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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le vendredi 6 décembre 1991 - Vol. 31 N° 89

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi n° 186, Loi modifiant la Loi sur le bâtiment et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Dix heures six minutes)

Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît!

Organisation des travaux

Alors, en remarques préliminaires, je voudrais juste préciser quelques petits points du règlement. Ce n'est pas qu'on ait des inquiétudes, bien au contraire, je pense qu'on a une tradition de travailler ensemble, les gens de l'industrie de la construction en général et cette commission parlementaire. Je sais qu'il n'y a jamais de problème. Je veux juste vous rappeler quand même qu'aucune forme de manifestation, que ce soient des rires, des applaudissements ou quoi que ce soit, ne peut être acceptée; que ce soit d'un bord ou de l'autre, quel que soit le contexte, d'aucune façon. On vous demanderait, s'il vous plaît, de vous abstenir; même si, des fois, c'est tentant, il ne faut pas. O. K. ? Ça fait partie des règles ici et ça nous aide aussi à faire un travail plus efficace et plus en profondeur. Donc, dans ce sens-là, je rappelle ces règles-là. Je vais essayer de les rappeler au cours de la journée, mais je sais que, pour la majorité, on les comprend et on les respecte.

On a accepté aussi, exceptionnellement, qu'il y ait des gens de chaque côté parce qu'on manquait de place. Je sais qu'à quelques moments dans la journée on aura encore plus de monde, c'est ce qu'on m'a dit. Alors, vous êtes tous les bienvenus. Vous êtes chez vous. C'est votre Parlement, ce n'est pas juste celui des députés. C'est notre maison, c'est la maison de la démocratie. Dans ce sens-là, nous sommes très heureux de vous voir aussi nombreux à participer à nos travaux.

Dans un premier temps, avant de passer aux remarques préliminaires, M. le ministre, j'aimerais déposer un mémoire de l'Institut québécois des revêtements de sol inc., qui ne sera pas entendu aujourd'hui, mais qui est déposé à titre d'information pour le ministre. Alors, je ferai circuler copie de ce mémoire-là au ministre et à Mme la critique de l'Opposition.

Sur ce, règle générale, nous allons fonctionner ainsi: à peu près 20 minutes pour la présentation des mémoires, mais on peut être élastiques et aller jusqu'à 30 minutes, mais on comprend que c'est à l'intérieur d'une enveloppe d'une heure et qu'on ne peut pas dépasser cette heure-là puisque nous sommes cédulés jusqu'à minuit ce soir. Donc, si on veut finir ce soir, on ne peut pas dépasser minuit. On va essayer de faire une gestion du temps qui sera serrée. C'est donc 20 minutes pour la présentation du mémoire. Il y aura 20 minutes pour le parti au pouvoir et 20 minutes pour l'Opposition pour poser des questions. Or, il se peut qu'on ne prenne pas les 20 minutes au complet, mais il se peut aussi qu'on les prenne. Donc, on s'entend là-dessus.

Lorsque les deux partis, comme c'est la tradition, remercieront ou salueront les groupes à la fin de leur présentation, je demanderais au groupe qui est déjà à la table de se retirer pour permettre à l'autre groupe de s'installer pour qu'on ait le moins de perte de temps possible, s'il vous plaît, et que ça se fasse le plus efficacement possible. Donc, ça termine mes remarques.

Nous aurions à peu près 10 minutes pour des remarques préliminaires. Alors, M. le ministre, et Mme la députée de l'Opposition par la suite. Juste un instant auparavant, est-ce qu'il y a des remplacements ce matin?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Claveau (Ungava) remplacera M. Chevrette (Joliette).

Le Président (M. Bélanger): Bien, je vous remercie. Pas d'autres remplacements? C'est bien. M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Normand Cherry

M. Cherry: M. le Président, chers collègues, membres présents. Il me fait plaisir de me trouver ici aujourd'hui dans le cadre de cette consultation particulière sur les projets de loi 185 et 186. Je profiterai de cet exercice pour écouter avec attention les représentations des neuf groupes qui se présenteront tour à tour pour faire entendre leur voix sur ces projets de loi.

Je rappelle que le projet de loi 185, qui vise à apporter des modifications à la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, est complémentaire au projet de loi 186 modifiant la Loi sur le bâtiment et d'autres dispositions législatives. Ces deux projets de loi se veulent des premières réponses au rapport Picard-Sexton et des éléments inscrits au plan d'action annoncé le 20 juin dernier par le biais d'une déclaration ministérielle. Dans les faits, ces deux projets de loi marquent le début de la réforme de l'industrie de la construction.

À mon arrivée au ministère du Travail il y a un peu plus d'un an, le rapport Picard-Sexton se trouvait sur ma table de travail. J'en ai pris

connaissance et demandé aux gens de mon ministère de se mettre à l'oeuvre. Je rappelle qu'au même moment de nombreux échanges ont eu lieu entre les parties contractantes et ont conduit à la mise en place d'un plan de formation pour le perfectionnement et le recyclage.

L'intention du législateur en proposant ces changements inscrits au projet de loi 185, M. le Président, est de rétablir la notion d'entrepreneur autonome, lutter contre le travail au noir, permettre la mise en place... un fonds de formation pour le perfectionnement et le recyclage et préciser les pouvoirs corporatifs de la Commission de la construction du Québec. Il vise également à majorer certaines amendes et à créer de nouvelles infractions et ce, pour mieux contrer le travail au noir. De plus, ce projet de loi étend à tout entrepreneur de la construction la responsabilité solidaire avec ses sous-traitants du paiement des salaires dus par ces derniers à leurs salariés et, de plus, il supprime l'obligation de publier dans les journaux la convention collective conclue par les parties et la requête demandant son extension juridique, et permet au gouvernement de déterminer les cas prévus par la loi où des frais, droits ou honoraires peuvent être exigés.

De son côté, le projet de loi 186 qui est, et je le répète, complémentaire au précédent a pour objet de rendre opérationnelle la Loi sur le bâtiment adoptée en 1985, restée toutefois sans effet, et ce, tout en lui apportant des modifications. Les changements proposés ont pour but d'améliorer la qualité des travaux de construction, responsabiliser davantage les intervenants, mieux protéger le consommateur et, enfin, mieux contrer le travail au noir. De nature hautement technique, je me limiterai à énumérer les grandes lignes du projet de loi qui sont: formation d'une régie du bâtiment et d'un comité consultatif, réconciliant ainsi le souci d'efficacité et le maintien d'une présence des partenaires dans le processus décisionnel; précisions à apporter au champ d'application dans les secteurs non mentionnés, comme la qualification des entrepreneurs, par exemple; systématisation des attestations; suppression des échappatoires et raccourcissement des délais pour accroître la responsabilisation; extension de l'attestation de conformité aux fabricants et réparateurs d'appareils sous pression, à l'entrepreneur de construction ainsi qu'à la personne exécutant des travaux sur des installations de gaz; apparition de nouveaux éléments lors du renouvellement de la licence d'entrepreneur: continuer à se mériter la confiance des parties, les infractions aux lois connexes et au code de déontologie ainsi que son dossier de points d'inaptitude; détermination des critères de reconnaissance d'un plan de garantie.

Je suis confiant, M. le Président, que les mesures énumérées précédemment combinées à une hausse significative des amendes devraient produire leurs effets sur le travail au noir. Je le répète, le travail au noir est un fléau qu'il faut à tout prix enrayer. En terminant, je tiens à assurer à tous les organismes qui se présenteront tout au long de la journée que leurs représentations feront l'objet d'une écoute attentive et les mémoires déposés, d'une lecture minutieuse. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le ministre, mesdames, messieurs, bonjour. J'ai pris connaissance d'un certain nombre de mémoires et je cite le mémoire de la FTQ qui dit. dans son tout permier paragraphe: Pour la nième fois, nous sommes convoqués devant votre commission afin d'exposer nos opinions sur des changements à être apportés sur toute la question concernant l'industrie de la construction.

Je comprends la lassitude du milieu, mais, en même temps, je dis que, peut-être ne serions-nous pas là si la loi 53 avait été mise en vigueur et opérationalisée, pour utiliser les termes du ministre, et si le gouvernement avait mieux fait son travail avec la loi 31. La loi 53, en fait, il faut se le rappeler, c'était le fruit d'un large consensus dans le milieu et partagé par la très très grande majorité des intervenants, bien que, pour quelques-uns, il y avait peut-être lieu de revoir un peu la composition de la commission. Ce projet de loi devait assurer une meilleure qualification des entrepreneurs, une meilleure protection du consommateur, un contrôle plus efficace du travail au noir et, si on l'avait appliqué, peut-être qu'on ne serait pas ici aujourd'hui. Nous y sommes et j'ai l'intention d'écouter avec beaucoup d'attention chacun des mémoires qui vont être présentés, de manière à voir si, ensemble, nous pouvons améliorer les deux projets de loi sur lesquels nous échangerons aujourd'hui, c'est-à-dire 185 et 186.

Le ministre, à notre invitation, a accepté de tenir cette commission parlementaire. J'estime et je regrette qu'elle soit trop brève. Nous avions demandé deux jours; ça nous aurait permis, à tout le moins, de rencontrer tous les organismes qui en faisaient la demande. Malheureusement, nous devons nous contenter d'une journée. Il faudrait comprendre que, lorsque nous avons fait cette proposition au ministre, c'était dans un esprit de collaboration parce que je connaissais sa volonté de vouloir faire adopter la loi avant la fin de la présente session. Mais le ministre a refusé. Nous nous trouvons donc avec une journée pour disposer des mémoires et des avis sur ces deux projets de loi.

Le projet de loi 53 avait fait l'objet d'une large consultation et l'Opposition d'alors, l'Opposition libérale, s'y était opposée parce qu'elle n'avait pas été consultée, nous disait-on, et le

projet de loi 53 a quand même été adopté. Mais aujourd'hui, on est devant deux projets de loi qui, à quelques exceptions près, n'ont pas fait l'objet de consultations avant d'être déposés. Certains groupes ont manifesté leur inquiétude et sont, pour ainsi dire, estomaqués par ce qu'ils retrouvent dans les projets de loi, surtout quand ils les comparent à la déclaration ministérielle du ministre du Travail déposée le 20 juin dernier en Chambre.

La consultation est trop brève, je le disais; elle ne nous permettra pas de rencontrer de nombreux organismes, et je pense en particulier aux associations de consommateurs qui sont concernés. Je pense aux ingénieurs et aux architectes. Je pense à l'Union internationale des journaliers de la construction, qui ont formellement fait la demande et, je dois dire, j'avais pressé le ministre de les entendre parce que j'estimais qu'ils avaient un des mémoires les plus fouillés sur les effets du travail au noir sur les caisses, sur les revenus de l'État. C'est un des mémoires les plus fouillés à cet égard et je pense que nous aurions tous eu intérêt à les entendre. Alors, c'est pourquoi je demanderais au président qu'on puisse déposer leur mémoire.

Alors, ces organismes, comme les organismes de consommateurs, auraient eu intérêt à venir se faire entendre ici, et nous aurions eu intérêt aussi à les entendre, parce qu'il y a plusieurs dispositions dans la loi qui prévoient des tarifications, qui prévoient les plans de garantie, qui prévoient les fonds d'indemnisation, différentes mesures susceptibles, tantôt, de se répercuter sur les coûts de la construction.

M. le Président, je vais rappeler brièvement les principaux éléments de fa déclaration ministérielle déposée le 20 juin dernier, c'était: améliorer la qualité des travaux, responsabiliser les intervenants, contrer le travail au noir et protéger le consommateur.

Responsabiliser les intervenants. Comme moyen de responsabiliser les intervenants, le ministre propose la création de la régie du bâtiment composée de cinq membres nommés pas le gouvernement. Ça va être l'équivalent d'une espèce de monstre bureaucratique qui risque de s'enliser rapidement dans un dédale infernal de directives, de règlements, de tarifications, et tout cela par-dessus la tête des entrepreneurs qui, et c'est quasiment normal, ne se sentiront pas liés par les décisions de la régie. Ils vont tout faire en leur pouvoir, probablement, pour tenter d'y échapper. Je dis qu'il y a une espèce de hiatus entre sa déclaration et celle du ministre Tremblay, le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui propose la concertation, la collaboration et ce qu'il appelle ses grappes, et j'ai l'impression que, de sa grappe, il y a comme des raisins qui ont été laissés-pour-compte ou qui sont tombés et qui s'appellent les entrepreneurs. À cet égard, je pense qu'il faudra revenir sur cette question de la composition de la régie du bâtiment.

Contrer le travail au noir. Nous aurions pu apprécier les effets de la loi 53 si elle avait été appliquée. Mais, à l'heure actuelle - je reviens sur la composition de la régie et la participation des entrepreneurs en construction - à l'heure de la concertation si bien définie dans le projet de son homologue, le ministre Tremblay, et auquel le ministre s'est engagé à souscrire lundi dernier, il aurait été souhaitable, si on avait été logiques, dans l'esprit de ce projet, de favoriser le regroupement des entreprises qui compétitionnent entre elles, et pourquoi pas en même temps le regroupement avec les travailleurs de la construction? Il serait préférable de créer une synergie dans cette industrie plutôt que de bâillonner les entrepreneurs. Et le ministre va me dire: J'ai le comité, là. Mais vous savez, un comité consultatif à une régie, moi, participer à ça, j'aurais de grosses hésitations, j'estimerais que j'y perds mon temps. Alors, les gens ne sont pas dupes, la régie du bâtiment va remplacer la commission qui avait au moins le mérite de réunir, faut-il le dire, au niveau décisionnel, pas tous les intervenants mais plusieurs intervenants. Alors, cette régie obligera l'entrepreneur à adhérer à un plan de garantie, ce qui n'est certainement pas mauvais, et à débourser ce qu'elle lui demandera de débourser. Et qui paiera en bout de ligne, M. le Président? C'est probablement le consommateur.

Mon inquiétude par rapport à la régie - j'aimerais entendre les intervenants là-dessus - il y a dans cette disposition du projet de loi tout ce qu'il faut pour un gouvernement pour aller chercher des taxes déguisées, comme on l'a fait pour la Régie de l'assurance automobile. Tandis qu'une commission qui a à assurer son fonctionnement, à s'autofinancer, et qui est gérée par des entrepreneurs est moins encline à céder à cette tentation, parce que chacun y perdrait, ou y gagnerait selon le cas, alors que, pour une régie, ça a toujours un côté inquiétant. J'espère entendre, là-dessus, des intervenants.

Il y a des intervenants qu'on a refusé d'entendre, mais je me demande comment et pourquoi - j'aimerais que le ministre nous l'explique aussi - la décision de substituer la régie au Bureau des examinateurs pour les électriciens et tuyauteurs. Il semble que c'était là deux corporations qui fonctionnaient relativement bien, qui ne coûtaient rien à l'État. On peut être d'accord avec l'idée de contrer le travail au noir, de mieux cerner la définition de l'entrepreneur autonome, mais fallait-il faire disparaître ces deux corporations? Je pense que la question se pose, parce que dans la population, de façon générale, ces corporations ont beaucoup de crédibilité, et il semble qu'elles aient bien assumé leurs tâches. Alors, c'est une question qui va certainement être abordée au cours des audiences.

M. le Président, il faudrait peut-être

rappeler que la loi 53, qui aurait pu contrer le travail au noir et dont on aurait pu connaître la capacité de le faire, n'a pas été mise en application alors qu'elle est adoptée depuis déjà six ans et demi. Mais il faut se rappeler que, si elle n'a pas été mise en vigueur, c'est qu'à l'époque, en 1985, quand le gouvernement libéral a pris le pouvoir, il faisait une espèce de "trip" de déréglementation, de libéralisation. Et, sans le dire ouvertement, les pratiques de travail au noir étaient perçues comme une bonne chose parce qu'elles réduisaient les coûts de la construction. Mais c'était de courte vue, puisque le travail au noir a des effets infiniment pernicieux sur les coffres de l'État, parce que le travail au noir, ça crée des problèmes de caisses à la CSST, à la RAMQ, à la Régie des rentes du Québec, mais, de façon générale, des problèmes de caisses lorsqu'il s'agit de payer l'éducation, les transports, tous les services publics, puisque ces personnes ne paient pas d'impôt et échappent à leurs obligations. C'était de courte vue que de penser que favoriser le travail au noir, c'était favoriser l'économie. Je pense que nos caisses et, actuellement, les finances de l'État s'en ressentent.

Les audiences devraient nous permettre de mesurer l'atteinte des objectifs sur le travail au noir et de mesurer ses effets, selon que vous êtes entrepreneur ou employeur. Là aussi, j'ai quelques inquiétudes, parce qu'il me semble que certaines dispositions s'avèrent extrêmement sévères à l'endroit des travailleurs - à l'endroit des travailleurs, nous aurons l'occasion d'y revenir - parce qu'à trop en mettre on risque non pas de décourager le travail au noir, mais de le rendre peut-être un peu plus invisible. Quelqu'un qui perd sa carte de compétence pour trois mois, il va falloir qu'il gagne sa vie - ne me demandez pas comment, je veux dire, il va se faire enfermer, aller en prison, je ne le sais pas. Mais il y a là des dispositions qu'il faudrait voir, s'il n'y a pas moyen, un peu, d'en atténuer la portée, selon certaines conditions.

Par ailleurs, ce qui me semble être la plus grande fraude, c'est celle des entreprises à numéro qui naissent et qui meurent comme les éphémères et qui laissent à la Commission la responsabilité de payer les ouvriers, qui échappent à toute obligation. C'est un vol manifeste et il me semble que, dans ce projet de loi, on a peu ou pas de disposition qui permettra de contrer cette pratique. Les compagnies à numéro qui obtiennent des contrats des sociétés de la couronne avec un dossier lourd d'infractions, compagnies que l'on embauche sans tenir compte de leur passé, du passé des propriétaires, qui ont des pratiques frauduleuses reconnues, pratiques qui s'apparentent au banditisme - et les sociétés d'État continuent d'embaucher ces entreprises parce qu'elles présentent les plus basses soumissions - ça constitue une compétition tout à fait illégale, anormale et inacceptable pour tous les entrepreneurs qui, eux, veulent respecter et se conformer aux lois, codes et règlements de la construction.

Les amendes sont majorées sans qu'on n'ait jamais vérifié leur effet réel, faute d'avoir appliqué, je le rappelle, la loi 53. Mais que vaut l'organisme qui a la responsabilité de faire les constats d'infraction si, en même temps, il n'a pas le pouvoir de faire la perception des amen des? Et ça, c'est un problème majeur parce que, entre le constat de l'infraction fait par la Commission, et le jugement et le paiement de l'amende, il peut s'écouler deux ans.

Alors, il y a des questions qui vont se poser tout à l'heure. Que fait-on du droit d'être entendu dans des délais raisonnables? Vous allez voir des causes qui vont sauter, parce qu'on sait qu'au criminel ça a été jugé inacceptable, passé un certain délai. J'imagine qu'au civil on aura tantôt ce problème. Alors, on aura beau majorer les amendes, si on ne se donne pas les moyens de les percevoir rapidement et si ce n'est pas le même organisme qui le fait, à mon avis, on sombre dans le ridicule et ce n'est pas sérieux. Qu'est-ce qu'on dirait si le Code de la route était confié à des organismes qui n'auraient pas le pouvoir de percevoir les amendes?

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi, je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

Mme Blackburn: Bien, M. le Président, je termine. Quelques mots sur la formation, brièvement. Bravo! il y a eu la signature d'une entente entre les syndicats, les entrepreneurs et le gouvernement, je m'en réjouis; cependant, il faudra savoir s'il n'y a pas là des chevauchements inutiles, il faudra voir comment on pourra harmoniser ça, par exemple avec les autres programmes existants et avec le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu.

La protection du consommateur, je dis: Bravo! La qualité des travaux, les certificats de conformité, les plans de garantie et les tarifications qui sont nombreuses, tant pour avoir un plan de garantie, tant pour qualifier les entrepreneurs, pour les surveiller, mais je rappelle: Quels seront les effets sur le consommateur? Il sera bien protégé, je dis oui, mais à quel prix? Nous ne le savons toujours pas.

Ce projet de loi est le fruit de la réflexion d'un ministre et je déplore une chose, c'est qu'il aurait dû s'associer, faire sa grappe avec le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre de la Justice et le ministre des Finances. Alors, j'espère qu'au cours des audiences qui vont suivre nous aurons l'occasion, mesdames et messieurs, d'échanger sur ces différents points et je sais, évidemment, que vous ne manquerez pas de nous apporter. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions, Mme la députée de Chicoutimi. Nous recevons un premier groupe ce matin, la Centrale des syndicats...

Mme Blackburn: M. le Président, le dépôt du mémoire de l'Union... Vous m'avez donné l'autorisation. J'ai demande...

Le Président (M. Bélanger): Oui, il n'y a pas de problème...

Mme Blackburn: Oui? Pas de problème?

Le Président (M. Bélanger): ...si j'ai le document. Si vous permettez un petit instant.

Mme Blackburn: J'avais aussi des copies pour l'autre, pour les carreleurs. Les aviez-vous?

Le Président (M. Bélanger): Oui.

Mme Blackburn: C'est parce que j'en avais fait faire. (10 h 30)

Auditions

Le Président (M. Bélanger): C'est donc le dépôt d'un mémoire de l'Union internationale des journaliers d'Amérique du Nord, local 62, qui est déposé à la commission. Donc, le document officiel maintenant de la commission sera distribué aux membres dans quelques minutes.

Nous recevons donc ce matin, dans un premier temps, le premier groupe, la Centrale des syndicats démocratiques, la CSD, c'est-à-dire le Syndicat des travailleurs de la construction du Québec, STCQ-CSD, représenté par M. Claude Gingras. Écoutez, je vais vous laisser le soin de vous présenter parce que ça nous prend les noms aussi pour les ordres d'intervention. Je vous demanderais aussi à chaque fois que vous avez à intervenir, s'il vous plaît, de bien vouloir donner votre nom. Ceci aide beaucoup les gens qui travaillent à la transcription des débats qui sont dans une autre pièce en bas et qui ne vous voient pas. Alors, si on pouvait aussi, à chaque fois, donner son nom. Par exemple, dire: "Claude Gingras", ce qui permet une meilleure transcription, c'est beaucoup plus facile pour les petites dames ou les petits messieurs qui travaillent en bas dans l'ombre. Alors, sans plus tarder, j'inviterais M. le président Gingras à nous présenter son équipe et à procéder à la présentation de son mémoire.

Centrale des syndicats démocratiques

M. Gingras (Claude): Merci, M. le Président. Je voudrais, comme vous l'avez indiqué, vous présenter ceux qui m'accompagnent pour la présentation des commentaires, analyses et recommandations de la CSD. À ma gauche immédiate, Michel Fournier, qui est le président du syndicat; suivant, Martin Ouellet, qui est le secrétaire du Syndicat des travailleurs de la construction du Québec-CSD, et, à mon extrême gauche, M. Lawrence Laroche, qui en est le trésorier; à ma droite, Pierre-Yvon Ouellet, qui est directeur professionnel du secteur construction à la CSD, et François Vaudreuil, à l'extrême droite, qui est le vice-président de la CSD.

M. le Président, M. le ministre, Mme Blackburn, critique du travail, membres de la commission permanente de l'économie et du travail. La CSD et le Syndicat des travailleurs de la construction du Québec qui regroupent plus de 17 000 travailleurs inscrits à l'Office de la contruction, dont 15 000 sûrement actifs dans l'industrie de la construction, cet important secteur de l'économie, nous, à la CSD. en tant que représentants de ces 15 000 travailleurs, accordons beaucoup d'importance aux travaux que vous entreprenez quant à l'étude des projets de loi 185 et 186. Les membres que nous représentons fièrement, d'ailleurs, sont très soucieux quant aux intentions du législateur de préserver leurs droits les plus fondamentaux.

Pour faire la présentation de nos commentaires, bien sûr, je suis assisté des membres du syndicat, mais je suis également, et vous pouvez le constater, en présence de plusieurs conseillers syndicaux de la CSD et également de membres de la CSD qui ont tenu à être présents aujourd'hui pour témoigner de leur intérêt à ce que ces travaux se traduisent effectivement par une reconnaissance pleine et entière de leurs droits démocratiques.

On ne peut sûrement pas aborder l'analyse du projet de loi 185 amendant la loi de la construction sans prendre un recul pour évaluer dans sa globalité l'état de cette industrie déterminante dans le développement du Québec. Depuis l'adoption de la loi de la construction survenue en 1986, l'État s'est attribué un rôle de partenaire de plein droit dans l'industrie. La loi de la construction a remplacé le modèle du "paritarisme contrôlé" pratiqué au sein de l'Office de la construction du Québec par un partenariat, effectivement, à trois. C'est ainsi, par exemple, que les associations syndicales représentatives, l'association patronale et l'État occupent d'égal à égal le même nombre de sièges au conseil d'administration de la Commission de la construction du Québec, quatre sièges par partenaire. En accentuant son rôle dans les lieux décisionnels de l'industrie de la construction et en adoptant un modèle de partenariat tripartite, l'État s'est attribué, en fait, davantage de droits et de pouvoirs. Mais, en même temps, il accroît ses obligations et ses responsabilités et ça, c'est notre prétention.

C'est sous cet angle que la Centrale des syndicats démocratiques veut aborder le projet de loi 185. Par le biais de son syndicat affilié, le

Syndicat des travailleurs de la construction du Québec, la Centrale est un intervenant actif et reconnu dans l'industrie. Nous avons ainsi la légitimité requise pour interpeller l'État et lui demander de nous rendre des comptes. Et je pense que sur ça, M. le Président, vous admettrez que l'entente privée qui a donné lieu quand même à ce qui se passe aujourd'hui, nous n'avons pas été associés très étroitement à son élaboration.

Y a-t-il un contrat social dans la construction? Comment s'organisent le partenariat et la concertation? Dans quelle mesure l'industrie de la construction reflète-t-elle les valeurs démocratiques de la société québécoise? Pour la CSD, il est pénible de répondre à ces questions. En effet, nous croyons que l'anachronisme, la contradiction et le ridicule se partagent les réponses. Vous allez peut-être trouver ça dur, mais c'est un peu notre vision de ce qui se passe.

Sur le plan des libertés démocratiques et du pluralisme syndical, par exemple, l'industrie de la construction dégage des reflets honteux et dégradants des valeurs démocratiques du Québec moderne: le dialogue et la concertation sont étouffés par le juridisme et l'affrontement; sur l'échiquier syndical, le respect des minorités numériques cède le pas à la loi du plus fort et à la discrimination; la transparence et la non-violence ne résistent pas à l'intimidation réelle et à l'apparence de corruption; les chantiers de moyenne et de grande envergure, très souvent financés massivement par des investissements et des gratifications monétaires publics, s'apparentent à des films de cow-boy où la loi de la jungle règne: Baie James, alumineries, papetières, etc.

En définitive, l'industrie de la construction appartient trop souvent aux nostalgiques de l'ère des "gros bras", de la dictature et du totalitarisme. Et le ministre du Travail se fait rassurant...

Or, le gouvernement du Québec est pourtant pleinement responsable de cette situation. En parrainant la loi de la construction de 1986, le gouvernement du Québec s'est attribué la responsabilité d'intégrer, de véhiculer, de représenter et de défendre les valeurs de société du Québec moderne dans l'industrie de la construction. Depuis cinq ans, le gouvernement du Québec n'a pas cessé de céder devant les intérêts privés et partisans. On peut dire que c'est un échec assez lamentable. Il n'a pas compris son nouveau rôle de partenaire de plein droit; il a plutôt continué à arbitrer en catimini des intérêts divergents issus d'un paritarisme conflictuel, contrôlé et dirigé. De même, le piétinement relatif au financement des mandats publics qui sont assumés actuellement par la CCQ fait preuve d'une malhonnêteté consommée de la part de l'État qui se veut un partenaire de plein droit.

Nous voulons vous soumettre une première position qui, pour nous, est essentielle. La CSD affirme que le projet de loi 185 amendant la loi de la construction doit prioritairement jeter les bases d'un vrai contrat social, moderne et démocratique dans cette industrie.

Le 4 octobre 1991, des représentants de la CSD et de son syndicat de la constrution rencontraient le ministre du Travail. Nous avons alors déposé à M. Cherry un document qui résume notre orientation quant aux mesures à prendre pour remettre l'industrie de la construction sur les rails de la démocratie, du respect des droits et libertés de la personne et du développement économique et industriel. Ce document est annexé au présent mémoire et nous n'avons pas l'intention de le reprendre ici dans les moindres détails.

Soulignons toutefois que, sur le plan du pluralisme syndical, nous affirmons haut et fort que, malgré la reconnaissance formelle de cinq associations représentatives dans la loi de la construction, le fonctionnement concret du pluralisme syndical est un véritable fouillis.

Depuis 1987, les travailleurs de la construction n'ont plus le droit de voter pour l'association syndicale de leur choix. Il y a uniquement les nouveaux travailleurs qui doivent adhérer à une association syndicale pour entrer dans l'industrie; depuis 1987, le choix d'allégeance est sans retour.

Les associations syndicales reconnues n'ont aucune garantie de siéger au conseil d'administration de la CCQ ni d'être associées au processus de négociation pour le renouvellement des conditions de travail.

Au sein des comités de la CCQ inscrits dans la loi de la construction, la représentativité des associations syndicales et les modes de décision sont disparates et arbitraires.

Il arrive continuellement à des travailleuses et travailleurs de la construction d'être victimes de discrimination à l'embauche et lors de mises à pied à cause de leur choix syndical. Comme on entend dire dans les milieux hypocrites, "ils n'ont pas choisi la bonne centrale"; les monopoles de placement vivent grassement. Dans ces cas, les recours prévus, plaintes au ministre notamment, sont inefficaces parce qu'ils sont désaxés par les acrobaties juridico-technocratiques et écrasés par une bureaucratie assommante. Il en résulte que lorsque, par miracle, une décision ou une action est prise par le ministre du Travail, c'est toujours avec une lenteur désarmante.

Face à ces constats, nous avons demandé au ministre du Travail d'apporter des amendements prioritaires à la loi pour consacrer la pleine reconnaissance du pluralisme syndical.

La CSD recommande, en fait, d'amender en priorité la loi de la construction pour, premièrement, instaurer un vote d'allégeance syndicale aux trois ans ou moins, par un scrutin obligatoire et postal; garantir la présence de toutes les associations syndicales au conseil d'administration

de la CCQ et au processus de négociation, pas dans le sens que certaines associations le préconisent, c'est-à-dire en éliminant tous ceux qui ne requièrent pas 25 % des travailleurs dans l'industrie de la construction - je trouve que c'est de l'aberration et si quelqu'un osait, un jour, embarquer dans de telles recommandations, je pense que ce serait la négation des droits fondamentaux des travailleurs à la liberté syndicale; uniformiser la représentativité et les modes de décision au sein des comités de la CCQ inscrits dans la loi: la CSD considère que sur des sujets comme la formation professionnelle et les avantages sociaux, le paritarisme patronal-syndical doit être privilégié.

Alors, la CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le règlement de placement pour centraliser le placement au sein d'un seul organisme qui appliquerait le principe de l'ancienneté de disponibilité. Qu'on mette fin, en fait, à la jungle qu'on connaît.

Le projet de loi 185 contient deux articles, en apparence anodins, sur la formation et les mesures relatives à la main-d'oeuvre. L'article 3, entre autres, précise que la CCQ peut administrer tout fonds que les parties jugent nécessaire aux fins de formation. L'article 10 indique que le décret peut contenir des dispositions touchant des mesures relatives à la main-d'oeuvre. Le projet de loi 185 contient aussi des dispositions transitoires et finales, en particulier l'article 26 qui permet au gouvernement d'édicter un règlement en matière de formation, perfectionnement et recyclage sans être obligé de publier préalablement un projet de règlement dans la Gazette officielle du Québec.

Ces amendements à la loi de la construction constituent un coup de force, à notre avis, qui relève un peu de l'hypocrisie et de la lâcheté, et on s'explique. Il vise essentiellement à frapper la CSD et les associations d'entrepreneurs, c'est-à-dire à les écarter d'un volet important du perfectionnement et du recyclage des travailleuses et des travailleurs de la construction.

Pour bien comprendre ces propositions d'amendements, il faut savoir qu'il y a quelques semaines, l'AECQ et l'alliance CSN-FTQ-INTER signaient une entente pour créer un fonds financé par les employeurs afin de favoriser le perfectionnement et le recyclage. La gestion de ce fonds, et des programmes en découlant, est confiée à des comités administrés par les signataires. Comme l'affirmait le ministre Cherry à la délégation de la CSD le 4 octobre dernier, il s'agit d'une entente privée.

Le projet de loi 185 vient officialiser cette entente privée; il permet à la CCQ de percevoir des sommes en formation et il permet au décret de traiter de formation. Ainsi, avec l'adoption du projet de loi, le Conseil des ministres pourrait, par règlement, modifier le décret pour officialiser l'entente. Pour s'assurer que le décret soit modifié en douce, bien sûr, le gouvernement se donne le droit d'adopter le règlement sans être obligé de publier un projet de règlement dans la Gazette officielle du Québec. On ne doit pas nécessairement, quand on veut couvrir des tiers, essayer de faire en catimini des choses qui vont assujettir d'autres personnes que celles qui ont été mises dans le coup. On élimine ainsi toute forme de contestation ou d'opposition au règlement; on enlève aux dissidents le droit démocratique d'exprimer leur opposition. Pour faire passer le tout, on prétexte qu'il y a urgence, l'entente privée devant entrer en vigueur en janvier 1992. Le gouvernement du Québec ne peut pas se permettre de respecter les délais de la démocratie... L'entente privée est prioritaire! Or, nous le déplorons amèrement.

Pour plusieurs raisons, la CSD n'accepte pas, bien sûr, la manoeuvre pilotée par le ministre du Travail. En particulier, on créerait une double structure de gestion de la formation professionnelle, provoquant ainsi un fouillis, de la confusion et des conflits de juridictions. De même, on écarte de la structure proposée des associations formellement reconnues comme partenaires dans l'industrie.

Pour bien saisir la portée du projet de loi 185 en matière de formation professionnelle, il faut rappeler brièvement l'historique du dossier. La loi de la construction de 1986 accordait aux partenaires de l'industrie des responsabilités déterminantes en matière de formation professionnelle. La loi créait un comité de formation professionnelle, l'article 18.1 de la loi et suivants, agissant dans le cadre des structures de la CCQ. Il s'agit du CFPIC. Depuis 1987, le CFPIC a tenu environ 40 réunions. Pour appuyer son travail, le CFPIC a mis sur pied des sous-comités régionaux, une dizaine, soit un par région, et des sous-comités professionnels, 26, soit un par métier, occupation, spécialité. Depuis 1987, les sous-comités ont tenu des dizaines et même des centaines de réunions. (10 h 45)

Pour simplifier la présentation des mandats, nous vous énumérons, en gros, les mandats qui relèvent du CFPIC, mais qui, actuellement, semblent assez clairs par rapport, justement, à la mission qui leur est réservée. Il y a des questions majeures qui se posent aussi, il y en a une en formation continue qui concerne les modalités de formation. Plusieurs options sont possibles: cours du soir à temps partiel en dehors des heures normales de travail; cours de jour à plein temps sans compensation financière; cours de jour à plein temps avec prestations d'assurance-chômage et compensation de frais; et d'autres formes de gestion de ces cours.

Il y a d'autres questions cruciales dans le domaine de la formation continue, entre autres, l'éloignement des travailleurs, la production de matériel de cours adapté, les prérequis exigés, l'accueil et l'orientation des candidats et candidates, la reconnaissance des acquis scolaires et

extrascolaires, l'attribution d'équivalences et le respect de la culture ouvrière.

Dans le cadre des travaux de ce CFPIC, les partenaires ont entrepris de multiples démarches pour répondre aux attentes en matière de formation continue. Par exemple, la CCQ est en discussion avec la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada pour mettre sur pied un fonds en fiducie de formation et un projet concret fut déposé pour étude. D'autres discussions ont lieu à la CCQ, entre autres, avec la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada.

L'entente privée AECQ-Alliance vient mettre en place une structure parallèle au CFPIC qui serait dotée de deux comités de gestion, l'un pour la caisse créée et l'autre pour les programmes. C'est, à notre avis, inacceptable; cette double structure ne provoquera que de la confusion, du tiraillage et des conflits de juridictions, de reconnaissance et de représentativité. Avec qui travaillera le MEQ? le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle? la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada? et les commissions scolaires?

Par ailleurs, l'entente privée AECQ-Alliance confine le dossier du financement et de la gestion des programmes de perfectionnement et de recyclage au domaine des relations du travail, ce qui veut dire qu'on met de côté les associations non engagées dans la dernière négociation. Sont exclus, entre autres, la CSD, le Syndicat de la Côte-nord et les associations d'entrepreneurs, et l'entente privée banalise, en outre, le rôle de la CCQ. Sur ce point...

Le Président (M. Bélanger): M. le président, je m'excuse de vous interrompre, nous avions convenu de 20 minutes pour la présentation de votre mémoire. Visiblement, vous avez besoin de plus de 20 minutes. Combien de temps encore vous sera-t-il nécessaire?

M. Gingras: J'aimerais que vous m'accordiez encore 5 minutes. Je pense qu'on pourrait s'en tirer.

Le Président (M. Bélanger): Alors, on a consentement, je présume? Oui? On est quand même ici pour les écouter. Alors, M. le président, allez-y.

M. Gingras: Alors, M. le Président, la CSD n'a pas fait porter son analyse prioritaire sur l'exclusion des associations d'entrepreneurs qui composent l'AECQ, mais nous estimons, toutefois, que ce geste d'exclusion est inquiétant et malheureux. Dans le cas de la CSD, par exemple, des dossiers honteux s'accumulent actuellement: les débrayages illégaux du printemps de 1990, les événements entourant la construction de l'hôtel Delta de Trois-Rivières, l'arbitrage de griefs relatifs au congédiement injuste d'honnêtes travailleurs sur les chantiers de la Baie James; et on peut vous donner des dossiers précis, d'ailleurs, qu'on a remis. Au train où vont les choses avec l'AECQ dans le décor, H faut craindre que le dossier du perfectionnement et du recyclage se traitera bientôt à coup de mises en demeure et d'Injonctions.

Cela dit, la CSD n'accepte pas que le projet de loi veuille officialiser l'entente privée et dénonce le gouvernement du Québec qui semble vouloir se prêter à cette manoeuvre. C'est un affront pour nous. La CSD n'a rien à se reprocher en matière de formation professionnelle.

Alors, nous recommandons, en fait, au gouvernement du Québec de modifier l'article 3 du projet de loi 185 en remplaçant les mots "les parties jugent" par les mots "le comité constitué en vertu de l'article 18.1 juge", et ce, pour remettre dans les mains du CFPIC le soin d'administrer, justement, les fonds de formation professionnelle.

La CSD recommande également au gouvernement du Québec d'insérer un article 10.1 du projet de loi 185 qui suivrait l'article 10 et qui se lirait comme suit: "L'article 61 de cette loi est suM de l'article 61.1 qui se lirait comme suit:

Toute disposition du décret traitant des mesures relatives à la main-d'oeuvre et faisant référence à la Commission sous quelque forme que ce soit, telle que la perception de cotisations, de contribution ou d'argent sous toute autre forme, la gestion de fonds, le versement de prestations, la gestion de programmes, doit être administrée exclusivement par le comité constitué en vertu de l'article 18.1 de la loi, dans le cadre des pouvoirs, responsabilités, droits et obligations dévolus audit comité."

Nous recommandons également au gouvernement du Québec de biffer l'article 26 du projet de loi 185.

Quant à l'élimination du travail au noir, bien, vous comprendrez qu'on partage les objectifs qui sont dans le projet de loi 185 pour éliminer le travail au noir. Nous demandons, bien sûr, que ces mesures pour éliminer le travail au noir soient l'accroissement des pouvoirs d'inspection, l'augmentation des amendes, la restriction de l'utilisation du statut d'entrepreneur autonome, la perte de certificat de compétence lors d'une deuxième infraction, etc. Il faut aussi souligner la promulgation de la Loi sur le bâtiment, rendue possible par le projet de loi 186. Elle va dans le même sens. Pour la CSD, l'adoption du projet de loi 186 est essentielle pour compléter les mesures contenues dans le projet de loi 185. Or, le gouvernement ne peut pas, en toute équité, adopter les mesures de lutte au travail au noir contenues dans le projet de loi 185 sans adopter simultanément le projet de loi 186.

Or, certaines mesures, cependant, visant à

combattre le travail au noir ont des effets pervers, de sorte que ces mesures déclenchent du travail au noir sous d'autres formes. Alors, il faudrait quand même être prudent. Par exemple, un salarié qui verrait son certificat suspendu en vertu de l'article 18 du projet de loi ne cessera pas nécessairement de vivre pour autant; il y a des risques pour que ce salarié continue de travailler au noir sans certificat. Dans cet exemple, le projet de loi 185 pourrait être perçu comme étant plus sévère pour les salariés détenteurs de certificats que pour ceux qui n'en détiennent pas.

Les salariés qui détiennent des certificats et qui se livrent, en fait, à du travail au noir le font souvent pour répondre à des directives, des ordres de leurs employeurs en particulier; ça devient une condition d'emploi non écrite, mais obligatoire. C'est le cas, par exemple, de ceux qui acceptent des tâches qui ne sont pas de leur juridiction ou qui renoncent à des frais de déplacement, qui transforment leurs heures supplémentaires en banque d'heures. Dans ce cas, les salariés sont à la merci de la "loi des employeurs" que le projet de loi 186 vise à corriger, du moins partiellement.

Pour ces raisons, la CSD considère que les mesures contenues dans le projet de loi concernant la lutte au travail au noir doivent être encadrées pour offrir un filet de sécurité aux salariés.

Alors, la CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le décret de la construction pour renverser le fardeau de la preuve et donner un préjugé favorable au plaignant dans le cadre de l'application de la section 14, discrimination, entre autres.

Aussi, la CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le décret de la construction pour introduire l'ancienneté régionale par employeur lors des embauches et des mises à pied dans le cadre de l'application de la section 16, préavis de mise à pied.

En conclusion, M. le Président, dans l'industrie de la construction, le temps des "réformettes" très partielles, partisanes et discriminatoires devrait être révolu. Je pense qu'il est grand temps d'intégrer l'industrie de la construction aux valeurs de société du Québec moderne.

Je vous remercie et on est à votre disposition pour répondre aux questions.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le président. M. le ministre, si vous voulez commencer.

M. Cherry: Merci. À cause de certains aspects de votre mémoire que vous n'avez pas eu le temps d'aborder, je voudrais vous suggérer quelques questions qui vous permettraient peut-être de toucher à ça.

J'aimerais savoir, parce que vous ne l'avez pas dit, quelle sorte de commentaire vous souhaiteriez nous faire sur le travailleur autonome qui est exclu du champ de la construction neuve, par exemple. J'aimerais vous entendre là-dessus. Vous ne l'avez pas fait à date, mais je présume que c'est parce que le temps vous a manqué. Donc, dans ce sens-là, j'aimerais, dans un premier temps, vous entendre.

M. Gingras: Bon. Concernant le travailleur autonome qui est exclu, en fait, c'est qu'on est d'accord actuellement avec le projet de loi dans la forme actuelle, telle qu'il le préconise, de traiter le travailleur autonome. Et il en va de même, bien sûr, pour l'entrepreneur autonome. Nous avons analysé les différentes facettes et, sur ça, la CSD est entièrement d'accord avec les recommandations ou les prescriptions qui apparaissent dans le projet de loi.

M. Cherry: O. K. Sur le projet de loi 186, avez-vous des représentations à faire, autres que les commentaires des pages 19 et 21, par exemple?

M. Gingras: Non, nous n'avons pas d'autres recommandations. Nous considérons que, de façon générale, 186 est un corollaire, et je pense qu'un dans l'autre, 185 et 186 sont deux projets de loi qui se complètent. Je pense qu'il y en a un qui touche surtout les travailleurs, mais il y en a un autre qui touche surtout les employeurs, le comportement des employeurs. Alors, dans ce sens-là, je pense que ces deux projets de règlement doivent être mis de l'avant. Ils se complètent très bien par rapport aux objectifs recherchés, quand on parle du travail au noir, entre autres, et de tout ce qui se développe dans l'industrie de la construction, pour continuer de laisser évoluer ce genre de fonctionnement là qui s'est développé au cours des années et qui prend, bien sûr, de plus en plus d'ampleur, comme vous le savez.

M. Cherry: Vous avez parlé fréquemment dans votre mémoire de l'aspect représentativité, l'expression de la démocratie syndicale, le vote, et tout ça. Souhaiteriez-vous être plus explicite ou est-ce que vous croyez que la partie du mémoire que vous avez couverte vous suffit? Ou est-ce que vous voulez profiter de l'occasion que je vous offre pour faire des commentaires additionnels?

M. Gingras: M. le ministre, je pense que quand on vous a rencontré à ce sujet-là, concernant la liberté syndicale et le droit démocratique des travailleurs de pouvoir exercer leur liberté de choix d'allégeance syndicale, nous avons été très clairs quant aux objectifs que la CSD poursuit.

Bien sûr, vous savez fort bien que le syndicalisme dans l'industrie de la construction

est obligatoire. Au départ, tout le monde doit être syndiqué pour travailler dans cette industrie. En fait, c'est une industrie fermée syndicalement: n'entre pas qui veut et, deuxièmement, ceux qui y sont doivent être syndiqués et choisir leur allégeance syndicale, et c'est en vertu de ces choix qu'éventuellement des associations les représentent dans leurs intérêts, soit la négociation ou l'application de leurs conditions de travail.

Nous avons, depuis quatre ans, assisté à toutes sortes d'exercices, d'études, et tout ça, qui ont traité de la liberté syndicale des travailleurs de l'industrie de la construction. Mais depuis quatre ans, ces travailleurs de la construction n'ont pas eu ou n'ont pas pu exercer leur liberté de choix d'allégeance syndicale. Vous savez qu'au début, quand on avait consacré le syndicalisme obligatoire dans l'industrie de la construction, on avait accepté des règles de démocratie dans cette industrie. On avait accepté qu'il y ait un vote obligatoire de façon constante et régulière pour permettre aux travailleurs de l'industrie de la construction d'assumer leur liberté de choix d'allégeance syndicale dans cette industrie. Il est impossible de penser qu'on va consacrer à une centrale syndicale ou à une organisation syndicale le soin exclusif de représenter les travailleurs. Je pense que, quand on décide d'un syndicalisme obligatoire dans une industrie aussi importante et aussi large que celle de l'industrie de la construction, on doit y associer le pluralisme syndical. Le pluralisme syndical, ça veut dire la possibilité d'être représenté par plus d'une association syndicale et une liberté de choix de ces associations syndicales.

Alors, c'est un peu autour de ça qu'a tourné, en fait, l'élaboration de la syndicalisation dans l'industrie de la construction, mais, avec le temps, ce qu'on a fait de cette industrie, vous le savez, il y a eu des fractionnements qui sont survenus. Entre autres, il y a eu une scission à l'intérieur de la CSN; il y a eu la création de la CSD; il y a eu une scission à l'intérieur de la FTQ où on a assisté à la création de plusieurs organisations syndicales qui représentent des travailleurs de la construction. Et ça, je pense que c'est sain. Les travailleurs de l'industrie de la construction ont une liberté de choix. Ils peuvent assumer cette liberté de choix, à un moment donné d'être représentés par l'association de leur choix. S'ils avaient voulu, au cours des années, donner ou choisir majoritairement des associations syndicales, ils les auraient choisies au moment où ils avaient l'occasion de le faire par des votes au scrutin secret.

Or, ce que nous disons là-dessus, c'est qu'il est important de redonner aux travailleurs cette possibilité de choix démocratique de leur allégeance syndicale. Ça fait quatre ans qu'ils n'ont pas pu l'exercer dans l'industrie de la construction et si on ne procède pas de façon rapi- de - quand on sait la façon dont les conditions sont renouvelées depuis quelque temps dans l'industrie de la construction, par prolongation - on se demande quand sera le prochain exercice de la liberté syndicale dans l'industrie de la construction. Pour nous, il est essentiel qu'on passe à l'action et que, prioritairement, le ministre consacre un vote syndical obligatoire dans l'industrie de la construction, et régulièrement, aux trois ans. Nous avons aussi comme position que, quelle que soit la représentativité d'une association, elle doit être associée à tout le processus de représentation de ses membres, c'est-à-dire négocier les conditions de travail, les appliquer et être présents à la CCQ qui a le rôle de gérer, en fait, les cotisations dans lesquelles eux sont impliqués, ou cotisent, aussi, et que leurs employeurs cotisent en leur nom. (11 heures)

Alors, dans ce sens-là, M. le ministre, je pense qu'un véritable exercice de liberté syndicale dans l'industrie de la construction repose sur la liberté de choisir périodiquement son allégeance; deuxièmement, il repose aussi sur le pluralisme syndical; troisièmement, I repose sur la reconnaissance pleine et entière des associations que les travailleurs ont choisies pour les représenter et aussi donner suite à leurs revendications quand ils veulent se faire représenter par ces associations. Je pense que ça, ce sont des conditions essentielles.

Alors, vous devez ordonner que ça, ce vote-là, ne soit pas obligatoire. Pas des votes bidon comme ceux qu'on a connus dans les dernières années, où seulement les travailleurs qui voulaient changer d'allégeance syndicale pouvaient aller se prononcer dans les bureaux. Ça, ça équivaut à dire: Bon! Bien, écoute, si tu vas te présenter pour voter ou choisir une allégeance syndicale, c'est parce que tu t'identifies immédiatement comme une personne qui veut changer d'allégeance syndicale, avec tout ce que ça comporte. Je n'ai pas besoin de vous faire de dessin là-dessus. Alors, quant à nous autres, c'est une formule bidon qui méprise la liberté de choix des travailleurs dans l'industrie de la construction; on vous demande de la changer, et ce, rapidement.

M. Cherry: Toujours sur le même sujet, M. Gingras, dans vos déclarations, vous avez dit: II est inconcevable qu'un organisme syndical puisse représenter l'ensemble des travailleurs. Vous avez soutenu cette logique-là par la fragmentation. Si on recule des années en arrière, c'était CSN-FTQ; il y a eu, comme vous l'avez expliqué, fragmentation de la CSN qui a fait la création de la CSD. Et il y a eu, comme vous l'avez également souligné, division au sein de la FTQ-Construction qui a créé le Conseil provincial. Donc, ça, c'est la situation de fait aujourd'hui.

Là, vous dites: II est impossible de penser qu'un organisme syndical puisse représenter

l'ensemble ou la majorité. Lors d'une expression de vote, si un fort pourcentage des travailleurs décidait de le faire ou s'il y avait regroupement qui ramenait cette même chose-là, est-ce que vous me dites que vous... J'aimerais vous entendre là-dessus. Je ne veux pas vous prêter de propos, mais il est important pour moi de saisir. Si un regroupement d'organismes créait une forte majorité, ce serait quoi votre position là-dedans? Vous en seriez exclus ou vous en ferie2 partie? J'aimerais vous entendre.

M. Gingras: On ne vous dit pas que c'est impossible que les travailleurs, un jour, choisissent majoritairement de confier leur adhésion à une association syndicale. Je ne pense pas que ce soit ce que j'ai voulu dire et je ne pense pas que ce soit ça que je vous ai dit. Ce que je vous ai dit, par exemple, c'est que, si les travailleurs avaient voulu, au cours des années, confier leur destinée à une association nettement majoritaire pour les représenter, ils l'auraient fait. Il y a certains moments où ils ont pu se prononcer à cet effet-là.

Ce que je veux dire, c'est que, dans une industrie comme l'industrie de la construction, ce serait tout à fait inconcevable qu'on décide de modalités qui feraient en sorte d'éliminer la liberté de choix et que, quand des travailleurs se prononceraient pour choisir une association syndicale, on les force, dans un deuxième temps, à en choisir une autre parce qu'elle n'est pas suffisamment représentative. Ça, ce serait de l'aberration; ce serait de la négation de droits fondamentaux de choix d'allégeance syndicale.

Or, pour nous, il est essentiel que cette liberté de choix puisse exister et que, quand les travailleurs ont choisi leur allégeance syndicale, ils puissent conserver la possibilité de laisser leur destinée dans les mains de ces associations qu'ils ont choisies, quitte à réévaluer leur choix dans un autre temps. Mais c'est ça l'importance parce que, essayer d'éliminer carrément, comme certains le préconisent, des associations syndicales de la possibilité de continuer de représenter leurs membres dans un secteur comme l'industrie de la construction, ce serait accepter un régime totalitaire dans lequel on évacue les minoritaires. Et on ne leur laissera jamais la chance de revenir, à un moment donné, comme les représentants des travailleurs dans ce secteur-là.

Comment pensez-vous, si on suivait les recommandations que certains préconisent, qu'une organisation syndicale qui représente des travailleurs et qui se verrait privée, pendant deux, trois, quatre ou cinq ans de représenter ses membres parce que, supposément, pas assez représentative - même si elle représente 15 000 ou 20 000 travailleurs, ce n'est pas assez représentatif - elle serait écartée de la représentation de ses membres... Comment pensez-vous que cette organisation syndicale là pourrait garder une certaine crédibilité pour, éventuellement, peut-être recueillir l'allégeance des travailleurs? Ce serait consacrer aux associations majoritaires des monopoles. Ce serait ça, le résultat de la décision.

Alors, je pense que la commission Cliche a suffisamment inventorié toute cette question et fait des recommandations très substantielles. Je pense que les parlementaires devraient s'en inspirer pour l'avenir et ne pas tomber dans le même panneau que celui qui était préconisé à l'époque et qui nous a amenés dans les incidents qu'on connaît.

M. Cherry: Vous venez de parler de groupes de 15 000 à 20 000; je pense que vous vous référez à l'organisation qui est la vôtre.

M. Gingras: C'est ça.

M. Cherry: Dans votre mémoire vous avez parlé de 18 000, dont 15 000 actifs. Est-ce que je vous cite bien? Je pense que c'est ça. Par rapport à l'ensemble des travailleurs dans l'industrie de la construction, en pourcentage, ça représente quoi?

M. Gingras: Vous savez comme moi qu'il y a 130 000 travailleurs dans l'industrie de la construction, plus ou moins, et ça équivaut autour de 10 % à 11 %, à peu près, des travailleurs de l'industrie de la construction. Mais quand on parle d'une représentation de 10 % à 11 % des travailleurs de la construction, il faut penser que c'est quand même une masse importante de travailleurs. Quand on parle d'une industrie qui emploie environ 130 000 travailleurs, on ne parle pas d'une petite usine de 5000 travailleurs, même si on met 5000 travailleurs. On parle d'une industrie. On ne parle pas d'une entreprise, là, parce que c'est une somme importante d'entreprises et, comme il n'y a pas d'accréditation par entreprise dans l'industrie de la construction, c'est une forme de reconnaissance syndicale. Et vous connaissez la transférabilité des travailleurs de cette industrie-là. Ce n'est pas des travailleurs qui sont nécessairement toujours attachés au même employeur. Il y a beaucoup de transférabilité. Or, dans ce sens-là, l'industrie de la construction a un modèle unique parce que, justement, elle a une situation qui est un peu unique par rapport à l'ensemble du secteur des entreprises.

Or, le pluralisme doit être quelque chose d'important dans cette industrie-là. La liberté de choix d'allégeance syndicale doit être préservée à tout prix, et ceux qui ont des mandats de représenter des membres là-dedans doivent être respectés et non pas discriminés. Lorsque le ministre a à prendre des décisions concernant les conditions de travail ou quelque forme de bénéfice que ce soit qui se rattache aux travailleurs de ces industries-là, il doit absolument

donner droit de cité aux associations qui ont le mandat de représenter leurs membres à l'intérieur de ces décisions-là.

M. Cherry: Une dernière question sur le même sujet et, ensuite, notre temps sera écoulé. Vous parlez de la représentativité de votre organisme sur l'ensemble de ce qu'est la structure pour le fonctionnement de la formation, et tout ça. On vient d'établir ensemble que vous représentez 10 % ou 11 %. Par rapport à la représentativité de votre organisme par rapport aux autres qui, eux, pourraient peut-être en représenter deux, trois ou quatre fois plus, vous verriez ça comment, cette forme de représentativité là par rapport au langage que vous me tenez? Pour ma compréhension, s'il vous plaît.

M. Gingras: Le nombre de sièges et de représentants qui pourraient quand même participer aux décisions et être représentés, ça peut-être quelque chose qui peut s'ajuster en proportion de la représentativité, mais il ne faudrait jamais écarter qui que ce soit. Je pense qu'au départ la justice élémentaire exige que si tu as un mandat de représenter, tu dois être là. Si tu n'es pas là, c'est qu'on te discrimine, en fait. On ouvre la porte à dire: Bon, bien, qu'est-ce que ça peut te donner de continuer d'oeuvrer à l'intérieur d'une organisation syndicale? On va te nier ton droit d'assumer pleinement tes obligations. Ça, je pense que c'est de l'aberration; c'est à ça qu'il faut mettre fin dans l'industrie de la construction, comme situation.

Ce qui est tout à fait acceptable, c'est que, quand on participe et qu'on prend des décisions, on les prenne dans la proportion de notre représentativité. Je pense que ça, on serait capable de vivre avec ça, mais ça oblige quand même les gens à travailler ensemble et puis, collectivement, à partager certaines décisions qui deviendraient des décisions majoritaires de l'industrie de la construction. Il ne faut pas tout simplement essayer d'écarter des gens et, après ça, refaire de nouvelles majorités sur la base de données qui sont fausses, qui écartent au départ une portion importante des travailleurs. C'est ça que je vous dis.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Gingras, messieurs, bonjour. Je vais passer tout de suite aux questions parce que l'intérêt, c'est de vous entendre. Vous parlez d'allégeance syndicale et j'ai cru comprendre tout à l'heure dans votre présentation que vous parliez de deux ans ou trois ans. Ce qui était prévu, c'était trois ans et c'était mal explicité, ce qui fait que les décrets le prolongent jusqu'aux négociations. Mais, deux ans, ça ne vous apparaîtrait pas un peu court?

M. Gingras: Écoutez, sur les deux ans, j'ai dit deux ans parce qu'on a comme cadre de référence un peu ce qui se passe dans le Code du travail. Le Code du travail prévoit que vous pouvez quand même exercer cette liberté de choix en vertu de conventions qui peuvent avoir une durée entre un an et trois ans. Or, quand j'ai mentionné ce cadre, c'est que c'est un cadre, à mon avis, et dans une période de trois ans il y a beaucoup de temps qui passe. La convention collective peut être une période de référence, d'ailleurs, tout à fait acceptable. Si la convention est de trois ans dans l'industrie de la construction, ça pourrait être trois ans aussi, le délai.

Je n'ai pas de limite fixe, mais si la convention dans l'industrie de la construction - parce que c'est permis - avait une durée de deux ans, est-ce qu'on va, à ce moment-là, négliger de permettre au travailleur de se prononcer à l'intérieur de deux ans pour voir s'il n'a pas changé d'idée quant à son choix d'allégeance syndicale? Pour nous, on dit qu'à chaque échéance de convention collective il devrait y avoir une période où les travailleurs sont appelés à exercer leur droit de choix démocratique. Le maximum serait de trois ans, toutefois, parce que je pense qu'un régime qui a plus de trois ans et qui t'empêche de modifier ton choix d'allégeance syndicale, c'est un régime qui, à mon avis, est discriminatoire.

Mme Blackburn: Je pense que ça fait l'unanimité. En tout cas, dans les mémoires que j'ai lus, je pense que tous les groupes réclament une disposition, une modification qui permettrait que ça soit tenu aux trois ans. Vous réclamez, au nom de la reconnaissance pleine et entière des organisations syndicales, la centralisation des comités de placement. C'est en page 8 de votre mémoire. J'ai fait un rapport entre les deux parce qu'il m'a semblé qu'il y en avait un. Alors, vous dites à la position 3: "La CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le règlement de placement pour centraliser le placement au sein d'un seul organisme". De qui relèverait cet organisme?

M. Gingras: Écoutez, moi, j'ai été de ceux qui ont participé à l'étude de Gold, dans le temps. On se reporte très loin dans le temps parce que, à l'origine, je suis un travailleur de l'industrie de la construction - président de la CSD aujourd'hui mais, à l'origine, travailleur de l'industrie de la construction. Et quand on a regardé le problème des travailleurs de la construction avec le juge Gold, il nous a dit, à cette époque - et vous vous rappelez le rapport Gold - II n'y a pas de possibilité d'appliquer un véritable régime de placement respectueux des droits fondamentaux des travailleurs en vertu de leurs qualifications professionnelles sans avoir un mécanisme, à cause, justement, de la trans-

férabilité, et tout ça, dans l'industrie de la construction, regroupé de placement. Et il l'était, à l'époque, si vous vous en souvenez; c'est lui qui est à la source du mécanisme de sécurité d'emploi pour les débardeurs. Et le rapport avait fait ses recommandations dans le même sens que le régime qui avait été instauré pour les débardeurs, pour les travailleurs de l'industrie de la construction.

Nous avons, à la CSD, toujours préconisé que les recommandations ou le sens des recommandations du rapport Gold, c'est à cette seule condition qu'on arrivera à la fois à respecter le choix d'allégeance syndicale des travailleurs, leur statut professionnel de travailleurs de l'industrie de la construction et à empêcher qu'on discrimine leurs droits; qu'on les place plutôt en fonction de critères publics connus et qui soient la règle pour tout le monde. C'est la seule façon.

Actuellement, dans l'industrie de la construction, si vous viviez dans cette industrie vous sauriez de quelle façon on peut être écarté d'un emploi parce qu'on n'est pas dans la bonne centrale, comment on peut être écarté d'un emploi parce qu'il se fait des pressions pour faire embaucher telle personne ou telle personne, et qu'on dit à des travailleurs: Bien, écoute, tu vas travailler à des conditions différentes, toi, demain matin, parce que si tu ne travailles pas à des conditions différentes pour moi, employeur, bien, c'est bien de valeur, j'ai le choix d'aller ailleurs, d'en choisir d'autres. Et ça, c'est le travail au noir qu'on appelle, O. K. ? Ça, c'est le véritable travail au noir. Pas de mécanisme de placement centralisé dans l'industrie de la construction, ça veut dire feu vert aux employeurs qui vont choisir les bons travailleurs qui sont prêts à faire des dérogations constantes aux conditions de travail et qui font en sorte de polluer l'atmosphère par le travail au noir. Alors, c'est le feu vert.

Alors, c'est pour ça que, pour nous, il est essentiel qu'on centralise le placement dans l'industrie de la construction, qu'on place les travailleurs en vertu de règles écrites, connues, publiques, qui pourraient être contestées si, éventuellement, le mécanisme ne s'appliquait pas selon les règles; il permettrait des recours pour les travailleurs qui seraient discriminés. Et l'organisme, à l'époque, on avait même accepté, sur votre question précise, que ce soit la CCQ qui le fasse, comme mandat, qu'elle accomplisse ce mandat. Dans le temps, à un moment donné, il y avait eu un règlement sur le placement. Au départ, ce règlement était beaucoup plus précis sur la responsabilité de la CCQ mais il a tellement été dilué qu'il ne signifie plus rien aujourd'hui. Quand on regarde ces aspects de discrimination il n'a plus aucun rôle à jouer sur la discrimination. (11 h 15)

C'est pour ça qu'on demande de réinstaurer des règles précises. Et l'ancienneté, bien sûr, viendrait jouer un rôle important pour permettre justement aux travailleurs de ne pas toujours avoir à souscrire à des demandes de dérogation des entreprises. Deuxièmement, il faut faire en sorte aussi qu'on ne les écarte pas d'emplois auxquels ils ont droit - parce qu'ils ont un statut professionnel de travailleurs, qu'ils sont qualifiés pour accomplir le travail et qu'ils ont la capacité de le faire - parce qu'on ne leur aime pas la face ou bien qu'ils ne sont pas dans la bonne centrale.

Mme Blackburn: Vous traitez longuement dans votre mémoire de la formation professionnelle et de ce nouveau fonds et vous dénoncez la double structure qui est susceptible d'administrer ce fonds et les chevauchements que ça peut créer. Mais qu'est-ce qui vous fait craindre que de distinguer la gestion de la caisse ou du fonds de la gestion des programmes, ça puisse créer un hiatus trop important qui risque d'entraîner des effets négatifs?

M. Gingras: Écoutez, je pense que quand on veut avoir de la cohésion, la formation professionnelle, c'est la clé, quand même. C'est la clé des prochaines années. Ça va être un peu le modus vivendi autour duquel beaucoup de secteurs industriels, incluant la construction, vont avoir à développer une performance quand même assez importante pour faire en sorte d'assurer le succès de ces industries-là. La formation professionnelle revet de plus en plus d'importance et va devenir la première responsabilité des parties.

Pour nous, actuellement, quand la loi a été modifiée dans l'industrie de la construction pour confier à la CCQ le soin de rétablir un système de formation professionnelle crédible dans l'industrie de la construction et de redonner aux parties un rôle important à jouer dans l'élaboration de la formation professionnelle, quand la loi a voulu faire ça dernièrement, on a dit: Bon, bien, saluons ça avec enthousiasme. Il faut embarquer là-dedans puis il faut faire en sorte de rétablir dans l'industrie de la construction un régime de qualification qui soit compatible avec les besoins de l'industrie dans laquelle on s'associe, les employeurs et les travailleurs, pour développer nos besoins et répondre à nos besoins de formation professionnelle, et ça, en misant particulièrement sur la clientèle et sur les travailleurs actuellement en emploi - pas nécessairement uniquement sur les travailleurs potentiels de l'industrie de la construction mais surtout en donnant la possibilité aux travailleurs déjà en emploi de se qualifier dans cette industrie-là.

