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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mardi 23 mars 1993 - Vol. 32 N° 43

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec


Journal des débats

 

(Neuf heures huit minutes)

Le Président (M. Forget): Je déclare la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de procéder à une consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Charbon-neau (Saint-Jean) par M. Fradet (Vimont); M. Blais (Masson) par Mme Marois (Taillon) et M. Claveau (Ungava) par M. Baril (Arthabaska).

Auditions

Le Président (M. Forget): Alors, je vais faire lecture de l'ordre du jour: Environnement Jeunesse; le Conseil de l'industrie de l'hydrogène; la MRC du Fjord-du-Saguenay et Cascades inc. Est-ce que l'ordre du jour est accepté?

Une voix: Accepté.

Le Président (M. Forget): J'invite Environnement Jeunesse à prendre place. Je rappelle le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échanges: l'exposé de l'organisme est de 20 minutes et la période d'échange de 40 minutes. Alors, je demanderais au porte-parole de se présenter et de présenter ses invités.

Environnement Jeunesse (ENJEU)

Mme Hudon-Fecteau (Eve-Lyne): Bonjour! Je suis Eve-Lyne Fecteau, d'Environnement Jeunesse. Alors, c'est Philippe Dunsky, qui est mandaté par ENJEU, qui a préparé le mémoire. Alors, madame, messieurs, bonjour. C'est avec fierté et grand plaisir qu'Environnement Jeunesse participe à l'élaboration du plan de développement 1993 d'Hydro-Québec. Nous vous présentons la position des jeunes actifs dans le domaine de l'environnement face à ce plan. (9 h 10)

ENJEU est un regroupement qui existe depuis 1979. Il compte aujourd'hui près de 100 groupes de jeunes répartis à travers le Québec, principalement dans les institutions d'enseignement, tant au secondaire, au collégial qu'à l'université. Près de 1000 membres individuels appuient également nos activités d'éducation relatives à l'environnement.

Le domaine de l'énergie n'est qu'un des domaines qui intéressent ENJEU. En effet, la gestion des déchets, les transports, les questions relatives aux jeunes et autres occupent une place importante au sein de notre organisme. Malgré cela, depuis 1991, nous nous impliquons plus attentivement relativement au dossier énergétique du Québec.

Nous participons, entre autres, au processus d'examen de Grande-Baleine et de Sainte-Marguerite ainsi qu'à deux comités conjoints avec Hydro-Québec. Nous avons également collaboré avec l'Association québécoise pour l'évaluation des impacts. Pour parfaire nos connaissances, nous avons visité, pendant trois semaines, plusieurs experts en énergie de l'Ouest du Canada et des États-Unis. En 1991, nous avons organisé un référendum sur l'énergie où plus de 12 000 jeunes se sont prononcés en faveur d'un débat public sur l'énergie ainsi que pour la taxation de l'essence. Cette activité s'est méritée le prix Ovation décerné par le Regroupement Loisir Québec.

Par notre présence ici ce matin, nous répondons à l'appel de nos aînés qui se demandent: Mais où sont les jeunes? Nous avons produit ce rapport avec sérieux. Nous y avons mis notre temps, notre argent et nos idées nouvelles. La qualité de nos apports dans le domaine de l'énergie a été, à plusieurs reprises, reconnue lors des rencontres mentionnées précédemment. Il n'en tient qu'à vous maintenant de considérer comme telle notre position, et vous verrez que les jeunes se manifestent.

Ceci dit, nous sommes convaincus que le plan de développement d'Hydro-Québec représente des choix de société cruciaux. À une époque comme la nôtre, où la conscience de la fragilité de notre écosystème et même de notre économie est acquise par plusieurs, la remise en question de certaines orientations s'impose. Notre avenir à nous, les jeunes, est en train de se jouer; la consommation d'énergie est un des enjeux déterminants de la société dans laquelle nous vivrons.

Philippe Dunsky a donc été mandaté par ENJEU pour s'exprimer au nom des jeunes sensibles au sort de la planète sur le développement d'Hydro-Québec 1993. C'est avec à la fois notre expérience et notre jeunesse que nous vous soumettons ces propositions de principe et ces solutions. Je laisse donc la parole à M. Dunsky. Merci de votre attention.

M. Dunsky (Philippe): Bonjour. Mesdames et messieurs, d'abord, je voudrais vous remercier pour cette opportunité qui nous est offerte de vous présenter le point de vue d'Environnement Jeunesse sur le plan de développement de 1993, proposé par Hydro-Québec.

Comme vous avez pu le constater, notre mémoire a tenté de faire le survol de la plupart des enjeux majeurs reliés à ce domaine des plus importants. Dans la

période de temps qui nous est accordée aujourd'hui, j'aimerais n'aborder que quelques-uns de ces mêmes enjeux. Les trois enjeux dont je voudrais vous entretenir aujourd'hui sont les suivants: 1° le traitement des mesures de gestion de la demande; 2° les processus de concertation; 3 e la régie de l'énergie du Québec.

Premièrement, si nous discutons du traitement accordé aux mesures de gestion de la demande, c'est parce qu'on croit qu'il existe un problème important, à l'heure actuelle, concernant ce sujet. En effet, il y a trois aspects principaux qui, pour ENJEU, Environnement Jeunesse, sont d'une importance primordiale dans le traitement des mesures de gestion de la demande. Ce sont, premièrement, la demande qu'on fait aux consommateurs de payer des dépenses d'investissement initiales au lieu de les facturer à long terme, comme on le ferait pour l'électricité; deuxièmement, le fait que le service public ne reçoit aucun revenu pour ses dépenses en efficacité énergétique; et, troisièmement, les caractéristiques différentes des mesures du côté de l'offre et de celui de la demande qui ne sont prises en compte nulle part dans le processus de classement économique.

Donc, on va commencer par la première, par le fait qu'on demande aux consommateurs de payer des dépenses d'investissement initiales pour la gestion de la demande. Environnement Jeunesse croit que les mesures du côté de la demande sont, à l'heure actuelle, pénalisées par le fait qu'elles ne sont pas livrées aux consommateurs de la même façon qu'on livre des kilowattheures du côté de l'offre. C'est-à-dire que, tandis que, dans le cas de l'électricité, Hydro-Québec paie tous les coûts de production, de transport et de distribution et livre ensuite l'électricité directement chez le consommateur, dans le cas de l'efficacité, on demande au consommateur de payer les dépenses d'investissement initiales en lui disant qu'éventuellement il devrait récupérer ses investissements en épargne. On traite les mesures du côté de la demande de façon contraire à celle dont on traite les mesures du côté de l'offre.

Donc, comme nous l'avons proposé dans notre mémoire, nous croyons que le traitement des mesures du côté de la demande devrait être modifié afin de le rendre semblable au traitement pour le côté de l'offre. Ce qui veut dire qu'Hydro-Québec se chargera d'aller directement chez le consommateur et de lui installer des économiseurs d'énergie, comme elle installe présentement l'entrée de courant d'électricité. Le fardeau des dépenses d'investissement initiales doit être assumé par celui qui est vraiment capable de les supporter à court terme, c'est-à-dire Hydro-Québec.

Deuxièmement, le fait que le service public, Hydro-Québec, ne reçoit aucun revenu pour ses dépenses en efficacité énergétique. Actuellement, à moins que la mesure d'économie d'énergie coûte moins cher, non seulement que son coût évité, mais que son coût évité moins les revenus perdus, cette mesure n'est pas rentable pour Hydro-Québec. Mais pourquoi faisons-nous une différence entre la production et l'efficacité énergé- tique de cette façon-là?

En produisant de l'électricité, Hydro-Québec rend un service à la clientèle. En revanche, elle demande un remboursement. Le cas des mesures d'économie d'énergie devrait être le même. Hydro-Québec rend un service énergétique à sa clientèle. Alors, pourquoi pénaliser Hydro-Québec pour avoir choisi cette option contre l'option production en ne lui permettant pas de récupérer ses dépenses par les consommateurs? Il y a là une question d'injustice contre l'option efficacité énergétique.

Environnement Jeunesse croit qu'Hydro-Québec devrait avoir le droit de demander un remboursement pour ses dépenses en efficacité énergétique, comme il lui est permis de le faire pour les moyens de production. Donc, en suivant notre proposition qu'Hydro-Québec devrait payer toutes les dépenses initiales d'investissement, elle devrait aussi se permettre de récupérer ses dépenses par le consommateur. Dans le cas où il est vraiment impossible de récupérer ses dépenses de cette façon-là, d'autres façons existent, dont le Electric Revenue Adjustment Mechanism, ou ERAM, dont HydroQuébec et la ministre de l'Énergie connaissent sûrement les principes.

Troisièmement, le fait que les caractéristiques différentes des mesures du côté de l'offre et de celui de la demande ne sont prises en compte nulle part dans le processus décisionnel ou le processus de classement économique. Chacun des moyens de fournir les services énergétique fiables au consommateur a ses propres caractéristiques. En effet, chaque option porte différents niveaux de coûts et de bénéfices, tant sur le plan environnemental que celui de la création d'emplois, de la flexibilité économique, de la disponibilité des ressources, des risques d'investissements dus à l'incertitude ou au temps de mise en oeuvre, etc.

Pourtant, dans le contexte actuel de planification, on ne tient compte nulle part ni de ces coûts ni de ces bénéfices particuliers à chacune des options. Environnement Jeunesse croit que, pour pouvoir être en mesure de garantir le meilleur approvisionnement d'énergie au moindre coût, toutes ces caractéristiques doivent être incorporées, et ce de façon explicite, à un endroit où un autre de la planification. Pour ce faire, on pourrait utiliser la méthode des externalités pour certains de ces enjeux dont l'environnement et la création d'emplois. Quant aux risques financiers et la disponibilité des ressources, on pourra incorporer ces considérations dans le taux d'actualisation utilisé. Finalement, pour les risques associés au temps de mise en oeuvre, on pourra adopter l'utilisation d'une courbe d'acquisition des ressources qui tienne compte des propriétés particulières de chacune des options.

Peu importe la façon de le faire, il faut, sans hésitation, commencer à incorporer tous les coûts et tous les bénéfices de chacune des options afin de pouvoir les comparer de la meilleure façon possible. Ne pas le faire équivaudrait, pour reprendre une expression que j'aime beaucoup de la part de M. Richard Cowarth, le Chairman du Vermont Public Service Board, à faire la mathé-

matique de l'autruche, c'est-à-dire que, même si on reconnaît qu'il existe des coûts non calculés, on se met la tête dans le sable pour ne pas avoir à les considérer.

Une fois que tous les aspects de chacune des ressources sont comparés de façon équitable, et que toutes les options, qu'elles soient du côté de l'offre ou de celui de la demande, sont traitées sur le même pied, le Québec sera finalement en mesure d'entrer dans la nouvelle ère d'une planification énergétique grandement améliorée. Quand cela sera fait, nous sommes convaincus que ce sont les Québécois et Québécoises qui seront les vrais gagnants. (9 h 20)

Maintenant, le deuxième thème: les processus de concertation, et non pas de consultation. Je voudrais maintenant vous parler de cet enjeu qui, pour nous autres, est très important. Contrairement à la position officielle d'Hydro-Québec, son processus de consultation n'a pas connu un succès total, comme notre service public essaie souvent de le démontrer. Ce processus de consultation, qui s'est déroulé durant l'hiver et le printemps passés, représente peut-être un avant-goût de ce qu'on pourrait éventuellement faire ensemble. Ça aura été une ouverture, un début, une introduction peut-être, mais le temps est maintenant venu pour la tenue d'un véritable, pour ne pas dire désirable, processus de concertation.

Environnement Jeunesse a participé de façon très active à tous les niveaux, voire à chaque rencontre de chacun des niveaux du processus de consultation. De plus, nous sommes le seul groupe qui participe actuellement au sein des deux comités Hydro-Québec-Groupes chargés de l'élaboration d'études sur la planification intégrée des ressources ainsi que sur les stratégies industrielles axées sur l'électricité. Donc, en ayant participé à l'ensemble de cette expérience, nous avons eu l'opportunité de voir jusqu'où ce type de processus pourrait aller. Nous croyons qu'il pourrait aller beaucoup plus loin.

En effet, Environnement Jeunesse croit que le Québec est mûr pour un véritable processus de concertation dans lequel une variété de groupes, représentant des intérêts divers de l'ensemble de la société, pourront discuter et arriver idéalement à des consensus face aux décisions importantes que doit prendre Hydro-Québec pour remplir les besoins et les voeux de l'ensemble de la communauté québécoise. De plus, nous sommes convaincus qu'une majorité des groupes québécois, qu'ils soient de nature environnementale, syndicale, entrepreneuriale ou autre, sont maintenant assez matures dans leur compréhension du dossier énergétique pour pouvoir atteindre de tels consensus.

Finalement, non seulement nous croyons que les Québécois sont prêts pour un tel processus, nous croyons que ce dernier est devenu essentiel pour le bien-être de notre société. Tous savent très bien, peut-être même trop bien, à quel point le domaine de l'énergie au Québec a réussi à susciter d'importantes divisions au sein de la communauté québécoise dans les dernières années. De plus, l'image de notre province à l'échelle internationale, et surtout avec nos voisins du Sud, s'est extrêmement détériorée à cause de ce même dossier.

Ces tensions, ces divisions et ces détériorations de notre image ne s'apprêtent qu'à s'intensifier dans un avenir prochain. Pour Environnement Jeunesse, la meilleure façon de contrer ces problèmes-là est de tenter d'arriver à un consensus social où les intérêts de toutes et de tous seront idéalement servis. La tenue d'un véritable processus de concertation est donc possible et désirable. Nous suggérons donc fortement que la commission parlementaire assume ses responsabilités en permettant, de cette façon, un véritable consensus pan-québécois.

Troisièmement, la fameuse régie de l'énergie du Québec. La reconnaissance de ses propres limites est toujours le meilleur exemple de ses propres capacités. C'est ce que nous avons dit déjà dans notre mémoire et c'est ce que nous répétons ce soir. Mesdames et messieurs, je vous prie de comprendre à quel point il est difficile d'être assis devant vous et de nous interroger sur votre compétence dans ce domaine. Mais nous devons le faire.

Le domaine de l'énergie, nous le constatons depuis que nous nous impliquons dans ce domaine, est extrêmement complexe. Ça prend, pour Hydro-Québec, au-delà de 25 000 employés pour le maîtriser, et même là nous ne sommes pas tout à fait certains qu'Hydro-Québec ait réussi.

Que le domaine de l'énergie soit d'une complexité énorme n'est qu'un fait. Mais, un autre fait, c'est que l'étude et l'éventuelle autorisation, en quelques semaines, d'un plan de 10 ou 15 ans, comportant des investissements de l'argent public de plus de 50 000 000 000 $ et des impacts énormes sur presque tous les enjeux importants auxquels fait face la société québécoise, ne devraient pas être faits par quelques hommes et femmes n'ayant aucune ou presque aucune expertise dans le domaine de l'énergie. On ne doute pas de vos compétences en politique ni de vos compétences personnelles, qu'elles soient sur le plan économique, celui du droit ou autre, mais vous n'avez simplement pas les compétences pour étudier et évaluer un domaine aussi grand, aussi complexe et aussi important que celui de l'énergie.

