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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mardi 27 février 1990 - Vol. 31 N° 10

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi n° 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants


Journal des débats

 

(Dix heures dix-huit minutes)

La Présidente (Mme Hovington): Bienvenue à la commission de l'éducation, en ce mardi 27 février. La séance de la commission de l'éducation est ouverte, dont le mandat consiste à une consultation générale et à tenir des auditions publiques sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements, ce matin?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Il y a le député de Chauveau, M. Poulln, qui remplace le député de Verdun, M. Gautrin.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, aujourd'hui, nous aurons à entendre différents groupes dont le premier ce matin, à 10 heures, est l'Association des étudiants de l'Université McGill; à 11 heures, l'Association générale étudiante des secteurs sciences humaines, arts et lettres de l'Université du Québec à Montréal; à midi, l'Association des étudiants en droit de l'Université Laval; à 15 heures, la Centrale de l'enseignement; à 16 heures, le Comité national des jeunes du Parti québécois; à 17 heures, le Protecteur du citoyen; à 20 heures ce soir, la Fédération des associations de professeurs des universités du Québec et, enfin, à 21 heures, l'Intersyndicale des professeurs des universités québécoises.

J'invite donc le premier groupe de ce matin, l'Association des étudiants de l'Université McGill, à prendre place. Si voulez bien vous présenter, s'il vous plaît.

Association des étudiants de l'Université McGill

M. Young (Cameron): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je m'appelle Cameron Young. Je suis le représentant de la Faculté de droit à l'Association des étudiantes et étudiants de l'Université McGill. À ma droite, M. John Fox, qui est vice-président des affaires extérieures de notre Association, et, à ma gauche, M. Santo Manna qui est président.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Alors, allez-y. Le porte-parole sera vous, M. Young?

M. Young: C'est ça, là.

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, M. Young, on vous écoute.

M. Young: Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, mesdames et messieurs, membres de cette commission, nous vous remercions de l'attention que vous allez porter à notre discussion aujourd'hui. Il nous fait plaisir, au nom des plus de 20 000 étudiants et étudiantes que nous représentons, de vous faire part de nos recommandations quant aux questions importantes qui sont devant nous aujourd'hui.

Notre but, en participant aujourd'hui, est de promouvoir une progression cohérente vers une accessibilité accrue pour tous les jeunes Québécois et Québécoises à une éducation universitaire de qualité.

Il y a 30 ans, nous avons témoigné de la naissance d'un mouvement social qui a indéniablement transformé la société québécoise. En effet, la Révolution tranquille avait comme objectif principal l'amélioration de la condition sociale du peuple qui est le nôtre. C'est un choix de société qui a fait de l'éducation une priorité. Il était alors reconnu que l'accessibilité à l'éducation était un droit et qu'en conséquence toutes les barrières culturelles et financières à l'accessibilité devaient être abattues.

Dans les mots du rapport Parent sur l'éducation, le droit de chacun à l'instruction, de l'école primaire jusqu'à l'université, et l'égalité des chances pour tous face à l'éducation sont les fondements même de notre philosophie sociale. C'est dans cette optique que le gouvernement du Québec a gelé les frais de scolarité en 1968. Son but était alors l'imposition graduelle et progressive de la gratuité.

Le gouvernement a confirmé, à plusieurs reprises, son adhérence à ce principe de l'éduca- . tion accessible à tous. Pendant les années soixante-dix, il y a eu le développement du régime de l'aide financière aux étudiants. Ce gouvernement a également ratifié, par arrêté en conseil, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont le paragraphe 2 de l'article 13 se lit comme suit: "L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et, notamment, par l'instauration progressive de la gratuité."

Le gouvernement du Québec, en ratifiant cette déclaration quand il n'en était pas obligé, puisque c'est le gouvernement fédéral qui accède à ce genre d'entente internationale, a clairement démontré son adhérence à ce principe de l'éducation accessible. Il nous semble donc tout à fait contradictoire que le gouvernement adopte maintenant une politique envers l'éducation dont

l'effet principal serait une limitation de l'accessibilité à l'enseignement supérieur.

En effet, la hausse annoncée par le gouvernement au mois de décembre dernier aurait un effet particulièrement prononcé sur l'accessibilité. Selon les estimations les plus conservatrices - celles du ministre lui-même - 5 % des étudiants et étudiantes qui étudient présentement dans les universités de cette province seraient contraints d'abandonner leurs études. Cela se traduit par plus de 11 000 étudiants qui arrêteront l'année prochaine et ce chiffre n'inclut pas ceux qui seront obligés d'abandonner des études à temps complet pour les compléter à temps partiel.

Mais de plus, nous sommes d'opinion qu'il est illusoire de croire que la réforme du régime des prêts et bourses entreprise par ce gouvernement saura remédier à cette situation inacceptable. L'insuffisance des fonds, les critères d'admissibilité et de calcul d'aide qui sont irréalistes et un endettement surélevé font du système d'aide financière aux étudiants un système qui ne répond pas aux besoins réels des étudiants et étudiantes les plus défavorisés dans notre société.

Pour la plupart, les propositions du gouvernement quant à la réforme du régime représentent des améliorations. Mais ces améliorations sont tout à fait mineures, ne mettant pas en question les fondements du régime, et nous sommes encore une fois d'avis que ces améliorations et cette réforme ne reflètent pas la réalité des étudiants et étudiantes au Québec.

Comme vous pouvez le constater d'après les chiffres à la page 4 de notre mémoire, les étudiants et les étudiantes de McGill voient la valeur relative de leur bourse diminuer depuis cinq ans, tandis que leur endettement s'accroît. Depuis cinq ans, le nombre d'étudiants de McGill ayant accès au régime d'aide financière aux étudiants a diminué de près de 20 %. Nous ne pensons pas que cette situation sera rectifiée par la nouvelle réforme du régime, puisque les grandes lignes restent inchangées.

Après cette réforme, nous remarquons encore plusieurs manques importants au régime. Ces manques sont au niveau de l'admissibilité au régime, des contributions parentales et du conjoint, de la définition de l'autonomie d'un endettement extrêmement élevé.

Premièrement, l'admissibilité au régime. Nous avons reçu avec intérêt la proposition du gouvernement dans les orientations de 1989, traitant de l'accessibilité des étudiants à temps partiel au régime. Nous sommes alors tout à fait déçus que le gouvernement ait, par la suite, décidé que ces étudiants et étudiantes, qui représentent près de la moitié des étudiants à McGill, doivent encore attendre pour avoir l'accessibilité au régime. Il est important de remarquer que ces étudiants sont particulièrement sensibles à des hausses de (rais de scolarité et qu'une des raisons principales pour lesquelles, souvent, ces étudiants poursuivent leurs études à temps partiel, c'est parce qu'ils n'ont pas les moyens de le faire à temps complet.

Nous nous demandons également pourquoi le gouvernement a établi des différences quant au nombre de sessions auxquelles un étudiant peut être admissible pour un prêt et pour une bourse. Ceux qui ont besoin d'un prêt ont également besoin de leur bourse. Le gouvernement devrait donc respecter les limites de temps établies par les administrations universitaires.

Pour ce qui est de la contribution parentale et du conjoint, nous trouvons entièrement irréaliste que le gouvernement se serve d'une présomption aussi incertaine, pour le calcul des revenus de l'étudiant, que celle de la contribution pa^ntale. Le Bureau de la statistique du Québec a démontré que, parmi ceux qui étaient réputés recevoir une telle contribution, seulement 40 % la recevaient actuellement, effectivement. Si le gouvernement tient à inclure, dans le calcul de l'aide financière, cette contribution parentale, il doit trouver un moyen pour s'assurer que cette contribution soit effectivement versée.

Nous croyons que, dans l'intérêt de l'harmonie familiale, des mesures incitatives sont appropriées. Ces mesures incluraient donc le fait de notifier aux parents le montant estimé de leur contribution, pour qu'ils puissent le savoir et être conscients de ce montant, et, par la suite, de les inciter à déverser cet argent par le biais de mesures fiscales favorables. Il faut ensuite s'assurer que le calcul des revenus de l'étudiant soit fait à partir du montant réel de cette contribution et non pas du montant estimé par le gouvernement. Pour s'assurer de cela, les parents devraient faire une déclaration, contresignée par l'étudiant, au gouvernement. (10 h 30)

Nous aimerions aussi faire remarquer que le coût du maintien de l'unité familiale établi par le régime des prêts et bourses est nettement en dessous du seuil de la pauvreté tel qu'établi par Statistique Canada. Nous trouvons illogique d'appeler les parents à vivre dans la pauvreté pour financer les études de leurs enfants. D'autre part, pour ce qui est de la contribution du conjoint, nous trouvons que c'est une conception dépassée de la famille québécoise, du couple québécois, qui mène à une contribution du conjoint. Nous demandons donc au gouvernement d'abolir cette contribution.

Troisièmement, pour l'autonomie. Les critères actuels nient, encore une fois, la réalité que vivent les étudiants et les étudiantes du Québec. La règle qui dit que tout étudiant habitant à moins de 50 kilomètres de distance du domicile de ses parents... La présomption que tout étudiant habitant à l'intérieur de cette distance résident effectivement chez ces derniers est complètement illogique et, encore une fois, nio la réalité des Québécois. La réalité des Québécois

est que de nombreux étudiants ont à payer un logement même s'ils sont présumés habiter chez leurs parents. Nous tenons à faire part au gouvernement de notre croyance: donner accès au régime, au titre d'autonome complet, à tout étudiant qui peut prouver à l'aide d'un bail qu'il ne reste effectivement plus chez ses parents serait un grand incitatif pour les études de premier cycle. Le régime ne pourra jamais répondre aux besoins des étudiants et étudiantes tant et aussi longtemps que les critères d'admissibilité à travers des fictions, à travers des présomptions, ne respectent pas la situation véridique des étudiants.

Donc, toujours suivant notre thème de la réalité, nous passons maintenant à l'endettement. Un étudiant qui accède au régime des prêts et bourses au premier cycle universrtairp et qui reste là jusqu'à la fin du troisième cycle peut accumuler une dette de plus de 20 000 $. Avec les intérêts, cela peut monter jusqu'à plus de 40 000 $. Nous trouvons ce fardeau extrêmement lourd sur nos jeunes les plus démunis.

Un des buts actuels de ce gouvernement est de favoriser la natalité chez les jeunes, mais ce n'est pas en les forçant à s'endetter jusqu'à 40 000 $, avant qu'ils aient le temps de commencer leur vie, qu'on va favoriser cette natalité accrue. Nous soutenons donc qu'il devrait y avoir des limites raisonnables à l'endettement. L'initiative du gouvernement, pour les cycles supérieurs, d'accorder 25 % de remise de la dette constitue une mesure incitative importante, mais que nous trouvons aussi valable pour les étudiants de premier cycle.

Deuxièmement, nous proposons un plafond raisonnable à l'endettement étudiant, de 10 000 $. Donc, tout étudiant complétant un diplôme universitaire aurait droit à une exemption de paiement de toute partie d'une dette qui serait supérieure à 10 000 $, après la remise des 25 % que nous avons déjà proposée.

Nous reconnaissons que ces propositions impliquent des coûts très importants pour l'État; c'est pourquoi nous nous tournons maintenant vers les sources de financement du réseau universitaire qui peuvent injecter des fonds pour ces coûts importants.

Il nous paraît clair qu'il y a une crise financière importante dans nos universités. Comme étudiants, nous savons que nos classes sont surpeuplées, que nos bibliothèques manquent de livres, d'équipement de laboratoire, que le nombre d'étudiants par professeur est trop élevé. De plus, les universités ont un déficit accumulé de près de 130 000 000 $ depuis cinq ans. Nous trouvons remarquable que, pour la même période, le gouvernement ait compressé ses subventions d'environ le même montant. Donc, en même temps que le gouvernement retire ses subventions aux universités, il demande aux étudiants de remplir le vide. Cela nous apparaît drôlement comme un simple transfert du fardeau financier.

Mais, de plus, il faut se demander si la hausse qui a été annoncée le mois dernier par le gouvernement va vraiment régler le problème du sous-financement de nos universités. L'argent généré par cette hausse sera insuffisant.

De plus, nous remarquons que le budget fédéral de la semaine dernière vient compliquer les choses. Il y en a même qui diraient que ça vient d'annuler toute hausse des frais de scolarité. Les résultats de la hausse, donc, ne seront tout au moins pas très apparents. Nous ne prévoyons donc aucune amélioration de la qualité de l'éducation que nous recevons et que nous allons recevoir. Devant cette croyance que l'éducation ne sera pas améliorée, nous avons en plus, comme nous l'avons déjà mentionné, des estimations qui disent que 5 % des étudiants vont se retirer. Donc, tout le monde est d'accord pour admettre que l'accessibilité sera affectée.

Pour ce gouvernement, la hausse des frais de scolarité équivaut à la solution facile à un problème d'ampleur, mais cette commission doit reconnaître qu'il existe d'autres solutions, plusieurs autres solutions. Nous en avons choisi une qui n'inclura aucune barrière à l'accessibilité, tout en injectant des fonds nouveaux dans le réseau universitaire. Les éléments de cette solution se résument dans la notion du nouveau partenariat présenté par la Fédération des étudiantes et étudiants du Québec, dont nous sommes membres.

Pour vous rappeler brièvement quels sont les éléments de ce nouveau partenariat, cela va comme suit. Tous les groupes qui, dans la société québécoise, bénéficient de l'éducation supérieure doivent y contribuer, c'est-à-dire la société, en général, parce qu'une société éduquée est une société prospère et que cette dernière doit contribuer à travers le gouvernement, à travers vous. Nous en appelons donc au gouvernement de maintenir ses subventions et de compenser pour les coupures antérieures.

Nous en appelons aussi au gouvernement de reformuler le financement universitaire, de manière à tenir compte du coût réel disciplinaire. La situation comme elle existe maintenant ne tient pas compte du fait qu'il y a certains étudiants qui coûtent plus cher à éduquer que d'autres. L'Université McGill est particulièrement affectée par ce sous-financement relatif.

Le deuxième groupe qui bénéficie de l'éducation dans la société québécoise se retrouve dans le secteur privé. Il va sans dire, je crois, que les entreprises québécoises bénéficient largement d'une base de main-d'oeuvre qui est bien formée et bien éduquée. Ceci évite la reformation des employés, une fois sur le marché du travail, et ceci assure aux entreprises québécoises la possibilité de faire concurrence au niveau international. C'est d'un personnel compétent que les entreprises ont besoin et ces compétences résultent de l'université.

La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez conclure assez rapidement. Vous avez 20 minutes d'écoulées.

M. Young: D'accord. Merci, Mme la Présidente. Mais les entreprises n'ont pas démontré leur bonne volonté de contribuer. Ce sont elles qui contribuent le moins en Amérique et nous pensons qu'elles peuvent faire plus. Pour notre part, nous aussi, les étudiants, on a la respon-sabflité de contribuer, mais cette contribution ne doit aucunement affecter l'accessibilité.

Nous reconnaissons que nous avons un rôle à jouer et nous sommes prêts à payer plus que nous ne payons maintenant, mais il est absolument important que ces paiements n'affectent aucunement l'accessibilité à nos classes. La formule que nous avons choisie est l'impôt postuniversitaire.

Comme nous arrivons à la fin de notre temps, je propose donc de répondre à vos questions sur cet impôt postuniversitaire, si vous en avez, pendant la période de questions. Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Young. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Oui. Je voudrais remercier la délégation de l'Association des étudiantes et étudiants de l'Université McGill de sa contribution très sérieuse au travail de la commission. On voit que l'Association a fait un examen attentif du projet de réforme et qu'elle présente des observations sûrement dignes de susciter la discussion. Celles que nous pourrons retenir, nous le ferons avec plaisir, toujours évidemment en tenant compte du cadre financier dans lequel nous devons évoluer et qui est évidemment plus contraignant pour un ministre qui fait partie du gouvernement que pour le président de l'Association des étudiantes et étudiants de McGill. Ce n'est pas une critique que je vous adresse, c'est presque une remarque d'envie.

Vous avez dit dans votre mémoire, à un moment donné, que les contributions du gouvernement aux universités ont diminué, depuis 1982, d'environ 130 000 000 $. Je voudrais corriger une impression qui risquerait de subsister, à la suite de cette observation que vous avez faite. Sous le gouvernement actuel, les subventions aux universités ont augmenté, de fait, d'environ 15 % par étudiant, équivalence temps complet, en dollars constants depuis 1986. Elles avaient diminué, en dollars constants, de 23 % ou 24 % pendant la période qui a eu lieu sous l'ancien gouvernement Mais le gouvernement actuel a entrepris un redressement dont les effets sont déjà significatifs. Et je pense que tout le monde sait ici que, dans les crédits additionnels que nous avons injectés dans la base des universités pour l'année 1989-1990, une part très substantielle a été réservée à l'Université McGill en vue de combler non pas de manière complète, mais quand même de manière sérieusement partielle, l'écart qui restait dans les subventions d'équilibre entre McGill et les autres universités.

Nous avons franchi un pas nouveau. Ça fait deux fois que nous faisons des étapes importantes dans la direction d'une égalité complète entre tous les établissements. Il y a des fruits de l'ancienne formule de financement qui ne sont pas faciles à éliminer, qui ont créé des iniquités dans le partage des subventions auxquelles nous ne pourrons remédier complètement que lorsque le niveau général des subventions aura été augmenté davantage. C'est une chose qui prend un temps plus long qu'on ne le souhaiterait, puis je pense que ça se comprend.

Mais, en tout cas, l'orientation, je pense qu'elle s'est engagée dans la bonne direction puis il fallait au moins corriger l'impression qui risquait de rester là-dessus. Si, évidemment, vous voulez me contredire là-dessus, vous serez entièrement libres de le faire. (10 h 45)

Un deuxième point que je voudrais souligner a trait aux limites dont doit tenir compte le gouvernement quand il établit les modifications souhaitables au régime des prêts et bourses Le gouvernement doit tenir compte des ressources dont il dispose et doit rechercher des améliorations à l'intérieur de ces contraintes. Je vous donne juste un exemple. Si vous dites, par exemple: II faudrait qu'on abolisse complètement la contribution parentale... Si on devait abolir complètement la contribution parentale et pour les étudiants non résidants et pour les étudiants résidants, la facture totale serait voisine de 800 000 000 $.

M. Young: Pardon, monsieur. M. Ryan: Pardon?

M. Young: Pardon. Je pense que je ne me suis pas assez bien exprimé. Nous ne demandons pas l'abolition de la contribution parentale. Nous demandons simplement que, s'il y a cette contribution parentale, on s'assure qu'elle soit effectivement versée. Quant à l'autonomie, ça n'affecte pas la contribution parentale. On peut être autonome tout en recevant une contribution des parents.

M. Ryan: Et là, je reviens à ce deuxième point. Si on donne l'autonomie seulement pour l'étudiant non résidant, ce qui est l'essentiel de la demande qui nous est présentée par plusieurs associations étudiantes, H y a quand même une facture très élevée ici de 270 000 000 $, selon nos calculs. Et, à moins que je ne comprenne mal, quand on parte d'autonomie au sens de la Loi sur l'aide financière aux étudiants, ça veut dire qu'il y a certains étudiants qui ont un statut les dispensant de la contribution parentale.

C'est la définition que nous donnons actuellement. Je suis content que vous me disiez que ce n'est pas tout à fait ce que vous voulez entendre. Vous pourrez me l'expliquer tantôt. Je vais juste compléter mon exposé, ce ne sera pas long. Ensuite, vous allez pouvoir commenter n'importe lequel des points que j'ai soulevés, évidemment.

Dans votre mémoire, évidemment, il y a bien des recommandations qui vont au-delà de ce qui est possible, étant donné le cadre financier dans lequel nous évoluons. Par conséquent, celles-là, nous ne pouvons évidemment pas les retenir. Vous dites qu'il faudrait penser à des solutions à long terme, comme l'impôt postuniversitaire, la contribution plus substantielle des entreprises. Ce sont deux idées qui ne sont pas mauvaises en soi, que le gouvernement est loin de rejeter en principe, mais de là à pouvoir en envisager l'application immédiate, il y a une marge que nous ne pouvons pas envisager.

Un impôt postuniversitaire, par exemple, ça voudrait dire, en termes concrets, que le gouvernement a la tâche de trouver de l'argent pour financer tout le paquet en attendant. Et en attendant, les obligations liquides du gouvernement sont très, très pressantes, très contraignantes. On ne pourra pas ajouter une charge comme celle-là à l'ensemble des charges gouvernementales, mais à longue période, c'est une question que nous allons approfondir, à la lumière de l'expérience qui se fait dans un pays depuis trois ans. Ce n'est pas une chose qui est généralisée. On va voir l'ensemble du contexte australien, puis on sera en mesure d'avoir une opinion là-dessus d'ici sûrement à un an ou deux. Ce n'est pas une idée que nous rejetons, loin de là.

De même, la contribution des entreprises est un élément important. Il s'agit de savoir à quel niveau on doit l'envisager. Nous estimons, du côté gouvernemental, que cette contribution doit être promue au niveau, par exemple, des campagnes de financement en vue de la réalisation de projets d'immobilisation des universités. Votre université a fait une campagne de financement, il y a deux ans, qui a rapporté, si mes souvenirs sont exacts, une somme approximative de 75 000 000 $, une partie venant des diplômés, qui sont nombreux, qui sont restés attachés à leur institution - et nous nous en réjouissons tous - et une autre partie venant des entreprises qui avaient pris l'habitude de donner plus à l'Université McGill qu'à d'autres universités du Québec, dans bien des cas.

Ce n'est pas une question de jalousie du tout, mais l'Université McGill a été favorisée de ce côté-là. Elle l'a mérité au cours des années aussi, il n'y a pas de tricherie là-dedans, pas du tout, mais nous disons que si les entreprises développent de plus en plus cette habitude de contribuer aux campagnes de financement des universités pour des fins d'immobilisation, ça, ça soulage de beaucoup les charges financières du gouvernement. C'est une contribution très utile.

L'autre forme de contribution qui a été largement pratiquée par les entreprises en faveur de McGill, mais pas beaucoup en faveur des autres universités, c'est la création de chaires ou de fonds de dotation. À l'Université McGill, on doit avoir aujourd'hui entre 800 et 900 fonds de dotation différents dont la valeur totale dépasse sûrement les 250 000 000 $. Ça rapporte des revenus intéressants pour la recherche de l'excellence. On en est tous très heureux. Mais là, il y a un champ d'action pour l'entreprise. On a une douzaine d'établissements universitaires au Québec, il y un champ d'action formidable.

Moi, il me semble qu'on serait mieux d'orienter la part de l'entreprise vers ces fins plutôt que de vouloir les taxer pour les budgets de fonctionnement des universités. Elles sont taxées pour les fins générales du gouvernement à un niveau qu'on peut discuter ailleurs qu'ici, mais je pense que cette taxation-là apporte des revenus pour l'ensemble du gouvernement et qu'on ne peut pas commencer à dire: Ça, ça va être pour les universités, ça, ça va être pour les hôpitaux, ça, ça va être pour les sports, ça, ça va être pour l'enseignement primaire. On n'en finira pas. Moi, c'est la conception que j'ai de cette question-là quant aux fonds.

Et j'ajouterai une dernière remarque en ce qui touche les étudiants de l'Université McGill. Vous dites que le nombre total de ceux qui ont bénéficié de l'aide financière a diminué ces dernières années. Au cours des cinq dernières années, il est passé de 4000 qu'il était en 1984 à 3265 en 1989. On observe la tendance générale à McGill, l'augmentation de l'aide sous forme de prêts; l'aide sous forme de bourses est demeurée à peu près stationnaire quant aux agrégats, aux montants totaux.

Je vais vous poser une question là-dessus. Tout d'abord, quand on fait la part de l'inflation, l'augmentation qui est survenue du côté des sommes consacrées aux prêts est plutôt de 20 % que de 40 %. Ce n'est pas énorme mais c'est ça qu'on visait. On visait à ce qu'une partie un petit peu plus grande de l'aide financière soit donnée sous forme de prêts plutôt que sous forme de bourses. Le gouvernement précédent a commencé à faire des changements dans cette voie. Nous en avons fait quelques-uns, nous aussi, et ça donne le résultat que vous indiquez. C'est vrai. Mais il y a une question que je vais vous poser: Est-ce que la diminution du nombre de bénéficiaires ne serait pas attribuable aux conditions économiques plus favorables que nous avons connues depuis cinq ans ou si c'est vraiment attribuable au fait... Parce qu'on n'a pas exclu des personnes. On leur a offert de l'aide sous une autre forme. Les conditions d'admission sont demeurées les mêmes. On les a même améliorées à bien des points de vue.

Je vais vous donner un exemple qui aurait dû favoriser les choses pour les étudiants de

McGill. Un étudiant qui obtient une bourse d'excellence, avant ça, c'était déductible à 100 %. Vous savez qu'H y en a plusieurs à McGill qui, grâce aux fonds de dotation, reçoivent des bourses d'excellence. Sous le régime libéral, la déductibilité a été réduite à 50 %. Alors, ça devrait faciliter l'accès. En tout cas, j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus en toute simplicité, de même que sur d'autres remarques que j'ai pu faire.

La Présidente (Mme Hovington): M. Young, vous avez la parole.

M. Young: Merci, M. le ministre. Pour ce qui est de votre réclamation que vous avez, en fait, augmenté les fonds réels qui se retrouvent dans les universités, nous voulons bien vous croire. Nous avons des chiffres produits par le Conseil des universités qui nous disent le contraire. C'est une question d'évaluer d'une manière différente. Je ne pense pas qu'on va s'entendre là-dessus.

Pour peut-être vous éclairer une dernière fois sur la relation entre la contribution parentale et l'autonomie, ces deux choses ne sont pas exclusives comme elles le sont présentement. Présentement, on a une contribution parentale quand on est dépendant de nos parents, qu'on soit résidant ou non, mais une fois qu'on accède à l'indépendance, cette contribution n'est plus nécessaire. Ce que nous proposons, c'est que la contribution parentale soit conservée, mais que le gouvernement s'assure qu'elle soit effectivement versée. Dans le cas d'un étudiant autonome qui ne vit plus chez ses parents, il peut toujours recevoir sa contribution parentale et, selon la formule que nous avons proposée, cette contribution sera reconnue dans le calcul de l'aide financière. Donc, on élimine le problème qui existe présentement des étudiants qui sont autonomes, qui sont indépendants, parce qu'ils ont déjà satisfait au critère des 90 crédits en vue d'un même diplôme, mais qui reçoivent encore la contribution de leurs parents. Ce que nous réclamons, c'est une reconnaissance de la réalité qui affecte nos étudiants et nos étudiantes.

Pour ce qui est de l'impôt postuniversitaire et des coûts importants que cela entraîne, nous, nous sommes ravis d'entendre que vous allez étudier le principe et que vous êtes d'accord avec le principe même. Nous ne pouvions espérer autant ce matin. Cependant, nous croyons qu'il est nécessaire que ce gouvernement adopte tout de suite des mesures pour aller dans cette direction. Nous avons vu, en Australie, que ce système peut marcher, et le système australien n'est pas le seul système. Il en existe plusieurs autres. Par exemple, dans le système australien, il y a des frais de scolarité qui sont fixes. Ils s'élèvent à environ 1800 $ ou 2000 $ par année, et l'étudiant a le choix de payer tout de suite ou de déférer ses paiements. Nous, notre première réaction à cela est que ça risque de favoriser encore certains groupes sociaux, c'est-à-dire que ceux qui ont les moyens le paient tout de suite et ça finit là, ils ont, en plus, une réduction, et ceux qui n'ont pas les moyens doivent attendre et doivent traîner ça pendant des années. Mais c'est déjà un bon point de départ, il y a une avance sur ce qui se retrouve ici, présentement.

Vu, justement, les coûts importants de la transition, qui est difficile, vers cet impôt, nous pouvons... C'est à ce point-là qu'on peut demander aux entreprises de contribuer. Nous ne croyons pas, bien sûr, que les contributions que les entreprises font actuellement, c'est-à-dire des dons privés, des dons à travers les fondations, etc., les prix d'excellence, nous ne pouvons dire que ceci est négatif, mais le fait reste que les entreprises au Québec ne contribuent pas autant qu'ailleurs, en Amérique du Nord, et ailleurs dans le monde occidental. De plus, vous avez remarqué vous-même que ces contributions privées des entreprises vont souvent aux mêmes institutions, McGill, par exemple. Nous croyons qu'il serait plus juste et équitable que les contributions soient, premièrement, obligatoires et, deuxièmement, que ce soit le gouvernement qui contrôle la direction de ces contributions.

La Présidente (Mme Hovington): M. Manna, vous aviez quelque... Est-ce que vous aviez fini, M. Young. Je m'excuse.

M. Young: Juste par rapport aux statistiques mentionnées par M. le ministre, les statistiques que j'ai, que nous avons, pardon, ne disent, bien sûr, pas pourquoi il y a moins d'étudiants aujourd'hui qu'il n'y en avait autrefois. On peut se poser la question et je ne peux vous assurer que ce soit parce les critères sont plus difficiles qu'ils ne l'étaient autrefois. Ce que nous remarquons, cependant, c'est qu'il y a de moins en moins d'étudiants qui ont accès, étant donné les critères d'admissibilité que nous avons énoncés plus tôt, et qui, nous le trouvons, auraient besoin d'être retravaillés.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. Manna vous aviez quelque chose à ajouter.

M. Manna (Santo): Oui, merci. Je pense, M. le ministre, qu'on ne devrait pas commencer à parler des dons privés. Vous avez commencé à parler à ce sujet-là, mais je ne pense pas que ça entre en question à ce point-là, parce que j'aimerais parler du financement des universités. Mais cet aspect-là du financement, on ne peut pas en discuter ici parce que vous savez que c'est très complexe. C'est un aspect du financement qui est à part du financement de la part du gouvernement. (11 heures)

Je pense que les dons privés que notre

université reçoit, ou des investissements additionnels... On peut attirer des chercheurs de qualité internationale et de haute qualité. Ces chercheurs attirent beaucoup d'argent pour la recherche qu'ils font. On a été contents de constater, en mai, quand le budget a sorti, que le gouvernement allait finalement consacrer une portion du budget aux coûts additionnels de la recherche, coûts de support. On a été contents de constater ça. Ce ne sont pas tous les coûts qui sont couverts, mais il y en a beaucoup qui ont été couverts. On est contents de constater ça. Mais, quand même, je veux aussi parler du financement des universités parce que, comme vous le savez, à McGill, M. le ministre, les étudiants comme l'administration sont très inquiets de la présente situation financière. Je pense que, quand le gouvernement a pris le pas de soulager le sous-financement relatif de McGill comme des trois autres universités à Québec, on a été contents de constater ça. On n'a pas été satisfaits parce que ça n'a pas été complet, mais on a été contents, au moins, de voir que le pas a été pris.

Alors, ce n'est pas difficile de voir, avec les endettements que McGill a, avec lesquels McGill se trouve, pourquoi l'administration, peut-être, a pris la position de demander au gouvernement de hausser les frais de scolarité. C'est très logique. C'est une injection de fonds dans le système et n'importe quelle injection de fonds, dans ce temps de crise financière, est bienvenue. Mais je pense que... On se demande si ça va vraiment soulager la crise financière à McGill ou à Québec. Et c'est là que les étudiants sont vraiment inquiets, parce que les étudiants veulent investir dans leur éducation, mais ils ne veulent pas investir et n'en retirer rien dans la qualité de leur éducation. C'est pour ça que je vous demande, M. le ministre, si je le peux, si le gouvernement va maintenir les subventions gouvernementales en dollars constants, son niveau de subvention à l'éducation postsecondaire, après le dégel des frais de scolarité parce que ça, ça nous inquiète beaucoup à McGill. J'aimerais vous demander ça parce que... Je dis que c'est à part les dons privés que je vous demande ça parce que, après une hausse des frais de scolarité des étudiants de McGill, je vous demande si la part du gouvernement va être réduite ou si ça va rester la même que c'était avant.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Je voudrais, tout d'abord, corriger un malentendu qui risque de subsister à la suite des remarques de M. Young. Il a dit: II y a des statistiques du gouvernement, il y a des statistiques du Conseil des universités, donc, c'est 50-50, on ne le sait pas. Je vous conseillerais d'aller puiser aux sources officielles des quatre dernières années et vous allez constater que ce que j'ai affirmé ici, c'est la vérité. Ne vous fiez pas à des sources qui pourraient être invoquées par le Conseil des universités, qui remontent peut-être à 1985-1986 ou 1986-1987. Il faut prendre toute la période de 1985-1986 à 1989-1990 et vous allez voir que les chiffres que j'ai donnés sont absolument exacts. Ce sont des tableaux qui sont préparés par les services de recherche du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et que j'ai invoqués à bien des reprises, ici. Ça fait une base quand même.

À la question que vous m'avez posée, M. Manna...

La Présidente (Mme Hovington): Manna, oui.

M. Ryan: ...le gouvernement apportera sa réponse lors du dépôt des crédits et lors du discours sur le budget. La réponse se fait toujours en deux volets d'abord, par le dépôt des crédits à la Chambre et, deuxièmement, par le dépôt du budget. C'est là que le gouvernement fait connaître ses intentions budgétaires, autant en matière de dépenses qu'en matière de revenus pour l'année à venir. Cependant, je signale, juste en terminant parce que le temps, malheureusement, est bref, qu'il y a plusieurs observations dans votre mémoire dont nous allons tenir compte. J'en prends une, par exemple. Vous dites qu'il faudrait: Que les parents soient informés par la Direction générale de l'aide financière du montant estimé de leur contribution". C'est une chose que nous avons déjà discutée avec des organismes qui sont venus nous rencontrer et nous envisageons sérieusement de la mettre à exécution. Je pense que c'est une recommandation qui est intéressante et que nous examinons très sérieusement.

Vous en dites et je vais vous en formuler une autre. Vous dites: Que les parents qui versent effectivement une contribution en fassent la déclaration écrite et que ce soit cette allocation réelle qui soit considérée dans le calcul de l'aide financière. Là, je suis porté à trouver que çâ va trop loin parce que seulement une déclaration écrite, c'est bien facile que les parents s'entendent avec leur enfant: Je t'ai donné ceci, et que ce soit une autre chose en réalité, juste pour que l'étudiant soit admissible à une aide financière plus substantielle. Je ne veux pas qu'on commence à avoir un système d'inspection qui va aller vérifier dans chaque famille comment les choses se passent. Alors, j'ai des réserves sérieuses sur la deuxième recommandation mais, la première, je pense qu'on peut faire un bon bout de chemin dans cette voie-là.

Vous mentionnez qu'on devrait avoir des mesures fiscales pour inciter les parents à contribuer davantage au financement des études postsecondaires de leurs enfants. Il y a des choses à regarder là-dedans. On a déjà un certain nombre de mesures fiscales, mais je vais

sûrement demander au ministre des Finances d'examiner avec nous des voies inédites qui pourraient être explorées de ce côté-là. Moi-même, pour avoir eu cinq enfants aux études postsecondaires - j'en ai encore deux - je peux vous dire que les parents, quand il y a un certain soulagement fiscal, l'apprécieraient beaucoup. Je comprends très bien la recommandation que vous formulez là-dessus.

À propos de la contribution du conjoint - juste un dernier point, si vous le permettez - celle-là, vous demandez qu'elle soit abolie complètement. Le coût de cette recommandation, à elle seule, c'est 40 000 000 $. C'est autant que tout ce que le gouvernement veut faite pour l'amélioration générale du régime. Je ne pense pas que nous soyons capables, mais en principe, si vous me demandiez de faire une thèse à l'université, je pense que je serais favorable à votre recommandation. Quand le gouvernement aura plus d'argent, peut-être qu'on pourra l'examiner. Dans l'avenir immédiat, je ne pense pas que ce soit accessible.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre. La parole est à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. D'abord, vous allez me permettre d'expliquer pourquoi c'est moi qui prends la parole. M. Gendron, député d'Abitibi-Ouest, a dû s'absenter pour des raisons majeures, tout à l'heure. Alors, comme j'ai déjà porté le dossier un moment, il m'a demandé de prendre la parole, d'autant que j'avais assisté à votre présentation.

D'abord, vous allez me permettre de vous féliciter pour avoir pris le temps de présenter un mémoire très articulé. Quand on constate que, dans votre université, il y a seulement 15 % des étudiants qui bénéficient effectivement de l'aide financière aux étudiants, ça veut dire que vous êtes très ouverts à tous vos étudiants, même ceux qui représentent une minorité, qui ont besoin de l'appui de votre discours.

Vous avez raison sur plusieurs points. Je vais juste me permettre d'en énumérer quelques-uns. D'abord, si le ministre n'avait pas été autant obnubilé par la solution de facilité de dégel des frais de scolarité, il aurait déjà commencé à explorer d'autres modes de financement. Ce que vous avancez, contrairement au discours qu'il tient, et je sais qu'il le sait, qu'il induit les gens en erreur lorsqu'il maintient ce discours, c'est que d'abord, les entreprises, par le biais de la fiscalité...

M. Ryan: Mme la Présidente, je compterais sur votre autorité pour rappeler madame à la dignité.

Mme Blackburn: Pardon? Madame, voulez-vous répéter?

M. Tremblay (Rimouski): Mme la députée de Chicoutimi vient de dire que le ministre de l'Éducation induit la population en erreur...

M. Ryan: Sciemment.

Mme Blackburn: Non, Mme la Présidente, je n'ai pas dit sciemment, j'ai dit: L'induit en erreur.

M. Ryan: Vous avez dit qu'il en est conscient, ça veut dire la même chose.

Mme Blackburn: II induit en erreur la population.

M. Ryan: Je vais vous acheter un dictionnaire.

Mme Blackburn: Si ça peut faire plaisir au ministre et flatter son orgueil, je retire mes paroles. Je n'ai pas de temps à perdre là-dessus. Je préfère entendre les étudiants.

M. Ryan: Faites attention, la prochaine fois. Mme Blackburn: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Continuez, s'il vous plaît.

Mme Blackburn: D'abord, les entreprises, tous nous le savons, finalement, en raison de nombreux abris fiscaux, réussissent pratiquement à échapper à la fiscalité. Ça, c'est une première chose. La deuxième chose, le type d'impôts dont on parle, en Ontario, il y a 3 % d'impôts sur la masse salariale des entreprises, et vous savez pourquoi - j'en suis fière, je trouve que c'est une bonne initiative - pour corriger les iniquités salariales. 3 %. On ne l'a pas, cette taxe-là, chez nous. Alors, parler d'un impôt aux entreprises de 1 %, ça ne serait pas le drame. C'était d'ailleurs une de nos propositions.

Le ministre dit: Écoutez, la diminution Plutôt que de dire que c'est le resserrement des règles de financement pour l'aide financière qui explique une partie de la diminution, il dit que les conditions étaient favorables. C'est drôle, il dit toujours que les conditions économiques étaient favorables pour expliquer la diminution des étudiants bénéficiaires de l'aide financière aux étudiants, mais, par ailleurs, jamais il n'utilise le même argument pour expliquer pourquoi on aurait dû augmenter le financement des universités. J'ai toujours trouvé que, là-dessus, il n'était pas tout à fait cohérent.

Par rapport au redressement du financement, il faut se rappeler deux choses. Je dois dire que la mémoire - la mienne certainement autant que celle des autres, sinon plus - c'est une faculté qui oublie. Le redressement du financement des universités avait été amorcé

sous M. Bérubé. Les 37 000 000 $ additionnels que nous avions ajoutés dans l'enveloppe en 1985-1986 n'ont pas été reconduits par l'actuel ministre. Alors, moi, je me dis: On ne peut pas dire n'importe quoi. De même, ses 15 %, vous avez raison de le questionner. 15 %, ça englobe tout, alors que, lorsqu'on parle d'un sous-financement, on parle particulièrement des frais de fonctionnement. Il faudrait faire les calculs pour savoir exactement ce que ça représente, dans les frais de fonctionnement directs, l'augmentation de l'enveloppe, mais ça n'a rien de plus épatant qu'il ne le faut.

Par ailleurs - là-dessus, je sais que vous avez raison mais, en même temps, je le déplore - j'avais mis en garde la Conférence des recteurs et principaux d'universités qui se disait d'accord avec le dégel des frais de scolarité, même si ça pouvait avoir des conséquences sur l'accessibilité. Je leur avais demandé: Avezvous eu un engagement formel du ministre à l'effet qu'il ne diminuera pas d'autant l'enveloppe des universités? Ils ont dit: On lui fait confiance. Je trouvais que, compte tenu de son passé, je n'étais pas sûre qu'ils avaient raison mais le résultat, et vous avez entendu la réponse: jamais ici, à cette commission, il ne s'est engagé à maintenir le niveau actuel de financement du côté du gouvernement. Et ça, ça a un aspect préoccupant parce qu'on aura porté atteinte à l'accessibilité et, en somme, on n'aura pas augmenté la qualité de la formation en dotant les universités de meilleurs équipements. Alors, moi, je trouve qu'on ne peut pas dire n'importe quoi; vous avez raison.

En ce qui a trait à l'impôt postuniversitaire, le ministre, je le rappelle, s'il n'avait pas été obnubilé par l'idée qu'il fallait dégeler, aurait examiné sérieusement l'hypothèse, parce qu'il y a un régime mixte - je pense que vous le savez aussi - de l'impôt postuniversitaire: il y en a qui paient pendant les études et il y en a qui paient après, ce qui fait que ça aurait diminué l'impact des effets qu'il signalait tout à l'heure. Par ailleurs - puis ça aussi, il faut le dire, parce qu'il a l'air de se trouver le meilleur ministre de l'Éducation qui ait passé au cours des trois dernières décennies, si ça n'est pas plus -remarquons un peu ses choix. Dans ses choix comme ministre, il a privilégié les écoles privées, les dérogations et les frais de scolarité, toutes des mesures qui sont antidémocratiques, avec les résultats qu'on se retrouve actuellement au secondaire, parce qu'on n'a pas augmenté les ressources au secondaire, c'est moins de 1 % - d'ailleurs, ce sont les chiffres qu'il nous fournissait dans ses données - les ressources au secondaire n'ayant pas été augmentées et, comme on a augmenté les exigences, la diplomation est passée de 72 %, en 1967, à 62,5 % au moment où nous nous parlons, et ça, c'est catastrophique par rapport à l'accès aux études supérieures. Pour aller à l'université, il faut d'abord terminer son secondaire, et là, on a un problème majeur.

J'avais quelques questions. La première: en page 3 de votre mémoire, vous faites référence à une étude de Jean Beaulieu, dans laquelle il estime qu'une augmentation de 100 % des frais de scolarité entraînerait une baisse de 36 % du taux de fréquentation. Je présume d'abord que l'augmentation, c'était sur une année; est-ce que vous pouvez me dire sur quelle base il a fait cette estimation?

La Présidente (Mme Hovington): M. Yôung ou M. Manna, peu importe.

M. Manna: Est-ce que vous pouvez répéter la question, s'il vous plaît?

Mme Blackburn: M. Beaulieu, dans son étude, estime qu'une augmentation de 100 % des droits de scolarité aurait comme effet de diminuer de 36 %, c'est-à-dire le tiers, la fréquentation universitaire. Je voulais juste savoir: Est-ce que vous avez suffisamment examiné l'étude pour savoir sur quelles données il se basait pour tirer une telle conclusion?

M. Manna: Les critères, vous voulez dire? Les critères du...

Mme Blackburn: Oui.

M. Young: Je ne les connais pas par coeur...

Mme Blackburn: Non?

M. Young: Je pense que le but de citer de telles oeuvres était simplement de faire part des différences qui existaient entre les propositions du gouvernement, par exemple, et celles de divers auteurs qui tiraient des conclusions qui étaient nettement différentes. Sans adopter de ces réclamations particulièrement, nous voulons simplement...

Mme Blackburn: Citer qu'il y en a?

M. Young: ...présenter les grandes différences.

Mme Blackburn: II y a de 5 %à36 %.

M. Young: C'est ça.

Mme Blackburn: D'accord. Vous parlez de l'article touchant la remise de 25 % de la dette contractée pour le régime de prêts et bourses. D'abord, dans la loi, ça ne touche que les étudiants de deuxième et troisième cycles, et vous la proposez pour tous les diplômés universitaires. Est-ce que, selon vous, ça incluait aussi les diplômés de certificats ou si c'était exclusivement les premier, deuxième et troisième cycles?

M. Young: Non, je pense que ça inclut les premier, deuxième et troisième cycles seulement. Notre Association ne comprend pas les certificats et, pour cette raison-là, on peut seulement parler des premier, deuxième et troisième cycles.

Mme Blackburn: Dans le document du gouvernement, on estime qu'il a deux mesures qui devraient favoriser les étudiants pour terminer leurs études dans des délais dits normaux. Ne me demandez pas comment on va qualifier ce qui est normal, quand on sait que les étudiants travaillent tous en même temps, en tout cas, dans une proportion de plus de 60 %. Ces deux mesures-là, c'est la remise de dette: 25 %, seulement pour le deuxième ou le troisième cycle, ce qui touche finalement peu de monde. Et l'autre mesure, c'est qu'après un certain nombre de sessions, qui n'est pas encore vraiment déterminé, l'étudiant n'aurait plus droit à la bourse - c'est ce que vous soulevez, d'ailleurs. D'abord, je trouve que ce sont des mesures... Souvent, les étudiants qui prolongent indûment leurs études au delà de ce qui est requis pour faire un bac ou un deuxième cycle, c'est parce qu'ils travaillent en même temps. (11 h 15)

Ce qu'il y a de plus malheureux en dessous des discours en ce qui a trait à ces deux dispositions, c'est qu'on laisse l'impression, qui est très péjorative, que seuls les étudiants les plus démunis prolongent leurs études au-delà des sessions normalement prévues à cette fin. À votre connaissance, est-ce que les étudiants qui sont bénéficiaires de l'aide financière aux étudiants ont tendance à rester plus longtemps à l'université, à prendre plus de temps pour terminer leurs études que ceux qui y sont un peu sur le bras de leurs parents?

M. Young: Je ne connais pas d'étude particulière à cet effet, mais, logiquement, je crois qu'une des raisons majeures pour lesquelles les études sont prolongées, c'est parce qu'il y a des problèmes financiers. Donc, il serait logique de conclure que ceux qui sont les plus démunis, ceux qui sont sur le régime ont des problèmes à cet égard.

Mme Blackburn: Par votre mémoire, vous demandez au gouvernement qu'il maintienne son niveau de financement actuel. Est-ce que vous ne croyez pas ou ne craignez pas un peu, comme tout le réseau actuellement, que le gouvernement prenne prétexte du budget fédéral pour expliquer qu'il n'investira pas davantage, alors que tout le monde sait, le ministre le premier, que le financement des programmes établis, qu'on identifie comme devant servir au financement de l'Enseignement supérieur et de la Santé et des Services sociaux, en fait, est administré par les provinces à leur guise? Ce n'est pas parce que c'est indiqué que c'est pour l'Enseignement supérieur, la Santé et les Services sociaux que, nécessairement, les gouvernements doivent l'affecter à ces programmes; ils peuvent très bien avoir d'autres priorités. Je ne sais pas si vous saisissez. Quand on a annoncé, au fédéral, qu'il y avait ces 200 000 000 $ qui étaient coupés dans les deux programmes: Enseignement supérieur et Santé, ce sont des titres de programme et ça ne justifie pas pour autant de dire que l'enveloppe de ces deux ministères devrait être diminuée d'autant, parce que c'est de l'argent qui est utilisable à la volonté et à la discrétion des provinces.

D'abord, est-ce que vous ne craignez pas que le gouvernement utilise ça? Puis, est-ce que vous étiez informés que, finalement, c'est de son propre choix s'il décide, effectivement, d'affecter ces deux ministères?

M. Fox (John): Oui, je pense qu'on aurait craint que le gouvernement ne contribue pas avec la même vigueur, même si le gouvernement fédéral n'avait pas fait cette annonce. Clairement, l'annonce du gouvernement fédéral est un peu un désastre pour l'éducation postsecondaire à travers le Canada. Oui, les étudiants à McGilI considèrent que, si on augmente nos frais de scolarité ou, plutôt, si on augmente notre contribution, il faut absolument que ce soit reflété dans la qualité de l'éducation. Clairement, si le gouvernement n'est pas capable de garantir un niveau de financement qui soit le même, aujourd'hui comme demain, les étudiants à McGill ne seront pas capables de supporter une augmentation de contribution quelconque. Il faut qu'on s'en aille vers un système d'éducation de qualité. Donc, oui, c'est une grande crainte.

Mme Blackburn: Là, ce que vous nous dites, c'est qu'on aura sacrifié l'accessibilité et la qualité, si ça continue.

M. Fox: Oui. Ça se peut fort bien que, si les frais de scolarité montent, comme c'est déjà proposé, et que le gouvernement utilise le gouvernement fédéral comme une excuse pour ne pas continuer à contribuer, on ait une diminution d'accessibilité sans aucune augmentation de qualité.

Mme Blackburn: Si ma mémoire est fidèle, quand votre Association est venue en commission parlementaire en automne 1986, vous étiez assez favorables - j'y vais de mémoire - et vous avanciez trois solutions, c'est-à-dire le redressement de l'administration des universités, le financement par les entreprises et |e dégel des frais de scolarité. Il me semble me rappeler ça. Vous semblez avoir évolué en disant: On a peut-être sacrifié l'accessibilité et on nest pas sûrs d'augmenter la qualité. Est-ce ce qui expliquerait que vous ayez changé d'avis sur le dégel des frais de scolarité?

M. Young: Je crois que les propositions que nous avons fartes en 1986 démontrent clairement le désir des étudiants de McGill de contribuer, premièrement, à leur éducation et, deuxièmement, d'améliorer Ja qualité de cette éducation. Nous avons proposé une hausse des frais de scolarité qui était nettement supérieure même à celle qui est proposée présentement par le ministère. Ceci devait être accompagné, bien sûr, de garanties pour le régime des prêts et bourses, etc.

Donc, ça démontre bien qu'on est prêts à payer pour notre éducation si on a des garanties que l'accessibilité ne va pas être exceptée. Nous avons changé notre attitude depuis ce temps-là justement parce qu'il est venu à notre attention qu'il existe des moyens de financement alternatifs qui n'affectent aucunement l'accessibilité et des meilleures façons de financer nos universités. Le système que nous avons actuellement est un système traditionnel nord-américain qui n'est pas suivi ailleurs dans le monde occidental et, donc, nous ne croyons pas qu'il sort nécessairement le meilleur. Il existe d'autres solutions.

Mme Blackburn: Vous savez, je prétends que c'est le privilège des gens intelligents de savoir changer d'opinion avec des informations additionnelles. Alors, c'est à votre honneur d'avoir su évoluer par rapport à votre perception de cette situation. Je n'ai pas l'impression que ce soit toujours bien compris des étudiants, l'impôt postuniversitaire. Est-ce que vous avez eu l'occasion de faire des séances d'information sur cette hypothèse? Pour ma part, je la trouve intéressante, parce qu'elle introduit un mécanisme d'équité, parce que vous ne payez que dans la mesure, proportionnellement à ce que la formation aura contribué à vous assurer de meilleurs revenus et, dans ce sens-là, je trouve que c'est très équitable et ça fait payer ceux qui en sont les principaux bénéficiaires. Est-ce que vous avez fait des séances d'information? Est-ce que vous avez l'impression que vos étudiants sont relativement bien informés de ce que ça pourrait vouloir dire?

M. Young: C'est un processus, bien sûr, qui prend beaucoup de temps. Depuis l'automne dernier, quand notre association a pris connaissance de cet impôt postuniversitalre, et ceci, à travers des rencontres avec d'autres associations étudiantes et des recherches particulières, nous avons tenu des assemblées générales. Nous avons essayé de faire passer cette information à travers les presses universitaires à notre disposition et nous avons également participé à diverses émissions télévisées, à des commissions parlementaires, etc.

M. Fox: J'ajouterais, si je le peux, qu'une des choses qui fait que c'est plus vendable chez nous, c'est le choix de payer à l'avance ou en arrière. De plus, chez nous, on sait qu'il y a une grande proportion d'étudiants qui viennent d'en dehors du Québec et qui présenteraient, si c'était une taxe simple, un problème pour le gouvernement du Québec, parce qi:'i! ne peut pas aller chercher le monde à Vancouver. Donc, ce qu'ils disent, c'est: Oui, on pourrait donner le choix et les gens qui viennent des autres provinces doivent payer à l'avance.

Mme Blackburn: D'accord. Ça ne se voulait pas un reproche, parce que le ministre, même si on lui en a déjà parlé un bon moment, ne semble pas avoir vraiment encore tout à fait compris la formule. Est-ce que vous avez, par rapport à cette formule-là - parce qu'un des problèmes que ça posait, c'était l'idée d'aller "collecter" - pour les étudiants diplômés qui iraient travailler, soit dans d'autres provinces canadiennes ou à l'étranger, l'obligation contractuelle, c'est-à-dire que l'étudiant qui ne paie pas en même temps qu'il poursuit ses études pourrait contracter avec le gouvernement une espèce de contrat, une obligation contractuelle, à savoir qu'il s'engage à rembourser les droits de scolarité même s'il travaille à l'étranger?

M. Young: Ça crée certainement un problème, ce qu'on fait avec les étudiants qui, après leurs études, quittent la province. Je dois, cependant, remarquer que ce problème existe déjà avec le régime actuel des prêts et bourses et, si je ne me trompe pas, c'est un grand problème. Nous avons pense à la question du régime contractuel et ça donnerait la même situation qui existe présentement avec le régime des prêts et bourses. Il va toujours y avoir un problème avec ces gens-là, mais il est à remarquer que ce problème serait seulement pour ceux qui viennent de cette province et qui quittent par là suite. Comme mon confrère l'a fait remarquer, ceux qui viennent d'ailleurs continueraient de payer des frais de scolarité.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, le temps est écoulé.

Mme Blackburn: Je vous remercie infiniment.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Chicoutimi, est-ce que ça va? En conclusion, rapidement, M. le porte-parole de l'Opposition, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Bien, en conclusion, je pense que...

La Présidente (Mme Hovington): Une courte petite minute.

M. Gendron: Oui, oui, très courte. Je voudrais remercier très sincèrement les étudiants.

J'avais pris connaissance de votre mémoire. Je pense qu'il y a là d'excellentes remarques, mais ce qu'il faut constater - et j'aurai l'occasion d'y revenir - c'est que le ministre de l'Éducation a décidé que, quoique vous apportiez comme argument, quelque éclairage que vous fournissiez pour indiquer qu'il s'agit là. Je ne me rappelle pas le terme... Oui, je m'en rappelle. Comment dit-on, un "plasteur" sur une jambe de bois? "Band" quelque chose...

Une voix: Band Aid.

M. Gendron: "Band-Aid". Il s'agit de sa réforme. En fait, ça a été dit par ses propres jeunes libéraux lors du conseil national en fin de semaine. Et, ce qu'il y a de plus grave, c'est qu'il a dévoilé du haut de sa chaire, à l'émission Sept jours, avec M. Pierre Nadeau, que quoique nous fassions dans les semaines qui suivront il s'agissait tout simplement de vous expliquer qu'il a raison et qu'il n'y aurait pas d'autres problèmes.

Alors, c'est sûr que je ne peux pas marcher là-dedans, que je ne peux pas être d'accord là-dessus. Ce qu'on sent, c'est qu'indépendamment des arguments... Dans votre mémoire, ce qu'on sentait en conclusion, c'est qu'il y a là un effort de réflexion honnête pour dire: Le gouvernement n'a pas fait son travail dans des solutions alternatives, c'est évident. Et quand vous mentionnez, ce matin, que vous êtes très heureux et que vous ne pensiez pas venir en chercher autant quand le ministre disait: Bien, on va regarder ça. Je vous dis: Faites attention, parce que ça fait plusieurs fois qu'il me dit: Je vais regarder ça. Je vieillis, la population du Québec vieillit et durant tout ce temps-là, je veux dire, il ne se passe pas grand-chose.

Autant il avait raison, à un moment donné, de dire que le Québec consacrait plus à l'éducation, êtes-vous au courant que dans les dernières années, c'est le Québec qui a commencé à ralentir sa part du produit national brut dans l'éducation? Et là, on est en chute libre, depuis quelques années, avec les libéraux. Il faut être conscient de ça comme société et c'est aussi vrai pour tout ce qu'on discute, les frais de scolarité, ainsi de suite. Le produit national brut est en décroissance depuis les quatre dernières années, alors que tous les autres pays modernes augmentent leur part. Nous sommes encore, comme part du produit national brut, supérieurs au reste, je n'en disconviens pas - oui, oui - mais nous sommes en décroissance alors que tout le monde nous dit que c'est le moment de mettre plus d'argent dans l'éducation.

J'aurais cru que s'il y a une place où il ne faut absolument pas se permettre de mettre des points d'interrogation majeurs sur l'accessibilité, c'est bien au niveau des études universitaires, compte tenu de notre retard avec l'Ontario et les autres provinces au niveau des diplômes Le ministre, lui, dit: Ce n'est pas grave, je ne m'occupe pas de ça. Venez me dire ce que vous voulez, je reste dans ma vérité absolue. Alors, moi, je vous remercie pareil d'avoir fait votre effort, mais je ne suis pas aussi confiant que vous, en conclusion, parce que le ministre aurait dit dans une phrase: Bien, écoutez, oui, on va regarder ça, l'impôt universitaire. En l'an 2008, il sera trop tard.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre, très rapidement, s'il vous plaît.

M. Ryan: Mme la Présidente, je dois rectifier certaines affirmations que je viens d'entendre de la part du porte-parole de l'Opposition. Il est vrai que le taux d'augmentation des dépenses consacrées à l'éducation par rapport au PIB a diminué au Québec depuis quelques années, mais la raison en est bien simple. On n'a pas besoin d'être grand clerc pour comprendre ça. C'est que la part des dépenses publiques, par rapport au PIB, a baissé au Québec. Elle était rendue à 25 % et plus sous votre gouvernement. Nous l'avons ramenée à quelque chose entre 21 % et 22 %. C'était trop fort, l'économie était en train d'écraser et on a dit: II faut réduire la part des dépenses publiques là-dedans. C'est normal que des secteurs aussi importants que l'éducation s'en soient ressentis, c'est 25 % du budget gouvernemental.

Mais malgré ça, comme je l'ai expliqué dans des auditions précédentes, la part de l'éducation dans les dépenses gouvernementales a augmenté au cours des mêmes années, et c'est ça qui est important. Pour le reste, on va faire le débat sur la part des dépenses publiques par rapport au PIB. On va le faire lors du débat sur le budget et nous ne sommes pas inquiets, c'est la tendance que tous les organismes sérieux recommandent aux pays développés. Et le Canada, il est temps qu'il se réveille aussi et qu'il l'applique véritablement, pas seulement avec des discours théoriques C'est ça qu'on a essayé de faire depuis quatre ans. C'est difficile, ça fait mal, mais ça ne peut pas engendrer d'autres résultats quo celui que vous avez évoqué.

Malgré ça, contrairement à l'affirmation fausse que j'ai entendue tantôt, le gouvernement a fait beaucoup de choses pour l'éducation On a augmenté les montants pour les constructions scolaires, énormément. Les deux dernières années, ça a été chercher 85 000 000 $ et 75 000 000 $ par année. La dernière année du PQ, c'était à peu près 10 000 000 $, 15 000 000 $. C'est une jolie différence, ça Les bibliothèques qu'on a faites à Concordia qu'ils sont en train de finir, c'était 40 000 000 $, le collège Dawson, 50 000 000 $, au coin d'Atwater et Sherbrooke. C'est de l'argent. Ce sont seulement quelques exemples. Les conventions collectives avec les enseignants, le député d'Abitibi-Ouest se souvient très bien, il avait soumis un

projet à son gouvernement comme ministre de l'Éducation pour alléger les groupes d'élèves auxquels faisaient face les enseignants au secondaire. Nous autres, on l'a mis dans la convention collective et le gouvernement a dit oui au ministre de l'Éducation, alors qu'il avait dit non à mon prédécesseur, qui était alors le député d'Abitibi Ouest

Je pourrais continuer. Dans les conventions collectives qui s'en viennent, le nombre d'élèves dans les classes de première année, c'est peut-être insignifiant pour la députée de Chicoutimi, mais c'est très important en soi: on va diminuer de deux unités. C'est 11 000 000 $, rien que ce point-là. Et les enseignants sont joliment contents, eux autres, par exemple. Je pourrais continuer indéfiniment. La réforme de l'enseignement professionnel qu'on est en train de faire, c'est énorme. Regardez ce qu'on met au point de vue modernisation des équipements, par exemple, dans nos écoles professionnelles au Québec, les sous-centres d'enseignement collégial qu'on a multipliés, les nouveaux collèges, celui qu'on va créer dans la Beauce, celui qu'on a créé à Val-d'Or, des régions qui étaient ignorées par le gouvernement précédent.

Je ne veux pas continuer l'énumération. On aura l'occasion de le faire en bien d'autres circonstances. Mais ça m'aurait fait de la peine que nos amis de McGill partent sans que je leur rappelle ces faits-là, parce qu'ils n'ont peut-être pas la chance de s'en saisir tous les jours, vu qu'ils sont complètement absorbés par leurs études et par les études qu'ils font sur les prêts et bourses. Je vous remercie beaucoup, blague à part. Il y a une partie de vos recommandations qui sont de caractère qénéral. Ça reprend des recommandations qui nous ont déjà été formulées quatre, cinq fois depuis une semaine. Je ne peux pas vous donner d'autre réponse que celle que j'ai donnée la semaine dernière. Je suis honnête avec vous autres et vous préviens que, quand on est au gouvernement, le racolage intellectuel est une entreprise plus difficile.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M le ministre. Alors, il me reste à vous remercier, au nom des membres de la commission de l'éducation, de votre mémoire et à vous souhaiter un bon retour à l'Université McGill à Montréal. Au revoir.

M. Young: Merci beaucoup, madame.

La Présidente (Mme Hovington): Je vous en prie. J'inviterais immédiatement, s'il vous plaît, l'Association générale étudiante des secteurs sciences humaines, arts et lettres de l'Université du Québec à Montréal à venir prendre place. Nous allons suspendre une minute pour laisser le temps aux intervenants de s'asseoir.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

(Reprise à 11 h 34)

La Présidente (Mme Hovington): Alors, si les membres de la commission veulent bien prendre place, nous allons continuer les travaux de la commission. Voulez-vous faire la présentation des gens qui vous accompagnent, M. Gagnon. Vous êtes le responsable général, je crois.