Ça, on l'avait salué avec beaucoup d'enthousiasme, cette législation qui venait confier aux parties, ou reconfier aux parties un rôle important et significatif à jouer. Et là on est en train d'essayer de morceler toute l'approche de

la formation professionnelle dans l'industrie de la construction. Le grand danger de créer deux ou trois organismes qui vont travailler mais qui ne seront pas coordonnés et qui n'auront pas nécessairement de cohésion dans le fonctionnement, le grand danger, c'est que ça va créer toutes sortes de dislocations qui risquent d'être néfastes à l'industrie de la construction.

Pour nous, il y a cette raison: la cohésion nécessaire pour atteindre les objectifs. Deuxièmement, déjà, sur les comités, les CFP, on reconnaît l'ensemble des parties qui composent les parties représentatives de la construction. Le fait de confier à ces CFP le rôle d'administrer les caisses, ce seraient des règlements d'ordre public qui auraient la même signification. Ce ne serait pas une entente privée. Ce serait administré par un organisme qui est le CFP, qui est déjà, quand même, consacré par la loi et qui existe pour s'occuper de toutes les questions en matière de formation professionnelle. Alors, ce serait de regrouper tout ça sous un même chapeau et avec des critères qui seraient universellement reconnus et publics pour l'ensemble des travailleurs qui ne souffriraient pas, bien sûr, de la discrimination de certains groupes ou d'autres.

Ce qu'il est important de préserver dans tout ça, c'est qu'on ne vienne pas, par des ententes privées, favoriser certains travailleurs au détriment d'autres. O. K. ? Ce qui est important, c'est que, quand on va mettre en place des dispositions pour disposer de ces fonds-là à l'endroit de travailleurs, ça respecte les travailleurs dans leurs besoins. Deuxièmement, que ça respecte leur choix d'allégeance syndicale. Et, troisièmement, que ça puisse permettre aussi à toutes les associations qui représentent les travailleurs d'être présentes dans l'établissement de ces règles-là et de ces conditions-là.

Vous comprendrez que l'entente privée de laquelle on est exclu... Vous savez que la masse salariale de nos membres va être cotisée là-dedans. O. K. ? Il y a des revenus qui sont basés sur les revenus de nos membres, qui vont entrer dans ces caisses-là. Si, demain matin, on fait des règles d'utilisation qui discriminent nos membres on va avoir cotisé sur nos masses salariales, mais on ne bénéficiera pas des avantages. Ça, je pense que c'est tout à fait aberrant et inacceptable.

Si on veut créer - et Dieu soit loué, on est d'accord avec ça - un fonds d'investissement pour la formation des travailleurs dans l'industrie de la construction, je pense que les associations doivent être associées à ça - les associations représentatives - et tous les travailleurs doivent en bénéficier sans aucune forme de discrimination.

Mme Blackburn: Bien. Vous avez fait état de vos craintes et vous avez présenté ces demandes-là au ministre. Quelle réponse avez-vous reçue à ce jour?

M. Gingras: Bien, écoutez, le ministre ne nous a pas donné de réponse formelle au moment où on l'a rencontré. Je pense qu'on a exploré avec lui ces questions-là et, quand il nous a rencontrés, il nous a dit: Je suis en présence d'une entente privée et j'ai accepté de lui donner suite. Alors, ce qui est inquiétant pour nous, et nous le lui avons dit à l'époque, on a dit: On ne peut pas accepter et on va contester avec toute l'énergie qu'on a qu'on fasse en sorte de créer deux sortes de travailleurs dans l'industrie de la construction, qu'on essaie de créer deux classes de travailleurs et deux classes de représentants des travailleurs dans l'industrie de la construction.

Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, en commission, nous dénonçons de façon aussi importante le projet de loi parce qu'il ne reconnaît pas... il consacre aux parties qui sont signataires d'une entente privée un rôle qui, à notre avis, devrait être consenti aux parties reconnues en vertu de la loi. Et ça, je pense que c'est tout à fait inacceptable. On l'a dit au ministre quand on l'a rencontré et on revient à la charge parce que le ministre, en prenant connaissance du projet de loi... À l'époque, quand on l'a rencontré, il ne nous a pas dit ce qu'il avait l'intention de mettre dans son projet de loi, mais quand on a vu le projet de loi, on s'est bien rendu compte qu'on n'avait pas influencé nécessairement la décision du ministre.

Mme Blackburn: Très bien. Très brièvement, parce que mon collègue veut intervenir, il y a deux questions sur lesquelles j'aurais aimé que vous nous pariiez un peu.

À deux endroits, à la page 3 et à la page 15, vous rappelez des événements qui auraient été malheureux: à l'hôtel Delta de Trois-Rivières et à la Baie James. Vous dites qu'à la Baie James, ça s'apparente à des films de cowboys et c'est un peu la loi de la jungle qui règne là-bas. De quoi voulez-vous parier?

M. Gingras: Je vais demander à Michel Fournier, qui est le président du syndicat, quand même, d'élaborer un petit peu et je pourrai peut-être compléter par rapport à ces dossiers-là.

M. Fournier (Michel): C'est que, sur des chantiers comme ça, on assiste beaucoup à des monopoles de placement; des associations représentatives placent des personnes influentes, genre contremaîtres ou surintendants, qui font monter à la Baie James ou sur des grands chantiers des travailleurs de leur association, en masse. Et nous, ce qu'on peut appeler les minorités, on en souffre beaucoup, de ça. C'est ça qu'on invoque.

M. Gingras: On a également fait part, je pense, au ministre - et d'ailleurs, il a été saisi de certaines plaintes - que depuis quelques mois, à certains endroits, il y a des travailleurs

qui se font carrément fermer la porte et les employeurs nous disent carrément: Bien, il y a des associations syndicales qui viennent ici et qui nous disent que si on engage un membre de la CSD, à ce moment-là, on aura des comptes à leur rendre. Alors, on a déposé des plaintes, et je pense que le ministre est saisi de certaines plaintes dans ce sens-là. Il y a même des représentants syndicaux qui, actuellement, sont visés par des plaintes qu'on a formulées.

Alors, quand on parle de ces cas-là, entre autres, on parle de la FIPOE qui a exercé sur un de ses représentants, M. Grégoire, de l'intimidation. Je pense que c'est notre membre, M. Grégoire, qui a été discriminé. Et ça, je pense qu'on a une preuve très claire, dans ce cas-là, d'une personne qui n'a pas pu obtenir un emploi parce que, justement, on lui a dit qu'il n'était pas dans la bonne centrale et qu'on embauchait uniquement des gens d'une centrale particulière.

Alors, ça, c'est une pratique - si on soulevait tous les cas d'exemples qu'on peut retrouver - qui est quand même assez connue actuellement dans le secteur de la construction et qui ne pourrait changer que si on faisait en sorte de mettre en place les mécanismes voulus pour que les travailleurs obtiennent un emploi dans cette industrie-là en fonction de leurs qualités professionnelles, de leur statut de travailleurs de l'industrie de la construction et de leur capacité de remplir les exigences de la tâche pour laquelle on cherche un travailleur. Actuellement, ce n'est pas les critères d'emploi qui prévalent dans l'industrie de la construction, malheureusement.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Notre rôle, comme député, en premier, c'est d'être législateur et de bien comprendre pour bien faire une loi, et la faire le mieux possible. D'un autre côté, on est aussi un député d'un comté et on a des gens qui ont des plaintes et qui ont des craintes aussi. Alors, ma question va être surtout dans le contexte de gens qui sont venus à nos bureaux, qui posent des questions et qui disent: Pourquoi, nous aussi, on est discriminés individuellement? Vous parlez de pluralisme, vous parlez de monopole, vous parlez de liberté de choix, vous parlez de régime, dans certains cas, dictatorial, vous parlez de discrimination.

Il y a des gens qui sont en vertu de la loi et des gens ont obtenu des avis de la cour disant qu'ils faisaient affaire, pour leur propre compte, qu'ils exécutaient pour autrui et sans l'aide de salariés des travaux de construction -la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, articles 19 et 120. Vous savez de quoi je veux parler.

Alors, vous dites que vous voulez, comme association, être reconnu et être partie prenante à l'ensemble des décisions. Il y a des gens qui disent: Écoute, moi, la seule chose que je fais, Jean-Pierre - quand ils viennent me voir à mon bureau - je fais des escaliers et c'est la seule chose que je fais à l'intérieur des maisons. L'autre dit: Moi, ça fait des années que je m'occupe de l'électricité, et là je n'ai plus le droit de travailler individuellement, même si je suis un entrepreneur enregistré, puis on m'oblige par de drôles de formules à m'incorporer - ce qu'il ne veut pas faire, d'ailleurs. D'autres vont dire: Moi, je suis un tireur de joints et, comme tireur de joints, j'ai des problèmes. C'est la seule chose que je fais; je ne veux pas faire autre chose. On a la même chose dans d'autres secteurs, dans l'entreprise lourde en particulier, où le gars dit: Moi, la seule chose que je fais, c'est de l'excavation avec une petite pépine, et c'est juste ça que je fais. Je ne veux pas savoir si la grosse machine qui va monter dans les airs me donne... Ça, je ne veux pas le faire, je ne veux jamais le faire. Je veux juste creuser des petits trous. Et là il dit: Moi, je suis coupé.

Alors moi, ma question, même si je ne veux pas vous dire que je suis d'accord ou en désaccord avec lui, je veux juste vous poser la question à vous autres, qui êtes dans le milieu: Qu'est-ce qu'on doit répondre à des gens comme ceux-là qui se sentent à leur tour discriminés individuellement dans leur choix et dans la liberté du choix qu'ils ont fait? Et moi, je veux savoir pourquoi vous dites - j'ai compris ça et c'est pour ça que je pose la question - ces travailleurs autonomes, on ne veut plus les voir dans le circuit? Pourquoi eux? Pourquoi eux autres, individuellement, n'auraient pas le droit que vous, comme petite association en termes de nombre, vous voulez avoir? Pourquoi?

M. Gingras: Écoutez, M. Jolivet, sur ce dossier-là, vous savez que ce n'est pas facile. L'industrie de la construction est quand même composée d'une série de personnes qui voudraient bien y oeuvrer, et y oeuvrer à leurs conditions et selon ce qu'elles conçoivent que doit être l'industrie de la construction. Sauf que, la façon dont ça oeuvre dans l'industrie de la construction, s'il n'y a pas un minimum de cadre et de réglementation et si on ne respecte pas les règles du jeu, à ce moment-là on vient complètement chambarder tout ce qui se passe dans cette industrie-là puis on en perd pratiquement le contrôle. Et quand on dit actuellement que le travail au noir pollue l'atmosphère de l'industrie de la construction, il faudrait que vous soyez sur le terrain, là, pour voir ce que ça signifie. C'est incroyable, la situation qu'on vit.

Alors, comment peut-on assainir les milieux de travail et l'industrie de la construction si on n'a pas un minimum de règles, connues toutefois? Alors, moi, je dis à ces entrepreneurs et à ces personnes ou ces travailleurs qui veulent tra-

vailler qu'habituellement les règles qui sont là - s'ils sont d'authentiques travailleurs comme ceux que vous me mentionnez - permettent à certains pour qui ce n'est pas automatique, quand même, d'aller faire reconnaître leur statut et leur compétence, d'aller les faire reconnaître par un mécanisme. Et ça, si à un moment donné ils veulent le faire, ils peuvent venir nous voir et, à ce moment-là, on va essayer de voir comment on est capables de les représenter vis-à-vis de ces mécanismes-là. Et, d'ailleurs, on le fait actuellement pour des travailleurs qui ont perdu leurs droits, ou des choses de même, puis on est capable de faire établir leurs droits. On est capable de le faire. Il y a des mécanismes. (11 h 30)

Je pense qu'on ne doit pas écarter des travailleurs qui ont vraiment un statut de travailleurs de la construction par une mécanique et ne pas s'en soucier après. Ça, je pense que là-dessus on doit avoir un minimum de souplesse pour faire en sorte qu'on reconnaisse leurs droits. Mais, en même temps, l'industrie a besoin d'être épurée aussi. On ne peut pas accueillir n'importe quand, n'importe qui dans l'industrie de la construction, qui va venir "compétitionner".

M. Jolivet: Le problème que j'ai, M. Gin-gras, il va être rapide, là. C'est parce que, moi, je me fais l'avocat du diable, vous le comprendrez très bien.

M. Gingras: Bien oui.

M. Jolivet: Pour bien comprendre les choses, il faut des fois le faire. Je vous dirai que l'individu dit: Moi, je suis un entrepreneur, j'entreprends la bâtisse au complet, mettons, mais je n'ai même pas le droit de travailler dedans parce que c'est une maison neuve. Tandis que si je fais de la réparation, j'ai le droit. Quand je fais de la construction, je ne peux pas être entrepreneur enregistré, il faut que je sois entrepreneur incorporé. Puis je ne veux pas l'être, entrepreneur incorporé, ce n'est pas ça que je veux. Je veux m'assurer de faire le petit travail dont j'ai besoin. Puis il ne pourrait même pas construire sa propre maison.

Le Président (M. Bélanger): Oui, alors, M. Gingras, une réponse très rapide.

M. Gingras: Mais sur ça, écoutez, moi, je pense que votre entrepreneur qui veut bâtir sa propre maison, je pense qu'il n'y a rien qui l'empêche de la bâtir.

M. Jolivet: Non, non, je comprends, je comprends. Ce que je veux dire... Je veux m'amuser. Mais ce que je veux dire, c'est quand il fait une maison pour d'autres.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de

Laviolette, malheureusement, le temps est écoulé. Alors, si M. le ministre voulait bien, là...

M. Cherry: D'abord, M. le Président, je voudrais remercier M. Gingras et ses collègues de s'être déplacés aujourd'hui et puis d'avoir présenté le mémoire qu'ils ont fait. Soyez assurés que vos représentations, je leur ai accordé de l'attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui, évidemment, va nous apporter beaucoup de travail, puis on va continuer à tenter de cheminer ensemble. Donc, encore une fois, merci de vous être déplacés et merci pour votre présentation de ce matin.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi, si vous voulez remercier nos invités.

Mme Blackburn: Oui, je voudrais vous remercier de votre présence ici. Le ton était viril, comme on dit dans notre milieu. Je dois dire que j'ai apprécié la franchise et les recommandations. Nous aurons l'occasion d'en parler plus longuement au moment où on examinera le projet article par article. Je vous remercie de votre présence ici aujourd'hui, en dépit du peu de temps que vous avez eu pour préparer votre mémoire.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission remercie la Centrale des syndicats démocratiques pour sa présentation. J'inviterais à la table maintenant la Confédération des syndicats nationaux, section construction.

Alors, j'inviterais donc la Confédération des syndicats nationaux-Construction à prendre place à la table, s'il vous plaît. C'est M. Lemieux. Alors, bonjour M. Lemieux.

Confédération des syndicats nationaux, section construction

M. Lemieux (Olivier): Bonjour, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): II nous fait plaisir de vous accueillir à la commission. J'aimerais, dans un premier temps, si la chose est possible, que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent et, à chaque fois aussi qu'un membre de votre équipe aura à intervenir, qu'il veuille bien s'indentifier. Ceci aide grandement les gens qui sont à la dactylographie des débats là, qui sont dans une autre pièce et qui ne vous voient pas. Alors, s'il vous plaît, sans plus tarder, on vous écoute.

M. Lemieux (Olivier): Très bien, à ma droite, Edouard Duchesne, premier vice-président de la fédération, à sa droite, Robert Le-vesque, trésorier de la fédération, à ma gauche, Jean-Noël Bilodeau, coordonnateur de la CSN-

Construction, et à sa gauche, Roger Trépanier, conseiller à la fédération.

Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire sur l'économie et le travail, nous remercions le ministre du Travail, M. Normand Cherry, et la critique de l'Opposition, Mme Jeanne Blackburn, pour le privilège qui nous est accordé de venir témoigner sur les projets de loi 185 et 186 que le gouvernement a déposés le 14 novembre dernier à l'Assemblée nationale.

La CSN-Construction représente au Québec plus de 32 000 salariés de l'industrie de la construction. Elle compte dans ses rangs des travailleuses et travailleurs de tous les métiers, des compagnons et des apprentis ainsi que des travailleuses et travailleurs d'occupations diverses, et ce, dans toutes les régions du Québec.

Ces deux projets de loi revêtent une telle importance pour nos membres que nous avons demandé au ministre, lors de leur dépôt, de nous entendre en commission parlementaire. Nous avons demandé à être entendus parce qu'à l'issue d'une première lecture, certains éléments de ces projets de loi nous sont apparus inquiétants et nous ne voudrions pas, comme organisation syndicale représentative, rester sur l'impression que nous sommes sur le point d'assister à une opération de camouflage des vrais problèmes de l'industrie, celui des chantiers noirs et celui des entreprises clandestines.

Aussi, l'obtention de cette rencontre avec votre commission nous rassure car elle nous permettra, sans nul doute, de mieux comprendre le législateur quant aux motifs qui l'ont vraisemblablement inspiré dans la rédaction des projets de loi concernés. Au besoin, nous tenterons modestement de l'éclairer sur certaines de nos appréhensions et nous nous permettrons quelques suggestions ou ajouts que nous estimons nécessaires à la bonne compréhension de ces textes de loi.

Le projet de loi 185: Le ministre nous a promis, à la suite du dépôt du rapport Picard-Sexton en juin 1990, de mettre tout en oeuvre pour faire en sorte que la recommandation de ce rapport soit entérinée par le gouvernement. Pour l'industrie de la construction, ce rapport était la somme de plusieurs années de travail, de recherche et de négociations.

Bien avant le dépôt de ce rapport les parties syndicale et patronale avaient proclamé l'urgence de trouver des solutions aux problèmes épineux de l'industrie, notamment ceux ayant trait aux entreprises clandestines effectuant du travail au noir. Déjà, en 1983, la CSN-Construction publiait un dossier majeur sur un phénomène qui grandissait alors à une vitesse stupéfiante, alimenté qu'il pouvait l'être alors par une récession économique. Dans ce dossier la CSN-Construction faisait ressortir, au moyen de données économiques indéniables, que les chances d'emploi des vrais travailleurs de l'industrie de la construction étaient devenues inversement proportionnelles à la croissance en valeur des travaux. Plus de 30 % des travaux, affirmions-nous alors, étaient entrepris par des "jobineux", des artisans, des entrepreneurs clandestins qui embauchaient à cette fin des travailleurs qui n'étaient munis d'aucune carte de qualification. À un point tel que plus de 22 000 vrais travailleurs de cette industrie étaient menacés, cette année-là, de perdre leurs cartes parce qu'ils n'avaient pas accumulé le nombre d'heures nécessaires à leur renouvellement.

Il aura fallu attendre quelque huit ans avant que le gouvernement ne bouge. Une loi poreuse, des entreprises enclines à tromper aussi bien la loi que les décrets à cause du laxisme gouvernemental, des travailleurs dont les conditions étaient soumises quotidiennement au chantage de l'exploitation nous ont enfoncés graduellement dans le marasme que nous connaissons aujourd'hui. Au cours du mois de novembre, la CSN-Construction, à elle seule, a déposé plus de 215 plaintes relatives à des chantiers noirs et ce, dans la seule agglomération montréalaise. Le phénomène est loin de se résorber, il s'amplifie. Nous en avons les preuves: nos militants ont identifié, lors de visites surprise sur des chantiers, plus de 500 travailleurs sans carte dans la même période.

Le projet de loi 185 se veut, au dire du gouvernement et de son ministre, une réponse aux inquiétudes de l'industrie. Il concrétiserait les recommandations du rapport Picard-Sexton et traduirait la volonté du gouvernement de mettre fin aux chantiers noirs au Québec. La CSN-Construction voudrait bien y croire mais elle a de la difficulté, à la lecture du projet de foi, à comprendre le lien qui peut exister entre ce projet de loi et les recommandations du rapport des commissaires Laurent Picard et Jean Sexton. Les commissaires Picard et Sexton recommandaient, à la page 132 de leur rapport, que le statut d'entrepreneur autonome soit abrogé, à l'exception des entrepreneurs de machinerie lourde et des entrepreneurs en excavation et terrassement, et que la loi ne reconnaisse que les statuts d'entrepreneur et de salarié; que les entrepreneurs autonomes existants choisissent entre l'un ou l'autre des statuts d'entrepreneur ou de salarié.

Ce n'est certainement pas ce que le ministre a retenu, puisque le projet de loi 185 confirme leur existence et reconfère à ce statut d'entrepreneur une légalité que notre organisation dénonce depuis 1979, soit depuis la loi 110 consacrée à la notion d'entrepreneur artisan. Les commissaires ont pu, lors de leurs travaux, vérifier les assertions de notre dossier de 1983 sur les chantiers noirs et ils notent, à la page 131 de leur rapport, qu'il y a eu prolifération nette d'artisans d'abord et d'entrepreneurs autonomes ensuite - quelque 10 000 en 1989 - qui non seulement érodaient le nombre d'heures

habituellement effectuées par les entrepreneurs et par les travailleurs de la construction mais qui ont vite débordé du secteur résidentiel. En effet, note-t-il, on a retrouvé, certes de façon illégale mais quand même réelle, les artisans et les entrepreneurs autonomes dans d'autres secteurs de la construction, notamment dans les secteurs résidentiel et commercial. L'effet d'effritement était alors accentué d'autant.

Lorsque le gouvernement a adopté, en 1988, le projet de loi 31 en vue d'exclure du champ d'application les travaux de réparation, d'entretien, de modification et de rénovation dans le secteur résidentiel, il venait d'ouvrir la porte toute grande à la déréglementation du secteur résidentiel. Cette fois, nous craignons que, sous le couvert du projet de loi 185 qui resserre la notion d'entrepreneur autonome, il ne fasse que garder ouverte la porte que nous voulions fermer à la déréglementation et à la désyndicalisation des autres secteurs de l'industrie, une porte ouverte aux excès.

Ces efforts pour modifier la définition de l'entrepreneur autonome sont louables. Les trous de cette définition auront permis, notamment depuis la loi 31, d'accentuer le phénomène que nous dénoncions. Les avocats et les responsables de l'application du Décret à la Commission de la construction du Québec n'arrivaient pas à circonscrire cette notion de manière à rendre possibles les poursuites prévues par la loi contre les illégaux.

Le ministre, en précisant que l'entrepreneur autonome sera soit une personne physique, une corporation ou une société, devra cependant, s'il veut éviter de nouvelles ambiguïtés, préciser du même souffle quelques notions exprimées dans son projet de loi. Ainsi, à l'article 1. k.1) ii. de la loi, il est dit que l'entrepreneur autonome est celui qui, pour autrui et sans l'aide de salariés à son emploi, exécute lui-même "des travaux d'entretien, de réparation et de rénovation mineure visés à la présente loi". Pourquoi ne pas préciser cette notion par une formule que la plupart des intervenants de l'industrie ont pourtant suggérée lors de consultations en 1988, soit celle des "travaux d'entretien, de réparation et de rénovation mineure d'une valeur inférieure à 10 000 $"? Voilà qui ferait en sorte de soustraire à l'appétit des entrepreneurs autonomes un champ d'application que le législateur n'entend certainement pas lui donner dans le cadre de cette loi.

Nous pourrions lire ainsi l'article: "des travaux d'entretien, de réparation et de rénovation mineure d'une valeur inférieure à 10 000 $ visés à la présente loi, si cette licence est relative à toute autre sous-catégorie".

Il serait également important que le législateur précise le rôle de l'entrepreneur autonome. L'entrepreneur autonome pourrait-il encore être à la fois un employeur et un salarié et s'octroyer, par exemple, les privilèges du salarié relativement aux avantages sociaux et, par extension, d'autres privilèges tels que l'accès aux programmes de recyclage et de perfectionnement pour lesquels le ministre a permis récemment la création d'un fonds.

Que le ministre ajoute, l'article 19.2 à la loi R-20. Est-ce qu'il est prêt à convenir que cette ambiguïté demeure lorsqu'on peut lire: "un employeur ou un représentant désigné en vertu de l'article 19.1 ne peut exécuter des travaux de construction qu'avec l'aide d'au moins un salarié de l'entreprise, sauf s'il s'agit d'un entrepreneur autonome ou du représentant désigné d'un entrepreneur autonome"?

Tel que rédigé, cet article pourrait permettre à un employeur de travailler sur un chantier avec l'aide d'un entrepreneur autonome, à moins que celui dont il s'agit dans l'article se réfère bien à l'employeur et non au salarié. Tel que rédigé, cet article pourrait également vouloir dire que l'employeur ne peut pas travailler s'il embauche un entrepreneur autonome.

Quelque part dans ce texte nous donnons certainement à l'entrepreneur autonome le droit de travailler à des travaux de construction autres que ceux pour lesquels la loi a créé son existence. Dans les dispositions transitoires, le législateur élimine la notion d'entrepreneur spécialisé au profit de celle d'entrepreneur autonome. Veut-il par là conférer à l'entrepreneur autonome le privilège accordé à l'entrepreneur spécialisé de travailler seul pour un employeur professionnel? Ce n'est sûrement pas l'intention du ministre.

Nous suggérons d'écrire l'article de la façon suivante: "19.2 Un employeur ou un représentant désigné en vertu de l'article 19.1 ne peut exécuter des travaux de construction qu'avec l'aide d'au moins un salarié de l'entreprise."

Dans le dossier des chantiers noirs, la CSN-Construction demandait que l'on attribue aux représentants syndicaux le pouvoir de vérifier les permis de travail et la licence d'entrepreneur, ainsi que celui de faire arrêter les travaux de tout chantier susceptible d'abriter une main-d'oeuvre clandestine ou la présence d'entrepreneurs sans permis, et ce, sans perte de salaire pour les vrais travailleurs de la construction oeuvrant sur le chantier.

Ces recommandations ont été soumises par la CSN-Construction à la commission Picard-Sexton. La CSN-Construction est persuadée que le phénomène des chantiers clandestins ne s'arrêtera jamais tant et aussi longtemps que la loi n'aura pas les dents suffisamment longues pour faire cesser de telles activités. Aussi, la CSN-Construction vous suggère d'amender l'article 7.1 de la loi R-20 en ajoutant un troisième paragraphe qui se lirait comme suit: (11 h 45) "3° ordonner à toute personne qui exécute elle-même des travaux de construction sans être titulaire, soit d'un certificat de compétence compagnon, soit d'un certificat de compétence

occupation, soit d'un certificat de compétence apprenti, ou soit d'une exemption délivrée par la Commission, ou sans avoir en sa possession ce certificat ou une preuve d'exemption de quitter immédiatement le chantier de construction et de ne le réintégrer qu'au moment où elle démontre qu'elle est détentrice d'un tel certificat ou d'une telle exemption."

Visa le noir. Lorsque le projet de loi 185 veut montrer les dents, il nous réfère aux articles nouveaux 119.2, 119.3, 119.4 et 119.5. Entre vous et nous, quand vous avez terminé leur lecture, qui, croyez-vous, sera le plus pénalisé? Celui qui paie une amende ou celui qui perd son certificat de compétence? S'il s'agissait d'une automobile, on dirait que celui qui conduit perd son permis mais que le propriétaire peut toujours continuer d'opérer ou de faire opérer le véhicule moyennant une amende à verser. Pourquoi la responsabilité n'est-elle pas équivalente? Pourquoi le détenteur de la licence d'entrepreneur ne verrait-il pas sa licence suspendue en même temps que le certificat de compétence de celui qu'il a embauché et qu'il a fait travailler à des fins illégales? Lorsque nous tentons d'obtenir des explications sur cette disparité des sanctions qui touche distinctement le travailleur et l'employeur, on nous répond qu'il faut lire pour cela le projet de loi 186, ce que nous avons fait.

Nous reconnaissons que la Régie pourrait se doter de tels pouvoirs, mais on nous explique également dans les articles 83 et 84 que les sanctions prévues à l'égard des employeurs s'établiront selon un système de points d'inaptitude! Sans doute que le modèle du Code de la route a été retenu ici mais n'a pas été retenu là par le même législateur. La faute commise par un travailleur sera durement sanctionnée en lui supprimant son droit au travail, alors que celle commise par celui qui l'embauche sera évaluée selon son degré d'inaptitude qui ne touchera que son portefeuille.

Les commissaires Laurent Picard et Jean Sexton avaient pourtant recommandé des sanctions équivalentes pour ceux qui pratiquaient le travail au noir. Les voici: "que tout employeur qui fait effectuer des travaux au noir ou qui tente d'en faire effectuer soit passible d'une amende sévère pour toute récidive, que sa licence d'entrepreneur soit révoquée par la Régie des entreprises de la construction pour une période de trois ans et qu'il soit tenu, en plus, de verser une nouvelle amende; "que tout travailleur qui effectue du travail au noir soit passible dune amende sévère pour toute récidive et que son certificat de compétence soit suspendu pour un an et qu'il soit de plus tenu de verser une nouvelle amende."

Nous avions critiqué les commissaires pour cette attaque du droit au travail, estimant que la suspension d'un certificat de compétence était de nature beaucoup plus grave que la suspension d'une licence, estimant également que, dans la plupart des cas, les travailleurs étaient placés dans l'obligation d'exécuter du travail au noir pour des entrepreneurs sans scrupule, utilisant leur condition systémique d'insécurité pour les forcer à exécuter de telles tâches prohibées.

Pourquoi le législateur s'en prend-il aux travailleurs plutôt qu'aux entrepreneurs, à ceux qui sont embauchés plutôt qu'à ceux qui embauchent? Pourquoi menacer et sanctionner ceux qui n'ont qu'une part secondaire et incidente de responsabilités? Ces nouveaux articles sont tout simplement inacceptables dans leur forme actuelle et risquent d'augmenter l'injustice sociale et l'insécurité dont sont victimes les travailleurs de l'industrie de la construction qui, à la différence des autres personnes syndiquées du Québec, n'ont aucune forme d'ancienneté ou de sécurité d'emploi et de revenu. Nous vous suggérons plutôt d'introduire cette notion de responsabilité des entrepreneurs quant au travail au noir: "119.2 Tout employeur qui est déclaré coupable d'une infraction prévue à l'article 83.1 ou à l'un ou l'autre des paragraphes 1, 3, 4, 9, 11 et 12 de l'article 119.1 de cette loi, en outre de la peine prévue pour cette infraction, sa licence ou le renouvellement de sa licence est suspendu pour une période de 1 à 3 mois."

La période de suspension prévue au premier alinéa est de trois à six mois si la licence de cet entrepreneur ou son droit d'obtenir la délivrance ou le renouvellement d'une licence a été suspendu dans les deux ans.

Au cours des dernières années, nous avons accompagné et soutenu une coalition syndicale représentant plus de 60 % des salariés de l'industrie de la construction dans la seule perspective d'obtenir, pour l'ensemble des travailleuses et travailleurs de notre industrie, une forme de sécurité d'emploi et de revenus. Ce que nous obtenons aujourd'hui est bien mince. Nous réalisons qu'une fois les textes de loi écrits nos principales revendications demeurent et que la lutte contre le braconnage de nos emplois doit continuer. Il n'est pas dit que les travailleurs de l'industrie laisseront leurs emplois et céderont leurs droits au travail au profit d'entrepreneurs autonomes dont la seule existence n'est due qu'à l'intérêt de certains de vouloir à tout prix déréglementer et désyndiquer l'industrie.

Le projet de loi 185, il est triste de le constater, nous apparaît comme une déviation du projet initial qui a amené la création de la commission Picard-Sexton. Nous sommes forcés de reconnaître qu'à moins de modifications majeures certains effets de ce projet de loi, s'ils ne sont pas corrigés, iront à l'encontre des intérêts des travailleuses et travailleurs de l'industrie de la construction.

Le projet de loi 186. Le projet de loi 186, pour sa part, est un élément essentiel d'une véritable politique de qualité de l'habitation au Québec et le législateur ne se trompe pas en

élaborant attentivement tous les éléments nécessaires à la mise en place de cette qualité qui fait défaut principalement dans le secteur de la construction résidentielle.

Tout en demeurant critiques de la structure mise en place par cette loi, nous considérons certaines des notions nouvelles qui y sont introduites comme particulièrement importantes dans le contexte actuel. La CSN-Construction apprécie particulièrement l'introduction de cadres d'ententes avec les municipalités, l'obligation d'adhésion à un plan de garantie ainsi que la création d'un fonds d'indemnisation.

La comparaison avec la Loi sur le bâtiment introduite par le gouvernement péquiste et sanctionnée le 20 juin 1985, mais dont peu d'articles avaient été promulgués, nous a permis de constater que le nouveau projet de loi élargissait de façon significative les pouvoirs de la nouvelle Régie. À cet effet, nous croyons que l'industrie de la construction devrait alors être plus présente, mieux représentée que le texte du projet de loi ne le suggère, afin d'éviter de créer là un monstre bureaucratique dont nous pourrions regretter un jour la création.

Du pareil au même? Dans le dossier des chantiers noirs, la CSN-Construction avait dénoncé et réclamé l'abolition de la Régie des entreprises de la construction du Québec qui s'est avérée une véritable passoire d'artisans et d'entrepreneurs spécialisés. Ceux-ci pouvaient y obtenir sans véritable vérification, moyennant seulement un montant d'argent minime, leurs licences d'entrepreneurs. Nous la dénoncions car elle nous apparaissait comme l'outil de la réglementation des chantiers ainsi que le tiroir-caisse du gouvernement pour empocher les contributions des entrepreneurs sans exercer sur ces derniers un véritable contrôle de leurs qualifications.

Le Président (M. Bélanger): M. Lemieux, en principe le temps de la présentation serait écoulé. Vous avez besoin encore de combien de temps?

M. Lemieux (Olivier): Environ 7 à 8 minutes, là, peut-être moins.

Le Président (M. Bélanger): De 7 à 6 minutes? Parfait, alors il n'y a pas de problème. Bien, alors, si vous voulez continuer; je m'excuse.

M. Lemieux (Olivier): Merci. Ces assertions ont été confirmées seulement l'an dernier. Plus de 2 000 000 $ ont été versés par la RECQ au fonds consolidé du revenu dans la province alors que la CCQ est incapable, faute de ressources financières suffisantes, d'assumer le dossier de formation professionnelle de la main-d'oeuvre de l'industrie que le même législateur lui confiait par la loi 119.

Quant au nombre d'entrepreneurs spécialisés, il y en aurait, selon les derniers chiffres, plus de 10 000 qui occupent, ne le cachons pas, les emplois des vrais travailleurs de l'industrie, tant dans le secteur industriel que dans les secteurs commerciaux.

Le projet de loi abroge cette Régie. Nous applaudissons. Il fallait la sortir du décor. Cependant, la nouvelle Régie, qui se dotera éventuellement de la réglementation nécessaire pour effectuer les contrôles de qualification des entrepreneurs et des entreprises inscrites dans son nouveau fichier, agira-t-elle différemment de l'ancienne? Nous voulons être rassurés par le ministre du Travail.

Dans le texte du projet de loi il est prévu de doter la Régie du bâtiment de cinq régisseurs nommés par le gouvernement. Y en aura-t-il qui seront nommément choisis dans le cadre de consultations avec l'industrie? Y en aura-t-il un qui sera choisi parmi les noms qui auront été suggérés par les associations syndicales représentatives et un autre par les associations patronales représentatives? L'avenir démocratique de cette régie en dépend.

En élargissant le cadre de ses responsabilités, en lui attribuant des pouvoirs de réglementation, en la dotant d'un véritable service d'inspection, nous sommes persuadés qu'il lui faudra s'adjoindre au plus haut niveau les compétences partagées de l'industrie. Le projet de loi, à l'opposé du projet de loi 53, retient l'idée d'un comité consultatif composé de 16 membres. À l'idée de composer un comité consultatif avec autant de personnes, nous ne comprenons la si petite place que le législateur réserve aux associations syndicales représentatives de l'industrie de la construction, alors qu'il en attribue cinq aux associations patronales. Nommez-en trois de plus dans le camp synndical, M. le ministre. Nous vous assurons qu'il n'y aura pas de jaloux, et tous les travailleurs de l'industrie seront alors représentés.

Actuellement, dans les divers comités mis récemment sur pied par le gouvernement, ou qu'il s'apprête à mettre sur pied, les associations syndicales représentatives sont toujours présentes. Pourquoi ne pas y appliquer la même règle du pluralisme? La démocratie saura sûrement mieux s'en porter.

Dès le début du projet de loi, nous constatons à l'article 13 que la nouvelle Régie aura comme mandat d'adopter un code de la construction. N'y aurait-il pas lieu, comme d'autres lois le font, d'y inscrire un processus de prépublication faisant en sorte que les parties puissent faire des représentations? Une telle consultation était prévue a l'article 190 dans le projet de loi 53, mais le projet de loi 186 vient l'abroger.

La CSN-Construction estime que cette consultation qui oblige la Régie à travailler à découvert est une étape essentielle de tout processus de réglementation. Il serait extrêmement dommage de soustraire du processus cette consultation essentielle. Aussi demandons-nous au

ministre du Travail de biffer l'article 87 de son projet de loi.

La CSN-Construction, qui a longtemps dénoncé l'absence de qualification des entrepreneurs dont les travaux exécutés font l'objet de dizaines de milliers de plaintes de consommateurs chaque année à l'Office de la protection du consommateur du Québec, tient à souligner la nécessité d'encadrer, comme le projet de loi le propose, la qualification des entrepreneurs. Les solutions proposées devraient donner les résulats souhaités en autant, bien sûr, que les articles de ce projet de loi, une fois en vigueur, soient respectés par les entrepreneurs de l'industrie.

La loi 119 sur la formation et la qualification de la main-d'oeuvre de l'industrie de la construction a occasionné la préparation de vastes programmes de formation pour les travailleuses et travailleurs de l'industrie. Malheureusement, cette mise en place connaît les ratés que vous savez à cause de l'insuffisance de fonds et de l'absence de transferts financiers qui auraient normalement été effectués en même temps que de tels mandats publics. Nous comprenons que de tels problèmes n'existeront pas à la nouvelle Régie puisque ses opérations seront entièrement financées à même les crédits votés à cette fin par l'Assemblée nationale, article 64.

Les municipalités. Lors des travaux de la commission Picard-Sexton, la CSN-Construction avait déposé des recommandations pour faire en sorte que les municipalités du Québec soient tenues de transmettre à la CCQ les informations relatives au lieu du chantier et à la valeur de la construction pour chaque permis de construction délivré. La Commission avait retenu nos suggestions. Nous remarquons, à l'article 18 du projet de loi, que le législateur retient à son tour nos suggestions. Nous croyons toujours que cette démarche des municipalités est nécessaire pour faire en sorte que puisse s'exercer un contrôle de la qualification. La CCQ pourrra, dès lors, en consultant le fichier de la Régie, améliorer sensiblement son service d'inspection et de contrôle.

Toutefois, lorsque nous lisons à 28.2 qu'un tel article ne s'appliquera que dans la mesure où une entente écrite est conclue entre la Régie et la municipalité, nous estimons qu'il s'agit là d'un geste timide qui risque d'être inefficace. Il serait préférable alors de biffer l'article 28.2 et de modifier l'article 28.3 de la façon suivante: "Une municipalité doit conclure avec la Régie une entente visée à la présente section."

En conclusion, M. le Président, dans l'ensemble, le projet de loi 186 nous apparaît plus conforme aux recommandations du rapport Picard-Sexton que le projet de loi 185. Si le même esprit avait prévalu dans les deux projets de loi, la CSN-Construction serait venue vous dire sa satisfaction vis-à-vis de l'intérêt nouvellement porté par le gouvernement pour contrer le problème du travail au noir et des entreprises clandestines et non qualifiées. Malheureusement, nous croyons que dans sa rédaction actuelle le projet de loi 185 risque de frapper à côté de la cible. Au lieu de "viser le noir", nous craignons qu'il risque d'affecter sérieusement le droit au travail déjà menacé des vrais travailleuses et travailleurs de la construction.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le ministre.

M. Cherry: Merci. Je vais, par des questions, tenter de vous permettre d'élaborer sur certaines choses qui sont dans votre mémoire. Vous avez parlé, à un moment donné, d'une enquête rapide que vous avez faite dans un quartier de Montréal, qui vous a permis de découvrir un nombre... si ma mémoire est bonne, c'est 217 que vous nommez là-dedans?

M. Lemieux (Olivier): C'est ça, 215.

M. Cherry: Pardon?

M. Lemieux (Olivier): 217 plaintes.

M. Cherry: Est-ce que je me réfère au bon endroit quand je dis que c'est une opération qui avait été conduite dans les quartiers de Rose-mont, qui avait obtenu une certaine publicité dans les médias?

M. Lemieux (Olivier): C'est dans un des quartiers, oui.

M. Cherry: Donc, par rapport à celui-là, est-ce que vous pouvez préciser s'il s'agissait là de constructions neuves? Est-ce qu'il s'agissait de rénovations? Vous, vous l'avez faite. Est-ce qu'il s'agissait, dans un premier temps, de bien savoir? Parce que j'aimerais, quand vous aurez répondu à ça, immédiatement après, enchaîner. Est-ce que c'étaient tous des contracteurs différents? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Lemieux (Olivier): En fait, là-dessus, il y a eu environ 700 visites dans tout l'ensemble. Il y a eu les plaintes. Mais, dans l'ensemble, c'était surtout des travaux de réparation commerciale. Et, en fait, c'est écrit dans le mémoire. On a vu environ 500 travailleurs qui ne possédaient pas les permis requis pour travailler dans l'industrie de la construction. Et on a aussi des photos qui ont été prises lors de ces visites aussi pour confirmer, avec les adresses des chantiers à l'endos des photos. Disons que c'est une opération qui a été organisée par le syndicat de la construction de Montréal, où on retrouve présentement, surtout à Montréal, beaucoup de chômage dans l'industrie de la construction. Et ce sont nos chômeurs qui s'organisent ensemble pour essayer de se trouver de l'emploi et effectuer des visites sur certains chantiers de la région de

Montréal. (12 heures)

M. Cherry: O.K. Toujours sur le même... Vous venez de préciser qu'H s'agit de chantiers de nature commerciale. Je vous demanderais, dans votre esprit, de nous faire la distinction, dans un premier temps, et dans un deuxième temps, par rapport à une des recommandations qui se trouvent dans votre mémoire, par rapport à un montant maximum de 10 000 $, voulez-vous tenter de me joindre les deux et de me l'expliciter, s'il vous plaît?

M. Lemieux (Olivier): En fait, lorsque la loi 31 a été promulguée en juin 1988, nous, on s'était dit, au niveau de la CSN-Construction, qu'il devrait y avoir un maximum de travaux de réparation pour une personne physique qui est non assujetti au décret, avec un maximum qu'on pourrait évaluer, par exemple, à 10 000 $.

Par contre, dans le cadre de travaux commerciaux, ce qui a été bien clair avec les équipes qui font les patrouilles - appelons-les comme ça - c'est important qu'ils fassent seulement que du commercial pour ne pas que notre enquête - appelons ça "enquête" - soit valable. Dans la première semaine, disons qu'il y avait un peu de confusion entre ce qui est assujetti et ce qui n'est pas assujetti à l'industrie. On a clarifié et on a dit: Non. Quand c'est un propriétaire, une réparation mineure, selon la loi 31, c'est non assujetti. On a dit: Allez dans le commercial pour être sûr que notre enquête et notre rapport soient valides lorsqu'on les sortira. Ça a été bien clair avec les équipes qui font la tournée des chantiers.

M. Cherry: O.K. Juste pour bien saisir la distinction que vous faites entre "rénovation mineure" et "commerciale", si je saisie bien, c'est quand le propriétaire les fait lui-même même dans une résidence. C'est pour ça que je vous demande de préciser. C'est important qu'on... Un des problèmes qu'on a souvent c'est que, quand on connaît bien notre matière, on pense que tous les gens la connaissent très bien. Donc, c'est vous offrir l'occasion de l'expliciter, s'il vous plaît.

M. Lemieux (Olivier): En fait, lors de nos visites, aussi, plus de 90 % de nos plaintes ont été fondées. Mettons que vous, M. Cherry, réparez votre maison. Vous avez le droit d'embaucher des travailleurs qui ne sont pas assujettis au décret de la construction. Si c'est quelqu'un qui possède un commerce... Si j'ai mon salon de coiffure et que j'entreprends des travaux mineurs, eh bien, j'ai le droit d'embaucher un entrepreneur autonome. C'est ça la notion.

En fait, les recommandations qu'on fait c'est pour clarifier ça, parce qu'on pense que déjà, pour beaucoup de gens, c'est la confusion.

C'est pour ça qu'on dit que dans le rapport Picard-Sexton il y avait deux notions: II y avait l'entrepreneur et il y avait le salarié. Alors, comme ça il n'y aura plus d'ambiguïté, il n'y aura plus de confusion. Les inspecteurs pourront faire leur travail et nos conseillers pourront faire leur travail sur les chantiers de construction.

M. Cherry: O.K. Dans un autre aspect de votre mémoire, vous parlez de la perception que vous avez de la sévérité par rapport aux travailleurs et, pas suffisamment, selon vos propos, vis-à-vis de l'entrepreneur. J'aimerais que vous explicitiez votre perception, juste pour fins de discussion entre nous.

Vous suggérez que l'on puisse suspendre la licence de l'entrepreneur immédiatement, s'il était trouvé coupable. Supposons qu'il embauche - pour fins de discussion - sur le chantier. 25 ou 50 travailleurs légaux. Ils travaillent pour un patron qui lui, ne l'est pas et qui viendrait d'être pris. On l'évincé, on l'évacué. Est-ce que, automatiquement, là... Qu'est-ce qui arrive avec les 50 travailleurs sur le chantier? Parce que celui qui avait obtenu le contrat et qui vient de le perdre, parce qu'il était illégal et qu'H a été évincé, est-ce qu'on doit revenir en appel de soumissions? Qu'est-ce qui arrive à ces travailleurs-là en attendant? Qu'est-ce qui arrive s'il y a une date de livraison pour le produit indiquée? Est-ce que vous avez estimé les impacts des coûts de ça et pour les travailleurs, et pour les consommateurs, par rapport à une situation telle que je la décrit, dans l'hypothèse où je retiendrais la présentation que vous faites?

M. Lemieux (Olivier): En tout cas, moi, M. le ministre, je pense... Dans le cas que vous me citez, une entreprise qui emploie, règle générale, au-delà de 10 ou 15 salariés dans l'industrie, très rarement, ces compagnies embauchent des travailleurs illégaux. On sait que la moyenne des entrepreneurs dans l'industrie de la construction embauche moins de 5 salariés. C'est surtout à ce niveau-là qu'on retrouve l'épidémie. Règle générale, les gros entrepreneurs qui embauchent plus de 20 ou 25 travailleurs se conforment aux règles de l'industrie.

Nous autres, on pense aussi que dans le projet de loi il pourrait y avoir peut-être, je ne sais pas mol, dépendamment de la grosseur de l'entreprise, une façon de mettre en place un système qui ferait que l'entreprise puisse continuer, mais - parce qu'on insiste nous autres aussi là-dessus - qu'au moins les illégaux sortent immédiatement du chantier.

Présentement, une plainte à la CCQ, ça prend des mois, voire des années avant que ça se rende au pénal. On pense que minimalement, ce que vous devriez faire, M. le ministre, c'est sortir les illégaux immédiatement des chantiers. Déjà ce serait un gros point pour contrer le

travail au noir.

M. Cherry: Toujours pour vous permettre de préciser ce que vous venez de me dire, si on l'évincé, le contracteur, on l'évincé, vous dites que le chantier devrait pouvoir se poursuivre quand même. À ce moment-là, qui aurait la responsabilité de l'exécution des travaux, et une fois que le consommateur en prendrait charge, s'il découvrait des défauts, des vices de construction, à qui pourrait-il les réclamer si les travaux s'étaient poursuivis pendant qu'il n'y avait pas un contracteur responsable en charge de la poursuite des travaux? J'aimerais vous entendre là-dedans, s'il vous plaît.

M. Lemieux (Olivier): M. le ministre, je ne dis pas qu'on évince l'entrepreneur. Moi, je pense qu'il pourrait y avoir dans le projet de loi une façon de procéder. Ça peut être le propriétaire. Mais l'entreprise qui est poignée, comme votre exemple de tantôt, qui a 50 travailleurs de l'industrie et qui en a 4 ou 5 qui sont illégaux, moi, je pense qu'on évince les illégaux, pas nécessairement l'entrepreneur. Déjà ce serait une mesure qui, je pense, si elle était appliquée demain matin, ferait disparaître une grande partie du travail au noir.

Si, lors de nos visites... Même les gens de Montréal me l'ont demandé: Veux-tu, Olivier, qu'on les sorte? J'ai dit: Non, constatez... J'ai dit: On ne peut pas faire ça immédiatement, la loi ne nous le permet pas. Sans ça, ça va être le chiard et le chaos sur les chantiers. Mais si la loi le permettait... Par exemple, sur votre chantier de tout à l'heure où vous avez 50 travailleurs et qu'il y en a 2 ou 3 qui n'ont pas les qualifications requises, lorsque vous constateriez par l'inspecteur de la CCQ ou l'inspecteur du bâtiment ou le conseiller de la CSN qui va chez vous pour vous donner le droit qu'on peut les sortir immédiatement du chantier, moi, je pense qu'il y aurait un bon pas de fait dans la bonne direction.

M. Cherry: O.K. Encore une fois, vous n'avez pas répondu au sens de ma question. Là, vous parlez des travailleurs qui serait trouvés illégaux. Moi, je prend pour acquis que les travailleurs, qu'ils soient 5, 10, 15 ou 50 sont tous correctement avec carte de compétence dans leur métier. Mais - je reprend une expression qui est favorite à ma collègue de Chicouti-mi - ils travaillent pour une compagnie à numéro qui, elle, ne l'est pas. Là, quand on trouve l'entrepreneur qui, lui, est en défaut, et si on l'évincé du chantier, qu'est-ce qui arrive avec les travailleurs qui sont là pour la poursuite des travaux, pour la responsabilité de la poursuite des travaux, les dates de livraison et la situation dans laquelle on place le consommateur par rapport à ça? C'est là-dessus... Deux fois vous m'avez dit: On devrait pouvoir prévoir. Bien, c'est ça que j'essaie de vous demander, vous qui êtes une des autorités dans ce milieu-là. Ce serait quoi le mécanisme à prévoir pour protéger les travailleurs et protéger le consommateur?

M. Lemieux (Olivier): Entre autres, M. le ministre, moi, je pense, disons que la première pénalité ça pourrait être une amende sévère et, en cas de récidive, bien, trouver une façon d'accélérer le processus, en fait. Ça pourrait être ça, d'un à trois mois, la deuxième. Moi, je pense qu'il y a moyen de trouver une façon. Le premier cas, c'est une grosse amende forte. Là, disons qu'il est avisé et il sait que s'il se fait pincer une autre fois, bien là, il perd sa licence pour d'un à trois mois. On pourrait y aller graduellement comme ça. Je n'ai aucun problème avec une espèce de mise en place d'un programme de cet ordre-là.

M. Cherry: O.K. Une dernière concernant le projet de loi 186, sur cette partie-là de votre mémoire. C'est plus un commentaire que des questions. Je constate que dans l'ensemble ce projet de loi vous apparaît plus conforme aux recommandations de Picard-Sexton et que la CSN-Construction, tout étant relatif, se déclare satisfaite. Est-ce que je décode bien cette partie-là de votre mémoire?

M. Lemieux (Olivier): Oui, en autant qu'on soit associés, à un moment donné, au processus, qu'il y ait au moins une organisation syndicale dans les 5 membres du comité, et qu'on se retrouve aussi dans les 16 personnes qui vont former le deuxième comité consultatif. Je pense qu'à l'heure actuelle l'industrie comme telle avec deux représentants syndicaux et deux représentants patronaux, c'est très peu sur les 16. En tout cas je pense, M. le ministre, qu'il y a moyen de trouver une façon pour que les organisations syndicales soient toutes représentées dans le comité de 16 qui va être formé.

M. Cherry: Merci. Ça termine ma période.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Lemieux, bonjour, messieurs. Je vais passer rapidement aux questions. Je vais peut-être essayer de creuser un peu la question qui a été amenée sur la table par le ministre, parce que je sens tout à coup comme une espèce de glissement. Vous dites que c'est trop sévère pour l'ouvrier, le travailleur, puis en même temps que c'est plus sévère que ça ne l'est pour l'entreprise. Mais le moyen de rendre ça applicable, une mesure de sévérité égale à l'entreprise, ça ne me semble pas tout à fait évident.

Moi, j'essayais de m'imaginer que je suis en train de me faire construire une maison - je ne

le sais pas - l'entrepreneur embauche des illégaux, puis je mets la clé sur le chantier. Ça me complique un peu la vie. En même temps, je suis soucieuse - parce que je pense que c'est là qu'il faut frapper - de voir comment on pourrait appliquer des mesures aussi rigoureuses a l'endroit de l'employeur fautif que de l'ouvrier. Je me demandais si vous aviez envisagé la possibilité - je pense à ça parce qu'on voit ça dans d'autres occasions, pas en contruction, je l'admets là - pour la Commission, par exemple, de nommer un autre entrepreneur d'office qui conserverait le même personnel pour terminer les travaux, étant entendu qu'il y a un plan de garantie, et que la qualité des travaux, leur confirmité est de toute façon garantie. Est-ce que vous avez fouillé un peu de ce côté-là?

M. Lemieux (Olivier): En fait, si j'ai bien compris, vous parlez d'un entrepreneur qui n'a aucune licence, qui construit votre maison. Moi, je pense que dans ce cas-là, il n'y a pas de questions à se poser. Il n'est pas supposé être là, puis je pense qu'en téléphonant à l'AECQ, ils vont vous soumettre quelqu'un. En plus, il pourrait y avoir peut-être certaines mesures qui pourraient être inscrites, comme vous avez mentionné, au niveau des garanties, mais ça pourrait être aussi dans le code de déontologie, qui va être monté par la Régie, où il pourrait y avoir peut-être un processus disant qu'un propriétaire peut faire appel à une banque d'entrepreneurs légaux, entre guillemets, qui pourraient effectuer les travaux.

Mme Blackburn: Bien là, je ne partais pas d'un entrepreneur qui n'a pas sa licence. J'espère qu'il ne travaille pas, là. Ça, c'est une autre affaire. C'est celui qui est fautif et qui engage des employés qui ne sont pas couverts. Là, vous dites qu'on pénalise les ouvriers, puis souvent l'entrepreneur a des pratiques telles que c'est quasiment des obligations pour l'ouvrier de se soumettre aux conditions qui sont posées par l'employeur.

Je connais des cas, à travers le Québec - on en a portés à mon attention - où l'ouvrier n'a comme pas le choix, où on lui dit: II y en a d'autres si tu n'es pas content. Le travail en temps supplémentaire, en fin de semaine, si tu n'es pas content là, hein, comme ça, il y en a en masse du monde qui attende. Alors, finalement, ces gens-là travaillent dans l'illégalité.

Vous dites qu'il faudrait - et c'était dans cette perspective - que la pénalité soit au moins équivalente pour le travailleur qui perd sa carte de compétence pour un à trois mois, mais en même temps, qu'est-ce qu'on fait de l'employeur qui, lui, sciemment, ne respecte pas les lois et le décret? À ce moment-là, je disais: On ne peut pas mettre la clé sur un chantier. Ça serait difficilement acceptable dans une société. Est-ce qu'on peut envisager une alternative? Par exemple, à la deuxième ou à la troisième infraction de cette nature, c'est que l'entrepreneur pourrait, pas seulement avoir des points de démérite qui feraient augmenter ses cotisations, mais pourrait, effectivement, être pénalisé et retiré du chantier. Est-ce qu'on peut envisager ça?

M. Lemieux (Olivier): O.K. M. Bilodeau va répondre. C'est lui qui a écrit le livre sur le chantier au noir, c'est un expert.

M. Bilodeau (Jean-Noël): Jean-Noël Bilodeau, coordonnâtes. Effectivement, les problèmes que vous soulevez sont des problèmes qui sont soulevés depuis plusieurs années et, dans le document qu'on avait déposé en 1983, on disait, notamment, qu'effectivement tout chantier noir devrait être susceptible d'être arrêté au moment où on constate des infractions, mais certainement pas en pénalisant, entre autres, les travailleurs. On disait, à ce moment-là, que les travailleurs, sur un chantier, qui seraient arrêtés ne subiraient pas de perte de salaire.

Naturellement, ce que Picard-Sexton a retenu, ce n'est pas nécessairement la même approche. Mais dans leur approche, par contre, ils disent que les deux doivent être touchés, parce que les deux - si on prend l'approche de Picard-Sexton - s'estimeraient responsables de l'activité clandestine. (12 h 15)

Actuellement, dans ce que vous proposez, le travailleur, lui, perd son certificat de compétence, mais l'employeur, lui, ne perd pas sa licence. On dit qu'Hs commettent une infraction suffisamment grave pour pouvoir la perdre dans le cas du travailleur et pas dans le cas de l'entrepreneur. Moi, je vous dis que ce qu'il faut, c'est que les deux soient pénalisés, si vous pensez qu'ils doivent l'être, mais de façon égale. Le chantier doit arrêter et les travailleurs qui seront là, avec leur carte de compétence, pourront à ce moment-là, s'ils sont pénalisés dans le fait qu'on arrête le chantier, s'ils ont leur carte de compétence, qu'ils continuent à travailler sans perte de salaire ou qu'ils arrêtent de travailler mais sans perte de salaire. C'est à peu près ça qu'était le sens de notre volonté.

Mme Blackburn: Vous voyez toute la difficulté d'arrêter des chantiers...

M. Bilodeau: Je dois vous dire que la difficulté d'arrêter les chantiers, si on en avait le pouvoir, ce serait peut-être plus facile que ce que les Inspecteurs de la CCQ font actuellement légalement.

Mme Blackburn: ...pas les difficultés, mais les conséquences pour le propriétaire, n'importe quel immeuble, pour le consommateur, la maison

résidentielle. Je pense à un immeuble à logements. Ils ont commencé à le louer alors qu'il est encore sur la table à dessin. Je pense à ces choses-là. C'est tout ça que j'essayais d'explorer avec vous, mais je ne voudrais pas qu'on perde une partie de notre temps. J'avais plusieurs autres questions.

J'aimerais que vous m'expliquiez la modification que vous proposez, en page 5, pour définir les travaux mineurs que vous fixez à 10 000 $ et si cette licence est relative à toute autre sous-catégorie. Je dois dire que je n'ai pas compris. C'est à la page 5 de votre mémoire, la modification que vous proposez: "ii. des travaux d'entretien, de réparation". Vous dites que ça devrait se lire ainsi.

M. Bilodeau: C'est tout simplement la façon dont est écrit actuellement l'article 1.k.1.ii. Quand on se réfère aux autres sous-catégories, c'est dans l'alinéa qui précède et qui se réfère aux entrepreneurs en machinerie lourde pour excavation et terrassement.

Mme Blackburn: D'accord, ça va. Vous dites que la loi est trop sévère et vous dites: il faudrait qu'on ait une interprétation pour l'article 19.2: "Un employeur ou un représentant désigné en vertu de l'article 19.1 ne peut exécuter des travaux de construction qu'avec l'aide d'au moins un salarié de l'entreprise". C'est votre proposition? Sur cet article-là, on m'a fait un commentaire, également, qui nous laisse penser que l'article... Pardon, ce n'est pas le même, j'y reviendrai. Pourriez-vous nous dire ce que vous appréhendez par rapport au libellé actuel?

M. Lemieux (Olivier): En fait, on pense qu'avec le libellé actuel, si ce n'est pas clarifié, ce que vise le projet de loi 185, il n'y aura pas de changements majeurs dans l'industrie comme tels. Les entrepreneurs à l'heure actuelle... En fait, on pense que ça va être pire, même. Si notre interprétation est bonne, on pense que ça va être pire. Avant ça, il fallait qu'ils aillent dans un champ de juridiction. Maintenant, ils vont pouvoir aller n'importe où en autant qu'un entrepreneur les embauche. Ça, c'est notre interprétation. Si on n'a pas la bonne...

Mme Blackburn: Ça ne mettra pas fin à la pratique qui est la suivante, où on retrouve une trentaine d'entrepreneurs autonomes sur un chantier de construction.

M. Lemieux (Olivier): C'est ça.

Mme Blackburn: Bien. Vous abordez, tout à fait avec beaucoup de pertinence, la publication dans la Gazette officielle du Québec. Moi, je pense que ce serait déroger à une pratique reconnue et admise que tout règlement est publié dans la Gazette officielle du Québec. Je trouverais tout à fait inacceptable qu'on déroge à cette pratique.

Par rapport à l'obligation faite aux municipalités, bien que je sois d'accord, il faudrait en évaluer les coûts. Ça m'étonnerait que les municipalités, si on leur faisait obligation, ne nous demandent pas de leur envoyer les moyens pour gérer cette activité-là ou cette obligation, parce qu'elles viennent de s'en faire passer pas mal épais sur le dos. En même temps, je sais que c'est une des seules façons pour donner accès à des documents qui permettraient un véritable contrôle. Mais il faudrait voir comment elles pourraient financer ce genre d'activités. Vous allez me dire que ce n'est peut-être pas si important que ça, la publication des permis de construction avec le détail qui vous permet de savoir l'importance, mais je reste un peu sceptique là-dessus. Il faudrait trouver les moyens.

Vous n'avez pas abordé la perception des amendes ou les poursuites à la CCQ. J'ai un mémoire, qui m'a été apporté, qui démontre, sur des cas très, très précis, que, par exemple, l'infraction contre un travailleur a été constatée au mois d'août et il risque de faire face aux tribunaux quelque part 26 mois plus tard. Vous n'avez pas abordé ce qui a été abordé, je pense, dans beaucoup de mémoires: On devrait redonner à la Commission la possibilité d'intenter des poursuites, pas seulement de constater des infractions.

M. Lemieux (Olivier): En fait, lors d'une rencontre récente avec le ministre, on a dit que la CCQ devrait recevoir les amendes. Nous autres, ce qu'on a essayé de faire dans les projets 185 et 186, c'était surtout de cerner la notion versus les entrepreneurs autonomes, parce qu'on pense que c'est là qu'est le gros du problème dans l'industrie de la construction. Déjà, on a fait nos présentations au ministre sur le point que vous venez de soulever.

Mme Blackburn: 10 000 $ comme étant les travaux minimaux, est-ce que ce sont les travaux pour l'ensemble de la rénovation ou si c'est pour - je ne sais pas, moi - l'électricité? Est-ce que c'est 10 000 $ par spécialité ou c'est pour...

M. Lemieux (Olivier): Non, c'est pour l'ensemble.

Mme Blackburn: C'est pour l'ensemble. M. Lemieux (Olivier): Par contrat, en fait.

Mme Blackburn: Ça ne m'apparaît pas très élevé, mais, ça, c'est mon commentaire personnel. Ça limiterait énormément le... Alors, vous dites qu'il faut adopter... Vous êtes assez d'accord avec la loi 186 et vous êtes le deuxième. On a entendu la CSD tantôt. Vous dites: II faudrait

que les deux soient adoptés en même temps. Moi, je vous pose la question: 185 modifié et 53 actuel, est-ce qu'on pourrait vivre avec ça? 53 actuel, c'est le...

Vous réclamez plus de sièges au comité consultatif de la Régie. Moi, je dois vous dire que le comité consultatif de la Régie, ça ressemble terriblement à de l'occupationnel, à peu près ce qu'on est en train de faire à la commission sur les offres d'Ottawa. C'est-à-dire on parle, parle, parle, mais je vous jure que ça ne mène pas loin. Un comité consultatif à un ministre, ce n'est pas très, très efficace et percutant. Alors, un comité consultatif à une régie, vous avez un problème.

Une deuxième chose. Vous abordez dans votre mémoire le fait que la Régie ait transféré aux fonds publics 2 000 000 $ alors qu'on avait des besoins en formation et là on est en train de créer une régie qui va pouvoir lever, faire des transferts aux fonds généraux à tour de bras, chaque fois qu'il va y avoir un ministre des Finances assez futé pour dire: Écoute, augmente-moi donc ça, j'ai besoin de tant dans ma caisse tantôt, organise-toi. Mors, la Régie, c'est ça mon inquiétude. Vous le constatez pour la Régie des entreprises. Il n'y a rien qui empêchera la Régie de la construction de subir les mêmes pressions de la part d'un gouvernement.

Alors, moi, je dis: Est-ce qu'on ne serait pas mieux avec 53? Ce n'est pas parce que je nie la valeur de toutes les recommandations et des modifications qui sont à l'article 186, mais est-ce qu'on pourrait, pour un moment, vivre avec 53 et en même temps obliger, permettre à la Commission de la construction de faire les poursuites? Donc, resserrer les poursuites... 53 et 85 resserrent un peu sur le travailleur autonome.

M. Lemieux (Olivier): À votre question, c'est oui, en resserrant un peu la 53. Je pense qu'avec la 53 telle qu'elle est présentement ça ne pourrait pas fonctionner, mais avec de légères modifications, ça pourrait fonctionner, oui. La 53, on n'a pas de problème avec ça.

Mme Blackburn: Elle n'a pas fonctionné parce qu'il n'y avait pas eu de volonté gouvernementale de le faire. On n'avait même pas vérifié si elle était bonne ou pas, là. Elle n'a pas été...

M. Lemieux (Olivier): Elle n'a jamais été promulguée, dans le fond là.

Mme Blackburn: C'est ça, elle n'a jamais été promulguée. Dans ce sens-là on aurait...

M. Lemieux (Olivier): Sur l'autre sujet que vous mentionniez tout à l'heure, moi, je pense que si la loi 53 ou la Régie ou la 186... On pense que si réellement les 300 inspecteurs font une job efficace dans leur travail et que, réellement, les efforts sont mis pour contrer le travail au noir, ça va apporter des revenus aussi à la Commission. Si on pense qu'il y a environ entre 10 000 000 et 20 000 000 d'heures faites au noir par année, c'est de l'argent perdu par l'État et aussi pour les organismes qui gèrent les lois qui régissent la construction, là. On pense que ça va être un apport important pour l'industrie, tant au niveau de la Commission que de la Régie.

