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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 1 mars 1990 - Vol. 31 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi n° 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants


Journal des débats

 

(Dix heures seize minutes)

La Présidente (Mme Hovington): Je demande aux membres de la commission de bien vouloir prendre place. La commission de l'éducation va entreprendre ses travaux. Je rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Maltais (Saguenay) remplace M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon); M. Poulln (Chauveau) remplace M. Parent (Sauvé).

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le secrétaire. Aujourd'hui, nous recevrons donc différents groupes. À 10 heures, c'est l'Association générale des étudiants et étudiantes du cégep de Lévis-Lauzon; à 11 heures, l'Association générale des étudiants et étudiantes du cégep de Tracy; à 12 heures, le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec; à 15 heures, l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels; à 16 heures, la Fédération des cégeps; à 17 heures, la Confédération des syndicats nationaux; à 18 heures, l'Association des syndicats de professionnelles et professionnels de collège du Québec.

Association générale des étudiants et étudiantes du cégep de Lévis-Lauzon

Alors, j'inviterais le premier groupe, l'Association générale des étudiants et étudiantes du cégep de Lévis-Lauzon à bien vouloir prendre place. Si vous voulez bien vous présenter, pour fins de transcription des débats.

M. Côté (Stéphane): Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre, membres de la commission. Je suis Stéphane Côté, le secrétaire général de l'Association. À ma droite, premièrement, c'est Hélène Saint-Pierre, attachée politique et, ensuite, Érick Daigneault, secrétaire à l'information.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue à la commission de l'éducation.

M. Côté (Stéphane): Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire.

M. Côté (Stéphane): D'accord.

La Présidente (Mme Hovington): Allez-y.

M. Côté (Stéphane): Je vais y aller avec la présentation. C'est avec une certaine joie que l'Association générale des étudiants et étudiantes du cégep Lévis-Lauzon, l'AGEECLL, présente son document à cette commission parlementaire sur les orientations gouvernementales concernant le régime de l'aide financière aux étudiants.

Notre intervention n'est pas le fruit du hasard. Vous vous rappellerez qu'à l'automne 1988 l'ANEEQ déclenchait, à la grandeur de la province, une grève générale devant la lenteur du ministre Ryan à déposer sa réforme sur les prêts et bourses. En ce qui nous concerne, le cégep de Lévis-Lauzon se limita à trois jours de grève. Par contre, l'exécutif de l'association étudiante recommandait à ses membres, lors de l'assemblée générale, la tenue d'une journée d'étude sur l'aide financière aux étudiants, à la session d'hiver 1989. Nous sommes fiers de mentionner que nous sommes la seule institution collégiale à avoir agi de la sorte. Cette journée, malgré une faible participation des étudiants, a quand même eu des résultats positifs sur les propositions qui ont vu le jour. Aussi, elle a permis une meilleure compréhension du régime. Nous tenons donc à remercier la DGAFE pour son excellente collaboration par le biais de ses fonctionnaires. Sans eux, cette journée n'aurait pas eu le succès escompté.

Mme Saint-Pierre (Hélène): Les propositions qui vous sont soumises dans ce document sont le fruit des réflexions de ladite journée. Il faudrait également mentionner qu'au cours de la session d'hiver 1989 quelques associations étudiantes se sont rencontrées dans le but de former un autre regroupement national étudiant. Malgré un certain échec, ces rencontres ont permis des discussions pertinentes concernant le régime de l'aide financière aux étudiants ainsi que des prises de position opportunes en ce qui concerne les réalités régionales.

D'ailleurs, à cet effet, il y a deux fins de semaine, le cégep de Lévis-Lauzon participait à une rencontre des cégeps de l'Est, à Rimouski, et la majorité des propositions qui sont amenées par notre association dans ce mémoire ont été entérinées par les cégeps de l'Est. Également, lors de l'assemblée générale mentionnée précédemment, les membres présents ont accepté par une forte majorité que l'exécutif de l'association étudiante présente ce mémoire à cette commission parlementaire, laquelle, à l'époque, on se rappelle, était une promesse du ministre de

l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Claude Ryan. C'est brièvement la raison de notre intervention ici, aujourd'hui.

M. Daigneauft (Érick): Cette commission parlementaire sur le régime de l'aide financière aux étudiants se veut pour fa masse étudiante, si tel est le désir de celle-ci, l'occasion de relever un défi important. En effet, il est essentiel que le discours véhiculé par les associations étudiantes, dont celle du cégep de Lévis-L»uzon, en soit un de gens responsables, c'est-à-dire un discours qui va vers les défis des prochaines années dans le milieu de l'éducation.

Qu'on le veuille ou non, les étudiants sont considérés comme les enfants gâtés du système. Mais la réalité est tout autre pour bon nombre de ceux-ci Nous en sommes venus à un tournant de notre société où il faudra davantage être performants et c'est à nous qu'il revient de préparer l'avenir, par le parler ou les agissements.

Mme Saint-Pierre: En tant qu'étudiants, nous avons un rôle social à jouer. Et c'est de concert avec les autorités - et ça, c'est très important - qu'il faudra créer un climat propice à la poursuite des études chez ceux qui nous suivent de près. Nous avons donc le défi aujourd'hui de proposer, suite à la lecture des orientations gouvernementales, des mesures qui ne feront qu'accroître l'accès aux études postsecondaires, tout en garantissant - et c'est vital pour la future génération - l'équité économique qu'elle a le droit de recevoir en tant qu'étudiante et consommatrice.

À la lecture des orientations du ministre Ryan, nous avons cm y voir un encouragement à la poursuite des études chez les étudiants chefs de famille. Certes, c'est déjà une approche sensible de celui-ci aux futures réalités, mais il serait possible de faire encore mieux. Avec la décision de votre gouvernement de hausser les frais de scolarité de 130 % en deux ans au niveau universitaire, cela remet en cause le principe de l'accessibilité aux études postsupérieures pour la classe à moyen revenu. Hausser les frais de scolarité pour garantir des revenus légèrement plus élevés aux universités et non pour financer complètement l'achat de matériel adéquat, nous, on trouve que c'est un petit peu fuir la réalité. D'ailleurs, cela fera l'objet, plus loin dans notre document, d'une critique.

M. Côté (Stéphane): Ce que nous reprochons dans l'ensemble à ce que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science propose, c'est l'oubli total des situations économiques et sociales des différentes régions du Québec - les disparités - ainsi que des mesures législatives afin de garantir aux étudiants bénéficiaires du régime de recevoir les contributions parentales telles que calculées par la DGAFE; c'est un gros point. Dans un premier temps, nous analyserons les propositions qui nous semblent peu adéquates. Deuxièmement, nous vous soumettrons certaines propositions qui nous semblent essentielles pour l'amélioration du système de l'aide financière aux étudiants. Et, pour finir, nous vous ferons part de nos interrogations et inquiétudes quant à l'avenir de l'éducation au Québec.

M. Daigneault: Nous espérons que les membres de cette commission tiendront compte des propositions et des suggestions contenues dans ce document. La plupart des étudiants ne sont plus les illuminés d'autrefois, n'est-ce pas? Nous sommes aptes à porter un jugement réaliste sur la société d'aujourd'hui et celle de demain, car nous y sommes directement impliqués, et surtout parce qu'il nous reviendra un jour de refaire ou de détruire ce qui nous semblera mauvais ou juste

Mme Saint-Pierre: Maintenant, en ce qui concerne les critiques des recommandations, nous suggérons des modifications à certaines des propositions émises dans le document des orientations gouvernementales, et les propositions dont nous ne parions pas sont jugées satisfaisantes par l'Association étudiante.

À la recommandation 8 du ministre, il est proposé de ne pas prendre en compte les ressources provenant d'allocations à la naissance ni celles du programme d'allocations mensuelles aux enfants d'âge préscolaire Nous, tout ce qu'on propose, c'est de rajouter, en plus, les crédits d'Impôt pour enfants et les allocations familiales, c'est-à-dire qu'ils ne soient pas comptés dans les déductions pour les dépenses admises.

M. Daigneault: A la recommandation 11 du ministre, il est proposé de demander une contribution minimale au candidat qui effectue un retour aux études après avoir été deux ans sur le marché du travail, comme ça est demandé à tous les étudiants. Nous modifions la proposition comme ceci: II est proposé de demander une contribution minimale au candidat indépendant qui demeure chez ses parents et qui effectue un retour aux études après avoir été deux ans sur le marché du travail, comme cela est demandé à tous les autres candidats.

M. Côté (Stéphane): Pour ce qui est de la recommandation 14 du ministre, il est recommandé d'allouer à l'étudiant qui demeure chez ses parents, à l'égard de ses frais de transport, un tarif simple de 10,50 $ par semaine pour celui qui se voit actuellement reconnaître cette dépense, et un tarif double de 21 $ par semaine pour les autres. Ce que nous proposons, c'est le retrait simplement de cette recommandation.

Mme Saint-Pierre: À la recommandation 15, il est proposé de rembourser aux bénéficiaires de

bourses les frais reliés à l'achat d'orthèses visuelles jusqu'à concurrence de 175 $ par étudiant et par enfant d'étudiant. L'aide offerte ne sera accessible à chacun qu'à tous les deux ans. Nous, ce que nous proposons, c'est de rajouter en plus les frais dentaires pour les boursiers jusqu'à concurrence de 100 $ par année d'études, parce que c'est un minimum que la DGAFE pourrait consentir pour de nombreux étudiants, en plus des orthèses visuelles.

M. Daigneault: À la recommandation 16, il est recommandé de retirer la prime de 22 $ par semaine au budget du candidat qui a été sur le marché du travail, lorsque ce dernier pendant ses études réside chez ses parents. Nous proposons simplement, également d'ailleurs, le retrait de cette recommandation.

M. Côté (Stéphane): En ce qui concerne la recommandation 17 du ministre, il est recommandé d'instituer un comité d'appel formé de quatre représentants des services aux étudiants en établissement, de quatre personnes en provenance du grand public, ainsi que de quatre étudiants, tous nommés par le ministre responsable. Nous suggérons d'instituer un comité d'appel par région, formé d'un représentant des services aux étudiants en établissement, d'un représentant du grand public, d'un étudiant, chacun nommé par le ministre responsable, bien sûr, en plus d'un comité national formé de deux représentants des services aux étudiants, d'une personne du grand public ainsi que de deux étudiants.

Mme Saint-Pierre: À la recommandation 18, il ' est proposé d'offrir une bourse à l'intention des étudiants universitaires à temps partiel inscrits à deux ou trois cours par session. L'aide sera modulée en fonction des revenus de l'étudiant et de ceux de ses parents ou de son conjoint. L'allocation couvrira les frais de scolarité, de matériel scolaire, de transport et les frais de garde. L'aide sera limitée à cinq sessions. Nous, ce qu'on dit, c'est: Pourquoi ne serait-ce pas offert également au niveau collégial? Nous rajoutons "pour les étudiants de niveau collégial professionnel et que cette aide soit limitée à trois sessions au niveau collégial."

M. Côté (Stéphane): À la recommandation 19 il est proposé d'accorder une remise de 25 % de la dette contractée à l'intérieur du régime des prêts et bourses, durant les deuxième et troisième cycles d'études universitaires, à l'étudiant qui aura complété son programme dans les délais prescrits. Nous suggérons de rajouter que ce soit la même chose, une remise, par contre, de 15 % de la dette contractée, au niveau collégial professionnel à l'étudiant qui aura complété son programme dans les délais prescrits.

Mme Saint-Pierre: Alors, voilà en quoi consistent nos modifications aux différentes recommandations du ministre dans les orientations gouvernementales sur l'aide financière aux étudiants. Nous croyons sincèrement que ces ajustements aux propositions émises sont plus qu'essentiels pour une meilleure équité économique non discriminatoire des différentes clientèles. Dans son document, le ministre a oublié plusieurs aspects que nous jugeons importants pour l'avenir de l'éducation dans les prochaines années. C'est pourquoi, dans le deuxième volet de ce mémoire, nous faisons part au ministre et aux membres de cette commission de certains ajustements qu'il serait important d'apporter à l'aube des années deux mille.

M. Daigneault: Les propositions qui vont suivre dans cette deuxième partie sont évidemment axées sur de nouvelles réalités socio-économiques du Québec pour la prochaine décennie. La dernière réforme majeure du régime des prêts et bourses a eu lieu en 1974. Certes, au fil des années, le ministère de l'Éducation a apporté des modifications ponctuelles au régime pour faire face à de nouvelles réalités sociales et économiques. Cette réforme, on le sait, était attendue depuis plus de quatre ans par la population étudiante du Québec. Nous avons cru que le ministre de l'Éducation aurait une vision vers l'avenir en élaborant sa réforme, mais ce n'est pas tout à fait le cas. Certes, plusieurs propositions aideront une certaine clientèle à poursuivre des études collégiales et d'autres, des études universitaires.

M. Côté (Stéphane): On le sait, le Québec a connu une certaine amélioration de sa situation économique et ce, au milieu des années quatre-vingt. Cependant, certaines régions de la belle province ont fait face à un dépeuplement massif. On pense ici à la Côte-Nord du Québec, entre autres, qui a dû faire face à un ralentissement économique important. Des villes en pleine effervescence au milieu des années soixante-dix sont devenues des ghettos où la population restante est liée de façon émotive à ce coin de pays. L'économie du Québec repose donc essentiellement sur les centres urbains au détriment des régions riches en main-d'oeuvre spécialisée et en usines abandonnées. Les jeunes surtout n'échappent pas à cette ruée urbaine. Ils poursuivent leurs études dans les grands centres et ne reviennent que trop rarement à leur lieu d'origine une fois les études complétées. Pourtant, les régions ont besoin de cette jeunesse pour pouvoir continuer à offrir des services de base essentiels à la population restante. C'est sur ces réalités que nous désirons élaborer et les propositions que nous soumettons dans les prochaines pages ne relèvent pas de la fiction. Bien entendu, certaines d'entre elfes ne pourront être incluses pour l'année d'attribution 1990-

1991. Mais si le désir premier du ministre de l'Éducation est de penser à l'avenir, ce que nous espérons, il trouvera sûrement quelques propositions intéressantes à faire analyser par les fonctionnaires de la DGAFE. De plus, cette instance gouvernementale doit agir dans les prochaines années afin d'inciter les étudiants finissants des universités et même ceux du collégial professionnel à participer à la relance économique des régions éloignées du Québec.

Mme Saint-Pierre: Alors, en ce sens, la première proposition que nous désirons amener est la suivante: Nous proposons d'accorder une remise de 50 % de la dette contractée à l'Intérieur du régime de prêts et bourses à l'étudiant finissant qui s'engage à travailler dans son domaine d'études en région éloignée pour une période minimale de trois ans et maximale de cinq ans. (10 h 30)

M. Oaigneautt: Dans un second temps, nous proposons d'abolir la prime d'éloignement de 400 $, sauf aux étudiants qui choisissent un programme d'études non dispensé dans l'université ou le collège le plus proche de leur lieu de résidence.

Mme Saint-Pierre: Nous proposons, dans un troisième temps, que la DGAFE entreprenne une vaste étude socio-économique des différentes régions du Québec avec la collaboration des responsables de l'aide financière des institutions collégiales et universitaires et que, suite à cette étude, la DGAFE procède à des bonifications des dépenses admises, s'il y a lieu, en tenant compte des réalités économiques des différentes régions.

M. OaigneauK: Nous proposons également que le ministère de l'Éducation, en collaboration avec les institutions d'enseignement, établisse le coût réel par programme d'études et que celui-ci soit réévalué à tous les deux ans.

M. Côté (Stéphane): Nous proposons aussi d'augmenter de 6 % le total des dépenses admises pour l'année d'attribution 1990-1991 et, par la suite, d'augmenter ces dernières annuellement, selon l'indice du coût de la vie.

M. Daigneault: Nous proposons que le régime des prêts et bourses accorde au bénéficiaire ayant plus d'un enfant à sa charge une prime supplémentaire pour le logement.

M. Côté (Stéphane): Nous proposons que la DGAFE entreprenne une étude dans le but d'établir un mode de versement de la contribution parentale, et ce, sans nuire à l'unité familiale bien sûr, et surtout de connaître les moyens réels de payer des parents.

Mme Saint-Pierre: Nous sommes de ceux qui croient que le régime d'aide financière doit permettre à une certaine clientèle de poursuivre des études supérieures et, en ce sens, nous pensons qu'il est important que le financement des universités ne devienne pas uniquement l'affaire des étudiants. L'État a un rôle à jouer, ainsi que les entreprises qui bénéficient du service des étudiants comme travailleurs à la fin de leurs études. Le financement des universités est une affaire de société, comme le choix de l'universalité des programmes sociaux. L'État a plusieurs possibilités afin de diminuer un déficit ou d'y remédier. La solution la plus facile est de taxer la classe moyenne au détriment de ses revenus. Nous ne possédons pas de solution miracle, mais nous croyons que d'autres avenues peuvent être exploitées pour le financement des universités.

M. OaigneauK: Pour ce qui est des perspectives futures, dans le dernier volet de notre mémoire, il s'agit d'un hymne à la reconnaissance du statut étudiant. C'est également un plaidoyer en faveur de l'accessibilité à l'éducation au Québec. C'est une constatation alarmante sur la vie sociale au Québec pour la prochaine décennie.

Il n'est pas nécessaire de faire un historique des conditions sociales au Québec depuis la Révolution tranquille pour comprendre que celui-ci entre dans une phase difficile en ce qui a trait à de nombreux acquis sociaux. Depuis quelques années, on assiste, impuissants, à une détérioration globale du système de l'éducation, des services de santé, de la baisse de la natalité. Nous sommes en droit, en tant que futurs travailleurs et administrateurs, de considérer l'avenir avec scepticisme. Nous pouvons nous questionner sincèrement sur les intentions des administrateurs gouvernementaux, avec quelques frissons. La société bâtie à grands coups de gratuité, de droits fondamentaux, s'effondrera plus rapidement que sa création entreprise il y a 30 ans.

M. Côté (Stéphane): Les heureux bénéficiaires des réformes sociales des années soixante et soixante-dix, par leur consommation désabusée, ont hypothéqué l'avenir. La gratuité scolaire au Québec a fait en sorte que les institutions d'enseignement se remplissent à leur pleine capacité, et cela a permis à ce même Québec de mieux concurrencer les autres provinces canadiennes, notamment l'Ontario, au niveau du nombre de finissants universitaires. Toute une génération, pour ne pas dire deux, a profité avec largesse des mesures de gratuité. Le prêt étudiant a augmenté plus vite que le coût de la vie, et les emplois ont diminué en même temps que le chômage a augmenté. Tout a augmenté, alors que les chances pour l'étudiant de se trouver un emploi dans son domaine d'études ont chuté de façon dramatique. Ils sont nombreux, ceux qui ont des diplômes et des baccalauréats et

qui travaillent dans des domaines pour lesquels Bs n'auraient pas eu besoin de s'endetter.

Mme Saint-Pierre: Dans la Déclaration des droits de l'homme, n'est-il pas dit que le droit à l'éducation est une chose fondamentale? Certes, il n'est pas question de gratuité, mais en augmentant de 130 % les frais de scolarité à l'université en deux ans, vous imposez aux 16-25 ans et à ceux qui désirent se spécialiser un choix qui n'est pas nécessairement le leur. Ils sont sûrement nombreux ceux qui remettront en cause le choix de leurs études, le choix de leur carrière. Déjà, le réseau de l'éducation québécois est déficient. Trop de programmes d'études dispensés au collégial et à l'université ne répondent plus aux besoins des petites et moyennes entreprises. Cela diminue déjà les chances pour l'étudiant de se trouver un emploi à la fin de ses études.

Dans un avenir rapproché, l'État, les entreprises et les étudiants devront trouver les moyens de travailler ensemble afin que le Québec puisse relever le défi de l'aventure économique mondiale. Les entreprises québécoises doivent investir, et nous insistons sur ce fait, dans les cerveaux étudiants, afin de devenir les centres nerveux d'une meilleure formation académique. Les étudiants et l'État seront les premiers gagnants de cette façon de procéder, puisque le Québec deviendra un peu plus, sinon très compétitif sur le plan des échanges économiques mondiaux.

M. DaigneauH: Donc, notre pensée sur la hausse des frais de scolarité est que l'État, les entreprises et les étudiants doivent participer pécuniairement, selon les moyens de payer de chacun, à la formation et à l'amélioration du réseau universitaire québécois. En ce sens, nous demandons au gouvernement de revoir de manière objective ses décisions et recommandations quant à l'accessibilité aux études supérieures dans le seul et unique but de ne pas hypothéquer aveuglément et de manière irresponsable l'avenir d'une jeunesse qui ne demande qu'à contribuer et à participer à la vie économique active du Québec par son dynamisme.

Nous comprenons que la hausse des frais de scolarité est devenue nécessaire, mais l'État et les entreprises doivent faire leur part autant que les étudiants afin de rendre les études supérieures accessibles et rentables pour l'ensemble de la communauté québécoise.

Mme Saint-Pierre: Alors, considérant que la hausse des frais de scolarité de 130 % en deux ans, au niveau universitaire, risque de nuire à l'accessibilité aux études supérieures...

M. Côté (Stéphane): Considérant que l'État doit investir dans la recherche et le développement de son réseau universitaire...

Mme Saint-Pierre: Considérant les perspectives économiques plutôt sombres des prochaines années...

M. Côté (Stéphane): Considérant que le Québec doit se tailler une place dans le domaine du marché économique mondial...

Mme Saint-Pierre: Considérant que les entreprises sont celles qui ont le plus à gagner dans un investissement à long terme dans les universités...

M. Côté (Stéphane): Considérant qu'il est encore temps pour l'État québécois de créer une interdépendance État-entreprises-étudiants pour mieux former la jeunesse au monde du travail...

Mme Saint-Pierre: Considérant la capacité de payer des entreprises québécoises dans le financement des universités et considérant le devoir de l'État d'investir dans sa jeunesse...

M. Côté (Stéphane): Nous proposons que le gouvernement du Québec reconsidère sa position d'augmenter les frais de scolarité de 130 % en deux ans. Nous proposons que l'État et les entreprises collaborent ensemble dans le but de créer des programmes axés sur la formation fondamentale indispensable aux divers besoins en main-d'oeuvre des petites et moyennes entreprises... Finalement, nous proposons que les étudiants participent à la hausse des frais de scolarité dans un pourcentage non nuisible à l'accessibilité pour eux aux études supérieures. À ces conditions, l'AGEECLL est en faveur de la hausse des frais de scolarité.

M. Daigneault: En terminant, nous voulons mentionner à cette commission parlementaire et surtout au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, en l'occurrence M. Claude Ryan, notre bonne volonté et nos efforts pour contribuer à l'accessibilité de l'éducation au Québec et à l'amélioration du régime de l'aide financière aux étudiants. Nous espérons que nos recommandations, nos suggestions et nos questions relativement à l'avenir de la génération étudiante présente et future du Québec trouveront une oreille attentive.

Nous souhaitons également que le ministre de l'Éducation prenne en considération que la hausse des frais de scolarité prévue est exhaustive et risque de mettre en péril l'accès à l'université à de nombreux étudiants et que sa répartition en quatre ans serait moins difficile à assumer pour l'ensemble des étudiants du Québec. Nous pouvons, en tant qu'étudiants, mieux comprendre les besoins de cette masse sociale bien au-delà de la paperasserie administrative du gouvernement qui, semble-t-il, est détaché, sans môme en prendre conscience, des réalités so-

ciales. En vous remerciant pour votre attention, nous-mêmes, représentants de l'AGEECLL inc.

La Présidente (Mme Hovington): Merci de votre présentation. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. Si j'étais un journaliste chargé de suivre !as travaux de la commission parlementaire autour du projet de loi 25, je n'éprouverais aucune hésitation à écrire que le mémoire dont on vient de nous communiquer la teneur est l'un des plus étoffés, des plus sérieux qui ont été soumis à l'attention de la commission depuis le début. Je voudrais vous en remercier très cordialement et surtout vous exprimer mon appréciation pour le sens des responsabilités dont votre mémoire témoigne du début à la fin.

À la fin, vous émettez des réserves importantes au sujet du taux arrêté par le gouvernement pour la hausse des frais de scolarité. Je reconnais parfaitement votre droit à la légitime dissidence sur un point comme celui-ci, mais vous l'exprimez d'une manière tellement digne et responsable que je ne puis faire mieux que de vous adresser tout de suite une question à ce sujet-là. Même si, comme je l'ai dit hier, la décision est arrêtée - elle a été prise au mois de décembre par le gouvernement et s'appliquera à partir du mois de septembre - j'aimerais quand même que vous me disiez... Vous trouvez que la hausse est forte. Vous auriez aimé qu'elle soit dosée autrement. Est-ce que vous pourriez nous indiquer quelle aurait été pour vous une hausse raisonnable à un double point de vue, du point de vue des besoins de notre système d'enseignement qui a besoin de ces revenus additionnels et, deuxièmement, du point de vue de la possibilité de payer de l'étudiant?

Mme Saint-Pierre: Premièrement, ce que l'on déplore un petit peu dans votre décision de hausser les frais de scolarité de 130 % en deux ans, c'est que la masse étudiante n'a pas été consultée comme telle. Nous, dans le fond, ce que l'on propose dans notre mémoire, ce que l'on voudrait que ça devienne, finalement, c'est une collaboration étudiant-entreprise État, selon la capacité de payer de chacun. De 130 % en deux ans, on l'a dit, ça peut monter jusqu'à 1280 $ d'ici à 1992. C'est sûr que les étudiants travaillent un petit peu plus pendant les périodes d'été, les revenus sont un petit peu plus élevés, beaucoup d'étudiants travaillent à temps partiel, mais peut-être que si la hausse avait été de 80 % à 100 % en deux ou trois ans, ça aurait donné une chance aux étudiants d'essayer de trouver des moyens de financement pour les universités. Ça aurait peut-être permis une collaboration qui aurait pu amener les entreprises à dire: Boni Oui. nous avons un rôle social à jouer. Nous sommes prêts à investir dans les entreprises et ça se chiffre à tant de millions ou de milliers de dollars par année.

Alors, c'est ça. C'est qu'on aurait aimé être consultés en tant qu'étudiants. Je pense qu'on en a, des idées, pour l'avenir, je pense que ça aurait pu être intéressant que le gouvernement...

M. Ryan: En tout cas...

Mme Saint-Pierre: ...nous pose des questions.

M. Ryan: ...si j'en juge d'après la teneur de votre mémoire, nous aurons intérêt à vous consulter de nouveau, à l'avenir.

Mme Saint-Pierre: On est toujours disponibles.

M. Ryan: Je le dis en toute simplicité. J'ai remarqué que votre mémoire est divisé en deux parties. Vous avez des remarques ponctuelles, dans la première partie, qui traitent directement des énoncés formulés dans le document publié par le gouvernement en avril dernier. Mon collègue, le député de Vimont, vous adressera quelques questions à ce sujet, tantôt.

Je voudrais commenter brièvement, peut-être, la deuxième partie de votre mémoire où vous formulez des propositions inédites par rapport au contenu de l'énoncé d'orientation et du projet de loi. Vous demandez, tout d'abord, qu'on envisage des mesures spéciales pour favoriser les étudiants en région éloignée. Vous demandez, entre autres, qu'on envisage la possibilité d'une remise de dette pour l'étudiant qui s'engage à rester dans sa région pendant une certaine période. L'Université du Québec à Rimouski a déjà présenté des Idées semblables à la commission Nous avons dit que nous étions pour les examiner attentivement. Alors, je vais vous dire la même chose ce matin.

Ce n'est pas facile, nous le faisons pour les médecins. Aux médecins que nous voulons envoyer en région nous donnons une prime, je pense, de 20 %. Alors, il y a quelque chose à regarder de ce côté-ci. J'ai parié tantôt au directeur de l'aide financière aux étudiants qui nous accompagne à cette commission. Il dit qu'on va essayer de regarder ça de plus près. Je n'ai pas d'autres commentaires à vous dire. Ce n'est pas facile à contrôler, c'est l'établissement d'un mécanisme de contrôle qu'il faut trouver. Parce que, si on veut que la mesure soit efficace, il faut qu'on puisse l'assortir des vérifications nécessaires. En tout cas, cela étant dit, je pense que c'est intéressant.

Vous pariez de la prime de 400 $. Peut-être que vous pourriez nous expliquer un petit peu ce que vous envisagez là-dessus. Vous voulez qu'on supprime la prime actuelle et qu'on la réserve pour l'étudiant qui va dans le collège de sa région, à moins qu'il ne doive s'éloigner parce

qu'H y aurait un programme qui ne serait pas disponible chez lui?

Mme Saint-Pierre: Oui, justement. C'est que, selon vos statistiques, cette prime représente environ 3 000 000 $ qui sont versés sous forme de bourses et 500 000 $ qui sont versés sous forme de prêts. C'est que bien souvent, justement, toujours dans le souci de garder les étudiants un peu dans leur région, ce que nous, on ne trouvait pas normal, un petit peu, c'est que les étudiants qui venaient du Saguenay-Lac-Saint-Jean puissent venir, comme ça, étudier à Lévis-Lauzon, etc., que ce soient des gens de Rimouski qui puissent venir étudier ici. Nous, ce qu'on veut tout simplement, c'est que les étudiants s'éloignent de leur région seulement si le programme n'est pas dispensé dans la maison d'enseignement la plus proche, pour dire que c'est important que les étudiants restent dans leur région.

M. Ryan: Très bien. Je continue brièvement. Vous demandez que le niveau des dépenses admissibles soit ajusté en tenant compte de l'évolution du coût de la vie. Vous demandez, à un moment donné, qu'on ajoute 6 % annuellement. Est-ce que ça serait en plus de l'indexation, ça, 6 %, ou bien si c'est votre évaluation de l'indexation? (10 h 45)

Mme Saint-Pierre: Bon. Lorsqu'on regarde les dépenses admises, de 139,45 $, si on compare au salaire minimum qui est de 5 $ l'heure, ça fait 3,82 $ l'heure et, 6 %, c'est quand même un mimimum; je pense que ça représente environ 6 $ ou 7 $ de plus par semaine. Ce serait important, je crois, quand on pense à différentes clientèles, entre autres, les familles monoparentales qui ont le même montant de dépenses admises que l'étudiant qui est indépendant auprès du régime des prêts et bourses. Alors, 6 %, ça représente environ 6 $ ou 7 $, et qu'il soit indexé chaque année, selon le coût de la vie; si le coût de la vie est à 5 %, qu'il soit indexé de 5 %.

M. Ryan: Très bien.

Mme Saint-Pierre: C'est une mesure qui représente environ, d'après nos légers calculs, 18 000 000 $, approximativement.

M. Ryan: Très bien. Si on mettait le 6 % brut, c'est 22 000 000 $, d'après nos calculs à nous autres. Ça ne veut pas dire qu'entre 22 000 000 $ et zéro il n'y a pas de l'espace à explorer, parce que l'idée en soi est très défendable et on va l'étudier.

Vous demandez que des études soient fartes sur les coûts comparés, suivant qu'on étudie dans une région ou dans une autre. Ça, il y a déjà des études qui se font continuellement à ce sujet par l'Office de planification et de développement du Québec. Quand on arrive à considérer la possibilité de régionaliser les prestations, c'est très difficile. Jusqu'à maintenant, le gouvernement n'est pas entré dans cette voie-là, on l'a discutée à plusieurs reprises, à propos du salaire minimum, à propos de l'allocation de logement qui est versée aux assistés sociaux, à propos des allocations sociales également. Il y a des obstacles qui sont insurmontables jusqu'à ce jour. Parce que les formules de remplacement sont toutes assorties d'imperfections. Je vous assure qu'on porte une grande attention aux différences qui peuvent exister dans le niveau de développement économico social d'une région à l'autre, mais quand arrive le moment de traduire les constatations que nous faisons dans les politiques de redistribution du revenu, c'est extrêmement difficile. On n'a pas trouvé de solution encore. J'enregistre ici et je ne peux pas vous laisser entrevoir des choses à court terme parce que c'est très difficile.

Je termine. Un autre point: vous demandez qu'on fasse des études sur les coûts réels des programmes. Ça, déjà, des travaux sont commencés avec... On a un comité des personnes-ressources qui travaille en collaboration avec la Direction de l'aide financière aux étudiants. Je vous assure qu'on va pousser sur ces travaux-là, vous soulevez un point qui est très pertinent.

Je termine là-dessus, Mme la Présidente, parce que je voudrais donner à mon collègue de Vimont l'occasion de s'exprimer aussi. J'ajouterai peut-être un point, c'est que j'ai eu vent qu'avant de vous engager dans toutes ces choses-la vous avez pris soin de vous renseigner aux sources compétentes. Vous avez pris soin, dès l'année dernière, d'aller chercher des renseignements avant de partir en campagne. Je pense que ça vous a permis d'acquérir une masse d'information et une compréhension du régime qui vous donne une bonne distance par rapport au gouvernement, distance critique nécessaire et très appréciée, en même temps qui nous invite à prendre au sérieux vos représentations. Alors, je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député de Vimont.

M. Fradet: Merci, Mme la Présidente. Je tiens aussi à vous féliciter pour la qualité de votre mémoire. Je pense qu'il y a plusieurs recommandations dans votre mémoire dont il va falloir tenir compte dans le régime d'aide financière.

M. Ryan a parié de votre première recommandation. Je pense, moi aussi, que c'est une recommandation qui est louable. On la vit déjà dans le système de la santé. J'aurais juste une question à ce sujet-là. Dans le système de la santé, nous, on a fait ça, je pense, parce qu'il y avait une pénurie de main-d'oeuvre en région. Je voudrais juste vous demander: Est-ce que vous

savez si, présentement, il y a des pénuries de main-d'oeuvre dans certains domaines, avec lesquels on pourrait travailler pour ce régime là, ou s'il y a une pénurie d'emplois et que les jeunes n'auraient pas plus d'emplois s'ils demeuraient en région?

Mme Saint-Pierre: Ce n'est pas facile de répondre à ça. Moi, de la façon que je le conçois, c'est qu'il y a des CLSC un peu partout, ça peut être des écoles, ça peut être des médecins, ça peut être des professionnels; par contre, ça peut être de la main-d'oeuvre spécialisée également. Quand on pense à des villes comme La Tuque, quand on pense à des villes comme Schefferville, il ne faut quasiment plus en parler, mais il y a quand même... Que ce soit Gaspé.. On voit souvent des annonces: Demande de personnel, des infirmières. Beaucoup de personnes n'osent pas s'en aller en région, justement, parce que c'est trop loin, c'est loin de tout, c'est loin de la famille, etc. Peut-être qu'avec un programme comme celui-là, ça favoriserait l'implantation de certaines personnes dans les régions et recommencer un niveau économique.

M. Fradet: Je ne nie pas ça du tout, ce que je voulais juste savoir, c'est si vraiment il y avait... C'est parce que cette mesure-là, c'était pour vraiment combler le manque de main-d'oeuvre en région, et puis s'il n'y a pas vrai ment... Je ne sais pas, je ne suis pas en région mais, s'il n'y a pas vraiment un manque de main-d'oeuvre, on aurait une mesure qui inciterait les jeunes à demeurer chez eux, mais il n'y aurait pas d'emploi à remplir. C'était juste ça, le but de ma question.

Ensuite, vous avez une autre recommandation, vous parlez des côuts réels. Je pense que c'est la deuxième fois que j'entends ça. Le collège de Drummondville, hier, je crois, le cégep de Drummondville nous a présenté un mémoire, nous a parlé de ça aussi. Je pense qu'il arrive qu'il y ait des différences de coûts, mais il y a une chose que je peux vous dire là-dessus, c'est que ce dont le ministère tient compte dans ses démarches, dans ses demandes d'aide financière, c'est ce que l'institution scolaire lui fournit comme coût réel. Je pense que, oui, il y a peut-être des problèmes, là; on parlait d'exemples avec la photographie, puis ces choses-là Je pense qu'il va falloir regarder ça attentivement. Il y en avait une autre où je voulais...

Vous parlez de la contribution parentale, à votre recommandation 8: "...la contribution parentale sans nuire à l'unité familiale et surtout de connaître les moyens réels de payer des parents." Je pense que, dans la réforme qu'on fait présentement, on va tenir compte de ça. Il faut dire tout de suite en partant qu'une contribution parentale, ça peut être de deux sortes: on a une contribution monétaire, puis on a une contribution, soit le loyer ou la nourriture. Je pense que ce que vous voulez dire dans ça, c'est la contribution monétaire. Oui, on en a tenu compte, je pense qu'on a diminué la contribution monétaire des parents ou on va diminuer la contribution monétaire des parents II y a eu aussi plusieurs propositions, dans d'autres mémoires qui nous ont été présentés, comme: envoyer une lettre aux parents pour leur mentionner le montant qui a été retenu, la contribution qu'ils doivent verser à leurs enfants, qui a été retenue dans le calcul de l'aide financière; je pense que ça, c'est une autre mesure qui est très importante. Sur ce, je pense que vous avez des éléments qui sont très louables et sur lesquels on va se pencher pour la réforme, et puis on va regarder ça ensemble. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.

M. Gendron: Alors, bonjour, les jeunes du cégep de Lévis-Lauzon. Je veux vous féliciter, vous aussi, d'avoir pris cette initiative. Je pense que c'est toujours rafraîchissant et intéressant de voir des jeunes qui s'intéressent à des questions d'avenir, questions fondamentales pour une société, comme les questions éducatives. C'est toujours un peu également votre responsabilité de ne pas rater le moment où on peut avoir l'occasion de vous entendre, d'entendre vos réflexions et de voir là qu'il s'agit, pour vous, d'un sujet d'intérêt important, puisque c'est un peu votre avenir qu'on discute, et un peu pas mal votre avenir. Donc, votre mémoire, je pense qu'il est bien fait, il tient compte à peu près de la plupart des revendications qui ont été faites par d'autres. C'est sûr qu'à partir du moment où vous indiquez que la plupart des étudiants d'aujourd'hui ne sont plus les illuminés d'autrefois, ça ne nous fait pas bien bien une belle jambe, pour employer une expression à la mode, admettons que ça ne nous fait pas une belle jambe, mais ce n'est pas grave, on dit: Ça doit être l'autre génération, la génération du ministre de l'Éducation et non pas la mienne. Donc, je ne vous en sais pas gré, je ne vous en fais pas gré, je suis de bien bonne humeur, et on passe outre à ça.

Si on avait à évaluer les principaux éléments de votre mémoire, en gros, il y a trois propositions là-dedans, trois sections majeures. Une première, c'est l'analyse des propositions que vous considérez comme inadéquates et injustes par rapport au régime d'aide comme tel Je pense que vous avez raison de revenir et d'indiquer: Écoutez, on ne peut pas véritablement parler d'un véritable régime d'aide financière aux étudiants s'il n'y a pas plus d'adaptation à la réalité quatre vingt-dix. J'ai l'impression qu'il faudrait prendre au moins jusqu'en juin pour rappeler ça au ministre, pour avoir un peu la conviction que ça peut l'atteindre. Comme on ne finit que la semaine prochaine, malheureusement,

on va être obligés de dire que ça n'a pas l'air à l'atteindre, d'aucune façon. Toutes les remarques par rapport à la pertinence quatre-vingt-dix, concernant l'autonomie, concernant la contribution parentale, concernant le niveau des dépenses admises pour le calcul du prêt ou de la bourse, concernant le comité d'appel, l'incongruité de ne pas considérer que c'est urgent de donner également aux temps partiel un régime de prêts et bourses, ça a toujours été balayé du revers de la main par le ministre, jusqu'à date. Mais quand vous touchez ces questions-là, même s'il vous dit que vous avez un excellent mémoire, j'ai hâte de voir comment il va en tenir compte dans le concret. Là, on pourra s'en reparler. Mol, je suis inquiet et j'ai la même inquiétude que vous.

Pour ce qui est de tout le volet sur l'an 2000, je pense qu'encore là, ce que votre mémoire illustre, sans les prendre une par une, c'est que le ministre de l'Éducation, d'après vous, aurait une vision vers l'avenir, mais qui vous inquiète drôlement parce qu'elle ne tient pas compte de certaines réalités des années deux mille, où un certain effritement des régions du Québec... Je ne sais pas à quelle page au juste, mais ce n'est pas important. À un moment donné, vous mentionnez: écoutez, il y a des régions qui sont en dépérissement et vous citez la Côte-Nord. Vous n'avez pas tort, sauf que pour être au parfum - c'est une expression - pour être bien informé, il faudrait dire toutes les régions, parce que, sincèrement, au-delà des banlieusards autour de la grande région de Montréal, toutes les régions du Québec sont malheureusement en décroissance. Il s'agit juste de lire le document des affaires sociales "Deux Québec dans un".

Je vois ma collègue de Lévis, elle a raison, parce que je la considère aussi comme étant dans la grande région métropolitaine de Québec où c'est sûr qu'il y a eu un développement accéléré sur la rive sud. Prenez les premiers kilomètres le long du fleuve, mais ne dépassez pas trop les quinze ou vingt premiers kilomètres en bordure du fleuve. Quand vous rentrez à l'intérieur des terres, dans la région de la Beauce ou un peu plus avant près de la frontière du Vermont, des États-Unis, c'est le même problème que dans l'Outaouais, qu'en Abitibi, qu'au Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est le même problème dans toutes les réglons: il y a un dépérissement grave des régions du Québec par l'absence de politiques, l'absence de soutien et le modèle de développement économique de ce gouvernement-là; il y a un modèle du laisser-faire. On regarde passer les trains, puis ils ne passent plus. Ça fait qu'il y a un problème. Quand tu es en période de conjoncture favorable, ce n'est pas si mal d'avoir une attitude de passéiste, d'attentiste, de laisser-faire comme ça, mais quand l'économie chute du nez comme c'est le cas, eh bien, on le paie cher dans les régions du Québec et c'est ce qui est en train d'arriver. Ce n'est pas moi qui ai inventé un taux de chômage de 22 % au Saguenay-Lac-

Saint-Jean. En Abitibi, on a vécu 6 %, 7 % dans la période de croissance forte avec les accréditives dans le domaine minier. Êtes-voua ail courant qu'on est remontés à 20 %, ça n'a pas été long. La Gaspésie, j'aimerais ça en parler, mais on est mieux de ne pas en parler. C'est autour de 40 %, si les chiffres sont exacts.