Association générale étudiante

des secteurs sciences humaines,

arts et lettres de l'UQAM

M. Gagnon (André): Oui. Bon, alors bonjour. Il me fait plaisir au nom de l'Association générale étudiante des secteurs sciences humaines, arts et lettres de l'UQAM de présenter notre mémoire à la commission parlementaire. J'ai, à ma gauche, Mme Johanne Muzzo, qui est la permanente de notre Association et qui a travaillé plus particulièrement au mémoire; à ma droite, M. Richard Arteau, qui a agi essentiellement à titre de conseiller politique pour le mémoire, et, à l'extrême droite, M. Eugène Jr Busqué, qui est responsable aux finances et aux services de l'Association.

Alors, pour présenter le mémoire, j'aimerais tout d'abord souligner qu'après avoir pris connaissance du projet de loi 25 et de la proposition de réforme du régime d'aide financière, déposé en avril 1989, notre Association considère qu'ils ne répondent pas aux besoins en financement de l'accessibilité à l'éducation supérieure et qu'outre certaines bonifications pour les personnes ayant déjà accès au régime des prêts et bourses le problème de fond de l'autonomie des bénéficiaires n'a pas été abordé. Plus généralement, nous considérons que le problème du financement de l'éducation supérieure au Québec comporte deux volets interdépendants, dont on doit tenir compte dans toute réforme: premièrement, le financement des institutions postsecondaires; deuxièmement, le financement de l'accès à l'éducation supérieure. Nous profiterons donc de cette tribune pour lier le problème du financement des institutions au problème du financement de l'accès à ces institutions et nous proposerons des pistes de solution alternative.

Le 21 avril 1976, le gouvernement libéral de M. Bourassa s'engageait à respecter le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié par le gouvernement canadien. Aujourd'hui, le gouvernement du Québec, bien qu'encore sous les auspices de M. Bourassa, referme la porte entrouverte il y a maintenant près de quatorze ans en ce qui concerne la gratuité scolaire. Nous faisons, bien sûr, allusion à la déclaration du ministre, en date du 19 décembre 1989. Bien que cette commission porte sur le projet de loi 25, notre Association ne peut faire abstraction de cette décision qui restreindra, malgré les réformes proposées au régime d'aide financière l'accessibilité aux études

postsecondaires. En annonçant ce dégel des frais de scolarité, le gouvernement du Québec ajoute tout son poids dans les attaques que mènent aujourd'hui les tenants du néo-libéralisme dans le domaine de l'éducation supérieure, à savoir que, l'étudiante et l'étudiant étant les premiers bénéficiaires de leur formation universitaire, ces derniers doivent également être les premiers responsables du financement de leurs études. Qui plus est, on cherche à démontrer qu'il est injuste, socialement, de faire payer, par l'entremise des impôts, des gens qui n'auront jamais accès à l'université. Pourtant, la société entière profite de la formation universitaire.

Notre Association croit quand même que les particuliers ont plus que fait leur part dans le financement universitaire et ce n'est certes pas une proposition de taxation accrue de ces derniers que nous mettrons de l'avant. Plutôt, nous constatons que peu d'intervenants et d'intervenantes ont souligné les bénéfices découlant de la formation universitaire pour les entreprises qui engagent une main-d'oeuvre qualifiée, leur permettant ainsi de maximiser leurs profits. La plaidoirie du monde des affaires en faveur de l'injection de nouvelles ressources financières dans le réseau universitaire fait état de ces inquiétudes de ne pouvoir avoir la main d'oeuvre qualifiée nécessaire pour répondre aux défis posés par la mondialisation du marché.

L'accessibilité aux études supérieures répond aux besoins des entreprises lorsque l'on considère qu'entre 1981 et 1986 plus de 50 % des nouveaux emplois créés nécessitaient un diplôme universitaire contre environ 18 % des nouveaux emplois exigeant un diplôme d'études secondaires. C'est donc dire les efforts encore plus grands que la société québécoise doit engager pour inciter les jeunes à poursuivre leurs études au-delà du secondaire V et leur donner les moyens pour y arriver, surtout auprès des jeunes francophones. Une étude récente révélait que, pour 44 étudiants et étudiantes de langue maternelle anglaise qui entrent à l'université, seulement 23 de langue maternelle française y accèdent.

Nous ne pensons pas que le problème de l'accès aux études supérieures est seulement lié aux ressources financières d'un individu, mais nous croyons que l'instauration de la gratuité scolaire et la mise en place d'une réforme s'appuyant sur le principe de l'autonomie auront un impact positif pour les enfants des classes moyennes et défavorisées. Jusqu'à maintenant, le Québec connaissait une évolution très intéressante en ce qui a trait au taux de participation des jeunes aux universités Ainsi, lorsqu'on étudie les changements dans les taux de par ticipation aux universités entre 1975 et 1986, pour les jeunes de 18 à 24 ans, on constate que le Québec a connu une augmentation de 60 %, alors que l'Ontario devait se contenter d'un maigre taux de 10 %. Mais cette réussite pourrait être ternie avec l'augmentation des frais de scolarité et un endettement étudiant de plus en plus sérieux. C'est pourquoi nous croyons que la problématique du financement de l'éducation supérieure ne doit pas être étudiée seulement en fonction du financement des institutions, mais que l'on doit également se pencher sur le financement de l'accès à ces institutions Bien que nous rejetions toute hausse des frais de scolarité, nous croyons que le ministre a reconnu la nécessité de lier ces deux volets du financement universitaire lorsqu'il propose d'injecter une partie des sommes engendrées par la hausse des frais de scolarité dans le régime d'aide financière.

Le projet de réforme proposé par le ministre comporte bon nombre de propositions qui sont les bienvenues et, sans nul doute, l'accès pour la première fois des temps partiel au régime d'aide financière représente un progrès important. Cependant, le ministre a depuis annoncé le report de cette mesure à une date inconnue. Ce report nuit beaucoup aux promesses du ministre quant à l'augmentation du nombre des bénéficiaires. Également, certains éléments constituent un net recul, par exemple, la diminution des périodes d'accessibilité à la bourse au niveau collégial et au niveau universitaire, l'abolition du boni accordé aux personnes qui retournent aux études après avoir été sur le marché du travail et, enfin, la réduction des allocations de transport

Nous avons surtout insisté sur deux aspects majeurs touchant l'accessibilité aux études supérieures et qui sont, pour notre Association, fondamentaux: premièrement, l'autonomie do l'étudiante et de l'étudiant dès le départ du domicile familial et, deuxièmement, l'endettement étudiant.

La réforme du régime québécois d'aide financière traduit, selon les principes de base, une volonté d'apporter des changements qui doivent favoriser l'accessibilité aux études postsecondaires Mais un autre principe vient limiter la portée du premier, celui de rendre l'étudiant ou l'étudiante et sa famille les premiers responsables du financement des études et des frais de subsistance Nous croyons que ce principe empêche de nombreux étudiants et de nombreuses étudiantes d'avoir accès à une aide financière, surtout ceux et celles qui ont quitté le domicile familial. Le maintien d'un tel principe découle principalement de considérations financières et non des besoins réels des étudiants et étudiantes, et c'est précisément ce que le ministère a reconnu.

Cette affirmation comporte implicitement la reconnaissance d'une réalité maintes fois rapportée par les associations étudiantes: l'étudiante ou l'étudiant issu d'un milieu socio-économique plus aisé ou de la classe moyenne, dans sa recherche d'autonomie vis-à-vis de la cellule familiale, n'a pas nécessairement à sa disposition plus d'argent

que l'étudiant ou l'étudiante provenant d'un milieu socio-économique plus défavorisé.

D'autre part, l'endettement de plus en plus élevé et la menace d'un dégel des frais de scolarité nous font craindre plus que jamais qu'un large fossé sépare la volonté gouvernementale affirmée de garantir l'accessibilité sans égard à l'origine socio-économique, et la réalité.

Enfin, le système de prêts n'est pas très rentable pour le gouvernement puisqu'il doit verser une somme considérable en intérêts chaque année. Ainsi, pour l'année financière 1987-1988, le gouvernement a déboursé un montant total de 66 600 000 $ en intérêts sur les prêts, montant dont la majeure partie ne sera probablement jamais réinjectée dans le financement de l'éducation postsecondaire.

Telles sont, à notre avis, les principales faiblesses que nous pouvons d'ores et déjà souligner dans ce projet de réforme, tel qu'il est présenté par le gouvernement. Nous pensons que les enjeux plus fondamentaux se situent à un autre niveau.

Le financement de l'éducation supérieure au Québec comporte, comme on l'a déjà dit, deux volets interdépendants: le financement des institutions et le financement de l'accès à ces institutions qui vise la clientèle.

Les orientations générales en matière d'éducation ont toujours relevé de choix fondamentaux de société. Aussi, chaque intervenant social a-t-il droit au chapitre et devrait, par conséquent, y apporter sa contribution. Toute politique de financement devrait être dictée par de tels principes et devrait reconnaître à chacun sa part de responsabilité. Dès lors, il faut nous questionner sur la part du fardeau de financement que devraient supporter les catégories diverses de contribuables.

Depuis le début des années quatre-vingt, l'idéologie néo-libérale qui s'est imposée à nos sociétés a envahi tous les champs de la vie sociale, y compris le secteur de l'éducation supérieure. L'État, dit-on, n'a plus les capacités d'assumer son rôle de promoteur économique et social comme avant. L'individu doit maintenant assumer son libre agir.

Il est clair que l'État, par l'appareil gouvernemental, doit conserver son rôle central dans l'élaboration et la gestion de la politique de l'éducation supérieure en tenant compte des intérêts multiples et souvent contradictoires. Mais le gouvernement n'est pas en lui-même une source de fonds. C'est par son pouvoir exclusif de taxation qu'il peut mobiliser les ressources nécessaires à la mise en oeuvre des politiques publiques. Or, les problèmes actuels du financement de l'éducation supérieure sont générés par une insuffisance dans les revenus de l'État.

D'une part, le gouvernement libéral en place voudrait bien éponger une partie du déficit des universités par un dégel des frais de scolarité et accroître d'au moins 130 % sur une période de deux ans ces frais qui seraient par la suite indexés annuellement à un quelconque indice des prix non encore déterminé. D'autre part, une partie de ces nouvelles ressources serait affectée au financement du programme d'aide financière. Vraisemblablement, ce processus de redistribution, pour le moins marécageux, ne réglera en rien le problème de sous-financement des universités et celui de l'accessibilité. (11 h 45)

La problématique du financement des universités ne se limite pas à la gestion du déficit budgétaire. Elle a plus fondamentalement trait au développement, au rayonnement et à l'épanouissement du réseau universitaire dans son ensemble. Aussi, toute politique visant à la stagnation, voire même à la régression budgétaire s'avère totalement contre nature dans un contexte où il est plus que nécessaire, tant sur la scène nationale qu'internationale, de développer nos ressources humaines et d'en accroître le niveau de scolarisation. Dans les années soixante, le rapport Parent soulignait, à juste titre, le retard du Québec face aux autres provinces canadiennes dans le domaine de la scolarisation. À l'heure actuelle, la population québécoise tire toujours de l'arrière par rapport au reste du Canada, même si le rattrapage a été plus que significatif.

Il ne s'agit plus, aujourd'hui, d'aller gratter dans les fonds de tiroir l'ombre de quelques crédits supplémentaires, mais plutôt d'incorporer une nouvelle masse de ressources budgétaires pour pouvoir sortir d'une impasse qui se dessine à l'aube des années quatre-vingt-dix et pour pouvoir relever les défis que nous imposent l'interdépendance des nations et la mondialisation de l'économie.

Dans ce contexte, et depuis le début des années quatre-vingt, nos gouvernements nous servent le discours de l'impérative nécessité de construire un nouveau partenariat social. Ce discours ne restera que voeu pieux dans la mesure où il n'est pas assorti d'une véritable volonté politique de mettre en oeuvre ce nouveau contrat social. Or, il nous apparaît qu'une catégorie d'intervenants ont jusqu'à présent refusé de faire leur part en ce qui concerne plus particulièrement le financement de l'éducation supérieure, c'est-à-dire l'entreprise privée.

Comme on le sait, 90 % du financement universitaire provient de fonds publics. Cela devient un problème sérieux lorsque les priorités gouvernementales s'orientent unidimensionnelle-ment sur la réduction des dépenses et du déficit budgétaire accumulé et la relance de l'économie par le biais de la réduction des impôts. Ainsi, l'impôt sur les profits des petites entreprises fut aussi réduit à 3 % et celui des autres entreprises à 5,5 %, et le Québec établissait ainsi des taux d'imposition sur les profits qui étaient de loin les plus bas au Canada où les taux des grandes entreprises représentent couramment, dans les

autres provinces, 14 %, 15 % ou 16 % des profits.

Mais regardons les chiffres d'un peu plus près. Pour le Québec, comme pour les autres provinces, et pour le gouvernement fédérai, la récession de 1982-1983 fut un moment d'inflexion en termes de politique fiscale. Après les politiques monétaires austères de la fin des années soixante-dix, début quatre-vingt, qui ont précipité le monde capitaliste dans l'une des plus graves récessions depuis les années trenlo, les pays les plus avancés, États-Unis en tête, se lancèrent dans la "Reaganomics" ou économie du côté de l'offre qui consiste principalement, du point de vue de la fiscalité, à moins taxer les entreprises et les ménages à revenus élevés pour stimuler l'épargne et l'investissement. Ce faisant, c'est en abaissant les taux marginaux d'imposition sur les revenus des particuliers et des entreprises et/ou par un laxisme qui permet le déploiement d'une panoplie d'échappatoires fiscaux qu'on cherche à atteindre les objectifs visés par ces politiques.

Cela ne règle en rien les problèmes liés au déficit budgétaire des administrations publiques qu'on cherchera à résoudre par le biais de coupures, tant dans les services publics que dans la taille et dans les effectifs des ministères et sociétés parapublics.

Derrière ces faits, mais surtout ces discours, une réalité bien tangible s'est dessinée de façon abrupte dans la fiscalité des gouvernements canadiens, et plus particulièrement au Québec. La source principale de revenus du gouvernement fédéral est l'impôt sur le revenu des particuliers. Viennent ensuite, par ordre d'importance, la taxe de vente et l'impôt sur le revenu des corporations. Cet ordre des choses n'a rien de nouveau en soi. Ce qu'il y a de nouveau, c'est en fait cette tendance à voir augmenter la part de l'impôt sur le revenu des particuliers dans l'assiette fiscale du gouvernement et, inversement, cette tendance à la diminution de la pan" de l'impôt sur le revenu des corporations.

En 1968, la part de la fiscalité des particuliers comptait pour 41 % de l'ensemble des revenus de l'État fédéral, tandis que celle des corporations se chiffrait à 17 %. 20 ans plus tard, ces chiffres ont glissé progressivement à 54 % et 10 %. La même tendance est observable pour les revenus du gouvernement du Québec, mais de façon beaucoup plus marquée que dans le cas fédéral. De façon générale, cette tendance est aussi plus marquée que dans le cas des autres provinces canadiennes. En fait, le Québec ressemble de plus en plus à un petit paradis fiscal pour entreprises privées. Les taux d'imposition sur les profits établis il y a quelques années à 3 % pour les PME et 5,5 % pour les plus grandes entreprises ne reflètent pas la part réelle de l'impôt des entreprises dans la cagnotte du gouvernement. Mais cela ne s'arrête pas là. Le bât blesse encore plus si on observe l'évolution des ratios des transferts courants du gouvernement aux particuliers et aux entreprises entre 1972 et 1986.

Bien entendu, en termes absolus, les particuliers bénéficient beaucoup plus des transferts gouvernementaux que les entreprises. C'est normal, puisque ces dernières ne contribuent que de façon marginale aux recettes du gouvernement provincial. En termes relatifs, toutefois, nous observons depuis quelques années un effet inverse de ce qui est survenu dans les cas des recettes fiscales. Tandis que la part des transferts aux particuliers reste assez stable entre 1972 et 1986 et que la part des impôts sur le revenu des particuliers s'accroît sensiblement, la part relative des transferts du gouvernement du Québec aux entreprises sous forme de subventions de toutes sortes s'est, elle, accrue plus que sensiblement pour presque quadrupler dans la même période. Ce phénomène se produit alors que la contribution relative des entreprises aux revenus de l'État québécois décline proportionnellement.

Ces chiffres pour le moins éloquents enlèvent toute crédibilité à ceux et celles qui osent prétendre que les étudiants et étudiantes des universités québécoises ne font pas leur part dans le financement de leurs études. Cela rend aussi caduc un argument qui dit qu'il faut cesser de taxer les entreprises privées qui seraient la source de la richesse économique et sociale, alors qu'elles profitent de plus en plus des paiements de transferts et cela, au détriment des restrictions budgétaires dans les domaines de l'éducation, de la santé, des services sociaux et de la sécurité du revenu.

Quelle est donc l'essence de ce nouveau partenariat social qu'on nous prêche depuis la récession de 1982-1983? Les chiffres que nous avons présentés en révèlent la nature. Qui ne fait pas sa juste part lorsqu'on considère la structure des recettes fiscales au Québec? Tel qu'il est aujourd'hui, le système fiscal favorise la paresse fiscale des entreprises privées qui ne paient pas leur impôt et qui se seront très bientôt assurées ce luxe dont la société québécoise n'a pas les moyens de se permettre.

Pour résumer, rappelons que le réseau des universités québécoises souffre d'un déficit budgétaire de 150 000 000 $; que 90 % de ce réseau est financé par des fonds publics auxquels les entreprises privées ne participent dans les faits à peu près pas; que ces dernières ne contribuent volontairement que pour environ 3 % du budget d'ensemble et que cette contribution est déductible d'impôt; qu'un dégel des frais de scolarité ne résoudra en rien les problèmes de sous-financement et portera atteinte à l'accessibilité aux études supérieures. Parmi la pléthore d'alternatives auxquelles n'a pas pensé le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, une découle tout naturellement de ce qui vient d'être dit: accroître sensiblement la contribution du secteur privé Cela peut se faire

de plusieurs façons et sur plusieurs fronts. D'une part, en réduisant le nombre d'abris fiscaux pour les corporations, le gouvernement accroîtra ses revenus. Privé d'une source importante de revenus, le gouvernement, et plus particulièrement le ministère, se voit contraint de gérer la décroissance et l'atrophie du réseau universitaire et, par conséquent, le blocage du développement des ressources humaines au Québec

Par le biais d'une fiscalité plus directive, tout gouvernement digne de ce nom devrait pouvoir se sortir de cette contradiction. Deux formes d'intervention peuvent alors être développées, l'une se rapportant au financement des institutions universitaires et, l'autre, au financement du régime d'aide financière et à l'accessibilité.

Premièrement, la création d'un impôt spécifique aux entreprises...

La Présidente (Mme Hovington): Excusez-moi. Les 20 minutes sont maintenant écoulées. Je sais qu'il reste quelques feuilles, peut-être les... Ça me prendrait le consentement des deux côtés pour continuer. Sinon, je vous demanderais de résumer vos recommandations.

M. Gagnon: Alors, j'en arrive à la conclusion.

La Présidente (Mme Hovington): Je vous en prie.

M. Gagnon: Alors, de deux façons: la création d'un impôt spécifique aux entreprises et la création d'un fonds public d'aide financière à l'accessibilité. En termes de recommandations, nous considérons d'abord que le régime doit favoriser l'accessibilité aux études postsecondaires; deuxièmement, que le régime doit considérer toutes les étudiantes et tous les étudiants demandant une aide financière et ayant quitté le foyer familial comme autonomes; troisièmement, le régime doit tenir compte de la situation économique réelle du bénéficiaire dans toutes les étapes du régime et ce, pendant et après les études; quatrièmement, le régime doit viser à favoriser la continuité et la persévérance aux divers cycles d'études.

En conséquence, nous recommandons que le gouvernement fasse contribuer le secteur privé au financement des institutions postsecondaires, notamment par un impôt obligatoire et universel aux entreprises; deuxièmement, que le gouvernement institue un fonds public au financement de l'aide financière aux étudiantes et étudiants en lieu et place du régime actuel et, troisièmement, que le gouvernement institue, pour déterminer les modalités d'une véritable réforme efficace du financement de l'éducation supérieure, une commission d'enquête pour explorer les diverses alternatives aux modèles américain et ontarien qui ne sont pas des voies adaptées aux besoins de la société québécoise et ce, dans les plus brefs délais

Telles sont nos recommandations. Et nous aimerions également, dans le cadre du débat de la commission parlementaire, que le ministre précise ses intentions qui ne sont pas clairement exprimées dans le projet de réforme, en particulier sur là question de l'endettement étudiant. On dit qu'on va ajouter des. montants dans le régime d'aide financière, mais on ne prend aucun engagement par rapport à la situation qui existe depuis l'entrée en fonction du gouvernement libéral en 1985, c'est-à-dire cette situation où la part relative des bourses diminue dans l'aide financière et où la part relative des prêts augmente.

On aimerait avoir un engagement clair et net, ferme du ministre à savoir que cette situation ne se développera pas, à savoir que la part relative des bourses, tout au moins, sera maintenue. Nous concevons qu'à défaut d'un tel engagement toute prétendue bonification ne serait, au bout de la ligne, que du domaine des farces et attrapes puisqu'elle serait récupérée en l'espace de quelques années, comme on l'a fait depuis 1985.

Nous aimerions aussi avoir des engagements clairs et nets du ministre, à savoir que, dans la foulée du dégel des frais de scolarité, il n'établira aucuns nouveaux frais à quelque niveau d'études que ce soit. Nous aimerions que ceci soit un engagement clair, net et précis, contrairement à la valse-hésitation que nous avons connue durant la période électorale, qui contraste de façon...

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Gagnon: ...marquante - je terminé -avec les intentions fermes et décidées du ministre moins de trois mois après son élection.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: J'écoutais avec intérêt la lecture, hélas un peu rapide, qu'a été obligé de faire M. Gagnon, du mémoire de l'Association des étudiants en sciences humaines, arts et lettres. Je constate qu'on a fait une très bonne étude, en partant d'une certaine perspective doctrinale, évidemment, qui n'est pas celle du gouvernement.

J'ai trouvé qu'il manquait un chapitre dans votre mémoire, je vous le dis franchement. Ça aurait été une bonne analyse, celle de la contribution de l'étudiant, mais il n'y est pas ce chapitre-là. Ça, ça aurait été bon que vous nous donniez les éléments de comparaison avec les autres provinces, l'évolution qui a pu se produire de ce côté-là depuis 24 ans. Ça aurait complété le tableau, je pense, de manière intéressante.

Abstraction faite de cette observation, il y

a des éléments très intéressants dans votre présentation que je vais soumettre à la vérification de nos services compétents. J'ai remarqué que vous faites une incursion dans le domaine des finances publiques qui est tout à fait légitime dans le cadre de notre démarche ici. J'ai remarqué que vos chiffres s'arrêtent, en général, à 1986 ou 1987. Je vais prendre les pages 20 et 21. Prenez, à la page 22, la part des impôts des sociétés et des particuliers dans les recettes de l'administration provinciale. On se fie que vous avez ça. Là, vous êtes à 1986, c'était 1, 4 %. Suivant des données que j'ai déjà eu l'occasion de porter à la connaissance de la commission parlementaire, la semaine dernière, pour l'exercice 1988-1989, la part de l'impôt des sociétés sur l'ensemble des revenus du gouvernement a été de 5, 3 % et, sur l'ensemble des recettes autonomes du gouvernement, elle a été de 6, 7 %. On est pas mal loin de 1, 4 %.

M. Gendron: M. le ministre, ce ne sont pas les mêmes données du tout.

La Présidente (Mme Hovington): Je vous en prie.

M. Ryan: Le député aura l'occasion de corriger tantôt, s'il y a des choses fausses.

La Présidente (Mme Hovington): Tout à l'heure, à votre temps de parole.

M. Gendron: Non, je ne veux pas corriger C'est parce que là, il y a manifestement une erreur. C'est la taxe de vente et les transferts fédéraux qu'ils comparaient. Alors, vous étiez loin de 1, 4 %. Je comprends, "sacré monde"! Vous prenez des chiffres dont je ne disconviens pas, mais qui n'ont rien à voir avec le tableau de la page 22.

La Présidente (Mme Hovington): La parole était au ministre de l'Éducation. Vous aurez votre temps de parole tout à l'heure.

M. Gendron: Oui, je comprends mais, pour des raisons d'intégrité intellectuelle, il aime bien ça - je veux dire d'honnêteté intellectuelle, pardon. Il n'a pas le droit de faire ce qu'il vient de faire là.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre, vous avez toujours la parole.

M. Ryan: En tout cas, il va nous dire... Regardez le témoin...

M. Gagnon: Est-ce que le ministre pourrait intervenir un peu plus fort? On a peine à l'entendre ici.

La Présidente (Mme Hovington): Voulez vous des écouteurs?

M. Ryan: Regardez, à moins que je ne lise mal - vous nous corrigerez tantôt - à la page 22, vous parlez des recettes de l'administration provinciale du Québec, de la part des impôts directs des particuliers et des sociétés, de la part de la taxe de vente et des transferts fédéraux en pourcentage, 1972-1986.

M. Gendron: C'est ça. (12 heures)

M. Ryan: Alors, là, vous dites que c'est 1, 4 %, en 1986, par rapport à 1, 2 %, en 1985. Moi, je vous dis que, pour 1988-1989, ça a été de 5, 3 %, suivant nos calculs, de 6, 7 % sur les lecettes autonomes et 5, 3 % sur l'ensemble des recettes du gouvernement. Si j'ai tort... Vous ferez vos vérifications pour 1988-1989. Il y a un conseiller, ici, qui pourra vous donner les sources. Je pense qu'on va se retrouver très bien. On pourra vous donner les raisons qui expliquent qu'en 1986, c'était 1, 4 %. Ça, c'est un point. Je ne veux pas engager un débat interminable là-dessus parce qu'on pourrait se retrouver à minuit, ce soir, et il resterait encore des choses à élucider, mais ceci pour montrer quon ne pout pas tirer de conclusion trop absolue.

Même chose à la page 23. Là, vos données vont jusqu'à 1986. Or, le gouvernement actuel a commencé son action en 1986, à toutes fins utiles. Il faudrait voir ce qui s'est passé au cours des quatre années qui ont suivi, ça nous intéressera d'en discuter avec vous également.

Ceci pour ajouter, à titre de remarque générale, qu'on ne peut pas allègrement faire abstraction du chapitre que nous discutons ici. Les autres chapitres, nous ne les éliminons pas, mais ils ne sont pas l'objet de la discussion de la commission parlementaire. Si vous voulez les soulever, nous en discutons, on ne soulève pas de point d'ordre ici. Mais ce que nous discutons, c'est la contribution de l'étudiant. On peut bien dire: Qu'il n'y en ait pas d'autre, ça ne change pas. Très bien, mais, nous autres, nous disons: II va y avoir un ajustement. Et nous trouvons que nous avons fait amplement la preuve de la nécessité de cet ajustement. On peut bien se considérer comme société distincte jusqu'au bout, mais nous évoluons dans le contexte nord-américain, dans le contexte canadien. Et nous devons, par conséquent, sur bien des points, avoir des éléments qui puissent se comparer à ceux des autres sociétés, ne serait-ce qu'en raison du système extrêmement complexe de péréquation, de transfert de recettes que nous avons sous le régime fédéral canadien pour bien nous bâtir une cage de verre, si nous voulons, à côté des autres. Mais ça ne fonctionne pas comme ça dans la réalité de tous les jours. Nous cherchons des ajustements raisonnables. Et quand nous parlons de hausser les frais de scolarité, nous disons: Le résultat net, après les deux

hausses que nous avons annoncées, sera que les frais de scolarité seront encore les plus bas de toutes les provinces canadiennes. J'ai expliqué pourquoi, sous l'angle des finances publiques, nous ne pouvons pas entrer uniquement dans un régime qui signifierait l'endettement accru du gouvernement pour une période des dix prochaines années.

Ça, c'est la première objection. Si ce n'était pas de ce chapitre qui fait défaut dans votre mémoire et de cette dimension dont nous ne pouvons malheureusement pas faire abstraction, c'est un excellent mémoire. C'est un excellent mémoire, mais le sujet principal a été escamoté, à mon humble point de vue; je vous le dis en toute simplicité.

Maintenant, vous proposez deux mesures pour établir le régime idéal dont vous rêvez. Vous proposez un impôt sur les sociétés pour les fins universitaires et, deuxièmement, la création d'un fonds d'aide. J'aimerais d'abord que vous me donniez des explications sur cet impôt aux sociétés et me disiez comment il va fonctionner.

M. Arteau (Richard): Bien, à ce niveau-là, on a décidé de ne pas déterminer, dans le mémoire, sur quoi, essentiellement, serait prélevé cet impôt-là. Ça aurait pu être sur les profits des entreprises. Ça aurait pu aussi être sur la masse salariale, étant donné qu'il y a un lien plus direct entre la formation professionnelle et les salaires que les entreprises vont verser à leurs employés. Donc, c'est dans cette perspective-là qu'on pourrait considérer la chose. Essentiellement, il y a une différence assez grande, par exemple, dans les recettes qui pourraient résulter de ces deux formes de mesures, ces deux formes de ponctions. Pour ce qui est de l'impôt sur les profits, en considérant les chiffres des années dernières, on considère que ça pourrait générer des revenus d'environ 170 000 000 $ et, donc, éponger le déficit des universités.

Sur la masse salariale, on a calculé que ça générerait des revenus de 700 000 000 $ qui pourraient être redistribués non seulement au niveau des universités, mais pour l'ensemble des politiques de formation professionnelle. Donc, ça ouvre des perspectives beaucoup plus intéressantes. Au niveau du fonds public, l'idée, c'est essentiellement de responsabiliser l'ensemble des partenaires sociaux dans le problème de l'accès aux institutions postsecondaires. À ce niveau-là, il y a plusieurs façons ou plusieurs sources de financement. Une partie de l'impôt qui pourrait être prélevé sur les profits ou sur la masse salariale des entreprises pourrait être injectée dans ce fonds public, en additionnant les crédits qui sont déjà consacrés à ça, dans l'actuel régime d'aide financière. Ça pourrait s'étendre à d'autres formes de mesures, comme des incitatifs fiscaux ou la création d'une espèce de fonds public où les particuliers pourraient contribuer, tout en voyant la somme qu'ils contribuent se déduire à 100 % de l'impôt. Donc, c'est un fonds qui pourrait grossir, grandir avec les années, qui pourrait être géré un peu comme la Caisse de dépôt ou je ne sais pas, un autre modèle, le Fonds de solidarité de la FTQ.

Essentiellement, on pourrait, en créant ce genre de fonds public, éviter qu'il y ait une fuite de fonds publics qui aillent dans les poches, finalement, des banques à qui l'État paie des montants considérables en intérêt pour financer l'actuel régime des prêts et bourses. Donc, on a calculé que, l'année dernière, c'était 66 000 000 $ que l'État payait aux banques pour financer ce régime. On considère que c'est une perte d'argent assez significative, qui pourrait être réinjecté dans le régime d'aide financière. Essentiellement, c'était ça.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Regardez - je vais en venir au deuxième point ensuite - sur le premier point, il y a deux difficultés inhérentes à la proposition que vous faites, selon moi. Si vous avez un impôt sur les sociétés qui ne contribue que partiellement au financement des universités, ça va aller dans le fonds consolidé du Revenu. Quand ça rentre, ce n'est pas marqué: Donnez ça à M. Johnston ou à M. Cloutier; ça s'en va à M. le ministre du Revenu qui, lui, doit transmettre ça au gouvernement.

Si ça ne va pas à l'ensemble des besoins des universités, là, il y a un jeu de vases communicants qui va se faire, il y aura toujours une décision qui va se prendre, chaque année. Le gouvernement, s'il décide que le niveau de financement annuel va augmenter un petit peu, va ajouter à cette source-là, il va ajouter plus ou moins, selon son appréciation de la conjoncture politique du moment. Quand même vous auriez un fonds, disons, de 200 000 000 $ qui viendrait des sociétés, ça ne change absolument rien à la décision, au bout de la ligne, absolument rien. On n'a pas de solution stable ni structurelle ni organique au problème du financement des universités. Je vais vous donner un cas, un exemple de ce... Vous savez, la Régie de l'assurance-maladie, là, on dit: II y a des contributions des employeurs et des employés. On finance la Régie de l'assurance-maladie avec ça. S'il y a un déficit au bout de la ligne, le gouvernement le met dedans. Ça, c'est clair.

Mais ce n'est pas ça que vous avez... Juste une taxe! On a déjà de ces taxes-là et ça s'en va dans le fonds consolidé du Revenu. Le gouvernement, quand il fait ses appropriations budgétaires, établit le partage. Vous n'avez pas de solution avec ça. Il reste la question, l'importance relative de la taxation des entreprises. C'est sûr que si vous bâtissez toute votre thèse à partir du chiffre 1, 4 et que le chiffre réel soit

5,3, ça fait peut-être une grosse différence, c'est à peu près de l'ordre de quatre fois plus. Il y a peut-être des choses à regarder de ce côté-là, mais je pose une interrogation.

Maintenant, j'en viens au fonds. Essayez donc de m'expliquer comment ça va fonctionner, ça m'intéresse; ce n'est pas une idée que je suis enclin à rejeter du revers de la main. Essayez donc de m'expliquer davantage comment ça marcherait. Ce serait une sorte de régie de l'aide aux étudiants, vous créeriez un fonds spécial qui s'administrerait lui-même et qui appliquerait toute la Loi sur l'aide financière aux étudiants, par exemple. J'aimerais avoir des explications parce que c'est loin d'être dénué d'intérêt. Le danger - vous allez répondre à ça, en même temps - c'est qu'on crée encore une bureaucratie gouvernementale.

M. Arteau: Évidemment, on aurait pu mettre beaucoup de détails là-dessus et faire énormément de recherche sur la façon de faire fonctionner un tel fonds. C'est pour ça, entre autres, qu'on recommande une commission d'enquête qui pourrait traiter en partie de ces alternatives là. Une commission d'enquête ne peut pas seulement porter sur le financement de l'éducation postsecondaire, mais sur un ensemble de problèmes existants à l'heure actuelle. Par contre, ça pourrait être un des objectifs de cette commission-là, d'étudier la façon de gérer ce genre de fonds-là et d'étudier les alternatives pour, disons, approfondir un peu plus ce qu'on avance ici. Ce n'était pas dans notre intention de faire une thèse sur la question et de creuser tout le fond du problème, mais disons que c'était d'amener aux oreilles du ministre qu'il existe des alternatives, de proposer ces alternatives-là et de voir si le ministère peut approfondir, compte tenu de ses moyens, les alternatives qu'on présente. C'est pour ça que la commission d'enquête était proposée au bout du compte

Pour ce qui est des sources statistiques sur lesquelles repose notre analyse, moi, je suis allé voir dans Statistique Canada et dans les sources du Bureau de la statistique du Québec, alors si le ministre ne fait pas confiance à ses propres institutions.. Je suis allé voir dans les budgets des années dernières pour voir un peu la ventilation et la structure de l'assiette fiscale. Ça correspond effectivement à ce que le ministre dit, mais, moi, je me fie à des sources, à des séries chronologiques qui ont été révisées et qui ont des bases scientifiques un petit peu établies, d'après moi.

M. Ryan: Mais à ce jour, on ne nie pas ce que vous apportez jusqu'en 1986, on vous dit:

Amenez-les jusqu'en 1969-1990. On est en 1989-1990.

M. Arteau: C'est que je suis allé voir dans Statistique Canada...

M. Gendron: Ce n'est pas validé.

M. Arteau: ...et les séries chronologiques continuent jusqu'en 1987.

M. Ryan: Nous l'avons. Pour Québec, on n'est pas obligé de passer par Ottawa pour avoir les statistiques sur Québec. On les a, nous autres.

M. Arteau: Mais il faut dire qu'on a eu un certain temps pour produire ce mémoire-là.

M. Ryan: Non, je ne vous blâme pas. Je vous dis qu'on va compléter ensemble, en collaboration. Les chiffres sont notre maître à tous les deux. S'il y a tel chiffre qui sort, moi, je ne perdrai pas deux minutes à discuter, soyez sûr de ça. J'ai toujours eu la paix avec ma femme quand elle vivait: quand elle avait un chiffre, c'était final.

La Présidente (Mme Hovington): II reste deux minutes.

M. Ryan: Oui, deux minutes. Sur le fonds que vous voulez créer, juste une chose. Il faut bien que vous compreniez qu'il va falloir emprunter de l'argent, même si c'est un fonds, et qu'il va falloir payer de l'intérêt là-dessus, et l'intérêt ne sera pas tellement différent si c'est un organisme public, selon la pratique qu'on suit actuellement. Alors, il ne faudrait pas penser qu'on va avoir un beau montant de 66 000 000 $ à administrer, qu'on va pouvoir injecter sous forme de bourses, et tout ça; ce n'est pas comme ça que ça va se passer. On va regarder la mécanique, en tout cas; l'idée est inédite, elle est proposée de manière sincère à la suite d'un mémoire qui est très bien étudié et on va l'examiner avec soin. Je suis très très conscient que ça vaut la peine de l'étudier. O.K.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M le porte-parole de l'Opposition, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Très sincèrement, encore là, je pense que vous avez... C'est toujours difficile de porter un jugement immédiatement, compte tenu que, moi, ça m'intéresse de continuer la commission parlementaire sur les frais de scolarité, contrairement au ministre, et de dire, à ce moment-ci, que c'est certain que vous avez le mémoire qui n'a jamais été présenté, c'est peut-être difficile. Mais une chose est certaine, en tout cas - et c'est à votre crédft pour une association d'étudiants des secteurs sciences humaines, arts et lettres, et encore là, sans porter de jugements - les considérations économiques vous intéressent drôlement. L'analyse économique vous intéresse drôlement et l'ensemble de l'évaluation que vous avez faite de la

fiscalité et de son usage au Québec est immensément intéressant. Et moi, en ce qui me concerne, je ne disconviens pas du tout des études que vous avez faites, même si vous les avez arrêtées pour la plupart en 1986. Ce n'est pas vrai qu'on va renverser les tendances parce que le ministre serait capable de nous montrer qu'en 1988 il y a un chiffre qui est différent de ce que vous avez amené dans votre mémoire.

Écoutez, ça fait treize ans que je fonctionne ici. J'ai vu souvent des analyses du Conseil du trésor et, globalement, l'ensemble des chiffres que vous avez établis, dont vous vous êtes servis pour faire les démonstrations que vous vouliez faire, sont très significatifs, très démonstratifs et font la preuve noir sur blanc que la part des corporations privées dans le financement universitaire est une des plus faibles au monde, assurément la plus faible au Canada. Et le ministre a le droit de lire lui aussi, c'est sûr qu'il dit et qu'il lit ce qui fait son affaire. Mais dans la revue Actualité, M. Godin lâchait un cri du monde des affaires en disant: Ça n'a pas de bon sens, les universités sont sur le bord de la faillite. C'est le monde des affaires qui disait: Oui, on le sait qu'en Ontario la part de la contribution des entreprises peut aller, dans certains cas, jusqu'à 19 %. 19 % du financement des universités provient de l'entreprise privée. Je ne dis pas de faire ça, là, mais je veux au moins vous dire, sur la base du mémoire que vous avez fait: Bravo! Premier commentaire. (12 h 15)

Deuxième commentaire, c'est évident, en ce qui me concerne, que vous posez très bien la problématique. On ne peut pas sérieusement discuter de toute cette question-là sans aborder à la fois le financement des institutions postsecondaires qui sont sous-financées d'une façon chronique. Moi, je ne m'obstine pas sur le chiffre, c'est tellement secondaire, mais je n'ai vu personne, personne: un bleu, un rouge, un nouveau créditiste, un nouveau souverainiste, parce qu'il y en a quelques-uns qui se font accroire qu'ils sont de cette étiquette-là, dernièrement, même eux autres, je n'ai vu personne qui ne disconvienne pas que le sous-financement des universités et n'importe quoi, aux alentours de 200 000 000 $... La brillante décision du gouvernement de dégeler va en donner 41 000 000 $, tu n'as rien réglé, tu as empiré une situation au niveau de la diplomation, tu as posé de sérieuses questions concernant l'accessibilité. À toutes les suggestions qui sont faites par les intervenants, le ministre dit: Non, je ne veux rien savoir de ça, il n'est pas question que je regarde ça sérieusement, même s'il nous dit: Oui, oui, je vais regarder ça. Ça va être bien le temps quand le mal va être fait.

Je vous rappelle - faites sortir le verbatim - M. le ministre de l'Éducation, l'émission de Pierre Nadeau. Je ne l'ai pas écoutée longtemps, parce que je n'en revenais pas, mais j'ai été obligé de l'écouter un peu pareil. J'ai fart venir le verbatim, ça dit très clairement: J'ai toujours supposé qu'à mesure que j'aurai l'occasion de donner l'information et que cette information sera honnêtement diffusée, il n'y aura plus de problèmes avec les étudiants, il n'y en aura pas de grève, les étudiants vont comprendre la nécessité de faire le choix que nous avons, de partager le choix que nous devons leur faire partager. Il nous dit très clairement: II s'agit juste qu'on me donne l'occasion de leur expliquer que nous avons raison et, en conséquence, ça ne donne rien d'aller plus loin, nous avons raison. Moi, je ne peux pas partager ça.

Je reviens à votre mémoire: Lier le financement des institutions avec le financement de l'accès; ce sont deux questions fondamentales. Moi, je ne trouve pas que vous avez oublié bien des affaires dans votre mémoire. Vous avez dit: Écoutez, nous, on fait la preuve que le financement des institutions postsecondaires est déficient et que sa mesure de dégel ne corrigera pas le problème. Mais qu'est-ce qu'on peut vous demander de plus? Moi, je pense que je ne vous demande rien de plus; vous avez raison sur cet aspect-là.

L'autre aspect, vous dites: Si le ministère de l'Éducation ne vérifie pas l'accès à l'éducation supérieure, il est dans les patates. Quand j'entendais - moi, ça m'a renversé, tantôt - que 81 % des étudiants qui ont présenté une demande d'aide... Juste une minute! Page 9, c'est ça. Quand on vieillit, c'est moins drôle! "Ainsi, il est troublant de constater que 81 % des candidates et candidats refusés au régime des prêts et bourses l'ont été à cause des ressources financières des parents jugées suffisantes." 81 %. Puis, le ministère de l'Éducation, aujourd'hui, vient faire un débat fondamental. Il n'a aucune étude pour réaliser ce qui s'est passé, concrètement, avec ces étudiants et ces étudiantes-là. Est-ce qu'il y en a qui ont abandonné leurs études? Vous savez que oui. Il serait intéressant d'avoir le chiffre. Est-ce qu'il y en a, devant ça, qui sont tombés dans ce que j'appelle les difficultés qu'on a au niveau universitaire: le temps partiel? La réponse, c'est: Bien oui. Je le répète, moi, je n'ai rien contre le temps partiel, mais j'en ai contre l'abandon, j'en ai contre le fait que dorénavant l'accès sera basé sur la capacité financière alors que, normalement, le seul critère qui devrait juger si un étudiant au Québec doit faire des études supérieures de premier, deuxième ou troisième cycle, ça ne devrait pas être le fric, ça ne devrait pas être le fric de ses parents, ça devrait être: Est-ce qu'il est capable, sur le plan des connaissances intellectuelles et de la capacité intellectuelle, d'envisager de faire des études universitaires? C'est la seule façon d'être une société performante pour l'avenir.

Et, là, il y a des abandons, il y a un endettement qui grandit, le sous-financement est

chronique, il y a de plus en plus d'étudiants à temps partiel. Puis là, vous arrivez avec un mémoire et vous suggérez d'autres alternatives. J'ai trouvé très intéressant quand vous avez dit avec conviction et avec preuve: Les particuliers, au Québec, ont fait plus que leur part; les citoyens et les citoyennes du Québec ont fait leur part dans le financement universitaire. Moi, je trouve que ce n'est pas mince comme affirmation prouvée, et je la partage, vous avez raison de dire que le ministre devrait y tenir et faire un peu plus attention. Quand vous affirmez ça, ça veut dire que vous ne lui dites pas: Vas-y allègrement dans le fonds consolidé. Vous donnez des suggestions intéressantes: l'impôt postuniversitaire, une part plus grande des corporations privées. Et quand le ministre essaie de vous envoyer aux calendes grecques en disant: On ne peut pas faire ça, parce que les taxes sont perçues dans le fonds consolidé... Je le cite au texte, parce que je veux être sûr. Il disait ceci: II ne peut pas y avoir un fonds spécial pour la santé, les routes, le financement universitaire. Bien, ce n'est pas exact, il s'agit juste d'avoir une volonté politique de le faire. Le même gouvernement dont il fait partie a un fonds spécial pour les entreprises qui font du recyclage. Ce n'est pas versé au fonds consolidé. Il y a un fonds spécifique dans les comptes économiques du Québec qui dit: Bon, toi, si tu t'orientes dans le recyclage, voici le fric dont l'État du Québec dispose pour développer le recyclage des biens de consommation qui ont encore une valeur utile. Ça se fait très bien.

C'est toujours le même problème qui me chagrine, c'est que pour tous les autres chiffres il se compare avec l'Ontario et le reste du Canada. Quand il dit que les frais de scolarité sont les plus bas du reste du Canada et de la société américaine, il a raison. Ça, personne n'a mis ça en cause, que même avec la hausse ils vont rester les plus bas. Mais on est les plus bas à bien d'autres égards: au niveau de la diploma-tion, au niveau des abandons, au niveau de l'endettement, au niveau de l'accessibilité et ainsi de suite. Alors moi, je me dis: Si ailleurs, dans le reste du Canada, les entreprises contribuent plus, que dos groupes viennent me faire une proposition concrète sur un impôt spécifique! aux entreprises qui serait de 3 %, 4 %, 5 %, 6 %. Je ne parle pas de ça, je dis: Qui les ramènerait à une participation de 3 %, 4 %, 5 %, 6 %, parce que, là-dessus, on a le même point de vue. Nous, on avait préconisé une taxe spéciale de 1 %. La moitié de ce 1 % là pourrait servir à des programmes de main-d'oeuvre, parce qu'on a beaucoup de rattrapage là-dessus, et également à un financement universitaire approprié parce que, de toute façon, sur le chiffre, personne n'est en désaccord, c'est n'importe quoi de 1 % sur la masse salariale, c'est 750 000 000 $ à 725 000 000 $. Alors, c'est pas mal plus significatif que les petits 42 000 000 $ avec le dégel des frais de scolarité, mais qui auront des conséquences terribles.

Moi, je pense avoir bien compris votre mémoire. J'ai deux questions. On a la chance d'avoir des intervenants qui ont fait la preuve que vous l'avez fouillée, la question, vous l'avez bien traitée, en ce qui me concerne, et surtout vous n'êtes pas de ceux qui disent: Écoutez, on vous garroche le problème, puis prenez des décisions. Vous faites des suggestions concrètes et il me semble qu'on aurait dû, avant de se présenter en commission, si on avait affaire à un gouvernement qui n'est pas assis sur sa chaire de vérité, fouiller ces questions-là, puis être en mesure de dire: Si nous l'avions fait, voici ce que ça aurait donné. Si on avait appliqué telle affaire, voici ce que ça aurait donné et nous ne le faisons pas pour telle ou telle raison, mais basé sur des études d'alternatives.

Parce que là, on a sauté sur la solution la plus facile. Il n'y a pas juste nous qui le disons. Quand leurs amis, les jeunes libéraux, viendront, on va avoir des belles questions à leur poser. Elles sont on ne peut plus claires. La réforme d'aide n'est pas du tout conforme à nos engagements, dit la Commisision-Jeunesse, puis elle pose des bonnes questions. Elle dit, un, que l'aide aux étudiants à temps partiel prévue s'applique dès 1990. Le ministre dit: Allez vous promener. Pas question. Il le leur a dit. Quand même qu'ils reviendront dire ça ici, demain ou après-demain, pensez-vous que ça va changer quelque chose? Le ministre dit: Je ne suis pas capable. Moi, j'ai la vérité et je ne suis pas capable. Pas question. Et c'est ça sur toutes les mesures. Donc, j'arrête là.

La question que je veux vous poser, c'est que, quand vous dites dans la réforme de l'aide financière qu'il y a plusieurs éléments de bonification qui étaient souhaités depuis plusieurs années et qui ont été abandonnés - et là, je vous cite: Certains éléments constituent un net recul: ainsi, la diminution des périodes d'accessibilité à la bourse au niveau collégial, l'abolition du boni accordé aux personnes qui retournent aux études après avoir été sur le marché du travail, la réduction des allocations de transport et ainsi de suite la simple question que je vous pose, c'est: Est ce que vous avez des éléments sur lesquels vous pouvez vous appuyer pour évaluer les raisons qui ont fait que le gouvernement a reculé là-dessus? Est-ce que, selon vous, c'est parce que ce sont les éléments sur lesquels il y avait le plus de coûts? Donc, c'est normal, quand on a uniquement une préoccupation d'économiser, de vouloir éliminer ces mesures-là.

M. Gagnon: Bon, en termes de coûts, le coût de ces mesures-là a été évalué. On ne pense pas en tant que tel que ce soit parce que ce sont des mesures qui sont très coûteuses. Au contraire, je pense que ces éléments-là où on

note des reculs, l'évaluation avait été faite au niveau du mémoire qui avait été présenté par l'Association nationale des étudiants et étudiantes du Québec dont on est membres. Et si je ne m'abuse, ces coupures-là sont évaluées à 15 000 000 $. Alors, ce ne sont pas des éléments qui étaient très coûteux. Néanmoins, ça constitue des reculs en termes de régime d'aide financière.

Pour ce qui est de notre mémoire, étant donné que nous sommes globalement d'accord avec l'analyse farte par l'ANEEQ du projet de réforme du régime d'aide financière, nous n'avons pas abordé en détail ces aspects-là Nous avons simplement mis en exergue, dans le texte de notre mémoire, les éléments qui constituaient des reculs. Alors, je n'ai pas avec moi le montant précis des coupures qui sont faites au niveau de ces points spécifiques et j'y vais de mémoire en disant que c'est d'environ 15 000 000 $.

M. Gendron: Deuxième question. À la page 24 de votre mémoire - ce n'est pas nécessaire d'y aller tout de suite, je vais vous le rappeler - vous mentionnez que "ces chiffres - en parlant plus spécifiquement des tableaux 7 et 8 - sont pour le moins éloquents et enlèvent toute crédibilité à ceux et celles qui osent prétendre que les étudiantes et les étudiants des universités québécoises ne font pas leur part dans le financement de leurs études."

Là, j'aimerais ça que vous soyez plus analytiques, en tout cas, pour moi. Moi, j'ai vu vos tableaux; je vous le dis, ils sont parlants, mais pas tellement sur l'aspect sur lequel vous portez un jugement. Moi, je trouve que c'est là-dessus qu'ils sont le moins parlants. Donc, je me dis de deux choses l'une: ou c'est moi qui ne comprends pas, et c'est possible... Et c'est pour ça que je vous pose la question suivante: À partir de quoi affirmez-vous, à la page 24, pour ce qui est du point de vue, c'est-à-dire d'en faire la preuve, que les étudiants et les étudiantes des universités québécoises font largement leur part dans le financement des études universitaires? De quels éléments des tableaux 7 et 8 vous servez-vous pour tirer cette conclusion-là? Moi, je vous avoue que, pour cet élément, je ne vois pas la conclusion que vous tirez.

M. Gagnon: On fait référence, on fait un lien avec les éléments qui sont déjà mentionnés auparavant dans le mémoire. C'est-à-dire que, pour nous, la part étudiante, au niveau du maintien ou au niveau de l'accès aux études postsecondaires, se calcule, d'une part, en manque à gagner et, d'autre part, par rapport à l'endettement qui est croissant. C'est cet aspect-là qu'on traite plus loin ou auparavant dans notre mémoire. C'est-à-dire que l'endettement s'est accru de façon très importante, en particulier depuis 1985. La part relative du prêt dans le régime d'aide financière a gonflé de quelque chose comme 60 %...

M. Gendron: Ça, je sais ça.

M. Gagnon: ...alors que la valeur réelle des bourses a diminué. C'est certainement une part étudiante importante. D'autre part, le manque à gagner existe toujours, surtout dans un contexte où, avec un chômage quand même important au niveau des finissants et des finissantes, il est loin d'être évident que l'endettement contracté pendant les études pourra être éliminé rapidement.

M. Gendron: Mme la Présidente, sur cette piste-là, ça va. Si c'est de revenir avec les considérations qu'on a évoquées à maintes reprises, qu'à partir du moment où ils ont inversé les proportions, il y a... L'augmentation de la bourse en valeur absolue a chuté d'une façon drastique et le prêt a augmenté d'une façon assez importante. Donc, par définition, c'est sûr que, s'il y a plus de prêts, il y a plus de dettes. Vous voulez pouvoir compléter, mais...

M. Gagnon: D'autre part...

M. Gendron: ...en même temps que vous allez compléter... Je veux finir avec une question pour des raisons de temps. J'aimerais ça, avant que vous ne complétiez, si vous avez une réponse, vous, savoir si vous avez fait une évaluation en valeur absolue, strictement en dollars, je veux dire, du niveau d'endettement moyen, après les études de premier cycle et de deuxième cycle, de nos universitaires québécois? Vous l'évaluez à combien? Si vous avez une évaluation, parce que je n'ai pas vu ça dans votre mémoire, mais je suis pas mal sûr que vous avez ces données-là. Alors, selon votre point de vue. Parce qu'on a des chiffres qui viennent d'un peu partout, mais j'aimerais ça, si vous avez un avis là-dessus, que vous nous l'indiquiez et, également, que vous y alliez de votre complément de réponse sur le premier élément.

M. Gagnon: Pour compléter ma réponse à votre première question, par rapport aux tableaux qui sont soumis il y a un autre élément également en ce qui concerne la part étudiante, c'est qu'il faut bien voir aussi que les deux tiers des étudiants et des étudiantes universitaires sont obligés de travailler, tout au moins à temps partiel, pour poursuivre leurs études et, en conséquence, paient des impôts. Ils sont donc compris aussi parmi la part des particuliers.

D'autre part, un nombre considérable d'étudiants et d'étudiantes sont obligés d'abandonner leur études à temps plein pour se diriger vers des études à temps partiel et, à ce moment-là, contribuent largement déjà à l'assiette fiscale du Québec. C'est doublement les pénaliser, par exemple, que d'augmenter les frais de scolarité. Notamment, ça a été mon cas. J'ai été dans

l'impossibilité de poursuivre mes études à temps plein. J'ai dû les poursuivre à temps partiel. Quand, en 1986, pour la première fois le gouvernement a annoncé son intention de dégeler les frais de scolarité, j'ai été véritablement choqué parce que, déjà pénalisé par le fait d'être incapable de poursuivre les études à temps plein et payant largement ma part d'impôt, je devais, en plus de ça, accepter selon la volonté gouvernementale de voir les frais de scolarité hausser soi-disant parce que je ne faisais pas ma part. Pour le moins, c'est choquant.

Et cet aspect-là, on l'oublie très souvent alors qu'une partie considérable de la clientèle universitaire, si ce n'est pas la majorité, est à temps partiel et pas toujours par choix, mais bien souvent par obligation. Alors, ça, c'est une donnée que souvent on oublie et on évacue, d'autant plus que le ministre a décidé de surseoir à l'aide financière pour les gens à temps partiel. Alors, c'est dire que les gens qui ont été obligés d'abandonner leurs études à temps plein pour celles à temps partiel, qui paient déjà des impôts, vont subir, avec un dégel des frais de scolarité, une surtaxe et on ne met même pas de baume là-dessus. On suspend toute aide financière à leur niveau.

Au niveau de l'endettement moyen au niveau universitaire, on peut sortir avec des chiffres statistiques à l'heure actuelle mais, là encore, ces chiffres-là peuvent être... Il faut savoir les interpréter. Ils peuvent être tout à fait faussés.

La Présidente (Mme Hovington): En con elusion, s'il vous plaît.

M. Gagnon: Oui, en conclusion. Par exemple, dans les cas que je viens de vous donner, beaucoup de gens décident, à un certain degré d'endettement, de retourner sur le marché du travail pour liquider cet endettement là et puis reviennent à temps plein et commencent de nouveau à s'endetter jusqu'à ce qu'ils arrivent à un niveau qui leur paraît acceptable ou tolérable d'endettement. Alors, le chiffre qu'on peut sortir, que je n'ai pas à portée de la main, il faut y mettre des réserves, notamment, toujours dans le cas que je vous donnais... C'est exactement mon cas. Quand j'ai eu atteint tel niveau d'endettement, je suis retourné sur le marché du travail pendant six ans pour liquider mon endettement et là, maintenant, je peux me permettre le luxe, entre guillemets, d'avoir accès au droit à l'éducation et de revenir à temps plein parce que j'ai liquidé mes dettes et j'ai mis un peu d'argent en réserve pendant six ans. Mais pendant ce temps-là, je n'ai pas poursuivi des études, ce qui était mon principal intérêt.

La Présidente (Mme Hovington): En con- clusion, s'il vous plaît. Alors, en conclusion... Ça va.

M. Gendron: En conclusion. Mille mercis. Je pense que vous avez un excellent mémoire et j'ose espérer, si ce n'était pas le ministre, que ce soient d'autres personnes préoccupées par ces questions-là qui le regardent.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Oui, peut-être deux remarques rapides. Vous m'aviez posé une question, au tout début, à laquelle j'ai omis de répondre. Vous avez demandé: Est-ce que la proportion de l'aide qui sera versée sous forme de prêts va continuer d'augmenter comme elle l'a fait ces dernières années, à la suite de l'adoption du nouveau régime d'aide financière? Je crois être en mesure de vous dire que, selon nos prévisions actuelles, les proportions vont demeurer pratiquement au même niveau où elles sont actuellement. Il y a un facteur qui va jouer beaucoup et c'est l'importance accrue de la bourse. À la suite de la hausse des frais de scolarité, nous avons dit que le montant total des frais de scolarité serait admissible au chapitre des dépenses admissibles. Il y a un jeu d'équilibre qui va se faire et, selon nos prévisions, le partage actuel devrait substantiellement rester le même. Ça, je pense que c'est une question que vous m'aviez posée et qui était très importante dans votre intervention. C'est la réponse que je crois vous apporter à ce moment.

Là, je voudrais répondre à une question que le député d'Abitibi-Ouest a formulée, ce matin, en conférence de presse ou en communiqué et, comme nous sommes en réunion publique, c'est le bon endroit pour donner des précisions. II se demandait: À quoi sert il de faire défiler des intervenants en commission parlementaire si aucune ouverture n'est possible? Je crois que le sujet de la commission parlementaire, c'est le régime de l'aide financière aux étudiants, le projet de loi 25. Et toutes les suggestions constructives et pertinentes qui nous sont adressées concernant le projet de loi 25 sont écoutées avec la plus grande attention et peuvent donner lieu à des modifications dans l'orientation du gouvernement. Par conséquent, la commission parlementaire garde toute sa raison d'être, même si ça pourrait être intéressant pour l'Opposition qu'on trouve le moyen de dire: C'est fini, ça ne sert plus à rien. Ce n'est pas du tout l'attitude du gouvernement.

La Présidente (Mme Hovington): Merci.

M. Ryan: Et dans votre mémoire, comme vous avez pu vous en rendre compte au cours de la discussion, vous avez formulé certaines idées qui seront l'objet d'un examen plus approfondi, peut-être d'échanges ultérieurs aussi.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M.

le ministre. Alors, c'est tout le temps que nous avions à notre disposition pour le groupe. Au nom des membres de la commission parlementaire de l'éducation, permettez-moi de vous remercier de nous avoir présenté un mémoire très bien fait. Merci! Et je demanderais à l'Association des étudiants en droit de l'Université Laval de bien vouloir venir prendre place. Nous allons suspendre quelques instants, le temps de vous installer.

(Suspension de la séance à 12 h 36)

(Reprise à 12 h 37)

La Présidente (Mme Hovington): Veuillez prendre place. Nous allons débuter avec l'Association des étudiants en droit de l'université Laval. Voulez-vous vous présenter, pour les fins de la transcription des débats?

Association des étudiants en droit de l'Université Laval

M. Desgagné (Pierre-Luc): Avec plaisir, Mme la Présidente. Chère madame, mesdames et messieurs de l'Opposition, mesdames et messieurs du gouvernement, mon nom est Pierre-Luc Desgagné; je suis président de l'Association des étudiants en droit de l'université Laval. À ma droite, M. Stéphane Chatigny et, à ma gauche, M. Patrice Bélanger. Nous formons tous les trois un comité ad hoc formé pour étudier le projet de loi 25 et également les modalités en fonction de la hausse des frais de scolarité.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Allez-y.

M. Desgagné: Avec plaisir, Mme la Présidente. Sans plus tarder, nous commençons en vous disant qu'à l'aube du XXIe siècle, notre société est appelée, certes, à faire beaucoup mieux. Certains prétendront qu'il n'est point besoin du XXIe siècle pour faire mieux; ces gens ont raison. À intervalles ponctuels, il faut se remettre en question, autant individuellement que collectivement. Toutefois, ce siècle nouveau qui s'amorce évoque tellement de défis qu'il apparaît impérieux de faire le ménage: le ménage de nos idées, de nos valeurs et de nos définitions des systèmes. Ce ménage est nécessaire afin de nous permettre d'avoir une vue plus claire de ce qu'il nous faudra faire pour profiter du XXIe siècle.

Depuis les années soixante, notre Québec a profité de son "boom" tranquille pour rattraper son retard dans certains domaines, dont l'éducation et l'enseignement supérieur. Mais cette révolution, depuis quelque temps, est devenue tellement tranquille qu'elle s'est assoupie. Il devient essentiel maintenant de secouer cette sorte de torpeur parce que, sinon, le Québec aura à s'en repentir. Rappelons-nous que cette révolution s'est effectuée parce qu'il existait dans notre État un consensus général, un consensus qu'il nous faut à tout prix reformer, ne serait-ce que le temps de participer ensemble à la réforme de l'enseignement supérieur, de son accessibilité, de son rôle, de son financement et également, et peut-être par-dessus tout, de l'apport que tous et chacun qui sont concernés par ce dossier peuvent consentir.

La société et, par le fait même, son gouvernement doivent par contre réaliser deux choses fort importantes. Premièrement, les étudiants québécois ne sont pas seulement des bénéficiaires, ils sont de plus et a fortiori des participants. Deuxièmement, la société québécoise a un besoin constant de diplômés. On ne peut donc toucher à certains acquis essentiels comme l'accessibilité à l'éducation.