Une voix: Pour continuer.

Le Président (M. Bélanger): M. Bilodeau.

M. Bilodeau: Vous avez mentionné dans votre question un autre élément aussi qui est important. C'est qu'on ne pense pas non plus avoir, je dirais, identifié clairement, sur le plan juridique, tous les aspects du projet de loi. Notamment, à l'article 19.2, ça nous a posé tellement d'ambiguïtés, tellement de questionnements, qu'on se demande sérieusement si le gouvernement ne devrait pas au moins, avant la troisième lecture, déposer une opinion juridique sur cet article-là précisément.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Lavlolette.

M. Jolivet: Ce n'est pas pour continuer ma conversation de tout à l'heure avec un autre groupe, mais simplement pour pousser plus loin. Quand je parlais de la propre maison, je ne parlais pas de la maison de l'individu, la maison qu'il avait décidé de construire avec d'autres entrepreneurs autonomes. Lui faisait l'électricité, l'autre faisait la menuiserie, l'autre, une autre chose. Je vous pose la question suivante: Dans le contexte... Je comprendais très bien sur des chantiers à Montréal, à Trois-Rivières, à Québec, dans des gros chantiers, Baie-James, peu importe, mais quand je suis dans des petits milieux ruraux, ma question est surtout là. Il y a des gens qui veulent, comme travailleurs...

C'est pour ça que je la pose. C'est pour avoir des réponses pour eux autres puis si ça ne marche pas, ça ne marchera pas, mais je veux au moins savoir: Pourquoi une personne qui a la possibilité parce qu'elle a les capacités, elle connaît le métier, elle a tout fait ça, bon, elle a appris ça dans le temps avec son père - vous savez comment c'a fonctionné - en électricité ou bien le gars fait juste des escaliers... La seule chose, lui, ce sont des escaliers. Quand il va le faire en rénovation dans un contrat de moins de 10 000 $, il n'y a pas de problème, mais le jour où il va aller faire ça dans la maison neuve, il n'a pas plus le droit. Lui, il ne comprend pas ça parce que lui, dans le petit village chez nous, il fait juste son travail puis il vit avec ça, puis il en a assez.

Alors, à partir de ça, je me pose la question: Qu'est-ce qui empêcherait, quels seraient

les moyens de surveillance en même temps qu'on devrait se donner pour éviter que ces gens-là ne se retrouvent sur un chantier de construction de haute envergure et, à ce moment-là, nuire, effectivement, aux travailleurs de la construction? Je me demande: Qu'est-ce qui empêcherait cette possibilité-là?

M. Lemieux (Olivier): Bien, en fait, je pense que... Votre travailleur, premièrement, est-ce qu'il possède des permis?

M. Jolivet: Oui.

M. Lemieux (Olivier): Est-ce qu'il a appris ça de son père. Moi, je pense...

M. Jolivet: II a ses cartes de compétence.

M. Lemieux (Olivier): Ah! O. K. S'il a ses cartes de compétence, c'est un choix qu'il a fait d'être salarié ou d'être entrepreneur. Moi, je pense que c'est un choix personnel qu'il a effectué.

M. Jolivet: Oui, je le sais, mais la loi dit: Si, sur un contrat, tu fais en bas de 10 000 $ dans la rénovation, il n'y a pas de problème. Vous comprendrez très bien qu'il y a des cycles aussi dans la construction comme partout ailleurs. À un moment donné, c'est peut-être le boom de la construction domiciliaire dans tel coin, mais... Le fameux escalier qu'il a fait dans la bâtisse une telle en bas de 10 000 $ - il a fractionné son contrat; il n'est pas fou, il l'a fait en trois ans au lieu de le faire en un an puis il l'a fait en bas de 10 000 $ - eh bien là, il dit: Moi, je pourrais le faire dans des maisons à côté qui sont en construction neuve, mais je n'ai pas le droit. Alors, je vous pose la question: Pourquoi?

M. Lemieux (Olivier): Mais s'il a ses qualifications, pourquoi n'a-t-il pas le droit? Vous m'avez dit qu'il avait ses cartes. Donc, s'il a ses cartes, il peut aller dans la construction neuve puis dans l'autre.

M. Jolivet: Écoutez, faisant des affaires pour son propre compte à exécuter pour autrui et sans l'aide d'un salarié des travaux de construction...

M. Lemieux (Olivier): Bien, il y a une place où il n'est pas assujetti puis l'autre place, il va l'être. Tu sais, il a le choix de...

M. Jolivet: Bien, je le sais qu'il a le choix, mais c'est ça que je dis...

M. Lemieux (Olivier): S'il a ses cartes, il n'en a pas de problème. S'il a ses cartes, il va aller à côté puis il va être rentré dans les livres. La seule différence, quand il fait l'escalier...

M. Jolivet: Oui, mais lui, là...

M. Lemieux (Olivier):... il n'est pas régi par l'industrie.

M. Jolivet:... le problème, c'est qu'il veut travailler à son propre compte comme entrepreneur sans être le salarié d'un autre. C'est pour ça que je vous dis que je comprends qu'il a fait un choix entre être salarié... Je vais vous donner l'exemple de chez moi dans le temps où je m'occupais du syndicat. Le gars travaille à côté dans une école privé, puis de l'autre bord, il travaille dans l'école publique. Il n'ont pas les mêmes conditions. Je comprends ça. Mais lui, il ne comprend pas. Il se demande pourquoi il n'aurait pas le droit de le faire. Alors, vous êtes en train de me dire ce que j'ai essayé de lui faire comprendre, c'est que la loi lui a donné un choix, lequel choix il a pris, mais il faut qu'il vive avec son choix. C'est ce que vous me dites?

M. Lemieux (Olivier): Bien, en fait, c'est ça. Mais, s'il veut travailler dans la construction neuve, il devient salarié comme l'ensemble des travailleurs de l'industrie. S'il veut rester à travailler dans le petit village, je ne sais pas trop où, bien, en fait, il reste comme il est. On sait tous comment ça se passe en campagne. Moi, je pense que ça prend un minimum de lois pour régir l'industrie. Déjà, il y en a beaucoup et on a encore de la misère. Disons que, surtout pour la question que vous posez, je pense qu'il y a une zone grise qui est très dure à couper, surtout dans les milieux ruraux.

M. Jolivet: O. K.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.

M. Cherry: D'abord, M. le président, vos collègues, merci de vous être déplacés et de nous avoir fait la présentation de ce matin. Soyez assurés que vos représentations font partie de nos attentions pour l'exercice que nous faisons aujourd'hui pour tenter d'apporter... Encore une fois, merci de vous être déplacés et merci de votre présentation.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui. Je voudrais vous remercier. J'ai apprécié le fait que vous vous en teniez aux lois. On pourrait toucher aux règlements, on pourrait toucher à beaucoup de choses, mais on sait, effectivement, que par la loi on ne peut pas modifier les règlements par rapport aux placements et un certain nombre de dispositions

dont on a discuté, quoique ce fût intéressant d'en entendre parler. Mais vous vous êtes limités à la loi et avec un certain nombre de propositions intéressantes, pertinentes. Si vous aviez, après réflexion, des solutions au problème que pose ce que j'appelle l'iniquité apparente, à tout le moins, entre le traitement qui est fait aux travailleurs et à l'entreprise fautive, vous pourriez peut-être, dans les prochains jours, nous en faire part. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission remercie les travailleurs de la CSN-Construction, les représentants du syndicat de la CSN-Construction, et suspend ses travaux jusqu'à 15 h 30. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 15 h 29)

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, messieurs, s'il vous plaît. Je ne voudrais pas déranger votre réunion, mais ne dérangez pas la nôtre, s'il vous plaît. S'il vous plaît, j'apprécie. Alors, nous recevons cet après-midi le Conseil provincial des métiers de la construction (International). Alors, M. Pouliot, je vous laisserai donc présenter l'équipe qui vous entoure et procéder à la présentation de votre mémoire. Vous connaissez nos règles. Vous avez 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes. Quand je dis 20 minutes, si ça prend quelques secondes de plus, on pourrait être prêt, on va s'entendre. D'accord? Alors, on vous laisse la place.

Conseil provincial du Québec des métiers de la construction

M. Pouliot (Maurice): M. le Président, M. le ministre du Travail, mesdames, messieurs et membres de la commission parlementaire, pour débuter, j'aimerais présenter les gens du Conseil provincial qui m'accompagnent. À mon extrême gauche, M. Yvan Bertrand, qui est gérant d'affaires du local 1929 des tireurs de joints, fixeurs de ciment; M. Gérard Cyr, gérant d'affaires du local 144 des plombiers; Mme Francine Legault, qui est mon agente d'information; le procureur du Conseil provincial, Me Robert Toupin, de même que l'adjoint au président-directeur général, M. Pierre Labelle, et moi, je suis président-directeur général du Conseil provincial.

J'aimerais simplement tenter de résumer le mémoire du Conseil provincial et je vais essayer d'apporter certains éclaircissements. Je pense qu'il serait peut-être important de faire connaître aux membres de la commission parlementaire le degré de représentativité de chacune des centrales syndicales dans la construction en débutant par la FTQ - Construction, qui représente 40,91 % de travailleurs de la construction, le Conseil provincial, notre degré de représen tativité est de 31,3 %, la CSN - Construction, 16,86 %, la CSD, 9,63 % et le Syndicat de la construction de la Côte-Nord, 1,28 %. C'est les degrés de représentativité officiels qui existent encore aujourd'hui.

Je voudrais aussi vous donner un peu notre structure du Conseil provincial. Avec les 45 000 travailleurs qui ont adhéré au Conseil provincial international, on représente 29 locaux qui lui sont affiliés. On est effectivement Chartres des unions internationales, dont le siège social est à Washington. Il y en a qui se plaisent à dire: Les Américains... Ça ne me déplaît d'aucune façon que ça soit dit.

Je pense qu'il faudrait aussi regarder le fait qu'il y a 140 000 travailleurs de l'industrie de la construction qui détiennent une carte de compétence, soit compagnon, occupation ou apprenti, de la Commission de la construction du Québec. On a l'impression que ces gens-là, les travailleurs et les travailleuses, devraient aussi avoir le droit, effectivement, de travailler dans leur industrie qui est celle de l'industrie de la construction. Les "dreamers" et les "outsiders", on pense qu'ils devraient aller travailler à l'extérieur.

L'industrie de la construction ne devrait pas, à un moment donné, être une "dompe" où tout le monde peut rentrer là-dedans, rentrer et sortir comme ça se fait. Je comprends qu'on essaie de corriger certaines lacunes qui existent avec les projets de loi 185 et 186 qui visent, à notre avis, à diminuer le travail au noir dans l'industrie de la construction et la protection du public. Et ça, c'est extrêmement important, et, quant à nous, les deux projets de loi font un tout.

On veut sûrement profiter de l'occasion que l'ex-minlstre du Travail avait pris un engagement en mai 1990 à l'effet de tenir une commission parlementaire et d'avoir une refonte totale de la loi dans l'industrie de la construction. Ce n'est pas nécessairement le cas avec les deux projets de loi qu'on a à commenter - et je parie du régime de négociation, du maraudage dans l'industrie de la construction - et on va sûrement revenir là-dessus. Chaque année, ce qu'on tente de faire, c'est de récupérer non pas ce qui ne nous appartient pas. On veut essayer d'éliminer ce qui s'appelle les illégaux dans l'industrie de la construction et on pense que le projet de loi réussit à toutes fins pratiques à faire ça.

Il faut se rappeler - je vais peut-être retourner en peu en arrière - que lors de l'adoption de la loi 290, le 18 décembre 1968, tout ce qui était à pied d'oeuvre sur un chantier de construction était effectivement fait par des travailleurs et des employeurs de l'industrie de la construction. On n'avait pas le problème qui existe actuellement, qui est survenu par la suite relativement au champ d'application. Il y a une autre loi qui a été adoptée, qui est la loi 68,

avec des exclusions qu'on retrouve aujourd'hui à l'article 19 de la loi. Et ça, le ministre, à l'exception de l'entrepreneur autonome, il ne parle pas tellement du champ d'application de la loi, et on ne se le cache pas, quant à nous, c'est une de nos priorités.

Concernant les entrepreneurs autonomes, ce qui fait à un moment donné beaucoup de discussions actuellement, c'est probablement une des raisons pour lesquelles on est en commission parlementaire. Je ne pense pas qu'on veuille prendre la place des entrepreneurs autonomes. Par contre, il faudrait se rappeler que les travailleurs ont aussi un droit d'oeuvrer sur les chantiers de construction. On peut se rappeler ce qui avait été discuté lors de l'adoption du projet de loi 110 par l'ex-ministre du Travail en 1979, M. Pierre Marc Johnson. Il a dit: On va créer une belle place au soleil aux artisans. Il leur a donné une belle place au soleil. Il leur permettait de participer au régime d'avantages sociaux des travailleurs de l'industrie de la construction de même qu'au régime de retraite et c'était la place qu'on donnait.

On se retrouve avec 7000 à 10 000 aujourd'hui... on n'appelle plus ça des artisans; on appelle ça des entrepreneurs autonomes, mais quant à nous, ça n'a pas tellement changé, mais on va revenir, effectivement, là-dessus. Je pense que le problème est encore plus grave lorsqu'on est en période de récession. Selon les chiffres qu'on a obtenus de la Commission de la construction du Québec, je pense que vous savez que les heures diminuent et diminuent de plus en plus dans l'industrie de la construction. Les prévisions pour l'année 1992 sont quelque chose de l'ordre de 96 000 000 d'heures qui devraient être enregistrées et, quant à moi, ce sont des chiffres qui sont peut-être un peu trop optimistes.

Actuellement, dans la région de Montréal, il y a 106 chantiers de 5 000 000 $ et plus et ça va baisser, en janvier 1992, à 42 chantiers de construction dans le Grand Montréal qui dépassent les 5 000 000 $. Il est peut-être bon de rappeler que lorsqu'un travailleur de l'industrie de la construction travaille légalement, il en fait travailler trois autres indirectement. Donc, je pense que le moteur créateur d'emplois, dans tous les secteurs d'activité, est de loin l'industrie de la construction. Quant à nous, il est plus qu'urgent que la loi soit effectivement adoptée et de récupérer les millions d'heures, à un moment donné, qui nous échappent. On croit qu'il devrait y avoir, effectivement, une sécurité d'emploi et de revenu dans l'industrie de la construction.

On peut se rappeler qu'il y a eu un rapport, le comité présidé par M. Sexton et, par la suite, il y a eu effectivement le rapport Picard-Sexton. Aujourd'hui, on se retrouve avec certains engagements et je pense qu'il est bon de clarifier la situation. La modification au décret qu'ont faite certaines centrales syndicales et l'AECQ, ce n'est pas une modification au décret qui a été faite en catimini, c'est une modification au décret qui est conforme à l'article 51 de la loi, qui a été acceptée par les membres que représentent les centrales syndicales et sûrement l'AECQ.

Évidemment, la loi 110 visait, au début, j'en parlais un plus tôt... il y avait toujours le fameux problème que nous expliquaient les attachés politiques, le problème de Mme Tartem-pion qui avait un problème avec son bras de galerie puis qu'elle ne pouvait pas payer 25 $ l'heure un menuisier pour faire réparer son bras de galerie. C'était donc effrayant que d'être obligé d'assujettir tous ces gens-là à l'industrie de la construction. Ils étaient effectivement assujettis au décret de la construction, mais on a eu une exception. En mai 1988, la loi 31, qui a été adoptée, visait effectivement à dire: Bon, O.K., pour la protection du consommateur à des fins personnelles, on va exclure certains travaux de réparation mineurs ou d'entretien pour la protection du consommateur.

Évidemment, on n'est pas sûr que ce sont des choses qui sont avantageuses pour le consommateur. Au contraire, des fois, on peut effectivement penser sauver 2 $ ou 3 $ l'heure, mais au bout de la ligne on s'aperçoit que le travail est mal fait. On reçoit des centaines de plaintes chaque année chez nous à nos bureaux pour savoir, à un moment donné, si on devrait référer le consommateur qui s'est fait avoir par des travaux mal exécutés à différentes associations patronales ou à l'Office de la protection du consommateur, et ainsi de suite. On pense qu'avec les garanties qu'il y a actuellement et qu'il va y avoir dans le projet de loi 185, ça bouche certains trous. Mais lors de l'adoption du projet de loi 31, il faut se rappeler la position du Conseil provincial (International). On a dit oui, en principe. On est d'accord que la loi soit adoptée puis pour la protection, si on veut, du consommateur.

Mais les travailleurs vont avoir un choix à faire. Ils vont devenir soit des entrepreneurs autonomes, soit des travailleurs de la construction, soit des employeurs. On ne pourra pas jouer sur trois tableaux. Ils vont être limités à trois champs d'activité qui sont l'entretien, les réparations et les modifications mineures. Là-dessus, on vous demande de retirer les mots "réparations mineures" parce que, pour certains, les mots "réparations mineures" peuvent être un montant de 10 000 $. Je vais vous mentionner qu'à la Commission de la construction du Québec, l'interprétation qu'on fait de travaux mineurs, c'est de l'ordre de 5000 $. On a parlé ce matin de 10 000 $. Mais c'est plutôt 5000 $. Mais il n'y a pas de chiffres de définis comme tels. Mais on parle plutôt de 5000 $.

Ça allait tout de même assez bien jusqu'à temps qu'il y ait certaines associations tradition-

nelles patronales qui convoquent des assemblées pour donner des trucs à leurs membres ou aux artisans devenus entrepreneurs autonomes. Comment effectivement aller à l'encontre de la loi 31? On leur donnait comme truc: Ce n'est pas tellement compliqué. Vous avez simplement qu'à aller vous incorporer, vous devenez une personne morale et le décret ne s'applique plus à vous, la loi non plus, et bingo! Tout est fait.

On se retrouve, finalement, qu'on a perdu dans le secteur de la construction des millions d'heures qui étaient déjà assujetties, qui ne le sont plus par rapport à la notion d'entrepreneur autonome. Puis, d'un autre côté, on nous donnait en compensation que l'industrie de la construction doit être faite par les travailleurs et les employeurs de l'industrie de la construction. C'était ça, le "deal", M. le ministre, qu'on avait en 1988.

Mais certaines associations, encore une fois, dont on retrouve, dans le mémoire du Conseil provincial, des copies qui venaient aux assemblées... On va vous dire comment ça marche, les trucs, puis vous allez voir, vous allez passer à côté de la loi. Il y en a 7000 ou 10 000 de même et ce n'est pas notre intention de pénaliser personne. Puis que ces gens-là arrêtent de jouer au martyr. Ce sont les profiteurs du système de l'industrie de la construction. C'est de même qu'on les qualifie. Ils font une concurrence déloyale.

Souvent, les rapports sont falsifiés concernant la CCQ. Ils vident le fonds d'assurance-santé, salaire, maladie de la construction. C'est tout de même une assurance de l'ordre de 70 000 000 $. Ils peuvent profiter du régime de retraite des travailleurs de la construction. Ils font exactement la même chose à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Évidemment, c'est eux qui amplifient de loin le travail au noir dans l'industrie de la construction. Donc, évidemment on n'hésite pas à dire: II y a 28 272 entrepreneurs inscrits à la Régie; il y en 18 698 qui déclarent des heures à la CCQ. Donc, il y en a environ une dizaine de milliers de "fly-by-night" quelque part, avec des incorporations et des licences dans les poches, puis ainsi de suite. Et ça, je pense qu'on se doit de dénoncer ça et on pense que la loi, effectivement, corrige ces choses-là.

Le champ d'application de la loi. Le ministre semble effectivement muet. Il dit: Bon, les exclusions, il y en a peut-être assez, il y en a peut-être trop. On va avoir un comité qui va être formé pour regarder tout le champ d'application de la loi. On se permet de vous faire une suggestion concernant une modification de l'article 1, paragraphe k de la loi concernant l'employeur professionnel, un employeur dont l'activité principale est d'effectuer des travaux visés par l'un ou l'autre des alinéas du paragraphe f.

En gros, effectivement, ce que ça veut dire, c'est la machinerie de production. Il y a les employeurs qui sont effectivement spécialistes dans l'installation de machinerie de production. Il y a plusieurs décisions du commissaire de ia construction qui mentionnent que ces travaux-la ne sont pas assujettis à la loi dans l'industrie de la construction. Ça, ce n'est pas nécessairement pour la protection du consommateur.

La Commission de la construction du Québec n'a pas d'autre force que de dire: Effectivement, c'est ce qui s'applique et ces travaux-là ne sont pas assujettis. On sait qu'on a déjà suggéré, dans différentes commissions parlementaires, l'élargissement plus grand du champ d'application de la loi, mais si au moins le ministre pouvait insérer un article semblable, ça réglerait une partie du problème. L'autre partie du problème, évidemment, quant à nous, pourrait être réglée par voie de règlement. (15 h 45)

Évidemment, le travail au noir, quant à nous, l'évaluation qu'on en fait - et c'est basé sur le rapport Picard-Sexton - c'est une perte entre 24 000 000 et 40 000 000 d'heures. Il y a entre 480 000 000 $ et 800 000 000 $ qui échappent au fisc tant fédéral que provincial et qui privent les travailleurs et les employeurs du travail de ce qui leur revient. Encore une fois, le problème des consommateurs qui sont pris avec ça et, souvent, Hs ne le savent pas... Ce qu'on demande, c'est qu'il y ait une campagne de sensibilisation pour informer le public en général, à un moment donné, des dangers qui peuvent être occasionnés lorsque le travail est effectivement mal fait. On demande aussi, évidemment d'avoir des pouvoirs plus grands qui seraient donnés aux inspecteurs de la CCQ, de même qu'aux représentants syndicaux. Les représentants syndicaux des centrales syndicales devraient avoir un rôle important pour veiller au respect de la convention collective ou du décret de l'industrie de la construction.

On voudrait aussi que toutes les amendes et les cautions, je pense, qui sont mentionnées à l'intérieur du projet de loi... C'est bien beau, ça, mais on sait fort bien que lorsqu'on a enlevé, de par la loi 119, les pouvoirs à la Commission de la construction du Québec de poursuivre les travailleurs ou les employeurs qui violaient le décret ou la loi dans l'industrie de la construction, on a enlevé ce pouvoir-là à la CCQ pour le donner au ministère de la Justice. Effectivement, il y a eu 54 000 visites de chantiers en 1990. On a constaté 55 539 infractions. Quand je dis "on", c'est la CCQ. Il y a 7000 plaintes dont, à un moment donné, on essaie de savoir ce qui se produit avec celles-ci. La CCQ nous dit: Ça dépend du ministère de la Justice, du Procureur, de son département. Avec différents districts judiciaires, on s'entend et avec d'autres, on ne s'entend pas. Vous comprendrez que le substitut du Procureur général qui a à défendre les causes - je m'excuse pour le procureur du

Conseil provincial - il va avoir souvent des causes à défendre, disons, un chasseur qui n'a pas de permis. Il peut avoir, à un moment donné, une poursuite en vertu d'un pêcheur qui a péché de la truite et qui n'avait pas le droit. Il peut se glisser aussi là-dedans un dossier de l'industrie de la construction. On peut parler aussi du problème des oiseaux migrateurs qui font tous partie... Et là, le procureur de la couronne, il est là et il ne sait pas de ce qu'il parle et le juge, lui, va être éclairé. Et là, j'aimerais ça comprendre, mais le procureur ne comprend même pas de quoi il parle.

Donc, comment vous voulez que le juge rende un bon jugement là-dedans? C'est normal, ce n'est pas de dire qu'on a les meilleurs procureurs, mais lorsqu'on a des procureurs qui sont spécialisés dans l'industrie de la construction... On a toujours dénoncé... Et ça, ça fait aussi un échappatoire du champ d'application de la loi. On redemande deux choses: que ça revienne pour le champ d'application de la loi et aussi, évidemment, qu'on puisse conserver les amendes qui doivent être la propriété de la Commission de la construction du Québec. Vous avez en annexe de notre mémoire tout un chapitre à l'intérieur, à savoir pourquoi on pense que les amendes devraient revenir à la CCQ.

Évidemment, on a mentionné le problème des avantages sociaux. Je sais qu'il faut aller assez rapidement. Si jamais le gouvernement décide l'allégeance syndicale dans l'industrie de la construction, il est évident qu'on veut avoir un vote obligatoire et avec une modification de la structure de négociation. On demande au ministre du Travail d'enlever le pouvoir à l'article 51 de prolonger ou de modifier le décret. Depuis l'adoption de la loi, à chaque négociation, on a toujours une épée en haut de la tête puis on est mieux de s'entendre ou le gouvernement nous passe une loi spéciale ou va nous imposer un décret. Je pense qu'on a eu assez de décrets imposés. On aimerait que le rapport de force puisse s'exercer de part et d'autre une fois de temps en temps. Sans mettre le désordre dans la province de Québec, on pense que ça devrait effectivement arriver.

Pour terminer, M. le Président...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît.

M. Pouliot: ...en conclusion sur la loi 186, évidemment, on ne compare pas, quant à nous, la loi 53 avec la loi 186. La loi 186 est beaucoup plus un pas en avant, en ce qui nous concerne, que la loi 53. On va passer des 10 inspecteurs qu'il y a actuellement à la régie des entrepreneurs à environ 280 inspecteurs qui vont avoir à policer toutes les lois et tous les règlements de la nouvelle Régie du bâtiment. Je pense qu'on sait que l'un des problèmes majeurs, c'est qu'il y a un fonds d'indemnisation dans l'industrie de la construction qui est pratiquement à sec. Il reste dans ce fonds-là 1 400 000 $. Donc, il est très malade. S'il y a effectivement une grosse compagnie qui fait faillite demain, on vient de vider le fonds puis les travailleurs de l'industrie de la construction vont effectivement perdre leur paie de vacances et leur régime de retraite, aussi leur droit de participer à l'assurance.

Donc, on pense qu'il est grandement temps que le ministre agisse en vertu de la loi 186 et 185. Quant à nous, c'est deux lois indissociables et qui doivent être améliorées, on en convient, qui doivent être bonifiées. On n'est pas prêt à donner un accord inconditionnel, mais je pense qu'il est urgent qu'on agisse.

Je pense que ce n'est pas tout à fait correct que certains entrepreneurs partent sous un nom et aillent chercher une autre charte sous un autre nom. C'est rendu, je pense... c'est pire que ce que madame de l'Opposition officielle, Mme Blackburn, mentionnait, à l'effet que c'est rendu des compagnies à numéro. On les voit passer au conseil d'administration de la CCQ et, souvent, c'est les mêmes personnes. Il est grandement temps, effectivement, que ce soit corrigé.

On aurait aimé qu'il y ait une entente avec les municipalités concernant les ordinateurs, afin qu'ils soient "connectés" et qu'il y ait des permis; que la CCQ et que la nouvelle Régie soient informées pour éliminer, effectivement, le travail au noir. Je sais qu'actuellement il y a peut-être des municipalités, avec une réforme qui s'appelle la réforme Ryan, ce n'est pas tellement populaire. Mais je pense qu'on aurait dû aller de l'avant et imposer une autorité comme quoi les municipalités donnent l'information.

Je peux vous dire qu'en 1982 il y avait eu un comité formé et c'était une des recommandations du comité qui avait été formé par l'AECQ et son président... et le Conseil provincial avait participé avec d'autres, et c'était une des recommandations. Il va s'être écoulé 10 ans entre notre recommandation et la journée que ça va se faire. Mais mieux vaut tard peut-être que jamais.

Donc, on pense que... Je vais terminer et je vais céder la parole au procureur du Conseil provincial pour deux minutes, si vous me le permettez. On pense que l'engagement qu'avait pris le gouvernement du Québec lors de l'adoption, en 1986, de la loi 119 concernant le financement des mandats publics que vous imposez à la CCQ, on n'a jamais vu le chèque. On a vu des ministres qui nous ont dit que le chèque s'en venait la semaine prochaine. Mais les ministres ne sont plus là et on n'a jamais eu l'argent. Actuellement, c'est les parties dans la construction, les employeurs et encore plus les travailleurs qui financent les mandats publics que le gouvernement du Québec impose à la Commission. Je pense que le gouvernement devrait respecter ses engagements.

Je sais que j'ai dépassé un peu mon temps,

mais je vais tout de même, si vous le permettez, céder la parole à mon procureur et on est prêt à répondre à vos questions par la suite. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Monsieur le procureur.

M. Toupin (Robert): On m'a dit deux minutes. Ça va être deux minutes. Après une analyse des textes relativement à l'entrepreneur autonome, on s'en déclare juridiquement satisfait, sauf qu'on voudrait soumettre aux personnes de la commission deux petits changements qu'il nous apparaît important de faire.

D'abord, la modification à l'article 1k. 1, à "entrepreneurs autonomes", vous avez les mots "sans, l'aide d'un salarié à son emploi". Le projet de loi 185 suggère les mots "sans l'aide d'un salarié à son emploi". En comparaison avec la loi actuelle, c'est "sans l'aide d'un salarié", sans avoir les mots "à son emploi". Nous recommandons légalement d'enlever les mots "à son emploi". La perception qu'on en a de l'entrepreneur autonome, que vous permettez qu'il continue à agir, mais cette fois-ci en couvrant ceux qui vont être incorporés, les illégaux actuels, donc, c'est qu'ils n'aient pas l'aide d'un salarié de l'industrie de la construction, quel qu'il soit, pas seulement ceux qui seraient à leur emploi Donc, il faut qu'ils travaillent seuls, c'est le but de la loi, qu'ils n'aient l'aide d'aucun salarié de l'industrie de la construction.

D'autre part, à la modification que vous introduisez à l'article 19. 2, vous dites que l'employeur ou le représentant désigné de l'employeur ne peut exécuter des travaux de construction qu'avec l'aide d'au moins un salarié, et vous ajoutez: de l'entreprise.

Lorsqu'on lit juste "à l'aide d'au moins un salarié", on sait que "salarié", ça correspond à la définition de la loi et un salarié, au sens de la loi, c'est les travailleurs de l'industrie de la construction. Mais la notion de salarié de l'entreprise est très large, ce qui permettrait peut-être à une cour de dire que l'employeur ou son représentant désigné peut agir avec l'aide d'au moins un salarié de l'entreprise, mais pas nécessairement un traditionnel travailleur de la construction. Je comprends que ça lui prend sa carte, mais cette expression-là est source de confusion, donc, source d'acquittement. Or, nous, nous vous suggérons d'enlever les mots "de l'entreprise" et les buts seraient atteints.

Il me reste sans doute cinq secondes. C'est pour dire - et on en a discuté, les membres du Conseil - je vous signale que, législativement et juridiquement, qu'il y ait présentement des gens, des personnes physiques incorporées qui oeuvrent sur tes chantiers de construction sans répondre en aucune façon de la réglementation et de la loi de l'industrie de la construction, il y a là une violation manifeste de la règle de droit dans une situation de société démocratique.

D'autre part, lorsque M. Pouliot vous a parlé qu'il est anormal que les plaintes pénales d'un milieu aussi spécialisé que l'industrie de la construction soient plaidées par les débordés procureurs, les substituts du Procureur général, je peux vous dire, par expérience, qu'ils ne peuvent pas livrer la marchandise, d'où le grand nombre d'acquittements. Ils ont trop de travail dans l'application de toutes les lois dans la province. Alors, il est impérieux, urgent que la Commission de l'industrie de la construction reprenne tes plaintes pénales et qu'on ait des condamnations autant des syndicats que des travailleurs et des illégaux qui violent la loi. Cest important que vos lois soient respectées devant les tribunaux, ce qui n'est pas le cas présentement.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Alors, M. le ministre.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Si mes informations sont exactes, on m'a souligné que c'est aujourd'hui l'anniversaire de naissance du président du Conseil provincial. SI c'est le cas, mes meilleurs voeux, M. Pouliot.

M. Pouliot: C'est exactement ma fête, dans les deux sens.

Une voix: On va fêter ça. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: O. K. J'ai pris des notes pour quelques questions. Je sais bien que votre mémoire est plus volumineux que le temps qui vous était alloué. Donc, vous avez passé rapidement. J'aimerais, pour le bénéfice de ma compréhension, que vous m'expliquiez de quelle façon, de la façon dont ça fonctionne actuellement, on peut abuser? Vous avez dit: On abuse de l'assurance-groupe, on abuse de la retraite, on abuse du fonds d'indemnisation. J'aimerais vous entendre là-dessus, là. C'est quoi le mode de fonctionnement qui vous permet de mettre ça dans un mémoire, que de la façon dont ça fonctionne, ça permet le type d'abus que vous décriez?

M. Pouliot: Bon, écoutez, H y a effectivement, comme vous le savez, dans le décret de la construction et le règlement no 14, ce qui dit qu'H peut y avoir des cotisations volontaires pour le régime d'assurance-santé, salaire, maladie et aussi, effectivement, le régime de retraite. On a une opinion de la Commission de la construction du Québec, le 25 juin 1991, qui nous dit clairement qu'on ne peut pas refuser l'argent qui nous arrive sur des bases volontaires.

Donc, la passoire est là, et les entrepreneurs autonomes et même les employeurs peuvent enregistrer le nombre d'heures qu'ils désirent.

Donc, ce qu'ils font, ils enregistrent juste pour être éligibles à l'assurance. Si ça prend 600 heures, ils enregistrent 600 heures. Donc ils payent 1 $ au régime et, d'un autre côté, ils en collectent 3 $. On pense que ça devrait cesser immédiatement et surtout qu'ils devraient arrêter de jouer aux misérables, les pauvres entrepreneurs autonomes, des fraudeurs légalisés qu'on appelle, nous.

C'est le régime des travailleurs de l'industrie de la construction, et c'est notre régime à nous autres. Il y en a 350 000 qui sont dans le régime de retraite et environ 80 000 qui ont le droit de participer, mais il y a une passoire qui est là, et on veut essayer de corriger le trou qu'il y a. Il y a peut-être d'autres trous qui vont exister à la suite du projet de loi, et ce qu'on espère, c'est que tous les trous vont être bouchés et qu'on va atteindre l'objectif. Mais la passoire est là, et elle existe, et c'est un document qu'on a qui émane du contentieux de la CCQ qui nous dit: On ne peut rien faire. C'est de même qu'il faut que ça marche. (16 heures)

Donc, il faudrait changer des choses à l'intérieur de ça pour les cesser de participer. Parce qu'il faut bien comprendre, l'objectif qu'on avait, c'est que si un travailleur de la construction devient un employeur et veut continuer de participer au régime, il a ce qui s'appelle un droit acquis. Il peut le faire. Ou quelqu'un est travailleur de la construction et devient par la suite représentant syndical. Il peut continuer à bénéficier du régime d'avantages sociaux de la CCQ, mais ça devrait se limiter à ça. Mais encore là, il y a eu des trous, il y a des trucs qui sont donnés, et les rapports entrent, la CCQ encaisse les chèques, et ces gens-là deviennent, à un moment donné, éligibles au régime d'assurance. Encore une fois, c'est eux autres qui sont les "boss". Ils ont de l'argent, ils mettent ça dans une poche et ils sortent ça de l'autre poche. C'est le même bonhomme, c'est le même entrepreneur autonome. Les chiffres qu'on nous a donnés - vous pouvez sûrement vérifier auprès de la CCQ; les gens de la CCQ sont ici - ils versent 1 $ dans le régime puis ils en collectent 3 $.

M. Cherry: Juste pour être bien certain que j'ai compris votre explication, vous me dites qu'un travailleur autonome pourrait déclarer 600 heures par année et, le fait qu'il fasse ça, ça le rend eligible...

M. Pouliot: Oui.

M. Cherry: ...à des réclamations d'assurance-groupe, et ça lui permettra de retirer des bénéfices de la caisse de retraite quand il sera rendu à l'âge de la retraite. Ça veut dire que...

M. Pouliot: II ne peut pas jouer, M. le ministre, avec les montants. Les montants ont été négociés ou imposés par le gouvernement. Donc, le montant pour l'assurance-santé et salaire coûte 0,70 $ l'heure et le régime de retraite, de fonds de pension, ça peut être différent entre un électricien, un plombier ou une occupation. Les montants sont écrits dans le décret. La marge de manoeuvre qu'ils ont, que n'ont pas les travailleurs de la construction, c'est qu'eux rapportent les heures qu'ils veulent. Donc, si ça leur prend 600 heures pour être assurés pour l'année, ils enregistrent 600 heures, contrairement à un travailleur de la construction dont la moyenne d'heures, disons, est d'environ 1000 heures. Lui, il paye pour 1000 heures les 0,70 $ l'heure pour l'assurance et aussi pour le régime de retraite, ils ont toujours la même carte, qui est la carte Médic-construction, et avec ça, on va à la pharmacie, puis on donne cette carte-là, puis on paye 1 $ et 10 % des prescriptions. Mais la différence, c'est que nous, on a payé réellement ce que ça coûtait, et les entrepreneurs autonomes, et même des employeurs, il faut le dire, eux aussi embarquent dans le régime et contribuent sur une base volontaire. Il y a une différence entre volontaire et l'obligation qui nous est créée comme travailleurs de la construction de participer au régime d'avantages sociaux. C'est quelque chose de gros parce que dans le régime de retraite, l'actif atteint actuellement 3 300 000 000 $ qui sont administrés par la Caisse de dépôt et placement, et notre assurance dans la construction, qui est administrée par la CCQ, est une assurance d'environ 170 000 000 $. Donc, c'est quelque chose tout de même assez volumineux, les deux régimes.

M. Cherry: Donc, contrairement à un travailleur qui, lui, doit contribuer pour le nombre d'heures exact qu'il fait dans une année, votre description, si j'ai bien saisi, c'est que le travailleur autonome, lui, après 600 heures, ça lui a permis de se qualifier, même si, selon vos prétentions, il pourrait faire plus d'heures que ça dans la même année, mais aurait droit aux mêmes réclamations et aux mêmes bénéfices. Est-ce que j'ai bien saisi ça?

M. Pouliot: Oui, oui. Au niveau de l'assurance-santé, salaire, maladie, c'est exactement... Vous avez saisi et je peux vous dire que les travailleurs qui travaillent encore à la Baie James - les projets qui sont là - eux, ils travaillent 60 ou 70 heures par semaine, ils paient 70 heures par semaine dans le régime d'assurance. Donc, s'ils travaillent, disons, 40 semaines, ils peuvent faire 2500 heures dans l'année, pour certains travailleurs qui sont très limités, au Québec. Mais eux autres, ils sont obligés de payer sur le rapport mensuel, contrairement aux autres entrepreneurs, aux entrepreneurs autonomes.

M. Cherry: O.K. Vous avez insisté, dans votre rapport, et votre procureur également, vous avez parlé, par exemple, dans votre mémoire... les recommandations 8 et 9 touchent les poursuites pénales et les amendes. Pouvez-vous nous donner plus d'explications? Pourquoi ces poursuites-là sont intentées par la CCQ? Est-ce qu'elles l'ont déjà été? Pourquoi elles sont comme ça? Il faut profiter de ces occasions-là et j'aimerais vous entendre là-dessus. On en a parlé en privé, mais en privé, ça n'a pas le même mérite que ce qu'on pourrait faire aujourd'hui en commission parlementaire.

M. Pouliot: Je pense, M. le ministre, que j'avais expliqué ça dans mon bref exposé, mais on peut y aller plus tranquillement. Evidemment, c'est l'adoption de la loi 119 qui a enlevé ce pouvoir-là à la Commission de la construction du Québec. Avant, on avait tout de même un système qui allait assez bien. Tout le travail est fait par les inspecteurs de la CCQ qui nous coûtent des millions de dollars et là, je parle pour les employeurs, pour les travailleurs de la construction. Il faut tout préparer les dossiers. Au bout de la ligne, les procureurs, effectivement, ne savent pas exactement ce dont ils parlent. Lorsqu'ils arrivent pour défendre les causes de l'industrie de la construction - j'ai donné les permis de chasse puis ainsi de suite en exemple - mais le procureur, lui, il donne une pile de dossiers...

Récemment, j'ai été en cour en Abitibi et les causes qu'il y avait, c'étaient des causes de la construction mêlées à des chasseurs qui n'avaient pas de permis et ainsi de suite. Donc, on avait des procureurs qui étaient spécialisés, qui allaient défendre les dossiers de la construction. Le gouvernement a enlevé ce pouvoir-là et aussi les sommes d'argent à la Commission. Par contre, il a dit: Continue à faire le job que tu fais, les plaintes et ces affaires-là. Et nous, on demande à la Commission de la construction, comme centrale syndicale: Où sont rendues les plaintes qu'on a logées à la CCQ?

Bon, il y a eu une visite de chantier. Un inspecteur a été sur le chantier. Il a constaté une infraction. Ils nous écrivent et nous disent: plainte fondée. Ça va bien. Là, on attend. Là, on appelle à la CCQ. Des fois, on dérange le président. On lui demande: M. le président, où est-ce qu'on est rendu avec ma plainte qui est là? Une minute, je "checke" ça. Là, ils essaient de faire des contacts puis ils attendent encore des nouvelles, dans plusieurs districts judiciaires. Donc, le fait n'est pas nécessairement juste de dire reprendre les sommes d'argent, c'est de reprendre le pouvoir et faire le travail comme il faut.

On a des décisions qui sont rendues relativement aux preuves réunies, à savoir si, oui ou non, ça devrait être assujetti à la loi dans l'industrie de la construction. Il y a des déci- sions qui disent oui, des décisions qui disent non. Les procureurs, là-dedans, sont un peu mêlés et, souvent, les juges rejettent. Pourtant, la CCQ, quant à elle, c'est clair. Effectivement, ça devrait être assujetti au décret et à la loi de la construction. Donc, tout ça nous amène à revenir comme c'était avant. Il est faux de prétendre que c'est la politique gouvernementale... Je pense que dans le mémoire qu'on vous a remis, il y a des organismes qui gardent les amendes et qui prennent les poursuites. On peut parler du ministère du Revenu. On peut parler des municipalités quant au code de la route. On peut parler de la CSST. Il y a plusieurs exemples qui sont donnés. Donc, c'est un organisme qui allait tout de même assez bien. Il y avait toujours place à amélioration, mais par une décision gouvernementale, on dit: On vous enlève cette responsabilité-là puis on confie ça à ce qui s'appelle le ministère de la Justice.

Je dois vous dire qu'on est totalement en désaccord et je vais me permettre de vous souligner que la loi 119, ce n'est pas nous autres qui l'avons écrite puis on n'était pas d'accora dans l'ensemble, au complet. Il y a certains paragraphes qu'on aurait voulu enlever de la loi 119. Mais la loi a été adoptée puis on a été obligés de vivre avec. Je pense que le gouvernement devrait reconnaître qu'il s'est trompé concernant cet article-là et redonner à la Commission de la construction du Québec les pouvoirs qu'elle avait avant l'adoption de la loi 119.

M. Cherry: Vous avez rapidement parlé de l'expression de la liberté syndicale, donc, un vote. Est-ce que je peux vous entendre plus là-dessus. Quel est le mode que vous privilégiez comme organisme?

M. Pouliot: Évidemment, M. le Président, dans l'industrie de la construction, il n'y a pas eu de vote d'allégeance syndicale depuis 1987. Mais il faut comprendre que depuis de nombreuses années il y a toujours des nouveaux travailleurs qui adhèrent à l'industrie de la construction. Bon, Us votent. Peut-être qu'il peut y en avoir 25 000 ou 30 000 nouveaux qui sont entrés en vertu d'un règlement sur le certificat de délivrance et du règlement sur les cartes d'occupation, le cours de connaissances générales et ainsi de suite. Le degré de représentativité, si on embarque ceux-là qui ont voté par la suite, ça n'a pratiquement pas changé. C'est à peu près les mêmes pourcentages. Le Conseil, peut-être qu'on représente aujourd'hui 30 % ou 32 %, mais c'est à peu près le même pourcentage, de même que les autres.

Nous, on dit que si le gouvernement veut décréter un vote - c'est d'ailleurs ce qu'on demande, un vote obligatoire dans l'industrie de la construction; II y a un paragraphe dans notre mémoire - ça devrait être relié à une négocia-

tion par métier et occupation de a à z et aussi enlever le pouvoir au ministre de pouvoir nous imposer, encore une fois, un décret.

On pense que le régime est malade. Le régime de relations du travail dans l'industrie de la construction est grandement malade. Il faudrait peut-être le soigner un peu. Et là, je parle au niveau... Évidemment, vous savez qu'il y a un monopole patronal dans la construction puis un pluralisme syndical. Il n'y a pas deux centrales syndicales, il n'y en a pas trois; il y en a cinq. Je les ai nommées au début, avec leur représentativité.

Donc, quant à nous, si le gouvernement... On pense qu'un vote obligatoire avec une modification aux méthodes de négociation, évidemment, de laisser quelque part, en avril ou mai 1993, le rapport des forces s'exercer, si jamais il n'y a pas d'entente pour une convention collective... Parce que, dans le système actuel, il est évident que pour avoir du maraudage, il faut qu'il y ait une convention collective qui soit signée. Le ministre intervient toujours pour nous imposer un décret ou une loi. Donc, il n'y a pas de convention collective qui est négociée ou il est très difficile d'avoir une entente dans le système actuel.

M. Cherry: Ça termine ma période de questions.

Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour M. Pouliot, madame, messieurs. Ça me fait plaisir de vous avoir là. Je dois dire que j'ai lu avec vous, mais rapidement, votre mémoire. Il est assez élaboré et intéressant. Je partage avec vous l'idée qu'il faut un peu mieux encadrer l'entrepreneur autonome parce que c'est allé largement au-delà de ce qui était prévu dans la loi 31. Il y a eu une espèce de détournement d'intention législative là-dessus. Je pense qu'il faut le dire. Des questions rapides, ensuite j'en viendrai à une qui sera peut-être un peu plus longue.

Certains syndicats ont avancé l'idée qu'on devrait procéder à l'éviction simplement d'un travailleur qui est sur un chantier sans les cartes de compétence. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Pouliot: Bien, sûrement. Si un travailleur n'a pas de carte de compétence, ça devient un illégal et on ne devrait pas avoir deux poids, deux mesures. On devrait avoir la même politique pour les travailleurs, pour les employeurs. S'il travaille pas de cartes, ça devient un illégal. Je vous l'ai expliqué au début de mon exposé. Il y en 140 000 qui ont des cartes puis qui ont droit d'oeuvrer sur les chantiers de construction légalement. Mais il n'y en a jamais plus qu'en- viron 75 000 qui travaillent légalement, qui sont rapportés à la CCQ. Donc, il y en a beaucoup trop à l'heure où on se parle. Donc, on commence à donner un genre de sécurité d'emploi et de revenu à ceux qui ont déjà des cartes pour travailler dans l'industrie de la construction.

Mme Blackburn: Parce que, actuellement, ce n'est pas permis. C'était juste une question. À la page 4 de votre mémoire, vous citez un certain nombre de données comparatives avec l'an passé. Au même trimestre, vous dites que les heures travaillées chutaient dramatiquement: 37 % au Saguenay-Lac-Saint-Jean, 34 % en Mauricie-Bois-Francs, 20 % dans le Grand Montréal, 39 % en Abitibi, 22 % en Estrie, 13 % dans l'Outaouais et 21 % en Gaspésie.

Quand on parle de travail au noir, moi, ce qu'on me dit très souvent, ce sont des syndiqués avec la carte de compétence qui travaillent au noir actuellement.

M. Pouliot: Bon, écoutez, il y a sûrement une partie de ça, oui, les travailleurs qui travaillent au noir qui ont des cartes de compétence, et ça existe. Mais il faut comprendre que, souvent, ils sont obligés de travailler sous la menace des employeurs qui leur ont dit: Moi, je vais te payer là, disons... Le travailleur doit gagner 20 $ l'heure. On ne parlera pas d'avantages sociaux pour l'instant. Je vais te payer 15 $ l'heure. Sans ça, si tu ne veux pas 15 $, je ne te prends pas. Je vais prendre mon ami Toupin à côté. Lui, il va les prendre, les 15 $ l'heure ou un autre. Mais ils sont obligés de travailler ou bien non ils sont forcés de demeurer sur l'as-surance-chômage, s'ils ont les timbres d'assurance-chômage, ou d'embarquer sur ce qui s'appelle le BS, le bien-être social.

Mme Blackburn: Je suis d'accord avec vous. On m'a parlé longuement de la pratique. Deuxième question: Croyez-vous que le projet de loi actuel permettra vraiment de mettre fin à cette pratique de forçage du côté des employeurs à l'endroit des travailleurs qui... Par exemple, les heures travaillées normalement payées en temps supplémentaire sont tout simplement comptabilisées. Elles sont données à un autre moment ou même, dans certains cas, me dit-on, elles sont données en effets. Ça veut dire vous avez des matériaux de construction pour construire votre chalet, par exemple, en échange d'un certain nombre d'heures travaillées. Bon, c'est payant pour l'entrepreneur qui... L'employé ne dit pas toujours... ne conteste pas toujours. Est-ce que vous pensez que ça va mettre fin sérieusement à cette pratique-là, les projets de loi qu'on a là?

M. Pouliot: Bon, je dois vous dire oui, partiellement. Je ne pense pas que le projet de loi ou les projets de loi 185 ou 186 vont effectivement faire des miracles. Mais ce n'est

sûrement pas des incitatifs à travailler au noir. Ce que visent les deux projets de loi, c'est d'éliminer le travail au noir dans l'industrie de la construction. Est-ce que vous me dites que certaines associations d'employeurs vont encore donner des trucs? Elles vont leur donner des idées comment faire des banques d'heures pour contourner la CSST et aussi contourner le régime de retraite? C'est possible. Je ne pense pas que... Il n'y a pas de loi parfaite. Mais c'est pour ça, je pense, que le ministre a accepté de convoquer une commission parlementaire pour qu'on essaie d'aider le gouvernement à dire: II peut survenir tel et tel problème. Je pense que si on peut régler 80 % des problèmes du travail au noir, de l'artisan ou de l'entrepreneur autonome, ou le champ d'application, mais ça va être pour moi un grand pas en avant par rapport à ce qui existe présentement.

Mme Blackburn: Bien. On me dit qu'une partie de-Une voix: Juste un instant... Robert Toupin.

Mme Blackburn: Oui. (16 h 15)

M. Toupin: Ça, c'est la même chose lorsqu'on compare un moyen pour faire respecter votre loi à l'égard, par exemple, des gens qui violent la loi, les gens en boisson avec leur automobile. Vous avez une loi où vous dites: Bon, tu n'as pas le droit de prendre ton automobile si tu es en boisson. Si tu te fais prendre une première fois, il y a une amende. Ça va aller jusqu'à la révocation du permis. C'est la raison pour laquelle beaucoup de centrales, y compris le Conseil provincial, vont vous demander: Prenez les mesures ultimes, expresses, y compris l'exclusion d'un chantier de quelqu'un qui est en illégalité sur le chantier. Au même titre, par exemple, vous expulseriez de l'Assemblée nationale quelqu'un qui parlerait sans être un élu du peuple. C'est la même chose là-dedans. Ou dans une cour de justice, un gars qui se déclarerait avocat et qui plaiderait devant le juge, on le prendrait et on lui dirait: Sors de la salle. Tu n'as pas d'affaire là! C'est la même chose sur un chantier.

Mme Blackburn: Ce n'était pas vraiment là ma question, mais quand même, j'apprécie la réponse. Vider les caisses... Tout à l'heure, vous parliez de ceux qui, finalement... que le fonds d'indemnisation... vous en parlez dans votre mémoire... qu'il risquait de se retrouver à zéro. Ceux qui travaillent un peu à vider les caisses, ce sont beaucoup ces entreprises qui amorcent des travaux, qui envoient les premiers versements, tel que prévu, à la CCQ et qui, finalement... Les travaux durent un mois et demi, deux mois. Ils terminent les travaux, font faillite et ça tombe sur les bras de la CCQ.

Dans ce sens-là, je me dis, ce genre de... Et les compagnies à numéro, j'y reviens parce qu'à mon avis, c'est un scandale. Ça me scandalise surtout quand ce sont les sociétés d'État qui acceptent de confier des contrats à ces entreprises-là. Je ne vois rien dans ce projet de loi qui va permettre de corriger cette situation Je suis toujours un peu mal à l'aise parce que je vois - et je sais que vous n'avez pas tort - comme une espèce d'offensive massive à l'endroit du travailleur autonome, alors que les grands propriétaires... Pour ne pas le nommer, Canadian Asbestos a simplement ouvert une compagnie à numéro puis obtient un contrat de plusieurs millions de dollars d'Hydro-Québec, alors qu'il ne respecte pas le code de la construction. Je me dis: On ne mettra pas fin à ça. Je suis toujours un peu mal à l'aise. Il y a comme une démesure dans la taxe, sinon dans les moyens. Je vous dis que dans ce projet de loi, il n'y a pas cette espèce d'équilibre.

Deuxième chose, c'est qu'on a des mesures importantes pour ramener les employeurs à la raison, pour les obliger à respecter les lois de la construction et le code, mais en même temps H y a, à quelques endroits, il m'a semblé, une démesure à l'endroit du travailleur.

J'ai un exemple. À l'article 18 qui vient modifier l'article 119.2 dans le projet de loi 185, il semble que, dans le paragraphe 2°, on pourrait suspendre la carte de compétence pour un à trois mois même pour quelqu'un qui, par exemple, porterait un madrier, alors qu'il n'est pas manoeuvre, là, vous savez. Alors, je me demandais si ça n'allait pas trop loin.

M. Pouliot: Bon. Deux choses. Je pense que les deux projets de loi 185 et 186 vont couvrir, disons, le problème du fonds d'indemnisation qui est actuellement dans le décret de la construction, dont le passif est de 1 400 000 $, ce que je vous ai expliqué. Les cautions que va exiger la Régie du bâtiment et aussi la Commission pour donner, à un moment donné, un numéro d'employeur, devraient boucher ce trou-là concernant les faillites des compagnies à numéro et ainsi de suite. Donc, ils vont avoir à payer une caution que la Commission de la construction décidera et aussi la Régie du bâtiment pour éliminer, justement, ce genre de fraude là que l'on voit passer à tous les mois au conseil d'administration de la CCQ. Puis, des fois, c'est les mêmes noms. Des fois, c'est la femme ou le chum ou... en tout cas. C'est tout un réseau puis H y a des spécialistes là-dedans. On pourrait vous donner les noms.

On pense que les deux projets de loi ensemble règlent ce problème-là, à savoir si, effectivement, l'article 119.2, vous nous demandez de le retirer. Nous, on pense qu'il devrait être là...

Mme Blackburn: Non, je n'ai pas dit...

M. Pouliot: ...et demeurer là. Et il ne va pas trop loin. S'il y a des coupables, qu'on punisse les coupables. Il n'y a pas juste des employeurs qui sont coupables. Il y a aussi des travailleurs, et c'est justice pour tous, en ce qui nous concerne.

Mme Blackburn: Je n'ai pas parlé de l'article complet 119.2. J'ai parlé de l'article 119.2 qui vient modifier l'article 83.1, paragraphes 1, 2, 7 à 12. C'était le deuxième paragraphe seulement. C'est une partie.

M. Pouliot: J'avais bien compris que vous vouliez enlever l'article 2 et, en ce qui nous concerne, on n'est pas d'accord.

Mme Blackburn: Bien, ça va. Alors, je suis d'accord. Vous dites: Tapez dedans. Ça va. O.K.

Crédits d'impôt. J'ai plus tendance à croire aux mesures incitatrices et, en même temps, je partage avec vous l'idée qu'il va falloir... Donc, quand vous abordez les crédits d'impôt, je suis d'accord, bien que je sache que les amendes - j'ai déjà eu l'occasion de l'exprimer - il faudrait qu'il y ait moins de délais entre le constat de l'infraction et l'amende, sinon ça n'a aucune portée. Je suis tout à fait d'accord avec vous. La campagne de sensibilisation, je trouve l'idée intéressante, également.

À la page 23, vous parlez des amendes de la CCQ et vous dites: II faudrait que l'on puisse percevoir ces amendes, ce avec quoi je suis d'accord, mais vous constatez que, depuis 1986, avec la loi 119, le gouvernement a fait verser ça dans ses fonds. On est d'accord avec ça?

Une voix: Oui.

Mme Blackburn: Alors que vous faites toute confiance au gouvernement par rapport à une régie. Vous savez ce que le gouvernement fait avec sa régie de la construction? Il est en train de nationaliser les entreprises de construction. On est en train d'étatiser les plans de garantie. On est en train de mettre la main là-dessus. Ça m'apparaît beaucoup. Et le gouvernement pourra, à ce moment-là, à n'importe quel moment, comme il l'a fait, là, avec la loi 119, venir piger allègrement dans la caisse de la Régie, alors que la loi 53, contre laquelle vous semblez en avoir, prévoyait une commission du bâtiment qui avait la responsabilité de contrôler, de percevoir auprès des entrepreneurs les sommes susceptibles d'établir des plans de garantie qui assuraient la qualification. Et c'était fait aussi... il y avait un certain nombre de syndiqués qui siégeaient sur le conseil.

Moi, à la question que je pose, vous me dites: On est d'accord. Les deux sont liées à la vie, à la mort. L'une n'est pas bonne sans l'autre. Qu'est-ce qu'il y a dans le projet de loi 186 qui ne pourrait pas être appliqué avec le projet de loi 53 intégral? Vous dites: II y a des choses. Il faudrait qu'on puisse augmenter les inspecteurs. C'est bon, c'est dans 186. Est-ce que ça nous empêche d'augmenter les inspecteurs avec 53? Je ne pense pas. Est-ce que ça nous empêche de revoir le fonds d'indemnisation à la Commission de la construction? Je ne pense pas.

Alors, les principaux éléments que vous invoquez pour dire qu'il faut absolument 186, ils sont jumelés puis inséparables. Si on avait appliqué 53 intégralement, est-ce qu'on serait en train, aujourd'hui, de tenir ce genre de débat là? Peut-être, mais il y a moins de chances, parce que vous vous rappelez que le projet de loi instituait les premières amendes assez élevées et un contrôle important, et il responsabilisait le milieu de la construction.

En somme, je dis: Autant je pense qu'il faut resserrer l'histoire des entrepreneurs autonomes, autant je pense qu'on fait une erreur collective en donnant à l'État, quel qu'il soit - je ne fais pas de politique partisane... C'est toujours tentant lorsque vous avez la possibilité d'aller piger dans une caisse.

Vous n'avez qu'à regarder ce qu'on fait avec l'assurance-automobile. Vous savez que dans votre assurance-automobile, il y a des taxes déguisées; ça va dans le fonds consolidé du gouvernement. Alors, avec la Régie, on va pouvoir le faire également, et ça, je trouve ça inquiétant.

M. Pouliot: Évidemment, M. le Président, sans faire de politique, si on avait mis en application le projet de loi 53, il y aurait sûrement moins de problèmes que ceux qu'on a aujourd'hui. Ça, je le concède à Mme la députée. Mais de là, je pense qu'il faut faire une grosse différence entre une régie et une commission. Vous savez, je pense qu'une régie, c'est pas mal plus fort qu'une commission et si on parle qu'on veut donner une suite logique au projet de loi 186, la Régie est bien placée pour ce qui est des ententes avec les municipalités, pour savoir lorsqu'elles émettent un permis de construction. Je pense que ça se fait dans un contexte global et, aussi, on demande - et c'est une de nos recommandations - que les parties, dans l'industrie de la construction, siègent au conseil d'administration de la nouvelle Régie du bâtiment. Donc, on n'est pas d'accord avec la composition actuelle, avec un comité consultatif, et c'est une de nos recommandations. Donc, il y a une grosse différence entre les deux. Commission et régie, je pense que ce n'est pas la même chose.

Mme Blackburn: La commission du bâtiment dans la loi 53 - si ma mémoire est fidèle, il faudrait que j'aille la refouiller, je l'ai lue assez récemment - permettait de conclure des ententes avec les municipalités. Le projet de loi 186 prévoit déjà un certain nombre de frais: les frais

d'inscription, les frais d'examen, les frais d'évaluation découlant de la délivrance, de la modification, du renouvellement d'une licence, une somme fixée par la Régie pour la délivrance d'un permis aux entrepreneurs, les frais qu'elle exige pour l'approbation, l'autorisation, la révision, l'inspection, la formation, la consultation, la délivrance d'attestations de conformité, l'accréditation des personnes qu'elle reconnaît pour fins de vérification, et l'article 66 dit: L'article vient modifier l'article 152 qui est remplacé par le suivant: "152. Les sommes perçues et les montants recouvrés par la Régie, en application de la présente loi, sont versés au fonds consolidé du revenu. "

C'est le pot, hein? Alors, moi... et ça va finir, parce que le problème...

Le Président (M. Bélanger): Pour conclure, Mme la députée.

Mme Blackburn:... le problème... On a jusqu'à 16 h 30?

Le Président (M. Bélanger): Vous aviez 16 minutes.

Mme Blackburn: Le problème, c'est que plus on va avoir de tarifications sur lesquelles le gouvernement va pouvoir imposer à la Régie un relèvement de la tarification, une augmentation de la tarification, ça va finir par se répercuter au moins sur le consommateur. Tandis qu'avec la commission telle que pensée et conçue dans le projet de loi 53, sur laquelle il y avait unanimité, en tout cas, un large consensus sur 53 en 1985 - et vous y étiez de ce consensus - on responsabilisait les entrepreneurs en disant: Écoutez, dorénavant, si ça va mal chez les entrepreneurs, on va savoir qui est responsable, tandis qu'une régie, vous ne vous sentez pas responsables d'une régie. Vous sentez-vous responsable de la Régie du logement? Ça n'a pas de nom, pas d'identité, tandis qu'une commission...

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, madame, s'il vous plaît.

Mme Blackburn:... gérée et administrée par les entrepreneurs, ça nous semblait être la meilleure solution et l'hypothèse qu'on avance, c'est que le projet de loi 185... de petites modifications, et on les regardera, il y en a quelques-unes sûrement, mais pourquoi ne pas conserver 53 et voir ensuite à l'application?

M. Pouliot: Moi j'ai l'impression que c'est ce qu'on fait, avec la loi 186: on modifie la loi 53 et on lui donne des dents pour pouvoir mordre ceux qui vont à l'encontre de la loi, et on lui donne plus de pouvoirs en l'appelant la Régie. Évidemment, notre intention, encore une fois, je le répète, c'est qu'on pense que sur le conseil d'administration, ça devrait être les parties dans l'industrie de la construction, et ça ne regarde pas simplement les employeurs, en ce qui nous concerne. Parce que lorsqu'il n'y a plus d'argent dans le fonds d'indemnisation, c'est ies travailleurs qui vont perdre des sommes d'argent de plusieurs millions de dollars. Donc, c'est pour ça qu'on veut avoir un oeil là-dessus. C'est aussi important, quant à nous, la Régie que la CCQ.

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie. M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.

M. Cherry. Alors, M. le Président, vous me permettrez de remercier M. Pouliot et les gens qui l'accompagnent, de vous être déplacés aujourd'hui et de nous avoir présenté vos propositions. Soyez assurés que vos représentations occupent mon attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous apportera beaucoup de travail. C'est pourquoi j'ai demandé à l'équipe du ministère de se mettre à l'oeuvre dans le suivi des dossiers. Alors, encore une fois, merci de votre présence aujourd'hui.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, merci M. le Président. Je voudrais vous remercier, madame et messieurs, de la qualité, d'ailleurs, de votre mémoire, vous dire que ça nous a appris beaucoup de choses. Mais une toute petite information: la loi 53 na jamais été promulguée. Ce n'est pas du pareil au même, là.

Le Président (M. Bélanger): Madame, on remercie nos invités. On ne fera pas la discussion, là.

Mme Blackburn: Je vous en prie! Laissez-moi terminer et les saluer à ma façon.

Le Président (M. Bélanger): Oui, mais il ne faut pas reprendre le débat.

Mme Blackburn: Je vous remercie infiniment et on va certainement...

Le Président (M. Bélanger): II est fini le débat, là.

Mme Blackburn: Si ça ne vous fait rien, je remercie comme ça me convient puis ça, c'est convenu généralement dans toutes les commissions.

Le Président (M. Bélanger): Je veux bien, madame, mais je vous dis juste de ne pas reprendre le débat, s'il vous plaît. Respectez au

moins les règles de la commission. Je vous remercie.

Mme Blackburn: Je vous remercie, et ça m'a fait plaisir. Je vais lire de façon plus attentive et complète votre mémoire, probablement en fin de semaine, parce que j'imagine que, dès le début de la semaine prochaine, on va commencer l'étude article par article. Je vous remercie.

M. Pouliot: On vous remercie, M. le Président, et on va être disponibles, même si la commission parlementaire se termine à minuit ce soir, on va être encore dans les alentours et on pourra rencontrer des gens des deux côtés de la Chambre.

Le Président (M. Bélanger): Alors, vous venez veiller avec nous.

M. Pouliot: Sûrement. Ça nous fait plaisir.

Le Président (M. Bélanger): On vous remercie beaucoup de votre participation et nous invitons à la table la Fédération des travailleurs du Québec, section construction. (16 h 30)

Bien. Alors, je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît, pour que nous recevions nos prochains invités qui sont la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, section construction, qui est représentée entre autres par le président, M. Lavallée, que j'inviterais à présenter les autres membres de son équipe. S'il vous plaît, dans la salle, s'il vous plaît. Si chacun veut bien reprendre sa place. Nous avons recommencé et nous écoutons présentement M. Lavallée. Alors, M. Lavallée, la parole est à vous.

Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, section construction

M. Lavallée (Jean): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, ça me fait plaisir de vous présenter le groupe de la FTQ-Construction qui, aujourd'hui, fait la présentation. Je suis accompagné de Hervé Morin, local 99 des peintres, à mon extrême gauche. À mon extrême droite, Jean-Marc Thouin, du local 791 des opérateurs de machinerie lourde; à ma droite, Yves Paré, directeur général de la FTQ-Construction. C'est avec plaisir qu'on...