Alors, si ça, c'est une croissance des régions du Québec, il y a un problème d'analyse et de lecture. Mais sur l'analyse il ne faut pas se surprendre. J'entendais le ministre tantôt - je n'en reviens pas - et il faisait des signes du bonnet en disant: Ouais, très bon mémoire, parce qu'il va dans le sens de ce qu'il revendique. Quand vous indiquez que votre accord est conditionnel à deux autres alternatives et que vous savez très bien que les deux autres alternatives n'y sont pas, à savoir une participation accrue de l'État et une participation des entreprises, je ne peux pas dire que vous venez nous dire en commission que vous êtes d'accord avec le dégel. Ce n'est pas ça que je dis. Je dis que vous avez été responsables, en disant: On est prêts à faire un effort et à regarder ça, mais pas à se clencher tout seuls. On n'accepte pas qu'on soit les seuls à porter une hausse qui ne réglera absolument rien au sous-financement des universités. Le ministre, ce n'est pas ça qu'il a lu, puis je vous remets allègrement en disant: Écoutez, voilà des jeunes responsables. Ils nous disent: Nous autres, on est d'accord.

Les deux conditions, il les a oubliées, puis ne vous cassez pas la tête, il nous l'a dit, parce que vous venez aujourd'hui, vous allez passer une heure ici, mais moi, ça fait un petit, bout de temps qu'on a commencé, ça fait une couple de semaines qu'on travaille là-dessus et on va finir la semaine prochaine et le discours aura été constamment le même. Il n'y a pas d'autre solution, pas question pour les entreprises, elles sont assez taxées. L'État ne peut pas en mettre plus. On n'a pas l'argent requis, puis on est en crise, puis il y a les routes, la santé, puis on fait tout un brasse-camarades de l'histoire, puis on dit: On ne peut pas aller plus loin. C'est ça qui a été dit par le ministre de l'Éducation.

Donc, ne pensez pas que les deux volets de votre recommandation où c'était très clair: un, deux, trois et vous finissez à la fin avec "à ces conditions", "à ces conditions"... Tout ce que vous voulez, c'est en faveur de la hausse des frais de scolarité, mais les deux autres points sont aux calendes grecques, en ce qui concerne le ministre. (11 heures)

J'ai trois questions. La première... J'aimerais ça que vous reveniez un peu à la page 29. Moi, je vous dis, quand j'ai lu ça, que j'ai filé mal, pour ne pas employer une autre expression. Vous dites: "Ce dernier volet de notre mémoire est un hymne à la reconnaissance du statut étudiant." Moi, j'ai vu plus là un cri d'alarme, un cri d'inquiétude parce que vous dites: "Depuis

quelques années, on assiste, impuissants, à une détérioration globale, du système de l'éducation... " Vous ajoutez: "Nous sommes en droit, en tant que futurs travailleurs et administrateurs, do considérer l'avenir avec sceptiscisme. " Là, j'ai de la misère: "Nous sommes en droit de considérer l'avenir avec scepticisme. " Et ça finit par des frissons. Vous dites: "Nous pouvons nous questionner sincèrement sur les intentions des administrateurs gouvernementaux avec quelques frissons. " Moi, je partage ça, sauf que j'ai de la misère à voir là l'hymne à la reconnaissance que ça va bien, qu'il n'y a pas de problème. Je trouve que c'est une description, quand même, qui est inquiétante comme perspective future et, si c'était là votre analyse, j'aimerais que vous la détailliez davantage. Quels sont les éléments que vous évaluez et que vous mettez en analyse pour conclure à une détérioration globale du système d'éducation?

Mme Saint-Pierre: Bien, de un, c'est surtout, comme je le mentionnais tout à l'heure, quand on regarde qu'il y a beaucoup de programmes qui sont dispensés au collégial ou à l'université, ou, des stages en milieu de travail. Quand l'étudiant vient pour s'en aller sur le marché du travail, bien souvent, l'employeur va lui demander: As-tu de l'expérience dans ton domaine? Ou encore il n'est pas formé comme tel par l'école pour faire face à un tel type de travail. Vous savez, d'après moi, ce qu'on enseigne dans les écoles, ce n'est pas mauvais, mais c'est surtout très global et le système d'éducation, dans ce sens-là, je veux dire... Qu'on regarde dans les universités où les bibliothèques sont remplies, bien souvent, de volumes en anglais ou même les bibliothèques au niveau collégial où il y a un volume pour 40 étudiants dans la réserve. Ça, ce n'est qu'un exemple qui démontre qu'il manque quelque chose dans les écoles pour former adéquatement une clientèle qui. elle, ne demande qu'à être formée comme du monde, d'être formée en fonction du marché du travail, tout simplement.

M. Gendron: Donc, rapidement, c'est un questionnement sur la dégradation des outils de support, c'est bien ça...

Mme Saint-Pierre: Entre autres.

M. Gendron:... des instruments pédagogiques et, également, un jugement sur la pertinence de certains programmes. Est-ce ça?

Mme Saint-Pierre: Oui, oui, en gros.

M. Gendron: Deuxième question. Est-ce que vous avez évalué... D'après vous, le sous-financement du réseau universitaire, même si vous êtes au collégial, iI est de quel ordre?

Mme Saint-Pierre: 160 000 000 $ environ.

M. Gendron: êtes-vous au courant du montant que va rapporter la hausse du dégel des frais de scolarité, combien ça va donner dans le sous-financement des universités?

Mme Saint-Pierre: 80 000 000 $ environ.

M. Gendron: Alors, tout de suite, il faut réduire de moitié: c'est 40 000 000 $. Ce n'est pas grave, mais c'est juste pour vous dire que c'est la moitié pour la première année, bien sûr. À ce moment-là, puisque vous-mêmes l'évaluez correctement à 160 000 000 $, sachant qu'il n'y aura que 40 000 000 $ par l'apport du dégel des frais de scolarité, est-ce que vous croyez que c'est une goutte importante, que c'est un montant significatif qui permettra de corriger les lacunes que vous déploriez tantôt au niveau des outils de support et des instruments pédagogiques plus adéquats pour donner une meilleure formation?

M. Côté (Stéphane): Oui, pour l'instant, ça ressemble plus peut-être à un coup d'épée dans l'eau, si on est seuls à pousser, comme on dit. On est prêts à tirer la charette, mais il faudrait peut-être tirer à trois: soit le gouvernement, les entreprises, les étudiants. Pour l'instant, on fournit 7 % et on va passer à 15 % avec la hausse des frais de scolarité. Il en manque encore. Il y a un gros fossé à combler. Je sais que c'est difficile de parler des entreprises à M. Ryan, de les taxer, mais, quand même, il faudrait peut-être finir par y penser un jour. C'est pour ça qu'on dit que ça va fournir 40 000 000 $ la première année. Ça ne sera même pas pour améliorer les techniques, les outils de support pédagogiques, qu'on appelle, ça va être juste pour financer le déficit, tout simplement. Donc, l'apport est inutile pour l'instant.

M. Gendron: Ma collègue, députée de Lévis, voulait poser une question. Alors, je lui laisserais le temps pour notre période. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez la parole, Mme la députée.

Mme Carrier-Perreault: Merci, Mme la Présidente Je suis la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

La Présidente (Mme Hovington): C'est M. Garon encore, M. le député d'Abitibi-Ouest.

Mme Carrier-Perreault: Mais il reste que c'est la rive sud.

M. Gendron: Vous avez tout à fait raison, Mme Carrier-Perreault, Chutes-de la Chaudière.

La Présidente (Mme Hovington): C'est le nouveau comté des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Et voilà. De toute façon, ça fait partie de la rive sud. Ça me fait plaisir de saluer les gens de chez nous. Oisons que c'est vrai que c'est un excellent mémoire; je reprends les propos de M. le ministre. Mais je pense qu'on ne pouvait pas s'attendre à autre chose des jeunes de la rive sud.

Moi, il y a une chose qui m'a beaucoup intéressée dans le mémoire en question, c'est votre préoccupation régionale. On sait que chez les gens qui ont à s'éloigner de leur région pour aller étudier, par exemple, surtout les jeunes qui quittent la région pour aller étudier à l'extérieur, rares sont ceux qui reviennent chez eux. Dans certains domaines, c'est dramatique. On voit au niveau des affaires sociales par rapport aux médecins que, même avec les incitatifs qui ont été mis, les primes d'éloignement, si on veut... Je pense que c'est une excellente idée d'en ajouter un peu parce qu'on voit qu'il y a des pénuries, il y a des manques encore dans plusieurs coins.

J'aurais une question, par ailleurs, sur la page 20 du mémoire. Quand vous partez d'abolir la prime d'éloignement de 400 $ aux étudiants qui choisissent un programme d'études non dispensé dans les collèges ou l'université la plus proche, j'aimerais savoir si vous avez une idée du nombre, par exemple. Quel est le pourcentage d'étudiants qui s'en vont étudier à l'extérieur de leur milieu quand le programme est dispensé chez eux? Avez-vous une idée à peu près? Est-ce que c'est important?

Mme Saint-Pierre: Aucune idée. Ce que je pourrais répondre à ça, c'est qu'il y en a environ 2000 à 3000 - un instant que je vérifie - qui bénéficient, par le biais de l'aide financière, de cette prime de 400 $. Sûrement que le nombre est plus élevé, sauf qu'il faut tenir compte aussi que beaucoup n'ont pas besoin de l'aide financière. Mais je vais vous répondre dans quelques instants. Alors, c'est 1211 cas très exactement.

Mme Carrier-Perreault: Qui ont bénéficié des 400 $ de prime d'éloignement.

Mme Saint-Pierre: Oui.

Mme Carrier-Perreault: D'accord. Peut-être qu'au ministère on connaît ces chiffres-là, à savoir lesquels sont à l'extérieur parce que le programme ne se donne pas chez eux ou, en tout cas, quelles sont les raisons profondes qui font que les jeunes préfèrent s'éloigner et s'en aller dans d'autres milieux pour étudier. Vous n'avez pas d'étude là-dessus non plus?

Mme Saint-Pierre: Non.

Mme Carrier-Perreault: Ça n'existe pas, j'imagine.

Mme Saint-Pierre: Je ne sais pas.

M. Côté (Stéphane): C'est sûr que le déclin des régions éloignées n'incite pas à rester là. On a peur. Les perspectives futures pour l'étudiant sont très sombres. Alors, ils aiment autant se rapprocher du centre urbain, je crois.

Mme Carrier-Perreault: D'accord. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Ça va?

Mme la députée de Terrebonne, vous avez une question?

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Moi aussi, je tiens à vous féliciter pour la qualité de votre mémoire. Vous avez vraiment su le présenter dans une approche globale. Je pense que ça, c'est important. On ne peut couper les faits de l'ensemble de la réalité québécoise et vous l'avez bien fait.

Vous avez dit tantôt que M. le ministre avait certaines réticences par rapport à la taxation des entreprises et vous avez raison, mais je pense que vous apportez un élément intéressant. Pour les entreprises, participer pour participer, ce n'est pas intéressant. Mais lorsque vous proposez que l'État et les entreprises collaborent ensemble dans le but de créer des programmes axés sur la formation fondamentale et Indispensable aux divers besoins en main-d'oeuvre des petites et moyennes entreprises, je pense que c'est vraiment une solution à la taxation parce que, lorsqu'on participe au programme, lorsqu'on obtient en retour un bienfait de cette taxation-là, je pense que ça serait peut-être plus acceptable. C'est dans ce sens-ià que vous le proposez?

M. Côté (Stéphane): Si on regarde le genre, justement, du système corporatif à Sherbrooke, qui est très intéressant pour les entreprises où il y a des stages qui s'effectuent plusieurs fois durant l'année, à ce moment-là, c'est plus intéressant pour eux autres de payer quand ils savent que les étudiants seront formés à leur milieu de travail et pourront entrer en fonction immédiatement.

Mme Caron: Une question que j'ai...

Mme Saint-Pierre: Oui...

Mme Caron: Oui, vous voulez compléter?

Mme Saint-Pierre: Je voulais tout simplement compléter en mentionnant que c'est déjà ce qui se fait en Allemagne de l'Ouest. Ça se fait déjà là-bas et le taux de chômage est de 2 %.

Mme Caron: Parfait. Une petite question

que j'ai posée assez régulièrement; Dans votre mémoire, quand vous invoquez la notion de conjoint, est-ce que vous incluez le conjoint de fait?

Mme Saint-Pierre: De fait? Oui.

Mme Caron: Merci. Est-ce qu'il reste un petit peu...

La Présidente (Mme Hovington): Une très courte.

Mme Caron: Une toute petite?

La Présidente (Mme Hovington): Oui.

Mme Caron: J'aimerais que vous élaboriez davantage sur la contribution parentale, ce que vous souhaitez vraiment à ce niveau-là.

Mme Saint-Pierre: C'est qu'actuellement beaucoup d'étudiants... Comme M. le député l'a mentionné tout à l'heure, c'est de deux ordres. Elle peut être de l'ordre du logement, de l'ordre de la nourriture ou du vêtement. Ça, c'est une forme de contribution des parents. L'autre forme, elle est monétaire. Bien souvent, il y a des étudiants qui n'ont pas nécessairement droit à l'aide financière parce que les parents devraient fournir x montant, 4500 $, 5000 $, 3000 $ et, bon, on envoie des lettres pour informer les parents du montant de leur contribution. C'est bien, sauf que beaucoup de parents ne donnent pas d'argent à leurs enfants. Les étudiants se débrouillent par eux-mêmes, travaillent à temps partiel.

Tout ce qu'on veut, finalement, s'il pouvait y avoir un moyen, soit sous forme d'impôt, etc., c'est que le montant de la contribution des parents soit directement versé à l'étudiant, bien entendu, pour ne pas que ça fasse de conflits familiaux. Il y a beaucoup d'étudiants, déjà, qui commencent à penser sérieusement à se rendre en cour contre leurs parents pour qu'ils leur donnent la contribution qui est calculée selon la formule de demande d'aide. Ce n'est pas tellement logique d'en arriver jusque-là. Il me semble qu'il pourrait y avoir un moyen puis ça, je pense que c'est au gouvernement de le faire, d'étudier la possibilité que la contribution parentale soit versée directement à l'étudiant, sans créer de conflits.

Mme Caron: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. En conclusion, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Merci beaucoup. Rapidement, je vous demande tout simplement d'être vigilants dans le suivi de vos recommandations. Je suis pas mal convaincu qu'à la lecture du résultat net, suite à l'adoption du projet de loi concernant l'aide financière, vous allez peut-être avaler différemment les propos élogieux que le ministre faisait de votre mémoire et peut-être dire à la fin, qu'il y a un problème d'adéquation entre le degré de suivi qu'il aura pris en compte de vos recommandations dans le résultat final et la présentation d'aujourd'hui, qui était très sympathique, très correcte, bien orientée. Je vous remercie beaucoup, vous aviez un bon mémoire.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Juste en terminant, là, je voudrais rappeler quelques données pour que ça fasse partie de l'échange que nous avons eu. A propos de la hausse des droits de scolarité, pourquoi la hausse? Parce qu'un ajustement était devenu, de toute évidence, indispensable. Le coût moyen d'un étudiant inscrit à l'université est de 8900 $ par année. La contribution moyenne qu'on exige de lui, actuellement, est de 540 $, ce qui est trois fois moins élevé que dans les autres provinces du Canada, y compris dans des provinces plus pauvres que le Québec, comme le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve. Je pense que, chaque fois qu'un citoyen entend ces explications, le taux de compréhension de la mesure gouvernementale augmente. On constate une évolution considérable de l'état de l'opinion là-dessus depuis un mois. Les gens sont capables de comprendre ce langage-là très bien.

Deuxièmement, j'entends l'Opposition qui répète sans cesse, à la manière d'un gramophone, sans réflexion et sans études, surtout sans preuves, que le gouvernement a laissé pourrir le problème du financement des universités. Nous reconnaissions, sur la base des données de 1986-1987, un écart de 162 000 000 $ avec l'Ontario. Là, nous avons injecté, depuis ce temps, 55 000 000 $ dans la base de financement des universités, récurrents. La contribution additionnelle requise des étudiants, sur deux ans, va rapporter 82 000 000 $ de plus. Ça va être 82 000 000 $ par année, à compter de la deuxième année. Si je compte bien, 55 000 000 $ plus 82 000 000 $, ça fait 137 000 000 $. Il reste une marge, mais l'écart, on l'a rétréci considérablement. Puis, de laisser entendre qu'on n'a rien fart, puis qu'on n'arrange rien... Voyons donc! Je pense qu'il faut, à un moment donné, se mettre les pieds à terre puis vérifier ce qu'on dit, puis, le dire avec des preuves à l'appui.

Nous avons fait des progrès et j'ajoute que le ministre des Finances, dans son dernier discours sur le budget, a dit: Nous reconnaissons qu'il va rester encore un écart à combler et le gouvernement est prêt à le faire dès que ses ressources le lui permettront. Alors, voilà la position du gouvernement sur cette question. Ça ne change pas le respect que j'ai pour la posi-

tion que vous avez énoncée parce que vous l'avez énoncée avec tellement de sens des responsabilités que je ne puis que vous réitérer ma vive appréciation pour votre présence parmi nous, ce matin.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme Saint-Pierre, M. Daigneault, M. Côté, au nom des membres de cette commission, il me reste à vous féliciter du bon travail effectué dans votre mémoire et à vous dire merci pour votre présentation.

Des voix: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Au revoir. J'inviterais l'Association générale des étudiants et étudiantes du cégep de Tracy à bien vouloir prendre place. Nous suspendons pour une minute, le temps de vous laisser vous organiser.

(Suspension de la séance à 11 h 15)

(Reprise à 11 h 17)

La Présidente (Mme Hovington): S'il vous plaît, je demanderais aux membres de la commission de bien vouloir reprendre leur place. S'il vous plaît, la commission de l'éducation doit reprendre ses travaux.

Alors, la commission de l'éducation reprend donc ses travaux avec l'Association générale des étudiants et étudiantes du cégep de Tracy. Si vous voulez bien vous présenter. Il y a M. Snyder et M. Valois, je crois?

Association générale des étudiants et étudiantes du collège de Sorel-Tracy

Une voix: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Lequel est lequel?

M. Snyder (Marc): Je suis Marc Snyder.

M. Valois (Jonathan): Nous nous présentons. Je suis Jonathan Valois, président de l'Association générale des étudiants et étudiantes du collège de Sorel-Tracy.

La Présidente (Mme Hovington): C'est donc vous, M. Valois, qui allez présenter le mémoire?

M. Valois: Non, c'est M. Snyder, par contre.

La Présidente (Mme Hovington): C'est M. Snyder? Alors, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire aux membres de la commission. Allez-y.

M. Valois: Merci. Ces audiences publiques sur le projet de loi 25... Il faut que j'attende la lumière rouge...

La Présidente (Mme Hovington): Ça va, il va vous l'ouvrir.

M. Valois: Oui?

La Présidente (Mme Hovington): Oui, oui.

M. Valois: Ces audiences publiques sur le projet de loi 25 nous donnent la chance de nous exprimer et nous l'apprécions. Le mémoire que nous présentons comporte des petites lacunes, nous le reconnaissons. Nous en sommes à notre première expérience dans ce domaine et nous sommes conscients d'avoir fait des erreurs de forme dans la présentation du document.

Le mémoire de l'Association générale des étudiants et étudiantes du college de Sorel-Tracy que nous présentons comporte deux volets. Vu l'incidence directe qu'a le régime d'aide financière sur l'accessibilité à l'éducation postsecondaire, ainsi que l'influence du dégel des droits de scolarité sur cette même variable, il nous paraît important de traiter de ces deux sujets du même coup.

M. Snyder: Suivant le dépôt du projet de loi par le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, nous considérons que dans son ensemble le projet de loi est valable, mais il nous reste quelques réserves. Nous sommes satisfaits que le ministre ait jugé bon de réduire le taux de contribution parentale de l'ordre de 30 %, mais nous croyons toujours fermement qu'une catégorie importante des étudiants postsecondaires ne reçoivent toujours pas cette aide. Nous croyons que cela découle d'une "mésinformation" de la part des parents. Un envoi de la Direction générale de l'aide financière aux étudiants aux parents les informerait que, dans le calcul de l'aide financière, il a été pris en considération le fait qu'ils fournissent un montant x. La réduction de 50 % de la contribution du conjoint va dans le même sens. C'est notre nette impression que dans la structure familiale des années quatre-vingt-dix, la séparation des biens et des revenus est beaucoup plus marquée que par les années précédentes.

Nous appuyons aussi les nouvelles exemptions ou augmentations des exemptions contenues dans la réforme: augmentation du montant des exemptions pour les parents ayant des enfants aux études, exemption pour les allocations aux jeunes enfants et les allocations à la naissance, exemption de la contribution minimale pour l'étudiant ayant à sa charge un enfant d'âge scolaire ou préscolaire. Mais nous sommes tombés de haut lorsque le ministre a subtilement enlevé de son projet de loi la mesure d'aide pour les étudiants universitaires à temps partiel. Nous considérions que cette mesure était une des plus

importantes contenues dans le projet de réforme du printemps dernier.

Nous pensons que le fait que les coûts de soins de santé ne soient pas catégorisés comme étant une dépense admissible est une situation désincitative pour les gens qui sont inscrits à un programme d'aide sociale. Nous considérons par ailleurs que le remboursement des dépenses pour l'achat de prothèses visuelles peur les étudiants bénéficiant de bourses est un très petit pas dans la bonne direction.

Il manque une autre des mesures recherchées par le mouvement étudiant, soit le remboursement des frais de transport pour les gens des régions éloignées. Ce sont justement ces mêmes régions qui ont le plus besoin de main-d'oeuvre qualifiée.

Considérant que les étudiants arrivent à survivre avec un revenu moyen de 5500 $ - ce qui est évidemment beaucoup plus bas que le seuil de la pauvreté - et que le régime d'aide financière a ou devrait avoir pour but de permettre aux étudiants de poursuivre leurs études dans des conditions favorables et décentes, nous proposons que les frais de subsistance soient fixés au seuil de pauvreté, tel qu'établi par Statistique Canada.

Nous considérons, comme le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, que la non-indexation des paliers de la table de contribution parentale est la principale cause de la surévaluation de la contribution parentale. Nous proposons que la table de contribution parentale soit indexée chaque année selon la variation du taux d'inflation.

Nous croyons que l'endettement étudiant est une barrière à la poursuite des études et qu'il devrait y avoir un seuil maximal de fixé et que, dépassé ce seuil, laide financière soft octroyée sous forme de bourses seulement.

Dans un tout autre ordre d'idées, nous croyons que l'amélioration du régime d'aide financière n'est pas une raison suffisante pour qu'il y ait un dégel des frais de scolarité au niveau universitaire. Représentant des étudiants d'un collège où les deux tiers des étudiants graduent avec un diplôme d'études collégiales du secteur général, nous nous sentons particulièrement touchés par un dégel aussi soudain. Peu de mesures peuvent être plus régressives qu'un dégel des droits de scolarité à ce moment-ci.

Le gel des droits de scolarité, à la fin des années soixante, a eu pour effet de hausser le taux de participation universitaire québécois. Statistique Canada nous dit que ce taux est passé de 8 % à 14 % chez les 18-24 ans, de 1970-1971 à 1986-1987, au Québec, soit une hausse de 80 %. En Ontario, cependant, le taux de participation est passé de 13,3 % à 16,8 %, soit une hausse de 26 %. Nous croyons que cela est un exemple parfait de relation de cause à effet. De plus, bien qu'il y ait eu des améliorations très importantes dans les dernières années, il reste tou- jours du chemin à faire, les taux de diplomation au Québec aux 1er, 2e et 3e cycles étant toujours plus bas que ceux de l'Ontario.

Un facteur qui n'a pas été étudié, à notre connaissance, est l'effet d'un dégel sur la migration étudiante. Il est envisageable que, vu la diminution de la différence entre les droits de scolarité des universités québécoises et ceux des provinces avoisinantes, les étudiants des régions limitrophes de la province décident d'aller étudier dans d'autres provinces.

Une autre préoccupation de notre population découle du fait que 20 % des revenus additionnels générés par la hausse des frais de scolarité soient injectés dans le régime de l'aide financière aux étudiants. Cela revient à dire que !es étudiants financeront, dans deux ans, 21 600 000 $ d'un régime qui a essentiellement pour but de les financer. Tous les groupes s'accordent pour dire que le réseau universitaire québécois est sous-financé. Là où on diffère, c'est dans la manière de régler le problème. Il est certain que les étudiants ne devraient pas être les seuls auxquels on demande une participation financière accrue. Nous sommes conscients des efforts fournis par le gouvernement qui, le printemps passé, a accordé 21 000 000 $ de plus d'argent neuf à l'enveloppe financière des universités. Il n'en demeure pas moins que les universités québécoises souffrent toujours d'un sous-financement de 160 000 000 $ par rapport aux universités ontariennes, ce qui est inadmissible. De plus, le gouvernement a tout de même financé l'injection de cet argent à partir des coupures de plus de 30 % en dollars constants qu'il a effectuées, au cours des dix dernières années, dans les universités.

Une action globale dans ce dossier se doit d'impliquer l'entreprise privée. Sa participation au financement universitaire comparée à celle des entreprises américaines est dérisoire. La participation des entreprises au financement du réseau universitaire pourrait se faire de différentes façons. La possibilité d'implanter un impôt spécial a été mentionnée par différents groupes. Un autre moyen serait d'augmenter les ressources comme les abris fiscaux pour les entreprises qui désireraient s'impliquer dans le financement des universités. On pourrait aussi améliorer les moyens incitatifs pour que les entreprises s'impliquent dans des projets de recherche.

Nous croyons vraiment que les universités ont encore un bout de chemin à faire. Nous sommes conscients que de grands efforts de rationalisation ont été faits par les universités dans les dix dernières années. Nous connaissons aussi la nébulosité avec laquelle sont faits les budgets universitaires et nous déplorons le fait que l'État n'ait pas plus à dire dans l'administration de cet argent. Nous ne voudrions surtout pas qu'une hausse des droits de scolarité serve à des dépenses administratives ou à repayer la

dette accumulée des universités.

Nous craignons que le fait que les universités puissent hausser leurs droits de scolarité unilatéralement de 10 % n'entraîne la catégorisation suivante. Les universités de qualité seraient accessibles aux plus fortunés et celles de moindre qualité ne seraient accessibles qu'aux classes plus pauvres. De plus, une hausse des droits de scolarité aura pour effet de créer une pression indue sur tes secteurs mous, les secteurs où les perspectives d'emploi ou de salaire élevé sont moins bonnes.

De plus, plusieurs points restent obscurs. Le ministre a déclaré qu'à partir de l'année 1992-1993 les droits de scolarité seraient indexés selon une formule que le gouvernement mettra au point en consultation avec les universités. Ne connaissant toutefois pas encore cette formule, nous ne pouvons la juger, mais il y a fort à craindre qu'elle ne soit défavorable aux étudiants. Cette impression est renforcée par fes commentaires du ministre quant au pourcentage qui, selon lui, devrait être payé par les étudiants. Il a mentionné que les étudiants devraient payer de 25 % à 33 % de la facture, soit de 2000 $ à 2700 $. Donc, nous craignons que cette hausse ne soit qu'une première étape et qu'il ne continue de les hausser jusqu'à ce qu'il arrive à ce niveau.

Nous croyons qu'une fois ces étapes complétées et ces détails éclaircis, une hausse de la participation financière des étudiants pourrait être envisageable. Un dégel aussi brusque reste une option, mais il faut prendre le temps d'en envisager d'autres. Une possibilité est un impôt postuniversitaire transformant le régime d'aide financière en un régime de bourses financé par un impôt obligatoire. Une autre possibilité est un gel au mérite, tel qu'expliqué par le tableau ci-dessous. Tout étudiant à temps complet n'échouant pas à plus d'un cours aurait ses droits de scolarité gelés au niveau actuel. S'il échoue à plus d'un cours, il devra alors payer en conséquence. Si, à la session suivante, il revient à la normale et n'échoue pas, ses droits de scolarité retourneraient au niveau actuel.

Le tableau de la page 8 est expliqué par la note en bas qui dit qu'à partir des données de 150 000 étudiants et qu'approximativement 20 % d'entre eux échouent à plus d'un cours, à partir de ce moment-là on voit que 150 000 étudiants paient 300 $ à la première session; ça rapporte des revenus additionnels. À la session suivante, admettons que 20 % échouent à plus d'un cours, ceux qui n'échouent pas à plus d'un cours, il en reste 120 000, ça fait des revenus additionnels encore. Ceux qui échouent ont une hausse des droits de scolarité substantielle, je l'admets, et ça rapporte des revenus additionnels, la première année, de 30 100 000 $. La deuxième année - c'est toujours approximatif - 20 % qui échouent, ceux qui n'échouent pas, ça rapporte des revenus additionnels de 51 200 000 $. La différence avec le moyen actuel, c'est que ça marche par session et que ça marche au mérite.

Ce ne sont que deux idées à l'état brut, mais il restera beaucoup à faire avant de les implanter. Nous demandons donc au ministre qu'il accorde au dossier des droits de scolarité un moratoire d'un an. Nous demandons aussi qu'il crée un comité conjoint regroupant à la même table le gouvernement, l'entreprise privée, les étudiants et les recteurs. Le mandat de ce comité serait d'étudier les alternatives au dégel des frais de scolarité.

Nous demandons aussi au ministre qu'il nomme une commission spéciale, comportant des étudiants, chargée de la vérification de la gestion des deniers publics dans l'administration des universités. Merci. (11 h 30)

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre de l'Éducation, vous avez la parole.

M. Ryan: Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Je l'apprécie. Il me fait plaisir de saluer les étudiants du collège de Sorel-Tracy, de même que leur valeureux député qui nous fait l'honneur de sa présence, ce matin, pour échanger un petit peu avec eux tantôt.

Avant que vous passiez la parole à mon collègue de Sorel, Mme la Présidente, je voudrais faire quelques brefs commentaires sur des propos que nous avons entendus de la part des représentants des étudiants du collège de Sorel-Tracy. Je ne répéterai pas ce que j'ai dit tantôt à la fin de la rencontre avec les étudiants du cégep de Lévis-Lauzon, parce que je serais porté à répéter la même chose, mais je pense que ça a été dit clairement, à plusieurs reprises, ces derniers mois. Je pense que j'ai donné les éléments essentiels du dossier du financement universitaire. Le dossier est établi clairement. Il s'agit maintenant de passer aux solutions. Ce n'est plus le temps des moratoires et des tergiversations des commissions d'enquête et tout; on a établi certains éléments décisionnels qui doivent recevoir leur réalisation dans les faits. Alors, de ce point de vue là, je suis sympathique à la requête qui est faite et il n'est pas question, dans l'esprit du gouvernement, d'un quelconque moratoire.

Vous demandez qu'une commission formée d'étudiants soit créée afin de vérifier les états financiers des universités. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Snyder: Ce serait: regroupant les étudiants, pour que ce ne soient pas seulement les étudiants naturellement.

M. Ryan: Ça là, vous pouvez le faire par vous-mêmes. Vous n'avez pas besoin du gouvernement pour ça. Ça fait partie de vos prérogatives.

Je me souviens quand j'étais dans les

mouvements de jeunesse, je ne vous dirai pas il y a combien d'années, et on avait fondé la Fédération des mouvements de jeunesse du Québec. On avait créé une commission sur les finances publiques. Je me rappelle que la commission s'était donné comme mandat: Qu'est-ce que ce gouvernement-là fait pour la jeunesse? On avait dépecé les comptes publics de fond en comble. On avait mobilisé un économiste des Hautes Études, M. Roland Parenteau, qui est à l'École nationale d'administration publique maintenant. On était venus voir le ministre du temps qui était Paul Sauvé. C'était dans le temps de Ouplessis. On lui avait dit: Votre patente pour la jeunesse, ça ne marche pas bien. On n'a pas dit au gouvernement: Formez-nous une commission. On est allés enguirlander le gouvernement. Mais je ne voudrais pas que vous comptiez sur le gouvernement pour former cette commission, c'est à vous autres de faire ça, si vous en avez la conviction.

Le gouvernement a ses moyens de vérifier les finances des universités et il les vérifie régulièrement. Il reçoit des données très détaillées sur la manière dont sont utilisés les fonds publics. Et comme je l'ai dit ici à plusieurs reprises, les universités publient, chaque année, des rapports financiers qui sont aussi élaborés que ceux d'Hydro-Québec, ceux de la ville de Montréal, ceux de Radio-Canada, ceux de n'importe quelle entreprise publique. Les cégeps, c'est la même chose: ils publient des rapports très élaborés, chaque année; les commissions scolaires aussi. Vous pouvez poser des questions II y a des assemblées où on peut poser des questions, mais je ne sais pas là, qu'est-ce que vous voudriez que le gouvernement fasse de plus là-dedans? Nous trouvons qu'il y a actuellement ce qu'il faut, de ce point de vue là. Si ce n'est pas suffisant, apportez-nous des éléments concrets. Ça va nous faire extrêmement plaisir de les examiner.

Je vais réserver ça. Je veux laisser du temps pour mon collègue, le député de Sorel, parce que j'ai des données à propos de la participation des entreprises. Vous en faites un thème important, dans votre présentation, au financement des universités. On aura l'occasion d'en discuter plus tard dans la journée, probablement. C'est une question que nous avons examinée évidemment et que nous continuons d'examiner et à laquelle le gouvernement n'est pas indifférent, quoi que vous entendiez. Le gouvernement est très intéressé à cette dimension-là. Il s'agit d'établir les modalités, les formes sous lesquelles la participation de l'entreprise peut être instituée ou souhaitée ou promue, avec des résultats concrets. Mais je prends note de ce que vous dites.

J'ajoute seulement, pour les fins de notre débat immédiat, que la participation des entreprises au budget de fonctionnement des universités dans tout le Canada est un élément extrê- mement réduit dans le financement des universités. J'ai des chiffres ici: pour l'ensemble du Canada, c'est 0,3 %, c'est-à-dire les trois diziè-mes de un pour cent du budget total des universités. En Ontario, c'est 0,4 %; au Québec, c'est 0,2 %, par conséquent, un pourcentage insignifiant. Ces données confirment ce que j'ai mentionné à maintes reprises devant la commission: Souhaiter des contributions directes des entreprises au fonctionnement des universités, ça ne semble pas être la voie la plus appropriée. Il y en a d'autres, cependant, il y en a beaucoup d'autres que nous allons promouvoir au cours des prochaines années. J'aurai l'occasion d'en dire davantage d'ici à la fin des travaux de la commission et à l'occasion des autres étapes qui suivront.

Alors, je vous remercie. Il est toujours intéressant d'échanger avec les représentants des communautés étudiantes concrètes et non pas des collectifs abstraits. On les accepte aussi, mais quand on peut avoir les deux, c'est encore plus enrichissant pour tout le monde. Je vous remercie beaucoup de vous être donné la peine de préparer un mémoire et de venir le défendre, ce matin.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député de Sorel.

M. Khelfa: De Richelieu.

La Présidente (Mme Hovington): De Richelieu, pardon, mais natif de Sorel. Ce sont vos commettants, ce matin, que l'on reçoit aujourd'hui.

M. Khelfa: Effectivement, Mme la Présidente. J'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'opportunité d'intervenir et surtout remercier le ministre de m'avoir laissé du temps sur son temps pour intervenir et poser des questions au groupe étudiant du comté de Richelieu, du cégep Sorel-Tracy. Donc, j'aimerais les saluer, saluer leur détermination, leur travail dans le processus démocratique de nos institutions. Leur participation à la commission parlementaire aujourd'hui, ça démontre leur volonté de participer à cette consultation d'une façon constructive.

J'ai lu, à quelques reprises, votre document. Dans un premier temps, j'aimerais vous féliciter pour le contenu, pour les recommandations, vous avez plusieurs natures de recommandations. Comme député du comté, je suis très fier de vous recevoir à l'Assemblée nationale, à cette commission.

Ceci étant dit, vous allez me permettre, dans un premier temps, d'échanger avec vous sur quelques recommandations que vous avez amenées. Dans un premier temps, quand vous parlez du temps partiel, des étudiants à temps partiel qui étaient non inclus dans la formule,

partez-vous d'étudiants à temps partiel adultes ou bien du temps partiel dans sa globalité? Pour-riez-vous nous expliquer?

M. Snyder: C'est qu'il y a un chapitre de la Loi sur l'aide financière aux étudiants qui parie spécifiquement des temps partiel à l'université, sauf que la date de mise en application de cette mesure n'est pas fixée. C'est à une date ultérieure ou quelque chose du genre, ce qui fait que ce serait une bonne idée de l'appliquer immédiatement.

M. Khelfa: Considérez-vous les étudiants à temps partiel adultes ou bien le temps partiel dans sa globalité, dans son ensemble?

M. Snyder: Tous ceux qui en ont besoin.

M. Khelfa: D'accord. Un autre volet dont j'aimerais... Personnellement, je me réjouis et je constate même que le ministre a eu une ouverture sans l'inclure d'une façon directe, c'est de pouvoir questionner l'administration et savoir comment les dépenses sont faites. Ça, c'est une preuve, de votre part, de vouloir s'impliquer dans le quotidien des universités, sachant que chez nous, dans le comté de Richelieu, ceux qui veulent aller à l'université doivent sortir du comté, aller ailleurs, pour pouvoir obtenir une diplomation universitaire. Votre participation, depuis quelques mois, à la vie collective du comté, c'est tout à votre honneur et je vous en félicite, je vous remercie. Voulez-vous m'expli-quer un peu le rôle de votre comité, votre vision du comité conjoint de consultation que vous avez mentionné à la page 6 - si je ne me trompe pas - de votre mémoire?

M. Snyder: À quelle page?

M. Khelfa: À la page 6, c'est votre recommandation à la fin: Un comité conjoint. À la page 8, excusez.

M. Snyder: Oui, on est d'accord qu'il y a un sous-financement et c'est évident. Tout le monde s'accorde pour dire ça. C'est qu'il y a d'autres alternatives: augmenter la participation d'une forme globale, soit des entreprises, des étudiants et du gouvernement. Une fois que ces mesures-là auront été mises en application, si les étudiants ont encore besoin, ils auront à payer. S'ils ont à payer, quelle forme prendrait exactement l'augmentation de leur implication financière?

Le point majeur avec lequel on n'est pas d'accord avec la mesure du gouvernement dans le dégel, c'est que ça touche à l'accessibilité. Il y a d'autres mesures qui peuvent ne pas toucher à l'accessibilité, que tous ceux qui sont capables d'aller à l'université auraient le droit d'y aller, sans tenir compte de leur capacité financière de payer, sauf que ça aiderait quand même au financement universitaire.

M. Khelfa: Mme la Présidente, si vous me permettez une dernière question concernant la formule que je trouve intéressante, le gel au mérite. Voulez-vous nous expliquer un peu plus votre pensée?

M. Valois: Avec le gel au mérite, on montre et on démontre même que nous autres, l'Association étudiante du cégep de Sorel-Tracy, on est capables de trouver d'autres alternatives qu'un dégel aussi brusque et violent, finalement. Le gel au mérite est vraiment une idée qu'on a ébauchée ici avec des chiffres vraiment abstraits. Pour donner un peu l'idée, c'est que la personne qui va à l'école, tout le monde paie par session. La première session, ça coûte 300 $ pour tout le monde. Donc, les frais de scolarité remontent à 600 $ par année, si tu n'as pas échoué du tout. Ce qui veut dire que c'est déjà 60 $ de plus d'augmentation des frais de scolarité, ce qui, à notre avis, ne devrait pas déranger grand monde. Puis, ça coûte 300 $ pour cette session-là. À cette session-là, si l'étudiant la passe sans échouer deux ou plus de deux de ses cours, à l'autre session d'hiver, qu'on a écrit ici, ça lui coûterait encore un autre 300 $. Par contre, s'il échouait, les frais de scolarité augmenteraient. On a écrit 1000 $; ça pourrait être 700 $ ou un autre chiffre. Les chiffres qu'on a écrits ici, ce sont vraiment des chiffres hypothétiques pour expliquer notre tableau. Premièrement, c'est pour que tous les étudiants puissent accéder à l'université et, deuxièmement, on est surtout partis des répliques lancées par différentes personnes qui disaient: Vu que ça ne coûtait pas cher, les gens prenaient les universités comme des "parkings". Les étudiants allaient à l'école, vu que ça ne coûtait pas cher et peu importe s'ils échouaient, ça restait là. Vu que ça ne coûte pas cher, on peut rester encore, parce qu'en Ontario finalement... Il faudrait aller à notre université pendant trois ans avant que ça coûte le même prix qu'en Ontario pendant un an. Alors, même si j'en échoue une, je vais continuer. Eh bien, pour nous, ce n'est pas comme ça, c'est pour suivre cette idée-là et on sait quand même que le Parti libéral aime vraiment ça, les choses au mérite. On sait que son régime de prêts et bourses marche dans ce sens-là. On a dit: Pourquoi pas le dégel aussi? C'est une idée comme une autre. C'est une idée alternative comme il en a été lancé. Vous avez sûrement entendu un paquet d'alternatives.

M. Khelfa: Est-ce que c'est implicite, dans votre pensée, qu'il pourrait y avoir des exemptions dans cette formule pour des maladies ou bien des conditions sociales?

M. Valois: Si elles vont avec tout le reste.

Ce n'est pas un gel au mérite seul, c'est un gel au mérite global qui suit les trois autres, comme ils ont toujours été répétés: (a société, les industries et, nous autres, c'est le financement des universités qu'on veut vraiment regarder de façon administrative, où passe leur argent, parce que... En tout cas, c'est peut-être une idée qu'on a dans notre tête qui est vraiment venue du saint ciel, mais on trouve que, quelque part, il y a sûrement de l'argent qui se passe dont les étudiants ne bénéficient pas et qui se perd dans l'administration des universités, ça aussi.

