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Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le mardi 6 février 1996 - Vol. 34 N° 21

Audition du sous-ministre de l'Éducation en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics


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Table des matières

Organisation des travaux

Exposé du Vérificateur général du Québec

Discussion générale

Remarques finales


Autres intervenants
M. Joseph Facal, président
Mme Jocelyne Caron, présidente suppléante
Mme Diane Barbeau, présidente suppléante
M. Rémy Désilets
M. Yves Beaumier
M. François Ouimet
M. Yvon Charbonneau
Mme Hélène Robert
M. Russell Williams
M. Lawrence S. Bergman
M. Jean-Guy Paré
*M. Henri-Paul Chaput, ministère de l'Éducation
*M. Jacques Babin, idem
*Mme Pauline Champoux-Lesage, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures six minutes)

Le Président (M. Facal): Bonjour. Comme nous avons le quorum, je vous propose d'ouvrir nos travaux. Bienvenue dans cette salle qui pose toujours le problème de savoir comment nous allons nous asseoir.

Le mandat de la commission est de procéder à l'audition du sous-ministre de l'Éducation, M. Pierre Lucier, dans le cadre de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics. Alors, bienvenue, M. Lucier, ainsi que tous les gens qui vous accompagnent.

Est-ce que nous avons des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Parent (Sauvé) est remplacé par M. Gautrin (Verdun) et M. Quirion (Beauce-Sud) par M. Williams (Nelligan).


Organisation des travaux

Le Président (M. Facal): Merci. Je souligne également à tous les participants que nous bénéficions aujourd'hui de la présence de M. Guy Breton, Vérificateur général du Québec, ainsi que de son équipe, que nous remercions pour sa collaboration et pour son soutien.

Il a été convenu, lors de notre dernière séance de travail, que notre journée serait organisée de la façon suivante: que nous consacrerions d'abord deux heures à échanger sur les sujets relevés par le Vérificateur général à propos du ministère de l'Éducation au cours des dernières années, suivies de quatre heures d'échanges cet après-midi, donc, sur toutes les questions touchant les niveaux primaire et secondaire, et que nous conclurions par deux heures d'échanges sur toutes les questions concernant les niveaux collégial et universitaire. Est-ce que cette façon de faire convient toujours aux membres de la commission?

M. Gautrin: M. le Président, les questions qui touchent la gestion générale du ministère, etc., pourront être abordées aussi éventuellement.

Le Président (M. Facal): Bien sûr. Personnellement, je voyais la période que nous avons mise sous la rubrique Vérificateur général comme une période pendant laquelle nous pouvions utiliser les remarques du Vérificateur comme des éléments déclencheurs qui nous permettraient, oui, d'avoir une vue d'ensemble des orientations du ministère.

M. Gautrin: C'est ça, qu'on puisse être souples et...

Le Président (M. Facal): Ah! bien sûr, bien sûr. Nous avons toujours été souples. Absolument. M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui. Moi, ce qui m'intéresserait en premier, ce serait, au départ, d'avoir une vision globale de la problématique, quitte, par la suite, à en venir au Vérificateur général ou à rentrer dans le sujet. Mais il me semble qu'une vision générale du dossier, ça m'aiderait à me faire une tête, puis à voir un petit peu ce vers quoi on s'en va, quitte à prendre, si on ne prend pas deux heures là-dessus, une heure. Je ne sais pas comment rétablir le temps, la chronologie, mais il me semble, au départ, que ça serait important, pour ma part. Je ne sais pas ce que les collègues en pensent, là.

(10 h 10)

Le Président (M. Facal): Pour bien nous comprendre, vous proposeriez un bloc de temps spécifique au départ sur un survol général et, ensuite, deux heures sur les remarques précises du Vérificateur ou bien à l'intérieur des deux heures prévues...

M. Désilets: Je n'ai rien arrêté comme tel. On a huit heures à faire?

Le Président (M. Facal): Oui.

M. Désilets: Et puis c'est peut-être de le prendre à l'intérieur. Les remarques du Vérificateur général sont quand même importantes. Est-ce que c'est trop, deux heures? Je pense que non. Je ne le sais pas. La plage horaire à l'intérieur, moi, je suis flexible là-dessus. Ce qui m'importe bien plus, c'est sûrement, au départ, d'avoir une vision globale. Après ça...

Le Président (M. Facal): Moi, je pense qu'à l'intérieur des deux heures consacrées au dernier rapport du Vérificateur on peut certainement, sans difficulté, trouver le moyen d'échanger en long et en large sur les orientations d'ensemble du ministère. Moi, je ne ferais pas de découpage dans le temps précis. Nous avons toujours fonctionné avec souplesse et ça nous a, jusqu'à maintenant, assez bien réussi.

M. Désilets: O.K. Moi, ça me va.

Le Président (M. Facal): D'accord?

M. Désilets: Oui.

Le Président (M. Facal): Bon. Alors, cela étant dit, est-ce que des membres ou alors M. Lucier souhaitent faire des remarques préliminaires pour camper un peu le terrain?

M. Gautrin: Je pense, M. le Président, qu'on est ici pour poser des questions plus que pour faire des remarques préliminaires pour tuer le temps.

M. Désilets: M. le Président...

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: ...lorsque les députés ou les personnes interviendront, est-ce qu'ils peuvent parler assez fort, parce que, lorsque M. Gautrin a parlé, je ne l'ai pas entendu?

M. Gautrin: C'est rare.

Le Président (M. Facal): Vous avez tout à fait raison, M. le député de Maskinongé. Le 1.38 a non seulement une acoustique épouvantable, mais, en plus, il cause des torticolis parce qu'il faut s'étirer le cou pour voir ce que dit le collègue. C'est très juste.

M. Gautrin: Il n'y a pas d'autres salles disponibles pour cet après-midi?

Le Président (M. Facal): Pour cet après-midi, oui, je crois que nous allons déménager nos pénates dans une autre salle. Vous en serez avisés. M. le Vérificateur, je crois comprendre que vous pouvez nous faire une mise en situation.


Exposé du Vérificateur général du Québec


M. Guy Breton

M. Breton (Guy): Exactement, en quelques minutes, si vous permettez. Alors, en plus des vérifications financières menées annuellement au ministère de l'Éducation, nous avons effectué, au cours des six dernières années, des interventions de vérification à caractère d'optimisation des ressources tant au ministère que dans le réseau. En résumé, ces interventions sont: la vérification de l'utilisation des subventions versées à cinq universités, qui a été effectuée en 1994-1995, le chapitre 13 de notre rapport actuel; la vérification de l'utilisation des subventions versées à huit collèges, cinq cégeps et trois collèges privés, effectuée en 1992-1993; la vérification de l'optimisation des ressources au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science à l'égard de l'enseignement collégial et de l'enseignement universitaire en 1991-1992, et le suivi des constatations et des recommandations effectué en 1994-1995; également, en 1994-1995, la vérification de l'optimisation des ressources de l'aide financière aux étudiants a été faite, le chapitre 12 de notre rapport de cette année; la vérification de l'utilisation des subventions versées à 20 commissions scolaires effectuée en 1990-1991 et le suivi des constatations et recommandations en 1993-1994; la vérification de l'optimisation des ressources au ministère de l'Éducation à l'égard de l'enseignement primaire et secondaire public en 1989-1990 et le suivi des constatations et recommandations effectué en 1992-1993.

J'aimerais mentionner que notre approche de vérification a changé depuis 1989-1990. Nous avons fait le passage d'une approche globale à une approche plus ciblée avec plus d'insistance sur l'impact économique des lacunes, c'est-à-dire le passage d'une approche axée sur l'examen de l'ensemble des processus pour assurer la qualité des services à une approche axée sur les résultats des secteurs qui nous apparaissaient les plus problématiques. Dans toutes ces vérifications, nous n'avons jamais remis en cause le bien-fondé des politiques et des objectifs des programmes. La Loi sur le vérificateur général ne le permet pas à l'article 25.

Toutes ces vérifications ont été orientées vers les grands principes de saine gestion et elles visaient particulièrement l'examen des mécanismes pour la planification des activités, la gestion des ressources et la reddition de comptes des activités et de l'utilisation des fonds publics. Nos constatations ne portent donc pas sur la qualité des services rendus, mais plutôt sur les systèmes et procédés mis en place pour assurer cette qualité. J'aimerais mentionner que, lorsque des vérifications ont fait l'objet d'un suivi des constatations et recommandations, des mesures ont été prises pour près des deux tiers de ces recommandations. Une vérification éventuelle pourra nous permettre de voir si ces mesures sont correctement appliquées.

Enfin, j'aimerais également mentionner aux membres de cette commission que, à la demande du ministre de l'Éducation, avant les Fêtes, nous l'avons rencontré, lui ainsi que les autorités du ministère, pour échanger sur les points non réglés dans les déficiences constatées au cours des dernières années dans le secteur de l'éducation. Nous croyons d'ailleurs avoir répondu à leurs attentes.

Le Président (M. Facal): Merci beaucoup, M. Breton. Alors, qui veut... M. le député de Verdun.


Discussion générale


Aide financière aux étudiants

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Alors, si je comprends bien, on va travailler à partir du rapport du Vérificateur général dans ce premier temps. Parce que 12 est avant 13, moi, je vais commencer par tout ce qui touche les questions sur l'aide financière aux étudiants. C'est une forme logique de commencer. Il y a trois points que je voudrais aborder avec vous et avec les gens du ministère et qui sont touchés dans le rapport du Vérificateur général: il y a la question qui touche la définition d'étudiant à plein temps, la question qui touche les contrôles et la question qui touche le recouvrement des comptes dus ou des mauvaises créances. Ça va être les trois points que je vais toucher et qui sont touchés dans le rapport du Vérificateur général.


Définition de l'étudiant à plein temps

Alors, dans le rapport du Vérificateur général – je fais référence à la page 194 du rapport du Vérificateur général et plus spécifiquement à l'article 12.12 – on parle du protocole d'entente entre le ministère et les établissements et on dit: «Ce protocole est vague sous certains aspects. Comme le démontre un récent sondage du ministère auprès des établissements d'enseignement – en particulier – l'absence de directives claires et précises entraîne des différences d'un établissement à l'autre [...] en ce qui concerne la définition du statut d'étudiant à plein temps.»

Alors, ma question, c'est: Qu'est-ce qu'il en est exactement de cette définition d'étudiant à plein temps et qu'est-ce que vous faites au ministère, actuellement, pour mieux préciser qu'on ait une vision uniforme entre les différents établissements du réseau pour ce qu'on appelle un étudiant à plein temps?

Le Président (M. Facal): M. le sous-ministre.

M. Lucier (Pierre): Oui, ça va. M. le Président, la définition de l'étudiant à plein temps, elle est simple, elle est même prévue dans la loi: on est étudiant à plein temps si on est inscrit à quatre cours. Quatre cours, donc, ça fait 180 heures. Les termes mêmes de la loi, on peut les citer. Donc, la définition est claire. Nous n'avons pas vu, de notre côté, de tergiversations ou d'hésitation sur la signification de ce qu'est un étudiant à plein temps.

M. Gautrin: Pourtant, les établissements semblent utiliser des définitions qui ne sont pas uniformes de ce qu'on appelle un étudiant à plein temps. Est-ce que c'est exact ou pas, ou si vous dites que ça ne marche pas?

M. Lucier (Pierre): C'est un problème que nous n'avons pas perçu de notre côté. Bon, la définition, elle est claire.

M. Gautrin: Et l'interprétation de la définition, elle est claire pour vous?

M. Lucier (Pierre): C'est difficile de passer à côté.

M. Gautrin: Donc, comment vous expliquez la remarque à 12.12, en haut de la page, deuxième colonne de la page 194? Je relis: «L'absence de directives claires et précises entraîne des différences d'un établissement à l'autre, par exemple en ce qui concerne la définition du statut d'étudiant à plein temps.» C'est quand même clair, ce que ça veut dire à ce niveau-là.

M. Lucier (Pierre): Je vous répète que, sur la définition, nous n'avons pas perçu, de notre côté, de problème.

M. Gautrin: Donc, vous, vous dites que, ça, ça ne marche pas.

M. Lucier (Pierre): Bien, c'est-à-dire que nous n'avons pas perçu ces difficultés-là.

M. Gautrin: Bon, alors, on est un peu en difficulté de fonctionnement. Vous, vous dites que, ça, ça n'existe pas.

M. Lucier (Pierre): Maintenant, là où il peut y avoir des choses moins claires, c'est sur la définition même de qui fait quoi. C'est de cette manière-là que, nous, nous avons compris cette remarque du Vérificateur général. C'est pour cela que nous les situons à l'intérieur de la clarification du protocole que nous avons avec les établissements.

(10 h 20)

Le Président (M. Facal): Les collègues assis aux deux extrémités me font comprendre que, en raison de la concurrence acoustique que le Carnaval nous fait, ils n'entendent absolument rien. Est-ce qu'il y aurait peut-être... Vous êtes aussi impuissant que nous, j'ai l'impression, hein?

M. Gautrin: C'est absolument... On va donc essayer de parler plus fort. Est-ce que vous m'entendez?

Une voix: Pardon?

Une voix: M. Gautrin, je vous entends; M. Lucier, c'est moins évident.

Le Président (M. Facal): Oui, il faudrait vraiment faire un effort pour s'approcher du micro.

M. Gautrin: Mais s'approcher du micro, ça n'a aucun effet.

Une voix: Il n'y a pas de haut-parleurs.

M. Gautrin: Ça n'a aucun effet, puisque c'est strictement pour l'enregistrement. Mais ça n'a pas plus d'effet que ça.

Le Président (M. Facal): Donc, à moins d'être un baryton comme vous, je crois que...

M. Gautrin: Je pensais que j'étais une basse!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Bon, alors, on va faire de notre mieux jusqu'à la séance de cet après-midi.


Prêts excédant les montants maximums permis

M. Gautrin: Bon. Alors, j'ai une deuxième question, toujours sur la question qui touche l'aide financière aux étudiants. Ça touche 12.16. Alors, le Vérificateur général dit que, «pour l'année 1993-1994, le ministère a accordé 1 839 prêts en excédent des montants maximums» permis et le coût total de cet excédent a mené à une dépense de 5 600 000 $. Je vous fais grâce des dollars. Alors, ce que j'ai lu dans la réponse que vous faites aux commentaires du Vérificateur général, vous dites qu'il y a une ambiguïté dans le règlement et que vous étiez justifiés d'accorder ces prêts en excédent. C'est-à-dire qu'il y a quand même...

Bon, 5 600 000 $, vous allez me dire, sur votre budget, ce n'est pas la fin du monde, mais, actuellement, on cherche de l'argent partout. Alors, qu'est-ce qu'il en est de ce fait-là? Comment se fait-il qu'il y ait des montants qui excèdent ce qui est prévu par règlement? Qu'est-ce que vous avez à répondre sur cette question-là? Donc, je fais référence à la partie 12.16. Montants maximums des prêts.

M. Lucier (Pierre): Alors, pour comprendre l'opération que nous allons mener à ce sujet-là, il faut rappeler la nature même du problème qui est soulevé ici. Je vais essayer de vous faire une histoire courte. Vous savez que les étudiants sont admissibles à l'aide financière en prêts et bourses pour le nombre de trimestres compris dans le programme, la durée normale d'un programme, donc du programme qu'ils choisissent. Par exemple, un cégep préuniversitaire, c'est quatre sessions; un bac de trois ans, c'est six sessions. Alors, disons pour ce qui couvre le nombre de périodes dites normales. On pourrait dire, hein, N périodes.

M. Gautrin: D'accord, ça marche.

M. Lucier (Pierre): C'est variable d'un cycle à l'autre évidemment. S'ajoutent à cela deux périodes supplémentaires où l'étudiant peut recevoir encore prêts et bourses et deux autres périodes supplémentaires où il reçoit son aide uniquement sous forme de prêts.

Quand la loi a été ajustée en 1990 – je n'étais pas là, mais la tradition orale a toujours été stable là-dessus – il avait été clair que la diminution des périodes d'admissibilité était, pour ainsi dire, compensée par le fait que les deux dernières sessions permettaient quand même d'avoir l'aide équivalente, même si c'était sous forme de prêts. Pour bien voir le problème, c'est que, dans la loi, on fixe quel est le montant maximal qu'on peut avoir dans un prêt, seulement pour ceux qui ont une aide et seulement en prêts. Et on dit, par ailleurs, que l'étudiant qui est dans les deux dernières sessions supplémentaires reçoit son aide uniquement en prêts.

La tradition orale nous dit que la volonté du législateur était claire, c'était que, même si l'aide n'était donnée que sous forme de prêts dans les deux dernières sessions, elle ne serait pas diminuée; elle serait quand même maintenue. Je ne veux pas entrer dans ces arguties des gens de robe, mais on nous a dit plusieurs fois qu'il y avait une différence entre «uniquement» et «seulement». Bon, alors, peu importe. Mais toujours est-il que nous avons vécu là-dessus, et la commission MacDonald, qui a étudié le problème l'année dernière, tient pour acquis que c'est ça, l'interprétation.

Donc, si on ne donne qu'en prêts à la fin, pour les deux dernières sessions, on ne donne pas moins. Et il y a un argument de poids là-dedans, qui est la philosophie même du régime: le régime est basé sur les besoins de l'étudiant. Alors, on calcule de quoi l'étudiant a besoin et on donne un montant. Alors, comment pourrait-on justifier que, dans les deux dernières périodes, on dise: Écoutez, monsieur, madame, c'est de valeur, vous n'aurez pas ce dont vous avez besoin, puisqu'on doit vous donner le prêt seulement qui, lui, est fixé par le gouvernement. La réponse administrative et, je dirais, politico-administrative, depuis 1990, c'était de dire que la dernière session était donnée uniquement en prêts, mais aptes à couvrir les besoins. C'est la logique même du système.

Une fois qu'on a dit tout cela, il reste que, à distance, effectivement – et c'est les remarques du Vérificateur général qui ont sonné l'alerte, si je peux dire – on s'aperçoit que ce n'est pas évident pour un lecteur ordinaire, que nous sommes tous, cette distinction entre «uniquement» et «seulement». Alors, il est évident que nous avons mis en marche un processus avec des services juridiques pour proposer une clarification de la chose non pas dans le sens de l'ablation, mais dans le sens de la confirmation de l'interprétation historique qui consiste à rester fidèle au principe même du régime. Remarquez qu'il s'agit de prêts seulement; les 5 000 000 $ dont il est question, c'est en prêts. Donc, dans le budget des intérêts, c'est à peu près 400 000 $.

Alors, l'application rigoureuse de l'interprétation ou de la question que pose le Vérificateur général consisterait à annoncer à 9 000 étudiants, prochainement: Excusez-nous, on s'est trompés. Vous n'avez pas droit à toute l'aide dont vous avez besoin en vertu de l'esprit du régime, puisque le prêt est limité. Alors, je serais étonné que le législateur décide d'aller dans ce sens-là. C'est pourquoi nous avons préparé tout ce qu'il faut pour faire cette clarification-là qui, dans la tête des gens du réseau de l'aide financière, ne portait aucune ambiguïté. Mais, en stricte rigueur de termes, nous avons accueilli cette remarque du Vérificateur. En fait, il nous a sonné l'alerte sur une ambiguïté.

Le Président (M. Facal): M. le député de Verdun.


Remboursement des montants dus

M. Gautrin: J'ai un troisième point que je voulais aborder avec vous sur la question de l'aide financière et peut-être, après, j'aurai d'autres questions, mais peut-être que les parlementaires... C'est toujours sur l'aide financière. Les remarques à 12.18 et 12.26, là, on va parler des remboursements de montants dus et, aussi, des comptes à recevoir. Pour mettre les choses en situation, dans votre rapport de 1994-1995, on voit, malgré tout, qu'il y a une amélioration: en 1993-1994, vous avez recouvré 11 000 000 $ de créances dues; en 1994-1995, vous avez recouvré 21 000 000 $ de créances dues. Donc, il y a, de la part du ministère, semble-t-il, une amélioration dans les recouvrements des créances qui sont dues par les étudiants.

Ma question à caractère plus global, au départ, c'est: Qu'est-ce que vous faites d'une manière très spécifique pour avoir ou récupérer ce qu'on vous doit dans le cadre des montants impayés des prêts-bourses, ce qui est quand même un montant assez important? Parce que, toujours en faisant référence à votre rapport, à la page 63 du rapport 1994-1995, le nombre de réclamations payées par le gouvernement était de l'ordre de 4 000, quand même. Mais vous êtes capable d'en récupérer plus. Je ne conteste pas que... Mais qu'est-ce que vous faites spécifiquement, actuellement, pour récupérer les créances dues et quel est votre programme de récupération dans ce cadre-là?

M. Lucier (Pierre): Là, je ferais remarquer qu'en citant 12.18 et 12.26...

M. Gautrin: Je vais revenir plus spécifiquement sur 12.26 après, qui est l'optimisation des montants dus. Donc, 12.18 est entre ma question que je vais poser après dans 12.26, si vous me permettez, qui est: Qu'est-ce que vous faites? Et après: Est-ce que vous réfléchissez sur l'optimisation de ce que vous faites? Mais, ça, c'est 12.26. Ça, je suis d'accord avec vous. J'ai bien compris. J'ai bien lu le rapport et je sais de quoi je parle.

M. Lucier (Pierre): Alors, à 12.18, c'est autre chose; il s'agit des bourses versées en trop. Vous savez que l'étudiant fait ses déclarations de revenus et, une fois l'année civile terminée, il arrive que le chiffre réel et vérifié du revenu ne soit pas le même. Évidemment, si l'étudiant n'a pas déclaré exactement tous les revenus qu'il a eus, ça a un effet sur sa bourse. Alors, si on découvre après qu'il y en a eu plus, de revenus, bien évidemment il y a eu une bourse versée en trop. Depuis deux ans, nous faisons une vérification au ministère du Revenu. D'ailleurs, les étudiants nous signent leur accord là-dessus. Vous pouvez vérifier au ministère du Revenu, ce n'est pas toujours facile pour eux d'avoir le montant exact.

(10 h 30)

Alors, cette vérification a été mise en place l'année dernière, non sans difficulté, je le reconnais, parce que c'était une grande opération, une opération frustrante, aussi, pour les étudiants. On a dû récupérer des bourses versées en trop pour un montant assez important et auprès d'un assez bon nombre d'individus, et l'opération se poursuit. Pour ces bourses versées en trop, je vous dirai que le recouvrement est total puisque nous avons la possibilité, donc...

M. Gautrin: Est-ce que les pénalités prévues pour déclarations fautives, vous...

M. Lucier (Pierre): Ça, c'est autre chose.

M. Gautrin: C'est autre chose. Alors, finissons les bourses versées en trop. Allons-y.

M. Lucier (Pierre): Je voudrais vous parler de la récupération des bourses versées en trop. Là, ce n'est pas un effort; c'est total. On récupère.

M. Gautrin: C'est-à-dire que l'étudiant reverse normalement...

M. Lucier (Pierre): Oui. Ou c'est déduit d'autres versements.

M. Gautrin: D'autres versements, etc.

M. Lucier (Pierre): Donc, nous récupérons. Voilà pour la récupération financière. La remarque du Vérificateur général porte sur l'application des pénalités.

M. Gautrin: 12.20.

M. Lucier (Pierre): Bon, alors, il y a des déclarations mensongères et il y a des déclarations fausses ou incomplètes. Nous avons fait remarquer dans le rapport qu'il y a une distinction énorme entre déclaration mensongère et déclaration erronée.

M. Gautrin: Exact.

M. Lucier (Pierre): Comment accuser quelqu'un de vouloir nous tromper – parce que c'est ça, le mensonge, selon «Le petit catéchisme» – s'il nous signe en même temps une permission d'aller voir au ministère du Revenu quels sont ses revenus? Alors, donc, le concept de déclaration mensongère doit être traité avec des pincettes. Il y a un certain nombre de cas, chaque année, disons, assez clairs, de manoeuvres douteuses où il nous est arrivé d'appliquer... Depuis 1978, voyez-vous, on a 640 cas où on a bloqué l'accès pour deux années, dans des cas clairs, disons.

M. Gautrin: Mais vous n'avez pas imposé de pénalité.

M. Lucier (Pierre): Non. Maintenant, pour ce qui est des pénalités, ce n'est pas nous qui pouvons les imposer. Il faut aller en cour pour ça. Donc, c'est un tribunal qui en décide.

M. Gautrin: Et l'optimisation des ressources...

M. Lucier (Pierre): Bon, alors, c'est un tribunal qui en décide. Nous avons mis nos efforts sur la récupération financière des bourses versées en trop. Nous n'avons pas perçu de volonté politique de poursuite ou d'incarcération des étudiants qui avaient des bourses versées en trop. C'est pourquoi nous n'avons pas bougé et nous n'avons pas l'intention de bouger. D'autant plus que, du strict point de vue des technicalités de discussion judiciaire, je ne suis pas avocat, mais je nous imagine mal plaider la tromperie quand quelqu'un nous dit qu'on peut aller dans ses dossiers au Revenu. Alors, donc, je voudrais qu'on démêle ces choses-là.

Donc, nous récupérons les bourses versées en trop, nous annulons l'admissibilité dans de bons gros cas de malversation ou de comportement frauduleux. Pour ce qui est des pénalités sur des bourses versées en trop, je vous le dis en toute simplicité, compte tenu de tout ce que je vous ai dit, à moins d'un signal politique clair, nous n'irons pas dans cette voie-là.

M. Gautrin: Alors, il me reste l'autre question, à ce moment-là. À la fin du processus, l'étudiant qui a cessé d'être étudiant doit donc rembourser son prêt. C'est donc des créances; on est dans le deuxième élément, 12.26, si je ne me trompe pas, l'étudiant qui ne rembourse pas son prêt ou qui est en défaut de paiement. Alors, quelles sont les mesures que vous avez mises sur pied pour avoir les remboursements de ces sommes dues? Le Vérificateur vous fait une remarque: «Il n'est pas rentable d'entreprendre une procédure de recouvrement. Il n'est donc pas en mesure d'optimiser ses efforts de recouvrement des comptes à recevoir qui s'établissent à plus de 189 500 000 $.» Il y a 189 000 000 $ de comptes à recevoir.

Je dois dire que, dans votre rapport, vous avez, entre 1993-1994 et 1994-1995, une augmentation des paiements des comptes à recevoir, si j'ai bien lu votre rapport; je me trompe peut-être sur la lecture, mais je pense que non. Alors, qu'est-ce que vous faites et comment vous réagissez à cette remarque, à 12.26, du Vérificateur général?

M. Lucier (Pierre): La remarque du Vérificateur rejoint nos souhaits à nous-mêmes. Évidemment, nous souhaitons optimiser notre capacité de recouvrer.

M. Gautrin: Vous faites quoi, actuellement, pour ça?

M. Lucier (Pierre): Sur la technicalité du processus, je peux demander à mon collègue Vachon de vous l'exposer, mais je vous dirai...

M. Gautrin: Parce qu'il y a quand même pas mal d'argent en jeu. Il ne faut quand même pas minimiser ce qui se passe. C'est 10 000 000 $ que vous avez gagné en un an. Il a quand même quelque chose que vous avez dû faire en particulier.

M. Lucier (Pierre): Alors, le problème très concret de gestion de cela, ça finit par être une question de ressources: nous-mêmes. Vous savez que nous faisons cela nous-mêmes et nous avons actuellement un projet imminent pour lequel nous allons essayer d'avoir les autorisations, la possibilité, disons, d'autofinancer les salaires des ressources affectées à cette fin-là à même ce qu'elles vont chercher. Alors, évidemment ça prend des gens pour faire des démarches. C'est parfois de petites créances, il y en a qui sont des créances... Nous devons en annuler, vous le savez. C'est une série de démarches, il faut téléphoner, il faut écrire; donc, ça prend du monde et, là comme ailleurs, évidemment nous ne sommes pas en expansion de ressources humaines. C'est pour cela...

M. Gautrin: Envisagez-vous de confier ça à une unité autonome du ministère qui pourrait être...

M. Lucier (Pierre): Ça, c'est autre chose. Ça ne changerait pas substantiellement...

M. Gautrin: Vous pourriez mesurer, à ce moment-là, si elle est rentable ou non rentable.

M. Lucier (Pierre): Nous pensons que c'est rentable de mettre du monde là et c'est pour ça que nous avons un projet pour accroître sensiblement notre force de ce côté-là. Mais ça nous prend un arrangement qui va nous permettre, je dirais, de le financer à même ce que l'individu va chercher en recouvrements. Alors, il me semble que l'individu qui va chercher son 1 000 000 $ dans l'année ne coûte pas cher, mais encore faut-il trouver des modalités de tout ordre pour permettre cela. Sinon, ça supposerait que nous enlevons des gens qui font autre chose pour faire ça.

M. Gautrin: M. le Président, sur ce qui touche l'aide financière aux étudiants, ça termine mes questions. J'en aurai d'autres sur d'autres points du Vérificateur général.

Le Président (M. Facal): Le député de Maskinongé a demandé la parole. Moi, je vous proposerais que l'on vide la question de l'aide financière et, ensuite, de passer à un autre des blocs relevés par le Vérificateur général, de manière à être bien sûrs que nous n'oublions rien et de manière à ne pas faire d'allers-retours d'un thème à l'autre.

Sur l'aide financière aux étudiants, j'ai dans l'ordre les députés de Maskinongé, de Marquette et de Groulx.

M. Désilets: M. le Président, ce n'était pas sur l'aide financière; c'était plus d'ordre général.

Le Président (M. Facal): D'accord. Sur l'aide financière aux étudiants, ça va? Sujet clos. M. le député de Groulx.


Prêts excédant les montants maximums permis (suite)

M. Kieffer: Oui, j'aurais une ou deux questions à demander à M. le sous-ministre. Tantôt, vous avez parlé de la période N qui équivaut à la durée normale des études. Ai-je bien compris?

M. Lucier (Pierre): Oui, c'est un sigle commode parce qu'il faudrait changer le chiffre à chaque...

M. Kieffer: Non, ça me va. Je n'étais pas très fort en algèbre, mais je peux comprendre le principe. La première période supplémentaire, là, vous accordez prêts et bourses et la deuxième période supplémentaire, vous n'accordez que les prêts. J'ai bien compris?

M. Lucier (Pierre): N plus deux plus deux.

M. Kieffer: C'est-à-dire les deux premières. Oui, oui, c'est ça.

M. Lucier (Pierre): C'est ça.

M. Kieffer: Quand vous dites deux, c'est deux sessions, je suppose.

M. Lucier (Pierre): C'est ça.

M. Kieffer: En dehors du curriculum tel que déterminé par l'université lors de la durée normale du cours suivi.

M. Lucier (Pierre): Oui, c'est ça. Au collège et à l'université.

M. Kieffer: Comment est-ce que le législateur justifiait cet octroi, à toutes fins pratiques? Est-ce que c'était compte tenu du fait que l'étudiant pouvait changer de programme, par exemple, ou est-ce que c'était plus associé à la difficulté de réussite de la part des étudiants?

M. Lucier (Pierre): C'est une décision assez ancienne, même la réforme de 1990 a amené la diminution du nombre de ces périodes-là. C'est un régime qui est axé carrément sur l'aide financière pour permettre d'accéder aux études. Ce n'est pas du tout axé sur l'excellence ou sur la réussite comme telle; c'est vraiment pour lever l'obstacle financier pour accéder aux études. C'est une loi qui était généreuse, si on peut employer le mot sans le qualifier indûment, dans ce sens qu'elle a prévu des marges de rallongement assez substantielles, puisque ce qu'on dit: N plus deux plus deux, c'est déjà moins que ce que ça a déjà été. Le régime était ainsi conçu, et le législateur a, en 1990, restreint les choses un peu avec cette modalité du prêt, calculé comme nous le calculons là, pour les deux dernières périodes.

M. Kieffer: Les coûts de plus deux plus deux, pas de N, en d'autres mots, les coûts de la rallonge sont de quel ordre?

M. Lucier (Pierre): Ah, mon Dieu! Écoutez, pour une des deux premières périodes, on est sûrement dans l'ordre de 20 000 000 $. Alors, je ne suis pas sûr que ça se multiplie par quatre, cependant.

(Consultation)

M. Lucier (Pierre): 32 000 000 $ à peu près.

M. Kieffer: À quel niveau: cégep, université ou le total?

M. Lucier (Pierre): Tous niveaux confondus.

M. Kieffer: Tous niveaux confondus, c'est à peu près 30 000 000 $.

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Kieffer: Pour les deux périodes supplémentaires.

M. Lucier (Pierre): Pour les quatre périodes.

M. Kieffer: Bien, c'est-à-dire oui, parce que j'y vais par blocs.

M. Lucier (Pierre): Pour les quatre périodes.

M. Kieffer: M. le Président, est-ce qu'on va avoir un bloc qui va toucher aux coûts de l'abandon et de l'échec ou bien si on en parle à ce moment-ci?

Le Président (M. Facal): Moi, je vous proposerais de l'évoquer dans les deux heures que nous consacrerons aux niveaux collégial et universitaire, mais le bloc ne s'arrime pas directement à ce que le Vérificateur a observé ces dernières années.

M. Kieffer: Il y a des notes du Vérificateur qui portent là-dessus. Il y en a des notes qui portent là-dessus. Mais je n'ai pas de problème à attendre. Si vous me dites qu'on peut y revenir, ça me va.

Le Président (M. Facal): Oui. Toujours sur l'aide financière, M. le député de Champlain.

M. Beaumier: Oui, une précision. Quand vous parlez de N plus deux plus deux, ça, c'est lié à l'étudiant qui est inscrit à un programme, etc. Mais, s'il change de programme, est-ce que c'est lié à la durée de l'étudiant comme tel ou bien donc s'il y a des changements de programme, d'orientation, s'il prend un deuxième D.E.C ou un deuxième baccalauréat...

(10 h 40)

M. Lucier (Pierre): Il est limité à l'intérieur du cycle du programme concerné, oui. Alors, s'il change...

M. Beaumier: C'est compris dans le N plus deux plus deux, puis il n'y a pas de prolongement par après?

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Beaumier: C'est beau, merci.

M. Kieffer: J'ai une petite précision parce que ce n'est pas clair. S'il change de programme, est-ce qu'il recommence à neuf, N plus deux plus deux, ou bien si, globalement, dans toute sa vie d'étudiant, de l'âge de 20 ans à 40 ans, il a droit à N plus deux plus deux? C'est ça?

M. Beaumier: Non, par cycle, par cycle.

M. Lucier (Pierre): Non, non, non. N plus deux plus deux pour chacun des cycles et des niveaux. Par exemple, si vous êtes entré au cégep, alors, pour un cégep préuniversitaire, c'est quatre plus deux plus deux.

M. Kieffer: Oui.

M. Lucier (Pierre): Alors, c'est ce que vous avez pour un D.E.C. préuniversitaire, que vous changiez ou non.

M. Kieffer: O.K. Donc, c'est globalement pour chaque niveau.

M. Lucier (Pierre): C'est ça. Alors, c'est...

Le Président (M. Facal): Je vous propose...

M. Lucier (Pierre): Excusez-moi.

Le Président (M. Facal): Je vous en prie.

M. Lucier (Pierre): Ensuite, bien, l'universitaire au premier cycle, six, et ainsi de suite.

Le Président (M. Facal): Comme nous avons beaucoup de terrain à couvrir, je vous propose de délaisser un petit peu l'aide financière aux étudiants.

M. Ouimet: M. le Président, juste une question sur l'aide financière aux étudiants.

Le Président (M. Facal): Et ce sera la dernière?

M. Ouimet: Ce sera la dernière.

Le Président (M. Facal): Parfait.


Faillites non reconnues par le ministère de l'Éducation

M. Ouimet: Ça concerne davantage un commentaire dans le dernier rapport du Protecteur du citoyen concernant les étudiants qui doivent déclarer faillite et dont les conséquences de la faillite ne sont pas reconnues par le ministère de l'Éducation. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, j'avais posé la même question au ministre Garon. Est-ce que la pratique du ministère a changé? En d'autres termes, les étudiants qui déclarent faillite et qui se présentent devant la Cour fédérale par la suite sont reconnus comme étant libérés de leurs créances. Sont-ils également libérés de leurs créances par rapport au ministère de l'Éducation?

M. Lucier (Pierre): Non. La réponse, c'est non. Nous appliquons la loi comme nous la comprenons et nous avions répondu au Protecteur que sa remarque équivalait à demander un changement à la loi.

M. Ouimet: Donc, lorsqu'on a un jugement d'une cour fédérale accordant la faillite à un étudiant, pour les effets sur le plan provincial en ce qui concerne le ministère de l'Éducation, votre interprétation de la loi sur l'aide financière fait en sorte que l'étudiant n'est toujours pas libéré de ses dettes.

M. Lucier (Pierre): Exact.

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.


Valorisation des ressources humaines

M. Désilets: Oui, c'est plus d'ordre général, par exemple, la question. On parle d'optimiser les ressources financières. Je voudrais savoir: Qu'en est-il des ressources humaines? Quand je vous dis ça, j'ai en tête la valorisation de tout l'appareil que vous avez sous votre responsabilité, jusque dans la classe. Comment pouvez-vous réussir à mobiliser ou à intéresser les gens en éducation? C'est large, là. Mais il y «a-tu» un objectif plus particulier? Il y «a-tu» des choses immédiates qui s'en viennent pour l'éducation là-dedans? On a beau parler de chiffres, mais l'humain qui est là, qui est démobilisé, il faut le reventiler, lui donner un second souffle.

M. Lucier (Pierre): Je comprends que la question concerne le ministère, parce que, nous, nous n'enseignons pas, nous n'allons pas jusque dans la classe, les fonctionnaires du ministère.

M. Désilets: Non, non, mais...

M. Lucier (Pierre): Nous essayons d'avoir des pratiques, en matière de ressources humaines, qui font appel à l'intelligence, à la responsabilité des gens, au dialogue ouvert. C'est ce que nous essayons de pratiquer à l'interne. Nous essayons de reconnaître concrètement les responsabilités des différents paliers et d'amener les gens à exercer leur zone de responsabilité et à en rendre compte. Nous essayons de le faire dans l'intelligence, autant que possible, dans le respect des personnes.

Mais je vous dirais qu'évidemment la clé des sentiments de valorisation dans un ministère comme le nôtre, c'est beaucoup lié à la perception que les fonctionnaires ont de l'importance de leur mission, de la perception de leur mission dans la société et de la clarté et de la vigueur des objectifs politiques qui sont proposés à leur action. C'est toujours cela qui est le plus valorisant. Pour ma part, comme premier gestionnaire de ministère, j'essaie de tabler sur ce genre de valeurs là plus que sur d'autres.

Je ne sais pas si ça répond à votre question, mais je ne peux pas vous parler de valorisation du monde de l'enseignement. Ça, ça déborde de beaucoup, disons, ma petite gestion à moi. Il y a telles choses que des commissions scolaires, des collèges, des universités. Enfin, on enseigne sans nous. Comme vous le savez, les choses se passent sans nous. C'est dans cette ligne-là que je répondrais. Alors, ça se traduit à la fois dans nos plans de délégation de gestion des ressources humaines, qui sont très décentralisés. Donc, les responsabilités sont prises dans les unités, dans tout ce qui... Moi, je ne me suis gardé que l'affectation des cadres et des mouvements d'unités plus générales. C'est vraiment les gestionnaires de première ligne qui ont des responsabilités en matière de ressources humaines. Nous pensons que cela aussi est un facteur de valorisation.

M. Désilets: Moi, je vous apportais ça parce que, pour avoir enseigné quelques années, tout près de 20 ans, souvent les gestionnaires d'une commission scolaire nous disaient: Ça, là, ça vient d'en haut, embarque. On ne se sentait pas partie prenante. Et, souvent, on est comme on est mené. Mais c'est dans la vision, dans le sens que, si les gens d'une commission scolaire ou au niveau régional se sentaient un peu plus partie prenante des décisions, peut-être que ça va se refléter dans la couleur sur le terrain, dans l'attitude des gens. C'est dans ce sens-là que je vous posais plus la question. Est-ce que vous avez perçu ou est-ce que vous préparez des choses pour embarquer le monde pour qu'il se sente vraiment partie prenante des décisions?

M. Lucier (Pierre): Évidemment, nous exerçons nos responsabilités dans un certain nombre de domaines qui sont prévus par les lois et les règlements. Cela, je pense qu'on essaie de s'y maintenir et de le faire correctement. Mais il existe un nombre très, très élevé de toutes sortes d'instances mixtes, de toutes sortes de discussions préparatoires à toutes les discussions. Il y a une tradition dans le monde de l'éducation là-dessus, nous la pratiquons. Nous la pratiquons diversement, selon les contextes ministériels, mais c'est toujours important.

Je vous dirai que, là-dessus, ce n'est pas une gestion par cogestion, mais c'est une gestion par partenariat et discussions assez poussées avec l'ensemble des réseaux. Du moins, c'est comme ça que nous voulons faire les choses. Ces organismes-là et ces instances-là sont plus ou moins actifs et effervescents selon les périodes de la vie ministérielle et de la vie des réseaux. Parce qu'il faut le dire, mais le fond est toujours le même, c'est toujours revitalisable, presque à volonté. Les gens en éducation sont des gens qui, pour la plupart, ont la piqûre – appelons plutôt ça la vocation – ont le sens de la mission. Et je suis toujours, moi, étonné de la capacité de réponse, quelles que soient les circonstances, et de la fidélité et de la loyauté à la mission éducative, quelles que soient les circonstances. Alors, nous essayons, en tout cas, moi, j'essaie, comme gestionnaire, de tabler sur ce genre de valeurs là en nous adaptant aux différents contextes ministériels que nous pouvons connaître au cours des années.


Universités

Le Président (M. Facal): Je vous propose de passer à une section suivante, qui serait le premier des points évoqués tout à l'heure par le Vérificateur, à savoir le monde universitaire, c'est-à-dire ce qui, dans le rapport du Vérificateur, se trouve au point 13.2 et suivants.

(10 h 50)


Étudiants canadiens inscrits dans les universités québécoises

Avant de passer la parole au député de Verdun, je voudrais – parce que je sais qu'il aura plus d'une question – en poser une rapidement, M. le sous-ministre, concernant les étudiants canadiens originaires de l'extérieur du Québec, mais inscrits dans les universités québécoises. On a évoqué, ces derniers temps, que leur nombre augmentait, d'une part, j'en suis certain, en raison de la qualité de ce qui leur est offert ici, mais aussi, bien sûr, en raison de l'écart dans les frais de scolarité entre les universités québécoises et les universités canadiennes. Il m'apparaît que la mobilité des cerveaux est certainement un enrichissement intellectuel et pour eux et pour tout le monde, mais il y a également, je présume, parvenu à un certain niveau, la question, tout de même, du volume.

Est-ce que vous trouvez la situation actuelle problématique ou non? Si vous la trouvez problématique, est-ce qu'il serait – je réfléchis à voix haute – techniquement et légalement envisageable de charger aux étudiants canadiens hors Québec les frais de scolarité en vigueur dans leur province d'origine? Question qui ne se pose pas si vous me dites qu'il n'y a pas là un problème et que les nombres restent tout à fait raisonnables.

M. Lucier (Pierre): Bien, je dirais qu'en un certain sens, comme l'enseignait Sartre, le problème, il est beaucoup dans la tête de celui qui le pose. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a des faits. Ce n'est pas d'emblée un problème. Bon. Dans le cas des étudiants canadiens non québécois, ils ont le même traitement que les étudiants québécois. C'est le principe général de la mobilité. Ce serait même la difficulté sur le concept de résidence: à partir de quand on a changé de territoire dit provincial. Alors, actuellement, nous en avons, quoi, une dizaine de mille étudiants canadiens dans nos universités, à peu près, oui; mettons 10 000 pour faire un chiffre rond. Est-ce que ça va croître? Ce n'est pas un problème en soi d'avoir du sang d'ailleurs.

Une voix: Absolument pas.

M. Lucier (Pierre): On ne peut pas parler dans leur cas d'étudiants étrangers au plein sens du terme, mais il y a actuellement, vous le savez, dans le monde une chasse aux étudiants étrangers. Les grands pays du monde se les arrachent, parce que c'est comme ça que se nouent les maillages technologiques, que se font les alliances et que se font les amitiés internationales importantes pour la mondialisation. On cite couramment le cas du Japon qui en veut 100 000 par année et qui met les ressources qu'il faut parce qu'ils ont jugé que c'était un bon placement. Donc, en soi, la circulation de sang neuf est... C'est parce que le premier instrument de transfert scientifique et technologique, c'est les personnes, c'est les diplômés, il ne faut pas se le cacher. Ça va dépendre, je dirais, de l'évolution. À 10 000, pour ma part, si je peux me permettre de donner une opinion, je ne vois pas où est le problème. Tout dépendrait...

Le Président (M. Facal): L'évolution ces dernières années?

M. Lucier (Pierre): Bon, ça a eu tendance à augmenter un peu, mais on n'a pas encore de courbe évidente que c'est une montée en flèche. Il faudra voir parce que, à ce moment-là, il faudra mettre en ballottage notre volonté d'accueillir du sang neuf et aussi notre capacité de payer, c'est évident. Est-ce qu'on est arrivé à ce point-là? Bien, c'est à chacun d'en juger. Nous n'avons pas vu une explosion telle que ça deviendrait critique subitement. Mais il faudra qu'on veille à ça, parce que, si ça prenait une tangente très forte, à ce moment-là, il faudra qu'on modère nos souhaits d'échange avec nos capacités de payer. Il n'y a aucun doute là-dessus.

Il n'est pas impossible que la hausse assez substantielle des frais de scolarité dans d'autres provinces, au-delà de la qualité de nos établissements, puisse avoir un effet d'incitation. Nous devrons le mesurer. Est-ce qu'il est possible d'agir? Je vous dirais que, sur papier, c'est possible d'agir. Le moyen est simple en un sens: on peut agir autant que pour les étudiants étrangers et avoir un forfait dit canadien. Ce n'est pas impensable en soi. Charger ce qu'ils paieraient chez eux, c'est difficile à partir du moment où ils ne sont plus chez eux et qu'ils ont acquis le droit le résidence ici relativement rapidement. Donc, ce n'est pas sûr que ça pourrait se contrôler aisément. Bon.

Disons, sur papier, c'est possible d'avoir un forfait canadien, bien, un forfait supplémentaire canadien comme il y a un forfait étranger. La question, elle n'est pas tellement administrative, à vrai dire; elle est franchement politique, au fond, sur le type de rapports que nous entretenons avec les partenaires canadiens. C'est évident qu'on a vu des discussions sur l'accessibilité à l'aide sociale en Colombie-Britannique. Est-ce qu'on pourrait avoir ce même genre de discussions sur la mobilité de la gent étudiante? Je ne suis pas devin, je ne sais pas, mais ce n'est pas impensable que ça puisse se faire.

Ça poserait aussi un certain nombre d'autres problèmes qu'il faudrait régler, problèmes dans le sens qu'il faut les régler. Les Français, pour ne nommer qu'eux et que nous aimons bien, sont traités ici sans supplément même de droits que les étrangers paient. Alors, on aurait la situation où les Canadiens auraient une taxe spéciale que les Français n'ont pas. C'est toutes des choses qui peuvent se régler, mais, je veux dire, ce sont des faits évidemment. C'est sûr qu'on ne peut pas écarter, dans un contexte d'échange continental, les représailles possibles, parce que nous avons aussi des étudiants québécois à l'extérieur. Alors, on ne peut jamais prévoir quel type de représailles peuvent être appliquées.

Alors, c'est une question... Si j'essaie de situer les niveaux, bien, je vous dis: Dans les faits, oui, ça augmente. On va suivre ça, et les questions se poseront. Le comment, ça, c'est plus compliqué.

Le Président (M. Facal): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Alors, d'emblée, je voudrais quand même bien préciser le cadre de notre questionnement lorsqu'on aborde le cadre des institutions universitaires. Nous questionnons aujourd'hui l'administrateur en chef du ministère de l'Éducation...

M. Lucier (Pierre): Le sous-chef.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Je sais que vous êtes sous-ministre; à ce sujet-là, on pourrait débattre sur le sens des responsabilités réciproques du ministre et du sous-ministre. Je n'ouvrirai pas cette porte-là aujourd'hui.

Je voudrais quand même bien préciser qu'on est, à mon sens, dans ces interventions, limités par un concept d'autonomie des institutions universitaires. Nous allons, comme commission, rencontrer les institutions universitaires et là, pour tout ce qui est le cadre de gestion, de diplomation, etc., nous aurons la possibilité de pouvoir les questionner directement. Donc, je suis bien conscient des liens qu'il y a entre les institutions universitaires et le ministère de l'Éducation.


Financement basé sur le nombre d'étudiants admis

Néanmoins, le ministère de l'Éducation est celui qui fournit ou qui paie, en quelque sorte, la majeure partie du financement, par paiements de transfert, des frais de fonctionnement des universités. Je crois que c'est rendu à 72 % ou 73 % actuellement. La formule, qui est la formule de financement, est basée essentiellement sur les variations de clientèle étudiante. Il y a d'autres paramètres qui rentrent en ligne de compte: la diplomation, les frais indirects de la recherche, mais le gros élément de financement, c'est les variations de clientèle étudiante.

Dans l'analyse du Vérificateur général – et j'en arrive maintenant à ma question et à pourquoi c'est pertinent de la poser au ministère de l'Éducation – le Vérificateur général semble avoir décelé – et j'utilise à volonté les termes «semble» et «décelé» – une tendance, dans certaines universités, parmi celles qu'il a pu voir, à accueillir des étudiants sachant qu'ils ont peu de chance de réussir et, d'autre part, de maintenir ou de retenir des étudiants sans même appliquer leurs propres règlements, un peu pour – on pourrait avoir cette lecture – gonfler leur masse étudiante. Et, s'ils gonflent leur masse étudiante, ipso facto, puisque les subventions viennent au prorata des clientèles étudiantes, ils gonflent ou ils augmentent leurs subventions.

(11 heures)

Est-ce que vous comprenez ma question? Alors, ma question, c'est: Est-ce que, vous, vous avez aussi perçu cette tendance dans les universités, à savoir d'augmenter, d'accroître ou d'accepter des étudiants ayant une faible chance d'être diplômés ou d'avoir une politique de rétention des étudiants même si on sait qu'au bout d'un certain temps ils ne pourront pas poursuivre leurs études avec succès?

Je fais référence, si vous voulez, aux commentaires en 13.19, 13.23 et 13.26 du rapport du Vérificateur général quant à un abaissement, si je puis dire, des normes à l'entrée. Et on remarque des mesures qui ont été faites. Par exemple, si on abaisse les normes à l'entrée, ça ne donne pas plus de chances de réussir, parce que, très rapidement, le taux de succès des gens dont on a abaissé les normes d'entrée est relativement faible, sinon très faible. Le fait que les vérifications sur les moyennes cumulées ne se font pas semestre après semestre, mais se font seulement à la fin de l'année, ça fait qu'on maintient dans le système des étudiants qui, dans le fond, sont à la porte, virtuellement, avec peu de chances de succès, et on sait que, le semestre prochain, ils n'auront pas de succès.

Alors, est-ce que, vous, du ministère, vous êtes, un, conscient de ce qui semble être une certaine politique qui est liée, bien sûr, à la formule de financement par relation à la clientèle étudiante? Est-ce que vous avez perçu ce type de problématique? Si vous répondez oui, bien, à ce moment-là, j'ouvrirai toute une autre porte de questionnement. Si vous répondez: Non, on n'a jamais vu ça, etc., ça n'existe pas, alors, là, je serai obligé...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non! Ce n'est pas ça! Si vous répondez: Non, ça n'existe pas, je serai obligé d'être beaucoup plus précis. Ha, ha, ha! Là, volontairement, je reste dans le cadre des tendances.

M. Lucier (Pierre): Il y a beaucoup de choses dans la question du député de Verdun. J'aimerais, pour une part, m'en tenir aux faits indiqués par le Vérificateur; j'aurais des choses à dire là-dessus. Je pourrais, ensuite, parler des liens avec la formule de financement. Quant aux tendances, je suis incapable d'extrapoler à partir des faits qui sont là, les pratiques étant d'ailleurs très variables. J'aimerais mieux m'abstenir sur les tendances, mais je pourrais parler des faits et du lien avec le contingentement, et terminer en soulevant une question de type sociétal là-dessus qui va sûrement intéresser les parlementaires.

Les faits qui sont là, vous pensez surtout aux admissions des gens qui n'ont pas le D.E.C.?

M. Gautrin: En partie, oui.

M. Lucier (Pierre): Entre autres. Vous pensez, j'imagine...

M. Gautrin: À 13.23, on dit qu'on maintient les gens sans avoir vérifié la moyenne dans le programme. Enfin, il y a un certain nombre de remarques qui sont, disons, dans la tendance générale qu'on pourrait ressentir d'une volonté de rétention d'individus qui ont peu de chances d'être diplômés.

M. Lucier (Pierre): Parlons des faits.

M. Gautrin: Tel que j'aurais pu le percevoir. J'ai bien dit au niveau de la perception.

M. Lucier (Pierre): Je ne veux pas entrer dans la perception de cette tendance. C'est à partir des faits qui sont là.

M. Gautrin: Non, non, mais vous avez les faits; moi, j'ai la perception à partir de la lecture de cela.

M. Lucier (Pierre): C'est ça.

M. Gautrin: Et vous avez les faits, c'est pour ça que... Mais je n'ai pas dit que j'avais exactement les faits dans les mains.

M. Lucier (Pierre): Alors, les faits qui sont là nous reportent à la responsabilité des établissements universitaires de gérer leur régime d'études, au fond. Ce n'est pas le ministère qui dit comment admettre des étudiants, ni à quelles conditions, ni de quelle manière. J'avais déjà fait observer au Vérificateur général, dans le cas, par exemple, des étudiants qui sont admis avec moins d'une année d'études collégiales, j'avais demandé au Vérificateur: Est-ce que c'est conforme au régime d'études? Est-ce qu'elles l'ont fait en application de leur régime? On m'a dit oui. Alors, j'ai demandé: Donc, vous êtes en désaccord avec le régime, avec la manière de... Je ne veux pas poursuivre. Donc, nous avons échangé là-dessus.

Ce qui est rapporté ici, c'est... C'est un fait que les universités admettent des gens qui n'ont pas leur diplôme d'études collégiales. Mais, alors, là, attention! Il s'agit évidemment de clientèles dites adultes, donc qui ne sont pas en continuité de formation scolaire, qui sont plus âgées et qui viennent du marché du travail ou qui ont acquis une expérience ailleurs.

On peut en penser ce que l'on veut, mais c'est général dans tout l'Occident et dans toutes les universités d'avoir prévu divers types d'accès à l'université. Il y a la filière, disons, de type continu où les étudiants ont fini leur secondaire ou ce qui en tient lieu et entrent à l'université. La règle générale, c'est que ça prend le diplôme antérieur pour entrer à l'université. Ça, je pense qu'on peut dire que c'est une ligne. Il y a une autre voie d'entrée qui est celle d'une formation académique, je dirais, moins serrée, moins collée là-dessus, mais qui est compensée par des expériences de vie, bon, qui sont à évaluer au mérite. Et puis, bien, il y a l'autre voie qui est la voie de la formation sur mesure, ou continue, où quelqu'un peut venir à l'université sans tellement de préalables pour un type de formation très spécifique. C'est la pratique générale dans le monde. Les universités québécoises pratiquent, comme toutes les universités que je connais dans le monde, cette double acceptation, même ce triple mode d'admission des étudiants.

