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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mardi 24 septembre 2002 - Vol. 37 N° 37

Mandat d'initiative sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures six minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je demanderais aux membres de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

Alors, le mandat de la commission qui se réunit aujourd'hui: afin de tenir des audiences publiques dans le cadre de son mandat d'initiative sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation au Québec.

Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. En vertu de l'article 130 du règlement, M. Lachance (Bellechasse) remplace Mme Caron (Terrebonne) pour la durée du mandat, et M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis) remplace M. Bergman (D'Arcy-McGee).

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, en vertu de l'article 132, Mme la députée de Bonaventure, qui est un membre volant dans chacune des commissions, n'a pas besoin de l'autorisation des membres pour poser des questions.

Alors, je vais vous donner la lecture de l'ordre du jour: à 9 heures, nous avons les remarques préliminaires, 15 minutes du côté ministériel et 15 minutes du côté de l'opposition; à 9 h 30, nous allons entendre le ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi, M. Sylvain Simard, qui sera accompagné de MM. André Vézina et Robert Maheu. Je tiens à faire remarquer à tous ceux qui sont ici que c'est rare, rare qu'un ministre accepte de participer à un mandat d'initiative. Alors, nous vous félicitons, M. le ministre. Alors, à 10 h 30, ce sera la Fédération québécoise des municipalités.

Des voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! À 11 h 30, Union des municipalités du Québec, représentée par Mme Murielle Angers-Turpin, la première vice-présidente et mairesse d'Amos, et Mme Diane Fortin, conseillère aux politiques à l'Union des municipalités du Québec; à midi trente, il y aura suspension; à 14 heures, la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, qui seront représentées par M. André Caron; à 16 heures, M. Robert Maheu, ministère de l'Éducation; à 17 heures, il y a l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, pour ajourner nos travaux à 18 heures.

Remarques préliminaires

Alors, M. le député de Saint-Jean, vous m'avez souligné que vous vouliez commencer les remarques préliminaires. Quinze minutes pour le côté ministériel.

M. Roger Paquin

M. Paquin: D'accord, Mme la Présidente. Alors, d'entrée de jeu, je vous indique que je ne prendrai pas les 15 minutes, mais simplement saluer les membres de la commission et vous-même en ce début de mandat. Je pense que ça va être un mandat très intéressant. On se souviendra que, au moment de nos travaux en commission, on avait à plusieurs occasions soulevé des effets des fluctuations de clientèles au niveau des effectifs étudiants dans les différents ordres d'enseignement, et avec toutes sortes de conséquences. C'est pourquoi, ensemble, on a décidé de dessiner ce mandat d'initiative.

Et on se souviendra aussi qu'au départ on s'était dit: On ne va pas déranger tout le monde, on va sélectionner un certain nombre d'organismes qui connaissent bien ces questions-là de façon à ce qu'ils puissent venir nous éclairer, qu'on puisse se faire une idée et peut-être en arriver à des recommandations. Le fait est que l'intérêt a été très marqué et qu'un grand nombre d'intervenants ont voulu venir participer. On avait pensé inviter une fédération pour parler, au nom de l'ensemble, des problématiques vécues à l'intérieur de chacune des institutions présentes à cette fédération, mais voilà que les gens préfèrent venir séparément et distinctement nous parler des effets qu'il y a dans leur milieu particulier. C'est donc dire que la problématique soulève de l'intérêt chez l'ensemble des intervenants et qu'en conséquence la commission, bien sûr, a accepté de rencontrer toutes celles et tous ceux qui ont souhaité venir s'y exprimer.

n (9 h 10) n

Vous aurez aussi constaté qu'on a parlé de fluctuations plutôt que de baisse de clientèles. En fait, ce qui s'observe, dans l'ensemble des effectifs, c'est un mouvement de décroissance. Cependant, il est très inégal et à ce point inégal qu'à certains endroits il y a une augmentation des effectifs. Donc, la problématique est multiple et il faut bien parler de fluctuations à ce moment-ci.

En fait, il y a trois types, si on veut, à première vue, il y a trois types de fluctuations comme tels. D'abord, il y a la diminution du nombre de jeunes, d'enfants dans la population par rapport à l'ensemble de la population globale en termes de proportion. Il est clair que les familles ont moins d'enfants actuellement qu'elles n'en avaient jadis et que ce n'est pas l'apport des immigrations qui va compenser ce phénomène-là. À partir du moment où une population a un taux de natalité qui est à la baisse, forcément, ça se manifeste dans les effectifs, dans les cohortes au niveau de l'éducation. En fait, on est parti d'un des niveaux de natalité les plus élevés sur la planète pour passer à un des plus bas. Et maintenant, on est en remontée, mais il reste qu'il y a là, au net, un premier aspect de la problématique auquel il ne faut pas oublier d'ajouter d'autres aspects.

Un deuxième mouvement de population au niveau des fluctuations, ce sont les déplacements de certaines zones du Québec vers d'autres zones du Québec. On peut penser, en particulier, à des régions qui sont en périphérie et à une tendance que l'on observe à plusieurs égards à ce que des jeunes partent de ces régions-là pour aller dans des sous-centres ou aller dans des centres régionaux et, enfin, vers la métropole ou la capitale nationale. Et cela correspond à une espèce de dépeuplement qui se manifeste et qui est distinct du nombre d'enfants qu'il y a dans les familles, c'est bel et bien un déplacement de personnes ou de familles vers d'autres centres, et ça, évidemment, ça interpelle toute la question de l'occupation du territoire, du développement non seulement en zone urbaine, mais dans toutes les régions. Et un développement qui serait correct ferait en sorte, à mon point de vue, que les jeunes qui vivent dans une région pourraient y étudier, y vivre, y fonctionner et s'y implanter.

Par ailleurs, il y a un troisième élément qui fait que les cohortes sont moins abondantes, et c'est au niveau de la problématique de la persévérance scolaire. Il y a des jeunes qui devraient être à l'école et qui n'y sont pas. Ils devraient être à l'école pour se former dans des professions pour lesquelles des postes deviennent disponibles et ils n'y sont pas ou ils ont décroché de l'école. Et finalement, voilà un autre élément qui fait en sorte que les populations sont moins abondantes au niveau des effectifs des différents ordres d'enseignement. Donc, une tendance de la population au niveau de la natalité, oui, vrai, mais aussi des mouvements de population avec des impacts sociologiques, économiques importants et, enfin, pour les personnes, pour les individus, toute la question de la persévérance scolaire qui est impliquée.

Alors, il n'est pas étonnant donc que des gens des différents ordres d'enseignement se soient manifestés, mais aussi des regroupements d'enseignants, des regroupements d'étudiants, des regroupements municipaux, des gens qui font la promotion de la ruralité et, en fin de compte, tous ceux qui ont bien compris qu'au Québec, comme ailleurs, l'avenir passe par la jeunesse et que donc ces mouvements de population, au niveau de la jeunesse et de l'éducation, ça pose toutes sortes de problèmes qu'il nous faut résoudre, d'autant plus qu'il est vrai qu'il y a des problèmes à résoudre là où les populations baissent, mais il y en a là aussi où les populations augmentent.

Et on a des zones, au Québec, en ceinture de la capitale nationale mais surtout en ceinture de la métropole, où vous avez à la fois les deux mouvements: il y a des zones où il y a accroissement de population, des zones où il y a baisse de population. Vous avez des parents dont les enfants sont voyagés dans des écoles différentes, qui ont trois enfants mais qui sont dans trois écoles différentes. Les enfants ne sont pas d'une année à l'autre dans la même école, ne développent pas de sentiment d'appartenance avec tout ce qui peut être attaché à cette culture de l'appartenance à un quartier, à un groupe d'amis, à un milieu, à une façon de vivre. Et voilà d'autres problèmes, donc, d'autres ordres qui apparaissent dans ces circonstances-là.

De plus, on voit parfois se superposer un autre type de problème lorsqu'une commission scolaire anglophone, par exemple, voit sa clientèle augmenter dans une municipalité où la clientèle francophone diminue, alors où on a des problèmes d'échange d'infrastructure et des éléments comme ceux-là. Voilà d'autres aspects périphériques mais néanmoins très présents qui alimentent l'actualité des gens dans les divers milieux.

Donc, l'objectif que nous poursuivons à ce moment-ci comme commission, en tout cas la façon dont, moi, je le vois, je l'interprète, c'est que nous voulons nous approprier très correctement, le mieux possible, et pas surtout en termes de chiffres ou de statistiques, mais en termes de phénomène, la nature et l'ampleur de ces fluctuations de population; de bien comprendre les problématiques que cela pose aux différents intervenants dans leurs champs de compétence respectifs; d'entrevoir des solutions et des interventions qui seraient susceptibles de faire du judo avec cette situation-là et de tirer les meilleurs bénéfices possible de l'action mais aussi de pallier aux inconvénients qui sont réels dans ce domaine-là et, enfin, peut-être d'être en mesure d'énoncer un certain nombre de recommandations qui pourraient être utiles pour la suite des choses.

En fait, notre mandat s'inscrit dans la prise en considération d'un dossier d'importance au regard non pas de l'immédiateté, mais du moyen terme de façon à pouvoir s'outiller, comme parlementaires, pour avoir des données mais aussi des points de vue et certainement des démonstrations de ce qui serait opportun de faire dans un avenir prochain.

Alors, c'est dans un esprit extrêmement constructif que nous nous présentons ici, et je dois vous dire, Mme la Présidente, que je suis très heureux de voir que la réaction auprès des intervenants a été si bonne et qu'il nous a fallu accroître le nombre de jours qu'on serait en commission, mais j'en suis heureux, ça signifie qu'il y a réellement là une problématique à laquelle il nous faut nous adresser. Et, également, les intervenants vont nous donner des bonnes indications. Donc, dans cet esprit positif, nous abordons les travaux à compter de maintenant, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le député de Bellechasse.

M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je veux vous dire mon intérêt pour ma participation à cette commission dont je ne suis pas membre régulier et je veux féliciter les parlementaires membres de la commission pour cette excellente initiative de regarder de près toute cette problématique qui nous confronte déjà depuis un certain nombre d'années.

J'ai un intérêt particulier pour cette question, qui sera débattue au cours des prochains jours, pour deux raisons principales: premièrement, j'ai moi-même oeuvré comme directeur d'école pendant huit ans au primaire et sept ans au niveau secondaire. Donc, j'ai eu l'occasion de voir de près qu'est-ce que signifiait la diminution d'une clientèle scolaire dans le milieu que je représente maintenant. Dans la circonscription de Bellechasse, parce que c'est celle évidemment que je connais le plus, mais je sais que c'est un problème qui déborde largement une seule circonscription, cette problématique est réellement présente, puisque depuis 10 ans il y a quatre écoles primaires, la dernière école de village, qui malheureusement ont été fermées, dont celle où j'ai fait mes études primaires, à Saint-Nazaire, où j'ai été maire pendant 14 ans, et je peux vous dire que ça a été un petit drame lorsque ça s'est produit en juin 2001. Alors donc, c'est quelque chose qui ne me laisse pas du tout indifférent.

Et, toujours dans ma circonscription, sur 29 paroisses, 29 municipalités, il y en a une vingtaine dont le nombre d'élèves est inférieur à 100 au niveau primaire. C'est dire toute l'anxiété qui habite les parents de ces endroits où on peut sentir une certaine menace.

n (9 h 20) n

J'observe aussi que, au fur et à mesure que cette problématique est présente, contrairement à ce qu'on réclame habituellement en région, où on veut que les décisions soient rapprochées, c'est tout à fait l'inverse qu'on observe. Quand l'école est menacée, on voudrait que ce soit le ministère de l'Éducation qui décide, oui ou non, du maintien ou de la fermeture d'une école, contrairement à ce qu'on veut habituellement, où on veut que les décisions soient prises par des gens plus près. On ne voudrait pas que ce soit la commission scolaire, mais on voudrait que ce soit plutôt le ministère de l'Éducation qui ait une politique claire là-dessus.

Je souhaite, moi, comme parlementaire, que les travaux de cette commission puissent permettre de dégager des pistes de solution dans une atmosphère la plus positive possible et empreinte d'ouverture d'esprit. Il y a d'excellentes suggestions qui peuvent être faites. Ce n'est pas facile. Parce que, si c'était facile, on n'en parlerait pas aujourd'hui. Alors, vous pouvez être certains que, par les journaux, par Internet ou d'autres moyens, les travaux de cette commission seront suivis avec énormément d'intérêt à l'extérieur, particulièrement dans les régions qui, malheureusement, doivent subir un déclin démographique; et c'est le cas à des endroits qui ne sont pas très éloignés de Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Bellechasse. M. le député de Vaudreuil.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Oui. Merci, Mme la Présidente. Bien, d'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue à tous les membres de la commission et au ministre également, qui se présente devant la commission ce matin; ce qui témoigne certainement de son intérêt pour ce sujet-là. On voudrait le remercier.

Je voudrais vous rappeler, Mme la Présidente, que c'est au début de 2001 que j'ai moi-même, à titre de porte-parole de l'opposition officielle, suggéré que la commission de l'éducation tienne un mandat d'initiative sur la question de la décroissance des clientèles scolaires et, dans certains milieux, de la croissance des clientèles scolaires. Je l'avais demandé parce que c'est un phénomène, comme on l'a mentionné ? et le député de Saint-Jean et le député de Bellechasse sont deux personnes qui ont une expérience d'ailleurs dans le domaine de l'enseignement ? qui est allé en s'accentuant au cours des 10 dernières années en raison des facteurs combinés du taux de natalité et de l'exode des jeunes en milieu rural. Et, à titre de porte-parole de l'opposition, également à titre... comme membre du caucus et avec d'autres collègues, nous avons reçu beaucoup de lettres ou de représentations de groupes ou de parents qui se disaient inquiets devant la fermeture d'écoles, les menaces de fermeture d'écoles et qui se disaient également un peu impuissants. C'est donc en février 2001 que la commission avait accepté de tenir ce mandat, et nous avions même, au cours de la séance de travail du 11 avril 2001, prévu que ces auditions pourraient se tenir à l'automne 2001.

Évidemment, pour toutes sortes de circonstances et peut-être devant certaines hésitations possiblement également de certains membres de la commission, ça a dû être reporté. Et je ne porte pas de jugement là-dessus; l'important, c'est que ça puisse se tenir à l'automne 2002. C'est bien sûr que, si ça avait pu être l'an dernier, ç'aurait été encore préférable.

Les parents se sentent un peu impuissants, et là ce n'est pas un commentaire du tout à l'égard de la représentativité des membres des commissions scolaires, au contraire, ou des commissaires. Mais l'impression que les parents ont parfois, c'est que la fusion des commissions scolaires et l'agrandissement des territoires les ont un peu éloignés du pouvoir de décision ou d'influence politique au sein des commissions scolaires ? et je pense que le député de Bellechasse sera peut-être en mesure d'en témoigner également. Vous savez, je suis moi-même originaire d'une région, d'un petit village, et je connais très bien l'importance que revêt une école dans un village. C'est un élément central de la vie et du devenir d'un village.

Donc, ce mandat, quant à nous, il s'inscrit également dans le cadre de la revalorisation du rôle des parlementaires. Le ministre de l'Éducation le sait, il a été président de la commission des finances ? fonction qu'il a assumée avec beaucoup d'autorité d'ailleurs ? il y a eu un rapport, l'an dernier, sur la revalorisation du rôle des parlementaires dans les discussions politiques. Et, quant à moi, quant à nous, ce mandat s'inscrit également dans cette perspective d'une contribution plus importante des parlementaires, sur une base non partisane, dans un esprit très constructif ? et je pense que, ça, c'est extrêmement important ? à l'élaboration de politiques.

Je dirais que, dans ce mandat-ci, notre rôle, c'est d'abord de bien connaître et de bien établir les faits, avec les personnes et les groupes qui viennent devant nous, qui sont intéressés par cette question ? et on a pu voir que ça intéressait beaucoup de personnes, et tant mieux; d'évaluer l'évolution de cette situation, ses impacts non pas seulement à court terme, mais également à moyen et long terme ? ce qui est essentiel ? et de contribuer également à suggérer de façon constructive des éléments de solution et des avenues à moyen et à long terme. Parce que l'éducation, ce n'est pas comme un commerce, vous le savez. Je pense qu'on ne peut pas maintenir artificiellement les clientèles. Il ne s'agit pas de dire: On va faire deux bacs ou trois bacs pour maintenir la clientèle. Je pense qu'il faut répondre à la demande, mais actuellement la demande, dans plusieurs régions du Québec, est en décroissance.

Cette commission va nous donner l'occasion de poser à la fois au ministre à la fois également aux autres intervenants une série de questions. D'ailleurs, je pense que le ministre peut, à titre d'exemple... Comment entend-il faire, face à ce phénomène à long terme, ce qui est important pour les régions et pour nos jeunes, pour les familles également? Je sais que le ministre a déjà pris certaines mesures sur le plan financier, mais ça se révèle, je pense, un peu davantage des interventions ad hoc et moins comme des engagements à long terme qui sont susceptibles d'assurer l'efficacité des solutions pour les parents, pour les élèves et pour les milieux concernés. À titre d'exemple, y a-t-il des économies dans les diminutions de la clientèle? Quels sont les rôles des autres intervenants dans les milieux concernés, en plus des commissions scolaires, de ceux et celles qui sont immédiatement impliqués dans la question de l'éducation?

Jusqu'où compte-t-on maintenir les activités d'enseignement dans une école? Y a-t-il une masse critique en dessous de laquelle on ne peut descendre? Tout ce qui touche les classes multiniveaux ou multiâges, est-ce qu'on doit l'encourager? Parce qu'il semble que ce soit une formule qui est performante, d'après ce qu'on peut voir. Quelles sont les conditions de succès de la mise en place de ces classes multiâges ou multiniveaux? Moi-même, je suis le produit d'une école à multiniveaux, Mme la Présidente. Dans mon petit patelin, je suis allé dans une école où il y avait huit années, une seule institutrice et avec à peu près 16 élèves. Alors donc...

M. Simard (Richelieu): ...

M. Marcoux: Pardon?

M. Simard (Richelieu): ...si mauvais que ça.

M. Marcoux: Je vous laisse en juger. Mais je pense que, m'excluant, il y en a d'autres qui ont su très bien se tirer d'affaire, qui ont reçu une très bonne éducation dans cette situation-là. Et j'imagine qu'il y a peut-être d'autres de ma génération qui ont également vécu ces expériences qui, dans le fond, étaient, à mon avis, positives. Je suis donc très optimiste sur les travaux de la commission.

Je voudrais signaler cependant que ma collègue de Bonaventure, qui est responsable des régions, et moi-même avions demandé, au début de septembre, un moratoire temporaire sur la fermeture d'écoles. La perspective étant la suivante: c'est que, un, il y a des travaux qui se font actuellement et qui devraient conduire à des pistes de solution; deuxièmement, l'année scolaire est déjà commencée, donc, je pense que ça ne change rien pour l'année en cours; troisièmement, je comprends que le ministre a décidé de mettre sur pied également un autre groupe de travail sur le maintien des écoles, et j'y reviendrai dans un instant. Donc, un moratoire temporaire, parce que vous savez comme moi que, lorsqu'une fermeture d'école est décrétée, c'est irréversible, et on ne peut pas revenir en arrière. Donc, avant de prendre des décisions à court terme, prendre quelques mois pour dire: On maintient pour le moment et on pourra ensuite agir selon une politique et un plan d'action cohérents. Et voilà pourquoi nous avions demandé un moratoire temporaire, et c'est ce que nous referions si c'était à refaire.

Enfin, un dernier commentaire parce que mon collègue de Westmount?Saint-Louis veut également intervenir quelques minutes. Nous avons noté évidemment que le ministre a mis sur pied, au mois de juin, un groupe sur le maintien des écoles de villages. On se rappellera évidemment que le parti au pouvoir avait promis une politique sur les écoles de villages en 1994. Donc, ça fait huit ans. Mais la commission de l'éducation s'est donné un mandat d'initiative. En tout cas, ça a été confirmé, le maintien des consultations au mois d'avril ou mai de cette année. Donc, après, le ministre a décidé de mettre sur pied ? oui, nous avons les dates; je pense que là-dessus on peut confirmer ? un autre groupe de travail, ce à quoi évidemment nous n'avons aucune objection, mais, si la commission parlementaire, la tenue des audiences avait eu pour effet, je dirais, de faire hâter le ministre dans ses recherches sur des solutions et un plan d'action, bien tant mieux.

n (9 h 30) n

Et j'imagine aussi qu'on pourra voir, compte tenu du rôle des parlementaires, comment le ministre pourra harmoniser évidemment les travaux du comité et ses conclusions par rapport aux conclusions qui pourront se dégager de la commission parlementaire après avoir entendu les différents intervenants.

Donc, Mme la Présidente, je voudrais vous dire que c'est avec beaucoup d'intérêt et beaucoup d'espoir que nous entreprenons, comme le disaient d'ailleurs le député de Saint-Jean et le député de Bellechasse, cette commission parlementaire sur un sujet fort important pour l'avenir des jeunes et l'avenir des familles, pour l'avenir des régions au Québec.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Vaudreuil. M. le député de Westmount? Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes, MM. les collègues, mesdames, messieurs qui sont dans l'auditoire ici, le mandat d'initiative d'une commission parlementaire fait ressortir, à chaque fois qu'il est utilisé... Il est utilisé de temps en temps, dans le fond probablement pas suffisamment souvent, mais il fait ressortir ce qui est considéré par les parlementaires comme étant une problématique sociale importante. Le dossier que nous avons devant nous, Mme la Présidente, sera sûrement considéré, jugé par non seulement les gens qui sont ici et qui nous regardent, mais par nos collègues parlementaires et aussi par l'ensemble de la population qui s'intéresse à ce genre de question là comme étant un des mandats les plus sérieux qu'une commission parlementaire peut étudier.

L'avenir de l'organisation de nos institutions scolaires, du primaire à l'université, compte tenu de la problématique de la démographie, ne peut pas faire autrement que d'inviter, d'interpeller chacun des parlementaires à se poser des questions sur quelle forme de société voulons-nous voir organiser pour l'avenir, et c'est fondamentalement, d'ailleurs, la raison pour laquelle éventuellement nous posons le geste individuel de se, un jour, présenter en politique, parce que nous croyons que nous pourrions modestement et humblement aider à faire en sorte que notre société vive dans de meilleures conditions et s'occupe spécifiquement de choses qui nous préoccupent d'abord personnellement.

Or, la situation que nous vivons est une situation dont l'histoire nous a déjà fait connaître quelques indices. Nous connaissons et nous allons connaître une diminution de clientèle scolaire, particulièrement dans les années à venir, qui est commencée, mais qui va s'accentuer dans les années à venir et qui ressemble beaucoup à ce que j'ai vu un peu quand j'ai commencé à... La première fois que j'ai été élu dans une commission scolaire, en 1975, on était en période de diminution de clientèle. Entre 1971 et 1985, les commissions scolaires ont perdu, à l'époque, presque 35 % de leur clientèle. Et, si on se rappelle bien, ça faisait écho à l'époque post... dans le fond, juste un peu avant le baby-boom ou le début du baby-boom, au moment où les diminutions démographiques étaient en pleine... en pleine chute. Et, par la suite, il y a eu redressement léger et, généralement, une certaine, relative stabilité au niveau de la démographie un peu partout au Québec. Et nous allons reconnaître une nouvelle décroissance, ce qui, évidemment, amène toutes nos institutions, particulièrement les parlementaires, le ministère de l'Éducation, les commissions scolaires, les municipalités... Enfin, tous les groupes sociaux que nous connaissons ne pourront pas faire autrement que regarder cette situation-là et s'en préoccuper.

J'étais assis dans le fauteuil qu'occupe aujourd'hui le député de Richelieu au moment où on a cristallisé une partie de cette question-là, que je trouvais extrêmement importante à l'époque, dans un dossier de Bastican, la fermeture de l'école de Batiscan, de Saint-Lucien, dans la commission scolaire des Chênes à l'époque, et on avait fait un grand four sur le plan politique avec cela. Je me rappelle que le chef de l'opposition de l'époque se promenait un peu partout au Québec pour dire comment il était pour régler cette question-là définitivement, mais, comme ministre de l'Éducation, à l'époque, j'étais pris un peu comme le ministre l'est actuellement, c'est-à-dire qu'il doit se poser des questions comment on gère ce genre de situation là.

Le député de Bellechasse, notre collègue, nous disait qu'il avait lui-même connu une fermeture d'école dans la paroisse qui l'a vu naître, Saint-Nazaire, récemment, et ça, quand tu es ministre de l'Éducation, ça ne te plaît pas, sauf qu'il y a des contraintes et, parmi les contraintes, il y a évidemment le poids des décisions locales, jusqu'à quel point tu dois représenter et respecter les décisions prises localement par rapport à ce voeu un peu machiste qui voudrait que tu règles le problème en donnant un coup de barre à gauche et à droite à chaque fois qu'un problème se présente à ton bureau, au ministère de l'Éducation, et ça, cette problématique-là devient fort compliquée. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles cette commission parlementaire là risque d'être importante, parce qu'elle peut nous amener à des pistes de solution qui soient un peu différentes de celles qu'on a toujours vécues.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Westmount?Saint-Louis, il vous reste une minute pour conclure.

M. Chagnon: Merci beaucoup, alors ce qui m'amène à penser qu'on devra évidemment se concerter rapidement pour essayer de trouver des solutions à ces problèmes-là. Je regrette par ailleurs, Mme la Présidente, que nos collègues de l'ADQ, de l'Action démocratique du Québec, n'aient pas jugé opportun de venir travailler avec nous. Ça fait neuf ans que je suis parlementaire, je ne les ai jamais vus encore en commission parlementaire. J'aurais apprécié les voir. Je pense que c'est un dossier qui a une importance certaine non seulement pour l'ensemble des communautés non seulement du monde rural, mais l'ensemble des communautés québécoises, et je trouve absolument dommage que nos collègues n'aient pas jugé opportun de venir discuter de ces questions-là avec nous. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Westmount, vous savez fort bien, avec l'expérience que vous avez, qu'on ne doit pas souligner l'absence des parlementaires.

M. Chagnon: Je n'ai pas souligné l'absence d'aucun parlementaire, j'ai souligné l'absence d'un parti politique...

Une voix: C'est la même chose. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): C'est très, très proche de la ligne quand même.

M. Chagnon: ...ce qui m'amène à conclure... Vous pourriez peut-être créer une nouvelle jurisprudence, Mme la Présidente, nous permettant de pouvoir signaler l'absence d'un parti politique et non pas l'absence de parlementaires.

La Présidente (Mme Bélanger): Nous en discuterons.

M. Chagnon: Mais c'est vous qui êtes la libre arbitre de cette question, madame. Et ma conclusion sera la suivante: je souhaite évidemment que les travaux de cette commission puissent nous éclairer davantage, à permettre non pas à regarder les questions sur l'angle politique à court terme... À l'époque, en 1994, le gouvernement qui est devenu votre gouvernement, qui nous a remplacés, avait promis une politique pour régler cette question-là, on l'attend toujours. Mais c'est des choses qui peuvent se dire comme ça peut-être dans le feu d'une campagne électorale, mais ce n'est pas vrai que, du jour au lendemain, on peut régler ce genre de question là autrement que par la réflexion et le genre de travail que nous allons faire dans les jours qui viennent. Et je vous invite, Mme la présidente, à faire en sorte de dépasser les problèmes et les approches partisanes pour tenter de régler les vrais problèmes dans ces questions-là. Merci beaucoup.

Auditions

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Westmount?Saint-Louis. Alors, nous en sommes à l'intervention de M. le ministre. Vous avez 15 minutes, M. le ministre, pour faire votre intervention... pardon, 20 minutes.

M. Simard (Richelieu): Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): ...d'une discussion de 20 minutes chaque côté de la Chambre.

M. Simard (Richelieu): Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, si vous voulez nous présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. Sylvain Simard, ministre d'État
à l'Éducation et à l'Emploi

M. Simard (Richelieu): Absolument. Je vais d'abord faire cela. Ça me permettra d'ailleurs de présenter un tout nouveau sous-ministre adjoint, puisque sa nomination a été faite la semaine dernière au Conseil des ministres, M. Louis Gendreau, qui est maintenant responsable de la recherche au ministère de l'Éducation. À ma droite, Jacques Turgeon, de mon cabinet, et Gilbert Gardner qui s'occupent respectivement des cégeps et du secondaire et primaire. Voilà.

Mme la Présidente, à mon tour de féliciter la commission d'avoir pris l'initiative ? c'est le cas de le dire ? d'entreprendre ce mandat si important. J'aurai l'occasion d'y revenir au cours des prochaines minutes, mais je crois qu'il s'agit là d'une occasion unique à saisir, non seulement pour les parlementaires, mais pour la société québécoise, pour faire avancer une réflexion nécessaire. Il est toujours difficile, Mme la Présidente, d'aborder le sujet qui nous préoccupe aujourd'hui sans soulever certaines craintes de nos concitoyens et concitoyennes à l'égard de phénomènes qui sont nouveaux et qui, nous rappelait tout à l'heure le député de Bellechasse, surviennent dans notre propre coin de pays. La mondialisation de notre économie, les pressions qui s'exercent dans nos régions, les mutations du marché du travail, le déséquilibre démographique, le vieillissement de la population ou le maintien des services en santé et en éducation sont, vous le savez, Mme la Présidente, des thèmes de plus en plus d'actualité. Face à l'inquiétude de nos concitoyens, le premier ministre, Bernard Landry, conviait, en mai dernier, l'ensemble des acteurs concernés au rendez-vous national des régions qui se tiendra à la mi-novembre afin de convenir ensemble des priorités d'action et de s'entendre sur les meilleurs moyens pour y parvenir.

n (9 h 40) n

À cet égard, le ministère de l'Éducation est directement interpellé par les grands thèmes qui seront abordés, soit la prospérité économique, la vitalité des milieux et la capacité des régions d'agir sur leur propre développement. Permettez-moi, à cet égard, de réitérer qu'aucune solution ne sera préconisée sans considérer au préalable l'avis des élus locaux et régionaux. On ne peut pas prétendre donner plus de pouvoir aux régions, régler des problèmes qui affectent les régions en diminuant le pouvoir des élus régionaux. Il faut, au contraire, écouter l'avis des élus locaux et régionaux.

À cet égard, je voudrais vous annoncer que le comité de travail auquel le député de Vaudreuil a fait allusion tout à l'heure pour favoriser le maintien des écoles de village qui... Ce comité de travail, qui a été mis sur pied en collaboration entre le ministre de l'Éducation et le ministre responsable des Régions, M. Rémy Trudel, a commencé ses travaux. Le comité, il est coprésidé par MM. André Caron, président de la Fédération des commissions scolaires du Québec, et Jacques Proulx, que vous connaissez tous, de Solidarité rurale Québec, et ces gens sont déjà à pied d'oeuvre pour élaborer un plan d'action qui respectera les volontés des milieux concernés.

Reconnaissant l'école comme élément de la revitalisation de la communauté rurale, le plan d'action identifiera des initiatives concrètes qui iront dans ce sens. À ce sujet, je dois dire ? et en toute référence ? je dois dire aujourd'hui, tout de suite avant d'aborder cette question, que j'arrive ici, moi aussi, avec un esprit non partisan, à l'écoute, bien décidé à profiter de chacune des réflexions, et des travaux, et des connaissances qui seront apportés par la commission parlementaire. Et, si parfois nos propos peuvent avoir une petite saveur partisane, je pense qu'il y a conviction de part et d'autre de cette table, vous le savez bien, vous-même, Mme la Présidente, que nous sommes tous préoccupés par cette question. Et je dois vous dire, à titre de ministre de l'Éducation, que je suis très attentif à toutes les propositions et suggestions qui nous sont faites.

D'ailleurs, à ce propos, permettez-moi ? vous en ferez ce que vous voulez ? d'offrir à la commission, après cette phase d'audiences, après la phase de réflexion, d'offrir mon entière collaboration et celle du ministère pour revenir rencontrer, réagir privément avec la commission à certaines des propositions qui pourraient être faites. Si vous le jugez à propos, comptez, en tout cas, sur notre collaboration, y compris, je vous le dis aussi, sur l'accès à toutes les informations pertinentes. Vous aurez d'ailleurs cet après-midi déjà un des fonctionnaires du ministère qui viendra, mais je peux vous assurer que, tout au long de cette démarche, vous avez mon entière collaboration et celle du ministère de l'Éducation.

Par contre, il faut bien se rendre compte aussi qu'il faut se méfier ? le député de Westmount?Saint-Louis rappelait certaines de ses propositions antérieures, ce qui départisane déjà notre point de vue au départ ? se méfier des solutions mur à mur, des solutions magiques qui, tout à coup, régleraient tous les problèmes d'un coup de cuillère à pot, là, sans se poser davantage de questions. Évidemment, il n'est pas très courageux d'annoncer qu'à partir de septembre, date où les décisions sont déjà prises et la prochaine élection, c'est-à-dire vraisemblablement avant la prochaine rentrée scolaire, on déclarerait un moratoire. On ne changerait strictement rien à rien, puisque les décisions pour cette année sont prises, et ça n'influencerait pas les décisions pour l'avenir. Si l'opposition officielle était sérieuse là-dessus, sans doute nous aurait-elle proposé un moratoire pour trois ans, cinq ans. Là, on aurait pu regarder ça avec beaucoup plus d'attention. Évidemment, ç'aurait été peut-être plus convaincant. Mais, encore là, méfions-nous des solutions faciles qui semblent régler les problèmes alors qu'elles ne font que jeter un petit peu de poudre aux yeux d'ici les élections.

La démocratie régionale et locale, je l'ai dit tout à l'heure, il faut la respecter. Ce sont des élus locaux qui prennent les décisions. Je vous dis que la Loi de l'instruction publique ne donne pas pouvoir... Et, là je l'apprends peut-être à certains parlementaires et certainement une partie de la population, puisque, à chaque fois, on demande l'intervention du ministre, la Loi de l'instruction publique confie aux commissions scolaires la responsabilité de cette planification, de cette décision de poursuivre ou de cesser les activités d'une école dans un village. Et ce que l'on demanderait maintenant, c'est, à un moment où on tente de décentraliser, de laisser le pouvoir aux populations locales... On demanderait au ministère de l'Éducation dorénavant de décider quelles sont les écoles qui restent ouvertes, quelles sont les écoles qui restent fermées. Il me semble qu'il s'agit là d'une dérive dangereuse. Ceci dit, il faut que des règles soient respectées, que des normes soient clairement exprimées, que des moyens soient mis entre les mains des commissions scolaires pour poser des diagnostics appropriés et prendre des décisions correctes. Il faut sans doute le faire, mais rappelons-nous toujours que cela se passe dans le respect des responsabilités des commissions scolaires.

Lorsqu'un groupe de citoyens ? et je les comprends ? en colère, déçu d'une décision fait appel publiquement au ministre pour renverser la décision de la commission scolaire, je leur dis à l'avance que la loi ne permet pas au ministre de renverser une décision de commission scolaire. Par exemple, si nous avions suivi la suggestion de l'opposition, il aurait fallu une loi spéciale, il aurait fallu qu'il y ait une loi à la rentrée pour décréter ce fameux moratoire qui n'aurait eu d'effet qu'entre la date de cette loi et l'élection prochaine, puisque c'est ça qui était... donc, qui n'aurait pas changé la réalité dans une seule école, mais en plus il aurait fallu changer la loi, même, pour y avoir droit. L'article 211, vous le connaissez, Mme la Présidente, est très, très clair à ce sujet.

Les régions sont et resteront au coeur des préoccupations du ministère de l'Éducation. L'économie du savoir, c'est bien, mais ce à quoi il nous faut aspirer, c'est à une véritable société du savoir, une société où tous ont accès à l'éducation sans distinction de race, de couleur, j'allais dire et de région. Dans ce contexte, je tiens à saluer l'initiative de votre commission qui souhaite examiner le phénomène de la fluctuation des clientèles scolaires et ses impacts dans les communautés concernées. Votre commission s'est fixé comme mandat de proposer des solutions concrètes, réalistes ainsi que d'identifier des conditions favorables au maintien des écoles ? vous avez déjà indiqué votre préjugé favorable au maintien des écoles; c'est ce qui nous unit dès le point de départ, nous sommes tous favorables au maintien des écoles ? et ainsi que d'identifier les outils indispensables pour assurer la vitalité des communautés. Je me félicite à nouveau, Mme la Présidente, de cette démarche qui rejoint en tous points mes préoccupations et, en ce sens, je vous remercie de me recevoir aujourd'hui.

Concernant l'ampleur des fluctuations de clientèle, la commission a déjà produit un document... déjà une contribution de valeur. Le document qui a été produit est extrêmement intéressant. Ce n'est pas une problématique nouvelle, certains le rappelaient tout à l'heure. J'ai été associé il y a une quinzaine d'années, pour un grand groupe national, à la préparation d'un document sur cette question et sur les effets de la situation démographique. Les Québécois pouvaient prévoir ces situations-là il y a déjà pas mal d'années. Mais, en fait, on le sait, ne suffit pas de prévoir, arrive un moment où nous devons faire face et vivre ces situations-là, et voilà où nous en sommes.

Dans les commissions scolaires, les collèges, les universités, cette question s'est mérité une attention toute particulière au cours des dernières années. Au niveau du gouvernement, cette préoccupation s'est traduite par l'adoption de mesures financières importantes pour soutenir les écoles de village ainsi que les cégeps et les universités en région. Elle s'est traduite également par l'adoption d'actions ciblées afin de maintenir ? et c'est là notre principale mission ? l'accessibilité et la qualité des services éducatifs pour tous les élèves du Québec.

Dans les faits, les données recueillies par le ministère permettent de constater une croissance des clientèles dans certaines régions, par exemple Montréal, les Laurentides. J'ai été aux prises, au cours des dernières années, par exemple, avec un phénomène dans l'Outaouais ou dans le secteur de Hull, une école dans le quartier du Plateau a été construite, le jour de son ouverture était déjà en surplus, alors que la même année la commission scolaire devait fermer certaines écoles du centre-ville. Vous voyez, nous sommes aussi dans des phénomènes beaucoup plus complexes que la simple décroissance généralisée, parfaitement partagée sur tout le territoire, des clientèles, nous sommes devant des phénomènes parfois contradictoires où, d'une région à l'autre ou même parfois à l'intérieur d'une même région, nous avons des ouvertures d'écoles nécessitées par la création de nouveaux quartiers, notamment par l'étalement urbain et, par ailleurs, des régions entières où les écoles sont remises en question.

n (9 h 50) n

Une analyse plus fine nous permet de constater donc la coexistence de deux phénomènes à l'intérieur d'une même commission scolaire. De plus, la baisse des clientèles scolaires est présente non seulement en région, dans les milieux ruraux, mais aussi dans certains quartiers des villes. Dans mon comté de Richelieu, à Sorel-Tracy, ceux qui ont eu le plaisir de venir à mon bureau de comté sauront que mon bureau de comté, depuis neuf ans, est dans une école désaffectée, qui avait fermé l'année précédente, qui s'est vue transformée... Et, mon histoire est assez banale, je suis sûr qu'il y a beaucoup de députés ou, en tout cas, beaucoup de citoyens au Québec qui connaissent ce phénomène où ces écoles sont maintenant occupées par des groupes communautaires, ont une activité de retour de services à la communauté, mais où il y avait, il y a à peine huit ou neuf ans... C'est en 1993 que ça a été fermé, cette école, à Sorel, c'était évidemment le point final, la clôture de la décroissance économique et démographique d'un quartier central, important de Sorel. Vous voyez, c'est un phénomène qui n'est pas uniquement rural. Bref, tous ces aspects doivent être considérés dans notre recherche de solutions.

Au mois de mai 2000, les commissions scolaires, vous vous en souvenez, ont organisé un colloque portant sur les fluctuations de clientèle qui a regroupé de nombreux intervenants du monde de l'éducation. Durant les interventions, les impacts financiers, économiques, administratifs y ont été largement décrits. Je vous en souligne certains ? et j'imagine que la commission a déjà obtenu tous les documents issus de ce très important colloque; si ce n'est pas fait, je suis convaincu que les parlementaires trouveraient grand intérêt à avoir accès à cette documentation ? on y parlait de l'alourdissement de certains frais, la non-adaptation du travail scolaire, l'augmentation des classes multiprogrammes.

À propos des classes multiprogrammes, auxquelles le député de Vaudreuil faisait allusion tout à l'heure, j'ai aussi assisté... Je n'ai pas étudié dans une école multiprogrammes, mais je me souviens de ma tante Candide qui enseignait dans une école à sept niveaux. Eh bien, on a, pendant des générations au moins, considéré que ces écoles étaient négatives, qu'il fallait ranger ça dans l'arsenal du passé, on s'aperçoit... Il y a des études qui ont été faites récemment en France, on a eu des résultats et on le voit aussi, parce que je pose régulièrement la question ici, dans nos commissions scolaires, que les résultats sont relativement positifs. On parle même de plus de chances de succès actuellement pour des élèves issus de multiprogrammes, c'est-à-dire que les aînés aident les plus jeunes, il y a une socialisation différente qui se fait. Il ne faut pas rejeter du revers de la main, quand elle se présente, une solution comme celle-là parce qu'elle est aussi une solution à la disposition des parents et des commissions scolaires. Il faut donc... On avait parlé, lors de ce colloque, du besoin d'instaurer de nouveaux modèles d'organisation scolaire.

Plus récemment, au printemps 2001, un comité mixte, ministère-Fédération des cégeps, a dressé un état de situation concernant la baisse des effectifs au niveau collégial, et vous vous souvenez que j'ai annoncé à la suite de ce rapport un plan d'action, injection de plus de 15 millions, des mesures extrêmement structurantes et importantes pour aider nos cégeps en région.

Depuis 1999, d'importantes mesures financières ont été adoptées pour compenser l'effet de la réduction des effectifs scolaires. Je vous en cite quelques-unes. Au total, c'est cette année seulement, là... Je pense que le chiffre... Je pourrai revenir sur le détail des chiffres, le temps file, mais vous dire que, simplement cette année, c'est 47 millions de dollars que nous avons rajoutés dans la base de financement des commissions scolaires pour compenser les effets négatifs des baisses d'effectifs. C'est pour ça d'ailleurs que vous avez très, très peu de cas d'écoles actuellement.

Par rapport aux centaines de situations où il y a des difficultés, il y a très, très peu de cas, actuellement, de fermeture parce qu'il y a eu des mesures financières majeures, très, très importantes, un effort considérable du ministère de l'Éducation, du gouvernement dans le financement des commissions scolaires pour compenser très directement les baisses d'effectifs. Je ne vous ferai pas ? on aura une période de questions, réponses ? la liste de ces mesures, mais elles ont toutes comme objectif de compenser les petites commissions scolaires, les commissions scolaires où il y a de petites écoles pour les pertes de revenus consécutives à cette situation, ce qui a permis évidemment de faciliter le maintien, dans presque tous les cas, des écoles de village cette année. Je passe donc sur toutes ces mesures qui sont évidemment très importantes, la décomposition de toutes ces mesures, je pourrai vous y revenir tout à l'heure.

Je voudrais vous parler un instant des universités en région. Votre mandat s'étend évidemment à toute la question des effectifs scolaires, et il ne faudrait pas négliger les universités en région. Pour nous ? et c'est vrai également pour les cégeps ? cégeps et universités en région sont non seulement des institutions d'enseignement essentielles à l'accessibilité à l'éducation, mais ce sont des pôles de développement économique, social et culturel. C'est autour, en région, des cégeps et des universités que les axes de développement prennent toute leur signification. C'est autour de l'initiative de la recherche, de l'enseignement diffusés ou faits par ces universités et ces collèges que les régions, actuellement, peuvent espérer développer leur économie et leur vie sociale.

Il y a des exemples multiples. Il n'y a qu'à aller à Rimouski pour se rendre compte de l'influence considérable de l'Université du Québec, de nos instituts de recherche, du cégep, notamment dans le domaine maritime, pour comprendre l'impact considérable sur cette région qu'une université et un collège peuvent avoir. Et on pourrait citer une foule d'exemples. D'ailleurs, lors d'une rencontre récente entre le premier ministre, le ministre des Régions et moi-même avec les recteurs d'universités en région, nous avons convenu qu'il était essentiel d'accélérer encore, d'accentuer, si c'est possible ? et le Sommet des régions devrait être une excellente occasion pour remettre ça sur la table ? d'accentuer l'aide apportée à ces institutions afin de nous assurer qu'elles jouent pleinement le rôle de pôle de développement économique et social dans les régions. Alors, voilà pour les universités. Elles ont été ? je vous le souligne, pour ceux qui l'auraient oublié ? elles ont été les grandes gagnantes des contrats de performance que nous avons mis en place il y a deux ans, puisque le financement qui leur a été apporté a tenu compte de leurs réalités, de l'étendue des territoires à desservir et leur a permis d'avoir plusieurs dizaines de millions de dollars supplémentaires.

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Oui, je sais. Vous voyez très bien que j'aurais des milliers de choses à dire, mais on aura l'occasion d'en rediscuter. Je veux simplement faire savoir à cette commission que notre intention, au gouvernement, est de mettre tout en oeuvre, continuer à tout mettre en oeuvre pour permettre aux populations de toutes les régions du Québec de pouvoir disposer d'écoles de qualité sur leur territoire. Je serai extrêmement ouvert aux travaux de la commission et je félicite tous ses membres et vous-même aujourd'hui pour cette initiative. Je vous assure évidemment de ma plus grande ouverture à l'égard de toutes les propositions qui seront faites visant à améliorer la situation pour maintenant, mais également dans l'avenir, puisque ce dont on doit parler maintenant, c'est dans cinq ans, dans 10 ans. Et je suis extrêmement heureux de voir que cet esprit qui règne aujourd'hui cherche à trouver des solutions plutôt qu'à lancer des pierres dans le jardin du voisin. C'est un..

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Alors, je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Merci, Mme la Présidente. Merci, M. le ministre, de cette contribution à nos travaux et de l'ouverture que vous manifestez pour la suite des choses. Il y a un point qui m'apparaît fort important dans ce que vous avez dit, concernant notamment ce qui se passe en région eu égard à la présence d'une université, d'une de ses composantes, d'un cégep ou d'un de ses campus, et dans un village, au niveau de la dernière école, par exemple, c'est que je pense qu'on n'est pas, au Québec, dans une dynamique d'instruction publique seulement, c'est-à-dire où le réseau du ministère ne servirait qu'à donner des instructions, qu'à donner de l'instruction à des personnes, il y a vraiment cette dimension de l'éducation qui, à travers l'instruction, mais aussi au-delà de l'instruction, a toutes sortes d'influences dans le milieu, et on peut parler d'une éducation au sens beaucoup plus large que la simple transmission de faits particuliers d'un professeur à un étudiant, par exemple. C'est pour ça que je ne crois pas, moi, que l'informatique ou l'enseignement à distance pourraient remplir le rôle que joue une institution ancrée dans son milieu, contribuant à le façonner, ayant une aura intellectuelle et aussi professionnelle autour de ça.

n (10 heures) n

Dans un milieu donné, on pourrait instruire des personnes, mais on n'aurait pas ce rôle d'institution d'éducation. Je pense à ce lieu de vie intellectuelle et professionnelle, ce lieu d'excellence du savoir, de transfert technologique, de transmission de valeurs, de raccrochement à des intervenants du milieu, de participation à la définition du milieu, à son projet de développement, à son adaptation en fonction des emplois qui pourraient être disponibles dans ce milieu-là, donc à ce lieu de recherche-action, à ce lieu de transmission de valeurs, à ce lieu qui catalyse la personnalité de tout un milieu. Alors, à cet égard, que ce soit la dernière école dans un village, ou que ce soit la présence d'une masse critique de chercheurs universitaires dans un milieu donné, ou que ce soit l'intervention d'un cégep dans une zone, il y a cette dimension institutionnelle, et j'aimerais ça, M. le ministre, que vous me parliez de cette dimension institutionnelle d'éducation, là, eu égard au milieu, parce que ça pourrait nous donner des barèmes ou des critères de reconnaissance des solutions ou des actions qui pourraient être entreprises de reconnaître leur pertinence.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, question complexe mais question passionnante, question essentielle. Ce n'est pas uniquement une question d'instruction, il ne s'agit pas simplement de transmettre un savoir. L'existence d'une école sur un territoire a un tel effet structurant que c'est toute la question de l'occupation du territoire qui doit être au coeur de nos réflexions. C'est un choix qu'on peut faire. Moi, je connais un économiste ? il est connu d'ailleurs ? à l'Université Laval qui voudrait qu'on ferme quatre ou cinq régions au Québec, qu'on rapatrie ça à Montréal et il fait une démonstration comptable qui le satisfait, lui, pleinement.

Ce n'est pas le choix que les Québécois font, ce n'est pas le choix qu'on a fait au Québec. Bon, on a fait le choix de rendre l'éducation disponible, accessible à tous les Québécois pas seulement aux niveaux primaire et secondaire, je vous souligne qu'on a décidé, par exemple, d'avoir des cégeps dans chacune des régions, ce qui n'est pas le cas des autres juridictions au Canada. Il y a 49 cégeps au Québec, il y en a 16 en Ontario. C'est une décision qui a été prise de faire en sorte que, sur tous les territoires, sur tout le territoire du Québec, il y ait accessibilité. Le réseau de l'Université du Québec, qui a été mis sur pied à la fin des années soixante, début des années soixante-dix, visait aussi la même réalité, rendre accessible, parce qu'un réseau d'éducation, c'est plus que simplement un lieu de transmission du savoir. L'école, c'est aussi un lieu où le tissu social d'une communauté prend toute sa signification, où certes les savoirs se transmettent, mais aussi la socialisation se réalise. Se socialiser parmi les siens, chez soi, entouré de ses parents, entouré de ses amis, ce n'est pas la même chose qu'être socialisé à 60 km.