M. Khelfa: D'accord. Mme la Présidente, je pense que je ne pourrai pas revenir. J'aimerais vous remercier pour votre réflexion dans l'amélioration de la mosaïque économique et sociale de notre comté. Je vous félicite et je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le député de Richelieu. M. le député d'Abitibi-Ouest. (11 h 45)

M. Gendron: Oui. Chers amis, les jeunes de Sorel et Tracy, je voudrais d'abord dire deux choses avant de débuter: Ce que j'ai aimé le plus dans votre mémoire, dans le fond, c'est à la page 5, quand vous dites... Et je trouvais ça intéressant pour des jeunes étudiants, qui n'ont peut-être pas l'occasion d'être là-dedans tous les jours, de voir que, même à ça, la vérité a ses droits et que vous avez indiqué ce qu'est la vérité: "Le printemps passé, le milieu universitaire s'est vu accorder 21 000 000 $. Je ne sais pas si vous étiez ici tantôt, quand le ministre, encore là, allègrement, disait que je faisais marcher mon gramophone en répétant les mêmes faussetés - c'est l'expression qu'il a employée - alors que dans le bulletin de la CREPUQ, c'est on ne peut plus clair, c'est 21 000 000 $ que nous avons reçus, signé par Patrick Kenniff, président, dans l'Info-CREPUQ, volume III, numéro 1. Il va continuer à satiété à répéter un chiffre que personne n'a vu. J'ai toujours pensé que si je fais un cadeau à quelqu'un et que celui à qui je fais le cadeau dit: Tu m'as donné 10 $, et que moi, je dis: Non, non, je t'ai donné 5 $... J'aime mieux me fier à celui qui a reçu le cadeau, parce que c'est censé lui faire plaisir. Il n'a pas de raison de tromper, il n'a pas de raison de conter des menteries, il n'a pas de raison de ne pas être content, on lui a fait un cadeau. Alors, j'étais content de voir ça que des gens qui ne sont pas là-dedans tous les jours... Ça arrive que l'information honnête passe, des fois. Vous avez dit: Écoutez, les universités nous ont dit qu'elles avaient reçu 21 000 000 $. On aime mieux parler de ce chiffre-là que du discours du ministre. Donc, j'ai été obligé de repartir mon gramophone, mais en indiquant qu'il n'était pas basé sur des fausses réalités.

Deuxième commentaire, et il faut que vous soyez conscients de ça, j'espère... Je pense que oui, parce que des jeunes, habituellement, c'est éveillé. Vous avez fini votre mémoire en disant ceci: On demande donc au ministre qu'il accorde dans le dossier des droits de scolarité un moratoire d'un an. On demande au ministre qu'il crée un comité conjoint - et je n'évalue même pas le mérite pur de vos recommandations - et, troisièmement, on demande au ministre qu'il nomme une commission spéciale.

Le ministre vous a dit que vous aviez un bon mémoire, mais il vous a envoyé littéralement paître sur toutes vos recommandations. Il faut que vous soyez conscients de ça. Il est bien bon pour féliciter, mais il vous a envoyé littéralement paître en disant: Retournez au plus vite à Sorel-Tracy refaire vos devoirs. Moi, je n'ai pas le temps de faire des commissions d'enquête. C'est exactement ce qu'il a dit. Ce n'est pas le temps de faire un moratoire, c'est le temps de décider. J'ai la voie, la vérité et, moi, je règle ça. Ce sont les étudiants qui sont clenches. Donc, on revient toujours à la même case. Je suis obligé de retaire marcher mon gramophone, comme il l'a dit tantôt.

Votre mémoire, rapidement, je le trouve intéressant parce qu'il a touché les mêmes questions que tout le monde a posées. Contrairement à ce que le ministre a affirmé en disant: Quand je leur explique, les étudiants comprennent plus, on se rend compte, depuis un mois, qu'il y a un changement de mentalité. Il le voit uniquement à son ministère ou dans ses lectures tardives, la nuit, parce que le changement de mentalité... Tous les mémoires ont dit la même chose et vous, vous dites ceci: Ça aura des effets sur la fréquentation. Vous craignez que la hausse ne soit qu'une première étape à vous clencher davantage. Nous, on vous dit que vous avez raison.

Deuxièmement, vous ne voulez pas être seuls. C'est ça que votre mémoire dit. Vous demandez également une participation financière accrue du gouvernement et des entreprises. Sachez que, dans la tête du ministre et dans sa réforme, ces deux volets n'y sont pas. Il faut que vous soyez conscients de ça. Seuls les étudiants sont clenches. Vous ajoutez: II faut prendre le temps d'envisager d'autres options. Le ministre a dit: Non, moi, je l'ai choisie. Il a même dit à des étudiants qui souhaitaient avoir été consultés là-dessus: Écoutez, ça aurait été aberrant d'aller vous consulter là-dessus, c'est évident que vous auriez dit non. Donc, on a pris notre décision et on a pris nos responsabilités. Là-dessus, il a raison, ils ont pris leurs responsabilités, mais leurs responsabilités, nous, de ce côté-ci et la plupart des mémoires, les voyons beaucoup plus larges que la solution facile d'augmenter l'endettement étudiant sans regarder des alternatives. Donc, quand vous dites qu'il y a d'autres options et qu'on regarde donc ça, faites-en votre deuil. Le ministre a dit qu'il

y en avait d'autres alternatives, mais qu'il n'en est pas question, il procède.

Vous demandez un moratoire d'un an pour qu'un comité regroupant les entreprises, le gouvernement, les étudiants et les recteurs étudie des alternatives au dégel. Vous l'avez eue, votre réponse. C'est le temps d'agir, ce n'est pas le temps de rêver, a-t-il dit.

En conclusion, moi, je prétends que vous avez un mémoire réaliste, pratique, concret par rapport à tout ce que les gens sont venus nous dire ici. Merci de votre contribution. Je ne peux pas le questionner vraiment, sauf sur un aspect, parce que je ne peux pas faire comme le député de Sorel qui, bien gentiment, vous dit: Oui, vous avez une bonne suggestion concernant votre impôt...

Mme Caron: Votre gel au mérite.

M. Gendron: ...votre gel au mérite, mais je ne la comprends pas, voulez-vous m'expliquer ça? Alors, moi, avant de dire que c'est une bonne suggestion, j'aurais fait le commentaire après avoir reçu l'explication. Moi, là-dessus, je pense que c'est la première fois qu'on voit ça. Moi, j'hésite énormément à endosser votre recommandation du gel au mérite pour deux raisons principales. Je connais peu d'étudiants qui ont des échecs par choix et je ne connais pas beaucoup d'étudiants qui sont heureux, contents ou qui ont procédé pour échouer, soit au niveau collégial ou universitaire. En conséquence, il y a déjà en soi un inconvénient majeur d'avoir échoué et leur rajouter de l'endettement, compte tenu de l'inversion que ce gouvernement-là a fait de l'aide financière... Êtes-vous au courant qu'au moment où on se parle il n'y a plus que 38 % des sommes versées sous forme de bourses, 38 %, au moment où on se parle? Le gros de l'aide ¦ financière est versé sous forme de prêts, donc on ajoute à l'endettement. Et, dans votre formule de gel au mérite, c'est sûr que ça aurait comme conséquence d'endetter davantage ceux qui ont échoué.

J'aimerais ça - parce que moi, mon jugement, c'est plutôt de dire: Ce n'est pas une voie de solution - que vous ne me donniez pas tellement d'explications sur comment ça marcherait, mais donnez-moi quelques explications additionnelles. Pourquoi prétendez-vous qu'il y a là une voie à regarder pour, éventuellement, mettre plus d'argent dans le système universitaire, mais en l'imputant à ceux qui, déjà, auraient à souffrir de l'inconvénient à bien des égards, mais surtout financier d'un échec? Parce que, quand tu veux avoir une diplomation et que tu as un échec, tu es obligé de te reprendre. Donc, tu dis: Comme récompense, toi, on va te donner une hausse de frais de scolarité à la suite de ton échec. Est-ce que vous ne le placez pas - c'est là-dessus que j'aimerais avoir vos commentaires - déjà dans une perspective d'échouer à nouveau, plus facilement que d'autres?

M. Valois: Le mémoire qu'on a fait avec cette perspective de gel au mérite, ce n'est pas un dégel aux non-méritants, c'est un gel au mérite. Tout le monde subit le dégel, sauf ceux qui passent, c'est le contraire. C'est: Je te remercie, je laisse cela gelé vu que tu passes. C'est dans cette perspective qu'on l'avait envoyé. Ça, c'est premièrement.

Deuxièmement, 50 % des étudiants, environ, laissent l'université avant de terminer leur 1er cycle, ça veut dire le bac. Tu échoues, ça coûte plus cher, tu y repenses deux fois avant de dire: Suis-je vraiment fait pour l'université? Et ce n'est pas si tu échoues juste à un cours, si tu échoues à deux et plus. Alors là, l'étudiant, dès le début, se questionne: Suis-je vraiment fait pour l'université vu que j'ai échoué à deux cours et plus? Ça va me coûter plus cher. Est-ce que je continue en assumant ça ou est-ce que je me relance dans ce gouffre-là? Et là, plus rapidement la décision va être prise, moins l'université va avoir à débourser pour cet étudiant-là et, comme on a pris les universités pour des "parkings", là, cela n'en sera plus parce que l'étudiant, dès la fin de sa première session, va avoir à prendre une décision. Mais ce n'est pas, je le répète, un dégel aux non-méritants, c'est un gel au mérite; il ne faudrait pas l'oublier. Tous les étudiants font face au dégel, excepté ceux qui échouent à un seul cours ou qui réussissent tous leurs cours. C'est comme un cadeau qu'on leur donne.

M. Gendron: Bien amicalement, entre dégel... Je reprends vos phrases, entré un dégel aux non-méritants et un gel au mérite, est-ce que, dans les faits, la conséquence n'est pas la même, sur le plan du résultat? Là, je pose la question: Est-ce que, dans les faits, seuls ceux qui ont échoué à plus d'un cours paieront les frais de scolarité, dans votre proposition? Est-ce que c'est bien ça?

M. Valois: Le résultat, en fait, est le même, ils vont payer, c'est vrai. Par contre...

M. Gendron: II y a uniquement ceux qui vont échouer qui vont payer...

M. Valois: Pardon?

M. Gendron: ...dans votre formule.

M. Valois: Non. Parce qu'il ne faudrait pas oublier que les autres qui n'échouent pas paient quand même un gros 60 $ de plus par année, parce qu'il y a déjà un dégel qui est fait de ce côté-là. Ils paient 300 $ par session, ça monte à 600 $ par année; 540 $ plus 60 $, ça fait 600 $. Eux autres aussi paient, ils donnent une contribution.

M. Gendron: C'est un moindre gel. M. Valois: C'est un moindre gel.

M. Gendron: Pardon, un moindre dégel. S'il réussit...

M. Valois: Bien, ça dépend...

M. Gendron: Non, non, mais ça va.

M. Valois:... pour qui.

M. Gendron: Ca va, on s'entend. Alors, je vous remercie beaucoup, je n'ai pas d'autre question. Merci beaucoup de votre contribution.

La Présidante (Mme Hovington): Merci. Alors, en guise de conclusion, M. le ministre.

M. Ryan: Je vous remercie également, je pense que ç'a été un échange très constructs et vous pouvez compter sur votre député, le député de Sorel, pour continuer à véhiculer auprès de nous... À supposer que nous ne soyons pas disposés à comprendre, comme le laisse malicieusement entendre l'Opposition, vous pouvez compter que le député de Sorel va se charger de véhiculer auprès de nous vos points de vue. Moi, je vous ai dit ce qu'il en était, bien franchement, sur le thème général que vous avez abordé, ce matin. Je pense que c'est important qu'on se quitte sans illusions, en étant bien conscients des points de vue des uns et des autres. J'apprécie votre position, et je crois que le Québec doit franchir un pas maintenant. Je complète juste. On peut discuter longtemps sur 55 000 000 $ ou 21 000 000 $, mais si ce n'est pas 55 000 000 $, c'est 21 000 000 $ plus 34 000 000 $.

Des voix: Ha, ha, ha!

M, Valois: C'est ça. L'année d'avant, c'était 34 000 000 $.

M. Ryan: Ça voudrait dire qu'il y aurait eu 34 000 000 $ l'année précédente. On ne s'en était pas vanté. Il y a eu 34 000 000 $ l'année précédente et 21 000 000 $ cette année. Ça fait 55 000 000 $ de toute manière. Comme je l'ai dit, en ajoutant le produit de la hausse des droits de scolarité, on va rétrécir très sensiblement l'écart qui subsiste avec l'Ontario et le gouvernement aura encore une part à faire, lui. Vous pouvez compter que, tous ensemble, les députés ministériels et le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, nous allons continuer de multiplier les pressions auprès du gouvernement pour que cet écart en vienne à être annulé dans les meilleurs délais. Merci de l'appui que vos représentations nous apportent à cette fin.

La Présidente (Mme Hovington): MM. Snyder et Valois, merci d'avoir présente votre mémoire aux membres de la commission de l'éducation.

M. Valois: Merci à vous aussi de nous avoir écoutés parce que c'est quand même nous.. Ce que nous avons fait et ce que nous ferons toujours dans le fond... Pour une fois, on ne se bat pas pour avoir plus, on se bat pour aller à l'école Moi, je me bats pour ça. Je dis non au dégel. Pourquoi? Pour l'accessibilité à l'éducation. Je me bats pour aller à l'école.

La Présidente (Mme Hovington): C'est tout à votre honneur et à l'honneur du Québec. Merci.

J'inviterais le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec à bien vouloir venir prendre place. Nous allons suspendre une minute. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 57)

(Reprise à 12 h 1)

Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec

La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais aux membres de bien vouloir prendre place. Nous allons recommencer nos travaux, s'il vous plaît.

Alors, bienvenue au Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec. Si vous voulez bien vous présenter à tour de rôle pour fins de transcription des débats, s'il vous plaît.

M. Bouvart (Alain): Bonjour. Je suis Alain Bouvart. Je suis président du Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec. Ici, à côté de moi, à ma gauche, Yves Fleury, directeur général, Michel Picard, secrétaire et Pierre Ouellet, deuxième vice-président de notre organisme.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Bouvart, c'est vous qui êtes le porte-parole ou si c'est monsieur...

M. Bouvart: Nous sommes tous porte-parole. Nous allons... Je vais vous présenter notre organisme, dans un premier temps, et après, M. Picard et M. Ouellet vont lire le mémoire.

La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Alors, allez-y, M. Bouvart.

M. Bouvart: Merci beaucoup. Bonjour, M. le ministre, bonjour, mesdames et messieurs. Le

Regroupement des aveugles et amblyopes est un organisme qui fait la promotion et la défense des

droits des personnes aveugles et amblyopes du Québec. On existe depuis quinze ans et nous sommes particulièrement intéressés en ce qui concerne l'éducation de nos membres. Ce mémoire, comme vous avez pu vous en rendre compte, s'adresse... Nous avons 65 personnes qui sont au cégep ou dans des universités à l'heure actuelle.

Notre conseil d'administration, le 10 juin 1989, s'est particulièrement penché sur le volet économique des étudiants. Tradionnellement, le RAAQ s'est toujours consacré d'une façon très intense et on a toujours été très très présents concernant l'intégration des personnes handicapées de la vue au niveau collégial et au niveau des universités. On était surtout présents par le passé en ce qui concerne l'adaptation des cours et la transcription de tout ce qui est imprimé parce que, pour nous, c'est quelque chose, comme vous pouvez le constater, de très important. C'est notre dossier un peu traditionnel.

Ce que j'aimerais aussi dire, c'est que nous avons eu, encore hier soir, une mauvaise nouvelle. Nous avons appris, à la télévision anglaise de Radio-Canada, dans une émission qui était consacrée aux personnes aveugles et aux personnes ayant une déficience visuelle, que nous avions un taux de chômage supérieur à celui de la Gaspésie et de l'Abitibi. Il est question d'un taux de chômage de 90 % dans notre communauté. C'est ça. Maintenant, je passe la parole à Michel.

M. Picard (Michel): Michel Picard, étudiant à l'université.

Contribution de l'étudiant atteint d'une déficience fonctionnelle majeure. Considérant que la personne ayant une limitation visuelle en situation d'études vit des contraintes très sévères à l'emploi; considérant que les services externes de main-d'oeuvre dits spécialisés dans le placement des personnes ayant une limitation visuelle ne priorisent pas la clientèle étudiante dans l'exercice de leurs fonctions et de leurs mandats émanant du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, le RAAQ recommande que le ministère de l'Éducation exclue le calcul de la contribution de l'étudiant atteint d'une déficience fonctionnelle majeure dans la détermination du montant d'aide financière lui étant accordé.

Contribution du conjoint ou des parents de l'étudiant atteint d'une déficience fonctionnelle majeure. Considérant que le conjoint ou les parents assument déjà des responsabilités importantes dans le soutien à l'autonomie des personnes ayant une limitation visuelle en situation d'études, considérant que laide constante d'une tierce personne s'avère primordiale pour la réussite des études d'une personne atteinte d'une déficience fonctionnelle majeure, telle que confrontée à l'accomplissement des tâches multiples dépassant les limites raisonnables imposées par la nature même de la déficience, le RAAQ recommande que le ministère de l'Éduca- tion exclue le calcul de la contribution du conjoint ou des parents dans la détermination du montant d'aide financière accordé aux personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure.

Exonération de l'obligation de rembourser les prêts étudiants. Considérant qu'une personne devenant atteinte d'une déficience fonctionnelle majeure en cours d'études vivra, à partir de ce moment, des contraintes très sévères à l'emploi et qu'il deviendra, de ce fait, extrêmement difficile d'être confronté au remboursement de prêts étudiants déjà accordés, considérant que le fait de devenir atteint d'une déficience fonctionnelle majeure occasionne une source de stress bouleversant l'équilibre d'une personne en cours d'études, le RAAQ recommande que le ministère de l'Éducation exonère les personnes devenant atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure en cours d'études de l'obligation de rembourser tout prêt contracté en matière d'aide financière pour fins d'études.

M. Ouellet (Pierre): Bonjour tout le monde, M. le ministre, mesdames et messieurs. Je ne sais pas si vous m'entendez bien.

La Présidente (Mme Hovington): Très bien, allez-y.

M. Ouellet: D'accord, je vous remercie. Comme je vous le disais, mon nom est Pierre Ouellet; je suis deuxième vice-président au Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec. Je m'implique dans ma communauté depuis plusieurs années. Je suis une personne qui est aux études, qui poursuit des études de niveau postsecondaire. Maintenant, je vais vous tirer les grandes lignes de la suite de notre rapport.

Reconnaissance financière appropriée du soutien académique. Considérant que les personnes ayant une limitation visuelle en situation d'études nécessitent les services de lecteurs pour l'accomplissement de leurs travaux, considérant que les salaires horaires des personnes accomplissant cette tâche doivent être déclarés comme source de revenus à l'État québécois, le RAAQ recommande que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science augmente substantiellement les montants accordés en matière de besoins spéciaux pour le soutien académique des personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure, particulièrement en ce qui a trait au salaire horaire des lecteurs pour les personnes ayant une limitation visuelle, afin de faciliter le recrutement de personnes compétentes dans ce domaine.

À titre personnel, j'aimerais ajouter et peut-être vous faire partager une expérience que j'ai vécue. J'ai terminé un bac en droit à l'Université de Montréal, en 1985. En 1986, j'ai fait une trentaine de crédits en relations industrielles. En 1987, j'ai essayé de faire mon Barreau, afin d'être membre du Barreau du

Québec et de pouvoir pratiquer la profession d'avocat. Je me suis heurté à un tas de barrières. Ce qui arrive, c'est qu'au Barreau il y avait, cette année-là, 18 volumes à l'étude au niveau de la formation professionnelle. La seule façon d'y avoir accès, parce que ces livres, habituellement, ne sont disponibles qu'à peu près un mois avant le début des cours, donc la seule façon d'y avoir accès était de fonctionner avec des lecteurs bénévoles ou rémunérés. Eh bien, je vous dis que ça a été une belle partie! J'ai passé environ le quart de mon temps, si ce n'est pas le tiers, à essayer de recruter des bénévoles semi-rémunérés. Au tarif horaire que le ministère me proposait, il était quasi impossible de trouver des gens qui étaient intéressés à travailler à 4 $ ou 4,50 $ l'heure, considérant que ces revenus-là sont déclarés. Donc, c'était définitivement irréalisable. Moi, j'ai même, à un moment donné, suggéré à la personne qui recommandait les 4,50 $ qu'elle dresse pour moi une banque de bénévoles et j'en aurais été vraiment heureux. Donc, au niveau d'une formation professionnelle à l'école du Barreau - comment je dirais bien ça? - les ressources qui étaient mises à ma disposition n'étaient aucunement adéquates. Il n'y avait aucune possibilité.

Je me suis réessayé en 1990 et je me suis heurté encore à la même situation. Je poursuis des études, mais dans un champ d'activité différent. Je poursuis des études en relations industrielles. Ce n'est peut-être pas tout à fait ce que je voulais faire mais, présentement, il ne semble pas y avoir d'autres alternatives ou possibilités afin que je puisse, comme tout autre étudiant qui n'a pas de limitation fonctionnelle, faire mon Barreau et, en fin de compte, me réaliser dans ce que j'ai le goût de faire dans notre société. Je pense que ça résume assez bien la quatrième recommandation de notre rapport.

Maintenant, nous allons passer à la cinquième. Éligibilité des personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure en situation d'études présecondaires, secondaires et à l'éducation aux adultes à l'aide financière. Considérant que les personnes ayant une limitation visuelle nécessitent l'obtention de diplômes leur permettant d'accéder à des études postsecondaires, considérant que ces personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure dans ces situations particulières d'études doivent absolument réussir ces programmes tout en assumant leur subsistance des plus précaires, la RAAQ recommande que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science soutienne financièrement l'accomplissement des études des personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure étudiant en alpha, présecondaire et secondaire, par l'allocation d'une aide financière substantielle en reconnaissance des efforts investis par ces personnes désirant mieux maîtriser leur situation de vie par une scolarisation accrue. Je pense que M. Bouvart aurait certains commentaires à faire vis-à-vis de cette cinquième proposition.

La Présidente (Mme Hovington): M Bouvart, allez-y.

M. Bouvart: En effet, nous avons quelques étudiants dans une école, à Montréal, qui s'appelle l'école Champagnat, qui sont en alpha, qui sont en présecondaire et qui sont en secondaire et ces étudiants, apparemment, recevaient une forme de bourse pour leurs besoins spéciaux, les années avant. Cette année, ces personnes-là ont reçu une mauvaise nouvelle: elles ne sont plus éligibles à ce genre de bourse. C'était simplement ce commentaire-là que j'avais à faire.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. (12 h 15)

M. Ouellet: Je vais continuer maintenant avec la sixième proposition de notre Regroupement. Imposition des frais inhérents aux besoins spéciaux des personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure. Considérant que l'imposition des frais inhérents aux besoins spéciaux représente une forme de taxation tout à fait immorale de l'adaptation scolaire à l'intention spécifique des personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure désirant s'intégrer à part entière dans la société, la RAAQ recommande que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science se concerte avec les autorités responsables au ministère du Revenu et au Conseil du trésor afin de faire cesser la pratique d'imposer les allocations accordées pour les besoins spéciaux.

Conclusion

M. Picard: Pour le point 6, ce qu'on veut dire, c'est de ne pas considérer les besoins spéciaux comme étant des revenus faisant partie d'une bourse parce que, par exemple, une bourse de lecteur de soutien académique. . Si une personne peut demander un versabraille ou une imprimante braille, si on met tout le montant sur un T-4 à la fin de l'année, la personne risque de payer de l'impôt sur, en fin de compte, un revenu qui n'est pas à elle parce que, pour les besoins spéciaux, tout ce qu'on fait, c'est qu'on signe le chèque et on le donne à une autre personne. Donc, ce n'est pas un revenu à nous autres qui fait partie de notre bourse. C'est tout pour le point 6.

M. Ouellet: Donc, en résumé, la personne se fait imposer sur des sommes qu'elles n'a pas touchées, en fin de compte.

Conclusion Notre organisme croit sincèrement que les personnes ayant une limitation visuelle doivent être stimulées et encouragées à poursuivre des études. Cela représente une des seules portes de sortie, sinon la seule, leur permettant d'accéder à une plus grande maîtrise de leur situation de vie. L'application de mesures

incitatives à caractère économique doit également s'opérer dans des délais raisonnables ne privant pas la personne en cause de revenus essentiels au bon déroulement de ses études.

Je vous remercie beaucoup. C'est terminé, en substance, en ce qui a trait à la présentation de notre rapport. Je pense que je pourrais laisser la parole à mes autres collègues.

La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Est-ce que c'est tout pour la présentation?

M. Picard: C'est tout, oui.

M. Fleury (Yves): Moi, j'aimerais ajouter quelque chose qui n'apparaît pas nécessairement dans le mémoire. C'est en ce qui a trait à la documentation qui est envoyée aux étudiants relativement à leurs prêts et bourses. Nous autres, on reçoit beaucoup de plaintes à l'effet que ce n'est pas adapté selon le mode de communication qui leur est accessible. Par exemple, ce sont toutes des choses qui sont envoyées imprimées et, souvent, les gens sont très fonctionnels en braille mais le ministère ne prend pas les dispositions nécessaires pour faire la transcription en braille ou sur cassettes de cette documentation-là. C'est impossible pour ces gens-là d'être autonomes et même d'aller de l'avant vers une plus grande maîtrise de leur situation économique par rapport aux prêts et bourses. Il faut toujours aller voir quelqu'un et se faire lire ce qui est dit. Je voulais simplement ajouter ça.

La Présidente (Mme Hovington): Merci de ce renseignement supplémentaire. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. C'est avec une sympathie toute spéciale que nous recevons votre groupe aujourd'hui. Surtout, nous essayons d'écouter et de comprendre les représentations que vous voulez nous soumettre. J'ai beaucoup d'admiration pour les personnes souffrant de handicaps majeurs qui décident d'entreprendre, malgré ces handicaps, des études aussi poussées que certains d'entre vous l'ont fait. Je pense que de nombreuses mesures déjà prises par le gouvernement indiquent que le gouvernement est conscient de la responsabilité de la collectivité à cet égard. La collectivité vous doit un soutien et, même si ce soutien ne s'exprime pas toujours sous des formes complètement satisfaisantes pour vous, je pense qu'il doit continuer de s'améliorer. Une série d'auditions publiques comme celle que tient la commission parlementaire de l'éducation fournit une tribune tout indiquée pour la présentation des problèmes qui vous sont propres. Je peux vous assurer que nous avons pris connaissance avec beaucoup d'attention des principales observations que vous vouliez nous soumettre.

Je vais me permettre de commenter briève- ment les principales recommandations contenues dans votre mémoire, après quoi ma collègue, la députée d'Anjou, vous adressera quelques questions. Excusez-moi, je fais une erreur terrible, la députée de Bourget.

Je vais vous faire une remarque générale, pour commencer, qui va éclairer les remarques particulières. En concevant le régime d'aide financière sous la forme renouvelée que nous entendons lui donner, nous sommes partis du principe que tous les étudiants sont considérés sur un pied d'égalité, que nous ne faisons pas de distinctions, sauf celles qui sont suggérées par les différentes opérations administratives qu'il faut faire en cours de route, comme entre résidents et non-résidents, des choses comme celles-là. Mais nous avons cru que, si le régime d'aide financière aux étudiants doit exister comme un régime à caractère universel, c'est-à-dire accessible à tous moyennant certaines conditions, il ne faut pas introduire des catégories particulières à l'intérieur du régime.

Pour prendre un exemple concret, si une personne souffre d'une infirmité majeure et qu'elle dispose, pour toutes sortes de raisons qui sont inhérentes à son histoire ou à son statut personnel, de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins de base, y compris ses besoins en éducation, nous ne pensons pas que ce soit la responsabilité automatique de la collectivité de lui verser des allocations spéciales en sus de ce qui peut lui suffire.

Nous avons pensé, pendant une certaine période, que nous pouvions multiplier les programmes a caractère général et nous en venons de plus en plus à des programmes qui sont axés sur les besoins des citoyens. Dans la mesure où des besoins spéciaux existent pour des catégories particulières de citoyens, y compris, au premier chef évidemment, les personnes placées dans une situation comme celle que vous nous avez décrite, ces citoyens ont droit à l'attention spéciale du gouvernement, mais nous considérons que ça doit se faire par un programme particulier, un programme qui vienne s'ajouter à celui qui est le programme de base pour tout le monde.

Ça, c'est la règle que nous avons choisi de retenir pour guider notre travail dans ce dossier. Par conséquent, il y a un certain nombre des recommandations que vous nous adressez qui relèveraient plutôt de ce programme spécial dont dispose le ministère pour répondre aux besoins spéciaux de la catégorie d'étudiants comme celle que vous représentez. On pourra discuter tantôt de l'ampleur de ce budget spécial, des difficultés qu'il peut soulever, mais il est là. Déjà, cette année, il nous permet de fournir une assistance spéciale à plus de 600 personnes handicapées, seulement dans le secteur où vous oeuvrez. Je pense que dans votre texte vous parliez de 65 personnes. Nous autres, nous en avons dénombré 148, dont 97 sont des étudiants à temps plein, 22

sont des étudiants à temps partiel, 21 sont des personnes inscrites à l'éducation des adultes et 8 personnes Inscrites au primaire et secondaire.

À ce sujet, vous avez mentionné, tantôt, que certaines personnes se sont vu refuser, cette année, l'accès à une aide spéciale, étant en alphabétisation. Je n'étais pas au courant de ça. Mes collaborateurs du ministère m'informent que c'est vrai que quelques personnes se sont vu refuser l'accès à l'aide financière suivant le programme d'alphabétisation. La raison administrative qui a inspiré cette décision, c'était que les cours d'alphabétisation ne sont pas des cours conduisant à l'obtention d'un diplôme, et ça, c'est le critère d'admissibilité qu'on a suivi jusqu'à maintenant. Il y a eu quelques exceptions dans le passé, mais qui n'étaient pas autorisées par le règlement. Je vais vous dire ce matin que je suis content que vous m'ayez informé de ce point-là et que nous allons le régler rapidement, parce que c'est une chose absolument inadmissible. Je pense que nos collaborateurs ont agi dans un bon esprit, en voulant être fidèles à la lettre des normes qui nous régissent, mais je pense que le besoin de ces personnes-là passe avant. Si on n'est pas capables de trouver une solution à ce besoin-là, je ne mérite pas de rester ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. J'ai toujours dit qu'il fallait que le ministre ait une certaine marge de souplesse et vous m'en donnez une nouvelle preuve, puis ça ne prendra pas de temps qu'on va trouver une solution à ce problème-là, je peux vous en assurer.

M. Bouvart: Merci, M. le ministre. En plus, cette année, c'est l'Année de l'alphabétisation. Ce serait comme dommage de marquer ça d'une pierre noire.

M. Ryan: Je n'ai pas besoin de passer par l'UNESCO pour me rendre compte qu'on a une responsabilité. Je vous le dis, j'aime bien l'UNESCO. Mais, soyez assurés, en tout cas, qu'on va trouver une solution à ce problème-là.

M. Bouvart: Merci beaucoup.

M. Ryan: Ensuite, je prends vos recommandations. Vous recommandez qu'on exempte l'étudiant atteint d'une déficience fonctionnelle majeure de la contribution exigée de l'étudiant. Mais pour la raison que je vous ai donnée tantôt, je ne peux pas souscrire à cette recommandation-là. Ce n'est pas de la mauvaise foi de la part du gouvernement, mais ça fait partie aussi de la philosophie générale d'intégration qui doit de plus en plus inspirer l'action du gouvernement. J'appliquerais la même observation en ce qui touche la contribution du conjoint et des parents, tout en reconnaissant avec vous que ceux-ci encourent des obligations beaucoup plus lourdes que des parents ou des conjoints ordi- naires. Il y aurait peut-être quelque chose à examiner Je ne souscrirais pas à l'abolition de la contribution, mais qu'il y ait lieu de faire un examen particulier du niveau de la contribution attendue et des modalités. Je suis prêt à le faire et je vais l'examiner, mais étant donné les orientations générales que j'ai définies tantôt, je pense que je ne pourrais pas aller beaucoup plus loin. J'appliquerais la même observation à la demande visant l'exonération de l'obligation de remboursement des prêts étudiants.

Vous avez une recommandation disant: II faudrait abolir la taxation qui est imposée sur les allocations reçues au titre des besoins spéciaux. Vous avez parfaitement raison. Nous avons fait des négociations avec le ministère du Revenu au cours des derniers mois. Il me fait plaisir de vous informer ce matin que ces négociations ont donné des résultats heureux et que cette imposi tion va cesser. Ça, je suis bien content que vous l'ayez rappelé à notre attention, parce que c'est un problème que nous avions dans le paysage depuis déjà quelques mois. J'avais héte que nous puissions annoncer qu'il était réglé.

En ce qui regarde les personnes qui sont aux niveaux primaire et secondaire, il y a quelque chose de spécial à rechercher. Ici, le régime d'aide financière dont nous discutons s'applique aux étudiants de niveau postsecondaire. Le programme de besoins spéciaux dont j'ai parlé s'adresse aussi à des personnes étudiant aux niveaux primaire et secondaire, parce qu'on ne voulait pas avoir deux programmes, il n'y avait pas assez de personnes pour qu'on multiplie la bureaucratie. Ça aurait coûté plus cher de fonctionnaires que d'aide; ça n'aurait été pratique pour personne. Mais on est en train d'examiner aussi du côté primaire et secondaire les possibilités d'amélioration sous l'angle de l'aide financière versée à des personnes comme vous.

Je pense que j'ai fait le tour des principales recommandations de votre mémoire. Maintenant, je vais laisser à ma collègue, la députée de Bourget, le soin de poursuivre l'échange, à moins que... Peut être que vous pourrez commenter tout ça lors de vos réponses.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Bourget, vous avez la parole.

Mme Boucher Bacon: Oui. Je remercie le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec de venir à la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants.

Alors, comme le ministre, M. Ryan, le mentionnait tout à l'heure, je crois que ça prend beaucoup de courage, lorsqu'on a un handicap visuel, pour pouvoir poursuivre des études et avoir la volonté d'aller aussi loin que M. Ouellet qui, d'ailleurs, m'a très surprise. Je vous en félicite, M. Ouellet.

Alors moi, dans les faits, ce que j'aimerais

savoir, c'est: Lorsqu'une personne ordinaire, sans handicap, a des besoins pour aller aux études, il y a des mécanismes, soit un prêt ou une bourse qui peut lui être accordé. Dans le cas d'un handicapé visuel, je crois que l'office de la protection des handicapés va vous donner, pour des besoins spécifiques, de l'aide. Alors, quand vous recommandez au ministre de l'Éducation, soit par des calculs ou soit par des exonérations d'obligation de rembourser des prêts des étudiants... Quels sont vos besoins spécifiques qui font que vous demandez ce genre de mutation? (12 h 30)

M. Fleury: Je voulais dire, au sujet de l'exonération, on est... Au sujet de cas, sans entrer dans l'identité de personnes, de cas particuliers, on est au courant que des personnes qui devenaient aveugles, complètement aveugles, ont été exonérées de rembourser la dette qu'elles avaient contractée au temps où elles étaient voyantes. Parce que du fait que... Quand tu deviens aveugle dans la vie, ça devient extrêmement difficile de rencontrer les obligations de rembourser des prêts de plusieurs milliers de dollars. Je comprends que ce n'est peut-être pas au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science à rendre compte de tout ce qui est discrimination systémique dans la société québécoise. Par contre, je pense que ça prend des mesures de discrimination positive qui sont de nature économique pour permettre aux gens de ne pas devenir égorgés en même temps que de devenir aveugles, surtout sur la question de l'exonération.

La contribution de l'étudiant, maintenant. Je pense que, comme les considérants l'expliquent, le fait de ne pas pouvoir avoir accès au marché du travail, mais d'une manière vraiment exagérée au niveau des désavantages en matière d'embauché... Il faut le reconnaître, ce n'est peut-être pas, là encore, la prérogative majeure du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science de voir à ce que les employeurs veuillent embaucher des personnes aveugles ou non, mais, au-delà des principes, la réalité demeure qu'il n'y a pas d'employeurs qui veulent embaucher des personnes aveugles. Ce qui fait que, si on a une contribution à mettre, puis de toute manière, l'été passe et on n'a pas d'argent, cet argent-là, on ne l'a pas. Ça fait que, quelque part, ça nous est soustrait de l'aide qui pourrait nous être accordée.

La contribution du conjoint et des parents, maintenant. Je pense que le conjoint, que ce soit le "chum", la blonde ou les parents, déjà, ils agissent comme personnes qui supportent de différentes manières et de plusieurs manières les personnes handicapées visuelles dans leur cheminement. Puis ce n'est pas un cheminement qui est si simple que ça pour les parents et pour le conjoint. Je pense que d'y aller, en plus, en obligeant ces personnes-là à souscrire d'une manière financière en plus du temps et des énergies qu'elles investissent, ça pourrait certainement être autrement. Vu qu'on ne parle pas d'un si grand nombre de personnes que ça, je pense qu'au-delà du principe on devrait reconnaître la réalité du concours de ces personnes-là dans l'existence de gens qui sont fortement défavorisés et très désavantagés au niveau sensoriel et systémiquement discriminés par la seule nature du fait qu'ils ne voient pas clair. Ça fait que le fait de demander une contribution du conjoint ou des parents, à ce moment-là, je pense qu'ils contribuent déjà en masse.

Ça aiderait davantage la personne handicapée visuelle sur le plan économique à avoir le goût de poursuivre des études malgré les difficultés énormes sur le simple plan académique, de l'admission et de l'inscription et de tout ce que vous pouvez imaginer en vous fermant les yeux et de retourner à l'école. Je pense que ça prend des incitatifs de nature économique et, que ce soit le gouvernement ou le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science qui contribue, je pense que tout le monde là-dedans peut faire son bout de chemin, de chaque ministère, d'un ministère à l'autre, pour faire en sorte que ces personnes puissent devenir des contribuables au lieu de rester des bénéficiaires de l'aide sociale. En tout cas, c'est ça que j'avais à répondre là-dessus, j'espère que ça a répondu.

Mme Boucher Bacon: Oui, ça me convient. Remarquez qu'il ne fallait pas que vous voyiez là-dedans une question piège, c'était simplement pour vous permettre de vous exprimer, de sensibiliser encore plus notre gouvernement, parce que, moi, je trouve louables vos recommandations. Je crois que M. Ryan aussi a vu une ouverture d'esprit. Ce qu'il peut donner, il le donne; ce qu'il ne peut pas, bien, c'est à nous de faire le cheminement pour que vous puissiez avoir ce à quoi vous prétendez.

Maintenant, je voulais féliciter aussi M. Ouellet de son cheminement de 1985, 1986, 1987 et j'aurais peut-être une dernière question, à savoir: M. Ouellet, si ça n'avait pas été du coût quasi impossible de 4 $ ou 4,50 $ l'heure, vous auriez trouvé une personne vraiment intéressante, vraiment intelligible qui aurait pu vous transmettre les valeurs pour vous permettre de passer votre Barreau. Est-ce que vous croyez qu'aujourd'hui vous seriez en mesure d'avoir une position d'avocat et de pratiquer?

M. Ouellet: Définitivement. J'espère, en tout cas, et je l'espère sincèrement que l'État québécois n'a pas investi en moi, à partir des années 1981 aller jusqu'à 1985, pour que je sois un futur prestataire d'aide sociale. Si tel est le cas, bien là, je suis désolé, je vais faire autre chose. Non! Je crois que si j'ai réussi le bac en droit, il n'y a aucune raison et alors aucune raison au monde pour que je ne puisse pas faire mon Barreau et pratiquer, à titre d'avocat, ou, en fin de compte,

occuper une position de même nature. Je n'y vois vraiment aucune contrainte physique ou encore de quelque nature que ce soit.

Maintenant, vous me félicitiez tantôt, je vous en remercie, mais ça ne s'arrête pas là. Ça fait depuis septembre 1985 que je suis admissible à l'école du Barreau et on se retrouve, en février 1990, en mars 1990, le 1er. Il n'y a pas eu grand cheminement qui s'pst fait depuis mai 1985, à ce niveau-là. Donc, à un moment donné, moi, j'ai beau y mettre de la bonne volonté, mais il n'y a à peu près pas de moyens existants pour y arriver.

La Présidente (Mme Hovington): Merci.

Mme Boucher Bacon: Je comprends bien. Je vous remercie beaucoup. Je vais essayer de voir à ce que vous puissiez arriver au Barreau et à bien pratiquer votre futur métier. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre, vous voulez ajouter quelque chose.

M. Ryan: Si vous me permettiez d'ajouter peut-être deux précisions. Sous le régime actuel, vous avez accès à la bourse, mais vous n'êtes pas admissible au prêt, d'après ce que nos collaborateurs me disaient. Sous le nouveau régime, il y aura l'admissibilité au prêt également, qui va changer des choses, évidemment.

En ce qui touche la contribution minimale, lorsqu'une personne est empêchée de travailler en raison d'un handicap, à ce moment-là, il n'y aura pas de contribution minimale d'exigée, dans ces cas-là. Je ne sais pas si ça répond complètement à la situation que vous avez évoquée, mais ce sont des aspects du nouveau régime que je voulais souligner.

M. Fleury: J'aurais une question à poser. De fait, la plupart des mesures qui concernent les personnes handicapées dans le projet de loi sont de nature discrétionnaire. Maintenant, il y avait quelque chose qui concernait le fait qu'un étudiant à temps partiel soit considéré comme un étudiant à temps plein et puisse bénéficier de l'aide financière du gouvernement comme s'il était à temps plein, s'il est inscrit à deux ou trois cours. Est-ce que c'est exact?

M. Ryan: Oui. Dans le projet de loi, il y a une section qui prévoit l'institution d'un programme spécial pour les étudiants à temps partiel. Maintenant, nous avions prévu, dans l'énoncé d'orientations, certaines modalités de ce programme qui donnent lieu à des critiques nombreuses, à des difficultés structurelles aussi. Il faut revoir ça de plus près, il faut préciser davantage la nature possible de ce régime, mais ça ne sera pas un régime qui consisterait à traiter l'étudiant à temps partiel comme un étudiant à temps complet, mais qui lui donnerait accès à une forme d'aide centrée sur les coûts occasionnés par les activités directement reliées aux études. Ça va prendre un certain temps avant qu'on puisse l'instaurer parce qu'on n'est pas prêt à le définir tout de suite, dans toutes ses modalités Ça va prendre peut-être, je ne le sais pas, une certaine période.

On me signale que, dans le cas des étudiants handicapés - je m'excuse, j'oubliais cet élément-là - pour eux, celui qui est étudiant à temps partiel pourrait être considéré comme étudiant à temps plein. Ça, c'est une disposition...

La Présidente (Mme Hovington): Ça répond à votre question?

M. Ryan: ...qui est dans l'énoncé d'orientations et que j'oubliais.

M. Fleury: Je vous remercie beaucoup et je tiens à féliciter le gouvernement de nous rendre non éligibles au prêt. Je pense que la nature même de la déficience fait que ce prêt-là, il serait, de toute façon, difficile à rembourser et presque impossible à rembourser.

M. Ouellet: Si on prend pour acquis... Si on considère, pour l'instant, avec les statistiques qu'on a, que plus de 90 % de notre population n'a actuellement pas d'emploi, je me demande comment les gens feraient pour rembourser le prêt.

M. Picard: À moins de rendre les mesures plus coercrtives en ce qui regarde l'embauche des personnes handicapées.

La Présidente (Mme Hovington): M le ministre, si vous voulez compléter votre réponse.

