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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mardi 9 mars 1993 - Vol. 32 N° 35

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec


Journal des débats

 

(Neuf heures quatre minutes)

Le Président (M. Audet): Je déclare la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous rappelle le mandat de la commission, qui est de procéder à une consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Parent (Sauvé) est remplacé par M. Fradet (Vimont); Mme Dupuis (Verchères) par Mme Marois (Taillon).

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, les membres de la commission ont pris connaissance de l'ordre du jour. Est-ce que l'ordre du jour est adopté?

Une voix: Adopté.

M. Chevrette: Oui, mais avec une suggestion.

Le Président (M. Audet): Oui.

M. Chevrette: Étant donné qu'il y a un groupe qui ne se présente pas...

Le Président (M. Audet): D'accord.

M. Chevrette: ...me dit-on — on me dit que les ingénieurs ne viennent pas — donc je suggère qu'on devance tous les groupes pour finir à 21 heures au lieu de 22 heures.

Mme Bacon: Bien, c'est parce que, si on fait ça... Il y a les discours en Chambre, si ma mémoire est fidèle, sur la journée des femmes.

M. Chevrette: Ah! Ah!

Mme Bacon: Vous allez vouloir être présent, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Madame, j'irai vous écouter avec tous les...

Mme Bacon: Non, non, pas moi, là, mais on va écouter les autres.

M. Chevrette: Ça veut dire que vous commenceriez à 16 heures au lieu de 15 heures.

Mme Bacon: Bien, probablement. C'est assez long, habituellement.

M. Chevrette: Ah! moi, je ne peux pas résister... Mme Bacon: Vous ne pouvez pas refuser ça.

M. Chevrette: ...à une telle demande en cette Journée internationale des femmes, qui était hier.

Le Président (M. Audet): Alors, l'ordre du jour est modifié...

Mme Bacon: Pourquoi on ferait...

Le Président (M. Audet): ...dans la mesure où, cet après-midi, nous pourrons reprendre nos travaux à 16 heures.

M. Chevrette: 16 heures.

Le Président (M. Audet): Ça va?

Mme Bacon: C'est ça.

Le Président (M. Audet): O.K. Alors, je vous rappelle brièvement les groupes que nous entendons ce matin. Je veux souhaiter la plus cordiale bienvenue au Conseil de la culture des régions de Québec et de Chau-dière-Appalaches. Monsieur, mesdames. Ensuite, à 10heures, nous recevrons l'association des producteurs privés d'hydroélectricité du québec. suivra ensuite, à 11 heures, les ami-e-s de la terre du québec.

Alors, puisque nos invités ont déjà pris place, je vous rappelle brièvement nos règles de procédure: vous disposez d'une vingtaine de minutes pour vous présenter d'abord — ce qui est très important pour le Journal des débats — et ensuite faire l'exposé de votre mémoire. Ensuite suivra une période d'échanges d'une quarantaine de minutes.

Alors, M. Cloutier, ou madame, peu importe, là. Alors, madame, allez-y.

Conseil de la culture des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches

Mme Laliberté (Manon): Mme la ministre, M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire, au nom des 2500 artistes professionnels et travailleurs culturels des régions 03 et 12 qu'il représente, le Conseil de la culture souhaite d'abord remercier la commission de l'économie et du travail de lui

donner l'occasion, ce matin, de participer aux débats sur le plan de développement d'Hydro-Québec.

Je voudrais vous présenter immédiatement les personnes qui m'accompagnent ce matin: à ma droite, M. Jean-Paul Cloutier, premier président de la Fondation de l'Opéra de Québec, trésorier de la Corporation de l'Opéra de Québec et représentant la table musique; Mme Louise Laplante, directrice générale de l'Orchestre symphonique de Québec; à ma gauche, Me Andrée Kronstrom, secrétaire du Conseil de la culture et représentante du secteur danse. Je voudrais également signaler la présence dans cette salle de plusieurs représentants du milieu culturel de notre région. Mon nom est Manon Laliberté, et je suis la directrice générale du Conseil de la culture.

Je voudrais immédiatement passer la parole à Me Kronstrom qui vous rappellera brièvement la mission de notre organisme, puis à M. Jean-Paul Cloutier qui vous présentera une synthèse de notre mémoire ainsi que nos recommandations. Merci.

Le Président (M. Audet): Merci.

Mme Kronstrom (Andrée): Alors, comme Mme Laliberté vient de le souligner, notre conseil de la culture représente les artistes professionnels et travailleurs culturels des régions de Québec et de Chaudière-Appala-ches. Sa mission principale est d'assurer le développement culturel de son territoire. Le Conseil assume cette mission à partir d'une approche fondée sur la concertation et au moyen d'une structure représentative du milieu. Le Conseil de la culture des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches est ainsi la principale instance de concertation du milieu culturel dans la région. Les préoccupations et recommandations énoncées dans le présent mémoire sont directement issues de ce milieu, et c'est, en fait, à la demande des organismes qu'il représente que le Conseil de la culture intervient dans la discussion du plan de développement d'Hydro-Québec.

Pour le milieu culturel, il est essentiel que les membres de la commission chargée d'étudier le plan de développement d'Hydro-Québec soient informés du rôle joué par Hydro-Québec dans le développement culturel et ainsi sensibilisés aux implications que pourraient avoir, dans le domaine culturel, les orientations prises par la société d'État.

Alors, M. Cloutier va maintenant brièvement résumer les caractéristiques du rôle joué par HydroQuébec dans le secteur de la culture, le jugement que nous en faisons et les recommandations qui en découlent. M. Cloutier.

M. Cloutier (Jean-Paul): Alors, M. le Président, Mme la ministre, MM. les membres de la commission parlementaire, vous voyez que la journée de la femme, pour nous autres, ce n'est pas seulement un nom. Voyez comment je suis entouré ce matin. Je suis entouré de trois...

M. Chevrette: Un vrai ancien politicien.

M. Cloutier: Oui. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cloutier: On garde cette qualité-là...

M. Chevrette: Ha, ha, ha!

M. Cloutier: ...de l'équilibre.

Mme Bacon: Vous allez encourager le député de Joliette.

M. Cloutier: Oui, c'est vrai. (9 h 10)

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cloutier: Alors, je vais faire un bref résumé. Je n'ai pas l'intention de lire le mémoire — vous l'avez — mais ça nous est apparu important, le Conseil de la culture qui regroupe, qui chapeaute tous les organismes culturels de la région de Québec, de venir faire une intervention au sujet du plan de développement d'Hydro-Québec. Et ça adonne bien, Mme la ministre, qui a déjà été ministre des Affaires culturelles, comprend bien, je pense, l'importance que nous soulignions cet aspect de l'intervention d'Hydro-Québec dans le domaine culturel.

Aujourd'hui, je pense qu'il est admis et il est souhaitable que les entreprises soient des bons citoyens corporatifs, et une entreprise de l'envergure d'Hydro-Québec doit être un citoyen responsable, et d'autant plus que le secteur culturel, c'est un secteur qui crée des emplois, c'est un secteur générateur d'activité économique, et ça, je pense que ça a été amplement démontré.

Quelle est la place, quelle est cette place qu'Hy-dro-Québec a prise avec les années dans le secteur culturel? Nous, pour notre part, nous sommes très satisfaits — le Conseil de la culture veut le souligner par son intervention de ce matin — de l'appui d'Hydro-Québec dans ce secteur. Son intervention est basée sur un soutien majeur. Chaque année, dans la région, la région 03, la région de Québec, il y a des subventions qui sont versées à une cinquantaine d'organismes, et 50 organismes dans le domaine culturel, dans la région de Québec, c'est important. Et c'est une politique — on pourrait la caractériser comme suit, aussi — très diversifiée.

Hydro-Québec ne se contente pas d'appuyer les grands organismes culturels comme, en fait, ceux qui sont représentés ici ce matin, en grande majorité, soit l'Orchestre symphonique, ou l'Opéra de Québec, ou la danse, mais il y a une foule de petits organismes qui, aussi, profitent de cette redistribution que fait HydroQuébec dans le domaine culturel. Et aussi, je pense qu'il faut le souligner, cette politique d'Hydro-Québec d'attribuer de l'aide et des subventions s'appuie sur une analyse sérieuse des performances artistiques. Ce n'est pas distribué comme ça, là, sans fondement. Et aussi, ça s'appuie sur une continuité: quand Hydro commence à

appuyer un organisme, c'est continu après ça; ce n'est pas une année et, après ça, ça disparaît; ça se continue. Alors, on doit féliciter la société d'État pour ces caractéristiques de son aide au secteur culturel.

Ces sommes-là sont loin d'être négligeables. Évidemment, je n'ai pas, ce matin... C'est Hydro qui pourrait founir, là, des chiffres, mais je sais personnellement, pour avoir milité dans plusieurs organismes, quelle est l'importance de l'aide. Et, moi, je pense que Mme Laplante, au cours des échanges, tantôt, pourra donner des chiffres pour l'Orchestre symphonique. Notre président, M. Jacques Perreault, le président de la Fondation de l'Opéra, pourra faire la même chose pour l'Opéra. Alors, cette aide-là, ce n'est pas négligeable, c'est important. Et ça constitue aussi un effet d'entraînement pour les autres entreprises du secteur privé.

Vous savez, quand Hydro décide d'appuyer un organisme, on le dit et on le dit avec fierté, parce que c'est un signe de qualité pour la performance artistique de ces organismes-là, et ça incite d'autres entreprises à faire la même chose. Et, je l'ai dit tantôt, ça s'inscrit aussi, cette aide-là, dans la durée, alors c'est une contribution à la stabilisation des entreprises et à la consolidation des organismes culturels, surtout des plus petits organismes qui ont moins de moyens que les grands que j'ai mentionnés il y a un instant. on ne voudrait pas non plus laisser croire qu'hy-dro-québec est seule à soutenir le secteur culturel. je pense qu'on pourrait mentionner, et vous le savez, ici, à la commission parlementaire, des grandes entreprises comme le mouvement desjardins, bell canada, alcan, la laurentienne, enfin des institutions financières dans la région de québec sont aussi des partenaires. bien souvent, ce sont des partenaires de la société d'état dans l'intervention en faveur des organismes culturels.

C'est important. Je dirais que c'est d'une importance cruciale, les soutiens d'Hydro-Québec, parce que les activités culturelles ne peuvent pas s'autofinancer, c'est impossible. Écoutez, si on chargeait le prix réel du billet pour une production d'envergure, ça serait hors de portée pour la majorité des gens. Alors, c'est pour ça qu'il faut qu'il y ait un soutien. D'abord, le premier soutien, bien sûr, c'est les gouvernements. Je pense que Mme Bacon est bien placée pour le savoir, ayant été ministre des Affaires culturelles, que le premier soutien, c'est évidemment les gouvernements. Mais, après ça, je pense que le secteur privé doit être présent aussi.

On a vécu une période plus difficile, ces deux ou trois dernières années. Les entreprises du secteur privé, les grandes entreprises du secteur corporatif ont été obligées de faire des choix. Elles ont beaucoup de demandes et, dans le flot de demandes qu'elles reçoivent, ces entreprises, des fois, elles sont obligées de laisser passer des organismes qui, par ailleurs, mériteraient d'être appuyés. Alors, la période de récession ne nous a pas rendu la vie facile, mais on sent que, maintenant, en 1993, on peut espérer que ça ira mieux.

À Québec — je le dis surtout pour ceux qui sont peut-être moins familiers avec l'économie de la région — ici, il y a moins de sièges sociaux, c'est moins... On regarde à Montréal, quand il paraît des annonces dans les journaux sur les interventions des grandes entreprises, il y en a plus, des sièges sociaux, c'est plus important. Alors, à Québec, on peut les compter sur, je pense, les doigts d'une main ou de deux mains, les grands sièges sociaux. Alors, on apprécie qu'Hydro se conduise comme un siège social ici, à Québec, et que son intervention soit majeure.

Alors, je résume, M. le Président, en terminant, en disant que notre intervention, c'était pour sensibiliser les membres de la commission parlementaire à ce volet de l'activité d'Hydro, si vous voulez. Dans son plan de développement, on ne voudrait pas que le secteur culturel soit oublié ou que la marge de manoeuvre d'Hydro soit rétrécie au point que ça pourrait compromettre la survie de certains organismes. Alors, on voulait aussi rendre, bien sûr, crédit à Hydro-Québec pour les efforts très sérieux consentis jusqu'ici, en souhaitant, évidemment, égoïstement, que ça se continue. Et on ne voudrait pas qu'Hydro remette en cause ses efforts qu'elle a mis des années à bâtir et cette politique qu'elle a mis des années à bâtir.

Alors, nous recommandons, évidemment, et c'est normal, au nom du milieu culturel, que, dans son plan de développement futur, Hydro-Québec continue de disposer des moyens nécessaires pour maintenir son implication dans le secteur culturel. Hydro-Québec doit rester une institution sur laquelle le monde culturel peut compter, et particulièrement ici, dans la région de Québec.

Alors, merci, M. le Président, et on est prêts à répondre à des questions.

Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Alors, mesdames, messieurs, je voudrais vous remercier d'être ici, à la commission parlementaire qui se penche, évidemment, davantage sur le plan de développement d'Hydro-Québec. Mais, comme vous nous le dites si bien, c'est un tout. Je pense qu'Hydro-Québec, quand elle se conduit comme un bon citoyen corporatif, c'est aussi important dans son plan de développement.

Vous mentionnez dans le mémoire que nous avons reçu que les entreprises doivent être de bons citoyens corporatifs, s'intégrer aussi dans la vie culturelle de leur société. Est-ce que, selon vous, Hydro-Québec cible bien son appui dans le domaine culturel?

M. Cloutier: Cible bien son appui?

Mme Bacon: Cible bien son appui, oui, dans les différents secteurs qu'elle supporte.

M. Cloutier: Bien, si on se base sur les critères qu'utilise Hydro-Québec pour appuyer les organismes culturels, on peut dire que chacun des organismes étant pris individuellement — Mme Laplante pourrait parler

pour l'Orchestre symphonique; moi, je pourrais parler pour l'Opéra de Québec — on peut dire qu'on est satisfaits de l'intervention d'Hydro-Québec. La polyvalence et la diversité de son intervention nous font constater qu'elle appuie aussi les petits organismes parce que, aussi, on est appelés, nous, à faire la promotion de ces petits organismes là.

Alors, je pense qu'Hydro-Québec aussi, dans ses choix, fait les bons choix des organismes à appuyer. Évidemment, si ses moyens étaient plus considérables... J'imagine qu'Hydro-Québec doit aussi refuser, parfois, d'intervenir non pas dans certains secteurs, parce que la liste que... J'ai vu, moi, une liste d'interventions d'Hydro-Québec, et je peux dire qu'il n'y a pas beaucoup d'organismes qui ont été oubliés. Tous les secteurs, de façon plus ou moins importante... Et, là-dessus, je pense que Mme Laplante, du côté de l'Orchestre, pourra donner tantôt des chiffres si elle le désire.

Mme Bacon: Vous parlez de critères. C'est basé sur des critères, quand même, les sommes qui sont versées. Quels sont les critères qui sont utilisés par Hydro-Québec — et peut-être que Mme Laplante peut répondre à ça — pour investir des sommes dans des régions données?

Mme Laplante (Louise): Mme la ministre, merci de cette question. Je pense que ce qu'on me demande à Hydro-Québec, c'est d'abord de prouver l'appui du Québec. Et, dans ce cas-là, dans le cas de l'Orchestre symphonique de Québec, il se trouve qu'Hydro-Québec a commencé par subventionner une série nouvelle qui s'adressait à un large public. Donc, ça a commencé par un désir de développement de l'auditoire. Et cette série, qui s'appelle la Série Hydro-Québec, très originalement, a eu énormément de succès. C'est la série la plus populaire. C'est elle qui amène à l'Orchestre des milliers de nouvelles personnes à chaque année, donc qui nous permet de rencontrer des objectifs, je dirais, de développement de l'auditoire, donc des objectifs philosophiques. (9 h 20) évidemment, la question financière est très importante. j'aimerais, si vous le permettez, parler de l'impact dans un budget comme celui de l'orchestre. et j'imagine qu'on pourrait faire un peu la même démonstration, dans d'autres proportions, dans des budgets un peu plus petits. on nous demande, le ministère de la culture nous demande de chercher de l'appui auprès des entreprises privées. on doit faire cette démonstration-là, nous, au gouvernement qui nous subventionne. et, dans un budget, disons, de 4 000 000 $ comme le nôtre, on va chercher 25 %, c'est-à-dire 1 000 000 $ en dons et en subventions corporatives. si on n'avait pas ça, c'est-à-dire qu'il nous manquerait 25 % de notre budget. qu'est-ce qui arriverait? comment pourrions-nous faire la démonstration auprès de ceux qui nous subventionnent, auprès du ministère, auprès du conseil des arts, auprès de la ville de québec, de la communauté urbaine, quand on nous demande, d'un côté: allez chercher des sous dans le secteur privé? alors, on doit faire cette démonstration-là. Et, du côté du secteur privé, inversement, on doit faire la preuve qu'on est un organisme qui est valable et qui répond à des besoins de la population.

Je pense que c'est un tout. C'est notre système nord-américain, particulièrement canadien, qui est comme ça. Vous savez qu'il est très... Ce n'est pas à vous que je vais démontrer comment ça fonctionne ici, mais on doit compter... C'est majeur, cette aide. Et, si elle est plus petite dans d'autres organismes, elle est probablement aussi importante en termes de pourcentage ou en termes d'impact sur le budget. alors, en réalité, si on regarde un peu une perspective d'avenir, qu'est-ce qui nous attendrait si l'orchestre symphonique de québec perdait, par exemple, les 80 000 $ à 90 000 $ qu'hydro-québec injecte chaque année? où irions-nous les chercher? combien de dons individuels est-ce que ça peut prendre pour aller chercher 90 000 $, et combien encore de subventions ou de pourcentage de subventions? ça va retomber sur la table de la ministre de la culture, c'est évident, s'il y a une perte comme ça. je pense que, dans notre système canadien, c'est un jeu d'équilibre. il y a environ 40 % à 50 % qui proviennent de subventions, il y a 20 %, 25 % qui viennent de dons et le reste vient de la billetterie. et c'est la même chose, finalement, qu'en europe, parce que, en europe, finalement, c'est 20 %, 25 %, 30 % qui viennent de la billetterie. les 80 % viennent des gouvernements. là, c'est un partage entre le gouvernement, l'entreprise privée et les individus.

Mme Bacon: II serait peut-être intéressant de comparer la contribution d'Hydro-Québec au soutien des arts avec celle d'Hydro-Ontario, ou peut-être encore avec celle d'autres entreprises d'utilité publique ailleurs au Canada ou même aux États-Unis. Est-ce que le Conseil a accès à des données qui nous permettent ce type de comparaison, et peut-être quelle conclusion pourrions-nous en tirer, de ça, si vous avez accès à ces données-là?

Mme Laliberté: Actuellement, nous n'avons pas accès à ce genre de données-là, mais ce serait intéressant, effectivement, de les confronter.

Mme Bacon: Pour pouvoir comparer. Les interventions d'Hydro-Québec se font certainement en concertation avec le milieu. Est-ce que les organismes représentatifs du milieu ont leur mot à dire quand la concertation se fait avec Hydro-Québec?

M. Cloutier: De la façon que...

Mme Bacon: Comme le Conseil, par exemple?

Mme Laliberté: II n'y a pas de lien direct, sauf que tous ces gens-là sont appelés à travailler ensemble par l'intermédiaire de comités, comité arts-affaires à la chambre de commerce et différents comités, en fait, qui travaillent autour de la question des arts et des affaires et de la notion de commandite. Donc, à l'intérieur de

ces instances-là, les gens sont appelés à se parler, mais, pour Hydro-Québec en tant que telle, ce sont des critères bien précis qui évaluent chacune des demandes de commandite.

Mme Bacon: Ça se fait directement avec les groupes eux-mêmes et non avec tout le milieu, comme votre groupe à vous?

Mme Laliberté: Ça se fait directement par Hydro-Québec, sur une base d'évaluation, sur une grille d'évaluation.

M. Cloutier: Par exemple, si on prend l'exemple de l'Opéra — M. Perreault et M. Boutet sont ici, les deux présidents actuels — quand on veut produire un événement spécial, mettons un récital d'opéra comme celui de ce soir à l'Assemblée nationale, on fait appel à des commanditaires privés. Alors, on fait notre propre demande à Hydro-Québec, et Hydro étudie notre demande sur la base des critères qu'on a soulignés, et là elle prend une décision. Mais il n'y a pas, comme Mme Laliberté le disait, de concertation organisée dans le milieu pour dire: Voici, on présente à Hydro un plan global pour la région de Québec, parce que je pense que ça serait aller peut-être un peu loin dans la place que l'on prendrait. Alors, chacun des organismes, actuellement... Est-ce qu'Hydro-Québec fait un genre d'équilibre? Ça, c'est elle qui pourrait répondre à ça.

Mme Bacon: D'accord, merci.

Le Président (M. Audet): Merci. M. ie député de Joliette.

M. Chevrette: Tout d'abord, un commentaire qui s!adresse à Hydro. J'apprécierais qu'on connaisse précisément la politique de développement culturel, sa participation culturelle; ses critères, comme vous avez mentionné, j'aimerais les avoir. Je voudrais savoir les secteurs subventionnés dans le niveau culturel. Est-ce que c'est seulement l'aspect ou les troupes professionnelles, ou bien s'il y a également, dans le loisir socioculturel, des subventions? J'apprécierais de savoir les montants annuels qui sont versés par Hydro dans le domaine culturel. Ça serait intéressant qu'Hydro fasse connaître ces ch^es, comme citoyen corporatif, d'autant plus que nous sommes tous des actionnaires d'Hydro, donc on a le droit de connaître, naturellement.

Vous avez mentionné une chose qui est importante et qu'on ne souligne pas assez: c'est dans le domaine culturel que ça coûte le moins cher de créer un emploi. Ça, on devrait le dire assez... Parce qu'il y a des gens qui, surtout dans des périodes de récession économique, disent: Regarde-les donc donner de l'argent à la culture! Si ma mémoire est fidèle — Mme la ministre pourra me corriger — avec 8000 $, tu peux créer un emploi dans le domaine culturel, alors que, dans le domaine industriel, c'est souvent à coup de 30 000 $, 40 000 $, 50 000 $ que tu crées un emploi. Et, dans certains cas, c'est 200 000 $. Donc, il n'y a pas de cachette à les dire, ces choses-là, pour démystifier précisément l'apport que peut donner un citoyen corporatif à la création d'emplois dans tel ou tel secteur. Et ça, je pense qu'on ne le dit pas assez. Et, comme politiciens, on ne contribue pas à démystifier, précisément, probablement pas de mauvaise foi, mais on devrait le dire très clairement, parce que c'est des choses concrètes qui ne sont pas assez véhiculées sur le terrain.

Ma question. Vous dites — je vais essayer de retrouver l'endroit précis — à la page 3 de votre mémoire: «Le Conseil de la culture des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches, au nom des organismes qu'il représente, tient à souligner sa grande satisfaction devant les soutiens et appuis mis en place jusqu'ici par Hydro-Québec». Si vous comparez Hydro-Québec — et je ne voudrais pas vous placer dans l'embarras, parce que vous avez à transiger avec Bell Canada, avec d'autres, comme vous l'avez dit — est-ce qu'Hydro-Québec constitue un modèle à imiter, à suivre, ou si ça se compare au niveau des grands citoyens corporatifs?

M. Cloutier: On n'a pas les chiffres des contributions de Bell Canada, de...

M. Chevrette: Non, mais votre expérience.

M. Cloutier: Oui. Dans notre expérience pratique... Moi, j'ai travaillé au sein de plusieurs organismes qui ont sollicité, à un moment où à un autre, des contributions d'Hydro-Québec, et je peux dire que ces contributions se comparent avantageusement avec tout ce qui peut être fait par d'autres entreprises. Et, sans connaître les chiffres, je pense que d'autres pourraient avoir le même sentiment que la contribution d'Hydro-Québec est supérieure à celle que... Sauf pour des événements, des choses très ponctuelles; mettons que l'Université Laval fasse une grande campagne de souscription, et là il peut y avoir des entreprises directement reliées au développement de l'université qui font une contribution très, très, très forte et très substantielle. Mais je parle du fonctionnement normal et ordinaire des organismes culturels de la région de Québec; je pense qu'Hydro-Québec peut se classer en tête des contributions. C'est ce que l'on perçoit à ce moment-ci, et ce, dans tous les secteurs. Hydro-Québec peut intervenir à l'Institut québécois de recherche sur la culture pour contribuer à la confection des histoires régionales; elle peut contribuer à FideArt pour un grand concert à la chapelle historique du Bon-Pasteur, elle peut contribuer à la danse pour d'autres événements très ponctuels, et ça... (9 h 30)

Je voudrais revenir à ce que M. le député de Joliette, M. Chevrette, a dit tantôt, le coût de création d'un emploi. Je prends un exemple que je connais bien, l'opéra. On fait travailler l'Orchestre symphonique. Il y a 70 musiciens et, à chaque opéra, l'Orchestre symphonique travaille, entre guillemets, et on lui donne une contribution majeure. Ils ont besoin de ça, l'Orchestre symphonique. Alors, avec deux opéras par année, on

donne un mois d'ouvrage à l'Orchestre symphonique. Prenez tous les métiers reliés: d'abord, il y a les chanteurs, il y a les choristes, mais vous avez tous les métiers que l'on ne voit pas et qui sont reliés à la production d'un opéra. Alors, il y a — je ne sais pas, quoi — 200, 250, 300 personnes qui travaillent pendant des semaines et des semaines à la production d'un spectacle d'opéra. Alors, c'est un exemple que je donne. L'Orchestre symphonique, c'est la même chose, et des petits organismes — et Mme Laplante le disait tantôt — ont des petits budgets, mais la contribution d'Hy-dro-Québec est importante par rapport à leur enveloppe globale; mais les emplois, eux autres aussi, ils créent des emplois. Alors, je pense que c'est important, la contribution d'Hydro-Québec.

M. Chevrette: Vous avez...

Le Président (M. Audet): Excusez. Mme Laplante, vous vouliez ajouter quelque chose?

Mme Laplante: J'aimerais simplement, à titre d'information, ajouter que l'OSQ a émis 300 T4 cette année. Nous avons émis 300 T4 cette année. Évidemment, ce n'est pas tous pour des sommes de 50 000 $, vous imaginez bien, mais c'est quand même 300 artistes qui ont gagné un certain montant avec l'Orchestre.

Le Président (M. Audet): M. le député.

M. Chevrette: À toutes fins pratiques, si j'ai bien compris votre message, vous venez remercier Hydro. Mais, en même temps, parce qu'il faut lire entre les lignes dans votre mémoire, j'ai le sentiment, en le lisant, que vous venez dire: Merci, mais, de grâce, continuez. À partir de ce qui se dégage de votre mémoire, est-ce que vous avez des craintes? Est-ce qu'il y a des fondements de crainte qu'Hydro-Québec, par exemple, pour sa santé financière... Parce que, dans votre résumé, vous avez habilement dit, comme un bon politicien sait le faire, qu'il fallait que ça continue, qu'il y a des restructurations, etc. Mais est-ce que vous avez des motifs minima de croire qu'Hydro, dans la restructuration ou dans son plan de Défi performance, aurait des intentions de couper à ce niveau-là?

M. Cloutier: L'expérience passée m'a appris, M. le député, que les citoyens ne remercient pas pour ce qu'ils ont eu, ils remercient pour ce qu'ils vont avoir, ce qu'ils s'attendent d'avoir. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cloutier: Alors, c'est sûr qu'on apprécie beaucoup ce qu'Hydro a fait jusqu'à maintenant, mais, dans tout ce contexte dans lequel évoluent les entreprises — et Hydro n'est pas différente des autres entreprises — tous ces plans de rationalisation, toutes ces mises à pied, ces restructurations, on craint que des choses qui nous semblent acquises à nous ne puissent être remises en question. Et ça, on ne voudrait pas que le volet culturel, qui est modeste par rapport au fonctionnement d'Hydro, aux millions et aux milliards, si vous voulez, on ne voudrait pas que ce volet-là diminue. Et, même s'il y avait possibilité qu'il augmente... Parce que ce n'est pas encore... Ce qui est important, c'est la signification que cette intervention d'Hydro prend en chiffres absolus, mais aussi comme effet d'entraînement. Parce que, je l'ai dit tantôt, plusieurs grandes entreprises corporatives ou moyennes entreprises disent: Hydro appuie cet organisme-là, c'est donc un signe de qualité, c'est donc un signe que cet organisme mérite de l'aide. Et elles s'appuient là-dessus; elles ne vont pas plus loin dans leur recherche; pour elles, c'est un critère, c'est une référence.

M. Chevrette: D'autant plus qu'il y a des groupes qui sont venus devant nous, effectivement, depuis le début, là — ça fait 5 ou 6 jours que l'on fait, peut-être plus — il y a des gens qui sont venus demander carrément qu'Hydro-Québec ne se contente que de la production d'hydroélectricité, un point, c'est tout. Elle ne devrait pas se mêler à l'industriel, ne pas se mêler à d'autres choses. Donc, que répondez-vous à ces groupes?

M. Cloutier: On répond qu'on n'est pas d'accord, premièrement; on n'est pas d'accord. Écoutez, je pense que, si toutes les entreprises ne se limitaient très étroitement qu'à leur mandat... Il y a des entreprises qui fabriquent des boîtes de carton; elles pourraient, ces entreprises, ne fabriquer que des boîtes de carton, mais est-ce que ce serait s'intégrer dans la société dans laquelle on vit? Est-ce que ce serait faire partie de la vie, de la qualité de la vie que de ne faire que strictement le premier mandat qui nous est dévolu? Je pense que, bon, autant Bell Canada assure les services de communication, autant Bell Canada s'implique dans le développement culturel, et toutes les entreprises. Les institutions financières font de la finance, bien sûr, mais il y a aussi des retombées, il y a une présence, il y a du prestige, il y a une satisfaction d'avoir contribué à l'avancement, à l'évolution, à l'épanouissement, à la richesse du milieu. Alors, je pense que c'est tout ça qu'Hydro doit considérer et que, si ce volet-là était écarté, dans l'hypothèse la plus pessimiste, où diminuée, dans l'hypothèse ni optimiste, ni pessimiste, je pense que ce serait...

M. Chevrette: Vous connaissez bien Hydro. Il y a toujours un scénario fort, moyen et faible. Merci.

M. Cloutier: Merci.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Lemire: Vous venez de souligner le soutien financier d'Hydro-Québec. M. le président, ou M. le trésorier, pourriez-vous me donner le chiffre, selon vous, du support financier que vous avez eu d'Hydro-

Québec dans le secteur culturel, dans les deux régions, pour les dernières années ou la dernière année? Avez-vous un aperçu?

M. Cloutier: Bon. Évidemment, on n'est pas dans les secrets d'Hydro, mais on a l'occasion de leur parler souvent, parce qu'on demande de l'aide, soit par téléphone ou soit par correspondance, en présentant des dossiers. Bon, disons qu'en en causant de façon très informelle avec eux, là, on pense que leur contribution pourrait se situer entre 250 000 $ et 300 000 $ pour les organismes culturels de la région de Québec. Ça nous apparaît extrêmement important.

M. Lemire: Comme le disait tantôt madame, à la billetterie, ça représentait un pourcentage. Le pourcentage de la subvention ou du support d'Hydro-Québec peut représenter quel pourcentage de vos événements?

Mme Laplante: pour l'orchestre symphonique de québec, c'est 7 %, monsieur.

m. lemire: c'est 7 %. j'ai une autre question: croyez-vous qu'hydro-québec est bien placée dans le moment pour choisir les organismes et les activités qu'elle supporte dans son choix?

M. Cloutier: On parle pour la région de Québec, là. Il n'y a pas seulement une aide financière. Je pense qu'Hydro-Québec achète aussi des billets pour les différents spectacles des organismes. Alors, ils peuvent aller vérifier sur place la qualité des productions, des représentations qui sont faites. Alors, en s'impliquant personnellement, il y a des membres d'Hydro-Québec à différents échelons, qui siègent aussi sur des conseils d'administration; c'est pour eux autres aussi un poste d'observation. Et je ne parle pas seulement pour la région de Québec, c'est dans toute la province. Personnellement, ces gens-là s'impliquent et ils acquièrent une connaissance du milieu, des besoins du milieu, de la qualité de la production, de la qualité des interventions dans le domaine culturel. Alors, je pense qu'on peut dire que, de façon générale, Hydro a une bonne connaissance de ce qui se passe dans le milieu.

Le Président (M. Audet): Ça va?

M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Quand vous avez à négocier avec Hydro, est-ce qu'il y a une filière bien établie, par exemple, pour la négociation du volet culturel, ou si c'est purement un lobby normal? Je comprends que, dans votre cas, l'Opéra ou l'Orchestre symphonique, c'est depuis plusieurs années, mais est-ce que Mme la directrice générale, par exemple, sait que, s'il s'ajoute un nouveau volet culturel dans la région... Est-ce qu'il y a une filière particulière à Hydro-Québec? Vous vous adressez au conseil d'administration? Comment vous procédez pour renégocier, par exemple, la subvention d'Hydro?

Mme Laliberté: Il y a des gens qui sont attachés à des fonctions de marketing. Il y a de l'ouverture pour des nouveaux projets culturels. Dans certains cas, on les a approchés pour des manifestations nouvelles, et il y a une ouverture d'esprit pour les nouveaux projets.

M. Chevrette: Est-ce qu'on sait si, à HydroQuébec, ça fait l'objet de décisions du conseil d'administration ou si une vice-présidence spécifique a le pouvoir de prendre une décision?

Mme Bacon: Il me semble que c'est le secrétariat qui décide, en fait qui reçoit les demandes et qui les analyse, et, ensuite, c'est porté... Je pense que ça doit être porté aussi au niveau supérieur, mais les décisions se prennent au niveau du conseil. Les décisions sont remises au conseil, mais la préparation des dossiers se fait au niveau du secrétariat. Il me semble. (9 h 40)

M. Cloutier: Je pourrais peut-être ajouter à ça, Mme la ministre et M. Chevrette, qu'on a déjà demandé... Dépendamment des montants, quand on dépasse un certain... Des fois, on est optimiste et on soumet une demande qui nous apparaît, à nous, modeste, mais qui apparaît à Hydro, dans un contexte particulier, un peu excessive. Alors, à ce moment-là, on nous dit: Si vous diminuez votre chiffre, peut-être qu'on pourrait régler ça au niveau... Et, ce que j'ai compris, c'est qu'il y a des niveaux aussi, comme dans les institutions financières. On m'a toujours dit: Si vous dépassez un certain montant, ça va au siège social, ça va au conseil d'administration, mais, si vous restez un peu plus modeste, on va décider ça ici. Alors, on se dit: Bien, on y retournera deux fois. On va diminuer le montant et on va y aller deux fois. Mais je sais que, nous, nos demandes, on les achemine à Hydro-Québec via le département des communications et des relations publiques d'Hydro-Québec, ici, à Québec. Alors, ils ont une équipe qui étudie les demandes et, s'ils ont besoin de demandes de renseignements supplémentaires, on les fournit.

M. Chevrette: Est-ce que les modalités, c'est plus... Je m'informe, parce que j'ai connu cela un peu avec le Festival international de Lanaudière où Hydro achetait plutôt un spectacle. Est-ce que c'est cette forme-là qui est privilégiée, ou si c'est vraiment une subvention de base dans les organismes que vous représentez?

M. Cloutier: Mme Laplante pourra parler pour l'Orchestre symphonique. En ce qui concerne l'Opéra, à Québec, Hydro n'achète pas, sauf dans les récitals d'opéra où elle a une contribution très forte et très spéciale. Mais, à Montréal, à l'Opéra, on voit dans les annonces sur les journaux que telle soirée d'opéra est réservée à tel commanditaire en particulier. Alors, nous, on en conclut que ce commanditaire-là a fait une contribution spéciale pour cette soirée d'opéra. On n'a jamais demandé sous cet aspect-là, nous, à l'Opéra, mais je pense qu'il y aurait des possibilités si on le faisait.

Mme Laplante, si...

Mme Laplante: Bien, je pense que c'est important aux deux niveaux, c'est-à-dire que la commandite permet d'atteindre certains objectifs plus spécifiques, comme le développement de l'auditoire dont je parlais tout à l'heure pour des projets spéciaux. Par contre, les dons permettent simplement de supporter l'organisme. Donc, ça agit en modèle au niveau philanthropique. Je crois que les deux sont très importants. L'Orchestre bénéficie des deux formes d'aide d'Hydro.

M. Chevrette: C'est parce que j'ai un souci dans tout cela, et M. Cloutier va comprendre. Il y a toujours une crainte qu'on ne subventionne une élite exclusivement, alors que, par le biais de l'achat d'un spectacle, oft peut faire bénéficier énormément de gens qui n'auraient pas les moyens, à la billetterie, précisément, de se payer un tel spectacle tout en raffolant, par exemple, de l'opéra ou bien de la musique classique. C'est pour ça que je demandais au début qu'Hydro dépose sa politique et ses critères, parce qu'on doit avoir un souci de l'accessibilité la plus grande possible à une population, et non pas réserver exclusivement à une élite.

Parce qu'on se le fait reprocher, par exemple, dans la politique des musées. On dit: Ça, c'est réservé à une élite, puis le monde ne peut pas y aller. On commence à ouvrir, par exemple, aux jeunes pour qu'on puisse leur donner le goût de la culture, de la musique, de l'opéra, des lettres, etc. Et c'est un peu pour ça que je pose toutes ces questions, pour venir à bout de démontrer une volonté, en tout cas, d'élargir un peu l'accessibilité. Est-ce que vous sentez qu'Hydro est ouverte à ça?

M. Cloutier: Oui. Moi, je peux dire que, quand on consulte les programmes souvenirs qui sont donnés le soir des spectacles, on constate par la publicité qu'assez souvent une entreprise en particulier a commandité tel spectacle. Ça peut être une chorale; je pense que ça peut être une des chorales de Québec qui reçoit une aide particulière pour présenter un concert. Ça peut être, comme je l'ai dit tantôt, un récital, ça peut être la même chose... Hydro aussi pratique cette politique. Mais, avec les grands organismes, nous, on n'a pas encore eu recours à ça. Mais vous nous faites penser que...

M. Chevrette: Je voyais madame sourire. J'aimerais ça qu'elle exprime son sourire par des mots.

Le Président (M. Audet): Madame, vous voulez ajouter quelque chose?

Mme Laplante: Non. Je frémis, monsieur, quand vous parlez d'élite. Vraiment, j'aimerais m'exprimer là-dessus, parce que la musique et l'art, ce n'est pas pour l'élite, c'est pour tout le monde. C'est vraiment pour tout le monde. Si on n'avait pas...

M. Chevrette: C'est l'élite du portefeuille dont je parle, madame. C'est très différent, ça. Je pense que je ne me trompe pas, moi non plus, quand je dis ça. Je frémis de vous entendre, moi aussi, là. Parce que le portefeuille, ça existe.

Mme Laplante: Mais tous les montants sont importants, même s'ils sont petits. Et ça permet, on l'a dit tout à l'heure, même à de petits organismes qui feraient, par exemple, une oeuvre de création, donc dans ce qu'il y a de plus difficile au plan artistique et qui n'est peut-être pas, dans un premier temps, accessible à tout le monde... Des fois, c'est un petit montant qui peut être très important pour la création.

M. Chevrette: Non, mais je veux rectifier ce que... Vous m'avez interprété vraiment faussement parce que, moi, je vous dis qu'on a des budgets, les députés, ce qu'on appelle le budget discrétionnaire, support ou soutien au... Voyez-vous, j'ai même de la misère parce que... Qu'est-ce qu'on fait avec ça, bien souvent? C'est précisément de le donner à des gens qui ont le goût de faire des choses mais qui n'en ont pas les moyens financiers. Et tu peux être un amant, par exemple, de la musique classique, puis tu n'as pas nécessairement les moyens d'y participer ou d'y accéder, d'aller entendre, par exemple, l'Orchestre symphonique de Montréal ou de Québec.

Ce que je veux dire, c'est si, par exemple, Hydro, dans ses politiques, pense à cela et achète, par exemple, un spectacle, met à la disposition de jeunes étudiants en musique une certaine portion de la billeterie qu'elle a achetée pour permettre précisément à ces jeunes de vivre quelque chose d'intéressant, c'est dans ce sens-là. Je ne voulais pas vous faire frémir, madame, quand je parle d'élite. L'élite n'est pas nécessairement... Quand je parle d'élite, moi, c'est dans le sens de celui qui a la possibilité d'y aller. C'est un mauvais terme que j'ai utilisé, mais tu peux être sans le sou, puis être un artiste extraordinaire, puis un amant de la musique, des lettres ou de l'opéra. Je pense que vous m'avez saisi, maintenant.

Mme Laplante: Oui, je vous comprends, mais... M. Chevrette: On va arrêter là, d'abord. Mme Laplante: Ha, ha, ha! Si vous voulez, oui.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Lemire: Je voudrais savoir, Mme Kronstrom qui représente la table de danse, est-ce que, d'après votre analyse, la société d'État vous supporte suffisamment dans votre démarche? C'est assez...

Mme Kronstrom: Au niveau de la danse, c'est sûr, et comme Mme Frulla l'a déjà souligné, la danse a toujours été le parent pauvre, un peu, au niveau artistique, tant au niveau public qu'au niveau subventions, parce qu'il n'y a pas énormément d'organismes. Et l'autre problème — et c'est le volet qui a été soûle-

vé — c'est le public. C'est que, souvent, il y a plusieurs spectacles qui se donnent, mais il y a peu d'assistance, ce qui fait que de grosses sommes d'argent sont englouties pour monter le spectacle, sauf que c'est présenté une fois ou deux fois. Alors, c'est vraiment le côté public aussi.

Et justement par, peut-être, une politique d'achat de billets, de distribution de billets, ça aiderait le public de la danse, ça aiderait les gens à être sensibilisés, ça motiverait aussi les jeunes danseurs et les troupes à faire beaucoup plus de spectacles. Parce que c'est sûr que, quand on est un artiste, le but principal, c'est de pouvoir danser et danser sur une scène, donc s'exprimer. Alors, je pense que c'est un volet très important au niveau de la danse. Bien entendu qu'on veut...

M. Lemire: J'aimerais peut-être... Mme Kronstrom: Oui.

M. Lemire: Croyez-vous que l'argent dépensé par Hydro-Québec dans le développement culturel s'inscrit dans cette pensée de la culture, qui est toute...

Mme Kronstrom: De façon générale, je pense que ça a déjà été souligné, le fait qu'Hydro-Québec donne de l'argent, mais aussi sur une base permanente. C'est qu'Hydro a toujours été là dans les différentes manifestations, et c'est toujours quelqu'un qui est là dans les différentes soirées Hydro-Québec qu'on peut voir. Maintenant, au niveau de la danse, c'est sûr qu'il y a moins de spectacles, surtout à Québec, il y a moins d'activités comme telles. Donc, on voit moins Hydro paixe qu'ii y en a moins. Alors, ça, c'est un peu un cercle vicieux. Plus il y aura de danse, plus il y aura d'organismes, plus il y aura de demandes de subventions, et c'est sûr qu'Hydro va sûrement contribuer beaucoup plus, mais c'est toujours un jeu de l'offre et de la demande.

C'est sûr qu'en danse il y a moins de visibilité, et donc moins de participation, peut-être, d'Hydro parce que, justement, il y a moins d'organismes. Mais je pense que, comme pour les Grands Ballets qui sont un organisme connu et depuis fort longtemps, il y a une contribution. Bon. Quand on parle de Casse-Noisette qui tourne toujours, il n'y a pas de problème. Mais c'est sûr qu'il y a des jeunes troupes, et surtout à Québec, ici, dans la région, qui n'ont pas, peut-être, l'appui. Je suis sûre qu'elles font des demandes à Hydro, mais... L'avenir est toujours prometteur, j'ai l'impression.

M. Lemire: Merci.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de Saint-Maurice.

Je vais maintenant reconnaître M. le député de Drummond. (9 h 50)

M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président.

Alors, ce sera seulement deux commentaires, parce qu'à la page 5 de votre mémoire, dans vos premières recommandations, vous souhaitez avoir sensibilisé les membres de la commission de l'économie et du travail à l'importance d'Hydro-Québec au niveau de la culture. J'ai toujours partagé la philosophie, moi, en privé, et encore plus maintenant que je suis député, qu'une entreprise doit avoir un rôle social, doit avoir une conscience sociale puis être un bon citoyen corporatif, puis qu'on ne vit pas simplement de matérialisme puis dans le signe du dollar, comme certains organismes qui ont voulu qu'Hydro-Québec se confine à produire et vendre de l'électricité. Je pense qu'Hydro-Québec est une compagnie moteur dans le développement économique du Québec, mais aussi qu'il y a le volet culturel que vous avez si bien souligné ce matin. Et je puis vous assurer, moi, pour être un député de région, avoir la chance aussi de côtoyer Hydro-Québec dans un événement majeur qui est le Festival mondial de folkore, où on met à la portée des Québécoises et des Québécois cette grande richesse du patrimoine universel. Alors, sans Hydro-Québec, je pense que ça serait difficile de tenir des événements de cette envergure-là en région.

Et le deuxième volet pourquoi je pense qu'il est important aussi pour Hydro-Québec de maintenir ça, et vous l'avez souligné tout à l'heure dans votre remarque: il n'y a pas simplement des gens au niveau de la grande organisation qui s'impliquent au niveau du développement culturel. Quand je regarde des régions comme chez moi, je regarde la part, moi, que les travailleurs et les travailleuses de la base d'Hydro-Québec font à la réalisation d'un événement majeur au Québec, et je pense que c'est tout à l'honneur d'Hydro-Québec.

Je tiendrais, en conclusion, à vous remercier aussi parce que, souvent, dans notre société moderne, on reçoit beaucoup mais on oublie de dire merci. Alors, je pense que le témoignage que vous rendez ce matin à Hydro-Québec est appréciable, puis je peux vous assurer que vous pouvez compter sur l'appui du député de Drummond pour faire en sorte, dans ses messages de conclusion, qu'il incite fortement Hydro-Québec à continuer son apport au niveau de la culture, parce qu'il est un des outils majeurs et importants de développement dans notre collectivité. Je vous remercie.

Le Président (M. Audet): M. Cloutier, vous voulez ajouter quelque chose? Oui.

M. Cloutier: M. le Président, je voudrais ajouter quelque chose en remerciant les membres de la commission parlementaire. Je voudrais attirer l'attention sur l'importance de la politique de jumelage des subventions. Mme Bacon l'a pratiquée quand elle était au ministère; M. Richard, Clément Richard, qui a été son prédécesseur, l'a pratiquée aussi. Et c'est excessivement important parce que, là, vous donnez aux organismes et à ceux qui travaillent au sein des organismes une motivation extraordinaire pour aller chercher des sous.

Ça va mieux pour faire des levées de fonds quand vous dites à l'organisme: Si tu mets, d'un côté, 100 $, le gouvernement va mettre 100 $. Alors, c'est comme

ça qu'on a réussi, il y a 10 ans, à mettre en place des organismes, même dans une période de récession, et l'Orchestre symphonique a une fondation, l'Opéra a une fondation, beaucoup d'organismes... Je ne sais pas s'il y en a dans la danse, mais beaucoup d'organismes ont mis sur pied des fondations. Et c'est avec ça, c'est avec cette politique de jumelage de subventions qu'on a réussi à bâtir quelque chose d'important. Alors, je pense que, si le gouvernement et si la ministre de la Culture, avec les nouvelles structures mises en place, peuvent jeter un coup d'oeil du côté de cette possibilité, on travaillerait dans ce sens-là.

Le Président (M. Audet): D'accord. Alors, mesdames, M. Cloutier, au nom des membres de la commission, je vous remercie sincèrement.

M. Cloutier: On vous donne rendez-vous, M. le Président. C'est le grand... Si le président avait un micro, le président de la fondation... Ce soir, dans le salon rouge — c'est pour ça qu'on est ici ce matin, on a été déplacé — c'est le récital d'opéra des jeunes talents, des belles voix de la région de Québec. Les lauréats des prix...

Mme Bacon: C'est parce qu'eux autres ils vont travailler, M. Cloutier, ce soir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Audet): C'est ça. Alors, merci.

Afin de permettre à l'Association des producteurs privés d'hydroélectricité du Québec de s'installer, nous allons suspendre nos travaux deux minutes.

(Suspension de la séance à 9 h 54)

(Reprise à 10 h 1)

Le Président (M. Audet): S'il vous plaît! Nous recevons maintenant l'Association des producteurs privés d'hydroélectricité du Québec. Alors, au nom des membres de la commission, messieurs, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Je vous rappelle brièvement nos règles de procédure: Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous présenter votre exposé, et je vous invite, avant de débuter votre exposé, à vous identifer pour la transcription de nos débats. Ensuite, suivra une période d'échanges qui durera une quarantaine de minutes. Vous avez la parole. Allez-y, on vous écoute.

Association des producteurs privés d'hydroélectricité du Québec

M. Lefrançois (Gilles): M. le Président, Mme la ministre, MM. les membres de la commission, je suis Gilles Lefrançois, président de l'Association. J'aimerais vous présenter mes collègues. À ma droite, Pascal Brun, qui est trésorier de l'Association; à ma gauche immédia- te, Pierre Lajoie, qui est secrétaire, et, à ma gauche, Pierre Dumas, qui est secrétaire; à la gauche de Pierre Dumas, Pierre Lajoie, qui est aussi membre du conseil d'administration de l'Association.

Il nous fait plaisir de répondre à votre invitation et de venir vous exposer notre point de vue sur le plan de développement d'Hydro-Québec. L'Association des producteurs privés d'hydroélectricité du Québec a été fondée en 1991. Elle regroupe les principaux promoteurs de sites hydroélectriques privés au Québec. Un représentant de notre association a assisté à toutes les séances de consultation publique sur l'élaboration du plan de développement d'Hydro-Québec et nous avons consacré de nombreuses heures à étudier la documentation qui a été fournie. À titre de promoteurs, d'entrepreneurs et de citoyens responsables, nous sommes donc particulièrement préparés et intéressés à faire valoir notre point de vue sur les quatre thèmes qui ont fait l'objet de la consultation, c'est-à-dire les moyens de production, l'efficacité énergétique, les industries à forte consommation et les exportations.