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez un instant, M. Lavallée, juste avant, on aura peut-être un petit dérangement en cours de route. Il est possible qu'il y ait un vote autour de 17 h 30 à l'Assemblée nationale. Donc, nous serons obligés, tout le monde, nous, d'aller pour ce vote. Alors, je vous préviens, si la cloche se met à sonner, je devrai vous interrompre. Il se peut qu'on ait le temps de finir votre intervention, mais il se peut que... Alors, je m'en excuse à l'avance.

M. Lavallée (Jean): O.K. La présentation du document va être faite par mon confrère Paré ainsi que par moi-même. Pour une nième fois, nous sommes convoqués devant votre commission parlementaire afin d'exposer notre opinion sur des changements à être apportés à la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de \a construction, ainsi que sur les modifications à la Loi sur le bâtiment. M. le Président, nous allons profiter de l'occasion qui nous est donnée afin de réitérer devant votre commission parlementaire ce que la FTQ-Construction demande depuis une quinzaine d'années en ce qui a trait à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

Nous croyons qu'il est essentiel, d'abord, de faire un historique des principales lois qui ont été adoptées depuis quelques années et qui ont sensiblement modifié la Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction. Depuis la commission Cliche qui remonte à 1975, M. le Président, il y a eu pas moins d'une douzaine de commissions parlementaires, soit pour des modifications à la loi, soit pour des impositions de conditions de travail des travailleurs de l'industrie de la construction. Je demanderai à mon confrère Paré de continuer.

M. Paré (Yves): Alors, pour sauver la grippe de mon président, sans remonter aussi loin que la commission Cliche, il est important de souligner qu'il y a exactement 5 ans, soit le 5 décembre 1986, plus de 5000 travailleurs de l'industrie de la construction étaient devant ce parlement afin de manifester leur opposition au projet de loi 119, que le ministre du Travail d'alors, M. Pierre Paradis, s'apprêtait à faire adopter. Cette loi devait redonner aux parties de l'industrie la responsabilité de la formation professionnelle dans l'industrie de la construction.

En tant que FTQ-Construction, nous nous sommes vigoureusement opposés à ce projet de loi parce qu'il ne donnait pas véritablement aux parties l'entière responsabilité de la formation ainsi que du contrôle de son administration de la nouvelle commission de la construction. Le gouvernement se débarrassait d'un dossier très chaud et forçait les parties à assumer une responsabilité financière qui n'était pas la nôtre. Le ministre Paradis s'était engagé à financer les mandats que le gouvernement nous demandait de remplir en son lieu et place. Nous devons vous rappeler, M. le ministre, que nous attendons toujours que le ministre du Travail apporte à l'industrie de la construction le support financier tant promis.

Quelque 15 mois plus tard, vers le mois de

mai 1988, M. Paradis, toujours ministre du Travail, déposait un nouveau projet de loi, soit le projet de loi 31. Ce projet de loi était destiné à exclure du champ d'application de la loi les travaux d'entretien, réparation, rénovation et modification d'un logement pour une personne physique agissant pour son compte et à ses fins personnelles et exclusivement non lucratives. Par ce projet de loi, le ministre espérait régler le travail au noir de l'industrie de la construction. À peu près tous les intervenants en commission parlementaire pensaient le contraire. Tout ce que le ministre a fait, c'est d'avoir légalisé une importante partie des travaux qui se faisaient illégalement.

L'ultime but visé était de n'avoir, dans l'industrie de la construction, que des entrepreneurs et des salariés pour effectuer des travaux de construction. Dorénavant, il n'y aura plus d'artisan dans la construction nouvelle, c'était le leitmotiv du ministre Paradis. C'était mal connaître certaines associations patronales qui se sont immédiatement mises à la recherche d'une erreur ou d'un trou dans la loi qui leur permettrait de contourner cette loi et qui les empêchait de continuer à frauder le système. Ils l'ont effectivement trouvé et immédiatement, des cours s'organisaient pour informer ces artisans ou nouveaux entrepreneurs autonomes comment échapper à la loi tout en demeurant actifs dans l'industrie de la construction.

Les braconniers de la construction, ceux qu'on appelle les "brokers" et qui n'embauchent aucun salarié de la construction, n'ont aucun intérêt à ce que la situation dans l'industrie se stabilise ou se civilise, car ils se servent de ces artisans ou entrepreneurs autonomes pour effectuer des travaux de construction à leur place. Ces artisans ou entrepreneurs autonomes sont à la merci de ces égorgeurs d'êtres humains et ils n'ont d'autres choix que de travailler illégalement, c'est-à-dire sous la couverte.

Plusieurs tentatives ont été faites auprès des différents ministres du Travail depuis l'adoption de la loi 31 afin de corriger la situation sans grand succès. Même si les parties étaient unanimes à dire qu'il fallait corriger la situation, jamais les correctifs n'ont été apportés. Les entrepreneurs autonomes ont alors envahi l'industrie de la construction par milliers, évitant ainsi toute poursuite de la part de la Commission de la construction. Tout le travail fait depuis des années pour régulariser une situation devenue incontrôlable était à refaire. Le manque de volonté politique faisait en sorte que le dossier traînait sur les bureaux et personne n'osait reprendre le bâton du pèlerin.

Plusieurs rencontres eurent lieu avec le successeur du ministre Pierre Paradis, soit M. Yves Séguin, sans aucun résultat même si unanimement nous demandions des correctifs. Des ententes signées par les trois plus importantes associations syndicales de la construction qui représentent 90 % et l'Association des entrepreneurs, l'AECQ, ont été déposées au bureau du ministre Séguin sans que rien n'y fit. Encore aujourd'hui, les entrepreneurs autonomes demeurent les serviteurs et les victimes des mêmes "brokers" insatiables.

Ainsi, il aura fallu plus d'une dizaine d'années de récriminations de la part de la FTQ-Construction concernant le travail au noir, le champ d'application de la loi ainsi que le régime de sécurité du revenu des travailleurs de la construction pour que le gouvernement accepte, dans un ultime et dernier effort, de mettre sur pied une commission royale d'enquête dans l'industrie de la construction.

Effectivement, lors de l'entente de prolongation du décret d'une année entre la FTQ-Construction, la CSN-Construction et l'AECQ en 1989, le ministre du Travail, Yves Séguin, mettait en marche une commission sur la stabilisation du revenu et de l'emploi des travailleurs de la construction. Cette commission, communément appelée la commission Picard-Sexton, avait pour mandat d'établir les modalités d'un système de stabilisation du revenu et de l'emploi dans l'industrie de la construction et de formuler ies propositions législatives ou réglementaires requises à l'implantation d'un tel système. Dans le cadre de son mandat, la commission devait tenir compte, entre autres, du champ d'application de l'industrie de la construction, de l'incitation pour les entrepreneurs à embaucher des travailleurs réguliers de l'industrie, de l'incitation à déclarer les heures travaillées afin d'éliminer le travail au noir et de la stabilisation des activités dans l'industrie de la construction afin de permettre la réalisation des buts visés par la commission.

Il nous semble que le mandat était très clair. On nous apprend, dans les tribunaux qui ont à trancher des litiges, que le législateur n'emploie pas de mots inutilement, que le législateur écrit ce qui est nécessaire à l'application d'une loi ou des règlements. Or, la commission avait pour mandat d'établir les modalités d'un système de stabilisation du revenu et de l'emploi dans l'industrie de la construction en tenant compte du champ d'application, de l'incitation pour les entrepreneurs a embaucher des travailleurs réguliers de la construction et de l'incitation à déclarer les heures travaillées afin d'éliminer le travail au noir.

Chacune des associations présentes ici aujourd'hui tant patronales que syndicales a, au cours de l'année qu'a duré l'enquête, eu toute l'opportunité d'être entendue par les commissaires et parfois à plus d'une reprise. Chacun des représentants de ces associations a pu exprimer son accord comme ses différends. Le ministre du Travail avait aussi ses entrées à la commission Bref, tout le monde a eu droit au chapitre. De tous ces mémoires présentés, de toutes ces consultations, de toutes ces audiences, les commissaires Laurent Picard et Jean Sexton ont

produit le 28 juin 1990 un rapport synthèse de 200 pages. Ils ont produit au ministre du Travail 62 recommandations. Ils ont fourni une dizaine de modifications aux différentes lois et règlements. Ils ont, M. le Président, rempli le mandat que le gouvernement du Québec leur avait confié. Nous ne comprenons pas qu'un an et demi après le dépôt du rapport Picard-Sexton nous nous retrouvions devant une commission parlementaire qui a pour objet de modifier la loi des relations de travail dans l'industrie de la construction. Nous ne comprenons pas qu'il y ait encore des associations ou des regroupements de personnes qui tentent de converser le statu quo dans l'industrie de la construction.

M. le ministre, depuis le dépôt dudit rapport Picard-Sexton, vous avez entendu tour à tour les associations patronales crier parfois même avec hargne contre les recommandations 52 à 63 du rapport. Vous avez entendu les associations déclarer qu'à cause de ces recommandations le rapport était à jeter aux poubelles. Vous avez aussi entendu que, pour les autres recommandations ainsi que pour l'analyse faite, le rapport était très acceptable et très vivable. Or, M. le ministre, la partie la plus contestée du rapport Picard-Sexton a fait l'objet d'une entente signée entre la FTQ-Construction, le Conseil provincial, la CSN-Construction et l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, l'AECQ.

En ce qui a trait au régime de sécurité du revenu ou au supplément à l'assurance-chômage, la FTQ-Construction a accepté de changer son vin en eau. Nous aurions aimé que les recommandations 53 à 62 soient mises en application intégralement. Malheureusement, il doit y avoir un début à quelque part et nous avons accepté de débuter modestement. Nous avons accepté que l'argent versé par les employeurs serve aussi à recycler et à perfectionner les travailleurs de la construction. Nous avons accepté parce que nous savons que, bientôt, les vrais employeurs de la construction vont vouloir aller plus loin dans ce modeste plan de stabilisation du revenu de l'emploi des travailleurs de la construction.

Pourquoi alors, M. le ministre, sommes-nous en commission parlementaire? N'y aurait-il plus de travail au noir? Les vrais entrepreneurs de la construction sont-ils heureux de la loyale compétition? Le champ d'application serait-il par miracle élargi? Ou y aurait-il encore quelques braconniers, "brokers" ou entrepreneurs qui voudraient libéraliser davantage l'industrie, pouvoir étouffer davantage la main-d'oeuvre actuelle de l'industrie de la construction et profiter encore plus du système sans avoir à y payer leur dû?

Malheureusement, il s'en trouve encore de ces associations qui enseignent comment frauder le système, comment passer à côté des lois et des règlements. Il s'en trouve encore qui, par des manigances ou des subterfuges, retirent deux fois plus d'avantages du système qu'ils n'y contribuent. Il est clair que, pour ces associations, les artisans, les autonomes, les fraudeurs, les parasites doivent demeurer dans l'industrie de la construction afin de mieux s'en servir pour contourner le système, pour permettre à ces braconniers, qui n'embauchent aucun salarié de la construction, de saper davantage dans les conditions de travail et les normes de construction. Ils ont besoin de ces gens pour compéti-tionner les vrais entrepreneurs qui désirent demeurer respectueux des lois, des règlements et des normes minimales de construction.

M. le ministre, ces mêmes associations, qui critiquent ouvertement toutes les lois et règlements de la construction ou qui veulent à tout prix sortir du champ d'application du décret de la construction pour pouvoir plus facilement fourrer le consommateur, n'ont pas hésité et, malheureusement, avec la complicité du gouvernement, à s'accaparer les 12 000 000 $ des surplus qu'avait générés Corvée-habitation. Pourtant, cet argent, qui avait été accumulé à même le fonds de pension de tous les travailleurs de la construction, n'aura servi qu'à aider un groupe restreint d'entrepreneurs qui cherchent encore le moyen de sortir du champ d'application de la construction.

Il n'est plus question de ressasser les vieilles discussions ni de reprendre un nouveau processus de consultations, à savoir s'il y a des problèmes dans l'industrie de la construction. Nous en avons suffisamment parlé. Il y a eu suffisamment d'enquêtes sur l'industrie. Il y a eu amplement de consultations. Il y a eu suffisamment de commissions parlementaires pour que le ministre sache la direction qu'il doit prendre afin de régler le sort des quelque 100 000 travailleurs et travailleuses de la construction. Le ministre connaît la position des 20 000 entrepreneurs de la construction. Le ministre connaît aussi les problèmes de l'industrie.

C'est pourquoi la FTQ-Construction, qui représente 60 000 travailleurs et travailleuses de l'industrie, a accepté de participer à cette commission parlementaire. Nous sommes venus dire au ministre et aux membres de cette commission que l'industrie de la construction ne peut plus continuer d'être le dépotoir des autres industries. Nous ne pouvons plus nous permettre d'être le champ de patronage de tout le monde. Nous voulons dire à cette commission que nous n'accepterons plus de jouer des rôles passifs et de second ordre dans cette industrie. Nous voulons vous informer que les travailleurs que nous représentons en ont assez de vivre dans une industrie anarchique et de se voir enlever leur emploi par des travailleurs qui viennent de partout, sauf de l'industrie de la construction.

Nous voulons vous dire qu'il ne manque pas grand-chose pour que l'industrie bascule majoritairement dans l'illégalité. La FTQ-Construction constate que les projets de loi 185 et 186 sont

déjà un pas dans la bonne direction. Toutefois, il manque, dans ces deux projets de loi, des éléments majeurs au bon fonctionnement de l'industrie de la construction. Force nous est de constater que plusieurs recommandations importantes du rapport Picard-Sexton n'apparaissent ni dans le projet de loi 185, ni dans le projet de loi 186. Nous réclamons donc du ministre d'apporter aux projets de loi 185 et 186 les modifications suivantes.

Premièrement, le champ d'application. Le champ d'application, c'est le coeur de notre industrie. C'est ce qui détermine ce qui est de la construction et ce qui ne l'est pas. Par conséquent, le champ de juridiction, c'est beaucoup d'emplois créés ou perdus. Le ministre avait annoncé la création d'un groupe de travail paritaire afin de procéder à l'analyse et évaluer les impacts des recommandations concernant la formulation de l'article 19 et, deuxièmement, le retrait de la loi et des règlements de la référence à machinerie de bâtiment et de production.

Ce comité devait faire rapport le 31 décembre. Il est certain qu'il n'est pas possible de rencontrer cet échéancier. C'est pourquoi nous demandons au ministre d'incorporer à la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction la définition du champ d'application apparaissant à notre mémoire. C'est une demande renouvelée qu'on n'a pas à lire. Le ministre pourra consulter notre mémoire là-dessus. (16 h 45)

Un autre point qui n'apparaît pas dans les modifications aux lois, c'est le vote d'allégeance syndicale. M. le ministre, l'article 32 de la loi actuelle prévoit un vote d'allégeance syndicale dans le onzième mois qui précède la date originale d'expiration du décret prévue à l'article 47. Or, l'article 47 de la loi parle d'une convention collective de travail signée entre une ou des associations représentatives et l'association d'employeurs qui peut être extensionnée en décret. Le décret actuellement en vigueur n'est pas le fruit d'une convention collective et, par conséquent, selon les interprétations, il n'y aurait pas de période prévue pour permettre à un travailleur qui le désire de changer d'allégeance syndicale. La dernière période ouverte qui permettait aux travailleurs qui le désiraient de changer d'allégeance syndicale remonte au mois de novembre 1987. Depuis, il y a eu entente en décembre 1987 pour prolonger le décret d'une année sans vote d'allégeance syndicale. À l'expiration du décret en avril 1989, il y a de nouveau eu entente pour la prolongation du décret d'une année sans vote d'allégeance. En avril 1990, le ministre du Travail imposait un décret de trois ans qui expirera en avril 1993.

S'il y a prolongation ou s'il y a négociation de convention collective, il pourrait arriver que les travailleurs de la construction soient une dizaine d'années sans pouvoir changer d'allégeance syndicale. Cela est inacceptable et nous demandons au ministre d'apporter les correctifs nécessaires afin qu'un vote d'allégeance syndicale soit pris de la façon suivante: que la loi soit amendée de façon à éliminer les associations représentatives qui n'obtiendraient pas 25 % d'adhésion; que des votes soient tenus parmi les personnes qui auront voté pour les associations et obtenu moins de 25 % afin qu'elles puissent choisir parmi celles ayant obtenu 25 % d'adhésion et, troisièmement, si au cas où aucune des associations majoritaires n'émergeait en vertu de a et de b, que des votes soient tenus parmi les personnes ayant voté pour la ou les associations ayant plus de 25 %, mais qui est ou qui sont le moins représentatives.

Troisième point: l'entrepreneur autonome. Deux points importants sont à noter en ce qui concerne l'entrepreneur autonome.

Premièrement, dans la définition d'"entre-preneur autonome", lorsqu'on parle de travaux d'entretien, de réparation, de rénovation mineurs visés à la présente loi, le mot "mineurs* demeure imprécis et peut facilement porter à Interprétation, alors que nous n'avons aucun processus d'arbitrage ou de décision afin de clarifier l'évaluation des travaux mineurs. C'est pourquoi nous demandons au ministre d'être plus précis dans la définition du mot "mineurs", soit en établissant un montant ou une proportion des travaux versus l'évaluation de la bâtisse ou encore en donnant à Commission de la construction du Québec le pouvoir de trancher en cas de litige.

Deuxièmement, l'entrepreneur de machinerie lourde et l'entrepreneur en excavation et terrassement. Lors de l'adoption de la loi 31, en juin 1988, il y avait eu entente et consensus entre l'AECQ, la FTQ-Construction, le Conseil provincial et la CSN afin qu'il n'y ait pas plus d'un entrepreneur de chacune de ces catégories en même temps sur un chantier de construction Nous demandons au ministre, puisqu'il y avait entente unanime, de respecter la volonté des parties et d'inclure dans la loi cette définition que nous pourrons remettre au ministre.

Quatrièmement, la perte du certificat de compétence. L'article 119.2 du projet de loi se lit comme suit: "Lorsqu'une personne est déclarée coupable d'une infraction prévue à l'article 83.1 ou à l'un ou l'autre des paragraphes 1°, 2°, 7° à 12° de l'article 119.1, en outre de la peine prévue pour cette infraction, son certificat de compétence est suspendu pour une période de 1 à 3 mois".

Or, partout ailleurs dans le texte de loi, le mot "quiconque" est employé au lieu de "lorsqu'une personne", et nous prétendons que l'entrepreneur autonome ou le représentant désigné d'une corporation ou d'une société ne serait pas visé par cet article, ce qui serait injuste et déraisonnable envers les travailleurs

parce qu'ils ne perdraient pas leur carte de compétence. Nous vous demandons donc de corriger cet oubli.

Cinquièmement, dans la déclaration ministérielle faite en juin dernier, le ministre du Travail énumérait une série de mesures qu'il entendait mettre de l'avant afin de corriger la situation dans l'industrie de la construction et, plus particulièrement, et je cite: "de la mise en vigueur après un certain nombre de modifications de la Loi sur le bâtiment. Par la même occasion, le gouvernement disposera des recommandations concernant la régie des entreprises en construction du Québec, dont celle portant sur l'imposition d'amendes sévères et la révocation de la licence d'entrepreneur dans le cas où ce dernier fait effectuer du travail au noir ou tente de le faire."

À aucun endroit dans les projets de loi 185 et 186, il n'est fait mention de cet aspect incitatif à ne plus effectuer ou faire effectuer du travail au noir. Pour les travailleurs, cette notion existe et même très précisément. En contrepartie, pour les entrepreneurs, il n'y a rien de moins clair. Nous demandons au ministre de rétablir la situation d'une façon aussi précise pour les entrepreneurs que pour les travailleurs.

Sixièmement, recommandations 34 et 35 du rapport Picard-Sexton. Afin de contrer davantage le travail au noir, la commission Picard-Sexton recommandait que chaque employeur de la construction soit tenu de déclarer à la Commission de la construction du Québec, dans les dix jours suivant le début des travaux pour un chantier donné, le nombre d'heures de travail prévues pour le parachèvement de ce chantier. Par cette mesure, il est clair que la Commission de la construction du Québec aurait un meilleur contrôle sur le travail au noir. De plus, l'application de cette recommandation est un autre incitatif à ne pas faire effectuer de travail au noir.

Septièmement, perception des amendes. Nous demandons au ministre de retourner à la Commission de la construction du Québec le pouvoir de poursuites pénales actuellement entre les mains du ministère de la Justice. La Commission de la construction est le seul organisme capable d'assurer un suivi permanent des dossiers et, de plus, la Commission est la mieux placée pour représenter les intérêts des parties.

Huitièmement, un point, M. le Président, qu'on réclame depuis très longtemps, c'est le délégué syndical. À nouveau nous réclamons du ministre du Travail la liberté de nommer sur les chantiers de construction des délégués pour représenter les travailleurs oeuvrant sur ces chantiers et voir à l'application de la convention collective ou du décret. Le secteur de la construction est le seul secteur où il est interdit de négocier une clause de délégué syndical. Nous ne pouvons plus, en 1991, être aussi archaïques dans nos relations de travail. Nous pensons que les deux projets de loi 185 et 186 forment un tout indissociable. Nous pensons que le projet de loi 186 manque de fermeté en ce qui a trait à rémission et à la perte de licence d'entrepreneur, mais aussi parce que la loi réfère souvent à des règlements à être adoptés par la Régie, et nous pensons que cette forme de procéder peut apporter des délais très longs avant de réagir.

Pour terminer, M. le ministre, il est arrivé le temps de mettre de l'ordre dans l'industrie de la construction et nous vous incitons à ne pas céder aux pressions de ceux qui croient qu'ils pourront encore profiter du système. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Alors, M. le ministre, vous avez 18 minutes.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans votre mémoire, au sujet de l'entrepreneur de machinerie lourde et de l'entrepreneur en excavation et terrassement, vous demandez qu'une seule de ces deux catégories soit en même temps sur un chantier. Sur quelle argumentation vous basez-vous? Vous avez passé rapidement. Vous avez parlé d'une entente, mais j'aimerais que vous explicitiez, là, pour la bonne compréhension, c'est quoi, comment ça se passe dans le vrai quotidien. C'est quoi les objectifs que vous visez et pourquoi c'est si important que ça pour vous autres?

M. Paré (Yves): Bon, on était venus à la conclusion, en 1988, par les discussions qu'on avait eues avec le ministre du Travail et certaines associations, à l'effet que ceux qui détenaient, qui possédaient une machine, bon, une pépine et ainsi de suite, on ne pouvait pas demain matin dire: C'est fini. Alors, puisque dans l'industrie de la construction, tous les autres artisans et entrepreneurs autonomes dans la construction neuve n'avaient plus le droit de fonctionner, ils ont dit: On ne peut pas enlever ces gens-là. Alors, on avait eu des rencontres, des discussions avec les associations, et on en était arrivés à la conclusion qu'il me semble que sur un chantier de construction deux entrepreneurs autonomes, parce que ça en fait deux, un qui détient une licence en machinerie lourde et un autre qui peut détenir une licence en terrassement, parce que, la plupart du temps, ils détiennent les deux, pouvaient oeuvrer en même temps sur un même chantier.

Bon, on dit: Sur une construction de route, un entrepreneur qui prend un contrat pourrait avoir un gars avec une pépine et un gars avec un "bull" qu'il voudrait embaucher ou des gens, pour prendre l'expression qu'on emploie souvent dans les petits villages, pourraient oeuvrer sur ces chantiers-là. On permettrait par une entente qu'il y en ait deux au maximum par chantier de construction et par employeur. On pense que c'était raisonnable, logique et, à ce moment-là,

on n'éliminait pas tous les entrepreneurs autonomes qui détenaient déjà et qui possédaient déjà ces machineries-là.

M. Cherry: Pour enchaîner, vu que vous reconnaissez, et c'est l'argument que vous venez de me fournir, là, à cause de l'importance de l'investissement, si j'ai bien compris... vous parlez de pépine, vous parlez de "bull", de bélier mécanique. Est-ce que vous vous limitez à ça, le type de reconnaissance d'investissements pour la reconnaissance d'un travailleur autonome? Est-ce qu'il n'y a pas - je vous pose la question - d'exercice d'autres genres de métiers que vous qualifieriez de travailleurs autonomes, mais qui pourraient eux aussi faire des investissements importants tout en étant les seuls à l'exercer? Je le demande, là. Vous êtes des gens dont c'est le quotidien de faire ça.

M. Paré (Yves): Non, je pense que dans le cas des autres travailleurs de l'industrie de la construction ils n'ont pas à investir autant dans ces choses comme de la machinerie lourde. Bon, une pépine, c'est quoi? C'est 60 000 $ ou 70 000 $. Il y en a qui ont une grue. Ils peuvent payer 250 000 $ ou 300 000 $. Lors de l'adoption de la loi, parce que ça, c'est arrivé comme un cheveu sur la soupe, le fait de dire: On sort le bungalow mais les entrepreneurs autonomes dans la nouvelle construction ou des artisans, il ne devrait plus y en avoir. Et là, c'est venu, le sujet de la machinerie lourde. Il était clair qu'il en existait. On ne peut pas dire: Demain, ça n'existe plus et tout le monde vend sa machine. Donc, je pense qu'il était raisonnable, à cause justement de ces investissements-là, du prix que ces gens-là avaient payé, de dire: Parfait, on va en tolérer un certain nombre par chantier par employeur, et c'est strictement dû à un investissement. L'entrepreneur autonome qui est charpentier-menuisier peut très bien être salarié demain matin. Il n'a pas investi sa chemise, lui, pour devenir autonome. Il n'a rien investi. Alors, on pense que dans la machinerie lourde, c'est important à cause de l'investissement, mais quant au reste des autres corps de métier, il n'y a pas ces investissements-là.

M. Cherry: Dans votre mémoire également, vous insistez sur une possibilité d'expression d'un vote d'allégeance syndicale, et là, vous faites l'historique, à savoir la dernière fois... O.K. Mais à moins que je n'aie pas lu suffisamment en détail, parce qu'il a peut-être fallu passer rapidement, est-ce qu'il y a un mode particulier de scrutin que vous préconisez, que vous favorisez? Vous avez sûrement été au courant, vous étiez présent, de mémoires de gens qui vous ont précédés... Est-ce que vous soutenez la même formule, en avez-vous une modifiée ou, en tout cas, une nouvelle? Qu'est-ce que, vous autres, vous soutenez?

M. Paré (Yves): C'est la formule du vote, bien sûr, pour déterminer une association représentative dans l'industrie de la construction. On a beau parler de travail au noir, on a beau parler de braconniers, on a beau parler de tout ce qu'on voudra, il reste, dans l'industrie de la construction, que ça fait à peu près une douzaine d'années qu'il n'y a pas eu de convention collective de travail.

On a beau avoir cinq centrales syndicales; on fait affaire avec une association d'entrepreneurs ou d'employeurs, dans l'industrie de la construction, qui est une association unique. On est divisés dans l'industrie de la construction. À ma connaissance, on a toujours prêché à la FTQ et, dans le temps qu'on était au Conseil provincial, ensemble, le Conseil provincial était d'accord aussi à ce moment-là qu'il devrait n'y avoir qu'une seule association dans l'industrie de la construction.

Comment y parvenir? C'est par une façon démocratique, en forçant un vote. Alors, il y aura un vote qui se tiendra et celui qui obtiendra la majorité représentera les travailleurs de l'industrie de la construction. Ceux qui n'ont pas 25 % ne seront plus là. Ils seront là dans trois ans, lorsqu'il y aura un nouveau vote; leur nom sera là, mais pour les trois prochaines années, pour la négociation de la convention collective de travail, il y aura des associations qui ont plus de 25 % qui demeureront dans l'industrie de la construction.

On aurait aimé, M. le ministre, aller encore plus loin que ça et je comprends mal que des associations syndicales disent: Dans la construction, ce n'est pas bon qu'il y ait juste une association, mais dans les "shops", c'est bon Parce qu'on arrive avec un vote, qu'il y ait 3000, 2000 travailleurs, si l'association n'a pas 50 %, c'est bien de valeur, elle ne sera pas là pantoute. Ça ne veut pas dire qu'elle va pouvoir être là dans trois ans. On dit, nous autres: Oui, mais donnons une majorité syndicale pour pouvoir avoir une relation de travail normale dans l'industrie de la construction comme partout ailleurs. Au bout de trois ans, à l'expiration de la convention, comme n'importe quelle autre industrie, il y aura un nouveau vote, il y aura une période d'ouverture. Les gens qui ont obtenu, mettons, plus de 15 % auraient le droit de réinscrire leur nom sur le bulletin de vote, faire une campagne et essayer d'aller chercher l'adhésion des travailleurs de l'industrie de la construction en nombre suffisant pour les représenter.

À l'heure actuelle, toutes les associations syndicales, M. le ministre, crèvent à peu près de faim. On ne peut pas donner les services qu'on voudrait. On est tous divisés. C'est peut-être très important de savoir combien les travailleurs investissent dans des paiements de cotisations syndicales annuellement pour ne pas pouvoir obtenir les vrais services auxquels ils ont droit

Pourquoi? Une association représente 1 %; l'autre représente 10 %; l'autre, 16 %; l'autre, 30 % et l'autre, 42 %. On est là et lorsque arrive le temps de négocier les conditions des travailleurs, même si on se regroupe ensemble, on n'a pas les mêmes visées. Ce n'est pas vrai qu'on représente tous les mêmes intérêts. Alors, les travailleurs en souffrent et on dit: Pourquoi pas l'industrie de la construction, comme n'importe quelle autre industrie au Québec?

M. Lavallée (Jean): En complément de réponse...

M. Cherry: Quand vous dites que vous ne...

Le Président (M. Bélanger): M. Lavallée, s'il vous plaît.

M. Lavallée (Jean): En complément de réponse, M. le ministre, ça permettrait aussi peut-être d'éviter certains problèmes qui existent sur les chantiers de construction, j'en suis convaincu. J'écoutais, ce matin, mes amis de la CSD aller accuser la FIPOE de les empêcher de travailler. C'est clair qu'un organisme qui représente 90 % des électriciens par rapport à un autre qui en a à peine 2 %, c'est peut-être normal qu'ils ne puissent pas entrer aussi facilement sur un chantier industriel que le groupe qui en représente 90 %.

Le fait qu'il y aurait une centrale syndicale, tous les problèmes de placement qui peuvent exister à l'occasion seraient définitivement réglés et ça permettrait une meilleure cohérence vis-à-vis de la partie partronale qui, elle, est une association patronale unique. Comme Yves le mentionnait aussi, on n'a pas voulu être pour la vie l'association syndicale unique. On a dit, après une période de temps, si c'est deux ans ou trois ans, le groupe qui aurait recruté un certain nombre, un certain pourcentage de 15 % serait automatiquement inscrit sur le bulletin de vote, ce qui permettrait une bien meilleure cohérence dans l'industrie de la construction.

M. Cherry: Vous me dites que si tout le monde était représenté, puis là, je reprends vos propos... Vous dites: Si tout le monde était représenté par une centrale syndicale, ça éviterait beaucoup de problèmes. Pourtant, aussi récemment que la semaine dernière, je rencontrais des gens d'un corps de métier qui sont représentés dans différents groupes et qui me disaient que les différents autres corps de métier ont l'intention, pour la fin de l'année, de déposer des descriptions de métiers qui auraient comme résultat de gruger dans l'ensemble de ce qui est le leur. Pourtant, ils sont à l'intérieur des mêmes centrales. (17 heures)

Donc, dans un premier temps, là, je suis loin d'être convaincu - et peut-être que vous pourrez ajouter là-dessus - que le fait que vous soyez tous à l'intérieur d'une même centrale, même divisés comme vous l'êtes là en quatre ou cinq, ça assure une homogénéité de fonctionnement puis le respect des champs de juridiction. Vous êtes là-dedans. De la même façon - et ça, c'est une révélation pour moi depuis que j'ai cette responsabilité-là - que l'on peut créer la perception que, parce que la loi a créé un seul porte-parole au nom des entrepreneurs pour ce qui a trait à la négociation pour relations de travail... Je vous assure que ce n'est pas ça qui garantit l'unanimité de pensée et de fonctionnement des entrepreneurs dans le secteur de la construction parce qu'ils représentent, eux aussi, comme chez vous, des intérêts bien différents. Ceux qui vont vous suivre d'ici la fin de la journée vont sûrement profiter de l'occasion pour nous l'exprimer.

M. Lavallée (Jean): C'est clair, M. le ministre. Je vous ai dit, moi, que ça éviterait beaucoup de problèmes en ce qui a trait au placement. C'est clair. En étant tous dans une même centrale syndicale, personne ne se met la tête dans le sable pour dire qu'il n'y a pas certains problèmes qui existent. Au niveau des juridictions de métier, c'est clair qu'on est né de traditions de métiers, comme il existe aussi dans d'autres domaines professionnels. Les avocats ont leur propre juridiction, les notaires ont leur propre juridiction. Dans nos structures, on a chacun des juridictions de métiers. Étant donné les changements technologiques, c'est clair qu'on a certains problèmes à s'ajuster.

Encore une fois, étant sous un même toit, ce serait plus facile d'essayer de coordonner nos tirs dans la même direction et de mieux nous parler pour pouvoir en arriver à des ententes dans les juridictions de métiers. Je ne dis pas qu'on réglerait à 100 % du jour au lendemain, mais soyez assuré que je suis convaincu qu'on réglerait beaucoup plus facilement plusieurs situations.

M. Cherry: O.K. Je veux revenir sur la question du vote d'allégeance syndicale. Est-ce que vous préférez... Vous avez décrit un processus de représentativité, vous avez utilisé le chiffre de 25 %. Est-ce que vous préconisez le même type de vote que d'autres qui vous ont précédés ce matin, à savoir un vote obligatoire, ou si vous voyez... En tout cas, je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais je vous demande de me dire quel est votre raisonnement là-dedans, peut-être basé sur des expériences passées ou...

M. Paré (Yves): Dans le cas d'une ouverture à l'élimination de centrales syndicales qui ne représentent pas 25 %, il est clair qu'il faudrait un vote obligatoire qui amènerait tous les travailleurs de l'industrie de la construction à se

prononcer et, une fois pour toutes, à décider. Ce qu'on disait ce matin, c'est vrai, c'est de remise en remise. Depuis 1972 où il y avait plus... il y a eu une troisième centrale qui a été reconnue et qui a été la CSD, elle a été reconnue en 1972, il n'y a pas eu, ou à peu près, de modifications dans tout ce qui a trait au pourcentage.

Il y a eu des séparations. Le Conseil provincial et la FTQ, à un moment donné, ont dit: Bon, on se dissocie. Mais prenez aujourd'hui, presque 20 ans plus tard, mettez le Conseil provincial et la FTQ ensemble, on vous donnera encore 73 %, c'est ce qu'on représentait en 1972. Il y a des sommes d'argent énormes qui se dépensent chaque deux ans et trois ans pour montrer qui est le plus beau et le plus fin et, pendant la durée de la convention, c'est de se battre, qui va placer qui sur les chantiers de construction, pour en arriver toujours, après chaque période de maraudage, aux mêmes résultats.

Alors, s'il y a des parasites, des braconniers qu'on appelle dans l'industrie de la construction, on a l'impression qu'il y a aussi du braconnage syndical, qu'il y a des associations qui existent, qui ne font que percevoir des cotisations syndicales et qui sont dans l'impossibilité de donner des services aux travailleurs qui paient des cotisations syndicales. Comme M se paie à peu près 30 000 000 $ de cotisations syndicales par année dans l'industrie de la construction, ça commence à être du stock. Alors, il faut qu'à un moment donné les travailleurs en aient pour leur dû. Ce n'est pas vrai qu'on peut tolérer la perception de cet argent-là alors que les travailleurs ne peuvent avoir les services auxquels ils sont en droit de s'attendre.

On dit: Régions donc ça une fois pour toutes, mettons une association syndicale qui va pouvoir donner de vrais services, qui va pouvoir faire de vraies relations de travail comme n'importe quelle autre industrie, et on verra. Il restera les problèmes de juridiction qu'on espère, comme Jean le disait, dans la même maison pouvoir se comprendre.

M. Cherry: O. K. Je dois poursuivre dans ce domaine-là. Supposons qu'il y ait un vote, comme vous le décriviez, mais que ça ne décrète pas une majorité. Vous proposez un deuxième tour de scrutin. Dans le climat dans lequel vous décrivez. Là, c'est bien certain qu'on se connaît depuis fort longtemps, mais j'ai décidé d'être législateur et il y a des questions qu'il faut que je pose. Un type d'activité comme celle-là, qui s'étendrait sur une période de x temps parce qu'il y a un premier et un deuxième tour sans qu'on n'ait pour ça la conviction et l'assurance que ça va dégager une majorité... Quels seraient les effets de ça, vous pensez, sur la qualité et sur la productivité des chantiers de construction?

M. Paré (Yves): M. le Président et M. le ministre, il y a eu énormément de votes d'allégeance syndicale depuis que la loi de 1990 existe et il n'y a pas eu, à ma connaissance, de baisse de productivité sur les chantiers de construction. D'abord, les votes, ce n'est pas une journée d'élection. C'est des votes qui s'échelonnent sur cinq, six, sept jours. C'est le soir et les fins de semaine. Alors, les travailleurs ont amplement le temps et la possibilité d'aller voter.

On pense qu'il y aurait une décision à prendre, à un moment donné. La première fois qu'on ferait exprimer la vraie démocratie, peut-être y aurait-il deux tours de scrutin. On pense que ça en prendrait peut-être deux et, après ça, ce serait fini. Il y aurait, au cours des années subséquentes ou des fins de conventions subséquentes, un vote qui se prendrait normalement. On ne pense pas que ça va perturber à ce point les chantiers de l'industrie de la construction et les entrepreneurs. On pense qu'un vote va se tenir comme il s'en est tenu depuis 1972, sans plus de problèmes que ça.

M. Cherry: La formule qui a été retenue les dernières fois, avec présomption... En d'autres mots, ceux qui ne se présentent pas, c'est comme s'Hs se déclaraient satisfaits de leur allégeance syndicale présente. Bon. Quelques-uns vont reconfirmer ce qu'ils ont. Mais vous avez raison de dire que... Je pense que ça n'a pas créé beaucoup de difficultés ou de ralentissement à cause d'une activité normale d'expression d'allégeance. Si on prenait votre formule avec un vote obligatoire, je pense que... en tout cas. Je vous questionne là-dessus.

M. Paré (Yves): M. le ministre, en 1981 il y a eu un vote obligatoire dans l'industrie de la construction. En 1981, il y a eu un vote obligatoire et, contrairement à ce qu'on disait ce matin, que les gens... qu'il n'y a que ceux qui veulent changer qui vont voter, c'est faux. À la lecture des résultats, plus de 50 % de ceux qui vont voter, c'est pour reconfirmer leur même association. Les gens disent: Si je ne vais pas voter, un autre pourrait voter à ma place. Alors, ça, c'est faux. En 1981, il y a eu un vote obligatoire dans l'industrie de la construction et je n'ai pas entendu dire qu'il y a eu des chantiers de fermés. Il y a eu six jours de votation, les fins de semaine et le soir, et ça s'est très bien déroulé. Ce n'est pas comme une journée, M. le ministre, où le "deadline" est entre 9 heures et 16 heures et là, c'est les bras qui ramassent tout et les chars se remplissent. Non. Je pense que le vote se fait de façon normale et il se déroule partout à travers la province de Québec simultanément. Et il n'y a pas de problème. La Commission de la construction fait bien ça. On pourrait lui confier encore le même mandat et ça ne serait pas pire qu'en 1981.

M. Cherry: Merci. En ce qui me concerne.

ça termine ma question.

Le Président (M. Bélanger): II y avait M. Lavallée qui avait un complément de réponse, je pense.

M. Lavallée (Jean): Je voulais dire au ministre, qui connaît bien le secteur industriel, qu'on vit, à l'occasion, une double votation pour une accréditation dans l'industrie. J'en ai vécu une à Sorel à la Q.I.T., les métallos et la CSN. On n'a pas perturbé pour autant les opérations de la Q.I.T. Je suis convaincu que, dans un vote comme ça, tous les gens sont assez matures et qu'il n'y aurait pas de perturbation dans l'industrie de la construction.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, j'ai lu avec attention votre mémoire que j'avais reçu un peu plus tôt. J'y ai trouvé un certain nombre de remarques pertinentes. Je suis toujours étonnée, quand les gens viennent en commission, de réaliser comment des petites choses nous échappent. Je pense à la page 19 lorsque vous rappelez qu'il ne faudrait peut-être pas confondre quiconque et personne, et je trouvais que c'était particulièrement intéressant et pertinent. Dans cet article, précisément... J'y reviens parce que l'interprétation qui m'a été faite de la modification, particulièrement le paragraphe deuxième, pourrait aller très loin en ce qui concerne les travailleurs. Alors, peut-être pas me donner la réponse tout de suite, mais peut-être que si vous y regardez d'un petit peu plus près et que vous pensez qu'il y a quelque chose là, j'aimerais que vous me le disiez.

M. Paré (Yves): Je m'excuse. Vous parlez de 119.2?

Mme Blackburn: C'est 119.2 qui vient modifier 83.1 à l'un ou l'autre des paragraphes 1°, 2°, 7° à 12°. Le 2°, on me dit que ça pourrait aller aussi loin que, par exemple, quelqu'un perdrait sa carte de compétence seulement parce qu'il aurait porté un madrier. On se demandait si ce n'était pas un peu beaucoup.

M. Paré (Yves): Bien, est-ce que c'est un peu beaucoup d'enlever le pain de la bouche de quelqu'un? Est-ce que c'est un peu beaucoup? Il y a, dans l'industrie de la construction, un paquet de travailleurs reconnus, qui ont leur licence, qui ont le droit d'oeuvrer sur les chantiers de construction. Lorsqu'il y a un employeur illégal, c'est parce qu'il y a un risque de fraude quelque part. Il y a quelqu'un qui, pour avoir cette job-là, accepte des conditions différentes, accepte bien souvent de ne pas payer ses dûs ni à la Commission de la construction ni au gouvernement du Québec par ses impôts, accepte des choses. Est-ce que c'est dur de dire au gars: Tu t'en viens travailler, tu vas perdre ta carte de compétence? S'il va travailler illégalement, il va perdre sa carte de compétence. Est-ce que c'est trop sévère? Non, ce n'est pas trop sévère.

Mme Blackburn: Ce n'est pas de ça que je parle. Si vous avez un électricien qui porte quelque chose qu'il ne serait pas supposé porter, le travail devrait être fait par un manoeuvre, est-ce qu'on devrait lui faire perdre sa carte de compétence de un à trois mois parce que. semble-t-il...

M. Paré (Yves): C'est une question de juridiction de métier, ce que vous me donnez là comme exemple.

Mme Blackburn: Non, ça va. Si vous me dites oui, ça va. Je...

M. Paré (Yves): Non, mais est-ce que le gars possède la carte de compétence pour faire le travail? S'il ne la possède pas, il ne le fait pas. Il ne le fait pas.

Mme Blackburn: Ça va. Dans le projet de loi 186, il y a deux modifications apportées. Il y en a un certain nombre qui viennent resserrer, augmenter, mais, à mon avis, la plus importante, c'est la modification radicale quant au fond, à la perspective et c'est le fait qu'on change la Commission du bâtiment pour en faire une Régie du bâtiment. Auriez-vous des objections fondamentales si on conservait la Commission de la construction sur laquelle était prévu siéger 15 personnes dont 3 ou 4 représentants des syndicats qui géreraient les activités qu'on est en train de confier à une régie, pour les raisons que j'ai expliquées tout à l'heure et que vous avez certainement entendues?

M. Paré (Yves): Ce qu'on pense, c'est que la loi 186 va plus loin que la Loi sur le bâtiment qui n'a pas été adoptée. Elle va beaucoup plus loin. Si vous me demandez: Est-ce que, pour cet item-là, vous préféreriez être sur le conseil d'administration plutôt que sur le comité consultatif? La réponse, c'est oui. On préférerait être sur le conseil d'administration que sur le comité consultatif. Mais est-ce que la loi 53 sur le bâtiment, qui est demeurée sur les tablettes, est mieux que 186? Je préfère 186. Elle va plus loin.

Mme Blackburn: Ce n'était pas tout à fait ma question. Je me dis 186, admettons là, préalable, on l'accepte, mais à condition qu'on revienne à l'idée d'une commission du bâtiment et non pas d'une régie. Je me permets de le rappeler parce que l'article 52... Attendez un peu!

C'est l'article 67 qui vient modifier le 153, à la page 29 du projet de loi, qui vous donne toute une série - d'abord, à la page précédente - de nouvelles tarifications, ensuite qui Indique que ces fonds sont versés au fonds consolidé et, ensuite, ça prévoit que tout ça va être indexé.

M. Paré (Yves): Oui.

Mme Blackburn: Indexé, ça veut dire que ça va dépendre un peu des besoins. Ce genre de disposition m'inquiète, je l'ai exprimé tout à l'heure. Auriez-vous des objections fondamentales à l'effet que, oui, le projet de loi 186, mais qu'on biffe là-dedans toutes les références à la Régie pour revenir aux dispositions de 53 qui prévoient la Commission?

M. Paré (Yves): Je vais vous avouer très candidement, madame, que je ne connais pas la différence entre l'interprétation d'une régie et celle d'une commission.

Mm» Blackburn: D'accord.

M. Paré (Yves): Je pense que ce qui est important pour le secteur de la construction chez nous, c'est qu'il y ait définitivement un contrôle sévère. Que ça s'appelle régie au lieu de s'appeler commission... Dans l'industrie de la construction, la loi des relations de travail, c'est une commission de la construction. On y est partie. Tantôt, je vous écoutais dialoguer avec d'autres avant nous autres. Ça serait peut-être préférable que ce soit géré par des entrepreneurs. J'aurais un genre de crainte là-dessus. Je ne suis pas sûr qu'il y en aurait beaucoup qui accepteraient, par exemple, d'enlever la licence. Entre eux autres, est-ce qu'ils accepteraient, par exemple, qu'un entrepreneur qui ne serait pas conforme perde sa licence, ces choses-là? Moi, je pense que.... Le terme "régie" ou "commission", est-ce que ça va faire une grosse différence? Nous, la loi qui est là, les modifications qui sont apportées font notre affaire. On avait beaucoup travaillé sur la loi 53, la FTQ-Construction en particulier, énormément. On était d'accord avec ça. Il y a des modifications qui sont apportées. On est entièrement d'accord avec les modifications qui sont apportées aussi.

Mme Blackburn: Mais ça...

M. Lavallée (Jean): Moi, je pense...

Mme Blackburn: Oui.

M. Lavallée (Jean): ...Mme Blackburn, que, pour nous, c'est clair, la Commission du bâtiment ayant été non pas promulguée, mais au moins la législation était là... Ça a pris cinq ans avant que le ministre la ramène et la modernise. Moi, prendre le risque sur une régie puis une commis- sion, ça ne m'énerve pas trop. Ce que je veux avoir, c'est quelque chose en place qui va nous permettre d'aller de l'avant pour contrer le travail au noir. Puis, pour moi, 186 le couvre, mais pas aussi clairement qu'on aimerait. On se pose la question. On dit au ministre: Pour nous, la perte de la licence par rapport au travail au noir n'est pas assez définie. Puis on dit qu'on va nous expliquer où on va mettre ça. On nous dit que c'est par un système de points de démérite qui va être adopte par règlement. Bien moi, j'aimerais voir le système de démérite adopté avant. Qu'on nous explique c'est quoi et qu'on ait les règles du jeu. J'ai crainte que, si on tarde trop à adopter la réglementation, on se réveille un peu comme ça existe dans certaines lois qui sont mises en application à un moment donné sur un conseil d'administration où je siège et que le ministre connaît bien, le représentant à la prévention à la CSST. La loi est en vigueur depuis dix ans et on a de la misère à s'attendre.

Donc, Yves vous disait tout à l'heure qu'on est conscients - et je pense que tout le monde dans cette salle ici en est conscient - de l'ampleur du travail au noir qu'on vit présentement. On a été sévères avec nos membres en disant: Eux... Il fallait être constants dans nos revendications. On ne pouvait pas dire: L'employeur, vous allez lui trancher la tête, et le salarié, lui, vous n'allez rien faire. Mais on veut - on sait que le salarié, il a la perte de sa licence, c'est son gagne-pain, temporairement - on veut aussi que le même pendant soit du côté de l'employeur pour justement éviter qu'on continue le travail au noir. C'est clair qu'on ne pense pas réussir à régler 100 % du travail au noir. C'est une éducation qu'on devra faire à nos membres et, aussi, avec toutes les incitations et les pénalités dans la loi, ça va nous permettre de récupérer. Si on récupère 30 %, c'est mieux que rien du tout. Moi, je n'avais pas peur de m'en venir à Québec et de rouler à 100 milles à l'heure. L'amende, ça ne me dérangeait pas. Mais depuis que je perds mes licences, soyez assurée que je ne roule pas et que je m'arrange pour ne pas perdre ma licence. Donc, si on veut réussir à réduire le travail au noir dans l'industrie de la construction, H faut mettre l'épée de Damoclès au-dessus des deux têtes. (17 h 15)

Mme Blackburn: Bien. Je rappelle, juste pour fin d'information, que la loi 53 prévoyait une commission du bâtiment administrée...

M. Lavallée (Jean): Oui, oui.

Mme Blackburn: ...par les employeurs. Ce n'était pas juste les employeurs, je veux dire, c'étaient les employeurs et les syndicats.

M. Lavallée (Jean): Non, non. On était dessus aussi.

Mme Blackburn: C'est pourquoi je pense que ce n'est pas tant, je veux dire, par rapport à votre participation, je préfère ça au comité consultatif. Moi, le comité consultatif, je vous le dis pour avoir siégé sur un comité, présidé un comité, un conseil consultatif, c'est de l'oc-cupationnel, un comité consultatif, à une régie. Je m'excuse de vous dire ça aussi brutalement, c'est un bonbon pour amuser le monde. Je n'y crois pas bien gros. Alors, moi, je préférerais que vous soyez assis à la commission et que vous assuriez la gestion de ça. C'était vraiment la question.

Deuxième question: Est-ce que vous avez des objections fondamentales à maintenir les droits des deux corporations: électriciens et tuyauteurs? Les droits de contrôle sur la qualification? Je sais qu'on leur reconnaît déjà dans la loi.

M. Lavallée (Jean): Moi, je ne sais pas ce que les corporations sont allées vous siffler dans l'oreille, il faudrait qu'on sache ce qu'ils ont demandé. Je pense qu'ils ont été plutôt vous voir pour essayer de vous convaincre de défendre les entrepreneurs autonomes - c'est peut-être la place où il y en a le moins - je comprends mal les corporations qui vont aller pleurer pour dire: C'est effrayant, nos pauvres entrepreneurs autonomes vont arrêter de vivre. Il y en a un, hier, qui laissait croire au public que ça lui prendrait deux hommes pour aller faire son entretien et sa réparation dans sa résidence, quand c'est complètement faux. N'importe qui peut le faire.

Mme Blackburn: Mais ce n'est pas ça ma question, M. Lavallée.

M. Lavallée (Jean): Je la comprends, votre question, mais je ne sais pas ce qu'ils vous ont demandé.

Mme Blackburn: M. Lavallée, je ne vous demande pas ce qu'ils m'ont demandé. Ils ont demandé à peu près... Chacun est venu défendre ses intérêts, n'en doutez pas. Alors, ce que je veux juste savoir, c'est dans la...

Une voix: Mesdames, messieurs.

M. Paré (Yves): Juste une question, madame.

Est-ce que, dans le projet de loi, la corporation perd des droits? Les deux projets de loi, 185 et 186.

Mme Blackburn: Dans 186, oui. M. Paré (Yves): Par la régie de...

Mme Blackburn: Ça fait disparaître les privilèges qu'ils avaient, eux, de contrôler, avec la commission et la régie des entreprises, comme tout le monde, la qualification, un certain nombre de choses. À ce qu'on m'a dit, ils avaient sensiblement des fonctions qui s'apparentaient un peu aux corporations professionnelles, des technologies physiques.

M. Lavallée (Jean): C'est très clair à répondre.

Mme Blackburn: Je ne parle pas de l'entrepreneur autonome, je parle juste de la corporation.

M. Lavallée (Jean): Non, non. Moi, la corporation habituellement, quand elle veut nous passer des messages, elle nous le laisse savoir. Je n'ai aucune idée de ce qu'ils veulent. Donc, s'ils ont des dossiers à défendre, qu'ils aillent voir les personnes aux bonnes places.

Mme Blackburn: Non, je voulais juste savoir si vous aviez réfléchi à la question.

M. Paré (Yves): Non.

Mme Blackburn: Comme vous avez lu les projets de loi, j'imagine...

M. Paré (Yves): On n'a pas pris conscience qu'ils perdaient.

Mme Blackburn: ...que vous avez passé là-dessus. J'y reviens donc. Les travaux assujettis, en page 14, vous proposez que la définition du champ d'application inclue les travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et vous revenez, à la page 18, si je ne m'abuse, et là, vous avez... Il m'a semblé qu'il y avait deux approches par rapport à la rénovation construction. Je n'ai pas vraiment la bonne page pour la première référence; la deuxième, ça va, pour la page 14. Ce que vous nous dites, c'est que la rénovation, entretien, réparation, il faudrait les définir pour établir un pourcentage qui ne sera pas de 10 000 $, qui serait de 5000 $, je pense que c'est vous qui nous avez dit ça.

M. Paré (Yves): C'est le mot "mineur".

Mme Blackburn: En même temps, lorsque vous parlez des champs d'application, vous dites: Tout ça devrait être considéré comme des travaux assujettis.

M. Lavallée (Jean): C'est deux choses différentes. L'entretien, réparation mineure, c'est une chose, et le champ d'application, c'est ce qu'on demande qui soit couvert dans la loi.

Mme Blackburn: D'accord. Ce qui n'empêcherait pas pour les travaux de rénovation, réparation.

M. Lavallée (Jean): Absolument pas.

Mme Blackburn: D'accord, ça va.

M. Paré (Yves): Définir le mot "mineur". C'est quoi, "mineur"? Vous savez, vous faites - on pariait de 10 000 $ - pour 10 000 $ de réparation dans un dépanneur du coin, dans le village, est-ce que c'est énorme? Si vous faites 10 000 $ de réparation à la compagnie Kruger, c'est presque pas, ce n'est rien. C'est ça que je veux dire, est-ce qu'on peut déterminer le mot "mineur"? Comment est-ce qu'on peut faire pour arriver à une vraie définition du mot "mineur"?

Mme Blackburn: II y avait quelques organismes qui prétendaient que ça pouvait être par rapport au pourcentage de la valeur, par exemple, de la résidence.

M. Paré (Yves): La résidence, c'est exclu. C'est exclu, ies résidences, parce que entretien, réparation, rénovation mineure, c'est dans le cas commercial, industriel, institutionnel et...

Mme Blackburn: Ah oui! C'est vrai. Vous avez raison. Vous avez tout à fait raison. Vous avez parlé des pratiques des "brokers" qui, finalement, ont entraîné l'abus. On a dépassé largement ce qui devait être entendu, ce qui devait, dans l'esprit, guider les entrepreneurs autonomes dans la nature des travaux qu'Ss devaient entreprendre et on s'est retrouvé, selon ce qu'on me dit, sur des grands travaux - je me suis dit: Ils ont exagéré, mais, quand même, j'aimerais vous entendre - avec une trentaine d'entrepreneurs autonomes sur un même chantier. On fabule ou quoi?

M. Paré (Yves): Pardon, est-ce que...

Mme Blackburn: Est-ce que c'est sérieux, ces avancés?

M. Paré (Yves): C'est très sérieux, madame, c'est très sérieux. Il y a des centres d'achats qui se bâtissent, qui se construisent avec, en majorité, des entrepreneurs autonomes. Quand on parie des "brokers", l'expression "broker", c'est quelqu'un qui n'emploie personne, qui a, je ne sais pas, 175 000 pieds carrés de terrain à vendre, qui construit 250 maisons et qui n'a jamais engagé un gars. L'excavation des caves a été faite par un entrepreneur autonome qu'il a payé en dessous de la table, le coulage du béton, c'est la même chose et le montage des murs... Nommez-en.

Je veux dire, à un moment donné, il faut que ça arrête quelque part et je pense qu'il était clair que, dans l'entretien, réparation domiciliaire, la marche d'escalier qu'on a attendue pendant 15 ans de temps, ça n'avait pas de sens. C'est sorti de l'industrie. Hier, Johnny en parlait, M. Brown, pour se plaindre: Les pauvres consommateurs, il va falloir qu'ils soient avertis, ça va nous prendre deux hommes pour aller réparer leur... C'est du charroyage. Alors, on dit: Parfait, le consommateur ne sera pas pénalisé, au contraire. Je pense que le consommateur va avoir une meilleure construction parce que ce ne sera pas n'importe quel - pour employer l'expression de Maurice - "fly-by-night" qui va aller faire la construction de sa maison.

Mme Blackburn: Vous demandez le retour... Pour ça, ce gouvemement-là m'inquiète lorsqu'on parie de régie parce que vous demandez te retour à la situation qui prévalait au moment où la Commission de la construction pouvait percevoir des amendes, ce qui m'apparaît normal. On m'a fourni ici des cas concrets, les noms ne sont pas au bout, pour lesquels la date d'infraction, le 2 août 1990, l'avis préalable est arrivé le 1er février 1991, la sommation, le 8 juillet 1991 et la comparution, le 21 octobre 1991. Là, on fait juste fixer la date. Alors, vous comprendrez qu'avec un système comme ça, ça n'a aucun sens.

Une voix: Exact.

Mme Blackburn: J'essaie d'imaginer qu'est-ce que ça donnerait à vous et à moi, si on faisait du 100 sur l'autoroute 20, - évidemment, pas du 100 km mais du 100 milles - on se faisait arrêter, comme ça arrive, et si on voyait seulement l'amende arriver, et les points de démérite, deux ans après. Il me semble qu'il y a quelque chose de pas très incitatif. Là-dessus, je dois reconnaître avec vous que s'il y avait des possibilités d'aller dans ce sens-là, je pense que... il ne s'agit pas juste d'augmenter les pénalités. Moi, je continue de maintenir que si on avait appliqué la 53 et qu'on avait conservé la possibilité que les pénalités soient perçues par la Commission, on ne serait pas ici en train de parler de ça et on n'aurait pas eu droit à cette remarque fort pertinente, en début de mémoire. où vous dites: Encore une fois, on est encore là. Je comprends la lassitude.

M. Paré (Yves): Probablement que vos arguments n'ont pas réussi à convaincre le ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.

M. Cherry: Bien, je vais d'abord vous dire merci de vous être déplacés aujourd'hui et d'avoir présenté votre mémoire. Je vous assure que vos représentations occupent une partie de mon attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous apporte beaucoup de travail. C'est pourquoi j'ai demandé à des équipes du ministère de se mettre à l'oeuvre et de donner

un suivi aussitôt que la journée se termine. Donc, encore une fois, merci de votre présence et de votre collaboration.

M. Paré (Yves): Merci.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, ça m'a fait plaisir de vous rencontrer. Comme il s'agit d'une grande association syndicale, mais on le fait pour tous les groupes qui se présentent ici, il y a des commentaires et des propositions qui sont fort pertinents et que, sans doute, on va tenter - évidemment, ça dépend du ministre, on est toujours à l'opposition et on est toujours minoritaire - de faire améliorer les projets de loi qui sont sur la table. Je vous remercie.

M. Lavallée (Jean): Merci, madame. M. Paré (Yves): Merci, madame.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission remercie la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, section de la construction, et appelle à la table des témoins l'Association des entrepreneurs en construction du Québec.

Alors, je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Nous recevons présentement l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. C'est M. Jean Perron qui est le président. J'inciterais M. Perron à nous présenter les gens qui sont avec lui et à passer à la présentation de son mémoire. Je vous remercie.

Association des entrepreneurs en construction du Québec

M. Perron (Jean): Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission, je voudrais d'abord, effectivement, vous présenter les gens qui sont avec moi: à ma droite, M. Reynald Couillard, premier vice-président; à mon extrême gauche, M. Robert Brown, directeur général adjoint, et quelqu'un que probablement la plupart des gens ne connaissent pas, M. Michel Dion, directeur général de l'Association.

Au début de cette intervention, vous me permettrez de vous introduire notre intervention tout bonnement, en vous relatant l'expérience et le vécu d'un employeur de l'industrie de la construction en 1991. Depuis 20 ans, j'oeuvre dans cette industrie et je suis fier d'y oeuvrer. Cependant, ce que je peux constater facilement, au moment où on se parle, c'est que le champ d'application de l'industrie n'est plus ce qu'il était et le travail au noir fait des ravages, en particulier dans une période comme celle qu'on connaît maintenant, une période de récession, une période de ralentissement important dans nos travaux. Moi, comme employeur, j'en souffre énormément. J'en souffre parce que je travaille désormais, en particulier à cause de la présence du travail au noir, dans un milieu où la compétition n'est plus égale. Il ne faudrait surtout pas penser que le travail au noir est quelque chose qui se fait strictement dans un domaine comme le résidentiel ou dans des domaines de plus petite ampleur. On connaît le travail au noir partout à travers l'industrie et dans tous les secteurs d'activité - Reynald pourrait vous en témoigner dans son secteur - et nombre d'employeurs, effectivement, sont confrontés à ce problème. (17 h 30)

Dans un plan d'action que, M. le ministre, vous avez proposé au milieu de l'été, vous nous avez indiqué une volonté qui se concrétise, croyons-nous, effectivement dans le projet de loi 185, lorsque vous parlez des travailleurs autonomes. Nous pensons que votre approche à ce niveau-là constitue un départ intéressant et important au fait d'assainir notre milieu et de faire en sorte que l'industrie de la construction soit quelque chose de viable et d'intéressant et pour les entrepreneurs et pour les employés. La détérioration de notre milieu a fait en sorte qu'au cours des années la partie syndicale en est venue à penser qu'elle devait essayer d'obtenir un revenu garanti. Nous sommes convaincus, et nous l'avons dit à maintes reprises depuis la mise en place de Picard-Sexton, que ce n'est pas par un revenu garanti que nous allons régler le problème et permettre à nos employés qui, malheureusement, dans une année comme celle-ci, sont trop souvent sur le chômage à cause en particulier du travail au noir dans mes sphères d'activité à moi, nous sommes convaincus qu'effectivement, en revisant notre champ d'application, en redonnant à l'industrie de la construction ce qui est ses travaux, en travaillant à réduire le travail au noir qui est devenu un cancer dans notre industrie, en voyant à étaler les travaux d'ordre public d'une façon plus adéquate, nous pourrons permettre à nos employés et à nos entrepreneurs d'atteindre à des revenus raisonnables pour vivre et qu'on n'aura pas besoin, à ce moment-là, de revenu garanti.

Évidemment, lorsque vous nous avez déposé, M. le ministre, un plan d'action, je pense que, du côté des entrepreneurs, des employeurs, nous avons répondu avec un enthousiasme certain. Nous avons répondu avec un enthousiasme certain, entre autres en acceptant de mettre sur pied un programme de formation et de recyclage, de recyclage et de perfectionnement, pour permettre une meilleure employabilité à nos employés et, donc, par ricochet, inévitablement de meilleurs revenus. C'est ce qui a motivé notre action à ce moment-là. Évidemment, dans le

cadre d'un projet de loi comme celui que vous nous présentez, qui devient essentiel pour nous, mais qui est un minimum, parce que nous comprenons malheureusement que vous n'ayez pas pu aller dans un premier temps peut-être plus loin avec le champ d'application, mais nous comprenons qu'il y a des engagements qui ont été pris dans votre plan d'action et que, éventuellement, ça débouchera sur des choses qui amélioreront.

Peut-être un dernier point sur lequel je voudrais revenir avant de laisser la parole à Michel. Nous avons accepté un plan de recyclage et de perfectionnement. Nous croyons qu'il est important de recycler notre main-d'oeuvre pour être plus efficaces, plus productifs. Nous pensons par là que le consommateur, quel qu'il sort, gros ou petit, sera davantage protégé, et nous sommes convaincus, à ce moment-là, que nos employés atteindront à de meilleurs revenus. Cependant, d'aucune façon pour nous il n'est question de verser des sommes à des gens à ne rien faire. Et je veux que ça, ça reste très clair. Sur ce, en fait, ce que je voulais vous livrer, moi, personnellement, comme président de l'association d'employeurs, c'était un message: Faites quelque chose, c'est un début, c'est intéressant, mais tenez votre bout et, s'il vous plaît, dans le cadre en particulier du travailleur autonome, le projet de loi 185 constitue pour nous un minimum. Je laisserai à Michel, à ce moment-ci, de continuer.

M. Dion (Michel): Alors, M. le Président, M. le ministre, madame, messieurs, je n'ai pas l'intention de lire le mémoire. Je pense que vous l'avez tous en main. Il est quand même assez volumineux. Je vais le passer en biais pour attirer votre attention sur les principaux points. Je sais que vous aurez sûrement une belle fin de semaine a passer à lire tous ces documents-là. Il y a aussi, effectivement, le fait que la position de l'AECQ sans surprise se rapproche d'une façon assez intense... en tout cas, une façon assez précise de la position des parties syndicales. C'est assez étrange, effectivement, que l'industrie de la construction patronale et syndicale, aujourd'hui, on a presque une voix unanime pour venir vous dire: Voici, on est devant un projet de loi qui va régler un problème majeur dans l'industrie de la construction. On est presque unanimes, aussi, à vous dire: On souhaiterait ardemment que vous puissez apporter à ce projet de loi là un certain nombre de modifications touchant spécialement leur champ d'application et en modifiant ou en améliorant certaines conditions.