M. Ryan: Oui. Je voudrais simplement dissiper une ambiguïté Là, vous tombez sous le régime général des prêts et bourses avec les modifications que nous apportons, donc vous seriez admissibles au prêt d'abord, comme tout le monde, et ensuite à la bourse. Je ne veux pas qu'il y ait de malentendu. Il y aurait les mesures spéciales, en plus, pour les besoins spéciaux. Mais je crois comprendre que votre position, c'est exactement le contraire.

M. Ouellet: C'est exactement le contraire. J'imagine difficilement comment une personne sans emploi pourrait vous rembourser un prêt après ses études, à moins qu'on ne lui garantisse du travail après. Mais je pense que ça ne relève peut-être pas nécessairement des obligations du ministère de trouver des emplois à des personnes quand elles finissent leurs études. Donc, je ne vois vraiment pas, à moins de consolider des faillites, vraiment pas comment.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: En tout cas...

M. Fleury: Juste pour clarifier. Vous dites que... Moi, j'ai fait des études er, arts plastiques, à l'Université du Québec, l'an dernier. J'ai eu une bourse de 5300 $. Je n'ai pas de prêt à rembourser. Est-ce que vous dites qu'à présent j'aurais un prêt à rembourser?

M. Ryan: Oui, c'est ça qu'est l'économie du nouveau régime.

M. Fleury: C'est ça l'économie?

M. Ryan: Oui. Je dis l'économie en ce sens que c'est la structure du nouveau régime. C'est à ça que ça conduit parce que, si une personne a un handicap, mais qu'en même temps elle a les ressources matérielles disponibles soit de par sa famille ou en raison d'autres éléments qui échappent à notre connaissance ou à notre contrôle, c'est normal qu'elle assume une obligation de prêt comme une autre. Ce n'est pas parce qu'elle est handicapée qu'elle est nécessairement pauvre.

M. Fleury: Mais elle ne doit pas être riche du fait que ses parents ou son conjoint sont autonomes financièrement. Si la personne n'a pas son autonomie financière... Je n'ai pas lu ça dans le projet de loi. C'est une très mauvaise surprise.

M. Ryan: Oui.

M. Fleury: Je trouve que c'est totalement déconnecté de la réalité.

M. Ryan: Très bien. Mais je suis content qu'on le précise quand même. Je vais regarder la question de nouveau, de notre côté. On se rencontre pour voir clair dans les implications du projet de loi, on va l'examiner attentivement, c'est pour ça que je voulais que ce soit net et qu'il n'y ait pas de malentendu.

La Présidente (Mme Hovington): M. Ouellet.

M. Ouellet: Je suis bien content qu'on en parle, ce matin, parce que c'est la première nouvelle que j'en ai. Je suis très heureux qu'on en parle pour justement essayer de faire la lumière là-dessus un peu. Comme je le disais tantôt, je me demande comment les gens... En tout cas, moi, personnellement, je me demande comment je le rembourserais, mon prêt. Qu'est-ce que je serais obligé de faire? Je ne le sais pas. Je n'en ai aucune idée.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Est ce que vous...

M. Ryan: Oui, je vais ajouter juste un élément. À supposer qu'une personne ait contracté une dette par la voie de l'emprunt sous l'empire du régime d'aide financière, qu'elle termine ses études, pendant qu'elle fait ses études, elle ne rembourse pas son prêt; c'est le gouvernement qui paie de l'intérêt là-dessus et le remboursement va après. À supposer qu'elle ait maintenant terminé ses études et qu'elle n'ait pas d'emploi, encore là, c'est le gouvernement qui paie de l'intérêt sur la dette. Et, si elle n'a pas d'emploi, cette personne-là, c'est le gouvernement qui assume la dette auprès de l'institution financière. Mais si elle a des revenus et si elle a les ressources pour s'acquitter de ses obligations, je ne pense pas qu'on agirait dans le respect de la dignité des personnes en disant: Non, on fait une exemption ou une exonération générale.

M. Ouellet: Sur le régime général, j'aurais peut-être une petite question juste d'intérêt.

La Présidente (Mme Hovington): Rapidement parce que le temps est maintenant...

M. Ouellet: Oui, oui. Dans le régime général, les personnes...

La Présidente (Mme Hovington): ...vous prenez du temps sur l'Opposition.

M. Ouellet: ...qui ont terminé leurs études et qui sont prestataires d'aide sociale, est-ce qu'elles doivent rembourser leur prêt?

M. Ryan: Pardon?

M. Ouellet: Les personnes qui sont sous le régime général actuellement, en 1990, qui sont maintenant prestataires d'aide sociale, qui ont gradué, admettons, en mai 1989 et qui sont présentement à la recherche d'un emploi et prestataires d'aide sociale, est-ce que ces personnes remboursent actuellement leur prêt?

M. Ryan: Non. M. Ouellet: Non?

M. Ryan: Non. C'est le gouvernement qui rembourse a leur place, quand ils sont sur l'aide sociale.

M. Ouellet: C'est ce que je voulais savoir.

M. Ryan: Oui, c'est ça.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole. (12 h 45)

M. Gendron: Oui, je voudrais vous remercier

chaleureusement d'être venus. C'est toujours un peu difficile parce que ça fait la preuve, quand on est obligé d'apporter des commentaires particuliers dus à la déficience que vous avez, que, contrairement aux volontés répétées des gouvernements, vous êtes loin encore de la notion de chance égale. Je me rappelle la publication d'une réflexion sur les personnes souffrant d'un handicap, que ce soit un handicap à caractère général ou un handicap visuel, il y avait une belle réflexion qui disait: On veut donner aux handicapés, quelle que soit la nature de leur handicap, des chances égales. J'ai l'impression que ça deviendra vrai quand on vous considérera comme tout le monde et qu'on aura les mêmes commentaires qu'à tout le monde. Là, on dit: On vous accueille avec sympathie. Je ne fais pas de reproches, je fais juste constater que ça fait une situation qui est troublante en soi.

À tout événement, si on avait joué les règles comme d'habitude, rapidement, j'aurais dit: Si c'est le gouvernement - et c'est le cas - qui est très interpellé dans ce mémoire-là, moi, je n'aurais pas d'objection, après les quelques commentaires que je veux faire, à vous laisser la parole pour vous donner l'occasion de clarifier avec le ministre certaines situations qui m'ap-paraissent confuses Que le ministre vous indique tout de go qu'il aime bien vos recommandations, mais qu'il ne peut pas en tenir en compte - parce que c'est à peu près ce qu'il a dit - dans le régime universel, c'est un choix qu'il peut faire mais, au moins, il me semble que vous êtes en droit de questionner le choix qu'il devrait faire, compte tenu de l'insignifiance, entre guillemets - ce n'est pas un jugement que je porte, ça veut dire peu significatif, insignifiant - du nombre de concernés. Alors, comme il n'y a à peu près qu'une centaine, quelque 100 personnes concernées, le ministre devrait être très ouvert et très attentif aux suggestions que vous lui faites parce qu'elles sont opportunes, requises, elles correspondent à une situation de fait bien décrite.

Quand M. Ouellet nous dit: Écoutez, moi, j'ai fait mon baccalauréat en droit et on m'empêche d'être avocat.. Et c'est ça, la réalité, parce qu'il n'y a pas de mesures particulières qui auraient pu lui permettre d'avoir l'assistance financière dont il avait besoin à ce moment-là. Je suis convaincu que le ministre conviendra avec moi qu'il s'agit d'un mauvais choix de société. C'est un mauvais choix de société. C'est une mauvaise utilisation des fonds publics. C'est évident qu'on utilise mal les fonds publics. Si, vous aussi, vous représentez un coût de x milliers de dollars et, à la toute fin, l'État ne se préoccupe pas que cet investissement que l'État a mis en vous, et que vous, vous avez eu l'intelligence, la sagesse, la détermination et le courago, avec toutes les difficultés que vous avez, de vous rendre là et on dit: Bien, écoutez pour des raisons de livres - parce que c'est un peu ce qu'on nous a dit - certains cons jouent le livre, indépendamment du concret. Alors, moi, je ne vais pas plus loin, sauf dire deux remarques: J'ai bien pris connaissance de vos recommandations. Elles sont pertinentes Et on n'a pas le droit, il me semble, de ne pas les prendre en compte quand on sait que ça ne serait pas terriblement coûteux pour l'État québécois mais combien respectueux de votre situation réelle. Écoutez, les embûches pour des étudiants qui n'ont, selon leur prétention, pas de déficience sont déjà tellement nombreuses qu'imaginez, pour ceux qui ont des déficiences observables, qu'elles soient visuelles ou autres, il faut absolument réduire, atténuer ces embûches additionnelles. Et vos cinq... Il y en a six mais, je veux dire, il y en a cinq, plus particulièrement, qui retiennent complètement mon attention parce que je considère qu'il s'agit là de demandes complètement légitimes et opportunes et que si, pour des raisons d'économie - qui est un beau grand terme - générale d'une pratique on ne peut les considérer à l'intérieur du régime général... Ça, c'est le gouvernement qui décide mais, à tout le moins, qu'il le considère à l'intérieur de dispositions spécifiques et particulières vous concernant pour que vous ayez au moins ces applications-là

Donc, moi, je conclus et, pour le temps qui m'est imparti, puisqu'il me reste du temps, si vous voulez le prendre... Jocelyne aurait peut-être une question, ma collègue députée de Terrebonne. Je fais juste vous indiquer que, moi, en ce qui me concerne, vous devriez être comme vous l'avez été: incisifs auprès du gouvernement et exigeants. Parce que je ne trouve pas que vous l'êtes fondamentalement, compte tenu des difficultés que présente pour vous un handicap visuel et, en particulier, au chapitre de la contribution du conjoint. Moi-même ayant une couple de personnes très proches de ma famille, je sais combien d'efforts ont été faits par des membres de la famille immédiate pour soutenir, aider des personnes qui souffrent d'un handicap visuel. Et, déjà là, il y a une contribution beaucoup plus forte que celle que mécaniquement on voudrait continuer d'exiger de vous parce qu'il y a une formule qui l'exige. Et, en ce sens-là, j'espère que votre courage et votre détermination réussiront à convaincre le gouvernement actuel, le ministre de l'Éducation qu'il y a lieu d'instaurer des mécanismes pour que vos demandes soient agréées.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente Très brièvement, votre contribution est essentielle à cette commission parce qu'elle nous fait vraiment prendre conscience des besoins particuliers vécus par les personnes que vous représentez et qu'on est souvent porté à oublier Je voudrais juste renforcer deux points. Compte tenu du nombre de

personnes touchées, je crois sincèrement que les montants que la société vous accorderait pour répondre à vos recommandations seraient rapidement récupérés à long terme, à cause de la formation que vous pourriez aller chercher.

Le deuxième point que je voudrais souligner davantage, c'est lorsqu'on parle de la contribution des parents. Vous dites qu'ils assument déjà des responsabilités importantes; moi, j'irais plus loin. Ils ne font pas qu'assumer des responsabilités importantes, ils épargnent même des coûts à la société. Je vais jusque-là. Ce n'est pas seulement assumer, mais épargner. On vous laisse le temps pour vos autres recommandations.

M. Gendron: Oui, à vous la parole.

La Présidente (Mme Hovington): C'est à vous. M. Fleury.

M. Fleury: J'aimerais aussi parler de l'égalité. Je ne considère pas qu'une personne handicapée visuelle est égale à une personne clairvoyante ou voyante parce qu'elles ont toutes deux un niveau d'endettement égal. Je pense que ça prend aussi la capacité de regarder des manières de rembourser égales. On parle plus de mesures d'équité que de mesures d'égalité, parce que, quelque part, une personne qui voit et une personne qui ne voit pas, ça ne se compare pas.

M. Gendron: Rapidement, parce que c'est moi qui ai évoqué cette situation. Je ne sais ce qui est arrivé, mais il me semble que vous l'avez pris à l'envers. C'est justement...

M. Fleury: Je parle plus de ce que M. Ryan disait tantôt...

M. Gendron: O. K.

M. Fleury:... à savoir qu'on soit, nous autres, mis sur le même pied que tout le monde au sujet de rembourser des prêts.

M. Gendron: Là, vous avez bien compris. M. Fleury: O. K.

M. Gendron: Donc, vous faites bien de questionner cet aspect, ça n'a pas d'allure.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Fleury, vous avez la parole. Vous avez encore une question à poser au ministre peut-être ou un éclaicissement à demander?

M. Ouellet: C'est vraiment un éclaircissement. L'étudiant qui poursuit des études postsecondaires, qui est clairvoyant ou qui est voyant, peut travailler chez Steinberg la fin de semaine. J'aimerais aller empaqueter des sacs, mais Steinberg ne m'engagera pas et Provigo non plus.

Donc, le revenu d'appoint que l'étudiant va chercher avec un travail complémentaire, moi, je ne peux pas aller le chercher. Je me ramasse avec un revenu qui est moindre que mon voisin. Donc, si on parie d'égalité, je ne comprends plus.

La Présidente (Mme Hovington): M. Fleury.

M. Fleury: Est-ce que c'est une intention affirmée du gouvernement de faire en sorte que des personnes handicapées visuelles soient sur le même régime de prêts que tout le monde?

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: J'ai répondu tantôt.

M. Fleury: Quand, M. le ministre, va-t-on voir les mesures discrétionnaires écrites sur papier pour que je puisse informer les personnes handicapées visuelles de l'existence de telles mesures? Parce que, dans le projet de loi, il n'a jamais été question de ça et nous allons nous y opposer vertement.

La Présidente (Mme Hovington): Est-ce qu'il y a autre chose?

M. Fleury: Je veux savoir où sont les mesures discrétionnaires pour que je puisse informer les gens. Je veux savoir ce qui en est du statut des personnes handicapées visuelles en situation d'études. J'aimerais avoir des écrits de ça. Je veux les publiciser. J'ai un bulletin d'information bimestriel. Je veux faire connaître ces mesures aux gens. Je pense que c'est important, l'éducation, et je pense que c'est important d'avoir des mesures d'équité...

M. Ryan: C'est peut-être l'occasion...

M. Fleury:... concrètes et réalistes en termes d'accroître le niveau de scolarité de ces personnes.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre. Vous avez la parole.

M. Ryan: Déjà, pour la présente année, les sommes consacrées à ces besoins spéciaux des personnes handicapées et plus particulièrement des personnes handicapées visuelles s'élèvent à plusieurs centaines de milliers de dollars. Lorsque nous déposerons ies crédits du gouvernement, dans quelques semaines, je serai en mesure d'indiquer avec précision les sommes prévues aux fins de ce programme pour l'année 1990-1991. Ça me fera plaisir de vous envoyer une note d'information là-dessus, pour que vous puissez Informer vos membres.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Est-

ce qu'il y a quelque chose d'autre?

M. Fleury: Juste un commentaire. Je pense qu'on parlait tout à l'heure d'environ 140 personnes handicapées visuelles qui étaient aux études au Québec.

M. Gendron: 138, oui.

La Présidente (Mme Hovington): Le ministre va ressortir le chiffre exact.

M. Fleury: Je pense que, de fait, ce nombre est appelé à décroître dramatiquement si les gens sont contraints à rembourser des prêts et à voir des agents de réclamation qui viennent sonner à toutes les deux minutes.

Puis je reviens sur le fait de l'exonération pour dire que le ministère a, de fait, procédé à ces exonérations. Ça fait que, mol, je veux voir ces mesures-là écrites. Je veux que les aveugles soient traités de manière égale, au moins entre eux autres, comme ç'a déjà été fait. Je pense que ça mérite d'être dit, je pense que ça mérite d'être écrit et je pense que ça mérite d'être réaffirmé, ça. C'est juste une mesure d'équité sociale.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: J'ai pris bonne note de votre requête légitime et, dès que les crédits auront été déposés, nous serons en mesure de fournir les explications sur les modalités suivant lesquelles cette aide-là sera disponible pour la prochaine année.

M. Gendron: M. le ministre, si vous permettez, très amicalement et sincèrement, il me semble que la demande ne porte pas uniquement sur les chiffres. La demande qu'il vous fait - je pense que c'est la quatrième fois qu'il la répète - c'est: Y a-t-il moyen que, comme ministre, vous preniez l'engagement de faire connaître par écrit les règles particulières...

M. Ryan: C'est ça que je viens de répondre. C'est à ça que je viens de répondre.

M. Gendron: Non, vous venez de répondre que, lors des crédits, vous allez faire connaître les chiffres, les sommes d'argent que vous mettrez là-dessus.

M. Ryan: Ah non! Puis les modalités suivant lesquelles on pourra avoir accès à ce programme.

M. Gendron: Non, mais puisque, M. le ministre, présentement, il y a déjà des handicapés visuels qui bénéficient d'une forme d'aide...

M. Ryan: Ils le savent très bien.

M. Gendron: Mais s'ils le savaient très bien, ils ne nous demanderaient pas les règles sur lesquelles seront basées l'analyse particulière de leur situation.

M. Ryan: Non, je pense que les personnes concernées sont très bien informées.

M. Gendron: Ce n'est pas ce qu'on entendait, mais ce n'est pas grave.

M. Ryan: Oui, puis on les tiendra informées avec encore plus de...

M. Fleury:... d'information. M. Ryan: Pardon!

M. Gendron: Ça fait trois semaines que j'entends des faussetés, ça fait que ça ne me surprend pas.

La Présidente (Mme Hovington): Excusez-moi, c'est le ministre qui avait la parole.

M. Gendron: C'est parce que je la lui ai donnée.

M. Ryan: Regardez, ces cas-là, j'en ai, en tout, 148. Ils ne sont pas arrivés par accident au ministère. Ils sont arrivés par les voies de l'information qui leur était accessible, de toute évidence. Puis s'il y avait des cas qui n'avaient pas eu accès à cette aide, je vous serais bien reconnaissant de me les signaler.

La Présidente (Mme Hovington): M. Fleury.

M. Fleury: J'aimerais revenir sur le... On parle beaucoup d'égalité depuis tout à l'heure. Puis, moi, j'ai noté, au début - puis personne n'a relevé ça - le fait que les gens, on ne communique pas avec eux autres dans le mode de communication qui leur est accessible. Je pense que la première des choses, puis le minimum, c'est d'au moins envoyer la documentation relative aux prêts et bourses, de même qu'aux besoins particuliers, de même que toutes les mesures discrétionnaires, écrites ou non écrites, dans un mode de communication accessible aux gens.

Si les gens lisent le braille, que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science procède à un envoi en braille de cette documentation. Ça, c'est une mesure d'égalité. Nous autres, on envoie un bulletin d'information sur cassettes, en braille et en gros caractères. Je pense que c'est strictement au niveau dela décence de pouvoir communiquer dans un mode de communication faisant en sorte que les gens ne soient pas obligés d'aller solliciter l'assistance d'une tierce personne exprès pour se faire lire ce qui leur est adressé à eux spécifiquement,

pour la poursuite de leurs études à eux, pas de la personne qui est appelée, à laquelle on dit: Veux-tu me lire telle affaire, là, je ne suis pas capable de la lire. Ça s'adresse à moi, ça. C'est mon argent, ça. Ce sont mes études que je poursuis. C'est une question d'avancer dans la vie aussi.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Ryan: Vous savez que le gouvernement, pour l'adaptation des instruments pédagogiques aux besoins des handicapés visuels, dépense déjà des sommes considérables. Les coûts sont très élevés et bien au-delà de ce que nous pouvons discuter ce matin. Puis je vous dis que, si nous faisons face à des besoins qui concernent, disons, 200 personnes dans le secteur postsecondaire, il y a des moyens d'assurer que l'information va être transmise. Ce ne sont pas nécessairement des publications de choses qui vont être imprimées jusque dans des détails non plus. Il y a d'autres moyens souvent plus directs et plus efficaces.

Je vous dis que l'information à laquelle vous avez droit sera mise à votre disposition. Et je ne suis pas pour prendre d'engagement quant aux modalités de transmission de cette information-là ce matin. Vous le comprendrez facilement. Mais vous avez votre association. En plus de ça, s'il y a des choses qui ne sont pas claires, vous nous le signalerez puis nous allons essayer de corriger ces choses immédiatement.

J'ajoute, pour l'information des membres de la commission et des délégués qui viennent nous voir, que nous venons justement de publier, au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, ces jours derniers, une brochure intitulée "Les personnes handicapées inscrites dans les universités québécoises, situation et perspectives". On a un tour d'horizon très détaillé de la situation qui existe à ce point de vue là. Vous allez en prendre connaissance, puis s'il y a des remarques à faire quant à des améliorations possibles, nous serons toujours très intéressés à en prendre connaissance.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, en guise de conclusion, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Merci beaucoup encore une fois. Mais je pense que vous êtes en droit d'insister. C'est moi qui ai évoqué, effectivement, qu'on n'est pas dans un contexte de chances égales si on ne permet pas, à tout le moins, de tenir compte spécifiquement, par une évaluation plus fine, de votre situation. Manifestement, les handicapés souffrant de déficience visuelle, quand on parle de poursuite d'études, ne sont pas dans les mêmes conditions que la clientèle régulière et, dans ce sens-là, vous avez des droits que, normalement, vous vous devez de revendiquer. C'est ce que vous êtes venus faire et j'espère que le gouvernement aura une écoule favorable parce que les besoins sont réels, facilement compréhensibles, puis j'espère qu'il y aura des suites concrètes qui seront données.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre.

M. Ryan: Merci, encore une fois, puis on va examiner vos représentations avec une attention toute particulière. Veuillez compter sur la compréhension du gouvernement pour faciliter la réalisation de l'objectif très noble dont vous êtes venus nous entretenir ce matin, qui est celui de l'accès aux études, à tous les niveaux, pour les personnes pouvant être affectées d'un handicap visuel.

La Présidente (Mme Hovington): Merci au Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec, au nom des membres de la commission de l'éducation, de votre mémoire. La commission de l'éducation suspend ses travaux, donc, jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

(Reprise à 15 h 10)

Le Président (M. Gobé): Si vous voulez reprendre place, la commission de l'éducation va reprendre ses travaux concernant la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. À l'ordre, s'il vous plaît, M. le député. J'appellerais maintenant l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels, s'il vous plaît.

J'aimerais informer les membres de la commission et les témoins qui vont venir déposer, que M. le ministre de l'Éducation sera en retard de quelques minutes. Il a actuellement une rencontre importante. Il m'a fait savoir qu'il allait nous rejoindre dans les meilleurs délais. Je vous demanderais donc de bien vouloir vous présenter et de procéder à l'explication de votre mémoire.

Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels

Mme Laurin (Élyse): D'accord, merci monsieur. Je saluerais M. le ministre, mais je le ferai tantôt.

Mesdames, messieurs, je me présente: Élyse Laurin, directrice générale de l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels. J'aimerais présenter des parents de l'Association, mais d'abord, Marc Frechette, un jeune handicapé visuel de 19 ans qui fréquente

présentement le collégial, il est en deuxième année. Ensuite, j'aimerais présenter son père, Normand Frechette, qui est aussi vice-président de l'Association. Ces deux personnes viennent de la région de Trois-Rivières. J'aimerais finalement présenter Huguette Turcotte, mère de Valérie, 14 ans, qui est atteinte de cécité totale et qui est intégrée à l'école secondaire ici, dans la région de Québec.

Le Président (M. Gobé): Mme Laurin. MM. Frechette et Mme Turcotte, je vous souhaite la bienvenue à cette commission et je vous passe maintenant la parole pour présenter votre mémoire.

Mme Laurin: D'accord. Je vais faire une brève présentation de l'organisme, ensuite chacun de nous prendra la parole.

L'AQPEHV est un organisme provincial de parents d'enfants handicapés visuels qui existe depuis 1980. Nous sommes donc, cette année, dans notre dixième anniversaire de fondation. L'Association concentre ses efforts sur la promotion et l'entraide. Elle vise particulièrement la mise sur pied et le maintien de services publics de qualité pour l'ensemble des jeunes déficients visuels de 0 à 21 ans, et ce, partout au Québec.

L'AQPEHV répond aux besoins d'information des parents. Elle publie cinq fois par année un bulletin de liaison qui s'appelle "Le Clairvoyant" et qui contient nouvelles, opinions et communiqués. Elle favorise aussi les rencontres de parents. En 1986, elle a publié le guide "Mémoires Vives" à l'intention des parents et de toute personne concernée par l'avenir des enfants déficients visuels.

L'AQPEHV intervient auprès des établissements et des ministères pour faire mieux connaître les besoins des jeunes qu'elle représente. Les problématiques qui retiennent plus son attention sont celles qui se rapportent à la scolarisation des enfants déficients visuels et aux services d'adaptation et de réadaptation, dont la stimulation précoce.

En 1987-1988, l'AQPEHV a été très impliquée pour avoir une meilleure disponibilité du matériel scolaire adapté nécessaire pour tous les élèves fonctionnellement aveugles et certains élèves fonctionnellement voyants, c'est-à-dire, d'avoir accès à du matériel scolaire adapté, braille ou autre, et/ou à du matériel agrandi. L'AQPEHV a d'ailleurs pris une position là-dessus.

En 1988-1989, elle a aussi été très impliquée dans l'organisation des services de soutien suprarégionaux à l'école régulière. Et tout récemment, en 1989, l'AQPEHV a été très impliquée dans le projet de loi 107, la Loi sur l'instruction publique.

Selon les données de 1988 fournies par les centres d'adaptation et de réadaptation, il y aurait, au Québec, près de 1000 enfants de 0 à 18 ans dont la vision correspond à la définition légale du handicapé visuel. Dans ce groupe de 1000 enfants, la majorité sont des enfants appelés fonctionnellement voyants. Ces enfants utilisent leur vision. Ils peuvent lire et écrire l'imprimé conventionnel, mais, selon leur vision, ils devront utiliser des aides optiques pour la vision de loin ou la vision de près - on peut utiliser un télescope, une loupe, etc. - et, dans certaines situations d'apprentissage, des caractères d'imprimerie agrandis.

Le nombre d'enfants fonctionnellement aveugles est beaucoup plus restreint. On a évalué, en 1988, le nombre d'enfants fonctionnellement aveugles qui suivent les programmes académiques réguliers dans nos écoles québécoises, spécialisées ou régulières, à moins de 50 enfants. Ces enfants n'ont aucune vision ou n'utilisent pas le peu qu'il leur reste. Ils ne peuvent donc pas lire l'imprimé courant et devront utiliser des médias substituts comme le braille, les graphiques en relief et des aides technologiques. Aussi, ils devront faire appel à des preneurs de notes ou à des lecteurs.

La plupart de ces enfants ont droit à des aides visuelles, dans le cadre d'un programme qu'on appelle AMEO, Aide mécanique, électronique ou optique, qui est distribué par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Cependant, ils n'ont pas d'autres recours pour recevoir une deuxième aide visuelle nécessaire à la poursuite de leurs études.

Je laisserais maintenant la parole à Huguette Turcotte.

Le Président (M. Gobé): Madame.

Mme Turcotte (Huguette): Oui, c'est moi, monsieur.

Le Président (M. Gobé): Mme Turcotte, vous avez maintenant la parole.

Mme Turcotte: M. le Président, mesdames, messieurs, ayant vécu très difficilement la situation où ma fille, qui est intégrée en sixième année du primaire, n'avait pas accès à un deuxième versabraille, je peux vous assurer que l'aide financière qui nous avait été allouée par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science était capitale pour l'intégration scolaire d'une jeune enfant aveugle, et ceci, tant au primaire qu'au secondaire.

Sachez d'abord qu'un appareil comme le versabraille permet à l'élève aveugle de vaquer à ses devoirs et responsabilités d'étudiant d'une façon normale et non marginale. Je précise ici la grande quantité de travaux scolaires que l'enfant aveugle a à faire par les soirs, ce qui l'oblige à trimballer son versabraille. L'importance de cet appareil n'est plus à démontrer et ses preuves sont amplement laites.

Au primaire et au secondaire, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science doit continuer d'aider les jeunes élèves aveugles à se procurer un deuxième versabraille pour des raisons pratiques, humaines et économiques. D'abord, du côté pratique, il est impossible pour un jeune enfant du primaire ou encore du secondaire de transporter quotidiennement de la maison à l'école, et vice versa, un sac rempli de livres scolaires en braille et un versabraille, car le poids total se situe aux environs de 35 à 40 livres pour le versabraille, compte tenu aussi de la fragilité de l'appareil, car c'est un ordinateur, et de telles manipulations provoqueraient des bris fréquents.

Dans notre cas, nous avons fait réparer le versabraille trois fois en l'espace de cinq mois à cause des problèmes dus au froid ou des problèmes de manipulations fréquentes. En plus du risque de bris par manipulations fréquentes, le jeune élève aveugle risque de tomber à cause de la surcharge de poids, surtout en hiver, à cause de la présence de la neige et de la glace. De plus, une telle surcharge peut, selon les spécialistes, provoquer des problèmes de posture, particulièrement en période de croissance.

Par ailleurs, nous considérons que c'est une lourde responsabilité pour un élève du primaire ou du secondaire d'assurer le transport et la protection d'un ordinateur dans ses déplacements en dehors de l'école. Dans le cas de ma fille, elle devait marcher sur une distance de 2,2 kilomètres pour se rendre à l'école.

Selon des informations obtenues auprès des parents de l'AQPEHV, on estime que la plupart des enfants ne peuvent trimballer boîle à lunch, canne, manuels scolaires et versabraille en même temps et que, bien souvent, le poids ne peut qu'être malsain pour les enfants, généralement de petite taille à cet âge, sans parler des bris éventuels causés par le froid et les chocs. Or, la réparation d'un appareil causerait un retard d'apprentissage à l'élève qui en serait privé.

Finalement, nous croyons qu'il faut continuer d'attribuer une aide financière directement à l'élève pour éviter que le ministère de l'Éducation n'ait à financer un tel achat chaque fois que l'élève change de commission scolaire ou lorsqu'il arrive au cégep ou à l'université. Dans le cas de ma fille, elle a changé de commission scolaire en arrivant au secondaire et son versabraille l'a suivie, compte tenu qu'il lui avait été attribué personnellement. Lorsqu'elle arrivera au cégep, ce sera la même chose. Nous croyons que c'est ainsi plus économique pour le gouvernement québécois et que cela éviterait que des versabrailles restent sur les tablettes dans différentes institutions d'enseignement.

Pour conclure, je vous rappelle que l'aide financière du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science a été très importante dans le cas de ma fille, dont la situation est similaire à beaucoup d'autres qui rêvent à une intégration scolaire un peu partout au Québec.

Un changement d'orientation du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science pour l'aide financière aux élèves souffrant de cécité ne serait pas rentable pour le gouvernement et hypothéquerait grandement les cas actuels et futurs d'intégration scolaire. Je vous remercie.

Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous avez terminé votre présentation?

Mme Laurin: Non, il y aurait M. Frechette.

Le Président (M. Gobé): M. Frechette, vous avez maintenant la parole.

M. Frechette (Normand): Merci. M. le Président, mesdames et messieurs, par cette courte présentation, je voudrais souligner l'importance du projet de loi 25 pour les enfants handicapés visuels. Il n'est pas question ici d'intervenir sur la totalité des articles de la loi. Je m'attarderai plutôt aux principes qui favorisent l'intégration scolaire et sociale des étudiants handicapés visuels.

Il faudrait que soient inscrits dans la loi les principes directeurs qui garantissent aux personnes handicapées visuelles l'accès à des bourses pour financer l'achat de matériel spécialisé et de services spécialisés. L'étudiant handicapé visuel doit souvent fonctionner en braille. Il doit, comme tous les enfants, avoir à sa disposition manuels scolaires, dessins, graphiques et autres outils. L'étudiant doit aussi communiquer avec son titulaire et ses compagnons de classe. On doit donc mettre à la disposition de ce dernier une panoplie de moyens de communication qui sont, pour la plupart, très dispendieux. Je pense ici aux versabrailles, télévisionneuses, logiciels d'agrandissement de caractères, services de lecteurs et preneurs de notes, traductions braille, etc.

Pour un étudiant fonctionnellement aveugle, il est extrêmement difficile, sinon impossible, de poursuivre ou même d'entreprendre des études s'il n'a pas accès au matériel nécessaire. La majorité de ces appareils de communication et de ces services spécialisés n'est pas disponible dans les écoles. D'autres - quelques-uns - sont alloués par les centres suprarégionaux dans le cadre du programme AMEO. Il n'en demeure pas moins qu'un nombre important d'outils d'apprentissage ne sont accessibles qu'en utilisant le service des bourses pour personnes handicapées.

Jusqu'à maintenant, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science attribuait des bourses pour l'achat d'équipement spécialisé non seulement au niveau collégial et universitaire, mais également aux niveaux primaire et secondaire. Or, dans le projet de loi, nous n'avons pas retrouvé la volonté du ministère de

rendre disponible ce service aux étudiants des deux premiers niveaux scolaires.

En résumé, il est important que la loi garantisse l'accès aux équipements et services spéciaux requis par les étudiants handicapés visuels, ceci a tous les niveaux d'enseignement et nonobstant les revenus des parents. Il en va de l'avenir de nos enfants. Je remercie les membres de la commission.

Le Président (M. Gobé): Est ce que vous avez terminé?

Mme Laurin: Non, il reste Marc Fréchette; et moi, je reprendrai la parole.

Le Président (M. Gobé): Alors, M. Marc Fréchette, vous avez maintenant la parole.

M. Fréchette (Marc): Je voudrais sensibiliser les membres de la commission parlementaire au vécu d'un étudiant handicapé visuel dans le système scolaire actuel. J'espère ainsi vous démontrer l'importance de rendre accessible un tel système de bourses permettant de financer des équipements et des services spécialisés. J'ai 19 ans et j'étudie actuellement en deuxième année du niveau collégial. J'espère entreprendre des études universitaires dès janvier 1991, soit en informatique ou en mathématiques. J'ai toujours été intégré dans une classe régulière et j'ai réussi à suivre le rythme des autres étudiants parce que je dispose d'aide matérielle et humaine indispensable à mon cheminement scolaire.

Comme vous l'avez sans doute remarqué, je suis handicapé visuel. J'ai ce que les médecins appellent une rétinite pigmentaire qui, comme vous le savez sans doute, est une maladie évolutive. Dès la sixième année du primaire, j'ai dû avoir recours à certains appareils tels télescope, agrandissement de caractères et dictionnaires adaptés. Étant alors fonctionnellement voyant, peu de matériel spécialisé m'était nécessaire, quoique indispensable. Au niveau secondaire, ma vue se détériora de nouveau.

Mme Laurin: Marc apprend le braille depuis peu de temps, alors...

M. Fréchette (Marc): Je n'arrivais plus à voir au tableau, ni à lire un imprimé ni à écrire convenablement. Une nouvelle évaluation de ma vision s'imposait et, dorénavant, je devais utiliser de nouveaux appareils qui s'avéraient beaucoup plus nombreux et complexes Avec ces derniers, je ne distinguais toujours rien au tableau, mais je pouvais consulter mes livres ou lire les notes de cours d'un camarade. La télévisionneuse, appareil qui est utilisé pour grossir les caractères, est un objet très lourd, de sorte qu'il fallait la laisser soit à l'école, soit chez moi. Heureusement, une deuxième télévisionneuse m'était octroyée. Je crois que je fus l'un des premiers à bénéficier de cette nouvelle politique de la Régie de l'assurance maladie.

L'achat d'un ordinateur défrayé par mes parents, parce que cet équipement n'était pas subventionné par le système de bourses pour étudiants handicapés, fut l'acquisition la plus importante pour la poursuite de mes études. En fait, je ne saurais comment fonctionner sans l'informatique. Enfin, je pouvais écrire sans que cela exige des efforts prolongés. La Régie de l'assurance-maladie me prêta un ordinateur portatif, et les périphériques nécessaires furent achetées par mes parents. J'avais un ordinateur à l'école et un autre à la maison. C'était indispensable et stimulant.

Me voilà maintenant au collégial. Suite à une nouvelle baisse de ma vision, je dois aujourd'hui fonctionner en braille. Donc, de nouveaux appareils et de nouveaux services spécialisés. La très grande majorité de ces appareils est reliée à des ordinateurs et est très dispendieuse. Je bénéficie de plus d'un service de lecteur et preneur de notes. Ces services et équipements spécialisés ne me sont fournis que par le système de bourses pour étudiants handicapés. Sans eux, je ne vois pas comment je pourrais envisager de poursuivre des études d'une façon efficace. Dans mon cas, c'est ici qu'on constate le caractère indispensable d'un système de bourses pour étudiants handicapés. (15 h 30)

II ne faut pas croire que tout est facile. Une partie de l'été et quelques jours de classe doivent être consacrés à l'apprentissage d'appareils. Je dois composer avec des retards de production de livres sur cassettes et avec des changements de volumes en début d'année scolaire. De plus, on peut multiplier par deux le temps requis pour effectuer des travaux scolaires. Je dois ajouter que, sans l'appui de mes parents, je ne me demanderais pas aujourd'hui dans quel programme universitaire je vais m'inscrire. Appui financier? Bien sûr, mais quotidien, surtout. J'ai maintenant conscience des efforts et du temps requis pour compenser mon handicap. Combien d'énergies ont-ils consacrées à convaincre le milieu scolaire que je pouvais entreprendre et réussir des études, à participer à des réunions avec des professeurs et directions d'écoles, à rechercher des services et à combattre préjugés et laisser-faire! Enfin, une question se pose: si j'avais été fonctionnellement aveugle dès le primaire et avais eu besoin des appareils et services dont je dispose aujourd'hui, aurais-je pu les obtenir?

Je remercie les membres de la commission d'avoir bien voulu recevoir cette courte présentation.

Le Président (M. Gobé): On vous remercie, M. Fréchette. Est-ce que quelqu'un de votre groupe veut maintenant intervenir?

Mme Laurin: Oui. Moi, je vais enchaîner avec la conclusion.

Au ttom des parents que vous venez d'entendre Ici aujourd'hui, au nom de Marc, étudiant handicapé visuel, et des parents d'enfants d'âge scolaire qui vivent avec une limite visuelle sévère, et au nom du conseil d'administration de l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels, je tiens à conclure cette présentation en insistant sur l'importance que le matériel et les services spécialisés soient accessibles aux étudiants atteints d'une déficience fonctionnelle majeure, tant aux niveaux primaire, secondaire, collégial et universitaire.

Par ailleurs, c'est depuis plusieurs années - à notre connaissance, depuis 1981 - que les parents de l'AQPEHV se prévalent d'une politique générale du gouvernement du Québec qui veut rendre tous les niveaux d'études accessibles aux étudiants handicapés désireux de les atteindre, mais dont les ressources financières s'avèrent insuffisantes.

De plus, au primaire et au secondaire, les élèves qui, à cause de la gravité de leur handicap sensoriel, sont incapables de suivre adéquatement les cours offerts par leur commission scolaire, pouvaient à ce jour surmonter cet obstacle en étant pourvus de matériel et de services spécialisés selon leurs besoins particuliers. Ainsi, ils pouvaient recevoir une bourse pour couvrir l'achat de matériel et de services spécialisés nonobstant la contribution des parents ou de ceux qui en tiennent lieu. Jadis subventionnés par l'Office des personnes handicapées du Québec, puisque les établissements ne dispensaient pas cedit matériel ou ces services, ils ont été jusqu'à aujourd'hui couverts par le programme de bourses pour élèves gravement handicapés. Je vais vous montrer. Sûrement que vous les connaissez. Ce sont les manuels qui sont la règle d'attribution pour élèves gravement handicapés, à l'intérieur de laquelle on retrouve des clauses particulières pour les élèves du primaire et du secondaire.

Les élèves pouvaient donc se procurer des appareils et des services spécialisés comme dictionnaire braille, machine à écrire en braille, magnétophone, versabraille, service de lecteurs ou de preneurs de notes. En 1989, les nouvelles demandes de bourses des parents de l'AQPEHV étaient refusées. Les autres qui avaient déjà adressé une demande au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science subissaient un traitement fiscal qui les obligeait à les inclure dans leurs revenus personnels.

À ce compte-là, l'AQPEHV a rencontré le ministre Séguin en mars 1989. Tout récemment, nous avons reçu une confirmation de Bernard Angers, du ministère du Revenu, confirmant que le revenu ne serait pas imposé. C'est ce que vous aviez dit ce matin au regroupement qui n'était pas encore informé. Alors, ça, là-dessus, on vous remercie sincèrement, M. le ministre, ainsi que

M. Séguin.

Ce contexte a donc provoqué une situation d'insécurité et d'attente chez les parents de L'AQPEHV et entraîné des difficultés aux étudiants handicapés visuels, difficultés qu'ils auraient pu surmonter autrement s'ils avaient eu leur matériel ou leurs services spécialisés, parce que, dans ce groupe-là, il y a encore des parents qui n'ont pas accès à ces services-là.

Aussi, nous avons constaté qu'il y avait actuellement un questionnement dans le milieu scolaire relativement à la responsabilité de ce matériel et de ces services spécialisés. À ce sujet, nous croyons que le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science est la meilleure instance qui permette l'accessibilité au matériel et aux services spécialisés en attribuant une bourse via un programme particulier ou autre aux étudiants handicapés, car nous ne sommes pas convaincus, entre autres choses, de la pertinence de la place des commissions scolaires dans l'attribution de ce matériel ou de ces services spécialisés.

Compte tenu du faible taux de prévalence des élèves fonctionnellement aveugles - ce matin, M. le ministre parlait de seulement huit élèves intégrés aux niveaux primaire et secondaire, alors je ne crois pas que ce soit un taux élevé d'élèves - alors, la probabilité que plusieurs commissions scolaires intègrent un élève handicapé total dans une de ses écoles est basse. Je ne crois pas que les commissions scolaires s'équiperaient de matériel spécialisé au cas où elles recevraient un étudiant handicapé visuel. Il serait plus économique d'attribuer ce matériel à l'élève.

Compte tenu qu'il y a des commissions scolaires non intégrées, c'est-à-dire qui n'offrent pas à la fois le primaire et le secondaire, il deviendrait onéreux au gouvernement d'ainsi attribuer pour chaque ordre d'enseignement le matériel et les services spécialisés à un même individu, sans oublier qu'il en serait ainsi aux études postsecondaires. De plus, nous croyons qu'il pourrait s'ajouter des délais lourds de conséquences, s'il y avait lieu de faire réparer le matériel spécialisé à un centre suprarégional. Nous demandons donc que le matériel et les services spécialisés soient attribués à l'élève pour l'ensemble de ses études.