Prenons un exemple radical, Baie-Johan-Beetz. Vous savez peut-être où c'est, sur la Basse-Côte-Nord, mais Baie-Johan-Beetz, il y a six élèves au primaire. Vous avez le choix, ou bien vous consentez ? ce que nous faisons ? les sommes nécessaires pour maintenir l'école ouverte ou vous fermez le village, parce que six élèves, là, représentent à peu près les sept plus grosses familles du village. Vous ne pourrez pas prendre ces enfants-là et les emmener à Sept-Îles ou les emmener à Québec. Si vous le faites, vous emmenez aussi les parents, vous fermez le village. Donc, la décision que l'on prend lorsque l'on...

Et ce n'est pas toujours comme ça. Je vais vous donner un exemple différent où quatre petites municipalités de mon comté ont décidé, il y a déjà plusieurs années, de former ce qu'on appelle l'école des Quatre-Vents. C'est-à-dire quatre municipalités ont formé un seul enseignement primaire, c'est-à-dire qu'elles se sont attribué des cycles différents. Les élèves font leur maternelle dans un village, font un premier cycle dans un autre village, et ainsi de suite, ce qui a permis... Solution que je ne veux pas transposer sur l'ensemble du Québec, mais solution que les gens ont trouvée pour faire face à cette réalité qui aurait amené inexorablement la fermeture de toutes ces écoles... au moins, de trois des quatre, et qui a été contrée grâce à une mesure qui n'est pas parfaite, pose un certain nombre de problèmes pédagogiques, mais qui, pendant un certain nombre d'années, en tout cas jusqu'à maintenant, a permis de maintenir ouverte suivant justement cette préoccupation que vous manifestez, M. le député de Saint-Jean, que l'école n'est pas uniquement un lieu de transmission du savoir.

Alors, il faut toujours avoir à l'esprit le préjugé que nous devons avoir à l'égard de cette question, et c'est pour ça que... Le député de Westmount?Saint-Louis soulignait... On ne peut pas mentionner l'absence d'un député ici, mais d'une formation politique, on peut quand même y faire allusion. Pourquoi ils ne sont pas ici? Pour une simple raison, le programme officiel de l'ADQ, Mme la Présidente, signifierait la fermeture de la plupart de ces écoles-là. Lorsque vous donnez des bons d'éducation égaux, à 5 000 $ chacun, alors que ça coûte, huit, 10, 12 000 $, 15 000, 20 000 sur la Basse-Côte-Nord pour éduquer un élève, ça veut dire que vous fermez ces écoles-là. Ils ne peuvent pas venir nous dire ça ici ouvertement. Point de vue comptable, ça plaît peut-être dans certains cercles de droite à Toronto, mais je ne pense pas que les citoyens du Québec envisageront avec beaucoup de plaisir de voir des centaines d'écoles possiblement être remises en question par une mesure qui n'a pas de sens, vous le savez tous très bien.

Alors, notre préoccupation ici, des deux côtés de cette Chambre, je crois, elle est très claire, tout mettre en oeuvre pour favoriser l'exercice de cette... On peut même parler d'un droit, dans ce cas, d'avoir son école, droit qui ne peut pas être absolu, qui ne peut pas être... qui doit tenir compte également de la qualité. La politique de la ruralité le dit bien, maintien de toutes les écoles de village, évidemment dans des conditions... Même le communiqué de presse assez habile du Parti libéral, la semaine dernière, le mentionnait, la qualité. Et, on ne peut pas maintenir des écoles pour quatre élèves, on ne peut pas avoir une école qui a 14 élèves à tous les niveaux, il faut qu'il y ait quand même... On doit donner une éducation de qualité. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui parle anglais si on veut enseigner l'anglais. Il faut qu'il y ait un minimum de qualifications réunies. Mais le préjugé favorable doit être tout au long du maintien des écoles partout où c'est possible.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, j'ai écouté attentivement votre présentation et je me suis arrêté à une question que vous vous posez à la page 11 de votre texte et à laquelle vous n'apportez pas de réponse immédiate, alors que vous...

M. Simard (Richelieu): Suis-je rendu à la page 11 de mon texte? Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Je vous y amène, M. le ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Et vous n'y apportez pas de réponse précise, alors qu'aux autres endroits dans votre texte, lorsque vous abordez des thèmes, vous vous expliquez, vous expliquez votre pensée. Alors, en bas de la page 11, vous dites: «Et quel rapprochement avec les...»

Une voix: ...

M. Kieffer: Bien, écoutez, je vous le passerai après, monsieur...

M. Chagnon: Non, mais on n'a pas eu la copie du texte. Ce serait peut-être gentil qu'on en ait une copie, quand même.

M. Kieffer: Tout à fait. Oui. Est-ce qu'il y a moyen...

M. Simard (Richelieu): Je pensais, Mme la Présidente, avoir le temps de le lire au complet, mais ça me fait grand plaisir...

M. Chagnon: On n'en a pas eu de copie.

M. Simard (Richelieu): ...de le transmettre à tous les membres de la commission, d'autant plus que le député de...

M. Kieffer: De Groulx.

M. Simard (Richelieu): ...Groulx ne semble pas avoir la même version que moi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Simard (Richelieu): Donc, je suis sûr qu'il va me situer.

M. Kieffer: Alors là vos services de reproduction ont des problèmes, M. le ministre...

La Présidente (Mme Bélanger): La version a été changée en cours de route.

M. Kieffer: ...parce que c'est bien écrit: Allocution du ministre Sylvain Simard. Bon, écoutez, à tout le moins, vous me corrigerez si ce n'est pas votre intention, mais vous dites: «Et quel rapprochement avec les municipalités?» Et, lorsqu'on lit... Parce que ceux qui vous vont suivre, là, c'est effectivement les deux grandes unions municipales du Québec, hein, la FMQ et l'UMQ, qui ont des revendications très précises, très claires et, je dirais même jusqu'à un certain niveau, très pointues vis-à-vis le rôle qu'ils aimeraient jouer. Par exemple, la FMQ demande, à toutes fins pratiques, un droit de veto. Quand on lit le texte, ce qu'ils disent, c'est que, avant qu'on puisse fermer une école, il faut que la municipalité soit d'accord. Alors, moi, dans mon langage, là, c'est un droit de veto, ça. O.K.?

Votre réflexion... Je sais qu'il va y avoir cet automne le grand rassemblement des régions. Je sais aussi que, dans vos remarques, vos orientations, vous parlez de la nécessaire collaboration, de la nécessaire écoute auprès de la communauté. C'est essentiel dans le maintien des écoles, mais les municipalités sont une structure qui s'inscrit et qui inscrit ses racines à la base même de la vie quotidienne, au même titre d'ailleurs que les commissions scolaires. Alors, qu'est-ce que vous en pensez de votre question lorsque vous dites: «Et quel rapprochement avec les municipalités?»

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

n(10 h 10)n

M. Simard (Richelieu): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Le député de Groulx nous amène dans l'actualité de ce matin, mais beaucoup plus que ça, dans une réalité fondamentale. Le territoire dont je parlais il y a quelques instants, il est occupé par des Québécoises et des Québécois et il est géré, au niveau local, pour certaines fonctions, par les municipalités, mais, pour la gestion scolaire, par les commissions scolaires. D'ailleurs, à l'article 211 de la Loi de l'instruction publique, je souligne que, «chaque année, la commission scolaire établit un plan triennal de répartition et de destination de ses immeubles. Ce plan est transmis à chaque municipalité régionale de comté ou communauté urbaine, dont tout ou partie du territoire recoupe celui de la commission scolaire.» Il y a déjà au départ, là, même dans la loi, le désir d'intégrer, d'impliquer à la décision les municipalités les MRC, les communautés urbaines. Pourquoi? Parce que les citoyens d'une municipalité ne sont pas uniquement des parents d'élèves membres d'une commission scolaire, ils sont aussi des citoyens qui oeuvrent au développement de leur municipalité, et il est tout à fait normal, souhaitable et désirable que les municipalités s'impliquent, s'impliquent de plus en plus dans l'avenir de leurs écoles.

D'ailleurs, l'objectif premier en mettant sur pied... Je sais qu'il y a un peu d'eau dans le gaz ce matin et, peut-être, quelques propos qui ont été un petit peu enflammés de part et d'autre ont semé quelque division. Il y a entre les commissions scolaires et les municipalités des points de vue, semble-t-il, différents, mais les commissions scolaires existent. Personne autour de cette table n'a fait la proposition de les abolir. Elles existent, elles ont des responsabilités, respectons ces responsabilités.

Par ailleurs, il faut absolument que, à la suite des travaux du groupe de travail, du chantier que nous avons mis sur pied sur l'avenir de ces écoles à l'aide du monde rural, du monde municipal et du monde scolaire, que l'on trouve des consensus nécessaires pour que tout le monde, sur le terrain, s'entende, lorsqu'il est question de la fermeture d'une école, que toutes les avenues aient été explorées, que l'on mette à contribution... Et c'est déjà le cas. Je peux vous dire qu'il y a, au Québec, des écoles qui sont maintenues sur le territoire parce que les municipalités fournissent des locaux, parce que les municipalités paient une partie du transport scolaire supplémentaire nécessaire. Il y a actuellement beaucoup de municipalités qui s'impliquent dans l'avenir scolaire de leurs enfants, et ça, c'est souhaitable et c'est sans doute l'un des modèles qui devra sortir des travaux à la fois de votre commission et de ce groupe de travail. Je suis convaincu qu'il est inutile de faire affronter ces deux structures-là. Au contraire, elles doivent travailler et collaborer, mais sans oublier que jusqu'à preuve du contraire... Et là tout est ouvert. Le premier cours de droit, c'était que les parlementaires peuvent tout faire, sauf...

Une voix: Ça a changé, ça.

M. Simard (Richelieu): Oui? Ça a changé?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Simard (Richelieu): C'est vrai que vous avez eu... Ah oui, il y a eu une commission parlementaire au printemps, c'est changé. Bon. Alors, il faudra changer ce premier cours de droit. Le Parlement pourrait, à la limite, changer ces choses-là. Je ne sens pas de volonté de la part de la population du Québec et, en tout cas, ce n'est pas la volonté du gouvernement de changer les structures actuelles qui font en sorte que c'est localement, régionalement, par leur commission scolaire que ces décisions se prennent. Qu'elles doivent se prendre à l'issue d'un processus sur plusieurs années où sont inclus dans la réflexion et la recherche de solutions les municipalités et tous les acteurs du milieu, c'est ça qu'il faut parvenir à mettre en place partout sur le territoire. Mais, ultimement, la responsabilité de fermer ou de maintenir ouverte une école, à mon sens, doit relever, tant que les commissions scolaires ont un sens et elles existent, des commissions scolaires. Sinon, que seront les commissions scolaires si elles n'ont plus ce pouvoir? Ce sont des gestionnaires de transporteurs scolaires ou d'entretien d'édifices, ça n'a aucun sens.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, vous avez parlé de l'importance que la décision se prenne au niveau de la commission scolaire. Moi, je ne veux pas vous mettre dans l'embarras, mais je vais vous dire, la vraie vie, comment ça se passe sur le terrain. Imaginez-vous que, dans mon milieu, il y a des citoyens, il y a des professeurs qui ont changé de commission scolaire cinq fois sans changer d'école. Vous cherchez l'erreur. Vous avez vu la réforme en 1972 ? puis là je ne fais pas de politique partisane, parce que, peu importe le gouvernement, il y avait des commissions scolaires locales sur le territoire comme il y avait de municipalités, ou à peu près ? alors, en 1972, il y a un regroupement chez nous, commission scolaire de l'Élan. Déjà, on a une représentation qui amène un commissaire par municipalité représentée. 1992, ah, ça, ça a été toute une histoire, commission scolaire Lévis-Bellechasse, la chicane poigne, on se ramasse commission scolaire de Bellechasse et, en 1998, commission scolaire de la Côte-du-Sud.

Savez-vous ce qui se passe dans la vraie vie, M. le ministre? Il y a des décisions qui sont prises par la commission scolaire ou les commissions scolaires qui apparaissent, aux parents ou à des gens, abusives. Et là on se dit: Si ça apparaît abusif, on va aller voir notre commissaire. Mais le commissaire, là, qui représente ? encore un exemple ? trois villages, le village A, le village B, le village C, quand il arrive une élection, qu'est-ce que vous pensez qu'il arrive? À moins que ce soit une nouille, ce n'est pas le cas généralement... Supposons que c'est le commissaire du village le plus important qui est élu parce que c'est là qu'il y a le plus d'électeurs... Alors, si le commissaire est élu dans le village B et que l'école qu'on veut fermer est dans le village A, quels sont les recours des parents du village A pour convaincre le commissaire de les appuyer auprès de la commission scolaire? Ça, là, ce n'est pas de la fiction, M. le ministre, c'est de la réalité qu'on vit à l'heure actuelle, et les gens voudraient bien dire: Bien, écoute, on t'attend aux prochaines élections. Mais il s'en fout, le commissaire, parce qu'il n'a pas été élu par... Il a été élu par l'ensemble des électeurs du territoire de son quartier électoral, et les gens, bien, sont laissés pour compte puis ils se disent: Il n'y a plus personne pour nous représenter.

Alors, vous voyez l'espèce d'effet qu'on peut vivre en région lorsque ces situations-là se présentent. Ce n'est pas jojo, et c'est pour ça que vous devez comprendre qu'il y a des gens qui vous demandent d'intervenir, même si ce n'est pas législativement, avec des moyens de persuasion, auprès des commissions scolaires, parce qu'il y a des gens qui regardent ça uniquement sur une base...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Bellechasse, si vous voulez avoir une réponse du ministre, il reste deux minutes.

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente.

M. Simard (Richelieu): Écoutez, c'est certain que nos structures scolaires ont eu tendance, au cours des années, à se rationaliser puis à être moins nombreuses. Écoutez, à Yamaska, dans mon comté, vous savez combien il y avait de commissions scolaires en 1967? Il y avait neuf commissions scolaires, neuf commissions scolaires complètes. Là, évidemment, on évite ce problème-là, il y a une école par rang puis il y a une commission scolaire par rang. Ça règle le problème. Inversement, on a grossi les commissions scolaires ces dernières années, et c'est vrai, et vous avez parfaitement raison, que ça amène un arbitrage à un niveau plus élevé qui peut parfois causer des frustrations au niveau local, et des arbitrages qui sont souvent... qui sont parfois pris ? j'imagine, c'est ce que vous inférez ? en faveur de municipalités plus populeuses. Alors, ce que j'aimerais entendre de votre part, c'est comment contrer ce phénomène-là. Vous imaginez bien que, si c'est le ministre qui tranche, là on touche pas loin de l'arbitraire. Qui va-t-il favoriser? La paroisse où habite le député péquiste? Je peux vous donner une série de critères, là, qu'il pourrait être tentant d'utiliser, mais vous voyez bien que, plus vous éloignez le pouvoir de décision ? c'est d'ailleurs la base de votre argumentation ? plus vous risquez de créer des frustrations au niveau du sentiment d'avoir été entendu.

Est-ce qu'il devrait y avoir des pouvoirs d'appel? Parce que, actuellement, les parents, parfois, ont recours aux tribunaux. Bon, ils se font donner raison ou tort selon les cas. En fait, c'est sur le processus. Est-ce que le processus a été suivi correctement? Est-ce qu'on a consulté la population? C'est important. Mais, en dehors de ça, est-ce qu'il y aurait lieu d'imaginer un processus d'appel, qui devrait être totalement autonome politiquement, vous vous en doutez bien, où on référerait à des cas limites?

J'ai fait, mon cher ami député de Bellechasse... Et, vous le savez, tous les deux, nous sommes des députés de comtés qui comptent une population rurale importante, j'ai fait ce que normalement d'autres ministres de l'Éducation ont dû faire avant moi, j'ai pris le téléphone puis j'ai appelé des présidents de commissions scolaires en disant ? je peux même donner des noms: À Sainte-Clothilde, là, pourquoi vous fermez? En faisant pression, en disant: On est prêt, j'ai des fonctionnaires qui vont être avec vous, avec la municipalité, lundi matin, on va faire notre part, et tout ça. Mais il arrive un moment où la décision se prend, la commission scolaire, en son âme et conscience, prend une décision. Est-ce qu'on peut améliorer ce processus-là? Moi, je veux entendre la commission me faire des propositions à ce sujet-là.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le... C'est qui, là? M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Merci, M. le ministre, et je vous remercie de nous avoir transmis votre texte, en supposant que c'est la bonne version, celle-ci, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Dieu seul le sait.

M. Marcoux: Comme le discours prononcé fait foi...

Une voix: ...

n(10 h 20)n

M. Marcoux: J'ai deux questions et je vais donner la parole à mes collègues après. Vous avez évoqué le financement additionnel qui avait été accordé au cours des dernières années dans le cadre pour aider des commissions scolaires à maintenir des écoles. Maintenant, la question que je veux vous poser est la suivante. On entend souvent dire que, compte tenu du mode de financement actuel, qui est per capita dans la plupart des cas, que la diminution de clientèle engendre des économies substantielles pour le ministère. Et ça a cours, ce discours-là. Donc, M. le ministre, ma question, c'est: Est-ce que c'est vrai que la diminution de clientèle engendre des économies substantielles, d'une part. Et, d'autre part, si oui, de quel ordre selon vous?

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, quand j'étais président du Conseil du trésor, c'était l'une de mes ritournelles préférées. À voir ces baisses de clientèle, normalement on devrait se retrouver avec des budgets de l'Éducation en décroissance, les finances de l'État devraient être soulagées. Malheureusement, vous le savez, hein, vous posez la question pour me permettre évidemment de l'exprimer, les budgets de l'Éducation ont augmenté, malgré les baisses de clientèle, pour une raison très simple, c'est qu'il n'y a pas un effet direct, direct qui permet d'équilibrer les liquides, qui permet de voir, d'un côté, des diminutions de clientèles et, de l'autre, des diminutions de crédits. Parce que, je vais reprendre l'exemple cité par le président de la Fédération des commissions scolaires, lorsque le toit coule dans une école, ce n'est pas uniquement au-dessus des classes qui sont vides, hein, il faut réparer tout le toit, quel que soit le nombre d'élèves. Les frais... Avant qu'il y ait des économies réelles du fait de la décroissance du nombre d'élèves, il y a une longue période où il faut, par exemple, contrer cette décroissance, donc donner un financement qui ne tient pas compte de cette diminution du nombre d'élèves, et il y a des frais incompressibles qui, pendant très longtemps, ne permettent pas de faire de réelles économies.

Ce serait très simple, là, si on faisait l'équation mathématique et on disait: S'il y a 37 000 élèves de moins dans deux ans, ça coûtera 37 000 fois 4 300 ou 6 000 $, selon le cas... Ce serait formidable pour le président du Conseil du trésor. Je suis sûr que mon collègue serait très heureux du résultat. Malheureusement, ce n'est pas comme ça que ça se produit, et, je dirais même, ce n'est pas comme ça qu'on veut que ça se produise, parce que cet effet mathématique, là, aurait des effets désastreux justement sur les grands principes d'occupation du territoire, du droit des parents à avoir une école près de chez eux, de l'accessibilité à l'éducation. Donc, il n'y a... On peut dire que, à long terme, dans les grands phénomènes budgétaires des 20 prochaines années au Québec, on peut compter qu'il y aura diminution de clientèle qui pourrait amener sinon des diminutions de coûts à l'éducation, du moins des réorientations d'investissements à l'éducation, mais, pour l'instant, je dois dire honnêtement que je ne vois pas beaucoup de secteurs où ces diminutions de clientèle ont apporté des économies réelles. Il y a des secteurs pointus comme le transport scolaire, dans certains secteurs, dont les coûts ont été diminués par la fermeture de certaines routes. Mais, dans l'ensemble, je dois dire actuellement que nous avons réinvesti dans des mesures de compensation les économies que nous avons réalisées.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Autre question, Mme la Présidente. M. le ministre, j'ai brièvement abordé, dans mes notes préliminaires, la question du comité que vous avez formé, qui est composé de gens fort compétents. Je vous rappelais que, évidemment, la commission parlementaire s'était donné un mandat d'initiative au mois de mai. La politique sur la ruralité était, je pense, rendue publique l'automne dernier, au mois de décembre. Donc, le 18 juin, vous annoncez la création de ce groupe de travail. Quand je regarde le communiqué d'hier, vous indiquez que le mandat... entre autres, le mandat suivant: dresser un portrait de la portée de l'ampleur du phénomène de décroissance des effectifs scolaires en milieu rural, élaborer un tableau de bord qui permettra de localiser les municipalités régionales en déficit d'élèves et d'identifier les écoles menacées de fermeture, relever des expériences innovantes. Ma question, c'est: Est-ce que le ministère n'a pas déjà fait ce travail-là? Et, si oui, pourrions-nous avoir accès à ces documents? Parce que ça fait quand même huit ans, là, qu'on parle de l'élaboration d'une politique sur le maintien des écoles.

M. Simard (Richelieu): Nous avons, dans les grandes lignes, évidemment l'essentiel des informations. Encore faudrait-il qu'à tous les niveaux elles soient partagées. Je pense que les deux premiers points de ce mandat, ici, consistent à faire partager, comprendre, assimiler, autant par les défenseurs du monde rural, par le monde scolaire que le monde municipal et les ministères concernés, ces réalités-là. Il faut vraiment que les gens se rendent compte de la réalité non seulement région par région, mais à l'intérieur des régions, avec beaucoup plus de précision. Nous avons évidemment... M. Gendreau pourrait en parler malgré sa nouveauté dans son poste, les services de recherche du ministère de l'Éducation, vous le savez, vous leur avez rendu hommage à quelques reprises, sont très efficaces, nous avons des portraits, mais également nous avons... Il faut arriver à des portraits qui ne soient pas uniquement statistiques, et c'est pour ça que la présence de la Fédération des commissions scolaires et les fédérations municipales, dans un dossier comme ça, sont importantes pour nous présenter le portrait non pas uniquement statistique, mais le portrait des lieux chauds, problématiques au cours des prochaines années de façon à ce qu'on puisse tenir compte de l'expérience terrain des gens.

Mais, dans les objectifs du comité, M. le député de Vaudreuil, il y a relever des expériences innovantes. Je pense que ça, c'est l'aspect le plus intéressant. Actuellement, les gens se débrouillent chacun dans leur coin sans trop savoir ce qui se passe ailleurs. Il va falloir rendre de plus en plus publiques, connues une série d'expériences qui ont lieu actuellement sur le territoire et qui permettent de faire face, en tout cas de façon structurante et pour plusieurs années, à ces situations. Des solutions très différentes. Il y a des régions qui ont décidé de concentrer leurs forces scolaires avec la participation de l'ensemble des parents ? peut-être pas de l'unanimité, mais de l'ensemble des parents ? de façon à se doter de meilleurs outils. Dans d'autres régions ? je donnais l'exemple de ma circonscription où on a cherché à maintenir vraiment ouvertes à tout prix les écoles en leur attribuant un cycle d'enseignement ? il y a des dizaines de formules actuellement qui sont utilisées, et il est important que ces expériences innovantes soient partagées par l'ensemble des intervenants concertés.

Et surtout, moi, ce que je souhaiterais ? et c'est un peu aussi l'objectif très structurant des travaux de votre commission ? au lieu de se retrouver constamment, d'année en année, devant une dynamique qui va nous amener une décision dans 18 mois, dans 12 mois, si on pouvait, dans chaque milieu, faire un portrait de ce que sera la situation ? mettons un chiffre, mettons un horizon qui n'est pas trop lointain ? dans cinq ans de façon à mettre tout le monde au travail, même là où les gens ne voient pas encore le problème. Mais on sait, nous, qu'il s'en vient, le problème, que tous les acteurs puissent se concerter pour imaginer déjà des solutions, parce que, si vous prenez un problème cinq ans plus tôt, vous avez plus de chances de le solutionner à la satisfaction de tout le monde que si vous improvisez parfois une décision en toute fin de parcours.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, je souhaiterais revenir sur la question qui a été posée par notre collègue le député de Bellechasse qui, à mon sens, est fondamentale. Dans la lutte que mènent les parents à l'heure actuelle, il y a des combats vraiment épiques, là, qui sont menés par des familles qui sont inquiètes, en fait, quant à l'avenir de leur village. Vous l'avez dit tout à l'heure dans votre présentation, l'école de village, ça incarne souvent, en fait... C'est le coeur, c'est l'âme, en fait, d'un village, d'une communauté, et votre réponse est un peu surprenante, parce que c'est comme si, en invoquant l'article 111 de la Loi sur l'instruction publique, vous affichiez clairement l'impuissance du ministère de l'Éducation et, en fait, une impuissance qui condamne les parents, les commissions scolaires à une partie de bras de fer qui évacue, en fait, l'essentiel. C'est quoi, l'essentiel, dans le contexte? C'est évidemment les besoins des enfants, c'est l'avenir de nos communautés, c'est, dans le fond, tout le défi lié à... En fait, on parlait d'occupation du territoire, c'est tout le défi lié, en fait, au Québec qu'on veut dans cinq ans, dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans.

Il y a des parents qui, M. le ministre, comme le député de Bellechasse l'a souligné, livrent, là, des combats absolument incroyables, ne se sentent pas écoutés par les commissions scolaires, en fait, se butent à une rigidité administrative, à des moyens qui viennent du ministère de l'Éducation, à des règles, à des normes qui ne sont pas du tout adaptées à la réalité du monde rural. Et il y a un cas, par exemple, dans une école dans le secteur de Chicoutimi où le ministère de l'Éducation accordait 0,25 professeur pour six étudiants. Alors, essayez de trouver un quart de professeur pour six étudiants. Alors, évidemment, dans ce contexte-là, vous parlez de moyens, mais il y aurait aussi, de la part du ministère de l'Éducation, la nécessité d'adapter donc ses normes à la réalité du monde rural, tel évidemment que souligné dans la Politique de la ruralité qui a été déposée en décembre dernier.

n(10 h 30)n

Mais, au-delà des voeux pieux, des intentions... Puis on partage tous, évidemment, en fait, vos préoccupations, puis en même temps ces préoccupations-là, comme parlementaires, nous interpellent, et il y a une commission parlementaire qui souhaite évidemment trouver des solutions à ça. Mais, concrètement, M. le ministre, face au combat que mènent les parents de Rémigny dans le Témiscamingue, de Sainte-Clothilde dans la Beauce, de Godbout sur la Côte-Nord, de Baie-Sainte-Catherine, de la région de l'Amiante, vous invoquez l'article 111 de la Loi sur l'instruction publique en disant: Moi, je ne peux rien faire comme ministre; il faut respecter évidemment la juridiction des commissions scolaires. Mais, si les commissions scolaires n'arrivent pas à s'entendre avec les parents, quelle est la solution, évidemment, qui se pose?

Je reviens là-dessus parce que ça me semble fondamental, dans la recherche de solutions, pour trouver des mécanismes qui favorisent une plus grande harmonie plutôt qu'une confrontation. Parce que c'est à ce climat-là face auquel on assiste actuellement, de la confrontation plutôt que de la concertation et de l'harmonisation. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Bon, évidemment, je ne donnerai pas une réponse qui satisfera tous les points de ce que vient de demander la députée de Bonaventure. Mais rappelons d'abord que la première mission du ministère de l'Éducation, c'est de s'assurer, par ces règles de financement ? parce que c'est là, hein, l'État et l'Assemblée nationale votent des crédits en Éducation ? de permettre, dans le plus grand nombre de cas possible, sinon dans tous les cas, une solution à ces questions-là. Il faut nous assurer que les règles de financement ne soient pas... soient le moins possible des obstacles à la solution de ces problèmes-là.

Donc, on a beaucoup fait évoluer ces règles de financement depuis quelques années. Je vais donner quelques exemples: assouplissement de la norme concernant l'ajout d'enseignants dans les commissions scolaires qui gardent une école ouverte. D'abord, pour les commissions scolaires, on l'a fait pour les commissions scolaires, les petites, de 9 000 élèves. Maintenant, on le fait aussi pour celles de 12 000 élèves depuis 2002-2003. Ça, c'est tout le calcul du ratio maître-élèves. On s'est assuré que ces commissions scolaires soient favorisées par nos normes, donc de faciliter la décision au plan local.

Il y a un montant de base de 250 000 $ par commission scolaire pour les autres dépenses éducatives. Évidemment, pour la CSDM à Montréal, ça ne veut rien dire, 250 000 $. Mais je peux vous dire que, pour la commission scolaire du député de Bellechasse, c'est une somme très importante qui ajoute des moyens dans les petites commissions scolaires.

La nouvelle carte scolaire qui est à la base de ces modes de financement tient davantage compte des besoins des régions. On a ajouté 10 millions simplement pour tenir compte de l'étendue géographique, ajouter des facteurs d'étendue géographique. En 2002-2003, on a d'autres mesures qui ont mis 11 millions de plus au budget des commissions scolaires pour maintenir des services dans les écoles de petite taille: subventions pour des coûts fixes, quel que soit le nombre d'élèves, il y a des coûts qui sont incompressibles; allocations spéciales pour les équipements, pour l'éloignement. Tout ça pour vous dire que la première mission du ministère, c'est de donner aux commissions scolaires les moyens de maintenir, en autant que possible, ces écoles ouvertes.

Maintenant, pour revenir au lieu de décision, vous savez, il y aura toujours, il y a toujours eu, il y aura toujours, au niveau local, un certain nombre de conflits. Lorsque vous décidez, par exemple, dans un quartier, de créer une école de cycles et d'envoyer, dans les quartiers voisins, les élèves des autres cycles, vous avez des combats qui se mènent, parfois justifiés, parfois injustifiés. Les parents défendent un point de vue. L'idéal, pour beaucoup de parents, c'est que l'enfant, que tous les élèves soient à portée de marche sécuritaire de l'école.

Parfois, il y a des décisions... Dans celles qu'on évoque d'ailleurs aujourd'hui, que vous allez évoquer au cours des prochaines semaines, il y a des décisions qui amèneront nécessairement des choix à faire qui ne plairont pas à tout le monde. Le combat légitime des parents, j'en suis, là, il faut qu'ils se battent, il faut qu'ils mobilisent tout le milieu. Il faut que tout le monde se mette à la recherche de solutions et participe aux solutions. Mais, en même temps, il arrivera toujours des moments où il y a des compromis à faire.

Qui est le mieux placé pour arbitrer ces questions-là? C'est ça, la question qu'on doit se poser. Les commissions scolaires, c'est notre structure actuelle de fonctionnement. Et, d'ailleurs, je vous dis en passant que le pouvoir dans les commissions scolaires, il est largement décentralisé, puisque une bonne partie du pouvoir appartient aux conseils d'établissement. Les parents et les enseignants, en tout cas, pour la vie quotidienne, comme pour les orientations pédagogiques des écoles, ont une influence considérable. Mais, ultimement, c'est la commission scolaire qui tranche quant au maintien ou à la fermeture d'une école.

Si ce n'est pas la commission scolaire, ce sera quelle structure? Est-ce que ce sera la municipalité, qui n'a pas de pouvoir de taxation scolaire, qui n'a pas d'influence sur... qui ne peut pas jouer un rôle? À moins que l'on change les structures, hein? Si vous voulez faire disparaître les commissions scolaires, vous allez mettre ça dans votre programme et vous allez vous défendre là-dessus et expliquer aux Québécois l'amélioration que ça apporterait à leur situation. Vous allez avoir des villes fusionnées qui sont certainement plus populeuses que des commissions scolaires, et je ne suis pas sûr que vous rapprochez la décision des citoyens.

Il faudra se poser toutes les questions à ce moment-là. Est-ce qu'il y a des processus de médiation? Est-ce qu'il y a des processus d'appel? Est-ce qu'il y a un lieu où les citoyens, aux prises avec un blocage avec une commission scolaire qui ne semble pas entendre ce que veut la population, veulent se faire entendre? Je pense qu'il faut creuser cette piste-là. Mais, rendez-vous compte que, si vous décidez que c'est Québec qui tranche, vous décidez que le Québec a droit de veto et d'orientation et que c'est fini de l'autonomie locale pour ces questions-là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, il y a d'autres députés qui voudraient vous poser des questions, ça fait qu'il faudrait que vos réponses soient un petit peu plus courtes.

M. Simard (Richelieu): Oui. Mais elle était complexe, celle-là, hein?

La Présidente (Mme Bélanger): Elle était complexe. Alors, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Depuis le début de votre présentation, M. le ministre, puis avec tout le respect que je vous dois, j'ai l'impression qu'on est en train d'étaler la feuille de route de votre gouvernement par rapport à toutes les étapes, par rapport à tout ce qui a pu être fait pour changer le système, l'améliorer, bon.

Je dénote aussi, surtout suite à votre dernière intervention, malgré le fait ? puis là je ne vous attaque pas, pas du tout ? malgré le fait que vous disiez que vous êtes ouvert à toutes sortes de propositions puis d'améliorations... Mais je vous sens les deux pieds sur les freins par rapport à la possibilité de regarder les structures. Pour avoir porté un autre chapeau, vous le savez, pendant 10 ans ? je parle de moi-même, là ? il y a une chose qui est certaine, dans ce cas-ci, la personne qui est au coeur de nos discussions aujourd'hui, quand on parle de la dernière école de village ou qu'on parle de la fluctuation, finalement, des clientèles dans le secteur de l'éducation pour quelque établissement que ce soit, c'est l'étudiant, c'est le parent, c'est la vie active d'une communauté. On a parlé de l'âme d'une communauté, on a parlé de développement de territoire, du développement économique.

Ma question, très crue, là: Est-ce que vous avez regardé la possibilité de remettre sur la table toutes ces structures-là et regardé la possibilité peut-être d'en faire sauter, peut-être de confier à une structure plutôt qu'à une autre l'ensemble de ces responsabilités-là?

Quand on parle de la dernière école de village ? moi, je ne vis pas dans un village, mais je peux très certainement comprendre qu'est-ce que ça peut vouloir dire... bien là je vis dans un grand, grand village, là, mais je ne vis pas dans un village ? est-ce qu'on peut se comprendre que l'exercice qu'on fait ici, aujourd'hui, c'est un exercice qui vise à changer les choses de façon non partisane? Bon. Je veux bien que le gouvernement du Parti québécois ait fait des choses. Qu'est-ce qu'on peut faire, nous, comme parlementaires, pour s'assurer de maintenir, dans nos villages, les écoles ouvertes, de donner le pouvoir aux gens qui sont immédiatement concernés? J'ai le plus grand respect pour les commissions scolaires. Je ne viens pas vous dire qu'il faut absolument les abolir. Mais ce n'est pas vrai quand vous dites que c'est souple, puis qu'on a démocratisé le système, puis que les gens peuvent prendre les décisions qu'ils veulent. C'est faux! C'est totalement faux! Les commissions scolaires sont prises avec le carcan budgétaire, doivent penser en fonction de ça. C'est la définition même de la commission scolaire. Je m'excuse, mais c'est ça. Bon.

Alors, est-ce que vous êtes prêt, vous, comme ministre de l'Éducation, à regarder la possibilité de confier certaines responsabilités à d'autres paliers gouvernementaux? Il y a justement les municipalités qui viennent tout à l'heure. Bon. Alors, c'est sûr que j'ai un dada peut-être plus particulier pour les municipalités, mais il y a trop de gens qui prennent trop de décisions qui, finalement, affectent les gens qui sont immédiatement concernés et qui se perdent complètement au travers de tout ça.

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, oui, nous sommes ici pour... et vous êtes réunis, et c'est vous qui avez la maîtrise de votre agenda, de vos décisions pour remettre sur la table tout ce que l'on veut, hein. On peut brasser toutes les cartes. Il faut quand même se rappeler deux ou trois choses. Des structures qui n'ont pas de carcan financier, Mme la députée, ça n'existe pas. Que ce soient les municipalités ou les commissions scolaires, là, ultimement, il y aura quelqu'un quelque part qui dira: Combien ça coûte et pouvons-nous payer? Ça, là, à moins... Je sais qu'on est tous en politique et, dans l'opposition, on veut faire croire qu'on rend tout possible du simple fait de son existence et du changement de pouvoir, mais la réalité, là, c'est que les municipalités ont des carcans financiers extrêmement étroits et elles auraient la responsabilité des écoles, elles auraient exactement les mêmes carcans financiers.

n(10 h 40)n

Que l'on remette, que vous remettiez en cause l'existence des commissions scolaires, nous, nous les avons restructurées, les commissions scolaires, nous avons déplacé le pouvoir pédagogique vers les écoles...

Mme Delisle: Je m'excuse, il faut que je reprenne le ministre, je n'ai jamais dit que je remettais en cause l'existence des commissions scolaires. Je vous ai demandé si vous étiez prêt à regarder la possibilité de revoir l'ensemble des structures puis de déterminer laquelle qui serait la mieux placée pour gérer le problème qui est existant. Et pour ça...

M. Simard (Richelieu): Alors, le problème de l'existence des écoles, on peut bien le dire ? les commissions scolaires, on ne remet pas en cause leur existence ? mais le maintien ou la fermeture des écoles, ça va dépendre des municipalités ou d'une autre structure. Moi, je veux bien que vous exploriez ça. Je veux juste vous mettre en face des difficultés que vous allez rencontrer. Vous n'aurez pas solutionné le problème en ayant changé la structure responsable. C'est beaucoup plus par un travail constant, sur le territoire, de concertation des structures.

Et peut-être faut-il réfléchir: Comment on peut arriver à forcer les structures à se concerter? D'ailleurs, c'est l'un des objectifs, à mon avis, du comité qui a été mis sur pied: Comment les municipalités et les commissions scolaires vont pouvoir travailler ensemble pour arriver ultimement, dans l'intérêt des citoyens et citoyennes, des parents d'élèves dont vous parliez tout à l'heure et des élèves eux-mêmes, qui sont les premiers concernés, qui sont ceux qu'on doit toujours avoir en tête... Comment amener toutes les structures de développement régional également? Vous savez, parfois ça implique le CLD. Dans le cas d'une école actuellement qui est en difficulté au Québec, c'est l'implantation d'une entreprise à un site plutôt qu'à un autre qui fait la différence. Je suis tout à fait ouvert, soyez-en certains, à toute ouverture de discussion sur les structures. Je demande simplement de ne pas faire semblant que, juste en changeant le lieu de décision, les contraintes vont être diminuées.

La Présidente (Mme Bélanger): Une dernière question, M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Chagnon: Mme la Présidente, tous mes collègues ont posé des questions qui concernaient particulièrement l'avenir de l'enseignement primaire et secondaire. Compte tenu des difficultés démographiques qui s'en viennent, vous comprendrez, M. le ministre, qu'elles vont avoir un effet direct éventuellement sur l'enseignement postsecondaire, c'est-à-dire les collèges et éventuellement les universités.

Dans l'ensemble des mémoires que nous avons reçus de la part des gens qui professent une autorité en matière d'enseignement postsecondaire, je pourrais qualifier de dénominateur commun quelques suggestions qui sont faites puis qui vont directement, qui interpellent directement le ministère de l'Éducation.

La première, qui n'est pas nouvelle, c'est de faire en sorte qu'on détermine une fois pour toutes un plan d'aménagement des options ou des programmes d'activités au niveau collégial avec des spécialisations régionales, des spécialisations à caractère provincial, mais directement orientées sur une base régionale. Ça fait 30 ans que la carte des enseignements professionnels a été faite au secondaire, mais elle n'a jamais été faite, dans le fond, au niveau collégial avec une rationalité semblable à celle qu'on retrouve au niveau secondaire. Alors, quand ce type de travail là sera-t-il réalisé?

Et, deuxièmement, au niveau universitaire, on aura probablement le même genre de question à se poser: Si Rimouski fonctionne bien, vous l'avez mentionné vous-même, c'est, entre autres, à cause de sa spécialité en océanographie et en sciences de la mer, ce qui évidemment pourrait être aussi le cas pour certaines autres constituantes comme l'Université du Québec à Chicoutimi qui est ciblée sur le plan démographique, absolument, de façon très particulière, et évidemment l'autre qui est l'Université de l'Abitibi-Témiscamingue. Dans ces cas-là puis dans les autres cas, je pourrais même mentionner les universités urbaines, pour les deuxième et troisième cycles, ils verront des problèmes de qualifications ou du moins des problèmes d'avoir le nombre suffisant d'étudiants, particulièrement pour faire de la recherche, si nous n'ouvrons pas encore davantage nos portes aux étudiants étrangers.

Alors, une autre des options qui est mentionnée là-dedans et qui mérite d'être suivie et sur laquelle je vous interpelle aussi: Qu'est-ce que vous entendez faire pour s'assurer qu'on ait des contingentements d'étudiants étrangers qui soient plus importants? Premièrement, entendez-vous aider les universités qui sont déjà en recherche d'étudiants étrangers en participant à des forums sur les étudiants étrangers comme le dernier qui a eu lieu à Marrakech au mois de mai? Et, autrement, avez-vous l'intention de modifier les règles budgétaires des universités pour permettre, par exemple, aux universités de pouvoir être financés pour les étudiants étrangers qu'elles reçoivent sans perdre leur financement d'étudiants réguliers qu'elles auront directement, donc permettre aux universités de conserver les droits de scolarité des étudiants étrangers à pleine mesure sans être affectées par la perte du financement des droits réguliers des étudiants? Merci, Mme la Présidente.

M. Simard (Richelieu): Je vais essayer d'être très rapide, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, parce que le temps est terminé.

M. Simard (Richelieu): Le temps est terminé, je le sais. Spécialisations régionales, oui, nous sommes à y travailler très fort. Vous le savez, il y a des spécialisations qui ont permis à des cégeps d'avoir une clientèle et de résister aux diminutions démographiques. On pense à l'ATM à Jonquière. Soit dit en passant, il y a des débats régionaux. Je ne sais plus comment formuler ma réponse à leurs questions. Il n'est pas question d'aucune façon de remettre en question l'exclusivité de ce mandat à Jonquière. Au contraire, on cherche à créer d'autres Jonquière, d'autres lieux ou des mandats spécialisés. L'ennui, c'est que, lorsque existe dans un grand cégep montréalais ou québécois une spécialité avec des professeurs compétents et qui satisfait le marché, c'est très difficile de revenir en arrière et de fermer cela parce que l'on pense que les gens devraient tous se déplacer dans une région. C'est beaucoup plus face aux nouvelles techniques. Et vous avez tout à fait raison, et je suis extrêmement heureux de vous l'entendre dire, que le modèle qu'on doit avoir en tête, c'est certainement ce qu'on a réussi à faire au niveau professionnel. Évidemment, on cherche dans chacune des régions à avoir la carte professionnelle la plus complète, mais on sait qu'il a fallu être complémentaire et faire en sorte que des formations professionnelles soient spécialisées, soient données dans une région plutôt que l'autre. Donc, la piste, elle est là, elle est en voie d'établissement.

Ce sera un travail de concertation. Je m'en vais dans quelques minutes rencontrer, à La Malbaie, les directeurs généraux des cégeps là-dessus. On se parle régulièrement...

M. Chagnon: Vous avez un échéancier.

M. Simard (Richelieu): Moi, je pense que c'est un défi qui doit connaître une accélération dans sa réalisation. Il y aura des décisions parfois difficiles à prendre, mais si, dans les trois prochaines années, on n'a pas révisé de façon cohérente la carte des cégeps, je pense, de façon réaliste, qu'on aura des problèmes. Mais je vous rappelle qu'il s'agit bien toujours de tenter de trouver des domaines d'exclusivité, parce que, quand l'étudiant de Gaspé a le choix entre un cours qui est donné à Rimouski ou à Montréal, dans la même spécialité, vous savez ce qui se passe. La mobilité interrégionale est très, très faible. Tant qu'à partir de la maison, on s'en va en ville. Alors, ça pose un problème majeur, vous le savez bien.

Pour ce qui est de l'autre sujet ? c'est un de mes dadas, je termine là-dessus ? oui, nous sommes à trouver des solutions à cette question. Vous mettez le doigt sur la piste exacte de solution. Il faut que, dans les règles budgétaires, ce soit encourageant pour les cégeps et les universités, plutôt que simplement attendre une péréquation des universités montréalaises, que ce soit stimulant pour ces universités d'aller chercher des étudiants à l'étranger avec notre aide. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci beaucoup, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Écoutez, je sais que le temps est écoulé. Si vous me permettez de dire un dernier mot...

La Présidente (Mme Bélanger): On a même dépassé largement le temps.

M. Simard (Richelieu): Si vous me permettez de remercier la commission, d'offrir à nouveau toute ma disponibilité pour la suite des travaux... Tous les propos qui ont été tenus ce matin ? je ne sais pas si ma réaction parfois a pu vous sembler moins enthousiaste dans une question que dans l'autre ? sont tous pertinents et légitimes, et c'est un débat de société dans lequel nous sommes pour plusieurs années. Et vous pouvez compter vraiment sur mon entière collaboration. Merci beaucoup, Mme la Présidente, et merci de votre invitation.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Alors, nous allons suspendre pour quelques instants, le temps de libérer la place.

(Suspension de la séance à 10 h 49)

(Reprise à 10 h 51)

La Présidente (Mme Bélanger): Nous avons déjà un retard, alors nous allons reprendre les travaux.

Des voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Groulx...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, on a le quorum. Alors, je demanderais à la Fédération des municipalités du Québec de bien vouloir s'approcher. Alors, le mandat est toujours de tenir des auditions publiques dans le cadre de son mandat d'initiative sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation au Québec. Alors, M. le président de la Fédération, si vous voulez bien présenter la personne qui vous accompagne.

Fédération québécoise
des municipalités (FQM)

M. Belzil (Michel): Alors, Mme la Présidente, Mmes, MM. les parlementaires, ça me fait plaisir de vous présenter notre mémoire. Il est tout à fait à point ce matin et fort attendu, quoique bien des gens sont au courant des principales recommandations qu'on va vous faire. Par contre, il est évident qu'il faut bien sûr porter attention à tous les arguments et à tout ce qui soutient ces recommandations. Et pour nous, à la Fédération québécoise des municipalités, ce n'est pas quelque chose qui vient de se produire il y a deux semaines, ce que nous mentionnons dans notre mémoire, ça fait déjà depuis 1996 que ça fait partie des réflexions de l'ancienne UMRCQ à l'époque. Alors, je vous présente Mme Marie-Joëlle Brassard, qui est conseillère en recherche et politique à la Fédération québécoise des municipalités.

Sans plus tarder, vous dire que ce mémoire présente, en premier lieu, la problématique vécue par plusieurs régions du Québec. Outre les données connues et pour cerner la problématique réellement vécue par les municipalités, la Fédération québécoise des municipalités a recueilli des informations auprès de 183 municipalités. En plus d'un état de situation, nous leur avons demandé aussi quelles étaient les solutions et alternatives qu'elles expérimentaient. C'est d'ailleurs l'objet de la seconde partie de ce mémoire. Nous concluons par des recommandations qui reflètent les fondements et orientations prises par la FQM en regard du maintien des écoles, positions qui sont en continuité avec celles déjà soutenues par le passé.

En effet, en août 1997, la FQM signifiait ses orientations dans un mémoire produit en réponse à l'avant-projet de loi modifiant l'instruction publique. Le positionnement de la FQM était clair: il fallait prioriser le maintien des écoles de village. Cette position n'était pas nouvelle puisque, en 1996, à l'occasion des états généraux de l'éducation, la Fédération affirmait que les petites écoles devaient rester ouvertes dans toutes les régions, être accessibles à tous les enfants, tout en continuant à offrir un service de qualité. Dans cette optique, la FQM proposait d'adopter sans délai un moratoire sur la fermeture des petites écoles. Et je cite intégralement le texte de l'époque: «L'UMRCQ demande au gouvernement de décréter le plus tôt possible un moratoire sur la fermeture des dernières écoles. En retenant que les ruraux n'ont pas que le mérite d'occuper la large part du territoire, ils ont aussi l'obligation de le développer.»

L'école, un levier de développement local. La décision d'une famille de demeurer ou de s'établir quelque part ne repose ni sur l'épicerie, ni sur un poste d'essence, pas plus sur un bureau de poste, une garderie ou même la seule présence d'une école. La décision repose sur tous ces éléments réunis, incluant l'école qui constitue l'élément central de la vie et du devenir d'un village. En ce sens, l'école constitue un levier de développement qui fait partie prenante de l'ensemble de la communauté. Nombre d'études ont démontré que l'appartenance au milieu, soit ce lien que les citoyens entretiennent avec leur espace de vie, est l'ancrage sur lequel repose un projet collectif d'avenir.

Par ailleurs, nous devons composer avec la réalité qu'est la baisse démographique que connaît le Québec des régions. Dans le contexte actuel, il est crucial de poser une réflexion qui tienne compte des impacts à moyen et long terme et, surtout, d'éviter de déstructurer les communautés en agissant sur la base de critères qui reposent sur le court terme. Les services d'éducation de qualité doivent demeurer accessibles à tous les enfants, sans discrimination basée sur le territoire. Par ailleurs, les communautés interviennent et tentent des solutions, alors que, le plus souvent, la décision de maintenir ou de fermer l'école tombe sur elles comme un couperet, sans qu'elles n'aient eu un mot à dire, outre celui de pouvoir se mobiliser et de contester.

La réorganisation administrative opérée au Québec en 1997-1998 a donné lieu au regroupement de plusieurs commissions scolaires, faisant en sorte de faire passer leur nombre de 150 à une cinquantaine. Cela a eu comme impact d'affaiblir la représentation des petits villages au sein des conseils des commissaires, certaines écoles ne disposant désormais que d'une demi-représentation partagée avec la ville voisine. Or, lorsqu'une école est en sursis d'être fermée, aucun mécanisme n'assure la tenue d'un débat public portant sur les impacts sociaux, politiques et économiques d'une éventuelle fermeture. Tout se passe comme si la décision était fondée sur des critères administratifs tenant compte de ratios d'élèves versus la superficie.

