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Version finale

34e législature, 3e session
(17 mars 1994 au 17 juin 1994)

Le mercredi 30 mars 1994 - Vol. 33 N° 1

Audition des dirigeants d'établissements universitaires afin de discuter des rapports sur l'implication des règles budgétaires annuelles sur le niveau des effectifs


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Table des matières

Auditions


Intervenants
M. André J. Hamel, président
M. Jean-Guy Bergeron, président suppléant
M. Henri-François Gautrin
M. Jacques Chagnon
M. Jacques Brassard
M. Neil Cameron
*M. René Simard, UdeM
*M. Jacques Lucier, idem
*Mme Claire McNicoll, idem
*M. André Bazergui, École polytechnique de Montréal
*M. Patrick Kenniff, Université Concordia
*M. Maurice Cohen, idem
*M. Serge Saucier, HEC
*M. Fernand Amesse, idem
*M. Adrien Lacombe, idem
*M. Jean-Denis Duquette, idem
*M. Jean-Luc Grégoire, Bishop's University
*M. Robert Cook, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission
    Note de l'éditeur: Cette commission a également siégé le mercredi 23 février 1994 (cf. fascicule no 62).
________________

Journal des débats


(Dix heures cinq minutes)

Le Président (M. Hamel): Étant donné que nous avons quorum, je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte. Le mandat de la commission pour cette séance est d'entendre des dirigeants d'établissements universitaires afin de discuter des rapports sur l'implication des règles budgétaires annuelles sur le niveau des effectifs, en application de l'article 6 du chapitre 35 des lois de 1993. M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci. Alors, l'ordre du jour se décrit comme suit: à 10 heures, nous recevons les représentants de l'Université de Montréal; à 11 heures, l'École polytechnique de Montréal; à midi, l'Université Concordia. Nous allons suspendre à 13 heures pour reprendre ensuite à 16 heures pour recevoir l'École des hautes études commerciales et, enfin, à 17 heures, Bishop's University. À 18 heures, nous ajournerons.

Alors, sans plus tarder, est-ce qu'il y aurait des déclarations d'ouverture, de part et d'autre? Ça va?

M. Gautrin: Je ne pense pas. On les a faites, M. le Président, au moment où on a commencé.

Le Président (M. Hamel): Bien, il me semble.

M. Gautrin: On est dans la poursuite de nos travaux. Donc, on n'a pas de déclarations d'ouverture à faire.

Le Président (M. Hamel): Tout à fait, mais parfois il peut arriver que...

Je dois vous prévenir que M. le ministre se joindra à nous dès qu'il aura terminé sa réunion. Comme vous le savez, le temps alloué à cette période de présentation et des échanges est de 60 minutes. C'est toujours 20, 20, 20. Alors, je demanderais à M. le recteur de l'Université de Montréal, M. Simard, d'identifier aussi et de présenter les gens qui l'accompagnent.


Auditions


Université de Montréal (UdeM)

M. Simard (René): M. le Président, M. l'adjoint parlementaire au ministre, distingués membres de la commission, je voudrais d'abord remercier la commission...

Le Président (M. Hamel): Excusez-moi, M. Simard. Pourriez-vous présenter vos invités?

M. Simard (René): Je vais le faire en cours de route.

Le Président (M. Hamel): Très bien. Alors, je veux annoncer qu'on a reçu votre mémoire et qu'on en fait un dépôt officiel. Ça va? Très bien. Vous pouvez y aller, M. Simard.

M. Simard (René): Bien. Je vous remercie de nous fournir l'occasion de venir discuter avec la commission du rôle et de la fonction de l'enseignement supérieur dans le développement de la société québécoise. Le geste est important. Il mérite d'être souligné et je pense que le moment pour le faire est particulièrement bien choisi. L'Université de Montréal a produit, à cette occasion, un mémoire qui vous a été distribué. J'espère que vous avez eu le temps de le lire. Pour vous le présenter, je suis accompagné du vice-recteur à l'administration, M. Jacques Lucier, qui est à ma droite...

Le Président (M. Hamel): Bonjour, M. Lucier.

M. Simard (René): ...qui représente un peu la mémoire de notre institution, et de la vice-rectrice aux affaires publiques, Mme Claire McNicoll, à ma gauche...

Le Président (M. Hamel): Madame, bonjour.

M. Simard (René): ...qui connaît bien le réseau de l'enseignement supérieur au Québec puisqu'elle a été auparavant directrice générale de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec.

Si vous voulez, on pourrait peut-être faire un peu l'histoire de l'Université de Montréal, pour le bénéfice des membres de la commission. L'histoire de l'Université remonte à 1878, lorsque l'Université Laval de Québec inaugure, à Montréal, une succursale qui comprend quatre facultés: théologie, droit, médecine et arts. Sa première charte civile est obtenue du Parlement de Québec en 1920 et, en 1967, elle devient un établissement à caractère public dont les buts sont l'enseignement supérieur et la recherche, et qui prévoit, nommément, la participation des professeurs, des étudiants et des diplômés à son administration.

En 1990, l'Université adopte un énoncé de mission intitulé «L'Université de Montréal vers l'an 2000» et elle y expose ses objectifs et sa philosophie de formation au premier cycle et aux cycles supérieurs, et son projet de devenir, dans les prochaines années, une grande université de recherche nord-américaine. L'Université de Montréal compte actuellement 13 facultés et de nombreux départements et écoles. Avec l'École des hautes études commerciales et l'École polytechnique qui y sont affiliées, elle comprend 108 unités de recherche, plus de 215 programmes de premier cycle, 50 programmes de certificat et de diplôme d'études supérieures spécialisées, 116 programmes de maîtrise et 75 programmes de doctorat, le tout pour desservir une population étudiante d'environ 52 000 personnes.

Son campus principal est situé, donc, sur le flanc nord du mont Royal et il est desservi par trois stations de métro – ça vous donne un peu une idée de la dimension du campus – dans le quartier Côte-des-Neiges de Montréal et de la ville d'Outremont, un quartier en pleine transformation vers une société multiculturelle et multiethnique. L'Université de Montréal possède un autre campus situé, celui-là, à Saint-Hyacinthe, où la Faculté de médecine vétérinaire contribue, avec les industries de l'agro-alimentaire et des biotechnologies, à faire de Saint-Hyacinthe une ville universitaire unique en son genre et un véritable moteur économique pour la région.

(10 h 10)

L'Université possède une structure administrative dite tricamérale où le conseil d'administration est responsable de la gestion générale de l'Université. Ce conseil est constitué, entre autres, de huit membres nommés par le gouvernement, en provenance, surtout, des milieux socio-économiques et des milieux des affaires. Il comprend aussi des représentants du corps professoral, des étudiants et des diplômés. La Commission des études, quant à elle, est directement responsable de la gestion académique des programmes d'études et de tout ce qui touche à la création et à la modification de programmes. Un troisième corps universitaire, l'Assemblée universitaire, possède un pouvoir de recommandation sur tout ce qui concerne l'université, avec pouvoir exclusif en ce qui concerne le statut du corps professoral. Voilà, M. le Président, tracées à grands traits l'histoire et l'organisation actuelle de l'Université de Montréal.

Maintenant, si on entre dans le corps du mémoire, jusqu'à tout récemment, les mots clés qui caractérisaient les liens étroits qui s'étaient établis entre l'État, les universités et le public en général, et ceci est vrai pour tout le continent nord-américain, ces mots clés, donc, étaient: le prestige, le «scholarship», la confiance. C'était là la marque de soutien général que l'on apportait au développement des universités, mais on peut dire que la situation a bien changé au cours des dernières années, autant aux États-Unis qu'au Canada, et que les attentes sont maintenant d'une nature entièrement différente. Le vocabulaire utilisé actuellement transpose une réalité nouvelle. On parle de productivité et d'efficacité, non plus de prestige et de «scholarship», et les questions qu'on nous pose sont les suivantes: Travaillons-nous assez fort ou, mieux, faisons-nous les bonnes choses ou, mieux encore, faisons-nous la meilleure utilisation de nos ressources? Un autre mot que l'on entend souvent, c'est l'«imputabilité», non plus la confiance, et les questions qu'on nous pose sont les suivantes: Pouvons-nous mesurer le produit? Pouvons-nous rendre des comptes sur la pertinence de nos cours, la qualité de notre enseignement et le cheminement de nos étudiants? Sommes-nous bien administrés ou trop administrés?

Un autre mot qui revient souvent, c'est «évaluation». Que valent nos programmes de formation en fonction des réalités d'aujourd'hui? Il est évident que les étudiants, les professeurs, les projets de recherche et les unités d'enseignement et de recherche son évalués constamment, mais toujours en fonction d'un environnement interne, de telle sorte qu'à l'externe on se demande si nos programmes sont évalués, si nos professeurs sont évalués, mais, à l'interne, nos professeurs et nos étudiants trouvent qu'ils sont trop évalués. Il y a là une déconnection, si vous voulez, entre ce qui se fait à l'interne et ce qui se fait à l'externe.

C'est pour ça que c'est une bonne occasion de faire savoir à la société en général, par le truchement de cette commission parlementaire, ce qui se fait à l'interne à l'Université de Montréal. Et c'est à ces questions que le mémoire voudrait répondre aujourd'hui, parce qu'elles sont toutes pertinentes. L'Université de Montréal le fait d'autant plus volontiers qu'elle se reconnaît un devoir d'imputabilité non seulement envers l'État, mais aussi avec l'État devant la société quant à la mission même de l'université. Il s'agit ici de démontrer que l'institution universitaire est un investissement, un investissement rentable, un investissement nécessaire au développement économique et social, et qu'elle doit bénéficier, dès lors, des ressources appropriées pour remplir cette mission.

Je vais maintenant passer la parole à M. Jacques Lucier, qui va vous parler des indicateurs de rendement.

Le Président (M. Hamel): M. Lucier.

M. Lucier (Jacques): Merci, M. le Président. Le ministère de l'Éducation publiait récemment un intéressant compendium sur des indicateurs de l'activité universitaire, où on retrouve des statistiques révélatrices non seulement sur chaque université, mais aussi sur l'ensemble du système universitaire québécois.

Quant à l'effectif étudiant, on note que, pour la période de 1971-1991, soit 20 ans, on observe un accroissement de 155 400 personnes, pour un taux moyen de croissance de 5 % par année, et une augmentation totale, pour le système, de 166 %. Cette progression dans les universités du Québec a porté de 7 % à 20 % le taux total d'inscriptions pour la population des 18 à 29 ans.

Au début des années soixante-dix, la population étudiante de l'Université de Montréal s'élevait à environ 16 000 étudiants et, quelque 20 ans plus tard, 51 537 étudiants réguliers, temps complet et temps partiel, étaient inscrits, à l'automne 1992, à l'Université de Montréal, dont 14 745 dans les deux écoles affiliées. Au cours, donc, de la même période, soit de l'automne 1971 à l'automne 1991, l'augmentation de la population étudiante qu'a connue l'Université de Montréal est de 131,2 %. Donc, on note que c'est moins que l'augmentation totale en pourcentage. Il faut comprendre que l'Université de Montréal, à ce moment-là, était à un stade d'avancement ou de vie universitaire plus longue, évidemment, que d'autres universités soeurs. Il faut comprendre aussi qu'à l'Université de Montréal environ la moitié des programmes sont contingentés. Je réfère, par exemple, à des secteurs comme la médecine, la médecine dentaire, le droit, etc.

Quant à l'évolution de la sanction des études durant la période de 1974 à 1991, toujours selon le même document, le rapport indique une augmentation de 67 % dans l'octroi des baccalauréats, de 125 % dans l'octroi des maîtrises et doctorats et de 400 % des certificats et diplômes. Pour la même période, l'Université de Montréal augmentait la sanction des baccalauréats de 9,6 %, celle des maîtrises de 71 %, celle des doctorats de 124,8 % et celle des certificats et diplômes de 341,6 %. Alors, en 1992-1993, pour faire état de la situation actuelle, l'Université a décerné 7751 diplômes répartis comme suit: 5399 au premier cycle, 2077 au deuxième et 275 au troisième.

Quant à la recherche, les statistiques fiables ne portent que sur les 10 dernières années, mais ces statistiques indiquent une progression spectaculaire pour l'ensemble du système. On est passé de 140 000 000 $ de subventions et contrats en 1980-1981 à 468 000 000 $ en 1990-1991, soit une augmentation de 330 %. Par ailleurs, les fonds de recherche en provenance des seuls organismes subventionnaires obtenus par l'Université de Montréal, y compris les écoles et instituts affiliés, sont passés de 50 000 000 $, il y a 10 ans, à 238 000 000 $ l'an dernier. Et on voit que l'augmentation est de 375 %. Donc, elle excède l'augmentation moyenne de l'ensemble du système.

Ces indicateurs de rendement témoignent de la productivité des institutions universitaires et des professeurs qui y oeuvrent puisque, au cours de la même période, l'accroissement du corps professoral n'a été que de 47 %. Ce sont tous des chiffres bruts qui se doivent d'être nuancés, mais ils ont le mérite de provenir d'un ministère qui les a validés, d'être fiables et de fournir une image globale de la productivité des universités. Il est bien entendu qu'une telle productivité ne pourra être maintenue dans le cadre de l'application de la loi 198 qui prévoit un allégement significatif des effectifs dans les secteurs public et parapublic. Je comprends que M. le ministre, lors de la dernière réunion où vous avez entendu d'autres universités, nous a rassurés en ces lieux puisqu'il nous a dit qu'il n'y aurait pas de relation directe entre la projection tracée par la loi 198 – je réfère aux pourcentages de 20 % et de 12 % sur cinq ans – et l'incidence sur ces personnels des règles budgétaires affectant le calcul des niveaux de subvention aux établissements universitaires.

(10 h 20)

Puisque c'est par l'implication précisément de ces règles budgétaires sur le niveau des effectifs de l'Université de Montréal que nous devons rendre compte, dans le document déposé hier, nous avons reproduit les tableaux qui avaient été envoyés préalablement. Dans ces tableaux I et II, on prévoit l'évolution du personnel régulier et autres ressources humaines au cours des années 1993-1994, par rapport à la situation au 31 mai 1993. Dans le cas des fonds sans restriction, l'Université de Montréal prévoit une réduction des effectifs non enseignants de 72 postes. Dans le cas du personnel enseignant, la croissance de 27 postes s'explique, d'une part, par l'annualisation en 1993-1994, donc durant l'exercice en cours, des engagements de 1991-1993 et, d'autre part, par la création de postes dans le cadre soit des actions structurantes ou des autres programmes. Les dépenses relatives aux chargés de cours et aux auxiliaires d'enseignement seront réduites d'un ordre de grandeur de 1 %, tandis que la projection pour le temps supplémentaire reflète une réduction des dépenses de 25 %. Une réduction générale des dépenses de 10 % sera effectuée dans les autres personnels.

Ces données sont extraites, en grande partie, du rapport «Système d'information financière des universités», connu sous le sigle SIFU, pour ce qui touche, bien sûr, l'exercice 1992-1993. Quant aux données 1993-1994, ce sont des estimations à partir du budget en cours. À cet égard, l'Université de Montréal a mis sur pied un groupe de travail chargé d'étudier le programme d'infrastructures des différentes unités et, cette année, au budget, il y avait de projetée une compression additionnelle à celle qui avait été faite, de l'ordre de grandeur de 3 000 000 $. Aux derniers états préliminaires, on pense que cette compression pourra être réalisée.

Compte tenu des augmentations des clientèles étudiantes ces dernières années et de leur répartition surtout dans les cycles d'enseignement premier, deuxième et troisième, et compte tenu des réductions de personnel intervenues durant la première moitié de la décennie des années quatre-vingt, l'Université de Montréal avait fait tous les efforts pour recruter plus de professeurs de carrière durant ces dernières années et améliorer les ratios professeur-étudiants. Il est évident que les réductions des ressources des présentes années remettent en cause les améliorations projetées et ce qu'on appelle chez nous les ententes de planification convenues avec les différentes facultés de l'institution.

M. Simard (René): Merci, M. Lucier. Maintenant, je vais demander à Mme Claire McNicoll de nous parler du cheminement des étudiants et de l'évolution des programmes à l'Université de Montréal.

Le Président (M. Hamel): Merci. Mme McNicoll.

Mme McNicoll (Claire): Merci, M. le Président. Alors, à l'Université de Montréal, le cheminement étudiant, la sanction des études, la persévérance à l'université et le suivi de nos diplômés sont devenus des préoccupations très actuelles. Non pas qu'elles n'existaient pas auparavant, mais parce que les nouvelles clientèles étudiantes nous obligent à concevoir des formes pédagogiques différentes, à développer des programmes de rétention d'étudiants et à adapter les règlements pédagogiques. Les études de cohortes que nous faisons depuis plus d'une dizaine d'années maintenant nous montrent que les étudiants qui fréquentent l'Université actuellement sont différents, à de nombreux égards, de ce qu'ils étaient il y a 20 ans. Durant les années soixante-dix, une proportion de 55 % des étudiants complétaient leurs études de premier cycle selon le temps requis, soit trois ans après leur première inscription dans la plupart des programmes. Ils n'étaient plus que 45 % à le faire en 1982 et 35 % seulement aujourd'hui. Leur formation antérieure est variée. Les clientèles sont majoritairement féminines et d'origine ethnique hétérogène. La population a vieilli, les 25 ans et plus représentant au-delà de 50 % de notre population avec une gamme des âges plus étendue. Un étudiant sur deux est maintenant inscrit à temps partiel et le décrochage est fréquent, surtout dans les programmes courts. Il convient de noter ici qu'à l'Université de Montréal, un étudiant sur cinq est inscrit aux études supérieures.

Les motifs qui incitent les étudiants à persévérer dans leurs études ou à les abandonner ont fait récemment l'objet d'une enquête et d'un plan d'action à l'Université de Montréal. Comme nous savons également que cette question intéresse vivement les membres de la commission, à l'intérieur de notre mémoire, à compter des pages 12 à 16, nous vous avons présenté un tableau de la persévérance à l'Université selon le cycle d'études; suivent également des graphiques, enfin, des figures permettant de voir le cheminement de la cohorte d'automne 1987 selon le secteur de programme et selon le cycle d'études.

Alors, je ne les commenterai pas en détail, mais j'aimerais vous donner, cependant, quelques indications quant à cette étude que nous avons faite au sujet de la persévérance de nos étudiants. Nous savons que 60 % environ des étudiants finissent par obtenir un diplôme, en moyenne. Bien sûr, dans les programmes les plus spécialisés, notamment dans les programmes contingentés, à souligner, disons, surtout les programmes de la santé, le taux d'obtention de diplômes est beaucoup plus élevé que ça – il oscille entre 85 % et 95 % suivant les programmes – si bien que l'étude approfondie que nous avons menée, qui porte sur les programmes longs de premier cycle, a exclu ces programmes très spécialisés et les programmes de santé nommément.

Nous avons recherché des étudiants ayant fréquenté l'Université de Montréal et s'étant inscrits à un programme de premier cycle de trois ans dans l'année 1989 et l'année 1990. Nous avons ensuite fait une étude approfondie par le biais d'un sondage où nous avons rejoint aussi bien ceux que nous appelons les persévérants que ceux que nous appelons les étudiants en attrition; 935 persévérants ont participé au sondage et 481 étudiants dits en attrition, c'est-à-dire ayant quitté l'Université de Montréal, ont été rejoints par ce sondage. Quand nous disons en attrition, nous disons ceux qui ont abandonné ou ceux qui ont, pour raison d'échec, quitté le programme. Nous ne comptabilisons pas comme en attrition, bien sûr, les étudiants de l'Université de Montréal qui se sont inscrits dans un autre programme de l'Université de Montréal. Il est intéressant de noter que les étudiants en attrition, dans 7 % des cas, s'inscrivent à une école affiliée de l'Université de Montréal, HEC ou Polytechnique; 50 % s'en sont allés dans d'autres universités et 17 % s'en sont allés au cégep.

Les principaux motifs de persévérance illustrés et indiqués, mentionnés par les étudiants, aussi bien les persévérants que ceux qui ont quitté le programme, c'est le bon choix du programme, en d'autres termes l'intérêt pour le programme dans lequel l'étudiant s'est inscrit. Inversement, les étudiants qui ont quitté disent qu'ils l'ont fait par manque d'intérêt pour le programme. D'où, évidemment, dans notre perspective, la nécessité d'une bonne sélection des étudiants, d'une bonne information au moment où les étudiants sont au cégep ou avant qu'ils entrent à l'université, d'une bonne sélection dans le programme et d'un très bon accueil à l'université. Ce dont on se rend compte également, c'est que, un peu à l'instar du titre d'un livre sur la psychologie de l'enfant où on disait: Tout se joue avant six ans, aujourd'hui on dit: Tout se joue au cours de la première année. Il y a 81 % des départs qui se font avant l'inscription à la session d'automne de la deuxième année.

Nécessité d'un encadrement de qualité et, facteur majeur à considérer de la part des étudiants qui ont poursuivi comme de la part des étudiants qui ont abandonné, on dit que le facteur socio-économique, le facteur économique n'est pas un facteur majeur d'abandon. Alors, j'y reviendrai, sans doute, au moment des questions. Je voudrais signaler, par ailleurs, si vous me le permettez, M. le Président, que nous...

Le Président (M. Hamel): Rapidement.

Mme McNicoll (Claire): ...devons également travailler sur des programmes d'études plus pertinents, c'est-à-dire que diverses mesures ont été prises au cours des 10 dernières années pour nous assurer que nos programmes d'études répondaient aux besoins de la société. Dès 1986, une évaluation systématique des unités d'enseignement et de recherche a été implantée. Les évaluations comportent la constitution d'un jury interne et d'un jury externe qui analysent le rapport d'autoévaluation fait par l'unité et ces évaluations donnent suite à des plans d'action qui s'insèrent à l'intérieur d'ententes de planification. Dans la plupart des cas, ces évaluations sont suivies de modifications structurelles importantes des programmes d'études.

L'autre chose que nous avons faite, bien sûr, c'est d'adopter une politique de valorisation de l'enseignement, qui comporte des volets relatifs aux critères de nomination et de promotion des professeurs, à l'évaluation de l'enseignement, aux ressources pédagogiques et à la formation pédagogique des professeurs, et aux retombées de la recherche sur la qualité de l'enseignement.

(10 h 30)

Le Président (M. Hamel): Merci. Écoutez, déjà, nous avons dépassé le temps normalement alloué à votre présentation, ce qui fait qu'on a moins de temps pour échanger. Alors, j'espère...

M. Simard (René): Si vous me permettez de conclure, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Rapidement, M. le recteur, s'il vous plaît.

M. Simard (René): J'irai rapidement pour souligner l'ouverture de l'Université vers l'extérieur. Il y a eu, depuis plusieurs années, une avalanche de programmes de partenariat Université-gouvernement-industrie et cela a considérablement modifié notre profil en tant qu'activité de recherche. À la page 23, vous avez un peu l'évolution des fonds de recherche à l'Université de Montréal. Depuis cinq ans, nous étions toujours classés bon deuxièmes parmi les universités du pays, derrière l'Université de Toronto. Voilà que, l'an dernier, à cause, entre autres, des programmes gouvernementaux d'incitatifs fiscaux, pour la première fois au Canada, il y a une université qui a dépassé l'Université de Toronto en termes de fonds de recherche et de contrats de toutes sortes, et c'est l'Université de Montréal, avec ces 238 000 000 $ qui sont arrivés sur notre campus. Cela a considérablement modifié notre profil, et on pourrait en parler parce que ça fait en sorte qu'on se pose quelques questions à ce sujet.

Je terminerai, M. le Président, en disant que ces succès en matière d'enseignement, de recherche et de collaboration avec l'entreprise sous forme de transfert technologique sont compromis par la raréfaction des ressources. Toutes les études des grands organismes internationaux de prospective économique le confirment. Nous sommes plus que jamais dans un contexte compétitif de valeur ajoutée par le savoir et l'avenir appartient aux pays qui seront capables de soutenir la concurrence par leur potentiel d'innovation. Cela passe obligatoirement par une main-d'oeuvre créative et hautement qualifiée, et les universités sont par excellence les lieux où se forme cette main-d'oeuvre. Elles le font, de manière générale, aux études de premier cycle, mais, de façon privilégiée, aux cycles supérieurs où l'on s'entraîne à la recherche, à la position de problématiques, à la mise en doute des conclusions éprouvées, à l'essai de méthodes nouvelles, où l'on s'habitue, en somme, à ne pas tenir pour acquises les connaissances actuelles. Cet apprentissage prend du temps, requiert l'encadrement suivi de la part des professeurs et du personnel de recherche des laboratoires. Or, les universités n'ont pas les ressources suffisantes pour accroître leurs efforts aux cycles supérieurs, et la formule de financement ne reconnaît pas suffisamment de poids aux études de maîtrise et de doctorat comparativement aux études de premier cycle. Cela pénalise directement les universités qui sont développées aux cycles supérieurs.

Pour terminer, je pense, M. le Président, qu'il serait ennuyeux d'avoir ici une discussion pointue sur la formule de financement des études supérieures, mais il faut certainement dire que le Québec n'ira nulle part comme pépinière de chercheurs et concepteurs de nouveaux savoirs si les universités n'ont pas des moyens adéquats et compatibles avec la politique du gouvernement en matière de formation d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée. À ce niveau d'imputabilité, ce sont les universités et les pouvoirs publics qui doivent rendre des comptes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Simard. Alors, écoutez, il me fait plaisir d'accueillir le nouveau ministre de l'Éducation. Bien, le nouveau, moins nouveau, là, effectivement. Alors, M. le ministre, bienvenue. Vous avez la parole.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue au recteur, à la vice-rectrice et au vice-recteur de l'Université de Montréal. C'est toujours avec un plaisir renouvelé que je rencontre M. Simard, soit à son bureau, soit au mien, soit à la CREPUQ. Enfin, on se rencontre régulièrement.

Vous avez bien fait de venir, ce matin, avec la dernière partie de la présentation de Mme McNicoll sur la diplomation, le niveau de diplomation des cohortes étudiantes, depuis 1987, de l'Université de Montréal. J'avais soulevé cette question-là lors de notre première rencontre avec les universités, il y a presque trois semaines, un mois, je pense. Et tous les députés ici avaient trouvé cette question extrêmement intéressante et avaient tous ensemble cherché à l'explorer davantage.

Je serai bref, comme j'ai cherché à l'être la dernière fois aussi que nos invités universitaires sont venus, d'abord et fondamentalement parce que je crois qu'une commission parlementaire est un lieu privilégié dans nos institutions parlementaires pour permettre, d'abord, aux députés de pouvoir exprimer leur point de vue. Alors, je ferai rapidement, en vous posant simplement une petite question: Est-ce qu'il n'y a pas un lien direct entre les niveaux de diplomation et le niveau relativement plus élevé de la moyenne d'âge des cohortes étudiantes chez vous? Est-ce qu'il n'y a pas ce même niveau de captation et de rétention de la clientèle, par exemple, aux deuxième et troisième cycles qui est directement relié et à l'âge et aussi à l'assurance, à tout le moins, que ces étudiants peuvent avoir d'être dans le bon cheminement sur le plan de leur formation et de leurs études? Est-ce qu'il n'y aurait pas un lien entre les facultés qui sont contingentées et le taux de rétention des clientèles? Si c'est le cas, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de resserrer à l'entrée le niveau des entrées, justement, de façon à avoir un niveau de diplomation plus élevé? Est-ce que c'est là une approche qui devrait être regardée ou pas? Merci.

Mme McNicoll (Claire): Il est clair, M. le ministre, que les secteurs contingentés retiennent mieux leurs étudiants et que la rapidité de leur diplomation est plus élevée. Ça, c'est un fait. Par ailleurs, si on regarde les différentes figures d'obtention de diplômes suivant les programmes, il y a des secteurs qui ont aussi d'assez bonnes performances. Quand je dis d'assez bonnes performances, lorsque l'on diplôme, comme c'est le cas dans le secteur des sciences appliquées ou dans le secteur des sciences sociales, 60 % des étudiants après cinq ans, c'est un indicateur relativement bon, si on veut, c'est-à-dire que c'est une performance relativement bonne compte tenu du fait que les étudiants ne vivent plus leurs études de la façon dont ils les vivaient autrefois. C'est-à-dire que les étudiants qui font, encore une fois, leur programme en trois ans, leur pourcentage a beaucoup diminué. Cela tient au fait que nous avons adapté nos régimes d'études, aussi, aux types d'étudiants que nous avons. Ils ont vieilli, ils ont parfois des contraintes familiales qui font qu'ils peuvent quitter leurs études temporairement, ce qui ne les empêche pas de venir les terminer quand même. Nos régimes d'études sont adaptés à ça.