Alors, les étudiants dont on parle ici, ce sont des étudiants qui ne viennent pas des collèges. Les universités n'admettent pas d'étudiants qui sortent de collège I. Il s'agit donc d'adultes dont ils ont évalué que l'expérience de vie, l'expérience professionnelle pouvait compenser. Je donne souvent l'exemple – je me permets de le faire puisqu'on est en milieu où vous en connaissez tous et j'en parlerai au féminin parce que ce sont toutes des femmes – de nos secrétaires, même, disons, de nos secrétaires principales, de nos secrétaires de niveau de direction. Ce sont presque toutes des femmes, dans la fonction publique, qui ont un secondaire V, mais qui ont vécu dans des milieux où elles ont continué à parfaire leur méthodologie de travail, leurs connaissances des rouages sociaux, leur capacité d'écrire, de lire et ainsi de suite.

Quand ces gens-là veulent retourner aux études après sept, huit, 10 ans, parfois plus de travail comme secrétaires de direction, je serais, pour ma part, le dernier à leur suggérer d'aller au cégep. Elles vont à l'université – on n'a pas besoin d'ailleurs de le leur suggérer – et elles réussissent très bien. Voici un exemple très clair où, s'il n'y avait pas ce genre d'accès dans les universités, bien, là, on aurait un problème; en tout cas, on serait parmi les seuls à ne pas le pratiquer.

Donc, il ne faut pas laisser croire dans cette remarque-là – je le faisais observer à l'équipe du Vérificateur – que les universités acceptent des gens collège I, c'est faux. Il s'agit ici de la voie, donc, des adultes dont on évalue l'expérience. Est-ce que les universités évaluent avec beaucoup de précision et de rigueur chaque dossier? Ça, je suis incapable de vous le dire. On pourrait penser, à lire le Vérificateur, que peut-être ce n'est pas tout à fait au point. C'est une remarque qui s'adresse aux universités. Nous ne sommes pas interpellés non plus là-dedans, puisque nous ne pouvons rien y faire, mais nous en prenons bonne note; ça, c'est un fait.

M. Gautrin: Est-ce que vous me permettez une remarque brève là-dessus? Bien sûr, je ne conteste pas le principe qu'il doit y avoir une souplesse dans les admissions et je pense que personne ne le conteste ici. Mais, néanmoins, comme fait, on peut dire qu'il y a deux tiers des gens qui sont admis de cette manière et qui abandonnent au bout d'une année, que le taux de succès est cinq fois moins bon que ceux qui sont admis avec un D.E.C. Donc, la question que je me pose, c'est: Est-ce qu'à l'heure actuelle les politiques d'évaluation sont bien faites par les institutions? Et, comme vous êtes, vous, l'organisme payeur à la fin, c'est-à-dire que vous payez par rapport aux clientèles admises dans les universités, est-ce que ça ne vous pose pas une question, à ce moment-là, si on n'aurait pas une tendance à admettre trop facilement?

M. Lucier (Pierre): Bien, je pense que les parlementaires auront l'occasion de poser cette question-là directement...

M. Gautrin: Directement, je le sais.

M. Lucier (Pierre): ...aux universités.

M. Gautrin: Mais je la pose à vous, comme organisme payeur, en fonction des relations clientèle étudiante.

M. Lucier (Pierre): Alors, comme organisme payeur, nous, nous acceptons, disons, qu'il y ait plus qu'une voie d'accès à l'université.

M. Gautrin: Nous aussi.

M. Lucier (Pierre): Bon. Alors, de ce point de vue là, ça va.

M. Gautrin: Mais la manière dont c'est appliqué...

M. Lucier (Pierre): Ça m'amène peut-être tout de suite à un débat plus fondamental. C'est évident que, même sur le plan étroitement académique, l'application très, très rigoureuse de ce genre, disons, de remarque là et l'implication que ça peut avoir, bien, il faudrait bien voir que ça signifierait très concrètement l'exclusion de l'université de plusieurs milliers de personnes. C'est ce que ça veut dire. Il faut en être bien conscients. Alors, s'il y a des signaux sociétaux dans cette ligne-là à l'effet qu'on pourrait exclure, par exemple, une quarantaine de mille étudiants des universités, là, c'est sûr que le problème se pose d'une autre manière. Mais ce n'est pas le choix qui nous est véhiculé de gouvernement en gouvernement depuis 30 ans; c'est plutôt de dire qu'il faut donner toutes les possibilités possibles à des gens de poursuivre des formations.

Bien sûr, on privilégie les diplômes de grade, on privilégie les diplômes complétés, mais on a aussi même mis en place des réseaux institutionnels complets pour donner accès dans d'autres filières moins longues. On a eu des certificats où on a beaucoup d'adultes à temps partiel. Alors, il faut bien voir que changer de cap à ce niveau-là, ça signifie très concrètement une diminution massive du nombre d'étudiants dans les universités et probablement la fermeture aussi de certaines universités en région. Il faut être conscients de cela.

(11 h 10)

M. Gautrin: Si vous me permettez, ce n'est pas de ça que je vous parle. Ma question n'était pas celle-là. Ma question est: Est-ce que, en principe, lorsqu'une institution admet un étudiant, elle doit pouvoir dire à cette personne: Vous avez des chances normales, si vous travaillez normalement, de réussir et d'obtenir le diplôme pour lequel vous vous inscrivez?

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Gautrin: Or, de facto, il semble qu'il y ait un certain laxisme dans les admissions. Je fais la coordination entre ce laxisme, puisque les jeunes ne réussissent pas – et là c'est un fait qu'on remarque, que les jeunes ne réussissent pas – envers les gens qu'on admet et, de l'autre côté, le fait qu'il y a un lien direct entre le nombre de personnes admises et le financement que reçoit l'institution. Sans vouloir faire un lien de cause à effet, je dis: Il y a une certaine corrélation entre les deux.

M. Lucier (Pierre): Bon. Parlons de la formule de... Oui.

M. Gautrin: Mais je ne conteste en aucune manière la nécessité d'admettre des gens qui n'ont pas nécessairement le diplôme collégial; ce n'est pas du tout le but de ma question. Je pense que ce n'est le but de personne ici, mais c'est de s'assurer – et je pense que chaque institution doit l'avoir – que, lorsqu'on admet quelqu'un dans un programme, on doit pouvoir aussi lui dire: Si vous travaillez normalement, vous avez des chances de réussir. Or, prima facie, il semblerait qu'il y a des gens qu'on admet et qui n'ont aucune chance de réussir, au départ.

M. Lucier (Pierre): Je dirais ce que...

M. Gautrin: Semble-t-il. Et je le dis à partir des chiffres que j'ai. Je m'excuse, M. le Président.

M. Lucier (Pierre): C'est aussi notre renseignement et c'est ce que nous répétons à tous les niveaux. Pour le bien même des étudiants et des candidats, les procédures d'admission se doivent d'être transparentes, claires, rigoureuses et exigeantes. Je pense que c'est le discours que nous tenons aussi. D'ailleurs, à cet égard-là, je peux vous dire – parce que nous avons discuté de ces choses-là en comité de liaison avec les universités – que, dans le cas des étudiants qui viennent des collèges, les universités viennent de décider qu'elles ne recourraient plus, sauf en de très rares exceptions, à l'admission conditionnelle. Donc, il faudra avoir le D.E.C. en main. J'ai une lettre de la Conférence des recteurs là-dessus, c'est à la suite de discussions que nous avons eues ensemble pendant les derniers mois. Je vous dirai que je me propose de discuter avec elles aussi cette question des autres étudiants admis pour d'autres considérations. Est-ce qu'il y a possibilité, là aussi, d'avoir des procédures plus nettes, plus communes et plus rigoureusement suivies par tout le monde? Mais c'est vraiment leur décision.

Maintenant, pour ce qui est du lien avec la formule de financement, je voudrais dire deux ou trois choses. Moi, je ne connais aucune formule de financement dans le monde qui ne soit pas liée d'une manière ou de l'autre au nombre d'étudiants. C'est simple à comprendre: il y a plus d'étudiants, ça coûte plus cher; il y a moins d'étudiants, ça coûte moins cher, en gros. On comprend ça assez spontanément. Et je ne connais aucune formule dans le monde qui ne soit pas bâtie là-dessus. Les États, en général, jugulent ou contrôlent cette approche du nombre par d'autres perspectives, par exemple en contingentant. On dira: Écoutez, on paie telle université pour tant de candidats dans telle matière. Donc, c'est une manière de... Mais il faut payer en fonction du nombre. Mais on peut limiter le nombre.

Ou encore on peut, comme ça se fait au Québec, en faire un coût marginal, à telle enseigne que, à regarder les choses de très proche, il n'est pas sûr qu'une université fasse un bon coup administratif et financier en tentant de hausser ses clientèles avec les taux que nous payons. C'est à voir de plus près, mais je ne suis pas sûr. Et je vous ferai remarquer que, de manière générale, la variation de clientèles, actuellement, joue de manière négative. Nous ne sommes pas en croissance. Alors, c'est intéressant, parce qu'on parle beaucoup, ces dernières années, de cette variation de clientèle, mais on en parle au moment où ça commence à être, j'allais dire, avantageux pour le trésor public puisque nous définançons, si vous me permettez cet affreux mot, les clientèles étant à la baisse.

Alors, est-ce qu'à travers tout ça il y a des établissements qui pensent faire une bonne affaire en admettant des gens et en faisant nombre? Je ne peux pas l'exclure, il faudra le leur demander. Je suis incapable de parler de tendance et je crois qu'il y a de plus en plus de gens qui s'aperçoivent que ce n'est pas une solution qui est financièrement très rentable.

Le Président (M. Facal): Merci. M. le député de Groulx.

M. Gautrin: J'avais un deuxième élément à ma question. Est-ce que vous permettez?

Le Président (M. Facal): Oui, mais j'aimerais quand même laisser un peu de temps de glace aux autres parlementaires...

M. Gautrin: Mais je voudrais simplement...

Le Président (M. Facal): ...quitte à revenir...

M. Gautrin: Non, mais j'avais posé une question qui n'a pas été répondue, M. le Président. Si vous me permettez, ce n'est pas une...

Le Président (M. Facal): Quelle était-elle?


Abandon de cours

M. Gautrin: ...question de temps de glace; c'était la question qui était aussi... Il n'y avait pas seulement la question des admissions, il y avait la question de persévérance à l'intérieur qui touchait...

Le Président (M. Facal): Bon, très bien.

M. Gautrin: ...l'État, en 13.23 et 13.26, si vous me permettez.

Le Président (M. Facal): Oui, oui.

M. Lucier (Pierre): Oui, sur le suivi. Je pense que c'est le même type d'approche.

Je voudrais faire peut-être une remarque, si vous me permettez; je ne voudrais pas enlever du temps de glace. Le concept d'abandon mérite d'être analysé plus finement. Le concept d'abandon, dans le cas surtout des adultes et dans des certificats, ne décrit pas toujours très bien une réalité. Il y a des gens qui viennent chercher un corpus parfois de quatre, cinq, six cours. Ils s'inscrivent dans le certificat, mais il n'y avait aucune intention, pour eux, d'entrer dans la moulinette de ce certificat-là. Je ne sais pas si nous les embêtons avec ça. Je ne sais pas, mais toujours est-il qu'il y a des gens qui, après avoir pris ce qu'ils voulaient prendre, quittent et, pour nous, ils entrent dans nos statistiques d'abandon. Ça, je dirais, c'est très, très... Techniquement, donc, il y a des significations très variées. Donc, il y a aussi un taux de malheur très, très varié là-dedans, parce que, si quelqu'un vient chercher ce qu'il lui fallait, puis qu'il part avec, comment ne pas être content de ça? On peut bien les mettre dans nos chiffres d'abandon...

Et puis il y a des niveaux aussi où l'abandon n'a pas tout à fait le même sens. Moi, si vous me permettez de le reprendre amicalement, j'avais fait remarquer que, dans toutes les nominations qu'on voit le vendredi matin sortir des bureaux des premiers ministres, il y a plein de décrocheurs, dans le sens qu'il y a plein de gens qui ont des scolarités de maîtrise, des scolarités de doctorat, des études supérieures, mais, comprenez, pas de maîtrise, pas de doctorat. Mais ça fait des gens pleinement valables. Alors, est-ce que c'est des gens qui ont abandonné? Je ne sais pas. Alors, je pense que, en tout cas, mes...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: La réponse, c'est oui...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...très clairement.

M. Lucier (Pierre): Oui, oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Mais je pense que nous avons un problème de... Sur l'abandon, revenons à des proportions plus cernables.

Le Président (M. Facal): Ceux d'entre nous qui ont planché pendant cinq ans sur des thèses et qui les ont terminées vous répondent: Oui, ils ont décroché. Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Alors, je me permets de répondre avec vous la même chose. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Ça va être un peu dans la continuation de ce que le député de Verdun a dit. Je vais y aller possiblement un peu plus précisément, M. le sous-ministre, mais je voudrais faire une remarque vis-à-vis de l'information que nous donnait le député de Verdun quant au nombre de personnes, habituellement à l'éducation des adultes, admises sans avoir les prérequis intermédiaires et qui, effectivement, sont acculées, en tout cas, à un taux d'échec élevé. C'est paradoxal, d'une part, et c'est désolant. C'est désolant d'autant plus que notre société s'oriente de plus en plus vers l'éducation continue et la nécessité de se recycler en permanence.

Moi, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que, trop souvent, les universités, surtout au niveau du premier diplôme et surtout au niveau de l'éducation permanente, utilisent ces étudiants-là littéralement comme des vaches à lait pour aller chercher leurs sous. Ils sont sous-équipés, sous-encadrés, le contenu des cours, souvent, laisse à désirer parce qu'on engage, j'allais dire, des surnuméraires, hein, des profs qui n'ont pas le statut de prof régulier à plein temps; évidemment, on les engage comme étant du «cheap labor», parce que ces gens-là sont obligés, par ailleurs, d'assurer leur survie ailleurs. Alors, je pense qu'il va falloir qu'on se pose ce type de questions là en tant que société; donc, le ministère aura à réagir par rapport à ça parce que c'est un problème majeur.

(11 h 20)

Ceci étant dit – et là je veux continuer aussi dans cet... – on va avoir, au cours des prochains mois, et on en est tous conscients, à prendre des décisions extrêmement difficiles quant à la gestion des budgets de l'État et des taxes que les citoyens nous donnent. Constamment, les gens nous disent: Si vous appliquiez les recommandations du Vérificateur général, il y a tellement d'économies à réaliser, ne serait-ce qu'au niveau d'une gestion serrée et étroite des budgets de l'État, que vous seriez en mesure de faire d'énormes économies. J'ai tendance à penser comme ça. Ça ne veut pas dire, par ailleurs, que c'est facile, hein? Et il y a le vieil adage qui dit: Il est beaucoup plus facile de...

M. le Président, je vous ferai remarquer que M. le député de Verdun a passé 25 minutes. Bon. Alors, j'ai des choses à dire – ha, ha, ha! – j'ai l'intention de les dire. Il est toujours plus facile évidemment de critiquer que de corriger, ce qui ne veut pas dire que le Vérificateur général ne fait pas sa job. Bon! Mon préambule étant terminé, j'aimerais savoir si vous avez ces informations-là. Sinon, est-ce qu'il y aurait moyen d'envisager que le ministère puisse se les procurer ou est-ce qu'il est limité par la loi? Je veux avoir votre lumière là-dessus. Le Vérificateur en parle. Il souligne aussi d'ailleurs qu'il n'y a pas suffisamment d'information.

Qu'est-ce qui fait que les étudiants dépassent les règles de temps associées à l'obtention d'un diplôme et qui coûtent énormément cher? Je reviens encore là-dessus, parce que j'aurais envie qu'à titre de société on puisse permettre aux étudiants de continuer à s'éduquer, à s'informer, à s'instruire tout en s'assurant que les coûts d'accession à leur diplôme soient dans les limites du raisonnable. O.K.? Donc, j'essaie de travailler sur ce qui provoque des dépenses supérieures à ce qu'on a déterminé comme étant le cadre général dans lequel on devrait fonctionner.

Donc, il me semble qu'il y a deux causes principales qui augmentent les coûts de l'éducation: d'une part, l'échec évidemment. À chaque fois que tu coules un cours, que tu te réinscris à répétition à ce cours-là, ça coûte plus cher au gouvernement, il me semble. Vous envoyez de l'argent dans les universités. Et il y a, deuxièmement, ce que j'appelle le tourisme universitaire interprogrammes. On a tous entendu parler d'étudiants et d'étudiantes qui restaient au niveau du bac pendant cinq, six, sept, huit ans, qui changeaient de programme, etc., puis qui ne terminaient à peu près jamais, mais qui coûtaient toujours de l'argent au gouvernement.

Donc, j'aimerais savoir s'il existe, si les universités vous le fournissent. Je sais que j'aurai l'occasion de reposer la question, mais je veux avoir votre vision là-dessus. Y a-t-il des données sur le tourisme universitaire, un, quant à la proportion des étudiants qui le pratiquent; deux, quant à la durée de ce tourisme-là – ha, ha, ha! – trois, quant aux coûts associés à ce tourisme-là et, quatre, quant aux causes de ce tourisme-là? Et ce que je veux savoir quant aux causes, c'est: Est-ce que ces causes-là sont habituellement liées à l'échec dans un programme qui force l'étudiant à changer de programme ou est-ce que c'est parce que l'étudiant change vraiment... Il avait mal perçu son orientation, là, puis il décide que ce n'est pas en biologie qu'il veut aller, mais c'est en histoire de l'art. Deuxième question. Alors, la première, ça s'appliquait au tourisme; la deuxième, ça s'applique à l'échec comme tel.

J'ai retrouvé certaines données dans le rapport du Vérificateur, mais il ne semble pas, lui non plus, satisfait de l'information qu'il reçoit. Y a-t-il des données sur les coûts de l'échec, sur la proportion d'étudiants, sur les coûts que ça entraîne? Si vous me dites que vous n'en avez pas, je veux que vous m'expliquiez pourquoi vous n'en avez pas. Est-ce que l'autonomie des universités est à ce point large qu'elles peuvent nous dire: Non, nous, on n'en a pas, puis on n'a pas envie d'en avoir?

M. Lucier (Pierre): Il y a plusieurs questions dans les deux questions. M. le député ne m'en voudra pas de ne pas reprendre son terme de «tourisme». Je comprends qu'il veut parler de la durée des études et puis des types de cheminement des étudiants, on se comprend bien. Dans le cas d'universités, nous disposons d'un certain nombre d'études de cohortes faites d'ailleurs avec les universités elles-mêmes. Donc, le problème n'est pas de communication de données. On a des données sur le temps que prennent certaines cohortes d'étudiants pour faire leurs études et leur taux de diplomation; d'ailleurs, je pense que ça fait partie, pour une bonne part, des indicateurs dont les universités viendront entretenir les parlementaires au titre de la loi 95.

Nous avons un problème technique qui n'a rien à voir avec l'autonomie des universités, au fond, et qui est l'absence du code permanent dans le cas des clientèles universitaires. Je vais vous faire une histoire courte. Le code permanent, c'est ce code qu'on donne à nos enfants quand ils entrent à la maternelle – vous savez, là, avec quatre lettres et puis huit chiffres – et ce code-là nous suit tout au long des études. Il se trouve que, quand on arrive à l'université, ce code-là disparaît, si je puis dire; il est remplacé par des matricules des universités. Alors, c'est évident que, si nous avions le code permanent, nous pourrions, comme dans le cas du secondaire, du collégial, suivre les cohortes, suivre même chaque individu – non nominalement, s'entend – et là on pourrait avoir une idée très précise des comportements, des changements de programme, des changements d'institution, des rallonges, bon, comme on peut l'avoir pour le collégial, le primaire et le secondaire. Nous n'avons pas ce code-là, et ce n'est pas parce que les universités n'ont pas voulu.

Je vais vous expliquer le processus. Comme il s'agit d'échanges de données, ça prend évidemment la conformité à la loi de l'accès à l'information, donc ça prend un avis de la Commission d'accès à l'information. J'ai personnellement signé avec plusieurs universités, dont d'aussi grosses que Laval et McGill, un protocole d'utilisation du code permanent il y a maintenant de ça déjà trois ans et demi. Ces protocoles ont été soumis à la Commission d'accès à l'information qui, contre toute attente, a jugé que ce n'était pas opportun et que ça pouvait porter atteinte à l'intimité des individus. La loi prévoit qu'en cas d'avis négatif il est possible, pour le gouvernement, de décréter et d'approuver par décret ces ententes. Alors, le gouvernement et les ministres sont bien au fait de cette situation-là. Donc, il y a incapacité d'utiliser le code permanent, et il y a eu avis négatif de la Commission d'accès à l'information.

Je dis «contre toute attente», si vous me permettez, parce que j'imagine que, si ce n'était pas bon pour les universitaires, ça ne pourrait pas être bon pour nos petits mioches. Mais, cela étant dit, il est évident que, dans le cas du primaire, secondaire, collégial, ce n'est jamais utilisé nominalement. C'est évident que ce qui nous intéresse, c'est les cheminements de cohortes. Alors, nous avons donc un problème technique d'absence de code permanent, ce qui veut dire que, quand nous voulons faire des études de cohortes – nous en avons fait, mais c'était très complexe – donc, il faut travailler presque à la mitaine, si je peux dire, avec des établissements qui, là-dessus, sont très, très ouverts.

Les universités avaient déjà manifesté de la réticence à utiliser le code, mais c'est terminé, cette période-là; elles sont tout à fait... J'ai des textes signés. Il s'agit maintenant de voir comment on peut donner suite à ça. Il est évident que, si on avait le code permanent, on pourrait répondre à beaucoup de questions sur les cheminements d'étudiants. On n'aurait pas toutes les réponses, mais on aurait une photographie extrêmement précise et interinstitutionnelle. Donc, ce n'est pas un empêchement, je dirais, qui tient à l'autonomie ou à la jalousie des universités; c'est une affaire qui a été réglée, ça. En un certain sens, il s'agit de savoir quelle suite nous donnons à cela. Nous n'avons pas changé, nous pensons qu'il nous le faut pour répondre à ce genre de questions là.

Maintenant, les causes de ces cheminements scolaires nouveaux, elles sont très nombreuses et probablement plus sociales que scolaires. Vous savez, le modèle de la vie étudiante, qui a été peut-être le vôtre – enfin, qui a été le mien – c'est que, quand on étudiait, on étudiait. On faisait ça pas mal à temps plein, avec des travaux d'été. Mais, pendant l'année, on était pas mal pris par les études. C'est un modèle qui est devenu un modèle minoritaire. Alors, on peut en avoir la nostalgie, mais ça n'existe plus.

(11 h 30)

Très jeunes, les étudiants et les étudiantes ont des priorités personnelles, sociales, touristiques au sens strict du terme, enfin, toutes sortes de priorités de la vie. Ils se mettent en ménage aussi. Donc, il y a toute une organisation de la vie qui fait que l'étude est mise en ballottage avec d'autres priorités personnelles et sociales. Ils commencent à travailler tôt, pas toujours pour payer leurs études, mais parce qu'on fait plus de choses avec argent que sans argent, c'est connu. Yvon Deschamps nous avait bien décrit ça. Alors, ils ont compris ça. Au fond, on les a élevés comme ça aussi, il faut dire. Et ils se comportent de cette manière-là. C'est comme s'ils fuyaient aussi les études, en un certain sens. Je ne porte pas de jugement, mais j'observe.

Alors, des comportements qui ont cet enracinement social et culturel aussi profond, on ne les changera pas par décret. C'est au-delà de l'échec scolaire proprement dit. C'est évident que quelqu'un qui est en situation d'échec n'est pas bien placé pour continuer, mais, parfois, aussi, l'échec est attribuable en partie au fait que l'énergie ou le temps n'a pas été mis. Mais je pense qu'il faut aller... C'est vraiment une question de comportement de type social, familial. Les étudiants se comportent, j'allais dire, comme on les a élevés. Ils ont appris très, très tôt à organiser leur vie autour de plusieurs types de priorités. C'est ce qui fait que ça rend les choses plus difficiles.

Alors, est-ce que nous avons des données sur les échecs? Dans le cas du collégial, on en a; on pourrait en parler peut-être plus librement ce soir. Dans le cas de l'université, on n'a pas les instruments pour aller déterminer ce qui est l'échec. Je ne suis pas sûr que, dans le cas de l'université, ce soit l'échec qui soit la principale cause; il y a aussi toutes sortes de phénomènes de gens qui viennent chercher quelque chose de spécifique, là, et qui partent quand ils ont pris ce qu'ils avaient à prendre. Je ne sais pas si ça répond au grand nombre de questions qu'il y avait sous les deux questions de M. le député.

M. Kieffer: En tout cas, je m'aperçois qu'effectivement on aura à prendre des décisions, puis il va falloir qu'on ait le plus d'éclairage possible. Ce que vous nous dites, c'est qu'il y en a un, certain éclairage, mais, par ailleurs, il y a des règlements techniques un peu débilitants qui nous empêchent d'avoir un portrait clair de ce que c'est, la situation des étudiants à l'université.

M. Lucier (Pierre): Oui, mais, cela étant dit, sur le plan à la fois technique et, je dirais, oui, sur papier, un gouvernement peut toujours décider qu'il ne finance plus tel type de cheminement ou tel type de programme. C'est une très, très lourde décision, à très large portée sociale, mais il peut le faire. Écoutez, on pourrait bien dire: On ne finance plus la participation à tel type de certificat ou à tel type de temps partiel, ça, c'est possible, mais ce n'est pas une question technique.

Le Président (M. Facal): Mme la députée de Terrebonne.


Contrôle des dépenses de recherche

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, M. le sous-ministre, j'aurais pu vous questionner sur le point 13.5 du Vérificateur général, ce qui aurait sûrement intéressé le député de Verdun, mais je vais plutôt vous demander votre avis sur le point 13.7 qui a trait au contrôle des dépenses de recherche des universités.

Alors, la remarque du Vérificateur général est à l'effet que, finalement, la gestion est largement autonome, elle est confiée aux milliers d'enseignants, de professeurs, et que, finalement, les universités ne peuvent remplir leur rôle de fiduciaire au niveau des dépenses de recherche. Suite à ce point-là soulevé par le Vérificateur général, est-ce que vous avez fait une certaine analyse? Est-ce qu'il y a certaines attentes? Est-ce que vous avez des pistes de solution pour que le ministère et les universités aient un meilleur contrôle sur les dépenses de recherche?

M. Lucier (Pierre): C'est une question qui nous préoccupe, parce qu'elle a des composantes même éthiques. Bon. Je pense qu'on peut dire, sans que ce soit carrément une opinion, que la recherche dans les universités vit une forme de crise de croissance, c'est-à-dire qu'on a assisté à une croissance fulgurante des approvisionnements en sources de recherche, donc des volumes insoupçonnables il y a 10 ans. Bon. Donc, il y a un volume, là, qui va exiger des précisions de processus dans le rôle de fiduciaire des universités. Vous savez que les subventions de recherche ne sont pas allouées à l'université; c'est des chercheurs et des chercheuses qui remportent la palme. En général, c'est des concours, c'est des jurys. Donc, c'est nominal. Ce n'est pas l'Université de Montréal qui a une subvention pour faire de la recherche; c'est le professeur Gautrin ou un autre, bon, et l'université, dans ce cas-là, elle est fiduciaire. Donc, elle doit trouver un aménagement pour gérer dans la transparence, mais sous les indications du subventionné. Bon.

Donc, je dirais qu'il y a un effet volume. Il y a un effet, aussi, complexité des règles. Vous savez, on a vécu une très large ouverture du côté de la fiscalité pour soutenir la recherche – c'était un choix gouvernemental des dernières années – ce qui a conduit les universités à s'embarquer dans des montages financiers extrêmement complexes où les partenaires avaient leurs crédits d'impôt à aller chercher à telles conditions, etc. Donc, c'est devenu presque une zone pour un métier nouveau, ça, de gérer ces choses-là. Et, là aussi, je dois dire que non seulement le volume, mais la complexité, puis la nouveauté des processus ont amené les universités dans des situations qu'elles n'avaient pas vu venir.

J'irai plus loin. Les gouvernements eux-mêmes et nous-mêmes, nous avons incité les universités à faire de la recherche dans des perspectives de partenariat avec l'entreprise et de viser la rentabilité, de viser, donc, le transfert, de viser la commercialisation, de changer quelque chose au développement économique. Ça, les gouvernements, nous avons fait ça, nous avons incité les universités à faire cela. Donc, nous les avons amenées sur des terrains nouveaux, en un certain sens. Quand vous mettez tout ça ensemble, il est évident que la place de la recherche et de la gestion de la recherche dans les universités n'a à peu près rien à voir avec ce que j'ai moi-même connu il y a 25 ans où on était loin des moyens qu'on a. On était loin des procédures qu'on a. On était loin, aussi, du «struggle for life» que l'on connaît actuellement. Ça n'avait rien à voir.

Alors, je pense qu'il y a une espèce, je dirais, de crise de conscience et puis, bien, il y a des ratés. L'occasion faisant le larron, il est évident que ces nouveaux contextes-là ont amené des situations malheureuses. On a eu des cas publics qui sont allés jusqu'à des meurtres d'hommes, ainsi de suite, donc des choses très tragiques, ou des suicides, enfin, bon, ou, dans certains cas, des malversations pointées. Je ne nommerai ni cas, ni individu, ni institution, mais je pense qu'on a tous à l'esprit qu'il y a eu des choses difficiles, ce qui a amené, en fait, les fonds subventionnaires, les universités et nous-mêmes à nous engager dans, plus qu'une réflexion, une entreprise de caractère éthique. Les fonds subventionnaires ont des chartes maintenant et les appliquent. Les universités sont embarquées dans ce mouvement-là individuellement et collectivement, et nous-mêmes, c'est dans notre discours, j'allais dire, presque quotidien par rapport aux universités, l'enjeu éthique.

Alors, c'est là qu'on en est. Moi, je vous dirai, comme administrateur public, que j'ai le double souci que nous ne jetions pas le bébé avec l'eau du bain et que nous circonscrivions nos modes de gestion des fonds de recherche. Je pense qu'on peut dire qu'il y a un degré de conscience dans les universités, à tous niveaux, sur cette question-là. Je suis plutôt très, très confiant que les choses vont avancer vite, parce que nous ne sommes pas les seuls à juger qu'il faut prendre les choses en main, mais, en même temps, ne pas compromettre cette explosion tout à fait positive de la recherche qui a mis nos universités sur la carte mondiale.

Mme Caron: Merci.

M. Lucier (Pierre): Il faut qu'elles y restent.

Le Président (M. Facal): Considérant l'heure et considérant que nous pourrons revenir sur ces questions ce soir, je vous propose de passer tout de suite aux deux autres blocs évoqués par le Vérificateur, soit le niveau collégial, ainsi que les commissions scolaires. On pourrait peut-être, dans l'ordre qui est celui de notre document, commencer par le niveau collégial. Est-ce qu'il y a là-dessus des questions? Sachant que nous pouvons y revenir ce soir, là.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que mon collègue...

Le Président (M. Facal): Sur les commissions scolaires?

M. Gautrin: ...avait des questions spécifiques.

Le Président (M. Facal): Oui. Très bien.

M. Gautrin: Et, le temps étant assez court...

Le Président (M. Facal): Oui, oui. Très bien.

M. Gautrin: ...je pourrais peut-être suggérer que monsieur...

Le Président (M. Facal): Absolument.

M. Gautrin: Mais, si vous voulez, je peux commencer sur le collégial.

Le Président (M. Facal): Non, non, le député de Marquette a été très patient.


Commissions scolaires


Absence de politique d'évaluation du rendement du personnel

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Merci, cher collègue. Concernant les commissions scolaires et la supervision pédagogique, nous avons les commentaires suivants de la part du Vérificateur général. On apprend que plus de la moitié des commissions scolaires n'ont pas encore adopté de politique d'évaluation du rendement du personnel. Je place ça dans le cadre suivant: on sait que 85 % des budgets des commissions scolaires sont affectés à des ressources humaines. J'aimerais entendre la réflexion du sous-ministre à cet égard. Quelles sont les intentions du ministère, d'une part, et, d'autre part, comment explique-t-il que les commissions scolaires ne se sont pas dotées de telles politiques d'évaluation du rendement de leur personnel? C'est à la page 419 du rapport.

(11 h 40)

M. Lucier (Pierre): Celui de cette année?

M. Ouimet: Non, celui de 1993-1994. Excusez-moi.

M. Lucier (Pierre): Tout ce qui concerne la gestion des ressources humaines dans les commissions scolaires comme dans les collèges et évidemment dans les universités est vraiment de la responsabilité des commissions scolaires. Alors, donc, autant nous essayons d'être au courant, autant nous n'avons pas d'actions pour suppléer à ce partage des responsabilités. Ça, c'est clair. Autant vous le dire en toute clarté, nous n'avons pas d'opérations dans ce secteur-là, dès qu'il s'agit d'un champ d'action qui est propre à la responsabilité des commissions scolaires ou des collèges, ou d'ailleurs. Et, dans le cas des ressources humaines, le cas est absolument évident.

Est-ce qu'on a des relevés plus récents? Je ne pense pas qu'on les ait, puisqu'on ne les a pas cherchés non plus. Donc, ce serait essentiellement ça, ma réponse. Maintenant, vous savez que ce n'est pas des choses simples, simples, non plus, dans une commission scolaire, parce que les politiques d'évaluation des ressources humaines, c'est beaucoup de monde. Ça s'applique différemment selon les cas. Dans la plupart des cas, c'est balisé par les conventions collectives que vous connaissez. Donc, le champ d'action des politiques d'évaluation des ressources humaines est passablement encadré. Ce serait l'essentiel de ma réponse. Donc, nous considérons que c'est vraiment du terrain des commissions scolaires.

M. Ouimet: Sentez-vous une résistance de la part des commissions scolaires à adopter de telles politiques?

M. Lucier (Pierre): Si vous demandez une perception générale, j'ai plutôt le sentiment qu'elles adoptent et qu'elles font ce qu'elles font quand elles pensent qu'elles peuvent le faire. Alors, c'est beaucoup des questions de conjoncture, des questions de climat, des questions d'histoire, aussi, de relations entre les différents corps. Alors, on a de tout, finalement, là-dessus dans les commissions scolaires. Je serais incapable de faire quelque appréciation d'intention. Nous observons de la diversité et nous observons des percées à droite et à gauche selon, parfois, l'identité des leaders, l'espèce de chimie institutionnelle qui se fait ou qui ne se fait pas, ou, dans d'autres cas, des histoires longues de conflits éternisés. Donc, nous observons une diversité, mais il serait difficile de dire qu'il y a de la résistance. Je ne serais pas capable, pour ma part, de souscrire à cette appréciation globale.

M. Ouimet: Mais, par ailleurs, dans d'autres situations, malgré l'autonomie des commissions scolaires, l'ancien ministre de l'Éducation n'a pas hésité à mettre de l'avant des règles pour inciter et pour forcer les commissions scolaires à respecter certaines choses. J'ai en tête toute la politique concernant l'octroi des contrats à des professionnels. Même si on respecte, d'une part, le principe de l'autonomie des commissions scolaires, le ministre a quand même décidé d'aller de l'avant avec une directive obligeant les commissions scolaires à respecter la politique qu'il a mise de l'avant. Et je me demande pourquoi vous n'avez pas la même préoccupation par rapport à l'évaluation du personnel.

M. Lucier (Pierre): Je vous dirais, en toute candeur, que ça peut dépendre des sensibilités ministérielles. Disons que le dossier des immobilisations peut, à certains moments, prendre plus d'importance que d'autres dossiers. Ça n'exclut pas que, dans une autre étape, les choses puissent se faire. Je vous ferai remarquer que, dans le cas de la directive sur les immobilisations, évidemment on se trouvait par là, aussi, à rejoindre les autres réseaux qui ont le même type d'instructions, si je peux dire.


Reddition de comptes

M. Ouimet: Une deuxième question, maintenant, qui touche la reddition de comptes. Le commentaire que nous fait le Vérificateur général, c'est qu'il est rare que les commissions scolaires rendent compte à la population de leur territoire en communiquant, par exemple, des taux de diplomation ou des taux d'abandon des études. Certaines commissions scolaires le font. Je sais que la CECM le fait, par exemple. Mais il y a d'autres commissions scolaires qui évitent de publier des indicateurs pour indiquer aux parents ou à la clientèle la performance des écoles, de façon générale, en ce qui concerne les examens du MEQ, par exemple.

M. Lucier (Pierre): Oui. Mais, en même temps, en mettant à la disposition du public et des commissions scolaires un certain nombre d'indicateurs, nous contribuons nous-mêmes à faire que l'information passe. Vous savez que le ministère publie les résultats aux examens non seulement par commission scolaire, mais par école, depuis maintenant deux ans. Et ça a toujours des succès de presse dans les régions, puisque les résultats sont aussi par région. Alors, nous publions aussi des indicateurs de gestion. Nous avons toute une série d'indicateurs; on pourra éventuellement en reparler. On en a une panoplie importante qui se trouvent à encadrer un peu la reddition de comptes locale.

Alors, il y a des commissions scolaires qui s'abreuvent abondamment dans ces indicateurs; d'autres les répercutent très carrément; d'autres nous laissent à nos bonnes oeuvres à nous, nos bonnes oeuvres de diffusion. Je crois que toute cette dynamique de reddition de comptes, dans le contexte de l'émergence très, très marquée des indicateurs de toutes sortes, est en train de prendre une coloration différente.

M. Gautrin: M. le Président, toute brève comme question. On a l'excellent document sur les indicateurs de gestion 1994; j'attends celui de 1995. J'ai vu, dans le rapport des états généraux, qu'ils existent, puisqu'on en fait état, on fait référence à eux. Alors, j'aimerais savoir quand vous allez les rendre publics, parce que j'aimerais les avoir.

M. Lucier (Pierre): J'ai été méthodologiquement un peu étonné de trouver, dans la bibliographie du chapitre 10 de la Commission, une référence à un document qui avait été, en toute candeur et transparence, communiqué sous forme miméographiée et temporaire. Il est en photocomposition ou sous presse.

M. Gautrin: Mais vous comprenez à quel point on est intéressés à les avoir dès qu'ils sont disponibles.

Le Président (M. Facal): Vous découvrez les coulisses de la fuite.

Une voix: Le 25 février.

M. Lucier (Pierre): Pour le 25 février. Alors, donc, elle était prête. Ils ont eu une primeur, disons, qui nous cause un petit problème, parce qu'ils auraient pu mettre «en préparation» en bas de l'édition, je ne sais trop. Ça donne l'impression que c'est disponible et ça...

M. Gautrin: Et vous allez nous en envoyer des copies dès qu'ils vont être...

M. Lucier (Pierre): Comme d'habitude.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Et c'est un excellent document, je le répète encore.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, suivi du député de Bourassa.

M. Ouimet: Une dernière question, maintenant, sur l'utilisation des journées pédagogiques. On apprend que la plupart des commissions scolaires n'énoncent pas toujours des lignes directrices et ne font pas le suivi non plus de ce qui se fait dans le cadre des journées pédagogiques. Avez-vous des réactions, avez-vous des intentions? Parce qu'on n'a pas l'impression que le ministère a l'intention d'avoir une prise sur ces journées pédagogiques.

M. Lucier (Pierre): Non, c'est vraiment du rayon des commissions scolaires.

M. Ouimet: L'autonomie des commissions scolaires.

Le Président (M. Facal): M. le député de Bourassa.

M. Lucier (Pierre): Notre sensibilité ne s'est pas exercée là.


Écoles non utilisées

M. Charbonneau (Bourassa): Merci, M. le Président. M. le sous-ministre, je voudrais profiter de l'occasion pour vous demander quelle est votre appréciation de la situation quant aux écoles non utilisées, les écoles fermées, les écoles qui ne sont plus, en fait, utilisées comme écoles dans certains territoires, à Montréal et ailleurs. Quelle est l'ampleur du phénomène? Qu'est-ce qui est fait pour résorber ça? Je n'ai pas nécessairement une référence dans le rapport du Vérificateur, mais ça pourrait peut-être être une indication de s'intéresser au phénomène davantage encore. Parce que, moi, j'ai des contribuables, dans mon comté...

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Charbonneau (Bourassa): ...franchement, qui m'ont soulevé la question et qui ont dit: On connaît des écoles fermées. Qu'est-ce qui est fait? On n'a pas l'air trop à pousser pour la vente; le marché n'est pas bon, c'est ci, c'est ça. Est-ce qu'il y a des stratégies qui sont suggérées de conversion, de réutilisation? Qui paie pour le chauffage en attendant? Quelle est l'ampleur du phénomène en termes de coûts, en termes de pieds carrés ou de mètres carrés?

M. Lucier (Pierre): Oui. Alors, sur les mètres carrés, les coûts, je vais demander, tout à l'heure, à M. Chaput de vous les donner; je ne les connais pas par coeur. Mais je pourrais vous dire quelle est notre action. Elle est substantielle depuis un an; ça porte sur le financement des surfaces excédentaires. Il y a eu, l'année dernière, un premier pas de franchi sur les espaces vides; M. Chaput pourra vous dire dans quel ordre de grandeur. Il est évident que cette lancée-là va continuer. L'action a été faite autant par un financement diminué de ces espaces-là que par une incitation à les partager avec d'autres partenaires, en particulier du côté municipal.

Maintenant, sur l'ampleur du phénomène, avec votre permission, je pourrais demander à M. Chaput, qui a tous ces chiffres-là de mémoire, de vous les donner.

(11 h 50)

M. Chaput (Henri-Paul): 2 000 000 m² au Québec, mais, en même temps, dans certaines régions, des absences, notamment dans la région au nord de Montréal. Vous voulez que je me nomme?

Le Président (M. Facal): Pourriez-vous vous identifier pour la postérité?

M. Chaput (Henri-Paul): Henri-Paul Chaput, sous-ministre adjoint.

M. Kieffer: Et pour les personnes présentes.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chaput (Henri-Paul): Alors, 2 000 000 m², effectivement. Qui paie pour le chauffage? Il y a, comme le sous-ministre vient de le noter, une aide financière, une allocation financière pour ce qu'on appelait les mètres excédentaires, parce que...

M. Charbonneau (Bourassa): Pas les enseignants, les mètres.

M. Chaput (Henri-Paul): Les mètres excédentaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chaput (Henri-Paul): Parce que, au début de cette allocation, on visait davantage des milieux isolés – je pense particulièrement à la Gaspésie – où il y avait des diminutions de clientèles et où, comme vous le notez, les espaces en question coûtaient les mêmes coûts. Il fallait chauffer. Et c'est ce à quoi nous référons quand nous demandons aux commissions scolaires de faire des efforts systématiques pour essayer de s'entendre avec les municipalités, avec des organismes communautaires pour éviter que ces espaces soient non utilisés. Et, comme vous le voyez, dans certaines régions, c'est majeur, incluant Montréal, incluant le territoire de Montréal où tous les mouvements en question – et M. le député le sait très bien – ont amené un certain nombre d'espaces à être utilisés à d'autres fins qu'à l'enseignement.

Alors, dans un premier temps, nous avons réduit cette allocation pour ce que nous pouvons considérer des espaces nettement et totalement non utilisés et nous avons demandé aux commissions scolaires, avec ce qu'on pourrait appeler un préavis d'un an, de trouver des solutions pour régler le problème. C'est 40 000 000 $, M. le député, à cette fin-là.

M. Charbonneau (Bourassa): C'est 40 000 000 $. Je voudrais juste me faire traduire ça. C'est moi qui vous ai donné le choix de parler en pieds carrés ou en mètres carrés, me voilà bien mal pris.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chaput (Henri-Paul): Me voilà aussi très mal pris.

M. Charbonneau (Bourassa): Vous m'avez répondu en mètres carrés. Disons que, si vous transposiez ça, là, par rapport à une polyvalente moyenne ou à une école primaire de 12 classes, ça fait combien, ça, 2 000 000 m²? On est dans l'ordre de combien de classes ou de combien de...

M. Chaput (Henri-Paul): Comme vous l'avez vu, M. le député, on m'a aidé aussi. Douze classes, c'est 3 000 m².

M. Charbonneau (Bourassa): Douze classes, 3 000 m².

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau (Bourassa): 2 000 000 m² divisés par 3 000 m², ça nous donnerait une bonne idée du nombre de classes, ça.

M. Chaput (Henri-Paul): Le ou vers.

M. Charbonneau (Bourassa): Est-ce que vos statistiques et vos coûts incluent aussi des entrepôts ou d'autres espaces qui ne sont pas des écoles? Moi-même, j'ai eu l'occasion de visiter d'immenses entrepôts à Montréal qui pourraient servir de lieux d'exposition du salon de la caravane et qui sont inutilisés.

M. Chaput (Henri-Paul): La réponse, M. le Président, c'est oui. Cependant, il n'y a pas, à l'intérieur de ce que je viens de noter, du financement. Et c'est pour ça que, quand on regarde l'ensemble du dossier, un, il faut faire attention que, dans des milieux plus isolés comme la Gaspésie, la réduction de nos allocations cause des problèmes sérieux à la commission scolaire et, deux, dans d'autres situations, à l'utilisation que les commissions scolaires en font ou pourraient en faire à d'autres fins.

M. Charbonneau (Bourassa): Donc, vous êtes aussi sensibles à cet aspect-là qu'aux classes comme telles, enfin aux surfaces scolaires, disons?

M. Chaput (Henri-Paul): Totalement.

Le Président (M. Facal): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Tous les points évoqués dans le rapport du Vérificateur général sont en vue...

M. Ouimet: J'aurais un commentaire juste sur les espaces excédentaires, si ma collègue me le permet. Une toute petite question avant qu'on...

Le Président (M. Facal): Oh! Habituellement, la députée de Terrebonne est très disciplinée et elle a un esprit de synthèse absolument remarquable.


Gestion administrative

Mme Caron: Ha, ha, ha! Alors, tout est en vue d'une meilleure gestion. Vous avez fait référence à plusieurs reprises, dans vos réponses, à l'autonomie: autonomie des commissions scolaires, autonomie des universités, autonomie des différents réseaux, finalement. Dans une vision un peu plus à moyen et à long terme, pour une saine gestion administrative, quelle est votre vision? Est-ce que le ministère a besoin d'outils supplémentaires pour mieux administrer ces différentes autonomies ou si vous pensez qu'il faut réduire ces différentes autonomies? Est-ce qu'il y a des réseaux, là, qu'on doit réduire ou dont on doit changer le mandat? Votre vision un peu plus globale pour une meilleure gestion?

M. Lucier (Pierre): Écoutez, sur ce genre de questions là, je parlerais moins de vision que de faits. Nous n'administrons pas ces autonomies, par définition. C'est que le système d'éducation n'est pas organisé avec un ministère qui a des directions générales; ce n'est pas ça du tout. Le ministère, en fait, est le dernier venu dans le monde de l'éducation.

Mme Caron: Est-ce que ça devrait être ça ou si ça devrait être autre chose?

M. Lucier (Pierre): Les écoles existaient, les collèges existaient, les universités existaient, et ce sont eux et elles qui accueillent les étudiants, qui enseignent, qui font l'essentiel de l'évaluation et qui guident les étudiants. Donc, cette action-là, elle n'est pas chez nous. Nos lois, notre corpus législatif indique les responsabilités des uns et des autres, et j'allais dire que c'est après coup que le ministère, finalement, s'est taillé une place là-dedans comme instrument d'une collectivité pour rendre le système vraiment partie prenante d'un projet démocratique. Bon.

Alors, nous travaillons avec cette logique-là. Alors, il s'agit de savoir, dans cette logique-là, comment les actions que nous posons et les fonds que nous versons sont, dans le respect des règles du jeu prévues par nos lois, quand même objet de contrôle suffisant. Alors, les dynamiques que nous pratiquons, c'est essentiellement, d'une part, des contrôles internes qui sont de plus en plus de type informatique – comme chacun sait, c'est des machines qui se parlent pour beaucoup; alors, il y a toujours possibilité d'avoir des failles là – mais c'est aussi la logique de la vérification externe. Nous donnons des mandats aux vérificateurs externes des commissions scolaires, des collèges et des universités leur demandant de vérifier telle, telle et telle chose, et nous travaillons avec le résultat.

Donc, c'est une dynamique qui n'est pas une... Autrement dit, les collèges, les universités, les écoles et les commissions scolaires ne sont pas, comme, par exemple, dans le cas des conservatoires, des directions d'un ministère. Ce ne sont pas nos fonctionnaires; c'est des corps constitués qui ont une légitimité prévue dans nos lois et voulue comme telle. Et, nous, nous sommes en appoint important puisque nous avons, selon les réseaux, des responsabilités, dans certains cas, d'orientation, dans certains cas, de diplomation et, partout, de financement.

Alors, il s'agit de trouver des modalités de contrôle correctes de l'attribution des fonds et de l'utilisation des fonds, mais tout en respectant le principe fondamental de l'imputabilité des gens qui sont en place pour les gérer. Quand on prend la peine de faire élire des gens ou quand on prend la peine de nommer une corporation publique, ou quand des universités ont leur propre charte, alors, ou bien on supprime ça ou bien on ne se supplée pas à ça. Alors, au fond, nous sommes en train de trouver, surtout avec les progrès des technologies de l'information, les types de contrôle qui seraient efficaces, mais qui ne seraient pas non plus de l'interventionnisme dans la responsabilité locale.

Alors, c'est pour ça que ça pourrait avoir l'air commode de dire: Ça, c'est de l'autonomie. Ce n'est par commodité: le système est fait comme ça. Je serais beaucoup étonné, quand je regarde ce qui passe dans les pays occidentaux et même ailleurs, qu'on aille à l'inverse de cela. La réclamation est plutôt pour plus d'autonomie locale, plus de responsabilité locale. Sans doute faut-il aller jusqu'à l'établissement peut-être plus que maintenant, mais je n'ai pas vu de système opérer des succions par le haut pour centraliser des choses. Parce que je ne suis pas sûr que tous les États, tous tant que nous sommes, nous faisons si bien dans ce que nous faisons déjà pour vouloir en embrasser plus.

Le Président (M. Facal): M. le... Oui, allez-y, bien sûr.

M. Lucier (Pierre): Prenez l'exemple du primaire, secondaire: les programmes, c'est nous, les examens, c'est largement nous, la diplomation, c'est nous. Alors, si nous pensons – et ce n'est pas seulement vrai pour le Québec – que nous faisons ça tellement bien que nous devrions le faire aussi pour les universités, ça mériterait réflexion.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, sur les espaces inoccupés.


Écoles non utilisées (suite)

M. Ouimet: Oui, merci. 2 000 000 m² en espaces excédentaires qui ne sont pas financés depuis un an, depuis la décision de l'ancien ministre de l'Éducation... Ce n'est pas exact?

M. Chaput (Henri-Paul): Ce n'est pas exact.

Une voix: Parlez plus fort.

Le Président (M. Facal): M. Chaput, pourriez-vous vraiment...

M. Chaput (Henri-Paul): Oui, bien sûr, je fais mon possible. Ce n'est pas exact, M. le Président. Le seul élément que nous avons, l'année dernière, retiré, c'était les espaces, comme j'ai noté, où il n'y avait ni enfant, ni enseignant – parce qu'il y a des résidences dans tout ce secteur-là – ni utilisation à des fins de ressources humaines. Ça existait au Québec. Et c'est les seuls espaces. Nous avons retiré, je pense, 10 000 000 $...

Une voix: C'est 4 000 000 $.

M. Chaput (Henri-Paul): ...4 000 000 $ sur l'ensemble. Donc, c'est vraiment une partie très spécifique que nous avons touchée l'année dernière.

(12 heures)

M. Ouimet: O.K. Mais, peu importe, 2 000 000 m² qui ne sont pas utilisés à des fins pédagogiques, c'est un coût énorme, pour le ministère ou pour le réseau des commissions scolaires. La question que je vous pose, c'est: Est-ce qu'il y a un incitatif pour que les commissions scolaires vendent ces édifices, dans la mesure où elles trouvent des acheteurs? Parce que ce qui est très bien connu dans le réseau des commissions scolaires, c'est qu'elles n'ont pas intérêt à vendre les bâtisses parce que le produit de la vente ne retourne pas à la commission scolaire; il retourne au ministère de l'Éducation. Donc, ce que font les commissions scolaires, c'est qu'elles louent les édifices et, parfois, par bail emphytéotique, pour des périodes de 40, 50, 60 ans pour, là, aller chercher un montant important d'argent. C'est ce qui explique que nous ayons tant de mètres carrés qui dépendent toujours du financement public.

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, d'abord, quand on dit 2 000 000 m² non utilisés à des fins éducatives, il faut être prudent sur ce volet-là. Quand on identifie un chiffre semblable de mètres excédentaires, c'est qu'on fait la différence entre les mètres que nous avons dans l'ensemble de notre réseau et le nombre de mètres qu'on attribue par enfant. Donc, c'est une opération mathématique, là. On ne va pas dans chacune des écoles. Parce que vous comprenez très, très bien que, si on a une école en Gaspésie – je vais prendre un exemple facile – qui est grande comme ça et que la diminution de clientèle fait qu'on aurait besoin, selon nos calculs mathématiques, de cet espace, ils peuvent utiliser et ils utilisent l'ensemble de l'école. Il faut bien se comprendre là-dessus. C'est un calcul qui est strictement le résultat du nombre de mètres carrés de l'ensemble de notre parc immobilier, avec une application du nombre de mètres carrés que nous accordons – et je reprends la question de tantôt – quand nous construisons une école et qu'on sait qu'il y aura 500 élèves. On se comprend bien là-dessus.

En deuxième, en ce qui concerne l'incitatif pour vendre ou utiliser, c'est ce que nous avons voulu faire l'année dernière, d'abord, en demandant à toutes les commissions scolaires – ce que j'ai dit tantôt – une sorte de préavis que nous voulions toucher à ça. Il y a bien des façons d'y toucher. Il y a une façon de dire que nous n'allouons plus rien et il y a une autre façon de regarder situation par situation, parce que ce n'est pas du tout la même réalité. Dans certains villages, certaines municipalités, l'école, sa valeur de vente ou la possibilité que la municipalité ou un autre l'utilise peut être très limitée. C'est ce que nous regardons actuellement pour trouver une solution qui ne mette personne dans un contexte absolument non gérable, parce que ce n'est pas du tout la même chose. Vous savez très bien que le problème en question, à Montréal, peut prendre une dimension complètement différente de celui que nous allons avoir à Percé ou dans un milieu semblable.