Pour bien évaluer les orientations proposées par Hydro-Québec, il est important de considérer la situation économique du Québec et son potentiel énergétique par rapport aux autres provinces et aux autres pays. Première caractéristique, un potentiel hydroélectrique exceptionnel. Au point de vue énergétique, le Québec est dans une position absolument privilégiée et peut-être unique au monde. Le Québec possède en effet 18 600 MW d'énergie hydroélectrique économiquement aménageable, et ceci sans considérer les projets de moins de 100 MW et sans considérer les producteurs privés. Cette puissance de 18 600 MW équivaut à 69 % de la puissance installée actuellement au Québec et cela est suffisant pour tous les besoins du Québec jusqu'en l'an 2021, soit les 30 prochaines années, en assumant le taux de croissance prévu dans le scénario moyen ou le plus probable.

Deuxième caractéristique, c'est une forme d'énergie avantageuse économiquement et écologiquement. L'énergie hydroélectrique au Québec est l'énergie la moins dispendieuse à long terme, la moins polluante, la plus fiable au point de vue approvisionnement, la plus prévisible au point de vue des coûts, la meilleure au point de vue de la balance des paiements, et elle est renouvelable. Que faut-il de plus?

Troisième caractéristique: l'importance du développement économique. En ce début de 1993 au Québec, le taux de chômage officiel est de 13,4 % et le taux de chômage réel de 18 % à 20 %. Avec toutes ces conséquences néfastes au point de vue économique et social, c'est la pire forme de gaspillage et d'inefficacité. Il n'y a donc aucun doute que le développement économique, aussi durable que possible, doit être une priorité pour la société québécoise.

Quatrième caractéristique: un avantage comparatif pour le Québec. En cette période de globalisation des marchés et de concurrence féroce à l'échelle planétaire, chaque pays, chaque région doit utiliser tous ses atouts pour se développer. Pour le Québec, son potentiel hy-

droélectrique doit être utilisé dans toute la mesure du possible.

Ceci ne veut pas dire que l'efficacité énergétique ne peut pas contribuer au développement économique, mais il faudra s'assurer, par le choix des options et par la concertation avec l'industrie, que les emplois créés sont bien situés au Québec et non à l'extérieur.

Finalement, une situation unique. Comme notre situation est unique, il faut éviter d'importer d'autres pays ou d'autres provinces des formules et des solutions toutes faites simplement parce qu'elles sont à la mode. La diminution de la demande n'est pas nécessairement synonyme de progrès et la croissance zéro n'est pas nécessairement un idéal. Quand un État ou une province doit compter uniquement sur le nucléaire ou le thermique, quand le kilowattheure coûte trois fois plus qu'ici, il est évident que les priorités seront bien différentes.

Alors, premier sujet de consultation: les moyens de production. L'orientation 19 d'Hydro-Québec se lit comme suit: «Privilégier la filière hydroélectrique, y compris les petites centrales des producteurs privés, comme filière principale. » Pour toutes les raisons déjà mentionnées, nous croyons que c'est la meilleure solution pour le Québec.

En ce qui concerne la production hydroélectrique privée, nous apprécions le fait qu'il n'y ait pas de limite imposée sur la quantité de projets ou sur le temps de réalisation. le plan de développement d'hydro-québec précise. "quant aux petites centrales hydroélectriques, nous favorisons les propositions des producteurs privés portant sur des centrales de moins de 25 mw. » ceci est dans le plan lui-même, dans le document principal. cependant, en étudiant les annexes, nous nous inquié-tonssur le nombre et la qualité des sites disponibles pour le producteur privé. en effet, dans l'annexe 3 consacrée aux moyens de production, on lit: «hydro-québec étudie la possibilité d'aménager de nouvelles centrales hydroélectriques de petite envergure», c'est-à-dire de 0 à 25 mw, alors que jusqu'ici hydro-québec avait considéré aménager uniquement les sites de 0 à 25 qu'elle possède déjà et qui, pour la plupart, ont déjà été aménagés. ceci indique, pour nous les producteurs privés, un recul par rapport à la situation actuelle.

Pour préciser la politique énoncée dans l'orientation 19, nous vous proposons l'adoption de la politique suivante: tous les sites hydroélectriques de moins de 25 MW devraient être réservés au secteur privé, sauf les sites déjà aménagés qui appartiennent à Hydro-Québec et qu'elle exploite déjà ou qu'elle entend remettre en exploitation au cours des deux prochaines années. L'autre exception: les sites publics qui sont requis par Hydro-Québec pour l'aménagement d'un complexe hydroélectrique plus important. Ce qu'on demande, c'est l'exclusivité, sauf exception, pour le secteur privé sur les sites de 0 à 25 MW.

De plus, quand on regarde un peu plus loin dans l'avenir — parce qu'on n'a pas l'occasion de venir ici à tous les jours — il serait avantageux pour Hydro-Québec et le Québec de favoriser le développement de la pro- duction privée en adoptant les politiques suivantes: les sites publics de 25 à 100 MW qui ne sont pas retenus par Hydro-Québec devraient être disponibles pour les producteurs privés et la politique d'achat d'électricité par Hydro-Québec devrait inclure, aux mêmes conditions, l'électricité provenant des centrales qui seraient aménagées sur des sites privés ou publics de plus de 25 MW.

Nous croyons que cette politique devrait être adoptée pour les motifs suivants: 1° les producteurs sérieux ont besoin d'une politique claire pour planifier leur développement et le Québec a besoin de producteurs sérieux et compétents; (10 h 10) 2° Hydro-Québec a d'ailleurs amplement de sites plus importants et qui correspondent mieux à ses capacités: 18 000 MW de grands projets et, éventuellement, 4000 MW dans les projets de moyenne envergure; 3° les producteurs privés peuvent développer des petites centrales à des coûts moindres qu'Hydro-Québec, à preuve, les producteurs privés ont plusieurs projets de remise en service de vieux aménagements qu'Hydro-Québec n'avait pas jugé rentables; 4° tout ce qui peut être dit en faveur de l'hydroélectricité en général s'applique aux projets de production privée d'hydroélectricité. En plus, ces projets ont des caractéristiques qui les rendent particulièrement intéressants au point de vue environnemental et socio-économique. Premièrement, souvent ils sont réalisés à partir de barrages existants; deuxièmement, la plupart sont au fil de l'eau, c'est-à-dire qu'ils n'accumulent pas d'eau dans de grands réservoirs et évitent ainsi la plupart des problèmes environnementaux; troisièmement, ils sont situés dans toutes les régions du Québec et favorisent le développement régional; quatrièmement, ils sont à proximité des lignes de distribution et, donc, les pertes de transport sont minimes de même que les inconvénients de construire de nouvelles lignes; cinquièmement, le prix payé par Hydro pour l'électricité est le coût évité, donc pas de subvention; sixièmement, Hydro n'a besoin ni d'investir, ni d'emprunter, et ainsi une partie de la dette qui serait autrement publique reste dans le domaine privé; septièmement, ils favorisent le développement multifonctionnel des rivières. À titre d'exemple, la construction de trois centrales sur la rivière Jacques-Cartier, près de Québec, faite en consultation avec l'association de protection de la rivière, va favoriser de façon considérable la réintroduction du saumon dans cette rivière. Finalement, les projets sont soumis à toutes les procédures d'approbation du ministère de l'Environnement, allant même jusqu'aux audiences publiques pour les projets les plus importants.

Alors, si on passe maintenant au deuxième sujet, où la consultation a été tenue par Hydro-Québec, c'est-à-dire l'efficacité énergétique, l'orientation 18... Est-ce qu'il y en a qui voudrait avoir des copies du mémoire, qui ne l'aurait pas? Tout le monde en a une copie.

Le Président (M. Audet): Chaque membre de la commission l'a eu et la plupart en ont pris connaissance.

M. Lefrançois: Parfait, j'arrive. Le Président (M. Audet): Allez-y!

M. Lefrançois: L'efficacité énergétique. L'orientation 18 d'Hydro-Québec: «Maintenir l'objectif d'économie d'énergie de 9,3 TWh en l'an 2000.» Nous croyons que cet objectif est à la fois réaliste et ambitieux et nous appuyons totalement le critère du coût évité pour décider si une mesure d'économie doit être adoptée.

Il y a plusieurs choses que vous allez entendre sans doute plusieurs fois. Je voudrais peut-être arriver immédiatement à l'article 6. Pour ce qui est du financement des mesures d'économie, nous sommes en général contre les subventions. Nous sommes contre les subventions pour nous-mêmes et nous sommes contre les subventions pour les autres aussi. Par exemple, au lieu de subventionner un consommateur pour qu'il adopte un système de chauffage biénergie, nous suggérons plutôt des frais de raccordement plus importants pour toute nouvelle résidence qui utiliserait l'énergie électrique seulement. Ceci mettrait fin à une situation assez cocasse: comme le prix du chauffage électrique domiciliaire est subventionné, c'est-à-dire trop bas par rapport au vrai coût, le consommateur n'a pas d'incitation à utiliser la biénergie. Pour corriger cette déformation, on ajoute une autre subvention. Alors, nous, on suggérerait d'éliminer le problème à la source et de charger plus cher à ceux qui veulent être tout électrique.

Le sujet suivant, sur lequel la consultation a porté, les industries à forte consommation d'électricité. L'orientation 27: «Favoriser l'implantation ciblée et limitée d'industries à forte consommation d'électricité.» Nous sommes d'accord avec cette orientation et avec les conditions proposées. Nous croyons cependant que les industries à forte consommation doivent payer à moyen terme le plein tarif grande puissance. Si on leur accorde des conditions spéciales de paiement basées, par exemple, sur le prix de vente de l'aluminium, il faut s'assurer que, sur une période maximum de 10 ans, non seulement l'escompte sera éliminé, mais les rabais encaissés seront remboursés.

Finalement, sur les exportations, l'orientation 28, qui est de favoriser le développement des exportations, nous approuvons entièrement cette orientation de même que les conditions proposées par Hydro-Québec. Notre position se base sur les points suivants: la rentabilité économique des exportations permet de réduire la facture pour les entreprises et les consommateurs résidentiels québécois; l'énergie exportée ne nuit en rien au développement de l'entreprise locale, puisqu'il s'agit de surplus que les Québécois ne peuvent utiliser et que ces surplus sont vendus à prix plus élevé que le tarif grande puissance; comme il s'agit uniquement de devancement de construction de centrales, l'effet négatif sur l'environnement est minimisé; finalement, 51 % des emprunts d'Hydro-Québec étant en monnaies étrangères, la vente d'énergie aux États-Unis est une source précieuse de dollars américains pour Hydro et pour le Québec.

Le Président (M. Audet): Ça va? Merci beaucoup, messieurs.

Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie.

Mme Bacon: M. le Président, je suis très heureuse d'accueillir aujourd'hui les représentants de l'Association des producteurs privés d'hydroélectricité du Québec. C'est une association qui a pris naissance suite à la mise en place d'un programme gouvernemental des petites centrales hydroélectriques. Je dois dire que vous avez déployé beaucoup d'efforts dans le secteur électricité et votre participation à cette commission est très appréciée.

Vous nous recommandez de rendre disponibles au secteur privé les sites publics de 25 à 100 MW qui ne seraient pas retenus par Hydro-Québec. C'est un octroi qui ne peut être autorisé que par loi spéciale, si décision il y avait. Est-ce que vous suggérez d'assujettir ces sites au programme des petites centrales hydroélectriques et à ses modalités d'attribution ou si vous avez d'autres recommandations à faire par rapport à 25 à 100 MW?

M. Lefrançois: Dans notre objectif, la façon de procéder actuelle est excellente parce que, en commençant avec des centrales de 0 à 25, ça permet au producteur de prendre de l'expérience, de se développer, de devenir plus compétent, plus important pour, plus tard, dans une deuxième étape, s'attaquer aux sites de 25 à 100 MW.

En ce qui concerne l'attribution, jusqu'ici, nous sommes pleinement satisfaits de la façon de procéder qui est adoptée, c'est-à-dire que le site est annoncé publiquement, les gens qui sont intéressés font une proposition et les propositions sont évaluées en fonction de critères définis. Pour le moment, on n'a pas d'objection à ce que le même mécanisme s'applique. Cependant, à mesure que l'industrie va progresser, on pense que peut-être, s'il y a deux ou trois sites sur une rivière, il faudrait attribuer les deux ou trois sites en même temps, parce que ça peut totaliser 40 ou 50 MW, de façon à ce que ce soit plus facile de planifier et qu'on puisse bénéficier des économies qui existent. Plutôt que d'y aller toujours site par site, peut-être qu'il faudrait y aller rivière par rivière.

Maintenant, on sait que, présentement, pour plus de 25 MW, ça prend une loi spéciale, mais on assume qu'une loi spéciale, ça dépend de la volonté du gouvernement, et, si la volonté est là, bien, que ce soit une loi spéciale ou un décret, ce n'est pas ça qui serait l'obstacle majeur.

Mme Bacon: Après 25 à 100 MW, M. Lefrançois, allez-vous nous en demander davantage?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lefrançois: Bien, disons que ce n'est probablement pas moi qui va être président de l'association dans ce temps-là.

Mme Bacon: C'est une étape importante ou c'est une étape tout simplement?

M. Lefrançois: Bien, disons que ce n'est pas une étape qu'on a besoin de réaliser demain matin, là. C'est une étape qui peut se réaliser dans trois ans, dans quatre ans. Il faut commencer par marcher avant de courir. Pendant trois ou quatre ans, on va pouvoir se satisfaire de 0 à 25. (10 h 20)

Mme Bacon: À la page 3, au point 3 de votre document, vous rappelez le taux de chômage élevé et ses conséquences sociales qui sont néfastes, évidemment, pour ensuite conclure que le développement économique doit être une priorité. À ce chapitre-là, est-ce que vous pourriez faire état des retombées économiques des aménagements des petites centrales hydroélectriques en termes d'emplois, de main-d'oeuvre, de matériaux, d'équipements, d'investissements et des perspectives qu'on peut avoir?

M. Lefrançois: Au point de vue de l'investissement, une règle qu'on peut appliquer, qui est pas mal toujours vraie, c'est à peu près 2 000 000 $, un coût de 2 000 000 $ par mégawatt. O.K.? Alors, il y a présentement des demandes auprès d'Hydro-Québec pour 252 MW, ce qui veut dire à peu près 500 000 000 $ d'investissement. si on regarde la partie qui demeure au québec, il y a à peu près juste les groupes turbines-alternateurs où on parle d'importations, et on arrive, nous, à la conclusion que ça peut représenter, dans l'ensemble des projets, à peu près 15 % d'importations, ce qui veut dire qu.; 85 % des 2 000 000 $ sont dépensés dans la province de québec. on se demandait aussi quelle était la portion dépensée régionalement versus la province. comme le coût des travaux, à peu près 45 % des coûts, c'est des travaux civils, c'est-à-dire du béton, de l'excavation, etc., on peut arriver à la conclusion qu'à peu près 40 % des dépenses sont faites régionalement.

En termes d'emplois, évidemment, les 2 000 000 $, tôt ou tard, c'est des emplois. Maintenant, au point de vue pratique, pendant la période de construction, si je pense, disons, à un site que je connais, d'à peu près 6 MW, ça va être à peu près 60 emplois pendant un an et demi.

Mme Bacon: Vous soutenez...

M. Lefrançois: Ça, c'est pour un site.

Mme Bacon: Excusez-moi. Oui, M. Lefrançois.

M. Lefrançois: Je disais que, pour un site de 6 MW que je connais, c'est à peu près 60 emplois pendant un an et demi localement, à part de l'emploi qui est créé par l'achat des turbines-alternateurs, etc.

Mme Bacon: C'est des emplois locaux.

Vous soutenez, en page 6 de votre mémoire, que les producteurs privés peuvent développer les petites centrales à des coûts moindres qu'Hydro-Québec. Comment pouvez-vous faire une affirmation? En tout cas, pouvez-vous l'expliquer, votre affirmation, et quels seraient les avantages comparatifs des producteurs privés?

M. Lefrançois: Moi, je tournerais la question de bord et je vous dirais: Si Hydro-Québec était très efficace pour faire des petites centrales de 3 MW, il faudrait se poser des questions quand elle en fait de 1000 MW, parce que c'est des compétences, c'est des choses complètement différentes. Chacun, dans sa vie de tous les jours, prend des décisions, quand il y a des besoins. S'il veut acheter un gâteau, il va aller chez le dépanneur; s'il veut en acheter 1000 ou 2000, il va aller voir Vachon. La compagnie Vachon n'est pas capable de vous livrer un gâteau chez vous de façon économique, mais, par contre, si vous en achetez 1000, ça vaut la peine de négocier avec elle. C'est la même chose dans le domaine de l'hydroélectricité.

Hydro-Québec est équipée pour faire — et elle le fait très bien — de gros projets parce que, sur un très gros projet, ça va prendre un spécialiste dans les barrages, ça va prendre un spécialiste dans les conduites forcées, ça prend un spécialiste dans les turbines, ça prend un spécialiste, etc. Quand vient le temps de faire une petite centrale qui va coûter 10 000 000 $, ça nous prend des généralistes, ça nous prend des gens qui connaissent tous les aspects, ça nous prend des gens qui sont polyvalents, et ce n'est pas du tout la même organisation. Hydro-Québec a toujours des standards. Alors, la centrale de 2 MW, il faut qu'elle respecte les standards comme la centrale de 200, puis les employés sont accoutumés de travailler comme ça, tandis que, nous, que le fil soit noir ou qu'il soit blanc, on n'a pas des codes qui sont valables pour l'ensemble de la province, on a nos codes qui sont valables pour une centrale. Alors, la flexibilité, la polyvalence et toutes ces choses-là.

Mme Bacon: Est-ce que ça vaudrait autant, M. Lefrançois, si vous aviez droit à des centrales de 25 MW à 100 MW?

M. Lefrançois: Je dirais que dépassé 100, on retomberait, comme dans la plupart des industries... Il y a les petits, puis il y a les grands, puis ceux qui sont entre le deux, c'est souvent des hybrides, puis c'est souvent difficile de bien faire. C'est pour ça que, dans notre esprit, 100, c'est pas mal la limite maximum pour dire qu'on a des entreprises qui fonctionnent bien.

Mme Bacon: À des coûts moindres?

M. Lefrançois: À des coûts moindres, exactement.

M. Dumas voudrait rajouter quelque chose.

Mme Bacon: Oui, M. Dumas.

M. Dumas (Pierre): Peut-être ajouter, oui, un complément d'information à ce que disait M. Lefran-çois. Il faut dire que les petites centrales, les 70 et quelques projets qui sont approuvés ou en négociations avec Hydro-Québec sont, dans la très grande majorité, situés dans des villages, dans des régions développées, ils sont dans la population, et on retourne un peu au concept des centrales qui ont été construites à la fin du siècle dernier, au début de ce siècle. Ce sont d'ailleurs les mêmes sites qui sont réactivés, qui sont rajeunis, qui sont rééquipés, et c'est à ce moment-là qu'on a défini le terme «centrale». C'est-à-dire qu'au lieu d'avoir chacun sa petite source d'énergie ou pas d'énergie du tout on faisait, au centre du village, une unité de production qu'on radiait ensuite à l'ensemble de la population du village. Alors, c'était une centrale. On peut dire, dans ce sens-là, que nos centrales de la Baie James sont très excentriques; ce sont des «excentrales», finalement.

Et la centrale, dans le village, elle a été construite par l'homme d'affaires du coin, par le commerçant, par l'industriel qui avait ses employés autour de lui, et le village s'est développé autour de sa centrale qui a donné le moteur énergétique, le moteur économique, le moteur industriel à sa localité.

On retourne, dans tous les cas qu'on connaît, à la même situation: les opérateurs des petites centrales, c'est du monde du village. Quand lui n'est pas là, c'est son beau-frère ou son beau-père. On revient quasi à l'artisanat, au début, et je pense, sans vouloir déprécier d'aucune façon Hydro-Québec, qu'Hydro-Québec ne peut pas faire du quasi-artisanat.

Hydro-Québec est très bien équipée, comme le disait M. Lefrançois, pour exploiter de très grands complexes, à très grande distance, avec des possibilités de télécommunications, de télécommande et de télémesure, chose qu'on n'a pas besoin de faire dans les petites centrales. S'il y a une lumière à changer, si l'alarme sonne, l'opérateur est là, il quitte son salon et il est là cinq minutes après. Ce n'est pas un camion qui vient de 75, 80 ou 150 km de distance. C'est une question d'échelle et seuls les privés, je crois, comme le disait M. Lefrançois, jusqu'à 25 MW et dans la zone grise de 25 et de 100 peuvent le faire économiquement.

Hydro-Québec, dans l'annexe 3 du plan de développement, dans les moyens de production, dit très bien que, si ce n'est pas économique pour elle d'aménager un site, elle le refile à l'industrie privée, ce qui laisse la possibilité à des tiers, qui disposent d'une meilleure flexiblité d'exploitation, de procéder à son aménagement. Hydro-Québec reconnaît clairement que l'industrie privée est en mesure d'aménager économiquement des sites qui ne sont pas économiques pour elle.

Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, tout d'abord, il y a une foule de questions. Je n'aurai jamais assez de temps pour vous poser tout le paquet de questions que je voudrais. Tout d'abord, c'est la privatisation. Je vais partir là-dessus, et c'est un commentaire que je vais faire. Votre appétit se limite à 25 MW, mais avec l'ouverture à 100. Vous n'êtes pas sans savoir la position, en tout cas, que, nous, de l'Opposition, on a pris, à savoir que si on veut privatiser au Québec l'hydroélectricité, on doit faire un débat ouvert et public, global, avec des interventions de la population parce que, Hydro-Québec, c'est un joyau québécois, qui appartient à l'ensemble des Québécois, et on ne veut pas qu'on privatise par la porte arrière ou qu'on soit placé devant des situations de fait, mais qu'on fasse un véritable débat là-dessus. Ça, je pense que, d'entrée de jeu, je me devais de vous faire connaître carrément notre position, pour que ce soit très clair, que ce soit honnête et que ce soit transparent.

Ceci dit, vous relevez du ministère, à toutes fins pratiques, et non pas d'une régie quelconque. Parlant de prix, d'abord, comment sont fixés vos prix?

M. Lefrançois: Le principe, c'est qu'ils nous paient le coût évité. Alors, le coût évité, lorsqu'il a été établi en 1990, le point de référence était Grande-Baleine. Alors, on a dit: Le coût du MW qui serait produit à Grande-Baleine serait de 0,422 $ du kWh, donc c'est ça qu'on vous donne.

M. Chevrette: Donc, la même affaire que la cogénération.

M. Lefrançois: Exact, parce que, que ce soit la cogénération ou l'hydroélectricité, c'est comparé à ce qu'Hydro-Québec ferait si on n'existait pas.

M. Chevrette: C'est le coût de Grande-Baleine rendu à Montréal, 0,43 $, pour arrondir les chiffres.

M. Lefrançois: Exact. C'était 0,422 $, c'est rendu 0,433 $ en date de novembre 1991, mais c'est juste de l'indexation.

M. Chevrette: Oui, je sais que ça fluctue.

O.K. Il n'y a pas de régie, vous ne relevez d'aucune régie, par exemple. (10 h 30)

M. Lefrançois: Bien, disons que notre principal régisseur, c'est Hydro-Québec, parce que le contrat avec Hydro-Québec nous impose des contraintes, nous impose des lignes, des règles de prévention, des règles de maintenance, des règles de sécurité, nous impose des conditions quand on va entrer en opération, etc.; donc, notre principal régisseur, c'est Hydro-Québec.

Mais évidemment qu'avant ça il y a toutes les règles normales. Alors, si le terrain est zone agricole, on est sujets à la Loi sur la protection du territoire agricole; il faut passer à travers toutes les procédures du ministère de l'Environnement, et le ministère de l'Énergie intervient si c'est un site public. Alors, si c'est un site totalement privé, ça s'arrête là; si c'est un site public, bien, il faut que le ministère de l'Énergie nous

accorde le site via un processus établi d'avance.

M. Chevrette: Vous ne croyez pas qu'il serait plus pratique d'avoir des audiences génériques pour l'ensemble des mini-projets que de les faire un après l'autre?

M. Lefrançois: Au point de vue de l'environnement ou au point de vue...

M. Chevrette: Au point de vue environnement.

M. Lefrançois: Bien, au point de vue environnement, c'est parce que chaque projet est très spécifique. Nous, en autant qu'on est concernés... Disons que la chose qu'on voudrait éviter, c'est que, lorsqu'on va en audiences publiques, une des questions qui est posée, c'est: Quelle est la nécessité d'avoir une centrale hydroélectrique? Alors, nous, on ne veut pas avoir besoin de répondre à ça pour une centrale en particulier. On veut être capables de dire: C'est la politique du gouvernement qui a décidé qu'il y aurait des centrales publiques. À partir de là, quels problèmes on cause à l'environnement, ou comment on améliore l'environnement? Mais chaque site est tellement particulier qu'on préfère que chaque site soit étudié à son mérite et que...

M. Chevrette: C'est parce que vous affirmez, dans votre texte — c'est à partir de votre texte que je vous ai posé la question — vous dites qu'étant donné que, pour la majorité, c'est la correction de barrages déjà existants...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...au point de vue environnemental, ça présente peu de problèmes par rapport au niveau d eau, etc., c'est pour ça que je vous ai posé la question, c'est à partir de votre texte.

M. Lefrançois: Bien... Oui, mais...

M. Chevrette: Parce que ça semble contradictoire avec la réponse que vous me donnez.

M. Lefrançois: Non, ce n'est pas contradictoire. Si on réaménage un site déjà existant, on va passer par le ministère de l'Environnement, mais les questions vont être très faciles à répondre, parce que les impacts vont être mineurs. Supposons que c'est un autre site de 5 MW sur un site vierge, qui est une rivière à saumon en plus, bien, là, même si c'est juste 5 MW, les questions sont très longues. O.K.? Je le sais, j'en ai un comme ça, et ça prend du temps.

M. Chevrette: Ce n'est pas la même discussion, ça, je suis d'accord avec vous, mon cher monsieur.

M. Lefrançois: Exact. C'est pour ça que...

M. Chevrette: Surtout si vous touchez au saumon.

M. Lefrançois: Exact. Vous en avez deux ici qui savent qu'est-ce que ça veut dire.

M. Chevrette: Ils sont ici? Ha, ha, ha! O.K. À la page 8, vous êtes carrément contre 1 ' interfinancement.

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: C'est d'une évidence totale.

M. Lefrançois: Bien, disons, évidemment, on est contre. On sait que, comme politiciens ou comme gouvernement, ce n'est pas la chose la plus facile à corriger.

M. Chevrette: Oui, mais, comme producteurs privés, là, on va s'en parler aussi.

M. Lefrançois: Ha, ha, ha! Le principe: On est contre toute subvention, et pour nous et pour les autres, et donc contre l'interfinancement.

M. Chevrette: Oui, mais c'est parce que vous allez... Je veux bien comprendre la trame de votre mémoire. Vous affirmez le principe que vous êtes contre l'interfinancement, vous arrivez aux compagnies grandes consommatrices, énergivores à outrance, que sont les alumineries, et vous dites: À moyen terme, ils doivent payer plein tarif. Si vous êtes contre, vous êtes contre. Vous n'êtes pas contre à moyen terme, ni à court terme, ni à long terme, vous êtes contre.

M. Lefrançois: On ne recommande pas que ce soit une subvention. Si on leur dit: Pour t'étàblir, au lieu de payer 0,03 $, tu vas payer 0,01 $ la première année, et tu vas payer 0,02 $, et ensuite tu vas payer 0,03 $, et ensuite tu vas payer 0,04 $ et 0,05 $, et, sur une période de 10 ans, il faut que tu paies le même prix que tout le monde...

M. Chevrette: Comment conciliez-vous ça avec les contrats déjà signés pour 30, 40 ans?

M. Lefrançois: Bien, disons que, en autant qu'ils s'éloignent de ça; on est contre.

M. Chevrette: Bien oui, mais il y a une situation... Moi, je suis peut-être trop pragmatique, mais il y a un contrat de signé.

M. Lefrançois: On ne peut pas rien faire avec ça, un contrat qui est signé.

M. Chevrette: Donc, vous avez écrit pour rien là-dessus.

M. Lefrançois: Non. Il va y en avoir d'autres, possiblement. On parle des futurs...

M. Chevrette: Bien non, ils ont décidé... Ils se sont aperçus qu'ils se sont fourré les pieds dans les plats, ils n'en feront plus; c'est ça qui est écrit dans le plan de développement.

M. Lefrançois: Non, ce n'est pas tout à fait ça qui est écrit, non. Ça parle que ça va être...

M. Chevrette: Oh!

M. Lefrançois: Bien, regardez l'orientation 19, ou je ne sais pas quel numéro... L'orientation 27: Favoriser l'implantation ciblée et limitée. On est d'accord avec ça.

M. Chevrette: Oui, oui, mais vous savez très bien qu'Hydro s'est expliquée là-dessus, elle a dit: Je n'ai pas le choix, il y a Alouette phase II qui est acceptée...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...et je pense qu'il y a Lauralco, ou quelque chose du genre. Mais de nouvelles alumine-ries, là, à portée de vue, je pense qu'ils se sont rendu compte qu'ils se sont pété le nez dans la vitrine, bien correct, et qu'ils n'en feront plus. Sauf qu'on est pris avec pour probablement une trentaine d'années; ça va nous coûter à peu près 1 500 000 000 $. De ce côté-là, moi, je suis bien d'accord avec vous, mais pourquoi voudriez-vous — c'est là qu'est ma question — à ce moment-là, qu'on paie pendant 30 ans? Qui va payer s'il n'y a pas d'interfinancement? Vous êtes-vous posé la question: qui va être la victime de ça, de la bêtise passée, si vous abolissez tout interfinancement?

M. Lefrançois: Bien...

M. Chevrette: Ça va être vos papetières, dont vous parlez, qui sont déjà pénalisées...

M. Lefrançois: Oui, mais...

M. Chevrette: ...et vous ne voulez pas qu'elles paient pour les grosses alumineries...

M. Lefrançois: Oui, mais...

M. Chevrette: ...ça va être le citoyen québécois qui consomme de l'électricité et qui est actionnaire. Contrairement à l'objectif de l'année 1962, il devait avoir l'électricité au plus bas prix tout le temps, tout le temps. Je ne vous comprends pas.

M. Lefrançois: C'est parce que vous ne voulez pas. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Non, non. Je m'essaie, mais je veux...

M. Lefrançois: Non?

M. Chevrette: ...vous faire sortir...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...ce que vous avez dans les tripes.

M. Lefrançois: O.K. Je vais vous expliquer clairement. Ce qui existe, existe. Bon. Ce qui est fait, est fait; les contrats doivent être respectés. Quand ça a été fait, ils ont jugé que l'apport économique était assez important pour justifier les prix qu'ils ont signés. Évidemment que là, on peut leur tomber dessus parce que, avec le prix de l'aluminium qui est très bas, bien, ça fait une très grosse différence. Et probablement que... Peut-être que dans trois ans, si le prix de l'aluminium est très élevé, ça sera une toute autre histoire. Mais c'est fait.

Par conséquent, ça n'empêche pas que, dans le futur, nous autres, on dit: Si vous êtes pour faire des concessions, que ce soit temporaire, il faut que ça se repaie. Et, dans tout ce qui existe aujourd'hui, il faut éliminer graduellement l'interfinancement, ça, c'est sûr. Évidemment que ces quelques millions vont devoir être supportés par l'ensemble de la population. Mais, quand ces industries-là ont été créées, ça bénéficiait à l'ensemble de la population aussi.

M. Chevrette: O.K. Si vous voulez avoir un prix garanti de 0,043 $...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...et vous dites que vous êtes contre les subventions...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...n'est-ce pas là une façon déguisée d'aller chercher des subventions officiellement? Parce que ça paraît bien, je vous assure, 0,043 $, ça m'en a coûté... Je pourrais le vendre 0,037 $ et je ferais de l'argent, mais on m'assure 0,043 $. Ce n'est pas là une forme déguisée de subvention?

M. Lefrançois: Non, pas du tout. Si ça vaut 0,043 $, on est prêts à le vendre 0,043 $. Si, demain matin, ils nous disent pour une raison quelconque: Ça nous coûterait 0,033 $ à Grande-Baleine, et que, par conséquent, il n'y a plus de projets qui sont rentables, on n'en fera pas.

M. Chevrette: On va essayer de reprendre ça. M. Lefrançois: Oui, mais regardez.

M. Chevrette: Vous êtes très habile, mais ce n'est pas ça que je vous pose comme question.

M. Lefrançois: Vous aussi! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Vous dites ceci, M. Lefrançois: On ne veut pas de subvention.

M. Lefrançois: Non.

M. Chevrette: J'ai bien compris votre mémoire là-dessus. Ça, c'est clair, c'est limpide, c'est transparent, il n'y a pas de problème.

M. Lefrançois: Et vous êtes en faveur de ça. M. Chevrette: Pardon?

M. Lefrançois: Et vous êtes en faveur de ça.

M. Chevrette: Ça, je pourrais le discuter dans un autre temps avec vous. Ceci dit, la cogénération ou quand tu assures un prix ferme...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette:... de 0, 043 $ du kwh, vous venez nous dire: nous, les privés, ça coûte bien moins cher que ça à opérer. pas de problème. on va réaliser ça à moindre coût qu'hydro-québec. mais, si on vous disait: on va vous assurer une marge de profit de 12 %, pas une cent de plus, comme ça se fait à peu près devant les régies, vous le savez... à ottawa, c'est 12, 5 % même quand on fait appel... donc, mettons 12, 5 % pour être réaliste avec ce qui se passe normalement.

M. Lefrançois: Moi, je pense...

M. Chevrette: Si on enlevait les 0, 043 $ dont vous parlez.

M. Lefrançois: O. K. Mais disons que, si HydroQuébec construisait demain matin une centrale, ça lui coûterait 0, 043 $ et ça resterait 0, 043 $ pour au moins 20 ans. O. K. ? Alors, quand elle nous donne les 0, 043 $ pour 20 ans, c'est normal, c'est dans l'ordre des choses.

Maintenant, moi, je trouve qu'à 0, 043 $ sur disons 100 sites qui existent au Québec, pris au hasard, il y en a peut-être 30 qui vont être rentables. O. K. ? Seulement 30 vont être rentables. Il y en a qui vont l'être plus que d'autres, mais il y en a juste 30 qui vont être rentables; il y en a 70 qui ne le seront pas, supposons. Mais est-ce qu'on va augmenter le prix pour rendre les autres 70 rentables?

Moi, je ne suis pas en faveur de ça. Je dis: Tant que le coût évité est de 0, 043 $, amenez-moi les sites qui sont rentables à 0, 043 $, et ceux qui ne le sont pas, c'est bien de valeur, mais il va falloir attendre, et, si ça monte un jour, vous les ferez. Nous autres, on a, par exemple, loué pour 60 ans trois sites sur une même rivière. Avec 0, 043 $, on a un site qui est assez rentable, on en a un qui est juste sur la limite et on en a un qui ne l'est pas. C'est sur la rivière Portneuf, près de Forestville. (10 h 40)

On va faire les deux sites qui sont rentables, puis celui-là qui n'est pas rentable, on ne le fera pas. Pourquoi Hydro-Québec nous donnerait 0, 048 $ pour qu'on aille faire ce site-là? Ce n'est pas logique. On est prêt à vivre avec ça. On va faire nos deux sites, et on va vivre avec, et, si un jour ça monte à 0, 058 $ et que l'inflation n'a pas été trop grande, on construira le troisième. Tous les producteurs ont les mêmes problèmes. Il y a beaucoup de sites qui seraient le «fun» à faire, mais qu'on ne peut pas faire parce que ce n'est pas rentable. On se contente de ce qui est rentable.

Le Président (M. Audet): Merci. Mme la ministre de l'Énergie.

Mme Bacon: Juste pour l'information de la commission, et peut-être enlever un petit peu les craintes du député de Joliette par rapport à la privatisation. On regarde le parc actuel d'Hydro-Québec, plus Churchill, il y a plus ou moins 30 000 MW. Le potentiel de nos grandes rivières, c'est plus ou moins 18 000 MW. Quand on regarde les petites constructions, les petites centrales de 25 MW, c'est 500 MW à 1000 MW sur l'ensemble du potentiel. Alors, je ne pense pas qu'on puisse parler de privatisation qui commence par la porte d'en arrière en ce moment. Ce n'est pas beaucoup.

M. Chevrette: Je parlais de leur appétit de 25 à 100.

Mme Bacon: On n'est pas rendus là, on parlait dans quatre ans tout à l'heure. Si j'ai bien compris, ce n'est pas pour demain matin. Alors, juste rétablir ça.

Mon collègue de Saint-Maurice.

M. Lefrançois:... pas réinviter?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bacon: Mon collègue de Saint-Maurice.

Le Président (M. Audet): M. le député de Saint-Maurice.

M. Lemire: Je voudrais revenir, M. le Président, sur l'interfinancement. Je remarque que, dans votre mémoire, à l'item 9, vous mentionnez qu'il devrait être éliminé le plus tôt possible. C'est ce que vous avez mentionné au député de Joliette tantôt. La situation d'interfinancement repose sur le fait que les abonnés d'Hydro-Québec n'offrent pas le même rendement à l'entreprise, puis je remarque que les secteurs résiden-

tiels et agricoles présentent un rendement plus faible. Ce n'est pas tellement payant.

Ma question: Ne croyez-vous pas que l'établissement des rendements visés devrait tenir compte des risques encourus par Hydro-Québec lorsqu'elle fournit de l'électricité? Et, selon vous, est-ce que les différents marchés d'Hydro-Québec à l'heure actuelle présentent les mêmes risques?

M. Lefrançois: Disons qu'il y a un certain élément là-dedans, mais il reste que les pertes pour mauvaises créances, il y en a dans l'industrie, puis il y en a dans le secteur résidentiel aussi. Ça dépend des résidentiels, ça dépend où ils sont situés. Supposons que ça représenterait 0,1 %, si c'est réellement un coût et qu'on pouvait prouver demain matin que le taux de mauvaise créance est énorme, sûrement que ça pourrait rentrer dans le coût, mais, actuellement, j'aurais tendance à croire que ça s'équivaut.

Aussi, il y a le fait que, à ce que je sache, si vous devez apporter une ligne spéciale ou faire des aménagements spéciaux pour un gros consommateur industriel, je crois qu'il y a des prévisions de faites immédiatement pour s'assurer qu'il va payer le coût additionnel de la ligne. O.K.? De toute façon, je pense que ça fonctionne. Donc, si, au bout de 5 ans, il ferme ses portes au lieu de les fermer au bout de 20 ans, l'immobilisation spéciale qui a été faite pour lui, je pense qu'elle a été réglée. Donc, c'est simplement qu'il arrête de prendre de l'électricité. Si vous avez collecté jusqu'au dernier mois, ce n'est pas pire qu'une résidence qui se défait.

M. Lemire: Je voudrais revenir maintenant sur les industries à forte consommation d'électricité. À la page 9 de votre mémoire, vous avez parlé des conditions spéciales des paiements basés, par exemple, sur le prix de la vente de l'aluminium. Moi, ce que je voudrais savoir: Pourquoi proposez-vous une période de 10 ans?

M. Lefrançois: Disons qu'il n'y a rien de sacré. Ça peut être 12, ça peut être 13, ça peut être 15, mais sur une période prévisible... Disons, il me semble, que 10, c'est assez long, là. Si quelqu'un s'implante et qu'il n'est pas rentable au bout de 10 ans, là, il ne le sera peut-être jamais.

M. Lemire: Même dans un contexte de crise économique? On aurait pensé que la crise aurait duré un an, et là on est rendu à trois ans. Même dans ce contexte-là, vous pensez que 10 ans, c'est...

M. Lefrançois: Bien moi, je trouve que 10 ans, c'est un bon objectif.

M. Lemire: Oui? M. Lefrançois: Oui.

M. Lemire: Maintenant, je reviendrais avec l'environnement, si vous me permettez. Vous m'avez dé- montré, à la page 7, que vous êtes... Vous mettez en relief le développement multifonctionnel des rivières dotées d'aménagements hydroélectriques. Vous donnez un exemple de réintroduction du saumon dans une rivière. Quelles sont, d'après vous, les mesures les plus susceptibles d'harmoniser les principales vocations d'un site hydroélectriques?

M. Lefrançois: Disons que, pour parler de cette rivière-là en question, je vais passer la parole à Pierre Dumas, mais, si voulez parler du principe, le principe, c'est que le ministère de l'Environnement accorde le permis. O.K.? La première question que le ministère de l'Environnement pose avant d'accorder le permis: Qu'est-ce que la communauté pense de votre projet? Alors, si vous voulez obtenir une autorisation et que vous avez l'ensemble de la communauté qui est contre, c'est bien difficile pour le ministère de l'Environnement de l'accorder. Alors, ça force le promoteur, disons comme un cas que je connais particulièrement, où il y a des saumons, à trouver le moyen de ne pas nuire au saumon, peut-être de favoriser le saumon.

Il y a un cas assez particulier dont je voudrais vous parler, celui-là de la rivière Jacques-Cartier. Pierre Dumas est le principal...

M. Lemire: L'expert.

M. Lefrançois: ...la personne impliquée. Je peux lui demander de vous en parler un peu.

M. Dumas: Je ne voudrais peut-être pas parler trop spécifiquement de la rivière Jacques-Cartier. Vous avez peut-être lu des articles de journaux. Dans ce cas-là, il y a une imprécision quant à l'avenir du projet justement en raison de la mise en valeur intégrée, et je ne voudrais pas mettre en jeu ici des intérêts et un projet privé dans un débat qui est plus large.

Je voudrais, par contre, faire le lien avec ce que je disais tout à l'heure quand je mentionnais que les petites centrales hydroélectriques sont au coeur de la population, sont dans les villages. Les centrales hydroélectriques ont la mauvaise habitude de s'installer ou d'être plus rentables aux endroits où il y a des chutes, et on comprendra pourquoi. Et une chute dans un village, bien, c'est l'endroit privilégié pour un site touristique, pour le paysage, pour la récréation, pour un paquet d'activités de plein air. Il n'est absolument pas question, dans aucun des projets que je connais et des projets qui sont envisagés, les 70, de bousiller l'environnement, de faire quelque chose qui n'est pas harmonieux, qui est mal intrégré. Alors, il faut, veux veux pas... Même le ministère de l'Environnement l'exige, comme le disait M. Lefrançois. Même s'il ne l'exigeait pas, on ne pourrait faire qu'une centrale mal intégrée dans son environnement et, la deuxième, on se ferait mettre à la porte.

L'expérience qu'on vit le plus souvent, c'est qu'il y a des projets qui sont envisagés, il y en a qui ne sont pas encore sur la liste, qui sont en train d'être travaillés. Les premières étapes: il faut aller voir le maire, il faut

aller voir la MRC, il faut aller voir tous les organismes du milieu, il faut négocier avec eux le paysage, l'aspect récréatif, la mise en valeur du patrimoine, faire quelque chose de doux où tous les partenaires se considèrent gagnants. Et, quand on a fait ça dans un village, on a vu à quelques reprises dans des réunions où le maire du village d'à côté vient nous voir et nous dit: Écoutez, moi, j'en ai une chute et il n'y a personne qui est venu me voir et il n'y a personne qui veut faire de centrale. Venez-vous-en, j'en veux un projet intégré! Et ce n'est qu'à cette condition-là qu'on pense qu'on pourra faire des projets hydroélectriques.

Et, dans ce sens-là, je profite de l'occasion pour exprimer un peu la désapprobation de l'Association ici à une affirmation qui est évoquée par Hydro-Québec, encore dans l'annexe 3, au plan de développement, quand Hydro-Québec dit qu'un mégaprojet, par exemple, à la Baie James, évidemment, a beaucoup d'impact sur l'environnement, mais que, si on additionnait bout à bout les impacts de petites centrales, ça serait plus qu'un projet; c'est mieux d'en faire un gros que 100 petits. Et ça, on est tout à fait contre. On n'est absolument pas d'accord avec cette affirmation-là. On a demandé à Hydro-Québec de nous démontrer le fondement de cette déclaration, on n'a pas eu encore la démonstration, mais on veut pousser la discussion un peu plus loin et leur amener notre argumentation qui démontre que plusieurs petites centrales sont mieux qu'une grosse centrale de puissance équivalente.

Évidemment, les petites centrales ne remplaceront jamais le complexe Grande-Baleine, on ne parle pas du même parc de puissance, mais les petites centrales sont douces, sont harmonieuses.

Le Président (M. Fradet): Merci, M. le député de Saint-Maurice.

Je reconnais maintenant M. le député de Laviolet-te.

M. Jolivet: Merci, M. le Président.

À la page 5 de votre mémoire, vous faites mention que les sites hydroélectriques de moins de 25 MW devraient être réservés au secteur privé. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a des municipalités qui, actuellement, possèdent des barrages, des centrales hydroélectriques. Vous n'êtes pas sans savoir non plus que des municipalités ont fait mention qu'elles voulaient entrer dans ce secteur-là. Alors, on a eu des discussions avec les gens d'Hydro-Québec et, finalement, on a obtenu une opinion légale nous indiquant que les municipalités ne sont pas habilitées, en vertu de la loi, à vendre de l'hydroélectricité à Hydro-Québec, ce qui ne les empêche pas d'en faire pour leurs propres besoins, probablement.

À partir de ça, s'il y avait un changement à la loi permettant aux municipalités de pouvoir entrer dans le secteur de vente de l'électricité à Hydro-Québec, est-ce que vous seriez contre? Est-ce que vous considérez que c'est un site qui est public, c'est-à-dire pas un site, mais une centrale qui est publique et non pas une centrale privée?

M. Lefrançois: Nous, on trouve que le partage actuel est excellent, parce que, si une municipalité a la possibilité d'aménager quelque chose à l'intérieur et a son propre réseau de distribution, il y a déjà un critère d'efficacité qui apparaît parce qu'il faut que le réseau de distribution fasse des profits, etc. À partir du moment où une municipalité se met à produire pour Hydro-Québec, là, ce n'est pas évident que le critère économique va toujours être là, O.K.? (10 h 50)

Nous, s'il y a un site qui n'est pas rentable à 0,043 $, on ne le fait pas. Une municipalité pourrait se rendre compte que le site, il serait rentable à 0,048 $, qu'à 0,043 $, il ne l'est pas. Mais qu'est-ce que c'est ça? Ce n'est pas grave, avec les programmes divers, puis avec les programmes de ci, puis avec les programmes de subvention untels, on va réussir à baisser les coûts. Puis, finalement, ils se mettent à faire des sites de 0,048 $, puis qui ne devraient pas exister, et ils n'ont pas le même critère que nous qui existe tout le temps, qui est: le coût du projet, il est tout là, puis le revenu, il est tout là, puis il faut que ça balance. O.K.?

Dans une municipalité où il y a beaucoup de chômage — je dirais dans toutes les municipalités — la tentation, c'est de dire: Bien, écoute, même si ça, ce n'est pas tout à fait rentable, on va le faire pareil, on va donner de l'ouvrage au monde, c'est bien important, etc. Et là, à mon avis, ça peut dégénérer de façon très importante, puis ce ne sera plus un programme normal. Donc, on trouve que tel que c'est là, on est absolument d'accord avec ça.

M. Jolivet: Deux questions encore. La première, c'est pour celles qui existent et qui fabriquent de l'électricité et la vendent. Vous n'avez pas d'objection, si je comprends bien, à les maintenir comme telles. Pour ceux qui viendraient...

M. Lefrançois: Vous parlez dans les municipalités?

M. Jolivet: Dans les municipalités, oui. M. Lefrançois: Pas de problème.

M. Jolivet: Et, dans le cas de municipalités qui voudraient avoir de nouveaux sites, de nouveaux barrages, de nouvelles centrales et qui seraient dans un coût équivalent au vôtre, même moindre, est-ce que vous seriez en désaccord aussi? Là, vous êtes en désaccord dans la mesure où ce serait moins dispendieux et, en conséquence, vous dites: Nous sommes contre cette façon de voir les choses, à cause des programmes dont vous faites mention. Mais pour un site qui serait rentable et qui permettrait à la municipalité de retirer une partie de l'argent pour payer des services dans sa municipalité?

M. Lefrançois: Moi, ce que je conseillerais à une municipalité, si c'est un site rentable, c'est d'aller voir

un promoteur et de se faire donner un pourcentage sur les revenus bruts. Ça va être beaucoup plus facile, beaucoup plus facile à contrôler. Ils vont avoir les mêmes avantages.

Nous autres, on a actuellement un site, disons, dans une ville, la ville de Port-Cartier. On a négocié un pourcentage sur les revenus bruts, on a négocié qu'on ferait tel et tel aménagement pour eux. Pour la ville, à mon avis, c'est l'idéal. Ils ont le revenu, ils sont sûrs de l'avoir, ils ont les aménagements, puis ils n'ont pas à rentrer dans un processus, quand même, assez complexe. Et une chose qui est sûre, c'est que, si le projet est rentable, il va se faire, puis, s'il ne l'est pas, il ne se fera pas. À mon avis, c'est la meilleure solution.

M. Joli vet: Merci.

Le Président (M. Fradet): Merci. M. le député de Joliette, maintenant.

M. Chevrette: Je vais partir de votre dernière allégation. C'est clair et je n'ai rien contre ça, c'est normal, en entreprise privée, qu'on fasse des profits à partir de projets qu'on... Il n'y a pas personne qui a encore la vocation d'aller bâtir des projets à perte, je comprends ça. Mais Hydro-Québec n'a pas la même mission que vous autres. Et toutes les régions du Québec... Si on a étatisé l'hydroélectricité en 1962, c'était pour sortir de la grande noirceur. Parce que Shawinigan Water and Power, si ce n'était pas payant d'allonger une ligne à quelque part, bien ils restaient à la noirceur, puis on se chauffait à la lampe à l'huile, puis à pomper le fanal, comme on disait.

Vous ne ferez pas de projet dans un milieu où ce n'est pas avantageux de le faire. Donc, Hydro-Québec devra se substituer à vous autres pour aller porter l'électricité, par exemple, à une entreprise qui se développerait, qui exigerait 4, 5 MW.

M. Lefrançois: Pas du tout. Parce que HydroQuébec, déjà, va porter l'électricité partout, O.K.?

M. Chevrette: Oui.

M. Lefrançois: Et ça, c'est...

M. Chevrette: Ah! mais vous savez très bien qu'il y a des régions du Québec qui sont à la limite.

M. Lefrançois: Oui, mais ce n'est pas les...

M. Chevrette: Je pourrais vous en donner des régions, là...

M. Lefrançois: Mais ce n'est pas les...

M. Chevrette: Ils ne le disent pas parce qu'ils ont peur d'affoler le monde...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...mais ils sont à la limite, par exemple, de la réfection. s'il y avait un barrage additionnel dans la région de saint-esprit, par exemple...

M. Lefrançois: Oui.

M. Chevrette: ...de 25 MW, ça serait très rentable pour Hydro de le laisser à l'entreprise privée, si jamais l'entreprise privée... au lieu de changer tout son système, puis d'augmenter le voltage.