Si on vous dit ça, c'est parce que ça nous inquiète énormément. Je ne me gênerai pas pour vous dire que, dans la communauté énergétique, qu'elle soit ici au Québec ou ailleurs, l'évaluation du plan de développement d'Hydro-Québec par votre commission parlementaire est reconnue tout simplement comme étant une farce. On ne s'attend pas à ce qu'une vraie évaluation soit entreprise. On ne s'attend pas plus à ce que les meilleures décisions en matière énergétique soient prises. Ni les groupes dits écologiques, ni les groupes de recherche, ni les industries, ni même Hydro-Québec ne s'attendent à ce que le plan soit évalué de la meilleure façon possible. Il y a donc, évidemment, une lacune énorme dans la politique énergétique québécoise.

Ce que nous proposons aujourd'hui, ce que nous avons déjà proposé dans notre mémoire et ce que plusieurs organismes proposent, et ce depuis longtemps, c'est la création d'une régie de l'énergie du Québec.

C'est une régie qui devrait se doter de personnes compétentes dans le domaine de l'énergie. Ces personnes-là devraient aussi avoir le temps ainsi que les ressources pour pouvoir très bien évaluer les plans d'Hydro-Qué-bec ainsi que ceux de Gaz Métropolitain. Une régie qui est capable d'étudier, d'évaluer et de prendre des décisions sur le sort du domaine de l'énergie au Québec tant au niveau des différents moyens de production et des options du côté de la demande qu'aux différentes façons de planifier, de faire les prévisions et autres facettes inhérentes à ce domaine. Nous répétons une dernière fois que la reconnaissance de ses propres limites est toujours le meilleur exemple de ses propres capacités. Nous espérons que vous, les membres de la commission de l'économie et du travail, tiendrez fortement à ce fait. Encore une fois, mesdames et messieurs, j'espère que vous avez eu l'opportunité de lire notre mémoire, car c'est avec le plus grand respect qu'on vous l'a remis. J'espère aussi être capable de répondre à toute question que vous aurez à me poser. Je vous remercie.

Le Président (M. Forget): Je vous remercie. Alors, Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources, à vous la parole.

Mme Bacon: Alors, je voudrais vous remercier de votre participation à, j'espère, pas une farce, mais un processus de consultation, si vous me permettez de vous le dire ce matin. J'espère que les 80 et quelques groupes qui sont venus nous rencontrer n'ont pas pris cette commission pour une farce mais pour un endroit très démocratique qui nous permet d'étudier le dossier du plan de développement d'Hydro-Québec. Que ce soit notre commission parlementaire, que ce soient d'autres commissions parlementaires, je pense qu'ici c'est le jeu de la démocratie qui se joue. Et il ne faudrait pas appeler ça une farce. En tout cas, moi, je me permets de diverger d'opinion avec vous. Mais je suis quand même heureuse de constater que des représentants de la jeunesse aient autant à coeur de collaborer à l'exercice de réflexion que nous avons mis, depuis au-delà d'un mois, sur le dossier du plan de développement d'Hydro-Qué-bec et je pense que, par moments, ça déborde aussi sur l'ensemble des énergies au Québec.

Dans votre mémoire, vous recommandez qu'Hy-dro-Québec mette en place, parallèlement à son processus de consultation, des tables de concertation portant, notamment, sur les externalités. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment vous entrevoyez le déroulement d'un exercice pareil et, peut-être, quels sont les résultats qu'on pourrait escompter?

M. Dunsky: Merci. Alors, pour ce qui est du processus, il y a plusieurs processus qui ont déjà été entrepris un peu partout en Amérique du Nord. Le plus récent, je pense que c'est au Vermont où il y avait un processus de concertation sur la question des externalités uniquement. C'est un processus où il y aurait — et là je pourrais peut-être lancer des idées parce qu'il y a différentes façons d'aborder cette questions-là, d'aborder un tel processus de concertation. Mais, par exemple, on pourrait demander au milieu environnemental, au milieu syndical, au milieu de l'industrie, etc., de se trouver des représentants qui pourraient représenter ces différents domaines, dans un processus où, par exemple, ces gens-là se rencontreraient à chaque semaine, à chaque deux semaines, à chaque mois, avec des experts et avec des ressources pour engager des experts sur la question, pour échanger sur les différentes possibilités, les différentes façons d'évaluer les externalités.

Comme je le disais, il y a différentes expériences qui se sont déjà vécues dans d'autres juridictions là-dessus. Il y en a une, par exemple, où, essentiellement, on a mis des gens dans les salles, on a fermé les portes, puis on ne les a pas laissé sortir de là pendant x heures par jour, pendant x semaines, jusqu'à ce qu'il y ait des consensus sur la majorité des dossiers que ces gens-là étudiaient. Ça s'est passé surtout en Californie. Donc, il y a différentes façons de le faire, mais, ce qui est sûr, c'est qu'il faut avoir un processus de concertation sur les externalités parce que les externalités, on le constate, il y a des dizaines et même des centaines de façons de faire, de les évaluer, de les prendre en compte dans le processus de classement économique ou dans d'autres processus décisionnels. (9 h 30)

Mme Bacon: Selon vous, l'utilisation du test de rentabilité «Tous y gagnent» permettrait des économies de 300 000 000 $ et la création de 34 000 emplois en 10 ans. Pour ce qui est des emplois, c'est à peu près comparable aux prévisions d'Hydro-Québec et la principale différence se situe au niveau des économies d'énergie que vous évaluez, dans votre texte, à 27,9 TWh, dans un scénario moyen que vous proposez, soit trois fois plus que celles qui sont envisagées par Hydro-Québec. Est-ce que vous pourriez peut-être, pour le bénéfice de la commission et pour faire notre éducation, nous expliquer les grandes lignes de l'approche qui vous permet d'espérer des résultats aussi élevés que 27,9 TWh, tout en projetant des tarifs plus faibles?

M. Dunsky: Alors, d'abord, je vais dire que le résultat, surtout pour ce qui est du potentiel d'efficacité énergétique, et je l'ai dit, je pense, un peu partout dans le mémoire, c'est un résultat très préliminaire. Je ne voudrais pas dire ici ou essayer de dire que c'est certain ou que même nous on est presque certains que ça pourrait être une réalité, les 27,9 TWh. Ça, il faudrait l'étudier davantage et, on le dit, on serait prêts à l'étudier davantage d'ici quelques mois.

Maintenant, pour ce qui est du processus pour ce test-là, l'idée, c'est assez simple, et c'est ce que nous avons dit dans la présentation ce matin, c'est tout simplement de mettre le côté de l'offre et le côté de la demande sur le même pied, c'est-à-dire en permettant à Hydro-Québec de demander un tarif pour l'efficacité énergétique auprès de sa clientèle. En permettant à Hydro-Québec de demander un tarif pour l'efficacité énergétique, Hydro-Québec pourrait dépenser beaucoup plus en efficacité énergétique, évidemment, parce que

des dépenses seraient comblées par des revenus. Ça, ça explique peut-être pourquoi on permettra plus d'efficacité énergétique de rentrer là-dedans.

Maintenant, pourquoi on pourrait baisser les dépenses des Québécois dans ce domaine? C'est tout simplement parce que les mesures d'efficacité énergétique, en général, sont moins chères que les mesures du côté de l'offre. Je vous donne l'exemple. Je sais qu'Hy-dro-Québec, actuellement, d'après ses tests de rentabilité, choisit toutes les options du côté de la demande qui sont rentables, qui coûtent moins cher que les mesures du côté de l'offre. Néanmoins, on regarde, mettons, un petit graphique et on voit que le coût moyen des mesures du côté de l'offre, la production, s'avèrent à peu près 0,065 $ le kilowattheure et le coût moyen des dépenses d'Hydro-Québec en efficacité énergétique est d'à peu près 0,022 $ le kilowattheure. Donc, il y a, par kilowattheure, mettons, beaucoup de mesures entre les 0,022 $ et les 0,067 $ qu'on pourrait aller chercher en permettant à Hydro-Québec un revenu sur ses dépenses.

Mme Bacon: Je n'ai pas saisi comment vous arrivez à 27 TWh. C'est trois fois plus qu'Hydro-Qué-bec quand même! Il faut que vous ayez fait des calculs pour arriver à 27. Et le fait d'avoir un coût pour l'efficacité énergétique, comment ça peut affecter toute la tarification? Vous parlez de cents, mais ça va affecter la tarification.

M. Dunsky: Ah oui! c'est certain. Il faudrait tout simplement, pas tout simplement, mais refaire la tarification pour qu'Hydro-Québec offre à sa clientèle deux options de tarification: une option qui est uniquement un tarif pour l'électricité et une autre option qui est une option de facturer la clientèle pour, d'une part, l'électricité et, d'autre part, l'efficacité qu'Hydro-Québec installe chez elle.

Maintenant, comme je le disais, on va étudier cette question davantage dans les mois à venir. À prime abord, je pense qu'il pourrait y avoir une difficulté assez énorme dans le cas du secteur résidentiel. Dans le cas du secteur industriel, par contre, c'est le contraire. On pourrait assez facilement connaître et quantifier les économies d'énergie qu'on pourrait atteindre dans les grandes industries, à titre d'exemple. Et, quand on peut quantifier les économies d'énergie qu'on met en place dans une industrie, on peut aussi quantifier, à partir de la consommation normale de cette industrie, l'argent que cette industrie va épargner. À partir de là, on peut facturer l'industrie pour l'efficacité énergétique qu'Hydro-Québec a mise dans l'industrie. Ce n'est pas une recommandation, je dirais, nouvelle. Ce n'est pas complètement nouveau. Ça se fait d'ailleurs en Californie. Je pense que c'est le Sacramento Utility ou le Sacramento Power Corporation qui fait ce même genre de test et surtout de tarification pour l'efficacité. Ils ne le font pas sur une base de cents par kilowattheure, mais sur une base mensuelle. La compagnie d'électricité facture l'industrie, facture le commerce sur une base mensuelle pour les économies d'énergie qu'elle vient d'installer.

Mme Bacon: ii y a un récent sondage d'hydro-québec auprès de sa clientèle qui a démontré que la hausse des tarifs constitue une des principales préoccupations. et, dans ce contexte, est-ce que vous ne croyez pas que la société en général serait prête à accepter l'ajout d'une prime totale de 50 %, tel que vous proposez, sur les options du côté de l'offre, et les inévitables hausses de tarifs qui s'ensuivent?

M. Dunsky: je ne le sais pas. je ne sais pas si la société québécoise est d'accord ou n'est pas d'accord avec une prime de 50 % sur les mesures traditionnelles du côté de l'offre. je ne pourrais pas me prononcer pour la population québécoise. je pense que, quelque part, il faut inclure les coûts externes dans nos évaluations coûts-bénéfices. j'espère fortement qu'hydro-québec va faire cet exercice le plus tôt possible. ce qu'on propose ici, ce n'est pas de mettre une prime à long terme de 50 %, c'est de mettre une prime entre-temps, tout simplement d'ici à ce qu'hydro-québec réussisse à vraiment évaluer les vrais coûts externes de chacun de ses projets. alors, une prime de 50 %, c'est uniquement provisionnel. si les québécois et les québécoises sont prêts pour ça ou sont d'accord avec ça, je ne le sais pas, mais je pense que, pour au moins commencer à intégrer la question environnementale dans nos décisions économiques, il faudrait le faire.

Mme Bacon: Est-ce qu'il me reste encore du temps?

Le Président (M. Forget): Votre temps est écoulé.

Mme Bacon: C'est fini? On reviendra.

Le Président (M. Forget): Alors, merci, Mme la ministre. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais remercier le porte-parole d'avoir pris du temps, dépensé des énergies pour venir nous faire profiter de votre science, nous qui sommes des membres du salon de l'incompétence.

Je pense qu'on en tirera sans doute des bénéfices extrêmes à vous avoir lu et à vous avoir entendu. J'ose espérer que l'expérience que vous vivez d'autre part, aujourd'hui, vous permettra de comprendre que, quand on veut donner des leçons, qu'on se permet de donner des leçons, ça fait partie aussi de l'expérience de la vie parce qu'il y a un petit ton d'arrogance dans votre mémoire qui est agaçant. Je ne sais pas pourquoi vous faites ça, d'ailleurs, ce n'est pas ça qui donne plus de sérieux au mémoire. Je ne comprends pas pourquoi. Qu'est-ce que vous diriez si vous étiez assis ici? Juge-riez-vous que vous avez la compétence de nous écouter si j'étais à votre place?

M. Dunsky: Si j'avais la compétence d'évaluer le

plan d'Hydro-Québec ou...

M. Chevrette: Si vous vous asseyiez à ma place et que je m'asseyais à votre place et que je vous disais que vous participez à une farce et qu'on n'a pas la compétence de juger d'un rapport... Si vous vous permettez de venir donner des avis, c'est parce que vous jugez que vous avez la compétence de donner un avis.

M. Dunsky: Je pense que j'ai la compétence de donner un avis. Je pense que tout le monde a la compétence de donner un avis. Par contre, dans un processus décisionnel sur un plan aussi important que celui-là, moi, je ne pense pas que j'aie la compétence. C'est clair.

M. Chevrette: Mais, dans une société structurée et organisée, ça prend quelqu'un pour prendre une décision en bout de course. Et c'est à partir d'avis d'experts. Quand il se dégage des consensus de la commission, par exemple, sur une dizaine de points majeurs... Il y a 85 groupes très compétents, comme le vôtre, qui sont venus donner des avis. Est-ce que vous nous reconnaissez au moins la capacité intellectuelle d'être capables de dégager des consensus, puis d'y aller dans ce sens-là? Et c'est ça la démocratie, c'est ça le processus. C'est parce que, de la manière que vous le rédigez, je vous avoue franchement, ça a l'air pédant. C'est comme si vous aviez la compétence de vous exprimer et qu'on n'aurait pas la compétence d'écouter et de comprendre. (9 h 40)

M. Dunsky: Bien non. Je m'excuse si c'est comme ça que je me suis exprimé. Ce n'est pas ça que je voulais dire. Je ne voulais pas m'interroger sur vos compétences à écouter du monde avec différentes opinions. Je ne m'interrogeais pas non plus sur vos compétences personnelles en quoi que ce soit. Simplement, dans le domaine de l'énergie, moi, je ne suis pas expert. J'imagine qu'on peut dire assez facilement que vous n'êtes pas des experts non plus. Expert, c'est un grand mot. Mais il existe des experts au Québec en matière d'énergie et il existe même des experts qui ne travaillent pas pour Hydro-Québec qui pourraient, je pense, avoir le meilleur aperçu du plan de développement, puis prendre les meilleures décisions sur le plan de développement.

M. Chevrette: Mais une politique de développement énergétique, que ce soit dans n'importe quel pays du monde, ordinairement, puise son origine à partir d'un gouvernement élu qui, lui, doit avoir la sagesse et la compétence de s'entourer d'experts. C'est pour ça qu'il y a un ministère de l'Énergie, qu'il y a HydroQuébec, qu'on ne doit pas laisser cela à Hydro-Québec seule, je suis d'accord avec vous parce qu'ils sont les seuls à avoir l'expertise, puis, s'il n'y a pas d'autres personnes pour nous renseigner, on risquerait peut-être d'être biaises... Mais le processus comme tel, auquel vous participez, c'est de venir donner votre opinion, même sur... Vous attaquez même Hydro-Québec dans son processus de consultation. Vous dites que c'est un peu pour la frime que c'a été fait. Ce n'est pas une véritable concertation. En tout cas, c'est ce que je retire de votre texte, ce avec quoi, je pourrais être d'accord avec vous. Mais je voulais vous amener à réfléchir, en un mot, sur le fait que, dans toute société structurée, organisée, ça prend quelqu'un, à un moment donné, pour trancher en bout de course. Et, pour trancher en bout de course, ça prend une autorité; une autorité qui est conférée par le peuple, dans les circonstances. Moi, je pourrais être d'une incompétence totale, ce avec quoi je pourrais être d'accord avec vous si vous m'attaquiez personnellement. Je vous dirais: Bien oui, mais j'ai eu le courage de me présenter, de me faire élire et d'essayer de comprendre. Et, si les citoyens jugent que je ne comprends rien, que je prends de mauvaises orientations, ils ont la capacité de me changer à tous les quatre ans, moi, ce qui n'est pas le cas dans bien des structures dites de société, même au niveau du fonctionnarisme, par exemple.

