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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 28 mars 1990 - Vol. 31 N° 24

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation particulière sur la proposition tarifaire d'Hydro-Québec pour l'année financière 1990-1991


Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place, afin que la commission de l'économie et du travail puisse procéder à une consultation particulière sur la proposition tarifaire d'Hydro-Québec pour l'année financière 1990-1991. Alors, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements, ce matin?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a un remplacement: Mme Marois (Taillon) est remplacée par M. Lazure (La Prairie).

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Du côté ministériel, y a-t-il des remplacements? Aucun. Donc, nous continuons nos travaux avec la même sérénité avec laquelle nous les avons commencés, hier. Ce matin, dans la première heure, soit de 10 heures à 11 heures, nous aborderons le cadre financier. Alors, Mme la ministre.

Cadre financier

Mme Bacon: Merci, M. le Président. Nous sommes, ce matin, dans le cadre financier. Hydro-Québec n'a pas réalisé les objectifs financiers qui étaient prévus l'an dernier, en raison, principalement, de faibles conditions d'hydraulicité qui se sont poursuivies en 1989. Cependant, il est clair que l'entreprise dort améliorer sa situation financière à court terme, afin d'être en mesure de réaliser l'important programme d'investissements indispensables à la satisfaction des besoins en électricité, à l'amélioration de la qualité du service et à la promotion de l'efficacité électrique.

Par ailleurs, à l'exception des hausses tarifaires proposées, ce qui retient surtout l'attention, dans le cadre financier, c'est la forte croissance des charges d'exploitation, et vous me permettrez de revenir là-dessus parce que, depuis 1987, ces dépenses évoluent à un rythme annuel moyen de 13,2 %. Pour l'année 1990, le taux de croissance s'établira à 12 %, soit presque le triple du taux d'inflation prévu.

Dans ce contexte de hausse tarifaire qui est nettement supérieure à l'inflation, il m'apparaît primordial qu'Hydro-Québec démontre qu'elle a rationalisé ses charges d'exploitation au moment où elle demande aux consommateurs de contribuer fortement au rétablissement de sa situation financière. À cet égard, j'apprécierais qu'Hydro-Québec nous présente les efforts qu'elle déploie pour contrôler la croissance future des charges d'exploitation et - je termine là-dessus - j'aimerais que vous me fassiez part, j'oserais dire, des sacrifices que l'entreprise s'imposera pour limiter l'augmentation des dépenses, parce que les ministères sectoriels ici sont habitués à faire des sacrifices.

M. Boivin (Claude): M. le Président, Mme la ministre, avec raison, se réfère à l'augmentation importante de nos charges d'exploitation, au cours des dernières années, lorsqu'on les compare au taux d'inflation. Je pourrai revenir, à la fin de mon exposé ou de ma réponse, sur les éléments qui ont justifié, au cours des dernières années, des augmentations aussi importantes de nos dépenses d'exploitation. Pour ce qui est de l'avenir, c'est-à-dire des années 1990 et suivantes, il est évident que nous sommes préoccupés par le taux de croissance de nos dépenses d'exploitation et que, comme le dit Mme la ministre, nous sommes non seulement prêts, mais que nous nous sommes déjà imposés un certain nombre de sacrifices.

Il est évident, par contre, que, dans un contexte où les années 1990, 1991, 1992 sont, jusqu'à un certain point, des années où il y a un certain rattrapage à faire au niveau des travaux d'entretien afin d'assurer une meilleure qualité du service pour les années futures, il n'est pas toujours possible, à ce moment-là, de contenir complètement l'évolution des dépenses d'exploitation. C'est-à-dire qu'il y a un certain nombre de dépenses que nous devrons absolument faire, dans les années qui viennent, pour nous permettre de réaliser notre mission fondamentale qui est de fournir un service de qualité.

Maintenant, au niveau des objectifs de contraindre les dépenses, il est évident, tout d'abord, que la première condition pour réaliser ces objectifs, d'ailleurs, condition que nous avons mentionnée comme étant un prérequis à la réalisation globale de notre pian de développement, est le règlement harmonieux et satisfaisant de nos conventions collectives, puisque, dans la négociation actuelle des conventions collectives, je dirais que les deux grands enjeux sont la capacité de fournir un service de qualité et la capacité, également, d'améliorer notre productivité.

En ce qui concerne la croissance des dépenses d'exploitation en 1990 par rapport, si on on veut, à nos dépenses d'exploitation de l'année 1989, je vais vous donner les principales composantes qui justifient les augmentations. Comme vous allez le voir, en fait, il y a tout d'abord un montant de 72 000 000 $ additionnel, en 1990 par rapport à 1989, qui touche directe-

ment les programmes d'amélioration de la maintenance, le programme PAM, et d'amélioration de la qualité du service tant en distribution qu'en clientèle, le programme PAQS, dont nous avons abondamment traité hier. Il y a 31 000 000 $ de croissance des travaux de base parce que l'entreprise Hydro-Québec est une entreprise en croissance dont les ventes continuent à croître. Il y a un gros montant pour le combustible de la centrale de Tracy et là, ça touche directement le contexte de la faible hydraulicité, soit 47 000 000 $. Il y a également 24 000 000 $ additionnels pour les économies d'énergie, les programmes d'économie d'énergie et 20 000 000 $ pour l'intensification de la formation.

Par contre, il y a des réductions, si on veut, conjoncturelles, soit une réduction de 67 000 000 $ qu'il faut enlever quand on compare par rapport à l'an dernier, puisque, l'an dernier, en 1989, nous avons payé des compensations de 67 000 000 $ pour racheter la bi-énergie commerciale et institutionnelle pour faire face à la faible hydraulicité dans une planification à hydraulicité moyenne. C'est une dépense qui devrait être non récurrente. Il y a également 30 000 000 $ de moins d'amortissement de subventions pour les différents programmes commerciaux qui avaient été mis en place et réalisés depuis le début des années quatre-vingt Donc, les amortissements, en 1990, sont de 30 000 000 $ de moins. Alors, ça vous explique les principales composantes des écarts, par rapport à l'année 1989, pour l'année 1990.

Mme Bacon: Mais il va de soi, M. le Président, que le contrôle des coûts doit être rigoureux dans une entreprise de la taille d'Hydro-Québec. C'est une entreprise qui a des activités qui sont décentralisées sur une base régionale. On constate que, depuis les trois dernières années, la croissance des charges d'exploitation a été systématiquement plus élevée que ce qui avait été prévu au départ. Est-ce qu'on a une explication pour ça? C'est plus que la dernière année et même que les trois dernières années.

M. Boivin: M. le Président, Mme la ministre touche deux volets. Le premier, l'aspect contrôle des coûts, comme tels, à l'intérieur de l'entreprise et, le deuxième, le dépassement des budgets d'exploitation prévus au cours des dernières années, dépassement qui semblerait laisser présumer que le contrôle des coûts est déficient.

Sur le premier volet, au niveau du contrôle des coûts, il faut comprendre qu'à Hydro-Québec, comme vous le mentionnez, nous avons une opération qui est largement décentralisée et que le gros de nos effectifs, de nos budgets et également de nos dépenses est réalisé dans nos 10 régions administratives et dans 46 secteurs d'exploitation à travers la province. Au niveau du contrôle des coûts, il faut comprendre que, lorsque les budgets sont alloués en début d'année, chaque unité administrative décentralisée, pour obtenir ces budgets, a dû présenter ses programmes de travail, ses justifications. Des budgets fermes sont donc alloués à chaque unité administrative décentralisée au début de l'année. Lorsqu'en cours d'année il arrive des imprévus - et dans une entreprise de notre taille, il arrive à travers l'année des imprévus - la région ne peut engager des dépenses au-delà de son budget sans revenir au central, c'est-àdire au siège social pour faire autoriser des dépenses extraordinaires. Je pourrais vous donner des exemples. Ainsi, il est évident que, dans la préparation des budgets régionaux, on ne prévoit pas les bris majeurs, comme dans le cas d'un transformateur à LG 4, l'an dernier, qui a brûlé. Alors, ce sont des dépenses de 1 500 000 $ ou 2 000 000 $. À ce moment-là, il est évident qu'il faut réparer ou remplacer le transformateur. Mais la région ne peut pas procéder sans être venue chercher, au niveau central, une autorisation de budget qui, à ce moment-là, est puisé à même la réserve corporative pour imprévus, mais qui est géré, en fait, au niveau du siège social. En général, ce type de dépenses extraordinaires doit être approuvé par un des deux présidents.

Pour ce qui est, maintenant, des explications des écarts ou des dépassements de budget au cours des dernières années, si vous me le permettez, je vais commencer par l'année 1987. Nous avions effectivement, en 1987, un budget d'exploitation de 1 000 000 196 $ et les dépenses ont été de 1 250 000 000 $, soit un dépassement de 4,2 %. Les principaux écarts ou les principales dépenses extraordinaires qui expliquent ce dépassement, c'est qu'en 1987 nous avons fait une radiation de 25 000 000 $ concernant le "monitoring" ou le suivi qui avait été effectué de 1982 à 1987 sur l'état du barrage Daniel-Johnson, le barrage de Manie 5. En 1987, nous n'avons pas réalisé entièrement le budget des immobilisations, et on sait qu'au niveau de l'exploitation il y a des dépenses qui sont facturées à l'immobilisation, particulièrement des dépenses de personnel. Lorsque nous réduisons les investissements, le personnel est utilisé pour faire des travaux d'entretien et d'exploitation. À ce moment-là, ça explique les 24 000 000 $ Nous avons eu, également, des prises d'inventaire en distribution, une normalisation de nos inventaires en distribution pour environ 15 000 000 $. Par contre, il y a eu quelques points légèrement favorables, donc, quand on fait le total de ces chiffres-là, on arrive à nos 50 000 000 $ de dépassement. Les deux principaux éléments, cette année-là, étaient la radiation d'étude sur le barrage Daniel-Johnson et une réduction de nos dépenses d'immobilisation.

En 1988, nous avons eu un dépassement de 61 000 000 $ de notre budget d'exploitation. Ces 61 000 000 $ proviennent, en grande partie, premièrement, du début des mesures de faible

hydraulicité. On se souviendra qu'en juin 1988 nous avons décidé de prendre une première mesure qui était le rachat de la partie restante des contrats de nos bouilloires industrielles et nous avons versé à nos clients, pour racheter ces contrats-là, 19 000 000 $. Nous avons également, en 1988, compte tenu des résultats que nous avions obtenus sur les appels d'offres, décidé d'abandonner le projet d'installer un cable sous-marin pour relier les Îles-de-la-Madeleine. Nous avons dû, à ce moment-là, faire une radiation des frais d'ingénierie et d'études qui avaient été engagés pour un montant de 13 000 000 $. On se souviendra également qu'en 1988 notre continuité de services s'était détériorée et nos frais de dépannage, c'est-à-dire de réparation d'équipements lors de pannes, avaient augmenté, par rapport à nos prévisions, de 10 000 000 $. Ce qui explique, finalement, dans les grandes lignes, les 61 000 000 $.

Pour l'année 1989, nous avons dépassé nos prévisions budgétaires de 151 000 000 $, ce qui a probablement été la plus mauvaise année au cours de la décennie. Il faut se rappeler qu'en 1989 nous avons décidé de racheter, à l'automne, les contrats de biénergie. Ça nous a obligés - et ce n'était certainement pas prévu dans nos dépenses d'exploitation - à verser 76 000 000 $ à nos clients. Nous avons également dû, en juin dernier, décider, compte tenu de la faible hydraulicité, de faire fonctionner la centrale de Tracy à plein temps, à compter de la fin de l'été, ce qui a entraîné des dépenses de combustible de l'ordre de 26 000 000 $ qui n'étaient pas prévues. Nous avons également, en 1989, décidé d'introduire autour de la centrale de Gentilly, notre centrale nucléaire, une provision pour fins de déclassement éventuel de la centrale. On sait qu'au moment de la mise au rancart d'une centrale nucléaire il y a des dépenses importantes engagées pour déclasser la centrale, alors nous avons commencé, en 1989, tout comme le font les autres utilités canadiennes, à imputer des charges pour bâtir une réserve pour le déclassement de la centrale, ce qui a amené, en 1989, des dépenses additionnelles ou des charges additionnelles à notre budget d'exploitation de 9 000 000 $. Nous avons également, au cours de 1989, nettoyé - si je peux dire - les dossiers de mauvaise créance que nous avions, ce qui a entraîné un montant très important, soit 41 000 000 $ de mauvaises créances que nous avons radiées, à la fin de l'année 1989, pour nous permettre de réduire ou de ne pas traîner dans nos livres des montants à percevoir, que nous savons que nous ne percevrons jamais. Ça explique les variations de dépenses.

Mme Bacon: Dans votre graphique "Charges d'exploitation par kilowattheure vendu, ventes totales", la situation d'Hydro-Québec s'est considérablement améliorée de 1981 à 1986. Toutefois, on observe une détérioration impor- tante, de l'ordre de 20 %, de 1987 à 1989, en dépit d'une normalisation des charges. Alors, le taux de charges par kilowattheure est, en effet, passé de 0,008 $ - on peut dire, je pense - ou 0,0089 $ à 0,0107 $ en deux ans, seulement. Comment peut-on expliquer cette dégradation soudaine d'un indice aussi important, d'autant plus que la normalisation soustrait l'effet de la faible hydraulicité et aussi des nouveaux programmes? Comme deuxième question, est-ce qu'il est réaliste d'espérer qu'Hydro-Québec puisse prendre les mesures nécessaires pour ramener, à tout le moins, les charges normalisées par kilowattheure vendu au même niveau qu'en 1987, soit à 0,008 $ par kilowattheure ou 0,0089 $ par kilowattheure?

M. Boivin: M. le Président, je vais peut-être, pour répondre à cette question-là, demander de projeter la diapositive PRO-92, pour permettre de visualiser et d'expliquer de façon aussi claire que possible l'évolution de nos coûts d'exploitation par kilowattheure vendu, c'est-à-dire par unité de notre produit vendu, et vous donner un peu les prévisions et ce que nous entendons réaliser dans les années qui viennent.

Mme la ministre, vous vous référiez bien à cette...

Mme Bacon: C'est ça.

M. Boivin: ...donnée-là. On remarquera que l'évolution de nos coûts unitaires d'exploitation par kilowattheure vendu a varié énormément au cours des dernières années. Lorsqu'on se reporte au début des années quatre-vingt, ces coûts se situaient à 0,0125 $, environ, par kilowattheure vendu. Il faut se rappeler qu'à ce moment-là nous étions dans la période de mise en service du complexe La Grande et que nous avions également des surplus assez importants. Malheureusement, ce graphique ne remonte que jusqu'à 1981, mais, effectivement, s'il remontait à la fin des années soixante-dix, soit, par exemple, en 1978, on se rendrait compte que le coût unitaire d'exploitation par kilowattheure vendu se situait à environ 0,01 $.

De 1983 à 1987, comme on l'a déjà expliqué ici, en commission parlementaire, dans les années passées, Hydro-Québec a fait des efforts importants de rationalisation de sa structure, de ses effectifs, et nous avons réussi à diminuer nos coûts d'exploitation par kilowattheure vendu à près ou à un peu moins de 0,009 $ par kilowattheure. On remarque maintenant, de 1988 à 1990, une tendance à la hausse, de sorte que nous revenons aux environs de 0,0115 $ par kilowattheure vendu. Si on tenait...

Je devrais mentionner immédiatement qu'en 1988, particulièrement en 1989 et 1990-1991, nous avons un certain rattrapage à faire, parce que je pense que les deux années 1986-1987, qui sont les années les plus basses, illustrent un peu le

fait qu'il y a du rattrapage, c'est-à-dire que, dans la rationalisation que nous avons faite, on a peut-être serré la vis un petit peu trop dans certaines activités d'entretien et d'exploitation. Ça baissé, effectivement, nos dépenses d'exploitation par kilowattheure vendu en dessous d'un seuil historique et probablement, non seulement probablement, mais ça explique effectivement qu'il y ait un certain rattrapage à faire. Et cette période de rattrapage-là, nous sommes présentement dedans.