M. Ouimet: M. le Président, mon collègue, le député de Bourassa, faisait précisément référence à la situation surtout à Montréal, même si on sait que le problème se pose ailleurs. Mais, à cause de l'effet de l'étalement urbain, les commissions scolaires sont aux prises avec un certain nombre d'édifices qui sont, à toutes fins pratiques, vides. La question que je pose, et je répète: Y a-t-il des incitatifs pour faire en sorte que les commissions scolaires décident de vendre leurs bâtisses vides – je parle des commissions scolaires à Montréal, par exemple – mis à part l'incitatif que vous nous avez indiqué où, là, vous indiquez aux commissions scolaires: On ne financera plus les espaces excédentaires?

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, sûrement que, si comme organisation... Et je vais prendre, puisqu'on me ramène à Montréal, la CECM ou la CEPGM. Je pense que c'est un excellent incitatif de savoir que le produit de la vente de ces immeubles demeure à la commission scolaire et peut être utilisé sur autorisation du ministre. Je pense que c'est un excellent incitatif. J'ai eu l'occasion d'ailleurs, avec la CECM, de regarder l'ensemble du plan qu'ils avaient de rénovation ou autres. Et l'origine des fonds qui servent au maintien du parc immobilier ou à son amélioration, c'est, d'une part, le maintien des actifs, une enveloppe très précise, et les résultats des ventes d'immeubles qu'ils peuvent effectuer en cours d'année. Cet argent n'est pas retourné au ministère; cet argent reste à la commission scolaire. Cependant, la commission scolaire est obligée d'avoir l'autorisation du ministre pour l'utiliser, pour une explication très simple: c'est que ce sont tous des biens qui ont été construits avec des sommes publiques. Mais ça reste à la commission scolaire.

M. Ouimet: Oui, mais, M. le Président, si ma compréhension est bonne, ce qui arrive également, c'est qu'avant d'accorder son autorisation le ministre va demander à la commission scolaire quel serait le degré ou le financement qu'elle serait prête à apporter pour la construction ou pour des projets d'agrandissement. En d'autres termes, c'est le ministère qui va réduire sa contribution dans des projets bien particuliers. À ce moment-là, le ministère va permettre que la commission scolaire conserve les fonds, mais, sur d'autres projets d'immobilisation, le ministère va réduire d'autant l'enveloppe budgétaire qui serait normalement consacrée pour la construction ou l'agrandissement d'une école ou d'un gymnase.

M. Chaput (Henri-Paul): Dans certains dossiers, c'est exact.

M. Ouimet: Dans les faits, dans la pratique, c'est ce qui s'est passé; donc, il n'y a pas d'incitatif vraiment.

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, dans certains dossiers, c'est exact, dans le sens que, dans le coût total de construction d'une école, il y a une partie qui peut être une contribution dite locale parce que ce sont des fonds qui sont disponibles. Dans un autre volet, cependant, vous savez très bien que la commission scolaire peut avoir d'autres besoins que des constructions ou des agrandissements d'écoles, et c'est le cas ne serait-ce que pour le maintien de la qualité des édifices. Ça, ce n'est pas du tout le même volet dont on vient de parler où, sur la construction d'une école de 7 000 000 $, par exemple, il y aurait une contribution locale de la commission scolaire de 1 000 000 $ ou 2 000 000 $. Ce n'est pas du tout le même cas. La CECM, à titre d'exemple, a tout un plan de restauration de ses fenêtres, et je me demande où est la partie qui est prise à l'intérieur de ce montant disponible.

M. Ouimet: Toujours est-il qu'indépendamment de ce que nous indique le sous-ministre je ne pense pas que la CECM ait vendu beaucoup d'immeubles depuis les 20 ou 30 dernières années. Elle en a vendu très peu. Et, si elle en a vendu très peu, j'ai l'impression que c'est qu'elle a senti qu'il n'y avait aucun incitatif à vendre, à se départir de ces immeubles-là; sinon, elle se serait départie de ces immeubles dans la mesure, bien sûr, où on trouve des acheteurs.

M. Chaput (Henri-Paul): C'est exact, M. le Président, qu'il n'y a pas eu de vente, ni de la CEPGM, ni de la CECM. Cependant, je pense, M. le Président, que la réalité actuelle et l'approche que nous avons dans ce dossier font qu'on en discute un peu dans une optique semblable. Et on me donne ici, à titre d'exemple, qu'à même les produits de vente d'immeubles – c'est à Montréal, ça – il y a eu des projets de rénovation d'écoles qui sont montés à 17 000 000 $. C'est sûr que c'est de l'argent qui sert à financer des besoins que la commission scolaire peut avoir, c'est évident. C'est de l'argent qui peut, à certains égards, permettre d'accélérer certains projets à l'intérieur des enveloppes que nous avons. C'est sûr, c'est très clair dans mon esprit.

Le Président (M. Facal): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Moi, M. le Président, ce que j'ai surtout vu à Montréal, en termes de rénovation de fenêtres, c'est du «plywood» dans les fenêtres des écoles.

Je voudrais demander quelle est la marge de manoeuvre d'une commission scolaire. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de l'accroître? On a bien mis au clair avec les questions de mon collègue qu'en termes d'incitatif ce n'est pas évident. Si c'est prélevé sur d'autres subventions, finalement, c'est du pareil au même. On sait qu'il y a aussi des frais de mise en vente d'une école. Est-ce que ces frais-là sont supportés par la commission scolaire? Si c'était supporté par la commission scolaire, puis que le produit de la vente lui échappe ou n'est nullement incitatif, on peut voir là pourquoi ça stagne.

En tout cas, je pose cette question: Quelle est la marge de manoeuvre d'une commission scolaire? Est-ce qu'elle peut aller jusqu'à raser l'école? Moi, je me suis fait dire par des gens qui regardent ça un peu en termes de possibilité d'investissement que, sur le site d'une ancienne école, c'est une nuisance d'avoir une bâtisse. Le terrain à lui seul est plus intéressant qu'occupé par une vieille école. Est-ce que c'est possible pour une commission scolaire de raser l'école? C'est aux frais de qui? Il faut que ça bouge, il faut que ce marché-là... Est-ce que c'est possible de convertir ça en logements, en condos, etc.? Quelle est la marge de manoeuvre d'une commission scolaire? Il me semble qu'on devrait s'ingénier à activer ce marché-là.

(12 h 10)

M. Chaput (Henri-Paul): D'abord, à la première question que le député pose, c'est évident que c'est à même les prix de la vente que la commission scolaire s'autofinance. Quant au deuxième volet, il est aussi, pour nous, très clair qu'à partir du moment où nous avons posé un premier geste, de ne plus donner d'allocation pour ce que j'ai appelé tantôt des espaces vides d'êtres humains, nous voyons les commissions scolaires présenter, préparer des planifications d'utilisation ou de vente de ces espaces. Vous posez une question très précise: Est-ce qu'une commission scolaire pourrait démolir...

M. Charbonneau (Bourassa): Aller jusqu'à...

M. Chaput (Henri-Paul): Allez jusqu'à démolir.

M. Charbonneau (Bourassa): Parce que le terrain a souvent plus d'importance.

M. Chaput (Henri-Paul): Je ne vois pas pourquoi elle ne pourrait pas, M. le Président.

M. Charbonneau (Bourassa): Qui va payer les frais de démolition?

M. Chaput (Henri-Paul): Si vous me dites qu'elle a un terrain qui a une valeur tellement intéressante, j'ai l'impression que, dans sa décision, elle va faire son calcul.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx, suivi de Mme la députée de Deux-Montagnes.

Une voix: Il reste le collégial.

Le Président (M. Facal): Oui, c'est vrai, il nous reste le volet collégial que nous n'avons pas encore traité. Alors, on pourrait peut-être prendre ces deux dernières interventions à condition qu'elles aient des préambules courts comme lors de la période des questions.

M. Kieffer: Je trouve que le timing du député de Verdun pour faire sa remarque est particulièrement efficace. Ceci étant dit...

Le Président (M. Facal): Ceci étant dit.

M. Kieffer: ...M. le sous-ministre, je reviens un peu à la question que vous posait tantôt la députée de Terrebonne quant aux structures, à leur autonomie, etc. Vous y avez répondu très habilement. Et ce n'est peut-être pas votre rôle, de toute façon, d'y répondre; c'est plus le rôle des politiciens.

Pour avoir une idée, on nous a souvent dit que le ratio maîtres, dans le sens d'enseignants, vis-à-vis les fonctionnaires au Québec était extrêmement élevé en comparaison, par exemple, des pays nordiques. Moi, ce que j'aimerais savoir, c'est combien y a-t-il de fonctionnaires qui travaillent au ministère de l'Éducation à Québec et en région? J'aimerais aussi savoir combien il y a de fonctionnaires au complet dans le secteur de l'éducation vis-à-vis le nombre d'enseignants. J'ai envie d'avoir une idée de ce que c'est. Pour ce qui est des enseignants, on peut parler de, quoi, une centaine de milliers à l'élémentaire, secondaire; au cégep, entre 15 000 et 20 000; à l'université, quelques milliers, je suppose? J'aimerais savoir c'est quoi, le rapport entre les deux. Et j'aimerais savoir aussi le rôle du ministère vis-à-vis les commissions scolaires en région.

M. Lucier (Pierre): Sur les chiffres, avec votre permission, on pourrait peut-être, sur l'heure du lunch, faire les rapports et puis vous...

Une voix: Vous l'avez dans vos rapports.

M. Lucier (Pierre): Oui, mais pas ce genre... Je ne pense pas. Alors, c'est encore plus simple. En tout cas, on pourrait les ramasser, parce que ce n'est peut-être pas très fonctionnel ici, mais ça nous fera plaisir de...

M. Kieffer: De nous les donner après-midi, pas de problème.

Le Président (M. Facal): On reprendra cette question cet après-midi, absolument.

M. Lucier (Pierre): Maintenant, sur la question des régions, est-ce que vous souhaitez qu'on en traite tout de suite ou cet après-midi? Ce n'est pas dans le rapport du Vérificateur général.

Le Président (M. Facal): Il est peut-être préférable de ramasser toutes les réponses à cette question, peut-être en début d'après-midi. Est-ce que ce serait possible?

M. Lucier (Pierre): Il n'y a pas de problème, quant à nous.

Le Président (M. Facal): Mme la députée de Deux-Montagnes et, après, nous passerons au collégial.


Maillage avec le ministère de l'Éducation

Mme Robert: Bon, d'accord. Ça suit très bien la question, même si vous allez y répondre cet après-midi, parce que ça suit le rapport du Vérificateur général. Tout à l'heure, la députée de Terrebonne vous a posé une question sur le rôle du ministère par rapport à l'autonomie des commissions scolaires, des universités, etc., et pourtant le Vérificateur général note que des commissions scolaires n'ont pas encore structuré l'implantation de programmes d'études. Tout à l'heure, on a soulevé la politique de supervision pédagogique, etc., qui doit revenir aux commissions scolaires, et je pourrais énumérer beaucoup d'autres sujets qui, à l'heure actuelle, reviennent aux commissions scolaires. Ce sont des choses qui ne sont pas faites.

Le ministère, à l'heure actuelle, va contrôler. Vous avez parlé surtout d'un rôle de contrôle au niveau de plus de programmes, mais pas sous ces aspects-là. À l'intérieur de la mission éducative, le ministère – en fait, j'ouvre la question – est-ce qu'il ne pourrait pas aller davantage comme partenaire sur ces questions-là, comme soutien aux commissions scolaires ou comme une espèce de maillage qui pourrait se faire, sans parler nécessairement de contrôle, pour une plus grande efficacité dans notre système d'éducation?

Parce que, là, on injecte des programmes, et toutes les questions qui sont alentour... On pourrait toucher à la question de la formation des maîtres, si je voulais aller plus loin; en tout cas, on peut toucher à un paquet de choses à ces niveaux-là. C'est cette espèce de maillage qu'on n'a pas; on retrouve un peu partout toute cette série de petites cases avec chacun son petit rôle et, à un moment donné, ça peut nous donner certaines horreurs dans l'application.

M. Lucier (Pierre): Je notais, M. le Président, qu'il existe, entre le ministère et les réseaux d'enseignement, un nombre très, très élevé d'instances de toutes sortes où le dialogue se fait, l'échange d'informations se fait, une sorte de partenariat s'exerce. C'est un fait, cependant, que, depuis quelques années, nous pratiquons moins l'approche-soutien, en ce sens que nous nous sommes partiellement retirés du champ de la production, par exemple, des guides pédagogiques, parfois, comme on le disait à la blague, des guides du guide, bon, étant entendu que notre principale tâche est de travailler à définir des objectifs, des standards, mais que nous ne pouvons pas nous suppléer à toutes les instances qui ont des responsabilités à exercer.

Donc, nous ne sommes pas actuellement dans une dynamique d'accroissement de soutien; d'accroissement de dialogue, oui, mais pas de soutien qui supposerait que nous mettions en place des mécanismes ou des opérations pour aider les gens à faire ce qu'ils ont à faire. Nous le voudrions que nous ne serions plus capables avec la diminution croissante des effectifs. Alors, nous devons cibler et miser très, très résolument sur l'exercice des responsabilités locales. Ça, c'est un fait. Mais nous ne le faisons pas en chambre close; nous le faisons dans de multiples instances avec les réseaux, mais, encore une fois, comme je vous dis, de moins en moins dans une perspective d'opération de soutien ou d'opération de clarté, de clarification, d'échange d'informations. Nous pensons qu'il y a une maturité suffisante dans tous les réseaux. Il y a des gens en place, ils ont la maturité suffisante pour faire ce qu'ils ont à faire correctement. C'est notre approche.


Collèges

Le Président (M. Facal): M. le député de Verdun, sur le niveau collégial, je crois.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Donc, j'interviens sur le rapport du Vérificateur général. Le rapport du Vérificateur général, cette année, ne touchait pas au niveau collégial; donc, il faut rentrer, pour le moment, dans les années précédentes et, en particulier, il y a un document qui a été déposé, qui est le document «Déficiences toujours présentes» dans le réseau collégial.

Il y a deux types de questionnement que je pourrais avoir. Il y en a un qui est qu'on semble ressentir aussi, dans le niveau collégial, les mêmes problèmes qu'on avait pu percevoir et sur lesquels nous avons échangé au niveau universitaire, c'est-à-dire l'admission des gens sans diplôme d'études secondaires, à ce moment-là, et la manière dont ils peuvent réussir dans le niveau collégial. Je n'aborderai pas cette question-là; je sais que vous me ferez le même type de réponse que vous m'avez... Non? Alors, je la conserve en réserve aussi, parce que je vais continuer à me poser des questions aussi à ce niveau-là.


Gestion de l'enseignement

Mais ce n'était pas là ma question principale; c'est sur la gestion de l'enseignement. Il y a une phrase dans le rapport du Vérificateur général, dans le suivi, en page 11, qui peut poser problème. Je vous la lis: «Par ailleurs, les collèges n'avaient pas tous l'assurance que la matière prévue aux programmes d'études était couverte par les enseignants afin que les étudiants puissent acquérir toutes les connaissances et les habiletés requises pour poursuivre leur cheminement.»

Autrement dit, c'est que, dans le Règlement sur le régime des études collégiales, on pouvait s'assurer de la qualité des plans de cours, etc., mais il semblait que certains collèges – je ne sais pas si c'est tous, si vous avez la même analyse que celle qui est faite actuellement par le Vérificateur général – n'étaient pas en mesure de garantir que les étudiants aient l'assurance que la matière prévue aux programmes d'études était couverte et que les habiletés requises avaient été acquises pour poursuivre leur cheminement.

Est-ce qu'il y a eu amélioration? Est-ce que, ce questionnement, vous le faites vôtre aussi? Et est-ce que le ministère, dans l'échange régulier qu'il a avec les cégeps, a cette préoccupation et a une possibilité d'améliorer ou de voir à corriger cette situation, si la situation est problématique?

(12 h 20)

M. Lucier (Pierre): Je commencerai par la deuxième question, la dernière. Le régime d'études collégiales prévoit, à l'article 20, le nouveau régime, des spécifications précises sur le plan de cours, sur l'obligation de l'établir et sur le fait que ce soit distribué aux étudiants. C'est un sujet dont nous parlons effectivement dans nos contacts avec les collèges. Il y a un élément nouveau dans la dynamique, qui a été instauré assez récemment, c'est la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Nous observons que, dans les opérations qu'elle mène sur différents programmes – les rapports commencent à sortir – bien, effectivement, c'est un des points sur lesquels la Commission insiste. Donc, on peut dire que non seulement il y a réaffirmation réglementaire claire de cette obligation-là – ça, c'est venu...

M. Gautrin: Mais l'obligation est sur le plan de cours. L'interrogation du Vérificateur général n'était pas sur le plan de cours; elle était sur l'assurance que la matière avait été effectivement couverte.

M. Lucier (Pierre): Bien, c'est dans le prolongement de la gestion des plans de cours. Et le principal mécanisme sur lequel le système mise actuellement, c'est la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial qui fait l'analyse non pas des programmes sur papier, mais des programmes effectivement donnés et des résultats que ça donne. Alors, j'allais dire que, comme système, nous comptons sur ce mécanisme-là. Et les rapports commencent à tomber, dans deux programmes tout récemment et un troisième gros programme dans les prochains mois. Donc, c'est l'instrument sur lequel, nous, nous misons.

M. Gautrin: Est-ce que vous me permettez? Vous avez évidemment des contacts plus réguliers avec la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial que nous comme parlementaires. Est-ce que la conclusion qui est tirée de ces rapports, c'est que les habiletés et les connaissances prévues dans les plans de cours sont suivies?

M. Lucier (Pierre): Ce sont des rapports institutionnels. Alors, les jugements sont différents d'un établissement à l'autre.

M. Gautrin: Est-ce qu'ils sont publics ou s'ils sont...

M. Lucier (Pierre): Ils sont de droit public. Moi, je vous dirai que je suis un lecteur assidu de tous ces rapports institutionnels.

M. Gautrin: Dans ces conditions-là, s'ils sont de droit public, est-ce que vous pourriez les faire parvenir aux membres de la commission qui seraient intéressés? Et, dans ces conditions-là, je tiens à vous signaler que je serais intéressé. Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Je ne sais pas si, techniquement, c'est la Commission qui doit le faire. Je pense qu'on pourrait servir facilement d'intermédiaire pour que vous puissiez obtenir cette très bonne lecture.

M. Gautrin: Merci.


Admissions conditionnelles

M. Lucier (Pierre): Maintenant, sur le premier problème, qui est considérable, je crois que c'est important, parce que j'aurais des choses à dire, aussi, sur l'approche même du Vérificateur général dans ces dossiers-là. Voici un exemple où on disait: Des collèges admettent des candidats qui ne répondent pas à toutes les conditions – donc, il parlait des admissions conditionnelles – ce qui procure aux collèges plus de 55 000 000 $ par année. Le 55 000 000 $ ici est une extrapolation du champ couvert par ce risque-là. Dit comme c'est dit là, ça peut laisser entendre que les collèges empochent 55 000 000 $ pour faire des choses qu'ils n'ont pas le droit de faire. La réalité, c'est qu'on a ici une extrapolation du champ de risque.

Voici un très bel exemple. Parce que cette remarque-là avait été faite par le Vérificateur au moment où le gouvernement était en train de modifier sa loi. Et vous savez que, depuis ce temps, il est impossible pour un collège d'admettre un étudiant qui n'a pas son D.E.S., donc son Diplôme d'études secondaires. Il n'y a plus d'admissions conditionnelles.

M. Gautrin: Non, ça tombe.

M. Lucier (Pierre): Il n'y en a plus.

M. Gautrin: Il n'y en a plus.

M. Lucier (Pierre): Et c'est un cas où nous avons tenu, même administrativement, la ligne, je dirais, dure. Il n'y a pas eu de...

M. Gautrin: Dérogation.

M. Lucier (Pierre): Aucune. Donc, ça prend le D.E.S. Et il y avait des craintes dans le milieu, parce que ça n'est pas très simple. Je ne sais pas si, vous et moi, on aurait été contents de voir qu'il y avait des jeunes laissés sur le coin de la rue parce qu'ils n'avaient techniquement pas le papier D.E.S. au moment opportun, même s'ils avaient eu des reprises au mois d'août. Mais on a joué ça, je dirais, de manière stricte, tout le monde étant bien conscient que nous travaillons au mieux-être... C'est fait. Puis-je vous dire que nous n'avons trouvé aucune trace des 55 000 000 $? Logiquement, si le propos implicite du Vérificateur général avait été exact ici, nous aurions retrouvé ces 55 000 000 $. Mais c'était une zone de risque qu'il identifiait. Dans les faits, aucune trace des 55 000 000 $.

M. Gautrin: Zéro.

M. Lucier (Pierre): Zéro. Pourquoi?

M. Gautrin: Expliquez-moi pourquoi, parce que, s'il y avait moins que 55 000 000 $, je comprends, mais zéro, ça m'intéresse.

M. Lucier (Pierre): C'est très simple. Ce n'est pas parce que les collèges admettaient des gens qui n'avaient pas, au moment précis, leur D.E.S. en main que nécessairement les choses ne marchaient pas. Ce qui s'est produit, c'est que l'ensemble des comportements des gens s'est rectifié; les résultats entrent plus vite, les étudiants connaissent les règles du jeu. Résultat: nous n'avons pas vu de baisse d'effectifs.

Alors, voici un exemple très intéressant, en fait, je crois, sur la bonne lecture qu'il faut faire des chiffres qu'avance le Vérificateur général. Si c'est bien compris, il identifie les zones de risque et il les chiffre. Mais ça ne veut pas dire que c'est de l'argent dilapidé ou détourné. Parce que, quand on fait exactement ce qu'il souhaite, ça n'arrivera pas nécessairement. Les 55 000 000 $, oubliez-les.

La Présidente (Mme Caron): Je reconnaîtrais maintenant le député de Groulx pour une brève question et une brève réponse, parce que nous terminons nos travaux ce matin à 12 h 30.

M. Kieffer: D'accord. Ma question va plus s'adresser au Vérificateur général. M. le président m'a dit que je pouvais poser ma question. Je trouve, M. le Vérificateur général...

Le Président (M. Facal): Le Vérificateur est une ressource à notre service

M. Kieffer: Bien, c'est ça, je voudrais avoir des informations sur une affirmation qu'il a faite et qui concerne directement...

Le Président (M. Facal): Une clarification vraiment technique plutôt qu'une demande d'avis.

M. Kieffer: Écoutez, écoutez-la et vous me direz si elle est admissible ou non.

Le Président (M. Facal): O.K.

M. Kieffer: Ce sur quoi on vient de discuter, vous dites que la plupart des collèges – c'est gros, ça, là – n'ont pas l'assurance que la matière prévue aux programmes d'études est couverte par les enseignants dans la prestation de leurs cours. Je trouve ça gros. Je trouve ça global. Pour avoir enseigné pendant 20 ans dans un cégep, en tout cas, moi, je ne l'ai jamais vu de même. J'aimerais, de la part du Vérificateur général, qu'il m'éclaire sur la façon dont il s'y est pris pour en arriver à cette conclusion-là. Que ce soit technique ou autrement, M. le Président, moi, s'il me dit qu'il y a des paramètres techniques qui lui ont permis d'y arriver, je veux les connaître. Je trouve ça trop gros.

Le Président (M. Facal): D'accord. Mais ce que je veux que vous compreniez, c'est que notre invité, c'est le sous-ministre, pas le Vérificateur.

M. Kieffer: Oui, oui, sauf qu'il passe un jugement sur le ministère de l'Éducation. Moi, je veux bien être d'accord sur bien des jugements qui sont passés, mais, celui-là, je voudrais savoir sur quoi il s'appuie pour le passer.

Le Président (M. Facal): Vous êtes à l'extrême limite.

M. Kieffer: Bien, je veux bien.

Le Président (M. Facal): Parce que les auditions du Vérificateur, c'est à la commission du budget et de l'administration. Maintenant, M. Breton, est-ce que vous vous sentez à l'aise pour...

M. Breton (Guy): Oui.

Le Président (M. Facal): Oui, bon.

M. Breton (Guy): Vous avez raison de dire que vous n'avez pas trouvé les 55 000 000 $. Je ne crois pas que, dans notre texte, on promettait une économie de 55 000 000 $. Ce qu'on a fait, c'était de multiplier la valeur de chaque étudiant par le nombre d'étudiants qui étaient concernés par cette situation sans présumer que ces étudiants-là ne viendraient plus, etc., pour donner un ordre de grandeur. Maintenant, nous cherchons à mesurer ou à transcrire en monétaire les réflexions que nous faisons soit pour attirer l'attention ou pour montrer l'ampleur du domaine. Dans ce cas-là, il y avait x milliers d'étudiants, un étudiant coûte tant dans un cégep, l'un par l'autre donnait 55 000 000 $. Donc, c'était une population de 55 000 000 $ dans la dépense globale. De là à prétendre qu'on aurait récupéré 55 000 000 $, je pense qu'on ne l'a pas dit. Je n'ai pas le texte sous les yeux. Dans ce sens-là, c'était 55 000 000 $ sur le coût total des cégeps. Ça permettait aussi de faire une autre relation d'importance, mais on n'avait pas promis 55 000 000 $.

M. Lucier (Pierre): Parce qu'il faut bien voir...

M. Kieffer: Je m'excuse, M. le Président, j'avais posé une question.

Le Président (M. Facal): M. Lucier, vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Lucier (Pierre): C'est parce que le commun des mortels, qui lit ce genre de libellé de faits saillants, comprend – et ça a été le cas dans plusieurs médias – qu'il y avait comme une passe de 55 000 000 $, mais pour un service qui était effectivement donné. On a fait exactement ce qui nous était recommandé et, j'en étais personnellement sûr, on n'a pas trouvé le 55 000 000 $ parce que les pratiques se sont ajustées. Et ça, c'est inhérent à la méthode qui consiste à chiffrer la zone de risque et à trouver des libellés médiatiquement consommables pour qu'on comprenne qu'il y a un gros risque. Mais, à un moment donné, certaines interprétations de ces propos, qui en soi sont tout à fait correctes, risquent de nous entraîner dans des demi-vérités, et une demi-vérité est une demi-fausseté.

Le Président (M. Facal): Alors, ces mises au point étant faites de part et d'autre, nous laisserons chaque lecteur tirer ses conclusions individuelles. Je me réjouis justement qu'il soit 12 h 30.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Alors, nous allons ajourner jusqu'à cet après-midi, 14 heures. Il est important de noter que, cet après-midi, on se réunit – libération – à la salle Papineau, à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 14 h 13)

Le Président (M. Facal): Nous allons reprendre. Je prierais tous nos invités de reprendre leur place. Nous devrons, cet après-midi, entreprendre, avec quelques minutes de retard, le bloc consacré à l'enseignement primaire et secondaire. Mais, auparavant, je vous rappelle que nous avions laissé à moitié en suspens deux questions que nous avions souhaité vider avant d'aller plus loin, deux questions qui avaient été évoquées par le député de Groulx. La première, qui était une question à tiroirs, portait sur le ratio administrateurs-enseignants. C'était là-dessus, M. le député de Groulx, que vous vouliez avoir – des fonctionnaires, oui – des chiffres, là. Et la deuxième portait sur une affirmation que vous aviez relevée dans le rapport du Vérificateur concernant les collèges. C'est ça?

M. Kieffer: C'est bien ça.

Le Président (M. Facal): Oui. Alors, pourriez-vous reprendre peut-être les deux questions sans préambule? Et, après, je crois que le député de Marquette... Oui, mais, vraiment, on s'entend, hein?

M. Kieffer: Oui, oui, oui.

Le Président (M. Facal): On finit là-dessus...

M. Kieffer: On finit là-dessus.

Le Président (M. Facal): ...et on reprend notre plan de travail tel qu'originellement prévu.


Ratio fonctionnaires-enseignants

M. Kieffer: Bien, écoutez, quant à la première question, le sous-ministre semblait l'avoir bien comprise; alors, il n'est pas nécessaire de la répéter.

Le Président (M. Facal): Oui, très bien.

M. Kieffer: Je répéterai la deuxième.

Le Président (M. Facal): Très bien.

M. Lucier (Pierre): Il y avait deux volets à la question de M. le député. Il y avait, d'abord, le ratio fonctionnaires. Un fonctionnaire, c'est quelqu'un qui fonctionne, là, j'imagine, au ministère; c'est ce que ça veut dire, là. Nous sommes actuellement 1 692 fonctionnaires au ministère, comprenant les régions, et il y avait 101 786 enseignants en 1993-1994. Alors, vous avez demandé le ratio, c'est 1,6 %. Je ne sais pas très bien ce que veut dire ce ratio, remarquez, mais c'est...

M. Kieffer: O.K. Alors, là-dedans, quand vous parlez des fonctionnaires, vous parlez uniquement des fonctionnaires de votre ministère, là.

M. Lucier (Pierre): C'est ce que vous avez demandé, oui.

M. Kieffer: O.K. C'est-à-dire, oui, mais j'aurais aimé aussi avoir l'ensemble des fonctionnaires dans le réseau. Alors, ça, c'est les commissions scolaires, c'est les cégeps, c'est les universités.

M. Lucier (Pierre): Oui, c'est parce que le concept de fonctionnaire appliqué à une école ou à une commission scolaire mérite d'être précisé.

M. Kieffer: Bien, pour moi, un fonctionnaire, c'est quelqu'un qui n'enseigne pas, mais qui travaille dans la boîte.

M. Lucier (Pierre): Oui, mais...

M. Kieffer: Alors, je le prends au sens le plus large...

M. Lucier (Pierre): Oui, oui.

M. Kieffer: ...et je ne passe pas de jugement.

M. Lucier (Pierre): Non, non, non, non, non.

M. Kieffer: On s'entend, là?

M. Lucier (Pierre): J'ai bien compris...

M. Kieffer: Bon.

M. Lucier (Pierre): ...que nous sommes loin de Courteline; ça, je l'ai bien compris. Est-ce qu'est fonctionnaire un conseiller en orientation? Est-ce qu'est fonctionnaire un orthopédagogue? Ce n'est pas des enseignants. Est-ce qu'est fonctionnaire un appariteur de laboratoire? Peut-être un petit peu plus. Et ainsi de suite, un conseiller pédagogique est-il fonctionnaire? Alors, c'est pour cela que les ratios qui portent sur simplement les enseignants pour les opposer à tout autre sont des ratios peu significatifs de ce point de vue là. Qu'est-ce que...

M. Kieffer: Est-ce que vous avez des chiffres plus précis, à ce moment-là? Est-ce que vous avez...

M. Lucier (Pierre): Bien, ça dépend de ce que vous voulez. Vous m'avez demandé les enseignants, c'est 101 000.

M. Kieffer: Oui, oui, d'accord.

M. Lucier (Pierre): Alors, ça fait 1,6 % par rapport aux fonctionnaires.

M. Kieffer: O.K. Alors, je tenterai de repenser à ma question. On pourra y revenir.

M. Lucier (Pierre): Ça nous fera plaisir.

M. Kieffer: Mais, si vous êtes capable de me le dire effectivement par catégorie d'emploi, moi, je suis...

M. Lucier (Pierre): Ah! on a tout ça. C'est même publié chaque année, largement.

M. Kieffer: C'est beau.

M. Lucier (Pierre): M. le député avait une question sur les directions régionales, je pense.

M. Kieffer: Oui.

M. Lucier (Pierre): Alors, il y a 216 fonctionnaires du ministère, parmi les 1 692, qui sont dans les 11 bureaux régionaux. Si vous êtes intéressé à ce qu'on en dise quelques mots, ces directions régionales fonctionnent, puisque c'est des fonctionnaires, pour le primaire-secondaire, comme vous savez; donc, essentiellement, elles n'ont pas d'actions spécifiques, sinon marginales, par rapport aux collèges ou aux universités. Ce sont des instances par lesquelles le ministère est présent en région et peut agir sur un certain nombre d'opérations, par exemple, les opérations régionales des états généraux ou d'autres consultations de même nature.

Ces directions-là ont une fonction importante de rétroinformation par rapport à nous, à Québec. Évidemment, elles sont sur le terrain et, par conséquent, elles sont au courant des événements, des dynamiques, des problèmes aussi, et un des rôles importants qu'elles ont à jouer, c'est d'assurer une bonne rétroinformation pour le ministère. Elles travaillent aussi à la concertation des partenaires régionaux dans toutes sortes de dossiers. Elles sont souvent un peu la plaque tournante de rendez-vous pour l'ensemble des intervenants. Elles ont aussi à intervenir pour nous, elles nous aident à faire des portraits qualitatifs et quantitatifs des réalités régionales en éducation.

Elles ont des fonctions aussi, je ne sais pas si je dois dire de soutien, d'aide ou d'animation auprès des commissions scolaires sur certains dossiers. Elles interviennent, en général, dans tout ce qui est difficulté ou conflit de première ligne, des fermetures d'écoles, enfin, toutes sortes de situations qui peuvent surgir. Et elles gèrent un certain nombre d'allocations budgétaires relativement limitées; par exemple, elles ont un rôle à jouer dans les contrôles des clientèles et ainsi de suite.

Alors, ce n'est pas de la décentralisation, comme vous savez; c'est une déconcentration. Au fond, c'est une présence du ministère en région; donc, 11 bureaux, 11 directions régionales pour 216 fonctionnaires. C'est leur rôle actuel.

M. Kieffer: O.K.

Le Président (M. Facal): La deuxième question laissée en suspens concernait...

M. Kieffer: Je peux la lire, M. le Président, ça va être bien plus simple.

Le Président (M. Facal): Oui, allez-y, oui.


Gestion de l'enseignement (suite)

M. Kieffer: Vous avancez, M. le Vérificateur général... Une de vos affirmations est la suivante: «La plupart des collèges n'ont pas l'assurance que la matière prévue aux programmes d'études est couverte par les enseignants dans la prestation de leurs cours.» Moi, comme je vous ai dit, j'ai trouvé ça gros, j'ai trouvé ça globalisant. J'aimerais savoir à partir de quelle procédure ou quelle démarche vous a amené à cette conclusion-là.

M. Breton (Guy): Si vous permettez, je vais relire, moi, le paragraphe 4.50 de ce rapport annuel où on disait... Les collèges ont la responsabilité d'établir, via des enseignants et pour chaque cours, un plan détaillé conforme au programme d'études. Ça, c'est à 4.48, en 1993, rapport de 1993. À 4.49: «C'est le département qui a la responsabilité du contrôle de la prestation des cours... Les coordonnateurs de département, élus annuellement par leurs pairs, doivent rendre compte au cégep des activités de leur département.»

(14 h 20)

«Les collèges visités ont mis en place différents mécanismes pour encadrer l'élaboration et l'autorisation... Généralement, un avis sur la conformité de chaque plan de cours est émis par un responsable tel que le coordonnateur du département. Toutefois – et c'est là que je vous rejoins – les collèges n'ont pas tous – de tous ceux qu'on a vus, il y en a quelques-uns qui ne l'ont pas – l'assurance que les plans des cours offerts à l'enseignement régulier sont conformes, puisque – ces quelques collèges – quelques directions des études ne reçoivent pas une information suffisante relative à cette autorisation.» Tout notre message est là. Ce n'est pas une généralité; il y a un certain nombre de collèges où la direction des études n'a pas reçu cette information qui est prévue par le coordonnateur, provenant du coordonnateur du département.

M. Kieffer: Si vous me permettez, M. le Président, je considère que c'est important. Déjà, dans votre réplique, vous relativisez votre affirmation. Là, vous en êtes rendu...

M. Breton (Guy): Non, non, le texte...

M. Kieffer: ...à un certain nombre...

M. Breton (Guy): C'est écrit tel quel à 4.50.

M. Kieffer: Oui. Mais ce que je lis ici, moi, M. le Vérificateur, c'est «la plupart des collèges». «La plupart», ça veut dire la plus grande partie des collèges.

M. Breton (Guy): Là, vous lisez ça dans...

M. Kieffer: Écoutez, dans le document qui nous a été remis par...

M. Breton (Guy): Oui, d'accord.

M. Kieffer: Bon. Et, dans les affirmations qui précèdent ce que vous venez juste de dire, vous dites: Bon, il y a le département; le département doit rendre compte au collège de ses activités et il est dans la définition même du département d'assurer cette autorégulation-là, O.K., ou cette régulation-là. Appelons-la «auto» ou autrement, c'est une de ses fonctions. Ce type d'affirmation là... Et soyez assuré que, la plupart du temps, je suis d'accord avec ce que vous avancez, mais, là, cette fois-ci, je trouve ça gros. Pour avoir été pendant 20 ans dans un cégep, je peux vous assurer une chose: c'est que, si un prof ne fait pas sa job, il y a un mécanisme automatique d'autorégulation que les étudiants eux-mêmes assument, puis je peux vous assurer que c'est efficace.

Ceci ne signifie pas, par ailleurs, qu'il ne faille pas une procédure peut-être plus systématique. Mais, pour moi, que l'information monte au ministre ou qu'elle ne monte pas au ministre, ce n'est pas là où on s'assure de la qualité et de l'étendue de la formation ou de l'information qui est transmise aux étudiants. Alors, dans ce sens-là, je trouvais ça gros, et ce qui arrive trop souvent, c'est que les médias s'emparent de ce type de déclarations là et ça jette une image qui est fausse des cégeps dans la population.

M. Breton (Guy): Si vous permettez, je vous ai cité 4.50, qui était le dépôt des plans. À 4.51, on dit: «Par ailleurs, une grande proportion des cégeps...» «La plupart», ça se ressemble, et ce que vous citez comme «la plupart», c'est un texte que les gens, en général, n'ont pas, parce que c'est un document de travail qu'on vous a préparé pour vous aider à tenir cette réunion.

M. Kieffer: Oui. Il y a des journalistes aujourd'hui dans la salle, hein?

M. Breton (Guy): Qui en ont une copie?

M. Kieffer: Bien, en tout cas, ce matin...

M. Breton (Guy): Je serais étonné.

M. Kieffer: ...quand c'est sorti, moi, j'étais assis à côté des journalistes.

Le Président (M. Facal): En tout cas, le document ne leur était pas destiné.

M. Kieffer: Non, mais ils ont des oreilles, puis ils écoutent, M. le Président. C'est tout ce que je...

M. Breton (Guy): Bon. O.K.

M. Kieffer: Je tenais à remettre les choses dans leur contexte.

Le Président (M. Facal): Bon. Le commentaire est passé.

M. Breton (Guy): Bon. Entre «la plupart» et «une grande proportion des cégeps – on ne fera pas de la sémantique là-dessus – n'ont pas mis en place les mécanismes qui les assureraient que la prestation des cours est conforme aux plans, tant à l'enseignement régulier qu'à l'éducation des adultes»... Ça, on l'a affirmé l'autre fois: Le plan lui-même, normalement, il peut être déposé, mais que le plan ait été suivi, la plupart des cégeps ne l'ont pas mis en place au moment où on a fait le travail, et c'est ce qu'on dit.


Niveaux primaire et secondaire

Le Président (M. Facal): Bon. Ces précisions étant faites, nous reprenons notre plan de travail sur les niveaux primaire et secondaire. M. le député de Marquette.


Écoles non utilisées (suite)

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je voudrais clarifier des réponses qui nous ont été fournies par le sous-ministre juste avant l'ajournement de nos travaux concernant le financement des espaces excédentaires. On nous a dit qu'il y avait pour environ 2 000 000 m² d'espaces excédentaires dans le réseau des commissions scolaires financés par le ministère. On posait la question, à savoir: Ça représente quoi en termes d'écoles? Et ce qui a été avancé, c'est que, pour une école primaire de 12 classes, ça représente environ 3 000 m². Si on prend le 2 000 000 m² et qu'on le divise par 3 000 m², ça nous donne, grosso modo, entre 650 et 700 écoles primaires. Je comprends qu'on doit nuancer ça. Ce que j'aimerais entendre de votre part, c'est, d'une part, les nuances. Dans un deuxième temps, combien d'écoles sont vides à travers la province et sont toujours financées par le ministère? Depuis combien d'années? Et ça représente combien d'argent?

M. Chaput (Henri-Paul): Mme la Présidente, je vais reprendre les quelques données que nous avons discutées ce matin. D'abord, dans le réseau primaire-secondaire, c'est presque 15 000 000 de mètres, 14 888 000 mètres, que nous avons. Quand je suis arrivé tantôt, ce matin, à 2 000 000 de mètres, c'est l'écart entre ce chiffre et ce que je vous ai expliqué ce matin, le calcul par enfant, par élève, par niveau primaire ou secondaire, de l'espace qui lui est consacré. Je donnais 2 000 000 de mètres excédentaires. Les vérifications qu'on a faites ce midi nous amènent à considérer que cet écart est de 2 300 000 mètres excédentaires. J'ai aussi noté ce matin que, cette année, nous avons soustrait de l'allocation aux commissions scolaires l'allocation qui était consacrée à des mètres excédentaires qui n'étaient pas utilisés soit pour des enfants ou pour des enseignants. Le 4 000 000 $ auquel j'ai référé ce matin, il correspondait à environ 560 000 m².

M. Ouimet: Là, ce n'est pas clair pour moi. Pourriez-vous...

M. Chaput (Henri-Paul): Alors, je viens de vous dire qu'il y a un écart...

M. Ouimet: ...vulgariser davantage?

M. Chaput (Henri-Paul): Certainement, Mme la Présidente. Il y a un écart de 2 300 000 mètres excédentaires. Si je me mets à jour aujourd'hui, compte tenu de la décision que nous avons prise de soustraire 500 000 m², vous arrivez à 1 800 000. Mon 2 000 000 de ce matin, c'est 1 800 000 quand je le valide. C'est clair, Mme la Présidente?

M. Ouimet: Oui. Donc, ce sont des espaces excédentaires.

M. Chaput (Henri-Paul): Excédentaires, selon l'écart entre ce que je vous ai noté tantôt, ce qui existe, et le calcul pour le nombre d'enfants.

Votre deuxième question: Combien de bâtiments? J'avoue que, sur l'heure du dîner, je pensais... J'avais terminé en disant que, pour Montréal... Je suis allé les chercher pour Montréal. Il y a donc des sous-questions, là, que je n'ai pas ici. Je peux vous dire qu'à Montréal c'est 165 bâtiments qui ne sont pas utilisés. J'ai les données en mars 1995, c'est 165 bâtiments, et à noter, Mme la Présidente, que ce n'est pas toutes des écoles. Il y a aussi, me dit-on, des résidences. Donc, ce n'est pas le même espace. On ne peut pas imaginer toujours le même type d'espace. Sur les 165 bâtiments non utilisés à la CECM...

M. Ouimet: Ça, c'est juste à la CECM, 165?

M. Chaput (Henri-Paul): Sur l'île. Pardon! On me dit sur l'île.

M. Ouimet: Sur l'île.

M. Chaput (Henri-Paul): Excusez-moi. ...il y en a 146 qui sont loués ou prêtés à des organismes hors réseau. Je pense à des organismes communautaires. Je peux aussi penser à des organismes municipaux. Je peux aussi penser à des organismes de la santé, des CLSC. Et c'est un peu dans cette optique que je répète, Mme la Présidente, qu'il y a un an nous avons donné un préavis aux commissions scolaires pour qu'on puisse mieux planifier l'utilisation de ces espaces en disant que nous regarderions cette année encore notre allocation.

Je fais une nuance sur la façon dont M. le député a posé la question. Quand on dit: C'est le coût, c'est l'allocation que nous y mettons. Et j'ai bien expliqué ce matin que c'est une allocation pour aider les commissions scolaires à défrayer des coûts supplémentaires qui ne seraient pas pris dans les grands calculs par élève ou par mètre-école. Et c'est tout ce que j'ai noté. Si vous prenez mon exemple de ce matin d'une école qui est grande comme ça et qu'on utilise ça en Gaspésie, je serais incapable de vous dire comment est-ce que ça coûte, ça.

M. Ouimet: Oui, ça, ça va.

M. Chaput (Henri-Paul): Incapable. C'est l'allocation que nous donnons, que nous versons aux commissions scolaires pour les aider et pour prendre en considération, ce que nous considérons, qu'ils ont des dépenses supplémentaires. C'est ce que j'ai noté.

M. Ouimet: Ça représente combien?

M. Chaput (Henri-Paul): C'est de l'ordre de 40 000 000 $, comme je l'ai noté ce matin.

M. Ouimet: Donc, 40 000 000 $ pour les 165 bâtiments sur l'île de Montréal?

M. Chaput (Henri-Paul): Non, non, non, non.

M. Ouimet: Non.

M. Chaput (Henri-Paul): Non, non, sur l'ensemble...

M. Ouimet: Sur les 2 000 000?

M. Chaput (Henri-Paul): Malheureusement, Mme la Présidente, j'avais pris juste les données sur le nombre de bâtiments. Est-ce qu'on les a?

(Consultation)

M. Chaput (Henri-Paul): O.K. Je ne les ai pas pour l'ensemble du Québec. Mme la Présidente, on peut fournir ces données-là très facilement, mais je ne les ai pas ici.

M. Ouimet: O.K. Lorsque vous parlez des 146 bâtiments sur 165 qui sont utilisés, avez-vous une idée des revenus que ça peut générer pour les commissions scolaires?

M. Chaput (Henri-Paul): C'est sûr que la CECM aurait, me dit-on, 14 000 000 $.

Une voix: Brut.

M. Chaput (Henri-Paul): Oui, brut, me dit-on.

La Présidente (Mme Barbeau): Vous avez terminé, M. le député de Marquette? Est-ce que c'est terminé, votre intervention?

M. Ouimet: Oui, je vais revenir parce que ce n'est pas...

(14 h 30)

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, c'est pour essayer de tirer la ligne là-dessus sans y passer tout l'après-midi. Si on comprend bien, le 2 000 000 approximativement dont on parlait ce matin sans trop nuancer ce qu'il comprenait, vous nous apprenez de manière définitive que, si on parle d'espaces non utilisés pour des fins scolaires, pédagogiques et si on veut tout englober, comme vous dites, ça dans ça, puis les écoles fermées, fermées, c'est 2 300 000.

M. Chaput (Henri-Paul): Oui, monsieur.

M. Charbonneau (Bourassa): De ça, il y a à peu près 560 000 m² qui sont des écoles fermées, fermées...

M. Chaput (Henri-Paul): Et que nous ne finançons plus.

M. Charbonneau (Bourassa): ...et que vous ne supportez en aucune manière. Donc, vous en supportez à peu près 1 800 000 à raison de 11 %, vous me disiez, à peu près? C'est 11 % que vous financez des infrastructures?

M. Chaput (Henri-Paul): En fonction de... Compte tenu de la taxe?

M. Charbonneau (Bourassa): Oui.

M. Chaput (Henri-Paul): C'est l'ordre de grandeur.

M. Charbonneau (Bourassa): Alors, on peut en déduire qu'il y a un coût beaucoup plus important, mais on ne sait pas de combien. Parce que c'est les commissions scolaires qui le supportent à travers leurs dépenses générales. Mais, pour le déboursé du ministère, vous nous avez donné l'ordre de grandeur qu'il convient de remarquer pour ce qui est de votre champ de responsabilité. Mais on sait bien qu'il y en a d'autres qui paient ailleurs. Est-ce que c'est à peu près juste?

M. Chaput (Henri-Paul): Mme la Présidente, c'est l'ordre de grandeur de l'allocation que nous versons aux commissions scolaires...

M. Charbonneau (Bourassa): C'est ça.

M. Chaput (Henri-Paul): ...et qui a été établi, bien sûr, par discussion avec elles, mais je serais incapable de faire une liaison directe entre le coût et l'allocation.

M. Charbonneau (Bourassa): Il y a un coût, mais on a de la difficulté, on n'a pas...

M. Chaput (Henri-Paul): Exact.

M. Charbonneau (Bourassa): ...les données pour l'établir. Alors, il y a donc 2 300 000 m² qui gisent en quelque part sans être pleinement utilisés ou même ne l'étant pas du tout.

M. Chaput (Henri-Paul): Il y a 2 300 000 m², Mme la Présidente. C'est l'écart entre le nombre de mètres carrés qui existe dans notre réseau et l'application...

M. Charbonneau (Bourassa): C'est ça.

M. Chaput (Henri-Paul): ...comme je vous ai donné, de 9 500 000 m² pour le primaire et de 14 200 000 m², je pense, pour le secondaire, multiplié par le nombre d'élèves. C'est une opération mathématique, et je prends mon exemple encore où on utilise toute l'école.

M. Charbonneau (Bourassa): C'est ça.

La Présidente (Mme Barbeau): Avez-vous terminé, M. le député de Bourassa?

M. Charbonneau (Bourassa): Oui.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Marquette.


Sort de l'ex-directrice régionale de Montréal

M. Ouimet: Oui, j'aimerais poser une question concernant l'ancienne directrice régionale pour la région de Montréal, Mme Mireille Andry, qui était dans le réseau depuis un certain nombre d'années. Pourriez-vous m'expliquer si elle est toujours à l'emploi du ministère de l'Éducation, si elle est toujours à l'emploi de la direction régionale de Montréal?

M. Lucier (Pierre): Mme Andry n'est plus directrice régionale de Montréal, mais elle est toujours dans les effectifs du ministère de l'Éducation. Elle est temporairement prêtée au ministère des Communautés culturelles pour un travail interministériel sur l'école montréalaise et les problèmes éducatifs, disons, ou les défis éducatifs soulevés par l'intégration socioculturelle.

M. Ouimet: Pourriez-vous nous indiquer pourquoi elle n'est plus directrice régionale?

M. Lucier (Pierre): Oui. Ça fait partie des mouvements réguliers de personnel, avec son plein accord, d'ailleurs. Elle a relevé un autre défi. Je n'ai rien d'autre à dire là-dessus. Avec son plein accord.

La Présidente (Mme Barbeau): Avez-vous terminé, M. le député?

M. Ouimet: Non, non. Ce qui circule dans l'ensemble des commissions scolaires de l'île de Montréal, c'est qu'elle a été limogée.

M. Lucier (Pierre): Elle n'a pas été limogée. Ce n'est pas exact.

M. Ouimet: Elle aurait été limogée parce qu'elle défendait les intérêts de Montréal avec beaucoup de vigueur, beaucoup d'agressivité, beaucoup d'acharnement également, par rapport aux dossiers.

M. Lucier (Pierre): Ce sont des bruits faux et sans fondement. C'est vérifiable auprès d'elle-même, d'ailleurs.

M. Ouimet: O.K.

La Présidente (Mme Barbeau): Est-ce que c'est terminé, M. le député de Marquette?

M. Ouimet: Là-dessus, oui.

La Présidente (Mme Barbeau): Est-ce qu'il y a d'autres questions?


Retard dans les programmes d'alphabétisation et d'éducation populaires

M. Ouimet: S'il n'y en a pas d'autres, j'aimerais poser des questions maintenant sur les programmes d'alphabétisation et d'éducation populaires qui ont fait la manchette, je pense, au mois de décembre. L'ancien ministre de l'Éducation avait fait plusieurs déclarations. Il avait pris également des engagements. Un des engagements qu'il avait pris, c'est que les organismes communautaires ou les groupes d'éducation populaire n'auraient plus jamais à perdre de temps pour chercher à ramasser de l'argent. Lorsque je l'ai questionné en Chambre, à l'Assemblée nationale, il avait fourni l'explication que les difficultés, le retard de presque deux mois concernant l'enveloppe budgétaire de 9 800 000 $ qui était destinée aux organismes populaires étaient liés au rodage du nouveau programme. Pourriez-vous m'en parler davantage?

M. Lucier (Pierre): Il s'agit ici de deux programmes: le Programme, donc, de soutien à l'alphabétisation populaire autonome, qu'on appelle, d'après le sigle, PSAPA, et le Programme de soutien à l'éducation populaire autonome, donc le PSEPA. Donc, le PSEPA et le PSAPA.

Il y a eu un certain nombre de décisions qui ont été prises au tournant de l'année budgétaire, effectivement. La première décision a été de hausser substantiellement les montants alloués aux programmes qui sont passés de 8 000 000 $ à 14 000 000 $, donc une augmentation substantielle des sommes disponibles pour les organismes dans les deux programmes. L'utilisation prévue pour ces sommes nouvelles était partagée entre un accroissement des subventions pour un accroissement d'activités et, d'autre part, un accroissement du nombre d'organismes éligibles ou admissibles. Voilà pour la première décision qui a été prise, donc, d'augmenter les sommes, et les organismes qui étaient déjà subventionnés avaient reçu une avance au tournant de l'année budgétaire.

À la suite de quoi, il y a eu reformulation des programmes, souhaitée par décision ministérielle de reformuler des programmes à la suite d'un certain nombre de discussions avec les groupes concernés, ce qui a abouti à deux programmes qui sont sortis à la fin du printemps. Enfin, la date exacte, c'est quelque part en mars ou avril, peut-être même mai. Je n'ai pas la date précise, mais en tout cas. Donc, il y a deux programmes qui, effectivement, précisent les règles d'admissibilité des organismes, imposent un certain nombre de conditions, notamment l'obligation de déposer une planification des activités, une obligation de recueillir aussi des appuis dans leur environnement, donc des lettres d'appréciation. Alors, le programme, essentiellement, précisait un certain nombre de conditions d'admissibilité. Il précisait aussi que, pour la première année, il y avait reconduction pour la plupart et ouverture d'un certain nombre de groupes et de nouveaux groupes, et il prévoyait que la suite des opérations pourrait, l'année suivante, aller plus avant dans la détermination des critères.

Alors, ces deux programmes ont été diffusés – j'aimerais ça qu'on me retrouve la date précise, je crois que c'est quelque chose comme avril ou mai – et les choses se sont ensuivies et, progressivement, les organismes ont reçu, si je peux dire, les subventions qui étaient prévues ici dans le programme. Rodage... Non, ça, c'est l'entrée en vigueur. Ce n'est pas la date de diffusion.

M. Ouimet: Ce que j'essaie de comprendre, c'est les motifs du retard. Il y aurait eu à peu près 60 jours et même plus de retard. Les documents internes du ministère indiquaient quand même que... Si je prends le protocole d'entente, dans le document officiel que vous avez signé avec l'ancien ministre de l'Éducation, on parlait du calendrier des opérations pour 1995-1996 où l'émission du deuxième versement de la subvention devait se faire soit au mois de septembre ou au mois d'octobre 1995. L'engagement n'a pas été tenu parce que, au mois de décembre, les organismes n'avaient toujours pas reçu le 9 800 000 $ en question, d'une part.

D'autre part, une note de votre ministère, suite à des discussions tenues entre plusieurs des fonctionnaires du ministère de l'Éducation et des représentants du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation, indiquait clairement que la note aux fins d'approbation ministérielle concernant le deuxième versement serait acheminée au cabinet d'ici le 20 octobre 1995, à l'époque. Ça, ça a été réalisé. L'opération administrative a été réalisée.

(14 h 40)

M. Lucier (Pierre): Oui. Il y a eu une difficulté spécifique, ça a été le dossier des organismes réunis ou concertés. Le programme prévoit que les subventions sont données aux organismes et non pas à des regroupements d'organismes. Disons que c'est – je n'ai pas le nombre par coeur – la série d'organismes, une quinzaine d'organismes qui sont des organismes regroupés qui ont soulevé une difficulté spéciale.