Donc, c'est dans ce sens-là que je voulais attirer votre attention. Quand vous venez devant une commission, moi, je ne vous demande pas de nous flatter, mais c'est de profiter de l'occasion pour vous faire comprendre que le processus qu'on vit présentement, c'est parce qu'on n'en a pas d'autres. Ça pourrait être une commission indépendante sur l'énergie, mais qui, en bout de course, ne peut pas décider de toute une politique énergétique parce que la richesse naturelle appartient au peuple. Donc, l'orientation ultime, il faut qu'elle soit prise par les gouvernants. Que les gouvernants prennent de meilleurs processus pour en arriver à se faire renseigner, à se faire conseiller pour prendre la meilleure décision, je suis d'accord avec vous autres, mais, ulti-mement, il faut bien comprendre qu'on ne peut pas se départir d'une responsabilité. Prenez un groupe d'intérêts qui se retrouverait en pouvoir de décision, puis qui dirait, demain matin, qu'Hydro-Québec c'est un organisme pour l'entreprise, pour la grande industrie, point. Qui pourrait se battre à ce moment-là pour que cette richesse naturelle, convertie en forme d'énergie, puisse servir l'ensemble de la collectivité? C'est dans ce sens-là. Vous me suivez?

M. Dunsky: Vous avez raison. Je pense que c'est une question importante. La question qui se pose, c'est: À quel point l'Etat participe dans les décisions du peuple? Puis différents États, puis différentes personnes répondent différemment. L'État ne prend pas des décisions, par exemple, pour les industries, mais il prend les décisions pour Hydro-Québec. C'est vague, il n'y a pas de règles du jeu là-dessus. Nous, ce qu'on pense, c'est que, dans le cas de l'énergie au Québec, ça ne devrait pas être une décision entièrement politique. Évidemment, la politique a sa place à jouer dans ça, c'est clair. Vous êtes les élus. On est en démocratie. Les élus ont évidemment une place dans les décisions. On ne dit pas le contraire. Mais on dit, par exemple, qu'on devrait se doter des meilleurs experts que nous possédons, ici, au

Québec, pour évaluer des choses aussi importantes.

Maintenant, qu'on mette en place une espèce de commission ou de régie sur l'énergie au Québec, puis qu'en bout de ligne la régie fasse des recommandations au gouvernement, ça, ça pourrait être intéressant. Ça relève toujours des élus de prendre des décisions ultimes, mais après avoir reçu l'avis d'un groupe d'experts qui ont eu le temps, les ressources, etc., pour les évaluer; ça, ça pourrait être intéressant.

On ne nie pas l'importance du gouvernement, évidemment. Si, quelque part, comme vous dites, il y avait un ton d'arrogance dans ce qu'on disait, je ne pense pas que c'était voulu. Mais, parfois, personne ne dit ce qu'il pense. Puis, quand on dit que l'opinion qu'on vient de vous donner est non seulement la nôtre, mais est partagée par la vaste majorité des intervenants dans ce domaine, c'est parce que c'est vrai. Et, s'il n'y a personne d'autre qui va le dire, bien, c'est à nous de le dire.

M. Chevrette: Juste un petit exemple. Si c'est vrai que tous les groupes pensent que... Prenez un exemple très concret. Il y a des consensus majeurs qui se dégagent. Par exemple, si Mme la ministre, demain matin, devait conclure que, je ne sais pas, moi, les tarifs devraient se limiter à, qu'elle crée une commission d'énergie, qu'elle aille dans le sens, par exemple, de l'interfinancement proposé par les groupes, ça aurait servi à quoi? Ce n'est pas une farce, ça? C'est grâce à l'influence des quelque 80 groupes ou des 65 qui sont d'accord que vous en êtes arrivé à gagner, que vous en êtes arrivé à gagner votre point de vue, puis à le faire partager par ceux et celles qui dirigent. Et c'est loin d'être un processus de... Si c'était une farce, je vais vous dire quelque chose, ça ferait trois semaines que je serais parti d'ici, parce qu'il y a du redondant en maudit depuis trois semaines, puis on a écouté patiemment. Puis je pense que, même cet après-midi, on va dégager des consensus qui découlent de vos mémoires. Et vous faites partie de ceux-là. Vous vous inscrivez dans le sens des consensus sur deux, trois points.

Donc, c'était juste ça mon message que je voulais vous passer parce que tu es bien plus réceptif quand les gens viennent te livrer leurs convictions que s'ils t'attaquent avec un bon coup de poing. Moi, si vous me donnez un coup de poing, je ne suis pas sûr que je vais vous écouter. Moi, je ne suis pas le Christ, je ne vous présenterai pas mon autre joue, comprends-tu?

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, M. le député de Joliette. Alors, je passe la parole au député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. Alors, comme le temps passe vite, je vais vous poser seulement une question. À propos de l'émission des gaz à effet de serre, vous faites référence à une déclaration du chef d'équipe du Freshwater Institute, qui a déclaré qu'il était plausible que certains réservoirs émettent autant de gaz à effet de serre qu'une centrale alimentée au charbon, au pro rata des mégawatts produits. Les travaux de cet institut-là ont porté sur des étangs naturels, au Manitoba et en Ontario. Si on revient au Québec, pour mettre en perspective un peu cette déclaration-là, les chercheurs d'Hy-dro-Québec et les chercheurs aussi de l'Université de Sherbrooke estiment qu'à partir des travaux portant sur des réservoirs hydroélectriques du Grand-Nord québécois la contribution de la production de gaz à effet de serre serait de 30 à 50 fois moindre à partir des réservoirs que la contribution d'une centrale thermique classique pour la même production d'énergie. Pourtant, vous recommandez que tous les plans futurs de construction hydroélectrique soient mis en attente jusqu'à ce que les résultats de l'étude finale du Freshwater Institute soient disponibles.

Alors, est-ce que les travaux et les études menés, au fond, à l'extérieur du Québec dans des contextes complètement différents, dans des milieux de références différents, vous apparaissent plus crédibles que les travaux et les études qui ont été menés ici au Québec, à ce niveau-là? (9 h 50)

M. Dunsky: Absolument pas. Et je pense que j'ai exprimé dans le mémoire qu'Environnement Jeunesse n'est pas d'accord ou en désaccord avec les hypothèses que lance M. Rudd et ses collègues au Freshwater Institute. Ce qu'on disait, par contre, c'est que 1'«experimental lakes ecosystem» que fait le Freshwater Institute dans le Nord-Ouest de l'Ontario présentement, c'est la première fois qu'on fait une vraie évaluation expérimentale de cette façon. Toutes les autres études sont des hypothèses de laboratoire, dont celles d'Hydro-Québec et de la vaste majorité des chercheurs qui croient, plus ou moins, aux données qu'Hydro-Québec avance.

Nous, on espère fortement qu'Hydro-Québec a raison, mais, étant donné que c'est la première fois, que ça se fait de façon expérimentale et qu'il y a des chances, juste des chances que ça puisse être vrai, si jamais c'est vrai, on est dans le trouble, ici au Québec. Puis j'espère fortement qu'ils n'ont pas raison, mais, s'ils ont raison, on a un problème ici au Québec. Et, ce qu'on dit dans le mémoire, c'est qu'il faudrait attendre pour s'assurer que ce n'est pas vrai.

M. Bordeleau: Oui, mais si... D'abord, juste signaler encore une fois que ces études-là sont faites dans des étangs naturels, ce qui n'est pas du tout le cas des réservoirs du Grand-Nord ici. C'est des contextes complètement différents et, dans ce contexte-là aussi, vous dites qu'il faudrait attendre, mais, au niveau des besoins énergétiques, on fait quoi, à court terme, si on ne développe pas l'hydroélectricité, disons, à partir des éléments qu'on a actuellement en main? On a quand même une expérience de plusieurs années où il semble bien que ce genre de problème là, ce soit la solution, au fond, la moins pénalisante du côté des gaz à effet de serre. Alors, on fait quoi, demain matin? Il faut quand même planifier pour les 10 prochaines années pour faire en sorte d'être capable de répondre aux besoins.

M. Dunsky: Absolument. Si on parle d'une étude du Freshwater Institute qui sera prête, je pense, en début 1995, on dit d'attendre deux ans, deux ans de plus. Attendre deux ans de plus, ça représente plus ou moins 2 TWh dans les prévisions de demande, il me semble.

Donc, on pourrait facilement, par exemple, remettre Hydro-Québec à un objectif d'exportation, maintenant, de 1500 MW, donc, 8,5 TWh, je pense, pour l'an 2004 à peu près, si on remettait cet objectif pour 2006 pour attendre les résultats. Ça, c'est un exemple d'une façon qu'on pourrait faire. Évidemment, je ne suggère pas de remplacer, pour les deux ans que je voudrais qu'on attende, l'hydroélectricité par le charbon, c'est clair. Mais on pourrait, par exemple, remettre l'objectif d'exportation pour deux ans.

M. Bordeleau: On vous remercie.

Le Président (M. Forget): Merci, M. le député de l'Acadie. Alors, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir à mon tour de vous souhaiter la bienvenue à notre table. Évidemment, vous aurez compris qu'on avait quelques remarques à faire sur vos commentaires quant au processus démocratique que l'on a choisi pour consulter les gens. Ce qu'il faut se dire, c'est que, quand on nous élit, quand on nous choisit, on choisit des gens responsables qui pourraient, aussi, ne pas consulter du tout, mais qui choisissent de le faire par les outils que l'Assemblée nationale met à leur disposition et, pour vous rassurer, il y a eu pas mal d'experts qui sont venus nous rencontrer.

Mais, cela étant dit, c'est un choix de forum. Vous suggérez, vous, que nous allions vers un autre forum pour qu'on ait un débat sur les questions énergétiques et je pense que c'est souhaitable aussi qu'on élargisse ce forum-là. Je partage donc votre point de vue à cet égard. Cependant, ce que j'aimerais savoir de vous, parce qu'on aura à en débattre encore sûrement pendant les semaines et les mois qui viennent, c'est: Comment envisagez-vous la tenue d'une telle consultation? Vous mentionnez même la nécessité, évidemment, ça va de soi, qu'il y ait, non seulement une consultation, mais une concertation quant aux choix énergétiques que le Québec devrait privilégier.

Alors, comment vous l'envisagez, cette consultation-là ou ce processus de concertation? Qui devrait y participer? Pendant combien de temps? Quels devraient être les outils utilisés pour ce faire: des débats, des panels, des rencontres, des consultations d'experts? Comment tout ça devrait se passer? J'imagine que vous avez pensé à un scénario, puisque vous suggérez que cela se tienne.

M. Dunsky: Alors, je veux juste m'assurer que je comprends bien. Vous parlez des processus de concertation ou du processus décisionnel par une régie?

Mme Marois: Non. En fait, dans votre document, vous proposez qu'il y ait un débat et, d'une part, vous dites: Le Québec est mûr pour un véritable processus de concertation dans lequel une variété de groupes représentant des intérêts divers de l'ensemble de la société pourront discuter et arriver à des consensus face aux décisions importantes que doit prendre Hydro-Québec. Et là vous suggérez donc que ce débat s'engage. Vous dites aussi, d'autre part, que vous souhaiteriez évidemment dégager du processus politique toute l'analyse qui concernerait les choix d'Hydro-Québec, entre autres par une régie. Mais, ça, c'est un outil qui pourrait être retenu suite à une consultation ou qui pourrait, même dès maintenant, être retenu si on le souhaitait.

Mais moi, c'est sur le processus de consultation de débat et de concertation. Comment vous le voyez? Qui, voyez-vous, devrait y participer? Pendant combien de temps, etc?

M. Dunsky: Alors, je pense qu'il y a deux choix qui nous sont offerts pour faire des espèces de processus de concertation, comme je disais. Il y a l'idée, que plusieurs mettent de l'avant, d'un grand débat public sur l'énergie, sur toutes les questions reliées à l'énergie. C'est une possibilité. Une autre possibilité, c'est de faire, comme je le mentionnais dans le mémoire, des processus de concertation sur différents thèmes en particulier, dont les externalités, l'actualisation du futur, etc. Je pense, mais même là ce n'est pas plus fort que ça, que l'idée de faire différents processus de concertation sur différents thèmes en particulier au même temps... Je ne trouve pas le mot en français, mais au même temps.

Mme Marois: Au même moment, là... M. Dunsky: Au même moment.

Mme Marois: ...selon les différentes sphères de... les différents sujets que l'on voudrait aborder, par exemple le gaz naturel, les différentes sources énergétiques ou la question des externalités ou autre chose.

M. Dunsky: Exact.

Mme Marois: Vous dites que ça pourrait être en parallèle, dans le fond.

M. Dunsky: En parallèle. C'est précisément ça. Alors, on pourrait... Moi, je pense que je favorise un peu plus ça au lieu de tout un grand débat sur l'énergie, mais, néanmoins, j'avoue que cette option-là aussi est intéressante. Si on faisait des processus de concertation parallèles sur différents thèmes en particulier, qui devrait participer? Bien, évidemment, il devrait, d'une part, ne pas y avoir trop de participants. Je ne suggérerais pas qu'on ait un processus comme Hydro-Québec a fait avec son processus de consultation, où on aurait une centaine de groupes. Avec une centaine de groupes, un consensus ne se dégagerait probablement pas. Je pense plutôt à un groupe restreint de représentants; un représentant, mettons, de plusieurs groupes environnemen-

taux ou un représentant de plusieurs groupes syndicaux, etc., sur différentes thématiques, comme je l'ai dit.

Pour ce qui est du temps accordé, encore là, ça dépend du sujet. Par exemple, on pourrait faire un processus de concertation sur la question des externalités, peut-être à l'intérieur de six mois. Je dis ça comme ça. Peut-être huit mois. Ça dépend de l'intérêt des gens, ça dépend des différentes ressources qu'on met à la disponibilité des gens si on décide de financer entièrement la participation des groupes ou si on demande aux groupes de se présenter quand ils peuvent, les week-ends, les fins de semaine ou les soirs. Ça, c'est une question aussi, mais je ne verrais pas pourquoi ça devrait prendre plus de six à huit mois, mettons, pour un thème en particulier.

Et, pour ce qui est des ressources, bien, là, je suggérerais évidemment que les groupes qui participent à un tel processus reçoivent les ressources nécessaires pour y participer, donc, pour engager des experts pour les représenter.

Mme Marois: C'est un peu comme ça que vous le voyez. Je pense que j'ai fini mon temps.

Le Président (M. Forget): Le temps est écoulé.