Alors, c'est quand même assez important, je pense, que vous constatiez que tout le monde de l'industrie de la construction, qui est reconnu, en vertu de la Loi sur les relations du travail, pour être actif dans les relations patronales et ouvrières, je pense qu'on est presque tous d'accord pour vous dire: C'est un projet de loi qui est important pour notre industrie. Il n'y a aucune cachette dans notre esprit face au régime de l'entrepreneur autonome. L'entrepreneur autonome, on peut peut-être être surpris de retrouver ça dans le projet 185. Pour nous, il n'y a aucune surprise, c'est une décision légale, législative qui a déjà été prise. Ça fait déjà au-dessus de trois ans - je n'ai pas tellement de mémoire des dates - ça fait déjà au-dessus de trois ans que le statut d'entrepreneur autonome a été accepté comme une norme pour l'industrie de la construction.

Le problème qui s'est présenté, c'est qu'il s'est créé un trou ou un "loophole11 dans ie projet de loi et, effectivement, on a pu utiliser ce trou, cette absence de couverture pour pouvoir passer à côté d'une législation dûment adoptée par un gouvernement. Alors qu'aujourd'hui, vous ne nous présentiez absolument rien de nouveau... Dans le fond, vous ne nous présentez rien de nouveau par le projet de loi. vous venez boucher un trou. Alors, pour nous autres, c'est intéressant, c'est essentiel, il n'y a rien de nouveau là-dedans. On ne peut pas comprendre qu'il y en ait qui se scandalisent de retrouver la notion d'entrepreneur autonome.

Elle est essentielle à notre industrie, je pense, et elle n'est préjudiciable à personne. On est une association d'employeurs, on n'est pas une association d'entrepreneurs, à l'Association, malgré notre nom, ça a l'air étrange. Notre job, la job des employeurs en construction, c'est de faire un commerce avec l'aide de salariés et on pense que l'industrie de la construction ou n'importe quelle autre industrie a ce droit d'un champ d'application et de faire des travaux à l'aide de salariés. Pour nous, toute personne qui peut entrer dans ce système-là d'une façon illégale et venir faire à notre place les travaux, c'est de la concurrence déloyale.

Il faut comprendre qu'on parle pour des employeurs en construction. Alors, la notion d'entrepreneur autonome, à ce moment-là, si elle est galvaudée et utilisée afin de faire une concurrence déloyale envers nos employeurs, c'est évident, à ce moment-là, qu'on est d'accord avec la modification. Par contre, il y en a qui prétendent qu'on sort des gens de l'industrie de la construction. Je dois vous dire qu'à moins qu'on ne comprenne très mal la législation, à l'heure actuelle, il y a un échange qui a été fait. On a légué, on a cédé une partie des activités de notre industrie. En considération du consommateur et en considération de ces gens-là qui avaient quand même un acquis dans l'industrie, on a cédé la réparation, l'entretien et la rénovation dans certaines limites. C'est dans ce système-là que les entrepreneurs autonomes ont une activité. Je pense qu'à toutes fins pratiques, la législation ne fait que confirmer une décision antérieure du gouvernement. Alors, il n'y a rien de tellement aberrant, je pense, dans le projet

de loi, face à cette partie-là du travailleur autonome.

La notion du cautionnement... Vous allez dire que je fais un chevauchement, mais j'y vais surtout sur les principaux points. Excusez-moi, non pas la notion du cautionnement... La notion du représentant désigné nous apparaît, à toutes fins pratiques, quelque chose de presque automatique. Il faut - et ce n'est pas quelque chose de nouveau pour nous autres, à l'AECQ, on l'avait déjà fait dans nos propres statuts - il faut, dans le cas d'une corporation ou d'une société, être capable d'identifier une personne, de désigner une personne qui est une personne théoriquement morale, la corporation ou la société, il faut identifier une personne physique.

Alors, la notion du représentant désigné, qui devient l'identification de la corporation dans une personne physique, c'est une notion qui nous apparaît tout à fait normale et on la trouve justifiée dans le projet de loi. Par contre, il y aura peut-être, un peu plus loin, quelques ajustements. On pense qu'effectivement, en introduisant cette notion-là, on a peut-être oublié de faire une certaine concordance, entre autres avec le régime des avantages sociaux. Or, les conditions d'exercice des représentants désignés, c'est un exercice comme tout l'ensemble de l'industrie à ce moment-là, c'est avec l'aide de salariés qu'ils vont pouvoir être actifs dans l'industrie de la construction. Ça, c'est simplement une clause que nous croyons logique. Nous croyons que la disposition, par contre, devrait être modifiée afin de permettre à l'employeur de travailler occasionnellement seul sur ses propres chantiers. On a mis ça dans notre mémoire. Ça peut apparaître surprenant comme position.

Le problème qu'on rencontre est le suivant et on doit vous avouer honnêtement qu'on n'a pas une solution miracle devant cette situation-là. C'est que l'employeur, avec ses salariés, débute un chantier; au fur et à mesure de l'avancement du chantier, il y a une réduction des travaux qui se fait. Il pourrait arriver, à l'occasion, que l'employeur, ayant une diminution assez importante des travaux, n'ait pas assez d'ouvrage, à ce moment-là, pour donner de l'ouvrage à des salariés. Nous, on pense qu'il y a une certaine logique - je vous répète qu'on n'a pas encore la solution miracle pour ça - pour que l'employeur pourrait, à ce moment-là, dans une certaine mesure, être habile à finir ses travaux. On parle d'occasionnels, on parle de finition de travaux déjà commencés à l'aide de salariés. On vous le dit honnêtement, on n'a pas réellement trouvé la façon de le dire.

Par contre, on peut vous dire ceci. C'est que, si l'inclusion d'une clause semblable dans un texte de loi avait comme conséquence de rouvrir la porte à du travail illégal, à du travail qui serait fait de la même façon que ce qu'on pouvait vivre avant, en dessous de la couverte, à ce moment-là, il vaudrait mieux, effectivement, maintenir la position actuelle que d'avancer dans cette avenue-là.

Les nouveaux statuts pour exécuter les travaux. Évidemment, on est d'accord avec la . création du statut de représentant désigné, je vous l'ai dit, parce que ça devient la personne physique représentant et, dans le cas du représentant désigné d'une corporation ou d'une société d'employeurs, le représentant est dit être un employeur au sens des articles 85.5 et 85.6. La précision de cet article nous amène à nous poser une question. En précisant qu'il n'est employeur qu'à l'égard des articles 85 et 86, nous avons une inquiétude à l'effet qu'il ne serait pas employeur a l'égard des autres articles de la loi. C'est probablement quelque chose qui, je pense, devrait être regardé dans le texte du projet de loi parce que ça pourrait créer un statut ambigu pour le représentant, la personne désignée de l'employeur, ce qui n'est pas le cas pour le représentant désigné pour l'entrepreneur autonome parce que ce cas-là est carrément réglé. La présomption étant très limitative à l'égard des articles 85.5 et 85.6, on a un doute à l'égard de l'ambiguïté que ça pourrait créer à l'égard des autres articles qui touchent la personne désignée de l'employeur.

On recommande effectivement qu'il y ait un ajustement qui soit apporté à l'égard de cette clause de façon à le traiter au même titre que le représentant désigné d'un entrepreneur autonome. De plus, nous croyons que le représentant désigné d'une corporation ou d'une société employeur devrait avoir le choix d'adhérer ou non au régime complémentaire d'avantages sociaux. Pourquoi on demande ça? C'est qu'il existe actuellement, dans la loi, un droit pour l'entrepreneur autonome, effectivement, de ne pas adhérer au régime des avantages sociaux. On n'est pas sûr si la concordance actuellement est suffisante pour permettre au représentant désigné de l'entrepreneur autonome, à ce moment-là, d'avoir le même droit que l'entrepreneur autonome, c'est-à-dire de ne pas être obligé de souscrire au régime complémentaire des avantages sociaux. C'est possiblement une question de concordance qu'il faudrait regarder dans le projet de loi.

La responsabilité des donneurs d'ouvrage. Je dois vous dire qu'on est loin d'être à rencontre de cette décision. Nous, le titulaire, l'engagement de personnes qui sont titulaires de licence, on est absolument favorables à ça. On a vécu, maintes fois, des donneurs d'ouvrage qui ne se sont absolument pas soucié de la réglementation de l'industrie de la construction et qui ont accordé des travaux à des entrepreneurs qui étaient soit pas titulaires des bonnes licences ou même pas titulaires de licence. Je ne voudrais pas me faire poser: Soulignez-nous donc le cas, mais je peux vous dire qu'on a vécu, dans le passé, des cas où c'était la partie gouvememen-

tale qui était comme donneur d'ouvrage et qui a confié des travaux à des entreprises qui n'étaient même pas licenciées. Pour nous, cette exigence que le donneur d'ouvrage doit travailler, et des entrepreneurs licenciés, nous apparaît justifiée.

Le cautionnement qui apparaît également dans le projet de loi, nous sommes d'accord et nous sommes d'accord sur deux points. Il y a eu beaucoup d'argumentation ce matin sur ce point-là et nous sommes d'accord. Le fonds d'Indemnisation qui apparaît dans notre industrie, nous le considérons un peu comme un cautionnement collectif. Mais le problème d'un cautionnement collectif, c'est que les bons paient pour les méchants. Notre fonds d'indemnisation nous coûte actuellement 2 cents l'heure et si, effectivement, on continuait de s'en aller vers des paiements aussi importants qu'on fait actuellement, il pourrait s'avérer absolument insuffisant, ce fonds d'indemnisation-là. On avait déjà, dans le passé, regardé la question et on en était venu à une conclusion qu'un cautionnement, mais un cautionnement individuel...

Le Président (M. Bélanger): M. Dion, je me vois dans l'obligation de vous arrêter, il y a un appel pour un vote en Chambre. Alors, nous reviendrons dans probablement 10 ou 15 minutes. On reprendra à la fin.

M. Dion: C'est excellent, on va pouvoir...

Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 17 h 46)

(Reprise à 18 heures)

Le Président (M. Bélanger): Je demande à tout de monde de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît. Bien. Il y a plus ou moins 12 minutes qui ont été perdues à cause du vote. Alors, est-ce qu'on a consentement pour prolonger nos travaux de 10 à 12 minutes pour finir l'audition du groupe de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec?

M. Cherry: Vous avez ma collaboration, M. le Président, pour prolonger...

Le Président (M. Bélanger): Consentement? On prolongerait de 10 minutes.

Mme Blackburn: Oui, oui, tout à fait.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Douze minutes, en réalité. Alors, ceci étant dit, M. Dion, nous vous invitons à continuer votre mémoire. On s'excuse, mais ce sont les aléas du métier. Ici, on s'expose à ça.

M. Dion: Pour autant que vous ayez bien voté, pas de problème.

Des voix: Ha, ha, ha! Une voix:...

M. Dion: Excusez, madame, je ne vous ai pas entendue.

Une voix: On a tous bien voté.

M. Dion: Parfait. Alors, je pense qu'au moment où on s'est laissés j'étais en train de finir sur le cautionnement pour vous dire que le cautionnement, pour nous autres, ça devenait une mesure qui était très très souhaitée parce qu'on regarde aller le fonds d'indemnisation, on regarde aller l'industrie de la construction et on est excessivement inquiets sur l'envergure que pourraient prendre les cotisations au fonds d'indemnisation si on ne trouve pas un moyen. Et le danger, actuellement, c'est que le fonds d'indemnisation nous apparaît comme une espèce de cautionnement collectif où les bons employeurs sont susceptibles de payer pour les moins bons employeurs.

Alors, c'est sûr, pour nous autres, qu'un système de cautionnement... Et j'insiste sur le mot "individuel" et non pas une espèce de système de cautionnement qui pourrait être collectif. Un système de cautionnement qui serait individuel. Les gens prendraient chacun leurs responsabilités. Je pense qu'il peut y avoir des responsabilités au niveau de certaines entreprises, à ce moment-là, et ce serait intéressant qu'à ce moment-là eHes soient obligées de fournir un cautionnement pour se remettre dans le droit chemin.

Alors, le mot: "individuel", pour nous autres, signifie ceci: c'est qu'il faudrait peut-être penser, au projet de loi, à faire un amendement ou à apporter, en tout cas, une précision pour s'assurer que les gens vont le faire. Il ne faudrait pas se retrouver éventuellement avec un système ou un groupement où quelque organisation se permettrait de fournir le cautionnement au nom d'un groupe, au nom des membres. Sans ça, à ce moment-là, on n'atteindrait pas du tout le but visé. Le but visé du cautionnement et du cautionnement individuel, c'est de responsabiliser celui qui est en faute. Alors, je pense que ça devrait réellement être un cautionnement individuel.

Suite au cautionnement, je vais maintenant vous parier de la responsabilité des employeurs dans l'omission du paiement du prélèvement des cotisations. On n'a pas objection - et je pense qu'on l'a démontré avec le fonds d'indemnisation - à être responsables, à titre les mandataires des sommes qu'on retient pour les fins de la Commission, mais nous considérons que la mesure est abusive à l'égard des cotisations. Des

cotisations, à ce moment-là, nous apparaissent d'autant plus difficiles à être responsables parce que les syndicats modifient régulièrement leur taux de cotisation.

Nous croyons que ce serait une mesure qui pourrait être envisageable si, à un moment donné, on se retrouvait avec la solution qu'on avait déjà proposée: une modification possible par année des cotisations et un taux de cotisation uniforme. Mais je dois vous dire qu'actuellement, là, il y a autant de cotisations qu'il y a de syndicats, multiplié par 23 métiers. Alors, c'est réellement quelque chose qui nous apparaît aberrant que de nous tenir responsables des cotisations au même niveau qu'on nous tiendrait responsables du prélèvement de la Commission. Alors on requiert, à ce moment-là, afin d'amender le texte du projet de loi, que l'employeur soit tenu, d'accord, au paiement des prélèvements mais, quant aux cotisations, d'éliminer ça du texte.

L'augmentation des amendes. Je vais passer très vite sur l'augmentation des amendes. Je dois vous dire que des amendes avec un minimum et un maximum, évidemment, ça peut paraître désuet, à l'heure actuelle. Cependant, il y a ceci, dans le projet de loi. C'est qu'il y a des amendes...

Le Président (M. Bordeleau): M. Dion... M. Dion: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): ...le temps qui est alloué est maintenant terminé. Il vous faut combien de temps, à peu près, pour terminer votre...

M. Dion: Je pensais que vous m'accordiez les 12 minutes de tantôt.

Le Président (M. Bordeleau): Non, on retarde de 12 minutes...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bordeleau): ...la fin de la session.

M. Dion: M. le Président, j'imagine qu'en dedans de 5 minutes, là, je devrais être bon pour passer à travers.

Le Président (M. Bordeleau): Consentement? Une voix: Oui, consentement.

Le Président (M. Bordeleau): Parfait! Vous pouvez continuer pour 5 minutes.

M. Dion: Or, sur l'augmentation des amendes... On n'a pas de difficulté à accepter une certaine augmentation des amendes mais on trouve quand même que, dans certains cas, les amendes sont exagérées, en tout cas, elles sont énormes. Et je vous donne le cas d'un bonhomme qui est "poigne" sur un chantier de construction - excusez l'expression "poigne". Il a une carte de compétence dans sa poche, le bonhomme, mais il est en train de faire des travaux qui ne sont pas nécessairement relatifs à cette carte de compétence. Je comprends que la personne est peut-être en infraction, mais c'est loin d'être le même cas qu'une personne qui se retrouve sur un chantier sans aucune carte de compétence.

Je pense que le projet de loi devra tenir compte de ça. Et ça va revenir aussi, à un autre niveau, un peu plus loin, là, un peu la même philosophie. C'est qu'il y a celui qui est réellement en marge totalement illégalement dans l'industrie et il y a celui qui est, d'une certaine façon, illégal, mais ce n'est pas le même style ou la même envergure d'illégalité. Je pense qu'on devrait tenir compte de ça. Alors, quand on arrive à des amendes pour ne pas avoir le bon certificat, je pense qu'on devrait y aller avec une pédale un peu plus douce.

Dans le cas du pénal, M. le Président, je me sens excessivement à l'aise de vous dire: Ça fait longtemps qu'on pense que ça n'aurait jamais dû nous être enlevé, le pénal. Je pense que toutes les parties se sont accordées pour venir vous dire: C'est aberrant qu'une organisation qui doit discipliner son monde n'ait pas le droit de faire ses poursuites puis avoir le fruit de ses amendes. Ça existe à peu près partout. N'importe quelle corporation professionnelle discipline ses membres et elle a droit à ses amendes. Or, je ne comprends pas que nous, dans l'industrie de la construction, on constate des infractions, on fait des gros rapports, on fait des enquêtes, on envoie ça... Puis j'écoutais... Je pense que c'est Mme Blackburn qui donnait toute une espèce d'historique d'un dossier, comment ça peut cheminer. C'est une réalité, il y a des choses comme ça qui se passent. Or, je pense que ce pénal-là - les poursuites pénales - ça doit revenir à l'industrie de la construction, ça doit revenir à la Commission, d'autant plus que c'était une source importante de financement pour les activités de l'industrie.

Je poserai - et je pose - la question au ministre, s'il a une seconde pour m'écouter. Comme on a tous dit qu'on est d'accord, M. le ministre, on aimerait savoir, je pense, séance tenante, ce que vous avez envie de faire avec ça. Je ne vois pas comment vous pourriez refuser a l'industrie de pouvoir récupérer son pénal ou ses amendes. Je suppose que vous prendrez le temps de me répondre tantôt.

Infraction concernant les certificats de compétence. Je vous ai dit... Il y a une jonction, dans deux circonstances, où les amendes d'une illégalité plus grande que l'autre devraient être prises en compte.

Je passe également à la suspension du certificat de compétence. C'est le même cas un peu que les amendes. On suspend le certificat à quelqu'un qui a fait quelque chose qui est réellement illégal. Mais quand c'est une personne qui exerce un métier sans détenir le bon certificat, je trouve que c'est peut-être exagéré de lui enlever son certificat, à ce moment-là, en tout cas, de la même manière que celui qui ferait une infraction plus grave.

La communication des renseignements. Je dois vous dire qu'on n'a aucun commentaire, on est absolument d'accord. On pense même que, par l'entremise de la loi 186, vous devriez faire la jonction avec la Régie des entrepreneurs en construction ou quel que soit l'organisme qui la remplacera.

Quant à la partie des choses qu'on aurait voulu voir dans le projet, je vais vous souligner... Il y a au moins un point très majeur qu'on trouve aberrant de ne pas retrouver dans le projet de loi. N'oubliez pas la déclaration, au départ, de notre président qui dit: On est dans une industrie où on a perdu notre champ d'application, où on a des heures de travail qui sont perdues. Les travailleurs sont en situation difficile parce qu'ils ont moins de sécurité d'emploi. Ils se plaignent de ne pas avoir suffisamment de revenus. La solution pour nous autres, effectivement, c'est quoi, le bobo? Donc, il y a un remède. Le remède, c'est d'éliminer le travail au noir, mais c'est aussi de récupérer nos heures dans l'industrie de la construction. C'est absolument aberrant, à tous les amendements qu'on a pu voir dans le passé au projet de loi, on perdait un bout de notre champ d'application. Par l'entremise des décisions qui peuvent se rendre au nh/eau du commissaire, on perd une partie de nos juridictions. On perd notre activité comme employeur, puis on perd l'activité, c'est-à-dire le gain ou la sécurité d'emploi que nos travailleurs pourraient gagner avec cette activité-là.

Je pense, M. le ministre, MM. du gouvernement, que c'est encore un point où toute l'industrie de la construction est absolument d'accord sur la récupération de notre champ d'application. Je pense que ça aurait dû faire partie du projet de loi et, si c'est encore possible de l'inclure, je pense que vous devriez y donner suite. Je pense que c'est essentiel si on veut ramener, dans l'industrie de la construction, une sécurité d'emploi aux travailleurs et aux employeurs de l'industrie.

Évidemment, on aurait pu parler de la planification, de la politique gouvernementale afin d'établir des stratégies de planification. On aurait pu parler de stimulation des investissements dans l'industrie, toutes des choses dont a parlé le rapport Picard et je pense qu'on aurait pu souhaiter que ça se retrouve effectivement dans ce projet de loi. Mais, M. le ministre, il y a un point...

Le Président (M. Bordeleau): Je vous demanderais de conclure, M. Dion, s'il vous plaît.

M. Dion: Je vais dire comme vous dites en Chambre: Je conclus. Alors, le crédit d'impôt. Je pense que le crédit d'impôt, pour nous autres, est essentiel, M. le ministre. C'est une mesure qui faisait partie, je pense, des choses qu'on discutait dans le plan d'action et on devrait effectivement s'attarder à essayer de régler le problème de l'industrie de la construction en réglant la possibilité d'obtenir les crédits d'impôt face à l'effort énorme que fait l'industrie de la construction pour la formation professionnelle de nos travailleurs en recyclage et en perfectionnement.

J'aurais eu tellement d'autres choses à vous dire, on ne vous voit pas assez souvent, mats je vais attendre. Peut-être que par les questions je vais réussir à passer le restant.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Dion. Nous allons aller maintenant pour deux périodes de 15 minutes au gouvernement et à l'Opposition. Alors, M. le ministre.

M. Cherry: M. le Président, merci beaucoup. Dans un premier temps, avant que je dirige mes questions à M. Dion, dans l'introduction qu'a faite le président, évidemment, il est le président de l'AECQ, mais j'ai senti - c'est la perception que j'ai eue - qu'il parlait, lui, de son entreprise, de ses difficultés par rapport à ta situation de travailleurs autonomes qui se font gruger tout le temps. Alors, dans un premier temps, M. le président, je m'adresserais à vous. Il me semble que ça ferait du bien à cette commission de vous entendre vous, comme entrepreneur, dans votre industrie propre, ce que vous vivez par rapport à la situation à l'heure actuelle.

M. Perron (Jean): M. le ministre, ce que je vis essentiellement, et ce que nombre de mes confrères vivent, c'est le fait qu'on se retrouve dans un milieu où le travail au noir fait qu'on se retrouve vis-à-vis d'une compétition déloyale, qui a pour effet de faire que moi, comme entrepreneur, je suis obligé de laisser de la main-d'?uvre qui travaille exclusivement pour moi. Et, au moment où je vous parie, je parie de 50 employés au moins qui ont dû être sur le chômage une grande partie de l'année 1991 parce que ce sont des gens qui, en travaillant au noir sous quelque forme - permettez-moi de ne pas vous définir les formes - en tricotant à travers la réglementation, ont pu s'approprier de contrats qu'autrement les véritables entrepreneurs auraient pu faire.

Deux choses à ce moment-là. Le véritable entrepreneur, ça lui permet de construire effectivement son entreprise sur des bases solides et de passer à travers une récession et ça permet aux véritables employés de l'industrie de la

construction, mes employés, dans mon cas, 50 au moment où je vous parle, de gagner leur pain. Le travail au noir, la catastrophe du travail au noir, M. le ministre, c'est ça.

M. Cherry: Merci. Ma première question, pour M. Dion. Cautionnement pour garantir le paiement des salaires. Pouvez-vous, pour le bénéfice de cette commission, nous faire la différence entre le cautionnement individuel et le cautionnement collectif, les avantages et les inconvénients, s'il vous plaît?

M. Dion: Dans un système comme celui qui existe à l'heure actuelle, le fonds d'indemnisation, tous les employeurs paient 2 cents l'heure; l'argent s'en va dans un fonds global et, effectivement, lorsqu'il y a des pertes, des faillites ou des chèques non payés, etc., on pige dans ce fonds-là et on paie effectivement un certain ensemble de choses qui sont dues aux salariés et qui n'ont pas été payées.

C'est l'ensemble des employeurs qui fournit de l'argent dans ce fonds-là et, au fur et à mesure des négociations et des années, le fonds a été augmenté en responsabilités et il a été augmenté aussi en dollars, en cents perceptibles. Mais on se rend compte que si on continue, effectivement, dans le système actuel, il est possible que ce fonds-là devienne déficitaire, incapable de remplir ses obligations et qu'on soit obligés de mettre de l'argent dedans.

La raison, c'est assez simple. C'est que, malheureusement ou heureusement, - je dirai surtout malheureusement - à l'heure actuelle, on est dans une période où les perceptions, dans le fond, sont plus grandes que les entrées. Je dirais heureusement, entre parenthèses, ça nous permet d'identifier le problème et ça nous permet d'être d'accord avec votre système de cautionnement. Ce système de cautionnement ferait responsabiliser les gens qui sont ceux qui vont chercher ou qui obligent à aller chercher de l'argent dans le fonds de cautionnement.

Et le problème, c'est que le fonds étant collectif, à l'heure actuelle, il y a des bons employeurs qui passent leur temps à mettre 2 cents dedans puis il y a des mauvais employeurs ou il y a des mauvaises créances qui sont perçues de ce fonds-là avec les sommes d'argent des bons employeurs. On dit, nous autres: S'il y a un cautionnement et il est individuel et non pas fourni d'une façon collective par un groupement au nom de ses membres ou bien quelque chose comme ça, si c'est un cautionnement individuel, chacun va devenir responsable de ses choses et on va pouvoir, à ce moment-là, réellement bâtir des professionnels de l'industrie de la construction.

M. Cherry: O. K. L'encadrement législatif que nous prévoyons pour l'entrepreneur autonome, est-ce que, d'après vous, ça causerait un préju- dice au consommateur en ce qui a trait au coût de la construction?

M. Dion: Non, pas du tout. M. le ministre, il faut comprendre ceci. C'est que sur la partie... Ce n'est rien de nouveau, je vous l'ai dit tantôt, c'est simplement boucher un trou qui existait. Le consommateur, à l'heure actuelle, pour les fins de ces services de réparation, rénovation, entretien, a le droit... il peut aller chercher les services de ce qu'on appelle un entrepreneur autonome, un artisan, n'importe quoi. Ce n'est pas couvert à l'heure actuelle. Donc, on ne touche pas à cette partie-là, on ne change aucun des droits et je pense que le consommateur y trouve son bénéfice. C'est pour ça qu'on a consenti à sortir ce champ d'activité là de notre industrie. (18 h 15)

Au niveau de l'entrepreneur industrie de la construction neuve, que ce soit un entrepreneur autonome qui aille faire les travaux en respectant la réglementation, c'est-à-dire en payant le taux de salaire du décret, ou que ce soit un salarié de la construction qui s'en aille faire les travaux en recevant les conditions du décret, ça va coûter le même prix. Il n'y a pas quelqu'un qui va me dire que ça va coûter moins cher parce que c'est un entrepreneur autonome, ce n'est pas vrai. L'entrepreneur autonome, s'il respecte les conditions de la législation, va charger effectivement les taux de salaire qui apparaissent au décret. Il n'y a aucun préjudice au consommateur, c'est strictement faux.

M. Cherry: Concernant la formation, M. Dion, j'ai eu des représentations qui m'indiquent certaines inquiétudes sur l'arrimage de la formation, entente avec les parties avec le mandat de la formation qu'on vit à la CCQ. Pouvez-vous l'aborder, s'il vous plaît, comme sujet?

M. Dion: Écoutez, vous ne voulez pas que je vous parle de subventions, M. le ministre, ce n'est sûrement pas de ça que vous voulez que je vous parle. Je pense que le mandat de la formation qu'on a, au niveau de la Commission - et on en parle, plus loin dans notre mémoire, je n'ai pas eu le temps de m'y attarder - je pense que l'objectif de remettre entre les mains des parties leur dossier de formation puis assurer la formation de leur main-d'oeuvre... Excellent! On est absolument d'accord. On n'a pas l'argent pour le faire et on n'a pas les moyens pour le faire, à l'heure actuelle. Je parle des moyens d'écoles et de professeurs. C'est sûr que la collaboration par subventions... Vous nous avez envoyé un mandat public; envoyez-nous l'argent et, à ce moment-là, on sera en mesure de remplir ce mandat-là. C'est sûr que ce n'est pas un mandat qui est facile. C'est sûr que quand on va arriver dans l'établissement des ratios compagnons-apprentis et les juridictions de métiers, les

parties vont avoir de la misère. Mais je pense qu'on est capables de faire nos armes et on est capables d'y arriver. Il faut avoir les moyens pour y arriver. Je pense que vous devez renforcer nos moyens et si vous les trouvez, les façons de renforcer nos moyens, dans votre projet de loi, vous devez le faire. Peut-être qu'on va avoir un peu de difficulté à passer à travers un établissement de ratios compagnons-apprentis qui sera basé sur de la formation et non pas sur du contingentement. Peut-être qu'on va avoir de la misère à passer à travers ça. Mais je pense que, finalement, on y arrivera et il faut avoir les armes pour le faire. Moi, j'ai confiance qu'on va y arriver, au bout. Envoyez-nous l'argent, par exemple, M. le ministre.

M. Cherry: Et une dernière question... M. Dion: Oui.

M. Cherry: ...concernant le pénal. Dans votre mémoire, vous nous indiquez que l'on retourne à la CCQ la gestion des poursuites pénales. Puis je comprends les fondements qui vous animent.

Au deuxième paragraphe de la page 30, ça me laisse un petit peu perplexe lorsque l'on indique: "La latitude sur la poursuite ou non, en cas d'infraction". Je vous demanderais d'élaborer sur ce sujet-là.

M. Dion: II faut comprendre ceci, M. le ministre. Il faut comprendre qu'il semble qu'une des raisons qui a pu justifier d'enlever ça, c'est l'espèce de latitude qu'on avait de jouer avec les causes. Moi, je pense qu'effectivement, dans l'application journalière de poursuites pénales, il doit s'exercer une espèce de jugement. Je vais vous donner un exemple. Un employeur est pris pour des travaux où son sous-traitant n'a pas fini de payer les salaires. Il fait payer par le fonds d'indemnisation. Il est responsable. Il paie 300 000 $. Pour finir ses travaux, il engage la main-d'oeuvre du sous-traitant qui a fait faillite et là, il les met au travail. Il ne prend pas le temps de "checker" s'il y a un gars qui a sa carte. Puis, dans les cinq gars qu'il avait engagés après avoir payé 300 000 $, il y a un gars qui n'a pas sa carte. Il reçoit une poursuite pour 575 $ - ou je ne sais pas trop, quelque chose de ce genre-là - pour non-détention d'un certificat de compétence. Je peux vous dire, là, à mon goût à moi, qu'il y avait une question de jugement, à savoir... Écoute, il vient déjà d'assumer la dette du sous-traitant pour 300 000 $, on a toutes les preuves ou les raisons de croire qu'il était de bonne foi et qu'il n'a pas essayé de fourrer le système. Il y a peut-être des cas de même où le jugement de la Commission, qui est très proche de notre industrie, qui est très présente, là... Moi, je pense que des cas de même, où on peut juger des situations, des circonstances, on peut s'apercevoir, peut-être, qu'il y a eu quatre infractions pour la même affaire, ce n'est peut-être pas justifié ou quelque chose comme ça.

Je pense qu'il n'y a jamais eu d'abus. Puis, je ne veux pas me porter garant de la Commission de la construction mais je suis convaincu qu'actuellement on peut dire facilement qu'il n'y a jamais eu d'abus dans notre industrie vis-à-vis de notre autodiscipline. Jamais!

M. Cherry: Merci, ça termine ma période, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Chicoutimi, vous avez 15 minutes.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, M. Perron, messieurs, vous avez, je pense, assez clairement exprimé votre opinion quant au travail au noir. Vous avez quand même fait une déclaration - ensuite, je vous poserai une série de questions - qui m'a un peu surprise. Vous avez dit: Même si l'entrepreneur ne détient pas le certificat d'entrepreneur conforme aux travaux qu'il va réaliser, c'est moins grave un peu. Mais je pense au cas - parce qu'il est récent - de Canadian Asbestos qui n'avait pas le bon permis parce qu'il est sur le verre plat alors qu'il fait, encore actuellement, de l'enlèvement d'amiante et ça fait partie des travaux assujettis selon le jugement qui a été rendu, il me semble que, là, il y a un cas précis où ça peut pénaliser lourdement toute l'entreprise parce que, lui, ça lui a permis, parce qu'il fonctionne sous licence du verre plat, d'embaucher des gens qui lui coûtent un peu moins cher que s'il avait embauché selon le code de la construction par rapport à des travaux de rénovation majeurs. Alors, j'ai été surprise un peu quand vous avez dit ça tout à l'heure.

M. Dion: Je pense que si vous l'avez évalué en fonction de l'exemple que vous donnez là, vous avez raison d'être surprise. Je pense que ce n'est pas ça qu'on voulait soulever. Je voulais soulever, exemple, ceci. Il peut arriver qu'un bonhomme est en train de faire de la finition de ciment, de mettre du ciment pour faire un perron de porte; il a une barre de fer à poser là-dedans. Effectivement, il va être arrêté parce qu'il est en train de poser une barre de fer, infraction. Il a un certificat, il travaille légalement, normalement, mais là, occasionnellement... Ce qu'on voulait dire, c'est qu'il y a une question de jugement et de faire une règle aussi étanche que ça, c'est dangereux.

On est contre le "cheap labour". Le but de ma représentation là-dessus, ce n'était pas d'essayer de permettre de faire du "cheap labor" - excusez l'expression - du travail à bon marché.

Mme Blackburn: II y a 19 000 employeurs et vous nous dites que 85 % d'entre eux - ça doit donner 16 500 à peu près - ont 5 salariés et moins. Donc, en période creuse, il peut arriver qu'il y ait 16 500 entrepreneurs qui veuillent terminer seuls un travail sur les chantiers de la construction. C'est à peu près ça. Parce que vous dites: Selon la circonstance, l'économie et tout ça...

M. Dion: Le cheminement est bien, oui.

Mme Blackburn: Mais comment est-ce qu'on peut contrôler ça pour éviter les abus qu'on a connus? Je sais que vous n'avez pas trouvé la formule, mais...

M. Dion: Écoutez, on avait envie de suggérer au législateur de mettre les mots "que l'employeur qui travaille sur son chantier avec ses salariés", ce qui est permis en vertu du décret, en vertu de... On avait envie de suggérer qu'il pourrait terminer des travaux qu'il a commencés avec ses salariés. Là, on s'est dit: II peut quand même aussi là y avoir des abus. Je vais vous dire honnêtement, on pense que ça pourrait être une solution: terminer des travaux débutés ou compléter des travaux. Mais on ne peut pas vous dire qu'on a une formule étanche. On est prêts à toute suggestion, c'est sûr. Mais je peux vous dire qu'il y a un petit problème. Quand je dis... ce n'est pas parce qu'il n'est pas important, mais il ne faut pas extensionner ça ad vitam aeternam. Par exemple, je peux prendre mon président, il peut être en train de finir, sur son chantier - s'il est un employeur il travaille avec ses hommes - tout seul, alors qu'il a encore des salariés actifs sur un autre chantier. Le problème ne se présenterait même pas à ce moment-là.

Mme Blackburn: Vous avez abondamment parlé des effets négatifs et nocifs du recours au travail au noir. On estime que c'est 96 000 000 d'heures qui seraient travaillées au noir...

M. Dion: Non. Il y a 96 000 000 d'heures travaillées dans la construction, et on pense qu'il y en a à peu près, au-dessus de ça, 25 000 000 à 30 000 000 qui sont travaillées au noir.

Mme Blackburn: En 1989, c'était 110 000 000 d'heures.

M. Dion: 110 000 000 d'heures travaillées dans l'industrie, déclarées...

Mme Blackburn: Et entre 25 % et 40 %... Vous dites 30 %, vous.

M. Dion: Oui, mais j'avais envie de vous dire que vous alliez lire dans le texte un peu comme de la contrebande, il faut la "poigner" pour savoir ce que c'est.

Mme Blackburn: D'accord. Alors 30 000 000 d'heures, ça veut 1000 heures par personne, ça nous donnerait 30 000 travailleurs de plus. Ça diminuerait le chômage de 30 000.

M. Dion: En tout cas, je ne veux pas dire que je ne suis pas d'accord avec vous parce que j'aime beaucoup ia façon dont vous travaillez l'exemple, sauf de vous dire que, nous, on n'est pas nécessairement d'accord que les travailleurs de la construction font tous 1000 heures dans l'année. C'est une moyenne mathématique travaillée dans l'industrie. Est-ce que ça créerait 15 000 nouveaux emplois, 20 000 nouveaux emplois? Chose qui est sûre, madame, c'est que ça créerait énormément d'emplois et que ça éviterait bien du chômage à bien du monde et, ici, on peut présumer au-dessus de 15 000.

Mme Blackburn: Je pense que ça ne créerait pas d'emploi, ça diminuerait le nombre de chômeurs. Vous comprenez, là, je veux dire...

M. Dion: Bon, O.K. Je vous le donne.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Les emplois, ils sont exclus.

M. Dion: Mais est-ce que je peux vous conseiller en vous disant que ça vous donnerait aussi de l'argent, au gouvernement, parce que vous récupéreriez les impôts?

Mme Blackburn: C'est ça. Alors, je me permets de le dire parce que j'ai un tableau ici qui est particulièrement intéressant à cet égard. Il est fondé sur 25 % d'heures qui seraient travaillées au noir. Ça représenterait, juste pour la Régie de l'assurance-maladie du Québec, 27 000 000 $ de plus qui entreraient dans les coffres de la Régie. Ça représenterait, à l'administration de la CCQ, 12 000 000 $ de plus; les fonds d'indemnisation de faillite, ça va ressembler à 700 000 $; les avantages sociaux, là, vous allez à peu près à 75 000 000 $. La Régie des rentes du Québec, 8 000 000 $; la CSST, 63 000 000 $. Il faudrait que je dise ça à la CSST, ça leur ferait plaisir, sûrement. Et ça, ça ne tient pas compte des impôts qui ne sont pas payés. On a des problèmes de caisse parce que ce gouvernement n'a pas pris ses responsabilités en 1986 et qu'il n'a pas appliqué la loi 53 qui aurait permis de contrôler un peu le travail au noir. Mais sans que ça soit dit, c'était comme implicite. Le travail au noir, ça permettait de faire construire à meilleur coût, c'était ce qu'on disait, sans réaliser les pertes énormes qui coûtent beaucoup plus cher que les économies réalisées. Et moi, je trouve que c'est une catastrophe, ça, parce que les gens qui travail-

lent au noir, on devra payer leur rente, tantôt, on devra continuer à les payer s'ils sont malades, on devra... Et ça, c'est inacceptable. Alors, là-dessus, je vous suis tout à fait. Oui.

M. Dion: Là-dessus, Mme Blackburn, j'ajouterais ceci. C'est que si, éventuellement, les gens qui font des heures de travail dans l'industrie de la construction versaient des sommes d'argent aux avantages sociaux, entre autres aux bénéfices d'assurances, l'argent qui s'accumulerait là éviterait peut-être d'augmenter, à chaque négociation, les sommes d'argent qu'on doit verser là pour accorder les bénéfices que les gens demandent et aussi, peut-être, par profit, à ce moment-là, permettraient à des gens d'aller acquérir de meilleures rentes, etc.

Par contre, il y a une chose que je dois vous dire, c'est qu'il y a une partie de ce travail au noir, qu'on a noté, nous, dans le temps, qui est comme, je dirais, historique. Il y en a peut-être une partie qu'on aura, effectivement, en difficulté. Mais il ne faut pas penser, non plus, que le fait de permettre ou de laisser aller le travail au noir a fait que, par exemple, dans la construction résidentielle, ça a coûté moins cher. Je n'ai pas d'exemple - et je ne suis pas un spécialiste dans la finance des maisons - que les maisons se vendent moins cher parce qu'elles sont faites au noir; elles se vendent le même prix.

Mme Blackburn: Ce que j'ai demandé et je ne l'ai pas obtenu - peut-être l'aviez-vous, vous - c'est la proportion du coût d'une maison qui est représentée par les salaires. Parce que, avant, on disait quasiment que c'était 50 %-50 % mais là, on sait qu'avec la mécanisation, tout ça, c'est quoi? 15 % des coûts d'une construction d'une résidence?

M. Oion: Écoutez, on varie, nous, dans les explications qu'on nous donne, entre 30 % et 50 % de coût de main-d'oeuvre.

Mme Blackburn: ...de main-d'oeuvre.

M. Dion: Et c'est environ 1000 heures. Ça varie entre 800 et 1000 heures. Probablement que ça dépend de l'utilisation des techniques, etc., mais ça peut varier. J'espère que je ne suis pas en train de me fourvoyer mais je pense que c'est... Nous, on travaille habituellement, quand on fait des recherches économiques, entre 800 et 1000 heures.

Mme Blackburn: 800 et 1000 heures pour construire une résidence.

M. Dion: C'est ça, c'est le tiers, dans le fond.

Mme Blackburn: ...d'une valeur moyenne...

C'est le tiers, 33 %.

M. Dion: C'est à peu près le tiers.

Mme Blackburn: Le travail au noir, par rapport à une hypothèse très conservatrice, on estime que ça représenterait une masse salariale de 800 000 000 $. Il faudrait dire ça au ministre des Finances. Lui aussi, il serait content.

J'ai une dernière question. Je dois vous dire que votre mémoire m'a étonnée par ce que je n'y al pas trouvé, c'est-à-dire ce qu'on retrouvait dans la loi 53 et toute la philosophie qui guidait le projet de loi 53 quant à la responsabilisation des entrepreneurs. Et cette responsabilisation était assumée par le biais de la Commission du bâtiment où étaient largement représentés les entrepreneurs. Et cette Commission gérait entièrement les activités ou presque toutes les activités, à l'exception de quelques-unes qui ont été ajoutées ici, qu'on retrouve actuellement dans la Régie. À la différence que la Régie, c'est cinq personnes nommées par le gouvernement et les entrepreneurs et les syndicats se retrouvent relégués à un petit comité - un petit! H est grand parce qu'il y a plusieurs personnes, là, mais - a un comité consultatif à une régie.

Alors, je dois vous dire que ça, moi, ça m'a étonnée et je me demandais si c'est parce que ça ne vous intéressait pas, vous aimez mieux laisser la job au ministre, vous aimez mieux leur laisser une caisse dans laquelle ils puissent puiser tant qu'ils voudront et ils vont fixer toutes les tarifications, les taux de cotisation. Ils ne le feront pas tout de suite comme ça, mais en cas de besoin, ça va leur faire la caisse pour aller puiser, comme ils l'ont fait pour la Régie de I assurance-automobile. Et ça m'étonne, vous, hommes d'affaires, que vous ne soyez pas revenus avec cette question.

M. Dion: Mme Blackburn, ce sont mes cheveux blancs qui nous ont amenés à faire ça de cette façon-là. C'est que l'AECQ a un mandat de relations de travail et il y a quand même, dans notre mémoire, certains commentaires. Dans notre esprit à nous, notre responsabilité devant la commission, ce qu'on voulait remplir et on veut le faire adéquatement, c'était de venir vous parler des problèmes de relations de travail, de champs d'application, de travail au noir, etc.

La loi 186 est une loi qui touche plutôt la responsabilité des autres associations patronales. Ça ne veut pas dire qu'on n'a pas une vue d'ensemble des choses qui devraient être faites.

Je dois vous dire qu'on est, en bonne partie, réellement d'accord à ce que les gens puissent eux autres mêmes s'autodiscipliner. Et ce que je veux dire par là, c'est qu'une régie gouvernementale où on ne saurait pas qui la composerait, cette régie-là, ça nous apparaît difficile pour l'industrie de la construction. Nous, on favoriserait peut-être que le gouvernement

révise le 186, à ce moment-là, puis au moins assure les parties d'une représentation d'employeurs sur la régie qui seraient recommandés par les parties de l'industrie. S'il y a cinq représentants, au moins avoir trois bonshommes de l'industrie de la construction, employeurs, pour aller mener leur corporation parce que c'est, dans le fond, une corporation qu'on essaie de mettre de l'avant.

On aurait peut-être, si j'avais eu plus de temps, élaboré sur certains points qui sont dans le projet de loi 186 et qui vont favoriser une saine industrie, des bons employeurs qui vont nous permettre, à ce moment-là, de créer des bons emplois pour les bons travailleurs, et tout le jeu du travail au noir, les municipalités. Je pense que c'est déjà un petit peu dit, là, dans notre mémoire. On s'est - avec beaucoup de prudence, vous l'admettrez - contenté de parler de notre mandat.

Mme Blackburn: Oui, je comprends que vous vous soyez limités, comme étant le porte-parole, à la table de négociation, des employeurs, mais j'aimerais, si vous avez un moment ou si vous souhaitez le faire, que vous examiniez ce que pourraient représenter les modifications qui sont introduites dans les articles 65, 66 et 67 quant aux possibilités pour un État d'aller chercher des revenus en période difficile. Parce que - je veux essayer de me réexpliquer - la Commission, essentiellement, donnait la responsabilité aux entrepreneurs et aux syndicats de gérer toute cette activité, y compris les plans de garantie. Alors, l'avantage d'une telle disposition, c'est que les entrepreneurs eux-mêmes n'avaient pas intérêt à faire de la surenchère dans la tarification, les frais d'inscription, la cotisation, toutes mesures qui, finalement, finissent par se répercuter sur les coûts généraux de la construction et, évidemment, sur vos entreprises également. Alors, je trouvais que l'avantage de la Commission du bâtiment, à comparer avec la Régie, était remarquable et l'était davantage dans la philosophie que défend, avec beaucoup de vigueur et beaucoup de brio, je dois dire, le ministre de l'Industrie et du Commerce, à savoir qu'il faut responsabiliser, il faut assurer une meilleure coordination, une meilleure concertation, une meilleure synergie entre les différents éléments d'un même secteur. Et il parle des grappes. Moi, je dis, en lisant ce projet de loi: II y a un raisin qui est tombé et ce sont les entrepreneurs, parce qu'on ne sent pas une volonté de vous responsabiliser.

Mais je prends bonne note du fait que vous êtes ici non pas à titre d'association d'employeurs mais bien à titre d'association siégeant pour les négociations. Alors, je comprends.

M. Dion: De par ma profession, je suis avocat et j'ai de la misère à me taire. Quand on me pose une question, j'ai toujours envie de répondre. Je dois vous dire que nous, on ne prête pas des mauvaises intentions à quelque gouvernement que ce soit. On pense que, normalement, un gouvernement qui fait une législation tente de faire une législation pour régler des problèmes, rendre service aux parties. C'est sûr que les gens pourraient, à ce moment-là, à la limite, et dans bien d'autres endroits à part ça et dans d'autres législations qui ont été faites antérieurement, exploiter des situations. C'est sûr qu'on peut déterminer, demain, que la licence, ce n'est plus 200 $, c'est 500 $. Ça tombe dans les coffres de l'État, c'est intéressant. Je ne pense pas et on n'y voit absolument pas des intentions de ce genre-là du gouvernement. On pense, actuellement, que le gouvernement tente, à l'intérieur d'un plan global - et je pense que ça a été un peu l'objectif avec lequel on était d'accord - d'assainir notre industrie. Et je pense qu'il y a une possibilité. Je veux vous rappeler qu'au moment où on commençait à parler du 186 je vous ai dit: J'ai la conviction que les gens, chez nous, si on leur posait la question, seraient favorables à recommander au ministre que la Régie devienne une régie avec une représentation majoritaire décisionnelle et, à ce moment-là, on pourrait faire notre travail de police, comme on le peut, à toutes fins pratiques, quand on siège à la Commission de la construction, à l'heure actuelle, au conseil d'administration, on a de la représentation gouvernementale. On sait quand même un peu l'emprise, en tout cas, l'envergure que le gouvernement peut avoir sur la Commission de la construction, mais on pense être quand même capables de jouer notre rôle si on est présents. Possiblement que les associations qui sont impliquées par le projet de loi 186, si elles avaient un droit de parole majoritaire à cette Régie, pourraient prendre soin de leurs bébés.

Mme Blackburn: M. Dion, je voudrais vous dire que je ne fais pas de politique partisane lorsque je soupçonne qu'on pourrait utiliser, à des fins autres que prévues, les fonds et les différents fruits de tarification de cotisations. Je dis qu'il ne faut jamais...

M. Dion:... vous répondre, dans ce sens-là, je peux vous dire jamais... Je m'excuse...

Mme Blackburn:... tenter un gouvernement, il ne faut jamais tenter un gouvernement quel qu'il soit. L'histoire m'a appris à être prudente là-dessus. Des lois pleines de bonnes intentions, tout à coup, on voit... Tantôt, je disais la Société de l'assurance automobile, mais, là, je regarde les inspecteurs de la CSST et là, on remonterait... Probablement que, dans mon temps, je ne suis pas sûre qu'on n'ait pas fait l'équivalent, si je me rappelle un peu, avec HydroQuébec. Autrement dit, ce que je dis, lorsque je travaille une législation, je ne la fais jamais

pour viser le ministre qui la présente parce qu'il est de bonne foi, j'en ai la conviction, mais je pense à ceux qui vont lui succéder. C'est toujours dans cette perspective que je me dis qu'il faut être extrêmement prudent quand on légifère parce qu'on ne légifère pas pour un ministre. Il va être là six mois, un an, on ne sait pas. Mais tout ça pour dire que, quel qu'il soit, le législateur doit toujours être extrêmement prudent et imaginer que ça peut être le pire des ministres comme le pire des gouvernements lorsqu'il légifère. C'est dans ce sens-là que je faisais mon intervention.

M. Dion: En tout cas, Mme Blackburn, je ne voudrais pas...

Le Président (M. Bordeleau): Dernier commentaire, M. Dion, s'il vous plaît.

M. Dion: Le dernier. Je ne voudrais pas que vous pensiez que je voulais viser cette partie-là de votre discours, pas du tout. Ce que je voulais tout simplement illustrer, c'est que nous, on pense qu'en étant présents, si ces choses-là pouvaient arriver... Ça pourrait ne pas arriver, mais si on est présents, je pense qu'à ce moment-là vous devez sûrement être d'accord avec moi qu'on devrait avoir une majorité de représentation.

Mme Blackburn: Ça pourrait être moins pire.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. le ministre, le mot de la fin.

M. Cherry: D'abord, je veux vous remercier pour vous être déplacés aujourd'hui et avoir présenté vos propositions. Je veux vous assurer que vos représentations ont occupé toute mon attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous apporte beaucoup de travail et c'est pourquoi j'ai demandé à une équipe du ministère de se mettre à l'oeuvre. On va être disponible, même en fin de semaine, si c'est nécessaire, je l'ai dit aux autres parties, je vais le faire encore à vous autres. Merci pour le temps que vous avez pris et la qualité du mémoire que vous nous présentez.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Messieurs, merci. Ça m'a fait plaisir de vous rencontrer et de mieux vous connaître, à la fois par votre mémoire et votre présentation. Je suis nouvelle dans le dossier, mais je trouve que c'est un dossier passionnant. Votre mémoire nous aura permis de nous éclairer sur un certain nombre de points. Vous l'avez fait avec beaucoup de modération et, je pense aussi, de sagesse, et je vous en remercie.

M. Dion: M. le Président, notre seul objectif, c'était de collaborer avec vous pour faire une loi meilleure et j'espère qu'on a réussi.

Le Président (M. Bordeleau): La commission vous remercie de votre présentation, messieurs.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 39)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Bélanger): Alors, je demanderais à chacun de bien vouloir prendre sa place, s'il vous plaît, pour que nous puissions recommencer nos travaux.

Nous recevons la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec qui sera représentée par M. Fernand Lavallée, qui est le président, et à qui nous laisserons le soin de nous présenter les gens qui l'accompagnent. Par la suite, il procédera à la présentation de son mémoire. Je ne sais pas si je dois vous le rappeler, on a 20 minutes pour la présentation du mémoire, 20 minutes d'un côté et 20 minutes de l'autre pour les questions. Et si, d'aventure, vous aviez besoin d'un peu plus de temps, comme on est là d'abord pour vous écouter, on vous laissera le temps et on posera moins de questions. Mais l'objectif, c'est qu'il faut terminer pour 21 heures, pour rencontrer l'autre groupe à 21 heures. D'accord? Alors, on y va.

Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec

M. Lavallée (Fernand): Bonsoir, mesdames, messieurs. Merci, M. le ministre, merci, M. le Président, de nous recevoir en commission pour pouvoir nous exprimer sur les projets de loi 185 et 186. Permettez-moi, M. le Président, de vous présenter les membres qui m'accompagnent présentement. Il s'agit de M. Jean Brière, à ma droite, qui est un entrepreneur en plomberie; M. Jean Morin, notre aviseur légal; M. Michel Favre, le directeur général de la Corporation, et moi-même.

Vous avez en main présentement deux mémoires concernant les projets de loi 185 et 186, et je n'ai pas l'intention de vous en faire la lecture, puisque vous l'avez sans doute déjà faite, M. le Président. J'aimerais, au contraire, en faire ressortir les points saillants qui viennent affecter notre métier de plombier. J'aimerais aussi faire une mise en situation de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec.

La Corporation est un partenaire avec le gouvernement depuis plus de 40 ans. Notre tâche, c'est de faire en sorte que les entrepreneurs qui oeuvrent en mécanique du bâtiment - soit en

plomberie, chauffage, ventilation, climatisation et en tuyauterie - soient les plus compétents possible. Notre Corporation répond aux demandes du public, tente de satisfaire tous les plaignants, discipline ses membres, fait des représentations auprès des autorités gouvernementales et a des contacts avec les autres associations de construction.

La réglementation de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec doit être approuvée par le gouvernement, y compris même la cotisation qu'elle charge à ses membres. De même, les examens d'admission qu'elle fait passer doivent être approuvés et peuvent même être dictés par le gouvernement, s'il le juge à propos. Les activités de la Corporation des maîtres mécaniciens ne coûtent rien à l'État, même quant à la partie qui a trait à la protection du public.

En ce qui a trait au projet de loi 185, M. le Président, on semble déceler que le gouvernement, par cette loi, veut contrer le travail au noir. J'ai également assisté, cet après-midi, au débat sur le sujet. J'en ai eu des frissons, M. le Président, lorsqu'on a qualifié les travailleurs autonomes d'artisans du travail au noir. Je ne peux pas comprendre l'interprétation que l'on en fait. Alors, chez nous, chez les maîtres mécaniciens en tuyauterie, nous avons, actuellement, 800 membres qui sont des entrepreneurs autonomes. Ces entrepreneurs se sont qualifiés au même titre que tous les 2300 membres; ils ont passé des examens et ils se comportent selon un code d'éthique, un code de déontologie et aussi un code de plomberie. Ces entrepreneurs ont la responsabilité d'effectuer leurs travaux de plomberie en conformité avec les codes de plomberie; ils doivent prendre des permis, faire inspecter leurs travaux et ils doivent également - et ils le font - déclarer leurs revenus et payer leur impôt. Ces membres, au même titre que les autres, paient leur cotisation à la Corporation; ils se comportent en professionnels.

J'ai entendu dire, aujourd'hui, que nos travailleurs autonomes sont des charlatans. Je ne peux comprendre comment ces travailleurs, que je viens de vous décrire, contribuent au travail au noir; je ne peux pas le comprendre.

En plus de ces 800 membres chez nous, il y a également de petites entreprises qui ont des salariés, de deux à cinq salariés; on en décompte pas moins de 1000. Je dois vous dire que ces petites entreprises sont des générateurs de l'industrie et, dépendamment de la saison et de l'achalandage au niveau de leur commerce, le nombre d'employés peut augmenter et peut même être réduit à ce que le patron soit le seul qui oeuvre dans l'entreprise. Alors, en plus de ces 800 à qui on veut retirer le droit de travailler, de faire des travaux de construction et des travaux de rénovation, nous avons également un bon groupe de nos membres qui vont se situer quelque part dans une même situation.

J'aimerais vous dire également que ma propre entreprise, qui a présentement 20 salariés qui oeuvrent dans la mécanique du bâtiment, cette entreprise, je l'ai acquise de mon père en 1964, qui lui était un travailleur autonome. J'ai acheté cette entreprise et c'est avec les années et avec l'achalandage qui a augmenté que je suis devenu un entrepreneur avec des salariés.

Du même fait, j'aimerais aussi vous faire remarquer, M. le Président, que le mémoire que nous avons déposé a été étudié en profondeur et, hier, nous avons eu un conseil provincial. Notre conseil provincial est constitué de 32 délégués qui couvrent tout le territoire de la province de Québec. Et de ces membres qui forment notre conseil exécutif, beaucoup de ces membres travaillent en région - la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, peu importe - et la majorité d'entre eux, à l'occasion, pendant la période estivale, si on se rapporte à la Gaspésie, peuvent avoir trois ou quatre ou cinq salariés. Mais pendant la période d'hiver, ces gens-là sont seuls dans leur entreprise. Alors comment pouvons-nous aujourd'hui dire à ces gens-là que demain ils ne pourront plus servir leur clientèle?

Soyez assurés, M. le Président, que ces 800 entrepreneurs chez nous, lorsqu'on leur retirera le droit d'entreprendre leurs travaux et de servir leur clientèle, nous allons les inciter à devenir des clandestins. Ils ne renonceront pas à leur clientèle, ils vont continuer à répondre à leur clientèle et ils vont exécuter ces travaux-là sans être enrégimentés ou contrôlés par les rouages de l'industrie de la construction.

J'aimerais demander à M. Brière, qui m'accompagne présentement, de donner un petit peu son expérience, comment il est devenu entrepreneur.

M. Brière (Jean): M. le Président, M. le ministre, j'ai parti mon entreprise en 1974 comme entrepreneur autonome. J'ai travaillé seul sur un camion à faire des réparations, des modifications, etc., pendant une période de temps, assez longtemps pour me permettre de ramasser les fonds suffisants pour soumissionner sur des projets un petit peu plus gros. Vous savez que, lorsqu'on soumissionne sur des projets, il y a toujours 10 % de dépôt que vous devez donner. Lorsque vous êtes plus gros, vous pouvez émettre des bons, quand vous êtes tout petits, des bons, c'est plus difficile à avoir. Il ne faut pas se fier sur le banquier pour vous aider trop trop au départ. Ni à la fin, d'ailleurs. Ni d'un bord, ni de l'autre.

Alors, ça fait, nous avons, aujourd'hui... Comme je vous le disais tantôt, j'ai commencé autonome. On a monté graduellement. Aujourd'hui, nous employons environ une soixantaine d'employés. Nous avons un chiffre d'affaires cette année, présentement, d'environ 6 000 000 $, et si nous sommes le moindrement chanceux dans les semaines qui viendront, nous finirons l'année

avec des ventes de presque 10 000 000 $. Alors, c'est comme ça que j'ai parti. Je ne peux pas voir où on peut prendre l'expérience. À moins d'hériter, je ne le sais pas. Peut-être que si j'étais parent avec ce monsieur britannique qui est décédé récemment, je ne serais pas... malgré qu'à lire les journaux dernièrement ce n'était pas meilleur. Ha, ha, ha! On va laisser faire celle-là.

Mais il faudrait comprendre que, quand on part en affaires, il faut aussi faire une période, un rodage. Il faut apprendre comment ça fonctionne. Il y a la question de permis, inspections, soumissions. Il y a un paquet de facteurs, l'industrie est très complexe. Je ne pense pas que, demain matin... à moins d'être quelqu'un qui avait des postes de commande chez un autre entrepreneur. Mais, même là, les fonds vous manqueraient. Même au niveau des bons et de la garantie que vous devez émettre sur certains projets, l'expérience n'y serait pas.

Malheureusement, on vous demande souvent... Vous venez pour soumissionner sur un projet de 5 000 000 $, on vous dit: Quelle est votre expérience sur des chantiers de 5 000 000 $? Je ne le sais pas. J'ai soumissionné pour 1 000 000 $ hier et, là, c'est la première fois. Je veux dire, il faut que tu montes comme ça, graduellement; il faut que tu démontres de l'expérience. Tu ne peux pas devenir demain matin l'expert total, il faut que tu commences quelque part. De là à dire que nos entrepreneurs, comme je l'ai entendu cet après-midi, sont tous des charlatans... Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas un, à un moment donné, qui s'égare, ça, c'est normal. Je pense que c'est comme ça.

M. le Président, moi, quand je regarde la situation et tout ça, j'ai de la misère à renier d'où je viens, c'est de là que je suis venu. Je ne pourrais pas accepter aujourd'hui qu'on nie un droit à un contracteur futur qui s'ignore présentement, qui est un syndiqué, par exemple, aujourd'hui. C'est un syndiqué ce gars-là. Je l'étais, moi. J'étais membre du Local 144. J'ai des confrères - Gilles Neveu, de Neveu & Neveu - qui sont exactement dans la même situation.

M. le Président, je pense qu'il faudrait y penser sérieusement avant d'adopter une chose semblable. C'est tout, M. le Président.

M. Lavallée (Fernand): M. le Président, j'aimerais continuer, toujours sur le projet de loi 185, avec le volet de la caution. On demande à nos entrepreneurs de fournir une caution pour garantir le paiement des salariés. J'ai le goût de vous demander, M. le Président, si le gouvernement va également, pour la contrepartie, nous garantir, nous, nos comptes recevables. J'ai le goût de vous demander ça puisque la réforme du Code civil présentement nous enlève notre privilège d'exercer justement un privilège sur la construction d'immeubles. On voit présentement transférer notre pouvoir de privilège par une hypothèque qui peut tomber au quatrième ou au cinquième rang. Alors, d'un côté, on nous enlève un outil que l'on avait pour se garantir auprès du consommateur et, de l'autre côté, on veut que l'on garantisse par une caution.

J'aimerais aussi vous demander, M. le Président: est-ce qu'on a procédé, est-ce qu'on a fait des évaluations sur l'incidence des coûts pour fournir une telle caution? Je me demande comment on peut mettre en application ce volet caution. Aujourd'hui, j'ai 20 salariés: demain, je peux en avoir 30 et, dans six mois, je peux en avoir 5. La caution, est-ce qu'elle va être comme un élastique? On va l'étirer au besoin toutes les semaines. Comment va-t-on se servir de cet outil-là? J'en vois très mal la mise en application.

J'ai aussi le goût de vous demander si Provigo doit fournir également une caution pour garantir le paiement de ses salariés? Alors, c'est un peu ça, M. le Président, et j'aimerais qu'on réfléchisse là-dessus avant d'exiger que l'on fournisse une telle caution. C'est les deux points sur lesquels on aimerait attirer votre attention dans notre mémoire sur la loi 185.

J'aimerais passer maintenant à la loi 186. Si vous me permettez, M. le Président, nous avons un résumé de notre mémoire, que vous n'avez pas en main. J'apprécierais qu'on me laisse le lire pour ensuite procéder à une période de questions.

Les rédacteurs du projet de loi 186 ont été mal inspirés. Ils n'ont pas compris lorsqu'ils ont rédigé la partie de la loi 186 qui touche à la Loi sur les maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec qui est contrôlée dans toutes ses activités par l'État. Il nous semble évident qu'ils n'ont pas vu que des dispositions sont prévues, permettant d'obtenir toute uniformité et coordination qui pourraient être souhaitables. Il est étonnant qu'on n'ait pas compris qu'il y a lieu de ne point détruire ce qui fonctionne bien et cela sans coût pour l'État. La qualification, la discipline par des corporations professionnelles sous la surveillance et même la dictée de l'État, n'est-ce pas l'idéal, surtout en ces temps où l'État doit prendre des mesures pour diminuer de façon draconienne ses dépenses?

Dans notre mémoire, nous avons cité des extraits de propos tenus par des hommes politiques au cours des dernières années qui vantaient le travail des corporations professionnelles, et particulièrement celui de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec. Ceux-ci se félicitaient de voir l'État exercer son rôle à si peu de coûts. On ne parle pas d'un guichet unique pour la qualification. Pense-ton à un guichet unique pour les comptables, les avocats, les ingénieurs, les architectes? Pourquoi un guichet unique? Il n'y en a jamais eu. Pour uniformiser peut-être? Cela n'est pas nécessaire puisque la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec doit suivre les normes

fixées par l'État quant aux prérequis pour obtenir une licence, etc.

Dans notre mémoire, nous faisons état de nombreuses gratuités contenues dans le projet de loi 186. Les motifs de plusieurs des propositions d'amendements contenus dans le projet de loi 186 sont impossibles à trouver. Le projet de loi 186, quant à la CMMTQ, est une erreur. Les principes qui le sous-tendent, s'il en est, sont en sens contraire des orientations des autorités gouvernementales au cours des dernières années. L'Assemblée nationale vient de créer une nouvelle corporation quant au courtage immobilier parce qu'elle s'est aperçue que c'était la façon la plus adéquate et la moins coûteuse pour s'assurer de réglementer ce secteur. Parallèlement, quelques semaines plus tard, on fait le contraire avec la CMMTQ et la CMEQ.

Il nous est dit que l'appartenance obligatoire demeure, que le pouvoir de discipliner demeure. Quelle est cette signification? Vous êtes obligé d'être membre d'une corporation, mais cette même corporation ne peut fixer les conditions d'admission, ne peut vous faire passer d'examen, n'a rien à voir avec la certification de votre compétence. Elle reçoit tout simplement un avis du gouvernement d'accepter telle personne comme membre. Elle n'a rien à dire. Est-ce intelligent?

Pourtant, l'État s'est gardé tous les pouvoirs qu'il doit avoir. Si la CMMTQ faisait du contingentement, si elle abusait d'une manière quelconque de ses pouvoirs, l'État a tous les outils nécessaires pour intervenir, la législation actuelle lui donnant tous ces pouvoirs. Il n'y a rien à comprendre du projet de loi 186 quant aux modifications qu'il suggère. Par ailleurs, les autres dispositions du projet de loi 186 auraient avantage a être repensées pour être plus conformes à la volonté exprimée par le ministre du Travail et par ses prédécesseurs et collègues, et particulièrement en 1985, de responsabiliser les intervenants dans l'industrie de la construction.