M. Ouimet: Ça, c'était un problème subséquent.

M. Lucier (Pierre): C'est ça.

M. Ouimet: Ça, c'était le problème de...

M. Lucier (Pierre): Le programme a été diffusé le 19 juin.

M. Ouimet: Mais les motifs du retard? Parce que ça a eu un impact considérable sur les organismes populaires. Plusieurs ont été menacés de fermeture, d'autres ont dû aller devant des institutions financières contracter des prêts pour pouvoir rencontrer leurs exigences. Dans certains cas, et là je parle de mémoire, les enseignants n'avaient pas été payés depuis plusieurs semaines. Ce que vous me dites: Sur le plan administratif, le dossier a bien suivi son cours et les dossiers étaient fin prêts pour signature...

M. Lucier (Pierre): Écoutez, si le député de Marquette veut me faire dire que le ministre n'a pas signé et que tout était prêt, je n'entrerai pas dans ce genre de discussion là.

M. Ouimet: Non, mais c'est parce qu'il a donné en Chambre une réponse comme quoi c'étaient des problèmes de rodage et j'essaie de voir si ce sont...

M. Lucier (Pierre): Bien, tout nouveau programme...

M. Ouimet: Si vous me permettez juste de terminer. Si c'étaient des problèmes de rodage, est-ce que ces problèmes de rodage là ont été corrigés de sorte que le problème ne se rencontre pas l'année prochaine, par exemple? J'essaie de voir. Les motifs qui ont amené un retard dans le dossier, est-ce que ça a été corrigé?

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'il y a tout ce qu'il faut pour que ça ne se répète pas. Les conditions sont réunies pour que ça ne se répète pas.

Une voix: On a changé de ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): M. le député de Bourassa.


Symposium sur le nouveau programme d'enseignement du français au secondaire

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, j'aimerais demander au sous-ministre s'il y a une action d'entreprise dans le ministère afin de préparer un symposium sur le projet de nouveau programme d'enseignement du français au secondaire, suite à la déclaration de l'ex-ministre de l'Éducation, qui est survenue au début de janvier lorsque la polémique a rebondi encore au début de 1996. Elle avait eu lieu un peu à la fin de 1995, puis, à un moment donné, M. Garon a dit: On va en discuter à un symposium, etc. Est-ce qu'il y a une action? Est-ce que vous avez, vous, commandé une action pour préparer ce symposium-là, actuellement, dans votre organisation?

M. Lucier (Pierre): J'ai appris par les journaux qu'il y aurait un symposium, et les circonstances ont fait que nous n'avons pas eu l'occasion de discuter de la manière de le mettre en oeuvre. Donc, c'est une annonce qui devrait être reprise dans la nouvelle conjoncture pour voir de quelle manière on lui donne suite.

M. Charbonneau (Bourassa): Que vous l'ayez appris par les journaux ou autrement, c'est d'un intérêt secondaire pour nous, là. L'intérêt, la question...

M. Lucier (Pierre): Non...

M. Charbonneau (Bourassa): Pour nous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): ...il est majeur dans la mesure où il ne fait pas partie de la planification administrative.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, mais ce que je veux savoir quand même, là, quel que soit votre mode d'apprentissage des nouvelles...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau (Bourassa): ...c'est: À l'intérieur du ministère de l'Éducation, est-ce que vous avez appuyé sur un bouton quelque part, vous, ou passé une commande et dit: Là, il faut organiser quelque chose pour démêler ça?

M. Lucier (Pierre): Non. Je vous ai répondu non pour le moment, parce qu'il faut savoir exactement quelle est l'intention ministérielle, qu'est-ce qui est visé, qu'est-ce qui a été dit exactement. Nous n'avons pas eu l'occasion en janvier de faire le tour de ça et, dès que les choses se seront précisées dans un sens ou dans l'autre, le bouton sera pressé.

M. Charbonneau (Bourassa): Est-ce que, quant à vous, ce serait une bonne manière d'essayer de voir clair dans ce débat-là que de tenir une espèce de colloque ou de symposium où serait discutée publiquement cette question-là?

M. Lucier (Pierre): De manière générale, quand les gens se parlent, c'est toujours utile. Quand les points de vue se confrontent, c'est toujours utile. Il s'agit de savoir ce qu'on peut attendre de concret des conclusions d'une telle table. Mais, en principe, plus les gens se parlent, mieux c'est.

M. Charbonneau (Bourassa): J'ai d'autres questions mais, si je n'ai pas...

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.


Rentabilité de l'intégration des commissions scolaires

M. Désilets: Oui. Merci, M. le Président. Je reviens en arrière. J'aime ça me faire vieux jeu, des fois. Depuis une couple d'années, voilà quelques années, on a assisté à l'intégration des commissions scolaires un peu partout sur le territoire. Est-ce qu'il y avait eu une évaluation sur le nombre de commissions scolaires en difficulté présentement ou avant? Pour faire une comparaison de la façon dont ils agissaient avant et maintenant, y «a-tu» une différence dans la rentabilité des argents investis? Et, au niveau pédagogique, est-ce qu'il y a un plus? Est-ce que c'est un must, le changement qu'on a fait à l'époque?

M. Lucier (Pierre): Ce changement a été inspiré par des objectifs assez clairs. C'était une volonté d'intégrer en continuum l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire. Ça a eu comme résultat de réduire le nombre de commissions scolaires évidemment. Nous en sommes à 158 maintenant, et toutes ou pratiquement toutes sont responsables à la fois du primaire et du secondaire. C'était cohérent par rapport à la structure même de la loi et du régime pédagogique qui voit le continuum, au fond, des 11 premières années. Donc, cela, en un sens, a été atteint. Il suffisait de le poursuivre pour l'atteindre, en un certain sens. C'est le même centre de responsabilité. Est-ce que ce mouvement-là est terminé? Je ne saurais vous dire. Il est possible qu'il reprenne pour d'autres raisons. Il y a un certain nombre de commissions scolaires qui ont une taille, disons, qui n'est pas loin de la taille critique. C'est un fait.

M. Désilets: La taille critique est de quel niveau?

M. Lucier (Pierre): C'est très variable. Ça devient critique quand ça commence à grincher, hein? Il n'y a pas de nombre idéal, parce que ça dépend beaucoup du territoire, ça dépend de la configuration socioéconomique...

Une voix: La décroissance.

M. Lucier (Pierre): Oui, la décroissance des effectifs, évidemment. Alors, il n'y a pas de chiffre absolu, mais il est évident qu'il est plus difficile d'offrir l'ensemble des services quand le nombre est très peu élevé. C'est plus difficile. En contrepartie de ça, on connaît de petites commissions scolaires qui performent très hautement dans les épreuves ministérielles.

M. Désilets: Mais vous n'avez pas d'ordre de grandeur entre, je ne sais pas, moi, 5 000, 10 000, 15 000, 20 000?

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Désilets: Non? Ça peut jouer là-dedans?

M. Lucier (Pierre): On a de tout.

M. Désilets: Vous avez de tous les ordres de grandeur.

M. Lucier (Pierre): On a de tout. Mais nous savons que, sur les 158, il y en a qui sont plus proches du seuil critique, mais qui n'est pas un seuil uniforme.

M. Désilets: Ma question, c'était plus d'avoir... Par exemple, au niveau du Québec, avant, il y avait combien de déficit pour l'ensemble? Et, maintenant, on «a-tu» encore le même montant déficitaire ou s'il est encore plus gros? Même si on a intégré, on se «ramasse-tu» avec autant de déficit qu'avant? Et de un. Et puis, même si on a intégré, puis qu'on a moins de commissions scolaires qu'on avait, on s'en va de plus en plus vers les... Au niveau des municipalités, on essaie de les diminuer, de faire ça plus gros. Les 158, celles qui sont déficitaires, s'il y en a deux, trois déficitaires qui sont proches l'une de l'autre, est-ce qu'on s'en va vers une intégration de ces commissions scolaires là?

M. Lucier (Pierre): Il n'y a pas actuellement de signal gouvernemental d'incitation à la fusion comme telle. Il y a dans les règles budgétaires, je vous le fais remarquer, une offre qui est faite de partager des coûts d'étude de faisabilité ou de rentabilité en vue de fusions éventuelles.

M. Désilets: Ça existe, ça?

M. Lucier (Pierre): Ça existe. Et je ne vous dirai pas qu'il y a eu beaucoup de preneurs au portillon.

M. Désilets: J'imagine.

M. Lucier (Pierre): Bon, pour toutes sortes de raisons, on peut s'en rendre compte, y compris des débats qu'il y a sur les commissions scolaires linguistiques à venir, éventuellement, voire sur la nature même des commissions scolaires. Ce n'est pas une période évidemment qui est complètement libre de toute question existentielle ou parasitaire. Mais il n'y a pas de message gouvernemental actuellement pour une diminution du nombre. Est-ce que les restrictions budgétaires importantes que nous vivons et que nous vivrons en amèneront quelques-unes à vouloir fusionner? C'est possible. C'est même prévisible. Mais il n'y a pas actuellement dans le discours gouvernemental une invitation à diminuer le nombre.

Sans compter qu'il y a eu, dans le discours récent aussi, des données relatives à la taille des commissions scolaires, et ce n'était pas un discours qui incitait à grossir la taille des commissions scolaires de peur de les éloigner davantage des citoyens. Alors, tout ça fait qu'on ne s'est pas bousculé pour faire des études de fusion, mais on peut penser que ça pourrait revenir.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette.

(14 h 50)


Compressions budgétaires

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Le monde de l'éducation s'attend à des coupures entre 400 000 000 $ et 500 000 000 $. C'est le chiffre qui est revenu sur la place publique de façon assez constante depuis les derniers mois. Il y a des représentants de votre ministère qui sont en lien avec les commissions scolaires pour leur indiquer l'ordre de grandeur approximatif des coupures qui s'en viennent, parce qu'on sait que les commissions scolaires doivent effectuer plusieurs étapes avant d'en arriver au dépôt de leur budget qui serait normalement au mois de juin. Pourriez-vous nous indiquer plus d'informations à cet égard-là? Est-ce que vous faites des recommandations aux commissions scolaires, à savoir qu'est-ce qui est compressible, qu'est-ce qui n'est pas compressible, pour donner les grands paramètres?

M. Lucier (Pierre): Au moment où on se parle, le quantum des efforts budgétaires, qu'il soit en coût de système ou en diminution brute, n'est pas fixé. Il est de la prérogative gouvernementale, comme vous le savez bien. Mais, par ailleurs, les gens qui ont lu, comme nous tous, le dernier budget de mai 1995 ont bien vu qu'il s'agissait, en plus du maintien des enveloppes, donc d'une diminution des enveloppes pour un 500 000 000 $. Alors, les gens font des estimés. Et on disait que, globalement, il y aurait à peu près 2 000 000 000 $ d'effort budgétaire. C'était tout dans le budget.

Alors, les gens disent: Bon, bien, quelle peut être la part proportionnelle de l'éducation là-dedans? Alors, ça reste des supputations qui ne sont pas sans fondement, et c'est, je pense, l'origine des chiffres que vous citez et de ceux que nous avons entendus. Mais, actuellement, nous ne sommes pas mandatés et personne n'est mandaté pour transmettre des chiffres sur les quotas de l'effort budgétaire. Le gouvernement ne les a pas encore fixés. Il peut être arrivé que des fonctionnaires, comme des citoyens ordinaires aussi, aient fait une lecture du budget, puis disent: Bien, en gros, attendez-vous à peu près à ça. Ce ne sera sûrement pas moins que ça, puisque c'est déjà annoncé. C'est là qu'on en est. Je ne peux pas vous en dire plus sur les chiffres. Je pense qu'il faudrait poser la question au politique.

M. Ouimet: Je comprends très bien que c'est la prérogative de l'Exécutif de faire ces annonces-là et de prendre ces décisions, mais quand même ça circule partout dans le réseau de l'éducation depuis belle lurette, parce que les gens doivent se préparer en conséquence. Mais, par rapport aux compressions à venir au niveau du ministère... En 1994-1995, votre budget a été réduit de 3 500 000 $, si mes chiffres sont bons, et environ 45 postes à temps plein ont été abolis. Qu'est-ce que vous prévoyez dans la prochaine vague de compressions qui s'en viennent? Avez-vous des pistes par rapport à votre ministère au niveau des réductions envisagées? On parle des compressions de l'ordre de 8 900 000 $ cette fois-ci, d'après les chiffres qu'on m'a fournis.

M. Lucier (Pierre): Je ne sais pas à quels chiffres vous faites référence; ça reste des chiffres plausibles, mais ils ne sont pas déterminés à ce moment-ci. Mais ça reste plausible. Quand on regarde la nature du budget et le type de masse proportionnelle, on peut penser à quelque chose du genre.

M. Ouimet: Est-ce que vous privilégiez certaines pistes à ce moment-ci? Ou avez-vous des hypothèses de travail sur votre table pour voir comment vous allez...

M. Lucier (Pierre): Vous parlez du ministère même?

M. Ouimet: Oui, du ministère de l'Éducation.

M. Lucier (Pierre): De manière générale, on est du côté, je dirais, «managerial», du côté de la précision des manières de faire, de la réorganisation du travail – il n'y a pas 56 pistes – de la réduction des coûts de fonctionnement comme tels et puis des compressions d'effectifs, dans la mesure où on peut quand même réaliser nos obligations prévues par la loi, puis dans la mesure aussi – on l'a pratiqué depuis de nombreuses années au ministère – où on ne met pas de personnes en disponibilité. Nous avons réussi jusqu'ici, au cours des années, en prévoyant les choses, à faire des coupures d'effectifs qui n'ont pas mis de gens en disponibilité ou sinon techniquement pour très peu de temps. Donc, nous sommes dans les mêmes voies.

Alors, il est évident que le vrai problème, au fond, quand on regarde les ressources d'un ministère comme le nôtre, c'est de savoir ce que nous devons faire. Parce qu'il y a un seuil au-delà duquel il faut couper des activités. Est-ce que nous devons continuer à faire des programmes? Est-ce que nous devons continuer à émettre des bulletins? Est-ce que nous devons continuer à faire des épreuves ministérielles, à les corriger? Est-ce que nous devons faire tel type de contrôle? Est-ce que nous devons être présents en région? Nous sommes rendus évidemment à ce genre de questions là. D'année en année, nous essayons et nous réussissons, je pense, à faire plus avec moins et à éliminer un certain nombre d'activités qui sont moins proches des obligations légales. Mais il est évident que, tôt ou tard, la taille du ministère est reliée à ce qui concerne son rôle, il n'y a aucun doute là-dessus. Est-ce que nous devons continuer à certifier des maîtres? Est-ce que nous devons continuer à faire de la classification de dossiers? Et ainsi de suite.

Le Président (M. Facal): M. Lucier, si vous me permettez, c'est pour relancer ce que dit le député de Marquette. Moi, je n'ai jamais travaillé dans la fonction publique; alors, excusez-moi si ma question a l'air parfaitement naïve. Mais expliquez-moi comment va se passer, de façon très concrète, le processus de détermination des lieux et la façon dont se feront les compressions. Supposons, par exemple, que le palier politique vous dit: M. le sous-ministre, il faut trouver x centaines de millions. On vous passe une commande. Le lendemain matin, comment est-ce que vous enclenchez le processus de déterminer où on coupe et comment? Comment ça va se passer? Vous allez faire appel à qui? Vous allez demander des études, convoquer un tel? Expliquez-moi de façon très imagée comment ça va se passer. Je n'ai jamais été à l'intérieur, moi.

M. Lucier (Pierre): Bon. Écoutez, ça commence effectivement comme vous le dites. Il y a des quantums, il y a des montants qui sont déterminés par la plus haute autorité politique, accompagnés, par ailleurs, de certaines orientations de fond. Je vais donner des exemples. Pouvez-vous viser le plus possible les coûts administratifs et toucher le moins possible aux services directs? Voici une orientation de fond. Pouvez-vous viser des mesures qui accroîtraient le rendement et l'efficacité en touchant le moins possible à la quantité de services offerts? Bon. Pouvez-vous trouver des mesures qui permettraient à des communautés locales ou institutionnelles de faire elles-mêmes un certain nombre de choix en fonction de leurs priorités? Bon. Pouvez-vous trouver des choses qui toucheront le moins possible à l'emploi? Est-ce que vous pouvez estimer qu'en faisant de meilleurs contrôles on évitera les déperditions de ressources? Voici le genre d'orientations de base. Elles ne sont pas purement fictives, celles que je vous rapporte; disons qu'elles font partie, j'ai l'impression, d'un consensus assez partagé, assez fondamental. Bon.

Ensuite, bien, écoutez, il faut s'appuyer sur la connaissance des uns et des autres de tous les rouages des modes de financement pour voir comment on peut faire cela. On en trouve, en général, un certain nombre, mais reste ensuite un certain nombre de questions où il y a des choix plus proprement politiques. En général, vous savez, sur un montant donné, avec ces orientations-là... Supposons qu'on vous dit: Bon, bien, c'est 100 000 000 $. Prenez un chiffre purement fictif, 100 000 000 $. En faisant tout ça comme ça, bon, on arrive et on dit: Écoutez, on se rend à 75 000 000 $; il y a un problème avec les derniers 25 000 000 $, à moins qu'on veuille prendre des risques énormes.

Là, bien, il y a d'autres possibilités, mais, alors, là, c'est matière à décision politique. L'exemple le plus facile, et il est fictif, c'est de dire, par exemple: Est-ce qu'on augmente les tarifications? Est-ce qu'on augmente les droits de scolarité? Est-ce que ci? Est-ce que ça? Est-ce qu'on va vendre telle chose maintenant plutôt que de... Ou est-ce qu'on va arrêter de subventionner telle affaire, tel service et puis, alors, les établissements ou les commissions scolaires, enfin les organismes paieront?

(15 heures)

Alors, il y a toujours une marge de décision politique plus délicate, et c'est pour ça qu'en général, quand on regarde les processus annuels, bon an, mal an, au cours des années, on s'aperçoit donc qu'il y a une partie de chemin qui peut être faite sur le plan technique, seul ou avec d'autres, c'est-à-dire que, dans la mesure où on est mandatés pour en discuter avec nos vis-à-vis, on le fait; si on ne l'est pas, on ne le fait pas, mais ça reste dans les mêmes eaux, donc c'est plus technique, plus paramétrique. Bon, c'est de s'ingénier à trouver laquelle des décimales il faut faire varier pour obtenir tel rendement ou calculer de telle manière ou de telle manière. Bon.

Mais il y a toujours un résidu, il y a toujours une zone importante plus aléatoire parce que plus risquée à tous égards. Ça peut être des risques qui sont purement administratifs, ça peut être des risques qui sont sociaux, ça peut être des risques qui sont aussi carrément politiques, disons les choses comme elles sont. Alors, là, c'est de bien informer les décideurs politiques des enjeux et des manières dont les choses pourraient se faire. On en a discuté ensemble, ce matin, d'un certain nombre de ces cas-là. Il y a un seuil où on n'est plus dans le papier. Nous, on peut rester dans le papier, mais, à un moment donné, il faut sortir du papier et dire: Bien, dans la vraie vie, est-ce qu'un gouvernement veut décider ça ou ça? En général, c'est la courbe que nous suivons.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette.


Formation à distance dévolue aux commissions scolaires

M. Ouimet: Oui. Dans la même lignée, M. le Président, j'aimerais parler de la formation à distance et de cette direction qui existait au ministère de l'Éducation. En janvier 1995, l'ancien ministre de l'Éducation, M. Garon, a annoncé le transfert du service de formation à distance au secondaire vers les commissions scolaires. Il y avait, auparavant, à la Direction générale de la formation à distance, 44 postes permanents, 12 postes occasionnels autorisés et un service de tutorat qui faisait appel à peu près à 70 contractuels à temps partiel, d'après mes chiffres. Le budget d'opération était d'environ 5 600 000 $ pour 1994-1995. Pourriez-vous m'indiquer où vous en êtes rendus dans cette opération-là de, si vous voulez, diriger le service de formation à distance vers les commissions scolaires? Est-ce qu'il y a toujours des coûts d'associés au niveau du ministère de l'Éducation? Si vous pouviez me faire le portrait de cette opération.

M. Lucier (Pierre): Sur les chiffres proprement dits, je vais demander à mon collègue, tout à l'heure, de vous les donner; il est là-dedans à plein temps. Sur le dossier lui-même, j'aimerais, pour le bénéfice des parlementaires, rappeler un certain nombre de faits et de décisions des années dernières. Vous savez qu'avec la formation à distance le ministère se trouvait à avoir son école, si je peux dire. Nous faisions de l'enseignement à distance par une direction du ministère. Alors, la décision a été prise de nous conformer à la logique de l'ensemble du système et de faire en sorte que nous n'ayons pas à enseigner, les commissions scolaires ayant plein mandat d'enseigner aux niveaux primaire et secondaire.

C'est un mouvement qui n'est pas propre au primaire et au secondaire. Vous savez que le mouvement avait été fait au collégial il y a quelques années, donc, de sortir, si je peux dire, du ministère cette école et de la renvoyer là où ça doit se faire, c'est-à-dire dans une école, et, en l'occurrence, c'est le cégep de Rosemont pour ce qui concerne la formation à distance au collégial. Alors, nous avions notre Direction de la formation à distance. Alors, une décision analogue a été prise, qui remonte à 1994 quand même, d'opérer un mouvement dans deux directions: distinguer, comme on le fait en général dans les structures de formation à distance, l'organisme qui fabrique le matériel et les cours, celui qui conçoit les cours d'autodidaxie, au fond, ou le dialogue informatique ou même, très carrément, le papier, le distinguer du lieu de prestation de services.

Alors, ce qui a été décidé à ce moment-là, ça a été que les commissions scolaires qui le voudraient pourraient ajouter à leur panoplie d'instruments pour faire de la formation le recours à la formation à distance, mais il serait gardé un organisme central de fabrication, de conception de matériel. En général, c'est le schéma qu'on peut observer dans la plupart des pays, parce que disperser cette fonction centrale, c'est la perdre, à toutes fins utiles. Alors, ce qui a été fait, c'est que les commissions scolaires ont fait le premier pas, si je peux dire, d'inscrire des étudiants, de dispenser le service en bout de ligne comme étant un instrument de plus mis à leur disposition, mais il a été convenu de sortir du ministère l'organisme central.

Il y a eu, à ce moment-là, différents modèles qui ont été regardés. Ç'aurait pu être d'aller dans une commission scolaire, comme c'est le choix qui avait été fait pour le collégial; ç'aurait pu être autre chose. Il est apparu à tout le monde que ce qui était le mieux, c'était que les commissions scolaires le prennent en charge et forment, au fond, un organisme avec conseil d'administration pour gérer et qu'il y aurait, donc, un transfert de ressources de la part du ministère. Sur ce cadre-là, avec votre permission, M. le Président, je demanderais à mon collègue, M. Chaput, de répondre plus spécifiquement aux questions du député de Marquette.

Le Président (M. Facal): M. Chaput.

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, 52 commissions scolaires au Québec ont fait le choix d'offrir les services de formation à distance. Certaines se sont regroupées; d'autres... C'est 52 sur les 80 environ qui donnent l'éducation aux adultes, parce qu'il faut bien voir qu'on s'adresse à cette même clientèle.

En ce qui concerne les effectifs auxquels le député de Marquette référait tantôt, je vais les séparer en deux, très simplement: l'école et ceux qui faisaient le matériel pédagogique, parce qu'il y avait deux unités, comme vous l'avez dit d'ailleurs, dans cette Direction générale. L'école: nous avons maintenu en place un certain nombre d'effectifs, 10 effectivement, parce que nous avons pris la décision de terminer avec les élèves qui étaient en processus chez nous. Et, de ces personnels-là, de la dizaine que nous avons conservée en poste, il en reste cinq et nous sommes en discussion actuellement pour les réorienter à l'intérieur soit du ministère ou de la fonction publique, de telle sorte que, dans tout le personnel, comme le sous-ministre l'a dit tantôt, les seuls qui sont mis en disponibilité sont ceux qui l'acceptent. Nous tentons de leur trouver une autre fonction équivalente à leurs qualifications.

Pour ce qui est du deuxième volet, cette direction du développement et du matériel pédagogique, ceux qui faisaient le matériel pour la formation à distance, la majorité du personnel en question – elle est toujours sous notre responsabilité en passant, cette unité – le 1er avril, serait transférée à cette Société que les commissions scolaires ont mise en place, la SOFAD, la Société de formation à distance. La Société en question a demandé au ministère, pour assurer la continuité dans l'expertise, de lui prêter des effectifs, ce que nous nous apprêtons à accepter, comme d'ailleurs ça s'est fait, comme M. le sous-ministre vient de le dire, au niveau collégial où il y a des effectifs du ministère qui travaillent au cégep de Rosemont.

Pour ce qui est des budgets, la donnée que vous aviez de 5 600 000 $ remonte probablement à deux ans ou à trois ans. Si vous allez au niveau des crédits que nous avons votés l'année dernière, c'est de l'ordre de 4 000 000 $; je n'ai pas le point quelque chose, là, mais c'est de l'ordre de 4 000 000 $. Une partie a été transférée dans l'enveloppe des commissions scolaires pour faire l'école; je le maintiens, ça n'a pas été une opération où nous avons diminué les crédits d'aucune façon. Nous avons pris l'argent que nous consacrions chez nous à faire l'école pour l'envoyer dans les commissions scolaires qui continuaient à faire l'école. L'autre partie est restée au ministère puisque c'est toujours nous qui faisons le développement et le matériel pédagogique, et des discussions sont en cours pour aider le nouvel organisme à continuer cette responsabilité à compter du 1er avril prochain. Voilà, M. le Président.

M. Ouimet: Juste un complément d'information, M. le Président. Dans les compressions que le ministère devait réaliser l'année dernière, le fait que le service se dirigeait vers les commissions scolaires, est-ce qu'il y a un lien à ce niveau-là par rapport à votre budget au niveau des compressions que vous deviez apporter? Et, lorsque vous indiquez que maintenant ces sommes-là seront dévolues aux commissions scolaires, se dirigeront vers les commissions scolaires, est-ce que ça réduit votre budget d'autant? En d'autres termes, est-ce que, de cette façon-là, vous allez atteindre l'objectif du ministre ou de l'Exécutif? Y a-t-il un lien ou s'il n'y en a pas?

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, au-delà du fait que c'est un fonds – je pense qu'on sait que c'est un fonds – pour faciliter le transfert, parce que c'est des opérations qui ne sont pas nécessairement faciles, nous avons assuré les commissions scolaires que l'argent qui y était consacré leur était transféré. Il n'y a pas eu de réduction de ces sommes d'argent a priori.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx.

(15 h 10)

M. Kieffer: M. le sous-ministre, tantôt, lorsque mon confrère a abordé la question des commissions scolaires, votre réponse m'a laissé un peu sur ma faim. Je vais essayer de vous faire part de mes préoccupations. Vous nous avez dit qu'il y a actuellement 158 commissions scolaires. Est-ce que c'est le nombre idéal? Ça ne semble pas être le nombre idéal parce que vous avez identifié un certain nombre de commissions scolaires qui étaient critiques, bon, mais, en tout cas, vous ne m'avez pas défini ce que vous entendiez par critiques. Mais je vais y revenir tantôt.


Budget de gestion des commissions scolaires

Moi, je pense que ça va bouger. En tout cas, ça bouge actuellement au niveau des municipalités. Je sais que la situation des municipalités est pas mal plus critique que celle des commissions scolaires. J'aimerais, dans un premier temps, que vous nous indiquiez les budgets que vous consacrez à la gestion des commissions scolaires, leurs budgets de gestion. Les 158, là, ça coûte combien?

M. Lucier (Pierre): Pendant qu'on cherche les chiffres, de manière générale, nos chiffres indiquent que les coûts administratifs sont de l'ordre de 7 % des budgets de la commission scolaire.

M. Kieffer: Sur le budget global du ministère de l'Éducation?

M. Lucier (Pierre): Non, comme moyenne dans les commissions scolaires, c'est 7 %.

M. Kieffer: De leur budget à eux, là, du budget que vous leur transférez. C'est ça?

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Kieffer: Plus la taxe foncière, là.

M. Lucier (Pierre): Non. Nous ne parlons pas de la subvention; nous parlons de leur volume de dépenses, de leur chiffre de dépenses.

M. Kieffer: Bien oui, mais c'est 7 % de quoi, là? Donnez-moi des chiffres.

M. Lucier (Pierre): On va vous le trouver, là.

M. Kieffer: O.K. Parce que j'ai de la difficulté à saisir.

M. Lucier (Pierre): Le chiffre d'affaires des commissions scolaires est autour de quoi? Bon, c'est 7 000 000 000 $. Alors, quand vous faites un 7 % de ça...

M. Kieffer: Bon, ça veut dire à peu près 600 000 000 $. C'est 550 000 000 $.

M. Lucier (Pierre): 420 000 000 $.

M. Kieffer: 420 000 000 $?

M. Lucier (Pierre): 420 000 000 $ de dépenses dont une partie importante évidemment est prise à la taxation.

M. Kieffer: Dont une partie importante est prise à même la taxe foncière. C'est ça. Mais c'est quand même 420 000 000 $, là, à peu près, les coûts de gestion. En tout cas, je trouve ça beaucoup. Il faut en tenir compte, hein, c'est un montant important.

M. Lucier (Pierre): Ce n'est pas des arachides.

M. Kieffer: Non, exact. On est tout à fait d'accord avec vous. Ha, ha, ha! Bon. Maintenant...

M. Lucier (Pierre): D'ailleurs, il faut aussi s'occuper du 1 500 000 enfants, hein.

M. Kieffer: Oui, oui. Et je ne dis pas que c'est gaspillé, là. Absolument pas. Mais on a quand même une idée de l'ordre de grandeur de ce que ça représente, les coûts de gestion. Ce serait quoi pour vous la commission scolaire idéale?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Bien, c'est parce que je veux vous amener à me définir un peu plus précisément ce que ça veut dire une commission scolaire viable en termes, par exemple, de clientèle, en termes de services offerts et en termes de programmes accessibles. Pas une commission scolaire minimale où il n'y aurait aucune ou à peu près aucune option de disponible, là. Vous devez quand même avoir des paramètres quelque part qui nous permettent d'évaluer ce que ça pourrait être, ce que ça peut être.

M. Lucier (Pierre): La commission scolaire idéale, là, je vais m'abstenir de faire état de mes fantasmes.

M. Kieffer: Bien, écoutez, ça prend toujours des fantasmes, des fois! Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Disons que c'est la commission scolaire qui fonctionne et qui fait ce qu'elle a à faire. Je maintiens que nous n'avons jamais, en tout cas, dans nos discussions à l'interne, pratiqué de chiffres absolus là-dedans. Ça dépend beaucoup de la conjoncture. Ce n'est pas la même réalité à Montréal, puis à Fermont et ainsi de suite, hein? Donc, il y a de petites commissions scolaires qui font des merveilles. Alors, écoutez, c'est toujours une question de richesse, de possibilités offertes aux élèves. Ça dépend du territoire, ça dépend du type de cohésion de la communauté, ça dépend du profil socioéconomique aussi des familles et des clientèles. Alors, une bonne commission scolaire, c'est une commission scolaire qui fait ce que la loi dit qu'elle doit faire, c'est-à-dire qu'elle est responsable et efficace dans la prestation des services éducatifs à la population du territoire.

Alors, évidemment, si une commission scolaire était dans tous les secteurs réduite à la portion congrue en options ou en services, on serait près d'un seuil critique. Mais ce n'est pas lié au nombre brut, ça. Il y a actuellement des commissions scolaires qui sont en processus de rapprochement en vue, éventuellement, de fusion. Il y a un cas du côté du Saguenay–Lac-Saint-Jean; on en a un à Chaudière-Appalaches; il y en a en Gaspésie. Je ne peux pas préjuger du résultat de cela. Mais, je regrette de décevoir M. le député, nous n'avons pas de chiffre idéal. Nous observons des comportements.

M. Kieffer: Finalement, vous concluez que c'est totalement subjectif comme démarche?

M. Lucier (Pierre): Pas subjectif, mais c'est du cas par cas, ce qui n'est pas la même chose.

M. Kieffer: J'ai une sous-question à vous poser qui a trait à ça, mais je laisserai ma consoeur, la députée de Deux-Montagnes, vous la poser.

Mme Robert: C'est parce qu'en termes... Vous parlez qu'en moyenne elles sont à 7 % de leur budget. Alors, ça peut varier entre quoi et quoi?

M. Lucier (Pierre): On se rend jusqu'à 11 % ou 12 % de maximum et, de l'autre côté, c'est du 4 %, 5,5 %.

Mme Robert: Alors, il y a certaines commissions scolaires où c'est 4 % en gestion et d'autres qui pourraient...

M. Lucier (Pierre): Ou 5 %. D'autres pourraient aller jusqu'à 11 % ou 12 %.

Mme Robert: À 5 % et d'autres pourraient aller jusqu'à 12 % de leur budget.

M. Lucier (Pierre): Oui. Les petites évidemment coûtent proportionnellement plus cher. Ça, c'est normal.

Mme Robert: Alors, l'écart n'est pas très grand.

M. Kieffer: Bien, c'est du simple au triple.

M. Lucier (Pierre): Ça peut être du simple au double.

M. Kieffer: Du simple au triple.

M. Lucier (Pierre): Non, non.

M. Kieffer: Si vous parlez de 4 % à 12 %, là.

M. Lucier (Pierre): Non, on a parlé de 5 % à 11 %.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): C'est plus près du simple au double.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, j'aimerais, sur une même question, que vous me donniez la ventilation de ce que vous appelez les frais de gestion. Ça comprend quoi, ces 400 000 000 $ et quelques, ce 7 % globalement, là? Est-ce que ça comprend les indemnités, les élus, les sièges sociaux, le personnel? Qu'est-ce qu'il y a là-dedans?

M. Lucier (Pierre): On va vous trouver ça. C'est des catégories des états financiers.

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, essentiellement, ce sont les dépenses qui servent à payer le personnel des sièges sociaux et toutes les dépenses afférentes. Ça ne comprend pas les directeurs des écoles dont d'aucuns pourraient dire que c'est du personnel administratif aussi. C'est vraiment le plus petit dénominateur commun administratif que, je pense, tout le monde saisit au niveau du siège social.

M. Lucier (Pierre): Ça comprend, effectivement, le conseil des commissaires...

M. Charbonneau (Bourassa): Le conseil des commissaires...

M. Lucier (Pierre): ...la direction générale...

M. Charbonneau (Bourassa): ...les frais de réunion, tout ce qu'il faut pour le fonctionnement de cette institution.

(15 h 20)

M. Lucier (Pierre): ...les ressources humaines, financières, matérielles, oui, informatiques de gestion, enfin, ce qui est de la gestion.

M. Charbonneau (Bourassa): Parce que c'est important qu'on...

M. Lucier (Pierre): C'est des définitions qui sont dans les états financiers, donc elles sont normalisées.

M. Charbonneau (Bourassa): La question a son importance étant donné le document dont tout le monde a été saisi récemment, provenant de la Commission des états généraux, au chapitre 7, qui pose, entre autres questions, celle du maintien des commissions scolaires ou de leur remplacement par d'autres types d'organisations. On peut vouloir la disparition des commissions scolaires pour certaines raisons liées à notre conception du système scolaire et du rapport entre le milieu et le ministère, et voir d'autres types d'organisations. Il y en a d'autres qui peuvent vouloir ça pour des raisons d'économie, qui pensent qu'il y a des centaines de millions d'argent à aller récupérer là en faisant disparaître des commissions scolaires.

Mais il y aura un coût de remplacement quelque part. Si on fait disparaître les commissions scolaires, si l'administration des infrastructures est transférée à une structure municipale ou MRC, en quelque part, il y aura là quelques ressources, dans ces structures, qui devront prendre charge des mêmes problèmes. Mais certainement qu'il y a cette question devant nous, parlementaires, devant l'opinion publique. Et nous prenons, nous, comme référence, actuellement, sans mettre dans la discussion les coûts de remplacement ou des scénarios de remplacement, 7 %, soit 500 000 000 $, plus ou moins. Est-ce qu'on peut, pour des fins de discussion...

M. Lucier (Pierre): Oui. Pour les fins, 450 000 000 $.


Inscriptions en formation professionnelle au secondaire

M. Charbonneau (Bourassa): 450 000 000 $. Bon. J'ai une question particulière, M. le Président et M. le sous-ministre. J'ai eu un échange avec l'ex-ministre de l'Éducation, le 5 décembre, à la période de questions, sur le taux de fréquentation de l'enseignement professionnel au secondaire. Quelques jours avant le 5 décembre, le ministre avait publié un communiqué et avait déclaré: «Les premiers résultats de l'année scolaire 1995-1996 démontrent le renversement de la tendance à la baisse quant à la clientèle en formation professionnelle.» Les chiffres sur lesquels s'appuyait le ministre de l'Éducation d'alors étaient les suivants: il annonçait que, au 30 octobre 1995, il y avait 16 776 élèves inscrits. Pour lui, ça représentait une augmentation de 15 % du nombre d'inscriptions d'étudiants de moins de 20 ans en formation professionnelle.

Je voudrais profiter de l'occasion pour essayer de voir exactement comment on peut soutenir, chiffres à l'appui, qu'il y a augmentation quand on est à 16 776, alors que, l'année d'avant, on était à 17 176, selon les données utilisées par le rapport Pagé. L'année précédente, 1992-1993, on était à 17 200, donc à peu près la même chose; l'année précédente, 1991-1992, on était à 18 600; et, l'année 1990-1991, on était à 18 400. Alors, si on regarde globalement le portrait, on est parti de quelque chose comme 18 400, 18 600 entre 1990 et 1992; on est passé par un autre plateau à 17 200, en 1992-1993, 1993-1994; on est à 16 700 à l'automne 1995, et on dit: Renversement de tendance.

J'ai posé la question, et le ministre a dit: «De toute façon, pour ceux qui regardent à l'oeil nu, sans microscope et sans statistiques, je vous dis que ça augmente partout et je suis prêt à demander aux gens du ministère, le directeur général des ressources informationnelles, M. Babin, avec toute la commission parlementaire, de faire la lumière là-dessus.»

Le Président (M. Facal): Bon, bien, voilà.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau (Bourassa): Alors, j'aimerais ça en profiter pour faire la lumière là-dessus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau (Bourassa): Et peut-être avoir l'éclairage de M. Lanoux aussi, puis...

M. Lucier (Pierre): Alors, écoutez, ce sera fait. Les chiffres qui ont été cités au mois de décembre étaient le fruit d'une cueillette spécifique non pas faite à la fin de l'année, mais en cours d'année, puisqu'il y a des programmes, comme vous le savez... Il y a, en particulier, ce qu'on appelle le volet 2, sur les métiers semi-spécialisés, qui est en cours et qui est nouveau. Mais je vais demander, avec votre permission, M. le Président, à M. Babin justement, qui est notre monsieur indicateurs et statistiques, de faire toute la lumière, comme l'ancien ministre l'avait annoncé, sur la nature de ces chiffres.

Le Président (M. Facal): M. Babin, éclairez-nous.

M. Babin (Jacques): Oui. Alors, Jacques Babin. Je suis directeur général des ressources informationnelles au ministère. Alors, les chiffres dont il est question ici aujourd'hui sont des chiffres, effectivement, qui ont été recueillis lors d'une cueillette spéciale avant Noël. On a posé la question suivante aux commissions scolaires: Quels sont les nombres d'inscrits dans votre commission scolaire ou quels étaient les nombres d'inscrits dans vos commissions scolaires au 30 octobre? Et ça, ça nous donnait un chiffre. Mais, pour qu'il soit significatif, on leur a posé en même temps la même question, mais relativement à l'année passée: Quels étaient les nombres d'inscriptions au même moment l'année dernière? Donc, ce sont des données que nous avons reconstituées, à la fin de 1995, relativement à l'automne 1995 et aussi à l'automne 1994. Sur la base de ces deux chiffres-là, déclarés par les commissions scolaires, il y a effectivement une augmentation significative de 15 % à 20 %; je n'ai pas les chiffres avec moi, là.

Il est évident, par ailleurs, que, quand M. le député cite les autres chiffres, c'est les chiffres qui étaient issus des systèmes habituels de cueillette qui portent sur des compilations sur l'ensemble de l'année et que l'on fait à la fin de l'année. Alors, il est évident que les chiffres que l'on a sortis pour l'automne 1995 ne peuvent pas être comparés à des chiffres qui traitent de l'ensemble de l'année antérieure. C'est pour ça qu'on a posé la question: Quelles étaient les inscriptions que vous aviez à la même date l'année dernière? Donc, sur la base de la nouvelle cueillette, il est effectif qu'il y a une augmentation significative des clientèles.

Le problème de validité maintenant; il s'agit de savoir si la mémoire des commissions scolaires était bonne quant aux inscriptions qu'il y avait l'année précédente, à l'automne. Alors, c'est sur cette base-là que nous avons fonctionné.

M. Charbonneau (Bourassa): Donc, si je comprends bien, il y a eu une commande spéciale d'aller chercher des chiffres auprès des commissions scolaires pour les deux dernières années, enfin la dernière année, puis l'année précédente.

M. Lucier (Pierre): Bien, c'était un effort pour mesurer l'impact du nouveau programme. Alors...

M. Charbonneau (Bourassa): Mais j'essaie de voir quand même. Entre les commandes spéciales pour en arriver à mesurer des mesures particulières, puis les statistiques de base compilées au ministère de l'Éducation, il me semble y avoir un certain décalage.

M. Lucier (Pierre): Bien, c'est-à-dire qu'on aura le fin mot de l'affaire à la fin de l'année. C'est à la fin de 1995-1996 qu'on aura un chiffre comparable aux autres chiffres et qui sera publié comme tel.

M. Charbonneau (Bourassa): Mais j'essaie de voir à partir de quel raisonnement on dit que 16 776, au 30 octobre 1995, c'est plus que 17 176, selon le rapport Pagé.

M. Lucier (Pierre): Je suis sûr qu'il n'y a personne qui a dit ça.

M. Charbonneau (Bourassa): Mais...

M. Lucier (Pierre): La comparaison, comme l'expliquait M. Babin, ce sont les inscrits au 30 octobre 1995 comparativement aux inscrits au 30 octobre 1994. Mais nos statistiques ne travaillent pas sur le 30 octobre; elles travaillent sur l'ensemble de l'année. Alors, c'est pour ça que je dis qu'on verra, à la fin de l'année, quel est le comportement global. Mais la question était très précise; il s'agissait de savoir quel pouvait être l'impact des nouvelles mesures sur les inscriptions faites cet automne dans les écoles par rapport à celles qui avaient été faites l'année antérieure. Les chiffres qui sont là ne font que répondre à cette question-là.

M. Charbonneau (Bourassa): Est-ce qu'on doit comprendre que cette augmentation, disons, alléguée de 20 %, ça mesurerait l'effet des cinq mesures annoncées une année plus tôt?

M. Lucier (Pierre): Bien, ça ne peut pas être les cinq...

M. Charbonneau (Bourassa): Ou, enfin, certaines des cinq.

M. Lucier (Pierre): ...parce qu'il y en a qui ne sont pas en vigueur actuellement.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui.

M. Lucier (Pierre): C'est fondamentalement l'effet général d'incitation, mais l'effet spécifique du volet 2, c'est-à-dire de ces métiers non spécialisés ou semi-spécialisés qui étaient l'objet du volet 2.

M. Charbonneau (Bourassa): Parce que M. le ministre lui-même disait, avec nuance, qu'il n'a jamais dit que cette augmentation résultait uniquement ou seulement du volet 2.

M. Lucier (Pierre): Non, non, pas uniquement. C'est bien ce que je vous dis, il y a des mesures générales d'incitation et de valorisation. Mais il est évident, par ailleurs, qu'il y a une cible très, très facile à chiffrer sur le volet 2, qui est très significative.

M. Charbonneau (Bourassa): Ce qu'on aimerait faire à l'aide de ces questions, M. le Président, c'est essayer de voir comment on pourrait dégager l'impact réel à la hausse, présumément, là, quant aux inscriptions en formation professionnelle à la suite de ces mesures. Est-ce que vous pourriez nous suggérer une méthode ou un mode de mesure de cet impact-là en particulier? Est-ce qu'il y a une méthodologie que vous pourriez nous conseiller pour qu'on puisse suivre ce dossier-là?

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'on peut dire que la compilation de la fréquentation des programmes liés au volet 2 est une mesure absolument fiable, si je puis dire, puisqu'on partait de zéro. Donc, s'il y a 600, 800 ou 1 000 étudiants, c'est un gain, disons. Bon.

M. Charbonneau (Bourassa): Puis, s'ils viennent d'ailleurs, je veux dire, si...

M. Lucier (Pierre): C'est un gain par rapport à la formation professionnelle. Alors, il s'agira évidemment, dans un deuxième temps, de voir, au fond, d'où ils viennent. L'hypothèse fondamentale, c'est qu'ils ne viennent pas des D.E.P.; ils viennent plutôt d'autres filières d'insertion sociale et professionnelle ou même carrément d'ailleurs.

M. Charbonneau (Bourassa): Ces mesures, si on se souvient, pour certaines d'entre elles, avaient un caractère – comment disait le ministre, là? – temporaire ou transitoire.

M. Lucier (Pierre): Expérimental.

M. Charbonneau (Bourassa): Expérimental.

M. Lucier (Pierre): Expérimental, oui, pour deux ans.

M. Charbonneau (Bourassa): Pourriez-vous nous rappeler la partie expérimentale de ce train?

M. Lucier (Pierre): Mais l'ensemble du programme était présenté comme un programme expérimental de deux ans. Et le rationnel qui animait M. le ministre, c'était de pouvoir aussi disposer d'expériences vécues au moment des discussions entourant les états généraux. Ça, c'était le discours explicite. Alors, le programme était conçu non pas comme quelque chose de figé à perpète, mais comme quelque chose dont les premiers effets vérifiés pouvaient faire l'objet de discussions dans le cadre des états généraux. Mais, au lieu de les faire de manière abstraite, il y aurait des points de référence, disons.

(15 h 30)

Alors, un programme expérimental de deux ans, mais dont tous les volets n'étaient pas en vigueur dès l'automne 1995, comme vous le savez. Il y en a deux fondamentaux qui commencent à l'automne prochain et qui concernent essentiellement des programmes commissions scolaires-cégeps, des programmes en continuum, des programmes dits intégrés. Les projets sont entrés et sont sous analyse. Il y a cet autre élément, aussi, d'une possibilité d'entrer dans certains programmes de formation professionnelle après la troisième année et la possibilité d'y poursuivre à la fois la formation générale et la formation professionnelle. Cela a nécessité un amendement au régime pédagogique et des choses sont en cours. Il y avait déjà eu là-dessus un avis favorable du Conseil supérieur de l'éducation.

M. Charbonneau (Bourassa): Une dernière question. Pour que nous puissions suivre l'évolution du taux de fréquentation en enseignement professionnel, vous nous avez dit, tout à l'heure: Attention, quant à nous, les statistiques de base, ce n'est pas celles du 30 octobre; on verra à la fin de l'année.

M. Lucier (Pierre): Par la force des choses.

M. Charbonneau (Bourassa): Qu'est-ce que c'est, la différence, là? Vous prenez la mesure à quel moment?

M. Lucier (Pierre): Si vous permettez, je vais demander à M. Babin...

M. Charbonneau (Bourassa): Qu'est-ce qui fait la différence, autrement dit, entre une photo au 30 octobre... C'est les défections? C'est les gens qui s'en vont? C'est quoi?

M. Lucier (Pierre): C'est dans les deux sens.

M. Babin (Jacques): Jacques Babin. Évidemment, au 30 septembre, c'est une photo, comme vous l'avez dit, alors qu'à la fin de l'année c'est un peu un film qu'on prend sur l'ensemble de l'année, l'objectif étant d'avoir des données que l'on souhaite avoir pour le financement, et le financement se fait sur la base d'équivalents temps plein. Alors, il est évident que l'équivalence temps plein au 30 septembre, ça n'a pas de sens. Il faut attendre la fin de l'année pour voir si ceux qui sont inscrits au 30 septembre ont été là pendant une partie ou pendant toute l'année. Alors, le système des CFP, qui est le système de déclaration des clientèles de la formation professionnelle, est un système qui a été, d'abord, conçu pour les fins de financement. Alors, on ne prend plus de photos avec ce système-là au 30 octobre. On les prend seulement sur l'ensemble de l'année, à la fin.

M. Charbonneau (Bourassa): Parce que c'est plus représentatif.

M. Babin (Jacques): Bien, écoutez, le chiffre au 30 septembre est très représentatif des inscriptions au 30 septembre. Ce que je vous dis, c'est que, ne sachant pas combien de temps les personnes inscrites au 30 septembre vont passer dans le système, si ma préoccupation en est une d'avoir l'équivalent à temps plein, ça n'a pas de sens. Ça n'a du sens que si on le prend à la fin de l'année.

M. Charbonneau (Bourassa): C'est comme au Forum. Il y en a tant qui rentrent, tant de billets vendus.

M. Babin (Jacques): Qui ne restent pas...

M. Charbonneau (Bourassa): Comment est-ce qu'il en reste à la fin du match, ça...

M. Babin (Jacques): C'est exact.

M. Lucier (Pierre): Dans le cas spécifique du volet 2, il est intéressant de noter qu'il y a eu une deuxième vague de projets à compter de janvier. Donc, il est évident que la photographie qui a été prise à l'automne est déjà, en un sens, modifiée par une photographie qui serait prise maintenant, puisqu'il y a eu une autre vague d'autorisations pour la rentrée de janvier.

Le Président (M. Facal): Mme la députée de Terrebonne.


Évaluation des apprentissages

Mme Caron: Merci, M. le Président. J'aurais deux questions. Une première sur l'évaluation des apprentissages. Dans le petit document qu'on nous a remis du Vérificateur général, en page 11, on nous parle du suivi 1992-1993 de l'enseignement primaire et secondaire public et on nous dit que le ministère ne procède pas encore à l'évaluation de la qualité des apprentissages à la fin de chaque cycle d'études, comme c'était mentionné aux énoncés d'orientation qui dataient déjà de plusieurs années. On nous parle aussi que le ministère ne s'assure pas que les responsabilités de l'exactitude des notes attribuées par les écoles, de la qualité des examens, de la détermination du seuil de réussite en formation professionnelle, etc., c'est bien exercé par les commissions scolaires. Dans le document sur les états généraux, on ne parle pas beaucoup, non plus, de l'évaluation des apprentissages.

Alors, selon vous, comment on peut vérifier cette qualité-là des apprentissages d'année en année de nos étudiants, puisqu'il n'y a pas d'évaluation systématique? Est-ce qu'il y a des moyens, des mesures que vous entendez mettre en oeuvre pour qu'on ait un portrait réel de cette qualité d'apprentissage là? Est-ce que la responsabilité vous appartient vraiment? Est-ce qu'elle doit être maintenue aux commissions scolaires?

M. Lucier (Pierre): Elle est partagée. Revenant à la remarque du Vérificateur général lui-même, le Vérificateur nous dit qu'on ne fait pas les évaluations dont on avait parlé; en tout cas, nous l'avions évoqué dans un certain nombre d'énoncés. Ce que j'ai fait observer à M. le Vérificateur et à son équipe, c'est qu'il y a des énoncés qui se publient soit au niveau politique, soit au niveau parfois administratif, mais ces énoncés-là aboutissent dans des décisions réglementaires ou législatives qui, elles, sont les points de référence. Voyez-vous, le livre orange, par exemple, sur l'école québécoise, en 1979 – c'était un livre blanc, mais il avait couverture orange...

Mme Caron: Oui, je m'en souviens.

M. Lucier (Pierre): ...et on l'appelle, comme vous le savez, le livre orange – indiquait un certain nombre de bonnes intentions et de projets d'évaluation, mais c'est le régime de 1981 qui fait foi maintenant. Alors, je ne comprends pas qu'on revienne sur des énoncés préparatoires à des décisions gouvernementales fermes. Ça a été repris en 1988 avec la loi 107 et il y a eu des modifications au régime pédagogique au cours des années. Nous, notre point de référence après coup, ce ne sont pas les énoncés verts, blancs ou orange; ce sont les règlements du gouvernement. Et la loi et le règlement pédagogique déterminent très clairement les responsabilités en matière d'évaluation.

Dans le cas du primaire, il est clair que ce sont les commissions scolaires qui sont responsables d'évaluer le progrès d'apprentissage de nos enfants. Ce sont elles qui prennent la décision de les faire passer au secondaire. Donc, il n'y a pas d'examens ministériels dans le cas du primaire dans aucun de nos règlements, de nos lois. Il y a telle chose qu'un examen, je dirais, de service ou appelons-le comme ça, si vous voulez; on le fait en français en sixième année. Maintenant, il y a un examen diagnostique au début de la cinquième année au primaire. Mais ce ne sont pas des examens pour une sanction, puisqu'il n'y a pas de diplôme d'études primaires, comme vous savez. Donc, il n'y a pas de gestes ministériels d'évaluation dans le cas du primaire. Ceux que nous posons, ce sont des gestes pour permettre, je dirais, des lectures de l'état de santé de l'évolution des apprentissages. C'est un peu comme un coup de thermomètre, mais ça n'a pas d'effets sur la sanction des enfants.

Dans le cas du secondaire, c'est plus complexe. La responsabilité est aussi carrément partagée. Il y a un certain nombre d'épreuves ministérielles qui sont, en fait, en quatrième et cinquième année. Elles sont déterminées par le ministre. Les examens sont passés par le ministre, ils sont corrigés ou non centralement. Et, même dans les épreuves proprement ministérielles, il y a une combinaison de la note avec une note de la commission scolaire. Donc, c'est une responsabilité qui est partagée. Et, là aussi, nous avons introduit un certain nombre d'épreuves de service en troisième, je pense, en français.

Donc, ce que je veux dire, c'est que le cadre législatif et réglementaire est très précis sur qui fait quoi en évaluation, et je pense pouvoir dire que nous faisons ce que nous avons à faire. Donc, nous évaluons dans les limites que nous dictent la loi et les règlements.


Examens de français pour les enseignants

Mme Caron: Je vous remercie. Ma deuxième question. Vous avez évoqué tantôt la vraie vie. Alors, j'ai un citoyen qui est venu me rencontrer, puis je vous avoue que j'étais un petit peu mal à l'aise pour donner une réponse à ce niveau-là, concernant les tests de français des enseignants et des enseignantes. Il était le père d'une jeune enseignante qui a passé un test de français à la fin de ses études et qui, à chaque demande pour enseigner dans une commission scolaire, doit repasser à nouveau un examen de français. Elle était rendue à son septième examen de français parce qu'elle avait fait six commissions scolaires...

M. Lucier (Pierre): J'espère qu'elle les a réussis.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Caron: ...plus l'examen... Et il se posait la question: Est-ce qu'il y a un coût – il y a un coût quand même à ça, parce qu'à chaque fois ils étaient quand même une trentaine à passer des examens – pour l'évaluation de ces examens-là? Il ne se demandait pas si, avec nos technologies modernes, il n'y avait pas moyen, une fois la note passée de l'examen, qu'on ne pouvait pas serrer ça dans le dossier de l'enseignant ou de l'enseignante qui allait de commission scolaire en commission scolaire. Moi, j'aimerais être éclairée là-dessus parce que j'avoue que j'avais un peu de difficulté à justifier le besoin de reprendre un examen de français à chaque commission scolaire.

