On demande même que le régime s'adapte et se renforce pour faciliter le retour aux études qui est un phénomène de plus en plus développé au Québec.

Au niveau des lacunes, pour conclure, on a quatre priorités. D'abord, élargir le statut d'autonomie. Il n'y a absolument rien dans le projet de réforme pour élargir le statut d'autonomie. Au contraire, notre interprétation du projet de loi 25 ferait en sorte que les mesures prévues viendraient restreindre le statut d'autonomie en appliquant unilatéralement, à la lettre, la réforme de l'aide sociale qui définit quels sont les critères pour être reconnu autonome des parents. Alors, c'est une uniformisation des programmes sociaux à la baisse et on trouve ça absolument épouvantable. On considère que ça prend un gouvernement rétrograde, archaïque,

dépassé, complètement décroché de la réalité, ça prend des ministres qui viennent d'une époque, on ne sait pas laquelle, pour essayer de nous proposer le maintien de la dépendance par rapport aux parents et de ne proposer absolument aucun assouplissement de ce côté-là. Encore aujourd'hui, en 1990, et c'est la réforme des années quatre-vingt-dix, donc jusqu'à l'an 2000, pour être reconnu autonome des parents, il faudrait soit être marié, soit avec des enfants, soit avoir un bac ou soit avoir été deux ans sur le marché du travail ou soit être enceinte de 20 semaines. Alors ce n'est vraiment pas très très adapté à la réalité d'aujourd'hui.

On demande également qu'un effort particulier soit fait pour les gens des réglons éloignées; présentement, le régime ne considère et ne reconnaît absolument pas les énormes frais de transport et de déplacement que les étudiantes et étudiants des régions éloignées doivent supporter. On demande que ce soit intégré. (10 h 45)

On demande également l'abolition du principe de dépendance entre membres d'un couple. Donc, on demande l'abolition ou la contribution du conjoint ou de la conjointe. Le projet de réforme prévoit et présente une réduction de cette contribution, mais on demande bel et bien l'abolition de ce principe-là. On demande également des efforts supplémentaires pour réduire la contribution des parents, pour la ramener à un niveau plus réaliste. Notre mémoire contient huit mesures supplémentaires très détaillées qu'on veut voir s'ajouter aux règles actuelles.

Et, également, en termes de conclusion pour faire une rapide évaluation de la prochaine réforme et de ses lacunes, au chapitre des contributions, la réforme continue de surévaluer la capacité financière des étudiantes et des étudiants. Elle maintient le principe de dépendance entre conjoints et néglige certaines mesures pour réduire la contribution des parents.

Au chapitre des allocations, le projet de réforme maintient le principe d'une zone de résidence et il n'y a aucune mesure pour ajuster les allocations de subsistance durant les périodes de chômage, l'été, et il ne propose absolument rien pour mieux couvrir les frais de transport.

Au niveau de l'admissibilité, le gouvernement ne fait absolument aucune ouverture pour favoriser le retour aux études des décrocheurs et des décrocheuses du secondaire. Il réduit la période d'admissibilité alors qu'il faudrait l'élargir et, les mesures envers les temps partiels, c'est un bon pas en avant, mais elles sont insuffisantes et trop restrictives. Il n'y a absolument rien pour favoriser l'intégration des immigrantes et des immigrants, comme on le demande.

Au chapitre de l'endettement, le gouvernement continue dans la voie qu'il a tracée. Il ne propose rien pour alléger ou régler le problème de l'endettement.

Au niveau du fonctionnement du régime, on remarque que, encore là, la proposition pour le comité d'appel est aussi insuffisante, quoiqu'on considère - on est d'accord avec l'instauration d'un comité d'appel, on le demandait depuis longtemps - que la composition, le rôle, le fonctionnement de ce comité devraient être redéfinis.

Mme Côté: Au chapitre de la condition économique de la population étudiante, parce que je pense que c'est un aspect qui est très important, le gouvernement dit aux étudiants et aux étudiantes: C'est maintenant le temps que vous fassiez votre part, soi-disant qu'on ne l'a Jamais faite, nous autres, on n'a jamais rien fait, on n'a jamais fait notre part, on est des enfants gâtés, des ci et des ça. Là-dessus, pourtant le ministre Ryan, depuis longtemps, a en main les études du Bureau de la statistique du Québec et d'autres études au niveau fédéral qui confirment ce que le Bureau de la statistique du Québec avait eu comme résultat lors de son enquête, en 1986. Ces données tiennent compte de toutes les sources possibles de revenu de la population étudiante: l'emploi, l'aide des parents, les prêts et bourses, les emprunts personnels et autres. Au collégial, les résultats sont les suivants: Le revenu annuel total moyen est de 4205 $ par année, soit 3419 $ pour les résidents et les résidentes et 5629 $ pour les personnes ne résidant pas chez leurs parents. Wow! À l'université, le revenu moyen est de 6791 $, soit 5257 $ pour les résidents et les résidentes et 8016 $ pour les non-résidents et les non-résidentes. Encore une fois, Wow! C'est vraiment extraordinaire comme revenu. On est très riches, nous autres.

Au niveau du sondage, maintenant, de La Presse, ça confirmait encore une fois ce qui avait été dit: Ce qu'on remarque, c'est qu'il en ressort que du côté collégial la moitié des étudiantes et étudiants à temps plein ne demeurant plus chez leurs parents vivent avec moins de 5000 $ par année; chez les universitaires à temps plein, la grande majorité ont des revenus bruts inférieurs à 10 000 $ et 41 % ont moins de 5000 $; 43 % des universitaires ne résidant pas chez leurs parents ont moins de 10 000 $ par année. En définitive, une forte proportion d'étudiantes et d'étudiants qualifient leur situation économique comme étant difficile; c'est le cas de 33 % de toute la population étudiante collégiale et universitaire. Un élément intéressant aussi pour évaluer l'efficacité du régime des prêts et bourses, 57 % des universitaires qui reçoivent une aide financière jugent leur situation difficile comparativement à 27 % des non-bénéficiaires. Parmi les universitaires à temps partiel, même si le revenu moyen est de 33 000 $... selon M. Ryan, une importante proportion, soit 22 % qualifient leur situation financière de difficile. Ça entraîne un grand

nombre d'échecs et d'abandons. Les données varient fortement à ce sujet. On est encore à étudier ça plus en profondeur, mais les adeptes d'une hausse des frais de scolarité vont même jusqu'à dire que les difficultés économiques ne sont qu'un prétexte que les étudiants et étudiantes non motivés invoquent pour justifier l'abandon des études. Pourtant, diverses enquêtes dont celle du Bureau de la statistique du Québec indiquent qu'environ le tiers des abandons des études sont directement liés à des conditions économiques difficiles. Une enquête exhaustive publiée en 1987 par le Secrétariat d'État fédéral, qui s'intitule "La situation financière des étudiants universitaires et l'abandon des études", va dans le même sens. Donc, on remarque que, déjà, la condition économique est une cause d'allongement des études, une cause d'échec et une cause d'abandon. Et on évalue qu'avec le dégel, le gouvernement ne réussira pas à faire en sorte que les gens vont sortir plus vite avec un diplôme, mais que beaucoup vont devoir travailler davantage, donc allonger leur temps d'études face à ça.

Maintenant nous autres, on dit: On la fait déjà notre part, et c'est vrai. On ne demande pas des revenus de 15 000 $ ou de 20 000 $ pour vivre pendant qu'on étudie; on se satisfait d'une situation relativement stable dans laquelle on peut se débrouiller, survivre, s'arranger, mais on n'acceptera pas non plus que les gens qui ont déjà de la misère à arriver soient pris à la gorge et qu'ils ne puissent plus aller à l'université. Ça, on ne le tolérera pas non plus. Mais qui doit faire sa part? Le gouvernement nous dit toujours: Je n'ai pas d'argent - c'est l'argument absolu - je n'ai pas d'argent. Je suis bien d'accord avec vos beaux principes, mais je n'ai pas d'argent. Vous êtes idéalistes, déraisonnables et des ci et des ça. On l'a entendu souvent. Vous n'avez pas d'argent, M. Ryan. Bon. Alors, on va regarder un peu qui doit faire sa part. On a un petit peu fait le tour. Évidemment, on continue d'étudier cette question-là - c'est à la page 14 de notre mémoire - la fameuse notion justement de qui doit faire sa part.

Au niveau de l'éducation, je pense que tout le monde s'entend pour dire que, du côté de l'entreprise privée, il y a des bénéficiaires de l'éducation, des bénéficiaires des diplômés universitaires, des gens qui profitent de l'éducation et qui, d'ailleurs, ne se gênent pas pour l'affirmer quand ils interviennent aussi fortement dans des dossiers politiques d'orientation de l'éducation. Tout ce débat soulève justement cette question centrale des finances publiques: Qui va payer? Qui doit faire sa part?

Nous autres, on estime que la solution se trouve probablement dans une restructuration de la fiscalité afin d'accroître les revenus provenant des entreprises. Ce qu'on remarque au Québec, c'est qu'il y a eu une tendance à la hausse de la part du trésor public provenant des particuliers et une forte tendance à la baisse de la part du trésor public provenant des entreprises. Entre autres, en quatorze ans, cette part-là est passée environ de 4,8 % à 1,4 %. Je pense qu'il serait bon de remonter au niveau d'une certaine époque si on veut aller chercher des fonds. Cette chute s'explique, d'une part, par la croissance de l'impôt sur les particuliers, comme je l'expliquais tantôt, mais aussi par la réduction du taux d'impôt sur les entreprises. "L'impôt sur les profits des petites entreprises fut aussi réduit à 3 % et celui des autres entreprises à 5,5 %... - le Québec - établissait ainsi des taux d'imposition sur les profits qui étaient de loin les plus bas du Canada, où les taux des grandes entreprises représentent couramment, dans les autres provinces, 14 %, 15 % ou 16 % des profits." C'est d'après un document de 1984 du ministère des Finances, dans le livre blanc sur la fiscalité. Non seulement l'impôt des entreprises ne fournit plus que 1,4 % des revenus de l'État, mais, en plus, les entreprises reçoivent une part grandissante des transferts gouvernementaux.

Ce qu'on remarque, c'est qu'il y a une tendance à la hausse de l'utilisation des fonds publics vers le secteur privé qui, dans certains cas, on l'admet, peut générer des créations d'emplois, donc être un bénéfice pour la population, mais qui, dans d'autres cas, ne profite à personne et, pourtant, c'est nous qui payons pour ça, quand on travaille, de même que nos parents et les gens qui paient leurs impôts. On a souvent donné des exemples de cadeaux que le gouvernement a faits à des entreprises qui n'ont eu aucune répercussion sur la population du Québec. J'aimerais qu'on m'explique en quoi l'éolienne de 40 000 000 $ qu'on a donnée à Laval in en cadeau a pu être au bénéfice des contribuables qui ont payé pour ça? J'aimerais qu'on m'explique aussi en quoi les 107 000 000 $ qu'on a donnés à Pétromont, soi-disant pour la relance économique de l'est... et on n'a jamais rien vu, ni emploi, ni rien, il ne s'est rien passé. Où est-ce qu'il est allé, cet argent-là? J'aimerais qu'on me dise, par exemple, dans le cas de Bell Helicopter, pour tous les millions qu'on lui a donnés alors qu'elle avait promis 3000 emplois, quels efforts on a faits pour retourner chercher l'argent, alors qu'elle n'a pas rempli ses engagements? J'aimerais qu'on m'explique aussi en quoi, par exemple, toutes les évasions fiscales qui profitent à la spéculation immobilière ont des bénéfices sur l'emploi et la population du Québec? Tout ce que ça a comme résultats, c'est de faire grimper le prix des loyers à Montréal, entre autres, et à Québec, dans les grands centres urbains. J'aimerais qu'on m'explique, cet argent-là, pourquoi on ne va pas le chercher? Quelles en sont les raisons fondamentales, et des raisons fondamentales autres que l'irréalisme ou le soi-disant contexte économique qu'on n'explique jamais et qu'on n'explique pas de façon exhaustive?

Nous, on évalue que, de ce côté-là, il y a énormément de choses à fouiller, de choses à voir qui pourraient rapporter des sommes très importantes dans le trésor public, qui n'auraient pas d'impact sur le climat économique et qui n'auraient pas d'impact non plus sur les possibilités de création d'emplois. J'ai donné de petits exemples; il y en a d'autres, mais je ne veux pas m'étendre là-dessus parce que le temps est court. Tout ça pour finir en disant que le gel des frais de scolarité universitaire et un régime d'aide financière adéquat, c'est tout simplement une question de justice sociale. Quand on me dit que le dégel, c'est une question de justice sociale parce que, de toute façon, c'est le monde pauvre qui paie des impôts pour le monde riche qui va à l'université, c'est quand on prend le point de vue du côté de celui qui abandonne l'objectif de démocratisation, de celui qui accepte le fait comme étant un fait absolu sans qu'on n'ait aucune possibilité d'agir en se disant qu'effectivement, dans nos universités, les gens des milieux défavorisés sont sous-représentés. Nous, on prend l'autre côté et on dit: Continuons à faire des efforts pour aller chercher ces gens-là parce que l'éducation, son rôle majeur, en tout premier lieu, doit être aussi de diminuer les inégalités sociales et non pas de les perpétrer et de les accentuer. Tout ce qu'on a sur la table à l'heure actuelle, que le gouvernement nous propose, va perpétrer, va accentuer les inégalités sociales et ne réglera en rien le problème que beaucoup de gens vivent parce qu'ils n'ont pas encore accès à l'université, que ce soit pour des raisons économiques, culturelles ou autres.

Je vous remercie. C'est tout. On demande le gel, on demande plusieurs mesures que Jean-Pierre a expliquées tantôt dans la réforme de l'aide financière et, concernant les fonds publics, ce n'est pas un argument final. Si le gouvernement manque d'argent, bien, quelque part, la population a droit de regard là-dessus et, du côté des entreprises, on remarque qu'il y a des abus énormes qui peuvent nous permettre d'aller chercher des fonds qui vont être pour le bien-être de tous et de toutes les contribuables. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. La parole est au ministre maintenant. Nous avons un peu moins de 60 minutes pour les échanges parce que vous avez pris, je crois, 35 minutes, me dit-on, pour votre présentation du mémoire. Alors, il reste 55 minutes pour les échanges. M. le ministre.

M. Ryan: Mme la Présidente, il me fait plaisir de retrouver ici deux porte-parole de l'ANEEQ que j'ai le plaisir de connaître depuis déjà un certain temps. Nous avons écouté avec intérêt évidemment la présentation qui nous a été faite. On nous a adressé un mémoire volumineux d'à peu près 70 pages dont je n'ai pas pu prendre connaissance malheureusement avant les heures assez avancées de la nuit, mais que mes collaborateurs ont étudié avec moi. Je pense que c'est un mémoire qui témoigne d'un travail considérable. On voit que l'ANEEQ a travaillé ces questions depuis longtemps et je lui en sais gré.

Il y a une partie du mémoire qui traite des politiques gouvernementales en général. Je ne peux pas m'attarder longuement là-dessus ce matin parce que c'est le sujet central de la politique que l'ANEEQ soulève. C'est son droit le plus strict, je ne le conteste pas, mais le lieu pour en discuter, c'est le Parlement et le véhicule qu'on utilise pour promouvoir une conception de la société, il me semble que c'est un parti politique. Ces débats, nous les avons faits lors de la dernière campagne électorale. Vous êtes libres de nous interpeller avec ça en tout temps, mais je ne pense pas que nous puissions rouvrir continuellement les débats que nous avons faits ces dernières années. Chaque parti représenté à l'Assemblée nationale véhicule sa conception de l'économie, des politiques sociales, des politiques culturelles, et il est élu par la population pour les mettre en application, pas pour les soumettre à tous les vents, a toutes les modes de l'opinion. Je pense qu'on peut mettre en question les politiques du Parti libéral, mais on ne peut pas l'accuser de manquer aux orientations générales qu'il a définies dans ses engagements envers la population.

J'avais fait le bilan moi-même de l'action du Parti libéral en matière d'éducation à l'occasion de la dernière élection à partir de 22 engagements qui avaient été pris en 1985. J'avais établi bien clairement qu'il y en avait au moins 19, 20 qui avalent été réalisés. Il y en a un qui ne l'avait pas été, c'était une question de finance. On avait parlé d'augmenter le nombre d'heures de présence en classe au niveau primaire. C'aurait été une affaire de 25 000 000 $, 30 000 000 $ que nous n'avions pas, étant donné la succession que nous ont laissée nos amis d'en face, évidemment.

On peut trouver que ces politiques étaient à courte vue, qu'elles étaient étroites, je le sais très bien, mais nous les avons réalisées. Cette fois-ci, nous avons soumis d'autres engagements à la population que nous pourrons réaliser également et l'un de ces engagements, c'était évidemment la mise en oeuvre du programme de modifications de l'aide financière aux étudiants. Je pense que nous sommes bien engagés dans la voie de la réalisation de cet engagement.

J'ai décrit longuement hier, en ce qui touche les finances publiques, les grandes données du problème qui se pose au gouvernement. Nous n'avons pas 26 formules. Il y a un certain total de dépenses auxquelles nous devons faire face dans l'année, il y a un certain total de revenus sur lesquels nous pouvons compter et il y a une certaine marge d'endettement que nous devons accepter, même si c'est contraire à

nos principes, de manière très générale. Là, il y a une équation à faire. Vous, vous pouvez dire: Les dépenses, ce n'est pas 33 000 000 000 $, c'est 38 000 000 000 $. C'est votre droit. Ça se décide au Parlement à l'occasion de la présentation du budget. Vous pouvez dire: Les revenus, ce n'est pas 31 000 000 000 $, c'est 39 000 000 000 $. Très bien! Mais ce n'est pas ça qui a été décidé par le Parlement légitime des Québécois. Le niveau de revenu qui a été décidé a été adopté avec le budget de M. Gérard D. Levesque au mois de mai ou juin dernier. C'est ça. On peut présenter d'autres points de vue. C'est comme ça que ça se présente. (11 heures)

L'endettement, nous trouvons qu'il est trop fort pour le Québec. Comme je l'ai dit hier, et je pense que M. Paquet était ici, parce qu'il nous accompagne depuis un temps immémorial dans nos démarches...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Nous aimons toujours le retrouver d'ailleurs. J'ai dit hier: Le fardeau de la dette cette année est de 5 000 000 000 $ sur des dépenses de 33 000 000 000 $. C'est beaucoup trop fort. Ce sont des sommes d'argent, du "cold cash", de l'argent comptant que nous devons donner à nos amis, les Japonais, nos amis de l'Allemagne de l'Ouest, à nos amis d'Italie, à nos amis de New York et à un certain nombre de prêteurs québécois aussi qui restent les plus importants, mais qui, quand même doivent être complétés par un recours à l'étranger. Est-ce qu'on va continuer cette saignée-là indéfiniment? Moi, le ministre des Finances m'a dit non. Il a dit non au Québec. Il a dit: Nous essayons de rétrécir cette marge. J'ai souscrit à cette orientation, autrement je ne ferais pas partie du gouvernement. Et si je veux que ce soit un langage sérieux, il faut bien que je resserre les choses quelque part. Autrement, faire plaisir à tout le monde, on augmente les dépenses, puis on augmente l'endettement, on n'est pas plus avancés. C'est notre proposition de base aussi simplement exprimée que je puisse le faire, appliquée au cas des universités et des collèges. Ça veut dire ceci: Nous avons des coûts dans le secteur universitaire en particulier qui demeurent sensiblement inférieurs à la moyenne canadienne. Nous avons rétréci l'écart ces dernières années grâce à des injections de fonds en provenance du gouvernement surtout, mais il reste un écart. Les universités nous disent: Aidez-nous à combler cet écart, autrement la qualité de la formation risquera d'en souffrir et en souffre peut-être déjà. Nous disons: C'est juste. Maintenant, où trouver la différence?

J'ai indiqué à maintes reprises que la contribution du gouvernement à l'enseignement postsecondaire, y compris l'aide financière aux étudiants, est déjà au tout premier rang de ce que fournissent les provinces canadiennes. On ne peut pas faire de reproches au gouvernement. On ne peut pas lui dire qu'il se désengage. J'ai établi clairement hier que notre contribution avait procentuellement augmenté depuis quatre ans. Alors de ce côté-là le ministre des Finances me dit: M. Ryan, nous faisons notre maximum. Nous ne pouvons pas faire davantage actuellement. Regardez donc s'il n'y a pas autre chose.

Je regarde les revenus qui peuvent arriver aux universités. Il y a des subventions gouvernementales, des revenus de fondation, des fonds de recherche, des projets de recherche qui sont subventionnés par des organismes subventionnâmes, etc. Ensuite, il y a les étudiants. Je pense bien que vous ne nierez pas que les principaux bénéficiaires de la formation universitaire sont les étudiants. Je pense bien qu'on peut s'entendre sur cette proposition-là.

Alors on regarde ce qui se fait en Amérique du Nord. On dit: Ailleurs, au Canada, la contribution des étudiants est autour de 18 %. Au Québec, elle est entre 6 % et 8 %, selon les critères qu'on emploie. J'ai fait la preuve que pour l'Université de Montréal, dans le dernier rapport annuel, c'est 4 % sur des revenus de 335 000 000 $. Vous l'aurez vérifié, je n'ai aucune inquiétude. C'est 13 500 000 $ que les étudiants versent. Là, on se dit: Si on était au moins à la moyenne canadienne. Nos gens ne sont pas plus irresponsables que les autres. Ils sont capables de comprendre la réalité comme on le fait partout ailleurs au Canada. Ça ferait ça de pris, ça ferait une quarantaine de millions de plus par année. Même, on ne sera pas à la hauteur de la moyenne canadienne. Avec ce qui est proposé par le gouvernement, on reste bien en deçà de la moyenne canadienne.

Vous parlez des compagnies. Les compagnies, ça fait partie de la fiscalité générale. On ne peut pas commencer ici à décider: On va aller piger dans la caisse des compagnies pour financer l'éducation. Au cabinet, si vous étiez aux réunions, je pense que je ne viole pas le secret de personne, il y a un ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui va nous dire: J'aimerais bien ça s'il y avait une loterie ou une taxe spéciale pour les sports au Québec. Il faudrait développer la capacité physique des Québécois. Le ministre responsable des hôpitaux: J'aimerais ça si on était comme en Irlande, si on avait une loterie ou une taxe spéciale pour les hôpitaux. Le ministre de l'Éducation va dire: J'aimerais bien ma taxe pour les universités. C'est le ministre des Finances qui décide de ça. Si vous voulez aller le rencontrer, lui faire une proposition... Moi, je vais lui transmettre vos propositions avec plaisir, mais c'est une question de politique fiscale générale qui est pas mal au-delà du sujet dont on discute ce matin. C'est intéressant en soi. Je ne suis pas de votre opinion sur le fond. Mais que vous ayez une rencontre avec le ministre des Finances... Je lui recommanderai de

vous recevoir, ça me fera plaisir. Mais je ne pense pas que ce matin on puisse avancer bien gros là-dessus.

Ma conception, je l'ai dit souvent, je veux qu'on fasse un effort beaucoup plus prononcé pour que les entreprises participent encore davantage aux campagnes de financement périodiques des universités. Elles l'ont fait ces dernières années avec de très bons résultats et j'espère qu'on pourra créer cette habitude d'une implication plus grande des entreprises dans le financement des dépenses d'investissement des universités. Et je souhaite aussi que les entreprises contribuent à doter nos universités de fondations plus récentes, de solides fonds de dotation comme en possède, par exemple, l'Université McGill, grâce à sa tradition beaucoup ancienne. Là, il y a tout un domaine à développer sur lequel, je vous le dis dès maintenant, moi, je suis entièrement favorable. Et je suis prêt à faire des efforts encore plus grands pour qu'on développe de ce côté-là. Mais du côté des revenus de fonctionnement des universités, je ne pense pas que ayez trouvé la mine d'or que vous pensez.

À propos des frais de scolarité, je suis content que vous ne vous soyez pas attardés, ce matin, sur le 5 % que vous m'avez attribué à bien des reprises. Moi, j'ai toujours dit, et si jamais je m'étais mal exprimé, par hasard, ça arrive à n'importe quel politicien, je le répète ce matin, qu'il pourrait arriver, je ne le sais pas, qu'il y eut un certain résultat de la hausse des frais de scolarité sur le taux de fréquentation qui pourrait aller peut-être, hypothétiquement, de 0 % à 5 %, dans la plus sombre des hypothèses, selon les données qui peuvent être disponibles, qui peuvent avoir un rapport avec notre problème, quoiqu'on n'ait pas d'éléments directs de preuve nulle part. Alors, ça, c'est bien important de le clarifier.

J'ai fait établir des données par mon cabinet, en particulier mon collaborateur en matière d'économie d'enseignement postsecondaire, M. Lévesque. J'ai des données ici sur ce qui est arrivé dans les autres provinces, depuis 1980. On a procédé à des augmentations, dans les autres provinces, depuis 1975, déjà. J'ai des données de 1980 à 1985. Les frais de scolarité sont demeurés gelés au Québec. Ils ont augmenté, dans les provinces autres que le Québec, de 41 %. Savez-vous quelle a été l'augmentation du nombre des étudiants? Au Québec, ça a été de 22,7 % et dans les autres provinces, 18,6 %. Entre 1985 et 1988, les frais de scolarité ont augmenté encore dans les autres provinces pendant qu'ils demeuraient encore gelés au Québec. Ici, le nombre des étudiants a augmenté de 6,3 %; il a augmenté de 8,9 % en Nouvelle-Ecosse et de 7,4 % dans le reste du pays, plus. C'est la période où on a augmenté la part du prêt, à part ça, les trois dernières années. Ça, ce sont des chiffres. On peut faire les théories qu'on voudra, mais, tôt ou tard - s'il y en a qui s'en aperçoivent, ce sont les gens qui sont situés dans l'Europe de l'Est - il faut se réconcilier avec les chiffres. On peut marcher avec des pourcentages, des abstractions pendant longtemps. À un moment donné, il faut arriver le nez sur la réalité. Ça, ce sont des chiffres, en tout cas, qui m'ont été remis ce matin par un collaborateur dont les travaux ont toujours été pris au sérieux. On vous fournira des données là-dessus, volontiers.

Là-dessus, je pense en avoir dit assez pour indiquer qu'au Québec, avec des frais de scolarité trois fois plus bas que la moyenne canadienne, il est temps qu'on se grouille, qu'on prenne nos responsabilités, qu'on les partage mieux. Vous parlez d'un partenariat; on vous invite à ce partenariat-là. On ne dit pas: On va aller se mettre en dehors des orientations générales du continent. On va dire: On va se mettre les derniers dans le convoi encore, mais, au moins, on va être de ce convoi-là et non pas d'un convoi d'un autre siècle ou d'une autre époque. C'est ça qu'on vous dit, tout simplement. Il n'y a pas plus d'arrière-pensée que ça là-dedans.

J'en viens maintenant au sujet de votre intervention et de nos débats qui est évidemment le régime d'aide financière et les modifications que le gouvernement compte y apporter. Vous l'avez souligné tantôt, l'ANEEQ donne un appui au moins partiel à 17 des 24 recommandations ou des orientations définies dans l'énoncé d'orientations, 17 sur 24. Je n'essaierai pas de trahir votre pensée, je sais que, sur certains points, vous dites: On dit oui, mais ce n'est pas assez. On note tout ça. Je vais vous dire une chose, sur ces points-là, je pense qu'on va penser ensemble à la condition étudiante, puis nous sommes prêts à travailler ces points-là, s'il y a certaines améliorations qui peuvent être apportées, et ça sera le sens de ma première question tantôt: Quelles sont les améliorations, sur ces points-là où vous êtes d'accord avec nous, qui peuvent être apportées? Quelles sont les choses qui pourraient être travaillées, même ensemble, avec les représentants des étudiants, pour qu'on arrive à des formules qui soient encore plus satisfaisantes et, en même temps, toujours, évidemment, compatibles avec les ressources du gouvernement? On est prêts à travailler ça avec vous autres, je vous le dis en toute simplicité et avec une certaine satisfaction aussi, parce que je dois reconnaître une chose, c'est que vous connaissez notre régime, vous l'avez discuté dans votre mémoire d'une manière qui est tout à fait fonctionnelle. On n'est pas totalement d'accord sur toutes les interprétations mais, dans l'ensemble, c'est un mémoire qui nous instruit sur les implications pratiques du régime, et il est très utile de ce point de vue-là.

J'ajoute une chose. Sur les points où vous n'êtes pas d'accord, là, j'ai fait faire des calculs, par nos services, sur les coûts. Un premier

estimé incomplet me permet d'établir - la question donnait suite à l'ensemble des recommandations de l'ANEEQ - que ça coûterait au-delà de 800 000 000 $. Au-delà de 800 000 000 $. Je prends seulement les plus grosses. Vous dites, par exemple, à la fin... ça vient d'une manière un peu subreptice à la fin, je ne m'attendais pas à ça, ça m'a empêché de m'endormir à 2 heures du matin. J'étais rendu là à 2 heures. Je pensais de laisser faire les deux dernières pages, mais j'ai trouvé des grosses choses là-dedans. Conversion de prêts en bourses, vous dites: On va abolir le prêt, on s'en va vers la bourse à 100 %. Ça, c'est un petit billet de 300 000 000 $. Un billet de 300 000 000 $. Vous voulez qu'on donne l'autonomie aux non-résidents, ça fait longtemps que vous présentez cette revendication-là à laquelle, sur le fond, je serais prêt à souscrire, si ce n'était des contraintes financières, si ce n'était des contraintes financières dont nous devons tenir compte, non seulement comme gouvernants et députés, mais aussi comme citoyens et citoyennes. Alors, ici, ça, c'est 270 000 000 $.

Statut de non-récidence sur présentation d'un bail, 46 000 000 $. Vous demandez qu'on abolisse la contribution du conjoint. En bonne théorie d'égalité des sexes, votre proposition est fort raisonnable, ce n'est pas moi qui vais la combattre en principe, mais, en pratique, le coût est de 40 000 000 $. Exemption pour soutien de l'unité familiale, en prenant les normes de Statistique Canada, 26 000 000 $. Vous dites: Abolition de la contribution minimale, 20 000 000 $; remise de dette de 25 % dès l'obtention du diplôme. Ça, je pense que ça veut dire que vous voulez appliquer au premier cycle ce que nous proposons pour les deuxième et troisième cycles, à moins que vous...

M. Paquet: Vous devez vous tromper de mémoire, ce n'est sûrement pas une revendication... Ce n'est sûrement pas nous, ça.

M. Ryan: Vous ne demandez rien de ce côté-là?

M. Paquet: On ne demande pas la... C'est de la remise de dette dont vous parlez, là, pour le premier cycle? C'est ça?

M. Ryan: Oui.

M. Paquet: Ce n'est sûrement pas nous qui demandons ça.

M. Ryan: Très bien, je vais mettre un point d'interrogation sur celui-là. Ça réduit la note à 760 000 000 $. Puis c'est incomplet, ceci, il y a des choses qui ne sont pas là-dedans, parce qu'en vérifiant les recommandations que vous avez faites vous allez trouver qu'il y en a sur lesquelles on n'a pas eu le temps d'établir de compilation de coûts.

Je vais vous dire une chose, les points sur lesquels nous sommes d'accord, je ne sais pas si vous pourriez préciser certains éléments qui vous sembleraient devoir être l'objet d'une attention particulière. Sur les points où il existe un désaccord radical, moi, je ne peux pas vous laisser entendre une possibilité de rapprochement à court terme, parce que je pense bien que, dans la mesure où je me rapprocherais de vous, je m'éloignerais du gouvernement. (11 h 15)

M. Paquet: Juste avant de passer à l'évaluation, ça apparaît aux pages 63, 64 et 65 de notre mémoire où on fait le résumé pour chacun de nos six grands axes de revendications. On fait la comparaison entre nos demandes et le projet de réforme pour pouvoir identifier là où sont les écarts. Maintenant, avant ça, je voulais juste rappeler quelques chiffres, que le dégel des frais de scolarité représenterait seulement 5 % de plus au budget des universités, donc, quand on parle de finances publiques, là, à un moment donné, que la réforme représente 5 % de plus de dépenses en neuf ans; ensuite, sur les autres provinces, là vous avez donné l'évolution du nombre d'étudiantes et d'étudiants, mais ce qu'il aurait fallu donner, c'est l'évolution de la proportion des jeunes par province qui accèdent aux études, et non pas le nombre absolu d'étudiantes et d'étudiants. Alors si on regarde la proportion des jeunes qui accèdent aux études, on remarque qu'il y a eu 50 % d'augmentation au Québec et 9 % d'augmentation en Ontario. Aussi, ce qui est très important, dans les autres provinces, c'est toujours de faire la différence hommes-femmes, parce qu'on remarque que dans plusieurs provinces canadiennes, il y a une augmentation importante de la fréquentation des femmes qui sont dans le processus de rattrapage, et on remarque que dans plusieurs provinces il y a une chute au niveau du taux de fréquentation des jeunes hommes. Alors hommes et femmes ensemble ça fait une moyenne, pour ces provinces-là, qui continue à augmenter, mais quand on la différencie, bon. Alors je ne veux pas faire une guerre de chiffres, mais c'est pour dire qu'il y a des nuances importantes, des fois.

Bon, juste un dernier élément que je voulais ajouter avant de préciser les éléments de la réforme. Quand on parlait de faire notre part et de diplômes, j'aimerais rappeler l'élément central de l'étude de Clément Lemelin sur le taux de rendement fiscal de l'enseignement universitaire. Ce que dit Clément Lemelin dans son étude, c'est que l'éducation universitaire est rentable, non seulement pour la population, non seulement pour les individus, mais pour l'État, c'est-à-dire que les diplômés universitaires qui ont accès en moyenne à des revenus plus élevés qu'un diplôme, payent davantage d'impôts, que ces impôts supplémentaires-là cumulés sur une période de vie active de 30 ans génèrent des revenus pour

l'État, qui dépassent le coût que l'État a investi dans la formation de ces jeunes-là. Donc c'est rentable pour l'État et ce n'est pas une dépense, et les étudiantes et étudiants, les diplômés remboursent largement ce que les finances publiques ont Investi dans leur formation, et ce n'est pas une hypothèse de côté, là, l'étude de Clément Lemelin, c'est l'objet central de son étude. Alors quand on parle de faire notre part, je pense que c'est un autre clou dans ce cercueil-là.

Donc, dans l'élément des différences ou des choses sur lesquelles on insiste, bon, comme on l'a dit tantôt, on revendique le retrait de toutes les coupures contenues dans la réforme. Une à une, il n'y en a pas une de justifiée. Ensuite, nos quatre priorités, c'est l'assouplissement du statut d'autonomie, où est-ce que là il n'y a absolument rien dans la réforme, l'abolition de la contribution de la conjointe ou du conjoint, des efforts supplémentaires pour couvrir et reconnaître les frais de transport pour les gens des régions éloignées, et des réductions supplémentaires à la contribution des parents, par sept éléments qu'on a identifiés dans notre mémoire. Entre autres, là encore dans le régime actuel, pour les parents, ce qu'on appelle l'exemption pour l'unité familiale de base, c'est-à-dire combien, quel montant dont le gouvernement considère que les parents ont besoin pour vivre, c'est 11 000 $, selon les règles du régime, on considère que les parents ont besoin d'environ 12 000 $ pour vivre à deux. C'est pas mal bas, tu sais, à un moment donné, il faut augmenter ça au moins au niveau du seuil de pauvreté. On dit aussi que le premier palier, tout comme la CREPUQ le revendique, on veut augmenter le premier palier. On veut introduire le principe d'une contribution maximale pour les parents, parce que ce n'est pas vrai qu'on peut demander des contributions de 6000 $ et 7000 $. Alors donc, une série de mesures comme ça.

Au niveau de l'admissibilité, on revendique un élargissement de la période d'admissibilité, parce qu'elle est déjà trop courte dans bien des cas. Aussi, au niveau des temps partiels, on considère que la période d'admissibilité est trop courte et que les dépenses admises, qui sont considérées pour les temps partiels, sont trop restreintes, c'est-à-dire qu'on a considéré, là-dedans, que les frais de scolarité, les frais de garde, les frais de transport, ça nous apparaît insuffisant. Au niveau de l'admissibilité, toujours, on dit: II y a 25 % des jeunes dans les écoles secondaires qui décrochent avant d'obtenir leur diplôme. Ces gens-là vont sur le marché du travail. Ils voudraient peut-être bien revenir aux études par la suite, mais ils n'ont pas de moyens financiers pour y revenir. Tout ce qu'ils ont, c'est l'aide sociale ou le chômage qui leur donne accès seulement à des programmes bien précis, et très limités. Alors, il faut que le régime des prêts et bourses permette aux jeunes du secon- daire de retourner au secondaire finir leurs études pour pouvoir se réinscrire ou se réintroduire dans le système d'enseignement.

Au niveau des allocations qui sont accordées pour que les étudiantes et les étudiants vivent, ça ce n'est pas l'axe central et majeur. Vous le savez, l'ANEEQ n'a jamais revendiqué que les gens qui ont déjà des prêts et bourses en aient nécessairement beaucoup plus. On a toujours plutôt insisté pour que les gens qui n'en ont pas en aient pour une première fois. Mais il demeure qu'au niveau des allocations, on demande des élargissements. Que ce soit au niveau des frais de transport pour les non-résidents, que ce soit pour la période d'été. Ça, on insiste là-dessus. Ça fait des années qu'on insiste là-dessus. Pendant la période d'été, les gens qui sont au chômage, ils se font couper leur allocation de subsistance des fols, de 140 $ ça tombe à 24 $ par semaine, parce qu'ils sont inactifs, ils n'ont pas d'emploi. Ça, ça fait des centaines de dollars de moins. On nous a toujours dit, au niveau de la DGAFE et des attachés politiques qu'il n'y avait pas d'objection de principe à ça, que toute la révision du calcul pour la période d'été, ce serait revu, que c'était une question de technicité. Ça fait quatre ans qu'on en parle. Il n'y a toujours rien dans la réforme là-dessus, alors qu'on nous dit qu'il n'y a pas d'objection de principe. Ce sont là des affaires inexplicables.

Au niveau aussi de la zone de résidence, c'est un non-sens. Ça n'existe nulle part dans un autre programme social où on dit que, pour qu'on reconnaisse ton statut de non-résidence, il faut que tu résides à environ 30 kilomètres de chez tes parents. Là, on calcule la distance entre ton arrêt d'autobus et la résidence de tes parents. Il faut voir si l'autobus passe assez souvent pour qu'on reconnaisse que c'est un système de transport efficace. Ça entraîne un allourdissement du régime complètement indescriptible. C'est un non-sens, ce principe de zone de résidence.

On peut continuer comme ça. Il y a plein d'hérésies, de choses qui datent d'il y a 20 ans dans ce régime et qui n'ont pas été ajustées parce qu'on considérait, il y a 20 ou 25 ans, que les étudiants et les étudiantes qui ne résidaient pas chez leurs parents allaient vivre sur le campus d'une université ou du cégep, en résidence. C'est juste pour donner un exemple à quel point le régime peut ne pas être adapté, des fois, à la réalité.

Sur l'autonomie, on insiste beaucoup là-dessus. On considère que le projet de loi 25 renforce le statut de dépendance par rapport aux parents. Ça nous apparaît très grave parce que, maintenant, pour donner juste un exemple, ce qui est prévu dans le projet de loi 25, c'est que, contrairement à la situation actuelle, les gens qui résident chez leurs parents devront travailler à temps plein. C'est-à-dire que, présentement, si tu travailles à temps partiel, tu peux, après deux

ans de travail à temps partiel, être reconnu autonome, même si tu as résidé pendant une certaine période de temps chez tes parents.

Le projet de loi dit nommément que, pour les périodes où tu résides chez tes parents, il faut avoir travaillé à temps plein. Alors, hier, dans une discussion de corridor, où on nous disait qu'on l'interprétait mal, sauf que nous, on lit ce qui est dans le projet de loi.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Juste un petit point, si vous me permettez. Quant à la citation que vous venez de donner du projet de loi, sur le travail à temps plein, vous soulevez un problème réel sur lequel notre attention a été attirée. Il y aura une modification qui sera apportée là-dessus, parce que, quand arrive la définition de ça, vous avez raison de signaler que ça cause des gros problèmes.

La Présidente (Mme Hovington): Mme Côté.

Mme Côté: Oui. Je voulais juste rajouter aussi que je trouve ça dommage qu'on ne nous ait pas répondu, en tout cas. On a parlé de l'ouverture... Est-ce qu'on rencontre M. Gérard D. Levesque? Effectivement, c'est lui le ministre des Finances, sauf que, dans le débat, on n'en sort pas quand même. On peut dire qu'on fait de la politique et on peut dire que, quand on parle d'orientations de l'éducation, on fait de la politique, mais on n'en sort pas dans le débat. Comment voulez-vous qu'on n'en parle pas de ces aspects fondamentaux puis qu'on s'en tienne à des arguments comptables, quand on ne sait pas ce qui s'en vient pour le Québec à long terme et qu'on ne sait pas ce qui s'en vient pour le Québec à moyen terme?

Quant aux arguments sur les finances publiques, j'ai donné des exemples tantôt puis j'ai demandé des réponses. Pourquoi ne va-t-on pas regarder de ce côté-là? Vous devez en parler, jamais je croirai, au Conseil des ministres, des fois, de tout ça. Je n'ai pas eu de réponse à ça, puis ce n'est parce qu'on est en commission parlementaire sur l'éducation et que vous me dites que vous n'avez pas d'argent que je n'ai pas le droit de poser des questions. Bien, comment ça se fait qu'il n'y en a pas d'argent? Puis comment ça se fait qu'on a découvert qu'il y en avait plein qui avait été dépensé ailleurs et qui ne donnait rien?

Je n'ai pas eu de réponse à ça, mais j'en veux, des réponses. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Regardez, je vais vous en donner un élément de réponse pour vous montrer comment c'est plus complexe que vous ne semblez le croire. Vous avez affirmé, dans votre mémoire, que les corporations fournissent 1,4 % de l'ensemble des recettes gouvernementales au Québec. Si vous prenez les comptes publics pour l'année 1988-1989, vous y lirez que l'impôt sur le revenu des corporations a rapporté 5,3 % de l'ensemble des revenus du gouvernement et 6,7 % de l'ensemble des recettes autonomes.

Mme Côté: Si on considère le fédéral, oui. Moi, je parlais juste des impôts au niveau provincial.

M. Ryan: C'est seulement au niveau provincial, ici, madame. Ça, c'est pour montrer... On peut dire ce qu'on veut. On peut partir, se promener pendant trois mois de temps avec 1,8 %. C'est seulement qu'une différence de trois fois. Ce n'est pas grave pour vous autres; pour nous autres, ça compte beaucoup. Et c'est pour ça qu'on ne peut pas se lancer. Moi, je ne peux pas me substituer au ministre des Finances, ici, et commencer à vous donner des réponses élaborées. J'épouse la politique du gouvernement, autrement, je n'en ferais point partie.

Et, là, nous sommes ici pour discuter un projet de loi précis. Si vous voulez prendre le temps de la rencontre pour discuter... Il y avait un autre cas. Je vais donner deux minutes de mon temps à mon collègue de Lafontaine, parce que vous avez cité le cas de l'entreprise dans l'est Montréal. Il va vous dire ce qui est arrivé exactement. On pourrait les prendre un après l'autre, mais, pendant ce temps, on ne parlerait pas de l'aide financière aux étudiants. Moi, ça ne me fait rien. C'est vous qui êtes maîtresse de l'agenda ce matin, pas moi. Mais, moi, je vais partir après. Je vais dire: Elle m'a parlé de l'affaire dans l'est de Montréal, elle m'a parlé des taxes des compagnies, de ceci puis de ça, mais on n'a pas eu le temps de parler de l'aide financière aux étudiants; on en parlera demain.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député de Lafontaine. On a une minute à peine.

M. Gobé: Oui, merci, M. le ministre. En effet, mademoiselle, vous avez mentionné dans votre mémoire que les subventions aux entreprises étaient dispensées bien souvent à tort et avec peu d'effets. Vous avez nommé en particulier Pétromont. Tout le monde le sait, Pétromont est dans l'est de Montréal, ça fait partie d'un complexe chimique très important dans l'est de Montréal. Et la subvention dont vous parlez était de 40 000 000 $. En effet, disons qu'il y a eu un autre ajout par la suite. Si ça n'avait été fait, on aurait assisté à la fermeture d'Union Carbide et la non-implantation d'une usine comme Himont, ça fait qu'on parle de 800 à 900 employés. On parle aussi de la non-venue, dans l'est de Montréal, de Soligaz parce

que Sollgaz fait partie de ce complexe pétrochimique aussi. Alors, je pense que les 40 000 000 $ étaient très bien investis.

Il y a eu des retombées très importantes parce que maintenant, l'usine Himont, qui est une usine qui fait du polypropylene, fabrique pour 800 000 000 $ de polypropylene par année, qui est exporté aux États-Unis. Alors, voyez-vous, ces 40 000 000 $, qu'on tienne compte des revenus et des taxes qui peuvent être payées et par les employés et par la plus-value de la production qui est exportée, juste pour Himont Canada, ils étaient remboursés de plusieurs fois peut-être de cette manière-là.

Maintenant, il y avait l'éolienne dont vous parliez aussi.

La Présidente (Mme Hovington): Ça, je m'en occupe, M. le député de Lafontaine. Je vais...

M. Gobé: L'éolienne, madame peut en parier, oui.

La Présidente (Mme Hovington): ...faire la mise au point tout à l'heure...

M. Gobé: Mais j'avais une petite idée là-dessus aussi.

La Présidente (Mme Hovington): ...parce que notre temps est écoulé.

M. Gobé: Je pense qu'il faut faire attention quand on énonce des faits comme ça, un peu à la légère, de voir que ça n'a pas des implications importantes sur les gens et sur l'économie en général. Je crois que vous avez peut-être raison dans certains cas, qu'il y a des subventions qui peuvent être, à l'occasion, moins rentables que d'autres, et c'est important pour le gouvernement de s'en assurer et de faire en sorte de les couper. Mais, dans le cas de Pétromont, en particulier, je crois que vous n'étiez pas tout à fait dans la bonne ligne. On comprend que, à l'occasion, vous pouvez avoir manqué d'information.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le député de Lafontaine. Mme Côté?

Mme Côté: C'est ça. Je voulais dire aussi qu'il y a certains exemples, en tout cas l'éolienne de Lavalin et tout ça, ça, c'est une partie. Il y a tout l'aspect aussi de la question des évasions fiscales, des dépenses fiscales, c'est aussi le débat. Sauf que là, je ne veux pas rembarquer dans ce débat-là aujourd'hui. Tout ce que je veux dire, c'est que ça ne nous satisfait pas, la réponse absolue du gouvernement qui dit: Je suis bien d'accord avec toutes vos affaires, mais je n'ai pas d'argent. On ne se contente pas de ça parce que sinon ce serait bien clair qu'on n'aurait plus rien à faire ici, d'abord. Parce qu'on peut bien en discuter des principes, puis on peut bien s'entendre, mais ça donne quoi si on donne tout le temps la même foutue réponse? Qu'est-ce qu'on fait ici? C'était juste pour dire ça, c'est qu'il y a des solutions à regarder, surtout aussi, au niveau des évasions fiscales et pas juste au niveau des subventions. Mais là-dessus...

M. Gobé: Je suis bien d'accord avec vous là-dessus.

Mme Côté: ...il y a tellement de programmes qu'on pourrait en parler toute la journée. Même au ministère des Finances, on est incapable de nous dire combien ça représente en montant global parce qu'il y en a trop.

M. Gobé: Non, mais je suis bien d'accord avec vous là-dessus, mais je crois que lorsqu'on nomme des exemples, qu'on les met dans un mémoire, qu'on met ça devant la presse, qu'on met ça devant tout le monde, je crois qu'on doit avoir une certaine rigueur et avoir des faits exacts et ne pas véhiculer des fausses impressions, parce que ça nuit à la qualité du débat. Je pense qu'actuellement il est très bon. Vous avez d'excellents arguments dans votre mémoire, sauf que lorsque vous dites qu'il y a des choses comme les subventions aux entreprises qui sont mal utilisées, bien nommez-en des cas raisonnables et précis et on va vous écouter.

La Présidente (Mme Hovington): On vous remercie M. le député de Lafontaine.

Mme Côté: Ils ne veulent pas m'en donner au ministère.

La Présidente (Mme Hovington): Juste une petite mise au point pour l'éolienne parce que ça me touche de très près, Mme Côte, c'est dans mon comté, cette éolienne dont vous pariez. Elle a été achetée en fait par Lavalin d'Hydro-Québec et elle est située à Cap Chat, qui est le village, le deuxième village au Canada où la population est la plus âgée. La moyenne d'âge est de 55 ans. Avec l'éolienne, il y a une nouvelle technologie, c'étaient plutôt des investissements au niveau de la recherche et de la technologie qui se sont développés. Il me fait plaisir de vous dire que les Allemands ont acheté cette année cette technologie et qu'il y a donc une possibilité d'une construction d'une deuxième éolienne à axe vertical plus petit, si vous voulez, donc, création d'emplois à Cap Chat, et surtout, il y a de jeunes cerveaux, comme vous, qui ont été obligés de s'exiler de la Gaspésie vers les grands centres, qui sont revenus à Cap Chat, dû aux recherches et à la nouvelle technologie que cette éolienne a développées au niveau du village de Cap Chat et au niveau de la Gaspésie. Il y a un attrait touristique extrêmement important

aussi, où on a la rétention des touristes l'été. Je vous invite à venir la visiter, c'est extraordinaire.

Cela dit, je vais passer la parole à l'Opposition maintenant, au porte-parole de l'Opposition, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: J'aimerais d'abord, comme premier commentaire, mentionner que j'espère que mes propos n'auront pas la même conséquence que ceux du ministre de l'Éducation tantôt, qui en forçant la vérité, a fait déclencher l'avertisseur d'ondes qui se brouille quand c'est un peu trop fort.

Des voix: Ha, ha, ha!

(11 h 30)

M. Gendron: Deuxième commentaire, je ne me permettrais pas, comme il le fait toujours et si bien, de vous faire une petite leçon sur ce que vous devriez dire et pas. En ce qui me concerne, je pense que le Parlement doit prendre racine dans la société québécoise et si les étudiants ne font pas partie de cette évolution des mentalités et de la société québécoise, moi, j'aurais de sérieux problèmes à fonctionner ici. J'ai l'impression que toutes les questions concernant l'avenir de la société vous concernent. Je ne commencerai pas à dire des choses qui devraient être discutées juste entre nous, ici au Parlement, et dire qu'il y a des choses qui ne vous regardent pas. Je pense que vous avez raison de vous exprimer sur à peu près tout ce qui vous intéresse comme futurs décideurs et décideuses de l'avenir et, en passant, moi je serais très déçu si jamais le dégel des frais de scolarité avait comme conséquence de vous faire abandonner les études, parce que j'ai l'impression que la société de demain a besoin de jeunes leaders comme vous, autant M. Paquet que Mme Côté.

Sur le fond des choses, au-delà des chiffres, parce que M. le ministre de l'Éducation aime bien ça vous amener dans ses créneaux qu'il a eu le temps de faire fouiller par ses fonctionnaires. Ils sont tous de valeureuse compétence et ils sont toujours intéressés de donner suite aux commandes du ministre de l'Éducation pour faire la preuve de l'idéologie qu'il veut développer, mais une chose qui est sûre - et ça regarde peut-être le débat beaucoup plus large et je pense que vous l'avez très bien situé - c'est que, essentiellement, votre mémoire est d'abord très bien étoffé, très articulé, fouillé et on sent que ce sont des questions que vous êtes habitués de traiter et beaucoup plus en connaissance de cause qu'on pourrait le laisser voir.

Donc, je pense que vous avez un excellent mémoire. Contrairement encore à ce que le ministre a dit, ce n'est pas parce que vous avez posé une question ou deux, que vous n'avez pas eu de réponse satisfaisante, que vous n'avez pas parlé du sujet de discussion qui est le dégel des frais de scolarité. Il a juste à lire le mémoire: Vous en pariez pendant 70 pages avec des solutions intéressantes à être regardées.

Sur les deux questions majeures et c'est ça qui est le drame, en tout cas, à ce jour, de cette commission, c'est rare qu'on reste collé aux deux questions fondamentales. La première, est-ce que le dégel des frais de scolarité va régler le sous-financement des universités du Québec? Ça, on doit parler de ça. La réponse, vous l'avez dit clairement, et la réponse du gouvernement on ne l'a jamais eue là-dessus. C'est-à-dire qu'on l'a eue très clairement à cause du gouvernement fédéral, du budget du fédéral: On va avoir des problèmes, puis on ne sera pas capable d'en mettre plus, puis notre effort est fait. Donc, il nous répond que ce n'est pas en dégelant les frais de scolarité qu'on va régler le sous-financement universitaire, puisque tout le monde a convenu, dans les années qui ont précédé la tenue de cette commission, que le sous-financement des universités est n'importe quoi alentour de 160 000 000 $. Au net, on va en donner 40 000 000 $ pour la première année. Donc, on n'aura rien réglé du sous-financement, mais c'est évident qu'on aura posé au moins des points d'interrogation sur deux questions majeures. Est-ce que, oui ou non, il y aura une conséquence au dégel, certains abandons, puis est-ce que dans une société comme la nôtre, c'est d'ouvrir un brèche majeure dans un régime qui a fait ses preuves? La réponse, c'est évident que c'est oui. Moi, ce ne sont pas les chiffres, ce n'est pas Lemelin, puis ce n'est pas Untel...

À la page 11 de votre mémoire, quand vous rappelez au ministre... C'est le ministre de l'Éducation qui dit constamment: Écoutez, vous me citez mal. Quand même j'aurais dit ça, 5 %, c'est par honnêteté, c'est par très grande franchise. Vous me connaissez comment je suis ouvert et franc. Alors, oui, j'ai dit ça par très grande humilité. Là, on a tous des doutes à le croire, mais il a quand même dit ça. Ce n'est pas là-dessus que j'accroche, c'est que dans sa déclaration de dégel - et vous l'avez bien cité, Mme Côté et M. Paquet - il a affirmé haut et fort, et là je pense qu'il avait raison: On ne peut pas pratiquer pendant 25 ans une politique qui a des effets majeurs sur une accessibilité accrue, y mettre fin et penser que ça n'aura pas de conséquences. J'appelle ça parler des deux côtés de la bouche. Je l'ai dit: II faut avoir une infirmité physique pour faire ça. On ne peut pas faire ça en même temps et on ne peut pas dire d'une main: Pendant 25 ans il n'y a pas eu de problèmes. On arrête ça, puis on est convaincus qu'il n'y en aura pas. Je prétends que, oui, on peut avoir des doutes. Et ce n'est pas le chiffre qui m'intéresse; ce n'est pas la préoccupation de la fourchette 0, 2, beaucoup, peu, passionnément, c'est de mettre fin à quelque chose qui était justifié dans notre société, parce que vous l'avez encore bien prouvé: Est-ce qu'on a un niveau de

diplomatics inférieur à ce qui se passe ailleurs? La réponse, c'est oui. Vous le savez. Le ministre le sait. Est-ce qu'on a trop d'étudiants à temps partiel?

Je suis content qu'il y ait des étudiants à l'université, mais on a un problème. Je rencontre des institutions universitaires, puis elles me disent: Toutes proportions gardées, ce n'est pas correct qu'il y ait tant d'étudiants comme ça dans notre société qui choisissent le temps partiel plutôt que le temps plein. Il y a des raisons, vous l'avez exposé. La situation économique des étudiants est l'une des raisons pour lesquelles effectivement il y a plusieurs étudiants qui font le choix du certificat plutôt que du baccalauréat, du temps partiel, plutôt que du temps complet. C'est la situation économique; c'est le contexte de l'éclatement des familles; on n'est plus, en 1990, dans une société qui était celle des années 1968-1970 où on a bâti le régime d'aide financière. Et on dirait qu'on ne tient pas compte de ça. On tire une ligne puis on dit: Nous, on est rendus là; on a fait assez d'efforts puis on n'en fera pas plus.