M. Lefrançois: Oui, mais, c'est parce que là, moi, je voudrais faire la distinction entre fournir le service d'électricité à la clientèle... O.K.? On est tous d'accord que tout Québécois, peu importe où il est situé, va recevoir l'électricité, puis va payer le même prix; même si ça coûte une fortune, il a le droit de l'avoir. Et ça, Hydro-Québec remplit déjà ce mandat, O.K.? Nous, on arrive et on agit uniquement dans le domaine de la production, ce qui veut dire que, si on s'installe, disons, tel village, au lieu que l'électricité vienne de Montréal, bien, elle va venir localement. Mais il reste toujours un fait, que la clientèle locale, qu'on soit là, qu'on ne soit pas là, ne sera pas affectée. Elle est déjà servie et, quand on va être là, le gros souci d'Hydro-Québec, c'est justement qu'on ne puisse pas faire d'interférence et diminuer le service à la clientèle. Donc, elle nous impose toutes sortes de mesures de sécurité pour être bien sûr qu'elle ne soit pas obligée de couper le courant plus souvent pour nous autres, que ça va être le même service qu'avant.

Et je dirais que tout le monde a l'électricité partout et c'est rare... Ça peut arriver que, dans un cas, on favorise... Souvent, on va favoriser l'efficacité d'Hydro-Québec parce qu'on s'implante sur les bouts de ligne, si on peut dire, et c'est bien plus intéressant, mais tant mieux! On a le même prix.

M. Chevrette: Avez-vous eu des échanges avec Hydro sur le projet de Robertson?

M. Lefrançois: Disons, on a vu...

M. Chevrette: 21 MW, 340 000 000 $. Qui dit mieux?

M. Lefrançois: II faut dire que ce n'est pas en pleine ville, le lac Robertson; ce n'est pas en pleine ville, O.K.? Aussi, il y a un autre facteur qu'il faut considérer, qui existe même pour l'entreprise privée, c'est que, si vous voulez aller installer un plan à Kuuj-juaq, vous n'aurez pas 0,433 $, vous allez avoir le coût évité à cet endroit-là, qui peut être de 0,08 $ ou de 0,10 $. O.K.? Alors, à Robertsonville, le coût évité est peut-être de 0,10 $, est peut-être de 0,15 $. Alors, peut-être que même à 300 000 000 $, c'est encore rentable, mais je ne peux pas vous dire.

M. Chevrette: On en discutera.

Le Président (M. Audet): Merci. Pas d'autres interventions?

M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

Vous avez mentionné qu'il y a 70 projets à l'étude pour à peu près 252 MW. Si je vous demandais la question suivante: Est-ce que votre association, avec ce que vous connaissez de la situation, peut livrer, pour Horizon 2003, 730 MW d'électricité à même les projets privés? Est-ce que c'est faisable? Si oui, est-ce qu'il faut se concentrer et déborder dans les 25 à 100?

M. Lefrançois: Disons que c'est une grosse question. Là, évidemment, on peut assumer que les 250 qui sont présentés actuellement, c'est peut-être les plus faciles, c'est ceux où il y a déjà des aménagements. Il y a des centrales, là-dedans, de 2 MW, de 1 MW, que, s'il n'y avait pas déjà un aménagement de fait, ce serait jamais possible de partir d'un site vierge. Donc, je croirais que les 250 qui sont là, c'est les plus faciles. Les 250 suivants, au lieu d'être des projets avec une moyenne de 4 MW, ça va être des projets avec une moyenne de 10 MW, 12 MW sur des sites vierges. Et se rendre à 730 d'ici 10 ans, garanti... Déjà, dans les sites, dans ceux qu'on a là, on se rend en 1996. Je doute que, dans les conditions actuelles, on puisse se rendre là.

M. St-Roch: La deuxième question, M. le Président. Dans l'éventualité qu'il y aurait un changement de politique gouvernementale pour vous octroyer des projets en haut de 25 MW, là, on commence à penser à des montants d'investissement qui sont assez substantiels, avec des perturbations du milieu qui sont un peu plus étendues. Dans la politique à l'heure actuelle d'Hydro-Québec, il y a le fameux 2 % qui est alloué pour compensation, soit au niveau environnemental, et aide aussi à corriger des choses et au développement régional. Est-ce que ce serait pensable, si jamais on était en haut de 25 MW, que cette même politique là serait maintenue par l'entrepise privée?

M. Lefrançois: C'est possible. Si vous regardez, d'ailleurs, aujourd'hui, les sites que je connais plus, les sites qui sont publics, déjà il y a des aménagements qui sont faits, qui dépassent peut-être le 2 %. La seule chose qui est importante, c'est de le savoir au départ. Si vous dites: Prévoyez dans vos coûts 2 % pour des coûts d'investissement pour donner à la communauté, bien là, on va dire: Ça nous coûtait 100 000 000 $, maintenant, ça nous en coûte 102 000 000 $. Est-ce que le projet est encore rentable? Alors, ce serait surprenant qu'un 2 % fasse un écart, fasse abandonner un grand nombre de projets. En autant que c'est su d'avance, c'est faisable, parce qu'on va le calculer.

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, messieurs, au nom des membres de la commission de l'économie et du travail, je vous remercie de votre présenta- tion.

Nous allons suspendre nos travaux deux minutes afin de permettre aux Ami-e-s de la terre du Québec de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 11 heures)

(Reprise à 11 h 2)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le groupe les Ami-e-s de la terre du Québec. Alors, madame, monsieur, on vous souhaite la plus cordiale bienvenue à cette commission parlementaire. Je vous rappelle brièvement nos règles de procédure. Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous faire votre exposé, mais, avant, je vous invite à vous présenter afin de permettre la transcription du Journal des débats. Ensuite suivra une période d'échanges qui durera une quarantaine de minutes. Vous avez la parole.

Ami-e-s de la terre du Québec

M. Waaub (Jean-Philippe): Bonjour à tout le monde. Merci de nous recevoir aujourd'hui. Mon nom est Jean-Philippe Waaub, pour les Ami-e-s de la terre du Québec, avec Margot Allen. On va vous présenter notre mémoire, donc, en une vingtaine de minutes. On a ajouté quelques petits points qui ne sont pas écrits, évidemment; ça arrive souvent, étant donné les délais qu'on a pour faire le mémoire et que la réflexion se poursuit. Alors, sans plus tarder, je passe la parole à Margot Allen pour commencer.

Mme Allen (Margot): Les producteurs d'énergie partout au monde subissent des changements et des transformations. Planification: pourquoi les producteurs d'énergie devraient incorporer les coûts environnementaux. Ceux qui insistent pour dire que les emplois créés par les projets hydroélectriques doivent passer avant les considérations environnementales se trompent. L'un ne peut exister sans l'autre. Nous ne pouvons plus ignorer les aspects négatifs de nos choix énergétiques. Les coûts absolument énormes de l'exploitation des ressources naturelles ont échappé à l'attention de l'homme depuis un siècle, mais ces coûts n'échapperont pas aux lois de la nature auxquelles on doit toujours rendre compte. Les acquis perdus et la perte en productivité qui en découle érodent silencieusement le bien-être économique d'une nation. On ne peut sacrifier l'avenir économique du Québec pour créer des emplois temporaires dans le secteur de la construction.

Les ressources naturelles ne peuvent plus être considérées comme des dons de la nature. Ignorer les coûts environnementaux au niveau de la planification, de l'évaluation des prix et de la sélection des ressources, c'est essentiellement leur fixer une valeur de zéro. Par contre, quantifier les coûts environnementaux externes au niveau de la planification et de la sélection des res-

sources servira à diminuer les problèmes de santé et les dommages causés par la pollution ainsi qu'à encourager les producteurs d'énergie à investir dans les ressources moins polluantes. Les coûts légaux et les coûts de réparation ou de dépollution vont continuer à augmenter. Alors, considérer ces coûts à éviter dans la planification et la sélection des ressources peut nous aider à éviter les coûts supplémentaires dans le futur. Il s'agit là d'une simple mesure de sécurité pour réduire les niveaux d'incertitude associés au plan de développement d'Hy-dro-Québec.

Recommandation 1: Hydro-Québec doit s'engager à quantifier les coûts environnementaux, sociaux et économiques de ses projets. On accepte plus facilement d'évaluer les «externalités» positives — création d'emplois, retombées économiques — mais on hésite à faire ressortir les coûts négatifs.

Quelques pays commencent à répertorier tous les effets environnementaux reliés à chaque source d'énergie dans le but de favoriser les sources énergétiques les moins dommageables pour l'environnement. À cet égard, un livre, «Environmental Costs of Electricity», publié en 1990, fait une révision des études qui quantifient les coûts indirects par différentes sources d'énergie: charbon, pétrole, gaz naturel, nucléaire, hydroélectricité, solaire, éolienne, incinération, technologies de conservation d'énergie. Les annexes 1 et 2 sont quelques exemples de façons de quantifier les coûts environnementaux et sociaux reliés aux projets hydroélectriques.

Recommandation 2: Hydro-Québec doit incorporer les coûts externes à ses coûts internes dans son analyse du coût pour chaque projet. Il y a différentes façons de le faire. On peut s'inspirer de l'approche «Least Cost Integrated Resource Planning», déjà un standard de travail dans 35 États américains. Les références 3 et 4 dans la bibliographie suggèrent diverses méthodes d'incorporer les coûts externes dans la planification des ressources.

M. Waaub: En ce qui concerne la méthode de planification, la méthode «Integrated Resource Planning», ou planification intégrée des ressources, a retenu l'attention d'Hydro-Québec qui s'est un peu mise à l'ouvrage, mais qui, hélas, n'a pas pu procéder à cet exercice-là pour ce plan de développement ci, ce qui est un peu dommage dans le mesure où elle reviendra seulement dans trois ans pour faire le prochain exercice, alors qu'on aurait pu considérer de façon systématique à la fois les options d'offre et de demande du point de vue de la rentabilité sociale globale, c'est-à-dire en incluant les coûts sociaux et environnementaux des options tout en respectant les critères financiers de l'entreprise. On pourra revenir là-dessus, sur la différence de planifier les ressources énergétiques en fonction d'une rentabilité sociale globale plutôt que d'une rentabilité d'entreprise.

Mme Allen: Section 2, la prévision de la demande. Une phase déterminante du processus de planification est la phase d'intégration des options d'offre et de demande. La planification doit commencer par une analyse des besoins, c'est-à-dire l'utilisation finale de l'énergie. Les consommateurs ne veulent pas de l'énergie, ils veulent des services que fournit l'énergie: chauffage, éclairage, services électrolytiques, mécaniques et informatiques. Nous devons nous poser des questions fondamentales: Comment combler ces besoins avec le plus d'efficacité? Quelles sources sont les moins chères au niveau environnemental et social, autant qu'au niveau économique? Quelles sources sont les mieux adaptées à chaque besoin? L'électricité en constitue seulement un parmi plusieurs moyens de satisfaire ces besoins.

Recommandation 3: il faut faire une analyse de tous les moyens de satisfaire chaque besoin pour voir quelle source d'énergie est la mieux adaptée pour chaque utilisation finale. La conservation doit être considérée comme une des sources et il faut l'exploiter au maximum. Par exemple, il semble que l'utilisation de l'électricité pour le chauffage des locaux en hiver n'est pas une utilisation rationnelle de cette ressource. Calculer une tarification moyenne sur toute l'année ne sert qu'à dissimuler le fait que l'emploi de l'énergie électrique pour le chauffage de locaux est dispendieux. Voir les annexes 3 et 4.

Hydro-Québec doit garder une grande réserve uniquement pour la courte durée de l'appel maximal de puissance et, en dehors de la période d'appel maximal, une partie de la capacité de production n'est pas utilisée. Les références 5, 6 et 7 dans la bibliographie démontrent comment l'utilisation du solaire passif peut servir à réduire la consommation énergétique d'un bâtiment pour les systèmes de chauffage, d'éclairage, de refroidissement et de ventilation. D'autres possibilités à étudier sont un meilleur aménagement urbain, l'incorporation du solaire actif et passif dans la construction neuve et la rénovation, la récupération de chaleur, l'emmagasinage de chaleur, l'intégration d'appareils pour le transfert et le stockage de la chaleur. (11 h 10)

Sujet 3, les industries à forte consommation d'électricité. Le Canada est un des pays les plus énergivores du monde, et ce, pour diverses raisons, entre autres, une structure industrielle énergivore basée sur la production des produits primaires, pâtes et papiers, minéraux et produits agricoles. Quels sont les besoins industriels du Québec? Comment pouvons-nous les combler avec le moins d'impacts négatifs possible —les impacts environnementaux, sociaux et économiques — et le plus d'impacts positifs — emplois et retombées économiques?

Il s'agit d'un projet de société. Le développement du Québec basé sur les industries à forte consommation d'électricité est de l'antidéveloppement car elles créent très peu de plus-value en leur fournissant l'énergie en deçà du coût de production. Si ces industries paient moins que le coût de production, le reste des consommateurs sont obligés de payer le déficit qui est ainsi créé. De plus, les payeurs de taxes défraient les coûts reliés à la dépollution et aux maladies causées par ces industries. Est-ce qu'il ne serait pas mieux de favoriser les industries de récupération et de recyclage qui permettent d'épargner non seulement en énergie, mais aussi

en ressources? Par exemple, le recyclage d'aluminium utilise 95 % moins d'énergie que la production primaire et le recyclage du papier nécessite 64 % moins d'énergie que la fabrication à partir de pulpe. Voir l'annexe 5 pour les détails. Il faut chercher à réduire surtout notre niveau de pollution.

Alors, notre recommandation 4: les grands projets industriels doivent aussi faire l'objet d'évaluations environnementales.

Recommandation 5: il faut d'abord calculer le potentiel de réutilisation et de recyclage pour chaque industrie. Si nous allons accorder des rabais tarifaires, il faut les accorder aux industries de réutilisation et de recyclage. Il faut demander des tarifs beaucoup plus élevés pour les pollueurs et arrêter de compter sur l'argent de la société et les taxes présentes et futures pour la dépollution.

Recommandation 6: pour les contrats déjà signés, Hydro-Québec doit s'engager à fournir des analyses non seulement sur les avantages, mais aussi les désavantages.

Recommandation 7: en attendant, il faut un moratoire sur tout nouveau contrat avec les industries de forte consommation d'électricité.

Sujet 4, les ventes à l'exportation. Quels sont les avantages et les désavantages de l'exportation? Quels sont les risques environnementaux, sociaux et économiques pour le Québec? La production d'un excès d'énergie pourrait s'avérer très coûteuse pour la population québécoise. Il faut savoir si l'énergie exportée sert réellement à réduire la consommation de combustibles fossiles et ainsi que les précipitations acides au Québec ou si l'énergie ne sert qu'à alimenter une croissance industrielle. Est-il logique d'emprunter de l'argent pour l'exportation et de subir les problèmes environnementaux et sociaux ainsi créés, quand tous les emplois créés par l'utilisation de cette électricité le seront aux États-Unis? De plus, les paiements d'intérêt sur l'argent emprunté qui quitte le Québec vont stimuler l'économie ailleurs, pas chez nous. Nous risquons une perte nette plutôt qu'un bénéfice.

Recommandation 7: il faut un moratoire sur les nouveaux contrats d'exportation.

Recommandation 8: pour les contrats déjà signés, Hydro-Québec doit s'engager à fournir des analyses non seulement sur les avantages, mais aussi sur les désavantages et à démontrer que ses ventes contribuent à une dépollution globale.

M. Waaub: En ce qui concerne les critères dont Hydro-Québec parle dans le plan de développement et auxquels les exportations devraient satisfaire, ça me semble assez vague. Justement, notamment toute la question du plein coût social de production est importante dans la mesure où il n'est pas question que toutes les nuisances environnementales se fassent au Québec et tous les gains se fassent aux États-Unis. Notamment, si on prétend qu'on va améliorer l'état de l'environnement global, on devrait peut-être en avoir même une rente plutôt que donner notre énergie à rabais. Tout ça aug- menterait les prix, évidemment.

Il y a aussi toute la question dans les exportations, certains l'ont déjà soulevée, de s'approvisionner en devises américaines. On finit par entrer dans une spirale qui est inflationniste au niveau des infrastructures, où on construit pour obtenir des devises et, après, on doit payer des intérêts en devises et construire pour continuer à alimenter le projet. De plus, c'est une entreprise à hauts risques, les exportations, parce que, contrairement à ce qu'on pense, nous autres, on n'est pas tout à fait d'accord avec l'idée qu'on en aura besoin dans 20 ans. De plus, les Américains eux-mêmes ne sont pas sûrs d'en avoir besoin pendant les 20 prochaines années. D'ailleurs, ils ont annulé de plus en plus les contrats. Ne fût-ce que de mentionner qu'en bas de 0,05 $ US le kilowattheure l'État de New York a identifié plus de 5000 MW d'économie d'énergie potentielle à avoir avant d'acheter à Hydro-Québec. L'annulation du contrat du Maine s'est faite pour les mêmes raisons.

Mme Allen: Sujet 5, l'efficacité énergétique. Il y a d'immenses possibilités d'économiser argent et énergie par l'efficacité énergétique, mais nous devons aller plus loin que les simples coûts évités à Hydro-Québec et aux consommateurs. Que faire des coûts à éviter pour l'ensemble de la société, les dépenses gouvernementales pour la dépollution, pour la santé, etc.? Les pays qui consacrent des investissements importants à l'amélioration de leur efficacité énergétique et à la conservation de l'énergie réduisent les coûts reliés à l'énergie et ils ont de meilleures chances de rester compétitifs sur le marché mondial.

Il y aura aussi des avantages pour toutes les régions du Québec. La réduction locale de la consommation d'énergie permet de stimuler le développement économique de chaque ville du Québec. L'argent non dépensé en électricité demeure disponible à d'autres fins et contribue à l'expansion du secteur commercial et à la création d'emplois locaux. Certains rapports indiquent même que l'investissement dans la conservation d'énergie crée plus d'emplois que la génération de nouvelle électricité. Notre argent doit être investi dans les secteurs les plus avantageux pour notre économie.

Recommandation 9: il faut chercher à éteindre le maximum du potentiel économiquement réalisable. Les prix de l'énergie devraient non seulement refléter le plein coût environnemental et social de la production, mais Hydro-Québec devrait aller jusqu'à employer les prix pour encourager la conservation d'énergie. Une politique de tarification différenciée changerait totalement la problématique. Chaque client devrait payer le vrai coût pour l'électricité qu'il consomme. Ce qui compte, c'est qu'au total la facture soit moindre ou égale pour le consommateur. Les kilowattheures sont moins chers, mais il y a moins de kilowattheures consommés.

Recommandation 10: voici quelques autres possibilités pour inciter le consommateur à réduire les consommations d'énergie: une vérification de l'efficacité énergétique, les nouvelles technologies, les standards de performance, la substitution de l'inefficace pour Peffica-

ce, taxes pour promouvoir l'efficacité, rendre visible la consommation horaire, fixer des objectifs de consommation pour un édifice ou par ménage, subvention pour les cas où le «payback time» est trop cher, mais où la mesure est socialement rentable.

M. Waaub: En ce qui concerne l'efficacité énergétique, il est important aussi de souligner qu'Hydro-Québec ne bénéficie pas du tout du soutien du gouvernement en ce qui concerne les mesures d'efficacité énergétique. On pourrait vous montrer un peu — et discuter de ça par la suite — comment le gouvernement pourrait jouer un rôle réellement efficace dans la conservation de l'électricité au Québec. Et c'est un problème important. On peut aller bien au-delà des 9,3 TWh prévus.

En plus, en ce qui concerne la question des emplois, bon, je pense que les chiffres annoncés par Hydro-Québec, dans son plan de développement à la page 39, me semblent assez critiquables en ce qui concerne la différence entre les emplois de conservation. On pourra en parler aussi.

En ce qui concerne, maintenant, les tarifs, c'est important que, justement, Hydro-Québec et le ministère peut-être fassent la preuve qu'on va pouvoir conserver les tarifs. Selon moi, c'est impossible. Je peux vous faire une petite démonstration qu'avec 50 000 000 000 $ ou 60 000 000 000 $ de dettes et des paiements annuels de 5 000 000 000 $ à 6 000 000 000 $, il faudrait qu'on soit une dizaine de millions de Québécois ou 12 000 000 de Québécois pour payer cette affaire-là dans les conditions qu'on pense. je pense que le gouvernement ici, les élus, ne devrait pas, en partant, donner une augmentation de tarifs supérieure à l'inflation, c'est-à-dire supérieure à 1,8 %. de plus, hydro-québec se donne aussi, concernant les tarifs, des politiques, des polices d'assurance parce qu'elle reconnaît qu'elle ne prévoit pas l'évolution de la demande. elle ne peut pas contrôler les taux d'intérêt ni le taux de change, etc. ça donne des éléments d'incertitude assez terribles, surtout quand on a 50 000 000 000 $ de dettes. imaginez, si le taux d'intérêt augmente de 5 %, la différence que ça fait en milliards de dollars à payer par les consommateurs québécois.

De plus, les tarifs devraient refléter le vrai prix de l'énergie. Nous autres, on est en faveur d'une tarification au coût marginal de production et d'une utilisation de la rente que cela procure pour justement financer des programmes, en collaboration avec le gouvernement, sur les économies d'énergie.

(11 h 20)

Mme Allen: sujet 6, moyens de production. le développement de sources alternatives d'énergie — solaire passif et actif, éolienne, etc. — est essentiel pour nous permettre de réduire notre pollution, nos tensions sociales et le stress sur notre économie. les mégaprojets d'hydro-québec immobilisent d'énormes capitaux pendant de longues périodes. ces capitaux plus les paiements en intérêts... présentement, nos paiements en intérêts sont 40 % de chaque dollar que le consom- mateur paie à Hydro-Québec. Alors, ces capitaux pourraient être utilisés autrement pour stimuler l'économie. Les sources d'énergie de plus petite envergure ont plus de flexibilité, peuvent être mises en production plus rapidement et demandent moins de capital.

Les recommandations, je pense que je ne vais pas les énumérer, mais je voulais juste... Vous avez une copie de notre mémoire. Mais j'aimerais juste soulever les questions sur la recherche et le développement. En 1990, l'électricité a reçu 100 000 000 $ pour la recherche et le développement, tandis que le solaire a eu seulement 1 000 000 $. Alors, si on veut voir un développement équitable de toutes nos ressources d'énergie, il faut que l'argent donné pour la recherche et le développement soit plus équitable aussi.

Sujet 7, la révision et la clarification de la politique énergétique du Québec. Une vraie évaluation des besoins énergétiques du Québec ne peut se faire lorsqu'un seul des producteurs d'énergie a la possibilité de faire valoir son point de vue. L'information devient nécessairement biaisée.

Recommandation 14: il faut penser à la mise sur pied d'une commission indépendante pour entendre et évaluer les propositions de toutes les options énergétiques au Québec. Il faut évaluer ces options du point de vue économique, social et environnemental. Il faut évaluer non seulement les moyens de production de l'énergie, mais aussi les moyens de l'utilisation de cette énergie.

Le Président (M. Audet): En terminant, s'il vous plaît.

M. Waaub: En terminant, j'aimerais insister sur l'option de développement durable qu'Hydro-Québec veut faire et j'aimerais revenir là-dessus dans la période des questions. Notamment, une option sérieuse de développement durable par le gouvernement du Québec et Hydro-Québec mettrait fortement en doute la croissance de la demande en ce qui concerne les industries fort consommatrices d'énergie, notamment le rôle du recyclage dans l'aluminium et les pâtes et papiers.

En plus, il y a quelques enjeux environnementaux qui sont importants: l'acceptabilité de la pollution au mercure, les lignes sous-fluviales, notamment à l'île d'Orléans, qu'on pourrait imaginer. Un autre point qui est important aussi, c'est le contrôle des dépenses d'Hy-dro-Québec en faveur d'une régie d'électricité qui reverrait aussi ces points-là et, peut-être, garder pour la période des questions aussi, le rôle des autochtones et le rôle des syndicats, aussi, dans le débat.

Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Je voudrais d'abord vous remercier de votre contribution à la commission parlementaire et vous dire aussi que vos commentaires, vos recommandations seront certainement soigneusement étudiées puis-

que nous tentons de prendre en considération ce que les gens viennent, dans leur témoignage, nous suggérer et nous recommander.

Je trouve que plusieurs de vos commentaires sont fort pertinents vis-à-vis des enjeux environnementaux, des enjeux sociaux aussi de l'électricité au Québec. Vous avez une approche pour améliorer l'efficacité énergétique et faire un usage plus rationnel de l'énergie. On ne peut pas faire autrement qu'être d'accord avec cette approche-là, bien que vous trouviez que le gouvernement n'en fasse pas suffisamment. Mais j'y reviendrai. Vous m'avez suggéré plusieurs questions, mais il y en a quelques-unes, en tout cas, que je voudrais vous demander tantôt.

Mais, dès le début de votre mémoire, vous mettez l'emphase sur l'importance de la planification. Vous soulignez la nécessité qu'Hydro-Québec quantifie, prenne en compte les «externalités» qui sont liées à chacun de ses projets dans l'analyse de son coût. Vous fournissez d'ailleurs, en annexe, les coûts associés aux différents impacts d'un projet d'aménagement hydroélectrique d'une rivière à saumon, par exemple, sur la côte ouest américaine. Est-ce que vous croyez que ces valeurs accordées par la Bonneville Power Authority au coût des impacts s'appliquent également aux différents projets d'Hydro-Québec? Est-ce qu'on peut transporter ça ici, dans les différents projets d'Hydro-Québec?

M. Waaub: Dans les méthodologies d'évaluation des coûts des impacts, c'est sûr qu'il y a des choses à examiner. C'est évident que c'est au cas par cas. Il y a beaucoup de façons, de méthodologies de travail et, même, on pourrait dire que certaines méthodologies sont elles-mêmes à critiquer. Notamment, par exemple, quand on évalue le coût d'une ressource à la capacité de payer des gens de la défendre et quand on voit qu'on est en crise économique, ça n'annoncerait pas gros pour l'environnement. Donc, il y a un certain nombre d'enjeux environnementaux, c'est sûr, qui doivent être évalués en coût, en dollars, projet par projet et en fonction d'une expertise qui est disponible au Québec, certainement.

Par contre, il y a des enjeux environnementaux qui ne doivent pas se réduire à une dimension coût et qui doivent rester un enjeu environnemental jusqu'à la prise de décision. Notamment, selon moi, la question de l'acceptabilité des risques relativement au mercure, par exemple... Hydro-Québec prétend que le mercure diminue après 25 ans. J'aimerais bien savoir, moi, si le Québécois moyen accepterait de subir quelque chose pendant 25 ans, notamment relativement, par exemple, à son régime alimentaire. Si on lui disait: Bon, au lieu de manger ton steak chaque jour, mange des fruits à la place parce que, le steak, il est contaminé pendant 25 ans, je ne pense pas qu'on apprécierait ça à sa juste valeur.

L'acceptabilité sociale joue, dans les questions. On a beau faire du «monitoring», de la surveillance, de l'expertise et se servir en plus de ça comme champ de recherche, c'est louable et c'est louable, aussi, de vou- loir diminuer les impacts, mais, quand il s'agit de projets nouveaux, il faut aussi se fier à ce qu'on sait déjà et minimiser pour l'avenir et à son vrai coût. Je pense que, si on en tenait compte à son vrai coût, ça diminuerait de beaucoup la rentabilité des projets d'Hydro-Québec. Quand on parle de 0,042 $, 0,043 $ du kilowattheure de Grande-Baleine, par exemple, ça change tout à partir du moment où on ajoute tous les autres coûts qu'il faudrait prendre en compte. À ce moment-là, les mesures d'efficacité d'énergie seraient encore plus rentables.

Mme Bacon: Justement, l'efficacité énergétique et l'utilisation appropriée, rationnelle de l'énergie, c'est des pierres angulaires de votre position, si j'ai bien compris votre dossier. En ce qui concerne l'efficacité énergétique, vous déclarez qu'il faut chercher à atteindre le maximum du potentiel économique réalisable, que les prix de l'électricité doivent refléter le plein coût environnemental et social de la production, et vous venez de nous le redire. De combien devrait-on majorer les tarifs de l'électricité pour qu'ils reflètent vraiment le plein coût environnemental et social de la production du Québec?

M. Waaub: C'est une question que je devrais vous poser, justement, de faire travailler vos fonctionnaires pour qu'ils essaient de le déterminer.

Mme Bacon: Non, mais vous venez nous dire qu'il faut en tenir compte.

M. Waaub: l'expérience montre que c'est à peu près 20 %. l'expérience étrangère montre que, si on majorait de 20 % le coût marginal, on aurait une première évaluation représentative des vrais coûts de l'énergie. en ce qui concerne l'efficacité énergétique, à ce moment-là, vous comprendrez que, si le gouvernement appuyait un petit peu la politique de tarification au vrai coût, mais, en plus, en ce qui... j'en profite, ici, pour reglisser la question des économies d'énergie et du rôle du gouvernement. c'est prouvé que... tout ça se joue ensemble, évidemment, c'est toutes des actions parallèles. c'est prouvé que, quand le gouvernement subventionne des mesures d'efficacité d'énergie auprès des consommateurs, dans les cinq à sept ans, il a récupéré son argent et plus, à cause des effets d'entraînement dans l'économie, à cause des retours qui se sont faits et à cause, aussi, du fait qu'on n'a pas investi, justement, dans des mégaprojets qui endettent la collectivité.

Mme Bacon: Quand vous parlez d'augmentation de 20 % ou de 25 % des tarifs, est-ce que vous croyez que la société québécoise, dans son ensemble, est prête à payer plus cher sa facture d'électricité pour favoriser l'efficacité énergétique au-dessus du coût marginal?

M. Waaub: Oui, tout à fait, dans la mesure où sa facture totale n'augmente pas, c'est-à-dire que, comme on l'a très bien prouvé, il y a moyen de faire une saine gestion de la demande en énergie et, par les mesures

d'efficacité d'énergie, pour payer le vrai coût de l'électricité mais en diminuant la consommation, ça fait que la facture totale du consommateur, elle, ne change pas.

Mme Bacon: mais... en tout cas, ça ne me semble pas simultané, là. je pense que, quand vous parlez d!augmentation de 20 %, 25 %... vous nous disiez tantôt, au cours de la lecture de votre mémoire: ii faut garder la hausse tarifaire au coût de l'inflation, 1,8 %, si ma mémoire est fidèle. comment conciliez-vous ça en parlant d'augmentation de 20 % à 25 % de la facture? c'est loin de 1,8 %, ça. (11 h 30)

M. Waaub: Oui. Il faut se résigner, aussi, à la... Il faut voir comment on voit le plan de développement. Quand Hydro-Québec arrive ici avec son plan de développement, nous autres, on joue sur plusieurs plans. On joue sur l'avenir, le long terme, et on a des propositions de long terme. Ça, c'est une proposition de long terme à atteindre, O.K.? En attendant, tout le monde sait bien que le plan d'Hydro-Québec va être à approuver et que, comme chaque année, le jeu des offres et des contre-offres pour les augmentations d'électricité va se jouer et que, tout compte fait, on aura une augmentation comme chaque année. Alors, pour cette augmentation-là de cette année-ci, ma recommandation, c'est de dire: Ne dépassez pas le 1,8 %, ce serait déjà ambitionner sur le programme.

Mme Bacon: Mais ils n'ont pas eu l'augmentation qu'ils avaient demandée l'an dernier.

M. Waaub: Non. Est-ce qu'il y a des raisons? Nous autres, on est en faveur, notamment, qu'il y ait une régie de l'électricité qui contrôle les dépenses. Il y a un certain nombre de dépenses, par exemple, qu'Hydro-Québec fait et qu'elle rejette dans les augmentations de tarifs et je pense qu'une régie n'accepterait pas tous les postes budgétaires qu'Hydro-Québec présente pour ses augmentations tarifaires, dans ses dépenses globales.

Mme Bacon: Vous avez dit tantôt que le gouvernement ne faisait pas suffisamment pour l'efficacité énergétique. Vous avez sûrement pris connaissance de la stratégie gouvernementale en efficacité énergétique.

M. Waaub: Oui.

Mme Bacon: Qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire concernant l'efficacité énergétique que vous blâmez, en fait, que le gouvernement ne fait pas?

M. Waaub: O.K. J'étais là lors de votre présentation, à l'hôtel Sheraton de Laval, il y a quelque temps, lors de la présentation...

Mme Bacon: Quand vous en avez discuté.

M. Waaub: ...et on en a discuté justement, mais je peux revenir un petit peu là-dessus, je trouve ça intéressant. Bon! La question qui est importante, c'est justement que le rôle du gouvernement, dans la politique d'efficacité énergétique, annonce en partant qu'en ce qui concerne le domaine de l'électricité il fait entièrement confiance à Hydro-Québec. Or, en ce point, nous autres, on trouve que le gouvernement manque à sa mission de protéger l'intérêt de l'ensemble de la société.

Justement, il existe un certain nombre de mesures d'efficacité énergétique dont on sait qu'elles sont rentables de façon sociale, mais qui ne sont pas rentables au niveau de l'entreprise immédiatement, tout de suite, mais, au niveau de la rentabilité sociale, si on regarde l'ensemble des coûts pour toute la société, le gouvernement aurait avantage notamment à subventionner certains équipements, certains moteurs ou des choses comme ça, par rapport à l'industrie, par rapport au consommateur privé. L'expérience, notamment, d'autres pays comme la Hollande, etc., montre très bien que les politiques, par exemple... Un des freins à l'efficacité énergétique, c'est que les consommateurs veulent retrouver leur argent dans les trois ans. O.K.? Pour une simple question de pain et de beurre, tout simplement.

Mais, à long terme — et le gouvernement est là pour ça, garantir l'intérêt de l'ensemble de la société dans une optique à long terme, pas juste dans une optique d'un mandat — il est question d'améliorer cette politique-là. Notamment, par exemple, moi, je suis un peu surpris qu'on ait, à travers toute la province, des programmes de rénovation de logements. Alors qu'on sait que les mesures de rénovation de logements améliorent beaucoup l'enveloppe thermique et que c'est un des gains importants, eh bien, il n'existe pas de réglementation qui oblige les gens qui rénovent leur maison, par exemple, ou les logements à obtenir un certain standard de qualité. Il y a des petites choses...

Mme Bacon: II y a le Code du bâtiment.

M. Waaub: ...mais c'est déjà dépassé. C'est déjà dépassé. On pourrait exiger bien mieux, sauf qu'il y a un «trade off», il y a des compromis qui se font continuellement, et le compromis est le suivant. On peut toujours isoler à 100 % une maison, mais, en même temps, les dépenses en investissement que ça demande font que le coût des travaux devient prohibitif et qu'à ce moment-là les gens ne sont peut-être plus intéressés à investir. C'est là que le gouvernement doit jouer et trouver un équilibre harmonieux. D'un côté, les règlements obligent une certaine norme d'isolation, mais c'est largement en dessous du R-2000, par exemple. Alors, pourquoi exiger du R-2000 dans la construction neuve, qui est déjà lui-même dépassé puisqu'on a maintenant les fameuses maisons performantes qui ont des consommations énergétiques encore en deçà de R-2000 et, dans les rénovations de logements, c'est en dessous de R-2000 encore, l'efficacité?

Le Président (M. Audet): Merci. M. Waaub: Oui.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Bonjour. Ça me fait plaisir de vous saluer. Je veux vous féliciter pour la qualité de votre mémoire. Dans le fond, ce que vous nous amenez à faire, je pense, comme commission, et ce qui est tellement essentiel dans le débat qui concerne l'énergie, mais qui concerne aussi tout le débat environnemental, c'est, je dirais, à évaluer, à soulever des questions qui sont majeures pour notre avenir et qui exigent qu'on s'y penche maintenant parce que, si on ne le fait pas maintenant... Je comprends la ministre de dire: Dans le fond, il y a un coût énorme à rencontrer peut-être maintenant, si on veut faire ce virage-là, sauf qu'il va tellement être plus énorme, plus grand plus tard, que ça vaut peut-être la peine de commencer quelque part, au moins, aujourd'hui. Je pense que votre mémoire a le mérite de nous obliger à positionner ces questions.

Moi, je vais commencer par la fin de votre mémoire. Il y a beaucoup de questions plus techniques que je veux poser, mais je vais commencer par la fin parce que j'ai l'impression qu'on risque de toujours prendre l'ensemble de la problématique par le petit bout de la lorgnette si on ne fait pas un débat en profondeur. Et là, à la recommandation 14, ce que vous nous dites — c'est l'avant-dernière recommandation: II faut une commission indépendante. Il faut mettre sur pied une commission indépendante pour entendre et évaluer les propositions de toutes les options énergétiques au Québec. Et, à mon point de vue, évidemment, ça comprend, et j'imagine que ça le comprend aussi, qu'on évalue tous les impacts environnementaux de ces choix, dans chacun des cas.

Je vous dis pourquoi je commence par cela. C'est parce que le reste devient des propositions... Évidemment, il y a des propositions fort pertinentes, là, je ne dis pas qu'elles ne sont pas pertinentes, mais tant qu'on n'a pas, un peu, fait les bonnes évaluations, on risque aussi de faire des erreurs, même en croyant qu'on fait des bons choix, dans l'utilisation de certaines filières énergétiques, entre autres. Moi, je voudrais vous poser comme question: Quelles sont les conditions que vous croyez nécessaires pour qu'un tel débat soit efficace et utile? Et j'entends par là: Est-ce qu'il est nécessaire qu'il y ait des études préalables soit sur des expériences ailleurs, dans d'autres pays, soit sur des expériences sur le continent nord-américain, soit comme telle de la recherche un petit peu plus en profondeur, pour ne pas dire fondamentale, avant que ce débat n'ait lieu, ou si nous avons suffisamment de données maintenant pour engager ce débat, alors, les conditions sur les contenus et sur la forme que ça devrait prendre? Parce qu'une... Moi, je suis tout à fait favorable à cela. Mais, je veux dire, il faut cependant qu'on l'encadre de telle sorte qu'on en tire des leçons qui vont nous permettre d'agir en conséquence. Alors, j'aimerais un petit peu vous entendre là-dessus.

M. Waaub: Bon. Moi, je vous remercie de votre intervention. En ce qui concerne l'expertise concernant les conditions préliminaires à ce débat, je pense que, durant les consultations qu'Hydro-Québec a tenues — et on a pu voir qu'il y avait de nombreuses personnes qui se sont présentées — l'expertise est là et les méthodologies de travail sont là aussi, sont déjà expérimentées dans de nombreux autres pays. Hydro-Québec est déjà au courant de ces méthodologies puisque je sais qu'ils ont envoyé leurs experts apprendre tout ça et, donc... Et, comme Hydro-Québec a la meilleure expertise dans le domaine, à peu près, au Québec, donc, normalement, on est équipé au sein d'Hydro-Québec. Je pense que, au sein du ministère de l'Énergie et des Ressources aussi, les personnes sont très au courant de ces outils. Il reste que, selon moi, l'enjeu principal, c'est un enjeu de contrôle politique de l'hydroélectricité comme outil de développement du Québec. Et je m'exprime là-dessus.

Nous autres, on est en faveur d'une régie de l'électricité. À partir du moment où il y a une régie de l'électricité, on ne peut plus se servir d'Hydro-Québec comme on le fait depuis 20 ans comme levier de ceci et de cela, un peu partout. C'est fini. Ce serait mettre fin à ces politiques qui veulent qu'en injectant, dans des mégaprojets, des fonds publics en masse on essaie de relancer l'économie. De toute façon, ce sont des politiques complètement dépassées, mais on semble acculé à ça. On manque complètement d'imagination, selon moi, au niveau du développement économique où on pense qu'on va relancer l'économie à partir de ce genre de projet. (11 h 40)

Donc, selon moi, la régie aurait le grand avantage d'enlever du secteur politique les enjeux conflictuels concernant l'utilisation d'Hydro-Québec à des fins de développement économique, alors que sa mission première, c'est une mission de service public. Pour prendre un exemple, on va créer des emplois soi-disant en créant des mégaprojets, mais de quelle sorte d'emplois il s'agit? De quelle sorte de développement il s'agit? Il s'agit d'emplois temporaires. Ce sont les mêmes travailleurs de la construction qui ont déjà espéré beaucoup des premiers projets et qui, aujourd'hui, crient famine parce qu'ils n'ont pas de projet. Si certains syndicats, justement, continuent à être en faveur, dans l'arène politique, de ce genre de projet, c'est tout simplement parce qu'il n'y a rien d'autre qui leur est proposé et parce que le gouvernement fait incurie dans le domaine du développement économique. On a M. Tremblay qui dit qu'il veut développer des grappes industrielles, qu'il faut qu'on défragilise en faisant de l'industrie manufacturière et, en même temps, on investit seulement ou majoritairement dans des projets d'aluminerie, par exemple, alors qu'on sait très bien que les alumineries, on exporte l'aluminium et qu'en fait c'est une exportation carrément déguisée d'électricité directement, que ça ne crée pas de plus-value ou à peine, parce que la vraie plus-value serait dans l'industrie de transformation et que cette industrie de transformation est située près des marchés qui ne sont pas ici. Ça, c'est une des questions.

Donc, on voit que les enjeux sociopolitiques dominent l'arène alors que ça devrait être ressaisir le problème au niveau d'une régie qui contrôle la méthodologie, qui contrôle la façon d'investir et qui contrôle un tas de paramètres qui sont mentionnés dans notre mémoire et dans d'autres mémoires. Je pense que c'est vraiment...

Mme Marois: Là, je comprends bien le point de vue que vous défendez, mais ce que vous me dites, c'est: Voici ce que j'attendrais, moi, comme résultat, dans le fond, d'un débat qui aurait lieu sur la question de l'hydroélectricité et des autres formes d'énergie, parce qu'on ne parle pas seulement de celle-là, évidemment, si on fait un débat et je comprends ce point de vue là. Mais ce que j'aimerais que vous m'explicitiez ou me disiez, si vous y avez réfléchi, c'est: Quelle devrait être l'ampleur de ce débat-là? Combien de temps on devrait y consacrer? Est-ce que ça exigerait qu'on mette des moratoires pendant le débat, etc.?

M. Waaub: Moi, je pense que, justement, vous avez soulevé de bonnes questions. On est actuellement à une période où la croissance ne sera, de toute façon, pas grande à cause d'un contexte économique. Donc, on peut profiter, peut-être, d'une dizaine d'années pour examiner en profondeur et réorienter le développement économique, industriel et énergétique du Québec. Tout va ensemble. C'est un projet de société qu'il faut se définir. Je pense que, aussi bien pour les projets d'avenir, les partis politiques auront à se prononcer sur, justement, des projets de société. Je pense qu'on a un petit peu failli à la gestion quotidienne. On a oublié ce genre de projet.

Selon moi, le débat doit justement prendre en considération pas juste l'énergie, mais justement le projet de société que le Québec se donne. C'est vrai que ça paraît un peu contradictoire, on dit: On fait une politique d'énergie force motrice de développement économique, puis en même temps, la politique de développement économique, on voit bien qu'elle est en cul-de-sac par rapport à cette politique énergétique là, que ça ne nous amène nulle part. Par exemple, j'ai remarqué, notamment, que, quand Hydro-Québec fait son programme d'efficacité énergétique, son approvisionnement en mesures d'efficacité énergétique est quasiment à 95 % à l'extérieur du Québec. Alors, on dit: Oui, mais, au Québec, on n'a pas développé cette expertise-là. Mais qu'est-ce qu'on attend? Dans 10 ans, on va encore nous dire qu'on ne l'a pas développée, si on ne prend pas position aujourd'hui. Il faut bien commencer quelque part. Je pense qu'il est temps de prendre position.

D'ailleurs, Hydro-Québec, dans son plan de développement et à travers le résultat de la consultation, lance un certain nombre d'avertissements au gouvernement et aux députés, de dire: On attend un signal. On attend un signal sur la tarification. On attend un signal sur les vrais coûts de l'énergie. On attend un signal sur les méthodologies. On attend un signal sur une éventuelle régie de l'électricité. Ces enjeux-là sont discutés maintenant, depuis plusieurs années, et puis il y a une responsabilité politique à prendre. C'est évident que ce n'est pas à Hydro-Québec de prendre cette responsabilité-là d'elle-même. Alors, ça prend à peu près, donc, selon moi, 5 à 10 ans dans lesquels des débats vont se tenir.

Mme Marois: Je trouve ça intéressant parce que, entre autres, dans une des recommandations, par exemple, vous dites: On souhaite un moratoire sur les nouveaux contrats d'exportation, mais on sait qu'Hydro, par exemple, ne prévoit pas de nouveaux développements vers l'exportation avant quelque part l'an 2000, ce qui fait qu'on a le temps souhaitable et nécessaire pour évaluer un certain nombre d'impacts. Effectivement, si on produisait de l'énergie par l'hydroélectricité et que ça avait comme effet de réduire l'utilisation des énergies fossiles, par exemple, et qu'il y ait un lien direct, bien, je pense qu'on pourrait donner un aval à un certain nombre de projets qui iraient dans ce sens-là. Mais encore faut-il savoir s'il y a un lien de cause à effet.

Toute l'efficacité énergétique aussi... Quand on confie une tâche à Hydro-Québec sous cet angle-là, bien sûr que c'est important, mais je pense qu'il faut se tourner aussi vers les économies d'énergie qui sont liées à l'utilisation du transport en commun, à la réduction de l'étalement urbain. Ça, ce sont des phénomènes qui sont assez majeurs dans nos sociétés et qui ont un impact énorme quant à la consommation de différentes énergies, qu'elles soient fossiles ou autres, finalement.

M. Waaub: Exactement. La valorisation de l'habitat, par exemple. Tant qu'on valorise un mode d'habitat très consommateur d'énergie, on a beau isoler les maisons, d'une certaine façon, on utilise l'espace, on utilise de l'énergie. La même chose dans le transport. Il y a moyen de rationaliser la consommation d'énergie et d'énergie électrique aussi dans des secteurs qui relèvent d'une intervention planifiée et concertée de tous les ministères: les Affaires municipales, Industrie et Commerce, ministère de l'Énergie et des Ressources, les Forêts, etc., et de plus en plus, d'ailleurs.

Je suis un peu étonné. On parle de développement durable. La table sur l'économie et le développement qui s'occupait de développement durable, elle est lettre morte depuis quelques mois, maintenant. Qu'est-ce qui se passe au sein du gouvernement à ce sujet-là? Les enjeux devraient revenir, il me semble. On était les premiers au Québec à mettre le processus en branle et tous les autres ont fini et, nous autres, on n'a toujours rien à proposer.

Mme Marois: Oui. Vous avez raison, c'est inquiétant.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Vimont.

M. Fradet: Merci, M. le Président.

Ça me fait plaisir de vous rencontrer, pour ma

part, pour la première fois en commission parlementaire et de vous lire et de vous entendre sur l'énergie au québec. j'ai plusieurs questions à vous poser, mais je n'aurai malheureusement pas tout le temps que j'aurais voulu. vous critiquez assez sévèrement, depuis tout à l'heure, l'action gouvernementale et d'hydro-québec; vous voulez des moratoires à plusieurs endroits. vous avez parlé d'augmentation de tarifs de 20 % tout en contrôlant l'augmentation des coûts à la population au taux d'inflation, qui se situe, selon vous, à 1,8 %. moi, je pense qu'il faut, lorsqu'on fait une analyse, la faire très précisément. aussi, lorsqu'on propose à des parlementaires... vous mentionnez, entre autres, dans une recommandation, qu'il faut donner la même chance à tous les producteurs d'énergie et à tous les groupes de s'exprimer. je pense que c'est ce qu'on fait depuis plusieurs semaines, ici, en commission, d'entendre, et c'est notre rôle.

Vous avez aussi mentionné qu'il était difficile pour le gouvernement de critiquer le programme énergétique d'Hydro-Québec. Je vous rappellerai que, l'an dernier, les parlementaires qui sont ici pour accorder et entendre Hydro-Québec sur l'augmentation de tarifs ont posé de sérieuses questions face à différents formats d'efficacité énergétique proposés par Hydro-Québec, entre autres sur la pomme de douche, sur les ampoules. Et c'est notre rôle, en tant que parlementaires. Je ne voudrais juste pas que vous pensiez que notre rôle n'est pas celui-là en créant une régie de l'électricité ou une commission indépendante. Nous sommes imputables à la population à tous les quatre ou au maximum cinq ans et, ne vous en faites pas, nous aurons à prendre des décisions politiques et nous les prendrons. Nous prendrons nos responsabilités lors des prochaines élections. Je ne voudrais pas que votre pensée s'en aille comme d'autres groupes nous l'ont mentionné, qu'on voulait former une régie ou une commission indépendante de l'énergie parce qu'on nous trouvait incompétents ou peut-être non disponibles à faire ce travail.

J'aurais une question à vous poser, entre autres, sur les mégaprojets que vous critiquez sévèrement. Je pense qu'il faut vraiment, aussi, regarder, comme vous le dites, l'ensemble des impacts sociaux et environnementaux lorsqu'on fait un projet. Premièrement, il n'y aura pas de mégaprojet s'il n'y a pas une demande supplémentaire en électricité. Ça, c'est clair dans ma tête. On ne crée pas ou on ne construit pas des mégaprojets pour créer de l'emploi simplement, mais il faut qu'il y ait une demande supplémentaire en électricité. Je ne voudrais pas qu'il y ait d'ambiguïté là-dessus. En tout cas, en ce qui me concerne, en tant que député... puis ne vous en faites pas, je serai capable de faire mes recommandations à la ministre de l'Énergie, qui siège à côté de moi. est-ce que vous êtes d'accord avec le fait qu'il y aura une augmentation de la demande d'électricité de 2,2 % sur les 10 prochaines années?

M. Waaub: Non, je ne suis pas d'accord avec cette...

M. Fradet: Vous n'êtes pas d'accord avec ça. M. Waaub: Je pense que la demande sera celle...

M. Fradet: Vous pensez qu'avec la cogénéra-tion...

M. Waaub: Excusez-moi.

M. Fradet: Oui.

(11 h 50)

M. Waaub: la demande sera ce qu'on la laissera être. si on la laisse être 3 %, elle va être 3 %. mais on peut même la restreindre à moins de 0 % et on peut même capitaliser sur les projets qu'on a pour faire du développement, en faisant de l'économie d'énergie. d'ailleurs, hydro-québec a même invité elle-même le fameux expert amory lovins, du centre de recherches du colorado, à être un peu un témoin expert, et il a mentionné qu'on peut réduire jusqu'à 30 % la consommation d'électricité au québec, mais, dans un horizon donné, évidemment, avec des mesures de soutien du gouvernement, avec tout ça, avec un programme qui vise ça.

Moi, je ne suis pas dans la philosophie du libre marché où on laisse tout aller et on prétend que c'est ça, la meilleure façon de satisfaire les besoins. Je pense qu'il y a un besoin d'avoir une planification là-dessus. Alors, je m'excuse, je vous laisse continuer.