Dans la politique qui est jointe à notre mémoire, c'est-à-dire que nous avons joint la politique qui a été adoptée par la Commission des études, quant aux moyens que nous avons à notre disposition pour améliorer encore, évidemment, la performance, nous avons indiqué le fait que nous devons faire une meilleure sélection. Une meilleure sélection, ça signifie de regarder de plus près quelles sont les motivations des étudiants, puisque, par ailleurs, nous observons que les étudiants les plus motivés et ceux qui ont le plus d'intérêt pour le secteur dans lequel ils sont sont ceux qui restent le plus longtemps dans le programme et, surtout, qui obtiennent leur diplôme en plus grand nombre. Alors, ça milite en faveur d'une sélection plus soutenue. Ça milite également en faveur d'une information plus précise au collégial parce que, bon, on donne souvent l'exemple des étudiants en droit qui, par les médias, voient les effets de manches que peuvent faire des plaideurs en cour...

M. Chagnon: Ou à l'Assemblée nationale.

Mme McNicoll (Claire): ...ou à l'Assemblée nationale, mais ne voient pas le caractère astreignant de l'apprentissage d'un code et des différentes contraintes qu'il y a à l'intérieur des études de droit. Alors, il y a des abandons qui sont liés à cela.

On pourrait donner des exemples dans plusieurs programmes: des gens qui viennent dans les programmes d'ergothérapie et à qui on n'a pas dit qu'il fallait qu'ils touchent les gens. Ça a l'air de rien du tout, mais, enfin, c'est ça, la vie d'un ergothérapeute. Alors, c'est important, il y a des informations, comme ça, que nous devons donner d'une manière plus précise aux étudiants.

Le Président (M. Hamel): Merci, madame. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Merci, M. le Président. M. le recteur, Mme la vice-rectrice, M. le vice-recteur également, ça me fait plaisir de pouvoir échanger avec vous en commission parlementaire, trop peu de temps, malheureusement. Aussi, j'aurais aimé ça, poursuivre sur la politique de persévérance, parce que je trouve ça extrêmement intéressant. Je ne sais pas si c'est un cas unique, mais, en tout cas, les autres universités ne nous en ont pas fait état. C'est la première fois qu'il y a une université qui, à la suite d'une enquête solide et approfondie, a décidé de concevoir et de mettre en vigueur une politique portant sur la persévérance et dans laquelle, entre autres – j'ai trouvé ça extrêmement intéressant – on prévoit valoriser la fonction enseignement.

On en a déjà parlé ici, en commission: il y a une tentation, souvent, à laquelle on cède dans les milieux universitaires, c'est de valoriser beaucoup la fonction recherche et de négliger la fonction enseignement. Là, il y a une politique, en tout cas, qui m'apparaît extrêmement intéressante, et je souhaite, quant à moi, que les autres universités québécoises s'engagent dans cette voie-là d'avoir une vraie politique. Elle est mise en vigueur à partir de janvier seulement. Évidemment, on verra dans l'avenir les résultats, les fruits de cette politique.

(10 h 40)

Mais, évidemment, aussi – ça ne vous surprendra pas que j'aborde cette question-là – en lisant La Presse ce matin, j'ai pris connaissance d'un article qui porte sur un certain nombre d'avantages ou de politiques de primes qui sont en vigueur à l'Université de Montréal. J'ai reçu aussi, d'ailleurs... Deux associations étudiantes m'ont fait parvenir – je pense qu'elles l'ont aussi déposé, c'est indiqué, devant le conseil de l'Université de Montréal – un document sur les avantages et la rémunération des cadres à l'Université de Montréal. Je vous avoue, d'entrée de jeu, que j'étais un peu surpris de certains avantages qui ont été consentis ou de certaines pratiques qui semblent être en vigueur à l'Université de Montréal – je ne sais pas si c'est répandu ailleurs aussi dans le réseau des universités – un peu surpris de la générosité de ces pratiques, puis, là, je vous en donne des exemples. J'aimerais ça, évidemment, avoir vos réactions, vos commentaires là-dessus, parce que, on le sait, ici, dans la fonction publique, dans le milieu politique, sur la colline parlementaire, toute cette question-là, c'est sous les projecteurs, je dirais; ça fait même l'objet de questions parfois à l'Assemblée nationale, on s'en rappellera. Donc, on est très sensibles à ces éléments-là.

Il y a la question des primes, par exemple. Il y a deux types de primes, d'après ce qu'on peut voir, à l'Université de Montréal: des primes de direction et des primes individuelles. On ne sait pas trop comment c'est géré, ce genre de primes là. De prime abord, on est portés à conclure qu'il y a beaucoup d'arbitraire, qu'il y a très peu de règles établies qui guident l'Université en matière de primes individuelles surtout. Ça varie beaucoup. Mais, aussi, évidemment, ce qui m'a estomaqué, c'est les privilèges accordés à l'occasion de retraites, de départs. Je donne deux exemples qui me frappent beaucoup: d'abord, cette pratique qui consiste à monnayer l'année sabbatique, qui, évidemment, se chiffre à des montants assez élevés qui vont dans les 120 000 $, 130 000 $. On monnaye l'année sabbatique à l'occasion d'une retraite. C'est arrivé pour deux anciens recteurs.

L'autre pratique qui m'a aussi surpris beaucoup, c'est celle qui consiste à accorder des primes de rentes supplémentaires pour le régime de retraite. En plus du régime de retraite régulier, on ajoute – puis ce n'est pas négligeable – 20 000 $, 25 000 $ de rentes supplémentaires pour la retraite. Ça aussi, c'est une pratique qui m'intrigue un peu. Ça m'a surpris et c'est la première fois que je vois ça, qu'on accorde ainsi des primes supplémentaires de retraite, en sus de ce qui est, évidemment, accordé normalement. Autres privilèges aussi qui m'ont un peu étonné: les autos de fonction qu'on laisse aux personnes qui quittent. Ça aussi, ça m'a un peu surpris.

Évidemment, ça a été déposé. Moi, je l'ai reçu hier, ce document-là. La Presse en fait état dans son édition d'aujourd'hui. Ça a été déposé devant vous; je sais que ça n'a pas été discuté par votre conseil, mais, globalement, la question que je pose, c'est: Devant ces faits-là un peu étonnants, surprenants, est-ce que l'Université de Montréal a une politique de rémunération de ses cadres, mais aussi une politique concernant le départ de ses cadres, et départ pouvant être aussi mise à la retraite?

M. Lucier (Jacques): Alors, M. le Président, il y a un certain nombre d'éléments qui sont en cause, et je ne voudrais pas qu'on garde l'impression que des cas particuliers constituent la politique institutionnelle. Je réfère à ce qui est dit dans le journal de ce matin et je comprends que vous avez en main le document qui avait été soumis expressément au conseil de l'Université. Les cas d'indemnité au moment du départ s'expliquent de la façon suivante: il s'agit de vice-recteurs qui ont le statut de professeur titulaire. À la fin de leur mandat, il y a une année sabbatique, de ressourcement et droit de retour à leur faculté d'origine. À ce moment-là, la décision qui a été prise, c'est une décision alternative: Est-ce qu'on investit...

Je ne dis pas que ça ne serait pas un bon investissement. Habituellement, les gens qui sont vice-recteurs ont été très brillants dans leur carrière antécédente et le fait de retourner à leur secteur d'attache, ça peut être un plus pour l'institution, mais, dans le cadre d'une réaffectation ou, plutôt, dans le cadre d'une politique du rajeunissement du corps professoral, le comité exécutif a voulu trouver des incitatifs en termes de coûts alternatifs. Autrement dit, est-ce que la personne, si elle est laissée libre, parce qu'elle n'a pas nécessairement l'âge de la retraite, retournerait dans sa faculté? Auquel cas, il faudrait payer l'année sabbatique avec les avantages sociaux qui sont rattachés au paiement de cette année-là et, ensuite de ça, pendant deux ans, cinq ans, 10 ans ou 15 ans, dans un cas en particulier qui a été analysé – et, évidemment, la journaliste ne parle pas de ce cas-là – retourner dans l'unité d'attache.

Dans les quatre cas qu'on a mentionnés de vice-recteurs, ce qui a été fait, ça a été de monnayer l'année sabbatique plus un certain nombre de mois pour permettre à la personne d'avoir un revenu qui l'inciterait à quitter l'université, à démissionner et qu'il y ait quittance, disons, de part et d'autre. Ce sont les cas qui sont en cause au niveau des vice-recteurs. Et aussi les deux cas de recteurs qui sont en cause, c'est exactement la même chose; c'est que les deux personnes avaient droit de retour à leur faculté comme professeurs titulaires et, à ce moment-là, pour retourner à la faculté, c'était donc de prendre une année sabbatique pour se ressourcer. Alors, en termes de coûts alternatifs, il a été établi que c'était moins dispendieux de faire des arrangements comme ceux-là.

Je voudrais mentionner aussi que, contrairement à d'autres institutions, le régime de rentes de l'Université limite à 1715 $ par année de services, jusqu'à un maximum de 35 ans, ce qui veut dire que quelqu'un qui aurait fait 35 ans est limité à 60 000 $. Il est évident que, au niveau des incitatifs, quelqu'un qui touche 115 000 $, même s'il avait droit au maximum – ce qui n'était pas le cas dans les cas cités – n'aurait que 60 000 $, donc un décalage assez important. En termes d'incitatif, évidemment, c'est un incitatif à retourner à son port d'attache.

(10 h 50)

Je voudrais aussi mentionner le fait que, si on regarde les moyennes de salaires payés aux recteurs au Canada et même au Québec, le taux de rémunération du recteur, 165 000 $, est en deçà de la moyenne effectivement payée. On pourrait penser que, compte tenu de la dimension de l'Université de Montréal, on ne se situe pas en dessous de la moyenne, mais qu'on est plutôt dans les éléments de tête. Alors, par un certain nombre de bénéfices qui sont accordés, le comité exécutif a voulu tenir compte de la situation salariale à l'Université de Montréal. Je note aussi pour mémoire que, contrairement à des tendances dans un grand nombre encore d'universités nord-américaines, il n'y a pas, attachés à la fonction du recteur de l'Université de Montréal, de bénéfices relativement à sa résidence.

M. Brassard: Mais, d'ailleurs, vous avez remarqué, M. Lucier, que je n'ai pas posé de questions sur la rémunération directement.

M. Lucier (Jacques): Mais elle est reliée.

M. Brassard: Pardon?

M. Lucier (Jacques): C'est parce que... Je m'excuse, M. le Président.

M. Brassard: Non, non, mais la question que j'ai posée, ça concerne les départs. Vous me donnez une explication, c'est une explication qui en vaut bien d'autres, qui a sans doute sa logique, mais, moi, ce que je veux signaler, c'est que, bon, votre logique, c'est de faire en sorte que ces personnes ne retournent pas à leur poste antérieur. Motif que vous invoquez: pour rajeunir le corps professoral. Motif louable en soi...

M. Lucier (Jacques): En termes de coûts aussi.

M. Brassard: Oui. En termes de coûts, bien, ça, là, je... Là, c'est un peu court, mais j'aimerais ça voir les calculs, parce que, en termes de coûts, quand on donne des montants qui dépassent les 400 000 $ pour un retrait ou un départ, je trouve ça élevé et, surtout, des pratiques qui, finalement, constituent des précédents, à mon avis, assez dangereux. Accorder des primes de rente de l'ordre de 25 000 $ et même de 40 000 $ en plus des rentes régulières du régime de retraite régulier, moi, je vous avoue que, ça, c'est une pratique qui m'apparaît dangereuse. Et c'est un précédent à ce moment-là, une voie dans laquelle on peut s'engager, et je ne vois pas pourquoi... À ce moment-là, si on fait ça pour des cadres, on peut se retrouver avec des revendications d'autres catégories d'employés qui disent: Pourquoi pas nous, non plus? Pourquoi ne pas monnayer notre retrait, notre départ de cette façon-là, en bonifiant, en améliorant le régime de retraite? Si le régime de retraite n'est pas suffisant par la négociation, il y a lieu, à ce moment-là, de le rendre meilleur, de l'améliorer, mais ça devient, à ce moment-là, des améliorations d'ordre général qui touchent tout le monde. Je vous avoue que... En tout cas, moi, je trouve que ce sont là des pratiques qui m'apparaissent questionnables à tout le moins.

M. Lucier (Jacques): C'est la loi...

Le Président (M. Hamel): Je vous demanderais d'être bref, s'il vous plaît.

M. Lucier (Jacques): Oui. Mais c'est la loi de l'impôt de 1971 pour les fonds de pension qui n'avait pas de dispositions plus avantageuses, qui nous impose de limiter à 1715 $ par année le maximum des retraites versées.

Je n'ai pas répondu à l'autre question concernant les primes de...

M. Brassard: De direction, puis les primes individuelles.

M. Lucier (Jacques): ...direction. Les primes de direction, ce sont des primes attachées aux fonctions de doyen ou de vice-doyen, selon un barème qui est identique pour tout le monde. Évidemment, la difficulté, c'est au niveau des primes individuelles. Il faut comprendre que les primes individuelles tiennent compte des situations de marchés particuliers. Il est évident que quelqu'un qui est sur le marché des philosophes n'est pas sur le même marché que les économistes, les médecins dans les spécialités, etc., de telle sorte que ces primes-là nous permettent d'être concurrentiels sur le marché au lieu d'une application rigoureuse des échelles qui se retrouvent dans les conventions collectives, et, à cet égard-là, dans nos échanges, nos relations avec les syndicats de professeurs, on a très bien compris que l'Université est une mosaïque de disciplines très différentes, et les gens sont vraiment sur des marchés très différents.

Le Président (M. Hamel): Alors, écoutez, on a presque épuisé le temps qui était alloué aux membres de l'Opposition. Il reste quelques secondes; alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je dois signaler, malgré tout, mon intérêt compte tenu du fait que je suis membre du corps professoral de l'Université de Montréal, mais je vais quand même essayer d'intervenir d'une manière la plus neutre possible. Je n'entrerai pas sur un vieux débat qui est le débat des primes que je connais bien et où je ne voudrais pas rentrer avec vous.

J'entrerai sur deux questions. Dans votre rapport, en page 7, après avoir fait état de la croissance que vous avez connue, vous signalez: «Il est bien entendu qu'une telle productivité ne pourra être maintenue dans le cadre de l'application de la loi 198.» Pourtant, si je regarde la manière dont vous avez appliqué la loi 198 – et vous l'avez appliquée à peu près comme toutes les universités qui, elles, ont continué, donc, ne se sont pas plaintes de manque de productivité – vous avez pu augmenter le nombre d'enseignants et de chercheurs en diminuant le nombre de personnes d'encadrement, c'est-à-dire de cadres supérieurs, de personnel technique et de personnel de bureau, de 2,78 %.

Je voudrais vous entendre m'expliquer pourquoi la loi 198 va avoir cet effet de diminuer votre productivité, alors que vous avez quand même pu – et je vous en félicite, parce que je pense que c'était l'esprit de la loi comme tel – diminuer le personnel de soutien et augmenter le personnel d'enseignants et de chercheurs. Je fais référence au premier article de la première intervention.

M. Simard (René): Il me semble que, quand on diminue le personnel d'encadrement académique, qui est responsable, par exemple, d'essayer de repérer les étudiants qui sont susceptibles de décrocher, puisqu'on parlait de ça tout à l'heure, il est évident qu'on sera beaucoup moins efficaces dans nos programmes relatifs à la persévérance, dans nos programmes de rétention des étudiants. Et c'est pour ça que, sans pouvoir prédire l'avenir, on peut penser qu'avec l'allégement des effectifs on sera peut-être moins efficaces dans le maintien de nos taux de diplomation dans certains secteurs. Je pense que la phrase veut dire cela, mais c'est une hypothèse. Peut-être qu'on réussira à faire travailler tout le monde beaucoup plus que ça.

Mais j'ai fait un article récemment dans les journaux – et, monsieur, vous les lisez, apparemment, souvent – sur la productivité des professeurs d'université. Je ne pense pas qu'on puisse continuellement... Et ça, je pense que c'est un article qui pourrait être cité parce que ça décrit ce qu'est la charge d'un professeur et ce qui va avec. Ce n'est pas uniquement la présence en classe dont on parle; c'est la charge de cours, la charge d'enseignement, les activités de recherche et la mise à jour des connaissances. Il me semble que, si on diminue considérablement le personnel d'encadrement dans les départements, dans les bibliothèques, dans les différents services qui sont à la disposition des professeurs, un jour ou l'autre, on va atteindre le bout du rouleau. Je ne sais pas quand et je ne sais pas si c'est dans le cadre des quatre ans d'application qu'il nous reste pour la loi 198, mais, un jour ou l'autre, on va arriver au bout du rouleau.

M. Gautrin: Mais il faut bien se comprendre: la loi vous demande seulement de faire rapport sur l'implication des règles budgétaires. Or, le livre des crédits qui a été déposé prévoit, à cause de la formule de calcul de la clientèle étudiante, une certaine augmentation des crédits pour les universités. Et ça va être l'entrée en matière de ma deuxième question, M. le recteur. Vous avez abordé, dans la fin de votre intervention, une remarque quant à la manière dont est partagée l'enveloppe des crédits pour les universités. Vous connaissez comme moi la formule de partage de l'enveloppe de crédits pour les universités. Vous avez abordé, à la fin de votre intervention, un point où vous demandez qu'on tienne plus compte des maîtrises et doctorats. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là. Qu'est-ce que vous suggérez?

(11 heures)

M. Simard (René): Oui. La formule, actuellement, reconnaît, pour la durée d'une maîtrise, 45 crédits; 45 crédits dans des sciences de laboratoire, bon, dans la majorité de nos laboratoires, c'est exactement un an. Est-ce que vous avez déjà vu un étudiant faire une maîtrise en un an? Moi, jamais. La formule reconnaît, pour les études de doctorat, 90 crédits, donc, deux ans. Est-ce que vous avez déjà vu un étudiant faire un doctorat en deux ans? Moi, jamais. Et dans aucune université québécoise ou canadienne.

Alors, ce que nous demandons – et j'ai eu une rencontre avec le ministre à ce sujet – c'est une reconnaissance plus équitable, en termes de financement, de la durée des maîtrises et des doctorats parce que je pense qu'au Québec on aura besoin d'une main-d'oeuvre de mieux en mieux formée à un niveau différent. On a fait un certain rattrapage au niveau du premier cycle, un rattrapage même certain. Je pense qu'il est temps d'essayer, en tant que société compétitive, de faire un rattrapage à la maîtrise et au doctorat aussi, aux études supérieures, et donc de reconnaître 60 et 120 crédits, 60 crédits pour la maîtrise et 120 crédits pour le doctorat, ce qui nous ferait 180 crédits, soit environ quatre ans pour des études supérieures, ce qui nous mettrait dans les normes reconnues par les conseils fédéraux de subvention, comme le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, qui donnent des bourses aux étudiants, qui durent exactement quatre ans aussi. Alors, je pense que ça découragerait l'allongement des études, mais, en même temps, ça nous permettrait de consacrer davantage de ressources aux étudiants qui sont à la maîtrise et au doctorat.

À la suite d'une recommandation du ministre, j'ai fait le tour de tous les recteurs des universités québécoises et je compte proposer cela à la CREPUQ après-demain, et peut-être que nous en rediscuterons avec M. Chagnon, s'il le veut bien, au cours des prochaines semaines.

M. Gautrin: Est-ce qu'il serait possible, pour l'information de cette commission – parce que je comprends que vous avez des liens avec le ministre, mais cette commission devra, évidemment, étudier les crédits qui sont les crédits de l'Éducation – de nous suggérer sur un texte court et succinct, parce qu'on lit peu, ce que vous venez de nous dire?

M. Simard (René): L'hypothèse...

M. Gautrin: C'est-à-dire ce que vous proposez, est-ce qu'on pourrait l'avoir sur papier? Est-ce que peut-être la commission pourrait nous...

M. Simard (René): Bien sûr, je peux vous dire les montants. Il s'agirait d'ajouter à l'enveloppe, actuellement, un montant. Nous avons choisi une hypothèse où aucune université ne perdrait parce que, si c'était fait à l'intérieur de l'enveloppe actuelle, évidemment, il y aurait des plus et des moins, ce qui serait inacceptable pour certaines universités. Si on veut l'unanimité à la Conférence des recteurs, il faut donc une formule. Alors, la formule minimum qui nous semblait une formule raisonnable respecterait le principe de reconnaître un poids plus équitable aux études de maîtrise et de doctorat et nécessiterait un ajout supplémentaire de 13 000 000 $ à l'enveloppe actuelle en termes d'argent neuf.

M. Chagnon: 12 900 000 $.

M. Simard (René): 12 900 000 $. Vous avez bonne mémoire, M. le ministre.

M. Gautrin: Est-ce que vous pourriez nous déposer un tel document...

M. Simard (René): Bien sûr.

M. Gautrin: ...le faire parvenir à la commission?

M. Simard (René): Bien sûr.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Hamel): Merci. Le mot de la fin, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Évidemment, le temps nous a manqué. On aurait pu poursuivre pendant longtemps sur bien des sujets. Je remercie l'Université de Montréal pour son document, les explications et, en particulier, les recommandations concernant les niveaux de maîtrise et de doctorat, qui m'apparaissent tout à fait pertinentes et on ne peut plus raisonnables. Et j'espère que le ministre, qui est à l'écoute, va en tenir compte.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le ministre.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je voudrais aussi remercier les représentants de l'Université de Montréal. Effectivement, le ministre va en tenir compte, de ces propositions-là. Il va essayer de faire en sorte d'aider les représentants de la CREPUQ, lorsque cela sera fait, semble-t-il dans une couple de jours, à regarder les possibilités. Mais vous connaissez les finances publiques, M. le député de Lac-Saint-Jean. Vous savez que rien ne se perd, rien ne se crée. Et, dans ce cadre-là, évidemment, ça devient un peu complexe comme situation, mais il nous faudra sûrement... Parce que c'est là aussi, je dirais, un facteur d'avenir. S'il y a un secteur où, au Québec, nous sommes légèrement en retard sur notre compétition, entre guillemets, tant canadienne et américaine, c'est sur le nombre de nos étudiants au niveau du deuxième cycle et du troisième cycle. Et, dans ce cadre-là, moi, je suis très près de la vision des recteurs qui appuient, entre autres, M. Simard dans sa démarche.

M. Brassard: Ça a des conséquences budgétaires, ça, M. le ministre.

M. Chagnon: Oui, mais c'est ce dont je viens de vous entretenir.

Alors, je vous remercie, madame, messieurs.

M. Gautrin: On échangera là-dessus au cours de l'étude des crédits plus tard.

Le Président (M. Hamel): Merci.

M. Chagnon: Je ne suis pas à mes derniers crédits, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Alors, je remercie les représentants de l'Université de Montréal, M. le recteur Simard, Mme la vice-rectrice McNicoll et M. le vice-recteur Lucier. Alors, je demanderais immédiatement aux représentants de l'École polytechnique, s'il vous plaît, de prendre place.

M. Gautrin: Est-ce qu'on peut suspendre pour deux minutes?

Le Président (M. Hamel): À la demande du député de Verdun, nous suspendons pour 60 secondes. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 6)

(Reprise à 11 h 8)

Le Président (M. Hamel): Alors, nous allons poursuivre nos travaux. J'accueille avec plaisir les représentants de l'École polytechnique de Montréal, représentée par M. Jean-Paul Gourdeau, président, M. André Bazergui, directeur général, et Mme Louise Vaillancourt-Châtillon, directrice des services administratifs. S'il vous plaît, à l'ordre! S'il vous plaît! Nous poursuivons nos débats.

Alors, je reçois un document de l'École polytechnique que nous allons déposer en bonne et due forme. Alors, sans plus tarder, vous savez les règles du jeu, vous avez 20 minutes. S'il vous plaît, si vous pouviez vous y en tenir, ça nous permettrait d'échanger plus longuement avec vous. Alors, allez-y.


École polytechnique de Montréal

M. Bazergui (André): Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, tout d'abord, merci de nous accueillir. Je pense que ça va nous donner l'occasion de vous présenter un peu les activités de l'École et, en même temps, de parler, bien sûr, de l'implication des règles budgétaires sur le niveau des effectifs et des activités de l'École.

Vous avez mentionné nos noms. Je suis André Bazergui, le directeur général de l'École. Je suis accompagné de notre président et principal, M. Jean-Paul Gourdeau, et de Mme Louise Vaillancourt-Châtillon, qui est notre directrice administrative. J'aurai l'occasion, dans quelques minutes, de vous parler un peu de la structure de l'École, ça va vous donner un peu une idée de l'organisation.

D'abord, je dois mentionner que l'École polytechnique a été fondée... C'est la plus vieille, je pense. Chacun réclame ce droit d'aînesse. On est, je pense, la plus vieille école d'ingénieurs du Canada. Elle a été fondée en 1873. Présentement, on est sans aucun doute le plus grand établissement des 33 facultés et écoles d'ingénieurs du Canada. Présentement, au Québec, nous avons huit écoles d'ingénierie et je suis le président du Comité des doyens d'ingénierie du Québec.

Notre statut, c'est que nous sommes affiliés à l'Université de Montréal; donc, nous avons un contrat en bonne et due forme, et, l'administration étant séparée, nous avons quand même... Du point de vue de la formation, de la qualité de l'enseignement, nous avons un contrat, donc, avec l'Université de Montréal. Donc, tous nos programmes passent par les rouages habituels de l'Université. Donc, si vous voulez, c'est une situation assez intéressante, puisque nous avons une reconnaissance universitaire tout en étant administrativement séparés. Le budget que nous recevons directement du ministère de l'Éducation est de l'ordre de 50 000 000 $. Le budget total, incluant les investissements, représente à peu près 95 000 000 $.

(11 h 10)

Du point de vue de la structure administrative de l'École, j'ai pensé que ce serait intéressant que vous voyiez comment ça fonctionne. Nous avons un conseil d'administration qui est présidé par M. Jean-Paul Gourdeau, qui agit aussi comme président et principal de l'École. Je suis le directeur de l'École, le directeur général. Il y a quatre directions fonctionnelles qu'on pourrait considérer un petit peu comme des vice-recteurs, ou des vice-doyens, ou des vice-présidents, dépendant de la façon dont on regarde l'objectif. Et il y a 11 directeurs de départements qui sont dans la liste donnée en bas de la page 3. Les directeurs de départements chez nous, c'est une structure départementale, mais, en même temps, ils sont responsables des programmes, de sorte que le directeur de département s'occupe aussi d'organiser les programmes de formation.

Polytechnique s'est donné une mission; ça fait déjà trois ans que j'ai établi cette mission dans un plan d'orientation que j'ai publié et dont je vous parlerai dans une minute. Nous pensons que la première priorité, c'est la formation – vous allez voir que le mot «formation», à la page 4, est répété au moins deux fois – et non seulement au niveau du premier cycle, car la fonction première de l'École polytechnique, c'est de former des ingénieurs – d'ailleurs, on a formé les ingénieurs du Québec pendant de nombreuses années, on était les seuls – mais c'est surtout de bien reconnaître que, pour l'ingénieur, c'est important de lui donner aussi des valeurs humaines, de sorte que, dans nos programmes, nous avons un certain nombre de cours qui insistent sur l'aspect social de l'ingénieur. On peut citer rien que l'aspect environnement, qui est un aspect très important, de plus en plus important pour l'ingénieur, mais on a des cours qui sont structurés pour mettre l'insistance et l'emphase sur cet aspect-là.