Et, là, sur les finances publiques - je fais juste un aparté - vous avez complètement raison de questionner ça. Je pourrais vous déposer ici même, on appelle ça, je pense, le "transcrlp" de l'enregistrement de nos débats à l'Assemblée nationale. Au moins à trois reprises, leur ministre des Finances a dit, pas tard, il y a un an et demi, deux ans, que l'argent rentrait, l'économie performait; ça allait bien; nous étions dans des années de vaches grasses, 1983, 1984, 1985, 1986, 1987 et 1988. Et c'est vrai que l'économie a performé. Vous avez droit à une part de cette redistribution de la performance de l'économie. Et, surtout qu'encore là, dans votre mémoire, vous la faites très bien, la preuve, Mme Côté et M. Paquet. Est-ce que ces gens-là ont été généreux avec le régime d'aide aux étudiants pendant les dernières années? La réponse, c'est non. Il ne leur a rien coûté. Il ne leur a presque rien coûté. Tout ce qu'ils ont réussi à faire, c'est de nous endetter de 100 000 000 $. Vous l'avez dit et on s'accorde là-dessus parfaitement, pas uniquement pour vous faire plaisir, contrairement à un éditorialiste que j'ai lu. Ce ne sont pas des propos pour faire plaisir à la classe étudiante. Ce sont les chiffres puis ça le confirme, 26 000 000 $ d'endettement par année de plus que sous notre régime au niveau du régime des prêts et bourses. C'est ça, la situation réelle: accentuation des prêts, réduction des bourses, donc, par définition - n'importe qui comprend ça - c'est un coût additionnel aux étudiants. Ça, c'est la dure et froide réalité d'aujourd'hui et votre mémoire l'expose très bien.

Donc, là-dessus, moi, toujours pour ne pas perdre les deux objectifs fondamentaux: Est-ce que le dégel va régler le sous-financement de l'université? La réponse, c'est non. Deuxième- ment, est-ce que le fait qu'on dégèle les frais de scolarité, ce sera compensé équitablement par le régime d'aide financière comme on le colporte? Bien sûr que la réponse, c'est non, parce que le ministre l'a dit lui-même. Il me l'a dit en Chambre, comme critique, à trois reprises en avril: M. Gendron, ne pensez pas qu'on va refaire tout notre système; on a un bon système d'aide financière. Puis je ne disconviens pas qu'il y a des bons éléments dans notre système d'aide financière. Mais, en Chambre, le ministre de l'Éducation actuel a affirmé haut et fort qu'il n'était pas question de chambouler puis de vraiment réformer d'une façon majeure le système d'aide financière.

Alors, encore là, on ne peut pas dire deux choses en même temps. Il a raison ou il a tort. S'il a raison qu'il n'a pas chamboulé d'une façon majeure le régime d'aide financière, vous, vous avez raison de dire, parce que j'étais content de voir ça dans votre mémoire: Écoutez, on est d'accord avec 17 des 24 mesures. Moi, je trouve que c'est bien. Là où le ministre se glorifie trop rapidement - parce que vous avez touché le bon point - dans les 17 des 24 recommandations, il peut être bien assis sur son portefeuille et ça ne lui coûte pas cher. Et il le sait très bien. Il sait très bien que dans les 17 des 24, oui, ce sont des bonnes mesures; oui, on les achète; oui, on les endosse; oui, ça va coûter 50 000 000 $ nets. À partir du moment où il en a pris 25 000 000 $ dans ses poches dans les quatre dernières années pour financer la nouvelle mesure; à partir du moment où il va en prendre, quoi, le quart, avec le dégel des frais de scolarité annoncé, il va se payer, par le dégel, une partie du coût de la bonification de son régime.

Alors, moi, je ne peux pas dire que le régime est excessivement généreux, même si vous donnez votre appui à 17 des 24 mesures. Et les deux questions fondamentales demeurent en suspens. Je n'ai pas la conviction qu'en dégelant, on va démocratiser davantage. Je n'ai pas la conviction que ça n'aura pas d'impact puis je ne suis pas capable de lire une compensation significative et majeure de la hausse de l'endettement étudiant par le dégel au niveau du régime d'aide financière, au niveau de la compensation.

Je pourrais aller plus loin dans l'analyse de votre mémoire que j'en fais puis dans les commentaires. Je trouve qu'il résume bien la problématique et vous avez bien posé le problème. Nous, on n'est pas du tout en désaccord avec la plupart de vos orientations, sur le fait que si on veut continuer à mettre l'accès à une priori-sation, à l'éducation, et surtout si on veut finir par comprendre, une fois pour toutes, que l'éducation au Québec doit être un investissement comme société pour prendre les virages, pour s'assurer de cette capacité de former des jeunes qui auront effectivement la formation requise pour relever les défis de l'avenir et surtout quand on a lu là-dessus puis que toutes les

universités se plaignent que leurs instruments support sont déficients... Elles ont plusieurs demandes pertinentes pour vous offrir une meilleure qualité d'enseignement collégial, universitaire de premier cycle, de deuxième cycle et de troisième cycle et ces gens disent, parce que ça fait quatre ou cinq ans qu'on fait des sacrifices, qu'on n'est pas capables de les assumer. Bien, je ne pense pas qu'on va améliorer notre performance dans l'avenir avec une décision comme celle-là.

J'aurais quelques questions à vous poser sur votre mémoire. D'abord, rapidement, je sais que vous n'avez pas les instruments dont dispose le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science mais est-ce que, vous aussi, vous faites une évaluation aussi faramineuse des différentes recommandations que vous avez présentées quant à la bonification du régime, en particulier au chapitre des frais de transport et à l'élargissement de l'assouplissement du statut de l'autonomie?

Moi, je n'ai pas compris que vous vouliez, en aucune façon, qu'on fasse abstraction complète, même si vous le souhaitez, de cette notion d'autonomie. Vous avez parlé d'une notion d'élargissement et d'assouplir le statut d'autonomie. Juste au chapitre de ces deux éléments, frais de transport et statut d'autonomie, selon vos évaluations, c'est quoi les coûts éventuels que ça coûterait de plus à l'État?

La Présidente (Mme Hovington): M. Paquet.

M. Paquet: Ce statut d'autonomie, évidemment, là c'est un grand débat. Le gouvernement chiffre ça à 800 000 000 $; d'année en année, ça augmente de 25 %. L'année prochaine, il va nous dire 1 000 000 000 $. Donc, sur le statut d'autonomie, c'est que l'hypothèse de base du gouvernement, c'est que si on accorde l'autonomie dès le départ de la maison familiale, instantanément, du jour au lendemain, 100 % des étudiants et des étudiantes vont partir en appartement pour l'heureux plaisir - à 75 %, 60 % que vous avez réduit ça, vous êtes pas mal haut - pour le simple plaisir d'aller vivre sous le seuil de la pauvreté, les gens vont partir en appartement. C'est évident qu'à ce moment-là, ça fait une évaluation absolument incroyablement élevée.

Évidemment, c'est toujours difficile de le chiffrer parce que ce qu'on remarque, c'est que le problème concernant le statut d'autonomie, c'est que les restrictions qui sont là font en sorte qu'il y a beaucoup de gens qui ne sont pas aux études, qui n'y sont plus, parce que ces gens-là qui sont en appartement, mais qui n'ont pas droit aux prêts et bourses, ils n'étudient pas parce qu'ils n'ont aucun revenu. Alors là, c'est d'évaluer combien de gens vont revenir aux études si on reconnaît, dans les faits, que ces personnes sont autonomes parce qu'elles ne résident pas chez leurs parents. C'est de ià que vient toute la difficulté de quantifier cette mesure. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il nous apparaît qu'il n'y aura pas de phénomène d'abus comme le ministère, des fois, tente de nous en convaincre. On ne prévoit pas qu'avec une mesure comme ça les gens vont partir de chez leurs parents pour le simple plaisir d'aller vivre sous le seuil de la pauvreté et de s'endetter avec des prêts et bourses.

Même ce qu'on remarque, c'est qu'une proportion non négligeable de personnes autonomes et qui résident chez leurs parents, ça existe, dans le régime, des autonomes résidents. C'est donc la démonstration que même s'il y a des gens autonomes qui sont bien chez leurs parents ou qui peuvent matériellement y rester, ils y restent. Donc, c'est difficile à quantifier, mais il nous apparaît, effectivement, que l'évaluation est très exagérée. Ça sert juste d'épouvantail pour dire: On ne peut pas accorder ça.

Sur les transports, parlez-vous de notre revendication ou de la coupure?

M. Gendron: Non, de votre revendication.

M. Paquet: Là aussi, c'est toujours difficile à quantifier parce qu'on ne connaît pas combien d'étudiantes et d'étudiants exactement doivent quitter leur région et aller étudier à l'extérieur. Sauf que ce qui est évident, si on prend quelques exemples, entre autres, les gens des Îles-de-la-Madeleine qui ont un tout petit campus qui offre très peu de programmes; bien ces gens-là, quand ils doivent déménager pour aller étudier - je ne sais pas moi - à Rimouski ou plus loin, à Québec ou à Montréal, bien ce sont des frais énormes de transport et de déménagement que cela exige et le régime ne considère absolument aucunement ce transport, sauf pour l'atterrissage jusqu'à Gaspé. Donc ça, ça représente des centaines de dollars que ces étudiantes et ces étudiants n'ont pas et qu'ils devraient avoir.

M. Gendron: Deuxième question. Vous avez évoqué, dans votre mémoire, une forme de partenariat gouvernement-entreprises. Moi, aujourd'hui, même si j'ai bien pris connaissance de votre suggestion de revoir l'ensemble de la fiscalité de l'État québécois pour réduire les exemptions fiscales, personnellement je ne dis pas qu'il n'y a pas de quoi regarder là, mais ce n'est pas tellement la voie que je choisirais. Puisque c'est vous qui êtes ici, la question que je vous pose est la suivante: Est-ce que vous avez évalué assez sérieusement un impôt postuniversitaire après vos études, envisagé que la forme de partenariat serait plutôt État-entreprises et les étudiants concernés, mais après les études, puisque de toute façon il y a une bonne logique de le faire après si on est d'accord pour dire que massivement une société qui dépense plus dans des services aux étudiants et à son réseau universitaire fait là véritablement un

investissement? Est-ce que vous avez un point de vue là-dessus? (11 h 45)

Mme Côté: C'est-à-dire que de favoriser cette solution-là, ça serait contradictoire avec ce qu'on présente. On vient juste de dénoncer la descente en flèche de la part de l'impôt des entreprises et de dénoncer également la montée en flèche de la part des particuliers dans l'imposition. On sait aussi par l'étude de Clément Lemelin qui était axée strictement là-dessus, qui a d'ailleurs fait ça conjointement avec deux autres économistes reconnus, que déjà, le surplus d'impôt correspondant au plus de revenus, que les universitaires paient sert déjà largement - Jean-Pierre en a parlé tantôt - à rembourser ce que l'État investit dans l'éducation. Donc, on se dit: Pourquoi parler d'un impôt postuniversitaire supplémentaire, alors que déjà, en tout cas, au niveau de la fiscalité pour la majorité des universitaires, c'est largement suffisant pour rembourser? Quant aux diplômés, par exemple, qui bénéficieraient de très hauts revenus et qui, dans le régime fiscal actuel, bénéficient d'évasion fiscale, donc, paient une part moindre que les revenus, par exemple, se situant entre 20 000 $ et 40 000 $ par année, la solution n'est pas dans un impôt postuniversitaire ou dans un minirégime fiscal pour chacun des services de l'État, mais beaucoup plus dans une évaluation plus progressive du système fiscal et dans une part des revenus de l'État qui viendrait autant des très hauts revenus que des moyens. Donc, c'est comme ça qu'on évalue la question et puis, on se dit: Bon, un mini-régime fiscal pour chaque service de l'État, est-ce qu'on va instaurer un impôt postopératoire pour les gens qui ont des chirurgies cardiaques dans les hôpitaux ou... Ça n'a plus de fin, un impôt "post-ci" un impôt "post-ça". On dit que c'est beaucoup plus rentable d'avoir un système fiscal qui a du bon sens et qui est équitable pour offrir des services à la population, qui ont du bon sens et qui sont équitables, peu Importe leur origine sociale. Et j'aimerais terminer en disant, en tout cas... Je ne sais pas combien de temps il reste à peu près.

M. Gendron: De toute façon, vous êtes dans le temps de l'Opposition et je vous en prête.

Mme Côté: J'aimerais terminer en disant que ce pourquoi on est ici aujourd'hui, c'est bien évidemment pour parler de la question d'une véritable politique de démocratisation de l'éducation. On pense que c'est un besoin au Québec. Il y a toutes sortes de problèmes dans le système d'éducation qui nécessitent un examen large, un examen approfondi, un examen intelligent aussi dans l'objectif de démocratiser l'accès à l'éducation. Et on n'accepte pas qu'un gouvernement tente de justifier d'une quelconque façon que ce soit un dégel des frais de scolarité universitaire qui, lui, va avoir un impact sur l'accessibilité et qui, lui, remet automatiquement en question la démocratisation de l'éducation. Et j'aimerais terminer en citant M. Lemelin encore une fois, qui pourtant est favorable à un certain dégel, mais qui admet "qu'on peut, par ailleurs, à l'aide des études nord-américaines sur le sujet, esquisser quelques caractéristiques de ceux qui seront davantage portés à se désister face au dégel. Ils sont plus âgés que la moyenne, issus d'un milieu moins favorisé, ont accès à moins de ressources personnelles, sont inscrits à temps partiel dans des programmes de cycle court, ou dans des filières moins prestigieuses et surtout sont moins convaincus de la pertinence de leurs études. Nous ne croyons pas que les facultés de médecine se vident." Ça, c'est Lemelin qui le dit et nous autres, on le dit aussi. Ce n'est effectivement pas les gens qui ont déjà les moyens, qui sont déjà dans des secteurs d'étude très rentables, mais ce sont surtout ceux et celles qui s'en viennent et ceux et celles qui sont dans des situations précaires en ce moment. Et ça, ce n'est pas juste socialement. Et vous n'allez pas me faire croire que pour 80 000 000 $, vous allez piler sur un droit aussi important que le droit à l'éducation au Québec. C'est tout ce que j'avais à dire.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Côté. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui. J'aurais deux autres questions à Mme Côté ou à M. Paquet. Dans votre mémoire, vous affirmez à un moment donné que la réforme ne compensera aucunement le dégel des frais de scolarité. Moi, je l'ai dit tantôt, c'est pas mal notre avis aussi qu'elle ne compensera pas aucunement... Là, on pourrait discuter. Mais ce qui m'a surpris un peu et je voudrais vérifier ça avec vous, ça signifie, selon vous, qu'il n'y aurait que 28 % des étudiants qui bénéficeraient du régime d'aide financière de prêts et bourses. Question: Si c'est bien ça, 28 %, est-ce que ça inclut tous les inscrits à temps partiel?

M. Paquet: Oui. Alors, c'est ce qu'on dit dans notre mémoire. Tout le monde va la payer, la hausse, et le gouvernement nous propose un régime de temps partiel parce que semble-t-il, eux aussi, il faut les protéger. Alors, quand on regarde temps plein, temps partiel dans les universités avec la réforme, en excluant la mesure pour les temps partiels qui est prévue pour on ne sait quand, il y aurait seulement 22 % des universitaires qui recevraient une aide. Et si on inclut les temps partiel...

M. Gendron: 28 %.

M. Paquet: ...pour faire plaisir à M. Ryan, ça en ferait 5 % de plus. Il y aurait 27 % des

Universitaires qui recevraient des prêts et bourses après la réforme. Alors, donc, ce n'est pas une grosse compensation. Il en reste 70 % qui n'en ont pas.

M. Gendron: Merci. L'autre question, vous avez sans doute pris connaissance que le ministre de l'Éducation a l'intention d'instaurer une espèce de régime d'enquête et d'évaluation, les "boubourses macoutes". Je voudrais savoir si vous avez regardé ça sérieusement et ce que ça vous dit. Avez-vous peur de ça? Est-ce que vous croyez que c'est une bonne formule de copier un régime qui a été discrédité, décrié avec raison, anti-charte des droits, anti à peu près tout ce que c'est? Le ministre l'a appuyé à plusieurs reprises. Il dit: C'est pareil, ça ressemble beaucoup à ce qu'on a instauré au niveau de la modification à la Loi sur l'aide sociale, alors que la Commission des droits de la personne, le Protecteur du citoyen, ont tous dit qu'il y avait des abus là-dedans, que c'était très dangereux d'instaurer un régime policier. Au niveau des régimes de prêts et bourses, on s'apprête à faire la même chose. Est-ce que vous avez regardé ça et quel est votre avis là-dessus?

Mme Côté: On est contre le fait d'instaurer des enquêtes comme celles de l'aide sociale. On s'était opposés aux enquêtes qui nuisaient aux droits et libertés de la personne au niveau de l'aide sociale et on s'oppose à de telles enquêtes au niveau du régime d'aide financière, d'autant plus que c'est instaurer un régime un peu terroriste face aux personnes de dire qu'on va fouiller dans la chambre à coucher des boursiers et des boursières. À ce niveau-là, ce qu'on a eu comme écho du ministère, c'est qu'il n'avait peut-être pas nécessairement l'intention de l'appliquer. On ne sait pas trop, ça reste nébuleux, mais nous allons surveiller ça de très près. Si ce genre d'ouverture pouvait être retiré du projet de loi, en tout cas, c'est ce qu'on demande, que ce genre de mesure soit retiré du projet de loi, d'autant plus qu'il serait beaucoup plus rentable d'investir pour améliorer le régime d'aide financière, d'engager du monde dans les services locaux d'aide financière que d'engager du monde pour faire enquête sur les étudiants et les étudiantes. À salaire-salaire, je pense qu'on a besoin de monde dans les services locaux d'aide financière, on a besoin de monde pour faire de l'information sur le régime d'aide financière. On n'a pas besoin de monde pour aller enquêter dans les appartements du monde.

M. Gendron: Une petite phrase rapidement. Est-ce que vous êtes d'accord, cependant, que le ministre de l'Éducation puisse garder un droit de regard pour un régime de dérogation? Êtes-vous d'accord que ce soit le ministre de l'Éducation qui ait la responsabilité de déroger au régime universel? Puisqu'il en a fait une pratique depuis qu'il est là, est-ce que vous êtes d'accord qu'il maintienne sa pratique courante?

M. Paquet: Non. On est tout à fait opposés à ça, et on l'indique dans le mémoire, parce que s'il y a un changement de ministre et qu'il soit moins gentil que celui qu'on a là, on ne sait pas ce qui va arriver.

M. Gendron: C'est ce que je voulais vous entendre dire. Ils ont confiance en vous.

M. Paquet: Ce qu'on met de l'avant c'est plutôt, comme on l'indique clairement dans le mémoire, un comité de dérogation dont la décision est finale et qui n'a en rien à soumettre cette décision au ministre... De toute façon, s'il commence à faire les enquêtes dans les appartements et qu'en plus il faut qu'il se tape le comité de révision, il n'en finira plus.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Ça m'amuse toujours un peu d'entendre le ministre faire ses comparaisons avec l'Ontario, mais il ne va jamais au bout des comparaisons. Ça ne m'étonne pas, ça ressemble à des demi-vérités lorsqu'il fait ce type de comparaisons. Lorsqu'on parle de la contribution des entreprises, comme vous l'avez fait en Ontario et au Québec, là on ne se compare plus avec l'Ontario. Lorsqu'on parle des droits de scolarité, là il faut se comparer avec l'Ontario. Lorsqu'on parle des écoles privées où 72 % du financement des écoles privées dans tout le Canada, c'est le Québec qui l'accorde, on se dit pourquoi est-ce qu'il ne se compare pas aussi à l'Ontario à ce moment-là? Mais, ce n'est pas la première fois qu'on le voit utiliser les comparaisons ontariennes juste pour appuyer son discours et quand ça fait son affaire.

J'ai pris connaissance de l'avis du Protecteur du citoyen qui est extrêmement sévère à l'endroit du projet de loi et il va jusqu'à dire que dans certains cas, particulièrement au sujet des déclarations erronées, il s'agit de dénis de justice. J'en passe... Juste pour vous voir réagir là-dessus, savoir si vous avez déjà eu des représentations. Et, si on parle de démocratisation de l'éducation, il faudrait peut-être parler de démocratisation dans l'application du régime. Ce n'est pas clair que ça le soit. Le Protecteur du citoyen qui a été saisi de plusieurs plaintes - et ça va en augmentant, il estime qu'il va y en avoir 47 % de plus cette année - a une bonne connaissance du régime d'aide financière des étudiants et il s'appuie là-dessus pour donner un avis au ministre. Il dit une première chose: Le projet de loi fait trop appel au pouvoir réglementaire. Il nous avait tellement rebattu les oreilles du temps du gouvernement du Parti

québécois en disant: Vous avez trop de règlements, nous autres, on n'en aura plus de règlement. Il n'y en a jamais eu autant, surtout avec le ministre de l'Enseignement supérieur, parce qu'il adore ça, le discrétionnaire. Alors, ce que le Protecteur du citoyen dit: Les pouvoirs réglementaires définis sont encore, à mon avis, beaucoup trop étendus. Il dit: Le rôle des parlementaires, c'est non seulement d'adopter des grands principes, mais c'est aussi d'adopter des paramètres qui doivent encadrer les règlements. Et le Protecteur du citoyen dit: Ça n'est pas dans le régime. Le Protecteur du citoyen dit: J'ai été également surpris de ne retrouver au projet de loi aucun mécanisme indépendant de révision, de réexamen des décisions.

C'est une gang de personnes qui sont nommées par le ministre et qui doivent se défendre, évidemment, pas tout à fait avec les mêmes moyens. Il s'agit ici, dit le Protecteur du citoyen, l'accès au régime d'aide financière, d'un droit et non d'un privilège et, tel que c'est traité, tel que c'est présenté dans le régime, il estime que ça ressemble davantage à un privilège, tant sont grands les pouvoirs discrétionnaires du ministre. Il dit: À cause des tracasseries administratives, j'ai souvent vu des étudiants abandonner leurs études devant un refus du ministère. Et il ajoute: Le projet de loi, en matière de déclarations erronnées par l'étudiant, établit un régime purement arbitraire, et il parle de déni de justice.

Est-ce que vous avez abordé cet aspect des questions? D'abord, trop de pouvoir, puis là, on adopte un régime d'aide financière, on n'a pas les règlements, on ne sait pas ce qu'il va contenir sur toutes sortes de questions, y compris la définition de résidence, la définition de handicap, un certain nombre de questions de cette nature?

M. Paquet: Oui, on n'en parle pas directement dans le mémoire, mais ça fait plusieurs années que, dans nos représentations, on indique que, effectivement, la loi est trop maigre et que la réglementation aussi est trop maigre, parce que beaucoup de choses sont décidées par des normes administratives qui ne sont même pas inscrites dans la réglementation. Juste un exemple, la réglementation actuelle dit que pour être reconnu autonome des parents, il faut avoir été sur le marché du travail pendant deux ans. Mais c'est quoi, ça, le marché du travail? Ce n'est ni dans la loi ni dans la réglementation. Alors, ça peut varier à la discrétion de n'importe qui, ce qui fait en sorte que, supposons qu'il y a une dose, là, on a été un petit peu sur le marché du travail, un petit peu à l'aide sociale et un petit peu au chômage... Alors, ça, ce n'est inscrit nulle part, et pourtant c'est un élément fondamental de notre régime.

Au niveau des révisions, également, notre revendication est à l'effet d'instaurer un comité d'appel sur le modèle des tribunaux administratifs pour justement assurer une indépendance à cette structure d'appel-là, pour ne pas que ça revienne entre les mains du ministre, parce que finalement ça ne fait que faire une révision dans les mêmes cadres que ceux dans lesquels la demande initiale a été étudiée. Alors, donc, si on regarde le modèle de l'aide sociale ou de l'assuran-ce-chômage où il y a des tribunaux administratifs, nous, c'est beaucoup plus là-dessus qu'on pousse et c'est ce vers quoi on veut aller, et qu'on demande... Ça, ça fait plusieurs années qu'on le dit, il y a trop d'arbitraire dans ce régime-là, les règles ne sont pas assez indiquées et, au bout de la ligne, les étudiantes et les étudiants ne connaissent pas du tout le régime. Il n'y a aucun effort de fait pour informer les gens sur la façon dont ça fonctionne, ce qui fait en sorte qu'il y a beaucoup de gens qui sont lésés de centaines de dollars et ça fait des millions de dollars.

Et, je termine là-dessus, il y a des responsables locaux d'aide financière qui font le suivi des demandes de révision et, grâce à eux, il y a des étudiantes et des étudiants qui vont chercher des millions et des millions en demandes de révision pour éviter que les étudiantes et les étudiants ne soient lésés. Alors, c'est important, je pense, de raffermir et de favoriser le rôle de ces responsables locaux d'aide financière et on remarque que la moitié des établissements collégiaux et universitaires n'ont pas de professionnels de l'aide financière, n'ont que des techniciens ou des techniciennes, ou un agent de pastorale qui fait ça à temps partiel, ou encore le DSAE qui fait ça une journée par semaine. C'est tout à fait inacceptable. Il faut valoriser le rôle des responsables locaux pour assurer un support aux étudiantes et aux étudiants pour que les demandes soient bien remplies et que les étudiantes et les étudiants arrêtent de se faire léser de centaines de dollars parce que les règles sont arbitraires.

Mme Blackburn: Sur une autre question, ça va être la dernière, parce que je pense que mon collègue avait... Non, ça va? J'ai essayé d'avoir un peu d'information là-dessus, et les personnes qui sont venues en commission parlementaire ne l'avaient pas. Il y a deux dispositions dans le projet qui veulent ou prétendent vouloir inciter l'étudiant à terminer ses études dans des délais dits normaux. Il y en a une, les 25 % de remise de la dette aux deuxième et troisième cycles - et là, ils sont tous à l'aide financière, aux deuxième et troisième cycles - et l'autre, c'est qu'il n'y a plus d'accès à la bourse, mais seulement au prêt, si vous prolongez indûment vos études. L'impression que ça laisse, au-delà du fait que... Moi, j'estime qu'il faut se poser toutes sortes de questions: Pourquoi restent-ils si longtemps, prennent-ils autant de temps à terminer leurs études et à aller chercher leur

diplôme? C'est toute une gamme de raisons qui ont peu à voir avec le fait qu'ils ont des prêts et bourses. Mais l'impression désagréable que ça laisse, c'est que seuls les étudiants bénéficiaires de l'aide financière seraient ceux qui restent plus longtemps que nécessaire à l'université. À votre connaissance, est-ce que c'est exact ou est-ce qu'on est en train de jeter du discrédit sur tous ceux et celles, un peu comme on l'a fait avec les assistés sociaux, qui sont bénéficiaires des prêts et bourses?

Mme Côté: Quand on parlait tantôt de véritable politique, justement, qui tient compte de la réalité et qui va dans le sens de régler les problèmes d'accessibilité déjà existants, non seulement au niveau économique, mais aussi au niveau de l'allongement des études et tout ça, ce qui est proposé par le ministre Ryan va exactement dans le sens qu'on parle. Le projet de loi va exactement dans le sens contraire. On ne s'oppose pas à la réduction de l'endettement, mais on s'oppose à une catégorisation de certains étudiants ou certaines étudiantes. Ce que ça veut dire pour nous cette mesure-là, c'est, autrement dit: Les gens qui ne finissent pas dans les délais normaux, tant pis pour vous, c'est votre faute, et ceux et celles qui finissent dans les délais normaux, on vous récompense, alors que la réalité, elle est tout autre, de la même façon pour la période d'admissibilité à la bourse. Ce qu'on remarque aujourd'hui au Québec, c'est que la tendance, entre autres, pour ce qui est de l'allongement des études, c'est souvent une réorientation ou souvent une charge de travail ou une charge familiale qui fait que certains cours vont être échoués ou certains cours vont être abandonnés pour un allongement des études. Ce phénomène-là s'agrandit année après année. Ce qu'on remarque, en tout cas, c'est que ce que le ministre propose, c'est de dire finalement aux gens qui allongent leurs études: C'est votre faute, vous aviez juste à terminer à temps, alors qu'on sait très bien qu'à l'heure où on se parle, aujourd'hui, déjà le phénomène d'endettement qui correspond à des milliers de dollars par année est déjà un incitatif plus que suffisant pour dire aux gens: Écoutez, il faut sortir vite. Personne n'a intérêt à traîner quand on s'endette. C'est tout à fait ridicule de dire aux gens qui prennent plus de temps: Voilà, c'est de votre faute et on vous coupe. Ça n'a pas de logique pour nous.

Mme Blackburn: Mais l'impression que laisse le document est plus grave, à mon avis, parce qu'elle discrédite les bénéficiaires en prétendant qu'ils seraient les seuls qui prolongent indûment leurs études. Vous savez, on fait, à cet égard, le même jugement que l'on fait sur les assistés sociaux: Ceux qui bénéficient de l'aide financière ont tendance à se traîner les pieds, ce qui ne serait pas le fait des autres, sous-entendu. Est- ce que, à votre connaissance, les étudiants qui ne bénéficient pas du régime terminent plus rapidement leurs études?

Mme Côté: Non, pas du tout. Mme Blackburn: Bon.

Mme Côté: Comme on le disait tantôt, ça toucherait 4 % des bénéficiaires, cette mesure-là, et dans ces 4 %, il y a une forte proportion de gens avec des charges familiales, de gens avec des réorientations. Il reste peut-être 0, 5 % - je ne sais pas combien, c'est difficile à quantifier - de gens qui, effectivement, s'amusent, mais même à ça, je veux dire, ils ne s'amusent pas, ils s'endettent. Il n'y a personne qui veut rester plus longtemps à l'école pour sortir avec 15 000 $ de dettes au lieu de sortir avec 8000 $.

Mme Blackburn: C'est ça.

La Présidente (Mme Hovington): Merci.

Mme Côté: D'autant plus, aussi, que le phénomène de réorientation au niveau de l'université et même au niveau collégial aussi se vit de plus en plus parce que ce qu'on remarque, la tendance dans le système d'éducation, c'est qu'on demande aux jeunes de plus en plus jeunes...

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, s'il vous plaît!

Mme Côté:... de choisir la branche qu'ils vont étudier et ce, en contrepartie d'une réduction de la période d'admissibilité et d'une impossibilité de se réorienter. Ça veut dire que c'est à 14 ou 15 ans qu'il faut faire nos choix et qu'on ne peut plus changer d'idée à 17 ans, 18 ans, 19 ans, 20 ans et c'est inconcevable, non plus.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, le temps est écoulé maintenant pour la période des échanges. Est-ce que vous voulez prendre une minute pour conclure, M. le député d'Abitibi-Ouest?

M. Gendron: Très rapidement. Encore une fois, je veux remercier l'ANEEQ pour l'excellente qualité de son mémoire et j'ose espérer que le ministre... Puisque vous n'étiez pas ici hier, il avait indiqué d'une façon assez claire qu'il était dans de bonnes dispositions pour tenir compte de certaines recommandations qui seraient faites par les concernés. J'estime que vous faites certaines recommandations spécifiquement, au-delà des grands principes que je partage, sur le régime d'aide financière qui devraient être prises en compte, en particulier, en ce qui me concerne, pour ce qui est de l'élargissement de la notion d'autonomie, qui est une notion importante

compte tenu du contexte social dans lequel on évolue et, deuxièmement, de grâce, ne pas abolir la subvention, les frais de transport, parce que ça a des conséquences graves pour les étudiants dans les universités dites des régions périphériques.

La Présidente (Mme Hovington): M le ministre, en conclusion.

M. Ryan: Je remercie les porte-parole de l'ANEEQ de la présentation qu'ils ont faite ce matin. Il y a des questions qui sont au-delà d'une possibilité d'accord dans l'immédiat. Je pense que toutes les questions qui entraîneraient, si on les appliquait, des dépenses de centaines de millions de dollars additionnels ne peuvent pas être considérées, non pas parce qu'elles ne sont pas bonnes en soi mais parce que le gouvernement n'a tout simplement pas les ressources pour le faire. Et il faut le rappeler avec franchise et réalisme, sans aucune âpreté. Il y a plusieurs représentations qui méritent d'être examinées de près. Je suis très heureux de constater que l'ANEEQ donne son appui, au moins en principe, à 17 sur 24 des mesures qui sont instituées...

Mme Côté: C'est à nous autres, ces revendications-là. C'est nous autres qui vous les avons... Ça fait quinze ans qu'elles sont dans nos revendications. On ne vous appuie pas, c'est nous autres qui les avons mises de l'avant.

M. Ryan: Vous nous mettez dans une position impossible: si on fait quelque chose de bien, vous dites que ça vient de vous autres; si on ne fait pas ce que vous voulez, vous dites qu'on est de gros méchants.

Écoutez, on vous donne volontiers la maternité partielle...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: ...pas de problème là-dedans, nous ne sommes pas jaloux. Mais je suis content de voir qu'il y a une possibilité de collaboration autour de ces 17 mesures. On va essayer de regarder de très près les choses que vous proposez et, dans la mesure, encore une fois, que ce sera compatible avec les ressources que le gouvernement met à notre disposition pour ce programme, nous le ferons volontiers. Je signale encore une fois, en terminant - c'est un fait que je n'ai pas rappelé ce matin avec toute la clarté voulue - qu'entre 1986 et 1989, période où le Parti libéral était au pouvoir au Québec, la part - vous l'avez souligné tantôt, M. Paquet - de l'aide financière qui est allée sous forme de prêts a augmenté. Le volume général de l'aide est demeuré à peu près stable. J'ai donné les chiffres hier. Sur les chiffres, on n'aura pas de discussions, je pense que ça va de soi. Mais pendant le même temps, le nombre des étudiants à temps complet dans nos universités a augmenté de 24 %; ça, c'est intéressant. C'est intéressant et je pense que ça montre que... On nous avait dit, dans le temps: - et le député de Verdun... ce matin - Quand on a à ajuster des frais de contribution pour matériel didactique, matériel d'études... on avait dit: Ça, ça va avoir des effets terribles sur la fréquentation scolaire. L'ajustement a été fait. Il n'y a pas eu d'effet sur la fréquentation scolaire. Il ne faut pas oublier une chose, je ne connais pas tous les noms des grandes vedettes, mais elles viennent à Montréal, au Stade olympique, les billets sont 40 $. C'est rempli, il y a 50 000 jeunes qui sont là. C'est rempli et ces billets-là ne sont pas achetés à crédit, ils sont achetés comptant. Je pense qu'il faut établir un équilibre. Et quand il y a quelques piastres de plus qui sont demandées pour les études, je pense qu'ils comprennent très bien, les jeunes d'aujourd'hui. Ça vaut la peine d'investir là. Ça, M. le député d'Abitibi-Ouest sera d'accord avec vous: quand le jeune met un petit peu plus d'argent dans ses études, c'est un très bel investissement pour son avenir aussi.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre.

Mme Côté: Les dépenses personnelles qui vont aux loisirs et à la santé pour les étudiants et les étudiantes, pas plus.

La Présidente (Mme Hovington): Je m'excuse, c'est tout le temps dont on disposait pour l'ANEEQ. Alors, au nom des membres de cette commission de l'éducation, je remercie l'ANEEQ de la présentation de son mémoire.

Nous allons suspendre une minute pour permettre à un autre groupe - je l'y invite maintenant, d'ailleurs - de venir s'asseoir, la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec.

(Suspension de la séance à 12 h 7)

(Reprise à 12 h 13)

La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais aux membres de la commission de prendre place. Nous allons commencer les travaux. Alors, la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec, représentée par M. Cédrick Pautel, porte-parole de la FEEQ; M. Nicolas Plourde, secrétaire général de la FAECUM, c'est un jargon; M. Daniel Moisan, porte-parole adjoint de la FEEQ; M. Raymond Boisvert, président de la CADEUL; et M. Santo Mana, président de la SSMU, Student's Society of McGill University.

Alors, veuillez prendre place. Si vous voulez bien commencer la présentation de votre mémoire, vous avez 30 minutes pour la présentation de votre mémoire, le temps étant divisé en un tiers, un tiers, un tiers. Merci.

Fédération des étudiantes et étudiants du Québec

M. Pautel (Cédrick): Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, mesdames et messieurs, membres de cette commission, il nous fait plaisir, au nom des 110 000 étudiants et étudiantes que la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec représente, de prendre part à l'important travail de réflexion que vous menez, en ce moment, sur l'accessibilité aux études universitaires. Car, si c'est dans cette juste optique qu'a été mis sur pied le régime d'aide financière aux étudiants, c'est dans une optique similaire que vous devez, aujourd'hui, y apporter les réformes nécessaires, afin qu'il continue de traduire adéquatement notre volonté de ne voir aucune barrière entraver l'accès au savoir universitaire et surtout pas des barrières aussi pernicieuses que celles qui sont constituées par les problèmes financiers des individus.

Partageant votre objectif, donc, de voir toujours davantage de jeunes Québécoises et Québécois accéder et acquérir un ou plutôt des diplômes universitaires, les associations étudiantes membres de la Fédération, ainsi que l'Association générale des étudiants de l'Université du Québec à Trois-Rivières et celle de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, qui se joignent à elles, ont choisi, tout au cours de la période de réflexion qui a mené à la rédaction du mémoire que nous vous présentons aujourd'hui, ont choisi délibérément le parti du réalisme. C'est donc dans un esprit de réalisme que nous aborderons le projet de loi 25, à travers ce que nous avons appelé "les cinq réalités vécues par les étudiants qui bénéficient de ce régime". C'est également dans un esprit de réalisme que nous vous présentons aujourd'hui un nouveau partenariat social qui ne porte pas atteinte à l'accessibilité et qui constitue notre réponse à la hausse des frais de scolarité.

Ce qui nous préoccupe surtout, c'est d'apporter à la fois une réponse adéquate aux problèmes financiers des universités, mais toujours de conserver l'accessibilité aux études universitaires car, en somme, nous ne saurions favoriser une université de qualité qui ne soit réservée qu'à quelques-uns. En somme, ce dont nous désirons parler aujourd'hui avec vous, c'est d'un choix élémentaire pour toute société digne de ce nom, celui de l'éducation. C'est un choix que votre génération a judicieusement fait, il y a 20 ans, et que la nôtre, je puis vous en assurer, endosse totalement.

Citoyens d'un État démocratique, nous vivons dans la liberté. Un rempart de déclarations, lois et chartes a même été édifié afin de protéger nos droits et nos libertés. Pourtant, le 19 décembre 1989, la liberté de choisir d'orienter son avenir selon ses goûts et ses aspirations, le droit de rechercher constamment à améliorer ses conditions de travail et de vie, le principe d'égalité des chances entre les personnes rejetant toute forme de discrimination, qu'elle soit basée sur la langue, le sexe ou la condition sociale, ont été bafoués.

Certains oseront peut-être encore prétendre que la hausse des frais de scolarité n'aura qu'un impact marginal et donc négligeable. Ainsi les estimations les plus conservatrices évaluent que seulement 5 % des étudiants actuellement inscrits à l'université seront contraints d'abandonner leurs études. Les statistiques ne sont que des chiffres, il faut les faire parler, comme le disait si bien M. le ministre tout à l'heure, pour comprendre tout le bien ou le mal qu'elles véhiculent. En l'espèce, cette donnée statistiquement marginale signifie la marginalisation de 11 765 jeunes Québécois et Québécoises. Ce n'est pas faute de talent ou de volonté qu'ils ne pourront terminer leurs études, c'est uniquement faute de ressources financières. Pour chacun d'entre eux, ainsi que pour tous ceux qui devront s'endetter davantage pour poursuivre leurs études, la décision ministérielle de majorer les frais de scolarité de 153 % orientera indûment leur vie ou se répercutera sur leur réalité quotidienne.

C'est donc leur parti que nous avons choisi et c'est de leur réalité dont nous souhaitons vous parler. Qu'il s'agisse de réformer le régime d'aide financière aux étudiants ou de chercher à procurer un financement adéquat aux institutions d'enseignement des cycles supérieurs, nous tenterons de mettre en évidence la réalité, celle qu'ils vivent quotidiennement.

C'est également le parti de notre peuple que nous avons choisi. Il y va de sa survie même, puisque sa langue, sa culture et son histoire en font une société distincte, unique et fragile. Alors que la globalisation des marchés économiques abat toute frontière, alors que la compétition des cerveaux détermine déjà les premiers gagnants ainsi que les premiers perdants, nous ne pouvons pas prendre le risque de n'éduquer qu'une partie seulement de notre jeunesse.

Le régime d'aide financière doit pallier le manque de ressources financières des étudiants. Dans ce but, il doit conserver toute la flexibilité nécessaire afin de s'adapter à la situation de chaque bénéficiaire. Entre la généralité statistique et la réalité individuelle, la loi d'ordre général doit toujours tendre à s'adapter à la seconde.

En 1976, ce gouvernement ratifiait le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels par lequel, à l'article 13, il reconnaissait "... qu'en vue d'assurer le plein exercice du droit à l'éducation: L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés... " C'est pourquoi nous pensons toujours aujourd'hui,

après quatorze ans, que ce principe fondamental n'a pas de raison d'être attaqué ou d'être abandonné. Au contraire, plus que jamais au tournant du 21e siècle, il nous faut nous tourner vers l'avenir et choisir d'investir dans notre jeunesse plutôt que de l'hypothéquer.

Au niveau de la réforme d'aide financière qui constituera la première partie de mon intervention, je vais donc, premièrement, faire un bilan de la réforme, pour ensuite traiter plus spécifiquement du problème des frais de scolarité.

Donc, au niveau de la réforme, il y a évidemment des améliorations qui ont été souhaitées longuement et qui sont donc les bienvenues. Cependant, certaines modifications supplémentaires sont nécessaires, à notre avis, pour que la réforme marque vraiment un tournant dans l'application du régime. Elles seront donc traitées en cinq points: premièrement, en ce qui concerne l'admissibilité au régime; deuxièmement, en ce qui concerne la pauvreté que semble perpétuer le régime à l'heure actuelle; troisièmement, en ce qui a trait aux contributions des parents et des conjoints; quatrièmement, en ce qui traite de l'autonomie et, finalement, le point le plus important, je crois, celui de l'endettement étudiant.

Nous avons été particulièrement surpris et même désappointés de constater que, malgré l'énoncé d'orientation présenté par le gouvernement en 1989, le projet de rendre accessibles au régime d'aide financière les étudiants à temps partiel fut abandonné par le gouvernement par la suite. Il s'agit, en somme, d'aider ou d'abandonner 52 % des étudiants universitaires au Québec. Il était plus que temps que les étudiants à temps partiel puissent accéder au régime. Pourtant, il semble que cette mise en application soit remise à une date déterminée par le ministre. Nous serions particulièrement intéressés à savoir si le ministre a déterminé cette date aujourd'hui.

Pour notre part, nous lui recommandons fortement que "cette innovation majeure" - et je reprends les termes de l'énoncé - entre en vigueur dès septembre 1990 car, comme je l'ai dit, il est plus que temps que 52 % des étudiants universitaires aient accès au régime d'aide financière. Plusieurs d'entre eux ont besoin du soutien financier de l'État et il est anormal qu'ils soient rejetés du régime tout simplement en raison de leur statut d'étudiant à temps partiel, surtout dans la perspective où un dégel semble probable ou, du moins, fortement souhaité par le gouvernement. Car une étude de Bishop et Van Dyk publiée en 1977 établissait déjà que les étudiants les plus fortement touchés par un dégel des frais de scolarité sont les étudiants à temps partiel car ils doivent actuellement lutter contre des désincitatifs très importants comme, entre autres, la durée de leurs études. Si, de plus, leurs frais de scolarité sont haussés, cela va encore ajouter un désincitatif à leur endroit. Comme le soulignait le recteur de l'Université du

Québec à Rimouski hier, ce cas pourrait être particulièrement grave pour les régions. Donc, nous pensons que le régime ou la réforme du régime, si elle veut vraiment porter ce nom, devrait, à tout le moins, conserver cette amélioration importante.

Dans un second temps, il est important, au niveau de l'admissibilité, qu'on n'oublie pas, évidemment, les étudiants à temps plein: 47,5 % d'entre eux bénéficient du régime, ce qui signifie que 52,5 % n'en bénéficient pas. Nous avons beaucoup de difficultés à comprendre pourquoi le gouvernement fait une distinction dans la période d'admissibilité entre les prêts et les bourses. Si le gouvernement juge qu'il faut huit sessions comme délai prescrit pour compléter son baccalauréat, pourquoi le met-il uniquement à la bourse? Il s'agit évidemment d'une pénalité. Quant à nous, il est évident que le terme de dix sessions aurait dû être conservé à la fois pour la bourse et pour le prêt. Il n'y a pas de raison de faire une distinction, surtout au moment où la multidisciplinarité s'impose, c'est-à-dire que de plus en plus il faut davantage qu'un seul baccalauréat, mais plutôt deux, et surtout au même moment où la spécialisation nécessite qu'on poursuive nos études à la maîtrise et au doctorat si cela est possible. Diminuer les périodes d'admissibilité à la bourse, c'est directement nuire à la fois aux deux, c'est-à-dire à la multidisciplinarité et à la spécialisation des étudiants au Québec.

Finalement, au niveau de l'admissibilité, nous notons avec beaucoup de joie la formation d'un comité d'appel, mais nous avons certaines réserves à émettre à ce sujet. Premièrement, nous pensons qu'il devrait être très clairement établi que ce comité juge sur l'esprit de la loi et non sur la lettre, il ne sert à rien d'avoir un tribunal qui va simplement veiller à appliquer la loi. Il y a déjà des fonctionnaires qui le font très bien ou des gens engagés par les bureaux d'aide financière sur les campus universitaires qui sont compétents pour le faire. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un comité qui puisse outrepasser la lettre de la loi lorsqu'un individu, un étudiant ou une étudiante ne correspond pas aux critères et est donc rejeté du régime. Il faut néanmoins que l'esprit du régime qui est de permettre à tous d'accéder aux études puisse, par l'intervention d'un comité d'appel, être appliqué, et je parle bien de l'application de l'esprit. Il y a des cas qui ne seront jamais prévus.

M. le ministre me corrigera si je fais erreur, s'il y a 30 cas similaires d'individus qui ne correspondent pas aux critères du régime, il y a automatiquement un processus de réforme pour voir si ces cas, en raison du nombre élevé, 30 personnes, ne devraient pas être compris dans le régime. Donc, on reconnaît que tout ne peut pas être prévu. Il faut donc, à notre avis, utiliser ce comité d'appel pour viser l'esprit de la loi. Mais il est évident que, pour qu'il soit

significatif et que ça vaille la peine de former un tel comité, il faut que ce comité soit déci-sionnnel. Et, finalement, comme nous le recommandons dans notre mémoire, nous pensons qu'à douze personnes ce comité ne sera pas efficace. Ça fait beaucoup trop de gens à réunir, ça fait beaucoup trop de gens à déplacer et beaucoup trop de gens aussi pour étudier un seul cas. Il y aura beaucoup de cas à étudier qui devront être faits rapidement en début de session, soit en janvier ou en septembre. Les étudiants ont besoin d'avoir une réponse rapide. Nous pensons que trois ou quatre personnes seraient suffisantes pour se pencher sur un dossier à condition qu'elles soient adéquatement conseillées car le régime d'aide financière est particulièrement compliqué. Vous avez sûrement eu l'occasion comme nous de le constater en étudiant la question et, également, il doit tenir compte de plusieurs lois. C'est pourquoi nous recommandons qu'un conseiller du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science soit présent uniquement pour conseiller et également un conseiller du ministère de la Justice pour faire le lien entre toutes les lois, celles du bien-être social, du chômage, etc., ou de l'immigration parce qu'il y a aussi des problèmes avec les étudiants qui sont des immigrants.

Au niveau de la pauvreté maintenant. Nous pensons qu'il est plus que temps encore qu'on hausse au seuil de pauvreté le coût du maintien de l'unité familiale en ce qui concerne les parents et les frais de subsistance en ce qui concerne les dépenses admises du candidat. À l'heure actuelle, on ne tient pas du tout compte des seuils de pauvreté de telle sorte qu'on estime qu'une famille de deux personnes, par exemple, est capable de maintenir son unité familiale avec seulement 12 000 $ alors que le seuil de pauvreté le fixe à 15 000 $. Et on estime également qu'un étudiant est capable de subvenir à ses besoins avec seulement 10 000 $ alors que le seuil de pauvreté est établi à 12 000 $. Donc, nous pensons qu'on devrait au moins tenir compte des seuils de pauvreté, que le régime ne devrait pas exiger des parents qu'ils vivent sous le seuil de pauvreté pour aider leurs enfants car lorsqu'on demande une contribution des parents sans tenir compte du seuil de pauvreté pour le maintien de leur unité familiale, en d'autres mots, on leur demande de vivre sous le seuil de pauvreté pour soutenir leurs enfants aux études. C'est évidemment inacceptable.

Deuxièmement, au niveau de la santé, il est évident que lorsque les personnes ont des revenus limités, comme c'est le cas des étudiants, comme c'est le cas, en tout cas, des bénéficiaires du régime d'aide financière, un des premiers éléments qu'ils peuvent être malheureusement poussés à couper ou à compresser, ce sont les dépenses au niveau de la santé. Ce sont donc les premières coupures et elles sont très graves surtout pour des gens qui sont en pleine crois- sance encore. Le problème est que, si effectivement on prend l'exemple du régime d'aide sociale, on tient compte dans ce régime des soins dentaires alors qu'on ne le fait pas dans le régime de l'aide financière. Là, encore, nous trouvons qu'il y a une inconsistance au niveau gouvernementale. Et, de plus, il y a effectivement moyen de demander le remboursement de certaines dépenses en frais médicaux supérieures à 100 $. Mais la chose est très compliquée. Encore à l'heure actuelle, les représentants des services d'aide financière sur les campus ont de la difficulté à appliquer la loi. Et pour vous donner un simple exemple, dans le cas des diabétiques, on ne sait pas encore si les seringues sont remboursées par le gouvernement, alors que les produits, évidemment les médicaments, le sont. Mais, par une évidence même, on ne peut pas utiliser ces médicaments sans seringues. Quelle est la distinction qui est faite? Pourquoi y a-t-il une distinction de la sorte? Il faudrait que le régime soit beaucoup moins compliqué et qu'il soit mieux connu et, également, qu'il tienne compte de tous les soins de santé encourus par les étudiants.

Finalement, nous pensons que des mesures régionales devraient être prises surtout en ce qui concerne les programmes qui sont exclusifs à une région, que ce soient des programmes de recherche océanographique à Rimouski ou de récréolo-gie à Trois-Rivières ou encore de droit ou de sciences économiques coopératifs à Sherbrooke. Lorsqu'un étudiant doit se déplacer et quitter sa région, il nous semble qu'il devrait bénéficier d'une bourse particulière pour l'aider dans ce cas précis car il doit nécessairement quitter sa région pour le faire.

Troisièmement, en ce qui concerne les contributions des parents et du conjoint, nous sommes tout d'abord très satisfaits de l'indexation de la table de contribution parentale. Nous avons cru comprendre néanmoins que, puisque, selon le gouvernement, selon M. le ministre, c'est la raison qui a causé des distorsions dans la contribution parentale par les années antérieures, nous croyons donc comprendre que dorénavant cette table sera indexée annuellement quoique ce ne soit pas spécifiquement dit dans le projet de refonte ou dans l'énoncé d'intention. Cependant, nous aimerions voir apporter une modification importante, celle qui concerne le premier palier. À l'heure actuelle, il y a une exemption pour la contribution parentale, pour les parents qui ont un revenu disponible qui ne dépasse pas 1000 $. Nous pensons qu'il faudra englober le premier et le deuxième palier et ainsi donner une exemption aux parents qui n'ont pas un revenu disponible de plus de 2500 $. C'est une amélioration qui aiderait particulièrement les parents ayant des revenus les moins élevés de la société. On parie alors de la classe moyenne la plus faible ou même parfois de la classe précédant la classe moyenne. De plus, pour tous ceux

qui ont droit à la contribution parentale, nous savons que 60 % d'entre eux n'en reçoivent pas du tout et, évidemment, nous sommes très déçus de voir qu'aucune mesure n'a été prévue dans le projet de réforme en ce qui concerne le versement de la contribution parentale. On continue encore une fois à fabuler et à s'imaginer que 100 % des parents la versent. On accepte donc d'office que 60 % des étudiants bénéficiaires du régime vont manquer de revenus parce que leurs parents ne leur versent pas de contribution parentale, tout simplement parce qu'ils estiment ne pas en avoir les moyens, et aucune mesure n'est proposée de la part du ministre. Là, nous avons une question à formuler, pour laquelle j'espère bien avoir une réponse: Qu'est-ce que le ministre ou le gouvernement compte faire pour s'assurer que la contribution parentale sera versée? (12 h 30)

Pour notre part, il est évident que, si l'on compte sérieusement à ce qu'une contribution parentale soit versée, il faut prendre des mesures, soit incitatives, soit coercitives. De façon coercitive, on n'a qu'à taxer les parents directement et aller prendre une partie de leurs revenus, si on croit vraiment qu'ils doivent verser cette contribution. Pour notre part, nous privilégions plutôt un moyen incitatif. Il faudrait, tout d'abord, que le gouvernement, à tout le moins, renseigne les parents sur la contribution qu'il estime qu'ils doivent verser. Déjà, cela l'inciterait, je crois, auprès des concitoyens et concitoyennes, à demander une contribution un peu plus réaliste.

Deuxièmement, il nous semble qu'il serait adéquat qu'il prenne des mesures fiscales incitatives pour encourager les parents à verser, pour les intéresser. Une des façons très adéquates de le faire serait de favoriser le régime d'épargne-études pour les étudiants, peut-être même d'envisager de le rendre obligatoire, puisque l'un des très graves problèmes que vivent les parents, à l'heure actuelle, c'est lorsqu'ils constatent, à quinze ans, qu'ils devront faire face au paiement des études universitaires de leurs enfants dans trois ans à peine. Il faut faire réaliser l'importance et le coût des études universitaires, surtout que cela va en augmentant, le plus tôt possible. La moindre des choses serait de publi-ciser ces régimes d'épargne-études et, entre autres, de faire en sorte que les revenus qu'ils versent aux enfants soient considérés comme la contribution parentale, car, à l'heure actuelle, c'est assez pernicieux, la façon qu'on utilise le régime d'épargne-études.

Premièrement, on dit aux parents: Prenez un régime d'épargne-études; dans 20 ans, il sera utile à votre enfant. Lorsque l'enfant entre à l'université, à 20 ans ou à 18 ans, il reçoit effectivement une contribution de la part du régime, mais qui est calculée comme un revenu de l'enfant et non pas comme la contribution des parents. Donc, le gouvernement continue de dire aux parents: Vous avez pris un régime d'épargne-études, mais, 20 ans plus tard, payez une contribution parentale. Il nie que le régime d'épargne-études est une contribution parentale. Dans un deuxième temps, lorsque l'étudiant est obligé de déclarer ce revenu, qui est, à nos yeux, la contribution de ses parents, il perd automatiquement l'aide du gouvernement sous forme de bourse ou sous forme de prêt. S'il reçoit une contribution du régime de 1000 $, le gouvernement lui dit: Tu as un revenu de 1000 $, alors je t'enlève 1000 $ de ta bourse ou 1000 $ de ton prêt. En d'autres mots, les parents prennent un régime d'épargne-études pour permettre au gouvernement de payer moins et, en bout de ligne, on exige encore d'eux qu'ils paient une contribution parentale, 20 ans plus tard.

Si on veut vraiment que les parents versent une contribution parentale, nous trouvons que ce régime est adéquat, mais il faut le considérer comme la contribution parentale et, dorénavant, il ne faut plus calculer les redevances comme le revenu de l'étudiant, mais bien comme la contribution ou la partie de contribution des parents. C'est une évidence consommée à nos yeux. De plus, il faudra absolument que le gouvernement tienne compte de la contribution qui est effectivement versée et non pas de la contribution qu'il estime devoir être versée. C'est pourquoi nous suggérons fortement que les parents et les enfants signent une déclaration commune, spécifiant la somme qui est versée à l'enfant sous forme de contribution parentale. Si nous recourons au régime d'épargne-études, la chose deviendra automatique et, de façon très officielle, il n'y aura pas de risque qu'il y ait contournement d'aucune façon. Ce sera le régime qui versera la contribution au nom des parents, comme cela devrait être le cas.

En ce qui concerne la contribution des conjoints, malheureusement, nous ne sommes pas du tout d'accord avec l'orientation gouvernementale. J'ai cru comprendre que M. le ministre pourrait être d'accord, en principe, avec nous, mais nous aimerions également qu'il traduise ses beaux principes dans les faits. Quant à nous, la contribution du conjoint est un concept complètement dépassé qui ne correspond pas du tout à la réalité actuelle vécue par les jeunes. Bien sûr, on peut maintenir un régime artificiel; bien sûr, on peut maintenir des lois qui ne correspondent pas à la réalité, mais, évidemment, n'attendez pas de notre part quelque cautionnement que ce soit, même pas sous le titre ou sous le thème de la raison d'État ou de la raison financière de l'État. Cette contribution doit être annulée parce qu'elle n'est pas représentative; à peine 8 % la versent. La contribution des conjoints, c'est finalement exiger des conjoints que, non seulement ils s'unissent au niveau du mariage, mais qu'ils s'unissent dans la bourse. Or, à l'heure actuelle, je pense que c'est une victoire même

que les femmes ont gagnée de chaude lutte: il y a partage des éléments du patrimoine financier des conjoints, il y a division et cette division doit être représentée. Si des conjoints veulent s'entraider, c'est à eux de le faire, mais ce n'est pas au gouvernement de l'exiger, car cela ne représente pas le désir de vie des étudiants à l'heure actuelle.