Si on tient compte maintenant des programmes, en fait, on remarquera, dans le graphique, que la bande bleue, pour les années 1990, 1991 et 1992, représente les efforts additionnels que nous allons faire pour la qualité du service. Maintenant, je voudrais bien faire remarquer ici que ces efforts additionnels-là sont non seulement du rattrapage, mais, comme on l'a expliqué hier, des efforts qui vont nous permettre de nous diriger vers des nouveaux standards de qualité du service, c'est-à-dire des standards plus élevés, au point de vue qualité du service, que ceux que nous avons connus dans les années soixante-dix. (10 h 30)

La bande rouge indique les dépenses que nous allons engager pour les programmes d'économie d'énergie, ce qui veut dire que nos dépenses d'exploitation par kilowattheure vendu vont avoir tendance à augmenter, au cours des dernières années, jusqu'à environ 0,0115 $. Mais si on normalisait, c'est-à-dire si on ne faisait pas ces efforts additionnels dans les années qui viennent, on voit qu'en 1992 nous revenons à environ 0,01 $ par kilowattheure vendu, ce qui est à peu près notre niveau historique. Maintenant, il est important, je pense, en regardant ces graphiques-là, de réaliser que, lorsque nous réussissons à revenir à des niveaux historiques, ça implique, effectivement, qu'il y a des gains de productivité, parce que les coûts de base, les coûts de nos kilowattheures vont en augmentant et que les coûts de nos installations vont en augmentant. Je pense, peut-être, que la meilleure preuve de l'augmentation historique de la productivité à Hydro-Québec est probablement le fait que, depuis 1963, en termes réels, si on exclut l'inflation, nos tarifs d'électricité se situent au même niveau et, pourtant, les installations que nous avons mises en service depuis 1963 sont des installations qui coûtent de plus en plus cher.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Alors, en vertu de nos règles d'alternance, c'est au parti de l'Opposition d'intervenir. M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Bon, critères financiers. En page 9, au chapitre d'introduction de sa proposition de plan de développement, Hydro-Québec nous présente les quatre grands ratios qui devraient, finalement, orienter l'ensemble de sa politique tarifaire. Elle nous parle d'un taux de couverture des intérêts d'au moins 1 %, d'un taux de capitalisation d'au moins 25 %, d'un taux de rendement sur l'avoir propre égal ou supérieur au coût moyen de la dette et d'un taux d'autofinancement d'au moins 30 %. Je pense que c'est important, au moment où on se parle, avant de parler de la tarification comme telle, de bien éclaircir ce que ça veut dire tout ça. J'ai donc quelques questions à poser à Hydro-Québec là-dessus, étant donné que ce sont là les grands paramètres qui, pour Hydro-Québec, semblent absolument immuables pour pouvoir garder sa cote de crédit sur les marchés internationaux, etc., pour en arriver à être une entreprise rentable

D'abord, concernant le taux de couverture des intérêts. D'après les calculs faits par HydroQuébec - et là-dessus j'espère qu'on s'entend bien - la couverture des intérêts, dans la mesure où Hydro-Québec, dans sa façon de les calculer, fait des bénéfices, tant et aussi longtemps qu'Hydro-Québec va générer 0,01 $ de bénéfice, son taux de couverture des intérêts va être nécessairement supérieur à 1 %, dans la mesure où, dans la formule retenue par Hydro-Québec, au niveau de la couverture des intérêts, on calcule le bénéfice net avant intérêts et pertes de change, plus le revenu de placement. Donc, en termes de chiffres, on a 2 800 000 000 $ plus 76 000 000 $ qui sont les revenus de placement et on divise ça par la charge des intérêts bruts. Alors, dans la mesure où les bénéfices nets, avant intérêts et pertes de change, sont supérieurs aux charges d'intérêts bruts, ce qui permet d'avoir des bénéfices nets, son taux de couverture est toujours égal à 1 % ou supérieur à 1 %

M. Drouin (Richard): M Labonté.

M. Labonté (Michel): De fait, c'est vrai que pour établir le ratio, nous utilisons nos bénéfices avant intérêts et pertes de change. Cependant, les intérêts que nous prenons dans le calcul de ce ratio-là comprennent deux montants: des intérêts sur les immobilisations qui sont en exploitation, donc ces intérêts-là apparaissent à l'état des résultats, auxquels on ajoute les intérêts sur les constructions en cours et ceux-là n'apparaissent pas aux résultats d'opération de l'année, ce qui veut donc dire que, dans les faits, selon le niveau des intérêts durant la construction, on peut dire que, pour avoir un ratio égal à un, il faut un bénéfice au moins égal aux intérêts sur les immobilisations en construction. Pour vous donner un exemple, en 1988, sur une dépense d'intérêt de l'ordre brut de 2 338 000 000 $, il y avait 257 000 000 $ qui étaient imputables aux travaux de construction en cours, de sorte que, dans l'état des résultats, les intérêts qui apparaissaient étaient plutôt de l'ordre de 2 000 000 000 $, les 2 338 000 000 $ moins 257 000 000 $, si on fait juste le raisonnement à ce niveau-là, de sorte qu'il aurait fallu,

pour avoir un ratio égal à un, un bénéfice au moins égal aux intérêts imputés à la construction en cours.

M. Claveau: Ça, les intérêts imputés à la construction en cours, dans le fond, c'est ce qu'on retrouve au poste... Cette année, c'est 323 000 000 $, ce sont les intérêts capitalisés.

M. La bonté: En 1989, exactement. Exact.

M. Claveau: Donc, ça veut dire que, par exemple, pour 1989, le taux est égal à un dans la mesure où vos bénéfices nets sont égaux ou supérieurs à 323 000 000 $.

M. Labonté: Exact. En une période où les investissements, comme à l'heure actuelle, s'en vont croissants, la charge d'intérêts sur le poste Construction en cours, pour Hydro-Québec, s'en va en croissant.

M. Claveau: Qu'est-ce que vous prévoyez comme charge d'intérêts pour l'année qui vient, et surtout au niveau des intérêts capitalisés?

Une voix: Pour l'année 1990?

M. Labonté: 378 000 000 $, pour l'année 1990. Ça s'en va en croissant, en 1991 et 1992, pour atteindre 606 000 000 $ en 1992, selon nos estimations actuelles.

M. Claveau: Bon, ça veut dire, ça, au moment où l'on se parle, avec un bénéfice net, comme cette année, de 565 000 000 $, qu'on en a encore pour quelques années avant d'avoir un réel problème au niveau du taux de couverture des intérêts.

M. Labonté: Je pense que je me permettrais de faire un commentaire, à ce stade; c'est qu'il serait très dangereux, pour une entreprise comme Hydro - évidemment, à cause de la variabilité et de la sensibilité de son profit net, par exemple, à différents événements, comme on l'a vu, la faible hydraulicité - de budgéter en début d'année avec un ratio de couverture des intérêts égal un. On pourrait facilement se retrouver en fin d'année avec un résultat net qui est inférieur à un. Donc, je pense qu'on verra les éléments de sensibilité peut-être plus tard, là, dans les résultats d'exploitation d'Hydro-Québec, mais il serait très dangereux de budgéter avec un ratio égal à un en début d'année, étant donné les circonstances actuelles, d'autant plus qu'on sait que ce ratio-là s'en va inévitablement en croissant, avec le programme d'investissement, de sorte que, si on veut lisser les augmentations tarifaires, on se doit d'optimiser les augmentations en fonction du niveau de l'année en cours, mais de l'endroit où l'on s'en va inévitablement à un an ou deux.

M. Claveau: O.K. Ça semble vous préoccuper beaucoup. Maintenant, comparons à Hydro Ontario. Hydro Ontario a un taux de couverture des intérêts, au moment où l'on se parle - le taux qui est déclaré - qui est à peu près semblable à celui d'Hydro-Québec, à quelques centièmes près, là, sauf que la méthode de calcul d'Hydro Ontario n'est pas la même que celle d'Hydro-Québec. On n'a pas tout à fait les mêmes paramètres qu'on retrouve dans la formule. Si on calculait le taux de couverture des intérêts d'Hydro Ontario en utilisant exactement la même formule qu'Hydro-Québec, on arriverait, pour Hydro Ontario, à un taux de couverture de 0,85. Pourtant, que je sache, la situation d'Hydro Ontario n'est pas beaucoup plus critique que celle d'Hydro-Québec.

M. Labonté: Michel Labonté. Est-ce que je peux...

M. Claveau: Oui...

M. Labonté: ...apporter une précision à ce niveau-là? Effectivement, le ratio d'Hydro Ontario était à 0,86 à la fin de 1988. Cependant, nous aimerions porter à votre attention un élément qui apparaît très important dans l'appréciation de ce ratio-là. Selon nos "estimés" très préliminaires - nous avons essayé de comparer - ce ratio-là est calculé selon la même façon qu'Hydro-Québec, vous avez raison de le dire. Cependant, Hydro Ontario n'utilise pas la même formule d'amortissement de ses immobilisations en cours qu'Hydro-Québec. En effet, Hydro Ontario procède en utilisant une dépréciation linéaire, alors qu'Hydro-Québec utilise une formule de dépréciation qui est un peu exponentielle, qui utilise un taux réel de 3 %.

Ceci a une incidence majeure quand on fait le calcul de la couverture des taux des intérêts. En effet, si on prend le bilan d'Hydro Ontario en 1988, elle avait près de 27 000 000 000 $ d'actif avant la dépréciation accumulée, 6 300 000 000 $ de dépréciation accumulée, ce qui donnait 20 600 000 000 $ d'actif immobilisable, en gros.

Ce chiffre-là se comparait, pour HydroQuébec, à 25 500 000 000 $. Cependant, avec 20 600 000 000 $ d'actif à déprécier, Hydro Ontario a une dépense de dépréciation de 811 000 000 $, ce qui lui donne un taux effectif de près de 4 % de dépréciation. Quand on regarde Hydro-Québec, avec 25 500 000 000 $ d'actif depreciable en 1988, nous avions une dépense d'amortissement de 538 000 000 $, ce qui nous donne un taux de 2,1 %.

Si on opère la correction, si Hydro Ontario avait la même politique de dépréciation de son actif qu'Hydro-Québec et qu'on utilisait un taux de 2,1 %, ceci aurait pour effet d'augmenter le bénéfice d'Hydro Ontario de 378 000 000 $. Quand on applique ça au taux de couverture des intérêts, et Hydro Ontario, selon nos

estimations préliminaires, avait un bénéfice net de 2 367 000 000 $, avant intérêt et perte de change nous ajoutons ces 378 000 000 $, ce qui nous reporte à 2 745 000 000 $ de bénéfice avant intérêt et perte de change. Si on soustrait la dépense d'intérêt brut, comme Hydro-Québec, avec la méthode d'Hydro-Québec, qui comprend les intérêts imputés aux résultats de l'année en cours, plus les intérêts imputés à la construction en cours, ça nous donne un montant de 2 752 000 000 $. Le ratio, donc, devient égal à un, à peu près exactement: 2 745 000 000 $ versus 2 752 000 000 $.

Donc, l'élément majeur de comparaison... Il faut comparer des choses comparables et la politique d'amortissement des deux entreprises est le facteur, d'après nous, explicatif majeur qui fait en sorte qu'on ne peut pas dire que les deux entreprises, quand elles sont évaluées par les milieux financiers, ont deux mesures différentes dans les faits.

M. Claveau: O.K. Tout ça pour dire, dans le fond, que, même avec les calculs, en ramenant semblables les critères de dépréciation et tout ça, on arrive avec une couverture des intérêts pour Hydro Ontario qui reste toujours inférieure à celle qu'Hydro-Québec a actuellement, de 1,26. Ce n'est pas, finalement, une augmentation, cette année, de la tarification à Hydro-Québec qui va faire en sorte de mettre en danger la couverture des intérêts d'au moins un.

M. La bonté: Je pense qu'il faut réitérer le fait que, pour l'année 1990, avec les augmentations demandées par Hydro-Québec, on se retrouverait à 1,05 et non pas à 1,26 et qu'il serait, à mon point de vue, imprudent de planifier et de budgéter avec un ratio de un en début d'année, à l'heure actuelle.

M. Claveau: Mais au-delà des prévisions à long terme, vous nous confirmez finalement que, dans le fond, votre premier critère du taux de couverture des intérêts serait tout à fait respecté, même s'il n'y avait pas d'augmentation de tarifs pour l'année qui vient.

M. Labonté: Non. On a produit une analyse de sensibilité dans le cadre du plan de développement où, si l'augmentation projetée avait été de 4,5 % au lieu de 7,5 %, tel qu'il avait été proposé l'année dernière, le taux de couverture des intérêts serait passé à 1,02 au lieu de 1,05. On trouve ça à la page 129 dans le plan de développement. On a une analyse de sensibilité des ratios par rapport à un taux d'augmentation des tarifs. (10 h 45)

M. Claveau: Bon. Là-dessus, de toute façon, on reste dans le chiffre. Toute capitalisation d'au moins 25 %, le deuxième ratio que vous nous présentez. D'abord, on va s'entendre pour dire que le taux de capitalisation - je vais me retrouver dans mes chiffres - ça, selon les formules que vous utilisez, c'est bien l'avoir de l'actionnaire divisé par l'avoir de l'actionnaire plus la dette totale de la compagnie C'est ça?

Une voix: C'est ça

M. Claveau: Bon, O.K. Lavoir de l'actionnaire, c'est 8 300 000 000 $, l'avoir de l'actionnaire qui comprend - et pour ça je me réfère même à vos propres textes - le capital-actions, 4 300 000 000 $ en gros, et les bénéfices non répartis, 3 800 000 000 $; ça veut dire 8 233 000 000 $. Ça, c'est l'avoir de l'actionnaire. La dette à long terme d'Hydro-Québec, ou enfin la dette totale d'Hydro-Québec, c'est 25 700 000 000 $ en gros. Bon, ça nous donne effectivement 24 et quelque chose pour cent, ce qui est très près de vos 25 %, sauf que. C'est là que je reviens à ma question d'hier À la page 65 des états financiers d'Hydro-Québec, on retrouve un item - et on en parlait tout à l'heure, d'ailleurs - qui s'appelle frais d'emprunt capitalisés au poste Construction en cours, les intérêts capitalisés qui, eux, viennent diminuer de 323 000 000 $ le coût total des intérêts et qui s'ajoutent donc au bénéfice net pour un montant de 323 000 000 $.

Ce bénéfice net, dans la mesure où il n'est pas remis à l'actionnaire sous forme de dividendes, va s'additionner aux bénéfices non répartis et, à ce moment-là, augmente la valeur de l'avoir de l'actionnaire dans la compagnie. Donc, ma question est à savoir s'il est vrai de dire que plus Hydro-Québec emprunte pour faire des grands travaux d'immobilisations - ces travaux-là vont entrer dans les charges d'exploitation d'Hydro-Québec juste au moment où on va commencer à produire un kilowatt avec les équipements - tant et aussi longtemps que c'est le cas, alors plus les intérêts qui courent sur ces emprunts sont capitalisés, plus ils viennent d'année en année augmenter le bénéfice net et, par le fait même, plus ils viennent augmenter l'avoir de l'actionnaire en s'en allant dans les bénéfices non répartis, augmentant ainsi le taux, évidemment, de capitalisation.

M. Labonté: Le taux de capitalisation, tel qu'il est prévu au cours des trois prochaines années, si on se réfère au tableau 6.14 du plan de développement à la page 134, s'en va légèrement en décroissant au cours des trois années, même avec les hausses tarifaires demandées II passe de 25,9 % en 1989 à 24,4 % en 1992 Donc, une des raisons qui sous-tendent les demandes de hausses tarifaires, c'est qu'il est dangereux de voir dévier et descendre le taux de capitalisation de façon trop brusque, surtout en période où les investissements d'Hydro-Québec deviennent très importants et où le programme d'emprunt va atteindre des niveaux records au cours des

prochaines années.

Donc, le taux de capitalisation, même en tenant compte du fait qu'il n'y a pas de dividendes qu'il est prévu de verser au gouvernement au cours de ces trois années-là, justement parce que le taux de capitalisation de 25 % n'est pas respecté, fait en sorte que tous les bénéfices restent dans l'entreprise, mais, malgré ça, la croissance des bénéfices n'est pas suffisante, en relation avec le programme d'investissements que nous avons, pour maintenir le taux de capitalisation. Au contraire, il se détériore légèrement. Donc, on est dans une situation où le bénéfice d'Hydro-Québec ne croît pas à un rythme suffisant en fonction du programme d'investissements qu'on a, tel qu'on le prévoit. On est donc vraiment en équilibre précaire, à ce stade-ci, au niveau du taux de capitalisation.

M. Boivin: II y aurait lieu d'ajouter également, M. le Président, que selon la théorie évoquée, à ce moment-là, les intérêts qui sont imputés à la construction en cours sont pris en compte également lorsqu'on établit le taux de couverture des intérêts. Selon cette théorie-là, plus on va imputer des intérêts à la construction en cours, plus on va augmenter l'avoir de l'actionnaire. En contrepartie, il est certain que le taux de couverture des intérêts irait en se détériorant si on ne contrôlait pas, en fait, ce poste budgétaire là.

M. Claveau: C'est quoi l'intérêt pour la compagnie, pour la société Hydro-Québec, de maintenir un taux de capitalisation d'au moins 25 %?

M. Labonté: M. le Président, je pense qu'il faut refaire possiblement un léger historique sur l'approche qu'Hydro-Québec, de même que le gouvernement qui est le garant d'Hydro-Québec sur tous ces emprunts sur les marchés financiers, a maintenue depuis au moins une vingtaine d'années. Hydro-Québec et le gouvernement, dans l'approche des milieux financiers, ont toujours... il y a eu convergence. C'est ce qui fait la force d'Hydro-Québec dans les milieux financiers, à l'heure actuelle, entre les objectifs poursuivis par le gouvernement et par Hydro-Québec à ce sujet-là. Le taux de capitalisation de 25 % et le taux de couverture des intérêts comme politique d'entreprise, c'est une politique établie de longue date et qui a été soutenue par l'ensemble des gouvernements qui se sont succédé au cours d'au moins les vingt dernières années, de sorte que ce qu'on est venu retrouver dans la loi de 1981 au niveau de ce taux minimum là, c'est que la loi de 1981 n'a fait que confirmer une pratique très bien établie et qui remontait à plusieurs années de manière à assurer les milieux financiers que ces taux-là seraient respectés et que le gouvernement ne déclencherait pas, par exemple, un dividende qui mettrait en danger la situation financière de l'entreprise.

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, en vertu de la règle d'alternance, Mme la ministre.

Mme Bacon: J'aurais peut-être eu une question à poser à M. Claveau, mais il ne faudrait pas qu'il embête son chef avec les 25%.

M. Claveau: II n'y a rien d'embêtant là-dedans, absolument rien, Mme la ministre.

Mme Bacon: M. le Président, Hydro-Québec mentionne qu'elle entend poursuivre ses efforts afin de limiter la croissance des charges d'exploitation, notamment par l'entreprise d'une productivité accrue. Je ne peux faire autrement que faire le lien et un lien très étroit entre la hausse des tarifs et la productivité d'Hydro-Québec. Est-ce que vous êtes en mesure de quantifier les gains de productivité attendus au cours des trois prochaines années et de nous indiquer leur impact sur la croissance des charges d'exploitation?

M. Boivin: M. le Président, afin de donner une réponse à cette question, je demanderais qu'on projette la diapositive PRO-41. Effectivement, j'aimerais mentionner, comme entrée en matière, que l'amélioration de la productivité pour les années qui viennent est une préoccupation très importante à Hydro-Québec et qu'effectivement, dans nos prévisions pour les années futures, il y a des provisions pour des accroissements assez importants de la productivité au niveau de l'entreprise. Pour quantifier ces prévisions d'accroissement de la productivité, je vous réfère à la diapositive qui est présentée maintenant. Pour tenter de simplifier les choses sur la méthode utilisée, malheureusement, je me réfère aux chiffres qui sont complètement en bas de la diapositive.