Mme Marois: Une phrase, peut-être, si vous me permettez, M. le Président. Je pense que c'est intéressant, sauf que vous constatez que ce n'est pas nécessairement une tâche facile que de mettre ça en oeuvre comme processus et, dans le fond, les embûches que ça soulève dans la proposition que vous faites, par exemple, c'est de dire: Si on veut se concerter, il faut que tous les partenaires soient concernés. Si on a un représentant, il devra faire un travail préalable ou par la suite. Alors, ce n'est pas nécessairement un débat facile à faire, mais je crois qu'il est souhaitable qu'on le fasse. Merci.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, Mme la députée de Taillon. M. le député de Drummond. (10 heures)

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Alors, un peu dans la même ligne que mes collègues. À la lecture de votre mémoire, il y a des choses avec lesquelles je suis en accord et d'autres moins en accord, mais j'ai respecté le ton. La présentation que vous avez faite ce matin apporte une tout autre dimension. On dit toujours: Des fois, regarder le passé, ça nous aide à mieux se camper et mieux s'orienter pour l'avenir. Lorsque vous mettez en doute un processus de consultation, comme vous le faites ce matin, parce que vous faites allusion aussi aux 25 000 employés d'Hydro-Québec, puis que même eux ont de la difficulté, j'aimerais vous rappeler qu'à un moment donné la société Hydro-Québec, en 1973, si ma mémoire est fidèle, lorsqu'on a présenté le plan de développement d'Hydro-Québec, on prévoyait plusieurs centrales atomiques le long du Saint-Laurent. J'aimerais vous rappeler aussi que c'est une commission parlementaire, ce sont des hommes et des femmes politiques qui, après avoir entendu tout le monde, ont dit:

Non, on va développer l'hydroélectricité. Et je pense qu'aujourd'hui, lorsque je regarde le rapport Brundt-land, la sagesse des hommes et des femmes politiques de la demie des années soixante-dix a encore prouvé qu'un processus démocratique comme le nôtre avait sa place, puis qu'ils pouvaient prendre des décisions. Parce que, dans quelque domaine que ce soit, puis je l'ai dit d'ailleurs dans mes remarques préliminaires, je ne croyais pas avoir le monopole de la vérité, mais il reste qu'à entendre 85 mémoires, en lire deux autres aussi, on est capables de dégager des grands consensus, comme mes collègues l'ont exprimé, et aussi surtout faire appel au flair et au pif du gros bon sens.

Ceci étant dit, j'aurai juste une question de fond, aussi, parce que plusieurs groupes sont venus nous voir... Lorsqu'on parle de financement, on a vu des épisodes aussi qui ont découlé de cette commission parlementaire dans La Presse, lorsqu'on voit que c'est Hydro-Québec qui finance, et vous le mentionnez aussi dans votre mémoire, à la page 12, que, par contre, les sommes n'étaient pas suffisantes pour la participation des groupes à la deuxième partie de la consultation... Or, moi, en tant que parlementaire, j'ai vu des gens me dire, puis j'ai entendu dire aussi, puis on l'a vu dans les résultats que j'ai mentionnés tantôt dans les journaux: Lorsqu'on reçoit de l'argent d'Hydro-Québec, on dit que les mains sont attachées; si c'est pour aller consulter Hydro-Québec, ça va; si c'est pour sortir d'Hydro-Québec, on a les mains attachées. Alors, j'aimerais savoir de votre part, vous représentez quand même un bon groupe de gens: Est-ce qu'on continue le financement à même les mêmes sources qui ont été données ou si ce serait un organisme, le ministère de l'Énergie ou quelqu'un d'autre, qui devrait donner le financement aux organismes?

M. Dunsky: Je pense qu'idéalement ça devrait être une certaine section ou partie du ministère de l'Énergie qui crée un fonds pour la participation des gens dans ce processus. Moi, personnellement, je ne crois pas totalement à toutes les accusations qui veulent que les gens qui reçoivent de l'argent d'Hydro-Québec sont achetés, etc., mais je pense qu'idéalement ce serait un financement qui parviendrait du ministère de l'Énergie et des Ressources, parce que nous ne pouvons pas participer à des processus comme ça, à n'importe quoi en fait, sans que ça s'autofinance. Pour nous autres, ça nous a pris beaucoup de temps et d'argent, beaucoup de fins de semaine et de soirs, même payer des gens pour la traduction, etc., et on n'a tout simplement pas ces ressources-là.

Le Président (M. Forget): M. le député de Drummond, je voudrais vous remercier. Au nom des membres de la commission, je vous remercie de votre participation. Alors, nous allons suspendre deux petites minutes, et j'inviterais le Conseil de l'industrie de l'hydrogène à bien vouloir prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 10 h 4)

(Reprise à 10 h 7)

Le Président (M. Forget): La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je vous rappelle les règles de présentation. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et une période d'échanges de 40 minutes. Alors, je vous demande de vous présenter.

M. Champagne (Richard D.): Richard Champagne, président-directeur général du Conseil de l'industrie de l'hydrogène.

Le Président (M. Forget): Merci. Alors, présentez votre mémoire.

Conseil de l'industrie de l'hydrogène

M. Champagne: Donc, le mémoire que nous présentons aujourd'hui porte sur le développement des technologies de l'hydrogène et constitue une prise de position de notre Conseil devant votre commission parlementaire. Le Conseil a choisi de présenter un choix sur les orientations souhaitables de la politique économique du Québec.

Permettez-moi, dans un premier temps, de présenter notre Conseil de l'industrie de l'hydrogène. Premièrement, il y a 10 ans, nous présentions devant la commission parlementaire de l'énergie, des mines et des ressources un mémoire avec cinq grandes recommandations sur les politiques énergétiques du Québec. Ces cinq recommandations-là ont été approuvées par le gouvernement dans les années subséquentes. Donc, permettez-moi de rétablir notre confiance dans ces institutions que sont les commissions parlementaires et aussi notre intérêt à y participer.

Donc, le Conseil de l'industrie de l'hydrogène a comme mission de favoriser le développement des technologies de l'hydrogène et leur utilisation dans des applications industrielles et commerciales au bénéfice de l'industrie et de la population en général. Pour remplir notre mission, nous avons quatre grands objectifs. Le premier, c'est de promouvoir la recherche et le développement, mais avec une orientation industrielle; deuxièmement, de représenter l'industrie auprès des gouvernements; troisièmement, de rechercher et d'encourager des projets d'utilisation, et j'aurai l'occasion, un peu plus loin, de vous faire part de ces réalisations-là au Québec. Finalement, en 1992, notre Conseil approuvait un quatrième objectif qui est d'accroître le ratio hydrogène-carbone dans l'ensemble énergétique canadien et de promouvoir l'utilisation de l'hydrogène comme moyen pour améliorer la qualité de l'environnement. (10 h 10)

Le Conseil a été fondé en 1982, et nous comptons de nombreuses réalisations dont, entre autres, au Québec, en 1985, une usine d'hydrogène liquide de 45 000 000 $, Hydrogenal; en 1986, une usine de peroxyde d'hydrogène de 50 000 000 $, Oxychem; en 1987, une usine d'hydrogène liquide, encore, de 35 000 000 $, à Magog, avec la compagnie Airco. Hydrogenal II, c'est-à-dire le premier projet que nous avons lancé en 1985, a triplé sa capacité de production et, aussi, les électrolyseurs qu'ils utilisent ont été exportés; cette technologie de pointe a été exportée au Brésil, donc des retombées considérables pour l'industrie. En 1986, le Conseil complétait les études de préfaisabilité du projet-pilote Euro-Québec et, finalement, en 1993, en janvier, on lançait le prototype de la première automobile à l'hydrogène avec la compagnie Mazda, dans le cadre du Salon de l'auto de Montréal.

Le Conseil gère un programme de recherche et développement de 1 000 000 $ par année. En 1984, le gouvernement canadien dépensait quelque 10 000 000 $ en recherche et développement en matière d'hydrogène et l'industrie dépensait une somme équivalente. Donc, on avait, à ce moment-là, un programme national canadien de 20 000 000 $. Donc, depuis les coupures drastiques du gouvernement fédéral en matière d'hydrogène, le programme canadien et les efforts industriels sont de l'ordre d'une dizaine de millions de dollars présentement.

Le Conseil participe à l'évaluation des programmes des chaires universitaires dans le secteur de l'hydrogène. Il participe également aux études et à la promotion visant la mise en place d'un institut de recherche sur l'entreposage, le transport et la sécurité de l'hydrogène, à l'Université du Québec à Trois-Rivières. On considère ce secteur comme stratégique. Et nous avons complété, depuis l'année 1982, quelque 35 études tech-nico-économiques qui ont servi aux implantations industrielles.

En ce qui concerne l'avenir de l'hydrogène, le Conseil de l'industrie de l'hydrogène a privilégié une transition évolutive vers l'hydrogène comme vecteur énergétique de l'avenir, contrairement à plusieurs organisations qui ont été mises de l'avant lors de la crise du pétrole où on préconisait des changements drastiques, que tout devait être propre et, à ce moment-là, de privilégier l'hydrogène comme carburant. Notre industrie a été très pragmatique et a privilégié une transition évolutive, et cette transition a porté fruit.

On voit aujourd'hui que la conjoncture énergétique et les exigences environnementales de plus en plus contraignantes ne peuvent qu'être bénéfiques à notre industrie dans les prochaines années. La nécessité d'accroître notre efficacité énergétique et la recherche d'une meilleure qualité de vie mettront de plus en plus en évidence le rôle que le Conseil de l'industrie de l'hydrogène a joué. Plus que jamais, les industriels, les gouvernements et les universités doivent conjuguer leurs efforts afin de faire d'une industrie en émergence une industrie apte à jouer un rôle de premier plan en vue d'assurer le développement durable de l'économie.

Le Conseil de l'industrie de l'hydrogène croit fermement que les exigences de compétitivité et de protection de l'environnement accentueront le besoin de concertation et de partage de risques au sein de l'industrie et rendront encore plus important le rôie de cataly-

seur qu'il joue auprès de ses membres.

Nos relations avec le gouvernement du Québec datent de 1983, lorsque nous avons déposé un mémoire devant la commission parlementaire. Par la suite, le ministère de l'Énergie et des Ressources accordait, à ce moment, son soutien financier à l'implantation du Conseil et a aidé grandement aux opérations de notre Conseil, et, nécessairement, les retombées les plus importantes de notre industrie sont venues au Québec. Le ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec a financé les activités de recherche des chaires universitaires. Nous avions fait des recommandations sur les universités les plus aptes à prendre cette responsabilité.

Également, le gouvernement du Québec a financé, de concert avec certains autres ministères, la seconde phase du projet Euro-Québec, c'est-à-dire les études de faisabilité, de 4 200 000 $. Également, le gouvernement du Québec a financé des études de faisabilité d'un institut de recherche en hydrogène sur l'entreposage, le transport et la sécurité, à l'Université du Québec à Trois-Rivières. Enfin, il a accordé son appui financier à tous les projets que j'ai mentionnés tout à l'heure, les projets industriels.

Il a donc été possible pour le Québec de se positionner de façon stratégique dans ce nouveau secteur industriel, et c'est certainement la province au Canada qui a montré le plus de vision en matière d'hydrogène.

En ce qui a trait à la conjoncture actuelle, à ce jour, les efforts de recherche ont surtout porté sur le développement des technologies de production par electrolyse de l'eau. L'avènement de l'institut de recherche en hydrogène, à Trois-Rivières, permettra de développer un nouveau secteur en matière de transport et d'entreposage de l'hydrogène. Cependant, la conjoncture économique actuelle et les restrictions budgétaires gouvernementales qui en découlent risquent de compromettre beaucoup du travail qui a été fait au niveau des développements technologiques. Il s'agit maintenant de développer des produits, de les mettre à l'échelle industrielle et de les commercialiser ici pour, ensuite, s'attaquer aux autres marchés.

La diversité des interventions gouvernementales par autant de ministères, aujourd'hui, en matière d'hydrogène au Québec risque de diluer les ressources disponibles.

Donc, ce sont certaines constatations que nous avons faites ces dernières années. Nos recommandations sont à l'effet d'une concertation des intervenants, des actions à entreprendre et des objectifs poursuivis; cela représente la pierre angulaire du développement économique de l'hydrogène au Québec. S'il est un choix stratégique qui mérite d'y investir des efforts, c'est dans le regroupement des intervenants.

Le Conseil de l'industrie de l'hydrogène croit que le gouvernement du Québec devrait accentuer le programme des chaires universitaires en hydrogène. Il devrait finaliser le financement de l'institut de recherche en hydrogène, à Trois-Rivières, mettre de l'avant un programme visant le développement et l'implantation de projets utilisant l'hydrogène dans les secteurs commer- ciaux, industriels et du transport présentant des avantages environnementaux. Il devrait «prioriser» l'émergence d'une grappe industrielle de l'hydrogène, favoriser la concertation de tous les intervenants en travaillant en étroite coopération avec le Conseil de l'industrie de l'hydrogène et en utilisant ses services d'évaluation, d'information, de recherche et de gestion d'activités et de programmes, de promotion et de développement de réseaux tant au niveau national qu'international.

Nous considérons que la mise en oeuvre de ces recommandations permettra au Québec de bénéficier d'une industrie de haute technologie résolument tournée vers l'avenir et lui permettra de jouer un rôle de chef de file tant au plan canadien qu'international. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Forget): Merci, M. Champagne. Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: M. Champagne, je vous remercie de votre contribution à cette commission parlementaire. Je crois que votre mémoire présente un point de vue qui est axé sur une exploitation optimale de l'énergie par la recherche et développement et, dans ce sens, il nous amène à entrevoir des perspectives d'avenir intéressantes et prometteuses en relation avec la filière hydrogène.

Les coûts de l'hydrogène demeurent apparemment relativement élevés. On entend ça souvent dans les milieux de l'énergie. Est-ce que vous pourriez nous dire comment ils se comparent à ceux des carburants conventionnels — on pense à essence, gaz naturel, propane — et nous indiquer comment vous croyez qu'il serait possible de rendre la filière hydrogène davantage concurrentielle au plan commercial?

M. Champagne: Cette concurrence, si on la prend selon les normes et les règles que l'on connaît aujourd'hui dans notre économie, il est certain que l'hydrogène en tant que carburant est plus dispendieux. Je me réfère au mémoire des jeunes qui ont précédé tout à l'heure. Lorsqu'on calcule les externalités, les problèmes causés à l'environnement en utilisant les hydrocarbures, on se rend vite compte que, pour comparer le coût de l'hydrogène aux autres carburants, si on veut justifier l'utilisation de l'hydrogène, il faut calculer aussi les problèmes que causent les hydrocarbures à l'environnement et à la santé humaine. Donc, je vais vous citer un exemple bien précis qui fait en sorte que ce n'est pas nécessairement les coûts qui sont la base d'un choix dans les carburants. (10 h 20)

Lorsque, au début du siècle, on a décidé de choisir entre deux technologies, le diesel et la locomotive au charbon, à la vapeur, et qu'on a choisi le diesel, ce n'est pas parce que le diesel était meilleur marché; tout au contraire, il était plus dispendieux que le charbon. Ce n'est pas qu'il y avait aussi une pénurie de charbon; il y avait des quantités considérables de charbon. Si on a choisi le diesel, c'est qu'à ce moment-là cette technologie était plus efficace, elle était plus propre et elle était

plus facile à utiliser. Donc, ce sont ces choix de technologies que devront faire les populations. dans l'état de la californie, les gens ont décidé qu'ils en avaient assez de mourir du cancer du poumon, parce qu'on attribue, dans la seule ville de los angeles, 50 000 décès par année causés par le smog des automobiles. donc, ils ont décidé — et c'est un choix de société — de se donner des réglementations extrêmement sévères sur l'émanation des véhicules. ils ont décidé qu'en 1998 2 % an parc automobile de la californie aura une émission zéro. donc, il n'y a pas de choix. il y a deux véhicules qui peuvent offrir ces performances; c'est l'automobile à l'électricité et l'automobile à l'hydrogène. donc, la question, à savoir si l'hydrogène est concurrentiel aujourd'hui dans nos marchés actuels, il n'est pas concurrentiel.