En ce qui concerne le statut d'autonomie, le quatrième point de notre présentation sur le régime d'aide financière, évidemment, nous trouvons encore une fois archaïque - ça, ça fait longtemps que ça se dit - qu'il ne soit pas reconnu qu'un étudiant est autonome s'il habite à moins de 50 kilomètres de la maison de ses parents. Dans les faits, donc, c'est complètement nier la réalité. Un étudiant va avoir un logement à payer, des frais à débourser, mais, parce que ses parents habitent à moins de 50 kilomètres, il n'est pas considéré comme autonome alors qu'il l'est effectivement. Nous ne voyons pas pourquoi cette distinction existe toujours. Peut-être est-ce, encore une fois, la raison financière de l'État mais, quant à nous, ce principe n'est pas valable. De plus, le fait de considérer ces étudiants autonomes - les étudiants qui ont un bail - serait, à notre avis, une incitation importante au niveau des études de premier cycle, du moins pour les étudiants qui seraient concernés. De toute manière, nous pensons qu'aucune loi ne peut fixer l'autonomie d'un individu, surtout lorsqu'on tient compte... Enfin, il n'y a qu'une seule loi qui peut fixer l'autonomie jusqu'à un certain point, c'est celle qui fixe la majorité à 18 ans. Donc, le gouvernement devrait respecter ses lois et un étudiant qui a 18 ans, qui est en résidence, qui a un bail, un logement, devrait, à tout le moins, être considéré comme un citoyen comme un autre, c'est-à-dire un citoyen autonome. Il n'y a pas de raison de créer un lien artificiel avec ses parents, un lien du fait qu'il ne réside que sur une distance de 50 kilomètres qui, d'ailleurs, est tout à fait arbitraire.

Finalement, le dernier point au niveau de la réforme, mais le plus important comme je l'ai dit, c'est celui de l'endettement. C'est le plus important et ça, je crois que le Parti libéral, particulièrement, sera d'accord avec moi, puisque je cite une des résolutions du Conseil général traitant de la hausse des frais de scolarité où on disait qu'il fallait à tout prix éviter que la hausse des droits de scolarité n'entraîne une hausse de l'endettement. Nous sommes tout à fart d'accord avec ça. Il faut, effectivement, éviter la hausse de l'endettement en tout temps. Malheureusement, la réforme, comme le régime, continue à augmenter l'endettement étudiant sans apporter aucune réponse à ce problème sauf, évidemment, la ristourne de 25 % pour les étudiants à la maîtrise et au doctorat qui auront terminé dans les délais prescrits. Encore là, nous aimerions bien savoir de la part du ministre quels sont ces délais prescrits parce que nous n'avons pas cru trouver dans la réforme ou dans le projet de loi une quelconque définition de ces termes. De toute manière, nous pensons qu'il serait très difficile de définir les délais prescrits au niveau de la maîtrise et du doctorat, puisque cela varie considérablement d'une faculté à l'autre, d'un domaine d'étude à l'autre, cela varie considérablement d'une université à l'autre et cela varie considérablement, le choix du thème d'étude, d'un individu à l'autre. Alors, comment fixer des délais prescrits lorsqu'en physique, par exemple, il faut aller faire un stage en Israël ou au Mexique pour étudier dans un observatoire pour pouvoir finir sa thèse? Quels sont les délais prescrits par rapport à l'étudiant de médecine ou par rapport à l'étudiant de droit? Il nous semble assez difficile d'établir des délais prescrits généraux qui puissent être vraiment représentatifs des besoins de tous les étudiants. Nous pensons que, plutôt, les universités devraient continuer à appliquer le principe actuel, c'est-à-dire que, si, aux yeux de l'administration universitaire, un étudiant dépasse les délais raisonnables, il va tout simplement perdre le droit de continuer sa maîtrise. Et tant et aussi longtemps qu'il ne perd pas ce droit de la part de l'administration universitaire qui est plus près, qui est plus apte, à notre avis, de juger de la question, tant qu'un étudiant ne perd pas ce droit, il devrait pouvoir bénéficier de l'aide financière de façon intégrale.

De toute manière, au niveau de l'endettement spécifiquement, comme je le disais, les prêts ont augmenté sans cesse et la réforme n'apporte pas de modifications majeures à ce niveau. De 1982 à 1988, le niveau d'endettement ou le niveau des prêts dans le régime d'aide financière est passé de 50 % à 55 % et il semble que cela va continuer dans cette voie. Pourtant, on nous dit que l'impact de la hausse sera comblé par le régime d'aide financière. Or, il nous apparaît difficile que ce soit le cas pour deux raisons, ou dans deux cas bien précis. Premièrement, dans le cas des étudiants qui ont à la fois le prêt maximal et la bourse maximale. Les étudiants qui ont le prêt et la bourse maximaux n'obtiendront donc plus rien désormais. Les 350 $ de cette année, plus les 350 $ de l'année prochaine, ils devront les financer à même les sommes qu'ils ont déjà. En d'autres mots, ils devront trouver 350 $ de coupures cette année et 800 $ l'année prochaine. Deuxièmement, c'est le cas également des étudiants qui n'ont pas le prêt maximal à l'heure actuelle. Pour ces étudiants, la hausse va se traduire de façon très concrète et directe en un endettement supplémentaire de 350 $ cette année et un autre endettement de 350 $ l'année suivante. En somme, l'impact de la hausse sera, soit, pour certains étudiants, des coupures dans leurs dépenses personnelles, soit, pour d'autres, un endettement supplémentaire et, encore une fois, on ne propose aucune mesure au niveau de

l'endettement. Pourtant, en 1978, il y avait 4 % des étudiants qui avaient une dette supérieure à 5000 $. Maintenant, il y en a cinq fois plus, c'est-à-dire 21,9 %.

Le taux d'endettement des étudiants augmente sans cesse avec la conjoncture qui semble arriver, une conjoncture de récession, de difficultés économiques, où il y aura donc chômage. Quelles seront les mesures que le gouvernement mettra de l'avant pour aider les jeunes, pour aider aussi la génération qui devra lutter contre la dénatalité à venir à bout, justement, de leur problème d'endettement? À notre avis, si on veut prétendre que la réforme d'aide financière va apporter une solution à la hausse des frais de scolarité, c'est là-dessus qu'il aurait fallu travailler, sur la question de l'endettement. Or, il est évident que cela n'a pas été fait et cela nous laisse insatisfaits. C'est pourquoi nous avançons trois propositions à ce sujet.

La première vise à limiter l'endettement à un maximum. Nous avons fixé ce plafond à 10 000 $. Quant à nous, 10 000 $ d'endettement est une somme raisonnable pour un étudiant universitaire. Si c'est un couple, ce sera donc 20 000 $ pour partir leur vie, et, encore une fois, dans le contexte de dénatalité, même si nous ne parions que d'éducation aujourd'hui, il faut quand même avoir l'esprit légèrement ouvert dans un contexte plus global et, lorsqu'on parle des étudiants, on parle aussi de la jeunesse, donc de l'avenir du Québec. Limiter l'endettement à 10 000 $, soit à 20 000 $ pour un couple, cela nous semble raisonnable. Cela leur permettra de faire leur part, de contribuer, mais cela aussi limitera de façon raisonnable la charge qu'ils devront supporter.

La deuxième mesure que nous proposons est une mesure incitative. Pour les étudiants qui ne s'endetteront pas de 10 000 $, qui s'endetteront de moins de 10 000 $, nous proposons de les faire bénéficier de la ristourne de 25 % également, même pour le bac. Il nous semble que si cette mesure était appliquée à la maîtrise et au doctorat, sur le principe de l'incitation, il faut aussi le faire au bac car cela encouragera plus de monde à terminer ses études de baccalauréat et, donc, nous permettra d'avoir plus d'étudiants potentiellement admissibles aux niveaux de la maîtrise et du doctorat.

Notre troisième proposition, quant à elle, vise à diminuer l'impact de l'endettement étudiant. Un des très graves problèmes, à l'heure actuelle, de l'endettement étudiant est que les étudiants doivent y faire face, coûte que coûte, peu importe leur condition financière. Bien sûr, ils ont un délai de grâce de six mois, et il porte bien son nom, d'ailleurs, bien sûr ils ont, semble-t-il, un délai supplémentaire de 18 mois mais, au bout d'un an, ils doivent faire face au paiement des frais de scolarité, au paiement, pardon, de leur endettement dû au régime de laide financière et peu importe qu'ils soient sur le bien-être social ou le chômage, peu importe donc leur niveau de revenus. Nous pensons donc qu'un individu devrait pouvoir bénéficier de la mesure suivante, c'est-à-dire de limiter le paiement de ses dettes à 5 % de son revenu annuel. S'il a des revenus supplémentaires, il peut effectivement payer davantage pour se débarrasser le plus vite possible de sa dette, mais, s'il n'a pas de revenus suffisants à ses yeux, il devrait pouvoir bénéficier de cette mesure limitant son paiement à 5 %.

Maintenant, en ce qui concerne la question des frais de scolarité. C'est une question très intéressante étant donné qu'elle est d'actualité. Évidemment, elle cadre tout à fait dans la réforme du régime de l'aide financière puisqu'on a présenté le régime comme étant la solution à la hausse des frais de scolarité. Quant à nous, donc, si l'accessibilité a été un objectif de la Révolution tranquille, qui a permis de hisser le Québec au niveau des sociétés occidentales, aujourd'hui encore, face à l'Ontario, nous avons un manque à gagner de 8500 diplômés par année. Il est donc faux de prétendre que nous avons atteint nos objectifs qui étaient justement de nous comparer avantageusement aux autres sociétés nord-américaines, à moins qu'on considère que l'objectif du Québec n'était pas d'être aussi bon que les autres en Amérique du Nord, mais simplement d'être le cinquième ou sixième, ou pourquoi pas le dernier. Quant à nous, il est évident que l'objectif est d'atteindre le niveau ou le seuil de diptomation de l'Ontario puisqu'on nous la présente comme un symbole d'avant-gardisme en Amérique du Nord et d'autant plus que la question est encore plus grave pour les francophones au Québec puisqu'à l'heure actuelle, pour 44 étudiants anglophones, il y en a seulement 23 qui sont francophones, à l'université. Nous voyons d'un très bon oeil le fait que près de 90 % des jeunes anglophones soient à l'université au Québec. Nous souhaiterions simplement que ce soit le cas aussi des francophones. Il y a évidemment encore beaucoup de travail à faire tout simplement parce que nous n'avons pas la même histoire, nous n'avons pas la même structure sociale, nous n'avons pas la même tradition universitaire en ce qui concerne la société francophone au Québec.

Tout à l'heure, j'entendais, avec un petit peu de déception, le ministre, M. Ryan, dire que, justement par rapport à l'Ontario où les frais sont très élevés, par rapport au reste du Canada où les frais sont beaucoup plus élevés, il y a pourtant plus d'inscriptions et que cela démontre que la hausse des frais de scolarité au Québec n'aura pas d'impact. Je ne suis pas d'accord Parce que, tout simplement, à l'heure actuelle au Québec, après 20 ans d'efforts considérables pour notre société, nous n'avons pas encore atteint le niveau d'éducation et de diplomation des Ontariens, entre autres. Il faut donc constater que nous n'avons pas le même bagage historique

et que nous avons un travail différent à faire. Sans vouloir entrer, encore une fois, dans un autre débat, notre société distincte se distingue, entre autres, par cela. Nous n'avons pas assez de diplômés, il faut donc faire des efforts en ce sens. Quant à nous, il est évident que la hausse des frais de scolarité va porter atteinte à l'accessibilité. (12 h 45)

II y a six études, il y en a même davantage, mais je peux vous mentionner six études ou sondages qui le démontrent et qui prétendent le contraire. Alors qu'à l'inverse je n'ai pas encore réussi à trouver une seule étude qui démontre noir sur blanc qu'il n'y a pas d'impact par la hausse des frais de scolarité. De toute manière je pense qu'un simple principe économique élémentaire veut que, lorsque le prix d'un produit augmente, sa consommation diminue. C'est exactement le même principe qui va s'appliquer pour l'université, comme cela s'est appliqué également en Ontario. Le prix augmentant, il est fort probable qu'il y aura une diminution.

Si nous prenons par exemple l'étude Handa et Skolnik de 1972, avec une hausse de 100 % des frais de scolarité, ils estimaient que l'accessibilité diminuerait de 10 % à 15 %. L'étude Beaulieu, de 1986, avec une hausse de 100 % également, estimait qu'il y aurait une diminution de 36 %. L'étude Leslie et Brinkmain, de 1987, avec une hausse de seulement 10 %, évaluait l'impact à 6 % d'étudiants qui abandonneraient leurs études. L'étude Lemelin, de 1989, avec une hausse de 100 % estimait qu'il y aurait 5 % des étudiants qui quitteraient. L'étude Léger, Lepage également, qui est un sondage, avec une hausse de 100 %, évalue, quant à elle, que 12 % des étudiants à temps plein vont quitter, 19 % des étudiants à temps partiel vont quitter et 25 % des étudiants à temps plein vont passer au temps partiel allongeant ainsi la période d'études. Finalement, je me permettrai même de mentionner M. Ryan qui, lui-même, reconnaissait qu'il pourrait y avoir une atteinte jusqu'à 5 %, donc qu'il pourrait y en avoir une. Quant à nous, comme nous l'avons dit plus tôt, une atteinte même de 5 %, une atteinte de seulement 11 765 diplômés de moins, n'est pas acceptable. Nous ne voyons pas sous quel prétexte, et même celui de la qualité de l'enseignement, on pourrait justifier cette perte considérable pour notre société.

En ce sens, il faut bien comprendre qu'il est tout à fait naturel que des étudiants abandonnent leurs études face à une hausse des frais de scolarité, pour trois raisons: Premièrement, il s'agit de leurs revenus. À l'heure actuelle le revenu moyen d'un étudiant se situe à 6791 $, alors que ses dépenses moyennes annuelles sont de 6741 $, ce qui laisse une marge de manoeuvre de 50 $. Or, je vous rappelle toujours que le seuil de pauvreté lui, se situe à 12 000 $ pour un individu, les étudiants vivent donc nettement sous le seuil de pauvreté. Le deuxième facteur important est celui de l'endettement. L'endettement moyen des étudiants est de 5743 $ et peut aller jusqu'à 20 000 $ pour compléter un bac, une maîtrise et un doctorat. Il s'agit évidemment toujours de couples qui devront faire face, eux aussi, à la dénatalité. Le troisième point, qui est le plus important peut-être, dans le contexte actuel, c'est le taux de chômage au Québec qui se situe à 10,3 %, alors que chez les diplômés universitaires, en 1987, ceux qui avaient un bac, deux ans après leur entrée sur le marché du travail, 13 % d'entre eux n'avaient toujours pas d'emploi, ce qui est donc un taux de chômage supérieur au taux de chômage moyen de la société québécoise. Tenant compte, donc, de leur niveau de revenu actuel, de leur endettement et aussi de la possibilité de chômage à laquelle ils doivent faire face, il est normal que des étudiants hésitent à continuer leurs études universitaires, s'ils doivent faire face à une hausse des frais de scolarité.

Certains domaines d'études comprennent un taux de chômage de 30 %. Ces étudiants, pourtant, comme les autres qui sont dans des domaines d'études plus favorables, devront, si on applique simplement le principe de la hausse des frais de scolarité, faire face au paiement de leur endettement. Alors que, si on utilisait d'autres principes ou d'autres systèmes, comme cela se fait en Australie, entre autres, avec l'impôt postuniversitaire, la chose serait beaucoup plus équitable, puisqu'on payerait selon son revenu. Mais nous y reviendrons un peu plus tard.

Lorsqu'on nous parle de la qualité de l'enseignement, il est évident que nous sommes tout à fait d'accord. Nous sommes les premiers à voir ce que nous coûte le manque de qualité d'enseignement. Nous sommes les premiers à manquer de professeurs. Nous sommes les premiers à étudier dans des locaux bondés ou à étudier dans des bibliothèques dont les derniers volumes sont tout simplement inexistants. Donc, nous souhaitons, bien sûr, avoir une éducation de qualité pour notre avenir et, dans un monde de compétition, nous souhaitons, évidemment, être bien équipés. Par contre, nous ne sommes pas dupes. Les 120 000 000 $ de manque à gagner actuel des universités ainsi que les 167 000 000 $ de déficit accumulé n'existeraient tout simplement pas si le gouvernement avait indexé sa contribution au taux de croissance annuel et s'il avait tenu compte de la croissance de la clientèle. En somme, s'il avait tenu compte de ces deux facteurs, l'indexation et la hausse de clientèle, c'est 127 500 000 $ de plus que le gouvernement verserait actuellement aux universités, ce qui éliminerait tout simplement le manque à gagner. Et si le gouvernement n'avait pas fait des coupures au niveau du régime d'aide financière et au niveau des universités, le déficit n'existerait tout simplement pas non plus.

Donc, nous ne sommes pas dupes et nous ne

pensons pas que ce sont les étudiants du Québec qui ont provoqué le déficit universitaire. Cependant, nous sommes tout à fait conscients que le dégel ne constitue pas une solution. Puisqu'il faut faire face à un déficit de 167 000 000 $ et à un manque à gagner de 120 000 000 $ annuellement, ce ne sont pas les 41 000 000 $ que nous allons ajouter cette année ou les 83 000 000 $ de l'an prochain qui vont régler la question.

Le seul résultat probant que nous allons obtenir - quant à nous, il sera très évident - c'est tout simplement que des étudiants quitteront les études, ce qui va entraîner, d'ailleurs, une baisse de revenus pour les universités. Puisque les subventions gouvernementales sont fixées selon le nombre d'étudiants, si, effectivement, il y a 5 % des étudiants qui quittent les universités, il y aura donc une baisse dans les subventions gouvernementales. En bout de ligne, le fameux octroi de sommes supplémentaires que les universités sont censées obtenir pourrait être nettement moindre que ce qu'elles estiment, à l'heure actuelle, pouvoir recevoir. En d'autres mots, de toute manière, cela ne constituerait qu'un transfert du fardeau sur le dos des étudiants, c'est-à-dire que le gouvernement pourrait très bien en profiter pour se retirer et passer la balle aux étudiants.

D'ailleurs, si on prend l'exemple du Canada et puisqu'on cite souvent en exemple l'Ontario, si la hausse des frais de scolarité des étudiants québécois a pour objectif d'apporter de nouvelles ressources financières aux universités québécoises, ce n'est certainement pas l'exemple de l'Ontario ou du Canada qu'il faut suivre. Car, de 1977 à 1987, la part des étudiants dans le financement des universités est passée de 13,8 % à 16 %.

Pendant ce temps, la part gouvernementale diminuait de 82 % à 79 %, à peu près une part équivalente. Et dans le cas de l'Ontario plus spécifiquement, alors que les étudiants ont augmenté leur contribution de 5,6 %, le gouvernement en a profité pour diminuer la sienne de 16 %. Est-ce que c'est l'objectif du gouvernement du Québec? Nous osons croire que non. Nous avons bien cru comprendre hier que les recteurs des universités n'ont pas obtenu l'assurance que les subventions gouvernementales seraient maintenues ou même qu'on compenserait pour les coupures qu'il y a eu. Alors, en somme, allons-nous être les seuls à mettre de l'argent dans un panier percé qui, de toute manière, ne réussira pas à améliorer la qualité de l'enseignement puisqu'il manquera trop d'argent pour le faire encore?

De toute manière, déjà, au Québec, les coupures ont commencé, comme nous le savons. Alors qu'en 1970 la part des dépenses gouvernementales au niveau de l'éducation était de 4,6 %, elle est actuellement de 3,8 %, ce qui est une diminution très importante.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez dépassé votre temps au moins de cinq minutes. M. Pautel: Je vais terminer brièvement.

La Présidente (Mme Hovington): Mais vous parlez tellement bien. Peut-être qu'un jour, avec cette facilité de vous exprimer que vous avez, aurez-vous le privilège de vous exprimer au salon bleu, en face. On ne sait jamais.

M. Pautel: Pour tout de suite, tout ce que je souhaiterais, c'est que ma bonne expression puisse convaincre les membres de cette commission et, particulièrement, M. le ministre. Je serais ravi.

Donc, pour terminer, nous proposons au gouvernement ce que nous appelons un nouveau partenariat. Pour notre part, nous sommes prêts à contribuer à l'amélioration de la qualité de l'enseignement, mais à condition qu'un principe fondamental ne soit pas atteint: celui de l'accessibilité. C'est pourquoi, premièrement, si l'on souhaite vraiment régler les problèmes financiers des universités, il faut, de un, que le gouvernement maintienne ses subventions. Cela signifie qu'il cesse de couper. Aussi, il faut qu'il compense pour les coupures qu'il y a déjà eu. Il n'est pas normal, il ne serait pas équitable, il ne serait même pas intelligent, en termes d'investissement social, de prendre les dix prochaines années pour régler le déficit sur le dos des étudiants. Il serait bien plus juste et équitable que ce soit le gouvernement qui s'en charge, du moins en très grande partie.

Dans un deuxième temps, il est évident, à nos yeux, que les entreprises doivent contribuer davantage. À l'heure actuelle, elles sont celles qui contribuent le moins en Amérique du Nord et il n'y aura aucune excuse fiscale qui pourra justifier ce laisser-faire de la part du gouvernement. Les entreprises doivent contribuer et elles doivent contribuer de façon générale, c'est-à-dire que, bien sûr, nous sommes tout à fait heureux de les voir investir dans des domaines qui leur plaisent, mais il faut également que nous continuions à subventionner le reste de l'université. Il n'y a pas que les facultés de science ou de génie, il y a aussi les facultés de sociologie, de philosophie et de psychologie qui doivent être financées par les entreprises, puisqu'une société plus éduquée est donc plus développée.

Dans le cas des étudiants, nous avançons l'idée d'un impôt postuniversrtaire parce que, à notre avis, il s'agit d'une solution tout à fait adéquate. Si l'on souhaite voir les étudiants contribuer davantage, il faut le faire de telle sorte que tous puissent accéder toujours aux études. L'impôt postuniversitaire a le grand avantage d'impliquer l'abolition des frais de scolarité, ce qui signifie que l'université est accessible pour tout le monde, et, d'un autre côté, de demander une contribution à chaque individu, selon ses moyens, selon son revenu. Ce

qui fait que si on investit dans un diplôme universitaire très rentable, comme en médecine ou en droit, on contribue davantage que si on investit dans un diplôme moins rentable ou encore on ne contribue pas du tout si notre investissement n'est pas rentable, qu'on se retrouve sur le chômage ou le bien-être social.

Pour finir, dernier point, il n'est pas question pour nous de contribuer, ou nous ne saurions même pas recommander au gouvernement du contribuer davantage, si nous ne nous assurons pas d'une meilleure gestion de la part des administrations universitaires. En ce sens, nous ne pouvons pas croire qu'alors... En Ontario, les dépenses d'administration par étudiant se chiffrent à 503 $; ici, au Québec, elles se chiffrent à 600 $. C'est simplement un exemple qui doit porter à faire une étude plus approfondie. À notre avis, il est évident que les universités doivent faire preuve d'une gestion plus ouverte. Encore à l'heure actuelle, le Conseil des universités le reconnaissait en 1986, plusieurs n'ont pas de plan directeur, pas de plan d'orientation, pas d'objectifs précis. Comment voulez-vous que nous mettions plus d'argent dans des universités qui, à l'intérieur même de leurs structures, n'ont pas de plan d'orientation et même, en tant que réseau, ont de la difficulté à se coordonner? Donc, nous souhaitons qu'une meilleure gestion soit mise en application afin de permettre ce nouveau partenariat. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Et pour les fins de la transcription des débats, voulez-vous présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

M. Pautel: Avec plaisir! À ma gauche, M. Santo Mana, président de la Student's Society of McGill University; à ma droite, M. Nicolas Plourde, secrétaire général de la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal; à ses côtés, M. Raymond Boisvert, secrétaire général de la Conférence des associations étudiantes de l'Université Laval, et, à sa droite, M. Daniel Moisan, porte-parole adjoint de la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec.

La Présidente (Mme Hovington): Merci! Alors, M. le ministre, c'est votre temps d'échange avec les intervenants.

M. Ryan: Merci! Alors, je remercie M. Pautel d'avoir présenté avec éloquence le point de vue de la Fédération. Êtes-vous le président de la Fédération, M. Pautel?

M. Pautel: Non, uniquement porte-parole.

M. Ryan: Porte-parole. L'éloquence séduit toujours certains auditeurs. Il y en a d'autres qui vont au contenu.

M. Pautel: Je m'excuse, je ne vous ai pas suivi.

M. Ryan: Non, je n'ai rien dit. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pautel: C'est ce que j'avais cru comprendre.

M. Ryan: II m'a fait plaisir d'entendre le point de vue de votre Fédération. Je pense que vous avez soulevé bien des points. Je serais tenté de vous adresser une question pour commencer. Vous parlez, à un moment donné, dans votre mémoire, de recherche d'un nouveau partenariat: "...étudier une formule de financement fondée sur un nouveau partenariat." Là, vous ajoutez: "Nous croyons que, dans le cadre d'une gestion plus efficace et ouverte, les contributions gouvernementales, des entreprises et des étudiants nous permettraient de nous doter d'un système d'éducation à la hauteur de nos aspirations."

Pourriez-vous nous dire comment vous voyez ça, la contribution des étudiants, vous là, à la fois dans un monde idéal et dans le monde d'aujourd'hui?

M. Pautel: Pour notre part, il serait tout à fait inutile de se payer le luxe d'avoir une université de très grande qualité qui ne soit réservée qu'à une élite. Entre finalement l'université de qualité pour quelques-uns et l'université décadante pour tout le monde, nous choisissons tout simplement l'université de la plus grande qualité possible pour tout le monde. C'est pourquoi hausser les frais de scolarité porte atteinte à l'accessibilité et, d'un autre côté, ne règle pas le problème de sous-financement des universités. C'est donc avec évidence une solution qui n'en est pas une.

L'impôt postuniversitaire demande un investissement. D'accord! Mais il s'agit bien d'un investissement dans la jeunesse d'aujourd'hui plutôt que d'hypothéquer notre avenir. Et c'est pourquoi nous voyons la participation des étudiants... Nous sommes d'accord avec une hausse de la contribution des étudiants si cela ne porte pas atteinte à l'accessibilité. Par l'impôt postuniversitaire, vous pourriez nous faire contribuer davantage. Moi, personnellement, ça ne me dérangerait pas de contribuer, une fois que je serai diplômé, que j'aurai un revenu annuel. Ça ne me dérangera pas parce que, à ce moment-là, j'aurai les moyens, mais je sais que si, l'année prochaine, vous me demandez de contribuer, certains d'entre nous n'auront pas les moyens et vous choisissez donc de les priver d'université ou, plutôt, de priver la société de ses universitaires.

M. Ryan: Supposez que vous établissiez

l'impôt universitaire, comment allez-vous financer ça? Ce sont des sommes considérables.

M. Pautel: Effectivement. Nous évaluons que ça coûterait 1 500 000 000 $. Donc, la façon de le mettre en application, entre autres...

M. Ryan: Alors, je vais vous organiser un rendez-vous avec le ministre des Finances.

M. Pautel: Ça me fera plaisir de le rencontrer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pautel: C'est pourquoi il est très important que les entreprises contribuent. Avec un impôt de 1 % sur leur masse salariale, on peut aller chercher 700 000 000 $.

M. Ryan: Avec le NPD.

M. Pautel: En cessant de couper les contributions gouvernementales et en compensant pour la perte, nous avons effectué la recherche de 1 500 000 000 $. (13 heures)

M. Ryan: Je me souviens. J'ai fait partie du parti CCF, en 1945, puis c'était un de nos thèmes dominants, qu'il fallait que les entreprises paient. Le NPD fait campagne là-dessus depuis 50 ans et ils s'aperçoivent, à un moment donné -- ils ont été au pouvoir dans certaines provinces - que ce n'est pas comme ça que ça marche. Moi, je vous dis ça et je l'ai répété à maintes reprises depuis le début des séances: On peut vouloir une participation plus grande de l'entreprise aux charges de l'État, c'est normal, mais compter que c'est la solution aux problèmes... Parce que vous n'en donnez pas d'autres. Ce que vous nous dites, c'est: Taxez les entreprises davantage puis que le gouvernement puise davantage dans une caisse qui est vide.

M. Pautel: Et que les étudiants contribuent sous la forme d'un impôt postuniversitaire.

M. Ryan: Oui, c'est ça: Faites-le maintenant puis payez plus tard. Ça, le Québec a marché sur ce principe-là depuis 20 ans et, aujourd'hui...

M. Pautel: M. Ryan, c'est simplement dire: Payez quand vous avez les moyens.

M. Ryan: Oui, mais c'est là qu'on n'est pas d'accord avec vous autres tout à fait. On trouve que l'estimation des moyens n'est pas la même de part et d'autre. J'écoutais vos statistiques tantôt, vous disiez: Ils ont calculé qu'avec une augmentation... Toutes les recherches que vous avez citées, pour entraîner une chute de clientèle de 6 %, quelle était l'augmentation que vous avez mentionnée?

M. Pautel: 10 %.

M. Ryan: 10 %. Alors, 10 % sur 540 $, c'est 50 $. On l'a fait, ça, avec les frais indirects à l'université, on les a augmentés de plus que ça, dans bien des cas. La clientèle a augmenté, ça fait que ça en fait une recherche qui ne vaut pas cher. Celle-là, vous pouvez vous en passer, elle ne nous éclaire en aucune manière.

M. Pautel: Avez-vous des études à présenter?

M. Ryan: Oui.

M. Pautel: Parce que j'imagine qu'en haussant les frais de scolarité vous avez étudié la question.

M. Ryan: Oui, mais oui.

M. Pautel: Avez-vous des études à présenter qui disent que ça ne touchera pas l'accessibilité?

M. Ryan: J'en ai donné des chiffres, depuis le début du débat; j'en ai ajouté des nouveaux encore, ce matin, quand nous avons rencontré l'ANEEQ tantôt. J'ai donné l'évolution des inscriptions dans les universités canadiennes, autres provinces que le Québec, depuis 1980, correspondante aux augmentations dans les frais de scolarité qui sont intervenues, et les résultats donnent des augmentations substantielles qui n'ont pas été tellement inférieures à celles du Québec...

M. Pautel: Je ne vous comprends pas, M. le ministre.

M. Ryan: ça fait qu'il faut bien s'interroger.

M. Pautel: Vous allez m'expiiquer quelque chose, là, je vous suis mal. Vous constatez comme moi que le Québec a un retard au niveau de la diplomation universitaire sur l'Ontario, alors que les frais sont moins élevés au Québec; d'un autre côté, vous constatez aussi qu'il peut y avoir une atteinte à l'accessibilité qui pourrait aller jusqu'à 5 % avec la hausse des frais de scolarité. En mettant tout ça ensemble, vous concluez que si on compare l'Ontario, qui a des frais de scolarité plus élevés et des taux de diplomation plus élevés, le Québec devrait obtenir le même résultat en haussant les frais de scolarité.

M. Ryan: Non. Je vous dis que la Nouvel-le-Écosse, l'île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve sont encore plus pauvres que le Québec, s'il doit être question de pauvreté dans le cas du Québec.

Ils ont ajusté leur tarification universitaire en fonction des réalités d'aujourd'hui du coût réel des études, puis il n'y a pas eu de révolution, il n'y a pas eu d'invocation des grandes théories du XIXe siècle, puis tout. On a dit: C'est ça, puis on marche.

Une chose qu'il faut rappeler, le coût d'un étudiant universitaire aujourd'hui, nous l'estimons, en moyenne, à 8900 $ pour l'année 1989-1990. 8900 $. 540 $ sur 8900 $, il faut le faire. Ce qu'on demande, c'est un ajustement. Vous, vous me dites que vous n'en voulez pas du tout. Le ton de votre mémoire...

M, Pautel: Non, on vous dit qu'on est prêts à contribuer comme vous nous le demandez.

M. Ryan: Ah! non, sous forme... Vous viendrez nous voir dans dix ans, quand on travaillera, vous nous mettrez une taxe puis tout ça. Mais nous autres, on a des problèmes de financement immédiats de l'État québécois et votre formule, qui n'est pas mauvaise en soi et que nous sommes prêts à étudier pour un avenir un petit peu plus éloigné, votre formule n'apporte absolument aucun élément de soulagement aux problèmes très immédiats de financement non seulement des universités du Québec mais de l'ensemble de notre système d'enseignement, de notre système hospitalier, de notre système de services sociaux, de tout notre système public et parapublic au Québec. Et là, ce que nous devons obtenir et instituer, c'est une participation plus responsable des citoyens aux coûts des services qui leur sont offerts dans certains domaines, dont l'enseignement universitaire.

M. Pautel: Qu'allez-vous faire quand vous aurez tes 83 000 000 $ et que ce sera insuffisant? Parce que vous le savez que ça va être insuffisant, qu'est-ce que vous allez faire?

M. Ryan: Oui, mais je vais donner des précisions là-dessus. On est partis d'un chiffre, quand on avait établi la comparaison avec l'Ontario, si mes souvenirs sont bons, c'était 162 000 000 $ d'écart; par rapport à la moyenne canadienne, c'était 189 000 000 $, si mes souvenirs sont bons. Alors, là, prenez les 162 000 000 $, nous avons injecté 55 000 000 $ dans la base. Cet écart-là, c'était avant l'injection des 55 000 000 $, je tiens à le rappeler, et le député d'Abitibi-Ouest ne l'a pas saisi encore.

M. Pautel: Donc, il en reste 107 000 000 $, là.

M. Ryan: 107 000 000 $. Puis là, si nous avons l'augmentation des frais de scolarité qui rapportent 40 000 000 $, vous êtes ramenés à 65 000 000 $, je pense, 65 000 000 $ ou 67 000 000 $.

M. Pautel: 67 000 000 $.

M. Ryan: Je pense que c'est 42 000 000 $, le produit réel, 41 000 000 $ ou 42 000 000 $. Là, vous comprenez pourquoi la Conférence des recteurs a dit: Ça prendrait 50 000 000 $ de plus.

M. Pautel: Est-ce que vous allez verser 50 000 000 $ de plus?

M. Ryan: Ce sont les données sur lesquelles on s'est entendus. On peut bien jouer avec les chiffres tant qu'on voudra, mais il faut bien les ramener à leur mérite. C'est pour vous montrer que l'injection de crédits nouveaux dans la base de financement de cette année n'est pas un geste insignifiant. C'est un geste très important. La part demandée aux étudiants est un autre pas très important et il reste l'autre. Là, les universités nous ont dit...

M. Pautel: Cela veut dire, si je vous comprends bien...

M. Ryan: Pardon?

La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous laisser continuer le ministre, s'il vous plaît, et vous prendrez la parole après.

M. Pautel: D'accord, excusez-moi.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Je ne voulais pas que vous pensiez que j'étais complice de cette décision. Alors, il reste l'autre partie. Il reste encore un montant d'une cinquantaine ou d'une soixantaine de millions, nous en convenons. Il n'y a pas de discussion là-dessus. Il y a des responsabilités qui incombent à la société québécoise. J'ai dit, hier, qu'avec les choses qui nous arrivent d'Ottawa ça complique notre besogne, ça complique notre besogne singulièrement pour l'exercice à venir, c'est évident. Mais voilà les données du problème et, dans ce contexte, encore une fois, est-ce que vous ne trouvez pas qu'une participation des étudiants aujourd'hui est une chose qui serait non seulement justifiée mais raisonnable et nécessaire?

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel.

M. Pautel: Tout d'abord, pour bien éclaircir ce que vous m'avez dit, si j'ai bien compris donc, le gouvernement ne coupera pas ses subventions à la suite de la hausse des frais de scolarité. Contrairement à ce qui s'est passé en Ontario ou ailleurs, vous nous assurez que le gouvernement va maintenir son niveau actuel en termes de PNB en dollars constants, son niveau

de subventions en éducation.

M. Ryan: Ça, nous aurons les décisions gouvernementales lors du dépôt des crédits et du budget. C'est là que le gouvernement annonce ses intentions en matière financière pour l'exercice à venir. Vous comprendrez comme moi que chaque ministre n'est pas libre de lancer ça dans toutes les directions avant le temps parce qu'il...

M. Pautel: C'est dommage parce que j'avais une deuxième question.

M. Ryan: Mais je prends en note la question, cependant, et je vais la référer, oui, oui, oui, à qui de droit.

M. Pautel: Vous la référerez à M. Gérard D. Levesque. Donc, dans la perspective où si jamais, par malheur là, il y avait effectivement une atteinte à l'accessibilité, 5 % ou 10 % ou 15 % - disons qu'on va prendre 5 %, ce qui est conservateur, quant à nous - est-ce que vous nous assurez également que les subventions gouvernementales ne seront pas coupées? C'est-à-dire que, même si elles sont fixées par le nombre d'étudiants, on n'enlèvera pas 5 % de subventions gouvernementales aux universités? Puisqu'on vise à améliorer la qualité de l'enseignement, puisque, de toute manière, on manque d'argent même après le dégel des frais de scolarité, est-ce que vous pouvez nous assurer que, si jamais il y a une atteinte à l'accessibilité, le gouvernement va maintenir son niveau actuel de subventions, néanmoins?

M. Ryan: Le gouvernement prendra ses responsabilités, à l'époque. Je ne sais même pas si je serai encore ministre, moi, à ce moment-là, parce que c'est tellement lointain, l'horizon que...

M. Pautel: Je sais mais, à l'heure actuelle, c'est vous qui êtes ministre. Moi non plus, je ne sais pas si je serai porte-parole, à ce moment-là.

M. Ryan: L'horizon que vous envisagez est tellement lointain et improbable qu'il y a de bonnes chances que, si jamais il se réalise...

M. Pautel: Ça pourrait être l'année prochaine, M. le ministre.

M. Ryan: ...il y aura eu deux ou trois autres ministres après moi.

M. Pautel: Enfin!

M. Ryan: Ce sont des perspectives hypothétiques. Vous comprenez bien que moi, comme ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, je fais tout ce qui est possible pour convaincre mes collègues de la deputation - parce que c'est l'Assemblée nationale qui vote les crédits - et du cabinet qui les propose de l'importance très grande de l'enseignement universitaire dans l'ensemble de l'activité collective au Québec. C'est ma responsabilité de le faire et je pense que je le fais avec toute l'énergie possible.

M. Pautel: Vous êtes en train de me dire, M. le ministre, que le Conseil des ministres ou le Conseil du trésor - là, je ne situe pas très bien lequel, dans toute cette dynamique parlementaire, a fait quoi - donc, il y a un conseil quelconque...

M. Ryan: II ne manque pas grand-chose.

M. Pautel: ...qui a décidé de hausser les frais de scolarité dans le but d'améliorer la qualité de l'enseignement au Québec, l'éducation, en constatant, grâce à votre excellent travail, que les universités avaient besoin de plus d'argent et que ce conseil, en même temps, ne s'est pas engagé, ne serait-ce que moralement envers lui-même, à maintenir ses subventions, qu'il ne sait pas encore, à l'heure actuelle, le gouvernement du Québec ne sait pas s'il va ou non se servir de la hausse des frais de scolarité pour économiser sur le dos des étudiants.

M. Ryan: Je vais vous dire une chose. Ce n'est pas une décision qui est venue de la cuisse de Jupiter, ça! Si vous avez suivi la littérature sur le sujet, vous saurez que ça fait longtemps qu'il en était question et le Conseil des universités a commencé à recommander cet ajustement des droits de scolarité au gouvernement, il y a déjà cinq ans, et il n'a cessé de le répéter depuis ce temps-là. La Conférence des recteurs des universités a fait la même chose. Alors, ce n'est pas un thème nouveau et ce n'est pas le secrétariat du Conseil du trésor qui a sorti ce petit rat-là du tiroir, disant au ministre: Tu vas l'avaler aujourd'hui. Ce n'est pas ça qui s'est passé du tout. C'est une évolution qui s'est faite, une évolution à laquelle il reste à associer quelques éléments comme vous, je pense bien qu'on va y réussir; ça, c'est un premier point.

Deuxième point, le gouvernement a annoncé clairement ses couleurs pour l'année 1989-1990. Il a injecté 55 000 000 $ dans la base de financement, dont 21 000 000 $ étaient des crédits nouveaux et dont 44 000 000 $ venaient renforcer les choses qui avaient été données de manière provisoire, 34 000 000 $, de manière provisoire. Or, cela a été rendu permanent et récurrent. C'est ça qui est la différence. Il a annoncé ses couleurs pour cette année. Et d'ailleurs, si vous avez entendu les recteurs des universités qui étaient ici hier, ils sont tous venus dire merci au gouvernement. Ils l'ont dit, ils l'ont apprécié, et ils nous ont déjà adressé des critiques en commission parlementaire. Les députés s'en souviennent ici. Ils nous ont

"blastés" à certains moments parce que nous ne faisions rien, surtout sous le gouvernement précédent, évidemment. Mais ils sont venus dire hier qu'ils appréciaient énormément le pas très important qui a été fait. Le gouvernement n'a pas fait ça pour s'amuser. Il l'a fait parce qu'il est conscient du problème. Et le ministre des Finances ajoutait dans son discours sur le budget: Le gouvernement est conscient qu'il faut faire encore davantage et il le fera en conformité avec le niveau de ressources dont il disposera. Ça, c'est la position du gouvernement.

Pour le reste, je ne peux pas aller plus loin aujourd'hui. Mais il n'y a aucun ministre qui pourrait aller plus loin aujourd'hui dans quelque secteur de l'activité gouvernementale que ce soit parce qu'il y a une règle de discipline et de solidarité qui nous lie qui est l'essence même du régime britannique des gouvernements.

M. Pautel: D'ailleurs, certains recteurs comme ceux de l'Université de Montréal et de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue vous ont demandé d'étudier l'impôt postuniversitaire également.

M. Ryan: Je le mets à l'ordre du jour.

M. Pautel: Sur la question maintenant de la gestion universitaire, nous croyons savoir qu'il incombe comme tâche au Vérificateur général, dans son mandat général, justement, de vérifier toutes les sommes d'argent sous forme de subventions ou quoi que ce soit que le gouvernement, en somme, que la société distribue, de telle manière à s'assurer que les objectifs qui vont de pair avec les subventions sont effectivement atteints. Est-ce que vous comptez mettre en place un mécanisme quelconque ou encore recourir au Vérificateur général pour vous assurer de la bonne gestion des administrations universitaires au Québec avant d'augmenter de quelque manière que ce soit l'apport aux universités?

M. Ryan: Non. Ma réponse est négative. M. Pautel: Pourquoi?

M. Ryan: Ma réponse est négative parce que ça se fait déjà. Ça se fait déjà. Nous requérons des universités continuellement des renseignements très précis sur la manière dont elles utilisent les ressources mises à leur disposition. Je vais vous donner un exemple bien précis et très récent. J'ai fait allusion hier aux négociations qui se poursuivent à l'Université Laval avec les professeurs. J'avais mandaté mes collaborateurs pour qu'ils aillent chercher toutes les données sur cette négociation-là parce que je ne veux pas me retrouver éventuellement avec un résultat de négociation qui m'apparaîtrait incompatible avec la politique gouvernementale. Je l'ai dit à la Conférence des recteurs il y a un mois et demi: Les négociations s'en viennent dans votre secteur; il y a une politique dans le secteur public qui vaut pour vous autres aussi. Et je vous assure qu'on y veille de près. On y veille de près. On n'est pas obligés d'avoir un gars qui s'appelle inspecteur avec une casquette et le titre d'inspecteur et on te l'envoyé demain matin. Ce n'est pas comme ça qu'on traite les universités. Je vous assure que, s'il y avait des endroits où les renseignements n'étaient pas à ma satisfaction, je verrais à ce que nous les obtenions. Et je peux demander en tout temps au vérificateur des comptes du Québec de faire une enquête dans un secteur qui m'apparaît source de problèmes. Et, si ce moyen-là ne marche pas, je peux toujours demander au gouvernement d'instituer une enquête n'importe quand. De ce côté-là, les pouvoirs du gouvernement sont considérables.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député de Vimont pour une légère question.

M. Fradet: J'aurais une question à poser à M. Pautel. Moi, je n'ai pas eu de prêt et bourse; alors, il y a peut-être des questions que je ne connais pas. Mais je voulais parler de la contribution parentale. Tout à l'heure, vous avez dit que 60 % des parents ne payaient pas la contribution parentale. Lorsque vous dites 60 %, j'aimerais savoir si c'est 60 % des parents qui ne paient pas en dollars ou... Parce que des parents peuvent contribuer. Moi, je sais bien que mes parents ne contribuaient probablement pas à mes études en dollars, mais j'étais logé et nourri, par contre. Et je pense que ça c'est une contribution parentale. J'aimerais juste savoir, les 60 %, c'est quoi? Parce qu'ici j'ai une étude, une enquête sur le mode de vie des étudiants au niveau postsecondaire et on me dit, concernant la proportion des étudiants ayant reçu une contribution financière, que pour les frais de subsistance pour les résidents c'est 98 %, 98,3 %, et pour les non-résidents, 78,8 %. Et là on peut s'en aller avec les frais de logement, les frais de garderie, les dépenses reliées aux études et tout ça, pour un ensemble d'environ 92 % pour les frais de subsistance et ça varie selon les critères. Je voudrais juste avoir des informations sur les 60 % dont vous parlez, de la contribution parentale. (13 h 15)

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel.

M. Pautel: Oui. Je tire ce chiffre de l'enquête sur le mode de vie des étudiants au niveau postsecondaire 1986 et ce sont des statistiques du gouvernement du Québec. Les 60 % concernent les étudiants au niveau de la contribution parentale financière. Donc, ce que ça signifie, c'est que le nombre d'étudiants pour lesquels le gouvernement évalue - cela ne vous

aurait pas concerné, cela ne concerne que les étudiants qui bénéficient du régime d'aide financière - qu'ils doivent recevoir une contribution parentale financière, parce que le gouvernement l'évalue financièrement, 60 % d'entre eux ne reçoivent rien du tout, 40 % reçoivent une contribution partielle. Et au niveau de la contribution, je peux vous citer ici l'étude, les parents contribuent presque tous d'une manière ou d'une autre aux coûts occasionnés par les études dont vous parliez, logement, nourriture ou autres, que ce soit en donnant un certain montant d'argent ou en fournissant le logement ou la nourriture, mais cela n'est pas quantifiable.

Cela signifie quand même, et c'est l'étude du gouvernement, qu'au niveau strictement financier il y a des étudiants qui ne bénéficient pas de la contribution parentale et qui doivent donc se débrouiller avec des revenus qui, déjà, au départ, sont inférieurs au seuil de pauvreté et qui, de plus, le sont davantage à cause de cela. Ce que nous proposons simplement, c'est de mettre en place des mesures qui vont s'assurer qu'on va tenir compte d'une contribution qui est effectivement versée et de celle qui est effectivement versée de telle sorte que ce sera beaucoup plus juste et réaliste.

M. Fradet: Je pense qu'on a les deux cas précis qui nous concernent, en tant qu'étudiant résident et étudiant non résident, c'est sûr et certain que la contribution parentale, lorsqu'on est étudiant non résident, pourrait plus facilement se chiffrer en dollars. Je pense que ça, c'est sûr et certain et je ne le nie pas. Mais, par contre, pour un étudiant qui est résident, je pense qu'on pourrait considérer que la nourriture et le loyer pourraient être une contribution parentale acceptable aussi, d'après moi.

M. Pautel: On le considère tout à fait.

M. Fradet: Je pense que dans ce sens-là on pourrait prendre les 60 % et jouer avec, en tout cas pour moi. C'est sûr et certain. Peut-être que l'étude a été faite par le gouvernement, comme monsieur le mentionne ici. Ce sont des questions sur lesquelles je m'interroge.

M. Gendron: Rapidement, la réponse, vous l'avez - excusez, M. le député - c'est ton propre gouvernement qui n'en tient pas compte dans le calcul. Alors, tout le monde est d'accord que ça pourrait être le logement et l'habitation. Mais ce n'est pas ça. C'est très simple la question.

M. Fradet: Non, mais je pense que dans la réforme...

M. Gendron: C'est que la contribution parentale, c'est du fric.

La Présidente (Mme Hovington): Je vous en prie. La parole était au député de Vimont.

M. Gendron: Et le fric n'est pas versé par les parents. Ce n'est pas compliqué.

M. Fradet: La contribution parentale peut être du fric lorsqu'on est des étudiants non résidents, mais je pense qu'ici, selon les statistiques sur l'aide financière aux étudiants, rapport 1988-1989, où on avait la cotisation des parents, la cotisation parentale était, pour les étudiants non résidents, de 875 $ et si je me fie à la réforme à laquelle on travaille présentement, au projet de loi 25, il y aurait des modifications à cette cotisation parentale qui ramèneraient le seuil de cotisation à un niveau plus appréciable. Je voulais juste avoir des renseignements et je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le député de Vimont. Très rapidement, parce que le temps court.

M. Pautel: Malheureusement, on n'a pas eu l'occasion dans nos pourparlers jusqu'à présent de traiter de cette question. Entre autres, la question des étudiants à temps partiel. Puisque la date sera déterminée par vous, M. le ministre, pouvez-vous nous faire part d'une estimation, à savoir quand les étudiants à temps partiel, les 52 % des étudiants universitaires pourront-ils bénéficier de l'aide financière?

La Présidente (Mme Hovington): Rapidement, il nous reste deux minutes.

M. Ryan: Ça ne pourra pas être pour septembre 1990.

M. Pautel: Pardon?

M. Ryan: Ça ne pourra pas être pour septembre 1990.

M. Pautel: Mais pour quand? Je me doute que ça ne sera pas pour septembre.

M. Ryan: Quand nous aurons trouvé les réponses aux problèmes qui ne sont pas encore complètement résolus.

M. Pautel: Merci, M. le ministre.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.

M. Gendron: M. Pautel, ainsi que vos collaborateurs, je voudrais sincèrement vous remercier pour la qualité de votre présentation absolument remarquable, pondérée et impressionnante par la qualité des arguments évoqués. Là, je pense que vous aviez raison tantôt, il faudrait être plus sensible aux arguments évoqués, en

tout cas, pour ce qui regarde le ministre, même si c'était très impressionnant de vous entendre.

Un premier commentaire. Le ministre de l'Éducation tantôt, et ça lui arrive fréquemment de mêler toutes les affaires... Moi, j'ai été cinq ans au Conseil du trésor, je n'ai jamais vu un secrétariat du Conseil du trésor faire une analyse de quelque besoin que ce soit à la demande du Conseil des universités ou du Conseil des collèges. C'est important que vous ne preniez pas ça pour une vérité. C'est inexact. Seules les analyses faites par le Conseil du trésor proviennent de décisions gouvernementales et, dans tout gouvernement, il y a une instance qui prend les décisions, c'est le Conseil des ministres. Bien sûr, le Conseil du trésor émet des balises, des politiques, mais, toutes ces politiques sont sanctionnées, ratifiées par le Conseil des ministres. Donc, il est évident que la cuisse de Jupiter dont on vous parlait tantôt, c'est le ministre actuel et c'est le gouvernement libéral. Ça, il faut bien identifier ça. C'est le gouvernement libéral qui décide d'être la cuisse de Jupiter dans le présent cas, pour ne pas qu'il y ait méprise.

Dans votre mémoire, M. Pautel, il est évident qu'on reprend les grandes orientations qu'on a soulevées lorsque j'ai eu l'occasion de faire mes remarques préliminaires, hier. C'est évident que vous faites, noir sur blanc, la preuve que leur décision ne corrige en rien les deux problèmes qui ont été signalés au tout début de cette aventure, à savoir: Est-ce que le milieu universitaire est sous-financé? La réponse, c'est oui. Est-ce que le dégel va régler le sous-financement? La réponse, c'est non. Donc, on n'est pas plus avancés sur votre objectif de conserver toutes les garanties concernant l'accessibilité.

Moi, je vous donne raison. On n'a pas les garanties de conserver l'accessibilité, et, je le répète, en ne me basant même pas sur les études. Moi, je ne me base sur aucune étude; je me base uniquement sur un principe qu'on ne peut pas avoir un système pendant 25 ans et dire: C'est grâce à ça qu'on a comblé des retards terribles au niveau de l'accessibilité, on y met fin, ça n'aura pas de conséquences. Ça, je ne peux pas acheter, ce n'est pas compliqué, ça. Je n'ai pas besoin d'études, ça, c'est une question de logique et la logique des choses doit continuer à exister.

Donc, en conséquence, pour ce qui est de l'accessibilité, je suis convaincu que ça aura des effets et le genre d'effets que ça peut avoir, ce n'est pas nécessairement strictement sur l'abandon. C'est peut-être sur des choix de types d'études universitaires, du genre de ce que vous avez très bien relaté: trop d'étudiants à temps partiel. Je le répète, j'aime ça qu'un étudiant fasse plutôt le choix d'aller à l'université, même à temps partiel, plutôt que de ne pas y aller, mais ce n'est pas uniquement comme ça qu'on va relever le défi de l'excellence, de la compétiti- vité, de la mondialisation des échanges, de tout ce qui nous arrive, et vous l'avez très bien exprimé.

Sur les frais de scolarité, vous indiquez également que vous êtes prêts à faire votre part. Vous êtes prêts à faire votre part, mais en considérant que de demander à des étudiants de faire leur part, ce n'est pas toujours au moment où le gouvernement vit une crise budgétaire ou financière - qui n'existe pas, en passant, parce que je ne change pas d'avis, la situation financière du gouvernement du Québec, toute comparaison avec d'autres, est en excellente santé. Je ne dis pas que sur le plan de l'économie il n'y a pas des indications de ralentissement, mais la situation financière du gouvernement du Québec, au moment où on se parle, n'est pas du tout en mauvaise santé financière. D'ailleurs, il se vantait, il y a à peu près un mois, que la cote du Québec avait été relevée. Règle générale, ça ne prend pas encore là un gros quotient pour faire la relation. Si c'était si terrible que ça, je ne suis pas sûr que la cote du Québec aurait été relevée, il y a à peu près cinq ou six semaines.

Une voix:...

M. Gendron: Non, ça, ça n'a rien à voir avec le gouvernement. S'il y a quelque chose qui n'a rien à voir avec ça, c'est...

Donc, quand vous indiquez que vous voulez faire votre part, je pense que vous êtes raisonnables, mais vous voulez le faire à un moment où il y aurait plus d'équité dans le système et c'est pour ça que vous parlez de l'impôt postuniversitaire.

Quant au régime de prêts et bourses, écoutez, on ne peut pas vous blâmer de ne pas l'avoir analysé adéquatement, correctement. Vous avez - si je ne me trompe pas - 23 recommandations précises, bien faites, caractéristiques d'une bonne analyse qui montre que votre évaluation vous amène à conclure que la majorité des modifications proposées ne sont que des améliorations nécessaires mais, tout compte fait, mineures - là je vous cite - qui ne rendent pas le régime assez souple, assez adéquat pour compenser la hausse des frais de scolarité.

Vous dites également que ça ne corrige pas les carences du monde moderne 1990 en éducation, que ce soit le niveau d'endettement, que ce soient les critères d'admissibilité restreints, que ce soient différents éléments sur lesquels il n'y a pas d'adaptation significative pour dire: Écoute, ce n'est pas un cheval, un lapin, on peut regarder ça. Là, vous dites: II y a, premièrement, sur le principe du dégel, quelque chose qui apporte une brisure sévère à ce que nous étions comme société. Encore là, je vous cite dans vos deux premières phrases. Vous avez dit: Nous, on veut conserver l'accessibilité avec toutes les garanties et, deuxièmement, on veut faire le choix de l'éducation. C'est vous qui avez dit ça: On veut

Taire le choix de l'éducation. Et vous ne sentez pas qu'avec les décisions que s'apprête à prendre ce gouvernement il fait la preuve qu'il fait le choix de l'éducation et je partage ce point de vue là. Vous avez posé plusieurs questions au ministre lui-même et souvent c'est tout autant utile que celles qu'on pourrait vous poser. Moi, je n'ai pas beaucoup de questions à vous poser, votre mémoire est clair, il est très clair, il est facilement compréhensible et, a fortiori, il a le mérite d'avoir été très, très, très bien rendu, très bien exposé. Vous avez également des arguments très très soutenants pour essayer de convaincre le ministre de l'Éducation de cheminer un peu plus dans des recommandations qui permettraient, d'une part, de bonifier le régime et de questionner sa vérité absolue sur le geste qu'il s'apprête à poser en disant: Bien, il n'y a rien là, ça n'aura pas de conséquences sur l'accessibilité puis c'est mince, même. Parce que, écoutez, autre fausseté, la CREPUQ, ils sont venus, hier, je le sais, mais je lis dans leur mémoire une petite phrase, là. Au même moment où ils disaient au ministre: Le bazou est dans le bon chemin - ça, c'est vrai qu'ils disaient ça - ils ajoutaient, pour être certain que ça marche un peu puis que le bazou ne prenne pas le champ: On rappelle - et là, c'est la CREPUQ qui parle - au ministre et au gouvernement la nécessité de faire sa part. Ils ne disaient pas. Parce qu'on pense que tu l'as faite, parce que le mémoire, ils ne l'ont pas écrit il y a trois ans, il y a deux ans, ils l'ont livré hier.