Pourtant, le mandat attribué et défini par la Fédération des commissions scolaires du Québec au rôle des commissaires d'école en est un de leader local et régional. Je vous cite, à cette fin, un paragraphe des déclarations de la Fédération des commissions scolaires en 2002: «À cette fin, les commissaires d'école s'intéressent aux opinions émises par les leaders de groupes socioéconomiques, les gens d'affaires, les journalistes, les chefs syndicaux, les leaders religieux, culturels et communautaires. Ils consultent et discutent avec les parents afin de les associer à leurs décisions. Ils s'engagent également dans différents organismes tels que les comités de citoyens, les chambres de commerce et les clubs sociaux dans le but de garder le contact avec la réalité sociale et de mieux saisir les aspirations de la population.» Alors, ici, on fait état bien sûr du large spectre de consultation et de leader que doivent être les commissaires scolaires.

Lorsqu'il s'agit de prendre une décision aussi cruciale que la fermeture d'une école, les commissaires d'école réunis n'auraient-ils pas le devoir de procéder à des audiences publiques qui permettraient d'analyser les impacts d'une telle décision sous les angles sociaux, politiques et surtout dans une perspective qui tienne compte des moyen et long termes?

Des 183 municipalités ayant répondu à un questionnaire adressé par la Fédération, portant sur la problématique des écoles, plusieurs allèguent que la difficulté tient à ce que leur commission scolaire opère uniquement en fonction de critères administratifs et budgétaires. De plus, chaque commission scolaire établit son propre plancher, c'est-à-dire un nombre minimal d'élèves, pour décider de la fermeture d'une école. Or, la seule baisse du nombre d'élèves contribue à créer un climat d'insécurité important dans la population. Cela est démontré, puisqu'on a observé un sentiment d'inquiétude dans la population face à l'avenir de l'école dans une proportion de 56 % des municipalités ayant répondu à notre consultation. Ce taux est nettement plus élevé que celui des municipalités qui rencontrent un problème de maintien de leur école, soit 35 %. La différence entre 35 % et 56 % démontre toute cette inquiétude.

Cette observation questionne sur le climat qui s'instaure dans une municipalité qui tente d'innover pour mieux utiliser son école comme levier de développement. Quelles que soient les actions entreprises et les énergies déployées, les citoyens n'ont pas de prise sur la décision de maintenir ou non leur école. Cela crée des situations où la responsabilité de trouver des solutions repose sur les épaules des municipalités, sans recours pour maîtriser les résultats de leurs efforts.

Par exemple, à l'école Saint-Elzéar, au Témiscouata, qui compte 33 élèves, les citoyens ont créé le Groupe Renaissance qui a le mandat de ramasser les fonds nécessaires au cas où le nombre d'enfants diminuerait sous la barre de 20, plancher fixé par la commission scolaire. Dans ce cas, le Groupe contribuerait pour un montant de 4 000 $ par enfant pour maintenir leur école, en puisant dans leurs propres fonds municipaux.

Autre exemple: dans la municipalité de Sainte-Famille, à l'île d'Orléans, les parents, par le biais de leur municipalité, tentent d'acheter leur école depuis quatre ans pour pouvoir décider eux-mêmes de l'avenir de cette école. Finalement, à La Doré, au Lac-Saint-Jean, la politique de la commission scolaire est de laisser l'école ouverte tant qu'il y a des enfants à la maternelle.

n(11 heures)n

D'une part, les municipalités expriment une quasi-absence de concertation entre elles et leur commission scolaire. Cette relation est souvent jugée difficile par les municipalités, préoccupées par des besoins des enfants, alors que la commission scolaire rétorque par des considérations administratives et budgétaires concernant le maintien des écoles. De plus, chaque commission scolaire définit ses propres balises pour garder ouverte ou non une école, créant par le fait même des inégalités entre les territoires. D'autre part, la municipalité ne dispose d'aucun pouvoir décisionnel en regard de la fermeture de l'école.

Pourtant, des 183 municipalités consultées par la Fédération, la totalité contribuent financièrement ou autrement au maintien de leur école. Les modes de contribution sont nombreux, que ce soit la participation financière à la rénovation de l'école qui, souvent... ça se joue dans des petits milieux, entre 10 000 et 25 000 ? pour vous dire que, actuellement, je travaille sur un dossier, et on demande 240 000 à trois municipalités pour rénover une école, c'est beaucoup d'argent; l'implication financière de la municipalité, comme je l'ai dit, pour la construction de terrains de jeu, de parcs-écoles; la mise en commun de locaux pour la bibliothèque municipale et celle de l'école; la location d'équipements; les levées de fonds pour les organismes locaux pour soutenir des activités et les sorties d'enfants; et des corvées, hein, par les parents ou par les citoyens pour réparer les écoles.

L'implication des municipalités dans leurs écoles démontre incontestablement qu'elles constituent une préoccupation centrale dans la vie de la communauté. Conséquemment, les municipalités expriment que la gestion des équipements scolaires devrait leur revenir, accompagnée des moyens financiers qui y sont associés. Cette voie pose un questionnement de société qui mériterait d'être approfondi et débattu publiquement.

Un choix politique d'abord. La FQM croit que la décision de maintenir ou non une école dépasse largement le seul critère fondé sur les indicateurs de gestion et de performance administrative, ratio élèves-superficie. Nous savons pertinemment que des choix fondés sur de tels indicateurs sont une solution à court terme et qu'ils n'abordent pas le problème dans toutes ses dimensions, sociale, culturelle et politique. De plus, cette lunette d'approche camoufle le déplacement de subventions des petites écoles vers les plus grandes municipalités, les fonds rendus disponibles étant déplacés vers la ville voisine. Finalement, les citoyens, avec le soutien de leur maire et conseillers municipaux, n'ont souvent comme seule alternative que de se mobiliser pour contester la fermeture de leur école. Dans ce contexte, il appert que la fermeture est largement documentée par des spécialistes et des fonctionnaires qui orientent le débat et qui connaissent bien les procédures.

Le maintien ou la fermeture d'une école relève d'un choix sociopolitique, puisqu'il concerne le devenir d'une communauté et, indirectement, celui de plusieurs régions québécoises qui font face à une baisse démographique. En effet, la problématique touche plusieurs écoles au Québec, ce qui occasionne des répercussions à moyen et long terme sur le développement des régions. L'absence de vision risque de conduire le Québec des régions à une impasse sur le plan du développement. En ce sens, la Fédération considère que la municipalité locale devrait être partie prenante de la décision de statuer sur la volonté ou non de maintenir une école. Pour ce faire, un débat public qui permet de dégager les enjeux et les impacts sociaux et politiques devrait être tenu dans chaque cas.

Des solutions qui font leurs preuves. Plusieurs écoles ont mis en place des systèmes multiprogrammes ou, dit autrement, des classes multiniveaux pour être en mesure de maintenir leur école. Les travaux de recherche réalisés par Carrier & Beaulieu, qui portent sur l'efficacité et la qualité de l'éducation dans les classes multiprogrammes, révèlent que les enfants de ces classes obtiennent des résultats comparables aux élèves qui reçoivent une dispense à un seul niveau. La différence tient davantage au fait que l'enseignant doit recevoir une formation adaptée au mode multiprogramme.

Or, les résultats de la consultation de la FQM auprès des ses membres démontrent qu'il existe une perception négative dans la population sur le mode d'enseignement multiprogramme. Pourtant, des recherches montrent que ce mode de dispense encouragerait plutôt l'autonomie, la prise de responsabilité, la débrouillardise du jeune qui devient plus actif face à son cheminement. L'Association canadienne de l'éducation corrobore ce constat. Selon l'organisme, le rendement des enfants ayant fréquenté les classes multiprogrammes était égal sinon supérieur à celui des élèves provenant de classes uniprogrammes sur les plans de l'autonomie, de la fiabilité, de la confiance en soi, de la responsabilité, de la collaboration, de l'image de soi, des relations interpersonnelles, du fonctionnement social, des habitudes de travail et de l'attitude envers l'école. Finalement, Jeanne Maheux, qui a réalisé une thèse doctorale sur les petites écoles rurales, abonde aussi dans le même sens, le regroupement multi-âge favorise davantage le développement intégral de l'enfant que le regroupement uni-âge. Il y aurait donc lieu de rassurer et d'informer la population sur les impacts des multiprogrammes comme une alternative intéressante qui permet à leurs jeunes d'obtenir des services de qualité.

Outre les classes multiprogrammes ainsi que le partage de locaux entre l'école et la municipalité, les contributions financières des municipalités aux rénovations et infrastructures de loisirs, plusieurs municipalités ont développé des avenues innovantes pour maintenir leurs écoles. Ce sont, par exemple, les vocations particulières spécialisées en lien avec les ressources du territoire: par exemple, l'École bleue de Baie-des-Sables, centrée sur les milieux marins ou encore les classes vertes en agriculture ou en foresterie; encore, le développement d'un centre d'accès informatique qui s'adresse à la fois aux jeunes et à toute la population, l'usage de nouvelles technologies de l'information, par exemple le nouveau programme Villages branchés du Québec qui vise à relier les écoles par un réseau de télécommunications à la fine pointe de la technologie. Et je vais passer tous les autres exemples, que vous pourrez lire dans le mémoire, pour aller rapidement maintenant à nos recommandations.

Il importe que le gouvernement reconnaisse que l'école appartient à son milieu, qu'elle constitue un levier de développement et qu'en ce sens son maintien s'inscrit dans une problématique reliée au développement local. L'avenir de l'école déborde largement la seule notion administrative et constitue donc un choix collectif, politique.

Également, on a pu observer que la grande majorité des municipalités s'impliquent activement face à son école, étant préoccupées que les jeunes développent une appartenance positive et une fierté face à son village. Il est important d'abolir l'établissement de critères arbitraires édictés par les commissions scolaires pour décider des fermetures d'écoles et de favoriser une concertation de partenariat et d'égalité entre la commission scolaire et l'instance municipale. Le gouvernement du Québec, de par sa Politique nationale de la ruralité, s'est engagé à adopter une approche souple et de flexibilité sur le plan de ses programmes comme sur celui des situations particulières du monde rural.

Concernant les écoles, la Politique nationale de la ruralité adoptée par le gouvernement du Québec en décembre stipule, bien sûr, que le ministère de l'Éducation veut assurer le maintien de toutes les écoles de village sur le territoire tout en s'assurant de la qualité de l'enseignement, favorise la tenue de débats importants dans ces petites écoles, et qu'il doit y avoir recherche constante de collaboration avec les différents intervenants dans le milieu ? je vous résume un peu les écrits ? et que la transparence dans les discussions nécessitant la participation des parents et des représentants de la communauté, principalement des municipalités... Alors, on parle déjà ici de toute cette notion de concertation avec les municipalités.

Et donc, conséquemment à l'argumentaire que j'ai dû escamoter un peu, la Fédération québécoise des municipalités recommande qu'un moratoire de cinq ans soit adopté pour maintenir les petites écoles d'ici à ce que des mécanismes de concertation n'aient été mis en place et pour permettre à tous les citoyens des régions d'être en mesure qu'émergent les premiers résultats de la Politique nationale de la ruralité;

Que le gouvernement se positionne clairement en faveur du maintien des écoles, principalement lorsqu'une seule école est en place dans un village;

Que le gouvernement mette en place un programme de soutien financier doté d'une compensation aux petites municipalités qui éprouvent des difficultés à maintenir leurs écoles. Alors, je ne l'ai pas développé ici, mais vous voyez très bien que, quand on demande aux citoyens des petites localités d'investir dans leur école, c'est comme si on favorise une double taxation de ces citoyens au Québec, hein? Dans bien des milieux, les parents... Dans la plupart des milieux, les parents n'ont pas à investir pour la petite école, ça relève du ministère de l'Éducation. Bien sûr, il y a beaucoup d'investissements des municipalités, mais ils n'ont pas le choix. Mais, en ce sens-là et à ce titre-là, je pense qu'ils devraient être compensés financièrement, parce qu'on arrive à ce moment-là à avoir deux classes de citoyens, ceux qui doivent payer pour leur école et ceux qui n'ont pas à s'en préoccuper;

n(11 h 10)n

Que la décision de fermer une école relève à la fois de la commission scolaire et de la municipalité, les deux instances devant obligatoirement être en accord sur la fermeture de l'école;

Qu'avant de décider de la fermeture d'une école il y ait obligation de tenir des audiences publiques portant sur les impacts sociopolitiques de la fermeture de l'école, incluant une consultation auprès de toutes les catégories d'acteurs présents dans la communauté touchée;

Qu'un siège de représentant élu municipal soit accordé au Conseil des commissaires;

Qu'un programme de soutien financier soit accompagné d'un volet information aux parents, enseignants et citoyens portant sur les solutions innovantes, notamment sur l'information pertinente sur les classes multiprogrammes et leur impact sur la qualité de l'éducation des gens; et finalement

Que la MRC soit sollicitée à donner son avis sur l'avenir ou le maintien d'une école sise sur son territoire.

En guise de conclusion...

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Un petit 30 secondes, s'il vous plaît. La Fédération québécoise des municipalités a mis en évidence, tout au long de ce mémoire, l'importance cruciale que revêt l'école dans la dynamique et le devenir du village. Elle a aussi démontré le rôle stratégique de l'école dans son milieu, sachant que plusieurs régions du Québec sont concernées par la problématique. Également, la Fédération insiste sur le danger qu'aurait une attitude consistant à réagir trop rapidement, créant une situation de panique collective, sachant que nos institutions publiques ont été mises en place...

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous voulez conclure, M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Oui. Alors, la situation démographique qui se présente montre qu'il y aura moins de jeunes au Québec dans un avenir rapproché et à moyen terme. Alors, voilà des raisons supplémentaires, que je pourrais élaborer tantôt, pour prendre grand soin de nos écoles de village.

La Présidente (Mme Bélanger): Vous allez avoir des questions, vous allez pouvoir élaborer.

M. Belzil (Michel): Merci. Je m'excuse.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. Belzil. M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Alors, Mme la Présidente, M. Belzil, bienvenue. Le moins qu'on puisse dire, c'est que votre mémoire a provoqué des réactions intempestives. Quand j'ai posé la question au ministre ce matin, je n'avais pas lu encore la réaction du président de la Fédération. Il ne l'a pas trouvé drôle, hein, il voit rouge.

Est-ce qu'on doit en conclure que... Mais, enfin, je n'irai pas aussi loin. Ha, ha, ha!

M. Chagnon: ...

M. Kieffer: Alors, ça a provoqué des réactions. À la lecture de votre mémoire, j'ai des questionnements. Moi, je viens d'un coin qui ne vit pas cette problématique-là, donc c'est probablement plus facile pour les commissions scolaires de parler, par exemple, aux municipalités. Ils ne sont pas toujours sur la même longueur d'onde, mais, bon, ils finissent par s'entendre: échange de terrains, construction de nouvelle école, où on va la mettre, etc.

Alors, vous dites clairement, à la page 3... J'espère que vous l'avez, messieurs dames. De l'autre côté, ça va? Oui? Bon. Alors, vous dites clairement à la page 3: D'une part, les municipalités expriment une quasi-absence de concertation entre elles et les commissions scolaires. C'est fort, ça, là. Ce n'est pas difficulté de concertation, c'est quasi-absence. Vous ne vous parlez pas. Vous arrivez par la suite et vous réclamez ? puis je trouve que c'est une piste intéressante, puis le ministre l'a abordée ce matin ? vous réclamez que, avant qu'une décision ne soit prise d'une fermeture d'école, par exemple, que la commission scolaire soit tenue, hein, de consulter les citoyens.

Moi, si j'ai bien compris les interventions du ministre ce matin, ça allait dans cette direction-là. Il faut effectivement se donner des outils qui vont permettre aux citoyens et aux citoyennes de faire valoir leur point de vue autres que le ratio, et j'apprends effectivement qu'il n'y a aucune balise, il n'existe aucune balise à la grandeur du Québec qui permettrait d'encadrer, de donner des indications quant aux conditions de maintien ou de fermeture. Alors, dans une commission scolaire, on garde l'école ouverte, qu'il y en ait trois, quatre ou cinq. Dans une autre, c'est 20; dans une autre, c'est 30, bon, etc. Et ça vous amène quelque part à vous dire: Avant de fermer une école, il faudrait que la commission scolaire ait la permission, hein ? c'est, à toutes fins pratiques, ce que vous demandez ? ait la permission de la municipalité. Ça, ça s'appelle un droit de veto, là. Puis, je l'ai dit tantôt, là, soyons clairs, c'est un droit de veto, puis ça signifie, à toutes fins pratiques, que vous allez tout le temps dire non. Pourquoi? Parce que l'école, c'est le centre, hein, c'est ce qui permet... C'est le poumon, surtout dans les petites municipalités. Donc, ce que vous dites aux commissions scolaires, c'est: Vous devez nous demander la permission pour fermer votre école, puis, nous autres, on va, à toutes les fois, vous dire non. O.K.? Je caricature un petit peu, mais pas beaucoup.

Avant d'en arriver à cette mesure que je considère extrême, parce que n'oublions pas que les commissions scolaires sont aussi redevables, ils sont élus puis ils ont le droit de taxer, pareil comme vous autres... Ça fait que ce que vous êtes en train de nous dire, c'est que vous les mettez sous tutelle. À ce moment-là, moi aussi, j'ai envie de poser la question, là, je veux dire: Est-ce qu'il y a lieu que les commissions scolaires continuent à exister? Est-ce que les municipalités ne seraient pas mieux placées pour gérer à la fois leurs équipements municipaux, les services municipaux puis aussi les services éducatifs offerts à leur population? Votre prétention, c'est que vous êtes beaucoup plus proches des besoins, des visions de vos populations locales. Ça fait que est-ce que ce n'est pas un peu ça, finalement, l'aboutissement de votre réflexion, il y a une structure de trop dans le paysage, et vous êtes mieux placés pour assumer les responsabilités qui vous sont confiées par vos citoyens et citoyennes que ne le sont les commissions scolaires? Et, sinon, il va falloir revenir à quelque chose d'un peu plus équilibré. Voilà.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Moi, je pourrais vous répondre: Écoutez, non, le but de notre mémoire, de notre présentation, ce n'est pas de réclamer l'abolition des commissions scolaires, du tout.

M. Kieffer: Ce ne l'est pas officiellement.

M. Belzil (Michel): Et, moi, je ne vois pas rouge ce matin, je suis tout à fait calme. Et ce que je vous dis, c'est ce que 183 municipalités chez nous nous ont dit, c'est ce qu'on dit depuis déjà 1996, et c'est assez clair, hein? Je veux juste faire état, là, de qu'est-ce qui se passe réellement, comme M. le député Lachance disait tantôt. Quand, vraiment, il y a une problématique de fermeture d'une école, qu'est-ce qui se passe? Pensez-vous que les commissaires sont pressés d'aller dans les médias, de convoquer les municipalités, etc.? Faites-vous en pas ? et je les comprends ? eux, ils ont à s'occuper d'un secteur, ils ont un silo, c'est les écoles et l'éducation, pour le peu quand même qu'ils ont encore de marge de manoeuvre dans les sous qui sont attribués, là, à l'éducation, alors ils se concentrent là-dessus. Bien sûr que les commissaires ? et j'en connais beaucoup ? il y en a plusieurs qui, au-delà de leurs fonctions, sont souvent même des élus municipaux et qui vont au-delà de cette perspective-là. Mais, quand même, ils oeuvrent dans un cadre, dans une commission scolaire avec un bureau de direction, il y a des interventions, il y a des directives, il y a ci, il y a ça qui viennent de tout niveau, et ils prennent leurs décisions d'une façon éclairée, à leur mesure. Mais pourquoi tous les citoyens, tout le monde se retourne vers le conseil municipal, vers le maire en tête, hein? C'est toujours la même réaction, on vient chez nous pour nous dire, là: Il y a un problème, puis on se fie sur vous pour ne pas fermer l'école.

Alors, moi, je pense que dans un... Comment je dirais ça? On pourrait dire que la municipalité est au coeur de ces débats-là. Et, bien sûr, tantôt... J'allègue, là, la multitude d'organismes dans un milieu, mais, dans le fond, là, la réalité de tous les jours, là, c'est que les citoyens, les parents s'en vont vers leur municipalité et leur demandent de l'aide, et les municipalités ont pieds et mains liés dans ces circonstances-là. Et qui a la mission? Et, de plus en plus, on va parler de décentralisation dans les mois qui viennent, qui a la mission réelle de développer un territoire dans son intégralité? Qui ne fonctionne pas par silo, hein, comme différents secteurs? C'est le monde municipal. Nous, là, on doit s'occuper du développement économique, de la qualité de vie de nos citoyens, des services de proximité. On s'occupe de tout. On est, nous, à une échelle horizontale, et la question des petites écoles, chez nous, est très importante, et tout ça, et tout ça. Alors, je pense que ça va être de tout temps que les municipalités vont se préoccuper de cet aspect-là et que, dans la mesure où ils verront que le débat n'a pas été fait, que les gens ne sont pas satisfaits, que la transparence n'a pas été au coeur du débat ? quand je parle de débats publics, ce n'est pas vrai que ça se fait partout, là ? quand ils verront ça, c'est évident qu'ils vont monter aux barricades en toute représentation de l'ensemble des parents et des citoyens chez eux.

n(11 h 20)n

Alors, moi, ce que je propose là-dedans, ce n'est pas l'abolition des commissions scolaires, mais c'est un processus décisionnel partagé et tout à fait légitime, comprenez-vous ? et je pourrais abonder encore plus longtemps dans ce sens-là ? tout à fait légitime, que les municipalités prennent part à ces décisions-là. Ce n'est pas vrai... Et ce n'est pas tous les cas. Je ne veux pas mettre les gens tous dans le même panier, mais il n'y a plus de représentation, comme disait M. le député tantôt, et c'est assez facile de claquer la fermeture d'une petite école quand la direction de la commission scolaire est à mille et une lieues de la petite école et on s'en fout. Ils peuvent bien crier, ils se disent: On ne peut pas satisfaire tout le monde, comme on dit dans le monde politique.

Mais je pense que, quand on parle de la petite école de village et la dernière, on n'entretient pas ces propos-là, et je ne suis pas d'accord avec ces propos-là. Quand les gens disent: Il y en a 270 qui ont fermé sur le territoire du Québec, qui sont fermées, il y a des villages qu'il n'y a pas d'école, et qu'est-ce que ça fait? je ne suis pas d'accord avec ces propos réducteurs là, hein? On est, aujourd'hui, là, à une époque charnière, on les développe, nos régions ou on ne les développe pas? La politique de la ruralité est intéressante, mais elle est fortement décriée aussi parce qu'on constate que les ministères n'épousent pas nécessairement toute la vision de la politique. Et on en était conscient dès la signature en décembre passé, mais je pense qu'il faut, là, arrêter de jouer sur des modèles de structure, arrêter de dire au président de la FQM: Toi, mon président, tu veux que ton monde gère les écoles, pas du tout. Nous, à la Fédération québécoise des municipalités, on veut que nos milieux se développent, et c'est notre responsabilité. Et ce n'est pas vrai que, moi, je veux faire un débat de structures. La preuve, c'est qu'on veut avoir un mot à dire de façon partagée avec les commissions scolaires, et on va s'assurer que le débat va se faire.

Alors, ce n'est pas quelque chose de bizarre. Ça ne nécessite pas de fonds supplémentaires à la municipalité, comme disaient certains tantôt. Écoutez, on n'est pas obligé de toujours mettre des bâtons dans les roues aussitôt qu'on annonce une idée intéressante. Alors, moi, là, c'est important pour nous. On a des municipalités qui ont été consultées, et je parcours l'ensemble du territoire du Québec, et je peux vous dire que les gens sont inquiets. À preuve, 35 % des municipalités sondées disent qu'ils sont en possibilité de fermeture d'écoles et 56 % disent qu'ils craignent, qu'ils sont dans une grande inquiétude pour la question de la fermeture des écoles.

Alors, il faut, je pense, avoir une perception juste du débat à ce moment-ci, et je pense inévitablement que nos propositions là-dessus seraient intéressantes. Et ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de concertation. On dit ici: Une absence de concertation, c'est les municipalités qui ont bien voulu répondre à notre invitation, les 183. Il y a une certaine concertation. Moi, j'évolue avec les commissions scolaires constamment, mais, quand vient le temps de ça, comme je l'ai dit dans le mémoire, c'est facile de faire appel à des professionnels, hein, au même titre ? puis là je vais terminer là-dessus ? au même titre que quand un parent ? et là je suis un peu à côté de la track ? quand un parent a une demande de rencontre avec la direction d'une commission scolaire, voyez-vous ce que c'est, toute l'histoire? Il y a des avocats qui sont là, hein? Il y a des avocats, c'est extrêmement compliqué. On me demande de les accompagner tellement c'est compliqué. Alors, c'est au même titre que tout ça. Je pense que je ne peux pas blâmer les commissions scolaires, mais là on veut les développer, nos régions, on ne veut pas les fermer, nos écoles, puis ce n'est pas vrai que je vais embarquer dans un débat de structures.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Belzil. Puis là je pense que je vais répéter encore une fois: Si les réponses pouvaient être un peu plus courtes, parce que les collègues veulent poser des questions puis le temps est limité.

M. Belzil (Michel): Je voyais bleu. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. D'abord, j'apprécie ? bonjour, M. Belzil, madame ? j'apprécie que la Fédération québécoise des municipalités, qui représente les petites municipalités au Québec, soit sensible à cette problématique. Vous savez, j'ai vécu le monde municipal depuis l'Union des conseils de comté, l'Union des MRC, et ces questions-là étaient peut-être moins préoccupantes à ce moment-là, il y a quelques années, mais aujourd'hui on sent que vous ne pouvez pas passer à côté.

Cependant, moi, je vais revenir sur l'aspect pédagogique. Vous savez, l'histoire du moratoire, là, je pense, c'est intéressant, plusieurs l'ont invoqué du côté de l'opposition. Moi, c'est mon opinion qu'aussi on peut ne pas s'entendre sur la durée, parce qu'un moratoire qui durerait 10 ans, pour moi, ce n'est pas un moratoire, là. Finalement, on fige tout. Mais il devrait, je pense, également y avoir un moratoire. En tout cas, personnellement, je penserais davantage à trois ans. On s'entend sur un moratoire.

Là où j'ai un problème, c'est que... Encore là, je l'ai vécu, c'est jusqu'où on peut aller? À quelle condition on va garder une école ouverte? Est-ce que c'est à n'importe quelle condition? Est-ce que, à la rigueur, on va dire: Bien, il y a 10 élèves, il y a cinq élèves, on garde l'école ouverte? C'est où, le plancher? Parce que, vous savez, il y a des réalités aussi qui sont vécues, et ça, encore une fois, je fais référence à quelque chose de précis. En 2001, chez nous, les gens, ils disaient: Toi, là, Claude, tu demeures à Saint-Nazaire, tu as été directeur de cette école-là, tu as été maire, tu connais... Utilise ton poids, si tu en as un, de député pour empêcher l'école de fermer. Puis, moi, j'ai dit: Écoutez, les amis, comme parent d'enfants ? parce que j'en ai trois ? aux conditions qu'on nous donne, je n'enverrai pas mes enfants dans une école primaire, même s'ils sont relativement intelligents, parce que je penserais que ce n'est pas bien pour l'enfant d'être dans une classe avec trois degrés ? parce que c'était ça qui était proposé. On n'est plus à l'époque où, moi-même, j'ai vécu, comme le député de Vaudreuil, 37 élèves avec une classe à sept degrés dans une école où on avait le poêle à deux ponts. Il faisait très chaud pour ceux qui étaient proches puis très froid pour ceux qui étaient loin, sans parler de toute la question sanitaire et puis de l'eau courante qui n'existait pas. On n'est plus là. Mais jusqu'où on peut aller?

La Présidente (Mme Bélanger): ...rendu député.

M. Lachance: Pardon?

La Présidente (Mme Bélanger): Ça a bien réussi, tu es rendu député.

M. Lachance: Oui, mais en tout cas. Il y en a d'autres, par exemple, qui restaient dans le fond de la classe, puis on ne s'en occupait pas, la maîtresse n'avait pas le temps de s'en occuper. La question est la suivante, c'est: Est-ce qu'on va réussir à attirer des enseignantes ? parce que ce sont surtout des enseignantes au primaire ? de qualité, intéressées quand on leur donne une charge de travail comme celle-là? Au vécu, là, on l'a observé. Savez-vous qu'est-ce qui s'est passé? D'abord, les enseignantes, dans ces conditions-là, ce sont les plus jeunes, celles qui sortent de l'université, celles qui sont en bas de la liste, et, aussitôt qu'elles ont une occasion de sacrer leur camp dans une autre école où la tâche est moins lourde, où la sécurité d'emploi est plus intéressante... Il n'y a pas de stabilité, et ça, c'est déjà un problème, un problème assez sérieux.

Et, pour le bien de l'enfant, c'est quoi qui est le mieux pour le bien de l'enfant? Je veux bien aussi qu'on conserve notre école, la dernière école de village le plus longtemps possible, mais c'est toujours à quelle condition? Est-ce qu'on ne devrait pas se préoccuper de cette question-là? Parce que là je suis allé voir les enfants qui sont déménagés à Saint-Léon, je suis allé voir dans d'autres municipalités aussi où ça s'est déjà passé, et, vous savez, ce sont bien plus les parents qui sont préoccupés par le problème que les enfants, parce que les enfants ont une très grande capacité d'adaptation. Je ne veux pas dire par là qu'on doit favoriser le déplacement des enfants, mais il faut regarder aussi le contexte, les facilités de déplacement, l'état des routes et la distance à parcourir, puis il y a toute une série de facteurs. Alors, moi, là, je vous demande, M. Belzil, est-ce que vous avez examiné chez vous cet aspect, là, plus le bien de l'enfant, l'aspect carrément pédagogique par rapport à l'autre aspect qui dit: Il faut garder l'école ouverte?

M. Belzil (Michel) Bien, écoutez, nous aussi, ça fait partie de nos préoccupations. Je sais bien que la Fédération des commissions scolaires, c'est leur principal argumentaire, hein, à un moment donné, quand vient le temps de faire affaire avec des écoles fragilisées avec un petit nombre d'étudiants. Il y a des MRC au Québec, hein, qui jouent ? des MRC, je ne me rappelle plus le nom ? qui jouent avec des planchers d'étudiants de 20 à 30 étudiants, et c'est tout à fait normal, et ça fait des années qu'ils jouent avec ce nombre, et ils nous disent qu'ils sont tout à fait à l'aise là-dedans et qu'il n'y a pas de préoccupation de fermeture. Il y en a d'autres, aussitôt que ça baisse en bas de 100, déjà des articles dans les médias, et on pense à ce que ça pourrait survenir bientôt. D'autres, à 50, c'est la fermeture, 50 moins un, c'est la fermeture, alors qu'on démontre dans notre mémoire et que ça aurait avantage à être diffusé plus amplement que les classes multiprogrammes, ce n'est pas vrai que ce n'est pas gage de succès, c'est intéressant, c'est bon. Et, même, je jasais avec le président de la Fédération des commissions scolaires, André Caron, récemment ? on se parle souvent ? et il me disait que lui aussi était d'accord avec cette vision de classes multiprogrammes.

n(11 h 30)n

Alors, on va, là-dessus, moi, vous dire qu'on a réfléchi à un plancher. Moi, je n'ai pas réfléchi puis je ne suis pas quelqu'un qui peut régler le cas de toutes les collectivités. Vous avez sûrement raison qu'il y a une évidence à laquelle il faut arriver à un moment donné, mais il faut que ce soient tous les gens, hein, concernés qui arrivent à cette évidence-là. Et, aujourd'hui, oui, il y a des cas où les parents disent: Oui, c'est préférable de fermer l'école et diriger nos enfants ailleurs, mais il y a aussi beaucoup de cas ? et surtout s'ils étaient informés des possibilités qui s'offrent à eux ? il y a aussi beaucoup de cas où les parents veulent garder l'école. Vous dites: Oui, c'est le bien de l'enfant. Mais les parents, ce sont eux qui sont les mandataires de ces enfants, d'après moi, pour ce qui est de leur bien-être. Alors, c'est un peu dans ce sens-là. Je ne réponds peut-être pas directement. Mais n'oubliez pas que c'est aussi à l'inverse: il y a des écoles qui ont six élèves, que tout le monde voudrait les fermer, mais le coût de transport serait tellement onéreux que même le gouvernement ou les commissions scolaires les laissent là, parce que la solution serait trop onéreuse.

Alors, il y a toujours des cas à l'extrême, hein, qui vont toujours être difficile à évaluer. Mais, en général, moi, je pense que le maintien des écoles dans chacun des villages, c'est une mission possible. Puis, écoutez, la Politique nationale de la ruralité, le premier ministre nous a lancé un défi d'innover. Il y a des municipalités, là, qui cherchent à attirer des jeunes familles chez eux. Alors, donnons-nous le temps, hein, que ça prenne son ampleur, que ça se mette en oeuvre. Donnons-nous le temps que ces mesures-là aient des bénéfices. Puis ce n'est pas dans un an. Les gens ne commencent qu'à s'approprier tout ça. Alors, moi, je dis: Un moratoire de cinq ans, c'est en fonction aussi de tous ces éléments-là.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Belzil. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Belzil, et merci pour votre mémoire. Vous savez, étant originaire d'un milieu rural, je comprends très bien les situations que vous évoquez. Je voudrais poser une question sur le dernier sujet que vous avez évoqué en terminant, et c'est votre proposition de moratoire. Je comprends que vous aviez proposé la même chose en 1996 ou 1997, ce que vous indiquez au début de vos propos. Donc, ça n'avait pas été retenu. Vous le proposez pour une période quand même assez longue. Cinq ans, c'est quand même plusieurs années où finalement ce sera un statu quo à travers la province.

D'autre part, il y a les travaux de cette commission parlementaire, que nous avions proposés dès le début de 2001, visant à examiner toute cette situation-là, la problématique, et à tenter de proposer des pistes de solution. Vous avez également constaté, parce que vous en êtes partie vous-même, que le ministre a mis sur pied un groupe de travail sur le maintien des écoles de village, en juin dernier, et demande à ce comité de proposer un plan d'action, si je comprends, pour le mois de novembre prochain. Donc, vous aurez concomitamment des propositions de cette commission, à moins que vous veniez nous revoir comme membre du comité, et des propositions de votre comité. Donc, novembre prochain, quand même, c'est assez près.

Je peux comprendre qu'un moratoire temporaire, en attendant l'élaboration d'une politique ? et je pense que c'est ce que vous souhaitez ? puisse se justifier. Mais, si vous allez avec un moratoire aussi long, est-ce que c'est parce que vous désespérez des solutions dont pourra accoucher le comité ou la commission? Parce que, normalement, ça devrait pouvoir arriver dès l'automne.

M. Belzil (Michel): Bien, écoutez, pour vous répondre, le comité de travail s'est réuni à une occasion où on a défini le mandat. Et le mandat, vous avez raison, c'est de voir à l'élaboration d'un plan d'action. Mais, pour moi, là, plan d'action, si je réfère à ma culture municipale, c'est plan d'action par un CLD, plan d'action. Alors, ce n'est pas du tout une stratégie. C'est loin d'être même une politique gouvernementale ou une politique nationale. Alors, c'est un peu ce que j'ai plaidé, je vous dirai, à ce groupe de travail auquel je vais continuer à participer et auquel je vais être très positif pour arriver à quelque chose pour le rendez-vous des régions au mois de novembre.

Par contre, mon mémoire n'est pas ? comment je dirais ça? ? nécessairement dans le groupe de travail. Je n'ai pas d'obligation, moi. Le mémoire, là, dont je parle: cinq ans, maintien des petites écoles, essayer de trouver des solutions. Je pense que le comité va essayer de mettre sur la table des solutions, un peu ce qu'on demande. Comprenez-vous? Mais, nous, ce qu'on dit, c'est que, au-delà du comité de travail, ce qu'on veut, c'est qu'on ait le temps de réfléchir. On propose, nous, un partenariat de décision entre la municipalité et la commission scolaire. Ça ne se fait pas dans quatre mois ni dans six mois, ce genre de chose là. Ça va prendre, j'imagine, quelques années avant d'arriver à bien argumenter tout ça puis légiférer là-dessus. Alors, on propose différentes choses qui ne se feront pas d'ici le printemps prochain.

Alors, c'est pour ça que, nous, le moratoire de cinq ans est tout à fait logique. Il n'empêche pas les discussions de groupes de travail, il n'empêche pas non plus votre rapport final à la commission. Mais j'espère que vous pourrez aller dans ce sens-là aussi, hein, et donner le temps aux collectivités, guidées par leurs municipalités et en appuyant les commissions scolaires ? voyez-vous comment les mots sont bien soupesés? ? donner le temps de trouver des solutions à leurs problématiques. Alors, pour donner le temps, ça en prend, du temps, et les initiatives locales qui vont se faire l'an prochain et dans deux ans vont porter des fruits dans quelques années. Si on pense à fermer une école alors qu'il y a 22 enfants et que, dans trois, quatre ans, pour quelque raison que ce soit, à cause d'initiatives des gens du milieu, on est rendu à 38 étudiants, bien, on aura manqué notre coup de la fermer prématurément.

Alors, nous, ce qu'on dit: il faut être cohérent. On veut qu'on se prenne en main et qu'on relève le défi lancé par le premier ministre, mais on veut aussi avoir le temps de trouver des solutions.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. M. Belzil, Mme Brassard, bienvenue. Merci de votre contribution par le dépôt de votre mémoire. Pour la question du moratoire, c'est un peu désolant, ce matin, compte tenu du mandat d'initiative de la commission, que le ministre ait semblé, en fait, repousser l'idée du revers de la main, parce que je pense que tout doit être mis sur la table à l'étape évidemment des travaux de la commission, y incluant bien sûr la possibilité d'un moratoire.

Je souhaiterais, M. Belzil, revenir sur la question qui a fait l'objet ce matin d'interrogations, de la part de moi-même et de notre collègue le député de Bellechasse, sur le combat que livrent les parents au quotidien, évidemment, pour maintenir en vie leur école de village. Vous avez sonné l'alarme récemment en indiquant qu'au Québec il y avait 400 écoles de village qui étaient menacées de fermeture dans la mesure où, en fait, elles contiennent 100 élèves et moins. Ce matin, le ministre... Parce que je le questionnais sur la possibilité ou la marge de manoeuvre du ministère de l'Éducation face à des parents qui se butent trop souvent à la rigidité des commissions scolaires puis finalement qui condamnent... en fait, ce qui fait en sorte qu'on a une dynamique de confrontation qui est déplorable.

Vous demandez, dans votre mémoire, à la page 10, en fait ? vous me permettrez de vous citer ? «que le gouvernement se positionne clairement en faveur du maintien des écoles, principalement lorsqu'une seule école est en place dans un village». Concrètement, sur la base de ce que nous a dit le ministre ce matin ? parce qu'il invoquait une espèce d'impuissance d'agir face aux commissions scolaires, face à la juridiction des commissions scolaires ? concrètement, comment une recommandation comme celle qui est contenue dans votre mémoire pourrait s'articuler? Est-ce que ça veut dire que le gouvernement, effectivement, devrait adopter une politique claire de maintien des écoles de village? Est-ce qu'on devrait, comme le ministre l'a souligné, aborder... en fait, déposer un amendement à la Loi sur l'instruction publique? Concrètement, comment on devrait le faire? Parce que, à l'heure actuelle, on est dans une espèce de vide, là, sur le plan législatif qui fait en sorte qu'il y a comme une insécurité, là, qui est palpable ? vous l'avez dit: les inquiétudes des parents, et tout ça.

Et là les parents, dans le fond, se tournent nécessairement, dans un contexte comme celui-là, de confrontation, vers le ministre de l'Éducation en l'interpellant: Vous, M. le ministre, qu'est-ce que vous pouvez faire pour nous pour qu'on puisse maintenir en vie notre école de village? Alors, comment donc on pourrait articuler ça concrètement?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Belzil.

n(11 h 40)n

M. Belzil (Michel): Oui. Je vais peut-être commencer par vous dire que, oui, j'ai assisté à la réponse que M. le ministre vous a donnée. J'ai un peu de difficultés, moi, avec toute cette sacro-sainte protection de juridiction à un niveau des commissions scolaires, alors qu'on les a quand même réduites à un tiers de leur nombre, alors qu'il y a eu des débats ? et vous le savez, et vous avez encore, même, des débats dans vos officines, à savoir: Est-ce qu'on les maintient ou on ne les maintient pas? On en est tous au courant au Québec.

Moi, j'ai de la difficulté parce que je regarde en parallèle ce qui s'est fait dans le monde municipal depuis trois ans. J'imagine que c'est un peu le même jeu. Peut-être qu'on a plus d'autonomie fiscale dans les municipalités, mais on nous a indiqué, avec une forte direction, certains changements majeurs dans nos municipalités; et, à ce que je sache, c'était la pensée gouvernementale tout entière. Alors, je me dis: Pourquoi insister sur une telle protection à ce moment-ci?

Moi, là, comme Fédération, au contraire ? vous lirez les quelques espaces où je parle des commissions scolaires ? non, on veut participer avec les commissions scolaires à ces décisions-là. Alors, j'ai de la difficulté au message, je veux dire: On ne peut pas toucher les commissions scolaires, elles sont autonomes de décision. Aïe! on a vécu bien des choses récemment, et c'est loin d'être le cas dans d'autres niveaux.

Mais, pour revenir à votre question, bien, je sais qu'il y a des gens qui prônent une politique nationale sur le maintien des petites écoles. Alors, moi, souvent, je pense que j'ai dit que le message doit être clair. O.K. Et je pense aussi que le ministre, grâce aux travaux de votre commission, j'imagine, pourra en arriver à un message encore plus clair, plus clarifié des choses. Et les pistes d'avenue qu'on vous cite, je pense que vous devriez les retenir. Et ce n'est pas, comme je vous l'ai dit tantôt, faire le voeu d'un certain corporatisme.

Aujourd'hui, là, le débat des petites écoles, Michel Belzil, président de la Fédération québécoise des municipalités, c'est un dossier personnel auquel il tient. Ce n'est pas une question d'aller chercher des pouvoirs des uns et des autres. On cherche une solution. Et je ne pense pas que la solution réside dans le statu quo à ce moment-ci. On propose, nous, quelque chose d'intéressant, le monde municipal, qui est intimement lié à toutes ces décisions-là. Et je pense que ça va favoriser la concertation.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Chagnon: Compte tenu de ce que vous venez de dire, M. Belzil, est-ce que vous accepteriez, par exemple, que la loi de l'éducation, la Loi de l'instruction publique soit modifiée et qu'on permette, par exemple, une augmentation de la capacité de taxation des commissions scolaires locales, justement, pour financer le maintien des écoles, des dernières écoles de quartier ou de la dernière école de village?

M. Belzil (Michel): Bien, je vous dirai rapidement que ce n'est pas une avenue que nous avons explorée du tout.

M. Chagnon: Je vous pose la question.

M. Belzil (Michel): Non, nous n'en sommes pas là. Ce qu'on dit, nous, c'est que les sous ? le ministre les a annoncés, 11 ou 15 millions ? qui sont dédiés...

M. Chagnon: Non, mais, moi, je parle aux commissions scolaires de pouvoir prendre leurs responsabilités locales. Vous êtes pour ça, les responsabilités locales? Alors, la meilleure façon de pouvoir leur donner une capacité de responsabilisation locale, c'est d'avoir une capacité fiscale qui soit plus grande.

M. Belzil (Michel): Mais je vous dirais là-dessus que la capacité fiscale des commissions scolaires est quand même limitée, hein, il y a un plafond. Et je ne vois pas que...

M. Chagnon: Si c'était déplafonné, ça permettrait aux commissions scolaires locales de pouvoir prendre des décisions de protection de leurs équipements locaux.

M. Belzil (Michel): Non, je ne vois pas, moi, que les citoyens seraient favorables à une augmentation de taxes, de la taxe scolaire. Je pense que, à l'intérieur des budgets actuels, avec la souplesse des budgets des ministères, il y a moyen de dégager quelques dizaines de millions par année pour maintenir ces écoles.

M. Chagnon: Mais c'est toujours l'argent qui revient des... Du 10 millions par année, il va venir d'où, vous pensez, l'argent du ministère?

M. Belzil (Michel): Ça vient des poches des citoyens, mais par une autre taxation.

M. Chagnon: Bon. Alors, on parle de la même chose. Lorsque, localement, une municipalité, comme vous l'avez mentionné, se sent obligée de participer au financement de la construction ou de l'amélioration locative d'un immeuble, elle le fait avec l'argent de ses citoyens. Est-ce que ce ne serait pas plus normal que ce soit le niveau de taxation des commissions scolaires qui lui permette de le faire, donc qu'il y ait déplafonnement de ce montant-là?

M. Belzil (Michel): Non, il y a d'autre moyen, et je pense qu'on l'a dit dans notre mémoire. Et, nous, on ne veut pas le déplafonnement du taux de taxation. On ne le veut pas pour d'autres raisons historiques, pas rien que pour celle-là. Mais on ne le veut pas non plus, hein. Les commissions scolaires...

M. Chagnon: Mais est-ce que, dans la logique de l'administration locale, ce ne serait pas plus évident, la prise de décision locale par une instance?

M. Belzil (Michel): Non, je pense qu'on ne peut pas non plus tout amener dans les municipalités et leur dire: Taxez. Quand on parle actuellement ? on va en parler beaucoup, cette semaine, à notre congrès ? de décentralisation, on n'est pas rendu à dire: Donnez-nous des éléments... des pans importants de décentralisation, on va s'occuper avec le financement. À la Fédération québécoise des municipalités, on n'est pas là. On demande au gouvernement de décentraliser des choses avec le financement normal l'accompagnant. Et on a vu dans l'histoire les quelques exemples de décentralisation où ça a fait gagnant-gagnant: décentralisation de la voirie locale à une époque. Le gouvernement a sauvé peut-être 80 millions, 100 millions, et les municipalités sont en mesure de faire un meilleur travail que ce qui existait avant. Alors, nous, il ne faut pas désincarner la responsabilité du financement.

M. Chagnon: Vous avez mentionné qu'un siège de représentant élu municipal, maire ou conseilleur, soit accordé au Conseil des commissaires. Est-ce que l'inverse pourrait être vrai aussi? Est-ce qu'un siège du Conseil des commissaires pourrait être attribué dans chacune de vos municipalités?

M. Belzil (Michel): Sans aucun problème. Un siège, bien sûr, les municipalités, on sait comment c'est... Un siège d'observateur, bien sûr.

M. Chagnon: Ce que vous réclamez pour le monde municipal et dans le monde scolaire, j'imagine que le contraire doit fonctionner dans les deux sens.

M. Belzil (Michel): Oui, oui. Tout à fait. Tout à fait.

M. Chagnon: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui, Mme la Présidente. J'aurais une autre question concernant, en fait... Vous revendiquez, comme mon collègue vient de le souligner, au-delà du siège que vous revendiquez au sein de la commission scolaire, mais, au-delà de ça, vous souhaitez une plus grande concertation entre les municipalités et les commissions scolaires. Et, en fait, mon collègue tout à l'heure, le député de Groulx, évoquait même l'aspect lié à une espèce de droit de veto.

Qui, selon vous, devrait assumer le leadership pour permettre aux deux instances d'avoir une plus grande concertation qui pourrait peut-être même être encadrée sur le plan juridique? Qui devrait favoriser? Parce que, au-delà évidemment des discussions qu'il peut y avoir sur le terrain, ce que je décode, c'est qu'on ne se parle pas suffisamment, finalement. Puis la preuve, c'est que vous souhaitez que les commissions scolaires consultent les municipalités avant de procéder ou de prendre la décision de fermer une école de village. Alors, pour officialiser tout le processus d'une meilleure collaboration entre les deux instances qui ont des juridictions bien différentes, est-ce que, par exemple, le ministère de l'Éducation devrait, ou le gouvernement... D'où devrait venir l'idée d'assurer un meilleur arrimage entre les deux sur le plan des juridictions concernant ce cas-ci?

M. Belzil (Michel): Je pense qu'il faut être clair. Nous, on peut jongler souvent avec les MRC, avec le gouvernement, avec d'autres structures qui sont supralocales. Mais, dans notre mémoire ? je veux revenir là-dessus pour répondre tantôt ? on parle vraiment que c'est la municipalité locale qui doit être ? comment je dirais? ? ...

Mme Normandeau: En interface...

M. Belzil (Michel): ...en intense discussion avec les commissions scolaires, et c'est ce lieu qu'il faut privilégier. Que de faire intervenir d'autres intervenants, comme je pourrais dire, c'est délicat. Il faudrait songer à cette question-là. Je comprends. Dans les cas où il y a de la difficulté, il faut qu'il y ait un leadership pour... Mais je pense que les gens, dans la mesure où c'est clairement édicté, clairement mis même dans les lois et avec un message clair, je pense qu'il n'y aura pas de problème à ce que les gens se parlent. Moi, je vais vous dire, là, aujourd'hui, on parle de confrontation avec les commissions scolaires. Je ne suis pas tout à fait là, personnellement, à ce niveau-là. Dans la mesure où les choses sont claires, c'est comme dans d'autres instances au Québec, si les mandats sont clairs, on dit aux gens: Vous vous assoyez ensemble, vous faites de la consultation à grand déploiement, etc. Je pense que les gens vont vouloir travailler ensemble. Moi, c'est la réponse que je vous dirais à ce moment-ci.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va?

Mme Normandeau: Juste une dernière question, Mme la Présidente. Donc, pas nécessairement de voie législative pour répondre à cet impératif-là d'une meilleure concertation. Vous dites que, dans le fond, sur le terrain, les gens peuvent se parler.