M. Fradet: Mais, malheureusement, on ne me laissera pas continuer. J'aurais bien aimé.

M. Waaub: Ah!

Le Président (M. Audet): Son enveloppe de temps est malheureusement terminée.

Mme la députée de Taillon, vous avez cinq minutes.

Mme Marois: C'est bref. Je vous remercie encore une fois, M. le Président.

J'écoutais le député nous dire de ne pas s'inquiéter, qu'on prenait nos responsabilités et qu'on rendrait des comptes devant Félectorat, évidemment, et qu'on serait jugé par l'électorat au moment de l'élection. Mais, moi, je pense que c'est inquiétant parce que je ne pense pas qu'on ait... Je pense qu'on doit, évidemment, assumer nos responsabilités, mais ce qui est inquiétant, c'est que justement, dans le cadre de ce que l'on discutait tout à l'heure, cette table sur l'environnement et le développement durable, en fait, ne s'est réunie que deux fois depuis sa création. Alors, il y a sûrement un manque de volonté quelque part en ce qui a trait aux questions environnementales.

On parlait des grands projets industriels. Là, je vais revenir sur une des recommandations que vous faites et qui va dans le sens, justement, de cette absence de volonté. Moi, force m'est de constater ça, quand je vois les lois qui s'adoptent et la façon dont on ne les

applique pas. Vous dites, entre autres, à la recommandation 4: «Les grands projets industriels doivent aussi faire l'objet d'évaluations environnementales.» C'est intéressant parce que vous êtes revenu à la question des entreprises de réutilisation et de recyclage qui devraient peut-être, elles, être avantagées dans certaines circonstances si on peut évaluer qu'il y a un impact significatif sur l'environnement et sur la réduction de l'utilisation de nos ressources, dans un premier temps, pour prendre celles qui sont déjà là sous forme de déchets, dans le fond, et les remettre en service, si on veut.

Ce qui est un peu inquiétant — et j'aimerais avoir un petit peu votre point de vue sur ça... Parce que, en décembre dernier, on a adopté une loi qui est la loi 61. Enfin, on s'est opposé à cette adoption-là parce que, d'abord, un, on trouvait que c'était très cavalier, la façon qu'on l'a faite, sans aucun respect pour les gens, les membres de l'Assemblée nationale, mais, en plus de ça, il y a des trous, à notre point de vue, quant au risque de voir s'échapper des projets industriels de l'évaluation environnementale souhaitable et nécessaire. Je sais que vous avez sûrement pris part au débat. J'aimerais entendre votre point de vue sur cette question-là...

M. Waaub: C'est certain que...

Mme Marois: ...puisque vous le demandez carrément ici, d'une façon claire et sans réserve.

M. Waaub: ...les lois concernant l'évaluation environnementale se sont considérablement affaiblies avec le processus qui a été mis en route. Dorénavant, je pense qu'on a redonné du pouvoir politique, justement, alors qu'on avait, avant, un pouvoir plus technocratique. Est-ce que c'est bien? Est-ce que c'est mauvais? Nous autres, on pense que c'est mauvais parce qu'il faut faire confiance un peu à nos experts du ministère de l'Environnement qui avaient... Ce n'est pas pour rien qu'il y a des lois et ce n'est pas pour rien qu'on avait des mesures à mettre en place. Les enjeux environnementaux vont continuer d'exister dans l'avenir. Justement, dans le cadre du développement durable, c'est un peu désolant de voir que le gouvernement lâche du lest et profite d'une période économiquement difficile pour justement... et qui crée forcément un climat social en faveur de ce genre de mesure là, pour la croissance à tout prix, alors que, justement, on devra en payer les conséquences après pendant très longtemps. ne regardons, par exemple, que les questions de développement durable dans les secteurs de l'aluminium et des pâtes et papiers. dans le secteur des pâtes et papiers, si on veut, comme on dit, recycler 50 % de la fibre, c'est technologiquement possible d'avoir 50 % de pâtes recyclées. ça, ça veut dire — c'est un marché nord-américain — que le marché québécois ne suffit pas, que, de toute façon, les moulins québécois vont produire la moitié de ce qu'ils produisent actuellement en fibres de première qualité et, donc, que les consommations d'énergie vont diminuer.

La même chose dans le secteur de l'aluminium. Le recyclage dans le secteur de l'aluminium, ce n'est pas gratuit. Ce n'est pas pour rien que même l'Alcan pense à, par exemple, des politiques de recyclage accru. C'est rentable pour eux. Ça coûte cher, de la bauxite, la faire venir de la Jamaïque, etc. Moi, j'ai calculé personnellement qu'une politique de recyclage nord-américaine de l'aluminium entraînerait une absence de croissance dans l'industrie de l'aluminium, contrairement à ce qu'on prévoit, là, et puis même une légère décroissance et que ça entraînerait, par exemple, toutes ces mesures-là, autour de 4000 MW en moins à installer. Ce n'est pas rien, ça. C'est des mesures qui demanderaient peut-être de s'en informer, surtout que c'est des choses qui viennent de soi puisque les entreprises, même, de recyclage, etc., c'est des entreprises qui veulent faire de l'argent et qui arrivent sur le marché de toute façon. Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas ici, elles vont s'imposer. Le cas des pâtes et papiers est flagrant puisque, là, on se fait imposer le marché américain.

Le Président (M. Audet): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

J'aimerais revenir sur un de vos propos de tout à l'heure à une question de Mme la ministre. Lorsqu'on parlait de tarification et d'augmentation de coûts d'électricité, on parlait d'efficacité globale, vous êtes revenu en réponse avec l'établissement d'une régie, puis vous avez continué votre réponse en disant qu'une régie permettrait de regarder plusieurs postes budgétaires, et là vous avez semblé hésiter. J'aimerais savoir, en laissant entendre qu'il y aurait peut-être bien des choses qui ne seraient pas autorisées au niveau des postes budgétaires d'Hydro-Québec, qu'est-ce que vous aviez à l'idée, à ce moment-là.

M. Waaub: Par exemple, personnellement, comme consommateur québécois, j'ai été choqué de la campagne de publicité d'Hydro-Québec en faveur de Grande-Baleine qui a coûté 6 000 000 $ et dans laquelle on nous faisait accroire que la famille Grégoire comprenait pourquoi on avait besoin de Grande-Baleine, etc. Ça, c'est 6 000 000 $. Selon moi, il y a tout un système qui fait qu'Hydro-Québec peut financer son propre marketing public de promotion de projets, de mégaprojets avec des fonds publics. C'est normal qu'ils essaient de faire leur marketing. Ça, je comprends ça. Mais qu'après ils nous refilent la note comme consommateurs... Qu'ils fassent ça à même la marge de profit qu'ils sont obligés de donner au gouvernement ou de dividendes à leurs actionnaires, pas dans les choses qui sont répercutées après sur des tarifs.

Il y a ça, mais il y a d'autres choses. Là, je ne suis pas un expert des postes budgétaires d'Hydro-Québec, mais je sais qu'il y en a plusieurs, que divers intervenants ont déjà suggéré qu'une régie pourrait justement

décider des choses qui seraient importantes.

M. St-Roch: Deuxième question. À votre recommandation 5, lorsque vous parlez du potentiel de réutilisation et de recyclage de chaque industrie, je souscris à ça. Je pense que vous misez juste. Mais ne croyez-vous pas qu'il va falloir un jour aller plus loin que ça? Si on veut réellement parler de développement durable... Et je vais prendre un exemple: toute l'industrie de l'emballage. Ça va être à partir de la conception d'un produit qu'il va falloir prévoir la réutilisation et les méthodes de recyclage qu'on va faire. À l'heure actuelle, il y a de grands secteurs au niveau du recyclage dont on ne sait pas quoi faire présentement avec la matière première. On a juste à regarder toute la récupération du plastique.

On commence un peu à voir poindre certaines utilisations. Ne pensez-vous pas qu'au niveau philosophique global une politique gouvernementale devrait inclure la planification du recyclage? À partir d'une automobile, on commence déjà à voir certains grands fabricants d'automobiles qui commencent à planifier certaines réutilisations, une certaine industrie de recyclage pour minimiser les coûts et, aussi, dans un contexte global. Ça, ça devrait être la première chose qu'il faudrait regarder si on veut réellement parler efficacité énergétique à long terme, si on veut parler de politique globale, de protection de l'environnement. Il va falloir un jour commencer par cette technique-là, cette approche-là globale.

M. Waaub: Je suis tout à fait d'accord avec vous dans la mesure où justement le gouvernement va s'engager, dans l'avenir, à aller de l'avant avec le développement durable. Je pense que ce dont il s'agit, c'est d'une révision en profondeur de la façon dont on produit et de la façon dont on consomme dans l'ensemble de la société. Ça, ça bouleverse complètement le genre de prévision de croissance de la demande qu'Hydro-Québec a tendance à faire, ou on fait des courbes tendancielles.

À partir du moment où on investit dans ce genre de changement de société, on investit dans des changements d'attitude et de comportement qui modifient complètement les patterns de consommation et les patterns de production. Et ça, ça s'en vient, et ça s'en vient de toute façon, d'ailleurs, parce que, comme HydroQuébec le mentionnait elle-même, ils sont surpris de la vitesse à laquelle les gens embarquent dans les programmes d'efficacité énergétique. Le public, il donne le signal qu'il est prêt depuis quelques années déjà. Maintenant, il faut qu'on lui donne les moyens de réaliser ses aspirations.

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, au nom des membres de la commission, madame, monsieur, je vous remercie de votre présentation.

Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 16 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 16 h 3)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît. La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux.

Je vous rappelle brièvement le mandat de la commission, qui est de procéder à une consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec.

Alors, il y a des changements au niveau des membres de la commission. M. le secrétaire, si vous voulez en faire part, s'il vous plaît.

Le Secrétaire: Oui. M. Gobé (LaFontaine) devient membre de la commission, ainsi que M. Forget (Prévost); M. Fradet (Vimont) va remplacer M. Borde-leau (Acadie).

Le Président (M. Audet): C'est parce que, ce matin, M. Fradet (Vimont) a été annoncé comme remplaçant de M. Parent (Sauvé). Maintenant, M. Parent (Sauvé) n'étant plus membre, suite à l'avis qui a été donné par le whip en Chambre tantôt, c'est M. Forget qui devient membre de la commission. Alors, étant donné que M. Forget doit s'amener sous peu, M. Fradet ne peut le remplacer. Alors, il y a eu un changement à ce niveau-là. M. Fradet remplacera, à ce moment-là, M. Bordeleau (Acadie).

Est-ce qu'il y a consentement là-dessus?

M. Chevrette: Consentement. Nous autres, on ne refuse pas les lumières.

Le Président (M. Audet): Alors, bravo, merci. Alors, nous recevons cet après-midi le Parti vert, ainsi que l'Association d'huile à chauffage du Québec inc. et l'Association des distributeurs indépendants de produits pétroliers. Alors, puisque les gens du Parti vert sont déjà installés à la table, messieurs, au nom des membres de la commission, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue et je vous rappelle brièvement le déroulement de nos travaux. Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous faire part de votre exposé. Ensuite, suivra une période d'échanges qui durera approximativement une quarantaine de minutes. Avant de procéder à votre exposé, je vous inviterais, aux fins du Journal des débats, à vous identifier, s'il vous plaît. Vous avez la parole, vous pouvez y aller.

parti vert du québec

M. Ouimet (Jean): Alors, mon nom est Jean Ouimet, je suis le chef du Parti vert du Québec, et Jean-François Labadie m'accompagne aujourd'hui. Alors, la présentation que je vais vous faire, c'est un peu, là..-. On a déposé tantôt la version finale. On va essayer de vous résumer ça. Les principaux arguments, ce sont les mêmes que dans la version préliminaire, alors il n'y aura pas de changements pour vous surprendre. Simplement pour vous rappeler que le Parti vert du Québec,

nous, le projet politique qu'on s'est donné, comme parti politique, c'est justement de participer à la réalisation d'un développement viable au Québec. Le développement durable, c'est une expression plus populaire. Nous, on a retenu le développement viable. Aux dernières élections, le Parti vert a quand même eu un appui significatif d'une partie de la population, et on veut donc continuer à véhiculer cette vision-là du développement viable au Québec. alors, pour nous, un développement viable, ça commande une réduction pour les pays du nord de notre consommation d'énergie, pour faire en sorte que les pays du sud puissent, eux autres, plus consommer d'énergie, et ça, ça fait suite au rapport brundtland, qui recommandait que les pays industrialisés en général envisagent une réduction de leur consommation d'énergie de 50 % d'ici 30 ans pour que les pays du sud puissent consommer, eux, de l'énergie, pour se développer. c'est là qu'il va falloir qu'il y ait un échange entre le nord et le sud et c'est dans cette perspective-là, nous, qu'on regarde le scénario que nous propose hydro-québec, avec lequel on a certaines réticences. il y a un pays comme la suède qui a décidé de relever le défi du développement viable et qui a, justement, étudié des scénarios pour prévoir des réductions de la croissance de la demande et faire en sorte, donc, de pouvoir relever ce défi-là, qui nous est présenté dans le rapport brundtland. malheureusement, ce n'est pas ça qu'on observe ici, au québec. si on regarde le plan de développement d'hydro-québec, lui, il nous propose une augmentation de 38 % d'ici 2005. ce qu'il y a d'intéressant, c'est d'observer ce qui nous était proposé dans le plan de développement de 1991, où on nous proposait trois scénarios de croissance annuelle, au niveau des ventes d'électricité, qui fluctuaient entre 1,2 %, 2 % pour le scénario moyen et 2,6 % pour le scénario fort. deux ans plus tard, après deux ans de récession, où les perspectives économiques sont encore plutôt douteuses — même si on sait qu'il y a une reprise, il n'y aura pas une grosse envolée en termes de consommation d'énergie tout d'un coup — hydro-québec nous propose, dans son plan de développement, une proposition où là le scénario faible, moyen et fort est majoré. de 1,1 % on passe à 1,4 %. le scénario de référence moyen, on l'amène à 2,2 % et le scénario fort, on parle de 2,8 %.

Pour nous, c'est quelque chose qui est tout à fait inacceptable dans le contexte de conjoncture actuelle, d'autant plus qu'il y a beaucoup de pays et des États aux États-Unis qui envisagent des croissances tournant alentour de 1,6 % au niveau de la demande d'électricité. Alors, je pense que, dans ce sens-là, nous, on questionne le scénario moyen qui est retenu par Hydro-Québec et, selon nous, au Parti vert du Québec, ce serait beaucoup plus réaliste d'envisager un scénario qui tournerait plus près du scénario faible.

On a retenu le chiffre de 1,4 % de la croissance parce que c'était plus facile de prendre des chiffres d'Hydro-Québec. On n'a pas les ressources pour pou- voir faire un scénario qui serait plus près de 1,6 %, mais, pour nous, donc, on a retenu l'idée de 1,4 % pour regarder, avec ce scénario-là de la croissance de la demande, ce qu'on a besoin comme nouveaux barrages hydroélectriques au québec, entre autres. c'est là qu'on trouve des choses intéressantes.

Alors, nous, on croit qu'il est possible de limiter notre augmentation des besoins globaux à 26 % d'ici 2010 en retenant, justement, le scénario faible. Alors, si on retient le scénario faible, on aurait, en 2010, une consommation de 170 TWh. Si on rajoute les livraisons de 6 TWh, les ventes à l'exportation, en les maintenant au même niveau, les pertes d'électricité, le développement industriel sans signer de nouveaux contrats pour les alumineries, en ne signant pas non plus de nouveaux contrats à l'exportation, on arrive à des besoins globaux d'énergie de 211 TWh.

Alors, maintenant comment peut-on répondre à cette demande-là, à ces besoins-là d'énergie au Québec? Alors, pour nous, pour répondre à ces besoins-là, il faut envisager quatre moyens. On va parler d'efficacité énergétique, de la gestion de la demande, de la politique économique moins énergivore et des sources d'énergie douce. Alors, si on regarde juste le scénario au niveau de l'efficacité énergétique, on retient la conservation de l'énergie et l'efficacité.

Alors, au niveau de la conservation, il y a tout un ensemble de moyens qui peuvent être mis de l'avant pour permettre de réduire notre consommation, justement, d'énergie en la conservant plus et avec efficacité. Dans les pays de l'OCDE comme dans beaucoup de secteurs, on évalue le potentiel d'efficacité énergétique comme étant substantiel. (16 h 10)

Au niveau de la gestion de la demande, si on pensait à l'étalement des heures de travail, l'intensification de la production énergivore durant la nuit et tarifer la consommation selon le niveau et selon l'heure de consommation, ça pourrait être des façons de mieux pouvoir gérer la demande et de réduire le besoin d'avoir une grande puissance aux heures de pointe, justement. Évidemment, des politiques économiques qui viseraient plus à développer des secteurs comme celui de l'information, des biotechnologies, des transports collectifs, feraient en sorte qu'on pourrait réduire notre consommation d'énergie globale. Développer des secteurs de gestion des déchets, entre autres. On sait que la gestion des déchets nous permettrait d'avoir un bilan énergétique plus favorable, et aussi des sources d'énergie douce. Alors, de ce côté-là, aussi, au niveau des biomasses, l'énergie éolienne, géothermique, on pourrait penser au niveau hydraulique et solaire. si on regarde une étude qui a été faite aux états-unis par le world watch institute, eux, ils évaluent qu'on pourrait arriver, dans 10, 20 ans, aux états-unis, à une diversité de sources d'énergie qui est intéressante. donc, on parle de 30 % d'énergie solaire, 20 % d'énergie hydroélectrique. on sait que, au québec, on a un plus grand potentiel, mais on peut voir que même ils ont diversifié, ils n'ont pas mis leurs oeufs dans le même

panier. Alors, on dit, au Québec, ça serait important, donc, de s'ouvrir plus du côté des énergies douces.

Alors, quel est l'objectif qu'a retenu Hydro-Québec en termes d'économie d'énergie? C'est le premier point, puis je pense que c'est celui sur lequel on veut plus s'attarder aujourd'hui. Hydro-Québec, en 1990, ils nous disaient qu'on pouvait avoir un objectif de 12,9 TWh. Pour le plan de développement 1993, on parle de 9,3 TWh. Alors, il y a une réduction de l'objectif. C'est drôle, à Hydro-Québec, on a l'impression que, depuis qu'il y a une nouvelle vice-présidence à l'efficacité énergétique, on investit plus dans l'économie d'énergie, mais on est moins efficace de ce côté-là.

Alors, selon des experts qu'on a consultés, on pourrait se donner un objectif, en 2010, de 20 TWh, soit 30 % du potentiel technico-économique de 31,7 TWh. Et on pourrait aussi, avec une gestion de la demande, comme je le mentionnais tantôt, limiter la nécessité d'avoir une grande puissance pour les heures de pointe. On pourrait aussi penser aux énergies douces comme l'éolienne et le solaire pour être capable de pouvoir approvisionner le réseau, en même temps de pouvoir utiliser de l'hydrogène pour substituer le pétrole par de l'électricité. Alors, pour nous, les enjeux énergétiques exigeraient, pour qu'on puisse avoir un vrai débat là-dessus, savoir où on s'en va, qu'il y ait une commission indépendante sur l'énergie pour, justement, veiller à la réalisation des objectifs énergétiques qu'on pourrait se donner, au Québec, pour aller dans le sens d'un développement viable.

Alors, pour nous, donc, ce qu'on retient, c'est que, avec les moyens déjà en place, en rajoutant les parcs de centrale existants, les constructions de La Grande phase II, les améliorations du réseau, l'efficacité énergétique, en retenant un scénario de 20 TWh, on arrive à des moyens pour répondre aux besoins de 214 TWh, alors que, avec le scénario qu'on vous présentait, on en avait 211 TWh. Alors, je pense qu'on considère ça suffisamment important pour voir que, avec des scénarios faibles qui se rapprochent plus de la réalité, en termes de croissance économique et de besoins énergétiques versus les installations déjà en place qu'on a, qui sont de 211 TWh, ça vaut la peine de se questionner si on doit investir 25 000 000 000 $ pour construire de nouveaux barrages hydroélectriques sur des territoires qui sont, actuellement, en train d'être discutés au niveau de qui va gérer le territoire pour les autochtones. Et on considère ça inacceptable de se lancer là-dedans tête perdue, là, tête première, plutôt, pour investir 25 000 000 000$. On se dit plutôt: Allons-y vers l'économie d'énergie, retenons un scénario où on serait capable de pouvoir s'ajuster s'il y avait une demande plus grande, mais retardons encore plus longtemps la construction de nouveaux barrages hydroélectriques. Et il y a des sources douces d'énergie qui pourraient être aussi développées et qui permettraient de répondre encore mieux à la demande.

Alors, c'est dans ce sens-là, nous, qu'on considère que de simplement dire que ça prend de nouveaux barrages hydroélectriques, la démonstration n'est pas faite par Hydro-Québec comme quoi c'est ça qui doit nécessairement être envisagé. Selon nous, le scénario faible est suffisamment probable pour qu'on le considère sérieusement et que, peut-être, on envisage, le temps de régler des choses avec les autochtones sur la gestion de leur territoire, de penser à d'autres sources d'économie d'énergie, d'autres sources d'énergie douce comme l'éolienne et le solaire. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on voulait présenter notre mémoire, et ça résume à peu près notre position.

Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Alors, je voudrais vous remercier de votre contribution à la commission parlementaire. Je pense que vos commentaires vont recevoir toute l'attention qu'ils méritent dans le cadre de notre processus décisionnel dans lequel nous nous trouvons.

En ce qui a trait à l'efficacité énergétique, vous mentionnez que, selon certains experts, il est possible et souhaitable de réaliser des économies d'énergie. Vous nous disiez, dans votre dossier préliminaire, 15 TWh et vous mentionnez, aujourd'hui, 20 TWh en l'an 2000. À quelle forme d'énergie faites-vous allusion? Et, compte tenu de la participation actuelle de la population au programme ECOKILO, à combien évaluez-vous le coût de mesures nécessaires pour arriver à ce résultat que vous nous mentionnez?

M. Ouimet: Malheureusement, on n'a pas les ressources nécessaires pour faire de telles analyses, au Parti vert du Québec. Ce qu'on a retenu, c'était que 15 TWh, je crois que c'était pour 2000, je pense, et 20 TWh, c'était pour 2010.

Mme Bacon: Ah bon!

M. Ouimet: C'est pour ça. C'était deux dates différentes.

Mme Bacon: C'est ça.

M. Ouimet: Alors, pour nous, c'était des objectifs que des experts disaient qu'on pouvait réaliser. Lorsqu'on regarde des évaluations qui ont été faites au niveau de l'OCDE sur des potentiels d'économie d'énergie sur ce qui a été mis en place, entre autres au Japon, comme mesures, on se rend compte qu'ils ont été capables d'augmenter de façon remarquable leur efficacité énergétique dans plusieurs secteurs. Je pense que c'est avec des expériences dans d'autres pays qu'on voit que le potentiel a été beaucoup plus développé qu'ici, au Québec. Et c'est sur cette base-là que les experts nous disent qu'au Québec, étant donné notre contexte, on pourrait viser plus haut et donc atteindre près de 60 % du 31 TWh techniquement possible.

Mme Bacon: Dans la proposition du plan de

développement, Hydro-Québec nous propose de favoriser l'efficacité énergétique jusqu'à concurrence du coût marginal des nouveaux équipements de production et des nouveaux équipements de transport. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Est-ce que vous ne croyez pas que la société québécoise, dans son ensemble, qu'elle soit prête à payer plus cher sa facture énergétique en favorisant l'efficacité énergétique au-dessus du coût marginal?

M. Ouimet: Je pense que, si on met en place des bonnes mesures, on pourrait faire en sorte que le coût du kilowattheure pourrait augmenter, mais que la facture, elle, pourrait ne pas augmenter. Si on met en place de bonnes technologies d'efficacité énergétique au niveau des foyers, entre autres, on sait qu'on est capable de réduire la consommation d'énergie de façon importante au niveau des foyers.

Justement, j'ai des données là-dessus. On peut regarder, par rapport à certains pays, au niveau de toutes les différentes installations qu'on retrouve dans un foyer. On peut voir l'exemple des États-Unis et de la Suède, lorsqu'on compare ça avec des équipements performants au niveau énergétique, ce que ça donne comme comparaison. Alors, on compare ici le chauffage, la climatisation, l'eau chaude, les réfrigérateurs, les congélateurs, cuisinières, éclairage et autres, et on peut voir qu'aux États-Unis ou en Suède on parle de 1500 à 1200 unités — malheureusement, les unités, j'ai oublié de les mettre là-dessus — versus, avec des appareils performants, de 328 à 260. Alors, c'est quand même à peu près le cinquième, avec des appareils performants, qu'on réussit à réduire, la consommation d'énergie au foyer. Alors, pour nous, d'augmenter le prix du kilowattheure, tout en donnant des technologies qui permettent de réduire la consommation d'énergie, c'est intéressant.

Je me souviens, lorsqu'on est passé la dernière fois, il y avait M. Lamarre qui était ici au nom de Lavalin et qui nous parlait d'une expérience qui avait eu lieu à Laval où on avait fait un essai sur un ensemble de maisons domiciliaires. On avait pu montrer qu'avec une technologie informatisée on pouvait réduire de 50 % la consommation d'énergie dans les foyers. Alors, pour nous, il serait justement possible de pouvoir augmenter, peut-être, le prix du kilowattheure, mais, avec une meilleure technologie, de maintenir la facture où elle est et de faire en sorte que les Québécois deviennent moins énergivores. C'est ça, l'objectif qui nous intéresse.

Mme Bacon: Mais le consommateur moyen va avoir à payer un prix assez élevé, quand même.

M. Ouimet: Pour nous, le consommateur moyen pourait faire en sorte de pouvoir maintenir sa facture où elle est là avec des technologies plus efficaces. C'est les gros consommateurs qui, selon nous, devraient être moins subventionnés. On est dans une société où plus on consomme, moins ça nous coûte cher, et, pour nous, c'est envoyer de mauvais signaux. Lorsqu'on regarde ce que ça coûte, les subventions qu'on accorde aux alumi-neries qui sont parmi les plus gros consommateurs au Québec, ça coûte très cher. Alors, on se dit: II faudrait faire en sorte que les gros consommateurs, eux aussi, utilisent leur imagination pour voir comment réduire leur consommation d'énergie.

Mme Bacon: Oui, mais,,, quand vous voyez les équipements achetés, par exemple, le consommateur à revenus moyens aura des sommes assez importantes à débourser.

M. Ouimet: Oui, il pourrait y avoir des investissements...

Mme Bacon: On ne parle pas de commerces, là, on parle de domestique. (16 h 20)

M. Ouimet: C'est sûr que les technologies qui permettraient d'être plus efficace nécessiteraient de faire des investissements, et, dans ce sens-là, il doit y avoir un engagement de la population à dire: Oui, on relève le défi de réduire notre consommation d'énergie. Et ça ne peut pas être simplement tiré par le gouvernement, ça doit émerger d'une volonté collective, d'une volonté où vraiment toute la population participe à ça. De là l'intérêt d'une commission indépendante sur l'énergie pour voir quel défi on relève collectivement par rapport à notre consommation d'énergie au Québec, comment on veut s'inscrire, dans le cadre du développement viable au niveau planétaire, à cette contribution-là pour réduire notre consommation d'énergie.

Alors, je pense que le gouvernement doit inspirer une démarche collective pour faire en sorte qu'on discute de nos choix de consommation pour que les gens s'engagent à les réduire, et, suite à ça — on le regarde au niveau juste de la collecte sélective — quand les gens veulent embarquer là-dedans, ils prennent les moyens nécessaires, ils font les efforts. Les gens veulent que ça change. Alors, c'est avec la population qu'on peut relever un défi comme ça.

Mme Bacon: Pour que les différentes formes d'énergie soient traitées sur un pied d'égalité relativement aux «externalités», qu'est-ce que vous nous suggérez? Est-ce qu'on devrait augmenter ou est-ce qu'on devrait diminuer les taxes sur le carburant?

M. Ouimet: On a déjà fait mention, à la commission parlementaire où on a parlé de fiscalité, d'une taxe sur le carbone. Pour nous, ce serait quelque chose d'important, d'avoir une taxe sur le carbone qui puisse servir justement à pouvoir peut-être investir dans de nouvelles sources d'énergie moins polluantes ou peut-être aussi même de faire un bilan entre la quantité de gaz carbonique qui est relâchée par la combustion du carbone versus la plantation d'arbres, trouver un genre d'équilibre entre les émissions de gaz carbonique et leur stabilisation à travers les arbres. Alors, il pourrait y avoir une taxe sur le carbone, sur l'énergie en générale,

mais qui devrait être en fonction du niveau de pollution de l'énergie puis de sa source. Alors, c'est sûr que, comme le pétrole, c'est celui qui nous intéresse le plus pour l'effet de serre, on a parlé d'une taxe sur le carbone, mais ça pourrait être appliqué aussi dans d'autres sections.

En fin de compte, pour nous, l'idée de la taxe, c'était d'avoir une taxe qui permette de refléter mieux les coûts sociaux et les coûts écologiques. Parce que c'est ça, le problème, c'est les fameuses «externalités» qui doivent être «internai isées» pour mieux faire des choix collectifs. Tant qu'on ne connaît pas les coûts réels, c'est souvent là qu'on est biaisé. On croit que, à court terme, ça nous coûte moins cher, mais, si on calculait, même à court terme, les coûts sociaux et les coûts écologiques, on ferait souvent des choix différents que ceux qu'on est amené à faire.

Mme Bacon: Si on augmente quand même le coût des équipements, si on fait des taxes, comme vous le proposez, notre industrie de ressources naturelles, vous n'avez pas peur qu'on la brise, cette industrie-là de ressources naturelles qu'on possède au Québec, qui est un atout important dans l'économie du Québec, qui est créatrice d'emplois?

M. Ouimet: Je crois qu'il faut maintenir ça, mais il faut peut-être s'assurer qu'elle respecte les seuils de renouvellement de la ressource dans plusieurs secteurs. Il ne faut pas quand même viser la surexploitation. Je pense qu'on a découvert, au niveau des pêcheries, qu'on a poussé un petit peu trop de ce côté-là, et il faudrait s'assurer que l'exploitation ne dépasse pas les seuils de renouvellement des différentes ressources. Dans ce cadre-là, il faudrait peut-être avoir des mesures un peu plus strictes pour s'assurer, entre autres, qu'on ne remplace pas une forêt diversifiée par une forêt de monoculture où on a juste des pins ou des sapins qui sont plantés, ou de l'épinette noire parce que ça pousse mieux dans certaines régions. On dit qu'il faudrait avoir, qu'il faudrait respecter la diversité de l'écosystème pour maintenir sa stabilité. Alors, dans ce sens-là, c'est une meilleure gestion de la ressource naturelle qui ferait en sorte qu'on arrêterait de la surexploiter.

Mme Bacon: Au sujet des filières éoliennes et des filières solaires, vous mentionnez que plusieurs États américains et des pays européens ont fait le choix d'utiliser ces nouvelles sources d'énergie. Elles ont fait la preuve de leur rentabilité économique. Est-ce que ce choix-là d'utiliser de nouvelles sources d'énergie pourrait se traduire par des projets de puissance substantielle?

M. Ouimet: Oui, bien, on peut référer, justement, à une étude qui a été faite sur le... Attendez. Parce qu'il y a une étude qui a été faite là-dessus, justement, qui est très intéressante.

(Consultation)

M. Ouimet: Bon, je vais y aller de mémoire. C'était l'Association canadienne d'énergie éolienne qui avait évalué le potentiel au Québec de l'ordre d'à peu près 11 TWh, si ma mémoire est fidèle, avec un ensemble de moulins à vent, si on veut, qui pourraient s'installer sur la Côte-Nord, en Gaspésie et également sur le sud de la côte de la Baie James, ce qui permettrait donc d'apporter une quantité d'énergie considérable, de créer des milliers d'emplois également et de faire en sorte de pouvoir approvisionner les secteurs plus éloignés avec des réseaux qui seraient plus autonomes en même temps.

C'est sûr que, pour un réseau hydroélectrique, ça pose des problèmes parce que ce n'est pas le même type de puissance, mais c'est quand même une source d'énergie qui, selon nous, vaut la peine d'être évaluée. Et on constate que le Québec est un des endroits en Amérique du Nord où le potentiel d'énergie éolienne est parmi les plus élevés, avec les grands vents qu'on a le long du fleuve Saint-Laurent et au niveau de la baie James. Je pense que ça vaudrait la peine de réaliser ce potentiel-là et de faire en sorte de le développer et de créer des emplois également en région. J'aurais eu des données plus techniques, mais, malheureusement, je ne les retrouve pas.

Mme Bacon: Ça va.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Bonjour, M. le Président.

Tout d'abord, j'ai quelques questions, en particulier avec les énergies... Moi aussi, je vais partir avec ce que Mme la ministre vous demandait sur les éoliennes. Hydro-Québec parle de 1000 MW en éoliennes. Est-ce que vous croyez que ce type d'énergie peut être utilisé exclusivement dans certaines régions du Québec, substituer, par exemple, l'hydroélectricité, dans certains milieux, exclusivement par des éoliennes?

M. Ouimet: Exclusivement, c'est peut-être un peu délicat, parce que c'est sûr qu'il y a quand même les aléas des vents. Ils ne soufflent pas toujours. Alors, il faut trouver une façon de pouvoir stocker, aussi, cette énergie-là. C'est un des problèmes des énergies douces comme le solaire aussi, c'est le stockage. Maintenant, on sait qu'il se développe des meilleurs moyens, avec des batteries, différents moyens de stocker l'énergie. L'hydrogène est justement une façon de pouvoir stocker l'énergie qui est en plus. On l'envisage au niveau de l'hydroélectricité, mais on pourrait aussi penser l'utiliser pour l'énergie solaire et éolienne pour emmagasiner cette énergie-là, à ce moment-là.

M. Chevrette: Les experts nous disent toujours, en tout cas ceux qu'on a rencontrés ou qu'on peut consulter, que c'est un type d'énergie accouplé avec un autre type d'énergie...

M. Ouimet: Oui, c'est ce qui est préférable, oui.

M. Chevrette: ...si on veut véritablement développer ce type d'énergie. D'autre part, moi, j'ai toujours une crainte que je voudrais vous exprimer. Qu'est-ce que vous diriez, vous, par exemple du Parti vert du Québec, si nous, du gouvernement, avec le Parlement, présentement, décidions d'installer une série de moulins à, vent aux Îles-de-la-Madeleine, parce qu'il vente en Jésus? Si on faisait des audiences publiques, qu'est-ce que vous viendriez dire si on avait un parc assez bien meublé, merci, d'instruments qui mènent beaucoup de bruit puis qui polluent visuellement les Îles-de-la-Madeleine?

M. Ouimet: C'est des points également à considérer...

M. Chevrette: Oui, mais...

M. Ouimet: ...la pollution visuelle, la pollution sonore. Il faut être capable de pouvoir pondérer tout ça, entre la nécessité de consommer du pétrole pour générer de l'énergie, générer de l'électricité ou bien utiliser ces sources-là. Alors, c'est un équilibre, puis il faudrait voir si c'est acceptable, une certaine quantité à certains endroits. Il faut voir avec la population. Pour nous, le solaire et l'énergie éolienne, ce n'est pas de dire: On met des panneaux partout puis on met des moulins à vent partout. Il faut être capable de voir, avec la population, ce qui est acceptable. La notion d'acceptabilité reste aussi pertinente pour des sources d'énergie douce qu'elle l'est pour d'autres sources d'énergie.

M. Chevrette: C'est parce que, aux États-Unis, on en a fait, des expériences, vous l'avez vous-même signalé. Les gens se plaignent du bruit, puis ils se plaignent de la pollution visuelle.

M. Ouimet: Oui.

M. Chevrette: Mais, moi, je voudrais bien qu'il y ait une certaine forme de cohérence, à un moment donné, dans... Parce qu'on est toujours «squeezes» dans le sens suivant. Les gens disent: Pourquoi n'allez-vous pas vers des énergies plus douces? On dit: Parfait, on embarque. On fait des audiences publiques, ça ne marche plus parce que, là, il y a la pollution visuelle. Ils se prononcent pour l'hydroélectricité, mais ils ne veulent pas qu'une ligne passe. Ils se prononcent pour le solaire, mais ils disent: Oui, mais où est-ce qu'on va installer ça? Où est-ce que le soleil est dominant? On se rend compte que, bien souvent, c'est dans des régions qui sont déjà très, très développées sur le plan résidentiel, par exemple, et industriel, puis qu'il n'y a pas de place pour...

M. Ouimet: Mais, ce qui est...

M. Chevrette: Moi, j'ai toujours tendance à être un petit peu offusqué du fait qu'on préconise des choses, puis les mêmes gens qui préconisent sont les gens qui viennent se battre tout de suite après pour nous dire que ça n'a pas de bon sens.

M. Ouimet: Bien, comme pour les éoliennes, je pense que où c'était envisagé, dans l'étude qui a été faite par l'Association canadienne d'énergie éolienne, c'était quand même dans des régions très peu peuplées. On parle de la Côte-Nord, ou entre Baie-Comeau et puis Sept-îles. Il n'y a pas grand monde dans ce coin-là.

M. Chevrette: Oui, mais prenez Rivière-du-Loup jusqu'à Gaspé. Il y en a du vent, là.

M. Ouimet: C'est ça. Puis il y a des endroits où ça ne dérangerait pas trop.

M. Chevrette: Imaginez-vous de quoi ça aurait l'air, des moulins à vent à partir de... Est-ce que ça serait bienvenu, sur le plan touristique, de voir des moulins à vent puis d'entendre ça? Tu sais, les gens de Gaspé diraient: Nous prenez-vous pour des malades?

M. Ouimet: Mais ce que je remarque, quand je vais à Cap-Chat, je peux vous dire que l'attraction qui est là-bas, le moulin à vent qui est là attire du monde.

M. Chevrette: II y en a un.

M. Ouimet: II y en a un.

M. Chevrette: Si vous en aviez à tous les 500 pieds, pensez-vous qu'ils nous parleraient de venir voir leurs 500 pylônes?

M. Ouimet: Non, c'est ça. Ce qu'il faudrait voir, avec la population locale, c'est ce qui serait acceptable, à quel endroit ils accepteraient d'avoir des moulins à vent et à quel endroit ils ne voudraient pas en avoir. Je pense qu'il faut vraiment discuter avec la population, voir où ça peut se mettre.

M. Chevrette: Oui, mais, M. Ouimet, c'est parce que je veux vous démontrer par mon questionnement qu'on pourrait bien rêver, par exemple, d'avoir 1000 MW en Gaspésie, mais la population juge qu'ils arrêtent à 300 MW. Donc, vous êtes loin de votre objectif global du 1000 MW, comprenez-vous? On peut avoir des objectifs bien précis, mais, si on compose avec les populations touchées, vous n'aurez pas le même résultat. Vos objectifs nationaux, vous ne pouvez pas les concilier avec le principe du respect des populations locales touchées. Moi, c'est ça que je veux...

Puis ce n'est pas à vous que je m'adresse, dans le fond, c'est un message que je veux apporter à certains groupes qui visent des objectifs nationaux puis qui disent: Bien, en même temps, respect des populations locales. Moi, j'en suis pour ça, mais, à un moment donné, il va falloir comprendre qu'il y a des objectifs

nationaux qui ne cadrent pas nécessairement avec les objectifs des populations touchées. (16 h 30)

M. Ouimet: Tout à fait.

M. Chevrette: Parce qu'on ne peut pas être à la fois pour les autochtones à tout prix et pour le barrage de Grande-Baleine sur l'autre bord, tu sais. À un moment donné, il ne faut pas parler des deux côtés de la bouche. Il y en a peu, au Québec, qui peuvent faire ça.

M. Ouimet: Ha, ha, ha! Pour nous, c'est pour ça que l'idée d'avoir un débat sur l'avenir énergétique du Québec, c'est essentiel pour savoir quel choix la population est prête à faire, quels sont les objectifs. Il faut composer avec la population, on en est bien conscient, et, nous, on dit: C'est un objectif à se donner, à réaliser peut-être dans 20, 30 ans. Quelle direction est-ce qu'on prend? Est-ce qu'on maintient notre direction de consommer de plus en plus d'énergie ou bien si on décide de réduire ça et on le réduira au rythme où la population est capable de l'accepter? Il faut qu'il y ait un débat là-dessus, sur l'avenir énergétique du Québec, c'est crucial.

M. Chevrette: Ça, je suis d'accord avec vous que... C'est par ce moyen-là, d'ailleurs, qu'on pourrait sensibiliser les groupes à une certaine forme de cohérence...

M. Ouimet: Tout à fait. Tout à fait.

M. Chevrette: ...également, et vous avez absolument raison. Vous vous surprenez, vous aussi, des objectifs d'Hydro-Québec en efficacité énergétique qui changent.

M. Ouimet: Tout à fait.

M. Chevrette: Moi aussi. Mais je ne sais pas s'il y a une erreur dans votre texte ou si les données qu'on a eues sont erronées, mais vous dites qu'ils ont changé de 1 TWh d'objectif de 1990-1993.

M. Ouimet: Oui. Sur un point, là, au niveau... Il faudrait que je retrouve...

M. Chevrette: C'est parce que les chiffres, moi... C'est que l'objectif pour 1995 était maintenu. C'était 5,6 TWh, ce que j'ai toujours trouvé assez optimiste, pour ne pas dire plus, parce que ce n'est pas le mot qui me vient dans la tête, mais je ne l'échappe pas. De 1990 à 1994, ils vont chercher 2,9 TWh d'économie d'énergie et, de 1994 à 1995, tout à coup, Hydro explose, devient forte sur le plan de l'efficacité énergétique. Là, ils passent à 5,6 TWh pareil, alors qu'on voit très bien, dans leur plan successif, effectivement, qu'ils ont diminué, se rendant compte qu'ils ne l'avaient pas atteint, je suppose. Je ne sais pas, là. Il doit y avoir quelque chose, parce que les chiffres diminuent. Est-ce que vous croyez qu'Hydro.... Vous n'avez pas participé à la consultation d'Hydro?

M. Ouimet: Non. Comme parti politique, on n'était pas invité à ces consultations-là.

M. Chevrette: Ah! ils ne vous ont pas invité, vous autres.

M. Ouimet: C'était juste les groupes écologistes qui étaient invités.

M. Chevrette: Ça aurait pu faire partie du financement des partis. Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Non, mais vous ne savez pas quel outil de contrôle utilise Hydro-Québec, sa façon de contrôler l'efficacité, ses programmes d'efficacité énergétique?

M. Ouimet: Non. Ça, je ne pourrais pas vous répondre. Disons que je ne suis pas le technicien, quand même, dans ce domaine-là. Malheureusement, il ne pouvait pas être avec moi aujourd'hui, alors je ne serais pas à même de vous répondre à cette question-là. J'essaie de trouver pour le térawattheure en moins, parce que c'était quand même très spécifique, sur un secteur.

M. Chevrette: Oui, c'est possible, mais c'est parce que, quand j'ai vu le chiffre, ça ne coïncidait pas, moi, avec...

M. Ouimet: C'était 1 TWh par rapport au potentiel d'économie d'énergie dans le secteur résidentiel. C'était dans ce secteur-là.

M. Chevrette: O.K.

M. Ouimet: C'est sûr qu'il peut y en avoir dans d'autres secteurs, mais, là, c'était pour ce secteur-là particulièrement.

M. Chevrette: À la page 2 de votre mémoire, en bas...

M. Ouimet: Oui.

M. Chevrette: ...vous payez toute une traite .'à Hydro, là, et vous dites qu'elle présente un scénario de croissance illimitée.

M. Ouimet: Oui.

M. Chevrette: Moi, je dois vous dire que c'est la première fois que je vois Hydro sans plan de croissance illimitée. Je ne sais pas si on fait la même lecture du plan de développement. Pour moi, c'est la première fois

qu'Hydro-Québec ne rêve pas trop en couleur, là. Et en page 3, là, il y a du carnage, la camisole de force, puis vous lui payez toute une traite. Ce sont des cannibales, je ne le sais pas trop, là.

M. Ouimet: Ha, ha, ha! Disons que, là, vous avez la version...

M. Chevrette: Moi, je vous avouerez que... C'est parce que je finis. Vous dites que ce sont des mégalomanes, à part de ça. Moi, je pense qu'ils ont provoqué une rareté. Vous avez peut-être raison pour un bout, mais vous en mettez plus que le client en demande. Ceci dit, je trouve qu'Hydro a été plus réaliste que le gouvernement. Rappelez-vous le rêve de M. Bourassa de 13 000 MW harnachés, qui a été diminué par Hydro à 3500 MW et qui est diminué même à 1000 MW d'ici 2005. Je trouve qu'Hydro, peut-être par la force des choses, sans leur donner le mérite... Vous ne trouvez pas qu'ils ont cessé d'être un petit peu «gargantuels»?

M. Ouimet: Disons que, quand je compare les courbes de croissance qu'on nous propose...

M. Chevrette: Gargantuesques.

M. Ouimet: Quand on regarde les courbes de croissance qu'on avait dans le scénario du plan de développement 1991 et celui qu'on a maintenant en 1993, on peut voir que le scénario moyen, là, c'est le scénario qui suit cette ligne-là, ici. C'est ça, le scénario que nous propose Hydro-Québec. C'est une croissance où on ne voit pas vraiment la fin versus ce que propose la Suède, où, là, vous allez voir qu'il y a des scénarios où il y a une baisse. La croissance illimitée, c'est celle-là, mais ils la rejettent. Ils retiennent des scénarios de réduction, et, là, ce n'est pas la même direction.

M. Chevrette: C'est accentué dans le sens qu'il n'y a jamais de...

M. Ouimet: La tendance se maintient.

M. Chevrette: ...stagnation qui arrive. O.K.

M. Ouimet: Avec Hydro-Québec, la tendance se maintient comme s'il n'y avait pas de limites. «The sky is the limit», à voir le graphique, là.

M. Chevrette: J'y reviendrai tantôt. M. Ouimet: D'accord.

Le Président (M. Audet): Mme la ministre de l'Énergie.

Mme Bacon: Je voudrais peut-être apporter une correction sur les 12,9 TWh en 1990 versus les 9,3 TWh à l'horizon 2000. On sait que les économies tendancielles sont celles qui se réalisent de toute façon, dû au développement technologique et au comportement des consommateurs. Ça, ça totalisait 3,9 TWh en 1990, et ils ne sont pas pris en compte dans les 9,3 TWh, mais c'est encore prévu, et, si vous l'ajoutez, vous êtes proche du 12,9 TWh. Alors, c'est des économies tendancielles qui sont de toute façon prévues.

M. Ouimet: Et qui se rajouteraient donc aux...

Mme Bacon: Ils ne sont pas comptabilisés quand on parle du 9...

M. Ouimet: O.K.

Mme Bacon: ...mais ça revient à la même chose. Vous arrivez à 12. Je voulais juste apporter cette correction-là.

M. Ouimet: D'accord.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Lemire: Moi, je voudrais revenir sur le potentiel énergétique éolien. À mon avis, on doit l'envisager, je pense, avec prudence, notamment pour les problèmes qu'on connaît au Québec, les problèmes de verglas. On a connu la noirceur au Québec, il n'y a pas si longtemps. Nos lignes de transport ont été brisées à cause de la tempête de verglas qu'on a connue dans le Nord. On a été chanceux, on n'a pas perdu les équipements, on a perdu seulement les lignes de transport. Moi, je voudrais savoir: Croyez-vous qu'il y a des menaces de risque que le verglas empêche l'éolienne de se développer au Québec? Est-ce qu'il y a un risque?

M. Ouimet: Bien, disons qu'il y a d'autres pays qui l'utilisent, comme au Danemark, et je pense que, le Danemark, ils ont des hivers comme ici. Ils sont sur le bord de la mer, et il doit y avoir des conditions climatiques, en termes de verglas et de précipitations de cette nature, qui doivent être semblables. Alors, j'imagine qu'ils ont dû trouver des solutions à ce genre de problème au Danemark et qui pourraient être la technologie qu'on pourrait utiliser ici, au Québec, également.

M. Lemire: II va falloir être très prudent.

J'aurais une autre question. Suite au questionnement que vous faites «Est-ce qu'Hydro-Québec ne chercherait pas à endormir la population québécoise — vous avez écrit ça — en lui faisant croire qu'elle s'occupe vraiment de la protection de l'environnement?» ma question: Compte tenu qu'Hydro-Québec est reconnue — et c'est dit même par des experts américains — comme un chef de file en matière de protection et de recherche environnementale, voulez-vous nous expliquer la base de votre questionnement?

M. Ouimet: Bien, disons que, lorsqu'on regarde

un peu tout le dossier Grande-Baleine, il y a tout un problème de faire des évaluations d'impacts globaux avec un projet comme ça. Ça n'a pas été complété pour le projet de La Grande phase I, où il n'y a pas eu d'évaluation globale qui a été présentée. On a eu des évaluations sectorielles, mais il n'y a pas d'évaluation globale qui a été présentée sur la phase I de La Grande. Alors, dans ce sens-là, on considère qu'il n'y a pas vraiment une volonté de sérieusement s'occuper d'environnement pour faire cette comptabilisation-là, cette compilation-là des différentes études sectorielles. Je pense que, s'il y a une volonté sérieuse d'Hydro-Québec, ça devrait être fait sur La Grande pour qu'on soit capable d'évaluer quel sera l'impact global sur un projet comme Grande-Baleine. C'est dans ce sens-là qu'il y a un manque de volonté d'Hydro-Québec de faire cette étude globale. Alors, pour nous, ça, c'est un point qui est très important. (16 h 40)

Lorsque je regarde aussi dans la proposition qui nous est présentée, où Hydro-Québec nous dit avoir le sentiment d'être aussi responsable pour les retombées écologiques et sociales, avoir cette responsabilité sociale et écologique, et que, par la suite, elle nous dit que, quand on veut évaluer les coûts globaux, on ne peut pas évaluer les coûts sociaux et les coûts écologiques, alors qu'il y a des études qui ont déjà été faites à certains endroits pour sortir certaines évaluations des coûts sociaux et écologiques dus à certains impacts, je me dis qu'il doit y avoir un investissement, de la recherche qui se fasse pour vraiment développer des outils pour mesurer ces fameuses «externalités» là. Si Hydro-Québec a vraiment une volonté d'être responsable socialement et écologiquement, elle doit mettre les ressources nécessaires pour faire cette évaluation-là, et je n'ai pas senti, dans la proposition qui nous a été faite, qu'il y avait une volonté de développer une évaluation des impacts sociaux et écologiques en matière économique. Pour nous, dans ce sens-là, c'est un engagement qui est très beau, mais, sur le terrain, quand vient le temps de sortir des données, on sent qu'il y a un manque de volonté pour l'évaluation globale de La Grande ou bien pour l'évaluation des fameuses «externalités».