C'est autour de ces deux idées maîtresses que se construira, comme nous le verrons ensemble, notre exposé. Celui-ci se subdivisera en trois parties: une première partie intitulée simplement "Oui, mais!!!" dont le titre est quand même relativement suggestif; une seconde qui reprendra une idée déjà connue mais combien essentielle, "Égalité des chances" et une dernière partie, mais non pas la moindre, une nouvelle idée qui mérite, dis-je bien, certes mieux qu'une tablette de luxe au bureau du ministère.

Pour clore cette introduction, laissez-moi tout simplement vous dire que l'urgence d'agir, l'urgence de réagir a occupé notre esprit durant la préparation de ce mémoire. Et nous ne semblons pas les seuls. Laissons la parole à l'ancien président de l'Université du Québec, M. Gilles Boulet, qui écrivait dans un récent article: "II est grand temps que tous les Québécois comprennent que leur avenir en tant que peuple, que leur culture, que leur équilibre industriel, dépendent largement, très largement, de l'avenir que l'on réservera à leurs universités."

Avant de passer à la première partie, juste un petit commentaire. Nous avons fait parvenir, hier, la version révisée de notre mémoire. Il n'y a pas de changement majeur au fond du mémoire, ce sont seulement quelques perfections que nous avons tenu à apporter. Comme vous le verrez, rien n'étant parfait dans ce monde, il y a quelques erreurs de frappe que nous pourrons corriger ensemble.

La première partie: "Oui, mais!!!" S'il est une certitude dans notre monde, c'est que jeunesse et espoir font toujours bon ménage. Mais nous conviendrons ensemble que l'espoir peut se passer plus facilement de la jeunesse que vice-versa. Il ne faudrait donc pas enlever, dans un geste réfléchi, l'espoir à la jeunesse. Ce serait tuer dans l'oeuf le modus vivendi du Québec de demain. Conscients de leurs responsabilités, les jeunes du Québec veulent les prendre. L'Association que nous représentons a

decide, en concordance avec nos arguments, de dire oui à l'augmentation, mais un oui conditionnel.

Cette augmentation est nécessaire. On ne pourra toujours nier les besoins des établissements postsecondaires et laisser le gouvernement québécois porter seul le fardeau, ceci dit dans son sens large et sans parti pris politique. Par souci de crédibilité et de sérieux, les étudiants veulent et doivent y participer, mais ils n'accepteront pas d'être les seuls. C'est la première condition. Les autres bénéficiaires du savoir, et il y en a beaucoup, devront s'organiser ou se faire organiser - et c'est un choix politique - se faire organiser pour être présents.

L'augmentation ne pourra se faire que dans le respect: le respect des acquis sociaux des dernières années, des personnes concernées et, par le fait même, de leur capacité de payer. C'est la seconde condition. Depuis plusieurs années, les différents gouvernements, généralement, se sont toujours souciés de la portée sociale de leurs gestes, le tout à l'honneur de notre peuple. Grâce à cela, des valeurs importantes animent maintenant notre société face aux études avancées. L'accessibilité à l'éducation, son prix raisonnable et un rapport acceptable entre ceux et celles qui veulent poursuivre les études et ceux et celles qui peuvent poursuivre les études constituent, à notre avis, des acquis sociaux importants que nous ne pouvons accepter de remettre en question, tout comme nous devons prendre en considération le respect des personnes, plus spécifiquement dans le cas qui nous intéresse, de leur capacité de payer. Ceux et celles qui fréquentent les institutions d'enseignement n'ont pas à subir une hausse trop drastique, trop rapide. On ne peut changer ainsi les façons de faire, les règles du jeu. Pour terminer là-dessus, disons simplement que la capacité de payer, expression d'ailleurs chère au gouvernement actuel, n'est pas illimitée pour quiconque et que, pour les étudiants, la marge de manoeuvre est fort mince. C'est pouvoir aller à l'université ou ne pas pouvoir y aller, par exemple. Nous reviendrons d'ailleurs sur ce point dans la seconde partie du mémoire, par l'entremise do la présentation de M. Bélanger.

En corrélation avec les énoncés précédents, voici la proposition formelle de l'Association des étudiants en droit de l'Université Laval: Oui à l'augmentation actuelle, mais sur une période de cinq ans. Si on fait le calcul, une augmentation de frais de scolarité de 130 % sur deux ans, sur un taux de base de 225 $, cela nous amène à une augmentation totale de 292, 50 $. Le taux d'inflation étant, pour janvier dernier, de 5, 5 %, soit autour de la moyenne des dernières années, il nous faut cesser de geindre contre l'augmentation du coût de la vie. Mais avec la décision ministérielle, on veut nous amener à des taux d'inflation aux alentours de 65 % par année.

Je sais que, dans la déclaration du ministre, ce n'est pas aussi drastique, ce n'est pas coupé au couteau, 65 % - 65 %, mais, grosso modo, ça veut dire à peu près ça. Ça n'a évidemment aucun sens, en fait, au sens de l'Association des étudiants en droit. S'il n'en tenait qu'à nous, on repartirait la roue cette année au taux d'inflation actuel, ce qui amènerait une augmentation de 12, 40 $, soit 237, 40 $ par session. Or, voilà! Nous ne discutons pas ici d'une possible idée, mais d'une décision ministérielle. Nous devons donc voir comment appliquer le plus favorablement possible à la population étudiante cettedite décision. Cinq ans nous apparaissent être, en termes très juridiques, un délai raisonnable.

Voyez-vous, on remet en question, actuellement, un choix de société, soit. Mais laissons au moins le temps aux principales personnes touchées de s'organiser. Après tout, les étudiants actuels, qui fréquentent des établissements postsecondaires, doivent-ils payer, entre guillemets, pour la décision de la fin des années soixante? Vous allez peut-être me dire que nous avons été choyés, que nous avons maintenant à en payer le prix, mais n'oubliez pas que nous avions, pour la plupart, à peine un an ou deux lorsque le gel fut décrété. À l'âge où nous pouvons en profiter, le dégel fait son apparition La société a changé, les étudiants aussi, les besoins éducationnels, encore plus. Nous sommes prêts à prendre nos responsabilités, à faire notre part, mais nous refusons - d'ailleurs, c'est souligné dans le mémoire - de payer en deux ans pour des choix différents faits par une société adulte, à l'époque. Après tout, a-ton demandé aux 6 000 000 de Québécois de régler le déficit olympique en deux ans?

Notre proposition ne tombe pas du ciel comme par enchantement, elle est mûrie et réfléchie. Nous la considérons comme honnête et réaliste. Nous vous l'amenons pour en discuter. Elle a au moins, comme l'autre proposition principale de ce mémoire, le mérite de perpétuer la fameuse union entre espoir et jeunesse. Et réalisons bien ensemble que les trois propositions de notre mémoire sont intimement unies.

Arrêtons-nous maintenant, si vous le voulez bien, en profondeur, sur l'égalité des chances avec M. Bélanger.

M. Bélanger (Patrice): Dans cette seconde partie du mémoire, nous revendiquons du gouvernement des gestes concrets qui permettront de diminuer l'impact qu'aura la hausse des frais de scolarité. Nous sommes conscients que l'étude du projet de loi 25 n'a pas été approfondie, voulant laisser place à l'idée principale du mémoire qui est le fonds étudiant, présentation qui va suivre avec M. Chatigny.

D'abord, l'accès à l'université. La règle économique de base veut que l'augmentation du coût d'un produit entraîne une baisse du nombre de consommateurs. Cet effet doit, à tout prix, être évité. II faut, à tout le moins, que la

fréquentation des études postsecondaires soit maintenue à son niveau actuel. La poursuite des études postsecondaires est un choix qui est socialement rentable et nous devons nous assurer que tous et chacun aient une chance d'y accéder.

Le régime des prêts et bourses peut nous permettre d'atteindre cet objectif. Il constitue, en effet, la bouée de sauvetage pour les étudiants qui pourraient être tentés de réagir négativement à la hausse. Ce système ayant comme objectif d'assurer l'octroi de ressources nécessaires à la poursuite des études, nous trouvons déplorable le fait que le gouvernement n'ait pas procédé à la révision du régime de prêts et bourses de façon concordante à la hausse des frais de scolarité. C'est une décision qui fait peur à la masse étudiante qui se voit attribuer une charge supplémentaire, sans savoir ce qui adviendra de sa source de financement.

Certains changements apportés sont, nous le concédons, positifs: la diminution de la contribution des parents et du conjoint dans l'évaluation du prêt et de la bourse, de même que l'accès au régime pour les étudiants à temps partiel.

Par contre, nous ne comprenons pas pourquoi un étudiant se voit encore automatiquement attribuer un prêt après avoir accumulé 90 crédits universitaires. Il n'est pas rare de voir ainsi un étudiant déposer son prêt en banque, en retirer les intérêts et le remettre ensuite au gouvernement. Un meilleur ciblage des bénéficiaires permettrait d'octroyer des prêts à ceux qui en ont vraiment besoin et ainsi d'éviter des abus. Cette tâche n'est certes pas facile, mais elle est nécessaire.

Les paramètres du régime sont par contre bien fixés. Le montant d'argent attribué est fonction de l'écart entre les besoins et les ressources. L'augmentation des frais de scolarité amènera de plus grands besoins et l'écart entre les ressources et les besoins grandira. Il faut donc que les prêts et bourses augmentent dans les mêmes proportions, de façon que ceux qui ont le plus besoin de ressources supplémentaires ne souffrent pas de la hausse.

Le projet de loi 25 ne fournit cependant aucun chiffre quant à la hausse du prêt ou de la bourse. Il se borne à dire que le tout sera déterminé par règlement. Pouvons-nous être assurés que les montants des prêts et des bourses seront augmentés en fonction du dégel des frais de scolarité? Pour avoir suivi les propos du ministre dans les dernières semaines, on dit que ça sera fonction de l'augmentation et on dit que ça pourrait peut-être amener une perte de la fréquentation scolaire de 5 %. Nous trouvons que c'était là la tâche du projet de loi 25 que d'éviter ces deux conséquences.

De plus, nous encourageons le gouvernement à prendre d'autres mesures pour améliorer le financement universitaire: convaincre les établissements universitaires d'abolir la gratuité scolaire pour les enfants ou conjoints de professeurs; demander une implication plus forte du secteur privé dans l'éducation de leurs futurs employés, implication qui pourrait être encouragée par un pourcentage de déductions fiscales, et contribuer surtout à la réalisation de l'idée principale de ce mémoire, soit la création d'un fonds étudiant dont l'explication du principe de fonctionnement suit, avec M. Chatigny.

M. Chatigny (Stéphane): Alors, nous avons une idée à vous proposer; c'est le fonds étudiant du Québec. La situation financière du système d'éducation postsecondaire au Québec se détériore de façon inquiétante depuis un certain nombre d'années. Le dernier budget fédéral n'arrangera assurément pas les choses. À dire vrai, il est une évidence que nous manquons de ressources; manque de ressources au niveau humain, manque de ressources au niveau matériel, pédagogique. Face aux défis modernes qui requièrent pourtant de nos étudiants une solide formation en prévision du marché du travail, nous sommes forcés, finalement, de faire mieux avec moins.

Or, outre la contribution accrue des étudiants au financement du système d'éducation par la hausse des frais de scolarité, le gouvernement, dans sa quête honnête de revenus additionnels, se doit d'examiner d'autres avenues. Aussi, nous proposons une initiative nouvelle qui s'inscrit, à notre avis, dans cette perspective: le fonds étudiant du Québec. Son objectif principal est de contribuer à l'amélioration de la formation des étudiants québécois du Québec, notamment, et non de façon limitative, par une participation au renouvellement du matériel pédagogique des institutions d'enseignement postsecondaire, par l'octroi de bourses à l'excellence, bourses à l'initiative, par la participation financière à des projets de recherche et l'initiative québécoise pourrait faire en sorte qu'à cette liste on ajoute d'autres projets.

La composition financière du fonds s'envisage ainsi. Nous avons pensé que 50 % des fonds pourraient provenir des étudiants, 25 % du secteur privé et les derniers 25 % d'associations diverses. Plus spécifiquement du gouvernement du Québec, nous ne demandons que son expertise technique dans la mise sur pied du fonds et la mise à profit des mesures législatives nécessaires à l'existence et au fonctionnement du projet. À ce niveau-là, c'est un des aspects essentiels parce que le projet ne démarrera pas si nous n'avons pas d'expertise technique. Il faut prendre conscience que nous sommes en droit et non en finance. Dans ce projet, il y a des aspects légaux, évidemment, mais il y a surtout des modalités financières sur lesquelles il faudra se pencher avec le gouvernement, et nous pensons que ça devrait l'intéresser.

En ce qui concerne le fonctionnement du fonds, il y a plusieurs perspectives. La première: l'injection directe. L'aspect essentiel s'avère ici être le gel du capital recueilli. Ainsi, les

étudiants verseraient, chaque session, une cotisation au fonds. Par exemple, admettons une cotisation de 5 $ par session. Si on se base sur les chiffres de 1987-1988, il y avait au Québec 432 055 étudiants postsecondaires, c'est à dire aux secteurs collégial, public, privé et universitaire. Alors, si on multiplie le chiffre d'étudiants par 5 $ pour la session d'automne, ça nous donne un montant de 2 160 275 $ et le même montant, lorsqu'on cotise 5 $ en session d'hiver, de sorte que, pour une même année, des étudiants du Québec, on aurait recueilli, avec une cotisation de 5 $ en deux sessions, en 1987-1988, 4 320 550 $, soit 50 % du fonds.

Quant au secteur privé et aux autres associations désireuses d'investir, l'incitatif fiscal nous semble représenter la meilleure invitation à le faire. Par exemple, imaginons que plusieurs entreprises privées acceptent, d'une part, de prévoir, dans leur budget annuel, un poste budgétaire intitulé "bourses" et que, d'autre part, ils acceptent d'acheminer annuellement le contenu de ce poste au fonds étudiant du Québec. Voilà, je pense, qui viendrait donner au fonds une dimension appréciable.

La deuxième perspective, c'est la solution dite mixte: Épargne-injection directe. Ici intervient l'idée que les étudiants du Québec, en plus de verser une cotisation au fonds, se verraient offrir la possibilité d'y investir leurs épargnes personnelles. Or, comme il nous faut absolument faire du capital sur cette épargne qui serait déposée et qui, par sa nature, s'avère friable, il sera nécessaire de convaincre - et nous admettons que ce sera quand même une tâche ardue, mais réalisable - les étudiants d'accepter un rendement inférieur en termes d'intérêts à ce qui s'offre ailleurs. Évidemment, pour privilégierons une argumentation faisant valoir les avantages indirects sur leur formation par l'existence du fonds.

Même chose pour les associations étudiantes qui accepteraient de déposer leur budget annuel dans le fonds étudiant. En ce qui regarde les épargnes, il demeure essentiel que l'accès à celles-ci soit assuré. Mais en contrepartie, toutefois, le fonds - je le répète - doit faire du capital sur cette épargne. C'est là qu'intervient le consentement des épargnants à un rendement inférieur de leurs avoirs respectifs. Car, qu'il s'agisse de l'une ou de l'autre perspective, l'idée de base demeure l'existence de capital qui, contrairement à l'épargne, ne s'effrite pas, donc permet de financer des projets d'investissement et de bourses et, incidemment, ce capital doit se régénérer pour assurer la continuité des projets et l'accroissement du fonds.

Finalement, ce qu'on propose, c'est de partir avec une petite source d'eau pour, peut être dans 10 ans, 20 ans et même moins, se ramasser, se retrouver avec un beau fleuve qui coule largement. Sur le plan financier, toutes les avenues doivent être, évidemment, examinées soigneusement car elles auront beaucoup d'influence sur la performance future du fonds.

Dans un autre ordre d'idées, la gestion du fonds. Au départ, nous envisageons que toutes les opérations relatives au fonds, c'est-àdire les dépôts, les versements des cotisations et autres opérations bancaires, soient effectuées par une société de fiducie. Le fonds étudiant du Québec devrait être géré par un conseil d'administration dont la composition réunirait des représentants des étudiants du secteur privé, du monde de l'éducation et du gouvernement. Quant à la proportion des sièges occupés par les étudiants, sans être nécessairement majoritaire, quoique ça puisse être souhaitable, elle devrait s'avérer significative.

Un point important qu'il convient de souligner est que les décisions d'investissement du fonds étudiant du Québec devrait être adaptées aux besoins régionaux, ce qui peut laisser entendre que la structure décisionnelle du fonds serait bien implantée en région afin d'être à l'écoute des véritables besoins du Québec.

Voilà de la façon la plus précise possible l'idée que nous vous proposons. Nous croyons sincèrement en ses vertus. Voué à l'éducation et plus spécifiquement à la formation des étudiants, nous partageons la conviction que l'apport financier qu'ajouteraient dans le tableau des pourvoyeurs du système d'éducation, le fonds étudiant du Québec contribuerait significative-ment à une meilleure préparation des étudiants au marché du travail et à la recherche, finalement, de l'excellence au Québec. Finalement, nous voulons faire plus et avec un peu plus. Voilà notre objectif.

En conclusion du mémoire, dans le contexte actuel, il nous apparaît impérieux et surtout emballant de faire des choix, de nouveaux choix. Bien sûr, notre système d'éducation comporte certains acquis hautement estimables sur lesquels il faut construire. Toutefois, face aux lacunes de notre système et aux défis du XXIe siècle, l'ardeur et l'originalité doivent caractériser nos initiatives. Aussi, non seulement tenons-nous à nous prononcer en faveur du dégel envisagé avec les réserves exprimées précédemment par M Bélanger et M. Desgagné sur la modalité, mais nous proposons des idées nouvelles, des perspectives hors des sentiers battus. Il ne s'agit plus, à notre avis, de tricoter sur les statu quo, mais plutôt de soumettre des avenues progressistes. Et, en terminant, nous voulons souligner que ce rapport, ce mémoire et tout ce qu'il contient a été largement appuyé par les membres de l'association étudiante en assemblée générale il y a deux semaines.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M Chatigny. M. Desgagné, merci. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Un bref commentaire, Mme la

Présidente, après quoi je demanderais à un de mes collègues de poursuivre le dialogue. J'apprécie d'abord l'esprit évidemment constructif dans lequel ont été formulées les observations de l'Association des étudiants en droit de Laval. On sent qu'il y a un désir de rechercher des solutions et je pense qu'il convient de le signaler.

De manière générale, je voudrais inscrire mon accord concernant certaines idées mises de l'avant dans le mémoire. Vous demandez, par exemple, que le gouvernement s'emploie à convaincre les établissements universitaires d'abolir la gratuité scolaire pour les enfants ou les conjoints des professeurs. J'ai déjà fait part aux recteurs de la volonté du gouvernement sur ce point et j'espère bien que ce sujet aura été complètement réglé dans un avenir le plus rapproché possible. Il m'apparaît que, dans le régime de financement public où nous sommes de l'enseignement universitaire, ces privilèges qui remontent à une autre époque où la rémunération des professeurs était à un niveau très modeste et qui pouvait s'expliquer n'ont plus leur raison d'être aujourd'hui. Et, quand je vois des syndicats de professeurs continuer à présenter des revendications sur ces points, je le déplore profondément et je suis en entier désaccord avec eux.

M. Gendron: Et je vous appuie...

M. Ryan: Merci.

M. Gendron: ...là-dessus.

M. Ryan: Vous demandez...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est un commencement.

M. Ryan: Je sais que dans l'Opposition, on ne peut pas tout dire. Je soupçonne le reste.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Vous demandez une implication plus forte du secteur privé dans l'éducation des futurs employés des entreprises. Je pense que c'est une excellente idée également. Quant à la possibilité d'assortir des mesures de cette sorte, soit la part des entreprises, d'incitatifs fiscaux, je vais la transmettre au ministère des Finances. Je vais l'examiner de mon côté également. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu a déjà manifesté son intérêt pour une formule de ce genre. Par conséquent, ce n'est pas une idée que nous rejetons du revers de la main, loin de là.

En ce qui touche la hausse des frais de scolarité, votre acceptation de principe est intéressante, mais j'eusse aimé qu'elle se traduisît par des propositions plus substantielles sous l'angle des revenus que nous pourrons en retirer. La proposition que vous faites... D'abord, la base de 292,50 $ que vous empruntez à la page 3, est-ce que c'est par année ou par session?

M. Desgagné: C'est par session. C'est 225 $ par session. J'ai même mon reçu ici.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Une augmentation totale de 292 $ par session?

M. Desgagné: Oui, par session. Y aurait-il une coquille?

M. Ryan: Après ça, comment ça peut-il donner 60 $ par année? C'est ça que je ne comprends pas là. Il me semble que ça va faire plus que ça. (13 heures)

M. Desgagné: Non, non, mais c'est parce que, cher M. le ministre, ça été changé, c'est devenu la page 4 dans le mémoire révisé qu'on a envoyé. Est-ce que vous auriez copie de l'ancien mémoire, parce qu'à la page 4...

M. Ryan: Ah! moi, je suis toujours aux anciens textes, d'après ce que prétend l'Opposition.

M. Gendron: Donc, on en a une preuve. M. Ryan: Ha, ha, ha! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Disons que c'est une certitude, mais pour toutes sortes de motifs.

M. Desgagné: Justement, c'est la raison pour laquelle on a envoyé un mémoire corrigé hier, c'était pour éviter cette faute-là, pour corriger cette faute-là, parce que nous savions qu'il y avait erreur.

M. Ryan: Et qu'elle était assez grosse, hein?

M. Desgagné: Oui, oui. M. Ryan: Très bien.

M. Desgagné: Mais voyez, le mémoire n'avait pas été signé quand on l'a envoyé. Là, maintenant...

M. Ryan: Combien ça donnerait d'augmentation par année, suivant votre dernière proposition?

M. Desgagné: Bien, 292 $, plus 292 $. Je sais que ça monterait en tout à un total de

517, 50 $ par session, donc au-delà de 1034 $ par année.

M. Ryan: D'augmentation?

M. Desgagné: Bien, 517 $ plus 517 $.

M. Ryan: Le montant dos frais de scolarité aurait à ce niveau là?

M. Desgagné: Oui, c'est ça.

M. Ryan: Au bout de cinq ans, ça?

M. Desgagné: Oui, au bout de cinq ans, selon notre proposition.

M. Ryan: Alors, là, votre proposition, si je comprends bien, ça serait une augmentation de 237, 40 $ par année.

M. Desgagné: Je vais juste repasser là-dessus. C'est qu'actuellement les frais de scolarité de base là dessus, je parle pour ma paroisse, soit l'Université Laval, et c'est sensiblement semblable - sont de 225 $ par session, plus les frais afférents. Donc...

M. Ryan: Regardez, à l'Université Laval, il y a beaucoup de départements où c'est pas mal plus élevé que ça, vous le savez.

M. Desgagné: Oui, mais c'est parce qu'il y a des frais afférents qui entrent en ligne de compte, là.

M. Ryan: Oui.

M. Desgagné: Pour m'être informé auprès de...

M. Ryan: Mais même les droits de scolarité, c'est plus élevé que ça dans la plupart des facultés. Je ne sais pas à quelle faculté vous êtes.

M. Desgagné: Mais je suis en droit.

M. Ryan: En droit. Continuez quand même, mettons 450 $. Moi, je veux savoir...

M. Desgagné: Écoutez, si on calcule sur des frais de base de 225 $ par année, puisque, bon, j'ai étudié les frais de scolarité de ma paroisse, si on veut...

Une voix: Par session.

M. Desgagné: Par session, pardonnez-moi. Une augmentation de 130 % - là, je ne regarde pas la période de temps - ça nous amène à une augmentation totale de 292, 50 $. Donc, si on additionne l'augmentation totale, plus les frais de base actuels, ça nous amène à 517, 50 $. Ça, là-dessus, on s'entend?

M. Ryan: Non, parce que là, regardez, si vous avez 450 $, là, plus une augmentation de 594 $, si je compte bien, ça fait 1044 $.

M. Desgagné: Je l'ai calculé hier soir avant de me coucher, pourtant.

M. Ryan: Combien ça vous donne, vous?

M. Desgagné: Bien 450 $, c'est par année. Moi, je vous parle de 225 $ par session. On peut calculer sur une année.

M. Ryan: Bien oui, il faut calculer sur l'année si on veut se comprendre.

M. Desgagné: Oui, pas de problème.

M. Ryan: Tout le reste de la littérature est sur une base annuelle.

La Présidente (Mme Hovington): Est-ce qu'on est d'accord, des deux côté de la Chambre, pour aller au-delà de 13 heures, étant donné les calculs.

M. Ryan: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, on va s'entendre, si vous voulez, pour que chaque côté on prenne 15 minutes au lieu de 20 minutes, pour qu'on puisse finir à 13 h 30.

M. Gendron: Complètement d'accord.

M. Desgagné: M. le ministre, avec respect, qu'on fasse le calcul par session ou par année, ça amène au même résultat.

M. Ryan: Ce qui m'intéresse, moi, c'est quelle augmentation il va y avoir chaque année. Pouvez-vous me le dire?

M. Desgagné: Bien, c'est parce que l'augmentation de 130 % va être calculée sur cinq ans. Donc, vous divisez 130 par 5.

M. Ryan: Non, mais je veux l'avoir en argent réel. Les pourcentages, c'est très dangereux, c'est la méthode soviétique et on a vu à ce que ça conduit. En tout cas, regardez, on fera les calculs ensemble, je ne veux pas monopoliser le temps, parce que j'ai mon confrère qui voudrait poser des questions.

M. Desgagné: Je comprends.

M. Ryan: Et Mme la Présidente, peut-être...

M. Desgagné: C'est parce que les pour-

centages nous apparaissaient plus malléables, et plus facilement.

M. Ryan: Je me méfie de ça comme la peste, je vous le dis franchement.

La Présidente (Mme Hovington): La parole est au député de Vimont.

M. Fradet: Merci, Mme la Présidente. Je pense que vous avez rédigé ur très bon mémoire, et vous l'avez très bien présenté aussi. Moi, je veux répondre, peut-être, à M. Bélanger, qui parlait tout à l'heure, des prêts et bourses, à la suite de l'augmentation des frais de scolarité. Je pense qu'il faut préciser que pour les bénéficiaires de prêts et bourses qui ont le maximum, soit le prêt maximum et la bourse maximum, là où l'étudiant va aller chercher des sous conséquem-ment à l'augmentation des frais de scolarité, c'est en bourses, strictement. Je pense que vous y avez fait allusion, tout à l'heure, et je peux préciser aussi qu'il va y avoir 3000 ou 4000 étudiants supplémentaires qui vont être admissibles aux prêts.

Moi, j'avais peut-être deux petites questions. D'abord, vous avez parlé - c'est monsieur, à droite, qui se trouve à être M. Bélanger - de l'abolition des prêts pour les étudiants qui veulent entreprendre, soit un deuxième bac, ou une maîtrise ou un doctorat. Je pense qu'il y a quelqu'un de vous trois qui a parlé d'abolir...

M. Bélanger (Patrice): Je n'ai pas parlé d'abolition, j'ai parlé de garder les mêmes critères que s'il s'agissait d'un premier bac, parce que je ne vois pas... Personnellement, à la fin de mon bac, je pourrais me voir attribuer un prêt alors que je ne considère pas en avoir besoin. Je ne paie pas mes frais de scolarité parce que je suis fils de professeur à l'université. Je n'ai pas le droit à un prêt présentement à mon premier bac. Je ne vois pas pourquoi, une fois que j'aurai accumulé 90 crédits, j'aurais le droit d'avoir mon prêt, de le mettre en banque, de retirer les intérêts et de vous redonner l'argent après. Pourquoi ne gardez-vous pas les mêmes critères pour l'obtention d'un prêt après 90 crédits?

M. Fradet: Mais ce que vous dites présentement, c'est que le critère qu'on a dans le régime d'aide financière qui dit que lorsqu'on a un bac on est dépendant...

M. Bélanger (Patrice): Autonome, oui.

M. Fradet: ...autonome, que vous ne voulez pas faire allusion à ce critère-là pour que ceux...

M. Bélanger (Patrice): La notion d'autonomie est bonne, mais je ne vois pas pourquoi quelqu'un qui n'a pas besoin d'argent après avoir accumulé 90 crédits s'en verrait octroyer? Je ne comprends pas.

M. Fradet: Mais vous êtes aussi d'accord qu'il y a des étudiants qui vont continuer leurs études, soit une maîtrise ou un deuxième bac?

M. Bélanger (Patrice): Oui.

M. Fradet: Qui, eux, vont avoir encore besoin...

M. Bélanger (Patrice): Oui.

M. Fradet: ...d'aide financière de la part du gouvernement.

M. Bélanger (Patrice): Tout ce qu'on essaie de dire, c'est que les critères devraient se voir resserrer parce que, présentement, ça permet des abus. Moi, je vais arriver au Barreau, je vais prendre mon prêt, je vais le mettre en banque, je vais retirer les intérêts et je vais vous le redonner l'année prochaine parce que c'est ça que vous me permettez de faire présentement et je serais niaiseux de ne pas le faire, parce que je vais faire 300 $ avec.

M. Fradet: II y a une autre chose. Ça fait deux fois que j'entends parler, depuis ce matin, dans deux mémoires différents, du fonds - je n'ai pas le terme exact - le fonds étudiant du Québec. Je pense que... Il y a juste une précision que j'aimerais avoir. Ce fonds-là, est-ce qu'il va remplacer le régime actuel ou si c'est une addition à ce qui se fait présentement?

M. Chatigny: Ce n'est même pas dans le même domaine.

M. Fradet: Ce n'est pas dans le même domaine du tout.

M. Chatigny: Non, parce que... Faites-vous référence au régime des prêts et bourses?

M. Fradet: Oui, c'est ça.

M. Chatigny: C'est complètement distinct l'un de l'autre. Le fonds étudiant, si vous voulez, je vais vous donner l'équivalence. On retrouve le Fonds de solidarité de la FTQ, la Fondation Desjardins, la Société d'investissement jeunesse. On oeuvre dans le... On fait des investissements et, avec ce fonds-là, les investissements sont ciblés sur le renouvellement du matériel pédagogique. Par exemple, à la Faculté de droit, la bibliothèque est incomplète, insuffisante. Bien, le fonds étudiant prête de l'argent, évalue la demande, trouve que ça a du bon sens, on renouvelle la bibliothèque de droit. Même chose dans un secteur génie où on a besoin d'un appareil. Le fonds étudiant est là pour venir en

aide financièrement à l'achat. On ne veut pas nécessairement dire que le fonds étudiant pourrait venir qu'à payer entièrement l'objet en question, l'appareil, parce que ça coûte très cher. Et là, on parle d'appareils sophistiqués. Pour avoir une meilleure formation, il faut que nos étudiants travaillent sur du matériel moderne. Là, c'est une question de capacité concurrentielle du Québec dans les années futures, meilleurs étudiants, spécialisation des ouvriers.

M. Fradet: C'est fait dans le même but que les fonds universitaires qui existent déjà pour certaines universités. Je pense qu'il y a des fonds pour l'université qui servent à défrayer le coût d'achat d'une nouvelle machine ou quelque chose comme ça...

M. Chatigny: C'est...

M. Fradet: ...et ce fonds-là, il y aurait 50 % qui serait la contribution volontaire des étudiants, si on s'entend bien, là. Ça ne serait pas une contribution obligatoire qui serait prise à même les frais de scolarité ou...

M. Chatigny: Dans la mesure où on retient la première perspective, c'est-à-dire la cotisation étudiante, je ne sais pas si on peut dire que c'est volontaire. Vous comprenez ce que je veux dire. Il y a une cotisation.

M. Fradet: C'est ça. Une cotisation qui serait obligatoire lorsqu'on fait nos études, au début de chaque session.

M. Chatigny: Exactement. Vous avez parfaitement raison. En ce qui concerne les bourses, ce sont des bourses à l'excellence et à l'initiative et toute autre avenue, ce ne sont pas des bourses d'aide financière comme telle.

M. Fradet: Et ça, ça serait un fonds à la grandeur du Québec ou juste par université?

M. Chatigny: Vous avez parfaitement raison, à la grandeur de la province.

M. Desgagné: Si vous me permettez, juste un petit rajout.

La Présidente (Mme Hovington): M Des gagné, oui.

M. Desgagné: Juste un petit rajout. Ce serait à la grandeur du Québec, mais vraiment ciblé de façon très régionale parce que vous allez être d'accord avec moi que l'UQAC n'a pas les mêmes besoins que Concordia et l'Université du Québec à Hull non plus que l'UQAR. C'est pour ça. C'est un petit commentaire

La Présidente (Mme Hovington): Les mêmes culottes ne font pas à tout le monde au Québec. M. Desgagné: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): C'est ça. Pour éclairer un petit peu les besoins des régions, M. le porte-parole officiel de l'Opposition.

M. Gendron: Je voudrais remercier les étudiants en droit de l'Université Laval de nous avoir livré une réflexion qui, tout compte fait, à des nuances près sauf pour un aspect véritablement neuf qui est le fonds étudiant, reprend les grandes orientations des autres associations étudiantes avec une différence fondamentale que vous avez expliquée quand vous dites: Bien, nous, on va être rafraîchissants comme association étudiante, on va dire oui à la hausse, mais on va la conditionner: conditionnelle à ce que cette hausse ne soit pas aussi subite qu'elle ne l'est à 130 % et qu'elle se fasse dans le respect des acquis sociaux et de la capacité de payer des étudiants. Ce sont vos deux principales considérations. Là, vous avez des éléments additionnels pour que cette hausse n'ait pas certains effets dissuasifs et, également, pour ce qui est du financement universitaire, qu'il y ait des sources d'argent qui proviennent d'ailleurs.

Je voudrais juste apprécier davantage deux ou trois éléments. Moi, un premier élément que je voudrais vous voir apprécier davantage... J'ai beaucoup de misère à mettre en relation votre prétention exacte que tout ça se fasse dans le respect des acquis sociaux avec un jugement qui finit par dire: Oui, sur le principe du dégel, nous sommes d'accord, c'est sur le quantum que nous avons des réserves. Mais à partir du moment où moi, aujourd'hui, dans l'évaluation de cette commission, je n'ai aucune garantie, aucune, sincèrement... Je connais ce gouvernement pas mal, j'ai lu la réforme à plusieurs reprises et je ne suis pas capable, d'aucune façon, d'acquérir la conviction que ça se fera dans le respect des acquis sociaux.

Donc, ma question: Puisque vous aussi, vous en faisiez une condition pour le dégel, comment arrivez-vous à conclure que vous seriez d'accord s'il était réparti sur cinq ans plutôt que sur deux ans puisque, dans votre mémoire, je ne vois pas non plus ce sur quoi vous vous basez pour convenir que le gouvernement, s'il étalait la hausse, respecterait, selon vous, les acquis sociaux concernant plus spécifiquement l'accessibilité, concernant le non-impact, ou du moins à la marge, d'une hausse répartie sur cinq ans? En termes très clairs, est-ce à dire que vous venez nous dire en commission qu'une hausse sur cinq ans n'aurait pas d'impact sur l'accessibilité, premièrement?

Deuxièmement, comme association étudiante sérieuse, est-ce que vous êtes en train de nous dire que la hausse, si elle était étalée, nous

permettrait de combler le retard que nous avons sur le niveau de diplômés? Parce que, ce matin, le ministre a fait référence, à la conférence de presse qu'on n'a pas pu faire mais qui, si on l'avait faite, aurait illustré d'une façon on ne peut plus claire, par des beaux petits tableaux... Parce que, souvent, c'est par là... Ce que le ministre est en train de faire et ce, en connaissance de cause, ce qui est le plus grave, c'est que notre écart de 8500 diplômés... Lorsqu'on fait la pondération des clientèles étudiantes Ontario-Québec, qui est de 8500 au moment où on se parle, elle s'accentuerait drôlement, selon la thèse de certains experts concernant l'accessibilité. En termes concrets, sans faire ici le prorata de la population, c'est 52 000 diplômés en Ontario, alors qu'au Québec, c'est 29 000. C'est juste au mérite pur; c'est-à-dire pas au mérite pur, mais au nombre absolu de diplômes. Évidemment, avec la hausse des frais de scolarité, il y aurait une chute importante du nombre de diplômes décernés. Nous l'affirmons haut et fort et on n'est pas les seuls à l'affirmer. D'ailleurs, dans quelques mémoires des étudiants, il y en a même un qui a prétendu, avec raison, que ça serait 10 000, l'écart, dès l'an prochain. Et 10 000 en 10 ans, ça fait 100 000 diplômés de moins, toujours avec la pondération de la population.

Nous pensons que nous n'avons pas les moyens de nous permettre, avec le retard qu'on a, 100 000 diplômés de moins, au niveau universitaire, que l'Ontario. Si nous avions comblé les écarts, là, on dit: On pourrait se permettre cette fantaisie d'avoir moins de diplômés que l'Ontario. Alors, c'est en même temps une explication par rapport au propos qui a été tenu tantôt. Mais la question est très simple. Vous dites - et, là, je vous cite pour ne pas me perdre - Nous autres, en autant que ça se fasse dans le respect des acquis sociaux, il n'y a pas de problème. Il s'agit juste d'étaler ça sur cinq ans. (13 h 15)

Question: Est-ce que, quand vous dites ça, vous avez acquis la conviction que ça n'aura pas d'incidence véritable sur l'accessibilité? Deuxièmement, est-ce que ce n'est pas exact qu'il y aura également un effet majeur sur le nombre de diplômés? Et moi, je le chiffre, c'est moi qui porte ce que je viens de dire. Je dis que, s'il y a dégel, l'an prochain, on se parlera et on verra que l'écart sera déjà rendu n'importe où entre 10 000 et 11 000 diplômés de premier cycle de moins que l'Ontario, tout en ayant fait la pondération de la population pour tenir compte du prorata.

M. Oesgagné: Si vous me permettez...

La Présidente (Mme Hovington): M. Desgagné.

M. Desgagné: Merci, Mme la Présidente. Si vous me permettez une réponse, vous soulevez un bon point, et ça me permet de préciser une idée. C'est que le mémoire que nous proposons forme un tout. Absolument. On ne veut pas donner un chèque en blanc. Le chèque en blanc, c'est la première partie. Les deux autres, faites-en ce que vous voulez. Le mémoire forme un tout. Ce qu'on dit, c'est que, si vous répartissez l'augmentation sur cinq ans, si le gouvernement répartit cette augmentation sur cinq ans, en ajustant les prêts et bourses - et ça, M. Bélanger pourrait peut-être parler plus là-dessus - en ajustant les prêts et bourses en fonction de ça, et s'il dit oui à la création du fonds étudiant, bien, on pourra contrer certains et la plupart même des effets négatifs d'une hausse des frais de scolarité, parce que le fonds étudiant, si vous avez vu, dans l'un de ses objectifs importants, ce sont des bourses à l'excellence et des bourses à la poursuite des études.

Donc, premièrement, si vous resserrez certains écarts, certains abus des prêts et bourses, si vous ajustez les prêts et bourses en fonction des besoins et si vous dites oui au fond étudiant, là, on pourra faire en sorte de ne pas subir de trop grand ressac d'une augmentation des frais de scolarité. Mais deux ans, deux ans, on ne l'accepte pas, et ça, on veut que ça soit clair. La proposition, ce n'est pas: Oui, bien là, nous autres, c'est peut-être cinq ans. Nous autres, c'est: Oui, sur cinq ans. Ce n'est pas oui, peut-être, si c'est deux ans et demi, non, non. Oui, cinq ans. Deux ans, on ne l'accepte pas. Sauf qu'on a joué le jeu puis après l'annonce, le lendemain matin, on ne criait pas: La grève, la grève, la grève! On vient jouer le jeu; on va attendre les réponses.

M. Gendron: Merci. Juste une seconde! C'est parce que, rapidement, êtes-vous au courant - je sais que ça fait un tout - que la CREPUQ est venue dire au ministre de l'Éducation: Nous, on trouve que vous êtes dans le bon chemin, à condition que vous mettiez 50 000 000 $. Le lendemain, qu'est-ce que le ministre disait? Il disait: La CREPUQ est d'accord avec le dégel des frais de scolarité. Alors, je veux juste que vous soyez conscients que même si vous, vous dites: Écoutez, oui au dégel, s'il est étalé sur cinq ans et si ça fait partie d'un tout... Je veux juste vous rappeler que vous risquez que le tout, quand vous allez être cités, soit édulcoré, si vous me permettez l'expression, parce que c'est évident que le ministre de l'Éducation dira: L'Association des étudiants en droit de Laval est venue nous dire qu'elle était d'accord avec le dégel. Ça, je vous gagerais pas mal d'argent que c'est ce que je vais entendre. Alors, ça, c'est juste un commentaire.

M. Desgagné: Mais on ne veut aucunement servir de caution morale, et ça, vous me permettez d'ailleurs de le dire: II n'est pas question de

servir de caution morale.

Secundo, pour avoir lu un ancien recteur et pour avoir consulté de façon très précise également un autre ancien recteur, je peux vous dire qu'ils sont au courant des besoins urgents et, au-delà des propositions qu'ils ont faites, nous sommes en accord avec - d'ailleurs, on le dit dans l'introduction du mémoire - l'urgence qu'il y a de réagir au Québec. Et ce n'est pas vrai que les étudiants vont continuer à vouloir tout avoir sans pour autant discuter et être prêts à faire des efforts. C'est là-dessus que j'argumente

Une voix: Je pense que M. Bélanger aurait...

M. Bélanger (Patrice): Oui, c'est ce qu'on voulait déplorer aussi dans la deuxième partie du mémoire, c'est-à-dire qu'on conçoive que le régime de prêts et bourses soit la bouée de sauvetage pour ça. Ce que le gouvernement a fait, c'est qu'il n'a pas ciblé ceux qui seraient vraiment touchés par l'augmentation des frais de scolarité, ce qui pourrait amener justement une perte de 10 000 diplômés par année. Si cette tâche-là avait été faite et, au lieu d'augmenter les bénéficiaires, si on avait plutôt apporté une aide accrue à ceux qui en ont vraiment besoin, de sorte que l'accessibilité ne s'en voie pas changée, là, il n'y aurait pas eu de problèmes. Mais c'est ça, la deuxième partie du mémo;.:; portait là-dessus, c'est-à-dire que, bon, oui, sauf qu'on trouve que le travail n'a pas été fait pour faire en sorte que l'accessibilité ne soit pas changée.

M. Gendron: Sur le fonds, moi, j'ai deux commentaires. Je pense qu'encore là on est toujours, j'espère, ouvert à des suggestions intéressantes, mais l'inquiétude que j'ai, c'est qu'il est évident qu'il y aurait un danger, d'après moi, parce que j'allais faire un raisonnement très rapide. De deux choses l'une: ou "bedon" - excusez l'expression - le fonds est important, ou "bedon" il est insignifiant. Donc, je suis convaincu que vous voulez qu'il soit signifiant, vous voulez qu'il soit important. S'il est impor tant, le danger d'un fonds étudiant majeur, significatif, c'est que rapidement l'État, devant une difficulté financière ou devant un pelletage de responsabilités du gouvernement fédéral dans la cour du Québec, comme c'est le cas, dise: Écoutez, pour un certain nombre d'années, on va demander que le fonds étudiant fasse un peu plus d'efforts pour assumer une responsabilité de virage, soit au niveau d'un sous-financement chronique du milieu universitaire ou au niveau d'autres préoccupations où il y a lieu de donner un coup rapide comme, à un moment donné, un renouvellement des équipements scientifiques, des instruments de support pédagogique pour les apprentissages; à un moment donné, ça sera un coût au niveau des bibliothèques.

Alors, je n'ai rien contre ça, sauf que je mettrais des réserves et, pour tout le reste des principes, je pense que vous avez raison, il y a de bonnes suggestions mais, à ma connaissance, il faudrait qu'il y ait une contribution plus significative parce que, là, le fonds comme tel n'aura pas tellement d'impact s'il n'est pas assez "substantif1, si tu me permets l'expression Donc, quand je voyais, entre autres, des cotisations de 5 $, quand on sait que malheureusement le paquet de cancer est à 4 $ et quelque, je veux dire, 5 $ par session, ce n'est pas significatif, même si je sais d'où ils viendraient II faudrait véritablement que ce soit plus significatif que ça rapidement, si on veut que cela donne ses effets pour corriger des lacunes au niveau du financement universitaire.

Donc, dernière question, toujours pour des considérations d'horaire. À la page 4, là, ça peut avoir changé, mais ce n'est pas important que ma citation soit bonne, compte tenu qu'il y a eu une correction, puis on l'accepte et tout est correct. Mais vous avez mentionné qu'il y aurait lieu d'apporter des changements majeurs à la réforme de l'aide financière aux étudiants quant à des modalités d'octroi de prêts et bourses. Et vous avez fait référence à un certain nombre d'abus mais, à ma connaissance, ils ne sont pas tellement détaillés, les abus qui justifieraient l'importance d'une réforme substantielle. Alors, ma question n'est pas bien bien compliquée. Moi, ce que je crois du régime actuel, c'est qu'il y a une série d'omissions bien sûr, mais je ne sens pas d'abus majeurs du régime actuel. Si je comprends bien là, il y a des omissions majeures, les gens à temps partiel ne sont pas dedans, la contribution parentale, on ne s'occupe même pas de vérifier si les parents la versent ou pas. Alors, j'appelle ça vraiment des points qui devraient être davantage vérifiés par le ministère de l'Enseignement supérieur. Mais, sincèrement, je ne vois pas d'abus majeurs du régime actuel. Je vois des carences, je vois des faiblesses, je vois des trous, mais je ne vois pas d'abus majeurs. À quoi faisiez-vous allusion si vous, vous voyiez des abus majeurs du système actuel?

M. Desgagné: Si vous me le permettez, Mme la Présidente, M. le député de l'Opposition ayant soulevé deux points relativement distincts quoique unis, M. Chatigny aimerait faire un commentaire sur le fonds, ensuite M. Bélanger sur...

La Présidente (Mme Hovington): Rapidement.

M. Chatigny: D'abord, M. Gendron, vous avez parfaitement raison, il y a un danger là et on compte sur vous pour nous aider à y remédier. Deuxième des choses, vous avez encore raison, le fonds doit être "substantif. Cependant, vous avez sûrement relevé que nous avons donné un exemple à 5 $. Parce que 5 $, vous avez

raison, ce n'est pas beaucoup. Puis, 10 $, 15 $, ça pourrait être une chose qui ne demande pas nécessairement un gros sacrifice de la part des étudiants. De cette façon, il devient plus "substantif".

Ce qui m'amène à dire une chose là-dessus, ça me donne une ouverture que nous souhaitons. J'espère qu'on se comprend bien avec M. Ryan. Ce n'est pas vrai que nous avons travaillé pendant un mois, même un mois et demi là-dessus, sur ce fonds étudiant et que l'idée repose sur des tablettes de luxe, comme M. Desgagné le disait. Vous avez dit que vous alliez le soumettre au ministre des Finances et à un autre ministre. Il va falloir que ce soit sérieux, qu'on en entende parler. Vous savez où nous trouver, l'Association étudiante de droit de l'Université Laval, le local n'est pas dur à trouver. Nous voulons, nous avons demandé une expertise technique. Le projet dans ses modalités financières, ce n'est pas nous seuls qui allons le monter. Nous avons besoin de votre aide. Durant cette session de commission parlementaire, plusieurs idées vont vous être proposées. Si vous répondez oui à toutes les propositions qui vous sont faites, c'est bien beau, ça démontre une volonté verbale mais, sur le fonds étudiant, nous vous soumettons qu'au-delà d'une volonté verbale il va falloir qu'il y ait des actions, parce que nous y croyons fermement. Et tout le monde aussi, il n'y a personne qui a dit que c'était une idée désastreuse. Ce n'est peut-être pas l'idée du siècle, mais on verra ce qu'on peut faire avec.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Chatigny.

M. Bélanger (Patrice): Oui, pour ce qui est du deuxième niveau de votre question, j'ai donné un exemple tantôt d'un abus possible et évident. Il est évident que ce n'est pas nécessairement dans l'octroi que les abus vont se faire, c'est plutôt des yens qui bénéficient d'un prêt ou d'une bourse autour de moi et qui n'en ont pas nécessairement besoin. Ce qu'on aurait voulu que le gouvernement fasse, c'est qu'il vise, qu'il cible les étudiants qui vont se voir touchés par la hausse des frais de scolarité, chose qu'il n'a pas faite.

M. Gendron: Rapidement, très court. D'après vous, quelles sont les raisons pour lesquelles un étudiant qui, selon vous, n'aurait pas besoin véritablement d'un prêt et d'une bourse en a un. Qu'est-ce qui est arrivé?

M. Bélanger (Patrice): Manteau de cuir ou...

M. Gendron: Non, non, je ne parle pas de ce qu'il fait avec. Pourquoi a-t-il obtenu un prêt et une bourse s'il n'en a pas besoin? Il a triché le système? Le système est mal fait?

M. Bélanger (Patrice): Pas nécessairement parce que... Il n'a pas triché. Le système lui permet d'avoir un prêt ou une bourse, d'après les critères qui sont actuellement établis. Justement, ce qu'il va faire avec, c'est qu'il va s'acheter un manteau de cuir ou il va payer son auto ou... Quitte à le remettre un peu plus tard. Mais ce qu'il aurait fallu faire, c'est plutôt viser - je me répète, mais c'est ça - ceux qui vont être touchés par la hausse et qui auraient des chances de ne pas avoir accès à l'université l'année prochaine à cause de ça.

M. Gendron: Mais rapidement, les avenues, vous, c'était par l'aide obtenue soit sous forme de prêts ou de bourses, c'est de faire des usages qui, d'après vous, ne sont pas prioritaires et, en conséquence, il faudrait contrer ça. Il faudrait contrer l'usage qu'on fait de l'argent obtenu quand on n'en a pas besoin.

M. Bélanger (Patrice): Exactement. M. Gendron: C'est ce que vous dites. M. Bélanger (Patrice): Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Ça va?

M. Gendron: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Une brève conclusion.

M. Ryan: Oui. Très brièvement.

La Présidente (Mme Hovington): Rapidement.

M. Ryan: Mais je ne voudrais pas qu'il y ait de malentendu entre nous. L'idée du fonds étudiant que vous proposez est une idée qui ne manque pas d'intérêt. Mais dans la formule où vous la suggérez, je crois que ça devrait être examiné attentivement avec le Mouvement Desjardins. Il me semble que ça serait mieux que ça ne soit pas un fonds gouvernemental ou public. Je crois qu'il y aurait intérêt, vu l'implication très très poussée des caisses populaires dans tout le système des prêts étudiants et qu'elles assument à elles seules au-delà de 60 % du volume total des prêts étudiants qui est voisin de 1 000 000 000 $ actuellement... Là, il y aurait des possibilités considérables, mais, du côté du gouvernement, franchement, j'ai de la misère à voir comment on pourrait songer à instituer ça. Je vous recommande ça, soit peut-être de pousser davantage les études avec le Mouvement Desjardins en particulier, mais je vais en parler à M. Béland. Je vais lui dire qu'on a été saisis de cette proposition par vous autres. Le Mouvement Desjardins aurait des moyens pour pousser une affaire comme celle-là qui pourrait être très

intéressante.

La Présidente (Mme Hovington): Oui...

M. Bélanger (Patrice): Une chose, il faut bien se comprendre...

M. Ryan: II y a juste un deuxième point, si vous me le permettez.

M. Bélanger (Patrice): Oui.

M. Ryan: J'ai réussi à établir le montant de l'augmentation annuelle qui découlerait de vos propositions pour les frais de scolarité. Je pense qu'on ne se trompera pas beaucoup. C'est à peu près 120 $ par année. Alors, c'est évidemment considérablement inférieur à ce que rapporteraient les deux hausses successives que nous envisageons. C'est à peu près trois fois moins. C'est facile à compter. Je ne crois pas que ça contribue, dans un avenir prévisible, à établir la contribution étudiante au niveau que nous estimons juste pour que ce soit un petit peu comparable avec le reste du pays. Je pense que le rythme proposé est un petit peu trop lent, mais quand même, j'ai pris note du principe et vous assure que je n'irai dire à personne au Québec - ce n'est pas ma manière - que vous approuvez les deux hausses successives de 350 $.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je...

M. Chatigny: Oui, je...

La Présidente (Mme Hovington): Très court parce qu'il est déjà 13 h 30.

M. Chatigny: Oui, c'est parce qu'il y a quelque chose qui n'a pas été compris. Peut-être nous sommes-nous mal expliqués, mais ce qu'on demande au gouvernement, ce n'est pas la gestion du fonds, de sorte que ça ne sera pas un fonds géré par le gouvernement. C'est une expertise technique, ce qui veut dire, par exemple, l'attribution de personnel pour développer les aspects financiers. Et nous rejoignons votre idée, M. le ministre, que ce soit géré par le Mouvement Desjardins. A ce sujet-là, nous allons avoir des rencontres très bientôt.

La Présidente (Mme Hovington): Bon, alors, c'est positif tout ça Au nom des membres de la commission de l'éducation, permettez-moi de vous remercier, vous, l'Association des étudiants en droit de l'Université Laval, d'être venue nous présenter un mémoire aussi intéressant.

La commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures. Merci.

(Fin de la séance à 13 h 28)

(Reprise à 15 h 11)

La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais aux membres de la commission de prendre place autour de la table et j'inviterais les membres de la CEQ, Centrale de l'enseignement du Québec, à bien vouloir prendre place afin de nous présenter leur mémoire.

Bonjour et bienvenue à la commission de l'éducation. Il y a Mme Rosette Côté, je crois, voulez-vous vous présenter pour fins de transcription des débats.

Centrale de l'enseignement du Québec

Mme Côté (Rosette): Merci beaucoup d'accepter de nous permettre d'exprimer notre point de vue sur la question. Les gens qui m'accompagnent sont: M. Marc-André Thibault, qui est un représentant de la Fédération des professionnels de collèges et d'universités; M. François Beauregard, qui est conseiller syndical spécialement chargé des questions d'éducation reliées à l'ordre de l'enseignement du collégial et des universités et je suis Rosette Côté, première vice-présidente à la Centrale de l'enseignement du Québec et responsable des dossiers éducation.

La Présidente (Mme Hovington): Je dois vous dire et vous informer que le ministre, M. Ryan, s'excuse de ne pas être ici pour le début de la présentation de votre mémoire. Malheureusement, il a été demandé pour aller au Conseil des ministres et au Conseil du trésor. Il sera à peu près vingt minutes en retard, mais soyez assurés qu'il a bien pris connaissance de votre mémoire. Il sera ici pour vous questionner, s'il y a des points qu'il lui semble bon d'éclaircir.

Mme Côté: Expliquer la hausse de 18 000 000 $?

La Présidente (Mme Hovington): On le lui demandera quand il reviendra, Mme Côté.

Mme Côté: D'accord.

La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez nous présenter votre mémoire, vous avez vingt minutes pour le faire. Allez-y.

Mme Côté: Nous allons un peu faire une analyse critique globale du mémoire et M. Beauregard, ensuite, prendra la parole pour expliquer certains amendements que nous saluons au passage et d'autres qui auraient mérité d'être libellés autrement.

D'abord, je dois un peu vous faire partager la lunette avec laquelle nous avons essayé de regarder le projet de loi. Nous avons réuni une table de travail des personnes qui travaillent directement avec la clientèle étudiante des cégeps et des universités pour qu'elles nous

apportent le point de vue des jeunes et qu'elles regardent en quoi l'ensemble des mesures pouvait réduire l'accessibilité des jeunes aux études postsecondaires. Nous n'avons pas voulu strictement nous contraindre à un ensemble de principes, mais voir les effets quotidiens d'accessibilité ou d'exclusion de certaines clientèles.

On s'est aussi inscrits dans une problématique de démocratisation de l'école et du savoir, d'un support financier qui permette d'éliminer les barrières économiques que les jeunes vivent et aussi comment on pourrait trouver un ensemble de mesures qui incitent à la persévérance à l'école pour éviter le phénomène du décrochage ou de l'abandon scolaire. C'est d'abord à partir d'un rapport éducatif, qui n'est pas strictement économique mais qui joue un rôle de développement social et démocratique, que nous l'avons regardé.

Nous croyons, de plus, lorsqu'on a regardé le projet de loi, que l'ensemble des études faites par les jeunes profite à la société et le fait qu'ils remboursent leurs dettes aussi, ne serait-ce que par la fiscalité ensuite qui vient chercher une part de leur travail.

Par rapport aux grands objectifs et aux grandes tendances de fond qu'on remarque, nous croyons qu'il y a certains critères qui restreignent le statut d'autonomie et qu'il faudrait absolument que la loi prévoie la définition de certains critères, notamment essayer de prévoir le sens du seuil de pauvreté, parce que nous considérons qu'il est injuste d'exiger une contribution financière pour les familles dont les revenus se situent sous le seuil de la pauvreté. Cependant, il y a différentes notions au seuil de pauvreté. Il serait peut-être intéressant d'inclure ce principe de base-là. Nous croyons aussi que l'objectif global, qui est de prendre tous les moyens pour qu'aucune jeune ou aucun jeune ne se voie interdire l'accès aux études supérieures, c'est un principe auquel nous souscrivons, et nous croyons, nous saluons que cet objectif-là soit mentionné dans le projet de loi.

Nous souscrivons aussi au premier objectif complémentaire, qui dit qu'il faut apporter des réponses aux besoins réels des étudiantes et étudiants. Je crois que c'est important de le signaler, même si on répète cette réalité-là. Cependant, il y a deux objectifs complémentaires que nous ne partageons pas: d'abord, toute l'analyse qui est faite autour de faire en sorte que l'aide offerte au Québec se compare à celle des autres provinces du Canada, et le deuxième objectif qui est de prendre des moyens pour qu'il y ait des incitatifs à ce que la continuité et la persévérance soient respectées.

Un bout là-dessus. D'abord, nous croyons qu'actuellement le régime va opérer certaines coupures à la bourse parce que, si on regarde le volume total de l'aide à la bourse qu'il y avait dans les 1984-1985, les coupures des quatre dernières années et ce qu'on constate actuelle- ment, malgré une injection de 18 000 000 $, cela fait en sorte que nous n'aurons pas atteint le volume total de bourses en 1990 que nous avions en 1984-1985. Deuxièmement, nous croyons que l'argument qui est invoqué pour avoir certaines mesures sur le phénomène de persistance et qui fait qu'on mettrait certaines mesures pour que les jeunes fassent leurs études en un temps prescrit, on croit que c'est une solution qui ne règle pas la réalité des jeunes. On ne croit pas que les jeunes qui prennent plus de temps à l'école, ce soit par laisser-aller ou par difficultés qu'ils pourraient résoudre autrement; on croit que, s'il y a de l'argent à injecter, c'est plutôt de voir comment on pourrait supporter les jeunes qui arrivent au cégep ou à l'université.

De plus, toutes ces mesures ne tiennent pas compte de la réalité du travail des jeunes. Les jeunes, actuellement, vivent deux types d'alternance: l'alternance travail-école en même temps, et l'alternance, aussi, un bout de temps au travail et un bout de temps à l'école. Et on croit qu'il faut tenir compte de ces nouvelles réalités-là.

De plus, certaines considérations qu'il faut ajouter, c'est que, lorsqu'on dit qu'il y aura une hausse des coûts, il y a clairement des crédits nouveaux, mais on ne sait pas où vont être les crédits nouveaux - c'est une question que nous adresserons tout à l'heure à M. Ryan - et on croit que les coupures qui ont été imposées depuis quatre ans et qui ont réduit l'accessibilité à la bourse devraient être dites. Il y a notamment certaines coupures qui font partie des nouveaux règlements. La disparition de la prime de 22 $ par semaine pour les enfants dont les parents ont des ressources financières en dessous des dépenses admises, on pense que ce n'est pas une bonne mesure. Deuxièmement, la coupure de la prime hebdomadaire de 30,50 $ pour la double résidence, ce n'est pas non plus une bonne coupure. On croit aussi qu'actuellement il y sûrement des besoins financiers, puisqu'on dit qu'il y a un jeune sur deux qui aurait besoin d'un financement de ses parents et qui n'en reçoit pas. Alors, on croit qu'il faut que le régime d'aide à la bourse et au prêt tienne compte de ces réalités-là aussi, même si on pourrait donner comme raison que certains parents devraient contribuer financièrement.

Les avantages comparatifs. On croit qu'actuellement le Québec ne se compare pas avantageusement aux autres provinces parce qu'on a un déficit de scolarisation, on a un déficit de diplomation et on a un déficit aussi de fréquentation scolaire comparativement aux autres provinces du Canada. On croit qu'actuellement il y a une spécificité du Québec. Le Québec a son caractère spécifique. C'est un mot qu'on entend avec différentes formules actuellement, dans les débats qui ont cours. On croit qu'il faut que le Québec tienne compte de cette spécificité-là. Je ne vais vous en donner qu'une seule. Nous avons

une clientèle adulte, à l'université ou au cégep, qui est beaucoup plus grande que dans les autres provinces. C'est une spécificité qui appartient au Québec et qui n'est pas aux autres provinces. Alors, il faut donc continuer à investir au niveau des prêts et bourses au Québec pour que ces déficits qu'on constate continuent à faire des pas dans notre pays.

Maintenant, il y a une réalité aussi qu'on trouve qui aurait dû être dans le projet de loi, c'est tout le fait que... On fait l'ar^lyse, nous... On ne peut pas analyser un régime d'aide financière aux étudiants et étudiantes sans regarder, sans examiner aussi les services qui sont offerts à la clientèle étudiante et adulte. On se rend compte, actuellement, qu'il faut absolument que les jeunes aient un droit très éclairé à une information pour que la décision qu'ils prennent dans la poursuite de leurs études ou dans l'arrêt de leurs études soit une décision éclairée. Et on croit que les jeunes ont le droit de savoir comment fonctionne toute l'application, les règles d'application et les critères pour l'accessibilité aux prêts et bourses. Certaines personnes qui interviennent auprès des jeunes nous disaient que, lorsqu'ils reçoivent des jeunes dans leur bureau, ils font plus qu'un "counselling" financier, mais ils travaillent au niveau de la formation financière auprès des jeunes: Comment administrer un budget? Comment réussir à passer à travers leurs études sans vivre un endettement trop grand? On croit qu'il faudrait regarder cette réalité-là et essayer de voir à ce que le personnel qui est en place puisse apporter l'information nécessaire aux jeunes.

Maintenant, pour les différentes recommandations plus grandes, moi, je me suis attardée plus aux grands objectifs mais les mesures directes, M. Beauregard va les regarder en saluant au passage, comme je le disais, les éléments qui nous apparaissent extrêmement importants.