Du point de vue de la recherche, moi, personnellement, j'insiste, comme mission de l'École, que, si une recherche n'implique pas des étudiants, ce n'est pas une recherche universitaire. Donc, le mot «formation», vous allez le retrouver là. Par contre, comme école d'ingénieurs, nous avons aussi une responsabilité vis-à-vis le milieu industriel. Donc, nous sommes continuellement en contact avec le milieu industriel, nous sommes en réponse aux besoins du milieu industriel, évidemment, en priorité, du Québec. Mais nous avons aussi un rayonnement et, de plus en plus, l'École veut se comparer à des institutions à l'échelle internationale, et c'est comme ça que nous allons réussir à remplir notre mission québécoise. Donc, on a un rayonnement non seulement au pays, mais aussi à l'étranger. Alors, vous voyez que la vision reflète un peu cet aspect des choses.

La façon dont nous planifions notre activité. Lors de ma nomination, lors de mon premier mandat, j'ai publié un document qui s'appelle «Progresser dans l'harmonie», qui couvrait la période 1991-1994 et qui donnait toute une série de plans d'action qui ont été assez bien suivis. En ce moment, je suis en train de travailler sur un plan d'orientation qui va couvrir mon deuxième mandat et qui est souligné par une série d'actions prioritaires que je vais présenter à mon conseil d'administration demain après-midi, mais qui, aussi, a une trame de qualité totale. Vous remarquez où c'est marqué «Contexte», à la page 5, nous avons un Programme d'amélioration continuelle de la qualité que nous avons lancé il y a plus d'un an maintenant, qui est en marche et qui sous-tend à peu près toutes nos actions. Et c'est ça qui est marqué par PACQ, qui est en haut.

C'est important de bien souligner que nous avons des activités. Entre autres, vous allez voir qu'il y a Poly 2000, qui est un comité qui a été formé et qui a regardé les besoins de l'an 2000; le comité qui a procédé à ma reconduction comme directeur de l'École a aussi fait des recommandations; et nous avons aussi ce qu'on appelle le COCEP, le Comité consultatif de l'École polytechnique, qui est formé d'une quarantaine d'ingénieurs qui viennent nous conseiller dans tous nos programmes. Donc, nous sommes extrêmement connectés avec le monde industriel.

Je vous ai donné, à la page 6, quelques statistiques d'inscriptions au niveau du baccalauréat et des cycles supérieurs. C'est évident qu'au niveau du baccalauréat il y a une baisse importante des inscriptions au cégep en sciences; c'est senti par tout le monde et on va sentir de plus en plus un manque d'inscriptions au niveau des écoles d'ingénieurs. C'est pourquoi nous devons prendre des actions très vigoureuses pour essayer de recruter; je ne parle pas seulement de nombre, mais il faut recruter les meilleurs pour remplir cette mission-là. Aux cycles supérieurs, je pense que vous voyez très bien qu'on n'a aucun problème pour recruter. Nous avons une augmentation assez dramatique; on est rendus à 1400 étudiants au niveau des cycles supérieurs. Je pense qu'on n'a pas beaucoup à s'inquiéter de ce côté-là.

Ce qui est important, par contre, c'est de plus en plus l'éducation permanente. Les courbes ne sont peut-être pas très claires, mais celle qui est la plus significative, c'est la courbe des certificats. Vous voyez que nous avons une augmentation assez substantielle. En 1992-1993, nous avons une augmentation, c'est passé de 707 étudiants à 955. C'est très important, ça prouve qu'il y a un besoin de formation continue, et nous remplissons ce rôle de façon, je crois, très vigoureuse. Ce qui augmente aussi d'une façon importante, c'est les cours intensifs. Ce qui baisse un petit peu, c'est les cours sur mesure. C'est parce que, là, il y a une compétition féroce de la part de l'industrie privée.

Du point de vue des diplômes, nous avons une cohorte de l'ordre de 640. Vous voyez qu'il y a une augmentation malgré la baisse d'inscriptions récente, mais, évidemment, là, on a un délai de l'ordre de quatre ans. Au niveau du doctorat, bien, là, ça marche un petit peu par à-coups. On a eu une grosse année en 1991-1992; 1992-1993, c'est une année calme. L'année prochaine, ça va probablement être beaucoup supérieur à 1991-1992 parce que ce sont des cycles du diplôme.

Les professeurs. En 1992-1993, nous avons atteint l'ordre de 240 professeurs, incluant les profs qui font de l'administration, donc les directeurs de départements, certains directeurs fonctionnels. Les courbes sont des courbes dynamiques, c'est-à-dire que ça inclut les promotions; ce ne sont pas des engagements nouveaux, de sorte qu'il y a toute une série de mouvements d'un type de prof à un autre.

Ce qui est important à noter, en bas de la page 9, c'est que les fonds obtenus par les professeurs en 1992-1993 se situent autour de 150 000 $ par professeur. Ça, c'est tous les fonds de recherche et d'activité industrielle. Et nous sommes, je crois, les deuxièmes, après l'INRS, qui avons une mission de recherche pure et simple. Je pense que c'est très important de noter que l'activité professorale est extrêmement dynamique chez nous. Le financement de la recherche est de l'ordre de 32 000 000 $, 33 000 000 $. J'ai mentionné 35 000 000 $, j'ai fait un chiffre rond tout à l'heure. Mais c'est important de voir aussi la progression significative récente. Et, quand on se compare avec le reste du Canada – on n'est plus au Québec, là – on est ceux qui ont la progression la plus importante surtout dans la recherche en relation avec l'industrie.

Finalement, dans les statistiques, je vous ai donné un tableau qui représente nos chaires industrielles. C'est une situation qui est absolument spectaculaire. Il y a quatre ans, nous en avions quatre; maintenant, nous en avons 11. Il y en a une dans le collimateur. Nous avons une chaire en environnement qui est sur le point d'être approuvée. Ça, c'est venu directement à la suite de la campagne de financement «Réussir ensemble», que nous avons faite à l'échelle du campus. Poly s'est donnée comme mission d'utiliser les fonds de la campagne pour lancer des chaires industrielles. Et vous voyez que la contribution des entreprises est quand même assez phénoménale.

J'ai pensé aussi vous indiquer que Polytechnique participe de façon active au niveau de l'expérimentation avec les cégeps. Nous pensons que c'est bien beau de se plaindre que la préparation des étudiants n'est pas adéquate, et c'est facile de le faire, mais nous pensons que nous avons un rôle à jouer avec les cégeps et, donc, nous travaillons un peu afin d'avoir une influence au niveau de ceux qui forment les étudiants qui viennent chez nous. Et nous avons donc accepté de participer à trois projets qui sont cités là, deux en sciences de la nature, puis le D.E.C. en sciences, lettres et arts. C'est des projets... On me dit qu'ils fonctionnent très bien. Il y a un haut niveau de satisfaction, et je pense que c'est important que le groupe ici le sache.

Quels sont les effets maintenant, les conséquences du «définancement»? C'est important de noter qu'alors que le nombre de professeurs en... Dans le tableau qu'on vous a remis à l'avance, qui est maintenant repris à la page 14, vous voyez qu'il y a maintenant 248 professeurs couramment, mais celui de la dernière page montre que le nombre de professeurs va être réduit de sept, on va tomber à 241, et les autres effectifs aussi sont diminués. Bien, il a fallu qu'on tienne compte des diminutions budgétaires. Je voudrais vous dire aussi que Polytechnique a un budget équilibré depuis de nombreuses années. J'ai un conseil d'administration absolument farouche qui n'accepte pas autre chose que zéro ou 1+. Je lui en suis reconnaissant, d'ailleurs.

(11 h 20)

Donc, on va avoir un problème d'accessibilité pour les étudiants, de diminution du nombre de cours offerts, bien sûr, de l'encadrement des étudiants. Mais on essaie autant que possible... Moi, je mets l'emphase là-dessus: s'il faut faire quelque chose, c'est l'enseignement qui prime. Par contre, les services... Je m'excuse, il y a une faute d'orthographe; il y a un «s» qui manque dans le deuxième «service». «Réduction des services dans le support à l'enseignement», ça a déjà été mentionné tout à l'heure, mais c'est surtout pour le génie, vous le savez, le sous-financement des infrastructures. Le génie, c'est quelque chose qui a besoin de laboratoires, d'installations. Le ministère avait été très généreux; dans sa sagesse, il nous a octroyé des fonds spéciaux pour toutes les facultés de génie du Québec, et ça devait durer cinq ans. Ça a duré deux ans; c'est quand même mieux que rien. Mais je pense que, s'il y a un besoin, c'est bien là et que, pour le bien, je pense, de l'industrie au Québec, de la haute technologie, c'est très important de bien mettre l'emphase sur ce point-là. Alors, M. le Président, ainsi se termine ma présentation.

Le Président (M. Hamel): Merci beaucoup, M. Bazergui. J'accepte le dépôt de votre document. Je dois vous remercier aussi pour la synthèse et la façon dont vous avez présenté votre document qui nous brosse un tableau assez exhaustif de Poly et qui va nous permettre d'échanger davantage avec vous. C'est très apprécié des parlementaires. Merci. M. le ministre.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. MM. Gourdeau et Bazergui, Mme Vaillancourt-Châtillon, d'abord, comme je le fais toujours à cette commission-ci depuis que nous rencontrons les universités sur le projet de loi 198, vous devez savoir que les commissions parlementaires sont le rôle institutionnel privilégié des députés. Alors, je ne prendrai pas de leur temps. Je ne voudrais pas voler de leur temps ou prendre insidieusement de leur temps.

Finalement, je vais vous poser deux questions, l'une dans la trame que j'ai ouverte la première fois que nous avons rencontré les universités il y a à peu près un mois, concernant votre taux de diplomation. Vous avez 643 diplômés au baccalauréat en 1992-1993. Vous avez une moyenne à peu près constante depuis 1988-1989, 636. Mais c'est quoi, le pourcentage? Si on a le nombre de vos étudiants au baccalauréat, par exemple, 3524, c'est quoi la proportion de ceux qui sont en quatrième année là-dedans?

M. Bazergui (André): La façon dont...

M. Chagnon: Alors, première question.

M. Bazergui (André): Je m'excuse. Première question, d'accord, c'est noté.

M. Chagnon: Alors, c'est quoi, le taux de rétention? Le taux de captation de votre clientèle, on le connaît, mais le taux de rétention de votre clientèle, quel est-il?

Deuxièmement, en ce qui concerne vos enseignants, vous en avez parlé, je remarque qu'en 1989-1990 vous aviez un total de 191 professeurs, adjoints ou titulaires, agrégés ou chargés d'enseignement, 191, lorsque vous aviez 3461 élèves, à tout le moins, au premier cycle, c'est-à-dire au baccalauréat. Il y a une plus grande proportion d'élèves qui augmente entre le deuxième et le troisième cycle, évidemment. Mais, lorsque j'ai une augmentation de 2 % au baccalauréat, j'ai une augmentation de professeurs de 26 % entre 1989 et 1993. J'ai une augmentation, par contre, qui est intéressante et importante au niveau des deuxième et troisième cycles. Peut-être est-ce là la réponse de cette augmentation du nombre de profs dans quatre ans. Ce sera là mes deux questions, monsieur.

M. Bazergui (André): Vous avez un esprit d'observation très prononcé, M. le ministre. Je ne m'attendais pas à moins de ça de vous. D'abord, la question du taux de rétention. Le nombre d'étudiants qui rentrent en première année, il y a, mettons, 1000 étudiants en moyenne. Il y en a 650 qui terminent; donc, on a un taux de rétention de 65 %. Sauf qu'il faut s'entendre, c'est que Polytechnique a eu une politique traditionnelle qu'on dit de porte ouverte. C'est-à-dire que notre première année, c'est une année où les étudiants s'inscrivent. Souvent, ils décident de poursuivre ailleurs à l'université. La plupart du temps, ce ne sont pas des échecs, ce sont des réorientations de carrière, de sorte que, dans un contexte universitaire plus général où les inscriptions sont un petit peu plus diluées dans un contexte de plusieurs facultés, ce taux de rétention n'est pas aussi clair que dans le cas de Polytechnique, parce que, nous, on est monofacultaires. Alors, les étudiants qui ne font pas le génie, bien, ils ne restent pas chez nous. Donc, ça nous permet, nous, si vous voulez, de donner l'occasion aux étudiants de voir s'ils sont capables de poursuivre. Mais on ne fait pas d'échecs. Il n'y a pas d'autoabandons après la deuxième année, très peu en tout cas, de sorte que c'est la première année qui est l'année cruciale pour les étudiants chez nous.

Alors, j'espère que ça répond à votre question. Évidemment, il va falloir se poser la question si on peut se permettre ce genre de régime. Sauf que les étudiants l'apprécient énormément, bien sûr, puisque, comme je vous dis, ce n'est pas qu'ils quittent le système universitaire, mais, très souvent, ils vont peut-être s'orienter vers autre chose. Il y en a qui vont aller en sciences, il y en a qui vont aller même en médecine. Ils font une année chez nous, puis ils s'orientent ailleurs. Alors, ce n'est pas une perte du tout; c'est une formation préliminaire qu'on leur donne et, d'ailleurs, il y a des régimes...

Je reviens, j'ai été sur un comité pour étudier la situation du génie en Nouvelle-Écosse. Là-bas, c'est deux ans. Ils ont un système de l'université qu'ils appellent les «associate universities»; les étudiants s'inscrivent dans ces universités pendant deux ans et, ensuite, vont faire leur génie. C'est un peu l'équivalent, si vous voulez, d'un cégep un peu plus poussé. Alors, là encore, on parle d'un taux de rétention de 50 %, mais ce n'est pas perdu. Alors, ceci étant dit, ça répond à la première question. J'espère que ça répond à la première question.

La deuxième question, c'est, évidemment, la question des profs. Alors, j'ai dû limiter mes statistiques à 1989-1990, mais il faut se reporter beaucoup plus loin en arrière. C'est qu'en 1989-1990 on venait de sortir d'une période extrêmement difficile, on a dû faire des coupures budgétaires. Comme je vous dis, l'École était la seule institution à n'avoir pas fait de déficit et ça a représenté des coupures majeures de postes dans les années 1982, 1983 et 1984, de sorte que le ratio étudiants-professeur était devenu inacceptable. Et, en 1989-1990, on s'est donné une mission. C'était, à l'époque, M. Doré qui était directeur de l'École. Il a mis des budgets importants pour, si vous voulez, diminuer le ratio étudiants-professeur, ce qui a fait qu'on s'est ramenés à un ratio de l'ordre de 20, 22, alors qu'on était montés jusqu'à 27, ce qui était tout à fait inacceptable. Alors, c'est pour ça que vous voyez ce saut majeur. Mais, là, on a atteint notre régime de croisière de 240. Malgré tout, à cause de l'augmentation des cycles supérieurs, vous voyez que les profs sont assez pleins comme point d'activité, mais c'est sûr qu'on ne pourra pas aller beaucoup plus loin. Vous voyez qu'on est montés un peu, puis, là, on va être obligés de redescendre.

M. Chagnon: Merci.

M. Bazergui (André): Puis il y a aussi... Ah oui, pardon, il y a aussi l'activité «chaires» qui est incluse là-dedans.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Bazergui. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Oui, M. le Président. D'abord, je constate que vous êtes l'université, enfin, l'institution universitaire qui a le taux d'encadrement le plus bas. Il est de l'ordre de 4,43 %. C'est le plus bas de tout le réseau québécois. Je pense que ça mérite d'être signalé. Il y a sûrement eu un effort soutenu, délibéré dans ce sens-là pour réduire le taux d'encadrement, ce qui donne un résultat comme celui-là.

Maintenant, j'ai surtout deux questions, tout en constatant avec satisfaction que, dans votre plan d'action, la formation est la vocation ou la mission prioritaire, ce qui est intéressant. Mais vous indiquez également que ce que vous appelez le «définancement», ce qu'on peut appeler aussi le sous-financement, ça a des conséquences, et vous les indiquez sommairement en page 13: accessibilité réduite pour les étudiants, diminution du nombre de cours offerts, diminution dans l'encadrement des étudiants, réduction des services et du niveau des services dans le support à l'enseignement et sous-financement des infrastructures. Vous en avez fait état tout à l'heure: il y avait un plan qui a été ramené à deux ans et qui a été abandonné en quelque sorte. Actuellement, le financement qui est le vôtre, est-ce que je dois conclure qu'on a atteint un niveau tel que, présentement, ça compromet la qualité des services, la qualité de la formation et que vous ne pourriez plus supporter sans, encore une fois, affecter la qualité des services de nouvelles compressions ou de nouvelles réductions ou une aggravation de ce que vous appelez votre «définancement» ou votre sous-financement?

(11 h 30)

M. Bazergui (André): Je crois que c'est évident que, si nous nous retrouvons dans la situation qu'on a déjà vécue dans les années 1982, 1983 et 1984 où l'École a tenu à ne pas faire de déficit à l'époque et, donc, où elle a fait des coupures majeures, ce serait assez dramatique, surtout quand on sait... Et, là encore, je dois ouvrir une parenthèse. Je fais partie du Conseil de la science et de la technologie et, donc, parmi les choses que le Conseil a demandées ou a proposées au gouvernement dans son dernier avis, qui s'appelle «Urgence-technologie», c'était qu'il y avait un besoin important de fournir au Québec un support technologique de bon niveau. On a donc un rôle à jouer. Moi, je pense que c'est beaucoup plus la question de la qualité que celle de la quantité. On ne peut pas former des ingénieurs n'importe comment et, ensuite, être pris à vouloir les placer. Mais on leur trouve de la place maintenant, les PME engagent des ingénieurs. On a un rôle à jouer là-dessus.

Alors, c'est sûr qu'au moment où vous dites: Les sources de financement sont réduites de la part du gouvernement, qu'est-ce qu'on va faire pour pouvoir maintenir notre rôle industriel? Mais, c'est qu'on va s'adresser au secteur privé de plus en plus. Or, il y a un risque. Le risque, c'est que le secteur privé, quand il vous donne 1 $, il veut en avoir pour 2 $ ou 3 $. Donc, eux, la formation, c'est bien beau, mais c'est beaucoup plus le court terme qui les intéresse, et c'est ça, le danger.

Nous, je pense qu'on peut vous assurer qu'on va continuer à remplir notre rôle; ce serait irresponsable de faire autrement. On ne peut pas vous tenir en otage et dire au gouvernement: Écoutez, si vous ne nous donnez pas d'argent, on va arrêter de travailler, sauf que, le risque, c'est l'épuisement. C'est-à-dire que les demandes qui sont faites au corps professoral d'une faculté de génie sont énormes. Les possibilités sont là d'aller chercher du financement et tout le reste, typiquement des chaires, mais un détenteur de chaire a un niveau d'enseignement réduit. On ne peut pas faire autrement parce qu'il faut qu'il remplisse une mission industrielle. Alors, c'est ça, le gros danger, et c'est pour ça que je vous dis qu'on est obligés de faire des choix. Et, quand on parle d'une diminution du nombre de cours offerts, c'est beaucoup plus les choix de cours. On ne pourra plus offrir autant de possibilités à nos étudiants. Il faudra qu'on les contingente davantage dans certains cours. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

M. Brassard: Ça répond à ma question dans le sens où ce que vous décrivez comme conséquences, c'est des conséquences actuelles, concrètes.

M. Bazergui (André): Absolument.

M. Brassard: Ce n'est pas des conséquences que vous envisagez dans le futur. Ça existe, c'est la réalité actuellement.

M. Bazergui (André): La réalité, c'est qu'en fait, actuellement, il y a sept professeurs – j'ai tous les détails – qui sont partis à leur retraite et qui ne seront pas remplacés, alors qu'on parle de l'importance du rajeunissement du corps professoral. Heureusement qu'on a réussi à le faire, malgré tout, dans les années qui ont précédé. Mais, là, si on continue comme ça, ça veut dire qu'on n'impartit plus d'engagements pour les trois, quatre prochaines années. C'est extrêmement pénible.

M. Brassard: L'autre élément que je trouve intéressant dans votre présentation, c'est cette collaboration que vous avez établie avec l'ordre d'enseignement collégial, certains cégeps, entre autres les collèges de-Brébeuf et de Maisonneuve, André-Grasset, Bois-de-Boulogne, Saint-Jérôme. C'est très succinct, évidemment, ce que vous me donnez là. Vous nous annoncez que vous avez des projets d'expérimentation avec les cégeps...

M. Bazergui (André): Pardon, il s'agit de projets qui ont été demandés par le ministère de l'Éducation.

M. Brassard: O.K. D'accord. Ah bon! Mais, est-ce que vous pourriez en dire davantage, parce que ça m'apparaît assez sommaire? Quel genre de collaboration et quel genre de projets d'expérimentation...

M. Bazergui (André): D'accord.

M. Brassard: ...sont en place?

M. Bazergui (André): Au ministère de l'Éducation, je ne sais pas si vous vous en souvenez, à l'époque du ministre Ryan, il était question de faire réétudier la situation de l'enseignement au cégep, et tout ça. Par la suite, Mme Robillard a lancé son opération de l'étude des cégeps. Mais, déjà, avant même l'annonce de cette évaluation de la formation au cégep, au ministère, au lieu de démarrer des programmes ou de faire des changements de programmes importants n'importe comment ou sur une base générale, ils ont décidé de faire plutôt de l'expérimentation en impliquant non seulement les cégeps, mais aussi ceux qui vont utiliser le produit du cégep. Ils ont dit: Quoi de mieux que de mettre les joueurs principaux dans des projets d'expérimentation de nouveaux programmes? Et c'est de ça qu'il s'agit. Et, nous, on a participé, avec des collaborations.

Ce sont des projets qui ont été agréés par le ministère, qui sont financés. C'est le cégep qui obtient les fonds; donc, c'est le cégep qui en est le maître d'oeuvre. Mais, nous, comme universités, nous agissons comme personnes-ressources de façon à dire: Bon, d'accord, c'est quoi, le profil d'un étudiant qui veut venir en génie? Vous voyez qu'il y a d'autres universités, l'Université de Montréal est impliquée; donc, on parle de sciences et de génie dans certains cas. De sorte qu'à la fin on va faire des recommandations sur le type de profil que devrait avoir un étudiant ou une étudiante qui passe par le cégep pour venir, par exemple, à Poly ou en sciences à l'université, ou en médecine. C'est un projet important...

M. Brassard: C'est à ce niveau-là.

M. Bazergui (André): Ah oui! C'est un projet. Nous, nous faisons partie de trois, mais je pense que, dans l'ensemble, il doit y en avoir une dizaine, de projets de ce type-là, qui ont été approuvés par le ministère. Mais peut-être que le ministre pourrait compléter.

M. Brassard: Mais c'est à ce niveau-là. C'est au niveau de la détermination du profil...

M. Bazergui (André): Oui.

M. Brassard: ...de l'étudiant, des compétences qu'il doit...

M. Bazergui (André): Le contenu des cours au cégep.

M. Brassard: ...maîtriser pour accéder à l'université.

M. Bazergui (André): C'est ça.

M. Brassard: L'autre question, M. le Président, que je souhaiterais poser, ça concerne également la mission de l'École, le deuxième élément de la mission qui lie la formation de deuxième et troisième cycle, la formation supérieure, aux besoins du milieu industriel et de la société. J'aimerais que vous élaboriez davantage là-dessus. Comment se fait ce lien entre la formation de niveau supérieur, maîtrise et doctorat, et les besoins du milieu industriel et de la société? Et est-ce que ça se traduit, à ce niveau-là, de la même façon aussi que pour ce qui est des chaires industrielles? Est-ce que ça se traduit par des retombées concrètes en termes de nouveaux produits, de nouvelles entreprises, d'expansion d'entreprises existantes?

M. Bazergui (André): Écoutez, je crois que, si je peux vous référer à la page 10, vous voyez les courbes qui sont montrées là. Sans vouloir trop vanter Polytechnique, elle s'est dotée, depuis maintenant plus de 20 ans, d'un centre de développement technologique qui a fait quasiment des miracles. En fait, c'est ça qui a commencé toute l'activité des bleus dans les universités. Nous étions les premiers. Et ce centre-là a fait que nous avons un partenariat. Quand on parle de partenariat, c'est un vrai partenariat, c'est-à-dire qu'on n'est plus là en train de rendre service à l'industrie de façon bête et méchante en disant: Bon, on vous fait quatre tests, on vous facture. Non, ce n'est pas ça. L'industrie, maintenant, nous consulte pour démarrer des projets, pour lancer des opérations, pour aller chercher des subventions communes, conjointes. On fait maintenant des vrais partenariats.

Alors, tout ceci implique des étudiants, parce que le prof est accompagné de chercheurs professionnels qu'il embauche dans le cadre de ces projets-là, mais partout il y a des étudiants. S'il n'y a pas d'étudiants, ce n'est pas un projet universitaire, je l'ai mentionné tout à l'heure. Alors, ces étudiants-là, ce sont des thésards, c'est des gens qui font une maîtrise ou un doctorat. Et c'est dans ce sens-là que ces étudiants étant impliqués dans des projets industriels font, finalement, des travaux pour les industries qui subventionnent partiellement ces projets et, donc, sont plus susceptibles de se trouver de l'emploi dans ces industries-là.

Et, effectivement, on note une chose: alors que, du côté du premier cycle, donc les bacheliers en ingénierie, on a un peu de difficulté de ce temps-ci à se placer – quoiqu'on y arrive maintenant, ça va un petit peu mieux cette année – ce qui est étonnant, c'est que, maintenant, c'est les maîtrises et les doctorats qui se trouvent de l'emploi plus facilement parce qu'ils répondent à des besoins très concrets dans l'industrie. Ils ont travaillé sur des projets industriels. Ça répond à votre question?

M. Brassard: Vous parliez tantôt des difficultés d'embauche pour les ingénieurs de premier cycle, mais que ça s'améliorait. Évidemment, la récession y est sans doute pour beaucoup, mais on a fait état, pendant la période, justement, de récession et encore maintenant, d'un taux de chômage assez élevé chez les ingénieurs, ce qui est un phénomène qu'on pourrait qualifier d'inédit, là; c'est du jamais vu. Comment percevez-vous ce phénomène-là, tout à fait nouveau? Est-ce que, pour vous, il est passager, il est conjoncturel et est-ce que la situation va finir par se rétablir pour les ingénieurs québécois?

M. Bazergui (André): C'est une question très, très brûlante actuellement. Je veux dire que, comme président du comité du domaine ingénierie, je suis, évidemment, très en contact avec l'Ordre des ingénieurs et nous avons des discussions courantes là-dessus. Nous venons d'avoir une réunion, justement là-dessus, lundi passé. Ça me préoccupe. Ce n'est pas conjoncturel. D'après moi, c'est un changement, vraiment, de façon de faire. La façon dont les ingénieurs étaient embauchés dans le passé, c'était des grosses compagnies qui avaient pris comme mission de faire de la formation, c'est-à-dire qu'elles se disaient: Bon, l'ingénieur rentre chez nous pendant un an. Il n'y a pas grand-chose à tirer de ça, on va le former à notre image.

M. Brassard: Exemple, Alcan, chez nous.

(11 h 40)

M. Bazergui (André): Bien, c'est exactement ça. Il y avait Alcan, il y avait Bell. C'étaient les grosses compagnies, Hydro-Québec, etc. D'ailleurs, ils nous disaient: Peu importe ce que vous faites avec, de toute façon, là, nous allons les faire à notre goût. Puis c'était bien entendu que, trois ans plus tard – il y avait une grande circulation de personnel – donc, l'ingénieur qui travaillait pour Bell, qui avait acquis une certaine expérience, était embauché par une petite compagnie, etc. Maintenant, ce qui arrive, c'est que c'est la PME qui est, si vous voulez, la source d'emploi. Les grosses compagnies font de la restructuration.

M. Brassard: Et diminuent même.

M. Bazergui (André): L'économie va mieux, mais ça ne représente pas des emplois, on le sait très bien. Mais les PME représentent, pour nous... On a un rôle à jouer, très important, et je pense que, pour le Québec, c'est ça qu'il va falloir pousser. Et l'Ordre des ingénieurs s'est doté de mécanismes pour pénétrer dans les PME, pour aller les voir. Parce qu'ils ne viendront pas nous voir; ils n'ont pas de temps à perdre. Ces entrepreneurs qui ont deux, trois employés chez eux...