M. Lemire: Vous avancez aussi, dans votre mémoire, le scénario faible, c'est-à-dire que vous proposez une croissance d'électricité de 1,4 % annuellement. À la suite de vos conclusions bien entendu basées... Sur quoi vous êtes-vous basés pour en arriver à ces conclusions-là? Pouvez-vous préciser vos sources d'information, revenir là-dessus? Vous", en avez parlé un petit peu tantôt, mais, moi, j'aimerais avoir plus d'information pour savoir de quelle façon vous avez évalué et où vous êtes allé chercher ces données-là?

M. Ouimet: d'abord, comme je le mentionnais tantôt, selon des gens qui sont dans le domaine, ils nous ont dit que, dans les états, plusieurs états aux états-unis et dans plusieurs pays, on envisageait une croissance de la demande de 1,6 %. ça tournait alentour de 1,6 % dans plusieurs endroits, dans le scénario de croissance de la demande. ici, au québec, comme on n'avait pas, nous, un scénario de 1,6 % qui était proposé par hydro-québec, on a retenu un scénario de 1,4 %, tout en étant conscients que ça serait un peu plus haut que ça, plus près de 1,6 %. mais on n'avait pas les experts pour pouvoir replacer le scénario à la hauteur de 1,6 %, alors on a retenu 1,4 % pour faire la présentation d'aujourd'hui, et en regardant que, au bout du compte, lorsqu'on prend en considération un scénario de 1,4 %, on arrive à même dégager 3 twh, si on prend le calcul que je faisais tantôt: 214 twh qu'on pourrait produire au québec avec les installations actuelles ou qui sont en train d'être développées versus la consommation qui, elle, pourrait être maintenue à 211 twh.

Alors, on est conscients que ça pourrait être différent si on avait 1,6 % de scénario de croissance, mais, par contre, il pourrait y avoir des sources — on parle d'éoliennes — qui pourraient être des sources d'énergie douce, qui pourraient, aussi, être peut-être plus développées et être plus mises dans la balance, aussi.

M. Lemire: Comme ça, vous considérez normal qu'Hydro-Québec nous propose plusieurs scénarios?

M. Ouimet: Tout à fait. Ce qu'on trouve anormal, c'est que les scénarios qui nous sont présentés dans la proposition sont à peu près de 0,2 % plus élevés que le scénario qui nous a été présenté il y a deux ans, alors qu'on est encore en une période de stagnation économique, à tout le moins, et on ne voit pas exactement quand on va en sortir, en se relançant dans une consommation d'énergie importante. Même au niveau des alumineries, ils mettent la pédale douce, parce qu'ils se rendent compte que le marché mondial est saturé et qu'on ne peut pas se lancer à développer aussi vite qu'on pensait. Alors, c'est dans ce contexte-là qu'on trouve ça drôle qu'Hydro-Québec propose un scénario plus fort maintenant qu'il y a deux ans. Si, au moins, c'était cohérent et que c'était le même scénario, qui était déjà très élevé par rapport à d'autres pays, on aurait déjà pu le questionner, mais, là, c'est encore plus fort. C'est ça qu'on ne comprend pas.

M. Lemire: Mais je pense qu'il faudrait peut-être justifier davantage ce que vous nous dites comme analyse, la façon que vous amenez ces conclusions-là, parce que ce n'est pas à cause des alumineries que, à ce moment-ci, Hydro-Québec propose plusieurs scénarios. Je pense que c'est bien plus pour protéger et pour sécuriser davantage l'approvisionnement de tous les citoyens, au Québec, et sécuriser principalement l'avenir des Québécois pour la demande en énergie dans les prochaines années. C'est pour cette raison qu'Hydro-Québec présente plusieurs scénarios, et une des raisons pourquoi on vous consulte en cette commission, c'est pour savoir ce que vous pensez des scénarios. Ce n'est pas parce qu'il y a eu des alumineries qui ont été bâties voilà plusieurs années.

Parce qu'il faut se souvenir que l'aluminerie à

Bécancour a été construite parce qu'il y avait des surplus à ce moment-là, lors de la première Baie James, et il y avait quelques milliers de MW additionnels. Plutôt que de laisser passer l'eau par-dessus les barrages, notre ami du temps, le ministre de l'Énergie Yves Du-haime, a fait un contrat avec la nouvelle société qui est venue s'établir à Bécancour, et, nous, en arrivant au pouvoir, on a corrigé ça pour arriver avec des contrats qui vont être reliés à la compétitivité et, en même temps, au profit de l'entreprise. C'est très différent.

M. Ouimet: Oui, mais, lorsque vous parlez de l'avenir, justement, des Québécoises et des Québécois, le rapport Brundtland dit que, si on veut assurer un avenir au niveau de la planète...

M. Lemire: Au niveau mondial. M. Ouimet: ...au niveau mondial... M. Lemire: C'est ça.

M. Ouimet: ...il faut que les pays du Nord envisagent de réduire leur consommation d'énergie. Et ce qu'Hydro-Québec nous propose, c'est un scénario où il y a encore une croissance qui n'est pas encore questionnée. Selon nous, il faudrait que les Québécois puissent sortir de la tête de peloton, où on est les plus énergivo-res, pour devenir plus efficaces avec notre énergie et faire en sorte de peut-être se comparer au Japon, à un moment donné, pour voir comment eux, ils arrivent à produire beaucoup de biens sans devoir consommer autant d'énergie que nous.

M. Lemire: Mais, quand le rapport Brundtland parle de ça, on se compare, et, quand on se compare, les autres pays ou les autres provinces, leur hydroélectricité n'est pas produite à 95 % par l'eau.

M. Ouimet: Oui, d'accord.

M. Lemire: Nous, c'est ça, c'est la force qu'on a, présentement, au Québec.

M. Ouimet: Oui.

M. Lemire: Je pense qu'on a un avantage.

M. Ouimet: Tout à fait.

M. Lemire: Maintenant, on veut aussi améliorer l'économie d'énergie. D'ailleurs, on a des programmes pour ça. J'aurais une autre question, si vous me le permettez.

Le Président (M. Audet): Alors...

Mme Bacon: Juste une autre question dans le même sens...

Le Président (M. Audet): Mme la...

Mme Bacon: ...si vous me permettez, M. le Président. Quand vous citez le rapport Brundtland, quand vous citez, en fait, la planète, là, parce que c'est ça qui nous préoccupe, où est-ce que vous situeriez les alumineries?

M. Ouimet: Dans quel sens? Comme source de pollution?

Mme Bacon: Bien, si vous dites qu'on ne devrait pas les avoir ici, où est-ce qu'elles devraient être, les alumineries?

M. Ouimet: Je pense que ce qu'il faudrait, c'est faire en sorte de s'assurer qu'on recycle encore plus au niveau des minerais, qui sont des ressources non renouvelables. Je ne pense pas que ce soit en favorisant une consommation toujours de plus en plus grande de ces ressources non renouvelables qu'on va pouvoir réaliser un développement durable au niveau planétaire.

Mme Bacon: Ça va toujours en prendre un petit peu, des alumineries, là.

M. Ouimet: Oui, mais si...

Mme Bacon: C'est parce qu'on ne peut pas dire qu'il ne peut pas y en avoir jamais, là.

M. Ouimet: D'accord, mais...

Mme Bacon: Où est-ce que vous les situeriez? Dans quel pays?

M. Ouimet: Au niveau des alumineries? Mme Bacon: Oui.

M. Ouimet: Bien, je pense que celles qui sont déjà en place, elles devraient rester là, puis elles devraient mettre en place des technologies pour pouvoir arrêter la pollution qu'elles génèrent dans l'environnement. On n'est quand même pas pour défaire ce qui est déjà là. Déjà, avec ce qu'il y a là, on répond plus qu'à la demande actuelle. Il y a une surproduction au niveau international. Et, si on mettait en place une technologie du recylage de l'aluminium, tout l'aluminium qui est déjà en place, actuellement, si on se mettait à le recycler, on pourrait faire en sorte de réduire pendant plusieurs décennies la nécessité de devoir en produire plus, alors qu'on est en train d'enterrer des richesses importantes quand on enterre nos cannettes d'aluminium. Et c'est ça qu'il faut aller chercher.

Mme Bacon: Oui, mais Brundtland nous dit de situer, disons, les alumineries là où il y a des richesses renouvelables, des ressources renouvelables, et on a des

ressources renouvelables, au Québec. C'est pour ça qu'on en a.

M. Ouimet: C'est pour ça qu'on ne vous dit pas de...

Mme Bacon: Et c'est Brundtland qui dit ça.

M. Ouimet: On ne vous demande pas de démanteler les alumineries qui sont déjà en place. Les alumi-neries qui sont déjà en place, on dit oui à ça. Même dans notre proposition, on reconnaît que les contrats déjà signés, au niveau des exportations et des alumineries, devront être respectés. Et ce qui était prévu pour produire de l'électricité, pour répondre à ces besoins-là, O.K. Mais on dit: Est-ce qu'on doit s'engager dans de nouveaux contrats à l'exportation, puis dans de nouvelles alumineries? C'est là, la question. Nous, on se dit: S'il faut produire plus pour pouvoir répondre à ces nouveaux contrats là, c'est là-dessus qu'on n'est pas d'accord. Mais les alumineries qui sont déjà en place, on n'est pas pour les démanteler. Je pense qu'on peut continuer à les opérer, mais en minimisant leur impact sur l'environnement, comme c'est déjà en train de se faire. Il va falloir qu'on aille encore plus loin de ce côté-là.

On n'est pas, non plus, pour démanteler les barrages hydroélectriques qui sont déjà en place. Je pense qu'on a beaucoup développé ce potentiel-là, et on considère qu'on devrait arrêter de toujours mettre nos oeufs dans le même panier et commencer à diversifier avec une politique économique qui soutienne plus des industries du tertiaire, qui sont moins énergivores, plutôt que juste des alumineries, qui sont très consommatrices d'énergie.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui. J'aurais le goût de faire une embardée sur les contrats secrets.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Je me retiens. Je pense que...

Mme Bacon: Vous pouvez vous laissez aller, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Pardon?

Mme Bacon: Vous1 pouvez vous laissez aller.

M. Chevrette: Je peux me laisser aller? Donc, j'y vais. Le député de Saint-Maurice disait, oui, que le ministre de l'Énergie du temps a signé un contrat à Bécancour. C'est vrai, à un moment et à des conditions, d'abord, qui ne sont plus celles d'aujourd'hui, qui ont été modifiées par les 13 contrats simultanés signés avec l'ensemble des alumineries, qui vont nous coûter quel- que chose comme 1 500 000 000 $ dans quelques années, et ceci, un contrat avec 13 alumineries, non pas dans un contexte de surplus d'énergie, mais dans un contexte qui nous a amenés, justement, à une rareté. Ça, c'est beaucoup plus grave. Et ça, ça se discute. Si c'était là le débat, vous verriez que je mâcherais moins mes mots.

Mais, ceci dit, quand vous parlez, par exemple, de la planification d'Hydro-Québec, moi, il y a un bout où je vous suis fort bien, c'est quand vous affirmez qu'Hydro devra programmer, planifier son efficacité énergétique en fonction d'une courbe zéro quant à, éventuellement, la construction de barrages additionnels, un peu comme certains pays l'ont atteint, comme la Suède, que vous donnez comme exemple. Mais, moi, ce qui m'inquiète dans ça, c'est que, tant et aussi longtemps qu'on va faire porter toute la pression de l'efficacité énergétique sur uniquement l'hydroélectricité, je me demande où on va aller. Parce que le débat sur l'énergie que vous demandiez au début s'impose, là. 60 % de la consommation énergétique n'est pas dans le domaine de l'hydroélectricité...

M. Ouimet: C'est ça.

M. Chevrette: ...il est dans le gaz naturel puis dans le pétrole.

M. Ouimet: Tout à fait.

M. Chevrette: Et toute la pression sur la réduction de la consommation énergétique se fait sur l'hydroélectricité. Je me demande bien où on va aller. Parce que, d'une part, tu ne fais aucune pression à ceux qui peuvent y aller bride abattue, puis tu voudrais habituer le monde à se serrer la ceinture dans un seul secteur énergétique. À mon point de vue, c'est illogique, ça. C'est illogique, même dans le processus d'une préparation des mentalités québécoises. Ou tu fais le débat global puis tu instaures une mentalité globale de l'efficacité énergétique, ou c'est de la poudre aux yeux, c'est du leurre que d'essayer de faire croire que tu veux habituer les gens exclusivement à réduire leur consommation hydroélectrique puis aller bride abattue dans le reste. Ça ne cadre pas avec un processus intellectuel intelligent. Et ça, moi, je pense que, dans votre partie de mémoire où vous demandez un débat global, vous avez entièrement raison. (16 h 50)

L'autre partie sur laquelle je suis entièrement d'accord, c'est sur la commission énergétique. Moi, je pense qu'il faut qu'il y ait un organisme neutre qui soit capable de dire des choses à Hydro, parce que Hydro est la seule à avoir l'expertise, puis elle endort tout le monde. Avec une commission d'énergie neutre qui aurait les budgets et la compétence pour donner dés contre-expertises, je pense qu'on pourrait assister à moins d'aberrations.

Par exemple, Hydro-Québec, à un moment donné, fait la promotion du chauffage électrique, et là elle dit:

Oups! ça consomme, c'est épouvantable, il faut se serrer la ceinture, alors qu'il y a du gaz naturel qui serait moins coûteux, à part ça, à court terme, nous dit-on, et qui pourrait desservir avec 50 % plus d'efficacité. Est-ce que c'est vrai? Moi, je ne le sais pas, je ne suis pas un scientifique, mais, s'il y a des gens qui ont le courage de venir le dire ici, il doit y avoir un peu de vrai dans ça. Ce n'est contredit par personne d'autre, là, actuellement. Sauf qu'en même temps que tu te permets des promotions tu demandes... C'est tout croche, cette histoire-là, et ça m'inquiète à moyen terme. Et je pense que le débat énergétique, on devrait le faire dans les meilleurs délais, au Québec, si on veut véritablement créer cette mentalité pour l'ensemble des consommateurs québécois face à l'ensemble des sources d'énergie, sinon on manque le bateau. Et je pense bien que vous avez entièrement raison dans votre mémoire de ce côté-là.

Maintenant, j'ai une question à vous poser: Quelle est votre réaction, vous autres, par exemple, face au gaz naturel, à ceux qui disent qu'ils ont un réseau bien établi, qui représente quand même un potentiel de 115 ans, nous ont-ils dit, à peu près 115 ans? Comment vous voyez ça, la combinaison ou la diversification des sources d'énergie?

M. Ouimet: La diversification est intéressante. Maintenant, on voudrait quand même éviter de consommer plus d'énergie fossile, et je pense que le gaz, ça s'inscrit quand même là-dedans, là. Le gaz naturel, le pétrole, c'est quand même une source d'énergie fossile qu'on se trouve à consommer et qui se trouve à relâcher du gaz carbonique. Alors, dans ce sens-là, on trouve ça plus intéressant la filière hydroélectrique. On reconnaît quand même que la filière hydroélectrique est moins productrice de gaz à effet de serre, et ça, on le reconnaît. Et c'est dans ce sens-là que ce n'est pas de taper sur les barrages hydroélectriques, c'est plutôt au niveau de notre vision sur l'avenir énergétique du Québec qu'on questionne, et on pense qu'il y aurait moyen de répondre à ces besoins-là. À la limite, on pourrait peut-être envisager de construire de nouveaux barrages qui répondraient mieux à certains critères plus localement, ce qui permettrait peut-être de substituer la consommation de pétrole par la consommation d'électricité. Alors là, ça irait dans un sens intéressant où éventuellement le gaz naturel... Ça pourrait être des étapes intermédiaires qui dégagent un peu moins de gaz carbonique.

M. Chevrette: Mais prenons l'exemple au lac Robertson, là.

M. Ouimet: Oui.

M. Chevrette: Vous allez avoir un barrage hydroélectrique au coût de 340 000 000 $ pour 21 MW ou quelque chose du genre, là. Je peux me tromper de quelques sous, là, mais, nous dit-on, il y avait des formules beaucoup moins onéreuses sur le plan financier, et, deuxièmement, si on avait fait preuve d'imagination, par exemple, on aurait pu coupler Féolienne au lieu de promettre 1000 MW, là, tous azimuts, et tenter une première expérience bien concrète en combinaison avec un produit fossile, par exemple.

M. Ouimet: Tout à fait. C'est le lieu idéal aussi pour ça, parce que la Côte-Nord a été repérée comme un des endroits potentiels pour le développement de l'énergie éolienne. Alors, c'est ce genre d'imagination là qu'il faut avoir, de combiner l'éolienne avec un barrage, pour pouvoir minimiser so^n impact, et il faut que la population soit dans le coup là-dedans. Je pense que la population de la Côte-Nord serait intéressée par des emplois de cette nature-là, qui viendraient de deux sources différentes, éolienne et barrage hydroélectrique. Mais je pense qu'il faut mettre la population dans le coup.

Actuellement, la population est hors circuit. On n'a pas accès à ce débat-là, et c'est un enjeu crucial pour l'avenir du Québec de savoir où on s'en va au niveau de notre énergie. Et, comme vous l'avez mentionné, ils ne doivent pas considérer uniquement l'électricité, mais aussi considérer les autres formes d'énergie qui sont également très importantes. Alors, il faut qu'il y ait un débat là-dessus, et c'est ce qu'il n'y a pas. La grande frustration des gens qui se préoccupent d'environnement au Québec, c'est de ne pas avoir l'occasion de débattre ça sérieusement, pour un pays qui veut, justement, nous dire qu'il se préoccupe des générations futures.

M. Chevrette: Je suis surpris que, dans votre mémoire, pour le Parti vert, vous ne parliez pas, par exemple, de rivières patrimoniales. Vous ne parlez pas de cela, et, moi, je m'attendais de vous autres, là — il n'y a pas de cachette, là — que vous me disiez: Bien, écoutez, on ne développera pas pour développer. On doit se garder quelques joyaux qui nous appartiennent. Pouvez-vous me dire pourquoi vous avez évité de parler de cet aspect-là?

M. Ouimet: II y a une question de temps, simplement. C'est sûr que, le Parti vert, on a des faibles ressources. Je suis le seul permanent, et, avec les quelques personnes avec lesquelles on peut travailler, on est arrivé... Parce qu'on se prépare, comme d'autres partis politiques, pour les prochaines élections générales. Nos énergies sont mises dans différentes directions, alors...

M. Chevrette: Voulez-vous une combinaison d'énergie? Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Ha, ha, ha! C'est un point également important, malheureusement, qu'on n'a pas pu développer.

M. Chevrette: O.K. C'est parce que c'est un aspect qui est peu touché, la question de certains cours d'eau qui pourraient être gardés comme valeur patrimoniale, et puis, au Québec, il n'y en a aucun. On a peut-être 150 réserves écologiques, je pense, de pointées et

tu n'as pas un cours d'eau qui ne pourrait pas actuellement ne pas faire l'objet d'une possibilité d'étude de barrage parce qu'ils demandent le feu vert sur n'importe quel cours d'eau. Vous l'avez remarqué?

M. Ouimet: Comme la rivière Moisie, c'est un bel exemple comment une rivière avec un potentiel...

M. Chevrette: L'Ashuapmushuan.

M. Ouimet: L'Ashuapmushuan, c'est ça. Ce sont des rivières comme ça qui devraient être préservées. Je suis tout à fait d'accord. Il faudrait qu'il y ait une volonté politique d'aller dans ce sens-là aussi. C'est peut-être ça qui manque actuellement pour préserver ces secteurs-là. Parce qu'on a pensé harnacher les rivières du Québec, et c'est souvent les plus grosses qui sont les plus belles.

M. Chevrette: Oui. Il faut dire que, quand on profite, en particulier aussi, d'une... Quand on n'a pas une politique là-dessus puis qu'on n'a pas décidé de consacrer des rivières comme sites patrimoniaux, ce qui arrive, c'est qu'on profite de la récession économique, où toute une population va dire: Moi, c'est des jobs. Puis tu ne peux pas blâmer les populations. Et, à court terme, donc, il y a un appétit pour les emplois, et c'est humain, c'est normal. Mais comment voulez-vous, à ce moment-là, que même un groupe sérieux, quel qu'il soit, puisse se battre contre cela? Il n'y a aucune commune mesure, parce qu'on joue sur des situations conjoncturelles pour faire prendre des décisions au détriment d'un développement correct à moyen et long terme. Merci.

Le Président (M. Audet): Merci.

Il ne reste plus de temps, alors c'est terminé. Alors, messieurs, au nom des membres de la commission, je veux vous remercier sincèrement de votre présentation, et, afin de permettre à l'Association d'huile à chauffage du Québec de prendre place, nous allons suspendre les travaux deux minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 57)

(Reprise à 17 h 2)

Le Président (M. Audet): Nous recevons maintenant l'Association d'huile à chauffage du Québec inc. et l'Association des distributeurs indépendants de produits pétroliers. Alors, messieurs, au nom de la commission, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Je vous rappelle brièvement nos règles de procédure. Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous exposer votre mémoire et vous présenter, ce qui est très important. Ne pas l'oublier avant de débuter votre présentation. Ensuite, suivra une période d'échanges d'une quarantaine de minutes. La parole est à vous, on vous écoute.

Association d'huile à chauffage du Québec inc.

(AHCQ) et Association des distributeurs indépendants de produits pétroliers (ADIP)

M. Charlebois (Paul-Émile): Merci. J'aimerais vous présenter, à ma droite, M. Gilbert Boulé, vice-président de l'Association d'huile à chauffage, ainsi que son président, Pierre Martel; à ma gauche, Daniel La-brecque, qui est vice-président de l'Association des distributeurs indépendants, ainsi que moi-même, Paul-Émile Charlebois, qui suis président.

M. le Président, Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources et vice-première ministre, Mme Lise Bacon, Mmes et MM. les députés membres de cette commission, M. le secrétaire, mesdames et messieurs, l'Association d'huile à chauffage du Québec ainsi que l'Association des distributeurs indépendants de produits pétroliers sont heureuses d'avoir été conviées à présenter à cette commission de l'économie et du travail leurs propositions relativement au plan de développement triennal qu'a soumis Hydro-Québec. Nous vous en remercions. Nos deux associations se sont réunies dans le but de mieux sensibiliser les parlementaires, les consommateurs et les médias à nos préoccupations communes. Nos associations regroupent plus de quelque 4000 emplois directs et 2000 emplois indirects au Québec, qui représentent l'ensemble du secteur pétrolier québécois, tant au niveau des entreprises majeures qu'au niveau des petites et moyennes entreprises reliées au chauffage.

Le 22 mai 1990, nous nous retrouvions devant cette commission, espérant de tout coeur que nos doléances soient non seulement entendues, mais qu'elles soient considérées au même titre que celles d'Hydro-Québec. Même si cette lueur d'espoir fut vaine, nous considérons que nous avons plus que jamais fait la preuve que le statu quo des dernières années a eu des effets lamentables, à la fois pour le gouvernement, pour Hydro, pour l'industrie pétrolière et, surtout et avant tout, pour le consommateur. Nous devons tous ensemble tenter de rechercher des solutions.

Comme vous avez pu le constater à la lecture de notre mémoire, nous éprouvons de grandes réticences à soutenir un plan de développement qui, malheureusement, dans son ensemble, fait abstraction presque totalement du concept de biénergie dont nous nous acharnons depuis quelques années à vanter les mérites. Comment, dans le contexte actuel de préservation et d'efficacité énergétique, Hydro-Québec peut-elle passer outre à une solution aussi viable et avantageuse à la fois pour elle, pour le consommateur et pour l'industrie pétrolière que nous représentons? Chacun d'entre nous pourrait sortir grand gagnant de ce débat de société si, avec la bonne foi qui devrait se manifester de la part de chacun des intervenants au dossier, nous essayions de renforcer ce concept biénergétique afin de l'étendre et de le mettre en oeuvre à l'échelle du Québec.

Hydro-Québec dira sans aucun doute que la biénergie en matière résidentielle existe déjà et que les programmes prévus à ces fins vont déjà bon train. Théo-

riquement, même si certains programmes de biénergie existent déjà, jamais ne sera-t-il possible d'en observer les avantages et bénéfices si Hydro-Québec ne parvient pas à se convaincre qu'il est primordial de considérer l'industrie pétrolière d'égal à égal. Les statistiques le prouvent: avec seulement 28 % de la part du marché biénergétique québécois, l'industrie pétrolière court à sa perte. Le consommateur doit absorber des coûts faramineux pour combler ses besoins minimaux. Le réseau hydroélectrique deviendra à court terme surchargé, ce qui occasionnera la nécessité de développer de nouveaux projets hydroélectriques et provoquera à nouveau des tollés de protestation de la part des populations locales et des environnemental istes.

Tout milite en faveur de la promotion de la biénergie. Premièrement, le partenariat. Les objectifs que le gouvernement ainsi qu'Hydro-Québec se sont fixés en matière d'efficacité énergétique, de protection de l'environnement et de développement économique seraient fort mieux réalisables si nous nous concertions pour travailler à l'élaboration d'une telle alternative. Pour ce faire, il faudrait qu'Hydro-Québec apprenne enfin à nous percevoir comme des partenaires professionnels, sérieux et aptes à collaborer avec elle. Nous représentons l'une des industries majeures du Québec et nous n'acceptons plus d'être relégués au dernier rang par Hydro-Québec.

Contrairement à la rumeur populaire largement véhiculée par Hydro, nous sommes loin d'avoir l'intention de promouvoir la substitution de l'électricité par l'huile à chauffage. Ce que nous désirons, c'est de maintenir notre parc au mazout et de trouver des solutions pour réduire les coûts très élevés que doit assumer le consommateur pour les périodes de pointe.

Vous savez, M. le Président, nous devons tous ensemble avoir une vision d'avenir. Personne ne peut garantir avec certitude ce qui se produira au tournant du siècle. Il faut dès aujourd'hui commencer à envisager des solutions d'approvisionnement en énergie qui sont viables et bénéfiques pour tous à long terme. La biénergie, vous en conviendrez, constitue une voie d'avenir privilégiée. Mais encore faudrait-il que les jeunes qui achètent aujourd'hui leur maison cessent de ne penser qu'à l'électricité et soient éduqués aux bienfaits des autres formes d'approvisionnement énergétique. (17 h 10)

Une meilleure technologie. L'industrie pétrolière a démontré, grâce à des technologies à la fine pointe de la recherche et du développement, qu'elle peut constituer un allié de premier ordre dans la mise sur pied de systèmes sécuritaires et économiques. Ces systèmes sont définitivement mieux adaptés aux désirs et aux besoins contemporains du consommateur de vivre dans un air ambiant sain et confortable. Depuis plusieurs années déjà, notre industrie participe à l'élaboration et à l'exécution de programmes en matière de recherche et de développement et contribue financièrement à la mise sur pied de ces derniers. Ces investissements ont été réalisés malgré l'absence de reconnaissance et de soutien de la part du gouvernement. Si nous cessions de voir notre part du marché biénergétique se désintégrer, en grande partie à cause de la politique d'Hydro et de l'inaction du gouvernement en matière biénergétique, nous serions sans doute plus enthousiastes à investir davantage dans le domaine de la recherche et du développement.

Hydro doit cesser de se fier sur les finances publiques. Le secteur privé considère que le contribuable a suffisamment financé le réseau.hydroélectrique à même les finances publiques. Afin de pallier une stratégie aussi incohérente dans le contexte économique actuel, il est grand temps que les décideurs gouvernementaux soient conscients de la nécessité de laisser le secteur privé intervenir et investir dans un tel champ d'activité. Le taux d'endettement actuel de chaque Québécois est encore pire et celui des générations futures est, hors de tout doute, fort inquiétant. Il est vrai, plus que jamais, que le gouvernement doit être au moins ouvert aux offres d'investissement pouvant émaner du secteur privé. Le partenariat, vous en conviendrez, est la solution de l'avenir, mais encore faut-il que ce partenariat respecte chacune des parties en cause.

Le mazout constitue, lui aussi, une ressource «propre, propre, propre». Une industrie présentement en danger de survie pourrait assainir ses finances, croître et créer des milliers d'emplois. Aucune raison logique ne pourrait justifier le gouvernement de permettre par son silence l'extinction d'une industrie comme la nôtre. Le mythe que l'électricité est la ressi ressource — environ-nementalement — la plus sécuritaire doit disparaître et laisser place à la vérité.

Sans vouloir revenir de façon trop répétitive sur le contenu de notre mémoire, mon collègue, M. Pierre Martel, expliquera, dans les prochaines minutes, les propositions que nous avons soumises à Hydro-Québec, mais qui sont restées, à maintes reprises, lettre morte.

M. Martel.

M. Martel (Pierre): Merci. C'est donc dans cet esprit et avec l'idée d'un partenariat sérieux avec Hydro-Québec que nous avons formulé à cette dernière des propositions des plus concrètes, avec une portée monétaire substantielle, dont je vous fais le résumé à l'instant. Je vous inviterais tout d'abord à vous référer aux pages 6, 7 et 8 du mémoire que nous vous avons soumis.

Suite à la dernière commission parlementaire à laquelle nous avons participé en mai 1990, nous avons compris plus que jamais que, si nous voulions parler ou négocier avec Hydro, il fallait parler argent. Pour ces raisons, des offres et propositions — selon nous, fort avantageuses pour Hydro — ont été présentées à de nombreuses reprises, notamment par M. Gilbert Boulé, ici présent, mais les refus successifs de la société d'État nous incitent maintenant à commencer à douter de la bonne foi de cette dernière.

Pour les maisons déjà existantes, nous proposons de participer financièrement au remplacement des appareils de chauffage au mazout par des appareils plus efficaces et de maintenir le parc au mazout actuel. Hydro-Québec estime que, d'ici l'an 2000, 90 000 résiden-

ces remplaceront leur système par un système tout à l'électricité. De ce nombre, 60 000 pourraient être remplacés par des appareils au mazout plus efficaces. De plus, 22 000 autres appareils au mazout pourraient être remplacés. Dès lors, l'économie en électricité serait de 0,9 TWh pour Hydro-Québec, soit 60 000 maisons multiplié par la consommation moyenne d'une maison, 14 000 kWh, et l'économie en argent serait de 30 000 000 $, chaque kilowattheure coûtant 0,034 $ à Hydro-Québec.

Ensuite, toujours pour les maisons existantes, nous proposons d'appliquer un programme de biénergie avec une répartition 50-50. Selon les prévisions d'Hy-dro, si nous changions les propositions de 72-28, qui sont actuellement à l'avantage d'Hydro-Québec, à 50-50, une économie d'électricité supplémentaire de 0,5 TWh serait enregistrée. pour les maisons neuves, notre objectif est basé sur le fait que 50 % des nouvelles résidences unifamilia-les pourraient être biénergétiques, dans une proportion de 50 % électricité, 50 % mazout, soit 121 000 unités. dès lors, l'économie en électricité serait de 0,9 twh pour hydro-québec, soit 121 000 maisons multiplié par 7000 kwh, qui est la consommation réduite de 50 %, et l'économie en argent serait encore une fois de 30 000 000 $, chaque kilowattheure coûtant 0,034 $ à hydro-québec.

Ainsi, dans son ensemble, notre proposition ferait donc économiser 2,3 TWh supplémentaires à HydroQuébec, soit environ 76 000 000 $ en comparaison au programme existant. Comme vous pouvez le constater à même notre document, l'impact monétaire de notre proposition est un apport direct de 102 000 000 $ du secteur privé à Hydro-Québec. Vous conviendrez avec nous que, dans le contexte économique actuel, une offre de partenariat du secteur privé pour 102 000 000 $ s'avère, à notre avis, une proposition intéressante. Dans une industrie concurrentielle comme la nôtre, non subventionnée, le fait d'obtenir l'assentiment des membres de nos associations pour une contribution monétaire de cette amplitude est une preuve du sérieux de nos propositions.

Nous avons encore eu la preuve, après la présentation de ces propositions à Hydro-Québec, que celle-ci n'a aucunement l'intention de changer un iota à sa stratégie énergétique et qu'elle considère le secteur chauffage de l'industrie pétrolière comme un citoyen de deuxième classe, qui ne fait que déranger certaines de ses actions. En effet, Mme la ministre, Hydro-Québec a rejeté cavalièrement toiftes les propositions mentionnées précédemment. Pour vous montrer, encore une fois, le peu de considération envers tous les intervenants dans le dossier, les consommateurs, l'industrie pétrolière et les emplois directs et indirects qu'elle génère, nous avons reçu la réponse officielle d'Hydro-Québec, une société publique, par l'entremise d'une note manuscrite gri-bouillée sur notre propre correspondance avec elle, retransmise par télécopieur à nos deux associations. C'est comme ça, chez Hydro-Québec, que l'on donne une réponse à des propositions d'investissement et de partenariat de plus de 100 000 000 $.

Je crois, Mme la ministre, que nous avons aiguisé nos crayons et qu'il n'appartient pas seulement à Hydro-Québec de déterminer aujourd'hui si ces offres sont acceptables ou non, surtout avec le peu d'esprit d'ouverture dont elle a fait preuve. Il appartient au consommateur, par la voix de ses élus, d'avoir la possibilité de faire un choix éclairé, et non pas de s'en faire imposer un. Merci.

M. Charlebois: Comme nous vous l'avons indiqué, un partenariat à part entière est nécessaire si nous voulons en arriver ensemble à des avenues respectables. Nous, l'industrie pétrolière québécoise, devons être intégrés au processus décisionnel eu égard aux tenants et aboutissants des grandes politiques énergétiques et des objectifs et stratégies qu'elles sous-entendent. Nous devons également travailler en collaboration étroite avec Hydro ainsi que le ministère concerné, afin d'accroître la qualité de la recherche et du développement effectués en la matière et, donc, d'assurer au consommateur un produit de qualité, économique et respectueux de son environnement.

Les membres de cette commission ont un rôle majeur à jouer dans ce débat qui nous concerne tous. Ils doivent rappeler au gouvernement les paramètres qu'il s'est lui-même fixés, en mars 1992, dans sa politique d'efficacité énergétique. En l'occurrence, ils doivent démontrer au gouvernement la responsabilité qui lui incombe dans la protection des intérêts du consommateur et dans la coordination des activités pouvant mener à un partenariat équitable, sain et profitable. À ces fins, nous recommandons que le gouvernement du Québec crée un comité formé de trois principales industries d'approvisionnement énergétique, soit celles de l'électricité, du mazout et du gaz naturel, afin qu'elles parviennent ensemble à la formulation de propositions et de solutions et que ces dernières fassent ensuite l'objet d'une analyse par le Bureau de l'efficacité énergétique. Un tel exercice ferait appel à la bonne foi de chacun des intervenants en cause et donnerait naissance à un véritable partenariat.

Nous terminons nos propos en citant un extrait du document «La stratégie québécoise d'efficacité énergétique», déposé par Mme Lise Bacon en mars 1992: Une promotion de l'efficacité énergétique est l'objet d'initiatives de toutes sortes: initiatives des producteurs et distributeurs d'énergie, avec des moyens et des priorités variables; initiatives des industries grandes consommatrices d'énergie, pour lesquelles la réduction dans la facture énergétique est un élément crucial de la compétitivité sur les marchés; initiatives de tous les individus et organismes concernés par la décision finale de consommer l'énergie. Toutes ces initiatives concourent au même objectif et doivent être encouragées par l'État, mais elles doivent également être coordonnées. Il est, en effet, essentiel d'éviter les dédoublements et les contradictions qui pourraient gêner ou même remettre en cause le succès de ces actions entreprises. Cette tâche de coordination revient, bien entendu, à l'État, qui peut

s'appuyer à cette fin sur des relais déjà existants. Je vous remercie.

Le Président (M. Audet): Merci beaucoup.

Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources. (17 h 20)

Mme Bacon: Alors, je voudrais vous remercier, messieurs, d'être présents ici, à la commission parlementaire, malgré les frustrations exprimées de la dernière commission parlementaire, de quand même avoir la possibilité d'être avec vous et de discuter avec vous aujourd'hui. Je pense que ça apporte un éclairage dont nous avons quand même besoin, au niveau de cette commission. Je dois vous dire que vous êtes quand même présents dans un... Et ça, c'est le ministère. J'ai formé un comité de travail sur la gestion intégrée des énergies et je pense qu'à ce moment-là votre industrie est présente. Vous avez un représentant qui siège au même titre qu'Hydro-Québec, que Gaz Métropolitain, que les ACEF ou que les gens, les consommateurs, et qui fait quand même une prestation importante à ce comité. Vous avez le même titre que les autres qui sont présents; alors, je ne voudrais pas que vous vous sentiez de seconde classe, comme vous l'avez dit tantôt. Peut-être face à Hydro-Québec — ça, il faudra que je les questionne, j'ai pris bonne note de ce que vous avez dit tantôt. Je pense qu'il y a des choses qui sont difficiles à accepter. Je vais aller vérifier.

Le dernier et récent...

M. Chevrette: Le fouet, c'est le fouet! C'est le bâton!

Mme Bacon: Non, non. C'est comme ça qu'on me fait une mauvaise réputation.

M. Chevrette: Votre caricature de ce matin est très bonne. Le bâton et la carotte, «watch out»!

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Bacon: Ha, ha, ha! Le dernier et récent programme de biénergie d'Hydro-Québec, qu'ils appellent «Bi-énergie nouvelle»... Les besoins d'Hydro-Québec sont, en fait, d'effacer une partie de la demande de pointe du réseau électrique. Hydro-Québec y voit aussi un avantage pour le consommateur d'améliorer le confort chez lui et de réaliser en même temps des économies sur sa facture d'énergie. Selon votre regroupement, est-ce que le programme d'Hydro-Québec présente des risques pour le consommateur?

M. Charlebois: Mme Bacon, le système biénergie, comme tel, on le prône, mais ce qui nous cause une grande difficulté dans l'industrie, c'est le niveau de transfert. O.K.? Autrement dit, on demande à l'industrie de desservir le consommateur, mais pour un mois par année. C'est un peu comme si on vous disait: Mme

Bacon, vous allez prendre votre auto pendant le mois de janvier. Sur 12, il y a un mois qu'elle fonctionne. Essayez de partir votre auto au bout de 11 mois. C'est ce qu'Hydro-Québec nous demande de faire.

Nous, avec l'équipement, un camion de livraison... Un simple camion de livraison nous coûte au-delà de 100 000 $. Comment voulez-vous qu'on tienne de l'équipement d'un tel prix sur le chemin pour desservir l'heure de pointe qu'Hydro-Québec ne peut pas fournir. C'est ce qu'on demande à Hydro-Québec, un partage plus équitable pour qu'on puisse quand même vivre et maintenir nos équipements, nous aussi, comme HydroQuébec veut maintenir ses équipements.

Mme Bacon: Vous avez mentionné que les programmes antérieurs n'ont pas réussi. Il y a 60 000 clients d'Hydro-Québec qui avaient délaissé le système biénergie, après y avoir adhéré. Qu'est-ce qui, selon vous, a amené ces clients-là à délaisser la biénergie? Est-ce que le nouveau programme d'Hydro-Québec permet de conserver les clients à la biénergie?

M. Martel: Évidemment, le programme est tout nouveau. Il va avoir deux ans en juillet. Les raisons des insuccès, au début des années quatre-vingt, c'est assez simple pour nous. C'est qu'il n'y a pas eu du tout de collaboration avec l'industrie pétrolière. Il y a eu une confrontation. Hydro-Québec, c'est un fournisseur d'énergie, mais les gens qui font le service à la clientèle et les gens qui vont dans les maisons, ce sont les gens de l'industrie pétrolière, tant des majeurs que des entrepreneurs.

Et ce qui est arrivé au début des années quatre-vingt, c'est qu'Hydro avait fait des ententes avec des manufacturiers et pour des équipements qui étaient — je pense que, de la voix même d'Hydro, ils vont vous le dire — désuets, des équipements qui, techniquement, n'étaient pas à point. Alors, on les a installés, puis ce programme, au début des années quatre-vingt, était tellement peu suivi, à un point tel où les clients se faisaient presque payer pour en installer un, finalement. Alors, c'était quand même très avantageux. On recevait presque un montant d'argent pour installer un système de biénergie, ce qui était bien amusant. Sauf que, par après, évidemment, Hydro, après avoir déboursé les montants des subventions, on a laissé, si on veut, entre guillemets, la pomme pourrie à l'industrie pétrolière ou aux gens à faire le service. Alors, c'était la première raison pour laquelle le programme n'a pas fonctionné.

Avec le programme Bi-énergie nouvelle, les équipements sont de beaucoup supérieurs. Donc, on assume que, probablement, il va y avoir un pourcentage d'efficacité de beaucoup supérieur, sauf que c'est vrai qu'actuellement l'industrie pétrolière est dans le programme biénergie puisque, de toute façon, quand une fournaise fonctionne à la biénergie — électricité, mazout — bien sûr qu'il y a un fournisseur ici, qui va fournir le client.

Par contre, vous voyez, à nos propos, qu'on ne peut pas dire qu'il y a eu une grande consultation. Il y a eu une consultation, oui, mais à savoir si on a considéré

les propos de l'industrie pétrolière, je ne pense pas qu'on a considéré vraiment nos propos, à savoir un partenariat, parce qu'un partenariat, habituellement, je pense que ça doit être équitable. Je pense que, dans ce cas-ci, ce ne l'est pas du tout. Alors, le succès du programme? Au niveau technique, probablement qu'il va fonctionner sur une courte période, parce que les équipements sont supérieurs, parce que l'industrie pétrolière et les manufacturiers ont investi de l'argent dans l'équipement. Par contre, quand va venir le temps de faire du service, ça va encore nous retomber dans les pattes. À ce moment-là, ce sera à nous à assumer les coûts, si jamais il y a eu des installations qui ont été moins bien faites par des gens qui sont plus ou moins compétents.

Mme Bacon: Quand vous nous dites que les négociations avec Hydro-Québec ont achoppé, ont échoué, là...

M. Martel: Oui.

Mme Bacon: ...qu'est-ce que c'est les points d'achoppement, les principaux points d'achoppement que vous avez?

M. Martel: Tout. Je veux dire les points d'achoppement... Premièrement, Hydro-Québec ne veut absolument pas bouger sur la répartition 72-28. Donc, quand un équipement biénergétique fonctionne à plein rendement dans un hiver normal, il y a 72 % qui est de consommation électrique, 28 % mazout. Ce qu'on leur dit, nous, c'est que... Puis je pense que vous avez dû le savoir, il y a eu des présentations d'autres fournisseurs d'énergie, etc. Un kilowhattheure amené à une maison, ça coûte environ 0,092 $ du kW; ils le vendent 0,056 $. Donc, ça leur en coûte 0,034 $ ou 0,036 $ chaque fois qu'ils amènent 1 kW dans une maison.

Nous autres, on leur dit: Si vous réduisez de 72 % à 50 % la consommation électrique, bien, déjà, vous allez économiser, parce que de 72 % à 50 % multiplié par 0,034 $, il y a une économie. Puis nous, en tant que fournisseur d'énergie, on n'aura pas le problème de la voiture stationnée 11 mois dans le stationnement, c'est-à-dire qu'on va pouvoir... Nous autres, on a des équipements, on a des inventaires de produits, des équipements, des gens qui travaillent pour nous. On n'est pas pour maintenir ça pour fonctionner un mois ou un mois et demi par année ou pour faire 2 livraisons, alors que, habituellement, on en fait 7, 8, 10. Alors, c'est un peu ça fa problématique. C'est là-dessus qu'on achoppe, 50-50. Pourquoi ils refusent 102 000 000 $? J'espère que vous allez trouver la réponse parce que, nous, on ne l'a pas eue. Ils ne veulent pas nous le dire. Ça ne correspond tout simplement pas à leur stratégie énergétique.

Puis, comme on l'a mentionné dans notre mémoire, on n'a jamais offert la substitution, parce que je pense que ça c'est utopique. On ne demande pas la substitution des appareils électriques par des appareils au mazout. On demande tout simplement d'avoir une part dans un marché qui, je pense que, pour l'avenir du Québec et pour les consommateurs, doit être avantageux autant pour eux autres, pour leur consommation directe, que pour la société en général. Si ça coûte moins cher à Hydro, le consommateur va éventuellement payer moins de taxes, on l'espère.

Mme Bacon: Vous suggérez, dans votre présentation, un comité tripartite.

M. Martel: Oui.

Mme Bacon: Quel serait le mandat que vous voudriez voir donner à ce comité-là et quels sont les objectifs que vous voulez atteindre, parce qu'il faut quand même se fixer ça au départ?

M. Martel: Moi, j'aimerais bien voir l'agenda caché d'Hydro. Si on pouvait juste le savoir, je veux dire en tant que... Je pense qu'il y a eu des présentations de M. Caillé, de Gaz Métro, qui a probablement eu des propos similaires, dans certains cas, avec nous, qui est un autre fournisseur d'énergie. Il y a peut-être un agenda caché qu'on ne connaît pas.

Il y a des choses qu'on propose, et je pense, en toute logique, que les propositions qu'on fait semblent, à tout le moins, rationnelles. Puis, qu'on se fasse refuser de façon, je veux dire, cavalière, sans... Ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est le résultat de trois ans de négociations. Ce n'est pas d'hier qu'on est ici.

Mme Bacon: Oui, mais le mandat que vous donneriez à ce comité tripartite?

M. Martel: Le mandat, c'est de connaître la façon la plus efficace, je pense, de chauffer les résidences du Québec, tout en regardant, évidemment, au point de vue macro-économique, les économies que tous les gens peuvent engendrer, les économies que ça peut engendrer tant au niveau, si on veut, gouvernemental, au niveau d'Hydro, puis au niveau du consommateur final, qui est celui qui paie au départ.

Mme Bacon: Et les objectifs à atteindre, c'est que chacun a sa part du marché?

M. Martel: je pense que ça serait logique. on n'est pas en train de dire à hydro: sortez complètement du marché. sauf que, si vous regardez... d'un côté, ils nous disent: bon, on investit 1 800 000 000 $ dans un programme d'efficacité énergétique, puis, d'un autre côté, on continue à construire 45 000 maisons à chaque année et il y en a 99,9 % qui se construisent, qui sont à l'électricité, avec des plinthes électriques. puis ça, bien, on n'en parle pas plus qu'il faut. alors, finalement, on peut investir le montant qu'on voudra. je vous garantis qu'en l'an 2003, quand ils auront investi 1 800 000 000 $, ils vont avoir construit assez de maisons électriques neuves pour effacer toute cette économie-là qu'ils vont avoir générée.

Mme Bacon: Quand vous fixez à 3000 $ la subvention qu'Hydro-Québec devrait verser pour l'installation d'un système de chauffage biénergie dans les maisons neuves, sur quoi vous vous basez pour trouver le chiffre de 3000 $? Est-ce que cette subvention-là serait rentable pour l'ensemble des consommateurs d'électricité?

M. Martel: Bien, premièrement, j'aimerais bien vous le dire, mais... Au départ, elle est déjà fixée, parce que Hydro donne déjà 3000 $, actuellement.

Mme Bacon: Oui.

M. Martel: Alors, on ne change rien dans le programme.

Mme Bacon: Vous gardez le même montant?

M. Martel: On garde le même montant, sauf que, nous, on donne 500 $ de plus. Ce qu'on dit à HydroQuébec, c'est: Vous, vous avez un programme de 3000 $, parce que vous avez fait vos économies, puis vous avez, évidemment, un cash-flow pas mal plus gros que nous autres. Nous autres, on vous dit: On va vous aider à promouvoir l'investissement dans la maison neuve, on va vous donner un 500 $ additionnel, plus, évidemment, notre participation au niveau du programme biénergie. Alors, avec toute l'industrie pétrolière, je pense que tous les gens commis dans un programme biénergétique, on n'essaiera pas, ni l'un ni l'autre, de se mettre des bâtons dans les roues, mais on va travailler, je pense, dans le même sens.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, c'est un cri du coeur que vous nous lancez.

M. Martel: Oui, ça a pris du temps avant qu'on en fasse un, mais, là, je pense qu'on est à bout.

M. Chevrette: Ça se sent au niveau du mémoire, effectivement. J'étais même surpris.

M. Martel: Pardon?

M. Chevrette: J'étais même surpris.

M. Martel: Habituellement, les gens de l'industrie pétrolière sont très conservateurs.

M. Chevrette: C'est parce qu'on n'est pas porté... Oui, mais c'est...

M. Martel: Mais ce n'est pas une allusion politique que je fais ici, là. (17 h 30)

M. Chevrette: Non, non. Je...

Mme Bacon: Ici, ça ne nous touche pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Soyez sans crainte, de ce côté-ci non plus. On a pris des beaux risques, dans le passé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Le message est passé. Changeons de poste.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Donc, blague à part, votre mémoire... D'abord, pour moi, il est très révélateur, parce que je vous avoue que je ne croyais pas que vous auriez périclité autant. Puis, il ne faut quand même pas se surprendre à cause de toutes les prises de position contre l'utilisation du mazout. Depuis des années, se sont multipliées les interventions contre de façon assez régulière, mais je ne croyais pas que ça avait chuté de moitié ou à peu près. En tout cas, en ce qui regarde le nombre de détaillants, c'est clair que c'est de moitié, d'après ce que j'ai compris dans votre mémoire, en membres.

M. Martel: Oui. En consommation, c'est encore plus.

M. Chevrette: En consommation, c'est...

M. Martel: En consommation, c'est encore plus.

M. Chevrette: C'est encore plus?

M. Martel: Oui. En consommation, si je me rappelle bien, fin des années soixante, début des années soixante-dix, il y avait 1 300 000 maisons qui chauffaient au mazout. Aujourd'hui, il y en a environ 450 000. Donc, c'est une chute d'environ 900 000 maisons, encouragée par les programmes gouvernementaux, autant au niveau fédéral qu'au niveau d'Hydro-Québec. Puis, on a fait un petit calcul rapide, l'autre jour. S'il n'y avait pas eu cet encouragement, HydroQuébec, du fait que ces 900 000 maisons sont rendues électriques, perd 428 000 000 $ par année pour amener l'électricité dans ces maisons, parce que, si elles étaient restées au mazout, ça ne lui coûterait pas le coût net que ça coûte pour amener 1 kWh dans une maison, aujourd'hui, qui est 0,034 $, là.

M. Chevrette: Mais, pour ce qui est des groupes environnementaux, des groupes écologiques qui se prononcent catégoriquement contre vous...

M. Martel: Oui.

M. Chevrette: ...vous dites qu'il y a du charriage-

M. Martel: Bien oui, c'est...

M. Chevrette: Vous affirmez qu'il y a du charriage, mais vous n'élaborez pas davantage. Quand ils disent que c'est la source d'énergie la plus polluante par rapport aux trois grandes sources, qui sont l'hydroélectricité, le gaz naturel et vous, qu'est-ce que vous répondez, à ces gens?