Jusqu'à maintenant, vous vous dites probablement que nos propos ont plein de bon sens. Mais n'en pensez pas moins qu'il s'agit là d'une politique qui peut toucher des règlements, des mesures particulières, des ententes entre ministères - le ministère de l'Éducation et le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, par exemple - et qu'il ne s'agit pas d'éléments à inclure dans le projet de loi.

Mais, justement, avec le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants, l'AQPEHV craint le pire, le vide juridique, entre guillemets. Les parents de l'AQPEHV ne voient pas dans le

projet de loi l'esprit ou les principes directeurs qui assurent l'accessibilité au matériel et aux services spécialisés pour les élèves handicapés visuels.

Qu'est-ce qui nous garantit que les enfants déficients visuels auront droit à un autre service d'attribution de ce matériel ou de ces services spécialisés, si le ministère de l'Enseignement supérieur se retire ou s'il n'y a pas d'aide financière pour couvrir ces achats, qu'il n'y a pas de bourse particulière si ce n'est pas le régime général?

Alors, est-ce qu'il y aura des bourses particulières? Qu'est-ce qui nous garantit...

Le Président (M. Gobé): Mme Laurin. Mme Laurin: Oui

Le Président (M. Gobé): Étant donné le temps, je vous demanderais de bien vouloir conclure, s'il vous plaît.

Mme Laurin: II me reste deux paragraphes, monsieur.

Le Président (M. Gobé): Allez-y, madame, je vous en prie.

Mme Laurin: Qu'est-ce qui nous garantit que les parents n'auront pas à faire encore et encore des démarches? Pourquoi nous retire-ton, dans le fond, cet acquis, puisque nous utilisons cette bourse depuis quasiment dix ans? Enfin, pour l'AQPEHV, la loi devrait inclure des garanties fermes autres que le régime général pour tous les niveaux, en ce qui concerne le droit à l'aide financière pour les élèves gravement handicapés.

Nous espérons que vous prendrez nos recommandations en considération et nous vous remercions de votre attention.

Le Président (M. Gobé): Merci, Mme Laurin. Vous avez pu dépasser votre temps sur consentement des deux partis de cette commission. C'était pour le meilleur intérêt de la commission. Je passerai maintenant, pour quelques questions, la parole à Mme la députée de Bourget. Mme la députée de Bourget, vous avez la parole.

Mme Boucher Bacon: Merci, M. le Président. M. le ministre, mesdames et messieurs de l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels. Ma question... Tout d'abord, je tiens à vous remercier de votre mémoire et, aussi, je voudrais faire un aparté pour Marc. Je pense que, dans le mémoire et les discussions qu'il y a eu, Marc est un exemple de courage qui a suscité tout l'émoi nécessaire à un coeur de mère vis-à-vis de son handicap visuel et surtout vis-à-vis de la société et des jeunes québécois qui sont aux études et des décrocheurs. Je pense que c'est un exemple de courage et Marc a toute l'étoffe d'un champion. Je t'en félicite. Merci de ta présentation.

Je passe à une première question, soit Mme Laurin soit Mme Turcotte, vous êtes bien libre de répondre Dans votre mémoire, surtout en page 5, il y a évidemment une distinction entre deux types de handicapé visuel II y a ceux que vous nommez, les enfants fonctionnellement voyants et fonctionnellement aveugles. Pourriez-vous, pour les besoins de la commission, en raison de l'importance de vos propos ici, préciser davantage la nature de cette distinction entre handicap visuel, ce qu'on appelle "voyant" et "aveugle".

Mme Laurin: D'accord. Les enfants fonctionnellement voyants sont des enfants qu'on appelle demi voyants, qui vont utiliser leur vision mais qui ont besoin d'appareillage comme des télescopes ou des loupes pour agrandir les caractères d'imprimerie conventionnels Ils ont besoin évidemment quelquefois d'appareillage comme des télévisionneuses ou des logiciels Vista, qu'on appelle. C'est très spécialisé, le jargon de la définition visuelle. Ils ont besoin d'agrandissement soit sur l'ordinateur ou soit sur le papier et ils ont besoin de matériel scolaire adapte, agrandi. Ça, c'est fonctionnellement voyants. Fonctionnellement aveugles, ce sont les personnes généralement qui utilisent le braille comme mode de communication et qui vont avoir besoin de tablettes braille, de dactylos braille, de versabrailles - c'est l'appareil qui est le plus utilisé, qui est un ordinateur, mais qui permet de transcrire en braille des données et de brancher ça sur une imprimante qui peut le sortir en noir, en caractère imprimé, ou en braille - grosso modo, c'est la différence.

Mme Boucher Bacon: J'avais une sous-question qui n'était pas tout à fait préparée, c'est relativement à ce que Marc disait Si j'ai bien compris, c'est que Marc était handicapé visuel voyant À cause de sa rétinite, il est devenu handicapé aveugle. C'est ça?

Mme Laurin: C'est ça

Mme Boucher Bacon: Et puis il mentionnait, à la toute fin de son discours: Le problème se pose, si j'avais été aveugle au tout début, est-ce que j'aurais bénéficié des mêmes avantages? Est-ce que vous pourriez, encore là, expliquer?

M. Frechette (Normand): Je l'ai vécu pour être son père. Je dois dire que j'ai vu sa maladie évoluer, etc, j'ai vu son intégration scolaire et je peux vous dire qu'au niveau primaire, vous l'avez compris, c'était relativement facile, peu d'appareils, bon. Au niveau secondaire, fonctionnellement voyant; là, fonctionnellement aveugle. Si vous pouviez voir maintenant la panoplie

d'instruments qu'il doit utiliser, surtout il a parlé énormément de l'ordinateur. Très rarement il écrtt à la main, c'est toujours sur ordinateur. Deuxième ordinateur: versabraille, par exemple. Est-ce qu'il l'aurait eu au primaire? Je ne le sais pas. La question se pose. Je ne connais personne qui l'a actuellement. Donc, je ne sais pas s'il l'aurait eu, c'est la question qu'on pourrait se poser. C'est pour ça que j'ai insisté aussi en voulant dire la nécessité que les handicapés aient accès à un programme spécialisé, pour pouvoir financer ce type d'appareil qui est très dispendieux.

Mme Laurin: Peut-être juste pour compléter. C'est que les commissions scolaires n'attribuent pas les appareils spécialisés. Il faut faire des demandes de bourse pour y avoir droit. Dans ce cas-ci, Mme Turcotte a une fille qui l'a eue au primaire secondaire.

Mme Turcotte: Oui. Moi, ma fille est de cécité complète. Elle a été intégrée en sixième année, il y a trois ans. Ce qui a permis cette intégration, c'est qu'on a eu d'abord un premier versabraille, autrement ce n'était pas possible de donner les travaux en noir au professeur ou même elle-même de faire ses travaux. On a dû se battre un bon bout de temps. Ça a pris un an et demi avant qu'on puisse avoir une bourse et qu'elle puisse avoir son deuxième appareil. Comme on l'a souligné tantôt, un seul appareil, le trimballer soir et matin, ça amenait des bris, des retards d'apprentissage, ces problèmes de toutes sortes. Maintenant, nous avons le deuxième versabraille, ce qui fait qu'elle en laisse un au secondaire - parce que maintenant, elle est au secondaire - et l'autre à la maison pour ses travaux qui sont très abondants, en passant. (15 h 45)

Mme Boucher Bacon: Je vous remercie. J'ai une autre question. Dans votre mémoire, la question de dépistage - pour moi, c'est bien important - des handicapés visuels a été évoquée, mais tout à fait légèrement. Sur cette question, nous aimerions croire qu'on a progressé dans notre société québécoise depuis dix ou quinze ans, mais pourriez-vous donner une idée de cette mesure dans cette progression? Comme je crois qu'il y a eu progression et grâce, sans doute, au travail de votre association, j'aimerais que vous élaboriez sur le dépistage, s'il vous plaît.

Mme Laurin: Le dépistage, je vous dirais que ça relève plus, à ce moment là, des professionnels du milieu scolaire ou des spécialistes, des orthopédagogues ou autres qui vont réussir à dépister les étudiants demi-voyants, mais nous, on n'intervient pas au niveau du dépistage. Ce n'est pas notre mandat.

Mme Boucher Bacon: Votre association...

Mme Laurin: Non, c'est ça. Pour en revenir, tantôt, au versabraille, c'est un appareil qui coûte environ 10 000 $. Alors, c'est bien entendu que le parent ne peut pas acheter ce matériel-là. Souvent, quand on parle de matériel spécialisé pour personnes handicapées visuelles, c'est du matériel dispendieux, qui coûte relativement cher, ce qui fait que le parent ne peut pas l'acheter. De toute façon, ce sont des appareils qui doivent être subventionnés par l'État parce que ce sont des appareils qui facilitent l'intégration scolaire. Aussi bien qu'un élève qui a un dictionnaire ordinaire, le handicapé visuel doit avoir droit à un dictionnaire en braille. Dans le fond, ça revient à l'État de subventionner ce matériel. On ne peut pas se procurer ça, nous, ce matériel-là, c'est pour ça qu'on fait appel au gouvernement, à l'État.

Mme Boucher Bacon: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme Laurin, merci, Mme la députée de Bourget. Oui, Mme Turcotte, allez-y, je vous en prie.

Mme Turcotte: Je voulais juste souligner que c'est un appareil qui est essentiel à l'intégration, à la scolarité. C'est dans cette idée, finalement...

Le Président (M. Gobé): C'est quel appareil ça, Mme Turcotte?

Mme Turcotte: L'appareil, le versabraille qui est l'ordinateur.

Le Président (M. Gobé): Le versabraille qui est l'ordinateur.

Mme Turcotte: Qui est l'appareil de 10 000 $ ou 12 000 $, on ne sait pas précisément le prix, mais on souligne l'importance de ces appareils pour l'intégration et la scolarité, tout simplement.

Le Président (M. Gobé): Est-ce qu'il est subventionné par le ministère des Affaires sociales?

Mme Turcotte: Par la bourse.

Le Président (M. Gobé): Par la bourse.

Mme Turcotte: C'est la bourse du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science qui nous a permis d'en avoir un deuxième.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie,

Mme Turcotte. Je passerai maintenant la parole à

M. le ministre de l'Éducation. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Bien, ça me fait plaisir de vous rencontrer. On va poursuivre la discussion qu'on a commencée ce matin. Il y a des points qui sont communs par rapport à ce qu'on a discuté ce matin. Je pense que ce n'est pas nécessaire de les répéter.

Je voudrais mentionner peut-être une pre mière chose. Dans la loi actuelle sur les prêts et bourses, il n'y a rien sur les handicapés.

Mme Laurin: Dans la réglementation M. Ryan: Dans la loi actuelle.

Mme Laurin: Actuelle? Non, il y a juste le temps partie*.

M. Ryan: La loi existante ne parle même pas de ça. Dans le texte du projet de loi 25, nous introduisons le concept étudiant handicapé. Ça, c'est un développement qui vaut d'être souligné, ça n'y était pas avant. On va pouvoir définir, par voie de réglementation, ce qu'est un étudiant handicapé. La porte est ouverte et ça va être plus légal.

Maintenant, on parlait du programme pour les besoins spéciaux, pour l'achat de matériel spécialisé et tout. Il existe une brochure où c'est tout décrit. C'est parce que quelqu'un, ce matin, disait que l'information n'était peut-être pas disponible. M. le député d'Abitibi-Ouest était un petit peu scandalisé de ça. Je voudrais signaler qu'il existe quand même une brochure où c'est bien établi ce qu'est le programme de bourses pour les étudiants gravement handicapés. Là-dedans, il y a toute une section qui traite des besoins particuliers. Alors, tout ça, dans l'ensemble, ça reste et j'ai bien précisé, ce matin, que l'étudiant handicapé à temps partiel...

M. Gendron: II n'avait qu'à le dire.

M. Ryan: ...continuera d'être considéré comme un étudiant à temps plein, comme c'est le cas actuellement déjà, d'après nos pratiques.

Mme Laurin: Je peux peut-être juste préciser, en fait, notre intervention. Nous savons que ça existe et nous l'avons utilisée, d'ailleurs, cette brochure. Il en existe même une depuis 1981. On sait que c'est au niveau de la réglementation, ça, on en est conscients

M. Ryan: Regardez, ce n'était pas pour vous autres, c'était pour mon collègue, le député d'Abitibi-Ouest.

Mme Laurin: D'accord.

M. Ryan: Je sais que vous êtes au courant, vous autres, je ne suis pas inquiet.

Mme Laurin: C'est ça. Et même si ça n'apparaissait pas dans le projet de loi, des articles concernant les personnes handicapées ou autres, nous, ce qui nous fait craindre le pire... En fait, on aimerait que ça apparaisse parce que la réalité, présentement, est à l'effet qu'il y a des parents qui n'ont pas accès à cette bourse, malgré le fait qu'elle soit indiquée dans les réglementations Alors, c'est pour ça que nous, dans le fond, ce qu'on veut, c'est au niveau plutôt philosophique, ce qui nous assurerait ou nous donnerait des garanties sur la réglementation. Je ne sais pas si vous me suivez.

M. Ryan: Voulez-vous répéter? Si vous permettez, j'ai eu un petit moment de distraction et j'ai perdu le fil

Mme Laurin: D'accord Ce que je dis, c'est que, oui, effectivement, on est au courant des règlements concernant les bourses. Cependant, dans la réalité, il y a des parents qui, présentement, n'ont pas accès à ces bourses-là, on les refuse carrément parce que présentement on dit que peut-être ce seraient les commissions scolaires qui attribueraient ces bourses-là. On s'est adressés à la fois au ministère de l'Éducation et au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et c'est pour cela que nous voulons que, dans la loi, il y ait des principes qui garantissent l'accessibilité à cette bourse-là, qu'elle soit particulière ou autre, mais qu'il y ait des principes qui nous assurent de sa faisabilité.

M. Ryan: Maintenant, comme je l'ai mentionné tantôt, le projet de loi porte exclusivement sur les étudiants du postsecondaire.

Mme Laurin: II peut y avoir des exceptions.

M. Ryan: Regardez, le gouvernement peut toujours décider de confier à la Direction générale de l'aide financière du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science la gestion d'autres programmes, y compris celui pour les besoins particuliers des élèves handicapés de niveau primaire et secondaire. Il peut faire ça, puis c'est ce qui arrive dans ce cas-ci. Il y a une couple de programmes...

Mme Laurin: C'est ce qu'on souhaite.

M. Ryan: ...qui sont gérés par la DGAF et qui ne relèvent pas nécessairement de la Loi sur l'aide financière aux étudiants. Alors ça, comme je vous l'ai dit ce matin, le programme concernant les besoins particuliers, lui, va continuer. C'est un programme qui a été institué en vertu du pouvoir général qu'a le ministre de faire des subventions.

Mme Laurin: Et même si on parie du primaire et du secondaire?

M. Ryan: Le primaire et le secondaire, ce que nous faisons actuellement va continuer. Maintenant, ça demande un examen plus approfondi que nous allons faire distinctement.

Mme Laurin: Parce que...

M. Ryan: Là, on est en négociation avec l'OPHQ, comme vous le savez, pour des transferts de responsabilités et de ressources. Ce n'est pas encore terminé, ça, je pense qu'il va falloir attendre encore une année parce qu'on n'a pas réussi à établir le point d'entente parfait de ce côté-là. On étudie également les problèmes d'aide financière qui peuvent se poser aux niveaux primaire et secondaire. Mais là, le projet de loi, on essaie de régler ce qui regarde les étudiants de niveau postsecondaire.

Mme Laurin: Oui. C'est parce que, ce qu'on se posait comme question, c'est s'il ne pourrait pas apparaître des clauses dérogatoires ou exceptionnelles, dans le projet de loi, ce qui est possible habituellement dans les projets de loi, qui nous garantiraient plus de...

M. Ryan: L'Opposition n'aime pas toujours ça, mais nous autres, ça nous arrive d'en mettre, c'est vrai.

Mme Laurin: Dans ce cas-ci, ça nous faciliterait la tâche pour nous.

M. Ryan: Très bien. Alors, comptez que les... Et vous avez parlé... je suis content que vous ayez reçu une lettre de M. Angers, le sous-ministre du Revenu...

Mme Laurin: Oui.

M. Ryan: ...ça confirme ce que je disais ce matin.

Mme Laurin: C'est ça.

M. Ryan: Je suis bien content que...

Mme Laurin: Pour l'année 1988-1989. Cependant, on ne nous avise pas des démarches en cours pour le futur, par exemple.

M. Ryan: Ne vous inquiétez pas pour l'avenir. Le gouvernement, quand il prend une décision une année, d'habitude ça dure un siècle.

Mme Laurin: Comme la loi 107, ha, ha, ha!

M. Ryan: Oui. Regardez, je vous remercie beaucoup, je pense que ça a été extrêmement instructif pour nous. Ça nous rappelle nos responsabilités aussi de rencontrer une délégation comme la vôtre. Soyez sûrs que ça va nous aider à mieux comprendre nos responsabilités dans la perspective du projet de loi 25. Je vous remercie.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le ministre. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez maintenant la parole.

M. Gendron: Oui. Très rapidement quand même, avec... J'ai rarement vu, en si peu de temps dire, autant d'énormités concernant l'Opposition. Alors, l'Opposition est capable de faire son travail. Je vais en relever deux parce que ça n'a pas de bon sens. Prenons juste un exemple: Quand un gouvernement prend une décision, c'est bon pour des siècles. Je pense que le ministre a fait ses devoirs à peu près 25 fois dans l'espace d'une année. Prenez juste la loi 107: il y avait quasiment plus d'amendements, six mois après la loi 107, dans la loi 9, qu'il y en avait dans 107. Alors, il faut le faire pour dire des... C'est gros, là. Ce ne sont même plus des pianos qu'on entre dans cette salle-ci, ce sont de gros camions. Bon! Là, je ne sais pas, parce que je pensais que le ministre avait compris que c'est un mémoire présenté par l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels et non pas de malentendants. Donc, ça ne justifie pas de dire des quarts et des tiers de vérité, parce que j'espère que vous entendez pareil, même si vous avez des problèmes visuels, pour certains. Et un des quarts de vérité qui a été dit: l'Opposition ne s'est pas offusquée ce matin, ce n'est pas ça la demande, puis je sais que ça existe depuis 1980 et 1982 qu'il y a une brochure concernant les étudiants éprouvant des handicaps majeurs. Ce n'est pas ça, la question. Mais quand il dit ce qu'il veut dire, il dit que la demande qui a été faite ce matin, ce qu'il y a de neuf comme orientation, y a-t-il moyen que nous ayons ça en braille? C'était ça, la question. Il n'en parle pas de ça.

Ce matin, je ne me suis pas offusqué, moi, qu'il y ait une brochure là-dessus. Je sais que ça existe depuis 1982 puis vous le citez dans votre document, juste pour rétablir les faits.

Votre mémoire ou votre réflexion... Puis je remercie MM. Frechette, père et fils de même que Mme Laurin que je connais depuis un petit bout de temps, de même que Mme Turcotte. Je pense que l'occasion était adéquate de venir présenter votre point de vue pour dire que, pour ce qui est des élèves ou les parents d'élèves handicapés visuellement, que ce soit d'une façon fonctionnelle ou non fonctionnelle, peu importe le degré, vous faites bien de venir saisir les membres de cette commission et surtout le ministre qu'il y a urgence et nécessité d'offrir de meilleures garanties à l'effet que des droits concernant ces personnes-là se sont préservés au niveau du système de prêts et bourses.

Ce que j'ai compris, c'est que dans le passé, au primaire et au secondaire, les élèves qui, à cause de la gravité de leur handicap

sensoriel, étaient incapables de suivre adéquatement les cours offerts par les commissions scolaires pouvaient recevoir une bourse puis ce n'est plus le cas, au moment où on se parie.

Mme Laurin: Cette année, là.

M. Gendron: Oui, je le sais, et c'est bien expliqué dans votre mémoire. Et lorsque vous dites: La loi 25 n'offre pas de garantie formelle que, autant les règlements vont tenir compte de certains principes qui seraient évoqués en termes de garantie dans le projet de loi, vous avez sûrement bien lu le projet de loi. Le Protecteur du citoyen est venu dire la même chose. Ce n'est pas parce que c'est la première fois, comme le ministre vient de le dire, dans le projet de loi, qu'on va parler de l'expression "déficience fonctionnelle" qu'on a réglé toutes les affaires.

Si la déficience fonctionnelle n'est pas définie dans la loi et non dans les règlements, vous n'avez aucune garantie législative que vos droits sont sauvegardés. C'est ça que le Protecteur du citoyen est venu dire, en disant qu'il était très inquiet sur ces dispositions-là, à l'effet que le ministre met un mot dans la loi et il dit: Je viens de vous donner énormément d'avantages. Sauf que, dans les faits, ça ne vous donne absolument aucune garantie. C'est lui qui va faire les règlements et on n'aura pas la capacité d'apprécier les règlements et vous n'avez pas de poignées législatives si, effectivement, il n'y a pas d'élément concret offrant ces garanties-là à travers ou à l'intérieur du projet de loi. C'est ce que je comprends.

J'ai bien compris votre problème. Je pense que le mémoire est simple. Vous jugez nécessaire de retrouver dans la loi des garanties fermes quant aux droits à l'aide financière pour les élèves grandement handicapés sur le plan visuel. Ça n'y est pas. Donc, ne prenez pas pour acquis des vessies pour des lanternes. Ce n'est pas le cas.

Deuxièmement, vous voulez vous assurer de retrouver dans le projet de loi 25 l'esprit qui permettrait que, quand on élaborera les règlements, nous tenions compte de cette garantie qui devrait être donnée dans le projet de loi 25 qui n'y est pas. C'est ça que j'ai compris de votre mémoire. Quant à la volonté du législateur de dire: Compte tenu qu'il est difficile, dans un régime universellement appliqué, de prévoir des modalités pour des groupes particuliers... Ce n'est pas une question qu'on veuille vous marginaliser mais, là, on ne peut pas vivre dans un autre monde; ça existe. Ça, c'est plus difficile d'apprécier s'il a tort ou s'il a raison, dans le sens: Est-ce qu'on intègre à l'intérieur du régime universel des dispositions spécifiques pour tenir compte de cette réalité?

Moi, je pense qu'ils peuvent avoir raison de vouloir le faire comme ils le font, à condition que le droit soit clairement établi, comme je l'ai dit tantôt; à condition que, dans la loi. le droit soit clairement établi; que pour des handicapés visuels ou d'autres types de déficience majeure significative qui causent un handicap aux apprentissages réguliers primaire, secondaire, collégial et universitaire, oui, il faut que l'État québécois trouve un moyen de consacrer ce droit-là quelque part, compte tenu des coûts, compte tenu de ce que ça représente comme efforts. Je suis convaincu que M. Frechette pourrait nous en parier longuement. C'est déjà excessivement stimulant de voir un jeune, avec des troubles visuels qui se sont aggravés au fil des ans, qui dit: Moi. je suis en collège II puis j'envisage de faire l'université. Sincèrement, c'est extraordinaire! Mais ça n'a pas dû être facile, et ça a dû être assez onéreux à tous les plans, sur les plans moral, psychologique et financier. Et je ne pense pas qu'il appartienne à des parents seuls de supporter autant d'épreuves. Je pense que l'État québécois doit s'assurer - en 1990, jamais je ne croirai, on doit être assez évolués pour être tous convaincus que cela appartient à l'État - d'avoir des mécanismes pour offrir un meilleur support aux personnes qui ont à vivre ces difficultés-là et, en particulier bien sûr, aux élèves concernés, parce que les parents ont été sûrement généreux, mais Marc aussi a dû avoir pas mal de courage et de détermination pour faire face à ce qu'il a fait.

Alors, moi, puisque les questions s'adressent davantage au ministre, dans les quelques minutes qui me restent, vous seriez peut-être mieux de vérifier jusqu'à quel point le ministre va prendre l'engagement ferme de trouver une place quelque part pour s'assurer de deux choses: qu'on reconnaisse le principe que ces difficultés-là soient assumées quelque part par l'État et que, si ce n'est pas dans le projet de loi 25, il faut que ça soit ailleurs. C'est à lui à répondre à ça, c'est lui qui est le législateur.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le député.

M. Frechette (Normand): Excusez. J'aurais une chose à rajouter, c'est qu'il faudrait faire comprendre que ces appareils-là... Bon, pour faire une comparaison, l'étudiant qui arrive au primaire, au secondaire, au collégial ou à l'université a besoin de volumes, a besoin de notes de cours, a besoin de professeurs, etc. L'étudiant handicapé visuel a aussi besoin de ça, mais les appareils dont il se sert sont aussi indispensables que ces volumes-là pour les autres étudiants; sans ces appareils-là, c'est comme si un étudiant non handicapé n'avait pas de volumes, ça revient à peu près à ça.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre.

M. Ryan: Là, je pense que l'étudiant handicapé est couvert par le projet de loi. On

dit même, exceptionnellement, que celui qui est étudiant à temps partiel sera considéré, pour les fins de la loi 25, comme un étudiant à temps plein.

M. Gendron: Non mais, une seconde, madame, une seconde. Je vais vous laisser répondre, mais c'est parce que le ministre avait l'air de s'adresser à moi.

M. Ryan: Non, non, je m'adressais .

Mme Laurin: Mais ça ne concerne pas notre clientèle.

Le Président (M. Gobé): A M. Frechette ou à M. le député?

M. Ryan: Je m'adressais à la délégation, à la délégation.

M. Gendron: Excellent, excellent.

Le Président (M. Gobé): Vous pourrez répondre, vous avez encore du temps, M. le député.

Mme Laurin: Bien, je vous dirais, M. le ministre qu'en fait ça ne s'adresse pas nécessairement à notre clientèle parce qu'on a des enfants qui sont au primaire et au secondaire. Dans notre recommandation, ce qu'on demande, c'est que ça touche le primaire et le secondaire, et la question n'est pas tant le temps partiel ou le temps plein. Mais on ne veut pas que ces élèves-là... Ils ne demandent pas nécessairement le régime général des prêts et bourses, ils veulent plutôt la bourse spéciale, la bourse aux élèves gravement handicapés. C'est à ce niveau-là qu'on veut plutôt intervenir et pas aux prêts et bourses, là, pas sur l'ensemble du régime. Alors, c'est pour ça que cet article-là ne nous concerne pas.

M. Ryan: Très bien.

Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?

Mme Laurin: Ce qu'on aimerait peut-être savoir c'est - j'imagine que vous allez étudier la question: Quels sont les délais ou de quelle façon allez-vous procéder? Il va y avoir des amendements, j'imagine, au projet de loi et tout ça.

M. Ryan: Là, j'ai dit: Pour les élèves du primaire et du secondaire, on ne le réglera pas dans ce projet de loi-ci. On va continuer les pratiques qui existent et si, éventuellement, il y a lieu de légiférer, on le fera, mais je ne l'envisage pas pour le moment.

Mme Laurin: Les politiques, c'est-à-dire celles du règlement? M. Ryan: Pardon?

Mme Laurin: Les politiques pour le primaire et secondaire seront celles de votre réglementation au niveau du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, c'est ça?

M. Ryan: Ce sont des pratiques administratives, il n'y a pas de réglementation comme telle là-dessus.

Mme Laurin: Mais, quand on parle des règles d'attribution des bourses...

M. Ryan: Oui, oui, c'est correct.

Mme Laurin: ...ce seront celles-là qui vont s'appliquer.

M. Ryan: Oui, oui.

Mme Laurin: C'est ça. En tout cas, nous, on voudrait des engagements, on aimerait avoir des articles qui concernent les personnes handicapées dans le projet de loi 25. C'est une demande ferme.

M. Ryan: Mais là, pour ceux du primaire et du secondaire, je ne peux pas vous donner cette garantie-là. Le ministère de l'Éducation a déjà des programmes assez élaborés d'aide aux élèves handicapés au niveau primaire et secondaire. Vous savez qu'on a même des écoles spéciales. On a un grand nombre de services, de ce côté-là, qui sont coûteux également et on ne s'en plaint pas, c'est normal, c'est une responsabilité qu'a la collectivité d'assumer la tâche de fournir des services adéquats aux élèves visuellement handicapés.

Mme Laurin: Oui.

M. Ryan: Alors, toute cette aide-là continue. Le problème de l'aide financière... Il faut voir quelle est la responsabilité de l'Office des personnes handicapées du Québec aussi et, comme je vous l'ai dit, nous sommes en discussion avec eux. D'ici un an...

Mme Laurin: Transfert.

M. Ryan: ...ces choses-là devraient avoir été clarifiées de manière complète et, après ça, il sera plus facile d'avoir un tableau vraiment intégré. Mais, en attendant, je crois qu'il y a quand même des ressources élaborées qui sont mises en oeuvre pour le service de ces enfants-là aux niveaux primaire et secondaire et il n'est pas question de les réduire ou de les supprimer, loin delà.

Mme Laurin: Parce que, présentement, nous savons qu'il y a des parents qui n'ont pas accès à la bourse-là, qui n'ont pas la bourse.

M. Ryan: Oui.

Mme Laurin: Ils ont fait une demande et ils n'ont pas la bourse.

M. Ryan: Ça, vous m'en saisirez. Vous m'écrirez à ce sujet-là pour m'en informer et je vous fournirai toutes les explications et, j'espère, surtout les solutions qui pourraient être indiquées.

Mme Laurin: Parce que, présentement, on m'a informée, la semaine dernière, que la commission scolaire de Charlesbourg a attribué des versabrailles, mais à des parents qui n'en avaient pas fait la demande, pour la demande de bourse, parce qu'elle avait évalué les besoins différemment. Alors, il y a comme une confusion dans les rôles présentement.

M. Ryan: En tout cas, signalez-nous ces cas-là et nous allons y voir assez immédiatement.

Mme Laurin: Je sais qu'au niveau du ministère de l'Éducation du Québec, aussi, ils ne veulent pas travailler avec le programme de bourses parce qu'ils n'ont pas juridiction sur la bourse, c'est plutôt le MESS. Alors, il y a plein d'éléments qui portent un peu à confusion et on compte sur vous pour démêler tout ça.

M. Ryan: Saisissez-moi des problèmes avec plus de précision là. La meilleure façon, c'est de me poser des cas concrets pour commencer. Chaque fois qu'on me soumet le cas d'un enfant qui n'a pas les services auxquels il a droit, nous y voyons immédiatement. J'ai eu plusieurs cas d'enfants visuellement handicapés qui ont été soumis à mon attention et, une semaine ou dix jours après avoir communiqué le problème, nos services m'assuraient que le problème était réglé. On verra là. S'il y a des choses qui traînent, laissez-le-nous savoir. Ça n'a pas de raison de traîner.

Mme Laurin: Merci.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme Laurin, M. le ministre. M. le député d'Abi-tibi-Ouest, avez-vous le mot de la fin?

M. Gendron: Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre témoignage et de votre présence.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre.

M. Ryan: Merci aussi.

Le Président (M. Gobé): Alors, la...

Mme Laurin: Bon, d'accord.

Le Président (M. Gobé): Madame?

Mme Laurin: Non, ça va.

Le Président (M. Gobé): Alors, au nom de la commission, je tiens à vous remercier d'être venus témoigner devant nous. La commission va suspendre ses travaux quelques minutes, le temps de permettre à la Fédération des cégeps de venir prendre votre place. La commission suspend ses travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

(Reprise à 16 h 11)

Le Président (M. Gobé): La commission de l'éducation va reprendre ses travaux et poursuivre la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. Je demanderais maintenant à la Fédération des cégeps de s'asseoir en avant et de se présenter. Allez-y M. Beaulieu, vous pouvez... M. Beaulieu, s'il vous plaît. M. le ministre.

Bonjour, M. Beaulieu, si vous voulez présenter vos collègues qui sont assis près de vous?

Fédération des cégeps

M. Beaulieu (Yvon): Merci, M. le Président. D'abord, à ma gauche, M. Gaétan Boucher, directeur général de la Fédération des collèges; à ma droite, M Guy Forgues, directeur des services aux étudiants du cégep de Lévis Lauzon; Mme Francine Provost, conseillère d'aide aux étudiants du cégep de Saint-Laurent, et, finalement, Mme Hélène Giguère, présidente de la Commission des affaires étudiantes; elle travaille aussi au cégep Ahuntsic.

Le Président (M. Gobé): M Beaulieu et vos collègues, je vous souhaite la bienvenue à cette commission et je vous inviterais maintenant à procéder à la présentation de votre mémoire. Vous avez 20 minutes pour ce faire.

M. Beaulieu: Merci, M. le Président. 20 minutes globalement?

Le Président (M. Gobé): Oui.

M. Beaulieu: Merci, M. le Président. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, MM, Mmes les députés membres de cette commission, mesdames et messieurs, la Fédération des cégeps se réjouit d'avoir l'occasion aujourd'hui de vous présenter son point de vue sur le nouveau régime québécois d'aide financière aux étudiants. Il s'agit, en effet, d'un

débat qui nous intéresse au plus haut point, puisqu'il porte sur un aspect fondamental du développement de notre société, l'accessibilité aux études supérieures.

Pour apporter la contribution la plus enrichissante possible, la Fédération des cégeps a procédé, ces derniers mois, à une vaste consultation dans les 45 collèges du réseau collégial. Elle s'est adressée surtout aux responsables des services d'aide financière aux étudiants qui connaissent à fond, par leur travail quotidien, la situation concrète des étudiants. Le mémoire que nous vous présentons est le résultat de cette consultation et des recommandations formulées par les collèges.

Une réforme du régime des prêts et bourses était nécessaire, compte tenu de l'évolution des conditions de vie des étudiants depuis la création du régime en 1966, et la Fédération appuie la démarche du gouvernement. Elle approuve les grands principes sur lesquels il s'appuie et particulièrement celui qui fait de l'accessibilité aux études postsecondaires un object essentiel du nouveau régime. Nous voudrions, cependant, insister sur un point fondamental à nos yeux: le régime québécois d'aide financière aux étudiants se compare avantageusement aux autres régimes canadiens ou américains. Nous nous réjouissons de le constater et nous pensons que tout doit être fait pour préserver cet avantage.

Nous partageons également l'objectif de favoriser la continuité et la persévérance dans les études qui est formulé dans l'énoncé gouvernemental. Mais il doit s'appliquer à l'ensemble des étudiants et pas seulement aux bénéficiaires des prêts et bourses qui seraient lésés par rapport aux autres. Nous souhaitons donc que le gouvernement retire ce principe de sa réforme du régime d'aide financière aux étudiants et qu'il le fasse figurer plutôt dans le cadre du mode d'allocation des ressources financières aux cégeps.

La Fédération des cégeps aimerait également soumettre à l'attention de la commission trois principes qui ne figurent pas dans l'énoncé du ministre, mais qui s'harmoniseraient parfaitement avec les siens et qui nous paraissent extrêmement importants. Tout d'abord, nous pensons qu'il faut accorder la priorité à la satisfaction des besoins réels des étudiants les plus démunis plutôt qu'à la simplification des règles administratives, quand il y a conflit entre les deux. Nous parlons ici du transport, des droits de scolarité, du coût des enfants à charge, etc. Les collèges ont constaté que les étudiants les plus démunis sont les premiers à être pénalisés par les mesures de normalisation, et ceci, parce qu'ils appartiennent à des groupes restreints et qu'ils ont souvent des besoins particuliers dont ces mesures ne peuvent pas tenir compte.

En second lieu, nous souhaitons que le régime d'aide financière aux étudiants mette l'accent sur l'épanouissement de la famille. Nous rejoignons ici une préoccupation de la société québécoise dans son ensemble, qui désire que toutes les mesures soient prises pour encourager la natalité. Le régime d'aide financière aux étudiants doit être parmi les premiers programmes gouvernementaux à s'inspirer de cette approche.

Enfin, la Fédération pense qu'il faudrait assurer aux étudiants et aux étudiantes des revenus comparables à ceux des assistés sociaux. Actuellement, la différence entre les deux niveaux de ressources joue souvent un rôle négatif. Bien des étudiants renoncent à leurs études parce que l'aide sociale leur offre davantage que le régime des prêts et bourses. Si les deux étaient équivalents, il est certain qu'un bon nombre d'entre eux n'hésiteraient pas à entreprendre des études postsecondaires ni à les terminer.

Je vais maintenant passer la parole à M. Guy Forgues, le directeur des services aux étudiants du cégep de Lévis-Lauzon. Il va vous présenter le résumé de notre mémoire, puisque nous n'avons que 20 minutes pour ce faire, préparé avant le dépôt du projet de loi 25 à l'Assemblée nationale. Il va de soi que les commentaires et les recommandations contenus dans ce mémoire concernent davantage le document ministériel sur l'aide financière aux étudiants dans les années quatre-vingt-dix, que le projet de loi 25. Mais, comme l'un a inspiré l'autre, nos remarques continuent néanmoins de prévaloir. M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, je vous remercie de votre attention et je passe la parole à M. Forgues.

Le Président (M. Gobé): Vous avez maintenant la parole.

M. Forgues (Guy): M. le Président, M. le ministre, je vais me permettre de présenter chacune des recommandations du mémoire de la Fédération, en n'élaborant pas sur chacune parce que je comprends que notre temps est limité.

La première recommandation consiste à indexer annuellement les paliers de la table de contribution parentale. On sait que les orientations gouvernementales prévoyaient une telle indexation et on sait que ça faisait plusieurs années que ça n'avait pas été fait. On considère que c'est une manoeuvre qui devrait être faite annuellement.

La deuxième recommandation: tenir compte de chaque enfant de l'unité familiale, qu'il soit ou non aux études postsecondaires, c'est dans le cadre d'un de nos principes qu'on met de l'avant, à savoir que, pour favoriser une politique familiale au Québec, on considère que chacun des enfants devrait être pris en considération dans le calcul et dans la division des contributions.

La troisième: attribuer un coefficient de

pondération de 100 % à chaque enfant, c'est en vertu du même principe.

La quatrième recommandation: Que les allocations familiales et les crédits d'impôt pour enfants ne soient plus pris en compte dans le calcul des allocations de prêts et bourses. On considère également que ce sont des mesures qui viennent assister, et appuyer, soutenir des gens qui ont décidé de fonder des familles, mais on considère comme n'étant pas très positif comme mesure que ça leur soit retiré automatiquement au niveau de leurs prêts et bourses.

La cinquième recommandation: retirer la onzième recommandation ministérielle et maintenir la pratique actuelle, c'est-à-dire alléger la contribution du candidat qui effectue un retour aux études après avoir été deux ans sur le marché du travail. On considère qu'il s'agissait là d'une mesure transitoire intéressante pour des gens qui veulent se réinsérer dans le monde des études. Étant donné que c'est une mesure qui n'est pas récurrente, donc qu'un étudiant ou une étudiante n'a droit à cette mesure-là qu'une seule fois, c'est peut-être positif en termes d'incitation au retour aux études.

La sixième recommandation: Que les dépenses admises pour les frais de garde soient portées, par enfant, à 13 $ par jour, soit 65 $ par semaine, et que ces montants soient indexés chaque année. C'est que les propositions gouvernementales actuelles font que les frais de garde qui sont compensés aux étudiants sont nettement en deçà du marché.

La septième recommandation: Que le montant des dépenses admises reconnu à l'enfant soit porté à 2440 $, dans le cas du premier enfant, et à 1895 $, pour les suivants. C'est une question de concordance avec une recommandation gouvernementale, qui est la recommandation no 1.

La huitième recommandation: Que la quatorzième recommandation du document ministériel ne soit pas retenue et qu'on maintienne plutôt la règle actuelle à l'égard des frais de transport. Cette recommandation est celle qui a l'effet le plus négatif sur l'accessibilité aux études car sa mise en application entraînerait une baisse significative des dépenses admises. Nous vous référons, à ce sujet-là, au mémoire, entre autres, de l'Association générale étudiante du cégep de Drummondville qui porte essentiellement ou en très grande partie sur cette recommandation, qui, pour nous, est très pénalisante au niveau de nos clientèles.

La neuvième recommandtion: Que la seizième recommandation du texte ministériel sur le retrait de la prime au budget du cadidat qui a été sur le marché du travail et qui réside chez ses parents pendant ses études ne soit pas retenue. On considère que là également, c'est une incitation pour les gens à demeurer ailleurs que dans leur famille et la pratique actuelle, d'après nous, supporte mieux ces clientèles-là.

La dixième recommandation. Qu'un comité d'appel soit formé d'un représentant des services aux étudiants en établissement, d'une personne venant du grand public et d'un étudiant, tous nommés par le ministre responsable. Il s'agit du comité d'appel ou du comité dérogatoire, dépendant du texte auquel on se réfère. On est en accord avec cette recommandation-là. On s'interroge un peu sur la façon dont ça va se vivre. On ne sait pas si les décisions vont être centralisées. Ce comité-là semble avoir un pouvoir de recommandations sur tout. Je ne sais pas s'il y a des études de faites à savoir, une première année, combien de cas peuvent lui être soumis. Mais ce qu'on veut, c'est que, si ce comité-là existe, il soit, autant que possible, efficace.

La onzième recommandation: Que la proposition d'offrir une bourse à l'intention des étudiants universitaires à temps partiel, inscrits à deux ou trois cours par session, soit élargie pour comprendre également les étudiants adultes de l'enseignement collégial inscrits à temps partiel à deux ou trois cours par session, et ceci, afin que les gens soient traités également, surtout que les programmes actuels, au niveau du ministère, au niveau de l'aide sociale traitent également ces clientèles-là en termes de statut.

La douzième: Que la vingt-deuxième recommandation du document ministériel sur les périodes d'accessibilité aux prêts et bourses ne soit pas retenue. On considère qu'actuellement on a des mesures facilitantes, en termes de gestion, concernant le nombre de sessions pendant lesquelles les étudiants sont admissibles à l'aide financière aux étudiants et trouve qu'il n'y a pas lieu de les changer.

La treizième recommandation: Que les montants accordés pour les frais scolaires soient haussés de manière qu'ils s'ajustent aux coûts réels et que soient reconnues les dépenses faites, dans certains progammes, pour l'achat d'équipement de travail. On voudrait attirer votre attention à savoir que le principe de la gratuité scolaire au niveau collégial subit un léger glissement, c'est-à-dire que, de plus en plus, le client - l'étudiant ou l'étudiante - a à fournir de sa poche des équipements qui, avant ça, lui étaient fournis par les collèges. Alors, étant donné qu'on laisse retomber sur ses épaules le financement de certains outils, on pense qu'il doit être compensé au niveau de l'aide financière aux étudiants.