M. Brassard: Ils ne sont pas habitués.

M. Bazergui (André): ...ils n'ont pas le temps d'aller recruter.

M. Brassard: Ils ne sont pas habitués, non plus.

M. Bazergui (André): Mais on va les voir.

M. Brassard: Ils n'ont pas l'habitude.

M. Bazergui (André): On va les voir chez eux. On leur dit: Écoutez, là, avez-vous du technique, ici? L'ordinateur qui rentre chez vous, êtes-vous capables de le faire fonctionner? Ils ne sont pas capables. Bien, on leur vend un ingénieur, et c'est très drôle parce qu'au bout de deux ans ils en embauchent un deuxième et un troisième. Ils réalisent qu'est-ce que c'est que d'avoir de la technologie dans la compagnie, qu'est-ce que c'est que de pouvoir absorber la technologie qui vient de l'extérieur. Et c'est là qu'on change. C'est pour ça que je vous dis que c'est très différent comme portrait.

Et pourquoi je vous ai dit qu'il y avait une bonne nouvelle? C'est parce que, déjà, l'Ordre des ingénieurs, avec, entre autres, l'aide du programme PSES qui a été majoré grâce, justement, aux grandes lamentations récentes de l'Ordre des ingénieurs, a réussi à embaucher. Ils nous parlent de succès phénoménaux. On a cinq ingénieurs qui font le tour du Québec et qui vendent aux PME l'idée d'embaucher des ingénieurs. Et ce qui est très intéressant, c'est qu'ils les embauchent sans même avoir recours au programme PSES. Ils les embauchent de toute façon. Ça, c'est très significatif. Je trouve que c'est la bonne nouvelle.

Nous, à la Poly, on s'est doté aussi d'un programme de placement de nos finissants. Le programme est sous la responsabilité directe du président de l'École, à cause de son rôle. C'est un rôle de contact avec l'industrie. Mais, là encore, on voit que ça va mieux. L'année passée, on avait de la difficulté. Cette année, on a placé 86 % de nos diplômés après 11 mois. Ce n'est pas ce qu'on a déjà connu – moi, quand j'ai fini, j'avais quatre offres d'emploi – mais c'est beaucoup mieux que ça a déjà été. Là, il y a des programmes de stages qu'on est en train d'établir, etc. On se grouille. On fait des choses qu'on est obligés de faire, qu'on ne faisait pas avant. Le contexte est très différent. C'est très exigeant. Ceux qui travaillent travaillent deux fois plus qu'avant, mais ça marche et on relève le défi.

M. Brassard: Je vous remercie.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Bien, le député de Verdun va peut-être demander à quelqu'un d'autre d'intervenir parce que, malheureusement, j'ai dû intervenir en Chambre et j'arrive un peu à la dernière minute. Est-ce que vous pourriez peut-être...

M. Chagnon: Moi, j'aurais d'autres questions...

M. Gautrin: Vous auriez d'autres questions? Parce que, moi, je serai prêt à intervenir dans un instant.

M. Chagnon: ...s'il n'y a pas d'autres députés qui veulent intervenir. Je serai bref, si Jacques veut reposer d'autres questions après.

Le Président (M. Hamel): M. le ministre.

M. Chagnon: Une des particularités de votre budget, c'est d'avoir presque 50 % en budget autonome et particulièrement organisé sur le plan de subventions à la recherche ou, davantage, de partenariat à la recherche. Est-ce que des organisations comme, par exemple, Innovatech et compagnie ont été, pour vous, des catalyseurs importants? M. le député de Lac-Saint-Jean posait une question en ce qui concernait la synergie entre ce qu'on retrouvait chez vous et j'essayais de l'inviter à poser la question en ce qui concernait les brevets. Est-ce que, chez vous, on place une action tout à fait spéciale sur la façon de breveter et de protéger les brevets de vos chercheurs? Comment vous faites, vous, comme institution, pour acquérir une partie des royautés de ces brevets-là? Et, troisièmement, n'avez-vous pas cette crainte, qu'on m'a déjà soulignée dans certains autres milieux universitaires, à savoir qu'on risquerait de dépenser son capital humain et de connaissances en faisant en sorte d'avoir trop de partenariat de recherche à l'extérieur? Est-ce que ce n'est pas un risque chez vous? Merci.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. M. Bazergui.

M. Bazergui (André): C'est une préoccupation. Maintenant, je vais répondre à toutes vos questions. Nous avons toujours quelqu'un sur le conseil d'administration d'Innovatech. Le prochain, ça va être moi.

M. Chagnon: Oui, c'est ça.

M. Bazergui (André): Alors, je veux donc... Je pense que ça a été confirmé. Je ne sais pas. Bientôt, je vais siéger à ma première réunion d'Innovatech... Je m'excuse. Je pensais à Inno-Centre. Je m'excuse. Oubliez. Je suis un peu... J'ai mélangé deux affaires. À Innovatech, nous avons quelqu'un. Nous avons été parmi ceux qui ont appuyé ce projet-là très fort. D'ailleurs, nous avons Roger Blais qui fait partie du conseil d'Innovatech.

M. Chagnon: C'est ça.

M. Bazergui (André): Innovatech nous a aidés dans le cas d'une chaire, la chaire Jarislowsky en management de la technologie. On a aussi un deuxième projet qui est un projet de microscope de haute performance, parce que nous avons un centre de microscopie très, très évolué chez nous et je pense qu'on a un projet très intéressant qui pourrait sans doute être avantageusement financé par Innovatech. Nous avons aussi tiré beaucoup profit du programme SYNERGIE, comme vous le savez, on a plusieurs projets SYNERGIE. Nous avons aussi fait des projets dans le cadre des programmes SPEQ, appel public à l'épargne, mais nous étions ceux qui avaient, dès le début, exigé de nos chercheurs et de nos montages financiers la plus grande rigueur de façon à ne pas, justement, jouer le jeu des compagnies de courtage qui ont un peu abusé, d'après moi, du système.

La question de la protection des brevets. Nous nous sommes donné une politique de protection de la propriété intellectuelle technologique à l'École polytechnique, de sorte que le chercheur, chez nous, a le droit de premier refus dans le cas d'une protection par brevet. Si le chercheur ne veut pas le faire, à ce moment-là, il peut céder ses droits à l'École. Et, quand on signe des contrats avec des compagnies, on a toujours cette clause qui est celle de protéger la propriété intellectuelle de nos chercheurs. Parce que, autrement, comme vous dites, c'est très risqué parce que le chercheur, quand il développe une idée, risque d'être pris tout le reste de sa carrière à ne plus pouvoir utiliser sa propre idée s'il ne fait pas attention à la signature du contrat dans lequel il s'est engagé. Et ça, on est très vigilants là-dessus. Et ça, c'est, encore une fois, grâce à notre expérience de longues années avec l'industrie. On a développé une façon de négocier des contrats qui est, d'après moi, assez vigilante, qui protège bien cet aspect-là.

Maintenant, pour répondre à la question du financement, je l'ai déjà mentionné, il y a toujours un risque parce que, quand vous signez un contrat avec l'industrie, bien, l'industrie s'attend à de la production, et vous ne pouvez pas lui dire: Vous savez, moi, j'ai deux, trois étudiants à former, puis ça prend un peu plus de temps que prévu, etc. Ils ne comprennent pas ça, eux autres. Alors, ça, c'est le gros risque.

M. Chagnon: Merci.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Bazergui. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. D'abord, je m'excuse de mon retard, mais je devais intervenir en Chambre. Il y a une situation qui est particulière sur le campus de l'Université de Montréal, c'est que l'école de génie, en quelque sorte, a une autonomie tout à fait spéciale. Dans les autres universités, il y a quand même une interaction très forte entre certains départements de sciences et l'université pour faire des économies d'échelle, en quelque sorte, où ils partagent les mêmes départements. Je pense, par exemple, aux mathématiques pour les physiciens, aux sciences de base où les mêmes cours de sciences de base peuvent être partagés par les étudiants de différentes formations.

Est-ce que, dans une période où les ressources sont quand même rares – il faut être conscient de ça – vous envisagez de développer ce type d'interaction avec votre partenaire naturel qui est l'Université de Montréal et l'autre partenaire qui est l'École des hautes études commerciales qui va venir témoigner dans un instant et qui est quand même sur le même campus au point de vue physique, même si vous avez une certaine autonomie de gestion?

M. Bazergui (André): Oui, bien sûr. Il ne faut pas imaginer que, parce qu'on a une autonomie administrative, on ne travaille pas avec l'Université de Montréal. Au contraire, je l'ai mentionné au début, c'est un grand avantage de pouvoir être, justement, sur le campus pour permettre ce genre d'interaction. Mais je vais vous donner des exemples très concrets. En génie physique, nous avons des projets courants avec le Département de physique de l'Université de Montréal. On a même des octrois de recherche conjoints. Bon, ça, c'en est un. Deuxièmement, nous sommes en pleine négociations actuellement pour regrouper le Département de géologie de l'université avec le Département de génie géologique et de génie des mines de l'École polytechnique. Déjà, le Département de géologie est situé physiquement chez nous.

Troisièmement, avec HEC, nous avons un centre d'études sur la recherche opérationnelle, qui s'appelle le GERAD et qui est, finalement, alternativement présidé par un prof de Poly ou un prof des HEC ou un prof de McGill, etc. On a actuellement une nouvelle construction qui va se terminer bientôt, c'est le pavillon des mathématiques informatiques. Nous avons des relations très importantes, au niveau des mathématiques, avec la Société de mathématiques de Montréal, le CERCA. Nous sommes impliqués avec l'Université de Montréal et d'autres. Nous avons aussi lancé la maîtrise en aérospatiale, qui est sujette à approbation bientôt. Et là, ce n'est pas l'université, mais c'est d'autres universités.

(11 h 50)

Je suis entièrement d'accord avec vous que, dans les temps de restriction, ce n'est plus le temps de faire des travaux tout seul. Moi, je suis celui, parmi tous les doyens d'ingénierie, qui prône ça; je propose des collaborations même avec Rimouski qui lance une nouvelle faculté de génie. Nous avons les deux premières années pour Abititi-Témiscamingue; nous avons aidé Chicoutimi à lancer son programme de génie; nous travaillons en étroite collaboration avec l'ETS. On travaille, nous, à l'échelle des collaborations. J'y crois fermement, personnellement.

M. Gautrin: Mais je pense que vous êtes dans la bonne voie parce qu'il faut quand même rationaliser les dépenses le mieux qu'on peut.

M. Bazergui (André): Infrastructures urbaines, c'est un autre programme qui s'en vient. On travaille avec d'autres, puis je pense qu'on ne peut plus se permettre de donner tout seul un programme d'envergure qui soit raisonnable. Il faut travailler avec d'autres, puis c'est la façon de travailler.

M. Gautrin: Je vous félicite de cette initiative qui va, à mon sens, dans la bonne direction. Merci.

Le Président (M. Bergeron): Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, en conclusion, M. le ministre.

M. Chagnon: Alors, M. le Président, je tiens à remercier les représentants de l'École polytechnique d'avoir bien voulu procéder à ces audiences qui seront un rendez-vous annuel. Merci beaucoup.

Le Président (M. Hamel): Alors, je vous remercie. Nous suspendons quelques minutes et nous invitons les représentants de l'Université Concordia à prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 52)

(Reprise à 11 h 54)

Le Président (M. Hamel): Alors, si vous vouliez prendre place, s'il vous plaît, nous débuterions nos travaux.

Alors, nous accueillons maintenant M. Patrick Kenniff, chancelier et principal à l'Université Concordia, accompagné de M. Maurice Cohen, vice-recteur aux relations institutionnelles et aux finances. Bonjour et bienvenue. Je vous rappelle les règles parlementaires que vous connaissez bien, mais j'insiste pour vous dire que nous souhaitons toujours très vivement que votre présentation se situe dans les 20 minutes requises afin que nous puissions échanger d'une façon plus convenable et dans des délais qui nous permettent d'aller un peu plus au fond des choses dans la période qui nous convient.

M. Brassard: On ne pourra pas parler de la loi 107.

Le Président (M. Hamel): Ça, M. le député de Lac-Saint-Jean...

Une voix: Son rapport ne vient pas avant la fin de juin. Beau dommage!

Une voix: Ce n'est pas dans le mandat de la commission. Bon.

Le Président (M. Hamel): Alors, voilà. M. Kenniff, nous vous écoutons.

M. Gautrin: Mais vous êtes suffisamment habile, vous êtes capable...

Le Président (M. Hamel): Messieurs, s'il vous plaît! M. le député de Verdun!


Université Concordia

M. Kenniff (Patrick): M. le Président, je m'excuse du retard à débuter cette présentation. J'étais en train de ranger mon dossier sur la loi 107 et de sortir mon dossier de l'Université.

Le Président (M. Hamel): Ah non, non, vous n'avez pas de retard, cher monsieur. Vous êtes, au contraire, tout à fait à l'heure.

M. Kenniff (Patrick): Bon. Je vous remercie et je vais essayer d'être très bref. Je veux d'abord remercier la commission de cette invitation, en vertu de la loi 198, à venir échanger avec vous sur l'Université et sur le rapport que nous avons soumis à l'Assemblée nationale l'automne dernier.

Très simplement, je voudrais dire quelques mots, vous donner peut-être un cadre général sur l'Université Concordia. Très, très rapidement, je vais faire quelques commentaires sur la situation actuelle et céder la parole à mon collègue, Maurice Cohen, qui est vice-recteur aux relations institutionnelles et aux finances. L'Université Concordia est un jeune établissement, même plus jeune que l'Université du Québec puisque, cette année, on fête nos 20 ans. C'est le résultat de la fusion, comme vous le savez, de l'Université Sir George Williams et du Collège Loyola en 1974.

Nous comptons actuellement un peu moins de 26 000 étudiants, dont 22 500 au premier cycle et environ 3500 aux cycles supérieurs, deuxième et troisième cycles. Il est intéressant de noter que la provenance de nos étudiants, pour 86 %, vient de la région de Montréal, 5 % des autres régions du Québec, 5 % du Canada et 4 % de l'étranger. Quinze pour cent ont comme langue maternelle le français, 18 % une langue autre que l'anglais ou le français, et les autres sont de langue maternelle anglaise. Le partage de la population étudiante entre hommes et femmes, 49 et 51 %.

Nous avons, en 1992, octroyé 4160 diplômes, dont 3500 de premier cycle et 660 au niveau de la maîtrise et du doctorat. L'Université est divisée en quatre facultés: la Faculté des arts et des sciences qui compte 50 % de l'effectif étudiant, la Faculté de commerce et d'administration pour 22 % de l'effectif étudiant, la Faculté de génie et de sciences informatiques, 10 %, la Faculté des beaux-arts, 8,6 % et les étudiants libres, 10 %. Au niveau des programmes universitaires, il y en a 94 au niveau du premier cycle; ce sont des disciplines où nous octroyons des grades. Il y en a 48 au niveau du deuxième cycle et 16 au niveau du troisième cycle.

L'Université Concordia s'est toujours distinguée par son souci d'innovation dans le domaine de l'enseignement supérieur par la définition de nouveaux programmes. Par la force des choses, étant une jeune université, nous avons dû, évidemment, nous démarquer par rapport aux autres établissements qui avaient déjà des programmes établis depuis plus longtemps et, donc, pour faire accepter les nouveaux programmes, ou bien faire preuve d'innovation ou bien proposer des programmes conjoints avec d'autres établissements universitaires. À l'heure actuelle, nous avons sept programmes de formation en alternance et nous sommes la seule université montréalaise à offrir les programmes coopératifs ou les programmes de formation en alternance dans un si grand éventail de disciplines. On peut également souligner l'existence à Concordia – et c'est une formule unique – de collèges interdisciplinaires au niveau du premier cycle, tels l'institut Simone de Beauvoir, l'École des affaires publiques et communautaires et d'autres du genre.

Au niveau de la recherche, nos efforts de recherche sont axés sur nos secteurs d'excellence. Il y a 17 centres de recherche reconnus par l'Université, et aussi les travaux de recherche se font beaucoup en collaboration avec l'entreprise. Parmi les centres de recherche bien connus, il y a le Centre d'études sur le bâtiment où le génie du bâtiment est à l'honneur et nous sommes la seule université québécoise à offrir un tel programme et à faire des travaux de recherche dans ce domaine.

Au niveau du personnel, les chiffres sont indiqués pour 1992-1993 et 1993-1994 dans le rapport que nous avons soumis à l'Assemblée nationale. Évidemment, aux chiffres qui sont donnés là s'ajoutent environ 1150 chargés de cours, qui ne sont pas représentés comme des personnes, mais qui sont représentés, en fait, par le nombre de cours donnés par des chargés de cours et en termes de budget.

(12 heures)

Je souligne que l'Université, de par la formule de sa création par fusion, a deux campus: le campus Sir George Williams et le campus Loyola, mais nous sommes situés dans environ 70 adresses civiques différentes à Montréal, beaucoup d'immeubles loués, de petits immeubles. On est donc bien insérés, certains diraient bien cachés, dans le paysage urbain de Montréal. Évidemment, on se doit de remercier le gouvernement du Québec pour le fait que nous avons pu, depuis cinq ans, faire certains ajouts à notre parc immobilier, dont nous sommes très fiers: l'expansion de la bibliothèque Vanier, sur le campus Loyola – cet immeuble a été ouvert en 1989; le pavillon McConnell, au centre-ville, qui a ajouté plus de 30 000 m² nets d'espace en 1992, et le nouveau Département de psychologie, qui est situé dans l'ancienne école secondaire Loyola complètement rénovée, qui a été ouvert en 1993, et l'ouverture officielle se fera, nous l'espérons, bientôt. Évidemment, ça ne comble pas tous nos besoins en fait d'espace étant donné qu'il y a encore un manque vis-à-vis des normes du gouvernement du côté des espaces à vocation académique. Et, évidemment, nous avons des projets pour doter l'Université d'équipements sportifs et récréatifs à la mesure d'un établissement de cette taille, étant donné que ce que nous avons présentement ne serait pas digne, suivant les normes du gouvernement, d'une école secondaire de 1000 élèves au Québec.

Nos sources de financement. Nous avons fait des efforts importants pour diversifier nos sources de financement depuis quelques années. Après le succès de la campagne de souscription de 25 000 000 $ en 1988, nous avons instauré un programme de souscription annuel, et on peut être fiers aujourd'hui de dire qu'on a commencé avec un objectif très modeste de 600 000 $ et que nous avons plus que triplé ce montant à 1 800 000 $ et plus en cinq ans. La prochaine campagne de souscription est en préparation. Elle sera pas mal plus importante que la dernière, mais je peux tout simplement vous dire, à ce stade-ci, même si on n'a pas déterminé un objectif précis, qu'on espère, par là, évidemment, combler certains des besoins d'aide aux étudiants, du côté aussi du parc immobilier, du côté de la réfection de nos immeubles, du côté de la dotation de chaires, de l'équipement scientifique, d'acquisitions pour la bibliothèque et ainsi de suite, à travers cette campagne de souscription.

Le financement de l'Université. Eh bien, parce que le président m'a dit que nous avions un maximum de 20 minutes, je ne voudrais pas, ici, faire l'historique, évidemment, de ce que nous avons vécu depuis la création de Concordia. Il y a eu une période d'environ 15 ans, de 1974 à 1989, où nous avons vécu une situation chronique et structurelle de sous-financement, qui était le résultat, d'une part, de la formule historique de subventions aux universités et, d'autre part, du gel des droits de scolarité, qui a été en vigueur jusqu'en 1990. Au cours de cette période, l'Université a accumulé un déficit de 43 800 000 $. Mais, depuis 1990, nous avons d'abord soumis un plan de résorption sur 10 ans et nous avons déjà effacé plus de 8 000 000 $ de ce déficit accumulé par les surplus que nous avons générés depuis 1990.

Évidemment, nous avons eu le plaisir... Même, dans cette salle, je me souviens, en 1984, d'avoir fait une présentation à la commission de l'éducation, à l'époque, et encore, en 1986, au salon rouge, sur le sous-financement des universités et de notre établissement en particulier. Des correctifs ont été apportés, à partir de 1990-1991, au plan de l'équité horizontale, la formule gouvernementale, d'une part, et, d'autre part, évidemment, par le dégel des droits de scolarité. Je m'arrête là. Pour parler plus précisément du rapport et de certains éléments de la situation financière de l'Université, je passerai la parole à mon collègue, M. Cohen.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Kenniff. M. Cohen.

M. Cohen (Maurice): M. le Président, très rapidement, le fonds de fonctionnement sans restriction de l'Université, qui est, en pratique, les revenus et les dépenses reliés à l'enseignement, la recherche, l'administration et le soutien, s'élève à environ 192 000 000 $. Sur les 192 000 000 $ de revenus, 75,5 % proviennent de la subvention du ministère de l'Éducation; à peu près 15 %, en fait, 14,5 %, proviennent des droits de scolarité; et 10 %, d'autres revenus. Autres revenus, c'est surtout les entreprises auxiliaires, etc. Donc, une très grande dépendance de la subvention du gouvernement, une dépendance un peu moindre des droits de scolarité.

En ce qui concerne les dépenses de 191 000 000 $, 70 % sont affectées à l'enseignement et à la recherche et au soutien à l'enseignement et à la recherche; 20 % à l'administration, terrains et bâtiments; et 10 % aux entreprises auxiliaires. Donc, nous sommes à peu près à trois quarts/un quart enseignement et autres. Peut-être, un détail important: les dépenses, à 84 %, sont des salaires; 84 % de nos dépenses sont des salaires. Un tout petit peu plus de 16 % sont des dépenses non salariales.

Quelques mots sur notre déficit accumulé. Malgré le sous-financement chronique, de 1974 à 1982, l'Université Concordia n'avait pas de déficit. Une gestion très serrée, très efficace – et je peux le dire objectivement, je n'étais pas là; je parle d'autres – avait mené l'Université à maintenir des budgets équilibrés. En 1982-1983, cependant, les choses ont changé. De 1982-1983 à 1985-1986, un déficit très important a été accumulé, le déficit annuel ayant atteint, dans les deux dernières années de cette période, 10 000 000 $.

Cela est dû à deux causes principales: l'Université n'a pu passer à travers les coupures très importantes du gouvernement dans ses subventions durant la période, alors qu'elle était déjà en sous-financement; deuxièmement, une sentence arbitrale par rapport à la première convention collective avec les professeurs a forcé l'Université à dépenser très rapidement plus de 4 000 000 $ de la base, et 4 000 000 $, à l'époque, ça faisait beaucoup d'argent.

De 1986-1987 à 1989-1990, alors que l'Université continuait à avoir des déficits annuels, ces déficits diminuaient dans le temps. La situation a été reprise en main et, en 1990-1991, finalement, l'Université a réussi non seulement à équilibrer son budget, mais a commencé à rembourser le déficit accumulé. La même année, nous avons présenté un plan de résorption du déficit accumulé, qui était, dans un certain sens, notre engagement, alors que le gouvernement avait corrigé les bases de financement, à faire la résorption du déficit sur les 10 ans à venir. En fait, à la fin de cette année, nous aurons remboursé 8 500 000 $ du déficit accumulé.

En ce qui concerne la loi 198 et l'impact des règles budgétaires sur l'année courante, l'impact, comme le montre le document qu'on vous a envoyé, a été minime sur les personnels. Nous ne prévoyons, en fait, cette année, que deux personnes de moins que l'année dernière; cela, malgré une coupure nette de notre subvention de plus de 2 500 000 $. Cela est dû à une situation très conjoncturelle. Nos droits de scolarité à l'Université étaient en deçà de la moyenne québécoise et, l'an dernier, nous avons rattrapé cette moyenne, ce qui nous a amené des revenus additionnels de 2 600 000 $, ce qui, en pratique, a effacé la coupure du gouvernement. Donc, pour l'année 1993-1994, pas d'impact majeur sur nos personnels à cause des règles budgétaires.

Cependant, nous prévoyons, en ce qui concerne l'avenir, une situation beaucoup plus sombre. Même en ne considérant aucune coupure de subvention du gouvernement, rien que pour pouvoir payer le coût du système salarial à l'Université, le remboursement du déficit, selon notre engagement dans le plan de résorption, et la marge de manoeuvre dont nous avons besoin pour faire du développement et de l'innovation, nous devons réduire nos dépenses de 15 000 000 $ dans la base, annuellement, dans les années à venir.

Pour la première année de ce plan financier de cinq ans, l'année prochaine, nous devons réduire nos dépenses de 3 680 000 $. Nous avons déjà fait un scénario où ce serait le secteur administration, terrains et bâtiments, qui aurait à diminuer le plus ses dépenses – une diminution de 10 % des dépenses de base – alors que, dans l'enseignement et la recherche, la diminution des dépenses ne serait que de 5 %. Pour ce qui est de l'administration, terrains et bâtiments, nous avons entrepris une révision totale de tous nos processus. Nous allons faire du «reengineering» pour essayer d'alléger tous les processus, de façon à augmenter l'efficacité, à diminuer les coûts ou à augmenter la productivité. En ce qui concerne le secteur enseignement et recherche, nous cherchons des économies de 5 %.

(12 h 10)

Finalement, nous n'avons aucune intention de diminuer notre corps professoral régulier, mais nous allons augmenter sa tâche de travail, que ce soit par l'augmentation du nombre de cours enseignés, par la taille des groupes-cours ou par la révision des programmes. Une structure de programmes moins riche pourrait amener des économies importantes dans la transmission des connaissances.

Je pense que je vais m'arrêter là. Ça fait exactement 20 minutes, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le vice-recteur. Ça fait même un petit peu moins de 20 minutes, mais nous apprécions beaucoup cette célérité. M. le ministre, quelques mots?

M. Chagnon: Merci, M. le Président. M. Kenniff, M. Cohen, d'abord, mes premiers mots iront pour vous remercier, vous saluer et souhaiter la bienvenue à ces travaux de la commission de l'éducation qui, comme vous le savez, évidemment, se penche sur l'étude de votre rapport concernant l'application de la loi 198. C'est une des qualités de cette loi-là de pouvoir nous permettre de rencontrer le monde universitaire au moins une fois. Ça fait longtemps que le secteur universitaire n'a pas eu cette chance qu'évoquait M. Kenniff. La dernière fois, ce fut en 1986, puis, la fois d'avant, en 1984. Eh bien, là, on commence à se retrouver. On va le faire de façon annuelle, semble-t-il, pour les quatre prochaines années.

M. Gautrin: On aimera tellement ça qu'on continuera.

M. Chagnon: M. le Président, à l'ordre! Rappelez mon collègue à l'ordre! Ha, ha, ha!

Le Président (M. Hamel): C'est ce que je faisais, comme d'habitude!

M. Chagnon: M. le Président, je tiens à souligner aussi, en même temps, puisque j'en ai la possibilité... Évidemment, je connais assez bien l'institution qu'est Concordia, puisqu'elle est située... Ce sont de mes citoyens corporatifs dans le comté de Saint-Louis, et j'ai aussi étudié à l'Université Concordia, il y a plusieurs années; j'ai gradué de là aussi, entre autres.

Je remarquais – parce que c'est une trame avec laquelle nous avons travaillé depuis un mois et demi – que les taux de diplomation de l'Université Concordia sont relativement bas, avec 42 %, 43 %, 45 %. Comment vous expliquez-vous cette performance quant à la diplomation, quant à la capacité de retenir ces clientèles aussi? On connaît l'histoire de Concordia. On connaît l'histoire de l'Université, qui est, finalement, une université qui a été très près des gens les moins bien nantis, des travailleurs. C'est une université qui a aussi développé beaucoup les cours qui sont devenus des certificats, par la suite, dans d'autres universités. Mais ça n'explique quand même pas totalement le pourquoi du niveau de faiblesse relative, en tout cas, de la diplomation.

Le Président (M. Hamel): M. Kenniff.