Prenons à titre d'exemple l'année 1992. Nous voyons que les charges d'exploitation en cents par kilowattheure sont prévues au niveau global à 0,0116 $ et vous reconnaissez là les chiffres qu'on avait dans la diapositive que j'ai projetée précédemment. On voit, à ce moment-là, que ça représente un taux d'accroissement de 2,7 %. Si on tient compte des prévisions de taux d'inflation à 5,2 % pour l'année 1992 et que nos charges d'exploitation en cents par kilowattheure vont croître à un rythme de 2,7 %, ça veut dire que l'écart entre l'IPC - l'évolution de l'inflation - et nos charges d'exploitation représente des gains de productivité.

Si on appliquait cette méthode-là à nos prévisions pour les années 1990, 1991, 1992, on se rendrait compte que nous prévoyons dans nos cadres financiers et nos prévisions de dépenses d'exploitation, pour les trois années qui viennent, des gains cumulatifs de productivité de 4,9 %,

soit 5 % en chiffre rond, ce qui représente pour chacune des années, en fait, parce que c'est cumulatif, des gains nets de l'ordre de 28 000 000 $ en 1990, c'est-à-dire qu'il y aurait 28 000 000 $ de dépenses de plus si nous ne prévoyions pas ces gains de productivité, en 1991, de l'ordre de 40 000 000 $ et en 1992, de l'ordre de 86 000 000 $, ce qui représente un gain de productivité cumulatif d'à peu près 5 %.

Mme Bacon: II est aussi mentionné, à la page 10 de votre mémoire sur la tarification, que les programmes de gestion de la consommation et d'économies d'énergie vont permettre de contrôler l'augmentation des coûts de fourniture. Afin de nous permettre peut-être d'apprécier les impacts de ces programmes, est-ce que vous pouvez nous indiquer quelle serait l'augmentation des coûts sans ces programmes?

M. Boivin: M. le Président, pour répondre à la question de Mme la ministre, il y a peut-être lieu d'expliquer très rapidement pourquoi on dit, en fait, que des économies d'énergie vont apporter une réduction du taux de croissance des coûts de fourniture. Il faut comprendre que les nouvelles installations que nous mettons en service coûtent de plus en plus cher parce que, comme tout bon gestionnaire, au cours des derniers 50 ans au Québec, on a toujours choisi en priorité de développer les ouvrages hydroélectriques qui étaient au meilleur marché et graduellement on s'en va vers ceux qui coûtent de plus en plus cher. Donc, lorsque nous pouvons contenir le taux de croissance de la demande, nous ne devançons pas ou nous retardons la construction de certains équipements. Compte tenu que la tarification à notre clientèle québécoise est établie selon les coûts moyens de production, ce qui veut dire que c'est le coût moyen de production de toutes nos centrales - et ça inclut, par exemple, les très vieilles centrales qui datent du début du siècle, qui sont totalement amorties, aussi bien que les dernières centrales que nous avons mises en service, soit celles du complexe La Grande où le coût de production est de l'ordre de 0,027 $ par kilowattheure - compte tenu de ça, lorsque nous comprimons le taux de croissance de la demande, nous réduisons le taux d'augmentation des coûts de fourniture. (11 heures)

Pour ce qui est maintenant spécifiquement des programmes d'économies d'énergie, si nous n'avions pas les programmes d'économies d'énergie que nous préconisons dans le plan de développement que nous avons déposé, effectivement, c'aurait à peu près pour impact de nous amener non pas sur le scénario cible tel que nous le préconisons, mais sur le scénario fort de prévision de la demande, parce que l'écart entre notre scénario cible et notre scénario fort est approximativement égal aux prévisions d'écono- mies d'énergie que nous anticipons avec les programmes, ce qui aurait pour effet d'augmenter le rythme de nos coûts de fourniture d'environ 0,75 % par année plus rapidement, au cours des années qui viennent.

Le Président (M. Bélanger): M. le député d'Ungava.

Une voix: M. le député de L'Assomption.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de L'Assomption, en vertu de la même...

M. Parizeau: M. le Président, j'aimerais revenir quelques instants., quelques instants qui nous restent - je comprends qu'il reste 10 minutes - sur la question du cadre financier. Si on regarde le tableau de sensibilité du cadre financier, hausse tarifaire, qu'Hydro-Québec nous a présenté, il me paraît clair que, pour 1990, l'impact d'une hausse de 7,5 %, comme celle qui est demandée, et 4,5 % qui, j'imagine, devait être conforme à l'inflation dans la projection de 1989 - c'est probablement de là que ça vient - ça fait assez peu de différence sur la couverture des intérêts. On se comprend, ce n'est pas ça qui donne une marge - dont parlait M. Labonté tout à l'heure - ce n'est pas ça qui donne une marge terrible. Passer d'une couverture d'intérêt de 1,02 % pour une augmentation de tarif de 4,5 % à 1,05 % pour une augmentation de 7,5 %, ça ne change pas grand-chose. C'est plus significatif cependant en 1991. C'est clair. Mais ce qu'il y a de remarquable, c'est que sur la base d'une projection de tarif de 4.3 % pour 1991 la couverture des intérêts, cependant, monte assez clairement, de toute façon, au-dessus de 1,08 %. Sur cette base-là, aller chercher 7,5 % deux fois, pour se sentir un peu plus "secure" quant à la couverture des intérêts, ça paraît quand même une hausse importante de tarif pour un objectif comme celui-là.

Évidemment, c'est une question de jugement, jusqu'à un certain point, je comprends. Quand on arrive au taux de capitalisation, là c'est clair, que ça soit 4,5 % d'augmentation - enfin, une augmentation conforme à l'inflation pour les trois prochaines années - ou bien 7,5 %, les 25 % de capitalisation ne seront pas atteints. Donc, il n'y aura pas de dividendes à payer au gouvernement Mais ça, du point de vue des équilibres financiers du gouvernement, au moins pour ce qui a trait au déficit, ça ne change rien puisque, maintenant, ce sont tous les profits d'Hydro-Québec qui sont incorporés dans les états financiers du gouvernement. Si le gouvernement veut avoir un dividende, maintenant, c'est pour une autre raison que pour ses besoins financiers nets. Ce n'est pas pour son déficit. Ça ne change rien à son déficit

Là encore, on revient aux 25 %, règle de prudence sûrement Je pense que M Labonté

faisait correctement recours à des discussions qu'il a bien connues dans des gouvernements précédents autour de moins de 25 %. Seulement, ça n'est qu'une règle, au fond, de prudence. Dans le passé, c'est arrivé à plusieurs reprises qu'Hy-dro-Québec tombe en dessous de 25 %. Pour même quelques années successivement. 1976, 1977, 1978, Hydro-Québec s'est promenée entre 23 % et 23,8 %; 1985, 1986, 1987, 24,1 %, 24 %, 24,9 %. Ce que je veux dire ici, c'est qu'il n'y a pas d'obligation juridique quant aux 25 %, encore que, quand on tombe en bas de cela, je comprends que l'on puisse devenir un peu nerveux en disant: II ne faudrait quand même pas que ça se détériore trop et trop longtemps. Et on prend des mesures de correction. Ce serait plutôt de ce côté-là que les hausses de tarif demandées sembleraient justifiées, plus que pour la couverture des intérêts. l_a question qu'on peut se poser est la suivante: Alors qu'on envisage, à cause de l'introduction de la TPS, et à cause d'une correction qu'on veut apporter à l'interfinance-ment, une augmentation, en douze mois, de 26 % dans les factures d'Hydro pour le résidentiel, est-ce que c'est le moment de faire tous les efforts possibles pour maintenir les 25 % ou bien si, comme c'est arrivé dans le passé, on dit: Compte tenu de l'ampleur inévitable de la hausse des factures d'électricité pendant deux ans, eh bien, est-ce qu'on ne serait pas mieux d'avoir des hausses de tarif plus faibles que celles qui sont prévues et, dans ces conditions, d'être un peu plus en bas de 25 % qu'on ne le serait, de toute façon? Quitte à dire, quand la TPS et tout le reste aura été absorbé dans le système: Bon, là, on remontera davantage. Vous pensez quoi de mon scénario?

M. Boivin: M. le Président, le chef de l'Opposition a raison de dire que ces critères financiers là, ce ne sont pas des critères financiers légaux que nous sommes tenus de respecter à tout prix. Je pense qu'au moment où la Loi sur Hydro-Québec a été modifiée pour inclure ces critères-là, le législateur avait été prudent de ne pas s'attacher à long terme dans une situation où éventuellement, compte tenu, comme nous l'avons démontré au cours des dernières heures et hier, que le domaine de l'hydroélectricité représente quand même des risques importants au niveau des fluctuations particulièrement causées par l'hydraulicité... Le législateur a été prudent de ne pas se placer dans une situation où, éventuellement, compte tenu d'un aléa imprévu, il aurait pu se retrouver forcé d'injecter du capital dans Hydro-Québec pour maintenir les ratios financiers prévus. Par contre, comme l'a dit Michel Labonté tantôt, notre vice-président aux finances, ces critères-là sont établis, ont été établis un peu basés sur les longs historiques que nous avons connus, à Hydro-Québec. En 1990, au moment où nous traversons une période de faible hydraulicité qui nous a frappés de façon très importante, au moment également où nous réamorçons, après une pause de sept ou huit ans, une phase intensive d'investissements, donc, nous anticipons, dans les années qui viennent, comme l'indique notre plan de développement, des investissements de l'ordre de 62 000 000 000 $ et de 13 000 000 000 $, au cours des trois prochaines années. Nous allons devoir recourir de façon beaucoup plus intense au marché des capitaux, dans les trois ans, dans les cinq ans et dans les dix ans qui viennent, que nous ne l'avons fait au cours des sept ou huit dernières années.

Nous avons également vu que, dans nos prévisions, il y a des aléas. On a mentionné, hier - et c'est indiqué dans le plan de développement - que la faible hydraulicité versus la forte hydraulicité, au cours de la période 1990-1992, peut signifier un écart de 1 400 000 000 $ dans nos revenus, au total. Ce sont quand même des risques importants. Alors nous jugeons, à Hydro-Québec, actuellement, que, compte tenu de ce contexte-là, la reprise des investissements, il s'agit d'une saine prudence et d'une saine gestion de préconiser, à ce moment-ci, de réatteindre le plus rapidement possible, de maintenir notre taux de capitalisation, notre critère de taux de capitalisation en gardant une certaine marge de manoeuvre, notre critère de taux de couverture des intérêts, devrais-je dire, en se gardant une certaine marge de manoeuvre, et viser le plus rapidement possible à réatteindre notre critère de 25 % de taux de capitalisation.

M. Parizeau: Qu'est-ce que... Comment ça se compare, ce taux de capitalisation d'Hydro, avec l'évolution récente, là - j'avais l'habitude de connaître ça, il y a plusieurs années, mais je n'ai pas suivi ça - avec les taux de capitalisation d'autres compagnies d'hydro au Canada? Est-ce que le... Où en sont-elles, Hydro Ontario, B.C. Hydro, en termes de taux de capitalisation?

M. Boivin: M. Labonté a ces données.

M. Labonté: Hydro Ontario... Ce qu'on constate, c'est qu'Hydro Ontario a tendance, depuis les quatre ou cinq dernières années, à augmenter son taux de capitalisation qui était de 15,6 % ou 15,7 %, en 1984, et qui serait rendu à tout près de 18 %, en 1989. Ça se comprend parce qu'Hydro Ontario, en 1988, avait 9 000 000 000 $ de construction en cours avec la centrale de Darlington. Donc, elle est en période de construction quand même encore importante et elle a un programme d'emprunt important à soutenir. Donc, Ontario Hydro se ramasse avec un taux de capitalisation qui est croissant. Cependant, nous n'avons pas pu tenir compte de l'ajustement de la politique d'amortissement également là-dedans, parce que ça a une certaine incidence sur le taux et, sur une base comparable à Hydro, ça aurait pour effet de l'augmenter. On

n'a pas pu faire ce genre de calcul là parce que ça viendrait augmenter le bénéfice non réparti, parce que les profits auraient été plus élevés durant cette période-là. Donc, il est croissant sauf qu'il faut faire bien attention, dans le cas d'Ontario Hydro, à cause de la politique d'amortissement.

Maintenant, les autres utilités... Les autres utilités canadiennes... À titre d'exemple, le taux de capitalisation de B.C. Hydro était, en 1988, à 19,6 %; Saskatchewan Power, à 21,5 %; Manitoba Hydro, à 2,4 %; Ontario Hydro, on l'a vu, près de 17 % à 18 %; Nouveau-Brunswick, 18 % et Newfoundland-Labrador Hydro, 22 %. Cependant, je tiens à mentionner que la politique d'amortissement qui est à peu près unique à Hydro-Québec a pour effet de nous montrer un taux de capitalisation supérieur, quand on se compare à bien d'autres, uniquement à cause de cette politique-là et on n'est pas en mesure de rétablir la correction exacte pour tenir compte de ça dans les chiffres qu'on vous donne. On prend pour acquis leur politique d'amortissement respective et on n'apporte pas de redressement.

Les utilités américaines, cependant, se retrouvent... La moyenne des utilités américaines, entre 1984 et 1988, est autour de 55 %, le taux de capitalisation; 56,31 %, en 1984, qui a été le plus haut taux et le plus bas, dans la période, a été 54,8 %. Donc, ils se maintiennent à un taux de capitalisation... Évidemment, ils n'ont pas de garantie gouvernementale qui y est associée. Cependant, on peut voir l'écart qui en résulte, ils ont un taux de capitalisation très élevé.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie de vos réponses. Alors, en vertu de la règle d'alternance, nous passons, d'une part, au chapitre de la tarification. J'inviterais Mme la ministre.

Tarification

Mme Bacon: Juste pour terminer, M. le Président, on pourrait dire qu'une chose intéressante, c'est que, même au moment de la grande récession, on a maintenu le taux de capitalisation à 25 %.

Alors, le mémoire sur la tarification de l'électricité proposée pour 1990-1991 se démarque, évidemment, des mémoires précédents, en raison de l'ampleur et de la durée des hausses tarifaires qui sont demandées. Contrairement à ce qui était prévu l'an dernier, il semblerait que révolution des tarifs à l'inflation soit insuffisante pour assurer le rétablissement de la situation financière de l'entreprise sur la période 1990-1992, notamment à cause des modifications structurelles qui sont apportées à vos coûts de fourniture. Évidemment, je suis préoccupée par cette nouvelle demande et je m'interroge aussi sur les effets économiques qui pourraient découler des hausses réelles des prix de l'électricité.

Je pense qu'il y a des interrogations qu'on doit avoir, en ce moment. Par exemple, est-ce que ces hausses de la tarification d'Hydro-Québec vont avoir aussi un effet sur les hausses de prix des autres formes d'énergie, sur le niveau des prix en général, sur la compétitivité de nos entreprises? On a lu dans les journaux et j'ai rencontré les différents représentants des entreprises.

Vous faites une demande pour deux ans. Est-ce que vous pouvez garantir que vous allez réaliser vos prévisions par rapport aux frais d'exploitation, par rapport à la productivité d'Hydro-Québec, ce qui va faire en sorte que ces prévisions que vous envisagez qui pourraient être réalisées vont faire que vous ne reviendrez pas nous redemander davantage, l'an prochain? (11 h 15)

M. Drouin: M. le Président, nous avons mûrement réfléchi à l'ensemble du dossier des propositions tarifaires pour l'année 1990-1991. Mon collègue, M. Boivin, vous a expliqué dans toutes leurs formes nos objectifs quant à la productivité et au gain de productivité pour les prochaines années. Nous avons, bien sûr, en arrière de nous, six années d'hydraulicité faible; nous avons prévu une somme de 212 000 000 $ pour tenir compte de la faible hydraulicité, en partie, pour cette année. Comme on l'a mentionné, il y aura lieu de revoir la question de l'hydraulicité, après les pluies et la saison d'été, la fonte des neiges, d'abord, et la saison d'été, de sorte que l'évaluation finale pourra se faire en octobre et novembre 1990.

Nous savons que notre proposition, tant sur le plan du cadre financier que des hausses de tarif, comporte, pour l'entreprise, certains risques. Il nous appartient de pouvoir dire si ce sont les risques que nous entendons prendre au cours des deux prochaines années, en venant demander fermement une augmentation de tarif de l'ordre de 7,5 % pour chacune des années. Cette évaluât ion-là, nous l'avons faite en sachant les risques qu'elle comporte, s'il devait y avoir une septième année d'hydraulicité faible. C'est le genre de risque, à notre avis, qu'une entreprise commerciale, qu'une entreprise de la taille d'Hydro-Québec doit prendre, et nous le prenons Nous le prenons dans le cadre de ce que si nous voulions rétablir la situation financière occasionnée par les trois facteurs qui ont été mentionnés tout au cours de ces débats, à savoir la faible hydraulicité, nos programmes spéciaux de qualité du service et les programmes d'économie d'énergie, nous savons que si nous devions ne demander une hausse tarifaire que pour l'année en cours, de façon à rétablir la situation financière de l'entreprise, elle devrait être bien supérieure à 7,5 % en moyenne. C'est peut-être une coïncidence, mais le réseau voisin, qui est celui qui est le plus près de nous en termes financiers, en termes de compétitivité, en termes d'attirance des industries, est à peu près en train de faire la même chose, comme on le

lisait dans le Globe & Mail, ce matin. Mais nous, c'est dans le but...