(15 h 40)

M. Lucier (Pierre): Je pense que la clé de l'explication, c'est qu'il n'y a pas d'examens ministériels uniformes dans ces situations-là. Il n'y en a pas. Il n'y a pas d'examens d'accès à la profession, en français ou en d'autre chose. Il n'y en a pas. Le brevet est donné sur la foi du diplôme universitaire, comme vous le savez. Les universités, de leur côté, ont accentué leurs exigences du côté de la maîtrise de la langue française, il n'y a aucun doute là-dessus, mais il n'y a pas d'examens ministériels.

Il arrive, et, effectivement, nous l'observons, que des commissions scolaires, dans leur fonction d'embauche, veulent se donner un instrument de sélection supplémentaire et font passer un test de français. C'est vraiment une initiative d'une commission scolaire. D'ailleurs, c'est probablement pour ça que ce n'est pas transférable. Je n'ai pas entendu dire que les commissions scolaires avaient fait front commun pour faire passer le même test. Nous n'intervenons pas là-dedans. Je ne suis même pas sûr que ce soit l'avenir. Le véritable avenir, ce serait que le brevet d'enseignement authentifie un ensemble de compétences, incluant la compétence en français. Il n'y a aucun doute là-dessus.

Alors, je pense qu'on est obligés de répondre que c'est une initiative locale, si je peux dire. C'est un instrument que se donne la commission scolaire pour faire sa sélection, tout comme il arrive que des gens, actuellement, qui engagent des secrétaires, en plus de regarder le diplôme, font un petit test en dictant une lettre ou deux, puis jugent de la qualité de la performance. C'est une forme d'examen qui est parfois artisanal, mais, enfin, qui vaut ce qu'il vaut.

Je vous dirai que, sur le plan du système, ce n'est ni poussé, ni encouragé, ni souhaité. Le véritable enjeu, c'est que le diplôme universitaire de formation à l'enseignement et le brevet qui le suit soient des garanties suffisantes de la possession, de la maîtrise des compétences.

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.

M. Lucier (Pierre): Si vous me permettez...

Le Président (M. Facal): Bien sûr, bien sûr.

M. Lucier (Pierre): ...je vous ferai peut-être observer qu'actuellement, dans tout le système, à tous les niveaux, en raison de la difficulté majeure dans laquelle nous sommes sur le plan linguistique, on assiste à toutes sortes d'entreprises, d'examens de toute nature, de tous les ordres d'enseignement, qui sont un peu, il faut le dire, dysfonctionnels par rapport à ce que devait être le système. Les universités ont pratiqué pendant des années des tests de français pour l'admission à l'université. Il y a eu des pas de franchis. Elles ont fini par faire le même et le ministère est entré dans la ronde pour qu'il n'y en ait qu'un qui soit administré de manière uniforme. Le gouvernement est allé plus loin, puisqu'il a convenu qu'il y aurait un examen de français intérieur au Diplôme d'études collégiales et ainsi de suite. Alors, on sent très bien que, dans un dossier comme celui-là, la ligne idéale, puisqu'on parlait d'idéal tantôt, ce serait que chaque ordre d'enseignement fasse ce qu'il a à faire et puisse garantir l'atteinte des objectifs d'apprentissage.

Maintenant, entre-temps et dans la vraie vie, on se rend compte que le français va progresser par toute une série de gestes – dont certains sont peut-être plus intempestifs que d'autres – qui montrent une préoccupation et qui exercent une espèce d'incitation collective à mettre vraiment l'épaule à la roue. C'est ma lecture des choses, en tout cas. Et le cas que madame cite est un cas parmi d'autres, d'initiatives plus ou moins heureuses, mais bien intentionnées pour stimuler et pour affirmer l'importance de la maîtrise du français.

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.


Élévation du seuil des connaissances de base au primaire

M. Désilets: Ça fait partie d'une suite à vos dernières questions, puis il y a une autre question; après, je reviendrai sur les commissions scolaires. Mais, en tout premier lieu, vous nous dites que le cadre législatif est très précis sur votre ingérence ou pas au niveau des commissions scolaires, suite à l'élévation du seuil de base d'apprentissage surtout au niveau primaire.

M. Lucier (Pierre): Sur l'évaluation.

M. Désilets: Sur l'évaluation.

M. Lucier (Pierre): Sur l'évaluation. Purement et simplement, sur l'évaluation. C'était le sens de la question.

M. Désilets: O.K. C'était le sens de la question. La question qui me préoccupe, c'est l'augmentation du seuil de connaissances de base de l'élève, puis, finalement, la société de demain. Avez-vous un oeil plus spécifique là-dessus au niveau des programmes ou si c'est laissé aux commissions scolaires? Et puis, en même temps, sachant qu'un élève n'a pas le droit d'échouer plus qu'une fois dans son primaire... Habituellement, à 12 ans, là, il s'en va au secondaire; ça fait que, s'il échoue une fois, deux fois, trois fois, il monte tout le temps année après année. Puis le prof, le titulaire qui a l'élève dans sa classe... L'élève peut être rendu en sixième année au primaire, mais de niveau deuxième. Mais il n'y a rien qui encadre ou qui donne un coup de main au titulaire pour, finalement, venir en aide à l'élève là-dedans. Y «a-tu» un encadrement plus spécifique? Y «a-tu» de quoi qui peut se faire au niveau du ministère, sachant ça? Les commissions scolaires n'ont pas d'argent; elles sont dans le déficit.

C'est pour ça que je vous reviens tantôt avec le... Pour moi, le phénomène d'intégration des commissions scolaires, il est primordial. Quand tu es trop petit, puis que tu n'es pas viable, tu ne peux pas donner un service qui a de l'allure à ta collectivité puis à tes jeunes. C'est tout interrelié, quant à moi, la problématique. Mais comment faire? Avez-vous un oeil là-dessus? Avez-vous un intérêt quelconque là-dedans plus que d'autre chose?

M. Lucier (Pierre): Bien, ce sont des questions si fondamentales que, si nous n'avions pas d'intérêt pour cela, je ne sais pas ce que nous ferions ici. Je pense qu'il y a plusieurs questions dans votre question.

M. Désilets: Oui.

M. Lucier (Pierre): Vous me permettrez d'en commenter deux, en autant que je comprenne. Le niveau visé d'apprentissage des enfants est une responsabilité ministérielle et gouvernementale. Dans notre régime, c'est le ministère, c'est même le gouvernement qui, par le régime pédagogique, fixe, je dirais, les règles du jeu de la détermination des niveaux d'apprentissage. Et un programme, c'est essentiellement cela; ça consiste à dire ce qui est visé comme apprentissage. Bon. Alors, nous avons actuellement les programmes que nous avons.

Je ferais deux remarques là-dessus. Il peut être décidé collectivement, par exemple, à l'occasion des états généraux, qu'il y a une hausse générale des niveaux. C'est une décision qui pourrait éventuellement être prise. Ça, c'est un type de réflexion qu'on peut faire. L'autre, c'est que, entre un programme sur papier et un programme vécu et des objectifs réalisés par les élèves, il y a autre chose. Il y a beaucoup de différences. Alors, c'est évident qu'actuellement, quand on regarde les niveaux visés de compétence pour les enfants du primaire et les jeunes du secondaire, ce sont des niveaux qui sont loin d'être banals. Ce sont des niveaux exigeants. Si, par exemple, tous les jeunes maîtrisaient effectivement les objectifs visés par l'enseignement du français par exemple, nous ne serions pas dans les problèmes dans lesquels nous sommes. Alors, donc, la détermination des niveaux est une responsabilité ministérielle ou gouvernementale.

M. Désilets: Ça, je n'en doutais pas. Je suis content de vous l'entendre dire. Mais qu'est-ce que vous faites pour vérifier que ça marche? Dans le sens que, moi, ce que je vois dans l'école primaire, c'est que l'élève en difficulté accapare de plus en plus d'énergie, parce qu'il y en a de plus en plus, dans une classe, d'élèves en difficulté, avec un an ou deux ans de retard, et puis le prof n'a pas d'aide pédagogique pour l'aider là-dedans. Ça fait qu'il consacre tellement d'énergie à ces deux, trois, quatre, cinq élèves-là que le seuil de base... Il n'a pas le temps d'enseigner le programme comme il faut parce qu'il n'a plus d'énergie; il n'a plus le temps, il a consacré trop de temps à faire de la discipline ou à faire le programme de première année, parce qu'il enseigne en troisième année, mais l'autre élève est en première, il y en a trois, quatre de niveau première... Avez-vous un oeil?

M. Lucier (Pierre): J'en ai même deux.

M. Désilets: Même deux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Désilets: Mais les deux yeux concentrés là-dessus, sur la qualité pas nécessairement de la pédagogie, mais du programme qui est enseigné pour la finition de l'année scolaire?

(15 h 50)

M. Lucier (Pierre): Écoutez, vous savez que les élèves en difficulté d'apprentissage – parce que, quand on est en deuxième en sixième, c'est vraiment une difficulté d'apprentissage – drainent des ressources très importantes dans notre système. Je crois qu'on parle de 24 % des ressources à peu près pour 12 % des élèves, donc c'est considérable. Donc, je ne pense pas qu'on puisse dire que des cas comme ceux que vous citez sont laissés à la bonne gouverne locale, comme s'il n'y avait pas des possibilités de services d'appoint. Ils sont considérables du côté des enfants en difficulté.

Mais, pour ce que vous soulignez, par ailleurs, sur, au fond, le redoublement, effectivement, on a presque un enfant sur cinq qui passe sept ans au primaire et, quand il quitte le primaire, il le quitte parce qu'il doit le quitter. À la limite, on n'est pas toujours sûr, non plus, qu'il a atteint les objectifs du primaire. Et on le voit d'après les taux de redoublement en première année du secondaire. On se rend bien compte qu'il y en a qui arrivent au secondaire et qui ne sont pas prêts du tout. Ça, c'est sûr que c'est un des très gros enjeux du système. Et, actuellement, le redoublement fait partie des réponses possibles. Nous ne sommes pas sûrs que ce soit la réponse la plus intéressante tout le temps, mais il est troublant de constater qu'il y a un enfant sur cinq à qui six ans de primaire ne suffisent pas.

M. Désilets: Il y en a là-dedans qui pourraient prendre deux, puis trois, puis quatre ans de plus. Ce que je veux dire, là...

M. Lucier (Pierre): Oui, mais, là, le législateur avait convenu que, rendu à 13 ans, c'était le temps de passer au secondaire parce que ça posait d'autres problèmes...

M. Désilets: Oui, correct.

M. Lucier (Pierre): ...de mêler les petits bouts de chou avec des adolescents, puis tout ça.

M. Désilets: Ça, je rentre là-dedans, je n'ai pas de misère, sauf que la problématique... Dans une classe, quand tu as deux, trois, puis quatre – pas quatre, mais au moins deux, trois – régulièrement années de retard, ça crée d'autres problèmes.

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Désilets: Il faut en tenir compte dans l'évaluation, puis dans la problématique. Je ramène ça encore avec les commissions scolaires, l'intégration des commissions scolaires. Elles doivent maintenir des services, mais, c'est ça, l'argent n'est pas là. Le taux de taxation... Parce qu'on est dans un milieu défavorisé, ils ne peuvent pas taxer comme ils veulent. Finalement, là, plus tu es pauvre, plus tu restes pauvre; puis plus tu es riche, parce que c'est dans un secteur d'une communauté qui est plus riche, tu peux taxer davantage et aller te payer plus de services. Dans ce sens-là, au niveau de la redistribution de la richesse, y «a-tu», là, un regard, encore une fois, qui est attentif de chez vous dans le milieu?

M. Lucier (Pierre): Il y a une oreille attentive.

M. Désilets: Une oreille attentive.

M. Lucier (Pierre): Écoutez, là, sur la taxation scolaire, vous êtes au courant qu'il y a une péréquation importante. La loi est ainsi faite qu'il y a comme deux balises pour fixer le niveau de taxation. Il y a, bien sûr, un 0,35 $ du 100 $ d'évaluation, mais il y a aussi une autre balise qui est un certain montant de dépenses admissibles par élève et par commission scolaire. Alors, quand une commission scolaire arrive à son sommet et est empêchée d'aller plus loin en taxation, elle reçoit une péréquation. Donc, la gestion de la taxe scolaire actuellement ne crée pas des riches et des pauvres au nom de la taxation scolaire, puisqu'elle est compensée par un système de péréquation qui a pour effet, en fait, de rapprocher la taxe foncière d'un impôt général. Ça, c'est majeur.

M. Désilets: En fonction des codes postaux.

M. Lucier (Pierre): Non, ça, c'est...

M. Désilets: Non? Ce n'est pas la même chose?

M. Lucier (Pierre): C'est une autre affaire, ça, là.

M. Désilets: C'est une autre affaire?

M. Lucier (Pierre): Je pense que vous parlez des cartes de distribution dites de la pauvreté.

M. Désilets: Oui.

M. Lucier (Pierre): Ça, c'est tout à fait autre chose.

M. Désilets: O.K.

M. Lucier (Pierre): Mais, du côté de la taxation, ce que...

M. Désilets: Je croyais que la taxation faisait partie aussi de ça.

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Désilets: O.K. C'est beau.

Le Président (M. Facal): M. le député de Nelligan.

M. Lucier (Pierre): Alors, on s'assure que...

Le Président (M. Facal): Si vous voulez finir votre réponse, M. Lucier. Je vous ai coupé la parole, je m'excuse.

M. Lucier (Pierre): Non, ça va.

Le Président (M. Facal): Ça va. M. le député de Nelligan.

M. Désilets: J'aurais juste un dernier petit point, M. le Président.

Le Président (M. Facal): Petit, petit point?

M. Désilets: Oui, petit, petit point.

Le Président (M. Facal): Un petit point?

M. Désilets: Un point seulement, l'éducation des adultes.

Le Président (M. Facal): Ah, c'est un petit point, ça?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Désilets: Oui, tout petit, tout petit.

Le Président (M. Facal): Ah! non, non, non, non, non.

M. Désilets: Ils sont adultes.

Le Président (M. Facal): Non, non. M. le député de Nelligan.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Désilets: Comme ils sont adultes, ça aurait pu aller vite.

Le Président (M. Facal): Oui, oui!


Accès aux écoles anglaises

M. Williams: Merci beaucoup. Merci, M. le Président, de me donner le droit de parler. Je trouve la discussion aujourd'hui tellement intéressante. Mais, aujourd'hui, je voudrais cibler mes questions un peu sur un sujet spécifique: c'est l'accès aux écoles anglaises. Je voudrais profiter de votre temps ici pour peut-être clarifier quelque chose que je trouve troublant. Je vais commencer avec un type de cas assez spécial et bien connu. Nous avons vu la famille Di Done, nous avons vu Nicholas Eyler et, bientôt, la famille Spenard qui sont ici temporairement, qui ont demandé d'avoir accès aux écoles anglaises, tel que permis par la Charte de la langue française parce qu'ils sont ici temporairement. Sauf qu'à cause d'une définition de «autorité parentale» l'État, le gouvernement du Québec commence à faire une différence entre la façon dont on traite les jeunes qui sont avec leurs parents biologiques et les autres enfants. Est-ce que vous pensez que c'est correct de traiter les enfants comme ça? Et, sinon, qu'est-ce que vous êtes en train de faire pour corriger cette situation?

M. Lucier (Pierre): Je ne répondrai pas directement à votre question sur ce que je pense correct ou pas correct.

M. Williams: Pourquoi pas?

M. Lucier (Pierre): Mais je vous dirai que la loi est appliquée selon ce qu'elle est. Alors, les fonctionnaires qui sont engagés dans l'administration de la Charte de la langue française et de son chapitre VIII appliquent la loi purement et simplement. Et c'est la même chose pour toutes les instances. Donc, c'est vrai pour les personnes désignées, comme on les appelle, dans les régions, c'est vrai pour la Commission d'appel et c'est vrai pour le ministre. En autant que je sois renseigné à la lumière des leçons de nos affaires juridiques, je comprends que la loi est appliquée comme elle doit l'être. Je ne suis pas juriste, mais je crois avoir compris qu'il y a eu une discussion sur le concept de «parent» et qu'il y avait une nécessité pour nous d'appliquer la définition du Code civil. Et, actuellement, nous vivons dans ce régime rigoureusement conforme à la loi, selon toutes les informations que j'ai, même si la gestion de la Commission d'appel ou de ce type d'instances là ne relève pas du tout de moi.

M. Williams: Au moins un demi-merci pour une demi-réponse.

M. Lucier (Pierre): On a la moitié du chemin de fait, là

M. Williams: Non, mais il me semble que c'est assez important parce que c'est l'image du Québec partout dans le monde. Les cas que j'ai cités, ils sont ici. Sans entrer toujours dans des choses nominales, la mère est la mère biologique, le père n'est pas le père biologique. Et l'État arrive avec des gestes administratifs tellement bizarres. Je ne suis pas un juriste, ici, mais, par le fait que la famille est ici dans un permis de travail du père, la mère ne peut pas le demander et, à cause que le père n'est pas le père biologique, l'enfant peut entrer. Voyons donc! C'est illogique.

Et, sans corriger ou entrer dans: Est-ce que la loi dit ça, oui ou non? il me semble que nous avons une certaine responsabilité dans le secteur de l'éducation d'assurer que ceux et celles qui méritent d'entrer dans les écoles anglaises aient ce droit. Et j'espère que, particulièrement avec l'article 74 de la Charte de la langue française qui est là spécifiquement... Et je vais le lire pour être clair, je vais lire ça en anglais parce que j'ai ma version anglaise maintenant: «The parent who may make the request provided for in this chapter must be the holder of parental authority. However, the person who has de facto custody of the child and who is not the holder of parental authority may also make such request provided the holder of parental authority does not object.»

Il me semble que c'est assez clair. Il me semble qu'effectivement c'est pour les nouveaux types de familles qui sont de plus en plus en vigueur. Et on doit, avec tout le respect – c'est ma suggestion – corriger cette interprétation dans les plus brefs délais. Parce que j'ai eu les copies d'un journal, aux États-Unis, qui cite ce problème. Et, si on veut respecter nos lois et si on veut être juste envers la famille et ne pas traiter d'une façon discriminatoire les différents types de familles, il me semble qu'il y a une responsabilité au ministère de l'Éducation de corriger ça, nonobstant le fait que ce n'est pas à 100 % votre responsabilité ou que vous ayez fait ça non plus.

(16 heures)

M. Lucier (Pierre): Je répète que nous appliquons la loi comme elle nous est expliquée. Et je ne sais pas si vous nous invitez, en présence du Vérificateur général, à en prendre un peu avec la loi. Ce ne serait pas devant un bon témoin. Ha, ha, ha!

M. Williams: Il me semble...

Le Président (M. Facal): Moi, je pense, M. le sous-ministre, que votre réponse consiste à dire, si j'ai bien compris, que vous appliquez la loi telle qu'elle est. Si cette loi est insatisfaisante, c'est un jugement que l'on peut porter, mais qui ne relève pas de votre ressort.

M. Lucier (Pierre): C'est exact.

Le Président (M. Facal): Et je crois comprendre que, si la même question vous est reposée, vous allez faire la même réponse.

M. Lucier (Pierre): Exactement.

Le Président (M. Facal): C'est tout.

M. Williams: M. le Président, je vais demander ma deuxième question.

Le Président (M. Facal): Bien sûr!

M. Williams: Mais, avant de demander ma deuxième question...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): C'est bon! C'est bon! On vous aime comme ça.

M. Williams: ...il me semble que... Et, si vous ne voulez pas faire une réponse officielle en ondes aujourd'hui, j'accepte ça; je ne peux pas vous forcer à répondre à mes questions. Mais il me semble que c'est impensable et inacceptable qu'on traite les enfants de la famille d'une façon différente pour la seule et unique raison qu'il y a un père ou une mère biologique ou pas biologique. Je trouve ça inacceptable. Vous avez déjà dit que vous ne répondriez pas. Avec ça, je vais... Vous voulez y répondre maintenant?

M. Lucier (Pierre): J'ai répondu.

M. Williams: Deuxième question...

M. Lucier (Pierre): Je n'ai pas d'appréciation à faire sur le contenu des lois. Si j'ai des propos à tenir sur le contenu des lois, c'est au gouvernement et à mes ministres que je dois le faire.

M. Williams: S'il vous plaît, faites ça le plus vite possible.

M. Lucier (Pierre): Je n'ai pas de jugement à porter sur les lois. Je suis presque comme le Vérificateur général.

M. Williams: Merci. Deuxième question: il y a de nombreux ou au moins quelques-uns des parents anglophones qui ont terminé leurs études à l'école française avant le 26 août 1977, date d'entrée de la Charte de la langue française, et qui n'ont pas, selon une interprétation stricte de la loi encore, le droit d'envoyer leurs enfants dans les écoles anglaises. À cause qu'ils sont avant-gardistes – ils ont voulu envoyer leurs enfants à l'école française – ils perdent leur droit, selon l'interprétation de la loi, d'envoyer leurs enfants maintenant dans les écoles anglaises.

Vous savez que le Protecteur du citoyen a annoncé qu'il va faire une étude systématique sur ça. Est-ce que vous pensez que ça va maintenant être opportun que le ministère de l'Éducation utilise ces informations, comme première question, et, la deuxième question, qu'il en profite pour revoir, faire une réévaluation de la façon d'interpréter la Charte de la langue française sur les questions d'accès à la langue anglaise?

M. Lucier (Pierre): Je vous répète que nous ne prendrons pas l'initiative de modifier la lecture qui doit être faite de la Charte de la langue française. S'il y a une entreprise de révision de quelque nature qu'elle soit et s'il y a des informations qui nous sont demandées sur ce genre de cas là, nous les fournirons, mais, au moment où je vous parle, nous n'avons pas de latitude pour disposer autrement des choses que ce que prévoit la loi.

M. Williams: Bon. Sans prendre trop de temps sur cette question, il me semble que, dans mon interprétation, il y a une responsabilité du ministère, quand il y a des problèmes, d'au moins mentionner, peut-être pas ici, en public, mais il me semble que... J'espère que nous allons faire une évaluation humaine, faire une évaluation pas juste cachée en arrière des règlements ou de la loi, et dire: Est-ce que c'est bon? Est-ce que c'est utile? Est-ce que c'est logique? Est-ce que c'est juste? «Is it fair?» Il me semble que, pour les parents qui, avec bonne volonté, ont envoyé leurs enfants avant 1977 à l'école primaire française et à l'école secondaire anglaise, ce n'est pas correct de pénaliser ces personnes.

Mais il y a une chose qui, je pense, tombe dans votre mandat et peut-être que vous pouvez répondre à ma question. Il y a, selon l'organigramme, un département pour les services anglophones, un département pour la communauté d'expression anglaise. Nous avons eu une excellente sous-ministre associée, je pense, si le titre est exact – adjointe, je m'excuse – spécifiquement en charge de la communauté d'expression anglaise. À notre perte, et je parle du gouvernement, elle a quitté et elle travaille à l'Université Bishop's.

M. Lucier (Pierre): Bishop's.

M. Williams: C'était une excellente personne qui avait suivi toutes les questions pour la communauté d'expression anglaise. L'avez-vous remplacée?

M. Lucier (Pierre): Je ne peux pas remplacer un sous-ministre adjoint, comme vous le savez; c'est une prérogative du premier ministre et du Conseil des ministres. Actuellement, j'occupe en attendant le poste de sous-ministre pour la communauté anglophone et j'essaie de participer assidûment aux travaux de la Commission d'éducation en langue anglaise et de garder des contacts avec l'ensemble des leaders de la communauté. Je peux prévoir que le gouvernement disposera de cette question-là à un moment donné, de la manière qu'il voudra bien le faire. Alors, au moment où je vous parle, le poste existe toujours et je l'occupe.

M. Williams: Avec aucun «disrespect» pour votre excellente compétence...

M. Lucier (Pierre): Je vous remercie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: ...cette lacune part de quand? Vous faites cette double responsabilité depuis quand?

M. Lucier (Pierre): Depuis le départ de Mme Hodder, qui s'est fait cet été.

M. Williams: Oui, c'est plus ou moins...

M. Lucier (Pierre): Elle a quitté à la fin juillet.

M. Williams: Cet été.

M. Lucier (Pierre): C'est ça.

M. Williams: Pensez-vous que c'est légitime que la communauté d'expression anglaise n'ait pas un sous-ministre adjoint depuis la fin de l'été, et nous sommes rendus au mois de février? Pensez-vous que c'est une bonne façon de gérer les affaires de l'État dans un dossier aussi important que l'éducation?

M. Lucier (Pierre): C'est une question qui n'appelle pas de réponse.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Bon. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Williams: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: M. le sous-ministre, pour poursuivre les questions de mon collègue de Nelligan, est-ce que vous ne pensez pas que c'est l'obligation d'un fonctionnaire de faire l'interprétation de la loi et pas de faire une stricte traduction de la loi? En fait, s'il y a deux personnes qui vivent ensemble comme un couple, de facto, le mari est comme le père de l'enfant. Dans ce cas, je pense que l'exigence de la loi est suivie et que le mari est vraiment, de facto – pas de jure – le père de l'enfant, et, à mon avis, vous avez une obligation, en loi, de faire une interprétation en faveur de cet enfant; sans quoi, l'enfant subit un préjudice de votre interprétation.

On le voit dans beaucoup de départements du gouvernement où les fonctionnaires doivent faire des interprétations. Si chaque fonctionnaire qui agit agissait strictement en relation des mots écrits – je pense en matière de taxes, d'impôt – il n'y aurait pas de décisions, les départements seraient gelés. Je pense que, dans ce cas, vous avez une obligation d'agir en faveur de cet enfant qui a le droit d'aller à l'école anglaise.

M. Lucier (Pierre): J'ai moi-même, ce matin, sur d'autres questions, dit comment nous nous situions devant certaines lectures de lois ou de règlements. Donc, je vous dirai que je suis tout à fait à l'aise avec la perspective d'une gestion, comme on disait, de bon père de famille ou intelligente des lois. Je n'ai pas de problème avec ça. Mais il faut voir que, dans le cas précis de la Charte, ici, en aucun moment je n'ai, moi, à prendre de décision. Il y a une mécanique qui est prévue. Il y a des personnes désignées spécifiquement, nominalement par le ministre pour porter une première décision de première instance dans les régions. Ce sont des personnes désignées par le ministre. Ce n'est pas à travers moi.

Il y a une commission d'appel qui dépend directement du ministre et qui n'est absolument pas dans mon champ de compétence. Et le ministre peut, d'après la loi aussi, porter un jugement de type humanitaire sur un certain nombre de cas. Dans aucun élément de ce circuit-là je n'apparais. Mes collègues ou moi-même, nous n'apparaissons nulle part là-dedans. Alors, la loi s'applique, elle a prévu une mécanique d'application, et je n'ai même pas de lieu pour exercer ce type de jugement là. C'est prévu que ce n'est pas les fonctionnaires qui le font: personnes désignées, Commission d'appel, ministre.

(16 h 10)

Alors, les gens qui ne sont pas satisfaits de l'application de la loi telle qu'elle est faite par les personnes désignées en région peuvent aller à la Commission d'appel. Il n'y a rien qui interdit à la Commission d'appel, aussi, de signaler des cas éventuellement au ministre; c'est ce qui est arrivé d'ailleurs récemment. Et le ministre a une certaine latitude pour prendre des décisions pour des motifs humanitaires. Alors, dans cette mécanique-là, je suis sensible à votre exhortation, mais je ne vois pas très bien où je pourrais lui donner suite.

Le Président (M. Facal): D'autant que nous allons entendre la Commission d'appel elle-même ici, le 5 mars.

M. Lucier (Pierre): Voilà!

M. Bergman: Une autre question.

Le Président (M. Facal): Bien sûr!

M. Bergman: Récemment, le gouvernement a renouvelé le mandat de trois membres de la Commission d'appel en matière de langue d'enseignement en nommant Francine Henrichon, Michel Trozzo et M. Solloway. L'article 83 de la Charte de la langue française dit que le gouvernement peut faire ces nominations après consultation de diverses personnes. Selon nos informations, le milieu de l'éducation, du moins le secteur anglais, n'a pas été consulté. Est-ce que vous pouvez dire s'il y avait eu des consultations, et spécifiquement dans le secteur anglais, avant que ces nominations aient été faites par le gouvernement?

M. Lucier (Pierre): Je n'ai eu à intervenir à aucun moment de cela; c'est ce que je vous ai expliqué tantôt. La Commission ne relève pas du ministère, mais du ministre. Je crois savoir qu'il y a eu consultation, mais cette consultation-là n'est pas gérée chez nous. Je n'ai pas à intervenir. Mes collègues et moi-même n'avons pas à intervenir là-dedans.

M. Bergman: Il me semble que ça tombe sous votre mandat, que c'est le gouvernement qui fait les nominations des membres de cette Commission. Alors, est-ce qu'on peut avoir une confirmation si le gouvernement a fait des consultations et particulièrement dans le secteur anglais?

M. Lucier (Pierre): Peut-être que les gens de la Commission d'appel le sauraient, je ne sais pas.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette.


Critères à suivre en matière d'immobilisations

M. Ouimet: Merci. J'aimerais poser quelques questions sur les immobilisations et connaître mieux le processus de cheminement des dossiers à partir du moment où une commission scolaire manifeste un besoin pour la construction d'une école, l'ajout d'espace, l'agrandissement d'une école ou la construction d'un gymnase. Comment est-ce que les dossiers cheminent et qu'est-ce que vous faites éventuellement comme sous-ministre au niveau des recommandations que vous faites à votre ministre? Et est-ce que vous accordez un certain nombre de critères ou de priorités par rapport à certains besoins qui vous apparaissent, sur le plan administratif, être plus prioritaires que d'autres ou est-ce que le ministre a une totale latitude par rapport au choix des différents projets? Parce qu'on sait que l'enveloppe budgétaire, elle est restreinte par rapport aux demandes et, des fois, il y a de nombreuses demandes très pressantes dans le réseau. Je veux comprendre le cheminement des dossiers pour mieux comprendre les décisions ultimes de la ministre de l'Éducation.

M. Lucier (Pierre): Je demanderai, tout à l'heure, à mon collègue Chaput, avec la permission de M. le président...

Une voix: Et le micro.

M. Lucier (Pierre): ...et le micro, bien sûr, de rappeler les étapes des cheminements. Je voudrais peut-être, dans un premier temps, me concentrer sur un élément de votre question qui concerne notre rôle, si je peux dire. Il est évident que, dans le dossier des immobilisations comme dans d'autres, on a toujours, selon les années et selon les ministres, une combinaison variable d'un processus, disons, de type technique – je ne dis pas technocratique, mais de type technique, donc de «due process», si vous me permettez l'expression – et, en même temps, il y a cette réalité fondamentale que le ministre a un champ de décisions. C'est lui qui fait la recommandation ou au Conseil des ministres ou au Conseil du trésor; donc, il y a une marge de prérogative ministérielle de choix pour d'autres considérations.

Alors, c'est évident que nous pratiquons – on va vous en parler – toute une série de critères qui sont très proches des critères du bon sens, en un certain sens, hein? C'est des besoins, c'est des clientèles, c'est l'état des lieux, c'est les programmes. C'est difficile de faire des immobilisations en dehors de ces critères-là. Mais il est évident qu'en bout de course, une fois toutes les choses analysées, nous avons effectivement des recommandations à faire sur le résultat final, mais ça n'est jamais à couper au couteau de manière parfaitement claire. Un ministre ou une ministre peut avoir beaucoup d'autres éléments dont il ou elle doit tenir compte.

Je pense que c'est pour ça qu'on peut dire que c'est une espèce de synthèse plus ou moins marquée de prérogative ministérielle et puis de produits un peu plus mécaniques d'une procédure technique. C'est toujours ça. En autant que c'est une décision ministérielle et gouvernementale, on ne peut pas évacuer qu'il y ait, donc, des décisions ministérielles ou gouvernementales, autre chose que simplement de mettre un label sur un processus qui irait tout seul.

Mais, cela étant dit, évidemment notre travail, nous, c'est d'assurer l'ensemble du processus d'analyse de toutes les demandes, de les situer par rapport aux différents critères habituels de gestion: les analyses de coûts, les analyses de clientèles, l'état des bâtiments, la capacité de payer, puis ainsi de suite. Et, un peu comme en réponse à la question de M. le président, tout à l'heure, sur les coupures, c'est un peu de même nature. On peut dire: Écoutez, bien, il y a eu tant de projets; en première analyse, il y en a une première série qui émerge, d'autres qui ne résistent pas à l'analyse et, dans cette série qui émerge, bien, ça dépend de combien de sous on dispose. Et, alors, à travers tous ces critères-là, un ministre doit prendre ses décisions sur un ensemble de facteurs qui vont du très technique au social et au politique. C'est normal, c'est comme ça dans tous les réseaux.

Ce serait ma réflexion de base, puis, à moins que vous vouliez rester là-dessus, j'inviterais mon collègue à vous parler plus du processus et des critères qui sont appliqués.

M. Ouimet: Oui, on va rester là-dessus juste pour quelques instants. Je ne me souviens plus trop dans quel journal et dans quelle région, mais le ministre, juste avant la période référendaire, avait agi avec une célérité sans précédent. La commission scolaire avait déposé une demande; trois mois par la suite, le projet était en voie de réalisation. La question que je pose: Est-ce que toutes les demandes cheminent via la machine gouvernementale ou est-ce qu'il arrive qu'un dossier prend une voie, je ne le sais pas, moi, express, une voie rapide, et voit le projet concrétisé? Parce que, des demandes, il y en a à travers la province, et je pense qu'une demande peut être aussi justifiable qu'une autre. Comment se fait-il qu'on se retrouve, à certains moments donnés, avec des décisions prises si rapidement, alors que d'autres demandes dans le réseau depuis fort longtemps pour des besoins aussi criants demeurent toujours sur la table?

M. Lucier (Pierre): C'est des choses qui peuvent arriver, un référendum n'étant pas le seul incitatif à la rapidité; il y en a beaucoup d'autres. On en observe.

M. Gautrin: Je dis: Qu'en termes délicats ceci est dit!

M. Lucier (Pierre): Mais, en toute hypothèse, à un moment ou l'autre du processus, il faut bien qu'un projet, même qui aurait pris une voie rapide, revienne à la moulinette des analyses, parce que, quand il s'agit de construire et de payer, de mesurer des mètres carrés, de toute façon, ça finit en analyses. Mais, moi, je pense qu'on a un exemple intéressant, ici, du rapport entre le politique et l'administratif, qui est beaucoup plus subtil et beaucoup plus complexe que ce que les discours courants évoquent.

Vous savez, l'administration publique, nous n'évoluons pas, nous, avec un agenda parallèle par rapport au politique. L'administration publique, ce n'est pas quelque chose qui évolue dans sa logique interne et puis, au terme de cette logique, un ministre mettrait un tampon. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Le premier gestionnaire des ministères, le chef des ministères, c'est le ministre dans notre régime. On ne réfléchit pas assez à ça. Il m'est arrivé de dire amicalement à des ministres qui faisaient des blagues sur des fonctionnaires: Vous êtes notre premier fonctionnaire. Ainsi sont faites nos lois. Et ça, c'est très important. Ça veut dire que, nous, nous n'avons pas d'agenda parallèle.

Et, j'ai assez d'expérience pour vous le dire, je n'ai pas de scandale philosophique à voir, dans notre régime, un ministre ou une ministre dire: Je veux aller là. Notre régime est fait comme ça et, nous, nous n'avons pas d'agenda parallèle qui fonctionnerait indépendamment des orientations politiques. Les premiers fonctionnaires des ministères sont des élus; c'est comme ça que notre système fonctionne. Alors, quand il est dit dans nos lois que le ministre détermine telle chose, que le ministre fait ceci, que le ministre accorde des autorisations, que le ministre décide quel est le plan d'immobilisations, ça veut dire quelque chose. Ça se joue différemment d'un ministre à l'autre – j'ai assez vu de situations pour voir que c'est très variable – mais la dynamique de fond est toujours celle qui est prévue dans notre régime politique. Le cas des immobilisations est extrêmement intéressant.

(16 h 20)

J'ai eu, pour ma part, d'assez longues discussions avec l'équipe du Vérificateur général qui aurait souhaité, dans le cas d'un des réseaux, qu'il y ait des normes beaucoup plus précises de priorisation de projets, et ma réponse a toujours été la même: C'est qu'il s'agit de savoir si les ministres ont l'information suffisante pour prendre des décisions. Mais il ne faut pas nier qu'il y a un champ de prérogatives qui ne pourraient pas faire longtemps très bon ménage avec des rouages dont on penserait qu'ils donnent des résultats automatiques. On a tout plein d'exemples dans l'histoire qui montrent que, pour des considérations autres et légitimes, il y a une décision qui est prise de construire ici plutôt que là telle chose plutôt qu'une autre. On en a un parfait exemple du côté des immobilisations, me semble-t-il. Alors, les processus que nous avons sont des processus rationnels et tout, mais la décision ultime, elle est prise, comme c'est prévu dans notre régime, à un niveau qui est politique.

M. Ouimet: Mais les considérations autres, comme vous les appelez, peuvent être légitimes dans la mesure où on arrive à déterminer quelles étaient les considérations dont le ministre a tenu compte dans sa décision. Pour l'instant, c'est l'obscurité la plus totale, il n'y a pas de transparence sur ce processus de choix là. Moi, la lumière que j'aimerais faire – et je ne la ferai pas avec vous nécessairement au complet aujourd'hui – c'est sur tout le processus administratif par rapport au processus politique. Je pourrai la faire avec la nouvelle ministre en temps opportun. Mais il y a quand même énormément d'obscurité par rapport à ces choix décisionnels là.

M. Lucier (Pierre): C'est matière à appréciation et probablement à du cas par cas. Vous comprendrez que je m'abstiendrai, ici.

M. Ouimet: Alors, si on pouvait faire la lumière sur tout le processus administratif pour voir comment les demandes entrent dans la machine gouvernementale et ce qui en ressort au niveau du sous-ministre, le plus haut fonctionnaire au niveau du ministère, avant que ça atterrisse sur le bureau de la ministre de l'Éducation...

M. Lucier (Pierre): Je vais demander à mon collègue de faire ce bout de chemin; nous pourrons peut-être revenir sur le rôle que, moi, je peux jouer spécifiquement, à la fin.

M. Chaput (Henri-Paul): Très simplement, M. le Président, dans un premier temps, les critères qui servent aux commissions scolaires à la base de leur planification en termes d'équipement sont introduits dans les règles budgétaires. Donc, les règles budgétaires disent quels sont les critères. N'importe qui ne peut pas bâtir une école s'il n'y a pas le respect d'un certain nombre de critères comme le nombre d'élèves, la distance des espaces disponibles, etc.

En deuxième, les commissions scolaires, en conséquence, à partir de ces critères, réalisent leur planification d'équipements et la soumettent à la direction régionale du ministère. Le dossier est d'abord étudié en région. Ce dossier nous est soumis avec des recommandations et, en général, les directions régionales font des recommandations en termes de conformité avec les règles budgétaires. Et c'est à partir de ce moment-là – c'est ce que le sous-ministre vient d'expliquer – que le dialogue commence avec le ministre.

Et je fais juste noter que, bon an, mal an, nous commençons nos travaux, au niveau des immobilisations, avec un calepin qui connaît à peu près 500 000 000 $ de projets. Vous l'avez noté vous-même, M. le député, les besoins et les budgets ne sont pas toujours exactement les mêmes, de telle sorte que nous connaissons actuellement des besoins identifiés par des commissions scolaires et, quand un projet est refusé, ce n'est pas uniquement parce qu'il ne répond pas; c'est peut-être parce qu'il n'y a pas suffisamment de fonds pour l'accepter cette année. Il peut être plus accepté l'année suivante.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx.

M. Ouimet: M. le Président, excusez-moi, je n'avais pas terminé.

Le Président (M. Facal): Oui.

M. Ouimet: Pourriez-vous m'expliquer? Lorsque le dossier passe de la commission scolaire à la direction régionale, il y a des décisions prises par la commission scolaire, dans un premier temps.

M. Chaput (Henri-Paul): Oui.

M. Ouimet: Mais, pour que la décision chemine de la direction régionale, la prochaine étape, c'est le bureau du sous-ministre? C'est bien ça que je comprends.

M. Chaput (Henri-Paul): Non. Tous les dossiers qui viennent de la direction régionale s'en vont à la Direction générale du financement et des équipements où il y a une unité...

M. Ouimet: Mais expliquez-moi les critères. Qu'est-ce qui fait en sorte qu'un dossier chemine, qu'un dossier avance, à part de me dire que ça dépend des règles budgétaires?

M. Chaput (Henri-Paul): M. le Président, tous les dossiers cheminent de l'étape régionale à la Direction générale avec une recommandation qui peut être de dire: Ce dossier ne respecte pas les normes, ne respecte pas les critères. Mais nous connaissons et nous soumettons au ministre tous les dossiers qui sont recommandés et tous les dossiers qui ne sont pas recommandés pour qu'il soit informé de tous les dossiers qui sont entrés au ministère, et c'est beaucoup, beaucoup de dossiers.

M. Ouimet: Donc, c'est à la fois les dossiers recommandés et les dossiers non recommandés.

M. Chaput (Henri-Paul): Oui, M. le Président.

M. Ouimet: Et les critères qui font en sorte que ces dossiers-là soient recommandés...

M. Chaput (Henri-Paul): C'est en fonction...

M. Ouimet: ...pourriez-vous m'en énumérer?

M. Chaput (Henri-Paul): ...des règles budgétaires, c'est en fonction de l'évaluation...

M. Ouimet: Ça veut dire quoi, ça?

M. Chaput (Henri-Paul): ...des clientèles dans les futures années, et nous partons des données qui ont été faites par notre collègue Babin, tantôt. C'est en fonction de la disponibilité dans un rayon donné d'équipement et c'est en fonction aussi de ce que nous appelons des projets communautaires ou, si une participation financière de 40 % est introduite dans un projet – exemple, un gymnase – nous le considérons admissible. C'est là, comme le sous-ministre le notait tantôt, qu'il y a une sorte de discrétion. Si vous en avez 50, 60, puis si vous avez uniquement un budget donné, c'est là que cette décision se prend au niveau ministériel.

M. Ouimet: Le 40 % au niveau des projets communautaires, ça, c'est inscrit dans les règles budgétaires?

M. Chaput (Henri-Paul): Oui, M. le Président.

M. Ouimet: Oui? Alors, il serait possible de produire les différents critères pour faire en sorte qu'un dossier chemine?

M. Chaput (Henri-Paul): Bien sûr, M. le Président.

M. Ouimet: Alors, j'apprécierais de recevoir ça. Et, après l'étape où ça se dirige vers la Direction générale, les autres étapes sont lesquelles?

M. Chaput (Henri-Paul): Bien, au niveau de la Direction générale, l'étape suivante, c'est notre équipe sous-ministérielle qui, en tant que sous-ministre responsable de ce secteur-là, discute avec mon équipe, qui bâtit les dossiers et qui évalue les coûts, qui confirme chacune des données. Il y a un travail technique qui se fait chez nous et nous préparons la partie, à laquelle le sous-ministre référait tantôt, de discussion avec le ministre.

M. Ouimet: Est-ce que vous travaillez uniquement sur les dossiers qui ont reçu une recommandation positive ou également sur des dossiers qui ont reçu une recommandation négative?

M. Chaput (Henri-Paul): Sur la totalité des dossiers; nous devons nous convaincre que la recommandation est conforme et que nous sommes capables de la défendre. Donc, nous voyons l'ensemble des dossiers. Nous pouvons interroger, au niveau de l'équipe sous-ministérielle, l'ensemble des dossiers positifs, avec recommandation positive ou négative.

M. Ouimet: Est-ce qu'il arrive, au bout du processus, que des dossiers ayant reçu des recommandations négatives se concrétisent?

M. Chaput (Henri-Paul): Ha, ha, ha! M. le Président, comme je l'ai noté tantôt, même des dossiers ayant reçu des recommandations positives ne sont pas tous...

M. Ouimet: Non. Ça, ça va.

M. Chaput (Henri-Paul): Ça va?

M. Ouimet: Mais dans l'autre sens?

Le Président (M. Facal): C'est l'inverse qui l'intéresse. Ha, ha, ha!

M. Chaput (Henri-Paul): Absolument, j'ai bien compris.

Le Président (M. Facal): Ha, ha, ha!

M. Chaput (Henri-Paul): Certainement, certainement. Et, si, à ce moment-là, ça ne respecte pas l'une des règles, il est possible d'aller en dérogation, mais il faut aller au Trésor, et nous respectons cette règle-là.

M. Ouimet: Donc, il faut aller au Conseil du trésor où, là, les responsables... Qui doit plaider?

M. Lucier (Pierre): Rendu à cette période-là, c'est un C.T. d'un plan d'immobilisations. Il y a des contacts sur les analyses techniques. Je pense que c'est une espèce d'équilibre entre les prérogatives proprement ministérielles et puis les objectifs, disons, de plafonnement des dépenses du gouvernement. Alors, selon les périodes, on ne peut pas dire que la tendance actuelle soit, pour le Trésor, d'aller réexaminer chacun des projets, mais plutôt de voir si ça rentre dans une enveloppe acceptable en plan de financement.

M. Ouimet: Et, à votre connaissance – dernière question – depuis le 26 septembre dernier, est-ce qu'il y a des dossiers qui ont fait l'objet d'annonces officielles et qui avaient reçu une mention négative de la part des différents ministères?

M. Lucier (Pierre): Je pense que, sur les... Vous comprendrez notre embêtement à répondre sur des recommandations faites à nos ministres.

M. Ouimet: M. le Président, nous sommes en commission parlementaire; il me semble que, comme parlementaire, j'ai le droit de connaître ces informations-là.

M. Lucier (Pierre): Je pense que les recommandations des fonctionnaires au ministre font partie du matériel de prise de décision et ça n'est pas accessible aux archives pour le moment.

Le Président (M. Facal): Notre règlement est tout à fait clair: vous êtes libre de ne pas répondre si vous jugez que le dévoilement de votre réponse pourrait être contraire à l'intérêt public.

M. Lucier (Pierre): Comme vous dites, M. le Président.

M. Ouimet: M. le Président...

Le Président (M. Facal): Oui.

(16 h 30)

M. Ouimet: ...je ne vois pas comment ça pourrait être contraire à l'intérêt public.

Une voix: Au serment d'office. Voyons! Écoute, les ministres ont prêté serment la semaine dernière.

M. Lucier (Pierre): Il y a peut-être une nuance à faire. Moi, je parlais des recommandations internes. Quand il y a des dérogations au Trésor, c'est tout public, ça.

M. Ouimet: Non, non, je ne parle pas de ce qui se passe au Conseil du trésor. Ça, ça relève du volet politique. C'est que vous savez, au niveau du nombre de dossiers qui, à un moment donné, sont dirigés vers le bureau du ministre, lesquels ont reçu des mentions favorables et lesquels ont reçu des mentions non favorables. La question qui m'intéresse, c'est de savoir: Est-ce qu'après les arbitrages devant le Conseil du trésor il y a eu, depuis le 26 septembre dernier, des dossiers qui ont fait l'objet d'annonces officielles, mais qui avaient reçu des mentions non favorables de la part de différents fonctionnaires? Ça, vous me dites que cette information-là n'est pas disponible.

M. Lucier (Pierre): Non.

Le Président (M. Facal): Bien, de toute évidence, je ne suis pas un grand expert de ces questions-là et le secrétaire fouille la jurisprudence, mais il m'apparaît qu'il tombe sous le sens qu'entre un sous-ministre en titre et son ministre il y a un rapport de confidentialité qui doit être absolument respecté. Et le ministre évidemment, lui, peut répondre, mais je ne pense pas que l'on puisse pousser indûment pour obtenir le dévoilement d'échanges qui... Je pense que la nature même de notre système prévoit que ces types de rapports doivent rester tout à fait confidentiels pour des raisons évidentes. M. le député de Groulx.

Mme Robert: Là-dessus, juste pour ne pas laisser l'impression que c'est nécessairement des choses pas correctes qui se font, etc. – c'est l'impression que ça peut laisser parfois quand on tient un tel langage – je veux poser la question suivante: Dans la plupart des cas où, par exemple, il y a une non-recommandation, c'est parce qu'il y a probablement certaines normes ou certaines choses établies qui n'entrent pas? Mais ces cas-là, quand ils sont acceptés, doivent aller en dérogation; donc, ça devient public, dans la plupart des cas, selon moi.

M. Lucier (Pierre): Il pourrait y avoir des cas où ce n'est pas matière à dérogation; ça peut être matière à décision différente. Mais, moi, je n'ai jamais qualifié les choses aussi sur quelque plan que ce soit, au plan qualitatif. Je dis simplement que c'est la logique même et c'est les fondements mêmes de notre système, de notre régime où il y a des décisions ministérielles à prendre. Et je redis que je n'ai aucun problème philosophique ou éthique avec cela.

Mme Robert: D'accord.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Oui, un petit aparté. Je voudrais rappeler au député de Marquette qu'un des principes fondamentaux de notre système, c'est la solidarité ministérielle. C'est clair que ça s'applique dans ce cas-ci, et ce, à tous les niveaux; sinon, le...

M. Gautrin: Il y a quelque chose qui s'applique, mais ce n'est pas ça.

M. Kieffer: Ah bien! Je m'excuse, mon cher ami! On pourrait en discuter fort longtemps.

Le Président (M. Facal): Posez donc votre question, puis, M. le député de Verdun, écoutez donc la question de votre collègue de Groulx.

M. Kieffer: Merci, M. le Président.

M. Lucier (Pierre): Maintenant, je tiens à assurer les membres de cette commission que ma discrétion là-dessus est inversement proportionnelle à mon degré d'ouverture envers mon ministre même.

Le Président (M. Facal): Qu'en termes élégants ces choses-là sont dites!

Des voix: Ha, ha, ha!


Formation professionnelle et technique au secondaire et au collégial

M. Kieffer: Bon. On va aborder un autre sujet. Ce qui me préoccupe beaucoup suite à la rencontre que nous avons eue la semaine dernière avec M. Bisaillon, c'est que plusieurs groupes, plusieurs mémoires ont fait état de la très grande difficulté que les niveaux secondaire et cégep ont à s'arrimer au niveau des secteurs professionnel, d'un côté, et technique, de l'autre. O.K. Ce qui ressortait dans le rapport d'étape, c'était la nécessité d'installer ou de créer un continuum. Au mieux, dans la situation actuelle, les liens nécessaires entre la formation professionnelle et la formation technique sont inadaptés aux besoins du marché et à la nécessité de la formation continue vers laquelle on se dirige en tant que société. Au pire – et je vous dirai qu'à ce niveau-là c'est plus mon opinion personnelle – c'est très anarchique.

J'en ai à la fois une expérience personnelle parce que je vis dans un comté où il y a un cégep et une commission scolaire. Je regarde comment ils s'entre-déchirent entre eux et elles pour aller chercher à la fois les contrats de l'entreprise privée qui peuvent être lucratifs. Quand General Motors, par exemple, a besoin de formation spécifique dans tel domaine, est-ce qu'elle doit s'adresser au secondaire ou est-ce qu'elle doit s'adresser au cégep? Bon, en tout cas, ça se chamaille, etc. Je trouve ça vraiment déplorable. Hier, j'étais au cégep et j'en discutais avec la directrice générale encore, et il n'y a pas beaucoup de choses qui ont été faites à ce propos. Il y en a beaucoup plus qui ont été faites entre le cégep et l'université, mais, entre le secondaire et le cégep, il n'y en a pas beaucoup.

Alors, ce que je veux savoir, c'est: Est-ce que le ministère a des pouvoirs spécifiques qui lui permettraient de régler le partage, d'assurer l'arrimage, de faire en sorte qu'un étudiant puisse commencer par être mécanicien et finir par être ingénieur en mécanique à l'université? O.K. Est-ce que vous avez ce type de pouvoirs là? Sinon, si vous ne les avez pas, quelles seraient vos suggestions? Parce que, moi, je pense qu'en quelque part il va falloir un arbitrage qui va être au-dessus de ce type de structures là qui, par définition, ont tendance à être plus en compétition, en tout cas, par les temps qui courent, qu'en synergie.

M. Lucier (Pierre): Paradoxalement, les liens entre le secondaire et le collégial sont du ressort de l'autorité ministérielle et gouvernementale. Je dis paradoxalement parce que ce n'est pas le cas dans la jonction collège-université. Collège-université, nous fonctionnons sur base volontaire dans des mécanismes dont on pourra s'entretenir si vous êtes intéressés. Dans le cas du secondaire-collégial, c'est paradoxalement, sur papier, plus simple. C'est le même gouvernement qui définit les deux régimes: régime d'études ou régime pédagogique. C'est lui qui détermine la structure de préalables; c'est lui qui détermine les diplômes, les objectifs des programmes de formation, les règles de sanction. Donc, ce n'est pas du côté des pouvoirs qu'il y a un problème.

Le problème – et je ne veux pas le compliquer, mais il est encore plus compliqué que tout ce que vous évoquez – il tient à la nature des choix que nous avons faits collectivement à propos du régime pédagogique et du régime des études collégiales. Nous avons fait des choix qui ont situé la formation professionnelle pratiquement en dehors de l'école secondaire. Vous le savez, on la réintroduit doucement. Mais ça a été ça, la... Bon. Mais nous n'avons qu'un diplôme d'études secondaires, vous le savez. Nous avons une voie qui est unique pour la diplomation. L'enseignement technique au collégial est intimement imbriqué à la formation générale.

Alors, quand on parle de continuum, il y a un secteur, disons, d'action qui est possible, qui est celui que nous menons: les projets concertés commissions scolaires-cégeps. Il y a certaines spécifications, qui sont dans le régime des études collégiales, sur des modules qui peuvent être reconnus au collégial par rapport au secondaire. Cette zone-là est relativement facile à gérer, mais elle ne va pas au fond des choses. Au fond, la continuité en formation professionnelle et technique, on ne peut pas la penser indépendamment des acquis de formation générale et de formation de base, pour des raisons très simples. Si vous faites un D.E.P. en mécanique, par exemple, que vous auriez fait après le secondaire III – supposons que c'est ça – ça prend un petit peu plus de mathématiques et de sciences fondamentales pour devenir ingénieur. Donc, il y a, d'une manière ou de l'autre, des seuils qualitatifs de compétence à franchir pour permettre des continuums.

Alors, dans la mesure où on a situé la formation professionnelle là où on l'a située, où on a consacré un seul diplôme d'études secondaires avec des contenus de formation générale, où, arrivé au collégial, il faut encore faire de la formation générale en formation technique, il n'est pas possible de sauter indûment des étapes. Mon vieux père, comme d'autres, disait: Il n'y a rien comme de faire une bonne onzième année avant de faire sa douzième. C'est d'une logique de fer. Comment est-il possible, par exemple, de faire du français ou de la langue maternelle, ou de la langue seconde au collégial sans avoir réussi juste l'étape qui précède, celle de secondaire V?