M. Kenniff (Patrick): Je pense, M. le Président, pour répondre à la question de M. le ministre, qu'il y a plusieurs facteurs. D'abord, je suis content de voir une note de satisfaction dans vos propos sur le succès de la rétention. Dans notre énoncé de mission – vous l'avez, on a fait circuler aux membres de la commission parlementaire une copie du bottin de l'Université, où on trouve notre énoncé de mission – on parle d'un environnement accueillant pour les étudiants. On a essayé de créer, au-delà des programmes de cours, un endroit où les étudiants et les étudiantes se sentent bien, quelles que soient leurs origines linguistiques, culturelles, socio-économiques, etc.

Depuis très longtemps, on était les pionniers, au Québec et au Canada, dans les programmes d'études à temps partiel, alors qu'aucune université n'était intéressée à ce milieu. On considérait que c'étaient des études un peu à rabais. Maintenant, tout le monde fait ça, mais, à l'époque, il n'y avait que Sir George Williams, à l'origine, et même le collège Loyola. Ça, je pense que ça y est pour quelque chose dans l'attachement des étudiants. Je dirais aussi que nous avons fait des efforts particuliers vis-à-vis de certains groupes d'étudiants ayant peut-être des difficultés au niveau de l'apprentissage. Par exemple, des gens qui ont des handicaps visuels, auditifs, etc. Même, on a des équipements spécialisés qui favorisent l'apprentissage par ces gens-là. Donc, on a tout un programme pour eux et vis-à-vis des étudiants étrangers également; ils sont une petite partie de la population étudiante, aujourd'hui, mais ça a déjà été beaucoup plus important.

Mais, cela étant dit, je vous dirai qu'on reconnaît, comme les autres établissements universitaires, que la rétention est une des grandes questions de l'heure. L'accessibilité, ce n'est pas seulement d'ouvrir les portes de l'université à ceux qui ont l'intérêt et la capacité de faire des études universitaires, c'est aussi de pouvoir leur offrir quelque chose qui va les retenir jusqu'à la diplomation. Sans ça, on ne fait pas oeuvre utile, d'une part; d'autre part, les fonds de l'État ne sont pas dépensés aussi efficacement qu'ils pourraient l'être.

Donc, on reconnaît que, malgré les succès du passé, il y a un effort important à faire pour augmenter même le taux de rétention actuel. Là-dessus, il y a, évidemment, des études qui se font à l'heure actuelle. Il y a un groupe de gestionnaires académiques qui se penchent sur cette question-là, à l'heure actuelle. On a des discussions et on a un certain nombre de mesures qui sont proposées pour insertion éventuelle dans notre plan stratégique de développement, qui viseraient à faire ce que d'autres établissements font à l'heure actuelle pour augmenter le taux de rétention, particulièrement au niveau des études de maîtrise et de doctorat.

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le recteur. Je m'excuse a priori et je vous remercie, en même temps, a priori pour votre participation à cette commission, puisque je devrai quitter pour d'autres rendez-vous qui partent à peu près immédiatement. En même temps, je m'excuse auprès de la commission parce que, cet après-midi, après la période des questions, je vais évidemment être au Conseil des ministres. Vous m'excuserez, à ce moment-là, auprès des gens. Je vais essayer de revenir pour HEC et Bishop's, je pense, qu'il nous reste, cet après-midi?

Le Président (M. Hamel): C'est ça.

M. Chagnon: Alors, je vais essayer de venir faire un saut, mais ce ne sera pas aussi long que je l'aurais espéré. Merci.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Oui, dans la même ligne, si je comprends bien, M. Kenniff, vous avez l'intention, un peu à l'instar de l'Université de Montréal, la première université qui a défilé devant nous ce matin, à 10 heures, et qui a déposé une véritable politique de persévérance... Si j'interprète bien vos derniers propos, vous êtes, par conséquent, en processus pour en arriver également, chez vous, à mettre en vigueur une politique de persévérance. Vous avez raison de le signaler et je pense que c'est tout à fait juste, ce que vous dites: C'est important de rendre les études supérieures accessibles, mais c'est aussi important de mener les étudiants jusqu'à terme, c'est-à-dire jusqu'à la diplomation, en tout cas, le plus grand nombre possible.

C'est ce qui fait, d'ailleurs, qu'à cette commission, depuis le début de ses travaux, on insiste souvent, de part et d'autre, sur le taux de diplomation parce que ça nous apparaît essentiel. Ce n'est pas tout de permettre à nos jeunes d'accéder à l'université, il faut aussi qu'ils cheminent jusqu'au diplôme. Il faut les conduire jusqu'au diplôme. L'Université de Montréal, à mon avis, en tout cas, était l'une des premières universités à mettre en place, à mettre en vigueur – c'est tout récent, cependant – à la suite d'une étude approfondie de la question, une politique de persévérance. On verra ce que ça va donner, mais je comprends bien que vous êtes aussi engagés dans cette voie-là.

M. Kenniff (Patrick): Ça fait partie d'un exercice global qui est celui de l'élaboration d'un plan de développement stratégique pour l'Université, mais c'est un...

M. Brassard: C'est une des dimensions...

M. Kenniff (Patrick): ...des thèmes prioritaires de discussion, à l'heure actuelle. Je peux dire que c'est non seulement à l'intérieur de notre établissement, mais au niveau de la Conférence des recteurs. Même à l'échelle du Canada, à travers l'Association des universités et collèges du Canada, ces discussions-là, depuis quelques années, sont très intenses sur, d'abord, l'analyse des facteurs qui contribuent à l'abandon des études ou à ce que les anglophones appellent pas le «drop out», mais le «stop out», qui est, enfin, un peu l'arrêt des études pour les reprendre plus tard. Parce qu'il y a beaucoup de gens qui arrêtent des études, on pense qu'ils ont abandonné complètement, mais ils reviennent plus tard. C'est un phénomène qu'il faut analyser, qu'il faut comprendre avant d'adopter des mesures qui vont contrer cette situation-là.

Nous avons une situation plus complexe chez nous, étant donné qu'il y a plus de 40 % de notre effectif étudiant qui étudie à temps partiel. Évidemment, le régime de la progression individuelle – certains l'appellent un peu le «smorgasbord» de l'enseignement – commence au niveau collégial, avec un grand nombre d'étudiants qui travaillent à temps partiel et qui prennent plus de deux ans pour terminer leurs études collégiales. Des efforts sont faits maintenant pour essayer d'accélérer la fin des études collégiales et la passation au niveau des études universitaires. C'est plus difficile avec les étudiants à temps partiel. Il faut qu'il y ait des attraits pour les encourager. Il y a plusieurs choses, au niveau de l'aide financière, qui ont déjà été suggérées. Il y a, évidemment, l'encadrement. Nous estimons que ce que nous, comme universitaires, on peut faire peut-être de plus important, c'est d'améliorer l'encadrement et les services-conseils aux étudiants pendant qu'ils sont à l'université.

M. Brassard: Surtout dans les premiers mois, à l'entrée. En tout cas, je pense que c'est capital, cette politique. C'est vrai, cependant, que les étudiants à temps partiel, ça influe beaucoup sur le taux de diplomation, mais, justement, une politique de persévérance doit tenir compte de ce facteur-là, puis essayer de faire en sorte que la diplomation augmente chez les étudiants à temps partiel.

(12 h 20)

M. Chagnon: On l'avait vu, aussi, à l'Université du Québec à Montréal.

M. Brassard: Oui, oui. Oui, justement, le cas de l'Université du Québec est un peu similaire à Concordia. Ils ont, eux aussi, un contingent d'étudiants à temps partiel très, très élevé, ce qui, évidemment, influe à la baisse sur leur taux de diplomation. Il faut tenir compte de ce phénomène-là, puis, à ce moment-là, envisager des politiques qui vont faire en sorte que les étudiants à temps partiel persévèrent jusqu'au diplôme.

L'autre élément qui m'a frappé chez Concordia, c'est la progression des employés par rapport à la progression des effectifs étudiants, des clientèles étudiantes. Je pense que vous êtes un cas unique. Contrairement aux autres universités où ces courbes-là progressent en parallèle, on note, surtout à partir de 1989-1990, une très forte poussée d'augmentation des employés, du personnel, mais une relative stabilisation de la progression des effectifs étudiants. Comment s'explique cet écart énorme entre les... Il y avait du rattrapage à faire, je ne sais pas trop, ou quoi?

M. Kenniff (Patrick): Mon vice-recteur ne veut pas me laisser répondre sans qu'il ait le premier mot. Je vais lui laisser le premier mot.

M. Cohen (Maurice): Le nombre d'effectifs dont vous parlez, ce sont des équivalents temps complet, si je comprends bien...

M. Brassard: Oui.

M. Cohen (Maurice): ...calculés selon une formule qui a peut-être changé, je ne suis pas certain. Mais ce que nous avons fait en 1989, comme vous avez parlé de 1989, nous avons fait l'équité salariale à Concordia, alors que toutes les autres universités, sauf HEC, ne l'ont pas encore faite. Ça a augmenté les masses salariales de ces employés et ça a sans doute augmenté le nombre d'équivalents temps complet sans augmenter le nombre de personnes. Je ne vous garantis pas que c'est l'explication...

M. Brassard: Oui.

M. Cohen (Maurice): ... mais c'est une explication possible, parce que nous n'avons pas, consciemment, ouvert beaucoup de nouveaux postes depuis 1989.

M. Brassard: Oui, sauf que, là, il faudra vérifier. Est-ce que c'est en nombre de personnes ou si c'est en masse budgétaire?

M. Cohen (Maurice): Si je comprends bien, ça sort des rapports financiers annuels. Ce sont des équivalents temps complet, calculés selon une certaine formule.

M. Brassard: Ah bon! On me dit que c'est la masse salariale.

M. Cohen (Maurice): Il y a ce phénomène. Quand on a fait notre exercice d'équité salariale, ça a aussi changé beaucoup d'employés de catégorie. Alors, une catégorie a augmenté beaucoup simplement par transfert de personnes selon le nouveau système d'évaluation de postes.

M. Brassard: D'accord.

M. Cohen (Maurice): Comme je vous dis, ce n'est pas une garantie...

M. Brassard: Mais, enfin, ça peut être une explication rationnelle.

M. Cohen (Maurice): ...mais c'est une explication possible, rationnelle.

Le Président (M. Hamel): M. Kenniff, oui.

M. Kenniff (Patrick): Il y a peut-être, si vous me le permettez, M. le Président, d'autres éléments aussi à donner à titre d'indication. C'est vrai que le nombre de personnes a pu augmenter dans certains secteurs ciblés. C'était, évidemment, une tentative de rattrapage. J'ai parlé tout à l'heure de 15 ans de sous-financement chronique et structurel de l'Université. Je ne fais de reproche à personne. C'était une formule historique qui remontait aux années soixante; selon le financement traditionnel, l'Université Sir George Williams, où étaient surtout des étudiants à temps partiel, n'était pas financée au plein tarif, à l'époque, et le collège Loyola était financé au niveau collégial et non au niveau universitaire. Tout ça a été figé dans la formule historique et ça n'a jamais été corrigé, sauf des petits ajustements en cours de route.

Donc, au moment où le gouvernement, par l'introduction de l'équité horizontale dans la formule de financement et le dégel des frais de scolarité, nous a donné quand même des ressources un peu plus importantes, on a corrigé certaines situations qui étaient vraiment criantes, avec lesquelles on vivait depuis des années. C'était au niveau, dans certains cas, du soutien à l'enseignement et à la recherche; c'était au niveau de la structuration d'une équipe fonctionnelle et efficace. Nous en sommes très fiers aujourd'hui, mais il y a plus de personnes qu'il n'y en avait il y a cinq ans au niveau du fonds de développement de l'université. Si nous sommes capables, aujourd'hui, d'aller chercher de l'argent auprès du secteur privé et de nos diplômés, c'est parce que nous avons une petite équipe, quand même, à comparer à d'autres universités, mais une petite équipe très efficace et qui est plus importante qu'elle ne l'était en 1988.

Mais, tout ça étant dit, nos chiffres nous indiquent, par exemple, en 1992-1993, que nous avions, au niveau du personnel de direction et de gestion, six équivalents temps complet par 1000 étudiants équivalents temps complet, alors que la moyenne pour le réseau était de 11. Au niveau, par exemple, du personnel de gestion, nos chiffres, par rapport au nombre d'étudiants, c'est juste un peu plus que la moitié de la moyenne pour le réseau. Je pense que nous sommes encore une organisation très dégraissée.

M. Brassard: Oui.

M. Kenniff (Patrick): Je vous donne quelques éléments additionnels à ceux donnés par M. Cohen.

M. Cohen (Maurice): Il y a une autre chose. C'est que, pour les profs, nous avons consciemment augmenté le nombre de postes depuis cette époque. Quand la correction du financement de base a eu lieu, nous avons augmenté le nombre de profs entre 60 et 100 depuis quelques années. Ça, c'était conscient.

M. Brassard: Bien. Un autre élément qui me paraît intéressant, chez vous, à Concordia, c'est la formule de l'enseignement coopératif que vous avez instaurée, qui n'existe pas partout, qui existe à Sherbrooke, je pense, entre autres. Est-ce que cette méthode pédagogique prend la même forme chez vous qu'à Sherbrooke? Est-ce qu'elle est généralisée dans tous vos programmes? Quelle est l'importance de cette formule d'enseignement coopératif? C'est en génie seulement ou enfin...

M. Kenniff (Patrick): D'abord, ce n'est pas généralisé dans tous nos programmes; à l'intérieur de chaque programme où l'enseignement coopératif existe, ce n'est pas généralisé à tous les étudiants. C'est sur une base sélective et ce sont d'abord les étudiants et les étudiantes qui veulent le programme coopératif. Évidemment, ils sont choisis sur la base de la qualité de leur dossier.

Nous avons commencé, il y a plus d'une dizaine d'années, avec trois programmes. Il y avait chimie, il y avait sciences économiques et il y avait actuariat. Pendant longtemps, c'étaient les trois programmes où nous avions une formule d'enseignement coopératif. Plutôt que d'offrir ça à tous les étudiants, nous avons choisi une formule où le nombre de places disponibles en enseignement coopératif est fonction du nombre de places qu'on peut trouver dans l'entreprise pour ces gens-là. Petit à petit, ça s'est généralisé. Ça s'est généralisé à peu près à tous les départements de génie, à l'heure actuelle, et c'est rendu aussi au département de physique. C'est rendu aussi en sciences comptables. C'est ça, je pense. Il y a beaucoup d'intérêt dans d'autres départements pour adopter la formule. Alors, on procède pas à pas dans ce dossier-là, parce que, d'abord, c'est extrêmement...

M. Brassard: Combien d'étudiants sont impliqués?

M. Kenniff (Patrick): Combien d'étudiants, au total?

M. Brassard: Oui.

M. Kenniff (Patrick): Je n'ai pas le chiffre précis avec moi aujourd'hui.

M. Brassard: Approximativement.

M. Cohen (Maurice): C'est moins de 1000 étudiants.

M. Kenniff (Patrick): C'est moins de 1000 étudiants.

M. Brassard: Moins de 1000.

M. Kenniff (Patrick): J'allais dire quelques centaines.

M. Cohen (Maurice): Quelques centaines.

M. Kenniff (Patrick): Ça demande, d'abord, du temps de personnel pour trouver les stages; également, c'est plus coûteux comme programme parce qu'il y a un encadrement personnel qui doit être donné non seulement pendant que les étudiants sont là à l'Université, mais également pendant les trimestres où ils sont à l'extérieur. Les relations avec les entreprises, la correction, l'annotation, si on veut, de leur stage, c'est très onéreux. Nous n'avions pas les ressources pour généraliser ça à l'ensemble de l'Université.

M. Brassard: Mais le taux de succès doit être très élevé.

M. Cohen (Maurice): Très élevé.

M. Kenniff (Patrick): Très élevé. Par exemple, dans le domaine de l'actuariat, c'est le seul programme coopératif en actuariat, au Québec. C'est sûr que ça attire beaucoup d'étudiants et de très bons étudiants. C'est un programme qui est très couru.

M. Cohen (Maurice): Le taux de succès est de 100 %.

M. Brassard: Ah oui, j'imagine.

M. Cohen (Maurice): Nous garantissons, en fait, l'emploi. Les programmes sont contingentés. Nous ne laissons entrer un étudiant que si on peut garantir à cet étudiant un emploi valable. Certaines universités en Amérique du Nord ont des programmes ouverts et créent des emplois, même s'ils ne sont pas nécessairement entièrement valables pour la formation. Nous ne faisons pas ça.

(12 h 30)

M. Brassard: Avez-vous des problèmes pour sélectionner, choisir des entreprises qui accueillent les étudiants?

M. Cohen (Maurice): C'est un travail ardu, mais, une fois qu'une entreprise embarque, on retrouve la même entreprise chaque année, parce que, en fait, nous garantissons aussi la qualité de l'étudiant étant donné qu'on contingente le programme. Mais c'est dur ces jours-ci. La situation économique n'aide pas beaucoup.

M. Brassard: À cause de la situation économique?

M. Kenniff (Patrick): Un dernier mot, M. le Président...

Le Président (M. Hamel): Oui, M. Kenniff.

M. Kenniff (Patrick): ...sur les programmes coopératifs. On pourrait dire que c'est aussi dans nos projets d'avenir d'essayer de généraliser, c'est-à-dire d'étendre les programmes coopératifs. Nous croyons que c'est une excellente formule. Je note, dans un document récent, document qui va être discuté à la réunion annuelle du Forum entreprises-universités, qui est un organisme pancanadien de recteurs d'universités et de chefs d'entreprises, qu'il y a une proposition dans ce document-là, je l'ai lu hier, d'essayer de généraliser le plus possible la formule de l'enseignement coopératif dans les universités. Je pense qu'on va dans la bonne voie. C'est une voie d'avenir que les étudiants apprécient beaucoup, parce que c'est très relié au vrai monde, comme on dit.

M. Brassard: M. Kenniff, est-ce que votre travail de chancelier et principal de l'Université Concordia va vous empêcher de remettre votre rapport à temps sur la loi 107?

M. Kenniff (Patrick): D'abord, je ne suis pas le chancelier; je suis le vice-chancelier. Ce qui veut dire que, ça, c'est une sinécure. Je remplace le chancelier quand il n'est pas là, mais c'est une fonction cérémoniale. À titre de recteur, non, ce n'est pas ça qui pourrait empêcher le dépôt du rapport.

M. Brassard: Il va être déposé à temps?

M. Kenniff (Patrick): Je l'espère. J'y compte bien.

M. Brassard: J'aurais juste une dernière question, M. le Président...

Le Président (M. Hamel): Certainement, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: ...sur votre déficit accumulé qui est élevé. Évidemment, c'est un des plus élevés dans tout le réseau des universités québécoises. J'ai bien compris, M. Cohen, que vous avez un plan de cinq ans pour, enfin, essayer de le réduire progressivement.

M. Cohen (Maurice): Progressivement.

M. Brassard: Mais est-ce que ce plan-là, parce qu'il m'apparaît assez rigoureux, là, en termes de réduction de dépenses dans certains secteurs, ça ne risque pas de compromettre votre mission éducative?

M. Cohen (Maurice): Nous avons entrepris une grosse démarche de consultation à l'intérieur de l'Université sur comment faire des économies sans que ça affecte les services aux étudiants et je pense qu'il y a maintenant une prise de conscience qu'en fait on peut faire des choses pour augmenter l'efficacité. Il est évident que, du point de vue de l'étudiant, être dans une classe de 10 étudiants avec un prof, c'est beaucoup plus valorisant, c'est beaucoup plus payant qu'être dans une classe de 200. Mais, entre 40 et 50, il y a peut-être moyen de faire en sorte que les services soient les mêmes. C'est de maximiser, en fait, les économies sans doubler la taille des groupes-cours, mais peut-être d'essayer de les augmenter de 10 %, en fournissant peut-être de l'aide aux profs, avec des assistants ou des correcteurs, ce qui fournirait aussi de l'emploi aux étudiants de deuxième et de troisième cycle: toutes sortes de façons de compenser pour s'assurer, en fait, que l'étudiant recevra le même bénéfice.

M. Brassard: La même qualité de services?

M. Cohen (Maurice): La même qualité. Il est évident qu'en fin de compte il y a quelque chose qui doit céder quand on fait des économies. Mais nous pensons pouvoir le faire sans dommage.

Le Président (M. Hamel): Merci. Je reconnais maintenant M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: Merci, M. le Président. I would like to say, first, by the way, that I remember very well when what might be called the shotgun wedding of Loyola and Sir George Williams took place. At that time, not only was the new institution under-financed, but it looked for a while as if it were going to be the most over-administered university in Canada. And I see that is no longer the case and that its administrative levels in numbers and cadres and so on correspond closely to the other universities, something that I suspect may have taken a certain amount of pain.

I would like to ask a couple of questions more about the future of Concordia, both in terms of financing and academics, that perhaps have not arisen so far. One thing that strikes me about the situation of all the universities in Montréal now, l'Université de Montréal, l'Université du Québec, McGill, Concordia, is that as recently, certainly, as the 1960s and 1970s each institution had what you might call a certain natural clientele. Everyone understood by and large who went to McGill University, although there were exceptions; everyone understood by and large who went to Sir George Williams University, although there were exceptions; everyone understood by and large who went to Loyola College, although there were exceptions, and who went to the University of Montréal. Language, ethnicity, religion and so forth virtually defined student bodies.

We now see evidence every week, in the press and so on, about the changing composition of the city of Montréal. We see that we have a declining population both of what we might call traditional Francophones and traditional Anglophones and an increasing population – I do not like the word very much, but I will use it for simplicity – of allophones. I would, therefore, guess that in all programmes the situation may exist more, that all of the Montréal universities might be competing with each other in a more direct sense than once was the case. In other words, where at one time you could assume, let us say, that an Irish Catholic boy was going to wind up at Loyola, out in the west end of Montréal, and, you know, a downtown working-class guy looking for an evening university class would wind up at Sir George and a Westmount WASP who had done well in Westmount High or something would wind up usually at McGill or something, now, all of those individuals, in fact in many cases bilingual so that they could also choose the Université de Montréal or McGill or something like that, could now say: «I have to look at each university and consider my reasons.»

So, I would like to know things like, for instance, how tuition compares between the different institutions, whether that is a factor; secondly, whether the Montréal universities – what I am talking about I do not think would have so much effect on places like Bishop's or Sherbrooke – have given any thought to specialization of function on their strong areas or something of that kind – I know there is some already, but I mean more so – and, finally, whether this may represent problems of financing, either for Concordia or the other universities, in terms of the formula that is used from the Government to provide funds. I know that is a bit of a mouthful, but...

M. Kenniff (Patrick): Ouf! M. le Président, je...

Le Président (M. Hamel): Oui. M. Kenniff, quand vous aurez répondu à tout ça, je pense que le temps va être écoulé pour l'Opposition.

M. Kenniff (Patrick): Non. Je vais essayer de faire vite...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Kenniff (Patrick): ...parce qu'il y a quand même possibilité de regrouper un certain nombre de ces questions du député de Jacques-Cartier, qui sont bien posées. Il est vrai qu'à une certaine époque il y avait une clientèle peut-être naturelle pour chaque établissement. C'est moins vrai. Il y a beaucoup plus de zones grises. L'identité de l'Université Concordia comme étant accessible aux communautés culturelles de Montréal, étant pour les étudiants à temps partiel, étant peut-être l'établissement qui avait des normes d'admission plus flexibles pour les gens qui avaient quitté les études au niveau secondaire et qui voulaient revenir, les étudiants adultes et tout, ça, ça s'est estompé. D'un autre côté, McGill, Montréal, UQAM acceptent des étudiants à temps partiel et ont diversifié leurs programmes, également.

Je pense que ça veut dire que, de fait, nous sommes beaucoup plus en concurrence sur bien des points, maintenant. Ça veut dire que les étudiants viennent chez nous, aujourd'hui, autant pour l'environnement qui découle de la réputation de l'établissement comme un établissement accueillant, mais aussi pour des programmes. Je regarde des programmes telle la Faculté des beaux-arts; on est un peu en concurrence avec l'UQAM, mais pas tellement avec McGill et l'Université de Montréal. Il y a beaucoup d'étudiants qui viennent chez nous à cause de la qualité du programme et de son orientation, je dirais, plus nord-américaine peut-être que d'autres. Le Département des communications, les gens viennent là pour ce programme-là; il y a à peu près 10 demandes pour chaque place. La Faculté d'administration, le programme de MBA, le Département de psychologie, et j'en passe, où les gens viennent pour des programmes. Il y a les collèges interdisciplinaires dont j'ai parlé. Il y a beaucoup d'étudiants qui viennent au collège de «liberal arts», qui sont acceptés à McGill et qui choisissent de venir chez nous parce que ce milieu-là est un milieu qui leur est accueillant et favorable.

(12 h 40)

Donc, la concurrence est plus vive. Mais je pense que les universités montréalaises ont adopté une attitude, une approche de saine concurrence au niveau des études de premier cycle, parce qu'il y a quand même plus de 120 000 étudiants au premier cycle, je pense, sur l'île de Montréal. Mais, au niveau des programmes de deuxième et troisième cycle, il y a une tradition qui est très forte et qui, je pense, est un modèle pour le Québec, pour l'ensemble du Canada et même dans le contexte nord-américain de coopération au niveau des études de maîtrise et de doctorat.

Je pense que c'est à Montréal qu'il y a eu le premier programme conjoint au niveau du doctorat; c'était le doctorat en administration en 1978 et, depuis ce temps-là... Ça, ça comprend les quatre établissements montréalais, mais, dans le cas de l'administration, c'est les HEC, et ces programmes-là sont de plus en plus nombreux. Je regarde le doctorat conjoint en communications, la maîtrise conjointe Poly-McGill-Concordia en génie aérospatial. Je regarde le programme en voie d'approbation, ce doctorat conjoint en histoire de l'art. Je regarde nous avec l'UQAM en sciences religieuses, etc. Il y en a un autre en nursing avec Montréal et McGill. Les programmes se multiplient. On croit que...

M. Gautrin: L'Institut des sciences mathématiques.

M. Kenniff (Patrick): Pardon?

M. Gautrin: L'Institut des sciences mathématiques.

M. Kenniff (Patrick): Bien, ça, c'est au niveau de la recherche plus qu'au niveau de... Ils veulent faire un doctorat conjoint. De toute façon, il y a une volonté, là, de mettre en commun nos ressources parce qu'on a des programmes, à ce moment-là, beaucoup plus efficaces avec des ressources plus importantes et l'encadrement des étudiants se fait mieux. Donc, au niveau, aussi, des centres de recherche, comme on l'a mentionné, il y a des centres de recherche qui comprennent toutes les universités montréalaises avec l'entreprise. Le Centre de recherche informatique de Montréal en est un bel exemple.

Nous collaborons même au niveau de la formation de chaires conjointes. On a annoncé tout récemment, avec l'UQAM et Concordia, la création d'une chaire en études interculturelles, qui aide justement à étudier les phénomènes de relations interculturelles surtout dans le contexte montréalais, ce qui est très important. Et qu'on ait une université francophone et une université anglophone qui collaborent dans un projet comme ça, je pense que c'est très intéressant. Bon. Alors, moi, je résume ça toujours en disant: Une saine concurrence au niveau du premier cycle, une bonne collaboration au niveau des deuxième et troisième cycles.

Vous avez posé la question des droits de scolarité. Les droits de scolarité sont, à quelques sous près, essentiellement les mêmes dans les universités étant donné la formule qui permet au gouvernement d'en déterminer le niveau d'augmentation annuel, avec un corridor de tolérance vis-à-vis le niveau des droits. Donc, on parle essentiellement des mêmes droits d'une université à l'autre, je veux dire à quelques dollars près.

Est-ce qu'on s'en va vers une formule de spécialisation? Je ne crois pas, personnellement, à la spécialisation des universités par décret; je crois qu'il y a, évidemment, des voies naturelles à suivre. On sait très bien que l'Université McGill n'est pas intéressée à créer une faculté des beaux-arts. Nous, on est intéressés à développer ce secteur-là et ainsi de suite. On peut donner d'autres exemples. Mais je pense que c'est au niveau de cette collaboration dont je vais parler tout à l'heure qu'on va trouver des formules intéressantes pour l'avenir. On va créer d'excellents programmes académiques, mais, par la bande, on va solutionner des problèmes de financement.