M. Beauregard (François): Alors, il y a certaines recommandations que nous avons trouvées excellentes et, dans le mémoire, à chaque endroit, on l'a mentionné à l'occasion, mais, étant donné que le temps qui nous est alloué est limité, je voudrais plutôt porter l'attention sur les recommandations qui nous inquiètent un peu.

La première des recommandations qui nous inquiète, c'est la recommandation 2. On propose d'indexer les paliers de la table de contribution parentale, c'est une excellente chose, ça faisait longtemps que ça n'avait pas été indexé, et on surévaluait la contribution parentale, le document gouvernemental le dit clairement, mais on s'est rendu compte, en examinant les nouveaux paliers de la table de contribution, que les gens qui ont des revenus relativement plus élevés ont une diminution plus grande de leur contribution parentale. C'est ce qu'on a indiqué à l'annexe III où on se rend compte que les gens qui ont des ressources disponibles de l'ordre de 6000 $ voient leur contribution parentale réduite de 32 %, alors que les gens qui ont des ressources disponibles de 1000 $ voient leur contribution parentale réduite de 16 %. On ne comprend pas pourquoi ce sont les gens qui ont les plus faibles revenus qui ont eu la plus faible diminution de la contribution parentale. Ça, c'est le premier problème qu'on avait avec cette recommandation-là.

Le deuxième, c'est le fait de considérer maintenant seulement les enfants au postsecondaire dans le calcul de la répartition de la contribution parentale. Là, je sais que je vais dans des détails un peu techniques, mais on prenait en considération les enfants du primaire et du secondaire, qui comptaient pour un demi-enfant, et, maintenant, on ne considérera plus ces personnes-là, ce qui fait que certaines familles vont voir leur contribution parentale doubler. Par exemple, une famille de trois enfants qui a un enfant au postsecondaire, un au primaire et un au secondaire, et qui payait 2000 $ de contribution en vertu des règles actuelles va voir sa contribution monter à 4000 $ avec la recommandation 2. On trouve ça extrêmement pénalisant et, surtout, si on compte que les frais de scolarité vont connaître une hausse éventuellement.

Sur la recommandation 3, on avait plutôt des questions. On dit que la formulation semble correcte, qu'on va tenir compte seulement des revenus nets établis par le fisc, mais qu'on va continuer à tenir compte des revenus de transfert. Or, quand on regarde les pratiques actuelles, on se rend compte que cette mesure-là a pour effet d'éliminer du calcul du revenu des parents des montants qui sont plutôt caractéristiques des hauts revenus. La partie non imposable des gains de capital, les amortissements déduits pour les édifices à logements, les dividendes reçus, ça ne nous apparaît pas être des montants caractéristiques des gens à faible revenu qui bénéficient normalement du système. On dit: Ça, c'est trop compliqué; on ne fera pas mieux que le fisc; on va seulement calculer le revenu net tel que le fisc le fait, mais les revenus de transfert, eux autres, on va continuer de les calculer. Le supplément de revenu garanti et les allocations au conjoint versées aux personnes âgées, les montants reçus en vertu du programme de supplément de revenu au travail, les montants reçus en vertu du programme d'allocations-logement pour personnes âgées, ce ne sont pas des montants qui sont caractéristiques des gens à haut revenu. Probablement que ces gens-là, qui reçoivent ces revenus de transfert-là, sont déjà admissibles à la bourse, mais ça paraît quand même curieux dans une orientation, dans un texte d'orientations gouvernementales, de retrouver des mesures de cette nature-là quand le principe premier du régime, c'est d'aider les gens qui sont en difficulté financière.

Pour terminer rapidement sur la question de la contribution parentale, on a remarqué à l'étude du document vert d'avril 1989, les orientations du gouvernement, que dans tous les cas types illustrés dans le document, il n'y a que des familles qui ont des enfants au postsecondaire. Comment se fait-il qu'on n'ait pas mis des cas types de familles qui ont des enfants au primaire et au secondaire et qui vont être pénalisés par la recommandation 2? Par ailleurs, dans le tableau où on voit l'impact des ajustements ou des coupures, à la fin du document, on n'a pas chiffré l'effet de la recommandation 2. Le fait qu'on ne considère plus les enfants du primaire et du secondaire dans le calcul de la répartition, ça va être une coupure importante et nous, on n'a pas les chiffres pour l'évaluer. Or, on serait intéressés à connaître ces chiffres-là pour savoir quel est l'effort réel que le gouvernement consent au chapitre de la contribution parentale.

Les mesures pour la contribution du conjoint sont excellentes.

À la recommandation 7, on parle de tenir compte d'une contribution minimale fixe selon l'ordre d'enseignement. Pour nous, ça ne tient pas assez compte des situations individuelles. En fait, il y a des jeunes qui vont faire des revenus moindres que cette contribution-là et qui vont être pénalisés par la mesure.

Pour ce qui est de la recommandation 11, là encore, de demander une contribution minimale au candidat qui effectue un retour aux études après avoir été sur le marché du travail, on comprend que ces gens-là ne sont pas nécessairement ceux qui sont financièrement les plus défavorisés du régime. Mais on se demande, dans le contexte actuel de fréquents aller et retour entre le marché du travail et l'école, si on est bien avertis d'éliminer les incitatifs au retour aux études, parce que, dans le projet de réforme, il y a deux coupures qui portent sur les incitatifs de retour aux études dont celle qu'on voit à la recommandation 11.

On avait des commentaires sur les frais de transport, mais ce n'est pas majeur.

La recommandation 16, le retrait de la prime de 22 $ par semaine au budget du candidat qui a été deux ans sur le marché du travail, voilà un autre incitatif au retour aux études qui disparaît et on se demande pourquoi pénaliser les jeunes qui cherchent à s'en sortir.

À la page 23, on a brièvement soulevé l'allocation pour les étudiants venant des régions périphériques. Actuellement, il y a des primes de 400 $ pour les étudiants de ces régions-là, mais ça mène à des situations un petit peu inéquitables. Par exemple, il y a des gens qui vont partir de Rimouski pour aller étudier à Montréal, parce que le programme ne se donne pas dans leur région, et ils n'ont pas le droit à l'allocation. Les gens de Montréal qui vont à l'Institut de marine de Rimouski... Les gens des régions périphériques qui se déplacent ont droit, mais les gens des centres urbains qui se déplacent n'ont pas droit. Pourtant, ils parcourent la même distance. Alors, nous, ce qu'on proposait plutôt, c'est que, dès que le programme ne se donne pas dans la région où l'étudiant réside, on lui octroie l'allocation, la prime de 400 $ par année.

Pour ce qui est du comité d'appel, on trouve que c'est une bonne mesure. Il faudrait au moins une autre instance pour que les étudiants fassent valoir leurs droits. On avait souligné dans le mémoire que le nombre de plaintes au Protecteur du citoyen avait connu une croissance assez importante au cours des dernières années. Même si on parle de quelque 384 plaintes sur l'ensemble des bénéficiaires, ce n'est pas énorme en pourcentage, mais il y a quand même une croissance à ce niveau-là.

Pour ce qui est de l'ouverture du régime aux étudiants à temps partiel, on considérait que c'était la seule mesure vraiment innovatrice de la réforme et on apprend que ça va être reporté à une date indéterminée, en tout cas si je me fie à ce que j'ai lu dans les journaux, et ça, on trouve ça un peu dommage parce que, même dans le document d'orientations, le gouvernement souligne qu'il y a 26 % des étudiants à temps partiel qui connaissent des difficultés financières actuellement avec des frais de scolarité qui sont de l'ordre de 540 $ par année. Comment ces gens-là vont-ils arriver lorsque les frais de scolarité vont monter de 130 % ou de 156 %, comme c'est prévu actuellement? Bien sûr, on dit toujours que les adultes à temps partiel ont des revenus moyens de 33 000 $, ce qui est exact, mais on oublie les cas extrêmes. Il y a des gens qui ont des revenus beaucoup plus élevés que ça et il y a des gens qui ont des revenus inférieurs. Alors, nous, on trouvait que c'était vraiment une mesure innovatrice qui aiderait les gens et on pense qu'on est tout à fait fondés de demander son application.

Pour ce qui est de la recommandation 19, l'excellence et la remise de dette, nous, on pense que c'est une recommandation qui relève plus de la performance scolaire que des besoins financiers réels et c'est une mesure qui va favoriser surtout les jeunes qui sont sans responsabilité familiale, qui ont beaucoup plus de chances de terminer leurs études dans les délais prescrits que, par exemple, une mère qui est chef de famille monoparentale avec trois enfants qui réussit à faire une maîtrise dans deux ans de plus que les délais prescrits. Est-ce que cette femme-là n'a pas fait preuve d'autant d'excellence qu'un jeune qui n'a pas du tout d'obligations familiales?

Pour ce qui est de la recommandation 20 sur le remboursement de la dette, c'est une excellente mesure qu'on salue.

La recommandation 21, c'est une mesure concernant les programmes d'entraînement sportif qui touchera peu de personnes. On est contents

que le projet de loi l'ouvre aux candidats aux études postdoctorales et aux stages, mais on se demande si c'est bien au régime de prêts et bourses à assumer ces frais-là. On pense que le régime devrait toujours être basé sur les besoins financiers réels des étudiants et que, s'il y a d'autres ministères qui veulent l'appuyer, que ce soit au niveau de la culture, au niveau des sports, ils devraient payer les intérêts sur la dette des étudiants qui sont dans des programmes sportifs ou dans d'autres types de programmes. (15 h 30)

La recommandation 22, la durée de l'admissibilité, on est conscients que dans d'autres provinces la durée de l'admissibilité à la bourse est moins grande, mais on trouve que c'est une mesure qui est extrêmement pénalisante. On nous indique que ça va être des coupures à la bourse de l'ordre de 9 000 000 $, qu'il y a environ 3000 étudiants qui vont voir leur bourse diminuer de 2850 $ et on va leur donner un prêt à la place. On trouve que cette mesure-là est très pénalisante pour les étudiants et on en demande le retrait.

Pour ce qui est de la recommandation 24, la diminution des pénalités, il était temps qu'on diminue ces pénalités-là de 50 % pour les jeunes qui remettent leur formulaire de prêt en retard; c'était purement excessif. Mais, même à 25 %, on trouve que c'est trop élevé. Je signale que le Protecteur du citoyen, à plusieurs occasions, avait relevé cet aspect-là. On pense qu'on ferait beaucoup mieux, étant donné que la production tardive des demandes ne cause pas tant d'ennuis à la Direction générale de l'aide financière, de prévoir une pénalité symbolique. Je ne sais pas si on se rend compte qu'une pénalité de 25 % dans le budget d'un étudiant au niveau des prêts et bourses, c'est énorme. Le 50 % actuel était purement excessif, à notre avis.

Je voudrais terminer en soulignant quelques points du projet de loi et particulièrement les critères qui mènent au statut d'autonomie qu'on retrouvent à l'article 4. Les critères qui mènent au statut d'autonomie étaient dans les règles d'application; on les retrouve aujourd'hui dans le projet de loi, mais on retrouve aussi des reformulations Par exemple, à l'alinéa 9, on parle d'une période de 24 mois, plutôt que de deux périodes de douze mois consécutifs, comme dans les règles actuelles. À notre avis, ça va avoir pour effet de retirer le statut d'autonomie à un certain nombre d'étudiants.

À l'alinéa 9, encore, on parle aussi d'avoir résidé ailleurs que chez les parents. Dans les règles d'application actuelles, il n'y avait pas de notion de résidence On estime qu'on est en train de réduire encore l'accès au statut d'autonomie par le biais de cette reformulation.

Sur la notion qu'on trouve d'avoir subvenu à ses besoins, là on avait une question. On se demandait si, pour le gouvernement, les prestataires d'aide sociale sont considérés comme des gens ayant subvenu à leurs besoins. Parce qu'a l'alinéa 10, on cite nommément les gens qui ont eu des prestations d'assurance-chômage, donc ces gens sont couverts, mais on se demandait si ça avait pour effet d'exclure les assistés sociaux.

Par ailleurs, dans les règles d'application actuelles, à la section VIII, on retrouvait un certain nombre de cas qu'on appelle les cas sociaux... Oui?

La Présidente (Mme Hovington): Le ministre voudrait savoir à quelle page de votre mémoire vous êtes.

M. Beauregard: Ce sont des notions qu'on n'a pas mises dans le mémoire parce qu'on l'a produit avant que le projet de loi ne soit déposé.

M. Ryan: Est-ce que je pourrais l'avoir? M. Beauregard: Pardon?

M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait l'avoir, puisqu'il y a des choses intéressantes là-dedans?

La Présidente (Mme Hovington): Est-ce que vous pourriez le déposer, ce que vous êtes en train de lire?

M. Beauregard: J'ai fait un commentaire que je n'avais pas écrit. Je pourrais toujours vous faire parvenir ces commentaires par écrit dans de très brefs délais.

La question qu'on s'est posée, c'est que, dans le document d'orientation du gouvernement, on n'annonçait pas une restriction au statut d'autonomie En tout cas, sauf erreur de notre part, on n'a pas vu ça et on se demande si les formulations actuelles n'auront pas pour effet de réduire le nombre de prestataires ou de bénéficiaires qui vont avoir le statut d'autonomie, ce qui a un impact considérable sur l'argent qu'ils reçoivent.

Il y avait aussi les cas sociaux que je voulais soulever. À la section VIII des règles d'application, il y avait des cas sociaux, par exemple des jeunes dont les parents étaient introuvables. Il y avait des dispositions qui disaient qu'on pouvait toujours considérer un statut de non-résidence ou réduire la contribution parentale de ces gens. On ne les retrouve pas dans le projet de loi. On se demandait ce qui arrivait avec ces cas particuliers.

Je vais terminer avec le nouveau chapitre sur les dispositions pénales. On a remarqué qu'il y avait un nouveau chapitre à ce sujet dans la loi et que, de façon générale, les dispositions pénales qui sont prévues sont de même nature que celles qui étaient dans la loi 37, la Loi sur la sécurité du revenu. Mais la question qu'on s'est posée, c'est la suivante. À la page 13 du projet de loi, à l'article 48, il y a une présomption de bonne foi pour les vérificateurs du

gouvernement. On dit: "Le Vérificateur ne peut être poursuivi en justice pour des actes accomplis de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions. " Ce qui nous semble tout à fait correct. Quand on arrive aux dispositions pénales, celles qui touchent les conseillers en aide financière dans les institutions, à l'article 55, on formule ça différemment. On dit: "Toute personne qui, par son acte ou son omission, en aide une autre à commettre une infraction à la présente loi est coupable de cette infraction comme si elle l'avait commise, si elle savait ou aurait dû savoir que son acte ou son omission aurait comme conséquence probable d'aider à la perpétration de l'infraction. " On se demande pourquoi il n'y a pas eu une présomption de bonne foi pour les conseillers en aide financière qui travaillent dans le réseau.

Voilà, globalement, les remarques que nous voulions faire sur le...

Mme Côté: Si je résume un peu, M. Ryan, parce que vous n'étiez pas là au début, je pense qu'on salue, le fait qu'il y ait un certain effort de bonification du régime, notamment par certaines mesures, comme l'ouverture aux étudiantes et étudiants ou aux adultes à temps partiel, mais la mesure n'est pas appliquée et il faudrait savoir quand elle va s'appliquer. Cependant, on aimerait ça que vous ventiliez les 18 000 000 $ et, entre autres, tout le volume à la bourse qui, selon nous, a diminué et ne sera pas rattrapé malgré l'injection d'argent. Comparativement à ce qui se passait en 1985-1986, il y aura encore un déficit de 10 %.

On pense aussi que le Québec n'a pas fini son rattrapage au plan de la scolarisation postsecondaire, qu'il faut que ça se continue et qu'on ne peut pas invoquer la comparaison avec les autres provinces. Au Québec, c'est différent et il faut en tenir compte aussi. On pense aussi que toute la considération des enfants du primaire et secondaire dans le calcul de la contribution parentale devrait revenir dans le projet de loi, tel que c'était avant. La disparition des mesures incitatives de retour aux études, on croit qu'il faut en tenir compte parce que, comme disait François et comme je vous le disais au début, la réalité des jeunes a changé et il faut aussi prendre les moyens pour que cette réalité se traduise dans les mesures qu'on met de l'avant.

Quant à toute la réduction de la période d'accessibilité et l'aide à la performance par rapport au délai prescrit, je crois que le meilleur service qu'on puisse rendre aux jeunes, ce n'est pas de les forcer à entrer dans un délai prescrit en disant: "Ensuite, vous aurez une remise de votre dette", mais c'est de prendre les moyens pour que les jeunes qui ont de la difficulté, soit au cégep ou à l'université, puissent avoir un support et puissent le faire dans un temps raisonnable et qui tient compte de leur réalité aussi.

Enfin, je voudrais, M. Ryan, souligner un élément qui n'est pas dans notre mémoire, mais qui devrait être souligné parce qu'on va profiter du débat pour vous dire qu'il y a quand même une clientèle de jeunes, qui sont les jeunes en formation professionnelle au secondaire, qui n'ont pas accès à ce régime-là, et la question devrait être considérée. Nous avons une recommandation du congrès qui nous demande de faire des représentations auprès du gouvernement pour inclure cette clientèle dans le régime d'aide financière aux étudiantes et étudiants.

Cependant, elle a été votée dans les années 1985-1986. La formation professionnelle n'avait pas vécu ce qu'elle a vécu et certaines réalités, entre autres d'harmonisation jeunes-adultes, font en sorte que nous aimerions faire le tour de cette question-là parce qu'il n'y a qu'une seule étude qui existe, au Québec, c'est une étude de l'ENAP. Nous serions donc disposés, comme Centrale de l'enseignement du Québec, à faire partie d'un comité d'étude qui essaierait de regarder toute la réalité de la dimension financière des jeunes en formation professionnelle au secondaire, soit pour en arriver à les inclure dans le régime et à quelles conditions, soit pour bonifier l'aide à la pension qui est actuellement donnée à ces jeunes.

Donc, je vous dis tout de suite que vous recevrez une lettre de la Fédération des enseignantes et enseignants et qu'ils vous demanderont une rencontre pour essayer de regarder cette question. Nous voulions profiter de l'occasion pour vous en parler. Je crois que les implications et l'impact demandent que nous fassions le tour de la question mais, étant donné que l'objectif de la journée était l'aide financière aux étudiants post-secondaires, nous soulevons la réalité et nous aimerions que ce soit traité subséquemment. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Mme la Présidente, je salue avec plaisir la présence des représentants de la Centrale de l'enseignement du Québec, tout d'abord en raison de l'importance sociale de cette Centrale, qui regroupe la très grande majorité des enseignants de notre secteur public, primaire et secondaire, et aussi des travailleurs d'autres secteurs, en particulier, un nombre important de travailleurs de l'enseignement dans le secteur collégial. Je les salue aussi avec un intérêt particulier, étant donné que nous avons également hâte, de part et d'autre, de voir les négociations qui se poursuivent toujours entre la Centrale, la partie patronale et, partie intégrante, le gouvernement, pour le renouvellement des conventions collectives dans le secteur de l'enseignement public, primaire et secondaire... Je pense que nous avons réglé la très grande

majorité des dossiers relatifs à la négociation. Il reste une question qui, malheureusement, nous sépare et, au rythme où vont les choses, je pense que je prendrai l'initiative de proposer une solution à mes collègues de la partie patronale, de manière qu'on puisse peut-être l'envisager plus tard.

Mais je souhaite qu'on puisse régler ce problème-là rapidement, parce que je pense que nous avons établi des dispositions nombreuses qui permettent d'innover, de faire face à des réalités nouvelles, en particulier dans un secteur comme celui de l'enseignement professionnel de niveau secondaire dont vous avez parlé. Je pense que les nouvelles dispositions sur lesquelles il y a accord entre les deux parties sont de nature à favoriser la souplesse qui s'impose dans ce secteur-là, si on veut que la réforme produise des fruits. Je mentionnais, ce matin, la disposition en vertu de laquelle il y aura allégement sensible de la tâche de l'enseignant qui oeuvre en première année du niveau primaire. C'est un point très important qui avait été soumis à notre attention avec une insistance spéciale. Je pense qu'on a apporté une solution qui est extrêmement intéressante, dont le coût sera évidemment assumé par le gouvernement. Alors ça, c'est une deuxième raison, en tout cas, pour laquelle je suis très heureux de la rencontre de cet après-midi.

Je veux assurer la Centrale de l'enseignement du Québec, en ma qualité de ministre de l'Éducation, que je continue à veiller sur ces négociations avec une attention particulière. Le point qui reste en litige, comme vous le savez, relève de la table centrale et non pas de la table où nous étions ensemble Je ne veux pas adresser quelque blâme que ce soit en faisant cotte nuance mais, en tout cas, je pense qu'en semble, en travaillant, nous pouvons trouver une solution aux problèmes qui restent également, comme nous l'avons fait pour les autres. J'apprécie énormément l'esprit dans lequel s'est déroulée la négociation. Je pense qu'il y a eu, de part et d'autre, des échanges francs et loyaux qui n'ont donné lieu, en cours de route, à pratiquement aucune distorsion dans les déclarations publiques, à partir des moments qui ont suivi les arrêts de travail de septembre. Je pense qu'on a eu une expérience qui a été extrêmement enrichissante et ça vaut la peine de le souligner.

J'ajoute une troisième raison, là, qui me rend particulièrement heureux d'être ici, cet après midi, je pense que c'est la qualité du mémoire qui nous est soumis. Je pense que le mémoire que vous nous présentez est entièrement centré sur l'objet du travail de la commission. Il n'y a pas d'excursus, qui pourrait être intéres sant mais qui n'ajouterait rien à l'examen que nous sommes censés faire du projet de loi 25. Toutes les observations portent expressément sur des dispositions du projet de loi 25. Nous ne sommes pas d'accord sur tous les points, mais je crois pouvoir dire que vous avez parfaitement saisi les intentions du gouvernement. Vous en faites une critique fort pertinente et je me ferai un grand plaisir de commenter avec vous certains points que vous soulevez dans vos observations.

Il y a un grand nombre de points. L'énoncé des orientations qui fournit la matière première du projet de loi 25 contient, je pense. 22 ou 24 recommandations - en tout, là, j'oublie toujours le chiffre.

Une voix: 24.

M. Ryan: 24 recommandations. C'étaient plus que des recommandations, c'étaient des orientations acceptées par le gouvernement. Évidem ment, il y a une distinction que je dois faire tout de suite. Il y a certaines de ces orientations qui trouveront leur confirmation dans le règlement qui accompagnera le texte de la loi. Le règlement, dans ce cas-ci, est presque aussi important parce que c'est lui qui définira les quanta des contributions, en particulier, et c'est là qu'on pourra vérifier, de manière définitive, la portée exacte des mesures qu'entend instituer le gouvernement. Comme je l'ai déjà dit en commission, nous ne pouvons pas déposer ce projet de règlement avant que le gouvernement ait fait connaître ses intentions budgétaires, à la fois par le livre des crédits et par le discours sur le budget. Dès que ces étapes auront été franchies, je crois pouvoir affirmer que nous serons en mesure de saisir la population et les parlementaires du texte des règlements projetés, dont la rédaction, en ce qui nous touche, est très avancée.

Alors, ceci étant dit, je voudrais commenter brièvement certaines de vos observations et peut être m'arrêter, en cours de route, pour vous poser une ou deux questions. Je me dispense de commentaires sur les articles où vous vous dites d'accord avec le gouvernement. Je pense que ce serait très intéressant pour moi, mais je ne veux pas abuser de votre présence parmi nous et je veux surtout rester agréable à l'Opposition jusqu'à la fin des travaux de la commission. (15 h 45)

M. Gendron: M.le ministre, vous savez bien que je vais le faire, ça

Des voix: Ha, ha, ha! M. Ryan: Ha, ha. ha!

M. Gendron: Vous savez bien que je fais toujours ce bout-là. Je ne suis pas obligé.

M. Ryan: Alors, sur la première recommandation, je n'ai pas de commentaires. Sur la deuxième, vous dites qu'il faudrait indexer annuellement les paliers de la table de contribution des parents. C'est une chose que nous envisageons de faire. Par conséquent, il y a cette précision que je suis heureux d'apporter, une

nouvelle fois, à la commission. Vous demandez que le premier palier des contributions, qui actuellement est de zéro à 1000 $, soit augmenté possiblement d'une somme de 500 $. C'est une recommandation qui est tout à fait digne d'examen et sur laquelle nous allons nous pencher. J'ai fait faire des vérifications préliminaires par mes collaborateurs et collaboratrices de la Direction de l'aide financière aux étudiants, et ce n'est pas une perspective que nous excluons. Je pense que les représentations qui sont soumises ici sont bien fondées.

Vous demandez de rétablir la prime hebdomadaire de 22 $ pour les personnes dont les parents ont des ressources financières inférieures aux dépenses admises. Ce qui arrive là-dessus... Cette prime n'a pas été supprimée; elle a été, en fait, transférée à l'aide sociale. Là, elle sera versée, disons, dans ces cas-là, aux parents de ces étudiants par le truchement de l'aide sociale. Il nous est apparu que si les parents n'ont vraiment pas ce qu'il faut, c'est à eux que devrait être destinée cette aide par le truchement de l'aide sociale. Évidemment, comme vous le savez, quand l'aide vient de ce côté-là, bien, il y a une partie de 50 % qui est financée par le gouvernement québécois et, l'autre partie, par le gouvernement fédéral en vertu de la Loi sur le financement des programmes établis.

À la troisième recommandation, vous vous étonnez que certains revenus soient exclus pour les fins du calcul des ressources des parents tandis que d'autres sont inclus. Dans le cas des revenus qui sont exclus, ça, ça va entièrement avec l'exemption pour la valeur de capital des investissements. On porte la valeur de 50 000 $ à 90 000 $ et on exclut les revenus qui pourraient venir se greffer à ça ici: les parties non imposables des gains de capital qui peuvent être enregistrés à la suite d'une vente, évidemment, les amortissements déduits à l'égard d'édifices à logements, le tiers du montant des dividendes reçus. Les autres, on les inclut: le supplément de revenu garanti, le montant reçu en vertu du programme Supplément de revenu de travail et les montants reçus en vertu du programme d'allocations-logement. Suivant le principe que le gouvernement n'est pas supposé faire la même contribution deux fois, s'il a fait celles-là, il doit en tenir compte dans le calcul d'une nouvelle contribution qu'on attend de lui sous la forme du régime des prêts et bourses. Peut-être qu'à ce moment-là on peut parler d'améliorer le niveau de la contribution gouvernementale, la deuxième fois, mais il faut qu'on tienne compte d'abord de tout ce qui a été reçu de source publique québécoise.

Alors, il y a toute une série de recommandations. Je vais jusqu'à 7 ensuite où, ici, vous demandez qu'il... Nous proposons, nous autres, de demander à l'étudiant une contribution minimale fixe selon l'ordre d'enseignement. Vous dites être contre cette recommandation et vous proposez de maintenir le mode de calcul actuel. Est-ce que je pourrais vous demander quelques explications là-dessus?

M. Beauregard: Tout de suite? M. Ryan: Oui.

M. Beauregard: Oui. Selon le mode de calcul actuel, il y a une contribution de base qui est établie. Lorsque l'étudiant a un revenu inférieur à cette contribution-là, on calcule son revenu plus 40 % de la différence. Et lorsqu'il a un revenu supérieur, on calcule la contribution de base plus 50 % de la différence, ce qui permet un peu d'ajuster la contribution au niveau du revenu des étudiants. Et, comme on le sait, d'une région à l'autre, les taux de chômage sont très différents chez les jeunes et il y a des jeunes qui vont se voir pénalisés là-dedans. Il y a des jeunes qui vont avoir une plus grande contribution que la contribution de base et, là, ils vont se voir donner une contribution minimale, donc, ils vont en bénéficier. Et ceux qui en ont moins, bien, ils vont être un peu pénalisés par cette mesure-là. J'ai très bien compris l'objectif d'éliminer les lourdeurs administratives et d'augmenter l'efficacité du système. En ayant une contribution minimale, le traitement des dossiers est plus rapide. Mais notre point de vue là-dessus, c'est que ça, c'est une chose, traiter les dossiers rapidement, mais respecter les situations individuelles en est une autre.

M. Ryan: Si M. Boisvert, le directeur général de l'aide financière, m'assure qu'à toutes fins utiles la formule que nous allons instituer est à peu près identique à celle que nous avons déjà et qu'il n'y aura, par conséquent, pas de modifications vraiment significatives... Alors, si vous voulez des précisions, M. Boisvert vous les fournira volontiers. Je ne pense pas qu'il y ait de problème ici, comme, je pense, dans plusieurs autres recommandations qui ne créent pas de problèmes majeurs, nous en sortîmes très heureux.

Ah oui! la recommandation 11! Là, nous demandons à l'étudiant qui revient du marché du travail une contribution minimale, comme à n'importe quel autre candidat à l'aide financière; ça nous apparaît une mesure d'équité. Il nous est apparu, à l'expérience, que, contrairement à ce que nous pensons, ce traitement spécial donné à l'étudiant qui revenait du marché du travail n'était pas justifié plus que dans le cas de l'étudiant ordinaire. C'est pour établir un principe d'équité, ici. Vu que nous n'avions pas de raison vérifiée de maintenir un traitement distinct, nous avons conclu que mieux valait le traitement commun. Maintenant, s'il y a des preuves à nous apporter... On peut bien dire, en théorie: C'est sûr, on pourrait instituer une allocation de 50 $ pour tout le monde. D'attrait, ça irait bien. Mais s'il y avait des éléments de

preuve à nous apporter, qui seraient de nature à influencer notre jugement, nous serions disposés à les entendre, évidemment.

Les allocations de garde aux enfants. Vous signalez, à juste titre, que l'allocation hebdomadaire est portée de 64 $ à 50 $. Évidemment, c'est un ajustement qui est fait avec l'aide sociale, vous le savez. Maintenant, en retour, nous avons fait disparaître le plafond actuel. Ça veut dire qu'une famille qui aurait plusieurs enfants pourrait dépasser le plafond actuel et qu'il n'y aurait pas de limites à la contribution qu'elle pourrait recevoir de ce côté-là. Alors, c'est l'esprit de la mesure. Je ne sais pas s'il y a des remarques...

Ensuite, au chapitre des frais de transport, vous émettez une critique qui nous intéresse particulièrement parce que, moi-même, j'ai des doutes sur la formule qui est actuellement proposée. Nous sommes en train de réexaminer nos positions sur ce point-là. Il y avait des défauts dans la formule que nous avons retenue et nous allons essayer de faire mieux. Si des suggestions précises peuvent nous être adressées là-dessus, nous en prendrons connaissance avec intérêt.

L'autre. Là, nous commençons par les lunettes, là: nous financerons l'achat de lunettes non . seulement pour l'étudiant mais également pour les enfants de l'étudiant. C'est sûr que ce serait intéressant de pouvoir financer également les soins dentaires. Question de finances, le gouvernement n'a pas les ressources, actuellement, pour ouvrir ce volet-là, mais nous prenons note de la recommandation qui est formulée dans un esprit éminemment social.

Ensuite, vous vous opposez à ce que nous retirions la prime de 22 $ par semaine accordée jusqu'à maintenant au candidat qui a été sur le marché du travail lorsque ce dernier, pendant ses études, réside chez ses parents. Je vous redonnerais un petit peu l'explication que je fournissais tantôt. Nous n'avons pas remarqué, dans l'expérience des dernières années, que cette allocation répondait à un besoin davantage démontré chez cette catégorie d'étudiants que chez les étudiants en général. Par conséquent, il nous est apparu que mieux valait redistribuer l'argent qui était dépensé là entre l'ensemble des bénéficiaires du régime.

Il y a une remarque intéressante que vous faites: Pourquoi n'aurait-on pas, dans les dépenses admissibles, certaines catégories qui tiendraient compte des dépenses d'équipement professionnel? C'est un point intéressant. Je ne sais pas... Avez-vous des commentaires à faire là-dessus, M. Boisvert? C'est une chose qu'on est disposés à considérer, ça. J'ai donné l'exemple de l'étudiant en photographie, c'est un bon exemple On a de cet enseignement au niveau des cégeps et c'est sûr que ça coûte, en équipement, beaucoup plus cher que pour étudier d'autres disciplines.

Vous parlez du comité d'examen, vous l'appelez "comité d'appel". Ce n'est pas exactement un comité d'appel, il y a toutes sortes d'appellations qui ont été proposées et, finalement, on a retenu "comité d'examen", si mes souvenirs sont bons. Quoi qu'il en soit, comme vous êtes généralement d'accord là-dessus, je n'insisterai pas davantage. Il y a seulement un point qui m'a frappé au cours des auditions de la commission. On dit: Ce comité-là n'aura pas un pouvoir décisionnel. Je pense que vous l'aurez noté. Il fera des recommandations au ministre, lequel prendra la décision. J'ai dit à mes collaborateurs: Oui, mais si c'est une décision administrative qui est mise en question et que le fonctionnaire s'entête, ne veut pas la changer, est-ce qu'il ne devrait pas y avoir un droit de recours? Mais vous savez ce que mes fonctionnaires m'ont répondu? Que ça n'arrivait pas, des choses comme celles-là, et je les ai crus sur parole, évidemment.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Ha, ha, ha! Dans notre service, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier. Les députés le savent, ici, et je ne pense pas qu'il y ait un député qui n'a pas eu recours au cabinet du ministre, une fois ou l'autre, pour un cas d'aide financière aux étudiants, quand il y a la moindre irrégularité qui semble s'être produite En général, on prévient le député ou on écrit directement au ministre et ces problèmes-là se règlent d'une manière qui est très correcte, très efficace. Ça évite de créer toute une autre bureaucratie. Moi, j'ai seulement une personne qui s'occupe de ça à mon bureau. Elle a une excellente collaboration de la Direction de l'aide financière et il y a une symbiose qui s'est faite entre les deux; je m'excuse d'employer une expression un peu chargée de sens, mais juste en l'occurrence. Alors, je pense qu'on a ce qu'il faut pour faire face à ces cas-là et je ne serais pas enclin à instituer un autre mécanisme. Mais celui-ci, c'est pour répondre aux cas nombreux d'étudiants qui ne tombent pas sous la lettre des règlements ou des dispositions administratives et qui auraient souvent plus droit à une aide que d'autres qui tombent sous la lettre des règlements.

Ici, vous demandez pourquoi la Direction générale n'est pas représentée. Je vous dirais de ne pas trop vous inquiéter pour elle, parce qu'elle rôde toujours autour. Elle n'est pas à la table ici, mais elle est très proche et elle ne souffrira pas beaucoup d'hérésie de la part du ministre Je pense que, de ce côté-là, les choses sont bien assurées.

La remise de dette. Ça, vous m'avez étonné Je ne sais pas si on s'est bien compris là-dessus Je termine là-dessus, Mme la Présidente La roiv.iso de dette, vous vous opposez à la mesure que nous envisageons qui consisterait à donner

une réduction de dette de 25 % à l'étudiant qui termine ses études de maîtrise ou de doctorat dans les délais impartis. Vous dites: II ne faut pas mêler l'aide financière avec l'excellence. On ne touche pas à l'aide financière. L'aide financière continue comme si de rien n'était. Mais à la fin, nous autres, on est obligés de se dire: Celui ou celle qui a fait ses études dans les délais réguliers sauve de l'argent à la communauté par rapport à celui dont les études ont duré deux ou trois ans. Celui qui a eu deux sessions de plus, on ne le pénalise pas pour autant. Mais qu'on donne une prime à celui qui a été un petit peu plus vite, qui a fart montre de diligence dans un système où il semble qu'on a été habitués à se hâter avec lenteur, ce n'est peut-être pas une mauvaise chose. J'aimerais ça, avoir votre explication. Ça couvre une autre mesure également.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez la parole.

M. Beauregard: Rapidement, je voulais revenir sur la question de la prime de 22 $ par semaine. On nous informe que c'est transféré à l'aide sociale maintenant, mais que faire avec les candidats, les parents qui ont le salaire minimum et qui ne reçoivent pas de prestations d'aide sociale et qui ont des ressources disponibles négatives? Ça, c'est la première question qu'on avait. Par ailleurs, les conseillers en aide financière dans les institutions nous disent qu'ils ont appris ce changement des règles d'application quand ils ont vu les certificats de prêts et bourses arriver et que les bénéficiaires n'ont pas eu de lettre pour leur indiquer qu'il y avait une coupure, que l'année dernière ils avaient droit à cette prime-là, qu'ils n'y avaient plus droit maintenant, mais que leurs parents pouvaient faire des démarches à l'aide sociale. En tout cas, il y a au moins quatre, cinq conseillers en aide financière à travers le réseau qu'on a consultés et ils nous ont tous dit qu'il n'y avait aucun bénéficiaire qui avait été informé de cette mesure-là. Alors, si on veut que les gens aient droit aux mesures qu'on leur propose, il faudrait que les gens soient correctement informes.

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y. Mme Côté: Sur la prime à...

M. Ryan: Si vous me permettez, Mme la Présidente, je vais finir avec ceci. À la fin de votre exposé, vous avez mentionné toute une série de points qui n'étaient pas dans le texte de votre mémoire. J'ai vérifié avec mes collaborateurs et à peu près tous ces points-là vont trouver une réponse satisfaisante soit dans certaines modifications au texte du projet de loi, soit dans le texte du règlement. Ils sont à peu près tous prévus. Je pense que les points que vous avez soulevés sont des points très justes.

M. Beauregard: Je comprends votre intervention dans le sens de dire que le gouvernement n'a pas l'intention de restreindre les critères qui mènent au statut d'autonomie.

M. Ryan: Non, celui-là, non. Celui-là, je pense qu'il faudrait qu'on le vérifie de bien proche. Je ne peux pas vous donner une déclaration générale comme celle-là. Il faudrait que vous me demandiez sur quel point. Mais vous avez mentionné cinq ou six sujets à la fin. (16 heures)

M. Beauregard: C'est à l'article 4 du projet de loi, aux paragraphes 9°, 10° et 11°. Je pourrais en discuter avec d'autres...

M. Ryan: Le travail en l'air, deux périodes de douze mois, c'est ça, à temps plein?

M. Beauregard: Tu as les deux périodes de douze mois, la notion de résidence, la notion d'avoir subvenu à ses besoins... Parce que dans un projet de loi, quand on énumère les gens qui sont admissibles, ceux qui ne sont pas énumérés, là, ça devient difficile de les couvrir après.

M. Ryan: II y a des corrections qui sont envisagées ici. Comme on le disait, il faut qu'ils travaillent à temps plein. Mais qu'est-ce que c'est, à temps plein? C'est très difficile de le définir, on va laisser tomber ça. On parlait de deux périodes de douze mois. Bien là, ça va être au moins deux ans. Ça va être tout pris ensemble comme c'était. Il n'y aura pas le changement qui était envisagé de ce côté-là. Mais ça, c'est à titre d'exemple. Si vous voulez d'autres précisions, je vous recommanderais peut-être de causer avec M. Boisvert qui va vous donner les informations supplémentaires que je ne peux pas vous donner, faute de temps.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. D'ailleurs, nous avons empiété d'au moins six minutes sur le temps de l'Opposition.

M. Gendron: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): M. le porte-parole de l'Opposition, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Comme d'habitude, on empiète toujours sur le temps de l'Opposition mais, comme le ministre était tellement heureux, d'abord, de signaler qu'il était content que la CEQ soit ici - il nous a expliqué trois motifs de son état de joie - alors, ça ne me faisait rien de laisser un peu plus de temps additionnel, parce que c'est rare qu'on le voit dans un état d'allégresse comme ça avec la CEQ.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Alors, pour les fois que ça passe, il faut en profiter. Alors, je salue Mme Côté...

La Présidente (Mme Hovington): Merci de votre générosité.

M. Gendron: ...ainsi que les gens qui l'accompagnent. Juste deux commentaires sur les notes introductives du ministre. Il disait tantôt qu'il était bien content parce que, enfin, les négociations s'étaient conclues avec la CEQ, et il a même indiqué qu'il avait l'intention de prendre l'initiative, hein, Mme Côté?

Mme Côté: Oui, j'ai noté.

M. Gendron: J'espère que vous lavez noté, mais j'espère que vous souhaitez qu'il arrête d'en parler et qu'il la prenne parce que...

Mme Côté: Ça, je n'ai pas le droit.

M. Gendron: Non, mais moi, j'ai le droit. Alors, moi, j'en profite pour dire qu'effectivement la meilleure façon de conclure les négociations, c'est de poser ces gestes qu'il faudrait poser pour mettre fin une fois pour toutes à la négociation avec les secteurs public et parapu-blic, y incluant le secteur des enseignants. Et moi, je suis très heureux, effectivement, que les négociations semblent avoir permis d'améliorer la condition enseignante. Tant mieux! Par contre, là, c'est moins le temps de veiller, comme il l'a dit, de continuer à veiller plutôt que de prendre une décision. Je pense que ça a assez duré. On reçoit des lettres d'à peu près toutes les associations syndicales de comté, de la CEQ de même que de l'Alliance des professeurs de Montréal, disant: Y a-t-il moyen que le gouvernement soit convaincu qu'à partir du moment où on a conclu plusieurs éléments majeurs, bien, on n'arrive pas à reculer sur un principe qui était acquis pour ne pas finaliser les négociations?

L'autre commentaire, en vous disant: Bravo! je suis content... Vous, vous avez parlé uniquement de la bonification de l'aide financière aux étudiants, c'est-à-dire le régime d'aide financière aux étudiants universitaires. Vous n'avez pas mêlé l'autre question. Moi, je ne peux pas être aussi heureux que lui parce que, de toute façon, s'il ne voulait pas qu'on traite des deux sujets, il avait juste à procéder autrement C'est lui qui s'est enferré, comme ministre, dans la décision, en décembre, en disant: Écoutez, je vais essayer de faire passer le dégel en masquant cette réalité dure pour le monde étudiant sous prétexte d'une bonification flaml>oyante du re financière. Alors, tout ce qu'on a vu depuis une semaine et demie, je vous dis que, mise à part la bonification retardée pour les temps partiel, il n'y a pas de quoi faire une démonstration d'allégresse, pendant trois semaines, comme si c'était une réforme sans précédent de l'aide financière. Je ne peux pas me gargariser aussi fort qu'il ne l'a fait, surtout que la mesure la plus mordante, la plus significative, c'est celle qui ne s'appliquera pas. Alors, moi, je vais vous dire tantôt, je l'aurais dit un peu plus fort, mais je vais y revenir.

Le ministre s'est mis à commenter les mesures que vous avez faites en disant qu'il s'agissait d'un excellent mémoire, et là, il a raison. On s'entend parfaitement parce que de mémoire, et j'ai vu plusieurs opinions de la CEQ sur différentes questions qui ont été débattues ici, c'est très rare que la Centrale de l'enseignement du Québec vienne ici et qu'elle n'ait pas un mémoire articulé, étoffé, fouillé, où on sent qu'elle traite des questions qui l'intéressent d'abord, qui correspondent à des préoccupations qu'elle manifeste au fil des jours et des semaines, où elle indique le souci qu'elle a de voir améliorer non seulement la condition enseignante, mais celle de ceux qui la subissent, et les premiers bénéficiaires, ce sont les enseignants. Donc, ce sont des questions qui vous intéressent et, encore là, votre mémoire fait la preuve que vous avez traité ces questions-là avec énormément d'attention, toujours dans ce même esprit de vouloir aider le législateur à mieux faire ses devoirs, et dans le présent cas, c'est toujours requis. C'est toujours requis avec ce gouvernement-là de l'aider à faire ses devoirs. Ils sont toujours assez mal faits, il faut les reprendre à plusieurs reprises.

Sur votre mémoire comme tel, le ministre a omis, en commençant ses remarques, de commenter, à la page 3 - et je tiens à vous le dire, le ministre n'en a pas parlé pantoute, ça ne fait pas son affaire - quand vous dites... Par rapport aux objectifs complémentaires, il y en a au moins deux sur trois sur lesquels il n'a émis aucun commentaire et c'est volontaire. Quand la CEQ a fait la preuve que l'aide offerte aux étudiants québécois... Pour eux - ce gouvernement-là - quand on veut dire que ça se compare avantageusement a ce qui est offert ailleurs, ça veut dire une réduction, par le bas, du régime. Il faut se le rappeler. Se comparer aux autres, ça veut dire le moins possible. Dans ce sens, comme notre régime était plus avantageux, c'est évident que lorsqu'on inverse les proportions prêts-bourses, ça a comme conséquence d'endetter les étudiants davantage et de réduire le régime d'aide financière et ce n'est pas comme ça qu'il devient comparable avec ce qui se passe à l'étranger. Ça fait leur affaire de dire en commission parlementaire: II faut se comparer aux autres. Tout le monde pense que ça veut dire une bonification du régime Dans notre cas, ça veut dire une réduction des bénéfices de l'aide financière et vous l'avez très bien dit dans votre mémoire. C'est évident, comme c'est vrai,

que je ne peux pas aller plus loin sur cet objectif.

Sur l'autre objectif, le troisième, promouvoir la continuité et la persévérance dans les études tout en incitant les bénéficiaires à compléter leurs études dans les délais normaux, toujours par notion d'équité, il me semble qu'il faut garder l'objectif, même si vous avez une opinion qui semble être différente. Je comprends, par exemple, les explications que vous avez données, c'est qu'on ne peut pas faire des politiques mur à mur, ce n'est pas pareil partout. Votre exemple était pertinent, surtout quand vous avez donné l'exemple d'une mère de famille qui fait une maîtrise, mais qui prend deux ans de plus parce qu'elle a d'autres préoccupations et qu'elle a d'autres obligations surtout, souvent, que la société lui fait. Elle peut être aussi méritoire de la faire en deux ans de plus. Même si, moi, j'applique ce raisonnement à quelque chose d'autre, je comprends que ce n'est pas quelque chose qu'on peut baliser d'une façon définitive et dire: II devrait y avoir un délai fixé, et que tout le monde a la vérité parce que ce serait le gouvernement qui fixerait le délai. Ça, c'est une question d'opinion; donc, je ne veux pas commenter plus.

À la page 6, j'aurais aimé ça entendre le ministre. C'est pour ça que ça ne me fait rien de ne pas avoir tout le temps, mais j'espère que, Mme Côté, vous reviendrez là-dessus ou M. Beauregard, peu importe. À la page 6, il y a quand même là une suggestion qui, en ce qui me concerne, m'apparaît fondamentale quand vous dites qu'il sort ajouté un troisième principe qui stipulerait qu'aucune contribution parentale ne pourrait être exigée pour des familles dont le revenu se situe sous le seuil de pauvreté Que ce soit habillé autrement je m'en fous; qu'il y ait un autre verbatim, ce n'est pas grave, mais le principe que le gouvernement n'ait rien à dire sur un principe aussi fondamental... Parce qu'une des remarques qui nous est faite et constamment répétée, c'est ça, c'est qu'il y a un certain nombre d'étudiants qui ont dit: Tu vas avoir tant de prêt ou tant de bourse parce qu'on exige de tes parents tant d'argent. D'abord, pas dans certains cas, dans la plupart des cas les étudiants concernés ne touchent presque jamais concrètement à la contribution parentale et, dans certains cas, il est complètement farfelu, illusoire et irresponsable d'exiger de certains parents au Québec une contribution parentale et de continuer à dire: Nous, on est d'accord avec l'accessibilité et nous, on est d'accord qu'aucun étudiant au Québec ne puisse être en mesure de faire la preuve qu'on lui a empêché la poursuite des études de niveau universitaire après le collégial, alors qu'on sait très bien qu'avec une telle mesure... Et le ministre n'avait rien à dire là-dessus. Il n'a pas dit un mot là-dessus, alors que ça m'apparaît un des éléments les plus fondamentaux de votre mémoire, sur l'aspect de l'aide financière aux étudiants, parce que vous n'avez pas traité des frais de scolarité. Mais j'espère que dans les quelques minutes qu'il restera, Mme Côté ou M. Beauregard, vous demanderez au ministre à quelle enseigne il loge à ce chapitre.

Aux pages 9, 10, 11, 12, le ministre dit: Écoutez, je suis content, vous avez parié juste d'aide financière. Il ne sait pas lire ou il l'a lu vite, parce que, aux pages 9, 10, 11, 12, c'est très clair, vous parlez des problèmes de fond: déficit de fréquentation scolaire, déficit de diplomation par rapport à l'étranger. Donc, vous resituez exactement à la même place que tous les autres intervenants la nécessité, si le ministre persiste dans sa volonté de dégeler les frais de scolarité. Vous redites ce qui a été dit par tous les intervenants: premièrement, ça ne règle pas le sous-financement chronique des universités; deuxièmement, on va encore avoir un écart plus grand au niveau de la diplomation; troisièmement, ça va avoir des incidences sur l'accessibilité et ce n'est pas le temps encore de se permettre ça parce qu'on a trop de recul. En tout cas, il y avait quatre pages qui traitaient de ça, c'est pour quelqu'un qui se donne la peine de les lire.

Les recommandations, rapidement. La recommandation 2, moi, je trouve, encore là, que vous avez raison de dire que, dans la façon de modifier la table de contribution des parents, il y a là comme une philosophie de gouvernement. J'espère que vous l'avez lue, mais il faut la reprendre, ce gouvernement n'a jamais eu beaucoup, beaucoup d'inquiétude pour sa clientèle la plus fondamentale et, règle générale, ce sont les plus munis de la société, pas les plus démunis. Et on le voit très bien dans la recommandation 2 quand vous faites l'application que, et je vous cite: "Un calcul des pourcentages d'indexa-tion selon les ressources disponibles nous montre que les familles ayant un revenu disponible de 1000 $ verront leur contribution réduite de 16, 7 % alors que les familles ayant un revenu disponible de 6000 $ verront leur contribution diminuée de 32, 3 %". Pour moi, c'est le monde à l'envers, c'est évident que c'est le monde à l'envers, c'est ce que vous avez voulu signaler et j'espère que le ministre regardera ça à nouveau.

J'ai deux questions sur la recommandation 18, parce que je vous l'avais dit que je reviendrais là-dessus, sur les temps partiel. J'ai un commentaire avant de poser la question. J'aurais trouvé que ç'aurait été une belle occasion pour dire: Puisque sur l'ajout ou la bonification des temps partiel, c'est ce qu'il y avait de plus signifiant dans la modification de la réforme, il aurait fallu le garder, parce qu'à partir du moment où on enlève ce qu'il y avait de plus signifiant, moi, je suis porté à dire qu'il ne reste plus grand-chose sinon l'insignifiance, nuançable. Il y a des choses qui sont importantes, mais ce n'est pas une réforme, ce n'est pas majeur. J'aurais aimé ça que la CEQ dise: Écoutez, nous,

on ne comprend pas, on ne comprend pas du tout pourquoi le ministre recule là-dessus.

Donc, la question que je vous pose - parce que vous l'avez entendu, le ministre a dit: Je ne suis pas prêt - pouvez-vous imaginer, vous qui connaissez le milieu, les motifs sérieux, crédibles sur lesquels le ministre peut s'appuyer pour dire qu'il ne met pas en vigueur les dispositions concernant les temps partiel? Vous, en avez-vous trouvé dans votre réflexion? Avez-vous trouvé quelque chose sur lequel le miiiistre pourrait s'appuyer, qui vous apparaîtrait crédible, pour ne pas mettre en vigueur ces dispositions-là?

Mme Côté: Sur cette question, nous, vous savez, on a mentionné dans notre mémoire que toute la réalité du temps partiel, c'était vraiment une ouverture qu'on considérait comme intéressante et qu'on considérait comme étant un pas dans la bonne direction. Cependant, avez-vous remarqué, partout où on en parle, on dit que c'est bien dommage, mais c'est une mesure qui ne s'appliquera pas. Finalement, les 26 % des jeunes qui attendent ça pour pouvoir poursuivre leurs études, parce que notre mémoire dit qu'il y a 26,4 % des jeunes qui ont besoin de cette aide, on a actuellement un pourcentage de 26 % de jeunes à temps partiel en danger. On croyait que la mesure permettrait que ce danger-là soit au moins éliminé. Je crois que c'est important de le souligner.

Tout à l'heure, M. Ryan, ce dont je me suis rendu compte, c'est qu'il avait vraiment lu le mémoire, notre mémoire, puisqu'il a, au passage, signalé: Nous avons tenu compte. Alors, j'aurais espéré qu'il dise: II y a deux éléments dont on va considérer la question: d'abord, les gens à temps partiel. Et j'aurais aimé ça aussi qu'il dise: Si notre volume d'aide à la bourse est inférieur à ce qu'il était dans les années 1985-1986, au-delà de la bonification, ces 10 % de déficit, on va injecter un certain montant d'argent pour pouvoir y répondre. C'est une réponse que je n'ai pas eue.

Je crois aussi, pour répondre à ce que vous dites, M. Gendron, que l'élément - je considère que M. Ryan a un peu passé par-dessus - c'est toute la réflexion qu'on fait sur la réduction du volume d'aide à la bourse. Oui, c'est vrai qu'on se rend compte qu'il y aura une plus grande disponibilité de prêts, mais la bourse va être diminuée. On considère que ça va avoir un effet sur l'endettement. Les jeunes qui auront accès aux deux réalités seront encore plus endettés et ceux qui n'ont accès qu'au prêt auront un endettement encore plus élevé. Alors, je crois que c'est une réalité importante et ce n'est pas pour rien qu'on a dit qu'on avait un déficit de 10 % par rapport à 1984-1985. C'est parce qu'on sait qu'il y a des mesures administratives qui ont fait en sorte que, depuis quatre ans, il y a eu une coupure. Il y a eu des coupures d'aide à la bourse parce que les règlements - et ça, c'est l'autre bout que je voulais dire à M. Ryan -nous, on le sait, souvent, sont plus dangereux, entre guillemets, dans le concret, que le projet de loi lui-même. Vous dites: Les règlements, nous ne les sortirons qu'après le budget Je comprends ça. Cependant, les personnes que nous avons consultées, qui sont des gens qui travaillent concrètement avec les jeunes - comme je vous dis, on n'a pas voulu parler d'en haut, on a voulu parler à partir du monde en bas - nous disaient qu'entre autres certaines directives qui arrivent en cours d'année, certains règlements qui sont très bien définis restreignent le droit à l'aide financière. Je pense que ces règlements vont être très importants et on va quand même les surveiller. (16 h 15)

M. Gendron: D'autant plus, Mme Côté, avant d'aller plus loin, et j'en profite pour l'annoncer à tout le monde, là, que, dans votre mémoire oui, une annonce importante et ce n'est pas contre vous, là - il faut se rappeler qu'à la page, en tout cas je ne sais trop quoi, mais à l'annexe I, concernant le tableau sur le volume des nouveaux prêts, volume de bourses, le volume total et le pourcentage du volume de bourses, vous aviez correctement mentionné les chiffres pour 1988-1989, mais sur la barre du "P", le "P" voulait dire les données prévisionnelles. Alors nous, entre-temps, on a ajusté ça, et là ce n'est plus sur des prévisions, c'est sur des faits, et vous avez une bonne idée de ce qui s'est passé: c'est pire que ce qu'on avait prévu, évidemment. Alors, le pourcentage du volume de bourses qui était prévisionnel à 40,2 % est baissé à 38,7 % Donc, il n'y a que 38,7 % du volume de l'aide totale qui est versé en bourses, comparativement à environ 50 %, il y a quelques années. Ça fait toute une réduction. Et ça, c'est vraiment ce que j'appelle la vérité corrigée, là. Oui, c'est important de vous signaler ça, parce que ça, c'est la réalité des chiffres observés, non plus les prévisions, mais ce qui s'est passé dans les faits

J'ai rapidement deux autres questions, pour que ma collègue ait l'occasion d'en poser au moins une Dans la recommandation 17, sur le comité d'appel, vous mentionnez que vous avez des réserves quant à sa composition Vous mentionnez également qu'il y aura beaucoup de boulot à faire, compte tenu du nombre de plaintes qui a particulièrement augmenté. Comme vous le disiez tantôt, le chiffre comme tel n'est pas important, mais le doublage est important Que les plaintes aient doublé, ça commence à être grave. Il se passe quelque chose. Moi, la question que je vous poserais est la suivante Moi, il me semble que, partout où il y a des comités d'appel, règle générale, il n'y a pas un autre pouvoir discrétionnaire ou dérogatoire du ministre Et comme vous n'aviez pas l'air, clans d'autres dossiers, d'être des tenants farouches de cette fâcheuse habitude qu'a le ministre de toujours se donner un pouvoir de dérogation à

peu près sur toutes les règles qu'il édicté, ou qu'il instruit dans ses divers prônes au cours des années, est-ce que vous n'avez pas là une opinion à savoir qu'il me semble que ça devrait rester au niveau du comité d'appel? Si c'est un comité d'appel et que c'est administratif, il y a deux choses: c'est là et ça reste là ou il n'y a pas de comité d'appel et on continue à faire ce qui se passe, on se lamente auprès du ministre. Alors, c'est quoi votre point de vue? J'aimerais ça que vous l'habilliez un peu plus, votre recommandation.

M. Beauregard: On avait beaucoup de problèmes avec la question du comité d'appel. On ne voulait pas empêcher les étudiants d'avoir un recours supplémentaire, étant donné les difficultés qu'ils éprouvent actuellement à faire valoir leurs droits. On se dit: Quatre personnes du grand public... Mais on n'a pas voulu entrer dans les détails techniques de la composition du comité, parce qu'on se disait: II me semble que le gouvernement devrait consulter les associations étudiantes pour voir quels devraient être les mécanismes. On n'a pas voulu, disons, avoir une attitude paternaliste envers les associations et leur dire: Bon, voici, vos problèmes devraient être réglés de telle façon. Nous, ce qu'on s'est contenté de dire - et c'est certain qu'on aimerait mieux qu'il y ait un comité décisionnel là - c'est: Les responsables d'aide financière qui travaillent chez nous, je suis certain qu'ils ont un engagement assez fort envers leur travail pour participer à toute solution qui va viser à améliorer le système.

Mais ce qu'on nous dit aussi, c'est qu'il semble qu'au ministère, depuis qu'on a exercé de nombreuses coupures dans les années quatre-vingt, les fonctionnaires ont beaucoup moins de marge de manoeuvre dans l'interprétation des règles d'application. Mais il y a les règles et il y a les humains qui sont dans ton bureau, qui ne rentrent pas dans la liste X et dont il faut tenir compte. Qu'est-ce qui va se passer à ce comité d'appel? Les professionnels, quand il y a des professionnels, parce qu'il y a des cégeps où il n'y a pas de professionnel à l'aide financière, vont faire un plaidoyer où ils vont, d'une part, regarder les règles et, d'autre part, essayer de faire valoir l'aspect humain ou l'aspect inhumain de la décision. Autrement dit, la marge de manoeuvre qu'avaient peut-être autrefois ceux qui s'occupaient de la révision des régimes, bien, elle va être transposée dans ce comité-là.

M. Gendron: ...le temps.

Mme Côté: Quant au deuxième volet de votre question, excusez-moi, je pense que vous connaissez les positions de la CEQ par rapport au pouvoir discrétionnaire du ministre. Nous croyons que, s'il y a un sujet qui arrive à l'oreille de M. Ryan, il va sûrement trouver une réponse. Cependant, on croit qu'il ne faut pas en échapper, donc qu'il faut des mécanismes qui fassent en sorte que l'ensemble des jeunes du Québec, que ceux qui sont lésés dans leurs droits puissent avoir un mécanisme qui soit le même pour tout le monde. C'est sûr que M. Ryan va sûrement écouter la demande, mais une personne peut faire en sorte qu'on en échappé 99.

M. Gendron: Rapidement, est-ce que vous ne croyez pas qu'un pouvoir comme celui-là, il ne serait pas mieux qu'il soit ailleurs qu'au ministère de l'Éducation? Par exemple, avez-vous un avis... Si on l'envoyait au Protecteur du citoyen, ça serait quoi votre avis?

Mme Côté: Ça, on l'avait regardé. Tout ce qu'on dit, c'est qu'il y a du monde chez nous qui travaille, nos professionnels à l'aide financière. Une chose est certaine, c'est qu'on considère qu'il faut qu'il y ait quelque chose, mais non pas un pouvoir directement lié entre le ministre et la demande à son bureau. Ça, c'est clair.

M. Gendron: Merci.

Mme Côté: Là-dessus, la réponse de M. Ryan ne nous satisfait pas. Ça, c'est clair.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, il vous reste deux minutes, Mme la députée de Chicoutimi, assez rapidement.

Mme Blackburn: Bien. Je vous remercie, Mme la Présidente. Un très bref commentaire. En relisant les débats de la commission parlementaire sur l'étude des crédits du 29 avril 1986, j'ai retrouvé les premisses de la politique du ministre en matière d'accessibilité. Je me permets de vous les lire parce qu'on constate que, pour certaines questions, il a beaucoup de suite dans les idées. Parlant du déficit des universités, il disait: "Nous ne voulons pas être mis devant le fait accompli, parce qu'il m'apparaît assez paradoxal que, d'un côté, on multiplie la publicité et les démarches pour recruter de la clientèle, comme si on était une entreprise en pleine expansion, et qu'en même temps, de l'autre côté, on aille se lancer dans des déficits." Et il concluait le paragraphe en disant: "Je ne veux pas qu'on nous mette devant des faits accomplis, fût-ce au nom des idéaux les plus nobles." Pour lui, un idéal, telle l'accessibilité, devait être soumis aux disponibilités budgétaires. Et je constate que, quand il nous dit que ce n'est pas dramatique qu'on en perde 5 %, il est assez fidèle à ce que, déjà, il nous annonçait en 1986.

Une question en ce qui a trait à l'accessibilité aux prêts et bourses qui serait limitée, c'est-à-dire à la bourse qui serait limitée selon la durée des études. L'objectif, c'est que les étudiants terminent le plus rapidement possible leurs études dans des délais dits normaux.

Voulez-vous me dire au nom de quelle logique, si c'est l'objectif qui est poursuivi, on pourrait trouver souhaitable cette pratique, cette politique qui ne touche que le tiers des étudiants qui ont effectivement accès aux prêts et bourses, et non pas les 66 % des autres? Est-ce que ça ne vous apparaît pas être un préjudice, si ce n'est un préjugé, à l'endroit des étudiants bénéficiaires de l'aide financière?

La Présidente (Mme Hovingtor.}: M. Beaure-gard.