(16 h 40)

Alors, on se rend bien compte que, pour faire évoluer la possibilité même d'un continuum en formation professionnelle et technique, nous aurons à prendre collectivement des décisions très importantes sur la structure même du curriculum du secondaire. Jusqu'à quel point allons-nous maintenir cette voie unique et qui est destinée aux études supérieures? Si nous la maintenons, il est évident que nous avons des sauts de plus en plus difficiles à franchir. Je vais vous donner un exemple très concret. Si, par exemple, on peut entrer en formation professionnelle après le secondaire III – c'est ce que nous poussons, c'est ce que je pousse depuis de nombreuses années, personnellement – il faut voir aussi toutes les conséquences, c'est-à-dire qu'il faut être capable d'assurer en même temps un peu de la formation générale. Parce que comment voudriez-vous que cet élève-là, qui a fait ses mathématiques de troisième secondaire, puisse éventuellement devenir technicien avancé ou ingénieur? Quand on parle des filières allemandes – vous savez, les filières allemandes, ce n'est pas des filières au rabais – ça s'adonne qu'on y fait des sciences fondamentales et des mathématiques. Parce que ce n'est pas possible d'être ingénieur avec des mathématiques de secondaire III. Oublions ça. Impossible.

Alors, pour pouvoir créer ces continuums-là, nous avons des décisions beaucoup plus lourdes à prendre sur la diversification des voies au deuxième cycle du secondaire. Actuellement, il n'y a qu'un seul diplôme, qu'un seul bloc de règles de sanction pour tout le monde. C'est cela ou pas de diplôme. Le diplôme d'études professionnelles, comme je vous dis, il a été éjecté de l'enseignement secondaire. Il est pris plutôt à la fin, presque à la toute fin. On voudrait de plus en plus qu'il se commence avant, mais qu'il continue avec de la formation générale.

Et, arrivé au cégep, je tiens à le répéter, il y a des exigences de formation générale qui sont souhaitées par beaucoup de monde, remarquez, mais qui ne simplifient pas non plus la chose. Le continuum que vous évoquez va exiger de nous, si nous voulons le réaliser, des décisions plus profondes sur la structure même du curriculum du secondaire. Je crois qu'on ne le dit pas assez. En un certain sens, nous avons collectivement voulu que les jeunes n'aillent pas tellement en formation professionnelle au secondaire. Quand vous haussez les seuils, quand vous mettez ça préférablement, je dirais, après le secondaire V, et c'était le souhait très largement poussé...

Moi, je me souviens d'époques où il était tout doucement hérétique de penser qu'on pouvait avoir des voies où la formation professionnelle pourrait se donner en même temps que de la formation générale. Donc, on l'a sortie, la formation professionnelle, du curriculum de base. Elle est plutôt après le secondaire. Alors, il ne faut pas s'étonner que les effectifs soient plus âgés. C'est un choix collectif voulu comme tel. Et tout le discours des années soixante-dix, souvenez-vous-en, sur la formation professionnelle prônait fondamentalement le retrait de la formation professionnelle de l'école secondaire. Et l'école québécoise, le régime pédagogique de 1981 a bâti un curriculum homogène, un des plus homogènes au monde, même au deuxième cycle.

Il ne faut pas s'étonner maintenant – c'est plus facile à dire après qu'avant, remarquez – qu'il y ait des cohortes importantes d'étudiants qui ont des problèmes à obtenir ce diplôme-là. Mais il faut bien voir qu'il est tout tricoté avec la formation professionnelle. C'est pour cela que, si on veut un continuum, il faut qu'on ajuste en même temps des choses en formation générale. La question est de fond parce que, encore une fois, c'est impossible d'être ingénieur avec des mathématiques de troisième année.

M. Kieffer: Pour ce qui est de votre analyse de la nécessité d'ajuster la formation générale si on veut effectivement installer un continuum, je comprends très bien ce que vous voulez dire. Quant à la chicane, à la dispute ou à la compétition effrénée pour aller chercher des options, je vais vous donner des exemples: la formation en secrétariat au secondaire vis-à-vis la formation en bureautique au cégep, qui gère ça? Quand on sait que, chez nous, ils se les arrachent. Tout le monde vante son cours en disant: N'allez pas au cégep, voyons, vous êtes capables de venir chercher... Puis, là, le cégep dit: Bien, voyons, vous n'êtes pas pour devenir une petite secrétaire niaiseuse; il faut que vous veniez chercher la formation technique en bureautique. Au bout de la ligne, là, on perd de l'argent, il me semble. Est-ce qu'il y a une différence à ce point entre les deux cours?

M. Lucier (Pierre): Je vous dirai là-dessus que j'ai été témoin de proche...

Mme Robert: Une petite secrétaire niaiseuse.

M. Kieffer: Je caricature.

M. Lucier (Pierre): J'ai été témoin, au début des années quatre-vingt...

M. Kieffer: M. le Président, je m'excuse là, c'est parce que ma consoeur vient de me dire... Je caricaturais, tout le monde l'a compris évidemment, lorsque j'ai utilisé l'expression «petite secrétaire niaiseuse». Sinon, je prends la peine de le dire pour les galées, parce que, ça va de soi, je ne considère pas les secrétaires évidemment comme étant niaiseuses, madame, mon amie.

Mme Robert: Merci.

M. Kieffer: Bon. Vous pouvez y aller, M. le sous-ministre.

M. Gautrin: C'est important que vous fassiez cette mise au point, parce qu'on n'avait pas compris.

M. Kieffer: Je vois ça. Bien, dans votre cas, ça ne me surprend pas.

M. Gautrin: Venant de votre part, ça ne m'étonnait pas du tout, M. le député de Groulx.

Le Président (M. Facal): Bon! Ça suffit!

M. Lucier (Pierre): Le cas du secrétariat et du travail technique de bureau est un cas historique, un des plus lourds, en fait. Au début des années quatre-vingt, il y a eu une tentative pour démarquer, en un certain sens, pour identifier qui s'en occuperait à l'avenir. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'il a été impossible de faire quelque consensus que ce soit, dans aucun milieu, à ce sujet-là.

Les pistes plus récentes qui ont été explorées et pratiquées, c'est de déterminer les objectifs propres à chacun des ordres d'enseignement et de déterminer quelles sont les parties du D.E.C. en techniques de bureau qui sont, pour ainsi dire, automatiquement reconnues pour quelqu'un qui viendrait du secondaire, dans la même discipline. Alors, voici un exemple, disons... C'était un des cas historiques les plus tricotés, les plus difficiles. Il y a de la demande pour les deux, c'est évident, même si tout n'est pas clair dans les rapports institutionnels sur le terrain. Les efforts des dernières années ont plutôt porté sur la capacité de distinguer ce qui peut être propre et la capacité, surtout, de reconnaître des pans entiers de formation pour quelqu'un qui viendrait de l'autre réseau.

Je ne sais pas si c'est une réponse qui vous satisfait. Je vous dis que vous avez touché là un des cas historiques où il n'y a pratiquement personne qui est prêt à faire quelque concession que ce soit. Mais, ultimement, je dois vous dire que les ministres ont toute autorité juridique pour procéder en ces matières. Il n'y a aucun doute là-dessus.

M. Kieffer: Vous dites que le ministère pourrait trancher?

M. Lucier (Pierre): Oui, il pourrait trancher, comme on tranche un certain nombre de choses sur du papier parfois. C'est plus compliqué que ça dans la vraie vie. Mais les pouvoirs, je dirais, juridiques et réglementaires sont là.

Le Président (M. Facal): J'ai sur la liste des intervenants, dans l'ordre, les députés de Verdun, Champlain, Bourassa et Marquette. Est-ce que les membres souhaitent que nous fassions une pause de 10 minutes avant de faire la dernière heure qui nous conduirait à la longue pause de 18 heures? Alors, disons qu'on reprend à 17 heures pile. Nous ajournons momentanément.

(Suspension de la séance à 16 h 49)

(Reprise à 17 h 5)

Le Président (M. Facal): Alors, si vous voulez bien prendre place, nous allons reprendre le plus rapidement possible. Il est 17 h 5. S'il vous plaît, veuillez prendre place. La parole était au député de Verdun.


Formation des enseignants

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je voudrais aborder avec le sous-ministre la question de la formation des enseignants. Le ministère, si je ne me trompe pas, a le pouvoir de délivrer les permis d'enseignement, si je comprends bien. Il délivre les permis d'enseignement sur quelle base? Alors, je vous pose la question: D'abord, comment vous délivrez un permis d'enseignement et de quelle manière vous accordez ou vous n'accordez pas un permis d'enseignement? Une fois que vous aurez répondu à cette question-là, j'ai une sous-question qui viendra tout de suite après.

M. Lucier (Pierre): Le système en place depuis les années soixante et dont on trouve les rouages dans le règlement qu'on appelle règlement n° 4 – qui n'est plus n° 4, mais qu'on a continué à appeler n° 4 – prévoit qu'il y a une autorisation temporaire d'enseigner qui est donnée sur présentation, par l'université, des diplômes. Donc, la permission d'entrer dans l'exercice du métier et de la profession est liée à l'obtention d'un diplôme universitaire reconnu. Donc, il faut qu'il y ait reconnaissance par le ministre d'un diplôme universitaire dans une université reconnue. En fait, c'est toutes les universités. Ensuite, le candidat a deux années à fournir avant d'obtenir le brevet au sens strict du terme. Ça, c'est ce qui est en vigueur actuellement.

Mais nous sommes en transition vers autre chose parce que la gestion de ces deux années de probation pose toutes sortes de difficultés avec le marché d'emploi que nous connaissons et les orientations de 1992 ont plutôt privilégié une intégration plus poussée de la formation pratique à l'intérieur de la formation initiale, donc un allongement de la formation initiale. Nous avons donc maintenant, et c'est commencé, des bacs de quatre ans comportant 700 heures, presque une année donc, de stage pratique. Et ce qui est prévu, lorsque les modifications réglementaires pourront être faites en temps et lieu, c'est que la probation de deux années que nous connaissons actuellement se trouverait, elle aussi, à disparaître.

M. Gautrin: Alors, M. le Président, je vais poursuivre mes questionnements. Est-ce que vous avez une vérification, d'une manière ou d'une autre, sur les curriculums qui sont dispensés par les universités et aussi sur le débat qui est propre à chacune des institutions entre la formation dans la discipline que le professeur a à enseigner et la formation en pédagogie? Vous savez à quel point, dans chaque institution universitaire – celle dont vous venez qui est celle dont je viens aussi – vous connaissez les débats à l'intérieur de ces institutions. Est-ce que le ministère a son mot à dire sur l'uniformisation de la formation des enseignants, d'une part, et, d'autre part, est-ce qu'on commence, dans le diplôme, le brevet d'enseignement, à spécifier la discipline ou une discipline dans laquelle l'individu peut enseigner?

M. Lucier (Pierre): Le ministre de l'Éducation, ayant la responsabilité et le pouvoir d'identifier des programmes qui donnent accès à la profession, exerce aussi – et, historiquement, il l'exerce – le pouvoir et la responsabilité de faire connaître aux universités ce qu'on pourrait appeler les spécifications de la formation des maîtres. C'est ce qui a été commencé en 1992 et 1993 à propos de la formation des maîtres pour l'enseignement secondaire et de la formation des maîtres pour l'enseignement primaire. Donc, le ministre, effectivement, a un pouvoir de détermination des orientations et des grands objectifs à couvrir par les programmes de formation des maîtres. Mais le ministre ne fait pas les programmes. Ce sont les universités, comme pour tous leurs autres programmes, qui ont l'entière responsabilité académique de bâtir le programme correspondant à la poursuite efficace des spécifications ministérielles.

Il s'est introduit un mécanisme, il y a quelques années, de comités d'agrément des programmes de formation en enseignement. C'est un mécanisme qui s'inspire des pratiques des ordres professionnels, comme vous savez, qui doit être adapté parce qu'il n'y a pas d'ordre professionnel des enseignants, le ministre étant pour ainsi dire la corporation. Alors, il y a donc un comité d'agrément formé de gens des universités, des employeurs, si je peux dire, des maîtres en exercice, qui doit agréer le programme, comme on le disait, qui doit l'examiner, voir si ça correspond et faire au ministre une recommandation de reconnaissance ou d'agrément du programme.

(17 h 10)

Alors, nous avons, depuis 1992, donc, élaboration et diffusion des spécifications sur les maîtres du secondaire, puis du primaire. Les universités ont préparé leurs programmes, les ont soumis aux comités d'agrément, lesquels ont fait leurs recommandations au ministre qui les a agréés ou pas agréés dans certains cas, ou agréés temporairement avec des conditions, ou agréés conditionnellement. Nous en sommes à l'an deux des programmes de formation à l'enseignement secondaire et nous sommes dans l'an un des programmes de formation à l'enseignement primaire.

Dans les spécifications ministérielles – et je rejoins votre autre problème qui est extrêmement intéressant et difficile – concernant le secondaire fondamentalement, mais c'est le même esprit pour le primaire, il y a eu un choix, je dirais, porté par un consensus, à ce moment-là, de favoriser une bidisciplinarité, donc d'éviter ou plutôt, positivement, de permettre à des enseignants de pouvoir professer dans plus d'une discipline. Alors, les universités ont fait des profils où des disciplines qui peuvent s'agencer de manière heureuse, si je peux dire, la plus heureuse possible, de façon à permettre sur le terrain une meilleure mobilité et une capacité donnée aux enseignants de rencontrer des étudiants plus longtemps puisqu'il y aurait plus d'une discipline. C'est le choix qui a été fait; c'est un choix qui n'est pas facile en tout point, mais qui a été porté vraiment par l'ensemble des enseignants. Ça va de la CEQ aux universités, du moins dans leur structure décisionnelle.

C'est évident que, ce faisant, entre autres choses, on se trouvait à poser un défi particulier pour l'organisation même de la vie universitaire, comme vous le savez, puisque ce choix-là consistait à remettre aux structures de sciences de l'éducation la responsabilité de l'ensemble de la formation des maîtres, quitte à ce qu'il y ait des collaborations disciplinaires. Donc, on n'est plus du tout dans la perspective où des gens prenaient, d'abord, par exemple, un bac monodisplinaire auquel ils joignaient un certificat d'aptitudes pédagogiques ou l'équivalent. Nous sommes plutôt dans un processus plus long, mais intégré.

Dans les conditions de base qu'il y avait à satisfaire pour obtenir l'agrément, il y avait donc l'intégration de la formation disciplinaire dans la formation didactique et professionnelle, le rationnel étant qu'un maître exerce une profession et, donc, que son programme est un programme de formation professionnelle. Il y avait cette bidisciplinarité. Alors, il est évident que, par rapport aux structures connues et habituelles de gestion de la formation des maîtres dans les universités, ça a amené une... Révolution est un grand mot, mais disons que ça a amené des changements importants qui ont troublé passablement les manières de faire, et tout le monde ne les a pas résolus exactement de la même manière non plus. Mais il est évident que le fait de confier la responsabilité de ces programmes-là aux sciences de l'éducation introduit un nouveau type de rapports avec les facultés disciplinaires.

Et on a vu naître autour de ça, aussi, des discussions plus philosophiques et pédagogiques sur l'opportunité même de poursuivre des bidisciplinarités. Là-dessus, les savants se scindent, comme chacun le sait. Il est évident que ceux qui étaient plus habitués et plus attachés aux structures traditionnelles ont vu là-dedans un dérangement excessif, et d'autres, notamment du côté des sciences de l'éducation, portés à la fois par les autorités, je dirais, universitaires, ministérielles et par des partenaires enseignants et employeurs des commissions scolaires, ont vraiment favorisé cette bidisciplinarité et cette intégration.

Alors, nous en sommes là. Nous allons devoir procéder avant longtemps à des spécifications concernant les maîtres de spécialités au primaire, par exemple, les maîtres pour les enfants en difficulté ou les formateurs d'adultes. Le cycle se continue sur le même modèle. On avait commencé par le plus urgent, si je peux dire, et le plus massif, donc, secondaire et primaire.

M. Gautrin: Le cadre de nos discussions n'est pas le lieu pour débat, mais pour information. Donc, je vous remercie de l'information. Est-ce que, néanmoins, ces décisions sont soumises à évaluation par votre Direction de la formation et de la qualification des enseignants?

M. Lucier (Pierre): Oui. Bien, évidemment, comme tout processus qui est enclenché, il est suivi avec un oeil et même deux yeux. Nous avons aussi...

M. Gautrin: Il est trop jeune actuellement pour pouvoir avoir une idée de...

M. Lucier (Pierre): C'est jeune, actuellement. Il n'y a aucun doute là-dessus.

M. Gautrin: O.K. Je pourrais...

M. Lucier (Pierre): Il y a aussi un comité d'orientation de la formation professionnelle des enseignants dont le mandat est justement de voir au grain et de se prononcer, au-delà des programmes particuliers, sur l'opportunité des orientations générales en formation des enseignants.

M. Gautrin: Cette Direction, qui est une direction chez vous, a-t-elle conçu de limiter ou d'apporter une certaine rationalisation sur l'émission des brevets ou des permis d'enseignement en fonction des besoins? Autrement dit, vous êtes conscient que les détenteurs de permis d'enseignement ne peuvent, en général, qu'enseigner principalement dans les écoles du Québec. On est capable d'avoir une idée assez juste des besoins en la matière et de projeter les besoins dans les années qui vont venir. Est-ce que vous essayez – tout en étant conscient qu'on ne peut pas être strictement au pourcentage près – de faire une certaine adéquation entre les besoins prévisibles et le nombre de permis émis?

M. Lucier (Pierre): Oui. Pour la première fois, c'est réalisé.

M. Gautrin: Il va y avoir une forme de contingentement dans le système.

M. Lucier (Pierre): Bien, voilà, nous en sommes à un contingentement volontaire, donc discuté avec les universités. Il y a, actuellement, l'équivalent d'un contingent pour l'admission en sciences de l'éducation en ce qui concerne le volet formation à l'enseignement. Il y aura des besoins énormes, c'est connu. Mais, par ailleurs, il y a aussi en circulation un nombre élevé de maîtres dûment brevetés qui n'ont pas pu, pour diverses raisons, entrer dans le système, donc qui seront aussi disponibles. Donc, les renouvellements massifs que nous prévoyons ne seront pas comblés seulement par de nouveaux candidats, mais il y a aussi un nombre très élevé de personnes dûment brevetées qui sont sur le marché.

M. Gautrin: Des occasionnels, des gens qui sont sur appel, etc.

M. Lucier (Pierre): Alors, nous avons actuellement des prévisions par région, par université. Et les universités ont accepté de pratiquer un contingentement volontaire à l'admission.

M. Gautrin: Ces documents, à la fois ces prévisions des besoins en termes de maîtres au secondaire, parce que je pense qu'on parle du secondaire principalement ici, et des diplômés ou des personnes qui vont recevoir un brevet, les prévisions que vous faites, à ce moment-là, seraient-elles suffisamment publiques pour pouvoir être déposées ici à la commission?

M. Lucier (Pierre): Oui, sans aucune difficulté.

M. Gautrin: Alors, je souhaiterais, Mme la Présidente, que ça puisse être déposé à la commission et que vous les fassiez transmettre à la...

M. Lucier (Pierre): Sans aucune difficulté. Évidemment, ces prévisions-là, vous savez, ne règlent pas toute la question de l'affectation...

M. Gautrin: J'ai bien compris ça.

M. Lucier (Pierre): ...dans un champ d'exercice. Il y a d'autres règles que le règlement n° 4 et c'est les conventions collectives qui spécifient les modalités de l'affectation.

M. Gautrin: Et qui permettent... Oui, mais, autrement dit, ce que je voudrais éviter, c'est qu'on recommence, ce qui s'est passé à un certain moment, à avoir une énorme poche de gens qui étaient des occasionnels ou des gens à statut précaire qui se trouvaient à avoir quasiment une vie relativement difficile. Nous préférons peut-être avoir moins de permis, mais plus de stabilité pour les gens qui seront détenteurs d'un permis. Je fais un jugement politique quand je fais cette dernière affirmation, mais mon seul but actuellement, c'est d'avoir l'information.

M. Lucier (Pierre): Il n'y a pas de problème.

La Présidente (Mme Barbeau): Alors, vous avez terminé, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: J'ai terminé, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): Alors, M. le député de Champlain. Vous aviez demandé la parole.


Autonomie accrue de l'école

M. Beaumier: Merci, Mme la Présidente. M. le sous-ministre, ma question sera, je ne sais pas si je dois dire à deux volets, à deux étapes, mais la première partie va partir de nos structures pour en arriver à l'essentiel, l'école. La deuxième, c'est, rendu au niveau de l'école, comment est-ce qu'on pourrait voir à l'organisation qui pourrait être faite de l'école? C'est un peu le cheminement que j'aimerais qu'on fasse, tout le monde.

(17 h 20)

Je pense que ce n'est pas une ineptie de dire que beaucoup d'efforts ont été faits depuis beaucoup d'années par tout le monde pour que l'élève, effectivement, soit au centre de l'école, que la formation de l'élève, son bien-être, son développement soient la raison d'être et soient au coeur de l'école dans sa mission. Je pense que ce n'est pas faux non plus de dire qu'autant d'efforts ont été faits pour mettre l'école au centre du système scolaire, ce qui fait que les commissions scolaires ou le ministère comme tel sont des instances d'encadrement, d'appui, pour que se fasse à l'école cette formation des élèves. Je pense que je n'invente rien en disant ça. Mais c'est un cheminement dans lequel, moi, je me reconnais et où j'espère que tout le monde se reconnaîtrait.

Dans cette optique-là, est-ce que, dans la réflexion que fait sûrement votre ministère, au niveau de l'école telle qu'elle est actuellement, en termes de perspectives, en termes d'efforts, il y a beaucoup de choses qui pourraient être... Est-ce qu'on pourrait davantage rendre l'école plus autonome dans le sens de la responsabilité? En quoi, à ce moment-là, les commissions scolaires ou le ministère pourraient, l'un par rapport à l'autre ou les deux par rapport à l'école, se départir d'un certain nombre de responsabilités ou d'un certain nombre de choses qu'ils font pour renforcer cette autonomie qui faciliterait, je le croirais moi, la vocation même de l'école?

Je crois beaucoup, moi, à l'école physique, entendue comme école communautaire. Vous savez un peu pour quelle raison également. Alors, j'aimerais ça savoir si le ministère a une réflexion sur ce vers quoi on devrait aller. Est-ce qu'on est rendus assez loin? Est-ce qu'on peut aller plus loin? Est-ce qu'on doit aller plus loin? Je pose comme exemple, et comme seul exemple, la question de l'autonomie des polyvalentes. Est-ce que c'est une chose vers laquelle on pourrait davantage aller? Ça, c'est ce que j'appellerais passer par la structure actuelle pour arriver à l'essentiel qui est l'école où se fait la formation.

Deuxième volet ou deuxième étape, étant rendu, par exemple, à l'école, notamment au niveau... Ça pourrait s'appliquer, toutes choses étant égales, au niveau de l'école primaire comme secondaire, mais je partirais plutôt de l'école secondaire et un peu de ce que les états généraux ont exprimé à ce sujet-là dans l'«Exposé de la situation» qu'ils ont rendu public dernièrement. Ça concerne le curriculum d'études au niveau secondaire – je résume et je suis conscient que c'est un peu grosso modo, là – en ce qui concerne, j'allais dire, la dynamique entre le fait qu'on constate l'éclatement des matières et la nécessité peut-être de se recentrer – je crois que le terme était ça, de se recentrer – au niveau des disciplines essentielles. On sait qu'au niveau de l'école également les disciplines ou le disciplinaire, ou les matières ne sont pas tout, parce que les enfants au niveau primaire et les élèves au niveau secondaire, c'est un tout. C'est plus que la question proprement, on pourrait dire, académique. Donc, il y a toute la question de la formation par d'autres apports à l'école même qui pourraient être autour du parascolaire.

Alors, je termine, c'est cette nécessité, peut-être, ou cette interrogation quant à recentrer un peu le curriculum d'études au niveau secondaire versus la problématique – si c'était une solution, je ne le sais pas – de l'allongement du temps de présence à l'école ou du temps d'enseignement; c'est deux choses différentes. Est-ce que cet allongement, d'une forme ou d'une autre, serait une nécessité, serait bénéfique ou bien donc si c'est par le recentrage autour des disciplines essentielles, sans allonger le temps d'enseignement ou le temps à l'école, que ça pourrait se réaliser? Est-ce que je me suis bien exprimé, là? Oui, ça va. Vous êtes poli. Ce n'est pas pire. Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Non, non. C'est clair, mais polyvalent. Je veux dire qu'il y a beaucoup de volets. Je comprends que vous nous donnez la possibilité de commenter librement ces questions-là.

M. Beaumier: Absolument.

M. Lucier (Pierre): Je vous dirai qu'au ministère et ailleurs il est connu et admis qu'un des enseignements les plus sûrs de toute la recherche des quinze dernières années en sciences de l'éducation a montré de manière absolument irréfutable que les choses se passent à l'école, que le facteur fondamental de la qualité, c'est ce qui se passe à l'école. C'est attribuable à des formes de leadership, à des formes de chimie institutionnelle dans l'équipe autour d'un projet éducatif articulé. La littérature nord-américaine et européenne est absolument unanime: c'est là que ça se passe.

Et, moi, j'ai déjà signé au Conseil supérieur, avec d'autres, un avis sur la qualité qui se gagne établissement par établissement. Je n'ai pas changé d'idée, personnellement, là-dessus. C'est là que ça se passe. Je viens moi-même d'une tradition pédagogique farouchement autonomiste et institutionnelle, celle des jésuites, et je comprends très bien ce que ça veut dire. Donc, sur l'importance de l'école et de la recentration sur l'école, je crois que vous trouverez, et au ministère et dans beaucoup de secteurs de nos réseaux, une conviction que c'est un enjeu de fond. Et ça, vous avez raison de dire que ça doit primer sur tous les débats de structures.

En même temps que l'on dit cela, il est évident qu'il serait compliqué d'avoir 3 000 écoles toutes seules dans le champ sans une forme ou l'autre de référence intermédiaire. Alors, là, je ne suis pas en train de vous dire comment je vois la commission scolaire idéale; je suis en train de vous dire qu'autant il y a eu unanimité pour dire que les choses se passent à l'école, que c'est là qu'elles doivent se passer et qu'il doit y avoir là une dose d'autonomie importante, autant, en même temps, la balkanisation totale d'un système en 3 000 ou 4 000 écoles et, dans d'autres cas, ce serait davantage, je n'en ai pas vu d'exemples dans les systèmes contemporains.

Le deuxième point que j'aimerais signaler, c'est que la loi actuelle, la Loi sur l'instruction publique, quand on la lit toute, révèle une architecture qui offre beaucoup de possibilités sur l'exercice des responsabilités de l'école. Cette loi, elle est bâtie ainsi, vous vous en souviendrez: on commence par parler des enfants, des élèves; ensuite, c'est l'école, et ainsi de suite. Et il y a des choses terriblement conséquentes concernant l'autonomie de l'école. Il y a même des structures prévues. Je ne vous dis pas que c'est la perfection, mais, je veux dire, il y a quand même des bases qui vont jusqu'à des connotations budgétaires qui permettraient des règles du jeu différentes de celles que nous pouvons voir dans certains cas. En tout cas, c'est très diversifié. Donc, je vous dirais que, sur l'importance de l'école, non seulement c'est une ligne de fond qui est positive, mais je ne suis pas sûr qu'on ait exploité au maximum l'ensemble des dispositions de la Loi sur l'instruction publique à cet égard-là.

Cela étant dit, quelle que soit l'évolution de ces questions-là dans l'opinion publique, puis dans l'ensemble, on pourrait dire, de la démarche qui entoure les états généraux, j'ai l'impression qu'il y a comme un rendez-vous incontournable vers une mise en place centrale de l'école par rapport au système. Et ça, ça veut dire qu'il y aura, d'une manière ou de l'autre, une interpellation pour modifier un certain nombre d'interventions des autres intervenants.

Dans le cas du ministère, en un sens, et dans le cas des commissions scolaires aussi, au fond, les choses sont relativement simples. Et c'est de cette manière-là que la Commission des états généraux pose des questions: Que souhaitons-nous collectivement que l'État garde comme responsabilités par rapport aux écoles, qu'elles soient ou non regroupées d'une manière ou de l'autre avec des instances intermédiaires? Au fond, la question est là. Est-ce qu'on veut que l'État, donc le ministère, continue de faire des programmes, continue de faire des examens, continue d'émettre des diplômes, continue de certifier les maîtres pour l'école? Au fond, la question est là. Et, selon qu'on répondra oui ou non à telle ou telle question – il n'y a pas d'enjeux métaphysiques là-dedans – il pourrait y avoir des retraits correspondants. Et la même chose du côté des commissions scolaires, au fond.

(17 h 30)

C'est évident que, si l'autonomie locale va, par exemple – parce que c'est ce que vous évoquez à la fin – jusqu'au curriculum, ce qui n'est pas impensable sur certains éléments du curriculum, j'imagine bien lire le sentiment assez partagé dans la population en disant que les Québécois ne vivraient pas très à l'aise avec l'hypothèse d'un curriculum qui serait éclaté entre 4 000 écoles. J'imagine ça. Dans aucun pays du monde d'ailleurs, ça ne se fait comme ça pour l'école de base. Donc, j'imagine qu'il va y avoir quand même un souhait et une demande, et une réponse sans doute de l'État, pour garder un certain nombre de balises sur les objectifs du système, sur les objectifs de formation.

Maintenant, jusqu'où ça doit aller, après ça, dans le comment et est-ce qu'il y a des zones d'adaptabilité, est-ce qu'il y a des projets qui peuvent se diversifier même dans le curriculum? Ce n'est pas impensable. On en voit des exemples. D'ailleurs, de toute façon, au moment où on se parle, même avec un curriculum très homogène, il y a quand même passablement d'écoles qui, finalement, font leur curriculum. Il y a beaucoup de projets spécifiques. Ça va du sports-études à l'école internationale, ainsi de suite. On pourrait en énumérer plusieurs. Donc, ce n'est pas impensable, et c'est déjà réalisable, qu'il y ait une certaine diversification des curriculums.

Vous avez parlé d'allongement du temps de présence à l'école. Bon.

M. Beaumier: M. Lucier, me permettez-vous?

M. Lucier (Pierre): Oui, je vous en prie.

M. Beaumier: Peut-être que je me suis mal exprimé. Je ne souhaitais pas un éclatement des structures par rapport aux écoles. Je ne souhaite pas un éclatement, l'autonomie des écoles au point qu'il y en ait 4 000. J'ai dû mal m'exprimer pour dire ça. Je dis, tout simplement: Au niveau de la réflexion du ministère, parce que c'est au moins soulevé dans les questions par les états généraux, entre autres, et un peu par les gens que l'on rencontre, etc., jusqu'où doit-on et peut-on renforcer l'école en la rendant un peu plus autonome, un peu plus responsable, ayant plus de responsabilités par rapport à ce qui est actuellement l'encadrement nécessaire que je crois? Et vous dites que, dans la loi – j'apprends beaucoup ici – il y a beaucoup de choses et qu'on peut aller assez loin dans cette direction-là.

Et c'est un petit peu différent aussi de l'autre volet qui était vraiment, une fois qu'on est rendus à l'école, hein – on parle de l'éclatement des matières, puis les enfants sont déjà assez éclatés par toutes sortes de choses, dont la télévision, etc. – de recentrer ça autour d'une formation, autour de disciplines plus essentielles. Pour ce faire, puis aussi pour que l'école soit un lieu de formation plus globale, ce que, je pense, chacun souhaite, surtout avec, souvent, les situations sociales ou familiales qu'il y a, bien, est-ce que la question de l'allongement du temps est la seule réponse? Je pense, par exemple, au décrochage. Moi, j'imagine... Tantôt, vous parliez de vos fantasmes, là. Bien, je vais parler des miens. Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): J'ai été discret, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Beaumier: Oui, ce sont des mots absolument pas négatifs, hein! On va parler d'un rêve, d'abord. Moi, je me disais simplement comme ça: Le fait de prolonger un peu l'école, pas par l'enseignement nécessairement... Quand on regarde les enfants qui, dès le primaire ou au secondaire, peu importe, peuvent avoir des difficultés d'apprentissage ou certains retards de toutes sortes, ou un manque d'encadrement ailleurs, bien, le décrochage pourrait être... Les enfants pourraient être pris en charge par un encadrement scolaire léger, mais présent, ce que permettrait la... Les jeunes aussi qui le veulent, dans leur parascolaire, que ce soit le sport, que ce soient les arts pratiques ou la culture comme telle, pourraient, là aussi, y trouver leur compte. Alors, c'est ça que je poserais comme question.

Comme réflexion, la vôtre, vous réagissez comment, par exemple, à cette possibilité d'allongement du temps à l'école, qui n'est pas nécessairement du temps scolaire, mais du temps à l'école, ce qui permettrait, pour moi, à première vue, de répondre à un certain nombre de problèmes très concrets. Quand ils ne sont pas réglés, on sait comment ça peut coûter au bout. Le dédoublement, on en a parlé, c'est des centaines et des centaines de millions, si j'ai bien compris. Alors, c'est un peu ça. Je vous ai mélangé tous les deux tantôt, quand j'ai mis les deux ensemble, là. Mais c'était deux choses pas mal plus à part.

M. Lucier (Pierre): Il m'apparaît évident qu'il y a autour du temps un des plus gros enjeux du système. On en a parlé sous d'autres aspects ce matin: le temps que prennent les étudiants pour compléter leurs études. J'ai évoqué aussi le temps que les étudiants mettent, consacrent à leurs études. Et le temps que les enfants passent à l'école, comment ils le passent? Est-ce que la seule réponse est du côté de l'allongement? Je ne suis pas capable de répondre à ça. Mais il y a sûrement un problème d'aménagement du temps; ça, il n'y a aucun doute là-dessus. Ça ne touche pas seulement la journée ou le nombre d'heures. Ça peut toucher aussi le calendrier. J'ai lu, il n'y a pas longtemps, un excellent et important rapport américain, «Prisoners of Time». Toute la problématique, au fond, tend à montrer qu'il y a autour de l'aménagement du temps scolaire un des plus gros enjeux actuels. Bon.

Nous avons observé que nos horaires sont plus courts que dans plusieurs autres systèmes. Quelle sera la solution à cela, étant donné les coûts qui y sont rattachés? Je ne suis pas capable de le dire à ce moment-ci. Mais il est évident qu'il y a un enjeu, en tout cas, sur l'aménagement du temps. Est-ce que c'est du temps d'enseignement dont nous avons besoin? C'est autre chose. Là, on constate qu'il y a quand même plusieurs centaines de cas où il y a du temps de garderie à l'école, de garderie éducative. On a même évoqué l'aménagement du temps des grandes vacances. Bon. Donc, il y a un enjeu de ce côté-là. Nous avons un problème avec le temps. Encore une fois, la solution n'est peut-être pas aussi simple que celle de dire: Il faut ajouter une demi-heure. Parce que plus de la même chose, des fois, ne règle rien. Mais il y a un problème d'aménagement du temps dans toutes ses dimensions, il n'y a aucun doute là-dessus.

Quant à la recentration du curriculum sur les choses essentielles, il me semble que la Commission des états généraux, dans son premier chapitre, pose une question à la collectivité, qui est extrêmement intéressante et percutante: Pensons-nous que l'école a pour mission, bien sûr, le développement des enfants, mais comme mission propre d'instruire et d'instruire sur les choses de base? Je ne sais pas jusqu'où iront les consensus là-dessus. J'ai l'impression que, sur le principe, on aura facilement des consensus. Mais évidemment qui dit recentration sur des disciplines essentielles dit aussi élagage de disciplines qui pourraient être perçues comme moins essentielles.

Alors, c'est toujours la même question qui est posée. On revient finalement à des aménagements. Il y a des discussions, donc, de partage de temps et de partage de ressources. Prenons l'exemple du comité sur l'enseignement de l'histoire. Il m'est arrivé de dire amicalement à des gens... J'imagine qu'on peut soupçonner le genre de conclusion; j'imagine qu'ils vont nous suggérer de faire plus, mieux, avec de meilleurs moyens. La deuxième question immédiate qu'il faudra résoudre: Quoi enlever pour faire plus de place à cette discipline fondamentale? Et là, vous le savez tout le monde, on soulève des questions d'arrangements sur le terrain où beaucoup de groupes vont s'affronter.

Mais, pour ce qui est de la nécessité de recentrer sur les matières essentielles, vous ne trouveriez au ministère non seulement que des complices, mais que des appuis. Il n'y a aucun doute. Il s'agit de savoir si nous sommes capables collectivement de faire des choix réels qui feraient qu'on donne plus de place à certaines choses au détriment d'autres. Puisque le mouvement des 20 dernières années... Enfin, ça a commencé à fléchir il y a quelques années, mais, si on se reporte aux années soixante et soixante-dix, et même au début des années quatre-vingt, la demande était plutôt pour que l'école assume toutes sortes d'autres fonctions. Moi, j'ai assisté, au cours des années, à des demandes d'inclusion de toutes sortes de choses. Ça va de la technique antiétouffement jusqu'à la santé-sécurité, prudence automobile et ainsi de suite.

Le Président (M. Facal): M. le député de Bourassa.

M. Beaumier: Merci.


Nouvelles technologies et bibliothèques scolaires

M. Charbonneau (Bourassa): Merci, M. le Président. J'aurais quelques questions qui ne sont pas très longues à poser. La première: il y a eu un colloque récemment, une conférence, à la fin du mois de janvier, sur les nouvelles technologies de l'éducation. Il y a eu un ensemble de conclusions qui ont été publiées dans certains journaux. Quel est le plan d'action? Qu'est-ce qui se passe au ministère après un tel colloque? Quel est le plan d'action qui est en marche?

M. Lucier (Pierre): Il s'est effectivement dégagé, comme vous le dites, de cette conférence-là un certain nombre de consensus de fond sur la place des nouvelles technologies par rapport à l'apprentissage, par rapport au rôle des enseignants. Il y a eu des engagements des uns et des autres, autant du côté de la formation que de la fourniture d'équipements, et ainsi de suite. L'événement s'est terminé le 26 janvier. Alors, il est évidemment dans notre programme d'en faire un état détaillé à la nouvelle ministre et de prendre avec elle les décisions de suivi qui vont s'imposer.

M. Charbonneau (Bourassa): Merci.

(17 h 40)

M. Lucier (Pierre): Mais, M. le Président, il est clair pour tout le monde qu'on a là un enjeu absolument incontournable et qu'il n'est pas question, quelles que soient les circonstances, de penser que nous passerons à côté.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, le document de travail d'ailleurs faisait état du décalage énorme qui nous marque par rapport à d'autres univers comparables, du retard, etc. Alors, c'est à marquer au coin de la plus grande urgence.

Par ailleurs, quand on lit le document des états généraux aux pages 71 et 72, il parle aussi de l'importance des nouvelles technologies et c'est dans le même ensemble qu'il traite aussi des bibliothèques scolaires. Le dernier chiffre de référence qu'utilise ce document-ci, c'est 1992-1993, les dépenses pour ce qui est des bibliothèques scolaires en 1992-1993. On dit: 166 000 000 $ pour ces bibliothèques publiques comparativement à 407 000 000 $ en Ontario. Est-ce que vous pourriez nous fournir des données plus récentes? Parce que 1992-1993... Est-ce que ça s'est dégradé depuis ce temps-là ou si ça s'est un peu amélioré? Est-ce qu'il y a une reprise de ce côté ou si c'est encore plus lamentable que c'était? Dans quel sens va le mouvement? Le chiffre en question, il est à la page 70, le paragraphe du haut.

M. Lucier (Pierre): Oui, depuis 1992, il y a eu un plan d'allocation supplémentaire de l'ordre de 3 500 000 $ ou 4 000 000 $ par année, 3 200 000 $, oui, qui a été introduit dans les bases. Donc, on a rendu permanente cette allocation spécifique d'aide aux bibliothèques. Les commissions scolaires, de leur côté, font aussi des efforts. Maintenant, de manière générale et globale, nous ne nous cachons pas que nous avons beaucoup de travail à faire du côté des bibliothèques, de leur contenu et de leur accès. Il est évident qu'il y a dans cette question-là des éléments de coûts importants et c'est pour cela aussi qu'il y a eu, ces derniers mois, des rapprochements importants avec le ministère de la Culture et des Communications dans le but de faire des jonctions de projets plutôt que des parallélismes de projets.

Alors, la question a été posée de plus en plus à l'occasion de la dernière vague d'immobilisations, la question a été posée aux municipalités, des contacts ont été faits avec le ministère de la Culture pour voir s'il n'y a pas moyen de conjuguer les forces de manière à investir ensemble dans des bibliothèques communes qui serviraient à la fois l'école et les collectivités. Maintenant, à la fois sur l'importance des bibliothèques et sur leur état discutable au moment actuel, je ne pense pas manquer à la discrétion de ma fonction en vous disant que vous ne trouverez au ministère que des appuis sur ces deux constats, sur ce constat et sur cette conviction.

M. Charbonneau (Bourassa): Si je pose les deux questions en séquence, c'est que, là, nous assistons à une reprise de la vague des nouvelles technologies. On a déjà connu une première vague, il y a une dizaine d'années, 10, 12 ans: les premiers achats d'ordinateurs, etc. C'était foudroyant, ce qui s'en venait. Là, il y a une deuxième vague. On dit: Quel retard, ça n'a pas de bon sens! Je fais une hypothèse et je voudrais vous voir la commenter, l'infirmer ou la confirmer. Si on faisait un document de 50 pages, comme vous en avez fait un pour les ordinateurs, sur les bibliothèques, sur l'état des bibliothèques scolaires, est-ce qu'il n'y aurait pas un diagnostic tout aussi lamentable qui pourrait sortir d'un tel document? Autrement dit, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu à une prise de conscience, aussi vive que celle qui a été provoquée récemment à propos des nouvelles technologies, à provoquer en ce qui a trait à l'écrit? Enfin, on sait que les bibliothèques peuvent avoir des documents audiovisuels aussi, mais quand même.

M. Lucier (Pierre): C'est possible. Mais j'aimerais faire deux réflexions là-dessus, combinant les deux thèmes que vous avez choisis. Effectivement, c'est une autre vague. J'ai connu avec vous la première et ses déceptions. Il y a dans la deuxième vague un saut qualitatif qu'il nous faut prendre en considération. Ce n'est pas la répétition de la première vague.

M. Charbonneau (Bourassa): Non.

M. Lucier (Pierre): C'est qu'il y a eu, entre-temps, un développement technologique tel – je n'en parle pas ici comme un expert, rassurez-vous – qui fait que le rapport à l'instrument informatique est complètement changé. On est dans la convivialité. Donc, on n'apprend plus le mécanisme des ordinateurs; on apprend à les utiliser, tout comme, quand on utilise un téléphone, on ne commence pas par étudier le diagramme de la programmation du téléphone, enfin on l'utilise. Cela a changé radicalement le rapport à l'instrument.

J'irai plus loin. La diversification des instruments satellites change la nature des choses et nous rapproche de votre deuxième thème. Quand vous pouvez avoir maintenant sur un CD-ROM une encyclopédie complète multimédia – donc, pouvoir faire l'histoire en voyant des lieux, en voyant bouger des gens, en voyant des costumes, en voyant des édifices – on est loin, disons, du cours ISI, d'initiation aux sciences informatiques, qu'on a mis sur pied au début des années quatre-vingt. Donc, ce changement qualitatif – je pense qu'il y a un saut, il faut le dire – nous oblige à poser le problème de manière tout à fait différente maintenant. C'est devenu un instrument de communication et d'accès à l'information. Il ne s'agit pas d'apprendre à programmer; au fond, il s'agit d'apprendre à utiliser et d'avoir accès à des sources d'information et à des moyens de communication.

Il est évident que tout ce qui gravite autour de tous les Internet de ce monde change radicalement la situation même d'une école isolée, change radicalement le rapport au savoir. Et là on se rapproche aussi des bibliothèques, parce qu'il n'y a plus de coupure vraiment claire entre l'instrument bibliothèque traditionnelle, essentiellement des documents sur support papier, et puis l'ensemble des instruments qu'on peut y trouver maintenant en multimédia. Et c'est pour cela qu'en même temps qu'on pose le problème des nouvelles technologies de l'information et des communications on pose le problème des bibliothèques, parce que l'un se rapproche de l'autre aussi.

Et j'ai été frappé, au cours de la conférence de la fin janvier, de l'insistance de beaucoup de participants à faire cette jonction. C'est qu'au fond l'accès aux nouvelles technologies est une forme d'accès à la bibliothèque, si je peux dire. Je ne pense pas ici seulement à l'informatisation des services de prêts ou de gestion des documents d'une bibliothèque; je pense à l'utilisation. Et on le voit assez chez nos propres jeunes – je peux en parler d'expérience – un CD-ROM, des consultations télématiques ou un livre, ça fait partie du même réseau de lieux où il y a du savoir. C'est pour cela que les discussions concernant les bibliothèques et les jonctions avec la Culture, où se trouve maintenant le Secrétariat de l'autoroute de l'information, sont très, très liées à ce à quoi nous réfléchissons concernant les nouvelles technologies.

M. Charbonneau (Bourassa): Ça a beaucoup changé depuis Sénèque.

M. Lucier (Pierre): Depuis Sénèque, oui, bien sûr, bien sûr.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, qui sera suivi par la députée de Terrebonne. Et je pense que ce sera les deux dernières interventions que nous prendrons avant la pause.


Dernière école de quartier ou de village

M. Ouimet: Merci. J'aimerais aborder rapidement, parce qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps, la question des petites écoles de village ou des dernières écoles de quartier. Avez-vous des groupes de travail qui se penchent sur la problématique au niveau du ministère? Est-ce que vous privilégiez certaines formules? Quelle est l'évaluation que vous faites, à ce moment-ci, des deux projets mis de l'avant par l'ancien ministre de l'Éducation, soit Lefebvre et Saint-Lucien? Est-ce que ce sont des expériences concluantes? Est-ce que vous pensez que c'est une voie à suivre?

M. Lucier (Pierre): Je vais répondre à la première partie de votre question concernant les travaux qui se conduisent. Il n'y a pas de travaux sur une politique de petites écoles. Le choix ministériel était clair et explicite; il s'agissait d'y aller de manière pragmatique et de voir concrètement, avec des communautés qui voulaient garder leur école, ce qu'elles étaient prêtes à faire, ce qu'elles étaient prêtes à bâtir ensemble, avec quels partenaires. Se sont dessinés ainsi quatre modèles dont on a parlé plus, quatre cas dont on a parlé plus: Batiscan, Jonquière, Lefebvre, Saint-Lucien, qui sont des formules différentes dans chacun des cas.

(17 h 50)

Il y a deux écoles du ministre, dont une a des relations avec sa commission scolaire. Dans les deux autres cas, les commissions scolaires ont rouvert les écoles. Je les ai vues d'ailleurs, je suis allé personnellement dans ces endroits-là. Ce qui était explicitement voulu par le ministre, c'était donc d'enclencher un mouvement et de voir quelles étaient les possibilités locales et régionales d'une prise en charge par les différents partenaires. Et la conviction publiquement dite du ministre de l'époque, c'était de procéder ainsi, pragmatiquement, visuellement, si je peux dire, sur des beaux cas et, donc, d'enclencher ainsi un mouvement.

Alors, on observe – effectivement, ce sont des faits – que, sans avoir eu besoin, si je peux dire, d'énoncer une politique sur la dernière école de quartier ou de village, il y a eu peu de fermetures depuis ou, en tout cas, s'il y en a eu, c'est avec l'accord des parents et des communautés. Donc, à ma connaissance, en tout cas, il n'y a pas eu de mise en place de structures pour élaborer une politique écrite ou normée, mais il y a eu, je dirais, un discours politique clair et des exemples visibles, clairs, de modèles qui consistaient à dire, finalement... Si on les avait exprimés dans des énoncés, il aurait fallu dire: Bien, on ne ferme pas une école quand les gens ne veulent pas qu'on la ferme.

Maintenant, il faut aussi que les communautés fassent leur part, s'engagent et se concertent, que la municipalité fasse sa part, que d'autres instances fassent leur part, que les parents eux-mêmes fassent leur part. Alors, ça a été ça, la perspective. Je vous décris les choses comme je les comprends et comme je les vois.

M. Ouimet: Sentez-vous qu'il y a un certain avenir de ce côté-là? Parce qu'un peu plus tôt on parlait de l'autonomie des écoles et on sait qu'un des facteurs importants au niveau de ce qu'on qualifierait d'être une bonne école, c'est l'école qui a le plus d'autonomie possible.

M. Lucier (Pierre): Ce qui m'apparaît le plus...

M. Ouimet: Et ça a fait l'objet de plusieurs études, comme vous le disiez tantôt, assez constantes depuis les 15 dernières années. Dans le cadre des états généraux, on relève davantage la lourdeur, la bureaucratie, le fait que les décisions se prennent loin des lieux d'action. Peut-être l'ancien ministre avait-il une piste intéressante lorsqu'il a créé deux modèles, deux écoles dites du ministre, qui ont pleine et entière autonomie, qui peuvent engager leur direction d'école, qui peuvent engager leurs enseignants, etc. À ce qu'on me dit également, les résultats scolaires sont très probants, ça va très bien. Sentez-vous qu'il y a une voie d'avenir dans cette direction-là?

M. Lucier (Pierre): Je ne saurais pas dire. Comment dire? Voici un type d'écoles... Quand je parlais, tantôt, d'autonomie plus grande de l'école, je ne pensais pas nécessairement à une petite école. Il y a une autre composante dans le décor. Je pense qu'il y a un enseignement, en tout cas, que nous pouvons aisément tirer de ça, c'est qu'on est obligés de confesser les uns les autres qu'il y a beaucoup de nos encadrements et de nos beaux principes qui ne réussissent pas, semble-t-il, à satisfaire les besoins de certaines communautés. Moi, j'ai entendu, de mes oreilles, des gens dire: Écoutez, vous nous tenez un discours de meilleure qualité de services et tout ça, mais on vous dit que, nous, notre priorité, ce n'est pas ça, puis qu'on veut nos enfants ici et qu'on veut s'en occuper. Je l'ai entendu. Alors, quand je reviens de là – et je l'ai dit d'ailleurs aux gens des commissions scolaires en public – on est obligés de prendre acte les uns les autres que l'ensemble des points de repère que nous avons bâtis ensemble frappe un noeud dans certains cas, et peut-être que ça pose des questions sur notre manière d'encadrer les choses et de faire les choses. Je pense qu'on peut dire ça.

Quel est l'avenir spécifique de ces cas particuliers? Ça, c'est une autre question. Je suis incapable de le dire. Ce sont des cas expérimentaux, si je puis dire, dans le cas des écoles du ministre; donc, il y aura des évaluations systématiques. Ce sont des expériences encore jeunes. Je suis incapable de vous dire quel en est l'avenir. Mais, derrière ces phénomènes spécifiques, précis, il y a sûrement des enseignements sur des vagues de fond, qui nous obligent à nous interroger, en tout cas, sur l'ensemble des mécaniques que nous avons prévues pour faire les choses.

M. Ouimet: Un dernier commentaire. Le décret ministériel prévoyait, je pense, une période de deux ans après laquelle vous feriez l'évaluation. Indépendamment du départ de l'ancien ministre, vous maintenez toujours cette orientation-là, de faire un bilan de la situation après deux ans pour voir si c'est concluant?

M. Lucier (Pierre): Un décret n'est pas lié à une personne. C'est un décret du gouvernement. L'État poursuit ses choses. À moins d'un changement de décret, le décret est toujours bon. Donc, ça va se passer comme ça à moins qu'il y ait un nouveau décret.

M. Ouimet: Les priorités changent également au sein d'un ministère, là, parfois. On sait ça aussi.

M. Lucier (Pierre): Oui, oui, mais...

M. Ouimet: Vous avez l'intention de...

M. Lucier (Pierre): Bien, écoutez, tant que le décret décrète, nous allons faire ce qu'il y a dedans.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Mme la députée de Terrebonne.


Politique de la petite enfance

Mme Caron: Merci, M. le Président. Il m'apparaît difficile de parler d'égalité des chances au niveau de l'enseignement primaire, puis des répercussions évidemment au niveau secondaire, puis de prévention du décrochage scolaire si on ne parle pas d'une politique de la petite enfance. Dans le rapport Bouchard, «Un Québec fou de ses enfants», il y avait d'excellentes pistes à ce niveau-là. Dans l'«Exposé de la situation» sur les états généraux sur l'éducation, le chapitre de l'accessibilité et de la réussite nous fait aussi un état de la situation et nous démontre qu'il est un petit peu difficile au niveau d'une politique de la petite enfance de trouver un chef de file. Il y a certains tiraillements entre les services sociaux, les services de garde, le ministère de l'Éducation. Il y a le milieu communautaire, le milieu municipal aussi qui peuvent être impliqués.

Au ministère, présentement, est-ce qu'il y a des études de prêtes sur une politique de la petite enfance? Est-ce que le ministère de l'Éducation serait prêt à être chef de file d'une politique de la petite enfance? Et où en sont les réflexions là-dessus?

M. Lucier (Pierre): Je vous dirai que, de manière générale, la petite enfance, c'est devenu une préoccupation vivante dans un ministère comme le nôtre et dans l'ensemble de la société, et incontournable. Vous parliez d'inégalité des chances. C'est évident, et c'est un des constats les plus troublants, nous observons qu'à l'arrivée à l'école les enfants sont déjà dans des situations inégalitaires absolument troublantes quant à leur développement personnel. Alors, les savants nous disent qu'il n'est pas rare de trouver des décalages de deux ans, déjà. C'est énorme. Et pour toutes sortes de raisons; on n'a pas besoin de s'étendre trop là-dessus, bon, les enfants ne vivent plus dans les contextes où ils vivaient. On observe aussi dans beaucoup de pays avancés une recrudescence de l'intérêt pour la petite enfance et il se trouve des États pour investir là.

Là se pose une deuxième série de questions, en un sens, plus philosophiques. Sous quel angle on va s'intéresser à la petite enfance? Vous le savez, il y a des approches qui sont plus ou moins éducatives, plus ou moins sociales, plus ou moins même condition féminine. Vous savez que, quand on observe la trajectoire du dossier de la petite enfance, des services de garde ou de ces instances-là dans l'histoire gouvernementale des 10, 15 dernières années, on s'aperçoit qu'il y a des migrations. Mais je ne suis pas sûr que la collectivité ait fait le choix, ni que les gouvernements aient fait le choix que ce sera une approche éducative. Ça, nous ne pouvons pas... Vous comprenez aisément que nous y serions sympathiques, mais c'est un choix qui ne relève pas du ministère de l'Éducation. Il y a un choix de société, là. Parce que, selon que c'est plus ou moins éducatif comme tangente, ce sera plus ou moins axé sur les opportunités de développement de l'enfant ou l'accommodement des parents, ce qui n'est pas la même chose.