Toutefois, ce que le Conseil a privilégié, ce sont des niches d'application où les conjonctures font en sorte qu'il est plus économique. Je vais vous donner un exemple très précis. Dans les mines souterraines, on en a plusieurs au Québec, lorsque les mines sont profondes, on doit construire des puits de ventilation très importants qui coûtent plusieurs millions de dollars, et les véhicules utilisent le diesel, donc il y a des changements d'air et on doit réchauffer cet air-là. Donc, il est possible d'utiliser des véhicules à l'hydrogène très sécuritaires dans les véhicules miniers souterrains, et le coût de l'hydrogène supplémentaire est compensé par les économies au niveau, justement, de ce puits de ventilation qui est beaucoup plus petit, et il y a beaucoup moins d'échange d'air et de coûts d'opération pour alimenter la mine en air propre. Donc, ce sont des niches d'application où l'utilisation de l'hydrogène comme carburant fait du sens et est économique et pratique, puis qu'on verra l'hydrogène se développer. Et l'exemple de la Californie est évident.

Mme Bacon: Est-ce qu'on peut dire que le développement de la filière hydrogène pourra avoir un impact sur la demande d'électricité au Québec?

M. Champagne: ii est certain, quand on considère l'utilisation de l'hydrogène comme carburant, nous avons des données qui confirment que, si tous les véhicules de la planète se transformaient à l'hydrogène, seulement 10 % du potentiel mondial hydroélectrique pourrait suffire à alimenter ces véhicules. donc, effectivement, il y a des limites à produire de l'hydrogène électrolytique. il faut bien comprendre qu'à long terme nous visons le solaire, c'est-à-dire l'utilisation de la pile photovoltaïque pour produire de l'hydrogène électrolytique. donc, effectivement, il y aurait des possibilités très intéressantes pour le québec d'utiliser et de mieux gérer son parc énergétique en utilisant l'hydrogène. comme vous savez, l'électricité ne s'entrepose pas. un moyen de le faire, c'est en produisant de l'hydrogène et, à ce moment-là, utiliser l'hydrogène, lorsqu'on en a besoin, dans la pile à combustible qui, lui, se reconvertit en électricité. donc, effectivement, l'hydrogène peut jouer un rôle très important, et hydro-québec examine défini- tivement cette possibilité.

Mme Bacon: Comment les entreprises avec lesquelles vous collaborez perçoivent-elles les développements qui se feront à long terme et pour lesquels il faudra vraisemblablement attendre encore plusieurs années pour obtenir des retombées?

M. Champagne: Oui, c'est un voeu de confiance, parce que les membres de notre Conseil, les grandes entreprises, les quelque 25 grandes entreprises canadiennes qui participent aux activités du Conseil de l'industrie de l'hydrogène et financent le Conseil, ce ne sont probablement pas ces entreprises qui vont devenir les industries de l'hydrogène de l'avenir. Toutefois, ces entreprises voient des bénéfices à court terme. C'est-à-dire, les réglementations plus sévères en matière d'environnement demanderont des technologies avancées, demanderont plus d'hydrogène dans leurs procédés. Je donne l'exemple, en particulier, de l'essence que nous utilisons dans nos véhicules d'aujourd'hui; les réglementations font en sorte qu'on doit enlever les aromatiques, le soufre et d'autres composantes nocives de l'essence actuelle et, pour ce faire, on a besoin de l'hydrogène. Donc, de là leur intérêt à participer dans un conseil qui développe des technologies, ce qui leur permettra d'accéder à de nouvelles sources et aussi à de nouvelles technologies qui leur permettront d'utiliser de plus en plus d'hydrogène dans leurs activités courantes.

Toutefois, les industries qui vont le plus en bénéficier, ce sont de petites et moyennes entreprises aujourd'hui qui ont des orientations technologiques et des capacités qui vont leur permettre de développer les équipements, que ce soient des piles à combustible, des électrolyseurs ou des métaux, des réservoirs avancés, qui vont devenir l'industrie de l'avenir en matière d'hydrogène.

Mme Bacon: II y a plusieurs entreprises japonaises qui étudient la possibilité d'importer de l'hydrogène pour répondre à des besoins énergétiques du Japon. Est-ce que le Conseil de l'industrie de l'hydrogène est favorable à la promotion d'exportation massive d'hydrogène et quel rôle le Conseil pourrait-il jouer par rapport à des projets d'exportation d'hydrogène du Québec, ou d'ailleurs au Canada, vers le Japon?

M. Champagne: Toute cette philosophie du transport d'énergie, de grandes quantités d'énergie vers d'autres continents a été développée en 1984 par le Conseil à l'occasion de la Conférence mondiale de l'hydrogène, où nous avions complété des études de préfaisabilité qui définissaient un avantage certain pour les Canadiens, et les Québécois en particulier, de développer les technologies qui permettront de développer des énergies renouvelables à travers le monde et de les exporter sous la forme d'hydrogène. Donc, on a lancé cette idée en 1984. On a fait les études de préfaisabilité dans le cadre de l'Agence internationale de l'énergie, et le Québec, dès 1988, je crois, ou 1939, s'est lancé

résolument dans la poursuite de ce concept dans le cadre du projet Euro-Québec, c'est-à-dire de faire la preuve et la démonstration que l'on pouvait transporter de l'énergie propre, de l'hydroélectricité, sous la forme d'hydrogène liquide vers l'Europe. Le même besoin se fait sentir par d'autres pays qui ont de la vision en matière d'énergie, et les Japonais viennent d'approuver un plan sur 27 ans. Leur intérêt, c'est de démontrer qu'ils peuvent accéder, parce que ce pays n'a pas d'énergie comme telle, ils n'ont pas d'énergie propre en quantité suffisante, donc accéder à travers le monde à de l'énergie sous la forme d'hydrogène. Et le seul vecteur connu de l'homme aujourd'hui pour transporter de grandes quantités d'énergie d'un continent à l'autre, c'est à travers l'hydrogène.

Notre intérêt en tant que Conseil n'est pas d'exporter nos énergies renouvelables. Au contraire, c'est de les utiliser ici pour notre développement économique. Par contre, nous voyons là une possibilité pour le Canada et le Québec de développer des technologies qui vont être les technologies de l'avenir. Le Conseil s'est battu résolument, justement dans le cadre du projet Euro-Québec, pour s'assurer que le Québec est un partenaire à part entière dans le développement de ce vecteur énergétique et de ce transfert d'énergie sous forme d'hydrogène.

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Forget): Merci, Mme la ministre. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: merci, m. le président. je voudrais tout d'abord parler de votre conseil. vous sem-blez dire qu'il est amoché un peu par le soutien qu'on lui donne. à la page 12: le ministère de l'énergie et des ressources accordait, à ce moment, son soutien financier à l'implantation du conseil, et ce, pour une période de démarrage de cinq ans. ce financement représentait, à la fin de la période, près de 30 % des besoins financiers du conseil. depuis, ce financement a été réduit à moins de 10 %. pourquoi?

M. Champagne: C'est parce qu'au tout début on était en lancement de cette nouvelle initiative. On avait besoin de soutien financier plus important. Toutefois, l'industrie a pris la relève et nos besoins sont moins importants. Toutefois, il y a tout lieu de croire qu'un support plus important du gouvernement du Québec nous permettrait de faire un travail plus intense. Il y a des étapes qui méritent d'être franchies. Nous considérons, en tant qu'industriels au Québec, qu'il y a des choses intéressantes, des potentiels importants. (10 h 30)

Toutefois, le support du gouvernement du Québec, je dois dire, il a été indéfectible, et c'est la seule province qui supporte les frais d'opération de notre Conseil depuis notre existence en 1983. Donc, on est très satisfaits du support qu'on a eu du gouvernement du Québec. Il est certain que, si on avait des sommes sup- plémentaires, on pourrait définitivement aller vers des activités qui permettraient des retombées. on voit que, depuis les apports du gouvernement du québec au conseil qui datent des quelques dernières années, quand on regarde les réalisations à partir de 1986, on a un peu moins de réalisations au québec qu'on avait dans les premières années, et c'est certain, parce que le gouvernement dépensait 30 % de nos budgets. on a mis beaucoup plus d'attention à la province de québec qu'aux autres provinces. aujourd'hui, les provinces de l'alber-ta et de la colombie-britannique semblent aussi très actives et, aussi, le manitoba s'intéresse énormément au transport d'énergie vers le japon, à partir de leur potentiel hydroélectrique.

Donc, effectivement, on serait très satisfaits d'avoir une augmentation de budget de la part du gouvernement du Québec. Toutefois, on doit dire que c'est une province qui a cru, qui a supporté le Conseil depuis ses débuts, et nous en sommes très heureux.

M. Chevrette: Vous souhaitez que votre secteur d'activité devienne une grappe industrielle, si j'ai bien lu et retenu votre mémoire. Est-ce que vous avez eu des rencontres avec le promoteur des grappes, l'actuel ministre de l'Industrie et du Commerce, qui gère en même temps le Fonds de développement technologique?

M. Champagne: Non.

M. Chevrette: Vous n'avez pas eu de discussion là-dessus.

M. Champagne: Nous n'avons pas eu de discussion. On a lu sur le domaine des grappes industrielles. Nous croyons qu'un tel concept pourrait s'apparenter au secteur de l'hydrogène. Nous croyons que l'accès au portefeuille et au Fonds de développement technologique serait un outil important pour développer des technologies de l'hydrogène ici, au Québec. Bon, c'est la politique et le jargon à la mode, donc, d'emblée, nous pensons que c'est une façon d'accéder à un support supplémentaire pour développer les technologies de l'hydrogène. Et c'est dans ce contexte-là que nous avons identifié la possibilité de créer une grapppe industrielle sur l'hydrogène.

M. Chevrette: Mais si c'est un secteur de pointe, comme on semble le dire, l'accès au Fonds de développement technologique — entre vous et moi, il n'y avait pas tellement d'argent de dépensé; il y avait beaucoup de liquidités dans ce Fonds, je crois que c'était 60 000 000 $ par année, si ma mémoire est fidèle, 300 000 000 $ de prévus sur cinq ans — ça pourrait être une source extrêmement importante au niveau du développement de ce secteur.

M. Champagne: Tout à fait.

M. Chevrette: Parce qu'il y a 68 000 000 $ de dépensés, me dit-on, sur 300 000 000 $ et quelques.

M. Champagne: Tout à fait. Je pense que c'est un Fonds très intéressant pour notre secteur, et on pense qu'il y a possibilité d'utiliser une partie de ces sommes-là pour positionner l'industrie québécoise et promouvoir le développement industriel.

M. Chevrette: Votre secteur compte combien d'emplois actuellement? Comment on peut évaluer le nombre d'emplois générés par l'hydrogène?

M. Champagne: C'est très difficile. Vous savez, il y a deux types: il y l'hydrogène qui est utilisé aujourd'hui dans les secteurs industriels traditionnels...

M. Chevrette: En pétrochimie.

M. Champagne: ...pétrolières, produits chimiques. Et vous savez, l'hydrogène, c'est un des produits qui est produit en quantité, en termes de poids, un des plus importants au monde, plus que la plupart des métaux connus. Et si vous vous rappelez un peu votre chimie, l'hydrogène, c'était le numéro 1 dans le tableau de Mendeleïev, le plus léger des éléments.

M. Chevrette: Oui. C'est loin, par exemple.

M. Champagne: Donc, c'est tout à son crédit d'en avoir autant produit aujourd'hui. C'est un produit qui existe, mais qui existe dans des industries fermées, que ce soit l'industrie des fertilisants, les raffineries, l'industrie des produits chimiques tels que le méthanol, donc, ce sont des grands utilisateurs d'hydrogène, de très grandes quantités d'hydrogène.

Ce que l'on promeut aujourd'hui, c'est une nouvelle vocation de cet hydrogène-là, c'est-à-dire d'aider ces industries chimiques et pétrolières à améliorer la qualité de leurs produits en mettant plus d'hydrogène; c'est toujours une question du ratio hydrogène-carbone. Plus on met de l'hydrogène, plus on améliore les carburants et les produits chimiques. Donc, c'est dans ce sens-là que nous jouons un rôle très étroit avec ces industries-là, et c'est des quantités considérables qu'elles utilisent. Toutefois, on se prépare au développement des technologies qui permettront d'utiliser l'hydrogène éventuellement avec les énergies renouvelables lorsque les hydrocarbures disparaîtront.

M. Chevrette: Est-ce que vous pourriez nous expliciter un peu — un peu, un peu beaucoup, pas mal, passablement — pour le bénéfice de tout le monde, le projet Euro-Québec? En quoi ça consiste? Qu'est-ce que ça vise? Qu'est-ce que ça génère?

M. Champagne: Comme je le disais tantôt, ce projet s'inscrit dans une politique et une philosophie des industriels canadiens de promouvoir l'échange d'énergie entre continents. Donc, dès 1984, nous avons lancé l'idée et nous avons fait les études de préfaisabilité. Par la suite, le Québec a pris la pole et a mis de l'avant, avec ses ministères, des études de faisabilité et a pro- cédé aux phases subséquentes.

En quoi consiste le projet? C'est de démontrer que l'on peut transporter de l'énergie propre d'un continent à l'autre, et la seule façon de le faire, connue de l'homme aujourd'hui, c'est par l'intermédiaire de l'hydrogène. Donc, on veut démontrer, et le projet avec l'Europe constitue une démonstration à partir des technologies existantes, que ça peut se faire. L'intérêt n'est pas pour le Québec et n'est pas pour le reste des provinces de l'Ouest, qui ont un projet semblable avec les Japonais, d'exporter de l'hydroélectricité vers l'Europe, malgré que ce serait beaucoup plus rentable que d'envoyer ça vers les Etats-Unis, comme on le fait actuellement, étant donné que nous avons une valeur ajoutée, c'est-à-dire qu'il y a une transformation de cette énergie ici. Mais, notre intérêt, c'est de développer les technologies qui sont reliées à l'hydrogène.

Tout à l'heure, compte tenu des expertises et des compétences des Québécois entre autres, on pourra aller ailleurs dans le monde, développer des barrages. Je pense au Zaïre où on a 5000 MW facilement exploitables. On pourrait, à ce moment-là, utiliser les compétences de nos utilités publiques pour aller développer ces barrages à l'étranger, fabriquer de l'hydrogène avec la technologie que nous possédons qui est la plus avancée au monde, l'électrolyse de l'eau, avec des efficacités de l'ordre de 80 %, 85 %, et produire cet hydrogène et le livrer aux pays qui en ont besoin et à des pays tels que le Japon, qui n'a pas d'énergie. Toute son énergie est exploitée, il importe des hydrocarbures actuellement, et sa population s'interroge sur ses activités, parce que la seule filière qu'ils ont pour produire de l'électricité actuellement, à part les hydrocarbures, c'est le nucléaire, et il y a des préoccupations de plus en plus importantes au Japon sur le nucléaire. Donc, la population fait des pressions.