Ce n'est pas de gaieté de coeur, M. le Président, que nous nous présentons pour demander une hausse de tarif de cet ordre. Ce n'est pas non plus dans les habitudes de l'entreprise, compte tenu de l'expérience des 25 dernières années, de vouloir dépasser le taux habituel de la fluctuation de l'inflation. Donc, plutôt que de demander, pour corriger nos ratios financiers, pour en venir... Là, je ferai une remarque un peu plus générale, M. le Président, pour dire que la capacité d'emprunt d'Hydro-Québec est bien connue, est bien cotée, mais elle est tout de même très diversifiée. Alors qu'Hydro Ontario emprunte, à toutes fins pratiques, l'ensemble de ses besoins financiers sur le marché canadien, pour ne pas dire spécifiquement sur le marché ontarien, à même les régimes de retraite et les grands régimes qui sont en vigueur en Ontario, nous, à Hydro-Québec, avec 13 000 000 000 $ d'investissements au cours des trois prochaines années, 62 000 000 000 $ au cours des dix prochaines années, il nous faut aller sur d'autres marchés, comme nous l'avons fart dans le passé, avec la crédibilité que nous avons eue. Cette crédibilité qui a été maintenue par les gouvernements successifs du Québec et par Hydro-Québec, au cours des vingt dernières années, fait en sorte que nous pouvons nous présenter sur les marchés étrangers différents de ceux du Canada, bien sûr. Notre dette, nous l'avions quand même "canadianisée", si je peux utiliser l'expression, au cours des récentes années, jusqu'à peu près 60 % de la dette.

Mais' avec les investissements que nous nous apprêtons à faire à court terme et à long terme, nous devrons avoir recours davantage à des marchés extérieurs et, en cela, je dis, le marché américain que nous utilisons, bien sûr, d'une façon importante, mais le reste, sur le marché mondial, qu'il soit européen ou japonais.

Il nous apparaît donc, dans le cadre de cette demande de hausse des tarifs - que je dis bien ne pas demander avec gaieté de coeur - important de rétablir en fonction du développement futur de l'entreprise, à partir des années 1992-1993, il nous apparaît important de rétablir la situation financière de l'entreprise et de restaurer les critères financiers que nous avons mentionnés dans notre plan de développement.

Les critères financiers qu'on a mentionnés... On a mentionné le taux d'intérêt, M. le Président. On a mentionné le taux de couverture d'intérêt, pardon, le taux de capitalisation. Mais il ne faudrait tout de même pas oublier que les Québécois placent 8 000 000 000 $ d'argent dans Hydro-Québec et que, cette année, ils ont reçu 7 %d intérêt sur ces 8 000 000 000 $.

Vous savez, il n'y a personne au Québec qui irait placer de l'argent, ce matin, à 7 % d'intérêt. Si nous avions une augmentation telle que nous avions prévue l'an dernier, à 4,5 %, le rendement serait de 3,6 % d'intérêt, ce matin. Bien sûr, ayant l'intention de rendre le choc tarifaire le moins violent possible, nous acceptons que ce rendement sur l'avoir propre des Québécois de 8 000 000 000 $ ne soit, pour l'année en cours, que de 4,8 %. Mais nous voulons le rétablir quand même le plus rapidement possible à des taux qui sont universellement connus de rendement sur l'avoir propre dans le domaine des utilités publiques. Et non pas en Europe, nous parlons au Canada, nous parlons aux États-Unis des taux de rendement connus qui varient entre 12,5 % et 14,5 % pour des utilités publiques.

Malgré ça, M. le Président, notre objectif, tout de même, sur ce dossier est d'en arriver, en 1992, à un rendement équivalent à 10,9 %, qui est à peu près celui que nous visions l'an dernier pour 1991. Donc, c'est une réponse un peu longue à la question que Mme la ministre m'a posée. Mais il m'apparaft important de répondre très catégoriquement que nous avons l'intention de prendre les risques que comporte notre proposition tarifaire de 1990 pour les deux ans, 1990 et 1991, et ça, dans le but d'éviter à nos consommateurs un choc tarifaire trop important pour l'année en cours.

Mme Bacon: M. le Président, je pense que la réponse n'est pas trop longue. Je pense qu'on a besoin de ces informations. J'aurais aimé entendre davantage une réponse quant aux prévisions de frais d'exploitation et de productivité, mais je pense que tout ça fait un tout quand vous vous engagez à vivre avec les demandes que vous nous demandez. Selon HydroQuébec, la présence de l'interfinancement s'explique par le fait que les abonnés domestiques ne participent pas dans une proportion égale aux revenus et aux coûts de l'entreprise; est-ce qu'on doit conclure que Hydro-Québec perd de l'argent avec ses abonnés domestiques?

M. Drouin: On peut peut-être conclure, M. le Président, qu'on fait beaucoup moins d'argent. Quand je dis ça, on a un tableau, qu'on pourrait peut-être projeter, sur la marge bénéficiaire, qui est le tableau PRO-129. Juste une remarque préliminaire sur la question de nos demandes de tarifs différenciés au niveau du domestique par rapport à la petite et à la moyenne entreprise.

Tout d'abord, M. le Président, c'est une demande qu'Hydro-Québec, année après année, a présentée devant cette commission, qui a été reconnue par les autorités gouvernementales ou par l'actionnaire, il y a trois ans. L'an dernier, effectivement, le gouvernement avait accepté une augmentation différenciée, compte tenu de la démonstration que nous avions faite entre le rendement des différentes classes de clients. Au domestique, comme vous pouvez le voir, pour 42 % de la part des ventes dans l'entreprise, ça

ne comporte qu'une marge bénéficiaire de 4,8 % et une part des bénéfices que de 14 %, alors que si on prend les deux autres classes qui sont la petite et moyenne entreprise, industries et institutions - ce n'est pas la grande puissance - ça comporte toutes les institutions, soit des institutions hospitalières, soit les petits commerces de coin de rue, enfin toute la petite et la moyenne puissance, la petite et moyenne industrie, la petite et moyenne entreprise pour, en fait, une part des ventes de l'ordre de 28 %, contribuent à 73 % ou 74 % dans les bénéfices d'Hydro-Québec. La marge bénéficiaire de ces deux classes d'employés est, par conséquent, de l'ordre de 62 %.

C'est donc un peu... Encore là, il ne faudrait pas penser qu'Hydro-Québec est masochiste au point de vouloir se martyriser mutuellement en taxant davantage le résidentiel, mais il s'agit tout simplement d'un équilibre entre les différentes classes de clients. On peut prétendre, comme la ministre l'a mentionné, que, peut-être, la participation aux profits de la classe tarifaire domestique pourrait être moindre que celle de la petite ou de la moyenne entreprise ou même de la grande puissance. On pourrait prétendre ça, mais, dans le dossier que vous avez devant vous, on n'en est même pas rendus à se poser cette question-là tellement l'écart est grand. (11 h 30)

On est bien conscients, dans une période comme celle-ci, que de demander une telle différenciation dans les tarifs, ce n'est peut-être pas à propos de le faire. On l'a évaluée également. Notre demande consiste à améliorer ou à corriger, je devrais dire, la situation que pour moitié sur une période de 10 ans, ce qui voudrait dire qu'au rythme que nous suggérons cette année, ça nous prendrait 20 ans pour corriger la situation. Mais il n'est pas, enfin, à ce moment-ci, même opportun pour nous de commencer - on peut le faire, remarquez bien - d'évaluer si, effectivement, il est opportun socialement qu'au niveau domestique, on participe moins à la marge bénéficiaire qu'au niveau de la petite et de la moyenne puissance tellement la différence est grande. Juste un complément de réponse à la question de Mme la ministre. Si en 1990, l'augmentation de tarif était de 7,5 % pour tout le monde, si nous prenions cette hypothèse, à ce moment-là, la marge bénéficiaire que vous avez vue tantôt de 4 % tomberait à négatif à 0,5 % de moins, moins 0,5 %.

Mme Bacon: En appliquant les hausses tarifaires qui sont proposées, quels seraient les taux de rendement des catégories tarifaires en 1991-1992? Qu'est-ce qui arriverait aussi si les hausses tarifaires étaient - et je reviens encore là-dessus - établies uniformément entre les catégories d'abonnés en 1991-1992.

M. Drouin: M. Boivin va répondre à cette question, madame.

M. Boivin: M le Président, je n'ai malheureusement pas de diapositive qui illustre ces chiffres-là. Je vais vous les donner pour le secteur domestique tout d'abord Le taux de rendement sur l'avoir propre pour le secteur domestique en 1989 s'est situé à 3,3 %. Avec les hausses proposées pour 1990 et 1991, il se situera à 0,2 %. Il y a une diminution. D'ailleurs, vous savez que globalement, même avec les hausses que nous demandons, il y a une réduction du rendement sur notre avoir propre pour se rétablir à 5,5 % en 1991. Si maintenant, toujours pour le secteur domestique, nous avions proposé une hausse uniforme de 7,5 %, soit la moyenne de la hausse de tarif que nous demandons, pour l'année 1989, 1990, pardon, le taux de rendement sur l'avoir propre au secteur domestique aurait chuté à moins de l'unité, c'est-à-dire que nous aurions eu un taux de rendement négatif très légèrement négatif effectivement de 0,09 %, donc un dizième de 1 % négatif. Et pour l'année 1991, le taux de rendement du secteur domestique serait de 4,62 % Si vous désirez les mêmes chiffres pour les autres catégories tarifaires, à savoir les tarifs de petite et moyenne puissance ainsi que de grande puissance, je les ai également et je pourrai vous les citer.

Mme Bacon: Pour le total.

M. Boivin: Au total, les taux de rendement pour nos ventes régulières au Québec en 1989, comme nous l'avions vu tantôt, s'étaient situés à 11,1 %. Pour 1990, avec les hausses que nous demandons, nous obtiendrons 7,8 % et pour 1991, 13,3 % pour l'ensemble des ventes régulières au Québec assujetties au règlement tarifaire.

Le Président (M. Bordeleau): Ça termine donc la période de temps qui était allouée au groupe ministériel. Alors, selon le principe de l'alternance, je vais laisser la parole au député d'Ungava au nom de l'Opposition.

M. Claveau: Merci, M le Président D'abord, quelques réflexions pour camper un peu le débat en ce qui nous concerne avant que je passe la parole à mes collègues qui auront à questionner sur quelques sujets bien précis dans le cadre de la tarification. D'abord, Hydro-Québec nous fait une demande sur deux ans, bon, une moyenne de 7,5 % par année sur deux ans. Et un des gros éléments dont il est question, justement, on en a encore parlé, c'est l'hydraulicité. Sauf qu'Hydro-Québec nous a dit hier qu'advenant une bonne hydraulicité pour cette année, eh bien, à partir du mois de juillet ou août, on pourrait arrêter les mesures exceptionnelles De deux choses l'une, si on arrête les mesures exceptionnelles, qu'on a de l'eau en masse, qu'à partir de 1991, tel que prévu, les dépenses relatives à la faible

hydraulicité égalent zéro et qu'au contraire, en contrepartie, on génère des bénéfices en vendant de l'énergie qu'on ne vend pas actuellement parce qu'on ne la produit pas, à ce moment-là, on a joué les Québécois. Hydro-Québec va aller chercher plus que ce dont elle aurait besoin si on acceptait cette année, tout de suite, pour une deuxième année, 7,5 %. En contrepartie, HydroQuébec nous dit: Si l'hydraulicité n'est pas bonne, on va arriver en dessous et notre cours va continuer à descendre et ça va nous coûter encore plus cher. Dans ce cas-là, Hydro-Québec va devoir revenir devant la commission et dire: On n'en a pas assez demandé. Alors là, j'aimerais savoir jusqu'à quel point il est honnête envers les payeurs, les acheteurs d'électricité québécois de leur demander tout de suite une augmentation sur deux ans. Hydro-Québec nous dit en page 13 de sa proposition tarifaire qu'il s'agit la d'une certitude de continuité pour les milieux financiers. Essentiellement, les milieux financiers à Hydro-Québec, ce n'est pas sorcier, c'est la cote de crédit du gouvernement. Hydro Ontario a une situation financière ou, enfin, des chiffres qui sont inférieurs en moyenne à ceux d'HydroQuébec. B.C. Hydro, c'est la même chose et pourtant, leur cote de crédit sur les marchés internationaux est meilleure que celle d'Hydro-Québec. C'est en fonction bien plus de la cote de crédit du gouvernement que de la performance à un dizième près d'un ratio quelconque d'Hydro-Québec que s'établit la cote de crédit pour les emprunts qu'Hydro-Québec fait. Moi, on ne me fera pas brailler avec ça.

L'autre affaire, les charges d'exploitation. Hydro-Québec dit: Depuis 1982, nos charges d'exploitation ont augmenté en moyenne de 1,9 %. Certes, depuis 1982, sauf qu'en 1983, l'augmentation a été de 5 %, en 1984, 6,3 %. On va le ramener en dollars constants pour aller sur les 1,9 % d'Hydro-Québec. C'est 1,8, 1,5, moins 7 en 1986, 5,7 en 1987, 10 en 1988, 9,9 en 1989 et on prévoit, pour 1990, 7,4 et ça va en montant. Je veux bien croire que l'hydraulicité a quelque chose à voir là-dessus, mais il y a d'autres problèmes quelque part, à mon avis, dont il faudrait se parler.

Hydro-Québec nous dit: Les Québécois ont investi 8 000 000 000 $ et ça leur a rapporté juste 7 %. Les pauvres petits Québécois! Hein! Si on était eux, on n'aurait jamais investi 8 000 000 000 $ pour avoir 7 % de rendement. Moi, je vais vous dire une affaire. Si ces 8 000 000 000 $ qu'on a investis me permettent de payer mon électricité moins cher qu'ailleurs, là, la différence entre les 7 % et les 13 %, je l'ai dans mes poches et c'est moi qui vais la gérer et c'est là que c'est rentable pour les Québécois. Il y a ça aussi. Je veux dire, si on nous dit: C'est bon pour les Québécois d'avoir un taux de rendement supérieur, sur leur investissement, à 7 %, bien, ce taux de rendement-là, ce n'est pas nécessairement Hydro-Québec qui doit le gérer, cet argent qui est généré. Si je veux le gérer moi-même à partir d'une diminution de mon compte d'électricité et si c'est ça le choix des Québécois, eh bien, ça sera ça. Ce n'est pas à Hydro-Québec à déterminer ce que les Québécois veulent comme rendement sur leur argent investi. C'est au gouvernement. L'actionnaire, c'est le gouvernement. Et dans ce sens-là, si l'actionnaire dit à Hydro-Québec: Nous autres, c'est bien de valeur, ce qu'on veut, c'est de payer l'électricité la moins cher possible pour que ça rapporte immédiatement à chacun des Québécois concernés, bien, Hydro-Québec s'y pliera. Hydro-Québec a à produire de l'électricité en fonction des paramètres que le gouvernement lui exige. Pour le reste, pour que ça rapporte, ce sera au gouvernement, en tant qu'actionnaire unique d'Hydro-Québec, propriétaire unique d'Hydro-Québec au nom des Québécois, de savoir ce qu'on veut faire avec cet argent-là.

Au niveau de... C'est la même chose pour les politiques d'économie d'énergie. Moi, j'ai hâte qu'on arrive à commission parlementaire du 8 mai pour en parler. J'ai très hâte qu'on parle des 62 000 000 000 $ qu'Hydro-Québec veut dépenser au cours des dix prochaines années versus les quelques dizaines de millions qu'elle met dans l'économie d'énergie. Il y a probablement là une piste qui sera à fouiller d'une façon très précise. Je trouve que ce que l'on met en économie d'énergie versus les dizaines de milliards qu'on veut investir en inondation de territoires est quelque peu disproportionné. On aurait peut-être avantage à ajouter quelques milliards dans l'économie d'énergie et à diminuer de quelques milliards la note d'inondation territoriale et peut-être qu'on arriverait à quelque chose d'intéressant qui serait moins lié à l'hydraulicité aussi. Ça, ça fait partie du problème. Dans ce contexte, je reste très sceptique par rapport aux exigences d'Hydro-Québec, ses demandes actuelles, ses prévisions à long terme et l'intérêt de faire ça sur deux ans. Cela dit, vous me permettez, M. le Président, de passer la parole à mon collègue qui va questionner là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): Je cède la parole au député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, j'ai une courte question à Hydro-Québec. Je voudrais savoir si, dans la préparation des tarifs proposés, HydroQuébec a tenu compte de notre appartenance au Canada et de l'introduction, le 1er janvier prochain, de la taxe sur les produits et services?

M. Drouin: Je pense qu'on a mentionné hier que, effectivement, il y a, présumément, à partir du 1er janvier prochain, une TPS, une taxe sur les produits et services, qui entrera en vigueur. Ce que nous avons mentionné, c'est que cette taxe avait un impact sur toutes les sources d'énergie, au même titre, que ce soit le gaz, que

ce soit l'huile à chauffage ou l'électricité.