M. Martel: Bah! Ce que je vous réfère... Premièrement, je ne veux pas faire une bataille de spécialistes, parce que je n'en suis pas un, puis je...

M. Chevrette: Bien, moi non plus, on va s'entendre.

M. Martel: Si je me réfère à vos propos, tantôt, la pollution... Il y a la pollution de l'air, il y a la pollution visuelle, la pollution sonore, etc. Alors, je pense qu'on pourrait élaborer longtemps sur le terme «pollution», puis sur le terme «effet de serre». Je pense qu'il y a des gens qui ne s'entendent pas encore sur l'effet qu'il y a sur l'effet de serre. Il y a des gens qui disent que c'est extrêmement dangereux puis que, dans cinq ans, on va disparaître, on ne pourra même plus sortir dehors.

Alors, nous, on a un document qui est en train d'être comptabilisé au niveau de l'effet environnemental de nos propositions. En fait, il faut quand même réaliser qu'actuellement il se passe quelque chose x au niveau environnemental, et puis, nous, avec l'effet de nos propositions, on veut démontrer que l'effet net ne sera sûrement pas une détérioration de l'environnement, mais sûrement une amélioration de l'environnement versus ce qui se passe actuellement.

M. Chevrette: C'est indiscret de vous demander si la réponse d'Hydro était signée par quelqu'un?

M. Martel: Oui, elle est signée par quelqu'un. M. Chevrette: C'est qui?

M. Martel: Parce que c'est le forum. Je l'avais écrit, puis je l'ai enlevé. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Non, non, mais, moi, je veux savoir. C'est public, ça. '

M. Martel: Oui, bien, c'est signé par Raymond Godbout, vice-président délégué à l'efficacité énergétique.

M. Chevrette: O.K. Vous n'aurez pas à chercher, Mme la ministre.

Mme Bacon: Je l'aurais trouvé. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Je suis convaincu que vous l'auriez trouvé, mais j'ai tendance à vous aider.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bacon: On a vu ça aujourd'hui.

M. Martel: C'est beau, le partenariat, hein!

Mme Bacon: Oui, mais ça ne dure pas tout le temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Ça dépend des journées.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ça dépend de la température.

M. Chevrette: Je vous remercie de l'information.

À la page 6, vous dites que le mazout, c'est «propre, propre, propre»...

M. Martel: Non, ce n'est pas à 6, ça.

M. Chevrette: ...et vous vous moquez, d'une certaine façon, de l'hydroélectricité, qui a déjà utilisé ce slogan.

M. Martel: On n'est pas 12 012, nous autres, par exemple.

M. Chevrette: Non. Ils sont rendus 27 000. Mais ma question est très sérieuse. Fondamentalement, reconnaissez-vous, cependant, que l'hydroélectricité est moins polluante que le mazout?

M. Martel: c'est comme je vous le disais tantôt, m. chevrette, ça dépend ce qu'on qualifie comme pollution. si, moi, j'ai un pylône de 100 pieds en arrière, puis que, quand c'est humide, j'entends l'hydroélectricité passer dans les fils, puis qu'il y a des gens qui disent qu'il y a de l'incidence sur le cancer à cause de ça — moi, je ne suis pas un expert, comme je vous le dis — ce n'est pas évident que, pour moi, l'hydroélectricité, ce n'est pas polluant. puis, si je reste dans une réserve, quelque part, qu'on inonde un terrain, une région x, ce n'est pas évident, pour moi, que l'hydroélectricité, ce n'est pas polluant. '

Alors, si on parle de pollution, comme je vous le dis, on peut en discuter longtemps, puis on peut peut-être dire: Bien, on parle du méthane, on parle du CC^, on parle des CFC? Vous savez que, la pollution, on peut s'étendre longtemps sur le sujet. Ce qu'on sait, par exemple, c'est que, si on chauffe, quand on vous parle d'une solution pour le consommateur, quand on parle d'une résidence, aujourd'hui, qui est chauffée avec des plinthes électriques, vous savez que l'environnement

ambiant, dans une maison chauffée avec des plinthes électriques, l'air devient vicié. Puis ça, il y a des études qui sont en train d'être faites par des scientifiques pour montrer que, premièrement, il y a, au niveau du taux d'humidité, au niveau de la circulation de l'air, etc., des choses qui sont... Même, il va y avoir des réglementations au niveau fédéral et, j'espère, au niveau provincial, au niveau de la circulation d'air, du nombre de changements d'air. Ça, ça en est de l'environnement, puis ça en est de la pollution par l'électricité qui se produit dans les maisons.

Alors, je ne serais pas prêt à vous dire: Oui, on est plus polluant. Ça dépend sur quelle base on va discuter et sur quels items vous voulez discuter.

M. Chevrette: Pour un gars qui n'est pas spécialiste, vous vous débrouillez assez bien dans vos réponses.

L'autre question que j'ai à vous poser, c'est la suivante: Comment vous expliquez, vous autres, qu'Hy-dro-Québec se refuse même à discuter? Comment vous expliquez ça?

M. Martel: Comme je vous le dis, ça fait trois ans qu'on discute avec Hydro-Québec, puis ça, c'est la deuxième phase. Il y a eu le programme biénergie au départ, au début des années quatre-vingt, où il y a eu des discussions avec Hydro-Québec jusqu'à la dernière minute et, finalement, bon, les négociations ont achoppé. On arrive avec un programme Bi-énergie nouvelle, où les intentions semblent très bonnes. Nous, on a approché Hydro-Québec, on a eu des consultations. Des réunions, croyez-moi, on en a eu, avec des gens très haut placés d'Hydro, les plus haut placés d'Hydro, même, et puis on nous a dit: Bah! C'est vrai, un partenariat, c'est intéressant, et tout ça. Alors, évidemment, nous, peut-être qu'on était un peu naïf — j'espère qu'on le devient moins aujourd'hui — on a avancé dans ce dossier-là pour se faire répondre, une bonne journée, après avoir acculé ces gens-là au mur, parce que...

Nous, on a des associations, mais on a des membres, et il y a de grosses compagnies comme de petites compagnies. On est prêt à commettre des énergies et des dollars, mais, à un moment donné, il faut qu'on ait un «commitment»: ou bien non on y va, ou bien non on n'y va pas. Alors, on a eu la réponse d'Hydro. Évidemment, ils ont le droit de répondre ce qu'ils veulent. Alors, ils ont répondu ce qu'ils voulaient, et ça, on a constaté encore leur réponse négative. Évidemment, la façon cavalière... J'ai profité du forum aujourd'hui, parce qu'on avait un petit peu de frustration, et ça nous donne l'occasion de la passer.

M. Chevrette: Ça soulage. M. Martel: Ça fait du bien. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Vous ne croyez pas qu'à moyen et à long terme il va falloir que vous vous résigniez? Si on regarde évoluer tous les intervenants qui sont passés devant nous, à moyen et à long terme, tout le monde nous demande de diminuer les sources de pollution. On s'en va vers des énergies neuves, nouvelles, telles les éoliennes, le solaire, et on en met. Ça a l'air d'être un courant, en tout cas, qu'on sent, qui semble irréversible. Est-ce que vous avez pris conscience de cela? Et est-ce que vous êtes sur le point d'être capable de discuter, par exemple, avec Hydro-Québec, de nouveaux types de technologies qui pourraient être des substitutions à la situation actuelle?

M. Martel: Écoutez, c'est difficile de voir dans le futur. Je vous écoutais tantôt avec vos commentaires sur les éoliennes, s'il y en avait une série jusqu'à Gaspé, peut-être que ça ne serait pas trop excitant.

M. Chevrette: II y en a un groupe qui va proposer ça demain.

M. Martel: Oui. D'accord.

M. Chevrette: On a lu les mémoires un peu d'avance.

M. Martel: Mais, évidemment, je pense que tout le monde a le droit de prêcher pour sa paroisse, mais, si je vous donne un exemple... On parle de prévisions, ou bien on va vous parler des tendances au niveau de l'environnement, de la pollution. Au début des années quatre-vingt, on prédisait que le baril de pétrole coûterait 60 $ le baril. Puis, évidemment, il y avait des projets d'investissements un peu partout dans le monde. Bon, il y en a encore qui se font pas loin de Terre-Neuve. Or, si je vous citais des statistiques, ce n'est pas... Le prix ne vient pas tout à fait en relation avec ce que vous dites, mais ça vous donne une idée que les gens qui prédisent le futur ont un petit peu de difficultés. depuis 1983, le prix de l'électricité a augmenté de 54 %, celui du gaz de 45 % et celui de l'huile à chauffage, du mazout domestique a diminué de 1 %. alors, au début des années quatre-vingt, on prédisait le baril de pétrole à 60 $ le baril; une augmentation faramineuse d'à peu près 300 %. admettons qu'il est stable, le prix du pétrole. donc, oui, vous avez raison. c'est sûr qu'il y a une tendance au niveau d'être plus propre, plus fin, mais je pense que l'industrie pétrolière, si vous regardez l'efficacité des équipements qu'il y a aujourd'hui, il y a eu énormément de recherche — et je l'ai mentionné tantôt dans le mémoire — non subventionnée. je pense que jamais personne de l'industrie pétrolière n'a demandé des subventions pour des équipements ou quoi que ce soit. on a amélioré l'efficacité de nos équipements. on est habituellement des gens qui sont assez proactifs au niveau de la protection de l'environnement.

Je peux parler strictement du secteur chauffage. Si vous connaissez l'industrie pétrolière un peu plus, vous

savez qu'au niveau du raffinage, que ce soit l'essence sans plomb, que ce soit, par exemple, un groupe d'intervention comme le COPIM, au niveau maritime, je pense qu'on a toujours été proactifs. Puis, en bon français, on ne dort pas sur la «switch». (17 h 40)

M. Chevrette: Mais je pense que le Québec est peut-être dans une situation un petit peu particulière, en ce sens que, nous, on n'a jamais eu d'aide ou pas du tout du gouvernement fédéral. Je regardais le fédéral investir dans Hibernia, c'est des gros sous; dans l'expérience du nucléaire en Ontario, c'est des millions et des centaines de millions de dollars que le fédéral a investis. Mais, nous, au Québec, on s'est débrouillé seul, et puis ça a été... Vous ridiculisez un petit peu le joyau québécois qu'est Hydro-Québec, au-delà de ses défauts, c'est un maudit beau capital qu'on a acquis comme population québécoise...

M. Martel: Effectivement.

M. Chevrette: ...comme coin de terre.

M. Martel: On n'est pas en train de vous dire qu'on veut détruire Hydro-Québec, au contraire, on est en train de demander à Hydro-Québec de travailler avec elle. On est prêt à investir 100 000 000 $ dans un programme, et elle ne veut pas. Si vous regardez au travers de nos propos, c'est sûr qu'il y a peut-être un moment donné où on était un petit peu sarcastique — je vous expliquais pourquoi tantôt — mais je pense que la base de nos calculs, elle est très rationnelle. On veut investir de l'argent, on n'est toujours bien pas pour se mettre à genoux devant elle.

Je trouve qu'à un moment donné il faut arrêter, et il faut dire les choses comme elles sont. Je pense qu'on peut travailler dans un partenariat avec elle, on a des choses à offrir. Hydro-Québec a une compétence, effectivement. Si on regarde au niveau des utilités, en Amérique du Nord, Hydro-Québec est probablement une des meilleures, dépendant des façons dont on les évalue, mais, nous aussi, au niveau de l'industrie pétrolière. Regardez tout ce qui s'est passé depuis 1970. On nous a tapé sur la tête, on a essayé de nous éliminer de toutes les façons possibles et imaginables et on est ici devant vous. Mon confrère me disait dernièrement qu'il y a 20 ans il y a un industriel qui lui a dit: Ne fais pas ton avenir dans l'huile à chauffage, il n'y en aura plus dans 5 ans.

Alors, ici, on est en 1993, et je pense qu'il y encore de l'espoir. Si on commence à regarder les choses de façon positive, moi, je me dis que l'industrie pétrolière peut travailler de concert avec Hydro-Québec, et on peut faire de grandes choses. Je ne veux pas dénigrer Hydro-Québec, loin de là, sauf que je pense que son attitude, ça, par exemple, on pourrait en discuter longtemps.

M. Chevrette: Ah! ça, je suis d'accord avec vous.

Le Président (M. Audet): Merci.

M. Charlebois: M. Chevrette, si vous permettez...

Le Président (M. Audet): Oui.

M. Charlebois: Je suis fier d'être Québécois, je suis fier d'Hydro-Québec, mais je suis fier aussi de gagner ma vie avec le pétrole.

M. Chevrette: Ah! ça, je n'en doute pas.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Gatineau, vous disposez d'environ sept minutes et demie.

M. Lafrenière: Merci, M. le Président.

À la page 6 de votre mémoire, vous proposez que les subventions versées par le contribuable pour maintenir le tarif d'électricité à un niveau compétitif soient désormais réduites. Pourriez-vous expliciter davantage vos préoccupations?

M. Martel: Excusez-moi, monsieur. Pourriez-vous juste répéter votre question? Parce que je cherchais ma page.

M. Lafrenière: À la page 6 de votre mémoire, vous proposez que les subventions versées par le contribuable pour maintenir le tarif d'électricité à un niveau compétitif soient désormais réduites. Pourriez-vous expliciter davantage vos préoccupations?

M. Martel: Ce qu'on disait en fait — c'est un petit peu détourné ça... Ce qu'on disait, c'est que plus Hydro-Québec continue à construire des maisons électriques, plus ça lui coûte cher, parce que, comme on le disait tantôt, quand on amène 1 kWh dans une maison, ça lui coûte un coût net de 0,034 $ du kilowattheure. Alors, plus elle continue de faire ça, plus le consommateur subventionne, par l'entremise de ses taxes, par l'entremise de ses paiements différés, etc., Hydro-Québec pour pouvoir amener l'électricité justement à ces maisons.

Alors, ce qu'on dit, nous autres, c'est qu'ultime-ment — et là on n'entrera pas dans la tarification, parce que c'est un sujet sur lequel on pourrait parler longtemps — on dit, je pense, qu'il faudrait tendre vers le vrai coût, et, à ce moment-là, on s'apercevrait qu'effectivement il y a des énergies qui sont beaucoup plus économiques que l'électricité. Je parle toujours du secteur résidentiel.

M. Lafrenière: Vos propositions portent sur le parc des maisons existantes et sur les nouvelles constructions.

M. Martel: Oui.

M. Lafrenière: Votre objectif de rejoindre 50 % des constructions neuves, soit une maison sur deux, n'est-il pas un peu ambitieux?

M. Martel: bien, je pense qu'il n'est pas... il y a peut-être d'autres gens qui ont demandé à hydro-québec de se retirer totalement du marché. nous autres, l'utopie, je pense qu'on n'est pas tout à fait d'accord. alors, ce qu'on dit, c'est 50 % du marché, en fait, biénergétique. il faut quand même s'entendre là, il y a de l'électricité dans ces maisons-là. l'utopie c'est de dire qu'on voudrait avoir tout le marché à l'huile à chauffage. ça, on sait qu'on ne l'aura pas. on pourrait dire qu'on veut avoir 50 % du marché tout à l'huile à chauffage, mais, encore là, on le met de côté cet objectif-là tout de suite. on aimerait bien, comme paul-émile le disait, gagner notre vie, mais on dit: 50 % à la bié-nergie.

Je pense que le consommateur ne réalise pas — et on le voit lorsqu'on discute avec les gens — les gens ne réalisent pas ce qui se passe actuellement. Si on faisait un sondage, si j'avais fait un sondage ici auparavant, vous auriez dit probablement qu'Hydro-Québec est la source d'énergie la moins chère, peut-être. Dépendant des présentations qu'il y a eu, vous en auriez peut-être nommée une autre. Mais ce qu'on est en train de mentionner ici, c'est 50 %. Je pense — c'est sûr que c'est un objectif à long terme; on n'est pas en train de dire que, demain matin, on va atteindre cet objectif-là— que, si la population réalisait... Regardez dans les provinces maritimes, en Atlantique, que ce soit à Terre-Neuve ou en Nouvelle-Ecosse, etc., il se construit plus d'une maison sur deux totalement au mazout. On est encore quand même dans le même pays, et ils ont un climat qui nous ressemble.

M. Lafrenière: La commission ici a reçu le mémoire de l'Association des redistributeurs d'électricité du Québec et des réseaux municipaux, qui proposent d'étendre l'option biénergie à la grandeur du Québec, et ce, par souci d'efficacité énergétique. Comment votre groupement réagit-il à cette proposition d'appui?

M. Martel: bien ça, premièrement... vous parlez de contrôler, probablement, les sondes biénergie de façon automatique — on sait que ça existe actuellement. hydro ou les redistributeurs d'électricité pourraient contrôler et avoir jusqu'à 98 % de consommation électrique dans une maison. maintenant, si vous, ça vous intéresse de prendre votre douche à trois heures du matin ou de faire votre lavage à cette heure-là, c'est une chose. ce qui arrive, c'est que, si, à un moment donné, on contrôle ça, ce n'est qu'un incitatif à utiliser ou non la biénergie ou l'électricité. alors, c'est bien évident, puis je peux comprendre le mémoire des redistributeurs d'électricité, mais si on regarde, par exemple, notre cas à nous, je pense qu'il est préférable, si l'on veut, de s'en aller vers une option qu'on prône.

M. Lafrenière: On constate, sur le marché, que les systèmes de chauffage s'améliorent et deviennent moins énergivores. Faites-vous la promotion de ces équipements plus performants?

M. Martel: Encore là, je reviens toujours avec ma non-subvention, mais on fait du financement d'équipement depuis plus de 10 ans, et on finance des consommateurs à même notre propre cash-flow. Avant même le programme de biénergie d'Hydro-Québec, il se vendait des milliers de fournaises totalement au mazout, parce qu'il n'y en avait pas, de fournaises intégrées biénergétiques, avant le programme d'Hydro-Québec. Alors, on finançait. On a toujours donné des facilités de financement à ces gens-là, puis on en donne encore, même au travers du programme biénergie. Donc, Hydro-Québec subventionne un montant x, mais, nous, on absorbe quand même le coût du financement, actuellement.

M. Lafrenière: C'est un facteur qui contribue à vos ventes?

M. Martel: Oui, évidemment. Oui. Oui, parce que c'est un service au client, on offre des plans de financement, dépendant des compagnies, jusqu'à 60 mois. Alors, à ce moment-là, ça permet au consommateur, évidemment, d'établir un budget, puis de pouvoir étaler ses paiements sur une période de 36 à 60 mois.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Moi, c'est un commentaire, dans un premier temps. Notre société est gâtée. L'hydroélectricité représente pour elle quelque chose de propre, non apparent, pas de fumée, rien, tu sais, puis pas de réservoir à côté. Vous pensez véritablement... Je ne sais pas comment vous réagissez, mais croyez-vous que la population va, à très court terme, changer ses habitudes, ses gâteries en faveur d'une source d'énergie qui, soit dit en passant, est publicisée dans le sens d'être plus polluante, en plus?

M. Martel: Oui, mais...

M. Chevrette: Est-ce que vous avez réalisé cela? Comment vous voyez la possibilité d'une modification, à ce moment-là, du comportement d'une société?

M. Martel: Évidemment, il y a, premièrement, un forum comme celui-ci qui, on l'espère, va nous permettre de faire connaître un petit peu la position au niveau de l'huile à chauffage. Deuxièmement, vous parliez d'un réservoir, tantôt. Il y a actuellement des recherches, et, croyez-le ou non, nulle part en Amérique du Nord... Vous savez qu'aux États-Unis il y a 11 000 000 de résidences qui chauffent au mazout domestique dans l'est des États-Unis, et ils ont encore le même vieux réservoir qui a été inventé dans les années quarante, alors que, nous, depuis environ un an et demi,

nos manufacturiers ont des nouveaux modèles de réservoirs qui ne sont absolument pas apparents. Il y a des réservoirs qui mesurent six pouces de large et qui peuvent s'appliquer sur un mur, une paroi murale, où vous ne les voyez même pas.

Alors, il y a des études qui se font, il y a des travaux qui se font de ce côté-là. On est conscients qu'au point de vue esthétique, et parce que les maisons rapetissent un peu, les gens veulent avoir plus d'espace viable. On travaille là-dessus, on en est conscients, sauf que, vous savez, si on parle d'autres sources d'énergie, si on parle, par exemple, du gaz propane ou de quoi que ce soit, il y en a, des réservoirs, soit à l'intérieur, soit à l'extérieur, etc. À un moment donné, je pense que les gens doivent passer par-dessus, si on parle au niveau de l'économie, puis tout ça. Nous, on fait des travaux pour essayer justement de cacher... En fait, si on pouvait cacher le réservoir, le faire disparaître quelque part, probablement que les gens seraient encore plus réceptifs à l'huile à chauffage. Mais il faut, au départ, faire connaître notre produit, puis ça, on vous l'avoue, que, peut-être, ça a été... Premièrement, il y a eu des campagnes pour le dénigrer, et on n'avait pas les moyens de combattre ça. Peut-être qu'aujourd'hui il y a des façons, en tant qu'association, de promouvoir notre produit, puis, si on peut travailler de concert avec des gens comme Hydro-Québec, et puis...

Imaginez si Hydro-Québec, on travaillait main dans la main avec eux, comment ça serait positif. Les Hydro-Québécois, on en a fait la promotion pendant des années, tout le monde était fier, puis toujours fier d'utiliser l'électricité. Maintenant, chauffer à l'électricité, ce n'est peut-être pas la meilleure solution. Alors, il faudrait qu'à un moment donné il y ait quelqu'un qui le dise, puis il faudrait peut-être qu'Hydro n'ait pas peur de le dire. Ils le disent peut-être, mais ce n'est pas toujours sur la place publique.

M. Chevrette: Accepteriez-vous de participer à un débat beaucoup plus global sur le plan énergétique? (17 h 50)

M. Martel: Sûrement qu'on accepterait, sauf que, comme Mme Bacon le mentionnait tantôt, il y a déjà un groupement formé avec les gens de l'ICPP, où on est représenté par une branche. Évidemment, vous réalisez que, dans un comité comme celui-là, on est beaucoup plus au niveau macro-économique et des grandes solutions globales au niveau énergétique, etc. Nous, lorsqu'on plaide dans un mémoire comme celui-ci, on parle de... Véritablement, on cible quelque chose qui est le programme biénergie, qui n'est pas un programme particulièrement dispendieux si vous regardez l'enveloppe totale au niveau d'Hydro-Québec, mais qui aurait des effets extrêmement positifs, tant au niveau du consommateur, qu'au niveau d'Hydro-Québec, qu'au niveau, évidemment, de nos associations, des membres de nos associations. C'est bien sûr qu'on ne peut pas refuser, si on veut, de participer à un comité, sauf que, comprenez-nous, ça me semble un paquet de comités et de discussions qu'on a sur le même sujet. On en est rendu...

M. Chevrette: Oui, mais, moi, je ne parlais pas d'un comité de travail, là, un débat national sur l'énergie comme telle.

M. Martel: Sûrement.

M. Chevrette: Parce que, vous êtes bien conscient... Vous étiez ici, tantôt, quand j'ai parlé au groupe qui vous a précédés. On fait un débat pour 40 % de l'énergie, en oubliant 60 %, et on axe... Je me rends compte qu'il y a beaucoup de mémoires qui, dans le fond, vous visent, alors qu'on étudie le plan de développement d'Hydro-Québec. Il y a d'autres mémoires qui viennent chialer contre d'autres formes d'énergie. On parle du plan de développement de l'hydroélectricité. C'est pour ça que, moi, j'adhère au courant de ceux qui disent: Si on avait peut-être un débat plus large... Mais je comprends qu'il faudrait peut-être l'encadrer quant à la forme pour ne pas que ça devienne non plus un immense spectacle, pour arriver à des choses précises, et peut-être contribuer à modifier des comportements de la population sur l'ensemble des sources énergétiques.

M. Martel: On ne peut pas être contre un débat de cette sorte, sauf qu'il faut réaliser qu'évidemment nos associations sont majoritairement formées d'entrepreneurs, de gens qui ne peuvent pas attendre peut-être encore quatre, cinq, six ans, à savoir que quelque chose de bien gros se développe. On a besoin de solutions rapides, le plus rapidement possible, justement, pour pouvoir continuer à opérer.

Finalement, n'oubliez pas qu'il y a des solutions qui sont irréversibles. Un coup qu'un consommateur est à l'électricité avec des plinthes électriques, je vais vous garantir que ça va lui coûter toute une fortune pour revenir à l'air chaud, mais c'est lui qui va être pénalisé, par exemple, actuellement, parce qu'il est pris avec ses plinthes électriques, ses enfants ont de la misère à respirer, et ils font des allergies. Il ne peut pas ajouter aucun équipement, que ce soit un humidificateur, un filtre électronique, un air climatisé, quoi que ce soit. Il ne peut rien faire. Il est pris avec ses plinthes électriques.

M. Chevrette: Dans ce cas-là, on lui fait accroire que c'est les tapis.

M. Martel: Pardon?

M. Chevrette: On lui fait accroire que c'est les tapis.

M. Martel: Ouais. C'est ça, oui. Une voix: II fait quoi? M. Martel: Les tapis.

Le Président (M. Audet): M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Voulez-vous rajouter quelque chose? Une voix: II a dit les tapis.

M. Boulé (Gilbert): Ah! Les tapis? Ah! c'est correct.

Le Président (M. Audet): Allez-y, M. le député de Drummond.

M. Chevrette: C'était une blague.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

Moi, je vous écoute... Qu'est-ce que je vais faire, là, si je suis un consommateur, demain matin? Parce que rien ne m'empêche, moi, de construire une nouvelle maison et de dire à Hydro-Québec: Bon! Je vais prendre ta subvention biénergie et je vais utiliser le mazout. Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui, en 1993 — les subventions sont là, vous avez votre part que vous donnez aussi...

M. Martel: Non, on ne donne pas de part, actuellement.

M. St-Roch: Vous ne la mettez pas. Parce que vous avez parlé tout à l'heure d'une méthode de financement où il y avait une aide...

M. Martel: Oui. Ce qu'on offre au client, c'est, par exemple... Qu'il achète quelque équipement que ce soit, on lui offre la possibilité de faire des paiements mensuels sur une période. Donc, on fait du financement, entre guillemets, de quelque équipement que ce soit.

M. St-Roch: Mais qu'est-ce qui va faire que les consommateurs vont décider d'utiliser la biénergie, même si Hydro-Québe disait demain matin: On y va avec votre formule, on convertit nos 3000 $, vous mettez vos 500 $, on s'en va et on va promouvoir le mazout? Qu'est-ce qui va faire que, moi, en tant que consommateur, je vais être incliné, là, à prendre votre option au lieu de prendre tout électrique ou au lieu de prendre biénergie avec le gaz?

M. Martel: Bien, il faut réaliser, premièrement, que les gens consomment... Ils font construire des maisons électriques parce que ça fait 25 ans qu'ils se font dire que l'électricité, c'est la source d'énergie la meilleure et la plus économique. Alors, il faudrait, premièrement, que quelqu'un leur dise que ce n'est pas vrai. Il faudrait qu'il y ait des programmes incitatifs, à savoir que, les gens, il faudrait qu'ils dirigent autrement leur consommation que vers l'électricité dans les maisons.

Ça, nous, on peut le faire, mais il faut quand même réaliser qu'il y a deux poids, deux mesures. Il y a

Hydro-Québec avec des milliards de dollars, et il y a nous, qui sommes des associations formées d'entrepreneurs qui doivent investir des montants d'argent. Donc, c'est David et Goliath. À ce moment-là, nous, on fait la promotion, et il y en a des gens, vous savez... Depuis des années, il y avait des maisons qui s'installaient avec des fournaises au mazout. Sans qu'il n'y ait de subventions, les gens en achetaient, ils ne s'en allaient pas avec des plinthes électriques. Nous, on a une force de vente... Comme je vous l'expliquais tantôt, il y a des gens qui vont dans les maisons, qui vont parler à la clientèle, etc., sauf qu'à un moment donné il y a la loi des nombres. Si on ne le dit pas au consommateur, si on n'a pas l'appui, si on veut, du gouvernement et d'Hydro-Québec et qu'Hydro-Québec ne dit pas vraiment les choses qui devraient être dites, à savoir qu'effectivement le mazout... D'autres sources d'énergie sont plus économiques — il ne faut pas se le cacher — que l'électricité. L'électricité, c'est la forme d'énergie la plus chère au Québec.

M. St-Roch: Mais vous ne croyez pas que le vrai problème, là...

M. Martel: Oui.

M. St-Roch: ...la vraie solution, c'est de revenir avec tout F interfinancement, au niveau de la tarification, avec l'interfinancement...

M. Martel: Oui.

M. St-Roch: ...et de dire: Si le consommateur a à payer les coûts réels...

M. Martel: Vous avez bien raison.

M. St-Roch: ...à ce moment-là, ça va l'inciter? Autrement, comment est-ce que vous iriez avec votre système? Tant et aussi longtemps que vous ne reflétez pas les coûts directs au niveau de la tarification, il n'y a pas d'incitatif à faire que le consommateur va analyser différentes méthodes.

M. Boulé: Ça, c'est sûr, mais disons que ce n'est pas sous notre contrôle. C'est évident — Hydro-Québec l'a avoué elle-même dans les ateliers — que, si elle vendait l'électricité au bon prix, elle ferait un milliard et demi de plus de dollars par année. Mais, étant donné qu'elle ne charge pas le bon prix, elle cache ce prix-là, il se fait de l'interfinancement. Un jour ou l'autre, on va arriver à la croisée des chemins, et les prix vont être là. tout à l'heure, pierre martel a dit que l'électricité, dans les 10 dernières années, a augmenté de 54 %. dans les années futures, ça va augmenter encore. on essaie de la maintenir en deçà de l'inflation, mais ça devrait être plus que ça. regardez — je regardais les chiffres, ce matin — comparez l'électricité par rapport à d'autres provinces canadiennes. à part winnipeg et edmonton, c'est au québec que l'électricité est la moins

chère. en suisse, c'est 0,13$ kw; ici, c'est 0,056$. peut-être que les suisses sont plus francs, ils donnent l'heure juste, parce qu'un jour c'est nos enfants qui vont payer pour ça. le marché résidentiel donne juste 17 % des revenus, et regardez les millions d'abonnés qu'il y a là-dedans. ça n'a pas d'allure.

M. St-Roch: Dernière question, parce qu'on me signale qu'il reste très peu de temps. Quand je regarde au niveau, toujours, du consommateur ou de la consommatrice, quand on fait le choix d'un système de chauffage, on parle au moins d'une dizaine d'années, normalement, dans le temps. Alors, quand on regarde toutes les rumeurs qui circulent au niveau de l'approvisionnement, au niveau du raffinage surtout, est-ce qu'il n'y a pas une inquiétude supplémentaire de la part des consommateurs...

M. Martel: Je suis content que vous me posiez cette question-là.

M. St-Roch: ...de dire: II n'y a plus de raffineries au Québec, on les voit fermer l'une après l'autre? Est-ce qu'on n'expédie pas, finalement, nos dollars complètement à l'extérieur et qu'on ne deviendra pas dépendants d'une situation qui peut être politique, économique ou géopolitique où est-ce qu'on n'aurait aucun contrôle?

M. Martel: Vous savez que l'industrie pétrolière a toujours été une industrie qui était responsable envers ses clients, et je pense qu'il n'y a pas un client qui peut dire, au Québec, qu'il a manqué de produits pétroliers. Je vais donner l'exemple le plus flagrant. En décembre 1989, l'hiver le plus froid en 150 ans, Hydro-Québec nous a dompé 500 000 000 de litres à aller livrer au mois de décembre, parce que, eux autres, ils n'étaient plus capables d'amener l'électricité dans ces maisons-là. L'industrie pétrolière, lorsque la voie maritime était bloquée, qu'il y avait la grève de la garde côtière et qu'il faisait à peu près -35 °C dehors, on nous a dit: Bien là, on ne peut plus fournir ces clients à la biéner-gie, qui sont des clients commerciaux. Voulez-vous, s'il vous plaît, vous en occuper? L'industrie pétrolière s'est retournée, et il n'y a pas un consommateur qui a manqué d'huile à chauffage.

Alors, je pense que la question de l'approvisionnement, ce n'est pas inquiétant du tout. Je pense que l'histoire de l'industrie pétrolière au Québec peut prouver hors de tout doute qu'il n'a jamais manqué de produits pétroliers au Québec. Il n'y a pas un client, je pense, qui peut dire qu'il a manqué de produits, alors qu'il y a des clients qui ont cessé d'être approvisionnés par Hydro et peut-être par d'autres sources d'énergie. Mais je ne pense pas que l'industrie pétrolière ait jamais dit à un seul client: Oups! Excusez, là, on ne peut plus vous fournir.

M. St-Roch: Prévoyez la même chose dans le futur.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Audet): Alors, messieurs, au nom des membres de la commission, je vous remercie sincèrement de votre présentation. Je vous souhaite une bonne fin de soirée, et nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Forget): Alors, la commission recommence ses travaux. Je rappelle que le mandat de la commission est de procéder à une consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec.

Je demanderais aux intervenants de l'Association Québec-solaire de bien vouloir se présenter.

Association Québec-solaire (AQS)

M. Côté (Richard): Oui. Alors, voici Guylaine Desmarais, qui est vice-présidente de l'Association, et puis moi, mon nom, c'est Richard Côté, je suis président de l'Association.

Le Président (M. Forget): Merci. Alors, je vous rappelle le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échanges: l'exposé de l'organisme est de 20 minutes et la période d'échanges est de 40 minutes.

Alors, Mme la ministre?

Mme Bacon: Non, non, c'est à eux, leur exposé.

Le Président (M. Forget): Ah! c'est vrai! Excusez-moi, Mme la ministre. Alors...

Mme Bacon: Nous voulons les entendre, M. le Président.

Le Président (M. Forget): Voilà! Merci beaucoup. Après ça, on va les...

M. Chevrette: Vous êtes nerveux, M. le Président?

Le Président (M. Forget): Non, je ne suis pas nerveux. Je suis près des gens de Joliette, je ne suis pas nerveux du tout.

M. Chevrette: Ah! O.K., très bien. Mme Bacon: Joliette, Laval, c'est correct. M. Chevrette: ...à Joliette.

Mme Desmarais (Guylaine): O.K. Alors, M. le Président, Mme la ministre, les membres de la commis-

sion, l'Association Québec-solaire tient premièrement à féliciter Hydro-Québec d'avoir tenu sa consultation publique. En général, nous sommes très satisfaits des résultats obtenus, surtout avec le délai qui était alloué. Entre autres, dans les questions retenues, des choses comme la «priorisation» des économies d'énergie comme moyen de production, l'augmentation de la recherche et développement sur l'efficacité énergétique, les éoliennes et les piles photovoltaïques, la restructuration incitative des tarifs et l'étude des «externalités» reliées aux moyens de production, ce sont, entre autres, celles-là qui nous semblent les plus progressistes dans les idées retenues.

Dans les mesures applicables immédiatement, l'AQS se réjouit de voir les principales technologies solaires, comme le chauffage passif des locaux, le préchauffage de l'air de ventilation et le chauffage de l'eau, figurer au document «Progrès technologiques et utilisation efficace de l'électricité». Mais Hydro-Québec affirme qu'elle entend promouvoir les avantages du solaire passif. Par contre, on mentionne aussi les nouvelles sources d'énergie qui pourraient pénétrer le marché québécois après l'an 2000. or, le cnrc, le conseil national de recherche du canada, avait déjà estimé, en 1980, que les mesures de nature architecturale, comme l'orientation, la fenestra-tion, la disposition des pièces et l'utilisation de certains matériaux, étaient les plus rentables parmi les mesures solaires pour combler les besoins en chauffage des bâtiments. c'était une étude de 10 maisons solaires passives dans l'est du canada qui avait été entreprise en 1980, et cette étude-là en vient à la conclusion que, pour un coût initial nul ou presque, l'architecture solaire peut rapporter des gains énergétiques pour couvrir 25 % à 35 % des besoins. il y a aussi une campagne de «monitoring» de niveau b, qui est un niveau technique assez poussé, qui a été faite entre 1983 et 1986 sur 20 maisons solaires à travers le canada. cette étude-là a confirmé que la contribution solaire moyenne était d'environ 28 %. donc, on peut voir, avec ces études, que l'architecture solaire fait certainement partie des mesures dont le coût est inférieur au coût marginal de fourniture de l'électricité. compte tenu de sa maturité technologique, le solaire passif devrait donc être inclus immédiatement dans l'option a d'efficacité énergétique. il permettrait, à ce moment-là, d'augmenter rapidement l'objectif de façon rentable. tout ce que ça prendrait, c'est un effort supplémentaire d'information et de commercialisation soutenu pour aiguiller la demande et obtenir des résultats significatifs. on voit déjà qu'il y a un intérêt à ce niveau-là, et il existe déjà, au québec, un certain nombre d'experts au niveau de la construction, des architectes, des ingénieurs, des urbanistes; ce sont tous des experts dans ce milieu-là qu'on pourrait utiliser. (20 h 10)

Une étude récente du CANMET sur le potentiel solaire passif au Canada, de 1990 à 2010, estime à 3 TWh par année la contribution solaire additionnelle de certaines technologies solaires au chauffage des locaux québécois à l'horizon 2000. Ce potentiel-là, qu'ils ont évalué, s'additionne à celui des mesures habituelles de l'architecture solaire passive, qui est la fenestration, l'orientation, des choses comme ça.

Ce chiffre-là est très conservateur parce qu'il inclut uniquement les technologies solaires émergentes les plus commercial isables et suppose un taux de pénétration du marché très raisonnable. On note pourtant que ce chiffre est supérieur au potentiel commercial de 2,7 TWh par année qu'Hydro-Québec attribue à l'ensemble des économies d'énergie dans le chauffage des locaux mentionné dans l'option A.

Alors, on note qu'il y a une différence entre les deux chiffres. Ça soulève peut-être la question qu'on aurait besoin de faire une étude plus poussée pour vraiment évaluer le potentiel solaire et les économies qui pourraient être attribuables à différentes méthodes, ce qui n'a pas été fait. En général, les experts s'entendent pour dire que, dans le bâtiment, on pourrait économiser environ un tiers de l'énergie par l'architecture solaire et un tiers par d'autres mesures d'économie d'énergie dans le bâtiment.

On note qu'il n'existe actuellement aucune étude complète sur le potentiel de l'énergie solaire au Québec et on sait pourtant qu'il y a un potentiel. Alors, l'AQS propose qu'Hydro-Québec entreprenne une évaluation sérieuse de ce potentiel. L'utilisation de la méthodologie habituelle de l'entreprise permettrait d'analyser et de comparer les mesures solaires avec les autres mesures d'économie d'énergie, et, nous, à l'AQS, on aimerait les appuyer dans cette démarche-là. On pourrait offrir une expertise et des ressources à Hydro-Québec.

Alors, comme conclusion, en attendant les résultats de cette étude, on peut quand même dire qu'il est évident que l'architecture solaire figure au premier rang des mesures d'économie d'énergie dans le bâtiment neuf et qu'elle devrait être identifiée clairement parmi les options d'efficacité énergétique dans l'annexe 2 du plan de développement afin que les intervenants concernés perçoivent un signal positif.

Je signalerai aussi que l'AQS travaille actuellement, avec la collaboration d'Énergie, Mines et Ressources Canada, du Bureau de l'efficacité énergétique et d'Hydro-Québec, à sensibiliser les intervenants municipaux à l'importance d'une orientation correcte des nouveaux lotissements pour profiter du potentiel solaire. On organise un colloque le 17 mars, qui aura comme thème: «Planification urbaine solaire», et qui visera à informer les gens à ce niveau-là et à mettre les différents intervenants en contact. On envisage aussi cette année toute une série d'actions dirigées vers les constructeurs d'habitation pour leur démontrer la simplicité des options solaires et on souhaite réellement qu'Hydro-Québec s'implique dans ces actions de promotion, qui vont profiter aussi à sa clientèle.

Je parlais du colloque. Nous, on aimerait continuer la collaboration qui a déjà été amorcée avec Hydro-Québec pour cet événement-là, la continuer et aussi la développer pour que les objectifs généraux soient atteints, des objectifs qui, en fait, concordent, qui sont

communs. En fait, les deux organismes ont des ressources complémentaires qui pourraient travailler ensemble pour atteindre les buts.

M. Côté (Richard): Alors, je voudrais vous parler peut-être, moi, des principaux avantages économiques de l'énergie solaire. Alors, si on regarde le principal avantage économique du chauffage solaire, c'est que ça constitue une création de richesse durable, voire inépuisable parce que chaque mètre carré de surface qui est bien orientée peut représenter environ la valeur d'un kilowatt de puissance installée. Même si c'est installé sur la façade d'une maison ou sur le toit d'un bâtiment au lieu d'être dans un barrage quelque part dans le Grand-Nord, c'est quand même l'équivalent d'une puissance installée dont les multiples se mesurent en termes de kilowatts plutôt qu'en termes de mégawatts, mais, si on additionne tous ces kilowatts-là, ça finit par faire des térawatts, comme Guylaine disait tout à l'heure.

Avec un faible investissement initial, chaque consommateur qui le décide peut capter chez lui le rayonnement solaire gratuit pour le transformer en énergie thermique à moindre coût souvent que s'il utilisait des sources d'énergie conventionnelles. Les bâtiments solaires continuent à récolter de l'énergie durant toute leur vie utile, qui peut être généralement de 20 à 50 ans. Il y a des bâtiments qui ont duré 2000 ans, mais, avec la qualité de construction qui se fait aujourd'hui, on peut quand même compter que ça dure une cinquantaine d'années.

Alors, c'est une source d'énergie qui est quand même durable, qui va bien avec tous les efforts dans le sens du développement soutenable. Ceci réduit évidemment d'autant la charge imposée au réseau électrique et la nécessité pour Hydro-Québec de s'endetter à l'extérieur. Parce que les investissements sont généralement le fait de particuliers ou de petites enterprises, alors ça ne nous oblige pas à emprunter à l'extérieur. C'est de l'investissement intérieur qui est très intéressant pour l'économie.

Ensuite, les kilowattheures qui sont générés, à ce moment-là, s'ajoutent au produit intérieur brut du Québec et puis ça contribue à renforcer notre économie. La création d'emplois associée à la conception et la construction d'installations solaires est sensiblement la même que celle qui résulte de la construction de barrages électriques. Ça, c'est affirmé dans le plan de développement d'Hydro-Québec. Ils ont fait des comparaisons et puis ils ont trouvé que c'est à peu près le même ratio de création d'emplois que de faire des gros barrages. Sauf que la différente principale, c'est que la création d'emplois dans ce cas-là est étalée dans le temps et dans l'espace, au lieu d'être toute concentrée dans un gros projet qui demande énormément d'investissements extérieurs. Et puis, ça dépend des décisions d'investissement de chaque consommateur qui peut manifester sa conscience écologique, si on peut dire, et puis son désir de laisser un patrimoine écologique intéressant à ses enfants, en faisant cet investissement-là.

D'ailleurs, le Mouvement des caisses populaires

Desjardins, il y a huit caisses de l'est de Montréal, dernièrement, qui se sont associées avec l'Association Québec-solaire, qui ont donné chacune un millier de dollars, et puis la Confédération aussi a donné un millier de dollars. On a demandé une subvention au Bureau de l'efficacité énergétique qui a doublé le montant pour faire une étude de faisabilité sur l'addition d'éléments solaires dans un contexte urbain, c'est-à-dire dans le faubourg Québec à Montréal. Et puis ça, ça vient de la base de ces caisses-là, ce sont les actionnaires de ces caisses populaires, les membres qui ont décidé qu'ils voulaient faire un effort dans ce sens-là puis qui voulaient trouver des manières de financer, des manières innovatrices de financer les économies d'énergie, par exemple, en accordant des taux d'intérêt plus bas ou en accordant des primes, en tout cas en faisant des choses comme ça. Alors là, je crois qu'on voit que la conscience de l'énergie solaire est rendue à des niveaux financiers intéressants. Ce n'est plus juste une idée qu'avaient des hippies dans les années soixante-dix, si on peut dire. C'est rendu à un autre niveau maintenant. Il y a des experts qui sont formés là-dedans.

Si on regarde les systèmes les plus courants et leur période de retour sur l'investissement, un bâtiment solaire passif très simple, en fait, a une période de retour sur l'investissement presque nulle. Parce que tout ce dont il s'agit de faire, c'est de bien orienter la façade principale et de répartir les fenêtres en gardant le même nombre de fenêtres dans la maison, en en mettant plus du côté sud puis moins du côté nord puis du côté est et ouest. Donc, le total est le même, c'est le même coût total. La seule condition préalable, c'est évidemment que les rues soient bien orientées pour permettre aux maisons de profiter de ça. Et ça, ça fait facilement 20 % d'économie de chauffage, sans mettre de masse thermique, sans mettre de système compliqué, juste en prenant de la construction standard.

Il y a d'autres technologies, disons, à un niveau un peu plus coûteux, des technologies genre le «solar wall» c'est-à-dire le mur solaire dans le genre de celui que la compagnie Bombardier vient d'installer sur son usine de Valcourt. Ça, c'est une espèce de système de tôle perforée très simple qui a un retour sur l'investissement d'environ trois ans puis qui sert à préchauffer l'air de ventilation des bâtiments industriels où il y a une grande nécessité de changer l'air. Alors, des systèmes comme ça pourraient s'appliquer aussi aux bâtiments commerciaux, aux tours à bureaux, à n'importe quel bâtiment, en les adaptant légèrement, en faisant un peu de recherche et développement là-dedans. Et ça, c'est une technologie qui a un retour sur l'investissement de moins de trois ans. Alors ça, c'est très intéressant pour les financiers. Généralement, quand c'est moins de cinq ans, ils trouvent ça intéressant.

Si on va un peu plus loin dans le retour sur l'investissement, il y a certaines mesures, comme le plancher solaire direct à basse température, entre autres, qui est très populaire en Europe, parce que les Européens trouvent que c'est le système de chauffage le plus confortable et les thermiciens s'accordent pour dire ça.

Ça, c'est un système qui possède un retour sur l'investissement de plus de cinq ans mais, quand même, qui procure un très grand confort additionnel. Et puis, ça pourrait facilement être implanté par des compagnies qui existent ici actuellement, qui ont des systèmes de chauffage de plancher mais qui chauffent ça avec du gaz ou avec de l'électricité. (-20 h 20)

II y a des systèmes combinés où, quand il fait soleil, c'est le soleil qui fait accumuler de l'énergie dans la dalle et, lorsqu'il n'y a pas de soleil, on peut avoir un appoint électrique ou au gaz qui serait hors pointe, parce que le chargement thermique de la dalle se fait pendant toute la journée, pendant que ce n'est pas l'heure de pointe électrique et, lorsque les gens arrivent à la maison, disons vers 16 heures ou 17 heures, là, la dalle est chaude, puis elle rayonne de la chaleur dans la maison pendant toute la soirée sans consommer d'électricité, à ce moment-là, parce qu'elle est déjà chauffée. Puis, vers la fin de la soirée, quand les gens se couchent, bon, ça refroidit légèrement, puis ça refroidit tranquillement jusqu'au matin, puis ça recommence, un cycle quotidien, comme ça.

Ce genre de stratégies — je ne vous donne pas un aperçu exhaustif de toutes les stratégies; je vous donne simplement des exemples qui fonctionnent bien, puis que ce sont des systèmes disponibles commercialement — ça répond bien à l'objectif d'Hydro-Québec d'étaler la demande. Malheureusement, il existe des préjugés bien répandus qui veulent qu'il n'y ait pas suffisamment de soleil au Québec et qu'il fasse trop froid pour utiliser l'énergie solaire. Mais il n'y a rien de plus éloigné de la vérité. Parce que, si on regarde, par exemple, la France, qui est à peu près à la même latitude que nous, elle a des taux d'ensoleillement hivernais moins grands que nous, mais ça n'a pas empêché l'Agence française pour la maîtrise de l'énergie et Électricité de France d'encourager fortement le recours au solaire dans les bâtiments résidentiels, entre autres en faisant des tarifications intéressantes pour les gens qui réussissent à avoir un niveau de cotation énergétique élevé pour leur bâtiment.

Il y a des pays, comme la Suède et la Norvège où est-ce qu'on ne peut pas dire que c'est la Floride, là, qui sont aux environs du 60° parallèle, donc ils ont encore bien moins de soleil que chez nous, bien, ils ont jugé bon, eux autres, de développer des systèmes d'habitats solaires adaptés à leur latitude en utilisant des techniques qui sont très semblables à celles qu'on peut utiliser ici. Eux autres, en plus, ils ont construit des systèmes de chauffage urbain collectifs où chaque habitation, disons, par des capteurs sur le toit, accumule de la chaleur solaire durant tout l'été et puis ils envoient ça dans un immense réservoir commun pour le redistribuer pendant l'hiver, un peu comme un réseau de chauffage à vapeur urbain.

Alors là, si on regarde un peu les actions à prendre pour établir ces stratégies solaires, je crois que la principale action à prendre, c'est d'informer les consommateurs, et puis ça suppose un travail à long terme sur le marché de la construction, puis sur les consommateurs de la construction.

Si on veut obtenir des résultats dans cinq ans, il faut commencer aujourd'hui à entreprendre ces actions. Si on attend dans cinq ans avant de commencer à entreprendre des actions, bien, ça va être dans un autre 10 ans qu'on va commencer à avoir des résultats. Alors, c'est le genre de chose qui, pour l'instant, ne coûterait pas très cher, de faire des campagnes d'information, mais qui va amener des résultats à moyen et à long terme. Même si le solaire ne peut pas combler les objectifs à court terme d'Hydro-Québec, soit d'essayer de sauver le plus de kilowattheures possible rapidement, je crois qu'il ne faut pas le négliger pour autant, parce que ça représente un potentiel dont l'ordre de grandeur est semblable à celui de toutes les autres mesures d'efficacité énergétique réunies dans le bâtiment, selon les chiffres qu'on a, d'après l'étude canadienne et puis d'après l'étude d'Hydro-Québec. Mais je crois que ce sont des chiffres qui sont peut-être un peu difficilement comparables. C'est pour ça qu'on croit qu'il faudrait absolument faire une étude en prenant les mêmes bases de comparaison, une étude où on utiliserait les mêmes méthodes d'évaluation qu'Hydro-Québec pour tout analyser ça.

Plus on retarde la mise en place d'actions concrètes de promotion, plus on éloigne le moment où la clientèle d'Hydro-Québec, pourra voir diminuer sa facture énergétique de façon durable.

Le Président (M. Forget): M. Côté, il vous reste une minute.