Hier, dans le mémoire, ils disaient: Faire votre part, c'est nous donner la garantie de 50 000 000 $ minimum pour la prochaine année en argent neuf, cette fois-ci, pas en arithmétique comptable, comme il a essayé encore de faire accroire. Toutes les universités en même temps nous ont dit, hier: Nous, on n'a touché que 21 000 000 $ dans votre mécanique chinoise de budget. Ce n'est pas 52 000 000 $, puis ce n'est pas 55 000 000 $. Puis, il me dit toujours: M. le député ne comprend pas ça. Moi, je comprends bien ça. Moi, ce que je comprends, surtout, c'est ceux à qui on prétend qu'on leur a donné de l'argent. Y a-t-il quelqu'un qui sait plus ce qu'il a reçu que ceux auxquels la problématique budgétaire devait donner satisfaction? Et tout le milieu universitaire nous dit: Écoutez, nous n'avons reçu que 21 000 000 $ d'argent neuf. J'aime bien mieux me fier à ceux a qui ont était supposé faire plaisir qu'à ceux qui disent qu'ils l'ont donné. Pourquoi ces gens-là mentiraient-ils? Ce sont eux qui l'ont reçu. Alors, ils ont dit: On a reçu 21 000 000 $. Et ils demandent un minimum de 50 000 000 $. Jamais le ministre ne nous a donné aucune indication. D'ailleurs, il nous a donné carrément les indications qu'il n'y aurait pas d'argent neuf, puis il essaie de faire accroire qu'une des raisons principales, c'est à cause du budget fédéral de M Wilson. M. Wilson, à matin, il les a réveillés un peu. Oui, il y a des coupures; oui, ils ont pelleté leurs responsabilités dans la cour du Québec, mais c'est une enveloppe globale qui est redistribuée au Québec. Il n'y a aucune coupure spécifique dans le budget du fédéral - ce n'est pas parce que je l'aime, ce n'est pas parce que je suis d'accord avec - spécifique à l'enseignement, à la santé, dans le budget Wilson. Zéro. Il y a une coupure dans les transferts généraux à l'ensemble des provinces, y incluant, malheureusement, le Québec, puis, après ça, le Québec fera ses propres choix. Mais si le Québec décide, en plus, de prendre prétexte du budget fédéral pour couper davantage dans l'éducation, bien, il aura fait la preuve que nous on pense qu'il a faite depuis quatre ans. Ce n'est pas vrai que c'est véritablement une priorité pour eux autres.

Deux seules questions pour conclure. Quand vous mentionnez, pour ce qui est de limiter l'endettement des étudiants, que, suite à l'obtention d'un diplôme universitaire, un étudiant qui aurait contracté 10 000 $ d'endettement devrait, pour une poursuite d'études subséquentes, bénéficier uniquement d'une bourse plutôt que d'un prêt pour ne pas augmenter son endettement, avez-vous fait une évaluation à savoir combien ça pourrait représenter d'étudiants au Québec?

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel.

M. Pautel: Non. Nous, on recommande au gouvernement d'agir ainsi. On pense que c'est à lui de faire ces évaluations. À notre avis, on lui avait déjà recommandé, par le passé, de donner une ristourne de 25 % - là, je parle des universités membres, la FEEQ n'existait pas à l'époque - à tous les niveaux d'études universitaires. On est donc heureux de constater que ça va être le cas pour le niveau supérieur, malheureusement pas pour le niveau du bac. Donc, le gouvernement a évalué la situation, j'imagine, et a jugé que la solution pouvait être mise en application.

À notre avis, étant donné que déjà on constate qu'il y a peu d'étudiants ou, en tout cas, qu'on n'a pas assez d'étudiants à la maîtrise et au doctorat au Québec, ce serait, justement, une mesure incitative très importante que de leur permettre de pouvoir accéder, par le bénéfice de bourses, aux études supérieures (13 h 30)

M. Gendron: M Pautel, je n'en disconviens pas, parce que je trouve que c'est une excellente suggestion pour inciter davantage à aller dans des cycles universitaires où, manifestement, on est en carence ou en déficience. Mais mon évaluation n'était pas en termes d'argent, elle était en termes de nombre d'étudiants. Ce que j'aimerais savoir, c'est si vous avez fait une évaluation, avec cette mesure-là, à savoir combien d'étudiants, éventuellement, pourraient être intéressés par cette nouvelle bonification au régime des prêts et bourses.

M. Pautel: On peut évaluer... Je sais qu'il y a des études qui ont évalué le nombre d'étudiants qui quittent, au niveau de leur endettement, quand ils sont rendus à 10 000 $, à 15 000 $ etc. Malheureusement je n'ai pas ces données avec moi en ce moment, mais effectivement c'est évident qu'il y aura un impact très considérable, qu'on ne peut pas chiffrer à l'heure actuelle. Mais c'est un point à soulever.

M. Gendron: Dans votre mémoire également, en rappelant au ministre de l'Éducation qu'il aurait pu prendre ses responsabilités, et le Parti libéral aussi, pour évaluer un peu plus sérieusement comment pourrait fonctionner, concrètement, l'application d'un impôt postuniversitaire... Et là je vous cite, vous dites: Nous sommes d'accord pour contribuer au financement des universités, par le biais d'autres mesures ne constituant pas une barrière à l'accessibilité, autres que l'éventuel impôt postuniversitaire. C'est quoi, précisément, les autres mesures sur lesquelles vous avez réfléchi?

M. Pautel: Nous, on voit vraiment ça dans un contexte global, le nouveau partenariat. Donc, ce qu'on veut mettre de l'avant, ce sont des solutions alternatives pour l'ensemble des partenaires. Dans le cas des étudiants, ça pourrait être l'impôt postuniversitaire, mais il existe plusieurs variantes de l'impôt postuniversitaire. En Australie, par exemple, les frais de scolarité sont à 2000 $. Donc ils sont nettement plus élevés, et pourtant les étudiants peuvent y faire face, parce qu'ils ont le choix, soit de payer à l'entrée.

M. Gendron: Ou à la sortie.

M. Pautel:... où soit de remettre le paiement plus tard sous la forme d'un impôt postuniversitaire. Pour notre part, nous évaluons aussi une autre possibilité, c'est que l'impôt postuniversitaire soit universel pour tout le monde. Qu'on doive recourir au régime d'impôt postuniversitaire parce qu'on considère que c'est un régime très juste, qui, justement, permet aux gens de payer selon leur niveau de revenus. Donc, c'est une forme de redistribution, qui permet aussi de contribuer au financement des universités selon le rapport d'investissement qu'on a obtenu par nos études. Donc, comme je le disais tout à l'heure, il y a certains diplômes qui rapportent d'avantage que d'autres, et il y a certaines circonstances économiques qui, parfois, rendent une contribution possible, une autre non. Donc, ce qu'on souhaite, c'est que l'impôt postuniversitaire soit étudié dans toutes les variantes possibles, et on doit tenir compte à la fois d'une question d'orientation sociologique, et là on laisse le soin aux deux partis politiques principaux d'émettre, d'aller de l'avant dans ces avenues, mais également on doit tenir compte, évidemment, des sources de financement qui vont de pair avec cela.

M. Gendron: Moi je tiens à vous remercier énormément, M. Pautel pour la très bonne qualité de votre mémoire et j'espère que le ministre de l'Éducation le relira attentivement. Il y a là d'excellentes suggestions, en particulier sur le volet bonification du régime de prêts et bourses, qui tiendraient compte, surtout, d'adaptations combien requises par rapport à l'évolution de ce régime-là, qui n'a pas été touché depuis plusieurs années.

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel, vous voulez ajouter un petit quelque chose?

M. Pautel: Oui, un tout petit quelque chose. Je sais que tout le monde est très pressé d'aller manger, mais, pour ma part, nous demeurons sur notre faim, parce qu'il y a certains éléments qu'on a soulevés auprès du ministre qui malheureusement sont retombés, sans nécessairement obtenir de réponse immédiate, quoique ce soit très simple. Néanmoins, j'aimerais les rappeler au ministre. Premièrement il y a le cas du seuil de pauvreté. Comme on l'a dit tout à l'heure, il serait important que le régime tienne compte du seuil de pauvreté, pour le maintient de l'unité familiale, ainsi que pour les frais de subsistance. Est-ce que le gouvernement a évalué cette question, si oui, que compte-t-il faire? Et il y a également une autre question très importante...

La Présidente (Mme Hovington): Excusez-moi, vous ne recommencez pas votre mémoire, là.

M. Pautel: Non, non, non.

La Présidente (Mme Hovington): Parce qu'il faut conclure.

M. Pautel: Oui, d'accord. Mais c'est parce qu'il n'y a pas eu de réponse et ce sont des points que nous avons soulevés, entre autres sur l'indexation de la table parentale.

La Présidente (Mme Hovington): D'accord.

M. Pautel: Est-ce que ça va se faire annuellement? Je pense que c'est relativement simple. Est-ce que le gouvernement compte indexer la table de contribution parentale à chaque année, M. le ministre?

M. Ryan: Est-ce que ça épuise les questions?

M. Pautel: Pardon?

M. Ryan: Est-ce que ça épuise les questions?

M. Pautel: Non.

M. Ryan: Mme la Présidente...

M. Pautel: Je vais terminer, dans ce cas-là.

M. Ryan: Pardon?

La Présidente (Mme Hovington): Vous terminez avec cette question-là?

M. Pautel: J'en ai encore trois autres.

M. Ryan: Posez la troisième, on va répondre à toutes ensemble.

M. Pautel: O.K. Deuxièmement, est-ce que vous avez évalué la possibilité d'agrandir le premier palier de la table de contribution jusqu'à 2500 $? Ensuite, est-ce que vous pouvez évaluer la possibilité que le régime d'épargne-études, les versements qui sont donnés par ce régime soient considérés comme la contribution des parents, et non pas un revenu de l'étudiant? Quatrièmement, et finalement, est-ce que le comité d'appel... Est-ce que vous avez évalué aussi la proposition que nous avons faite du comité d'appel, c'est-à-dire qu'il soit composé de quatre personnes seulement, avec des conseillers, et aussi que ce soit un comité décisionnel qui se base surtout sur l'esprit de la loi et non pas sa lettre?

La Présidente (Mme Hovington): C'est tout pour les questions?

M. Pautel: C'est tout.

La Présidente (Mme Hovington): Bon. Je passe la parole au ministre et on reviendra au député de...

M. Ryan: Oui, je pense qu'on va pouvoir répondre rapidement, ça va permettre de terminer l'entretien. Au sujet du seuil de pauvreté, je vous dirai que le seuil de pauvreté admis pour l'aide sociale est actuellement de 10 560 $. Celui qui est admis pour fins de fiscalité par le ministère des Finances est de 10 560 $. Celui qui prévaut pour le régime de prêts et bourses est de 12 745 $. Ça demeure insuffisant par rapport au critère que vous avez proposé, mais ce critère est inaccessible quand on voit cette question dans la perspective de l'ensemble des politiques fiscales et sociales du gouvernement québécois.

La deuxième question... Mon écriture est tellement mauvaise que je ne suis pas capable de la relire. Voulez-vous juste rappeler un mot à la deuxième question, pas toute la question?

M. Pautel: C'est l'indexation de la table annuelle.

M. Ryan: Oui, ça c'est acquis, ça va être fait.

M. Pautel: Et le palier, l'agrandissement du palier.

M. Ryan: Le palier, c'est une chose que nous étudions. Je me demande si le porter.. C'est le palier de 0 à 1000 $, dont vous parlez?

M. Pautel: De 0 à 2500 $ dorénavant.

M. Ryan: Vous voulez qu'il soit porté à 2500 $. Déjà, comme vous le savez, l'augmentation de l'exemption pour les enfants va faire en sorte que le palier va être amélioré. Mais on va regarder également cette possibilité qui a été soulevée dans plusieurs mémoires. Et je crois qu'il ne serait pas impossible d'envisager peut-être de 0 à 2500 $. Mais il y a une chose dont je vous préviendrais tout de suite, c'est que nous ne jouerions pas avec les pourcentages au-delà de ce premier palier. Les pourcentages devraient demeurer ceux qui ont été présentés dans le projet, autrement on refait toute l'économie du projet. Mais ce palier, on va le regarder avec beaucoup d'intérêt et ce n'est pas impossible.

La Présidente (Mme Hovington): C'est tout? Ça va?

M. Ryan: II y avait une autre question, le comité d'appel. Le comité d'appel, comme je l'ai déjà dit, c'est un comité qui comprendrait douze membres, mais qui siégerait par banc de trois personnes pour avoir toute la mobilité voulue, pouvoir se déplacer même, au besoin, aller examiner des cas dans une région, s'il y en avait assez. Il y aurait beaucoup de mobilité là-dedans. Le principe serait qu'il y aurait un élément en provenance de chacun des trois grands secteurs dont il est question dans le projet de loi.

En ce qui touche le pouvoir décisionnel du comité, ça c'est infiniment plus délicat. Je dois répondre non à ça; parce que s'il s'agit surtout de rendre des décisions de caractère plutôt discrétionnaire, je crois que ça doit relever de la compétence du ministre, mais on ne veut pas que le ministre le fasse seul. Il recevra les avis de ce comité-là, il ne pourra pas agir de sa seule motion. Et on ne peut pas donner à ce comité ce pouvoir entièrement, je ne pourrais pas le recommander. Une question se pose à mon esprit cependant. Pour une procédure d'appel qui porterait uniquement sur une erreur possible, là, c'est différent. Je pense bien que c'est une chose qui ne doit pas être exclue, mais je ne veux pas qu'on multiplie les structures indéfiniment non plus. Je pense toujours à l'individu qui se trouve aux prises avec le fonctionnaire: Tu n'as pas le droit. Lui dit: J'ai le droit, je fais appel. S'il n'y a pas de garantie que ça va être examiné de manière impartiale, je pense qu'il y a quelque

chose qui n'est pas satisfaisant.

La Présidente (Mme Hovington): Le député de Gouin voulait poser une dernière question.

M. Boisclair: Est-ce qu'il y a consentement, puisque je ne suis pas membre de cette commission?

La Présidente (Mme Hovington): Parce qu'il n'est pas membre de la commission, est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Gouin pose une question? Allez-y, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: J'aimerais juste essayer de reprendre une démonstration que vous avez essayé de faire ou plusieurs indices que j'ai moi-même essayé de faire à plusieurs reprises, à d'autres occasions, devant le ministre. Vous semblez remettre en question l'efficacité de la gestion de nos universités. Plusieurs de vos associations membres, particulièrement dans la région de Montréal, dénoncent le manque de concertation entre les différentes universités et remettent aussi en question le fameux principe de permanence des professeurs. On discute aussi de la façon dont les professeurs viennent à être agrégés par cooptation de leurs pairs et non pas sans subir d'examen comme ça puisse être le cas dans d'autres pays. Est-ce que d'autres cas vous ont été rapportés par vos associations membres sur, justement, des cas qui pourraient illustrer une gestion déficiente de nos administrations d'universités?

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel?

M. Pautel: Les cas sur lesquels nous nous sommes concentrés particulièrement sont ceux strictement en rapport avec la gestion administrative. Entre autres, quant à nous, l'université, comme nous l'avons écrit dans notre mémoire, doit se concentrer sur ses objectifs fondamentaux qui sont l'enseignement, la recherche et le service aux collectivités. C'est pourquoi toute une politique de désengagement de l'université dans les domaines autres doit être appliquée, à notre avis.

En ce qui concerne la question des professeurs, nous pensons que c'est aux administrations universitaires de veiller à mettre en place de nouveaux mécanismes et c'est pourquoi nous avons surtout mis l'accent sur la question d'une gestion adéquate des services auxiliaires.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Je remercie votre association...

M. Pautel: II y a une question à laquelle on n'a pas répondu, celle du régime d'épargne-études.

La Présidente (Mme Hovington): On a beaucoup dépassé le temps alloué. La présidence a fait preuve de beaucoup de souplesse parce que vous étiez deux groupes importants.

M. Ryan: Mme la Présidente, la réponse c'est non, dans l'immédiat, et je vous expliquerai pourquoi.

La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Alors, nous suspendons les travaux de la commission jusqu'à cet après-midi, 15 heures. Merci d'avoir été avec nous.

(Suspension de la séance à 13 h 40)

(Reprisée 15 h 19)

La Présidente (Mme Hovington): À l'ordre, s'il vous plaît!

J'inviterais les membres de la commission à prendre place. La commission de l'éducation va reprendre ses travaux; son mandat est de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants.

Alors, j'appellerais le groupe suivant, s'il vous plaît, la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal, à prendre place. Alors, il y a M. Nicolas Plourde. Si vous voulez bien vous présenter pour les besoins de la transcription des débats.

FAECUM

M. Plourde (Nicolas): Oui, à ma gauche, Marlène Dallaire qui est permanente politique à la FAECUM et, également, M. Laurent Martin qui est coordonnateur aux affaires académiques à la FAECUM. Tantôt, il y aura M. Cédrick Pautel qui est coordonnateur aux affaires externes à la FAECUM et également porte-parole de la FEEQ, comme vous avez pu le constater tantôt et, moi-même, Nicolas Plourde, secrétaire général de la FAECUM.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, vous pouvez commencer. Vous avez, comme vous le savez, 20 minutes de présentation de mémoire et il y aura 20 minutes à chacun des groupes parlementaires pour faire des échanges avec vous.

M. Plourde: D'accord, merci.

La Présidente (Mme Hovington): Vous pouvez commencer.

M. Plourde: Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, permettez-moi tout d'abord, au nom des étudiants que je représente, de vous saluer

et de vous remercier de nous accueillir aujourd'hui. Le temps qui nous est alloué étant très bref, vous nous permettrez, sans plus tarder, de passera l'essentiel de notre présentation.

Pour débuter, je laisserai la parole à Mme Dallaire, permanente politique de la FAECUM, qui vous entretiendra sur la réforme du régime d'aide financière. Par la suite, j'aborderai la question du financement des universités, plus particulièrement celle des frais de scolarité.

La Présidente (Mme Hovington): Mme

Dallaire, vous avez la parole.

Mme Dallaire (Marlène): D'abord, j'aimerais préciser que notre analyse repose essentiellement sur la somme de nos expériences quotidiennes à l'université et sur nos contacts fréquents et privilégiés avec des étudiants et des étudiantes. On n'a pas l'intention de donner place à des batailles d'experts sur les chiffres ou sur toute autre étude. Ce n'est pas là notre objectif; c'est d'abord de faire des recommandations et des critiques sur l'actuel régime d'aide financière aux étudiants.

Alors, nos recommandations visent essentiellement à mettre à jour le régime d'aide financière, car ce programme révèle actuellement de nombreuses défaillances et il nous semble désuet, à bien des égards. Nos propositions et nos critiques respectent, cependant, le cadre du régime, c'est-à-dire son caractère supplétif, malgré la complexité et les incohérences que cela peut impliquer à l'intérieur du régime.

Le régime des prêts et bourses est, avec le gel des frais de scolarité, le meilleur outil dont nous disposons actuellement pour assurer l'accessibilité aux études supérieures et pour démocratiser l'enseignement. Ce qui lui manque, cependant, c'est du réalisme, c'est de coller au réel et nous sommes justement ici pour vous parler de la réalité, des réalités, en fait, des étudiants et des étudiantes.

En avril 1989, nous avons pris connaissance, avec beaucoup de déception, de ce qu'on appelle désormais, à tort, la réforme des prêts et bourses. Nos préoccupations majeures, qui sont partagées par toute la population étudiante, n'y trouvent, en effet, qu'un très faible écho. 1° Les critères d'admissibilité au régime sont resserrés, à tout le moins pour les bourses, au lieu d'être élargis. 2° Les statuts d'autonomie et de dépendance sont à peine révisés. 3° Le calcul des contributions parentales du conjoint et de l'étudiant lui-même fait l'objet d'ajustements dans certains cas intéressants, mais qui sont largement insuffisants. 4° Le problème de l'endettement est à peine effleuré. Une solution partielle pour les étudiants de deuxième et de troisième cycle est même proposée, mais elle est liée à l'excellence suivant une définition que l'on trouve plutôt bâtarde.

Nos propositions. D'abord, l'accès au régime. Au chapitre de l'admissiblité, nous sommes heureux que le ministre et le ministère fassent preuve d'une certaine ouverture quant à l'éventuelle admissibilité des étudiants à temps partiel au programme d'aide financière. Nous attendons, cependant, avec beaucoup d'impatience l'application de cette mesure.

Quant aux bénéficiaires actuels du régime, les étudiants et les étudiantes à temps plein, le gouvernement ne devrait pas limiter, comme il veut le faire actuellement, le nombre de sessions d'admissibilité aux bourses car cela impose une discrimination vis-à-vis des étudiants qui rencontrent plus de problèmes que d'autres dans leur cheminement scolaire et c'est une discrimination qui est pour nous inadmissible.

Au niveau des statuts maintenant, c'est sans doute là que l'on retrouve le plus d'absurdités, le moins de réalisme. Les définitions des statuts de dépendance et de résidence ne tiennent pas compte de la réalité. Ces deux situations sont présumées, dans une totale naïveté. Il est donc impératif d'y apporter les correctifs suivants: 1° Que le statut de non-résident soit accordé à tout étudiant qui ne demeure plus chez ses parents. Pour nous, cela va de soi. 2° Que le statut d'autonomie soit accordé à quatre nouvelles catégories d'étudiants: d'abord, les étudiants en union de fait. Le régime l'accorde déjà aux étudiants qui sont légalement mariés. Alors, on ne voit pas pourquoi on ne pourrait accorder ce statut aux étudiants qui vivent en union de fait. 2° Statut d'autonomie pour tous les étudiants qui sont aussi des parents, qu'ils aient leur enfant avec eux directement ou qu'ils ne l'aient pas. 3e Statut d'autonomie aussi pour les étudiants qui ne vivent plus chez leurs parents depuis au moins deux ans. On met ici le même plancher, 24 mois, que pour les étudiants provenant du marché du travail qui obtiennent ainsi le statut d'autonomie. 4° On demande le statut d'autonomie pour tous les étudiants universitaires.

Parlons maintenant des contributions. Là aussi, on remarque pas mal de naïveté et de complaisance, principalement au niveau du calcul des contributions parentales. Les contributions parentales sont d'abord surévaluées. Le ministère de l'Enseignement supérieur nous en explique la cause, de façon assez étonnante d'ailleurs, dans la réforme. C'est que les tables pour les contributions parentales sont gelées depuis 1974. Enfin, la majorité des étudiants bénéficiaires de prêts et bourses ne reçoivent pas d'aide de leurs parents. Il y a donc Heu de réviser le calcul des contributions parentales.

Par souci de réalisme et pour donner au régime un véritable caractère supplétif, c'est-à-dire supplétif à des ressources qui sont réellement disponibles, nous croyons que les parents devraient être personnellement avisés par la DGAFE du montant calculé comme étant la

contribution qu'ils doivent verser à leur enfant. Ensuite, pour les parents qui versent une contribution à leur enfant, ils devraient en faire la déclaration écrite, contresignée par l'étudiant, à la OQAFE et au Solliciteur général du Québec. Troisièmement, que, dans le calcul de l'aide financière accordée à tout étudiant, la DGAFE ne retienne que le montant faisant l'objet de cette déclaration écrite comme étant l'aide qui est effectivement versée et qu'en l'absence de telle déclaration écrite il soit présumé que l'étudiant ne reçoit pas de contribution de ses parents. Et, enfin, que cette contribution soit déductible d'impôt pour les parents qui la versent effectivement. Nous croyons qu'une telle mesure serait un incitatif sérieux pour les parents à verser réellement leur contribution parentale.

Toujours dans les contributions parentales, nous croyons que nous devons chercher des solutions pour éviter de les surestimer comme c'est le cas actuellement. Il faut éviter de surestimer les contributions, mais aussi les ressources disponibles des parents, des conjoints, des étudiants. La DGAFE devrait utiliser, à tout le moins, les tables de seuil de pauvreté telles qu'établies par Statistique Canada dans le cas, notamment, du coût de maintien de l'unité familiale.

Je vous ai parlé d'admissibilité, de statut, de contribution; il me reste l'endettement. Depuis le début des années quatre-vingt, le gouvernement ne cesse de réduire la part de l'aide qu'il accorde en bourses. Parallèlement, le niveau des prêts augmente et, avec eux, l'endettement des étudiants. La conjoncture économique, le chômage chez les jeunes qui atteint de plus en plus les diplômés d'université et le fait qu'il n'y ait plus de véritables options gagnantes dans les universités font de l'endettement étudiant un problème de plus en plus alarmant. On entend dans les milieux non étudiants que l'endettement est un incitatif sérieux à terminer ses études dans des délais normaux. Notez que cet incitatif existe seulement pour les bénéficiaires de l'aide financière, les autres peuvent prendre tout leur temps pour étudier.

Nous avons trois recommandations reliées les unes aux autres concernant l'endettement étudiant. D'abord, la remise de dette de 25 % qui est proposée dans la réforme des prêts et bourses devrait s'appliquer également aux diplômés du premier cycle. Voilà, selon nous, un véritable incitatif à obtenir un diplôme. Deuxièmement, pour les étudiants de deuxième et de troisième cycle qui atteignent un endettement de 10 000 $, nous croyons que, dans la poursuite de leurs études, ils devraient avoir accès à des bourses seulement. Et, enfin, pour ce qui est du remboursement, nous croyons que les étudiants devraient pouvoir avoir le privilège de ne remettre que 5 % de leurs revenus annuels après leurs études pour rembourser leurs prêts. Actuellement, il y a des délais de grâce de six mois, une mesure qui s'applique seulement dans certains cas. On aimerait que la mesure soit généralisée et que tout le monde qui en sent le besoin puisse y recourir.

Avant que vous ne me parliez d'argent et que vous ne me demandiez combien coûteraient toutes les recommandations que nous avons faites, je vais céder la parole à mon collègue, Nicolas Plourde, qui vous parlera du financement des universités et du dégel des frais de scolarité.

La Présidente (Mme Hovington): M. Plourde.

M. Plourde: Oui. En août 1986, la FAECUM était venue ici à la commission permanente de l'éducation pour discuter du financement des universités. A ce moment, nous nous étions fermement opposés au dégel des frais de scolarité et aujourd'hui, encore plus que jamais, c'est notre position. Donc, considérant le lien étroit qui existe entre le régime d'aide financière et les frais de scolarité, vous nous permettrez de réitérer notre position à ce sujet.

En 1960, la décision de geler les frais de scolarité fut l'objet d'un choix de société pris à la lumière du rapport Parent. Aujourd'hui, le gouvernemont du Québec a annoncé, sans tambour ni trompette, tout simplement son intention de remettre en question cet important acquis. Ce geste posé en catimini derrière les murs du Conseil des ministres est, selon nous, inacceptable. Avant de hausser ainsi les frais de scolarité, cela aurait été à tout le moins normal, du moins la moindre des choses, de faire ce que le gouvernement du Québec a fait il y a 30 ans, c'est-à-dire susciter un véritable débat de société autour de cette question et ce, avant de prendre la décision qu'il a prise et à laquelle il nous confronte aujourd'hui.

Actuellement, il nous est même impossible d'obtenir une copie du libellé de cette décision, tellement elle est cachée et tellement elle a été prise sans débat, copie qui pourrait nous servir, si on le juge utile, à déterminer si on peut attaquer cette décision devant les tribunaux. On ne peut même pas exercer ce droit, on ne peut même pas vérifier si on a ce droit actuellement, ce qui, selon nous, est, encore une fois, inacceptable. Cette façon de faire nous inquiète au plus haut point. Est-ce à dire que, demain, le gouvernement, du Québec, par simple caprice, pourra ainsi remettre en question d'autres acquis tout aussi importants, telle, par exemple, l'universalité des soins de santé? Malheureusement, rien ne nous porte à croire le contraire.

La FAECUM est contre le dégel des frais de scolarité parce qu'il existe, selon nous, d'autres solutions et parce que cette mesure aurait pour conséquence de compromettre l'accessibilité aux études universitaires. Pour régler véritablement le problème du financement des universités, la FAECUM propose plutôt, comme la

FEEQ et comme plus de six associations étudiantes universitaires, un nouveau partenariat qui, selon nous, serait beaucoup plus efficace pour sortir les universités du marasme dans lequel elles se trouvent présentement. Ce nouveau partenariat ferait appel à un effort concerté de quatre grands acteurs, soit le gouvernement du Québec, les entreprises, les universités et, évidemment, les étudiants.

En haussant les frais de scolarité, le gouvernement du Québec a laissé entendre que cette mesure réglerait à elle seule le sous-financement des universités. Selon ses prévisions, en 1990-1991, 41 000 000 $ de plus d'argent neuf serait injecté et, en 1991-1992, 83 000 000 $ de plus. Pourtant, pour l'année 1988-1989, le Conseil des universités avait évalué que les universités auraient eu besoin de 120 000 000 $ de plus pour dispenser ce qu'il appelait un enseignement de qualité comparable à des normes pancanadiennes. Donc, c'est bien clair pour nous que la hausse des frais de scolarité ne résoudra pas le problème du sous-financement des universités, d'autant plus qu'elles ont accumulé, selon les sources qu'on consulte, un déficit variant entre 150 000 000 $ et 200 000 000 $. Comment, donc, demander aux étudiants aujourd'hui de contribuer davantage au financement des universités sans nous assurer que celles-ci s'en trouveront mieux?

L'université ne profite pas qu'aux étudiants. Elle bénéficie aussi à la société et aux entreprises. Or, le gouvernement nous demande aujourd'hui de majorer notre contribution au financement des universités, mais sans nous assurer qu'il fera de même. Pis encore, le gouvernement du Québec a effectué, de 1982 à 1987, des compressions de 61 200 000 $ et des prélèvements de 70 900 000 $ dans ses subventions aux universités et ça, ce sont des chiffres du Conseil des universités. De plus, si ces subventions avaient été régulièrement indexées au coût de la vie et si elles avaient tenu compte de la croissance des clientèles, elles auraient été plus élevées en 1988-1989 d'un montant de 127 500 000 $. Encore là, ce sont des chiffres du Conseil des universités. De plus, à la fin de la décennie des années soixante-dix, les subventions du gouvernement du Québec aux universités représentaient 4,6 % de ses dépenses alors qu'en 1988-1989 elles n'en représentent plus que 3,88 %. Donc, on peut constater avec acuité que le gouvernement du Québec se désengage progressivement du financement des universités. Il est faux, je pense, de blâmer les étudiants et le gel des frais de scolarité pour le sous-financement des universités. À notre avis, c'est la faute des gouvernements, c'est la faute des coupures et non pas d'une politique, celle du gel des frais de scolarité qui, au contraire, a grandement amélioré l'accessibilité.

Donc, nous proposons que le gouvernement du Québec maintienne et même augmente sa contribution au financement des universités et que la formule de financement des universités dite historique, actuellement, et qui est très déficiente selon plusieurs, soit révisée afin de tenir compte du coût moyen disciplinaire.

Maintenant, qu'en est-il des entreprises? Au Québec, elles contribuent pour environ 3 % du budget des universités, alors qu'en Ontario ce pourcentage est beaucoup plus élevé. En France, par exemple, il atteint même 20 %, apparemment. En 1972, les entreprises contribuaient pour 4,8 % de l'assiette fiscale au Québec alors qu'en 1986 elles contribuaient pour 1,4 %. Donc, pendant que le fardeau fiscal des particuliers n'a cessé d'augmenter, celui des entreprises n'a cessé de diminuer. En France, un impôt direct prélevé auprès des entreprises sert ainsi, notamment, à financer les universités. En conséquence, on considère qu'un tel impôt devrait être prélevé auprès des entreprises d'ici, au Québec, et c'est l'une de nos revendications en ce sens.

Les objectifs fondamentaux de l'université sont l'enseignement, la recherche et les services à la collectivité. Nous croyons qu'elle devrait donc se concentrer dans ces domaines. Plusieurs services gérés par les universités sont déficitaires. À l'Université de Montréal, il y a plusieurs exemples en ce sens. Selon nous, cette situation est inacceptable. Avant de rajouter de nouvelles sommes, comme on nous le demande, il y a lieu, à notre avis, de prendre les mesures qui s'imposent pour rationaliser la gestion universitaire. Par exemple, le meilleur exemple à l'Université de Montréal, c'est qu'en 1976 les services aux étudiants qui avaient accumulé un déficit de 900 000 $ ont été pris en main par l'association étudiante, la fédération étudiante, et aujourd'hui, à l'heure où on se parle, les services aux étudiants accusent un surplus de 1 000 000 $. Donc, vous voyez qu'avec une gestion dynamique et avec la participation, par exemple, des étudiants à cette gestion, on a pu redresser la condition financière du moins d'un service, ce qu'il serait possible de faire pour plusieurs autres services, ne serait-ce que, par exemple, le stationnement. À l'Université de Montréal, par exemple, encore, les services alimentaires, qui étaient chroniquement déficitaires il y a quelques années, ont été confiés à un concessionnaire, à l'entreprise privée; maintenant, ils font des surplus et les emplois ont quand même été protégés.

Donc, en ce sens, nous proposons que les universités fassent preuve de plus d'ouverture et de transparence dans leur gestion; que les universités se dotent, dans les plus brefs délais, d'une politique de faire-faire, particulièrement pour les services auxiliaires déficitaires. Finalement, nous demandons que les universités acceptent que les étudiants soient associés étroitement a leur gestion et aux prises de décisions s'y rattachant. À l'Université de Montréal, on a pu constater que cela a été pour

le bien de tous. On pense que, si cette formule de coopération était étendue à plusieurs autres services et même à plusieurs universités, tout le monde s'en tirerait très bien.

Finalement, si le gouvernement du Québec, les entreprises et les universités, ces trois grands partenaires, étaient prêts à faire leur part, nous disons, nous, les étudiants, que nous serions également sûrement disposés à contribuer davantage au financement des universités si nous pouvions le faire quand nous en avons les moyens, c'est-à-dire lorsque nous avons un emploi, après nos études, lorsque nous avons un salaire, lorsque nous gagnons de l'argent. En Australie, par exemple, les étudiants ont le choix de payer leurs frais de scolarité immédiatement ou encore de demander que le paiement en soit différé. S'ils choisissent cette dernière option, les étudiants australiens sont alors assujettis, après leurs études, à un impôt supplémentaire, mais progressif, pendant dix ans ou jusqu'à ce que le montant de leurs frais de scolarité ait été récupéré. À ce sujet, il y aura l'Association des étudiants et des étudiantes des deuxième et troisième cycles de l'Université McGill qui pourra vous entretenir un petit peu plus sur le système australien lors de la présentation de son mémoire. C'est un système qui nous semble intéressant et qui vaudrait au moins la peine qu'on l'étudié.

Cette formule, comme je le dis, permet donc aux étudiants de contribuer au financement des universités sans que l'accessibilité aux études supérieures ne soit compromise, ni même menacée. Donc, en conséquence, nous recommandons que le gouvernement du Québec évalue la possibilité d'abolir les frais de scolarité et les frais afférents, et de prélever la contribution des étudiants au financement des universités par le biais d'un impôt postuniversitaire.

C'est en ce sens que nous demandons au gouvernement du Québec qu'il revienne sur sa décision de hausser les frais de scolarité jusqu'à ce qu'une commission d'enquête composée de représentants du gouvernement du Québec, des entreprises, des universités, des professeurs et du mouvement étudiant ait pu étudier les alternatives à cette hausse des frais de scolarité.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez déjà 20 minutes d'écoulées.

M. Plourde: Oui. Je termine, je conclus immédiatement.

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, s'il vous plaît!

M. Plourde: Donc, en conclusion, comme vous pouvez le voir, il y a des alternatives, il y a des solutions. Et nous demandons donc, aujourd'hui, au gouvernement d'étudier ces alternatives. Le dégel des frais de scolarité est, selon nous, une solution à court terme qui ne réglera rien; ça, il ne faut pas se le cacher. En plus, on pouvait lire, ce matin, dans Le Devoir, que le budget du ministre Wilson allait complètement, selon le ministre, annuler les effets de la hausse des frais de scolarité. Donc, pourquoi ne pas rechercher de vraies solutions? Pourquoi ne pas avoir une perspective globale, une perspective à long terme? Pourquoi ne pas gérer l'État qu'est le Québec d'une façon rationnelle et en ayant une perspective à long terme? C'est ce que nous vous proposons aujourd'hui, de trouver des solutions qui, définitivement, régleraient le problème du sous-financement des universités, ce que ne fera pas le dégel des frais de scolarité. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Mme la Présidente, je serai plutôt bref parce que, dans l'ensemble, le mémoire reprend beaucoup des points qu'on avait dans le dernier mémoire entendu ce matin. Je pense que l'orientation générale et même les porte-parole sont passablement les mêmes. On ne voudrait pas faire de répétitions. Il y a certains arguments; quand même on les répéterait dix fois de part et d'autre, ça ne changera pas les positions de chacun dans l'avenir immédiatement prévisible. Alors, je fais cette remarque-là.

J'ai remarqué dans le mémoire quelques observations: des valeurs familiales dépassées, des gens qui vivent trois, quatre siècles en arrière et tout. On entend ça depuis des années. Je crois qu'il est opportun de rappeler que les valeurs familiales sont toujours très importantes. Les gens sont libres de les concevoir comme ils le veulent. Mais si on veut que la société québécoise ait la moindre consistance, il n'est sûrement pas inopportun de rappeler que les valeurs familiales sont très importantes. En tout cas, moi, je l'affirme sans la moindre hésitation. Je serai toujours heureux d'être contredit, mais ça n'influencera aucunement ma façon de voir et je pense que c'est la conception de la très grande majorité de nos concitoyens. On respecte l'autre conception. Je ne voudrais pas qu'on vienne me créer de complexe d'infériorité en m'affublant d'épithètes comme celles-là parce que ça tombe comme de l'eau sur le dos d'un canard, pour être franc avec vous.

Je comprends très bien, d'autre part, que les conditions ont évolué et que nous devons faire face à des réalités aujourd'hui qui ne sont pas toujours les mêmes qu'autrefois. Il faut bien mesurer chaque réalité aussi à ses fruits. Au bout de la ligne, si on veut avoir une société forte, je pense bien que toutes les valeurs et toutes les attitudes n'ont pas également le même poids aux yeux d'une personne sérieuse. Il y en a qui produisent des fruits et il y en a d'autres qui produisent plutôt de l'amertume et des déceptions aussi; ça, je tiens à le souligner vu

que vous avez abordé le sujet. Je ne veux pas insister davantage, mais moi, je veux affirmer très fermement le grand respect que je conserve plus que jamais pour l'importance irremplaçable des valeurs familiales et j'ajouterais aussi des valeurs de responsabilités, y compris des responsabilités financières.

Vous avez parlé, à propos des droits de scolarité, d'une décision qui aurait été prise sans débat. Je ne sais pas où vous étiez depuis quatre ans, mais moi, j'ai été associé à ce débat-là depuis quatre ans sans arrêt. Le débat a commencé lors des auditions publiques de la commission parlementaire sur le financement des universités, en septembre 1986. C'est là qu'il a commencé pour vrai. Il s'est poursuivi dans le Parti libéral du Québec pendant tout ce temps-là. C'est vrai qu'on n'a pas débattu fort de l'autre côté, parce qu'on n'était pas en position pour débattre autant, peut-être, mais nous en avons débattu, nous autres, autant comme autant et nous avons même modifié la position du Parti libéral sur cette question-là, parce que nous avions conclu que la position qui avait été tenue pendant de nombreuses années ne résistait plus à l'épreuve des faits.

J'ai entendu dire, tantôt, que les subventions aux universités, si elles avaient été indexées, apporteraient beaucoup plus aujourd'hui. Depuis 1986, les subventions du gouvernement aux universités ont augmenté de 27,8 % en dollars courants et de 15,4 % en dollars constants. Ça, c'est jusqu'à 1989. Alors, c'est une augmentation de 15,4 % en dollars constants. Si vous voulez savoir ce que ça signifie, je vous dirais simplement que, pendant la même période, les dépenses générales du gouvernement ont augmenté de 3,1 % en dollars constants. On peut bien proclamer qu'on a reculé en matière d'université, mais les chiffres disent le contraire. Ce ne sont pas des chiffres que j'invente; ce sont les chiffres que nous avons construits à coups de décisions, à coups de sacrifices dans d'autres secteurs de l'activité collective. Je pense que ce n'est pas mauvais de le rappeler parce qu'on ne semble pas s'en rendre compte. (15 h 45)

La décision aurait été prise en secret! Non, elle a été prise par le cabinet. Les décisions du cabinet... Il y a des députés de l'autre côté, de l'Opposition, qui ont siégé au gouvernement; ils savent très bien que, pour les décisions du gouvernement, en général, le texte est confidentiel; la substance est communiquée par le ministre concerné suivant les modalités qu'il juge opportunes. Mais il n'y a pas de lèse-majesté là-dedans et il n'y a pas de problème. Si vous lisez la loi sur l'accès à l'information, dont j'ai des extraits ici, vous allez comprendre tout de suite que ce que je dis, c'est une affaire de vérité courante, finalement. C'est comme ça que le gouvernement marche. Il n'y a pas d'application spéciale dans ce cas-ci

Cela étant dit, je pense que j'ajouterai un point parce qu'on semblait intéressé à cet aspect-là tantôt. J'ai, évidemment, fait établir le coût estimatif des demandes qu'on nous présente cet après-midi et le total auquel j'en arrive, c'est à peu près du même ordre que pour la présentation de l'ANEEQ, ça va chercher autour de 800 000 000 $, sans compter l'impôt universitaire et l'impôt postuniversitaire qui viendraient s'ajouter, évidemment. Alors, je ne donne pas le détail de ces calculs, à moins qu'on me le demande. La question que je serais porté à vous poser: Où allez-vous trouver ces 800 000 000 $ pour financer les recommandations que vous présentez? Où allons-nous trouver les 800 000 000 $ qui sont nécessaires? Oui.

M. Plourde: D'une part, concernant les valeurs familiales, ce ne sont pas les valeurs familiales que nous remettons en question.

M. Ryan: Ah!

M. Plourde: Nous disons tout simplement que les réalités familiales ont changé. C'est ça, notre point. Jamais n'avons-nous remis en question les valeurs familiales. Vous le savez très bien: les étudiants, les jeunes sont autonomes plus rapidement aujourd'hui et dire qu'ils restent dépendants de leurs parents, même s'ils ont quitté la maison et vivent en appartement, c'est faux. C'est faux de le prétendre et ce sera toujours faux de le prétendre. C'est la même chose pour la contribution du conjoint, c'est une valeur... Je pense que maintenant on en a fart la preuve, même si deux personnes vivent ensemble, il n'y a pas union de portefeuilles, loin de là. Donc, ce sont, à notre avis, des valeurs rétrogrades que le régime colporte encore. Et, à notre avis, il devrait y avoir des modifications sur ces questions.

Concernant la décision de hausser les frais de scolarité, vous avez peut-être consulté, M. le ministre, les recteurs, les entreprises, mais jamais les étudiants n'ont été consultés sur la hausse des frais de scolarité. Jamais vous n'avez demandé à nous rencontrer, tout simplement, une simple rencontre à votre bureau avant de nous annoncer la hausse des frais de scolarité. Ça ne s'est pas fait et il me semble qu'il aurait été normal de le faire. Nous sommes les premiers concernés, les premiers touchés et jamais on n'a reçu un appel de votre part pour aller vous rencontrer avant que cette hausse des frais de scolarité soit annoncée. Je suis convaincu que les recteurs le savaient bien avant nous. Pas nous! Pas nous! Pas les étudiants! Et, pour nous, c'est inacceptable.

Et c'est dans ce sens que nous disons qu'il n'y a pas eu de débat social. Les premiers intervenants, les premiers intéressés, les étudiants, ont été exclus de ce débat. En commission parlementaire, il y a quelques années, oui,

on a abordé rapidement la question. Brièvement. Mais on n'en a pas fait un débat social comme en 1960 où il y avait eu un rapport exhaustif, où on avait demandé à plusieurs experts de se pencher sur la question. Il n'y a rien de ça qui s'est fait. On vous propose aujourd'hui des solutions intéressantes qui n'ont même pas été étudiées. À notre avis, avant de hausser les frais de scolarité, il aurait été normal et responsable d'étudier ces alternatives. C'est tout simplement ça qu'on vous demande. On essaie d'être responsables, de vous montrer qu'on est responsables et on propose des solutions alternatives. Et c'est ça qu'on vous dit: II aurait été normal de les étudier.

Sur la question des subventions, peut-être qu'on n'a pas les mêmes chiffres. Moi, je me fie au Conseil des universités qui est, quand même, un organisme gouvernemental et qui dit, et je peux le lire textuellement: "Si la subvention par EETC avait été régulièrement indexée au coût de la vie, et si on avait tenu compte de la croissance des clientèles, l'enveloppe de 1988-1989 serait plus élevée d'un montant de 127 500 000 $." Et le Conseil des universités a également évalué le manque à gagner à 120 000 000 $. Donc, vous voyez que les chiffres concordent. Si les subventions avaient été indexées, il n'y aurait pas eu de manque à gagner. Et si les subventions avaient été indexées et s'il n'y avait pas eu de coupures, il n'y aurait pas eu de déficit. Donc, on ne doit pas blâmer, je pense, le gel des frais de scolarité pour le déficit et le manque à gagner des universités, loin de là.

Sur la question de la décision. Bon, vous avez cité, je pense, un article de la loi sur l'accès à l'information. Mais si vous lisez bien l'article, le gouvernement peut, s'il le veut, rendre publique cette décision. À notre avis, c'est une décision tellement importante, tellement capitale, qui touche tellement d'administrés, soit les étudiants, qu'elle devrait être rendue publique. Et si vous voulez en faire un débat juridique, je pourrais même vous apporter de la jurisprudence qui dit que, lorsqu'une décision d'une telle ampleur touche autant de contribuables, elle devrait être rendue publique pour permettre à ces contribuables d'attaquer cette décision, s'ils le désirent. Et on a envoyé une lettre. Vous le savez, on vous a envoyé une lettre à ce sujet-là. On l'a fait également au Procureur général du Québec et on espère que, pour la justice, vous rendrez publique cette décision. Il me semble que c'est normal, que ça va de soi. C'est tellement minimal comme demande. C'est, tout simplement, nous permettre d'exercer nos droits, si nous en avons. Et, pour l'instant, on ne peut pas constater, on ne peut pas vérifier si nous avons de tels droits parce que nous n'avons pas cette décision.

Et, finalement, sur l'impôt postuniversitaire, votre dernière question, nous pensons que nous pourrions mettre en place un tel régime si les entreprises y contribuaient. On demande, justement, aux entreprises de contribuer. Au Québec, elles ne contribuent que pour 3 %. En France, c'est 20 %. En Ontario, c'est 6 %, 7 %, 8 % apparemment et, dans d'autres provinces, c'est plus élevé encore. Donc, s'il y avait un vrai partenariat social, si tout le monde s'y mettait, si le gouvernement s'y mettait, les entreprises, les universités et les étudiants, on pourrait mettre en place cet impôt postuniversitaire qui, selon nous, réglerait une fois pour toutes le problème.

On a fait faire quelques petites études actuarielles, vite faites parce qu'on n'a pas les ressources nécessaires pour le faire, mais, selon ce qu'on a pu constater, le régime pourrait être rentable d'ici quelques années, selon qu'on adopte un scénario pessimiste, optimiste ou réaliste; d'ici quelques années, ce régime pourrait faire des profits et, à long terme, réglerait définitivement le problème du sous-financement des universités. Ce n'est pas vrai que la hausse des frais de scolarité va régler le problème. Dans quelques années, on va peut-être nous annoncer un nouveau dégel et, vous-même, vous le dites très bien, avec le budget Wilson, on peut s'attendre à d'autres coupures encore. Pouvez-vous nous assurer qu'il n'y aura pas d'autres coupures dans les subventions gouvernementales? Ça, apparemment que non. Donc, dans trois ans, je suis convaincu qu'on va être ici, à la même place; peut-être que ce sera des personnes différentes, mais on va se poser les mêmes questions. C'est ce qui nous inquiète et c'est pour ça qu'on essaie de proposer des solutions qui vont régler le problème définitivement.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Deux mots, Mme la Présidente. Tout d'abord, contrairement à ce qu'affirmait tantôt le porte-parole du groupe, le gouvernement n'a jamais dit que la hausse des frais de scolarité, c'était la réponse totale au problème du financement des universités. Il faut cesser de véhiculer des faussetés. On a dit que c'était un élément de solution. J'ai donné les autres composantes, ce matin, ceux qui ont écouté auront très bien compris. Vous avez cité le Conseil des universités. Tout dépend, quand le Conseil parle, de la date à laquelle il aurait voulu que commence l'indexation. Pour les trois dernières années, 1986 à 1989-1990, je vous ai dit que les subventions ont été augmentées de 15,4 % en dollars constants. Ça, ça veut dire que ça a été non seulement indexé, mais considérablement supérieur à l'indexation. C'est assez clair? Ce sont les chiffres que j'ai devant moi qui sont compilés par le gouvernement. Les recteurs, si vous les avez écoutés hier matin, sont venus le dire, ils reconnaissent que les

subventions ont augmenté ces dernières années et fis se souviennent très bien qu'elles avaient diminué considérablement sous le règne de ceux qui vous feront croire qu'ils vous appuient tantôt.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député de Verdun, je crois que vous avez une...

Aviez-vous fini, M. le ministre? M. le député de Verdun.

M. Ryan: J'avais fini.

La Présidente (Mme Hovington): Vous aviez une question.

M. Gautrin: J'ai un certain nombre de questions, si vous me le permettez.

La Présidente (Mme Hovington): II reste six minutes.

M. Gautrin: Bon. Le débat sur les subventions, évidemment, ça dépend si on fait jouer des variations de clientèles étudiantes ou pas dans les calculs. Je pense que c'est la réponse que vous vouliez donner au ministre.

Moi, j'aurais un certain nombre de questions à poser sur votre mémoire. Lorsque vous parlez du mécanisme pour comptabiliser la contribution parentale - je passe à la page 29, aux recommandations 16 à 19 - est-ce que, dans votre esprit, la contribution parentale doit être maintenant, pour vous, versée directement sous forme monétaire ou bien si elle peut, comme elle l'est actuellement, elle l'est dans le projet, être une contribution sous forme de logement ou, éventuellement, d'aliments donnés à l'étudiant? J'ai du mal à comprendre comment votre mécanisme pourrait s'appliquer dans le cas où la contribution parentale prend la forme d'une contribution, disons, sous forme de logement ou en nature.

Mme Dallaire: Actuellement, de toute façon, dans le régime, il y a deux poids, deux mesures. Pour les étudiants qui sont dépendants, pour lesquels on calcule une contribution parentale, elle est chiffrée en termes monétaires. Pour les étudiants qui vivent effectivement chez leurs parents et qui reçoivent une contribution parentale, on ne sait pas non plus actuellement à quoi ça peut ressembler en termes monétaires. Alors, le problème se pose déjà. Ce qu'on voudrait, en fait, c'est que les données qu'on ne peut chiffrer c'est-à-dire les contributions en nature, le soient d'une façon ou d'une autre, c'est-à-dire à travers des déclarations écrites, et de l'étudiant et des parents. À ce moment-là, on pourrait établir des grilles et ce serait très simple de cette façon de voir ce qui est versé effectivement dans le cas des services ou dans le cas d'une contribution en nature. Le problème, il se pose déjà. Alors, tout ce qu'on veut, c'est qu'il soit ajusté en fonction de la réalité.

M. Gautrin: J'ai deux autres questions, si vous me le permettez, Mme la Présidente. Dans le langage de la FAECUM ou des exécutifs qui vous ont précédés, lorsqu'on a, à l'Université de Montréal, imposé ce qu'on a appelé des frais afférents et que vous, vous avez appelé des augmentations de frais de scolarité, dans le langage de la FAECUM, il y a deux ans, est-ce que vous confirmez l'information qui nous a été donnée hier par les recteurs que ça a eu un effet nul sur la fréquentation universitaire, c'est-à-dire que le fait que les étudiants ont dû payer plus par session pour aller à l'université dû à l'imposition de frais afférents, ça n'a eu aucun effet sur la fréquentation universitaire? Est-ce que vous confirmez ça ou si vous l'infirmez?

M. Plourde: Je pense que la question ne se pose même pas. On parle de 40 $ de plus par session. Là, on fait face à une hausse de 350 $ l'année prochaine et de 800 $ dans deux ans. Donc, ça ne se compare même pas. C'est évident que pour 40 $ l'étudiant va décider de continuer et il trouvera les ressources financières nécessaires, mais là ce n'est pas du même ordre de grandeur. Je pense que ça ne se compare pas du tout. Et c'est vrai que, pour nous, ce n'est que des frais de scolarité déguisés. On n'a jamais pu réussir à nous en expliquer la pertinence et si ces frais afférents avaient une existence en soi, ça, on n'a jamais réussi à le confirmer.

M. Gautrin: Je ne reviendrai pas sur le débat des frais afférents. J'ai une dernière question pour mon information personnelle. Vous avez projeté le modèle australien, que je ne connaissais pas. Quel est le montant des frais de scolarité en Australie?

M. Plourde: Le montant des frais de scolarité est de 1500$.

M. Gautrin: Merci.

M. Plourde: Mais l'étudiant, et je le répète, a le choix de payer soit avant ou après, quand il en a les moyens.

M. Gautrin: J'ai aussi un point sur lequel je voudrais quand même vous encourager, le principe des 25 %. Vous êtes donc en faveur, contrairement à l'ANEEQ, qu'on remette les 25 % à ceux qui obtiennent leur diplôme dans les délais réguliers et vous...

Mme Dallaire: Non, pas du tout. Ce que j'ai dit dans ma présentation, c'est qu'on trouvait, justement, que la définition de l'excellence était un peu bâtarde, c'est-à-dire que l'étudiant, pour bénéficier de la remise de 25 %, devait terminer

dans des délais normaux. Dans le cas des étudiants à la maîtrise, on parle de six sessions, je crois. Alors, nous, ce qu'on voudrait, c'est que ces 25 % soient remis sans égard au nombre de sessions que l'étudiant va passer à l'université et qu'ils soient applicables également aux diplômés du premier cycle.

M. Gautrin: Ça, j'ai compris que vous vouliez les étendre au premier cycle, mais pour les étudiants à la maîtrise, vous savez bien comme moi qu'au bout d'un certain temps ils ne sont plus inscrits, s'ils n'ont pas obtenu leur diplôme parce qu'il y a un délai minimum pour obtenir son diplôme. Donc, les choses entrent l'une dans l'autre. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, la parole est au député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, j'ai des commentaires d'ordre générai sur les propos du ministre de l'Éducation et non pas sur le mémoire des étudiants de la FAECUM. C'est de valeur qu'il n'y ait pas autant de journalistes que je le souhaiterais parce qu'il arrive que, lorsque le ministre a le droit de parole, il dit de grosses choses. Il y a quelques minutes, il disait, - et je le cite encore là - qu'un débat au sein du Parti libéral, lui, il appelle ça un débat de société. Je ne suis pas d'accord là-dessus, évidemment, et vous me comprendrez. Ce n'est pas parce que les membres du Parti libéral en ont parlé entre eux... Mais c'est ça, la réalité. Écoutez, ça prend du culot pour nous faire accroire que, depuis 1986, on débat de la question du dégel des frais de scolarité. Il faut vraiment être culotté un peu rare. (16 heures)

Là-dessus, je pense que vous aviez raison. Sincèrement, il n'y a pas eu de débat de société là-dessus. Écoutez, ce n'est pas parce qu'ils en ont parlé à l'interne. De toute façon, c'est même faux aussi parce qu'en 1985, rappelez-vous quelle sorte d'engagement ils ont pris. Ils ont pris, en 1985, l'engagement du maintien du gel des frais de scolarité. Alors, comment pouvez-vous croire que, le lendemain de l'élection, le ministre de l'Éducation dise: Nous, on ne s'occupait pas de nos engagements, on a refait un débat de société entre nous pour convenir qu'il y avait lieu de dégeler? Moi, je ne marche pas là-dedans, c'est évident.