M. Bourdon: Je voudrais savoir si, dans les calculs que vous avez faits des proportions relatives de revenus et dépenses par grande catégorie - je parle du tableau TA-05, quand on regarde le domestique, la petite puissance, la moyenne puissance et la grande puissance - est-ce que vous avez évalué la relation entre la part de chaque catégorie, l'avez-vous comparée à ce que va devenir les coûts par catégorie, après que la TPS sera adoptée? Parce qu'il y a beaucoup de gens qui disent que M. Wilson est sérieux et qu'il va appliquer la TPS. Ce que j'entends par la, M. le Président, c'est, on voit que dans la structure tarifaire proposée, le domestique aurait une hausse de 8,5 % et les utilisateurs de grande puissance de 8 % et les petits et moyens de 6,5 %, ce qui donne, entre le domestique et les utilisateurs de grande puissance, une différence de 0,5 %. Mais quand on ajoute la TPS et qu'on combine les augmentations et qu'on les estime un peu plus de douze mois après le début des hausses tarifaires, au 1er mai 1991, ça donne, comme différence, une hausse de la facture de 26 % dans le domestique, de 13,4 % pour les utilisateurs de petite puissance, même chose pour la moyenne puissance, et de 14,9 % pour les utilisateurs de grande puissance, 16,6 % moins l'effet du programme de stabilisation tarifaire. Parce que les entreprises obtiennent des crédits d'impôt pour ce qu'elles ont payé en TPS, la fourniture d'électricité étant un intrant. À cet égard, il faut regarder de près, et je m'étonne qu'Hydro-Québec ne l'ait visiblement pas fait, quelle sera la charge réelle supportée par les catégories, qui sont, bien sûr, domestique, petite, moyenne, grande puissance. Mais il y a aussi les entreprises comparées aux individus, c'est-à-dire vous, moi, nous, qui allons payer une facture d'électricité. J'écoute depuis ce matin le débat passionnant sur le taux de rendement, sur le taux de capitalisation et je ne sais pas ce qui passe dans Taschereau, Drummond ou Chomedey, mais, dans Pointe-aux-Trembles, j'entends parler facture d'électricité. Les gens sont très reliés à cela. Et le gouvernement est là pour s'assurer que ça soit raisonnable ce qui se fait, parce qu'il représente les actionnaires, les actionnaires étant les contribuables. On sait que les entreprises ne votent pas. Ce sont les contribuables qui votent. À cet égard, est-ce qu'Hydro-Québec pense qu'il y aurait moyen, pour le gouvernement qui va avoir à décider des tarifs, pas Hydro-Québec, de tenir compte de la taxe sur les produits et services? (11 h 45)

II y a quelque chose d'irréel dans le débat qu'on entend ici. C'est comme si on n'appartenait pas au Canada, encore, et que pour avoir notre part des Rocheuses on ne devait pas, le 1er janvier prochain, payer la TPS. Est-ce qu'il y a eu une réflexion, au niveau du gouvernement, sur le fait que le chauffage et l'éclairage des maisons, ce sont des biens essentiels, peut-être tout aussi essentiels que les meubles, les chaussures et les vêtements que le gouvernement exclut de sa taxe de vente? Et, à cet égard, on peut se poser une question... Le gouvernement est hostile à la TPS. Il ne le dit pas souvent, parce qu'il y a autre chose à négocier avec le Canada et que ce n'est pas simple; mais le gouvernement est hostile à la TPS Est-ce que la ministre pourrait concevoir d'entreprendre peut-être une négociation pour exclure le mazout, le gaz naturel et l'électricité de la TPS? Parce que, écoutez, on peut faire comme si la TPS n'existait pas, mais pour les gens qui reçoivent une facture d'Hydro-Québec, à un moment donné, il y a un 7 % qui va se retrouver dedans, c'est incontournable. Alors, dans le fond, ma question s'adresse au président d'Hydro-Québec et à la ministre: Est-ce qu'on va tenir compte de la taxation qui s'applique, tant et aussi longtemps qu'on appartient au Canada?

M. Drouin: M. le Président, c'est évident qu'Hydro-Québec, dans toute la présentation que nous avons faite au cours des deux derniers jours, a examiné l'ensemble du dossier financier d'Hydro-Québec, de ses budgets d'exploitation, de ses budgets en général, pour en arriver à rétablissement des coûts de fourniture du service électrique au Québec. Je ne crois pas que ce soit notre rôle à ce stade-ci d'évaluer l'opportunité de la TPS dans tout ce dossier-là. Nous, ce que nous faisons... Puis vous pouvez nous le reprocher, mais nous ne sommes pas un organisme gouvernemental aux fins d'établir l'opportunité d'une telle taxe au Canada et au Québec. Nous, notre raisonnement serait faussé si on devait inclure - puis on est parfaitement au courant de toute la mécanique envisagée - l'impact de la TPS dans l'étude de nos coûts de fourniture Alors, pour nous, ça ne fait pas partie des intrants qui servent à établir la hausse tarifaire.

Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la députée de Verchères.

Mme Dupuis: Bonjour monsieur Hier, ma collègue de Taillon, Mme Marois, a questionné un peu, a abordé le sujet de la tarification en serriculture. La réponse qui a été donnée, je ne peux pas m'en satisfaire pour le moment De toute façon, c'est trop complexe et puis ce n'est pas assez clair pour que Ion puisse transmettre aux serriculteurs une réponse qu'ils vont trouver satisfaisante.

Au niveau de la tarification qui a augmenté, qui était de 2,8 % - et là, je m'informe pour savoir si mes renseignements sont exacts - est-ce vrai que c'est 60 % de plus que la tarification de l'Ontario pour la serriculture? L'information qui m'a été donnée, c'était que lorsqu'on demandait 2,8 %, le taux de 1987, c'est

60 % de plus dispendieux que l'Ontario, dont le taux se situe à 1,8 %. Est-ce vrai? Et si oui, comment expliquer cette différence au niveau de la tarification, quand on sait que la principale dépense, le coût le plus élevé pour la production en serre est le coût d'électricité et que nos serriculteurs, nos producteurs se doivent d'être compétitifs avec l'Ontario, qui est leur principal concurrent; quand on sait aussi que le ministre Pagé déclarait, en conférence de presse, le 9 juin 1986, que, malgré les efforts déployés depuis de nombreuses années par les divers intervenants au Québec pour développer la production de légumes en serre, le déficit à combler reste énorme et que la situation persistera ainsi tant que nous ne réussirons pas à baisser les coûts de production? On sait que les coûts de production sont énormes pour les serriculteurs, en matière d'électricité.

M. Drouin: M. le Président, avant de céder la parole à M. Finet qui a, évidemment, l'expertise dans ce dossier, je voudrais juste informer la députée que, suite à l'intervention de la députée auprès d'Hydro-Québec tout récemment, j'ai pris la responsabilité de rencontrer moi-même les serriculteurs, en la personne de M. Paré, en compagnie de M. Finet. Je voudrais juste informer la députée que M. Paré s'est dit totalement satisfait des explications qui avaient été fournies par Hydro-Québec mais que, évidemment, dans le contexte qu'il vivait, il se devait d'aller plus loin. Je le dis parce que cette rencontre a été non seulement cordiale, mais elle a été très explicative et elle a permis de voir quels étaient réellement les problèmes au niveau des serriculteurs. C'était déjà en discussion. Mais j'insiste sur le fait que nous avons rencontré, M. Finet et moi, M. Paré des serriculteurs et pour eux, je le dis bien, pour eux, la situation est très claire. Elle n'est peut-être pas satisfaisante, mais elle est très claire. La position d'Hydro-Québec est très claire. Là-dessus, je demanderais peut-être à M. Finet de compléter, sur le plan technique.

M. Finet (Jacques): Jacques Finet. Un point en particulier que vous avancez... Vous faites une comparaison avec l'Ontario. Les serriculteurs, bien entendu, sont en compétition avec ceux de l'Ontario. Sauf qu'il faudra se souvenir, au cours des discussions, hier, qu'on a démontré que les tarifs d'électricité en Ontario sont d'au moins 30 % supérieurs à ceux du Québec. Il y a cependant un avantage pour certains serriculteurs, en Ontario. Il s'agit de ceux qui ont une possibilité d'alimentation au gaz. Le gaz est meilleur marché en Ontario qu'il ne l'est au Québec et, à ce moment-là, il y en a quelques-uns qui sont avantagés par ça. Alors, là-dessus, la situation est très claire. Cependant, ce que les serriculteurs nous disent, c'est que votre tarification biénergie, indexée au prix du pétrole - surtout dans le temps, alors que le prix du pétrole a baissé et que, nécessairement, nos prix ont baissé en conséquence - les a vraiment aidés financièrement. Elle leur a pratiquement permis de se mettre au monde, mais avec aussi tout un scénario financier qui tenait compte d'un marché pour les prix des aliments, qui tenait compte aussi des prix de la main-d'oeuvre, enfin, de toutes les composantes de leurs coûts à eux. Et finalement, cet ensemble-là aussi a été perturbé, je vous dirai, pas tellement par le prix de l'électricité comme par d'autres facteurs, surtout. Alors, dans ce sens-là, lorsqu'on leur dit: On revient à un tarif de 0,028 $ - qui élimine cependant l'autre tranche qu'on avait ajoutée par après - là, ils nous disent: Hydro-Québec, on comprend, c'est normal, vous allez nous ramener à des coûts de fourniture. Vous nous fournissez même une situation un peu particulière qui nous permet d'avoir un prix plus bas - parce qu'ils utilisent l'électricité en dehors des périodes de pointe. Mais ils disent: Notre situation financière n'est quand même pas meilleure pour autant. Mais il s'agit de la situation financière dans son ensemble. Et ils disent là-dessus: Fort possiblement qu'on va continuer à faire des représentations auprès du gouvernement du Québec, tout en reconnaissant qu'Hydro-Québec, vous autres, vous avez fait votre part. Alors, je pense que la balle, je peux vous dire, elle n'est pas dans notre camp. Au moment où on se parle, on a vraiment fait toute la démarche qu'il fallait pour donner une assistance à une industrie qu'on a aidé à mettre au monde.

Mme Dupuis: L'augmentation qui devait avoir lieu le 1er mars 1990...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Verchères, le temps de votre formation étant écoulé, je dois céder la parole à Mme la ministre.

Mme Bacon: Alors, M. le Président, il est généralement reconnu que les tarifs d'électricité au Québec sont parmi les plus bas en Amérique du Nord. Est-ce que cette affirmation tient toujours, à la lumière des hausses tarifaires que vous nous proposez?

M. Drouin: La réponse très simple, c'est oui, mais je vais demander à M. Finet d'élaborer sur cette réponse.

M. Finet: M. le Président, vous avez, en page 4 du mémoire sur la hausse de tarif, un court tableau qui donne une comparaison pour différents types d'usage entre des villes du Canada et des États-Unis et qui démontre clairement qu'au niveau du domestique, de la clientèle résidentielle, on est vraiment les plus bas à travers le monde avec Winnipeg, à peu près, et si on allait dans certains coins des

États-Unis, avec la ville de Seattle. On ne peut pas se permettre de dire qu'on est les plus bas au monde: il y a à peu près deux ou trois autres endroits dont la situation est comparable à celle que connaît le Québec actuellement. Là où on est un petit peu plus en déséquilibre, c'est pour les catégories générales de petite et moyenne puissance, où nos tarifs sont plus élevés. On a expliqué la situation d'interfinancement et, à ce moment-là, la situation est moins claire. On s'aperçoit, par exemple, que Vancouver et Winnipeg, encore, sont vraiment plus bas que le Québec. Pour les autres villes, l'écart est moins grand.

Là-dessus, j'en profiterais cependant pour vous glisser un message, qui est celui-ci. Lorsqu'on parle des catégories générales de petite et de moyenne puissance, on a souvent tendance à penser aux commerces et aux industries et à dire: Eux, ils ont la possibilité d'inclure leur facture d'électricité dans leurs dépenses. Il ne faudrait pas oublier qu'il y a aussi, dans cette clientèle-là, des institutions, que ce soit des édifices du gouvernement provincial, fédéral, municipal; il y a aussi des écoles, publiques et privées; il y a des garderies, il y a des organismes à vocation culturelle. Et c'est d'eux, principalement, qu'on reçoit souvent des représentations - et je suis certain que vous en recevez vous aussi - pour nous dire que la facture d'électricité est très élevée. C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on propose de donner un certain allégement dans la hausse de tarif à ces catégories générales, petite et moyenne puissance, qui n'incluent vraiment pas seulement les commerces et industries qui créent de l'emploi.

Dans ce sens-là, nos tarifs sont encore très compétitifs sur la scène mondiale, j'entends. Et par rapport aux autres formes d'énergie, que ce soit le mazout et le gaz, vous avez le même tableau... C'est-à-dire que vous avez un tableau, également en page 4, qui vous démontre que le système biénergie en particulier, qu'on désire développer au cours des prochaines années, est vraiment la solution la moins coûteuse pour les Québécois. Par après, si on regarde les chiffres de près, on s'aperçoit que l'utilisation du mazout et du gaz, lorsqu'il y a des systèmes à haute efficacité - et ce n'est malheureusement pas le plus grand nombre de cas qu'on retrouve dans un parc d'habitation - est vraiment une formule aussi avantageuse. Par après, autant pour les anciens systèmes à l'huile et au gaz que pour l'électricité, la situation est plus avantageuse.

Mme Bacon: Je pense que je vais faire suivre tout de suite une question, par rapport à la biénergie. Vous avez l'intention, vous nous dites, d'augmenter fortement les tarifs biénergie relativement au tarif régulier. Lorsqu'on considère que des clients de la biénergie ne sont pas présents pendant la période de pointe du réseau, pourquoi avez-vous l'intention d'aug- menter plus fortement ces tarifs?

M. Finet: M. le Président, la réponse est tout simplement pour, là aussi, mieux refléter nos coûts de fourniture. D'ailleurs, je dois préciser que la hausse pour le tarif régulier, le tarif D, et la hausse pour le tarif DT sont identiques, à toutes fins utiles, en ce qui concerne le chauffage à l'électricité comme tel. Parce que si vous prenez la dernière tranche du tarif régulier, la hausse est de 9 %; et pour le tarif DT, aussi, la hausse est de 9,1 % et 9 %, chacune des deux années. Donc, ils sont augmentés de la même façon, et c'est vraiment pour refléter les coûts de fourniture. Parce que, même s'ils ne sont pas présents en période de pointe, ces clients-là, il reste quand même qu'il y a des équipements, autant en production, en transport, en distribution, qui ont été mis en place pour les servir. Alors, tout ce qu'on épargne avec eux, ce sont les frais de pointe. Ce qui nous permet, en fait, d'accorder une réduction à peu près annuelle de l'ordre de 250 $, pour un tarif biénergie versus le tarif régulier. (12 heures)

M. Boivin: M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais apporter une information complémentaire à la question précédente de Mme la ministre. Lorsqu'elle a parlé de l'évolution de la position concurrentielle, M. Finet a donné la position concurrentielle, ou des comparaisons, avant les hausses de tarif. J'aimerais ajouter peut-être, à titre d'information, que lorsque - du moins par rapport à certains réseaux canadiens, ceux pour lesquels on connaît déjà les prévisions de hausse de tarif... Je pense qu'il est important de les mentionner, parce qu'on peut voir effectivement, à partir de là, que la position concurrentielle de l'électricité devrait à peu près se maintenir, sinon se détériorer très légèrement par rapport aux réseaux canadiens voisins. À cet effet, par exemple, Hydro Ontario a annoncé, pour 1990, une hausse de tarif de 5,9 %. Et pour 1991, comme le mentionnait M. Drouin ce matin, Hydro Ontario vient d'annoncer une prévision de hausse de 7,8 %, ce qui est au-delà de ce que nous prévoyons nous-mêmes pour 1991. En parallèle, du côté de l'Ontario toujours, mais pour les réseaux municipaux, la hausse de tarifs est de 7,8 % et de 7,9 % pour les deux années 1990 et 1991. Du côté de la Colombie-Britannique, B.C. Hydro a annoncé en novembre dernier trois hausses consécutives de 3 % à chaque six mois, ce qui donne une hausse cumulative de 9 % entre novembre 1989 et avril 1991. Donc, la position concurrentielle, lorsqu'on considère que partout ailleurs au Canada, il y a également des pressions très fortes à la hausse sur les coûts de fourniture et donc, sur la tarification... Ce qui veut dire qu'effectivement, notre position concurrentielle devrait se maintenir. Je pourrais revenir à des chiffres que j'ai mentionnés hier soir, par exemple, sur l'évolution au cours des

sept ou huit dernières années. Par exemple, la tarification au Québec par rapport à la tarification en Ontario, où l'avantage de l'hydroélectricité au Québec s'est accru énormément au cours des dernières années, passant, en fait, des hausses moyennes en Ontario... Il y a un écart de 12 % qui s'est creusé, par exemple, ou près de 13 % où nous étions en 1982, pour se retrouver maintenant avec un avantage comparatif de 34 %.

Mme Bacon: Au niveau de la structure des tarifs domestiques, on remarque qu'Hydro-Québec propose d'augmenter la deuxième tranche du tarif de 9 % et la première tranche de 8,2 %. Qu'est-ce qui justifie ces taux d'augmentation différenciés?

M. Finet: Jacques Finet. Voici. Si je me réfère à votre discours d'ouverture, où vous disiez qu'il faut, dans la mesure, refléter les coûts de fourniture et penser à des structures de tarifs d'énergie électrique qui incitent le client à en faire une meilleure utilisation, le changement qu'on fait maintenant à la structure de tarifs va dans ce sens-là. Dans le sens que le kilowattheure, pour fournir l'électricité à des fins de chauffage, augmente plus rapidement que le reste de la consommation. Deuxièmement, si on veut donner un signal de prix qui incite le client à bien utiliser l'énergie, à en faire une utilisation efficace, à ce moment-là, la modification va aussi dans ce sens-là. En se rappelant, bien entendu, et surtout en n'oubliant pas qu'il y a en parallèle un programme d'économie d'énergie qui va donner au client les trucs nécessaires et même certaines incitations financières pour qu'il en vienne à passer à l'action et vraiment contrôler, faire une gestion de sa facture d'électricité, être capable de réduire l'impact des hausses de tarifs. Donc, à votre question, bien précisément, c'est pour mieux refléter les coûts de fourniture et bien entendu aussi, reflétant mieux les coûts de fourniture, inciter le client à faire une utilisation efficace de l'électricité.

Mme Bacon: Est-ce que vous pensez, ou est ce que vous êtes convaincu qu'un consommateur est au courant de ça, s'il est dans la première ou dans la deuxième tranche?

M. Finet: M. le Président, il nous appartient de vraiment sensibiliser la population adéquatement. Je vous dirai, lorsqu'on parle d'économie d'énergie et qu'on fait des sondages, surtout auprès de la clientèle, la clientèle a l'impression qu'au Québec, on est encore dans une situation d'abondance, que de l'électricité, il nous en sort littéralement par les oreilles et qu'on n'a pas à se soucier d'en faire une économie. Il y a aussi la perception qu'économiser de l'énergie, ça veut dire passer à une formule de rationnement, donc se priver, donc sacrifier sa qualité de vie, sacrifier son confort. Alors qu'en fait, ce n'est pas ça du tout que vise le programme d'économie d'énergie. Ça vise à donner à notre clientèle d'abord le pourquoi des programmes d'économie d'énergie, à rendre les gens conscients que l'électricité, l'hydroélectricité au Québec est une richesse qu'il faut protéger tout comme on protège nos forêts, tout comme on protège nos cours d'eau. Il faut protéger cette richesse qu'est l'hydroélectricité. Ensuite, le client qui nous dit qu'il est prêt à passer à l'action en autant qu'on lui dise comment faire, ce sera à nous aussi de lui indiquer les façons d'économiser l'énergie.