Alors, que l'État garde tous les pouvoirs d'intervention, mais qu'il délègue au milieu l'exécution des tâches qu'il souhaite accomplir. Le projet de loi 186 fait disparaître plusieurs des dispositions de la Loi sur le bâtiment qui était dans ce sens, et cela est regrettable.

Ça termine mon exposé, M. le Président. Nous sommes prêts à répondre à vos questions s'il y en a.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, monsieur. M. le ministre.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je vais prendre la première partie de votre intervention qui s'adressait à la situation. Vous avez décrit votre participation cet après-midi avec des frissons, vous avez entendu des commentaires des gens qui vous ont précédés. Donc, c'est ce sujet-là que je vais aborder en premier pour vous permettre un peu plus de temps dans ce sens-là.

Les chiffres. Si j'ai bien compris, vous dites qu'il y a 800 des membres de votre Corporation qui ne pourraient plus exercer leur profession ou leur métier.

M. Lavallée (Fernand): C'est ça.

M. Cherry: Voulez-vous, pour la compréhension de la commission, me décrire de quelle façon vous en arrivez à cette conclusion, que ces gens-là ne pourraient plus continuer à faire ce qu'ils font dans le moment? Et vous nous dites "surtout en région". Je ne veux pas vous pousser par là, mais il me semble que vous avez dit: "Par exemple, en région, on a des membres..." Qu'est-ce qu'ils seraient obligés de faire différemment, à partir de maintenant, d'après la perception que vous en avez par rapport à ceux dans les régions pour débuter?

M. Lavallée (Fernand): L'entrepreneur qui est seul présentement, qu'on qualifie ou qu'on nomme autonome, c'est un entrepreneur qui fait une multitude de tâches. Il peut faire des travaux de réparation et d'entretien, il peut répondre à sa clientèle qui veut ajouter à sa maison une nouvelle salle de bain au sous-sol ou qui veut faire une rallonge et qui doit extension-ner le système de drainage pour un drain de toit. Ce même entrepreneur, en région, puisque c'est celui qui va être le plus affecté, contracte actuellement de la plomberie dans les nouvelles constructions résidentielles, et on parle de petites régions, là, où il peut y avoir trois, quatre, cinq chantiers de construction résidentielle pendant la période d'été. Alors, cet entrepreneur seul, dorénavant, ne pourra plus faire ces travaux de plomberie que je viens de vous décrire, soit au niveau d'une construction d'une résidence neuve ou soit de travaux de modification ou de rénovation, puisque le texte de la loi dit qu'il devra, à l'avenir, avoir des salariés pour les exécuter.

M. Cherry: O.K. Juste pour être bien certain qu'on parle de la même chose, vous dites que, évidemment, durant l'hiver, il va continuer à desservir sa clientèle et, là, vous ajoutez l'aspect où, durant l'été, il est possible qu'il ait, à ce moment-là, durant cette période-là, deux, trois, quatre constructions neuves.

M. Lavallée (Fernand): Oui.

M. Cherry: Est-ce que, d'après le mode de fonctionnement que vous décrivez, durant cette période d'été, il pourra continuer à donner le service à sa clientèle régulière durant les autres saisons de l'année? Et est-ce qu'il va, en même temps, être capable de faire tous ces travaux-là dans le neuf, seul - également les deux - ou

est-ce que, sans vous l'avoir entendu dire, durant cette période de l'été, ça ne serait pas la seule période de l'année où il engagerait peut-être une ou deux personnes pour lui permettre, lui, de satisfaire sa clientèle régulière et, en même temps, pouvoir solliciter et exécuter les travaux durant l'été pour la neuve? Je veux vous entendre là-dessus.

M. Lavallée (Fernand): Je comprends votre question, M. Cherry. J'ai également le goût de vous dire que cet entrepreneur-là, oui, va continuer à faire les travaux d'entretien même pendant l'été. Mais qu'adviendra-t-il du consommateur dans une région éloignée comme Rivière-au-Renard qui veut bâtir sa propre maison? Qu'est-ce qu'il va répondre à son client? Puisque, aujourd'hui, je peux détenir une maison et avoir le projet de déménager dans une nouvelle maison. Donc, si j'appelle mon entrepreneur en plomberie, qui me sert depuis toujours, que je lui soumets un plan de construction et que je lui dis: Bon, j'ai besoin de tes services pour ma nouvelle résidence. Cet entrepreneur, qu'est-ce qu'il va dire? Il va dire: Je ne peux pas faire ton contrat parce que, moi, je n'ai pas de salariés et je n'ai pas les qualifications pour le faire. C'est à cette situation-là que je veux vous faire réfléchir, M. le Président.

Alors, non seulement notre membre qui oeuvre seul présentement ne peut pas uniquement gagner sa vie juste à faire de l'entretien mais, écoutez, M. le Président, notre entrepreneur autonome ne pourra plus se rendre chez vous pour installer un lave-vaisselle puisqu'il s'agit d'installer de l'équipement neuf, de la tuyauterie additionnelle. Le projet de loi lui défend de faire ça. Alors, qu'est-ce qu'il va faire le gars? Le consommateur, qu'est-ce qu'il va faire face à ça?

M. Cherry: Je vous avoue que sur celui-là, j'ai de la misère à vous suivre, sur le fait qu'installer une laveuse ou une sécheuse à l'intérieur d'une maison, ça serait construire du neuf. L'appareil est neuf, mais la maison n'est pas neuve.

M. Lavallée (Fernand): M. le Président, on dit que l'entrepreneur autonome ne pourra plus installer de la tuyauterie, de faire des travaux de modification, de faire des travaux de rénovation. Il va être confiné à faire des travaux d'entretien. Alors, dans mon livre, le texte est tellement vague qu'installer, ajouter un lave-vaisselle...

M. Cherry: Ce n'est pas ça qu'on dit du tout.

M. Lavallée (Fernand): II s'agit d'ajouter des choses. Vous n'aimez pas mon exemple, M. Cherry? Que faites-vous avec l'exemple que je vous ai apporté d'ajouter un cabinet de toilette au sous-sol?

M. Cherry: II n'y a pas de problème. C'est de la rénovation, ça. C'est de la rénovation et c'est déjà exclu du champ de l'application. Il peut le faire maintenant et il pourra continuer à le faire après.

M. Lavallée (Femand): A condition qu'il ait un salarié.

M. Cherry: Non, non. Dans ce sens-là, il n'y a pas de changement. La rénovation est déjà exclue du champ d'application dans ce sens-là. Ce n'est pas nouveau là. Il n'y a rien qui ait affaire avec ça. Ça existe déjà dans le moment. On me dit - évidemment, c'est avant moi, mais j'en suis responsable - que c'est quelque chose qui a fait partie de l'entente de 1988. Et ça, ça ne changera pas par rapport à ça. Là, je comprends votre réticence, si c'est ça l'interprétation que vous en faites. Mais je me dois de vous rassurer, de vous dire que ce n'est pas ça l'intention. Et si vous le lisez comme ça...

M. Lavallée (Femand): Qu'arrive-t-il avec l'exemple que je vous donne, M. Cherry, de l'entrepreneur autonome qui est seul, qui se voit invité à soumissionner pour exécuter des travaux de plomberie, pour des constructions de trois, quatre, cinq maisons...

M. Cherry: Oui.

M. Lavallée (Fernand):... et qui se voit astreint à ne pas le faire?

M. Cherry: II n'y a rien qui l'empêche de soumissionner. S'il l'obtient, au moment où il fera l'exécution des contrats, à quatre, cinq nouvelles constructions, il retiendra sûrement les services au moins d'un employé qualifié avec lui.

M. Lavallée (Fernand): Ce n'est pas sûr, M. Cherry. Si je suis invité à soumissionner sur un projet de construction pendant l'hiver...

M. Cherry: Oui.

M. Lavallée (Femand):... pour un projet qui va être fait au printemps...

M. Cherry: Bien sûr.

M. Lavallée (Fernand):... alors, je présume qu'au printemps j'aurai des salariés pour l'exécuter. Qu'arrive-t-il si, au printemps, je n'ai pas d'autres choses à faire que de la plomberie dans deux nouvelles résidences? Est-ce que je vais être obligé d'engager un salarié pour deux semaines, trois semaines, et me priver, moi, de la possibilité de l'exécuter moi-même? Je vais engager un salarié pour faire deux maisons

pendant trois semaines? Lorsqu'on construit une nouvelle maison, M. Cherry, notre travail est à plusieurs phases. Il y a une phase souterraine, qui peut durer une journée, ou une demi-journée. On est appelés, trois jours après, pour faire la partie élévation. On est appelés, une autre semaine plus tard, pour faire la tuyauterie d'eau. On est appelés, par la suite, pour faire la finition des appareils. Donc, si on ajoute tout ça ensemble, ça peut faire un contrat assez volumineux. Mais c'est fait sur une période peut-être de deux ou trois mois. Alors, notre travailleur autonome qui l'a toujours fait, qui a toujours eu les capacités et les compétences pour le faire, demain matin, il ne pourra plus le faire.

M. Cherry: C'est ça, sa compréhension. (20 h 30)

M. Lavallée (Fernand): Qu'arrive-t-il avec l'entrepreneur, M. Cherry, qui a... Il y en a au-dessus de 900 qui ont de 3 à 5 employés? Ça peut également monter à 10, et descendre à un homme seul. Avec la récession qu'on a présentement, je vous dis 800 sous toutes réserves. Peut-être qu'il y en a plus de nos entrepreneurs qui n'ont pas de salariés présentement. Et lorsqu'ils n'ont plus de salariés, ce ne sont plus des entrepreneurs? Ils ne sont plus vrais? Si j'ai eu des frissons cet après-midi, c'est qu'on a dit que mon membre, chez moi, qui est un entrepreneur autonome, c'est un travailleur au noir. C'est ça que je ne comprends pas. Il paie ses impôts, il déclare ses revenus, il est contingenté, il est réglementé, il passe des examens, il prend des permis. Comment pouvons-nous décrire cet entrepreneur-là comme un travailleur au noir? C'est aberrant!

M. Cherrry: C'est intéressant de voir le cheminement des mémoires et l'importance de la représentation quand on change de clientèle, et c'est ça l'avantage de faire une... C'est bon que vous y ayez été cet après-midi, vous pouvez commenter les mémoires que vous avez entendus.

M. Lavallée (Fernand): Oui, oui. J'aurais eu le goût, à un moment donné, de me lever et de demander la parole, mais c'était impossible.

M. Cherry: Probablement que ceux qui vous écoutent, qui pariaient cet après-midi, auraient le goût de faire la même chose.

Mme Blackburn: Vous vous imaginez ce que le ministre aurait manqué si on n'avait pas demandé une commission parlementaire?

M. Cherry: Imaginez ce qu'on aurait manqué si on ne s'était pas entendus sur la qualité des intervenants!

Mme Blackburn: C'est juger de ceux qui ne sont pas là.

Le Président (M. Bélanger): Une autre question, M. le ministre?

M. Cherry: Je vois qu'il vient de recevoir une note. Peut-être qu'il souhaiterait dire quelque chose.

M. Lavallée (Fernand): Oui, on aimerait renchérir.

M. Cherry: Parce qu'on est surtout là pour vous écouter, ça fait que, profitez-en!

M. Lavallée (Fernand): On aimerait renchérir, M. le Président. Rénover une résidence. Si vous avez une résidence d'un certain âge et que vous voulez la rénover, vous voulez déplacer la salle de bain, en faire une nouvelle, vous voulez ajouter... Ce n'est plus un travail mineur. Ce sont des travaux qui sont généralement confinés à des entrepreneurs, peut-être un travailleur autonome ou un petit entrepreneur qui a de trois à cinq employés. Alors, si ce n'est pas une salle de bain, ça peut être la rénovation d'une maison, vous savez. Alors, c'est ça, notre travailleur autonome ne pourra plus le faire.

M. Cherry: Encore là, vous me permettrez de différer d'opinion sur l'interprétation qui en est faite.

M. Lavallée (Fernand): J'inviterais, s'il y a des gens avec moi qui auraient d'autres exemples à apporter afin de mieux comprendre...

M. Morin (Jean): M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): C'est M. Morin.

M. Morin (Jean): Oui. Rénover, ce n'est pas construire. Je vais vous prendre comme exemple, M. le Président. Vous n'avez pas de salle de bain au sous-sol. Vous en faites faire une. Vous ne rénovez pas, il n'y en a pas; vous construisez une salle de bain. Quand vos conseillers, M. le ministre, semblent vous dire qu'installer une nouvelle salle de bain, ce n'est pas construire, mais c'est rénover, moi, je diverge d'opinion. Vous savez, rénover, c'est remplacer, faire du neuf avec du vieux. Mais une nouvelle installation, une rallonge, un nouveau cabinet au sous-sol, vous ne rénovez pas, vous installez, vous construisez.

M. Cherry: Allez-y, continuez.

M. Morin (Jean): J'avais fini.

M. Cherry: Ah! vous aviez fini!

M. Morin (Jean): J'avais fini.

M. Cherry: Je vous avoue que si c'est ça,

votre interprétation, je peux comprendre les difficultés que vous avez. Mais je vous avoue que, dans l'esprit, on n'a pas fait de distinction entre construire une nouvelle salle de bain qui n'existe pas au sous-sol ou la rénover comme telle. Dans la conception, c'est que, tant que vous n'agrandissez pas les fondations, tout le reste qui existe déjà à l'intérieur d'une maison unifamiliale existante, c'est perçu, dans le langage - mais, là, je réalise que ce n'est pas l'interprétation que vous en avez faite - comme étant et faisant partie de rénovations. Alors, tant mieux si ça permet, entre autres, de clarifier ça.

M. Morin (Jean): Ce serait bon que vous le clarifiiez. Vous dites que, du moment que c'est sur le même terrain ou dans la même maison, on peut faire n'importe quoi. Écoutez, vous finissez votre sous-sol complètement, vous faites des installations. Vous êtes en train de rénover, vous? Vous construisez, là, M. le ministre, vous ne rénovez pas. En tout cas.

M. Cherry: O.K. Le concept qui a dirigé ça, c'est qu'à l'intérieur d'une maison unifamiliale déjà existante, que vous ajoutiez un service ou que vous en changiez quelque chose, la perception que l'on a, c'est que ça demeure toujours de la rénovation dans le sens que nous, on le comprend. Mais, là, je perçois que ce n'est pas l'interprétation que vous en faites. Ça, j'en tiens compte.

Le Président (M. Bélanger): M. Brière, vous aviez un commentaire, oui.

M. Brière: Ce que je disais, M. le Président, c'était... Je comprends que si les quatre murs sont existants, tout ce qui se fait a l'intérieur, c'est de la rénovation.

M. Cherry: Si ça peut aider les gens qui sont en arrière, qu'ils consultent "Un champ d'application", chapitre III, article 9: "...aux travaux suivants exécutés par une personne physique agissant pour son propre compte et à ses fins personnelles, exclusives, non lucratives, d'entretien, de réparation, de rénovation, de modification d'un logement qu'elle habite." En tout cas, si ce n'est pas assez clair, tant mieux que ça ait permis de clarifier ça. O.K. Merci.

Le Président (M. Bélanger): D'autres questions? Alors, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, je vous remercie, M. le Président. Il me fait plaisir d'accueillir les membres de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie, les tuyauteurs du Québec.

Je vais essayer de faire un peu rapidement le tour de la question. La première question: Est-ce qu'il y a une adhésion obligatoire à la

Corporation?

M. Lavallée (Fernand): Oui, il y en a une.

Mme Blackburn: Tous les entrepreneurs doivent être...

M. Lavallée (Fernand): Membres.

Mme Blackburn: ...obligatoirement membres de la Corporation.

M. Lavallée (Fernand): C'est ça.

Mme Blackburn: Bien. Vous invoquez le fait que ça fonctionne bien, que vous avez bien contrôlé la Corporation et que ça ne coûte rien. Alors, moi, je pense que c'est peut-être pour ça, finalement: comme ça ne coûte rien, vous ne rapportez rien non plus, dans le sens pécuniaire du terme. Alors, j'y reviendrai un peu.

Les questions que vous posez, dans le fond, moi, j'aurais comme le goût de les poser au ministre. Mais, quand même, je vais faire un petit bout de chemin avec vous. Ensuite, j'aimerais peut-être que le ministre soit un peu plus clair, parce que je dois dire que je n'ai pas vraiment compris les raisons fondamentales qui amènent le ministre à modifier une situation qui allait relativement bien: je parie des électriciens et des tuyauteurs. Alors ça, je dois dire que ça m'étonne et ça a étonné beaucoup de monde. Je comprends un peu l'impression qu'ont pu vous laisser les propos de certains porte-parole cet après-midi, mais, je pense, sans vouloir prendre leur défense, qu'ils font état de situations ou, dans la grande région de Montréal en particulier, on se retrouve avec de grands travaux de construction, où celui - ils l'appellent un "broker" -qui engage des entrepreneurs autonomes, il peut en avoir 30. Là, eux, ils ne sont absolument pas soumis au décret. Il y a eu un abus. Ça, c'est clair et net, H y a eu un abus...

M. Lavallée (Fernand): On est contre ça.

Mme Blackburn: ...qu'il faut essayer de contrôler, c'est ça.

M. Lavallée (Fernand): On est contre ça.

Mme Blackburn: Je suis certaine que vous êtes contre ça. On a dit aussi, cet après-midi, un syndicat - pour ne pas le nommer, la FTQ - a dit: écoutez, avec eux autres, on n'a jamais eu de problème.

M. Lavallée (Fernand): Avec nous autres?

Mme Blackburn: Avec vous autres, avec les deux corporations...

M. Lavallée (Fernand): Ah!

Mme Blackburn: ...en réponse à une question que j'avais posée. Alors, je pensais que le ministre avait bien... que ce n'était pas tombé dans l'oreille d'un sourd. J'espère qu'il écoutait à ce moment-là. Les corporations ne semblent pas poser le même problème, de toute façon, à la FTQ, en tout cas, parce que c'est la seule que j'aie interrogée là-dessus, la seule organisation syndicale.

À présent, vous allez me dire quelque chose, parce qu'il y a effectivement un trou dans la loi, il faut le reconnaître, qui a donné lieu à des pratiques abusives. Le travail au noir nous coûte des sommes astronomiques au Québec; je ne recommencerai pas mon petit laïus là-dessus. Je ne sais pas si vous étiez là, mais je pense que c'est important qu'on trouve des moyens parce que ça nous coûte tous cher, à vous, à moi et à tous ceux qui paient des impôts.

Comment ça fonctionnait avant 1988, vous, dans votre Corporation?

M. Lavallée (Fernand): À quel niveau?

Mme Blackburn: Parce que 1988 a reconnu le statut de travailleur autonome. Vous aviez un statut de travailleur artisan, avant? Comment ça fonctionnait?

M. Lavallée (Fernand): Oui.

Mme Blackburn: Pouviez-vous travailler seul sur une construction neuve?

M. Lavallée (Fernand): Michel.

M. Favre (Michel): II n'y avait aucune limitation quant au champ d'activité.

Mme Blackburn: Avant 1988. M. Favre: Avant 1988.

Le Président (M. Bélanger): Ça, c'est M. Favre.

M. Favre: Oui. C'était la différence. Depuis 1988, les gens sont restreints. On les déclare incompétents. Des gens qui investissent des montants de 30 000 $ à 40 000 $ pour acheter un camion, s'outiller, qui ont pignon sur rue, qui oeuvrent depuis des années, se voient maintenant dire qu'ils sont dorénavant incompétents. Ça ne se prend pas.

Mme Blackburn: Bien, là, vous comprenez, d'abord une première chose. Je pense qu'il y a deux choses très claires. La première, c'est: rénovation, entretien et réparations, ça vous est ouvert. Ça, c'est la loi qui le prévoyait en 1988 et qui demeure la même. Sauf que sur la construction, là, il faudrait y avoir un salarié. Et c'est ce qui vous pose problème. Le ministre n'a pas vraiment semblé comprendre tantôt. C'est ce qui leur pose problème en cas de pénurie, s'il n'y a pas beaucoup de travail. À ce moment-là, ça veut dire que tout ce qui est maison neuve, ils n'y ont pas accès. Il va falloir qu'au village, à Cap-Chat, ils aillent chercher quelque part, peut-être à Rivière-au-Renard ou à Gaspé, avant de trouver le prochain plombier. Je connais un peu la région.

Mais ce qui a été dit et avancé cet après-midi, c'est qu'il faudrait essayer de voir comment on peut, à la fois, éviter les abus qu'a entraînés une interprétation excessive, pour ne pas dire abusive, de la loi 31 et, en même temps, ne pas complètement mener à la faillite un certain nombre d'entrepreneurs autonomes. Et, là, je vous dis que ce n'est pas facile. Je suis d'accord là-dessus avec le ministre, mais il me semble qu'il faudrait peut-être examiner si les deux corporations qui, à ce jour, n'ont pas semblé abuser du système avec un minimum d'encadrement, voir s'il n'y aurait pas lieu d'éviter les abus qu'on a connus, par ailleurs, un peu partout dans la construction. Mais est-ce que vous avez réfléchi dans ce sens-là?

M. Lavallée (Fernand): Si je comprends bien, ce qui semble ennuyer certains, c'est les charges sociales que les entrepreneurs ont à payer. Vous faites allusion à l'association de plusieurs travailleurs autonomes qui se réunissent pour exécuter des contrats d'une plus grande envergure. Alors, l'encadrement est là, Mme Blackburn. Que l'on bouche ce trou-là et qu'on fasse payer à ces gens-là les charges sociales qu'ils doivent payer. Alors, on n'est pas pour tout foutre en l'air à cause de ça. On peut modifier ces "joint venture" pour que les entrepreneurs qui s'unissent pour faire des contrats de plus grande envergure paient les charges sociales. Mais on n'a pas à leur enlever le privilège ou le droit qu'ils ont présentement de gagner leur vie. Alors, que trois ou quatre entrepreneurs s'unissent ensemble pour exécuter un contrat de plus grande envergure, que trois d'entre eux se déclarent comme salariés et qu'ils paient les charges sociales auxquelles on faisait allusion cet après-midi, on n'a rien contre ça.

Mme Blackburn: Mais, ça, c'est déjà prévu dans la loi. Vous avez un représentant et les trois autres pourraient travailler comme salariés. Je sais que ça a provoqué des réactions.

M. Lavallée (Fernand): Mais, là, moi, je vous ramène toujours à l'entrepreneur de Rivière-au-Renard qui est invité à faire de la plomberie dans une maison. Vous, vous me parlez de trois ou quatre entrepreneurs autonomes qui se regroupent ensemble pour faire un contrat de plus grande envergure. On est d'accord avec vous, on s'objecte à ça.

Mme Blackburn: O.K. Mais ce n'est pas trois ou quatre entrepreneurs qui se réunissent, c'est-à-dire qu'ils sont invités par quelqu'un qui boucle l'affaire. Puis, finalement, il donne le contrat à plusieurs entrepreneurs; ça s'est vu dans la région de Montréal. Dans le fond, ce que j'essaie de faire avec vous, c'est de voir comment, compte tenu de la qualité de votre travail, du professionnalisme de votre Corporation, on pourrait tenir compte de ce passé pour essayer d'infléchir la décision du ministre quant aux modifications à apporter au projet de loi.

M. Lavallée (Fernand): Mais ces quatre entrepreneurs-là qui se regroupent ensemble ou les dix qui se regroupent ensemble pour exécuter un contrat de plus grande envergure, ce ne sont pas des travailleurs au noir, ce sont des gens qui déclarent leurs revenus, qui paient des impôts et qui se comportent selon les lois de la plomberie et qui font... (20 h 45)

Mme Blackburn: Oui, mais, là, attendez un peu. Ceux qui font ça, c'est-à-dire qu'ils échappent... D'abord, un, ils ne sont pas syndiqués et ils sont comme... Par rapport à la loi actuelle, il n'y a pas de définition qui les touche quant aux cartes de compétence et à toutes sortes de... parce qu'ils échappent à la définition de "salarié".

M. Lavallée (Fernand): O.K. Et en s'échap- pant de la définition de "salarié", ils s'échappent également des charges sociales qu'un entrepreneur avec des salariés a à payer.

Mme Blackburn: À l'occasion.

M. Lavallée (Fernand): Je vous dis que l'encadrement est là. Le système est déjà conçu. On n'a qu'à imposer à ces gens-là de payer des charges sociales s'il y a lieu.

Mme Blackburn: Mais, là, ça prendrait des inspecteurs, vous comprendrez.

M. Lavallée (Fernand): Bien écoutez... Mme Blackburn: D'accord.

M. Lavallée (Fernand): ...je ne vous dis pas quoi faire, Mme Blackburn.

Mme Blackburn: Non, non, écoutez, moi, je n'ai rien contre vous, là.

M. Lavallée (Fernand): Non, non, je le sais. Je comprends votre intervention. J'essaie de vous répondre du mieux que je peux. M. Brière aurait peut-être quelque chose à vous dire là-dessus.

M. Brière: L'entrepreneur, que vous qualifiiez de "broker" tantôt, c'est un entrepreneur général qui donnerait un contrat à, disiez-vous, 15, 20, 30 petits entrepreneurs pour exécuter un contrat d'envergure. Pour chacun des contrats, on doit obtenir un permis. Un entrepreneur doit aller chercher son permis, il doit signer pour. L'entrepreneur qui n'aurait pas d'employés et qui n'en engage pas non plus... Il doit certainement exister une façon, je ne sais pas... Je ne peux pas en estimer le coût. Mais en allant chercher un permis, ça pourrait être un numéro, ça pourrait être une lettre en avant du numéro, je ne le sais pas, mais qui pourrait faire, avant l'émission du permis de construction, qu'on puisse voir que cet entrepreneur-là n'a pas d'employés, qu'il ne peut pas exécuter un travail... C'est bien sûr qu'il n'est pas question qu'un entrepreneur autonome aille faire place Ville-Marie; ça n'aurait pas d'allure, ça durerait longtemps.

Mme Blackburn: Non, sans que ça soit Ville-Marie, H y a des immeubles importants...

M. Brière: Même un huit étages.

Mme Blackburn: ...et qui ont été construits de cette manière-là. Ça veut dire que vous pouvez avoir 30 ouvriers sur un chantier sans qu'aucun de ces ouvriers-là n'aient besoin de détenir des cartes de compétence parce qu'ils arrivent là comme travailleurs ou entrepreneurs autonomes. Ils peuvent avoir des cartes de compétence, mais ils ne sont pas soumis au Code de la construction, au décret de la construction, j'allais dire.

M. Brière: On est d'accord et on est prêts à trouver une façon pour essayer de contrer ça.

Mme Blackburn: O.K.

M. Brière: Parce qu'on est contre ça nous autres aussi.

Mme Blackburn: C'est ça ma question. Avez-vous essayé d'imaginer ce que pourrait être la nature des contrôles qu'on pourrait exercer, pas sur tout le Québec, par rapport à votre Corporation?

M. Lavallée (Fernand): J'inviterais Jean Morin à vous parler là-dessus.

Mme Blackburn: Oui, bien.

M. Morin (Jean): Peut-être, M. le Président, Mme Blackburn, que vous pourriez dire dans une loi que sur un même chantier, pas plus d'un travailleur autonome par spécialité.

Mme Blackburn: Oui, j'avais pensé à ça.

M. Morin (Jean): Ce n'est pas si compliqué

et, en faisant cela, vous n'empêcherez pas le travailleur autonome de Rivière-au-Renard de gagner sa vie. Vous savez, vous n'avez seulement qu'à dire: Sur un même chantier, pas plus d'un, de deux ou de trois entrepreneurs autonomes par spécialité. Et le tour est joué. Vous n'en aurez pas 40 en plomberie, à ce moment-là, ça en prend un. Et la meilleure police, ce sera les travailleurs syndiqués qui sont déjà là, sur le chantier, qui vont dénoncer la présence de plus d'un entrepreneur autonome. Je vous fais une suggestion. Pas besoin d'aller interdire aux entrepreneurs autonomes de gagner leur vie partout dans les régions, etc. pour régler ce problème de gros chantiers. Est-ce que ce problème est si fréquent aussi? Oui?

Mme Blackburn: Écoutez, le travail au noir, ça représente... Je peux vous ressortir les chiffres. Peut-être étiez-vous ici cet après-midi lorsque j'ai cité les chiffres qui nous viennent de la Commission de la construction du Québec, c'est extrêmement important et ça constitue un manque à gagner majeur pour les caisses de l'État, les programmes sociaux, la Régie des rentes du Québec, la CSST, mettez-les tous, et y compris évidemment les impôts. On estime que la masse salariale...

M. Lavallée (Fernand): Je comprends mal. Mme Blackburn:... le manque à gagner...

M. Lavallée (Fernand): Comment faites-vous intervenir les impôts là-dedans?

Mme Blackburn: Ça représente une masse salariale de... Le travail au noir.

M. Lavallée (Fernand): Oui, mais l'entrepreneur...

Mme Blackburn: Là, je ne parle pas des entrepreneurs autonomes, je parle du travail au noir.

M. Lavallée (Fernand): Ah! C'est différent.

Mme Blackburn: S'ils en font au noir, Ils sont dans la même situation que n'importe quel travailleur au noir. C'est 800 000 000 $, la masse salariale qu'on estime en 1990. Alors, 800 000 000 $ de travail au noir, ça veut dire que c'est autant d'impôts qui ne sont pas payés, autant de contributions qui ne sont pas faites à la RAAQ, à la RAMQ, à la CSST, partout. C'est un problème. Moi, je pense que vous avez raison de dire que...

M. Lavallée (Fernand):... que l'on impose des charges sociales.

Mme Blackburn:... vous ne vous sentez pas beaucoup concernés par ça. C'est l'avis d'ailleurs, je le rappelle, de la FTQ. En même temps, est-ce qu'on peut conserver - et c'est la question qu'il faut poser au ministre - les privilèges des deux corporations, parce qu'on va entendre la seconde, par rapport à: premièrement, le statut et les pouvoirs qui sont les leurs actuellement et, éventuellement, prévoir des modalités un peu plus souples. Parce que, effectivement, lorsqu'on s'en va dans les régions... Pour venir d'une région, bien que le voisin plombier que j'ai a toute une équipe, mais, je sais que, dans les campagnes, c'est déjà beaucoup moins facile. Quand vous allez en Gaspésie, en Abitibi, que vous allez dans les villages ou dans les campagnes, il est évident que vous n'avez pas beaucoup de gros entrepreneurs en plomberie; c'est généralement un qui travaille de temps en temps avec un apprenti. Ça, on est conscient de ça. La seule façon, je vous le dis, moi, si je veux convaincre le ministre, il faut que vous me convainquiez et que vous le convainquiez en même temps.

M. Favre: La Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, ce qu'elle vous dit ou ce qu'elle veut dire au ministre, c'est que ses membres ne sont pas responsables des problèmes rencontrés, des problèmes évoqués.

Mme Blackburn: C'est ça le problème.

M. Favre: Ils ne devraient donc pas faire l'objet des contraintes qui sont prévues dans votre projet de loi.

Le Président (M. Bélanger): Si je comprends bien, vous n'êtes pas la cause du problème.

M. Favre: Effectivement.

Le Président (M. Bélanger): Vous subissez ses effets?

M. Favre: On les subit.

Le Président (M. Bélanger): Vous n'êtes pas la cause mais vous êtes obligés de prendre la pilule, par exemple.

M. Favre: Oui.

Le Président (M. Bélanger): Ce n'est pas drôle ça!

M. Cherry: Juste pour compléter. Merci, M. le Président. Encore aujourd'hui, avec des gens avec qui j'avais à discuter et étant sensible aux représentations que vous m'avez faites précédemment, les gens en régions éloignées, je soulevais aux fins de la discussion, je voulais faire sortir en disant là: Comment est-ce que je fais, comme vous le disiez, pour faire la police? Comment est-ce qu'on va faire à Rivière-au-Renard, qui

est l'exemple classique que tout le monde soulève, là? Il me semble que c'est un endroit très populaire. Là, ce qu'on me dit, quand c'est du neuf, on me dit: M. le ministre, la vérité - et, là, je vous demande de répondre à ça - c'est que c'est vrai que l'entrepreneur autonome reste tout seul, mais, ce qu'il fait, c'est qu'il engage un gars au noir. Il engage un gars pour se faire aider pareil, mais au lieu de prendre un vrai travailleur de la construction, il va prendre quelqu'un qui est sur le bien-être social, il va prendre quelqu'un qui est ailleurs, qui est sur le chômage, et il va lui payer 6 $, 7 $, 8 $ de l'heure en-dessous de la table. Il va se faire aider pareil plutôt que de prendre pour se faire aider un vrai travailleur de la construction, un apprenti.

Jusqu'où ça c'est vrai? J'ai tenté de faire le point que vous faites aujourd'hui et voici la réplique qu'on m'a donnée. Je vous la repasse pour que vous réagissiez.

M. Lavallée (Fernand): On ne vous demande pas d'accepter ça. On vous dit juste de l'arrêter. C'est interdit de faire ce que vous venez de décrire.

M. Cherry: Est-ce vrai ça?

M. Lavallée (Fernand): Si ça se fait?

M. Cherry: Oui.

M. Lavallée (Fernand): Peut-être. Je ne peux pas vous dire, je n'habite pas à Rivière-au-Renard!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lavallée (Fernand): M. le Président, les codes en vigueur présentement ne permettent pas ça. Si ça se fait, mettons-les à l'amende, condamnons-les, mais n'empêchons pas notre travailleur autonome de travailler.

Le Président (M. Bélanger): La police, vous feriez ça?

M. Lavallée (Fernand): Si la CCQ n'a pas les moyens, qu'elle n'a pas assez d'inspecteurs pour "policer", en fait, c'est d'elle que relève le droit et la responsabilité de s'assurer que les ouvriers qui travaillent dans l'entreprise, dans l'industrie de la construction, aient les cartes de compétence pour le faire. Ce n'est pas nous qui avons cette responsabilité-là. Mais, moi, je vous dis que si l'entrepreneur de Rivière-au-Renard, demain, n'est plus entrepreneur, il va être encore entreprenant et il va le faire dans le noir. Il va travailler de quatre heures à minuit et puis, le jour, il va dormir, il va aller à la pêche. Il va faire sa plomberie pareil, par exemple, mais, là, il ne paiera pas ses impôts; il ne sera plus membre nulle part et il ne se comportera plus selon un code d'éthique. Vous savez, de la plomberie, c'est de l'hygiène, c'est important. Il faut que ce soit fait selon des codes. Puis, ça, on s'occupe de ça, nous autres. La qualification, ça relève de nous autres. Nos membres, on les forme et on les performe, puis ils se comportent en conséquence. Lorsqu'ils ne le font pas, on est là pour les "policer", pour les mettre au pas. Les 800 membres artisans ne sont pas moins bons que les autres, au contraire. L'artisan qui travaille aujourd'hui ou l'autonome, appelez-le comme vous voudrez, c'est bien souvent le meilleur homme que j'ai qui, lui, décide demain d'être entrepreneur. Et peut-être que lui, dans cinq ans, va en avoir 5 ou 10, des salariés à son emploi. Mais s'il ne peut pas commencer quelque part, on n'en aura plus de relève, il n'y en aura plus d'entrepreneurs.

Mme Blackburn: Mon collègue, allez-y! Une voix: Non, allez-y.

Mme Blackburn: Je voyais la députée de Kamouraska-Témiscouata. J'imagine qu'elle a un comté là qui illustre parfaitement comment ça se passe, et ses collègues aussi. Vous avez, surtout madame, sûrement, monsieur, vous avez des villages. Dans ce sens-là, je me dis qu'ils sont plus en mesure de mieux comprendre la situation qui est la vôtre. Je m'attendais à ce qu'ils posent des questions. Mais, ce qu'on peut envisager, c'est qu'ils puissent convaincre le ministre, à tout le moins. Et moi, c'est ma position, je pense que les corporations ont fait un excellent travail de protection et d'éthique auprès de leurs membres: formation, code de déontologie...

M. Lavallée (Fernand): L'environnement.

Mme Blackburn: ...environnement. Bon. Vous avez, là-dessus, fait vos classes et vos preuves. À cet égard, en ce qui concerne le rôle et le mandat de la corporation, je souhaiterais, et je le dis, que le ministre, par rapport à la loi 186, revienne sur sa décision. Il est vrai qu'ils ne pourront pas en tirer beaucoup de revenus mais, à tout le moins, ça ne leur coûtera rien parce que, actuellement, ça ne leur coûte rien. Je pense qu'il y aurait lieu de revoir la décision. Moi, j'aurais terminé là-dessus.

Le Président (M. Bélanger): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Si vous me permettez, M. le Président, moi, je dirais autre chose de complètement différent. Vous avez parlé, lors de votre présentation, de la caution pour le paiement des salaires, en disant que c'était comme si on obligeait Provigo à payer une caution. Le

problème, disons, c'est que les travailleurs de Provigo sont directement liés par une convention de travail à leur entreprise. Et aussi, j'imagine qu'il y a peut-être moins de mouvance dans le milieu de travail quand il s'agit des gens de Provigo ou de n'importe quel autre genre d'entreprise, sauf que dans le domaine de la construction, ce n'est pas évident.

J'aimerais savoir comment vous pouvez faire en sorte... Peut-être que le problème ne se pose pas chez vous, comme ça peut se poser dans d'autres groupes de travail, d'autres corps de métier. On a vent assez souvent dans nos bureaux de comté d'entreprises qui sont disparues dans le décor en laissant des travailleurs non payés, souvent même après avoir passé des contrats avec des camionneurs artisans et toutes sortes de gens dans le milieu et puis, tout à coup, pouf! tout le monde est disparu! Il n'y a personne de payé et on court après. Je pense que c'est à partir de ce genre de problème que le ministre dit: Bon, bien, écoutez, peut-être qu'il faudrait payer une caution pour assurer une espèce de base de revenus pour tout ce beau monde-là.

Comment vous réagissez, dans le fond, très pratiquement, au fait qu'il y a - du moins, nous, on en entend parler - des travailleurs de la construction qui ont souvent beaucoup de difficulté à se faire payer par des entrepreneurs qui sont plus ou moins solvables? C'est quoi, votre façon de répondre à ça?

M. Lavallée (Fernand): Je veux vous faire remarquer que l'entrepreneur que je suis et comme mes 2300 membres sont, on a la responsabilité présentement d'endosser personnellement leur marge de crédit et de supporter leurs comptes à recevoir. Et lorsque l'entrepreneur fait faillite, si c'est le cas, il perd sa chemise, ce gars-là. Et non seulement il perd sa chemise, il endosse personnellement par ses biens les responsabilités des engagements bancaires.

Vous parlez d'une caution. Pour avoir une caution, il faut que la compagnie qui cautionne ait également des endossements personnels. Alors, l'entrepreneur qui oeuvre présentement dans le domaine de la construction a un potentiel d'emprunt. On ne peut pas signer indéfiniment à la banque et avec les compagnies de caution. On fournit des cautions de réalisation de nos contrats. On fournit des cautions au propriétaire pour lui garantir qu'on va terminer et accomplir nos travaux. On garantit personnellement aux banques les marges de crédit. On garantit personnellement par nos inventaires. On supporte des retenues qui sont imposées par les devis sur les projets de construction, des retenues qui durent un an. Là, vous nous demandez une autre caution additionnelle à ça.

M. Claveau: Je ne vous le demande pas, là.

M. Lavallée (Fernand): Mais c'est ce qu'on nous demande.

Le Président (M. Bélanger): Malheureusement, je vais vous demander d'en rester là puisque le temps est écoulé. Vous voyez comme ça passe vite une heure!

M. Lavallée (Fernand): Mais on n'a pas répondu à ce monsieur-là.

M. Claveau: Est-ce qu'on peut avoir un consentement? J'aimerais avoir, si le ministre...

Le Président (M. Bélanger): Non. On s'est entendus qu'on ne faisait pas ça puisqu'on en a jusqu'à minuit et ça va amener le dernier groupe à passer beaucoup trop tard cette nuit. Ça fait que si on veut s'en tenir à notre horaire, on est mieux d'être très stricts. Je suis un "casseux" de party, mais je maintiens ça. Alors, M. le ministre, si vous voulez dire un mot de remerciement à ce groupe.

M. Cherry: D'abord, je veux vous remercier de vous être déplacés aujourd'hui et de nous avoir fait partager votre proposition et votre mémoire. Je veux vous assurer que vos représentations sont importantes dans l'exercice qu'on a à faire aujourd'hui. Je vous dis à vous autres, comme je l'ai dit aux groupes qui vous ont précédés, que suite à l'exercice d'aujourd'hui, j'ai demandé à l'équipe du ministère de... On va travailler en fin de semaine et on va regarder ce qu'on peut faire ensemble.

M. Lavallée (Fernand): Si vous avez besoin d'aide, on va vous assister. (21 heures)

M. Cherry: C'est pour ça que je le fais publiquement, pour que si vous n'y étiez pas, je pourrais vous dire que quand on a tenté de vous rejoindre vous n'étiez pas là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Alors, vous avez déjà la réponse si vous avez des problèmes.

M. Lavallée (Fernand): On vous remercie infiniment, monsieur.

M. Cherry: O. K.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, M. Lavallée, messieurs, ça m'a fait plaisir de vous entendre. Juste une petite remarque sur la caution. Dans le fond, c'est pour payer le salaire. Comme vous avez peu d'employés - à l'exception de vous qui êtes à la table, généralement, les

entrepreneurs autonomes n'en ont pas ou peu -ça ne pourra pas coûter très cher comme caution pour couvrir le coût des salaires.

M. Lavallée (Fernand): Est-ce qu'il y a un minimum?

Mme Blackburn: Oui.

M. Lavallée (Fernand): La caution devra couvrir combien? Aujourd'hui, j'en ai trois, demain...

Mme Blackburn: Ça, ça n'a pas été établi. Vous avez raison sur un...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!

S'il vous plaît! J'aimerais qu'on s'en tienne à remercier nos invités, qu'on ne reparte pas ie débat...

Mme Blackburn: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): ...le temps est écoulé.

Mme Blackburn: Mais vous savez, M. le Président, comme on leur a un peu volé quelques minutes, je me suis dit qu'on pouvait leur en consacrer un petit peu plus.

Le Président (M. Bélanger): C'était généreux de votre part, mais... Alors, la commission remercie la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec et appelle à la table des témoins l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, autrement dit, l'APCHQ. Messieurs, si vous voulez vous approcher.

Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec

Si vous me permettez, je vais demander à chacun de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Merci de votre collaboration. Je comprends que c'est long de rester, là, en silence, docilement à écouter, ce que vous faites très bien d'ailleurs. J'apprécie l'appui que vous nous donnez en maintenant ce silence-là.

Nous recevons maintenant l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, l'APCHQ, dont le président est M. Reynald Jacques. J'inviterais M. Jacques à nous présenter les gens qui l'accompagnent et à nous présenter son mémoire. Pour s'entendre, vous avez plus ou moins 20 minutes pour la présentation de votre texte et l'échange avec les parlementaires est de 40 minutes. Alors, c'est à vous, allez-y.

M. Jacques (Reynald): Merci. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, j'aimerais vous présenter mes permanents: M. Orner Rousseau, vice-président à l'APCHQ, et M Serge Crochetière, conseiller.

Nous devons, encore une fois, venir défendre les intérêts de nos membres devant vous, face à l'intervention du gouvernement, cette fois. Cependant, c'est également l'intérêt de l'ensemble des citoyens qui est menacé ainsi que celui de nos associations d'entrepreneurs. Le gouvernement semble avoir adopté l'attitude d'imposer des mesures discutables au nom d'une supposée paix sociale sans tenir compte de leurs impacts sur l'habitation. On agit comme si la capacité de payer des gens était inaltérable en imposant des mesures coûteuses comme exclure les entrepreneurs autonomes, interdire aux entrepreneurs de travailler seuls, exiger deux cautionnements pour garantir les mêmes risques et le reste. Nous osons croire que le présent exercice aura pour effet de ramener un juste sens des valeurs dans les lois que vous vous proposez d'adopter. Je cède la parole maintenant à M. Rousseau.

M. Rousseau (Omer): M. le Président, M. le ministre, évidemment, avant de procéder d'une façon directe, c'est-à-dire article par article, j'aimerais simplement vous faire quelques commentaires sur l'organisation au cas où quelques membres de cette commission ne connaissent pas l'organisation.

En fait, l'Association provinciale représente plus de 10 000 entreprises à travers le Québec, dont près de 7000 sont réparties à travers 14 associations affiliées et les autres, évidemment, dans d'autres associations affiliées qui ont une certaine parenté avec l'organisation.

Il est très important que vous notiez que l'organisation, par l'entremise de ses entreprises, représente plus de 80 % de tous les travaux qui se font dans le secteur résidentiel, constructions neuves et rénovation. À ce titre, je peux, simplement vous faire remarquer que dans le cadre de Corvée-habitation, le programme qui existait en 1982 et deux ou trois années après, de même que dans le cadre du programme Mon taux, mon toit, les dernières statistiques sont sorties. Dans un cas, nous représentions plus de 90 % de toutes les unités résidentielles de même que dans ce cas-ci, aux environs de 85 %.

C'est donc dire que je pense qu'on représente facilement... On peut parler facilement au nom de l'industrie de la construction résidentielle. Par ailleurs, je veux simplement vous dire que l'organisation existe depuis 1961. Néanmoins, je pense qu'on a été capable d'assumer notre responsabilité. D'ailleurs, puisqu'on parle de responsabilisation, je pense qu'on peut en faire état. Depuis 1976, nous avons été le premier programme de garantie au Québec. Les autres sont venus nous copier par après. D'ailleurs, c'est le programme de garantie qui a la plus grande étendue, c'est-à-dire en termes de

garantie, en termes de protection au niveau des consommateurs à travers tout le Canada.

Aussi, nous avons été les premiers à instaurer un programme de garantie dans le domaine de la rénovation. À toutes fins pratiques, nous sommes le seul programme qui est offert dans ce domaine-même au Québec. Par ailleurs, je pense qu'il y a lieu que vous sachiez que nous offrons différents services. Nous sommes présents surtout, c'est-à-dire en termes de présence au niveau du consommateur, tant au niveau des expositions... Aussi, nous sommes très présents en termes techniques: formation et transferts technologiques.

Bref, c'est une organisation qui représente, je pense, l'industrie de la construction. Pour vous montrer jusqu'à quel point l'industrie de la construction est extrêmement importante, je voudrais simplement vous référer à deux tableaux de statistiques qui sont tirés de Statistique Canada de même que de la Commission de la construction du Québec. Vous remarquerez que l'industrie de la construction résidentielle représente aux environs de 41 % de tout le PNB dans l'industrie de la construction.

C'est un tableau, évidemment, à partir des permis de construction qui émanent depuis 1991. On prend l'autre tableau de la CCQ et on arrive au même pourcentage bien que la répartition entre la construction neuve et les autres secteurs de rénovation ne sont pas les mêmes chiffres. Évidemment, on ne parie pas nécessairement des mêmes années et on ne part pas nécessairement sur la même base. On en arrive toujours quand même à la même proportion, c'est-à-dire 40 %, aux environs de 40 % 42 % dans le secteur de la construction résidentielle par rapport aux autres secteurs.

Donc, il est extrêmement important que cette commission comprenne que quand elle va jouer au niveau des relations de travail, quand elle va jouer dans l'industrie, elle joue à 40 % dans le secteur de la construction résidentielle, et elle joue directement sur le consommateur. Alors, sur ce, je veux simplement vous dire, M. le ministre, que je pense que les deux lois qui font l'objet d'une étude présentement nécessitent des modifications.

Si on prend le projet de loi 185, nous avons, je pense, des commentaires sur deux points. Evidemment, vous en avez entendu parier toute la journée, mais nous avons encore des commentaires qui ne seront peut-être pas nouveaux. En tout cas, on va tenter d'y ajouter des éléments d'information, notamment sur l'entrepreneur autonome et le cautionnement.

Quant au projet de loi 186, nous avons des commentaires à faire sur la structure de la nouvelle Régie du bâtiment, notamment sur la présence du monde patronal sur cette nouvelle régie. Nous voulons aussi attirer votre attention sur la question de l'attestation de conformité - je pense qu'elle est extrêmement importan- te - de même que sur l'autre point, le cautionnement par rapport au fonds d'indemnisation, mais également par rapport à nos garanties financières.

Bref, je vais laisser à Serge Crochetière le soin d'y aller, c'est-à-dire point par point. Après ça, on pourra, à deux, répondre aux questions.

Le Président (M. Bélanger): M. Crochetière.

M. Crochetière (Serge): Merci, M. le Président. M. le ministre, mesdames, messieurs. Quant au projet de loi 185, le premier sujet dont on doit vous entretenir, c'est la question de l'entrepreneur autonome. Nous n'avons jamais nié, au cours des 10 dernières années où j'ai participé à des commissions parlementaires, que, chez nous, l'entrepreneur autonome - dans le temps, on pouvait appeler l'artisan - constituait la soupape de sûreté qui permettait à l'industrie du secteur résidentiel de continuer à oeuvrer alors que toute la négociation se fait sans tenir compte véritablement de ses besoins et de la demande du marché. Alors, pour nous, c'est quand même un élément qui est essentiel.

Cependant, il faut, je pense, ramener les choses à leur vraie dimension. On en parie toujours en pariant du travail au noir. En vertu de quoi traite-t-on ces gens-là de travailleurs au noir? Les tableaux qu'on vient de vous montrer établissent qu'on effectue plus de 9 000 000 000 $ d'affaires par année; et ça, ce sont les statistiques officielles, ce n'est pas du noir. Ce sont les contrats, ce sont les permis de construction, tels qu'ils sont émis par les municipalités. Quand on vous dit - comme j'ai entendu cet après-midi - que l'enrepreneur général paie comptant le gars avec sa pépine... D'abord, je vous ferai remarquer que c'est à peu près le seul travailleur autonome que vous allez continuer à autoriser à oeuvrer. Mais, indépendamment de ça, il n'est pas payé comptant. C'est faux. Il est payé en argent, généralement inscrit par chèque, avec la TPS et peut-être - j'espère que non - avec la TVQ. Tous ces chiffres-là sont des chiffres officiels.

De plus, ces gens-là sont qualifiés. Ils ont une carte de compétence pour faire les travaux qu'ils exécutent. En plus, ils ont une licence émise par la Régie des entreprises de construction du Québec. Alors, quand on parie de travailler au noir et qu'on vise essentiellement les travailleurs autonomes, c'est tout à fait inexact. Le travail au noir, il existe, mais il n'est pas le propre des travailleurs autonomes. Il peut être fait aussi bien par les salariés de la construction. Je pense que tout le monde ici, dans la salle, si on faisait, peut-être pas un examen de conscience, mais si on se demandait si on connaît des gens qui font exécuter du travail au noir, qu'on se demande si c'est toujours par des travailleurs autonomes ou si ce n'est pas parfois par un cousin qui est lui-même un salarié de la

construction qui vient le samedi. Alors, ce n'est pas le propre des travailleurs autonomes. Ce n'est même pas la grande partie du travail au noir qui se fait de cette façon-là. Ce n'est pas illégal, non plus, les gestes qu'ils posent. On veut rendre ça illégal, mais ça ne l'est pas. Je comprends qu'il y aurait eu une entente. Certaines personnes ont même parlé de "dear, il y a trois ans. On n'y était pas partie. On maintient que le travailleur autonome est un travailleur légal dont on a besoin, nous, sur nos chantiers.

D'autre part, les travailleurs ou les employeurs - ça a été reconnu, entre autres, par l'AECQ - n'ont pas nécessairement des salariés de façon permanente pendant toute l'année. Il s'agit d'une embauche qui est cyclique. Il est important aussi que ces gens-là puissent continuer à travailler s'ils veulent pouvoir continuer à donner de l'emploi aux salariés.

Maintenant, la notion de travailler à l'aide d'un salarié sur un chantier. Dans le résidentiel, on n'a même encore été capable de définir ce qu'était vraiment un chantier. Sur un projet étendu, où il y a des maisons en rangée, des maisons unrfamiliales et des maisons en hauteur, est-ce qu'on a un chantier par lot? Si c'est discontinu, parce que le promoteur fait affaire avec cinq constructeurs, à ce moment-là, est-ce qu'il va être obligé d'avoir un salarié qui va le tenir par la main toutes les fois qu'il va faire un travail dans une pièce, même, disons, dans une série de maisons? Personne n'a jamais été capable, même la CSST actuellement, de nous donner une définition exacte de ce qu'est un chantier. Comment va-t-on faire pour vivre avec ça?

Alors, sur la question du travailleur autonome - parce que je ne veux pas passer tout le temps qui nous est alloué là-dessus - c'est, en gros, ce qu'on avait à vous dire. On veut que le travailleur autonome continue à travailler. On dit que l'application que la loi en fait est impossible à vivre pour les entrepreneurs, dans le secteur résidentiel, même s'ils avaient un salarié, parce que c'est impossible de prétendre qu'ils vont toujours être en compagnie de ce salarié, sur un chantier, tel qu'on pourrait le définir. (21 h 15)

La question des cautionnements, maintenant. Pour nous, il s'agit d'un dédoublement des exigences posées aux entreprises de construction. Si vous parlez de cautionnement... Quel type de cautionnement allez-vous exiger? Est-ce que ça va être un cautionnement comme celui qui est demandé par la Régie des entreprises de construction, c'est-à-dire pour les fraudes, malversations, détournements de fonds? C'est facile, ça. Est-ce que ça va être comme l'Office de la protection du consommateur, en fonction du chiffre d'affaires ou si ça va être vraiment pour protéger la masse salariale? Or, vous voulez avoir une caution pour un chiffre d'affaires qui n'est pas encore déterminé. Tantôt, des intervenants, aussi, ont bien illustré la difficulté. Est-ce qu'on a été voir les compagnies de caution, actuellement, qui agissent dans l'industrie pour voir ce que sont leurs exigences? On exige... C'est vrai que c'est pour du cautionnement d'exécution, matériaux et main-d'oeuvre, mais on va exiger souvent au moins une liquidité de 50 000 $ à 75 000 $ dans les coffres de l'entreprise, plus des actifs ou des immobilisations pour 100 000 $ à 200 000 $. Est-ce qu'on a vérifié auprès de la Régie des entreprises combien d'entreprises pourraient continuer a se qualifier? Actuellement, juste avec le projet de loi, tel qu'il est proposé, vous auriez à l'oeil 10 000 entreprises qui disparaîtraient parce que sur 28 000, 18 000 ont rapporté des heures ouvrables. C'est à la page 7 du mémoire. Si, en plus, on exigeait des cautionnements, tel qu'on les trouve actuellement, cautionnement d'exécution, matériaux et main-d'oeuvre, sur la même base, pour les masses salariales - ça, c'est un chiffre que je lance en l'air, je n'ai aucune compétence - à mon avis, vous allez avoir un autre 50 % des entreprises qui ne pourront plus se qualifier. Ça prend de ces gens-là pour les faire travailler, vos salariés, M. le ministre. Alors, ce sont, en gros, les représentations qu'on voulait faire sur le projet de loi 185.

Je vais maintenant passer au projet de loi 186, si vous voulez bien. L'ordre de mes commentaires n'est pas nécessairement celui qui va avec l'importance des sujets, mais c'est parce qu'il suit l'ordre chronologique du texte de loi.

Dans un premier temps, ce qui nous a concernés à la lecture de ce projet de loi là, c'est la question des attestations de conformité. La Loi sur le bâtiment actuelle parlait d'attestation de conformité, mais le Code, tel qu'il était défini, était établi par le gouvernement et mis en application par une régie. Les attestations de conformité devaient porter sur des éléments tels que la solidité, la salubrité, la sécurité, l'accès aux bâtiments pour les handicapés. On est d'accord avec ça, on a toujours été d'accord avec ça. Mais ce qu'on nous propose ici, c'est que la Régie, désormais, établit des normes et c'est elle qui choisit, parmi les normes qu'elle aura établies, celles qui sont assez importantes pour qu'on émette une attestation de conformité.

Or, une attestation de conformité qui ne toucherait pas à la solidité, à la stabilité, qui ne créerait aucun préjudice, qui ne créerait aucune perte de valeur, ça va plus loin même que le Code actuel et ça va plus loin que le Code, le projet de Code civil puisqu'on va pouvoir accepter sans réserve des défauts apparents. Le texte, en plus, crée une responsabilité spécifique, c'est-à-dire au qualificateur technique qui dort personnellement répondre de ça. Pour un entrepreneur de construction résidentielle, qui construit 200 ou 300 unités, je ne dirais pas aux quatre coins de la province parce que ça, il n'y en a pas beau-

coup, mais aux quatre coins de la ville de Montréal, par exemple, comment va-t-il faire? C'est lui qu'on personnalise, c'est-à-dire qu'on responsabilise directement et personnellement. En plus de ça, cette attestation-là doit porter sur tous les éléments qu'on va bien vouloir établir sans justifier si ça crée un préjudice quelconque. En plus, c'est la Régie qui a fait le Code qui doit juger de la conformité des attestations; c'est elle qui a le pouvoir de nier la validité de ces attestations-là. C'est cette même Régie qui a le pouvoir de poursuivre ces gens-là qui ont signé personnellement. Ils ont aussi, après avoir établi un code de déontologie, le pouvoir de les faire parader devant eux. Ce n'est qu'à ce moment-là que la Régie, suivant le texte de la loi, a l'obligation de les convoquer pour se défendre, à savoir si on va suspendre ou révoquer leur licence. Mais quand la Régie va avoir fait tout l'autre processus, quelle chance l'entreprise va-t-elle avoir de se faire entendre validement? Elle est déjà condamnée. Il n'y a plus aucune chance d'avoir une possibilité d'audition qui va être bien fondée là-dessus. Alors, c'étaient nos remarques concernant les attestations de conformité.

On a parlé aussi, très sommairement, de boucher un gros trou quant au travail au noir, en faisant des ententes avec les municipalités. Premièrement, il faut avoir l'entente. Avec l'ancienne Régie, ils n'ont même pas été capables de régler le cas avec toutes les municipalités du Québec pour qu'elles leur dénoncent les numéros de licence qui avaient déjà été enregistrés parce que les municipalités ont toujours dit au gouvernement: Si vous voulez nous attribuer des fonctions, donnez-nous un dédommagement. Dans le contexte actuel - là, encore une fois, c'est une réflexion tout à fait personnelle - je ne sais pas si les municipalités sont prêtes à collaborer beaucoup et à travailler gratuitement pour le gouvernement provincial ou pour un organisme de l'État.

Deuxièment, la loi, telle qu'elle est établie, exclut les constructeurs propriétaires et les personnes qui construisent des bâtiments personnels de l'obligation de détenir même une licence de constructeur propriétaire. La municipalité va enregistrer quoi? C'est dans ce domaine-là qu'on risque d'avoir le plus de travail au noir. Or, il y a un trou gros comme ça. Il va se présenter, il va dire: Moi, je veux un permis. Je vais dire: Donne-moi ton numéro de licence. Je n'en ai pas besoin, c'est pour moi. La Régie ne le saura pas plus. C'est l'article 49.2 de la loi.

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à faire rapidement puisque...

M. Crochetière: O.K., dans ce cas-là, je vais aller peut-être à des choses qui, pour nous, sont plus importantes. Il y a la question des plans de garantie. Quant aux plans de garantie, que la Régie puisse les encadrer, en exiger dans le domaine résidentiel, 77, 78, et les encadrer, on peut - non seulement on peut mais on comprend - être d'accord avec ça. Là où on n'est pas d'accord, par exemple, c'est quand, en plus, la Régie prétend avoir le droit de fixer les primes, fixer les réserves, fixer les placements et fixer les indemnités à payer tout en exigeant qu'on ait des cautions. Nous, on a une caution, c'est connu. On a une compagnie d'assurances très solvable qui garantit toutes nos obligations. Or, pourquoi la Régie, en plus, viendrait-elle nous dire quelles doivent être nos réserves quand c'est déjà établi, et que notre assureur fournit tous les chiffres au Surintendant des assurances du Québec?

En plus, après avoir imposé cet encadrement-là aux plans de garantie, la Régie se réserverait, suivant le texte de l'article 84, le droit d'exiger un autre type de cautionnement supplétif. Pourquoi faire si elle a déjà déterminé la nature, la portée et l'étendue de la garantie? Qu'on restreigne 84, à ce moment-là, à d'autres secteurs - institutionnel, commercial, ça va -mais pas résidentiel puisque le résidentiel est déjà couvert par les articles 77 et 78, tant dans le neuf que dans la rénovation. Si jamais nous ne pouvions pas satisfaire aux exigences établies par la réglementation de la Régie, elle a le pouvoir d'imposer un cautionnement et de créer un fonds d'indemnisation supplétif. Cependant, la loi ne nous garantit pas qu'elle aurait le droit d'exiger de ces cautions-là la même couverture que celle qu'elle doit, qu'elle peut exiger des plans. Or, M. le ministre, les représentations qu'on nous avait faites, c'est que si jamais on n'était pas capables d'y arriver et qu'on nous remplaçait par des cautions, c'était tout naturellement parce que ces cautions-là pourraient satisfaire aux exigences qu'on nous imposerait. Or, ce n'est pas ça que le texte de loi dit à l'article 86. C'est autre chose.

Alors, ça veut donc dire que, techniquement, elle pourrait nous demander des exigences très élevées, sachant pertinemment qu'on ne pourrait pas les rencontrer pour substituer une caution a nos plans de garantie. C'est parce qu'on s'appelle plan de garantie mais, dans les faits, ce que l'on pratique, c'est du cautionnement. Est-ce qu'on va pouvoir aller se qualifier quand même dans une réglementation moins forte et moins grande sous notre titre de caution? Ça ne se tient pas. Il y a quelque chose là-dedans qui est paradoxal, qui ne résiste pas à l'analyse.

Reste la composition de la Régie elle-même. La Régie, telle qu'elle est proposée, aurait un conseil d'administration composé de cinq membres où on a aucune garantie que l'industrie serait représentée. Le comité consultatif, disons que c'est un comité à peu près consultatif. La Régie peut lui donner des mandats et les quelques mandats que la loi lui donne d'office, la Régie n'est pas obligée de tenir compte de ses avis.

Alors, pour ce qui est de la composition de la Régie, on voudrait qu'au conseil d'administration, la majorité des sièges soient détenus par des gens désignés par l'industrie de la construction, les associations d'entrepreneurs. Quant au comité consultatif, on voudrait aussi y avoir une place prépondérante.

Or, en résumé, si vous voulez bien, ce que nous préconisons, c'est: maintenir le statut actuel de l'entrepreneur autonome; garantir, pour tout entrepreneur, le droit d'exécuter lui-même des travaux de construction sans la présence d'un salarié à ses côtés; abroger les dispositions de l'article 82.1 du projet de loi 185; maintenir l'universalité de l'application de la Loi sur le bâtiment - dans le projet de loi 186, le législateur s'est absous de l'application automatique de la loi, c'est-à-dire qu'autrefois on disait: La présente loi lie le gouvernement, ses ministères et ses organismes mandataires. Là, on a ajouté: dans la mesure où le gouvernement adopte un règlement à cet effet. On vient de changer complètement la portée de la loi; restreindre les attestations de conformité aux dispositions concernant la sécurité, la stabilité et la salubrité et responsabiliser l'entreprise tout en dégageant le qualificateur personnellement; repenser la pertinence d'un système de points d'inaptitude - je n'ai pas eu le temps d'élaborer, si on a le temps tantôt, je vous en parlerai; s'abstenir de s'ingérer dans les plans de garantie après avoir défini les critères de solvabilité auxquels ils doivent s'assujettir; restreindre l'application des dispositions du nouveau article 84 aux seuls secteurs de la construction commerciale, industrielle et institutionnelle; assujettir la mise en application des dispositions des articles 85 et 86 aux mêmes critères et conditions que ceux édictés pour les plans de garantie en vertu des articles 77 et 78; assurer la présence prépondérante des représentants de l'industrie au sein du conseil d'administration de la Régie du bâtiment; désigner nommément les associations d'entrepreneurs visés par cette loi; assurer un pouvoir réel au comité consultatif et, à la demande de certains intervenants, nous vous soulignons que nous sommes aussi d'accord pour que les amendes payées aillent dans les coffres de l'ACQ. D'accord. Ce sont les représentations qu'on avait à vous faire. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Cherry: O.K.

Le Président (M. Bélanger): ...les amendes relatives à la loi 186 aillent à la Régie du bâtiment!

M. Cherry: O.K. Merci. D'abord, c'est la troisième fois dans les dernières semaines qu'on a l'occasion de se rencontrer; le président, c'est la deuxième fois cette semaine. Je m'adresse à vous parce que lors de notre première rencontre, en début de semaine, vous m'avez fart l'historique de votre entreprise. Vu que vous êtes un homme à qui on peut facilement dire que vous avez personnellement beaucoup d'expérience dans la construction domiciliaire - je pense que c'est là-dedans - j'aimerais ça que vous décriviez, pour les besoins de la commission, basé sur votre expérience, les types de travaux qui peuvent être exécutés facilement par - ce que vous avez l'habitude de décrire dans votre jargon - les "travailleurs autonomes" sur une construction résidentielle, une unrfamiliale. Vous en avez fait plusieurs, donc...