Le deuxième fait qui est pas mal gros, c'est de faire accroire que, parce qu'on a déjà été au gouvernement... Oui, il y avait des règles concernant la transmission des décisions du gouvernement, c'est exact, sauf que ce dont j'ai eu connaissance, c'est que vous avez demandé copie du décret, pas copie du mémoire ministériel, s'il y en a eu un, justifiant ou non l'analyse de la décision de ce gouvernement-là de dégeler les frais de scolarité. À ce que je sache, pour avoir été au Conseil des ministres pendant sept ans, il est exact que la tradition veut que les mémoires sur lesquels les ministres s'appuient pour obtenir une décision du Conseil des ministres restent à l'intérieur de l'appareil gouvernemental pendant vingt ans. Mais ce n'est pas ce que vous avez demandé. Vous avez demandé copie du décret. Moi, je pense que vous avez complètement raison. Quand on prend une décision et qu'on a la prétention qu'ils ont d'être assis dans la chaire de la vérité, je ne vois pas pourquoi ils ne rendraient pas public le décret sur lequel ils se sont appuyés pour dire: Nous, on a la vérité; la solution doit passer par le dégel. Premièrement, il n'y aura pas de problème et, deuxièmement, les universités vont être contentes. La CREPUQ est venue dire ça; ça fait cinq fois qu'il répète ça. Ce n'est pas vrai. Pour quelqu'un qui sait lire, ce n'est pas ce que la CREPUQ a dit. La CREPUQ a dit: Ole! Ole! Bravo! Mais pour autant que vous ajoutiez 50 000 000 $.

Mme Blackburn: C'est ça.

M. Gendron: Pour autant que vous ajoutiez 50 000 000 $ d'argent neuf. C'est dans le mémoire de la CREPUQ. Le ministre n'en parle jamais. C'est pour ça que vous avez raison de dire qu'au niveau des principes, c'est clair que - et ce n'est pas un reproche, au contraire - la FAECUM reprend exactement les grandes lignes de l'ANEEQ et de la FEEQ, à savoir qu'on n'a aucune garantie que ça n'aura pas d'incidence sur l'accessibilité, que d'aucune façon ça ne règle le problème de fond d'un sous-financement chronique. Quand on parle de sous-financement, c'est parce que vous souhaitez avoir un enseignement universitaire de qualité, un enseignement adéquat, avec des instruments de support modernes, qui sont de 1990.

Même que, immédiatement au sortir de la commission parlementaire, des audiences d'hier, les mêmes recteurs nous disaient: Écoutez, si on n'a pas d'argent neuf, on est loin d'être convaincus d'assumer pleinement notre responsabilité d'enseignement universitaire avec une recherche adéquate, avec des instruments pédagogiques de support, que ce soit au niveau de la bibliothèque ou d'autres types d'équipements, parce qu'ils ont acquis la conviction qu'au fil des ans, compte tenu du fait qu'il n'y a pas eu d'indexation, ils ont subi une pénalisation importante.

Un dernier commentaire sur ses propos. Il dit bien toujours la même chose. Il dit toujours ce qu'il veut, avec les chiffres qu'il veut. Je viens d'aller faire relever un document officiel du même gouvernement. C'est son document, il a été transmis à ma collègue lorsqu'elle était critique au niveau de l'enseignement supérieur, et c'est très clair: 1986-1987, 1985-1986, l'augmentation du budget de fonctionnement pour ce qui est de l'enseignement universitaire, dans leurs livres à eux autres, 2,8 %.

Mme Blackburn: Et l'indice du coût de la vie.

M. Gendron: Et l'indice du coût de la vie, en 1985-1986, selon leurs propres chiffres, 4,2 %. C'est évident que moi, je ne veux pas jouer à ça. Je n'embarquerai pas dans les chiffres parce qu'il cite les chiffres qu'il veut et là, je viens de faire pareil. Comme je n'aime pas cette méthode-là, je n'en citerai pas d'autres. Mais une chose est sûre, ce n'est pas exact que le niveau de financement a été adéquat ou requis, puisque son adjointe parlementaire, l'ancienne députée de Jacques-Cartier, Mme Joan Dougherty, n'aurait pas écrit la lettre qu'elle a écrite au premier ministre en se lamentant publiquement: Ça n'a pas de bon sens, c'est ci et c'est ça. Et le premier ministre du Québec n'aurait sûrement pas dit publiquement: Vos demandes sont raisonnables, justifiées, je vous félicite, je pensais que vous seriez plus exigeants. C'est à peu près ça que le premier ministre a dit. Il n'y a pas donné suite; ce n'est pas nouveau. Il n'y a pas donné suite, même si c'était raisonnable et justifié. Donc, écoutez, on ne me fera pas brailler en disant que ces gens-là ont été beaux et fins, qu'ils ont financé l'université, que nous, on a fait ça. Ce n'est pas ça, la réalité. La réalité, c'est, en 1990, est-ce que les universités sont financées adéquatement? La réponse est non.

Là, on décide de dégeler les frais de scolarité sans se préoccuper d'autres solutions alternatives. Ce que j'aime, dans votre logique, c'est que dans le fond vous ne dites pas - en tout cas, moi, je comprends ça de même - carrément: On ne veut rien savoir d'une participation. Vous ne dites pas: Nous, on ne veut pas contribuer. Quand vous parlez de formule de partenariat avec l'entreprise privée... D'une façon spécifique, les autres sont à 5 %, 6 %, 7 %, 8 % et 9 % et nous, au Québec, on est à 3 %. Vous dites: Ce n'est pas assez, l'entreprise devrait faire plus. On a dit la même chose, au Parti québécois. On s'est fait traiter de toutes sortes de choses. Nous, on est des taxeurs. Bien oui! Parce qu'on sait que, de temps en temps, ça prend les revenus requis pour mettre les priorités à la bonne place et, pour nous, l'éducation, c'est important. On avait dit aux entreprises, à l'élection de 1989, comme parti politique: Oui, il y aura une partie du 1 %, de la taxe spécifique qu'on veut imposer aux entreprises pour toute la question de l'adaptabilité aux programmes de main-d'oeuvre, de recyclage et pour la formation universitaire. On voulait prendre une partie de cette taxe de 1 % pour augmenter leur contribution à ce qui leur profite beaucoup. Le monde des affaires est très intéressé à mettre la main sur des diplômés universitaires et je ne veux pas faire de caractérisation, mais par ce qu'on a vu ce matin, par ce qu'on a entendu ce matin en termes de capacité de présenter vos affaires, en termes d'éloquence, en termes également de sérénité et de conviction du travail que vous avez fait sur ces données-là que vous connaissez, je suis convaincu que de jeunes universitaires comme ça n'auront pas de trouble à se placer dans le futur, puis l'entreprise et la société vont en profiter.

Donc, vous dites: Le gouvernement, il faut qu'il fasse plus. Est-ce que c'est facile? La réponse est: Non, ce n'est pas facile. Ce n'est pas parce que ce n'est pas facile qu'on ne doit pas se donner l'obligation. Est-ce que ces gens-là n'ont pas d'autres priorités? Moi, je viens d'assister en fin de semaine, en Abitibi-Témis-camingue, à une biennale. Bon, on n'a pas eu ce qu'on voulait, mais je peux vous dire que même ce gouvernement-là est venu donner l'absolution à certains projets d'amélioration d'équipement de loisirs, d'équipement d'aréna, d'équipement culturel. Je ne dis pas que je suis contre ça; je dis qu'ils sont venus prendre des décisions de gouvernement et dire: On pense qu'il y a des besoins dans ce domaine-là. Nous, comme vous, on dit aujourd'hui: II y a des besoins criants dans le milieu universitaire, ça prend plus d'argent, puis vous sautez sur la solution la plus facile et la plus bête en même temps, parce qu'elle n'est pas trop analysée: clenchons les étudiants pour 40 000 000 $, ne réglons rien et ne regardons pas les autres affaires. C'est ça qu'ils viennent de dire: Ne regardons pas d'autres alternatives suggérées par le milieu, que ce soit l'impôt postuniversitaire, que ce soit également d'autres formes de participation plus fouillées, qui vous permettraient d'avoir moins cette crainte de l'endettement.

Moi, j'ai lu attentivement votre mémoire et, si on avait à le résumer en trois lignes, vous dites, au niveau des principes, que vous n'êtes pas d'accord. Vous l'avez dit: La FAECUM réaffirme carrément son opposition au principe du dégel; ça, ça règle une partie. Pour ce qui est du régime d'aide financière, je lis, là: "innovations rudimentaires", "régime teinté d'illusions", "aucun progrès"; "l'accessibilité limitée, les définitions faussées des statuts d'autonomie et de dépendance, ne trouvent pas de réponse..." Au contraire, les problèmes s'aggravent "par le resserrement des critères d'attribution des bourses et aussi par le dégel des frais de scolarité".

Là, on pourrait en discuter un peu plus, mais je ne pense pas que c'est à moi de commencer à dire: Bien, écoutez, dans les recommandations que vous préconisez pour améliorer le régime d'aide financière, à certains égards, moi, j'estime que votre jugement est plus sévère que le mien. Moi, je prétends qu'à certains égards, oui, il y a une amélioration sensible, parce que, si c'était uniquement des éléments très secondaires, non significatifs, le coût ne serait pas de 50 000 000 $. Je ne parle pas de ce qui va rester; je parle juste du coût net de la réforme.

Donc, nous, nous pensons que, dans la réforme de l'aide financière au niveau des prêts et bourses, il y a une amélioration, mais là où on a les mêmes inquiétudes, c'est que, dans l'analyse des critères sur lesquels on s'est appuyé pour faire la bonification, on ne tient pas assez compte, d'après moi, du réel. Entre autres, il y a trois ou quatre choses qui me fatiguent. J'en donne un exemple. On a beau poser des questions sur ce que signifie la participation des parents, qu'on appelle...

Une voix: Contribution.

M. Qendron: ...la contribution parentale, écoutez, la contribution parentale, que ce soit en logement, en maison, ce n'est pas ça dans la grille. Dans la grille, dans le calcul, on prétend que, parce que leurs parents vont payer une contribution parentale qu'ils ne versent pas, l'étudiant a moins de bénéfices de prêt ou de bourse. Alors, le drame, c'est de dire: En 1990, il y a trop de parents qui ne la paient pas. Donc, on ne peut pas en tenir compte dans la grille, comme on l'a fait au début de ce régime-là parce que la situation pratico-pratique n'est plus la même. C'est ça que j'ai compris et c'est ça que j'ai entendu. Là-dessus, vous avez 100 % raison. Je ne poserai pas de questions pour aller dans les nuances. Je prétends qu'à peu près dans toute l'application du régime, c'est de ça qu'il manque le plus, de références au contexte de 1990. Que ce soit sur l'autonomie, que ce soit sur la notion de conjoint pour des jeunes de 22, 23 ans, quel que soit leur sexe, à l'université, ça n'a pas la même notion, moi, que j'ai connue il y a 20 ou 25 ans. Et pour toutes sortes de raisons. Je ne veux pas refaire l'évolution de notre société, on est rendus là en 1990. Quand bien même je voudrais revivre en 1980 ou en 1962, j'aurais des problèmes.

Alors, moi, votre mémoire, je pense qu'il va dans les lignes que nous avons évoquées lors de l'introduction des débats de cette commission. On partage la plupart de vos objectifs "et je n'ai pas, comme telles, de questions spécifiques à vous poser parce que je comprends très bien votre affaire. J'ai été particulièrement content de voir que vous souhaiteriez, compte tenu qu'il y a quand même des pistes qui n'ont pas été fouillées, que le gouvernement marque un temps d'arrêt, au mieux, et dise: On va faire des évaluations plus fines d'autres solutions avant de se jeter dans une solution à courte vue. Je pense que c'est M. Plourde qui disait ça. C'est sûr que le dégel des frais de scolarité ne règle rien et que c'est à courte vue, à la petite semaine, sans orientation, comme on y est habitués depuis quatre ans avec ce gouvernement-là. C'est soit pas de décision ou des petites décisions le nez collé dans la vitre. Le nez collé dans la vitre, on décide de prendre une petite décision et, là, et on vient d'en prendre une qui ne règle rien, qui vous fait mal un peu, qui pose une série de points d'interrogation, et on évaluera dans quelques années ce que cela a donné. Mais je ne pense pas qu'on doive gérer une priorité comme ça au Québec. Et si l'éducation est véritablement une priorité fondamentale, comme je pense qu'elle doit l'être, on devrait regarder un peu plus le genre de décisions qu'on s'apprête à prendre. Voilà les commentaires que j'avais à faire. Je ne sais pas si mes collègues ont des questions.

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel voulait prendre la parole, je crois, en réponse. Alors, Mme la députée de Chicoutimi. Allez-y.

M. Gendron: Oui, M. Pautel.

La Présidente (Mme Hovington): M. Pautel.

Mme Blackburn: Allez donc.

M. Pautel: Oui, merci beaucoup. Il y a trois petits points que j'aimerais soulever. Premièrement, c'est suite à l'intervention du député de Verdun, c'est ça? M. le député, vous avez dit quelque chose qui m'a agréablement surpris. J'espère avoir bien compris. Il s'agissait des délais prescrits pour la ristourne de 25 % aux étudiants de la maîtrise et du doctorat qui terminent dans les délais prescrits. Vous nous avez fait comprendre que les délais prescrits étaient ceux des universités et non pas ceux qui seraient prescrits, justement, par la réforme ou par la loi ou par les règlements, parce qu'il y a une grande partie de la réglementation qui va dépendre des règlements. Si tel était le cas, bien, ma foi, c'est exactement la demande qu'on faisait. Alors, si vous pouvez me confirmer la chose, cela nous rassurera. Et nous sommes tout à fait d'accord avec vous sur ce point parce que, effectivement, comme je le disais ce matin, dans chacune des universités, des facultés, des départements, dans chacun des cas de thèse de maîtrise et de doctorat, cela varie beaucoup d'un individu à l'autre, d'un domaine d'études à l'autre, de telle manière qu'il serait de toute façon illusoire de vouloir appliquer un délai prescrit pour tout le monde. Donc, évidemment, il est beaucoup plus logique d'avoir des délais prescrits par les universités, par les facultés.

M. Gautrin: On doit, si vous me le permettez, les couper et les ramener beaucoup plus bas qu'ils ne le sont actuellement.

M. Pautel: Ah, ça, ce n'est pas ce que j'avais compris dans les délais prescrits. Il me semblait, justement, que les facultés étaient bien placées pour déterminer quels sont les délais qu'elles doivent accorder.

M. Gautrin: C'est ce qu'elles sont en train

de faire, c'est-à-dire les restreindre.

M. Pautel: Parce que là, je pense qu'on rentre dans la liberté académique. Je crois que c'est comme ça qu'on appelle ça.

M. Gautrin: Absolument!

M. Pautel: Et, donc, c'est aux universités, justement, de déterminer, à leur avis, quel est le temps nécessaire pour faire une maîtrise, par exemple.

M. Gautrin: Je suis tout à fait d'accord.

M. Pautel: Et, même, la sanction étant teflement grave, parce qu'un étudiant qui ne termine pas dans les délais prescrits de l'université se voit tout simplement refuser à sa maîtrise ou à son doctorat, je ne vois vraiment pas la nécessité de réduire la période ou de pousser pour que les universités réduisent les périodes, surtout si on veut favoriser la diplomation au niveau supérieur de la maîtrise et du doctorat. Alors, si nous nous sommes bien compris sur ce point de laisser la liberté académique des universités entrer en jeu, je pense-Une voix: Oui, c'est très clair. M. Gautrin: Si on a le système...

M. Pautel: Enfin, M. le député de Verdun pourra peut-être compléter sa réponse par la suite parce que j'ai d'autres points à soulever. Entre autres, M. le ministre, dont je salue le retour, a soulevé le point qu'il fallait des réformes qui ne coûtent pas trop cher parce qu'on n'a pas beaucoup d'argent. Alors, justement, il y a une des propositions qu'on a soulevées dans le mémoire de la FAECUM sur laquelle peut-être nous pourrions nous pencher, parce que je pense qu'elle ne vous coûte rien, en somme. La proposition fait rapport à la recommandation no 22 de votre énoncé d'orientation, qui vise à réduire la période d'admissibilité à la bourse et non pas la période d'admissibilité au prêt. (16 h 15)

En d'autres mots, comme je vous le dis, à mon avis, ça ne vous coûterait rien de tout simplement laisser le régime dans l'état où il est, c'est-à-dire de permettre aux étudiants de bénéficier d'une bourse et d'un prêt dans les mêmes périodes d'admissibilité, qui sont les périodes actuelles, et non pas de réduire la période d'admissibilité à la bourse dont l'objectif, me semble-t-il, n'est que de pénaliser les étudiants, à moins que vous ne comptiez là-dessus pour faire une économie. Si tel était le cas, peut-être que vous pourriez nous le signaler. Sinon, donc, cela ne vous coûterait rien de laisser le régime dans l'état actuel des choses et, quant à moi, donc, de laisser le régime sain et sauf.

Finalement, j'ajouterai, car vous souleviez, tout à l'heure, le fait que la FAECUM reprenait plusieurs positions de la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec et, donc, qu'il n'était pas nécessaire de revenir sur tous ces points, que je pense qu'il faudra vous y habituer, car non seulement la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec propose un nouveau partenariat, non seulement la FAECUM propose aussi un nouveau partenariat, non seulement la CADEUL propose un nouveau partenariat, non seulement la Student's Society of McGill University propose un nouveau partenariat, mais également l'Association des étudiants de deuxième cycle de l'Université McGill le propose aussi. Et là, je ne vous ai nommé que celles qui vont vous présenter un mémoire pour vous le dire, car il y a également l'Université du Québec à Trois-Rivières, l'Université du Québec à Rimouski et l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Donc, en somme, c'est presque l'ensemble des associations étudiantes universitaires qui vous proposent ce nouveau partenariat. Et le seul espoir que nous avons, c'est qu'à force de l'entendre, peut-être, puissiez-vous le comprendre.

Une voix: C'est un principe pédagogique: toujours sur le même clou.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Chicoutimi, vous vouliez...

Mme Blackburn: Oui, Mme la Présidente. Je ne peux m'empêcher de réagir aux propos du ministre quand il prétend que la commission parlementaire de septembre 1986 qui a fait un large débat sur toute la question du dégel des frais de scolarité. Je dirais que ce n'est pas honnête de le dire de cette façon-là. La commission parlementaire a été convoquée sur le financement et le niveau de financement des universités et non pas avec comme objectif de faire un large débat sur le dégel des frais de scolarité. Et, si le ministre veut bien se le rappeler, il y avait, dans le mandat de cette commission, précisément une question qui touchait l'importance ou le rôle des entreprises privées dans le financement des universités. Alors, qu'il nous dise aujourd'hui que c'était ça, le débat de société qu'on a eu là-dessus, là, je trouve que ce n'est pas honnête de nous présenter ça comme ça.

J'ai dit, en début de séance cette semaine, que, dans le fond, la commission parlementaire de septembre 1986, qui a été convoquée sous le prétexte de discuter du financement des universités, camouflait l'autre question qui était le dégel des frais de scolarité. Et la présente commission sur le projet de loi qu'on étudie camoufle le dégel, elle aussi. L'autre camouflait

le débat qu'on voulait avoir là-dessus et celle-ci escamote tout le débat sur le dégel des frais de scolarité. Alors, prétendre qu'on a eu un débat de société là-dessus, parce que le Parti libéral en a parlé beaucoup... Parce qu'au moment où le Parti libéral avait décidé qu'il y avait gel des frais de scolarité, avant l'élection de 1985, pour des raisons familiales, l'actuel ministre de l'Enseignement supérieur n'était pas à la rencontre. Et on s'est fait dire que, depuis, il n'a eu de cesse qu'on dégèle les frais de scolarité. Je pense que c'est ça, la réalité. Et prétendre que son opinion à lui, c'est l'opinion de toute la société, bien, ça lui ressemble peut-être un peu, mais je trouve que ce n'est pas nécessairement l'opinion que la société aurait eu si elle avait eu en main toutes les données.

Actuellement, la situation est critique: si on a 5 % de diminution des clientèles, c'est-à-dire que ce sont 11 000 diplômés de moins qui viennent s'ajouter aux 8000 que nous avons déjà de moins par rapport à l'Ontario. C'est tout près de 20 000 étudiants diplômés de moins, par année; c'est énorme. Si vous réalisez, sur dix ans, c'est 200 000. Est-ce que je me trompe? Non. Vous savez, c'est toute une partie de la population québécoise. Actuellement, dans les écoles secondaires - et ça aussi, c'est catastrophique; personne n'en a parlé parce qu'on n'est pas là pour en parler - on était à 75 % de diplomation au niveau secondaire ou tout près, et on a chuté à 62 %. Ça, si ça n'a pas des conséquences, tantôt, sur la fréquentation universitaire, je ne comprends pas notre système. Pour passer à l'université, il faut au moins avoir terminé son secondaire. Et ça, c'est catastrophique. On n'a pas parlé de cette réalité-là.

Ce qui m'apparaît plus sérieux, c'est la réponse, ce matin, à une question visant à savoir, dans l'hypothèse où il y aurait une diminution de clientèles dans les universités, si les universités auraient au moins l'équivalent, avec au moins l'indice du coût de la vie, de l'enveloppe budgétaire de cette année pour leur fonctionnement. Le ministre ne l'a pas assuré. On peut même se demander si, actuellement, la diminution de clientèles dans les universités ne fera pas l'affaire du gouvernement qui va diminuer proportionnellement son enveloppe. Ça, je trouve que c'est de l'irresponsabilité. On a dit peu de choses là-dessus, mais je trouve qu'il y a des choses...

On ne peut pas taire trop longtemps la vérité. Ça, ce sont des vérités qui ne se disent pas, évidemment, on évite beaucoup d'en parler, mais la gestion du système, du réseau de l'éducation et de l'enseignement supérieur et de la recherche au Québec s'est détériorée, d'année en année, depuis que ce gouvernement-là a pris le pouvoir. Ça ne paraît pas, personne n'en parlait; là, on commence à le voir avec la formation au niveau secondaire, on commence à le voir avec l'enseignement universitaire, on le sait déjà dans la recherche. Je ne sais pas à quel endroit il nous amène; ça va être absolument intenable pour la génération qui est la vôtre. C'est ce que je trouve préoccupant, actuellement. Je trouve que c'est irresponsable, cette façon de traiter ça comme si ce n'était rien. Ce n'est pas toujours parce que l'Opposition le dit et elle ne le dit pas à son titre, elle ne le dit pas exclusivement sur des connaissances qui lui viendraient de quelque part de l'au-delà; elle le dit sur la foi de documents que tous peuvent consulter, y compris le ministre.

Après ça, il y a une autre chose sur laquelle je vais revenir, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, parce que ça fait 20 minutes, vos 20 minutes sont écoulées.

M. Ryan: Alors, ça demande le consentement.

Mme Blackburn: Mme la Présidente...

M. Ryan: Ça demande le consentement, Mme la Présidente.

Une voix: Consentement.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous aviez droit à 20 minutes et même...

Mme Blackburn: Alors, je serai-La Présidente (Mme Hovington): ...on dépasse d'une minute le temps qui vous est alloué.

Mme Blackburn: Très bien, Mme la Présidente. J'apprécie la collaboration de l'autre côté. Je sais que ça fait mai, mais j'aurai l'occasion de me reprendre parce que les chiffres sur le financement sont aussi erronés en ce qui concerne l'année 1986-1987. Je pense qu'ici on a des jeunes qui sont particulièrement articulés...

La Présidente (Mme Hovington): Alors, Mme la députée, en conclusion...

Mme Blackburn: ...et qui connaissent bien leur dossier...

La Présidente (Mme Hovington): ...s'il vous plaît.

Mme Blackburn: ...et, madame, que je voudrais remercier, au nom de l'Opposition. La génération future - ils vont monter là - et celle qui s'en vient, je pense qu'on n'aura pas de quoi s'en plaindre.

La Présidente (Mme Hovington): Avez-vous un petit mot de conclusion, M. Ryan?

Mme Blackburn: Ils vont pouvoir faire des leçons au ministre.

La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous...

M. Plourde: Mme la Présidente, s'il y a consentement, j'aurais une dernière question.

La Présidente (Mme Hovington): On dépasse le temps déjà d'une minute.

M. Ryan: Pourvu que ce soit une question, Mme la Présidente, parce qu'on a d'autres organismes à entendre...

La Présidente (Mme Hovington): C'est ça. M. Ryan:... jusqu'à la fin de la journée. M. Plourde: C'est rapide.

La Présidente (Mme Hovington):... jusqu'à 10 heures, ce soir.

M. Ryan: On a d'autres responsabilités, en plus.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, une courte question. Allez-y, je vous en prie, une question.

M. Plourde: Oui, rapidement. Avant de quitter, vous aviez dit que la hausse des frais de scolarité ne réglerait pas le problème du financement des universités et vous avez parlé d'autres composantes, d'autres solutions. Est-ce que vous avez envisagé ces solutions? Quelles seraient ces solutions? Est-ce que vous allez régler le problème du financement des universités, même s'il y a une hausse des frais de scolarité? Est-ce qu'il y aura un effort supplémentaire du gouvernement? Et, pour terminer, il y a deux ou trois questions qui ont été posées concernant le régime d'aide financière, on pourrait les rappeler, si vous voulez.

La Présidente (Mme Hovington): Non. Vous aviez une question, je vous en prie. Alors, M. le ministre.

M. Plourde: Bien, c'est parce qu'on avait lancé des questions avant; on aimerait avoir des réponses, si possible.

M. Ryan: Mme la Présidente, cette question a reçu sa réponse ce matin; ce n'est pas nécessaire de la répéter.

M. Plourde: Bien, c'est ça. Vous avez dit que vous aviez donné une réponse, mais on ne se la rappelle pas, on ne semble pas l'avoir entendue. Vous avez parlé de hausser...

M. Ryan: Elle a été donnée.

M. Plourde:... les frais de scolarité, mais d'aucune autre mesure pour régler définitivement le problème du financement des universités. À moins que je ne me trompe, à moins que je ne fasse erreur, je ne me rappelle pas d'autres solutions que vous avez mises de l'avant. Est-ce que je me trompe?

La Présidente (Mme Hovington): Alors, il n'y a rien d'autre à ajouter? Bon! Alors, le temps que nous avions mis à votre disposition est écoulé. Nous avions...

M. Pautel: On n'a pas obtenu de réponses. Excusez-moi, Mme la Présidente, mais j'ai posé une question au député de Verdun sur son intervention. J'aimerais qu'il apporte un éclaircissement, ça ne m'apparaît pas clair. J'ai également posé une question à l'endroit de M. le ministre concernant une des recommandations que nous faisons, de maintenir les périodes d'admissibilité à la bourse. Je n'ai pas obtenu de réponse là-dessus non plus. Et, pour conclure, s'il y a eu une réponse, ce matin, M. le ministre, vous devriez nous la répéter parce que ça nous rassurerait, nous sommes inquiets au sujet de la hausse des frais de scolarité.

M. Ryan: Tout d'abord, je pense qu'on pourrait rappeler, question de courtoisie, que d'ordinaire ce sont les députés qui posent des questions aux délégations qui viennent exposer leur point de vue ici. On peut bien vouloir transformer ça autrement; à la prochaine élection générale, je pense que ça va être une bonne occasion de le faire.

Mais si vous voulez répéter les deux questions, on va y répondre. La première, celle qui a été soulevée à propos de l'intervention du député de Verdun, il a donné des précisions lui-même et ces précisions-là sont contenues dans le projet, dans l'énoncé d'orientations. C'est clair que le nombre maximum de périodes, comme c'est le cas actuellement, sera défini dans le règlement ou dans la politique du gouvernement, pour l'admissiblité à la bourse.

La Présidente (Mme Hovington): Oui, M. Pautel, l'autre question?

M. Pautel: Excusez-moi, M. le ministre, c'est parce que vous étiez absent à ce moment-là, mais M. le député de Verdun, lui, a dit que c'était aux universités de déterminer les délais prescrits.

M. Ryan: Je sais bien, mais je vous donne la réponse du gouvernement. Je respecte beaucoup l'avis du député de Verdun, mais dans le Parti libéral nous sommes habitués à avoir des avis différents sur un point ou l'autre. Ça n'en-

tame absolument en rien la collaboration que nous avons entre nous. La réponse, vous l'avez dans les textes, à part ça. Vous la connaissez très bien.

M. Pautel: Merci, M. le ministre.

La Présidente (Mme Hovington): Voilà qui clôt les interventions des différents groupes parlementaires. Il me reste à vous remercier, au nom des membres de la commission de l'éducation, d'être venus nous présenter votre mémoire. Merci. Nous allons suspendre durant une courte minute pour laisser le temps à l'autre groupe de venir s'installer. J'appellerais dès maintenant la Conférence des associations étudiantes de l'université Laval à venir prendre place à la table. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

(Reprise à 16 h 31)

CADEUL

La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez bien prendre place, nous allons reprendre nos travaux avec la Conférence des associations étudiantes de l'Université Laval. Bonjour et bienvenue. Voulez-vous vous présenter, s'il vous plaît?

M. Boisvert (Raymond): D'abord, ce n'est pas la Conférence, mais la Confédération des associations...

La Présidente (Mme Hovington): Ha!

M. Boisvert: ...d'étudiants et d'étudiantes de l'Université Laval.

La Présidente (Mme Hovington): Confédération.

M. Boisvert: Confédération...

La Présidente (Mme Hovington): Merci.

M. Boisvert: ...comme notre beau pays.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Voulez-vous vous présenter s'il vous plaît?

M. Boisvert: Je vous présente, à ma gauche, Mme Sylvie Grégoire, secrétaire aux affaires pédagogiques de la CADEUL; M. Daniel Moisan, secrétaire aux affaires externes de la CADEUL; et mon nom est Raymond Boisvert, secrétaire général du même organisme.

La Présidente (Mme Hovington): Jérôme

Boisvert?

M. Boisvert: Raymond.

La Présidente (Mme Hovington): Raymond Boisvert. Vous pouvez y aller.

M. Boisvert: Mme la Présidente, M. le ministre...

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 20 minutes pour la...

M. Boisvert: 20 minutes, c'est court.

La Présidente (Mme Hovington): ...présentation de votre mémoire.

M. Boisvert: Le ministre Ryan faisait remarquer récemment qu'on a été très choqué des décisions de M. Wilson parce qu'elles n'avaient pas été effectuées en consultation avec les provinces. On pourrait se demander pourquoi il n'a pas consulté les étudiants avant d'appliquer sa décision d'augmenter les frais de scolarité. C'est ce que nous avons décidé de faire. Cette semaine, un référendum a été organisé à l'Université Laval et pas moins de 12 000 étudiants et étudiantes .y ont participé et ont voulu signifier, par ce fait même, au ministre, au gouvernement et à la société, leur opinion au sujet de la hausse des frais de scolarité. Je dois vous signaler que M. Moisan sera là aussi pour présenter la partie qui traite de la réforme de l'aide financière. Il nous annoncera d'ailleurs, en même temps, les résultats du référendum dont on est en train de dépouiller les votes, finalement, à l'université.

Je commencerai donc par la partie qui concerne les alternatives au problème du sous-financement des universités québécoises. Les réformes proposées par le ministre de l'Enseignement supérieur ont une ampleur limitée à cause de l'insuffisance des sommes investies par la société dans nos universités. La décision de hausser les frais de scolarité est perçue par le gouvernement comme pouvant constituer la seule solution à ce problème. Pourtant, d'autres alternatives moins coûteuses socialement auraient dû être envisagées. Une contribution accrue de l'entreprise privée, la mise sur pied d'un impôt postuniversitaire et des réformes dans le mode de gestion des universités constituent maintenant des avenues beaucoup plus prometteuses.

Le financement par l'entreprise privée constitue l'une des plus intéressantes solutions au financement des universités québécoises. Malheureusement, actuellement, l'entreprise privée finance peu l'enseignement, sa part se limitant à 3 % du budget de nos universités québécoises, ce qui constitue une des contributions les plus basses en Amérique du Nord. On peut remarquer que les entreprises privées sont les premières à

déplorer le manque d'adéquation de la formation universitaire avec les exigences du marché du travail. On pourrait leur demander de prouver davantage leur attachement à l'avancement du Québec en contribuant davantage au financement du savoir.

Voilà pourquoi nous croyons qu'il est nécessaire d'imposer une taxe spéciale aux entreprises privées dans le but d'accroître le financement des universités et ce, sans toutefois porter atteinte au principe de l'autonomie universitaire. Par contre, nous considérons que cette autonomie ne serait pas mise en péril par la constitution de structures consultatives et parfois même décisionnelles dans les matières administratives grâce auxquelles pourrait se développer la concertation entreprises-universités. Le principe de l'autonomie doit en effet pouvoir coexister avec l'objectif de répondre aux besoins de la collectivité. C'est en se branchant davantage sur le reste de la société que les universités québécoises pourront accroître leur légitimité et, par voie de conséquence, leur financement.

En conséquence, nous proposons, tout comme la Fédération des étudiants du Québec et de nombreuses associations au Québec, que le gouvernement impose les entreprises québécoises afin de financer le réseau universitaire.

Depuis nombre d'années, les universités québécoises accumulent des déficits de plus en plus importants. Ces déficits sont le résultat non seulement des coupures budgétaires imposées par le gouvernement, mais également d'une gestion déficiente des services parallèles. À l'Université Laval, par exemple, le déficit du service alimentaire atteint maintenant des proportions astronomiques. Il atteint maintenant plus de 5 000 000 $ et les déficits annuels dépassent les 500 000 $. Le gouvernement doit inciter les universités à confier la gestion des services ne relevant pas directement de leur mission fondamentale au secteur privé ou aux organisations étudiantes. Et, à ce sujet, plusieurs organisations étudiantes au Québec ont démontré une bonne gestion, ma foi, et n'enregistrent pas de déficit lorsqu'elles offrent des services à leurs membres.

On peut se demander pourquoi un tel laxisme administratif a pu être toléré depuis si longtemps et ce, malgré les coupures budgétaires. Le gouvernement demande aux étudiants de contribuer davantage au financement des universités alors que ces dernières engloutissent des sommes faramineuses dans des secteurs qui n'auraient jamais dû leur être confiés. L'expérience le démontre, elles n'ont étonnamment pas les compétences nécessaires à leur bon fonctionnement. Nous croyons que le ministre devrait demander des comptes aux universités sur la gestion de leurs services parallèles plutôt que de faire payer les étudiants et étudiantes pour des déficits nébuleux.

En effet, il est toujours difficile d'obtenir des budgets d'opération ventilés. Le ministre parlait tout à l'heure de l'augmentation un peu déguisée des frais afférents, des frais de matériel pédagogique. Les associations étudiantes qui se sont succédé à l'Université Laval ont demandé à leur administration ainsi qu'au ministre de nous expliquer à quelles fins avaient servi ces augmentations. Où était allé l'argent? Personne n'a pu nous répondre. Étant financées à 90 % à même les fonds publics, les universités devraient répondre publiquement de leur gestion, il me semble que c'est logique, et désormais faire preuve d'un peu plus de transparence.

Quoi qu'il en soit, nous considérons que les services parallèles devraient être confiés au secteur privé ou aux organisations étudiantes afin de mettre fin à ce détournement de fonds inacceptable et ainsi d'affecter les montants versés aux universités là où ils devraient aller, c'est-à-dire dans l'enseignement et dans la recherche.

Nous proposons donc que les universités se dotent d'une politique du faire-faire en confiant la gestion de leurs services déficitaires au secteur privé ou, le cas échéant, aux étudiants.

Dans la recherche d'alternatives au financement des universités, nous croyons qu'une taxe s'appliquant aux étudiants et étudiantes une fois sur le marché du travail et qui financerait la gratuité scolaire ainsi que l'amélioration des programmes de bourses est une avenue que le gouvernement aurait avantage à explorer. L'objectif serait d'éliminer les frais de scolarité et d'établir un programme de bourses complet qui n'ajouterait pas aux dépenses du gouvernement. En vertu du système actuel, la gratuité scolaire augmenterait les coûts du système d'éducation et bénéficierait avant tout aux classes privilégiées qui ne contribuent que d'une façon minime à son financement.

La mécanique de l'impôt postuniversitaire s'appuie donc sur quatre principes. Les bénéficiaires du système d'éducation doivent participer au financement des coûts reliés à leur formation considérant la valeur économique qui en découle pour eux. La méthode de perception de cette contribution ne doit pas agir comme une barrière économique à l'accessibilité. Un individu connaissant des difficultés financières ne devrait pas avoir à contribuer pendant la durée de ses études, mais plutôt après la fin de celles-ci; c'est une des bases fondamentales du projet. Les payeurs de taxes ne devraient pas se voir obligés de payer pour l'ensemble du réseau postsecondaire alors que seule une minorité en bénéficie directement. Alors, vous voyez que les étudiants sont d'accord pour contribuer, mais sous certaines garanties, sous certaines conditions.

L'application de trois mesures, l'abolition des frais de scolarité, l'augmentation du nombre de bourses et l'augmentation du montant des bourses, permettrait d'augmenter l'accessibilité en faisant disparaître toutes les barrières économiques qui freinent la poursuite d'études supé-

Heures.

L'impôt postuniversitaire pourrait être constitué d'une taxe différée, payée par les bénéficiaires de l'éducation postsecondaire, une fois leurs études universitaires terminées. La taxe serait appliquée sur tout revenu au-dessus d'un niveau prédéterminé aussitôt que l'étudiant ou l'étudiante obtiendrait un emploi permanent. La taxe serait prélevée de la même façon que l'impôt sur le revenu. Pour chaque année équivalente de temps complet de cégep et d'université, le bénéficiaire paierait cette taxe pendant trois années, ce qui, finalement, serait nettement suffisant pour financer une bonne partie des coûts de formation du bénéficiaire.

Et, finalement, cette taxe serait appliquée de façon uniforme à tous les finissants et finissantes, qu'ils aient ou non bénéficié d'une bourse. De cette façon, l'étudiant ou l'étudiante dans le besoin reçoit plus qu'il ne contribue en moyenne. Avec un tel système, tous paieront la note des frais et ceux qui devront faire appel à une bourse la recevront en supplément. L'étudiant qui ne sera pas supporté par ses parents se retrouvera ainsi sans dette et paiera la même taxe que l'étudiant aidé financièrement par ses parents.

En conclusion sur l'impôt postuniversitaire, un tel système a le mérite de viser un objectif qui devrait primer pour le gouvernement, celui de l'accessibilité. En effet, une université accessible à toutes les classes sociales maximise le potentiel collectif de production, contribue à une distribution des revenus qui soit équitable et favorise une structure sociale plus flexible et, donc, plus adaptable.

On parle maintenant de la responsabilité de l'État parce que, selon nous, c'est, d'abord, la plus importante et c'est celle qui va de soi. L'objectif d'augmenter l'accessibilité aux études supérieures fut priorisé par la commission Parent lorsqu'elle proposa de geler les frais de scolarité afin d'en arriver à une abolition complète de ces frais. Le ministre de l'Enseignement supérieur lui-même semble reconnaître les mérites d'une telle politique lorsqu'il écrit: "La politique de gel observée par tous les gouvernements qui se sont succédé à Québec a contribué à une hausse très importante du taux de fréquentation universitaire au Québec." C'est ce qu'il déclarait le 19 décembre dernier.

Cependant, bien que nous ayons franchi des étapes importantes en termes de fréquentation scolaire, plusieurs lacunes dans le système actuel ont fait en sorte que le réseau souffre de nombreux problèmes. Ainsi, le nombre d'étudiants à temps partiel et le nombre d'étudiants pour les diplômes de courte durée demeurent encore aujourd'hui plus élevés au Québec qu'en Ontario. De plus, comme le démontrent les chiffres dévoilés récemment par l'Université du Québec à Montréal, un grand nombre d'étudiants et d'étudiantes abandonnent avant d'avoir terminé leurs études, ce qui est de plus en plus dramatique.

Enfin, le Québec accuse un retard considérable au niveau du nombre de maîtrises et de doctorats décernés. Ce n'est certes pas en haussant les frais de scolarité que le gouvernement du Québec apportera une solution définitive à ces problèmes. Il contredit même par cette politique, par ses déclarations, un engagement ferme qu'il a pris en adhérant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Dans ce Pacte, il y a l'article 13 qui stipule: "L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et, notamment, par l'instauration progressive de la gratuité." Le ministre pourra nous répondre tout à l'heure s'il considère que son gouvernement, en haussant les frais de scolarité, renie un pacte auquel il a adhéré dans les années soixante.

Pourquoi cet objectif de gratuité affirmé par la commission Parent et confirmé par le gel des frais de scolarité par tous les gouvernements qui se sont succédé par la suite ne serait-il plus valable aujourd'hui? Alors que, partout dans le monde, on s'entend pour dire que la matière grise est la ressource la plus précieuse, le gouvernement du Québec décide paradoxalement de sous-financer les universités et d'en restreindre l'accès en haussant les frais de scolarité.

Il est facile de comparer les frais de scolarité et le taux de fréquentation universitaire du Québec avec ceux de ses voisins pour prétendre que la hausse des frais de scolarité ne portera pas atteinte à l'accessibilité. En effet, pourquoi les universités ontariennes émettent-elles plus de diplômes alors que leurs frais de scolarité sont trois fois plus élevés? Selon nous, l'explication à ce phénomène se trouve dans les racines historiques et culturelles du Québec.

Notre passé laisse toujours planer une hypothèque sur notre avenir. On n'a qu'à examiner le taux de scolarisation des Québécois il y a 25 ans pour s'en convaincre. Les données statistiques actuelles nous démontrent qu'encore aujourd'hui il y a loin de la coupe aux lèvres en matière de maximisation du taux de fréquentation scolaire au Québec. Ainsi, chez nous, la proportion de la population âgée de 15 ans et plus détenant un grade universitaire se situe à 12,4 % en Ontario alors qu'elle n'est que de 10 % au Québec. Pour ce qui est du taux de diplomation, il est encore inférieur de 25 % par rapport à l'Ontario.

En 1987, les universités québécoises décernaient 29 000 diplômes universitaires comparativement à 52 000 en Ontario, ce qui signifie un déficit de 8000 diplômes par année. La réalité, on l'a souligné à de nombreuses reprises, est encore plus préoccupante pour les étudiants francophones, parce que le taux de diplomation des étudiants anglophones, contribue à hausser la moyenne de diplomation québécoise.

On demande donc au ministre de l'Enseignement supérieur de reconsidérer sa position de hausser les frais de scolarité. D'ailleurs, aucune étude sérieuse n'a pu, jusqu'ici, démontrer qu'une hausse des frais de scolarité au Québec n'affecterait pas l'accessibilité aux études postsecondaires; au contraire. À l'Université Laval, un sondage a été réalisé l'an dernier pour le compte de la CADEUL par la firme Léger et Léger. Il nous révèle que 19,3 % des étudiants inscrits à cette université abandonneraient leurs études si on décidait de doubler les frais de scolarité et 18,5 % des étudiants décideraient, quant à eux, de poursuivre leurs études à temps partiel plutôt qu'à temps plein.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposons avec vigueur à la décision du ministre de l'Enseignement supérieur de hausser les frais de scolarité de 130 % au cours des deux prochaines années. Pour le progrès du Québec, nous disons non au dégel. (16 h 45)

En conséquence, nous proposons que le ministre Ryan reconsidère sa décision de hausser les frais de scolarité et qu'il maintienne ces frais au niveau actuel, comme l'ont fait tous les gouvernements du Québec depuis 25 ans.

Nous abordons maintenant la première partie qui concerne la réforme du régime de laide financière. J'aurais aimé pouvoir laisser la parole à M. Pierre Moisan qui a énormément travaillé sur cette section. Il est en train de dépouiller les résultats du référendum à l'Université Laval et il doit arriver sous peu. Alors, je vais commencer sans lui et je lui passerai la parole par la suite.

Le régime des prêts et bourses existe parce que des citoyens et des citoyennes du Québec n'ont pas les moyens d'assumer les coûts relatifs à leur formation. L'État a donc mis en oeuvre un mécanisme visant à supporter ces coûts, mais ce mécanisme est imparfait. Comme toute norme générale et impersonnelle, il ne peut tenir compte de tous les cas particuliers. On veut donc corriger, dans la mesure du possible, les iniquités engendrées par l'actuel régime des prêts et bourses.

Les étudiants sont prêts à contribuer davantage afin d'accroître l'accès aux études supérieures et la qualité de l'éducation. Voilà pourquoi nous vous proposons aujourd'hui une solution que nous croyons innovatrice et qui permettra aux étudiants et aux étudiantes de s'assurer de l'obtention des moyens financiers nécessaires à la poursuite de leurs études. On ne va pas répéter l'ensemble des propositions qui ont été émises par la Fédération des étudiants du Québec et auxquelles adhère la Confédération de l'Université Laval. Nous allons donc mettre davantage l'accent sur certaines mesures qui n'ont pas, jusqu'à maintenant, été mises de l'avant.

Le régime actuel oblige les étudiants et étudiantes à contribuer au financement des dépenses reliées à leur éducation. Il oblige également leurs parents à faire de même tant qu'ils ne sont pas autonomes. Pourtant, il arrive fréquemment que les étudiants et étudiantes ne puissent travailler pendant le nombre de semaines requis afin de satisfaire aux exigences actuelles du régime et ce, pour des raisons hors de leur contrôle. De même, la contribution des parents n'est souvent que théorique. Dans les deux cas, le gouvernement n'adapte pas l'aide qu'il verse à ces contingences qui constituent, par le fait même, un obstacle à la poursuite des études.

L'instauration d'un service civil volontaire pourrait, selon nous, permettre à tous et à toutes de s'assurer un revenu suffisant tout en participant au mieux-être de la société. Le service civil volontaire permettrait aux étudiants de mettre leurs compétences au service de la collectivité en retour de quoi l'État s'engage à leur verser une bourse équivalente à la contribution minimale qu'il exige d'eux ou de leurs parents. En participant au service civil volontaire, l'étudiant s'assure de pouvoir contribuer réellement au financement de ses études.

Le service civil volontaire mène à un élargissement de la conception traditionnelle des services à la collectivité. Vous savez que beaucoup d'associations étudiantes au Québec encouragent ce genre de service depuis nombre d'années. La CADEUL ainsi que la FAECUM et d'autres associations étudiantes ont mis sur pied des carrefours étudiants de services à la collectivité qui donnent l'occasion aux étudiants de parfaire une expérience pratique de travail dans des organismes à but non lucratif, des groupes sociaux, même des ministères et même des entreprises privées. Il permet donc aux étudiants d'acquérir de nouvelles connaissances par l'exercice d'activités qui devront, de toute façon, être entreprises par l'État québécois. On sait qu'il y aura beaucoup d'investissements qui seront requis dans les années futures dans le domaine de l'environnement. Le reboisement, la dépollution et le recyclage des déchets constituent maintenant des priorités pour notre société. Également, l'aide aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à l'intégration des immigrants sont des champs d'action prioritaires où les ressources font cruellement défaut.

Cette approche nouvelle mérite, selon nous, d'être approfondie parce qu'on croit que ça constitue une excellente alternative à un régime dont les ressources sont limitées. Par l'entremise d'un service civil volontaire, le gouvernement et les étudiants font d'une pierre deux coups, le premier, en investissant dans l'éducation tout en améliorant le bien-être de la collectivité et le second, en s'assurant de pouvoir acquérir les ressources suffisantes à la poursuite de leurs études tout en développant des compétences nouvelles et un nouveau sens de la solidarité.

Si vous le voulez bien, je vais maintenant aborder la partie...

La Présidente (Mme Hovington): II faudrait conclure.

M. Boisvert: II ne nous reste pas beaucoup de temps. C'est ça?

La Présidente (Mme Hovington): II faudrait conclure.

M. Boisvert: Je vais conclure.

La Présidente (Mme Hovington): Vos 20 minutes sont écoulées.

M. Boisvert: Oui, je vais conclure avec...

La Présidente (Mme Hovington): Résumez peut-être votre pensée.

M. Boisvert: ...une partie de la présente réforme dont on n'a pas beaucoup discuté. Alors, il s'agit des dispositions du chapitre, en fait, des articles 47 à 52. Le libellé des articles 47 à 52 du projet de loi 25 est identique à celui des articles 70 à 75 de la Loi sur la sécurité du revenu. Cela nous oblige à questionner les objectifs du gouvernement à l'égard des étudiants bénéficiant du régime des prêts et bourses. Est-ce qu'on s'apprête à mettre en place un régime d'inquisition présumant la mauvaise foi ou la malhonnêteté des étudiants et des étudiantes requérant l'aide financière du gouvernement? Quelles seront les limites aux pouvoirs des vérificateurs? Il ne semble pas y avoir beaucoup de dispositions quant aux limites aux pouvoirs des vérificateurs dont on fait mention dans ce projet de loi.

Évidemment, il est essentiel que l'aide financière aux étudiants aille seulement aux personnes admissibles afin de ne pas pénaliser ceux et celles qui y ont droit. Le respect du principe de l'égalité l'exige, nonobstant le fait que, d'après nous, le régime actuel n'est pas suffisamment accessible. À cet égard, les mécanismes de contrôle actuels visant à déterminer l'admissibilité des étudiants et des étudiantes au régime nous semblent, à moins de preuve du contraire, largement suffisants. Il nous semblerait donc préférable que le gouvernement investisse ses deniers dans l'amélioration du système d'éducation plutôt que dans l'instauration d'un escadron de "boubourses macoutes".

Il peut être très dangereux d'accroître indûment l'intervention de l'État dans la vie privée des personnes. L'article 12 de la Déclaration universelle des droits de l'homme stipule d'ailleurs ce qui suit: "Nul ne sera l'objet d'immixtion arbitraire dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteinte à son honneur ou à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes." À l'heure où les pays de l'Est se libèrent du joug totalitaire des régimes communistes, il est désolant de constater que le gouvernement s'apprête à multiplier des mesures qui s'apparentent aux pratiques de ces régimes.

Doit-on présumer que, depuis 1966, les critères employés par le gouvernement pour juger de l'admissibilité des étudiants et des étudiantes sont inadéquats?

La Présidente (Mme Hovington): On voudrait savoir à quelle page dans votre mémoire se trouve le texte que vous lisez.

M. Boisvert: II s'agit simplement d'un ajout de trois paragraphes étant donné que dans le document que le ministre a déposé le 19 décembre dernier on ne faisait pas mention de cette partie concernant les enquêteurs, les "boubourses macoutes". On a cru bon de l'ajouter.

La Présidente (Mme Hovington): Donc, ce n'est pas dans votre mémoire, actuellement.

M. Boisvert: Ce n'est pas dans le mémoire actuel. Ça vous va?

La Présidente (Mme Hovington): Continuez, c'est parce que le ministre cherchait votre texte.

M. Boisvert: Étant donné la gravité, je pense, des implications de telles mesures, qu'il nous soit donc permis d'en parler un petit peu.

La Présidente (Mme Hovington): Oui, oui. Je vous en prie, allez-y.

M. Boisvert: Oui. Alors, je termine. Une minorité d'étudiants et d'étudiantes ont accès au régime des prêts et bourses. Nous pouvons présumer, étant donné les critères d'admissibilité actuels, qu'une infime partie d'entre eux profitent indûment du régime. Il est donc fort probable que la mise sur pied d'un système de "boubourses macoutes" entraîne des coûts supérieurs aux bénéfices escomptés. On l'a vu avec les "boubous macoutes", les premiers. On l'a vu que ça n'a pas donné de si bons résultats. Nous demandons donc au ministre de l'Enseignement supérieur de nous expliquer pourquoi H croit nécessaire d'engager des "boubourses macoutes". Demandera-t-on, comme dans le cas du régime d'aide sociale, aux voisins de surveiller les allées et venues des étudiants et de les dénoncer? Le gouvernement a-t-il prévu des directives pour encadrer le travail de ses vérificateurs?

Dans une société comme la nôtre, les exigences que posent la liberté et la démocratie impliquent de limiter le plus possible les intrusions de l'État dans la vie privée des citoyens et des citoyennes. Nous croyons qu'il est dangereux de multiplier les visites gouvernementales à domicile et de développer des réseaux de délateurs. N'est-ce pas ainsi, par

exemple, que les communistes chinois ont suscité la méfiance et la peur dans la population afin de conserver leurs pouvoirs? Nous sommes convaincus que le gouvernement a à sa disposition d'autres moyens pour assurer que ses deniers servent bel et bien aux fins auxquelles ils sont destinés.

En conséquence, nous proposons que le gouvernement retire du projet de loi 25 les articles 47 à 52 inclusivement. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. le ministre, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter ou à commenter?

M. Ryan: Oui, Mme la Présidente, je voudrais faire quelques observations. Ensuite, mon collègue de Lafontaine, s'il reste un petit peu de temps, continuera peut-être sur un des thèmes soulevés par la délégation de la CADEUL. Je voudrais rappeler certains faits de base parce qu'en écoutant l'intervention qui a été faite, j'ai l'impression qu'il y a certains faits qui n'ont pas été saisis clairement. On a parlé du désengagement du gouvernement vis-à-vis de l'enseignement supérieur. C'est une fausseté. Le gouvernement, depuis quatre ans, a augmenté ses contributions à l'enseignement supérieur et il les a augmentées de manière très importante. Ça, c'est un fait de base qu'on ne peut pas nier, qui est corroboré par tous les documents publics, je tiens à le rappeler avec force.

Deuxièmement, l'étude que M. Gaétan Lévesque a publiée, ces jours derniers, sur les régimes d'aide financière aux étudiants existant dans différents pays, établit clairement que, pris dans son ensemble, le régime québécois est un de ceux qui créent les conditions les plus avanta geuses pour les étudiants, à peu près n'importe où dans le monde. Si on veut contredire ça, on peut le faire. Mais M. Lévesque a fait une étude approfondie de travaux qui ont été faits sur des régimes d'aide financière existant dans plusieurs pays. On en arrive à cette observation. On peut bien essayer de l'effacer, mais elle est là, elle est inscrite là, bien clairement.

Il y a un troisième fait que j'ai rappelé à votre attention quand je suis allé vous visiter à l'Université Laval, il y a une dizaine de jours. Les frais de scolarité, au Québec, sont trois fois plus bas que dans le reste du Canada. Est-ce que le Québec a un indice de richesse trois fois plus élevé que le reste du Canada? Au contraire, nous sommes un petit peu en deçà de la moyenne. Ça veut dire qu'il faut qu'il y en ait d'autres qui paient pour la différence. Ça veut dire qu'il y a d'autres services qui devaient être laissés en veilleuse. Lesquels on va laisser en veilleuse pour favoriser un régime particulier pour les étudiants du Québec? Si la spécificité québécoise devait aller jusque-là, elle m'inspirerait des doutes très sérieux. Et j'aimerais que vous me fassiez la preuve du contraire.

Vous avez parlé de l'impact de la hausse des frais de scolarité sur la fréquentation universitaire. J'ai donné des chifres sur l'évolution de la fréquentation universitaire au Canada, au cours des dernières années: le Québec, où nous avons eu le gel des frais de scolarité, comparé aux autres provinces, où les frais de scolarité ont suivi l'évolution du coût de la vie, tout simplement. On constate que l'évolution de la fréquentation universitaire n'accuse aucune différence marquée entre les autres provinces et le Québec, à moins qu'il n'y ait encore des secrets de notre spécificité qui échappent à mon entendement. J'aimerais bien qu'on regarde ces faits-là, qu'on les explique clairement. À un moment donné, au bout de la ligne, les équations nous rejoignent; quand on ne veut pas les admettre, elles nous rejoignent.