Le tarif a deux composantes. Il y a une première tranche de 900 kilowattheures qui est, en fait, pour couvrir le marché dit captif: l'éclairage, l'utilisation des petits appareils, une partie du chauffe-eau. Celui-là, vous l'avez à l'année. Il est à un prix réduit, parce que c'est vraiment un marché plus captif. Celui sur lequel vous pouvez avoir une action plus efficace, c'est beaucoup plus avec le chauffage de l'eau et le chauffage des locaux et donc c'est celui-là sur lequel on doit donner un signal de prix qui est encore plus près de la concurrence, plus près de nos coûts de fourniture et qui l'incitera vraiment à passer à l'action, avec, bien entendu - je le répète encore une fois - un bon message d'information, une bonne communication de la part d'Hydro-Québec, pour à la fois sensibiliser le consommateur et lui dire les trucs à utiliser.

Mme Bacon: M. Finet, vous avez l'impression que ce message-là est passé?

M. Finet: Mme la ministre, je vous dirai que non, il n'est pas encore passé. Nous avons une campagne de communication qui commencera dans les prochaines semaines et qui vraiment va véhiculer ce message.

Mme Bacon: M. le Président, Hydro-Québec annonce qu'elle a l'intention d'entreprendre une réforme du tarif grande puissance. Combien de clients sont-ils assujettis a ce tarif? Et, est-ce que la réforme proposée aura un impact uniforme sur la facture d'électricité de ces clients?

M. Roy (Gilles): Mon nom est Gilles Roy.

M. Boivin: Gilles Roy, directeur à la tarification, va vous donner la réponse.

M. Roy: On poursuit, avec cette réforme, un certain nombre d'objectifs. Le premier est de simplifier et de moderniser une structure qui est un petit peu complexe et un peu anachronique aussi, si on se réfère à la structure actuelle de notre tarif L, qui est le tarif grande puissance. Il y a 192 clients, en passant, qui sont soumis à cette tarification. Actuellement, on a un prix de puissance et trois tranches d'énergie selon une formule dégressive d'une tranche à l'autre. À

cela s'ajoutent un certain nombre de rabais, étant donné la tension d'alimentation. Notre but avec la restructuration est de simplifier, je vous le disais, cette structure-là pour en arriver éventuellement à un seul prix pour l'énergie. Ce qu'on voudrait faire disparaître en même temps, c'est cette notion de dégressivité qui est un peu anachronique, comme on le disait, surtout dans le contexte d'économie d'énergie dont on parlait tantôt. C'est une chose qu'on a, au cours des dernières années, d'ailleurs, essayé de redresser doucement, mais là on veut s'attaquer fondamentalement à la restructuration du tarif pour faire disparaître complètement la dégressivité de nos tranches d'énergie, et pour en arriver, sur une période graduelle de trois ans, à un seul prix d'énergie.

Quant au résultat de ça, les calculs qu'on a faits - et on l'a fait pour chacun de nos 192 clients - le résultat est globalement neutre. On ne va pas chercher de revenus additionnels avec ça. Dans les faits, il y a 70 % des clients pour lesquels c'est un petit peu favorable. Il y a 30 % des clients pour lesquels c'est un peu défavorable. On en connaît... Évidemment, ceux qui nous intéressent le plus, ce sont ceux pour lesquels c'est défavorable. Il y en a sept qu'on connaît exactement, pour lesquels la restructuration voudrait dire une hausse de l'ordre de 3 %. Et pour ces sept-là, dont quatre municipalités, on a pensé aussi à des formules de rattrapage et de récupération qui vont faire qu'on va lisser les effets déplaisants que la hausse ou que la restructuration pourrait avoir dans les années qui viennent.

Mme Bacon: Justement par rapport aux réseaux municipaux qui seront affectés par la restructuration du tarif grande puissance, on a parlé d'un mécanisme de plafonnement des hausses. Est-ce que vous êtes en mesure d'expliciter davantage ce mécanisme de plafonnement?

M. Roy: Je pourrais vous en donner la formule mathématique, mais fondamentalement, ce dont on va s'assurer c'est que la hausse pour les réseaux municipaux ne dépassera jamais un demi-point de plus que le tarif L pour l'année qui va être impliquée. Donc, il y a une formule qui arrive à ce résultat, le but étant, évidemment, de ne pas détruire de façon sauvage la marge bénéficiaire de ces réseaux. Parce qu'on sait qu'on en contrôle à la fois les prix d'achat et les prix de vente. Donc, on veut s'assurer qu'on ne fera pas disparaître la marge bénéficiaire des réseaux municipaux. En fait, comme je vous le disais, il y en a quatre qui sont touchés et on est déjà en discussion avec eux sur l'application de ces formules.

Mme Bacon: Hydro-Québec soutient aussi, à la page 16 de son mémoire, qu'une dépendance de sa rentabilité envers les abonnés, les tarifs petite et moyenne puissance représentent, à terme, un risque financier qu'il importe de redresser progressivement. Est-ce que vous pourriez expliciter ces risques que vous mentionnez dans votre mémoire et donner aussi un ordre de grandeur de leur impact financier probable?

M. Finet: Le tableau 7 de la page 16 indique que pour les ventes assujetties aux règlements tarifaires, il y a une proportion fort importante - 42 % de ces ventes - qui contribue vraiment très légèrement à la marge bénéficiaire, à la part des bénéfices de l'entreprise, alors qu'on disait tout à l'heure qu'il y en a 28 % dans les catégories de petite et moyenne puissance qui contribuent pour 75 %.

C'est un écart qui est vraiment inacceptable et qui même nous met en danger, on le voit, puisque la hausse des tarifs de 8,5 % en 1990 n'est même pas suffisante pour conserver les 14,5 % de participation aux bénéfices et c'est pourtant notre plus gros bloc de consommation. Ce qui veut dire que ça nous oblige à faire porter par les autres consommateurs un fardeau beaucoup plus grand. On l'expliquait tout à l'heure, à ce moment-là, ce sont tes industries, les commerces et tous les autres clients institutionnels, que ce soient les gouvernements ou les secteurs de services qui doivent en supporter la facture. Pourtant, on n'est pas les seuls. Si on regarde ce qui s'est fait au Canada et aux États-Unis, tout le monde, d'ailleurs, va dans cette démarche de mieux refléter les coûts de fourniture et de réduire cet interfinancement.

Le projet qu'on vous propose, aujourd'hui, 1 % de plus dans le domestique versus la moyenne, à notre avis, est un pas qu'on peut qualifier, je ne dirais pas de timide, mais du moins et loin d'être exagéré, compte tenu du fait que, dans 10 ans, on n'aura pas encore éliminé 50 % de l'interfinancement. Il faut y aller à un régime modéré, surtout qu'on y va maintenant avec un règlement de deux ans et surtout qu'en parallèle on offre un programme d'économie d'énergie - et je le répète parce que ce sera important qui va permettre au client de sauver vraiment une bonne partie de sa facture.

Vous savez, si on peut penser... La hausse qu'on apporte aujourd'hui, elle peut être totalement éliminée. Je vous donnerai juste une illustration avec deux lampes de 100 watts qui consommeraient vingt-quatre heures par jour. Faites l'économie de l'équivalent de ça et vous annulez tout à fait l'impact de la hausse des tarifs. Alors, il n'y a pas beaucoup à faire pour vraiment éliminer l'impact de cette hausse de tarifs.

Mme Bacon: Au niveau de la petite et de la moyenne puissance, quelle est la position concurrentielle d'Hydro-Québec? Est-ce qu'on parle de risques pour Hydro-Québec9 Quelle est votre

position concurrentielle?

M. Boivin: M. le Président, pendant qu'on sort les données, j'aimerais préciser, concernant justement le risque associé, en fait, à avoir 74 % de nos bénéfices qui proviennent de deux secteurs qui ne représentent que 28 % de nos ventes, qu'il faut ajouter à ce que M. Finet a dit - et on va vous fournir les chiffres dans quelques minutes - que ce sont, en plus, les deux secteurs où notre position concurrentielle, par rapport aux autres sources d'énergie, est la moins bonne. Donc, ce sont des marchés où nous sommes, d'une part, plus vulnérables et, d'autre part, qui génèrent 75 % ou 74 % de nos bénéfices. Donc, ça accentue le risque et c'est dans ce sens-là qu'on dit que ce déséquilibre accentue le risque à moyen ou à long terme.

M. Finet: J'ajoute un complément d'information. Ici, on dit dans une étude que nous avons faite: Le mazout coûte, en 1989, entre 39 % et 52 % de moins que l'électricité aux tarifs généraux. Cet avantage du mazout devrait rester à peu près le même puisqu'on prévoit une augmentation du prix du mazout léger d'environ 13 % en 1991. Or, c'est majeur comme écart de prix entre le mazout et l'électricité dans les secteurs généraux de petite et de moyenne puissance.

Le Président (M. Bélanger): Alors, je cède maintenant la parole au député d'Ungava.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Dans un premier temps, allons sur les indices comparatifs des prix d'électricité au 1er mai 1989 dans les différentes villes canadiennes. Je voudrais juste, à titre d'information... Je suppose qu'on a tous à l'occasion regardé la météo, le soir, après les nouvelles, à Radio-Canada et on est à peu près tous à se demander comment ça se fait qu'on ne vit pas tous à Vancouver. On a dû remarquer qu'à l'occasion, quand il fait moins 20° à Montréal ou à Québec, il fait 1° à Vancouver. Même dans le temps des fêtes, ça leur prend tout pour avoir de la neige. Ça, ça veut dire, probablement, qu'ils paient un petit peu moins cher de chauffage que nous autres. Sans avoir des chiffres très précis, on peut penser, au départ, que ça leur coûte un petit peu moins cher de chauffage que ça peut nous coûter quand on reste à Québec, à Chicoutimi, à Chibougamau ou à Val-d'Or. Par conséquent, il y a de fortes chances pour que les 12 % de plus qu'ils paient sur la facture d'électricité, sur lé kilowattheure qu'ils achètent, soient largement compensés par cette différence-là en termes de chauffage de "heater" de char - excusez-moi, mais il doit y avoir un terme français pour ça - de chauffe-moteur d'automobile. Il n'y en a pas tellement à Vancouver, mais chez nous on en a besoin de temps en temps, etc. (12 h 15)

Alors, est-ce que vous êtes capable de nous dire, au-delà des beaux pourcentages qui mêlent tout le monde et que personne ne comprend, combien ça coûte à un consommateur moyen chauffé à l'électricité à Vancouver, par rapport à un consommateur moyen chauffé à l'électricité quelque part au Québec? Prenons, dans le meilleur des cas, Montréal; c'est encore là que c'est le moins froid à peu près. C'est quoi, la facture? Je pourrais vous demander celle de Kuujjuaq, mais ce serait différent. Disons Montréal. C'est plus doux en général que même à Chicoutimi.

M. Finet: Écoutez, on pourrait vous sortir les chiffres, oui, exactement, ce qu'il peut en coûter pour du chauffage à Vancouver versus ce qu'il en coûte ici à Montréal. Probablement, vu que le climat est plus modéré, que la facture d'énergie serait moindre, mais à ce moment-là, pour être honnête, il faudrait aussi comparer le coût de la maison à Vancouver, le coût du panier d'épicerie, le prix des assurances et, finalement, vous auriez peut-être vraiment une réponse précise qui vous permettrait de juger de la qualité de vie à Vancouver et à Montréal.

M. Claveau: On en est à l'électricité, parce qu'il y a bien d'autres choses qu'on pourrait comparer au Québec aussi en termes de... Juste Petro-Canada vend son diesel plus cher au Québec que n'importe où ailleurs au Canada. Vous savez, on pourrait comparer également.

On va s'en tenir à la facture d'électricité. J'aimerais qu'on nous donne ces chiffres exactement pour savoir comment un consommateur moyen, tel que vous le définissez au tableau 11 de votre proposition tarifaire... Vous définissez une facture moyenne par catégories de consommateurs qui chauffent à l'électricité et de consommateurs qui ne chauffent pas à l'électricité, etc. J'aimerais qu'on ait le même tableau pour un consommateur de Vancouver et un consommateur de Toronto. Celui de Winnipeg, il fait froid à Winnipeg, on le sait, mais il a à peu près le même coût que nous, il est à 101 %; il y a 1 % de différence. Ça doit ressembler à la nôtre. Je remarque... On dirait que moins il y a tendance à faire froid, plus les tarifs sont élevés. Il y a peut-être là une concordance qu'on ne connaît pas, c'est peut-être une loi non écrite. En tout cas, j'aimerais avoir un peu plus de précisions là-dessus.

L'autre affaire... Parce que c'est beau de parler de chiffres, mais des pourcentages il n'y a rien de plus trompeur: 10 % de 10 $, ça fait 1 $. Tout le monde est capable de l'absorber, c'est vite fait. Mais 10 % de 1000 $, tu es rendu à 100 $; c'est moins évident quand ton revenu n'a peut-être pas augmenté du tout. Pour revenir à ce que disait tout à l'heure le député de Pointe-aux-Trembles, il faut bien comprendre que si on applique tout ce qui est demandé - la TPS

qui s'applique en fonction évidemment du pourcentage, puis, l'année prochaine, elle va être plus élevée, parce qu'elle va s'appliquer sur 114 % ou 117 % si on a 8,5 % cette année et l'année prochaine, puis les taxes du Québec là-dessus - si on applique tout ça, ça nous donne en gros, pour un consommateur moyen, tel que vous le définissez au tableau 11, quelque chose comme 277 $ par année de plus. Savez-vous que pour un pauvre célibataire sur l'aide sociale, ça représente quelque chose comme une fois et un tiers son chèque mensuel d'aide sociale? Est-ce que ça veut dire que le gouvernement du Québec s'engage à combler la différence? À moins qu'il soit obligé de se passer complètement d'électricité, puis de chauffer au bois; ce n'est pas évident quand tu restes à Montréal. Ça fait partie du problème qu'on a à voir comme population. Est-ce qu'on va dire aux assistés sociaux: C'est bien de valeur, mais à partir de demain matin, clang! on vous ferme le compteur, parce que vous n'êtes plus capables de payer? Ou bien, le gouvernement va prendre des mesures en conséquence pour que les assistés sociaux continuent d'être branchés sur Hydro-Québec C'est ça que ça veut dire en bout de piste. Ça veut dire ça pour bien d'autres affaires aussi. On prend ce cas-là, mais il faut regarder globalement quel impact social ça va avoir, parce qu'il y a du monde qui vit au-delà des chiffres, des colonnes comptables, puis du taux de rendement, puis du taux d'efficacité, puis du rendement sur l'avoir propre. Il y a des gens qui vivent en dessous, puis qui n'ont peut-être pas des taux de rendement très élevés par les temps qui courent, au moment où on annonce encore, par exemple, des mises à pied énormes chez GM, à Montréal, puis au moment où on vient de perdre l'année dernière plus de 1000 emplois juste dans le domaine minier au Québec, etc. Ce n'est peut-être pas évident que tout le monde a un taux de rendement de 14 % sur son avoir propre.

Parlons rapidement des agriculteurs. On en a parlé avec les serres. Page 20 de votre proposition, exploitations agricoles. On dit: Les exploitations agricoles qui bénéficiaient du tarif domestique connaîtront des hausses se situant entre 7,9 % et 9 %, alors que la moyenne atteindra 8,7 %. Il reste au Québec 46 503 agriculteurs, d'après ce que je peux voir, qui sont branchés sur Hydro. À moins qu'il y en ait quelques-uns qui ne le soient pas, mais ça me surprendrait. Il y a à peine une dizaine d'années, il y en avait quelque 60 000. Il nous en reste 46 000. Et là, vers où on s'en va avec ça, moi je ne connais pas beaucoup d'agriculteurs qui ont des taux de rendement sur leur avoir actuellement de l'ordre de 14 % ou de 15 %. Je ne sais pas si vous avez des chiffres là-dessus, mais à ma connaissance, les agriculteurs, ça tire un peu le diable par la queue, comme on dit, dans bien des cas. Ce n'est pas évident, l'agriculture au Québec, parce que ce n'est pas évident non plus que tu peux être concurrentiel avec la vallée de l'Okanagan, et avec la région de Windsor en Ontario, et avec les subventions qui sont données aux producteurs de grain dans l'Ouest canadien et que les nôtres ne peuvent pas avoir au Québec. Hein! Ce n'est pas évident qu'on est capables d'être concurrentiels Une augmentation des charges d'électricité de 9 % pour les agriculteurs, savez-vous que ça risque peut-être d'en mettre plusieurs au bord de la faillite? Sans compter que la TPS va s'appliquer sur d'autres affaires. C'est sûr qu'il va y avoir des remboursements dans le cas de l'agriculture, là, probablement, parce que ça va dans les intrants, mais il y a des frais marginaux qui sont importants et qui augmentent partout Est ce que Hydro Québec est en train de devenir, après avoir été pendant des années une société qui devenait un moteur économique, créatrice d'emplois. D'ailleurs, on l'a vu, dans les emplois soutenus par HydroQuébec, on met tout ce qui s'appelle entreprises hautement consommatrices d'électricité, etc Est-ce qu'on est en train de faire maintenant d'Hydro-Québec une société qui va ralentir l'économie québécoise, qui va égorger des consommateurs québécois qui n'ont pas un taux de rendement de 14 % et qui ne sont pas capables d'avoir un taux de capitalisation de 25 %? Je pense que, là, il est du devoir du gouvernement du Québec de regarder ça très sérieusement, à moins qu'on soit en train de nous dire qu'on va se contenter de 15 000 à 20 000 agriculteurs au Québec et tant pis pour le reste. Parce que je vous assure d'une chose, c'est que, dans le domaine de l'agriculture, une hausse de 9 % des tarifs d'électricité, c'est quelque chose. Mais Hydro-Québec se fart une belle jambe, parce que tout de suite dans le paragraphe suivant, elle dit: Vous êtes chanceux, les agriculteurs, vous pourriez être bien pires que ça Une plus grande proportion de clients connaîtra une hausse supérieure à 8,5 % en raison des caractéristiques de cette consommation Les exploitants agricoles facturés au tarif D conservent tout de même un avantage important du fait même qu'ils bénéficient du tarif domestique plutôt que du tarif général normalement appliqué aux entreprises commerciales et industrielles auxquelles elle s'apparente On dit: Vous êtes encore chanceux, on aurait pu vous étrangler plus que ça, on aurait pu vous changer de catégorie. Et c'est quand même extraordinaire Je suppose qu'il y a bien des agriculteurs qui vont s'en réjouir.