M. Côté (Richard): Oui. Alors, un exemple du rôle que pourrait tenir l'Association Québec-solaire par rapport à Hydro-Québec, ça serait de répondre aux question du public concernant les énergies soutenables à la ligne téléphonique 1-800-énergie. Nous, on veut établir des collaborations avec Hydro-Québec, on veut les augmenter. Notre volume d'activité, actuellement, est presque suffisant pour justifier l'engagement d'une personne-ressource à plein temps et notre plan de développement prévoit, dans un avenir rapproché — c'est un plan de développement qu'on a présenté au ministère de l'Énergie et des Ressources il y a deux ans — toutes sortes d'activités de transfert technologique, comme des ateliers, des conférences, des publications et des actions de ce type qu'on veut entreprendre en conjonction avec d'autres associations, comme l'APCHQ, le BEE et puis d'autres intervenants du milieu.

Là, on organise aussi un concours de design urbain solaire dont les gagnants vont être dévoilés au congrès de la Société de l'énergie solaire du Canada qui va être tenu conjointement avec l'Association Québec-solaire au mois de juillet, ici, à Québec. Alors, on espère faire une grosse action publicitaire avec ça pour montrer aux médias qu'il y a toutes sortes de solutions possibles et puis on va s'arranger pour faire une publication avec ça, après. La plupart des intervenants qu'on a approchés, jusqu'à date, sont très intéressés à collabo-

rer avec nous et ils ont montré leur intérêt à ce qu'on élargisse notre domaine d'activité aux autres énergies renouvelables pour avoir un plus large bassin de «membership».

Alors, en guise de conclusion, j'aimerais insister, disons, sur l'offre que fait l'Association Québec-solaire de collaborer avec Hydro-Québec et avec tous les autres intervenants pour fournir l'expertise concernant l'énergie solaire, parce que c'est la stratégie énergétique que Mme Bacon a dévoilée l'automne dernier qui insiste sur le fait qu'on doit travailler avec les associations existantes pour faire une synergie. Et c'est de cette façon-là, en créant une synergie, qu'on va réussir à arriver à quelque chose.

Alors, je vous remercie beaucoup, Mmes et MM. les membres de la commission, de nous avoir écoutés.

Le Président (M. Forget): Merci. Alors, Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources, un échange de 10 minutes.

Mme Bacon: Oui. Alors, je voudrais vous remercier, M. Côté et Mme Desmarais, de nous faire bénéficier de votre expérience et de votre expertise dans le domaine de l'énergie solaire. Moi, j'aimerais en savoir davantage sur votre association. Est-ce que vous avez des membres à travers le Québec? Est-ce que vous avez des buts bien précis en vous reproupant comme ça? Et quel est votre plan d'action pour les prochaines années?

M. Côté (Richard): On a des membres à travers le Québec au nombre d'environ... ça fluctue selon les moments de l'année; le minimum c'est environ 100 et ça monte à 300 dans le temps des colloques quand il y a plus d'intérêt. Les buts de l'Association, qui sont inscrits dans sa charte, c'est de faire la promotion de l'énergie solaire parce qu'on constate que les pétrolières font la promotion de l'énergie pétrolière, les gazières font la promotion du gaz et ça prend quelqu'un pour faire la promotion de l'énergie solaire et des autres formes d'énergie renouvelable parce que ce sont des formes d'énergie qui sont jugées comme essentielles pour le développement durable. Et puis notre plan de développement prévoit des actions, par exemple — je devrais peut-être vous en laisser une copie, après, ça serait peut-être mieux que de tout vous lire ça parce que...

Mme Bacon: Ça va. D'accord. Je ne voudrais pas vous faire énumérer.

M. Côté (Richard): ...il y en a une trentaine de pages.

Mme Bacon: Je vais vous poser quelques questions, M. Côté.

M. Côté (Richard): Oui.

Mme Bacon: Est-ce que le Québec présente des obstacles particuliers à l'utilisation du solaire? Ou bien est-ce que, ici comme ailleurs, la pénétration des technologies solaires n'est pas simplement retardée par la progression relativement lente des prix de l'énergie comparativement aux projections qu'on a pu faire à une certaine époque?

M. Côté (Richard): Oui. Ça, c'est sûr que les prix de l'énergie ne montent pas aussi vite, mais, comme je vous ai démontré tout à l'heure, il y a certaines solutions solaires qui n'ont pas de coût additionnel. En fait, c'est comme si on avait de l'énergie gratuitement au lieu de la payer 0,06 $ le kWh. Ça, c'est le solaire passif. L'obstacle principal à l'implantation de ces solutions simples, c'est que, traditionnellement, vu que le fleuve est orienté nord-est, sud-ouest, Jean Talon a divisé les concessions perpendiculaires au fleuve. Alors, toutes les trames de rues urbaines, en général, sont orientées à 45 degrés par rapport au nord ou au sud, en particulier la trame urbaine de Montréal.

Mais il y en a beaucoup, il y a des trames urbaines, par exemple, dans le West Island, dans le Lakesho-re, dans certaines banlieues, il y a bien des villes qui sont orientées est-ouest. Par exemple, Saint-Jérôme est une ville dont une partie est très bien orientée pour bénéficier du solaire. Et puis, justement, le colloque qu'on organise le 17, c'est pour faire prendre conscience aux intervenants municipaux de la nécessité de bien orienter les rues dans les nouveaux lotissements si on veut profiter de l'énergie solaire, si on veut avoir un rendement, disons, de 100 %. Parce que, quand on a une orientation à 45 degrés, on obtient quand même certains rendements, mais c'est moins intéressant, donc ça fait un rapport...

Mme Bacon: Mais c'est le principal obstacle, ça, M. Côté?

M. Côté (Richard): Je dirais que c'est un des principaux obstacles, oui, actuellement.

Mme Desmarais: II y en aurait un autre, moi, que je verrais, c'est le manque d'information. Comme M. Côté avait mentionné, c'est le manque d'information, parce que, comme il a mentionné, dans des pays comme la France, la Norvège, c'est déjà presque courant, l'utilisation de systèmes solaires, mais ici on a la mauvaise conception que ce n'est pas efficace et que c'est quelque chose de marginal pour des gens hippies ou «granola».

M. Côté (Richard): Oui. Il y a un petit livre, ici, qui est publié par le Comité d'action pour le solaire, c'est le résultat d'un concours «Maisons solaires, maisons d'aujourd'hui», qui se tient tous les ans en France; où on voit des maisons solaires, là-dedans, de tous les types, de toutes les descriptions, correspondant à tous les genres de styles qui sont à la mode. Alors, on voit bien que ce n'est pas un animal étrange qui mange du foin en hiver, c'est quelque chose de bien réel, qui

fonctionne bien. Et puis ici, c'est parce qu'il n'y a pas eu de campagne de promotion et d'éducation encore dans ce sens-là.

Mme Bacon: Pourquoi, dans votre mémoire, vous n'avez retenu que la contribution du solaire passif? Est-ce que la contribution des autres technologies solaires est négligeable, d'après vous, parce que ce n'était pas ça il y a quelques années, ou bien que le déploiement ne concerne pas Hydro-Québec? (20 h 30)

M. Côté (Richard): C'est parce que, dans le document principal du plan de développement d'Hydro-Québec, elles sont déjà mentionnées, les autres technologies. Il y a juste le solaire passif, lui, qui figure, disons, à Pavant-dernière page et à la dernière annexe. Alors, on s'est dit qu'il devrait aussi y avoir au moins quelques phrases dans le plan principal qui mentionnent cette source-là.

Si on parle de l'électricité photovoltaïque, ça, évidemment, pour l'instant, au coût que ça coûte, c'est négligeable comme apport au Québec. C'est quelque chose qui est très intéressant, par exemple, si on veut pénétrer des marchés d'exportation, par exemple dans les pays du Sahel où il n'y a pas de réseau électrique et où c'est une façon économique, à ce moment-là, plutôt que d'acheter des piles qui leur coûtent très, très cher du kilowatt, si on a des photopiles solaires, on peut faire de 1'electrification villageoise, du pompage, des choses comme ça, et puis aussi pour des choses éloignées comme des stations répétitrices de micro-ondes dans le Grand-Nord ou des affaires comme ça, c'est intéressant, le photovoltaïque. C'est un domaine, disons, où on suppose que les prix vont baisser dans le futur avec plus de recherche et développement.

Si on regarde le solaire actif, il y a des études qui ont été faites par Hydro-Québec, par exemple sur les chauffe-eau, qui ont démontré que, sur des blocs d'appartements, par exemple de 10 logements et plus, ça devient rentable d'installer des systèmes de chauffage de Peau qui sont des systèmes mécaniques assez complexes, parce que, avec la technologie des tubes sous vide, ça peut être performant même en plein hiver. Mais, malheureusement, le seul fabricant de tubes sous vide a fermé ses portes au Québec, c'est Fournelle, parce qu'il n'y avait pas suffisamment de marché, là, il n'y avait pas suffisamment d'incitation pour qu'on utilise son produit.

Mme Bacon: Quel rôle souhaiteriez-vous voir jouer par Hydro-Québec relativement à l'implantation des technologies solaires — vous avez parlé tantôt d'offres de collaboration — ou même à l'égard des énergies nouvelles?

M. Côte (Richard): Ce qu'on aimerait, c'est qu'au lieu de mettre l'énergie solaire dans le sac des économies d'énergie, sur le même pied qu'une ampoule de 20 W ou d'une affaire comme ça, vu que le potentiel de l'énergie solaire est égal au potentiel de toutes les autres économies d'énergie réunies, il faudrait, je pense, qu'il ait une place prépondérante et qu'on le mentionne. Qu'on ne fasse pas juste dire: C'est une petite affaire parmi d'autres, mais qu'on le mentionne comme tel, pour donner un signal au consommateur que c'est quelque chose d'intéressant, l'énergie solaire, c'est quelque chose qui est encouragé par Hydro-Québec.

Mme Bacon: Est-ce que la prise en compte par Hydro-Québec des «external ités», c'est susceptible d'avantager les technologies solaires ou les énergies nouvelles en général — parce que je pense qu'on ne peut pas les dissocier les unes des autres — pour que l'implication directe d'Hydro-Québec dans leur développement et leur déploiement ne soit pas indispensable?

M. Côté (Richard): Excusez, j'ai mal compris votre...

Mme Bacon: Est-ce que la prise en compte par Hydro-Québec des «externalités» est susceptible d'avantager les technologies solaires ou les énergies nouvelles pour que l'implication directe d'Hydro-Québec dans leur développement ou leur déploiement ne soit pas indispensable?

M. Côté (Richard): Je crois que ça ne serait pas suffisant. Ce que ça va donner, si on prend en compte des «externalités», ça va changer légèrement, disons, le prix ou le seuil de rentabilité des énergies nouvelles. Donc, ça va devenir plus attrayant du point de vue de l'investisseur, mais je crois que ce n'est pas suffisant parce que ça prend une poussée de plus, ça prendrait vraiment une bonne poussée là-dessus pour partir ça, pour que, après ça, ça puisse rouler tout seul. Juste le calcul d'«externalités», d'après moi, ce n'est pas suffisant.

Mme Bacon: Ce n'est pas suffisant, d'après vous.

M. Côté (Richard): Mais c'est essentiel quand même, il faut...

Mme Bacon: Oui. D'accord, ca va.

Le Président (M. Forget): Merci, Mme la ministre.

Alors, j'inviterais le député de Joliette.

M. Chevrette: Je ne sais pas trop par quel bout commencer, parce que vous affichez beaucoup de convictions. Par contre, il y a très peu de données scientifiques comme base de ces convictions-là. Et c'est pour ça que je ne sais pas par quel bout commencer, parce que ça fait plusieurs années qu'on entend parler d'énergie solaire. D'autre part, je suis prêt à admettre avec vous qu'il y a très peu de spécialistes qui ont réfléchi et qui ont pensé véritablement à faire en sorte, par exemple, que le parc immobilier de maisons résidentielles soit conçu pour aller capter le maximum d'énergie.

Mais les gens nous disent: Oui, c'est vrai, ça a un avantage l'hiver, le printemps, mais, à certains moments donnés, c'est le contraire, ça nous prend de l'énergie pour climatiser nos maisons parce qu'il y a trop d'énergie solaire passive de la manière dont c'est disposé. Qu'est-ce que vous répondez à ces gens-là?

M. Côté (Richard): Bien, ça, justement, quand c'est mal conçu, disons, et puis, par exemple, si on met trop de fenêtres du côté ouest ou du côté est, évidemment que ces fenêtres-là vont capter de l'énergie surtout en été, dans l'après-midi ou le matin, et là ça va faire des surchauffes.

M. Chevrette: Oui.

M. Côté (Richard): Alors, le secret, disons, du solaire passif, c'est de concentrer la plus grande quantité de fenêtres du côté sud et de mettre des avant-toits qui font que, lorsque, le soleil est haut en été, il ne pénètre pas dans les fenêtres, alors ça ne fait pas de surchauffe, mais, lorsqu'il est bas, en hiver, là, il pénètre dans les fenêtres et il chauffe, quand on en a besoin. Ça, disons que c'est le principe de base.

Par rapport à ce que vous disiez sur les études scientifiques, les études qu'on a citées ici sont des études canadiennes, sur le sujet, qui sont quand même comparables. Il y a beaucoup d'études américaines sur le sujet, il y a des études françaises, il y a des études suédoises, mais, malheureusement, il n'y a pas d'étude québécoise en profondeur. Et puis, j'aimerais autant que vous voir une étude québécoise en profondeur sur le sujet pour qu'on puisse comparer des pommes avec des pommes, savoir comment on peut comparer les autres formes d'efficacité énergétique avec l'énergie solaire dans le contexte bien particulier du Québec.

M. Chevrette: Mais, d'entrée de jeu, on sait très bien que l'énergie solaire ne peut pas être une source exclusive, il faut que ce soit une source combinée. Est-ce qu'on s'entend là-dessus?

M. Côté (Richard): Oui, oui.

M. Chevrette: Bon. Je vais vous poser directement la question. Avec quelle source est-ce que vous privilégiez la combinaison? Avec l'électricité, avec le gaz naturel ou si vous acceptez l'un ou l'autre?

M. Côté (Richard): Avec l'un ou l'autre. Je crois que c'est plus facile de lé faire avec l'électricité, compte tenu, aussi, de ce qu'on pourrait appeler la culture de chauffage des gens, qui sont habitués au chauffage électrique. Et puis c'est parce que, généralement, les techniques solaires se basent sur l'inertie thermique d'une dalle ou des choses comme ça. Ça prend du temps à chauffer puis ça prend du temps à refroidir. Alors, le complément idéal, ce sont des simples plinthes électriques qui peuvent donner une chaleur instantanée lorsqu'on en a besoin. Puis disons que, si la dalle n'est pas encore rendue tout à fait assez chaude pour chauffer, bien, on peut tout de suite, avec la plinthe électrique, faire un appoint. On peut aussi utiliser le gaz si ça fait partie des stratégies d'Hydro-Québec, parce que, dans certains cas, Hydro-Québec préfère qu'on utilise le gaz pour le chauffage. Oui, ils le mentionnent...

M. Chevrette: Je m'excuse, je veux vous arrêter parce que ce n'est pas ce que j'ai compris ici, moi. Depuis une semaine et demie, c'est le contraire, tout le monde vient nous dire qu'Hydro-Québec ne pense qu'en fonction de l'hydroélectricité. Gaz Métropolitain est venu ici, l'Association québécoise du gaz naturel, le mazout est venu après-midi avant vous autres puis ce n'est pas ça qu'ils disent d'Hydro-Québec. Ils disent: Hydro-Québec ne nous fait pas de place. C'est pour ça que...

M. Côté (Richard): Bon...

M. Chevrette: Qui vous a dit ça, à Hydro-Québec, qu'ils faisaient de la place au gaz naturel, pour qu'on lui parle un peu pour savoir ce qu'il pense?

M. Côté (Richard): J'ai lu ça dans le plan de développement. Ils disent que, dans certains cas, ils préfèrent... Ils veulent remettre les gens à la biénergie, entre autres pour couper la pointe. Ils veulent utiliser le gaz pour faire de la cogénération dans des gros complexes immobiliers, ils veulent avoir des centrales à gaz pour la pointe, pour les moments de pointe, près des villes, des centrales à gaz qui sont près des agglomérations puis qui peuvent fonctionner, disons, seulement pendant une heure ou deux chaque jour. Alors, moi, je pense qu'ils ont une place pour le gaz. Probablement qu'ils ont moins de place pour le mazout parce que, du point de vue conjoncturel, le gaz, bon, c'est un produit canadien qui est en surplus actuellement, qu'on vend à vil prix aux États-Unis, c'est-à-dire que l'Ouest canadien vend pour rien aux États-Unis, alors que...

M. Chevrette: Le gaz albertain...

M. Côté (Richard): Oui.

M. Chevrette: ...par le gazoduc Iroquois.

M. Côté (Richard): C'est ça. Puis on en a un gazoduc qui vient jusqu'ici, qui a juste besoin de quelques réparations pour fonctionner et puis qui pourrait permettre d'utiliser une combinaison de gaz et d'électricité. Moi, je pense que toutes les formes d'énergie sont complémentaires et puis que ça dépend de chaque circonstance.

M. Chevrette: Mais, comme promoteur de l'énergie solaire, comment vous inscrivez-vous dans le débat des énergies en général? Est-ce que vous avez, par exemple, le souci de la qualité environnementale? Est-ce que vous vous situez dans le groupe des écolos qui

disent, par exemple, qu'il faut miser exclusivement sur l'efficacité énergétique? D'autres disent: L'hydroélectricité, c'est propre, propre, propre, les autres sources sont polluantes, les sources fossilifères, il faut les bannir. Où vous branchez-vous, dans tout ça, comme énergie complémentaire?

M. Côté (Richard): J'ai l'impression que chacun a peut-être tendance à prêcher pour sa paroisse...

M. Chevrette: C'est vrai, ça.

M. Côté (Richard): ...mais, dans notre cas, disons que la considération de base qui motive les gens à utiliser l'énergie solaire est une considération écologique, parce qu'on sait que c'est une énergie qui est propre, qui est durable, qui est inépuisable. Et puis la raison pour laquelle on privilégie d'utiliser l'hydroélectricité comme complément, c'est parce que, ça aussi, c'est à peu près ce qu'il y a de plus propre. C'est quand même plus propre que le gaz, ça ne fait pas d'effet de serre. Ensuite, en troisième lieu, je mettrais le gaz parce que c'est plus propre que le pétrole. Je mettrais une échelle comme ça par rapport, disons, aux dommages environnementaux que peut créer la forme d'énergie, puis je mettrais peut-être le nucléaire en dernier lieu de tout, qui serait une ressource à laquelle on doit recourir vraiment quand on n'a pas le choix de faire autre chose. Comme en France, par exemple, ils n'ont pas le choix, ils sont obligés de faire des réacteurs. Alors, ils vivent avec, ils ne savent pas si ça va leur sauter sur la tête un jour, mais ils n'ont pas le choix. Puis c'est pour ça, d'ailleurs, qu'ils encouragent beaucoup le solaire, c'est parce que, eux, leur choix, il n'est pas très intéressant.

Mme Desrnarais: ...

M. Chevrette: Est-ce que vous voulez ajouter, madame?

Mme Desmarais: Non. J'ai juste passé un petit commentaire. Ça va.

M. Chevrette: Excusez. Vous parlez, dans votre mémoire, que vous êtes très contents qu'Hydro-Québec ait été correct dans sa consultation. Bravo! Vous sem-blez croire qu'Hydro-Québec fait beaucoup de place à l'énergie solaire. Est-ce que c'est suite à des conversations? Parce que vous mettez une ou deux références du plan de développement, mais, moi, je n'ai pas vu d'objectifs, par exemple dans le plan de développement d'Hydro, très, très précis quant à l'énergie solaire. Ils ont fait des grandes phrases pour faire plaisir à tout le monde, mais même les 1000 MW d'éoliennes, c'est 1000 MW garrochés ici et là, mais il n'y a pas de projet précis pour dire: On va le réaliser. (20 h 40)

Même le groupe qui représentait l'énergie éo-lienne cet après-midi, le Parti vert, il parlait, par exem- ple, qu'il faut respecter les populations. Mais, si tu as 1000 MW de prévus pour les îles-de-la-Medeleine, je ne suis pas sûr que le député Farrah va être bien, bien fort sur les moulins à vent partout sur l'île, à cause du bruit et à cause de la pollution visuelle. Donc, on ne pourra pas combiner à la fois l'objectif de pollution visuelle et de pollution par le bruit avec l'objectif de la population qui ne voudrait pas. Moi, j'ai de la misère à suivre un peu tout ce débat-là parce que c'est contradictoire dans les énoncés de principes.

M. Côté (Richard): Oui, mais, moi, je les ai prises quelque part les affirmations, elles sont dans le document de travail no 4...

M, Chevrette: Oui, je sais.

M. Côté (Richard): ...qui va avec le plan de développement. Il y a toute une page où c'est écrit qu'Hydro-Québec va encourager le recours à l'énergie solaire passive.

M. Chevrette: Oui, mais là, je vous pose la question, c'est pour ça, je l'ai lu, ça, votre document. Je vois les références, mais avez-vous un programme qui démontre qu'Hydro-Québec, par exemple, met de l'avant l'encouragement à l'énergie solaire? Avez-vous trouvé un programme?

M. Côté (Richard): Non, c'est justement pour ça qu'on vient témoigner parce qu'on dit: C'est bien beau d'avoir écrit une phrase comme ça à la dernière page de leur affaire, mais on aimerait ça qu'ils en fassent un programme et qu'ils nous incluent dans l'efficacité énergétique.

M. Chevrette: Là, on se comprend, M. Côté, on se comprend très bien. Il y a une différence entre faire une phrase ronflante pour faire plaisir à des groupes qu'on a consultés et passer à l'action concrète.

Le Président (M. Forget): M. le député de Joliette, une minute.

M. Chevrette: Pardon?

Le Président (M. Forget): II reste une minute.

M. Chevrette: Je vous remercie. Ça allait bien.

Le Président (M. Forget): Oui, ça va bien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: II m'a coupé complètement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Vous ferez pareil avec la ministre tantôt, s'il vous plaît.

Une voix: Bon!

M. Chevrette: Blague à part, moi, je ne crois pas ces phrases ronflantes qui font plaisir à tout le monde quand ce n'est pas concrétisé par un objectif précis, par un programme concret. Par exemple, dans Féolienne, ils mettent 1000 MW. Au moins, ils mettent un chiffre. Dans le domaine de l'énergie solaire, il n'y a aucun objectif d'atteinte de kilowattheures, ou de mégawatts, ou de térawattheures. Il n'y a rien.

M. Côté (Richard): Ce qu'ils ont dit, ils ont groupé ça dans les formes d'énergie peu développées et qui sont bonnes pour après l'an 2000. Ils ont groupé ça un peu là-dedans.

M. Chevrette: Oui, oui. Ah! ça, je l'ai vu.

M. Côté (Richard): Malgré ce qu'ils ont dit, qu'ils allaient l'encourager, et tout ça, alors, nous, on voudrait qu'ils l'encouragent maintenant, pas qu'ils attendent à l'an 2000, parce qu'on est tanné d'attendre. Nous autres, on est des gens d'action, on fait des actions depuis des années pour essayer de démontrer aux gens...

M. Chevrette: Avez-vous l'expertise nécessaire, M. Côté, pour dire, par exemple, qu'Hydro-Québec devrait fixer un objectif, ne serait-ce que minime, un objectif précis, et du type de programme dont il faudrait qu'elle fasse la promotion pour l'atteinte de cet objectif-là?

M. Côté (Richard): Oui. Le type de programme, ça, on sait déjà exactement ce qu'on encouragerait comme type de programme. Pour ce qui est de fixer un objectif, je crois qu'il faudrait le faire avec HydroQuébec, en étudiant leur scénario avec eux autres, parce que, lors de la consultation, ils ne nous ont pas montré jusque dans le fond leur scénario, comment ils calculaient leurs chiffres, s'ils utilisent toujours le programme Énergain pour calculer leurs chiffres. On ne sait pas comment ils les ont calculés. Alors, si on regardait ça, on pourrait certainement fixer, en accord avec HydroQuébec, un objectif réaliste, parce que c'est sûr que la question de la pénétration des marchés, quand c'est des technologies nouvelles et tout ça, il faut aller vers les innovateurs. C'est sûr qu'on n'aura pas des millions de maisons solaires demain matin au Québec, mais il faut commencer, il faudrait aire: Bon! Telle année, on va en faire 100 et, l'année d'après, on va en faire 200, vraiment faire un plan de développement, un plan, disons, de mise en marché de ça, comme ils ont fait pour les maisons Novelec à un moment donné, comme ils ont fait pour les maisons R-2000 au fédéral.

Le Président (M. Forget): Je remercie M. le député de Joliette.

Alors, M. le député de Taschereau, il vous reste cinq minutes.

M. Leclerc: Oui, merci, M. le Président.

Vous me permettrez de revenir une seconde sur la première question du député de Joliette où il mettait en contradiction un peu les problèmes de chauffage l'hiver et de climatisation l'été. Je vous avoue que de plus en plus au Québec, me semble-t-il, les gens climatisent, les entreprises climatisent, les commerces climatisent. Et vous, est-ce que vous avez pris connaissance d'études américaines, notamment dans le Sud des États-Unis, où il y a vraiment beaucoup de climatisation? Et est-ce que ces études-là concluent que, oui, c'est encore possible de faire des économies en orientant les maisons comme il se doit?

M. Côté (Richard): Moi, j'ai travaillé pendant trois ans au Nouveau-Mexique à concevoir des maisons solaires. Je travaillais pour un entrepreneur qui les construisait. Dans cette région-là, qui est beaucoup plus ensoleillée, malgré que c'est quand même assez froid... Les gens ne s'imaginent pas que, dans les montagnes, il y a 7000 degrés jours de chauffage et il y a de la neige et il ne fait pas chaud, au Colorado, ces places-là. Des maisons à haute masse thermique n'ont pas besoin de climatisation justement avec les stratégies que je disais, d'abriter des rayons d'été et d'avoir les fenêtres bien orientées. Et puis, au Québec... J'habite moi-même dans une maison solaire expérimentale que j'ai construite il y a quelques années. Bien, je n'ai jamais besoin de climatiser. Je veux dire, je ne mettrais jamais de climatiseur là-dedans parce que je n'en ai pas besoin. L'été, le soleil, il descend et il arrive juste sur le bord de la fenêtre; il ne rentre pas dans ma maison. Et puis, vu que j'ai des dalles de plancher d'une certaine épaisseur, avec un matériau à haute densité, la nuit, j'ouvre mes fenêtres, disons, et ça se refroidit cette affaire-là. Alors, ça me fait comme une dalle froide toute la journée qui garde ma maison froide. Alors, en utilisant les techniques solaires, on peut aussi faire de la climatisation naturelle, sans appareil.

M. Leclerc: Le principe des vieilles églises. M. Côté (Richard): Un peu, oui.

M. Leclerc: Pouvez-vous nous donner un chiffre? Combien, en pourcentage, votre maison qui est une maison solaire, comme vous dites, coûte de plus qu'une maison équivalente conventionnelle?

M. Côté (Richard): Dans le cas de la mienne, je ne pourrais pas vous donner de chiffre précis.

M. Leclerc: En pourcentage.

M. Côté (Richard): C'est parce que c'est une maison expérimentale. Mais, dans une maison qui n'a pas de masse thermique, qui a juste la stratégie de bien placer les fenêtres, de bien les orienter, le coût additionnel est 0, sauf peut-être le coût de design, peut-être quelques centaines de dollars pour mieux «designer» le

plan, avoir un plan mieux fait. Dans le cas où on ajoute, disons, des éléments de masse thermique, là, on se trouve à faire un type de construction qui est un peu plus lourd, qui est un peu plus de haute qualité. Alors, si on compare ça, disons, à une maison ordinaire de 150 000 $, une maison d'un certain luxe, c'est à peu près le même prix aussi. On a peut-être quelques milliers de dollars de plus à investir dans la masse thermique, par exemple une cheminée de pierre, des dalles en céramique, des choses comme ça. Et, si on passe carrément à des systèmes actifs avec des capteurs sur le toit, là, bon, ça peut être 10 000 $ de plus.

M. Leclerc: O.K. Et vous faites beaucoup référence, donc, à l'urbanisme, à l'architecture. Quand vous faites vos colloques, parce que vous semblez dire que c'est les moments forts de votre groupe, est-ce que l'Ordre des architectes, les urbanistes, de façon générale, participent à vos choses? Est-ce que vous sentez que vous percez parmi ces gens-là?

M. Côté (Richard): Oui. Je ne sais pas si vous avez eu le dépliant du colloque tout à l'heure. Il y a la liste de tous les gens qui sont membres de notre comité aviseur. Il y a le président de la Corporation professionnelle des urbanistes, il y a des gens de l'Ordre des architectes, de l'APCHQ, des arpenteurs-géomètres. Nous, notre stratégie, c'est d'aller dans tous les milieux qui ont quelque chose à voir avec le solaire, puis les réunir ensemble pour qu'ils mettent leur tête ensemble et qu'ils trouvent des solutions. Et on a l'appui de tous ces gens-là. Par exemple, le concours qu'on est en train d'organiser, le concours d'urbanisme, bien, évidemment, le président du jury, ça va être le président de la Corporation professionnelle des urbanistes parce que, eux autres, ils étaient enchantés quand on leur a proposé ce colloque-là, quand on leur a proposé ce concours-là. C'est le genre d'actions qu'ils aiment parce qu'ils trouvent que c'est un problème important. Les arpenteurs-géomètres aussi sont très intéressés par la question parce que eux ont un rôle à jouer dans les lotissements.

M. Leclerc: Évidemment, c'est peut-être plus compliqué d'avoir une action directe auprès des consommateurs qui, un à un, décident du modèle de leur maison et de l'emplacement, mais est-ce qu'on ne devrait pas d'abord s'attarder aux édifices publics qui sont des gros consommateurs d'énergie et sur lesquels on a peut-être plus d'emprise quant aux normes qu'ils doivent suivre?

M. Côté (Richard): Dans le cas d'édifices publics neufs, ce n'est pas tout à fait la même stratégie, dans les édifices publics parce que souvent, l'édifice public, à cause de l'éclairage dedans et des gens qui sont là-dedans toute la journée, il produit un excès de chaleur et puis, dans le cas d'un édifice public, généralement, ce qu'on cherche à faire, c'est à prendre cet excès de chaleur là et, au lieu de le jeter par la fenêtre, c'est de l'emmagasiner peut-être dans le sous-sol ou dans la dalle pour, pendant la nuit, pendant que les gens ne sont pas là, pour le réutiliser pour chauffer l'édifice pendant la nuit pendant que les gens ne sont pas là au lieu d'allumer le chauffage.

Alors, les stratégies ne sont pas exactement les mêmes. Mais, par contre, la stratégie de préchauffage de l'air de ventilation pourrait très bien s'appliquer en «retrofit» sur des édifices publics existants. Ça, ça ne serait pas bien compliqué de «designer» des configurations qui permettraient de bien intégrer ça, à faible coût.

Le Président (M. Forget): Alors, M. le député... M. Leclerc: Merci.

Le Président (M. Forget): ...de Taschereau, votre temps est écoulé. Je vous remercie.

Alors, M. le député de Joliette. (20 h 50)

M. Chevrette: Oui. Merci, M. le Président.

Je voudrais revenir sur un point. Vous dites qu'Hydro-Québec a quand même quelques pages de faites. Il n'y a pas rien de concret et vous venez nous dire qu'est-ce qu'il faudrait pour être concret. Il faudrait passer à l'action immédiatement, etc. Mais ne croyez-vous pas qu'Hydro-Québec, dans le fond, ne cherchera pas à développer ces énergies concurrentielles? Qu'il vaudrait mieux une commission de l'énergie indépendante qui doit juger de l'équilibre des énergies, de l'utilisation des énergies ou je ne sais quoi? Plusieurs ont soumis ça, la commission de l'énergie indépendante, pour qu'on puisse s'exprimer. Qu'est-ce que vous dites face à ça, vous autres?

M. Côté (Richard): Je suis d'accord avec l'idée d'une commission indépendante pour analyser les scénarios, mais je ne suis pas d'accord avec le fait qu'on soit concurrentiel avec Hydro-Québec. C'est comme si Hydro-Québec disait que les économies d'énergie, c'est concurrentiel avec Hydro-Québec. Je crois qu'ils ont compris le discours de gens comme Amory Lovins qui dit que 1 kWh qu'on économise, c'est comme si on le produisait sans que ça ne nous coûte rien. Alors, 1 kWh qui vient de l'énergie solaire, c'est la même chose, c'est une production de richesse qui fait qu'Hydro-Québec, les kilowattheures qu'on n'utilise pas pour chauffer nos maisons, elle peut les vendre à l'étranger et faire entrer des devises avec ça.

M. Chevrette: Mais les gars de mazout qui ont passé avant vous autres là, ils ont reçu une fin de non-recevoir avec un crayon écrit sur leur propre lettre qu'ils avaient envoyée en disant: «No way!», puis on est une énergie pourtant qui pourrait faire économiser des kilowattheures qu'on pourrait vendre pour faire de l'argent. Je comprends. Moi, je vous avoue, on est ici, nous autres, ça fait une semaine et demie, puis c'est diamétralement opposé les uns aux autres. Vous, vous prétendez qu'Hydro-Québec vient de comprendre qu'économiser 1 kWh d'énergie hydroélectrique, c'est de

l'argent qu'elle va faire, puis ils ont répondu aux gens du mazout: «No way», on ne veut rien savoir de vous autres.

M. Côté (Richard): C'est parce que le mazout, il faut l'acheter aussi, puis c'est des devises... Ça vient de l'extérieur du pays, en général.

M. Chevrette: Non, non, mais le citoyen qui paie, le citoyen qui ferait un combiné électricité-mazout pourrait faire économiser... Ils nous ont donné des chiffres assez éloquents. Gaz Métropolitain a fait pareil, puis Hydro ne semble pas ouverte du tout, puis elle le serait pour l'énergie solaire?

M. Côté (Richard): II y a certaines personnes à Hydro qui sont convaincues du raisonnement dont je vous faisais part.

M. Chevrette: Eh bien, j'espère! Ça, je suis d'accord.

M. Côté (Richard): Mais ce n'est pas tout le monde. Hydro, ils sont rendus à combien? 20 020 ou...

M. Chevrette: 27 000. Bien, il va en rester 25 000.

M. Côté (Richard): Bon. O.K. Alors, il y a des gens progressistes à Hydro comme il y en a dans n'importe quelle société, puis il y en a d'autres qui sont plus conservateurs, c'est normal, n'importe où. Mais je crois quand même que les arguments sont là et, du point de vue scientifique, ils sont plutôt irréfutables ces arguments-là même si des gens ne sont pas d'accord.

M. Chevrette: C'est parce que celui qui a répondu, M. Côté, au distributeur de mazout, c'est le vice-président à l'efficacité énergétique.

M. Côté (Richard): M. Ouimet?

M. Chevrette: Je ne me rappelle pas de son nom, moi.

M Côté (Richard): M. Godbout, ah bon!

M. Chevrette: Si c'est le vice-président, c'est celui qui est en charge de l'efficacité énergétique.

M. Côté (Richard): M. Godbout est le président d'honneur du...

M. Chevrette: II y en a rien qu'un...

M. Côté (Richard): M. Raymond Godbout est le président d'honneur du congrès de la Société d'énergie solaire du Canada, conjoint avec le... qui va se tenir au mois de juillet, ici, à Québec. Puis, il va probablement être sur le jury de notre concours d'urbanisme.

Mme Desmarais: En plus, quand on parlait d'objectifs communs tantôt, c'est qu'Hydro-Québec semble avoir misé sur les économies d'énergie, puis l'énergie solaire, c'est une façon d'atteindre ces objectifs-là pour moins cher et, encore plus, d'ajouter à tout ce qu'elle prévoit avec les ampoules qui consomment moins, les têtes de douche, les choses comme ça; ça aiderait à pousser son programme plus loin. Alors, ce n'est pas vu comme concurrentiel. En fait, c'est ce qu'on disait tantôt dans le mémoire, ça allait dans la même direction.

M. Chevrette: Je comprends, mais on pourrait discuter longuement. Vous parlez d'ampoules. Je pourrais bien vous dire que les ampoules, par exemple, qui ne dégagent pas de chaleur en hiver obligent ta plinthe électrique à en produire davantage, des effets combinés, vous le savez. Donc, on pourrait discuter longuement de ça.

Mme Desmarais: Non, mais, je veux dire, ça fait partie de leur programme.

M. Chevrette: Mais, moi, c'est parce que je ne comprends pas qu'Hydro pourrait se montrer ouverte à des types d'énergie, c'est vrai, qui ne coûtent rien... L'énergie solaire, il s'agit d'avoir un concept, je comprends tout ça, puis j'en ai visité quelques-unes, puis je trouve ça intéressant. Et je suis bien content d'apprendre que vous êtes plus chanceux que d'autres types d'énergie qui visent précisément à faire économiser. Il y a au moins un secteur vers lequel Hydro semble ouverte. Je pourrais finir ma phrase, M. le Président?

Le Président (M. Forget): Oui, oui, mais je voulais juste vous mettre au courant. Oui, c'est bien, M. le député de Joliette. Continuez.

M. Chevrette: Bien, je n'ai jamais chialé sur rien. Quand madame a deux phrases à finir, je lui laisse finir avec beaucoup de politesse et je vous demande la pareille. C'est correct?

Je vous disais que je suis heureux, je suis très heureux que vous ayez une oreille attentive à Hydro-Québec, et je vous souhaite bonne chance, mais exigez des programmes concrets et non pas des voeux pieux.

M. Côté (Richard): L'ennui, c'est que, si c'est nous qui exigeons ces programmes-là, on est trop petits. Justement, c'est peut-être pour ça qu'ils ne nous ont pas dit «no way!» à nous. Ils n'ont pas peur de nous autres, on est tellement petits qu'ils n'ont pas peur de nous autres. Alors, on a beau leur demander et leur demander, finalement, ils finissent pas céder légèrement, un petit peu à la fois, mais, moi, je crois que ce serait au ministère de l'Énergie, qui est le patron d'Hydro-Qué-bec, de leur dire: Bien, on veut que vous alliez dans cette direction-là, puis, s'il vous plaît, donnez un peu plus de place à l'énergie solaire.

M. Chevrette: Une autre fois, elle va sortir son fouet.

Le Président (M. Forget): Alors, merci, M. le député de Joliette.

J'inviterais le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

Dans la même foulée un peu que M. le député de Joliette, ne croyez-vous pas, dans un contexte de politique globale d'énergie, quand je regarde au niveau passif, que ce serait beaucoup plus facile d'essayer de convaincre tout le monde — on a 1558 municipalités au Québec, avec tout ce que ça comprend — de dire: Oui, scientifiquement, c'est valable; à partir d'aujourd'hui, tout nouveau lotissement se doit d'être orienté pour avoir le maximum d'économie solaire? Ça, c'est quelque chose qui pourrait arriver au niveau d'une norme, au niveau d'une loi, qui ferait qu'à partir de la sanction de la loi ou de la norme tout le monde se serait rendu conforme. Ne croyez-vous pas que ce serait une des premières choses à faire en tant que, ici, membres de la commission et aussi législateurs lorsqu'on monte en haut au salon bleu? Que c'est ça qu'il faudrait prôner le plus rapidement possible pour faire ces gains-là de perception au niveau des gens? J'aurai une autre question après ça dans un autre domaine.

M. Côté (Richard): Oui. Je suis d'accord avec vous que la voie législative est intéressante, et puis justement, actuellement, on est à réviser la loi de l'économie d'énergie. Ce serait peut-être quelque chose d'intéressant de mettre ça là-dedans. Bon, pour l'instant, avec le colloque qu'on organise, on essaie d'utiliser l'approche incitative pour commencer. Si ça ne marche pas, après ça, il faudra peut-être utiliser des approches plus musclées et, à ce moment-là, passer par des législations. Mais, en France, par exemple, dans la législation, ils ont comme des niveaux de cotation énergétique des bâtiments et puis, pour atteindre le niveau 5 qui donne le droit aux plus grandes réductions de tarif d'électricité de France, ils ne peuvent pas y arriver sans utiliser le solaire. Alors, ça incite les gens, par la loi, à... La réglementation est incitative. Elle n'est pas nécessairement coercitive, dans ce cas-là.

M. St-Roch: Dans un autre domaine complètement à part, c'est un élément au niveau de l'agro-ali-mentaire, au niveau de toute la serriculture au Québec. On sait qu'un des problèmes majeurs qu'on a c'est le chauffage l'hiver, puis avec l'électricité. Je suis d'accord avec vous, pour avoir regardé et fouillé ça un peu — j'aurais mille et une questions à vous poser — qu'au niveau de l'ensoleillement on n'a rien à envier ici, que ce soit avec la Hollande ou quoi que ce soit. Alors, pourquoi la serriculture ici n'a jamais pensé à utiliser l'énergie scolaire pour se chauffer et avoir les économies qui la mettraient dans une position beaucoup plus rentable? C'est le manque de technologies, le manque d'équipements? Qu'est-ce qui est en cause?

M. Côté (Richard): Je crois qu'ils ont adopté un modèle de serres qui est comme horizontal, c'est-à-dire qui fait face, qui rayonne vers le ciel en haut où c'est le plus froid, parce que le rayonnement s'en va, c'est comme un trou noir en haut, tandis que le principe du solaire passif, bon, c'est de rayonner vers le côté sud où c'est le plus chaud. Donc, on rayonne moins. Et puis, si on adoptait, par exemple, pour la serriculture, de faire de la serriculture sur ces coteaux du côté sud, peut-être qu'on aurait de meilleures performances parce que là, au lieu d'avoir un versant qui donne au nord et l'autre versant qui donne au sud, alors on en a un qui perd de l'énergie et l'autre qui en gagne, on aurait rien qu'un versant qui donnerait au sud et puis ce serait rien qu'un gain à ce moment-là.

Ça, c'est le genre de choses qui m'intéressent personnellement et que je voudrais travailler éventuellement, parce que je suis un peu dans la recherche et développement. J'aimerais ça travailler ce genre de choses là, mais, là encore, essayer d'avoir une subvention pour faire ça, c'est impossible. Les gouvernements ne donnent plus de subventions à la recherche. Même s'ils disent qu'ils vont en donner, ils n'en donnent pas.

M. St-Roch: Vous ouvrez une autre parenthèse au niveau de la recherche et développement. Ne croyez-vous pas, à regarder et aussi pour avoir lu les volumes d'Hydro, qu'il ne semble pas qu'il va y avoir énormément d'argent qui va être mis au niveau de recherche et développement dans cette technologie-là par HydroQuébec? Je vous écoute aujourd'hui. On sent qu'on a une base de spécialistes ici, au Québec, parce que Hydro nous a parlé aussi de maillage, d'essaimage, d'aller avec des experts, de contracter à l'extérieur du circuit pour gagner ces expertises-là. C'est un endroit où Hydro devrait accroître, quant à moi, ses pourcentages de budget de recherche et développement, qu'elle en donne une partie pour qu'on accélère ces domaines-là. (21 heures)

M. Côté (Richard): Oui. Je pense que ça devrait être fait parce que je crois que l'approche d'Hydro-Québec pour la R-D, c'est de la R-D de très haute technologie, par exemple l'hydrogène, le projet Toka-mak, disons de la recherche d'ingénieurs, si on peut dire, là, de haute technologie, et puis peut-être qu'ils sont moins orientés, comme culture de la boîte, à penser à des choses plus simples. Ils sont habitués à penser à des choses compliquées puis grandioses, disons, au lieu de penser à des petites choses simples.

Le Président (M. Forget): M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Juste un bref commentaire, M. le Président. En conclusion, on pourrait peut-être passer le message aussi à tout le regroupement des serriculteurs, leur dire aussi d'aller chercher cette filière-là solaire, avec recherche et développement avec Hydro-Québec, au lieu d'accepter seulement des montants d'argent. Merci.

Le Président (M. Forget): Alors, Mme Desmarais, M. Côté, au nom des membres de la commission, je voudrais vous remercier.

Alors, on va suspendre la commission pour deux petites minutes pour permettre à nos invités, l'Association régionale des commissaires industriels du Saguenay—Lac-Saint-Jean, de s'installer.

(Suspension de la séance à 21 h 1)

(Reprise à 21 h 4)

Le Président (M. Forget): Je demanderais aux invités de prendre place. La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je rappelle le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échanges: l'exposé de l'organisme, 20 minutes; la période d'échanges, 40 minutes. Je demanderais au président de s'identifier et d'identifier les gens qui l'accompagnent.

Association régionale des commissaires industriels du Saguenay—Lac-Saint-Jean (ARCI)

M. Boivin (Marc): Alors, M. le Président, bonsoir. Mesdames et messieurs de la commission, bonsoir également. Mon nom est Marc Boivin. Je suis président de l'Association régionale des commissaires industriels de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean et directeur général de la Société de développement de Jonquière.

Je vous présente mes collègues: ici, à ma droite, M. Claude Godin, directeur général de la Société de développement Domaine-du-Roy, Roberval et son territoire; également, à ma gauche, M. Gilles Potvin, directeur général de la promotion industrielle du secteur de Saint-Félicien; également M. Guy Grenier, directeur général de la Corporation de développement économique Maria-Chapdelaine, secteur Dolbeau-Mistassini. J'aimerais également vous présenter M. Rénald Martin, commissaire industriel au conseil économique d'Alma, qui est tout juste ici, derrière nous.

Donc, cette Association régionale des commissaires industriels regroupe les corporations qui sont ici représentées ce soir, mais aussi la Corporation de développement économique de Chicoutimi et également la Corporation de développement économique de la ville de La Baie. Avant de débuter, nous aimerions saluer de manière particulière Mme Blackburn, députée de Chicoutimi, avec qui nous avons toujours de fructueux échanges dans nos travaux de développement à l'égard de la région.

M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs, la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean s'est ouverte à la colonisation et au développement il y a un peu plus de 100 ans. Elle s'est industrialisée à partir de ses ressources forestières et énergétiques, surtout reliées à ses puissantes rivières drainant un territoire de 87 000 kilomètres carrés. L'essentiel de l'activité économique régionale a été bâti autour des pôles industriels de trans- formation du bois et de l'aluminium, qui, il faut bien le signaler à ce moment-ci, subissent une crise structurelle très importante, donc des pôles industriels qui visaient et qui visent encore essentiellement l'exportation de ressources naturelles sur les marchés internationaux.

Le développement de la région a donc été très majoritairement décidé de l'extérieur, ce qui lui a valu le qualificatif de région-ressource, comme plusieurs régions du Québec, d'ailleurs. Dernièrement, en 1990, elle se donnait même le vocable de région-laboratoire, tel que décidé lors du dernier sommet économique qui eut lieu dans la région, parce que, précisément, on veut y expérimenter des façons différentes de faire les choses afin d'éviter de reproduire les erreurs du passé, c'est-à-dire, évidemment, d'exploiter des ressources naturelles uniquement dans le but d'en faire le commerce extérieur.

On ne peut pas dire que les développeurs du passé ont fait preuve d'une grande originalité. C'est peut-être un constat historique non seulement pour la région, mais aussi pour plusieurs autres régions du Québec. L'exploitation des ressources naturelles pour l'exportation a été la dominante du développement régional depuis les 50 dernières années. Nos équipements industriels se compé-titionnent plus qu'ils ne se complètent et les grappes industrielles sont plutôt rares dans notre territoire, parce que, évidemment, grappe industrielle est aussi synonyme d'intégration industrielle à partir de l'extraction et de l'exploitation de la matière première jusqu'à sa transformation et sa distribution sur les marchés de consommation.

Selon les estimations, la région présente près de 500 barrages, dont 67 forment des retenues d'eau de plus de 500 hectares; 18 centrales hydroélectriques d'importance opèrent dans la région, fournissant un potentiel de 2550 MW, en majeure partie sur la propriété de l'entreprise privée qu'est la compagnie Alcan, mais qui est aussi un fournisseur d'énergie électrique à d'autres entreprises, dans le domaine des pâtes et papiers particulièrement, dont Domtar, Dolbeau, la compagnie papetière Domtar, de Dolbeau, par voie d'entente avec Alcan.

À l'exception des alumineries et des usines de transformation primaire du bois pour l'exportation, peu d'autres types d'entreprises à forte valeur ajoutée existent dans notre région. Depuis une vingtaine d'années, la région a commencé à montrer des signes d'essoufflement de son développement et des symptômes inquiétants de «maldéveloppement», tels que l'épuisement des ressources forestières avec l'éloignement de plus en plus progressif des parterres de coupe face aux usines de transformation, la dégradation importante de l'environnement aquatique, l'exode des jeunes, qui est véritablement un drame social, une augmentation du chômage et de la pauvreté ainsi qu'une surmortalité et une détérioration de la santé publique. Même la ouananiche, dont on voulait faire un pôle de développement touristique important, a connu, dans les dernières années, une diminution drastique d'abondance. La population régionale a désespérément besoin de projets de développement qui

lui permettent de donner un nouvel essor à son économie et d'assurer ainsi une qualité de vie à sa population actuelle et future. (21 h 10)

En 1979-1980, Hydro-Québec proposait de construire sur l'Ashapmushuan un complexe hydroélectrique permettant de harnacher la puissance de cette rivière, le troisième affluent en importance du lac Saint-Jean. En 1993, ce projet est toujours d'actualité, malgré des péripéties qui ont retardé de façon importante la réalisation. Les principales réticences à ce projet proviennent de la population et de certains groupes de pression qui considèrent que le harnachement de cette rivière, tel que prévu par Hydro, ne correspond pas nécessairement à un mode de développement viable pour notre région. Une région victime du «maldéveloppement», qui voit actuellement sa population la déserter, ses écosystèmes se dégrader et son économie se détruire peut-elle accepter qu'on lui propose, au nom du développement durable, des projets qui ne font que répéter l'histoire? Sommes-nous condamnés à répéter l'histoire?

Certains éléments nouveaux doivent être considérés pour qualifier des projets de développement durable. Ce n'est pas seulement un concept de salon. Parmi les questions auxquelles Hydro-Québec n'a pas su répondre dans les consultations d'avant-projet du harnachement possible de l'Ashapmushuan, les questions liées à l'influence de la construction de barrages pour le développement à long terme de la région ont été escamotées ou ont reçu des réponses insatisfaisantes. Pendant l'ensemble de cette consultation, Hydro-Québec s'est comportée envers les propositions régionales de façon défensive, hésitant à entrer dans un dialogue réel, soi-disant pour ne pas créer de précédent avec une région. Évidemment, la politique des précédents est toujours très difficile à gérer dans un contexte de changement accéléré tel qu'on peut le vivre dans une région comme la nôtre.