Et c'est de là le projet que nous avons avec les provinces de l'Ouest qui s'intéressent à «accéder» de l'hydroélectricité sous la forme d'hydrogène. Donc, on veut mettre à profit nos capacités en tant que développeur hydroélectrique, en tant que fabricant d'hydrogène, et de tout gérer cette logistique pour transporter d'un continent à l'autre cet hydrogène-là. Et c'est là. On est après... Et l'intérêt des industriels, c'est de développer les technologies et les maîtriser, être le maître d'oeuvre de ces systèmes de transport d'énergie d'un continent à l'autre, et c'est ça que vise le projet Hydro-Québec... pas le projet Hydro-Québec, Euro-Québec, et le projet Canada-Japon avec les Japonais.

M. Chevrette: Croyez-vous que votre point de vue serait mieux considéré si nous pouvions compter sur la présence, au Québec, d'une commission de l'énergie qui regarde toutes les facettes des sources énergétiques au Québec plutôt que se limiter exclusivement en fonction d'un plan de développement d'Hydro, comme on fait présentement?

M. Champagne: Ah! c'est une question bien importante. Le problème n'est pas au Québec. Le pro-

blême est au niveau canadien. C'est qu'au niveau canadien l'hydrogène ne joue pas tellement une importance comme il devrait le faire. Il y a eu des commissions parlementaires, il y a eu une dizaine — on les a listés à un moment donné — de groupes très importants, de scientifiques, d'économistes, d'industriels qui se sont réunis pour faire le point sur le secteur de l'hydrogène, comment ça se faisait que le gouvernement canadien ne misait pas sur ce secteur-là. Il en est résulté la chose suivante. (10 h 40)

C'est que, dans toute la grille des possibilités énergétiques canadiennes, les hydrocarbures sont contrôlés par le gouvernement fédéral, l'électricité est contrôlée par les provinces. Il n'y a pas d'intérêt au niveau du ministère de l'Énergie fédéral d'accélérer la filière hydrogène et de supporter la filière hydrogène. À ce moment-là, au niveau national, canadien, cette filière est un peu entre deux planches. Ce qui fait que les provinces n'ont pas les moyens de jouer le développement de ce vecteur énergétique seules. Chacune a ses priorités. L'Alberta, elle, a du gaz et du pétrole; elle voit les sables bitumineux, elle aurait besoin d'hydrogène. Il y a un agenda en matière d'hydrogène. Le Québec, l'Ontario, chacune a ses filières. Ce qui veut dire qu'au niveau canadien, si ce n'est de la concertation que font les industriels dans le cadre du Conseil de l'industrie de l'hydrogène, il n'y a pas de politique et d'orientation énergétique qui favoriserait le développement de la filière hydrogène. Et c'est en cette absence que le Québec a pris, depuis une douzaine d'années, des décisions allant dans la direction d'une politique favorisant l'hydrogène. Et les raisons sont évidentes, c'est qu'on a un potentiel hydroélectrique très important et, pour les deux ou trois prochaines décennies, les grandes quantités d'énergie propre seront produites à partir de l'hydroélectrique. Donc, c'est, de là, de l'intérêt du Québec de jouer sur cette filière-là et il le fait quand même avec ses moyens. Mais le problème de base, c'est de rétablir au Canada un programme important de recherche et développement, de remettre les 20 000 000 $ qu'on avait en 1984. C'est là qu'il faut relancer la balle.

Le Président (M. Forget): Merci, M. le député de Joliette. M. le député de Saint-Maurice.

M. Lemire: M. Champagne, M. le président-directeur général, j'aimerais faire certains comparatifs. Le gouvernement du Québec a déjà entrepris d'importantes actions pour le développement de cette filière énergétique qu'est l'hydrogène. Vous avez eu des appuis financiers aux activités du Conseil de l'industrie de l'hydrogène. On a assisté à la création de chaires universitaires telles que l'Université McGill, l'École polytechnique, l'Université de Sherbrooke; au financement conjoint d'études et de projets de démonstration avec la Communauté européenne; à des travaux de développement de la technologie de l'électrolyse avec Noranda, Electrolyser et Hydro-Québec. Vous avez eu aussi, comme on l'a dit tantôt, un projet de coopération avec le Japon en matière de recherche et développement. Moi, ce que j'aimerais savoir: Comment, de votre point de vue, cet effort se compare-t-il avec ce qui se fait ailleurs au Canada et ailleurs dans le monde?

M. Champagne: Ailleurs au Canada, il y a présentement trois provinces qui sont actives dans le secteur de l'hydrogène. Il y a le Manitoba qui a aussi un potentiel hydroélectrique important. Il y a 1'Alberta; elle, sa filière hydrogène est plus reliée aux hydrocarbures; elle a un programme avec le gouvernement fédéral qui dépense 1 000 000 $, 1 500 000 $ depuis quelque quatre ans. La Colombie-Britannique, qui, aussi, a un potentiel hydroélectrique et de gaz naturel, s'intéresse à la filière. Donc, leur approche est reliée au développement de technologies compatibles avec leur parc énergétique. Donc, ils ont eu beaucoup moins de succès à date que le Québec, parce que le Québec a été le premier à supporter les initiatives de concertation industrielle du Conseil, et c'est pour ça qu'on voit les retombées: les usines qu'on a lancées ici, au Québec, alors que, dans l'Ouest canadien, on a réussi à lancer une usine très importante qui est une usine d'ammoniac, la première au monde qui dépend strictement de l'accès à de l'hydrogène sous-produit. C'était la première usine. Habituellement, une usine d'ammoniac produit son hydrogène et, dans ce cas-là, suite à un inventaire du Conseil, on avait réalisé qu'en Alberta il y avait 600 tonnes-jour d'hydrogène qui était non utilisé ou brûlé. Donc, c'est des quantités considérables. Et là il y a eu une usine d'ammoniac de taille mondiale qui s'est créée à partir de cet hydrogène sous-produit.

Donc, il y a des provinces qui ont des intérêts différents, mais c'est dans cette complémentarité qu'on voit les possibilités pour le Canada de jouer une partie très importante et de prendre le leadership. Nous avions, en 1984, le leadership mondial en matière d'hydrogène, et le Québec, avec son électrolyseur, avait influencé la plupart des pays industrialisés, à ce moment-là. Depuis 1984, il y a des pays qui, comme l'Allemagne et le Japon, dépensent des centaines de millions de dollars par année à développer des technologies de l'hydrogène. C'est strictement par le fait que l'industrie au Canada travaille ensemble dans le cadre du Conseil et, deuxièmement, que nous avons un potentiel énergétique important au Canada que nous jouons encore un rôle significatif sur la scène internationale.

Toutefois, si on ne va pas de l'avant avec des investissements importants dans la technologie, on ne supporte pas l'industrie, parce que, comme je le mentionnais tout à l'heure, les industries importantes qui sont là, ce ne sont pas les industries de l'avenir de l'hydrogène. Ce sont les petites entreprises comme Electrolyser, Ballard, de petites entreprises qui vont devenir les industries de l'hydrogène de l'avenir, et celles-là n'ont pas les capacités financières de faire les développements technologiques — c'est là que le rôle des gouvernements doit entrer en ligne de compte — alors que les grandes entreprises telles que Shell, Esso, qui font partie du Conseil, elles, leur intérêt, c'est

d'acheter des équipements de l'hydrogène, ce n'est pas de les développer. Ce ne sont pas des développeurs, ce sont des acheteurs d'équipements. C'est dans le cadre de cette concertation-là qu'on peut, en tant qu'industrie, ici, au Canada et au Québec, jouer un rôle plus important.

Mais il faut bien comprendre que d'autres pays... le Japon, en décembre dernier, votait un programme de 27 ans de 1 700 000 000 $ pour supporter la filière hydrogène, donc ils sont très sérieux. On a décidé, nous, en tant qu'industrie, de travailler avec eux, de travailler aussi avec les Russes, on a signé une entente très importante. Les Russes, on a développé des liens avec eux depuis 1984 et, en 1992, on signait une entente-cadre faisant du Conseil de l'industrie de l'hydrogène le partenaire privilégiée de la Russie. On a accédé, dans des ententes bilatérales qui ont suivi, à 23 technologies, dont 5 des plus avancées au monde, dont une, entre autres, qui pourrait voir le jour à Montréal-Est, justement. C'est une technologie qui permet de dissocier l'anhydride sulfureux, le H2S; les procédés actuels connus dans le monde de l'Ouest permettent seulement de récupérer le soufre, et ce procédé allemand... pas allemand, mais russe, qui utilise le plasma à froid permet de récupérer l'hydrogène et le soufre. C'est une avance technologique intéressante, efficace et qui permet aussi de protéger l'environnement parce que c'est un procédé propre, alors que, le procédé actuel, c'est un procédé qui contribue aux pluies acides. Donc, c'est dans ce cadre-là qu'on se situe en tant que Conseil de l'industrie de l'hydrogène, tant au Canada qu'au Québec, mais aussi sur la scène internationale.

M. Lemire: À ce moment-ci, comment percevez-vous le rôle d'Hydro-Québec dans ce domaine-là?

M. Champagne: II est clair qu'Hydro-Québec a un rôle à deux volets. D'une part, il est un producteur d'hydroélectricité, d'électricité, de là son intérêt à examiner cette filière qui utiliserait cette énergie pour produire de l'hydrogène, donc un client important potentiel. D'autre part, je pense qu'Hydro-Québec aussi peut jouer un rôle très important vis-à-vis les autres partenaires en matière de recherche et développement. La crédibilité de l'IREQ est bien établie et, à cet égard, un programme de recherche important à l'IREQ en matière d'hydrogène contribuerait définitivement au développement du secteur au Québec. Le programme a été diminué considérablement dans les dernières années, compte tenu que le gouvernement fédéral n'appuie plus ce secteur-là comme il le faisait avant. Il y avait plusieurs programmes combinés et, à ce moment-là, les programmes d'Hydro-Québec ont été diminués d'une façon importante. Je pense qu'il y aurait lieu de réexaminer cette possibilité-là et, définitivement, la capacité scientifique des gens d'Hydro-Québec pourrait certainement contribuer au développement de technologies importantes, comme ils l'ont fait dans le domaine des électrolyseurs, par exemple.

M. Lemire: Merci. (10 h 50)

Le Président (M. Forget): Je vous remercie, M. le député de Saint-Maurice. Alors, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Est-ce que vous avez des relations étroites avec l'IREQ, le CRIQ, par exemple, également, en fonction de développer des technologies encore plus de pointe, plus à point?

M. Champagne: Oui. Définitivement, l'IREQ est un des joueurs les plus importants dans notre portefeuille de recherche et développement. D'ailleurs, il prend une bonne partie de notre programme annuel. Il est fait en collaboration avec les investissements que fait l'IREQ. Les industriels aussi participent à ce programme-là, financent des activités de l'IREQ. Donc, le programme a diminué ces dernières années, mais il est quand même important, un des programmes importants. Il regarde des technologies très avancées, comme la pile à combustible réversible qui pourrait jouer le rôle tant d'électrolyseur que de pile à combustible. C'est un secteur prometteur. On a de belles compétences à l'IREQ. Oui, on travaille très étroitement avec eux. D'ailleurs, les membres de l'IREQ ont présidé notre comité de recherche scientifique pendant un certain nombre d'années. Aujourd'hui, ce sont d'autres industriels qui président, mais ils sont très actifs.

M. Chevrette: Est-ce que vous êtes au courant si le CRIQ a des projets concrets, par exemple, sur la table de travail?

M. Champagne: Non, malheureusement. Le CRIQ avait appliqué pour le Conseil, pour devenir membre du Conseil; on leur avait dit qu'on leur donnerait un statut privilégié, puis ils ont trouvé que 2000 $, c'était trop par année. Puis le Conseil a dit: S'ils n'ont pas 2000 $, ils ne sont pas sérieux. Donc, le CRIQ n'est pas membre du Conseil. On le regrette parce qu'on pense qu'il pourrait contribuer définitivement.

M. Chevrette: Ils ont refusé ça pour 2000 $, le CRIQ?

M. Champagne: Oui.

M. Chevrette: Je vais dire comme vous.

M. Champagne: Ce n'était pas sérieux.

M. Chevrette: Ce n'était pas sérieux. Je vous remercie, M. Champagne.

M. Champagne: Ça m'a fait plaisir.

Le Président (M. Forget): Merci, M. le député de Joliette. M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Vous avez partiellement répondu à mes questions, parce qu'à la page 16 de votre mémoire je pense que c'est là que j'ai détecté le cri d'alarme de votre organisation. Vous avez couvert la première partie du haut, qui était le leadership mondial, dont j'étais au courant qu'on l'assumait et qu'on a perdu. Mais c'est la partie du bas aussi qui m'intrigue, parce que vous semblez indiquer qu'avec le peu de ressources maintenant qu'il nous reste on est en train de les saupoudrer à peu près un peu partout à travers les différents ministères. Est-ce que ce serait de bonne guerre, parce qu'on est dans l'ère des créations de centres de spécialité ou de recherche, que, dans la foulée aussi de ce que vous mentionniez au niveau de la formation d'une grappe industrielle, on fasse une espèce de centre de spécialité ou un parc technologique consacré directement à cette technologie-là? Parce qu'il n'y a pas de doute, vous avez raison, c'est la technologie de l'avenir.

M. Champagne: Oui. Non, je pense que ce qu'on veut mentionner ici, c'est que, depuis quelques années, il y a moins de concertation au niveau des intervenants au Québec qu'il y en avait auparavant. C'est que le gouvernement a décidé, de son côté, de se lancer résolument dans ce programme de transfert d'énergie sous forme d'hydrogène avec la Communauté économique européenne, et c'est le gouvernement qui a pris le leadership, alors qu'auparavant le gouvernement avait décidé, à travers le ministère de l'Energie et des Ressources, d'utiliser le Conseil de l'industrie de l'hydrogène pour examiner toute cette filière et tout ce développement au Québec. Donc, étant donné qu'il a investi plus d'argent, il a décidé, dès 1989-1990, de prendre en main cette concertation non pas seulement au plan technologique, mais aussi au plan industriel. Et c'est là que nous, le Conseil, on a pris un recul effectivement, du moins au Québec. À ce moment-là, on a moins de concertation qui se fait, il y a plusieurs intervenants, et on réalise une chose, c'est que, quand on veut jouer dans cette partie-là de l'hydrogène, c'est international, ça prend des gros sous. Et, dans ce sens-là, on réussira seulement si on travaille ensemble, d'une façon concertée.

Donc, le message qu'on passe ici, c'est qu'il y a peut-être un petit peu moins de concertation qu'il y en avait dans les années passées. Certains membres qui font partie du programme de développement du ministère... Bien, en fait, il y a trois ministères qui pilotent le projet Euro-Québec... il y a plusieurs industriels qui ne sont pas membres du Conseil, et on pense qu'il y aurait avantage à devenir membres du Conseil. Ces gens-là sont aidés présentement par le gouvernement, sont concertés par les ministères pour s'occuper d'un secteur que plusieurs d'entre eux ne connaissaient pas auparavant. Je pense qu'on a développé une synergie, une façon de faire, des banques de données, de l'information, qui est unique au monde. D'ailleurs, on a des demandes de plusieurs industriels d'autres pays qui veulent participer à nos activités. On pense que ces industriels-là qui ont été motivés par le gouvernement à s'associer et à participer au programme devraient être membres de notre Conseil. Donc, on a perdu un peu de vitesse, effectivement, au Québec, à ce moment-là. Toutefois, ça n'empêche pas qu'il y a des sommes importantes qui se dépensent dans le secteur de l'hydrogène, et on en est très heureux au Québec. Toutefois, pour faire face tout à l'heure à une concurrence très importante des pays d'Europe, entre autres, je pense qu'une concertation industrielle serait très nécessaire.