M. Belzil (Michel): Oui, oui, une voie législative, parce que sinon...

Mme Normandeau: Oui. O.K. D'accord.

M. Belzil (Michel): Nous, on demande à ce que les municipalités prennent part à la décision. Alors, il faudrait que ce soit édicté dans des lois.

Mme Normandeau: Bien là vous interpellez le législateur, en fait, actuellement. O.K. Bien. Merci. C'est beau, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Il reste trois minutes. Une dernière question. Dans le mémoire de l'Union des municipalités du Québec, cette dernière dit que le renforcement d'une région passe par le renforcement de sa municipalité d'influence ou de sa municipalité-centre, et c'est dans le mémoire que nous avons aujourd'hui. Est-ce que vous êtes d'accord avec cet énoncé?

n(11 h 50)n

M. Belzil (Michel): C'est parce que je n'ai pas lu le mémoire, je ne sais pas où on veut en venir avec l'influence de la municipalité-centre. Mais, moi, j'ai déjà jasé avec des maires de villes de centralité qui m'ont dit: Écoute, Michel, dans la mesure où il y aurait même des municipalités en périphérie de villes-centres, je n'aurais même pas d'objection, moi, à tatouiller pour dire: On peut prendre même des élèves de la ville-centre, d'écoles en périphérie. Maintenant, il y a eu des fusions des villes-centres avec le rural, vous le savez. Alors, ils ne verraient pas d'objection à ce que ça aille dans ce sens-là pour le maintien d'écoles. Alors, je trouve ça intéressant. Je ne sais pas si c'est le sens du mémoire, mais, dans ce sens-là, on est tout à fait d'accord, on est tout à fait ouvert. Mais il ne faut pas, là... Si c'est dans un autre sens, il ne faut pas mêler les choux avec les patates, là, hein. On parle du développement des écoles de village, puis j'attendrai de voir le mémoire pour réagir.

M. Marcoux: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui. Continuez, M. le député de Vaudreuil. Je vais vous arrêter quand ça va être le temps.

M. Marcoux: Une dernière question, M. Belzil. Je voudrais revenir au groupe de travail sur le maintien des écoles, parce que le ministre a insisté sur le rôle important de ce comité-là en indiquant que ça semblerait être le forum qui arriverait avec des pistes de solution d'avenir. Ce que je crois comprendre de vos propos, c'est que vous n'êtes pas tout à fait aussi optimiste que le ministre à cet égard-là, premièrement.

Ma deuxième question: Est-ce que les recommandations que vous faites dans votre mémoire à la commission, évidemment, ce sont celles également que vous allez avec force défendre auprès des membres, des autres membres du Comité sur le maintien des écoles de village?

M. Belzil (Michel): Vous avez tout à fait raison, ce mémoire-là fera partie intégrale des discussions de notre prochaine rencontre du groupe de travail, et je pense que les gens pouvaient s'attendre à un tel mémoire de la part de la Fédération québécoise des municipalités.

Pour ce qui est des espoirs que je mets, moi, dans les conclusions du groupe de travail, je vous dirai qu'il y aura des conclusions, quant à moi, à court terme et des conclusions qui vont devoir s'échelonner sur l'an prochain. Parce que je ne pense pas qu'on peut, pour le rendez-vous de novembre, avoir fait tout le tour de la question, avoir évalué l'ensemble du portrait, etc., etc. Par contre, on va dégager ? c'est mon opinion, il faudrait demander aux deux coprésidents ? on va sûrement être en mesure de dégager pour novembre ? comment je dirais? ? des liens ou des grandes préoccupations ou ce vers quoi on peut s'en aller. Peut-on parler de moratoire? Peut-être qu'on pourrait aller jusque-là. C'est certain que, ce matin, j'ai un peu de difficultés avec ce que je lis, mais de toute façon le groupe de travail va se réunir, on va discuter et, moi, je vais y aller d'une façon très positive.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Belzil. Nous vous remercions, Mme Brassard et M. Belzil, de votre participation. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 53)

(Reprise à 11 h 55)

La Présidente (Mme Bélanger): Nous reprenons nos travaux, et je demanderais à l'Union des municipalités du Québec de bien vouloir s'approcher à la table.

Alors, nous vous souhaitons la bienvenue, et je vous demande, pour le bénéfice du Journal des débats, de vous présenter, la porte-parole, et de présenter la personne qui vous accompagne.

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Mme Angers-Turpin (Murielle): Merci, Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés, Mmes, MM. les membres de la commission, je vous remercie d'offrir aujourd'hui à l'Union des municipalités du Québec l'opportunité de vous transmettre son point de vue dans le cadre des consultations particulières sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation. Il me fait plaisir de vous présenter Mme Diane Fortin, urbaniste et conseillère aux politiques à l'Union des municipalités du Québec, qui m'accompagne ce matin.

Avec ses quelque 200 membres, comptant plus de 6 millions de citoyens, l'Union des municipalités du Québec représente le monde municipal dans toute sa diversité. Elle appuie et supporte ses membres en intervenant en leur nom, en les tenant informés sur les développements de la scène municipale et en leur donnant la possibilité d'influencer ensemble le cours des décisions dans le meilleur intérêt de ses citoyens. Enfin, reflétant en cela l'évolution de la pensée et de l'action municipale des dernières années, l'Union mène à bien divers mandats de services auprès de ses membres, favorisant ainsi une saine gestion des deniers publics.

Avant d'entrer dans le coeur du sujet, permettez-moi de vous souligner qu'à l'UMQ nous trouvons quelque peu paradoxal de nous retrouver devant cette commission suite à votre invitation du 20 juin dernier. De sa main droite, le ministre de l'Éducation sollicite notre contribution pour la recherche de solutions à la décroissance scolaire dans le cadre de ces consultations particulières, ce qui est fort bien. Ce qui l'est moins, c'est que sa main gauche nous tienne à l'écart du Groupe de travail sur le maintien des écoles de village, mis en place récemment par les ministres de l'Éducation et des Régions, dont la première réunion, à ce qu'on a entendu tout à l'heure, s'est déjà tenue.

C'est donc avec une certaine stupéfaction que nous avons appris que ce groupe de travail, qui réunit des représentants du ministère de l'Éducation, du ministère des Régions, de la Solidarité rurale, de la Fédération des commissions scolaires, de la Fédération des comités de parents, de l'Association des commissions scolaires anglophones et de la Fédération québécoise des municipalités, ait oublié un acteur important: l'Union des municipalités du Québec. Il est inconcevable que l'UMQ, qui représente près de 75 % du territoire municipalisé au Québec, plus de 80 % de la population et plus de 90 % des budgets municipaux, soit absente de ce comité.

À cet égard, nous vous rappelons que la force de l'UMQ réside dans la diversité de ses membres qui proviennent des régions centrales, des régions-ressources, des petites et des grandes municipalités et que, par conséquent, la majorité de ses membres sont directement concernés par la problématique de la décroissance scolaire et du maintien des écoles, et nous espérons que cette situation sera corrigée dans les plus brefs délais.

Ceci étant dit, j'aimerais vous aviser que nous avons déposé hier une nouvelle version de notre mémoire. Suite à une rencontre de notre bureau de direction vendredi dernier, nous avons décidé d'apporter quelques amendements relatifs à des aspects fiscaux proposés dans notre premier document. Je demande donc aux membres de la commission de ne pas tenir compte du mémoire que nous vous avons transmis en début de semaine dernière, mais de plutôt considérer cette dernière nouvelle version. L'UMQ, tout...

M. Chagnon: ...parce qu'on a vu...

n(12 heures)n

Mme Angers-Turpin (Murielle): Ce sont sur des aspects fiscaux qui sont proposés dans le document. Si vous me permettez, je vais continuer, et puis on pourra en discuter tout à l'heure.

L'UMQ, tout comme la commission de l'éducation, est préoccupée par le dossier qui nous rassemble aujourd'hui et par les impacts négatifs de ce phénomène dans les communautés. La plus récente contribution de l'UMQ à la réflexion sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation remonte à mai 2000, dans le cadre du colloque sur la décroissance scolaire organisé par la Fédération des commissions scolaires du Québec, sous le thème À tout le monde de jouer. Deux ans et demi après cette réflexion, l'UMQ insiste encore sur l'importance de conserver à différents milieux leurs équipements scolaires, mais, pour ce faire, il faut le soutien de l'État pour aider les communautés à prendre en charge leur développement. Ainsi, en 1995, dans la foulée du vaste chantier des états généraux de l'éducation, le conseil d'administration de l'UMQ et de la Fédération des commissions scolaires s'est penché sur les impacts des décisions de chacune des institutions sur l'autre afin d'identifier des modes efficaces de gestion locale et développait une position conjointe dans un rapport intitulé L'ouverture et la fermeture des écoles. Ce rapport mettait l'accent sur le besoin de coordonner les décisions des municipalités et des commissions scolaires en matière de planification.

Dans le cadre du présent mémoire, l'UMQ n'entend pas répondre à toutes les questions du document de consultation relatives à chacune des clientèles, puisque la problématique de la diminution des effectifs relève toujours de la même dynamique, l'occupation du territoire québécois et le développement des régions du Québec qui passent avant tout par une politique cohérente d'aménagement du territoire et une prise en charge par le milieu de son propre développement. Faire abstraction de cette problématique de fond relèverait d'un manque de vision de la part du milieu municipal.

Nos propos témoigneront donc de l'importance que revêt pour l'UMQ la problématique du développement des régions du Québec et du rôle crucial de la municipalité d'influence dans la valorisation du potentiel de développement d'une région. Cette préoccupation, qui anime à plusieurs occasions les comités et les tables de discussion des membres de l'Union, ne concerne pas uniquement le présent débat, mais aussi celui entourant la réorganisation municipale, le fonctionnement de la structure régionale qu'est la MRC, la Politique nationale de la ruralité et, bientôt, touchera celui entourant le Rendez-vous national des régions qui se déroulera à l'automne 2002.

Le phénomène de fluctuation des clientèles dans le secteur de l'éducation n'est pas nouveau. Il découle du déplacement de la clientèle scolaire qui procède de deux forces majeures: d'abord, la baisse de la natalité et le vieillissement de la population qui font chuter les contingents globaux d'élèves; ensuite, le déplacement de la population vers les zones périurbaines au rythme de leur enrichissement et de la motorisation. Le Québec s'est ainsi retrouvé progressivement, depuis trois décennies, avec une pénurie d'écoles dans les banlieues et un trop grand nombre d'écoles dans certains quartiers centraux et dans plusieurs régions. En 2002, le problème de la diminution des effectifs scolaires s'est accentué, et ce, à tous les niveaux. Ce phénomène est d'autant plus inquiétant qu'il va de pair avec l'appauvrissement de la population des régions du Québec.

Outre la situation géographique, il faut avoir à l'esprit que le déplacement des clientèles scolaires, qui force les commissions scolaires à fermer les écoles à certains endroits et à en ouvrir à d'autres, relève en partie des décisions et des comportements traditionnels des différents acteurs du développement qui ont engendré le modèle de croissance urbaine qui caractérise le territoire québécois depuis les 50 dernières années. Le processus de développement urbain soulève, à l'évidence, certaines interrogations. La décision d'une commission scolaire de choisir de maintenir ouverte une école plutôt qu'une autre soulève toujours une levée de boucliers, particulièrement en milieu rural. La fermeture de l'école dans une petite municipalité signifie bien souvent, pour cette population, la fin du village. Pourtant, la fermeture de l'école n'est que la conséquence inéluctable de la désertion des jeunes familles vers les régions métropolitaines et du vieillissement de la population restante. Le combat contre la fermeture de l'école est avant tout, dans bien des cas, le combat contre la fermeture du village.

Cette menace de la fermeture de la dernière école d'un village découle, pour une bonne part, des problèmes de croissance économique des régions. À cet égard, une réforme de la fiscalité municipale et une véritable politique intégrée d'aménagement et d'occupation du territoire s'impose, car il en va de la consolidation du développement économique des régions et de la qualité de vie des populations autant urbaines que rurales. Dans cette perspective, il est clair que certains remèdes, conçus pour solutionner le problème de financement de la construction des équipements scolaires, semblent appropriés pour conserver à différents milieux leurs équipements scolaires. Ils ne peuvent cependant résoudre la problématique à eux seuls. Tout au plus, peuvent-ils participer localement à des prises de conscience quant à l'importance des coûts des équipements demandés pour sauver le milieu contre une lente, mais inexorable déstructuration et conduire à la responsabilisation financière du milieu qui assume les véritables coûts de ces équipements et services.

Les milieux ruraux sont fragilisés par le déclin démographique, par l'absence ou la disparition d'activités économiques structurantes et, souvent, par l'absence d'industries de transformation des ressources naturelles dans la région même où elles ont été prélevées. Seul le gouvernement est habilité à supporter les milieux par le biais de l'ensemble de ses interventions sectorielles. Pour l'UMQ, il est fondamental que le gouvernement dote le Québec d'une véritable politique d'aménagement et d'occupation du territoire. Il faut être conscient qu'une telle politique implique des déboursés importants en termes de maintien d'écoles, mais aussi en termes de maintien ou de développement de services publics de toutes sortes.

Le défi du renforcement économique et social des milieux en difficulté est d'autant plus grand que la mise en place des mesures pour soutenir la prestation de services et la rentabilisation de ces services et des institutions qui les dispensent commandent souvent une masse critique de population pour être rentable. À ce titre, rappelons que les régions qui se sont le mieux développées sont celles situées près d'une aire métropolitaine, comme la Montérégie ou les Laurentides, ou celles qui s'appuient sur une zone d'influence forte comme Rimouski ou Sherbrooke.

Le problème de maintien des écoles de village est tributaire des problèmes des zones rurales. La première étape est donc de s'attaquer à ce problème de fond en mettant en place des conditions gagnantes pour contrer la décroissance scolaire et assurer la survie des communautés. Pour l'UMQ, il est clair qu'il faut conserver à différents milieux leurs équipements scolaires, mais, pour ce faire, il faut que le gouvernement mette d'abord en place les conditions gagnantes pour assurer le développement local et régional. Le maintien de la dernière école d'un village par le biais d'outils de financement est nécessaire mais ne résoudra pas à lui seul les problèmes structurels de développement économique de la région.

Permettez-moi de vous parler de ces conditions gagnantes. Déjà dans les années soixante-dix, les problèmes de développement auxquels sont présentement confrontées les régions du Québec étaient perceptibles et, par le fait même, liés aux fluctuations des clientèles dans les différents établissements d'enseignement. Or, l'État québécois, comme acteur de premier plan en ce début du XXIe siècle, n'est pas parvenu à donner plus de cohérence aux approches sectorielles inhérentes aux missions ministérielles dans le cadre des nombreuses politiques et programmes touchant le territoire québécois. Nous croyons que la coordination des efforts du gouvernement doive converger vers une politique intégrée d'aménagement du territoire québécois, notamment pour consolider les acquis des régions et favoriser l'émergence de nouvelles avenues de développement dans les collectivités rurales. Or, le niveau peu élevé de formation de base de la population de certaines régions et le niveau parfois élevé des paiements de transfert dans ces mêmes territoires indiquent une population assistée de longue durée avec tout ce qui en découle.

L'activité économique des régions étant de moins en moins agricole et de plus en plus axée vers des secteurs de production industrielle et de services, le gouvernement devra doter les régions d'une base sociale solide en privilégiant la formation de la main-d'oeuvre et l'aide aux entreprises. À cet égard, le défi de l'occupation du territoire est de taille. Il nous apparaît d'une telle ampleur qu'il exige du gouvernement l'émergence d'une vision globale et intégrée de chaque région portée par des perspectives de croissance soutenue.

Pour l'UMQ, le développement des régions du Québec passe avant tout par une prise en charge par le milieu de son propre développement. On parle ici de développement endogène qui se traduit dans des moyens laissant la place au choix des acteurs locaux sur les orientations à donner à leur développement et dans des moyens suffisamment souples et évolutifs pour s'adapter au potentiel spécifique de chaque région. Il est donc impensable d'aborder la question du développement des régions et du maintien des établissements d'enseignement sans parler des pôles urbains et de leurs difficultés à supporter le développement socioéconomique de leur région.

En matière de développement économique, les élus des municipalités, qui représentent la zone d'influence d'une région, ont vu leur rôle évoluer de celui de gestionnaires de services, donc de gestionnaires à la propriété, à celui de développeurs, soit de services à la personne. Les municipalités ont un rôle crucial à jouer en tant que structure la plus près des citoyens. Un effort particulier doit viser la vitalité des municipalités, qui constituent le pôle de développement d'un territoire, car le développement d'une région s'effectue à partir d'un pôle central qui rayonne sur toutes les municipalités de sa zone d'influence. La contribution des municipalités, tant pour l'aide technique destinée aux entreprises, pour la création et l'entretien des parcs industriels, pour la participation à des fonds d'investissement que pour la promotion économique et touristique, n'a cessé de croître.

J'aborderai donc maintenant l'inéluctable question des sources de revenus autonomes et diversifiées pour les municipalités. Depuis une quinzaine d'années, les responsabilités et les enjeux des municipalités ont évolué à un rythme effréné, alors que leur richesse n'a cessé d'évoluer de manière défavorable. Les actions du gouvernement en matière de décentralisation se sont traduites notamment par la superposition d'une multitude de structures et par l'adoption d'un volume sans précédent de textes législatifs et réglementaires. Aussi, alors que les responsabilités municipales étaient traditionnellement centrées sur des services à la propriété, comme on vient de le mentionner, elles ont graduellement évolué vers un important volet de services à la personne sans pour autant bénéficier de revenus autres que la taxe foncière.

n(12 h 10)n

Le gouvernement provincial a par ailleurs transféré aux municipalités, au fil des décennies, un volume important de responsabilités en matière sociale, environnementale et économique. Or, la richesse foncière uniformisée dans l'ensemble du Québec a progressé de 0,9 % de 1996 à 1999, alors que les revenus personnels se sont accrus de 10 % et que les recettes provenant de la TVQ se sont accrues de 34,2 %. Il découle de cette situation un déséquilibre fiscal entre les municipalités et le gouvernement du Québec qui est d'autant plus préoccupant qu'il s'accompagne, depuis le début des années quatre-vingt-dix, d'un transfert de responsabilités du gouvernement vers les municipalités et de l'obligation pour celles-ci d'absorber plus de 1 milliard de dollars de factures.

Dans ce contexte, les municipalités ne peuvent dégager de marge de manoeuvre suffisante pour faire face à leurs obligations. Les municipalités d'influence des régions sont les plus touchées par ce phénomène, puisqu'elles doivent fournir de nombreux services diversifiés, alors que leur principale source de revenus, la taxation foncière, subit un ralentissement marqué de la croissance de ses bases. La fragilité financière et fiscale des municipalités en région s'explique souvent par la dépendance de ces municipalités envers une seule entreprise ou un seul secteur économique. Or, si cette entreprise décide de fermer, c'est la survie de la municipalité qui est remise en cause et, par conséquent, tous les établissements d'enseignement qui y sont localisés. Les cas récents de Murdochville ou de Notre-Dame-du-Lac sont éloquents à cet égard.

En ce qui concerne les plus petites municipalités, les dotations étatiques constituent une part plus importante de leur budget, car elles ne peuvent souvent pas compter sur la taxation foncière uniquement pour délivrer les services essentiels à leur population. Les décideurs municipaux sont désormais confrontés à adapter les structures municipales et à les doter de compétences et de pouvoirs suffisants pour répondre avantageusement à l'enjeu majeur de maintenir et d'accroître la vitalité et la prospérité des collectivités.

Pour relever ce défi, il est important de reconnaître les courants naturels de convergence des leviers de développement vers les municipalités-centres et le rôle primordial de ces municipalités d'influence comme moteur de développement des régions. De plus, il est incontournable que les municipalités fondent leur existence sur des principes permanents d'autonomie locale qui appellent des règles assurant une véritable démocratie locale et des sources de financement durables et diversifiées. Cette autonomie ne pourra cependant être atteinte sans financement autonome ni si le gouvernement continue à transférer des nouvelles factures aux municipalités. L'équilibre budgétaire des municipalités a suffisamment été mis à l'épreuve depuis le milieu des années quatre-vingt. Les solutions passent par une véritable reconnaissance du rôle de la municipalité et une réforme globale de la fiscalité municipale québécoise.

Qui dit réforme de la fiscalité et reconnaissance des municipalités dit nouveaux pouvoirs et, pourquoi pas, nouveaux partenariats. Pour l'UMQ, il faut tenter de conserver aux différents milieux leurs équipements scolaires, mais, pour ce faire, il faut que le gouvernement donne aux municipalités et aux commissions scolaires des outils adaptés à la situation actuelle. À cet égard, il y aurait lieu d'alléger l'encadrement normatif des commissions scolaires en vue de permettre des dérogations aux normes en matière de maintien d'écoles marginales de quartier ou de village. Il serait aussi souhaitable d'accorder aux municipalités visées par les fermetures d'écoles l'équivalent d'un droit de préférence qui leur permettrait de participer activement à la décision d'une fermeture compte tenu de l'importance de l'école pour l'avenir, voire la viabilité du village et des régions.

Il existe au Québec une multitude d'ententes scolaires-municipales qui ont été signées depuis une trentaine d'années entre les commissions scolaires et les municipalités pour construire en commun, aménager et partager un grand nombre d'équipements scolaires et municipaux. Et, dans l'avenir, ce type de partenariat prendra d'autres formes, et vous avez un exemple dans le document. Cette contribution active au développement de la région touche l'organisation des services scolaires et communautaires, l'organisation de programmes de formation professionnelle adaptés aux besoins des entreprises, la formation en entreprise ainsi que la révision et l'adoption des schémas d'aménagement et des règlements d'urbanisme.

Pour l'UMQ, il faut que le gouvernement supporte ce type de partenariat adapté aux particularités des régions en amenant le réseau scolaire et les municipalités à intervenir en complémentarité les uns des autres pour la prise en main et le contrôle du développement de leur milieu dans le respect des limites des ressources et des missions respectives de chacun. Selon nous, les décisions de la municipalité et de la commission scolaire doivent se prendre en cohérence. C'est le dernier point que j'aborderai avec vous.

La Présidente (Mme Bélanger): ...venir à la conclusion, à vos recommandations, parce que le temps est presque terminé.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Alors, j'allais vous... Oui, je vais arriver. D'ailleurs, je vais vous suggérer, là, des modifications à la Loi sur l'instruction publique et à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Et, avant de conclure, l'UMQ désire réitérer sa consternation en signifiant à la commission qu'elle considère inacceptable de ne pas participer au Groupe de travail sur le maintien des écoles de village et demande au gouvernement d'accueillir favorablement sa requête pour contribuer aux travaux de ce comité. Par conséquent, l'Union vous rappelle son entière collaboration pour alimenter les réflexions et soutenir les efforts de ce groupe de travail dans la réalisation de son mandat.

Pour l'UMQ, le problème crucial de la diminution des effectifs scolaires à tous les niveaux d'enseignement est très inquiétant, car il va de pair avec l'appauvrissement de la population des régions du Québec. La consultation sur la fluctuation des clientèles dans le secteur de l'éducation vise principalement à trouver des solutions concrètes et réalistes et d'identifier des conditions propices au maintien des écoles et de la vitalité des communautés. L'UMQ appuie cet objectif et croit que la réflexion et les pistes de solution énoncées dans son mémoire démontrent que la clé du succès réside dans le développement endogène, soit la prise en charge par le milieu de son propre développement. Et, à cet égard, l'UMQ estime qu'il faut le soutien de l'État pour aider les communautés à prendre en charge leur développement. Aussi, l'UMQ a longuement documenté que le renforcement des régions du Québec passe par le renforcement des municipalités d'influence, par leur autonomie davantage accentuée et par l'élimination du déséquilibre fiscal entre les municipalités et le gouvernement du Québec.

Enfin, il est indéniable que la commission scolaire s'avère un partenaire incontournable pour le milieu municipal pour la mise en place de projets innovateurs en matière de développement local et régional. Mme la Présidente, mesdames, messieurs, voilà l'essentiel des propos que nous voulions partager avec vous ce matin. Nous sommes disposés à répondre à vos questions. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme la vice-présidente. Et j'aimerais vous faire remarquer, Mme la vice-présidente, que le comité que le gouvernement a formé pour faire l'étude que vous mentionnez dans votre mémoire n'a rien à voir avec le mandat de la commission ici, c'est deux mandats complètement différents. Ici, c'est une initiative de la commission de l'éducation, alors que l'autre mandat, c'est un mandat dicté par le gouvernement.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Nous nous adresserons aux autres instances, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Exact. Alors, est-ce que... Oui, M. le député de Westmount? Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bienvenue, Mme Turpin. Évidemment, nous sommes très heureux de vous recevoir à cette commission justement et d'avoir pu étudier votre mémoire. Vous nous avez parlé du mémoire A puis du mémoire B. Pour justement une fin de compréhension, est-ce que la différence entre les deux ne se retrouve pas dans l'ancien 2.4, «de nouveaux pouvoirs aux municipalités et aux commissions scolaires», toute la question qui touchait la taxe de secteur que vous avez soulevée? C'est ça, la nuance entre les deux?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Tout à fait.

M. Chagnon: O.K. J'aurais une question spécifiquement là-dessus, mais je vais prendre un autre chemin. J'ai posé la question tout à l'heure à vos collègues et néanmoins amis, je présume, de la Fédération québécoise des municipalités au sujet de toute cette problématique de la dernière école de quartier ou de dernière école de village en la regardant sous un plan fiscal. Est-ce que l'idée d'élargir la capacité fiscale des commissions scolaires, de leur permettre d'assumer ces responsabilités de garder les dernières écoles ouvertes localement ne serait pas une ouverture intéressante de la part de votre Union?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Ce que nous privilégions ? et nous l'avons mentionné ? c'est une réforme globale de la fiscalité municipale québécoise. Actuellement, la philosophie de taxation, hein, c'est une philosophie de taxation foncière, donc, qui est basée sur les services à la propriété et non sur les services à la personne. Et, de plus en plus, au niveau des municipalités, on a à offrir des services à la personne. Par exemple, si on parle de services à la santé et d'améliorer la qualité de vie des citoyens, la journée que nos infrastructures ne sont plus capables d'absorber... de donner de l'eau potable aux citoyens, ça va être des problèmes de santé publique que nous aurons. Alors, il y a un...

Puis je voudrais juste compléter pour vous mentionner que, aujourd'hui, avec les entreprises d'économie du savoir, hein, elles n'ont pas besoin de beaucoup d'immeubles, alors on a une diminution importante de notre niveau de taxation dans nos municipalités. Et on a toujours convenu ? en tout cas, j'ai entendu tout à l'heure la Fédération québécoise des municipalités ? à l'Union des municipalités que le champ de taxation foncier, c'était un champ exclusivement municipal au moment où on se parle, sauf, là, l'exception qui a été faite jusqu'à 0,35 $ pour les commissions scolaires.

n(12 h 20)n

M. Chagnon: Ce qui a été modifié dans le temps d'ailleurs pour permettre aux commissions scolaires d'avoir plus d'espace fiscal. Mais tous, on se rappelle qu'il n'y a pas longtemps les municipalités ont accepté d'emblée de signer un pacte fiscal avec le gouvernement, il y a quelques années, s'excluant du champ de la taxe de vente à l'époque pour pouvoir occuper l'ensemble du panier fiscal foncier. C'est un choix local... C'est un choix que les municipalités avaient fait à l'époque, puis je comprends qu'on puisse le remettre en question un jour. Mais ça ne répond pas à la question précise que je parlais.

Mme Angers-Turpin (Murielle): On peut dire un choix avec les bras tordus, oui.

M. Chagnon: À partir du moment où on accepte le choix, peu importe qu'on ait les bras dans le milieu du dos, en dessous des pieds ou autrement... À partir du moment où on accepte le choix, on devient responsable du choix qu'on a pris.

Mme Angers-Turpin (Murielle): C'était pour accepter que le voleur qui nous avait volés nous redonne une partie de nos argents qu'on avait perdus, M. le député.

M. Chagnon: Alors, à ce moment-là, on exclut cette situation-là, parce qu'on ne veut pas éventuellement se faire remettre sur le nez comme ayant accepté une nouvelle situation. On continue de se plaindre puis on se plaint pour des principes.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bien, ce qu'on demande, c'est qu'on demande qu'il y ait une réforme en profondeur de la fiscalité municipale et une politique d'aménagement cohérente du territoire, parce que, dans les dernières années, ce qu'on s'est rendu compte aussi, c'est que, bon, il y a un contexte de globalisation, hein? On est dans l'économie mondiale de marché et on se rend compte qu'au niveau du gouvernement on ne suit pas toujours. Et là je m'explique. On a des politiques sectorielles, on a... Par exemple, on a vu récemment, hein, la loi n° 170, la réforme municipale, le renforcement des MRC, le cadre d'aménagement urbain. Ça, c'est fait par le ministère des Affaires municipales.

Et, d'autre part, on voit le ministre des Régions qui nous fait la politique nationale des régions, et bientôt on aura le sommet national des régions. Mais c'est lancé et ça aboutit quand, ça aboutit où puis ça aboutit comment? Alors, il y a tout ce débat-là, je pense, aussi à faire. Et, à travers de ça, quand on parle des commissions scolaires et de la fluctuation de nos jeunes dans les villages, bien ça tient aussi à cette politique cohérente d'aménagement qui n'est pas là.

M. Chagnon: Alors, vous offrez jusqu'à un certain point, parce que vous l'avez fait et vous le faites encore, de vous... en fait, de vous substituer au financement scolaire pour le maintien d'écoles locales, mais vous n'accepteriez pas que les commissions scolaires locales aient un pouvoir fiscal plus étendu afin d'assumer leur propre rôle. C'est ce que je comprends.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Ce que nous disons, c'est que nous voulons travailler en partenariat avec les commissions scolaires. Nous voulons davantage que, par exemple, quand une commission scolaire veut installer ses équipements, il y ait une discussion avec la municipalité, et vice versa. Ce sont les deux pages que je n'ai pas eu le temps de lire, là, où j'aurais pu davantage vous expliciter, mais actuellement il n'y a aucune consultation. Quand une commission scolaire veut installer un équipement, elle n'est pas obligée de consulter la municipalité locale. Elle consulte la MRC. Or, la municipalité locale, c'est elle qui doit voir à son règlement d'urbanisme et de zonage. Or, dans les lois actuelles, les municipalités ne sont pas consultées. Alors, on dit: On voudrait que les municipalités soient là.

M. Chagnon: Parce que le problème qui se pose, ce n'est pas tellement pour l'accueil de nouveaux bâtiments, c'est plutôt le problème du maintien des bâtiments existants, j'ai l'impression. Bien, enfin, la discussion qu'on a eue depuis ce matin et puis celle qu'on va avoir durant cette semaine, c'est plutôt le maintien des bâtiments existants. Je suis un peu surpris d'apprendre qu'une commission scolaire peut construire une école dans une municipalité sans consulter la municipalité. Mon expérience date un peu évidemment, ça fait quelques années que je suis ici, mais, à l'époque où j'étais dans ce secteur-là, ce n'était pas le cas, je n'ai jamais vu cette histoire-là arriver. Maintenant, si... Le problème qu'on a devant nous, c'est plutôt un problème de maintien des bâtiments existants à cause de la diminution de la démographie. Et, dans ce cadre-là, la question qui se pose, c'est: Quel devrait être le rôle des municipalités qui sont affligées, effectivement, par la perte d'une école? On a vu des gens se battre pour maintenir leur bureau de poste, on comprend facilement que les gens puissent forcer, se battre aussi pour le maintien de leur dernière école, ou de l'école de leur quartier, ou de leur école de village. Mais comment on fait pour arrimer ça?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Oui. Et je pense que là aussi il devrait y avoir un allégement du cadre normatif des commissions scolaires. J'ai dû passer vite tout à l'heure, alors...

M. Chagnon: Vous voulez dire quoi par cela?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bien, les commissions scolaires ont toutes sortes de normes ? et je pense qu'elles vont vous en parler davantage que moi ? et, à ce moment-là, elles pourraient...

M. Chagnon: Vous, vous voulez dire quoi?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Une véritable autonomie, de la même façon que les municipalités, où on demande une véritable reconnaissance du rôle des municipalités. Autrement dit, là, que le gouvernement nous dise qu'est-ce qu'on ne peut pas faire plutôt que de tout nous dire qu'est-ce qu'on a à faire comme à un enfant.

M. Chagnon: O.K. Mais l'autonomie des commissions scolaires ne passe-t-elle pas, un peu comme l'autonomie des municipalités, par une indépendance fiscale? Et, dans ce cadre-là, pourquoi voudriez-vous... Ou pourquoi ne nous suggérez-vous pas...

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bien, je pense qu'il ne faut pas réduire juste à l'aspect fiscal, là, c'est plus ça, là. Les commissions scolaires, je pense, ont à voir tout l'aspect pédagogique aussi en plus de l'aspect fiscal, de la même façon que les municipalités n'ont pas juste à voir un service aux propriétés, mais aussi à voir aux services aux personnes même si ce n'est pas ce que le gouvernement lui demande. Mais la réalité est tout autre que ce que la créature du gouvernement a à faire.

M. Chagnon: Mais vous convenez que c'est par la fiscalité que vous développez ou vous démontrez votre indépendance ou votre niveau de capacité de prendre des décisions localement véritablement.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Et notre autonomie est limitée à la capacité de payer de nos citoyens aussi.

M. Chagnon: Exact. Mais ça, c'est évident. C'est vrai pour tout le monde, puis partout. Mais c'est vrai aussi pour le monde scolaire, j'imagine.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Oui. Mais je ne comprends pas, par exemple, qu'on dit toujours: On a trop de paliers de gouvernement. C'est quoi, les paliers de gouvernement? C'est les niveaux de taxation. Et, si on veut rajouter toujours des niveaux de taxation, on veut avoir des préfets élus au suffrage universel, ça veut dire qu'éventuellement, quand le gouvernement va se désengager, on va aller le chercher dans les poches des citoyens. C'est un autre palier de gouvernement.

M. Chagnon: C'est clair.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Alors, est-ce qu'on a fini de taxer les citoyens à différents paliers de gouvernement? Et c'est pour ça qu'on s'objecte.

M. Chagnon: Je vais retourner ma question dans un autre sens, est-ce que vous suggéreriez la suppression d'un de ces paliers-là, qui pourrait être les commissions scolaires dans ce cas-là?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Disons que la réflexion que nous avons faite à l'UMQ n'est pas dans ce sens-là, elle est plutôt dans le sens d'une collaboration entre les deux instances pour faire en sorte que, sur un territoire donné, il y ait une complémentarité de services et d'ententes.

M. Chagnon: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, ça me prend un consentement pour dépasser midi trente. Est-ce qu'il y a consentement? Alors, M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, Mme Turpin, et on souhaite que vous soyez invitée par le ministre à faire partie du Groupe de travail sur le maintien des écoles de village.

Parmi vos membres, est-ce que ? les municipalités qui sont membres de l'UMQ ? il y en a plusieurs qui sont aux prises avec ce problème de maintien d'écoles de village ou d'écoles de quartier? Et, pour votre Union, est-ce que c'est vraiment un problème? Je comprends que vous parlez beaucoup de croissance, et, dans d'autres régions, notamment celle que je représente, c'est davantage un problème de croissance de la clientèle. Maintenant, si on parle de décroissance, est-ce que parmi vos membres il y en a un certain nombre qui vivent, là, des problèmes de décroissance de clientèle et de maintien d'écoles de village ou de quartier?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Oui, M. le député. Je peux vous dire que je suis une mairesse de la ville d'Amos, et nous avons d'ailleurs... À la commission scolaire, on a fermé une école à la dernière année, alors je peux vous dire qu'on vit cette problématique-là. Alors, il y a plusieurs municipalités. À l'Union des municipalités du Québec, il n'y a pas que des grandes villes, hein, il y a toutes sortes de municipalités. Vous avez Senneterre, en Abitibi, que je connais très bien, qui a 2 500 de population, chez nous c'est 13 000, et il y en a d'autres ailleurs partout au Québec, Carleton, qui sont membres de l'Union des municipalités du Québec. Plusieurs municipalités dans notre Union sont aux prises avec cette problématique-là, je peux vous dire.

M. Marcoux: Peut-être poser une question, et ma collègue voudrait également intervenir subséquemment. Vous avez vu que la Fédération québécoise des municipalités a proposé un moratoire, bon, d'une durée de cinq ans afin de pouvoir donner le temps d'établir une stratégie et une politique cohérente, là, sur le maintien des écoles de village et de quartier. Est-ce que c'est une avenue avec laquelle vous êtes d'accord?

n(12 h 30)n

Mme Angers-Turpin (Murielle): Je pense que la Fédération des commissions scolaires serait beaucoup mieux en mesure de répondre à cette question. Nous, nous avons traité le dossier sous l'angle de la complémentarité entre le monde municipal et le monde scolaire, et c'est pour ça qu'on dit: Si on avait une politique cohérente d'aménagement et d'occupation du territoire, la problématique qu'on discute ce matin ne serait pas là. Mais il faut que toutes les politiques et les programmes du gouvernement soient cohérents pour faire en sorte de permettre que tout le territoire du Québec se développe et de faire en sorte que... Il y a des régions qui s'appauvrissent aujourd'hui parce que, bon, baisse de natalité, vieillissement de la population, et, si on avait cette...

Vous savez, on a la Politique rurale, là, nationale de la ruralité, hein? Je peux vous donner un exemple très concret. Chez nous, j'ai de la ruralité, j'ai 13 000 habitants, mais la ville d'Amos a déjà, dans les années passées, fusionné certaines municipalités, mais ces municipalités-là qui sont fusionnées ne font même pas partie de la ruralité. Il y a des incohérences. Alors, il faudrait que toutes ces politiques, ces programmes fassent en sorte d'être cohérent pour pouvoir développer vraiment le Québec si on veut le développer. Mais il faut avoir une volonté gouvernementale pour le faire.

Mme Normandeau: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Si vous permettez, je souhaiterais évidemment interpeller Mme la mairesse d'Amos. On vous appelle Mme la mairesse, c'est ça?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Oui.

Mme Normandeau: Bien. Écoutez, bien, ce matin, en fait, vous allez dans votre mémoire un peu plus loin que la Fédération québécoise des municipalités qui, elle, ce matin, a plaidé pour une politique cohérente, une politique globale sur le maintien des écoles de village. Vous, vous plaidez, en fait, pour une politique d'aménagement et d'occupation du territoire et, dans ce sens-là, vous rejoignez l'Association des régions du Québec qui plaide pour cette politique-là ou l'adoption d'une politique de cette envergure-là. Probablement qu'ils vont venir nous livrer ce message-là, je pense, dans deux jours ou quelque chose comme ça.

J'aimerais peut-être cependant revenir sur un aspect important à la page 14 de votre mémoire, tout l'aspect lié à... Puis, dans ce sens-là, aussi vous rejoignez ? et c'est bien ? la Fédération québécoise des municipalités qui souhaite un meilleur arrimage entre les commissions scolaires et les municipalités. De toute évidence, vous avez creusé un peu plus loin, là, en proposant une série d'amendements à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, également à la Loi sur l'instruction publique. Du côté de la FQM, on parlait... Je reviens à l'expression qu'utilisait mon collègue le député de Groulx, à un droit de veto carrément sur la fermeture des écoles de village. Vous, bon, vous répondez, vous semblez répondre par la négative. Est-ce que c'est possible de nous donner des précisions sur l'objectif que vous poursuivez qui est certainement un objectif de meilleure harmonisation des interventions? Mais, si on se préoccupe spécifiquement du cas lié à l'avenir des écoles de village ou des écoles de quartier... Par exemple, vous savez que Jonquière a livré une bataille très, très forte pour l'école de quartier qui, malheureusement, a été démolie, mais, chose certaine, comment atteindre l'objectif d'une meilleure occupation de notre territoire en apportant les amendements législatifs que vous proposez? Dans le fond, en d'autres termes, là, au-delà de la concertation et de la meilleure harmonisation, qu'est-ce que vous souhaitez obtenir avec des amendements qui pourraient être apportés à ces deux lois-là?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bien, d'abord, je pense que ces amendements-là qu'on demande, c'est comme le b.a.-ba.

Mme Normandeau: Comme le?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Le b.a.-ba, l'a b c, si vous voulez.

Mme Normandeau: O.K. Oui.

Mme Angers-Turpin (Murielle): L'a b c d'une loi. Ce n'est pas normal que sur un territoire donné la commission scolaire consulte la MRC mais n'a pas à consulter la municipalité. Mais ce n'est pas une question... Quand on dit consulter, ce n'est pas faire un droit de veto, là, ce n'est pas ça du tout, là. Alors, c'est vraiment de faciliter les échanges entre les deux partenaires que sont la commission scolaire et la ville. J'entendais ce matin que, à des endroits, c'est peut-être plus difficile, il tient souvent aux intervenants, mais il faut toujours penser, on est à la réduction de la fluctuation de la clientèle dans les commissions scolaires. Il faut penser aux enfants. Et le député qui était là ce matin, il n'est plus là, mais il disait: Moi, comme parent, oui, comme parent, mais le bien de l'enfant... Alors, je pense que la municipalité autant que la commission scolaire, on se doit de travailler en collaboration, en harmonisation pour faire en sorte que c'est au bien des enfants qu'on pense d'abord et non pas à chacun, le pouvoir municipal, le pouvoir scolaire. Alors, c'est plus une volonté d'harmonisation. C'était l'objectif qu'on...

Mme Normandeau: Donc, vous interpellez à la fois le ministère des Affaires municipales et de l'Éducation pour qu'on puisse procéder aux amendements que vous souhaitez?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Tout à fait. Oui, parce que actuellement les politiques qu'on peut voir sont plutôt sectorielles et ne sont pas à l'horizontal. Et, je reprends les propos de mon collègue M. Belzil qui est passé avant, comme municipalité, on a à travailler à l'horizontal et on a à travailler avec les commissions scolaires et avec ces parents-là qui sont nos concitoyennes et concitoyens.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Merci, Mme la Présidente. À la page 6 de votre mémoire, vous insistez avec la phrase suivante: «Pour l'UMQ, le renforcement d'une région passe par le renforcement de sa municipalité d'influence.» Quelle est toute la portée que vous mettez à ce point de vue?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Vous savez, il y avait un colloque récemment, c'était à l'Université de Montréal, justement sur la globalisation et tout ce qui se vit au niveau municipal un peu partout dans le monde, et il est clair qu'aujourd'hui la taille d'une municipalité n'a plus d'importance. C'est-à-dire que qu'est-ce qui est important, c'est où est-ce que le coeur du développement se fait. Alors, on parle de développement économique. Prenez une municipalité-centre et prenez d'autres petites municipalités autour, où est-ce que le développement économique se fait? Où est-ce que ça se passe? Alors, souvent, ça se passe dans le centre, hein, c'est comme le coeur, mais tout est en interrelation, tout se joue à l'aval et en amont. Alors, ce qu'on dit là-dedans, c'est tout simplement que c'est là où c'est le coeur, c'est le moteur du développement. Et c'est en relation avec les autres que le développement doit se faire, mais c'est cette zone d'influence là, c'est la zone d'influence, et c'est elle qui doit finalement ? j'allais dire un mot anglais, là, je vais chercher le mot français ? supporter tous les alentours.

M. Paquin: Mais est-ce que ça signifie que, dans votre esprit, il doit y avoir consolidation des institutions de la commission scolaire dans cette ville d'influence là et que, par exemple, pour que l'effectif étudiant soit suffisant pour avoir des services de qualité, il vaudrait mieux les concentrer dans une municipalité d'influence ou est-ce que ça peut être sur l'ensemble du territoire?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Pas nécessairement. Je vous dirais: Dans la zone d'influence, là on parle de la municipalité d'influence, là, comme pôle d'influence, mais je peux vous donner l'exemple d'une municipalité autour de ma ville pour... Je vais parler de ce que je connais. C'est un exemple personnel, vous allez me dire, mais une école à 15 km a développé un projet éducatif qui tourne autour de la musique, et il y a des gens de la ville d'influence qui vont à cette école-là, et vice versa. Dans une autre région, on a développé un autre projet éducatif. Tout dépend des projets éducatifs qui se développent. Ce qui fait la force finalement, c'est la complémentarité de tous ces projets éducatifs.

M. Paquin: Alors, les fluctuations peuvent continuer à se produire à l'intérieur du milieu. Ce que vous semblez indiquer, c'est que c'est par la consolidation des municipalités d'influence qu'on va stabiliser l'effectif d'une région?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Effectivement, parce que, si le développement économique est fort dans cette municipalité d'influence, on va consolider tout ce qui est autour.

M. Paquin: Quand, par la suite, vous dites que vous voulez requérir du gouvernement une politique cohérente d'aménagement et d'occupation du territoire, bon, c'est clair que si on a une occupation du territoire qui est prévisible et qu'on en fait un objectif comme tel, on pourrait stabiliser des effectifs étudiants un peu partout sur le territoire en fonction de ça et prendre des décisions de conservation d'institutions ou de dernière école, des choses comme ça, mais en quoi le fait que la politique d'aménagement aurait cette cohérence-là et qu'on planifierait, en quelque sorte, l'occupation du territoire... En quoi est-ce que dans votre pensée, là, ça influencerait les effectifs scolaires comme tels?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bon. On parle d'une politique cohérente d'aménagement et d'occupation du territoire. Actuellement, ce qu'on a plutôt vécu, c'est qu'on a créé des structures, on a créé des institutions, mais, en termes de politique cohérente, je vous ai mentionné tout à l'heure... C'est comme, actuellement, si on a une politique aterritoriale si on regarde toute la carte, là, du Québec. Plutôt que d'avoir des politiques sectorielles... Par exemple, je vous ai parlé la loi n° 170, je vous ai parlé du renforcement des MRC, du cadre d'aménagement métropolitain, tout ça a été mis en l'air, ça a été commencé, il n'y a rien de fini. Le ministère des Régions a par ailleurs, en vase clos, à côté, alors que le ministère des Affaires municipales ne sait absolument rien de ce qui se passe au niveau du ministère des Régions... Mais les régions, ça ne vit pas tout seul à côté, ça. Au Québec, il y a comme une interdépendance entre des pôles-centres et les régions, mais actuellement c'est comme si c'est un à côté de l'autre. Et, tant qu'on va avoir cette vision-là, on ne pourra pas développer toutes les régions du Québec.

n(12 h 40)n

M. Paquin: Mais, indépendamment de ça, de quelle façon ça peut jouer sur les effectifs scolaires? Peut-être qu'à la limite ça pourrait avoir comme effet de les stabiliser au niveau où ils sont actuellement, mais de quelle façon est-ce que vous entrevoyez... En fait, ce que je ne vois pas très clairement, de quelle façon, si les stratégies étaient plus cohérentes, ça aurait comme effet automatique d'avoir un effet sur les effectifs étudiants dans les écoles. C'est cet aspect-là que j'aimerais que vous m'expliquiez mieux.

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bien, ce qu'on voit actuellement, c'est qu'on est obligé, dans certains endroits, de fermer des écoles, alors que, à côté, on en construit. Est-ce que c'est normal? Alors, c'est tout ça. Alors, c'est pour ça, si on avait une vision plus globale, on n'aurait pas cette problématique qu'on voit.

M. Paquin: Le plus souvent, les cas auxquels vous référez, là, dans l'exemple que vous donnez, c'est des cas de banlieues de ceinture de la métropole ou de la capitale nationale où vous avez des quartiers où les gens vont s'établir en banlieue pour élever leur famille, et tout ça, donc créent une pression pour de nouvelles infrastructures en délaissant le centre urbain, et très souvent ça se passe à l'intérieur du même territoire de commission scolaire. Vous avez des situations où une même commission scolaire vit, dans des zones qui sont des banlieues de ceinture, une explosion de population pendant que des écoles en milieu rural se vident ou alors, là, même dans le coeur de certaines municipalités satellites de Montréal comme Saint-Jérôme, ou Saint-Jean, ou Sorel. Alors, le fait d'avoir des interventions pour empêcher l'étalement urbain ou de consolider dans ces zones-là pourrait avoir un effet d'éviter des fluctuations d'effectifs dans cette zone-là, mais est-ce que ça aurait des effets, selon vous, aussi interrégionaux? Et, en particulier, est-ce que ça aurait un effet net sur, par exemple, les régions de périphérie, l'Abitibi ou la Gaspésie, si on veut, en termes de maintien d'effectifs? C'est ça que j'aimerais que vous établissiez comme lien.

Mme Angers-Turpin (Murielle): D'accord. Bien, une pratique cohérente d'aménagement, ça doit être basé d'abord sur un diagnostic des potentialités des milieux pour faire en sorte de voir tous les milieux locaux dans le contexte de la nouvelle géoéconomie. Parce que l'économie n'est plus ce qu'elle était, hein, les régions-ressources sont en train aussi de se modifier. Il y a à développer, par exemple, l'écotourisme, l'agrotourisme, etc. Alors, une véritable politique devrait d'abord faire un diagnostic de toutes les potentialités de tous les milieux. Or, ça, ce n'est pas là. Alors, moi, je dis souvent: Si on veut savoir où on va, il faut savoir d'où on vient. Alors, c'est ça d'abord, de faire un diagnostic de nos potentialités pour ensuite les développer. Mais, ça, actuellement, en tout cas, on ne l'a pas vu à aucun endroit.

M. Paquin: O.K. Je passerais peut-être à d'autres aspects, entre autres à la page 14 où vous retenez toute une série d'éléments, mais aussi c'est touché par ailleurs dans votre mémoire. Vous proposez d'alléger l'encadrement normatif des commissions scolaires en vue de permettre des dérogations aux normes en matière de maintien d'écoles marginales de quartier ou de village.