Un autre point que je veux souligner. On parle beaucoup des compagnies. J'ai fait sortir des données sur le fardeau comparatif des entreprises, au Québec et dans la province voisine, l'Ontario, puisque, surtout en matière d'entreprises, il faut bien comparer avec l'Ontario, c'est la province qui nous fait la compétition la plus immédiate et la plus vive pour les investissements. L'entreprise qui est située à Grenville, dans mon comté, peut décider d'emprunter le pont Pearly et, deux minutes plus tard, elle se retrouve en Ontario sans qu'il n'y ait aucune frontière, rien. Elle peut décider de déménager de l'autre côté et puis il n'y a rien qui l'en empêche. Si elle voit que le fardeau fiscal est plus élevé d'un côté et que ça l'attire plus de l'autre, il n'y a absolument rien qui l'empêche de le faire. Et pour la garder et l'attirer, il faut que nous lui créions des condi tions qui soient raisonnablement compétitives, comparables. (17 heures)

Alors, actuellement, selon les dernières indications que nous avons, le taux général de taxation des entreprises était 1,8 % plus élevé au Québec qu'en Ontario. Ça, ce sont les données de 1989. Il n'y a pas de marge. Je ne sais pas où est la marge, de ce côté-là, qu'on pourrait aller chercher. Si vous la connaissez, vous pouvez nous l'indiquer, ça nous fera plaisir d'en prendre connaissance. Je remarque, assez curieusement, qu'il y avait déjà eu une réduction des contributions fédérales pour les services de santé et d'enseignement postsecondaire et le gouvernement, qui est encore au pouvoir actuellement, avait décidé, le 1er mai 1986, les députés plus anciens s'en souviendront, d'augmenter la taxe sur les entreprises. On avait décidé d'augmenter la taxe sur les entreprises d'un pourcentage assez substantiel pour aller chercher la différence. On était bien contents d'avoir cette marge qui nous a permis de répondre à un besoin créé par une décision unilatérale du gouvernement fédéral. On l'a fait.

J'ai mentionné encore, je donne un autre

fait - je pense que ça va faire bien des arguments qu'on apporte au cours du débat; de ce point de vue-là, le débat est très utile - le fardeau fiscal des Québécois par rapport au fardeau fiscal de l'Ontarien, le fardeau de la dette, en particulier, le fardeau de la dette... Parce que ce que vous proposez, l'impôt postuniversitaire, ça pose une question: Qu'est-ce qu'on fait, le temps que cet impôt-là ne rapporte pas de revenus? Qu'est-ce qu'on fait, tant que cet impôt ne rapporte pas de revenus? On introduit... Vous dites la gratuité, vous êtes contre les frais de scolarité, ça veut dire que c'est le gouvernement qui paie et le gouvernement qu'il faut qu'il aille emprunter parce qu'il n'a pas l'argent pour financer la gratuité scolaire. Il est même obligé de demander aux universités d'augmenter les frais de scolarité.

Alors, dans l'immédiat, nous n'avons pas cette marge de manoeuvre. Dans un autre contexte, proposition qui est raisonnable, je l'ai dit à plusieurs reprises, qui mérite d'être étudiée sérieusement et peut-être dans un contexte plus propice, on pourra franchir des pas dans cette direction-là, mais dans l'immédiat, la situation est la suivante: Au Québec, nous avons un budget de recettes, cette année, de 31 000 000 000 $. Le fardeau de la dette, à lui seul, vient chercher 5 370 000 000 $, c'est-à-dire 17,3 % des recettes et au moins 14 % des dépenses, parce qu'il y a un déficit, à la fin de l'année. En Ontario, ils ont 40 000 000 000 $ de recettes et 4 290 000 000 $ de fardeau de dette, 1 000 000 000 $ de moins que le Québec. Si nous avions le même niveau de recettes que l'Ontario, ça veut dire qu'ils ont un fardeau de dette de 2 000 000 000 $ moins élevé que nous autres. Si nous avions ces 2 000 000 000 $, le gouvernement du Québec, nous pourrions faire une foule de choses. Nous aurions, si ça avait dépendu de moi, augmenté les frais de scolarité, mais peut-être de manière plus tempérée, peut-être de manière plus tempérée. Je ne dis pas qu'on les aurait augmentés, on les aurait ajustés au coût réel de la vie.

Alors, ce sont des données de base qui créent le contexte dans lequel a été prise cette décision que nous ne pouvons pas effacer d'un revers de la main, il n'y a pas un discours politique qui peut effacer ça, il n'y a pas une décision de gouvernement. On est obligés de vivre avec parce que c'est nous autres qui les avons créées, ces conditions-là, au cours des années. Dans ce contexte-là, je pense que le plus que je puisse vous dire sur l'impôt postuniversitaire, c'est que nous sommes prêts à l'étudier. Mais là, ça fait des années que le débat dure, je regrette infiniment de contredire des collègues là-dessus, ça fait des années qu'on débat de ça et on ne peut pas arriver avec cette solution-là, en dernière minute, et dire: C'est ça et on va retarder tout le reste à cause de ça. Ce ne serait pas sérieux de la part du gouvernement.

Mais se donner le temps de l'examiner attentivement, on le fera volontiers, en consultation, s'il y a lieu.

Vous avez parlé de deux choses. Vous avez dit: Vous n'avez pas consulté les associations d'étudiants. Bien, les exécutifs passaient leur temps à se prononcer contre, à gauche et à droite, depuis quelques années. Les fois où on les a rencontrées, c'est ce qu'on s'est fait dire: On est contre ça. Bien, quand on me dit "on est contre ça", on l'enregistre, on respecte votre opinion, très bien, mais on n'ira pas vous demander: Devrait-on le faire? On savait quelle serait la réponse, vous venez de nous la donner encore, c'est la même réponse depuis que je suis au gouvernement. Je n'ai pas d'objection à ce que vous mainteniez la même opinion, c'est votre privilège, mais on le savait, on le savait. Et il y a une chose, quand on sait une chose, on ne fait pas comme si on ne le savait pas.

Vous avez parlé du pouvoir d'enquête du ministre, je vais terminer là-dessus. Je suis content que ça ait été soulevé parce que ça ne l'avait pas été encore, depuis hier. Ce que nous mettons dans la loi, là, c'est un pouvoir qui est, normalement, attenant aux responsabilités confiées au ministre. Le ministre a la responsabilité de la bonne gestion des fonds publics qui seront distribués par le truchement de ce programme d'aide financière aux étudiants. Il faut qu'il soit capable d'aller vérifier certaines situations. Il ne sera pas dans la même position que le ministre responsable de l'aide sociale, parce que la définition même des critères d'admission est plus mécanique, plus objective, en somme, que ne l'est celles qui prévalent pour le programme d'aide sociale. Par conséquent, les occasions, par exemple, de fraudes ou d'erreurs ou tout ça, ne sont pas de même nature. Mais il faut que ce pouvoir-là existe. Je vais vous donner un exemple. Moi, j'administre la Loi sur l'enseignement privé. J'ai été saisi de quelques cas de dérèglement présumés dans la gestion de certains établissements. Et quand j'ai examiné la loi avec nos conseillers juridiques, la Loi sur l'enseignement privé, j'ai constaté que je n'avais pas de pouvoir d'enquête là-dessus - j'en ai comme ministre de l'Éducation. On l'a confirmé clairement dans la loi 107. Les députés s'en souviennent - mais je n'en avais pas pour la Loi sur l'enseignement privé et je m'aperçois que, dans la Loi sur l'aide financière aux étudiants, il n'y en a pas non plus. J'ai dit: Mettez-le. Ça va être clair. Ça va être là. Ça va être net. Il n'y aura pas d'ambiguïté et, si jamais il arrive un cas qui requiert une intervention percutante, j'aurai le pouvoir d'agir immédiatement. Ça ne veut pas dire qu'on va s'en servir. Ça ne veut pas dire qu'on va s'en servir souvent non plus. Je pense que c'est de la nature de l'autorité politique qu'on lui confie des attributions comme celle-là et c'est de la responsabilité d'un ministre de s'en servir avec tout le discernement et

tout le respect des libertés fondamentales des citoyens que ça incombe. Mais traiter ceci de geste qui nous rappelle la Roumanie de Ceauces-cu et la Chine, ces derniers mois...

M. Boisvert: Peut-être pas mais qui peut nous faire diriger vers.

M. Ryan: Franchement là... M. Boisvert: Bien oui.

M. Ryan: ...il va falloir qu'on fasse une épuration de nos lois. Il y a peut-être une cinquantaine de nos lois qui ont des pouvoirs comme ça. Franchement, je ne vois pas... C'est étonnant, évidemment, parce que ça n'y était pas. Mais moi, quand on a parlé de ça, j'ai dit: Franchement, il me semble que c'est de la nature des choses. Si je me trompe, si on me fait la démonstration que je n'ai pas été attentif à certains dangers - je n'ai pas l'oreille fermée, je vais écouter avec attention - je suis même prêt à modifier mon opinion sur ce point-là. Je ne suis pas seul. Il y a le gouvernement qui est avec moi aussi. Je suis prêt à écouter. Mais, a priori, je ne vois pas la justification des craintes que vous exprimez.

J'ai terminé, Mme la Présidente, si le président de la CADEUL veut bien commenter. Ça va me faire plaisir de l'entendre.

M. Boisvert: D'abord, sur le premier point: le désengagement de l'État dans le financement des universités. Vous avez refusé, ce matin, de garantir aux étudiants que la baisse de financement qui va nécessairement résulter de la diminution de 5 % du taux de fréquentation universitaire serait comblée par l'ajout de sommes par votre gouvernement. Alors, n'est-ce pas là le prétexte, le plus beau prétexte de désengagement de l'État dans le financement du réseau universitaire ainsi que dans d'autres cas, le désengagement de l'État dans le financement des programmes sociaux? C'est la question que nous posons. Vous refusez de le garantir toujours. La question vous a été posée plusieurs fois. Est-ce que vous allez combler le manque qui résultera nécessairement de la diminution du taux de fréquentation?

Le deuxième point. Vous dites que les frais de scolarité sont trois fois plus bas ici, au Québec, qu'en Ontario et vous posez la question: Est-ce que, au Québec, on a une richesse collective qui est trois fois plus élevée qu'en Ontario? Il est étonnant qu'on n'ait jamais soulevé encore jusqu'ici que le Québec est la province la plus taxée, la plus imposée, en fait, une des sociétés les plus imposées en Amérique du Nord. Si on accepte de le faire en tant qu'État, que société, c'est justement parce qu'on a beaucoup de priorités et qu'il faut financer davantage l'université qu'ailleurs.

Troisième point. Vous avez dit que les entreprises privées, au Québec, étaient de 1,8 % plus taxées qu'en Ontario. Les entreprises québécoises étaient de 1,8 % plus taxées qu'en Ontario. À cela, on répond: Tant mieux. C'est là une preuve que l'État assume ses responsabilités, qu'il ne se défile pas.

Vous avez dit également que l'application de la mesure de l'impôt universitaire nécessiterait des emprunts énormes, probablement 1 000 000 000 $ ou 1 500 000 000 $, comme la FÉÉQ l'a démontré dans son mémoire. C'est sûr, comme toute mesure qui modifie passablement la formule de financement des universités, ça implique une période de transition et des transformations importantes. Il faut s'y attendre et ça ne doit pas être un prétexte pour évacuer cette alternative. Il est évident que l'État devra emprunter davantage, mais ce ne sera que pour quelques années, peut-être deux ans, peut-être trois ans, après, par l'impôt postuniversitaire, par la taxe que paieront les bénéficiaires, tout va se résorber.

Vous avez dit également que vous n'avez pas consulté les associations parce que les associations étudiantes québécoises, depuis des années, se prononcent contre le dégel des frais de scolarité. Ce que vous avez oublié de mentionner, c'est que, aussi, 58 % des Québécois sont contre cette même hausse. Ça vient juste d'être démontré, il y a encore deux semaines; 58 % des Québécois, selon un sondage CROP, sont contre l'augmentation des frais de scolarité. Vous avez également dit, finalement, que le ministre a la responsabilité d'assurer le contrôle et d'enquêter, dans le cas des "boubourses macoutes". La question que nous vous posons, c'est: Est-ce que vous reconnaissez par là que, depuis 1966, en fait depuis que le régime des prêts et bourses a été mis en application, le système de contrôle n'est pas efficace? Est-ce que vous ne faites plus confiance en vos fonctionnaires? Est-ce que c'est ça? Est-ce que vous estimez que vous avez perdu le contrôle sur l'argent que vous distribuez aux étudiants pour assurer le financement de leurs études?

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Boisvert: Je pense que j'ai soulevé aux moins cinq à sept questions.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Boisvert: J'aimerais peut-être avoir une réponse.

M. Ryan: La première question, le gouvernement parle pas ses actes. Ce que le gouvernement a fait depuis quatre ans parte bien plus fort que toute promesse que je pourrais vous

faire. Et nous avons augmenté sensiblement les contributions financières du gouvernement aux universités. C'est ma réponse à votre première question. Il n'y a rien qui indique que le gouvernement veuille agir autrement dans l'avenir. Au contraire, dans le dernier discours du budget, le ministère des Finances a indiqué qu'il y avait encore des choses à faire. Il dit: Quand nous aurons les moyens de les faire, nous les ferons. Ça, c'est la réponse du gouvernement à la première question.

Deuxième question. Vous dites: II faut accepter d'être taxés plus lourdement parce qu'on a des services plus lourds au Québec. C'est ça que j'ai compris, hein? Alors, on vous dit, nous autres, que le message que la population nous a donné en nous élisant, c'est: Tâchez de diminuer un peu la lourdeur des services pour que la charge fiscale du contribuable cesse d'être plus lourde au Québec qu'ailleurs et, dans quatre ans de gouvernement, nous avons réduit l'écart entre le Québec et l'Ontario, en matière fiscale, qui était de l'ordre de 10 %, nous l'avons ramené à peu près à 1 %. Et nous n'entendons pas retourner à un écart de 10 % parce que c'est écrasant pour une société que de porter un écart comme celui-là. C'est la réponse à la deuxième question.

Troisième question. Vous parlez d'un sondage de CROP. Comme je l'ai signalé à l'époque, les gens ont répondu de la manière que vous indiquez, mais il y avait une deuxième question qui demandait: Êtes-vous au courant si les frais de scolarité sont trois fois... Êtes-vous au courant au sujet de ce que sont les frais de scolarité actuels? La réponse était: 80 % ne le savaient pas. Il y a un autre sondage de CROP qui est sorti ces jours-ci. La question était formulée autrement. Là, il arrive déjà 50-47, je pense. Ça s'en vient très bien. Plus on va parler ensemble et plus ça va progresser. Plus l'information va être diffusée, plus les opinions vont être éclairées.

Une voix: C'est l'inverse du lac Meech.

M. Ryan: Pardon?

Une voix: C'est l'inverse du lac Meech.

M. Ryan: Je ne sais pas, mais... En tout cas, là-dessus, vous êtes au courant...

M. Boisvert: Mais ce n'est pas un argument, M. le ministre, parce que...

La Présidente (Mme Hovington): Bon.

M. Boisvert: ...les gens non plus ne savent pas que le Québec est la société la moins scolarisée. Ils ne savent pas non plus qu'on a...

M. Ryan: Mais on est sortis de...

M. Boisvert: ...des retards à tous les niveaux en...

La Présidente (Mme Hovington): Je vous en prie. On va laisser le ministre répondre à vos questions...

M. Boisvert: Ce n'est pas un argument.

M. Ryan: On est sortis de cette noirceur et on...

La Présidente (Mme Hovington): ...parce qu'il reste à peine une minute.

M. Ryan: ...n'y retournera pas. Le pouvoir d'enquête du ministre signifierait-il que celui-ci ait perdu confiance dans ses fonctionnaires? Au contraire. Vous voyez l'appui formidable qu'ils m'apportent. Même dans le travail que nous faisons ensemble, ils me nourrissent de renseignements pertinents et fiables que j'apprécie beaucoup. Mais je veux qu'ils puissent accomplir leur travail aussi dans les meilleures conditions possible et, encore une fois, ce pouvoir d'enquête, ce n'est pas une affaire qu'on va leur mettre dans les mains et ils vont se promener avec une "batch": Moi, je suis l'enquêteur du ministre. Ça, je n'en veux pas de ça, je vous le dis franchement, et il n'y en pas dans les ministères dont j'ai la responsabilité. Je veux que si une situation spéciale surgit, on puisse agir et vite à part de ça. Je n'aime pas quand ça traîne trop. C'est un pouvoir qui fait partie, encore une fois, de ceux que doit détenir un ministre dans une société où le gouvernement est la puissance chargée d'agir au nom de la collectivité. Il n'y a pas d'autre chose que ça là-dedans.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Est-ce que ça va, M. le ministre? Alors, je vais donner la parole au député d'Abitibi-Ouest et porte-parole de l'Opposition en éducation. M. le député. (17 h 15)

M. Gendron: Oui, je voudrais remercier les étudiants de l'Université Laval. Je pense que vous avez un mémoire qui s'inscrit dans la continuité des associations étudiantes du Québec dans ce réalisme également par rapport à d'autres types de contexte ou de lecture qu'on peut faire. Et avant d'aller plus loin dans votre mémoire, je voudrais reprendre quelques éléments soulignés par le ministre. Il nous disait, en termes de remarques préliminaires: Bon, on a une étude de M. Levesque qui prouve que le régime d'aide financière aux étudiants au Québec est plus avancé qu'ailleurs. À ma connaissance, moi, je n'ai pas entendu que vous mettiez ça en cause. C'est juste pour montrer qu'avec ce genre d'analyse-là, on n'avance nulle part. Vous l'avez vu également par ses réflexions sur le sondage. Ce n'est pas la première fois qu'il dit à des

gens: C'est parce que vous ne comprenez pas. Mais il faudrait qu'il dise toujours la même chose.

Alors, moi, je l'ai entendu vendre cet extraordinaire accord du lac Meech qui est absolument insignifiant en ce qui nous concerne. Il n'y a rien dedans. Mais la même réponse. Les gens disaient: Écoute, nous, on pense que c'est bon. La deuxième question. Est-ce que vous connaissez le contenu? Réponse: Non. Est-ce que le ministre s'en servait de cet argument-la pour vendre l'accord du lac Meech? Bien non, ça correspond à une ligne de pensée qui s'en va. Alors, moi, je ne peux pas m'en aller comme ça. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Ça dépend qu'est-ce qu'on met sur la table. Il ajoutait: Si on en mettait un peu plus pour ce qui est de l'éducation au Québec, il faudrait faire des choix par d'autres services. Il faudrait sacrifier d'autres services. Et son expression c'était: De mettre d'autres services en veilleuse. Il a raison. On est conscients qu'il faudrait effectivement, si ces gens veulent donner priorité à l'éducation, comme c'est devenu requis, compte tenu de faits plus généralement observables par tout le monde qui n'ont rien à voir avec ses statistiques, les miennes ou les vôtres. Parce que là, je donne un exemple. On a le meilleur régime. C'est nous autres qui aidons le plus aux étudiants. Mais votre point ce n'était pas ça. C'est qu'on est en retard. On est en retard avec ceux avec qui on se compare. Quand vous commenciez votre mémoire entre autres en disant: Bien écoutez, je ne connais pas moi personnellement M. Pierre Dion, mais vous avez l'air à le citer. Alors, je tiens pour acquis que c'est exact. Il dit: On s'aperçoit qu'il faut avoir le même nombre de diplômes universitaires par 100 000 de population. Donc, là, il y a la règle du per capita en Ontario, ce qui fait que ça devient une donnée comparable. Bien, il faut dire à cette même population qui a dit: On ne veut rien savoir de la hausse des frais de scolarité: Vous avez raison parce que notre retard avec le meilleur régime au monde est encore grand au niveau de la diplomation. Et il disait, pour le citer comme du monde: Le Québec aurait besoin de 8000 diplômes de plus chaque année, c'est-à-dire 37 000 au lieu de 29 000. Et là, il faisait une petite projection. C'est important d'entendre ça. Dans sa petite projection, il disait ceci: Dans 20 ans, si la tendance se maintient... Est-ce que vous pensez que la tendance va se maintenir avec ce gouvernement-là? C'est évident qu'elle va se maintenir, mais elle va s'empirer. Elle va s'empirer avec ce gouvernement-là, qui, contrairement encore à ce qu'il dit, a coupé. Si c'était vrai qu'il avait mis tant d'argent dans le réseau universitaire, est-ce que la CREPUQ demanderait 50 000 000 $ d'argent neuf? Est-ce que le monde des affaires aurait joué à peu près tous les tambours et les cymbales qu'ils ont pour indiquer que c'était criant, critique, dramatique?

M. Godin, je l'ai cité hier, disait: C'est dramatique, on s'oriente vers la pire crise qu'on n'a jamais vue. Ça été repris par M. Dufour, du Conseil du patronat, la Chambre de commerce de Montréal, et à peu près toutes les associations. Ça ne marche pas la thèse de dire: On leur a donné tout ce qu'ils demandaient. Puis, ces gens-là, depuis deux ans, trois ans, poussent les hauts cris avec raison, savoir que le sous-financement est chronique.

Mais là, je ne veux pas perdre mon fil avec l'Ontario. Écoutez bien ça: Dans 20 ans, si la tendance se maintient, 500 000, ce n'est pas de la tarte, ça là, 500 000 diplômés de plus sortiront des universités de l'Ontario. Qu'est-ce qui va se passer, vous pensez, avec le libre-échange et les investissements, etc? On va aller s'établir où on peut effectivement compter sur une matière grise diplômée et de qualité etc. Ça, c'était une donnée plus universelle au-delà des opinions politiques. Et moi, savoir aujourd'hui qu'avec la tendance qui va empirer par le bas pour le Québec, dans quelques années il y aura 500 000 de plus de diplômés universitaires en Ontario, c'est évident que j'ai peur. C'est évident que je ne suis pas confiant comme je le souhaiterais face à l'avenir parce que... Il continuait, et c'est la dernière phrase que je cite là-dessus: Où croyez-vous que les entreprises étrangères vont s'établir? Elles pour qui la qualité de la main-d'oeuvre est un facteur déterminant. Vous l'avez, la réponse, et vous l'avez noté la réponse, c'est dans votre mémoire. Ça, ce sont des facteurs beaucoup plus objectifs que les fines analyses du ministre qui disait: Écoutez, les gens sont contre les frais de scolarité, mais ce n'est pas grave, c'est parce qu'ils ne connaissent pas ça. C'est ce qu'il a dit au Saguenay-Lac-Saint-Jean: Vous n'êtes pas informés, vous êtes trop loin des grandes villes. Vous êtes dans la brume. Tout le reste du monde est dans la brume. Donc, à ce moment-là, on ne peut pas tenir compte d'une donnée comme celle-là.

Moi, je dis: Oui, on a un bon régime. Pour vrai, sincèrement, on a un bon régime d'aide. Mais avec un bon régime et une décision de dégeler les frais de scolarité, on se place dans une situation de fragilité pour l'avenir, que j'aimerais mieux ne pas envisager tout de suite, surtout quand le même gouvernement nous dit: Dans les options alternatives, vous avez raison, il y en a d'autres. Mais on va regarder ça; on va étudier ça et, un peu plus tard, on va regarder ça. Mais les décisions vont être prises. Le mal va se faire. Les conséquences vont avoir lieu et je ne pourrai pas reculer avec les conséquences qui auront lieu.

Je le répète, un dégel des frais de scolarité, c'est débarrer la porte, c'est débarrer la serrure à un fonctionnement de 25 ans qu'il nous a servi, selon le même ministre qui débarre la porte. Il prend la clef, il débarre la serrure dans

un contexte social qui fait que lui-même disait: Oui, j'affirme, du haut de la vérité révélée, que ça a eu une force sans précédent, le fait qu'on ait maintenu le gel pendant des années. Ça a contribué à combler une bonne partie de notre retard. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? On ne peut pas, du revers de la main, dire: Non, ça n'arrivera plus. C'est ça, les conditions objectives dans lesquelles on doit apprécier le débat qu'on fait aujourd'hui. Si les étudiants viennent dire: On ne veut rien savoir, comme il !'a dit, il dit: On n'a pas besoin d'aller vous voir, vous m'avez dit: On ne veut rien savoir. Mais, pourtant, ce gouvernement devrait représenter quelque chose. La population a dit la même chose que vous. La population a dit la même chose que ceux qu'il n'a pas voulu aller voir, sous prétexte qu'il connaissait la réponse. Et il s'apprête pareil à prendre la décision. Donc, ça veut dire que ce n'est pas cette base-là, ce n'est pas pour ça qu'il fonctionne de même. Il y a d'autres motifs qui l'animent.

Je pense qu'on pourrait taxer les étudiants du Québec d'être irresponsables s'il n'y avait pas d'alternative. Mais ils proposent l'alternative et ils se conscientisent au fait que l'État ne peut être le pourvoyeur de fonds constamment sans une participation d'autres types.

Le même ministre dit: Écoutez, le niveau de taxation au Québec par rapport à l'ensemble de l'Ontario est plus élevé. Pas au niveau du support aux universités, et il le sait bien, l'entreprise privée, par rapport à ce que nous discutons, maximum de 2,5 % à 3 % d'apport dans l'ensemble de l'argent généré dans le milieu universitaire. En Ontario, 8 %, 9 %, 10 %. Ça va jusqu'à 13 %, dans certaines universités canadiennes, la participation du secteur privé au financement universitaire parce que ces gens disent que c'est capital pour notre avenir. On veut investir dans l'éducation parce que, rapidement, on y trouve notre compte, on y retrouve notre dû. Donc, ils considèrent que ce n'est même pas une dépense. Ils considèrent que c'est un investissement. Sur les éléments de votre mémoire, je pense qu'on s'accorde.

Deux questions: Vous êtes les premiers, à ma connaissance, à revenir avec une notion qui a circulé dans le temps, celle de l'instauration d'un service civil volontaire, sur la notion noble objectivement de dire que ça nous permettrait, sur le terrain, d'aller prendre une expérience pragmatique ou pratique, d'être des collaborateurs aux créneaux ou aux crédos nouveaux, que ce soit l'environnement, les personnes âgées qui manquent de ressources. La difficulté que j'ai avec votre nouvelle formule d'un service civil volontaire, et c'est là que j'aimerais vous entendre un peu plus, c'est dans l'application, le concret, le vécu. Est-ce que ça signifie, puisque vous dites que l'État compenserait par une bourse ou un prêt variable par rapport à l'apport de travail que nous donnerions, soit au niveau d'une problématique de l'environnement de personnes âgées ou autres... Et là, c'est drôle, il me semble qu'en termes de compréhension, je vois là autant de petits prêts et de petites bourses qu'il y a d'étudiants puisqu'il faudrait que ce soit basé sur la prestation de services que vous offririez à la société et, dans la gestion d'un système comme ça, c'est probablement parce que je n'y ai pas assez réfléchi, mais vu que c'est vous qui suggérez ça, j'aimerais que vous me donniez quelques pistes à savoir comment gérer ça. Je veux essayer de voir comment on pourrait opérationaliser l'affaire pour avoir quand même un régime assez universel comme société, qu'on pourrait appliquer à l'ensemble des étudiants qui feraient du service civil sur une base volontaire.

M. Boisvert: Alors, c'est simple et compliqué à la fois. L'État considère que le bénéficiaire du régime d'aide financière doit contribuer au financement de ses études, selon un calcul déterminé et il arrive, dans plusieurs cas, que l'étudiant ne travaille pas le temps requis, par exemple pendant l'été, pour gagner le montant qui correspond à la contribution calculée par l'État. Il arrive aussi, et ça dans beaucoup plus de cas, que l'étudiant ou l'étudiante ne reçoive pas l'aide financière de ses parents. Étant donné que l'État reconnaît ces deux facteurs comme faisant partie du financement de base de l'étudiant pour assurer son année, il faudrait que, dans les cas où les étudiants n'ont pas ce financement pour des raisons hors de leur contrôle, il donne la possibilité concrète à l'étudiant qui le veut bien de s'assurer de ce financement par le biais d'un travail qui soit socialement rentable. Ça, c'est le principe. Maintenant, le mécanisme exact pour tous les cas particuliers, je pense que... on l'a vu, la réforme est, comme tout règlement ou tout projet de loi, toute loi, une règle qui est impersonnelle et qui laisse place justement à toutes sortes de cas particuliers.

Je pense que, à ce niveau-là, le comité d'appel pourrait justement s'assurer de donner ou de veiller à ce que l'argent donné à l'étudiant soit fidèle au travail qu'il donne à l'État, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas de désavantage de personnes lésées. On n'a pas tellement élaboré sur le mécanisme, parce qu'il pose toutes sortes de problèmes. Ce qu'on demande à l'État, ce qu'on demande au gouvernement, c'est d'analyser la possibilité d'offrir à tout étudiant qui le veut bien la possibilité de travailler dans des organismes à but non lucratif, dans des groupes sociaux où les ressources font défaut et de lui donner un salaire carrément: ça peut s'appeler bourse, ça peut s'appeler salaire, ça ne nous dérange pas, c'est le principe qui est d'abord important. Je ne sais pas si vous comprenez tous...

M. Gendron: Bien, on aura probablement

l'occasion d'en rejaser, mais c'est un peu plus clair, en tout cas, avec les explications que vous me donnez, que ce que j'en comprenais.

Deuxième question que je voudrais aborder. Vous êtes au courant que le ministre a l'intention d'instaurer, dans sa réforme d'aide financière aux étudiants une espèce de comité d'appel mais non décisionnel, parce qu'il veut se garder ce pouvoir-là au 15e étage. Alors, moi, je n'en suis pas sur le pouvoir qu'il veut garder au 15e, mais avez-vous une réaction plus élaborée sur le fait qu'un comité d'appel n'ait pas de rôle décisionnel? Je ne sais pas si je vous ai manqué dans votre mémoire, mais il me semble que là-dessus, il manque...

M. Boisvert: On en a beaucoup parlé à la FEEQ, mais je pense que là-dessus, lors de la présentation du mémoire de la Fédération des étudiants et étudiantes du Québec, on a parlé des propositions qu'on suggère au ministre. On n'a pas cru bon d'insister là-dessus mais plutôt d'insister, par exemple, sur le service civil volontaire, les "boubourses macoutes" et autres pour ne pas répéter toujours la même chose, mais on partage évidemment les visions de la FEEQ. Il y a tellement de cas d'exception et il faut créer une structure qui permette d'agir rapidement, de répondre rapidement aux besoins pressants des étudiants qui sont lésés pour toutes sortes de raisons, un ensemble de raisons.

M. Gendron: Sur les "boubourses macoutes", comme vous les appelez, vous avez suggéré de retirer complètement les articles 47 à 52 du projet de loi?

M. Boisvert: Oui.

M. Gendron: Moi, je ne porte pas de jugement sur ce que vous avez dit là-dessus: c'est sûr que si c'est la même patente et ça semble être la même patente qu'aux affaires sociales, aux assistés sociaux où ça a tellement créé d'évaluation par toutes sortes d'organismes, comme étant très discriminatoire, ça ne fait aucun doute que nous, nous serons d'accord pour que ça ne soit pas ce genre de mécanisme. Mais la question que je vous pose, puisque vous l'avez dit en conclusion, je recommande le retrait pur et simple des articles 47 à 52, est-ce que vous avez une opinion sur l'instance, l'ombudsman, le senior, c'est qui, qui devrait, éventuellement, faire le suivi du remboursement des prêts? (17 h 30)

M. Boisvert: Écoutez, nous... Du remboursement, ou vous voulez dire des cas de fraude?

M. Gendron: Les cas de fraude, excusez-moi, c'est moi qui me suis trompé.

M. Boisvert: Bon. Nous, on considère à la

CADEUL la possibilité concrète que d'instaurer toute mesure visant à contrôler ou d'aller vérifier chez les étudiants s'ils fraudent ou non le régime ne serait pas rentable. On l'a vu dans le cas de l'aide sociale. Il y a eu à peu près 15 % des bénéficiaires de l'aide sociale qui ont été sous enquête. Et sur ces 15 %, je pense que c'est 5 % seulement des cas des personnes qui ont effectivement fraudé. Donc...

M. Gendron: Un instant, M. Boisvert. Je ne suis pas tellement sûr, mais concrètement, vu que vous êtes étudiant, vous représentez une association étudiante, j'aurais aimé savoir rapidement, qu'est-ce que c'est que le ministre peut prétendre être des cas de fraude évidents au niveau de l'aide financière. C'est plus ça que j'aimerais entendre de votre part.

M. Boisvert: Des cas de fraude évidents.

M. Gendron: Oui. C'est quoi les cas de fraude dans l'aide financière puisque ça prend à peu près 25 papiers, 25 vérifications. Comment faites-vous...

M. Boisvert: Effectivement, c'est ça qu'on pose comme question. Regardez, c'est tellement difficile d'avoir accès, étant donné les critères actuels d'admissibilité au régime d'aide financière, qu'il serait très étonnant qu'un grand nombre d'étudiants fraudent. Comment vont-ils le faire?

M. Gendron: Ça n'existe pas.

M. Boisvert: C'est donc que le ministre reconnaît publiquement que son système de contrôle actuel n'est pas adéquat. Ou bien, quoi d'autre? C'est le règne de "Big Brother" qu'on veut imposer, instaurer.

M. Gendron: C'est bon, Mme la Présidente.

M. Boisvert: Si on applique le même rapport, si on fait le parallèle au niveau des prêts et bourses, pour le nombre de personnes qui ont été visitées et qui ont effectivement fraudé, si on fait le même rapport pour le nombre de bénéficiaires du régime de l'aide financière des prêts et bourses, on va s'apercevoir que c'est quoi? C'est quelques centaines d'étudiants qui, finalement, pourraient être accusés ou pourraient effectuer des remboursements pour avoir fraudé. Donc, tout l'appareil qui va être mis en place va nécessairement coûter beaucoup plus d'argent que les bénéfices que l'État va en retirer. Ça c'est clair et net que le ministre essaie de nous...

La Présidente (Mme Hovington): Oui.

M. Gendron: Un instant. Juste une seconde. Juste pour finir.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je pense que je n'ai pas abusé. Au contraire. C'est un peu ces propos-là, M. Boisvert, pas nécessairement que je voulais entendre... Dans le sens de ne pas vous faire dire des choses que je veux absolument que vous disiez. Mais ça, ce que vous venez de dire, ça m'apparaît être conforme à la réalité du milieu étudiant. Il n'y a pas, en réalité, selon ma connaissance - j'en ai deux enfants, moi, qui sont aux études, je connais un peu ce milieu-là - il n'y en a pas vraiment de cas, on n'est pas du tout dans le même régime que l'aide sociale pour 25 000 raisons. Dans ce sens, instaurer un mécanisme similaire à celui de voir correctement l'application de cette loi d'aide sociale qui a davantage comme préoccupation de faire la guerre aux pauvres plutôt qu'à la pauvreté, c'est débile en ce qui nous concerne, mais ça peut s'expliquer.

Mais, par contre, au niveau de l'aide financière aux étudiants, c'est évident qu'il n'y a pas de commune mesure. Alors, c'est ce que vous venez de me confirmer par vos propos et c'est ce que je voulais entendre.

M. Boisvert: II n'y a pas de commune mesure. On a fait une enquête qui n'est peut-être pas scientifique. On a appliqué un petit peu le principe à l'Université Laval. Si 15 % des personnes qui sont bénéficiaires du régime d'aide financière à l'Université Laval étaient visitées et que 5 % de ces 15 % fraudaient effectivement le régime, on arrive à peu près à dix ou douze étudiants, peut-être même moins. On a fait rapidement le calcul. On voit déjà qu'il y a une démesure entre le moyen de contrôle qui veut être appliqué et toutes les implications que ça comporte, et la réalité vécue dans mon expérience.

M. Gendron: Ça va.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci. En conclusion, M. le ministre.

M. Ryan: Simplement là, sur le dernier point qui vient d'être l'objet d'échange d'idées, j'ai dit, tantôt, aussi clairement qu'on peut le dire: II n'y aura pas de service spécial de créé avec ça. Qu'il n'y aura aucune administration, aucune bureaucratie particulière. Est-ce que c'est clair? C'est un pouvoir qui est là et si le ministre est saisi d'une situation très spéciale qui peut être de différentes natures, qui peut même impliquer des fonctionnaires, par moment, et s'il y a des possibilités d'enquête, il y en a dans tous les domaines de l'administration publique, il pourra agir, il aura le pouvoir qui est là. Mais il n'est pas question de créer un service d'inspecteurs, rien de ça. Il n'en est pas question et nous n'en avons pas besoin. C'est clair?

M. Gendron: Mme la Présidente, ce qui est surtout clair, c'est qu'on lirait là les mêmes articles, le même libellé que ce qu'il y a dans un autre projet de loi. Ça, c'est bien plus clair que ce que vous venez de dire.

M. Ryan: Je vais vous donner un exemple, Mme la Présidente, qu'on se comprenne bien.

M. Gendron: Ça, c'est clair.

M. Ryan: Dans la Loi sur l'instruction publique, le ministre possède un pouvoir d'enquête comme celui-là. Il n'y a pas de service spécial qui l'entoure à cette fin-là. S'il y a une enquête à instituer, il prend ses services réguliers. Il va demander au sous-ministre des recommandations. Il va décider de choisir telle personne pour aller faire telle mission à telle place. Il n'a pas besoin de service, il n'y a pas de bureaucratie et il n'y a pas d'enquêteurs permanents sur la route, en aucune manière. Il n'y en aura pas là-dedans, je veux que ce soit bien clair.

La Présidente (Mme Hovington): Bon, merci. Une voix: Mais dans ce cas-ci...

M. Ryan: Si vous niez, en principe, ce pouvoir d'enquête au ministre, là, il y a un problème entre nous deux.

M. Boisvert: ...vous en avez besoin main-tenant et vous n'en aviez pas besoin auparavant. Depuis 1985, M. Ryan, vous êtes ministre de l'Enseignement supérieur. Que s'est-il passé depuis ce temps?

Une voix: Je crois que vous l'avez expliqué.

M. Ryan: Oui. J'ai donné l'exemple de la Loi sur l'enseignement privé, tantôt, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Je pense que ça a été expliqué. Alors, si vous voulez, nous allons conclure ici parce que nous avons dépassé le temps. Il me reste à remercier la Confédération des associations d'étudiants et d'étudiantes de l'Université Laval de son mémoire.

J'inviterais l'autre groupe, l'Union des gradués inscrits à Laval, à venir s'asseoir à la table.

Nous suspendons pour une ou deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 37)

(Reprise à 17 h 40)

La Présidente (Mme Hovington): À l'ordre,

s'il vous plaît!.

Je demande aux membres de la commission de prendre place autour de la table, s'il vous plaît.

Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'éducation va reprendre ses travaux. Nous avons avec nous l'Union des gradués inscrits à Laval. Bonjour et bienvenue. Si vous vouiez bien vous présenter pour les fins de la transcription des travaux.

Union des gradués inscrits à Laval

M. Verrette (Denis): D'accord. Alors, mon nom est Denis Verrette. Je suis vice-président aux affaires externes à l'Union des gradués inscrits à Laval, ce qui est l'association des deuxième et troisième cycles de ladite université. Alors, je vous présente, à ma droite, Hugues Bouchard, qui est mon prédécesseur au même poste, et Etienne LaBillois, qui est notre recher-chiste.

La Présidente (Mme Hovington): C'est vous qui allez être le porte-parole, M. Verrette?

M. Verrette: Non, on va parler tour à tour concernant ces sujets-là.

La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Alors, vous pouvez commencer.

M. LaBillois (Etienne): D'accord.

La Présidente (Mme Hovington): Ce sera M. LeBillois.

M. LaBillois: LaBillois.

La Présidente (Mme Hovington): LaBillois.

M. LaBillois: Oui

La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Allez-y.

M. LaBillois: D'accord. Pour l'UGIL, la réforme, telle que présentée par le ministre Ryan, tente de remplacer les objectifs de formation par un accroissement de productivité de l'enseignement et de la recherche et ce, au profit d'une logique économique.

Le principe qui sous-tend la réforme et, du même élan, le dégel des frais de scolarité est: Qui s'instruit s'enrichit. Or, cela reflète une situation inexacte si on la compare avec le quotidien des gens de deuxième et troisième cycle. D'une part, les prêts augmentent plus vite que les bourses, depuis plusieurs années, sous prétexte que la capacité des futurs diplômés est plus grande de s'acquitter des dettes enregistrées en cours de formation. Une telle logique nous apparaît conditionnelle, d'une part, à l'obtention d'un emploi et, d'autre part, d'un emploi qui est relié au domaine de spécialisation du diplômé. Pour nous, dans la situation actuelle, la devise deviendrait plutôt: Qui s'instruit vit l'insécurité, la précarité et l'endettement.

De plus, il faut noter que le gouvernement libéral a, depuis 1985, coupé dans l'aide financière accordée aux étudiants. D'un montant de 115 276 000 $ en 1985-1986, on ne notait, en 1986-1987, que 95 003 000 $, et ça uniquement pour le réseau universitaire. Les résultats de telles coupures? Une baisse de 54 % des bénéficiaires d'un prêt, une chute de 59 % des bénéficiaires d'une bourse et le prêt a augmenté de 36 % durant la même période; il est passé de 2360 $ à 3210 $, ce qui est bien supérieur au taux d'inflation enregistré durant cette période qui oscille aux alentours de 18 %.

Avec les 52 000 000 $ d'argent neuf prévu par M. Ryan dans la réforme du régime des prêts et bourses, on affirme qu'il y aurait 14 445 nouveaux étudiants qui auront droit à une bourse, soit une majoration de 22,5 %. Or, si on exclut les temps partiels, on note qu'il ne reste plus que 1245 nouveaux bénéficiaires, soit pour un pourcentage de 1,94 %. Il faut noter, d'ailleurs, qu'en enlevant les étudiants à temps partiel, sur les 18 500 000 $ d'argent neuf prévu, il ne reste plus que 13 200 000 $ pour les étudiants à temps complet.

Pour l'UGIL, la réforme telle que présentée est irrecevable. D'ailleurs, selon un sondage mené en 1988, on note que 72 % des chercheurs étudiants devaient travailler parallèlement à leur formation pour obtenir un revenu décent. Ça s'avère nécessaire car 45 % d'entre eux vivent sous le seuil de la pauvreté. Les résultats qui risquent de découler de la présente réforme, en plus d'un endettement accru, risquent de prolonger indûment la durée des études, dû au fait que les étudiants chercheurs devront continuer de travailler durant leur formation, toujours dans l'esprit d'améliorer leur situation financière. Ils risquent également d'aboutir à un abandon scolaire.

Les étudiants se sont endettés depuis 1986-1987, en général, d'environ 20 000 000 $ par année. On sait, d'autre part, que la valeur du prêt a augmenté de 36 % durant la même période et que la quote-part du fédéral dans l'aide financière est passée de 55 500 000 $ à 77 400 000 $, de 1985-1986 à 1987-1988. L'UGIL ne peut accepter un endettement accru de ses membres.

D'ailleurs, pour une plus grande équité, nous demandons au gouvernement de reconnaître les frais de recherche reliés à la formation aux études de deuxième et troisième cycle au même titre qu'il reconnaît les frais reliés aux stages.

M. Bouchard (Hugues): Je vais continuer. Pour ce qui concerne les étudiants à temps partiel, on est d'accord avec le principe de

fournir une aide financière à ces étudiants à temps partiel, mais on est contre l'idée qu'ils aient seulement des bourses. Pour nous, le régime à avantager est le régime d'études à temps plein et, en faisant en sorte que les étudiants a temps partiel ne reçoivent que des bourses, on se trouve à leur donner un certain avantage. De plus, ces étudiants à temps partiel occupent généralement un emploi, ce qui fait qu'ils ont une capacité plus grande de rembourser leur dette, s'ils en contractaient une lors de leurs études. Aussi le régime d'études à temps partiel fait en sorte que la durée des études s'allonge.

En ce qui concerne la contribution du conjoint, nous voyons d'un bon oeil le bout de chemin fait par le gouvernement, mais on se demande si cela est suffisant pour les revenus faibles ou modestes.

Le remboursement de la dette. On est d'accord avec le principe de rembourser 25 % de la dette des étudiants chercheurs contractée lors d'un cycle supérieur. Mais, pour ça, on se demande quels sont les délais normaux. Le délai pour la rédaction d'un mémoire de 100 pages ou celui pour la rédaction d'un essai de 25 pages, ce n'est pas la même chose. Un diplôme de deuxième cycle ou un certificat de deuxième cycle, ce n'est pas le même délai que ça demande. Alors, lorsqu'on parle de délais normaux, on voudrait savoir ce qui est exactement un délai normal. On voudrait que ce délai tienne compte de la problématique de chacune des facultés dont l'étudiant chercheur fait partie et des diplômes qu'elles émettent. Ensuite, on voudrait aussi que ce délai tienne compte de la réalité quotidienne, tels les délais de correction, les délais pour trouver les résultats pour la recherche, etc.

Aussi, en ce qui concerne la recommandation pour les étudiants faisant partie d'un programme d'entraînement national, on est contre l'idée, en principe, que ces étudiants-là aient une remise, que le régime leur paie, en fin de compte, les intérêts. Cela créerait une certaine catégorie d'étudiants parmi l'ensemble, ce qui fait qu'on est contre cette idée.

En ce qui concerne le pouvoir de vérification du ministre tel que contenu dans la loi, on est d'accord avec le principe. On voit bien que le ministre doit surveiller la gestion des deniers publics, mais on se demande s'il n'y aurait pas d'autres moyens de le faire.

Il y a aussi, plus loin, l'article 53 où le ministre dit: Lorsque la personne sait ou aurait dû savoir que ces documents étaient faux ou que ces documents étaient incomplets ou contenaient des renseignements faux. Il est vrai que, dans l'aide financière, c'est beaucoup plus objectif. Mais ces mêmes documents sont donnés par plusieurs personnes et il y aurait des risques d'erreur. Je pourrais fournir au ministre l'exemple d'un étudiant qui était sur l'aide financière, qui avait demandé à son employeur un relevé des gains gagnés. Son employeur lui a donné le relevé. Il n'a pas vérifié, mais l'aide financière a vérifié, parce que l'aide financière vérifie actuellement, et il a été pénalisé. Mais ce n'est pas sa faute si le document était faux. Il ne 'S'en était pas rendu compte. Alors, quand on dit: Aurait dû savoir, on devrait peut-être limiter un peu la portée de ça. Denis.

M. Verrette: En ce qui concerne la décision unilatérale du ministre de dégeler les frais de scolarité, pour reprendre une expression consacrée qui rappellerait peut-être au ministre certains souvenirs, on peut se poser des questions non pas sur sa légalité, mais sur sa légitimité. Le gel, il faut bien comprendre qu'il a été établi depuis le milieu des années soixante et qu'il constitue une suite d'une commission royale d'enquête sur l'éducation. Son but était d'"ac-cessibiliser" la fréquentation universitaire au Québec. Donc, une mesure qui est établie à la suite d'une commission royale d'enquête sur l'éducation constitue, en quelque sorte, une manifestation d'un choix de société, lequel choix de société, lui, est remis en question par un décret; un décret, en fait, une décision qui met les principaux et principales intéressés, les étudiantes et les étudiants, sur la défensive devant les faits accomplis. Il n'y a pas eu de document public qui aurait formellement évalué les alternatives au dégel pour régler le problème de sous-financement des universités ou les impacts du dégel sur l'accessibilité et sur la fréquentation universitaire. On n'a pas été consultés sur un tel document. Dans ce sens-là, la commission parlementaire de 1986 n'est pas un exemple valable de consultation. Et que dire du moment? Le 19 décembre, fa veille du temps des fêtes, quatre mois ouvrables avant l'application de la décision, alors que la seule tribune pour s'exprimer à ce sujet était une commission parlementaire devant porter sur un projet de réforme de l'aide financière aux étudiants. Le ministre a récemment dit que les associations gagneraient à mieux informer leurs membres, mais, en fait, il n'a rien fait pour favoriser cela.

D'autre part, le dégel des frais de scolarité soulève plusieurs autres questions qui sont indissociables: la gestion des universités, la contribution gouvernementale à leur financement, la participation des autres intervenants, notamment privés, au financement des universités et l'accessibilité. Le gouvernement doit proposer une réponse plus globale et consulter les intéressés avant de décider sur ce projet.

Quant au fond, la déclaration du 19 décembre laisse subsister de nombreux doutes dans l'esprit de l'association étudiante des deuxième et troisième cycles de l'Université Laval.

En ce qui concerne l'accessibilité, comment affirmer qu'une mesure contraire au gel, instauré pour accroître l'accessibilité à l'éducation supérieure - ce qu'a admis, d'ailleurs, le ministre

dans sa déclaration - et dont l'application a effectivement coïncidé avec une hausse substantielle de la fréquentation et de la diplomation universitaires au Québec, n'aura pas l'effet inverse? Bien que réduit, l'écart qui demeure entre le Québec et le reste de Canada, à ce chapitre, satisfait-il le ministre? Et, sinon, quels moyens propose-t-il pour le réduire, compte tenu des limites du régime de prêts et bourses?

Car limites il y a. À la faveur de la hausse du prêt maximal et de l'augmentation de la part du prêt par rapport à celle de la bourse, l'endettement étudiant s'est accru depuis les dix dernières années. Et c'est encore plus vrai aux deuxième et troisième cycles, en raison de l'importance des emprunts. Or, la compensation partielle proposée via les prêts et bourses aura pour effet d'aggraver cette situation. Alors que les frais de scolarité doivent être "rencontrés" dès le début d'une session, l'obtention de prêts et bourses demeure soumise à des délais, de l'incertitude. Du reste, la bonification de l'aide aux étudiants et étudiantes conserve un caractère ponctuel qui ne saurait compenser l'effet permanent de la levée du moratoire sur les frais de scolarité.

Quant à l'équité maintenant. Pour l'UGIL, cette mesure apparaît, par ailleurs, inéquitable. La situation financière des chercheurs et chercheuses étudiants des cycles supérieurs, on l'a dit, n'est pas aussi reluisante qu'on le laisse entendre: plus du tiers d'entre eux et elles touchent des revenus inférieurs à 10 000 $, près des trois quarts occupent un emploi hors de leur cadre de recherche, le niveau d'endettement est élevé, etc.

De plus, s'il est vraisemblable que les étudiants et étudiantes continuent de provenir majoritairement de milieux favorisés, l'accès croissant à l'université, enregistré au cours des dernières années - donc en période de gel de frais de scolarité - a contribué à relativiser ce phénomène. Et la capacité des parents est d'autant moins pertinente pour évaluer celle des étudiants et étudiantes chercheurs et chercheuses que ceux-ci et celles-ci sont considérés comme autonomes aux deuxième et troisième cycles. Il est donc tendancieux d'affirmer que, par le gel des frais de scolarité, la population subventionne les riches.

De plus, l'effort consenti par les étudiantes et étudiants ne se limite pas aux seuls frais de scolarité. Il se traduit par la réponse aux besoins courants, par l'achat de matériel, de documents, par le manque à gagner en temps et en argent, etc. Prétendre qu'ils et qu'elles ne font pas déjà leur part, c'est ignorer une bonne partie des faits.

L'augmentation des frais de scolarité apparaît aussi inéquitable parce que ceux-ci doivent être "rencontrés" en début de session, alors que les bénéfices provenant de l'éducation sont anticipés et demeurent soumis à des incertitudes, notamment au niveau de l'emploi. L'endettement accru, auquel un tel projet contribue, ne tient pas compte de la capacité de payer des diplômés.

Les universités, en tant que service public, ne devraient-elles pas être financées par les personnes, morales et physiques, en proportion de leurs revenus et, donc, de leur capacité réelle de payer? Rappelons qu'actuellement les dons, qui sont volontaires, des entreprises qui bénéficient, en dernière instance, du savoir transmis par les universités ne comptent que pour 3 % du financement des universités. Les étudiants qui sont beaucoup moins nantis en assument actuellement 6,6 %. Le gouvernement, prompt à doubler, et même plus, la contribution qui, elle, est obligatoire de ces derniers, n'a même pas envisagé, du moins publiquement et formellement, l'alternative d'une ponction plus grande sur le revenu des compagnies.

Enfin, en ce qui concerne la qualité de l'éducation, le problème du sous-financement des universités ne provient pas tant du fait que la contribution des étudiants et des étudiantes n'a pas été majorée officiellement - certains établissements, dont l'université Laval, ont imposé, depuis quelques années, des frais afférents et de matériel pédagogique avec la bénédiction du ministre, en 1986 - mais bien plus des coupures drastiques que le gouvernement a lui-même opérées dans leur budget de fonctionnement. La part des dépenses gouvernementales en cette matière est passée de 4,6 %, à la fin des années soixante-dix, à 3,88 % en 1989-1990, quoiqu'elle ait atteint un plancher de 3,54 %, en 1983-1984. Donc, on reconnaît un certain effort gouvernemental accru, ces dernières années, mais cet effort gouvernemental accru n'a pas compensé les coupures antérieures qui avaient été réalisées. Il y a donc là une question de priorités, de choix de société.

Et c'est, justement, à partir de ce moment que les pressions des administrateurs et administratrices universitaires en faveur d'une hausse des frais de scolarité se sont intensifiées. Alors que le ministre a fait miroiter une augmentation du financement gouvernemental moyennant un effort accru des bénéficiaires, on pourrait se demander si l'addition de cette nouvelle source de financement n'aura pas, à terme, l'effet contraire. Comme pour l'aide financière aux étudiantes et étudiants, une promesse d'investissements publics accrus dans le réseau universitaire, en raison de son caractère ponctuel, ne saurait compenser un dégel aux effets permanents.

L'exemple de l'Ontario, à ce sujet, apparaît éloquent. Malgré des batailles incessantes livrées par les associations étudiantes afin d'empêcher ou de limiter les augmentations, les frais ont suivi le coût de la vie entre 1978-1979 et en 1988-1989, donc pendant une décennie. Pendant ce temps, les subventions gouvernementales, elles, ont diminué de 16 % en dollars constants.

Instrument de justice et de stabilité sociales, le gel des frais de scolarité devrait être perçu comme un élément positif du caractère distinct de notre société dans le continent nord-américain. Faire le consensus sur ce qui contribue à notre qualité de vie, c'est une autre façon d'être attractif et, par là, compétitif.

M. LaBillois: Enfin, Mme la Présidente, nous aimerions rappeler au ministre Ryan les recommandations émises par l'UGIL afin de rendre la réforme proposée plus réaliste et acceptable.

L'UGIL recommande donc que l'aide financière supplémentaire débloquée par le ministre soit investie davantage dans l'octroi des bourses et non dans les prêts. Deuxièmement, que le régime tienne compte dorénavant des frais de déplacement et de recherche applicables à toute démarche scientifique et ce, au même titre que les frais occasionnés par les stages. Troisièmement, d'accorder une aide financière aux étudiants inscrits à temps partiel sous forme de prêts et non de bourses, considérant que la plupart d'entre eux ont une plus grande facilité à s'acquitter de leurs dettes d'études car plusieurs occupent un emploi. Quatrièmement, de revoir à la baisse la contribution du conjoint car elle risque d'être trop élevée pour les ménages à faible ou moyen revenu. Cinquièmement, que la contribution du candidat soit davantage explicitée et que l'on en précise le montant tout en demeurant réaliste envers la situation présente de l'étudiant; préciser également ce qu'il adviendra d'un étudiant inscrit à temps complet durant l'été.

M. Bouchard: Que le gouvernement n'accorde aucune faveur particulière à qui que ce soit pour le remboursement de la dette car il s'agit d'un danger d'accroître l'inégalité entre les étudiants. De plus, tous les finissants risquent d'être confrontés à des difficultés de remboursement et nous n'acceptons pas que certains individus bénéficient d'un traitement de faveur alors que les autres seront laissés pour compte. De plus, de revoir le principe de la remise de la dette en tenant compte des aléas propres à chaque démarche de recherche. Ce principe doit davantage tenir compte de la réalité universitaire en ce qui a trait au déroulement d'une recherche et aux corrections des mémoires ou thèses; de limiter l'accès à cette remise de dette à ceux ayant des difficultés financières ou n'ayant pas reçu un revenu décent durant leurs études; d'accorder une certaine flexibilité tenant compte des imprévus ne mettant pas en cause le chercheur étudiant tel un retard dans la remise des corrections. De redéfinir ce que l'on entend par délais normaux afin de tenir compte de la spécificité de chaque programme d'études; d'établir des normes justes en respectant les contraintes imposées par les programmes et que l'étudiant ne peut outrepasser. D'accorder une aide financière sous forme de prêts et bourses durant toute la durée du programme d'études afin d'assurer à l'étudiant le droit de le terminer dans les délais prescrits et/ou requis; d'abolir le principe de n'accorder que le prêt tout au long du programme et la bourse uniquement aux six premiers semestres pour la maîtrise et dix pour le doctorat; de prévoir de la flexibilité pour ceux rencontrant des embûches occasionnant une prolongation de la durée des études.