M. Jacques: Vous avez le goudronneur de solage, le polisseur de ciment, pour les planchers de cave...

M. Cherry: Oui.

M. Jacques: ...le poseur de déclin extérieur, le tireur de joints, le poseur d'armoires. Il y en a plusieurs autres... le plombier, l'électricien. Toujours en disant qu'on parle de la petite maison, ce que je vous parlais cette semaine, une petite maison de 70 000 $. On ne peut pas se permettre dans des maisons de ce prix-là d'avoir des entrepreneurs avec des employés ou plusieurs employés. Comme exemple, faire une entrée d'eau. Un plombier... si ils viennent, deux hommes, pour faire un travail qui dure une demi-heure, trois quart d'heure, c'est inacceptable du côté des coûts. Vous connaissez les salaires des employés de la construction. Pour réussir à faire une maison de même, il faut réduire les coûts au minimum. C'est facile... Si on est obligé d'avoir deux employés partout où on va faire ces travaux-là, cette petite maison là de 70 000 $ va monter à 80 000 $ facilement. Par exemple, le poseur de tapis. S'H faut qu'ils soient deux pour faire ce travail-là, c'est inacceptable. Le poseur de céramique, le menuisier de finition... Dans une petite maison comme ça, il y a 12 portes, les moulures, les plinthes de bas de mur, les cadrages de fenêtres et les tablettes de garde-robe, c'est fini. Un homme tout seul fait ça dans une journée. Si on met deux hommes, les frais de déplacement de ces hommes-là durant la journée pour s'en aller sur un autre chantier... Moi, je viens d'une petite ville comme Victoriaville, alors le volume de construction n'est quand même pas énorme dans des périodes de récession comme on vit là. (21 h 30)

M. Cherry: C'est ce que vous m'aviez décrit cette semaine et c'est ce que je voulais, pour les bénéfices de la commission, que vous refassiez ici. Maintenant, je dirigerai mes questions à n'importe quel membre du distingué panel. Concernant le travailleur autonome, dans votre mémoire, sur ce point, à la page 11, vous

demandez au gouvernement d'adopter des critères qui reflètent le besoin d'embauché cyclique.

Voulez-vous essayer d'être un peu plus explicite sur ce point, s'il vous plaît?

M. Crochetière: En fait, c'est clair. On veut avoir une concordance aux livres au moins plutôt qu'aux chantiers.

M. Cherry: Une concordance aux livres?

M. Crochetière: Plutôt qu'aux chantiers, c'est-à-dire... En fait, quand l'entrepreneur n'a pas besoin d'avoir un salarié, on considère qu'il est inutile d'exiger de lui qu'il engage un salarié pour faire le type de travail qu'on vous décrivait tantôt. Quand il y a assez de travail pour l'engager, le salarié, qu'il l'embauche. Mais, entre-temps, s'il peut justifier d'un nombre d'heures qu'il a fait travailler des salariés, au moins, il aura un minimum. Il pourrait, lui, profiter de cette espèce de minimum-là qu'il vous aurait fourni pour justifier de sa présence sur les chantiers quand il n'y a pas assez de travail pour deux.

M. Cherry: O.K. Comme vous y étiez cet après-midi, vous avez été présents au moment des mémoires qui ont été entendus, certains d'entre vous...

M. Crochetière: Certains.

M. Cherry: ...concernant le cautionnement, et vous l'avez soulevé tantôt. Il m'apparaît que ce que vous désirez, c'est que le cautionnement soit couvert par le fonds d'indemnisation. Donc, une augmentation possible de la cotisation si, ce qui nous a été décrit aujourd'hui - on disait que le fonds est rendu à 1 400 000 $ parce qu'il est utilisé fréquemment. D'autres intervenants préfèrent un cautionnement individuel plutôt qu'un collectif. Quel est votre point de vue? Pouvez-vous donner les raisons qui supportent votre point de vue, s'il vous plaît?

M. Crochetière: À notre point de vue, on est mieux, effectivement, avec une majoration de la cotisation. D'abord, c'est tout lié à l'exercice véritable de chacune des entreprises puisque c'est basé sur les heures travaillées effectivement par chacune des entreprises. Ça n'amène pas l'obligation du coût et du gel des liquidités des entreprises comme une caution. D'abord, dans notre mémoire, ce qu'on redoutait, c'est qu'on impose les deux systèmes. La dualité des deux exigences, ça c'est catastrophique! Si on nous demandait le choix entre les deux, notre préférence irait vers le fonds d'indemnisation. C'est sûr que plutôt que d'en avoir deux, on préfère la caution. Mais, si on a à choisir entre les deux, on va préférer nettement le fonds d'indemnisation.

M. Cherry: Que ce soit bien clair. Quand il est question du fonds collectif d'indemnisation, c'est toujours pour les salaires.

M. Crochetière: C'est ça, pour les cas d'insolvabilité des entreprises... pour les salaires.

M. Cherry: Donc, si on parle d'un cautionnement, c'est toujours pour prendre soin de la même situation au lieu d'aller dans le collectif et de l'augmenter...

M. Crochetière: C'est ça, exactement.

M. Cherry: ...de le faire parce que vous avez entendu, cet après-midi, des intervenants dire que ce sont toujours les mêmes bons qui payent pour les méchants et dire que c'est toujours à peu près les mêmes qui font faillite. C'est presque cyclique. Il faut toujours - ce que vous avez entendu cet après-midi, on revoit passer les mêmes noms - piger dans le fonds de ceux qui ont respecté, eux, qui ont mis l'argent. C'est 0,02 $ de l'heure, vous allez me dire, mais c'est de l'argent quand même pour toujours dépanner ceux qui ont pris un risque. Rendus à l'automne, ça n'a pas marché. Ils font faillite, ils n'ont pas payé leurs gens. Il faut encore revider ça. Donc, s'il y avait celui-là, le double, à ce moment-là, là, si celui qui le prend en est un mauvais utilisateur, ça s'appliquera à lui plutôt que de faire passer sa facture à l'ensemble de la collectivité. C'est dans ce sens-là que je voulais vous clarifier ce point de vue et vous entendre.

M. Crochetière: D'une part, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen, même au niveau du fonds, d'établir une codification distincte justement pour ceux qui auraient déjà fait faillite? Deuxièmement, la Loi sur les compagnies existe encore, même pour l'industrie de la construction. Les administrateurs sont personnellement responsables pour les salaires, traitements impayés pour les six mois qui précèdent la faillite. C'est parce qu'on ne va pas les chercher dans certains cas. Enfin, même si on impose une caution, c'est le principe de l'étendue du risque. Ceux qui vont avoir fait faillite, quand la caution va avoir été payée, à qui elle va demander les plus grandes exigences, et à qui elle va demander les plus grosses primes? Aux bons qui vont rester, M. le ministre. Ils vont repayer pareil.

M. Cherry: Toujours sur le cautionnement supplétif au plan de garantie, l'article 84.

M. Crochetière: Pardon? Je m'excuse.

M. Cherry: Je vais recommencer. La 186... le cautionnement supplétif au plan de garantie, l'article 84. Vous nous demandez de restreindre le cautionnement à la construction commerciale, industrielle ou institutionnelle. Est-ce qu'on doit

comprendre que, dans le résidentiel, vous êtes d'accord que les critères pour les plans de garantie vont couvrir le risque que visait l'article 84?

M. Crochetière: Effectivement, puisqu'on était... Dans le résidentiel, nous avons et la construction neuve et la rénovation, 77 et 78, et nous couvrons déjà les éléments qui constituent, disons, toute la protection des acomptes. Il y aura des discussions avec la Régie. Je présume que la Régie voudra peut-être parler de privilèges ou de choses comme ça. On va être disposés à en discuter dans la mesure où il va en rester, des privilèges. L'Office de révision du Code civil propose de les abroger.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Dionne: Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais intervenir à ce moment-ci parce que, tout à l'heure, je n'ai pas pu le faire. Notre temps était écoulé et Mme la députée de Chicou-timi a soulevé certains points sur l'importance que les députés ministériels attachaient au dossier et aux deux projets de loi. J'aimerais quand même, avant d'aborder ça, parler peut-être de votre mémoire parce que vous parlez des grappes industrielles. En tant qu'ajointe parlementaire au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, effectivement, c'est nouveau cette semaine de parler de grappe, de parler d'habitat. Quand on parle de cette grappe-là, ça implique un tas de monde, que ce soient les entrepreneurs, que ce soient les travailleurs, que ce soient les scieurs qui font des deux par quatre, aux gens qui font faire de la décoration. À un moment donné, on va en arriver à la maison intelligente de demain. Ça s'en vient quand même assez rapidement. Il va falloir que tout le monde se parle et que tout le monde se concerte pour en arriver à la faire la plus intelligente possible.

Quand Mme la députée de Chicoutimi a parlé de nos préoccupations, c'est que... J'aimerais vous dire et dire à ceux qui sont passés avant vous que, effectivement, les députés ministériels ont travaillé. Cette semaine, on a rencontré à deux reprises le ministre - dont une fois ce matin - sur plusieurs préoccupations qu'on a. Bien sûr, on parle du travail au noir, c'est sûr, mais, de façon particulière, sur la notion d'entrepreneur autonome. Je pense qu'on va continuer d'attacher une importance à ce point-là en particulier puisque ce n'est pas facile à déterminer. Le fait que vous ayez, durant la fin de semaine, le temps de discuter avec le ministre et ses fonctionnaires, je pense que c'est très intéressant puisque, lundi, nous aurons une autre réunion sur le même sujet. Donc, je pense qu'il y aura peut-être beaucoup de travail de fait durant la fin de semaine, qui permettra d'essayer d'éclaircir ce point-là, et que l'entrepreneur autonome soit peut-être une notion qui soit juste et équitable pour tout le monde à travers le Québec, qu'on soit en région ou en ville.

J'aimerais aussi ajouter que l'autre préoccupation, c'est le travail au noir. Une des recommandations qu'a faites le Conseil du patronat, c'est une forme de crédit d'impôt qui serait fait pour les gens qui font faire des réparations, des rénovations. J'aimerais vous entendre sur vos idées. Comment enrayer le travail au noir qui... Je pense qu'au Québec, dans le moment, tout le monde en parle et tout le monde a des idées là-dessus. Vous avez sûrement des recommandations à nous faire, que ce soit à cette commission-ci ou au comité Poulin qui a déposé ses recommandations au gouvernement, ce matin. On en parie et on essaie de trouver des solutions pour s'assurer que les revenus qui doivent venir à l'État viennent et, je pense qu'on travaille au blanc dans l'avenir. J'aimerais vous écouter là-dessus.

M. Crochetière: Dans un premier temps, si les travaux exigent des plans de garantie, je peux vous dire que les plans de garantie exigent des entrepreneurs qu'ils aient des licences. Ça va peut-être régler une partie du problème dans ce contexte-là.

D'autre part, on a déjà suggéré une solution: que le donneur d'ouvrage, dans les cas où il s'agissait de travail au noir, c'est-à-dire de gens qui n'avaient aucune licence, aucune carte de compétence, soit dégagé du paiement de toute autre somme que du coût des matériaux et des heures travaillées dont on pourrait justifier auprès de l'ACQ. Les gens sachant qu'ils ne sont pas obligés de payer et les autres, sachant qu'ils risquent de ne pas être payés, vous en élimineriez peut-être plusieurs. Ça aussi, c'est une mesure qu'on n'a jamais voulu mettre de l'avant.

La question d'exemption d'impôt. Je présume que ça peut être important. Cependant, si on disait qu'on va exempter du paiement de l'impôt, il faudrait être certain que dans les cas du travail au noir, même le paiement d'impôt équivaut à une somme au moins équivalente à ce qu'ils sauvent en payant en dessous de la table, en bon français. Si l'incitation n'est pas plus forte, ils vont continuer à faire travailler des gens en dessous de la table. La justification du travail au noir, c'est d'abord de sauver de l'argent. Peut-être qu'il en reste une deuxième, c'est-à-dire qu'ils connaissent bien les gens en qui ils ont confiance même s'ils n'ont pas un certificat de qualification. Mais dans la mesure où ce serait un incitatif palpable, je crois qu'effectivement ce serait une bonne mesure.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous avez d'autres questions? Pas de question? Non. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, bonsoir. J'ai suivi avec attention votre exposé. Vous nous dites: Le travail au noir, ce n'est pas le fait des entrepreneurs autonomes ou ce n'est pas surtout le fait des entrepreneurs autonomes. Je pense bien avoir bien entendu ça tout à l'heure. C'est le fait de qui, et est-ce que ça existe?

M. Crochetière: J'ai dit que ça n'était pas uniquement ciblé chez les entrepreneurs autonomes, comme je l'ai entendu depuis le début de l'après-midi. En plus de ça, les représentations qu'on vous a faites, c'était que, automatiquement, quand c'était un entrepreneur autonome, il s'agissait de travail au noir. C'est ça que je voulais nier. Comme vous le voyez, il y a 9 000 000 000 $ de travaux donnés par des entrepreneurs en construction qui sont souvent ce que les gens appellent ici, de façon un peu dérisoire, des "brokers" - ce que partout ailleurs, au monde, on appelle des promoteurs, d'accord? - qui n'ont pas nécessairement des salariés, et qui ne sont pas nécessairement des gens qui fraudent l'impôt. Ce sont des gens qui paient leurs travailleurs et leurs entrepreneurs autonomes qui, eux, ont pignon sur rue. Ce sont des gens qui ont une licence, qui ont une place d'affaires, qui ont souvent, désormais, une corporation et qui paient, qui font des rapports d'impôt, qui ont des marges de crédit. Ce n'est pas du travail au noir. Jusqu'à aujourd'hui, ce n'est pas, non plus, illégal ce qu'ils font. Ils ont aussi les certificats de compétence pour exécuter les travaux qu'ils exécutent sur les chantiers. Alors, ce n'est pas le propre de ces gens-là d'avoir, si vous voulez, l'intention de faire du travail au noir comme on semble l'avancer depuis aujourd'hui.

Mme Blackburn: Là-dessus, je pense que vous n'avez pas tort et la mise au point est pertinente parce qu'on semble confondre deux choses: travail au noir et organisation qui permet de faire faire des travaux complets par des entrepreneurs autonomes qui sont embauchés - vous dites que ça se fait partout dans le monde - et qui, finalement, peuvent exécuter des travaux sans être soumis au décret de la construction. Ça, je pense, que c'est deux choses et vous avez raison. Mais, selon vous, est-ce que ça existe le travail au noir ou si ce n'est pas exclusivement le fait des entrepreneurs autonomes? À quelle place qu'on le retrouve particulièrement?

M. Crochetière: Vous voulez que je vous réponde vraiment?

Mme Blackburn: Bien oui, j'imagine, si je pose la question.

M. Crochetière: Je pense que tout le monde ici, dans la salle, connaît des contrats et plusieurs dans la salle ont donné des contrats au noir. Je pense que la plupart des gens, quand on arrive en commission parlementaire, font comme si ça n'existait pas. Ça vient de disparaître le travail au noir, alors que tout le monde ici connaît un voisin, un cousin, un ami qui le fait faire. Je ne vois pas pourquoi, quand on arrive ici, que ça vient de disparaître. C'est faux.

Mme Blackburn: Non, c'est parce que...

M. Crochetière: C'est chacun des citoyens qui le fait faire, le travail au noir. Si chacun des citoyens le fait faire, c'est que les conditions auxquelles on assujettit l'industrie de la construction résidentielle, ce n'est pas adéquat. C'est tout simplement ça. C'est une loi du marché.

Mme Blackburn: Dans votre mémoire, vous dites effectivement que si on a autant de travail au noir, c'est parce que c'est trop réglementé. J'essaie de retrouver la page parce que j'ai dû le lire un peu rapidement, comme vous ne l'avez pas fait... Bon, vous dites: Ça s'explique parce qu'il y a trop de règlements. Comme c'est trop réglementé, ça finit par coûter trop cher. Donc, on le fait faire en dessous de la table. Je ne le sais plus, je vais retrouver la page.

M. Crochetière: Je m'excuse, j'avais deux commentaires.

Mme Blackburn: Je vous la retrouverai d'ici la fin de la présentation. Mais, est-ce que ce n'est pas le fait de la plupart des pays? Comme on a ici des lois, des règlements, un décret de la construction, un code de la construction, est-ce que ce n'est pas normal?

M. Crochetière: C'est en page 9 qu'on me dit. Mais, ce que je peux vous répondre, cependant, c'est que je ne sais pas pour les autres secteurs. Mais je sais qu'on est le seul endroit dans le monde industrialisé et dans le monde occidental à avoir un régime de syndicalisation obligatoire, par métier, universel, sans tenir compte du secteur et dans un cloisonnement de tâches qui est défini à partir des chantiers traditionnels de plus grande importance. Ça, ça n'existe nulle part au monde. (21 h 45)

Mme Blackburn: Vous reconnaissiez tout à l'heure, avec moi et avec tout le monde, je pense bien, que le travail au noir ça se fait et que c'est courant. J'ai fait faire des travaux, puis les gens demandaient...

M. Crochetière: Je veux que tout le monde le reconnaisse.

Mme Blackburn:... comme si c'était normal. Est-ce que vous voulez faire - ça se demande

comme ça - affaires avec un entrepreneur? Puis, j'ai été assez étonnée, je veux dire, bon. Je me disais, au moins une députée, peut-être pas là. Mais ça se pose. Ç'a a l'air que c'est assez courant. Donc, ça existe. Donc c'est une plaie, à mon avis, parce qu'il y a des gens qui ne paient pas leur dû à la société. Comment est-ce qu'on contrôle ça?

M. Crochetière: Tantôt, on a parlé de moyens de le faire, en disant... Si vous me demandez la recette miracle...

Mme Blackburn: Oui.

M. Crochetière:... j'aimerais ça la connaître, madame. Je pense qu'il y a plusieurs États qui aimeraient la connaître. Mais je vous ai dit que si on essayait de couper l'incitation des gens qui travaillent au noir, en ce sens que le donneur d'ouvrage, il ne faut pas le déposséder des sommes qu'il a payées pour des matériaux... Pour ce qui est des heures travaillées, dans la mesure où il doit rapporter des heures, seules les heures qui seraient rapportées - quand on en demanderait des comptes - seraient payées.

Ce serait peut-être une façon, en tout cas, d'assurer un certain contrôle ou de le diminuer.

Mme Blackburn: Bien. En ce qui a trait à la loi 186, je dois dire que j'ai retrouvé là une partie des préoccupations qui étaient aussi les miennes. J'écoutais la députée de Kamouraska-Témiscouata, tout à l'heure, qui parlait - vous en parlez d'ailleurs dans votre mémoire - des grappes industrielles. L'industrie de la construction en constitue une, mais il semble... Je dis toujours à la blague qu'il me semble qu'il y a un raisin qui est tombé de la grappe parce que les entrepreneurs ne sont pas très responsabilisés dans la nouvelle structure qui est proposée, c'est-à-dire la Régie de la construction.

À tout prendre, est-ce que vous préférez la Commission de la construction, telle que prévue dans la loi 53, ou la régie telle que proposée dans le projet de loi, qui vient amender d'ailleurs la loi 53?

M. Crochetière: Dans la mesure où l'industrie y a droit de parole, je ne crois pas qu'on accorde une importance aussi grande au fait que ce soit une commission ou une régie. Bien sûr, ce sont deux institutions juridiques distinctes. Mais si l'industrie peut mieux s'exprimer dans une structure, quelle qu'elle soit, c'est celle-là qui est notre choix.

Mme Blackburn: La commission - peut-être vous le rappelez-vous, peut-être pas - prévue responsabilisait totalement et entièrement les entrepreneurs...

M. Crochetière: Vous parlez de la respon- sabilisation.

Mme Blackburn:... en concertation avec les syndiqués, ce que ne peut pas faire une régie.

M. Crochetière: Évidemment, on préfère avoir le plus de responsabilisation et le moins d'interventions dans l'encadrement des entreprises. Encore une fois, que ça s'appelle régie ou commission, c'est beaucoup plus la philosophie derrière ça qui va lui apporter une modification.

Mme Blackburn: Vous rappelez avec justice les nombreux pouvoirs que se laisse le gouvernement de réglementer. À la page 18, vous rappelez un article qui permettrait... Moi, j'ai hâte d'entendre le ministre là-dessus. On va l'entendre quand on va faire l'étude article par article. "Le gouvernement peut, par règlement, soustraire de l'application totale ou partielle de la présente loi des catégories de personnes, d'entrepreneurs, de constructeurs-propriétaires, de fabricants d'appareil sous pression, de propriétaires de bâtiment, d'équipement destiné à l'usage du public ou d'installation non rattachée à un bâtiment de même que des catégories de bâtiments, d'appareils sous pression, d'équipements, d'installations ou de travaux de construction. "

Si ma mémoire est fidèle, cependant, c'est qu'ont été ajoutées quelques petites modifications parce que l'essentiel de l'article se retrouvait dans le projet de loi 53. Oui.

M. Crochetière: C'est-à-dire que vous aviez l'article 4, dans l'ancienne commission, qui disait que le gouvernement pouvait soustraire certains territoires alors que là ce ne sont plus des territoires. Notamment, il y avait la Baie-James, il y avait tout ça pour des raisons de chantiers. Mais là, ce n'est plus une question de territoire qui est distraite de l'application de la loi, c'est un pouvoir donné au gouvernement de distraire du champ d'application défini par la régie, des entreprises, des bâtiments, des catégories et des sous-catégories. C'est ça qu'on questionne dans le projet, tout simplement. Pourquoi?

Mme Blackburn: À la page 19, vous dites: "Ainsi, par exemple, le gouvernement se réserve désormais le droit de décider s'il sera lui-même, ainsi que ses ministres et les organismes qui en sont mandataires, assujettis au code de construction qu'adoptera la Régie. " Comment pouvez-vous faire cette interprétation? À partir de quelle base?

M. Crochetière: C'est parce que...

Mme Blackburn: C'est le deuxième paragraphe de la page 19.

M. Crochetière:... on a rajouté la disposition, comme je l'ai dit tantôt. La Loi sur le

bâtiment disait: La présente loi s'applique au gouvernement, ses ministères et les organismes qui en sont mandataires. Là, on a rajouté le petit bout de phrase qui dit: dans la mesure où le gouvernement adopte des règlements à cet effet. Donc, ça veut dire que s'il n'y a pas de règlement, il ne l'est pas, assujetti.

Mme Blackburn: S'il n'y a pas de règlement, donc, il n'y a pas d'obligation.

M. Crochetière: C'est ça. On vient donc d'inverser la vapeur.

Mme Blackburn: Ça va être ma dernière question, mon collègue voulait aussi intervenir. En ce qui a trait aux attestations de conformité, vous semblez être assez réfractaires aux dispositions, finalement, qui me semblent pertinentes parce que la réputation des entrepreneurs en construction réside beaucoup sur la qualité des travaux. Vous êtes les mieux placés pour le savoir, comment ça démolit quand vous avez quelqu'un - passez-moi l'expression - qui botche son travail. A un moment donné, ça revient et ça rebondit de partout. Alors, j'avais pensé que vous devriez être d'accord avec ça.

M. Crochetière: S'il botche, oui. Mais s'il y a une erreur humaine qui ne cause aucun préjudice, qui n'affecte pas... Je vais vous donner un exemple. Dans le code, on dit que la contremarche doit avoir six pouces. Si le charpentier la coupe à six pouces et quart, toute votre course jusqu'en haut a la même chose, ça ne créera aucun problème. À un moment donné, s'il y a un litige, le deuxième acheteur - parce que le deuxième peut demander une attestation de conformité - va demander l'émission d'une nouvelle attestation de conformité. Si on lui donne le droit, au deuxième acheteur, d'avoir une attestation de conformité, je présume que c'est parce qu'il va y avoir une sanction si on ne le respecte pas. Alors, on dit: Si ça va vers des choses qui ne créent aucun préjudice, qui n'affectent pas la valeur, qui n'affectent pas la solidité, la stabilité, la conservation d'énergie, pourquoi responsabiliser les gens?

Mme Blackburn: L'esthétique? Bien, je vous remercie, je vais laisser le temps de... quelques questions... à mon collègue.

Le Président (M. Bélanger): M. le député d'Ungava, oui.

M. Claveau: II me reste un peu de temps. J'aimerais bien revenir sur la question du travail au noir. J'ai bien aimé, tout à l'heure, votre intervention, quand vous disiez: Écoutez un peu, quand on parle du travail au noir, on ne parle pas du sexe des anges, on parle de quelque chose qui se vit dans le quotidien et auquel tout le monde, d'une façon ou d'une autre, un jour ou l'autre, doit faire face. Vous avez, à toutes fins pratiques, raison. Il y a un problème qui se pose. Moi, j'aimerais bien savoir comment vous interprétez ça, comment vous pouvez faire pour contourner ça.

Le problème est le suivant. On l'a tous vécu, et j'ai l'impression que tout le monde est au courant d'exemples à peu près semblables. Le genre, par exemple: Tu as une petite job à faire faire dans ta maison. Tu vas voir un contracteur et il te dit: Oui, je vais te faire ça. Combien tu charges? Si tu ne veux pas de facture, ça va être 300 $ et si tu veux une facture, ça va être 400 $. Là, tu dis: Bien, moi, je voudrais avoir une facture. Ah bien! tu n'es pas assez niaiseux pour payer 100 $ rien que pour avoir une facture. C'est comme si ça faisait un peu l'affaire de tout le monde. Si tu acceptes, tu as avantage à te fermer la boîte, à ne pas le dénoncer, tu es aussi coupable que celui qui te le propose.

M. Crochetière: On est d'accord.

M. Claveau: Si tu n'acceptes pas, comment peux-tu faire la preuve comme quoi il te l'a proposé? Si tu t'ouvres la trappe, tu vas passer pour un chialeux, et il n'y a personne qui ne peux prouver rien. Alors, comment est-ce qu'on va arriver à dénoncer ça?

M. Crochetière: Ce que vous décriez, c'est la conscience sociale des gens. Je ne crois pas que ce soit avec un projet de loi dans l'industrie de la construction qu'on va arriver à l'instaurer dans toute la société. Vous avez raison sur le fond.

M. Claveau: Mais il va falloir un jour ou l'autre trouver des mécanismes - je ne le sais pas - ou des moyens de faire en sorte que la personne qui se sent frustrée parce qu'on lui fait une proposition semblable puisse le faire savoir d'une façon ou d'une autre.

M. Crochetière: Tout à fait d'accord.

M. Claveau: Cet après-midi, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec disait: Nous aimerions pouvoir récupérer les sommes des amendes qui sont versées, comme ça se fait dans d'autres corporations professionnelles. Ils donnaient, à titre d'exemple, les médecins, les avocats, etc. Sauf que dans ces corporations professionnelles là, il y a une espèce de code d'éthique, il y a des codes de déontologie. Il y a des mesures disciplinaires qui sont prévues à l'intérieur même des corporations pour les contrevenants, pour les malfaisants, pour ceux qui vont nuire à l'image de la corporation, ce qui fait qu'ils ont des espèces de tribunaux à l'interne; ils jugent leurs individus. S'ils chargent

des amendes ou, enfin, obligent des sanctions, ils peuvent en bénéficier, ils peuvent même suspendre des licences ou radier des membres de leur corporation.

J'imagine que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec avait aussi à l'esprit ce genre d'approche là à l'interne, en ce qui les concerne, s'ils veulent pouvoir prétendre à la récupération des amendes. Est-ce que, de votre côté, vous seriez d'accord - là, je suis peut-être un peu au-delà du projet de loi -pour...

M. Crochetière: On a dit oui.

M. Claveau: ...que s'établisse une espèce de structure déontologique à l'intérieur de l'industrie qui fasse en sorte que chacun ait à voir, à l'intérieur de son champ d'intervention, à ce que l'on puisse respecter des choses et que les gens de l'industrie, eux-mêmes, aient à suspendre, à radier, à éliminer, à écarter des individus malfaisants qui nuisent à leur profession?

M. Crochetière: Écoutez, tantôt, on a dit qu'on était d'accord pour que les amendes qui étaient payables, aux termes de la loi 186, aillent à la régie. Or, dans le projet de loi, il y a un pouvoir réglementaire de créer un code de déontologie, de créer des points d'inaptitude. On a des réserves sur la façon dont la loi prévoit que ça va être appliqué parce qu'on ne croit pas que c'est au même organisme qui pose des jugements préalables à entendre, ensuite, au niveau de la déontologie, ceux qu'ils ont déjà condamnés. Mais on est d'accord sur le principe qu'il y ait une déontologie et que les dérogations à cette déontologie-là soient sanctionnées, soit par des augmentations de paiement, soit par des paiements d'amendes. Nous sommes aussi d'accord pour que les amendes ainsi payées aillent à l'organisme, c'est-à-dire à la régie, dans ces cas-là.

M. Claveau: Mais, j'allais plus loin que ça...

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le député.

M. Claveau: ...dans mon questionnement, à savoir si vous autres, par exemple, comme association d'entrepreneurs ou de constructeurs d'habitations, comme d'autres qui étaient là avant vous au niveau des maîtres plombiers, enfin les maîtres mécaniciens en tuyauterie, est-ce qu'à l'intérieur même de votre corporation, sans attendre qu'il y ait un grand chapeau, qu'il y ait un parapluie au-dessus de tout ça, vous seriez prêts à vous discipliner vous autres mêmes, à vous charger des amendes et à demander des radiations de licences, même de vos membres qui vous (ont honte, finalement, sur le plan de l'éthique professionnelle?

M. Crochetière: On fait plus que ça. lorsqu'ils font des dommages, on paie leurs dommages avec nos plans de garantie et on les expulse. Maintenant, si vous voulez qu'on ait un pouvoir, il faudrait qu'on soit constitué en corporation et que ces gens-là soient tenus d'être chez nous. S'ils sont chez nous volontairement, comment voulez-vous qu'on leur impose des amendes? Ils vont sortir.

M. Claveau: Comme c'est le cas pour la corporation professionnelle.

M. Crochetière: Mais on n'est pas une corporation, nous. C'est une association volontaire.

Le Président (M. Bélanger): Ça termine le temps qu'on avait à notre disposition. M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.

M. Cherry: À vous, M. le président et à vos compagnons, je veux vous remercier de vous être déplacés aujourd'hui et de nous avoir présenté vos propositions. Je veux vous assurer que vos représentations occupent mon attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous apporte beaucoup de travail. Comme je l'ai dit aux autres groupes, et je tiens à vous le redire, c'est pourquoi j'ai demandé à une équipe du ministère d'être en disponibilité pour qu'en fin de semaine on puisse être en contact ensemble, et voir de quelle façon on peut améliorer ce qui est l'objet de notre rencontre d'aujourd'hui. Encore une fois, merci beaucoup.

M. Jacques: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi. (22 heures)

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, je vous remercie de votre contribution aux travaux de cette commission et je dois dire qu'à travers les différentes présentations j'apprends beaucoup. Je souhaiterais qu'éventuellement, et je le rappelle, dans le prolongement de ce que disait mon collègue d'Ungava, c'est que les entrepreneurs, tel qu'il était prévu à 53, finissent par véritablement se prendre en main et puissent adopter, effectivement, des codes d'éthique et de déontologie qui leur soient propres et qu'ils s'autoréglementent davantage quant aux pratiques. J'aurais souhaité que ce soit plus 53 à cet égard que la régie - 53, c'est-à-dire avec la Commission - mais peut-être qu'on amènera le ministre à la raison là-dessus. Je vous remercie de votre participation aux travaux.

Le Président (M. Bélanger): La commission de l'économie et du travail remercie l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du

Québec, c'est-à-dire l'APCHQ, pour sa présentation, sa participation à nos travaux. J'invite sans plus tarder la Corporation des maîtres électriciens du Québec à s'approcher à la table des témoins, s'il vous plaît. Merci.

Si vous permettez, je demanderais à tout le monde de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît. Je vous remercie. Nous recevons présentement la Corporation des maîtres électriciens du Québec, dont le président est M. Jean-Guy Brown. M. Brown, si vous voulez présenter votre équipe et nous procéderons. Vous avez plus ou moins 20 minutes pour la présentation de votre mémoire plus, enfin... Je pense que vous avez assisté à tous nos travaux jusqu'à maintenant.

Je demanderais aux gens aussi... S'il vous plaît, pour des raisons de sécurité, on voudrait que tout le monde soit assis. Je comprends qu'on est fatigués. On a le même problème à ce bout-ci. C'est notre partie qui est la plus tenue à contribution après 15 heures de... M. Brown, s'il vous plaît, vous pouvez procéder. On y va.

Corporation des maîtres électriciens du Québec

M. Brown (Jean-Guy): Merci, M. le Président. Je vais vous présenter les personnes qui sont: à mon extrême droite, M. Jean-Louis Auger; à ma droite, M. Roger Gosselin; à mon extrême gauche, le directeur général de la Corporation, M. Yvon Guilbault, et à ma gauche, M. Richard Lavergne. Ce sont tous d'anciens présidents de la Corporation des maîtres électriciens du Québec. Je tiens aussi à remercier tous les entrepreneurs électriciens de la province de Québec qui se sont déplacés pour venir écouter notre mémoire et nous approuver dans la démarche que nous faisons.

Nous sommes heureux de pouvoir faire valoir notre point de vue, mais les circonstances ayant entouré le dépôt des deux projets de loi et la teneur de ceux-ci nous déçoivent. Nous ne croyons pas qu'une journée de consultations, par le biais d'une commission parlementaire, soit suffisante, pas plus que les délais de procéder à cette consultation. Malgré tout, l'exercice auquel s'est livrée la commission depuis le début de la journée est important.

Notre mémoire rappelle les raisons de la création de la Corporation. Organisation dynamique, soucieuse de la sécurité du public, gardienne de l'éthique et de discipline, la CMEQ fait fa fierté de ses membres depuis plus de 40 ans qu'elle oeuvre au service du public.

Je vous parlerai d'abord du projet de loi 185. Contrairement à d'autres associations, la Corporation regroupe un nombre important d'entrepreneurs autonomes. L'appartenance à la Corporation des maîtres électriciens du Québec est obligatoire. La Corporation qui regroupe environ 3000 membres estime qu'environ 1400 de ceux-ci sont des entrepreneurs autonomes, c'est-à-dire des personnes faisant affaire seules sans l'aide de salarie et ce, la plupart du temps.

L'entrepreneur autonome de 1991. Que fait le projet de loi 185 quant à cet entrepreneur autonome? Il va encore plus loin. Une compagnie pourra être entrepreneur autonome. Que penser de l'interdiction de faire certains travaux? Ces entrepreneurs sont qualifiés et compétents. Avant d'obtenir une licence d'entrepreneur à la Régie des entreprises de construction du Québec et avant d'être membre de la Corporation des maîtres électriciens, un entrepreneur électricien se doit de respecter de nombreuses conditions. Qui plus est, pour être capable de travailler sur un chantier de construction, il doit détenir absolument une carte de compétence et ce, comme n'importe quel salarié ou comme n'importe quelle autre personne agissant pour le compte d'un employeur.

Nous ne croyons pas que si l'on fait disparaître de tels entrepreneurs, il y aura plus de travail pour les salariés. C'est faire abstraction de la réalité et c'est faire preuve d'an-gélisme. Ce qui risque d'arriver c'est que les entrepreneurs en question cesseront de se faire qualifier et ce, malgré toutes les amendes qui peuvent exister. Ils feront du travail au noir et ils feront encore une plus vive concurrence aux salariés de l'industrie de la construction.

En agissant comme on se propose de faire, on tue l'esprit d'initiative des Québécois et des Québécoises. On oublie injustement les régions où, déjà, il est extrêmement difficile pour un entrepreneur seul d'obtenir des contrats vu la situation économique qui y règne. Comment feront les entrepreneurs en région qui y sont installés pour faire quelques constructions neuves vu qu'ils n'ont pas de salariés? Ce sera seulement les entrepreneurs des grands centres et les salariés qui pourront faire ces travaux.

L'entrepreneur électricien, une profession de services. Un électricien est un professionnel qualifié qui ne fait pas que des travaux de construction. Il doit d'abord se créer une clientèle lorsqu'il part en affaires grâce à une gamme étendue de services qu'il peut rendre. On élimine cette possibilité. On a l'impression que la solution retenue ne fait que favoriser l'émergence soit d'un plus grand nombre de salariés ou l'émergence d'un plus grand nombre d'employeurs mais qu'elle ne tient nullement compte des besoins de la population, de la liberté de l'entreprise, de sa croissance, de son évolution et de la capacité de payer de la clientèle.

Des dispositions semblables à celles qui existent déjà et que vous vous proposez d'ajouter heurtent le sens commun des Québécois. Dans tout autre domaine que celui de la construction, on trouverait absurdes de telles propositions. Pourquoi n'aurait-on pas le droit de faire affaire sans l'aide de salariés si l'on est compétent pour le faire et qu'on peut le faire?

Nous sommes cependant conscients que l'existence de la notion d'entrepreneur autonome peut créer des problèmes. Mais au lieu de l'empêcher de travailler dans des domaines où il est compétent pour le faire, nous suggérons la mise en place de mécanismes de contrôle.

L'entrepreneur autonome doit être lui aussi connu de la Commission de la construction du Québec, il doit s'y inscrire, il doit produire un rapport mensuel qu'il embauche ou non des salariés. Il devrait être soumis aux mêmes amendes, aux mêmes prélèvements et aux mêmes obligations que l'entrepreneur-employeur. Nous sommes d'accord pour que l'entrepreneur autonome soit plus encadré et que la différence qui existe dans le coût en faisant affaire avec une organisation plus petite plutôt qu'avec une organisation plus grande, soit limitée, mais nous ne sommes pas d'accord pour que vous empêchiez l'entrepreneur autonome ou l'artisan de travailler, quand et où bon lui semble en autant qu'il détienne les compétences et les qualifications requises pour le faire.

Il est anormal que l'on doive, pour débuter une entreprise, être obligé d'embaucher des salariés. Il est anormal que si l'on décide de se retirer en partie des affaires on ne puisse plus continuer à faire le travail que l'on a toujours fait alors qu'on est compétent et qualifié pour le faire seulement parce qu'on n'a pas de salarié. Il est inacceptable que dans une société libre et démocratique comme la nôtre on limite d'une telle façon notre droit à la liberté. On a encore le droit de décider si on a besoin de salariés ou non.

Ces entrepreneurs ne sont pas des ennemis des salariés. La plupart d'entre eux sont d'anciens salariés syndiqués. Eux aussi sont contre le travail au noir et ils subissent, eux aussi, les méfaits de cette pratique. Ces entrepreneurs ne sont pas non plus des ennemis des employeurs. Plusieurs de ces employeurs ont commencé avec une petite organisation et sans l'aide de salariés. Ils ont réussi à force de travail et d'initiative à faire agrandir et prospérer leur entreprise.

Le cautionnement pour le paiement des salaires. Le projet de loi introduit également la possibilité d'adopter un règlement pour exiger qu'un cautionnement sort fourni pour assurer le paiement des salaires. Assurer le paiement des salaires est un principe louable. Dans les faits, cependant, qu'est-ce que cela représente? Les entrepreneurs-employeurs devront s'acheter une protection d'assurance, ils devront la payer et ils la chargeront en surplus aux clients. Mais ce qu'il y a de plus incroyable, c'est que les entrepreneurs, eux, n'ont pas de garantie de paiement pour les travaux qu'ils exécutent. Les modifications qui seront apportées au Code cMI laissent présager le pire. L'hypothèque légale de construction risque, d'après les informations que nous avons obtenues, de n'avoir aucun poids vis-à-vis de l'hypothèque d'un financier. C'est bien beau d'exiger qu'un entrepreneur fournisse un cautionnement pour garantir le paiement des salaires, mais encore faudrait-il qu'en contrepartie on donne à l'entrepreneur la garantie d'être payé.

Les amendes. Le nombre des amendes sera augmenté de façon considérable. Voilà ce qu'on a trouvé pour contrer le travail au noir, l'épouvan-tail des amendes. C'est sûr, il peut y avoir un effet dissuastf avec de telles mesures, mais une personne qui considère qu'elle a besoin de travailler ne s'inquiétera pas des amendes et elle travaillera. Elle prendra une chance. Il n'y a pas de solution miracle pour contrer le travail au noir. L'imposition d'amendes plus sévères peut aider, mais nous suggérons que d'autres mesures soient envisagées et ces mesures devraient être envisagées avec le ministre des Finances et le ministre du Revenu. Il doit exister des mesures fiscales pour encourager le consommateur à faire affaires avec un entrepreneur dûment qualifié. Ces mesures devraient favoriser la déduction du revenu du consommateur, de toutes dépenses de rénovation, construction, d'entretien et de réparation à la condition qu'un entrepreneur de construction dûment licencié y soit impliqué.

Je commenterai maintenant le projet de loi 186 à la page 18, pour ceux-là qui ont le mémoire. Ce projet de loi a été déposé sans consultation. La Corporation des maîtres électriciens du Québec, qui voit sa loi constitutive modifiée par ce projet de loi, n'a pas été consultée. Elle n'a jamais été mise au courant des orientations ministérielles. Elle n'avait fait qu'entendre des rumeurs. Vous comprendrez donc notre surprise, dans un premier temps, et, dans un deuxième temps, notre amère déception face à ce projet de loi qui, selon nous, ne tient pas compte de l'historique du milieu, de sa prise en charge par lui-même et des coûts véritables de cette réforme. (22 h 15)

Pourtant, nous étions déjà encouragés par la déclaration ministérielle du 20 juin 1985 et par le communiqué de presse qui avait alors été émis et qui faisait suite au dépôt du rapport Picard-Sexton. Le ministre disait alors qu'il entendait mettre en application la Loi sur le bâtiment après y avoir apporté les amendements jugés nécessaires pour rencontrer les objectifs premiers de cette loi, entre autres améliorer la qualité des travaux de construction, responsabiliser davantage les intervenants, mieux protéger le consommateur et mieux contrer le travail au noir. Cette volonté exprimée par le ministre nous semblait aller dans la bonne voie.

De Picard-Sexton au projet de loi 186 Quelle ne fut pas notre surprise en prenant connaissance du projet de loi 186. Ce projet de loi renie les principes de la Loi sur le bâtiment de 1985. Il est malheureux que le projet de loi qui, normalement, devait responsabiliser les

intervenants n'atteigne nullement cette fin. Il est malheureux que ce projet de loi qui modifie une loi qui a fait l'objet d'une consultation extensive le fasse sans qu'il y ait de consultation préalable du milieu. Il est malheureux qu'on ait déposé un projet de loi qui ne tient pas compte de ce que le critique de l'Opposition officielle, en juin 1985, disait de la création de la Commission du bâtiment et de son financement.

Une régie aux pouvoirs énormes. Que fait pour les entrepreneurs de construction le projet de loi 186? On crée une régie plus importante, plus tatillonne et surtout plus coûteuse. On donne à la régie du bâtiment l'ensemble des pouvoirs réglementaires que le gouvernement s'était conservé. La régie du bâtiment du Québec pourra intervenir à tous les stades, à tous les niveaux. Ce n'est certainement pas ce que voulait l'Opposition officielle en juin 1985. Ce n'est certainement pas ce que voulait non plus le parti au pouvoir en 1985.

Une régie génératrice de coûts élevés. En 1985, l'Opposition officielle s'interrogeait sur les coûts de la réforme. La question est toujours d'actualité. La Commission devait s'autofinancer au bout de cinq ans. Aujourd'hui, les fonds amassés iront au fonds consolidé du revenu. L'argent pourra servir à d'autres fins. On peut aussi s'interroger sur les méthodes de financement. Celles-ci peuvent être basées sur un facteur d'importance des activités ou de la performance d'une entreprise. On pourra aussi instaurer un système de points d'inaptitude qui aura une influence sur les frais que devront payer les entrepreneurs. L'industrie de la construction devient ainsi un réservoir inépuisable de ressources financières. Ces frais seront transférés aux clients et les coûts de construction seront augmentés en conséquence.

La Corporation offre à ses membres le cautionnement et le fonds d'indemnisation. Or, la loi nous enlève cette possibilité. Le fonds d'indemnisation sera administré par la régie. On ne laisse plus rien à l'initiative privée. Quant aux plans de garantie, la Corporation, suite à l'adoption de la Loi sur le bâtiment et avant même l'adoption de cette loi, avait entamé des démarches pour doter ses membres d'un tel plan et elle recherchait des façons simples et peu coûteuses, tant pour elle-même et ses membres que pour le public en général, pour traiter les dossiers. Or, la loi nous enlève même le pouvoir de créer un tel plan de garantie et de le rendre obligatoire pour nos membres.

On se retrouve donc avec une régie toute puissance qui n'est pas représentative du milieu. En effet, rien n'oblige dans la loi que les membres de la régie du bâtiment soient nommés après consultation d'organismes représentatifs. On n'a pas non plus mis dans le coup les entrepreneurs, les autres personnes impliquées comme on l'avait fait avec la Commission du bâtiment.

La Loi sur le bâtiment donnait à la Corporation des maîtres électriciens du Québec et à la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec la pleine qualification de leurs membres. Pour les autres associations d'entrepreneurs, la loi prévoyait la possibilité de faire des ententes pour leur permettre de qualifier leurs membres. On enlève cette possibilité. On ne tient pas compte que la Corporation des maîtres électriciens du Québec a plus de 40 ans d'histoire sans tache.

Pourquoi fait-on cela? Pourquoi crée-t-on une superstructure administrative qui régente tout alors qu'il existe déjà des organismes dans le milieu qui peuvent, sous l'autorité gouvernementale, en respectant des normes et conditions émises par le gouvernement, très bien exercer de tels pouvoirs et ce, sans qu'il en coûte trop à l'État. Aussi, on enlève à la Corporation ses pouvoirs et l'exclusivité du titre d'entrepreneur électricien.

En conclusion, M. le Président, nous vous demandons de ne pas adopter ces deux projets de loi. Ces deux projets de loi, dans leur forme actuelle, ne sont pas de bons projets de loi et ne règlent pas les problèmes. Ils en créeront une multitude. Nous croyons qu'il serait plus sage d'avoir une consultation plus large sur l'ensemble des problèmes de l'industrie et ce, dans un avenir rapproché pour que nous puissions, tous ensemble, trouver des solutions aux problèmes de l'industrie. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. Brown. M. le ministre.

M. Cherry: Merci. Nous aussi, c'est la deuxième fois dans la même semaine que nous nous voyons. Comme introduction, j'ai le goût de vous demander moi, je la connais, mais pour le bénéfice, encore une fois, de la commission votre expérience personnelle et votre cheminement. Vous êtes aujourd'hui un maître électricien. Comment êtes-vous arrivé à ça? Comment avez-vous commencé? On se connaît depuis longtemps, mais j'aimerais ça que vous le disiez.

M. Brown: Moi, personnellement, j'ai commencé suite à ma formation technique à l'Institut de technologie de Trois-Rivières. J'ai commencé comme salarié de la construction, syndiqué, sur des gros chantiers de construction. J'ai oeuvré là-dedans de 1972 jusqu'à 1976, jusqu'à ce que je devienne entrepreneur électricien. Durant ce temps, j'ai milité au niveau du syndicat. J'ai été délégué de chantier et j'ai été directeur du comité d'administration de la FIPOE, à ce moment-là. J'ai travaillé lorsqu'ils ont changé du 568 à la FIPOE. Suite à ça, j'ai été à la Corporation des maîtres électriciens du Québec. J'ai passé mes examens d'admission et je suis devenu entrepreneur autonome, si on veut. Un entrepreneur qui était seul.

Après une première année de dur labeur, créer une clientèle... Je suis natif de Drummondville, alors en débutant à Granby, je ne connaissais pas du tout le milieu - je suis arrivé là par hasard... Alors, j'ai réussi à me faire une clientèle. Ça m'a pris une année. La deuxième année, j'ai eu un employé. Troisième et quatrième années... Ensuite, est venue la récession de 1982. J'ai eu moins d'employés. Après ça, j'ai structuré mon entreprise différemment et j'ai réussi à avoir trois, quatre et cinq employés.

Là, le problème c'est peut-être un problème personnel, mais je ne suis pas capable de supporter ça, avoir des employés. Il y en a qui peuvent avoir 80 ou 100 employés, mais, personnellement, quand je dépasse cinq, je n'aime pas ça. Alors, à ce moment-là, j'ai décidé de revenir en arrière. On est en récession et là je redeviens travailleur autonome, je tombe tout seul. Le projet de loi que vous voulez adopter me confinerait quasiment, comme je l'ai dit hier, au bien-être social.

M. Cherry: Merci. C'est parce qu'on s'était vus cette semaine et vous m'aviez raconté votre cheminement.

M. Brown: Oui, on avait fait abstraction des lois et règlements de la Corporation et on s'était parlés en tant que ministre et entrepreneur électricien.

M. Cherry: C'est ça. Alors, je voulais l'entendre parce que vous m'aviez dit que vous aviez choisi d'être autonome.

M. Brown: Exactement.

M. Cherry: Vous ne l'avez pas dit dans ces mots-là ce soir, mais c'est ce que vous m'aviez dit quand on s'est vus cette semaine, entre autres.

M. Brown: C'est pour ça que j'ai ajouté que je n'aimais pas ça quand j'avais trop d'employés.

M. Cherry: Vous avez choisi un auditoire pour le dire.

M. Brown: Ah!

M. Cherry: Quelques-unes des questions, toujours concernant le travailleur autonome... Je ne sais pas si vous avez passé une partie de la journée avec nous. Je ne sais pas si vous avez entendu la présentation de mémoires qui a précédé. Sinon, je vais dire... Aujourd'hui, en rencontre avec des gens sur le même sujet, fort des expériences qui m'avaient été présentées cette semaine, pour les besoins de discussion, je faisais valoir des arguments qui m'ont été présentés, à savoir celui qui travaille en région éloignée. On ne parle pas toujours des grands centres: Rivière-au-Renard, c'est ça l'exemple classique? Toute la journée on a parié... J'espère qu'il y en a un qui est là, à Rivière-au-Renard.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a quelqu'un de Rivière-au-Renard dans la salle pour nous dire où c'est et comment gros c'est?

M. Cherry: C'est l'exemple qui nous a été fourni toute la journée. Alors moi, durant la journée, en pariant avec des gens, j'ai dit: Écoutez, là, comment un gars qui oeuvre... Je le vois physiquement avec son camion: II essaie de se débrouiller, il fait du service, il s'est bâti une clientèle, il fait de la réparation, de l'entretien. À un moment donné, il se bâtit un chalet neuf dans le coin où il se bâtit deux maisons neuves. Comment peut-on lui dire qu'il faut absolument qu'il engage quelqu'un là-dedans?

Ils me disent qu'aujourd'hui avec les nouveaux matériaux de construction, c'est plus léger qu'avant, qu'avec les nouveaux équipements, ça peut se faire tout seul. La réponse qui m'a été donnée, c'était celle-là que je voudrais que vous commentiez. Ils ont dit: C'est ça qu'ils vous disent, qu'ils le font tous seuls, mais dans les faits, M. le ministre, ils s'engagent un gars sur la "sly", qui est sur le bien-être social. Ils le paient en dessous de la table à 5 $, 6 $ de l'heure, et ils en ont quelqu'un pareil plutôt que de donner cet ouvrage-là à un vrai apprenti ou à un vrai travailleur de la construction.

Donc, j'aimerais vous entendre commenter sur la description qui m'a été faite en réponse à ce que je viens de vous dire.

Le Président (M. Bélanger): Alors, pour vous taquiner un peu, je vous inviterais à la prudence. Le ministre du Revenu est juste derrière vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brown: Alors, pour votre bénéfice, M. le Président, on ne travaille pas en dessous de la table. Pour ce travailleur-là, moi, je vais répondre nécessairement - vous allez bien vous attendre à ça - au nom des entrepreneurs électriciens. Les autres corps de métiers, chacun a débattu sa cause, chacun est venu plaider sa cause. Moi, je vais m'occuper en ce qui concerne les entrepreneurs électriciens.

Un entrepreneur électricien - on va changer de place, on va le prendre en Abitibi, ce n'est pas péjoratif, là - est dans un village et il se bâtit trois maisons durant l'année. Selon la loi qui existe à l'heure actuelle, cet entrepreneur électricien doit avoir ce qu'on appelle un permis de raccordement. Suite aux installations qu'il fait, il y a nécessairement une inspection au niveau du Bureau des entrepreneurs électriciens. Alors, ces permis-là, ce sont des permis qui sont gouvernementaux. Suite à ça, l'entrepreneur électricien émet une facture au client et il la

rentre dans ses livres. Alors, l'entrepreneur, en tant que tel... Les lois qui sont là déjà à l'heure actuelle dans le marché, on a des formulaires à remplir et c'est pour ça que ça nous contrôle plus qu'au niveau des autres corps de métiers, si on veut.

M. Lavergne (Richard): Si vous me permettez, si je pouvais juste renchérir et ajouter. Il est évident que si des choses telles qu'on vous a dites cet après-midi passent, je ne pense pas que c'est à nous, finalement... Quand je dis à nous là, ce n'est pas le projet de loi comme tel qui va empêcher ça, mais par contre, un peu comme on a dit plus tôt ce soir, c'est la conscience sociale des gens. Alors, si les gens vous ont dit cet après-midi que ce sont des choses qui se passaient, que ça se payait en dessous de la table, ça doit être parce qu'ils sont au courant qu'il y a certains gens qui le font.

Alors, sûrement leur conscience sociale devrait être capable de les laisser venir les déclarer aux personnes et de dire: Je sais que cette personne-là le fait, et sur tel projet et tel projet, etc., ça se fait comme tel. De l'autre côté, comme mon président vous a dit tantôt, c'est qu'on est réglementé. On a des permis. Alors, si une personne qui se dit un travailleur autonome sort pour x nombre de permis, pour toutes les installations, je pense qu'il y a une concordance qui peut être faite avec tous ces permis-là et dire: Écoute, est-ce que c'est possible que tu aies fait tout ces travaux-là seul?

De l'autre côté, si les gens disent que ça se fait, eh bien, qu'on les déclare et qu'on dise: Oui, ça se fait et c'est à telle ou telle location et qu'on les pince. On n'est pas d'accord que ça se fasse. La Corporation des maîtres électriciens n'est pas d'accord que le travail se fasse d'une façon clandestine, et qu'elle soit payée en dessous de la table.

Le Président (M. Bélanger): C'était M. Lavergne, pour les fins de la transcription.

M. Lavergne: Excusez-moi, j'aurais dû m'identifier.

M. Brown: II y aurait M. Roger Gosselin qui aurait quelque chose à ajouter sur cette particularité.

M. Gosselin (Roger): Je suis chanceux, je n'aurai pas besoin de me nommer. Mon président m'a nommé. Je renverserais peut-être la question. Est-ce qu'on doit pénaliser les 80 % qui sont corrects pour les 20 % qui ne sont pas corrects? S'il y a 1400 entrepreneurs électriciens au Québec qui sont déclarés ou, semble-t-il, sont autonomes, et s'il y en a 20 % qui sont à côté de la "track", doit-on abolir le droit au travail du travailleur autonome?

Je pourrais vous poser une autre question. Est-ce qu'on va empêcher les pharmaciens de travailler dans leur pharmacie? Est-ce qu'on va empêcher les épiciers de travailler dans leur épicerie? Ce que vous voulez faire avec la loi que vous voulez mettre en vigueur, c'est d'empêcher des gens qualifiés de travailler dans leur entreprise. C'est là, je pense, qu'il y a certainement moyen de trouver une autre façon de contrer le travail au noir autrement que d'abolir le droit au travail des entrepreneurs autonomes. C'est tout ce que j'ai à dire là-dessus. (22 h 30)

M. Cherry: Concernant le travailleur autonome - on va le décrire comme ça - vous nous indiquez dans votre mémoire que vous avez 1400 autonomes sur 3000 membres, ça vient d'être relevé. Vous nous dites qu'il faut encadrer l'autonome, vous écrivez ça en page 10.

M. Gosselin: Oui.

M. Cherry: Vous utilisez le mot "encadrer". Je voudrais vous demander, M. le président, ou quelqu'un qui vous accompagne: Pouvez-vous être un peu plus explicite et nous dire ce que vous entendez par l'encadrement qui pourrait être offert?

M. Brown: Je vais laisser mon directeur général répondre à cette question-là puisqu'on en a discuté...

M. Guilbault (Yvon): Mon nom est Guilbault. M. Brown: Yvon.

M. Guilbault: Yvon, oui. Oui, "boss". Quelle est la question, là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brown: C'est parce qu'il a dit le mot "boss", à ce moment-là, et ça...

M. Guilbault: Concernant l'encadrement, c'est parce que... La question qu'on se pose tout le temps sur le travail au noir, on rapporte toujours ça comme si l'entrepreneur qui fait des travaux, c'est lui qui fait du travail au noir. Mais l'entrepreneur qui travaille lui-même ne fait pas de travail au noir. Il a ses licences, il a ses permis, il est inspecté par à peu près cinq, six inspecteurs, la masse salariale, la CCQ et ainsi de suite. Là, on présume que cet entrepreneur-là va embaucher des gens illégalement et qu'il va les payer en dessous de la table. C'est ça qu'on dit. Donc, ça fait du travail au noir.

La plupart du temps, pour les entrepreneurs qui sont ici dans les galeries, le travail au noir est fait par un salarié qui n'est à l'emploi de personne et qui va travailler en dessous de la table. Depuis qu'on est ici aujourd'hui, tout ce

qu'on entend, c'est le travailleur autonome, c'est-à-dire celui qui est qualifié, qui a des licences, qui a des permis qui, lui, serait accusé de tous les péchés du monde. Le travail au noir, ça se fait par des gens qui peuvent être qualifiés, donc, qui ont des certificats de compétence mais qui ne sont pas nécessairement entrepreneurs. Des fois ce sont des pompiers aux multiples talents...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Guilbault: Eux n'iront pas voir le ministère du Revenu.

Le Président (M. Bélanger): Non, non, non, je regrette, je regrette. Malheureusement, c'est strictement et formellement interdit dans ce milieu-ci. Aucune manifestation de quelque sorte qu'elle soit n'est permise. Je regrette infiniment et je vous demanderais, s'il vous plaît, votre collaboration.

M. Guilbault: Je ne l'ai pas fait exprès, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Je n'ai aucun doute, mais ne recommencez pas. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Guilbault: Quand on parle d'encadrement, ce qui fatigue les employeurs qui vous parlent à la journée longue - et nous autres, les entrepreneurs, non pas les travailleurs, les entrepreneurs autonomes - ce qui les fatiguent, c'est quand ils embauchent, comme ils disent, un salarié "on the side" et qu'ils ne le déclarent pas. Et ils ont raison. Ce qu'on défend ici, ce soir, c'est l'entrepreneur autonome qui travaille seul sans l'aide de salariés. À partir du moment où il embauche un salarié, il devient employeur, donc il n'y a pas de problème. Ce qu'on dit, nous autres - pour répondre à votre question parce que je m'en souviens - c'est: II faut encadrer cette personne-là de telle façon qu'il travaille seul tout le temps. Quand il ne travaille pas seul, il faut que la personne qui l'embauche déclare ses heures travaillées à la CCQ comme n'importe quel employeur.

C'est ça, le noeud du problème. Le noeud du problème, ce n'est pas, comme on l'a déjà entendu de certaines bouches: Ces chaudrons-là, il faut s'en débarrasser. Ce sont des entrepreneurs futurs qui peuvent devenir gros ou, de temps en temps, petits, mais la solution, ce n'est pas de les éliminer, surtout dans notre métier où les entrepreneurs sont tellement encadrés par le Bureau d'inspection - il n'y a pas ça nulle part ailleurs. Les entrepreneurs électriciens paient 15 000 000 $ par année. Il y a le livre bleu d'Hydro-Québec, il y a des normes d'installations. S'ils ne les font pas bien, ils se font taper sur les doigts. Il y a la CCQ, il y a la Corporation des maîtres électriciens - espérons qu'il va en rester plus quand on va s'être parlé après. Il y a un paquet de monde qui surveille les entrepreneurs électriciens et ils sont encadrés régulièrement. Ils ne comprennent pas ce qui leur arrive, c'est pour ça qu'ils sont là.

M. Lavergne: Je pourrais, si vous me permettez, ajouter juste une chose, et je pense que c'est important de la soulever. Le fait que l'entrepreneur autonome, comme on l'appelle, l'entrepreneur qui a des employés a eu un début quelque part, eh bien, l'entrepreneur qui a des employés aujourd'hui va aussi avoir une fin quelque part. Alors, il y a des fins de carrière et il y a des débuts de carrière. Le fait que l'individu va avoir un début de carrière et une fin de carrière avec des qualifications, finalement, comme tout le monde - c'est entrepreneur électricien, c'est maître électricien - pourquoi l'y circonscrire puis lui dire: Tu n'as plus le droit de faire ça?

Sur le travail au noir, il faut dire une chose, à part ça, c'est que les gens qui sont travailleurs autonomes, si on leur enlève le droit de travailler le 1er janvier 1992, on va faire une chose parce que ces gens-là ne sont peut-être pas nécessairement prêts à aller travailler pour quelqu'un d'autre. Ils vont peut-être continuer à gagner leur vie puis peut-être que, là, on va en créer du travail au noir. Alors, les 10 000 dont on parle ou les 1400 chez nous, on va peut-être créer plus de travail au noir parce que ces entrepreneurs, et on l'a dit tantôt, vont continuer à entreprendre. Alors, il faut penser un peu en réglementation au début d'une carrière, à la fin d'une carrière et aussi ce qui peut arriver à ces gens-là.

Une autre chose que je voudrais juste renoter, c'est que, parmi les gens qui sont ici, on a les entrepreneurs autonomes et on a aussi les entrepreneurs qui font des 9 000 000 $ et 10 000 000 $ comme chiffre d'affaires et qui regrettent ce projet de loi parce qu'ils ne sont pas d'accord d'enlever la raison d'être d'un travailleur autonome.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. Lavergne.

M. Auger (Jean-Louis): Je m'excuse, M. le Président. Est-ce que je pourrais faire juste une intervention?

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, M. Auger.

M. Auger: II ne faut jamais oublier aussi que la Corporation est une corporation fermée, a titre obligatoire, et lorsque de nos membres font, à un moment donné, peut-être des accrocs à la loi, eh bien, on a un comité de discipline et ces

gens-là sont disciplinés. Aussi, lorsque des entrepreneurs - si, malheureusement, il y en a - se permettent, par exemple, d'engager de la main-d'oeuvre non régulière, eh bien, à ce moment-là, c'est la discipline qui les attend et ils sont accusés de compétition déloyale, par exemple. Donc, effectivement, on a une Corporation qui est très bien suivie et ses membres sont évidemment sujets à la discipline. Donc, effectivement, il y a moins de danger, je pense, chez les membres de la Corporation que dans toute autre association.

M. Gosselin: Juste, peut-être, pour terminer sur le travailleur autonome. Tantôt, quand je suis intervenu, j'aurais peut-être dû vous dire que ça fait 17 ans que je suis en entreprise. Je n'ai jamais été autonome, moi, pour un, et ce n'est pas les autonomes qui me maganent. C'est juste ce que je voulais dire. Je suis une entreprise qui a toujours eu des employés et je n'ai jamais été autonome. Notre problème, dans l'industrie de la construction, il n'est pas là. Il est sur le travail au noir, mais ce n'est pas les entrepreneurs autonomes qui font la majorité du travail au noir.

M. Brown: Toujours en respectant que nous défendons les droits des entrepreneurs électriciens.

Le Président (M. Bélanger): Merci.

M. Cherry: O. K. Je le sais, mais toujours pour le bénéfice de la commission, les membres chez vous et un ex-président, M. Auger, viennent de dire que, chez vous, la participation est obligatoire. C'est une corporation et, au Québec, quiconque veut exercer cette profession-là doit être membre chez vous. Vos membres font également partie d'autres associations qui oeuvrent à l'intérieur. Ils peuvent être membres d'organismes qui ont déjà témoigné ou qui vont témoigner.

M. Auger: Évidemment.

M. Cherry: Évidemment, c'est la nature même de l'industrie qui veut ça. Tu participes à, tu échanges tes cartes d'affaires, tu fais des contacts, ce qui fait que ta "business" peut progresser. Ça ne surprendra pas ceux que j'ai rencontrés cette semaine, mais je voudrais entendre vos commentaires là-dessus. Les gens qui sont membres de votre Corporation, qui sont venus nous rencontrer et qui étaient en participation de délégation d'autres organismes ont tenu un langage qui disait: M. le ministre, dans le fond, nous autres, une corporation, on n'a pas besoin de ça. Vous auriez dû l'abolir. Ce n'est rien qu'une affaire qui nous envoie des calendriers une fois par année et qui nous oblige à vendre ça et à acheter ça.

Je sais que ça a choqué le président cette semaine quand je lui ai dit et là, je veux lui permettre l'occasion de renchérir. Évidemment, ils m'ont dit: Ceux qui disent ça, c'est ceux qui ne s'impliquent pas nécessairement dans la Corporation, mais c'est les mêmes qui, quand ils font des soumissions, sont bien contents d'utiliser les taux qui sont établis par la Corporation. Je voudrais vous permettre aussi d'enchaîner sur la sorte de services que vous offrez à vos membres, sur une base bénévole... Pardon, pas sur des bases obligatoires, celles-là, mais qui vous permettent, qui permettent à ceux qui s'en servent... et faire la liste des services que vous offrez. J'aimerais ça l'entendre aussi.

M. Brown: O. K. M. le Président, tout comme lorsque vous m'avez posé la même question, je vais laisser répondre mon directeur général.

M. Guilbault: La Corporation, il ne faut pas oublier d'abord que c'est une corporation professionnelle, donc on a des obligations en vertu de la Loi sur les maîtres électriciens dont vous êtes responsable. On a un comité de discipline, on a un service des enquêtes, on a un service des plaintes, on a un code d'éthique, un code de déontologie dont on parie tant ici: On veut le faire. Nous, on l'a. Donc, on administre d'abord la loi.

Mais, dans la loi, comme il est mentionné dans le mémoire, il faut aussi offrir un paquet de services aux membres de la Corporation et ces services sont surtout de nature administrative. Vous allez comprendre que, le calendrier, c'est une caricature, parce que si on vendait juste des calendriers, ce serait bien le bout, les membres ne seraient pas contents. Alors, c'est sûr qu'on offre des services d'informatique, de gestion, des services de marketing. Le calendrier, c'est une infime partie du plan de marketing. On offre des services de communication, des services d'assurances, tout ce qui fait qu'un entrepreneur peut profiter collectivement d'un meilleur prix d'une chose qu'il ne pourrait pas avoir individuellement. Alors, là, définir toute la liste, ce serait peut-être un peu fastidieux, mais ce sont des services que, comme organisation, on rend aux membres.