M. Beauregard: On avait clairement signalé dans notre mémoire que cette réduction de la période d'accessibilité à la bourse nous apparaissait discriminatoire, parce qu'on cherche à régler le problème de l'allongement des études, auquel faisait allusion le Conseil des universités dans son avis, mais en ne pénalisant que les étudiants qui sont bénéficiaires de bourses, donc les plus démunis. Est-ce que le dilettantisme ou le manque de maturité supposé à l'allongement des études n'est le fait que des gens qui ont les plus bas revenus? On met ça sérieusement en doute.

Mme Côté: ...sur lequel on est en désaccord. La Présidente (Mme Hovington): Mme Côté.

Mme Côté: Oui, excusez-moi. La remise de la dette, c'est un principe qu'on ne veut pas du tout voir apparaître dans un régime de prêts et bourses. Nous croyons que si on veut récupérer... D'abord, nous croyons que le gouvernement a raison de dire: II faut prendre les moyens pour que les jeunes s'inscrivent dans un cheminement normal, pas prescrit mais normal. Cependant, nous croyons que, l'argent que le gouvernement voudra aller récupérer, doit le prendre et le mettre pour essayer d'aider les jeunes à l'école. Notre objectif, nous autres, c'est de garder les enfants à l'école, ce n'est pas de trouver des moyens pour les éliminer. Par conséquent, je pense qu'il y a toute une espèce de courant par rapport à la performance et nous n'en voulons pas. Ça, c'est clair et ça répond aussi à votre deuxième question qui est: Pourquoi ces jeunes là seraient-ils soumis à une règle précise et que d'autres n'y seraient pas sous prétexte qu'ils paient entièrement leurs études?

La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Côté. Alors, c'est tout le temps dont on disposait. Vous voulez conclure, rapidement? D'accord.

M. Gendron: Merci beaucoup. Sincèrement, c'est un bon mémoire et vous avez d'excellentes suggestions. Toujours le même souci en ce qui me concerne, c'est que le ministre s'en occupe.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. Ryan.

M. Ryan: La distance qui nous sépare étant plutôt réduite, d'après ce que j'ai lu en tout cas, je pense bien qu'on va tenir compte des suggestions qui nous ont été données, en ce sens qu'on va les étudier sérieusement. S'il y avait des précisions à apporter sur l'un ou l'autre point que vous avez soulevé, ça nous intéressera d'en prendre connaissance aussi. J'ajoute juste un bref commentaire, en terminant, sur le rapport entre la bourse et le prêt, quand vous dites: On s'en va du côté du prêt, c'est effrayant, et tout. Ce n'est peut-être pas exactement comme ça. Peut-être que les chiffres agrégatifs peuvent conduire à de fausses impressions. Dans le cas de l'individu bénéficiaire, de l'étudiant bénéficiaire, j'ai des statistiques ici qui établissent que chez ceux qui bénéficient d'une bourse, la bourse représente aujourd'hui 50 % de l'aide totale, alors qu'en 1986-1987, c'était 56,7 %. Il n'y a pas eu une variation aussi grande que peuvent le laisser penser les chiffres agrégatifs.

Vous allez me demander: Comment cela se fait-il? Bien, la raison est dans la diminution du nombre de personnes qui ont soumis des demandes pour l'année 1988-1989. Les demandes de bourses - attendez un petit peu - représentent 6000 demandes de moins. Aussi, c'est normal qu'il y ait eu moins de bourses attribuées. S'il y a eu 6000 demandes de moins, c'est normal que le total des sommes versées en bourses soit moins élevé également, mais le bénéficiaire individuel, lui, reçoit plus, et je pourrais vous donner des statistiques sur le montant de la bourse moyenne. En 1986-1987, il était de 2548 $ et, cette année, il est de 2827 $, alors que le prêt, lui, était à 1949 $ et est monté à 2280 $. La différence n'est pas aussi considérable que le laissent entendre les interprétations qui peuvent être superficielles. Alors, je mentionne ces données-là pour montrer que, si l'on pousse plus loin l'analyse, on va trouver que la situation comporte peut être des facteurs qu'on serait tentés d'ignorer. Cela se comprendrait quand ça vient de l'Opposition, mais d'un organisme sérieux comme la CEQ, on est sûr que c'est une chose qui va faire l'objet d'un examen attentif.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre. Alors, il me reste à vous remercier...

M. Gendron: C'est vous qui avez la parole, là.

Une voix: Ha, ha, hal

La Présidente (Mme Hovington): ..de votre excellent mémoire et, au nom de tous les membres de cette commission, merci beaucoup de

nous avoir apporté un éclairage nouveau.

Je demanderais au Comité national des jeunes du Parti québécois de bien vouloir prendre place immédiatement. Nous allons suspendre une minute pour vous laisser le temps...

(Suspension de la séance à 16 h 27) (Reprisée 16 h 31)

Comité national des jeunes du Parti québécois

La Présidente (Mme Hovington): Si on veut bien prendre place, nous allons reprendre nos travaux. Bonjour et bienvenue au Comité national des jeunes du Parti québécois. Si vous voulez bien vous présenter aux fins de la transcription des débats, s'il vous plait.

M. Facal (Joseph): Oui, bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre, bonjour à M. Gendron qui se joindra à nous, incessamment sans doute, et bonjour à tous les autres ici présents. Je me présente ainsi que les gens qui m'accompagnent. Je suis Joseph Facal, président des jeunes du Parti québécois. Immédiatement à ma droite, donc à votre gauche, Henri Lahaie, qui est conseiller et qui va parler plus spécifiquement du projet de loi 25; immédiatement à ma gauche, donc à votre droite, André Turmel, qui est le vice-président aux affaires politiques du comité et qui va parler des frais de scolarité et, à mon extrême gauche, Cleo Palacio-Quintin, qui est la trésorière du comité des jeunes et qui va conclure sur les mesures spécifiques que nous prônons.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Allez-y.

M. Facal: Merci beaucoup, madame. Dans un premier temps, je vous remercie d'avoir bien voulu nous recevoir et nous écouter. Chaque fois que les jeunes du Parti québécois ont eu l'occasion de réaffirmer leur attachement au principe de l'égalité des chances et de la démocratisation, nous avons saisi cette chance et, aujourd'hui, c'en était une. Voilà donc ce qui explique un petit peu notre présence ici. Soyez assurés, dans un premier temps, que nous venons ici avec une absolue bonne foi, sans aucune animosité et l'esprit aussi ouvert que possible. Nous ne sommes pas ici pour une bataille de chiffres. Vous comprendrez aisément que, dans un dossier comme celui-ci, on trouve assez de chiffres divergents pour étayer à peu près n'importe laquelle position. La partie gouvernementale a les siens, que nous ne remettrons pas en cause. Nous avons les nôtres et la chose est ainsi faite.

Dans un premier temps, je voudrais dire qu'assurément la décision d'un étudiant de poursuivre ou d'arrêter ses études n'est pas uniquement fonction de ses ressources financières. Celles-ci sont un obstacle parmi d'autres. Mais il nous est apparu vital, et depuis aussi longtemps que nous existons, d'affirmer que ce type d'obstacle, qui n'est pas le seul, je le répète, devrait être éliminé dans la mesure du possible. Par ailleurs, on sait que l'actuel régime d'aide financière n'a pas subi de modifications notables depuis sa mise en place et il nous apparaît qu'aujourd'hui, le temps est peut-être venu de nous demander s'il répond encore bien à l'objectif qu'il s'était initialement donné, soit de donner à tous des chances égales. Sauf qu'évidemment, pour nous, le régime d'aide financière, les frais de scolarité et le financement des universités sont trois thèmes indissociables, en quelque sorte, trois facettes d'une même problématique. Et voilà pourquoi nous présentons un point de vue global et non une simple discussion étroite et technique des 24 mesures de l'énoncé gouvernemental que vous trouverez en annexe à notre mémoire.

J'espère que cette façon de procéder ne choquera personne. Avouez, entre vous et moi, que ça ne vous étonne sans doute pas que nous venions ici pour parler également des frais de scolarité. Par ailleurs, nous connaissons les principaux problèmes qui sont actuellement en toile de fond dans l'enseignement supérieur québécois. L'accès aux études universitaires est beaucoup plus fréquent chez les Québécois de langue anglaise que chez ceux de langue française, et on ne le répète pas assez. Le gouvernement a assurément ses chiffres, nous avons les nôtres qui disent qu'entre l'âge de 20 et 24 ans 25,9 % des Québécois de langue anglaise sont à l'université, alors que seulement 14,9 % de Québécois de langue française la fréquentent. Nous savons aussi qu'un élève du secondaire dont le père est ouvrier, manoeuvre, fermier a, en moyenne, deux fois moins de chances de parvenir à l'université qu'un enfant dont le père est cadre moyen ou administrateur. Nous savons aussi qu'il se décerne au Québec, proportionnellement, deux fois moins de diplômes de maîtrise et de doctorat qu'aux États-Unis et 30 % de moins qu'en Ontario.

Je n'insisterai pas - tout le monde l'a fait - sur l'état de sous-financement chronique de nos universités et sur l'impact que cela a sur leur équipement, le recrutement des chercheurs, les bibliothèques, etc. Je n'ai pas non plus besoin, à ce stade-ci du moins, de m'étendre sur le phénomène de l'endettement des étudiants dans un contexte général où le marché du travail se resserre tellement pour les jeunes qu'ils n'ont même plus l'assurance que les sacrifices consentis pendant la durée de leurs études vaudront la peine quelques années plus tard. Je n'insisterai pas non plus sur l'évolution défavorable du ratio prêt-bourse depuis quelques années dont les précédents intervenants ont fait mention. Tout cela est connu. D'autres ici avant nous l'ont dit.

Voilà pourquoi, selon nous, il faut évaluer le projet de loi à la lumière de ce qu'il fait ou ne fait pas pour non pas solutionner ces problèmes, mais, à tout le moins, les reconnaître, les admettre et les confronter. C'est cela, si vous le voulez, notre grille d'évaluation du projet de loi. En quoi trouve ton là-dedans quelque chose qui, à tout le moins, reconnaisse, admette les problèmes?

Un dernier point avant de passer la parole à mon collègue. Tout récemment, plusieurs de ces éditorialistes et chroniqueurs qui, souvent, se prennent pour l'opinion publique au Québec, de même que certains représentants du milieu des affaires, ont tenu des propos qui accréditent l'image des étudiants comme étant des jeunes qui, ne se rendant pas compte à quel point ils sont privilégiés, feraient preuve, en rejetant la réforme et le dégel, d'égoïsme, de mesquinerie, de corporatisme ou d'une déplorable tendance à ne pas voir les choses telles qu'elles sont ni à se remettre en question. Vous me permettrez de déplorer ces propos que je juge tendancieux et faux. Il est absolument injuste de dire que les étudiants ne seraient pas conscients du contexte budgétaire global Nous reconnaissons le sous-financement. Nous l'admettons d'autant que nous en voyons quotidiennement les effets sur nos conditions d'études. Nous l'admettons.

Il y a quelques jours, je pense, il y a deux jours, j'entendais le ministre à une émission d'affaires publiques dire: Lors de la commission parlementaire, les étudiants viennent m'expliquer leur point de vue et je leur explique la réalité. Vous vouliez sans doute dire votre réalité, M. le ministre, car personne, et assurément pas nous, ne prétend avoir le monopole de la vérité. Nous ne sommes pas des enfants gâtés et soyez assuré que nous sommes prêts à faire notre part. Et oui, la question de la contribution étudiante peut et doit être légitimement posée. Ce que nous acceptons mal, c'est qu'on refile à nous seuls et sans nous consulter le fardeau d'un déficit dont nous ne sommes pas responsables puisqu'il est la conséquence directe des décisions prises par tous ceux qui nous ont précédés et pas uniquement vous, j'en conviens. Plusieurs générations ont profité de notre système tel qu'il est. Ils l'ont poussé au maximum, en ont profité autant que possible et maintenant qu'il n'est plus tenable, qu'ils n'en ont plus besoin, ils refilent la facture à ceux qui suivent. C'est eux qui osent nous dire que c'est nous les égoïstes. Mais c'est une farce monumentale! Ils ont le front de nous faire la morale alors qu'ils voyaient bien pendant toutes ces années vers où nous conduisait ce laisser-aller.

Bref, nous en avons gros sur le coeur et je m'excuse si ça paraît. Je pense que notre amertume et notre colère sont légitimes. Alors, nous sommes donc ici, M. le ministre, non seulement pour exposer notre point de vue, mais aussi pour poser des questions auxquelles nous voudrions bien humblement qu'on essaie de nous répondre parce que cette commission est pour nous pratiquement le seul forum que nous aurons pour poser ces questions. Je voudrais qu'on s'efforce de nous répondre. J'espère que nous pourrons y venir dans la partie échange qui suivra tout à l'heure. Alors, sans plus tarder, après cette peut-être trop longue introduction, je passe la parole à Henri Lahaie qui va parler plus spécifiquement des technicités du projet de loi 25 et de ce que nous en avons pensé.

M. Lahaie (Henri): Mme la Présidente

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez la parole. Allez-y.

M. Lahaie: Merci. Quand, dans les principes de base de la réforme de l'aide financière, le gouvernement affirme que le régime doit favoriser l'accessibilité aux études postsecondaires, les jeunes du Parti québécois sont d'accord avec lui. Toutefois, le projet de loi 25 qui est présenté à la population du Québec ne répond pas du tout au problème d'une plus grande accessibilité aux études supérieures. De plus, le projet ne semble pas vouloir toucher les aspects essentiels du régime qui nécessiteraient certaines améliorations. Nous croyons que le gouvernement aurait dû tenter avec vigueur de répondre aux problèmes les plus criants du régime, c'est-à-dire la question de la contribution parentale, la question de l'endettement et la durée de l'admissibilité au régime. De ces trois problèmes, on sait très bien que les parents ne contribuent pas, dans 60 % des cas, aux études de leurs enfants, que l'endettement prend des allures faramineuses et que la durée d'admissibilité au régime favorise les plus aisés à entreprendre et compléter des études au niveau de la maîtrise et du doctorat au détriment des plus défavorisés qui, en bénéficiant des sessions d'aide au baccalauréat, peuvent se voir privés d'aide financière au deuxième mais surtout au troisième cycle. Ça, c'est dû au maximum d'aide auquel on a droit pendant nos études.

Le projet de loi 25 introduit trois nouveautés au régime actuel, soit l'aide financière aux étudiants à temps partiel, la création d'un comité d'examen des demandes dérogatoires et la remise de 25 % de la dette à la suite de l'obtention de diplôme dans les délais prescrits. Outre l'accroissement de certaines exemptions et indexations, les principes de la contribution parentale, pour fins de calcul de l'aide, sont maintenus. De plus, rien ne laisse penser à un rééquilibre du ratio prêt-bourse qui aurait permis d'alléger le fameux phénomène de l'endettement d'étudiants. Malgré l'aspect novateur de certaines mesures énoncées dans le projet de loi 25, les jeunes du Parti québécois craignent qu'elles n'aient pas les effets escomptés. L'aide financière aux étudiants à temps partiel est certes une mesure intéres-

sante, mais cet énoncé demeure à l'état de principe et laisse planer un doute quant aux modalités d'application très largement déterminées par réglementation. Il est à se demander quand ce programme sera instauré. En ce qui a trait au comité d'examen des demandes dérogatoires, certains éléments de son fonctionnement, de ses pouvoirs et de sa composition nous semblent obscurs. N'oublions pas que ce comité est sans pouvoir réel puisqu'il n'a aucun droit décisionnel. Les recommandations du comité seront acheminées au ministre pour la décision finale. Autrement dit, c'est le ministre qui décide du sort de l'étudiant. De plus, notons que les membres de ce comité seront nommés par le ministre.

La proposition d'accorder une remise de 25 % de la dette contractée à l'intérieur du régime des prêts à l'étudiant qui aura complété son programme d'études dans les délais prescrits semble alléchante et ouvre une avenue intéressante. Toutefois, la proposition, telle que formulée dans le projet, limite d'elle-même sa portée réelle puisque seules les dettes contractées pendant les études de deuxième et troisième cycles seront sujettes à la remise. D'autre part, la proposition ne tient pas compte des limites du nombre de sessions pendant lesquelles les étudiants peuvent bénéficier de l'aide dans le cadre du régime actuel. De plus, le concept de délais prescrits est évasif et laisse suggérer un caractère indûment restrictif qui ne tiendrait nullement compte des réalités.

De plus, comment peut-on croire à une plus grande accessibilité aux études postsecondaires quand, par le projet de loi 25, on propose de réduire les périodes d'accessibilité à la bourse? En fait, c'est sept sessions d'aide en bourses que le gouvernement donne en moins aux étudiants poursuivant des études du premier, deuxième et troisième cycles universitaires. En plus, un étudiant qui avait décidé de faire dans son parcours universitaire un deuxième baccalauréat sera désormais pénalisé de onze sessions. Le projet de loi maintient toutefois les périodes actuelles d'accessibilité aux prêts, mais à quelle sorte de prêts l'étudiant peut-il s'attendre? Là, le projet est très flou. Nous nous questionnons à savoir si ce prêt sera soumis à un plafond, ce qui créerait un manque à gagner pour les étudiants ou s'il couvrirait le montant normalement obtenu, à la fois en prêts et en bourses; ce dernier scénario créerait un niveau d'endettement assez extraordinaire pour les étudiants bénéficiant de cette modalité.

Enfin, après l'utilisation de son nombre de sessions maximum d'aide en bourses, l'étudiant aux ressources financières insuffisantes se verra sûrement contraint à quitter ses études, ceci remettant en cause la volonté d'accessibilité invoquée par le projet de loi. En outre, que penser de la volonté de retirer la prime de 22 $ par semaine au budget du candidat qui a été sur le marché du travail lorsque ce dernier, pendant ses études, réside chez ses parents? Par cette mesure, le gouvernement privera ces étudiants d'une somme de 1144 $ par année. Nous déplorons cette mesure car elle remet en cause l'accessibilité aux études à ceux qui voudraient, par un retour aux études, miser sur une meilleure éducation pour améliorer leur situation.

En définitive, Mme la Présidente, le projet de loi 25 sur l'aide financière n'est pas une réforme des prêts et bourses, mais tout au plus un rapiéçage d'éléments divers qui ne répondent pas vraiment aux récriminations des étudiants. Si l'accroissement de certaines exemptions et indexations semblait être un pas en avant vers l'amélioration du régime, certaines dispositions portant directement atteinte à l'accessibilité sont un recul face au régime actuel. Enfin, nous nous posons la question à savoir en quoi ce projet garantit l'accessibilité à l'éducation, propose de véritables solutions à l'endettement, résout le problème de la contribution parentale ou, encore, accroît l'aide financière aux étudiants.

Nous exprimons notre déception face à l'ensemble du projet de loi qui est fortement axé sur la réglementation. Cet état de fait nous empêche de connaître les limites du projet de loi. Ce dernier, sans modification réelle, équivaut à une coquille vide que le gouvernement se chargera sans doute de remplir à sa façon. Enfin, il ne faut pas se leurrer. La clé de la position gouvernementale en matière d'enseignement supérieur n'est pas le projet de loi 25, mais bel et bien l'annonce de la hausse des frais de scolarité.

Je passe maintenant la parole à M. Turmel qui parlera plus longuement de ce sujet. (16 h 45)

La Présidente (Mme Hovington): M. Turmel, il vous reste quatre minutes.

M. Turmel (André): Bon, j'essaierai d'être bref. Merci, Mme la Présidente. Comme mon collègue l'a si bien dit, notre mémoire étant présenté dans une approche globale, nous devons donc traiter succinctement de la hausse des frais de scolarité.

M. le ministre, d'entrée de jeu, nous vous répétons que nous ne songeons absolument pas à remettre en cause la participation de l'étudiant au financement de ses études. Ce contre quoi nous en avons, c'est la façon d'imposer une telle hausse qui nous semble inacceptable. Nous croyons qu'il serait utile, trente ans après le rapport Parent, de resituer l'éducation postsecondaire pour les années quatre-vingt-dix.

Alors, pour nous, une hausse des frais, comme vous le proposez, aura deux effets immédiats. Premièrement, une hausse des frais de scolarité s'accompagnera automatiquement d'une demande de prêts et bourses et, donc, augmentera les déboursés gouvernementaux. Pour nous, si le gouvernement utilise chaque dollar reçu par

l'université en frais de scolarité pour le verser en prêts et bourses, la part nette des ressources à l'université ne serait pas optimale. Donc, une hausse des frais de scolarité n'irait pas complètement à l'université. Deuxièmement, une telle hausse si subite apportera une nette diminution de l'accessibilité au réseau supérieur d'éducation.

M. le ministre, vous avez parlé de 8000 à 10 000 étudiants en moins dès l'an prochain et ceci n'est pas une catastrophe pour vous. Pour nous, c'en est une. Surtout lorsqu'un économiste de l'Université de Toronto, M. David Stager, indiquait que cette baisse pourrait se chiffrer jusqu'à 30 000 étudiants en incluant les étudiants à temps plein ainsi que ceux à temps partiel. Ceci constitue une diminution de 13 % de la population universitaire totale. Les partisans d'une hausse des frais nous disent que cette augmentation viendra résoudre le problème de la mise en péril de l'accessibilité. Pour nous, ceci est de la simple fumisterie puisque même si l'étudiant a un revenu plus élevé, il se peut quand même qu'il prenne la décision de s'instruire moins et de réallouer son revenu ailleurs. Pendant ce temps, 3 % des Québécois francophones accèdent à la maîtrise alors que c'est plus du double chez leurs collègues anglophones. Lorsqu'on parle d'accessibilité, c'est bien de fréquentation des collèges et des universités qu'il s'agit. Ce qu'on constate, c'est que depuis 1975 le Québec possède une moyenne inférieure au Canada et en Ontario pour ce qui est des adultes détenant un grade universitaire. Bien sûr, ce sont des chiffres mais ces chiffres peuvent compter quand même. Ces motifs sont assez sérieux, croyons-nous, pour se questionner sur la justesse et l'opportunité de procéder de la sorte.

Bien sûr, les universités, nous le constatons, ont besoin d'oxygène. L'étudiant, l'entreprise et l'État doivent, selon nous, contribuer au financement de l'éducation postsecondaire. Il faut se serrer la ceinture dans d'autres programmes gouvernementaux également. Le gouvernement, lui aussi, selon nous, doit être réaliste. On n'a qu'à donner l'exemple de l'hypothétique bilinguisation des panneaux de signalisation qui utiliserait des fonds qui pourraient être mieux utilisés ailleurs. Pour nous, la comparaison des frais de scolarité payés à travers le Canada est une indication et non une fin en soi. Vous qui nous remettez toujours sur le nez cette comparaison, acceptez le fait qu'au Québec, l'entreprise contribue pour 3 % du financement des universités alors qu'en Ontario, c'est 10 %. Bien sûr, vous allez nous avancer l'argument de la compétitivité de nos entreprises qui seraient surtaxées à cause d'une contribution supérieure à l'éducation postsecondaire, mais, pour nous, elle n'est pas mortelle. En effet, on peut faire le pari que des diplômés de qualité peuvent rehausser cette compétitivité si on injecte de l'argent neuf dans le réseau via la contribution nécessaire de l'entreprise.

Enfin, un impôt postuniversitaire représen- tant un pourcentage fixe du salaire pour une période à déterminer, après l'entrée de l'étudiant sur le marché du travail, semble une des alternatives intéressantes à explorer, pas dans cinq ou dix ans, mais maintenant ou le plus tôt possible. L'exemple australien semble intéressant là-dessus. Bien sûr, il s'agit d'une société lointaine et différente de la nôtre, mais avouons qu'elle a aussi des diplômés à produire pour s'assurer une place sur l'échiquier économique international, comme nous. On ne dit pas qu'on doit copier cet exemple, car le contexte peut différer quelque peu. Mais, au moins, cet exemple a le mérite d'élargir votre perspective et la nôtre.

Rapidement, traçons le portrait de ce pays Ce pays a fait face, comme nous, à un sous-financement des universités. Les frais de scolarité sont payés de la façon suivante, et les étudiants ont le choix. Premièrement, ils ont le choix de payer les frais de scolarité immédiatement, en bénéficiant d'une ristourne de 15 %. Deuxièmement, ils ont le choix de payer plus tard une surtaxe graduelle sur l'impôt sur le revenu pendant une période maximum de dix ans et ce, jusqu'à ce que les frais soient remboursés. Cette taxe n'est prélevée, bien sûr, que si l'individu gagne plus que le revenu moyen australien. De plus, le gouvernement a amélioré son aide aux étudiants et 50 % des étudiants ont droit à des bourses, contre 18 % au Québec.

Les premiers résultats nous démontrent quand même de bons résultats. Premièrement, le gouvernement a annoncé, selon des coupures de presse australiennes, des revenus supplémentaires provenant de cette taxe qui lui ont permis de stopper le déclin du financement étudiant. Enfin, le nombre d'étudiants a augmenté de 49 000 au cours des trois dernières années, soit une hausse de 15 %. En terminant, l'objectif du gouvernement australien était d'augmenter substantiellement le nombre de diplômés d'ici à l'an 2001. Avons-nous un tel objectif? On peut constater que ce gouvernement est sur la voie de réussir.

En terminant, c'est dans cette optique que ma consoeur, à ma gauche, vous fera connaître nos recommandations. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. La parole est au député de Vimont. M. le député.

M. Fradet: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir d'entendre votre position, aujourd'hui, sur le projet de loi 25, la réforme de l'aide financière aux étudiants. Malheureusement, on n'a pas eu assez de temps, j'aurais aimé entendre votre position sur les recommandations supplémentaires que vous faites à la commission. C'est de ça que je voulais vous parler surtout, parce que vous en avez quelques-unes, je pense, qui sont importantes et qui pourraient contribuer à l'amélioration de notre régime présentement.

Vous en avez une, à la page 53 de votre

mémoire, qui dit: "Que le gouvernement incite les administrateurs universitaires à mettre en place le plus rapidement possible des mécanismes d'évaluation des programmes, de l'enseignement, des services et du rayonnement socio-communautaire". Je pense que vous n'êtes pas non plus le seul groupe à penser ça. On a, entre autres, la Commission-Jeunesse du Parti libéral, avec laquelle j'ai parlé en fin de semaine. Je voudrais là-dessus vous remémorer une partie de la déclaration du ministre, en conférence de presse, au mois de décembre dernier, lorsqu'il annonçait qu'il y aurait des travaux complémentaires à faire pour que la hausse des frais de scolarité trouve tout son sens. Il y avait dans ce texte: "Le gouvernement entend poursuivre, par ailleurs, les démarches de rationalisation qu'il a entreprises de concert avec les universités de manière à amener, dans toute la mesure du possible, les coûts de l'enseignement et de la recherche universitaire à un niveau compatible avec les ressources dont dispose la communauté québécoise".

Il y avait aussi une partie qui disait: "Les universités seront également invitées à resserrer les procédures d'évaluation à tous les niveaux". Je pense que ça fait partie de vos demandes. "Elles devront, là où ce n'est déjà fait, se doter de procédures permettant l'évaluation périodique de la qualité de leur enseignement et de leurs travaux de recherche par des pairs impartiaux et impliquant de façon appropriée la participation des étudiants. Enfin, des efforts seront entrepris afin d'assurer une meilleure harmonisation entre les programmes d'études des niveaux collégial et universitaire."

Je pense que pour moi aussi, en tant que député, cet article est important et je vais faire des représentations auprès du ministre pour que ça se réalise. Mais, de toute façon, je pense que le gouvernement et le ministre lui-même ont une volonté politique de le faire.

Je vais juste continuer et, après, vous pourrez peut-être répondre. Il y avait aussi quelques recommandations avec lesquelles j'étais sensiblement d'accord. Je pense qu'on pourrait améliorer. Vous demandiez, à la page 50, que la table de contribution parentale soit indexée chaque année. Je pense que le ministre en a parlé un petit peu tout à l'heure. Je pense que ce serait important. Vous avez demandé aussi que la DGAFE informe personnellement les parents du montant calculé de la contribution qu'ils doivent verser à leur enfant. Ça aussi, je pense que ça pourrait être intéressant au sein du programme. Vous dites aussi que le comité d'appel, que nous appelons le comité d'examen, soit composé d'un étudiant parmi les trois représentants. Je pense aussi que c'est très important qu'on ait un représentant de la communauté étudiante à ce comité. Je pense que ce sont les mieux placés; entre autres, ils connaissent très bien, pour la vivre, la situation. Il y en a encore quelques-un que je pourrais énumérer.

J'avais une question aussi. Je vous ai entendu parler - je pense que c'est monsieur qui en parlait - de la fréquentation ou, je pense, c'est vous, M. Facal, qui avez parlé de ça. Vous disiez qu'il y avait 25 % d'anglophones qui fréquentaient les universités par rapport à 15 % de francophones. C'est la première fois que j'entends cette remarque. Ce que je me demande là-dessus: Est-ce que vous pensez que c'est notre régime qui favorise plus les anglophones que les francophones ou si vous pensez que c'est une statistique qui est comme ça? Je voulais juste avoir un peu d'information, ce que vous pensiez. Je ne pense pas qu'on puisse tourner ça - comment je pourrais dire? - en francophone anglophone, la fréquentation universitaire au Québec. Je me demande comment vous voyez ça et ce qui pourrait causer cette... Ça peut être des chiffres...

M. Gendron: Je m'excuse, mais ça n'a pas de bon sens.

M. Fradet: Je vais demander à M. Facal quand même. Moi, je ne le sais pas.

La Présidente (Mme Hovington): M. Facal, vous avez la parole.

M. Facal: Je pense qu'assurément le régime d'aide financière n'est pas le seul facteur explicatif. Je crois que cet écart s'explique également pour des raisons historiques, culturelles. Jusqu'à tout récemment, les Québécois francophones ne valorisaient pas suffisamment l'enseignement supérieur et il n'y avait peut-être pas autant de pression familiale sur l'enfant pour pousser ses études au plus haut niveau qu'il n'y en avait chez les anglophones. Je constate cela.

Cela dit, une fois que l'on constate le retard du Québec francophone, qui dit retard dit effort de rattrapage. Tout notre régime était précisément conçu pour cela. Je pense qu'un certain rattrapage a été accompli. Le malheur, c'est que dans le Québec des années quatre-vingt-dix je vois trop de pétage de bretelles. Le retard a été rattrapé et là on s'assoit. Non, il n'a pas été totalement rattrapé. On observe, oui, un resserrement des écarts, mais pas suffisamment. Ce qui veut dire, et je termine là-dessus, oui à l'aide financière, bien entendu, mais une véritable réforme de laide financière doit, selon nous, être perçue comme un élément central, mais non unique d'une politique d'accessibilité. Ce qui compte, ce ne sont pas quelques améliorations techniques qui, oui, vont dans le bon sens. Tout n'est pas mauvais dans ce projet. L'important, c'est de voir en quoi cela attaque les grands problèmes qui ont émergé depuis que le régime est là: endettement, accessibilité, sous-diplomation. C'est là-dessus que nous aurions voulu voir un petit peu plus de viande dans le

projet de loi.

Si je peux me permettre également, Mme la Présidente, étant donné que nous n'avons pas eu le temps de présenter nos recommandations, j'insiste, pour le bénéfice de tous ceux qui ont une copie du mémoire, mais n'ont pas pu le parcourir en long et en large, sur le fait que tous nos commentaires sont mis en annexe. Si vous voulez avoir directement notre opinion sur les mesures, allez à l'annexe, vous y trouverez les explications techniques requises. Mais, comme je le disais en introduction, pour nous, ce n'est pas ça l'essentiel. Pour nous, la commission est une occasion de poser des questions qui nous tiennent à coeur. Je me demandais si j'avais la possibilité, par exemple, d'en poser une première au ministre. Je voudrais brièvement vous expliquer ma démarche.

La Présidente (Mme Hovington): Je pense que la parole était au député de Vimont, M. Facal. Vous avez répondu à ses questions, alors je donne la parole au député de Vimont.

M. Facal: Ah! fort bien!

M. Fradet: Peut-être que vous voulez poser des questions. Je suis d'accord avec vous, mais je pense que le principe de la commission parlementaire, c'est que les élus, les députés posent les questions aux groupes qui viennent les rencontrer, à moins que je ne me trompe. (17 heures)

Des voix: C'est ça, c'est ça.

La Présidente (Mme Hovington): La tradition veut que ce soient les élus qui posent les questions pour éclaircir certains points des mémoires qui leur sont présentés. Alors, c'est pour cette raison que j'ai donné la parole au député de Vimont qui avait encore des questions à vous poser.

M. Fradet: Non, ça va.

M. Facal: Mais s'il y a des obscurités dans le projet de loi, puis-je m'en enquérir afin de les éclaircir?

La Présidente (Mme Hovington): Bien, pour l'instant la parole est au député de Vimont.

M. Facal: Fort bien.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, je vous en prie.

M. Fradet: Je suis d'accord. Je voulais juste revenir sur la question que j'ai posée avec M. le député d'Abitibi-Ouest, que ce sont des chiffres et gue ce sont los chiffres, mais je voulais savoir, lorsque M. Facal avait prononcé ces chiffres, s'il pensait qu'au sein de l'aide finan- cière, dans le programme d'aide financière, il y avait des mesures qui pénalisaient les francophones. C'est ce que je voulais savoir. Oui, c'est correct, mais je voulais préciser avec vous. Je sais que vous écoutez.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, c'est tout, M. le député de Vimont? Vous avez terminé, M. le député de Vimont?

M. Fradet: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez encore dix minutes, M. le ministre.

M. Ryan: Hum! c'est beaucoup! Je voudrais juste souligner, à propos de l'accès à l'enseignement universitaire selon la langue, qu'encore ici les jugements dépendent un petit peu des données dont l'on dispose, et si l'on prend les études de baccalauréat formelles, c'est vrai que le taux d'accès est encore sensiblement plus élevé du côté anglophone que du côté francophone. Mais si l'on considère que la proportion des étudiants de langue française inscrits à des programmes de certificats est beaucoup plus élevée, on peut arriver à établir que les chances d'accès à la formation universitaire, si on prend l'ensemble des personnes qui vont à l'université, sont à peu près les mêmes du côté français et du côté anglais. J'ai une étude ici, je vous donne le titre - parce qu'on n'a pas de monopole dans ces choses-là, ce sont les chiffres qui nous commandent, évidemment - intitulée "Accès à l'université, description de la situation à partir dos données de 1984-1985, ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science". Alors, c'est à la page 11. Vous savez que les programmes de certificat, les universités s'aperçoivent de plus en plus que lancer ça en l'air, sans que ce soit relié à rien, c'est très dangereux, ça comporte un danger de dispersion énorme, alors, on tend de plus en plus à les incrire à l'intérieur de cheminements pouvant conduire, par l'accumulation de certificats, à un baccalauréat, par exemple. Alors, là il y a des voies différentes. Il ne faut pas qu'on prenne les données de manière trop isolée, faire comme par exprès pour provoquer des antagonismes et tout. Quand on tient compte des cheminements différents, des antécédents différents aussi, je pense qu'on est amenés à constater qu'il y a eu quand même des progrès énormes d'accomplis. Il ne faut pas être complètement inconscients, il faut garder l'oeil ouvert, il faut veiller à ce que les progrès continuent de s'accomplir, mais il y a ces éléments-là qui sont encourageants.

Je vous signale une chose aussi, bien simplement, en toute considération. Nous aurions voulu faire plus. Nous ne pouvons pas fairo davantage au titro do l'aide linandore aux étudiants pour des raisons financières dont nous n'avons jamais fait mystère, que nous n'avons

point cachées, qui sont une donnée essentielle de l'action gouvernementale et que vous-mêmes, dans votre mémoire, rappelez à un moment donné. Je pense que vous avez un tableau à une page qui rappelle l'évolution des contributions gouvernementales au financement des universités, même sous le régime du parti qui est celui de votre coeur, au moins de votre inscription. Et vous voyez que les chiffres parlent par eux-mêmes. Si vous continuiez - je pense que vous avez terminé votre enumeration en 1986 - si vous aviez continué jusqu'à 1990, vous auriez ajouté une page très intéressante.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Ceci étant dit, nous prenons bonne note, comme l'a dit le député de Vimont, des nombreuses suggestions que contient votre mémoire. Je pense qu'il a été présenté dans un excellent esprit, et je veux vous assurer que le but de tout ceci que nous essayons d'accomplir, en ce qui touche le financement des universités, c'est de faire en sorte que la qualité de l'enseignement et de la recherche universitaire soit meilleure. C'est le but que nous poursuivons. M. le député de Vimont a rappelé les mesures dont j'ai moi-même parlé aux recteurs des universités quand je leur ai fait part des décisions gouvernementales, et nous avons beaucoup de travail à accomplir là-dessus, que nous accomplirons d'ailleurs. Je suis très heureux de constater que la jeunesse des deux partis politiques principaux porte une attention spéciale à l'enseignement postsecondaire. Je peux l'assurer qu'on écoute ses représentations avec intérêt. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. Gendron: Madame-La Présidente (Mme Hovington): Là, il vous resterait...

M. Gendron: Oui, c'est ça.

La Présidente (Mme Hovington): ...quelques minutes. Si vous voulez poser une question ou deux au ministre pour éclaircir peut-être...

M. Gendron: II ne reste pas quelques minutes...

La Présidente (Mme Hovington): ...quelques points.

M. Facai: Oui, tout à fait.

M. Gendron: ...il en reste dix. Il reste dix minutes.

La Présidente (Mme Hovington): Assez rapidement, par contre.

M. Facal: Fort bien. Vous avez remarqué que notre mémoire traite aussi, en long et en large, des frais de scolarité, et c'est une question dont j'ai dit qu'elle était intimement liée à la question de l'aide financière. Je vois le ministre hocher la tête de déception. Eh oui! encore un groupe qui vient parier du gel! Mais que voulez-vous, M. le ministre? La question est incontournable.

Alors, voici. Vous admettez, enfin, on s'entend tous les deux, tous ici, sur le sous-financement des universités. Fort bien. Il ne peut pas être comblé uniquement par une hausse des frais de scolarité. Le reste, vous allez le chercher où? J'ai cru comprendre que vous aviez répondu aux recteurs: Déjà, 50 000 000 $ ont été versés. J'ai cru également comprendre que les recteurs avaient dit, avaient répondu: Bizarrement, nous n'avons reçu que 21 000 000 $. Enfin, bref, tout ce qui reste pour aller chercher les quelque 150 000 000 $, où allez-vous le prendre? Chez les entreprises? Il m'a semblé que vous avez exclu cette éventualité. En haussant les impôts? Vous l'avez également exclu. Alors, où?

M. Ryan: Non.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Vous répondez à ma place, je vous en sais gré, vous m'évitez des réponses pénibles, mais je n'ai pas exclu les choses que vous évoquez là. D'abord, je n'avais pas le mandat pour en parler, surtout la hausse des impôts, je pense que c'est le ministre des Finances qui fait les recommandations au gouvernement. On attendra ses recommandations à ce sujet. Mais, au point de vue du financement des universités, nous établissions un écart d'à peu près 160 000 000 $ par rapport à l'Ontario. Le gouvernement injecte 55 000 000 $ dans la base de financement des universités, les recteurs en conviennent. Ce qu'ils disent, c'est qu'on avait déjà une partie qui avait été reçue sous forme de subvention de transition l'année précédente et la deuxième année précédente. Mais là, c'est parce que nous l'avons inscrit dans la base de manière récurrente; c'est pour ça qu'on est en droit d'ajouter 21 000 000 $, plus 34 000 000 $, ça fait 55 000 000 $. Je pense que personne ne conteste ça, à part le député d'Abitibi-Ouest.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Alors, là, avec l'augmentation des droits de scolarité, il y a un autre montant de 41 000 000 $ ou 42 000 000 $ qui va venir s'ajouter. Les universités en conviennent tellement bien qu'elles nous ont dit: Bien, il faudrait que vous nous donniez un autre 50 000 000 $ et on ne serait pas tellement loin du compte, à ce

moment-là. On s'est rapproché beaucoup et on va continuer de se rapprocher et, là, la contribution étudiante va fournir un peu moins, à peu près le quart de ce qui était attendu, mais tout le reste, il faut aller le chercher ailleurs, et peut-être aussi sous forme de taxation des compagnies, ce n'est pas exclu, ça. C'est le ministre des Finances, encore une fois, qui fera les recommandations. Moi, ce à quoi je m'objectais, c'est un impôt: Mais ça, on le taxe pour telle raison, on le taxe pour telle autre raison. Ce n'est pas comme ça que ça marche. En général, le ministre des Finances va avoir le courage de dire: J'ai besoin de 400 000 000 $ pour l'enseignement, pour la santé, pour les routes; je vais aller en chercher tant ici et tant là. Il ne marquera pas chaque impôt d'un ticket rouge: Ça, c'est pour les universités... C'est ça qui est ridicule, parce que ça s'en va tout dans le Trésor commun et c'est distribué par le Conseil du trésor après. C'est dans ce sens-là que j'ai des objections à certaines propositions qui ont été faites ici, mais pas à l'idée de taxer un peu plus les compagnies. Ça, c'est une autre chose sur laquelle j'attends les recommandations du ministre des Finances, comme les autres membres du gouvernement et de l'Assemblée nationale.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre, de ces éclairages. Malheureusement, il faut donner le temps, à moins que vous ne preniez du temps sur l'Opposition.

M. Gendron: Non, non. Question de règlement, rapidement, Mme la Présidente. Là, vous ne l'avez pas, si vous me permettez. Il ne prend pas de temps sur l'Opposition. La lecture, la présentation du mémoire s'est terminée à 16 h 53 et...

La Présidente (Mme Hovington): Combien resterait-il de temps, M. le Secrétaire?

M. Gendron: ...et l'Opposition a vingt minutes. Alors, ils ont le droit de...

La Présidente (Mme Hovington): II reste encore deux minutes.

M. Gendron: Oui, oui, il reste du temps...

La Présidente (Mme Hovington): Ha! Il reste deux minutes.

M. Gendron: ...si vous voulez questionner le ministre en dehors du temps de l'Opposition.

M. Facal: Oui. Nous ne pouvions pas venir ici sans, évidemment, vous poser une question qui vous fera assurément hocher la tête, elle aussi. L'impôt postuniversitaire, clairement, M. le ministre, c'est bon, c'est mauvais, ça ne vous plaît pas, oui, quand?

M. Ryan: Dans l'immédiat, ce n'est pas très bon.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Dans l'immédiat, aujourd'hui, hic et nunc, comme on le disait selon la formule d'autrefois, ici et maintenant, j'ai besoin d'autre chose que ça, mais, à long terme, je pense que c'est une formule qui mérite d'être examinée soigneusement et nous l'étudierons attentivement lorsque nous aurons mis un peu d'ordre dans la situation immédiate. Maintenant, il faudra prévoir, quand nous examinerons ce sujet, que si vous imposez cette forme de remboursement d'études il va falloir que quelqu'un paie l'intérêt sur le capital que ça prendra. Est-ce que ça va être le gouvernement? Est-ce que ça va être le diplômé de l'université sous la forme d'une taxation accrue? Ça, on n'a pas eu de réponse claire à cette question-là. On l'examinera avec le reste. Mais il y a une chose sûre, c'est que, pour les dix prochaines années, avant qu'un impôt comme celui-là commence à produire, il faut qu'on trouve de l'argent et ça prend autre chose que des emprunts, parce que déjà le Québec est surendetté.

M. Facal: Corrigez-moi si je me trompe mais j'ai senti, au fil des semaines, un certain infléchissement dans votre position. Il y a quelque temps, vous disiez que, selon vous, il n'y avait aucun rapport entre le dégel et l'accessibilité ou, à tout le moins, que ce rapport-là ne pouvait pas être établi par qui que ce soit, que nous manquions de données. Tout récemment, vous mettiez de l'avant des chiffres qui, moi, m'ont surpris parce que je ne m'attendais pas à un tel aveu de votre part, des chiffres à l'effet que, et là, j'ai entendu 8000 ou 10 000, ou je ne sais pas trop, enfin, vous corrigerez, étudiants ne s'inscriraient pas à l'université à la suite de cette hausse. J'aimerais vous demander si vous trouvez cela dramatique ou pas, ou si vous êtes prêt à vivre avec? Si c'est le cas, serait-ce parce que vous considérez notre rattrapage comme terminé? Enfin, bon, ce nombre d'étudiants qui ne s'inscriraient pas à la suite du dégel, vous l'estimez à combien et vous l'évaluez comment?

M. Ryan: D'abord, je suis content parce que vous me permettez de répéter peut-être pour la troisième ou quatrième fois des précisions que j'ai déjà données à la commission parlementaire, depuis le début de cette série d'auditions publi ques. Quand j'ai discuté de cette chose-là, j'ai toujours considéré qu'il y avait une certaine possibilité d'impact d'une hausse des frais de scolarité sur la fréquentation universitaire. J'ai toujours considéré, à la lumière des données disponibles et des études que j'avais consultées ailleurs, que cet impact serait limité et tem-

poraire, s'il devait avoir lieu. Je ne sais pas ce qui se produira au Québec précisément, parce qu'on n'a pas fait l'expérience depuis 24 ans. On ne peut pas avoir des données vraiment fraîches sur lesquelles se fonder.

Alors, moi, j'ai dit: Faisons l'hypothèse - je discutais, une fois, avec Mlle Côté de l'ANEEQ - faisons l'hypothèse, pour les fins de la discussion, que ça pourrait aller de zéro à 5 %. Je n'ai jamais dit que ça va être 5 %, jamais. Et si j'avais donné l'impression de l'avoir dit, je tiendrais à la dissiper totalement parce que je n'ai jamais dit ça. Je ne l'ai pas pensé. Et depuis ce temps-là, les statistiques qui ont été portées à ma connaissance sur l'évolution de la fréquentation universitaire dans les autres provinces canadiennes, à la suite de hausses des frais de scolarité, toutes les données dont nous disposons indiquent qu'en même temps qu'il y a eu ajustement des frais de scolarité en fonction du coût de la vie il y a eu augmentation substantielle des inscriptions dans les universités. Je crois que ces données factuelles, procédant de l'expérience canadienne des dix dernières années, sont bien plus éloquentes que toutes les études particulières qui ont pu être faites n'importe où, parce que ce sont des "hard facts".

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre. Alors, la parole est au député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Avant de commenter le rapport des jeunes du Parti québécois, je voudrais faire deux commentaires sur ce que le ministre vient de dire. Claude Ryan, ministre de l'Éducation: Une baisse temporaire d'étudiants dans l'université ne serait pas une tragédie. Là, il n'y avait pas de nombre, mais ça semble bien être une citation du ministre de l'Éducation qui a été reprise à moult reprises. Il avait ajouté: Si c'étaient 5 % - je suis prêt à reconnaître que c'est vrai, selon ce que j'ai ici - si c'étaient 5 %, cette baisse ne serait que temporaire - et là, c'est le ministre qui continue - 5 % sur une clientèle universitaire de 240 000 étudiants, cela fait 12 000 étudiants. 5 % dans l'ensemble, c'est peut-être plusieurs milliers d'étudiants - c'est le ministre qui parle - mais si c'est pour un an, ou deux ou trois et qu'un bon nombre de ceux-ci reviennent aux études après être allés un an ou deux travailler pour épargner un petit peu, je pense qu'il n'y a rien là. Il n'y a pas de tragédie. Et là, c'était bel et bien le ministre. De toute façon, pour quelqu'un qui est mal cité, il est drôlement repris partout. Encore hier, dans La Presse, un jeune étudiant - l'auteur est étudiant à la maîtrise en philosophie à l'Université de Montréal, il s'appelle René Gobeil; C'est bien ça - disait ceci: "Une baisse temporaire des inscriptions dans les universités provoquée par la hausse des frais de scolarité n'aurait rien d'une tragédie, déclarait à La Presse M. Ryan, ce sont là des propos qui étonnent - c'est l'étudiant qui parle - dans la bouche d'un homme de lettres et d'esprit et qui appellent une prompte réplique." C'est ce qu'il a fait et bien fait sur six colonnes, dans La Presse d'hier. Alors, je vous invite à prendre connaissance de ces informations. (17 h 15)

Sur votre mémoire... Je voudrais tout simplement, avant, vous remercier sincèrement parce que moi, en tout cas - et je veux dire la même chose aux jeunes libéraux - quelles que soient les options politiques, je pense qu'il était requis, nécessaire et fondamental pour des jeunes qui ont le courage, la détermination de militer au sein d'une formation politique - parce que c'est un peu ça, la démocratie - de venir s'exprimer sur une question aussi fondamentale. On doit vous féliciter.

Je pense que c'est votre responsabilité, comme jeunes décideurs et jeunes décideuses de demain, de profiter d'une tribune comme celle-là parce que, contrairement, encore là, à certaines prétentions du ministre, les tribunes pour discuter de cette décision ne se sont pas multipliées au cours des derniers mois. Au contraire, c'est la première qui a un peu un caractère public. Et, contrairement encore là, à ses prétentions, il est tout à fait légitime, sensé, en ce qui me concerne, requis, et ça prouve leur bonne intelligence, de traiter d'une façon tripartite les trois notions suivantes. C'est indissociable.

On ne peut pas venir à une commission parlementaire comme celle-là et dire: On ne va vous parler que d'aide financière. Pourquoi y a-t-il de l'aide financière? Pourquoi y a-t-il des mesures d'aide financière? Tout le monde le sait; c'est pour faciliter l'accessibilité, c'est pour permettre à des gens qu'ils ne soient pas conditionnés par la non-accessibilité de leur prop'o portefeuille. Pourquoi pensez-vous qu'on a parié pendant des mois, au Québec, du sous-financement chronique des universités? Pourquoi pensez-vous qu'on a parlé de ça? C'est parce que, quand il y a un sous-financement chronique, tout le monde convient que les services offerts aux jeunes étudiants universitaires ne sont pas parfaitement adéquats.

Troisièmement, la décision de dégeler les frais de scolarité est intimement reliée à trois notions. Donc, les jeunes du Parti québécois, le comité des jeunes place correctement la perspective. Moi, je vous dis que ça prouve, encore une fois, que vous êtes capables de lire correctement et adéquatement une problématique. Et dans la problématique dont on a à discuter les frais de scolarité, le régime d'aide financière et le financement des universités, c'est indissociable. Ça va ensemble et vous avez bien fait d'en parier ensemble. Tout autre groupe ou organisme qui fait le choix d'en parier différemment, et c'est son droit le plus strict, rate une occasion

en or de montrer qu'il a bien compris et bien saisi l'ensemble de la trilogie qui existe entre ces trois données ou ces trois considérations.

J'ai juste des commentaires rapides avant de vous questionner. En regard de l'aide financière, écoutez, puisque vous êtes, en ce qui me concerne, dans le vrai monde, comme groupe, c'est évident que vos recommandations traitent des vraies choses. Les sujets que vous avez soulevés traitent des vraies choses. Donc, ça concorde avec plusieurs autres organismes, associations, pour qui les lacunes principales au chapitre de l'aide financière sont exactement au même endroit qu'elles étaient avant l'annonce de la consultation que le ministre tient.

Ce n'est pas parce qu'on tient une consultation qu'on va déplacer les lieux de problèmes bien précis que vous avez bien identifiés. Elles sont où les lacunes? Tout le monde le dit: Contribution parentale. Est-ce qu'il y a quelque chose de majeur pour modifier le problème de la contribution parentale? Réponse: Non, et vous l'avez dit. Le ministre, lui, dit: Moi, je vous écoute, mais je procède. Je l'ai dit, je l'ai répété, quand je suis allé chercher le verbatim de son émission avec Pascau, c'est on ne peut plus clair: Dès que j'aurai l'occasion d'informer honnêtement et de diffuser notre salade, les étudiants vont en comprendre la nécessité fort désagréable, mais ils vont être convaincus que nous avons raison. Moi, mon point n'est pas là. Sur la contribution parentale, il n'y a pas grand-chose de neuf. L'endettement et les conditions d'admissibilité au régime ont-ils changé? Est-ce que la réforme nous annonce, essentiellement, qu'on va modifier les conditions d'admissibilité au régime d'aide financière? La réponse, vous le savez, c'est non.

Donc, sur l'aide financière, il y a lieu de féliciter, de saluer quelques réformes qui vont dans le sens des revendications traditionnelles du monde étudiant. On dit: Bravo! Mais on ne peut pas dire qu'il s'agit là d'une réforme majeure, qui chamboule l'ensemble des principes qui permettraient de faire contrepoids vraiment à l'annonce de leur décision, qui n'est pas la mienne, c'est-à-dire de dégeler les frais de scolarité, même si moi je prétends que c'est prématuré, inopportun et très grave pour l'ave nir, compte tenu des conséquences que ça aura au chapitre des deux éléments qu'eux-mêmes partagent, c'est-à-dire qu'on n'a pas atteint des niveaux de performance quant aux diplômes émis qui nous permettraient d'avoir ce laxisme et, deuxièmement, qu'on a encore énormément à faire, quant à une accessibilité plus large, pour éviter que des gens de régions, des gens de partout au Québec soient obligés de sacrifier une formation universitaire pour des raisons de piastres, de sous et non pas de capacité intellectuelle. Et ça, c'est malheureux quand on est rendus en 1990.

L'autre dossier, c'est-à-dire l'autre élément, c'est les frais de scolarité. Là, le comité des jeunes réclame un moratoire et, quand on réclame un moratoire, il est justifié de dire: Pourquoi veut-on un moratoire? C'est parce, que, entre-temps, il y a quelque chose de majeur à faire. À ce niveau-là, j'aurais une question et je suis aussi bien de la poser tout de suite. Ce n'est pas que je sois en désaccord, mais il m'apparalt quand même que c'est pas mal gros, à ce moment-ci, d'envisager une commission d'enquête sur l'ensemble du dossier des frais de scolarité puisque, essentiellement, ce serait pour que cette commission-là apprécie des solutions alternatives et que nous les avons, il y a plusieurs intervenants qui les ont suggérées. Le ministre disait tantôt: L'impôt postuniversitaire, jo ne "trippe" pas trop là-dessus. En attendant - c'est le ministre qui disait ça - ça se fait en Australie et ils ne doivent pas être si caves que ça. Ils le font actuellement en Australie. C'a pris six mois à régler les ajustements, l'évaluation et comment ça se rendrait opérationnel.

Donc, ma première question là-dessus, M. Facal ou les gens qui l'accompagnent, c'est: Comment en êtes-vous arrivés à conclure qu'il y aurait lieu d'embrasser ça plus large puisque les solutions, vous semblez les avoir, et je partage votre point de vue; impôt postuniversitaire ou taxe au niveau de l'entreprise parce qu'il n'y a pas la part comparativement à l'Ontario ou ailleurs? Alors, j'aimerais avoir un peu d'éclairage de votre part là-dessus.

La Présidente (Mme Hovington): Oui, vous avez la parole, M. Tunnel.

M. Turmel: M. Gendron, la commission d'enquête que l'on propose ne porterait pas uniquement sur la hausse des frais de scolarité, mais porterait sur l'ensemble de la problématique de l'éducation postsecondaire, c'est-à-dire le financement des universités, à savoir qui doit payer, combien, pour nous, et comment. Il y a les entreprises, H y a l'État et il y a l'étudiant, selon une mécanique qui déviait être ajustée. Il y a toute la question de la gestion des universités. Il n'est pas normal - et maintenant, on voit ça de moins en moins - qu'une université gère une cafétéria, gère des menus plutôt que des programmes académiques. Donc, cette commission d'enquéte-là, on voudrait qu'elle porte un tableau global, 30 ans après le rapport Parent. D'ailleurs, on a fait une commission d'enquête sur la santé et le rapport Rochon et le régime de santé est plus récent, plus jeune que...

M. Gendron: Dans votre esprit, ça veut dire que ça inclurait également une série d'autres éléments comme une toute nouvelle...

M. Turmel: Oui, oui, c'est global.

M. Gendron: ...réflexion sur nos retards, les raisons fondamentales pour lesquelles on ne réussit pas à avoir de la diplomation, le même niveau de diplômes, pourquoi il y a tant de temps partiel comparé au temps plein, pourquoi il y a également plusieurs abandons et plusieurs échecs. Vous mettriez tout ça dans l'évaluation.

M. Turmel: Oui.

M. Gendron: C'est bien ça?

M. Facal: C'est l'ensemble de l'enseignement supérieur au Québec qui, plus de 20 ans après le rapport Parent, serait réexaminé de nouveau, de fond en comble, sous toutes ses facettes, et ça prendra le nombre de mois que ça prendra avec consultations...

M. Gendron: Mais...

M. Facal: ...en région et tout le "kit" là.

M. Gendron: Pour des raisons de temps, une autre question. À un moment donné, vous faites une démonstration économétrique dans votre mémoire. Ce n'est pas tellement là-dessus que je veux revenir, mais comme le lien est là, je le fais et aidez-moi à comprendre. Vous dites qu'une hausse de frais de scolarité n'irait pas complètement aux universités et qu'une hausse des frais de scolarité diminuerait l'accessibilité aux études supérieures dont les effets ne seraient pas atténués par la réforme. Alors, moi, quand je le dis comme je viens de le dire, je n'ai pas de problème à comprendre ça, mais la question que je vous pose, c'est: Où et comment voyez-vous clairement que la hausse des frais de scolarité ne serait pas imputable directement aux universités?

M. Facal: Écoutez, ce n'est pas compliqué. Si la hausse des frais de scolarité, si ce montant-là était entièrement redonné aux universités afin d'en améliorer la qualité, déjà la pilule passerait mieux. Si on nous disait: Vous avez l'assurance que ça va à la qualité... Pantoute! On n'a eu aucune assurance à savoir où va aller cet argent. Nous, on fait un calcul fort simple. On se dit: L'étudiant va avoir davantage de frais de scolarité à payer, alors il risque d'y avoir davantage d'étudiants qui vont demander de l'aide financière. Si cela est suivi, dans quelques années, par une augmentation des sommes que le gouvernement doit verser en prêts et bourses, on se dit qu'il y a de fortes chances que ce qu'il s'est trouvé à ramasser d'une main, il va devoir le redonner de l'autre. Et donc, on se doute fort bien que l'ensemble de l'argent ramassé n'ira pas là où il devrait aller, c'est-à-dire aux sous-équipements, aux bibliothèques et ainsi de suite. Évidemment, tout ceci est complètement théorique et passe sous silence le fait que, depuis deux ou trois jours, on apprend, en raison des coupures dans les transferts aux provinces, que cette hausse va être complètement annulée. Alors, c'est rendu maintenant que les sommes d'argent qu'on ospôrait avoir pour combler en partie le sous-financement, on ne risque même pas de les avoir. Alors, ça va d'autant moins aller à l'augmentation de la qualité, qu'on ne risque même plus de les avoir, ces rentrées de fonds supplémentaires pour l'État.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Chicoutimi, vous avez la parole.

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Je ne peux m'empêcher de réagir aux propos du ministre. Vous savez qu'il faut se rappeler... Quand il dit que ce n'est pas une tragédie, 5 % de diminution de clientèle, c'est déjà, je le rappelle, l'attitude qu'il avait en 1986, quand il disait: Les universités, si elles font des déficits, qu'elles arrêtent donc de solliciter la clientèle. Alors, lui voyait que la solution au déficit des universités, c'était dans une diminution de clientèle. Et là, il la provoque. Il la provoque et je peux le citer au texte ici.

L'autre chose, il y a une espèce de raisonnement à contresens. Il dit: Les frais de scolarité sont les plus bas en Amérique et nos jeunes ne fréquentent pas autant qu'on le voudrait. Donc, augmenter les frais de scolarité, la conclusion, c'est que ça va diminuer. On ne peut pas tirer une conclusion comme ça, sinon à contresens. Par ailleurs, moi, je vous dis que les gens qui lui ont fait confiance à l'effet que l'essentiel des sommes prélevées aux étudiants par le biais de cette nouvelle taxe irait dans les universités, moi, je n'avais pas tout à fait cette confiance, sur la base d'une expérience qui est la suivante: le ministre de l'Éducation, alors qu'il était à l'Opposition, s'est fait le champion défenseur - nous n'avions jamais entendu d'aussi beaux discours - de l'éducation des adultes. Et allez voir! L'éducation des adultes, c'est probablement et très certainement le secteur le plus défavorisé de l'éducation de l'enseignement supérieur, actuellement.

Et la dernière mesure, la plus brillante, c'est qu'il coupe de 50 % dans les heures de cours disponibles pour les étudiants adultes. Alors, moi, je dis qu'il y a deux discours constamment et c'est une chose qu'il ne faut jamais oublier. Vous avez, tout à l'heure, fait état de... Je reviens sur deux de vos remarques. La première touchait la nécessité de tenir ce que j'appelle, moi, des états généraux sur l'éducation. Je pense que 25 ans, 30 ans après la commission Parent, effectivement, avant de toucher à des orientations fondamentales, votées et adoptées sur la base d'un consensus au Québec, on ne change pas ça sans qu'il y ait à nouveau une espèce de regard neuf. Sauf que jamais, ici, on n'a eu de consultations sérieuses lorsqu'il s'est

agi de modifier les orientations fondamentales. J'imagine que de tels états généraux... Est-ce que vous pensez à des états généraux ou l'équivalent d'une commission d'enquête?

La Présidente (Mme Hovington): M. Facal.

M. Facal: Je dois vous avouer que, n'étant pas très familier avec le jargon gouvernemental, oui, je serais tout à fait prêt à vivre avec un intitulé "états généraux". L'idée rj6nérale, c'est que le temps est venu de faire le point. Le temps est venu, si on veut faire des changements, de ne pas les faire passer via une réglementation, de se rencontrer tous ensemble et de faire le point. On est tous absolument conscients qu'il y a de graves problèmes. Donc, je me dis: Bon, si on s'entend tous sur les principaux problèmes, il y a peut-être moyen de dépasser les clivages partisans et de réunir, autour d'une même table, étudiants, CEQ, partis politiques et ainsi de suite là. Ça prendra bien la forme que ça voudra, mais quelque chose d'aussi large que possible et quelque chose qui prendra le temps qu'il faudra pour faire vraiment bien le tour de la question.

Mme Blackburn: Bien, une autre question sur...

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y.

Mme Blackburn: Vous avez parlé de l'importance qui était laissée au volet règlements en rapport avec la loi, donc des morcea..A extrêmement importants du document d'orientation qu'on ne retrouve pas dans la loi et qu'on aurait dû retrouver, mais qu'on retrouve dans les règlements. Je dois dire, là-dessus, qu'on va attendre le prochain intervenant qui est le Protecteur du citoyen, qui - grâce à la vigilance de l'Opposition, on l'entend au moins à 17 heures et non pas à 21 heures, tel que l'avait planifié le gouvernement - aura l'occasion de nous en reparler un peu plus longuement tout à l'heure. Mais vous, quels sont les... J'ouvre une parenthèse pour rappeler qu'à l'Opposition, ce ministre, l'actuel ministre, dénonçait avec une violence verbale, quasi sans précédent, l'abus, l'usage abusif du recours aux règlements. On n'en a jamais tant eu. Ça, c'est encore une autre chose qui fait que, moi, la confiance, elle commence à être limitée. Mais quels sont, selon vous, les principaux éléments qu'on retrouvera peut-être, on n'en est pas certains, dans les règlements et qu'on aurait dû retrouver dans la loi?