La quatorzième recommandation: Que le montant correspondant aux coûts réels du transport, y compris le transport en commun, soit octroyé aux étudiants ayant un statut d'étudiant autonome, à titre de chef de famille monoparentale, de couple marié ou de couple vivant maritalement et ayant un enfant, et qu'on reconnaisse, selon le cas, la double résidence aux étudiants considérés comme autonomes, à titre de chef de famille monoparentale, de couple marié ou de couple vivant maritalement et ayant un enfant. Il s'agit de clientèles qui sont dans des

situations particulières et qui, à notre avis, mériteraient d'être supportées financièrement, mieux qu'elles le sont actuellement.

La quinzième recommandation: Qu'un montant de 11 $ par semaine soit octroyé aux étudiants non résidents qui ont à employer le transport en commun pour se transporter jusqu'à l'établissement d'enseignement.

La seizième recommandation: Que la location annuelle soit portée à 3650 $ pour les familles monoparentales de trois enfants ou plus.

La dix-septième recommandation: Que l'étudiant handicapé bénéficie des mêmes avantages que la personne handicapée qui n'est pas aux études et qu'on harmonise à cette fin le régime québécois d'aide financière aux étudiants avec les différents programmes gouvernementaux concernés.

La dix-huitième recommandation: Que la contribution minimale de l'étudiant ne soit pas retenue aux fins de calcul du prêt, et ceci, tel qu'il est prévu à l'article 14 du projet de loi actuel. Ça nous met dans des situations où des gens, des familles, qui ont 9000 $ de revenus, ont des prêts inférieurs à des familles où les parents gagnent 30 000 $ et plus.

Que l'allocation aux étudiants venant de régions éloignées soit réservée à ceux qui doivent sortir de leur région, soit parce que le programme choisi n'y est pas donné, soit parce qu'ils n'y sont pas admis. Cette recommandation-là de notre mémoire est retirée, étant donnée que l'assemblée générale de la Fédération s'est prononcée à rencontre de cette recommandation cette semaine.

La vingtième recommandation: Que soit rétabli le supplément hebdomadaire de 22 $ pour tous les étudiants dont les parents sont des personnes à faible revenu. Lorsque cette mesure-là a été enlevée, on croyait que ces clientèles-là, ces familles-là étaient compensées par le programme APPORT, mais on se rend compte à l'usage que ce n'est pas du tout le cas.

Alors, il s'agit là de l'essentiel de nos recommandations. Je comprends que c'est très rapide et que c'est un peu beaucoup technique, mais il faut penser que c'est un mémoire qui a été fait, qui a été écrit suite à des consultations qui ont été faites dans les collèges par les personnes qui reçoivent quotidiennement des étudiants et des étudiantes qui vivent avec le régime d'aide financière aux étudiants.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie. Est-ce que vous en avez terminé avec votre présentation?

M. Forgues: Oui, monsieur.

Le Président (M. Gobé): Alors, je passerai maintenant la parole à M. le ministre pour une période déterminée d'avance. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: M. le Président, je remercie la Fédération des cégeps des suggestions nombreuses qu'elle nous apporte en vue de contribuer à l'amélioration du projet de loi 25. Les représentations de la Fédération ont été conçues à la lumière de l'expérience des établissements qui en font partie et, en particulier, du personnel spécialisé qui se consacre à l'aide et aux services à l'intention des étudiants dans les collèges. On voit que le mémoire a été rédigé en fonction d'une connaissance concrète des situations auxquelles font face des étudiants et les administrateurs d'établissement et ça lui apporte d'autant plus d'intérêt.

Évidemment, on a plusieurs suggestions qui visent des améliorations importantes dans le régime que nous proposons. J'ai fait un calcul rapide de ce que coûteraient les principales recommandations faites par la Fédération. Je ne sais pas si vous avez établi un calcul de votre côté, M. le président.

M. Beaulieu: Je dois vous dire que, là-dessus, pour nous, c'est assez difficile de faire une évaluation précise en termes de cents et de dollars. On n'a pas vraiment tout l'ensemble des statistiques qui nous permettraient de réaliser ça. L'intention qui était derrière nos recommandations était de sensibiliser votre ministère et vous-même, M. le ministre, à l'ensemble des problèmes qui restent à régler dans l'aide financière aux étudiants en ayant à l'esprit l'aide aux plus démunis. C'est dans ce sens-là. Nous sommes bien conscients que la capacité de payer de l'État est quand même relativement limitée, qu'il y a eu un effort important de fait dans le projet de loi qui est actuellement déposé, mais nous pensons que le gouvernement, dans la mesure de ses capacités financières, et s'il peut faire plus... Nous lui avons indiqué à quelles places il fallait, effectivement, peut-être appuyer davantage l'aide financière aux étudiants.

M. Ryan: En tout cas, je prends note de cela, mais je voudrais vous indiquer qu'un calcul rapide que j'ai fait dresser de mon côté indique que l'ensemble des recommandations que vient de résumer votre porte-parole donneraient un total d'à peu près 118 000 000 $. Ça va vite. Et les sommes que nous projetions de libérer pour l'amélioration du régime, lorsque nous avons publié l'énoncé d'orientation, étaient en tout de 52 000 000 $, c'est-à-dire un montant d'à peu près 34 000 000 $ au prêt, un montant de 18 000 000 $ à la bourse, que nous financions en partie par certaines ablations que nous faisions dans les éléments du programme qui nous apparaissaient moins justifiés aujourd'hui qu'au moment où ils furent institués.

Je fais mention de cette dimension générale parce que je pense que ça aide à situer notre échange dans un contexte peut-être plus immédiatement concret. Je donne juste un exemple: la

contribution du conjoint. Là, je prends l'exemple le plus lourd dans tout le paquet; il y en a d'autres qui... Ce sont des choses qui peuvent être échangées. La contribution du conjoint, si nous allions l'abolir, ça, ça implique des coûts additionnels de 40 000 000 $, un manque à gagner de 40 000 000 $. Les frais de garde, nous les avons ramenés à 50 $ par semaine par enfant. C'est réduit par rapport à ce que c'est actuellement par enfant; c'est un fait. Il a fallu nous aligner sur les normes qui ont cours à l'aide sociale parce que faire garder un biifant pour un couple qui est sur l'aide sociale ou un couple dont l'un des conjoints est aux études, on ne voit pas qu'il y ait une différence métaphysique et on ne voulait pas avoir l'air de favoriser indûment le couple dont le conjoint est aux études, excepté qu'on n'a plus de plafond. Il y avait un plafond sous le régime actuel. Je ne sais pas de combien il était... Le plafond actuel est à 84 $ et il n'y aura plus de plafond sous le régime que nous proposons. Par conséquent, H y a un certain biais en faveur des familles plus nombreuses, c'est évident, et ça rejoint un des principes que vous voulez voir ajouter à ceux que nous mettons de l'avant, le principe de l'encouragement aux responsabilités familiales.

Je mentionne ces points-là, non pas pour dire que je m'oppose à l'un ou l'autre, mais pour dire que nous avons dû faire ce que j'appellerais un mixte, un paquet dont tous les éléments se tiennent et qui peut se tenir lui-même à l'intérieur du cadre qui nous est fixé. C'est pour ça que je vous dis que, peut-être, vous pourriez faire un effort de votre côté pour resserrer un petit peu vos propositions et peut-être les sérier par ordre d'importance. Ce sera peut-être l'objet de ma première question. Si on vous disait: Là, on est rendus au stade où il ne peut pas être question d'élargir le cadre financier, mais à l'intérieur de ce cadre-là, est-ce qu'il y a des échanges que vous entreverriez? Par exemple, parmi les propositions que vous faites, est-ce qu'il y en a que vous substitueriez à des améliorations que nous proposons dans l'énoncé d'orientation, ou s'il y aurait des modifications de cette nature? Mais je pense que ça, c'est le cadre à l'intérieur duquel nous discutons, et le reste nous le retenons pour des jours meilleurs. (16 h 30)

M. Forgues: M. le ministre j'entends bien ce que vous dites par rapport à l'ensemble du coût de nos recommandations. Remarquez que l'exemple que vous avez cité... En tout cas, je ne me souviens pas qu'on ait demandé d'enlever la contribution du conjoint, là, mais c'est probablement une erreur de ma part. Mais c'est sûr que ces recommandations-là n'ont pas toutes le même poids. Sauf qu'il faut dire que si on relit l'ensemble de nos recommandations avec une vision historique de l'évolution du service d'aide financière aux étudiants, ou la façon dont les clientèles ont été traitées, pour certains éléments, il nous semble qu'il s'agit d'une perte pour les clientèles actuelles. Lorsque, dans un régime on prévoit des mesures pour favoriser la réintégration au niveau de l'école et qu'on a verbalisé ça par un allégement de contribution et qu'on veut faire perdre le bénéfice de cet avantage-là à ces étudiants-là, pour nous, il ne s'agit pas de coûts supplémentaires, mais il s'agit de coupures par rapport aux services que les étudiants ont actuellement, ou ont déjà eus. Et dans ce sens-là, je ne pense pas que ça doive nécessairement se chiffrer au même titre que des améliorations à l'état pur qu'on pourrait vous suggérer. Par exemple, lorsqu'on vous suggère que tous les étudiants non-résidents touchent des frais de transport, aux coûts du transport en commun, je pense que c'est une lecommandation qui, d'après nous, n'a pas la même valeur que, par exemple, de mieux soutenir les étudiants qui sont soutien de famille monoparentale, etc. Sauf qu'on se rend bien compte, dans l'exercice de notre profession, tous les jours, qu'actuellement, il y a des étudiantes, en particulier, qui vivent des situations difficiles et pénibles, et que les règles ne nous permettent pas de leur donner le minimum décent non seulement pour les inciter à rester dans le réseau, mais à vivre dans le réseau de l'éducation.

Alors, pour ce qui est de votre suggestion, peut-être de les mettre par ordre de priorités, je pense que c'est une exercice auquel on pourrait se livrer.

M. Ryan: Je m'excuse. S'il y a eu méprise à propos de l'abolition de la contribution du conjoint, je m'en excuse, si vous me dites que ce n'est pas dans le mémoire. Nous croyions nous souvenir que ça y était, mais si vous me dites que ça n'y est pas, je prends votre parole pour l'instant et je retire ce que j'ai pu indiquer là-dessus.

Je reviens avec ma question, M. Forgues Dans les points que vous soulevez, est-ce que vous pourriez indiquer, par exemple, peut-être les trois plus aigus, à la lumière, justement, de ce qui m'intéresse spécialement, c'est-à-dire votre expérience quotidienne avec les étudiants qui s'adressent aux programmes d'aide financière.

M. Forgues: Je vous dirai qu'à notre avis, celle qui est la plus pénalisante pour nos clientèles, c'est votre recommandation 14. Notre recommandation 8 s'oppose à votre recommandation 14, à savoir les frais de transport pour les étudiants qui ne peuvent bénéficier des transports en commun. Je pense qu'à ce titre-là, le mémoire qui vous a été présenté par l'Association des étudiants du cégep de Drummondville... Pour certaines parties du Québec, il nous semble que c'est très pénalisant. On comprend bien, pour avoir discuté déjà avec des gens qui

travaillent à la Direction générale de l'aide financière, qu'il y a une question de principe importante là-dedans, à savoir que le gouvernement ne veut par financer des autos aux étudiants là où il n'y a pas de transports en commun. Sauf qu'il faut comprendre aussi que quelqu'un qui demeure à 50 ou 60 milles et qui fait le choix de continuer à rester dans sa famille, ne doit pas être pénalisé financièrement par rapport à celui qui coûte effectivement plus cher à l'État et qui décide de ne pas résider avec ses parents. On croyait que les règles actuelles faisaient que ce choix-là était financé jusqu'à concurrence d'une non-résidence, ce qui nous paraissait tout à fait juste, parce que...

M. Ryan: Sous le régime actuel, M. Forgues, jusqu'où ça peut aller, la contribution versée à l'étudiant au seul titre des frais de transport? Ça peut aller jusqu'à 3000 $, 4000 $, ou 5000 $ par année?

M. Forgues: Ça peut aller jusqu'à la différence entre un budget de résident et celui d'un non-résident. Je pense que c'est 91 $ par semaine. Ça peut faire un écart de 2200 $. Sauf qu'il faut penser que cet étudiant-là, il subit un coût; il faut qu'il se transporte. S'il décide de ne pas se transporter, s'il n'y a pas de transports en commun et qu'il décide, à ce moment-là de se prendre un appartement en ville, à ce moment-là, le régime actuel prévoit que son budget de dépenses va passer de 48,45 $ à 139,45 $; donc, les 91 $, le gouvernement les paiera de toute façon, sauf que l'étudiant...

M. Ryan: C'est de l'argent.

M. Forgues: ...pour avoir ce financement-là, va rester ailleurs que chez ses parents.

M. Ryan: C'est de l'argent, ça, ce qui fait qu'on est obligés d'y penser bien comme il faut. Mais, en tout cas, je suis content, vous m'indiquez que c'est le problème le plus aigu dans la liste de ceux que vous soumettez à notre attention. J'en prends note. Vous n'êtes pas le premier à le souligner. Je pense que c'est un des points qui nous ont été soulignés le plus fréquemment depuis le début des auditions publiques de la commission. On est obligés de le regarder de près, mais je ne sais pas si vous auriez une solution qui pourrait coûter un petit peu moins cher que ce qu'on encourt actuellement. Ça m'apparaît très élevé.

M. Forgues: Je pense que peut-être...

M. Ryan: Je ne sais pas si vous avez pensé à quelque chose d'intermédiaire. Moi, je suis toujours fort sur les solutions intermédiaires.

M. Forgues: Oui. C'est absolument politique aussi. Je pense qu'effectivement on pourrait peut-être tenter de trouver un moyen de financer le transport des étudiants. Sauf qu'il mô semble qu'à partir du moment où on va laisser le choix à des étudiants, soit de prendre un appartement et, à ce moment-là, d'être financés par l'État à 100 %, ou selon un budget de non-résident, ou de faire accroire à l'Etat que les gens demeurent ailleurs que chez leurs parents... Parce que, d'après nous, c'est une ouverture à la fraude de façon extraordinaire. Un étudiant ou une étudiante n'a qu'à se trouver une adresse, à Drummondville, par exemple, et, même s'il continue à voyager de chez ses parents à une ville à 20 kilomètres, on va le considérer comme un non-résident et on va le financer complètement. Alors, c'est à ce niveau-là où on pense qu'il y a peut-être lieu de trouver une façon pour favoriser l'honnêteté des gens et que ça ne coûte pas plus cher, en bout de course, à l'État. Mais c'est une mesure, je pense, sur laquelle je voulais attirer votre attention.

D'autres mesures qui touchent, à notre avis, des gens qui sont peut-être moins bien nantis, il s'agit de notre recommandation 14. Celle-là, M. le ministre, je vais me permettre de l'illustrer par un cas que je vis au collège actuellement. Présentement, parmi mes étudiantes, j'ai une dame, qui est mariée, qui demeure à Saint-Philé-mon de Bellechasse - par rapport au cégep Lévis-Lauzon - et qui a cinq enfants. Actuellement, on lui octroie un budget de non-résident, parce que c'est sûr qu'elle ne demeure pas chez ses parents, elle demeure avec son mari et ses cinq enfants. Tous les jours, elle voyage de Saint-Philémon à Lévis-Lauzon et les règles actuelles ne nous permettent pas de lui attribuer de frais de transport. À mon avis, ce serait difficile d'exiger d'elle, pour que, effectivement, elle se retrouve dans la même situation que n'importe quel étudiant ou étudiante, qu'elle déménage à Lévis-Lauzon pour trois années d'études. Alors, moi, je considère qu'on devrait lui octroyer des frais de transport. Mieux que ça, étant donné que c'est une étudiante qui étudie dans un programme où il y a des stages, une journée par semaine, cette étudiante-là se rend à Montmagny, qui est moins loin de chez elle que Lévis-Lauzon et, à ce moment-là, on lui octroie des frais de transport entre Lévis-Lauzon et Montmagny, ce qui veut donc dire qu'actuellement, le régime, dans son cas à elle, ne la favorise sûrement pas à se réintégrer au niveau des études et à s'investir au niveau des études, parce que ça lui coûte plus cher que ce que compense le régime actuel des prêts et bourses. Alors, c'est l'objet de notre recommandation 14.

Une autre recommandation, aussi, c'est la dernière recommandation, qui consiste, comme dans le passé, à remettre aux étudiants...

M. Ryan: Dites-moi donc, cette personne-là, comment est-elle remboursée actuellement, quand

elle va à Montmagny? Est-ce que c'est 0,21 $ ou 0,22 $ le kilomètre?

M. Forgues: C'est 0,21 $ le kilomètre. Elle a droit à des frais spéciaux de transport, étant donné que son lieu de stage est situé à un certain nombre de kilomètres de l'établissement d'enseignement qu'elle fréquente, et ce sont des coûts qu'elle encourt actuellement, parce que, effectivement, il faut qu'elle y voyage.

Deux autres recommandations sur lesquelles j'aimerais peut-être attirer votre attention. Il s'agit de la recommandation 20 concernant les 22 $ pour les étudiants dont les parents sont des personnes à faible revenu. Cette mesure-là a été enlevée du régime d'aide financière aux étudiants cette année. On vit ça actuellement, en 1989-1990, et l'argumentation qui nous a été donnée, c'est que la relève a été prise par le programme APPORT au niveau de l'aide sociale. Or, les études qu'on a faites nous démontrent qu'effectivement, ce ne sont pas tous les étudiants et étudiantes qui auraient été bénéficiaires de cette mesure-là dans le passé et qui ne sont pas compensés par le programme APPORT.

M. Ryan: Oui. Le transfert a été fait, dans ce cas-là, à l'aide sociale.

M. Forgues: Pardon?

M. Ryan: Cette partie-là du programme est transférée au régime de l'aide sociale.

M. Forgues: Oui, c'est-à-dire que...

M. Ryan: Puis là, l'allocation, évidemment, va être versée aux parents. On dit: Ils ne peuvent pas fournir de contribution parce qu'ils sont dans le besoin. Mais on dit: L'aide sociale va fournir une contribution directe aux parents, puis cette contribution-là est financée par le régime de l'aide sociale. Ça, ça va embrasser peut-être 3000 ou 4000 cas.

M. Forgues: Mais, à notre avis, l'aide sociale ne vient pas compenser toutes ces familles-là, parce qu'il faut absolument que les faibles revenus dont il est question soient des revenus de travail. Or, à partir du moment où ces revenus proviennent de la Régie des rentes du Québec, par exemple, il n'y a pas de compensation. Parce que APPORT, c'est Aide aux parents pour leur revenu de travail. Alors, à partir du moment où ce ne sont pas des revenus de travail, mais de la Régie des rentes du Québec, que ces gens-là touchent, ils ne sont pas compensés.

M. Ryan: L'aide sociale, ce n'est pas ça. M. Forgues: Pardon?

M. Ryan: L'aide sociale...

M. Forgues: Le programme APPORT, oui, c'est ça. C'est l'objet de ce programme-là.

Lorsque les gens touchent l'équivalent d'environ 300 $ par mois de revenus autres que des revenus de travail, que ce soit de l'aide sociale de la CSST, ou de la Régie des rentes du

Québec, Ils ne sont plus admissibles à ces programmes-là.

M. Ryan: Attendez un petit peu. Ce n'est pas relié au programme APPORT. Le transfert qu'on a fait, c'est directement à l'aide sociale. L'allocation est versée aux parents et, par conséquent, il n'y a pas de perte de revenu.

M. Forgues: Pour l'étudiant, oui.

M. Ryan: L'étudiant, if est postulé qu'il a une contribution de ses parents, mais l'argent qui faisait défaut à ses parents va être donné par l'aide sociale, le même montant.

M. Forgues: À condition que l'étudiant ou l'étudiante satisfasse aux critères de résidence et de non-résidence, à la fois aux prêts et bourses et à l'aide sociale.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre, c'est là tout le temps que vous aviez, et je me dois maintenant de passer la parole...

M. Ryan: Je voudrais souligner quand même le caractère très constructs de l'ensemble du mémoire. J'apprécie l'appui que donne la Fédération aux orientations générales de la politique du gouvernement. Je sais bien qu'on pourrait désirer mieux; on esquisse à plusieurs endroits des possibilités d'amélioration intéressantes. Je pense que la Fédération est l'un des organismes les mieux placés pour comprendre les contraintes auxquelles doit obéir le gouvernement, parce que ces contraintes commandent également les rapports d'ordre financier que nous avons avec les collèges d'enseignement général et professionnel à travers le Québec. J'apprécie hautement l'esprit constructif dans lequel ces choses-là sont apportées et les points sur lesquels nous avons échangé. Si vous avez des compléments d'information à nous communiquer, qui pourraient nous aider à mieux comprendre, nous les recevrons avec beaucoup d'intérêt. Je voudrais exprimer mon appréciation aux personnes qui font partie de votre délégation, cet après-midi, et qui siègent à notre comité de personnes-ressources pour l'étude de ces questions-là. Je pense que si nous avons pu nous rencontrer comme ça, c'est parce qu'il y a beaucoup de travail de convergence et de consultation qui se fait.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre,

vous aurez deux minutes à la fin pour conclure.

M. Ryan: Merci. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gobé): Je vais maintenant passer la parole à notre collègue, le député d'Abitibi-Ouest, qui doit certainement avoir quelques questions à poser, lui aussi. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez maintenant la parole pour une période de 20 minutes ou moins, à votre choix.

M. Gendron: Oui. Je voudrais remercier la Fédération des cégeps d'avoir profité de cette occasion pour venir nous donner l'éclairage qu'elle voulait nous donner en tout cas, sur deux aspects principaux de la question que nous débattons, même si moi je trouve qu'il y en a d'autres. On ne peut pas toucher uniquement la question du dégel des frais de scolarité et la loi 25 sans aborder également toute l'évolution de l'accessibilité des études, la diplomation et, également, les garanties que notre système d'éducation, aux niveaux collégial et universitaire, progresse plutôt que de régresser.

Je vais traiter rapidement de la première partie de votre mémoire. En tout cas, indépendamment que ce soit dans l'ordre ou non, ça n'a pas d'importance. J'estime que vous avez bien fait de rappeler qu'au niveau des principes, il me semble que nous avons, comme société, un régime d'aide financière qui répond à certains principes qu'il n'y a pas lieu, en ce qui me concerne, de remettre en question. C'est ce que vous avez fait au début de votre mémoire en disant que vous approuviez sans réserve les quatre premiers et je n'ai pas à répéter ça.

Au niveau du cinquième, je vous félicite d'avoir rappelé que là, vous avez de sérieuses réserves. Moi, je ne les trouve pas assez sérieuses à mon goût, mais ça, c'est une question d'opinion. Il me semble qu'on dit la même chose. C'est juste une question - est-ce que c'est peu, beaucoup, passionnément, à la folie? - c'est une question de variation. Je pense qu'avec ce gouvernement-là, qui a toujours comme objectif de toujours égaliser les choses par le bas en défaveur des concernés, vous faites bien d'indiquer que le régime doit viser à être comparable à ce qui est offert dans les autres sociétés. Malheureusement, dans le présent cas, c'est évident que ça veut dire une réduction des bénéfices, ça veut dire une coupure de certains éléments. D'ailleurs, le ministre l'a admis lui-même, c'est une nouvelle réforme qu'il veut financer en partie par les gains qu'il fait sur des éléments qu'il coupe du régime actuel et en bonne partie également par le dégel des frais de scolarité. Donc, ça fait un peu curieux quand on parle de bonifier un régime, mais que pour l'essentiel de la bonification, on passe la facture à quelqu'un d'autre; il faut être conscient de ça. Sur ce principe-là, je vous félicite d'avoir rappelé au ministre - même si, lui, il lit bien ce qu'il veut lire - que là. il y a un problème. (16 h 45)

Un autre point également. Je pense que vous avez fait une remarque pertinente en disant que d'avoir l'objectif de favoriser la continuité, la persévérance aux divers cycles d'études tout en incitant, bien sûr, les étudiants à compléter leurs études dans des délais normaux, c'est la tarte aux pommes, c'est la vertu. Mais il est bon de le rappeler parce que je pense que, comme société, personne ne souhaite que les études s'éternisent, à moins qu'il n'y ait des motifs valables pour que, de temps en temps, ça prenne plus de temps à les faire. Ça, il peut y avoir des circonstances qui l'expliquent, avec le type d'étudiants qui composent notre société en 1990 par rapport aux années 1970-1972. C'est un élément sur lequel je trouve que vous n'avez pas assez insisté. Pour des gens qui sont sur le terrain comme vous autres, qui vivez avec des clientèles, j'aurais aimé qu'il y ait plus de descriptif des clientèles collégiales. Je ne change pas d'avis qu'il y a de plus en plus de jeunes qui sont démunis, qui sont seuls et qui ne peuvent pas compter sur énormément de support de leurs parents pour 25 000 raisons que je ne veux pas analyser, mais qui sont là. Il me semble qu'un organisme comme le vôtre aurait dû être capable de mettre un peu plus d'acuité là-dessus en disant: Compte tenu de l'éclatement des familles, compte tenu des familles reconstituées, compte tenu des familles qui, au plan de la notion économique de ménage, ont un statut de monoparental - et c'est plus de 40 % en 1990 - ça ne donne pas un profil étudiant comme je souhaiterais en avoir un et ça n'en donne pas un au Québec qui ressemblerait à celui de l'île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Ecosse ou du Nouveau-Brunswick. Ce sont des réalités qu'il faut prendre en compte.

Le ministre, lui, nous compare avec le reste du Canada en disant que les frais de scolarité vont demeurer les plus bas même avec la hausse; il a raison. Mais il ne faut pas regarder juste ça. Il y a des raisons pour lesquelles il y a lieu de les maintenir les plus bas et d'arriver à l'autre dossier auquel je vais arriver dans quelques minutes, celui du dégel.

Sur vos recommandations, sincèrement, vous avez, je pense, touché à peu près aux mêmes recommandations qui sont constamment revenues. Le ministre a dit que c'est celle-là qui est revenue le plus souvent. À ma connaissance, elle est revenue dans tous les mémoires, sauf dans celui de la CREPUQ, qui a fait plus l'analyse de la problématique du financement universitaire et du dégel que de l'aide financière, et c'est parfaitement normal. Il n'y a pas de blâme dans ce que je dis. Mais, parmi tous ceux qui ont fait une analyse plus détaillée du régime d'aide financière, il n'y a à peu près personne qui n'a pas convenu d'être plus sensible à toute la

notion d'autonomie, de contribution parentale et des frais de transport; ce sont toutes des notions qui sont constamment revenues pour tenir compte aussi des actifs, la notion d'actifs à l'intérieur du calcul. Il y en a plusieurs qui sont venus en disant qu'il y a lieu de faire des révisions là-dessus. Vous, de la Fédération des cégeps, vous dites: On approuve à peu près la moitié des recommandations précises concernant le régime d'aide financière. Je n'ai pas de difficulté à vivre avec ça.

Quant aux éléments qui sont supprimés, le ministre dit: Nous, on avait compté financer une partie de notre réforme là-dessus et, donc, c'est pour ça qu'il faut les supprimer. En tout cas, je suis heureux que vous ayez rappelé que... Je ne pense pas qu'il y ait lieu de supprimer la recommandation 14, qui réduit considérablement les frais de transport alloués. Vous avez bien fait de rappeler la nécessité de la maintenir. Les 22 $ également, vous souhaitez que l'on supprime la recommandation qui veut retirer la prime de 22 $; donc c'est revenir à ce qui existait. Je pense, encore là, que c'est une bonne recommandation qui a été rappelée par la plupart. Je n'ai pas de problème à vivre avec ça.

Quant à l'ajout, vous dites: La Fédération des cégeps, sur les points qui ont été ignorés dans le document... Vous proposez des recommandations supplémentaires au ministre. Écoutez, tout ce que je peux dire, c'est que ce sont de bonnes suggestions et j'espère que le ministre va en tenir compte.

Sur vos recommandations concernant le régime d'aide, je ne peux pas vous poser de questions pour poser des questions. Je pense que c'est clair; votre mémoire est bien clair. J'espère que le ministre va en tenir compte et que, dans l'évaluation générale qu'il fera, il insistera bien sûr davantage à l'endroit où il me semble que, avec plus d'acuité, il y a lieu de corriger de vrais problèmes, puisqu'on fait une réforme de l'aide financière et que c'est le moment de le faire.

Quelques commentaires sur votre opinion qui n'est pas tellement traitée dans le mémoire, mais puisque vous en avez parlé publiquement et que vous venez d'émettre un communiqué de presse avec un embargo jusqu'au 27 février - mais c'est passé - sur le dégel des frais de scolarité, j'aurais un ou deux commentaires. Mes deux questions, puisqu'on a la chance de vous avoir, porteraient là-dessus. Dans l'article de presse, avant de regarder spécifiquement votre communiqué, on vous faisait dire, bien sûr, que vous étiez pour le dégel des frais de scolarité. Je vais juste lire la fin de votre article: "La Fédération est d'autre part favorable au dégel, mais à certaines conditions." Évidemment, ça, on n'a plus reparlé de ça dans les titres et tout ça; ça, on est habitués, ce n'est pas grave. Mais moi, ce que je veux approfondir, c'est... Vous avez posé des conditions et vous en avez posé une majeure, à savoir qu'il faut absolument que cette hausse d'argent soit directement affectée à l'amélioration de la qualité de l'enseignement. Comme je sais que l'éducation vous intérese et que vous avez suivi les débats de cette commission parlementaire, peut-être pas en étant assidus ici, mais par ce que les groupes en ont dit, ce que la presse en a dit, est-ce que vous avez acquis cette conviction, suite au déroulement de cette commission parlementaire? Ou est-ce que vous avez obtenu, vous, comme fédération, la garantie du ministre que, effectivement, cette hausse sera directement affectée à l'amélioration de la qualité de l'enseignement?

M. Beaulieu: Si on a reçu la certification du ministre là-dessus?

M. Gendron: Oui.

M. Beaulieu: Bon. D'après le débat qui s'ensuit, effectivement la hausse va être attribuée à la formation universitaire. Le danger qu'il y a, c'est qu'il y art possiblement un désengagement de l'État, dans la mesure où compte tenu... Si l'on se sert des hausses ou des produits de la hausse pour faire en sorte que, par ailleurs, l'État se désengage au niveau des subventions, bien là, la problématique du financement des universités va rester la même, c'est-à-dire qu'on est d'accord avec l'augmentation des frais de scolarité dans la mesure où le produit de cette augmentation-là puisse effectivement servir au financement des universités et régler le problème du sous-financement. Cependant, effectivement, il n'y a pas d'engagement connu à l'effet que le gouvernement, par ailleurs, ne réduira pas les subventions qui sont accordées aux universités actuellement.

M. Gendron: Vous, vous l'évaluez à combien, le sous-financement universitaire?

M. Beaulieu: Le sous-financement universitaire?

M. Gendron: Oui.

M. Beaulieu: C'est très difficile à évaluer. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il semble accepté communément qu'actuellement la problématique de la qualité de l'enseignement universitaire passe par une addition très substantielle de subventions et de financement. Que cette augmentation-là exige ou autorise de solliciter de la part des étudiants et des étudiantes du Québec une contribution supplémentaire, soit, mais ça ne doit pas avoir pour effet que le gouvernement se désengage, par ailleurs, quant à ces subventions. Je pense que la responsabilité gouvernementale à cet égard-là dort être une responsabilité qui non seulement doit être maintenue, mais doit être aussi accentuée au niveau de ces

subventions. Donc...

M. Gendron: Si je lançais tes chiffres suivants... Je prétends que le sous-financement, avant l'injection de l'argent du dégel, était à peu près de 160 000 000 $...

M. Ryan: Avant les 55 000 000 $?

M. Gendron: Je répète: 160 000 000 $...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: ...et que si le ministre a bien compté, que la réforme va rapporter 40 000 000 $ en argent neuf, on n'a pas la garantie qu'il va aller directement dans le financement universitaire. Mais même si cela était, 160 000 000 $ moins 40 000 000 $, il reste 120 000 000 $. A ce moment-là, la question que je pose: Si vous lisiez la même chose que je viens de lire sur la situation exacte des chiffres que le sous-financement demeure à 120 000 000 $, auriez-vous la même opinion sur le dégel des frais de scolarité?

M. Beaulieu: La même opinion?

M. Gendron: À savoir d'être favorable au dégel, même si ça ne réglera rien du financement des universités.

M. Beaulieu: Quant à moi, je pense que ça règle une partie, ça ne règle pas tout le problème. Le problème du financement ou du sous-financement des universités demeure encore un problème important, aigu et auquel l'État ou le gouvernement doit s'attarder et travailler.

M. Gendron: Sur l'accessibilité, avez-vous une opinion à l'effet que le dégel des frais de scolarité puisse avoir un inconvénient significatif sur l'accessibilité, puisque le maintien du gel, selon le ministre, pendant 25 ans, a contribué énormément à la démocratisation et à l'accessibilité. Est-ce que que vous êtes les tenants de la thèse que le dégel des frais de scolarité n'aurait pas d'effet sur l'accessibilité?

M. Beaulieu: Nous pensons que le dégel n'aura pas un effet très significatif sur l'accessibilité.

M. Boucher (Gaétan): Si vous permettez, M. Gendron, votre question amène de ma part aussi un commentaire. Tout notre système d'éducation, au moment où on se parle, est pris avec un problème de sous-financement. Les universités peuvent, d'une certaine façon, s'estimer chanceuses de pouvoir compter, peut-être, sur 40 000 000 $ à travers les frais de scolarité. Les commissions scolaires se plaignent d'un sous-financement. Le Journal de Montréal, ce matin, faisait état d'un possible transfert, à travers l'assiette fiscale. Mais les collèges également sont victimes d'un sous-financement, sauf que nous, nous n'avons ni pouvoir de taxation, ni frais de scolarité. Évidemment, au moment où on se parle, on peut, à notre point de vue, être inquiets face à ce portrait-là et inquiets, aussi - et je partage l'avis du ministre - par rapport au dernier budget Wilson, en ce qui concerne les transferts fiscaux, bien qu'ils aillent dans le fonds consolidé, mais, néanmoins, on peut être inquiets. Il y a une partie, que le ministre évalue à 65 000 000 $, soit 30 %, qui, en principe, est réservée à l'enseignement postsecondaire. On peut être inquiets, à l'aube de l'annonce du discours du ministre des Finances, puisque, dans notre cas, en tout cas, c'est sûr, on n'a ni pouvoir de taxation, ni frais de scolarité. On compte donc sur l'État, les subventions de l'État, pour assumer la mission qui est la nôtre.

M. Gendron: Une dernière question, en ce qui me concerne, vous avez affirmé avec énormément de conviction, comme quatrième principe, que vous donniez, selon ce que je lis dans votre communiqué, votre accord au dégel, et je vous cite, vous dites: C'est probablement là la plus importante des conditions pour la Fédération des cégeps, soit que le dégel s'accompagne d'une amélioration de l'aide financière, de sorte que nul ne se voit refuser l'accès aux études universitaires à la suite de l'augmentation des frais de scolarité. Est-ce qu'en lisant attentivement le projet de loi sur l'aide financière, vous avez acquis cette conviction que nul ne se verra refuser l'accès aux études universitaires et qu'en conséquence la condition la plus importante est satisfaite et que c'est pourquoi vous êtes à l'aise de donner votre appui au dégel?

IUI. Beaulieu: Là-dessus, je dois vous dire que je ne pense pas que le projet d'aide financière permette actuellement à l'ensemble des étudiants et des étudiantes du Québec, et surtout à ceux et à celles qui sont les plus démunis, d'avoir une garantie d'accessibilité, et c'est pourquoi nous avons déposé un mémoire, et c'est pourquoi nous avons fart un certain nombre de recommandations.

M. Gendron: D'après vous, actuellement, au niveau des études collégiales, c'est combien le pourcentage des étudiants de niveau collégial qui reçoivent une aide financière sous forme de prêts et de bourses?

M. Forgues: Au niveau des prêts, je pense qu'à ma connaissance c'est un étudiant sur quatre; au niveau de la bourse, je pense que c'est un étudiant sur trois, ou le contraire.

M. Gendron: Oui, le contraire.

M. Forgues: C'est-à-dire qu'un étudiant sur trois a un prêt et un étudiant sur quatre à la bourse.

M. Gendron: Alors, si vous voulez juste répéter ça s'il vous plaît.

M. Forgues: Je vais prendre la feuille pour essayer de vous donner la bonne information. C'est un étudiant sur trois qui a un prêt pour une valeur d'environ, pour les collèges publics, 80 000 000 $ et un étudiant sur six des collèges publics a une bourse, pour l'équivalent de 60 000 000 $.

M. Gendron: Vous dites qu'il y a seulement 20 %, dans les collèges publics, des étudiants de niveau collégial qui ont une bourse, c'est bien ça?

M. Forgues: Un sur six.

M. Gendron: C'est ça. Merci.

Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous avez terminé, M. le député?

M. Gendron: Moi, j'ai terminé, mais ma collègue a peut-être des questions à poser dans les deux minutes qui me restent.

Lé Président (M. Gobé): Oui, s'il vous plaît. Mme la députée.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Une seule question. Vous ne croyez pas que le dégel des frais de scolarité va amener une non accessibilité. Vous réaffirmez, dans le communiqué, l'importance de la gratuité au collégial. Si ce principe était remis en cause, est-ce que ça toucherait à l'accessibilité?

M. Beaulieu: Bon. Lorsqu'on dit qu'au niveau universitaire il n'y aura pas d'impact significatif, je pense que ça, c'est une chose et on y croit. En ce qui concerne le niveau collégial, il faut bien se rendre compte que, dans la conjoncture actuelle et cette des prochaines années, le niveau collégial, de par la mondialisation des marchés, de par les champs de spécialisation qui vont définir finalement les connaissances de base ou les connaissances fondamentales pour que les jeunes puissent accéder éventuellement au marché du travail, on pense qu'effectivement le niveau collégial va devenir de plus en plus le niveau presque absolument essentiel pour un jeune s'il veut atteindre une fonction de travail convenable, au niveau collégial. Donc, ça devient un niveau quasiment obligatoire éventuellement et, partant, il me semble que là il y a une responsabilité de l'État qui est encore supplémentaire, qui va devenir de plus en plus importante et qui va de plus en plus s'accroître, à ce niveau-là.

Est-ce que l'augmentation ou l'ouverture à la problématique des frais de scolarité va avoir un impact sur les étudiants jeunes? Très certainement aussi. C'est vrai, il va y en avoir un impact. Est-ce qu'il va être significatif? Ça, je ne saurais vous le dire.

Mme Caron: Donc, l'impact est marqué au niveau collégial, mais ne l'est pas au niveau universitaire.

M. Beaulieu: Au niveau universitaire, il y aura un impact, mais il ne sera pas nécessairement significatif. Au niveau collégial, il y en aura certainement un aussi, mais de là à dire qu'il sera très significatif, je ne pourrais pas l'affirmer.

Mme Caron: Merci.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme la députée de Terrebonne. M. le député de d'Abitibi-Ouest, un mot pour conclure?

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le député de d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, vous avez un mot aussi?

M. Ryan: Oui, juste un mot, M. le Président. Je voudrais rappeler clairement, parce que j'entendais le président de la Fédération des cégeps parler des étudiants les plus démunis, qui seraient peut-être les personnes les plus affectées par la hausse des frais de scolarité... Je pense qu'il est important de rappeler, comme je l'ai dit à plusieurs reprises depuis le début des travaux de la commission, que tout étudiant présentement bénéficiaire d'une bourse verra sa bourse augmenter d'au moins le montant de l'augmentation des frais de scolarité. Par conséquent, il n'y aura pas d'impact monétaire pour cet étudiant là découlant de la hausse des droits de scolarité. Je pense que c'est important de le signaler avec clarté, parce que ça fait deux semaines qu'on le dit puis, du côté de l'Opposition en particulier, il y en a qui n'ont pas compris ou qui affectent de n'avoir pas compris. Je pense que c'est important que ce soit rappelé clairement.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Au nom de la commission, je tiens à vous remercier d'être venus. La commission va suspendre ses travaux quelques minutes afin de permettre à la Confédération des syndicats nationaux de prendre votre place en avant. La séance est suspendue pour une minute.

(Suspension de ia séance à 17 h 2)

(Reprisée 17 h 7)

Le Président (M. Gobé): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'éducation va reprendre ses travaux concernant la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. Je demanderais à la Confédération des syndicats nationaux de bien vouloir prendre place à la table, en avant. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

Est-ce que je pourrais demander aux intervenants de se présenter ou, du moins, à la personne qui va faire la présentation de présenter ses vis-à-vis.

Confédération des syndicats nationaux

Mme Lamontagne (Céline): Oui. Alors, Céline Lamontagne de la Confédération des syndicats nationaux.

Le Président (M. Gobé): Bonjour, Mme Lamontagne.

Mme Lamontagne: Bonjour. Je vais vous présenter ceux qui m'accompagnent. Denis Choi-nière, président de la Fédération nationale des enseignants «t des enseignantes du Québec; Jean Charest, conseiller syndical à la CSN, économiste de profession, et Mario Guertin, président du comité des jeunes de la CSN. Je voudrais aussi excuser l'absence de Mme Ginette Guérin, présidente de la Fédération des employés et employées des services publics qui regroupe les employés du soutien collégial et soutien élémentaire et secondaire.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Il me fait plaisir de vous accueillir et de voir qu'il y a même des économistes parmi nous aujourd'hui. Je vous donne maintenant la parole. Vous avez une période de 20 minutes pour procéder à la présentation de votre mémoire et, par la suite, le ministre et M. le critique en chef de l'Opposition auront chacun une période de temps pour vous questionner et faire valoir leur point. Alors, vous avez maintenant la parole.

Mme Lamontagne: Merci, M. le Président. Alors, il nous apparaît peut-être important quand même, avant d'aborder nos commentaires sur les orientations gouvernementales et les propositions gouvernementales sur le régime d'aide financière aux étudiants, de rappeler ce qui nous apparaît, à nous, certains enjeux de cette réforme et de rappeler aussi dans quel contexte cette réforme se fait.