Le Président (M. Hamel): Merci. Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Brièvement parce que beaucoup de points ont été touchés. Je voudrais avoir votre opinion, M. le recteur, sur une formule qui a été mise de l'avant par le recteur de l'Université de Montréal dans le témoignage qu'il a fait ce matin.

M. Kenniff (Patrick): J'aurais dû être là.

M. Gautrin: Pardon?

M. Kenniff (Patrick): J'aurais dû être là.

M. Gautrin: Non, non. Je ne veux pas que... Je vais vous la résumer en peu de mots, si vous voulez. Il s'est plaint, comme vous, du sous-financement des universités. Je pense qu'il n'y a pas une université qui a trouvé qu'elle a été financée correctement. Et, particulièrement dans le partage de l'enveloppe, il a trouvé qu'on ne tenait pas assez compte des études de maîtrise et de doctorat, et a suggéré qu'on augmente le nombre de crédits dans la formule de financement, c'est-à-dire, je crois, qu'on double le nombre de crédits pour la maîtrise et qu'on triple, je crois, le nombre de crédits pour le doctorat. Mais, le triple, j'en suis un peu moins sûr; je crois que c'était cela quant à la formule de financement. Il est clair que, dès qu'on change une formule de financement, on est en train de repartager à la manière dont les gens se partageaient un gâteau.

Quelle est votre réaction aux changements éventuels de formule de financement? Je comprends que vous êtes tous d'accord en disant: Les crédits alloués dans l'enveloppe globale ne sont pas suffisants. Ça, on le comprend. Une fois que l'enveloppe est fixée – et ça, c'est fixé en fonction des paramètres que le gouvernement doit respecter, les formules de partage – comment réagissez-vous à une formule de partage qui tiendrait plus compte des études de maîtrise et de doctorat?

M. Kenniff (Patrick): Je commencerais par dire qu'on vit avec un engagement que le gouvernement a pris, qui n'a pas d'échéance, mais un engagement qui dit que nous allons essayer de rattraper, dans le financement des universités, la moyenne canadienne. Ça remonte à 1989. On s'en éloigne un peu par les temps qui courent, mais ça, c'est une difficulté avec laquelle on vit, puis on partage les problèmes du sous-financement de l'État, si on veut, à l'heure actuelle.

M. Gautrin: Absolument, oui.

M. Kenniff (Patrick): Il y a une constante dans les positions prises par les recteurs d'université. Moi, ça fait 10 ans que je suis là. Alors, de mon expérience, il y a une constante qui a marqué nos discussions sur le financement à travers les années quatre-vingt et les années quatre-vingt-dix, et c'est que personne n'était intéressé à une formule qui redistribuait l'enveloppe des subventions du gouvernement en faveur de certains et en défaveur d'autres.

Donc, lorsqu'on parlait d'établir l'équité horizontale de la formule de financement au cours des années quatre-vingt, toujours dans la position des recteurs, ça dépendait de l'ajout d'argent neuf. Ça, c'est un phénomène. Et c'est clair que modifier cette formule qui a été l'objet d'un consensus en 1988-1989 et qui donnait un certain poids aux étudiants de maîtrise, aux étudiants de doctorat, aurait un impact en faveur de certains établissements et créerait des ennuis pour d'autres établissements.

Donc, de prime abord, si quelqu'un me disait: Voudriez-vous sacrifier 5 000 000 $ de financement à l'Université Concordia pour les donner à l'Université de Montréal? je dirais: Je voudrais voir les raisons qui justifient cela dans le concret. Mais ce n'est pas le cas. Écoutez, le recteur de l'Université de Montréal, mon collègue René Simard, a déposé un document qui va faire l'objet de discussions au comité exécutif de la Conférence des recteurs. Personnellement, si on peut démontrer clairement, à la lumière de ces discussions-là, que c'est une formule intéressante pour toutes les universités, on va l'examiner sous cet angle-là et l'échange va être intéressant.

De prime abord, j'ai des inquiétudes, voyant venir au cours des années à venir peut-être des efforts importants de compression dans les dépenses de l'État de façon générale. L'ajout de 10 000 000 $, 12 000 000 $, 15 000 000 $ de financement pour favoriser davantage les études de maîtrise et de doctorat dans le système pourrait très vite être perdu sur d'autres plans. Moi, pour ma part, dans une université où il y a quand même 13 % d'étudiants de maîtrise et de doctorat, ce n'est pas aussi important qu'à l'Université de Montréal, j'ai quelques inquiétudes sur cette formule-là. Je le dis en sachant très bien que, dans notre plan stratégique de développement, on compte augmenter le poids des étudiants de maîtrise et de doctorat dans l'ensemble de la population étudiante, on veut passer peut-être de 13 % à tout près de 20 %. Mais, même avec cet objectif en tête, j'ai des inquiétudes vis-à-vis certains aspects de cette formule-là. On va l'examiner. On va en discuter. On va essayer d'arriver à un consensus.

Le Président (M. Hamel): Oui, M. Cohen.

M. Cohen (Maurice): Mais ils n'ont pas à aller à la Conférence des recteurs pour faire face à M. Simard. Je peux me permettre quelque chose d'un peu plus net que mon recteur.

M. Gautrin: C'est le vice-recteur qui décide.

M. Cohen (Maurice): Un des derniers avis du Conseil des universités, avant sa disparition, montrait, je pense, qu'alors que nous avions 75 % de nos étudiants au premier cycle et 25 % aux deuxième et troisième cycles, l'université «dévoue» 25 % de ses ressources au premier cycle et 75 % aux deuxième et troisième cycles, si on compte toute la recherche. La recherche à l'université, c'est le prérequis pour faire la formation des chercheurs. Donc, si toutes les dépenses, incluant le temps des profs à la recherche, sont attribuées à la formation de deuxième et de troisième cycle, on peut dire que 75 % de toutes nos ressources vont aux études de deuxième et de troisième cycle, et 25 % au premier. Est-ce bon, est-ce mauvais et, s'il y a correction à faire, dans quel sens? Je pense que la proposition de M. Simard ferait une correction peut-être pas dans le bon sens.

Le Président (M. Hamel): Ha, ha ha! Merci, M. Cohen.

(12 h 50)

M. Gautrin: J'ai une autre question à vous poser. Alors, évidemment, je comprends votre intervention, M. Cohen, en réponse au député de Lac-Saint-Jean lorsqu'il vous demandait une question sur les variations de personnel. Et, évidemment, les calculs qu'on a peut-être ici sont en personnel équivalent temps complet. Donc, c'est en fonction d'une masse salariale. Mais je remarque quand même que, entre 1993 et 1994, vous, vous n'avez pas augmenté le nombre d'enseignants et de chercheurs. C'est resté à 870 dans les documents que vous nous avez donnés...

M. Cohen (Maurice): Oui, pour l'année prochaine, c'est le statu quo.

M. Gautrin: ...ce qui, malgré tout, est une... Vous êtes la seule université... J'imagine que vous avez dû recevoir aussi les documents comparatifs de tout le monde, là, qu'on a reçus. Chaque université a fait le même exercice que vous avez fait. Alors, bien des universités ont fait l'effort d'augmenter le nombre d'enseignants, tout en diminuant le personnel, disons, cadre, le personnel de bureau, de manière à avoir un meilleur rapport entre personnel strictement de première ligne, c'est-à-dire enseignant, par rapport aux administrateurs.

C'est-à-dire que la réaction qu'on a vue dans les autres universités a été de maintenir, quand même, l'augmentation des enseignants, mais de diminuer les postes de cadres, techniques, de bureau, métiers et ouvriers de manière à satisfaire, bien sûr, les compressions budgétaires, tout en maintenant une croissance légère – parce que, dans les autres universités, elle est légère – du personnel enseignant. Vous vous singularisez par rapport aux autres. Est-ce que c'est une situation tout à fait due à une conjoncture exceptionnelle ou au fait que vous portez le poids du saut dont faisait part notre collègue de Lac-Saint-Jean? C'est-à-dire que, comme vous avez eu une forte croissance en 1991, ça justifie que, maintenant, vous êtes sur une station de palier, etc.

M. Cohen (Maurice): Je pense que c'est une situation conjoncturelle au passage de l'année 1993 à l'année 1994, parce que, dans les années précédant 1993, nous avons augmenté le nombre de profs de façon significative. Pour l'année courante, toutes les autres universités ont eu des augmentations importantes de clientèle. Nous n'en avons pas eu. Et ça n'aurait pas nécessairement été le bon message à envoyer, d'augmenter le nombre de postes alors que le nombre d'étudiants n'a pas augmenté.

M. Gautrin: Très bien. Mais, enfin, c'est quelque chose que vous comprenez que, année après année, on va quand même suivre pour le regarder.

M. Cohen (Maurice): Vous allez suivre...

M. Gautrin: Et il est clair que ce n'est pas sur une microannée qu'on peut, évidemment, avoir une idée d'une tendance et que, si on regarde sur trois ou quatre ans, vous avez une forte croissance en 1989-1990. M. le Président, ça termine les questions que j'avais envers eux.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Verdun. Le mot de la fin, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: C'est pour vous remercier et vous dire que votre approche, M. Cohen, quant aux deuxième et troisième cycles, ma foi, c'est à prendre en compte. Parce que, au fond, c'est vrai, tout le financement de la recherche dans une institution universitaire, ça sert, en très grande partie, à la formation des étudiants en maîtrise, puis en doctorat. Donc, d'une certain façon, quand on fait les comparaisons, ça doit être pris en compte. Je vous avoue que c'est une vue originale des choses qui est éclairante.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. Kenniff, M. Cohen, au nom de M. Chagnon, le ministre, qui ne peut pas être là, au nom des députés de ma formation politique, je tiens à vous remercier, à vous féliciter, parce que vous avez une université qui est éminemment dynamique, ouverte et qui répond aux défis qu'on vous a donnés. Soyez assurés qu'on vous suit avec à la fois un oeil intéressé de savoir ce que vous faites. Mes félicitations pour le travail que vous avez fait et je suis sûr que mes collègues et le ministre s'associent à ces félicitations. Merci.

Le Président (M. Hamel): Merci. Alors, merci, messieurs. Tel que convenu, la commission suspend ses travaux et elle les reprendra après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

(Reprise à 16 h 25)

Le Président (M. Hamel): Alors, je demanderais, s'il vous plaît, aux représentants de l'École des hautes études commerciales de prendre place. Nous allons débuter. Nous avons déjà un certain temps de retard. Alors, tel que convenu, la commission reprend ses travaux et je souhaite la bienvenue à M. Serge Saucier, président du conseil d'administration; à M. Jean-Denis Duquette, secrétaire général; à M. Adrien Lacombe, directeur de l'administration et des finances; à M. Fernand Amesse, directeur des programmes. Bonjour.

Alors, vous connaissez sensiblement nos règles parlementaires. La durée de l'audition est de 60 minutes. On vous demande, s'il vous plaît, de faire un exposé à l'intérieur de 20 minutes pour permettre ensuite à chaque groupe parlementaire d'échanger avec vous durant les 40 autres minutes qui suivent. Alors, à vous la parole.


École des hautes études commerciales (HEC)

M. Saucier (Serge): Merci beaucoup. Au nom des collègues de l'École des hautes études, je voudrais, d'abord, vous remercier de nous accorder cette opportunité de venir expliquer un petit peu ce qu'est l'École des hautes études, sa mission, et de rendre compte, dans une certaine mesure, de l'utilisation des fonds publics que vous nous allouez. Donc, pour cela, on tient à vous remercier.

D'abord, peut-être quelques chiffres pour situer ce qu'est l'École des hautes études. C'est 11 400 étudiants; le nombre total de personnes qui rentrent dans une année à l'École et qui en sortent, c'est 11 400. C'est 17 % de plus d'étudiants que ce que nous avions en 1986. C'est 5000 étudiants à temps complet; vous savez ce que c'est, la formule pour convertir les étudiants à temps partiel en étudiants à temps complet. C'est un personnel, au total, de 568 personnes, dont 170 professeurs et 398 personnels administratifs et de soutien.

C'est également une école qui, je pense, dispense ses cours de façon efficace. Une mesure pour cela: il y a 42 élèves par classe; c'est plus que ce que nous retrouvons généralement dans le milieu universitaire – l'UQAM, pour donner un chiffre, a 35 étudiants par classe, on en a 42 – pour les étudiants de premier cycle. Les étudiants de deuxième cycle, là, c'est pareil: on en a 23 en moyenne par classe; une comparaison, l'Université de Montréal en a 11. Alors vous voyez que nous tentons d'être le plus efficaces possible.

L'encadrement – c'est le nombre de professeurs à plein temps pour s'occuper de nos élèves – est assez faible. En toute honnêteté, c'est 45 %. Alors, ça veut donc dire que 55 % des élèves sont encadrés par des professeurs qui ne sont pas de carrière, par des chargés de cours. Contrainte budgétaire oblige, nous devons trouver les moyens pour opérer à l'intérieur des enveloppes qui nous sont allouées.

C'est également une école qui connaît une croissance importante, particulièrement au deuxième cycle. Il faut quand même indiquer qu'au premier cycle il y a une certaine stabilisation: la croissance a diminué, a cessé, à toutes fins pratiques, elle est plus faible. Mais l'École des hautes études continue de croître d'une façon passablement importante, beaucoup plus importante que partout ailleurs au Québec, en termes d'étudiants au deuxième cycle. C'est également une école qui accueille beaucoup d'étudiants étrangers. Il y a 900 inscriptions – c'est 9 % à peu près de toutes les inscriptions de l'École – d'étudiants qui viennent de 54 pays différents.

C'est un budget annuel de 51 000 000 $. Pour vous situer l'état de santé de notre établissement, on ne peut pas dire que nous sommes pétants de santé; il y a un déficit accumulé de l'ordre de 4 000 000 $, un petit peu moins, qu'on tente de régler au cours des années. Ce déficit provient, en fait, d'un surplus et d'un déficit. Il y a un déficit des activités subventionnées, de l'ordre de 10 000 000 $. Mais l'École, avec le temps, s'est débrouillée dans d'autres activités qui n'ont rien à voir avec les subventions et a accumulé 6 000 000 $ de surplus par ses activités commerciales. Évidemment, on s'attendrait d'une école de commerce qu'elle soit capable de faire du commerce et c'est ce qu'on réussit à faire. Le net des deux donne un déficit de 4 000 000 $.

Nous prenons des mesures pour réduire ce déficit. À tous les ans, il y a des opérations de contraction. On tente, évidemment, de faire un surplus budgétaire. Cette année, ce sera autour de 300 000 $. Ce n'est pas beaucoup, 300 000 $, pour réduire un déficit de 4 000 000 $. On voit qu'à ce rythme-là ça va prendre 11, 12, 13 ans avant d'effacer complètement le déficit accumulé. Et pourquoi le surplus diminue d'année en année? On le sait bien, les enveloppes qui nous sont allouées, elles aussi, subissent le couperet du gouvernement et on comprend dans quelle situation vous êtes également.

(16 h 30)

Un chiffre à retenir, le coût par étudiant est 7800 $ et, lorsque vous comparez ce que notre école investit par étudiant et que vous regardez ce qui se fait dans des universités concurrentes, ailleurs au Canada et ailleurs dans le monde, on se rend compte que le montant qu'on investit – dans le fond, c'est ça, l'enseignement universitaire qu'on dispense – est faible: 7800 $, ce n'est pas beaucoup d'argent. Les contractions budgétaires vont sans doute nous amener à moins de 7800 $ avec le temps, et on se dit: C'est le montant que la société investit sur un diplômé de premier cycle et de deuxième cycle. Tout compris, c'est la moyenne que nous avons chez nous. Aller plus bas dans les investissements que nous faisons sur nos jeunes, c'est mettre aussi en péril, pour le futur, la qualité. Non pas qu'on ne croie pas qu'on dispense quelque chose qui soit de qualité, mais, à long terme, c'est un investissement qui va s'effriter et ce n'est certes pas souhaitable.

Deuxième élément, au-delà de ces quelques chiffres: ce que nous avons appelé «ce que nous faisons de bien». Qu'est-ce que nous faisons de bien à l'École des hautes études commerciales? On ne vous dira pas beaucoup ce qu'on ne fait pas bien. Mais ce qu'on fait bien, c'est un certain nombre de choses. D'abord, nous tentons, pour nos diplômés de premier cycle, d'inventer de la valeur ajoutée en créant des programmes de valorisation. Il ne suffit plus d'avoir un B.A.A. – c'est là qu'on a le plus d'étudiants – un baccalauréat en administration des affaires, mais nous voulons que les gens, dès leur engagement au sein de notre institution, s'inscrivent au profil Mercure. Donc, les étudiants qui s'inscrivent au profil Mercure doivent démontrer un certain nombre d'autres aptitudes, par exemple sur la scène internationale, au niveau de la langue, au niveau des aptitudes socio-économiques, et ça amène, assez curieusement, un effet d'entraînement très positif pour l'embauche. Nous réussissons – c'est peut-être ça et autre chose – à placer nos étudiants. Dans le contexte économique dans lequel nous sommes, on est fiers, on se vante beaucoup de placer entre 91 % et 97 % des étudiants. Alors, 91 % à 97 % de nos étudiants ont une job à leur sortie. On fait en sorte de les placer. Donc, les HEC, c'est quelque chose qui mène à des emplois. Les initiatives que nous faisons, comme le profil Mercure, nous amènent à cela également.

Habiletés de communication. On met l'accent beaucoup là-dessus. On fait passer des tests de français à nos étudiants, même au niveau universitaire, et on est contents de vous indiquer que c'est notre institution qui a la meilleure moyenne, dans tout le Québec, des tests de français du ministère.

Nous accroissons de façon importante – on l'a indiqué un peu plus tôt – le nombre de nos étudiants de deuxième cycle. Saviez-vous qu'au Canada, c'est aux HEC qu'on retrouve le plus grand nombre d'étudiants au doctorat dans le domaine des sciences administratives et comptables? On est ravis de ça. C'est, en partie, grâce à vous, bien sûr, parce que vous nous donnez des ressources pour le faire. Mais, dans notre compte rendu, on tient à vous l'indiquer.

L'École met aussi l'accent sur les subventions externes. Nous allons chercher de plus en plus de chaires, de subventions de recherche. Un chiffre là-dessus: on a doublé, depuis un certain nombre d'années, le montant que nous avons de l'extérieur en subventions de recherche, de 1 700 000 $ – ce n'est pas des chiffres importants pour vous, mais, pour nous, ça l'est – à 3 700 000 $. On a donc doublé le montant de l'argent qui nous est confié sous forme de subventions, sous forme de commandites, sous forme de chaires: la chaire Maclean Hunter, chez nous, sur l'«entrepreneurship», la chaire Omer DeSerres sur le commerce de détail, sur l'international également. Nous possédons la plus grande bibliothèque d'affaires au Canada. Ça aussi, nous sommes fiers de vous l'indiquer.

Nous jouissons de bourses importantes de sociétés comme Téléglobe, Weston, qui nous permettent d'envoyer des étudiants à l'étranger. Là aussi, on est contents de vous indiquer que plus de 100 de nos étudiants vont à l'étranger dans le cadre de leurs études, dans les programmes d'échanges que nous avons élaborés avec un certain nombre d'universités étrangères, ce qui, encore une fois, amène un taux d'engagement, par le secteur privé, qui est encore plus élevé. Et c'est ce qui nous guide. Vous allez nous voir revenir souvent avec cette expression: On veut que nos gens travaillent. On veut qu'au sortir de l'université, chez nous, on les place. Et Jean-Denis Duquette, qui est ici avec nous, fait ça presque à temps plein, s'assurer que toutes et tous qui sortent de l'École des hautes études trouvent de l'emploi. On fait des efforts considérables à cette fin. On pense qu'on a cette responsabilité, on pense que les étudiants vont continuer de venir à l'École des hautes études s'ils sentent qu'au terme de leur diplôme ils pourront se trouver de l'emploi. Il faut croire qu'on réussit assez bien parce qu'on a encore un taux de refus à l'entrée de cinq étudiants sur six au baccalauréat. Sur six demandes, on en prend une. Alors, ça doit vous indiquer que c'est recherché un peu. Il y a une réputation autour de notre institution.

Je termine, M. le Président. Est-ce que c'est comme ça qu'on vous appelle, M. le Président? Parce que je n'ai pas l'habitude des commissions parlementaires; alors, vous allez excuser les fautes que nous allons commettre.

Le Président (M. Hamel): Vous savez, nous sommes très souples, M. le président. Ha, ha, ha!

M. Saucier (Serge): Nous sommes certainement à la croisée des chemins, à l'École des hautes études. Nous avons un programme de construction très important, nous sommes à construire une nouvelle école, un projet de près de 100 000 000 $. Les travaux vont très bien et ça va donner un nouvel élan à notre institution. Ce que le ministère de l'Éducation, je crois, a pu trouver d'un peu original dans la formule que nous avons utilisée, c'est de faire en sorte de rapatrier comme biens publics des espaces qui bénéficiaient à des promoteurs immobiliers qui louaient, aussi bien à l'Université de Montréal qu'à l'École des hautes études, un tas de locaux. On a rapatrié tout ça dans un équipement qui va appartenir à l'ensemble de la collectivité québécoise. On est contents du montage financier qu'on a fait. Remarquez bien qu'on a quelques Ph.D. en finances à l'École, qui nous ont beaucoup aidés à le faire.

Voilà donc une partie de nos réalisations. Vous allez trouver ça assez vantard, mais, si on ne se vante pas, ce n'est pas les autres qui vont le faire à notre place aujourd'hui. Alors, vous nous permettrez ce petit péché. Peut-être qu'on n'a pas pris 20 minutes, en se disant qu'on pourrait compléter dans la période des questions, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Alors, je vous remercie, M. Saucier, de votre exposé. Je reconnaîtrai maintenant M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. M. Saucier, d'abord, je dois excuser ici M. Chagnon, M. le ministre de l'Éducation, qui ne peut pas être présent. Vous savez qu'il y a le Conseil des ministres actuellement. Mais il m'a demandé de vous transmettre toute son appréciation pour le travail que vous faites à l'École des hautes études commerciales.

Dans votre exposé, j'ai pris bonne note que vous placez à peu près tous vos étudiants. Je dois vous dire que je vais échanger avec vous et, comprenez-moi bien, dans le cadre de l'échange, on échange non pas sur les bonnes choses, parce que, évidemment, on aurait toujours simplement à s'envoyer des fleurs, mais sur les points qui nous posent des questions. Donc, si je vais soulever les points qui posent question, ça ne veut pas dire que, dans l'ensemble, on n'est pas, au contraire, très conscients de la qualité de l'École des hautes études commerciales.

Il y un point qui nous inquiète, c'est le taux de diplomation. Je comprends que vous diplômez tous vos étudiants, mais j'ai l'impression, si on regarde l'efficacité de la machine en question, qui est l'École des hautes études commerciales, que les chiffres que nous avons – et je ne sais pas si je dois les valider avec vous – sont que, pour les Hautes Études commerciales, si on prend le rapport de 1987 – et c'est notre recherchiste qui a fait ça – et qu'on regarde qu'est-ce qui est passé après, le taux de diplômés, c'est 57,8 % et 30,8 % d'abandons. Et, si j'essaie de décomposer ces abandons – l'analyse est venue du fichier de recensement des clientèles étudiantes – pour les étudiants à temps complet, il y en avait, dans l'analyse qu'on a eue, 576 et, là-dessus, on en a eu 64 % qui ont eu un bac, 31 % qui ont abandonné, ce qui est dans la norme générale.

Par contre – et là, c'est ma question – quand je vais aux étudiants à temps partiel, vous avez 76 % d'abandons sur les 200 personnes qui sont inscrites et seulement 6 % des gens qui sont inscrits aux études de bac à temps partiel. Excusez-moi, je n'ai pas mis mes lunettes, 9,5 %. Enfin, c'est en dessous de 10 %, mais c'est 9,5 % et non pas 6 % qui ont obtenu leur bac et 6 % qui ont obtenu un diplôme de certificat à peu près. Mais c'est, quand même, 76 % qui ont abandonné leurs études dans les étudiants à temps partiel. Alors, ça, c'est des chiffres qui, malgré tout, mesurent l'efficacité des institutions, qui sont à même de nous inquiéter.

(16 h 40)

Alors, au temps complet, je ne vous demande pas de répondre parce que vous êtes à peu près dans la moyenne de toutes les institutions. Mais, au temps partiel, vous dérogez par rapport aux autres institutions. Est-ce que c'est parce que vous êtes très libéraux dans la manière dont vous acceptez les gens au temps partiel, c'est-à-dire que vous êtes beaucoup moins contraignants pour les gens qui rentrent au temps partiel que vous l'êtes pour les gens qui entrent au bac, c'est-à-dire que les mesures dont vous parlez, de un sur cinq, c'est strictement pour les gens au temps complet? Je voudrais vous entendre là-dessus parce que les chiffres, à première vue, nous posent problème.

M. Saucier (Serge): Oui. Alors, je vais demander à Fernand Amesse, qui est le directeur des programmes d'enseignement, de répondre à votre question. Tantôt, quand je référais aux cinq sur six que nous refusons, c'est au baccalauréat...

M. Gautrin: Donc, c'est ceux à temps complet.

M. Saucier (Serge): ...donc des étudiants à temps complet.

M. Amesse (Fernand): Je ferai peut-être une brève remarque sur le temps complet, où vous disiez que le taux est à peu près normal. Nous vivons...

M. Gautrin: Comparable aux autres universités. Je ne dis pas normal parce qu'on demande à chaque université d'améliorer ses taux, mais disons qu'il est comparable.

M. Amesse (Fernand): Ce que je veux dire, c'est que, contrairement aux autres universités, nous avons plus de chances de perdre un étudiant, par exemple, qui change de discipline, alors qu'à l'Université Laval un étudiant qui change, je ne sais pas, moi, de discipline et qui passe d'administration à économie ne quitte pas l'Université Laval, ce n'est pas une perte. Aux HEC, si on quitte l'administration, on change d'université. Donc, ce taux-là est peut-être encore un petit peu plus dur pour nous que pour une université multifacultaire.

Pour ce qui est des temps partiels, je vous rappellerai que nous avons près de 5000 étudiants aux certificats et dans les programmes de certificat. Nous avons comme politique de dire que nos programmes de certificat ne sont pas des programmes, pour un jeune sortant du collégial, pour faire des études. Donc, tous ces programmes sont balisés pour que ce soient des adultes en situation de travail qui viennent suivre des cours aux certificats. Nos étudiants qui sortent des collèges viennent dans les programmes de baccalauréat. Et l'adulte aux certificats, en situation de travail, n'est pas quelqu'un qui vient pour le diplôme d'abord; il vient pour suivre un cours, le cours dont il a besoin pour une promotion pour une tâche qu'on va lui confier. S'il a besoin d'un cours d'informatique de gestion, il le prend.

M. Gautrin: Un complément de formation pour un objectif...

M. Amesse (Fernand): S'il a besoin d'un cours de comptabilité, il le prend.

M. Gautrin: ...de travail tout à fait spécifique.

M. Amesse (Fernand): La majorité des étudiants aux certificats, au fond, ne font que quelques cours et ils s'en vont.

M. Gautrin: Ce qui justifie le peu de... D'après ce que vous me dites, donc, ils ont obtenu ce qu'ils recherchaient à l'École. C'est ça?

M. Amesse (Fernand): Selon une enquête qu'on a faite, ils nous disent: Nous avons atteint notre objectif. Nous voulions faire deux cours de comptabilité, un cours de finance. Et ils quittent. Un certain nombre décident de continuer, de faire un certificat, mais c'est un petit nombre par rapport au total. Je dirais qu'un plus petit nombre décident de cumuler des certificats pour obtenir un baccalauréat, mais qu'un grand nombre d'étudiants qui fréquentent les certificats viennent chercher le type de formation qui leur permet d'atteindre leur objectif dans leur entreprise. C'est un peu l'explication de ce phénomène d'attrition, je pense, au temps partiel, particulièrement à travers les certificats.

M. Gautrin: Comment fonctionne-t-on? Est-ce que je pose toutes mes questions d'abord ou bien est-ce que, dès que je sors d'un sujet, je passe à un autre sujet?