Enfin, de considérer les alternatives au dégel des frais de scolarité comme solution au problème du sous-financement des universités et de consulter préalablement les étudiants sur cette question. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci de votre présentation. Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Mme la Présidente, je remercie les dirigeants de l'Union des gradués de l'université Laval des observations qu'elle a décidé de nous soumettre au sujet du projet de modification au régime d'aide financière aux étudiants. J'ai eu l'occasion de transiger à maintes reprises avec votre organisme depuis de nombreuses années déjà et je dois reconnaître, sans aucune hésitation, que j'ai toujours été favorablement impressionné par le sérieux de vos représentations et surtout par l'engagement au service de la recherche et de la vie intellectuelle que traduisent les idées que vous voulez communiquer dans des débats autour de sujets comme celui qui nous préoccupe. Alors, j'accueille avec beaucoup d'intérêt les observations que vous nous communiquez. Je ne peux pas être du même avis que votre association sur tous les points soulevés. Mais, lorsque je ne peux pas être de votre avis - j'ai bien dit: Je ne puis pas être de votre avis - c'est parce qu'il y a des questions de ressources qui nous séparent; ce ne sont pas du tout des questions de convictions. (18 heures)

Lorsque vous dites, par exemple, dans votre première recommandation, "que l'aide financière supplémentaire débloquée par le ministère dans le cadre de cette modification soit investie davantage dans l'octroi des bourses et non dans les prêts, si la société québécoise, à mon jugement, disposait des ressources nécessaires pour répondre à votre voeu, j'en serais personnellement très heureux, mais je ne pense pas que nous puissions aller très loin dans cette direction-là. Je vais quand même examiner avec mes collaborateurs si certaines améliorations ne pourraient pas être apportées au projet dans le sens de l'orientation que vous indiquez. Je ne peux pas en dire davantage pour tout de suite, mais je prends ça en considération et, si on peut élargir à certains endroits, on le fera. Le cadre financier dans lequel nous faisons la réforme demeure assez nettement fixé et, surtout dans la perspective des développements survenus depuis deux

jours du côté fédéral, c'est évident qu'il va y avoir un effort de contraction qui va s'imposer du côté du gouvernement et on ne pourra pas envisager d'expansion, en tout cas, au-delà de ce qui est déjà annoncé.

Vous demandez que le régime tienne compte dorénavant des frais de déplacement et de recherche applicables à toute démarche scientifique au même titre que l'on tient compte des frais occasionnés par les stages. A priori, c'est une proposition qui me semble être fort raisonnable: je vais demander qu'on l'examine sérieusement, celle-là. Je pense qu'on est capables de faire quelque chose de ce point de vue là et nos services communiqueront avec vous ces temps prochains pour voir ce qui pourrait être envisagé comme manière de tenir compte de ce facteur très important. "D'accorder une aide financière aux étudiants à temps partiel sous forme de prêts et non de bourses." Vous êtes l'un des nombreux organismes qui nous ont fait connaître des réserves quant à la formule que nous voulions retenir dans le projet de loi au sujet des étudiants à temps partiel. J'ai déclaré hier que nous nous donnerons un petit peu plus de temps pour mettre au point une formule qui soit vraiment capable de répondre aux besoins des étudiants à temps partiel sans créer de discrimination. Nous ne l'avons pas encore mise au point. Nous avons d'autres hypothèses que nous étudions, des suggestions nous ont été faites et, si vous aviez des propositions précises à nous soumettre sur un point comme celui-ci, je l'apprécierais vivement. "De revoir à la baisse la contribution du conjoint ou de la conjointe." Ici, évidemment, nous avons recherché soigneusement une harmonisation avec le régime d'aide sociale pour ne pas qu'il y ait trop trop d'écarts. Il y a des écarts qui tiennent compte de la différence de mode de vie de celui qui est étudiant et de celui qui est à l'aide sociale, mais tous ces barèmes ont été établis après de minutieux calculs qui visaient à ne pas créer de poches d'enflure, à ne pas créer d'iniquités d'un secteur à l'autre, tout en tenant compte de certaines différences. Je vais demander qu'on examine votre recommandation attentivement, mais je ne peux pas vous laisser entrevoir de gros changements de ce côté-ci parce que, déjà, nous procédons quand même à un ajustement important dans la contribution du conjoint ou de la conjointe. "Que la contribution du candidat ou de la candidate soit davantage explicitée et que l'on en précise le montant." Nos services m'assurent que, dans les formules que l'étudiant ou l'étudiante recevra, le montant de sa contribution sera clairement indiqué. Il n'y aura pas d'ambiguïté là-dessus, ça va être indiqué très nettement. Vous demandez que l'étudiant qui va être inscrit à temps complet durant l'été ne soit pas affublé de la contribution de base obligatoire; c'est acquis, ça, on va faire exception dans ces cas-là. Ça va? Surtout pour vous autres, je pense que c'est particulièrement pertinent parce qu'il y en a beaucoup parmi vous qui restent attachés dans le secteur où ils oeuvrent pendant l'année, pendant la période estivale ou des vacances à d'autres saisons de l'année. Alors, de ce côté-ci, par conséquent, voici une question qui sera l'objet de précisions favorables. "Que le gouvernement n'accorde aucune faveur particulière à qui que ce soit pour le remboursement de la dette." Est-ce que je dois comprendre que la réduction de 25 %...

M. Bouchard: Non, c'était par rapport à la recommandation 21 portant sur les étudiants inscrits à un programme spécial d'entraînement sportif.

M. Ryan: Très bien, très bien. J'ai pris note de votre observation là-dessus. Nous avons un programme d'excellence dans le domaine sportif qui oblige les étudiants directement impliqués à suivre des programmes très spéciaux, à encourir des dépenses particulières. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche m'avait fait des représentations là-dessus, de même que les milieux sportifs, et nous avons cru devoir en tenir compte. Je ne change pas d'idée, mais je vais tenir compte des observations que vous nous faites. Je regarderai s'il y a des possibilités, mais je ne voudrais pas non plus que ces milieux-là, qui sont dans une situation très, très particulière, pensent que nous voulons les ignorer. Je veux qu'on revoie le principe de la remise de dette en tenant compte des aléas propres à chaque démarche de recherche.

Ici, je vais vous dire une chose. C'est vrai qu'on ne peut pas déterminer arbitrairement, dans le bureau du ministre, que la maîtrise, ça va prendre six sessions et ça finit là. Moi-même, j'ai cinq enfants qui sont passés par les universités. J'en ai une qui est passée par la maîtrise et les périodes définies par l'université ne correspondaient pas à son propre cheminement. Je crois que son cheminement, dans ce cas-là, était infiniment préférable à la norme abstraite de l'université et, à plus forte raison, du ministre.

Pour être sûrs qu'il n'y aurait pas d'exagération, nous avons demandé au Conseil des universités de faire un examen très attentif de cette question. Le Conseil poursuit son examen en collaboration avec au moins sept établissements. Je pense que nous aurons un rapport du Conseil avant l'automne, qui nous donnera des paramètres capables de tenir compte des exigences de souplesse dont vous parlez. Soyez sûrs que nous sommes très, très sensibles à ce que vous avez dit là-dessus. Je pense que vous avez reflété la réalité de votre milieu. Et je crois que, si nous avions eu davantage de représentations parlant des réalités des milieux représentés,

le travail de la commission serait encore plus riche. De ce côté-ci, c'est une dimension qui est prise en compte et que je vous sais gré d'avoir signalée à notre attention.

C'est la même chose pour la définition des délais normaux. Ça va dans la même ligne de pensée. Nous n'imposerons pas de définition abstraite de l'extérieur, mais il faut quand même des normes. On va les définir après des consultations élaborées et, si vous avez des représentations à nous faire là-dessus, on va ajouter le nom de votre association sur la liste de ceux que... Nous demanderons au Conseil des universités - je ne sais pas s'ils vous ont consultés - de prendre contact avec vous avant d'envoyer leur rapport. S'ils n'ont pas eu le temps de le faire, on le fera, nous.

Ensuite, "d'accorder une aide financière sous forme de prêts et de bourses durant toute la durée du programme d'études." Oui. Là, évidemment, il y a une question de coût. Une fois qu'on a dépassé certains délais... On avait du traînage. Je sais que ça fatigue les gens d'entendre parler de ça. Moi, j'aime autant appeler les choses par leur nom. Il faut que ça cesse. Il y a des personnes qui semblent promises à une vocation éternelle dans le monde étudiant et nous croyons que c'est un monde où il doit y avoir une mobilité continuelle. C'est pour ça que le principe que nous avons déjà dans notre système, nous le maintenons et je ne vois pas que nous puissions accepter votre proposition. Cependant, je regarderai, au deuxième cycle... C'est un peu relié au paragraphe précédent. S'il y a des ajustements à faire, nous les ferons.

Enfin, "de considérer les alternatives au dégel des frais de scolarité comme solution au problème du sous-financement des universités et de consulter préalablement les étudiants sur cette question". Des alternatives, il n'y en a pas beaucoup. Au cours des dernières années, nous avons examiné toutes les possibilités et nous en sommes venus à la conclusion qu'il y avait une part de la solution qui devait venir d'un ajustement des frais de scolarité. Pas toute la solution, mais une part qui doit venir de là. Je crois que ça doit se faire aussi parce que toutes les indications que nous retirons de la réalité nous invitent à aller dans ce sens-là. Mais, on va continuer d'être en recherche parce que le problème du sous-financement des universités va se poser encore longtemps et j'ose espérer que nous trouverons des éléments à ajouter à ce qui se fera prochainement afin que notre système soit plus complet et plus humain.

M. Bouchard: Est-ce que je peux vous poser une question, M. le ministre?

La Présidente (Mme Hovington): C'est M. Verrette?

M. Bouchard: Non, Bouchard, madame.

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, M. Bouchard

M. Bouchard: Par rapport à la recommandation 1, qui traite de l'octroi de bourses et non de prêts, étant donné que les étudiants des deuxième et troisième cycles sont déjà endettés parce qu'ils sont passés par le collégial et parce qu'ils sont aussi passés par le premier cycle, est-ce que je pourrais demander que votre ministère regarde un peu plus attentivement s'il n'y aurait pas lieu, pour les étudiants des deuxième et troisième cycles, d'aménager ça de telle sorte qu'il y ait un peu plus de bourses et moins de prêts? Parce que l'endettement des étudiants est quand même un facteur important de la non-continuité dans les études.

M. Ryan: Le directeur du service de l'aide financière aux étudiants est présent avec nous, aujourd'hui. Je lui demande publiquement d'examiner cette question. Nous allons l'examiner ensemble et, étant donné l'importance que nous attachons tous au développement des études des deuxième et troisièmes cycles, je pense que ça demande d'être accueilli avec respect.

M. Bouchard: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, la parole est au porte-parole officiel de l'Opposition, qui a dû s'absenter. Est-ce que c'est la députée de Terrebonne qui prend la relève? Mme la députée de Terrebonne, allez-y.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je dois vous remercier pour votre mémoire qui, effectivement, nous apporte de nouveaux éclairages, principalement sur la réalité qui est vécue par les étudiants de deuxième et troisième cycle, nos étudiants en recherche, éclairages dont nous n'avons pas tellement parle depuis le début de cette commission. Je vais sûrement avoir des questions là-dessus. Quand vous parlez, dans la mesure no 4, "de revoir à la baisse la contribution du conjoint" et que M. le ministre nous dit que cette contribution doit s'harmoniser avec les mesures de l'aide sociale, est-ce que vous sous-entendez que l'harmonisation doit s'étendre, avec l'aide sociale, jusqu'à l'union de fait?

La Présidente (Mme Hovington): M. Bouchard.

M. Bouchard: Oui, jusqu'à l'union de fait. C'est sûr qu'il faut tenir compte de la réalité du Québec d'aujourd'hui, même si on peut avoir des valeurs familiales plutôt traditionnelles comme dans mon cas. Je suis mal dans une telle situation parce que j'ai des valeurs familiales, alors que notre association n'a pas discuté de ce point-là. On considère généralement qu'une union

de fait, c'est équivalent à un mariage. Donc, si je suis votre question, d'après notre association, on devrait considérer - aller jusque-là - l'union de fait comme faisant partie de ça.

Mme Caron: Parce que, si on parle d'harmonisation avec l'aide sociale, il ne faut pas oublier que, du côté de l'aide sociale et de la sécurité du revenu, l'union de fait est reconnue, et très rapidement.

M. Bouchard: Oui.

Mme Caron: Merci. Lorsque vous nous parlez, dans la mesure 5, de préciser "le montant tout en demeurant réaliste envers la situation présente", M. le ministre nous confirmait que le montant serait clairement indiqué, mais est-ce que vous n'entendiez pas plutôt qu'on se devait de tenir compte des gains réels des étudiants?

M. Bouchard: Oui, entre autres choses, tenir compte des gains réels, étant donné que les étudiants peuvent avoir un travail qui n'est pas tellement rémunérateur - ça peut arriver qu'on travaille à 4 $ ou 5 $ l'heure - tenir compte davantage des gains réels que d'une contribution plutôt abstraite, une contribution fixe, fixée abstraitement, alors que l'étudiant, dans la réalité, ne pourrait pas l'atteindre.

Mme Caron: Donc, même si le montant est clairement indiqué, ça ne répond pas aux besoins réels de l'étudiant.

M. Bouchard: Bien, s'il y a une différence entre les deux, il y a peut-être lieu d'harmoniser ça de telle façon que l'étudiant puisse continuer à faire ses études et que la contribution ne lui nuise pas. Si ça l'empêche de continuer ses études parce qu'on a une contribution abstraite trop élevée...

Mme Caron: M. le ministre, tantôt, semblait retenir favorablement la mesure 2: qu'il "tienne compte des frais de déplacement et de recherche applicables (...) au même titre que les frais occasionnés par les stages". J'aimerais que vous élaboriez davantage là-dessus, concrètement.

M. LaBillois: Les frais qui sont reliés à la recherche, c'est les frais de déplacement, les frais sur le terrain, les frais de photocopies, dans la mesure où un étudiant fait une enquête empirique, par exemple, qui demande l'élaboration d'un questionnaire, photocopies d'un questionnaire, l'envoi postal, la compilation. Dans certains départements, la direction va donner un fonds pour le traitement informatique uniquement. Tout le reste qui relève des frais de déplacement, d'hébergement, d'envois, de photocopies, normalement, c'est l'étudiant qui en paie les frais, parce que l'université ne reconnaît pas officiellement ou n'accorde pas d'aide officiellement à ce genre de services ou de dépenses là.

Mme Caron: Les taux sont sûrement varia blés, mais est-ce que vous avez une idée de la moyenne?

M. LaBillois: Non, je dois avouer qu'on ne s'est pas vraiment penchés là-dessus parce que chaque projet de recherche aux deuxième et troisième cycles est une entité distincte, la démarche est différente. C'est aussi banal que le questionnaire peut varier d'un milieu à l'autre, les frais de recherches... Si on regarde en sciences et génie, en microbiologie ou des choses comme ça, je pense que les disparités sont beaucoup trop prononcées pour être capables de mettre une moyenne, pour l'instant à tout le moins.

Mme Caron: D'accord. Dans la mesure 10, lorsque vous parlez "de considérer des alternatives au dégel des frais de scolarité", quelles alternatives envisagez-vous?

M. Verrette: Officiellement, notre association n'a pas de position concernant une alternative face à une autre, parce qu'il faut bien comprendre que le ministre a annoncé sa décision le 19 décembre dernier. Et puis, comme tel, bien que ça fasse quand même un certain nombre d'années que le débat était dans l'air, il n'y avait rien qui nous laissait supposer que ça viendrait, disons, aussi vite, à ce moment-là, et tout ça. Alors, nous, ce qu'on a fait, on a regardé la décision du ministre, on l'a évaluée. On avait déjà pris position, notre association, en 1986, dans le cadre de la commission parlementaire sur le financement des universités, contre le dégel des frais de scolarité. Il y avait eu des alternatives, non pas de notre association, mais de la part d'autres associations, qui avaient été mises sur la table. Mais, à ce moment-ci, on n'est pas prêts à en proposer une en particulier. On sait qu'il y en a qui ont été proposées, puis on trouve regrettable que le ministre n'en ait retenu qu'une et qu'il n'ait pas réalisé de document public qui aurait évalué au mérite le bonheur de celle qu'il a retenue et, finalement, peut-être nuancé les autres. Là, il y a vraiment une option, un choix, puis on est face à ça, finalement. Mais nous, à ce moment-ci, compte tenu de la décision du 19 décembre applicable à partir de septembre prochain, on n'a pas vraiment une alternative à proposer. Parce qu'il y a, quand même, un certain nombre de nuances, puis tout ça. On n'en est pas rendus là encore.

Maintenant, ce qu'on souhaite, justement, c'est que le ministre sursoie à sa décision et qu'il procède à un débat public sur cette question-là. Si on a l'occasion de s'exprimer sur un projet, bien on va en avoir des alternatives à

proposer, à ce moment-là.

Mme Caron: Donc, vous me dites qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultation et vous souhaiteriez qu'on revienne sur cette décision.

M. Verrette: Exactement. Mme Caron: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député d'Abitibi-Ouest, bon retour. Vous avez la parole.

M. Gendron: Je voudrais vous remercier sincèrement pour la production de votre mémoire parce que ça nous donne l'occasion d'avoir un éclairage additionnel, puisque vous êtes déjà des gens qui sont passés par un bout d'études universitaires, puisque vous êtes des gradués. Sur lé dégel des frais de scolarité, je peux juste constater que vous avez une position que nous partageons de ce côté-ci, en particulier quand vous rappelez qu'il y a toutes sortes de jugements qu'on peut porter quant aux instruments de justice et de stabilité sociale. Et vous croyez que le gel des frais de scolarité devrait être, justement, perçu comme un tel geste positif et un caractère distinct. Nous, c'est une position qu'on achète, puisque c'est conforme à notre société, puis c'est conforme également à l'évolution des choses au Québec, mais toujours eu égard à la même problématique, je veux dire, pas assez de diplomation et encore du retard à combler.

Je suis intéressé à avoir également votre point de vue, parce que, à moins que je ne me trompe, vous avez dit qu'un véritable régime d'aide financière devrait tenir compte du point de vue suivant, à savoir offrir de meilleures garanties et de meilleurs avantages à ceux qui font le choix d'être des étudiants à temps plein plutôt qu'à temps partiel. À moins que je ne me trompe, il me semble que vous avez dit ça d'une façon très claire. Moi, ça m'agrée et je trouve ça correct, puisqu'une des lacunes de notre système, c'est qu'effectivement il y a toutes sortes de difficultés et des coûts autres que strictement les frais de scolarité: les frais de subsistance et la difficulté de trouver de l'emploi dans certaines facultés. Les facultés ne sont pas toutes du même acabit. Un étudiant aux Hautes Études commerciales ou un étudiant du niveau de la maîtrise, dans certains créneaux de développement qui correspondent plus à des perspectives d'emploi modernes, ça va, mais on a encore besoin qu'une société forme des étudiants en sociologie - c'est un exemple que je donne - en sciences politiques, et je ne suis pas sûr que, demain matin, les possibilités d'emploi seront les mêmes. Dans ce sens, des mesures qui auraient comme conséquence d'encourager davantage les études à temps plein plutôt que les études à temps partiel semblent être une position que vous agréez.

J'aurais juste une question. À la page, je pense, 15 ou 11 de votre mémoire, justement sur cette question des temps partiels... Je l'avais noté, page 8. Un instant, ce ne sera pas long, Mme la Présidente. C'est exact. Vous dites: Tout en étant d'accord avec l'idée de fournir une aide financière aux chercheurs étudiants à temps partiel, nous croyons que cette dernière devrait prendre la forme d'un prêt, considérant la possibilité plus grande de cette clientèle de s'acquitter des dettes d'études." Là, je vous avoue que - puis, ce n'est pas parce que je suis contre - je voudrais avoir plus d'explications, parce que je ne comprends pas vraiment pourquoi la prétention serait que, pour des étudiants à temps partiel, ce serait plus facile de s'acquitter de leurs dettes d'études. Où avez-vous pris cette information? Est-ce que vous avez des données sur lesquelles vous pouvez vous appuyer pour prétendre qu'il est plus facile pour les étudiants à temps partiel de rembourser leurs dettes d'études compte tenu qu'il y aurait là une meilleure possibilité d'emploi? Ça m'apparaissait un peu contradictoire avec votre préoccupation des temps pleins et votre préoccupation de former davantage d'étudiants de second et de troisième cycle.

M. Bouchard: Par rapport aux étudiants à temps partiel, on se fondait sur le document du ministre, à la page 32, lorsqu'il dit que les étudiants inscrits à temps partiel étaient, dans 74 % des cas, sur le marché du travail. On est en train de voir si on n'a pas de statistiques dans le dernier sondage qu'on a fait, nous, pour les étudiants gradués. Est-ce qu'on en a là-dessus? On va vérifier. Il me semble qu'on avait une statistique ou deux.

M. Gendron: Non, mais regardez, c'est parce que je voudrais qu'on se comprenne bien. Est-ce que ça veut dire que vous prétendez qu'au second et au troisième cycle universitaire, même les étudiants à temps partiel sont en situation d'emploi? C'est ce que je veux savoir.

M. Bouchard: Généralement, chez nous, aux deuxième et troisième cycles, les étudiants à temps partiel sont en situation d'emploi. Il peut y avoir des exceptions, mais généralement. Il suffit de comprendre que, si on regarde du côté des sciences de l'éducation, la majorité des personnes qui sont là sont à temps partiel. Normalement, ce sont des professeurs qui enseignent déjà qui font une autre recherche. Même chose en administration, généralement.

M. Gendron: À ce compte-là, si, effectivement, les statistiques affirment ce que vous venez de dire, je pense que vous avez raison, sincèrement, de suggérer que, pour ce type

d'étudiants, s'il y a une bonification, la bonification devrait prendre davantage le sens de l'aide financière sous forme de prêt que sous forme de bourse, parce que tout le monde sait que ça n'a pas la même signification pour l'étudiant, si c'est une bourse versus un prêt. À ce moment-là, je trouve que votre recommandation est intéressante. Je n'ai pas d'autres commentaires à formuler.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, est-ce que vous auriez voulu ajouter quelque chose?

Une voix: Non.

La Présidente (Mme Hovington): Non. Ça va, M. le ministre?

M. Ryan: Je remercie la délégation de l'Union des gradués de l'université Laval. Je pense qu'on a dit tout l'essentiel qui devait être dit. On va poursuivre le travail. Je vous remercie beaucoup encore une fois.

La Présidente (Mme Hovington): Au nom des parlementaires de cette commission, je vous remercie de votre mémoire. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de (a séance à 18 h 23)

(Reprise à 20 h 10)

Le Président (M. Gobé): La commission de l'éducation reprend ses travaux et je déclare la séance ouverte. Le mandat de notre séance, ce soir, est de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. J'appellerai maintenant l'Association générale des étudiants et des étudiantes de la Faculté de l'éducation permanente de l'Université de Montréal à s'asseoir. Est-ce que vous pourriez vous présenter pour les besoins de l'enregistrement des travaux?

M. Martin (Robert): Robert Martin.

Le Président (M. Gobé): Présentez votre vis-à-vis avec vous, votre collègue.

M. Martin: M. Denis Sylvain, qui est secrétaire général de l'association, et moi-même, Robert Martin, président de l'association.

Le Président (M. Gobé): Bonjour, M. Martin. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour exposer votre mémoire et, par la suite, M. le ministre aura un temps de parole de 20 minutes, et le représentant de l'Opposition aura, lui aussi, un temps de 20 minutes. Si vous voulez commencer, vous avez la parole.

AGEEFEP

M. Martin: Merci, M. le Président. Bon, en fait, nous allons présenter, dans quelques instants, notre mémoire. Nous allons traiter de questions en ce qui concerne le dégel des frais de scolarité, naturellement, du régime d'aide financière, particulièrement en ce qui concerne les étudiants à temps partiel, puisque nous représentons essentiellement des étudiants qui sont à temps partiel à l'université, et puis, aussi, bien sûr, de certaines propositions concernant les besoins de ces étudiants. Donc, je demande à Denis Sylvain de vous présenter le mémoire.

M. Sylvain (Denis): M. le Président, au départ, je voudrais dire aux membres de la commission que nous n'avons pas axé notre mémoire sur un ensemble de statistiques et d'études visant le régime d'aide financière pour les étudiants à temps partiel, puisque d'ores et déjà nous savons tous que la résolution 18 a été remise. Donc, je procéderai maintenant à la lecture.

Profitant de l'étude en commission parlementaire des crédits de son ministère, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Claude Ryan, annonçait le 21 avril 1986 son intention d'entreprendre une réforme du régime d'aide financière aux étudiants plutôt que de simplement y ajouter 28 000 000 $ par année, comme l'avait promis le Parti libéral au cours de la campagne électorale de 1985.

Solidaire en cela avec l'ensemble du mouvement étudiant québécois, l'Association générale des étudiants et des étudiantes de la Faculté de l'éducation permanente de l'Université de Montréal adhère sans réserve au principe de la révision d'un régime d'aide financière qui a été conçu il y a plus de 20 ans et qui répond mal aux besoins des années quatre-vingt-dix.

Dès le mois d'octobre 1986, à la commission parlementaire de l'éducation sur les orientations et le cadre de financement du réseau universitaire québécois, l'AGEEFEP avait défini les orientations majeures qui, selon elle, devraient inspirer une réforme du régime d'aide financière. Depuis, elle a eu le temps de raffiner ses propositions et de les transmettre à M. Réjean Bilodeau, l'attaché politique du ministre, responsable de la consultation qui a précédé l'énoncé politique gouvernemental d'avril 1989 intitulé "L'aide financière aux étudiants dans les années 90. Orientations gouvernementales".

Notre intervention en commission parlementaire repose donc sur l'analyse des recommandations de ce dernier document en relation avec les propositions que nous avons soumises antérieurement. Dans la première partie de ce document, nous nous en sommes tenus à la logique ministérielle qui ne s'attaque pas aux principes mêmes gouvernant le régime d'aide financière et qui se limite à proposer un certain

nombre de modifications. Comme plusieurs autres intervenants, nous constatons que des changements majeurs se sont produits ces derniers mois - nous pensons ici à l'annonce d'une hausse majeure des droits de scolarité - et nous croyons qu'il serait, aujourd'hui, nettement plus approprié de concevoir le régime d'aide financière dans une perspective plus globale, en relation avec le problème du financement des universités et celui des droits de scolarité. Tel sera l'objet de la conclusion de ce document.

Regroupant une clientèle particulière, celle des 14 000 étudiants et étudiantes inscrits à des programmes de la Faculté de l'éducation permanente, des adultes dont la très grande majorité occupent un emploi à temps plein - plus de 90 % - et poursuivent des études à temps partiel - 94 % - l'AGEEFEP est tout à fait consciente que la plus grande partie de ses membres ont des revenus qui les rendent inadmissibles au régime d'aide financière. Toute la clientèle de l'éducation permanente n'appartient cependant pas aux couches à revenu moyen ou élevé, comme le démontre un récent document du Bureau d'études et de développement de la Faculté de l'éducation permanente de l'Université de Montréal dont on trouvera copie en annexe. L'on y apprend ainsi que "32,1 % des célibataires disposaient, en 1985, d'un revenu familial inférieur à 20 000 $, comparativement à 17,3 % des personnes veuves, séparées ou divorcées et à 4,1 % des personnes mariées ou en union libre." Parmi eux, un bon nombre ne franchissent pas la barre des 10 000 $ de revenu annuel. Beaucoup de ces gens, indique un autre tableau, assument des responsabilités familiales. Plus troublant encore, l'étude de Mme Rita Therrien rappelle que ces données ont été recueillies auprès des diplômés de la faculté. Elle ajoute ceci: "Les diplômés représentent seulement une partie des étudiants qui fréquentent la Faculté de l'éducation permanente. En effet, bon nombre d'étudiants abandonnent en cours de route. Pour le moment, les données disponibles ne nous permettent pas d'évaluer leur proportion de façon exacte étant donné que les étudiants à temps partiel mettent plus de temps que les autres à terminer un programme. Nous ignorons, par exemple, combien de personnes abandonnent leurs études pour des raisons financières ou à cause de leurs responsabilités familiales qui s'ajoutent à leurs responsabilités de travail." Ne serait-ce que pour faire valoir les besoins de ces gens, l'AGEEFEP serait déjà pleinement justifiée d'intervenir à la présente commission parlementaire. Elle doit aussi rappeler qu'elle compte dans ses rangs environ 5 % d'étudiants à temps plein et que de nombreux autres ont des enfants en âge de fréquenter les universités.

Concernant la contribution parentale, les quatre premières recommandations du document gouvernemental d'avril 1989 portent sur la contribution financière parentale aux études postsecondaires de leurs enfants. Le principe retenu par le gouvernement consiste, somme toute, à compenser les effets de l'inflation en relevant les seuils à partir desquels une contribution parentale est exigible.

Faute de mieux, l'AGEEFEP ne peut évidemment s'opposer à de telles mesures. Faute de mieux, disons-nous bien, car il est bien connu que la politique gouvernementale, en retenant le principe absolu de la dépendance, repose sur une vision idéalisée de la famille québécoise. S'il est vrai qu'une majorité de parents sont tout à fart disposés à consentir des sacrifices financiers pour que leurs enfants mènent des études postsecondaires, la réalité sociale d'aujourd'hui nous dit que le financement des études ne constitue pas la priorité de nombreux parents; elle nous dit aussi que, pour toutes sortes de raisons, des milliers de jeunes adultes sont en rupture de ban avec leur famille et que, laissés à eux-mêmes, ils ne sont pas en mesure de financer leurs études. Tous ces jeunes sont donc pénalisés parce qu'ils ne sont pas nés dans une famille idéale, dont les parents seraient inspirés par une générosité et un sens du devoir exemplaire. En ce sens, malgré le titre coiffant le document gouvernemental, le nouvelle orientation du régime s'inspire davantage des années cinquante que des années quatre-vingt-dix et elle perpétuera des injustices criantes. Le présumé manque de ressources financières invoqué par le gouvernement n'invalide en rien ce constat.

Concernant le retour aux études, une analyse de la même nature, croyons-nous, s'applique aux recommandations 5 et 6. Parce qu'elle est plus généreuse que la politique actuelle, la possibilité que les besoins du conjoint qui n'est pas aux études soient couverts par l'aide sociale représente une amélioration sensible. De même, l'élimination de la contribution du conjoint à faible revenu et la diminution de la contribution de 50 % pour les autres constituent un pas dans le bon sens. Mais, encore là, la politique gouvernementale présuppose, erronément à notre sens, que tous les couples sont tout à fait d'accord pour le retour aux études d'un des conjoints et pour le financement de ses études. Or, c'est un secret de Polichinelle que le retour aux études d'un conjoint dans les couples plus traditionnels peut être perçu par l'autre comme une menace, une volonté suspecte d'émancipation. À ce jeu-là, ce sont surtout les femmes qui risquent d'être perdantes. Parce que 75 % de ses membres sont des femmes, l'AGEEFEP est particulièrement sensible à ces problèmes et elle croit que l'application sans nuances de ce principe est une injustice pour celles qui se buteront à l'intransigeance et à l'étroitesse d'esprit de leur conjoint. Voilà pourquoi l'AGEEFEP croit toujours qu'il aurait été nettement préférable d'abolir complètement le principe de la contribution du

conjoint.

À notre sens, pour éviter un trop grand écart avec l'aide sociale et les revenus d'emploi, le régime d'aide financière devrait consentir à celui qui retourne aux études une somme de 3000 $ répartie sur deux trimestres. Une telle mesure assurerait une somme de 100 $ par semaine, ce qui serait plus réaliste que l'allocation de 31,60 $ actuellement accordée. Dans la même logique, vous comprendrez que l'AGEEFEP n'est pas du tout d'accord avec la recommandation 11 prônant une contribution du candidat qui effectue un retour aux études après avoir été deux ans sur le marché du travail. Ce ne sera pas un facteur décisif, mais nous croyons qu'il s'agit là d'une mesure dissuasive et inacceptable pour les raisons qu'elle constitue un recul par rapport aux dispostions actuelles, aucune contribution n'étant présentement exigée.

Quant aux autres mesures, par contre, parce qu'elles allègent le fardeau financier des étudiants qui ont des enfants ou qui retournent aux études après avoir été bénéficiaires de l'aide sociale, les recommandations 8, 9, 10 et 13 nous apparaissent très positives. Nous nous demandons cependant pourquoi le ministère n'a pas retenu la même logique pour la recommandation 12, qui réduit de 64 $ à 50 $ par semaine les frais de garderie pour le premier enfant d'âge préscolaire. Les familles comptant un seul enfant étant les plus nombreuses, un grand nombre d'étudiants seront ainsi pénalisés alors qu'un petit nombre seulement bénéficieront de l'élimination du montant maximal accordé à une même famille.

Deux pas en arrière, un pas en avant, sommes-nous tentés de dire à la lecture des recommandations 14, 15 et 16. Pourquoi couper de moitié l'allocation de transport accordée à l'étudiant qui réside chez ses parents, tel que le préconise la recommandation 14, alors que cette allocation est de nature à inciter l'étudiant à demeurer chez ses parents?

Nous voyons évidemment d'un oeil favorable la recommandation 15 qui accorde aux bénéficiaires de bourses le remboursement des frais d'orthèses visuelles, mais nous ne comprenons nullement l'intention gouvernementale d'éliminer la prime hebdomadaire de 22 $ pour l'étudiant qui retourne aux études tout en habitant avec ses parents. Cette mesure nous semble très douloureuse pour les familles qui, sans être bénéficiaires de l'aide sociale, n'ont que de faibles revenus.

En ce qui regarde la recommandation 17, l'AGEEFEP ne peut s'opposer à ce qu'il existe un mécanisme d'appel pour les étudiants qui se sentent lésés. L'Association croit également qu'il est judicieux de remettre 25 % de la dette aux étudiants qui complètent leurs études de deuxième et troisième cycles dans les délais prescrits, encore qu'il faille préciser quels sont ces délais, mais elle se demande pourquoi cette mesure n'est pas également appliquée aux étudiants qui terminent leur baccalauréat.

Nous sommes aussi d'accord avec les recommandations 20, 21, 23 et 24 avec une réserve dans ce dernier cas. Même en étant réduite de 50 % à 25 %, la pénalité pour un simple retard à formuler une demande de prêt et de bourse nous apparaît d'une rigidité injustifiée. Quant à la recommandation 22, nous sommes généralement d'accord sur les périodes d'admissibilité définies par le ministère, mais nous croyons que le régime devrait permettre aux étudiants universitaires de premier cycle de compléter deux baccalauréats; pour ce faire, il suffirait de porter de huit à douze le nombre de périodes d'admissibilité.

Quant aux étudiants à temps partiel, comme nous venons de le voir, l'AGEEFEP, tout en reconnaissant un certain mérite aux améliorations proposées, entretient de nombreuses réserves quant aux insuffisances du projet de réforme du régime d'aide financière aux étudiants. Ces réserves sont devenues totale déconvenue depuis que le ministre, M. Claude Ryan, a annoncé le mois dernier qu'il reportait sine die l'admissibilité des étudiants a temps partiel à l'aide financière gouvernementale, telle que prévue dans la recommandation 18. Dans notre tradition politique, "sine die" est trop souvent synonyme de "calendes grecques" pour que nous ne suspections pas le ministre de vouloir, sur ce point, balayer la poussière sous le tapis jusqu'au début du prochain millénaire.

Pour reprendre l'évaluation que le ministre lui-même en a faite - 13 000 000 $ - l'admis-sibHité des étudiants à temps partiel ne risque pas de saigner la caisse du régime d'aide financière et elle aurait le mérite d'aider plusieurs milliers de personnes à entreprendre ou à poursuivre des études postsecondaires à temps partiel. Le seul fait qu'ils seraient admissibles à un régime dont les bénéficiaires vivent sous le seuil de la pauvreté indique bien qu'il s'agit là de gens à faible revenu. Voilà une bien étrange application du principe de l'égalité des chances.

À la lumière de tout ce qui précède et en nous basant sur un système de notation littérale en vigueur depuis cette année à l'Université de Montréal, nous sommes forcés d'accorder à M. Ryan la note "E" pour son devoir sur la réforme du régime d'aide financière. Pour ceux qui l'ignoreraient, "E" veut dire Faible ou, entre parenthèses, échec. Dans sa générosité, notre système d'éducation autorise une reprise et nous souhaitons ardemment que le ministre se prévale de ce droit.

Conclusion: Pour une véritable réforme. Si on en croit un article publié dans La Presse du 25 janvier dernier, le ministre, M. Ryan, au moment où il a annoncé le dégel des droits de scolarité, avait dans sa serviette un livre de l'économiste torontois, David Stager, considéré comme le meilleur spécialiste canadien sur la question du lien entre les droits de scolarité et

l'accessibilité aux études universitaires. Or, selon le même article, M. Stager qualifie de "simplistes" les programmes actuels de prêts et bourses au Canada. Pour la simple raison que "ces programmes supposent que la plupart des étudiants reçoivent une aide financière de leurs parents alors que, les familles étant ce qu'elles sont aujourd'hui, c'est loin d'être toujours le cas."

L'AGEEFEP partage entièrement le point de vue de M. Stager. Elle croit aussi qu'il serait plus judicieux d'examiner simultanément et de considérer comme trois aspects d'un même problème le régime d'aide financière, le dégel des droits de scolarité et le financement des universités.

Pour entreprendre une réforme qui ne soit pas que cosmétique, nous ne doutons pas qu'il faille plus d'argent. Mais, dans les mesures qui ont été annoncées ces derniers mois, nous déplorons en premier lieu la légèreté avec laquelle ce gouvernement renonce au principe de l'érosion par l'inflation des droits de scolarité à l'université, tel que décidé et maintenu pendant 25 ans au Québec; nous constatons aussi que les étudiants sont les seuls qui soient mis a contribution pour solutionner les difficultés financières du réseau d'études postsecondaires, un objectif qui demeurera d'ailleurs hors de portée avec cette seule mesure; nous craignons, enfin, que le gouvernement profite de l'occasion pour diminuer sa part dans le financement des universités et qu'au bout de la ligne celles-ci ne disposent pas d'un sou de plus que présentement.

Si les étudiants doivent absolument assumer une plus grande part de leurs études, pourquoi ne pas étudier la possibilité d'instituer un impôt postuniversitaire qui aurait l'avantage de faire contribuer chacun en proportion des bénéfices réels qu'il tire de sa formation et qui, surtout, éliminerait le danger de rendre les études universitaires inaccessibles aux gens à faibles revenus?

Les étudiants ne doivent cependant pas être les seuls à contribuer davantage au financement d'un système dont bénéficie l'ensemble de la société. Il est temps aussi que les entreprises québécoises, qui profitent directement de la compétence des diplômés universitaires, délient leur bourse, elles dont les contributions ne comptent que pour environ 3 % du budget des universités. À cette fin, la création d'un impôt spécial sur les profits des entreprises nous semble tout à fait justifiée.

Question de crédibilité, et puisqu'il reconnaît lui-même les besoins financiers des universités, le gouvernement devrait également prendre l'engagement ferme que, loin de diminuer le poids de l'État dans le financement de l'éducation, il augmentera lui aussi sa contribution.

Nous terminerons notre intervention en soulevant une question qui, bien que moins connue, n'en a pas moins une grande importance.

Elle a trait à la transparence dans la gestion des universités. Nous n'avons pas suffisamment fouillé la question dans les autres établissements, mais nous constatons qu'à l'Université de Montréal une poignée de personnes non élues gèrent un budget de l'ordre de 250 000 000 $ par année, qui provient essentiellement du trésor public, sans devoir rendre de comptes à quiconque et en prenant toutes les décisions à huis clos. Héritée de la tradition cléricale, cette façon de faire n'a rien pour convaincre ceux à qui l'on demande de délier leur bourse que leur argent sera utilisé à bon escient. Merci.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Sylvain. M. le ministre, vous avez maintenant la parole pour une période de 20 minutes.

M. Ryan: Merci. J'ai écouté avec intérêt les propos qu'on vient de nous tenir. On a trouvé des choses familières, d'autres choses qui nous apportent des interrogations et d'autres qui suscitent quelques commentaires que nous vous livrerons volontiers. Tout d'abord, des commentaires de caractère général, ensuite, quelques commentaires sur des points qui se rattachent immédiatement au sujet de nos délibérations, c'est-à-dire les modifications au régime de l'aide financière.

Des propos de caractère général, j'en aurai quatre. Vous dites, à la fin, sous une forme qui m'a plutôt étonné, qu'on a renoncé au principe de l'érosion par l'inflation des droits de scolarité. On n'avait jamais affirmé ce principe-là nulle part, vous savez. Les gouvernements ont flotté paresseusement sur ce principe à l'état latent pendant des années parce qu'ils ne faisaient peut-être pas face à leurs responsabilités. Ça n'a jamais été décidé par personne, ça. Ça n'a jamais été approuvé par l'Assemblée nationale, jamais été soumis en délibérations pendant des élections, à ma connaissance. On vivait là-dessus sans l'avoir défini et on glissait tranquillement vers la dérive de la gratuité totale. (20 h 30)

Là, le gouvernement, en regardant la situation, s'est dit: On ne peut pas continuer comme ça sans au moins se le dire, sans au moins l'écrire sur papier: on s'en va vers la gratuité et on l'accepte ou on ne l'accepte pas. Le gouvernement actuel s'est dit: On ne peut pas l'accepter. Il aurait bien souhaité pouvoir le donner. Il n'y a rien de plus facile pour un parti politique ou pour un gouvernement, je pense que vous le concevrez, que de dire: Nous sommes favorables à la gratuité universitaire. C'est la voie la plus facile. Mais nous ne pouvions pas à cause des conditions financières dans lesquelles se pose la question des universités aujourd'hui et nous ne pouvions pas à cause du contexte financier dans lequel se débat le gouvernement. C'est un premier point qui est clair. Par consé-

quent, si c'est une nouvelle pour vous autres, ce n'en est pas une pour moi parce que ça fait déjà plusieurs années que j'ai dû en venir à cette conclusion-là à l'examen du dossier.

Je causais avec mon collègue, le ministre de l'Éducation de l'Ontario, la semaine dernière; il me disait combien eux regardaient avec intérêt ce qui se passait au Québec. Il y a un problème en Ontario. On compare toujours avec l'Ontario. Savez-vous qu'en Ontario on entend les mêmes choses sur le financement des universités que tout ce qui se dit au Québec? Détérioration de la qualité, dégradation des équipements, sous-financement par rapport à la moyenne canadienne, on entend tout ça. Ils disaient: On est très intéressés parce que, eux-mêmes qui passent pour une province riche, sont à la recherche de revenus nouveaux pour les universités et regardent la possibilité d'en trouver de ce côté. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment de rupture quelconque ici. Il y a une décision qui a été prise, qui était d'ailleurs envisagée depuis déjà trois ans, je pense bien. On avait pris un engagement, à la dernière élection; on l'a tenu mais on ne l'a pas renouvelé, à l'élection de l'an dernier, à dessein.

Deuxièmement, vous dites que vous espérez que le gouvernement ne va pas profiter de la hausse des frais de scolarité pour diminuer sa mise. Je l'espère avec vous. C'est mon opinion, il y a encore beaucoup à faire pour assurer cet équilibre financier de nos universités. Nous n'avons pas encore touché sérieusement au déficit accumulé des dernières années, pour ne prendre qu'un exemple. Il y a encore beaucoup à faire et je ne pense pas que ce serait le moment pour le gouvernement de se dire: Bien là, on a une petite marge, on va la prendre pour diminuer notre mise. Nous reconnaissons tous qu'il y a encore un écart qui n'a pas été comblé. Je suis content que vous l'ayez rappelé. Je pense que c'est utile que vous l'ayez rappelé.

Vous avez été ici pas mal toute la journée. Je vous en remercie, d'ailleurs. Vous avez pu constater que nous avons déjà discuté de l'impôt postuniversitaire. Je pense que vous vous souviendrez que j'ai dit que, comme solution immédiate, ça n'en peut être une parce qu'il y a des problèmes de financement de tout ce système d'aide financière aux étudiants. Si nous allions retenir l'impôt postuniversitaire comme formule principale, ça consisterait à pelleter le problème à plus tard et, dans l'immédiat, il faudrait élargir le déficit pour financer ces dépenses parce que, les dépenses des universités, il faut bien les payer. On peut parler d'impôt pour l'an 2000, mais les salaires des professeurs d'université, les réparations dans les universités, ça se paie maintenant. Il y a là un problème de court terme qui est très, très aigu, auquel on ne peut pas apporter une réponse par cette solution. Encore une fois, je ne l'exclus point pour l'avenir, à moyen ou à long terme. Je pense que c'est une avenue qu'il vaudrait la peine d'explorer davantage. On le fera volontiers, à part ça.

Vous dites qu'il faudrait aller chercher du côté de l'impôt sur les profits des corporations. J'ai établi clairement, à la lumière des chiffres les plus récents, que les corporations au Québec - sans que j'aie à leur endroit une affection particulière, ce n'est pas mon monde propre, je n'ai pas passé ma vie dans ce milieu et je ne pense pas que mes perspectives d'avenir soient de ce côté - leur niveau de taxation est légèrement plus élevé encore au Québec qu'en Ontario. La marge de manoeuvre n'est pas grosse, de ce côté. Même quand on parle d'impôt postuniversitaire, ça veut dire que vous ajoutez au fardeau d'une catégorie de contribuables et, déjà, ils vont être plus taxés, en partant, que leurs concitoyens des autres provinces. Il reste encore un petit écart. Il faut y penser deux fois.

La politique du gouvernement actuel, c'est d'aller vers une parité de plus en plus grande, en matière de charge fiscale, entre le Québec et les provinces ou États immédiatement voisins ou concurrents. Tout ce qui nous est proposé qui tend à agrandir l'écart, nous ne pouvons que le recevoir avec réserve. Je vous dis ça bien simplement, mais c'est l'approche du gouvernement. Quand même je vous dirais oui aujourd'hui ici, je m'en irais au cabinet ou au comité du gouvernement, les gens me diraient: Tu te rappelles la politique du gouvernement, c'est ceci. Tu fais partie de ce gouvernement, toi. C'est vrai.

J'en viens à vos observations à propos de dispositions qui concernent, plus immédiatement, le projet de réforme du régime des prêts et bourses. Le concept de dépendance, vous semblez le percevoir comme un concept dépassé ou déphasé. Je ne suis pas de votre opinion. On peut diverger, honnêtement, d'opinions là-dessus. Je ne partage pas votre avis. Je crois que Ut in pluribus, de manière habituelle, de manière générale, c'est un concept qui a encore toute sa raison d'être, toute sa nécessité dans la société d'aujourd'hui II faut qu'on ait une part de souplesse. C'est vrai qu'il y a des problèmes beaucoup plus nombreux qu'autrefois. Je ne le nie point. Mais de là à penser que le modèle serait complètement changé, moi, je ne suis pas prêt à concevoir ça. Je ne suis pas prêt à le concevoir et j'observe la famille d'aujourd'hui. J'en ai une moi-même. J'ai des jeunes qui sont en train de former des familles aussi et j'ai des collaborateurs. J'en ai un champ d'observation assez large.

Ce n'est pas en ce sens-là que vont mes observations. Il y a des périodes pendant lesquelles on a l'impression que c'est ça qu'est l'avenir. Mais regardez après cinq, six, sept, huit, dix ans, et on revient à des concepts plus stables. On ne forme pas des familles en envoyant promener toutes les valeurs et tout. Les gens se rendent compte que, si on veut

former un peuple, il va falloir former des familles. On n'a pas le choix. Alors, de ce côté-ci, je pense qu'en regardant le concept de dépendance le gouvernement n'a à rougir d'aucune manière et rappelle aux citoyens: Quand vous mettez un enfant au monde, vous en êtes responsable bien au-delà de l'âge de 18 ans. Bien au-delà.

Ça prendrait des formes différentes, mais c'est nécessaire. Ça va l'être d'autant plus qu'aujourd'hui les familles ont généralement un ou deux enfants. À plus forte raison, la société pourrait exiger davantage des parents, vous savez. On ne met pas des enfants au monde seulement pour se libérer le plus vite possible. C'est complètement contraire aux indications les plus élémentaires de la nature, à mon humble point de vue. On essaie de garder ces choses-là. Comme je l'ai dit, c'est un concept qui est présent dans la plupart des régimes d'aide financière que nous avons observés à travers le monde. Ce n'est pas une particularité québécoise. C'est une particularité qui va avec la nature humaine, je pense.

J'admets qu'il y a des variantes concrètes, mais je ne voudrais pas que vous pensiez que je souscris en quelque manière à l'idée que le concept de dépendance serait un concept dépassé ou mauvais ou péjoratif; je pense que c'est un concept qui peut être très positif, pourvu qu'il soit assumé. Les étudiants à temps partiel, j'aurais aimé que vous me disiez ce que vous pensez de la formule qui est dans le projet. D'abord, vous ne m'avez pas donné vos commentaires là-dessus. On est obligés de différer parce que cette formule que nous avions mise de l'avant a été l'objet de beaucoup de critiques. Elle n'a pas suscité d'adhésion bien forte. Les gens disent: Oui, l'idée n'est pas mauvaise d'une certaine aide financière aux étudiants à temps partiel, mais ce n'est peut-être pas la bourse qui est la meilleure formule. Faites attention de ne pas faire de discrimination. Et vous savez toutes les réserves qu'on a émises. J'aimerais ça avoir votre point de vue là-dessus. Ça va me rendre service et je pense que ça va rendre service au gouvernement aussi.

M. Sylvain: Concernant la dernière question sur la recommandation 18 qui touche les étudiants à temps partiel, évidemment, tel que libellé, pour nous, elle nous apparaît très intéressante dans la mesure où cette allocation couvre les frais de scolarité, le matériel scolaire et de transport et les frais de garde. Donc, c'est, à notre avis, une mesure très intéressante pour inciter les étudiants à temps partiel à retourner ou à continuer des études, tout en leur donnant l'aide dont ils ont besoin parce que, à notre avis, c'est cette aide-là, étant donné que ce sont des étudiants à temps partiel, qui peut se limiter au cadre de la recommandation 18 tel que libellé.

En ce qui concerne la dépendance, il faut remarquer que les conditions dans lesquelles les étudiants évoluent aujourd'hui par rapport à leur milieu familial font en sorte qu'il y a beaucoup d'étudiants qui, s'ils devaient prendre les mesures auxquelles les législations leur donnent droit, auraient à traîner souvent leurs parents devant les tribunaux pour les forcer à donner la contribution qu'ils seraient normalement supposés donner. Il faut voir en ça toute la complexité d'une telle problématique. Est-ce qu'un enfant de 18 ou de 20 ans est en mesure de traîner ses parents devant les tribunaux? Je pense qu'encore là ce serait l'éclatement de la cellule familiale beaucoup plus que si le terme de dépendance était retiré. À notre avis, il ne faut pas se leurrer, il y a énormément de familles dont les parents, soit parce qu'ils sont au seuil minimal et l'étudiant n'a pas accès au régime d'aide financière ou pour d'autres raisons, ne contribuent pas, tel qu'ils devraient le faire. Donc, évidemment, les étudiants ont quand même des recours, mais ces recours-là mettent en péril, justement, cette fameuse cellule ou unité familiale. Donc, à notre avis, c'est en cela et c'est pourquoi le système de dépendance devrait, pour nous, être complètement retiré.

Quant à l'impôt postuniversitaire, évidemment, ce projet est un projet dont nous demandons au gouvernement d'étudier la portée, les mesures et la faisabilité. Cependant, pour nous, il est très clair que ce régime est tout à fait faisable, dans la mesure où l'autre recommandation, celle qui porte sur les profits des entreprises, sera aussi mise à contribution, donc, qui fera en sorte de venir injecter des capitaux dans l'éducation et qui permettra, à moyen terme, d'ici à peut-être deux ou trois ans, de pouvoir avoir cet impôt postuniversitaire.

Donc, en ce qui concerne la qualité de l'enseignement, à notre avis, il y a là un gros danger quand le gouvernement ou les entreprises disent que, si on augmente les frais de scolarité, la qualité de l'enseignement ne s'en portera que mieux. Si on regarde présentement le dégel des frais de scolarité et les 150 % d'augmentation, il est évident que cela aura un impact flagrant sur les étudiants à temps partiel puisque ces étudiants à temps partiel, d'une part, n'auront pas une contribution de l'aide financière. Donc, ce ne seront sûrement pas les entreprises qui augmenteront leurs salaires en conséquence pour qu'ils puissent continuer leurs études. Même à cela, le député de Verdun a aussi, lors d'une émission de télévision avec M. Nadeau, dit clairement que les étudiants à temps partiel étaient ceux qui allaient être les plus susceptibles d'être renvoyés de l'éducation universitaire. Pour cela, nous, vu qu'on défend les "temps partiel" - nous sommes représentants des 'temps partiel" - on y voit un danger énorme quant au dégel des frais de scolarité. Et la peur que nous avons, par conséquent, c'est qu'avec

une diminution des crédits étudiants pour les universités il y ait aussi diminution des subventions. Donc, il n'est pas clair pour nous, par rapport à une augmentation des frais de scolarité qui ferait en sorte qu'il y aurait moins d'étudiants ou moins de crédits étudiants, donc moins de financement de la part du gouvernement, que les universités vont se retrouver avec plus d'argent. Donc, pour nous, ce n'est pas du tout évident que la qualité de l'enseignement va se retrouver en meilleure condition qu'elle ne l'est présentement.

M. Martin: Si vous me le permettez, M. le Président... Au tout début, M. le ministre, vous avez souligné, en fait, au sujet du principe par l'érosion... Nous, jusqu'à maintenant, on a toujours cru que l'histoire qui s'est passée au moment de la Révolution tranquille, c'est que, tout simplement, on avait fixé les frais de scolarité, à cette époque, il y a 25 ans, et que, au fil du temps, ils seraient usés par le temps pour en arriver, à la fin, à la gratuité. En fait, c'est toujours cette question, et nous avons été convaincus... Aujourd'hui, au moment où on dégèle les frais de scolarité, nous pensons qu'on met un terme, si on veut, à ce principe de gratuité scolaire qui avait été pensé à cette époque. On dit aussi que c'est une page de l'histoire du Québec qu'on tourne, à ce moment-là. (20 h 45)

Maintenant, aussi, vous avez souligné... Au niveau de la famille, au sujet de l'importance de prendre en considération la famille et de faire en sorte aussi que les parents soient responsables, que les parents voient aux besoins tant de santé qu'éducatifs de leurs enfants, nous croyons en cela. Mais nous pensons que, dans toute société, que ce soit celle du Québec ou toute autre société qui puisse exister en Amérique, bien sûr, entre cet idéal d'une famille qui serait parfaite, entre l'idéal d'avoir des parents qui ont ces préoccupations, qui ont aussi reçu déjà, eux, une certaine instruction qui leur permet de reconnaître la valeur des connaissances et tout ça... Ce ne sont pas toutes les familles, ce ne sont pas tous les parents qui ont pu acquérir ces qualités. C'est dans ce sens-là qu'on a dit: II faut prendre en considération que ce n'est pas dans toutes les familles du Québec que ça se passe ainsi, mais c'est un souhait. Ce que nous souhaitons, c'est que toutes les familles du Québec puissent, dans les années futures, avoir cette pensée et prendre cette responsabilité-là vis-à-vis de leurs enfants. On pense que ce n'est pas le cas.

On pense aussi que, même au niveau des familles, au niveau des couples, au niveau des unions, ce n'est pas sûr non plus que hommes et femmes, bien qu'ils puissent s'entendre dans la vie, voir à assurer leurs besoins primaires, leurs besoins, en fait, essentiels de survie... mais de là à ce que l'éducation ou, en fait, l'accessibilité aux connaissances soit une des priorités, ce n'est pas sûr non plus. Il est possible, par contre, que dans le couple ou dans la cellule il y ait une personne qui puisse être réellement intéressée à acquérir de nouvelles connaissances. Lorsqu'elle dépend de son conjoint ou de la conjointe, je pense, à ce moment-là, que ce n'est pas néces sairement la plus grande des justices. C'était pour répondre un peu à ce que vous souleviez tantôt.

M. Ryan: Si vous permettez. Vous savez que, si nous laissons tomber le concept de dépendance sous prétexte qu'il ne fonctionne pas à 100 %, on s'en va dans un autre régime totalement, le régime d'autonomie. Avez-vous mesuré les coûts de ce passage?

M. Martin: Oui, oui. On sait... C'est pour ça que... Oui?

M. Ryan: Pensez-vous que la société québécoise en soit capable financièrement, à l'heure actuelle?

M. Martin: Non, M. Ryan, non, M. le ministre. C'est pour ça que nous avons bien dit que c'est un idéal à rechercher, mais que c'était impossible de le réaliser et que nous étions d'accord, bien sûr, qu'actuellement ça puisse être pris en considération. Mais de là... Nous disons aussi qu'il est très important de prendre en considération, d'avoir une certaine marge de manoeuvre entre ce principe-là et celui de donner aussi l'accessibilité à ces gens.