Rappelons qu'en 1965 le Québec avait décidé de se retirer du programme canadien d'aide financière et on sait qu'à l'époque il y avait plusieurs raisons qui militaient en faveur de ce retrait. C'était un retrait, comme on le sait, avec compensation. On reconnaissait, par ce retrait-là, qu'il y avait des besoins spécifiques au Québec en matière d'éducation et que, si on voulait instituer un régime particulier d'aide aux étudiants, c'est qu'on souhaitait, entre autres - ce n'était pas la seule raison - faciliter le rattrapage en termes de scolarisation de niveau postsecondaire. Alors, si on dit que notre régime est peut-être meilleur qu'ailleurs au Canada, c'est parce qu'il y avait des objectifs et une situation particulière au Québec. Même si le Québec, aujourd'hui, à notre avis et de l'avis de tous, a fait des grands pas en termes d'accessibilité aux études postsecondaires, il nous apparaît que l'objectif d'accessibilité doit demeurer encore un objectif majeur de tout l'ensemble de nos politiques en éducation. Cet objectif-là, pour nous, n'est pas en contradiction avec des objectifs de qualité, de performance, d'augmentation du nombre de diplômes de 2e et de 3e cycles. Ce ne sont pas deux objectifs qui se contredisent, mais plutôt deux objectifs, à notre avis, qui devraient se compléter parce que le Québec, encore aujourd'hui, a du rattrapage à faire. Entre autres, rappelons-en quelques-uns, il y a le retard des francophones par rapport aux anglophones au niveau du temps, de la durée des études. Quant aux femmes, même si elles ont fait beaucoup de pas au niveau de l'accès aux études universitaires, il demeure que dans les niveaux non traditionnels, entre autres en sciences pures, il y a des retards importants et on demeure toujours en retard sur l'Ontario particulièrement au niveau du nombre de diplômés de 2e et de 3e cycles. Donc, un régime d'aide financière doit avoir comme objectif, toujours comme il a été dès le départ, de permettre une plus grande accessibilité des étudiants aux études postsecondaires.

Un deuxième aspect qui nous apparaît important aussi, c'est qu'on ne peut dissocier cette réforme que la commission parlementaire étudie actuellement du contexte du dégel des frais de scolarité. Parce que le régime d'aide financière visait des objectifs d'accessibilité et, historiquement, également la volonté politique de maintenir les frais de scolarité au Québec à un niveau plus bas que dans les autres provinces, visait des objectifs d'accessibilité et de rattrapage. En ce sens, les deux politiques se rejoignent. De plus, on en a parlé tout à l'heure dans l'autre présentation, c'est clair, et c'est la volonté du gouvernement, que la réforme qui est proposée au niveau de l'aide financière vise à compenser les effets négatifs du dégel des frais de scolarité pour les plus démunis ou ceux qui sont le plus économiquement faibles.

Nous, nous sommes inquiets, et très inquiets, des orientations qui sont sous-tendues par la jonction de ces deux projets qui sont parallèles et qui, en même temps, se joignent très bien. Nous ne croyons pas que des mesures de soutien financier aux étudiants et étudiantes

ne doivent pas entrer en contradiction avec d'autres moyens pour faciliter d'autres mesures qu'on pourrait qualifier de mesures plus universelles pour faciliter l'accessibilité de tous aux études. Il y a un choix politique qui est inquiétant actuellement au Québec, c'est qu'on remet de plus en plus des mesures dites universelles pour dire, oui, si on coupe dans des mesures universelles, on va, par ailleurs, créer des programmes pour que les pius démunis n'en soient pas touchés. C'est tout le débat qu'on a fait, les dernières semaines, sur le ticket modérateur sur la santé. Ça rejoint ce débat-là On sait que tout, que ce soit le dégel des frais de scolarité ou d'autres formes de ticket modérateur, l'effet, en bout de piste, de toutes ces coupures dans les mesures universelles, ça pénalise toujours les plus faibles et les plus démunis économiquement. Nous pensons que des corrections ne doivent pas être apportées à ce niveau, mais doivent être apportées par un régime fiscal.

L'autre question qu'on se pose quand on lie les deux politiques actuelles, dégel et aide financière, c'est: Est-ce que les bonifications actuelles qui sont proposées à l'aide financière vont permettre une pleine compensation des coûts supplémentaires? M. le ministre a parlé tout à l'heure de ceux qui étaient récipiendaires de bourses, mais qu'en sera-t-il pour ceux qui sont récipiendaires de prêts, qu'en sera-t-il pour ceux qui sont dans des limites difficiles? Comment seront-ils compensés par la réforme actuelle du régime? C'est d'autant plus inquiétant qu'on dit que peut-être ça pourrait aller - on n'en est pas sûr - jusqu'à une diminution de 12 000 étudiants au niveau universitaire, du fait du dégel des frais de scolarité. C'est pour ces raisons et c'est en lien avec la politique d'aide financière qu'on s'oppose aussi au dégel des frais de scolarité.

Si on revenait maintenant aux orientations gouvernementales sur l'aide financière. D'abord, on peut dire qu'on est en accord avec plusieurs modifications, mais on est inquiets, par ailleurs, de la tendance de l'augmentation de l'appart relatif des prêts par rapport à l'appart des bourses dans l'ensemble du régime d'aide financière. Ça s'est développé depuis les dernières années et, à notre avis, c'est un effet pervers du régime, dans la mesure où ça aura pour conséquence d'augmenter l'endettement des étudiantes at des étudiants.

On va nous dire que l'endettement des étudiants est moins élevé au Québec qu'en Ontario, mais je pense qu'il faudrait avoir des études beaucoup plus approfondies de comparaison de niveau de vie et on sait qu'il y a peut-être moins de facilité pour un étudiant ou une étudiante québécoise à se trouver un emploi au Québec qu'en Ontario, quand on connaît le niveau de chômage.

Alors, je reviendrais maintenant, si vous le permettez, M. le Président, aux recommandations qui sont contenues dans notre mémoire que vous ayez entre les mains. Je vais aller assez rapidement pour rappeler et dire quelles sont les modifications qu'on souhaite voir aux recommandations, aux orientations gouvernementales. Si on prend la recommandation 1 du cahier gouvernemental où on parle de l'exemption, où on parie de la contribution parentale et on parle de l'exemption pour enfants, nous, on est d'accord avec cette première recommandation-là, mais on souhaite qu'il y ait une formule d'indexation d'année en année pour tenir compte de l'augmentation du coût de la vie.

Deuxième recommandation: Nous, on s'inquiète d'une chose. On trouve qu'il faudrait réviser les tables pour s'assurer qu'il n'y aura pas une diminution de la contribution parentale pour les parents les plus fortunés. Sur la recommandation 3: Quand on propose que le revenu net soit celui établi par le fisc, on recommande qu'on inclue le revenu des gains de capital, les amortissements déduits à l'égard des édifices à logements, etc. Donc, que ce soit plus le revenu net que celui qui est prévu dans les formules d'impôt.

Au niveau de la recommandation 4: On est d'accord pour porter à 90 000 $ les actifs nets. Au niveau de la recommandation 5: On est d'accord avec le fait que les besoins du conjoint soient couverts par l'aide sociale. Au niveau de la recommandation 6: On est aussi d'accord avec la réduction de la contribution du conjoint. On s'est rendu compte, cet après-midi, qu'on était peut-être moins radical que la Fédération des cégeps. On n'a pas demandé l'abolition de la contribution du conjoint, mais on peut dire qu'on a fait un peu ce débat et, sur le principe de l'indépendance économique de chacun des conjoints, on pense que ça se défend très bien. Au niveau économique, on n'a pas fait les calculs de ce que ça pourrait signifier.

Nous recommandons, à la recommandation 7 sur la contribution de l'étudiant qui propose une contribution minimale fixe, qu'on revienne au statu quo, c'est-à-dire qu'on tienne compte des contributions individuelles. Nous sommes en accord - je ne nommerai pas l'ensemble des recommandations - sur tout ce qui améliore, tous les ajustements qui sont faits dans les recommandations, dans les orientations pour améliorer ceux qui sont des étudiants et les étudiantes qui ont une charge parentale. Je pense que ça nous apparaît intéressant et souhaitable actuellement.

Au niveau de la recommandation 11: Nous sommes aussi en accord avec cette recommandation-là pour des raisons d'équité La recommandation 12, elle, qui porte sur les frais de garde, nous, on croit qu'on a baissé par cette recommandation le plafond qui était à 64 $. On devrait maintenir le plafond qui existe actuellement. C'est vrai que peut-être des étudiants ou étudiantes ont droit à d'autres subventions, mais

ce n'est pas égal partout. Il y en a qui doivent avoir recours à la garde en milieu familial non subventionnée. Donc, 64 $ par semaine, ça nous apparaît vraiment un minimum pour la garde des enfants.

Nous appuyons la recommandation 13. La recommandation 14 sur le transport: Nous ne sommes pas d'accord pour qu'il y ait une diminution aussi substantielle, qu'il y ait diminution tout court du transport pour ceux qui n'ont pas accès au transport en commun. On pense que ça pourrait entraîner une mesure des gens qui deviendraient non résidents parce que les frais de transport ne sont pas payés comme ils devraient l'être. On n'en tient pas compte comme ils devraient être.

Au niveau de la recommandation 16 qui a pour effet de retirer la prime de 22 $ par semaine au budget du candidat qui était sur le marché du travail, on croit que cette recommandation devrait être biffée pour maintenir la prime de 22 $, parce qu'on ne croit pas que ce soit une prime, d'abord, parce que ce sont des frais réels qui sont entretenus par les étudiants et, d'autre part, je pense que ça pourrait aussi encourager la non-résidence, si tous les frais ne sont pas calculés.

Sur le comité d'appel, on est d'accord avec un comité, mais on est inquiets, à savoir si ledit comité va pouvoir traiter avec diligence les demandes qui sont faites, parce qu'il peut y avoir un "embourbement". Deuxièmement, oh souhaite, quand on parle des représentations des étudiants, qu'il y ait consultation des associations représentatives comme ça se fait dans d'autres comités consultatifs ou d'autres comités gouvernementaux.

Une des recommandations majeures de cette réforme, c'est d'élargir aux étudiants à temps partiel le régime d'aide financière. Évidemment, nous sommes en accord avec ça. Cependant, on souhaiterait qu'il soit élargi aux niveaux... à ceux des étudiants du collégial, parce qu'il y a aussi des étudiants à temps partiel au collégial et l'aide ne devrait pas être limitée à cinq sessions seulement, parce que, à cinq sessions, ce sont surtout les certificats, les étudiants qui sont au niveau des certificats. Et on pense qu'on devrait encourager, même à temps partiel, les étudiants à obtenir des baccalauréats.

Très rapidement. Une recommandation sur la question de la remise de la dette de 25 % pour les étudiants et les étudiantes de 2e cycle qui auraient complété leurs études dans les délais prescrits. Nous, on croit que cette recommandation devrait être retirée. Nous n'avons pas d'analyse assez substantielle qui nous dit que cette mesure-là va permettre d'encourager les études de 2e et de 3e cycles. Deuxièmement, on ne sait pas non plus quelles sont les causes, pourquoi les étudiants ne rentrent pas dans les délais prescrits ou allongent leurs études, surtout au niveau du doctorat, et on pense que ce sont d'autres programmes qui devraient encourager et inciter les études de niveau supérieur, par exemple, des programmes de bourse. Le fonds FCAR devrait être beaucoup plus accessible, plus substantiel. Il y a des bourses de particuliers. Donc, on ne croit pas que ce soit une mesure qui a sa place dans un régime d'aide financière, même si on est d'accord qu'il faille trouver des incitatifs pour les études de 2e et de 3e cycles.

D'autre part, si on passe à la recommandation 21, c'est que sur la question des sports, un régime particulier pour ceux qui participeraient à des compétitions d'envergure internationale, on s'est posé la question: Pourquoi pas ceux qui font du théâtre ou des arts? On pense que ces programmes-là devraient relever des fédérations sportives. Donc, on pense que ça n'a pas sa place dans un régime d'aide financière.

Au niveau de la recommandation 22: On est en désaccord aussi avec cette recommandation-là et on veut retourner au statu quo. C'est la limite des nombres de sessions pour être eligible au régime de prêts et bourses. Sur ce qui favorise les familles, on est en accord aussi.

Une dernière remarque...

Le Président (M. Gobé): Mme Lamontagne...

Mme Lamontagne: ...sur les propositions, qui est à la page 21 de notre mémoire. C'est tout le système de vérification. Nous, on est inquiets de ce système-là parce qu'on trouve que ça s'apparente au régime qui a été mis sur pied pour l'aide sociale. On sait que notre régime doit être crédible. Par ailleurs, est-ce que des moyens ont déjà été entrepris dans d'autres régimes, entre autres, celui de l'aide sociale qui n'était pas loin de l'abus de pouvoir? Deuxièmement, on pense aussi que les abus sont tellement minces que les moyens qu'on y met administrativement et les coûts qui sont encourus par ces mesures de vérification, valent-ils la peine de mettre tout cet arsenal? Parce que, dans tous les régimes, il y a peut-être des abus, mais c'est marginal.

Le Président (M. Gobé): Mme Lamontagne, votre temps est presque terminé, si vous voulez conclure.

Mme Lamontagne: Alors, j'avais presque fini.

Le Président (M. Gobé): S'il vous plaît.

Mme Lamontagne: Je voudrais, en termes de conclusion, rappeler que le régime d'aide financière, c'est un aspect de tout le débat qu'il y a en éducation. Nous, on considère que l'éducation profite aux individus, profite à la collectivité et, en ce sens-là, on croit toujours important qu'il y ait une part du financement public en éducation. On est inquiets à la fois des choix fiscaux, des

choix gouvernementaux qui ont été faits au niveau fédéral. La damier budget Wilson est très inquiétant parce qu'il y a une réduction des paiements de transfert qui va avoir des conséquences assez désastreuses pour les Québécoises et les Québécois. On espère que le gouvernement du Québec, qui a déjà fait des choix fiscaux avec lesquels on n'était pas en accord, ne va pas continuer dans ce sillage du gouvernement fédéral et qu'on va continuer à augmenter et qu'on va même augmenter les ressources en éducation. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Merci, madame. Je passerais maintenant la parole à M. le ministre de l'Éducation pour une période de vingt minutes.

M. Ryan: M. le Président, je remercie la CSN de l'excellente contribution qu'elle apporte à notre débat. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le mémoire qua la délégation, présidée par Mme Lamontagne, nous a résumé dans son intervention. J'en viendrai tout de suite à un certain nombre de commentaires qui réapparaissent pertinents en l'occurrence.

Je ferai d'abord quelques commentaires de caractère général sur les orientations qui sous-tendent tes interventions ponctuelles à propos du projet de loi; ensuite, peut-être quelques remarques à propos des points qui portent plus directement sur le projet de loi.

De manière générale, je pense que les passages les plus importants du mémoire sont aux pages 6 et 7 À la page 6, on parle de l'effet de l'entrée en scène d'une nouvelle conception du rôle de l'État dans la société. Ensuite, on parie de l'impact que ce développement a pu avoir sur l'importance que les sociétés, en particulier la nôtre, accordent à l'éducation.

Je ne serais pas enclin à partager la perspective dans laquelle est faite cette analyse, en page 6 en particulier. Je crois que ce qui s'est produit dans les sociétés développées, ces dernières années, ça a été un phénomène d'engraissement, un phénomène de corpulence qui a gravement affecte leurs capacités concurrentielles. Elles ont dû constater que pour rester dans la course, elles devaient ramener leur train de vie et leur style de dépenses à des niveaux mieux accordés à leurs moyens véritables.

Les États, en particulier le Québec, s'étaient dotés de programmes sociaux très élaborés, d'un train de dépenses fort élevé, d'une bureaucratie considérablement développée, tout ça s'étant traduit par un fardeau de denes très lourd dont le poids se répercute dans les dépenses quotidiennes de l'État. L'illustration la plus pratique que je puisse en donner, c'est que, pour la présente année, les charges de dettes de l'État québécois sont d'à peu près 5 300 000 000 $ sur un budget de 32 000 000 000 $. Je pense pouvoir dire devant vous, et sans aucune arrière-pensée d'antisyndicalisme, que les syndicats n'ont pas été étrangers à ce développement. Ils ont contribué à développer, dans notre société, des conventions, des contraintes, des modes d'organisation du travail qui ont contribué à ces phénomènes d'engorgement dans bien des endroits, qui ont conduit à la situation paradoxale que nous connaissons: pendant que notre société produit des milliers d'emplois nouveaux, de caractère précaire, il y a d'autres emplois, à un autre niveau, qui sont surprotégés, surtout dans les secteurs public et parapublic et tout ça se traduit par des coûts pour la collectivité. (17 h 30)

Nous allons renouveler encore les conventions collectives. J'espère bien qu'on conclura ça très bientôt, M. Choinière Encore là, dans les conventions, nous accordons aux travailleurs du secteur collégial, que représente M. Choinière, une protection qui va bien au-delà de ce que le secteur privé est capable d'accorder, et nous finançons cette protection avec les taxes des citoyens, il faut bien le dire. Je ne mets pas en cause autre chose que ce qui a été discuté aux tables de négociation. On donne des planchers d'emploi, par exemple, ça fait l'objet de débats continus entre nous, mais dans le secteur privé, les milliers d'entreprises qui sont à la marge même de la survie ne peuvent même pas discuter de plancher d'emploi; c'est tout juste si elles savent si elles vont être encore en circulation le lendemain. C'est dans ce contexte-là qu'on a été obligés de reprendre en main l'appareil de l'État et de se dire: II faut faire fonctionner l'État à un niveau qui convienne davantage à nos ressources.

Comme vous le signalez justement dans votre mémoire, la part des dépenses publiques dans le fonctionnement de la société québécoise a diminué, depuis quatre ans, d'au-delà de 25 % qu'elle était à la fin du régime du Parti québécois, à quelque chose qui est entre 21 % et 22 %, actuellement. C'est évident que ça se traduit par des contraintes nombreuses dont les membres du gouvernement sont les premiers témoins, les témoins les plus directement affectés, dans la conduite de l'action dont ils avaient rêvé. Mais c'est une contrainte que nous devons nous imposer. Quand nous regardons les statistiques, nous sommes encore à un niveau qui dépasse celui de sociétés correspondantes. L'Ontario, lui, il a un fardeau de dette de 4 000 000 000 $ pour un budget annuel d'au-delà de 40 000 000 000 $; nous autres, c'est 5 300 000 000 $ pour un budget de 32 000 000 000 $ ou 33 000 000 000 $; il faut que quelqu'un le paie.

C'est la situation à laquelle nous faisions face qui explique ceci. Je pense que, dans l'éducation, nous avons bien tenu le coup, finalement. J'ai donné des statistiques, au début des travaux de la commission, indiquant que, tout compte fait, l'éducation a légèrement amélioré sa place dans l'ensemble des dépenses de l'État.

Mais, étant donné ce que j'ai dit plus tôt, c'est évident que le taux d'augmentation des dépenses pour l'éducation a diminué par rapport au produit intérieur brut. Je pense que tout ça se tient, évidemment. Mais c'est un contexte qui s'est Imposé de force à nous.

Je me rappellerai toujours quand le gouvernement précédent a été obligé de serrer la vis et même de renier sa signature sur des contrats collectifs, de venir chercher dans la poche de nos travailleurs des millions et des millions de dollars. Il l'a fait parce qu'il avait reçu des appels vraisemblablement de certaines sources qui lui disaient: Vous êtes rendu au sommet de l'endettement. Il faut que vous établissiez un meilleur équilibre dans vos affaires.

C'est le problème qui s'est posé à nous. Nous autres, nous avons choisi la voie de la santé en nous disant que, quel que soit le sort du Québec au point de vue constitutionnel ou autre, il n'aura toujours de véritable force que celle de son portefeuille, celle de sa situation financière solide. S'il y a des vertus de travail, d'initiative, de créativité en arrière de ça, tant mieux. Mais, si on a tout le reste et qu'on n'a pas la force économique pour appuyer le reste sur un fondement solide, c'est bien difficile de fonctionner. C'est ça, le fond. Le reste, il peut y avoir un rapport Gobeil, un rapport Bertrand, un rapport Ryan et un rapport ci et ça, mais la société québécoise se défend bien contre tous ces rapports-là et recherche un équilibre quelque part qui est discutable. Quand l'équilibre ne fait plus l'affaire, le gouvernement est renversé et on en met un autre à sa place.

J'en viens au financement universitaire, maintenant. Ça s'inscrit dans tout ceci. Le sous-financement universitaire est une manifestation de ce mouvement qui avait commencé sous le gouvernement précédent, évidemment. Nous l'avons corrigé, là. Nous l'avons corrigé. Je vais vous donner des chiffres. Je vois que vous hochez la tête et j'en suis content, parce que vous m'obligez à m'expliquer davantage. Depuis quatre ans, nous avons augmenté les subventions aux universités d'au moins 15 % en dollars constants, alors que les dépenses du gouvernement en dollars constants augmentaient seulement de 0,8 %. Là, il y a quand même eu un effort de redressement qui se traduit par l'injection de 55 000 000 $...

Une voix: Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: ...dans la base de financement des universités et...

M. Gendron: Perroquet, gramophone.

M. Ryan: J'ai un léger différend avec (e député d'Abitibi-Ouest qui est d'une nature tout à fait mineure. Je parle de 55 000 000 $ et il parle de 21 000 000 $. Il sait très bien qu'il faut ajouter 34 000 000 $, ce qui donne 55 000 000 $.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: La seule chose qui nous sépare, c'est: Les 34 000 000 $, est-ce qu'on les compte pour l'année précédente ou pour cette année?

M. Gendron: Je ne peux pas. Le bulletin de la CREPUQ: 21 000 000 $.

M. Ryan: 55 000 000 $, par conséquent. M. Gendron: Une menterie.

M. Ryan: ...ajoutés par le gouvernement. Nous avions établi le sous-financement relatif par rapport à l'Ontario sur la base de 1986-1987, à 162 000 000 $. Il y a 55 000 000 $ qui avaient été ajoutés. Par rapport à 1986-1987, le député d'Abitibi-Ouest ne peut pas me chicaner parce qu'on l'applique à 1987-1988, le 34 000 000 $, ou à 1989-1990, ça ne change rien. Il est ajouté dans la base.

M. Gendron: Pour ça, je ne peux pas vous chicaner.

M. Ryan: 55 000 000 $ dans la base.

M. Gendron: Oui, oui.

M. Ryan: Merci.

M. Gendron: Je n'ai jamais mis ça en cause.

M. Ryan: Très bien.

M. Gendron: Je parle de l'argent neuf, l'an passé.

M. Ryan: Là, avec les frais de scolarité nous allons ajouter, mettons 41 000 000 $ par année pendant deux ans, ça fait 82 000 000 $ plus 55 000 000 $, 137 000 000 $. Entre 162 000 000 $ et 137 000 000 $, vous admettrez que nous aurons franchi un pas très important. On ne peut plus parler, 125 000 000 $ à 200 000 000 $, parce que ce ne sera plus ça la réalité. En outre, le ministre des Finances a déclaré dans son dernier discours du budget, que dès qu'il en aura les moyens, le gouvernement reconnaît qu'il doit faire encore plus pour les universités. Je pense qu'il voulait signifier la différence dont nous parlons ici.

J'ajoute, en toute franchise, que l'Ontario n'est pas notre modèle. Le modèle que nous choisissons en matière universitaire, c'est la moyenne canadienne, laquelle est supérieure à ce qui se fait en Ontario. En Ontario aussi on avait accusé une régression pendant un certain nombre

d'années.

Les droits de scolarité viennent s'inscrire dans ceci. Il nous est apparu, à la lumière des données que nous possédions sur l'ensemble du pays canadien, que l'effort demandé aux étudiants, pour le financement des universités, était complètement déphasé par rapport à la réalité canadienne. Alors que le coût d'un étudiant à l'université est devenu autour de 8900 $ par année, la contritublon qu'il est appelé à verser était restée à 540 $ depuis 24 ans, en moyenne. On s'est dit, un certain ajustement de ce côté... Tout a monté, les prix ont monté partout, c'est dû à un certain ajustement. Si on mettait ça seulement au coût de l'inflation, ça serait 2400 $. Là on va l'amener à 1240 $ sur deux ans. C'est dur. Et moi-même j'aurais préféré infiniment ne pas être le parrain d'une telle mesure. Mais c'est nécessaire, en raison de tout le contexte où nous opérons. C'est pour ça que vous avez raison de situer les droits de scolarité dans le contexte plus large. À condition que le contexte plus large soit présenté dans ses véritables dimensions. Je crois l'avoir fait en toute simplicité. Mais, quoi qu'il en soit, j'admets la divergence. C'est du débat politique. On présente la thèse du gouvernement réduite à ses termes les plus simples, et je le fais en toute bonne foi. Autrement, je ne ferais pas partie de ce gouvernement, si je ne croyais pas que c'est la voie qui peut le mieux nous conduire à une certaine santé. Je ne veux pas, par là, insinuer qu'il n'y aura pas eu d'erreur dans la conduite du gouvernement, qu'on n'aurait pas fait des choix budgétaires discutables. Tout ça est possible.

J'en viens maintenant au deuxième thème. Je vais faire ça très rapidement, M. le Président...

Le Président (M. Gobé): Je compte les minutes.

M. Ryan: Aux remarques sur l'assistance financière aux étudiants. Dans l'ensemble, je les trouve éminemment constructives, évidemment. Je les apprécie au plus haut point. Je vois que vous avez fait une étude très poussée des propostions contenues dans l'énoncé d'orientation. Vous nous exprimez votre accord sur la majorité de ces propositions. Vous émettez un certain nombre de réserves sur d'autres. Nous allons en tenir compte consciencieusement.

Je vous donne un exemple. Vous vous étonnez des pouvoirs d'enquête accordés au ministre. Évidemment, cette partie-là est un petit peu modelée - je le dis sans aucune cachette - sur lés passages qu'on trouve dans la Loi sur l'aide sociale. On nous a dit: Si on doit le faire pour l'aide sociale, il faut également qu'on puisse le faire pour l'aide financière aux étudiants. On a fait valoir à cette commission - le Protecteur du citoyen en particu- lier - que les situations n'étaient pas les mêmes, les possibilités de fraude sont très différentes. C'est une question que nous reconsidérerons. Pour introduire un mécanisme fort dans une loi, il faut qu'on ait un besoin vérifié et démontré. Dans ce cas-ci, sur la base de l'expérience, il y a matière à doute. Nous laisserons cette question continuer de travailler nos esprits.

Étudiants à temps partiel, vous suggérez que ça vaille également pour les étudiants du collégial. Je pense que c'est un point sur lequel on peut être facilement d'accord. J'en ai parlé avec la Fédération des cégeps tantôt. On va essayer, au cours des prochains mois, de trouver des modalités qui conviendraient le mieux à cette classe d'étudiants, pas facile à définir, parce que extrêmement hétérogène. Si vous avez des recommandations à nous faire là-dessus... La méthode que nous préconisions pour répondre aux besoins des étudiants dans notre énoncé d'orientation n'était pas la plus réaliste. Si vous aviez quelques observations à me faire là-dessus, je l'apprécierais vivement.

Je souligne juste un petit point, pour le comité d'appel, iI ne faudrait pas vous inquiéter trop parce qu'il n'y aura pas seulement... Il va y avoir un comité, mais avec plusieurs bancs. Les bancs vont siéger à trois, et il y aura de la mobilité, ils pourront se déplacer d'un endroit à l'autre. Il pourrait y en avoir trois ou quatre qui siégeront en même temps. On va faire en sorte que, comme vous le dites, il ne s'accumule pas de listes de cas qui n'auraient pas été traités. Je me fais un point d'honneur de voir à ce qu'il n'y ait pas d'accumulation d'arriéré dans les affaires du ministère. On va essayer d'être fidèle à la tradition des dernières années. Je vous remercie. S'il y a des remarques particulières sur les étudiants à temps partiel, j'apprécierais les recevoir, évidemment sur d'autres, les commentaires que j'ai pu formuler, que j'ai faits en toute bonne foi.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le ministre. Je dois maintenant passer la parole à M.. Je m'excuse, mais ce serait sur le temps de M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Ryan:... empiéter sur mon temps.

Mme Lamontagne: Ça va. On va prendre les questions de M. le député et on...

Le Président (M. Gobé): On se doit malheureusement ou heureusement de suivre les horaires. Il y a des gens qui attendent de passer après vous. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez maintenant la parole.

M. Gendron: Une chose est certaine. C'est sûr que, compte tenu de l'analyse sociopolitique que le ministre vient de faire, il aurait été légitime de laisser quelques minutes de réaction

avant que je prenne la parole et moi, je suis prêt, sincèrement, parce que je trouve que ça n'a pas de bon sens que vous n'ayez pas une couple de minutes de réaction à son discours. Normalement, on reçoit des invités. Alors, je croyais qu'il y aurait un peu d'échanges avec vous et avec les règles qu'on s'étaient imparties, il a pris ses 20 minutes, alors il n'y a pas bien bien d'échanges. Moi, je vous donnerais au moins deux minutes de mes minutes, moi, ça ne fait rien d'en avoir 18, pour avoir deux ou trois minutes de réaction à son discours épistolaire sur une analyse sociologique et socio-économique de la société québécoise, selon les vues du Parti libéral, j'aimerais avoir les vôtres.

Le Président (M. Gobé): M. le député d'Abititi-Ouest, je vais maintenant passer la parole à Mme Lamontagne pour faire quelques remarques.

M. Ryan: M. le Président, si l'Opposition veut consentir à un certain nombre de minutes additionnelles pour qu'on n'empiète pas sur le temps de l'Opposition, nous n'avons pas d'objection de ce côté-ci.

M. Gendron: Non, mais c'est surtout pour leur permettre de réagir et je vais...

M. Ryan: Je ne voudrais pas que vous pensiez que vous nous faites une faveur parce que...

M. Gendron: Moi, non, je ne fais pas de faveur, je ne fais pas de faveur.

M. Ryan: Très bien.

M. Gendron: Je fais ce que je viens de faire.

Le Président (M. Gobé): Mme Lamontagne, vous avez la parole.

Mme Lamontagne: D'abord un premier commentaire sur les premiers commentaires de M. le ministre sur le rôle de l'État. Je pense que ça demanderait plus de deux minutes pour faire un débat, parce que c'est d'abord un débat politique et des conceptions politiques du rôle, finalement, du gouvernement. On peut comprendre la situation des pays industrialisés dans les années quatre-vingt, les situations difficiles qui ont été vécues, mais est-ce que, à notre avis, il y a des choix politiques qui ont été faits de vouloir, par exemple, être concurrentiels au niveau économique? Tout le monde doit être d'accord avec cet objectif-là, mais comment on y arrive, selon quels moyens, selon quels choix fiscaux on le fait, ça, il y a place à débat politique. Évidemment il y a aussi, quand on parle, un peu étonné par ailleurs, des conventions collectives à ce niveau-ci, c'est aussi un débat en soi de parler de la place des conventions collectives du secteur public. On en a beaucoup parlé ces derniers temps. Mais une chose, juste une remarque, qui est très pointue, mais qui m'ap-paraït importante quand on parle de la sécurité d'emploi dans le secteur public, il nous apparaît deux choses majeures, c'est que, premièrement, la sécurité d'emploi est un moyen important pour assurer une qualité des services ou une continuité des services, que ce soit dans l'éducation ou dans la santé; deuxièmement, à notre avis, et quand on compare avec d'autres expériences qu'on a dans le secteur privé où il y a fragilité, il n'y a pas de sécurité d'emploi, à notre avis, il est plus facile, de faire des changements dans un milieu où les travailleurs et les travailleuses se sentent en sécurité, sentent qu'ils ont un avenir où ça ne sera pas la mise à pied ou la fermeture qui arrive. Donc, je pense que c'est un gage à deux niveaux de la qualité des services que cette protection de l'emploi qui existe dans le secteur public. Sur des questions d'ordre financier, je demanderais à Jean de continuer.

M. Charest (Jean): Je vais être bref, je n'entrerai pas dans les détails, je voudrais juste faire référence, si vous permettez...

M. Gendron: Je vous permets, vous, après ça, je vais y aller. (17 h 45)

M. Charest: Oui, ça va. Parce que M. le ministre a fait référence d'entrée de jeu à la capacité de payer de l'État et à la capacité de payer des citoyens et, à juste titre, à notre avis... Évidemment, nous ne sommes pas en faveur d'assister à une explosion de la situation financière du gouvernement. Cependant, je pense que quand on fait référence à la capacité de payer de l'État et, donc, à la capacité de payer des individus, des citoyens et des citoyennes au Québec, il faut bien voir que les besoins en éducation, puisque c'est de ça dont on parle, après-midi, sont réels peu importe qui les assume financièrement. Les coûts qui sont reliés à ces besoins-là en éducation sont aussi des coûts qui sont réels, qui sont existants. On peut jouer un peu sur les coûts, mais globalement, quand on constate certains besoins de formation, certains besoins d'éducation dans la société, il y a des coûts qui sont inhérents à ça et qui ne disparaissent pas du fait que l'État effectue des coupures ou du fait que l'État se désengage pour prendre l'expression de plus en plus consacrée.

Ce qui fait que le fardeau financier pour la société demeure, pour répondre aux besoins qu'on constate en éducation. À ce niveau, quand on fait justement référence à la capacité de payer des citoyens et des citoyennes, je pense qu'il est important de voir que quand l'État se désengage, les coûts ne disparaissent pas pour autant. Ils se répartissent différemment chez les individus dans

la société. On assiste, malheureusement, à notre avis, depuis quelques années, à un transfert de plus en plus important de ce qu'on pourrait appeler des charges directes, en termes financiers, directement vers les usagers et les usagè-res et ça à tous les niveaux de l'éducation.

À notre avis, on assiste donc là à une nouvelle répartition des coûts qui, de toute façon, vont demeurer dans le domaine de l'éducation, tant et aussi longtemps qu'on considère qu'il y a des besoins dans ce domaine-là. La question, à notre avis, se résume beaucoup plus à savoir - et je termine là-dessus - est-ce que ces coûts-là, on va choisir de les faire assumer par la gestion du régime fiscal, et donc, en tenant compte, à notre avis, davantage de la capacité de payer des individus? Ou, est-ce qu'on va les transférer de plus en plus vers les individus, vers les usagers et les usagères, ce qui est néfaste, à notre avis?

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie. Je passerai maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, très rapidement. Je vais prendre mon temps quand même, mais je veux vous dire que je pense que vous avez un excellent mémoire. Vous avez un mémoire très très bien fouillé, qui a le mérite de faire plus que juste une analyse ou une observation un peu neutre de deux éléments de la problématique: dégel des frais de scolarité et bonification, amélioration ou réduction de certains bénéfices du régime d'aide financière. Qu'un organisme comme le vôtre prenne la peine de fouiller des orientations de société, des problématiques beaucoup plus larges que strictement un geste ponctuel comme celui de dire: Nous on poursuit - et c'est vous qui parlez - encore la démocratisation de l'enseignement postsecondaire et vous expliquez pourquoi. C'était requis, nécessaire de le faire, le problème que nous avons, c'est que tout argument autre que ceux dans lesquels est bien campé le ministre ne semble pas avoir d'emprise sur lui.

Lorsque le ministre faisait cette espèce d'analyse de sa philosophie et de la nécessité que le gouvernement réduise les engorgements, et ça ne donne rien de faire ça parce qu'objectivement, il n'y a personne qui a mis ça en cause qu'à partir du moment où on passe à travers une crise de fou comme on a passé, qu'il fallait faire des choix plus rationnels. Est-ce que nous aussi on poursuivait l'objectif de réduire le rythme de croissance des dépenses? Ils diront ce qu'ils voudront, mais tous ceux qui ont regardé un gars comme Darcy McKeough, ce n'était pas PQ bien bien ça, pour ceux qui ne le savent pas là, tous ceux qui ne connaissent pas Darcy McKeough, c'est l'ancien ministre des Finances ontarien, type crédible, qui, pendant une quinzaine d'années, a eu une responsabilité majeure en Ontario et disait: Le gouvernement du Parti québécois, tout compte fait, s'est très bien acquitté de sa responsabilité de gestionnaire des finances publiques de l'État québécois.

Et un type comme Alain Dubuc, je ne veux pas citer Alain Oubuc, mais c'est parce que dans ce domaine-là, on ne s'en sort pas. Moi aussi je suis capable de mettre des preuves et des éléments. Alain Dubuc disait, à un moment donné: Ce qu'il y a de crédible quand on analyse le comportement d'une administration par rapport à l'autre, c'est les besoins financiers nets parce qu'il disait: Toutes les autres affaires, c'est de la merde, excusez l'expression. Donc, est-ce que les besoins financiers nets, sous le Parti québécois, ont été réduits en période de dégonflement de l'appareil de l'État versus les libéraux? Il a dit: Un demi-mHliard les trois dernières années du Parti québécois, un demi-milliard les trois premières années du Parti libéral. Donc, moi, ce n'est pas sur ces pistes-là que je veux engager le débat parce que sur deux éléments, réduction du rythme de croissance des dépenses, nous avions également cet objectif. On n'avait pas le choix.

Deuxièmement, le niveau d'endettement de l'État, est-ce qu'il a été, à un moment donné, trop élevé? Réponse: Oui. Parce que ça ne m'intéresserait pas, moi, aujourd'hui de - je veux dire - défendre un régime comme ces gens-là d'en face défendent, indéfendable strictement sur le plan du comportement des finances publiques et là, je parte du régime fédéral. C'est criminel d'avoir un niveau d'endettement comme le Canada en a un. Êtes-vous au courant que nous, nous en aurions un à peu près de 8 500 000 000 $ à 9 000 000 000 $ de déficit en 1990, s'il n'y avait pas eu des comportements responsables qui ont été faits au cours des années quatre-vingt à aller jusqu'à aujourd'hui? Ça, c'est établi. C'est réglé. Moi, je suis capable de vivre avec ça et ce n'est pas ça le débat.

Je reviens, par contre, à des objectifs que vous avez, qui sont plus lents. Est-ce que, oui ou non, on doit poursuivre l'objectif, en 1990, de la démocratisation et de l'accessibilité de l'enseignement secondaire et postuniversitaire, c'est-à-dire collégial et universitaire? C'est évident que la réponse est oui, d'après moi. Il n'a pas dit un mot de ça. Vos raisons pourquoi on doit continuer - page 3 - il n'en a pas parlé, le ministre. Ça, ça mériterait une analyse sérieuse si on avait affaire à un ministre qui veut analyser les vraies causes. Qu'est-ce que vous avez dit là? Pourquoi est-ce nécessaire? C'est parce qu'au niveau des francophones versus les anglophones, c'est grave notre taux de diploma-tion. C'est grave. Le taux de fréquentation universitaire, c'est grave. Vous avez dit: Les femmes. Vous avez raison. Il y a eu un rattrapage mais il y a encore bien trop de recul pour se permettre des folies, pour se permettre de poser des gestes qui auraient des conséquen-

ces graves. Vous avez dit une autre affaire: Temps partiel et adultes. Pensez-vous que vous n'avez pas raison? Jasez avec du monde universitaire. Ils vont dire: On est à peu près la seule société... Bien oui, on est distincts, mais on ne peut pas se comparer et puis quand ça fait en défaveur de nous autres prendre les éléments. Au niveau du temps partiel, est-ce qu'on a un niveau d'étudiants à temps partiel trop élevé au Québec? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'un temps partiel a exactement la même qualité qu'une formation continue? C'est non. Est-ce qu'on ne devrait pas poser des gestes, comme gouvernement, pour s'assurer qu'il y ait plus d'étudiants qui fassent le choix d'études à temps plein? La réponse, c'est oui. Est-ce que ce gouvernement-là fait ces choix-là? La réponse, c'est non. C'est ça le genre de débat qu'on doit avoir. Vous l'avez bien exprimé à la page 3.

Page 4, vous dites: Nous, l'accessibilité du plus grand nombre à l'éducation postsecondaire reste toujours, pour nous, un objectif fondamental du système d'éducation. Vous avez le droit de faire ça parce que c'est correct.

Page 5, le ministre de l'Éducation, pas un mot sur la page 5. Qu'est-ce que vous avez illustré à la page 5? Et là, on n'est pas dans les grands discours de l'État, là, à la page 5. Là, on est dans une réalité de ce gouvernement qui a endetté les étudiants de plus en plus, en inversant les proportions prêts et bourses. Là, il y a des chiffres qui parlent. Écoutez! Pendant cinq ans, le volume des prêts est passé de 160 100 000 $ à 245 000 000 $, une augmentation de 43 %. C'est quoi ça qui a augmenté? Le prêt. Le prêt, c'est quoi? C'est de la dette étudiante. C'est de l'endettement étudiant. Puis, j'arrête là parce que si on lit comme il le faut la page 5, on se révolte un peu de voir que, dans la décision qu'ils prennent, ils ne tiennent jamais compte du comportement qu'ils ont eu sur les aspects qui sont liés à la décision qu'ils ont prise. La décision qu'il a prise de dégeler les frais de scolarité et d'arriver avec un nouveau régime d'aide financière, ça n'a rien à voir avec le discours qu'on a entendu sur vos pages 6 à 8. Même si moi je tenais à ce qu'il soit dans votre mémoire, le discours sur les pages 6 à 8 qu'il a fait, mais ça traduisait, vous autres... Là où il y a un écart fondamental entre votre perception et la nôtre, c'est qu'à un moment donné vous l'affirmez haut et fort. Vous, là, vous ne favorisez pas le retrait de l'État comme instrument de promotion collectif et de réduction des inégalités. Ça c'est du fondamental. En ce qui nous concerne, ce n'est pas un discours, c'est une pratique. Nous, on l'a prouvé dans la pratique. Nous aussi, on n'était pas des tenants d'un État le plus petit possible, le moins interventionniste possible, le plus rapetissé possible, qui n'a presque plus de rôle à jouer. Ce n'était pas ça notre conception et ça, c'était une question clé. Est-ce qu'on doit encore, en 1990, convenir que ça prend un bras puissant de l'État pour corriger des inégalités là où elles se produisent les inégalités? La réponse, en ce qui nous concerne, c'est oui, chers amis.

Je vais vite sur tout le bon travail, sincèrement, que vous avez fait au niveau du régime comme tel. Comment je prendrais une demi-heure pour commenter les bonnes recommandations que vous avez faites, dans le fond, là je vous cite juste un peu, vos recommandations sur le régime, vous avez scruté les 24 recommandations et, à toutes choses près, ce sont les mêmes commentaires émis par d'autres groupes sauf pour la recommandation numéro 11 où il y a une originalité, et moi je vais m'en servir. Je vais m'en servir lors de l'étude article par article du projet de loi qui va venir subséquem-ment. Vous m'avez donné un excellent instrument de travail pour, à chaque fois qu'on arrivera dans, ce qu'on appelle, le quotidien du projet de loi. Là, il y aura lieu de se servir des suggestions que vous nous faites pour faire des ajustements, que ce soit sur les amendes qui sont trop sévères, que ce soit sur le système de vérification et d'enquête qui m'apparaît abusif... Il faudrait retirer ça de là parce que ça n'a pas d'allure. Le Protecteur du citoyen est venu nous le dire. Ça me fait juste des appuis de plus pour dire: Écoutez, il me semble que tout le monde a dit la même chose, donc, on enlève ça de là.