Une voix: Vous pouvez continuer.

M. Gautrin: Moi, j'ai un autre sujet de questions. Est-ce que je passe... Qu'est-ce que vous suggérez? Je continue? Donc, je vais changer de sujet, comme question, et je vais poser la même question que j'ai posée aux collègues de l'École polytechnique, ce matin. Vous êtes dans une situation, comme vous l'avez rappelé, un peu particulière, c'est-à-dire qu'à Montréal vous êtes, sur un même campus, trois institutions qui sont autonomes, mais ayant des liens les unes avec les autres. Dans un esprit de rationalisation à l'heure actuelle, les autres universités, celles qui sont, disons, multifacultaires, peuvent avoir des économies d'échelle dans la mesure où elles s'échangent des cours: le même cours d'économie, par exemple, peut être suivi par les étudiants en économie, ceux en administration à l'Université Laval ou à l'Université McGill. Est-ce que, dans la période de restrictions où on est, vous envisagez ou vous essayez de développer des liens ou des passerelles entre l'Université de Montréal, l'École polytechnique et vous pour obtenir ces économies d'échelle qu'on obtient dans d'autres institutions?

M. Saucier (Serge): Je voudrais commencer par répondre par les compressions que nous avons faites dans le cadre du respect de la loi 198. Nous avons nous-mêmes réduit d'une façon importante le nombre de cadres, et ça, c'est avant l'introduction de la loi 198. Vous avez peut-être noté, 27 % de réduction quant à notre nombre de cadres, c'est un effort relativement important. Nous comptons réduire, cette année, une vingtaine d'autres postes pour aller complètement respecter... Oui, nous faisons des efforts de collégialité avec les autres universités, et je vais laisser M. Amesse vous en parler, notamment un doctorat que nous décernons en collaboration avec deux autres universités où l'on voit l'utilisation des ressources de façon efficace, en ayant un bout des études qui est fait chez nous, puis deux autres bouts d'études faits ailleurs.

Le Président (M. Hamel): M. Amesse.

M. Amesse (Fernand): En fait, l'École, dans certains de ses programmes, effectivement, travaille en collaboration avec les autres universités, précisément dans le but de faire un meilleur usage des ressources. Le programme de doctorat conjoint, au moment où on l'a créé, effectivement, il est fait avec McGill, Concordia, l'UQAM et nous, ce qui nous permet d'avoir des tailles de groupes, au niveau du doctorat, et une offre de séminaires pour un ensemble d'étudiants qui vaut pour les quatre universités. Finalement, un séminaire peut fort bien être donné par un professeur de McGill aux étudiants des HEC, de l'UQAM et de Concordia et, tantôt, par un professeur des HEC. On le fait également par le processus des cours hors faculté, c'est-à-dire que, plutôt que de multiplier l'offre de cours, dans certains cas, tout simplement, l'étudiant est autorisé à aller suivre un cours dans une faculté à l'Université de Montréal ou même dans une autre université à Montréal.

M. Gautrin: Donc, vous utilisez au maximum les ressources universitaires qu'il y a dans la ville de Montréal, actuellement.

M. Amesse (Fernand): Oui.

M. Gautrin: J'ai un troisième champ. Ce matin, le recteur de l'Université de Montréal, qui est venu témoigner aussi, nous a entretenus sur les critiques qu'il faisait quant à la formule de financement des universités. Bon, je comprends que chacun va dire qu'il n'a pas assez d'argent. Mais, enfin, vous comprenez la situation dans laquelle est le gouvernement. On a donc un crédit qu'on donne aux institutions universitaires. Cette masse d'argent est répartie suivant une formule assez compliquée sur laquelle il y avait eu un accord en 1988-1989. Le recteur de l'Université de Montréal souhaitait qu'on révise la formule, nous a-t-il demandé, où on donnerait plus de poids aux études du deuxième cycle, en particulier à la maîtrise et au doctorat. Si je ne m'abuse, il faudrait qu'on compte le temps de maîtrise pour 90 crédits au lieu de 45 tel que c'est dans la formule actuellement, et le temps de doctorat pour trois fois 45, c'est-à-dire 135 crédits au lieu de 90 tel que c'est actuellement.

Il est évident que changer une chose... Et je comprends que vous allez échanger avec lui au niveau de la CREPUQ, mais j'aimerais avoir, à première vue, votre réaction sur une modification de la formule de financement. Est-ce que c'est quelque chose qui vous sourit ou si c'est quelque chose sur lequel vous avez une objection de principe, au départ?

M. Saucier (Serge): Non. Nous, ça fait déjà un certain nombre d'années que nous demandons des modifications à la formule. Un peu comme le disait M. Amesse tantôt, on est un peu coincés du fait qu'on n'ait qu'une seule faculté. Alors, on n'a pas le mécanisme des vases communicants d'une grande université qui va un peu se tirer d'affaire par des cours qui sont plus subventionnés que d'autres et où les coûts ne sont pas nécessairement plus élevés. Je ne sais pas combien on donne à l'Université de Montréal pour sa Faculté de musique, ou à l'UQAM. Ce que nous savons, c'est ce que nous recevons pour la Faculté d'administration, et nous ne recevons que ça.

Bien des fois, on a fait valoir qu'il y avait là une injustice en donnant très peu pour ce que nous faisons, par opposition à l'ensemble des universités qui reçoivent beaucoup plus. Puis on a fait valoir qu'on ne pouvait guère mettre plus de 42 élèves dans une classe. Ce serait intolérable au niveau secondaire et au niveau collégial. Les parents vous bloqueraient votre entrée, s'ils savaient ça. Et puis, nous, c'est 42, pour ne pas dire que, souvent, nos gens sont assis dans les escaliers parce qu'on n'a pas de place pour les asseoir dans certains cours du baccalauréat. Alors, on se plaint, comme toutes les universités, d'un sous-financement et là, nous, de la formule de répartition. C'est difficile de commenter de façon...

M. Gautrin: Plus ponctuelle.

M. Saucier (Serge): ...en tout cas, pour moi qui ne suis pas là à temps plein, de prendre la formule dont vous avez fait état tantôt et de dire: En augmentant le poids relatif qu'on accorde aux étudiants de deuxième cycle – c'est un peu ce que la formule veut dire – vous...

M. Gautrin: C'est ce qu'avait soulevé le recteur, ce matin.

(16 h 50)

M. Saucier (Serge): ...trouveriez là une formule de financement plus équitable. C'est un débat monstrueux que celui-là, parce que c'est toujours entre les universités de s'accaparer une part plus importante des ressources. Nous aussi, on fait valoir depuis longtemps notre formule, qui n'a pas été retenue, et l'Université de Montréal, on comprend qu'elle dépose maintenant une formule... Je ne pense pas qu'on puisse vous dire aujourd'hui que nous pourrions agréer cela facilement sans faire l'exercice. Adrien, qui est notre financier...

M. Gautrin: Mais vous avez une autre formule à suggérer?

M. Lacombe (Adrien): Non, non. Mais on est d'accord avec la formule qui est proposée par le recteur de l'Université de Montréal à l'effet de mettre un peu plus d'emphase sur l'encadrement des cycles supérieurs. C'est bien évident qu'on ne peut pas être contre. Ce à quoi notre président, M. Saucier, faisait allusion, c'est que si les crédits nécessaires pour ce faire étaient sous la forme d'une péréquation, bien, on n'y gagne pas parce que la formule est déjà restreinte. Les compressions, comme la loi 198, ce qu'elles nous imposent, c'est de diminuer le personnel de soutien. Or, très souvent, l'avantage qu'on pourrait avoir de considérer des crédits additionnels pour les deuxième et troisième cycles, ça pourrait dégager des sommes de façon à permettre l'encadrement au niveau des activités de recherche et des choses semblables, ce qui se fait nécessairement avec des deuxième et troisième cycles.

Alors, je pense que, pour l'École des HEC, on ne peut pas être en désaccord avec la position du recteur de l'Université, parce que je pense que c'est un but avoué pour toutes les universités de penser au développement des deuxième et troisième cycles, et de favoriser des crédits additionnels pour aider au développement de ces cycles-là. Alors, c'est évident que ça s'impose. La seule chose, c'est qu'il faut que ce soit de l'argent neuf et non pas de l'argent recyclé à même l'enveloppe existante.

M. Gautrin: Je vous remercie. Je pourrais peut-être éventuellement revenir après...

Le Président (M. Hamel): Oui, oui. Certainement.

M. Gautrin: ...mais je pense que je vais passer la parole.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Oui. M. le Président, j'ai deux sujets à aborder. D'abord, vous avez indiqué, tout à l'heure, que le financement que vous receviez de l'État, si vous le mettiez sous forme de per capita, vous aviez un per capita assez bas par rapport à d'autres institutions financières. Si j'ai bien compris, c'était de 7800 $ par tête.

M. Saucier (Serge): Ça, c'est les coûts. C'est les coûts...

M. Brassard: Les coûts.

Une voix: Et non pas la subvention.

M. Saucier (Serge): ...et non pas la subvention. Donc, les coûts, dans nos revenus...

M. Brassard: O.K.

M. Saucier (Serge): ...au-delà de la subvention et des frais de scolarité, et d'autres revenus que nous avons, ça, c'est ce qu'on dépense.

M. Brassard: Ça, c'est les coûts. O.K. Parce que je note que les HEC, les Hautes Études commerciales, si on prend le nombre d'enseignants et de chercheurs que vous avez à votre emploi et que vous rapportez cela aux effectifs, au nombre d'étudiants, vous avez un ratio, effectivement, par rapport à d'autres, assez élevé. C'est près de 30. En réalité, c'est 30: 30 étudiants pour un enseignant chercheur. C'est ce qu'il y a de plus haut. C'est plus haut que Polytechnique, pas mal, que Bishop's, que Concordia, que l'Université de Montréal. C'est ce qui explique peut-être que vous avez des classes, des groupes de classe de plus d'une quarantaine d'étudiants. Mais j'essaie de voir l'explication d'un phénomène semblable. Comment se fait-il que vous soyez tellement défavorisés par rapport aux autres institutions universitaires, en termes de ratio enseignant chercheur-nombre d'élèves?

M. Lacombe (Adrien): Je pourrais vous donner une réponse, M. Brassard. Elle est d'abord historique. Si on pense à la formule de financement, elle est historique. Vous savez qu'elle part de 1968; vous êtes très familier avec les origines de la formule de financement. L'École a toujours été gérée un peu comme une entreprise privée, du type de rationaliser au maximum les opérations. Et même, dans la base historique, les certificats, qui étaient, à l'origine, l'éducation permanente, avant 1975, étaient faits sous l'égide de l'autofinancement. D'ailleurs, un des éléments que vous pourriez voir en analysant la position financière de l'École, c'est que les droits de scolarité sont un peu supérieurs aux moyennes permises dans le réseau, parce que c'est encore une question historique.

Ce qui a favorisé l'École, dans une certaine mesure, ce que le président, M. Saucier, a mentionné tantôt, c'est les activités entrepreneuriales de l'École, c'est-à-dire là où on peut faire de l'argent, c'est-à-dire là où on a fait, à l'étranger, avec notre Centre d'études en administration internationale, des activités qui ont rapporté des sommes d'argent. Ça veut dire que, pour l'École des HEC, la composition de 7800 $ comme coût par étudiant... Les revenus se composent des droits de scolarité, de la subvention et de l'argent provenant de surplus réalisés sur des projets à l'étranger.

Alors, la taille des groupes-cours est un des phénomènes. Le nombre de chargés de cours utilisés, on a toujours eu un objectif d'essayer d'arriver à 50 % au moins et on n'y arrive même pas. Alors, l'ampleur des coupures auxquelles l'École fait face, c'est malheureux dans les circonstances parce qu'on n'a pas été là, dans la base historique, comme étant quelque chose qui était normatif dans le passé. Nous sommes victimes de nos politiques de gestion.

M. Brassard: Oui, je comprends la base historique, effectivement. Donc, ce que vous nous dites, c'est que vous étiez défavorisés dès le point de départ. Alors, vous traînez ça depuis le début.

M. Saucier (Serge): Vous avez parfaitement raison.

M. Brassard: Ça vous colle à la peau depuis le début.

M. Saucier (Serge): C'est en plein ça. À l'époque, on n'engageait pas de professeurs. On se disait: On va se débrouiller avec ce qu'on a, parce qu'on n'avait pas beaucoup de revenus. Puis, on s'est dit: Il faut qu'on soit capables de faire un équilibre. Alors, on a eu, pendant des années et des années, un manque quant à l'engagement de nouveaux professeurs. Soudainement, on change les règles du jeu en matière de financement et on établit la base de l'année 0, de l'année 1, au moment où on a changé la base de financement, et là on s'est retrouvés coincés. Lorsqu'est venu le temps de vouloir engager des professeurs pour avoir des ratios nombre de chercheurs versus le nombre d'élèves, le nombre d'élèves par classe, on n'a pas été capables de le faire parce que la formule ne le permettait pas. C'est ce qui a fait l'objet de tant et tant de récriminations de la part de l'École vis-à-vis les formules de financement qui existaient depuis toujours. Chaque fois, on revient avec l'année 1968; on remonte et on dit: Écoutez, à l'époque, quand on a commencé, ce n'était pas bon? Alors, on a un peu payé le fait... L'École a toujours gagné de l'argent. On faisait des surplus accumulés. On voulait gérer ça comme une entreprise privée et ne pas perdre d'argent, mais, aujourd'hui, on en subit, malheureusement, le contrecoup.

M. Brassard: Évidemment, je constate, cependant, que ça n'affecte pas, en tout cas, gravement la qualité des services, la qualité de la formation, ce ratio élevé.

M. Saucier (Serge): Mais, un jour...

M. Brassard: Vous vous tirez quand même assez bien d'affaire.

M. Saucier (Serge): Oui, tout à fait, mais il reste que la qualité se mesure difficilement. On aime à penser qu'on produit des gens de grande qualité. On a des réactions très favorables de la part des employeurs qui engagent nos diplômés; c'est peut-être là aussi une mesure qui nous réjouit. Mais, lorsqu'on voit le montant qu'on investit – je reviens donc au coût de 7800 $ – versus ce que la compétition à l'extérieur du Québec fait, on se rend compte que, sur un avenir quelconque, on va finir par ne plus être dans la même ligue. Pourquoi un M.B.A., qui passe par Yale ou qui passe par Harvard et qui paie 18 000 $US pour subir les cours, ici paie 1500 $CAN pour subir les mêmes cours? En partant, on aime à penser que les 18 000 $ vont être investis sur l'individu. Quant à la masse d'enseignement qu'il va recevoir, chiffrée en termes de dollars, on se dit: Il commence à y avoir un décalage et ce décalage se traduit au Canada.

Et là, on arrive avec un commentaire qu'on voulait absolument vous formuler, c'est celui des frais de scolarité. Nous, on a prêché souvent pour le relèvement des frais de scolarité. On a organisé une pétition qu'on a adressée au premier ministre, M. Bourassa, à l'époque, pour qu'il y ait un dégel des frais de scolarité. Dégel il y a eu, mais on a commis l'erreur, par la suite, de ne pas continuer à laisser les frais de scolarité à une moyenne canadienne ou de se référer à une autre base que l'inflation. Ce qui fait qu'aujourd'hui on ne demanderait qu'une seule chose, c'est d'avoir la liberté de pouvoir «charger» des frais de scolarité pas excessifs, mais qui se rendent à la moyenne canadienne. C'est tout ce qu'on demanderait. Puis, on ne l'a pas, cette liberté. Les règles imposent à toutes les universités d'imposer les mêmes frais de scolarité avec un écart de 10 %, qu'on utilise, d'ailleurs.

(17 heures)

Et on garantit que, si on avait cette liberté, on ne refuserait aucun élève, même les gens qui n'ont pas les moyens de payer, parce qu'on a organisé au sein de l'École un système de prêts et bourses pour aider les étudiants qui n'ont pas les moyens de payer même les 1500 $ qu'on demande aujourd'hui. Et, si on nous permettait d'aller à la moyenne canadienne ou un peu en deçà de la moyenne canadienne, on gagnerait des ressources sans rien demander au gouvernement, tout en assurant tout le monde d'une accessibilité. On vous le garantirait parce qu'on a toutes sortes de façons d'y arriver par des systèmes de prêts et bourses. On est connecté sur le milieu des affaires – il faut bien comprendre ça – et on va chercher l'argent dans ce milieu qui est assez généreux pour l'École des hautes études. On réussirait, comme ça, à aller chercher 2 000 000 $ de plus par année, qu'on investirait sur nos élèves pour dépenser plus que 7800 $, ce qui nous apparaît se gruger avec le temps et finira peut-être par produire un produit de moins grande qualité.

Mais, vous n'entendrez pas ces mots-là dans la bouche des universitaires. Moi, je le dis parce que je ne suis pas à plein temps à l'École; c'est du bénévolat. Donc, je me permets de dire ça un peu. Mais, à la longue, écoutez, si vous avez moins de ressources que les autres... Je veux bien comprendre que nos gens sont toujours plus intelligents, que le Québécois, admettons-le, est plus intelligent que tout le monde – puis on exagère, on le sait tous – mais à force d'investir moins que tout le monde, on va finir, à la longue, par produire un produit de moins grande qualité que les autres.

M. Brassard: Évidemment, on ne fera pas le débat ici, mais c'est clair qu'en ouvrant sur les droits de scolarité, les frais de scolarité, vous abordez une question extrêmement controversée dans la société québécoise. Et là, on ne réglera pas cette question-là cet après-midi, sûrement.

Mais j'aurais une deuxième question, moi, à vous poser ou un deuxième sujet. Ça concerne le taux d'embauche, qui est très élevé. Vous en avez parlé tout à l'heure: 91 % et plus de vos étudiants, de vos diplômés trouvent un emploi. En période de récession, je vous avoue que je trouve ça extrêmement performant, extrêmement élevé. On sait que, dans les sciences administratives – bon, il n'y a pas juste HEC, il y en a partout, dans toutes les universités – on en produit beaucoup; c'est même un des créneaux au Québec où, depuis un certain nombre d'années, on a une assez haute production de diplômés dans ce secteur-là. Je ne connais pas les autres taux d'embauche ailleurs; on n'a pas eu l'occasion d'aborder cette question-là avec les universités, mais comment vous l'expliquez? Est-ce que c'est la réputation de l'École qui fait que vous avez un taux d'embauche aussi élevé que ça? Parce que je ne suis pas certain qu'ailleurs on atteigne des niveaux de cette ampleur-là. Est-ce que vous êtes au courant des différents taux d'embauche pour, évidemment, les diplômés en administration au Québec?

M. Duquette (Jean-Denis): Si je ne voulais pas vous dévoiler tous nos secrets, je vous dirais: C'est parce qu'on a les meilleurs diplômés, c'est parce qu'on a les meilleurs professeurs, c'est parce qu'on a la meilleure école. Ça, c'est vrai. Il y a aussi que je pense qu'on prend des bons moyens. Voyez-vous, en 1982, on a réalisé qu'il y avait une grosse difficulté dans le placement. Il y avait eu une légère déflation de l'économie et, pour la première fois, on avait 58 % de nos étudiants qui étaient placés en septembre. On a pris des moyens pour qu'en décembre... On s'est regroupé, on a rencontré des présidents d'entreprises; en décembre, tout le monde était placé et nous étions beaucoup avancés sur le placement de l'année suivante.

À la suite de ça, on a fait une réflexion et on a fait un comité consultatif sur le placement où on a été chercher des gens en réaffectation dans le monde des affaires, d'autres qui sont des chasseurs de têtes. On a pris des représentants de l'École, des représentants de l'association des diplômés, et nous avons réfléchi à ce que devrait être un service de placement du XXIe siècle assez avancé. On s'est donné comme chiffre 2025.

On s'est mis à réfléchir et ça nous a fait penser qu'il fallait refaire la mission du service de placement. Dans tous les services de placement, on pensait à marier des jobs avec des diplômés. On garde cette optique-là, mais ce que nous faisons maintenant, c'est qu'on vise à rendre chacun et chacune de nos diplômés apte à être responsable de son placement à 90 % quand il quitte l'École et pour le reste de ses jours. Ce qui veut dire qu'on leur apprend à faire des curriculums, on leur apprend à passer des entrevues, à se renseigner sur les entreprises pour passer des entrevues. Et tous les mystères de leurs relations avec les employeurs, même comment s'habiller, comment parler, on leur enseigne ça; comment faire leur recherche d'entreprises, comment décider dans quel créneau ils vont aller présenter leur demande et, dans ce créneau-là, établir leurs priorités, faire leur demande, être supportés par des lettres de recommandation, et ça a fait merveille.

Ce que je peux vous dire, c'est que cette année, à la maîtrise en sciences – là aussi, c'est un programme gagnant; il y en a à peu près quatre de cette qualité-là dans le monde – nous avions tous les étudiants de M.Sc. placés, sauf une personne qui, elle, avait trouvé un emploi aux États-Unis, mais n'avait pas obtenu sa carte verte ou grise de travail aux États-Unis. Moi, je suis daltonien, je ne peux pas retenir la couleur parce que je ne la vois pas. Il y avait une personne. Au M.B.A, on avait déjà 91 % de nos diplômés qui étaient placés.

Ce que je peux vous dire, c'est que, malgré l'ouverture dont on parle quand on parle des minorités, je ne pourrais pas vous dire que c'est des minorités invisibles; alors, les problèmes qu'on a, c'est de ce côté-là. Ça ne veut pas dire qu'ils sont moins bons, au contraire, parce qu'ils n'auraient pas leur diplôme. Ils sont très bons, mais ça présente plus de difficultés, souvent parce qu'ils n'ont pas la même expérience, qu'ils viennent d'ailleurs, qu'ils sont devenus canadiens récemment. Bon.

Alors, au baccalauréat, ce que je peux vous dire aussi, c'est que nos étudiants, à 91 %, étaient placés. Et la difficulté qu'on a eue, parce qu'on aurait eu un meilleur placement, c'est que, dans le monde de la comptabilité, il y a un contingentement très fort des emplois – M. Saucier pourrait le dire – et, sur l'ensemble des cas qui nous restaient, nous en avions 29 qui étaient des étudiants de sciences comptables, dont plusieurs ont réussi au C.A., mais ne pouvaient pas trouver de travail parce qu'ils n'ont pas trouvé de stage dans les entreprises de C.A. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Brassard: Oui, oui. Très bien. La seule sous-question que je vous poserais, c'est: Ce genre de service de placement, parce que j'ai bien compris que vous avez un service de placement...

M. Duquette (Jean-Denis): Oui.

M. Brassard: ...est-ce que c'est un phénomène unique? Est-ce que, à votre connaissance, ailleurs, dans d'autres facultés de sciences administratives, ça existe ou s'il y a juste aux Hautes études commerciales qu'on fonctionne de cette façon-là?

M. Duquette (Jean-Denis): Il y en a partout, des services de placement. Là, ce que je peux vous dire, c'est qu'au moins deux établissements nous ont demandé de les aider à s'organiser, et nous avons dit, d'une façon fort magnanime, que nous les aiderions.

M. Brassard: Si je comprends bien, vous avez trouvé la formule la plus...

M. Duquette (Jean-Denis): Il n'y en a pas, de formule gagnante.

M. Brassard: Une formule efficace, en tout cas.

M. Duquette (Jean-Denis): Il faut les mettre au point tout le temps, mais il y a une chose qui nous aide aussi. Voyez-vous, la plupart des universités n'ont pas établi nécessairement des grandes loyautés avec leurs diplômés. Nous, on a le service de placement des diplômés et nous avons, à côté, le service de placement des finissants et le service de placement des étudiants pour l'été. Alors, les diplômés que nous plaçons restent loyaux à l'École et viennent ensuite embaucher. Et nous avons toutes les listes des personnes qu'on peut contacter pour placer nos diplômés. Alors, là, je vous révèle tous nos secrets. Si tout le monde fait pareil, on va se retrouver dans des grandes difficultés, mais je peux vous dire que c'est difficile à faire et que ça demande beaucoup de travail et d'organisation pour le faire d'une façon rationnelle.

M. Brassard: Bien, vous nous donnez aussi un fait: vous développez aussi un fort sentiment d'appartenance.

M. Saucier (Serge): Ah oui, tout à fait! Honnêtement, M. Brassard, il y a ça. Je veux bien croire qu'on est meilleurs que tout le monde, mais soyons calmes. Une fois qu'on a fini de dire ça, on est comme les autres. La différence, c'est qu'avec le temps... L'École des hautes études existe depuis plus longtemps que d'autres, puis il y a des gens qui sont en poste, puis il y a un sentiment de fierté de s'identifier HEC, puis on engage HEC, etc. Je pense que ce sentiment-là existe ailleurs aussi, puis on bénéficie de ça. Ensuite, il faut bien comprendre que nos diplômés ne sont pas en arts et culture, et c'est plus facile à placer un M.B.A., un M.Sc., un B.A.A., un comptable agréé que dans d'autres disciplines.

M. Brassard: Je comprends, sauf qu'en période de récession un taux de 91 % d'embauche, c'est quand même...

(17 h 10)

M. Saucier (Serge): Regardez, je vais vous donner l'exemple de notre firme. Il fut un temps où on était le plus grand employeur, par année, de nouveaux diplômés universitaires au Québec. À partir de là, il faut faire des choix. On a comme un préjugé favorable pour l'École des hautes études. Et pourquoi ça? Bien, on y est associés. Alors, tu finis par avoir un préjugé favorable. Et ces préjugés favorables là, beaucoup en ont. Sur leur conseil d'administration, des gens d'affaires de très grand prestige siègent. Quand ils ont besoin, pour le développement de leur société, de diplômés universitaires, naturellement, ils vont penser à l'École des hautes études dans la science qui les concerne. Il y a donc un effet d'entraînement naturel.

Mais, au-delà de ça, je pense que l'effort dont Jean-Denis Duquette parlait, qui s'est traduit... Un petit exemple, le CETAI, on l'appelle de même, a fait des travaux à l'étranger, dans d'autres pays, avec passablement de succès, puis on gagne beaucoup d'argent à faire ça. Ça a un effet d'entraînement. Maintenant, l'École elle-même est soumissionnaire pour exécuter des travaux à l'étranger, dans des pays en voie de développement, en utilisant les ressources à l'interne. Alors, vous voyez comment la boule commence à tourner. Puis, si on est dans ces pays-là, on engage des jeunes pour le faire. D'où ils vont venir, les jeunes? Ils risquent de venir de l'École des hautes études. Il y a cet effet d'entraînement qui nous a aidés beaucoup, mais il y a les efforts de Jean-Denis Duquette, inlassable. Il nous achale jusqu'à temps qu'on l'engage; on finit par l'engager, le diplômé. Il peut vous donner le nom, puis la date de naissance de tous les diplômés qui n'ont pas de job. Il est fatigant, puis il finit par les placer.

M. Duquette (Jean-Denis): Ne dites pas ça devant M. Amesse, il le sait.

M. Amesse (Fernand): Je dois vous dire, M. le Président, que M. Duquette est, en effet, insistant.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Hamel): M. le député de Verdun, vous aviez une question. Mais c'est bien agréable.

M. Gautrin: Brièvement, je voudrais revenir – je voudrais vous féliciter aussi sur votre mécanisme de placement – un petit peu en arrière, sur les formules de financement. Quand je suis revenu, vous évoquiez à quel point les formules qui étaient basées sur les questions historiques revenant à 1968 vous défavorisaient. Mais, si vous vous compariez... Et là, je n'ai pas les chiffres parce que, moi, j'ai les chiffres... Évidemment, on a les chiffres pour HEC. Vous êtes une structure, comment on pourrait dire...

M. Saucier (Serge): C'est plus facile.

M. Gautrin: C'est plus facile. Et je n'ai pas les chiffres par faculté comparable dans les autres universités, mais est-ce que votre situation en termes de ratio, par exemple, nombre d'étudiants par classe... Vous parliez de l'investissement de 7800 $ par étudiant. Est-ce que c'est comparable dans les autres facultés d'administration, si on peut employer ce terme-là, ou bien est-ce que vous êtes actuellement particulièrement défavorisés? Si on se compare non pas aux autres universités, mais à des choses comparables, c'est-à-dire la Faculté d'administration de McGill, par exemple, et je crois qu'il y en a une à l'Université du Québec à Montréal, Laval en a une; si on fait des comparaisons, comment vous vous situez? Est-ce que vous êtes réellement fort défavorisés par rapport à ça ou bien est-ce que c'est le secteur de l'administration qui, pour des raisons, disons historiques, est peut-être défavorisé?