Alors, deux aspects. Est-ce que, selon vous, le cas des écoles marginales de quartier ou de la dernière école de village, c'est la même problématique ou une problématique analogue, et jusqu'à quel point? Et, deuxièmement, qu'est-ce que vous avez à l'esprit d'une manière concrète comme des allégements qui seraient possibles?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Votre première question, vous parlez...

M. Paquin: En première question, est-ce que, dans votre esprit, l'école marginale de quartier ou encore la dernière école de village, c'est réellement deux problématiques semblables ou la même problématique ou s'il y a des différences significatives entre les deux problématiques?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Entre l'école de quartier et l'école de village. Bien, la dernière école de village, on le mentionne dans le mémoire, c'est la dernière école du village qu'on doive fermer, c'est souvent la fin du village. Quand il ne reste plus l'école, il ne reste plus le dépanneur du coin, le marchand central. Ou c'est souvent la dernière chose qu'on ferme, je dirais, avant l'église, parce que j'ai en tête le coin, là, où il n'y a plus d'école, et puis il reste encore l'église, mais avec 13 citoyens à peu près. Alors, je pense que de fermer la dernière école du village, c'est vraiment problématique.

Mais l'encadrement... Vous m'avez posé la question sur l'encadrement normatif, on sait qu'il y a toute la question aussi des conventions collectives qui pose certains problèmes. Par exemple, il y a des normes au niveau du transfert des étudiants. Alors, est-ce que trois niveaux, c'est souhaitable dans une école de quartier pour garder l'école? J'entendais M. le député ce matin, moi, je peux vous dire, j'ai l'expérience, un peu comme Émilie Bordeleau, j'ai enseigné à cinq divisions. Mais, dans le temps, je pense que la complexité était différente qu'aujourd'hui. Je pense qu'aujourd'hui c'est de plus en plus complexe au niveau de l'enseignement et je ne suis pas sûre qu'il faut revenir à ça. En tout cas, nous n'en traitons pas dans notre mémoire, mais c'est plus un point de vue personnel que je vous livre là.

M. Paquin: Donc, c'est surtout, là, les normes de relations de travail avec les syndicats, ces choses-là que vous avez à l'esprit?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Ah, l'exemple qu'on me donne, là, c'est la notion de distance, à 50 kilomètres, par exemple. C'en est un des exemples qu'on me donne. C'est plutôt la notion de... Oui, les contrats de travail, mais ce n'est pas que ça, il y a plusieurs... Les cartes d'enseignement, on en a parlé. En tout cas, nous... Je regarde juste au niveau municipal et j'imagine... Je n'ai pas la connaissance approfondie du niveau scolaire et je ne veux pas m'embarquer là-dedans, mais, pour faire un règlement d'emprunt, il faut s'adresser au ministère des Affaires municipales. Est-ce que c'est nécessaire? Ça revient à dire ce que je disais tantôt, pourquoi est-ce que la loi ne nous dirait pas qu'est-ce qu'on ne peut pas faire puis nous laisser faire le reste? Puis j'appliquerais ça, la même chose, à la commission scolaire.

M. Paquin: Vous avez aussi parlé de partenariats innovateurs comme étant des solutions, là. Donc, vous avez parlé de partenariats innovateurs, de développement local et régional adapté aux particularités, là. Est-ce que vous avez aussi des exemples à nous donner, à la commission, à titre de pistes qu'on pourrait explorer?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Je pense qu'on en a donné un dans le mémoire, ce qui s'est fait, par exemple, sur la Côte-Nord. Je n'ai pas eu le temps de le traiter, là, dans le discours ce matin, mais on l'a dans le mémoire. Et je sais qu'il y a d'autres commissions scolaires qui ont aussi des partenariats avec le CLD, avec la municipalité, par exemple, pour l'utilisation des piscines. On en a chez nous aussi. Il y en a plusieurs commissions scolaires et municipalités qui ont des partenariats de ce genre. Maintenant, ça facilite et ça empêche justement d'augmenter les coûts pour des équipements que nous partageons.

M. Paquin: Peut-être un dernier aspect. Dans les considérations que vous avez données comme exemples et dans ce que j'ai perçu à travers votre mémoire, c'est beaucoup plus la question des écoles primaires ou secondaires que vous avez en considération. Vous n'abordez pas de front la présence d'un cégep, par exemple, dans une région donnée, et moi, je pense que la question de la présence d'une composante d'une université dans une région donnée... Actuellement, les problèmes d'effectifs et les fluctuations, il est vrai qu'à cause du comité qui est mis sur pied actuellement, c'est ça qui est mis en relief, mais il y a toutes les autres dimensions des fluctuations de clientèle sur le moyen et sur le long terme aussi, parce que, s'il n'y a pas d'étudiants dans les écoles primaires, même s'il y a une persévérance scolaire puis qu'on évite le décrochage scolaire, un moment donné il y aura quand même un effectif qui sera modifié dans les universités et puis dans les collèges.

Donc, sur l'institution qu'est le cégep en région, sur l'institution qu'est la composante universitaire en région, qu'est-ce que vous avez à dire à ce moment-ci?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Vous avez tout à fait raison en disant que, si on n'a pas de jeunes au primaire et au secondaire, on n'en aura pas plus au cégep et à l'université. Maintenant, comme je vous disais tout à l'heure, on a fait l'étude davantage avec la lunette de la politique d'aménagement et d'occupation du territoire. Alors, si on l'aménage d'une façon cohérente, si on l'occupe d'une façon cohérente, on aura des enfants au primaire, au secondaire et, ensuite, on en aura au cégep et à l'université, parce que, de plus en plus, en tout cas en région, les cégeps et les universités sont déconcentrés de toute façon.

M. Paquin: Peut-être une dernière préoccupation. Vous devez avoir dans vos membres plusieurs municipalités où les fluctuations de la population anglophone ne suivent pas le même rythme que celles de la population francophone. J'ai des exemples à l'esprit où il y a une croissance de population dans certaines écoles anglophones, où les familles sont un peu plus nombreuses, où on a concentré le primaire et le secondaire dans une même école et où finalement, à cause de ça, ça a un effet d'attraction, il y a des familles qui viennent s'installer de façon à être à proximité de l'école, et donc il y a une explosion de population anglophone et, concomitamment, vous avez des quartiers francophones où il y a un dépeuplement.

n(12 h 50)n

Ça pose la question du transfert des équipements d'une commission scolaire à l'autre. Ça peut être un autre équilibre, là, mais vous voyez le passage d'un équipement d'une commission scolaire à l'autre, ou l'utilisation d'un équipement par une municipalité, ou la dévolution d'un équipement à l'éducation aux adultes, ou l'intervention d'un cégep, tous ces aspects-là. Ça peut amener aussi des espèces de jalousies au niveau, là... Bon, bien, on crée des écoles pour un groupe et on n'en crée pas pour l'autre. Et on déplace les étudiants d'une communauté vers des écoles de banlieue qui sont disponibles dans le réseau francophone, mais on ne déplace pas les anglophones, on ajoute des classes. Bon, ça pose des problèmes sociaux.

Est-ce que c'est un cas isolé que celui auquel je réfère ou est-ce que, à votre connaissance, parmi vos membres, il y a plusieurs lieux au Québec où, comme ça, il y aurait une différence significative entre les flux de population et les effectifs du côté anglophone par rapport au côté francophone, par exemple?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Bon, là-dessus, nous n'avons pas traité le mémoire sous cet angle-là que vous mentionnez, mais ce que je dirais à ça, c'est que partout où on travaille en silo on risque de ne pas être aussi efficace et efficient. Quand la main gauche ne sait pas ce que la main droite fait dans une même commission scolaire... Dans le temps où il y avait l'éducation des adultes à part, on disait que c'était la vache à lait des commissions scolaires, mais qu'elle était à part, elle avait ses équipements à part et sans égard à ce qui se passe à la commission scolaire. Je pense que c'est tout ça que le débat et la commission va pouvoir analyser avec les principaux intervenants, mais nous, nous ne l'avons pas traité sous cet angle-là.

M. Paquin: Et vous n'avez pas de données sur le nombre de situations au Québec où la fluctuation serait très différente chez les anglophones par rapport aux francophones pour un même territoire?

Mme Angers-Turpin (Murielle): Non, je n'ai pas de données.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Merci, Mme Angers-Turpin et Mme Fortin, pour votre participation à la commission. Alors, nous allons suspendre...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Nous suspendons les travaux...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Mais, normalement, c'est 14 heures. Le groupe va arriver pour 14 heures. Alors, nous suspendons les travaux pour 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 52)

 

(Reprise à 14 h 5)

La Présidente (Mme Bélanger): Nous allons ouvrir la séance de travail. Le mandat de la commission est: la commission est réunie aujourd'hui afin de tenir des auditions publiques dans le cadre de son mandat d'initiative sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation au Québec.

Alors, nous avons l'honneur de recevoir cet après-midi la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires. Alors, je ne sais pas combien vous voulez prendre de temps pour faire votre exposé.

M. Caron (André): On a prévu entre 30 et 40 minutes, Mme la Présidente, si vous le permettez.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, c'est très bien. Alors, je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier et présenter les personnes qui l'accompagnent.

Fédération des commissions scolaires
du Québec (FCSQ) et Association
des directeurs généraux des commissions
scolaires (ADIGECS)

M. Caron (André): Merci, Mme la Présidente. Mon nom est André Caron, je suis président de la Fédération des commissions scolaires du Québec. Et permettez-moi de présenter les personnes qui m'accompagnent: à mon extrême gauche, Mme Anny Roy, présidente de la commission scolaire Lac-Témiscamingue; à ma gauche immédiate, M. Réjean Morel, directeur général de la Fédération des commissions scolaires; à mon extrême droite, M. Serge Pelletier, directeur général de la commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs, région Témiscouata et des Basques; M. André Roy, commission scolaire Beauce-Etchemin; et M. Denis Roy, président de l'ADIGECS et aussi directeur général de la commission scolaire des Affluents. Et ce n'est pas prévu qu'on avait quatre ou trois Roy qui nous accompagnaient, c'est le hasard qui veut ça, parce qu'on s'est associé, le réseau, dans l'élaboration de nos positions.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, vous pouvez commencer votre exposé.

M. Caron (André): D'abord, la présentation de nos organisations. La Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des directrices générales et directeurs généraux ont convenu de préparer un mémoire conjoint sur la problématique des fluctuations de la clientèle partageant la même vision ainsi que les mêmes solutions.

La Fédération représente depuis 55 ans le principal réseau de commissions scolaires au Québec. Elle regroupe les 60 commissions scolaires francophones ainsi que la commission scolaire du Littoral. L'ADIGECS, pour sa part, regroupe les personnels des directions générales, des directions générales adjointes ou des conseillers-cadres des commissions scolaires. Parmi nos mandats, nous avons à défendre les intérêts de nos membres et à faire avancer la cause de l'éducation en présentant des mémoires, des avis, recommandations et propositions.

Le mandat d'initiative de la commission de l'éducation de l'Assemblée nationale nous interpelle directement. Toutes les commissions scolaires sont affectées, soit par la décroissance, soit par la croissance, à des degrés différents. Dans ces deux contextes, il est opportun de rappeler, et j'insiste, que notre première préoccupation est toujours de rendre des services éducatifs de qualité à l'ensemble des élèves du Québec.

Pour les fins de la présentation, Mme la Présidente, je vais couvrir le volet décroissance, avec les recommandations qui s'ensuivent, et M. Roy va vous présenter le volet de la croissance et la conclusion de notre mémoire.

Au niveau de la décroissance de la clientèle, un phénomène de plus en plus répandu. Le tableau figurant à l'annexe I parle par lui-même. Vous constatez que, de 1993-1994 à 2001-2002, 47 commissions scolaires étaient en décroissance. Or, selon les prévisions de 2001-2002 à 2006-2007, presque toutes les commissions scolaires seront en décroissance, sauf quatre dont le taux de croissance sera très faible.

Je sollicite la permission des membres de la commission pour déposer, après notre présentation, un document cartographique intitulé Nos petites écoles, reflet de la décroissance de la clientèle scolaire en 2001-2002. La secrétaire de la commission a déjà ce document. Il vous sera déposé à la fin, et on commentera brièvement la présentation pour bien vous situer.

La Présidente (Mme Bélanger): D'accord.

M. Caron (André): Ce document illustre, entre autres choses, la localisation des écoles de 100 élèves ou moins de même que des dernières écoles de village, et cela, par commission scolaire. Selon les données 2001-2002, les commissions scolaires comptaient 348 écoles primaires ou secondaires de 100 élèves ou moins, dont 99 écoles avaient moins de 50 élèves; 583 dernières écoles de village; 270 municipalités sans école; et ça, c'est selon le nouveau découpage des municipalités au 30 avril 2002. Avant les fusions municipales, il y avait 354 municipalités sans école. On peut conclure que le phénomène de la décroissance n'est pas seulement le résultat d'un exode des jeunes, mais aussi une tendance démographique beaucoup plus fondamentale que celle de la dénatalité québécoise.

n(14 h 10)n

Dans certaines régions périphériques, c'est une double réalité: la dénatalité et l'exode. On pourrait possiblement freiner l'exode, mais, de toute évidence, on ne pourra ralentir le processus de dévitalisation.

Abordons maintenant les impacts dus à la décroissance. L'impact au plan pédagogique. Le volet éducatif, et particulièrement la notion de qualité de services, prend une importance capitale dans la problématique de la décroissance. Et rappelons-nous ici que la mission de l'école, selon la Loi de l'instruction publique, est de donner de la formation, c'est-à-dire instruire sa clientèle, également la socialiser et la qualifier. D'ailleurs, on vous a inséré, à l'annexe III, l'extrait de la Loi de l'instruction publique.

Un des impacts pédagogiques, c'est les classes multiâges ou communément appelées les classes multiprogrammes. La preuve des classes multiâges n'est plus à faire. Toutes les études le démontrent, les élèves sont aussi performants que dans les classes régulières. En 1992, selon une étude du ministère de l'Éducation, il y avait des classes multiâges partout au Québec, même dans les écoles plus populeuses. Cependant, il reste encore des milieux qui n'en veulent pas, et on a des exemples pas loin de Québec, ici, notamment à Sainte-Clothilde, dans la région de l'amiante. Il est évident que les classes multiâges subissent un problème sérieux d'image, un problème auquel il faudra absolument remédier.

Les impacts sur l'ensemble des écoles d'une commission scolaire. Le maintien des écoles dans les milieux moins peuplés peut se traduire par des effets sur les autres écoles. Ainsi, pour maintenir un nombre minimal de personnel enseignant dans chacune des petites écoles de son territoire, la commission scolaire peut être souvent obligée de remplir au maximum les classes de ses autres écoles.

Venons-en aux impacts sur les spécialistes et le personnel non enseignant. Les services de formation spécialisée sont nécessairement affectés, je veux dire par là les arts, la musique, l'éducation physique, et on pourrait en nommer d'autres. Ces spécialistes doivent couvrir plusieurs écoles et consacrer beaucoup de temps à leurs déplacements. Même situation pour le personnel non enseignant.

Impacts sur l'organisation des services pour les élèves en difficulté d'apprentissage et handicapés. Bien sûr, le faible nombre d'élèves par classe signifie un meilleur encadrement, un meilleur suivi pour les élèves en difficulté d'apprentissage dont le degré de difficulté est faible. Toutefois, dès que les cas se compliquent, les services spécialisés ne peuvent être donnés dans les petites écoles. Bien souvent, on doit regrouper les cas dits lourds dans d'autres écoles. Même chose pour les élèves handicapés intellectuellement.

Un autre volet: la socialisation des élèves. Quand on dit socialisation des élèves, on veut dire susciter et développer chez eux les rapports sociaux. C'est plus difficile à réaliser dans les milieux plus défavorisés. D'ailleurs, le ministère de l'Éducation identifie, dans sa carte de l'indice socioéconomique, 852 écoles primaires en milieu défavorisé. Dans les petites écoles, les services complémentaires comme le théâtre, les ensembles vocaux ou de musique et les sports collectifs deviennent très difficiles sinon impossibles à offrir. Le nombre d'élèves étant insuffisant, il faudrait regrouper par des activités parascolaires des élèves de différentes écoles, avec les conséquences sur l'horaire.

La décroissance frappe également le niveau secondaire. On dénombre 168 écoles de moins de 225 élèves. Il est déjà difficile d'offrir toutes les options dans ces écoles. Ainsi, nous avons beaucoup d'appréhensions face à la réforme de l'éducation au secondaire qui est annoncée.

Attardons-nous maintenant sur le plan des ressources humaines. En raison des règles d'ancienneté prévues aux conventions collectives, nous éprouvons beaucoup de difficultés à désigner du personnel expérimenté dans les plus petites écoles. C'est un héritage des conventions collectives des anciennes commissions scolaires dont les territoires étaient beaucoup moins étendus qu'actuellement. Valables à l'époque, les règles en vigueur lors des fusions des commissions scolaires n'ont pas permis de les adapter au contexte d'aujourd'hui. Elles sont donc devenues des contraintes majeures qui doivent obligatoirement être modifiées.

Cette difficulté augmente avec l'éloignement de l'école. Souvent, les commissions scolaires n'ont pas le choix. Elles n'ont pas le choix d'affecter du personnel moins expérimenté qui demande rapidement une réaffectation. Même problème pour le personnel enseignant spécialisé. De là, une source importante d'instabilité pour les élèves.

Impacts sur la formation des maîtres, leur soutien et leur perfectionnement. Les classes multiâges nécessitent des approches pédagogiques et une gestion de classe différentes des classes traditionnelles, connaissances que le niveau personnel ne maîtrise pas nécessairement. De plus, le personnel enseignant des petites écoles se voit souvent isolé à cause du nombre limité de collègues ? même chose pour les spécialistes.

Au niveau de la gestion des établissements, de nombreuses directions d'établissement doivent composer avec plus d'un conseil d'établissement et avec plusieurs écoles-bâtiments. En pages 16 et 17 du mémoire, vous avez quelques statistiques d'un relevé effectué auprès de la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement, un de nos partenaires, et je vous en souligne quelques-unes: 25 directions d'établissement avec trois conseils d'établissement; un conseil d'établissement qui couvre sept écoles-bâtiments ? juste pour vous donner l'ampleur. Les directions manquent de temps pour assumer pleinement leur rôle de leader pédagogique.

Les conventions collectives et les règlements nous empêchent d'affecter du personnel à une double fonction, comme être directeur d'établissement et enseignant, par exemple. C'est la même chose pour le personnel de secrétariat qui est appelé à desservir plus d'une petite école. Ça signifie une présence partielle dans chacune des écoles, donc souvent absent quand le besoin se fait sentir. Encore là, les conventions collectives nous empêchent de partager la tâche d'un personnel avec d'autres organismes du milieu.

Impacts sur la sécurité d'emploi. Avec des territoires excédant une étendue de plus de 50 km, certaines commissions scolaires se retrouvent dans la situation assez paradoxale où elles ont des postes à combler et des employés en disponibilité, puisqu'elles ne peuvent affecter ces personnes en disponibilité à ces postes en raison des contraintes de la sécurité d'emploi.

Ici, il faut éviter de revivre la situation du début des années quatre-vingt où on a dû mettre en disponibilité des milliers d'enseignants, dont un fort contingent en formation professionnelle, et à des coûts dépassant annuellement les 100 millions de dollars durant plusieurs années. Là-dessus, nous n'avons pas beaucoup d'écoute du Conseil du trésor à ce sujet-là dans les négociations.

Impacts au plan communautaire. De nombreux modèles de partenariat ont été développés dans ces milieux visant la complémentarité avec les acteurs locaux, et avec l'espoir de ralentir la décroissance. Vous retrouvez à l'annexe IV de nombreux projets qui vont dans ce sens-là, de ce que je viens de dire. Ce sont des modèles de collaboration avec les municipalités, avec des groupes communautaires en vue de faire de l'école un carrefour d'activités, de rendre l'école accessible en tout temps. Les espaces excédentaires ont été prêtés ou loués à des municipalités, à des regroupements ou à des associations ou encore à des entreprises. Des corporations municipales ont accepté la responsabilité de l'entretien de l'école, de la cour d'école, par exemple. En d'autres endroits, c'est la caisse populaire, le bureau de poste ou l'âge d'or qui sont aménagés dans les locaux de l'école. Il y a même des logements résidentiels. Même tous ces efforts n'ont pas suffi à freiner la décroissance de la clientèle scolaire et l'exode des jeunes. Mais il faut faire attention de ne pas vider les écoles des villages voisins pour en sauver une. Et on a un exemple dans une localité tout près de Matane, à Sainte-Paule, notamment.

Cela nous amène à parler d'occupation du territoire. Comme le mentionne souvent Solidarité rurale, organisme dont nous faisons partie, l'enjeu du maintien des écoles de village dépasse l'institution en soi. La problématique des baisses de la clientèle affecte particulièrement le milieu rural. Les solutions à ce problème dépassent de beaucoup le domaine de l'éducation. Très souvent, la commission scolaire a l'odieux de fermer la dernière institution du village, mais, bien avant cela, le bureau de poste a quitté, la fabrique s'est regroupée avec d'autres fabriques, la caisse populaire est disparue et, parfois, il n'y a plus d'épicerie ou de station de services. Mais toute la pression politique est absorbée par la commission scolaire qui doit aussi rationaliser compte tenu de ses ressources limitées.

Bien sûr, la politique de la ruralité amène certaines perspectives intéressantes, mais notre inquiétude est grande lorsque l'on voit que des entreprises, malgré les millions du gouvernement, décident de quitter des régions. On a un bel exemple à Notre-Dame-du-Lac dernièrement.

Impacts au plan de la formation professionnelle et de l'éducation des adultes. Nous avons aussi comme mandat d'organiser des services de formation professionnelle et de formation générale des adultes. C'est un choix historique du Québec d'offrir aux adultes les mêmes possibilités de formation que les jeunes. Aujourd'hui, les exigences de formation tout au long de la vie rendent ces mandats encore plus pertinents. Nous sommes, de cette façon, des acteurs majeurs dans le développement des communautés locales et régionales.

n(14 h 20)n

Dans une perspective de soutien à la revitalisation des communautés et des régions, les commissions scolaires contribuent activement à mettre en place des programmes visant à intéresser les jeunes à découvrir la richesse et le potentiel de leur région et à développer leur sens de l'entrepreneurship. Nous avons une grande inquiétude, si les règles ne sont pas assouplies et que le financement n'est pas réajusté, d'assurer le maintien et le développement de ces secteurs d'activité.

Au plan des ressources matérielles et financières maintenant. Jusqu'à tout récemment, les règles budgétaires applicables aux commissions scolaires étaient basées sur le principe de montant per capita. Dans une situation en croissance, ce principe demeurait valable. Toutefois, ce n'est plus le cas avec la décroissance, puisque nous devons continuer à supporter des coûts fixes comme, par exemple, les réparations, l'entretien, le chauffage des bâtiments, la sécurité d'emploi.

Impacts sur les ressources matérielles. Il existe des allocations particulières pour les petites écoles liées à leur fonctionnement. C'est une partie de la taxe scolaire dédiée aux dépenses, soit entretien, réparation, consommation énergétique, et une allocation supplémentaire du ministère de l'Éducation. Nos allocations sont nettement insuffisantes pour répondre aux besoins. Une école construite pour 300 élèves, alors qu'on n'y trouve que 50 élèves, entraîne des coûts fixes importants. Le plus problématique, c'est l'état du parc immobilier qui requiert actuellement au moins 1 milliard de dollars de travaux. Parfois, les commissions scolaires sont obligées de regrouper des élèves dans une bâtisse en meilleur état physique, compte tenu du coût des travaux à effectuer dans certains bâtiments. Nous ajoutons plus de 50 millions aux allocations du MEQ à ce chapitre. Enfin, la réglementation actuelle empêche le milieu de réaliser lui-même les travaux.

Impacts sur les ressources financières. À la suite de nombreuses représentations de la Fédération et de l'ADIGECS, nous avons obtenu des modifications importantes aux règles budgétaires de 2002-2003. La notion de coût de base a été introduite afin de se dissocier un peu de la notion du montant par élève. Il faudra poursuivre au cours des prochaines années. Nous faisons des efforts considérables pour maintenir les écoles ouvertes et offrir des services de qualité tout en respectant la Loi de l'instruction publique qui prévoit que les commissions scolaires ne peuvent faire de déficit et doivent équilibrer leur budget.

Avec un taux d'administration se situant à 4,9 % de leurs dépenses totales, soit le taux le plus bas des secteurs public et parapublic, il est donc très clair que nous investissons massivement dans les services éducatifs au détriment des services administratifs, malgré l'ajout continuel d'obligations supplémentaires découlant des lois et règlements du gouvernement.

De plus, le gouvernement se plaît à dire qu'il investit davantage en éducation que l'Ontario, que les provinces de l'Ouest et même que plusieurs pays de l'OCDE, c'est-à-dire plus de 7 % de son PIB. Il faut nuancer cette affirmation. La dépense globale d'éducation par élève est en général plus élevée au Québec, surtout pour l'enseignement postsecondaire où elle est de 52 % plus élevée; le PIB par habitant est plus bas au Québec, ce qui le force à consacrer une plus grande part, soit 1 % environ, de son PIB à l'éducation. Et, finalement, la population est plus dispersée, ce qui occasionne, certes, des coûts plus élevés. Il convient également de souligner que toute comparaison avec l'Ontario devrait tenir compte, notamment, que le Québec est la province au Canada qui finance le plus le réseau d'écoles privées et que le Québec finance certaines dépenses supplémentaires dont les services de garde.

Depuis deux ans, il y a réinvestissement en éducation, réinvestissement ciblé ? baisse de ratio à la maternelle et au primaire, par exemple ? ne procurant qu'une bien petite marge de manoeuvre ou pas du tout de marge de manoeuvre, sinon de maintenir les services en place. Des changements majeurs ainsi que de nouvelles responsabilités sont survenus depuis 1997-1998. En page 25 du mémoire, vous avez la liste de ces changements ? et je vous fais grâce de cette énumération à ce moment-ci.

Tous ces changements n'ont pas toujours été accompagnés des ressources financières suffisantes et... réalisés en bonne partie dans une période de compressions budgétaires majeures. Ainsi, nous sommes convaincus que la gestion de la décroissance et le maintien des services dans les milieux locaux passeront nécessairement par l'ajout de ressources supplémentaires. Autre volet: les solutions qui sont déjà en application. Très brièvement, les commissions scolaires ainsi que le ministère de l'Éducation ont fait plusieurs efforts et plusieurs modifications depuis quelques années, mais ce n'est pas suffisant, et nous souhaitons que ça se poursuive.

Abordons maintenant l'aspect des recommandations. Tout le constat énoncé précédemment nous amène à soumettre les recommandations suivantes. Au plan pédagogique, sur les classes multi-âges:

Que le ministère de l'Éducation poursuive la recherche sur les classes multiâges et diffuse de l'information pour valoriser ce modèle d'organisation pour en faire connaître les résultats;

Que le ministère de l'Éducation soutienne les commissions scolaires dans le développement et la diffusion des instruments pédagogiques sur les classes multiâges en vue de supporter le personnel enseignant;

Que l'ensemble des universités prennent en compte, dans l'élaboration de leurs programmes, le modèle d'organisation de classes multiâges en vue de mieux préparer le personnel enseignant à cette réalité qui devient de plus en plus présente.

Concernant les nouvelles technologies:

Que le gouvernement poursuive le programme de réseautage des écoles, particulièrement en milieu rural, et, aussi, augmente le rythme d'implantation;

Que le ministère de l'Éducation poursuive et accélère l'expérimentation et l'implantation des nouvelles technologies en milieu rural pour assurer le maintien des services éducatifs;

Que le ministère de l'Éducation s'engage fermement à intégrer les contenus informatiques interactifs adaptés aux programmes d'études, à l'enseignement et à l'apprentissage.

Côté socialisation:

Que le ministère de l'Éducation soutienne les commissions scolaires dans le développement de programmes de socialisation et d'activités parascolaires visant une meilleure intégration des élèves dans leur milieu.

Au plan des ressources humaines, les recommandations:

Que le ministère de l'Éducation, en concertation avec le réseau des commissions scolaires, développe des programmes de perfectionnement pour le personnel enseignant, les spécialistes et le personnel de direction eu égard à l'organisation pédagogique, à la gestion des classes et à la gestion dans les petites écoles;

Que le gouvernement assouplisse les conventions collectives concernant l'organisation du travail, la règle du 50 km lorsque du personnel se trouve en surplus, la capacité d'affecter du personnel à différentes tâches de nature scolaire, municipale et communautaire;

Que le gouvernement modifie ses diverses réglementations afin de permettre aux commissions scolaires d'avoir recours à des bénévoles pour effectuer certaines tâches reliées à des travaux d'amélioration des écoles, permettant ainsi à la communauté de s'investir dans l'amélioration de ses institutions scolaires;

Que le gouvernement assouplisse les encadrements légaux et les conventions collectives pour permettre le cumul de fonctions et la stabilité du personnel ? exemples, enseignement et direction d'école, enseignement et professionnel, enseignement et responsable d'immeuble ? ou pour développer de nouveaux modèles: les «head teachers», par exemple, ou le mentorat, en bon français.

Recommandations au plan communautaire:

Que le gouvernement, dans ses politiques de développement du territoire et ses orientations eu égard au maintien des services de proximité, respecte et valorise la mission et les responsabilités de la commission scolaire comme gouvernement local autonome et responsable de la mission éducative;

Que le gouvernement adopte des orientations claires sur l'objectif de l'occupation du territoire et mette en place un plan d'action approprié.

Au plan de la formation professionnelle et de l'éducation des adultes:

Que le ministère de l'Éducation assouplisse ses règles qui touchent l'ensemble des programmes de formation professionnelle et de formation continue afin qu'ils soient adaptés au maintien des services au niveau local.

Les ressources matérielles et financières:

Que le ministère de l'Éducation poursuive le développement des règles budgétaires fondées sur le principe que l'économie générée par la décroissance soit réinvestie en partie dans les services de base des commissions scolaires affectées;

Que le gouvernement accorde les ressources supplémentaires nécessaires à l'application des recommandations tant au plan pédagogique, des ressources humaines que de la formation professionnelle;

Que le gouvernement rende récurrentes les sommes dévolues par le Fonds Jeunesse pour le programme Une école ouverte sur son milieu dans l'objectif d'assurer des activités parascolaires dans l'ensemble des écoles du Québec et de permettre notamment de soutenir des activités de socialisation dans les milieux en décroissance.

Enfin, une recommandation générale:

Que le ministère de l'Éducation analyse le modèle d'organisation des écoles existant dans certaines commissions scolaires, fondé sur le principe d'une école-centre ou une école-ressource offrant des services de soutien en réseau à un certain nombre d'écoles satellites, qui permettrait de pallier à la perte d'expertise et à l'inefficience résultant des temps des déplacement.

Je demanderais maintenant à M. Roy de poursuivre.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Roy.

M. Roy (Denis): Mme la Présidente, je vais vous parler d'un problème qui est plus heureux, certes, la croissance de la clientèle, mais qui ne se vit pas sans problème dans les commissions scolaires. On comprendra bien sûr que la situation est très différente de ce que vivent nos collègues des commissions scolaires en croissance. Plusieurs tendances se manifestent. On voit de moins en moins de croissance univoque. On a certaines commissions scolaires en croissance régulière. On a des commissions scolaires qui ont un rythme de croissance à la baisse, ou bien des commissions scolaires qui ont une croissance sur une partie de leur territoire, une décroissance sur l'autre, ou, ce qu'on voit de plus en plus, une décroissance au préscolaire et au primaire dans la même commission scolaire et une augmentation de clientèle au secondaire pour, au total, être une commission scolaire en croissance. Or, bien sûr, pour ces dernières catégories de clientèle, il y a un double effet. Au plan budgétaire et au plan d'utilisation des locaux, elles doivent supporter, d'une part, les impacts de la décroissance et, d'autre part, ceux de la croissance.

n(14 h 30)n

Quels sont ces principaux impacts au plan pédagogique, d'abord? Les problèmes majeurs demeurent bien sûr le manque de place disponible, l'incapacité de répondre adéquatement et rapidement à toutes les demandes d'ajout d'espaces. C'est ainsi que des locaux spécialisés sont souvent transformés en locaux de classes. Le service de garde de l'école doit souvent être déplacé devant l'arrivée de clientèle. Ces commissions scolaires font face à une surutilisation des locaux disponibles, avec un impact sur la vie de l'école, aussi un impact sur la disponibilité des locaux offerts à la communauté en soirée. On comprendra que c'est particulièrement dû au succès des services de garde en milieu scolaire. L'école a un problème organisationnel important pour offrir des spécialités. Certains programmes à vocation particulière souhaités par des parents sont ou bien exclus ou limités compte tenu du manque d'espace.

De plus en plus, les bassins de clientèle des écoles doivent être revus à chaque année, ce qui implique des déplacements de clientèle. La surutilisation de l'école ayant ses limites, la commission scolaire doit, dans plusieurs situations, déplacer des enfants vers d'autres écoles sans toutefois que ceux-ci aient l'assurance de pouvoir fréquenter cette même école l'année scolaire suivante. Il arrive même que des enfants aient à fréquenter trois ou quatre écoles différentes au cours de leur formation primaire. Des familles sont parfois divisées. Les frères et soeurs ne peuvent pas fréquenter la même école. Ces diverses situations engendrent, bien sûr, souvent tant chez les élèves, chez les parents que chez le personnel enseignant de l'insatisfaction, de l'insécurité. Il y a donc un impact sur la stabilité du milieu de vie que doit être l'école et également sur la réussite éducative.

En somme, les commissions scolaires ont comme choix parfois d'agrandir les écoles par l'intérieur, donc d'utiliser des locaux à d'autres fins que pour celles auxquelles ils sont prévus, de revoir les territoires de desserte des écoles avec la préoccupation d'éviter de sortir les élèves de leur milieu.

Au plan des ressources humaines, on comprendra que, dans des écoles en débordement de clientèle, il s'ensuit souvent une série de problèmes affectant le personnel et les élèves, qu'on parle de problèmes de sécurité, de fatigue excessive ou de stress accru. Il s'ensuit des problèmes organisationnels tels que des bureaux et des salles de travail inexistants pour le personnel enseignant, pas de locaux pour certains spécialistes. La nouvelle orientation ministérielle d'attribuer des ressources en vue d'aménager des locaux pour le personnel enseignant se butera certainement dans ces milieux à des obstacles majeurs en termes de disponibilité de locaux.

Au plan communautaire, toujours dans le contexte de débordement, il devient difficile pour les commissions scolaires de faire de l'école une plaque tournante ou un centre multiservice, éducatif, social et culturel. Notre nouvelle mission communautaire est donc difficile à rencontrer.

Les commissions scolaires avec des secteurs en croissance et d'autres en décroissance rencontrent les mêmes problèmes de fermeture d'écoles de quartier, la même résistance des parents lorsque la commission scolaire envisage de transférer des élèves, notamment d'un milieu socioéconomique à un autre.

Au plan de la formation professionnelle et de l'éducation des adultes, contrairement aux commissions scolaires en décroissance, les commissions scolaires en croissance ont des élèves mais manquent de locaux. Les commissions scolaires sont parfois obligées de transformer des locaux d'éducation des adultes en locaux d'enseignement de formation générale aux jeunes. Ces commissions scolaires ne peuvent pas offrir toute la panoplie de programmes de formation professionnelle faute d'espace, et ce, même si le ministère de l'Éducation a investi de façon importante, on en convient, dans les centres de formation professionnelle depuis quelques années.

Au plan des ressources matérielles et financières, la commission scolaire est souvent forcée de recourir à d'autres alternatives que la construction de nouvelles écoles en raison d'un manque de financement ou du retard de financement. La commission scolaire doit, en certaines occasions, soit louer des locaux soit recourir à l'utilisation de locaux préfabriqués, et certaines municipalités ont tendance à supprimer le droit d'aménager des locaux préfabriqués, parce qu'on sait que ces locaux sont conçus pour quelques années, et on doit souvent prolonger leur vie utile. De plus, les commissions scolaires doivent souvent procéder à des investissements importants à chaque année dans la transformation des locaux pour accueillir les nouvelles clientèles, et ce, sans contribution financière du gouvernement.

Parfois, suite à une réponse favorable du ministère de l'Éducation pour la construction d'une nouvelle école, la commission scolaire se bute à des difficultés de trouver un terrain adéquat. Ce manque évident de collaboration de certaines municipalités entraîne des délais indus dans la construction. Des délais d'un ou deux ans pour obtenir un terrain adéquat ont déjà été remarqués. En attendant, ceux qui subissent les contrecoups, ce sont les élèves.

La liste de ces problèmes ne serait pas complète si on devait passer sous silence toutes les difficultés d'organisation de transport scolaire, de déplacements d'élèves dans les écoles plus éloignées. Les parents, on le comprendra, qui s'installent dans un nouveau quartier prennent généralement en compte la localisation de l'école et prennent pour acquis que ce sera l'école de fréquentation de leur enfant. Ce n'est pas toujours possible compte tenu des espaces disponibles. Malgré tout, les commissions scolaires gardent toujours en tête le respect, dans la mesure du possible, des limites de municipalité ou de quartier, tentent de réduire l'impact et de maintenir les élèves dans leur milieu. Plusieurs solutions ont déjà été mises en place au niveau des commissions. S'il faut constater que plusieurs efforts ont été effectués pour atténuer les problèmes générés par le phénomène de la croissance, et ce, tant par les commissions scolaires que le ministère de l'Éducation, il faut aussi constater que c'est insuffisant.

Alors, les recommandations que la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des directeurs généraux formulent sont les suivantes:

1. Que le gouvernement dégage les sommes nécessaires pour répondre plus adéquatement aux besoins cruciaux d'espace, qu'il s'agisse de construction, d'agrandissement, de rénovation ou de location, et qu'il finance entièrement les coûts.

2. Que le gouvernement modifie les mécanismes pour accélérer les processus décisionnels du ministère de l'Éducation et du Conseil du trésor concernant les autorisations de projets de construction et d'agrandissement ou d'acquisition de nouveaux équipements scolaires.

3. Que le gouvernement réintroduise dans les coûts prévus pour la construction des écoles le financement pour l'achat des terrains.

4. Que le gouvernement prévoie un programme d'investissement particulier pour les locaux de services de garde dans certains milieux.

En conclusion générale, bien que le phénomène des fluctuations de la clientèle interpelle grandement le milieu scolaire, causant des problèmes sérieux qui exigent la mise en place de mesures gouvernementales, le déclin démographique alarmant que connaît le Québec dans plusieurs régions confronte l'ensemble des acteurs sociopolitiques, non seulement les commissions scolaires. Malgré tous les efforts déployés par les commissions scolaires au cours des dernières années pour maintenir des services éducatifs de qualité dans les milieux en décroissance, force est de constater que le déclin démographique va se poursuivre, accentuant davantage la pression sur l'organisation des services éducatifs. Il faut, en effet, s'assurer que nos élèves pourront avoir accès normalement au service d'un psychologue, par exemple, d'un orthopédagogue. Il faut assurer à ces élèves des leçons de musique, l'apprentissage de nouvelles technologies ou encore l'accès à une bibliothèque digne de ce nom. Il faut assurer la socialisation des élèves qui vivent au quotidien en petits groupes et qui devront éventuellement être confrontés à la réalité des écoles secondaires plus populeuses.

Ce sont là quelques-uns des défis qui confrontent le milieu scolaire primaire et secondaire et qui ne trouveront certes pas de réponse, nous en sommes convaincus, dans l'adoption par le gouvernement de mesures coercitives aux effets souvent démobilisateurs. C'est dans le respect des responsabilités des gouvernements locaux scolaires, dans un support financier accru et dans des modifications de conventions collectives et réglementaires que le gouvernement pourra le mieux soutenir l'action des commissions scolaires. Le gouvernement devra s'assurer aussi d'une coordination efficace des divers programmes et politiques reliés au développement des régions. Il doit mettre en place des solutions intégrées qui proposent une vision globale et structurante pour enrayer le déclin des régions. Cela va bien au-delà d'un simple débat sur le maintien de la dernière école de village.

Quant aux commissions scolaires qui sont toujours en croissance de clientèle, elles sont aussi confrontées à des problématiques majeures liées au manque de locaux pour accueillir tous les élèves d'une communauté, comme nous avons démontré dans le présent mémoire. Encore là, les commissions scolaires mettent tous les efforts et les énergies pour maintenir les élèves dans leur milieu, même s'il faut surutiliser les locaux, en louer ou installer des locaux préfabriqués. Malgré ces tours de force répétés, plusieurs élèves de quartiers en croissance démographique doivent souvent, au grand dam des parents et des commissions scolaires, être déplacés vers des écoles de quartiers environnants. Dans les deux cas, il y a des conséquences, aux plans pédagogique, humain et communautaire, qui sont majeures pour les élèves, les parents et le personnel. Il faut que le ministère de l'Éducation accélère l'octroi des autorisations de construction et d'agrandissement pour permettre à ces milieux encore pleins de vitalité de maintenir des services éducatifs de qualité.

Pour la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, les problèmes reliés aux fluctuations de la clientèle dans le réseau des commissions scolaires passent nécessairement par des investissements en éducation et aussi particulièrement par des mesures structurantes pour le développement des régions en déclin démographique. Que ce soit dans un contexte de croissance ou de décroissance de la clientèle, nous insistons sur le fait que la préoccupation première des commissions scolaires a toujours été et demeure de rendre des services éducatifs de qualité à l'ensemble des élèves.

Le Président (M. Paquin): Est-ce que ça complète la présentation?

M. Caron (André): Peut-être un petit complément d'information sur la carte qui va vous être distribuée dans quelques instants par le secrétaire de la commission, où M. Morel va vous en faire un bref descriptif. M. Morel.

Document déposé

Le Président (M. Paquin): Alors, j'accepte le dépôt du document.

n(14 h 40)n

M. Morel (Réjean): Alors, disons que ce sont des cartes que nous avons mises à jour au cours des dernières semaines, qui avaient été déposées lors du colloque de la Fédération des commissions scolaires sur la décroissance des clientèles en l'an 2000. Dans la toute première page, vous allez voir une carte du Québec, là, qui vous montre d'abord les commissions scolaires en croissance, où ça se situe par rapport aux commissions scolaires en décroissance. On voit qu'elles sont en majorité dans le contour de Montréal, du Grand Montréal. Et par la suite vous avez, pour chacune des commissions scolaires, au plan géographique, indiquées les écoles de moins de 50 élèves, donc 49 élèves et moins, les écoles de moins de 100 élèves, et vous avez aussi placées la dernière école de village ainsi que les écoles qui ont été fermées de 1992 à 2002, donc les 10 dernières années, ainsi que les municipalités sans école. Vous savez, on a 380 municipalités qui n'ont pas d'école actuellement dans le Québec. Et vous avez aussi, pour chacune des commissions scolaires, aussi quelques données sur les clientèles actuelles, 2001-2002, ainsi que les fluctuations, là, positives et négatives des clientèles de chacune des commissions scolaires.

Alors, tout à l'heure, par rapport à des interventions qui pourront être faites, on pourra référer à des cartes, là, particulièrement à la carte Beauce-Etchemin de la page 3, ainsi que Lac-Témiscamingue, à la page 28, puis du Fleuve-et-des-Lacs, à la page 18, pour pouvoir situer un peu le problème de ces commissions scolaires là.

La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez fini votre présentation?

Une voix: Non.

La Présidente (Mme Bélanger): Je m'excuse, là, il y a eu une petite distraction.

M. Caron (André): ...c'est normal.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Merci, Mme la Présidente. M. Caron, messieurs, madame, je vais continuer un peu sur ma lancée de ce matin. Je suppose que vous deviez être ou bien ici pour écouter le ministre et les représentants municipaux ou, à tout le moins, avoir lu leur mémoire, à tout le moins pour M. Caron. Vous n'y allez pas de main morte. Je lisais ce matin le compte rendu de vos réactions au journal Le Soleil vis-à-vis le mémoire de la Fédération québécoise des municipalités. C'est clair, vous ne voulez pas de leur ingérence, et, eux autres, ils sont préoccupés uniquement par les bâtiments, alors que les commissions scolaires ont pour objectif le bien-être des enfants. Je le dis sans être péjoratif à quelque niveau que ce soit, là. Et, par ailleurs, effectivement il y a plus de 1 300 ententes qui lient les municipalités aux commissions scolaires. Donc, ça ne doit pas être si pire que ça, se parler, puisque vous en arrivez à faire des ententes. Pour vivre dans mon coin, ils ne sont pas toujours faciles, mais ils sont là.

Mais ? et ça, c'est ressorti ce matin des témoignages que nous avons eus aussi bien de la Fédération que de l'Union ? ils font ressortir ce manque de concertation entre les commissions scolaires et les municipalités malgré le fait qu'il puisse y avoir plein d'ententes. Eux prétendent que le gouvernement municipal est le gouvernement qui est le plus près des citoyens et qui est un gouvernement par définition horizontal, donc qui s'occupe de l'ensemble des besoins du citoyen, contrairement au ministère, par exemple, ou aux commissions scolaires qui sont plus verticaux dans la mesure où ils s'occupent d'un... ils sont plus sectoriels, à tout le moins. Puis ils disent: Il faut qu'on en arrive, dans la gestion de la décroissance, à pouvoir établir des liens de réflexion, de concertation, de discussion, puis ils vont même aussi loin que de décision, hein? Ça a été d'ailleurs un des éléments qui vous a fait bondir et qui vous a fait devenir rouge ? au sens le plus étroit du terme, évidemment, je ne préjuge pas de vos allégeances. Ha, ha, ha!

M. Caron (André): C'est ce qu'on dit.

M. Kieffer: Ça, ça me préoccupe. Ce matin, quand j'ai posé ces questions-là ? puis je n'ai pas été le seul à les poser ? les gens étaient peut-être un peu plus tempérés que leur mémoire, ils disaient: Oui, mais, bon, finalement ce n'est pas si mal. Sauf que la Fédération, elle demande un droit de veto ? moi, j'utilise le terme «droit de veto» parce que, en bout de ligne, c'est ça que ça va donner ? sur la fermeture des écoles. Par contre, le ministre a ouvert la porte et d'autres intervenants ont ouvert la porte sur, à tout le moins, qu'on mette en place des structures légères et non pas lourdes, hein, il faut bien se comprendre, où il va falloir qu'il y ait de la consultation, il va falloir que les gens puissent se parler, il va falloir que les différentes instances qui sont directement concernées par ce type de problématique là puissent se parler. Je pense, entre autres, aux municipalités, mais pas uniquement les municipalités... Surtout les petites, parce que je pense qu'au niveau des municipalités plus grandes, les 20 000 et plus ou les 15 000 et plus, la problématique se pose beaucoup moins. Mais les petits villages, les petites municipalités où on retrouve souvent cette problématique de fermeture d'écoles sont très concernés. Le député... Claude...

Une voix: De Bellechasse.

M. Kieffer: ...de Bellechasse a donné des exemples très, très intéressants, très, très intéressants où il dit: Tu as trois villages, le commissaire s'est fait élire dans le village principal, puis l'école est fermée dans l'autre petit village, puis il dit, lui... Il s'en fout. Bon, évidemment, il caricaturait, là, mais quelque part c'est aussi le reflet de cette réalité-là. Alors, j'aimerais entendre vos commentaires là-dessus parce que vous en avez peu parlé dans la présentation de votre mémoire. Au niveau local, les structures horizontales, qui concernent directement les citoyens, où vous êtes étroitement impliqués par votre action éducative, il n'y aurait pas moyen de penser à une ouverture où on pourrait tenter de gérer ces problèmes-là de fermeture d'écoles, surtout qu'il y a de beaux exemples, à part ça ? je ne vous les ai pas cités, mais vous lirez les mémoires ? il y a de beaux exemples de collaboration? Je vous écoute.

M. Caron (André): D'abord, bon, je ne répliquerai pas à la première partie, là, sur la couleur, allons-y sur la concertation. Dans beaucoup de milieux, ce processus-là de fermeture d'écoles ou d'envisager la fermeture d'écoles se fait en concertation avec les milieux école et avec les milieux municipaux, et je vais demander tantôt à Mme Roy d'en donner un témoignage. Mais, avant ça, je voudrais juste préciser, par exemple, que quand, dans d'autres structures ? et, je les nomme, genre CLD, genre CRD ? dans beaucoup de milieux au Québec, il faut que les commissions scolaires se battent pour avoir des sièges, après ça, on se surprend que la commission scolaire, de son côté, elle reste cloisonnée. Donc, je pense qu'il y aurait du ménage à faire ou un arrimage à faire, une harmonisation dans les deux sens.

M. Kieffer: M. Caron, vous avez raison, mais deux moins, ça n'a jamais égalé un plus.

M. Caron (André): Bon. Donc, on a du chemin à faire là-dessus, ce n'est pas, hein, avec le statu quo qu'on va avancer. Mais, dans beaucoup de milieux ? et Mme Roy va en témoigner dans quelques instants ? ça se fait en collégialité avec le milieu. La prise de décision, les annonces, les plans triennaux des commissions scolaires, les milieux sont consultés. Et, Mme Roy, si vous voulez enchaîner sur mes propos, je vous laisse la parole.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Roy.

Mme Roy (Anny): Oui. Je viens d'un milieu où est-ce qu'on vit beaucoup de décroissance. Toutes les problématiques que M. Caron tantôt nommait par rapport à ça, on les vit depuis plusieurs années. Présentement, depuis un an et demi, on est dans un processus de remise en question de nos services, et tout ça se fait en collaboration avec le milieu municipal. On les a invités à chaque fois qu'on avait des consultations sur le sujet. On a passé dans toutes les municipalités qui sont concernées, même celles qui n'étaient pas concernées par la décroissance, pour expliquer les problématiques. On a invité la MRC aussi à ce niveau-là. On est présentement en train d'élaborer certaines solutions à la commission scolaire avec tous les constats qu'on a ramassés et on retourne ensuite encore dans les milieux concernés pour parler des solutions puis échanger avec les gens. Ça fait que, dans notre milieu, tout se fait en concertation avec le monde municipal.