Avant de laisser ma collègue poser quelques questions, je ferais deux ou trois autres considérations, aux pages 25, 26 et 28, parce que, encore là, je trouve qu'il y a pas mal d'éléments d'analyse. Avant d'aller à ces pages, je vais juste rappeler qu'à un moment donné, vous avez affirmé: Notre population, au Québec, il faut qu'elle tienne compte des milieux défavorisés, des temps partiel, des francophones, des femmes, des interruptions des études, de l'endettement et du choix de programmes courts plutôt que de programmes longs.

Ça, c'était une bonne vision, parce que ce sont tous les problèmes que nous avons au niveau d'études universitaires adéquates. Page 25. Là, c'est pour contredire le ministre de l'Éducation, quand il dit: Tout compte fait, dans le domaine de l'éducation, on est chanceux. On s'en tire très bien puis les dépenses dans le domaine de l'éducation n'ont pas substantiellement été réduites. Bien, ce n'est pas ce que les chiffres disent. Vous l'avez prouvé aux pages 25 et 26. C'est on ne peut plus clair. Tous les niveaux d'enseignement ont été atteints et ont été atteints d'une façon assez dramatique, parce que c'était 7 % du PIB du Québec alors qu'actuellement, on est rendus à 5,3 % puis même pas. On est rendus plus bas, à ma connaissance. Ça, c'est 1987-1988.

En 1987-1988, le Conseil des collèges estimait que les collèges publics recevraient 480 $ de moins par étudiant qu'en 1977-1978. Puis, pourtant, même avec ces choix-là, vous

avez indiqué une bonne trace pour les membres ministériels. Le budget d'enseignement privé, lui, n'a pas eu de problème: 15 000 000 $ d'augmentation par rapport à l'année précédente. Ça indique des choix.

Finalement, vous avez touché une question, mais ce serait peut-être ma question accompagnée d'une autre. Je trouve qu'il est légitime d'être très critique dans ce dossier-là, quand on voit qu'il n'y a aucune demande de la part de ce gouvernement-là d'un effort additionnel du secteur privé. Et vous savez que le secteur privé, il n'a pas été "clenche" sous ce gouvernement-là. Vous avez des chiffres qui le prouvent. Il n'a pas trop été "clenche". Que ce soit le fait qu'on ait enlevé l'exemption pour gains de capital, 34 000 000 $ de moins dans le Trésor public. Merci, le gouvernement Provigo, merci beaucoup! Même chose au niveau du taux d'imposition pour les riches. D'un coup sec, on l'a baissé de 33 % à 28 %; ce n'était pas assez. Le taux d'imposition, on l'a baissé; il est passé de 28 % à 24 %. Là, on aime bien ça, nous autres, les gens qui sont riches, sauf qu'on trouve que dans la société, il y en a I %. Un gouvernement n'est pas censé avoir un comportement ou de la réglementation pour 1 % de la société. Il est censé l'avoir pour la grande majorité de la société. Ce n'est pas parce qu'on hait les hommes riches. On adore ça C'est bon pour l'économie québécoise, sincèrement, mais pas au détriment de l'ensemble ou de la majorité d'une population.

Donc, les entreprises, elles n'ont pas été trop "clenchées". Et je pense que c'est l'abbé Dion qui disait, en mars 1989: Je déplore le manque de générosité du secteur privé. Ma question précise est la suivante: Est-ce que vous croyez qu'avant de prendre une décision sur le dégel des frais de scolarité qui va jeter à terre tout un pan du mur du Québec moderne par rapport à l'accessibilité, est-ce que, vous, vous seriez favorables à une taxe sur la masse salariale qui serait applicable à deux chapitres précis: premièrement, au recyclage de la main-d'oeuvre, parce que c'est un problème majeur de la société québécoise et également une partie de cette taxe sur la masse salariale qui serait applicable au financement universitaire? Parce que même si je ne veux pas m'obstiner avec le ministre sur les chiffres, il n'en demeure pas moins que dans le bulletin de la CREPUQ, même avec son addition, la CREPUQ dit: En même temps que tu es sur la bonne voie pour dégeler, nous, c'est conditionnel à 50 000 000 $ de plus cette année. Ça, c'est dans le bulletin de la CREPUQ signé Patrick Kenniff, président.

Alors, ça signifie que le sous-financement universitaire, on ne l'a pas réglé. Alors, c'est quoi, vos commentaires sur cette question?

Mme Lamontagne: Premièrement, par rapport au lien entre les maisons d'enseignement et les universités, en particulier, l'entreprise, c'est évident. Là, on est en train de faire des études que l'entreprise, pour les retombées qu'elle a de l'éducation, du système de l'éducation, particulièrement des systèmes universitaire et supérieur, finance très peu le système de l'éducation.

Par ailleurs, on est aussi conscients qu'il ne faut pas qu'il y ait une dépendance des maisons d'enseignement par rapport à l'entreprise. Il faut qu'il y ait des liens, H faut qu'il y ait un financement qui vienne des entreprises, mais il faut que les maisons, les universités demeurent autonomes dans leurs objectifs. Elles ont des objectifs beaucoup plus sociaux et beaucoup plus larges.

Quant au fonds pour financer le recyclage de la main-d'oeuvre et à la fois les universités, on n'a pas de position précise sur cette question là Par ailleurs, au niveau de la formation professionnelle, on a toujours demandé, soit par le biais des conventions collectives, que les employeurs mettent une partie de la masse salariale dans la formation professionnelle de leur main-d'oeuvre. Ce qu'on étudie aussi au niveau de la formation professionnelle, on le sait, ça a été proposé par le rapport au niveau fédéral, c'est qu'à cause, entre autres, des petites et moyennes entreprises qui, même si elles mettaient tant de pourcentage, 1 % de leur masse salariale pour former leur propre main-d'oeuvre, ça ne serait pas suffisant pour leur propre main-d'oeuvre.

On est en train de réfléchir sur la question d'un fonds qui serait un fonds peut-être semblable à celui qu'il y a pour l'indemnisation des accidentés du travail, qui pourrait être géré, je ne sais pas, de façon collective, qui pourrait servir à la formation professionnelle. Le débat est à faire, par ailleurs, à savoir si ce même fonds doit servir pour financer directement les universités. Mais c'est sûr que s'il y a plus d'argent pour la formation de la main-d'oeuvre, même en emploi, ça a des retombées sur l'ensemble du système, même du système postsecondaire parce que le recyclage en emploi n'est pas juste de niveau secondaire, il est surtout de niveau postsecondaire et aussi de niveau universitaire. Parce qu'on sait que les études de main-d'oeuvre qu'on fait, les projections sur les besoins de main-d'oeuvre, c'est que c'est une main-d'oeuvre de plus en plus qualifiée, de plus en plus de niveau universitaire dont on aura besoin au Québec.

Donc, c'est clair que si les entreprises investissaient dans leur propre formation, il y aurait des retombées sur l'université. Et sur la question précise du fonds, c'est oui pour la formation professionnelle et on est en réflexion sur la question, à savoir si ça doit financer les universités directement.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme Lamontagne. M le député, un mot pour

conclure.

M. Gendron: Bien, si c'est bien vrai qu'il ne nous reste plus de temps.

Le Président (M. Gobé): Non, malheureusement, nous devons...

M. Gendron: On va respecter les règles, on va conclure. La conclusion, je vais la faire, mais dans le sens que je la partage avec nos invités. Il est clair que la décision du gouvernement de dégeler les frais de scolarité s'inscrit dans la continuité des politiques budgétaires et fiscales du gouvernement, c'est-à-dire un désengagement progressif non seulement de ses responsabilités, parce que là-dessus, on s'est bien entendus. Nous, on pense qu'à partir du moment où le coût est élevé, il faut que l'État soit convaincu que notre régime ou notre système universitaire offre un enseignement de qualité, si on veut prendre le virage et relever les défis.

Je n'ai pas, moi, la conviction que l'injection des 40 000 000 $ va régler quoi que ce soit et ça me répugne de voir qu'elle sera portée exclusivement par les étudiants, non pas parce que je ne suis pas conscient qu'ils ont les frais de scolarité les plus bas dans le monde ou en Amérique du Nord, mais parce qu'on est une société qui a du rattrapage à faire et qui a des problèmes cruciaux qui n'ont pas été évalués et pris en compte depuis cinq ou six ans. Si on avait pris en compte...

Moi, j'en ai une jeune fille qui est à l'université et je sais ce que ça coûte. Je n'ai pas de prêt, je n'ai pas de bourse. Je n'en demande pas parce que je suis d'accord avec cette philosophie sociale que les plus hauts salariés s'arrangent et c'est notre responsabilité. Elle, elle l'est moins, par exemple, compte tenu du niveau d'autonomie et de l'âge qu'elle a, mais ça, c'est un autre débat. Mais je veux juste signaler que je sais très bien ce que ça coûte, je sais très bien ce que ça coûte à l'étudiant. Et quand on laisse voir qu'il ne paie que 574 $ de frais de scolarité, c'est une fausse réalité par rapport à notre vécu. Ça, on ne le dit jamais. Ça ne correspond en rien au coût réel. Écoutez, il y a quelqu'un qui est venu prouver que même au collégial, il n'y en a pas de frais de scolarité et, en moyenne, ça coûte 500 $. Et là, je parle juste des frais de catéchisme, de volumes, de ci et de ça. Je ne parle pas de pension et ils ont le droit de vivre eux autres aussi.

On est dans une société où on a un paquet de familles éclatées. On dit: On est d'accord avec une politique familiale, on est d'accord pour inciter à une espèce de soutien plus intéressant que ça et ce sont ces données-là qui ne paraissent pas dans la réalité un peu froide de dire: Écoutez, c'est plus bas, on hausse et on regardera les conséquences après. Moi, je ne peux pas marcher là-dedans. J'ai senti que vous aviez la même conviction, que le moment n'est pas venu de requestionner un régime qui, actuellement, a fait ses preuves quant à deux questions de fond: la démocratisation et l'accessibilité. Et quand nos retards seront comblés, on regardera ça.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, avez-vous quelques remarques brèves à faire?

M. Ryan: Non. Je pense que je m'abstiendrai de remarques additionnelles. J'ai dit l'essentiel tantôt. C'était bien clair et ce ne sont pas des positions qu'on peut ébranler par des échanges de cinq minutes, évidemment. Encore une fois, je voudrais signaler qu'en ce qui touche le régime d'aide financière aux étudiants, j'ai apprécié l'analyse responsable qu'a présentée la CSN et je crois que tôt ou tard, par la force des choses, elle en viendra à faire le même genre d'analyse pour l'ensemble de nos problèmes économiques et sociaux et que ça nous rapprochera beaucoup. Merci beaucoup.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Mesdames et messieurs, au nom de fa commission, je vous remercie.

Nous allons maintenant suspendre pour permettre à l'Association des syndicats de professionnelles et professionnels de collège du Québec de se présenter en avant.

La séance est suspendue une minute.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

(Reprise à 18 h 7)

Le Président (M. Gobé): La commission reprend ses travaux. C'est la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. J'appellerais maintenant en avant l'Association des syndicats de professionnelles et professionnels de collège du Québec. À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous voulez partir de... Je demanderais aux gens de la CSN, si vous voulez aller discuter un peu dans le salon à côté, parce qu'il y a des gens qui doivent prendre place en avant. À l'ordre, s'il vous plaît! Ce n'est pas un "meeting" ici, là. Allez faire le piquet de grève ailleurs. M. Bussière et M. Michel Chagnon, si vous voulez prendre place. Merci, M. le ministre. Si vous voulez vous présenter, afin que nous puissions vous connaître visuellement.

M. Bussière (Alain): Alors, Alain Bussière, président de l'Association des syndicats de professionnelles et professionnels de collège du Québec.

Le Président (M. Gobé): Bonjour, M. Bussière.

M. Bussière: Et M. Michel Chagnon, qui est un des signataires du document que vous avez; il est aussi une ressource dans le milieu, c'est-à-dire qu'il est professionnel à l'aide financière au cégep de Joliette, de Lanaudière.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Vous avez maintenant vingt minutes pour exposer votre mémoire; par la suite, le ministre et le critique de l'Opposition auront chacun un laps de tempe pour répondre à vos questions et parler de votre mémoire. Vous avez maintenant la parole, vous pouvez procéder.

Association des syndicats de professionnelles et professionnels de collège du Québec

M. Suseière: Évidemment, ce mémoire, vu la nouveauté du concept que nous vous proposons, se veut principalement un document de réflexion. Nous sommes tout à fait conscients que nous ne disposons pas de toutes les ressources requises pour en évaluer toutes les implications. Compte tenu des remarques que j'ai entendues tout à l'heure de savants participants à cette rencontre, je précise justement que ça se veut vraiment un document de réflexion. Donc, on sait pertinemment qu'au cours des vingt dernières années, le Québec a pratiqué une politique de plus grande démocratisation et de permettre l'accessibilité maximum aux gens du Québec de se scolariser. Pour cela, il a créé, évidemment, le régime de prêts et bourses qui a évolué au rythme des besoins et des choix du Québec. Aujourd'hui, dans le cadre de cette commission, nous proposons l'ajout d'un nouveau concept de gestion de ce régime, soit la bourse différée. Qu'est-ce que c'est que la bourse différée? Une très courte définition: la première des choses, c'est l'abolition de la notion de prêts et bourses, c'est-à-dire de cette distinction, jusqu'à la fin du 1er cycle universitaire. Autre particularité: reconnaissance du principe de l'indépendance de l'étudiant dès son admission aux études postsecondaires. En fait, ça constitue l'ensemble de l'aide reçue par l'étudiant au cours de ses études.

L'application de ce concept dans la gestion du régime d'aide financière aurait pour effet le paiement des intérêts des bourses différées tant et aussi longtemps que l'étudiant est aux études. À la fin de ses études, l'ex-étudiant ferait un prêt consolidé pour la totalité des sommes reçues. Il aurait donc droit à un terme de remboursement de dix ans au maximum. Le remboursement annuel de sa dette se ferait proportionnellement à sa capacité de payer, compte tenu de son salaire, de ses responsabilités familiales, ou s'il possède une jeune entreprise, etc. La contribution future du candidat remplacerait la contribution parentale actuelle. Pour le calcul des remboursements annuels, nous proposons une table de contribution, celle qu'on utilise actuellement pour la contribution parentale. À titre d'exemple, pour peut-être mieux comprendre ce projet, imaginons qu'un étudiant ait fini un premier cycle universitaire. Il aura eu besoin de deux ans de bourses différées pour faire ses études collégiales, donc, disons, chaque année, environ 5000 $, ce qui fait 10 000 $. Trois ans d'études universitaires à raison de 7000 $ par année, ce qui totaliserait 21 000 $. Donc, il aurait reçu, d'aide, un montant total de 31 000 $. Après ses études, il devrait normalement rembourser 3100 $ par année, plus les intérêts, ce qui ferait environ 3500 $ à rembourser annuellement, étalés sur une période de dix ans.

L'application de la contribution proposée, c'est donc celle des parents à l'annexe I. Supposons maintenant, pour prendre un cas bien concret, que, pendant ses études, II s'est marié et a un enfant. Donc, pendant sa première année de travail, sa femme ne travaillant pas à l'extérieur de la maison, lorsqu'il fait son rapport d'impôt, il lui reste un revenu net de 20 000 $. Compte tenu de sa situation, nous calculons un seuil de pauvreté d'environ 15 000 $. Nous avons donc un revenu disponible de 5000 $, ce qui fera une contribution totale de 1325 $. Il remboursera donc le minimum de ces deux montants, soit 1375 $, pour sa première année de travail. Il aura donc reçu, selon l'ancienne terminologie, une bourse de 2125 $. Ce montant de remboursement se fera ainsi de suite pendant ses premières années sur le marché du travail, toujours, évidemment, ajusté à son revenu et à ses obligations. Si l'ex-étudiant se retrouve avec un revenu net en bas du seuil de pauvreté calculé, il n'aura rien à rembourser pour ces années. Dans notre exemple, cela correspond donc à une bourse de 3500 $. Par contre, si l'ex-étudiant possède un revenu net supérieur, supposons un revenu de 35 000 $, il devra rembourser la totalité, soit 3000 $.

Quant à l'impact financier d'un tel régime, il faudrait une étude, évidemment, actuarielle, mais il est réaliste de croire que le coût des bourses versées en différé serait moindre que celui des bourses versées dans le régime proposé, et ce, en atteignant mieux les objectifs d'acces-silibité aux études postsecondaires. Par contre, les sommes ainsi économisées, s'il y en avait, devraient être réinjectées dans des programmes particuliers de bourses au secondaire, ou au collégial, aux personnes ayant de plus grands besoins, dans des secteurs où l'abandon des études est plus élevé.

En fait, ce concept de gestion aurait l'avantage d'atteindre les objectifs suivants: Réaliser l'accessibilité à des études postsecondaires à tous les citoyens québécois qui le veulent; responsabiliser davantage l'étudiant, dans sa gestion financière, et aussi dans ce qu'on pourrait appeler la gestion de son programme d'études; l'intégrer davantage dans ce qu'on

pourrait appeler le monde des adultes; respecter la capacité de payer des ex-étudiants rendus sur le marché du travail; tenir compte des possibilités financières de la société québécoise; et aussi, respecter la capacité de payer des parents. Il faut, évidemment, bien tenir compte que la classe moyenne, présentement, éprouve certaines difficultés, dans un contexte de rupture des ménages et certaines obligations additionnelles, ou encore dans certaines périodes de crise, ou parfois les obligations des parents augmentent considérablement, sans qu'ils en soient nullement responsables. Aussi, ça permet de se doter d'un outil pour encourager davantage certaines catégories d'étudiants à poursuivre des études ou à aller travailler dans certains secteurs ou dans des régions particulières.

Alors, on a fait rapidement le tour de la proposition que nous avions à faire. Évidemment, je suis tout à fait convaincu que ça va susciter beaucoup de questions. Nous sommes là pour y répondre.

Le Président (M. Gobé): Je vous remercie,

M. Bussière. Je passerai maintenant la parole à

M. le ministre de l'Éducation. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Je ne suis pas enclin à vous poser beaucoup de questions aujourd'hui, parce que l'idée est très intéressante en soi. Elle est très neuve aussi par rapport au contexte québécois, à tout le moins. Comme vous le dites vous-même, dans un passage de votre mémoire, il est assez difficile de calculer l'impact financier d'un tel régime renouvelé. C'est ce que je vais demander à nos services de faire au cours des prochaines semaines.

Nous autres, nous avons dû, je vous le dis pour que ce soit bien clair, élaborer une réforme du régime d'aide financière, qui n'est pas une véritable réforme. Le député d'Abitibi-Ouest l'a souligné à quelques reprises et je ne lui cherche pas noise là-dessus. C'est une série de modifications qui nous sont apparues à la fois opportunes et faisables, dans un contexte de contraintes budgétaires très serrées à l'intérieur duquel nous devions concevoir cette opération. Pour l'avenir, aucun horizon n'est fermé. Nous devrons enregistrer cette proposition que vous faites, une proposition massive, considérable et généreuse et, je pense, inspirée d'un souci de rationalité de bon aloi. Nous allons l'examiner soigneusement, mais nous ne pourrons pas arriver à des résultats à temps pour la présente opération. Nous serons obligés de l'entrer dans la machine des projets à plus long terme que nous examinerons avec toute l'attention nécessaire. Je vous le dis en toute vérité. Il n'y aura pas d'illusions ou de malentendu entre nous. Les choses seront claires

Cela dit, je serais très heureux d'entendre mon collègue de Verdun poursuivre cet échange et vous faire part de l'intérêt que suscitent chez lui vos propositions.

Le Président (M. Gobé): M. le député de Verdun, vous avez la parole pour quelques minutes.

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Je dois dire que votre approche est originale et intéressante. Si vous me le permettez, je voudrais prendre les quelques minutes qui viennent pour vous poser des questions pour essayer d'approfondir ce que vous avez comme propositions.

Qu'est-ce qui distingue ce que vous proposez d'un impôt universitaire après le premier cycle ou d'une forme d'imposition après le premier cycle? J'ai un peu l'impression... Évidemment, vous avez voulu, pour ne pas alerter les gens, rester proche du concept de bourse, mais, pratiquement, vous voulez graduer les remboursements année après année. Autrement dit, quelqu'un qui a été aux études a dix ans pour rembourser et son remboursement est proportionnel à ses revenus. Ça ressemble bigrement, entre guillemets, à une forme d'impôt universitaire après le diplôme de premier cycle. Est-ce que je me trompe ou quoi?

M. Bussière: En fait, dans notre esprit, ça ne rejoint pas nécessairement ce concept-là parce que, de toute façon, dans le système actuel, la dimension prêt est remboursable par l'étudiant.

M. Gautrin: Oui.

M. Bussière: Nous, on l'a fait dans un souci de plus grande justice. En fait, c'est que l'étudiant ne cotise pas nécessairement en proportion de ce qu'il a reçu, finalement, de la société, dans le sens que si vous avez un revenu nettement supérieur, compte tenu de ce que vous avez reçu au cours de vos études, on trouve justifié que cette personne-là rembourse, en fait, la totalité. C'est dans un concept d'investissement, ça. On investit dans ses études. Alors que si vous vous retrouvez dans des secteurs où, temporairement, l'embauche est plus difficile, où la demande est moins forte et le salaire moins élevé, bien, l'ex-étudiant rembourse au prorata. On trouve, nous, à ce niveau-là, qu'il y a plus de justice. Donc, ce n'est pas lié au niveau de l'impôt et, comme vous avez pu le voir dans notre document, on n'est pas tellement ferrés en ce qui concerne les questions d'imposition, ou tous ces aspects-là.

M. Gautrin: Comment vous... Pratiquement, si je comprends bien, tous les étudiants qui termineraient un premier cycle universitaire auraient donc, à ce moment-là, un énorme endettement avec des facilités de remboursement, mais ils auraient un énorme endettement. Or, il y

a beaucoup de gens qui sont venus témoigner devant cette commission en se plaignant énormément de l'endettement des étudiants à la fin de leurs études Est-ce que ça vous pose des problèmes ou non?

M. Chagnon (Michel): Je pense que dans ce concept de bourse en différé, ce qu'il est important de comprendre, c'est deux choses Actuellement, ce qui pose problème dans l'endet tement étudiant, c'est que l'étudiant se retrouve avec une dette et, dans bien des cas, II n'a pas les ressources financières suffisantes pour rembourser sa dette. Imaginons un étudiant qui termine avec 10 000 $ de prêt. Il fait un prêt consolidé, il se retrouve avec une petite job qui fait qu'à un moment donné, il doit rembourser pareil. Tandis que dans le concept de bourse en différé, nous avons la situation suivante où l'étudiant rembourse selon ses revenus Donc, l'étudiant qui n'a pas de revenu quand il a terminé ses études n'a rien à rembourser Donc, le problème de l'endettement, c'est un problème quand je n'ai pas de ressources comme telles.

Si on applique maintenant la table d'imposition parentale à l'ex-étudiant, nous nous retrouvons dans une situation où celui qui a des revenus moyens avec une charge familiale forte n'a rien à rembourser. Il se retrouve avec un endettement ou une remise de sa dette moins forte que dans la situation actuelle. Parce que, dans la situation actuelle, on ne tient pas compte du tout de sa capacité de payer. Tout ce qu'on dit: Tu as une dette et tu payes tant par mois. Dans ce concept-là, on retient l'idée de dire: C'est selon sa capacité de payer. Ça, ça m'appa-rart très important de voir cet aspect-là.

Par rapport à un autre aspect aussi, j'aimerais ajouter que dans le régime actuel, ce qui fait défaut, à mon point de vue, c'est qu'on se retrouve avec une masse d'étudiants, souvent sans ressources, parce qu'on dit tout le temps: Ce sont les parents qui sont responsables de lui financièrement, parce que les parents ont des ressources financières. Or, on sait qu'on vit dans des familles éclatées; il y a beaucoup de familles éclatées; c'est une réalité, que je dirais, québécoise. Je regarde dans mon milieu, chez nous, à Joliette, beaucoup du travail du conseiller en affaires étudiantes est lié au fait qu'il y a beaucoup de parents qui refusent de payer leur contribution. Les étudiants qui se retrouvent dans cette catégorie-là, ils se retrouvent sans ressources financières. Et ça, je pense qu'il faut le regarder d'une façon attentive parce que ces gens-là, les seuls moyens qu'ils ont pour s'en sortir, c'est d'appliquer les critères d'indépen dance qu'on connaît dans le régime actuel, ou d'aller travailler davantage que les autres étudiants; ils sont donc, davantage pénalisés. Or, chez nous, les gens de cette catégorie-là travaillent entre 22 et 31 heures de plus que les autres étudiants qui se retrouvent dans des catégories moins favorisées, donc des revenus parentaux entre 15 000 $ et 20 000 $, ou ceux qui ont des revenus très élevés de la famille.

M. Gautrin: J'ai peu de temps encore. Il me reste deux minutes?

Le Président (M. Gobé): Oui, une couple de minutes, M. le député.

M. Gautrin: Une dernière question, puisqu'on a coupé dans le temps, mais j'aurais voulu quand même continuer à échanger certains propos avec vous. À la fin du premier cycle, pour quelqu'un qui entre dans un deuxième ou un troisième cycle, vous dites que c'est le régime actuel qui s'applique pour eux. Est-ce qu'il est considéré comme ayant des revenus? Est-ce qu'il commence à rembourser? Qu'est-ce qu'il fait? Ou est-ce qu'on attend sa période de remboursement à la fin de ses études? Quand est-ce qu'on peut, dans votre approche, considérer la fin des études?

M. Chagnon (Michel): Dans la proposition que nous faisons aujourd'hui, on dit: Jusqu'au premier cycle, c'est ce régime de bourse en différé qui est appliqué. À partir du deuxième cycle, c'est le régime actuel. Et tant et aussi longtemps que l'étudiant est aux études, il n'a rien à rembourser. Il commence à rembourser à la fin de toutes ses études. Donc, il va avoir un endettement, si je peux m'exprimer ainsi, un endettement théorique plus grand jusqu'au premier cycle, ça, c'est vrai, mais en même temps, comme je l'expliquais tantôt, cet endettement-là est relatif aux revenus qu'il aura. S'il a des revenus plus bas, ce n'est plus un endettement, ça devient une bourse. Donc, il n'y a plus d'endettement. Et avec des revenus plus bas, on a un endettement inférieur à la situation actuelle. Au deuxième cycle, c'est le régime de prêts et bourses actuel qui est appliqué pour les deuxième et troisième cycles.

M. Gautrin: Ça veut dire que les dix ans à rembourser ne commenceraient à courir qu'après la fin du doctorat

M. Chagnon (Michel): C'est ça, à la fin de toutes ses études.

M. Gautrin: O.K. J'aurais encore beaucoup à échanger avec vous, mais enfin j'imagine que le temps est fini On va passer la parole au député d'Abitibi-Ouest.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, M. le député de Verdun. M. le député d'Abltibi-Ouest. (18 h 30)

M. Gendron: Rapidement pour éviter.. Parce qu'il y a peut-être des bénédictins et des

jésuites qui vont regarder nos réflexions. Alors pour éviter qu'il y en ait qui restent accrochés à la dernière question de mon collègue et néanmoins ami de Verdun, de laisser voir qu'il y en a qui commenceraient à rembourser uniquement après le doctorat, je trouve que c'est tendancieux un peu parce que ça ne mouille pas les rues, les étudiants du Québec qui finissent des études doctorales. Donc, j'aimerais mieux qu'il en reste à la pratique plus courante, comme le gros de nos étudiants ont du temps partiel, du premier cycle universitaire, le remboursement pour l'État se ferait quand même bien plus rapidement que de laisser voir qu'on ne le verra presque jamais.

De votre mémoire, je veux dire trois ou quatre choses. Ma collègue aura une question ou deux. Je vais être bien franc. Je veux évaluer la formule, la regarder un peu plus. Je la comprends, mais ce n'est pas, à sa face même, la première fois qu'on peut considérer toute l'implication d'une telle formule, en tout cas, selon moi. Il y en a peut-être d'autres qui sont plus vite que moi, c'est leur privilège, et tant mieux. Ce qui m'intéressait cependant dans votre formule, c'est de regarder vos prétentions au niveau des principes de cette formule. Moi, une formule qui vise l'accessibilité des études secondaires à toutes et à tous les citoyens qui le veulent, moi, j'aime ça. Si c'est ça, ça m'intéresse de regarder ça. Une formule qui a comme principe de respecter la capacité de payer des ex-étudiants rendus sur le marché du travail, je suis capable de vivre avec ça. Nous, nous étions les tenants d'un impôt postuniversitaire, formule de l'Australie, qui donne le choix: On paie avant ou après, parce qu'il y a une logique, compte tenu de l'ampleur des besoins du régime universitaire pour augmenter la qualité de l'enseignement reçu et pour régler une fois pour toutes le sous-financement chronique et repartir avec de nouvelles bases, à condition qu'on fasse les corrections au régime, qui sont requises. Donc, je n'ai pas de trouble à vivre avec ça.

Tenir compte également des possibilités financières de la société, c'est un argument qui, dans le présent contexte, n'est sûrement pas à balayer du revers de la main. Donc, moi, pour l'instant, j'ai mis un peu plus de réflexion sur vos critères, sur ce que vous appelez les principes ou les objectifs que viserait votre formule et, moi également, j'aimerais ça prendre un peu plus de temps pour la regarder. Je ne suis pas en mesure de faire des simulations comme le ministère peut le faire, mais je tiens à vous féliciter sincèrement parce qu'on ne peut pas, du revers de la main, dénoncer un geste et une décision que le gouvernement s'apprête à prendre, et dire: Écoutez, moi, ce n'est pas mon problème de regarder autre chose. Alors c'est évident que n'importe quel intervenant qui met sur la table une proposition quelconque, moi, ça me plaît, parce que la leur, c'est clair que je ne la trouve pas bonne. On en a parlé peut-être pendant 35 ou 40 heures depuis qu'on a commencé nos auditions, et je vais continuer à en parler. C'est un choix trop facile, "bebête", qui ne règle rien. C'est un choix "bebête", qui ne règle rien, qui crée des dangers pour l'avenir de notre société. Dans ce sens-là, quand quelqu'un met quelque chose sur la table et dit: Est-ce que ça pourrait pallier certains inconvénients de leur formule, moi j'achète ça. J'achète votre formule au niveau des objectifs, pour le moment, parce que je n'ai pas le temps de l'apprécier dans sa mécanique et, pour l'instant, je ne peux pas dire autre chose.

Quant aux commentaires que vous avez faits sur les diverses recommandations, parce que j'ai eu l'occasion de prendre connaissance de votre mémoire, et vous dites que, pour ce qui est du deuxième cycle et du troisième cycle, c'est le régime proposé par le gouvernement. Dans le régime proposé par le gouvernement, je l'ai dit: 11 y a des éléments de bonification intéressants. Je ne change pas d'avis. Ça ne contrevient pas à des principes que nous connaissons et ce n'est pas le moment de contrevenir. Donc, les principaux principes de la réforme sont encore là. La seule conclusion que je fais, à ce moment-ci, sur la réforme de l'aide financière aux étudiants, c'est que je trouve qu'elle ne coûte rien au gouvernement. Et c'est malhonnête de présenter ça comme étant un équivalent au dégel des frais de scolarité parce qu'il y a un nouveau régime d'aide financière qui ne leur coûte à peu près rien parce qu'il est financé par l'inversion prêt-bourse. Il est financé par 10 000 000 $ ou 12 000 000 $ qui disparaissent du paysage et, à ce moment-là, il n'y a pas vraiment d'argent neuf dans la nouvelle réforme, alors que c'était censé être l'élément pour permettre aux étudiants de voir la compensation au dégel.

Moi, je m'arrête là, en vous remerciant sincèrement de votre contribution. Ma collègue, la députée de Terrebonne, avait une couple de questions à vous poser.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de Terrebonne, vous avez maintenant la parole.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Dans votre conclusion, suite à l'alternative que vous proposez, qui m'apparaît à première vue une formule concrète d'impôt postuniversitaire, mais qui tient compte plus globalement de la capacité de payer, vous dites: "II faut aussi être capable de reconnaître que certaines catégories d'étudiants et d'étudiantes sont à l'heure actuelle pénalisées ou dans l'impossibilité d'entreprendre des études postsecondaires". Est-ce que vous croyez qu'avec le dégel des frais de scolarité le nombre de personnes incapables d'accéder à l'université sera croissant?

M. Bussière: En fait, je ferai tout simple-

ment ici une précision. Vous comprenez facile ment que le rapport que nous avons fait porte sur le régime des prêts et bourses. Nous ne nous sommes pas prononcés sur le dégel des frais de scolarité.

Mme Caron: C'est bien pour ça que je vous pose la question.

M. Bussière: On pourrait dire, évidemment, que tout ce qui peut appauvrir l'étudiant, pour nous, on ne serait pas d'accord ave:, ce principe là, pour une raison très simple, c'est qu'en tant qu'aide pédagogique oeuvrant dans un collège, la principale cause d'abandon des études ou d'échec des études qui apparaît dans les études que nous avons fartes, c'est le travail à l'extérieur et le manque de motivation aux études très souvent lié à ça. On pourrait, évidemment, et souvent, on conclut trop facilement au caprice des étu diants... Pour vivre continuellement avec des étudiants, je peux vous dire que ce n'est pas une question de caprice. C'est une question fort simple où, présentement, la classe que l'on dit moyenne - moi j'aurais plutôt tendance à l'appeler un peu pauvre - n'a pas nécessairement, n'a plus la capacité de subvenir aux besoins de grands adolescents. L'autre aspect, et je pense qu'on l'oublie peut-être un peu trop, on ne parle que de questions d'argent. Je pense qu'on oublie les grands principes à la base de ce rapport, au point de départ, rendre plus accessibles les études. Ça pour nous, c'est un élément très important. Lorsqu'on dit de ne pas faire porter toute la responsabilité sur les parents, je crois que c'est important parce que les parents n'ont plus nécessairement toute la capacité qu'on leur prête. Aussi, comme je le disais tout à l'heure, la situation familiale change. Donc, les obligations changent, ce qui fait que c'est l'étudiant qui se retrouve avec des problèmes et c'est loin de l'aider au niveau de son rendement académique.

Une autre dimension qu'on oublie malheureusement tout le temps... N'oubliez jamais que de se sentir, parfois jusqu'à l'âge de 25 ans, toujours dépendant de son père, de toujours aller le supplier pour la moindre chose et pour faire un cadeau à sa blonde à Noël, on trouve ça plus ou moins justifié. Lorsqu'on vit dans ces milieux, nous estimons qu'il est très important que l'adolescent se sente responsable de sa vie et ce n'est pas, dans notre esprit, en lui refusant certains accès ou en le prétendant, au point de départ, toujours sous la tutelle de ses parents, qu'on va arriver vraiment à le rendre responsable. On ne lui apprendra même pas le minimum vital, c'est-à-dire d'être capable de gérer sainement un simple budget.

M. Chagnon (Michel): Aussi, si je peux me permettre de compléter, la question du dégel pose la question des ressources financières de l'étudiant. Et le problème du dégel, c'est qu'on dit que ça va coûter plus cher, mais on ne lui donne aucun moyen supplémentaire.

Une voix: C'est ça

M. Chagnon (Michel): Et c'est ça, le problème du régime des prêts et bourses; c'est ça, le problème de l'aide financière. Or, le régime qui est proposé par l'Association, ça résout en très bonne partie . ces problèmes-là, je dirais, pour la raison suivante. Quand, tantôt, on mettait des chiffres, ça veut dire qu'on va évaluer les besoins de l'étudiant incluant, cette fois-là, ses frais de scolarité, c'est clair que ça va augmenter ce que j'appellerais sa dette, qui sera évaluée selon sa capacité de payer par la suite Si je dis: Ça coûte 1000 $ de plus pour sa scolarité, mais qu'en même temps je lui permets d'avoir l'argent pour la payer, le problème du dégel ne se pose pas du tout dans le même contexte. C'est pour ça que, pour moi, le problème actuel du dégel, à mon point de vue, est un problème où on évite la capacité de payer de l'étudiant en disant: Seuls ceux qui seront admissibles au régime des prêts et bourses vont pouvoir être davantage aidés, en ajustant nos tables en fonction du régime, en fonction de la nouvelle situation des frais de scolarité. Moi, je pense que ça fait plusieurs réformes qu'on vit, et je me demande s'il n'est pas temps, actuellement, d'avoir une réforme plus radicale, qui tienne compte, justement, de l'ensemble des principes qu'on évoquait tantôt, c'est-à dire que l'étudiant doit avoir les moyens financiers et aussi être responsable de ce que coûte sa formation. Et quand cet étudiant-là est rendu sur le marché du travail, il doit être aussi davantage responsable pour rembourser les coffres de l'État en fonction de ses revenus. Et celui qui aurait reçu beaucoup, je dirais, de la société, va devoir rembourser davantage. Et celui qui reçoit moins rembourse moins, compte tenu de sa situation.

Mme Caron: Les principes qui sous tendent votre proposition mettent exactement le doigt sur les problèmes actuellement vécus par nos étudiants. Je pense qu'on le sent, là, que vous connaissez vraiment la réalité. Pour mettre en place un programme comme celui que vous proposez, au départ il est évident qu'il faut quand même de l'argent pour le commencer Vous préconisez une participation des entreprises. Où le gouvernement ira-t-il chercher l'argent pour commencer ce programme?

M. Chagnon (Michel): On n'a pas du tout imaginé de façon de le faire, comme telle, mais on peut regarder ça d'une façon différente. Imaginons qu'on décide d'appliquer ce principe de bourses en différé, et quon oublie que... Autrement dit, du niveau collégial jusqu'à la fin du premier cycle, qu'il n'y ait plus de bourses telles

qu'on les connaît dans le régime actuel. Ce qui coûte cher dans le régime actuel, dans les 400 000 000 $ qu'il coûte par année, ce sont les bourses, parce que ce n'est jamais remboursé. À ce moment-là, il faudrait évaluer, là, je n'ai pas les chiffres, à savoir combien, dans le régime actuel, coûtent les bourses du cégep jusqu'à la fin du premier cycle universitaire. Une deuxième chose qu'il faut regarder aussi, dans ce qu'on propose comme tel, c'est surtout des intérêts, dans les premières années, que ça coûte. Ça ne coûte pas de l'argent comme tel, ça devient des prêts qui sont faits. Sauf que ça va devenir des bourses au moment où l'étudiant va aller sur le marché du travail. Moi je pense que, dans les premières années, ça demanderait un investissement plus important dans le régime d'aide financière, mais qui va être remboursé par la suite, dans les années subséquentes. Mais je n'ai pas de chiffres plus précis que ça à vous donner.

Mme Garon: Vous dites bien qu'au début, ça va coûter plus d'argent. Mais on va le chercher où?

M. Chagnon (Michel): Bon ça ...

Mme Garon: Avez-vous des réticences à l'égard d'une collaboration avec les entreprises?

M. Chagnon (Michel): Mais quand vous dites: Ça va coûter plus cher...

Mme Garon: Vous-même l'avez souligné...

M. Chagnon (Michel): Oui, dans le sens qu'on va devoir investir de l'argent plus en termes de prêts. Mais les prêts ne sont pas avancés par le gouvernement, ce sont les caisses qui avancent l'argent - les caisses ou les banques - mais ce sont les intérêts qui sont avancés par le gouvernement. Donc, ça, les intérêts payés pour l'ensemble des prêts contractés par des étudiants ne coûteront pas nécessairement plus cher que les bourses que l'on donne actuellement. Je n'ai pas de chiffres là dessus, mais imaginons que le volume des prêts soit multiplié par deux, par rapport à la réalité, ou par trois, faisons un taux de coût à ça, c'est ça le coût que le Québec va devoir payer, par rapport à ce nouveau régime-là.

Mme Garon: D'accord. Une dernière ques tion. En annexe, vous faites des commentaires, recommandation par recommandation. Si vous aviez une seule recommandation à retenir, quelle serait la plus importante pour vous7

M. Bussière: En fait, c'est évident que co que nous venons de vous exposer constitue pour nous la principale recommandation.

Mme Caron: Mais dans les recommandations que vous faites sur le document du ministre?

M. Chagnon (Michel): Moi, je dis que la plus importante, à mon point de vue, en tout cas, pour les cégeps des régions éloignées, une des choses importantes, c'est quand on abolit les frais de transport.

Mme Caron: D'accord, merci.

M. Chagnon (Michel): Ça m'apparaft quelque chose d'extrêmement important, parce que pour beaucoup d'étudiants, le fait d'être éloignés du cégep, le coût principal, ce n'est pas les frais de scolarité, c'est souvent le transport.

Mme Caron: Merci.

Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la députée de Terrebonne. M. le député d'Abitibi-Ouest, un mot en conclusion?

M. Gendron: Non, la conclusion, je l'ai dit tantôt, je la répète: Merci sincèrement, parce que votre formule, en tout cas, il faut qu'elle soit regardée de plus près, en ce qui me concerne, parce qu'elle est au moins alternative à ce qui est sur la table à date, et ça, c'est intéressant.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. M. le ministre, votre conclusion, s'il vous plaît, brièvement.

M. Ryan: Alors, dans l'immédiat, nous porterons une attention spéciale à vos observations qui ont davantage trait aux implications immédiates du projet de loi 25. Et à long terme, on va examiner votre proposition avec plusieurs autres qui ont été mises sur la table ces derniers temps, et ça pourra fort possiblement faire l'objet d'une réorientation de la politique gouvernementale, dans quelques années. Mais là, on embarque dans un régime, ça va durer au moins, au moins, j'imagine deux, trois ou quatre ans. J'aime autant vous le dire franchement. On va examiner votre projet très attentivement avec une attention particulière aux implications financières, non seulement pour l'État, mais aussi pour l'individu, parce que moi je suis bien effrayé par la perspective d'une dette de 35 000 $, en moyenne, disons, qui échoirait à chaque diplômé d'université; de se voir aux prises avec une charge de dette de 3000 $ ou 4000 $ pendant dix ou quinze ans, c'est de l'argent. Mais ce sont des chiffres hypothétiques que J'émets après une première lecture de votre document. On va le regarder attentivement, puis si la preuve peut être faite que ça peut être institué dans des conditions raisonnables, je pense bien que votre idée fera son chemin dans l'opinion, et aussi, éventuellement, auprès du gouvernement. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Merci aux collègues membres de la commission. Merci, M. Bussière et M. Chagnon. Maintenant, la commission va ajourner ses travaux au mardi 6 mars 1990, à 10 heures, en cette salle. La séance est levée.

(Fin de la séance à 18 h 43)

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