M. Facal: Écoutez, il y a plusieurs choses qui nous ont frappés quand on a lu, d'abord, l'énoncé d'avril 1989 puis le projet de lo. comme tel qui est évidemment écrit dans un jargon pour avocat. Enfin, il a fallu se pencher là-dessus, bon. La première chose qui nous a frappés, c'est le temps partiel. Au début, on s'est dit: Youppi! le temps partiel! Enfin, ils se sont ouvert les yeux. Et puis après, on nous a parié de date ultérieure. Bon, d'accord. Très bien, date ultérieure. Mais laquelle? Quand? Dans six mois ou bien dans trois mois? On aurait voulu quelque chose d'un petit peu plus, là. Aussi, on a été, dans le projet de loi, un petit peu inquiétés, mais ça, la CEQ, tout à l'heure, nous a enlevé un petit peu les mots de la bouche. Il y a tout l'aspect vérification et enquête, là, dont l'intitulé ressemble étrangement à celui de la Loi sur l'aide sociale. Je dois avouer qu'il y a là quelque chose qui nous a un petit peu ébranlés. On n'a peut-être pas toute l'expertise requise, mais on s'est demandé s'il n'y avait pas là anguille sous roche. On aurait voulu un texte de loi peut-être beaucoup plus limpide, à cet égard là, bien que j'admette que nul n'est censé ignorer la loi et que donc l'étudiant doit... Mais quand on constate que, parallèlement à ça, il n'y a pas partout des conseillers en aide financière dans toutes les institutions, la possibilité qu'a l'étudiant de véritablement se renseigner sur toutes les possibilités qui lui sont offertes et les risques, si jamais il fait une déclaration fausse, ces risques-là nous semblent un peu grands et c'est un aspect du projet de loi qu'on aurait aimé voir davantage précisé.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, nous sommes rendus aux conclusions. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Une phrase Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Très rapidement.

M. Gendron: ..à l'équipe des jeunes du Parti québécois. Je l'ai dit tantôt, je pense qu'il était capital et opportun que vous veniez vous exprimer, en espérant, encore une fois, que les recommandations pertinentes qui s'appliquent tout autant à la réforme de l'aide financière qu'à l'ensemble des principes qui se doivent d'être retenus et évoqués lorsqu'on discute de telles questions soient retenues et prises en compte par le gouvernement.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M le ministre, rapidement

M. Ryan: Je vous remercie également de votre participation. J'en profite pour me réjouir de nouveau publiquement de l'intérêt que des personnes jeunes comme vous portent à la chose publique et, en particulier, à la politique dans ses incidences sur la poursuite des études, parce que c'est un fait extrêmement significatif et je veux le signaler avec beaucoup de plaisir. Je vous remercie

La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres de la commission de l'éducation, merci de votre mémoire.

M. Facal: Merci infiniment de nous avoir donné l'occasion de nous exprimer. Nous espérons simplement que nous ne reviendrons pas, dans trois ans, pour dire encore les mêmes arguments et entendre les mêmes réponses. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): C'était déjà fini, M. Facal. Votre temps était écoulé. Merci. J'inviterais le Protecteur du citoyen à venir prendre place, s'il vous plaît, et on suspend une minute pour laisser le temps à tout le monde de bien s'installer.

(Suspension de la séance à 17 h 34)

(Reprise à 17 h 35)

Protecteur du citoyen

La Présidente (Mme Hovington): Je vous demande de bien vouloir prendre place. La commission va reprendre ses travaux avec le Protecteur du citoyen, représenté ici par M. Daniel Jacoby. Il y a Mme Lucie Lavoie et M. Guy MacDonald, délégués. Si vous voulez bien vous présenter vous-mêmes, pour les fins de transcription des débats, pour qu'on puisse bien vous situer à vos places.

M. MacDonald (Guy): Guy MacDonald, délégué du Protecteur du citoyen.

Mme Lavoie (Lucie): Lucie Lavoie, directrice adjointe des enquêtes.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue à la commission de l'éducation. Vous avez vingt minutes, M. Jacoby, pour nous faire part de votre mémoire.

M. Jacoby (Daniel): Merci, Mme la Présidente. Je voulais d'abord, avant de faire des remarques plus spécifiques, vous indiquer que c'est la première fois, depuis vingt ans de création de l'institution, que le Protecteur du citoyen se présente en commission parlementaire pour faire des commentaires sur un projet de loi. En effet, je pense qu'avec l'expertise que notre institution a, il est important que l'on puisse faire de la prévention et, à travers le libellé des projets de loi, voir dans quelle mesure ça ne pourrait pas être source d'injustice, d'une manière ou d'une autre.

Depuis la création du bureau du Protecteur du citoyen, évidemment, nous recevons des plaintes quant au programme d'aide financière aux étudiants de la même manière que nous recevons des plaintes d'à peu près tous les secteurs de l'administration gouvernementale. Le nombre de plaintes, sans être indicatif de problématiques particulières, ne fait qu'augmenter, ici comme dans la plupart des programmes gouvernementaux. Alors que de 1980 à 1985, en moyenne, nous recevions 200 plaintes par année, on prévoit, pour l'exercice en cours, recevoir près de 500 demandes. Ce n'est pas dramatique et je ne veux pas dire que ce programme est plus injuste que d'autres, mais on assiste, depuis quelques années, à une augmentation des plaintes en ce domaine.

Deux mots sur l'institution du Protecteur du citoyen. En fart, nous ne sommes pas un organisme du gouvernement comme tel, nous sommes un organisme qui relève de l'Assemblée nationale et dont le rôle est, entre autres choses, de surveiller les abus de l'administration dans l'application des lois, des règlements et des programmes gouvernementaux.

Le projet de loi 25... Je voudrais rapidement faire quelques remarques générales sur lesquelles je reviendrai un peu plus tard. D'abord, je dois dire que je suis heureux de voir que beaucoup d'aspects de l'aide financière aux étudiants trouvent, avec le projet de loi 25, une assise juridique. Il y avait des clauses importantes du régime qui reposaient sur je ne sais quoi, mais quoi qu'il en soit, dans ces clauses importantes, il y avait notamment la question de la contribution des parents, le programme pour handicapés, la notion de résidence chez ses parents, les frais de médicaments prescrits aux étudiants.

Ce projet de loi constitue une nette amélioration sur les plans juridique et administratif par rapport à la loi actuelle. Cependant, je dois constater que ce projet de loi - et ce n'est pas le seul - fait beaucoup trop appel au pouvoir réglementaire. Je pense que le pouvoir réglementaire est une solution de facilité. J'ai toujours pensé qu'en démocratie les projets de loi devaient non seulement contenir les principes qui guident l'action du gouvernement et du législateur, mais également définir et prévoir la substance des concepts qui font que la loi s'applique ou ne s'applique pas. Je peux constater, dans ce projet de loi comme dans plusieurs autres, qu'on abuse du pouvoir réglementaire, à mon point de vue, en tout cas. Je comprends très bien qu'on utilise le pouvoir réglementaire pour, notamment, fixer le taux d'intérêt, parce qu'on sait que ce taux d'intérêt fluctue et que ce ne serait peut-être pas pratique d'être obligé de changer la !oi chaque fois. Mais je ne pense pas que l'on puisse valablement déterminer, par voie réglementaire, ce que constitue, par exemple, une déficience fonctionnelle majeure, ou encore ce que constitue la notion de résidence. Je pense que des éléments comme ça sont fondamentaux sur le pivot de la loi et devraient être définis dans la loi et, par voie réglementaire, en préciser les modalités d'application ou les critères.

Je sais qu'il existe une Loi sur les règle-

ments mais, bien sûr, cette Loi sur les règlements n'a pas le même impact que l'étude d'un projet de loi, d'autant plus que la consultation publique n'existe pas de la même manière que pour les études de projets de loi en commission parlementaire. Je souhaite donc que les auteurs du projet revoient l'article 59 pour tenter, dans la mesure du possible - et je sais que ce n'est pas facile mais c'est faisable - de renvoyer certaines dispositions dans la loi elle-même.

Le troisième point qui m'inquicle, c'est que le projet de loi ne mentionne, en aucune manière, l'existence d'un mécanisme de réexamen des décisions. Je suis d'autant plus étonné que dans la quasi-totalité, pour ne pas dire la totalité des lois à caractère social, on prévoit toujours, de par la loi, des droits pour les citoyens ou les citoyennes de recourir devant une instance indépendante, lorsqu'ils ne sont pas satisfaits des décisions de l'administration. Ici encore, je constate qu'il n'y a pas de mécanisme indépendant, externe, de prévu. D'autant plus que, si on regarde ça sous un angle strictement sociologique, il faut dire que les personnes qui ont besoin d'aide financière en matière d'enseignement, ce sont des personnes qui sont défavorisées. Qu'ont-elles de recours contre l'administration? Elles ont les recours de droit commun. Ça veut dire qu'en pratique, si c'était pratique, on demanderait à des étudiants d'utiliser les mandamus en vertu du Code de procédure civile, tous les brefs de prérogative, ce que je trouve tout à fait inadéquat.

Ma quatrième remarque, c'est que sur un point particulier en matière de déclaration erronée par les étudiants, j'ai le sentiment que l'on établit un régime arbitraire et encore plus arbitraire que le régime actuel.

Considérations particulières. L'aide financière aux étudiants gravement handicapés, en fait, je pense que l'on devrait effectivement définir dans la loi ce qu'est la déficience fonctionnelle majeure qui est prévue à l'article 10 et non pas par règlement. Parce que l'expérience que nous avons eue dans ce domaine, vous avez un cas qui est mentionné ici, à la page 6 du document, où véritablement on a utilisé des normes relativement discrétionnaires pour refuser une aide financière particulière à un étudiant qui, bien sûr, n'avait pas un handicap sévère au sens des normes du ministère, mais qui, dans le contexte d'un amphithéâtre où il y a 200, 300 étudiants avec un professeur qui souvent parie au tableau, le dos tourné, ne pouvait pas l'entendre. Alors, je pense qu'il faut véritablement que l'on indique dans la loi les paramètres qui doivent être pris en compte pour établir ce qu'est une déficience fonctionnelle majeure.

L'autre point, c'est que notre expérience nous démontre que, lorsque l'étudiant produit des expertises au niveau de ses déficiences, il arrive que le ministère décide de manière unilatérale de ne pas tenir compte de ces expertises. Je pense, d'une part, que le ministère ne devrait pas agir de cette manière sans avoir obtenu lui même une contre-expertise par un spécialiste.

Le troisième point que je voulais mentionner quant à cette question des étudiants gravement handicapés, c'est qu'à l'heure actuelle le régime d'aide financière fait en sorte que les étudiants gravement handicapés reçoivent de l'aide financière sous forme de bourses et non pas de prêts. Je ne connais pas l'historique de ce régime particulier, mais, avec le libellé de l'article 59, je ne suis plus sûr que le ministère puisse continuer à verser laide financière exclusivement sous forme de bourses

Dans le cas du failli libéré, je vais sauter par-dessus, parce que je voulais simplement, là aussi, féliciter le ministère pour avoir bonifié les pratiques et la réglementation actuelle, parce qu'on va reconnaître les faits de réhabilitation sociale d'une faillite personnelle. Quant au remboursement des trop payés, je pense qu'il va falloir, lorsque des bourses ont été versées à un étudiant et que l'on découvre par la suite que cet étudiant n'y avait pas droit, que le ministère applique cette norme de récupération prévue dans le projet de loi d'une manière souple, surtout lorsque l'erreur provient d'une erreur administrative du ministère. Vous savez que, dans plusieurs régimes gouvernementaux - je ne dis pas que ça doit être ça, ici - lorsque l'erreur est causée par la faute d'un fonctionnaire, dune manière générale, on va effacer la dette, et ça existe dans la Loi sur la sécurité du revenu

Pour ce qui est de la résidence au Québec, la situation était telle qu'un entant qui et Hit parti à l'étranger avec ses parents, qui revenait au Québec et qui allait poursuivre ses études, ne pouvait pas être admissible au régime à moins qu'il n'y ait résidé douze mois et sans tenir compte du temps passé aux études. Nous avions fait la recommandation au ministère de corriger cette situation, qui nous apparaît impraticable et discriminatoire, et je suis heureux de pouvoir dire aux membres de la commission que, récemment, par l'entremise du sous-ministre, nous avons reçu une lettre qui nous indique que le ministère allait revoir cette problématique et corriger la situation par voie réglementaire.

Pour ce qui est des résidents permanents indépendants, je n'insisterai pas non plus là-dessus parce que, effectivement, le problème que nous avons soulevé est sur le point d'être réglé, parce que là aussi le ministère nous a transmis une lettre disant que cette question serait réglée par voie réglementaire, et je ne peux qu en féliciter les autorités et le personnel du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Je voudrais également parler - mais je passerai relativement vite - des délais et pénalités. À l'heure actuelle, vous n'ignorez pas que, lorsqu'un étudiant produit sa demande en retard, il est pénalisé de 50 % du montant d'aide qui lui

aurait été normalement accordé. Le projet de politique indiquait que la pénalité serait ramenée à 25 %, mais nous n'avons jamais été d'accord et nous l'avons mentionné au ministère il y a déjà plusieurs mois. Là-dessus, je dois admettre que, d'après une lettre qui émane du sous-ministre, tout à fait récemment, le ministère se propose de réduire la pénalité à un montant fixe de 150 $ plutôt qu'à un pourcentage de l'aide financière. Alors, je voudrais, là aussi, remercier le ministère d'avoir suivi nos recommandations.

Il y a également, dans le projet de loi ou dans la pratique, la production de documents qui pénalise, à l'occasion, les étudiants. Je ne veux pas entrer dans le détail de ce genre de pénalités, mais là aussi je demande au ministère de l'Enseignement supérieur, à la Direction générale de l'aide financière, de traiter ces dossiers-là avec beaucoup de parcimonie et de ne pas considérer, parce qu'il manque une pièce au dossier, que l'étudiant n'a pas droit à une aide quelconque ou à une ressource quelconque, mais de prendre les moyens pour que ce soit fait de manière tout à fait exceptionnelle, que, faute de production de documents dans un délai imparti, on retire l'aide ou on amoindrisse l'aide financière aux étudiants.

Par ailleurs, au niveau des délais, l'article 37. 1 du projet de loi précise que l'étudiant, et c'est tout à fait normal, doit aviser, sans délai, le ministère de tout changement dans sa situation qui pourrait influer sur le montant d'aide financière. Je me pose des questions sur la notion de "sans délai". Notamment, je me pose des questions lorsque, comme on le sait, beaucoup d'étudiants, l'été, vont travailler sur appel ou même pendant l'année académique, vont travailler sur appel. Est-ce que ça veut dire que chaque fois que l'employeur va communiquer avec un étudiant pour le faire travailler trois ou quatre heures, peut-être, aux quinze jours, il va falloir que l'on envoie cette information au ministère? Ce que je souhaite, c'est qu'encore là le ministère fasse preuve de souplesse de manière qu'on n'applique pas cette norme de manière aveugle, au préjudice de l'étudiant ou qu'on la change purement et simplement.

Je me suis permis ici de lancer, comme matière à réflexion, le fait qu'il fallait peut-être envisager l'opportunité - et je ne parle pas seulement pour l'aide financière aux étudiants -de pénaliser peut-être les ministères qui font preuve de délais déraisonnables. Vous savez, j'ai un peu de misère à comprendre que, dans les programmes sociaux, pour beaucoup de programmes sociaux, le fait de produire en retard une demande va pénaliser la personne qui réclame une prestation quelconque. A l'inverse, quand il s'agit du ministère, ou d'un ministère, ou d'un organisme gouvernemental, on n'est à peu près jamais pénalisé. Or, la Loi sur la fonction publique indique bien que les services publics doivent fournir les services à la population avec diligence. Et je ne sais pas si ça veut dire autre chose que des sanctions administratives ou disciplinaires à l'égard des fonctionnaires ou de l'administration. Je pense qu'il faudrait, dans certains cas, revoir beaucoup de programmes pour indemniser les citoyens qui reçoivent des prestations en retard, ce qui leur cause préjudice.

Les déclarations erronées. Ça, c'est un point qui est extrêmement important. Le dernier paragraphe de l'article 41 nous indique: Est exclu du régime, pour une période de deux années, celui qui produit une fausse déclaration ou qui n'a pas déclaré un changement qui peut influer sur le montant de l'aide financière. Ça, ça veut dire, en pratique, qu'à partir du moment où un étudiant, volontairement ou non, omet de fournir un renseignement ou fait une déclaration qui est, soit trompeuse soit fausse, cet étudiant sera pénalisé. H sera pénalisé parce qu'on le prive pendant deux ans de toute admissibilité financière. Ce qui m'inquiète, mesdames et messieurs de la commission, c'est que l'article 41, paragraphe 3, va pénaliser tant les étudiants de bonne foi qui pèchent par omission ou par action, mais par oubli ou par inadvertance, de la même manière que les étudiants de mauvaise foi, qui, eux, ont volontairement voulu frauder le programme. Et c'est laissé à la discrétion du ministère.

Je considère que cette disposition constitue un recul par rapport à la loi actuelle qui, elle, tient compte de l'intention coupable des étudiants. Je suis d'autant plus inquiet que le projet de loi ne prévoit pas de mécanisme de recours pour des décisions aussi discrétionnaires que ça. Je suis d'autant plus inquiet que, finalement, si la personne qui, présumément, a fraudé le régime d'aide financière, qui, elle, sera traduite devant un juge pénal, en vertu d'une autre disposition, cette personne-là, pour se défendre, aura le droit à une audition impartiale, une audition publique, une présomption d'innocence, possibilité de recourir à un avocat pour défendre une accusation de fraude au sens de cette loi-là. Mais quand il s'agit de montants aussi considérables que l'aide financière et qui mettent en jeu la survie économique ou la possibilité, pour certaines personnes, de faire des études, ça n'existe pas. Les règles de justice naturelle n'existent pas. Alors, je recommande qu'il y ait des changements qui soient apportés à cet article.

Est-ce qu'il me reste une minute?

La Présidente (Mme Hovington): Vos vingt minutes sont écoulées, mais allez-y, en conclusion. On va vous laisser Je temps quand même de bien vous exprimer.

M. Jacoby: En conclusion... C'est-à-dire, il me reste une minute?

La Présidente (Mme Hovington): Oui, je vous en prie, allez-y.

M. Jacoby: Je reviens sur l'absence de mécanismes de réexamen, parce que l'exemple que je vous mentionnais précédemment et d'autres exemples font en sorte que ça n'a pas de bon sens, en 1990, alors qu'on e une charte canadienne des droits, une charte québécoise des droits, alors que tous les régimes d'aide sociale ou de sécurité sociale prévoient oes mécanimes de révision devant des arbitres, devant des comités, devant la Commission des affaires sociales, qu'en 1990 le régime de prêts et bourses ne permette pas, ne donne pas droit aux étudiants de s'adresser à des instances autres que le ministère.

Pour terminer, je vais vous lire ma conclusion, cette fois-ci, parce que je la trouve bonne.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, monsieur.

M. Jacoby: Je suis d'avis que le projet de loi constitue une nette amélioration par rapport à la situation actuelle, et je pense qu'avec quelques modifications il sera, en ce qui nous concerne en tout cas, parfaitement acceptable.

Mais ce que je voudrais rappeler au législateur, c'est qu'une bonne loi et d'excellents règlements ne peuvent régler à eux seuls tous les problèmes. Au-delà des textes, il y en a d'autres que les parlementaires ne voient jamais, ce sont les règles administratives, les politiques administratives, les manuels d'opération, les directives administratives qui sont élaborés, interprétés et appliqués par ceux qui administrent ces normes-là. Je n'ai rien contre ça, parce que c'est essentiel pour l'application des lois. Et, à côté de ces règles, il y a aussi les attitudes, il y a aussi les pratiques qui ne sont pas écrites. Moi, je prétends et je suis de plus en plus convaincu qu'on a beau faire les plus belles lois au monde, les lois les mieux faites sur le plan technique, les règlements les mieux faits sur le plan technique, le libellé de toutes ces normes qu'on ne voit pas et qui sont des outils de l'administration et, surtout, la manière dont les administrateurs conçoivent leur clientèle, cela fait en sorte qu'une loi peut devenir libérale comme elle peut devenir inique.

Je souhaite - et je sais que je m'adresse à des personnes qui le comprennent très bien - pour cette loi comme pour toute autre loi à caractère social, qu'elle soit appliquée avec toute la richesse que commande l'article 41 de notre Loi d'interprétation qui veut que toute loi ait pour objet de corriger des abus ou de procurer des avantages, et qu'à ce titre elle reçoive l'interprétation large et libérale qui assure l'accomplissement de sa finalité. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Est-ce que j'ai le consentement des deux côtés de la Chambre pour continuer après 18 heures?

Une voix: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. le ministre, vous avez la parole. (18 heures)

M. Ryan: Merci, Mme la Présidente. Je remercie M. le Protecteur du citoyen de cette contribution qu'il apporte par son témoignage d'aujourd'hui et le mémoire écrit dont il nous a fait l'envoi avant la présente séance, à notre démarche en vue d'améliorer le régime de l'aide financière aux étudiants. Je fus témoin de la naissance de l'institution du Protecteur du citoyen, il y a maintenant une vingtaine d'années peut-être. J'ai bien connu le premier titulaire de la fonction avec qui j'ai eu des contacts fréquents, à l'époque. J'ai vu l'institution prendre forme. Elle fait partie maintenant de nos institutions et de nos moeurs. Je pense qu'elle se déploie avec la liberté que le législateur avait voulue, à l'origine.

La dimension que vous donnez aujourd'hui à la fonction du Protecteur du citoyen m'avait quelque peu étonné, au début. Mais je me souviens de conversations que j'ai eues avec M. Marceau et même des membres de l'Assemblée nationale, à l'époque, et il avait été bien con venu que l'on devait donner au Protecteur du citoyen le pouvoir de faire, de sa propre motion, les interventions publiques, même sur des sujets de caractère général

La question qui se posait, à mon esprit, portait plutôt sur le caractère général de la présente intervention. Normalement, on voit l'intervention du Protecteur du citoyen dans des situations très concrètes, impliquant des personnes, et là nous discutons plutôt d'un projet de loi. Mais la loi constitutive de l'institution ne crée aucune difficulté. Elle ouvre la porte à cette fonction, à cette modalité dans l'exercice de la fonction et nous l'accueillons, pour notre part, du côté du gouvernement, avec beaucoup d'ouverture.

J'ai consulté les statistiques auxquelles fait référence votre intervention écrite et je constate qu'en ce qui touche le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science - évidemment, les institutions d'enseignement ne relèvent pas de votre champ d'intervention, mais la loi de l'aide financière, elle, relève de votre champ d'intervention - vous avez un certain nombre d'interventions qui sont faites auprès de vous, chaque année, qui ne sont pas extrêmement considérables, d'après moi. Je regarde en 1985, vous en avez accepté, je pense, 281; en 1986, 300; en 1987-1988, 337; en 1988-1989, 324. Par consé-

quent, il n'y a pas eu prolifération, il n'y a pas eu de développement extraordinaire de ce côté-là. Vous en attendez davantage en 1989-1990; vous nous expliquerez peut-être un peu pourquoi tantôt.

De manière générale, le régime de l'aide financière aux étudiants a connu, ces dernières années peut-être, entre autres, deux développements significatifs en relation avec les sujets que vous avez mis sur la table. Tout d'abord, nous avons amélioré considérablement les procédures administratives à telle enseigne que les retards presque innombrables dont nous étions saisis, il y a environ quatre ans, sont pratiquement disparus. Ça diminue considérablement le nombre d'interventions dont le ministre est le siège, en particulier. J'en suis très heureux et j'en félicite les responsables de l'aide financière aux étudiants qui ont accompli un travail de mise en ordre remarquable de ce côté, qui me rend optimiste, d'ailleurs, à l'idée d'aborder la nouvelle phase de l'existence du régime que couvrira l'adoption du projet de loi 25.

Il est arrivé une autre chose aussi. Je pense pouvoir dire sans exagérer - j'encaisse bien des critiques là-dessus - que c'est bien normal que j'essaie de faire ressortir le côté positif de l'action que j'essaie de faire dans la gestion des affaires publiques dans les secteurs dont j'ai la responsabilité. Il y a une certaine conception de l'administration publique qui tend à mettre le ministre sur un piédestal, à en faire une espèce de statue qui vient bénir les jours officiels, qui appose sa signature à des documents dont on n'oserait pas lui infliger la lecture, à le protéger contre tous les cas particuliers qui peuvent vouloir mobiliser son attention, sous prétexte que de minimis non curât praetor.

Moi, ce n'est pas ma conception des choses. J'ai une conception beaucoup plus directe et concrète et je me dis que si un citoyen m'écrit, quand même il s'appelle Jos Lemoignan qui m'écrit du fond de la Gaspésie, il existe pour moi autant que si le recteur de l'Université de Montréal m'écrivait et je lis sa lettre avec la même attention. Je lui apporte des suites. S'il m'apporte une plainte, je vois à ce que l'administration en soit saisie et lui rende des comptes ainsi qu'à moi. Ça permet de régler un grand nombre de problèmes, en cours de route. Ça permet de disposer, chaque année, de centaines et de centaines de cas qui, autrement, traîneraient dans les archives à gauche et à droite. On fait énormément de nettoyage de ce côté-là. Il y en a qui disent que ça fait un style un petit peu interventionniste. Au bout de la ligne, on ne pense pas à ça. Ce qui est intéressant, c'est que le citoyen vous dise: Mon problème a été réglé, merci. C'est pour ça qu'on est là. Tout le reste, moi, franchement, ça m'indiffère.

Alors, de ce point de vue, je pense que vous n'aurez pas trop d'accumulation parce que mes fonctionnaires partagent ma philosophie et je leur en rends hommage parce qu'ils ont été d'un esprit de collaboration magnifique de ce côté-là. Je vous assure que, même par mon cabinet, il passe une foule de cas chaque année qui trouvent un règlement clair, honnête et satisfaisant. Vous avez sans doute examiné bien de ces cas-là à travers l'examen des plaintes qui vous ont été soumises et j'espère qu'on va continuer à agir dans ce sens-là. Ces deux facteurs tempèrent beaucoup la manière dont je perçois certaines choses par rapport à l'approche que j'aurais pu avoir quand j'observais le gouvernement de l'extérieur. Là, je me dis: Je suis à l'intérieur et c'est à moi de le faire marcher, je suis payé pour ça, dans le secteur dont je suis responsable encore une fois.

Ceci étant dit en guise d'introduction, je pense que nous avons le même souci sur le fond, par conséquent, que le citoyen et la citoyenne soient bien et efficacement servis dans le respect de leur dignité. J'en viens aux questions que vous avez soulevées dont une première, où vous dites qu'il y a certaines dispositions que vous souhaiteriez voir davantage dans la loi que dans la réglementation. J'aimerais peut-être vous demander sur ce point de me donner des exemples parce que nous avons travaillé cette question, évidemment, avec beaucoup de soin. Lorsqu'il s'agissait des montants, par exemple, les quanta, il nous est apparu que c'est préférable de les inscrire dans les règlements. Ma première réaction a été une réaction d'étonnement aussi parce que je me disais: II faudrait bien qu'on le dise clairement; si on ne dit pas ça dans la loi, qu'est-ce que la loi va signifier? Mais, finalement, les conséquences de l'inscription d'une telle donnée dans la loi sont tellement considérables au point de vue de certaines rigidités dans le maniement des situations concrètes que je me suis rendu au raisonnement qu'on m'avait fait valoir en faveur de la supériorité d'une option du côté de la réglementation. Mais, peut-être, mon exemple n'est pas le plus, celui auquel vous pensiez davantage. Si vous voulez me donner un certain nombre d'exemples, ça m'aiderait à comprendre mieux le point de vue de ce point de vue là, parce que c'est une question qui me préoccupe.

M. Jacoby: Je n'ai pas dressé une liste exhaustive des concepts qu'on voudrait voir transférer dans la loi. Ce que je constate, c'est qu'il y a certains concepts qui, à mon point de vue, devraient être précisés dans la loi plutôt que par règlement. Si on parle de différentes contributions de dépenses admises, de quantum, de questions purement monétaires, moi, je pense que... Je comprends que pour l'administration, ce sera beaucoup plus souple d'utiliser le pouvoir réglementaire étant donné qu'on peut modifier les règlements en cours d'année. Cependant, je me dis: II y a des administrations chez nous,

comme le ministère du Revenu qui s'impose des barèmes dans sa propre loi et on change la loi tous les ans et on dit que c'est du droit fiscal. Bien sûr, donc, c'est dans la loi. Ce n'est pas par voie réglementaire qu'on le fait. On va dire que la loi fiscale, la Loi sur le ministère du Revenu ou la Loi sur l'impôt est une loi compliquée, mais je suis convaincu que la Loi sur l'aide financière aux étudiants, si elle était plus explicite dans le texte lui-même, ne serait pas aussi compliquée que la Loi sur Ip ministère du Revenu ou la Loi sur l'impôt. Moi, c'est une question de principe. Je n'admets pas qu'on puisse définir par règlement le cas où une personne a une déficience fonctionnelle majeure. Comment c'est défini par règlement et comment, en plus, à partir du règlement, on va élaborer des directives, des critères et des politiques pour la mise en oeuvre du règlement? L'exemple que l'on donnait tout à l'heure de cet étudiant qui était frappé d'une déficience auditive qui, suivant les barèmes du ministère, en deçà d'un certain niveau de décibels, avait une déficience tout à fait moyenne et on ne lui reconnaissait pas l'aide financière... Mais moi, je me dis qu'on donne trop de discrétion à l'administration quant à la définition de choses aussi fondamentales que la déficience majeure fonctionnelle. Et le législateur se devrait, notamment, de tenir compte de l'environnement et que ce soit dit dans la loi. Je pense que ce sont les grandes balises qui doivent être dans la loi qui, elles, vont guider le Conseil des ministres lorsqu'il va adopter des règlements et qui, elles, vont guider l'administrateur lorsqu'il va élaborer ses cahiers de normes et de politiques.

M. Ryan: Avez-vous terminé? M. Jacoby: J'ai terminé.

M. Ryan: Très bien. Là, je ne suis pas sûr que je pourrais être de votre opinion, parce que je pense aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage dans notre système scolaire. S'il fallait mettre toutes ces définitions-là dans nos lois, dans la loi 107 qui a déjà 750 articles, je pense que ce ne serait pas gérable et, à un moment donné, il arrive que des données nouvelles nous obligent à faire certains changements. S'il fallait toujours passer par la législation... Vous ne savez pas ce que c'est l'Opposition, vous. Ils sont terribles.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Mais c'est tout un processus quand on passe par la législation parce qu'il faut répéter la même chose à peu près cinq fois pour être compris. Il y a toutes sortes d'étapes, là. Le calendrier, à part cela, l'agenda de la Chambre, ne laisse de place à chaque session que pour un nombre très limité de projets. Vous le savez ce qui arrive, même avec le nombre limité, quatre sur cinq sont adoptés à la vapeur à la dernière minute. On n'a jamais été capables de corriger ça. Ça veut dire qu'à chaque session il y a peut-être cinq, six, sept projets importants qui peuvent être discutés. C'est un gros total que je vous donne là.

J'ai de la misère à concevoir, au point de vue pratique, comment on pourrait donner suite à votre voeu qui, en principe, attirerait ma sympathie. J'ai de la misère, mais, en tout cas, je vais l'examiner et, s'il y a des cas précis que vous pourriez ajouter à ceux que vous avez mentionnés dans votre mémoire et votre réponse verbale, je l'apprécierais vivement et on pourrait continuer. Je vais passer à un autre sujet parce que l'Opposition attend son tour et je ne vou drais pas aller plus que le temps qui m'est imparti.

Vous parlez de l'absence d'un mécanisme d'examen des décisions. Je vais parler de ça et des pénalités aussi. Ce sont des gros sujets que vous abordez, M. le Protecteur du citoyen. Sur l'absence d'un mécanisme de révision, je vais vous dire comment je vois ça, moi. Un comité d'examen comme celui qui est prévu dans le projet de loi 25, ça, nous en avons besoin. Ce n'est pas un comité pour corriger des erreurs; c'est un comité pour aller au-delà de la lettre et vous savez combien c'est important dans ce secteur-ci. Là, il est prévu qu'au bout de la ligne, vu que ce sont des décisions de caractère légèrement discrétionnaire, parfois assez auda-cieuspment discrétionnaire, mais ça, c'est le domaine du ministre, ce n'est pas le domaine du fonctionnaire, ce n'est pas le domaine d'un comité de ci ou de ça, c'est le domaine en propre du ministre... Mais on dit: Pour ne pas qu'il agisse de manière arbitraire, il faudrait qu'il ait reçu l'avis d'un comité d'examen auparavant, lequel comité sera composé de manière qu'on soit assuré de la présence des principaux points de vue intéressés. Alors, je pense que de ce point de vue là on a une procédure qui va permettre, justement, de régler, de manière plus rapide et plus généreuse parfois, ces cas-là, plusieurs douzaines de cas chaque année dont nos fonc tionnaires sont obligés de conclure qu'ils ne tombent pas sous le règlement et dont eux mêmes sont les premiers à me dire: Des fois, ça mériterait trois fois plus que le cas qui tombait sous le règlement. Avec ça, on a une prise, là. On va pouvoir agir.

L'autre possibilité, je me suis interrogé depuis le début des auditions de la commission: Est-ce qu'en plus de ça il faudrait un mécanisme d'appel proprement dit pour les décisions de caractère administratif qui pourraient être injustes ou arbitraires? Je vais vous dire - peut-être que je vais proférer une hérésie - que je ne vois pas la matière, je ne vois pas la raison concrète, parce que je n'ai pas de résidu de cas de cette nature qui se présentent à moi. Si on

m'avait dit: Voici, là, il y a eu un certain nombre de cas. Mais, pas en général, toujours, à ma connaissance, dès qu'il y a un cas qui nous est présenté et qui se justifie... Il peut arriver que les fonctionnaires se trompent. Les gens ne sont pas fous. Ils vont voir leur député ou écrivent directement au ministre et, quand le député est saisi d'un cas, il vient voir le ministre. En général, nous leur donnons une réponse. Il y a un certain résidu qui reste là, dont une partie va arriver à votre bureau. Bien, il y en a peut-être quelques cas, quelques unités, mais je pense que vous allez convenir avec moi qu'on dispose de l'ardoise d'une manière fort convenable. Si on pense qu'on doit traiter chaque année au-delà d'une centaine de milliers de demandes, c'est formidable, quand même, qu'on soit arrivés à ça.

Maintenant, je ne le sais pas, je vous pose la question pour la procédure d'appel: Est-ce que vous voyez vraiment une matière pour avoir un mécanisme d'appel formel et décisionnel? Moi, je n'en vois pas pour l'instant. Je vous le dis en toute simplicité.

La Présidente (Mme Hovington): M. Jacoby. (18 h 15)

M. Jacoby: M. le ministre, sur la question du - comité d'examen qui est prévu dans le projet de loi, il s'agit véritablement d'un secteur très limité. Il s'agit du quantum, du montant de l'aide financière. Ce comité fonctionne sur la base de recommandations ou d'avis qui sont fournis au ministre, mais ça ne touche pas des questions comme, par exemple, la notion de résidence. Ça ne prend pas en compte le fait, par exemple, que le ministère pourrait indûment pénaliser un étudiant qui, supposément, aurait fait une fausse déclaration. Ça ne règle pas ce problème-là. C'est un pouvoir extrêmement limité dans la loi. Donc, il y a toutes les autres facettes de l'administration de cette loi qui ne font pas l'objet de la juridiction du comité que le projet de loi propose de mettre sur pied, M. le ministre. Une fois que j'ai dit ça, je comprends très bien et je dois vous féliciter du fait que vous interveniez, comme vous dites, de manière très concrète, très pratique. Vous êtes très présent dans l'administration de vos dossiers et nous en sommes très conscients. Je pense que c'est un plus, c'est un grand plus.

Cependant, il faut penser que le ministre, quel qu'il soit, ne sera jamais un ombudsman au sens des lois d'ombudsman qui existent à travers le monde. Un ministre est avant tout le chef d'un ministère. Un ministre est d'abord et avant tout là pour appliquer ou faire appliquer les programmes qui sont de son ressort. Un ministre est d'abord là pour défendre ses politiques ou défendre les politiques que l'administration lui a élaborées. Un ministre ne peut pas être complètement impartial et sans préjugés quand, par ailleurs, l'on sait qu'il existe non seulement des décisions de nature administrative dont le ministère se dote ou de politiques administratives, mais il y a aussi les politiques partisanes.

Malgré toute la bonne foi que peut avoir une administration, que ce sort au niveau du directeur général de l'aide financière, que ce soit au niveau de l'agent d'aide financière, que ce soit au niveau du sous-ministre associé ou du sous-ministre adjoint, au niveau du sous-ministre en titre et du ministre, jamais, jamais on ne pourra avoir, dans une décision, l'objectivité et l'impartialité d'une instance extérieure. D'ailleurs, c'est pour ça, M. le ministre, qu'on a inventé les tribunaux. Autrement, il n'y aurait pas de tribunaux. Il n'y aurait pas de régime de séparation des pouvoirs. Mais quels sont les étudiants qui peuvent aller devant les tribunaux? On y croit ou on n'y croit pas, aux tribunaux. Si les tribunaux de droit commun... Je me dis que si on pense que les ministères peuvent être tout à fait impartiaux, abolissons les tribunaux.

Ceci étant dit, un mécanisme de réexamen, tous les programmes de sécurité sociale au Québec contiennent des mécanismes de réexamen. Ça ne veut pas dire que les personnes qui siègent à ces mécanismes de réexamen sont "loadées", qu'elles en ont par-dessus la tête, ça veut dire tout simplement qu'on va permettre à une instance différente de la première qui a pris une décision de reconsidérer la décision en voyant peut-être la chose sous un angle différent, M. le ministre. Ce que je veux dire par là, c'est que, de toute façon, et on le voit tous les jours à l'échelle gouvernementale, il est très difficile de demander, par exemple, à une direction qui est dans les opérations de revoir sa propre décision. Quand le ministre ou l'attaché politique ou le sous-ministre va demander aux opérations de reconsidérer une décision, dans 99,9999 % des cas, la réponse sera: Nous maintenons notre décision. C'est normal, c'est humain, M. le ministre. C'est peut-être dans 0,0001 % des cas qu'on voudrait faire en sorte qu'on puisse bénéficier d'un mécanisme de réexamen.

Ceci étant dit, on peut penser à bien des façons d'instaurer un mécanisme de réexamen. Il y a ce que j'appelle des mécanismes très internes de réexamen, puis des mécanismes très externes de réexamen. Ça va d'un comité interne du ministère où on ferait siéger des gens de l'extérieur du ministère jusqu'à des recours devant, par exemple, une division spécialisée de la Commission des affaires sociales.

M. Ryan: Regardez, on pourrait avoir une disposition qui permettrait des recours, plutôt qu'aux tribunaux qui existent actuellement, à la

Commission des affaires sociales, je n'aurais pas d'objection, mais ce à quoi je m'objecte, c'est à la création d'une nouvelle bureaucratie arbitrale dont je ne vois pas la preuve du besoin concret sur la base des cas qui m'auraient été soumis, y

compris par vous. Si j'avais un dossier impressionnant: C'est effrayant, regarde ça, la gang, qu'est-ce qu'ils font là, à l'aide financière, ça n'a pas de bon sens, ils ont zigouillé un tel, ils ont traité un tel de telle manière, et tout ça. Mais je n'ai pas cette matière, je ne cours pas après ces procédures-là juste pour le plaisir de les avoir. Mais vous posez une question de principe à laquelle je suis sensible. Je vais regarder avec mes conseillers s'il y a quelque chose qui peut être envisagé, mai? ça ne sera sûrement pas une bureaucratie originale parce que ce n'est pas ma spécialité.

L'autre point, les pénalités, et c'est mon dernier point; il y en avait d'autres, mais je pense qu'on va avoir couvert les principaux points. Là, vous avez touché à un point sensible; je pense que vous avez mis le doigt sur un bobo réel dans le projet de loi et dans nos pratiques: les pénalités sont excessives dans bien des cas. Je pense que vous l'avez signalé de manière fort éloquente. On vous a déjà indiqué - vous y avez fart allusion tantôt - que certaines pénalités seront réduites considérablement à l'aide d'amendements que nous apporterons au projet de loi au stade de l'étude en commission. Je pense qu'on va revenir à des proportions plus raisonnables: il y avait vraiment des excès que je vous sais gré d'avoir signalés. Je me servirai de votre intervention auprès de mes collègues du gouvernement pour leur faire voir qu'il y a certaines choses dans ceci qui vont trop loin et on les avait peut-être empruntées un petit peu trop servilement: des pratiques établies sous la férule des fonctionnaires, faut-il croire, parce que les ministres ne peuvent pas être responsables de choses comme celles-là, vous le savez très bien. Alors, je pense que de ce côté-là, c'est excellent, et comptez qu'on va travailler.

Vous m'avez écrit récemment - je fais juste allusion à ça - pour l'affaire des étudiants gravement handicapés. Vous m'avez soumis un cas particulier qui oblige à une définition peut-être plus large de ce concept-là. Nous sommes en train de l'étudier. J'ai pris bonne note de votre intervention et, encore une fois, sur ce point-là, je suis porté à croire que ça irait mieux par voie réglementaire que par voie législative, peut-être même par voie administrative directe dans certains cas, quand les cas sont urgents, mais on y verra.

Je souligne seulement, en terminant, que, dans le cas du comité d'examen, sa compétence me paraît plus large que ce que vous avez signalé, M. le Protecteur du citoyen; en tout cas, c'est l'intention que nous avons. Vous avez lu comme moi l'article qui décrit son champ d'intervention, c'est l'article 42, mais il faut le référer au champ d'intervention du ministre. Le pouvoir du ministre ne se limite pas seulement à changer le quantum de laide financière dans certains cas. Il peut trouver qu'il y a dos raisons très sérieuses, c'est lorsqu'il voit un danger d'abandon des études qu'il peut intervenir dans un cas. Ça va aller plus loin, mais, là, jusqu'où exactement? On va l'examiner de près parce qu'il y a des problèmes difficiles là-dessus. Il y en a qui sont portés à se méfier du ministre aussi, pas seulement à l'extérieur comme du côté de l'Opposition, c'est un peu normal, mais même parfois à l'intérieur du gouvernement. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, assez rapidement. Je voudrais féliciter, comme c'est titré - pour éviter la personnalisation - le bureau du Protecteur du citoyen. En ce qui me concerne, il s'agit d'un mémoire d'une remarquable pertinence à ce moment-ci. J'étais conscient, en vous entendant tantôt, que c'était la première fois, à ma connaissance, que le Protecteur du citoyen - et son équipe - se présentait ici sur un projet de loi et venait, dans le cadre de ses responsabilités et des attributions qui lui sont confiées par une autre législation, exprimer ses craintes, ses réserves. Autant que faire se peut - il peut y avoir une couple de fois... Il me semble qu'on pourrait discuter si c'était de sa juridiction ou de son pouvoir de donner un avis sur tel et tel aspect, mais, au-delà de ces nuances, il m'apparaft que vous avez eu cette responsabilité professionnelle de demeurer collé à des réalités qui sont sous le couvert de la responsabilité d'un protecteur du citoyen dans son mandat. Il n'y a pas d'avis sur le dégel; il n'y a pas d'avis, à savoir si ça aura un effet sur l'accessibilité; il n'y a pas d'avis, à savoir si nous sommes véritablement en retard, et ainsi de suite, et ça, je trouve que c'est tout à fait conforme, correct que le Protecteur du citoyen s'en tienne à des responsabilités qui lui paraissent être sous sa responsabilité de Protecteur du citoyen.

Deuxième commentaire général. Il est évident, M. le Protecteur du citoyen - en tout cas, en ce qui me concerne et en ce qui concerne sûrement l'Opposition - que vous nous avez fourni là un excellent outil de travail pour les étapes subséquentes que, comme parlementaires, nous allons devoir franchir dans l'évolution de cette loi concernant l'aide financière aux étudiants, parce qu'il y a plusieurs aspects sur lesquels, si j'avais plus de temps, j'aurais le goût de questionner davantage. Je vous dis tout simplement que, si on résume votre mémoire, vous avez touché des aspects concrets, de temps en temps sur les mécanismes, de temps en temps sur des dispositions d'application à caractère plus arbitraire et plus injuste. Vous nous avez déjà donné des exemples précis de certaines anomalies, selon vous, eu égard à des principes de droit, en particulier pour ce qui est des délais, des pénalités. Moi, en tout cas, je suis convaincu quo je vais m'en servir d'une façon trtSs adéquate

lors de l'évolution des autres étapes du projet de loi.

Je fais un dernier commentaire sur les grandes lignes: Est-ce que le projet de loi fait trop appel au pouvoir réglementaire? Il me semble qu'à sa face même... Je pourrais même déposer des réflexions qu'on a faites avant même de venir ici en commission, de l'équipe qui nous conseille, et en particulier de quelqu'un qui entoure le leader de l'Opposition officielle, qui est quand même assez habitué - vous le connaissez tous de nom, M. Charles Grenier - qui en a vu, des législations, il en a vu, des projets de loi. Effectivement, son étonnement était celui-là, de dire: Écoutez, on vous demande d'aller en commission parlementaire sur un éventuel projet de loi, c'est exact, sauf que 80 %, pour ne pas dire plus, de la mécanique de la gestion, de la façon dont certains principes seront établis, nous ne les connaissons pas. Et le gouvernement dit: Ça, ce n'est pas ton affaire, je ne te montre pas ça.

Ecoutez, on ne parle pas à un enfant d'école, en tout cas de ce côté-ci. Le ministre disait de vous: Vous ne connaissez pas ça, l'Opposition. Je ne porte pas de jugement sur vous mais, moi, je connais ça un peu, et lui aussi, parce qu'il l'a été à date plus souvent que moi, parce qu'on a été neuf ans au pouvoir, puis nous sommes au début de la quatorzième année. Malheureusement, c'est encore trop long.

Mais, indépendamment de ça, lui aussi connaît l'Opposition et il m'apparait qu'il est inconcevable, pour un projet de loi de cette nature, que nous ne soyons pas plus exigeants afin de pouvoir prendre fait et cause de certaines dispositions où on retrouvera la façon dont le principe qui est véhiculé dans les articles de loi sera articulé. Là-dessus, vous avez raison, alors je ne peux pas aller plus loin, trop de pouvoirs réglementaires. Mais, là, pour des raisons de temps aussi, je ne peux pas tout dire. Ce n'est pas la première fois qu'on dira à ce ministre-là qu'il ambitionne sur le pouvoir réglementaire. Je pourrais citer un autre document, ce que je pourrais faire la semaine prochaine, où on donnera des exemples concrets, où il est très, très, très pointilleux que tout atterrisse au quinzième, à son bureau.

Le projet de loi maintient l'absence de mécanique de réexamen des décisions. Là-dessus, rapidement, je veux juste vous dire une phrase. Moi, ce ne sont pas les exemples que je veux avoir. Qu'il y en ait ou pas, je m'en contrefous sincèrement. Ce n'est pas parce que je ne veux pas être pragmatique autant que le ministre, sauf que, vous l'avez dit, le propre d'une administration légitime, correcte, normale, adulte et responsable, c'est de justifier les décisions qu'elle prend. Je l'ai été un bout, ministre, et j'aurais été déçu si, chaque fois que je leur ai dit: "II me semble que ça n'a pas de bon sens, ce que vous avez fait, voulez-vous me réexaminer ça", ils auraient dit: Vous avez raison, M. le ministre, ça n'a pas d'allure, ce qu'on a fait. C'est très rare que ça commençait de même, les échanges que j'avais à peu près avec tous les responsables de service, peu importe leur poste. Normal, légitime, qu'une administration dise: Écoutez, M. Gendron, je vais vous donner l'ensemble de l'information sur le dossier. Ça commence toujours de même. Et sous prétexte que nous, on n'a pas l'éclairage de l'ensemble du traitement administratif du dossier, bien, c'est sûr qu'on est biaises parce qu'on n'a pas l'éclairage. Et après qu'un ministre reçoit l'éclairage, la tendance humaine, normale, sans aucune partisanerie politique, sincèrement, c'est d'épouser logiquement les explications qui lui sont données et fournies par ses subalternes. On ne peut pas réinventer la roue.

Là-dessus, vous avez encore à 100 % raison, et je n'ai pas le temps de citer votre phrase. De toute façon, elle était tellement belle, puis c'était tellement clair: Je crois que tout citoyen - enfin, un petit bout - a droit à ce que son dossier soit réétudié par une instance autre que celle qui a rendu la première décision. C'est du fondamental tout court. Je ne vais pas plus loin, c'est du fondamental tout court, y compris pour le ministre de l'Éducation, qui a le nez fourré partout, dans bien des cas correctement, correctement.

Le laïus que vous avez fait en disant qu'on sent qu'il s'occupe de ses dossiers, je le comprends. Je rencontrais quelqu'un aujourd'hui qui me disait: À notre lettre - et je ne veux pas faire erreur - du 11 septembre dernier on a reçu hier la réponse. Bravo! Enfin, il y a eu une réponse, six mois plus tard. Je ne peux pas le blâmer parce qu'il veut voir les affaires et souvent, une lettre, lui, ça n'a jamais en bas de 15 à 20 pages. Alors, bravo pour cet aspect-là, mais ça crée d'autres inconvénients ailleurs. (18 h 30)

Sur le dernier commentaire dit d'ordre général, le projet de loi en matière de déclarations erronées par l'étudiant établit un régime purement arbitraire, vous avez raison.

Moi, deux questions, parce que ma collègue veut en poser une et le temps file. Vous mentionnez en page 31, et avec raison, je pense, qu'il y a un rapprochement presque mot pour mot - pas rien que presque, intégralement, ne nous cachons pas la vérité, là - les articles 47 à 52, c'est le même régime que celui qui existe au niveau des boubous macoutes ou de la Loi sur la sécurité du revenu. Et vous me dites que vous avez reçu pas mal de plaintes. Alors, pouvez-vous nous dire combien de plaintes vous avez reçues de la part de bénéficiaires de l'aide sociale concernant, justement, l'application de ces articles qui, à ma connaissance, vont à rencontre de tout principe de droit, même pour quelqu'un qui ne connaît pas ça? Si vous en avez reçu beaucoup, je comprends davantage votre bon

jugement de dire: Est-ce qu'il y a moyen de questionner la pertinence que les mêmes éléments ou le même éléphant soient reproduits dans l'article que nous étudions?

La Présidente (Mme Hovington): M. Jacoby, allez-y.

M. Jacoby: Effectivement, sur ce nouvel élément des agents vérificateurs, on n'a pas reçu de plainte pour la bonne raison qu'à l'aide sociale, au moment où on se parle, on n'a pas encore mis en oeuvre les dispositions de la Loi sur la sécurité du revenu qui créent ces agents vérificateurs et qui s'ajoutent, entre guillemets, à ces macoutes dont on parle. Les plaintes que nous recevons, ce sont sur les inspecteurs. Ce sont les inspecteurs qui sont dotés de pouvoirs de commission d'enquête. Mais pour ces nouvelles dispositions qui, à mon point de vue, sont devenues une mode de légistes depuis quelques mois, on n'a encore rien reçu parce que l'aide sociale ne l'a pas mis encore sur pied, ce corps d'emploi. Alors, je ne suis pas en mesure de vous le dire, mais déjà, sous le système actuel des inspecteurs ou des enquêteurs comme tels, on reçoit un grand nombre de plaintes, bien sûr. La question fondamentale que je pose ici, comme je l'ai posée à propos de la Loi sur la sécurité du revenu, c'est: A-t-on besoin de cet arsenal de munitions? Est-ce que le régime d'aide financière, d'après les normes du ministère, est rendu au point qu'il y a 25 % des gens qui fraudent? Si oui, il y a quelque chose à faire. Mais est-ce que c'est le taux de fraudes que l'on retrouve normalement dans tous les régimes?

Ce qui est extrêmement dangereux, c'est que l'addition comme ça de nouveaux mécanismes d'enquête et de vérification va faire en sorte que, si je prends toutes les dispositions les unes par rapport aux autres, on arrive à des choses qui sont aberrantes. Par exemple, si je ne réponds pas à une question d'un agent vérificateur ou si je ne lui produis pas un document, que va faire en pratique l'agent vérificateur? Il va se retourner vers l'enquêteur qui exerce ses pouvoirs de commission d'enquête. Quelle qu'en soit la raison, la personne ne répond pas au commissaire enquêteur. Pour la même infraction, pour le même acte délinquant au sens de la loi, le même individu pourra être condamné pour outrage au tribunal par l'enquêteur du ministère et pourra être condamné au pénal à la suite du dépôt d'une plainte du vérificateur du ministère. Tous ces gens-là travaillent dans la même organisation. Je dis que des législations comme ça peuvent conduire à des abus.

Ce que je dis, c'est qu'avant qu'un ministère adopte des dispositions qui sont des modes de légistes - et ça revient, c'est cyclique, tous les quinze ans, ces affaires-là; j'ai l'expérience parce que j'ai été légiste à une certaine époque - je vais vous dire une chose: II faut qu'on fasse la preuve qu'il est nécessaire d'avoir tout cet arsenal de munitions. Je ne peux pas comprendre si on n'a pas de preuve. Il ne faut pas que, simplement, l'administration dise: On n'aura plus d'armes pour confondre les fraudeurs, encore faut-il que ce soit justifié.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député d'Abitibi Ouest.

M. Gendron: Oui, M. Jacoby, rapidement. Vous l'expliquez comment, le nombre de plaintes qui va se chiffrer aux alentours de 500 en 1990? Parce qu'on en avait l'occasion tantôt et on a dit: On espère que vous aurez l'occasion de toucher ça. Alors, c'est quoi les raisons principales qui font qu'il y aurait une recrudescence majeure du nombre de plaintes cette année?

M. Jacoby: Vous savez, il y a plusieurs facteurs et les facteurs ne sont pas les mêmes d'un programme gouvernemental à l'autre. Il y a une chose qui est, pour moi, très claire, c'est que, dans notre société, depuis, je dirais, une dizaine d'années, il y a une transformation sociologique qui fait que le citoyen, qui est un consommateur de services et de biens du privé, par l'influence de toutes les législations sur la protection du consommateur, a développé beaucoup d'exigences auprès du secteur privé pour les producteurs de biens ou de services.

Ce réflexe est en train de passer chez le citoyen consommateur de services gouvernementaux. Ça, c'est un phénomène qui est observé à travers le monde, aussi bien en Europe qu'aux États-Unis. On va exiger de l'administration les mêmes services et on va être aussi exigeant de l'administration publique qu'on peut l'être pour les entreprises du privé. Ça, c'est un phénomène sociologique.

Deuxième phénomène sociologique, c'est que, de plus en plus, les gens sont informés du fait qu'ils ont des droits Je ne dis pas qu'ils sont informés de leurs droits, mais ils sont informés de plus en plus qu'ils ont des droits. Et vous avez, notamment, les bureaux d'aide financière dans les universités qui ajoutent à ça. Il y a une conscience plus grande des citoyens de leurs droits.

Troisièmement, je pense que c'est un phénomène irréversible On a beau dire Les plaintes vont augmenter. Je ne pense pas que ce soit parce que le Protecteur du citoyen est un peu plus visible depuis deux ans que ça change les choses. Les plaintes augmentent depuis la création de l'institution. Ce que je pense, c'est qu'il faut que l'administration comprenne que les citoyens exigent maintenant des prestations de l'administration II faut que les administrations comprennent que ce ne sont pas des privilèges qu'on apporte aux citoyens, que ce n'est pas un cadeau, l'aide financière, mais un droit. Le gouvernement, lorsqu'il met de l'argent dans

l'aide financière, il ne fait pas une dépense, il fait de l'investissement. Il faut donc que l'administration s'attende nécessairement à avoir de plus en plus de plaintes.

Je dois admettre qu'il y a eu beaucoup de corrections au programme d'aide financière ces dernières années. Je dois en féliciter les administrateurs, mais cela n'empêchera pas que les plaintes vont augmenter et c'est ce qu'on constate partout, vous savez, même dans les programmes où on a mis des bureaux de révision, des bureaux paritaires, des comités de réexamen, les plaintes augmentent. C'est un phénomène sociologique.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Bravo! C'est un excellent mémoire et, comme le disait mon collègue, tout à l'heure, c'est probablement le premier et le seul que nous verrons qui, vraiment, traite exclusivement de cette question du régime des prêts et bourses. Les autres, comme il se devait, le ministre a essayé de cacher le débat du dégel des frais de scolarité en dessous de celui de la réforme de l'aide financière, mais, évidemment, personne ne s'est laissé prendre, tout le monde en a parlé.

Le ministre ou son ministère, et quel que soit le niveau d'enseignement, est en train d'ériger le pouvoir de dérogation en système. Il le fait pour les dérogations à l'âge d'admission. Là, il va se le donner pour l'aide financière aux étudiants. Il agit un peu comme un prince. Il absout ou condamne; il signe, il brûle. On sait aussi que, lorsqu'il donne des dérogations à l'âge d'admission, il signe la lettre, mais que, lorsqu'il ne l'accorde pas, c'est un fonctionnaire qui signe, parce que c'est connu, avec le ministre, que les fonctionnaires sont bêtes et méchants et que le ministre est juste et magnanime. C'est ça qu'on est en train d'ériger en système. Moi, ça m'inquiète profondément, indépendamment du ministre. Il doit faire son possible, je pense que oui, mais c'est profondément inquiétant lorsque l'arbitraire régit les décisions touchant les personnes.

Vous faites un certain nombre de relevés. J'aurais aimé que vous puissiez lire tout votre mémoire parce qu'il y a des morceaux fort pertinents et intéressants qui touchent ce que vous appelez un déni de justice et c'a trait aux vérifications, aux enquêtes, aux déclarations erronées, aux mécanismes de réexamen, aux remboursements des trop-perçus, entre autres.

Moi, je me demandais, à vous entendre: Est-ce que, dans sa forme actuelle, ce projet de loi peut s'appliquer sans que les jeunes, les étudiants puissent le contester, à moins qu'il n'ajoute une disposition, ce qu'on appelle la clause dérogatoire, en vertu des chartes canadienne et québécoise? Parce qu'il me semble qu'il ne reconnaît pas aux étudiants les mêmes droits qu'aux citoyens. Ce sont des citoyens de seconde zone qu'on peut traiter à peu près n'importe comment parce qu'ils vont chercher un privilège, c'est un peu ça que sous-entend le régime actuel. Alors, ma question est: Est-ce que, dans sa forme actuelle, la loi peut être contestée à moins que le ministre n'y insère une disposition dérogatoire?

La Présidente (Mme Hovington): M. Jacoby.

M. Jacoby: Être contestée, vous savez, on peut toujours contester une loi et, comme ça se voit souvent, on utilise les chartes québécoise et canadienne. Mais je ne voudrais pas me substituer ou remplacer en aucune manière l'opinion du jurisconsulte ou des services juridiques du ministère de l'Enseignement supérieur, ça m'est donc très difficile de répondre à cette question. Je vous dirais au pif, comme ça, par la lecture, que je ne pense pas, en tout cas à première vue, que ça aille à rencontre des chartes comme telles, l'ensemble du projet. Je ne pense pas que, parce qu'on ne traite pas nécessairement les étudiants comme l'ensemble des citoyens, ça constitue en soi de la discrimination; encore faut-il que cette discrimination soit préjudiciable. Si, à l'intérieur de la classe d'étudiants, on avait plusieurs catégories, je dirais oui, mais je vous donne mon opinion sous toutes réserves.

À première vue, je dirais qu'il y a peut-être des éléments dans le projet de loi, comme les agents vérificateurs, par rapport à la Charte québécoise des droits, où il est possible que ça puisse entraver des libertés ou des droits fondamentaux, comme le droit à la vie privée. C'est fort possible. Et il est fort possible qu'on ait des contestations là-dessus, parce qu'il est évident qu'à partir du moment où un agent vérificateur, notamment, exigerait d'une tierce personne des renseignements sur un étudiant, renseignements qui mettraient en cause des données personnelles et qui attenteraient à la vie privée, contrairement à la Charte québécoise des droits, il est possible qu'il y ait des contestations. Maintenant, il y a l'article 9.1 de la Charte québécoise des droits qui est l'équivalent de l'article 1 de la Charte canadienne. Est-ce que ce sont des limites raisonnables, à toutes fins pratiques, dans notre société? Je ne peux pas vous répondre d'une manrtère très claire, mais il y a possibilité, certainement, de faire des contestations sur certains points.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Malheureusement, c'est tout le temps qu'on a. Nous sommes rendus aux conclusions.

Mme Blackburn: En conclusion, je dirais qu'il y avait une catégorisation. Il y a les étudiants à temps partiel du cégep et de l'uni-

versité qui ne seront pas traités de la même façon quant à l'accès au régime. Ça en fait au moins une. Écoutez, je voudrais à nouveau vous remercier de votre participation, elle nous est très précieuse. Soyez assurés que ça va nous servir et que ça va être considéré comme un outil de référence quasiment indispensable au moment où on va examiner le projet de loi article par article. Je souhaite sincèrement que le ministre révise certaines attitudes et certaines orientations de ce projet de loi. 's le rappelle, les pouvoirs réglementaires sont abusifs et, chose surprenante, c'est celui qui les dénonçait le plus à l'Opposition et c'est certainement, à ma connaissance, celui qui en abuse le plus, avec le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, malheureusement. Mais j'espère qu'avec une lecture aussi sage il va revenir à de meilleurs sentiments. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre, rapidement.

M. Ryan: Je voudrais d'abord rétablir les faits en ce qui touche les pouvoirs dérogatoires attribués aux ministères de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science. Je crois qu'ils ont servi à nettoyer des situations dont certaines avaient pourri sous le gouvernement précédent. Le plus bel exemple que j'en puisse donner, c'est celui des enfants admissibles à l'enseignement en langue anglaise. Vous avez laissé pourrir ça pendant des années...