M. Kieffer: Vous avez mentionné les plans triennaux, puis, effectivement, il y a une obligation de consulter, sauf les municipalités. Les municipalités ne font pas partie... Et, je reprends ce qu'on nous a dit ce matin, et personne ne l'a contredit, là, vous avez consulté les MRC, vous avez consulté d'autres organismes, mais pas les municipalités. Et, madame, avec tout le respect que je vous dois, vous parlez, vous... J'ai eu l'impression que vous nous parliez effectivement de vos orientations, là. Quand arrive un cas de fermeture d'école, là, moi, je veux quelque chose de concret, là, ce qu'on nous dit, c'est qu'il n'y en a pas de consultation. Vous, la décision est prise au bureau-chef de la commission scolaire, puis les gens dans la municipalité doivent se battre. Bien, pourquoi il y en a tant que ça qui se battent? Pourquoi...

M. Caron (André): Mme la Présidente, à mon avis...

M. Kieffer: Oui, allez-y.

M. Caron (André): Je vais tenter une explication.

M. Kieffer: Allez-y.

M. Caron (André): C'est que, dans beaucoup de milieux la concertation, ça veut dire décider. Et, si on consulte une municipalité puis que ça ne fait pas leur affaire, après ils vont dire: On n'a pas été consulté. Si on prend la bonne décision qui va dans leur sens, ah, là, ils ont décidé.

Et, avant de passer la parole à M. Pelletier, qui, lui aussi, dans un autre coin de la province, a fait des consultations dans son milieu, je voudrais juste, avant de l'oublier... Quand vous parlez qu'un commissaire d'école, par exemple, qui représente trois villages ne représente... pour représenter le plus gros village, un député représente-t-il seulement sa plus grosse municipalité? M. Pelletier, s'il vous plaît.

M. Kieffer: Si vous parlez de moi... C'est parce que là vous... Ha, ha, ha!

M. Caron (André): Non, non, je ne vous pointe pas, là, en général.

M. Kieffer: Moi, j'ai trois municipalités à peu près d'égal... et avec un vote à peu près équivalent dans les trois. Allez-y.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Pelletier.

n(14 h 50)n

M. Pelletier (Serge): Oui. Bonjour. Serge Pelletier, commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs dans le territoire du Témiscouata et des Basques. Je dois vous dire qu'on a mis en place, nous autres, une politique du maintien des petites écoles. Comme c'est prévu au niveau de la loi, on avait cette possibilité-là, et on l'a fait. Par rapport, à la consultation, on a consulté l'ensemble des municipalités se retrouvant dans les deux MRC concernées. Il y a eu un processus de consultation, les gens étaient d'accord sur le principe de la politique, mais, lorsqu'est arrivé le temps, un an ou un an et demi plus tard, pour l'application de la politique, dans certains milieux, c'est là que ça a accroché. Donc, à mon point de vue, on a fait participer les gens au niveau du processus, mais, quand arrive le temps des décisions, là c'est beaucoup plus émotif, et c'est normal.

J'ai fait des rencontres, moi, dans des collectivités. Dans des petits villages où est-ce qu'il y a 350 personnes, j'ai déjà vu, un soir, 260 personnes dans une salle attendant le D.G. et le président de la commission scolaire, et ce n'était pas nécessairement pour leur dire bonjour. Et, à ce moment-là, on s'est rendu compte que les gens, la question des services qu'on donne à la clientèle, c'est secondaire. Pour les gens, l'école, avant toute chose, c'est important, c'est significatif parce que ça peut mettre en péril la survie du village. C'est comme ça qu'ils perçoivent ça. Mais, quand on va plus loin avec eux autres et on leur dit: C'est quoi, la position des parents des élèves? Là, ce qu'on s'en rend compte souvent, c'est que le milieu municipal prend le dessus sur les parents dans la recherche de solutions.

Et quand on les amène à trouver des solutions avec nous autres... Et, nous autres, dans notre territoire, on a quand même fait beaucoup de partenariats. Je pense que nous avons une quinzaine d'écoles où on a des locations de toutes sortes, on a des caisses populaires intégrées dans des écoles, on a des clubs de l'âge d'or, on a des clubs de fermières, on a même des loyers résidentiels. On a toutes sortes de partenariats possibles et imaginables, et je vous dirais que, dans l'ensemble, ça va bien. Mais ce qu'on se dit aussi, c'est qu'à un moment donné, avec les ressources qui sont disponibles au niveau de la commission scolaire, ça va devenir difficile, à un moment donné, d'assurer des services éducatifs de qualité. C'est vraiment là-dessus que ça accroche le plus, et, quand on fait des discussions avec les gens du milieu, c'est secondaire, cette dimension-là, à ce moment-ci. C'est ce que je peux dire par rapport à ça.

M. Kieffer: ...Mme la Présidente, je vais laisser la parole à mon confrère.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie...

M. Kieffer: Ah, il y a M. Caron qui voulait ajouter.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Il y a un volet que j'aimerais que M. Roy, Denis, couvre, c'est celui du silo, que vous avez fait référence, où je ne suis absolument pas d'accord avec votre perception. M. Roy.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Roy.

M. Roy (Denis): Je partage le désaccord de M. Caron là-dessus, sur la perception. Quand on regarde la mission d'une commission scolaire, c'est éduquer, instruire, socialiser et qualifier. C'est aussi la mission communautaire inscrite dans la loi depuis 1998. C'est aussi toute la formation en entreprise. C'est aussi de plus en plus, dans les régions, une implication massive des commissions scolaires dans le développement régional. C'est aussi la participation, aux conseils d'établissement, de représentants de la communauté. À chacun de nos conseils d'établissement, que ce soit de nos centres, que ce soit de nos écoles. Vous donner simplement quelques chiffres, et je les pige dans ma commission scolaire par hasard: 245 millions de budget; là-dessus, 104 millions versés en salaires sur le territoire des deux MRC et 32 millions d'achats locaux sur le territoire des deux MRC. C'est 136 millions d'impact économique. Alors, ce n'est pas juste de la formation, ce n'est pas juste en silo, je pense que le... Puis, ce n'est pas le seul exemple dans notre région, dans d'autres régions, c'est pareil. Souvent, la commission scolaire est le plus gros employeur et l'organisme qui a le plus d'impact au niveau du développement économique de la région, de l'impact économique en termes de salaires, en termes de dépenses. Et c'est 5 000 employés. Alors, je pense que c'est plus qu'un silo, c'est... Le silo est très ouvert, de plus en plus.

Une voix: Services de garde.

M. Roy (Denis): Services de garde. Et, on pourrait en énumérer beaucoup, participation de la communauté et des villes à l'utilisation des locaux... Vous citiez tout à l'heure les protocoles municipaux et scolaires, et il y a encore plus de développement qui est à venir dans ces éléments-là. Alors, c'est plus sur l'opinion, là, on a une autre lecture de la réalité scolaire.

M. Kieffer: Alors, je vais laisser la parole... quoique j'aurais aimé continuer, mais, bon...

Une voix: ...

M. Kieffer: Non, non, non. Allez-y.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Geoffrion: Oui. Merci. Bonjour, madame, messieurs, M. Caron. Bien, moi aussi, je vais poursuivre un peu dans la même lancée que mon collègue. Assez impressionné par l'annexe, finalement, votre mémoire bien fait, évidemment. Mais l'annexe IV, là, quand on parle des projets novateurs ayant permis de maintenir des écoles ouvertes, bon, le mot qui m'accroche, c'est évidemment le mot «novateur». Et moi qui est dans une commission scolaire où là vraiment... Je regarde la carte de ma commission scolaire, là, Grandes-Seigneuries, sur la Rive-Sud de Montréal, je ne vois pas beaucoup d'étoiles bleues, là, hein? On est plutôt, encore pour quelques années, dit-on, en croissance, et c'est plutôt des problèmes de construction d'écoles qu'on vit encore dans ma région. Donc, j'apprends dans votre annexe un paquet de choses intéressantes, là, notamment, bon, sur certains projets dans certaines commissions scolaires. Je connaissais évidemment les classes vertes, mais là on tombe dans le très spécialisé, là. Quand on parle de projet de Réseau québécois des écoles microentreprises environnementales, chapeau, là!

Donc, ce que je veux dire, c'est que monsieur disait tout à l'heure en réponse à la question de mon collègue: Tout va bien. Je comprenais que tout va bien, souvent, au niveau administratif, là. Des ententes avec les municipalités, bon, il y en a plus de 1 300 ? j'apprends ça aujourd'hui ? dans plus de 1 000 municipalités et des expériences novatrices, je suis convaincu, qui sont très intéressantes. Mais, plus qu'au niveau administratif, c'est là-dessus que j'aimerais vous entendre. Au point de vue pédagogie, là, au point de vue des enfants, là, donc ces expériences-là de partager, par exemple, des classes avec la Société historique de Charlevoix, ou avec des groupes de personnes âgées, ou... Évidemment, ce sont, la plupart du temps, des écoles primaires, je pense. On parle vraiment d'écoles primaires?

Une voix: ...

M. Geoffrion: Plus? Il y a également des écoles secondaires?

M. Pelletier (Serge): Oui, ils ont des ententes, effectivement.

M. Geoffrion: Bon. Donc, est-ce que vous avez fait une évaluation, un petit peu, des impacts sur les enfants? À savoir, est-ce que ces projets innovateurs là sont, par rapport à des écoles chez nous ou ailleurs sur le territoire québécois où il n'y a pas ce type de problème là... Est-ce que c'est mieux ou est-ce que les enfants sont plus motivés? Et, évidemment, si on parle d'écoles secondaires, on a souvent eu l'occasion d'en parler avec M. Caron, on n'a pas abordé dans votre mémoire toute la question du décrochage. Est-ce que, dans le cas de ces expériences-là dans les écoles secondaires... Est-ce que, par exemple, ça a fait en sorte qu'il y a moins de décrochage? Autrement dit, est-ce que ces expériences-là, qui sont très novatrices, ont des effets positifs sur les enfants, sur leur réussite?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Je vous dirais: L'information que, moi, je possède, pour en avoir entendu et non vécu, entre autres, dans Charlevoix où il y a une école primaire avec des résidences pour personnes retraitées au deuxième étage, où on me raconte que l'intergénérationnel est très fort, les personnes âgées descendent dans l'école, c'est comme... C'est devenu des complices. Bon. Comment ça se vit exactement? Ce serait vous mentir de vous décrire comment ça se passe. Je ne sais pas si ici, autour de la table, il y a des personnes qui ont vécu des expériences semblables, mais j'ose espérer et j'imagine que, si les personnes ont accepté de demeurer au deuxième étage d'une école, ils sont prêts à vivre aussi avec des ti-pits, hein, qui sont en bas puis qui sont quelquefois bruyants, mais qui vont aller... puis qui vont aller, hein, leur donner un petit peu d'affection. Et, moi, je trouve ça drôlement intéressant et j'ai trouvé ça génial comme idée.

Pour revenir à votre autre sujet du début de votre présentation, au niveau des microentreprises sur l'environnement, si vous avez le goût d'entendre le président de ce réseau-là, il est avec nous, c'est Clément Provencher, qui est secrétaire général à la Fédération. Et j'ai été témoin, dans plusieurs écoles au Québec, de ce genre d'activité là, et c'est une vie école extraordinaire et qui fait participer, contrairement au silo de tout à l'heure, toute la communauté et même les entreprises du milieu qui commanditent, notamment, ces microentreprises-là qui fonctionnent depuis plus d'une dizaine d'années maintenant, notamment dans la région d'Alma où ça a parti. Mme la Présidente, M. Serge Pelletier pourrait peut-être donner une information au niveau du vécu des écoles qui ont des classes multiprogrammes puis des activités.

M. Geoffrion: ...que vous énumérez dans votre annexe.

M. Caron (André): M. Pelletier détient le record à date, là, dans l'annexe, des ententes municipales notamment.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Pelletier.

M. Pelletier (Serge): Au niveau des classes multiprogrammes, comme vous parliez tout à l'heure, ce qu'il faut noter, c'est, à mon point de vue, que les enseignants qui travaillent dans ces milieux-là ont un travail particulièrement stimulant, mais très, très exigeant. Je pense qu'il faut qu'ils innovent. Quand on parle de nouvelles approches pédagogiques, dans les classes multiprogrammes, ils n'ont pas le choix, il faut vraiment qu'ils s'adaptent à ces situations-là. Et, à mon point de vue, les enseignants qui oeuvrent dans les classes multiprogrammes sont actuellement les mieux placés pour faire face à la réforme telle qu'on la connaît actuellement, là, qui est en train d'entrer dans les écoles primaires et qui va entrer dans les écoles secondaires dans les prochaines années.

n(15 heures)n

Mais, en même temps qu'on dit ça, ce qu'il faut noter aussi: dans plusieurs milieux, il y a une participation active des parents. Dans les petits villages, dans les petites écoles, souvent, quand il y a une activité qui se fait à l'école, s'il y a 30 enfants, il y a habituellement une trentaine de parents de présents et des fois plus. Donc, c'est une vie communautaire qui se fait là.

Mais il y a aussi beaucoup d'ententes entre écoles, ce qu'on vit, nous autres, depuis quelques années. Parce que ? vous vous rappelez la mission de l'école qui est instruire, socialiser et qualifier ? la problématique qu'on voit souvent dans les petites écoles, c'est la dimension socialisation, et on essaie d'atténuer cette problématique-là en trouvant divers moyens.

Et il y a des échanges entre écoles, il y a le réseautage au niveau informatique qui nous permet de répondre un petit peu à cette problématique-là; il y a divers projets de cette nature-là qui font en sorte que les jeunes du primaire, dans les petits milieux, ont la chance de mieux se socialiser. Parce que la problématique, à notre point de vue, ce n'est pas lorsqu'ils sont au primaire, c'est lorsqu'ils transfèrent dans les écoles secondaires et que, là, ils arrivent dans un plus gros milieu. Ils ont des fois, dans certains milieux, de la difficulté à s'adapter à cette grande école là. Et c'est des problématiques qui surviennent souvent dans nos milieux, là. Mais, de façon générale, les élèves des petites écoles réussissent aussi bien et à certains égards mieux que bien d'autres écoles primaires plus populeuses.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Juste... Seulement rajouter: Sur des projets novateurs comme ça, il y a quand même un danger. J'ai passé rapidement dans la présentation tout à l'heure mais, dans le mémoire, vous la retrouvez, la petite histoire de l'école Sainte-Paule, dans le coin de Matane, où l'effet négatif, c'est que les autres villages d'à côté perdent leur clientèle au profit de cette école-là qui a un projet basé sur l'environnement. Et là, c'est les autres écoles voisines qui sont en danger, maintenant. Donc, il y a un équilibre à conserver, là. Ce n'est pas une solution miracle à tous les maux, là. Il faut faire attention dans ces...

La Présidente (Mme Bélanger): Allez, M. le député de La Prairie.

M. Geoffrion: Bien, juste pour finir. Finalement, autrement dit, la recherche de solutions qui étaient peut-être, à la base, purement administratives, bon, de problématique de places-école, etc., bon ? vous avez une panoplie, finalement, de solutions ? il y a peut-être eu des essais de laboratoire, si vous voulez, en termes pédagogiques, on s'entend là-dessus, que la plupart... Il y a des exceptions peut-être, là, du côté de Matane ou dans d'autres régions, d'effets plus négatifs, mais on s'entend que ça a pu donner lieu à des expériences qui pourraient être mises à contribution dans d'autres écoles, dans d'autres milieux moins affectés par la décroissance. On pourrait aller jusque-là?

Une voix: C'est le but du comité, d'ailleurs.

M. Geoffrion: Oui? Merci.

M. Caron (André): Si vous permettez, Mme la Présidente, je fais faire du pouce là-dessus, parce que le Comité du maintien des petites écoles, qui a été mis sur pied par le ministre Simard et le ministre Trudel, c'était ça, l'objectif ? mais c'est encore ça d'ailleurs ? de partager ce qui se fait au Québec, de prendre la photo de la population mais aussi de partager ce qui se fait, et, partir de ce constat-là, d'essayer de dégager des pistes d'action. Donc, c'est un partage... c'est une richesse de pouvoir partager ces projets-là avec l'ensemble.

M. Geoffrion: D'accord.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Chagnon: Non, ça va être le député de Vaudreuil.

La Présidente (Mme Bélanger): C'était M. Paquin avant? Pardon? Vous allez y aller... Ce n'est pas ce qui était marqué, mais en tout cas. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: D'ailleurs, je lui donne ma parole. Ha, ha, ha! C'est bien. Bienvenue, M. Caron, M. Morel, Mme Roy, M. Roy, M. Roy et M. Pelletier. Je ne voudrais pas, vous savez, brimer un ex-président de la Fédération des commissions scolaires, le député de Westmount?Saint-Louis, dans son droit de parole, mais ce ne sera pas très long.

M. Chagnon: Prenez tout votre temps.

M. Marcoux: M. Caron, j'avais peut-être trois petites questions précises, là, à vous poser, qui sont plus des réponses d'information, et j'aurai quelques autres questions un peu plus générales.

D'abord, la première, à la page 9, vous dites: «Toutes les études démontrent que les deux phénomènes de la décroissance et de l'exode dépassent les frontières du Québec et se manifestent dans tous les pays industrialisés.» Je sais que la Fédération a des liens avec d'autres associations scolaires au Canada ou ailleurs. Est-ce que vous avez soit des études ou des analyses qui indiquent des mesures qui auraient été prises ailleurs, justement dans un contexte semblable au nôtre ? peut-être qu'ils ne peuvent pas s'appliquer ici ? mais qui parfois peuvent servir d'inspiration, là, pour apporter des solutions dans notre contexte, à nous?

M. Caron (André): Malheureusement...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Malheureusement... Merci, Mme la Présidente. Malheureusement, dans le temps qui nous a été accordé ? parce que c'est quand même des délais assez courts ? on n'a pas sorti à l'extérieur du Québec, à quelques exceptions près, et on s'est concentrés sur la situation québécoise, et je pense qu'on a assez de richesses dans les modèles québécois pour pouvoir en profiter, l'ensemble. Mais, malheureusement, je n'ai pas de données externes au Québec.

M. Marcoux: Ma deuxième question touche les classes multi-âges. Vous mentionnez, je crois, à la page 10, qu'il y a eu une étude du ministère de l'Éducation qui a été faite en 1992 ? donc il y a 10 ans ? sur le nombre de classes multiâges, bon, au Québec. Est-ce qu'il y a une étude plus à date qui a été faite par le ministère de l'Éducation, selon vous, sur la situation qui existe présentement, en 2002?

M. Caron (André): Je ne pense pas. Je n'en connais pas, en tout cas, personnellement. On me souffle à l'oreille que, non, il n'y en aurait pas. Mais, moi, je prétends que la quantité de classes multiâges a augmenté depuis le temps, compte tenu d'abord de ses effets bénéfiques ? ce n'est pas négatif, c'est bon ? pour les élèves et aussi ? c'est précisé dans le mémoire ? ça se fait même dans des milieux très populeux. Dans le cas d'une surcapacité d'élèves dans une même école, par exemple pour garder les élèves proches de leur quartier, proche de leur milieu, de leur résidence, on va y aller ? ça se fait ici dans la région de Québec, dans ma propre commission scolaire ? où des classes multiprogrammes, multiâges pour conserver les élèves le plus près possible de leur résidence...

M. Marcoux: Je comprends. Donc, selon vous, le ministère n'a pas refait l'étude...

M. Caron (André): Mise à jour? Pas à ce que je sache.

M. Marcoux: ...et non plus du côté de la Fédération, vous n'avez pas de portrait de ce qui existe à cet égard-là au Québec.

M. Caron (André): Malheureusement.

M. Marcoux: Troisième question. À la page 16, vous parlez de la sécurité d'emploi et vous mentionnez que la diminution importante de la clientèle prévue dans les prochaines années pourrait générer des surplus de personnels dans plusieurs commissions scolaires dont le territoire excède une étendue de 50 km, et je pense qu'il y en a un bon nombre, maintenant. Et vous dites également que certaines commissions scolaires se retrouvent déjà dans la situation où elles ont des postes à combler et des employés en disponibilité qui répondent aux qualifications requises. Bon.

Ma question est la suivante: Un, est-ce que vous avez des données sur les commissions scolaires qui se retrouvent déjà dans cette situation paradoxale? Et je comprends que ça implique des coûts. Donc, j'imagine que vous devez avoir des données là-dessus, premièrement. Et, deuxièmement, est-ce que vous avez une sorte, je dirais, de prévision justement pour les commissions scolaires où vous dites, là: On voit qu'il y a une décroissance et on prévoit qu'il y aura des surplus de personnels?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Mme la Présidente, je vais demander à M. Morel d'apporter des... Compte tenu qu'il a vécu le premier... le petit bout de 1980, il va vivre celui-là, il va vous répondre.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Morel.

M. Morel (Réjean): C'est ça. En 1980, 1982, on se souviendra, on a eu 8 000 enseignants en disponibilité au Québec, surtout au secondaire. Il y avait une baisse de clientèle à ce moment-là au secondaire qui coûtait à peu près, je me souviens, en l'année... depuis 1983, 130 millions de dollars. Alors, si on prend ça en argent 2003, là, on peut penser presque 200 millions que ça pourrait coûter.

Et là ce qui nous inquiète beaucoup, le principal problème qui nous inquiète beaucoup, c'est que, là, on est en train de renouveler d'une façon massive nos personnels dans les commissions scolaires, hein? D'ici 2006-2007, on va avoir changé à peu près 60 000 enseignants sur 70 000. On va avoir changé 90 % de nos directeurs d'établissement. Actuellement, on a près de 50 % de nouveaux directeurs et directrices d'établissement, actuellement.

Même chose au niveau des cadres, on s'entend? Donc, un renouvellement massif qu'on se fait. Et on s'en vient, on voit venir le mur, là. Parce que, avec la baisse de clientèles, compte tenu que ces personnels-là, après deux ans, obtiennent la sécurité d'emploi mur à mur, donc... Puis on ne remet pas ça en cause, là, c'est-à-dire que... Mais c'est un peu comme au gouvernement actuellement lorsqu'un fonctionnaire obtient une sécurité d'emploi, la première année, il a le 50 km qui joue, mais, après ça, c'est partout au Québec où on peut l'affecter s'il ne s'est pas trouvé un travail, alors que là, actuellement, on maintient encore, on a encore du monde, une centaine de personnes des années 1983 en formation professionnelle, qui sont encore en disponibilité, depuis 1983. Ça fait 20 ans, puis on fête... ils ont fait leur 20e année, cette année, de sécurité d'emploi.

Et c'est des gens qui sont... On peut difficilement les réaffecter, notamment en formation professionnelle spécialisée en électricité, en mécanique, en coiffure. On peut difficilement les réaffecter dans les écoles. Alors, c'est le premier problème qu'on voit venir, là, rapidement, avec une baisse de clientèle, puis on va passer autour de 180 000 élèves actuellement autour de 800 000, 825 000 qu'on va passer. Donc, on peut penser que d'ici cinq ou six ans on va avoir beaucoup d'enseignants en disponibilité qu'on ne pourra pas réaffecter à cause du 50 km.

n(15 h 10)n

Et déjà ce n'est pas universel, là, c'est quelques cas, là, mais on prévoit déjà... Par exemple, si je prends la commission scolaire des Chic-Chocs, qui part de Sainte-Anne-des-Monts, Cap-Chat jusqu'à l'autre côté de Percé, de Gaspé, c'est peut-être 200 quelques kilomètres de rivage, actuellement. Alors, le 50 km, vous comprendrez que c'est toutes des petites écoles, hein? L'école secondaire de Rivière-au-Renard, qui est construite pour 900 élèves, on en reçoit actuellement à peu près 200 à cette école-là, donc... puis la prochaine, ça va à Gaspé. Donc, le 50 km, rapidement il devient une enfarge importante. Donc, on ne pourra mettre des sous supplémentaires dans ce programme-là qui nous empêche d'être efficaces dans la réaffectation des personnels. Mais, sans remettre en cause la sécurité d'emploi, il va falloir les utiliser au moins sur un territoire de commission scolaire sinon ailleurs dans d'autres commissions scolaires qui sont en demande de candidats.

M. Marcoux: J'aurais une question avant de donner la parole à mon collègue. M. Morel, je connais votre compétence dans les chiffres et les prévisions. Est-ce que présentement vous avez un estimé des coûts, par exemple dans certaines commissions scolaires, là, où il semble qu'il y a des postes à combler puis qu'il n'est pas possible d'en réaffecter d'autres, et, sur les trois prochaines années, selon ce que vous estimez, quels seraient les coûts s'il n'y a pas de changement justement dans les possibilités de réaffectation et si on maintient tel qu'aujourd'hui, là, les critères très rigoureux des conventions collectives?

M. Morel (Réjean): Bon. On n'a pas de relevé ni d'estimé précis là-dessus, là. D'ailleurs, c'est un dossier qu'on essaie de convaincre le Conseil du trésor dans la prochaine ronde des négociations, là, de remettre ça sur la table avec des analyses un peu plus précises qu'on peut le faire.

M. Marcoux: Ça va.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Chagnon: Mme la Présidente, une grande partie de la réponse à cette question-là repose sur le postulat suivant: Combien de profs, combien d'enseignants vont-ils prendre leur retraite dans les années à venir? Parce que ce qu'on a comme chiffres... Puis le prochain intervenant, ce sont des gens du ministère, M. Maheu et puis M. Kouadio Antoine N'Zué, qui vont venir nous parler des statistiques du ministère.

Mais, si je me fie aux statistiques du ministère, en 2002-2003, il y a 57 014 profs réguliers. Donc, si on regarde cinq ans en avance, là, 2007-2008, il en reste 52 154. Ça veut dire à peu près 5 000 profs sur six ans comme enseignants réguliers, là, qui pourraient changer. S'il y a 5 000 profs qui prennent leur retraite, évidemment, c'est un peu plus compliqué dans le secteur secondaire. Dans le secteur primaire, c'est relativement facile de faire l'équation, à savoir s'il y a un prof qui part, tu peux le remplacer. Mais c'est vrai que vous risquez d'avoir un problème de surplus d'effectif s'il y a moins de profs qui partent, qui prennent leur retraite dans les années à venir. Mais vous n'avez pas de données là-dessus?

M. Morel (Réjean): Peut-être préciser, là. Quand vous me parlez de 57 000, c'est des ETC, équivalents temps complet, ça.

M. Chagnon: Oui, oui, oui, absolument, réguliers.

M. Morel (Réjean): On a au-delà de 80 000 enseignants, là, au total, surtout au niveau des adultes, de la formation professionnelle où on a des...

M. Chagnon: J'en ai 73 000 effectivement réguliers temps partiel. Commissions scolaires, réguliers, en 2002-2003, 57 014, temps-partiels, 16 807, pour un total de 73 821.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Bien, j'imagine que c'est vrai si le ministère vous les a communiqués.

M. Chagnon: Si je vous le dis...

M. Caron (André): Si vous le dites, M. Chagnon, ça doit être vrai.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Si je vous le dis... Alors, c'est les chiffres que j'ai. Maintenant, toute la question revient encore à ce que je disais tout à l'heure. Le postulat, c'est de savoir combien est-ce qu'il y en a qui vont prendre leur retraire, et ça, généralement, dans les commissions scolaires, on connaît son personnel. On sait qui approche de la zone du 30, 31, 32 ans d'ancienneté. Alors, il y a M. Roy qui... MM. Roy et Roy.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Roy.

M. Roy (Denis): Oui, si vous permettez, Mme la Présidente, M. Chagnon ouvre une très belle porte, et je vais en profiter. Encore il y a trois semaines, au niveau de l'Association des directeurs généraux, on refaisait la même demande au bureau des sous-ministres. On l'a faite au ministre de l'Éducation, M. Legault, il y a deux ans. Il faut savoir que les commissions scolaires ne connaissent pas le dossier de retraite de leurs employés.

Si vous regardez, ce qu'on appelle souvent une entreprise normale, c'est normal qu'un employeur sache non pas quand l'employé va prendre sa retraite, parce que c'est sa décision personnelle, mais quand il pourrait être admissible à la retraite. Les commissions scolaires ne peuvent pas parce qu'il y a une disposition dans la Loi d'accès à l'information qui fait en sorte que la Commission administrative des régimes de retraite refuse l'accès aux données de nos employés, à moins que l'employé signe ? et la CARRA vient de faire parvenir à nos personnels leur attestation de participation et prend le soin de le faire parvenir à domicile. Or, les commissions scolaires n'ont pas cet outil qui est essentiel en termes de planification de main-d'oeuvre alors que, si on prend, M. Chagnon, simplement sur le plan médical, vous savez les détails qu'on peut avoir sur la santé d'un employé.

M. Chagnon: Ah, je suis d'accord avec vous.

M. Roy (Denis): Mais on ne peut pas savoir à quel moment il peut être admissible à la retraite, et on nous demande de planifier la main-d'oeuvre. Il y a un petit peu une contradiction.

M. Chagnon: Je suis d'accord avec vous, M. Roy. Mais vous savez que tel prof dans telle école chez vous a 12, 15, 18, 25 ou 32 ans d'ancienneté. Vous savez ça.

M. Roy (Denis): Oui. Mais, vous savez, M. Chagnon, qu'entre l'ancienneté puis la reconnaissance de participation au régime de retraite et savoir ne serait-ce que dans quel régime de retraite la personne est...

M. Chagnon: Oui, oui, oui. Ils peuvent être...

M. Roy (Denis): ...on est un peu en aveugles là-dedans. On trouve que c'est anormal.

M. Chagnon: Je vous comprends. Entre le RRF ? entre le RRE dans votre cas ? puis le...

M. Roy (Denis): Le RREGOP, le RRPE...

M. Chagnon: Le RREGOP.

M. Roy (Denis): ...il y a beaucoup de subtilités là-dedans, les années de participation, et on n'a aucune possibilité d'accès, à moins que l'employé dise: Je signe, et vous pouvez avoir accès à mon dossier. On trouve que, comme employeur, on perd énormément de possibilités de planification de main-d'oeuvre, et on ne s'aide pas comme secteur public quand on a cette situation-là.

M. Chagnon: Ceci étant dit, pour revenir dans un autre élément, le ministre, ce matin, est venu nous dire que, depuis les dernières années, on avait bonifié grandement les règles budgétaires du ministère vers les commissions scolaires pour financer justement les opérations de sauvetage et de maintien des écoles de quartier et de dernière école de village. Or, on apprenait en même temps que plusieurs de ces écoles-là avaient été fermées au cours des dernières années. Est-ce que c'est un problème financier? C'est quoi, la cause qui a provoqué ces fermetures-là?

M. Caron (André): Je demanderais à M. Morel, compte tenu qu'il a travaillé dans le nouveau modèle des règles budgétaires, de répondre à la question, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Alors, c'est sûr qu'il y a eu un changement majeur cette année, qu'on a opéré avec le ministère; c'est une des demandes répétées qu'on faisait. D'ailleurs, le colloque de 2000 quand on voulait alerter les gens, on l'a fait en partenariat avec le ministère des Régions et non pas avec le ministère de l'Éducation.

Alors, on avait quand même un pas à franchir important, et on a modifié les règles, puis, comme une première étape, en reconnaissant des montants de base par commission scolaire pour différentes activités, notamment les activités administratives, les activités reliées aux équipements scolaires ou reliées aux écoles, donc une reconnaissance des montants de base. Donc, c'est un premier pas en disant: On convient d'établir des coûts fixes puis des coûts variables. Mais on a demandé des études puis on n'en a jamais eu, là; c'est vraiment un coût fixe.

Par exemple, une commission scolaire de 6 000 élèves ou de 10 000 élèves, bien, on demande un paquet de réglementation, ça prend des comptables, ça prend des D.G., ça prend... On n'est jamais capables d'avoir des études précises pour établir le montant comme tel. Et il y a encore quand même, je vous dirais, peut-être 80 % du modèle qui est encore basé sur un modèle montant par élève, donc qui va l'affecter. C'est pour ça qu'on demandait dans nos recommandations d'y aller graduellement, pas tout d'un coup. Mais, lorsqu'on a 10 000 élèves de moins par année, bien, on retourne au Trésor les sommes. Donc, il n'en reste plus qu'une partie pour les réinjecter dans les montants de base, bonifier ces choses-là.

Si je reviens au niveau des écoles, il y a deux prétentions que le ministère dit puis qu'on n'est pas tout à fait d'accord là-dessus. La première ? et même Solidarité rurale dans son mémoire en parlait: Est-ce que le ministère finance correctement les enseignants dans les écoles? Parce qu'il y a un modèle qui va lier l'organisation de chacune des écoles des commissions scolaires. Or...

M. Chagnon: On parle du ratio, là.

M. Morel (Réjean): Oui. Or, on oublie qu'il y a une ligne du bas dans la réglementation de 1998 à laquelle j'ai contribué ? malheureusement, maintenant. On y indique que, un coup qu'on a quantifié le nombre d'enseignants dans les commissions scolaires, on vient couper 73 millions dans le réseau en termes d'équilibre budgétaire gouvernemental. Ça veut dire, ça, 1 500 enseignants, hein, qu'on vient couper. Alors, même si on prend en compte l'organisation puis les petites écoles puis tout ça, à la fin, on met une ligne du bas en disant à telle commission scolaire: Sur 1 000 élèves, on t'en enlève 25.

M. Chagnon: C'est un demi-prof par école au Québec.

M. Morel (Réjean): C'est ça. Alors, c'est à peu près 2 %, ce qui veut dire que... C'est pour ça qu'on dit que les commissions scolaires doivent resserrer souvent l'organisation pédagogique dans les grosses écoles pour pouvoir maintenir les services dans les petites écoles. Ça, c'est une grosse dépense éducative.

L'autre élément qu'on parle, c'est au niveau du fonctionnement des écoles. Quand je parle du fonctionnement, c'est en partie réparations, électricité, chauffage, c'est le gardiennage et entretien ménager, et c'est une dépense de 547 millions par année, 500 $ par élève, dans les commissions scolaires. Or, on se souviendra, quand on a mis ça dans la taxe scolaire, en 1991 avec M. Ryan, on avait dit 310 millions pour ça qui, aujourd'hui, si je l'indexe, là, tombe autour d'à peu près 400 millions, et il y a une mesure particulière, pour maintenir les écoles du ministère, de 31 millions. Ça fait 430 millions. On en dépense 447.

Une voix: 547.

n(15 h 20)n

M. Morel (Réjean): 547. Donc, on autofinance une centaine de millions pour maintenir l'ensemble de nos superficies. On a 15 millions de superficie dans les commissions scolaires pour nos équipements, et, si on reconstruit tout en neuf puis on maximisait tous nos élèves dans les écoles, là, les plus grosses écoles, on aurait comme 2 millions, 2,2 millions de mètres carrés de trop qu'on supporte et qu'il faut financer, puis ça, ce n'est pas financé, ça. Donc, c'est pris à même, là... Vous vous souviendrez que, dans le réseau scolaire, à même l'ancienne taxe du 0,25 $, c'est financé à même ça, alors que c'était prévu pour des projets pédagogiques propres aux écoles puis aux commissions scolaires.

M. Chagnon: Avez-vous déjà réclamé une augmentation de votre... pour lever le plafond de taxation justement pour vous permettre de pouvoir financier ces activités-là?

M. Morel (Réjean): On avait abordé la question dans la commission sur la fiscalité municipale, la commission Bédard, notamment. Bon. Mais ce n'est jamais populaire ? et vous êtes bien placé pour le savoir ? une augmentation de taxe. Donc, ça a eu l'effet du moment, puis, à ce moment-là, on est passé à autre chose.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. M. le président, messieurs, madame, peut-être un élément de précision dans un premier temps. Ma question s'adressera à Mme Roy. Vous êtes du Témiscamingue, je crois. De quel village ou de quelle municipalité exactement? Parce que vous êtes une citoyenne, vous êtes ici à titre de citoyenne. C'est ça?

Une voix: Présidente...

Mme Roy (Anny): Je suis ici...

Mme Normandeau: Présidente?

Mme Roy (Anny): ...à titre de présidente de la commission scolaire Lac-Témiscamingue.

Mme Normandeau: Ah! Excusez-moi. Pardon. Je suis désolée. Alors, la commission scolaire, quel est le nom de la commission scolaire que vous représentez?

Mme Roy (Anny): Du Lac-Témiscamingue.

Mme Normandeau: Du Lac-Témiscamingue. Il y a plusieurs évidemment écoles dans votre secteur qui sont...

Mme Roy (Anny): Je n'ai pas entendu, on me parlait.

Mme Normandeau: Il y a plusieurs écoles qui sont hypothéquées dans votre secteur, hein?

Mme Roy (Anny): Oui, plusieurs.

Mme Normandeau: Rémigny, Angliers, Moffat. Ça, c'est dans votre commission scolaire?

Mme Roy (Anny): Oui.

Mme Normandeau: Bien. Ma question, Mme la Présidente, s'adresserait ? merci, Mme Roy ? à M. le président, M. Caron. Évidemment, mon collègue le député de Groulx vous a interpellé ce matin sur votre réaction ? évidemment, on a eu l'occasion de lire ce matin, dans le journal ? relativement à la suggestion, que nous avons formulée, que la Fédération québécoise des municipalités est venue formuler ce matin, sur la nécessité d'avoir un moratoire sur les fermetures d'écoles de village.

Et le député de Bellechasse, qui, malheureusement, bon, a certainement d'autres occupations à l'heure où on se parle, ce matin a fait référence à la dynamique ? et je partage tout à fait son point de vue ? à laquelle souvent les parents sont confrontés sur le terrain. Et la dynamique est la suivante: C'est que les parents, souvent, en fait, ont carrément une partie de bras de fer, entretiennent des parties de bras de fer souvent avec les commissions scolaires pour ce qui est du maintien de leur école de village. Il y a une dynamique de confrontation qui n'est absolument pas saine, qui est malsaine en fait et qui favorise non pas l'harmonisation mais la confrontation.

Et je dois vous dire que les parents sont un peu désemparés devant la rigidité des commissions scolaires qui, elles, souvent, évoquent des contraintes d'ordre administratif, comptable qui font en sorte que les commissions scolaires... Enfin, l'image qu'on reçoit ou les difficultés qu'on reçoit des commissions scolaires, c'est: Écoutez, on n'a pas la marge de manoeuvre financière disponible ou nécessaire pour permettre justement de répondre à l'inquiétude souvent des parents.

Et ce matin la Fédération des commissions scolaires, à la page 9 de son mémoire, puis vous me permettrez de citer, parce qu'ils n'y sont pas allés avec le dos de la cuiller, là, puis je pense qu'ils ont assez bien traduit... Puis, en passant, le mémoire qui a été déposé a été fait à partir d'un sondage qui a été effectué dans 183 municipalités.

Alors, la Fédération québécoise des municipalités dit la chose suivante: Il est important d'abolir l'établissement de critères arbitraires édictés par les commissions scolaires pour décider des fermetures d'écoles. On parle de critères arbitraires.

Moi, je représente un comté qui s'appelle le comté de Bonaventure, en Gaspésie; donc la commission scolaire René-Lévesque est la commission scolaire du territoire. Et l'inquiétude des parents, dans plusieurs dossiers de la commission scolaire, elle est palpable, puisqu'on est interpellés comme élus, comme députés. Et ce qu'on sent, c'est vraiment une énorme frustration de la part des parents face à une commission scolaire qui, effectivement, souvent, amène comme prétexte des règles financières, une marge de manoeuvre insuffisante pour répondre à leurs besoins puis des normes qui sont imposées par le ministère de l'Éducation qui font en sorte qu'il y a une rigidité face à laquelle les parents n'ont pu aucune marge de manoeuvre. Ils ne savent plus trop à quel saint se vouer si la commission scolaire leur refuse, par exemple, leur soutien pour ce qui est du maintien de l'école de village. Alors, naturellement, les parents se tournent vers le ministre de l'Éducation, vers les députés.

Alors, vous avez invoqué, par rapport au moratoire sur les fermetures d'écoles de village, le fait que les commissions scolaires sont des entités autonomes. Vous avez évoqué la question de votre juridiction. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que, là, je vous livre un message qu'on entend, nous, sur le terrain, que les parents nous livrent avec beaucoup d'émotion. Et je dois vous dire qu'on est très sensibles, comme élus, face à des situations comme celle-là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Je vais réagir, dans un premier temps, sur l'article de ce matin pour le contexter. Je ne veux pas dire que j'ai été cité hors contexte, là, loin de là, O.K.? C'est que, face à un autre comité qui s'appelle le Comité du maintien des écoles, formé par le ministre de l'Éducation, ministre des Régions, M. Trudel, où je suis membre ? un des six membres, dont la FQM est membre ? on avait convenu, la semaine dernière, de se donner une image de ce qui se passe au Québec au niveau du quantitatif, du nombre d'élèves, de ce qui se fait. Chaque membre a ça comme mandat actuellement, et la FQM aussi a ça comme mandat, d'apporter à ce comité-là ? appelons-nous, pour se comprendre, le comité Proulx-Caron ? d'apporter les statistiques, d'apporter ce qui se fait et ce qui s'est fait dans les 10 dernières années pour maintenir les écoles de village, O.K.?

Et vous comprenez ma stupéfaction hier matin quand je vois que la FQM, déjà, a la réponse finale du Comité. C'est ça mon étonnement; ce n'est pas sur nécessairement le moratoire, même si je suis contre le moratoire, parce que, pour moi, c'est de démobiliser tout ce qui se passe au niveau des commissions scolaires et des milieux qui sont en recherche de solutions. Parce qu'un moratoire, c'est un statu quo, et, à ce moment-là, tout le monde, si vous me permettez l'expression, Mme la Présidente, tombe au neutre, puis là, il n'y a plus rien qui se passe. On attend quoi? On ne le sait pas trop, trop; on attend que quelqu'un prenne une décision à notre place. Donc, le moratoire, ce n'est pas une recherche de solutions, et c'est pour ça d'ailleurs qu'on propose des modèles dans le mémoire d'aujourd'hui. Juste pour contexter l'article de ce matin et ma couleur donnée par Le Soleil.

Sur les autres points de vue que vous avez, je ne suis pas capable de commenter si, dans votre commission scolaire, l'harmonie, à quel niveau elle peut se situer entre la commission scolaire et les écoles. Mais je sais, et M. Pelletier pourrait en témoigner... Si lui, dans son milieu, par exemple, il y a 15 ententes scolaire-municipal puis que ça fonctionne, ça veut dire qu'en quelque part il a parlé à quelqu'un, il a parlé à du monde, et puis ça s'est fait dans l'harmonie, et les gens sont heureux, parce qu'ils ont constaté qu'avec un nombre d'élèves peut-être insuffisant...

Prenons un exemple pour bien se comprendre. Si, dans une année x, une commission scolaire ou un village s'amène avec trois élèves en maternelle, on peut comprendre que c'est compliqué. Donc, il y a une recherche de solutions où le milieu, le conseil d'établissement, la commission scolaire vont s'asseoir, les directions d'établissement, les dirigeants de la commission scolaire, et dire: Qu'est-ce qu'on fait maintenant? C'est quoi, la meilleure solution pour ce milieu-là? Et je pense que Mme Roy l'a fait, cet exercice-là, notamment avec plusieurs municipalités, dans son coin.

Donc, je pense que l'harmonie, là... il faut nuancer un petit peu les propos, parce que, dans mon livre à moi, ça se fait en harmonie dans beaucoup de secteurs.

Mme Normandeau: Oui, je comprends, M. le président, et je ne dis pas que ça ne se fait pas, là, au contraire. Mais je vous interpelle par rapport aux frustrations qui sont vécues par les parents, et je veux savoir si, évidemment, dans le fond ? parce qu'on est tous à la recherche de solutions ? par rapport, évidemment, à des arguments qui sont souvent invoqués par les commissions scolaires à l'effet qu'elles ont un cadre budgétaire qu'elles doivent respecter, elles ont un budget bien précis, elles ont des normes souvent très rigides, imposées par le ministère de l'Éducation, qui font en sorte que les parents se butent à un mur et qui est une source qui génère évidemment des frustrations et des inquiétudes, quand même, qu'on n'invente pas; le député de Groulx en parlait encore, ce matin. Ce qu'on peut dire, M. Caron, c'est que, oui, heureusement, il y a certains milieux, ça va bien, mais il y en a d'autres où les gens sont plus inquiets. Je pense que vous ne pouvez pas nier ça.

Mais, en même temps, puisqu'on est à la recherche de solutions, la contribution de la Fédération des commissions scolaires aux travaux de la commission... Par rapport à une situation comme celle-là, alors, qu'est-ce qu'on pourrait changer? Si vous êtes contre l'idée du moratoire, pour permettre dans le fond de préserver au maximum l'ensemble des écoles de village au Québec, alors quelle proposition vous nous faites? Il y en a une série qui sont édictées. Par exemple, le ministère de l'Éducation devrait assouplir davantage ses normes?

Le moratoire, en passant, M. Caron, je vais vous livrer notre vision, parce que la suggestion a été rendue publique par moi et mon collègue qui est assis ici, à ma droite. L'idée d'un moratoire, en fait, quand on parle de statu quo, ce n'est pas d'avoir un système qui est au neutre. Au contraire, c'est de sécuriser la population, les parents, parce que, évidemment, avec un moratoire, on va avoir un horizon bien déterminé, bien précis dans le temps qui va nous permettre justement de travailler à la recherche de solutions. Il y a déjà des solutions qui ont été identifiées, il y a des projets novateurs qui ont vu le jour. Tant mieux! Mais les projets novateurs qui ont vu le jour s'expriment à échelle variable, en fonction des besoins des milieux.

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est que le moratoire annoncerait une orientation gouvernementale ferme, claire, en respect, bien sûr... En fait, on ne s'érige pas contre l'autonomie des commissions scolaires. Au contraire, ce qu'on souhaite, c'est, avec les commissions scolaires qui sont un partenaire évidemment majeur, travailler à l'élaboration de solutions qui sont durables dans le temps.

Alors, je voulais quand même... Si vous avez fait une mise en contexte pour l'article de ce matin, je tenais évidemment, à notre tour, à vous faire une mise en contexte qui fait en sorte qu'on a proposé l'idée d'un moratoire, compte tenu des nombreuses inquiétudes qui s'expriment sur le terrain. Alors...

La Présidente (Mme Bélanger): Trente secondes, M. Caron.

n(15 h 30)n

M. Caron (André): Bon. Bien, c'est parce que j'aimerais, Mme la Présidente, faire témoigner Mme Roy, M. Pelletier et M. Roy justement sur la perception qu'il peut y avoir dans les comtés ou dans les régions face au processus. Si vous permettez, Mme la Présidente, Mme Roy, dans votre processus de consultation, au niveau des milieux, que vous avez élaboré et la réception que vous avez reçue des parents au niveau des écoles...

Mme Roy (Anny): C'est ça, on remet en cause des services dans notre commission scolaire. On a fait le processus que j'ai dit tantôt, et c'est relativement bien reçu de la part des parents, et on retourne en deuxième étape avec une partie de solution, aller échanger avec les milieux.

Et j'aimerais revenir sur le fait que vous disiez: C'est surtout des choses administratives qui font en sorte qu'on remet en question...

Mme Normandeau: Les parents, je crois, qui se butent à...

Mme Roy (Anny): ...qui disent ça. Nous, dans nos milieux... Bon, vous devez connaître notre territoire ? c'est à la page 28, là, du document ? ...

Mme Normandeau: Oui. Oui, tout à fait.

Mme Roy (Anny): ...on est un milieu très étendu, avec plusieurs petites écoles. Il y a un phénomène... il y a plusieurs phénomènes. Je parlerai, entre autres, d'un qui fait terriblement mal, c'est celui de la difficulté de rétention des professeurs dans ces secteurs-là. C'est souvent des écoles avec seulement deux classes, donc deux enseignants. Il n'y a pas de directeur d'école, à part une journée, peut-être par semaine. Il n'y a pas de secrétaire non plus, il y a des téléphones dans les classes pour que les professeurs puissent répondre aux appels. Et puis c'est des jeunes enseignants qui sont là, qui se retrouvent là parce qu'on n'a pas de professeurs avec une certaine ancienneté ou une certaine connaissance qui veulent aller dans ce milieu-là parce qu'ils se sentent très isolés. Ils ne sont que deux enseignants, des ressources spécialisées qui passent à la miette en facteur, si on peut dire. C'est ça qui fait en sorte qu'on a de la difficulté à retenir des profs là, et à chaque année pratiquement on change tous les profs. Ça fait qu'à ce moment-là ça devient très difficile. Et, nous, on le met en contexte, ça, quand on aborde les parents et qu'on dit qu'on remet en question certains services, ce n'est pas que du administratif, cette difficulté d'organisation là, qu'on le jase avec eux autres.

Mme Normandeau: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Je pense, d'entrée de jeu, qu'il y a des expériences intéressantes qui se font un peu partout dans le territoire, et ça, je pense qu'il faut le reconnaître. Cependant ? et je veux simplement reprendre les propos de ma collègue ? je puis vous dire, moi, que, comme porte-parole de l'opposition, j'ai reçu beaucoup de lettres, des représentations de parents, beaucoup d'autres collègues, disons, ont vécu la même chose. Alors, je veux tout simplement vous indiquer que ce n'est pas, là, je pense, limité, très, très limité, il y a des problèmes, je pense. Et je comprends que c'est très émotif aussi et que les parents veulent que leurs enfants, souvent, bien, continuent d'aller à l'école, et c'est important pour le village aussi. Je viens d'un milieu rural, moi, et c'est important, ça, pour le village, l'école.