M. Lacombe (Adrien): Il y a deux éléments à votre question. On peut difficilement faire des comparaisons avec la Faculté d'administration de l'Université Laval parce que, en fait, quand on regarde HEC, on voit HEC comme étant une faculté avec toutes ces dépenses qui y sont affectées. On oublie les cours interfacultés qui se donnent dans les universités, et ça, c'est un élément important pour fausser la comparabilité des coûts. La formule de financement est assez simple au niveau des universités, puis, en même temps, fort complexe quand on la voit sur la base historique. Elle est simple, la matière première étant l'étudiant et, les frais investis, c'est d'abord les frais des professeurs. Alors, plus les tailles groupes-cours sont élevées et plus on utilise de chargés de cours, donc, moins on investit en termes de premier argent. Et la composition des coûts, bien, c'est évident que, la deuxième étape, c'est l'encadrement pour l'enseignement et, après ça, le soutien administratif.

Je ne pense pas qu'il y ait d'autres universités qui aient des ratios de tailles groupes-cours... Il y a de l'encadrement peut-être au niveau des chargés de cours, mais les tailles groupes-cours, même dans les conventions collectives, sont inférieures de beaucoup à ce que nous avons à l'École des HEC.

M. Gautrin: C'est-à-dire les autres cours, c'est 42. C'est ça. Le nombre moyen d'étudiants par cours, c'est 42, ce que vous m'avez donné tout à l'heure.

M. Lacombe (Adrien): Oui. C'est la moyenne.

M. Gautrin: Non, non. Je comprends, mais, écoutez, je suis obligé de fonctionner par...

M. Lacombe (Adrien): Oui, oui. Oui, oui. C'est ça.

M. Gautrin: Et, si je veux avoir un chiffre comparable dans d'autres...

M. Lacombe (Adrien): La seule façon dont vous allez l'avoir, à moins de le demander, ce serait de voir ce qui est écrit dans les conventions collectives. Vous allez lire 33 ou 35.

M. Gautrin: Je vais tâcher d'avoir ces informations-là, parce que je pense que vous avez un point qui est important. C'est difficile de vous comparer aux autres.

M. Saucier (Serge): Oui, c'est ça.

M. Gautrin: Évidemment, si on fait un peu plus de recherche, on doit pouvoir trouver. Ça, c'est... Ça va. Merci.

Le Président (M. Hamel): Merci. M. le député de Lac-Saint-Jean, le mot de la fin.

M. Brassard: Ça va. Merci beaucoup.

M. Gautrin: Bien, on devrait quand même profiter de l'occasion, M. le Président, pour remercier, ici... Je vois que M. Chagnon est venu vous saluer, mais, enfin, il a dû repartir. Il est reparti, là. Mais, enfin, il était venu temporairement, commutant avec le Conseil des ministres. Je voudrais vous remercier pour l'information que vous avez eu la gentillesse de nous transmettre et dire que c'est un des bénéfices de la loi 198 de faire en sorte que chacune des institutions puisse avoir cette tribune privilégiée pour parler aux parlementaires. Pour nous, c'est extrêmement instructif. Alors, merci pour l'information.

M. Saucier (Serge): C'est nous qui vous remercions.

Le Président (M. Hamel): Merci, messieurs, et bon voyage de retour. Je demanderais maintenant aux représentants de l'Université Bishop de venir prendre place à la place des représentants des HEC. Merci.

Alors, il me fait plaisir d'accueillir M. Jean-Luc Grégoire, vice-recteur à l'administration, et M. Robert Cook, doyen des sciences naturelles et mathématiques de Bishop's University. Alors, vous savez sensiblement quelles sont les règles parlementaires. Nous souhaitons que vous fassiez votre exposé à l'intérieur d'une période de 20 minutes ou moins, si vous le désirez, pour permettre ensuite aux parlementaires d'échanger plus à fond avec vous. Alors, nous vous écoutons.


Bishop's University

M. Grégoire (Jean-Luc): M. le Président, madame, MM. les députés, je voudrais d'abord excuser notre recteur, le Dr Scott, qui, malheureusement, est en dehors du pays. Vu qu'il n'a pas été possible de recéduler notre comparution ici, aujourd'hui, il est malheureusement absent. On vous a présenté notre doyen de la Faculté des sciences, M. Robert Cook. Mon nom est Jean-Luc Grégoire. Je suis vice-recteur à l'administration.

Avant de vous expliquer notre rapport sur l'application du projet de loi 198 et afin d'informer ceux qui ne connaissent pas notre université ou qui ne la connaissent qu'à travers les rapports des médias suite aux frasques de nos étudiants ou suite aux victoires de notre équipe de football – exact – laissez-moi vous dire quelques mots sur l'histoire et la tradition de notre université.

Nous fêtons, cette année, notre 150e anniversaire. Fondée en 1843 grâce aux démarches auprès des Parlements canadiens et québécois de l'évêque anglican de Québec, Mgr Mountain, l'Université Bishop s'est développée lentement et a toujours offert des programmes de formation générale dans les arts et les sciences. Nous essayons de respecter la tradition «liberal arts» qui est pas mal répandue aux États-Unis et dans plusieurs pays anglophones. Par exemple, pour le programme académique en administration, qui est peut-être notre faculté la plus spécialisée que nous ayons à l'université, un étudiant doit suivre au moins 25 % de ses cours dans des disciplines complètement autres que l'administration.

(17 h 20)

La grande majorité des cours est donnée par des professeurs à temps plein. Nous avons très peu de chargés de cours pour les cours réguliers de jour, même si ceci implique une charge de travail supérieure à celle des autres professeurs des universités du Québec. L'encadrement des étudiants est nettement amélioré et le contact étudiant-professeur est habituellement plus facile.

Notre campus est situé à Lennoxville. On peut dire en banlieue de Sherbrooke, M. le député de Sherbrooke. Grâce à la générosité du gouvernement du Québec et du gouvernement d'Ottawa, qui nous ont donné des subventions de 18 000 000 $, et aux dons reçus lors de notre dernière levée de fonds auprès de nos anciens, des entreprises, etc., qui a généré tout près de 10 000 000 $, nous avons pu effectuer des restaurations et des rénovations majeures à nos anciens édifices, ainsi que des ajouts à certains autres locaux, tout ça à temps pour les festivités de notre 150e anniversaire.

Une bonne partie des locaux – et ça, c'est un peu unique chez nous – et des services sont partagés avec un cégep anglophone, le collège régional Champlain, qui a aussi des campus ici, à Québec, ainsi qu'à Saint-Lambert. Le collège possède son propre édifice administratif qui a été construit, en passant, à même les mêmes subventions que je mentionnais plus haut. Cet édifice-là est construit sur nos terrains avec un bail emphytéotique et nous leur louons les locaux requis pour les cours, les laboratoires et les autres activités étudiantes. La bibliothèque, le centre sportif et plusieurs services aux étudiants sont dispensés par les employés de l'université et sont financés, en partie, grâce à un contrat de services avec le collège. La population étudiante à temps plein des deux institutions totalise plus de 3000. À peu près le tiers de ces étudiants résident sur le campus.

Dans notre rapport sur l'implication des règles budgétaires annuelles sur le niveau des effectifs, qui est le rapport qu'on a dû soumettre, que vous avez sans doute devant vous, concernant l'application de la loi 198, nous avons montré une réduction des personnels dans les catégories enseignants et chercheurs et dans la catégorie professionnels. Le montant total consacré aux chargés de cours et aux auxiliaires d'enseignement et de recherche a aussi diminué. En gros, ceci représente une réduction de 2 % dans le personnel régulier et de 1 % dans les autres ressources humaines. Ça, c'est entre les années, évidemment, 1993 et 1994. Ces réductions sont, bien sûr, rendues nécessaires afin de maintenir un équilibre budgétaire au moment où les compressions budgétaires incluent non seulement les réductions prévues par la loi 198, mais aussi d'autres manques à gagner importants suite à la non-indexation des autres dépenses et à l'insuffisance des sommes prévues pour le vieillissement des personnels.

Ceci se produit au moment même où notre clientèle étudiante augmente encore. Notre population étudiante est passée de 1700 à 1900 en deux ans, soit une augmentation de 12 %, et ce, malgré un contingentement très serré dans plusieurs disciplines. Par exemple, le pourcentage requis pour l'admission au programme d'administration et de psychologie est de 75 %, et 40 % de tous les étudiants à qui nous offrons l'admission à Bishop's ont conservé une moyenne supérieure à 80 %. Lors de l'adoption de notre programme de planification à long terme, il y a deux ans, nous avions décidé de contingenter afin de ne pas augmenter la population étudiante au-dessus de 1700 étudiants à temps plein. L'université va essayer de respecter cet objectif à long terme.

Voici, en quelques mots, notre présentation. Nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Grégoire. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, encore une fois, vous l'avez vu tout à l'heure, je tiens à excuser ici le ministre de l'Éducation. Il est retenu au Conseil des ministres. Il aurait voulu être ici présent pour vous témoigner l'appréciation qu'il a pour votre institution.

Je vais rentrer dans mon questionnement sur les effets de l'application de la loi 198. Vous êtes une des rares institutions qui ont choisi de couper sur le personnel enseignants et chercheurs plutôt que sur le personnel cadre, sur le personnel de soutien, de bureau. J'avoue que, quand j'ai traversé l'ensemble des documents, ça m'a semblé un peu bizarre parce que, d'après la réaction des autres institutions, vous avez même des institutions qui, compte tenu des situations financières difficiles dans lesquelles nous sommes, ont maintenu et même parfois augmenté le nombre d'enseignants, quitte à diminuer le personnel de bureau, le personnel technique. Bon, ils sont venus nous dire: C'est effrayant, avec le personnel de bureau et technique en moins, la qualité de l'enseignement en perd. Mais la première personne, en première ligne, dans une institution d'enseignement, ça reste quand même le professeur. Je ne comprends pas les choix que vous avez faits. À moins que ce ne soit tout à fait conjoncturel et lié au fait que, dans la conjoncture, vous aviez des départs à la retraite et que ça a été des choses comme une photographie instantanée, et que ça ne correspond pas à une tendance générale.

Le Président (M. Hamel): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean-Luc): Je pense, M. le Président, qu'il y a un peu de ce que vous dites. C'est conjoncturel, en partie. C'est dû, en partie, au fait que notre politique de congés sabbatiques a été modifiée suite à une négociation collective, il y a quelques années, ce qui nous a amenés à accorder un peu plus de congés sabbatiques durant l'année se terminant le 31 mai 1993. Dans notre cas, vu que nos professeurs sont à peu près tous à temps plein, ont déjà des pleines charges de travail, il faut absolument les remplacer. Donc, il y a eu cette espèce de cloche, si on veut...

M. Gautrin: De gonflement.

M. Grégoire (Jean-Luc): ...en 1993. Ça l'explique en partie. Cependant, il y a une autre explication, c'est que les nombres d'étudiants par cours ont nécessairement augmenté. Les étudiants additionnels que nous avons acceptés sont dans des disciplines où les groupes-cours n'étaient pas tellement élevés, puis où on pouvait absorber une partie du choc de cette façon-là. Je faisais allusion, dans mon petit exposé, à la charge de travail de nos professeurs. Chez nous, la charge de travail est de trois cours-semestre. Il y a plusieurs professeurs qui en font un peu plus. Donc, déjà, les professeurs peuvent absorber certaines des réductions de cette façon-là.

Maintenant, pour la partie qui a trait aux employés de soutien, je dois vous admettre que notre administration et notre soutien à l'université est relativement léger. Nous avons très peu d'administrateurs et le personnel de soutien est quand même assez modeste. Donc, c'est très difficile de couper ça.

M. Gautrin: Je comprends que c'est difficile de couper 20 % sur une seule personne.

M. Grégoire (Jean-Luc): Oui.

M. Gautrin: Ça fait des situations un peu bizarres et un peu difficiles. Ça, je comprends ça.

Votre taux de diplomation est relativement semblable aux autres universités, c'est-à-dire le taux d'abandon, mais c'est la même question que, nous, on se pose. Vous avez, quand même, sur quelqu'un qui s'inscrit, à peu près 60 % qui va être diplômé et 40 % que vous allez perdre, à travers l'abandon ou la réorientation. Est-ce que c'est le cas? Est-ce que vous confirmez mes chiffres ou...

(17 h 30)

M. Cook (Robert): Oui. Les chiffres sont les chiffres de 1984 jusqu'à 1987. Pendant les années de la décade quatre-vingt, nous n'avons pas le même niveau de demandes d'admission. Nos étudiants, dans cette période, étaient un peu plus faibles que maintenant. C'était naturel qu'il y ait un plus grand taux de «décadrement». Mais, maintenant, nous avons un niveau de demandes plus élevé, et le niveau des étudiants est plus élevé. Et nous avons en place plusieurs programmes pour aider les étudiants qui ont des problèmes académiques.

M. Gautrin: Donc, si je comprends bien ce que vous me dites, c'est que vous avez amélioré la qualité, disons, de votre population étudiante actuellement. Je comprends. Et, simplement pour ma culture personnelle, votre population étudiante provient de quelle origine? Bishop's est réputée comme ayant des étudiants qui viennent d'un peu partout au Canada et même d'un peu partout au monde. Est-ce que vous avez – ça, je ne l'ai pas comme statistique – une image du caractère, je ne dirais pas international, mon collègue le dirait, mais, enfin, pluriprovincial de Bishop's? Parmi vos étudiants – vous avez 1800 étudiants, vous m'avez dit, à peu près – quel pourcentage provient, disons, du Québec, quel pourcentage provient du reste du Canada, quel pourcentage provient des autres pays?

M. Cook (Robert): Pour les étudiants à plein temps, pour le Québec, c'est 37 % et approximativement 5 % d'étudiants de l'international. Le reste vient des autres provinces. Nous avons maintenant, sur le campus, au moins un étudiant de chaque province et des Territoires.

M. Gautrin: Ça veut dire qu'il y en a 58 % qui viennent des autres provinces du Canada. C'est ça?

M. Cook (Robert): Oui.

M. Gautrin: C'est une caractéristique tout à fait unique chez vous, qui existe, je pense, dans peu d'institutions au Canada, et je pense qu'on peut vous féliciter, à ce niveau-là, de pouvoir permettre un brassage des différentes populations canadiennes. Je pourrai revenir plus tard et je pourrais passer la parole à mon collègue et ami, le député de Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je ne sais pas si ça mérite des félicitations ou pas, là. C'est un fait, effectivement, intéressant, inusité dans l'ensemble du réseau des universités. Est-ce qu'on doit comprendre, à ce moment-là, que c'est une orientation délibérée de la politique de recrutement et d'admission de Bishop's de faire en sorte qu'un pourcentage aussi important que ça d'étudiants venant des autres provinces soient admis et complètent, fassent leurs études dans votre université? C'est voulu, c'est délibéré? Je dirais, ça fait partie de votre personnalité? C'est un trait de la personnalité de l'université ou si c'est un hasard historique et que ça continue de se maintenir? Comment il se fait qu'une petite université comme la vôtre – ce n'est pas une grosse université, c'est une petite université – soit aussi, comment dire, courue en dehors du Québec, ait autant d'attraits que ça?

Une voix: Le football.

M. Brassard: Le football? Oui? Ah bon!

M. Cook (Robert): Non. Primo, je pense que c'est un accident historique parce que, pendant les années 1980 à 1984, par exemple, nous avons eu le plus grand taux d'étudiants du Québec et, pour adresser ce problème, nous avons maintenant dans notre encadrement quelqu'un qui a comme spécialisation le recrutement de plus d'étudiants du Québec. Nous avons fait un effort pour visiter tous les cégeps, anglophones et francophones, dans toute la province de Québec, depuis deux ans, et nous avons déjà des résultats. Le pourcentage des étudiants à plein temps du Québec a augmenté. C'est long, mais ça a commencé.

M. Brassard: Est-ce que ça ne s'explique pas aussi du fait que la communauté anglophone de l'Estrie est quand même une communauté qui s'est amenuisée en termes de nombre et, comme Bishop's est une université estrienne, évidemment, son bassin, à ce moment-là, de recrutement d'étudiants s'est trouvé, par la même occasion, réduit, et ça a été compensé par des étudiants venant d'ailleurs? Mais, là, je comprends bien que votre politique, actuellement, c'est vraiment d'essayer d'augmenter la proportion d'étudiants venant du Québec, y compris les étudiants francophones, parce que, je pense à McGill entre autres, il y a beaucoup d'étudiants francophones qui fréquentent McGill. Donc, vous vous efforcez maintenant aussi de faire du recrutement du côté des étudiants francophones pour compenser peut-être un peu cette diminution en quantité de la communauté anglophone de l'Estrie.

M. Cook (Robert): Oui. Il y a un autre problème aussi pour nous. Pour les étudiants qui habitent à Montréal, bien sûr, c'est moins coûteux de faire des études à McGill, à Concordia et à l'Université de Montréal que de venir à Bishop's parce qu'on doit déménager, on doit avoir un appartement, et c'est peut-être 4000 $ de plus par an. C'est difficile pour nous, spécialement pour les étudiants allophones, parce qu'ils ont l'habitude de rester chez eux; c'est difficile de convaincre les étudiants allophones de quitter Montréal et de venir chez nous. Mais nous faisons l'effort dans toute la province, à Montréal et dans toutes les autres villes, grandes et petites. Nous voulons, comme but, avoir 50 % au moins d'étudiants du Québec.

M. Brassard: J'imagine que vous jouez un peu aussi sur le cadre géographique de Bishop's, qui est tout à fait exceptionnel.

En termes de diplomation, je reviens là-dessus, je trouve au contraire que vous avez quand même un taux de diplomation passablement élevé, si on regarde en particulier dans certains secteurs: en sciences pures, c'est bon; en sciences de l'administration, c'est très, très élevé, 78 % de diplomation; en lettres aussi, 68 % de diplomation. Vous êtes au-dessus de la moyenne dans la plupart des secteurs. Donc, vous avez un taux de diplomation quand même acceptable. Est-ce que ça s'explique par le fait que vous avez peu d'étudiants à temps partiel? Votre clientèle d'étudiants à temps partiel est très faible. Est-ce que c'est une des explications ou est-ce que, également, en termes de critères ou de conditions d'admission, vous êtes assez sélectifs?

M. Cook (Robert): Je pense que maintenant tous les taux qui sont ici ont diminué de peut-être une demie. J'ai commencé de faire cette étude, dans la Faculté des sciences, en 1987, étudiant par étudiant, de suivre chaque étudiant pendant toute la période des études à Bishop's. Et je pense qu'il y a une nette amélioration de la situation. Je suis d'accord...

M. Brassard: Une plus grande persévérance?

M. Cook (Robert): Excusez-moi?

M. Brassard: Une plus grande persévérance?

M. Cook (Robert): Oui.

M. Brassard: Ils persévèrent davantage.

M. Cook (Robert): Et, aussi, le niveau de nos étudiants est meilleur maintenant, sans doute.

M. Brassard: Comment est-ce que vous expliquez ça? Est-ce que vous avez une politique très articulée, très précise, pour justement améliorer la persévérance et, donc, augmenter le taux de diplomation?

M. Cook (Robert): Oui, nous avons maintenant en place des programmes de support pour les étudiants. Nous n'avions pas le même genre de programmes avant. Ça a commencé depuis trois ans.

M. Brassard: Depuis trois ans?

M. Cook (Robert): Oui.

M. Brassard: Et déjà vous commencez à percevoir une nette remontée, une nette amélioration?

M. Cook (Robert): Absolument, oui, c'est vrai.

M. Brassard: Moi, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je suis d'accord sur les taux de diplomation; je m'excuse, avec la fatigue actuellement, je m'étais trompé de colonne, alors excusez-moi. Je voudrais rentrer sur un point qui vous intéresse aussi. Vous agissez principalement au premier cycle. Quel est votre taux de succès d'admission de vos étudiants à la maîtrise ou au doctorat dans d'autres universités? C'est une manière de mesurer la qualité d'une institution si ses étudiants qui finissent le baccalauréat, par exemple, et qui désirent aller faire des études graduées sont facilement admis ou plus difficilement admis, je dirais, dans les grandes institutions universitaires.

(17 h 40)

M. Cook (Robert): Nos étudiants n'ont aucun problème pour entrer dans les programmes de deuxième cycle et de troisième cycle. Par exemple, en sciences, je peux parler pour la Faculté des sciences, nous avons presque 100 % de succès pour nos demandes de «fellowship» du CRSNG...

M. Gautrin: Yes.

M. Cook (Robert): ...et des autres qui donnent des bourses pour les deuxième et troisième cycles. Un exemple spécifique: en chimie ou en biochimie, presque 80 % de nos étudiants qui ont un baccalauréat «honours» – c'est un programme spécifique – ont continué leurs études de deuxième et troisième cycle, 80 %.

M. Gautrin: C'est excellent. C'est excellent. Écoutez, il y avait une dernière petite question qui était d'ordre technique. Si on regardait, parce que je pense que le temps passe, la question budgétaire... On va quitter le domaine de la pédagogie pour rentrer sur la question des équilibres budgétaires. Je ne voudrais pas me tromper de page, cette fois-ci, pour ne pas avoir l'air idiot. Donc, je vais prendre mon temps. Si je regarde la situation de l'université, vous avez été en situation de déficit budgétaire en 1990-1991; vous avez été en situation de surplus budgétaire en 1991-1992; à nouveau, en situation de déficit budgétaire en 1992-1993. C'est bien cela? Est-ce que vous avez un plan de résorption de déficit?

Mais je comprends aussi que, dans une petite institution, de petites variations peuvent amener des variations importantes en situations de surplus ou de déficit, parce qu'il suffit d'avoir une variation de clientèle étudiante et vous ne pouvez pas vous séparer de votre personnel parce que vous êtes obligés de le payer. À ce moment-là, vous pouvez passer rapidement de surplus en déficit, en fonction des variations de clientèle étudiante. Comment se situe votre situation budgétaire, actuellement?

M. Grégoire (Jean-Luc): Pour l'année en cours, 1993-1994, nous prévoyons un équilibre budgétaire. Évidemment, le surplus ou le déficit inclut des entreprises qui s'autofinancent ou qui sont supposées...

M. Gautrin: Qui doivent s'autofinancer.

M. Grégoire (Jean-Luc): ...s'autofinancer: les entreprises auxiliaires, les services aux étudiants. L'an passé, le budget de fonctionnement régulier de l'université était en équilibre; ce qui ne l'était pas, c'étaient nos opérations, comme les groupes de conférences, l'été, qui ont été beaucoup moindres, probablement à cause de la récession et pour toutes sortes de raisons, et certains autres secteurs où, là, ça n'a pas été équilibré. Alors, c'est ce qui a créé un déficit, l'an passé.

Évidemment, vous ne voyez pas ça dans vos chiffres, mais, chez nous, tout ça est comptabilisé séparément. Les entreprises auxiliaires qui accumulent un déficit devront le rembourser éventuellement, quand les temps seront meilleurs. Alors, c'est ce qu'on prévoit faire. Notre politique a été d'avoir des budgets de fonctionnement équilibrés à travers toutes ces années-là. C'est ce qu'on essaie de faire année après année. On avait commencé à résorber notre déficit, comme vous l'avez bien remarqué, avec un surplus, il y a quelques années.

M. Gautrin: Absolument.

M. Grégoire (Jean-Luc): Évidemment, après ça, le plan de résorption de déficit qu'on avait fait a été un peu bousculé par des compressions budgétaires, par toutes sortes de facteurs. Donc, on n'a pas, depuis ce temps-là, pu continuer à rembourser notre déficit accumulé. On espère que ces bons jours-là vont revenir, mais, entre-temps, on essaie à tout le moins d'équilibrer nos opérations.

M. Gautrin: Une dernière petite question. Comment est fixé le loyer des bâtiments que vous louez au cégep Champlain? Parce que, dans le fond, en même temps, vous êtes subventionnés, vous avez un déficit, mais, après, vous nous louez des bâtisses; enfin, je dis à nous, c'est-à-dire au ministère de l'Éducation. Alors, comment s'établit le coût de location? Est-ce que c'est le ministère de l'Éducation qui décide du coût de location, point, et dit: C'est ça qu'on vous donne, prenez-le?

M. Grégoire (Jean-Luc): Ce n'est pas tout à fait ça. Il y a une certaine négociation, mais, comme vous le savez sans doute, la politique du gouvernement du Québec, c'est justement de ne pas permettre à un des organismes qu'il subventionne déjà de s'enrichir en percevant un loyer qui serait profitable. Alors, tout ce qu'on essaie de faire et tout ce que le gouvernement nous permet de faire, c'est de récupérer nos dépenses. Alors, on essaie d'identifier aussi justement que possible les dépenses réelles encourues. Pas la dépréciation sur les bâtisses et ce type de choses là, mais vraiment les dépenses, les déboursés qui ont trait aux espaces qui sont loués au collège, sur une base de mètres carrés.

M. Gautrin: Pourtant, à l'intérieur du ministère, il y a une formule pour les subventions qui vont aux cégeps – et c'est assez compliqué, la manière dont on subventionne les espaces – qu'on donne aux corporations des cégeps pour financer des espaces cégeps. Alors, ça peut amener de la rénovation, enfin, il y a toutes sortes de paramètres à l'intérieur. Est-ce que vous, vous recevez au minimum l'équivalent de cela – non? – ou si c'est strictement votre coût qui est là?

M. Grégoire (Jean-Luc): C'est strictement notre coût. Ce qu'on fait simplement, c'est qu'on cumule les coûts dans le secteur universitaire terrains et bâtiments, avec un certain pourcentage pour le «overhead», si on veut, puis, après ça, on prend une proportion des mètres carrés occupés par le collège, occupés par l'université et on fait une règle de trois. Après ça, c'est soumis au collégial qui, eux, regardent ça et, éventuellement... Mais je ne suis pas au courant de ce que le collégial fait avec le cégep.

M. Gautrin: C'est ça. Je vous poserai très brutalement...

M. Grégoire (Jean-Luc): Je doute qu'ils paient deux fois.

M. Gautrin: ... la question: Est-ce que c'est le collégial qui fait de l'argent sur l'Université Bishop?

M. Grégoire (Jean-Luc): Ça me surprendrait parce que...

M. Gautrin: Bien non, mais vous comprenez bien...

M. Grégoire (Jean-Luc): Oui, oui, je comprends votre...

M. Gautrin: ...qu'il y a une formule de financement où ils sont financés pour leurs pieds carrés.

M. Grégoire (Jean-Luc): Oui.

M. Gautrin: Est-ce que vous recevez l'équivalent ou pas?

M. Grégoire (Jean-Luc): On n'est pas dans le secret des dieux de ce que le collège reçoit. Est-ce que le ministère de l'Éducation...

M. Gautrin: C'est connu, ça, c'est public. La formule de financement, c'est compliqué, mais je peux vous l'envoyer. C'est très intéressant.

M. Brassard: Regardez ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non, mais c'est public et c'est connu. Moi, je vais la regarder, ça m'intéresse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: En tout cas, ça termine mes questions. Je voudrais vous remercier pour avoir eu la gentillesse de vous être déplacés, d'être venus nous informer sur ce qui se passe chez vous. Et je voudrais encore vous témoigner l'appréciation du ministre de l'Éducation, M. Chagnon, qui, malheureusement, n'a pas pu être présent parmi vous, mais ça ne veut pas dire qu'il ne vous porte pas dans son coeur.

M. Grégoire (Jean-Luc): Merci beaucoup.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je voudrais vous remercier pour votre témoignage et vous souhaiter bonne chance dans votre recrutement d'étudiants à travers le Québec.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Grégoire, M. Cook, et bon voyage de retour. La commission parlementaire de l'éducation ayant accompli son mandat, j'ajourne la séance sine die.

(Fin de la séance à 17 h 49)