M. Ryan: Je suis d'accord avec vous sur ce point-là et c'est ce que nous allons rechercher, en particulier, par le mécanisme de révision qui est introduit dans le projet de loi et par l'assouplissement de certaines clauses sur lesquelles, d'ailleurs, vous nous avez donné un accord à plusieurs endroits. Donc, je vous remercie.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Je passerai maintenant la parole à M. le critique officiel de l'Opposition, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, M. le Président, deux commentaires, rapidement, avant de parler de votre mémoire. J'écoutais religieusement la prédication du ministre de l'Éducation sur la notion de dépendance, où il nous indiquait sa vision des choses. Le problème, c'est que moi, je n'ai pas vu dans votre mémoire qu'il y avait là un jugement sur votre vision de ce que devrait être la notion de dépendance. Ce que j'ai vu dans votre mémoire, c'est ça qui est difficile avec le ministre de l'Éducation actuel, vous avez mis dans votre mémoire une description de la réalité que nous vivons en 1990. Il y a toute

une différence entre les visions où je voyais les répondeurs automatiques hocher du bonnet en disant "combien il a raison, parce que c'est beau, c'est noble", je suis pour ça, moi, personnellement, mais la réalité, ce n'est pas ça. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Il y a 41 % des familles, au moment où on se parle, qui, dans son propre gouvernement, au ministère du Revenu, ont un statut de monoparental. Ça, c'est le portrait.

Aujourd'hui, on n'est pas là uniquement pour véhiculer ce qu'on voudrait que ça soit, comme gouvernement. Un gouvernement doit refléter, un tant soit peu, les courants de la société. De temps en temps, il doit essayer de les orienter différemment, ça, j'y suis, mais on ne peut pas être un gouvernement de la planète Mars. Les familles éclatées, les familles reconstituées, ce n'est pas ma réalité, ce n'est pas la réalité du ministre de l'Éducation, mais c'est la réalité québécoise, en étoile, par exemple. C'est un peu ça que je voyais dans vos propos. Et même si, moi, je partage - je l'écoutais, et je vous le dis religieusement, je suis habitué à ses prédications... Ce n'est pas ça le dossier. Alors, premier commentaire.

Deuxième commentaire, je suis bien heureux qu'il nous indique que le ministre de l'Éducation de l'Ontario, lui, est au travail, parce que si notre ministre avait été au travail sérieusement-Quand vous avez accusé de légèreté sur le principe de l'érosion, j'y reviendrai, je pense que vous avez raison. S'il était au travail sérieusement, ce n'est pas vrai que ce se serait passé comme ça, il serait arrivé, comme membre d'un gouvernement, ministre de l'Éducation, avec quelque chose de fouillé, en disant: Je ne peux pas aller vers l'impôt postétude pour telles raisons: Ça coûte tant, ça représente tant de chiffres. Il l'aurait regardé. Il n'a pas regardé ça pantoute. Deuxièmement, il aurait regardé d'autres alternatives, il aurait pu... Un gouvernement sérieux, avant de se garrocher sur la solution facile, aurait pu dire, effectivement: On a fait des vérifications avec le secteur privé. Je suis loin d'être convaincu de ce qu'il affirme. J'ai eu quelques contacts avec le secteur privé, et lisez la revue Actualité, les remarques que ces gens-là nous ont faites il y a un an, un an et demi, devant la crise terrible du sous-financement chronique du milieu universitaire, et il y avait toujours là un début de portes ouvertes pour une participation tripartite. Toujours. J'ai toujours vu ça.

C'est sûr qu'ils ne courent pas après le gouvernement pour lui dire: Serais-tu assez gentil de nous imposer une taxe spéciale d'une couple de pour-cent sur la masse salariale? Écoutez, je ne suis pas un cave. Mais c'est évident qu'il y avait une ouverture là pour les faire participer. Et là le ministre répond toujours à l'envers en disant: Oui, mais quand on regarde avec l'ensemble de l'Ontario... Ce n'est pas ça le dossier.

L'Ontario, dans l'éducation, particulièrement au niveau universitaire, les entreprises contribuent dans une fourchette de 8 % à 11 %. Ça c'est une modalité. Je parle du principe, M. le ministre. Et, au niveau des principes, au Québec, ici, le maximum c'est 3 %. Est-ce qu'il y avait une capacité pour eux d'absorber 0,5 % qui aurait représenté peut-être 650 000 000 $ à 700 000 000 $? Bien sûr, pour l'État québécois, pour faire des choix. Nous, c'est un choix qu'on aurait fait. Ce sont les deux commentaires que je voulais faire.

Sur votre mémoire, je pense qu'il est court mais il est clair en étoile. Il est très clair. Vous avez bien posé le problème au début de votre mémoire en disant: D'abord, ça aurait dû être regardé tripartite ces trois notions-là: le financement des universités, droits de scolarité, meilleur régime, parce que c'est ensemble. Donc, là-dessus, je pense que vous êtes tombés dans le mille.

Je reviendrai sur la notion de dépendance pour une question. Vous dites à la page 5: Enfin le ministre avait annoncé - en avril quand il a fait connaître sa réforme - qu'il y aurait un petit quelque chose de neuf souhaité, voulu par tous. Je me rappelle, je l'avais même, en Chambre, félicité - ça m'arrive - d'arriver dans ses nouvelles réflexions pour une bonification du régime des étudiants à temps partiel. Encore là, pour une raison très simple, j'ai dit au début que je ne suis pas content de constater le si grand nombre d'étudiants à temps partiel. Et ça je le pense sincèrement. Ce n'est pas une bonne affaire pour l'avenir. Mais c'est ça. Il y a 50 % à peu près, 52 % des étudiants de nos universités qui sont à temps partiel. Et là je n'analyse pas les raisons pour lesquelles c'est comme ça, tout de suite dans ma réflexion. Mais c'est comme ça. En conséquence, si on prend la peine de faire une bonification d'un régime, la logique nous demande de penser à eux autres. Ils sont 52 %. Et là le ministre dit: Non, je n'ai pas fini de regarder ça. Je ne sais pas ce qu'il veut regarder de plus. Mais moi je sais très bien ce que ça veut dire. Ça ressemble drôlement au devancement de l'âge de la maternelle. C'était dans leur engagement en 1981, répété en 1985. 1985, c'est le même gouvernement, il doit y avoir quelques comptables dans ce gouvernement-là, certain. Vous ne me ferez pas accroire qu'ils ne savaient pas ce que ça coûtait. Pourtant, on est en 1990 et ce n'est pas appliqué. La raison, l'excuse qu'on donne c'est qu'on n'a pas le fric. Ce que je ne partage pas là. Mais la raison qu'on donne: Ils ne sont pas en mesure de faire ça. Alors le temps partiel, vous avez raison de dire que pour ce gouvernement-là: Sine die, ça veut dire Salut Baptiste! On ne verra jamais ça. Votre note, je pense qu'elle est légitime dans les circonstances.

Sur, également, l'autre point quand vous dites: Stager ou "Stajer" ou "Stéger", il a indiqué qu'il fallait regarder ça sous trois aspects du même problème, le régime d'aide financière, le

dégel des droits de scolarité et le financement des universités. Je trouve que vous avez parfaitement raison. On ne peut pas ne pas tenir compte de l'entièreté de la problématique. Et je pense qu'encore là vous avez une très bonne vision, très réaliste ou vous connaissez très bien ce gouvernement-là ou le ministre, en indiquant que, lui, son choix il l'a fait, seuls les étudiants sont mis à contribution puisque - relisez-le dans sa déclaration d'ouverture, relisez-le dans les commentaires qu'il a faits à la CREPUQ - c'est loin d'être assuré que, même avec un dégel, l'argent neuf va rester aux universités. C'est loin d'être sûr. Il n'y a aucune garantie qui a été donnée. Et moi je les connais. Et en plus de ça, sur la demande du réseau universitaire pour de l'argent neuf, moi je mettrais pas mal de quoi dans le chapeau qu'il n'y en aura pas. Donc, on n'aura pas réglé le sous-financement chronique. On n'aura pas bonifié les instruments de support. Les étudiants n'auront pas une meilleure qualité d'enseignement. On aura une réforme mineure, une réforme qui, tout compte fait, est mineure. Les bons éléments, il les a retirés de sa réforme.

Je pense, en conclusion, que, si on avait voulu faire une réforme d'envergure, on aurait pris ça, les trois éléments, en compte, on aurait organisé un débat de société très court, parce que je pense que ces réflexions-là ont cheminé depuis quelques années, c'est exact, mais au moins pour permettre d'avoir d'autres alternatives sur la table pour que les gens qui viennent nous donner des points de vue puissent le faire sur des choses qui auraient été fouillées par le gouvernement, qu'on aurait pu, nous, commenter, contester, interpréter; ça aurait été sûrement plus bonifiant pour cette commission.

J'ai une question à vous poser sur votre mémoire, c'est juste une question de compréhension. Lorsque vous prétendiez que la nouvelle orientation du régime d'aide financière aux étudiants s'inspirait bien davantage des années cinquante que des années quatre-vingt-dix, est-ce que c'était un jugement général ou si c'était un jugement exclusivement sur la notion de dépendance?

M. Martin: C'est surtout relatif à la notion de dépendance et du conjoint, en fait, parce que, comme je l'expliquais tantôt, on pense qu'à notre époque, naturellement, on a toujours les espoirs que les familles soient le plus unies, mais étant donné justement les modifications dans les cultures familiales, etc., c'est différent aujourd'hui et on doit se soucier de la liberté de ces individus-là qui sont souvent jeunes, ou tout simplement en union, soit libre, ou mariés ou... En fait, on doit s'ajuster à notre époque. Et c'est dans ce sens-là que nous avons inscrit cette phrase.

M. Gendron: Merci. Autre question: À partir du moment où vous avez quand même convenu dans l'échange avec le ministre de l'Éducation, même si ce n'était pas selon votre vision à vous, qu'il y avait lieu, compte tenu du choix du gouvernement de le faire uniquement sur le dos des étudiants sans le support de l'État ni de l'entreprise privée, qu'il fallait maintenir cette notion-là, si vous avez une réflexion à faire à partir du moment où on maintient quand même la contribution parentale - on se suit là?

Une voix: Oui, oui.

M. Gendron:... de quel ordre, pensez-vous, et dans quelle proportion on devrait tenir compte du fait, et comment compenser le fait qu'il y a à peu près 50 % ou 55 % des parents qui ne versent pas concrètement de contribution à l'étudiant, même si elle figure dans le calcul pour établir l'aide financière qu'ils auront?

M. Sylvain: Oui. Alors, nous en avons parlé à plusieurs reprises avec d'autres organismes étudiants. À cet effet-là, l'une des facettes que nous pourrions envisager serait que les parents soient tenus de déclarer par écrit les contributions qu'ils donnent et que ce soit contresigné par les étudiants. À ce moment-là, ça donnerait vraiment le portrait des parents qui donnent la contribution et de ceux qui, pour une raison ou pour une autre, ne la donnent pas ou qui ne veulent tout simplement pas la verser. Donc, ce serait une façon de pouvoir le contrôler et une façon aussi de voir dans quelle mesure ou quelle proportion la contribution parentale est réellement versée ou non.

M. Gendron: Donc, au-delà du jugement que vous portiez, vous avez le même point de vue que plusieurs autres associations étudiantes qui nous ont effectivement fait la même suggestion...

M. Sylvain: Oui.

M. Gendron:... de contresigner éventuellement pour être bien conscient de l'apport de la contribution parentale.

M. Sylvain: Oui.

M. Gendron: Moi, je vous remercie. Je n'ai pas d'autres commentaires.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, avez-vous quelques commentaires finaux à faire?

M. Ryan: Savez-vous que je vais remercier les représentants de l'Association des étudiants de la Faculté de l'éducation permanente de l'Université de Montréal. J'espère que nous pourrons préciser, au cours des mois à venir, le type de mesures qui répondraient avec précision et de manière équitable aux besoins des étudiants à

temps partiel. Quand nous avons conçu cette mesure, nous avions une pensée spéciale, pas pour les gens qui sont au travail... Vous savez, nos chiffres indiquent qu'il y en a à peu près le tiers de ceux qui suivent des cours du soir à l'université, en vue de l'obtention d'un diplôme, qui ont des cours payés par leur employeur. Ceux-là, c'est évident qu'on ne pensait pas spécialement à eux, parce que leur problème est déjà réglé. Il y en a d'autres qui ont un revenu moyen d'à peu près au-delà de 30 000 $, un nombre très important - on ne pensait pas à eux non plus. On pensait, en particulier, je vais vous dire franchement, aux femmes qui sont restées au foyer pour élever leurs enfants et qui doivent réintégrer le marché du travail et qui doivent suivre des cours de recyclage, de perfectionnement ou de développement de compétence pour être admissibles au niveau dont elles sont capables sur le marché du travail. On pensait à ces personnes-là. Et la mesure que nous avions conçue s'adressait à peu près directement à elles. Elle avait été conçue d'ailleurs en consultation avec le Secrétariat à la condition féminine. Et nous ne l'abandonnons pas. Maintenant, peut-être que ça a été formulé de manière trop générale et ça a donné naissance à d'autres problèmes qui nous ont été signalés à juste titre, mais je veux vous assurer que l'intention demeure. Si vous pouvez nous aider à instaurer des mesures qui seront vraiment adaptées, nous allons continuer de travailler à cet objectif. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gobé): M. Martin et M. Sylvain, au nom de la commission, je vous remercie de vous être déplacés pour venir nous présenter votre mémoire. Nous allons maintenant juste prendre quelques minutes. Vous voulez parler encore?

M. Martin: Je voulais juste dire un dernier mot avant...

Le Président (M. Gobé): Allez-y! Allez-y, je vous en prie.

M. Martin: ...si vous me le permettez, M. le Président. Je voudrais juste rappeler, malgré l'attitude de M. le ministre à entendre parler continuellement de l'impôt postuniversitaire, pour nous, il demeure toujours que c'est la solution qui pourrait régler tous ces problèmes-là, autant pour les étudiants qui peuvent être à temps plein, autant pour les étudiants qui pourraient être à temps partiel. Après les étudiants de la FEEQ, la FAECUM, la CADEUL, avant elle, la SSMU, l'AGEUQTR, l'AGEUQAR, la CADEUS, en fait, je pense qu'il existe une entente entre toutes les associations étudiantes dans les universités puisque, bien sûr, depuis déjà plusieurs mois, nous discutons de ces questions-là et je pense qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire. Il serait peut-être important que le gouvernement, que le ministre, puissent prendre cette proposition et l'étudier d'une façon très sérieuse parce que probablement que... En fait, nous demeurons assurés que ça pourrait être une solution plutôt que de dégeler les frais de scolarité, comme on s'apprête à le faire présentement. Voilà, c'était pour le mot de la fin. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre, vous avez terminé?

M. Ryan: L'idée soulève les difficultés que j'ai évoquées à plusieurs reprises et au sujet desquelles on n'a pas apporté beaucoup de clarté, jusqu'à maintenant. D'ici dix ans, il faut que le gouvernement se finance. Il faut établir un coût pour une mesure comme celle-là pour les dix prochaines années. Peut-être que, lorsque nous serons tous disparus, la mesure apportera des revenus intéressants au gouvernement mais, là, le court terme est un problème. Des fois, le député d'Abitibi-Ouest nous accuse de penser au court terme, on y est obligés; surtout quand on hérite d'une succession lourde, on doit penser au court terme. On doit essayer de diminuer le fardeau de la dette pour pouvoir respirer et innover ensuite. C'est ça qu'est la conjoncture concrète, c'est pour ça que je ne la rejette pas du tout pour l'avenir. Mais, dans l'immédiat, je ne peux pas penser comme vous que ça pourrait être la solution aux problèmes du financement universitaire.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Messieurs, je vous remercie, encore une fois. La commission va suspendre ses travaux quelques minutes, le temps de changer les groupes, et nous allons entendre, par la suite, l'Association des étudiants québécois en France. Alors, la commission suspend ses travaux deux minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 3)

(Reprise à 21 h 8)

Le Président (M. Gobé): La commission va reprendre ses travaux. À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: À l'ordre! À l'ordre!

Association des étudiants québécois en France

Le Président (M. Gobé): À l'ordre!

La commission de l'éducation reprend ses travaux. J'appellerai maintenant l'Association des étudiants québécois en France. Je vous inviterais à vous présenter, pour les fins de l'enregistrement des débats.

Mme Sauvé (Ginette): Ginette Sauvé.

M. Noreau (Pierre): Et Pierre Noreau. Nous sommes délégués de l'Association des étudiants et étudiantes québécois en France.

Le Président (M. Gobé): Bienvenue à cette commission. Comme vos prédécesseurs, vous avez 20 minutes pour exposer votre mémoire et, par la suite, M. le ministre de l'Éducation pourra vous questionner 20 minutes et le leader, pas le leader, pardon, le critique de l'Opposition aura, lui aussi, 20 minutes.

M. Gendron: C'est une de mes fonctions.

Le Président (M. Gobé): Mais il est, quand môme, leader adjoint de l'Opposition, de là mon lapsus.

Vous avez maintenant la parole. Lequel d'entre vous va prendre la parole? Je vous en prie.

M. Noreau: Ça va être relativement court, en fait, parce que ce qu'on est venus dire, ce sont des choses relativement connues. Le mémoire a été produit et, essentiellement, on a essayé de le rendre suffisamment clair pour ne pas inutilement avoir à en ajouter. Je pense que, comme tel, le texte se suffît relativement à lui-même et, compte tenu de l'heure, on n'investira pas beaucoup de temps à vous expliquer ce que vous avez sans doute tous déjà lu.

Il y a une chose, tout de même, qu'il faut remarquer, c'est qu'on est à la fois heureux et tristes de se retrouver ici parce que les choses dont on va discuter sont connues. En fait, on aurait voulu ne pas être obligés de les ramener aujourd'hui en commission parlementaire, parce qu'on considère que ce sont des choses relativement évidentes. Il y a une autre chose aussi que j'aimerais ajouter. En fait, nous, on vient ici pour l'Association des étudiants québécois en France, mais, personnellement, on n'a pas beaucoup de choses à attendre nous-mêmes des conclusions de la commission parce que, lorsque les réformes seront votées, on aura sans doute terminé nos thèses, de sorte qu'on ne profitera jamais des choses qui seront décidées à la suite de ce qu'on va présenter.

On se dit, au fond, que, si, il y a cinq ou six ans, des gens qui, comme nous, avaient vécu à l'extérieur, avaient vécu à l'étranger et avaient décidé, avaient pris cette décision de poursuivre des études à l'étranger, si ces gens-là, ayant connu ce que c'était, étaient venus présenter en commission ou autrement ce qui était la réalité des étudiants québécois à l'étranger, sans doute qu'une partie de notre vie, à nous, aurait été changée. C'est ce qui nous motive aujourd'hui à venir présenter le mémoire et répondre aux questions, en espérant que ça apporte quelque chose dont nous aurions sans doute voulu profiter.

Mme Sauvé: Peut-être ajouter aussi qu'il y a deux ans nous avions soumis un mémoire au ministre de l'Éducation et, lors d'une conférence de presse à Paris, nous avions tenté de lancer un cri d'appel et, à l'époque, les journaux avaient dit: C'est un cri de S.O.S. de nos étudiants québécois à l'étranger. Alors, ce S.O.S., nous vous le relançons à nouveau.

M. Noreau: On sera tout simplement maintenant ouverts aux questions de ceux qui l'ont lu, à moins que tu désires ajouter quelque chose.

Mme Sauvé: Peut-être vous rappeler que nous avons cinq recommandations dont les thèmes, respectivement, sont les suivants. Nous parions de la question d'admissibilité aux bourses pour les étudiants québécois à l'étranger, ce qui n'est pas le cas présentement. Nous tentons de vous souligner aussi l'importance de prendre en considération les réalités académiques particulières des étudiants étrangers, à la fois dans les délais pour se soumettre à des procédures administratives, de preuves, de documents, de tout ça et aussi dans l'allongement de la période des études. Vous en traitez en termes d'excellence. Je pense que, bien souvent, le simple fait de se rendre à l'étranger peut être une preuve d'excellence. Donc, on veut vous sensibiliser aux réalités académiques particulières et également, bien sûr, aux réalités financières particulières des étudiants à l'étranger, à savoir prendre en considération les réalités des pays d'accueil, des niveaux de vie auxquels nous devons nous confronter, des frais de scolarité particuliers et, également, une indexation des prêts et bourses. On se souviendra notamment, il y a deux ans, d'un krach boursier et nous avons nous-mêmes pu voir des étudiants perdre 20 % de leur budget en l'espace d'une journée, et nous avons vu beaucoup d'étudiants repartir à regret et c'était triste à voir, je vous l'assure. Donc, de tenir compte aussi de ces réalités auxquelles peuvent être confrontés vos étudiants québécois à l'étranger.

C'est là l'essentiel de nos recommandations

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme Sauvé. Mademoiselle? Madame, pardon. Mme Sauvé. M. le ministre, vous avez maintenant la parole. Je pense qu'ils ont terminé leur exposé. Vous pouvez procéder.

M. Ryan: Je suis content de vous retrouver, madame, parce que j'avais eu l'occasion de causer avec vous de ces problèmes, il y a déjà maintenant plus de deux ans. Les choses passent très vite. Vous m'aviez remis un mémoire, à l'époque, dans lequel vous évoquiez sensiblement les problèmes qui sont décrits aujourd'hui. Vous faisiez un certain nombre de requêtes que j'avais soumises à l'examen de mes fonctionnaires du

ministère.

Je voudrais peut-être commenter quelques-unes de ces requêtes qui reviennent dans votre mémoire d'aujourd'hui. Nous n'étions pas arrivés à arrêter des solutions aux problèmes que vous aviez posés, parce que, comme la réforme était engagée, que les travaux préparatoires étaient en marche, nous nous étions dit: Nous allons examiner ce problème en même temps. Finalement, il n'y a pas de mesure propre à votre situation dans les recommandations qu'incorpore le projet de loi. C'est un fait. Maintenant, rien n'interdit qu'au stade de la réglementation ou des décisions administratives ou des règles d'interprétation nous ne puissions ajouter certains éléments.

J'en prends un, par exemple. Vous dites: Pour l'étudiant qui est à l'étranger actuellement si rétablissement qu'il fréquente est reconnu comme offrant un programme qui ne soit pas disponible au Québec, l'étudiant qui y est inscrit peut être admissible au prêt. Je crois que nous avons multiplié, depuis trois ans, les reconnaissances d'établissements à cette fin. Encore une fois, en vertu des pouvoirs qui me sont dévolus, qui inquiètent toujours mon collègue, le député d'Abitibi-Ouest, chaque fois qu'on m'a soumis un dossier où le doute existait en faveur de l'établissement et de la non-existence du programme qu'il offrait au Québec, j'ai choisi l'intérêt de l'étudiant, c'est-à-dire que j'ai accepté de reconnaître l'établissement de manière que l'étudiant qui y est inscrit puisse avoir accès au prêt.

Mais là, vous me posez le problème de la bourse. Si vous me disiez: Pour tous les étudiants québécois qui s'inscrivent dans des établissements étrangers, il faudrait que l'accès à la bourse soit reconnu, je ne pense pas que, financièrement, ce serait possible. Les frais seraient trop élevés pour ce dont le gouvernement s'estime capable, à l'heure actuelle. Vous soulevez le cas des étudiants qui sont en France. Savez-vous que je n'avais pas remarqué les statistiques que vous donnez dans votre mémoire? Elles ne m'avaient pas frappé à ce point-là. Vous dites qu'au début des années soixante-dix il y avait de 3000 à 4000 étudiants québécois en France, alors qu'il n'y en aurait plus que de 350 à 400 à la fin des années quatre-vingt, sur 850 étudiants canadiens seulement. Là, vous m'avez un petit peu renversé, parce que moi, je fréquentais davantage la France à ce moment-là, dans le bon temps, et j'ai toujours tenu pour acquis qu'on avait de très nombreux étudiants québécois là-bas parce qu'on en rencontrait beaucoup, au temps où j'y allais assez souvent.

La politique, contrairement à ce qu'on peut penser, ne favorise pas les voyages pour tous ceux qui la pratiquent. Dans mon cas, cela a été des voyages à l'intérieur du Québec surtout. Mais, là, vous m'inquiétez parce que, s'il y en a seulement 350 à 400 à Paris, pour l'avenir de la culture française au Québec, c'est très inquiétant. Très inquiétant. Et je vais être amené, à la suite des représentations que vous nous faites sur ce point-ci, à réexaminer ce cas particulier. Dites-moi donc ça: Les frais de scolarité en France, pour vous, les étudiants du Québec, quels sont-ils?

M. Noreau: Ils ne sont pas plus élevés, en fait, que les frais auxquels sont soumis les autres étudiants qui sont français eux-mêmes. En fait, ça doit tourner aux alentours de 600 francs par année.

Mme Sauvé: 650 francs.

M. Noreau: 650, pour les universités, les facultés. 650 francs, si on divise par 4 ou 5, en fonction du taux de change, ça vous donne une idée. Par ailleurs, il y a un certain nombre de grandes écoles où les frais sont un peu plus élevés. Moi, par exemple, je suis inscrit à sciences po et ce sont sans doute les frais à peu près les plus élevés qu'on puisse payer. C'est 1500 francs par année.

M. Ryan: Pour?

M. Noreau: L'Institut d'études politiques de Paris. C'est une exception dans le cadre du système français. 1500 francs, ça fait à peu près 300 $ par année.

M. Ryan: Ce n'est pas encore très cher.

M. Noreau: Relativement. C'est plus que deux fois ce que ça coûte ailleurs. Les étudiants français, eux, trouvent ça très cher.

M. Ryan: Très bien. C'est un cas, nous allons l'étudier de manière spéciale. Avant d'aller en commission parlementaire, on va faire le débat sur le principe du projet de loi, à l'Assemblée nationale. Nous allons l'examiner de manière spéciale, celui-là. Je vais en parler avec le ministre des Affaires internationales. Personnellement, je pense que nous devons nous préoccuper beaucoup de l'attraction très forte qu'exerce le Sud, c'est-à-dire les États-Unis, sur nos étudiants; il y a bien des raisons qui nous attirent du côté des États-Unis. Au simple point de vue culturel, moi, j'éprouve plus d'intérêt à lire le New York Times chaque jour que le journal Le Monde. Pas parce que je n'aime pas le ioumal Le Monde ou Le Figaro - Le Figaro, il est lu par mon collègue de Lafontaine - c'est parce que l'autre m'apporte les nouvelles plus immédiatement. J'ai le journal le jour même et c'est plus proche de moi. Ce qui se passe à New York est plus proche de moi que ce qui se passe à Paris. Leur politique ressemble à la nôtre à bien des points de vue tandis que, là-bas, c'est un autre univers.

M. Noreau: Ça dépend de ce qu'on recherche dans un journal, effectivement.

M. Ryan: C'est ça. C'est le journal le plus complet du monde, à part ça, je pense qu'on en convient tous.

M. Noreau: Le Figaro?

M. Ryan: Non, le New York Times.

Ha, ha, ha! Mais on va étudier ce problème-là de manière spéciale. Je suis content que vous l'ayez rappelé à notre attention et j'apprécie beaucoup.

M. Noreau: J'aimerais pouvoir en rappeler un autre aussi, c'est que je ne suis pas convaincu qu'il n'y ait pas non plus une baisse, actuellement, des étudiants qui s'en vont aux États-Unis. Si on regarde, par exemple, du côté des étudiants qui sont boursiers, qui ont des bourses d'excellence, il y a eu une étude là-dessus, du Conseil des universités, si je me rappelle bien, en 1985 ou 1986 - on en parle à la note 7 - qui semble indiquer que, même chez les étudiants qui bénéficient de bourses d'excellence, il y a une baisse du nombre d'étudiants allant aux États-Unis. Mais, en fait, il y a des raisons assez précises. Je pense que, en général, il y a des problèmes d'information. Il y a un paquet de problèmes; on en a parlé dans le premier mémoire qu'on a déposé il y a deux ans. Mais les problèmes d'ordre financier sont sans doute l'un des principaux problèmes.

Vous m'avez posé tout à l'heure - je voudrais seulement revenir là-dessus - la question des frais de scolarité. Évidemment, nous, on n'était pas nécessairement venus pour parler de ça et on ne voudrait pas s'étendre non plus. Mais je soulignerais simplement qu'il y a eu, en France, une tentative d'augmentation des frais de scolarité, dans la période où nous, on y était. C'était à l'automne de 1986, sous la fameuse loi Devaquet, dont vous avez dû entendre parler. Ça a suscité une mobilisation qu'on ne pourrait pas voir ici parce que, évidemment, on n'a pas le même bassin d'étudiants, mais c'était assez important. Il y a même un jeune qui est mort dans cette affaire-là, finalement, dans les confrontations qui s'ensuivirent avec la police. Enfin, c'était simplement pour compléter ça.

J'aimerais quand même souligner aussi... Pardon?

M. Gendron: J'ai dit que le résultat du vote est censé être sorti, à la CADEUL.

M. Noreau: Ah!

M. Gendron: Je ne veux pas vous influencer trop, trop.

M. Noreau: C'est intéressant, ce que vous dites là. La CADEUL que j'ai créée en 1981. Mais je ne vous connaissais pas, à cette époque.

Question sur le financement...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Noreau: ...sur ce que représenterait le financement des études à l'étranger. Je pense que c'est important de revenir là-dessus. Écoutez, moi, je n'ai pas de statistiques sur combien ça coûterait de pouvoir donner aux étudiants les bourses dont ils ne disposent pas actuellement. Je ne le sais pas. Mais compte tenu du peu d'étudiants qui, présentement, en tout cas, sont en France, je peux vous dire que ça ne représente certainement pas grand-chose parce qu'ils ne sont vraiment pas très nombreux. C'est une chose que vous pourrez vous-même vérifier, même auprès de la délégation du Québec. Ils ont quelques chiffres là-dessus, même s'ils ne tiennent pas un inventaire toujours extrêmement serré; ils font ce qu'ils peuvent parce que ce ne sont pas tous les étudiants qui passent par la délégation. Mais c'est un fait qu'il y a eu une chute drastique. Et si on peut craindre le fait que ça puisse amener nos universités à s'américaniser, oui, je pense que c'est un problème. C'est un problème qui existait déjà, en 1970, et ça explique beaucoup pourquoi, dans cette période-là, on a envoyé beaucoup de gens là-bas. Évidemment, il y avait aussi des facilités quant à la langue. Il y avait tout un contexte historique qui jouait pour beaucoup. Mais je dirais aussi que cette préoccupation-là, qui était présente à l'époque, correspond à un problème qui existe encore aujourd'hui.

M. Ryan: Mais moi, je ne m'inquiète pas d'abord de l'américanisation de nos universités Je m'inquiète de l'américanisation progressive de nos institutions, nos journaux, nos stations de radio, nos organismes à vocation financière, nos organisations syndicales, nos organisations coopératives. Si nous n'avions pas de contacts plus approfondis avec la France, je pense qu'il y a quelque chose qui ferait tragiquement défaut pour notre avenir. C'est pour ça que je prends note du problème que vous nous avez posé et je le vois dans des termes beaucoup plus larges que le seul impact de la situation sur l'avenir de nos universités. Je ne sais pas si c'est clair. Je pense à nos journaux, en particulier. Si on veut garder des journaux à vocation différente et que ce ne soient pas seulement des répliques, dans une autre langue, de ce qu'on a en Amérique du Nord, je pense qu'il y a un gros coup à donner.

Il y a un autre problème que vous posez, c'est la variation dans le montant de l'aide financière pour tenir compte des variations des taux de change. Vous nous aviez posé ce problème-là. Je l'avais fart examiner par nos services. Finalement, il s'était avéré impossible de tirer

une conclusion là-dessus. Je ne sais pas comment on pourrait régler ce problème-là, c'est très complexe. Il faudrait qu'on l'applique également dans d'autres pays. Et avec les variations très fortes des taux de change auxquelles nous assistons ces années-ci, il pourrait en résulter des variantes assez importantes dans le volume de l'aide accordée. Je ne sais pas. Il y a des formules qu'on peut trouver, sans doute. Mais, pour le moment, nous n'en avons mis aucune au point. Nous allons étudier de nouveau le problème, en même temps que nous allons examiner le cas particulier des étudiants québécois inscrits dans des établissements universitaires en France.

Ce sont les remarques que je voulais faire au sujet de votre mémoire. Vous avez d'autres observations au sujet des conditions de remboursement des prêts. C'est important aussi, ça. C'est très important, ça, j'en ai pris bonne note. Mais, encore une fois, je suis très satisfait de votre contribution à notre recherche parce que je pense que vous ajoutez une dimension à laquelle nous n'avions pas pensé autant qu'il aurait fallu. Votre présence est venue nous la rappeler de manière concrète. Alors, je vous remercie.

Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. le ministre. J'aurais peut-être une question à vous poser: Êtes-vous au courant du nombre d'étudiants québécois qui étudieraient à l'Université de Wallonie, en Belgique?

M. Noreau: On n'a pas beaucoup de données là-dessus, non. Et, de fait, dans la période où nous, on a été là, on a été là pendant deux ans, on n'a pas eu non plus de contacts avec eux, même si, a priori, entre Paris et Bruxelles, il n'y a pas une longue distance. Il y a le train, ce qui n'est pas toujours dans les moyens de beaucoup de monde. Mais, de fait, on n'a pas de données là-dessus. Je ne sais pas si la délégation à Bruxelles en a; s'ils font comme la délégation du Québec, ils vont peut-être avoir le nom du quart des étudiants qui passent, mais il n'y a pas vraiment de données là-dessus.

Au niveau du troisième cycle, dans mon secteur en tout cas, il n'y en pas beaucoup en sciences politiques, mais il est possible que ce soit parce qu'il n'y a pas grand-chose à faire en sciences politiques, en Belgique. Enfin, c'est ce que les politicologues français disent, mais là ça deviendrait difficile d'évaluer le pour et le contre.

Le Président (M. Gobé): Ma question était dans le sens de savoir s'ils connaissaient les mêmes genres de problèmes que vous pouvez connaître en France...

M. Noreau: Oui, vraisemblablement.

Le Président (M. Gobé): ...et si ce qui était bon pour vous pourrait s'appliquer aussi pour ces gens-là. La Belgique est quand même un pays francophone et, lorsqu'on dit que la France, c'est très important pour nous, les contacts, je suis tout à fait d'accord avec ça, mais je crois que les contacts avec la Belgique, au niveau universitaire, doivent être aussi très importants pour la francophonie au Québec.

Mme Sauvé: Oui, je peux peut-être vous dire que, simplement par expérience personnelle, il nous est souvent arrivé de côtoyer d'autres étudiants québécois ou même canadiens qui étudiaient à l'étranger. Nous nous rencontrions dans les aéroports ou sur un même vol pour venir voir notre famille après un an et demi d'absence. Je peux vous dire que les témoignages qu'on avait étaient à peu près similaires, c'est-à-dire qu'ils considéraient qu'aller étudier à l'étranger, ça signifiait énormément de sacrifices et qu'au niveau financier c'était clair que c'était beaucoup plus un coup de coeur qu'un choix économique rationnel. Je pense que tous les étudiants qu'on a pu rencontrer et qui étudiaient à l'étranger disaient le faire dans des conditions... S'ils le faisaient, c'était vraiment plus par conviction et par engagement que par facilité.

Le Président (M. Gobé): Donc...

Mme Sauvé: Même en Angleterre, j'ai des exemples...

Le Président (M. Gobé): Si je comprends bien, si on devait prendre des considérations spéciales pour l'étudiant québécois en France, on devrait en prendre aussi probablement pour l'étudiant québécois en Belgique.

M. Noreau: Oui, oui, vraisemblablement, sur cette question-là, il n'y a pas de doute que, même pour ceux qui iraient aux États-Unis, le problème du financement des études, le problème de l'endettement incroyable que ça constitue sont des problèmes que rencontrent tous les étudiants inscrits à l'étranger. C'est pour ça qu'en fait on a essayé d'élargir les recommandations qu'on avait présentées à l'ensemble des étudiants qui sont à l'étranger, sachant très bien qu'ils sont pris, financièrement, tous avec la même situation.

Il faut bien comprendre une chose, les gens qui vont étudier à l'étranger, ce ne sont pas des dentistes, O.K., ce sont tous des gens qui sont en recherche fondamentale, qui reviennent ici avec des formations dont le Québec a souvent besoin, même s'il n'a pas toujours les moyens d'engager ces gens-là. O.K. Et, de ce fait-là, beaucoup de gens se retrouvent dans des situations économiques extrêmement difficiles au lendemain de leurs études, parce que, ayant été à l'extérieur, ayant acquis des formations de pointe, n'ayant pas toujours, du fait qu'ils sont en recherche fondamentale, la possibilité de

trouver des emplois à l'université, comme ce fut te cas à une certaine époque où on avait des besoins, ifs se retrouvent finalement à la fois avec un endettement extrêmement important et avec une capacité de revenu extrêmement limitée. Ces situations-là sont vécues par tous les étudiants.

C'est un peu difficile d'exprimer tout ce que ça peut signifier comme insécurité, mais si jamais ça peut vous servir, on peut toujours... Ginette, c'est ma femme; on est allés ensemble en France. C'est nous qui avons créé cette association-là qui nous demande aujourd'hui de venir parler en son nom. Mais je ne sais pas, il faut quand même voir que, lorsqu'on va avoir terminé ces études-là, à deux, on va devoir à peu près 50 000 $. Ça va représenter, pendant dix ans, des coûts à payer qui représentent, compte tenu de l'intérêt, à peu près 650 $ par mois. Évidemment, on va dire qu'on n'en meurt pas, mais ça dépend, on n'a pas tous des salaires importants. (21 h 30)

Mme Sauvé: Et je pense qu'il faut tenir compte aussi du fait que la très grande majorité des étudiants et étudiantes à l'étranger, ce sont des étudiants de deuxième et troisième cycle, donc, pour la plupart, des adultes. Alors, je pense qu'il faut voir aussi qu'encourager les études supérieures pour nos étudiants ici, c'est encourager des adultes à ne pas entrer immédiatement sur le marché du travail qui est aussi attractif pour nous que pour les autres jeunes de notre génération. Donc, ce sont des adultes à qui on dit: Donnez le meilleur de vous-mêmes pour le mieux-être de votre société de demain et vous, vous faites partie d'une catégorie à part, vous vivez d'amour, d'eau fraîche, de livres et d'un café.

Le Président (M. Gobé): Est-ce que les champs d'études dans lesquels vous êtes, au troisième cycle, au deuxième cycle, sont disponibles ici, au Québec?

M. Noreau: Vous savez, ce que vous dites là, c'est très, très intéressant et ça prouve souvent l'incompréhension dans laquelle les gens ici se trouvent par rapport aux formations qu'on peut aller chercher là-bas. Moi, je vais chercher un troisième cycle là-bas. Mais qu'est-ce que ça signifie? On va me dire: Bien oui, mais en sciences politiques, vous pouvez toujours aller le chercher à Laval, monsieur; vous pouvez aussi aller le chercher à l'Université de Montréal. Mais, en fait, il faut comprendre qu'il y a des traditions intellectuelles aussi en sciences politiques ou en sociologie. Même si je vais chercher un diplôme équivalent, il ne sera jamais équivalent. Je vais être avec des types qui ne vivent pas ici, qui ont une pensée complètement différente. Il faut voir ce qu'on se tape, quand on arrive là-bas, comme littérature, compte tenu de la formation qu'on a acquise ici. C'est incroyable! Parce que, eux, ils ont une tradition complètement différente. Et c'est ça qu'on ramène ici, nous, sauf qu'évidemment on peut toujours se poser la question à savoir s'il y a des besoins pour ça actuellement ou si, au Québec, on peut encore accepter d'aider des gens qui vont chercher des formations alors qu'en retour ici on n'a pas toujours de place pour eux. On peut toujours se poser la question. Mais ça n'empêcherait pas qu'on considère, nous - et c'est pour ça qu'on y est allés - qu'il y avait un besoin pour le Québec de gens qui iraient se former comme ça à l'étranger. Il y a une dimension "vocationnelle" dans les démarches que ces gens-là font et qui n'ont pas beaucoup de rapport avec tout ce qu'on entend aujourd'hui sur une espèce de... Nous, quand on est partis, on y allait un peu avec la foi, je dirais. On est revenus et on s'est un peu fait dire qu'on était des petits entrepreneurs. C'est-à-dire que, finalement, on avait investi du temps, de l'argent pour aller acquérir des formations qui seraient rentables, alors que la façon avec laquelle la plupart des étudiants vont à l'étranger, la mentalité et ce que ça implique n'ont pas beaucoup de rapport, finalement, avec ce type de calcul là, qu'on peut peut-être attribuer, comme je dis, aux ingénieurs, mais qu'on ne peut pas nécessairement attribuer à des étudiants qui s'en vont vivre à l'étranger un peu dans la solitude, un peu dans l'isolement, dans des drôles de conditions.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Noreau.

Je passerai maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest. Vous avez la parole, M. le député.

M. Gendron: Oui, M. le Président, deux rapides questions. Voici la première. Puisque vous nous avez fait la confidence, Mme Sauvé, que vous avez eu la chance inouïe de rencontrer l'actuel et assez stable ministre de l'Éducation il y a un an et demi, deux ans, j'aimerais que vous nous indiquiez si les échanges que vous avez eus avec lui portaient essentiellement sur les mêmes revendications qu'aujourd'hui. Si oui, comment expliquer, vu qu'il y a quand même certains éléments qui ne sont pas liés à un aspect financier, qu'il n'y ait pas eu ces ajustements requis? Si je regarde, entre autres, quelques recommandations où vous dites qu'il y aurait lieu de tenir compte des délais compte tenu que vous êtes à l'extérieur ou encore de toute la notion d'excellence sur certains critères, est-ce que, lors de ces échanges avec le ministre, il avait été question à peu près des mêmes recommandations que vous avez faites aujourd'hui?

Mme Sauvé: Je pense que c'est plus à M. Ryan, au ministre de l'Éducation, que vous devriez poser la question. Moi, je vous dirais

simplement qu'à l'époque nous lancions un S.O.S. Nous le relançons aujourd'hui encore.

M. Gendron: Merci, mais je pense que c'est à vous que je devais poser la question. Vous êtes nos invités. Et, dans ce sens-là, puisque j'en ai la chance et que c'est vous qui avez indiqué que vous aviez eu l'occasion de communiquer avec le ministre de l'Éducation, je voulais savoir tout simplement si, effectivement, lors de ce S.O.S., les mêmes messages avaient été lancés. Moi, c'est ce que je crois comprendre.

M. Noreau: Essentiellement, les mêmes messages ont été lancés puisque les problèmes sont les mêmes. Ça explique en partie aussi pourquoi on ne s'est pas sentis obliges de vous lire notre mémoire; en fait, c'étaient des choses déjà connues qui ont passé aussi dans les journaux. Maintenant, qu'est-ce qui fait qu'il n'y a pas eu de réponse à ça? Évidemment, c'est vrai que c'est plutôt au gouvernement de répondre à cette question-là. Maintenant, nous, ce qu'on constate, c'est qu'il y a des choix, quand même, qui sont faits. Peut-être qu'il y a des questions de moyens derrière le fait que nous, on n'ait pas bénéficié de bourses pour poursuivre nos études à l'étranger. Je parle de bourses du système des prêts et bourses. C'est vrai qu'il y a sans doute des questions de moyens.

Mais on ne peut pas exclure, lorsqu'on utilise ou lorsqu'on n'utilise pas certains moyens, qu'on poursuit, qu'on le veuille ou non, et qu'on défend, qu'on le veuille ou non, certaines fins ou certaines façons de voir ce qu'est la formation. C'est pour ça que je vous parlais tout à l'heure de la question de savoir si les études constituent toujours un investissement au sens, je dirais, économique du terme ou individualisto-économi-que du terme. C'est vrai que la question se pose. Peut-être que, dans certains secteurs, c'est vrai, mais dans le nôtre, ça ne se pose absolument pas. Je pense qu'il y a indirectement un choix qui est fait à notre place, en fait, sur le sens que représente le fait de poursuivre des études à l'étranger, le fait qu'on ait à emprunter et, finalement, à s'endetter pendant des années, comme si ça constituait pour nous l'Eldorado, en fait, cette formation-là.

M. Gendron: Et voici la seconde question que je voudrais vous poser, à vous, M. Noreau, ou à Mme Sauvé. J'aimerais avoir de vous un jugement quant à la chute drastique du nombre d'étudiants. Moi, j'ai l'impression que la cause est facilement identifiable, mais j'aimerais le savoir de vous qui avez vécu là. Sur la base d'une dizaine d'années à peu près, le nombre d'étudiants a chuté d'une façon très importante puisque, si vos données sont exactes, et je n'ai pas de raison de croire qu'elles ne le sont pas, il est passé de 3500 à 4000 étudiants dans les années soixante-dix à 350 à 400 à la fin des années quatre-vingt; c'est une chute drastique. Avez-vous une explication rapide de la raison principale? Il y en a plusieurs, mais moi, en ce qui me concerne, je pense qu'il y a une raison principale. Je lance comme ça que c'est le niveau de vie en France qui est absolument intenable pour des étudiants québécois.

Mme Sauvé: Je pense que c'est important. Comme on le soulignait tantôt, ce n'est pas juste en France, c'est même aux États-Unis. Quand on regarde parmi même ceux et celles qui ont la chance d'avoir des bourses d'excellence et de FCAR ou même des bourses canadiennes, il y a aussi une baisse d'études à l'étranger tout simplement parce que... Comparons simplement le salaire d'un diplômé qui, après un baccalauréat en informatique, s'en va travailler chez IBM et un étudiant à qui on dit: Poursuis tes études, il y a une très bonne petite équipe, il y a un centre de recherche de fine pointe à Montpellier ou je ne sais où, et je pense que, là, il y aurait une recherche importante, fondamentale, à aller faire. Qu'est-ce que la plupart des étudiants vont choisir? Continuer une petite vie d'étudiants un peu à la bohème où on se contente de...

M. Gendron: D'un café chaud et ainsi de suite.

Mme Sauvé: Ou à peu près.

M. Gendron: C'est ça que vous avez dit.

Mme Sauvé: ...et, je pense, obtenir un statut, il faut le voir aussi. Souvent, l'étudiant, l'adulte qui poursuit des études supérieures a le sentiment d'être encore considéré comme un enfant d'école, si vous me permettez l'expression, alors que je pense qu'il serait important de lui reconnaître un statut et d'avoir le sentiment qu'on est des citoyens et citoyennes à part entière. Je pense que ce qu'on exige de nos étudiants pour poursuivre des études à l'étranger, c'est un sacrifice énorme.

M. Noreau: Maintenant, j'ai quand même des choses à ajouter là-dessus. Évidemment, on s'est préparés un peu. On ne peut pas toujours sortir tout le stock qu'on a. Mais j'ai fait le tour des différents programmes électoraux - en sciences politiques, on ramasse beaucoup de papiers - et j'ai trouvé que, finalement, dans les propositions du Parti québécois jusqu'en 1976, il y a l'idée d'un présalaire étudiant. C'est vrai que ça, ça nous aurait beaucoup aidés si vous l'aviez fait après être entrés au pouvoir. Ça nous aurait aidés parce que, évidemment, on serait moins endettés si on avait pu bénéficier de ça, parce qu'il aurait éventuellement pu être applicable à la fois aux étudiants inscrits au Québec et aux étudiants inscrits à l'étranger.

Il y a autre chose. Il faut quand même

voir... Et là, je ne veux pas, non plus, jouer uniquement le jeu de M. Ryan; évidemment, vous avez vos "games" et on a les nôtres, mais ce que je voudrais qu'on...

M. Gendron: II n'y a pas de "games" ici. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Noreau: Oui, oui, je vous comprends bien. Mais il faut...

M. Gendron: II n'y a pas de "games" ici.

M. Noreau: II y a aussi une raison majeure, pour ce qui est du cas de la France, qui explique pourquoi aujourd'hui il y a moins d'étudiants québécois en France. C'est qu'en 1982 il y a eu l'abolition de la bourse Québec-France. C'était une bourse qui était financée à parts égales par la France et le Québec. Il y a des raisons historiques qui sont liées à ça, entre autres, parce que la France s'était désengagée.

M. Gendron: C'est ça.

M. Noreau: La question, c'était de savoir - attention! - si le Québec devait se désengager également. Si la moitié des étudiants avaient pu s'en prévaloir, parce que la France ne fournissait pas sa part, ça aurait tout de même été ça. Et, quelque part, il y a des gens qui en auraient profité; on n'aurait pas vécu dans les conditions dans lesquelles on a vécu.

Alors, la question financière, c'est quelque chose d'important. Il y a d'autres conditions, il y a d'autres explications qui font qu'il y en a moins. Il y a des questions d'information, il y a des questions de réseaux qui auraient dû se constituer et qui ne se sont pas constitués. Et les professeurs qui y sont allés dans les années soixante-dix et qui sont aujourd'hui les enseignants des universités ont une part de respon sabHité qui n'est pas négligeable.

Il y a aussi le fait, et il ne faut pas se le cacher qu'un certain nombre d'universités préfèrent garder leurs étudiants de troisième cycle, parce que, en bonne partie, les départements sont financés par tête de pipe en fonction de ces étudiants qui restent inscrits longtemps au doctorat ou à la maîtrise. Moi, je n'ai pas été particulièrement encouragé personnellement à aller faire des études à l'étranger. J'y suis allé là à mon corps défendant, mais je me suis rendu compte en allant là-bas que je n'avais pas été le seul.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Gobé): Avez-vous terminé. M. le député? J'ai eu une demande du député de Verdun, qui lui-même est un ancien étudiant québécois en France, d'ailleurs. M. le député de

Verdun, vous avez la parole pour quelques minutes.

M. Gautrin: Brièvement. D'abord, vous recréez en 1986 l'Association des étudiants québécois en France. Qu'est-ce qui était arrivé à la défunte AGEQF? Elle était morte ou quoi?

M. Noreau: Elle était morte, mais, vous savez, la réalité de ces associations-là, c'est la même que celle des étudiants d'ici. Les étudiants passent et ces institutions-là mises sur pied ne restent pas toujours. Elle est disparue vers 1975 et on l'a remise sur pied, peut-être parce que, en fait, on constatait que les situations vécues par les autres étudiants étaient un peu les nôtres et que, dans le fond, il y avait un paquet de trucs, de services, d'aide que personne d'autre n'aurait pu nous donner, exception faite de nous-mêmes.

M. Gautrin: Quand je lis votre mémoire que je trouve très pertinent, sans vouloir vous faire de peine, il y a des demandes et des recommandations qu'on avait déjà il y a à peu près 23 ou 24 ans.

M. Noreau: Maintenant que vous êtes au pouvoir, il s'agit tout simplement de donner suite à ces espoirs-là.

M. Gautrin: La question que je dois vous poser plus particulièrement; concerne l'analyse des bourses, particulièrement des bourses de FCAR qui sont d'un montant certainement relativement faible, comme vous le savez, mais on calcule que probablement l'étudiant au deuxième cycle ou au troisième cycle pourra avoir un complément de revenus en étant engagé comme assistant de recherche ou démonstrateur à l'intérieur de sa propre université. Est-ce que la situation a évolué à l'étranger, c'est-à-dire est-ce que nos étudiants québécois peuvent avoir cette espèce de complément de salaire dans les universités?

M. Noreau: Les étudiants français ne l'ont pas. Alors, évidemment, ils ne le donnent pas, non plus, aux étudiants québécois. N'empêche qu'il existe un certain nombre de bourses françaises d'aide et parfois des Québécois réussissent à en obtenir lorsqu'ils réussissent à faire la preuve qu'ils sont meilleurs que leurs collègues français. Mais ce n'est pas toujours le cas, ils sont bien formés là-bas.

M. Gautrin: C'est-à-dire que, allant étudier à l'étranger, vous n'avez pas accès à ce complément de salaire que les étudiants...

M. Noreau: Non, d'ailleurs, ça relève de deux statuts bien différents. Il faut voir que ce qui nous permet d'obtenir le permis de long

séjour de résidence en France pour fins d'études ordinairement nous interdit de doubler ça d'un visa de travail, ce qui fait qu'on ne peut pas, en fait, poursuivre les deux en même temps. Ça complique beaucoup les choses. Évidemment, comme vous le voyez, on n'en meurt pas, mais il faut voir dans quelles conditions on vit.

Le Président (M. Gobé): Avez-vous terminé, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Alors, maintenant, M. le ministre, peut-être un petit mot de la fin.

M. Ryan: Je crois que madame a fait signe avant. Je ne voudrais pas l'empêcher de dire un dernier mot.

Mme Sauvé: Oui, je voudrais peut-être juste me permettre un commentaire. Quand nous parlons de l'admissibilité aux bourses, comprenons-nous bien, ce n'est pas un privilège qu'on demande pour les étudiants québécois à l'étranger; c'est un dû. C'est-à-dire que, selon, les mêmes calculs, moi, je n'ai pas compris pourquoi, tout au long de mes études postsecondaires, j'ai eu droit à des prêts, j'ai eu à soumettre une déclaration de situation réelle et, par la suite, j'ai eu droit à des bourses. Et j'ai cessé d'y avoir droit le jour où je choisissais d'aller confronter ma formation à l'étranger. Alors, ce que l'on désire, c'est que, sur la base des mêmes critères pour les autres étudiants québécois qui restent ici, si la preuve est faite que nous avons des besoins financiers qui le légrtimisent, on ait droit, nous aussi, à la bourse, qu'on ait, au fond, le même dû que si on poursuivait nos études ici, au Québec. Car il me semble que, déjà, le sacrifice est quand même là de vouloir aller à l'étranger.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, madame. M. le ministre, vous avez maintenant la parole.

M. Ryan: Je pense bien que vous avez résumé de manière très concrète ce que nous avons discuté. J'ai dit que nous étudierions le cas particulier que vous nous avez soumis. Je vais jeter un coup d'oeil de nouveau sur l'ensemble du tableau de nos étudiants à l'étranger pour voir s'il y aurait des possibilités du côté de l'admissibilité à la bourse. En tout cas, vous nous avez rappelé de manière fort intéressante un problème auquel nous ne saurions être indifférents. Merci beaucoup.

J'ajoute juste une chose que nous avons faite au cours de la dernière année, pour ceux qui ne le sauraient pas. On a une Maison canadienne à Paris. Je ne sais pas si vous l'avez fréquentée vous-mêmes, mais c'est une maison qui reçoit, je ne sais pas combien... Il y a de (a place pour 75 ou 80 étudiants, je pense.

Nous avons fourni une contribution substantielle pour la réfection matérielle de la maison. Même si c'est une maison qui ne relève pas du gouvernement du Québec, nous tenions à ce qu'il y eût un lieu où les étudiants canadiens en provenance du Québec, qui forment la majorité, d'ailleurs, des étudiants inscrits à cette maison puissent se retrouver dans des conditions convenables. Ça a été fait au cours de la dernière année, justement parce que nous voulions que ce lien soit maintenu entre la France et le Québec. Nous examinerons aussi l'ancienne bourse France-Québec pour voir l'origine de la rupture qui s'est produite en 1982, m'avez-vous dit, et voir s'il y aurait des possibilités de reprendre la collaboration de ce point de vue. Je vous remercie beaucoup et je vous souhaite bonne chance.

Le Président (M. Gobé): Je pense que M. le député d'Abitibi-Ouest voulait dire un petit mot aussi.

M. Gendron: Oui, très sincèrement, un mot de remerciement. C'est sûr qu'après avoir été plongés toute la journée dans la réalité étudiante québécoise, c'est intéressant, quand même, de nous donner l'occasion de nous plonger dans l'autre réalité; même si elle est moindre en importance numérique, elle est quand même significative pour des Québécois et des Québécoises compte tenu de l'expérience qu'ils peuvent tirer de cette confrontation, comme vous l'avez si bien dit, de nos acquis pédagogiques. Si tout ceci était apprécié sur la base des mêmes règles, exactement, auxquelles nous assujettissons nos étudiants au Québec, je pense que, indépendamment de la somme que ça signifiera dans la poursuite de vos études en France, ce serait intéressant de pouvoir compter sur cet acquis comme étudiants.

Le Président (M. Gobé): M. Noreau et Mme Sauvé, au nom de la commission, je vous remercie de vous être présentés à cette heure-ci devant nous. Soyez assurés que votre témoignage a été bien entendu et, d'après ce que je peux voir autour de la table, apprécié. Je vous remercie.

Maintenant, je vais ajourner la commission jusqu'au mardi 27 février, à 10 heures, en cette salle.

(Fin de la séance à 21 h 48)

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