L'idée ? et c'est pour cette raison-là que, dès le début de 2001, nous avions proposé ici qu'une commission parlementaire de l'éducation tienne des séances sur le phénomène de décroissance et de croissance des clientèles scolaires ? ce que je remarque ? et vous avez un excellent mémoire en passant, je voudrais vous féliciter pour la qualité du mémoire ? je voudrais faire deux réflexions. D'une part, vous faites un certain nombre de recommandations, qui sont, en résumé, très bien préparées, à la fin du mémoire. Ce que je note là-dedans, c'est évidemment que ces recommandations touchent des actions que le gouvernement doit prendre. Vous dites: Le gouvernement doit faire ci, le ministère de l'Éducation doit faire ça. Je retrouve peu ? et là je ne vous le dis pas négativement ? de choses: Et les commissions scolaires pourraient faire ça. Comprenez-vous, là? Le gouvernement, le gouvernement, le ministère, le ministère, mais les commissions scolaires pourraient faire ça.

Deuxièmement, vous avez accepté ? et je vous en félicite, d'ailleurs ? la coprésidence, M. le président, d'un groupe de travail sur le maintien des écoles que le ministre a formé au mois de juin. La commission parlementaire, à ce moment-là, était acceptée depuis le mois de mai, la politique sur la ruralité était déposée depuis le mois de décembre. Bon, le ministre a formé un comité au mois de juin, puis je pense que je vous félicite de votre nomination.

Mais ma question, c'est la suivante: Est-ce que vous êtes optimiste qu'il va être possible, en l'espace d'un mois ? parce que je comprends que c'est pour le mois de novembre, là, qu'on demande le rapport, du moins d'après le communiqué qui a été émis hier ? d'arriver avec un plan d'action, un plan stratégique, pas seulement des actions à court terme, mais des avenues qui auront un impact à court, moyen et long terme, et notamment, parce que c'est très important ce que vous mentionnez, tout ce qui touche les conditions de travail et les normes administratives, les rigidités dans la réaffectation du personnel? Vous dites: Un enseignant ne peut pas même agir partiellement comme directeur d'école, etc. Donc, ça me paraît comme étant des conditions, ça, importantes. Est-ce que vous dites: Le comité que je copréside arrivera avec des stratégies à moyen et long terme, là, selon lesquelles les parents, puis les écoles, puis le milieu, pas seulement les commissions scolaires, mais également les municipalités, les autres intervenants connaîtront les règles du jeu et les stratégies? Et ça, je pense que c'est extrêmement important.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): M. le député, ici, je vais apporter une précision face au comité qui est sorti hier, parce que, ayant participé et même présidé, à ce moment-là, le dernier comité du maintien des écoles, qui date d'à peu près une dizaine de jours, à l'unanimité ? pas consensuel, à l'unanimité ? les membres, on a convenu que la date du rendez-vous des régions de novembre n'était pas réaliste pour mener à bien nos travaux et que ce serait plutôt en fin d'année 2002, en décembre que serait déposé le rapport final, il y aurait un rapport de fait aux ministres Simard et Trudel au niveau des rendez-vous des régions, mais non loin d'être un rapport final, un rapport d'étape. Et, on n'a même pas décidé si ce serait un rapport écrit, ça pourrait même aller jusqu'à un rapport verbal. Donc, on ne s'est pas donné comme objectif d'escamoter une facette quelconque des travaux de ce comité-là avec une date butoir de novembre, c'est irréaliste. On a mis ça en décembre et on a même convenu de réviser cette date-là, si on s'aperçoit que ce n'est pas réaliste puis qu'on n'a pas tout creusé la question, puis de le mettre en 2003 s'il fallait. Rectification sur les dates. Ça, ce n'est pas public nécessairement, c'est un comité restreint, et je vous donne l'information.

Juste pour peut-être nuancer quelques propos qui viennent d'être tenus, qu'est-ce que les commissions scolaires font? Bien, vous avez l'annexe IV qui vous dit qu'est-ce que les commissions scolaires font puis qu'est-ce que les écoles font. Et ça, là, dans le peu de temps qu'on a eu... Si on avait eu plus de temps, on aurait encore plus que ça de ces exemples-là. Donc, je pense que notre bonne volonté à maintenir les écoles est très bien exprimée là-dedans.

Et aussi, pour répondre à Mme la députée, qu'est-ce que nous proposons? Vous avez, en page 29, la recommandation générale où on amène un nouveau modèle d'organisation des écoles. On a appelé ça... Pour les besoins de la cause, ça pourrait être baptisé, si le besoin s'en fait sentir, une école-centre ou une école réseau qui serait en lien ou responsable d'écoles satellites plus petites dans une certaine région géographique d'une commission scolaire. Il pourrait y avoir une, deux ou trois de ces écoles-ressources-là avec des personnels non enseignants supplémentaires, avec du personnel de soutien supplémentaire, avec des liens et des conventions collectives un petit peu déboulonnés, à savoir, par exemple, qu'un enseignant pourrait être enseignant et gestionnaire un petit peu en même temps pour un pourcentage de tâche, en lien avec l'école-ressource, des liens Internet, des équipements informatiques pour donner la qualité de service aux écoles satellites, la même que les écoles-ressources.

Quand vous dites qu'on n'apporte pas d'éclairage à la... Je ne dis pas que c'est la solution idéale, parfaite, on pense que ça mérite d'être au moins analysé. On demande des sommes d'argent pour réaliser ce modèle-là et laisser aux commissions scolaires le soin de la peaufiner et de l'ajuster à leur réalité et géographique et de la clientèle de leur territoire.

La Présidente (Mme Bélanger): Dernière question.

M. Marcoux: Dernière question, Mme la Présidente. M. le président, évidemment, la commission, ici, va entendre les divers intervenants. Il y a beaucoup de groupes, donc ça démontre qu'il y a un intérêt. Il y a beaucoup de personnes qui sont interpellées par ce phénomène-là. Et, si après avoir entendu ici tous les groupes et avoir discuté au niveau de la commission parlementaire ? parce que c'est vraiment une commission non partisane, et je pense que ça, c'est important ? nous jugions qu'il pourrait être intéressant de vous rencontrer à titre de coprésident avec votre autre coprésident de comité, parce que vous êtes en train de faire du travail où il y aura des données qui pourront nous être utiles ici, pensez-vous que ce serait possible de le faire?

M. Caron (André): Moi, j'ai toujours, je pense, une approche de solution. J'ai toujours dit que les commissions scolaires, on faisait partie de la solution, qu'on ne faisait pas partie du problème, et je le maintiens. Et si, pour trouver des solutions, il est nécessaire qu'on se reparle, à n'importe quel titre, moi, je n'ai pas de problème là-dessus.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Caron.

M. Caron (André): Mme la Présidente, M. Morel voudrait ajouter un élément d'information, s'il vous plaît.

n(15 h 40)n

M. Morel (Réjean): Peut-être au niveau des moratoires, on considère, nous autres, le moratoire comme du mur-à-mur au gouvernement. Puis on a des exemples qu'il s'est fait des choses au cours des dernières années, là... Je vais vous donner celui-là, le plus récent, moratoire sur les porcheries, là. On a des entreprises qui pourraient s'établir au Témiscamingue pour faire du promiscuito. Ils ne sont pas capables de s'établir actuellement ? ils ont des dizaines de millions à investir ? à cause du moratoire.

On vit la même chose... Notre-Dame-du-Lac. Des entreprises voudraient remplacer DuBreton, mais ils ont des problèmes par rapport à ce moratoire-là. Un moratoire, c'est mur à mur. Le discours gouvernemental, c'est que les régions se prennent en main, que les localités se prennent en main, mais on fait toujours des mesures mur à mur, la norme bien souvent gouvernementale tout le temps, pour que tout le monde fonctionne la même affaire. Et, dans bien des cas ? la majorité des cas, qu'on me dit ? avec les parents, au niveau des services, ça a été attaché, et c'est quand que le monde municipal, au plan politique, viennent mettre leur doigt là-dedans que là ça prend une éclosion différente. Il faut voir ça aussi, hein, dans toute cette démarche-là, parce que, la plupart du temps, avec les parents, c'est toujours bien attaché, et puis, les consultations, ils sont d'accord avec les processus.

Puis ce n'est pas nouveau, ça, ce système-là. Actuellement, là, on a 270 municipalités qui n'ont pas d'école. Je suis dans une municipalité qui n'a pas d'école, moi, puis ma municipalité a pris 200 habitants de plus depuis 10 ans, et je demeure à l'Île-d'Orléans. 270, ça, c'est après les fusions, là. C'était 350, voilà deux ans, municipalités sans école. Puis on a fait le recensement de la population de ces municipalités-là, et M. Roy l'a fait dans sa commission scolaire dans la Beauce, et, dans la plupart des municipalités, ce n'est pas vrai, ils n'ont pas diminué de population comme tel, donc...

Et souvent, la dernière école de village, qu'est-ce qu'on fait quand... On avait un article justement dans le journal en fin de semaine sur les fabriques. Dans la ville de Québec, de 28 fabriques, on est passé à 10. Chez nous, à l'île d'Orléans, on est passés de six à deux fabriques. C'est le même niveau de services un peu qu'on peut se donner à un autre niveau. Au niveau des caisses populaires, des bureaux de postes, des commerces d'alimentation, c'est la même situation. Mais, on arrive à l'école, c'est un peu plus émotif, c'est comme un symbole où on arrive avec, là, des problèmes particuliers. Alors, c'est un peu ce que je voulais rajouter dans le débat, mettre un petit peu de bois dans le poêle.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci. M. le député de Saint-Jean, cinq minutes.

M. Paquin: Merci, Mme la Présidente. Au niveau du problème de la fluctuation des clientèles, il n'y a pas que la question des dernières écoles de village et de quartier, et on cible beaucoup là-dessus. Quand on a donné le mandat à la commission, c'était vraiment pour examiner l'ensemble des fluctuations, ses causes, comment intervenir de façon idoine et faire en sorte de faire le plus possible de judo avec cette situation-là et d'avoir des bonnes stratégies.

Maintenant, le mandat que le ministre a donné au comité est beaucoup plus sectoriel, il s'adresse à cette problématique des écoles, des dernières écoles, et tout ça, et je pense qu'il est correct que vous ayez un agenda là-dessus qui... vous avez un problème à solutionner, vous êtes axés là-dessus et qu'il n'y a pas lieu nécessairement que tous les rendez-vous de l'automne arrivent en même temps. Mais, par contre, le nôtre nous amène à discuter plus large que juste cette problématique-là, et moi, je vous dirai que, quand j'examine l'ensemble de la question des fluctuations de clientèle à ce moment-ci, ça vient de trois types de paramètres.

Il y a la dénatalité qui fait en sorte que l'effectif de jeunes disponibles pour les études ou pour tout le reste est plus bas qu'il ne pourrait être si notre taux de natalité était plus près du taux de renouvellement de la population, ce qui n'est pas le cas. Bon, ça, c'est le premier point, la dénatalité. Deuxième point, les déplacements. Les déplacements qui viennent faire en sorte que, de certaines régions du Québec, on migre vers d'autres, ou, parce que certains services ne sont pas disponibles à un endroit, on va les chercher ailleurs, ou encore dans une même commission scolaire, parce qu'il y a des édifices de libres à un endroit puis un accroissement de population à l'autre, on déplace des jeunes d'un endroit à l'autre. Ça, c'est le deuxième type. Donc, dénatalité et déplacements. Et le troisième, c'est qu'il y a des gens qui devraient être aux études qui n'y sont pas parce qu'ils ont décroché, c'est le décrochage, hein? Donc, moi, dans mon esprit, il y a trois grands segments auxquels adresser notre réflexion: dénatalité, déplacements puis décrochage.

Alors, dénatalité, je pense que c'est un point que je mets de côté pour le moment et je regarde ce qu'on peut faire concernant les déplacements et concernant le décrochage. Donc, soyons positifs par rapport à persévérance scolaire et par rapport à l'offre de services dans le milieu où les gens se trouvent. Alors, du côté de la persévérance scolaire, si tous les jeunes qui seraient censés être aux études y étaient, jusqu'à quel point il y aurait des baisses d'effectifs par rapport à la situation actuelle? Si, pour toutes les entreprises, toutes les industries qui ont des besoins de main-d'oeuvre à ce moment-ci, les personnes qui ne sont pas qualifiées, mais qui pourraient l'être étaient en train d'étudier et de se former à ces emplois-là, jusqu'à quel point ça influencerait la baisse de clientèle actuelle? Donc, simplement ce volet-là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Caron.

M. Caron (André): Bon, sur le décrochage, Mme la Présidente, c'est surtout au secondaire qu'on retrouve ça. Au primaire, donc, le problème qu'on vient de parler depuis une heure et demie au niveau des petites écoles de village, c'est quasiment pas présent, sauf dans les écoles secondaires. Donc, le décrochage, au secondaire. Et, là-dessus, il y a des programmes gouvernementaux, dont Agir autrement, dans les milieux défavorisés où il y a des sommes d'argent qui ont été injectées pour essayer d'améliorer la vie de l'école et motiver les jeunes à rester à l'école. Donc, ça, là-dessus, la lutte au décrochage, je pense que c'est un objectif qu'il faut toujours avoir dans nos cartons. Il va toujours y en avoir, et on essaie de le diminuer le plus possible.

Quant à la fluctuation de clientèle en croissance, on a l'avantage d'avoir un directeur général d'une commission scolaire qui vit la croissance chez eux, M. Denis Roy, et je pense qu'il pourra peut-être aborder la question plus pertinemment.

M. Roy (Denis): Bien, peut-être que je vais vous parler, si vous permettez, de croissance et de déplacement. Je disais tout à l'heure d'entrée de jeu que dans beaucoup de commissions scolaires, maintenant, les phénomènes sont mixtes. Alors, la commission scolaire des Affluents, on est à l'est de Montréal, Mascouche, Terrebonne, Repentigny, donc en banlieue. C'est une commission scolaire encore en légère croissance, 1 % d'augmentation de clientèle cette année. Par contre, 668 élèves en septembre, cette année, de moins au préscolaire et au primaire et 1 032 de plus au secondaire. Alors, vous voyez, là, le déplacement de besoins de locaux, le déplacement de besoins budgétaires aussi. Et, par contre, en même temps, on a dans la même commission scolaire cette année ? et je vais vérifier ? c'est ça, 590 élèves du primaire qui ne peuvent pas fréquenter leur école de quartier, qu'on a dû déplacer parce que, dans certains secteurs, les écoles sont archipleines, alors que la population est là, mais, dans d'autres secteurs, pour parler de Repentigny, secteur ouest, secteur est, il y a des écoles vides dans un secteur et des écoles qui sont en surcapacité de l'autre. Et ce n'est pas évident de convaincre les parents qu'on peut les déplacer comme ça. Puis, là on ne parle pas de 20 km, on ne parle pas du village d'à côté, là, on parle de la même ville, mais on parle de réalités géographiques, socioéconomiques différentes, puis on parle à ce moment-là du milieu de vie des enfants, là.

C'est des situations comme ça qui se vivent de plus en plus dans des commissions scolaires en croissance, en plus du manque de locaux, là, qui peut être généralisé. Mais on vit des phénomènes mixtes à l'heure actuelle à l'intérieur des mêmes organisations. Et, je prends l'exemple de la commission scolaire des Affluents, il y a d'autres exemples qui peuvent venir. M. le député de La Prairie parlait tout à l'heure des Grandes-Seigneuries. Bien, si on regarde les prévisions de clientèle, c'est sûr qu'il se prépare, pour d'ici quatre ou cinq ans, aux Grandes-Seigneuries aussi un déplacement de clientèle. Et ça ne fera pas en sorte qu'on va avoir moins de déplacements d'élèves au primaire, parce qu'il y a des quartiers puis il y a des municipalités où il y a surutilisation des locaux. Alors, ce sont des problématiques importantes, là.

M. Paquin: Si on prenait la première partie... Si tous les étudiants au secondaire ou à l'éducation des adultes étaient actuellement présents là où ils devraient être, c'est-à-dire en train de se former, il y aurait combien de pour cent de plus de clientèle au niveau secondaire à ce moment-ci?

M. Roy (Denis): Écoutez, la moyenne au Québec, je pense, les derniers chiffres, c'est de l'ordre de 28, 29 %, là. C'est inégal au Québec, le pourcentage de décrocheurs. C'est bien sûr que si on les mettait tous dans les écoles, bien c'est peut-être, je ne sais pas, 80 000 élèves, là, rapidement, de plus. Si je prends la commission scolaire chez nous, au niveau du secteur secondaire, bien ça serait probablement 1 500 élèves si on était à 100 % de présence, là.

M. Paquin: Donc, ne serait-ce que sur le plan...

M. Roy (Denis): Mais ça ne change rien à la problématique, laquelle je vous parlais, au primaire, là.

M. Paquin: M. Pelletier, vous vouliez ajouter quelque chose?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Pelletier.

M. Pelletier (Serge): Bien, c'est plus en fonction... Il faut dire que, quand on parle de décrochage, il faut tenir compte de certaines réalités. On a des gens qui n'obtiendront jamais de diplôme et qui ne se qualifieront pas au niveau de diplômes ministériels, mais ils vont quand même chercher de la formation au niveau des écoles secondaires. On pense, par exemple, à des formations comme des cheminements continus, on pense aussi à ISPJ ou à d'autres types de formation comme le volet II semi-spécialisé. C'est des gens qui ne vont pas chercher nécessairement un diplôme d'études secondaires ou un diplôme d'études professionnelles, mais qui vont quand même chercher, je dirais, une qualification qui n'est pas toujours ministérielle, mais qui est une forme de qualification quand même.

M. Paquin: Mais il reste qu'il y a quand même là un pourcentage important de clientèle qui est potentiel. Compte tenu du peu de temps que j'ai, j'aimerais peut-être passer à un autre aspect. C'est que dans les déplacements, par exemple, il y a toute la question des gens qui se déplacent d'une région vers une autre ? on ne parle pas à l'intérieur du même commission scolaire, là ? et ça, ça vient, nous dit-on... Ce matin, on a parlé beaucoup d'une espèce de planification du territoire, d'une vision de l'occupation du territoire québécois, d'une certaine façon d'habiter les régions et, bon, de responsabilités qui, cette fois-là, sont moins de l'ordre de la pédagogie ou de l'administration scolaire comme telle, mais du développement des régions ou encore de la mission municipale.

n(15 h 50)n

Sur la question, là, d'une stratégie nationale d'occupation du territoire, vous réagissez comment à des propos qu'on a entendus aujourd'hui à l'effet qu'il y aurait là quelque chose d'important si on voulait éviter qu'il y ait des déplacements inutiles de population d'une région-ressource vers une région urbaine? Et vous voyez le genre de problématique. Alors, vous réagissez comment à ce genre... Est-ce que vous pensez que ça aurait effectivement des effets très positifs, et de quelle façon, sur les effectifs de jeunes à vos ordres d'enseignement?

M. Caron (André): Il y a différents niveaux... Là, vous faites référence, j'imagine, à l'exode. Nous, on appelle ça l'exode, hein, les gens qui partent d'une région puis migrent dans une autre région. Bon, on vit aussi le phénomène inverse où il y a des industries qui s'installent, des jeunes familles des milieux centraux, des milieux urbains qui s'en vont là, mais, au lieu de résider dans le petit village de la petite école, vont résider à 25, 30, 40 km, dans une ville un petit peu plus centre et voyager soir et matin, parce que, pour eux autres, c'est une qualité de vie améliorée. Ils ont fait deux heures le matin et le soir depuis qu'ils travaillent et là ils vont faire 25 minutes, c'est extraordinaire. Mais, dans le petit village en question où l'industrie a été s'installer, ça n'a pas amené d'élèves, ça. Comprenez-vous que ce n'est pas aussi simple que de dire: On amène des gens puis on va amener des enfants? Ce serait l'idéal que les jeunes familles s'installent dans les petits villages puis qu'on commence à repeupler ces petits villages là. Nous, on ne demande pas mieux, les commissions scolaires. S'il y a des élèves dans les villages, il va y avoir des écoles de village. Mais, s'il n'y a plus d'élèves, s'il y a zéro élève, est-ce qu'on garde l'école ouverte sous prétexte que, l'école étant ouverte, on va avoir des familles qui vont aller s'installer? Moi, je pense que là on est rendu à l'extrémité, là.

M. Paquin: Alors, une dernière question: En termes donc de développement et de réflexion sur ce qu'il faudrait faire dans le sens de ce que vous avez dit, à quel genre de partenariat êtes-vous ouverts comme organisme pour discussion avec les municipalités, et tout ça? Est-ce qu'il y a déjà des positionnements que vous avez pris comme organisme à cet égard-là par rapport au repeuplement de certaines zones, et tout ça?

M. Caron (André): C'est un nouvel aspect de la dernière révision de la Loi sur l'instruction publique qu'on doit participer au développement régional, donc on participe. Et, pour donner un exemple bien précis de choses à changer peut-être, je vais demander à M. Morel de donner son exemple.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Pour te donner un exemple, quand on parle, là, d'éléments provinciaux qui ont des impacts localement, prenons la loi de protection agricole. En soi, cette loi-là, c'était un besoin quand on parlait d'étalement urbain dans certains milieux ou des terres agricoles extrêmement fertiles, mais l'impact qu'il y a, par exemple, sur Lac-Témiscamingue où on voit des enfants qui voudraient se construire une maison sur la terre paternelle pour continuer à... Puis ils ne peuvent pas. Donc, ils vont s'établir dans le village à côté, puis ils voyagent, comme agriculteurs, sur la terre de leur père. Voyez-vous l'effet pervers d'une loi, là, mur à mur où les gens ne peuvent pas... Aujourd'hui, on a peu de petits agriculteurs. Maintenant, c'est toutes des grosses business ? excusez-moi l'expression anglaise ? que... Mais ces petits là ne peuvent pas s'établir à cause du zonage agricole. Tu sais, il y a bien des enfarges en particulier. Quand on parlait dans notre mémoire d'avoir des politiques globales qui tiennent compte de ces facteurs-là, souvent on a des politiques sectorielles qui empêchent justement le développement des régions plus agricoles, qui peut être vrai pour la Montérégie ou pour Lanaudière, mais qui ne n'est pas vrai pour la Gaspésie puis qui n'est pas vrai pour l'Abitibi. C'est un peu ça, là, qu'on faisait comme remarque.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Caron, M. Morel, M. Roy, Mme Roy et M. Pelletier, nous vous remercions de votre présence et de votre participation. Nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 54)

(Reprise à 15 h 57)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous accueillons... Nous reprenons nos travaux. Nous sommes toujours dans le même mandat et nous recevons M. Robert Maheu.

Des voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Westmount?Saint-Louis, c'est repris, alors...

Alors, M. Maheu, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, et qui sera suivi d'une discussion avec les membres de la commission par la suite.

M. Robert Maheu, ministère de l'Éducation

M. Maheu (Robert): Je vous remercie, Mme la Présidente. Donc, je suis Robert Maheu, directeur de la Direction de statistiques et des études quantitatives au ministère de l'Éducation. Je suis accompagné par Kouadio Antoine N'Zué, qui est démographe dans la même Direction.

Alors, c'est notre Direction qui produit les prévisions d'effectif scolaire pour le ministère. Nous en faisons une quantité assez considérable. À chaque année, nous faisons des prévisions pour chacune des commissions scolaires, des collèges, des universités. Dans le cas des commissions scolaires, la plupart d'entre elles nous demandent de subdiviser leur territoire en petits secteurs géographiques, et ce sont ces prévisions qui viennent ensuite alimenter la prise de décision au niveau des constructions, agrandissements d'écoles ou parfois fermetures d'écoles, bien que, nous-mêmes, ne participons pas à cette étape des prises de décision. Donc, notre participation se limite à faire la prévision.

Ce que nous vous présentons aujourd'hui est le fruit d'un exercice un peu nouveau que nous avons fait il y a quelques mois, une prévision à plus long terme, donc pour les 15 prochaines années, pour les commissions scolaires, mais sans les subdiviser par secteurs, pour les collèges et pour les universités. Donc, dans nos prévisions habituelles, nous n'avons qu'un seul scénario. On les fait dans un contexte où la marge d'inconnue est moins grande parce qu'elle ne porte que sur cinq ans pour le primaire, 10 ans pour le secondaire, et ainsi de suite. Donc, nos prévisions habituelles, elles concernent des enfants qui sont déjà nés, où, donc, la marge d'erreur peut sembler plus faible.

n(16 heures)n

Ici, nous avons... Pour faire des prévisions donc pour une quinzaine d'années, nous nous sommes basés sur les projections de population faites par l'Institut de la statistique du Québec. Nous avons retenu trois scénarios qui sont les trois scénarios habituellement retenus pour balayer l'éventail de ce qui semble le futur possible, raisonnable. Dans ces scénarios de l'Institut de la statistique du Québec, le scénario A, dit de référence, suppose une fécondité de l'ordre d'un enfant et demi par femme. Le solde migratoire, donc la différence entre les entrées et sorties du Québec, est fixé à plus 12 000. Le scénario faible de l'ISQ suppose une fécondité plus faible, donc de 1,3 enfant par femme, et, pour l'éducation, c'est une variable importante. Le solde migratoire, lui, serait de l'ordre de moins 1 500 personnes par année au Québec. Et, à l'opposé, il y a un scénario fort où à la fois la fécondité et les mouvements migratoires sont présentés de façon plus optimiste, donc la fécondité serait à 1,7 enfant et le solde migratoire serait de plus 26 500.

Si vous permettez, je ne suivrai pas l'ordre du mémoire pour ma présentation. Je vais plutôt vous mettre en perspective en vous envoyant au tableau 5 de notre mémoire qui concerne le nombre d'élèves du secteur des jeunes dans les commissions scolaires. Depuis 1961... De 1961 à 1970-1971, il y avait eu augmentation assez considérable de 37 % du nombre d'élèves. C'était à la fois le résultat du nombre de naissances dans les années cinquante et du développement de l'éducation, en particulier de l'enseignement secondaire, dans les années soixante. Dans les années qui ont suivi, les 15 années qui ont suivi, donc de 1970-1971 à 1985-1986, il y a eu une diminution considérable, si on fixe arbitrairement à 100 l'effectif de 1961-1962. En 1970-1971, on avait monté à 137 et, en 1985-1986, on se retrouvait à 90, donc une baisse de l'ordre de 40 % pendant ces 15 années-là.

On a eu, pendant les 15 années qui ont suivi, une période de stabilité, puisque de cet indice 90, on baissait à 88 en 2000-2001, donc une petite baisse. Mais ça s'est accompagné, en même temps, d'un mouvement plus important sur le territoire, donc il y a des régions qui étaient en croissance, d'autres en décroissance. Au sein de régions en croissance, on observait, par exemple, souvent dans les grandes villes des diminutions d'effectifs scolaires dans les centres-villes et des augmentations en couronne, autour de ces grandes villes, donc à mesure que se développaient des banlieues qui attiraient les jeunes couples.

La diminution que nous prévoyons pour les 15 prochaines années est nettement moins importante que celle que nous avions connue entre 1970 et 1985. Donc, il y aura une diminution assez importante, mais le système scolaire a déjà connu des baisses nettement plus importantes que celle-là.

Le modèle de prévisions que nous avons utilisé pour cet exercice est simple. Nous avons appliqué des taux de scolarisation selon l'âge. Nous avons pris les taux observés et nous les avons maintenus fixes. Donc, la prévision indique l'impact des changements démographiques prévus sur les effectifs scolaires. Et donc, pour ceux qui étaient familiers avec les projections de population de l'Institut de la statistique du Québec, ces projections ne devraient pas constituer une surprise.

Donc, depuis quelques années, on a eu une nouvelle baisse du nombre de naissances, parce qu'arrivaient en âge normal de se reproduire les générations plus faibles issues de la première chute de la natalité au Québec. Donc, il y a maintenant, à l'âge de reproduction, un nombre moindre de jeunes adultes. Et donc, combiné à un niveau de fécondité qui est faible, on observe moins de naissances, et le phénomène a commencé depuis déjà quelques années au Québec. Il se fait sentir d'abord au préscolaire, au primaire, au secondaire, éventuellement au collégial et à l'universitaire. Cette nouvelle baisse du nombre de naissances, on n'en voit pas les effets sur les clientèles universitaires dans l'horizon de la projection, il aurait fallu faire rouler le modèle au-delà de 2015 pour avoir l'effet de cette nouvelle baisse du nombre de naissances sur les clientèles universitaires.

Alors, sans vouloir vous présenter trop de chiffres ? parce que c'est souvent le défaut des démographes que nous sommes ? on prévoit au primaire une baisse assez généralisée pour les 15 prochaines années. Donc, pour l'ensemble du Québec, ce serait une baisse de 20 % de l'effectif. Il y a des variations régionales à cette baisse: pour la Côte-Nord, ce serait 31 %; pour l'île de Montréal, ça ne serait que de 9 %. Ça, c'est avec le scénario de référence. Avec le scénario fort, il y a une région où nous aurions une croissance: Montréal. Il y a décroissance partout ailleurs. Avec le scénario faible, la décroissance serait généralisée. Donc, ce tableau 4 vous présente aussi les résultats en regroupant les commissions scolaires par région. À l'enseignement secondaire, dans le scénario de référence, il y aurait croissance à Montréal, alors qu'au primaire il y aurait une décroissance.

En ce qui concerne l'enseignement collégial, nous prévoyons des décroissances touchant en particulier ce qu'il est convenu d'appeler les régions-ressources. Donc, ce sont les régions qui subissent l'effet négatif de mouvements migratoires défavorables. Par contre, trois régions, elles, seraient en croissance: Montréal, Laval et Laurentides.

En ce qui concerne l'enseignement universitaire, dans l'ensemble, on prévoit une quasi-stabilité pour l'enseignement universitaire, enfin une toute petite baisse. Mais, lorsqu'on regarde institution par institution, le portrait est différencié. Les universités situées dans les régions-ressources, en général, connaîtraient une baisse. Il en va de même, selon nos prévisions, pour l'Université Laval qui, elle, n'est pas dans une région-ressource. Dans le cas de l'Université Laval, il faut comprendre qu'elle est alimentée assez largement par des étudiants qui proviennent de tout l'est du Québec, et nous prévoyons que ce bassin d'alimentation, qui est important pour l'Université Laval, va se restreindre. Par contre, nous prévoyons certaines croissances dans les universités de la région de Montréal. Pour ce qui est des universités anglophones, elles sont dans une situation particulière, parce qu'elles sont alimentées en partie par des étudiants ? enfin, dans une partie non négligeable ? qui proviennent d'autres provinces ou des étudiants étrangers, et ces bassins d'alimentation ne sont pas près de se tarir.

n(16 h 10)n

Les conséquences de ces prévisions dans quelques domaines et de ces évolutions. Concernant le nombre d'écoles des commissions scolaires. Depuis 25 ans, le nombre d'écoles primaires a très peu diminué. En pratique, beaucoup ont été fermées, mais beaucoup ont été construites, de telle sorte que le bilan a été une quasi-stabilité. Par contre, le nombre moyen d'élèves par école primaire, bien sûr, a diminué. Pour les écoles secondaires, il y a eu, depuis 25 ans, une diminution de près de 14 % de ces écoles. Mais là encore, c'est inférieur à la diminution des clientèles. Et là encore, si on voulait regarder des portraits plus détaillés, on aurait... il faudrait faire des nuances, parce qu'on verrait que, oui, des écoles ont été fermées, que d'autres ont été construites.

Au sujet de l'évolution du personnel enseignant qualifié, bien sûr, étant donné les règles, les conventions collectives qui sont celles qui ont un impact majeur ici, on prévoit, d'ici 2015, que ce nombre d'enseignants suivrait à peu près l'évolution du nombre d'élèves. On abordait, dans des discussions avec des groupes précédents, l'hypothèse que nous ayons à connaître à nouveau une période de mise en disponibilité importante d'enseignants. Il est possible qu'effectivement nous ayons, dans le futur, enfin que les commissions scolaires, puisque ce sont elles qui sont les employeurs, aient à nouveau à mettre les enseignants en disponibilité. Mais, pour ce que nous en savons, rien n'indique que le phénomène aurait la même ampleur que ce que nous avions connu dans le passé.

Donc, la baisse d'effectif scolaire des 15 prochaines années s'annonce plus faible que celle que nous avions connue entre 1970 et 1985, d'une part. D'autre part, notre effectif enseignant est maintenant plus âgé qu'il ne l'était il y a une vingtaine d'années. De telle sorte que les taux de départs à la retraite que nous prévoyons sont plus importants que le rythme de diminution de l'effectif scolaire. Ça, bien sûr, c'est un portrait d'ensemble. Comme d'habitude, il y aura, localement, des évolutions différenciées. Mais, de façon générale, le phénomène n'aura pas la même ampleur.

Un autre argument concourt à penser dans ce sens-là: par rapport à la situation d'il y a 20 ans, il y a, aujourd'hui, un plus fort pourcentage d'enseignants qui sont à statut précaire et donc pour lesquels il n'y a pas de lien de sécurité d'emploi. Ça termine mon exposé, et nous serons heureux de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je vous remercie. M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Ce ne sera pas très long, Mme la Présidente, messieurs. Votre scénario de référence, selon vous, c'est le scénario le plus réaliste pour les années à venir, que ce soit au niveau du taux de fécondité ou de l'apport migratoire?

M. Maheu (Robert): Nos collègues de l'Institut de la statistique du Québec appellent scénario de référence celui qui leur semble le plus réaliste. Lorsque nous regardons ce qui s'est passé depuis que ces prévisions ont été faites par l'ISQ, nous voyons que nous sommes un petit peu en bas du scénario de référence. Là, je cite les chiffres de mémoire, je crois que l'indice de fécondité de l'an 2000 était à 1,4, et, pour 2001, je crois qu'il était temporairement estimé à 1,47, donc le scénario de référence était à 1,5. Donc, on est un peu en bas.

Pour le solde des mouvements migratoires, nous serions aussi un peu en bas, donc en zone positive, mais à un niveau moins élevé que dans le scénario de référence. Je sais que dans certaines régions-ressources comme le Saguenay?Lac-Saint-Jean, pour ce qu'on peut en savoir, l'évolution démographique a été plus défavorable que celle observée, que celle qui a servi à faire les hypothèses de prévision. Donc, nous sommes un peu en bas du scénario de référence, mais c'est celui dont nous sommes présentement le plus proche.

M. Kieffer: J'essaie de... Les différents gouvernements québécois, depuis, bon Dieu, bon nombre d'années, qui ont pu voir cette décroissance démographique ont mis en place différentes mesures d'encouragement à la famille, puis je regarde vos chiffres, là, on n'a pas frappé dans le mille, hein. En tout cas, la tendance n'est pas vers une reprise en main. Est-ce que votre ministère a déjà fait des études comparatives, avec d'autres pays où la croissance démographique est beaucoup plus forte ? je pense à la natalité, je pense à la France, entre autres, mais pas uniquement la France, les États-Unis aussi ? sur les mesures mises de l'avant qui pouvaient encourager, faciliter et autres?

M. Chagnon: ...aux États-Unis, il y a des parties tout à fait... facilement identifiables de la population où il y a un taux de natalité qui est beaucoup plus élevé, chez les Noirs, les Portoricains, les hispaniques; en France, chez les Arabes, etc.; en Allemagne, chez les Turcs. Mais ce n'est pas vrai chez les Blancs, WASP(s), etc.

M. Kieffer: Y compris en France?

M. Chagnon: Oui.

M. Kieffer: Je sais qu'aux États-Unis, effectivement, la croissance démographique a une couleur, là.

M. Chagnon: Elle a une couleur à peu près partout.

M. Kieffer: Y compris en France?

M. Chagnon: Oui.

M. Kieffer: Est-ce que c'est à peu près les... Un, est-ce que vous les avez faites? Et, deux, est-ce que vous en venez à peu près à ces conclusions-là?

M. Maheu (Robert): Écoutez, à toutes les quelques années, les gouvernements qui se succèdent mettent sur pied des comités interministériels...

M. Kieffer: Qui ne vous disent rien, quoi. Bon.

M. Maheu (Robert): ...pour se pencher sur la situation démographique. Le Québec a un certain nombre de mesures de soutien à la famille, plus que les États-Unis, et la fécondité est plus élevée aux États-Unis que chez nous. La France a des mesures plus massives que nous, elle a une fécondité plus élevée. Donc, personne n'est en mesure de trouver la recette miracle qui permettrait de rehausser le niveau de fécondité.

Nous savons que les jeunes adultes ont, en matière de fécondité, des aspirations relativement élevées, mais, chez les jeunes femmes en particulier, les études se prolongent beaucoup plus longtemps qu'autrefois et, souvent, on va reporter l'arrivée des enfants après la fin des études. Donc, déjà, l'âge avance. Il y a l'entrée en carrière aussi. Souvent, l'arrivée d'un enfant n'est pas toujours facile à concilier avec une installation solide dans une carrière. Ceci dit, des mesures ont été prises pour arriver à aider à concilier les deux.

n(16 h 20)n

L'instabilité des couples au Québec est très forte. Au Québec, je pense que nous aimons bien passer souvent d'un extrême à l'autre en matière de comportement démographique. Nous avons eu une transition démographique d'une fécondité élevée à une fécondité basse très rapide, à peu près plus forte que ce qu'on a vu partout ailleurs en Occident. De la même façon, on a vu au Québec une grande désaffection face au mariage et, au niveau des couples qui se constituent, il y a une assez grande instabilité. Il y a une période de temps qui peut être favorable à l'arrivée des enfants, elle se situe en général après la fin des études ? cette fin des études, elle est retardée ? et il faut que les jeunes soient engagés dans une union stable et que cette union dure un certain nombre d'années pendant lesquelles on peut avoir des enfants. Arrivées au-delà d'un certain âge, peu de femmes choisiront encore d'avoir des enfants parce qu'elles ont leur travail et leur carrière. Donc, il y a une petite fenêtre favorable à la fécondité qui s'est restreinte. Donc, les gens veulent des enfants mais finissent par en avoir moins que ce qu'ils souhaitaient.

M. Kieffer: Dernière question. Tantôt, dans un échange que le député de Westmount?Saint-Louis avait avec la Fédération, on parlait justement du facteur de décroissance versus la mise à la retraite. Tantôt, ce que vous sembliez dire, c'est que, à tout le moins à la grandeur du Québec, le taux de mise à la retraite va être supérieur à la décroissance des effectifs. Donc, vous ne semblez pas partager, à tout le moins pour l'ensemble du Québec, les craintes de la Fédération, mais vous avez aussi indiqué qu'il y aurait un bon écart. Alors, reprenez-moi si j'ai mal interprété vos propos, mais, sinon, l'écart, c'est de quel ordre?

M. Maheu (Robert): Pour les prochaines années, on s'attend à ce que la clientèle scolaire diminue de 1 à 2 % par année. Là, je parle de la clientèle du secteur des jeunes des commissions scolaires. Le taux d'attrition des enseignants prévu est de l'ordre de 4 à 4,5 % par année, ce qui permet de dire que, dans l'ensemble et s'il y avait une mobilité parfaite des personnels, les seuls problèmes que nous aurions seraient des problèmes de recrutement et de formation d'enseignants, notamment dans certaines disciplines où nous avons plus de difficultés comme sciences, mathématiques, français. Il n'y a pas cette mobilité parfaite et la décroissance de la clientèle est inégalement répartie sur le territoire.

Nous avons déjà essayé de modéliser la mise en disponibilité des enseignants. Ça s'est avéré un phénomène extrêmement complexe où nous aurions besoin de prévisions extrêmement précises à un tout petit niveau, et on arrive au niveau de la nanostatistique. Pour arriver à bien prévoir ça, il faudrait prévoir dans des chiffres qui sont tellement petits, à des niveaux tellement micros que la prévision n'est pas sérieuse, et on serait certains d'une seule chose, si on tentait de faire des prévisions à de si petits niveaux géographiques ou organisationnels, c'est qu'on serait certains de se tromper.

Il nous semble, par contre, que les commissions scolaires, qui connaissent beaucoup mieux leur personnel... et on peut, dans une commission scolaire, poser des questions aux enseignants sur leurs intentions en matière de retraite. Il me semble que cette planification peut se faire utilement au niveau de la commission scolaire.

M. Kieffer: Donc, ils n'ont pas obligatoirement besoin de la CARRA pour en arriver à prévoir. Ils pourraient procéder autrement, là.

M. Maheu (Robert): Même avec la CARRA, un modèle actuariel ou démographique, lorsqu'on essaie de le faire fonctionner sur des effectifs très petits, ne produit pas de résultats crédibles. C'est ce qui est le problème.

M. Kieffer: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Groulx. M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Merci, Mme la Présidente. Vos statistiques, en fin de compte, sont, par prudence, établies avec un taux fixe de scolarisation, si j'ai bien compris. De combien faudrait-il que ce taux varie à la hausse pour que les écarts de 1 à 2 % par an soient comblés? Est-ce que, si tous les étudiants qui devraient être à l'école y étaient, on aurait ce taux-là?

M. Maheu (Robert): Écoutez, à l'enseignement primaire, le problème ne se pose pas parce qu'il n'y a pas de décrochage. À l'enseignement secondaire, il existe du décrochage, là, il y a plusieurs façons de le mesurer, il y a plusieurs concepts qui donnent plusieurs résultats, là, je n'entrerai pas dans cette discussion. Il est certain que, si ces élèves qui décrochent demeuraient plus longtemps à l'école, jusqu'au diplôme, cela contribuerait à freiner la décroissance appréhendée à l'enseignement secondaire.

Un des phénomènes que nous observons aussi et que nous tentons de réduire, c'est le retard scolaire ou, si vous préférez, le redoublement. Donc, il y a aussi des élèves dont le cheminement scolaire est trop lent dans le système. À l'enseignement secondaire, en particulier, il y a un niveau élevé de redoublement à la première année de l'enseignement secondaire: soit qu'on fasse deux fois la première année ou que, localement, on fasse faire aux élèves ce qu'on appelle une présecondaire, qui est quelque chose qui n'existe pas ni dans le régime pédagogique ni dans les systèmes d'information du ministère. Ça s'appelle, chez nous, secondaire I dans chaque cas. Et donc, dans les objectifs ministériels de réduire le décrochage et de réduire le redoublement, ce sont deux objectifs qui auraient des effets de sens contraires sur l'effectif scolaire. Donc, si on redouble moins, donc on reste moins longtemps dans le système. Par ailleurs, si on décroche moins, d'autres y restent plus longtemps. Il me semble très difficile de dire quel serait l'impact si nous avions du succès sur ces deux objectifs. Donc, les deux ont des effets de sens contraires. L'exercice que nous avons présenté ici suppose que rien ne change, qu'il y a des taux fixes de scolarisation et qu'on ne regarde que les effets de l'évolution démographique.

À d'autres ordres d'enseignement, il y a place pour des changements qui pourraient être plus importants. C'est le cas à l'enseignement collégial. Pour atteindre les objectifs de diplomation pour 2010 à l'enseignement collégial, il serait nécessaire d'accroître l'accès à l'enseignement collégial. Mais tous ces éléments sont interreliés. Si on veut que plus de jeunes Québécois accèdent à l'enseignement collégial, il faut que plus de jeunes Québécois se rendent jusqu'au diplôme d'études secondaires qui est la condition d'accès au collégial. Donc, c'est peut-être plus au collégial qu'on pourrait voir, imaginer des changements liés au type de phénomène qui vous intéresse.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je voudrais saluer aussi MM. Maheu et N'Zué de leur présence ici. C'est très rare et malheureux, dans le fond, que nous n'ayons pas plus souvent des hauts fonctionnaires d'un ministère comme l'Éducation qui viennent nous présenter les statistiques du ministère. C'est un document qui est très intéressant puis c'est un document qui va servir évidemment encore pendant plusieurs années, d'autant plus que le document a le mérite de définir, avec le temps, vos qualités de pronostiqueurs. Et vous en avez encore, pour subir votre document, quelque 14 années en avant de vous à vivre avec le document.

M. Maheu (Robert): Nous allons remettre nos prévisions à jour d'ici là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Je n'en doute pas, compte tenu que maintenant vous pouvez compter sur un collègue qui est sous-ministre à la Recherche et qui pourra vous appuyer dans les années à venir justement pour remettre à jour vos données.

n(16 h 30)n

C'est intéressant un peu, la discussion qu'on a depuis tout à l'heure, mais c'est assez curieux, il y a un problème... pas un problème, c'est plus une réalité que d'autres choses, il me semble. Dans les faits, lorsqu'on regarde le taux de fécondité des femmes puis qu'on le regarde non seulement sur une base géographique locale, Québec ou une partie du Québec, qu'on regarde à l'extérieur du Québec, on s'aperçoit que le taux de fécondité est généralement contraint par des... est régulé par des situations qui découlent très souvent ? bon, très souvent, je dirais même ? à peu près automatiquement du niveau d'éducation, d'instruction qu'ont les citoyennes à gauche puis à droite, un peu partout dans le monde.

J'ai eu l'occasion de me promener dans plusieurs pays en voie de développement, et c'est clair que plus on s'aperçoit qu'un pays est en émergence, plus son taux de fécondité diminue non seulement par des motivations politiques, par des tentatives de certains gouvernements ? je pense, entre autres, à la Chine et à l'Inde qui ont tenté d'avoir des politiques très draconiennes pour la limitation des naissances ? mais, malgré cela, on se retrouve avec des problèmes assez particuliers.

N'allons pas loin. Même si on regarde chez nous, uniquement chez nous, on disait tout à l'heure que notre taux de fécondité est relativement bas, 1,3, 1,2, 1,3, 1,4, dépendamment quelles années on regarde, mais on a une communauté qui est intégrée, et intégrante, et partie même de notre communauté québécoise, la communauté autochtone... La communauté autochtone se retrouve avec un taux de fécondité qui n'a rien à voir avec le restant du Québec. Puis, ce n'est pas vrai uniquement chez les autochtones du Québec, c'est vrai aussi chez les autochtones de partout au Canada. Et même, hors du Canada, si on regarde le taux de fécondité des autochtones du Groenland par rapport aux Danois, on s'apercevra qu'il y a une très grande différence. Et, généralement, cette différence-là s'explique. En tout cas, je ne dirais pas qu'elle s'explique, mais on s'aperçoit que cette différence-là, lorsqu'on la compare avec les taux de scolarisation des populations concernées, on arrive directement avec un niveau qui correspond à peu près à une baisse, là, qui est à 1,2, 1,3, 1,4, 1,5, 1,6.

Quand on regardait... On parlait tout à l'heure de la France, ou de l'Allemagne, ou des États-Unis. On s'aperçoit encore une fois qu'aux États-Unis, en France, ou en Allemagne, voire en Angleterre, les taux de fécondité sont plus élevés chez les nouvelles populations de ces pays-là. Et, dans les nouvelles populations, on a souvent des gens qui sont arrivés comme immigrants qui étaient peu scolarisés, dont la culture de scolarisation n'est pas encore très grande, qui va aller en s'amplifiant. Et je peux d'ores et déjà quasiment vous prédire que, plus cette propension à la scolarisation va aller en se développant, plus le taux de fécondité va descendre. Ça semble être inscrit dans les gènes humains. Qu'on le regarde par quelque côté de la lorgnette que ce soit, on s'aperçoit que, peu importe le pays où on va, à partir du moment où les taux de scolarisation commencent à augmenter, le taux de fécondité descend.

Quant à nous, bien là, nous, on va atteindre le creux de la vague, c'est clair, d'ici une quinzaine d'années. Mais il y a dans vos statistiques des données que je trouvais un peu curieuses. Outre la question du scénario de référence qui a été posée préalablement par un collègue, vous soulevez, par exemple... Vous soulevez un pronostic, vous nous annoncez qu'on aura, d'ici 2015-2016, 11,7 % de moins d'élèves au préscolaire de quatre ans. Le problème, c'est qu'il n'y en a quasiment pas de préscolaire de quatre ans aujourd'hui. Comment on fait pour prédire qu'il va y en avoir 11,7 % de moins en 2015-2016?

M. Maheu (Robert): C'est une question purement mécanique liée au modèle que nous avons utilisé pour cet exercice. Nous avons maintenu des taux de scolarisation à quatre ans et nous leur avons fait subir l'évolution prévue de la population âgée de quatre ans.

M. Chagnon: Alors, votre hypothèse, c'est que, s'il y avait ? ce qui serait très bien, à mon avis ? un élargissement de l'enseignement de la petite enfance pour les enfants de quatre ans, s'il y avait un élargissement de cette politique-là comme il y en a eu un récemment pour les enfants de cinq ans en élargissant la maternelle en en faisant une maternelle plein temps... S'il y avait éventuellement une maternelle quatre ans, disons, et que tous les enfants, comme c'est à peu près le cas... C'est à peu près dans l'ordre de 98 % à l'heure actuelle. C'est les dernières statistiques que j'ai eues. Ça, c'est le taux de fréquentation de la maternelle cinq ans. Donc, si tu avais un taux de fréquentation à peu près de cet ordre-là et si tous les enfants étaient en maternelle quatre ans, en 2015-2016, il y aurait, si je comprends bien, -11,7 % d'enfants en préscolaire quatre ans. C'est ce que vous voulez dire?

M. Maheu (Robert): Si on ouvrait les classes de maternelle à tous les enfants de quatre ans, on peut penser que presque tous s'y précipiteraient. On voit dans beaucoup de pays d'Europe occidentale que l'éducation préscolaire est souvent faite dès l'âge de trois ans.

M. Chagnon: Absolument. La France, la Suisse, la Suède.

M. Maheu (Robert): Et donc, dans beaucoup de ces pays, à trois ans, quatre ans, cinq ans, pratiquement tous les enfants sont à l'école. Dans le cas de la France, il y a même ouverture dès l'âge de deux ans, mais là c'est moins complet, c'est à peu près 35. Enfin, quand j'étais allé étudier en France il y a déjà assez longtemps, mon fils avait pu bénéficier de cette scolarisation dès l'âge de deux ans et il ne s'en porte pas plus mal aujourd'hui, n'en doutez pas.