Il y a certains membres qui, pour des raisons d'affaires, font partie d'autres associations, ce qui est tout à fait normal. Mais je vous rappelle que, pour une corporation fermée - étant donné que vous faites allusion aux rencontres que nous avons eues - à adhésion obligatoire, selon un sondage qui a été fait par une firme indépendante, Léger et Léger, sur laquelle nous n'avions pas de contrôle, une association qui a un taux de satisfaction de 90 %, c'est assez rare. Le Parti libéral aimerait ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Tous les partis, monsieur.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi.

M. Brown: M. le Président, pour en revenir à cette particularité des calendriers ou des services informatiques, il faut aussi préciser que ces services commerciaux, comme on les appelle à l'intérieur de notre corporation, s'autofinancent. Alors, si cette personne-là n'en veut pas, de calendrier, ça n'affecte pas la cotisation du membre. Ça, c'est très important. Tous les services commerciaux qu'on offre à la Corporation des maîtres électriciens du Québec s'autofinancent.

Le Président (M. Bélanger): J'aurais une courte question pour vous, quasiment dans le privé. Vos calendriers, est-ce que ce sont ceux qu'on met dans la "shop", en arrière, ou est-ce qu'ils sont mettables dans la maison, où il y a les enfants?

M. Brown: On les met partout.

Le Président (M. Bélanger): Ne répondez pas à ça.

M. Brown: Ils sont très... Ils sont fantastiques.

Le Président (M. Bélanger): II y a les calendriers pour la "shop" et il y a les autres.

M. Brown: Non. Ils sont caricaturés. Ce ne sont pas les calendriers auxquels vous fartes allusion.

Des voix: Ha, ha, ha! Mme la députée de Chicoutimi. Excusez-moi.

M. Brown: On va vous en faire parvenir un. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Moi, je suis célibataire.

M. Brown: Vous aussi?

Mme Blackburn: Ce n'était peut-être pas ceux-là qu'il voulait.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: On peut lui en trouver un.

Le Président (M. Bélanger): Qui vous a dit ça, Mme Blackburn? Alors, c'est à vous, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, M. le directeur général, messieurs, bonsoir. Vous avez défendu, vous défendez votre position avec brio. À entendre le ministre, j'ai comme l'impression qu'on n'aura peut-être pas a poursuivre. S'il se fait aussi accueillant à vos propositions qu'il semble se faire attentif à vos remarques, je pense que la chose serait, comme on dit, dans le sac, en ce qui vous concerne. Mais je ne suis jamais vraiment certaine. Alors, je vais poursuivre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: La Corporation des maîtres électriciens n'est pas régie par le Code des professions. Bien. Vous avez présenté, M. Guil-bault, tout à l'heure, de façon assez intéressante, mais, pour mol, peut-être pas tout à fart complète, toutes les règles qui régissent l'accès à la Corporation, l'accès au titre de maître électricien. J'aimerais que vous m'en parliez un petit peu plus longuement, en nous rappelant quelles sont les exigences de formation de base pour avoir accès à ce titre, la nature des examens, sanctionnés par qui, le code de déontologie, les sanctions. Autrement dit, j'aimerais que vous nous traciez un tableau un peu plus précis de ce qui se pratique chez vous. On pourrait peut-être ensuite se demander: Est-ce que c'est applicable à d'autres secteurs d'activité dans la construction?

M. Guilbault: Vous me posez une question dont la réponse peut être un peu longue. Je vais essayer de résumer. La Régie aimerait bien faire ce qu'on fait, dans le sens que ce que la Régie du bâtiment veut faire pour les autres métiers ou les autres professions, on le fait, à la Corporation des maîtres électriciens.

Actuellement, la Corporation, qui est une corporation qui existe en vertu de la Loi sur les maîtres électriciens, donc, qui ne tombe pas sous le code de la profession, fait passer des examens aux aspirants maîtres électriciens ou entrepreneurs électriciens. Ça se fait de concert, depuis 1980, avec la Régie des entreprises dans une harmonisation qui est assez complète, assez totale. (22 h 45)

Depuis 1980, quelqu'un qui veut devenir maître électricien fait d'abord une demande à la Régie des entreprises de construction qui a ses propres exigences concernant la solvabilité, entre autres, et certaines autres exigences aussi prévues par la Loi sur la qualification professionnelle. La Régie des entreprises lui fart passer un examen spécifiquement sur le Code de l'électricité et ces gens-là spécifiquement, de façon générale, sont des hommes de métier, c'est-à-dire des hommes qui sont d'abord électriciens, c'est-

à-dire compagnons électriciens, qui ont acquis une certaine expérience comme électricien.

Comme c'est normal, en termes d'aspiration professionnelle, les gens, quand ils veulent partir à leur compte, comme on dit, ou partir en affaires, après une certaine expérience comme salarié, ce qui est une ambition tout à fait légitime, vont à la Régie des entreprises - je voulais vous parler de la qualité des gens qui vont passer l'examen - passent l'examen sur le Code de l'électricité, se font vérifier concernant leur solvabilité de point de départ et, par la suite, c'est la Régie des entreprises de construction qui nous avise si tel candidat doit passer un examen d'ordre technique et un examen d'ordre administratif. Ce n'est pas la Corporation qui décide quel examen va être passé à tel ou tel candidat. Nous n'avons pas cette décision-là à prendre.

Or, la Régie nous fournit une directive concernant un candidat en particulier pour dire: Vous allez lui administrer les examens, par exemple, d'administration et technique, qui sont les deux examens qui sont administrés par la Corporation et préparés par la Corporation selon les normes d'élaboration fixées par la Régie. Nous passons les examens au candidat après une courte journée de familiarisation et de cours de formation - ça qui dure une journée et demie... Enfin, ce n'est pas tellement long, mais c'est toujours très apprécié par les futurs entrepreneurs qui, inutile de le dire, dans beaucoup de cas sont très nerveux parce que leur avenir en dépend. Une fois que l'examen est réussi avec succès, si c'est le cas, nous, on avise la Régie des entreprises du résultat des examens. La Régie des entreprises, si toutes les conditions sont remplies, après que le candidat a aussi rempli les conditions de la Corporation qui exigent que cet entrepreneur-là ait une place d'affaires, soit identifié publiquement, à ce moment-là, la Régie des entreprises de construction lui émet sa licence d'entrepreneur électricien.

Donc, la licence est émise par la Régie des entreprises mais à travers un processus où tous les entrepreneurs électriciens sont regroupés au sein d'une même corporation.

Mme Blackburn: Est-ce qu'il y a des exigences quant à la formation de base? Est-ce qu'on exige une formation de niveau collégial, de niveau secondaire?

M. Guilbault: Non. Il n'y a pas d'exigence... Mme Blackburn: Non.

M. Guilbault:... précise concernant cette question-là. Il y a tout simplement un examen.

Mme Blackburn: D'accord.

M. Guilbault: Dans le milieu de la construc- tion, il est permis d'avoir trois personnes habilitantes: une personne habilitante en sécurité, en administration et en technique. Mais ces trois personnes-là, ou qui peuvent être à la fois une seule personne, ça se produit dans le cas d'une très grosse entreprise, ce qui fait que dans bien des cas un entrepreneur électricien qui a une grosse entreprise va être qualificateur technique, mais il va être secondé en administration par une autre personne habilitante. Je peux vous dire que dans 90 % des cas, au moins 90 % des cas, c'est une seule et même personne qui qualifie en technique, en sécurité et en administration et, dans bien des cas, l'entrepreneur qui part en affaires est secondé par son épouse - dans bien des cas - qui fait l'administration. Je vous rappelle que l'entrepreneur est d'abord un homme manuel. Il travaille avec ses' mains, à tel point que quand l'entrepreneur ne travaille pas avec ses mains, il a l'impression de ne rien faire. C'est comme ça la mentalité d'un entrepreneur.

Mme Blackburn: Ça nous arrive aussi.

M. Guilbault: Moi, ce n'est pas mon cas. Quand je travaille avec mes mains, c'est le désastre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Bien. C'est une profession, à ce que vous nous dites, qui est très réglementée et vous étiez presque en train de nous dire que c'est un peu la profession de laquelle s'est inspiré, finalement, le projet de loi qui forme la Régie et qui lui donne un certain nombre de mandats. Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est: On n'a pas attendu le gouvernement pour le faire, on s'est bien organisés, on est soumis à un certain nombre de règles extrêmement strictes parce que, évidemment, quand on parle d'électricité, il y a des obligations, des exigences quant à la sécurité, quant à la qualité des travaux et à leur fiabilité, et je sais que c'est régi très rigoureusement d'ailleurs. Il faut savoir ce que ça prend le moindrement quand vous voulez faire faire des changements à l'intérieur d'une résidence.

Sur un autre sujet... J'aimerais vous dire, pendant que j'y pense, en ce qui concerne le Code civil, que je sais que ma collègue et députée de Hochelaga-Maisonneuve travaille le ministre de la Justice pour s'assurer que ce qui était déjà existant dans le Code actuel soit reconduit dans le prochain Code civil quant aux garanties. Ce qui amène une autre question... Vous dites deux choses et je vais y revenir parce qu'il reste trop peu de temps. Vous dites à la page 20 que, finalement, la Régie telle que composée est génératrice de coûts élevés mais qu'en même temps ça va devenir un réservoir inépuisable de ressources financières. Pourriez-vous nous illustrer ça?

M. Guilbault: Écoutez, quand on lit tous les pouvoirs carrément de taxation de la Régie, c'est facile d'imaginer tous les revenus qui peuvent rentrer à la Régie. Qui pensez-vous va payer ça? Évidemment, c'est le client, mais, entre-temps, il y en a une couple qui vont peut-être être placés dans l'impossibilité de survivre. C'est une régie tout à fait contraire à l'esprit de 1985, la loi 53 qui avait été adoptée à l'Assemblée nationale après au moins deux ans et demi de consultations. À ce moment-là, tout le monde était d'accord pour dire qu'il y avait un consensus dans l'industrie et ce n'est pas nécessairement facile à obtenir.

Aujourd'hui on se retrouve avec une loi, comme il a été dit par le président tout à l'heure, centralisatrice où les intervenants n'ont plus aucun mot à dire, ce qui est tout à fait inacceptable. Vous essaierez d'appliquer les choses quand les parties ne sont pas d'accord, diamétralement opposées. Les gens vont réagir avec leurs tripes et ça ne fonctionnera pas, même avec des amendes de 1600 $ pour dire qu'ils n'ont pas fait correctement. Les gens vont tricher, parce qu'ils ont des familles à nourrir. Ce qui est incroyable dans ces choses-là, c'est qu'on est excessivement sévère vis-à-vis des entrepreneurs, que ce soit du côté des entrepreneurs autonomes ou avec la Régie en termes de qualifications et on oublie complètement tous les salariés qui travaillent "on the side", qui ne travaillent pas pour un entrepreneur.

Alors, vous voyez l'injustice qui s'empare, qui est dénoncé par un peu tout le monde qui est ici ce soir. Ça prend quelque chose de scandaleux pour déplacer autant d'entrepreneurs comme on a pu le faire ici ce soir. Et on me dit qu'il y en a 200 dehors qui gèlent.

Mme Blackburn: Vous nous dites en page 15 de votre mémoire que c'est un projet qui va à l'opposé de la déclaration ministérielle qui indiquait une volonté du gouvernement de responsabiliser davantage les intervenants. C'est un peu ce que je comprends dans votre intervention quand vous dites finalement: On va totalement les déresponsabiliser parce qu'ils ne se sentiront pas engagés ou tenus par des décisions sur lesquelles ils n'ont aucune prise, les décisions de la Régie, si j'ai bien compris.

Dans l'hypothèse que le ministre l'accepte - ce projet de loi était modifié en vue d'abolir, de ramener le projet de loi initial quant à la Commission du bâtiment qui remplacerait la Régie du bâtiment et qui était, elle, cette Commission, administrée en très grande partie par les entrepreneurs qui avaient la responsabilité de s'autodiscipliner, d'assurer la formation, la qualification des entrepreneurs - est-ce que vous seriez enclins à penser qu'on pourrait adopter avec ce type de modification, en même temps en ramenant, en consacrant les acquis qui sont les vôtres évidemment? C'est peut-être dans cette perspective-là que j'y pensais. Est-ce que ça deviendrait un projet acceptable?

M. Lavergne: Si vous me permettez, moi, je dis oui, dans un sens. Je veux dire un peu comme on avait dit tantôt à l'APCHQ, que ce soit une régie ou une commission. Mais ce qui avait été adopté en 1985 était sûrement acceptable à l'industrie parce qu'on l'avait accepté. Un des points dans tout le préambule que vous avez dit tantôt, je pense que vous ne l'avez peut-être pas mentionné, puis c'est une des choses qu'on décrit dans le mémoire ici, à la commission, c'est le fait qu'en 1985 on parlait qu'on avait cinq ans pour s'autofinancer. Alors, on avait le milieu, l'industrie de la construction était impliquée. On nous avait donné cinq ans à l'intérieur de ça, cinq ans pour faire un autofinancement, tandis que dans le projet de loi actuel, ça n'existe pas. On ne parle pas d'autofinancement, finalement. En tout cas, ça va chercher des fonds, ramener des fonds et ce qu'on va faire avec, je ne le sais pas.

Alors, en réponse, on dit oui, qu'on l'appelle comme on le veuille, mais dans le sens que ça avait été fait en 1985, on l'avait accepté et on pense que c'est carrément mieux que ce qu'on voit ici.

Mme Blackburn: D'accord. Ce que vous dites c'est que vous rappelez ce que j'avais peut-être oublié, à savoir que la Commission de la construction avait la responsabilité non seulement de s'autoréglementer mais de s'autofinancer. Le gouvernement ne pouvait pas faire de ponction dans la caisse de la Commission, mais, en même temps, la Commission avait la responsabilité d'assurer entièrement son financement.

M. Lavergne: Dans un temps donné, oui.

Mme Blackburn: Méchamment, des fois. Je pense que c'est pour ça qu'ils l'ont transformée en régie.

Une voix: Pas de commentaires.

M. Brown: C'est ça que je voulais ajouter. C'est que dans cinq ans, elle devait s'autofinancer et s'il y avait des surplus, ça restait à l'intérieur.

Mme Blackburn: Oui, c'est juste.

M. Gosselin: Si vous me permettez, M. le Président. À l'époque, je me rappelle, j'étais dans le groupe qui avait travaillé là-dessus au niveau de la consultation provinciale qu'on avait faite. Je peux vous dire que le milieu avait accepté, non pas facilement, mais il avait accepté, parce qu'il y avait un genre d'équilibre entre les responsabilités et le paiement des choses à l'intérieur alors que, là, dans le projet de loi

actuel, tout ce qu'on fait, c'est qu'on paie. On charge.

Ça va faire, si vous voulez mon point de vue, comme ça a fait au niveau de la Direction générale de l'inspection, à un moment donné, où on a mis des amendes à tour de bras sur des gens qui essayaient de suivre le droit chemin. À un moment donné, on faisait le tour des régions et les gars ont dit: On ne lèvera plus de permis en électricité parce qu'aussitôt qu'on lève un permis, on se fait taper dessus. On va lever des permis quand on va être obligés. Il y avait des gens qui avaient réalisé, à l'époque, que peut-être de mettre une amende, ça réglerait les problèmes, mais il n'y avait pas d'équilibre. Et quand tu n'as pas d'équilibre, ça ne peut pas marcher.

Ça va faire que les gens vont choisir la voie la moins dangeureuse. Si la voie la moins dangereuse est de ne pas respecter les lois en vigueur, les lois ne seront pas respectées. En 1985, lors de la loi 53 sur la Commission du bâtiment, je me rappelle très bien, il y avait un certain équilibre. On avait un droit de parole, on avait un droit de gérance à l'intérieur, chose qu'on ne retrouve absolument pas dans la nouvelle Régie. Une régie, moi, ça me fait peur de toute façon. Des grosses CSST, on en a assez d'une.

M. Brown: Alors, c'est ce que mon confrère vient aussi de répéter. Les amendes qu'on a vécues il y a deux ou trois ans, c'est l'attitude, à un moment donné, que les entreprises en électricité de la province de Québec ont adoptée. On va s'organiser pour en lever le moins possible et, comme ça, on ne se fera pas poigner. Alors, les amendes qu'on a à l'heure actuelle dans le projet de loi en tant que tel, qui sont là, plus on va en mettre, plus il va y avoir des hors-la-loi.

M. Gosselin: Le but à viser par des projets de loi semblables, c'est de contrôler ceux qui font mal, non pas d'achaler ceux qui font bien, non pas de taper sur ceux qui font bien, parce que ceux qui font bien, ils vont venir à faire mal si on tape dessus tout le temps. C'est ça qui va se passer, je pense, dans l'alignement qu'on prend actuellement. C'est qu'on amène tout le monde sur le même pied: la politique et l'égalité des têtes. Quand on coupe la tête aux genoux, il ne reste plus grand-chose pour réfléchir.

Le Président (M. Bélanger): Alors, merci, M. Gosselin. Sur ces paroles pleines de sagesse, M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.

M. Cherry: D'abord, je voudrais vous remercier de vous être déplacés aujourd'hui et de m'avoir présenté ce mémoire. Je veux vous assurer que vos représentations occupent une partie importante de mon attention et que dans l'exercice que nous faisons aujourd'hui, nous apportons beaucoup de travail. C'est pourquoi - je vous ai déjà informé, mais je le fais à votre organisme comme aux autres - j'ai demandé à une équipe du ministère de rester disponible. On va travailler en fin de semaine, en collaboration, pour tenter de trouver, ensemble, les pistes de solutions qui nous conviendront, je l'espère, respectivement. Alors, encore une fois, merci de vous être déplacés, non seulement vous, les officiers, mais les membres qui vous accompagnent.

M. Brown: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi. (23 heures)

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, messieurs, je vous remercie de votre participation aux travaux de cette commission. Je dois dire que le niveau de réflexion était particulièrement intéressant et enrichissant également, mais ce que j'apprécie le plus, finalement, des deux corporations, je dois le dire, c'est que vous ayez démontré la capacité de vous prendre en main et de réglementer votre façon de faire et de vous autodiscipliner. Il faudrait juste qu'on puisse le retrouver davantage dans d'autres secteurs d'activité, d'autres métiers de la construction. Je ne sais pas si c'est possible, mais il me semble qu'il y a là un modèle de fonctionnement qui devrait nous inspirer. Il serait regrettable, pour ne pas dire infiniment déplorable, qu'on traite cette expérience et ce modèle de développement comme si ça n'avait pas existé et qu'on démolisse comme ça, du revers de la main, une expérience qui a été enrichissante, mais qui a été efficace et qui a donné des résultats.

Je me serais attendue à ce que le ministre prenne des engagements un peu plus fermes. Je vous disais tout à l'heure, au moment où j'ai commencé l'interpellation, pas l'interpellation mais les questions, que je pensais que le ministre se montrait un peu plus ouvert. J'aurais cru qu'il aurait, au terme de votre intervention, pris des engagements un peu plus fermes.

M. Brown: On est prêts à l'écouter. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Je suis prête à lui laisser quelques minutes. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): La commission de l'économie et du travail remercie la Corporation des maîtres électriciens du Québec et, avant d'inviter l'autre groupe, n'oubliez pas mon calendrier.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Bonsoir et merci beaucoup.

Nous entendrons maintenant l'Association de la construction du Québec. S'il vous plaît! Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place. Nous avons un dernier groupe a recevoir qui est l'Association de la construction du Québec. Comme on dit en bon français "the last, but not the least". Compte tenu de l'heure, je demanderais votre collaboration, s'il vous plaît! Je pense que tout le monde est un petit peu fatigué, mais nos derniers invités ont droit à autant de considération que les premiers. Quelque part, c'est écrit que les derniers seront les premiers... En tout cas, ça devrait s'appliquer ici, je présume.

Sans plus tarder, M. René Lafontaine, qui est le président de l'Association de la construction du Québec. M. Lafontaine, je vous demanderais de bien vouloir présenter les gens qui vous accompagnent et de commencer la présentation de votre mémoire. On est tout ouïe. Je vous remercie.

Association de la construction du Québec

M. Lafontaine (René): Merci, M. le Président. Permettez-moi de vous présenter d'abord, à mon extrême gauche, M. Denis Linteau, entrepreneur en électricité et en mécanique, secteurs industriel et commercial; à ma gauche, M. Robert Linteau, président-fondateur de l'ACQ et membre du conseil d'administration de la SHQ; à mon extrême droite, M. Claude Bernier, entrepreneur, secteur résidentiel; ensuite, Me Jean Ratté, avocat, directeur des services juridiques à l'ACQ; M. Richard Di Muro, vice-président de l'ACQ et membre du CFPIC; Me Michel Paré, secrétaire exécutif de l'ACQ, et je suis René Lafontaine, président. Merci.

Je demanderais à Me Paré de faire la présentation, s'il vous plaît!

Le Président (M. Bélanger): Vous connaissez nos règles du jeu: 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes. Oui? O.K. On y va maintenant.

M. Paré (Michel): On va commencer un vendredi et on va finir un samedi.

Le Président (M. Bélanger): II y a des chances, oui.

M. Paré (Michel): M. le Président, en cette 23e heure de ce magnifique vendredi de décembre, l'ACQ vous remercie de lui donner l'opportunité de se faire entendre sur les projets de loi 185 et 186. Nous avons été convoqués à cette commission parlementaire il y a six jours à peine pour vous produire le petit mémoire qu'on vous a remis, mais qui est de grande importance et qui est axé sur l'avenir et sur l'industrie. Vous avez cependant battu le record de huit jours accordés par votre prédécesseur, M. Pierre Paradis, en mai 1988, lors des auditions sur le projet de loi 31, avec les résultats que nous connaissons aujourd'hui. Espérons que ce record ne camouflera pas un échec encore pire que le projet de loi 31.

La composition du mémoire - on s'excuse si on vient à peine de vous le remettre - comporte plusieurs éléments. Il y a d'abord une présentation de l'ACQ, quelques énoncés politiques de base que l'on y retrouve, une critique sur l'orientation législative du projet, etc., et plusieurs annexes qui sont des documents, des mémoires ou des discours et des énoncés politiques pour références futures. En espérant que vos fonctionnaires liront l'ensemble du document avec le même enthousiasme et la même ferveur que l'ACQ lorsqu'elle prend connaissance de vos projets de loi.

La présentation de notre mémoire, évidemment, ne sera pas une lecture de l'ensemble du document. On va se limiter à quelques éléments de présentation de l'ACQ parce que, aujourd'hui, c'est quand même la première commission parlementaire que l'ACQ fait en tant que nouvel organisme. Nous allons également discuter surtout de l'orientation législative, nous vous présenterons nos revendications particulières et nous conclurons en souhaitant que vous aurez eu le temps de partager nos 10 énoncés politiques de base que l'on retrouve au chapitre II du mémoire.

Au niveau de la présentation de l'ACQ, laissez-moi vous rappeler que l'Association de ia construction du Québec, de façon libre et volontaire, représente quelque 6500 entreprises de construction qui réalisent plus de 80 % du volume des travaux de construction au Québec. Ces entreprises que l'on retrouve à l'intérieur de notre réseau composé de 15 associations de construction affiliées opèrent comme entreprises générales ou comme entreprises spécialisées. L'ACQ représente des entreprises générales du secteur résidentiel, du secteur commercial, du secteur industriel, institutionnel et de génie civil. Elle regroupe des entreprises spécialisées dans toutes les catégories de spécialisation que l'on retrouve dans la construction: électricité, peinture, plomberie, excavation, toiture, etc.

De plus, l'ACQ représente la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération du Québec, l'Association d'isolation du Québec, l'Association des entrepreneurs en ventilation et climatisation du Québec, l'Association des maîtres peintres du Québec, l'Association des entrepreneurs en intercommunication et l'Institut d'acier d'armature. L'on représente également 400 entreprises qui sont assujetties aux décrets de menuiserie métallique, produits de béton, décret sur la tuile, marbre et terrazzo, et production de cadres et portes d'acier. Et c'est l'ACQ qui est le négociateur patronal.

Dans le domaine de l'électricité industrielle, l'ACQ représente différentes entreprises et nous avons soumis quelques noms. Dans le domaine de la mécanique industrielle, vous y retrouvez également des entreprises qui sont membres de l'ACQ.

En termes d'heures déclarées à la Commission de la construction, des 50 plus gros employeurs identifiés par la CCQ en 1990, 84 % sont membres de l'ACQ et représentent à eux seuls un nombre d'heures déclarées de plus de 17 000 000. En termes de chiffres d'affaires, selon une compilation faite par le journal Québec Construction, 80 % des plus grandes entreprises sont membres de l'ACQ, pour un chiffre d'affaires de plus de 3 000 000 000 $. Si on y ajoute certaines entreprises que l'on connaît et qui, normalement, devraient se retrouver dans ce palmarès, c'est plus de 4 000 000 000 $ faits par environ 75 entreprises, et vous avez des noms en référence.

L'ACQ est donc le seul véritable porte-parole de l'entreprise qui oeuvre dans l'industrie de la construction pour toutes les questions affectant l'entreprise autres que la négociation des relations du travail relative au décret de la construction. C'est pourquoi l'ACQ est représentée au sein de conseils d'administration et de différents comités. À titre d'exemple, on vous en a mis quelques-uns à la page 8; ça va du conseil d'administration de la CCQ à la Société d'habitation du Québec, au Conseil d'arbitrage commercial national et international, etc.

L'ACQ est aussi la seule association industrielle du secteur de la construction qui est reconnue par le ministère québécois de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. Nous espérons que cette brève description saura démontrer aux membres de l'Assemblée nationale l'importance et le rôle de l'ACQ dans l'industrie de la construction. L'adhésion de notre "membership" se faisant sur une base libre et volontaire, cela nous fait partager des préoccupations d'industrie et non des intérêts corporatistes.

Les 10 énoncés politiques de l'ACQ, vous les avez, et ils pourraient se résumer dans un slogan que plusieurs ont partagé dans le passé et que nous avons adapté à l'industrie, "Les travaux de construction aux entrepreneurs de construction".

Malheureusement, l'orientation législative du projet de loi s'inscrit dans une démarche interventionniste traditionnelle alors que notre société est à franchir une étape historique où la mondialisation des marchés devient une composante importante de notre économie et particulièrement de l'industrie de la construction. Le défi actuel de notre industrie, c'est de faciliter la métamorphose de l'entrepreneur traditionnel en développeur industriel compétent, ce qui est l'unique moyen pour contrer la compétition internationale et faire face à la globalisation des marchés et assurer le maintien des emplois et l'utilisation des produits et du savoir québécois.

Ce défi est pourtant connu des autorités gouvernementales. Le président-directeur général de la Société d'habitation du Québec, dans un discours prononcé en avril 1990 à l'intention des entrepreneurs du secteur résidentiel sur "Les innovations technologiques: une menace pour votre industrie", disait, et je cite: "Vous devez chercher à améliorer votre part du marché. Cette recherche de nouvelles méthodes de construction, l'utilisation de nouveaux matériaux et le transfert de certaines technologies pour obtenir des coûts de production des unités plus abordables...." Il poursuivait: "Un retard dans ce domaine favorisera la concurrence extérieure au Québec [...] on ne parlera pas d'améliorer votre part du marché, mais plutôt de ne pas la voir trop diminuer ou même disparaître." Et on vous a mis, dans le mémoire, à la page 14, quelques exemples qui vous démontrent jusqu'à quel point l'industrie de la construction au Québec est en péril. (23 h 15)

Car il faut savoir que le bâtisseur d'aujourd'hui doit faire appel à de nouvelles technologies s'il veut être capable de concurrencer l'arrivée d'entreprises étrangères et aussi d'exporter son savoir-faire. À l'heure actuelle, les techniques de construction utilisées au Québec perpétuent à 85 % les méthodes traditionnelles de construction sur le chantier. Le niveau d'implantation de nouvelles façons de bâtir demeure très faible, l'environnement réglementaire et les pratiques commerciales étant les principales embûches à l'implantation des nouvelles techniques.

L'ACQ, au mois d'août, était heureuse de constater, et nous l'avons fait savoir au ministre, que le gouvernement rejetait l'idée d'un régime de revenu garanti pour retenir le concept d'instauration de la qualité totale dans l'industrie. Nous lui avons même souligné que l'ACQ travaille sur un projet d'implantation d'un programme de qualité totale qui est une pièce maîtresse pour le développement d'une stratégie industrielle globale dans l'industrie de la construction.

L'ACQ a tendu la main au ministre du Travail pour élargir à son ministère le partenariat ACQ-MICT. Malheureusement, certains ont préféré proposer un rapiéçage en vase clos de vieilles lois d'où on ne peut dégager aucune stratégie industrielle pour répondre aux nouvelles réalités et aux réels besoins des entrepreneurs.

Bien plus, le projet de loi apparaît comme une pièce détachée de son origine Picard-Sexton sans même en respecter l'ordre chronologique établi. Une fois le spectre du régime de revenu garanti passé, on pouvait toujours retrouver dans ce rapport Picard-Sexton quelques éléments moteurs pouvant s'apparenter à la mise sur pied d'une stratégie construction: politique de construction publique, commission de stabilisation, etc. Mais voilà, on vient de sauter le tiers des

recommandations.

Or, le ministre est en train de rater une belle occasion de faire sa marque comme artisan d'une réforme de l'industrie axée sur l'avenir par l'implantation d'une stratégie industrielle globale pour la construction. Cette absence de visée industrielle résulte probablement du mandat même du ministre dont la Loi sur le ministère du Travail impose comme fonction première à son titulaire d'élaborer et de proposer des politiques visant à favoriser des relations du travail harmonieuses entre employeurs et salariés. À la base même, pour l'ACQ, le processus est vicié. Il est temps, même urgent, que l'industrie de la construction soit perçue sous un angle autre que les seules relations du travail.

D'autre part, plusieurs tentent de ramener l'industrie au seul secteur habitation ou à un seul métier. Ces trois orientations, relations du travail, habitation, un seul métier, ont conduit l'industrie là où nous sommes aujourd'hui, dans un cul-de-sac, simplement parce qu'elles reposent sur des sous-ensembles de l'industrie. Pour s'en convaincre, regardez les problèmes reliés à la tuyauterie industrielle, à la réfrigération, à l'électricité industrielle, etc.

Avant de devenir un employeur dans la construction, il faut d'abord avoir l'âme, le goût et les qualités d'entreprendre, de devenir entrepreneur, de fonder une entreprise, de construire. Il faut une qualification professionnelle et l'ACQ partage le même objectif, mais dans une démarche différente. Mais il faut d'abord avoir accès à un marché et, au rythme où vont les choses, quand ce n'est pas la compétition étrangère qui étouffe l'industrie, ce sont les pouvoirs publics par le rétrécissement du champ d'application de la loi.

Il faut reconnaître et décréter de façon urgente que tous les travaux de construction doivent être effectués par des entreprises de construction, sinon nous allons carrément vers une disparition du marché de l'industrie de la construction, puisque la part de production occupée par les entrepreneurs engagés principalement dans l'industrie de la construction était passée de 80 % en 1975 à seulement 64 % en 1985, tandis que la part occupée par les entreprises non principalement engagées dans la construction, dont les pouvoirs publics et les organismes publics, passait, elle, de 20 % à 36 % au cours de la même période. Un exemple précis, Hydro-Québec est détenteur d'une licence d'entrepreneur de construction dans 8 catégories d'entrepreneur général et 18 catégories d'entrepreneur spécialisé, et, en 1990, Hydro-Québec était le 6e employeur professionnel en importance au Québec dans le domaine de la construction, avec un nombre d'heures rapportées à la CCQ de 668 000. Lorsqu'on a rencontré le ministre la semaine passée, Hydro-Québec était au 15e rang, mais on avait les chiffres de 1989. Ils sont rendus au 6e.

Il y a deux projets de loi sur la table et aucune volonté politique d'accorder les travaux de construction aux entreprises de construction. C'est inacceptable. Il faut bouger, parce que c'est vous autres, les parlementaires, par les lois que vous adoptez, qui avez réduit le champ d'activité de la construction. Aujourd'hui, il faut corriger les erreurs du passé, et le projet de loi 185, dans son champ d'application, est une belle occasion de le faire.

Au chapitre des plans de garantie résidentiels de l'ACQ, il faut avoir l'honnêteté de reconnaître que ces plans s'inscrivent dans un processus de qualification professionnelle supérieur aux normes gouvernementales actuelles, et cela, depuis une bonne dizaine d'années. Au lieu de vouloir s'en prendre aux plans de garantie, le gouvernement devrait, dans un premier temps, obliger les deux tiers des entrepreneurs errants à se faire accréditer à un plan de garantie résidentiel. Au moment où l'on se parie, une proportion de 20 % à 25 % des demandeurs, détenteurs d'une licence de la Régie, ne passent pas au tamis des exigences des critères de sélection de l'ACQ. Il existe donc déjà, sans alourdir la réglementation actuelle, les outils nécessaires pour autodiscipliner l'industrie, par une prise en main de sa propre destinée plutôt que par la création d'un organisme de tutelle qui décide de tout, sans avoir à consulter qui que ce soit.

Le gouvernement n'a pas à être gêné des pians de garantie de l'ACQ, puisque le texte de nos garanties et de nos protections a été imposé par nul autre que le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Nous ne pouvons aujourd'hui accepter que le gouvernement nous reproche d'avoir respecté les textes qu'il nous a imposés en 1982 et, par surcroît, qu'il se base sur notre respect de ses propres directives pour nous imposer une camisole de force tricotée dans des isoloirs.

À la lumière de notre expérience, nous constatons aussi que les demandes irréalistes vis-à-vis le plan de garantie actuel concernant la couverture de toutes les réclamations envisageables d'un propriétaire mécontent obligeront la Régie à établir ses propres critères qui s'avéreront substantiellement plus dispendieux pour les consommateurs que ceux déjà offerts par les organismes privés. L'ACQ réitère sa position à l'effet que les plans de garantie doivent devenir obligatoires, en autant que le pouvoir d'accréditation des entrepreneurs demeure aux organismes privés reconnus par le gouvernement. Nous soutenons également que l'ensemble des notions relatives à la Loi sur la protection du consommateur doit être enlevé de la Loi sur le bâtiment afin d'éviter toute confusion, et ce, au même titre que le gouvernement l'a fait lors de la révision du Code civil il y a quelques semaines.

En termes de protection du consommateur, l'ACQ a fait plus en 10 ans que n'importe quelle Régie des entreprises de construction du Québec,

et vous devez nous respecter. Et nous respecter, ça signifie de ne pas déléguer les pouvoirs du gouvernement à une régie exclusivement administrée par des fonctionnaires. Nous respecter, ça signifie que les entrepreneurs de construction doivent absolument siéger de façon majoritaire au conseil d'administration de la future régie du bâtiment si l'intention gouvernementale est toujours de procéder à toute vitesse à l'adoption de cette loi, ce à quoi nous vous donnons une fin de non-recevoir. Nous respecter, ça signifie de ne pas reléguer les entrepreneurs dans une instance de deuxième zone sans aucun pouvoir effectif et placés sur le même pied qu'un consommateur ou un travailleur, alors que l'essentiel même du projet de loi porte sur la qualification professionnelle des entreprises. Parce que, actuellement, la mécanique de fonctionnement de la future Régie exclut les entrepreneurs de tout pouvoir décisionnel, cette démarche est étrangère à la notion de responsabilisation du milieu.

Soyons au fait de la réalité. L'orientation du projet de loi 186 ou, devrait-on dire, l'engouffrement par un tel projet de loi, se compose à plus de 70 % de pouvoirs discrétionnaires. En somme, c'est un chèque en blanc à l'ordre d'une poignée de fonctionnaires. Un peu plus de 25 % des articles regroupent plus de 150 pouvoirs discrétionnaires. Traduction: une mise en tutelle de l'industrie de la construction.

Bref, le projet de loi sur le bâtiment écarte les entrepreneurs des pouvoirs décisionnels concernant leur industrie, accorde aux fonctionnaires un pouvoir discrétionnaire de vie ou de mort sur l'entrepreneur, soustrait le gouvernement de toute mesure pouvant favoriser l'industrie de la construction et n'accorde aux entrepreneurs qu'un simple pouvoir de consultation au même titre que les travailleurs, consommateurs, municipalités, etc.

Nous ne sommes plus à l'ère de la prise en otage. Nous sommes à l'ère de la libération des otages, de la concertation, du partenariat. Il est temps que le ministère du Travail se mette à la page s'il veut maintenir un minimum de crédibilité à l'intérieur du patronat de la construction. Alors que ce projet de loi s'inscrit dans un discours politique qui déclare rechercher l'atteinte de la qualité totale dans l'industrie, sait-on seulement, comme le disait le député de Sherbrooke dans un discours du mois d'avril 1990, que dans le domaine du bâtiment la non-qualité représente entre 10 % et 20 % du chiffre d'affaires? Des progrès importants ne pourront être accomplis dans ce domaine que par le développement des plans de qualité dans toutes les firmes et par un réel partenariat sur le chantier.

Alors, force est de constater qu'il n'y a aucune mesure dans le projet de loi 186 visant à développer une stratégie d'implantation générale de démarche qualité au sein de l'entreprise. Il n'y a aucune mesure visant à augmenter la compétitivité de nos entreprises. Il n'y a aucune mesure visant à favoriser une plus grande efficacité et une meilleure productivité. Il n'y a aucune mesure visant à conserver nos marchés actuels et surtout en développer de nouveaux tant dans le marché intérieur qu'extérieur. Il n'y a aucune mesure visant à aider nos entreprises à gérer le développement et il n'y a aucune mesure visant à aider nos entreprises à instaurer un PDRH.

Donc, cette nouvelle régie semble être l'opposée de la réalité et du défi actuel de l'industrie; elle conjugue au présent les incertitudes et le gouffre de notre futur. Le véritable défi de notre industrie tient en des enjeux de recherche, de développement, de formation, de gestion de qualité, d'économie de marchés, de pratiques commerciales, d'utilisation et d'accès aux nouvelles technologies, d'impact de la réglementation sur la productivité et la compétitivité, de maillage propriétaire-concepteur-manufacturier. Le défi de notre industrie doit aussi faciliter la métamorphose de l'entrepreneur traditionnel en développeur industriel compétent et reconnu. Il doit aussi corriger le système d'octroi des contrats publics développé exclusivement sur les plus bas prix pour accorder des contrats sur la base de critères de compétence, d'expérience, de performance et de qualité. Le défi de notre industrie doit aussi récupérer la part de marché évaluée à plus de 36 % actuellement qui est détenue par des entreprises non principalement engagées dans l'industrie, ce qui n'inclut même pas le travail au noir.

À l'heure ou les discours de notre société s'articulent autour des prémisses de prise en charge par le milieu, de qualité totale, de partenariat et de grappes industrielles, où l'habitat est considéré comme une grappe dite stratégique, mais non concurrentielle, on devrait ajuster les futurs organismes gravitant autour du ministère du Travail au diapason de la réalité économique et organisationnelle de l'industrie avant d'adopter une loi de tutelle. (23 h 30)

L'ACQ vous propose l'option ACQ, comme orientation, ce qui veut dire reconnaître l'industrie de la construction comme un secteur industriel et développer une stratégie globale d'intervention pour permettre aux entreprises d'affronter le libre-échange et la concurrence internationale par le développement technologique de leur structure d'opération pour en arriver à un produit final québécois compétitif et rentable par la qualité dans le domaine du bâtiment et du génie civil.

L'option ACQ, c'est de reconnaître que tous les travaux de construction doivent être effectués par des entreprises de construction et mettre en application les mesures fiscales appropriées pour combattre le travail au noir. L'option ACQ, c'est de cesser de confondre l'administration des régimes de relations du

travail avec la mise en place d'une stratégie industrielle de développement de l'entreprise du secteur construction. L'option ACQ, c'est de développer un vrai partenariat entre le gouvernement et ses principaux ministères concernés par la construction et l'ACQ.

Quant aux revendications de l'ACQ sur le projet de loi, vous les avez à la page 43: c'est le report du projet de loi 186 parce que l'organisme proposé ne répond pas aux attentes actuelles de l'industrie - je vous laisse un temps pour avoir une réponse positive - et, à défaut de reporter l'adoption du projet de loi 186, les entrepreneurs doivent être membres du conseil d'administration et être majoritaires au conseil d'administration de la régie; c'est reconnaître l'ACQ comme le seul représentant de l'ensemble de l'industrie de la construction pour toute question autre que le domaine des relations du travail dévolues à l'AECQ; c'est la mise sur pied d'un comité interministériel des principaux ministères concernés par la construction et l'ACQ; c'est la mise sur pied d'un comité gouvernemental avec l'ACQ pour déterminer les paramètres des plans de garantie; c'est reconnaître et mettre en application les énoncés politiques de l'ACQ qui doivent guider toute action de support de l'État québécois dans le secteur de l'industrie de la construction, tel qu'énoncé au chapitre II du présent mémoire.

En conclusion, M. le Président, l'ACQ appuie les divers objectifs véhiculés dans le discours du ministre du Travail de juin dernier, intitulé "Vers la qualité totale dans l'industrie de la construction, les suites gouvernementales au rapport Picard-Sexton", et qui visent à améliorer la qualité des travaux de construction, à responsabiliser davantage les intervenants, à mieux contrer le travail au noir et à mieux protéger le consommateur.

Nous sommes d'accord avec l'instauration d'amendes plus sévères, d'un guichet unique de qualification, du retrait ou de la suspension de la licence ou d'un code de déontologie. Cependant, nous sommes définitivement contre la façon de faire pour l'atteinte de ces objectifs. L'encadrement doit se faire à la lumière d'une vision globale de l'industrie. Une telle démarche doit s'inscrire dans un processus de partenariat avec l'ACQ, ce qui n'est malheureusement pas le cas du projet de loi 186. On a plus l'impression que c'est une réforme partielle et incomplète d'une réglementation désuète et sans perspective d'avenir, faussée par l'insertion d'un nouvel organisme à l'intérieur du mauvais ministère. De prime abord, l'ACQ possède peut-être plus d'affinités avec la vision d'ensemble prônée par le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie plutôt qu'avec la vision artificielle centrée sur les fonctions premières du ministère du Travail.

Les projets de loi sous étude maintiennent une partie importante des travaux de construc- tion en dehors de l'industrie, démontrent une absence totale de stratégie industrielle du secteur de la construction, ne prévoient aucune disposition favorisant une plus grande efficacité et une meilleure productivité, ne proposent aucune mesure efficace pour conserver nos marchés actuels et surtout en développer de nouveaux, ne relèvent aucun des vrais défis de l'industrie et ne répondent pas aux réels besoins des vrais entrepreneurs.

Le projet de loi 186 mérite plus que d'être voté, mérite plus que d'être bafoué à la hâte; il doit faire l'objet d'une étude plus approfondie par l'effort de concertation des vrais intervenants de l'industrie. À ce titre, l'ACQ tend la main à tous les parlementaires et au ministre pour travailler ensemble au développement d'une véritable stratégie industrielle de notre industrie qui est et qui continuera, avec le projet de loi, d'être l'industrie la plus réglementée des industries québécoises. L'industrie de la construction au Québec est en péril et les projets de loi déposés n'apaisent aucunement les menaces qui nous guettent. Merci de votre attention.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Vous avez commencé votre intervention en disant que vous n'aviez eu que six jours d'avis et que c'est pour ça que vous nous aviez préparé un petit mémoire comme celui-là. Je regrette quasiment de vous avoir donné six jours.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laforrtaine: M. le Président, ça fait plusieurs années qu'on prêche dans le désert, par exemple.

M. Cherry:...

Une voix: Ça fait plusieurs années que vous écriviez. Vous attendiez l'occasion.

M. Paré (Michel): M. le Président, si vous me le permettez, la brique que l'on vous a remise constitue la première pierre de l'édification d'une nouvelle industrie de la construction au Québec.

M. Cherry: O.K.

M. Paré (Michel): À vous de la prendre.

Le Président (M. Bélanger): La pierre angulaire. M. le ministre.

M. Cherry: Merci. Je voudrais vous entendre. À la page 43, au point 3, vous dites. "Reconnaître l'ACQ comme le seul représentant de l'ensemble de l'industrie de la construction

pour toute question autre que le domaine des relations du travail dévolues à l'AECQ". Voulez-vous nous dire pourquoi votre organisme seul plutôt que d'autres organismes que nous avons entendus ce soir, que ce soit l'APCHQ, que ce soient les corporations? Quelles sont les qualités que vous croyez être les seuls à posséder qui vous qualifient pour être les seuls représentants de l'ensemble de l'industrie, sans faire de place aux organismes que je viens de nommer?

M. Paré (Michel): Vous avez, dans le domaine des relations du travail, la négociation du décret, un organisme qui est l'AECQ, qui négocie les relations du travail. Il y a beaucoup plus dans la vie d'une entreprise de construction que la négociation du décret: les autres aspects de l'industrie, il y a différents corps de métiers, différentes spécialisations. Vous avez, au Québec, quelques corporations à adhésion obligatoire unimétier. La réalité de l'industrie n'est pas unimétier. Il y a plusieurs intervenants d'autres secteurs de spécialisation. Il y a dans la construction une multitude d'entreprises qui n'oeuvrent pas uniquement dans le secteur résidentiel, mais qui font également des travaux commerciaux, institutionnels, etc. Il y avait des statistiques que je n'ai pas ici, qu'on a présentées dans le rapport Picard-Sexton et qu'il va nous faire plaisir de vous transmettre dès lundi matin. Vous devez avoir une perspective plus large où on parle de marché, où on parle de technique, de technologie, où on parle d'exportation, où on parle de formation. C'est un secteur industriel et, au Québec, il faut qu'il y ait un seul organisme qui travaille sur ces aspects.

Vous avez, en annexe, un document qui explique que les petites entreprises sont perdues dans toutes les interventions gouvernementales. Il y a énormément de recherche et de développement un peu partout à gauche et à droite. Les petites entreprises sont perdues et ne sont pas capables de s'y rendre. Nous vous disons qu'il doit y avoir un organisme qui oeuvre et qui représente les entreprises dans leur vie d'entreprise. Nous avons actuellement des conflits de spécialisations entre organismes qui ont pour effet de tuer des entreprises, et ça, c'est inacceptable. Ce résultat découle strictement d'une vision corporatiste et je fais référence au dossier d'Hydro-Québec, dans son programme Bi-Énergie, où les entrepreneurs détenteurs d'une licence de la Régie ne peuvent pas devenir maîtres d'oeuvre. Les entreprises en réfrigération thermopompe... Il y a des entreprises qui sont en train de crever présentement, qui disparaissent, et ça, c'est le résultat d'une bataille corporative. Nous disons qu'il faut que les entreprises soient qualifiées et, si elles détiennent les licences spécifiques qui leur permettent de réaliser les travaux, qu'on leur donne la possibilité d'effectuer ces travaux. Qu'on ne les oblige pas, pour avoir le droit d'effectuer ces travaux, d'être membres, depuis trois ans, d'autres organismes. Peut-être que monsieur... Voilà.

M. Cherry: Merci. Vous avez mentionné dans votre mémoire, vous avez parlé, vous avez fait référence à votre souci de maintenir les plans de garantie, et vous en possédez, votre organisme. Lors de nos rencontres précédentes, vous m'avez indiqué que, dans ce domaine-là, vous cheminiez en étroite collaboration avec l'Office de la protection du consommateur pour assurer l'arrimage des exigences de cet organisme-là avec vos plans. Et toujours en référence avec ma première question à laquelle vous venez de dire, dans des termes qui sont les vôtres, les justifications que vous croyez pour que vous soyez les seuls, au niveau des plans de garantie, vous en avez et d'autres en ont, comment distribuez-vous la part du marché qu'est la vôtre par rapport aux autres?

M. Paré (Michel): II y a deux plans de garantie. Les deux plans continuent d'opérer et il y a une saine compétition entre les deux plans. C'est différent de l'adhésion obligatoire à un organisme. Il n'y a pas deux corporations des maîtres électriciens du Québec; il y en a seulement une. Il n'y a pas deux corporations des maîtres mécaniciens en tuyauterie; il y en a seulement une. Si les corporations perdent leur pouvoir de qualification, et nous sommes d'accord avec le guichet unique de qualification, ils n'ont plus de raison d'être. Si les entreprises du secteur électricité ou du secteur plomberie veulent se regrouper, nous applaudissons à cette volonté d'entrepreneur, mais qu'elles le fassent au même titre que les autres entreprises, les autres spécialités, qu'elles le fassent sur une base volontaire. Qu'on cesse de maintenir artificiellement des organismes. Et les plans de garantie sont, évidemment, une activité strictement commerciale. Il y a une saine compétition et elle est féroce.

M. Cherry: Ça termine mes questions, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le président, M. le directeur général, messieurs, bonsoir. Je pense qu'il valait la peine de rester aussi tard pour vous entendre. C'est un des mémoires qui nous a replacé toute la situation dans une perspective beaucoup plus intégrée et dans la perspective qui est celle, j'allais dire du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. Mais je pense qu'il n'a pas parlé à son collègue ou son collègue ne lui a pas parlé, parce que ça semble être deux voies parallèles, mais on n'a pas l'impression qu'ils vont se rencontrer tantôt.

En fait, la régie du bâtiment, c'est l'équivalent de l'étatisation de l'industrie de la construction. On a nationalisé l'industrie de la construction et je trouve ça regrettable, parce que, autant le projet de loi 53, j'y reviens, avait fait consensus dans le milieu, autant celui-ci divise. Ces deux projets de loi vont diviser. Je ne comprends pas que le ministre soit arrivé à ces conclusions compte tenu de ce qu'il avait annoncé dans son énoncé, pas d'orientation, mais dans sa déclaration ministérielle de juin dernier.

Vous avez raison de dire - évidemment, II faut le comprendre également, le ministre est ministre du Travail - que la perspective dans laquelle est placé ce projet de loi en est une exclusivement de travail. Donc, elle n'a pas pris en compte l'aspect plus global et plus dynamique de la synergie qui devait exister entre travail, exécution, développement, recherche, tous les aspects, finalement, qui composent l'industrie de la construction, dans une perspective de grappes dont on parle tant ces jours-ci, mais il semble que, dans votre cas, les vendanges vont être loin. " (23 h 45)

On parle de grappes industrielles. Ce projet de loi pèche de la façon suivante. On aurait dû retrouver autour de la même table, pour élaborer ce projet de loi, le ministre des Finances, ie ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. On aurait dû pouvoir voir l'influence de ces ministres au sein de ces projets de loi. Le deuxième défaut de ce projet de loi qui, à mon avis, est important, compte tenu de la réaction qu'il a suscitée chez les autres intervenants, on a attaqué violemment les entrepreneurs autonomes comme s'ils étaient les seuls responsables et coupables du travail au noir. Il y a du travail au noir, mais le travail au noir, c'est aussi le fait de grands entrepreneurs, je veux aussi vous le dire, qui embauchent sous la table et qui ne respectent pas le décret de la construction. Et c'est facile par les temps qui courent parce qu'il y a le chômage, puis on exerce des pressions sur le travailleur, s'il veut garder son emploi: Tu travailles, tu te tais, tu ne fais pas de rapport, sinon regarde-moi venir, tu sais, il y en a d'autres qui attendent. Il y a également les employés syndiqués qui détiennent des cartes de compétence et qui travaillent sous la table. Mais ce dont on a le plus entendu parler, finalement, ce sont les entrepreneurs autonomes et ça m'a semblé prendre plus de place que leur part relative du travail au noir. Mais ça, c'est difficile à évaluer.

Je veux faire cette intervention parce que les travaux vont se terminer tout à l'heure, parce que je pense que le ministre aura à réfléchir d'ici la fin de semaine, d'ici lundi finalement, sur ce qu'il fait de ces projets de loi. Ou il affronte, prend de front la majeure partie des entreprises de la construction et une partie des syndicats, ou encore il révise sa situation et se donne le temps de la réflexion. Je souhaite très sincèrement qu'il se donne le temps de la réflexion. On n'est pas dans une situation, économiquement parlant, qui nous permet de créer des divisions au sein de l'industrie de la construction. Ce n'est pas propice, à ce moment-ci, ce genre de division alors que, de l'autre côté, on prêche la concertation, on prêche le partenariat, on prêche la synergie, alors que ces projets de loi ne faisant pas l'unanimité vont créer le mécontentement. Mon appréhension, c'est que les entrepreneurs, les syndiqués et les entrepreneurs autonomes, mais beaucoup de personnes, ne se sentiront pas liés par les décisions de la régie. Ils vont tout faire pour contrer ses orientations ou ses décisions.

Le projet de loi qui crée une régie plutôt qu'une commission, j'y reviens - et là, je ne voudrais pas faire offense aux fonctionnaires - mais on a l'impression que ce projet de loi veut garder une mainmise forte, une emprise complète, totale et entière du gouvernement sur l'industrie de la construction. Messieurs, j'aimerais vous entendre. Ensuite, mon collègue va prendre la parole. Vous nous dites que vous accepteriez une modification qui vous donnerait plus de sièges ou des sièges garantis à la régie de la construction. Mais vous ne croyez pas que cette régie de la construction, même si vous y êtes majoritaires, devra, un jour ou l'autre, pourrait, un jour ou l'autre, céder aux pressions d'un gouvernement qui voudrait en faire un réservoir de ressources financières pour garnir les coffres de l'État, indépendamment du gouvernement, je le dis, il ne faut jamais tenter un gouvernement et il faut adopter les lois, non pas pour un ministre, mais il faut légiférer en se disant que les lois pourraient être gérées par le pire des ministres dans le pire des gouvernements?

M. Di Muro (Richard): Ce qu'on dit, madame, ce n'est pas d'avoir des sièges absolument. Ce qu'on dit, nous, c'est tout simplement inacceptable, cette formation comme telle. Mais, le moindre mal, si jamais il y avait cette régie, on voudrait quand même être représentés, si vous voulez, majoritaires au niveau de cette régie pour en avoir le contrôle. Mais notre demande, ce n'est pas ça, c'est qu'elle n'existe tout simplement pas.

M. Unteau (Robert): Vous avez parlé de 1985, de la loi 53, je peux vous en parler légèrement parce que j'ai participé au cours des dernières années à trois ou quatre commissions parlementaires. D'après les entrepreneurs qui ont paradé encore ici aujourd'hui, je me rends compte que c'est encore du parei au même. Et là, quand on arrive avec la régie qui est proposée, c'est même complètement à l'inverse de tout ce qui s'est dit ici en 1985 et en 1988 quand on

parlait de la Loi sur le bâtiment, de la Commission du bâtiment, on disait: II ne faut pas créer une régie, un éléphant blanc; il faut faire attention pour ne pas créer une deuxième CSST. Je pense que c'est clair. On a les résultats d'une grande CSST, ça donne quoi? Les entrepreneurs payent assez généreusement merci. Je suis convaincu qu'avec la régie que vous voulez créer là on va se retrouver dans trois ans, les mêmes entrepreneurs vont encore parader une journée de temps et ils vont avoir seulement cinq jours, six jours pour prendre connaissance du projet de loi et, cette fois-là, ça va être un projet de loi pour tenter de diminuer le déficit de cette fameuse régie. Ça va être ça. Vous allez prendre l'argent où? En 1988, lors de la loi 31, M. Paradis a dit textuellement: On n'est pas capables de réglementer, c'est-à-dire de mettre des inspecteurs pour arrêter le travail au noir; donc, légalisons-le. Mais pensez-vous que c'est la solution? Tous les entrepreneurs qui ont paradé ici aujourd'hui ont des solutions. Puis je dis que l'industrie de la construction a des solutions à vous proposer. Mais je pense que ça va prendre plus que six jours ou deux jours, une fin de semaine pour essayer de passer un projet de loi à la hâte, dont tous les intervenants du milieu ne veulent rien savoir, et je pense que la réponse est assez claire. On est tous prêts, on travaille tous bénévolement et on va en travailler des jours, des nuits et des fins de semaine encore si vous voulez nous écouter et au moins prendre ce qu'on va vous amener de l'industrie de la construction. C'est nous autres qui le vivons. Je pense, en tout cas, moi en particulier, j'ai 25 ans d'expérience, on n'est pas tout seuls, il y a tellement de gars qui sont prêts à y travailler et à vous dire c'est quoi l'industrie de la construction et c'est quoi les problèmes et quelles solutions vous pourriez apporter. Nommez-moi le meilleur gars qui peut vous dire comment réglementer, qualifier son compétiteur? C'est sûrement un entrepreneur. Il a sûrement les moyens et la "pogne" nécessaire pour vous dire: C'est de même que vous devriez qualifier les entrepreneurs ou faire respecter tel projet. Je pense que c'est un gros manque et c'est malheureux. C'est très malheureux d'autant plus que, imaginez-vous, on vous a présenté ça à six jours d'avis. Donnez-nous en donc seulement 15, imaginez-vous tout ce qu'on va vous apporter.

Le Président (M. Bélanger): M. le député d'Ungava.

M. Paré (Michel): M. le Président, si vous me permettez, pour enchaîner sur la question. À la page 11 de notre mémoire, l'on fait référence, aux points 8 et 9, à deux énoncés politiques de l'ACQ: redéfinir, alléger et simplifier l'encadrement législatif et réglementaire de l'industrie de la construction; réorganiser et rationaliser les interventions gouvernementales et paragouver- nementales dans l'industrie. On a présenté ailleurs, dans d'autres commissions parlementaires, à d'autres tables de concertation, des études qui ont été faites par d'autres et nous en avons produit une au niveau de la Table de concertation sur l'habitation et que vous avez en annexe. Mais vous avez également une annexe qu'on avait présentée à une commission parlementaire sur la réforme du Code civil où vous avez, en termes de réglementation, d'organismes qui interviennent dans la construction, une étude de 1986 et, depuis ce temps-là, ça n'a fait qu'augmenter: il y a environ 16 organismes gouvernementaux et 28 lois différentes qui encadrent l'industrie de la construction; en matière de normalisation, vous avez 13 organismes, 24 lois différentes; en matière d'autorisation, 10 organismes, 18 lois; en matière de certification, 5 organismes, 6 lois; en matière d'accréditation, 10 organismes, 12 lois; en matière de surveillance et de régularisation, 15 organismes, 25 lois; 16 des 21 lois qui régissent le bâtiment font appel à la même activité qui consiste à faire des vérifications, des inspections ou des enquêtes. Le jour où vous nous direz en quoi les pouvoirs réglementaires dévolus à cette régie vont venir simplifier cette vie des entreprises, on sera heureux. C'est la raison pour laquelle on parle de déréglementation. Donnez-nous du souffle! On devient des fonctionnaires de la construction. C'est inacceptable pour l'entreprise privée.

Le Président (M. Bélanger): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Oui. Je voudrais juste vous poser une question sur le guichet unique. Tout à l'heure, vous avez fini votre intervention en parlant, entre autres, des maîtres électriciens et des maîtres mécaniciens en tuyauterie, en disant que, finalement, ils devraient, dans le cadre d'une approche unique, plus ou moins se dissocier puis revenir à des organisations sur une base volontaire comme ça se fait dans d'autres domaines. Je vous pose la question sans aucune arrière-pensée, mais j'imagine qu'on pourrait avoir le problème à l'inverse aussi. C'est-à-dire qu'à partir de l'exemple qui a été conçu ou monté historiquement par les maîtres électriciens et les maîtres mécaniciens en tuyauterie, on pourrait imaginer, plutôt que d'aller à travers un guichet unique où tout le monde se perd, où on ne sait plus trop à qui on se réfère et comment on se situe à l'intérieur de tout ça, on pourrait stimuler le fait que les autres corps de métier, les entrepreneurs en réfrigération, les ferblantiers, les peintres, les couvreurs, etc., s'organisent chacun dans leur secteur à l'image de ce qui s'est fait au niveau des électriciens et des mécaniciens en tuyauterie. À ce moment-là, j'imagine qu'il serait beaucoup plus simple, beaucoup plus facile de responsabiliser tout le

monde et de faire en sorte que chacun, dans son métier respectif, développe un code d'éthique, développe des normes de déontologie et que Ion puisse beaucoup plus facilement identifier les fauteurs de trouble dans chacun des domaines, dans chacun des corps de métier. J'imagine, en tout cas, à première vue, que ça pourrait être tout aussi intéressant que de parler à travers un guichet unique où personne, finalement, ne se reconnaît et où on met toujours la faute sur le dos de l'autre.

M. Paré (Michel): Si vous me permettez, et je vais laisser la parole à d'autres par la suite. Il y a 23 métiers dans la construction. Il y a - vous avez le président de la Régie ici - au moins une cinquantaine de spécialités, de licences émises par la Régie. Allez-vous faire 50 organismes pour délivrer 50 types de licences différentes? Lorsqu'on parle de guichet unique, c'est pour simplifier, c'est pour rationaliser, c'est pour frapper à une porte. On ne peut pas fonctionner avec 23 guichets pour des métiers, 50 guichets pour les spécialisations, actuellement, qu'on a à la Régie. Il y a des limites à un moment donné. Et ça ne vient, d'aucune façon, la philosophie que vous exprimez, réduire la réglementation. Je vais laisser la parole à d'autres.

M. Di Muro: Je voudrais juste renchérir dans ce sens-là. Au niveau de l'Association, chez nous, les mêmes corps de métier qui se trouvent à l'intérieur des corporations ont formé des groupes de travail qui représentent des métiers en électricité industrielle. Ils se sont regroupés pour refaire des codes d'éthique et des choses de même. Mais quand même, ils se rattachent à une association et il y a des groupes qui se refont à l'intérieur de chacun des métiers, mais, quand même, qui s'associent à une association maîtresse pour toute la partie contractuelle de l'industrie. Mais en ce qui regarde leur métier propre, ils sont capables de se réunir à l'intérieur d'une association, ça ne prend pas 23 corporations pour réussir une chose semblable. On demande l'unification à l'intérieur de notre marché. Ce n'est certainement pas en le fragmentant encore plus, en le séparant, chacun avec son petit problème, qu'on va amener l'uniformité et la bonne coopération dans l'industrie de la construction. Si on veut vraiment faire le bordel total, on n'a qu'à agir de la sorte et on va réussir, je peux vous garantir ça, c'est 100 % de réussite ce que vous proposez.

M. Lafontaine: Lorsqu'on parle de guichet unique, c'est uniquement pour la qualification des entreprises. Pourquoi 18 000, 20 000 entreprises dans la construction doivent-elles passer à telle place pour la qualification et d'autres ailleurs? Je veux bien croire que peut-être au point de vue politique, dans un grand terme, plus il y aura d'associations, plus il y aura de parties et il y aura beaucoup plus de facilité à les faire battre l'un contre l'autre. C'est peut-être dans cet esprit-là. Mais un guichet unique donnerait l'heure juste dans la construction, tout le monde serait qualifié à la même place. C'est dans ce sens-là qu'on parle de guichet unique.

M. Paré (Michel): Si vous me permettez, M. le Président - c'est une façon polie de prendre la parole. Qu'ont fait les corporations devant les entrepreneurs en électricité industrielle, les entrepreneurs en mécanique industrielle qui étaient en train de crever sur des chantiers avec des contrats à clauses abusives, à partage de responsabilités exagérées? Ce ne sont pas des organismes obligatoires qui ont défendu ces entreprises-là. Elles se sont regroupées de façon volontaire à l'intérieur de l'ACQ. Nous avons permis à ces entreprises, avec les propriétaires, les donneurs d'ouvrage, d'en arriver avec des contrats plus équitables entre les entrepreneurs et les propriétaires.

Je vous invite, je sais que vous n'avez pas eu le temps, ce n'est pas un reproche, mais j'espère que d'autres ou que les personnes qui vous entourent auront la possibilité et le plaisir de lire le document jusqu'à la fin, dans les annexes. Dans le mémoire qu'on avait déposé au comité Bernard sur l'octroi des contrats par le biais du système de soumissions, il y a des recommandations. Qui entendez-vous parler de ce genre de dossier là, à part l'ACQ?

Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions. Malheureusement, le temps est écoulé. M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.

M. Cherry: D'abord, ce n'est pas parce que vous êtes les derniers que vous avez été les moindres. Je pense que, ensemble, on a apprécié votre présentation. Je tiens à vous remercier de vous être déplacés aujourd'hui, même à une heure aussi tardive. Ça valait la peine. Je veux que vous soyez assurés que vos représentations vont occuper une place importante dans l'attention et dans la réflexion que j'ai à faire. Évidemment, ça décode beaucoup de travail. Il y a des gens du ministère, chez nous - je l'ai dit à d'autres et je vous le répète - qui seront au travail en fin de semaine et on tentera de trouver ensemble des pistes de solutions qui seront acceptables. Encore une fois, merci beaucoup pour votre présentation.

M. Lafontaine: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, nous vous remercions beaucoup, d'autant plus que c'était facile, les chantiers étant fermés le vendredi soir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Alors, messieurs, je vous remercie. Tout à l'heure, je pense avoir fait un peu les notes de conclusion. Puisqu'il n'y a pas de conclusion à ce genre de commission, je me suis permis de le faire parce que j'estimais que votre mémoire parlait de lui-même. Il n'avait pas besoin de beaucoup d'explications. Il était clair et limpide. Je l'ai apprécié pour sa rigueur et sa qualité intellectuelle, mais également pour les orientations que vous entrevoyez, et j'espère que le ministre le soumettra à ses autres collègues qui partagent sensiblement votre vision du développement et de l'avenir de l'industrie de la construction. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): La commission de l'économie et du travail remercie l'Association de la construction du Québec pour sa participation à ses travaux aujourd'hui. Je voudrais aussi remercier le personnel de la sécurité et tout le personnel de soutien qui ne nous ont pas lâchés jusqu'à la dernière minute et qui ont fait un travail aussi très important. À mes collègues et à tout le monde, merci et bonsoir. La commission, ayant acquitté son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 4)

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