Mais moi, il y a quelque chose que j'ai de la difficulté à comprendre dans la logique fondamentale d'Hydro-Québec Je veux bien croire qu'on a des problèmes à Hydro-Québec. Je veux croire qu'on doit régler des problèmes. Mais tandis qu'on roule carrosse doré. Somme toute, c'a l'air d'aller assez bien à Hydro-Québec, en règle générale: la mobilisation des troupes, comme on l'a vu dans la dernière planche, ça a

assez bien réussi au cours des derniers jours, ça mobilise bien... Tandis qu'on roule quand même carrosse doré à Hydro-Québec, qu'on veut investir des dizaines et des dizaines de milliards en construction, qui vont représenter des frais énormes, on a une population qui est en train de croupir en dessous et qui va avoir de plus en plus de difficulté à payer. Ça, ça semble carrément passer par-dessus la tête d'Hydro-Québec et la tête du gouvernement. Je voudrais savoir c'est quoi, là, comment est-ce que vous envisagez ça? Est-ce que vous allez carrément liquider quelque chose comme peut-être quelque 100 000 assistés sociaux qui ne seront plus capables de payer parce que la note va dépasser leur augmentation et de loin, ou bien si vous allez dire: payez votre électricité mais vous ne mangerez pas? Je voudrais en savoir un peu plus là-dessus. C'est quoi, la corde sensible d'Hydro-Québec par rapport aux besoins, aux problèmes des consommateurs?

M. Boivin: M. le Président, le député d'Ungava semble penser qu'Hydro-Québec n'a aucune préoccupation envers sa clientèle. Comme l'a dit mon collègue, Richard Drouin, ce n'est certainement pas de gaieté de coeur que nous devons, aujourd'hui, demander des augmentations de tarifs aussi importantes. Il faut cependant se rappeler les raisons qui nous amènent à demander ces augmentations de tarifs. Il y en a une qui est hors de notre contrôle, on l'a mentionné, c'est la question de la faible hydraulicité, mais un des facteurs très importants, c'est l'amélioration de la qualité du service. À tort ou à raison, nous avons perçu à Hydro-Québec, au cours des deux ou trois dernières années, un message très clair de la part de toute notre clientèle québécoise que la qualité du service que nous avions n'était pas satisfaisante et que même en revenant au niveau de la qualité du service que nous connaissions au début des années quatre-vingt, ce n'était pas non plus satisfaisant. Nous, les objectifs que nous nous sommes fixés, c'est de fournir aux Québécois de nouveaux standards de qualité du service et c'est ce qui nous amène à augmenter, à demander des hausses de tarifs cette année.

Maintenant, pour ce qui est de la politique de base, nous n'avons jamais eu, à Hydro-Québec, le mandat de confier, de répartir la richesse au Québec. Nous ne pensons pas et il n'y a rien dans notre loi qui nous indique que ce serait notre rôle. Nous sommes cependant conscients du rôle que nous devons jouer comme moteur économique tout en fournissant également à nos clients des conditions qui leur permettent de survivre, comme vous le dites.

M. Finet mentionnait, hier, que nous allons commencer, dès le printemps, auprès de 500 assistés sociaux, une expérience pilote qui devrait déboucher sur des programmes plus spécifiques pour les aider, en fait, à économiser et à utiliser de façon plus rationnelle l'énergie électrique. C'est un exemple, en fait, de la préoccupation qu'a Hydro-Québec envers ses petits clients. Mais, par contre, nous ne pouvons pas et nous n'avons pas le mandat de charger à l'ensemble de la clientèle des tarifs supérieurs pour subventionner certains secteurs de la population. Je dois admettre en toute sincérité que nous ne considérons pas, pour le moment, que c'est notre mandat. Nous serons prêts à le considérer si jamais le législateur nous le confie.

M. Claveau: Je reviens un peu à ce que je disais tout à l'heure au sujet des politiques d'économie d'énergie. Il y a des problèmes de consommation énergétique au Québec, on en convient. Bon! Hydro-Québec a deux choix, deux possibilités. C'est de dire: On investit massivement pour économiser de l'énergie... Et massivement là, on ne parle pas des quelques millions de dollars, des grenailles ici et là, qui sont prévus pour les trois ou quatre prochaines années. Vous savez, en comparaison avec des investissements de 62 000 000 000 $ sur 10 ans, ce sont des bagatelles. Hydro-Québec peut dire: On investit massivement pour faire en sorte de baisser, à la limite, d'aider aux gens à baisser leur facture d'électricité en consommant moins, dégageant ainsi un certain nombre de kilowatts ou de mégawatts - parce que ça va se compter en mégawatts - que nous pourrons revendre à d'autres clients et, de cette façon-là, nous n'aurons pas à investir dans de nouvelles constructions. Actuellement, Hydro-Québec dit: Oui, on va le faire un petit peu. On va en faire un peu, mais il faut qu'on investisse à coups de dizaines de milliards de dollars dans des nouvelles constructions avec tous les troubles que ça implique et, par le fait même, bien, il faut garder des taux de rendement élevés, il faut garder notre cote, il faut... Bon, il va falloir s'organiser pour se payer; ça va coûter cher et, dans le fond, c'est la même clientèle qui paie. Est-ce que Hydro-Québec n'aurait pas avantage à réviser - et là c'est une question peut-être anticipée, mais qu'on aura sûrement à débattre plus en profondeur au mois de mai - complètement sa vision "engineering", j'oserais dire, du développement, parce que des grands travaux, ça paraît bien, puis ça crée des emplois vite, puis ça fait élire des gouvernements? (12 h 30)

Mais au-delà de ça, est-ce que HydroQuébec n'aurait pas avantage à y aller peut-être un petit peu moins fort dans ses vues de type "engineering", puis à mettre la pédale un petit peu plus vite surtout dans les mesures d'économie d'énergie? J'imagine, par exemple, que si Hydro-Québec mettait en place un programme de 10 000 000 000 $ en économie d'énergie, les "blocks" à Montréal qui ne sont pas isolés, on les isole tous demain matin. Ça va peut-être créer autant de jobs qu'une nouvelle rivière à la

Baie James. Puis, finalement, les économies d'énergie, on pourrait toujours les refacturer sous forme de services ou autres à l'intérieur de la "bracket" de diminution. Et, à la limite, je ne suis pas convaincu qu'Hydro-Québec ne perdrait pas d'argent, puis que ce ne serait pas plus rentable pour l'ensemble de la société, sans avoir à faire une pression indue sur l'ensemble des consommateurs. Est-ce que ça a été envisagé de cette façon-là à Hydro-Québec?

M. Drouin: M. le Président, ce qu'on propose, cette année, en matière d'économie d'énergie, à notre avis, est un dossier ambitieux. Vous savez, le dossier de l'efficacité énergétique, puis le dossier des économies d'énergie, puis de la gestion de la demande, Hydro-Québec n'embarque pas dans ça pour la première fois. Si vous regardez tous nos énoncés dans le plan de développement actuel et dans les annexes, vous verrez que ça remonte jusqu'à 1960 où on a eu des actions précises en termes de favoriser auprès des consommateurs des économies d'énergie, soit par des modes d'isolation, soit par des chauffe-eau, enfin, une série de mesures.

Donc, on n'en est pas à nos premières armes là-dessus. Il faut aussi regarder dans le contexte, disons nord-américain, pour ne pas dire du bloc de l'Ouest comme tel y incluant l'Europe, mais au moins du contexte nord-américain pour voir que dans les nouvelles formules d'économie d'énergie, beaucoup d'utilités en sont à leurs premières armes dans ces dossiers-là. Autrement dit, il y a beaucoup de "trial and error", si je peux utiliser l'expression anglaise, relativement aux économies d'énergie. Dire qu'on met quelques millions seulement dans les économies d'énergie dans le dossier qu'on présente dans notre proposition de plan de développement, ce n'est pas tout à fait juste, M. le Président, puisqu'on parle de 1 800 000 000 $ sur une période de dix ans. 1 800 000 000 $, ça veut dire d'arriver, en 1999, à sauver sur une consommation annuelle de 12,9 térawattheures... Ça veut dire sur toute la période. Bien sûr qu'on ne peut pas commencer à sauver 12,9 térawattheures la première année, ce n'est pas possible. D'ailleurs, les montants qu'on vous a mentionnés en termes d'investissements dénotent le fait qu'il faut habituer les Québécois à éteindre le gaspillage, si je peux utiliser l'expression. Il faut les habituer par des formes de communication et de publicité et aussi des accessoires qui leur permettront de sauver...

Mais ce que nous ambitionnons et je dis bien "ambitionner" et j'utilise l'expression, c'est de sauver ou d'économiser, sur une période de dix ans, 70 térawattheures. C'est très ambitieux et on a mentionné dans notre plan de develop pement ou dans l'exposé qu'on vous a fait hier... On a fait certaines comparaisons et dont une... Puis je regrette, on la fait souvent, parce qu'on pense que c'est réellement celle avec laquelle on peut réellement avoir des comparaisons qui sont éloquentes, celles de l'Ontario Et quand on fart cette comparaison on enlève le dossier des alumineries, parce que les nouvelles alumineries sont, de toute façon, très efficaces Donc, on ne peut pas penser avoir des économies additionnelles ou ambitionner de faire des économies additionnelles au niveau des alumineries. Mais quand on regarde ce que l'on peut sauver sur une période de dix ans, en termes d'augmentation de la consommation, c'est 25 %, M. le Président.

C'est ambitieux, mais nous n'avons pas l'intention de geler ce programme-là pour une période de dix ans, puis de se revoir dans dix ans, puis de vous donner les résultats. On devra le faire au jour le jour, semaine après semaine, mois après mois, au fur et à mesure que des accessoires, au fur et à mesure que des programmes de publicité ou des programmes d'implantation de ces économies seront faits, évalués et, par la suite peut-être, amendés et changés. Mais...

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

M. Drouin: ...exactement dans l'objectif de ce que le député d'Ungava mentionne, il s'agit d'atteindre l'objectif le plus haut tout en prenant bien soin de dire que les 12,9 térawattheures, dans dix ans, si on ne les a pas effacés, ça veut dire qu'on n'a pas les équipements pour le faire. Parce que, vous avez raison, M le député d'Ungava, de dire que ça remplace des ouvrages qui vont donner de l'électricité à ce moment-là. Donc, il faudra livrer les 12,9 % ou, du moins, les réévaluer en cours de route

Conclusions

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie, M. le président. Nous passons maintenant à la phase finale de nos travaux, soit les remarques de clôture. Alors, M. le président, ou votre porte-parole, vous avez dix minutes pour les conclusions, le porte-parole de l'Opposition aura dix minutes et Mme la ministre, dix minutes. Alors, je vous invite donc à procéder.

M. Richard Drouin

M. Drouin: M le Président, je voudrais d'abord vous remercier sincèrement pour avoir si habilement présidé les travaux de cette commission. Je voudrais de plus remercier la ministre de l'Énergie et des Ressources, le chef de l'Opposition et le député d'Ungava, ainsi que les autres députés, qui, par leurs questions et réflexions, nous ont fourni la possibilité d'expliquer notre situation ainsi que les facteurs qui nous amènent à vous soumettre notre demande tarifaire pour les deux prochaines années.

Vous me permettrez de reprendre brièvement en conclusion les cinq objectifs énoncés

par la ministre de l'Énergie et des Ressources au début de cette commission. L'hydroélectricité constitue pour tous les Québécois un bien précieux, une richesse collective que nous devons développer et utiliser avec rigueur et efficacité. C'est cette tradition qui nous a permis, depuis bientôt 30 ans, de planifier, d'aménager et d'exploiter avec succès un réseau hydroélectrique dont plusieurs caractéristiques le rendent unique au monde. Hydro-Québec d'aujourd'hui ainsi que le réseau que nous exploitons sont le résultat du travail des employés et des gestionnaires qui nous ont précédés, mais aussi des décisions prises par le gouvernement en vue d'assurer l'autonomie énergétique du Québec, tout en favorisant le développement.

L'intérêt des consommateurs qui composent notre plus large clientèle est au centre de nos préoccupations. Les travaux et les actions qui seront réalisés au cours des prochaines années visent à implanter de nouveaux standards de qualité, tant au niveau de la continuité du service que de nos services à la clientèle. Malgré l'augmentation des coûts de fourniture et les demandes tarifaires qui en résultent, nos clients domestiques continueront de payer beaucoup moins cher leur électricité que les consommateurs de la plupart des autres provinces canadiennes. De plus, la mise en oeuvre de nos programmes d'économie d'énergie visera d'abord les clients résidentiels qui pourront, dès les prochains mois, bénéficier d'un programme d'aide à l'acquisition d'accessoires de haute qualité et de haute efficacité. Ces clients seront, de plus, l'objet d'une importante campagne d'information et de sensibilisation destinée à les aider à effectuer les meilleurs choix dans la gestion de leur consommation. Ces premiers programmes seront accessibles à tous nos clients résidentiels, qu'ils soient locataires ou propriétaires, chauffés ou non à l'électricité, et une attention particulière sera accordée aux plus défavorisés. Nous nous engageons donc à tout mettre en oeuvre pour permettre aux consommateurs québécois de disposer de moyens concrets et efficaces pour réduire sensiblement l'impact de nos demandes tarifaires sur leurs factures.

L'électricité est et demeurera très concurrentielle pour toutes nos catégories de clients, que ce soit par le prix, la disponibilité ou la qualité du produit. Le prix de l'électricité, au Québec, a connu une croissance moyenne inférieure au taux de l'inflation, depuis 30 ans. De fait, au cours des trois dernières années, la croissance moyenne des tarifs a été de 4 %, alors que l'inflation était de 4,3 %. Même si les circonstances que nous connaissons et les mesures que nous avons prises pour y faire face nous obligent à demander des hausses tarifaires supérieures au taux d'inflation anticipé, nous sommes convaincus que l'électricité demeurera à un prix très compétitif par rapport aux autres sources d'énergie disponibles au Québec. De plus, tous nos clients québécois continueront de bénéficier d'un avantage concurrentiel sur leurs voisins de l'Ontario. Cet avantage, qui s'est accru pour les clients de grande puissance au cours des dernières années, varie présentement de 20 % à 34 % selon les catégories tarifaires.

L'électricité demeure aussi très concurrentielle au Québec par sa disponibilité. La mise en oeuvre de la politique énergétique du gouvernement a fait augmenter de 21 % à plus de 41 % l'apport de l'électricité dans notre bilan énergétique et notre autosuffisance est basée sur l'exploitation d'une ressource renouvelable. Sa disponibilité sera d'ailleurs renforcée par la réalisation de nos programmes visant l'amélioration de la fiabilité du réseau. En outre, si la faible hydraulicité que nous connaissons depuis six ans affecte à court terme notre clientèle, il faut se rappeler que la disponibilité, c'est aussi la possibilité que nous avons, en période de forte hydraulicité, comme ce fut le cas au début des années quatre-vingt, d'offrir à notre clientèle québécoise de l'énergie excédentaire à des prix encore plus avantageux.

L'électricité est enfin une énergie de grande qualité, parce qu'elle est efficace, propre, facile d'utilisation et adaptée aux technologies les plus modernes. De plus, l'implantation des nouveaux standards que nous proposons augmentera davantage la qualité de notre produit. L'électricité, comme tout autre bien, doit avoir un prix. Nous proposons de l'établir en fonction des coûts moyens de fourniture pour chaque catégorie de clients parce que cette formule est équitable pour tous nos clients et qu'elle assure le maintien de la santé financière de l'entreprise.

Il est vrai que certaines entreprises peuvent reporter le coût de leurs factures d'électricité à leurs clients, mais, pour plusieurs, cette possibilité a des limites et peut affecter leur position concurrentielle. Nous convenons toutefois qu'il faut appliquer ce principe avec discernement et modération pour tenir compte de la conjoncture actuelle. C'est pourquoi nous proposons, pour les deux prochaines années, des hausses tarifaires assorties d'une légère différenciation pour chacune des catégories de clients. Nous devons, de plus, revoir nos méthodes de détermination du taux de rendement pour tenir compte des caractéristiques propres à chaque catégorie de clients. Ainsi, nous pourrons accorder une attention particulière à la clientèle domestique qui est stable et captive et représente un risque plus faible pour Hydro-Québec.

Nous prenons, par ailleurs, un engagement ferme en matière d'efficacité énergétique à l'endroit de notre clientèle québécoise. Simple et avantageux pour tous, notre objectif consiste à réduire, d'ici 1999, la croissance prévue de la demande au Québec d'au moins 25 % ou, formulé autrement, à diminuer de 10 % la consommation totale d'électricité au Québec par rapport à nos prévisions. Nous investirons 1 800 000 000 $ dans

le plus vaste projet d'efficacité énergétique de notre histoire. Le défi est ambitieux, mais nous pourrons même le dépasser si tous nos partenaires conviennent d'y contribuer avec détermination et nous y gagnerons tous, individuellement, par la réduction de nos factures et, collectivement, par la valorisation de notre ressource hydroélectrique.