Une voix:...

M. Ryan: ...puis il y avait des situations absolument inhumaines qui vous laissaient indifférents; vous les traitiez comme des "non-persons". C'est ce que vous aviez dit; définition donnée en pleine Chambre par le ministre du temps. Mais, nous autres, nous les considérons comme des "persons", des personnes, d'où qu'elles viennent puis quelles que soient leurs prétentions. Et nous avons un mécanisme qui est inscrit dans la loi qui fonctionne très bien, puis vous n'en entendez même plus jamais parler tellement ça va bien. Je vous défie de soulever des problèmes à ce sujet-là.

L'autre cas que nous avons, celui-ci, celui-ci puis celui-ci, ça va aller très bien. Déjà, on a une bonne préparation parce que le ministre a fait usage de son budget discrétionnaire pour régler un bon nombre de cas. J'ai été obligé d'écrire dans mes lettres - vous en avez peut-être vu M. le procureur. Je vous avertis, ça n'a rien à voir avec l'aide financière. Ça avait à voir avec. Ça signifiait que ça ne marchait pas dans l'autre patente, mais l'étudiant avait un droit d'être aidé, puis il était aidé. C'est bien plus important. Venir faire accroire que c'est de l'arbitraire, du discrétionnaire, madame, je regrette infiniment, je suis en profond désaccord, je trouve que c'est de la calomnie et ça me fait de la peine. Ça me fait de la peine, mais ce pouvoir...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, M. le ministre.

M. Ryan: Voyez ma colère, Mme la Présidente! Ha, ha, ha! J'ai bien du mal à la retenir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Je complète. Ces pouvoirs sont strictement résiduaires, c'est pour le résidu qui est au fond du verre; il fallait nettoyer le verre comme il faut puis ça prenait quelque chose de spécial, une petite brosse spéciale. On prend ça puis ça finit là après.

Maintenant, sur les autres points, M. le Protecteur, en ce qui regarde le pouvoir d'enquête, on va regarder ça de nouveau. J'ai bien pris note de ce que vous avez dit. Je suis porté à être très sympathique à ce que vous avez dit. Comme vous le savez, ce sont des dispositions calquées sur une autre loi. On ne voulait pas faire de discrimination à l'endroit des assistés sociaux. On a dit: On leur a imposé un carcan de l'autre côté, on va l'imposer également aux étudiants. Si c'est un carcan, il n'y a pas de raison de le multiplier, surtout s'il n'a pas de raison d'être. On va le regarder comme il faut. On va le regarder comme il faut, je pense que c'est un autre point très utile qui se dégage de notre rencontre, cet après-midi.

En ce qui touche la procédure d'appel, le mécanisme, je ne suis pas porté à vous laisser entrevoir des choses parce que je nai pas de matière, encore une fois, qui justifierait la création d'une nouvelle structure. Mais on va l'examiner. On va l'examiner. Tout le monde a écouté ce qu'on a dit aujourd'hui et nos conseillers vont examiner tout ça. Il reste que toute personne qui requiert l'aide financière a quand même un recours aux tribunaux qui est toujours là, des recours administratifs nombreux et, si on devait conclure que ce n'est pas suffisant, bien, on verra. Mais jusqu'à preuve du contraire je ne suis pas enclin à aller trop loin de ce côté-là

Je vous remercie de votre précieuse contribution. Surtout, je voudrais signaler un point, c'est qu'on a l'impression, en vous voyant agir, que vous avez l'air d'aimer votre fonction, je pense que c'est un trait très important pour le succès de la fonction. Chaque fois que vous défendrez, auprès de nous, la personne, vous serez écouté avec un grand respect. Si vous nous donnez des opinions de caractère général, on les discutera avec respect aussi, mais en gardant notre marge de décision ou de jugement qui peut parfois varier. Mais lorsqu'il s'agit des droits de la personne, je pense que, làdessus, si vous avez

un point qui doit être retenu, on va le faire avec respect et empressement. Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Au nom des membres de la commission parlementaire, nous vous remercions, M. le Protecteur du citoyen. Je pense que la présidence a fart preuve de beaucoup de souplesse parce que votre mémoire touchait à des points vraiment fondamentaux. Merci beaucoup. Nous suspendons jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 47)

(Reprise à 20 h 15)

La Présidente (Mme Hovington): La commission de l'éducation reprend ses travaux de consultation générale et d'auditions publiques sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. J'aimerais que la Fédération des associations de professeurs des universités du Québec veuille bien prendre place. S'il vous plaît, messieurs les membres de la commission, voulez-vous prendre place. S'il vous plaît, voulez-vous vous présenter, pour les fins de transcription des débats.

Fédération des associations de professeurs des universités du Québec

M. Campbell (Michel): Mme la Présidente, membres de la commission, je vous remercie de nous accueillir ce soir, les représentants de la FAPUQ. Je suis Michel Campbell, président de la FAPUQ. À ma gauche, Paul Langlois, vice-président; Mme Annie Méar, vice-présidente du SGPUM; à ma droite, Marc-André Gilbert, président du Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Trois-Rivières. À la FAPUQ, le dossier du financement des universités relève d'un comité, le comité des affaires universitaires, et c'est Paul Langlois qui est président de ce comité. Je lui laisse la parole pour présenter notre mémoire.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue à la commission. Vous avez donc vingt minutes pour présenter le mémoire aux membres de la commission. Allez-y, M. Langlois, on vous écoute.

M. Langlois (Paul): Merci, ce sera suffisant. Je vais me permettre, parfois, de résumer peut-être quelques passages. Je présume que le mémoire intégral devrait paraître dans la Gazette. Enfin, entendons-nous, est-ce que le texte paraît, habituellement, ce que l'on lit, ou le texte que nous avons présenté?

M. Gendron: Vous voulez dire le Journal des débats?

M. Langlois: Le Journal des débats, et non pas la Gazette officielle...

M. Gendron: II n'y aura pas autre chose que ce que vous allez dire.

La Présidente (Mme Hovington): Que ce que vous allez dire ce soir.

M. Gendron: C'est de l'inscription. M. Langlois: Ce que je vais dire?

La Présidente (Mme Hovington): Ce que vous allez dire ce soir, c'est ce qui va être transcrit aux débats, ce ne sera pas le mémoire en tant que tel.

M. Langlois: Ce ne sera pas le mémoire. Merci, alors je vais voir ce qui...

La Présidente (Mme Hovington): Par contre, le mémoire est déposé au secrétariat de la commission. Il est accessible aux membres de la commission, donc.

M. Langlois: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, allez-y.

M. Langlois: Alors, j'y vais. La FAPUQ, la Fédération des associations de professeurs des universités du Québec, comme l'a dit tout à l'heure le président, s'intéresse, bien sûr, au financement des universités, mais aussi à tout ce qui touche le milieu de l'éducation et de l'enseignement supérieur. Une de ses principales préoccupations a été, effectivement, le sous-financement des universités parce que, entre autres, il remet en question le principe de l'accessibilité à une éducation universitaire de qualité.

En septembre 1986, les membres de la Fédération participaient avec d'autres syndicats de professeurs à la présentation d'un mémoire sur le sujet. Depuis, la FAPUQ n'a cessé d'exprimer ses inquiétudes à cet égard, à de multiples occasions. C'est ce qui l'a amenée, d'ailleurs, à créer, en 1988, un comité des affaires universitaires dont le mandat est d'étudier toute question qui touche de près à la vie universitaire. Toute mesure, donc, qui tend à remettre en question l'accessibilité à l'enseignement supérieur nous préoccupe grandement.

C'est dans ce contexte que le document intitulé "L'aide financière aux étudiants dans les années 1990: Orientations gouvernementales, qui avait été déposé en avril 1989 par le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, a particulièrement retenu notre attention. Le dépôt

du projet de loi 25 sur l'aide financière aux étudiants, précédé de l'annonce par le ministre du dégel des frais de scolarité au niveau universitaire, a tout naturellement amené le comité à se pencher à nouveau sur les grands principes de la démocratisation et de l'accessibilité qui caractérisent l'histoire de l'enseignement au Québec depuis la Révolution tranquille. Cette réflexion s'est faite à la lumière de l'énoncé de politique sur l'aide financière aux étudiants mis de l'avant par le gouvernement et le projet de loi à l'étude. L'accessibilité à l'éducation et au diplôme universitaire demeure donc la principale préoccupation de la FAPUQ dans le cadre du débat intense qui secoue actuellement le milieu de l'enseignement.

Le dégel des frais de scolarité, la position traditionnelle de la Fédération. Il convient donc, au préalable, de rappeler la position traditionnelle de la FAPUQ sur ce sujet. Dans un mémoire commun des professeurs d'universités auquel je me référais tout à l'heure, en 1986, nous écrivions: Tout en sachant que la gratuité n'assure pas à elle seule l'égalité d'accès à l'université, il faut reconnaître que les frais de scolarité, même minimes, constituent un obstacle pour les plus démunis. Ainsi, il faut non seulement maintenir les frais de scolarité à leur niveau le plus bas mais, au premier cycle surtout, subventionner les étudiants les plus démunis. " C'est tiré de ce mémoire intitulé: "Autonomie, accessibilité et fonction critique".

Plus récemment encore, à l'occasion de son conseil fédéral de juin 1989, la FAPUQ réaffirmait très clairement sa position par une résolution non équivoque adoptée quasi unanimement: La FAPUQ s'oppose à toute hausse des frais de scolarité des étudiants.

Le dégel, est-ce une solution au problème du sous-financement? Malgré la situation difficile que vivent en ce moment les universités québécoises et malgré les problèmes financiers qu'éprouve le gouvernement québécois, ce qui est d'autant plus aigu, semble-t-il, ces derniers temps, la FAPUQ ne croit pas que l'augmentation des frais de scolarité réclamée par de nombreux intervenants de la société québécoise constitue en soi la panacée à tous les maux qui affligent les universités du Québec. La FAPUQ ne croit pas non plus qu'une augmentation des frais de scolarité signifiera automatiquement que l'enveloppe budgétaire mise à la disposition des universités québécoises en sera d'autant augmentée. Interrogé sur cette question tout récemment, à l'émission Virages, le président de la CREPUQ, M. Kenniff, n'a pu, en fait, le confirmer lui non plus. Rien n'assure, d'autre part, que l'augmentation des frais dans une institution accroîtra d'autant la masse budgétaire de cette dernière et c'est bien ce que nous avons cru comprendre des propos du ministre tenus récemment.

Jamais qui que ce soit au gouvernement du

Québec n'a donné l'assurance aux universités qu'elles pourraient conserver l'intégralité des fonds supplémentaires ainsi recueillis. Il n'est pas sûr que le gouvernement n'amputera pas le budget global du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science d'une partie ou de la totalité des nouvelles ressources rendues disponibles. À notre avis, et jusqu'à preuve du contraire, il pourrait tout aussi bien s'agir d'un leurre qui, malheureusement, semble présentement attirer tant les administrateurs d'universités qu'une partie de la population en général. L'avenir nous donnera peut-être tort, mais l'histoire récente nous rend fort méfiants. Et même si le mémoire a été écrit il y a déjà quelques semaines, je pense que l'histoire la plus récente semble vouloir nous donner raison.

L'impact sur l'accessibilité aux études universitaires. Ce qui préoccupe davantage la FAPUQ face à l'augmentation prévisible des frais de scolarité, c'est son impact sur l'obtention du diplôme de premier cycle et l'accessibilité aux études de deuxième et troisième cycles. En effet, tous les intervenant du milieu universitaire s'entendent pour affirmer que le rattrapage pour ce qui est de la diplomation aux cycles supérieurs que devaient permettre les mesures d'accessibilité mises en place au milieu des années soixante est loin d'être acquis.

Dans ce contexte, donc, nous croyons que la hausse des frais de scolarité amènera un grand nombre d'étudiants soit à renoncer aux études universitaires, soit à abandonner celles qu'ils ont entreprises, qu'il s'agisse d'études de premier, de deuxième ou de troisième cycle. Nous croyons pouvoir l'affirmer malgré la réforme de l'aide financière qui est présentement à l'étude. La démonstration du contraire, en fait, aurait incombé au gouvernement. Le ministre se devait, d'après nous, de démontrer par des études sérieuses que le dégel, évalué à la lumière de la réforme de l'aide financière, ne menace ni le chemin parcouru en ce qui concerne l'accèssibilité aux études supérieures ni l'avenir de ce qui sera, il faut bien le dire, celui que se réserve l'ensemble de la société québécoise à l'aube des années deux mille.

Les éléments d'analyse dont nous disposons concordent tous à démontrer que l'augmentation des frais de scolarité aura un impact négatif sur la clientèle universitaire. Nous nous référons à une étude publiée en 1986 pour le compte de la FAECUM, association étudiante, et faite par Léger & Léger, qu'advenant une hausse substantielle des frais de scolarité "12 % des étudiants inscrits à temps plein et 19, 5 % inscrits à temps partiel abandonneraient leurs études et près de 25 % des étudiants inscrits à temps plein modifieraient leur statut pour poursuivre leurs études à temps partiel. " D'après la même étude, l'impact d'une hausse des frais de scolarité se ferait encore plus durement sentir chez les femmes que chez les hommes. Plus de 15 % d'entre elles

abandonneraient tout simplement leurs études et les abandons surviendraient surtout dans le secteur des sciences humaines. Le document ajoute, et cela est plus grave, quant à nous, pour l'avenir de la société - et je cite - "Plus que la poursuite même des études, c'est la longueur de ces études qui est affectée par la perspective d'une hausse des frais de scolarité: il est beaucoup moins question de s'engager dans de longues études universitaires... dans une proportion élevée, l'on abandonne le projet de poursuivre les études au niveau du deuxième et troisième cycle:..." Le pourcentage passe alors de 50,7 % à 37,5 %.

Le journaliste André Pratte, dans un article paru dans La Presse le 25 janvier de cette année, relate une entrevue qu'il a eue avec l'économiste David Stager, spécialiste canadien de la question. Ce dernier, nous dit-il, prévoit que la hausse annoncée entraînera une baisse de clientèle de 13 %, tout en précisant que le phénomène devrait se résorber après trois ans. Enfin, d'après le sondage tout récent aussi CROP-La Presse du 3 février, la hausse projetée aura pour effet, selon les répondants toujours, de provoquer l'abandon des études de 9 % des étudiants au niveau collégial et de 5 % au niveau universitaire. Elle aura également pour effet d'obliger 28 % des collégiens et 18 % des universitaires à travailler davantage à des fins lucratives.

L'approche gouvernementale du financement des études universitaires. Pour la FAPUQ, ce qui paraît encore plus grave dans la décision gouvernementale d'augmenter les frais de scolarité, c'est le fait de reporter indistinctement sur la tête de tous les étudiants, quelles que soient leurs perspectives d'avenir, la fardeau de la hausse. On part du postulat que la formation supérieure est d'abord un bien individuel qui profitera, avant tout, à ceux qui l'acquièrent. Rien de plus discutable, pourtant. L'éducation n'est pas un bien de consommation comme un autre; c'est aussi un enrichissement collectif et qui profite autant, sinon plus, à la société qu'à l'individu. L'adage "Qui s'instruit s'enrichit" a longtemps été mis de l'avant pour démontrer que l'accès aux études universitaires équivalait presque automatiquement à un emploi stable et rémunérateur. Si cela s'est avéré ainsi dans les décennies soixante et soixante-dix, il faut tempérer aujourd'hui cette affirmation dans ce qu'elle comporte de trop absolu. Qui pourra, par exemple, jamais prétendre que l'étudiant en théologie ou en lettres a les mêmes chances de rentabiliser son éventuelle mise de fonds au sortir de l'université que l'étudiant en médecine ou en administration? Et pourtant, le gouvernement les frappe tous indistinctement de la même hausse comme s'ils avaient la même promesse d'enrichissement.

Il est reconnu depuis longtemps que le mode de taxation le moins régressif et le plus équita- ble est l'impôt sur le revenu. Il nous semblerait beaucoup plus juste que le gouvernement répartisse sur l'ensemble de la collectivité les coûts de l'éducation supérieure et fasse payer davantage ceux dont le revenu est plus élevé. C'est ainsi que ceux qui tireraient profit de leurs études universitaires devraient rendre à l'État une plus juste quote-part de leur enrichissement. Certaines formules là-dessus ont été proposées, dont une par un organisme étudiant, en 1986, qui existe d'ailleurs dans certains pays - je crois que c'est l'Australie - qu'il y ait une surtaxe à l'impôt dans les études universitaires, une fois les études universitaires terminées, si le revenu est suffisant. Une autre forme aussi a été proposée par la commission Jean, à savoir une taxe sur la grande entreprise qui est certainement un des principaux bénéficiaires du système de formation supérieure que se donne une collectivité. D'autant que des comparaisons établissent que les milieux d'affaires québécois contribuent moins que leurs voisins au financement des universités - et je cite un extrait d'article paru dans Le Soleil du 11 mars: - "Nos hommes d'affaires réclament une main-d'oeuvre plus qualifiée, des chercheurs plus nombreux et plus compétents, des universités plus performantes pour aider nos entreprises à devenir plus compétitives sur la scène internationale. Cependant, ils se montrent nettement plus avares que leurs collègues anglophones et américains quand vient le temps d'appuyer financièrement nos universités." (20 h 30)

Au lieu, donc, de se plaindre du sous-financement et de vouloir faire porter le fardeau par les étudiants, nos hommes d'affaires feraient bien d'augmenter leur propre contribution. C'est d'ailleurs ce que proposait récemment un parti politique du Québec et c'est ce que les syndicats et associations de professeurs du Québec suggéraient dans leur mémoire qu'ils présentaient à la commission parlementaire, en 1986. "On pourrait imaginer - et je cite - une contribution particulière des grandes entreprises à la formation universitaire sous forme de taxe par exemple."

La Loi sur l'aide financière aux étudiants. Une analyse rapide des orientations de base ayant inspiré le gouvernement dans le cadre du projet de loi nous permet de considérer que l'approche adoptée est en soi louable, bien que conservatrice comme prise de position. Les orientations en question sont citées dans les orientations gouvernementales, je me passe de les lire.

En effet, l'aide financière aux étudiants est, dit-on, essentiellement supplétive. Elle repose sur le principe que l'étudiant, ses parents, son conjoint sont les premiers responsables financiers des études postsecondaires. Par contre, elle doit être analysée en fonction d'une hausse de plus du double des frais de scolarité au niveau universitaire.

Les principes de la réforme, tels qu'ils apparaissent dans le document des orientations générales qu'on énumère ensuite, et je passe... Avant d'entrer de plain-pied dans l'étude du projet de loi et de son adéquation avec les principes ci-haut mentionnés, nous aimerions faire les remarques préliminaires qui suivent.

De 14 articles que contenait la Loi sur les prêts et bourses, le projet de loi en contient 65. Bien qu'il codifie, en substance, certains des principes ci-haut mentionnés, comm» le caractère contributif du régime, la définition et la gestion d'un prêt, la définition d'une bourse, etc., il n'en demeure pas moins que le projet de loi, dans son aspect essentiel, c'est-à-dire le calcul de l'aide financière et ses paramètres, demeure dans le domaine de la législation déléguée. C'est, effectivement, dans la réglementation que nous pourrons voir si sont tenues ces promesses de financement. Là-dessus, je pense que M. le ministre a fait part des contraintes de présentation de budget avant la présentation des règlements, sauf que nous devons bien prendre cela comme c'est actuellement, c'est-à-dire sans réglementation, en sachant que tout cela peut être modifié.

On remarque, et il faut le souligner, que les articles 47 à 52 du projet de loi laissent craindre la formation d'un système qui permettrait d'enquêter sur tout fart visé par la loi ou le règlement. L'apparition de telles dispositions n'est pas sans rappeler le débat encore récent sur les dispositions comparables de la Loi sur l'aide sociale. Est-il besoin d'en rajouter? Surtout que nulle part dans le document portant sur les orientations gouvernementales, ni dans l'ensemble des données disponibles, on n'a fait mention d'abus au régime qui permettraient d'évaluer la pertinence d'une telle mesure.

Les articles 43 à 45 instituent un comité d'examen des demandes dérogatoires auxquelles serait soumise la demande d'aide financière prévue à l'article 42. Ce comité d'examen n'aurait aucun pouvoir autre que d'aviser le ministre. Puisque le projet de loi crée des droits et obligations pour l'étudiant et que la privation partielle ou totale des droits qui sont prévus audit projet peut avoir un impact déterminant sur la poursuite de ses études, nous nous interrogeons s'il ne serait pas pertinent de remplacer ce comité aviseur par un tribunal au sens de l'article 23 de la Charte des droits et libertés. Et je crois, entre parenthèses, que nous rejoignons là les propos de M. le Protecteur du citoyen québécois, M. Jacoby, cet après-midi.

Bien sûr, cette quasi-judiciarisation du recours pourrait augmenter le délai de prise de décision, mais elle aurait l'avantage de soumettre le processus décisionnel d'attribution de l'aide à un tribunal qui assurerait à l'étudiant la protection de ses droits garantis, par ailleurs, par la Charte et l'application des règles de justice naturelle. Dans ce sens, l'ensemble du processus décisionnel de l'attribution de l'aide devrait être soumis à la juridiction de ce tribunal, et non seulement à la décision visée à l'article 42 du projet de loi; et la décision de ce tribunal, évidemment, serait finale et sans appel. Cette solution est envisageable, surtout en considérant les sommes substantielles qui sont en jeu pour l'étudiant - plus de 14 000 $ en 1989, par exemple - et l'impact que peut avoir sur son avenir le refus d'attribution d'aide. Il peut être utile de rappeler que pour un litige civil dont le montant s'élève à 15 000 $, tout étudiant peut s'adresser à la Cour supérieure et non pas à un simple comité-conseil.

Accessibilité aux études postsecondaires. Hormis l'article 1 du projet de loi qui institue un programme d'aide financière pour les études universitaires à temps partiel, celui-ci reste muet sur la concrétisation de ce principe. M. le ministre a annoncé, d'ailleurs, que cette aide était remise à plus tard, que cette partie était remise à plus tard.

Le document sur les orientations gouvernementales indique, par ailleurs, que les modifications envisagées entraîneront une augmentation de 20 % du nombre de bénéficiaires. Pour chacun de ceux-ci, l'aide moyenne connaîtra un accroissement de 915 $. Si on considère que l'augmentation moyenne des frais de scolarité sera de 350 $ à 400 $ l'an pour les deux prochaines années, l'augmentation réelle, donc, de l'aide moyenne s'en trouvera d'autant diminuée et l'accessibilité aux études postsecondaires plus compromise. D'autant que, d'après l'économiste Clément Lemelin, et je cite: "Des études indiquent aussi que les étudiants sont plus sensibles aux droits de scolarité qu'aux bourses".

Responsabilisation de l'étudiant, de sa famille et de son conjoint. La recommandation numéro 7 des orientations gouvernementales propose de demander à l'étudiant une contribution minimale fixe selon le niveau d'enseignement pour les différents cycles universitaires, ce qui est en soi équitable. C'est le salaire minimum qui, actuellement, tient lieu de base du calcul de cette contribution. Rien ne justifie qu'une telle base doive être modifiée

Quant à la contribution parentale...

La Présidente (Mme Hovington): Ça fait déjà 20 minutes.

M. Langlois: Ça fait déjà 20 minutes?

La Présidente (Mme Hovington): Mais oui.

M. Langlois: J'aurais dû écourter.

La Présidente (Mme Hovington): Continuez, mais en accélérant un petit peu plus.

M. Langlois: Je vais essayer de résumer un peu plus ce qui suit. Je m'excuse, le temps

passe.

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y!

M. Langlois: Sur la contribution parentale, ce que nous croyons, c'est que dans la société actuelle la contribution parentale, surtout après ce qu'a dit le Conseil des universités, d'après son étude à l'effet que les parents, finalement, ne contribuent pas autant qu'on ne le croirait pour leurs enfants... Il nous semblerait que, si on ne veut pas qu'il se crée des mariages de convenance pour échapper à cette règle, il serait peut-être préférable, dans un avenir peut-être plus lointain, de tendre vers une diminution pour ne pas dire une élimination de la contribution parentale. De même en serait-il de la contribution du conjoint à cause aussi d'un fait de société que l'on constate tous, comme la durée relative des unions d'aujourd'hui, qui sont des faits de société, effectivement, qui vont peut-être à rencontre de l'approche qui semble adoptée par le gouvernement.

Le régime doit répondre aux besoins réels établis de l'étudiant. Là-dessus, je suis obligé aussi de me reporter à la lecture que vous en avez peut-être faite préalablement. Je vais peut-être me contenter de passer à la page 22 pour parler de la comparaison avec les régimes similaires de bourses canadiens et américains, puisque l'avis du Conseil des universités affirmait que notre régime se comparait avantageusement aux autres régimes. Mais il s'y comparait avantageusement compte tenu des frais de scolarité qui étaient très bas et aussi de la durée de l'admissibilité aux prêts et bourses. Or, comme cette durée est écourtée et comme les frais de scolarité vont augmenter, ces avantages, qui étaient purement québécois, viendront peut-être modifier quelque peu la place concurrentielle du régime des prêts et bourses.

Je vais peut-être passer tout de suite à la conclusion, parce que j'abuserais du temps. En conséquence, à la suite de l'analyse du mémoire, la FAPUQ recommande, premièrement, de sauvegarder le principe de l'accessibilité à l'enseignement supoiiour en laissant les frais de scolarité à leur niveau actuel; deuxièmement, de remédier au sous-financement des universités par le biais de l'impôt sur le revenu des particuliers et des entreprises, particulièrement la grande entreprise; troisièmement, de remplacer, dans le projet de loi 25, le comité d'examen des demandes dérogatoires par un tribunal au sens de l'article 23 de la Charte des droits et libertés; quatrièmement, de diminuer graduellement la contribution parentale jusqu'à sa disparition complète dans le calcul de l'aide financière aux étudiants et, enfin, d'éliminer la contribution du conjoint dans le calcul de l'aide financière aux étudiants. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Mme la Présidente, il me fait plaisir de saluer les représentants de la Fédération des associations de professeurs des universités du Québec, fédération qui représente un groupe significatif de professeurs d'universités du Québec puisqu'on trouve parmi les associations affiliées les professeurs de Bishop, de l'École polytechnique, de l'École de technologie supérieure, de l'Institut Armand-Frappier, de l'université Concordia, l'Association des professeurs de McGill, les professeurs de l'Université de Montréal, les professeurs de l'Université du Québec à Trois-Rivières et ceux de l'Université de Sherbrooke. Je ne sais pas combien ça représente, proportionnellement, sur l'ensemble des professeurs d'universités, mais disons que c'est une proportion respectable. Avez-vous une idée de la proportion?

M. Campbell:... M. Ryan: Pardon?

M. Campbell: 4000 professeurs sur 7000, en gros.

M. Ryan: Vous en comptez 7000, vous autres? Nous autres, on était plus en haut de 8000, en tout cas. J'ai pris connaissance du mémoire. Sur bien des points, il nous rappelle les thèmes qui nous ont été signalés à maintes reprises au cours des deux dernières semaines et c'est une source de réflexion quand même intéressante pour nous. Sur les droits de scolarité et le financement des universités, je voudrais faire quelques rapides commentaires.

Vous dites que la preuve est au gouvernement de démontrer, d'abord, qu'il y a un besoin véritable et, deuxièmement, que la hausse des frais de scolarité est un élément important de solution. Il y a un passage de votre mémoire qui dit: Si le gouvernement prétend que c'est la solution, qu'il le dise. Le gouvernement n'a jamais dit ça. Il ne peut pas le prétendre non plus. Il prétend que c'est un élément de solution, parmi d'autres, un élément important qui représente une proportion dont on peut établir facilement l'importance dans l'ensemble du dossier. De là à penser qu'on doive maintenir les droits de scolarité à leur niveau actuel, je pense qu'il y a une différence énorme.

Je pense que la proposition qu'on fait est en dehors de la réalité contextuelle de 1990 parce que le Québec n'est quand même pas isolé de l'ensemble du pays canadien et du contexte du continent nord-américain; nous sommes dans ce contexte-là, nous ne sommes pas dans le contexte européen. Et dans ce contexte-là, même dans les sociétés encore moins pourvues que le Québec, on impose des droits de scolarité importants. C'est le cas en Nouvelle-Ecosse, au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve, à l'île-du-Prince-Édouard.

Et comme nous faisons partie d'un système politico-économique dont les éléments s'imbriquent les uns dans les autres, y compris les systèmes de péréquation de ressources que nous avons au Canada, il est bien difficile que tout le monde ne tire pas un petit peu de la même manière, sauf sur des questions de principes absolument fondamentaux, de distinction radicale au chapitre de la culture, pa. exemple. Il est bien difficile qu'il n'y ait pas une certaine harmonie dans la manière dont les énergies sont mobilisées et mises au service de l'ensemble, et voici un cas où il y avait un phénomène d'asymétrie, pour dire le moindre. Je crois que de proportionner l'effort d'une manière un petit peu plus comparable, ça n'a rien d'irrationnel, ça n'a rien de nocif par rapport au caractère distinctif de notre société. Quant à ce qui touche les grands objectifs de scolarisation universitaire, le gouvernement estime que nous avons maintenant effectué un rattrapage suffisant pour qu'il puisse être question d'un ajustement raisonnable.

Vous me demandez des preuves. Vous dites que c'est au gouvernement d'établir la preuve qu'il n'y aura pas de perte d'effectif. Je l'ai dit à maintes reprises, depuis le début des travaux de la commission, personne ne le sait avec assurance, mais nous disposons quand même de données significatives sur ce qui s'est produit dans les autres provinces, nous avons pas mal de données là-dessus maintenant. On a un beau champ d'observation parce que, dans les autres provinces, ça fait dix ans qu'on les ajuste, les frais de scolarité. On a constaté, en Nouvelle-Ecosse, par exemple, ou même dans les autres provinces qui ont agi de cette manière, que dans les deux ou trois années qui ont suivi immédiatement la première hausse, il y a eu un ralentissement des inscriptions universitaires, ça a cessé de progresser au rythme très rapide qu'on avait connu avant. Ça n'a pas reculé, ça a cessé de progresser aussi vite. (20 h 45)

Puis, après ces années de transition, ça a recommencé à remonter aussi vite qu'au Québec, tellement que, pour les années 1985 à 1988, les effectifs étudiants au Québec ont augmenté de 6.3 %; en Nouvelle-Ecosse, de 8,9 %; en Ontario, de 7,4 %; en Colombie-Britannique, où on a le niveau de frais de scolarité le plus élevé de tout le Canada, de 9,8 %. Alors, 6,3 % au Québec et 7.4 % pour l'ensemble du Canada, sauf le Québec; 8,9 % en Nouvelle-Ecosse; 7,4 % en Ontario; 9,09 % en Colombie-Britannique où, encore une fois, on a le niveau de frais de scolarité le plus élevé du Canada. Entre 1985 et 1988, on l'a porté de 1800 $ à 2200 $. Alors, je pense que ce sont des données quand même factuelles, concrètes, vérifiables, qui établissent qu'il n'y a pas lieu de semer le climat de frayeur à l'endroit de ces ajustement que certains s'emploient à cultiver, d'après moi. Alors, le gouvernement a tout examiné ce dossier, en est venu à la conclusion que lui-même a déjà fait une part importante en augmentant les subventions aux universités de manière substantielle au cours des quatre dernières années.

Le ministre des Finances déclarait, dans son dernier discours sur le budget, en mai dernier, que le gouvernement fera encore plus quand il en aura les moyens. Et là, nous en sommes venus à la conclusion qu'il y a ce facteur des bénéficiaires immédiats qui fournissent une contribution très réduite et que ce serait le temps d'exiger qu'ils fournissent une contribution plus substantielle. Et, même après les hausses que nous avons décidé d'instituer, le niveau des droits de scolarité, au Québec, restera le plus bas de toutes les provinces canadiennes. Même à supposer que tout resterait gelé pendant deux ans dans les autres provinces, on serait encore derrière Terre-Neuve, qui est quand même une province pas mal plus pauvre que le Québec, hein! Alors, ça, ce sont des données.

Vous me demandiez de répondre au défi du fardeau de la preuve en ce qui touche cet argument. Je pense que voilà des arguments qui ne sauraient être minimisés. Si ce n'était pas nécessaire d'agir, vous savez bien qu'il n'y aurait aucun empressement de la part de quelque gouvernement que ce soit à se précipiter dans cette affaire-là. Ce serait bien plus facile de ne pas toucher à ça, au point de vue politique, de dire: Très bien, on ne créera pas d'agitation dans le milieu étudiant, les professeurs d'université vont être avec nous, et tout ça. On est bien confortable, dans ce temps-là: on peut aller aux cocktails intellectuels et tout ça, et ça va bien. Mais nous autres, nous sommes pris dans une situation: il faut que les deux bouts de la chaîne se rencontrent au bout de l'année. Nous avons un déficit énorme, des pressions en provenance de tous les secteurs d'activité collective qui ne cessent d'augmenter, des obligations de dettes très lourdes, il faut établir un équilibre et ce point-là est un élément. C'est un élément, encore une fois, ce n'est pas toute la solution.

Les autres solutions. J'ai regardé votre mémoire attentivement, je suis à la recherche de solutions intéressantes. Des solutions miracles, il n'y en a nulle part et ça, je pense que nous le savons tous, après avoir fait le tour du jardin Nous autres, quand nous avons fait le tour du jardin, à Québec, nous disons: II y a trois manières d'agir. Ne pas augmenter les impôts - pour ça, on n'a pas besoin de mémoire de la FAPUQ pour augmenter les impôts, on est capables de faire ça tout seuls Vous nous faites des suggestions de ce côté-là, je les apprécie. Et, encore une fois, là, quand on discute, même entre nous, en caucus, les chers collègues, à un moment donné, il y en a qui disent: Bien, augmentez les impôts, on va avoir l'argent qu'il nous faut pour fournir nos groupes dans nos comtés, avoir des meilleurs services, comme à l'hôpital d'Argenteuil, avoir un meilleur service

de transport pour la population de Lachute qui n'en a même pas pour aller à Saint-Jérôme. Ça fait que, vous savez, on voit ça des fois. Il faut comparer avec les besoins réels des populations concrètes qui vivent en dehors des milieux que nous fréquentons d'une manière plus habituelle. Alors, on dit: Augmentez les impôts. Là, le ministre des Finances nous dit: Oui, mais avez-vous pensé qu'on est déjà taxés plus qu'ailleurs au Canada et que, si on vout être concurrentiels et garder nos talents, attirer des talents de l'extérieur, attirer des entreprises, il faut qu'on soit concurrentiels au point de vue de la fiscalité? Il n'y a pas énormément, il n'y a pas beaucoup beaucoup de marge de ce côté-là. On peut appeler cela impôt sur le revenu des particuliers, surtaxe, impôt postuniversitaire, impôt sur les sociétés, ça ne change pas grand-chose dans le "mix". C'est un "mix", au bout de la ligne, puis on ne peut pas avoir une solution qu'on coupe du reste, je vous le dis franchement.

Deuxièmement, on peut décider de couper des dépenses pour trouver plus d'argent pour cette chose-là. Mais là, je pense qu'à peu près tous les observateurs, et encore davantage les acteurs immédiats, sont d'accord pour considérer qu'on a coupé pas mal ces dernières années, et qu'on est rendus à l'os, comme on dit, et qu'il n'y a plus beaucoup de marge de ce côté-là. Ça, c'est le thème que j'entends le plus souvent en provenance des commissions scolaires, des cégeps, et, a fortiori, des universités. Par conséquent, on n'a pas grand-chose à aller chercher là. Couper sur les routes, on l'a déjà fait. Couper sur l'agriculture, si vous voulez prendre cette proposition-là, je vous propose de fonder un parti et d'aller couper des subsides aux cultivateurs. Vous allez voir qu'ils vont arriver avec des chevaux devant votre maison, ça ne prendra pas de temps. Je vous avertis que ce ne sont pas des choses faciles dans la pratique. Ça, c'est le deuxième point, de couper les dépenses.

La troisième source, augmenter le déficit. Augmenter l'endettement du Québec qui est déjà... Je l'ai fait valoir en commission, l'autre jour. Nous paierons, cette année, en fardeau de dette, en intérêts, 5 300 000 000 $, sur un budget de 32 000 000 000 $. L'Ontario a un budget de 40 000 000 000 $ et il va payer 4 000 000 000 $ en charges de dette. Ils sont beaucoup plus riches que nous et ils ont un revenu par personne qui est supérieur d'au moins 20 % à celui du Québec. Ça, c'est la problématique concrète. C'est pour ça que les équations qu'on peut faire ne sont pas très nombreuses. J'ai accueilli avec intérêt vos observations et, sur la base de ce que je viens de vous dire, j'aimerais que vous réagissiez; j'aimerais connaître votre réaction, à tout le moins. Et si vous pouvez me réfuter de manière persuasive, je serai très heureux de me précipiter, demain matin, chez le ministre des Finances pour lui dire que ce soir, j'ai appris des choses que je n'avais pas entendues auparavant, avec démonstration à l'appui.

La Présidente (Mme Hovington): M. Lan-glois.

M. Langlois: Oui, si vous le permettez, quand même...

M. Ryan: Comme vous êtes des professeurs d'université, je me permets de vous défier un petit peu plus directement parce que...

M. Langlois: Lorsque nous avons parlé d'impôt sur le revenu des particuliers et du système d'imposition, nous avons dit que c'était le système le moins régressif. En parlant de cela, nous avons insisté surtout sur l'augmentation des taxes sur les revenus des sociétés et surtout des grandes entreprises. C'est là que porte surtout notre position. Lorsque nous avons parlé d'impôt sur le revenu des particuliers, nous avons parle de cette taxe sur l'impôt sur le revenu de ceux qui auront suivi des études universitaires, et nous l'avons bien nettement liée à cette augmentation des frais de scolarité qui frappe indistinctement tous les étudiants, en sachant que leur promesse d'avenir, d'enrichissement futur n'est pas identique. À ce compte-là, ceux qui auront bénéficié de revenus supérieurs après leurs études devraient effectivement remettre, mais sous cette forme-là qui est moins régressive, qui est plus juste et plus équitable. C'est un peu dans ce sens-là que notre mémoire a été rédigé. Est-ce que vous vouiez ajouter quelque chose, madame?

Mme Méar (Annie): Je voulais simplement ajouter un commentaire, Mme la Présidente. Je trouve un peu paradoxal que Ton se compare aux autres provinces canadiennes et aux États américains pour justifier une hausse des frais de scolarité, alors qu'en ce moment, en particulier, nous clamons bien haut notre droit à la différence pour ce qui est de la langue et de la culture. Il me semble que, justement, le Québec est une province différente et l'université en particulier devrait contribuer au développement de cette langue et de cette culture, et pour cette raison en particulier, on devrait tout faire pour sortir l'université de son sous-financement chronique.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Madame, je regrette, les salaires que nous payons aux professeurs d'université n'ont pas de langue, et les taxes que doivent payer les contribuables, non plus. Et c'est ça qui est la base des finances publiques. Le caractère distinctif du Québec a peu à voir avec ça. Je ne vois pas du tout au nom de quel principe sacré

on viendrait soutenir qu'on n'est pas capables d'accepter une augmentation significative de la participation des étudiants au financement d'études supérieures dont ils seront, de toute évidence, les premiers bénéficiaires. S'il y a un lien entre ça et la vocation nationale du Québec, je serais très heureux de le connaître parce que, franchement, il ne m'apparaît pas à l'oeil nu. Je vous le dis en toute simplicité, je suis un défenseur du caractère distinct du Québec, mais j'aime bien que ce caractère s'^rirme par le partage équitable des responsabilités, aussi, dans notre société. À propos, si vous me permettez de... Est-ce qu'il y a autre chose à ajouter sur les solutions possibles? Ça m'intéresse.

M. Gilbert (Marc-André): C'est une ques tion...

La Présidente (Mme Hovington): M Gilbert.

M. Gilbert: C'est une question plus qu'une solution. L'augmentation des droits de scolarité risque d'avoir un effet, peut-être temporaire, peut-être permanent, sur la fréquentation en milieu universitaire. C'est une hypothèse, mais on ne croit pas, en tout cas, qu'au Québec ça entraînera une hausse de la fréquentation. Les meilleures hypothèses, c'est que ça restera la même chose ou ça diminuera quelque peu l'accessibilité. On connaît aussi, d'autre part, que le financement universitaire est en partie basé sur un principe d'accroissement des clientèles des universités, à moins que la formule de finance» ment des universités ne se soit modifiée substan tiellement et qu'on n'ait manqué cette information-là. Je ne crois pas, en tout cas, avec l'information que nous possédons pour le moment, qu'il y ait une modification majeure de la formule de financement des universités qui soit passée ou qui s'apprête à passer. Alors, s'il y a une diminution de la fréquentation universitaire, ça aura un impact inévitablement sur le financement des universités, puisque le financement universitaire est basé sur la fréquentation universitaire. Je voudrais savoir, pour ma part, comment cet impact de la diminution de la fréquentation universitaire va être pris en compte dans la formule de financement des universités.

M. Ryan: Regardez, la question est hypothétique, je n'ai pas à envisager toutes sortes d'hypothèses, mais je peux vous donner un fait qui s'est produit sous le premier mandat du gouvernement actuel. Il s'est produit une diminution de clientèle dans les cégeps. La clientèle était autour de 140 000, et elle est descendue jusqu'autour de 135 000, et nous avons maintenu des subventions au niveau qui existait, nous avons vu à faire des ajustements de manière qu'il n'y ait pas de creux qui se produise. Le gouvernement était très conscient...

M. Gilbert: Le financement au niveau des cégeps est différent...

M. Ryan: Pardon?

M. Gilbert: Le financement des cégeps est différent du financement universitaire.

M. Ryan: C'est entendu, c'est entendu, mais là vous me demandez... Je vous réponds par un exemple qui est quand même de même nature ot, s'il arrivait un phénomène de même nature du côté des universités, ce que je ne formule pas à l'état d'hypothèse, je veux que ce soit clair, je pense bien que le gouvernement prendra ses responsabilités et n'a aucun intérêt à affamer les universités ou à les priver de ressources Au contraire..

M. Gilbert: Ce que j'entends, c'est un engagement de la part du gouvernement à s'assurer que le financement universitaire ne sera pas affecté.

M. Ryan: Non, ce n'est pas ce que je vous dis, je ne le sais pas. La décision sera prise en temps et lieu, si cette situation se produit. Je ne serai peut-être même plus ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science à ce moment-là, je ne pourrais engager ceux qui seront là. En ce moment, je vous dis ce que nous avons fait, sous le gouvernement actuel, et votre serviteur étant le titulaire de la charge du ministère, cost co que nous avons fait dans le cas des cégeps et, dans le cas des universités, comme je l'ai dit, nous avons augmenté sensiblement la contribution du gouvernement par le moyen des subventions d'équilibre, sans parler, évidemment, des subventions d'immobilisation qui ont été très significatives, au point que, si l'on examine la contribution du gouvernement à l'enseignement supérieur, sous l'angle combiné des subventions d'équilibre budgétaire et de l'aide financière aux étudiants, le Québec se situe au tout premier rang des provinces canadiennes. Il ne traîne pas derrière, il est au tout premier rang. Ce qui veut dire qu'il y a d'autres secteurs de l'activité collective qui reçoivent moins, proportionnellement. C'est pour ça que le gouvernement ne peut pas se précipiter tout seul en avant. Il l'a déjà fait. Il est obligé d'essayer de demander à ses colistiers de s'inscrire un peu plus dans la course réelle.

La Présidente (Mme Hovington): Merci... (21 heures)

M. Ryan: Et je pense qu'il y aura un phénomène qui va en résulter, ça va être une appréciation encore plus grande de la très grande valeur des études universitaires, puis ce n'est pas à négliger, ça.

La Présidente (Mme Hovington): Ça va?

Merci. Alors, je cède la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, merci, Mme la Présidente. Toujours la même façon de travailler, deux commentaires sur ce que le ministre vient de dire. Vous avez bien fait de poser la question sur les clientèles parce qu'il est évident que ces gens la vont répéter le geste qu'ils ont pratiqué et j'ai les chiffres ici en 1986-1987. Les subventions pour les nouvelles clientèles en 1985-1986 étaient de 36 000 000 $, en 1986-1987, première année des libéraux, elles sont tombées à 27 000 000 $. Pour les nouvelles clientèles, donc votre question était pertinente. C'est évident que vous n'aurez pas le financement requis parce que vous le savez, vous êtes dans le milieu, vous n'aurez pas le financement s'il y a une chute quant à l'accessibilité, donc réduction des clientèles. Est-ce que le niveau d'argent, dans l'ensemble des universités, va être le même? La réponse est non, c'est évident. Votre question était pertinente.

Sur les commentaires du ministre, il faut toujours se rappeler... Et puis ma collègue le citait et le mentionnait lors du débat le 29 avril 1986, ce n'est pas d'hier, il est plus stable que vous pensez ou qu'il vient de le dire. Il laisse voir qu'il ne le sait pas s'il va être encore ministre prochainement, il est pas mal plus stable qu'il vient de le dire à ce poste-là. C'est le ministre de l'Éducation d'aujourd'hui qui parlait dans le passé: Nous ne voulons pas être mis devant le fait accompli parce qu'il m'apparaît assez paradoxal que, d'un côté, on multiplie la publicité et les démarches pour recruter de la clientèle - il vous parlait là - comme si on était une entreprise en pleine expansion et qu'en même temps, de l'autre côté, on aille se lancer dans des déficits. Il va falloir qu'on s'assoie. C'était ça, sa préoccupation en 1986 pour améliorer la qualité et l'accessibilité à l'éducation, il considérait ça comme une entreprise en disant: Écoutez, vous êtes responsables, vous courez après les clientèles et ça fait des déficits et, en conséquence, on va vous passer dans le hachoir. C'est ce qui est arrivé.

Sur votre mémoire: Écoutez, je ne peux pas être long. D'abord, la FAPUQ est représentative d'un grand nombre de professeurs dans le domaine, ç'a été dit par le ministre lui-même. Ce sont des sujets que vous connaissez et si, rapidement, je fais un commentaire sur la première partie de votre mémoire... Le dégel des frais de scolarité: Vous dites, c'est clair et je trouve que vous avez à 100 % raison en ce qui me concerne. Il n'y a pas de fligne-flagne - excusez l'expression - et de faux-fuyants, si, non, vous n'êtes pas d'accord avec le dégel. Puis, il me semble que vous avez pas mal une meilleure preuve que la sienne. Je parle de celle du ministre. Il faut le faire en connaissance de cause, prétendre que - et là je le cite - "le

Québec n'est pas isolé, il n'est pas dans le contexte européen". Il n'y a personne qui a prétendu ça. Le Québec n'est pas isolé et il n'est pas dans le contexte européen, on le sait. Il est dans le contexte nord-américain et canadien mais, justement parce qu'il est dans ce contexte-là, comment se fait-il qu'on ait du rattrapage? Comment se fait-il qu'on ait moins de diplômes? Comment se fait-il qu'on ait plus de temps partiel? Comment se fait-il qu'on ait plus d'abandons? Il le sait, il sait toutes les réponses à ça. Pour des raisons historiques et parce qu'on est comme ça, et ça s'explique depuis 25 ans, c'est la réalité qu'il connaît très bien. Faire des cas de comparaison avec le reste du Canada surtout, et moi, ça ne me gêne pas de le faire sur l'aspect de la langue, parce que ça a une incidence, parce que comme par hasard les Canadiens anglais québécois - je fais volontairement l'application là, pour se comprendre - les Canadiens anglais québécois, ils vont dans une proportion de 10 % à 15 % plus élevée à l'université. Mais il sait ça, puis il le sait très bien.

Donc, il n'y a aucune espèce de gêne à dire: Au Québec, oui, on est différents, oui, pour des raisons historiques. Le fait d'accéder à des études universitaires, ça a une incidence sur ce que nous sommes, une majorité francophone en cette terre d'Amérique et au Québec. Donc, cette réalité-là, ce n'est pas parce que je veux mettre un bandeau, dire que ça va avoir un effet sur l'île-du-Prince-Édouard, il n'y a pas de saint danger! Je veux dire, on est distincts, puis il faut l'évoquer, puis ce caractère distinct là, il faudrait avoir assez de courage pour souhaiter qu'il perdure dans le temps. Qu'il perdure dans le temps pour cette réalité-là. Quand on aura comblé les retards, quand on aura un niveau de diplomation comparable, quand on aura moins d'abandons, on aura moins d'étudiants au premier cycle, moins à temps partiel, qu'on en aura autant au deuxième cycle et au troisième cycle, là on pourra faire des beaux discours avec la Colombie, puis le Canada et les États-Unis. Alors, vous, vous dites: On est contre. Bravo, vous faites bien!

Deuxièmement, vous dites que le dégel, comme la solution au problème du financement, ça n'en est pas une. Il y a une bien meilleure preuve, la vôtre est bien meilleure preuve, vous dites: Écoutez, on est capables de faire la preuve que le dégel ne règle, mais en rien, la question du sous-financement chronique. Vous avez raison. Depuis qu'on se parle ici, tous les mémoires le confirment et le ministre en ajoute. Le ministre de l'Éducation en ajoute puisqu'il ne donne jamais la confirmation que l'argent additionnel obtenu par le dégel, vous allez mettre la patte ou la main dessus - excusez l'expression vulgaire - mais il le dit: Non, je ne peux pas vous donner ces assurances-là. Je sais pourquoi, moi, il ne peut pas les donner.

Et en plus de ça, si au moins on disait... À un moment donné, la CREPUQ a dit: Oui, mais vous êtes sur la bonne voie. Ce n'est même pas exact. Pour être sur la bonne voie, il faudrait avoir l'assurance que la petite partie qui va rester, parce qu'il en prend au moins 10 000 000 $ à 1? 000 000 $ pour financer la réforme de l'aide financière, premier crime... Les petits 41 000 000 $ qui restent, noyés dans la mer du financement de 180 000 000 $ établie par tout le monde, cela va corriger quoi, concrètement, dans l'ensemble du Québec? Moi, je dis: Quelque chose d'insignifiant, pour ne pas régler un problème majeur. Le problème du financement universitaire, est-ce que c'est un problème majeur? Réponse: Oui, et c'est eux autres qui l'ont établi. C'est Mme Dougherty, l'ancienne adjointe du ministre, c'est M. Bourassa et mettez-en.

Là, je n'ai pas envie de tout reciter ça. Les hommes d'affaires, le patronat, les chambres de commerce, le paquet, ils ont dit: Universités en crise, situation dramatique terrible. Je suis d'accord. C'est vrai. Là, on ne règle à peu près rien et on dit: C'est la solution. C'est ça. Nous, notre solution, comme gouvernement, c'est le dégel. Les universités n'en auront pas plus, pas plus d'instruments de support, pas de meilleures garanties, et là, au pire du pire, c'est que, même s'il n'y a que quelque 40 000 000 $, on dit: Bien, attention! On aimerait ça, vous les laisser. Et là, dans ce temps-là, le ministre joue à Ponce Pilate: Je ne suis pas président du Conseil du trésor. Je ne suis pas ministre des Finances. Je ne fais pas partie de ce gouvernement-là. Vous verrez au budget. Moi, je suis juste ministre de l'Éducation.

Je ne peux pas marcher là-dedans.

M. Ryan: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: ...si le député peut me permettre juste une correction, je n'ai jamais dit que je ne faisais pas partie de ce gouvernement-là, j'espère.

M. Gendron: C'est moi qui l'ai dit. C'est moi qui viens de le dire.

M. Ryan: Oui, mais vous m'imputez ça à moi.

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: Je n'ai jamais dit ça.

M. Gendron: Je ne change pas d'avis.

M. Ryan: Quand je dirai ça, ça sera: Je ne fais plus partie.

M. Gendron: En tout cas, rapidement, Mme la Présidente...

M. Ryan: Je n'ai jamais dit ça. Franchement, je ne serais pas ici.

M. Gendron: Non, non, écoutez, dire ce que... Je pense que vous avez assez de capacité d'analyse. Dire: Écoutez, ça, ça relève du ministre des Finances, ça, c'est les autres, ça, je n'ai pas le mandat...

M. Ryan: Non, non, non.

M. Gendron: ...discuter de ça, c'est l'équivalent de vous décharger d'une responsabilité qui vous regarde. C'est ça que je viens de dire.

M. Ryan: Je suis solidaire des politiques gouvernementales, autrement je n'en serais plus.

M. Gendron: C'est votre droit le plus strict.

M. Ryan: Très bien.

M. Gendron: Je ne vois pas en quoi il y a un point de règlement là-dedans

Trois, l'impact sur l'accessibilité aux études universitaires. Moi, je prétends que votre démonstration vaut probablement celle du ministre, que ça aura un impact et que ça va amener un grand nombre d'étudiants, à tout le moins, à faire deux choses, soit renoncer ou soit changer de voie, prendre la voie du temps partiel versus la voie du temps plein. Un des impacts très négatifs de notre système universitaire, c'est que, tout le monde le dit, il y a beaucoup trop d'étudiants à temps partiel. La preuve, on est obligés de confier une responsabilité, à un moment donné, au Conseil supérieur de l'éducation pour évaluer toute la question des chargés de cours. Et là, je ne porte pas de jugement.

Moi, les chargés de cours, je trouve qu'on en a besoin, ça fait partie du système et tout ça. Mais, sur la base historique, l'arrivée des chargés de cours, c'était quoi, ça? Regardez le dossier. Vous le connaissez autant que moi. C'était ça. C'est qu'à un moment donné il y a tellement d'étudiants à temps partiel que les professeurs à temps plein ne peuvent pas suffire à la tâche et, rapidement, on a intégré des chargés de cours. C'est ça, l'historique. Je suis convaincu que je n'erre pas en disant ce que je viens de dire.

Donc, deux choses. Oui, ça va avoir un impact, et en plus d'avoir un impact, plusieurs étudiants vont changer de voie. Là, vous dites: La démonstration incombe au gouvernement. Je ne trouve pas qu'il nous l'a faite. Il nous l'a faite dans un régime autre que le nôtre qui n'a rien à voir avec nos bases historiques, qui n'a rien à voir avec tous les chiffres qu'on peut mettre en preuve, et c'est ça, sa preuve S'il

regarde ce qui se passe à l'étranger, ce n'est pas péjoratif. Ce n'est pas nous autres. Ce n'est pas ça, notre réalité. Quand bien même on montrera cinq fois ce qui se passe à l'étranger, le niveau de diplômes de l'Ontario, ça ne me donnera pas plus d'étudiants au deuxième cycle et au troisième cycle, ça ne me donnera pas d'étudiants de plus a temps plein et ça ne me donnera pas cette culture historique qui fait que les anglophones, eux autres, ils sont bien plus capables de pousser leurs jeunes aux études universitaires que les francophones, pour toutes sortes de raisons qu'on pourrait expliquer pendant plusieurs heures ce soir. Mais c'est ça, la réalité, et il n'en tient pas compte.

Les chiffres, moi, ce n'est pas une question de chiffres. Je l'ai dit et je conclus là-dessus. Quand le même ministre de l'Éducation dit: La pratique du gel pendant 25 ans et plus a contribué largement et d'une façon majeure et importante à ce qu'il y ait beaucoup de jeunes qui accèdent ainsi à des études universitaires, le jour où tu y mets fin, le même ministre qui vient de dire que ça a contribué, il ne peut pas dire, de l'autre côté: Dégelez, il n'y aura pas d'impact. Il ne peut pas dire ça, parce qu'on ne peut pas, en même temps, dire deux vérités différentes, à moins d'être infirme, puis ce n'est pas son cas, visuellement en tout cas.

L'approche gouvernementale du financement des études universitaires, je pense qu'elle est viciée. Elle est viciée, l'approche du gouvernement au niveau du financement des études universitaires. Vous avez raison, ce n'est pas un bien de consommation. Ce n'est pas un bien de consommation et, en conséquence, il s'agit d'un enrichissement collectif qui permet à toute la société de s'enrichir. Et quand une société peut compter sur un niveau de scolarisation plus élevé, une meilleure culture universitaire est plus apte à prendre le virage, est plus apte à s'adapter aux technologies nouvelles, puis elle est plus apte à faire face au défi de 1992, que ce soit l'Europe ou d'autres défis. Donc, votre mémoire, moi, je n'ai rien à y redire, je pense l'avoir bien compris.

Si vous aviez dit au ministre, si vous l'aviez amené sur les voies où il essayait de vous amener, est-ce que vous avez parlé de couper les dépenses? Moi, j'ai lu votre mémoire deux fois, il n'a pas été question de ça. Le ministre vous a dit: Écoute, notre choix, ça serait de couper les dépenses. Il n'a pas été question de ça. Est-ce que, dans votre mémoire, vous avez dit: Augmentez le déficit? Il n'a pas été question de ça. Je n'ai jamais vu, dans votre mémoire, des indications d'augmenter le déficit. Ce dont il a été clairement question, c'est que oui, il y a lieu de poser un geste majeur pour régler le sous-financement, puis il faut que ce geste-là soit posé si on veut que la société puisse donner un niveau de développement des études universitaires adéquat; c'est: le secteur privé devrait faire un effort additionnel.

C'est prouvé que le secteur privé ne fait pas l'effort qu'on lui demande de faire ailleurs, puis il en bénéficie. Ça, c'est clair. Donc, le secteur privé devrait faire un effort additionnel. Est-ce que l'État devrait faire un effort additionnel? Moi, je n'en démords pas, la réponse, c'est oui, parce que l'éducation, c'est une priorité collective. Ça appartient à l'État d'assumer cette responsabilité là.

Puis, troisièmement, la solution pour que les étudiants fassent plus, parce qu'il est normal que les étudiants en fassent un peu plus, c'est soit un impôt postuniversitaire, soit toutes les réflexions qui ont été mises sur la table pour s'assurer qu'il y ait plus d'équité par rapport à la formation qu'ils ont reçue. Et vous avez raison, en termes régressifs ou pas, l'impôt sur le revenu est peut-être ce qu'il y a de moins régressif. Dans ce sens-là, je pense qu'il y aurait une contribution importante à leur demander, puis vous n'êtes pas en désaccord.

Quelques mots sur l'aide financière aux étudiants. Toutes vos remarques vont dans le même sens que celles qu'on a entendues. Elles sont adéquates, elles sont fondées, à savoir que la notion d'autonomie devrait être plus grande. La contribution parentale est faible, minimale, il y en a la moitié qui ne la verse pas, quand on continue à l'exiger dans le calcul; donc, ça signifie que les étudiants ne la touchent pas. Un vrai régime d'aide financière devrait tenir compte de ces éléments-là.

Quant aux mécanismes d'enquête et de vérification, les articles 47 à 52, vous trouvez que c'est inapproprié; on a dit la même chose, tout le monde a dit la même chose, puis le ministre est d'accord.

Je n'ai pas d'autres remarques à faire et je ne poserai pas des questions pour poser des questions, parce que je comprends bien la présentation de votre mémoire.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Le ministre adore les comparaisons Québec-Ontario. Moi, j'ai travaillé comme porte-parole de l'Opposition à l'Éducation, à l'Enseignement supérieur et à la Science et c'est toujours, toujours, toujours ce qu'il nous ramène, mais, assez curieusement, il ne ramène que celles qui lui conviennent. On pourrait en faire, des comparaisons avec l'Ontario, que j'aimerais bien qu'on imite: 3 % de la masse salariale des entreprises pour corriger les inégalités salariales; ça concerne davantage les femmes, c'est intéressant, mais c'est quand même majeur comme mesures, là. On ne parle pas de n'importe quoi. 3 %, c'est plus de 1 000 000 000 $, ça, peut-être 3 000 000 000 $ ou 4 000 000 000 $, la masse salariale, peu importe, avec la nôtre.

En Ontario, des écoles privées financées par le public, il n'y en a pas, à part les écoles pour les enfants qui éprouvent des difficultés d'apprentissage ou encore pour les enfants handicapés. C'est tout à fait à l'inverse, à l'autre bout de la chaîne, de nous autres; nous autres, ils ne les prennent pas les handicapés dans les écoles privées. (21 h 15)

Le financement des universités régionales en Ontario pour l'enseignement à distance, pour le financement des universités en région, c'est 22 % de plus que l'enveloppe de base des universités dans les grands centres. J'aimerais ça, moi, qu'il regarde ces comparaisons-là. Il nous dit: Une hausse des frais de scolarité n'aura pas d'effets sur la clientèle. Vous savez, ça, je trouve toujours que c'est un raisonnement qui n'a pas de bon sens. Il dit: Écoutez, on a les frais de scolarité les plus bas et on conserve une diplomation plus basse qu'ailleurs. Résultat: augmenter les frais de scolarité, ça va augmenter le monde. Franchement! Je veux dire, il y a comme quelque chose qui ne va pas dans le raisonnement.

Mais il nous parie souvent du déficit, ce avec quoi on peut être assez d'accord qu'un déficit - en tout cas, si je pense au déficit canadien, ça commence à être assez apeurant, merci - mais le déficit le plus important au Québec, c'est un déficit de ressources humaines. C'est là qu'il est, notre déficit, et là, il va entraîner un autre déficit, c'est le déficit de notre capacité de développement économique. Ça passe par là. Ça, c'est le genre de comparaison, c'est drôle, on dirait qu'il est sourd là dessus. Il doit envoyer ça au ministre de l'Industrie et du Commerce probablement.

J'ai une question. Vous abordez toute la question de l'introduction de mesures de vérification et de contrôle, le pouvoir d'enquête qui est un pouvoir quasi judiciaire. A cet égard, le ministre, l'actuel gouvernement - et là, ce n'est pas seulement le ministre, je pense à celui qui est responsable du ministère de la Sécurité du revenu qui a fait la même chose - ils ont une approche de résolution de problèmes, ils disent: Si vous avez des problèmes, tapez ceux qui utilisent les services. Ça s'est fait en santé, c'est-à-dire que ça se parle en santé, ça se fait en éducation. Là, ça se fait un peu partout, c'est la mode.

À présent, tout le monde est soupçonné coupable jusqu'à preuve du contraire. On a, là aussi, comme inversé notre processus qui était, selon la loi britannique, que tout le monde est innocent jusqu'à preuve du contraire. Mais là, tout est installé. Les régimes s'installent comme si tout le monde était coupable jusqu'à preuve du contraire. Je me disais que vous avez raison de dire qu'on n'a pas fait mention d'abus au régime qui permettraient de justifier une telle mesure.

Sur une autre question, vous parlez du problème de la diminution des clientèles et vous dites que ça se fera plus durement sentir chez les femmes que chez les hommes, et vous le dites sur la base, évidemment, des données du sondage auquel vous vous référez, celui de Léger et Lepage. Ça représente combien? Vous dites que vous représentez quatre universités, mais quel est le pourcentage des femmes dans les clientèles à temps partiel?