Cette ouverture est cependant nécessaire à toute démarche ultérieure si on veut qualifier ce projet de développement durable, et je tiens à le souligner dès maintenant, dans un esprit constructif et positif et non pas dans un esprit revendicatif ou de négociation, c'est davantage une approche de partenariat dans le but de réaliser des objectifs communs, à savoir le mieux-être de la population. En effet, le développement durable doit contribuer à assurer la qualité de vie de la génération actuelle, tout en ne remettant pas en question la capacité des générations futures de satisfaire à la leur.

Or, le passé nous démontre que la construction de barrages, même si elle a un effet économique pendant la période de la construction proprement dite — et aussi un effet économique positif sur l'ensemble de la collectivité québécoise, il faut bien le souligner — ne présente à peu près aucune retombée économique pendant les années de son exploitation, les années subséquentes, pour la région immédiate, évidemment, qui est touchée par l'opération de ces installations-là. Or, la dernière chose dont les générations à venir ont besoin dans la région, c'est certainement d'un barrage de plus simplement pour avoir un barrage de plus dans le but d'augmenter la capacité énergétique. Évidemment, je pense qu'il n'y a pas une région qui n'est pas prête à faire son effort pour participer à l'effort collectif d'autonomie énergétique de la province, mais, en contrepartie, il faut s'assurer que ces installations-là, ces investissements-là ont un impact durable pour la région, non pas dans le but de siphonner des fonds de l'État ou d'essayer de négocier des rentes de façon permanente, mais...

Éliminons la dimension des rentes et parlons davantage de partenariat dans le but de créer de la valeur dans les régions qui sont en train de mourir à petit feu au moment où on se parle, comme peut-être aussi certaines grandes agglomérations centrales. On pourrait donc, à ce moment-là, aller un peu plus loin dans une démarche, dans une véritable politique de développement énergétique qui puisse être arrimée également à une politique de développement économique, tel que l'entend, d'ailleurs, le ministre Picotte dans sa réforme des conseils régionaux et tel que l'entend, d'ailleurs, le ministre Gérald Tremblay dans sa réforme reliée aux grappes industrielles. Nous autres, on voit des interrelations là-dedans, parce qu'on est convaincus qu'il y a des leviers économiques qui peuvent être utilisés dans le but d'accélérer l'implantation de ces réformes-là.

Nous voulons profiter de la commission parlementaire sur l'économie et le travail pour explorer des pistes. Évidemment, c'est à se parler et à échanger qu'on sera en mesure d'identifier des leviers qui pourront nous servir à réaliser des stratégies communes à l'égard du développement économique du Québec et de ses régions. Et c'est donc à travers certains des objectifs de son plan de développement qu'il faut, donc, contribuer d'une manière significative au développement régional, tout en continuant de réaliser le mandat principal de l'entreprise de service qui fournit aux Québécois de l'électricité qui leur est nécessaire pour maintenir leur qualité de vie, mais aussi pour permettre à la collectivité de maintenir un niveau de vie intéressant, une qualité de vie intéressante et aussi un pouvoir économique intéressant face à son développement.

Alors, nous suggérons de développer les entreprises régionales susceptibles de porter à long terme la responsabilité du développement régional, et ces entreprises-là pourraient devenir d'excellents clients d'Hydro-Québec dans le but d'utiliser de l'énergie additionnelle dans un contexte où elles pourront se développer et dans un contexte où elles pourront conquérir de nouveaux marchés, et donc créer de nouveaux emplois, mais aussi utiliser de l'énergie nécessaire à leur compétitivité, de l'énergie à bon compte. Parce que c'est clair que la PME aussi a besoin d'un support de l'État et d'Hydro-Québec dans le but d'avoir des tarifs concurrentiels qui lui permettent de compétitionner sur les marchés dans un contexte de libre-échange. Et c'est donc par une attribution judicieuse des fonds qu'Hydro-Québec pourrait consentir à une démarche positive de développement de nos entreprises régionales, que nous pourrions envisager le développement même du potentiel d'Hydro-Québec dans les régions périphériques, dans les régions

dites éloignées.

Évidemment, pour nous comme pour tout résident qui se respecte, dans la province ou ailleurs, la région éloignée, c'est toujours celle qui est à côté de nous, de nous-mêmes. C'est un concept qui est bien abstrait, d'une certaine façon, quand on a l'amour de notre région ou l'amour de notre territoire ou de nos populations respectives. Or, c'est une dimension qui nous préoccupe au plus haut point, et le plan de développement actuellement préparé par Hydro-Québec présente certaines orientations qui nous permettent de croire que la société d'État peut jouer un rôle nouveau dans le développement régional. Comme principal instrument qui, depuis 50 ans, a été le levier économique principal du Québec dans le développement de la province, nous, on pense qu'Hydro-Québec doit définitivement déborder uniquement son rôle de producteur, et également davantage jouer un rôle social, en collaboration avec les ministères économiques qui se sont aussi donné des stratégies de développement et de partenariat avec les régions et les collectivités locales.

Par ses projets de production, ses orientations de recherche et de développement aussi bien que ses objectifs d'économie d'énergie, Hydro-Québec peut devenir un agent réel de développement durable pour la région mais aussi pour toutes les autres régions du Québec, aussi bien productrices que consommatrices d'électricité. Avec un peu d'imagination et de bonne volonté mais aussi beaucoup de détermination, il faudra bien le dire, il est possible pour Hydro-Québec, comme aussi pour les collectivités locales de notre région et d'ailleurs, de partir sur de nouvelles bases et de devenir de réels partenaires du développement.

Nous constatons, par exemple, que l'orientation 20 de la stratégie de développement d'Hydro propose d'élargir le programme de mise en valeur de l'environnement à des initiatives favorisant le développement régional dans le cas des centrales. Cette orientation nous paraît mal ciblée pour favoriser le développement viable d'une région. Ce n'est pas à l'intérieur de la maigre enveloppe du programme de mise en valeur de l'environnement qu'on peut trouver une marge de manoeuvre pour le développement régional.

Ce qu'on pense, c'est qu'il faut absolument séparer les postes budgétaires. Quand on parle d'environnement, on ne parle pas de développement économique et, quand on parle de développement économique, on ne parle pas nécessairement d'environnement. Ce sont deux dynamiques qui sont totalement différentes mais qui peuvent être interreliées dans un concept de développement durable. Cette approche serait, de toute façon, vouée à l'échec. En effet, le mode de répartition de ces fonds ne favorise pas réellement des projets porteurs d'avenir pour la région; il sert plutôt à réparer les dégâts plus que les erreurs. Parce que, évidemment, quand on construit, on essaie de gérer le chantier lui-même et puis tous les impacts environnementaux que ça peut représenter autour. (21 h 20)

De plus, les fonds disponibles pour les questions environnementales dans notre société sont si rares qu'il ne conviendrait point d'y puiser quelques ressources pour le développement régional. De même, le développement touristique, une avenue intéressante dans une approche intégrée de développement durable, ne saurait être le plus important pôle de développement viable d'une région comme la nôtre. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas intéressant et important; ça veut seulement dire que ce n'est pas nécessairement la priorité des priorités en termes de développement économique. Malgré nos avantages touristiques axés sur le paysage, l'histoire, la culture et la faune, ces ressources ne peuvent entretenir à elles seules la qualité de vie à laquelle nos citoyens aspirent.

En plus du reste de ses exportations, la région exporte actuellement ce qu'elle a de plus précieux: ses jeunes, éduqués et formés, tous prêts à enrichir les métropoles mais aussi les autres provinces, et souvent les autres pays, parce que, de plus en plus, on constate un exode des jeunes également à partir des métropoles québécoises. On nous dit qu'il faudrait peut-être qu'elle exporte plus d'énergie, mais, si elle veut traverser le XXIe siècle, elle ne pourra pas faire les deux. Les projets de développement qui résultent de retombées éventuelles des projets d'Hydro-Québec doivent donc offrir à nos jeunes la capacité de réaliser chez eux leur potentiel humain. Cette politique devrait être d'autant plus incitative qu'elle s'applique sur un territoire plus proche physiquement des impacts d'un projet donné.

Parmi les choix de développement énergétique, les diverses alternatives qui s'offrent à Hydro n'ont pas toutes le même coût par kilowattheure. Elles n'ont pas non plus la même fiabilité pour répondre aux besoins en période de pointe. À l'inverse des centrales à gaz qui représentent une solution dispendieuse pour satisfaire la demande de pointe, le harnachement de certaines rivières situées à proximité de centres urbains permet de planifier des coûts de construction beaucoup moindres pour la même puissance. Par exemple, on n'a pas à construire de réseau routier particulier pour acheminer les appareillages et les matériaux en place; on peut loger une partie des travailleurs dans des unités de logement soumises aux forces du marché; on peut éviter certains frais de dédommagement des populations autochtones résidentes. Ces centrales peuvent répondre de façon fiable aux demandes de pointe, contrairement à des parcs d'éoliennes, et elles correspondent à la priorité 22 du plan de développement d'Hydro-Québec.

Malheureusement, les rivières proches des centres de population deviennent, après leur harnachement, moins intéressantes pour certains aspects récréatifs. Le harnachement risque aussi de leur faire perdre une partie de leur valeur écologique et patrimoniale particulière, parce que c'est évidemment là que les gens vivent, à côté de l'installation. Ces pertes représentent des coûts sociaux et environnementaux qu'il est difficile de comptabiliser mais qui se comparent aisément à la différence de prix avec les moyens plus dispendieux de production de l'énergie, notamment dans les territoires nordiques. Pis encore, ces coûts seront assumés en termes de man-

que à gagner par les générations à venir.

Et, en termes de conclusion, M. le Président, l'ARCI demande à Hydro-Québec de travailler de concert avec les autorités politiques régionales que sont les municipalités dûment élues par leur population respective dans la définition des moyens à être mis en place afin d'atteindre les objectifs de développement du milieu. Hydro-Québec devrait s'assurer que la région définisse elle-même la structure réceptrice du fonds, que la sous-région immédiate reçoive une compensation à la mesure des inconvénients et que l'ensemble de la région puisse, par les interventions du fonds, recevoir un appui important à l'intérieur d'une stratégie régionale de développement qui a déjà été élaborée par l'ensemble des maires de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean à travers le Forum d'action économique régional qui est un des partenaires privilégiés du Conseil régional de développement qui est en voie de structuration ou de restructuration, dépendamment comment on le voit.

Finalement, Hydro-Québec, toujours en collaboration avec la région, devrait s'assurer de la pérennité du fonds en relation avec l'idée de supporter le développement de nos PME régionales, justement dans le but de réaliser le développement durable. Merci.

Le Président (M. Forget): Merci. Alors, j'invite la ministre de l'Énergie et des Ressources à échanger pour 10 minutes.

Mme Bacon: Alors, je vous remercie de mettre un peu plus de lumière sur des activités d'Hydro-Québec en région et d'apporter votre contribution à cette commission parlementaire.

En me référant à votre mémoire, pour créer un fonds de développement régional et pour aller au-delà de l'orientation d'Hydro-Québec, qui vise à oeuvrer en harmonie avec les populations qui sont touchées, vous suggérez d'imposer à la population, pour toutes les nouvelles centrales, un prix qui serait basé sur le coût moyen des centrales développées en régions nordiques. Les coûts liés à ces centrales sont — et, ça, selon votre mémoire — plus élevés que ceux établis en régions accessibles. Vous ne croyez pas qu'une mesure semblable provoquerait une hausse de tarif?

M. Boivin: C'est possible. Ça dépend quels seraient les nouveaux volumes d'énergie produits face aux projets qu'on voudrait implanter et réaliser dans l'ensemble, si on veut, des installations qui seraient proches des agglomérations urbaines ou rurales. Donc, il y a certainement une relation directe entre le nombre de projets, et le nombre de kilowatts qu'on veut produire de plus, et le coût moyen de production qu'on peut anticiper sur l'ensemble du réseau d'Hydro-Québec dans un contexte de tarification globale.

Évidemment, je pourrais répondre oui, je pourrais répondre non. On n'a certainement pas les données pour être en mesure d'y répondre de façon précise, mais il y a une chose qui est sûre, c'est que, dans le contexte où on a des économies à la réalisation du projet en lui- même... Et c'est sûr que le but premier d'Hydro-Québec de construire ce genre de projet là proche des régions accessibles, c'est justement de réduire les coûts.

Alors, ce que vous posez comme question, si j'ai bien compris: Si on prend le différentiel de réduction de coûts puis qu'on le verse dans un fonds de développement, est-ce que, dans le fond, on n'annihile pas exactement l'effort qu'on veut faire, justement, pour essayer de mettre en valeur des ressources qui seraient plus accessibles? Bien, je me dis que, dans la mesure où ces fonds, je dirais, débloqués ou consentis au développement régional créeraient de la valeur... Il ne s'agit pas, pour nous, d'un fonds qui serait constitué dans le but de verser une redevance ou une rente à des populations, mais d'un fonds de développement qui aurait comme objectif fondamental de créer de la valeur, donc de créer des entreprises, créer des emplois, générer des impôts et aussi de consommer de l'énergie hydroélectrique; ces entreprises deviendraient elles-mêmes des clients additionnels dans le paysage des PME québécoises.

Or, comment on peut faire la relation entre un impact économique de création de valeurs que procurerait la marge de manoeuvre du fonds en lui-même et l'impact sur les tarifs hydroélectriques? Il y aurait certainement une analyse détaillée à faire là-dessus, mais ce serait certainement un maillage extrêmement intéressant entre Hydro-Québec et les politiques gouvernementales de développement régional, qui visent effectivement à essayer de mettre sur pied du maillage, du partenariat dans chacune des régions.

M. Godin (Claude): Je pourrais peut-être compléter la réponse.

Mme Bacon: Oui, allez, je vous en prie.

M. Godin (Claude): Mme la ministre, effectivement, pour être plus direct en réponse à votre question, ça occasionnerait, pour l'ensemble des consommateurs du Québec, une augmentation du prix moyen, parce que tout bénéfice consenti au profit d'une région productrice va devoir être nécessairement absorbé par l'ensemble des consommateurs. Mais, dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, on a dit qu'il s'était fait des développements dans le passé. On a dit que ces développements se sont faits de façon anarchique, ne se sont pas faits au profit des populations régionales concernées. On se rend compte qu'à l'heure actuelle, sur l'ensemble de la région, tout le monde serait d'accord — je dis tout le monde, tous ceux qui sont intéressés par la question économique — de dire oui à des projets de développement énergétique en autant qu'Hydro-Québec considère la région comme un partenaire.

On est prêts à s'associer dans une négociation avec Hydro-Québec, où on serait perçus comme tel, parce qu'il faut bien reconnaître qu'entre les 0,05 $ de prix de vente moyen au Québec, ou 0,055 $, ou 0,06 $, le prix de vente moyen d'électricité au Québec, lorsqu'on le compare avec les 0,14$, par exemple, aux

États-Unis, le prix moyen, bien, il y a un prix minimum acceptable qu'on se doit de payer pour l'énergie au Québec. Donc, nous, on dit: Si ça coûte 0,07 $ pour produire de l'énergie au Moyen-Nord, puis que ça coûte moins cher pour en produire plus près, la différence de coût entre les deux, c'est la marge de manoeuvre que possède Hydro-Québec pour négocier avec la région réceptrice.

Donc, ce n'est pas juste les 2 % du programme de mise en valeur; c'est effectivement le différentiel de coûts, de prix de revient de l'énergie qui constitue la marge de manoeuvre dans sa négociation avec les régionaux. Puis on sait pertinemment... Puis je pense que les maires, entre autres, des deux MRC qui sont directement concernées, à savoir la MRC Le Domaine-du-Roy et celle de Maria-Chapdeleine, qui revendiquent des avantages récurrents... Notre mémoire dit: Bien, écoutez, il y a un différentiel de coûts qui peut être de l'ordre de 0,005 $ à 0,01 $ du kilowattheure produit. C'est la marge de manoeuvre dont dispose Hydro-Québec pour rendre acceptable le projet d'investissement de la population régionale.

Mme Bacon: Est-ce que, ce faisant, vous ne demandez pas davantage pour votre région que si c'était construit au Nord?

M. Godin (Claude): Non, parce que...

Mme Bacon: vous voulez la différence et vous voulez en plus les 2 %, si je vous ai compris. (21 h 30)

M. Godin (Claude): Mme la ministre, le programme de mise en valeur environnementale, il s'applique partout. O.K. Donc, c'est une politique générale.

Mme Bacon: Oui, mais vous voulez la différence, en plus, des coûts.

M. Godin (Claude): C'est une politique générale. Nous, on suggère à Hydro-Québec d'établir un prix de revient moyen, acceptable pour l'ensemble de la population du Québec, qui pourrait être celui du prix des développements au Moyen-Nord. Donc, s'il y a effectivement des économies à produire plus près, que ce soit au Saguenay—Lac-Saint-Jean, sur la Côte-Nord ou ailleurs, le différentiel de coûts, qu'il soit versé en partie ou en totalité — écoutez, ce serait en totalité et on serait bien heureux — au bénéfice du développement régional, et ceci, ce serait au profit de tout le monde. Nos régions se meurent. On a besoin d'investissements. Vous le savez, le gouvernement, à l'heure actuelle, reçoit des demandes de tous les conseils régionaux pour des enveloppes de développement plus grandes. HydroQuébec pourrait être l'instrument qui permettrait aux régions de se développer.

M. Boivin: Tout en faisant en sorte que les régions deviennent de véritables partenaires d'HydroQuébec dans les projets, dans un contexte où, mutuelle- ment, on est d'accord sur l'objectif qu'on veut créer de la valeur, Hydro-Québec, son objectif fondamental en fabriquant de l'électricité, c'est qu'il crée une utilité, une valeur pour les citoyens et les consommateurs. Alors, on a à peu près les mêmes objectifs parce que, d'une certaine façon, quand bien même on produirait de l'électricité, si, demain matin, les régions n'ont plus la possibilité d'en acheter parce qu'elles n'ont pas économiquement la force de consommer et les capacités économiques de consommer, bien, le marché interne va se dégrader progressivement. Et c'est exactement ce qui est en train de se produire dans plusieurs régions du Québec, dont la nôtre.

Donc, ce qui est proposé, concrètement, c'est de dire: Voici; il y a des marges de manoeuvre qui peuvent être dégagées dans un contexte de partenariat. Il ne s'agit pas de prendre les sommes et de les donner en assistance sociale mais de prendre les sommes pour créer de la valeur additionnelle qui va être régénérée dans l'économie québécoise à travers la fiscalité et à travers, aussi, la consommation additionnelle d'énergie hydroélectrique.

Mme Bacon: En fait, ce que vous me dites, c'est que vous voudriez qu'à partir de maintenant les centrales qui sont construites le soient au coût évité de Grande-Baleine, par exemple.

M. Godin (Claude): Oui.

Mme Bacon: C'est ça?

M. Godin (Claude): Oui, les coûts comparés.

Mme Bacon: Oui. Au niveau du développement de projets, vous souhaitez qu'Hydro-Québec s'assure de la participation des entreprises locales de façon à permettre le développement ou le transfert d'expertise en région. Quels seraient les mécanismes qu'Hydro-Québec devrait développer pour s'assurer de cette participation-là?

M. Boivin: Je pense qu'au niveau régional il y a déjà des initiatives fort louables qui sont, je dirais, en évolution assez accélérée à ce moment-ci dans le contexte de la restructuration du CRCD, mais il y a aussi les maires de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean qui ont pris une décision très importante, dès le printemps 1992, de mettre sur pied un forum régional d'action économique. Et ce forum-là, d'ailleurs, s'inscrit dans le contexte du travail du CRCD qui, lui-même, s'est donné le mandat de déterminer, d'élaborer une stratégie de développement économique au cours des deux prochaines années. Alors, c'est sûr que, nous, on n'a pas vraiment le temps d'attendre les deux prochaines années. C'est pour ça que les commissaires industriels de la région, en collaboration avec leur corporation de développement économique et leur maire respectif, ont mis au point une stratégie économique basée sur le vécu et basée sur, je dirais, les choses pratiques de la vie, à

savoir de réaliser des projets, pas pour dans 10 ans mais immédiatement.

Et c'est dans ce contexte-là qu'on a déposé une stratégie qui a été acceptée par l'ensemble des maires, et une stratégie qui a également été déposée au CRCD. Et tout ce brassage d'idées là va, je dirais, se structurer, se rationaliser dans le contexte des travaux de la stratégie de développement économique que le CRCD va enclencher au cours des prochaines semaines.

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il existe aujourd'hui des mécanismes de concertation régionaux à l'intérieur desquels Hydro-Québec peut évoluer dans un contexte où on sait très clairement sur quoi on travaille avant de commencer. Il ne s'agit pas d'essayer de négocier ça de façon globale ou de discuter de ces questions-là de façon globale, mais de partir sur un principe fondamental, à savoir qu'il est possible de faire un partenariat régional uniquement, à notre sens, comme commissaire industriel, dans le contexte où on veut et on peut créer de la valeur économique. Parce qu'il est hors de question pour nous de parler de rentes, de parler d'une dimension d'assistance sociale dans un contexte où tout le monde veut s'en sortir et mettre l'épaule à la roue pour créer de la valeur pour l'ensemble de la collectivité. Et on pense qu'Hydro-Québec, c'est certainement un des leviers privilégiés qui peut être utilisé et qu'on doit utiliser dans un contexte où on doit absolument prendre les virages technologiques, les virages sur les marchés extérieurs, etc.

Le Président (M. Forget): Alors, merci, Mme la ministre.

Alors, j'inviterais le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, je trouve votre mémoire bien fait puisque vous vous situez, au niveau argumentaire, dans les deux groupes qu'on a entendus. Tout d'abord, vous vendez les mérites de ce que vous avez aussi bien que ceux qui sont contre le projet, et vous exigez plus ou, en tout cas, vous allez jusqu'aux modalités des prérequis que demandaient les maires. À mon point de vue, le mémoire comme tel est plus précis. Et je trouve que, au niveau des prérequis, vous y allez plus carrément. Parce qu'il y a certains maires qui sont venus, on a eu bien de la misère à leur faire dire qu'il y avait des prérequis. Je me rappelle, moi, surtout celui qui était porte-parole — je ne me souviens pas de son nom — c'était plus carré au niveau de...

Des voix: Gendron.

M. Chevrette: Gendron. Mais l'autre, Hydro était bien smatte, puis partenaire, puis il ne disait pas... J'ai eu bien de la misère à lui faire échapper qu'il y avait des prérequis, mais je suis venu à bout de le lui faire dire. D'ailleurs, aidé du commissaire industriel que vous avez à votre gauche, monsieur le porte-parole, il a senti le besoin de dire qu'il y avait des prérequis véritables. Et, sans ces prérequis, j'ai réussi à leur faire dire aussi qu'il n'était pas question d'avoir un projet, parce qu'on perdait, déjà, au moins le potentiel qu'on avait présentement.

Vous êtes plus carré aussi au niveau du fond environnemental, de mise en valeur environnementale. Je ne suis pas loin de partager entièrement votre point de vue sur ce point-là. Mais, fondamentalement, ce que vous demandez, c'est un nouveau type de relation plus global qu'Hydro-Québec. Et ce n'est pas pour rien. Je pense que vous dites... Picotte fait partie de ça, dans sa réforme. Moi, je pense... C'est de même que je l'ai compris, votre mémoire.

M. Boivin: M. Tremblay aussi.

M. Chevrette: En d'autres mots, ce que vous voulez dire, c'est: Écoutez, les gens — puis je voudrais voir si j'ai bien compris — on est mal pris. On subit toutes sortes de problèmes: l'exode des jeunes, une région qui se délabre, à toutes fins pratiques. On a un certain potentiel; on n'a même pas d'argent pour exploiter le potentiel actuel. Et, si vous nous enlevez notre potentiel sans nous donner des budgets récurrents, un fonds, un fonds d'indemnisation, là... pas d'indemnisation, mais c'est un fonds de développement...

M. Boivin: De création de valeur.

M. Chevrette: Exact. J'ai trouvé ça bien comme expression, d'ailleurs. Ça ressemblait aux vrais commissaires industriels, ça. Mais, fondamentalement, ce que vous demandez, c'est un nouveau contrat, un nouveau contrat de relations entre gouvernement et sociétés d'État avec les régions. Est-ce que c'est un prérequis?

M. Boivin: Je dirais que oui, d'une certaine façon, parce que la stratégie de développement économique et industriel du Québec repose essentiellement sur Hydro-Québec. Ça, c'est un constat historique. On ne fera pas... On ne remontera pas les cours d'histoire pour démontrer ça. Je pense qu'on s'entend pas mal tous là-dessus. Si on ne continue pas, puis on ne fait pas une formule de mariage ou de partenariat entre le principal levier de développement, d'intervention de l'État dans l'économie qu'a représenté historiquement HydroQuébec, on aura beau faire de grands discours... Mais il y a une chose, au moins, qui nous appartient. HydroQuébec, ça, ça n'appartient pas aux autres; ça appartient à la population, ça appartient aux citoyens. Et donc, à mon sens, Hydro-Québec doit être une entreprise profitable d'un point de vue financier, et ça doit se traduire dans les tarifs aux citoyens, bien sûr, mais la «profitabilité» doit aussi se traduire dans la création de valeur au niveau des PME manufacturières industrielles.

M. Chevrette: Hydro-Québec, demain matin, déciderait de vous donner 2,5 % de la valeur du projet dans un fonds de développement régional, puis il dirait: C'est notre dernier mot. Quelle serait la...

M. Boivin: C'est dans le...

M. Chevrette: II dirait: C'est notre dernier mot...

M. Boivin: Oui.

M. Chevrette: ...2,5 % dans un fonds de développement régional de la valeur du projet et 1 % dans le fonds de mise en valeur environnementale. Il dirait: C'est notre dernier mot. Quelle serait la position des commissaires industriels?

M. Boivin: On dirait oui et non.

M. Chevrette: Ah! mais ça, ni oui, ni non, bien au contraire, ça n'existe pas, ça.

M. Boivin: Mais, en politique, des fois, ça existe. Mais...

M. Chevrette: Oui, mais c'est des «tataouineux» avec qui je n'aime pas frayer. (21 h 40)

M. Boivin: Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que, dans notre esprit, il ne s'agit pas de créer un fonds pour créer un fonds. Il ne s'agit pas de créer un fonds pour créer un fonds. Si, comme régionaux, on n'est pas assez matures, on n'est pas assez dynamiques pour proposer à un fonds de développement, récurrent ou non récurrent, des projets qui sont économiquement défendables et qui créent une valeur réelle en termes de création d'emplois, bien, évidemment, notre objectif, ce n'est pas de créer un fonds qu'on devrait dépenser à tout prix ou investir à tout prix parce qu'on a obtenu un fonds.

M. Chevrette: Mon cher monsieur, vous êtes très habile, mais je vais reposer ma question. On vous offre demain matin, proposition ferme et finale, un fonds de 2,5 % sur le champ, sans récurrence d'aucune manière. Ne patinez pas, donnez-moi une réponse.

M. Boivin: On n'est pas en négociations. On dirait certainement oui, dans un premier temps.

M. Chevrette: Donc, vous seriez pour le projet.

M. Boivin: Pardon?

M. Chevrette: Vous seriez pour le projet.

M. Boivin: Bien sûr.

M. Chevrette: Mais, à ce moment-là...

M. Boivin: Mais il y a une chose, c'est qu'on serait en accord avec la proposition qui nous serait faite parce que, un, c'est mieux que rien, parce qu'on est des commissaires industriels, n'oubliez jamais ça.

M. Chevrette: Donc, la récurrence, ce n'est qu'un objet de négociation.

M. Boivin: Ce n'est pas une question de négociation, c'est une question de partenariat. Est-ce qu'on croit que les instruments de l'État, qui appartiennent aux citoyens, peuvent servir de levier de développement économique pour les régions du Québec? Si on croit à ça, bien, on s'arrange pour, justement, faire des investissements puis faire des maillages et faire des partenariats avec les régionaux. Ça veut dire que l'objectif ultime, en autant que la chose est possible, en autant que la faisabilité est démontrée, en autant que les citoyens, les entrepreneurs, les politiciens de nos régions respectives font leur devoir, en autant que tout le monde fait son devoir, c'est d'avoir toujours de l'argent pour en faire, du développement.

M. Chevrette: Oui, mais écoutez bien. Moi, je regarde votre...

M. Godin (Claude): M. Chevrette, j'aimerais apporter un complément.

M. Chevrette: En autant que vous ne prenez pas tout mon temps, parce que je veux finir là-dessus.

M. Godin (Claude): m. chevrette, vous dites 2,5 %. premièrement, c'est des chiffres lancés en l'air.

M. Chevrette: Je donne un exemple théorique.

M. Godin (Claude): Ça fait 25 000 000 $. Je vous dis non, parce que la compensation qui est amenée n'atteint pas les objectifs souhaités. parce que, lorsqu'on parle d'un différentiel de coûts de l'ordre de, peut-être 0,055 $ à 0,02 $ — écoutez, là, on n'est pas ici pour discuter de chiffres — c'est une contribution annuelle au développement régional, de la part d'hydro-québec, qui pourrait se situer entre 5 000 000 $ et 25 000 000 $ annuellement. donc, les 2,5 %, il faudrait qu'ils soient beaucoup plus larges pour qu'on les accepte de façon unanime sur le plan régional. donc, ça, c'est juste des extrapolations de chiffres.

M. Chevrette: Non, mais, si je disais ça, c'est parce que, dans votre...

M. Godin (Claude): Mais, si Hydro-Québec nous verse, M. Chevrette, 200 000 000 $ en partant et que l'objectif de contribution au développement régional soit de 10 % ou de 15 % en ayant une autogénération de fonds, là, on vous dira oui, parce que le même objectif sera atteint.

M. Chevrette: C'est bien sûr. C'est ça.

M. Godin (Claude): Mais c'est vos 2,5 % qui sont la cible pas assez élevée.

M. Chevrette: Non, non, mais ce n'est pas pour

rien que je l'ai fixé là, c'est parce que je connais un peu Hydro-Québec et je sais très bien, à peu près, ce qu'ils peuvent offrir aux autochtones et ce qu'ils offrent à peu près où ils passent, et je n'ai pas l'impression qu'ils vont s'enligner sur le précédent que vous demandez. Parce que, moi, je prétends que, ce que vous demandez, c'est beaucoup plus une politique globale du développement régional en soi où vous mettez à contribution Hydro-Québec. C'est de même que je le comprends.

M. Boivin: C'est exactement ça. En d'autres termes, on ne veut pas de compensation.

M. Chevrette: J'ai bien compris.

M. Boivin: On ne veut pas de compensation pour acheter la paix, pour s'assurer de la paix. Ce n'est pas ça. On propose...

M. Chevrette: Mais le tarif différencié dont vous parlez dans votre formule... C'est une formule fort intéressante, dans le fond, parce que vous maintenez un taux moyen au Québec, quel que soit le projet, de sorte que la différence aide précisément à, non seulement... Je ne dirais pas à amenuiser, parce que ça devient le mot «indemnité» — il faut que je me surveille, quand même, dans mon vocabulaire — mais il permet d'avoir une politique de développement régional un peu compensatoire, par exemple, parce que ça peut grossir le programme régulier de développement régional qui serait établi au Québec. Si tu as une politique de développement régional où le gouvernement met 1 000 000 $ ou 2 000 000 $ par année dans un fonds de développement régional, Hydro-Québec, par le fait qu'elle utilise — si j'ai bien compris, toujours — vos infrastructures naturelles, devient un ajout pour compenser — je dis bien pour compenser, entre guillemets — pour pallier la possibilité de développement que vous auriez à partir de vos voies naturelles. Est-ce que je comprends bien?

M. Godin (Claude): Oui.

M. Boivin: C'est exactement ça, mais je n'aime pas le mot «pallier».

M. Chevrette: Non, je sais, mais c'est parce que, là, mes synonymes, à cette heure-là, sont moins rapides.

M. Boivin: Parce que ce n'est pas notre état d'esprit. Notre état d'esprit, c'est qu'on pense qu'Hy-dro-Québec peut jouer un rôle fondamental pour créer de la valeur, créer du développement économique dans la province, avec un effet indirect sur la fiscalité et sur la création d'emplois, qui va faire en sorte que les sommes investies à travers Hydro-Québec via les projets régionaux vont être récupérées par d'autres canaux, parce que l'économie, évidemment, c'est tout des vases communicants. C'est sûr que, développer un modèle pour démontrer ça, ce n'est pas évident, là; ça peut donner de l'ouvrage à au moins cinq personnes pendant trois ans. Mais, nous, on n'a pas le goût d'attendre trois ans avant d'avoir le modèle.

Je pense qu'il y a des orientations politiques et économiques qui doivent être données. Et, nous, ce qu'on pense, c'est qu'aujourd'hui on est dans une situation dramatique dans la région: on a des pertes d'emplois, on a des taux de chômage absolument désastreux, qu'on n'a même pas espoir d'être capable de ramener à un niveau acceptable au cours des prochains mois et des prochaines années. Alors, c'est sûr qu'on a besoin du gouvernement, on a besoin d'Hydro-Québec qui est le principal levier économique historique de la province, sur lequel on peut compter, sur lequel on doit compter pour, justement, faire ces virages-là.

Mais, encore là, il ne s'agit pas de dire à HydroQuébec: Venez nous développer. Il faut que, comme régionaux, on fasse notre job aussi. Il faut qu'on ait des projets, il faut qu'on ait des structures qui soient crédibles au niveau régional et qu'on soit capable de se concerter, et de «prioriser» des projets, et d'appuyer nos PME. Mais, encore là, il ne s'agit pas d'un fonds pour aller construire des aqueducs et des égouts dans un village où il n'y en a pas encore, là. O.K.? Il s'agit...

M. Chevrette: Ou bâtir un petit centre communautaire et, après ça, bye, bye.

M. Boivin: Ou de choisir de bâtir un petit centre communautaire pour le maire du village, pour favoriser sa réélection. Ce n'est pas ça, là. On parle uniquement d'un fonds d'investissement pour supporter la croissance des PME.

M. Chevrette: Ça, c'est clair. J'aime ça de même.

Le Président (M. Forget): Alors, je remercie M. le député de Joliette.

Alors, j'inviterais M. le député de Gatineau.

M. Lafrenière: Merci, M. le Président.

Les producteurs privés d'électricité qui ont installé des industries majeures depuis le début du siècle ont permis d'assurer le développement économique de votre région en utilisant notamment le potentiel hydroélectrique. Par ailleurs, les problèmes que rencontre votre région correspondent aux problèmes d'une bonne partie des autres régions dont l'économie est de type monoindustriel. Ma question: En quoi un fonds de développement régional provenant des profits hydroélectriques serait-il plus efficace que d'autres formes de fonds pour appuyer le développement de votre région?

M. Boivin: Au Québec, on est aujourd'hui tout à fait dans l'enfance de l'art dans le domaine du capital de risque. Les quelques fonds de capital de risque qui existent sont des fonds qui sont tellement petits et qui prennent tellement pas de risques ou peu de risques qu'on n'est pas capable, définitivement, d'avoir une

stratégie de développement, de création de PME de façon systématique et agressive. Et ce n'est pas parce qu'il manque d'idées, ce n'est pas parce qu'il manque d'«entrepreneurship», et ce n'est pas parce qu'il manque de talent, et ce n'est pas parce que les gens n'ont pas le goût d'être compétitifs avec les Américains, les Japonais et les Européens, et on peut tous les additionner ensemble.

On a les capacités de faire ça; on a une population éduquée, une population qui a le coeur à l'ouvrage, qui est capable de créer de la valeur, mais on a un problème fondamental dans la région, dans les régions du Québec, et c'est aussi vrai dans les métropoles comme Montréal et Québec: il n'y en a à peu près pas, de capital de risque disponible — privé, j'entends. Public, ça, c'est une autre histoire. La SDI et les garanties de prêts, c'est tout à fait une autre dynamique.

Maintenant, nous, on dit que, comme régionaux, il est fondamental qu'on puisse bénéficier d'un support financier pour aller de l'avant avec des projets. Vous savez, ce que les municipalités et ce que les collectivités locales réussissent à dégager, c'est à peine les ressources pour nous payer pour être ici ce soir. On peut bien chacun se cotiser pour essayer d'aider une PME ou essayer de faire un démarrage, mais c'est loin d'être suffisant pour qu'on puisse le réaliser. Et ça, c'est la réalité quotidienne qui se vit dans l'économie québécoise, et ce n'est pas unique à la région. On est d'accord en vous disant que, dans le fond, les préoccupations qu'on soulève ne sont pas juste des préoccupations du Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est des préoccupations de l'ensemble de la population de la province. Alors, c'est très clair.

M. Lafrenière: Vous indiquez que le prix de revient du kilowattheure est moins élevé lorsque la centrale est développée dans une région accessible plutôt qu'en région nordique. Quels sont les coûts que vous avez considérés pour arriver à cette conclusion?

M. Boivin: On n'a pas d'étude là-dessus; on n'a pas d'expertise non plus pour évaluer les différentiels de coûts de construction. C'est sûr que ce serait important qu'on les ait, mais, encore là, les ressources sont limitées, et je pense qu'au niveau d'Hydro-Québec il est très facile d'obtenir ces données-là assez facilement.

M. Lafrenière: Alors, merci.

M. Boivin: Mais, simplement, la simple logique des choses nous amène à prendre ces conclusions-là comme étant crédibles. (21 h 50)

M. Godin (Claude): Je vous dirai que transporter de l'énergie sur 1000 km ou la transporter sur 500 km, il y a déjà là un différentiel de coûts extrêmement important, ne serait-ce que pour les 500 000 000 $ d'investissements qui ne sont pas requis par Hydro-Québec pour assurer ce même transport. Il y a tous les coûts reliés à la construction. Quant à la production d'énergie comme telle, c'est le même coût, mais ce sont tous les coûts d'amortissement, d'hébergement, de transport de main-d'oeuvre, puis mettez-en, coût du capital. Donc, ne serait-ce que le transport, c'est déjà une réduction de coût importante au niveau de la consommation, du prix de revient.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, M. le député de Gatineau.

M. le député de Joliette.

M. Chevrette: II y a sans doute les pertes du réseau aussi. Plus tu es long, plus tu as des chances de pertes. Ça rentre dans le coût de revient, effectivement. Et je suis convaincu qu'au point de vue construction même ça coûte pas mal moins cher. Il ne s'agit que de lire un petit peu les décrets, juste les décrets et conventions collectives, pour savoir que c'est un coût moindre énorme; ça doit être près de la cent du kilowattheure, sûrement. Ça, c'est évident.

Ceci dit, dans votre milieu, il y a des gens éper-dument contre, des gens éperdument pour. Le monde municipal me semble assez pour, tout en ayant, pour certains, des exigences très fortes, pour d'autres moins fortes; ça transpire au niveau des réponses. Et, en ce qui vous regarde, moi, je sens qu'il y a énormément de cohérence au niveau de la solidité des prérequis. Est-ce que j'interprète bien votre mémoire?

M. Boivin: Je pense que c'est tout à fait exact. Dans le fond, ce qu'on est venus vous dire, c'est qu'on a le goût d'être autre chose que des porteurs d'eau ou des retenants d'eau pour faire tourner des turbines. On a le goût de participer au défi collectif que représente Hydro-Québec, et d'y participer non seulement dans une direction mais que l'ascenseur revienne dans l'autre direction aussi. Parce qu'on a aussi besoin d'Hydro-Québec, qui représente probablement notre levier principal de développement économique dans la province, pour, justement, nous épauler. Parce qu'on aura beau faire des discours pendant longtemps sur les stratégies économiques, les restructurations de tel conseil en tel autre conseil, quelque part, ça va prendre des entrepreneurs, ça va prendre des promoteurs puis ça va prendre de l'argent pour créer de la valeur, créer des emplois. Et, ça, ça ne se fait pas ailleurs que là.

M. Chevrette: Si on enlève, par exemple... Il y a une bonne partie de votre forêt qui... Un bon rond, si je me souviens... Je ne me souviens pas exactement de la superficie, mais... Puis très productrice, on m'a dit; très productive. Supposez que ça disparaisse, ça, demain matin. Quelles sont les alternatives de développement, chez vous?

M. Godin (Claude): En fait...

M. Chevrette: II y a la forêt, puis peut-être un peu au niveau du tourisme, parce qu'il y a une inondation beaucoup plus vaste.

M. Godin (Claude): en fait, ce qu'on est venus vous dire par rapport à votre question précise sur la forêt: les études d'impact d'hydro-québec estiment à 1 % la perte de forêt productrice pour la région. bien, 1 %, lorsqu'il est exprimé comme ça, c'est peu, mais, lorsque traduit en emplois, c'est énorme. parce que la forêt, chez nous, c'est 12 000 emplois directs; 1 % de 12 000 emplois directs, bien, ça fait 120 emplois directs. on nous prévoit 75 emplois directs pour l'opération des barrages après. donc, on se retrouve...

M. Chevrette: Déficitaires.

M. Godin (Claude): ...avec moins qu'on avait. Mais ce qu'on est surtout venus dire ce soir, ici, c'est l'expression de... Tantôt, on exprimait des réticences de la population régionale à la venue du harnachement de PAshuapmushuan. Parce qu'on se rend bien compte que, oui, il va y avoir un boum mais, après ça, qu'est-ce qu'on fait? L'énergie, c'est la seule ressource naturelle qui reste au Saguenay—Lac-Saint-Jean. La forêt est épuisée, le mémoire le dit. Les créneaux de développement futurs pour la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est quoi?

Tantôt, on parlait de région monoindustrielle, mais ça ne sera même plus une région industrielle tantôt. Le bois s'éloigne; on n'est absolument pas sûr des mesures palliatives qui ont été avancées — puis j'emploie bien le terme «palliatif», parce que... Puis l'industrie touristique, la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean n'est pas, à notre avis, dans une position telle qu'elle puisse prétendre développer l'industrie touristique qui va lui permettre de faire vivre sa population.

Donc, il reste des mégawatts disponibles, qui sont offerts à la consommation du Québec puis au marché d'exportation, sauf qu'on dit: Si vous venez l'exporter chez nous, on veut que cette ressource-là contribue à l'amélioration de la qualité de vie des citoyens qui y vivent aujourd'hui et des enfants qui y seront demain. Donc, c'est pour ça qu'on propose un partenariat. On ne dit pas à Hydro-Québec: Versez-nous 40 000 000 $ par année; on dit à Hydro-Québec: Partageons l'économie que vous réalisez. C'est ce qu'on dit à Hydro-Québec.

Donc, c'est de faire reconnaître à Hydro-Québec qu'il y a un différentiel à produire de l'énergie en région proche des bassins de consommation et que ceci devrait se faire au bénéfice de la région productrice, tout comme la région consommatrice bénéficie du fait que les régions ont consenti à uniformiser le prix de l'électricité au Québec. Est-ce que Pechiney serait implanté à Bécancour si Pechiney avait dû payer le transport de l'énergie en provenance de la Baie James? Est-ce qu'elle ne se serait pas installée beaucoup plus proche de la production, tout comme Alcan l'a fait en 1927 au Saguenay—Lac-Saint-Jean? Si Alcan revenait se réimplanter dans la région, revenait se réimplanter au Québec en 1993, je ne suis absolument pas sûr qu'avec les politiques d'uniformisation des prix de l'électricité Alcan s'implanterait au Saguenay—Lac-Saint-Jean.

Donc, il y a des avantages qui sont consentis par les régions au profit des bassins de consommation. On estime qu'il est juste qu'Hydro-Québec considère qu'une compensation soit versée à la région productrice, tout comme la région productrice consent des avantages à la région consommatrice.

M. Boivin: II y a peut-être un élément que j'aimerais ajouter. Quelle que soit la collectivité ou la taille de la collectivité, comme société québécoise dans son ensemble, il y a un aspect qui est fondamental, c'est qu'il faut que le territoire soit occupé par des personnes et des occupants qui sont dynamiques, qui font partie de la prospérité de l'ensemble de la collectivité. C'est pour cette raison que, avec la technologie qui nous permet de transporter aujourd'hui l'énergie sur de très longues distances sans qu'on soit obligé d'imposer à ces entreprises-là de s'implanter à la source d'approvisionnement de cette énergie hydroélectrique, il est clair que, si on n'a pas une espèce de retour d'ascenseur pour, justement, minimiser les impacts dus à l'éloignement de nos populations des marchés de consommation... Parce qu'une entreprise qui s'établit à Jonquière n'a pas le même coût de conquête des marchés que l'entreprise qui s'établit à Montréal, ou à Joliette, ou ailleurs dans la province. Et, ça, ce n'est rien qu'une question de raisonnement et de logique face au système de marché qu'on connaît.

Donc, il y a un choix de société à faire. Est-ce qu'on veut maintenir les régions ouvertes? Et de quelle façon on veut les maintenir ouvertes si on veut qu'on puisse contribuer à notre façon à l'effort collectif face à notre qualité de vie et à l'amélioration de nos conditions?

Le Président (M. Forget): Alors, j'inviterais le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Vous aviez un complément à rajouter? J'ai vu...

M. Potvin (Gilles): Oui...

M. St-Roch: Bon, allez-y, même si c'est sur mon 'temps.

M. Potvin: Oui. Peut-être rien qu'une petite mise au point, un petit commentaire, parce que j'ai témoigné... C'est la deuxième reprise que je témoigne devant les membres de la commission; un petit rappel à faire à propos de la région, surtout que vous avez entendu, peut-être, des sons un peu discordants, des tendances, des fois, même opposées. Mais je rappellerai qu'en ces périodes critiques où il faut rationaliser et il faut optimiser les investissements publics, la plus belle démonstration que la région est venue faire devant vous depuis une semaine et demie — et d'ici la fin de la commission, éventuellement — c'est que la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean est sans doute la région au Québec

la plus sensible, la mieux préparée pour développer ce nouveau modèle, cette nouvelle formule de partenariat avec Hydro-Québec. On a exacerbé toutes les tendances chez nous; on est prêt à produire rapidement, à se mettre à table et puis à produire, à être très productif dans l'élaboration de ce nouveau modèle. Alors, on vous rappelle la disposition, la disponibilité de la région pour collaborer avec le gouvernement et Hydro-Québec pour développer le modèle le plus efficace pour l'ensemble du Québec.

M. St-Roch: Merci.

Une réflexion: Vous avez absolument raison lorsque vous mentionnez qu'on n'a pas vraiment de capital de risque dans l'entreprise privée, ici, et je vous trouve très généreux lorsque vous dites que la SDI assume cette partie-là. (22 heures)

Ceci étant dit, vous êtes le troisième intervenant à venir ici, devant nous... Oui, moi, je suis quelqu'un du coeur du Québec. Alors, on approche vos problèmes, peut-être, avec un peu de recul. Il y a deux théories: c'est de laisser cette rivière-là, l'Ashuapmushuan, comme patrimoine et aller bâtir et développer toute une infrastructure récréotouristique. Et il y avait aussi les concessions qu'on semblait donner, qui étaient de dire: Bien, il y a des rivières chez nous qui sont déjà harnachées ou partiellement harnachées; il y a peut-être d'autres barrages qu'on pourrait sortir; on pourrait finir de massacrer ce qui est déjà massacré, et ça serait plus acceptable. Ça, il y a un groupe qui est venu nous dire ça. On parlait de la Péribonka.

Alors, ma question est celle-ci. J'ai lu votre mémoire, j'ai compris la différence que vous faisiez entre rente et pérennité du fonds, parce qu'à un moment donné je me questionnais sur ce que ça voulait dire...

M. Boivin: Oui, il y a une différence.

M. St-Roch: ...mais vos réponses ont apporté une clarification. Alors, ma question est celle-ci: Dans l'éventualité où le gouvernement, dans sa stratégie, dirait: Oui, on va garder des rivières patrimoniales au Québec pour les générations futures, laisser à nos petits-enfants le soin de se casser la tête un jour, si HydroQuébec choisissait la Péribonka, est-ce que les prérequis que vous avez mis dans votre mémoire seraient exactement les mêmes?

M. Boivin: Écoutez, on ne s'est pas posé la question sur la valeur... On s'en est posé, des questions, sur la valeur patrimoniale. Moi, personnellemenet, je suis né à Péribonka. Alors, je peux vous parler de la rivière Péribonka. J'ai grandi...

Une voix: Elle est déjà harnachée.

M. Boivin: Oui, elle est déjà harnachée, et c'est une très belle rivière harnachée, en passant. Les outar- des atterrissent quand même le printemps, et il n'y a aucun problème au point de vue qualité de vie pour les citoyens qui ont vécu à côté de la rivière Péribonka, qui est une rivière harnachée depuis le début de l'opération des barrages dans la région. Donc, il y a des façons de faire. C'est sûr qu'aujourd'hui on a amélioré les procédés, on a amélioré le design des barrages pour, justement, tenir compte des impacts environnementaux. Et, nous, ce qu'on souhaite, c'est qu'effectivement on prenne toutes les précautions nécessaires pour préserver la qualité de vie et le patrimoine touristique, faunique et floral de la région.

Maintenant, il y a une chose, c'est qu'on est 6 000 000 d'habitants... 7 000 000? Je suis déjà passé date.

Une voix: On va...

M. Boivin: On est 7 000 000 d'habitants sur un territoire grand comme plusieurs pays. Or, je me dis que je ne peux pas croire qu'on ne peut pas essayer de maîtriser la nature, d'apprivoiser cette nature-là au profit économique des citoyens. Parce que ça ne sert strictement à rien à personne de harnacher des rivières s'il n'y a pas d'impact sur la qualité de vie des citoyens qui l'environnent...

M. St-Roch: J'ai très peu de temps. Je suis obligé, malheureusement, d'être impoli et de vous couper, mais ce n'est pas ça qui est ma question. Ma question était: S'il y avait une décision politique qui dirait: L'Ashuapmushuan, celle-là, on la garde comme rivière patrimoniale et la Péribonka — parce qu'on a ouï-dire aussi qu'il y a 330 MW de possibilité — on continue à la harnacher et on va aller développer les 330 MW sur la Péribonka, tout en gardant les caractéristiques de protection de l'environnement, est-ce que les demandes que vous faites ce soir, dans votre mémoire, seraient les mêmes?

M. Boivin: Les mêmes. Ah! tout à fait.

M. St-Roch: Bon! C'est ça que je voulais entendre.

M. Boivin: Ce n'est pas juste pour l'Ashuapmushuan.

M. St-Roch: Tous les projets hydroélectriques, petits ou moindres.

M. Boivin: Ah oui!

M. Godin (Claude): Tous les potentiels.

M. St-Roch: Oui, je n'avais pas compris, excusez-moi.

Le Président (M. Forget): Alors, merci, M. le député de Drummond.

Au nom des membres de la commission, je voudrais vous remercier de votre participation, et la commission de l'économie et du travail ajourne ses travaux jusqu'à 10 heures demain, à la salle du Conseil législatif.

(Fin de la séance à 22 h 4)

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