M. Chagnon: J'imagine.

M. Maheu (Robert): Donc, il y aurait là un potentiel. Donc, certaines sociétés font le choix, pour les services à la petite enfance, d'impliquer davantage le système scolaire en amenant les enfants dès l'âge de, souvent, trois ans à l'école. Ici, le choix qui a été privilégié, c'est le développement de services de garde qui est par ailleurs un choix moins coûteux.

M. Chagnon: Ah, ça, je ne suis pas d'accord avec vous, par exemple. Combien coûte un enfant en classe de préscolaire cinq ans? C'est quoi, votre coût moyen au Québec? On va se fier au... Bon, ma collègue, ici, dit 3 000, 4 000.

M. Maheu (Robert): Ils sont maintenant à temps plein.

M. Chagnon: Ma collègue ne doit pas être bien loin de la vérité.

M. Maheu (Robert): Enfin, ici, dans nos indicateurs, nous le publions tous confondus, préscolaire, primaire, secondaire. Ce qui est publié, c'est une dépense de fonctionnement, donc ce n'est pas toute la dépense, 7 761.

Une voix: Combien?

M. Maheu (Robert): 6 700.

M. Chagnon: Savez-vous combien coûte un enfant qui est en garderie à 5 $? 8 200. 8 200.

M. Maheu (Robert): Je rajouterai les dépenses d'immobilisation et j'arriverai à votre chiffre.

M. Chagnon: Ah, ne comprenant pas les dépenses d'immobilisation pour les CPE. Alors, c'est pour ça que c'est assez curieux. Lorsqu'on regarde ça, c'est pour faire rien que des amis, là, mais en évoquant la possibilité d'au lieu d'investir dans le système qu'on a actuellement, mais investir dans une approche qui correspond davantage à l'orientation occidentale et de faire en sorte qu'on investisse davantage en scolarisation de la petite enfance, quatre ans et éventuellement trois ans... Mais, si on prend rien que quatre ans, on s'apercevrait que, économiquement parlant, c'est non seulement défendable, mais ça pourrait être intéressant.

M. Maheu (Robert): Si vos chiffres sont bons, votre point de vue se défend sûrement.

M. Chagnon: Bien, je prends les chiffres du ministère, là. On vient de traverser une période d'étude de crédits du ministère de la Famille, et c'est des chiffres qu'ils nous donnaient. Vous pourriez les vérifier. Ah, d'ailleurs, vous avez un service de recherche maintenant, là, avec un sous-ministre adjoint à temps plein là-dessus, vous pourrez vérifier ça. Et, M. le Président, je m'excuse de vous avoir féminisé pendant un bout de temps, je ne vous avais pas vu changer de sexe.

n(16 h 40)n

Mais je reprends votre donnée. Vous nous annoncez une diminution de 2,8 % à l'enseignement universitaire. Vous annoncez avec raison que l'enseignement universitaire, tous ceux qui vont rentrer à l'université 2015-2016 sont nés actuellement. Ça, c'est sûrement une bonne note, parce que c'est incontestable et assez facile à prédire. Mais je suis moins certain que c'est facile, que c'est possible aujourd'hui de tenter de, avec justesse, mettre un chiffre sur le décalage d'étudiants qu'on aura entre le secteur universitaire en 2015-2016 et celui qu'on a actuellement parce qu'il me semble qu'il y a des indicateurs qui ne sont pas dans les données statistiques normales. Je pense, entre autres, à des étudiants qui vont étudier plus longtemps. Je pense, entre autres, à un retour des personnes qui vont avoir pris leur retraite, là, dans les années à venir puis qui vont décider qu'ils vont faire un bac ou une maîtrise par satisfaction personnelle, ils vont retourner à l'université. Et je pense, entre autres, à la capacité, à laquelle je crois, de nos universités de pouvoir retrouver des clientèles hors Québec qui pourraient être des clientèles qui pourront faire en sorte de compenser l'état des clientèles locales à l'enseignement universitaire. Alors, ça m'apparaît un peu compliqué, moi, de sortir une statistique pour 2015-2016, particulièrement pour le monde universitaire.

En ce qui concerne le primaire et le secondaire, ça marche généralement, mais, pour le secteur universitaire, ça me semble beaucoup plus complexe à cause du nombre d'indicateurs dont vous avez beaucoup plus de difficulté à traiter de l'importance dans vos données statistiques.

M. Maheu (Robert): Votre intervention est tout à fait pertinente. Lorsqu'on fait des prévisions à horizon cinq ans au primaire, la marge d'erreur est assez faible.

M. Chagnon: Il me semble.

M. Maheu (Robert): À horizon 15 ans, surtout à un ordre d'enseignement où la scolarité n'est pas obligatoire, la marge d'erreur est potentiellement plus élevée. Enfin, ça soulève un peu toute la pertinence, là, des prévisions dans ce domaine-là. Donc, nous nous protégeons de plusieurs façons. Alors, il y a trois scénarios. Nos prévisions sont remises à jour très régulièrement. Et donc, s'il apparaît que nous n'avons pas prévu tel ou tel phénomène, bien, en les remettant à jour, on peut les prendre en considération.

Par ailleurs, les phénomènes dont nous parlons ici ont quand même une inertie assez grande. Alors, c'est le cas des phénomènes démographiques qui, en général, ne changent pas rapidement. Donc, une population de 7 400 000 personnes ne modifie pas sa composition si vite que ça, et le nombre d'enfants qui naissent aujourd'hui a une grande influence sur le nombre de personnes qui arriveront à la pension de vieillesse 65 ans plus tard. Donc, tous ces phénomènes sont reliés entre eux, ce qui fait que les prévisions faites par les démographes marchent assez bien. Non pas qu'ils soient plus talentueux que les économistes ou les météorologues, mais ils s'adressent à des phénomènes qui sont plus stables et plus prévisibles.

M. Chagnon: C'est M. N'Zué qui est le démographe chez vous. Vous, vous êtes quoi? L'astrologue?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maheu (Robert): Je suis également démographe et économiste.

M. Chagnon: Démographe aussi. O.K. Et économiste.

M. Maheu (Robert): Donc, les prévisions marchent raisonnablement bien et sont remises à jour très régulièrement. Et c'est important, notamment, je pense, lorsqu'une prévision, par exemple, pour un secteur d'une commission scolaire vient donner un signal d'alerte, de revoir à chaque année les données et de remettre à jour la prévision, parce que ça peut avoir des conséquences importantes sur la décision de maintenir ou de fermer l'école.

M. Chagnon: Et l'organisation des prévisions de clientèle a des conséquences extrêmement importantes sur l'organisation des budgets des commissions scolaires, parce que les budgets sont faits, sont prévus, sont planifiés à peu près... Dans quelques mois, on va commencer à planifier les budgets de l'an prochain dans les commissions scolaires. Alors, il leur faut être capable de comprendre à l'avance quelles seront les clientèles le plus exactement possible, parce que, s'il manque, dans une commission scolaire de 15 000 étudiants ou 20 000 étudiants... s'il en manque 800, il va y avoir un trou entre l'énoncé budgétaire puis la réalité budgétaire, et ça, évidemment, ça va compliquer le problème des administrations locales.

M. Maheu (Robert): Nous constatons chez nous que même les commissions scolaires qui n'envisagent pas de constructions ou de fermetures, la plupart d'entre elles nous demandent des prévisions d'effectifs scolaires par secteur. Elles s'en servent pour planifier une foule de choses. Elles peuvent également faire leurs propres prévisions si elles le souhaitent. Elles ont cette marge de manoeuvre. Nous répondons à toutes les demandes que nous adressent les commissions scolaires.

M. Chagnon: Alors, je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Et, encore une fois, je voudrais remercier M. N'Zué, M. Maheu d'être venus nous rencontrer pour nous faire part de leurs travaux. C'est très intéressant et pertinent dans le cadre de ce que nous étudions. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. Maheu, M. N'Zué, pour votre participation. Alors, nous allons suspendre un instant, le temps d'appeler les autres invités à la table.

(Suspension de la séance à 16 h 46)

 

(Reprise à 16 h 47)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission reprend ses travaux. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent. Alors, nous souhaitons la bienvenue à l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.

Association des commissions scolaires
anglophones du Québec (ACSAQ)

M. Paterson (Ron): Merci bien, Mme la Présidente. Mon nom, c'est Ron Paterson, je suis président de l'Association des commissions scolaires anglophones pour la province de Québec. Et mon ami, c'est M. André Caron, comme vous le savez peut-être. Et puis, moi, je sers des choses pour les anglophones, lui, pour les francophones.

Mme la Présidente, membres de la commission, j'aimerais d'abord présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui: à ma gauche, M. John Cyr, qui est président de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires anglophones du Québec, et il est aussi directeur général de la commission scolaire Central Québec; et puis, à ma droite, M. Jeff Polenz, directeur général de l'Association.

Les deux associations sont heureuses d'avoir l'occasion d'exprimer leur point de vue sur les fluctuations des clientèles dans le secteur de l'éducation. L'initiative de la commission de l'éducation est très à propos, car on reconnaît que de plus en plus l'avenir du développement économique et social du Québec est lié étroitement à un système scolaire qui réussit à donner aux élèves les connaissances, les compétences et les aptitudes nécessaires pour devenir des citoyennes et citoyens responsables, aptes à s'intégrer à une société en constante et rapide évolution. Dans notre mémoire, nous avons l'intention d'identifier certaines conditions et mesures qui pourraient aider le secteur de l'éducation à faire face à la fluctuation des clientèles scolaires.

Le système scolaire anglophone est géré par un réseau de neuf commissions scolaires anglophones qui, en 2001-2002, a offert des services éducatifs à environ 105 000 élèves au préscolaire, au primaire et au secondaire. Au total, les neuf commissions scolaires gèrent 340 écoles primaires et secondaire et ont à leur emploi environ 10 000 personnes à titre d'enseignantes et d'enseignants, de personnel de soutien, de professionnelles et de professionnels et de cadres.

En grande partie, le système scolaire anglophone reflète la composition linguistique du Québec. Les 105 000 élèves constituent environ 10 % de la population totale d'âge scolaire dont 50 % demeurent dans le territoire des deux commissions scolaires anglophones sur l'île de Montréal. Bien que concentrées dans la région de Montréal, il est important de noter que les écoles anglophones à travers le Québec desservent des communautés allant de la Côte-Nord et de la Gaspésie jusqu'à Val-d'Or et Noranda. Il y a environ 50 000 élèves en région qui reçoivent de l'enseignement en anglais dans les 215 écoles, soit à l'extérieur de l'île de Montréal.

n(16 h 50)n

Pour compléter le portrait du réseau scolaire anglophone et décrire un contexte pour la commission de l'éducation, il est important d'identifier quelques facteurs-clés qui définissent le système scolaire anglophone, notamment en région. Premièrement, bon nombre d'écoles anglophones ont moins de 200 élèves, un critère qui sert souvent à définir une petite école. Un sondage récent de l'Association démontre que, dans les régions desservies par quatre commissions scolaires anglophones, 60 % des écoles dans ces régions accueillent 200 élèves ou moins. Ça veut dire 48 écoles sur 80. Ce portrait devient de plus en plus révélateur lorsque nous examinons le nombre d'écoles ayant moins de 100 élèves. Selon le même sondage, 27 % de ces écoles dans les quatre commissions scolaires concernées ont moins de 100 élèves. Ça veut dire 22 écoles sur 80.

Le deuxième facteur commun du réseau anglophone est la dispersion des écoles. Dans bon nombre de cas, l'école anglaise n'est pas seulement la dernière école du village, mais aussi de la MRC. Sur les prévisions démographiques, selon les prévisions du MEQ, il y aura une baisse de la clientèle scolaire totale au préscolaire, au primaire et au secondaire dans le secteur anglophone. La population diminuera de 105 000 élèves en 2001-2002 à 102 800 d'ici 2006-2007, soit une baisse de 3,2 %.

Sur une base régionale, une croissance modeste est prévue pour les commissions scolaires anglophones desservant Montréal, Laval, les Laurentides, Québec et certains secteurs de la Montérégie, alors qu'une baisse de clientèle est prévue pour la Gaspésie, l'Estrie, l'Outaouais et d'autres régions du Québec. Selon les prévisions du MEQ, le secteur préscolaire et l'ensemble des commissions scolaires anglophones connaîtraient une diminution de 1 220 élèves d'ici 2006-2007, ce qui représente une perte de 15 % par rapport à 2001-2002. Les prévisions du secteur préscolaire sont un indicateur important de la croissance future du système scolaire, car les élèves de ce secteur passent ensuite au primaire et au secondaire.

Bien que les prévisions globales pour le secteur anglophone reflètent la tendance générale prévue pour tout le système scolaire du Québec, il est important d'accorder une attention particulière aux prévisions de clientèle scolaire à moyen et à long terme pour le secteur anglophone. L'expérience nous démontre que des facteurs difficiles à prévoir influencent les prévisions pour le secteur anglophone ? on veut dire croissance et décroissance. Ces facteurs incluent, entre autres, l'impact du climat économique sur la clientèle scolaire, surtout dans la région de Montréal, ainsi que le choix de la langue d'enseignement des parents qui ont l'option d'inscrire leurs enfants dans les écoles anglophones ou francophones. Notre expérience des prévisions démographiques antérieures nous démontre que ces facteurs et autres, tels les mouvements de la population entre les provinces, peuvent créer des différences importantes entre les prévisions et la réalité.

Il est important d'affirmer que la communauté anglophone témoigne d'un attachement profond à ses écoles. Les écoles anglaises, surtout en région, sont souvent les seuls établissements publics qui représentent toujours la présence et l'identité de la communauté anglophone. À travers la province, l'école n'est pas seulement une bâtisse où des services éducatifs sont offerts, mais aussi le centre d'activités communautaires et sociales, un lieu où la communauté locale peut partager et mettre en valeur son patrimoine, ses valeurs culturelles et son appartenance régionale.

Dans bon nombre de cas, la fermeture d'une école anglaise ne priverait non seulement la communauté de son dernier établissement, mais aussi augmenterait de façon inacceptable le temps de déplacement des élèves. À cet égard, il est utile de noter que, selon une étude menée par l'Association en 2001, un autobus scolaire, en milieu rural, circule en moyenne 62 km par parcours simple ou 124 km par journée de classe normale, ce qui représente un temps de déplacement des élèves de plus de deux heures par jour. Compte tenu de la volonté des communautés de maintenir leurs écoles et l'objectif d'offrir un environnement éducatif viable aux élèves, le secteur anglophone a élaboré de nouveaux modèles d'organisation qui méritent d'être examinés. On les présente.

Selon le premier modèle, les élèves du primaire et du secondaire sont regroupés dans le même édifice ou établissement. Regrouper les élèves dans la même école a l'avantage de leur permettre de rester dans la communauté pour la durée de leurs études, de renforcer les liens des écoles avec leur communauté et de se doter de méthodes d'enseignement conjointes dans tous les cycles de l'école. Ce genre d'approche organisationnelle a été implanté dans plusieurs régions où la baisse de la clientèle scolaire primaire et secondaire était si forte qu'il n'était plus rentable de maintenir des écoles distinctes et que le transport à l'école la plus proche n'était pas possible. Dans le secteur anglophone, ce genre de modèle ? maternelle à secondaire V ? a été implanté dans bon nombre de territoires sous la juridiction des commissions scolaires anglophones, dont, entre autres, Chibougamau, Noranda, Maniwaki et Pontiac.

Une deuxième approche, bien que peu répandue en ce moment, comprend le partage d'une école ou d'un établissement entre les populations anglophone et francophone d'une même municipalité. Ce modèle de cohabitation existe dans la municipalité de Sutton, dans la région de l'Estrie, où on retrouve deux actes d'établissement pour une seule bâtisse. Bien que les deux écoles maintiennent leurs propres projets éducatifs, le modèle permet aux écoles de partager certaines activités et aux commissions scolaires de réduire les coûts d'entretien de la bâtisse et d'autres coûts fixes.

Bien que les commissions scolaires aient adopté des modèles d'organisation différents afin de maintenir les écoles qui font face à une baisse de clientèle, il y a bon nombre d'enjeux qui ont un impact direct sur la rentabilité future de ces écoles et méritent l'attention et l'intervention du gouvernement.

n(17 heures)n

Le premier enjeu traite de la gestion des ressources humaines, notamment le recrutement et la rétention du personnel enseignant et d'autres personnels. Les commissions scolaires anglophones, surtout celles desservant les régions, continuent à avoir beaucoup de difficultés à recruter et retenir du personnel enseignant et d'autres personnels. C'est au deuxième cycle du secondaire, concernant l'enseignement des mathématiques et des sciences ainsi que certaines options de formation professionnelle, que ce problème est le plus aigu.

Des recherches préliminaires semblent indiquer que les universités du Québec ont de la difficulté à recruter des élèves aux facultés des sciences de l'éducation et que le taux de rétention des enseignantes et enseignants anglophones de moins de 35 ans est de deux à six fois inférieur à celui de leurs collègues francophones. Donc, le portrait qui se dessine dans le secteur anglophone en est un où le recrutement aux facultés des sciences de l'éducation est inférieur aux contingents fixés où les jeunes enseignantes et enseignants sont plus susceptibles de quitter le Québec pour aller travailler dans d'autres provinces et où les enseignantes et enseignants en région sont plus susceptibles de quitter pour des postes d'enseignement dans les centres urbains plus grands.

À court terme, nous recommandons que le gouvernement introduise un programme universitaire spécialisé d'un an ? on veut dire 12 mois ? afin de permettre à des diplômés et à des diplômés sans baccalauréat en éducation de devenir des enseignants et enseignantes.

Un deuxième enjeu relié à la gestion des ressources humaines dans le contexte de la décroissance est la mobilité du personnel.

Les conventions collectives négociées au cours des dernières décennies prévoient un régime de sécurité d'emploi pour le personnel syndiqué et imposent certaines restrictions concernant le mouvement du personnel. Une de ces restrictions est le droit d'une personne salariée permanente et en disponibilité de refuser tout poste vacant situé à plus de 50 km de son lieu de travail ou de son domicile.

Dans le contexte où certaines commissions scolaires auront à faire face à la croissance ou à la décroissance de clientèle dans leur territoire et où les écoles sont souvent situées à plus de 50 km l'une de l'autre, les commissions scolaires seront obligées d'engager du personnel enseignant ou autre personnel pour combler des postes vacants refusés par le personnel excédentaire ou en disponibilité dans la même commission scolaire.

Le processus de négociation des dernières décennies a créé un modèle de gestion des ressources humaines qui ne répond plus aux besoins du système scolaire et qui est difficile à réconcilier avec un mouvement croissant pour une utilisation plus efficace des fonds publics. Étant donné que deux tiers des coûts de l'éducation sont consacrés aux ressources humaines, le gouvernement se doit de bien étudier le problème de la mobilité du personnel et des mesures de recyclage.

Le troisième enjeu qui demande une attention particulière et aiderait les petites écoles, notamment en région, est l'accès aux nouvelles technologies de la communication. Plus particulièrement, le projet annoncé dans le budget de novembre dernier afin d'appuyer les écoles et autres établissements locaux à accéder au réseau de télécommunications à grande vitesse et à large bande a été un pas dans la bonne direction. Toutefois, il faut augmenter les fonds alloués à cette fin et accélérer le processus d'approbation des projets.

Une autre mesure connexe qui demande plus d'appui et d'attention de la part du gouvernement est la formation à distance. Ce genre d'enseignement et d'apprentissage est d'un intérêt particulier aux petites écoles rurales et peut devenir un modèle très efficace pour offrir des services éducatifs aux élèves qui autrement n'auraient pas accès à de la formation ou à des cours spécialisés.

Un quatrième enjeu d'un intérêt particulier au secteur anglophone est la disponibilité des services complémentaires.

Au cours des dernières années, il est devenu de plus en plus difficile pour les écoles anglophones, notamment en région, d'assurer des services complémentaires reliés au mandat des organismes de santé et de services sociaux locaux ou régionaux.

En plus du problème des services disponibles en anglais, nous croyons qu'il existe un manque de coordination entre le MEQ et le MSSS quant à leurs mandats respectifs et l'absence d'un plan qui permettrait d'offrir des services soutenus et durables aux élèves. Le phénomène de la croissance pose aussi certains problèmes. Par exemple, les commissions scolaires font face à un retard avant d'obtenir les approbations nécessaires pour la planification et la construction d'autres places d'étudiants résultant de la croissance. Dans ces cas, les commissions scolaires doivent faire face à la surpopulation des locaux ou à des installations à location non propices aux élèves et au personnel enseignant. De plus, la frustration du milieu scolaire augmente avec le besoin de plus d'espace pour, entre autres, les services de garde.

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. Paterson.

M. Paterson (Ron): Ça va. C'est presque terminé. En conclusion, si le gouvernement a l'intention de faire face à ces problèmes et d'offrir des services éducatifs de qualité à travers le Québec, il doit s'engager fermement à y consacrer les ressources et à mettre en place les conditions qui favorisent la réussite de tous les élèves. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Paterson. M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Merci, Mme la Présidente. Dans les écoles anglophones primaires, secondaires, et en particulier donc surtout au niveau secondaire, à quoi ressemble le phénomène du décrochage? Est-ce qu'il est semblable à celui qu'on observe dans les populations francophones ou est-ce que... Mon sentiment, c'est qu'il est moins élevé, mais je ne sais pas. Est-ce que vous pourriez me répondre sur cet aspect-là?

M. Paterson (Ron): Je vais demander à M. Cyr de répondre.

M. Cyr (John): Je n'ai pas les statistiques précises, mais je sais que, lorsqu'on a fait des études les années antérieures, elle était plus basse un petit peu. Cependant, la mesure n'est pas précise.

Un décrochage au Québec, c'est un élève qui n'est plus au Québec l'année suivante, alors que, du côté anglophone, lorsque nous avons des écoles qui sont proches d'un territoire, par exemple dans les bases militaires, etc., lorsqu'on parle de décrochage, il peut y avoir des écoles qui ont un décrochage de 40 % ou 50 % alors qu'il y a un taux de décrochage réel de zéro, puisque les élèves sont partis dans d'autres provinces pour être scolarisés. Donc, la mesure de décrochage, je sais que le ministère est en train de travailler pour essayer de la préciser davantage actuellement, mais il y a un problème de mesure quand même, mais je crois qu'elle est plus basse actuellement, quand même.

M. Paquin: Ce que j'observe sur le terrain dans ma région, chez les jeunes adolescents, chez les enfants de 10 ans et plus, chez les jeunes adolescents, c'est un grand sentiment d'appartenance à l'institution chez les anglophones, de loin plus grand que celui que j'observe chez les francophones. Chez les francophones, vous allez avoir un bal de finissants éventuellement, ce que vous avez aussi chez les anglophones, mais vous avez aussi la cérémonie de la collation des grades qui est amenée et qui crée une émulation, une stimulation. Les étudiants des autres années sont présents. Très souvent, tous les grades étant présents dans la même institution, ça a un courant d'émulation qui va... Les gageures se prennent sur qui va avoir les prix, et tout ça. C'est un aspect, en tout cas, la collation des grades, qui m'apparaît quelque chose de positif. Mais, dans l'ensemble, il y a comme un... En tout cas, je crois que les étudiants anglophones ont un sentiment d'appartenance institutionnelle assez fort à leur école. Est-ce que vous vérifiez cette donnée-là ou est-ce que c'est inexact?

M. Cyr (John): Je crois qu'il y a une vérité dans ce que vous dites. Si on regarde les modèles, par exemple, de maternelle à secondaire V, il y a des élèves que ça fait 11 ans qui sont dans la même école. Ils sont peut-être dans le nombre de 200 élèves. Tout le monde les connaissent, ils se connaissent entre eux. Les enseignants et tout le personnel enseignant et de l'école connaissent tous les élèves. Donc, il y a possiblement, dans les petites écoles... Je ne dirais pas que c'est un phénomène nécessairement anglophone ou francophone mais un phénomène de petites écoles, lorsque le modèle de maternelle à secondaire V est employé. Je crois qu'il y a un phénomène qui donne une plus grande appartenance à leur école.

n(17 h 10)n

M. Paquin: Il y a une partie du territoire de Montréal, sur l'île de Montréal, où à certains moments on a parlé que la génération des adultes qui pouvaient avoir des enfants avait tendance à se déplacer vers les autres provinces et faire en sorte donc que des jeunes enfants soient moins nombreux, notamment dans la partie de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, qu'ils ne l'auraient été s'il y avait moins eu de déplacements vers d'autres provinces. Est-ce que c'est une donnée qui se vérifie, ça, ou est-ce qu'elle est inexacte?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Polenz.

M. Polenz (Jeff): C'est difficile à vérifier, dans le sens qu'on n'a pas toutes les données nécessaires pour effectivement faire une validation importante. Mais ce qu'on constate, c'est que, depuis quelques années quand même, il y a une nette perte du côté anglophone en termes de l'immigration intercanadienne, puis ça, ce n'est pas un phénomène nouveau, ça existe quand même depuis quelques années. Par contre, ce qu'on constate aussi, c'est qu'on observe aussi le phénomène de l'étalement urbain, et on le voit surtout dans les couronnes de Montréal, nord de Montréal, dans la région Laval, les Basses Laurentides, ainsi que dans certains secteurs de la Montérégie. Alors, il y a un certain déplacement à l'intérieur de la grande région de Montréal, il y a certainement un déplacement, mais il y a une nette perte vers les autres provinces.

M. Paquin: Chez nous, en Montérégie, dans la région de Saint-Jean plus particulièrement, ce à quoi on a assisté, c'est qu'on a tenté de consolider la présence des secondaires III, IV et V à Saint-Jean même parce que les gens étaient déplacés vers Longueuil, Saint-Hubert, et c'étaient de très longues distances, comme celles que vous avez évoquées tantôt. Au moment où on a rapatrié ces classes-là, ce que ça a eu comme effet, c'est que les familles se sont installées à proximité de cette école-là et il y a eu une croissance de population plus grande qu'on aurait pu s'y attendre, parce que ce n'est pas seulement les étudiants qu'on ne déplaçait plus qui venaient à l'école, mais là, désormais, les familles s'implantaient parce que l'école était disponible pour tous les grades.

Ça a amené une situation où vous avez une croissance de population très importante dans l'école anglaise de notre MRC, qui est située à Saint-Jean-sur-Richelieu. Dans un quartier de banlieue à proximité, qui est la zone de Saint-Luc, vous avez une population francophone qui vient s'installer en banlieue et qui travaille à Montréal et qui accroît la population des jeunes francophones. Mais, partout ailleurs, vous avez un dépeuplement des écoles francophones, ce qui fait qu'on se retrouve dans une situation actuellement où vous avez une grande croissance dans l'école anglophone, une croissance dans la population francophone à qui on ne donne pas d'école mais on met les enfants dans les autobus et on les déplace dans la zone rurale, et, évidemment, ça crée des désagréments majeurs.

Il est très difficile de trouver des solutions. On en a imaginé qui impliquaient par exemple des échanges de services de l'éducation des adultes d'une école francophone qu'on aurait agrandie, d'un partage d'écoles avec la commission scolaire anglophone, et ça pose toute la question de l'utilisation optimale des écoles qui sont disponibles dans le tissu urbain.

Tous ces déplacements, ces transports étudiants sont entraînés par le fait que ce n'est pas la même autorité qui a la gestion de toutes les écoles. Si c'était la ville de Saint-Jean qui était propriétaire des écoles anglophones, francophones et l'éducation aux adultes où est la MRC, je peux vous dire qu'il n'y aurait pas de problème de relocalisation des classes. Mais, voilà, on a un certain nombre d'autorités, et ça rend difficile, ça rend vraiment difficile l'optimisation des ressources. J'aimerais ça que vous réagissiez à cet aspect-là de mes propos.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Polenz.

M. Polenz (Jeff): Oui. En tout cas, je ne connais pas tous les détails dans le cas précis auquel vous faites référence.

M. Paquin: Utilisez-le comme une illustration, puis peut-être répondre de façon plus générale.

M. Polenz (Jeff): Oui. Je dois avouer que, de façon générale, ce que je constate, il y a quand même, disons, une certaine amélioration qu'on devrait apporter à la gestion du parc immobilier du réseau scolaire, et, quand je parle de ça, le réseau scolaire francophone et anglophone partout. Je pense que, dans une période où de plus en plus on a toutes les redditions de comptes par rapport à l'utilisation des fonds publics, il y a quand même une certaine, je pense, une certaine responsabilité qu'on a à tous les niveaux et dans tous les secteurs de faire en sorte qu'on soit à la recherche de solutions créatives.

On a fait référence dans notre mémoire à la situation incertaine à laquelle... où, dans l'Estrie, dans la municipalité de Sutton, on a les deux commissions scolaires qui partagent le même territoire, qui cohabitent dans un même édifice...

M. Chagnon: Macdonald-Cartier... dans l'École internationale.

M. Polenz (Jeff): Oui. Alors, il y a des exemples partout. Et là on se retrouve où les deux commissions scolaires ou bien les deux communautés locales sortent «winner-winner», gagnante-gagnante, dans le sens que les commissions scolaires font des économies assez importantes au niveau de l'entretien des immeubles, au niveau des coûts de chauffage et sont capables de faire en sorte que les élèves sont capables de demeurer dans la région.

C'est le modèle qui marche, qui fonctionne, mais qui repose sur un élément très important, c'est que l'expérience nous démontre que cette évolution-là, ça se fait par étapes et ça implique par définition la consultation exhaustive avec les communautés et que les communautés locales doivent embarquer. Ça ne marche pas si les autorités, que ce soit au niveau des commissions scolaires ou ailleurs, penchent et tranchent pour les communautés. Il faut que les communautés locales s'embarquent dedans, et, au moment où ils sont d'accord, c'est le modèle qui est très efficace et qui fonctionne. Alors, de façon plus générale, d'après moi, il y a quand même des choses, disons, plus poussées qu'on peut faire de ce côté-là, à travers la province.

M. Paquin: On a entendu aujourd'hui des gens du monde municipal qui ont des attentes vis-à-vis des commissions scolaires, notamment quand il s'agit de fermer une école ou de gérer une question d'un quartier particulier et qui sont en demande pour avoir une consultation obligatoire des autorités municipales. On a entendu des gens aussi qui souhaitent qu'il y ait un plan de développement de l'ensemble du territoire québécois et qui y voient la possibilité de retombées en termes de meilleur équilibre au niveau des effectifs.

On a entendu aussi la Fédération des commissions scolaires francophones qui est très prudente et qui a des réserves vis-à-vis de ce genre d'éléments, qui n'ont pas fermé la porte à toute discussion, mais on sent bien qu'il y a actuellement une certaine méfiance ? appelons ça comme ça ? entre le monde municipal et le monde scolaire au niveau, là, des discussions qu'on a pour aller vers des vraies solutions à long terme, et ça commande une certaine sérénité. Alors, j'imagine que le temps peut faire son oeuvre, à condition qu'on en appelle, bien sûr, à la bonne volonté des uns et des autres.

Mais, à ce moment-ci, moi, j'aimerais savoir: Quelle est la qualité de vos liens avec le milieu municipal dans l'ensemble du territoire pour l'ensemble des consultations qui ont cours, que ce soit au niveau du sommet vers les régions, que ce soit la question des petites écoles, que ce soit l'ensemble des données? Comme Association des commissions scolaires anglophones du Québec, vous qualifieriez comment les relations que vous entretenez avec le monde municipal?

M. Paterson (Ron): D'après moi, on n'a pas eu beaucoup d'expériences là-dedans. Mais, selon les expériences qu'on a déjà eues, pour moi, on n'a pas eu tellement de problèmes. Et puis peut-être mes collègues en savent plus, mais, par rapport à la croissance, un groupe de commissions scolaires, on a franchement eu des bons résultats, mais pour les bâtisses et pour... S'il y a la bonne foi et le monde s'embarque là-dedans et puis ils sont prêts à parler, on peut résoudre les problèmes, c'est presque sûr. Je ne sais pas si, vous autres, vous en avez eu, des expériences.

n(17 h 20)n

M. Cyr (John): Je pourrais peut-être parler pour certaines commissions scolaires qui ne sont pas en milieu urbain. Parfois, nous couvrons un territoire qui est si énorme que le contact municipal avec la commission scolaire, via l'école ? parce que, dans le fond, c'est une école plus qu'une commission scolaire, normalement, qui est en cause ? n'est pas évident. Dans certaines de nos commissions scolaires, certains de nos territoires, on peut avoir 16, 20 MRC, même.

Je peux donner un exemple. Certaines écoles... Je peux en nommer. Au Lac-Saint-Jean par exemple, on a deux écoles dans la région de Jonquière qui couvrent un territoire énorme. Les autobus sont transportés de partout dans la région. Donc, le nombre de MRC impliquées, le nombre de groupements municipaux qui sont impliqués peut être assez élevé, et le contact municipal n'est pas une mauvaise volonté de la part ou de l'autre, c'est presque inexistant, à ce moment-là. Par contre, dans d'autres régions plus urbaines, ce n'est pas la même réalité.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? M. le député, ça va aussi?

M. Geoffrion: Ça répond un petit peu à la question que je voulais aborder. Je voulais aborder un petit peu la question des relations avec la communauté.

La Présidente (Mme Bélanger): O.K. Alors, M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente, et bienvenue, M. Paterson, M. Cyr et M. Polenz, et nous vous remercions de votre présentation.

Si je comprends, évidemment, vous avez beaucoup de petites écoles, notamment à l'extérieur de la région de Montréal. Cependant, vos prévisions indiquent qu'il y a une certaine stabilité au cours des prochaines années, par rapport à votre clientèle. Vous dites: Nous avons à peu près 105 000 élèves présentement, on prévoit une diminution à 102 800 d'ici 2006-2007, si j'ai bien compris. Alors, ça veut dire quand même, vous avez une stabilité relative de votre clientèle scolaire et non pas une diminution importante, comme on retrouve dans certaines régions du côté francophone, où il y a des diminutions de clientèles majeures.

Et est-ce que je comprends également que, au cours des dernières années, vous n'avez pas procédé à des fermetures d'écoles? Est-ce que... Au cours des dernières années, y a-t-il eu des fermetures d'écoles, comme c'est arrivé du côté des commissions scolaires francophones?

M. Paterson (Ron): Bien, franchement, on a fermé des écoles. Mais je ne sais pas si vous connaissez la situation à Montréal.

M. Marcoux: Oui.

M. Paterson (Ron): Souvent, on a des parents qui nous poursuivent ? j'ai été impliqué moi-même là-dedans ? puis on a tellement de difficulté à fermer les écoles, comme vous le savez. Mais les chiffres, quand on parle d'une baisse de 105 000 jusqu'à 102 000, dans ce coin-là, il faut savoir que, en ville, on prévoit une croissance un peu, et c'est en dehors de Montréal qu'on a vraiment des problèmes. Et puis c'est pour ça que c'est une situation, d'après moi ? et, peut-être, M. Cyr peut parler ? assez critique. On devrait se pencher sur les suggestions qui étaient préparées par notre comité qui ont des solutions qu'on devrait considérer sérieusement pour ces élèves qui sont dans des situations très graves, d'après nous. John?

M. Cyr (John): Il y a une pression énorme aussi de fermer l'école quand c'est une école qui n'est pas juste de municipalité mais c'est une MRC. C'est la seule école dans la MRC, puis, lorsqu'on la ferme, il y a une pression énorme.

On a des écoles de 20 élèves, puis 25, puis 30 élèves qui fonctionnent à travers la province. Donc, je crois qu'il y a un effort de maintenir les écoles ouvertes, définitivement, quand c'est la dernière école dans la MRC. Oui, je pense que vous avez raison quand vous dites: Il y a une hésitation à fermer certaines écoles. Mais je pense qu'il y a quand même certaines régions où il y a les commissions scolaires qui ont fermé leurs écoles, ils ont restructuré le réseau scolaire au niveau de leurs bâtiments et de leurs clientèles. Ça se fait à travers la province, au niveau anglophone autant que du côté francophone. Cependant, quand on parle en région que c'est la dernière école de la MRC, c'est évident que ça prend une autre proportion que lorsqu'on parle de restructurer la clientèle.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Vous avez évoqué évidemment quelques solutions fort intéressantes, là: quand vous parlez du regroupement d'écoles primaires et secondaires; également de la cohabitation dans le même bâtiment d'écoles francophone, anglophone, l'exemple de Sutton. Est-ce que vous avez également, à l'intérieur de celle-là ou d'autres, là, des écoles multiniveaux ou des écoles où on enseigne à un, deux, trois, quatre et cinq dans la même école? Une même enseignante peut enseigner à des élèves de un, deux, trois ensemble? Est-ce que vous avez ces expériences-là et est-ce que ce sont des expériences qui sont positives à la fois pour les enseignantes et les enseignants puis également pour les élèves?

M. Cyr (John): Oui. Nous avons des écoles à travers la province qui sont multiniveaux. Les écoles de 20 élèves, par exemple, au primaire, c'est évident que c'est un multiniveaux. Il n'y a pas autrement, c'est la seule façon. Nous avons des écoles multiniveaux, même de façon courante et c'est très répandu, on respecte la réforme.

Nos cycles, souvent, c'est des cycles de première et deuxième années, troisième et quatrième ensemble, cinq et six ensemble. Ce n'est pas nécessairement parce qu'on n'a pas précédé l'intention du ministère de l'Éducation, mais c'est par obligation de le faire.

Cependant, ceci étant dit, toutes les indications qu'on a reçues à date indiquent que l'apprentissage est aussi bon sinon meilleur dans ces situations-là. Sauf qu'il y a une résistance, habituellement de la part des parents et des enseignants, mais c'est quand même des modèles, lorsqu'ils sont bien appliqués, qui fonctionnent bien puis il y a un bon apprentissage qui a lieu.

M. Marcoux: Peut-être une autre question. Vous avez, en fait, parlé, avec raison, d'enjeux reliés aux ressources humaines. D'une part, il y a les questions de mobilité de personnel ? et on pourra y revenir ? mais vous avez mentionné des problèmes à recruter des enseignantes et des enseignants, notamment en mathématiques et en sciences. Ce que vous suggérez, c'est que des personnes soient diplômées ? un bac ? et qu'elles fassent un an, puis, après ça, qu'elles puissent enseigner. Est-ce que cette hypothèse-là, votre suggestion a déjà été discutée avec le ministère? Et est-ce que le ministère est ouvert à mettre en oeuvre ce que vous suggérez, là, d'avoir des spécialistes qui font un an puis qu'après peuvent aller enseigner?

M. Paterson (Ron): C'est un modèle qui existait dans le passé, comme peut-être vous le savez. Moi, j'ai été un enseignant qui a subi un programme d'un an. Heureusement, moi, j'ai mon bac en sciences et puis je n'ai pas eu de difficulté à trouver un poste. Mais ça, c'est un phénomène qui est... Je suis presque sûr que le secteur qui sert les francophones ont le même problème que nous autres pour les sciences, pour les mathématiques. Mais c'est des suggestions qui étaient faites dans notre mémoire. Jeff, maybe you want to add something?

Une voix: ...

M. Cyr (John): O.K. À ce sujet-là, nous avons tellement de difficultés parfois à recruter du personnel dans les matières, par exemple les mathématiques, etc., que nous sommes en train d'expérimenter ou piloter avec des cours à distance en technologie.

Cette année par exemple, on a trois commissions scolaires en partenariat qui offrent les mathématiques, secondaires IV et V, chimie-physique, sciences physiques et histoire 414 dans 10 écoles, pour deux raisons: premièrement, c'est parce qu'il n'y a pas assez de clientèle pour avoir un professeur attitré ou par manque de qualifications des enseignants. Ça peut être un ou l'autre.

Nous avons 80 élèves actuellement qui suivent des cours à distance dans ces domaines-là, dans 10 écoles différentes du Québec, pour essayer de pallier en particulier à cette problématique-là, et, l'autre partie, c'est la problématique du nombre d'étudiants dans une école secondaire.

M. Marcoux: Dernière question: Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire si cette expérience-là s'avère positive et...

M. Cyr (John): À distance?

M. Marcoux: ...à distance et pour les étudiants? Si je comprends, c'est au secondaire.

M. Cyr (John): Oui.

M. Marcoux: Est-ce que, au primaire également, ça pourrait se faire ou si c'est beaucoup plus difficile de le faire au primaire, compte tenu de l'âge des élèves?

n(17 h 30)n

M. Cyr (John): L'an passé, qui était la première année qu'on a essayé ce pilote-là dans trois écoles, avec 12 étudiants en mathématiques 536, qui se trouve à être le cours plus élevé en mathématiques, nous avions 12 étudiants. Onze ont réussi. C'est un taux de réussite assez élevé pour un cours aussi... Puis les clientèles qui étaient concernées n'étaient pas nécessairement les meilleurs étudiants, c'étaient des étudiants d'habiletés différentes, pour la première partie de votre question.

La deuxième partie, du primaire, je trouve que c'est problématique, à moins qu'on ait une meilleure technologie, puisqu'on parle de l'aspect humain et du contact avec l'enseignant, etc. Au secondaire, lorsqu'on a fait notre expérience, on a fait venir tous les jeunes qui ont participé pour faire un «postmortem» ? je ne sais pas comment on dit ça en français ? et le taux de satisfaction des élèves était tellement élevé qu'ils ont dit que c'était comme une salle de classe.

Et le deuxième point, c'est que, pour eux, le plus important qu'ils ont manqué, c'était le contact entre eux autres et avec l'enseignant. Mais, par contre, ça ne veut pas dire qu'on devrait lâcher, parce que je crois qu'il y a des solutions à apporter pour raffiner ce modèle-là, et nous sommes en train de travailler sur les meilleures pratiques actuellement pour essayer d'ajuster le modèle pour qu'il soit plus convivial pour l'aspect humain, pour mettre plus de contact humain. Et c'est pour ça, la bande passante, si elle peut être un petit peu plus large, peut-être qu'on va pouvoir avoir des opportunités avec nos jeunes.

La Présidente (Mme Bélanger): Parfait. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci. Alors, messieurs, merci de nous éclairer de la sorte. Moi, je voudrais vous ramener sur un côté qui est peut-être un peu plus problématique pour les familles et pour les enfants qui sont voyagés sur de très longues distances. Pour avoir rencontré à quelques reprises les gens d'Eastern Québec ici dans la région de Québec, pour avoir aussi tenté... et je peux comprendre aussi que les budgets sont quand même assez limités, les budgets de transport évidemment. Donc, on a des enfants qui voyagent une heure pour aller à l'école, une heure pour revenir. Je sais que ça se fait dans d'autres secteurs aussi, mais prenons le vôtre. On a des enfants qui partent de la Côte-de-Beaupré, puis qui rentrent à Québec, puis qui vont à St. Pat's, ici, en ville, ou à Québec High School.

Est-ce que vous avez noté chez ces enfants-là une plus grande difficulté de concentration, d'apprentissage, ou est-ce que ces jeunes se sont habitués finalement, puisqu'il fallait le faire, il fallait se déplacer une heure pour aller à l'école puis une heure pour y revenir, sans compter évidemment qu'il y en a plusieurs qui n'ont pas déjeuné parce qu'ils n'ont pas eu le temps, parce qu'ils n'ont pas le goût de déjeuner à six heures moins quart, le matin, avant d'arriver à l'école? Je suis sûre que vous vous êtes penchés là-dessus, là, mais avez-vous des statistiques pour nous démontrer au niveau de l'apprentissage, donc au niveau de la réussite, par conséquent, qu'il n'y a pas de conséquence là-dessus ou bien est-ce qu'il y en a une?

M. Paterson (Ron): On n'a pas vraiment de statistiques là-dessus, vraiment, d'après tout ce que je sache, moi-même, même à Montréal. Mais, pour parler des écoles de Québec...

Mme Delisle: Mais je sais qu'ailleurs aussi c'est comme ça, là.

M. Paterson (Ron): ...bien, peut-être que M. Cyr est mieux placé que moi pour répondre.

M. Cyr (John): Des statistiques, non, on n'a pas de recherches précises là-dessus. Cependant, nous avons beaucoup de rétroaction de parents et d'historiques qui nous indiquent quand même qu'il y a une problématique qui se vit à ce moment-là. C'est entendu que les élèves apprennent à vivre avec, mais ce n'est pas une situation idéale, loin de là, et quand ils arrivent à l'école, ils ont une journée rallongée d'au moins deux heures sinon plus.

Mme Delisle: L'autre question que je voulais vous poser, c'était sur la capacité de rétention des professeurs, et je veux faire un lien avec les élèves qui quittent, peut-être parce que les parents sont transférés ailleurs, mais aussi avec les élèves ou les enfants qui, pour des raisons de distance, les parents feraient le choix de les sortir de l'école anglophone pour les envoyer dans les écoles francophones. Est-ce que vous avez constaté un phénomène qui irait se mettre un peu... cette possibilité où la distance aurait pris tellement... ce serait tellement gros finalement comme stress familial, stress au niveau des études... Est-ce que vous avez des statistiques qui pourraient nous guider à ce niveau-là?

M. Polenz (Jeff): Globalement, puis là je ne fais aucune distinction entre ce qui se passe dans les régions et les centres urbains, mais globalement, de mémoire, il y a encore à peu près 11 000 à 12 000 élèves qui sont admissibles à recevoir l'enseignement en anglais et qui sont, par choix ? le choix de leurs parents, là ? dans le réseau francophone. C'est un montant assez élevé.

Mme Delisle: Mais, dans ce choix-là, c'est un choix à réponses multiples, là. Ça peut être parce qu'ils veulent l'éducation en français, mais ça pourrait être pour les raisons que je viens d'évoquer aussi, là.

M. Polenz (Jeff): Voilà. Mais on n'a pas de précisions, ou je n'ai pas de données qui pourraient dégager, là, disons, une explication plus détaillée.

Mme Delisle: J'aurais une dernière question à vous poser. Elle est peut-être complètement hors champ, mais elle m'est inspirée par votre expérience dans les Cantons-de-l'Est où vous nous dites que les deux commissions scolaires, anglophone et francophone, ont conjugué tous leurs efforts finalement pour maximiser l'utilisation des équipements, etc. Est-ce que ça pourrait aller jusqu'à avoir les mêmes professeurs qui seraient bilingues, à titre d'exemple, qui pourraient ? je sais que c'est hors champ là, mais...

M. Paterson (Ron): C'est vraiment hors champ.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Ce n'est pas hors champ, c'est hors normes.

Mme Delisle: Bien, hors normes... Bien oui, mais on est ici pour mettre tout sur la table. Pourquoi on ne pourrait pas... Pourquoi, dans des régions éloignées, si un tel exercice se faisait, on ne pourrait pas avoir un professeur de sciences qui est bilingue, à titre d'exemple, et qui pourrait donner à la fois dans une classe francophone son cours de sciences 101, puis l'autre, ce serait sciences 101, là, je ne sais pas?

M. Chagnon: Garde ta question pour la Centrale des syndicats du Québec...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Polenz (Jeff): Oui, mais j'y répondrais en disant que c'est peut-être...

Mme Delisle: Vous n'y avez jamais pensé?

M. Polenz (Jeff): Oui, j'y ai pensé, j'y ai même rêvé.

Mme Delisle: Bon. Alors, ce n'est quand même pas si hors champ que ça, là.

M. Polenz (Jeff): Mais je pense que c'est une question qu'il faudrait poser peut-être plutôt à Mme Richard et à son collègue qui dirige le Syndicat des enseignants anglophones. Il y a toute une problématique d'accréditation qui est autour de cette question-là, et la gérance même des conventions collectives provinciales. Alors...

Mme Delisle: Je ne veux pas vous mettre en boîte puis vous n'êtes pas obligé de me répondre, mais est-ce que, dans un monde où on pourrait sauver nos écoles, nos dernières écoles, à la fois dans nos régions francophones et pour la survie de l'école anglophone également, parce que ça fait partie intégrante de notre histoire ou de nos moeurs quand même, là, dans un monde idéal, est-ce que c'est quelque chose qu'on pourrait tenter de mettre en oeuvre, de viser à faire si les syndicats étaient d'accord puis si tout le monde avait la même vision finalement du développement, là? On a chacun nos agendas, je le sais.

M. Paterson (Ron): Non, je sais, mais peut-être, comme on met tout sur la table, que c'est une des options qu'on pourrait au moins étudier, voir si c'est valable, si c'est pour le bien de tous, spécialement pour les élèves, et puis... Mais les portes ne sont pas fermées, hein, de mon point de vue.

Mme Delisle: Je trouve ça intéressant que vous disiez «pour le bien de l'élève», «si c'est pour le bien de l'élève», parce que, dans le fond, on est ici pour le bien de l'élève. Alors, c'est pour ça qu'on est ici.

M. Paterson (Ron): On est tous ici pour la même raison, c'est pour les élèves. C'est tout.

M. Chagnon: Mais on se souvient qu'il y a 20 ans...

M. Paterson (Ron): C'est pour ça que je suis ici, à Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Delisle: Bienvenue dans la capitale.

M. Paterson (Ron): Merci bien.

M. Chagnon: On se souvient qu'il y a 20 ans il y avait des professeurs mis en disponibilité dans le secteur anglophone, très, très nombreux. On aurait voulu les avoir dans le secteur francophone pour venir enseigner l'anglais puis on n'était même pas capable de faire ce transfert-là.

M. Paterson (Ron): Oui, vous avez raison.

Mme Delisle: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est terminé. Alors, merci, M. Paterson, M. Cyr et M. Polenz, de votre participation, et on vous souhaite un bon retour. J'ajourne les travaux...

Des voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Un instant, s'il vous plaît. J'ajourne les travaux...

Des voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): MM. les députés!

Des voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Bien, ce n'est pas fermé encore. J'ajourne les travaux à mercredi, 25 septembre, 9 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 40)


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