Alors, jusqu'ici, je crois que le choix est resté hésitant. Il devra être fait d'une manière ou de l'autre – d'ailleurs, il n'est peut-être pas à trancher au couteau – mais il est sûr que nous devrons nous interroger sur le type de préscolaire que nous avons actuellement. Est-il assez préscolaire, justement? Est-il assez long? Vous savez qu'il y a des pays qui s'occupent des enfants dans le système éducatif dès qu'ils sont propres – et ils ont même trois niveaux de maternelle – et qu'ils arrivent en cours préparatoire, c'est-à-dire l'équivalent de notre première année, en sachant déjà un peu lire. Ce sont des choix de société. Et le choix que nous avons fait ici, c'était, un peu sur la pointe des pieds, d'avoir un préscolaire non obligatoire et à demi-temps. Nous avons de la maternelle quatre ans dans un certain nombre de cas et nous avons aussi des services de garderie dans les écoles, on en a 800.

(18 heures)

Alors, il est évident qu'on sent une espèce d'effervescence et de brassage des idées autour de ça. Il y a une prise de conscience collective, il n'y a aucun doute. Mais je maintiens qu'il y aura des choix à faire sur la nature des services et, conséquemment, sur les leaderships qui pourront être pris. On imagine que, si c'est éducatif, ce sera plus près du ministère de l'Éducation. Maintenant, là aussi, est-ce que nous avons comme seul modèle de développement de services les modèles de développement que nous avons utilisés pour développer l'école primaire et secondaire? Si tel est le cas, on parle de centaines de millions. Est-ce qu'il y a d'autres modèles? Est-ce qu'il y a des jonctions de modèles? C'est sûr que, si on prend la moulinette scolaire au sens strict comme nous l'avons bâtie, probablement elle nous coûtera plus cher que ce que nous pouvons nous payer. Mais il s'agit de savoir comment aménager ça. Mais, sur l'opportunité, la légitimité et l'urgence de l'enjeu éducatif, vous ne trouverez dans notre ministère que des gens convaincus que c'est un rendez-vous.

Mme Caron: Merci.

Le Président (M. Facal): Nous allons donc ajourner nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

(Reprise à 20 h 6)

Le Président (M. Facal): Je vous propose de reprendre nos travaux. J'espère que cette pause a fait du bien à tout le monde. Il nous reste deux heures à faire que nous avions décidé de consacrer aux niveaux collégial et universitaire. Qui veut débuter? M. le député de Verdun. Nous n'en attendions pas moins de vous.

Une voix: Comme à la petite école.


Niveau collégial

M. Gautrin: Avec la discipline qui est la mienne, M. le Président, j'aimerais commencer à questionner le sous-ministre, tout en concevant que, dans cette partie de questionnement, je suis parfaitement conscient des liens différents qui existent entre le ministère et les organismes du réseau dans ce cadre-là.


Effets des compressions budgétaires dans le réseau

Ma première question va être strictement au niveau de l'information. Lorsque cette commission a rencontré votre ministre dans la période des crédits, nous avions énormément de questionnements sur les effets des coupures que vous aviez dans l'enveloppe budgétaire, des coupures que vous faisiez dans les paiements de transfert au réseau des cégeps. Nous appréhendions, du moins de la part de l'opposition, qu'il y aurait des effets très nocifs par cette diminution de budget dans l'enveloppe des paiements de transfert aux cégeps.

Vous avez une position absolument privilégiée d'observateur de ce qui se passe dans le réseau collégial. Alors, ma question est la suivante: Vous, comme observateur de ce qui se passe dans le réseau collégial, qu'est-ce que vous avez remarqué comme effets des compressions budgétaires dans le réseau collégial cette année? Je suis strictement sur le niveau administratif. Je ne vous pose pas une question sur le bien-fondé ou non des compressions. Mais il y a eu des compressions dans l'enveloppe, la dernière fois, et ça a eu quoi comme effets dans le réseau?

M. Lucier (Pierre): Je ne pourrais pas répondre directement à votre question, sinon à partir d'impressions sur lesquelles je préférerais...

M. Gautrin: Mais vous avez quand même des indicateurs périodiques qui vous sont donnés.

M. Lucier (Pierre): Bon, alors, justement, sur les...

M. Gautrin: Comme sous-ministre, vous recevez...

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Gautrin: ...périodiquement des rapports et des indicateurs de ce qui se passe dans le réseau des cégeps.

M. Lucier (Pierre): Non. Nous sommes encore un peu tôt dans l'année pour avoir tous les instruments chiffrés de ce qui s'est passé, comme aussi d'ailleurs sur des effets plus structurants. C'est trop tôt, en février, pour savoir cela. Il y a, par contre, des données qui ne trompent pas, enfin, que nous savions à l'avance. C'est sûr que ces coupures-là n'ont pas eu d'effets sur le corps enseignant comme tel. Donc, ce n'est pas dans l'enseignement comme tel que ça a coupé. On savait à l'avance que la pression se ferait dans les autres coûts et autres personnels. Pour mesurer l'effet cumulatif ou l'effet total de cette ponction-là, nous n'avons pas, actuellement, au début de février, d'instruments, mais nous savons que ça va jouer dans ces paramètres-là autres que l'enseignement comme tel.

(20 h 10)

M. Gautrin: Pour le bénéfice de la commission, lorsque vous aurez des informations plus complètes, est-ce qu'il serait concevable que vous les transmettiez, sous forme succincte, bien sûr, et en respectant les critères de confidentialité que je respecte, à la commission? Vous comprenez à quel point nous sommes préoccupés par ces compressions. Vous êtes capable de nous les transmettre?

M. Lucier (Pierre): Écoutez, nous faisons toujours l'analyse détaillée des états financiers quand ils sont disponibles...

M. Gautrin: Absolument, oui.

M. Lucier (Pierre): ...et c'est là qu'on peut voir certains mouvements de fonds. Il y a des choses plus qualitatives qu'on ne peut pas voir, sinon par des récits, par des contacts plus informels et notre circulation dans les réseaux.

M. Gautrin: Je comprends bien ça aussi. Nous aussi, on a nos réseaux d'information, nos collègues ministériels aussi, mais il est important d'avoir une vision plus objective que ce qu'on pourrait avoir par ouï-dire. Je pense que c'est important pour nous de l'avoir comme information.

M. Lucier (Pierre): Il y aura différents indices, notamment l'évolution des soldes de fonds ou, éventuellement, des situations proches de la situation déficitaire. Dans le domaine, comme vous dites, plus qualitatif, ce serait plus difficile d'avoir des données. Mais, de toute façon, en début de février, c'est trop tôt.

M. Gautrin: Toujours sur cette question budgétaire, les médias nous ont fait état d'une ponction supplémentaire – et je voudrais savoir si c'est exact, parce que ce que disent les médias n'est pas nécessairement... – dans l'enveloppe des cégeps de 28 000 000 $ qui auraient été affectés au développement d'un cégep dans l'ouest de Montréal et d'une ponction de 8 000 000 $ qui seraient affectés pour rendre public, disons, le cégep de l'Assomption qui était un cégep privé jusqu'à maintenant. Est-ce que ceci correspond à l'information qui est circulée ou pas?

M. Lucier (Pierre): Non. Je pense que nous sommes dans la fiction, là.

M. Gautrin: On est dans la fiction à ce niveau-là.

M. Lucier (Pierre): Dans les deux cas, il n'y a pas un sou de dégagé ou pratiquement pas et, de toute façon, il s'agirait de montants au service de la dette. Alors, il faudrait traduire ça en taux d'intérêt sur 25 ans.

M. Gautrin: Donc, les annonces qui ont été faites par le gouvernement n'ont pas d'effets en termes de compressions dans la masse, puisque vous fonctionnez dans un budget fermé, ont eu peu d'effets sur les paiements de transfert aux autres cégeps.

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'on en n'est pas à l'étape des déboursés.

M. Gautrin: Je comprends.

M. Lucier (Pierre): Plutôt loin, même.

M. Gautrin: Simplement, M. le Président, si vous me permettez, il y a une étude qui a été faite, qui n'a pas été rendue publique à ce que je sache, en particulier dans le cas du cégep de l'Assomption, sur les effets de débordement que – je cherche le mot pour rendre public, le contraire de la privatisation – l'antiprivatisation du cégep de l'Assomption pourrait avoir sur les cégeps avoisinants, à savoir celui de Joliette, celui de Saint-Jérôme et celui de Sainte-Thérèse aussi, je pense. Est-ce que cette étude est publique ou est-ce qu'elle peut être disponible? Si elle est disponible, j'aimerais l'avoir.

M. Lucier (Pierre): Écoutez, il y a eu une étude d'impact, effectivement. Elle est de quel mois?

Une voix: L'hiver dernier.

M. Lucier (Pierre): Entre le mois de décembre et le mois de mars.

Une voix: On l'a eue à l'automne.

M. Lucier (Pierre): Bref, il y a eu une étude qui était destinée, en fait, au ministre. Elle n'a pas été rendue formellement publique, mais nous l'avons reçue de multiples sources par le biais des communautés de Lanaudière sud. Alors, nous ne pouvons pas, nous, la rendre publique, mais j'ai l'impression que c'est public, elle a circulé.

M. Gautrin: Est-ce que ce serait possible de vous transmettre la demande, quitte à ce que vous vérifiiez avec votre ministre si c'était possible de la rendre publique, le cas échéant?

M. Lucier (Pierre): Je pense que oui. Je pense que nous ne pourrions pas...

M. Gautrin: Je comprends que vous êtes tenu au caractère de confidentialité aujourd'hui, mais, si vous pouviez rendre publique cette étude de débordement éventuel sur les cégeps avoisinants, ce serait utile pour les membres de la commission, j'imagine.

M. Lucier (Pierre): En tout cas, si elle n'est pas publique, elle circule beaucoup.

M. Gautrin: Je sais qu'elle circule beaucoup, mais, entre un document...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non, mais vous comprenez bien que j'essaie de ne pas déborder mon mandat, de ne pas vous poser de questions sur un document que je peux avoir en ma possession, mais sur lequel je ne peux pas vous poser de questions, parce que je ne suis pas censé l'avoir.

M. Lucier (Pierre): Ce n'est pas pour pouvoir le lire, là.

M. Gautrin: Non, non, ce n'est pas pour pouvoir le lire, parce que je l'ai lu, mais c'est pour pouvoir vous questionner...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...sur le document.

Une voix: Pour comparer le texte?

M. Gautrin: Non, non, ce n'est pas ça. Je pense que j'essaie de respecter le caractère administratif de nos rapports actuellement.

M. Lucier (Pierre): Alors, s'il y a une demande à cet effet-là, ce sera traité conformément à la loi 65.

M. Gautrin: Ce qui nous permettrait, après, de pouvoir en parler.


Centres collégiaux de transfert technologique

Toujours en restant dans le domaine des cégeps, monsieur, dans le document ou le rapport que vous avez fait – moi, j'ai lu avec intérêt votre rapport annuel 1994-1995 – vous faites état du comité de suivi sur les centres collégiaux de transfert technologique. Vous savez à quel point, du moins de ce côté-ci de la Chambre, on est intéressés – page 37, deuxième colonne, en bas – à ce qui se passe dans les centres de transfert technologique et à l'expérience des centres de transfert technologique. Si je comprends bien, vous avez fait une évaluation ou l'évaluation était en cours. Mais, au moment où vous faites votre rapport... J'imagine qu'il y a un délai entre le moment où vous faites votre rapport et la période d'aujourd'hui; donc, le rapport devrait être terminé.

Quelle est l'évaluation que vous faites, comme sous-ministre, actuellement, de ce projet? Quels étaient les objectifs du projet lorsqu'on a créé les centres de transfert technologique? Et est-ce qu'on a atteint les objectifs que nous nous étions fixés au moment où on a créé les centres de transfert technologique? Autrement dit, l'évaluation a-t-elle justifié les investissements que nous avons mis, enfin, que collectivement la collectivité a mis dans ces centres de transfert là?

M. Lucier (Pierre): J'ai lu les rapports d'évaluation. C'est une entreprise assez complexe. Il y a un rapport d'évaluation de type quantitatif; il y en a une autre de type qualitatif. Dans les deux cas, les conclusions – c'est presque gênant – en fait, c'est extrêmement positif. Sur le plan quantitatif... Évidemment, si les choses vous intéressent, j'imagine que ce n'est pas des documents ultrasecrets, là, ce n'est pas...

M. Gautrin: Est-ce que ça serait possible – je suis sûr qu'il y a des collègues qui seraient intéressés, de la part des ministériels aussi – de nous transmettre l'évaluation des centres de transfert technologique?

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'il n'y a pas de problème là-dessus.

M. Gautrin: M. le Président, moi, je souhaiterais que nous les recevions.

M. Lucier (Pierre): Sur le plan qualitatif, les conclusions sont à l'effet que les objectifs visés, autant du côté de la mise à la disposition des entreprises de ressources et du côté des retombées sur la formation technique... Les résultats sont si intéressants qu'il faut songer évidemment à poursuivre l'expérience, voire à l'étendre. Et, à la suite de cela, nous sommes pratiquement prêts à faire à notre ministre des recommandations sur le suivi de ce programme-là et sur les ajustements qui sont dans les rapports d'évaluation et qui sont suggérés, aussi, pour sa poursuite.

M. Gautrin: Vous comprenez que nous sommes très intéressés par cette question-là.


Mission de la Direction générale de l'enseignement collégial

Toujours dans le réseau collégial, je veux revenir, donc, à votre rapport, page 14, sur la mission de la Direction générale de l'enseignement collégial. Vous dites: «Élabore les programmes d'études préuniversitaires et les épreuves uniques.» Alors, à moins que je ne connaisse pas ça, je pensais que c'était chaque cégep qui élaborait son programme d'études à l'intérieur des grandes balises qui étaient fixées, c'est-à-dire qui étaient déterminées par le régime pédagogique. Est-ce que maintenant, actuellement, le ministère comme tel élabore les programmes d'études préuniversitaires? Ça m'a semblé bizarre quand j'ai lu votre rapport 1994-1995. Je croyais que, avec le changement de régime pédagogique dans les cégeps, ce n'était plus dans votre mission.

M. Lucier (Pierre): L'expression «élaborer des programmes d'études» doit être comprise selon les termes de la loi et du régime des études collégiales qui précisent que, dans le cas de ces programmes, c'est le ministre qui détermine les objectifs et les standards. Et, quant aux activités d'apprentissage, sauf dans les cours de formation commune et obligatoire, ce sont les collèges qui doivent préciser les activités d'apprentissage. Donc, c'est une activité à responsabilité partagée.

M. Gautrin: Donc, voir ça, ce n'était pas de penser que...

M. Lucier (Pierre): Non, non.

M. Gautrin: La responsabilité du collège reste encore entière. Ce n'est pas un changement...

M. Lucier (Pierre): Au contraire, non.

M. Gautrin: ...de politique que j'ai cru voir à l'intérieur de la lecture.

M. Lucier (Pierre): Non. Je pense même que l'expression «élabore des programmes d'études» est peut-être un reliquat d'un vocabulaire déjà tout doucement dépassé et qu'il aurait mieux valu dire, j'imagine... Je crois que, la prochaine fois, on pourrait dire que le ministère s'occupe des objectifs et des standards, et d'un certain nombre d'activités d'apprentissage. Mais ce sont les collèges qui, dans le cas des programmes universitaires, selon une certaine proportion qui est prévue, doivent délimiter eux-mêmes les activités d'apprentissage, tandis que, dans les programmes d'études techniques, en dehors du champ de formation obligatoire et générale, le ministère ne fait que définir les objectifs et les standards, mais pas les activités d'apprentissage.

(20 h 20)

Les épreuves ministérielles. La loi et le règlement spécifient que le ministre peut administrer des épreuves ministérielles dites uniques à propos des blocs où il définit lui-même les objectifs, les standards et les activités d'apprentissage, ce qui est le cas pour une partie de la langue d'enseignement, de la langue seconde, de la philosophie ou «humanities» et puis de l'éducation physique. Concrètement, il est, depuis plusieurs années, annoncé et prévu que la première cible comme épreuve ministérielle sera la langue d'enseignement et littérature. Cette épreuve-là sera destinée à remplacer l'actuel test de français et sera, en 1998, incluse dans les règles de sanction, de sorte qu'il y aura une exigence en langue maternelle et littérature incluse dans le D.E.C. Donc, le D.E.C. témoignera en même temps d'une réussite en langue maternelle et littérature. Et, quand la première année s'appliquera, ça sera au terme d'un long processus qui nous avait fait partir de tests multiples post-D.E.C. à un test unique intra-D.E.C.

M. Gautrin: Merci. Dans les mandats, toujours, de votre direction, la Direction générale de l'enseignement collégial, en dernier point, vous traitez les plaintes des individus et des organismes qui exigent une intervention du ministère. Est-ce que vous avez eu beaucoup de plaintes? Elles parlaient de quoi? C'était quoi, les plaintes que vous avez pu recevoir?

M. Lucier (Pierre): Je peux peut-être demander, avec la permission de M. le président...

M. Gautrin: Bien sûr.

M. Lucier (Pierre): ...à ma collègue de nous parler des plaintes.

M. Gautrin: Non, mais c'est quoi? Vous comprenez que, quand vous dites que vous traitez les plaintes, on s'est posé la question: C'était de quoi que le monde se plaignait?

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Il y a des plaintes qui nous parviennent des parents... Je me nomme Pauline Champoux-Lesage, je suis sous-ministre adjointe à l'enseignement collégial. Alors, les plaintes nous parviennent soit de parents d'élèves ou soit majoritairement d'étudiants qui, par exemple, dénoncent des comportements de collèges au moment de l'admission. On a eu des plaintes qui peuvent toucher la correction de certains examens, des mesures de discrimination qui seraient portées, là, à l'attention aussi de la Direction de l'enseignement collégial, par exemple, des gens...

M. Gautrin: Et quel suivi vous donnez à ces plaintes-là?

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Généralement, on vérifie la portée de la plainte, le bien-fondé de cette plainte-là, et on joue plus un rôle de médiateur, finalement, mais on n'intervient jamais directement pour régler le conflit. Donc, on établit le pouvoir respectif du collège ou les droits de l'élève. On fait des vérifications auprès des services juridiques, le cas échéant, et c'est davantage...

M. Gautrin: Mais vous n'intervenez pas. Parce que j'imagine que quelqu'un qui n'est pas heureux de sa note ou un truc comme ça, ça peut être une plainte qu'il peut porter.

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Non, à ce moment-là, on retourne toujours au collège, mais ça permet, finalement, de dénouer beaucoup de choses, d'éviter que... C'est un service qui est rendu, là, à la population en général. Et, aussi, des plaintes qui peuvent nous être acheminées quelquefois, ça peut toucher des écoles d'enseignement privées ou des trucs comme ça. Alors, on assure le suivi de ces plaintes-là.

M. Gautrin: Je vous remercie. M. le Président, peut-être qu'un autre collègue pourrait intervenir. J'ai encore beaucoup d'autres questions, mais je terminerai plus tard.

Le Président (M. Facal): Ha, ha, ha! M. le député de Maskinongé.


État des bibliothèques

M. Désilets: Avant la pause, le député de Bourassa nous avait entretenus ou avait posé quelques questions concernant les bibliothèques aux niveaux primaire et secondaire. Est-ce qu'on retrouve les mêmes créneaux ou les mêmes choses rendu au cégep, les mêmes ratios, les mêmes problèmes de peu d'investissements dans les réseaux de bibliothèques et la problématique des nouvelles technologies reliée?

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'on peut dire que les problèmes ne se posent pas exactement de la même manière. D'abord, on n'a pas affaire au même taux de dispersion et on a affaire à des bibliothèques dont le contenu est aussi dicté très directement par les programmes d'études, ce qui n'est pas le cas exactement dans une école de base, du moins une école primaire. Alors, je vous dirais, à l'oeil, à l'évidence que, quand on circule dans les bibliothèques des collèges, on n'a pas exactement le même sentiment de difficulté, voire de pénurie. Maintenant, dans le domaine des bibliothèques, je suis de ceux qui pensent que plus, c'est toujours mieux. Bon, alors, une bibliothèque, par définition, c'est quelque chose qui est le plus universel possible.

Mais, avant de laisser ma collègue peut-être répondre de manière plus spécifique à votre question, je pense qu'on ne peut pas faire le même type de constats. Les collèges sont quand même des maisons d'enseignement supérieur et la nature même de leur mission d'enseignement dans les programmes qu'ils ont à offrir exige plus directement, je dirais, des investissements et des ressources mises à la disposition des étudiants et des enseignants. Alors, ça ne se pose pas directement de la même manière, et on le voit quand on circule d'ailleurs. Maintenant, est-ce que...

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Je pense que, de manière générale, les fonds de bibliothèques sont relativement bien garnis. Les demandes qui nous sont acheminées sont davantage en vue d'augmenter les espaces, parce que les bibliothèques sont aussi des lieux de travail. Et ça, on y donne suite en fonction de la clientèle qui fréquente le cégep.

M. Désilets: Et le lien avec les nouvelles technologies, c'est la même chose?

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Oui. Bien, de manière générale, comme le soulignait M. Lucier, sauf peut-être au regard du préuniversitaire, dans la plupart des programmes techniques, les nouvelles technologies sont présentes dans tous les collèges. Ce n'est pas un problème de disponibilité. Il y a des problèmes, bien sûr, de mise à jour et de mise à niveau de l'ensemble du parc d'équipement informatique, mais il y a des provisions qui sont prévues pour assurer la qualité du parc informatique en tant que tel dans les collèges.

Le Président (M. Facal): M. le député de Lotbinière.


Approche par compétences

M. Paré: Oui. M. Lucier, est-ce qu'il est trop tôt pour qualifier l'expérience de l'approche par compétences? Ça a été décrié dans l'«Exposé de la situation» au niveau des états généraux par des administrateurs de collège et, surtout, des professeurs.

M. Lucier (Pierre): Écoutez, il y aurait beaucoup de choses à dire sur l'approche par compétences. Je ne veux pas me transformer en spécialiste de la chose, mais je voudrais m'en tenir à des lignes de fond. Au-delà de toutes les doctrines qu'on pourrait tenir sur le détail de la chose, il faut bien voir que le mouvement de la formation par compétences est une vague de fond, elle est mondiale. Elle consiste essentiellement en ceci: à détourner l'attention de ce que l'on doit enseigner vers ce que l'on doit apprendre. Je ne vous dis pas que ça s'oppose. Mais vous vous souviendrez d'une expression qui avait beaucoup cours à l'époque où je commençais à enseigner, il y a, hélas, déjà 30 ans, entre nous. Des gens disaient: Ah! Je n'ai pas eu le temps de voir mon programme ou j'ai tout vu mon programme. On voulait dire quoi? On voulait dire qu'on avait dit ce qu'on devait dire aux étudiants, on avait fait les travaux qu'il fallait.

L'approche par compétences consiste, au fond, à braquer les réflecteurs sur l'autre pôle et à s'interroger sur ce que l'étudiant doit acquérir, puis ce qu'il doit maîtriser comme compétences au terme du processus d'apprentissage. Il y avait déjà de ça dans la révolution de l'apprentissage par objectifs, par objectifs d'apprentissage. Mais il est évident qu'on a vu apparaître... Ça a commencé surtout dans les secteurs techniques en Amérique du Nord et, maintenant, c'est généralisé du côté de la formation générale, cette perspective, disons, d'un enseignement qui est centré sur les compétences que l'étudiant doit maîtriser.

Alors, le régime des études était assez discret là-dessus; il définissait les objectifs en disant: Ce sont des compétences, virgule, connaissances ou habiletés, virgule, signifiant bien là que la compétence comportait autant des éléments d'habiletés au sens strict de «skills» que de connaissances qu'il faut aussi maîtriser. Et le régime des études n'a pas proposé de catéchisme détaillé sur l'approche par compétences.

Mais on observe ceci, et je l'ai observé tout récemment au dernier congrès de l'Association pour le développement de la mesure en éducation: il y avait un des savants panélistes qui avait fait une recherche dans ERIC, vous savez, cette banque bibliographique nord-américaine en éducation qui est une des références mondiales. Il avait observé une émergence de toute la littérature sur les compétences, très nettement à la fin des années soixante-dix, début des années quatre-vingt, surtout dans le secteur technique, il avait vu tout à coup son expansion presque géométrique. Et il signalait amicalement aux chercheurs qui étaient là: Mesdames, messieurs, si vous cherchez des valeurs boursières à la hausse, de grâce, investissez de ce côté-là, l'avenir est là.

(20 h 30)

Alors, trêve d'anecdote, ce que je veux souligner, c'est que, derrière tous les débats qu'on peut entendre autour de la compétence, je pense qu'il faut se remettre en face de cette réalité de fond. Cette thèse-là, si je peux dire, le ministère, comme d'autres, l'a soutenue et la soutient. Cela signifie des exigences importantes de conversion dans les types d'enseignement et dans la manière de proposer les programmes. Tout ça ne va pas de soi. Je vais aller plus loin. Je vous dirais même qu'il a pu se trouver, à droite, à gauche, des gens qui se sont peut-être transformés en gourous du catéchisme des compétences et qui n'ont pas aidé la chose. C'est possible. Je ne l'écarte pas. Mais je peux vous dire que, du côté ministériel, je crois que nous n'avons jamais perdu le nord là-dessus pour nous centrer sur ce qu'il y a de fondamental dans cette révolution, qui est pédagogique, finalement, et didactique. Et nous ne pensons pas qu'il y ait là une mode; elle est trop fondamentale.

J'observe aussi que, dans toute la littérature nord-américaine concernant l'évaluation des étudiants, ce qui intéresse de plus en plus et les centres d'accréditation et d'évaluation et même les bailleurs de fonds, c'est ce que l'établissement réussit à donner de plus-value en termes de maîtrise des compétences chez les étudiants qu'il reçoit, non pas uniquement leur valeur à l'arrivée ou leur valeur à la sortie, mais la plus-value. Et elle est toujours axée sur le «student assessment». Donc, il faut témoigner de ce que l'étudiant a acquis. Alors, cette révolution-là, si je peux dire, elle est profondément dérangeante et tous ceux qui ont, d'une manière ou de l'autre, un jour enseigné savent ce que ça peut exiger de conversion d'approche. Il ne s'agit plus seulement de voir son programme; il faut s'assurer d'une démarche qui, au terme, permet aussi de vérifier si l'étudiant a acquis et s'il maîtrise les compétences qu'on visait pour lui et avec lui. Je pense que c'est ça qui est la base.

Alors, on peut interpréter de diverses façons, disons, les hésitations ou, dans certains cas, les oppositions. Elles peuvent porter ou bien, je dirais, sur des inflations verbales ou sémantiques, ou des hypersophistications de concepts pas toujours utiles. C'est possible. C'est possible qu'il y ait des gens qui en aient donné plus que le client en demandait. C'est possible. J'espère que nous ne sommes pas, quant à nous, tombés dans ce piège-là.

M. Paré: Ça nous apparaît évident au niveau de la formation technique et professionnelle, mais au niveau de la philosophie, exemple...

M. Lucier (Pierre): Bien, au niveau de la philosophie aussi, de la même manière, vous savez...

M. Paré: Mais c'est ça que je me demande: Est-ce que le réseau a bien compris ça? S'il le décrie, donc...

M. Lucier (Pierre): Bien, écoutez, c'est des choses qui sont trop fondamentales pour se régler en six mois ou un an.

M. Paré: Exactement.

M. Lucier (Pierre): On assiste à un apprivoisement. On assiste à une décantation aussi. Mais prenez l'exemple de la philosophie; vous me permettrez d'en parler, c'était mon métier.

M. Paré: Oui, bien sûr. C'est pour ça que j'en parle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): L'objectif pédagogique d'un prof de philo à ce niveau-là, c'est d'initier les gens à philosopher, pas à répéter ce que je leur raconte en classe. Il faut qu'ils posent le geste de philosopher. Donc, qu'est-ce que c'est que philosopher? Quel type d'analyse il y a là-dedans? De quoi on part? Comment on procède? Et de viser ça comme objectif et de vérifier ça à la fin, c'est-à-dire de voir comment l'étudiant est capable de problématiser une question, de l'analyser de manière conceptuelle, avec des liens logiques, c'est ça qui est le résultat. Ce n'est pas de savoir s'il a pu se souvenir de la date de naissance, très discutée d'ailleurs, de Thalès de Milet ou d'Isidore de Séville, c'est intéressant à d'autres égards, ou de connaître les trois éditions de la métaphysique de Kant.

Je pense que l'objectif, c'est qu'à la lumière de textes... On apprend à philosopher en fréquentant des philosophes. Donc, il faut fréquenter des maîtres. C'est difficile de philosopher sans un peu de grec, c'est-à-dire sans un peu de Platon, sans un peu de Socrate. C'est difficile, puis ça ne se limite pas à ça, Dieu m'en garde. Donc, il y a une initiation à des textes, il y a une fréquentation de maîtres. Mais le but, le résultat ultime, c'est que l'étudiant ait progressé dans sa capacité d'analyser des choses, donc d'être un petit peu plus capable de philosopher au terme qu'en commençant. C'est ça, l'approche par compétences. Alors, ça veut dire que, quand on parle, nous, d'objectifs, de standards, les objectifs sont formulés en termes de maîtrise de compétences à acquérir. Alors, ça veut dire qu'au terme, l'étudiant, il a quelque chose à réaliser. Ce n'est pas nécessairement un coup de marteau. C'est une écriture, c'est une analyse, ce que font les philosophes. Les philosophes, ils finissent toujours par mettre par écrit des choses; sinon, on n'en parle plus.

Mais quel est ce geste qui consiste à analyser une réalité, à profiter des écrits antérieurs, à les comparer? C'est une forme d'habileté, ça, «skill», hein, et ça se mesure. Ça se mesure. C'est plein de connaissances, mais ça se mesure. La capacité de raisonner de manière logique, ce n'est pas de pouvoir réciter les règles en baralipton ou les syllogismes en barbara, ou des axiomes de la logique boolienne. Il faut être capable de raisonner concrètement et de s'apercevoir que, quand on est dans une contradiction, il faut en sortir ou bien arrêter tout ça là. Donc, l'approche par compétences, elle est centrée sur la capacité que l'étudiant acquiert de poser ce geste intellectuel qui s'appelle philosophie.

M. Paré: Merci.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Je trouve très intéressante, M. le sous-ministre, votre définition de l'approche par compétences. Je vous avoue que j'en ai entendu à ce niveau-là de toutes les couleurs, puis je ne suis pas sûr que c'est bien compris dans le réseau. Vous devriez peut-être d'ailleurs entreprendre une tournée pour l'expliquer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Je ne sais pas si vous avez les budgets. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Ceci étant dit, vous avez terminé en parlant de la mesure, hein. Il faut aussi savoir mesurer. Et là – ça fait déjà 18 mois que j'ai quitté – on avait prévu deux formes de mesures, si ma mémoire est bonne, l'examen synthèse et une activité de fusion...

M. Lucier (Pierre): D'intégration.

M. Kieffer: ...d'intégration. C'est ça, d'intégration. Qu'en est-il?

M. Lucier (Pierre): Bien, les étudiants qui sont dans le cycle du nouveau régime sont en deuxième année. Donc, les premières cohortes vivent leur quatrième trimestre et, donc, l'épreuve synthèse n'est pas obligatoire cette année, mais il y a, dans beaucoup de cas, des activités d'intégration qui se font. Alors, là, il est trop tôt pour observer comment ça se fait puisqu'on y arrive.

M. Kieffer: Est-ce que les paramètres qui devaient guider cette fameuse activité d'intégration ont été précisés? Parce que, si je me rappelle, c'était flou, là. On parlait de deux cours ou possiblement de trois cours où l'étudiant aurait à faire un exercice qui allait aller chercher la matière de deux ou trois disciplines différentes...

M. Lucier (Pierre): Bon, écoutez, l'épreuve...

M. Kieffer: ...et que ça allait être fait en «joint teaching». En tout cas, il y avait toutes sortes de...

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'on va avoir toutes sortes de modèles, effectivement, mais l'idée de fond de l'épreuve synthèse, elle est simple. Elle n'est pas sans lien avec ce que nous appelions il n'y a pas si longtemps des «comprehensives». Autrement dit, pour s'assurer que le programme soit plus que l'addition de cours ou d'activités, mais qu'il y ait vraiment une poursuite intégrée et cohérente d'objectifs communs à toutes les activités, bien, il est prévu cet exercice synthèse qui va prendre différentes formes, mais qui oblige une reprise de l'ensemble des objectifs du programme par les étudiants.

Alors, ce n'est pas, je dirais, une invention récente, hein? Il y a une longue tradition d'examens dits de synthèse ou d'activités de synthèse dans une tradition académique très éprouvée et elle a été introduite au collégial pour stimuler l'approche-programme et stimuler l'intégration de l'acquisition des connaissances par les étudiants. Quelle forme elle va prendre? C'est le collège, d'après le régime, qui est responsable de l'élaboration et de la passation de l'épreuve synthèse.

(20 h 40)

M. Kieffer: C'est la même chose pour l'activité d'intégration aussi.

M. Lucier (Pierre): Oui, bien, l'activité d'intégration – comment je dirais – c'est l'activité qui sous-tend l'épreuve comme telle.

M. Kieffer: Les profs, ils réagissent comment? Parce que, au début, ils étaient très récalcitrants.

M. Lucier (Pierre): Écoutez, ce n'est pas l'introduction de changements qui se font aisément, ce n'est pas non plus des concepts ou des pratiques qui sont familiers à tout le monde. Nous observons, nous, une pénétration normale et, je dirais, assez sûre et assez irréversible de ce genre de réalité là. Comment pourrait-on imaginer qu'à moyen terme les enseignants refusent de penser programme et refusent de penser intégration des apprentissages par les étudiants? C'est impossible. Mais qu'on assiste à des réticences parce qu'il y a des habitudes qui sont changées... Ça suppose beaucoup de choses, une approche-programme et une activité d'intégration.

M. Kieffer: Entre autres, des départements.

M. Lucier (Pierre): Bien oui, mais justement le département n'est pas axé autour du programme; il est axé autour de la discipline.

M. Kieffer: Voilà.

M. Lucier (Pierre): Donc, ça oblige les collèges, et les enseignants par conséquent, à s'organiser, à trouver les manières de s'organiser autour de la réalité-programme. Il y a d'autres instruments, aussi, dans le régime des études qui vont stimuler cela, par exemple, le fait que tous les collèges doivent avoir leur politique d'évaluation de programmes. Ce n'est pas une petite chose. Et la Commission des études doit se pencher là-dessus. La même chose quand la Commission d'évaluation vient évaluer, examiner la politique d'évaluation de programmes ou des programmes en particulier, bien, elle ne peut pas faire autrement que de stimuler et d'inciter les gens à adopter l'approche-programme. Mais ce n'est pas des changements qui peuvent se faire rapidement. Mais je serais porté à faire une énorme distinction entre, disons, des réalités de fond et la réelle intégration pas toujours facile des choses et puis, bien, certains discours à l'emporte-pièce qui, à force d'être caricaturaux, finissent par ne même pas être drôles et surtout pas vrais.

M. Kieffer: D'accord.

M. Lucier (Pierre): Alors, écoutez, sur l'approche par compétences, on peut rire, on peut dire toutes sortes de choses, mais il y a un seuil où on tomberait dans le ridicule et dans l'ignorance crasse. Je ne pense pas que beaucoup le franchissent.

M. Kieffer: Non.

Le Président (M. Facal): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Toujours sur...

M. Lucier (Pierre): Excusez-moi, l'approche par compétences, ce n'est pas une invention de la Direction de l'enseignement collégial ou de ses dirigeants; c'est un mouvement de fond en Occident, qui nous a précédés et qui devrait nous survivre.


Introduction de la dimension internationale dans la formation

M. Gautrin: Toujours sur la question de l'enseignement de niveau collégial, j'aurais deux questions qui sont reliées à votre rapport annuel, M. le sous-ministre. En page 38, quand vous utilisez «la coopération», vous avez une phrase que je n'ai pas comprise et que je voudrais comprendre: «Le ministère a poursuivi ses efforts afin de contribuer à introduire la dimension internationale dans la formation et dans les politiques institutionnelles.» C'est quoi, ça? Page 38, la coopération. Après, on dit: «Il collabore – à cette fin – avec le Secrétariat.» Mais il fait quoi, là?

M. Lucier (Pierre): Les collèges sont...

M. Gautrin: Non, c'est le ministère, là: «Le ministère a poursuivi...»

M. Lucier (Pierre): Oui, «afin de contribuer à introduire». Oui, effectivement, nous soutenons les collèges dans leurs efforts de coopération internationale. Vous savez, les collèges sont de plus en plus engagés dans des travaux de réalisation internationale.

M. Gautrin: Ça, je comprends ça, mais ce n'est pas ce que ça dit, votre phrase, là. Refaisons un peu de philosophie ensemble, si vous voulez: «Le ministère a poursuivi ses efforts afin de contribuer à introduire la dimension internationale dans la formation.»

M. Lucier (Pierre): Oui. Effectivement, sous l'influence, je dirais, de ces engagements internationaux, si vous consultez les annuaires de chacun des collèges, vous avez de plus en plus de collèges qui ont des dimensions internationales dans certains programmes, dans les parties qui les touchent de plus près, et, dans beaucoup de secteurs, c'est, effectivement, une dimension importante, dans une perspective de mondialisation.

M. Gautrin: Vous avez un exemple à me donner, concret? Ce serait quoi, ça?

M. Lucier (Pierre): Bien, on a le cas... Je voyais encore, la semaine dernière, un profil de sciences humaines avec, je dirais... Ils appelaient ça «option» ou «profil international», c'est-à-dire qu'il y avait des activités autour. Par exemple, vous ne faites pas seulement de l'économie, mais vous faites de l'économie dans une perspective mondiale, et ainsi de suite. Donc, ça peut toucher les programmes de formation. C'est la même chose dans le cas de la formation technique. Alors, peut-être que la formulation ici est...

M. Gautrin: Qu'est-ce qu'a fait le Secrétariat aux affaires intergouvernementales là-dedans? Puisque vous avez collaboré avec le Secrétariat.

M. Lucier (Pierre): Oui, bien, c'est parce qu'il y a des échanges entre les provinces canadiennes, il y a des ententes. C'est le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes qui les gère, et nous sommes partie prenante quand il s'agit de nos établissements d'enseignement.

M. Gautrin: Est-ce que vous seriez capables de me... Est-ce que vous avez un rapport sur ce qui s'est passé réellement, sur l'état de cette collaboration?

M. Lucier (Pierre): Tout ce qui concerne les ententes de coopération donne lieu à des rapports.

M. Gautrin: Ça serait concevable de les... si ce n'est pas trop volumineux.

M. Lucier (Pierre): On mettra ça dans le wagon.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Merci. Ne vous inquiétez pas, je digère. Non, mais n'ayez crainte, j'ai une grande possibilité de digestion.

M. Lucier (Pierre): Éventuellement, nous pourrons faire la transmission Internet.

M. Gautrin: Ah oui! mais je n'ai pas de problème, moi, sur ça.

M. Kieffer: M. le Président, nous ne sommes pas nécessairement tous preneurs des demandes du député de Verdun.

M. Gautrin: Non, non, mais vous n'êtes pas obligés de les prendre, si vous voulez.

Le Président (M. Facal): Vous ne lirez pas ce que le wagon contiendra, tout simplement, là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non, mais ça... J'ai une deuxième, toujours...

Une voix: Un rapport synthèse, là.


Réduction des normes d'admission au cégep

M. Gautrin: M. le Président, donc, après avoir touché à la question, il y a une phrase qui m'a inquiété, à ce moment-là: «Afin de faciliter l'accès aux études collégiales, divers travaux ont été menés pour réduire – c'est le mot «réduire» qui m'a inquiété – les préalables, tant au secteur technique qu'au secteur préuniversitaire.» Alors, je comprends: «Afin de faciliter l'accès aux études collégiales, divers travaux ont été menés pour réduire les préalables, tant au secteur technique qu'au secteur préuniversitaire.» C'est quoi que vous avez fait? Autrement dit, vous êtes en train de me dire que vous baissez...

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Gautrin: ...les normes d'admission au cégep, c'est ça que vous êtes en train de me dire...

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Gautrin: ...de manière à faciliter l'accès. Je comprends que, si on baisse les normes d'admission, on facilite l'accès.

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Gautrin: Mais je ne suis pas sûr que ce soit l'objectif que vous aviez énoncé...

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Gautrin: ...puis que ce soit l'objectif qu'on doit poursuivre.

M. Lucier (Pierre): Non.

M. Gautrin: Alors, ça veut dire quoi, ce que vous avez écrit?

M. Lucier (Pierre): Le dossier des préalables... Il ne s'agit pas ici des conditions générales d'entrée. Vous savez que, quand on parle du dossier des préalables, autant pour l'université que pour le collège, on désigne des cours spécifiques de l'ordre d'enseignement précédent qui doivent être suivis pour permettre à l'étudiant de poursuivre dans tel ou tel programme.

M. Gautrin: C'est exact.

M. Lucier (Pierre): C'est une manière, je vous dirai, discutable de faire les choses, mais qui n'est pas non plus sans fondement.

M. Gautrin: Bien, vous savez, les disciplines verticales, c'est tout à fait normal.

M. Lucier (Pierre): Certaines sont plus linéaires que d'autres, effectivement.

M. Gautrin: Verticales.

M. Lucier (Pierre): Il faut savoir aussi qu'historiquement la détermination de ces préalables n'a pas toujours servi uniquement la linéarité ou la continuité des apprentissages, donc, elle n'a pas toujours pu être justifiée pleinement sur le plan pédagogique, mais elle a pu aussi servir d'instrument de sélection. Je vous l'affirme tout de go: On a pu observer certains programmes où on exigeait, par exemple, tel cours spécifique en mathématiques et la raison fondamentale, c'est que, pour une raison ou pour une autre, il y a des gens qui pensent que les mathématiques – vous m'excuserez de faire cette personnalisation – sont une discipline où se manifeste avec beaucoup de lumière...

M. Gautrin: Je pense qu'on ne peut pas faire... Actuellement, vous conviendrez avec moi que, sans mathématiques, on ne pourrait pas vivre, on ne pourrait pas fonctionner.

M. Lucier (Pierre): Ah! la vie est impossible sans mathématiques.

M. Gautrin: Absolument.

M. Lucier (Pierre): Maintenant, tout est une question de savoir quel cours de mathématiques permet de suivre tel ou tel secteur de formation.

M. Gautrin: Sur ça, je n'ai aucune difficulté à faire le débat. Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Ha, ha, ha! Bon. Alors, sur la base de ces affirmations-là, il y a une volonté partagée dans le système inégalement, mais partagée dans le système et très claire au ministère de s'assurer que ces préalables spécifiques n'obéissent pas à des contraintes autres que celles qui sont justifiables pédagogiquement. Et c'est dans ce sens-là qu'il y a eu diverses vagues d'élagage, des élagages plus ou moins vigoureux des préalables, là où ce n'était pas nécessaire. Tout le monde ne comprenait pas d'emblée qu'il était nécessaire, par exemple, de prendre tel cours de mathématiques pour les techniques policières, et ainsi de suite. Donc, il y a eu un travail d'élagage.

(20 h 50)

En contrepartie, il est évident que – et c'est à ça qu'on fait allusion ici – les travaux se sont poursuivis pour, aussi, s'ajuster aux règles de sanction qui sont en voie d'implantation. Alors, c'est sûr que, dans la mesure, par exemple, où il y a un cours de mathématiques qui entre dans la sanction même du Diplôme d'études secondaires, bien, il devient inutile de le mettre en préalable. Alors, ce mouvement, disons, d'élagage de préalables, il se poursuit. Il n'est pas facile. Nous l'avons poursuivi aussi avec les universités pour nous assurer que, dans certains programmes, il n'y ait pas de surenchère ou qu'il n'y ait pas de voie détournée de sélection, que c'était vraiment adapté à chacun des programmes. Mais ce sont des processus longs.

M. Gautrin: Je m'excuse. Vous êtes intervenu au début de votre témoignage pour dire que, justement, vous avez toujours respecté l'autonomie des universités.

M. Lucier (Pierre): Oui, c'est ce que nous faisons.

M. Gautrin: Vous m'inquiétez, à ce moment-là, par rapport à...

M. Lucier (Pierre): C'est ce que nous faisons. Dans le cas des collèges, c'est le ministre qui détermine les préalables.

M. Gautrin: Oui, mais vous avez introduit une procédure ici avec...

M. Lucier (Pierre): Oui, si vous me donnez la chance de vous l'expliquer, je vais vous l'expliquer.

M. Gautrin: Oui.

M. Lucier (Pierre): Dans le cas des universités, c'est les universités qui prennent leurs décisions. Mais nous avons une table où nous discutons clairement et en toute limpidité de ces choses-là. Nous posons des questions mutuellement d'ailleurs et, au terme, chacun prend les décisions qui lui reviennent.

M. Gautrin: C'est bien.

M. Lucier (Pierre): Dans le cas des universités, ce sont les universités qui ont décidé d'ajuster un certain nombre de préalables. Je suis le premier à défendre avec une volonté farouche cette autonomie académique. Alors, revenons aux préalables du collégial; donc, c'est le ministre qui les fixe. Alors, ce qui est dit ici, c'est qu'il y a eu déjà une première vague d'élimination de préalables jugés non pédagogiquement nécessaires et il y en a une autre qui est en route, mais qui va s'adapter à l'évolution de l'implantation du régime de sanction du secondaire.

M. Gautrin: Parfait.

M. Lucier (Pierre): Parce qu'il est évident que, dans la mesure où le Diplôme d'études secondaires comporte un certain nombre de garanties suffisantes, on n'a pas besoin de cette béquille, si je peux dire, qu'est le préalable...

M. Gautrin: Donc, les travaux sont en cours...

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Gautrin: ...et vous arrivez à une décision.

M. Lucier (Pierre): Il y a eu déjà des tranches qui ont...

M. Gautrin: Il y a déjà eu des travaux, mais vous êtes en cours de travaux là-dessus...

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Gautrin: ...dont vous allez faire rapport dans un prochain rapport.

Une dernière question que j'ai sur le collégial...

M. Lucier (Pierre): Bon, on surveillera bien les mots, cependant. Ha, ha, ha!


Prix décernés pour les initiatives pédagogiques

M. Gautrin: Ha, ha, ha! ...avant de rentrer sur l'universitaire. J'ai trouvé intéressants les prix du ministère décernés pour les initiatives pédagogiques. Je trouve que c'est intéressant, sauf que vous n'en avez peut-être pas fait beaucoup de publicité. Moi, personnellement, par exemple, je ne savais pas, d'une part, l'existence de ces prix et, de surcroît, je ne connais pas les bénéficiaires. Si vous me permettez, je ferai une remarque en même temps qu'une question, et ma question serait: Qui sont les bénéficiaires? Mais j'ai l'impression que vous devriez plus publiciser ces éléments-là. Honnêtement – et pourtant je suis ce qui se passe chez vous avec un intérêt certain – je n'étais même pas au courant des bénéficiaires. Alors, vous me direz: On l'a montré à tel ou tel endroit. Mais ce serait intéressant que vous soyez en mesure de faire un peu plus de publicité. C'est important, à la fois la rétribution... Ce n'est pas seulement le montant que vous leur donnez, mais aussi la reconnaissance que vous leur faites. Et ce serait important de...

M. Lucier (Pierre): Le programme auquel vous faites allusion, ce sont les prix du ministre, ce qu'on appelle les prix du ministre.

M. Gautrin: Les prix du ministre.

M. Lucier (Pierre): Oui, c'est ça. Alors, ça, c'est un programme qui date de la fin des années soixante-dix et qui a été mis sur pied pour encourager la production...

M. Gautrin: La création, la production de matériel didactique.

M. Lucier (Pierre): ...de matériel didactique de qualité. Alors, chaque année, il y a un concours. C'est un concours, en fait. Il y a une fête qui couronne les lauréats. Depuis plusieurs années, ça se fait à l'intérieur du Salon du livre, à Montréal, en général le soir de l'ouverture, une fête d'ailleurs tout à fait sympathique où un trophée est remis à chacun des gagnants. Il y a une présentation, enfin, il y a un vidéo qui est fait avec ça. Il y a des prix en argent aussi pour ceux qui n'ont pas eu d'aide du ministère pour le faire. Alors, c'est une des fêtes intéressantes de la famille collégiale et qui a stimulé la production de matériel didactique de très bonne qualité. Et c'est l'occasion d'ailleurs d'aventures communes. Il y a beaucoup de ces oeuvres-là qui sont faites en collaboration de gens de plusieurs collèges.

M. Gautrin: Mais je maintiens quand même ma requête devant toute cette...

M. Lucier (Pierre): Est-ce que je comprends que M. le député souhaiterait être sur la liste des invitations...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: C'est exact.

M. Lucier (Pierre): ...de la prochaine soirée?

M. Gautrin: Vous avez compris. Merci.

Une voix: Ah! Ah!

M. Lucier (Pierre): Cela sera fait.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx.

M. Gautrin: Il ne désire pas être sur la liste.

Des voix: Ha, ha, ha!


Formation continue et besoins de l'industrie

M. Kieffer: Ce que je veux savoir, en fait, c'est où en est rendu l'état de la réflexion, parce que je sais qu'il n'y a pas de réponse à la question que je vais vous poser, mais c'est un problème. L'éducation des adultes dans les cégeps, associée à la nécessité de la formation continue, dans un contexte où l'entreprise exprime de plus en plus clairement ses besoins et attend de créer des rapports de plus en plus étroits avec des institutions comme le cégep, compte tenu du fait que plus d'un ministère est impliqué dans le dossier – qu'on pense au ministère de l'Emploi, puis qu'on pense au ministère de l'Éducation, qu'on pense aussi aux deux niveaux de gouvernement, à tout ça, là – je sais que ce n'est pas demain matin que ça va se régler, mais ça pose un problème qui est important. Moi, dans mon comté, il y a une entreprise qui pense créer sa propre institution, son propre institut, parce qu'elle trouve extrêmement difficile de pouvoir fonctionner avec les établissements du réseau de l'éducation public. Alors, où en êtes-vous rendus au niveau d'en arriver à faire en sorte que ça soit efficace?

M. Lucier (Pierre): En deçà de l'efficacité, je pense qu'il est important de rappeler les balises de la loi, qui sont des balises relativement récentes dans leur précision, en tout cas. Parmi ces balises, il y a le fait que la loi ne fait pas de distinction au collégial, ni à l'université d'ailleurs, mais ce n'est pas la loi... Dans le cas du collégial, donc, la loi des cégeps ne fait pas de distinction entre des adultes et des jeunes. On est étudiant au cégep ou bien à temps partiel ou bien à temps complet, à temps plein. Si on est étudiant à temps plein, on a droit à la gratuité si on est inscrit dans un programme de D.E.C. On peut aussi avoir droit à la gratuité si on est inscrit dans un programme d'A.E.C., d'attestation d'études collégiales, qui est un programme local. Mais ce n'est pas universel comme gratuité, c'est selon les spécifications gouvernementales.

Donc, il y a temps plein, temps partiel. À temps plein, c'est gratuit dans un programme; donc, ça donne droit au financement, donc c'est possible d'organiser. Des adultes qui sont en processus de temps plein n'ont pas ce problème-là. Les gens qui sont à temps partiel, s'ils sont à temps partiel dans un D.E.C., il y a des frais. S'ils sont en attestation d'études collégiales, ils peuvent, dans certains cas, avoir droit à la gratuité; dans d'autres cas, ils devront payer. Bon.

Alors, nous avons donc un accès qui est généralisé pour tout temps plein dans un D.E.C., mais, pour les autres, il s'agit d'enveloppes fermées. Il y a une enveloppe fermée pour le temps partiel, il y a une enveloppe fermée pour les A.E.C., pour les attestations d'études collégiales. Et là il y a une mécanique qui partage, disons, les priorités, je dirais, ministérielles centrales et puis les priorités régionales. Donc, il doit y avoir discussions sur le plan de la région pour décider ce qu'on va organiser avec les moyens qu'on a.

Donc, il y a, dans le cas du collégial, effectivement une contrainte assez forte d'enveloppes fermées concernant la possibilité d'organiser des A.E.C. C'est souvent le format qui convient dans le cas de la formation continue et des adultes, c'est souvent ça qui convient. Donc, il y a des limites certaines à la fois quant aux ressources disponibles et quant à la possibilité de charger des frais, parce que les frais ne sont pas chargés inconsidérément ou sans normes. Il est spécifié que c'est à peu près 2 $ de l'heure, hein, c'est le tarif.

(21 heures)

Alors, on observe comme vous que les collèges et que les milieux souhaiteraient à la fois que les enveloppes fermées soient fermées moins bas, donc fermées avec plus de ressources. Et, dans d'autres cas, il y a un souhait pour qu'il y ait un assouplissement du côté de la possibilité de tarifer auprès d'acheteurs éventuels ces cours-là. Dans certains cas, on nous dit et répète qu'il y a des acheteurs qui seraient prêts à payer plus. Il y a, à côté de ça, évidemment la formation sur mesure. Il est possible de faire, je dirais, des contrats de gré à gré où le produit, si je peux dire, est vendu au prix coûtant. Mais, dans la mesure où on est dans les programmes des collèges, des A.E.C. ou des D.E.C., voici les balises que la loi donne, et je crois que ça détermine à peu près toute la discussion actuelle sur la capacité des collèges d'oeuvrer en formation continue.

M. Kieffer: Mais avez-vous l'impression que vous êtes en train de récupérer tout ce marché-là, en fait, cette réalité-là ou que c'est en train de vous glisser entre les doigts? Moi, j'ai des exemples concrets, par exemple, où la Banque fédérale de développement ne veut pas travailler avec des cégeps. Dans mon coin, chez nous, ça a été clair. Lanaudière s'est fait évincer; Laval s'est fait évincer de la formation, par exemple, à l'exportation. O.K.? La Banque fédérale de développement a dit: Nous autres, on ne donne pas ça aux cégeps, on n'en a rien à foutre; on va donner ça à l'entreprise privée. Le seul collège qui avait réussi à conserver un certain contrôle, c'était le cégep Lionel-Groulx, et je pense que, lui aussi, s'il ne l'a pas perdu, va le perdre très bientôt.

M. Lucier (Pierre): Écoutez, nous observons comme vous ce genre de phénomène. C'est difficile de penser qu'on pourrait changer ces choses-là en soi. Je veux dire, en un certain sens, c'est un libre marché, aussi. Par ailleurs, c'est évident que les formations offertes ailleurs que dans le système d'éducation ne conduisent pas à des sanctions, et beaucoup de gens tiennent à des sanctions. Donc, il ne s'agira sûrement pas d'attestations d'études collégiales, encore moins de D.E.C. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas des formations intéressantes, mais ce que j'essaie de dire, c'est que les collèges, dans l'organisation de leur offre et dans leur capacité de se retourner et de répondre aux besoins, vivent, je dirais, dans des balises juridiques et financières qui sont relativement serrées. En un certain sens, ça n'explique pas tout. Il y a aussi des conversions à faire dans les manières de faire et dans les...