Mme Méar: Je peux vous répondre, si vous voulez, pour l'Université de Montréal.

Mme Blackburn: Oui.

Mme Méar: À l'Université de Montréal, 30 % des étudiants à temps partiel sont des femmes.

Mme Blackburn: Autant dire, comme on repousse l'accès au régime pour ces clientèles, que dans 90 % des cas, ça va être des femmes qui vont être touchées par ça. Dans les autres universités, est-ce que vous les avez également?

M. Langlois: On n'a pas d'autres chiffres. Une voix: Juste ceux pour Montréal. M. Langlois: Je n'ai pas d'autres chiffres.

Mme Blackburn: Mais j'imagine que ça ne doit pas autrement émouvoir le ministre parce que le ministre - je me permets de le rappeler - vous savez, parlant du déficit des universités, disait: Je ne veux pas qu'on me mette devant des faits accomplis; plus de déficit les petits gars, vous avez compris, qu'il fusse au nom des idéaux les plus nobles... Et là, il parlait de l'accessibilité Ce qui fait dire que vous avez tout à fait raison quand vous dites que les 52 000 000 $, ce n'est pas sûr qu'on les retrouve dans les universités, et loin de là. Combien est-ce que ça pourrait représenter d'économies pour un gouvernement, pour le gouvernement du Québec? Dans une hypothèse où il y aurait une diminution de 5 % des clientèles, ça représente combien, ça, à peu près?

M. Langlois: Un calcul rapide...

La Présidente (Mme Hovington): Qui répond à la question? Est-ce qu'il y avait question?

Mme Blackburn: Oui, il y a question.

La Présidente (Mme Hovington): Avez-vous compris la question? Oui.

M. Langlois: Enfin, c'est une autre question, c'est-à-dire que ce n'est pas la réponse, précisément, à votre question. Cependant, vous venez d'aborder le problème des personnes qui sont le

plus susceptibles. Comme nous l'avons fait dans le mémoire - effectivement, elles sont plus susceptibles - nous avons dit: Les femmes sont peut-être les plus fragiles sur le plan de l'affectation par la hausse des frais de scolarité, mais ce qui nous inquiète aussi, peut-être, ce sont les strates sociales qui pourraient être affectées par, évidemment, l'accessibilité, c'est l'accessibilité des classes moins favorisées, bien sûr. C'est qu'avec l'augmentation des frais de scolarité il ost possible encore, parce qu'on constate effectivement que, dans les universités, il y a davantage d'étudiants et d'étudiantes de milieux favorisés qui fréquentent les universités... Cependant, c'est un fait de société, même si on augmente les bourses ou les prêts, parce qu'on augmente toujours les bourses en fonction des prêts - et les frais de scolarité qui viennent s'ajouter, finalement, même si on augmente le prêt aux étudiants et étudiantes - il reste que ce n'est pas dans les traditions sociales des milieux défavorisés de comprendre que de s'endetter ou d'emprunter peut être synonyme de faire de l'argent, de rentabiliser des investissements. Dans les classes défavorisées, il n'y a pas cette forme de conception, c'est le gain le plus rapide ou celui qui coûte le moins cher à acquérir pour travailler. La crainte que nous avons, c'est qu'en augmentant même les prêts pour payer les frais de scolarité plus élevés, qui semblent peu élevés maintenant, mais qui risquent de le devenir effectivement à la longue, parce que c'est un élan qui est donné, à ce moment-là, on affecte davantage les classes défavorisées qui ne voudront pas, malgré le talent, peut-être, accéder à des études universitaires. Et ça, c'est un risque que nous courons.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. C'est tout le temps que nous avions. En guise de conclusion?

M. Ryan: Juste un petit mot, en guise de conclusion, ce n'est pas parce que je tiens à changer les termes du débat, mais je me rappelle que, dans les documents que j'ai examinés en préparation de la commission parlementaire, j'ai lu une étude qui a été faite sur le financement du système universitaire français, une étude de l'OCDE, et, dans cette étude, on établit clairement qu'en France, où ils ont la gratuité universitaire depuis au moins le lendemain du dernier conflit mondial - moi, j'allais là vers la fin des années quarante et c'était gratuit déjà - à ce moment-là - le taux de scolarisation universitaire est beaucoup plus bas que le nôtre et la composition sociale des clientèles universitaires est encore davantage marquée par des clivages que la nôtre. Ça veut dire que le lien de causalité que certains veulent établir - le député d'Abiti-bi-Ouest a la preuve facile, lui, il accepte n'importe quoi pourvu que ce soit contre le gouvernement - mais le lien de causalité que vous-mêmes cherchez à établir n'est pas établi du tout. Plus on recueille de données, plus ça va dans un sens contraire.

On a donné l'exemple de la Suède ici. La Suède, ils ont la gratuité. Ils l'avaient jusqu'à récemment. Ils avaient un régime universel de prêt pour tout étudiant âgé de plus de 18 ans. On constate, en scrutant le dossier davantage, que, dès 1985 ou 1986, à la sortie des études, l'étudiant suédois avait sur le dos une dette de plus de 18 000 $ Alors, il faut prendre l'ensemble d'un dossier quand on regarde ça puis il faut le situer dans le dossier plus large des finances publiques de chaque société. C'est ce que nous essayons de faire, nous autres, faire entrer dans le portrait tous les facteurs, sans en oublier aucun. Ça nous conduit à la conclusion qui est celle que nous proposons. J'apprécie quand même que le point de vue contraire nous soit soumis, je pense que c'est nécessaire et ça nous oblige à l'enregistrer puis à nous interroger. On n'a jamais de vérité définitive là-dedans et, dans ce sens-là, je pense que l'exercice est très salutaire et je vous en remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, il me reste à vous remercier au nom des parlementaires membres de la commission.

Mme Blackburn: Est-ce qu'on peut en faire autant à l'endroit de cette délégation, de ses représentants?

La Présidente (Mme Hovington): Je vois que le porte-parole de l'Opposition est revenu, peut-être en guise de conclusion.

M. Gendron: Mais compte tenu du fait que je n'ai pas été témoin de l'accusation gratuite du ministre, ma collègue l'a entendue, alors je vais la laisser conclure.

La Présidente (Mme Hovington): Rapidement, parce que nous avons déjà dépassé le temps.

Mme Blackburn: Je voudrais vous remercier de votre présentation. Comme l'a dit mon collègue d'Abitibi-Ouest, on n'a pas à élaborer davantage, tout est là-dedans, tout est contenu. Vous savez, le ministre a cette désagréable manie: si vous ne pensez pas comme lui, tout ce qui ne pense pas comme le ministre, c'est nécessairement de travers. Il a la foi, la vérité e! la vie. Quand vous avez tout ça, c'est bien difficile d'aller discuter avec quelqu'un. Et quand il dit que le député d'Abitibi dit n'importe quoi et que les arguments qu'on avance, du moment qu'on les avance sur des données et que lui, en grand prêtre, n'a pas eu l'occasion, de participer à l'étude ou encore de la faire lui-même, ça n'a jamais de bon sens. On aurait beau dire n'importe quoi. Alors, quand il accuse de façon facile, je trouve qu'il manque totalement d'argu-

merits. Vous aurez remarqué aussi que, quand il manque d'arguments, il devient un petit peu méchant.

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, s'il vous plaît!

Mme Blackburn: Ou encore, quand on a des bons arguments, il devient un petit peu plus méchant. Alors, dans ce sens-là, ça veut dire probablement que nos arguments l'ont frappé.

M. Ryan: On va vous laisser parler encore.

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion.

Mme Blackburn: Si vous restez assez longtemps en commission parlementaire, vous aurez l'occasion de l'apprendre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Je vous remercie infiniment de votre participation. Au plaisir.

La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha! Merci beaucoup. Alors, je demanderais à l'Intersyndicale des professeurs des universités québécoises de bien vouloir s'approcher et nous allons suspendre une minute pour laisser le temps à tout le monde de s'installer.

(Suspension de la séance à 21 h 27)

(Reprise à 21 h 28)

La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez bien prendre place, nous allons reprendre nos travaux. Est-ce que l'intersyndicale des professeurs des universités québécoises voudrait bien prendre place, s'il vous plaît, les représentants? Bonsoir, bienvenue à la commission de l'éducation. Pour les fins de la transcription des débats, voulez-vous vous présenter, s'il vous plaît, à tour de rôle.

Intersyndicale des professeurs des universités québécoises

M. Campagna (Michel): Merci, Mme la Présidente, Mmes et MM. les députés et membres de la commission, M. le ministre. Je suis Michel Campagna, président de l'Intersyndicale, qui regroupe douze syndicats de professeurs des universités québécoises qui comptent, à eux douze, 4800 membres. J'ai avec moi ce soir, à ma gauche, M. André Leblond, qui est vice-président de l'Intersyndicale et président du Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi; à la gauche de M. Leblond, c'est M. Roland Ouellet, vice-président du Syndicat des profes- seurs de l'Université Laval; à la gauche de M. Ouellet, M. Joseph Mathieu, qui est vice-président du Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Chicoutimi; à ma droite, M. Roch Denis, qui est président du Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Montréal; à la droite de M. Denis, M. Claude Livemoche, qui est président du Syndicat des professeurs de l'Université du Québec à Rimouski.

De toute évidence, Mme la Présidente, la nécessité d'une nouvelle loi ayant pour objet d'établir un cadre législatif pour l'application d'un régime d'aide financière aux étudiants sous forme de prêts et bourses ne fait aucun doute pour les syndicats participant à l'Intersyndicale des professeurs des universités québécoises. Toutefois, ce projet de loi, tel que présenté, est un cadre législatif qui ne répond pas aux besoins et aux réalités socio-économiques du Québec, "paramétrés" présentement par une sous-scolarisation universitaire au niveau global, une sous-scolarisation aiguë au niveau des régions, une sous-scolarisation universitaire aiguë au niveau des femmes, l'éclatement des familles et l'augmentation, par conséquent, des familles monoparentales et des jeunes mères célibataires.

Ce projet de loi ne tient pas compte non plus de la volonté des femmes, des jeunes, d'accéder à leur indépendance économique.

Par conséquent, Mme la Présidente, et compte tenu de ces énoncés, l'Intersyndicale se devait de réagir et de présenter un mémoire ayant pour but d'apporter une critique constructive à ce projet de loi, dans le but de contribuer un tant soit peu à son amélioration. À cette fin, nous avons articulé ce mémoire autour des trois objectifs principaux suivants: premièrement, l'autonomie des étudiants et des étudiantes; deuxièmement, l'accessibilité de tous ceux et celles qui sont aptes aux études universitaires et, troisièmement, le financement adéquat par l'État des universités.

Nous allons d'abord développer le thème de l'autonomie. L'étude globale du projet de loi 25 révèle qu'il repose sur le maintien d'un lien de dépendance de tous les étudiants et étudiantes universitaires vis-à-vis de leurs parents et d'un lien de dépendance des femmes et des hommes vis-à-vis de leur conjoint au mépris de leur autonomie. Ce projet écarte de plus une quantité très importante des étudiants universitaires, soit les étudiants adultes. À titre indicatif, dans le réseau de l'Université du Québec, ces étudiants adultes sont au nombre de 51 000 et constituent les deux tiers des inscrits. Par conséquent, l'Intersyndicale recommande que les chapitres I et II du projet de loi 25 soient modifiés pour assurer la pleine et entière autonomie de la femme et de l'homme par rapport à son conjoint, de l'étudiant et de l'étudiante de niveau universitaire a l'égard do ses parents et des adultes en situation de perfectionnement ou de retour aux études après une expérience sur le marché du

travail.

Mme la Présidente, pour atteindre cet objectif de pleine autonomie, l'Intersyndicale recommande que la loi 25 prévoie: 1° que la contribution parentale soit progressivement abolie ou carrément supprimée; 2° que la contribution des conjoints soit également abolie; 3° que les étudiants adultes aient accès à une assistance financière, soit par un régime de prêts et bourses spécial, soit par un programme de formation professionnelle associé aux programmes d'aide sociale ou d'assurance-chômage; 4° que les étudiants de deuxième et troisième cycles soient éligibles au programme de prêts et bourses, sans restriction; 5° qu'à l'exemple d'autres provinces ou États américains des programmes d'assistance et de création d'emplois permettent d'assurer aux étudiants gradués un revenu minimum de 12 000 $ par an. En particulier, ces étudiants devraient pouvoir bénéficier à l'université d'avantages spécifiques tels que des bourses d'excellence, des salaires d'assistant, des salaires de moniteur, etc.

Permettez-nous, Mme la Présidente, de citer nos collègues Dumont, Dansereau, Fortin, Bouchard et al. dans Le Devoir du 27 février: "Si l'on veut augmenter au Québec le nombre de candidats... à la diplomation de maîtrise et de doctorat, il faudra envisager des mesures sérieuses de support financier et ne pas augmenter indûment les frais de scolarité. À ce stade des études - de maîtrise et doctorat - les abandons sont très nombreux et dus très souvent à un besoin d'argent."

Nous abordons maintenant le second thème: l'accessibilité générale aux études supérieures. Hélas! Le gouvernement a autorisé les universités à hausser considérablement les droits de scolarité afin qu'elles puissent, éventuellement, compenser le manque à gagner de leur financement par l'État. L'Intersyndicale croit que cette mesure diminuera l'accessibilité à l'université et, par le fait même, qu'elle nuira aux étudiants. N'est-il pas communément admis que, plus le niveau de formation est élevé dans une société, plus celle-ci se développe politiquement, économiquement et socialement. Il y a donc un rapport évident, pour nous, entre le développement de la conscience politique et sociale du citoyen, son bien-être économique et son niveau de scolarisation. Ce rapport est d'autant plus important pour nous, Québécois, que nous entrons dans une période de libre-échange avec les États-Unis, un phénomène qui entraînera une croissance du secteur tertiaire de l'économie.

Dans un tel contexte, il est impérieux que les études supérieures soient accessibles à tous les Québécois et à toutes les Québécoises. Sans doute, le gouvernement va-t-il répondre que cette accessibilité est déjà un fait. Nous répondons: Non, Mme la Présidente, ce n'est pas le cas. Je vous invite à regarder les tableaux 1 et 2, en annexe à notre mémoire. D'abord, sur le tableau 1. au niveau du Québec, globalement, le taux de scolarisation universitaire, au Québec, se situe en dessous de la moyenne canadienne: 8,6 % comparativement à 9,6 %. Deuxièmement, le taux de scolarisation universitaire du Québec est inférieur de 2 % à celui de l'Ontario, ce qui nous place en situation de nette infériorité. Troisièmement, le taux de scolarisation universitaire des femmes québécoises se situe à 6,8 % comparativement à 10,5 % pour les hommes, soit un écart relatif de 35 %. Quatrièmement, le taux de scolarisation universitaire est de 12,6 % à Montréal et à Québec, alors qu'en région on constate des taux qui sont de beaucoup inférieurs: 4,3 % en Abitibi, 4,6 %, en moyenne, au Lac-Saint-Jean, 6,7 % au Saguenay, 8,2 % à Rimouski et 8 % en Mauricie.

À la suite de ces constats, l'Intersyndicale est plus que jamais convaincue que l'accessibilité est un droit fondamental et qu'elle doit être retenue par le gouvernement comme une grande priorité. En conséquence, nous recommandons au gouvernement de surseoir à toute hausse des frais de scolarité; en second lieu, d'ajouter au projet de loi 25 des dispositions spéciales en faveur des femmes québécoises, leur permettant de rattraper le taux de scolarisation universitaire des hommes; en troisième lieu, de proposer un nouvel énoncé de politique comportant a la fois des modifications au projet de loi 25 et d'autres mesures législatives, afin de permettre le rattrapage du taux de scolarisation universitaire des régions et des sous-régions du Québec, soit par des programmes spéciaux d'aide financière aux étudiants adultes, soit par l'offre d'un plus grand nombre de programmes d'études et de services sur place.

Mme la Présidente, le ministre Claude Ryan a reconnu que la hausse des frais de scolarité entraînera une baisse de 5 % du nombre d'étudiants. Une étude récente évalue que doubler les frais de scolarité au Québec entraînerait une chute de 12,5 % de la fréquentation universitaire. L'Intersyndicale en conclut qu'indéniablement l'accessibilité sera diminuée et qu'en conséquence l'enveloppe de financement des universités sera réduite d'autant. Cette diminution sera non seulement dramatique pour l'accès des femmes, des populations à temps partiel et des étudiantes moins favorisées à l'université, mais aussi pour le développement de la scolarisation universitaire en région.

Nous abordons maintenant le troisième objectif qui est le financement adéquat des universités par l'État. Dans son mémoire au premier ministre, la Conférence des recteurs avait fait état de deux études permettant d'apprécier le degré de sous-financement de nos universités. On y lit: "Les universités sont sous-financées à raison de 200 000 000 $ par an. L'Intersyndicale ne croit pas nécessaire de répéter cette démonstration. Par contre, l'Intersyndicale s'étonne que le gouvernement du

Québec abandonne sa responsabilité première de financer adéquatement le réseau des universités en choisissant des solutions de facilité, à savoir:

Première solution de facilité: le maintien et l'augmentation du ticket modérateur que constituent les frais de scolarité, ces frais constituant une taxe spéciale imposée aux étudiants et étudiantes, alors qu'un projet de société adopté dans les années soixante avait voulu voir disparaître ces frais de scolarité avec le temps.

Comme deuxième solution

Mme la Présidente, il semble bien que le premier acte de ce scénario tragique soit déjà en cours. L'Intersyndicale désapprouve donc totalement la position des recteurs sur l'augmentation des frais de scolarité comme moyen de financement des universités.

L'Intersyndicale constate également que les recteurs des universités en région n'ont pas réussi du tout à convaincre leurs collègues, ni à convaincre le gouvernement à introduire une formule de financement des universités du type "Northern grant", laquelle tient compte de la taille et de l'éloignement, ainsi que de l'indice de sous-scolarisation universitaire des régions et des sous-régions.

Par conséquent, l'Intersyndicale propose les quatre solutions alternatives suivantes: premièrement, que le gouvernement du Québec perçoive un impôt spécial sur les grandes entreprises; deuxièmement, que le gouvernement du Québec incite toute municipalité où est implantée une université, qui est desservie par cette université, à contribuer à son financement; troisièmement, que le gouvernement introduise des mesures fiscales supplémentaires permettant aux citoyens de contribuer au financement de leur université régionale; quatrième piste de solution, que le gouvernement du Québec introduise au plus tôt une formule de financement des universités du type "Northern grant", qui tienne compte de la taille, de l'éloignement et de l'indice de sous- scolarisation universitaire des régions et des sous-régions.

Le projet de loi 25 constitue une négation à peine déguisée de l'accessibilité aux études supérieures pour les étudiants et étudiantes, accentuée par la hausse des frais de scolarité et le maintien du sous-financement des universités. De plus, ce projet de loi 25 tel qu'il est ne comporte aucune mesure correctrice visant à favoriser le rattrapage des femmes québécoises, ni des populations régionales au plan de la scolarisation universitaire. Enfin, ce projet écarte totalement les étudiants adultes.

De ce point de vue, l'Intersyndicale est profondément déçue de ce projet de loi 25, d'autant plus que le Canada, dont le Québec est encore une des parties constituantes, a ratifié en 1966 et mis en vigueur en 1976 le Pacte des droits économiques et sociaux, dont on peut lire l'article 13.2C, je cite: "L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous, en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés, et notamment par l'instauration progressive de la gratuité." (21 h 45)

Plus récemment, le Canada, par l'intermédiaire des ministres provinciaux de l'Éducation, dont celui du Québec, au cours de la 41e session de la Conférence internationale de l'éducation, a adopté la recommandation 76. Cette recommandation indique entre autres, le principe suivant: Assurer à tous ceux qui ont les capacités requises pour accéder à ce niveau d'enseignement l'égalité des chances dans la préparation à la vie - et plus particulièrement à la vie professionnelle - et dans la participation aux diverses activités de la société.

Quant aux mesures et programmes concrets à adopter, cette recommandation indiquait ce qui suit: Dans ce but, il est indispensable de prendre des mesures afin d'assurer aux étudiants remplissant les conditions voulues et dont la situation économique l'exige l'octroi de bourses, de crédits ou d'autres formes d'aide sociale et financière. Une attention spéciale devrait être accordée à la formation pour l'emploi des femmes et des jeunes filles. À cette fin, l'inscription des jeunes filles dans les filières scientifiques et techniques devrait être encouragée et une plus large place devrait être également attribuée à l'emploi des professeurs femmes enseignant au niveau secondaire.

En bref, Mme la Présidente, le projet de loi 25 est un cadre législatif qui répond probablement aux besoins du ministère et de son intendance. Ce projet de loi n'est malheureusement pas adapté aux besoins de la société québécoise d'aujourd'hui. Nous recommandons instamment aux membres de la commission et au gouvernement de prendre en bonne considération les recommandations de l'Intersyndicale. Nous vous remercions, ainsi que les députés membres de la commission et le ministre, pour votre bonne

attention et nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Campagna. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Mme la Présidente, je veux saluer avec plaisir les représentants de l'Intersyndicale des professeurs des universités québécoises, leur dire que nous avons pris connaissance avec intérêt de leur mémoire. J'aurais peut-être une petite question d'information à vous soumettre avant de commencer. Je vois qu'il y a des syndicats qui sont affiliés à la fois à la FAPUQ et à l'Intersyndicale, est-ce que je me trompe?

M. Campagna: Non, vous ne vous trompez pas. C'est que l'Intersyndicale admet la double allégeance. Et l'Intersyndicale est avant tout une table de concertation pour le moment. Ce n'est pas une fédération de professeurs.

M. Ryan: Très bien, je vous remercie. L'Intersyndicale est-elle affiliée à une centrale syndicale?

M. Campagna: L'Intersyndicale n'est affiliée à aucune centrale syndicale.

M. Ryan: Complètement autonome? M. Campagna: Absolument.

M. Ryan: Où est-ce qu'est le siège social? Excusez-moi.

M. Campagna: Notre secrétariat est à Chicoutirni, pour l'instant. Notre siège social peut changer suivant les administrateurs pour une année en cours.

M. Ryan: Très bien. Vous me permettrez quelques rapides commentaires sur les idées que vous nous avez soumises. Je voudrais sauter par-dessus, peut-être, des thèmes que nous avons discutés avec la délégation précédente pour éviter des répétitions, ce qui ne vous empêchera pas de commenter les points que nous avons discutés si vous le jugez à propos. Soyez bien libre. Vous parlez de la formule du "Northern grant" ontarien pour les universités. Vous êtes sans doute au courant que, dans le nouveau mode de partage des subventions gouvernementales entre les universités, nous avons prévu cette année une somme significative destinée aux universités situées en régions éloignées, laquelle somme a été confiée à l'Université du Québec qui est chargée d'établir le partage des ressources à l'intérieur de son réseau. Alors, nous avons une formule qui n'est pas le "Northern grant", mais qui tient compte des besoins propres des universités qui sont en régions éloignées et les sommes que nous avons réservées à cette fin cette année viennent s'ajouter à des sommes qui avaient déjà été inscrites dans la base de financement des universités il y a quelques années, de manière que, tout compte fait, nous ayons présentement un dispositif qui tienne lieu de cette formule de "Northern grant". D'ailleurs, des représentants d'universités régionales qui sont venus ici, comme l'Université du Québec à Rimouski, l'ont signalé, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue également. Nous sommes très heureux d'avoir pu insérer cet élément additionnel dans la base de financement des universités à compter de l'année 1989-1990 pour les choses nouvelles qui venaient s'ajouter à d'autres éléments déjà existants.

Vous faites une proposition, dans votre mémoire, à propos des étudiants gradués. C'est très important, les étudiants gradués, pour l'avenir du Québec. Je pense que nous en convenons tous. Vous dites qu'il faudrait leur donner un salaire annuel minimum de 12 000 $. J'ai fait des calculs rapides qui sont seulement un point de départ pour la discussion. Évidemment, nous en avons à peu près 18 500 étudiantes et étudiants de niveau gradué et post-gradué, dans nos universités. Si on multiplie ça par 12 000 $, ça fait à peu près 225 000 000 $.

Disons qu'il y a déjà une partie de cet argent qui est employé parce qu'il y en a qui sont employés comme attachés de recherche, il y en a qui ont des bourses du fonds FCAR, il y en a qui ont des bourses d'excellence d'autres sources. Mais, quand même, je pense que votre proposition viendrait ajouter aux obligations du gouvernement une somme d'au moins 150 000 000 $. Je serais bien en peine de trouver la source qui pourrait nous procurer une somme comme celle-là tout en convenant que plus on pourra permettre à des étudiants de ces niveaux de s'employer utilement, avec une certaine rémunération en relation avec leurs préoccupations immédiates, à des travaux d'assistance ou de recherche, accompagnés de leur professeur, je pense que c'est un objectif excellent auquel nous souscrivons. Et sans être en mesure de vous dire que l'objectif que vous proposez soit capable d'être atteint, on va regarder si on peut améliorer les choses qui se font déjà de ce côté-là. Et si on peut faire un certain nombre de pas, c'est autant de pris.

Vous demandez que des mesures soient prises en faveur des femmes, en particulier, des femmes adultes qui veulent revenir aux études après une expérience au foyer ou sur le marché du travail. Je pense que nous sommes d'accord sur cet objectif. Et c'était la raison principale de la mesure que nous envisagions pour les étudiants à temps partiel. Nous pensions, de manière toute spéciale, aux femmes qui ont élevé leur famille, qui veulent revenir sur le marché du travail, se perfectionner auparavant. C'est pour ça que nous avions parlé même de bourses dans

ce cas-là, mais on nous a soumis diverses représentations qui indiquent que c'est plus complexe encore que nous ne le pensions. Nous préferons nous accorder un répit de quelques mois pour travailler ce sujet-là de manière approfondie afin de mettre au point les formules qui permettraient de vraiment répondre au besoin d'une manière efficace.

J'ai établi, rapidement là, le coût de certaines mesures que vous proposez. Vous demandez que la contribution parentale soit progressivement abolie ou carrément supprimée. Si on la supprimait complètement, il faut mettre un coût de 300 000 000 $. L'améliorer, la diminuer graduellement, mais là, il y a plusieurs mesures dans le projet de loi 25 qui visent précisément à l'allégement de la contribution parentale. Il y aura des allégements très sensibles à la suite de l'adoption du projet de loi 25. Mais les allégements que nous avons inscrits dans le projet de loi indiquent le point où peut aller le gouvernement actuellement. Ils indiquent aussi le point au-delà duquel il n'est pas possible d'aller dans l'avenir prévisible.

Je ferais une remarque analogue à propos de la contribution des conjoints dont vous proposez l'abolition. En principe, je pense que c'est difficile de mettre en doute l'objectif que vous proposez. En pratique, le coût d'une telle mesure serait de 40 000 000 $. Nous n'avons pas ces sommes à l'heure actuelle. Je vous indique ces réserves pour montrer que, lorsque nous avons établi le projet de loi 25 et l'énoncé d'orientation, nous avions l'obligation, moi surtout, comme ministre, de tracer un plan qui serait compatible avec le cadre financier du gouvernement dont je fais partie. Je ne mets pas le blâme sur le ministre des Finances; vous ne m'entendrez pas dire: Je l'ai demandé au Conseil du trésor, il me l'a refusé. Le Conseil du trésor, c'est un peu moi-même aussi, c'est un des comités du cabinet, et les décisions des comités du cabinet lient tous les ministres. Un ministre n'est pas autorisé à aller se plaindre en public contre le Conseil du trésor, c'est une chose qu'on ne fait pas, en général. Alors, de ce côté-là, je ne viens pas porter mes griefs ou tout, j'en délibère à l'intérieur du gouvernement Une fois que la décision est prise, tant que je suis membre du gouvernement, je suis solidaire de la conclusion, justement.

Les mesures que vous proposez, j'ai essayé de voir, je vous montre les conséquences financières très lourdes de certaines propositions que vous mettez de l'avant, ensuite, je regarde du côté des solutions. En plus, vous voulez qu'on gèle les frais de scolarité, c'est encore 42 000 000 $ de revenus nets pour les universités chaque année, ça; l'an prochain, ça sera 82 000 000 $. 41 000 000 $, 82 000 000 $ l'an prochain. Vous dites: On n'a pas besoin de ça, gelez ça, ne touchez pas à ça. Je regarde ce que vous nous proposez comme solutions: un impôt spécial sur les grandes entreprises, une contribution des municipalités au financement des universités implantées dans leur territoire, des mesures fiscales pour le financement des universités en région. Finalement, quand on regarde ça, brut, ce sont des mesures fiscales où vous dites: Augmentez les taxes, augmentez les taxes. Trouvez un beau nom qui va être clair, mais, au bout de la ligne, c'est un chèque qui doit tomber dans le fonds consolidé du revenu. Vous avez beau appeler ça "ma taxe" sur les universités, "ma taxe" sur la santé, "ma taxe" sur les trottoirs, ça s'en va tout dans le fonds consolidé du revenu. C'est distribué, après ça, en fonction des besoins généraux du gouvernement.

Je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'originalité là-dedans, je vous le dis en toute simplicité. Vous parlez de la contribution des municipalités. L'impôt sur le revenu, il n'y a rien d'original là-dedans; ça, on le sait, on n'a pas besoin de représentations de l'extérieur pour ça. Chacun des ministres souhaiterait que le ministre des Finances augmente un petit peu l'impôt sur le revenu pour ses fins à lui. Moi, je voudrais qu'il le fasse pour les universités, je n'ai pas de secret avec vous. M. Paradis voudrait sans doute que M. Gérard D. Levesque le fasse pour l'environnement, Mme Robillard voudrait qu'on le fasse pour les affaires culturelles, M. Pagé pour l'agriculture, et je pourrais continuer. C'est pour ça que je vous dis que ce n'est pas très original. Vous nous dites: On veut ça. On l'encaisse très bien. Je n'ai pas beaucoup de discussions à faire là-dessus. Mon problème, c'est que notre impôt sur le revenu des particuliers est déjà encore un petit peu légèrement supérieur à celui de l'Ontario. On n'a pas beaucoup de marge là. Notre impôt sur les sociétés est légèrement supérieur à celui de l'Ontario. La marge, il y en a qui la voient, mais si on découpe cette affaire-là, qu'on regarde ça en soi puis on dit: La Sun Life, c'est gros, ça, à Montréal, tout. Mais si on regarde ça dans l'ensemble, je vous dis qu'il n'y a pas beaucoup de marge. Vous pouvez penser le contraire, mais, moi, j'ai une opinion différente, voyant les choses d'un oeil différent.

La contribution des municipalités au financement des universités, c'est une bonne idée, mais la contribution de la municipalité va se faire de bien des... Mais ça ne sera pas au budget de fonctionnement. Je vais vous le dire, ça ne sera pas pour payer les salaires des professeurs. Je vais vous dire les exemples que nous avons. À Montréal, par exemple, le maire Doré est un homme très conscient de l'importance des universités sur le territoire de la ville de Montréal; il en a quatre, lui. C'est la première fois que je vois un maire, à Montréal, se rendre compte que c'est très important pour lui, et j'en suis fort heureux. Mais le maire vient nous voir, il va nous dire: Moi, j'ai mon vélodrome, ça ne sert pas à grand-chose, ça, je voudrais faire un biodôme avec ça; ça serait bien bon

pour la recherche, pour le développement de la culture scientifique dans la population, ça serait très intéressant. Donnez-moi 40 000 000 $, je vais vous faire marcher ça pendant 20 ans après; vous ne vous ennuierez pas. Le gouvernement a donné 40 000 000 $ Ensuite, il est venu nous voir, il a dit: J'aurais besoin d'un insectarium. Ça, ça va permettre aux savants qui s'occupent de zoologie et tout ça d'avoir un laboratoire extraordinaire; ça va faire de l'éducation populaire en même temps. Le gouvernement a participé à ça. M. Doré est venu me voir l'été dernier, puis il m'a dit: II faudrait qu'on fusionne l'Institut botanique de l'Université de Montréal avec le Jardin botanique, faire un lieu de recherche botanique de toute première qualité au Québec, puis profiter de cette fusion-ià pour créer un institut de recherche sur la culture des plantes. Je trouve ça formidable, et nous avons pris l'engagement de participer également. La ville de Montréal va avoir une participation là-dedans; nous en avons une, c'est très intéressant. (22 heures)

Mais je ne peux pas, d'un point de vue réaliste, m'imaginer que la ville de Montréal sera capable de contribuer au budget de fonctionnement de ses quatre universités. Le maire Doré va nous dire: Ça, c'est la responsabilité de Québec. Vous le savez très bien. Il y a des possibilités, c'est très intéressant et très important aussi, mais ça va être de l'ordre dont je vous parle. Je vous le dis là, ayant les mains dans la pâte et étant appelé à transiger avec nos municipalités. Allez à Chicoutimi, ils ne peuvent pas donner grand-chose pour l'Université du Québec à Chicoutimi; s'il y a un projet d'agrandissement, un projet de développement, on pourra demander une collaboration de la ville, ça peut être très intéressant aussi. On pourrait prendre les autres exemples. À Trois-Rivières, nous avons une excellente collaboration avec l'autorité municipale.

De ce côté-là, il n'y a pas beaucoup de solutions à notre problème. Je pense toujours à notre problème de cadre de financement. Vous dites: mesures fiscales encore pour le financement des universités régionales. Ça va être quelle sorte de mesures fiscales? Vous ne le dites pas dans votre mémoire. Il faut présumer que ça va être encore de l'impôt sur le revenu, pas très original. Et je vous le dis bien simplement, en toute franchise, et si vous n'êtes pas de mon opinion, j'aimerais beaucoup vous entendre.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez la parole, s'il vous plaît. Est-ce que vous voulez...

M. Campagna: Commenter les réponses du ministre?

La Présidente (Mme Hovington): ...émettre des commentaires? Oui. Il reste quatre minutes sur notre temps

M. Campagna: Dans notre démarche, nous avons voulu suggérer au gouvernement et à cette commission des moyens d'améliorer le projet de loi 25. Évidemment, si ça avait été une commission d'étude sur la fiscalité du Québec, on aurait préparé un mémoire en conséquence. Maintenant, les pistes de solutions que nous avons apportées au ministre, le ministre semble les écarter du revers de la main en disant: Voici, ce n'est pas possible parce qu'on n'est pas l'Ontario et on est inférieurs à l'Ontario en termes de revenu, en termes de taxation. Mais nous, on constate aussi qu'on est inférieurs à l'Ontario en termes de scolarisation, en termes d'accès à l'éducation.

Alors, voilà, il va falloir briser le noeud gordien quelque part et on a suggéré des pistes au ministre de façon qu'il puisse améliorer son projet de loi. Maintenant, si mes collègues ont quelque chose à ajouter, M. Leblond, sur le "Northern grant."

M. Leblond (André): Pas particulièrement. Je pense que les solutions que nous proposons, même si elles ne sont pas d'une très grande originalité, sont tout de même des solutions à considérer très sérieusement. Je pense que c'est aussi sérieux que de prendre un moyen aussi facile que de hausser les frais de scolarité. Je pense que ça, ce n'est pas très original non plus. En ce qui concerne le "Northern grant", j'aimerais bien que le ministre nous envoie les documents de la nouvelle formule québécoise "Northern grant."

On nous dit qu'on a nous distribué des sommes d'argent pour les universités régionales. On a entendu parler de ça, mais on n'a jamais vu de documents, de chiffres ou de dollars véritables, justifiés par une formule quelconque qui donnerait une certaine justice aux universités régionales. Notre fédération, notre syndicat, a produit un document, à la suite du rapport Després, à ce sujet-là, dans lequel nous donnions, nous, une formule au gouvernement pour tenir compte du financement des universités régionales en fonction de leur taille et des régions desservies. On serait très heureux de voir quelle formule le gouvernement a utilisée et quelle formule i! préconise pour l'avenir.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Maintenant, nous autres, nous avons établi une formule, nous en avons fait part à la direction de l'Université du Québec et, comme vous le savez, le budget attribué par le gouvernement à l'Université du Québec est réparti entre les constituantes et les instituts affiliés par l'Assemblée des gouverneurs de l'Université du Québec suivant des critères que

celle-ci définit elle-même. Alors, pour la manière dont seront réparties les sommes que nous avons attribuées à l'Université du Québec, pour la fin que j'ai mentionnée, je pense qu'il faudra vous adresser à l'Assemblée des Gouverneurs de l'Université du Québec. Mais le gouvernement, lui, a fait son travail et a fait rapport à l'Université du Québec. Il lui a fait part des sommes auxquelles elle aurait accès.

La Présidente (Mme Hovington): Ça va?

Merci. La parole est au député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, toujours très simplement et calmement, j'avais noté que si je prenais l'essentiel de vos arguments, vous savez le risque que j'encours, celui de me faire dire par le ministre que je lui dis n'importe quoi. Mais ça sera au moins partagé puisque ça veut dire qu'il va vous dire la même chose. Je reprends vos arguments. J'estime cependant que vos arguments ont le mérite d'être un peu plus de 1990 que des années soixante. Je comprends un peu le ministre d'avoir de la difficulté avec ça, des arguments de 1990, pour le ministre de l'Education, ça lui pose des problèmes, des fois.

Très rapidement, sur vos premières recommandations, le ministre dit: Ce n'est pas tellement original. Il y a un petit problème, c'est drôle, je viens de compter le nombre de mémoires qu'on a entendus, il y en a dix-neuf. Si on enlève celui du Protecteur du citoyen, qui est censé se mêler de ses affaires sur les aspects pour lesquels il a fait un mémoire, alors qu'il n'a pas parlé trop trop d'accessibilité, parce que, comme dirait l'autre, ce n'est pas tellement son mandat, donc il n'a pas parlé de ça. Et si j'enlève la CREPUQ, qui est venu nous dire: Hourra! Bravo parce que vous réglez notre problème... Sauf qu'elle a posé des conditions, et ces conditions n'ont jamais eu de réponse, on ne l'a pas réentendue, je n'ai pas réentendu M. Kenniff qui est parti en disant: J'ai l'assurance que, si le ministre dégèle les frais, il me donne également 50 000 000 $. Il y avait ce bout là dans son mémoire. Il y avait ce bout-là dans le mémoire, puis là je ne veux pas défendre le mémoire de la CREPUQ, j'explique qu'au moins il y avait ce bout-là. Il disait: C'est conditionnel, on est d'accord, à condition qu'il y ait au moins 50 000 000 $ d'argent neuf au-delà des 41 000 000 $ que le dégel va nous donner.

Il y avait autre chose aussi, mais faisons vraiment les affaires comme il faut, regardons les trois universités qui sont venues dire. Nous, on est tellement pauvres, on est tellement dans une situation de pauvreté terrible que la mienne, l'Abitibi-Témiscamingue. Rimouski, c'est quelle? La première journée? Il n'y en a plus d'autre, parce que le Conseil des écoles professionnelles privées, ce n'était pas pantoute ce message là qu'il avait à nous dire, ça ne regarde à peu près pas les travaux qu'on discute. Donc, dix-neuf moins deux que ça ne regarde pas, ça fait dix-sept, moins les trois dont je viens de parler, si je compte bien, ça fait quatorze. Quatorze mémoires sur dix-sept nous ont dit intégralement ce que vous nous dites à peu près. Il y a des variables, mais c'est intégralement contre le dégel.

D'autres solutions, impôt universitaire, taxe de 1 % sur les entreprises. Je vous prends... Modifier l'aide financière au chapitre de l'autonomie pour que la notion d'autonomie soit plus forte... Toute la question de la contribution parentale, soit l'éliminer, ou, progressivement, l'abolir... Que la notion de conjoint ait une incidence moins forte sur le calcul de l'aide financière. Vous, vous dites: Que la contribution des conjoints soit également abolie. Je pense que le ministre est correct en disant: Oui, mais il y a une facture à ça. Mais, au moins, je voulais vous reprendre là-dessus pour dire que vous n'êtes pas original, mais vous ressemblez en maudit à tous ceux qui nous ont parlé de ça. Alors, il y en a quatorze jusqu'à maintenant sur dix-sept qui nous ont suggéré à peu près exactement les mêmes recommandations au chapitre majeur et important qu'on discute. Pour des gens qui manquent d'originalité, il y a au moins une belle continuité.

Sur les autres recommandations de votre mémoire, recommandation 3, surseoir à toute hausse des frais de scolarité, ce n'est pas nouveau, il y en a quatorze qui nous ont dit ça Recommandation 4, que le gouvernement du Québec perçoive un impôt spécial sur les grandes entreprises. Le ministre n'a jamais répondu sérieusement adéquatement là-dessus. Il nous dit: Oui, mais, globalement, on est plus imposés qu'ailleurs. Ce n'est pas de ça qu'on parle. On parle des frais de scolarité, et le secteur privé, partout ailleurs, contribue plus au financement universitaire qu'ici au Québec. Donc, est-ce que c'est farfelu et pas original? Moi, je dis que c'est original en étoile puisque c'est évident que les entreprises, ont intérêt à mettre la main, entre guillemets, sur des diplômés universitaires, pour leur propre bénéfice, et c'est le cas fréquemment. Des diplômés des HEC, dans des disciplines modernes qui correspondent au virage technologique, ce n'est pas vrai que ça traîne quatre ou cinq ans avant de se placer, règle générale.

Dans ce sens-là, exiger une taxe de 1 %, nous, on l'avait fait en campagne électorale, pas d'hypocrisie. Nous, on a dit. Un des problèmes majeurs de la société du Québec actuellement, c'est une main-d'?uvre pas assez qualifiée, pas assez recyclée par rapport au virage technologique. Les gens dans mon coin qui travaillaient pour l'Abitibi Paper, comme bûcherons, il y a quinze ou vingt ans, et qui sont dans ma rue, il n'y en a plus bien bien qui travaillent comme bûcherons. Ça ne se fait plus comme ça, c'est toute de la machinerie hautement sophistiquée. Si

on ne recycle pas ces gens-là, vous pensez qu'ils font quoi? De toute façon, s'ils essayaient de se recycler... J'ai une lettre aujourd'hui que je veux vous soumettre. Je ne savais pas ça, mais vous venez de donner cette belle instruction-là, dans vos directives concernant les règles budgétaires des commissions scolaires. Je viens d'apprendre qu'un adulte qui décide, compte tenu de !a carte des options professionnelles, d'aller prendre une option qui ne se donne pas dans sa commission scolaire, lui, il n'a pas le droit d'avoir une allocation comme s'il était considéré comme un étudiant à temps plein. Parce qu'il est adulte, il n'a pas le droit. Vos directives sont très claires: Pas question, tu n'auras pas d'aide à la pension, ça n'existe pas pour toi. Ça existe uniquement pour le jeune à qui on dit: Va prendre ta cuisine professionnelle à la commission scolaire Har-ricana, supposons, par rapport à Abitibi. Là, il y a une aide à la pension. Mais l'adulte qui fait la même chose et à qui on impose ça parce que c'est le choix qu'il a fait dans son recyclage professionnel, il n'est pas question d'aide à la pension. Ils viennent d'apprendre ça dans une directive que le ministre vient d'envoyer comme instruction aux commissions scolaires. Parce qu'il parle, de temps en temps, aux commissions scolaires.

Pour moi, ici, que le gouvernement du Québec perçoive un impôt spécial des grandes entreprises, oui, c'en est une solution, M. le ministre, parce que, quand tout le monde la répète, on ne peut pas être tous dans les patates, il y a toujours un bout! On ne demande pas de les étouffer, on leur demande une contribution de 1 % de plus. 1 %, en passant, sur la masse salariale, c'est à peu près 750 000 000 $ ou 720 000 000 $. Est-ce qu'on peut faire des choix de société majeurs et importants? Je comprends! Est-ce qu'on a les pinottes de 41 000 000 $ qu'on ne garantit même pas qu'ils vont pouvoir garder? Vous savez bien que la réponse, c'est non. Là, les 41 000 000 $... Il clenche les étudiants, mais il ne sécurise pas l'avenir du financement requis des universités. Tu n'as rien réglé parce que c'est parcellaire. Ça fait mal à ceux qui passent par là. Puis, le ministre dit: Non, moi, je ne peux pas garder une taxe de 1 %. Moi, je dis que, comme membres de cette société-là, vous avez le droit de le suggérer; je vous trouve originaux de le faire. Au cours des deux prochaines semaines, je vais répéter le même discours en espérant, des fois, qu'à force de tabler ou de frapper sur le même clou ou sur la même tête, il finit par entrer quelque chose. Et, dans ce sens-là, quand on aura fini d'entendre tous les mémoires, si tout le monde est venu nous dire que c'est une étape de solution, on aura acquis la conviction commune qu'on peut maintenir cette recommandation-là.

La recommandation 5. C'est rare que ça m'arrive, mais j'ai le droit d'avoir mes faiblesses, moi aussi... Je suis d'accord avec le ministre qu'à la recommandation 5, sérieusement, vous n'avez pas, selon moi, très bien analysé cette situation-là parce que, suggérer que le gouvernement du Québec incite les municipalités à payer davantage... J'aimerais ça vous entendre davantage tantôt. Je trouve ça compliqué, un petit peu inéquitable, pour toutes sortes de situations. Je pense à ma région parce qu'on connaît toujours mieux les nôtres. L'université est à Rouyn-Noranda, c'est censé être une université régionale. Comment Rouyn-Noranda accueillerait-elle l'invitation que vous lui faites de payer additionnellement parce que l'université d'Abitibi-Témiscamingue est située à Rouyn-Noranda? Je connais très bien le conseil de ville de Rouyn. J'ai l'impression qu'il y aurait quelques flammèches - excusez l'expression - et avec raison, parce que c'est un peu inéquitable par rapport au bassin. Eux, ils prétendent qu'ils contribuent beaucoup, parce que l'université est là, en termes de logements sociaux que ça a pris... Avec ce gouvernement-là, ça n'a pas aidé bien bien, tous les programmes d'habitation ont été coupés. Alors, même s'ils ont été obligés d'avoir de l'habitation additionnelle pour loger et offrir des alternatives à la résidence étudiante qui n'existe pas... Il y en a juste une toute petite et je pense qu'on l'a eue dans les années de Duplessis; on n'a pas eu d'aide gouvernementale depuis ce temps-là pour améliorer le logement étudiant. Alors, la ville de Rouyn a dit: Ce sont des rues, des services... Elle est obligée de contribuer, à même sa fiscalité municipale, pour offrir des services connexes adéquats aux étudiants universitaires. Donc, elle fait sa part. Cette recommandation-là ne m'apparaït donc pas véritablement souhaitable.

Même chose pour la recommandation 6. J'ai toujours été un régionaliste et je pense que pour aller dans le sens de la recommandation 6, la formule en est beaucoup plus une de financement qui tient compte des paramètres des régions, c'est-à-dire la dispersion, beaucoup de temps partiel, le redéploiement - il y a des coûts à ça - le support aux collectivités, une notion que je connais très bien. Dans les régions, nos universités ne font pas juste de l'enseignement et de la recherche, elles font également du support aux collectivités et le support aux collectivités, il coûte cher mais il n'est pas financé. Il n'y a pas un rond pour l'apport des universités régionales au support aux collectivités. Et, une formule de financement de type "Northern grant" de l'Ontario, je suis complètement d'accord avec ça. Mais il faudrait que le gouvernement, premièrement, l'impose et la fasse connaître. J'entendais le ministre, tantôt: Oui, mais ça, nous autres, on ne s'occupe pas de ça; on distribue l'enveloppe au siège social, à l'Assemblée des gouverneurs - que je connais bien - puis ce sont eux qui vont vous envoyer ça. Je peux vous dire que moi, ça fait cinq ou six fois que le nouveau recteur de l'Abiti-

bi-Témiscamingue, M. Arsenault, me rencontre et me fait part du sous-financement chronique de l'Abitibi. Il me fait part de ce qu'il a entendu dire comme inconvénients que ça créerait à notre université régionale et on n'a toujours pas touché cette supposée aumône, ce fric que le ministre aurait distribué à l'Assemblée des gouverneurs. Alors, j'ai hâte d'en voir une cenne ou deux. Je te dis que chez nous, ça n'a pas atterri bien, bien. (22 h 15)

Écoutez, encore là, je ne peux quand même pas vous poser bien des questions; le mémoire était très très clair. J'aimerais avoir quand même une réaction, à savoir pourquoi vous faites la recommandation 5, pourquoi vous y tenez. Mais globalement, il me semble que vous reprenez là des choses, en conclusion en ce qui me concerne, qui auraient comme conséquences d'explorer véritablement des pistes de solutions pour au moins avoir un règlement plus global de cette situation-là. Parce que, encore une fois, je me rappelle que vous mentionniez, avec ce que le ministre nous propose, compte tenu que ça aura une incidence sur les clientèles, que vous risquez effectivement, dans un an ou deux, de venir nous faire la preuve par quatre que non seulement ça n'a rien réglé, mais que ça a affaibli, ça a sous-financé additionnellement les universités par, bien sûr, une perte de clientèles... Puis, comme la règle principale pour obtenir du financement dans le milieu universitaire actuellement est basée sur les clientèles, s'il y a une baisse de clientèles, il va arriver ce qui est arrivé en 1987 avec eux autres. Je vous l'ai dit, je ne sais pas si vous vous rappelez: 1987, première année du régime libéral quand il y a eu des subventions aux nouvelles clientèles, ils les ont coupées de 13 000 000 $. Puis, j'ai les chiffres, c'était 36 000 000 $ en 1985-1986; je parle des nouvelles clientèles, première année du régime libéral, 27 000 000 $. C'est exactement ce qui va vous arriver. Ils vont dire: Écoutez, arrangez-vous avec ça. On n'aura rien réglé. J'aimerais ça avoir une réaction de votre part, M. Leblond ou M. Campagna, sur la recommandation 5.

M. Leblond: Sur la recommandation 5, vous comprendrez que c'est quand même une recommandation tout à fait originale, contrairement à ce qu'on a dit tout à l'heure et nous ne l'avons pas, peut-être, expliqué de façon très succincte. Je crois qu'on n'a pas à définir tout de suite et maintenant toutes les avenues et toutes les façons dont une université régionale peut être financée par son gouvernement régional, surtout quand son gouvernement national à Québec la sous-finance constamment. Je pense que les pouvoirs politiques régionaux devront réagir à ces pouvoirs centraux qui desservent trop souvent uniquement les centres urbains. Voilà pour la politique.

Je pense que le ministre a peut-être apporté un élément de solution, un élément de possibilité. Nous, on dit ici "qu'on incite", donc qu'on permette aux municipalités, premièrement, et ensuite qu'on leur dise: Allez-y. On l'a fait en France dernièrement. Ce n'est pas parce que ça se fait ailleurs qu'on devrait le faire, mais dernièrement, le ministre Bérégovoy a fait une rallonge de 500 000 000 de francs aux universités à la dernière minute. Qu'est-ce qu'il a dit: II a dit aux gouvernements régionaux et aux municipalités: Aidez-nous, on n'est plus capables. Alors, on pense que les gouvernements régionaux et les municipalités devraient pouvoir suppléer au gouvernement au niveau des équipements, des bâtisses. Des équipements scientifiques sont actuellement déficients, ça ne date pas d'aujourd'hui là. Ça fait quinze ans Je suis professeur de sciences moi-même, et on enseigne constamment avec des choses désuètes. On marche avec des bouts de corde et avec de la débrouillardise.

Donc, il faut faire appel à nos gouvernements régionaux pour se mettre sur la carte. Si on veut être compétitifs dans le système de libre-échange, non seulement faudra-t-il se battre pour avoir de bonnes universités et former nos gens, mais il faudra se battre aussi pour avoir des routes, pour sortir les gens de nos régions, il faudra se battre pour tout. Et je pense que de permettre à nos municipalités d'aider leurs universités, ce serait promouvoir le développement des régions qui, actuellement, vous l'avez vu dans notre mémoire, sont sous-scolarisées, sous-développées et il faudra, je pense, penser à des solutions alternatives. C'en est une, elle s'ajoute à celle concernant la taxation sur les entreprises. Nos entreprises québécoises n'ont aucune culture universitaire. Elles s'en mêlent des universités en disant, avec une bonne petite tape dans le dos: Cotisez les étudiants, nous on ne contribue pas. On contribue *rès peu aux fondations. On va donner des exemples des fondations, ces dernières années... Mais les entreprises ne sont pas intéressées du tout. Produisez-nous des gens très compétents, c'est la responsabilité de l'État. Pendant ce temps-là, nous, les universitaires, on voit qu'il y en a de l'argent partout, il y en a dans les municipalités, il y en a dans les poches des citoyens, il y en a beaucoup dans les poches des entreprises. Et on va s'empêcher de se développer au Québec, de devenir une véritable société distincte en plus, et non pas en moins, pour des questions financières. Alors, voilà notre réponse.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Leblond.

M. Gendron: Juste une phrase. Vous avez raison de dire: Regardez ça, suggérez ça. Sauf que donner l'exemple de la France! Ce n'est pas parce que je la connais à mort, mais j'ai ou

l'occasion d'aller dans la région de la Franche-Comté II y a une structure porteuse qui peut recevoir éventuellement ce que j'appellerais une commande comme ça, de faire un peu de redistribution de l'argent qu'ils reçoivent de l'État français central à leur université, parce qu'il y a des conseils régionaux partout. Le conseil régional de la Franche-Comté, à Besançon, pourrait dire: Dans l'enveloppe qu'on reçoit de l'État central, on en prend 8 %, 2 %, 0,25 % pour financer ou aider au financement de l'Université de Besançon. C'est un exemple. Nous, on n'est pas, je pense, rendus là avec la décentralisation gouvernementale, de pouvoir compter sur chacune des régions, sur une structure décentralisée qui a soit un pouvoir fiscal ou une enveloppe déconcentrée de l'État qui lui permettrait de faire sa part.

La Présidente (Mme Hovington): M. Cam-pagna.

M. Carnpagna: Mme la Présidente, M Roch Denis voudrait ajouter un court commentaire.

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, M. Denis.

M. Denis (Roch): Je voudrais faire une observation, sur un autre plan, au ministre. Même si, M. le ministre, vous arriviez à démontrer que la hausse des frais de scolarité n'aura pas d'impact négatif, significatif sur la fréquentation de la jeunesse québécoise aux études postsecondaires, je crois que vous ne devriez pas être insensible aux impacts de la hausse sur le rendement scolaire. Comme professeurs d'université, nous enseignons à des dizaines de milliers d'étudiants, tous ensemble, qui sont obligés, très souvent, pour subvenir à leurs besoins, pour payer leurs études, de travailler et nous voyons que cette situation a un impact négatif sur le rendement scolaire, sur les conditions dans lesquelles les étudiants doivent faire leurs études. La hausse, à mon avis, même si on ne discutait que des aspects économiques, va accroître cette espèce d'exigence négative, ce poids à porter aux étudiants pour les forcer encore davantage à travailler pour gagner leurs études et aura un impact, à mon avis, fort négatif sur le rendement scolaire, la qualité de la formation de la jeunesse québécoise pour la prochaine génération. Je voulais simplement livrer cette observation à votre attention.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Denis. Il vous reste deux minutes, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: J'aurais tant de commentaires. Alors, deux minutes pour une question, l'état du réseau. Peut-être que je vous inviterai un jour à réfléchir là-dessus. Vous êtes à la fin de la chaîne, il faudrait peut-être voir comment ça se passe au début. Actuellement, le réseau n'a jamais été dans un état aussi pitoyable et ça, c'est du primaire à l'université. Le taux de diplomation en chute libre... On n'a pas relevé le taux de diplomation au niveau collégial. Les équipements sont désuets. En matière de recherche, on s'était voté 60 000 000 $ au Fonds de développement technologique; on a réussi à en donner 6 000 000 $ à l'Agence spatiale; les universités, semble-t-il, n'étaient pas prêtes. L'apport du fédéral, en matière de recherche, on en a de moins en moins. L'enseignement secondaire professionnel en chute libre ou en déroute; là, il commence un petit peu à se rétablir, mais c'était la déroute. 10 000 inscriptions de moins par année pendant quatre ans. Des écoles confessionnelles qui rendent de plus en plus difficile l'accès des jeunes allophones à nos écoles françaises; ils s'en vont à la PSBGM. Les choix du ministre: les écoles privées, la dérogation, le dégel et l'enseignement catholique.

Vraiment, d'un bout à l'autre de la chaîne, il est en train de "scraper" le réseau, si vous me passez l'expression, et il trouve ça drôle. Le réseau n'a jamais été dans un aussi mauvais état. Alors, la réputation du ministre est surfaite. Malheureusement, on va s'en apercevoir ou les gens vont s'en apercevoir deux ou trois ans trop tard. Moins de diplômés, et il se trouve drôle; c'est avec ça qu'on est supposés relever le défi économique. Il se fait de moins en moins de recherche, il se trouve drôle; c'est avec ça aussi qu'on devrait relever le défi économique. Et au secondaire, il trouve ça drôle aussi, on est rendu à 62 % de diplomation; on est passé aux alentours de 75 % à 62 %. Chute libre également. Alors, pour aller à l'université, il faut encore qu'ils terminent leur secondaire. À l'éducation des adultes, c'est probablement là qu'il aura tapé de façon la plus dure et à tous les niveaux, de toutes les manières. Cherchez-en, il les a toutes inventées, y compris l'alphabétisation à un moment donné. J'espère que ça ne durera pas encore... Il dit qu'il ne sera peut-être pas là quand ça va s'appliquer, la formule de financement pour les universités en région. Je pense qu'on devrait, comme collectivité, se le souhaiter.

Une question: À combien évaluez-vous les économies que le gouvernement pourrait réaliser avec une diminution de clientèle de 5 %? J'ai essayé de faire un petit peu les calculs, c'est 6800 $ en moyenne par élève. 6900 $?

Une voix: 8900 $.

Mme Blackburn: 8900 $. Alors, ça peut faire des économies importantes. Oui?

M. Leblond: Les économies, pour 5 %, c'est...

Mme Blackburn: Et peut-être une deuxiè-

me...

M. Leblond:... 70 000 000 $, à notre avis. C'est-à-dire que nous, on pense que c'est beaucoup plus que ça. C'est au moins une chute de clientèle de 10 %. Pour le gouvernement, c'est sûrement une économie de 140 000 000 $, 140 000 000 $ de moins aux universités, mais plus 82 000 000 $ supposément des frais de scolarité. Qui perd gagne.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, c'est tout le temps que nous avions. Nous sommes rendus maintenant à la conclusion. Si vous voulez conclure, M. le député d'Abitibi-Ouest, rapidement.

M. Gendron: Oui, merci sincèrement d'être venus livrer votre réflexion, parce que votre réflexion, elle mérite, encore là, d'être appuyée sur des données que vous avez l'occasion de vérifier tous les jours. Moi, je pense que c'était quand même important qu'une question comme celle-là soit traitée. Peu importe la structure sous laquelle vous êtes regroupés, mais que des professeurs d'universités profitent de l'occasion pour dire: Nous, on pense qu'il y a un danger, là, important, majeur; on veut vous le signaler et, en plus de ça, on a des alternatives à vous proposer. C'était votre devoir de le faire, vous l'avez fait. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. M. le ministre, en conclusion. Vous ne voulez pas conclure, M. le ministre?

M. Ryan: Oui, oui, j'y pense avant.

La Présidente (Mme Hovington): Ah bon!

M. Ryan: II y a tellement de choses qui ont été dites, Mme la Présidente, que je voudrais faire centrer mon attention sur ce qu'il y a de plus significatif peut-être. Je pense bien qu'il n'y a personne qui prend au sérieux les propos hypocondriaques qu'on a entendus tantôt sur l'état présumé du réseau. Ceux qui suivent les choses de plus près savent très bien que les affirmations qu'on a entendues sont une déformation assez primaire de la réalité, en particulier en ce qui touche le réseau universitaire. Je pense que l'aide du gouvernement au réseau n'a jamais été aussi grande que depuis quatre ans au cours des quinze dernières années. Et surtout quand on fait partie du groupe qui a contribué à affamer les universités pendant neuf ans, on ne vient pas tenir des propos comme ça si on veut être pris au sérieux.

J'ajoute à l'intention des professeurs qu'il ne serait pas mauvais que les professeurs examinent leur propre statut à l'intérieur de l'université également, l'épongement qu'ils contribuent aussi à créer sur le financement universitaire. Je vous entendais, M. Leblond, dire: S'il y a une réduction de clientèle, le gouvernement va sauver 150 000 000 $. Vous savez bien que ce n'est pas comme ça que ça se passe. La plupart d'entre vous avez la sécurité d'emploi. Le gouvernement va être obligé de vous payer quand même, comme ça s'est fait dans les autres réseaux, si jamais il y a des diminutions de clientèle. Puis, quand on met des gens à la retraite à l'université, je n'ai jamais entendu parler qu'on les mettait à la porte purement et simplement, sauf les chargés de cours, ça c'est un cas particulier auquel les solutions doivent être apportées avec le temps. Mais l'étude que nous avons fait faire sur les chargés de cours a montré que le problème est bien plus limité qu'on ne l'a prétendu. Il affecte un certain nombre, une proportion, peut-être 20 % de l'ensemble, mais pas tout le monde.

On a fait faire une autre étude sur la tâche des professeurs d'université également. L'étude a révélé qu'en dehors des sciences pures - et ça, ça vous exclut, M. Leblond, tant mieux - la tâche de nos professeurs d'université est sensiblement inférieure à celle de la moyenne canadienne aussi. C'est un problème qu'il va falloir qu'on examine franchement.

Des voix:...

M. Ryan: Ah oui! Une variation de l'ordre de 15 % à peu près, qui est supposée être compensée par des réunions de ci et de ça. On a beaucoup de "comitites" au Québec.

Des voix:...

Une voix: Ce n'est pas le sujet à l'ordre du jour, des réunions de ci et de ça.

M. Ryan: Oui, oui. Nous allons en venir à cette question là. Nous allons l'examiner de front. Nous allons l'examiner franchement. Mais je vous le dis, là, si vous voulez interpeller le gouvernement, le gouvernement va vous interpeller en temps utile également. On va aller au fond des choses, dans tous les aspects du fonctionnement de l'université. C'est comme ça qu'on va mettre de la santé et de la vigueur dans nos universités, pas seulement en réclamant des augmentations de taxes. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M le ministre. Alors, au nom de tous les membres de cette commission parlementaire, permettez-moi de vous remercier et de remercier l'intersyndicale des professeurs des universités québécoises. La commission est ajournée a demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 30)

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