Hydro-Québec est la plus importante société d'État du Québec. Son développement a été étroitement lié à l'importance qu'ont toujours accordée ses gestionnaires et le gouvernement au maintien de la santé financière. La gestion de cette santé repose d'abord sur un contrôle rigoureux des coûts et des revenus. À HydroQuébec, les intérêts sur la dette à long terme absorbent 40 % du revenu en 1989. La gestion de la dette constitue donc un objectif majeur pour l'entreprise. Les charges d'exploitation représentent, quant à elles, près du tiers de nos revenus. Nous devons, au cours des prochaines années, accorder une importance primordiale à la gestion de ces charges. Même si nous avons pu démontrer que nos coûts d'exploitation en termes réels et répartis sur chaque kilowattheure vendu n'ont pas augmenté depuis 1978, nous reconnaissons qu'il nous faut maintenant ajouter à cette productivité globale l'accroissement possible de la productivité de chaque employé. (12 h 45)

L'augmentation de la productivité individuelle demeure un objectif majeur de la négociation que nous poursuivons actuellement avec nos trois principaux syndicats, et nous nous engageons à mobiliser tous les gestionnaires et employés de l'entreprise pour l'atteindre. Nous sommes convaincus que les actions que nous avons entreprises au cours des deux dernières années en matière de gestion des ressources humaines, matérielles et financières, commencent à porter fruit. Elles devront, par conséquent, être poursuivies et accentuées, afin de ramener à son niveau historique la confiance qui caractérise la relation qu'entretiennent tous les clients d'Hydro-Québec avec leur entreprise d'électricité. De plus, l'acceptation de nos demandes tarifaires nous permettra de mieux faire face aux risques reliés à l'évolution de l'hydraulicité. HydroQuébec doit disposer de moyens financiers suffisants pour lui permettre de gérer la situation conjoncturelle présente et future sans compromettre sa santé financière.

En résumé et en conclusion, la demande tarifaire que nous soumettons au gouvernement du Québec dans le cadre de notre proposition de plan de développement est équitable pour toutes nos catégories de clients, nous permet d'implanter de nouveaux standards de qualité, maintient la position concurrentielle de l'électricité face aux autres sources d'énergie, assure à tous nos clients une disponibilité d'énergie malgré la faiblesse de l'hydraulicité, rétablit notre santé financière et nous fournit les moyens de faire face aux risques associés à la faible hydraulicité, favorise la mise en oeuvre de notre projet d'efficacité énergétique en collaboration avec tous nos clients et valorise la richesse collective que constitue, pour le Québec, notre ressource hydroélectrique.

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie, monsieur. M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: M. le Président, je tiens d'abord à remercier tout le personnel d'Hydro-Québec, M. le président-directeur général, le président et chef de l'exploitation ainsi que tous les vice-présidents qui ont participé à cet exercice qui sera sûrement très bénéfique pour éclaircir la vision que les Québécois ont d'Hydro-Québec et la vision qu'Hydro-Québec a des Québécois, ce qui n'est pas nécessairement toujours juxtaposé à 100 %. Je voudrais aussi souligner la présence de tous les employés-cadres, enfin de spécialistes d'Hydro-Québec qui sont ici dans la salle en un nombre assez impressionnant et qui ont sûrement tiré beaucoup de bénéfices de cette discussion de deux jours. Aussi, quant à Mme la ministre, je la remercie de l'intérêt qu'elle porte à la question d'Hydro-Québec. Elle démontre vraiment qu'elle veut prendre les choses en main et faire en sorte de fixer à Hydro-Québec ses véritables paramètres, en tant que représentante des actionnaires d'Hydro-Québec, des propriétaires d'Hydro-Québec à la table. Je remercie également tout le personnel du ministère qui a participé en alimentant, entre autres, la discussion par toute une série de notes, d'informations diverses, tel que c'est généralement le cas dans une commission semblable.

Cela dit, on a pu voir, finalement, au cours de ces débats, qu'Hydro-Québec s'est fixé des critères, des ratios, des objectifs en tant que société et en tant que gestionnaire de fonds pour l'État québécois, gestionnaire d'un bien qui appartient aux Québécois. Là-dessus, on n'a rien à redire, dans la mesure où Hydro-Québec, en tant que gestionnaire a, dans son mandat de gérer, au meilleur de sa connaissance, et de rentabiliser l'argent qu'elle a en main tout en fournissant, à un prix raisonnable, l'électricité aux Québécois. Donc, qu'Hydro-Québec fasse ses propositions et qu'elle dise: C'est comme ça qu'on croit que ça devrait se passer, c'est excellent, c'est comme ça que ça doit se passer. C'est la démarche normale Mais il y a un représentant, en l'occurrence une représentante de l'actionnaire ici qui a à orienter tout ça, à prendre des décisions par rapport aux propositions qui sont faites par Hydro-Québec Les taux de rendement, les taux de capitalisation, la couverture des intérêts, le rendement sur l'avoir propre, enfin tout ce que vous pouvez amener

comme paramètre sont des paramètres, sont des données qui relèvent d'abord des intérêts des actionnaires. Dans n'importe quelle société, ce sont les actionnaires qui se prononcent là-dessus. La direction peut faire des propositions, mais ce sont les actionnaires qui orientent les activités, qui déterminent ce qu'ils veulent comme rendement et comme taux de couverture, enfin comme prix de fourniture, comme prix à recevoir de ce qu'ils ont à vendre. Ce sont les actionnaires qui disent: Nous, c'est comme ça qu'on veut que ça fonctionne. À partir de là, les gestionnaires de la compagnie prennent les mandats puis les appliquent. Dans ce sens-là, c'est au gouvernement d'orienter Hydro-Québec, lui donner des mandats clairs et précis. C'est au gouvernement de dire à Hydro-Québec ce qu'il nous faut comme taux de rendement, ce qu'il nous faut comme taux de capitalisation, ce qu'il nous faut comme couverture des intérêts, enfin tous ces ratios. C'est au gouvernement aussi de dire à Hydro-Québec: Dans le fond, on pense que, telle façon de faire, vous devriez peut-être la changer, la réorienter. C'est certain que, dans la mesure où le gouvernement ne donne pas de mandat à Hydro-Québec, Hydro-Québec, comme gestionnaire de fonds publics, va proposer ce qu'il y a de mieux. Elle va proposer l'idéal, mais là, c'est au gouvernement de savoir quelle est la marge entre l'idéal et le possiblement réalisable dans le contexte actuel. C'est là que le gouvernement a à se prononcer.

Nous croyons, en ce qui nous concerne, que la proposition tarifaire qu'on a sur la table va avoir des impacts très négatifs dans l'économie québécoise, dans la mesure où on a une économie qui est déjà prise à la gorge, qui est déjà relativement essoufflée, qui a de la difficulté à trouver de l'air. On parie de ralentissement économique - c'est un nouveau terme pour désigner une crise, mais en tout cas - bien ralentissement il y a. Ce n'est pas quand tout ralentit sur le plan économique, quand ça devient difficile de souffler pour tout le monde, qu'on doit s'amuser encore à égorger le client; parce qu'il est à terre, on va en profiter pour fesser dessus.

Ce n'est pas une attitude responsable de la part d'un gouvernement. On sait comment va l'économie, actuellement. Le gouvernement lui-même est en train, avec ses crédits qu'il nous a déposés hier, de trouver toutes sortes de façons de couper des dépenses ici et là pour balancer ses chiffres. Le gouvernement va être le premier à avoir des problèmes. Les municipalités, qui sont déjà surtaxées, vont devoir taxer encore. Quant aux commissions scolaires, on nous dit que la taxe scolaire va peut-être doubler au cours de l'année qui vient. Le compte d'électricité aussi s'additionne à tout ça. Dans ce sens-là, on croit que ce n'est pas le moment pour Hydro-Québec de vouloir forcer à la limite la capacité d'augmenter les tarifs et, en plus, de nous parier d'interfinancement.

Toutes les catégories de tarifs à HydroQuébec sont rentables. Il y en a qui sont plus ou moins rentables, mais elles sont toutes rentables. Hydro-Québec ne perd pas d'argent avec aucune des catégories tarifaires qu'elfe a actuellement. Dans ce contexte-là, ce n'est quand même pas si mal. Il y a bien des grandes entreprises, avec des produits diversifiés, qui sont obligées de prendre de l'argent d'une production pour combler le manque à gagner d'une autre ligne de production ou d'un autre produit qui, lui, n'est pas rentable. Dans ce sens-là, Hydro-Québec est tout à fait au-dessus de la mêlée. Tous ses produits sont rentables. Ce n'est quand même pas mauvais.

Les investissements, les choix d'investissements d'Hydro-Québec, j'ai hâte qu'on en reparle en commission parlementaire, au mois de mai, et longuement, j'espère. On nous disait, tout à l'heure, qu'Hydro-Québec prévoit des économies d'énergie; ce n'est quand même pas des grenailles, ce sont 1 800 000 000 $, ça veut dire que c'est au-dessus de 1000 millions, c'est de l'argent; 1 800 000 000 $ pour économiser 5600 mégawatts, parce que, quelque 12 térawattheures, 12,9 térawattheures, ça se traduit, en termes de puissance installée dans des centrales, par quelque chose comme 5600 mégawatts. Alors, 1 800 000 000 $, c'est vrai que c'est de l'argent en bout de piste, mais c'est peu comparativement aux investissements globaux qu'Hydro-Québec veut faire pendant la même braquette de dix ans; 62 000 000 000 $, ça, c'est de l'argent. Savez-vous que 1 800 000 000 $ de 62 000 000 000 $, ça représente quelque chose comme 3 %. Avec 3 % des investissements d'Hydro-Québec au cours des dix prochaines années, on va économiser 5600 mégawatts. Avec 3 % des investissements et avec, à peu près, toute la différence, c'est-à-dire quelque chose comme 55 000 000 000 $ ou 56 000 000 000 $ sur les 60 000 000 000 $ qui restent, on va bâtir des centrales, on va créer des problèmes écologiques, on va inonder des territoires, on va avoir des compensations à verser pour dédommagement aux autochtones, etc. et avec ces 55 000 000 000 $, en gros, de travaux d'"engineering" bien pensés, bien calibrés par des gens qui connaissent leur job d'ingénieur, on va produire quelque chose comme 10 800 mégawatts.

Le Président (M. Bélanger): M. le député, je vous inviterais...

M. Claveau: ...55 000 000 000 $...

Le Président (M. Bélanger): ...à conclure.

M. Claveau: Oui, M. le Président. C'est 55 000 000 000 $ de travaux de construction pour 10 800 mégawatts, 1 800 000 000 $ en économie d'énergie pour 5600 mégawatts. Je pense qu'il ne

faut pas être sorcier pour comprendre le rapport.

Là-dessus, j'inviterais Hydro-Québec à penser peut-être plus en termes d'économie d'énergie à coups de milliards. Si on est capables de mettre 55 000 000 000 $ en investissement, dans les dix prochaines années, pour construire des centrales, on serait peut-être capables d'en mettre 8 000 000 000 $ ou 10 000 000 000 $ pour faire plus d'économie d'énergie. Et ça semble être pas mal plus rentable par kilowatt ou par mégawatt que peuvent l'être les constructions de centrales et peut-être bien moins dommageable, à long terme, pour l'ensemble de notre économie.

Tout ça pour dire, M. le Président, que les augmentations qui nous sont proposées nous semblent complètement irréalistes, en dehors de la situation du contexte actuel et qu'on aurait avantage à discuter globalement toute la problématique d'Hydro-Québec avant d'accorder quelque sou que ce soit d'augmentation.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la ministre.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: Alors, M. le Président, au cours des deux dernières journées, nous avons eu la possibilité d'interroger les représentants d'Hydro-Québec sur les modifications qu'ils souhaitent voir apporter à la grille tarifaire de leur entreprise et, surtout, sur les raisons qui justifient de telles modifications. Les réponses apportées à mes questions par les représentants d'Hydro-Québec ont confirmé certains points qui sont essentiels. Hydro-Québec est confrontée à plusieurs problèmes résultant, en bonne partie, de phénomènes conjoncturels qu'il aurait été difficile d'anticiper, il y a encore un an. Ainsi, les représentants de la société d'État nous ont longuement exposé l'impact de la faible hydrauli-cité sur les résultats financiers de l'entreprise. Nous avons souligné avec force que votre situation financière vous laisse une marge de manoeuvre plutôt étroite dans la définition des tarifs, du moins à court terme. Il me parait effectivement évident que les modifications tarifaires qui seront finalement autorisées par le gouvernement devront tenir compte de ce facteur de façon particulière.

À ce propos, je voudrais rappeler combien il est important pour l'ensemble de notre collectivité que la première de nos sociétés d'État dispose d'une situation financière saine, solide, la rendant capable de répondre aux besoins des Québécois pour les années à venir, et cela, dans le meilleur intérêt de l'ensemble du Québec. Cependant, nos discussions d'hier et d'aujourd'hui ont confirmé des préoccupations auxquelles une attention spécifique doit être portée.

J'aimerais revenir sur trois d'entre elles fort importantes. Mon premier souci concerne les consommateurs d'électricité et nous sommes loin, je pense, de la demande qui avait été faite et accordée, en 1982, de 17,5 % d'augmentation domestique. Alors, je pense, M. le Président, que le gouvernement, et je l'ai rappelé hier après-midi, considère comme essentielle la protection de l'intérêt des consommateurs. La proposition tarifaire d'Hydro-Québec, si elle était entérinée, expliquerait que, cette année et l'année prochaine, les prix de l'électricité augmenteraient à un rythme plus élevé que l'inflation. Le gouvernement étudiera avec la plus grande attention la demande de la société, d'autant plus qu'au Québec, les prix de l'électricité ont un effet d'entraînement indéniable sur les prix des autres formes d'énergie. Sur plusieurs marchés, les tarifs avantageux offerts aux consommateurs d'électricité ont constitué une pression à la baisse pour les formes d'énergie concurrentes. Une augmentation rapide des tarifs d'Hydro-Québec risquerait ainsi de se répercuter, au moins en partie, sur l'ensemble du marché énergétique québécois. Hydro-Québec a donc, en matière de prix, une responsabilité qui excède le seul secteur de l'électricité et que la société d'État doit pleinement assumer. C'est également afin de protéger les consommateurs d'électricité, et particulièrement dans la conjoncture actuelle, que des aménagements devront, en plus, être trouvés à la proposition tarifaire qui nous a été présentée. Je souhaite, en effet, que les hausses qui seront demandées aux consommateurs d'Hydro-Québec soient plus également réparties entre les catégories tarifaires.

Nous avons parlé à plusieurs reprises d'interfinancement, au cours de cette commission parlementaire. Indépendamment des principes en cause et des conditions de leur application, je m'interroge sérieusement sur l'opportunité d'aborder cette question dans la conjoncture que nous connaissons. En d'autres termes, est-il raisonnable de demander à certains consommateurs un effort spécifique au titre de vos objectifs d'interfinancement alors que les hausses de tarif demandées à l'ensemble des abonnés sont déjà supérieures à l'inflation. Dans la situation exceptionnelle que vit, cette année, HydroQuébec, il serait peut-être légitime de reporter l'application de vos objectifs d'interfinancement et d'accorder ainsi un répit aux consommateurs visés.

Ma deuxième préoccupation concerne les charges d'exploitation d'Hydro-Québec et, d'une façon générale, la situation de la productivité au sein de la société d'État. Hier et aujourd'hui, nous avons abordé à plusieurs reprises cette question. Comme je l'ai déjà souligné, il me semble aller de soi qu'Hydro-Québec récupère, par une gestion interne appropriée, une partie de la marge de manoeuvre qu'elle semble avoir perdue. En termes pratiques, il faudra que la société d'État mette en place un véritable plan d'action touchant les frais d'exploitation et

l'amélioration de la productivité et rende des comptes sur ce dossier. C'est dans ce sens que je formulerai certaines recommandations au gouvernement.

Une troisième question doit également retenir notre attention. Il s'agit des économies d'énergie, de la nécessaire action visant à mieux utiliser notre potentiel hydroélectrique. Là aussi, de nombreux points ont été soulevés lors de cette commission parlementaire. Le souci de mieux utiliser notre électricité rejoint, en fait, à mon sens, l'objectif de protection des intérêts du consommateur. En effet, une efficacité plus grande dans l'utilisation de l'énergie aura pour résultat de réduire la facture électrique des consommateurs québécois, tout en améliorant notre autosuffisance. Je m'attends donc à ce qu'Hydro-Québec fasse preuve d'imagination dans la mise en place des moyens visant à permettre une meilleure utilisation de l'énergie électrique.

Pour terminer, je voudrais remercier les représentants d'Hydro-Québec de leur disponibilité, de la coopération dont ils ont fait preuve lors de ces discussions. Je suis certaine que cette commission a fait avancer de façon très positive les débats concernant la gestion de notre principale richesse énergétique. Je voudrais remercier mon collègue, le représentant de l'Opposition, porte-parole de l'Opposition en matière d'énergie, mes collègues députés des deux côtés de cette Assemblée et vous aussi, M. le Président.

Je pense que ces débats reprendront et s'élargiront dans moins de deux mois, lorsque nous aborderons l'avenir même de l'électricité au Québec. Nous ne nous servirons pas de cette prochaine rencontre pour faire le procès d'Hydro-Québec. J'aimerais replacer ici les discussions que nous aurons, dans deux mois: la place de l'électricité dans les mandats énergétiques au Québec, ce sont les mandats que nous avons donnés à la commission, la situation et l'évolution de la demande d'électricité au Québec à moyen et long termes, les orientations et les choix possibles afin de satisfaire l'évolution de la demande d'électricité au Québec à moyen et long termes, les moyens en termes de ressources et d'équipements proposés par Hydro-Québec dans le cadre de son plan de développement pour accomplir son mandat et fournir l'électricité nécessaire au Québec et les moyens de concilier la satisfaction des besoins d'électricité au Québec, la qualité de l'environnement et le développement économique durable.

D'ici là, M. le Président, le gouvernement aura statué sur la demande tarifaire qui est déposée par la société d'État. Je suis convaincue que la décision gouvernementale saura tenir compte de tous les éléments que nous avons discutés ici, au cours de nos travaux.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, la commission de l'économie et du travail remercie Hydro-Québec de sa participation, remercie aussi tout le personnel qui nous a soutenus dans ces travaux et, compte tenu qu'elle a accompli son mandat, nos travaux sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 13 h 4)

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