M. Kieffer: Oui.

M. Lucier (Pierre): ...attitudes pour, je dirais, aérer les processus, les rendre parfois moins complexes. Et il est possible – je suis de ceux qui le confessent volontiers – que, parfois, notre système manifeste des rigidités sur des choses. Mais, en même temps, il y a parfois dans la demande des éléments qui ne sont pas toujours facilement compatibles les uns avec les autres. Vous savez, il y a des gens qui voudraient le diplôme, mais ils ne voudraient pas telle chose, ils ne voudraient pas telle chose. Alors, il est possible que, dans nos manières de faire, nous, nous n'ayons pas toujours la souplesse et la rapidité qu'il faille.

Mais, lorsqu'on est, je dirais, dans un univers de libre comportement, d'offre et de demande, j'ai l'impression que la vie va décider, au fond, de ce qui va arriver de tout ça. Comme disent les Anglais, on vote avec ses pieds, parfois, aussi. Et on verra des gens aller ailleurs, ce n'est pas impossible. Mais, en revanche, on observe aussi que les collèges sont engagés plus qu'ils sont capables d'en faire, finalement, dans l'ensemble de ces entreprises-là de formation. Ils ont des contraintes sérieuses quant au financement, il n'y a aucun doute là-dessus.

M. Kieffer: Donc, il n'y a pas de ligne directrice qui viendrait du ministère et qui dirait: Il faut s'orienter dans cette direction-là, c'est important. Il faut qu'on soit de plus en plus en synergie avec...

M. Lucier (Pierre): Écoutez, là-dessus, le discours ministériel, il est ferme, il est clair, il est répétitif, il est insistant. Mais, en même temps, je vous dis...

M. Kieffer: Mais il y a des réticences en bas. C'est ça que vous me dites?

M. Lucier (Pierre): Non. Il y a la capacité de se retourner dans ce contexte juridique et financier. Ma perception – on peut échanger des perceptions – n'est pas négative du tout là-dessus. Je perçois plutôt que les collèges sont souvent nerveusement engagés dans des entreprises, il n'y a aucun doute là-dessus.

M. Kieffer: Moi, je trouve ça très inégal.

M. Lucier (Pierre): C'est inégal.

M. Kieffer: Je veux dire, il y a, effectivement, des exemples de cégeps... Qu'on pense à Édouard-Montpetit, par exemple, qui est rentré à plein là-dedans, puis qui sert de modèle à plusieurs égards. Il y en a d'autres où c'est beaucoup moins évident.

M. Lucier (Pierre): C'est très variable. Nous observons, nous aussi, des différences. Tout le monde n'est pas non plus également convaincu ou entiché de ces mouvements-là. Il s'en trouve pour penser que les collèges se distraient de leur mission première d'éduquer les gens qui viennent dans le D.E.C. et il y en a qui pensent qu'ils sont en affaires, des fois, plus qu'en éducation. Donc, ce n'est pas des réalités simples.

M. Kieffer: Non.

M. Lucier (Pierre): Donc, c'est pour ça qu'on peut observer, dans certains... Il y a peut-être des établissements où il y a des composantes qui sont plus réticentes à cause de ces risques de dérive ou de perversion, de diversion. Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Perversion. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Qualifiée.

M. Lucier (Pierre): Nous allons régler pour diversion.

M. Kieffer: Merci.

Le Président (M. Facal): Il est 21 h 5. Je vous propose de passer tout de suite aux universités, qui représentent le dernier bloc que nous avons à aborder. M. le député de Verdun, c'est toujours vous qui commencez.


Aide financière aux étudiants (suite)

M. Gautrin: M. le Président, si vous me permettez, j'aurais un élément charnière entre l'université et le cégep. Ce matin, on a commencé nos échanges avec l'aide financière aux étudiants à partir du rapport du Vérificateur général, et, volontairement, j'ai contenu mes interventions dans le cadre du rapport du Vérificateur général. Vous savez, néanmoins, qu'en septembre 1995 le rapport qui s'appelle le rapport MacDonald a été déposé. Une des recommandations importantes du rapport, qu'on qualifie de rapport MacDonald, était, disons, de décentraliser ou déconcentrer la gestion de l'aide financière aux étudiants dans les établissements.

Alors, ma question, c'est: En termes de gestion d'aide financière, est-ce que le ministère compte suivre cette recommandation, premièrement? Et, s'il compte la suivre, qu'est-ce qu'il va faire avec ses fonctionnaires? Parce que vous avez à peu près, dans la Direction de l'aide financière aux étudiants, 229 employés, je crois, si je ne me trompe pas. Est-ce que vous allez les répartir? Alors, qu'en est-il dans la déconcentration de l'aide financière?

M. Lucier (Pierre): Je crois pouvoir dire, en toute modestie, que l'utilisation du concept de déconcentration dans le rapport MacDonald ne couvre pas du tout la réalité dont il voulait parler et dans laquelle nous sommes engagés.

M. Gautrin: Alors, dans quoi êtes-vous engagés en termes de...

M. Lucier (Pierre): C'est ce que je vais vous expliquer. Vous savez que l'aide financière, bien sûr, elle est gérée centralement au ministère; donc, c'est un programme ministériel. Mais il y a, dans tous les établissements, des services aux étudiants qui sont des points de chute et nos vis-à-vis pour les contacts directs avec les étudiants. C'est dans les établissements que les étudiants vont chercher l'information, qu'ils vont chercher leurs certificats de prêt ou de bourse, et ainsi de suite. Donc, le principal partenaire de gestion du régime, ce sont les établissements via les services aux étudiants.

Alors, ce qui est en cause dans le rapport MacDonald, et d'ailleurs qui traduit un mouvement qui est déjà entamé, il s'agit de savoir, de déterminer quels types de gestes pourraient être posés dans les établissements et qui n'auraient pas besoin d'être posés au central, en particulier sur la manipulation de documents. On a parlé de l'optimisation de la phase I et II. Vous vous souviendrez peut-être d'avoir été témoin de la phase I qui a été essentiellement l'établissement de liens informatiques directs et interactifs avec des établissements, donc capacité d'interroger des banques, d'avoir des réponses instantanées. Donc, il est possible pour un étudiant d'avoir l'essentiel de ses réponses dans son établissement. Donc, cette phase informatique, elle est déjà en place. La deuxième phase va faire franchir un pas de plus. Nous sommes à étudier, actuellement, avec... Il y a beaucoup d'instances gouvernementales d'impliquées, parce qu'il faut assurer, aussi, la validité des opérations. Il y a des gestes qui pourraient être posés, par exemple, autrement qu'en envoyant un document au central.

Alors, la déconcentration dont parle le rapport MacDonald, ce n'est pas de la déconcentration au sens des enseignements de l'ENAP ou des facultés de sciences de l'administration; il s'agit plutôt d'une répartition des responsabilités qui permettrait que certaines choses se fassent dans l'établissement en vis-à-vis avec l'étudiant plutôt que par le biais de la poste de Sa Majesté et, donc, de manipulation de documents au central. Une fois qu'on a dit ça, les choses ne sont pas aussi simples, parce qu'il faut vérifier et voir ce qui peut être ainsi dévolu, et de quelle manière on assure aussi les traces documentaires que M. le Vérificateur ira sans doute un jour examiner.

(21 h 10)

M. Gautrin: Vous me permettrez, néanmoins... Je comprends, mais le mot «déconcentration» a déjà été utilisé dans le rapport MacDonald et, de surcroît, je vous rappellerai la recommandation 96. Elle disait bien: «Que les établissements d'enseignement soient considérés comme responsables de leurs décisions en matière d'attribution – ils utilisaient le terme, vraiment, d'attribution – de l'aide financière aux étudiants, mais qu'ils soient soumis à des vérifications a posteriori.»

M. Lucier (Pierre): Oui, oui.

M. Gautrin: À mon sens, la lecture que j'ai faite du rapport MacDonald était plus que ce que vous semblez suggérer. Si je comprends bien, la décision du ministère, c'est d'en prendre et d'en laisser dans le rapport MacDonald.

M. Lucier (Pierre): Bien, ce serait d'aller le plus loin possible dans le réalisable. Il n'y a aucun doute là-dessus. Maintenant, ce rapport-là va être discuté, mais, moi, je vous dis quels sont les gestes qui sont déjà enclenchés. Nous verrons, à la suite des discussions, s'il y a lieu d'aller plus loin. Mais ce n'est pas une déconcentration au sens, disons, où on a des directions régionales.

M. Gautrin: Très bien. M. le Président, sur la partie Aide financière aux étudiants, mes questions se terminent là. Je suis prêt à rentrer sur les universités, mais peut-être que mes collègues auraient des questions sur l'aide financière.

Le Président (M. Facal): Sur l'aide financière, ça va? Bon.

M. Gautrin: Bon. Donc, tout ce qui va toucher...

Le Président (M. Facal): M. le député de Verdun. Oui?

M. Breton (Guy): Pour votre information, j'attire votre attention sur le fait que l'Institut canadien des comptables agréés vient de publier une brochure sur «Les télédéclarations: contrôle et vérification», qui répond justement à votre préoccupation. Les grandes têtes de chapitre sont «Risques et contrôles directs», «Cadre de contrôle pour le système de télédéclaration», «Conception d'un système de télédéclaration» et «Vérification des contrôles exercés sur un système de télédéclaration». C'est récent d'il y a deux semaines, «Les télédéclarations: contrôle et vérification» par l'Institut canadien des comptables agréés.

M. Lucier (Pierre): M. le Président, est-ce que je pourrais demander à M. le Vérificateur de nous mettre ça dans le wagon de retour, peut-être?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Nous allons échanger.

Le Président (M. Facal): Je crois comprendre, M. le député de Verdun, que vous voulez ouvrir un autre volet que l'aide financière aux étudiants. Vous avez terminé là-dessus.

M. Gautrin: J'ai terminé. Mon questionnement sur l'aide financière aux étudiants, qui était pour moi un élément charnière entre le cégep et l'université, est terminé. Je voudrais rentrer maintenant avec quelques questions sur le monde universitaire, mais peut-être que mes collègues veulent rester sur l'aide financière aux étudiants.

Des voix: Non.


Niveau universitaire

Le Président (M. Facal): M. le député de Verdun, est-ce que vous me permettez de poser une toute petite question sur les universités en général?

M. Gautrin: Bien sûr, allez-y.


Étudiants étrangers inscrits dans les universités québécoises

Le Président (M. Facal): M. Lucier, est-ce que vous avez les chiffres exacts concernant les effectifs des étudiants étrangers et comment ils se répartissent dans les différentes universités au Québec? Parce que j'ai entendu toutes sortes de choses et je voudrais connaître les faits.

M. Lucier (Pierre): Oui, on va vous trouver le chiffre exact. C'est un peu moins de 10 000, à l'oeil, comme ça, mais...

Le Président (M. Facal): D'ailleurs, qu'entend-on exactement par un étudiant étranger dans les définitions de votre ministère?

M. Lucier (Pierre): C'est un étudiant qui n'a pas le statut de citoyenneté canadienne ou qui n'est pas résident. On disait immigrant reçu. Maintenant, on parle de résident permanent ou de quelque chose comme ça. C'est quelqu'un, donc, qui n'a... C'est la définition habituelle.

Le Président (M. Facal): D'accord. Le critère étant la citoyenneté canadienne.

M. Lucier (Pierre): C'est la citoyenneté...

Le Président (M. Facal): D'accord.

M. Lucier (Pierre): ...ou la notion de résidence qui est un statut intermédiaire. L'appellation exacte, je ne l'ai pas en mémoire, mais il y a un statut qui n'est pas la citoyenneté comme telle, mais qui est une espèce de transition et qui a le même effet.

Une voix: Résident permanent.

M. Lucier (Pierre): Résident permanent. Bon, 10 433 à l'automne 1994, on n'était pas loin, 10 433. Il y en a 4 310 dans les universités anglophones et 6 123 dans les universités francophones. On les a par université, oui, oui.

Le Président (M. Facal): Est-ce que vous avez, à l'intérieur des étudiants qui ont la citoyenneté canadienne, une façon de départager ceux qui proviennent de l'extérieur du Québec de ceux qui sont des résidents permanents du Québec? Je fais référence à ce que je disais plus tôt ce matin, que l'écart entre les frais de scolarité dans les universités québécoises versus dans les universités du reste du Canada risque de créer un incitatif. Est-ce que vous avez des données là-dessus?

M. Lucier (Pierre): Oui. On peut relever dans nos systèmes les étudiants étrangers, les étudiants non québécois, mais canadiens et les étudiants québécois. Voyez-vous, il y avait, en 1994, pratiquement le même nombre, 10 846 citoyens canadiens provenant d'autres provinces.

Le Président (M. Facal): 10 846 étudiants...

M. Lucier (Pierre): Canadiens.

Le Président (M. Facal): ...canadiens originaires des autres provinces.

M. Lucier (Pierre): Oui.

Le Président (M. Facal): Comment se répartissent ces 10 846 étudiants canadiens hors Québec dans une université?

M. Lucier (Pierre): On a surtout ça par université aussi.

Le Président (M. Facal): Combien y en a-t-il à Bishop's?

M. Lucier (Pierre): À Bishop's, il y en a 1 075.

Le Président (M. Facal): Sur une population étudiante totale de combien?

M. Lucier (Pierre): À Bishop's, 2 408. C'est une petite université. Oui, c'est ça, un peu moins que la moitié.

Le Président (M. Facal): C'est-à-dire que, à l'Université Bishop's, pratiquement la moitié de l'effectif étudiant est composée d'étudiants de l'extérieur du Québec?

M. Lucier (Pierre): C'est exact.

Une voix: C'est pour ça qu'ils ont une bonne équipe de football.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): J'avoue que ça me questionne, M. Lucier, ça me questionne beaucoup. Moi, je suis absolument favorable au principe général de la mobilité de la matière grise, j'ai moi-même été étudiant à l'étranger, mais, dans de telles proportions, je dois vous dire que ça m'interpelle. Nous avons pratiquement la moitié des effectifs d'une université québécoise qui provient de l'extérieur du Québec. On ne parle pas, ici, d'un appoint; on parle pratiquement d'une véritable usine à fabriquer des cerveaux en transit.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Dans de telles proportions, vraiment, je me questionne. Et, considérant que les fonds publics québécois subventionnent la majeure partie du coût réel de la formation de ces étudiants et qu'on peut présumer que la très grande majorité de ces étudiants repartiront d'où ils viennent, cela équivaut à une subvention directe du Québec au reste du Canada pour l'enseignement supérieur. Est-ce que mon raisonnement est logique au strict plan formel?

M. Lucier (Pierre): Au strict plan formel, je pense qu'on doit l'accueillir tel qu'il est.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): C'est une compétence maîtrisée.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Est-ce que le ministère... Je comprends que ce n'est pas à vous de jouer au préfet de discipline, ce n'est pas à vous à faire ces mises en garde, surtout pas au niveau universitaire, bien sûr, mais est-ce que vous avez eu des échos en provenance de cette université? Est-ce qu'elle semble considérer que c'est une pratique normale? Peut-être que, dans le fond, M. Breton, c'est à vous que la question s'adresse, à bien y penser, là!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): C'est vous qui vérifiez!

Des voix: Ha, ha, ha!

(21 h 20)

Le Président (M. Facal): Je ne le sais pas, je découvre ça, qu'une université québécoise a la moitié de ses effectifs qui provient de l'extérieur. Excusez ma candeur, je trouve que les proportions, là, sont considérables. Peut-être qu'il y a une explication tout à fait sensée qui m'échappe, et je serais prêt à l'accueillir.

M. Lucier (Pierre): Bien, écoutez, je pense que le principal de l'université viendra vous voir prochainement. Donc, il y a des questions que vous pourriez leur poser. Pour nous, ce sont des faits sans surprise, connus depuis toujours.

Le Président (M. Facal): Pour vous, oui, pas pour moi. Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Maintenant, je pense que, pour qui connaît aussi l'histoire de l'Université Bishop's, il n'y a pas de surprise, non plus, à ce qu'il en soit ainsi. Maintenant, j'ai entendu parler, et vous pourrez le vérifier auprès des autorités, qu'il y a une volonté, me semble-t-il, à Bishop's de recruter davantage au Québec.

Le Président (M. Facal): Ah! Il y a une volonté à Bishop's de recruter davantage au Québec. Bien, vous m'en voyez ravi!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Vous pourrez le vérifier, mais...

Le Président (M. Facal): Ah, soyez sans crainte! Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): ...les chiffres... Maintenant, il y a une tradition de Bishop's; c'est une de nos vieilles universités – vous en connaissez l'origine, dans un contexte ecclésiastique que vous savez – avec une mission qui était, à l'origine, pour ainsi dire, pancanadienne. Donc, il est resté quelque chose de cela. Et c'est aussi une tradition académique plutôt «liberal arts», donc un campus, je ne veux pas dire très victorien, mais, en fait, très britannique et un peu Nouvelle-Angleterre aussi. Donc, c'est une tradition très typée au plan académique, tout à fait cohérente. Alors, ils ont traditionnellement, effectivement, attiré des étudiants d'un peu partout au Canada qui voulaient ce genre de formation.

Alors, autant votre raisonnement formel était tout à fait correct, autant, une fois qu'on a fait ce raisonnement-là, reste la question tout à fait intacte: Est-ce qu'il est bon qu'il en soit ainsi? Alors, là, il y a matière à appréciation. C'est sûr.

Le Président (M. Facal): Oui.

M. Lucier (Pierre): Nous, nous sommes portés à prendre plus globalement les chiffres et à dire: Nous avons 10 846 étudiants non québécois, mais canadiens ici. Nous avons aussi des étudiants québécois dans les autres provinces.

Le Président (M. Facal): Bien sûr, bien sûr.

M. Lucier (Pierre): Il y a un échange. Est-ce que vous les avez?

M. Kieffer: Vous avez les chiffres là-dessus?

Le Président (M. Facal): Oui, les étudiants québécois dans les autres provinces, je crois que c'est là-dessus, M. le député de Groulx?

M. Lucier (Pierre): Oui, il y en a moins de 10 000. Il y a un déficit, si je peux dire. C'est 6 000 ou 7 000, quelque chose comme ça. On pourrait trouver le chiffre précis. Donc, il y a un certain déficit, mais c'est ça, une circulation d'étudiants.

Le Président (M. Facal): Oui, mais comprenez-moi bien – étant donné que nous sommes enregistrés, je veux que ce soit bien clair – je ne prête pas de motifs à quiconque et je suis sûr que ces gens-là ont une explication. D'ailleurs, vous le dites vous-même, elle est en bonne partie historique, l'explication, là.

M. Lucier (Pierre): Il n'y a pas de cachette, hein?

Le Président (M. Facal): Tout à fait, tout à fait. Mais, ce matin, je n'avais pas réalisé cette situation, parce que vous aviez présenté le chiffre global, 10 000. Mais, quand on regarde comment il se répartit, là, j'ai vu cette situation qui m'étonne.

M. Lucier (Pierre): Ah, c'est sûr que ça frappe plus l'imagination qu'en Abitibi-Témiscamingue où il y en a un.

Le Président (M. Facal): Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Bishop's va aller le recruter, soyez-en certain. Ha, ha, ha!

M. Kieffer: En complément, en complément.

Le Président (M. Facal): En complément là-dessus?

M. Kieffer: Oui. La répartition des effectifs hors Québec entre les universités francophones et anglophones, qu'est-ce que ça donne sur les 10 000?

M. Lucier (Pierre): Sur les 10 000, écoutez: Bishop's, 1 075; Concordia, 1 850; et McGill, 5 834.

M. Kieffer: C'est-à-dire 8 000, à peu près?

M. Lucier (Pierre): Ça veut dire, ça, 8 000. La grande majorité sont dans les universités anglophones.

Le Président (M. Facal): M. Lucier, est-ce que vous pourriez nous donner cette ventilation par université? Parce que nous la cherchions et nous ne l'avions pas.

M. Lucier (Pierre): Vous n'avez qu'à demander.

Le Président (M. Facal): Alors, vous la rajouterez dans le wagon.

M. Lucier (Pierre): Dans le wagon! Ha, ha, ha! Dans le wagon.

Le Président (M. Facal): Merci. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, merci, M. le Président. Nous cherchons de l'information sur le même sujet. Est-ce que nous avons une idée de combien de Québécois et Québécoises étudient hors Québec?

M. Kieffer: Oui, 6 000, à peu près.

M. Williams: 6 000?

M. Lucier (Pierre): Non, mais c'est moins de 10 000 dans les autres provinces. On pourrait trouver le chiffre précis, mais j'ai...

M. Williams: Les Québécois qui étudient pancanadien et dans les autres universités américaines et mondiales?

M. Lucier (Pierre): Là, c'est plus compliqué à l'extérieur du pays.

M. Williams: Oui, c'est plus compliqué.

M. Lucier (Pierre): Oui, c'est plus compliqué. On en a dénombré quelque chose comme 6 000 ou 7 000 dans les autres provinces.

M. Williams: Mais vous ne comptez pas les États-Unis, là?

M. Lucier (Pierre): Non, non, on parle des Canadiens.

M. Williams: O.K. Merci. Avec ça, il me semble... Ce n'était pas le sujet de ma question, mais j'ai pensé que c'était dans l'esprit de nos universités pancanadiennes d'avoir un échange assez intéressant. Et j'espère que peut-être le président peut visiter Bishop's et voir comme c'est une excellente place pour accueillir les nouveaux Québécois et Québécoises. Les étudiants qui étudient là, j'en connais plusieurs qui ont déménagé ici. Ils ont étudié et, finalement, ils ont décidé de rester au Québec. Je trouve que c'est une excellente chose.

Mais, quand j'ai écouté le président, j'ai pensé qu'il avait commencé à faire un argument positif pour une politique d'augmentation des frais de scolarité. Peut-être qu'il peut discuter ça dans son caucus, mais c'est ça que j'ai compris quand vous avez...

Le Président (M. Facal): Pas du tout, pas du tout. Je disais simplement que l'écart entre les frais de scolarité peut être perçu comme un incitatif à aller là où on pourra avoir une formation équivalente à moindre coût. C'est un calcul économique élémentaire.

M. Williams: Selon mon information, les universités demandent d'avoir ce pouvoir d'augmentation de leurs frais de scolarité. Avec ceci, vous pensez à un écart. Peut-être qu'on peut réfléchir sur cette question encore une fois.


Niveau collégial (suite)

Mais, M. le Président, sans briser toute votre ligne de pensée, j'ai mentionné, avant le souper, que j'ai eu le goût de retourner à cette commission, parce que je suis membre de deux commissions, aujourd'hui, et je sais que vous avez déjà eu une partie du temps sur les cégeps. Est-ce que, sans briser toutes les discussions, je peux retourner à une question sur les cégeps? Parce que vous avez dit...

Le Président (M. Facal): Oui, parce que c'est vous, on va vous le permettre.

M. Williams: Merci beaucoup. Parce que, la dernière fois, M. le Président, ce n'était pas aussi facile que ça.

Le Président (M. Facal): Si je vous le fais encore une fois, vous allez encore m'envoyer une lettre.

Des voix: Ha, ha, ha!


Cégep francophone dans l'ouest de Montréal

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais retourner à l'autre côté de la médaille linguistique dont j'ai parlé ce matin. Je voudrais parler d'un dossier qui touche la communauté d'expression française, la communauté qui demeure dans l'ouest de l'île de Montréal. Parce que nous avons un système public en éducation assez intéressant, jusqu'au secondaire V, qui garde français-anglais. Il y a les commissions Baldwin-Cartier, PSBGM et Lakeshore. Mais, au niveau des cégeps, nous avons un excellent cégep, John Abbott College, qui est un cégep anglophone, mais n'avons pas un cégep francophone.

Juste avant les élections de 1994, le gouvernement québécois de M. Daniel Johnson a annoncé qu'ils avaient eu 4 600 000 $ pour une antenne d'un cégep francophone dans l'ouest de l'île de Montréal, 500 élèves, préuniversité, attaché avec Saint-Laurent. Je pense que tout le monde est au courant de ça. Mais un des premiers gestes de ce gouvernement, à mon opinion, ça a été d'empêcher le développement des francophones dans l'ouest de l'île de Montréal, parce qu'ils ont arrêté ce projet. Ils ont annoncé quelque chose de plus large, plus beau, plus fantastique, plus cher. Le chiffre de 22 000 000 $ en comparaison de 7 000 000 $ est toujours sorti.

En tout cas, j'ai continué de pousser le dossier un bon un an et demi après les élections. Chez nous, nous n'avons rien. Nous avons un cégep avec un nom, Gérald Godin, un nom assez connu dans la société québécoise. J'ai entendu dire qu'il est en train de chercher un directeur général. Mais, avec une réponse que j'ai reçue du ministre... Et j'espère que vous pouvez répondre à ces questions, ce soir, ceci étant effectivement sous votre champ de compétence, parce que je pense qu'avec la réponse que j'ai reçue nous allons avoir un cégep qui doit partager tous les services administratifs. On doit partager, même, les services académiques. Ils doivent utiliser des locaux communs. Il doit y avoir un partenariat et une collaboration avec les organismes, les entreprises locales, les municipalités. Pour les laboratoires, on doit se faire prêter ça par les entreprises. Pour les équipements sportifs, récréatifs, culturels, on doit se faire prêter ça par les municipalités. Avec ça, nous avons un cégep à rabais, un «second-class», un «secondhand» cégep, et nous n'avons rien.

(21 h 30)

Quand je vois les articles dans Le Devoir , le dernier cadeau où nous avons parlé de 30 000 000 $, un cadeau dans le comté de l'ancien premier ministre, je voudrais savoir qu'est-ce qui se passe. Qu'est-ce qui se passe dans ce dossier? Je voudrais savoir, peut-être parce que je n'ai jamais reçu une réponse claire. Nous n'avons rien dans l'ouest de l'île de Montréal, maintenant, pour les francophones de l'ouest de l'île, au niveau cégep. Je voudrais avoir une réponse claire, ce soir, s'il vous plaît. Qu'est ce qui se passe dans le dossier? Quand nous allons avoir notre cégep? Quand les portes vont ouvrir? Quand les francophones vont avoir accès à leurs classes en français dans l'ouest de l'île de Montréal, et pas partager et emprunter des services partout? Ils ont parlé d'un cégep autonome, et nous avons un cégep vide maintenant. S'il vous plaît, est-ce que vous pouvez dire ce qui se passe avec les 4 600 000 $, un, qui ont été protégés par le Conseil du trésor, et, deux, en général, qu'est-ce qui se passe avec le cégep francophone de l'ouest de l'île de Montréal? Merci pour la chance de demander des questions, M. le Président.

M. Lucier (Pierre): Les faits, vous les avez essentiellement rappelés: donc, la nature de la décision, la création formelle, par lettres patentes, de la Corporation du cégep Gérald-Godin, la nomination, telle que prévue par la loi, des cinq premiers membres du conseil d'administration. Et, actuellement, comme cela est normal et prévu dans tout processus de création de cégep, c'est au conseil d'administration de jouer. Il est en processus de recrutement d'un directeur général et les choses vont se mettre en place. Ce n'est pas le ministère qui construit ou qui crée; c'est une corporation, comme vous le savez, qui a ses lettres patentes et qui aura les budgets nécessaires au fur et à mesure que les déboursés se feront.

Alors, les 4 500 000 $ dont vous parlez, qui ont été grossis dans le dernier plan triennal, ils sont toujours là. C'est un coût d'emprunt en immobilisation; alors, il est toujours là. Évidemment, on ne commence pas à payer l'hypothèque avant d'avoir construit. Alors, la Corporation devra choisir son directeur général, choisir son terrain, faire son devis pédagogique et présenter ses projets de construction.

M. Williams: Mais les 4 600 000 $, c'était attaché avec le cégep Saint-Laurent. La lettre était au cégep Saint-Laurent, et il me semble, encore une fois, que rien n'a bougé dans le dossier. Est-ce que vous pouvez dire... Parce que je vois, je m'excuse, une certaine abdication des responsabilités. Ce matin, nous avons parlé d'accès aux écoles anglaises; maintenant, je parle d'une création de cégep. Il me semble que l'État... Je ne parle pas de vous-même, je m'excuse.

M. Lucier (Pierre): Je le prends historique.

M. Williams: Il me semble que nous avons une certaine responsabilité. C'était tout un débat politique pendant la campagne électorale. Nous avons eu quelque chose en main; maintenant, nous n'avons rien en main. Il me semble que l'État a une responsabilité aux francophones de l'ouest de l'île de Montréal et, jusqu'à maintenant, je n'ai rien vu, sauf les choses structurales, rien de pédagogique. Je voudrais savoir, avec les dates, avec les budgets, quand est-ce que nous allons avoir un budget pour ce cégep et quand est-ce que nous allons ouvrir les portes? Avant 2000?

M. Lucier (Pierre): L'an 2000, vous dites?

M. Williams: Avant l'année 2000.

M. Lucier (Pierre): Je ne sais pas, mais je pense que j'ai répondu à l'essentiel en vous parlant des étapes. Il y a, d'abord, un devis pédagogique à faire, un plan de programmation de formation et les budgets suivront, mais ils ne précéderont pas.

M. Williams: D'une façon générale, ces étapes que vous avez juste expliquées prendront combien d'années?

M. Lucier (Pierre): Bien, ça va...

M. Williams: En général. Historiquement, là, j'ai entendu que ça prend quatre ou six ans pour faire un cégep autonome.

M. Lucier (Pierre): Ça m'apparaît beaucoup. Ça va dépendre beaucoup du rythme de fabrication du devis pédagogique, du choix des terrains et puis du projet de construction.

M. Williams: Mais, selon la réponse du ministre, les municipalités doivent donner le terrain, le secteur privé doit donner les laboratoires. Tout le monde doit donner, sauf le gouvernement du Québec?

M. Lucier (Pierre): Non. Je pense que, là, il y a une lecture orientée des réalités.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Je ne sais pas à quel document vous faites allusion, mais tous les écrits...

M. Williams: Le document déposé par le ministre à l'Assemblée nationale.

M. Lucier (Pierre): ...officiels ont bien indiqué que le ministre souhaitait non pas un collège de seconde main – et je reprends ses mots – mais un collège de seconde génération. Il incitait fortement le conseil d'administration à établir des jonctions avec les ressources existantes non pas seulement pour se les faire donner ou pour quêter, simplement pour bien brancher le collège sur les ressources du milieu; à voir s'il est possible de faire des jonctions avec les équipements culturels, sportifs de la région, s'il est possible d'utiliser au maximum la formation en entreprise, donc l'utilisation des laboratoires des entreprises. Je pense que l'objectif ministériel déclaré était plus qualitatif que financier.

M. Williams: Dernière question sur ça. Dans le contexte de toutes les coupures budgétaires que nous avons eues dans ce secteur, pensez-vous que c'est tellement stratégique et utile de créer un nouveau cégep de 1 200 élèves, qui va prendre l'argent d'un réseau pour faire quelque chose qui est peut-être trop grand pour commencer? Parce qu'il y a un débat sur le nombre d'étudiants nécessaires. Pensez-vous que, dans le contexte budgétaire que nous avons maintenant, c'est sage, avec les dépenses publiques, de dire: Non, c'est plus important de dépenser de l'argent dans la structure que dans l'éducation? Parce que le modèle de l'antenne, c'était couper dans l'administration pour sauver de l'argent; on peut mettre nos ressources dans l'éducation. Mais, maintenant, le modèle est effectivement le contraire: la chose la plus importante, c'est la structure, et nous allons prendre toute l'énergie et le temps pour créer la structure, le conseil d'administration, le directeur général et toutes les autres choses. L'autre modèle était d'oublier tout ça, de mettre l'argent dans l'éducation. Est-ce que vous pensez que cette direction est sage, M. le sous-ministre?

M. Lucier (Pierre): Je m'abstiendrai, bien évidemment, de cette invitation à porter un jugement d'opportunité.

M. Williams: Merci pour votre réponse, parce que, sans avoir votre appui à 100 %, je peux comprendre vraiment votre réponse. Merci beaucoup.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Je ne peux pas faire d'autre réponse.

Le Président (M. Facal): M. le député de Nelligan...

M. Williams: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Facal): ...parce que je vous aime beaucoup...

M. Williams: Et vice versa.

Le Président (M. Facal): Merci. ...il y a quelque chose que j'aimerais que vous m'expliquiez. Vous avez commencé votre intervention en disant: Quand est-ce que le cégep s'en vient? Je suis impatient.

M. Williams: Oui.

Le Président (M. Facal): Deux minutes plus tard, vous nous dites: Dans le contexte budgétaire actuel, serait-ce une bonne décision?

M. Williams: Oui.

Le Président (M. Facal): Bref, s'il s'en vient, il sera trop cher; s'il ne s'en vient pas, on ne remplit pas un engagement.

M. Williams: Non, tu n'as pas compris.

Le Président (M. Facal): Vous avez un problème de cohérence, il me semble.

M. Williams: Non, non, pas du tout, là, M. le Président. Peut-être tu peux me visiter dans mon comté, et je peux vous expliquer tout ça à vous, parce que, chez nous, là, on ne veut rien savoir d'un débat de gaspillage d'argent public juste pour créer une autre chose. On veut avoir les services, vraiment les services pédagogiques. Enfin, on peut trouver des nuances dans ce que nous avons suggéré, mais l'idée de ça: Ne dépense pas d'argent sur les choses administratives et dépense de l'argent, ce qui est moins cher, sur les choses pédagogiques. Il me semble que c'est tellement sage et il n'y a aucune contradiction. Et on peut faire ça plus vite pour moins d'argent. Et j'espère que votre gouvernement va appuyer les choses qu'il peut faire plus efficacement, plus vite et avec moins d'argent. Avec ça, je pense que tu commences à comprendre pourquoi le modèle que nous avons proposé était le meilleur modèle.

M. Kieffer: Pourquoi vous ne l'avez pas réalisé pendant que vous étiez là?

M. Williams: Parce que vous avez arrêté ça.

Une voix: Vous avez été là neuf ans.

Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Facal): Il est inutile, M. le député de Groulx, que vous rappeliez ce que nous savons tous: que le précédent gouvernement a eu neuf ans pour venir au secours des francophones de l'ouest de l'île et qu'il voudrait que nous fassions en 15 mois ce qu'il n'a pas fait en neuf ans. Cela étant dit...

(21 h 40)

M. Gautrin: Vous basculez dans la partisanerie.

Le Président (M. Facal): Oui, oui, oui, vous avez raison, c'est notre premier écart partisan de la journée. Ce n'est pas si pire, quand même. Ce n'est pas si pire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Il est 21 h 45.

M. Gautrin: Je pense qu'on a encore du travail à faire.

Le Président (M. Facal): Il est 21 h 45, c'est la fatigue. Bon. M. le député de Verdun, on a encore du travail à faire, vous avez raison.


Niveau universitaire (suite)

M. Gautrin: Vous avez raison, et je vous remercie. Je pense qu'on va revenir maintenant à la discussion sur les universités, tout en étant conscient, dans les interventions que j'ai à vous poser, de l'autonomie des universités et qu'une bonne partie des questions que j'aurais sur le système universitaire, nous allons pouvoir les poser à la fin de ce mois, dans le cadre de l'application de la loi 95.


Performance du système universitaire québécois

J'ai devant moi, M. le Président, une toute petite question quant à l'action de la Direction générale des affaires universitaires et scientifiques dont un des mandats, une des principales fonctions consiste à effectuer des analyses qui permettent de situer le système universitaire québécois par rapport à celui de l'ensemble du Canada, des États-Unis et de l'Europe. Comme c'est une des principales fonctions de votre direction, j'aimerais savoir les études que vous avez faites. Vous pourriez me le dire et me les déposer, le cas échéant, parce que j'aimerais les connaître.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Je rappellerai que vous le signalez dans votre rapport comme étant – non, ce n'est pas risible, M. le Président – une des principales fonctions que vous avez à faire. Je fais référence à la page 15 du rapport et je vous lis: «Ses principales fonctions se résument comme suit...» un, deux, trois, quatre, et c'est la cinquième principale fonction.

M. Lucier (Pierre): Effectivement, à différents paliers – je pense, par exemple, au chantier global des indicateurs – il y a de disponibles dans la publication de nos indicateurs des comparaisons avec, par exemple, l'Ontario.

M. Gautrin: Les États-Unis et l'Europe?

M. Lucier (Pierre): Pas là-dedans.

M. Gautrin: Alors, c'est où?

M. Lucier (Pierre): Bon. Bien, tout ne fait pas nécessairement objet de publication.

M. Gautrin: Je comprends, mais, moi, je suis intéressé à cette information-là.

M. Lucier (Pierre): Oui, alors, ça, c'est peut-être plus difficilement accessible parce que, le but, c'est souvent de faire des analyses, par exemple, pour situer tel programme par rapport à des programmes qui se font à l'extérieur, des formules de financement, par exemple.

M. Gautrin: Mais on parle du système universitaire, ici, hein?

M. Lucier (Pierre): Oui, oui.

M. Gautrin: Ce n'est pas le programme.

M. Lucier (Pierre): Non, non. Le système universitaire, mais la réalité des programmes d'enseignement est une composante fondamentale...

M. Gautrin: Bien sûr.

M. Lucier (Pierre): ...du système universitaire...

M. Gautrin: Oui, oui.

M. Lucier (Pierre): ...et alors, nous avons des analyses d'opportunité à faire sur des nouveaux programmes, et ceux et celles qui les font ont besoin de puiser dans des expériences étrangères. Même chose pour ce qui est des formules de financement, même chose pour ce qui est des tendances des systèmes universitaires.

M. Gautrin: Ça, je comprends bien, mais est-ce que...

M. Lucier (Pierre): Mais ça ne donne pas lieu...

M. Gautrin: Moi, ce que je voudrais savoir, c'est: Est-ce que vous avez effectué une analyse qui permet de situer le système universitaire québécois par rapport à celui de l'ensemble du Canada, des États-Unis et de l'Europe? Vous me dites oui, vous l'avez, ou non. Si c'est oui, j'aimerais l'avoir; si c'est non, bien, tant pis.

M. Lucier (Pierre): J'essaie de vous répondre pour vous dire qu'il s'est fait effectivement des analyses sur différents aspects du système pour les fins du ministère et que ça n'a pas donné lieu à des publications...

M. Gautrin: Ce qui serait transmissible dans ce champ-là...

M. Lucier (Pierre): Au wagon!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...je serais heureux que vous l'incluiez dans votre wagon d'informations. Non, non, mais c'est assez important, si vous me permettez, M. le Président, compte tenu des discussions que nous allons avoir à la fin de ce mois avec l'ensemble des universités que nous allons rencontrer, de pouvoir faire ce qu'on appelle le «benchmarking», c'est-à-dire être en mesure de comparer telle institution avec les institutions comparables dans les autres provinces et dans le reste du monde. Ça m'a l'air un élément qui est important.

M. Lucier (Pierre): Je vous dirai que je suis personnellement consommateur de...

M. Gautrin: De ce genre d'affaires.

M. Lucier (Pierre): ...ce genre d'études...

M. Gautrin: On a les mêmes défauts.

M. Lucier (Pierre): ...et de ces rapports internationaux, et la Direction générale est une de mes sources d'approvisionnement.

M. Gautrin: Merci. M. le Président, dans les questionnements du Vérificateur général, ce matin, il y avait une remarque, et c'était à 13.8, qui rappelait que «certaines universités ont peu développé les indicateurs de performance». Dans l'ensemble, dans les deux pieds qu'on a reçus de documents des universités et que j'ai eu le plaisir de lire, j'ai remarqué que certaines universités contestaient les indicateurs de performance de la loi 95, que nous avons passée ici, qu'on leur a demandé de remplir.

Alors, ma question – et, si vous pensez que je dépasse strictement l'administration, vous ne me répondez pas: Quelle est votre opinion sur les indicateurs de performance qui sont inclus actuellement dans la loi 95? Y en aurait-il d'autres que nous aurions dû inclure, comme législateurs? Si oui, lesquels? Et, sinon, quels sont ceux qui sont mal formulés, le cas échéant?

Là, je comprends qu'on est presque à vous demander de porter un jugement sur un travail de législateur. Mais je m'adresse non seulement à l'administrateur, mais aussi à l'expert et je voudrais savoir si vous avez une opinion sur ces indicateurs qui ont été... Mais, d'abord, je vous les rappellerai brièvement. Il y avait ce qui touchait les taux de diplomation, il y avait ce qui touchait l'encadrement, il y avait ce qui touchait les politiques de développement, il y avait ce qui touchait les politiques de recherche, si vous me permettez, dans chaque institution.

Nous n'avions pas pu inclure les suivis des cohortes. Vous avez, ce matin, clairement établi pourquoi il était difficile de suivre les cohortes d'étudiants, compte tenu – je pense que c'était une question du député de Groulx – du changement quant à la manière de compter les étudiants. J'ai remarqué, néanmoins, que vous avez pu le faire par voie de sondage pour les cohortes 1984 et 1994. Je vous poserais la question et, dans le wagon, ça serait intéressant. Ha, ha, ha! Ma première question, donc: Essentiellement, quel est le jugement que vous faites sur ces indicateurs qu'on a mis de l'avant?

M. Lucier (Pierre): Vous me permettrez de ne pas porter de jugement...

M. Gautrin: Très bien. Je comprends.

M. Lucier (Pierre): ...d'appréciation d'un texte du législateur.

M. Gautrin: Très bien. Non, non.

M. Lucier (Pierre): Je vais prendre la question autrement, cependant.

M. Gautrin: J'étais conscient que je m'étais... Mais c'est à l'expert, en même temps, que je m'adressais.

M. Lucier (Pierre): Oui, je comprends, mais dans un autre contexte. Je voudrais vous faire remarquer que, des indicateurs sur l'activité universitaire, nous en publions systématiquement un assez bon nombre. J'imagine qu'a déjà fait partie des wagons antérieurs cette publication des indicateurs de l'activité universitaire. Il y en a qui sont repris dans la publication annuelle des indicateurs.

M. Gautrin: Ça serait bon que, peut-être, vous en envoyiez une copie à tous les membres.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non, mais sérieusement. Excusez-moi, sérieusement, je ne suis pas sûr que tous les membres de la commission aient le document brun que vous avez dans les mains actuellement. Non, non, peut-être que tout le monde l'a eu. Moi, je suis sûr que, de l'autre côté, certains de mes collègues ne l'ont pas eu, et ce serait peut-être bon qu'assez rapidement, avant que le wagon parte, là – mais ça serait peut-être un wagon express...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...compte tenu du fait qu'à la fin du mois on doit rencontrer les universités – on puisse le recevoir.

M. Lucier (Pierre): Alors, vous trouverez là-dedans d'autres indicateurs que ceux qui ont été signalés dans la loi 95.

M. Gautrin: Je suis tout à fait conscient de ça.

M. Lucier (Pierre): Il y en a qui concernent la recherche, il y en a qui concernent les qualifications du personnel enseignant, la composition féminine ou masculine, le nombre de... Bon. Bien sûr que la diplomation reste parmi les indicateurs de base. On pourrait y ajouter le nombre de prix Nobel, aussi.

M. Gautrin: Ce serait intéressant.

Une voix: Combien y en a-t-il de prix Nobel?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non, ne riez pas! Non, non, mais il y a d'autres... Vous mettez ça en boutade, mais je ne voudrais pas qu'on le traite en boutade comme tel. Le réseau universitaire québécois, sans aller au niveau d'une multiplicité de prix Nobel, réussit à avoir des distinctions scientifiques, sur le plan international, qu'il ne faut pas non plus minimiser ici autour de cette table, et je ne voudrais pas qu'on traite ça en dérision, du tout.

M. Lucier (Pierre): Je signalais ce matin comment nos universités sont maintenant dans le circuit international et réussissent des percées remarquables dans un bon nombre de secteurs. Donc, je pense qu'elles sont – c'est une observation qui n'est pas une opinion – dans les grands circuits, dans les ligues majeures, dans beaucoup de cas et dans beaucoup de secteurs.

M. Gautrin: Donc, vous allez pouvoir nous transmettre ce document assez rapidement.

(21 h 50)

M. Lucier (Pierre): Oui. Il y a d'autres indicateurs. Vous connaissez aussi... Il y a une nouvelle génération, si je peux dire, d'indicateurs plus sophistiqués, mais très difficiles à quantifier et qui concernent justement le «student assessment». Donc, des indicateurs de type – c'est paradoxal de dire ça – plus qualitatif, si tant est qu'un indicateur puisse être, en soi, qualitatif.

Mais nous pouvons observer, autant dans les pays de l'OCDE, et très massivement dans les États américains, une tendance à chercher des indicateurs qui se rapprochent de la maîtrise des compétences et de la plus-value apportée par l'institution. Soyons très concrets. Par exemple, est-ce que tel collège ou telle université, qui recrute dans les cohortes les plus fortes et, donc, les diplôme, si vous me permettez le mot, à peu près comme elle les a reçues, est un établissement plus performant qu'un établissement qui les accueille plus faibles, mais qui fait franchir un terrain plus considérable?

M. Gautrin: Ça va être la base de nos débats à la fin du mois, cher ami.

M. Lucier (Pierre): Donc, on peut dire, dans le domaine des indicateurs, sans porter de jugement, que ceux de la loi 95 sont parmi les indicateurs classiques, qu'il y en a d'autres et qu'il y a de nouvelles générations en train d'émerger, mais plus compliquées à cerner sur le plan mathématique.


Augmentation des femmes diplômées

M. Gautrin: Merci. M. le Président, j'ai encore une autre question qui, maintenant, va retoucher ce qu'on avait abordé ce matin sur le décrochage, et c'est lié, à mon sens, à cela. Dans votre rapport, vous signalez, ce qui est assez connu, qu'à l'heure actuelle... Je vais vous lire la phrase et je voudrais avoir votre commentaire. En 1993-1994, on constate que les femmes atteignent les études de baccalauréat dans une proportion de 43,2 %, tandis que chez les hommes la proportion est de 33 %. C'est-à-dire qu'on est en train, à l'heure actuelle, d'inverser la tendance au niveau du baccalauréat universitaire où on va avoir à peu près un 60-40 de diplomation. Même, pour ceux qui sont dans le milieu, dans les disciplines – si telles disciplines il y avait – traditionnellement masculines, dans des disciplines qui sont plus scientifiques, disons plus scientifiques dures, vous commencez dès maintenant à avoir une majorité de diplomation féminine.

Je ne sais pas si vous pouvez commenter cela, parce qu'on a quasiment inversé la tendance. Alors, je comprends que... Non, non, je m'excuse. Que la tendance soit trop inversée dans un sens ou trop inversée dans l'autre sens, il y a le même élément pernicieux...

Une voix: Le retour du balancier.

M. Gautrin: Non, non, il y a un élément pernicieux à l'intérieur. Est-ce que vous avez des commentaires à faire à ce sujet-là, si ce n'est de nous référer aux taux de décrochage qu'on retrouve dans les populations masculines jeunes et qui ont déjà été signalés d'ailleurs dans le rapport des états de fait sur les états généraux comme étant un des problèmes sociétaux sur lesquels nous devons nous pencher?

M. Lucier (Pierre): Le phénomène est massif; nous n'avons qu'à bien nous tenir, messieurs. Le phénomène est tout à fait massif dans l'ensemble du système d'éducation. Les filles et les femmes performent massivement de manière supérieure, globalement; elles persévèrent, elles font leurs études en moins de temps. Et c'est vrai que nous sommes rendus, si vous voulez, au baccalauréat; les chiffres sont plus égalitaires dès qu'on arrive à la maîtrise et au doctorat.

M. Gautrin: Je le sais, oui.

M. Lucier (Pierre): Vous savez qu'à la maîtrise c'est 8,8 % à 8,3 %, donc presque à égalité.

M. Gautrin: C'est arrivé presque à égalité. Au doctorat...

M. Lucier (Pierre): Au doctorat, comme vous le savez, c'est l'inverse.

M. Gautrin: ...on s'en sort encore.

M. Lucier (Pierre): Pardon?

M. Gautrin: On est encore... Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Donc, ce que ça signifie, c'est qu'il y a une percée manifeste, mais qui n'a pas encore atteint le troisième cycle, si je peux dire. Elle n'a pas atteint tous les secteurs non plus, pas tous encore, du côté des sciences appliquées. Quoique, là aussi, ça évolue.

M. Gautrin: C'est commencé déjà. Si vous permettez, mes connaissances du secteur m'amèneraient à dire que, déjà, ce qui n'était pas le cas il y a cinq ou six ans, dans les sciences appliquées, vous avez aussi une forte percée, actuellement, des clientèles féminines.

M. Lucier (Pierre): Il y a des percées. C'est ça. Et ce n'est pas encore aussi vrai du côté des structures de décision.

M. Gautrin: Est-ce que vous avez pensé à la cause de ce renversement?

M. Lucier (Pierre): Écoutez, je vous dirai que nous en parlons fréquemment, que nous cherchons tout ce que nous pouvons trouver là-dessus. J'observe que, dans la plupart des systèmes comparables au nôtre, un phénomène analogue est observable. Actuellement, nous nous perdons un peu en hypothèses sur les explications profondes de cela. Certains sont allés jusqu'à dire que le protocole scolaire était plus proche des qualités de force des filles et des femmes. Certains sont allés jusqu'à dire que l'école de base était, finalement, plus féminisée qu'on ne le croit. D'autres ont fait des liens avec les familles monoparentales qui sont généralement sous la responsabilité de femmes. Nous en sommes actuellement en exploration d'hypothèses.

M. Gautrin: Autrement dit, à l'observation du fait brut, sans explications.

M. Lucier (Pierre): Bien, il y a des hypothèses sur le marché...

M. Gautrin: Il y a des hypothèses, bien sûr, oui.

M. Lucier (Pierre): ...il n'y a aucun doute. Elles sont difficiles à étayer complètement. Sans doute ne sont-elles pas massivement fausses, là, mais nous sommes un peu beaucoup dans la brume sur les explications du phénomène.

M. Gautrin: Merci.

M. Lucier (Pierre): Mais nous sommes plusieurs systèmes à être préoccupés par cela.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Facal): Comme il est 21 h 55, je pense que le moment est peut-être venu de procéder aux remarques de conclusion. M. Lucier, est-ce que vous sentez le besoin d'ajouter quelque chose que vous n'avez pas eu l'occasion de dire?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): Non, là, si, après huit heures... Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Vous avez encore quelque chose à dire? Ha, ha, ha!


Remarques finales


M. Pierre Lucier, sous-ministre de l'Éducation

M. Lucier (Pierre): Non, mais je voudrais simplement signaler ma satisfaction et, je pense, celle de mes collègues, de la manière dont les choses se sont passées. Nous avons innové aujourd'hui, nous étions dans un genre neuf. J'étais arrivé avec un peu d'appréhension, un peu d'interrogations et je suis, pour ma part, très content du type de dialogue que nous avons pu tenir. Vous savez, ce n'est pas très fréquent que nous pouvons, en direct, parler aux parlementaires. Nous sommes toujours en appoint à des ministres; c'est notre travail, je ne m'en plains pas. Mais j'ai trouvé extrêmement intéressant de pouvoir le faire en direct. C'est une longue séance, c'est plus long que ma soutenance de thèse...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lucier (Pierre): ...et peut-être que la vôtre aussi, M. le Président?

Le Président (M. Facal): Beaucoup plus long que la mienne également, oui.

M. Lucier (Pierre): Ha, ha, ha! Mais je voudrais vous remercier personnellement, M. le Président, et vous tous, les membres de la commission, d'avoir accepté ce genre de dialogue très direct et très instructif pour nous aussi. Je vous en remercie beaucoup.

Le Président (M. Facal): Merci. Est-ce que l'opposition officielle voudrait... Oui, M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, je voudrais remercier le sous-ministre de l'Éducation et le personnel du ministère de l'Éducation, de même que le Vérificateur général et son personnel, de l'aide qu'ils nous ont accordée dans cet exercice. Je rappellerai que je fais partie de ceux qui croient que l'imputabilité des fonctionnaires devant les parlementaires est quelque chose qui est absolument fondamental et, donc, le parlementaire est non seulement un législateur, mais est aussi un contrôleur des effets de la gestion de l'appareil gouvernemental.

On a essayé – peut-être qu'il y avait un peu de difficulté – de se cantonner strictement dans l'administratif. Je pense qu'il était important de faire, de manière non partisane et du côté strictement administratif, la rencontre. Et, si on veut avoir du succès dans ce genre de travail là, il ne faut pas que ça devienne un échange à caractère partisan, mais bien un mandat où les parlementaires surveillent ou questionnent dans leur gestion, à partir principalement des remarques faites dans les rapports du Vérificateur général, les administrateurs publics sur la manière dont ils gèrent et ils administrent leur ministère ou leur organisme.

Parfois, on est un peu tentés, parce que nous sommes des politiciens, de dévier un peu de cette ligne. On a essayé, dans la mesure du possible, de ne pas en diverger. Et je dois vous dire qu'on comprend parfaitement, de ce côté-ci, lorsque, avec beaucoup d'habileté, vous nous avez rappelé la limite qu'il y a entre la nature politique, qui appartient en propre au ministre, et la nature administrative, qui est le propre des gestionnaires de l'État et des administrateurs d'État que vous êtes.

Je dois dire que, moi aussi, j'en sors extrêmement... Mais j'y croyais dès le début, et ça fait longtemps que j'y crois, moi, vous savez, à ce genre d'exercice. Je suis extrêmement intéressé à ce genre de rencontre, et je crois qu'il faut les multiplier et appliquer dans son intégralité ce qui reste de la loi 198. Merci.

(22 heures)

Le Président (M. Facal): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Groulx.


M. Robert Kieffer

M. Kieffer: Ce sera très court. Ce matin, lorsque nous étions dans le pigeonnier, en haut, là, j'étais tout près des journalistes, et, à la fin de la session de la matinée, plusieurs d'entre eux ont dit qu'ils avaient trouvé cette commission... qu'ils avaient été surpris par le sérieux, par les échanges, par l'intérêt qu'ils en retiraient. Ça, ça m'a surpris, moi, et j'en suis fier parce que, effectivement, on a réussi à faire un travail, la plupart du temps, non partisan. Et c'est au bénéfice des députés – nous sommes tous, avant tout, des représentants du peuple – et c'est aussi à votre bénéfice, M. le sous-ministre. Je suis très satisfait. Voilà, on vous remercie et on vous dit au revoir, parce qu'on va sûrement se revoir.

M. Gautrin: L'an prochain, parce que cet exercice...

M. Kieffer: Vous aussi, d'ailleurs, M. le Vérificateur général.

M. Gautrin: ...est annuel.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Merci, M. le député de Groulx. Je remercie, moi aussi, M. Lucier et toute son équipe, ainsi que le Vérificateur, M. Breton, et la sienne, tous les parlementaires, tous les assistants des parlementaires, tout le personnel de la commission. Et il restera à voir si ces journalistes, si heureusement surpris, l'écriront dans les papiers de demain qu'on fait des fois du bon travail.

Alors, notre mandat étant terminé, nous ajournons. Merci.

(Fin de la séance à 22 h 1)


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