M. St-Roch: Merci.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, M. le député de Drummond. Le député de D'Arcy-McGee voudrait prendre la parole, et ça prend le consentement de la commission. Est-ce que vous donnez le consentement?

Une voix: I am not sure. Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Consentement de ma part, M. le Président.

Une voix: I will be generous.

Le Président (M. Forget): II faut être unanimes pour le consentement. Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: I will be generous.

M. Chevrette: Moi, je vais me montrer très généreux et j'espère que cette générosité se transposera de temps à autre en Chambre de la part du député de D'Arcy-McGee.

Une voix: Ce qui est rare.

Le Président (M. Forget): On a consentement. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: C'est juste une petite question sur le processus de transformation de l'électricité par l'électro-lyse à l'hydrogène. Est-ce que vous avez des études importantes sur la question de sécurité de ce processus de transformation? Je présume qu'il y a des usines ici qui font, par l'électrolyse, cette transformation. Est-ce que vous avez des études sur la sécurité de ça et même sur l'impact environnemental de cette transformation?

M. Champagne: Au niveau de la sécurité, des électrolyseurs existent dans le monde depuis plusieurs années. D'ailleurs, la compagnie qui a développé les grands électrolyseurs au Québec et dans 90 pays où elle vend ses petits électrolyseurs, il n'y a pas d'incident. C'est une technologie extrêmement sécuritaire compte tenu des propriétés de l'hydrogène. Étant plus léger que l'air, lorsqu'il y a un échappement quelconque, il se

dissipe dans l'atmosphère, et est très sécuritaire comme élément et comme carburant.

En ce qui a trait aux grands électrolyseurs, il n'y en a pas beaucoup dans le monde qui ont été implantés. L'usine la plus importante de grands électrolyseurs avancés, c'est l'usine Hydrogenal, à Bécancour, où on a 7 MW d'électrolyseurs installés, et la prochaine usine sera au Brésil, où on a fait la duplication du projet au Québec là-bas, et on va porter cette usine-là à 14 MW. Donc, ce sont des systèmes très avancés de détection qui sont là et, définitivement, l'hydrogène, la maîtrise de l'hydrogène en industrie est considérée, sous sa forme à l'état naturel, comme un gaz des plus sécuritaires. Donc, le record sécurité de l'hydrogène en industrie est très, très positif. C'est certain qu'il y a des mythes reliés au domaine du gaz et à l'hydrogène, mais on peut facilement y répondre.

M. Libman: Merci.

Le Président (M. Forget): Je remercie le député de D'Arcy-McGee. Au nom des membres de cette commission, M. Champagne, je vous remercie beaucoup de votre participation. Alors, nous allons suspendre pour deux petites minutes, et je vais inviter la municipalité régionale de comté du Fjord-du-Saguenay à bien vouloir venir prendre place à la table.

(Suspension de la séance à 10 h 59)

(Reprise à 11 h 1)

Le Président (M. Forget): La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je rappelle que le temps alloué pour la période de présentation, la période d'exposé de l'organisme est de 20 minutes, la période d'échanges est de 40 minutes. Alors, je demande au porte-parole de l'organisme d'identifier, de présenter les personnes qui l'accompagnent.

MRC du Fjord-du-Saguenay

M. Halley (Jean): M. le Président de cette commission, MM. et Mmes de la commission parlementaire, mon nom, c'est Jean Halley, préfet de la MRC du Fjord. M'accompagne ici le préfet suppléant et maire de Chicoutimi, M. Ulric Blackburn, à ma gauche; j'ai également le directeur général de la MRC du Fjord, M. Rénald Gaudreault, à ma droite, et un conseiller pour nous à la table de la MRC, M. Guy Dufort.

Le Président (M. Forget): Je vous invite à présenter votre mémoire.

M. Halley: Vous nous excuserez un petit peu. Le malentendu, en fait, c'est qu'on avait déposé une proposition de la table de la MRC du Fjord concernant l'objet pour lequel on est devant vous ce matin. Le malentendu: on n'avait pas compris qu'on se devait de faire parvenir un rapport à l'avance au niveau de cette commission. Cependant, vous verrez, on pensait que notre proposition était assez claire. Mais on précisera quand même, dans la documentation que vous avez, l'objet de cette proposition, et on pourra également répondre à vos questions s'il y a des précisions additionnelles. Je pense qu'on pourra s'entendre malgré le malentendu!

Le mardi, 12 janvier dernier, des représentants d'Hydro-Québec de la région Saguenay—Lac-Saint-Jean ont exposé aux membres de la MRC du Fjord-du-Saguenay, alors réunis en assemblée régulière, les orientations du plan de développement 1993-1995 de la société d'État. Les élus de notre MRC ont apprécié cette démarche d'information et de consultation. Ils ont manifesté leur intérêt à ce plan de développement en faisant parvenir une résolution décrivant leurs préoccupations. Dans cette résolution, les membres de la MRC du Fjord-du-Saguenay demandent d'instaurer une politique énergétique strictement destinée aux régions périphériques productrices d'électricité et/ou dont le territoire est ou sera traversé par d'importantes infrastructures de transport d'énergie, en particulier, dans la région Saguenay—Lac-Saint-Jean, laquelle politique pourrait contribuer à stimuler le développement économique dans lesdites régions. D'ailleurs, une copie de cette résolution est jointe à ce mémoire. C'est avec plaisir et confiance que la MRC du Fjord-du-Saguenay a accepté l'invitation de détailler l'esprit de sa résolution par ce mémoire qu'elle dépose aujourd'hui devant cette commission de l'économie et du travail.

Nous avons pris connaissance de la proposition d'un plan de développement 1993-1995 en retenant les orientations 19, 20 et 21 comme étant les orientations les plus susceptibles d'influencer notre MRC. Ces orientations représentent, pour nous, des opportunités, en plus de permettre de partager avec le gouvernement notre vision de la contribution d'Hydro-Québec à notre restructuration économique.

S'appuyant sur ces orientations, notre mémoire revêt davantage un caractère d'énumération de principes qu'une approche technique. Alors, nous sommes des élus, on a laissé la technique aux autres, et on regarde surtout sur le plan politique les retombées économiques possibles pour nos régions.

La MRC du Fjord-du-Saguenay recouvre au Saguenay une superficie de 44 000 km carrés, regroupant 20 municipalités situées de part et d'autre du Saguenay, et compte 175 000 habitants. Je pense, pour le renseignement de cette commission, qu'à part les villes de Laval et de Longueuil, c'est en fait la plus grosse MRC du Québec, si on considère les municipalités rurales qui la forment avec les trois grandes villes. Les territoires non organisés — TNO — occupent la plus grande superficie avec 39 500 km carrés. C'est pour ça que, lorsqu'on va parler de corridors qu'on traverse, on a du terrain, et il va y en avoir des lignes qui vont traverser notre territoire.

La MRC du Fjord-du-Saguenay, son économie traditionnelle à maturité. Comme vous le savez, la grande industrie regroupant l'exploitation forestière, la

production de l'aluminium et l'exploitation minière a été le fondement du développement, de la croissance et de l'essor économique de notre territoire. Les papetières et les industries de bois de sciage se sont établies chez nous à cause des largesses de la forêt, et Alcan à cause du potentiel hydroélectrique que représentent les rivières, les ressources naturelles de cette région. Cependant, au début des années quatre-vingt, l'économie générée par cette grande industrie est entrée dans sa phase de maturité. Ceci s'est traduit par une rationalisation de la main-d'oeuvre, elle-même entraînant des mises à pied. De plus, notre économie glisse d'une façon inquiétante vers une phase de déclin. Il s'agit de regarder à l'heure actuelle les études démographiques pour démontrer qu'il y a un dépeuplement beaucoup plus poussé que dans d'autres régions. cette situation se reflète, d'ailleurs, dans trois des principaux indicateurs du marché du travail: chômage à 14,6 %, taux d'activité à 57,7 %, rapport emploi-occupation à 49,2 %. je ne veux pas vous citer davantage de données statistiques démontrant cet état de fait puisque vous êtes déjà sensibilisés à cette situation. laissez-moi vous dire, cependant, que nous sommes déficitaires d'environ 6000 emplois, et la perte de la dernière année est astronomique avec 4500 emplois.

Ce que je veux que vous reteniez est ceci: Nous ne comptons plus sur la grande entreprise pour assurer notre survie économique. Le renouveau économique de notre région s'appuiera désormais sur le développement de nos PME et PMI existantes et sur la création de nouvelles.

C'est ici que s'inscrit notre réflexion sur le plan de développement 1993 d'Hydro-Québec dont la contribution pourrait nous aider à amorcer et à franchir cette phase de transition entre l'économie traditionnelle que nous avons connue depuis une centaine d'années et le renouveau économique de la prochaine décennie. C'est aussi l'avis des commissaires industriels et des directeurs généraux des CADC que nous avons consultés.

La MRC du Fjord-du-Saguenay, territoire ressource hydroélectrique. Depuis plus de 65 ans, l'eau des rivières de notre territoire alimente les grandes, moyennes et petites centrales hydroélectriques pour une capacité installée d'environ 3000 MW. Ici, naturellement, j'inclus le réseau d'Alcan. Des lignes de transport et de distribution de l'énergie produite ici ou ailleurs serpentent à travers notre territoire. Qu'il s'agisse de mentionner qu'à l'intérieur du schéma d'aménagement de notre MRC nous connaissons déjà d'avance un corridor d'environ 12 km de largeur qu'on a réservé strictement pour des passages de lignes électriques provenant du Grand-Nord.

En vertu de la Loi sur le régime des eaux et en vertu du bail de la Péribonka, Alcan verse annuellement environ 30 000 000 $ au gouvernement québécois en redevances pour l'utilisation de l'eau des rivières Péribonka et Saguenay — or, 30 000 000 $, on nous dit que c'est un chiffre très conservateur parce qu'on n'a pas pu connaître l'ensemble des retombées qui sont versées par Alcan au niveau du gouvernement — de sorte que pour les 20 prochaines années ces redevances totaliseront un minimum de 600 000 000 $.

Notre vision. Face à l'état de notre situation économique en phase de transition et au caractère de «ressource hydroélectrique» qu'est notre territoire, nous proposons à Hydro-Québec de passer de fournisseur d'électricité à partenaire du renouveau économique de la MRC du Fjord-du-Saguenay. D'abord, nous demandons au gouvernement québécois de créer un fonds régional de développement économique avec les sommes que lui verse et lui versera annuellement Alcan comme redevances. Ce fonds pourrait porter le nom «héritage hydroélectrique» et seuls les intérêts pourraient servir au développement économique selon une politique établie entre le gouvernement et des représentants du milieu. Et, ça, ça s'inscrit avec un système de décentralisation préconisé à l'heure actuelle par nos gouvernements. (11 h 10)

Aussi, nous demandons à Hydro-Québec de procéder immédiatement à l'élargissement du champ d'application de son programme d'octroi de crédits mis à la disposition des collectivités touchées par des projets de centrales et de lignes, de sorte que des crédits peuvent être octroyés à la création ou au développement des PME et des PMI. Nous souhaiterions que cette politique soit rétroactive et puisse être appliquée à des lignes existant depuis plusieurs années.

Alors, nous connaissons les redevances qu'Hydro-Québec fait à l'heure actuelle au niveau des territoires touchés, mais pour les lignes qui sont déjà là depuis des années, où il n'y a jamais rien eu de versé, on vous dit que ceci pourrait aider au développement économique de nos régions par ce fonds régional.

En plus, qu'il s'agisse de petits barrages ou d'usines de cogénération, nous demandons qu'une politique tarifaire soit adaptée et disponible aux PME et aux PMI établies ou qui s'établiront à proximité de producteurs privés d'électricité. Finalement, nous demandons à Hydro-Québec d'alléger sa politique tarifaire de puissance annuelle souscrite pour les PME et les PMI éner-givores, de sorte que seule la consommation réelle soit payée. Ainsi, ces industries ne seront pas obligées de payer pour de l'énergie électrique qu'elles ne consomment pas. Selon nos commissaires industriels, cette mesure seule rendrait les PME et les PMI compétitives sur le plan mondial.

Alors, voilà l'essentiel de notre réflexion sur le plan de développement hydroélectrique d'Hydro-Québec. Ce plan propose un ensemble d'orientations que prendra son développement durant les prochaines années. À la MRC du Fjord-du-Saguenay, nous avons retenu les orientations 19, 20 et 21 puisqu'elles représentent pour nous des opportunités garantissant son devenir économique.

L'économie traditionnelle basée sur la grande entreprise est en mutation qui se traduit par des taux de chômage élevés de 14,6 %, alors que l'ensemble du Québec se situe à 12,8 %. Les jeunes quittent la région puisque le nombre de personnes ayant 15 ans et plus et possédant un emploi diminue. En effet, le rapport em-

ploi-population était de 50,4 % en 1991 comparativement à 49,2 % déjà en 1992.

Puisque nous avons été, sommes et serons une région ressource, et puisque notre devenir économique s'appuiera désormais sur la PME et les PMI, nous demandons au gouvernement du Québec de créer un fonds monétaire pour le développement économique avec les 30 000 000 $ que lui verse annuellement Alcan; à Hydro-Québec d'élargir immédiatement à la création de PME et de PMI son programme d'octroi de crédits à la collectivité et de favoriser par une politique tarifaire adaptée les PME et les PMI.

Au nom de la MRC du Fjord-du-Saguenay, je vous remercie de votre invitation, d'une part, de présenter à cette commission nos préoccupations face au plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec et de lui communiquer notre vision de sa participation à notre renouveau économique.

Et avant de passer au questionnaire, naturellement, en soumettant ce rapport, je ne voudrais pas passer outre aussi à la satisfaction, en fait, que nous avons des actions posées déjà par Hydro-Québec, que ce soit dans sa nouvelle approche du milieu, que ce soit au niveau de la réorganisation de son organisation qui nous a permis, au niveau de la région, d'aller chercher des emplois présentement et des emplois dans les prochaines années au niveau de l'ensemble de cette réorganisation.

Ce que je voudrais vous dire ici aujourd'hui: Si on n'a pas truffé de statistiques et de chiffres ce rapport, c'est qu'on n'est pas des techniciens, naturellement, comme je le disais tout à l'heure. Ce qu'on veut dire, en fait, c'est au niveau des politiques gouvernementales. Je sais que vous l'avez déjà entendu dire à maintes reprises, qu'elles sont un petit peu du tapis mur à mur. C'est-à-dire que quand on prend une décision d'appliquer des politiques, que ce soit au niveau d'Hydro-Québec ou autre chose, elles s'étendent dans l'ensemble du Québec. Et même si nos populations vont alimenter, en fait, les grandes régions du Québec, on se dit chez nous quand même: C'est assez! Pour nous, on n'a pas d'autres choix que d'avoir des politiques de retour de crédits, comme on vous le suggère à l'heure actuelle, qui nous permettraient de développer et aussi d'attirer chez nous des petites entreprises qui permettraient de garder nos jeunes, au moins nos génies, dans notre région. Alors, je vous remercie.

Le Président (M. Forget): Alors, on vous remercie beaucoup.

Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Alors, messieurs, je voudrais vous remercier de vous présenter à la commission parlementaire et de nous faire connaître votre vision des choses, et particulièrement votre vision régionale. Je suis un petit peu surprise de voir que vous mettez de côté rapidement tout le dossier du développement régional qui a été mis de l'avant par mon collègue, M. Picotte. Et ce n'est pas du tapis mur à mur. À ce moment-ci, avec la création des conseils régionaux de développement, les priorités se font en région. Peut-être que les budgets se ressemblent, mais, même là, il y a des modulations de budget suivant les régions et les besoins. Est-ce que vous mettez ça de côté tout à fait quand vous faites vos propositions dans votre mémoire?

M. Halley: Absolument pas. On ne met pas de côté ces suggestions. Et une réponse rapide que je pourrais vous faire là-dessus, c'est que quand même au niveau de ma municipalité propre — si je ne prends pas le territoire de la MRC du Fjord — on tente, à l'heure actuelle, de se développer au niveau un petit plus industriel. C'est-à-dire qu'on voit que nos industries de base, en fait, on doit ne plus s'en occuper; la forêt n'est déjà plus ce qu'elle était; l'aluminium ne produit pas la sous-traitance qu'il produisait avec des diminutions astronomiques d'emplois, donc, on tente de se tourner vers de nouveaux créneaux.

On a extrêmement de difficulté à trouver des sommes monétaires, même si on a des plans de développement régional... Alors, en fait, on va parler de quoi? Au niveau de notre région, on n'a pas de programme tant et aussi longtemps que les applications du dernier sommet économique ne seront pas révolues en 1996. Donc, les 3 000 000 $ qui sont dévolus aux régions à l'heure actuelle pour le développement régional ne sont applicables pour nous qu'après cette période-là seulement. Nous avons des budgets au niveau du CRCD. Je siège au conseil d'administration et je suis au courant de 700 000 $ et d'un autre 125 000 $. Mais dans une région qui perd des emplois comme on en perd à l'heure actuelle, et qui cherche à se trouver des nouveaux créneaux de développement, ce sont des montants très minimes par rapport aux besoins que nous avons.

Mme Bacon: Vous demandez de créer un fonds régional de développement économique avec les sommes que verse Alcan à titre de redevances hydrauliques. Sur l'essentiel, Alcan verse des redevances au trésor public, évidemment, compte tenu qu'elle utilise notamment un bien public, à savoir l'eau. Par ailleurs, l'usage de la ressource hydraulique permet à Alcan de générer des activités commerciales qui bénéficient directement à votre région. Moi, j'aimerais savoir sur quel principe le gouvernement devrait utiliser les montants tirés d'un bien qui appartient à la collectivité québécoise au profit d'une seule région.

M. Halley: Je me doutais qu'une question comme ça nous serait posée, évidemment. C'est parce que notre mémoire tourne autour, complètement, de «région-ressource». Je veux dire, on ne s'est jamais fié, par exemple, sur d'autres régions du Québec pour s'alimenter en énergie électrique au niveau de la région chez nous. Au départ, c'est Alcan qui a le plus bénéficié, depuis les années 1927, 1929, de l'ensemble de l'eau qui coule dans nos rivières, Péribonka et Saguenay. Et plus tard sont venus s'ajouter quelques petits... On ne peut pas parler d'Hydro-Québec au niveau de notre région encore, mais il n'en demeure pas moins qu'Hydro-Québec a

des projets de développement, qu'on parle d'Ashuap-mushuan, peut-être un nouveau projet sur la Péribonka, de petites centrales qui sont à l'heure actuelle... Parce qu'on parle aussi de petites centrales.

Vous dites «qui appartiennent à la collectivité québécoise», mais au niveau d'une région qui voit partir ses gens comme on le voit chez nous, à l'heure actuelle, l'idée qu'on a développée que les ressources énergétiques appartenaient à la collectivité québécoise se tourne maintenant pour dire: Ça provient quand même de nos régions. Et on a apprécié, en fait, ce que les usines de papier, ce que les gens ont fait dans le passé avec le nombre d'emplois élevé qu'on avait dans le temps pour ces choses-là, mais, à partir du moment où, en fait, notre population diminue dangereusement, les gens chez nous se disent maintenant: Ce n'est plus une collectivité québécoise, probablement, qui sert à l'ensemble des Québécois, mais ces ressources-là sont sur nos territoires à nous. C'est dans ce sens-là qu'on propose cette chose-là.

Mme Bacon: Mais si ce principe-là devait s'étendre également à l'ensemble des régions, pour d'autres secteurs que l'électricité, est-ce que vous avez bien analysé les avantages, les inconvénients pour les régions et pour le Québec, au fond, avant de formuler cette recommandation-là? (11 h 20)

M. Halley: C'est-à-dire qu'à partir du rapport qu'on vous a déposé ce matin c'est évident qu'on est prêt à s'asseoir et à discuter de tout ce portrait au niveau économique, tant pour notre région que pour les autres régions du Québec. Ce qu'on vous rapporte, c'est une discussion qui s'est déroulée chez nous, dans notre territoire, et qui se déroule dans d'autres MRC près de chez nous, à l'heure actuelle. On se dit, à l'intérieur de ça: C'est vrai qu'au niveau d'autres régions du Québec il pourrait survenir des choses identiques et ça peut faire partie de demandes d'autres régions du Québec. On est prêts à s'asseoir et à discuter. Avec la consultation qu'Hydro-Québec fait, c'est ce volet-là qu'on voudrait voir ajouter, à l'heure actuelle, avec des représentants du gouvernement et d'Hydro-Québec; c'est ce volet-là qu'on veut voir ajouter au niveau de cette consultation, à l'heure actuelle, qui se fait par Hydro-Québec et par le gouvernement.

Mme Bacon: Est-ce que vous remettez en cause que ce soit le gouvernement qui redistribue la richesse à l'ensemble des Québécois?

M. Halley: Absolument pas. On ne veut pas remettre en cause cette chose-là, c'est une demande qu'on fait au gouvernement du Québec, et comme d'autres régions pourraient faire d'autres demandes dans d'autres secteurs d'activité en particulier, je n'ai pas à regarder... À l'heure actuelle, je me fie au niveau de l'ensemble de la ressource forestière, de l'ensemble de la ressource minérale, de l'ensemble de la ressource énergétique qu'il y a au niveau de la région Saguenay—Lac-

Saint-Jean, de l'ensemble de ces lignes de transport qui vont passer à travers notre territoire. On sait déjà qu'il y a une ligne 12 qui s'en vient, on en connaît déjà une treizième qui va passer sur le territoire de notre MRC, une quatorzième et une quinzième. Alors, c'est tout ça qu'on dit: 1 %, ce n'est peut-être plus suffisant. quand on a commencé à appliquer cette politique de redistribution de 1 %, c'était une chose, ça correspondait peut-être aux besoins du moment; aujourd'hui, par contre, par rapport à ce qui se passe, le phénomène qui se passe chez nous, on dit: ça devrait être quelque chose d'additionnel.

Mme Bacon: Est-ce que vous étendez votre demande, par exemple, aux mines, aux forêts? Parce qu'il y a des arbres qui partent d'une région. Est-ce que vous étendez ça à des mines qui sont exploitées dans une région ou seulement au niveau de l'eau qui fait l'électricité chez nous?

M. Halley: Écoutez, à l'heure actuelle, nous n'avons pas touché aux petits barrages qu'Hydro-Price peut avoir chez nous, qui occupent la rivière Shipshaw ou Chicoutimi, quelque chose comme ça. C'est minime comme redevances, semble-t-il, puis on n'a pas pu obtenir les chiffres très précis, on ne les a pas avancés. Alors, c'est évident qu'on inclut aussi cette possibilité-là. Au niveau, par exemple, de la forêt et de ces choses-là, on n'a pas voulu se rattacher, dans ce rapport-là, au niveau de ces ressources du bois. Cependant, j'ai l'impression que d'autres personnes pourraient éventuellement le faire. Mais nous autres, en tout cas, on s'est limités, notre MRC, dans notre territoire, au niveau des ressources hydroélectriques.

Mme Bacon: Vous parlez d'une tarification préférentielle pour les PME, PMI, comme celle que vous proposez dans votre mémoire; ça entraînerait un manque à gagner pour Hydro-Québec. Dans votre esprit, qui devrait financer ça, ce manque à gagner? Est-ce que c'est le gouvernement?

M. Halley: Je pense qu'on a quand même deux propositions qui se tiennent. On a dit: Est-ce qu'on pourrait regarder la création d'un fonds? Est-ce qu'on pourrait regarder, en même temps, une diminution tarifaire? Et c'est dans ce cadre-là que les deux suggestions sont faites à l'heure actuelle. Nous pourrions éventuellement, lors de discussions, si on est prêts à regarder ce nouveau portrait, en fait, par rapport à cette nouvelle réalité économique de notre région, regarder de quelle façon on pourrait supporter ces choses-là. C'est-à-dire qu'on n'a pas voulu, en fait... Si on arrive puis qu'on ne fait qu'une seule demande, on risque de s'en faire couper énormément.

L'autre chose qu'on veut voir aussi, c'est que de plus en plus notre paysage va être drôlement changé aussi par l'ensemble des lignes hydroélectriques de ces grosses infrastructures qui vont venir de la rive nord. Quand on considère certaines redevances par rapport à

la situation économique, on peut en rajouter. On revient toujours sur le fait qu'il y a réellement un manque. Malgré une nouvelle politique de développement des régions du ministre Picotte et ces choses-là, à chaque fois que nous avons des demandes à faire pour du développement en entreprise, il manque de capitaux. Quand une entreprise prend jour chez nous, on ne peut pas la dire concurrentielle avec celle qui va se développer à Montréal, au sud de Montréal ou près de Québec. Et, pourtant, on paie le même taux d'électricité, même si on est très près des ressources énergétiques.

Mme Bacon: II est vrai que les entreprises à forte consommation d'électricité ont souvent tendance à s'implanter en région plutôt que dans les grands centres. Dans ce contexte-là, vous ne croyez pas que la proposition concurrentielle des tarifs québécois d'électricité, les efforts réalisés pour attirer des industries même à forte consommation d'électricité, ça constitue déjà un soutien important au développement économique régional.

M. Halley: Ce qui est fait à date, on le reconnaît. Je vous l'ai dit tout à l'heure, même s'il n'est pas dans le mémoire, ce qui est fait à date, on le reconnaît. Je reviens toujours avec ça et je vais me répéter, Mme la ministre, mais notre situation, à l'heure actuelle, au niveau régional, demande plus que ça.

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, Mme la ministre.

Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à mon tour. Je reconnais bien l'imagination des gens de votre région dans la proposition que vous nous faites. Cela étant dit, j'ai aussi un peu les mêmes craintes ou appréhensions que semble vouloir manifester la ministre, ou du moins le même questionnement, particulièrement sur la création de ce fonds dû aux redevances, à cause, évidemment, de l'impact que cette demande-là pourrait susciter dans les autres régions qui seraient tout aussi légitimées de le faire. Je pense à mon collègue de la Mauricie. Je pense à des gens comme ceux de PAbitibi qui, eux, bon, évidemment, sont davantage tributaires de ressources naturelles comme les mines, etc.

Donc, dans ce sens-là, je me demandais si vous aviez exploré d'autres avenues. Je peux comprendre cependant l'état de situation que vous faites, qui est bien réel et qui concerne les difficultés économiques auxquelles vous êtes confrontés, et aussi le fait qu'il y a des investissements significatifs qui ont été faits dans la région et qui, maintenant, se rétrécissent un peu, jusqu'à un certain point, avec l'effet que ça donne quant aux questions d'emplois. Mais est-ce que vous avez exploré d'autres avenues quant à la mise en place d'un fonds de l'ordre de celui que vous proposez?

Il existe actuellement, à travers le Québec, des expériences de création de fonds d'aide à l'emploi, à l'entreprise où les différentes institutions financières se réunissent. Même chez vous, il y a une expérience, enfin, dans votre grande... dans la grande région, il y a une expérience, à cet égard-là. Mais est-ce que vous avez songé à des avenues comme celles-là qui rejoindraient l'essentiel de vos préoccupations, mais qui ne poseraient pas ou ne soulèveraient pas toutes les difficultés que nous voyons apparaître aussitôt qu'une proposition comme celle-là est déposée sur nos tables?

M. Halley: Alors, en ce qui concerne les autres régions, nous y avons pensé. Au moment, tout à l'heure, où Mme la ministre me posait la question «est-ce que, pour les autres régions du Québec...», ce qui m'est venu à l'esprit, c'est que nous en avons discuté également chez nous. On a considéré la situation de l'Abitibi-Témiscamingue, toute cette région-là au complet, la région de la Mauricie aussi, on y a pensé quand on a préparé un petit peu notre proposition, notre résolution; ça a été discuté, c'est bien évident. Mais on se dit, à l'heure actuelle: on pose un premier geste au niveau d'une région. On l'a posé dans le sens aussi qu'on entend parler tellement de décentralisation, à l'heure actuelle, que les gouvernements veulent faire, veulent nous refiler graduellement des responsabilités au niveau des régions, responsabilités, pour nous, je vais vous dire, au niveau de la MRC du Fjord, qu'on est prêt à prendre, certaines responsabilités.

Alors, on s'est dit: Si on nous reporte graduellement des responsabilités additionnelles, pourquoi ne pas trouver un moyen quelconque pour nous former un fonds régional qui nous permettrait d'absorber graduellement ces responsabilités-là? D'un autre côté, vous posez la question: il existe des fonds régionaux. Je me doute de l'allusion que vous faites à certains fonds à l'heure actuelle, dont on peut bénéficier. C'est évident qu'on peut bénéficier de certains fonds à l'heure actuelle. Nous avons aussi des fonds fédéraux, à l'heure actuelle, au niveau des centres d'aide aux entreprises qui peuvent nous aider à créer certaines entreprises. Mais, malgré cela encore, ce sont des fonds limités. Alors, qu'on parle de fonds au niveau du Fonds de solidarité, au niveau de la petite PME, c'est 50 000 $ maximum. Si on va au niveau des centres d'aide aux entreprises, c'est 75 000 $ maximum.

Je travaille à l'heure actuelle... Tu sais, un maire, dans une petite municipalité, est aussi un agent de développement industriel. Et comme je suis un gars à la retraite, bien, je fais beaucoup de travail, je fais beaucoup d'heures supplémentaires pour essayer de développer ma municipalité. Mais je sais, à l'heure actuelle, pour prendre des contacts dans tous les ministères, qu'il n'est pas facile de sortir des sommes d'argent pour le développement de la petite entreprise. Il y a une foule de réglementations qui, à un moment donné, font que ce n'est pas un produit considéré comme un produit fabriqué. Là, c'est un projet, par exemple, une entreprise environnementale, et là on ne peut pas aller chercher d'argent. Ça aurait créé 15 ou 20 emplois; malheureuse-

ment, on ne peut pas y aller parce que les programmes gouvernementaux ne le permettent pas. (11 h 30)

Alors, ça nous permettrait, en région, en fait, avec un fonds, avec des décideurs régionaux... On nous demande de prendre davantage de décisions en région; bien, avec des décideurs régionaux, on pourrait éventuellement, en fait, être capables de disposer des sommes nécessaires pour partir ce genre d'entreprises. Et, d'un autre côté, peut-être qu'on aura d'autres choses à proposer à la ministre aussi sur un fonds régional. Je lui parlerai sommairement de ça tout à l'heure, on aura d'autres propositions à lui faire pour permettre au milieu de se développer et de pouvoir gérer en région ces fonds qui nous permettent de développer des nouveaux créneaux d'entreprises.

Mme Marois: D'accord. Mais vous êtes conscients, donc, qu'une demande comme la vôtre susciterait une telle demande ailleurs et, donc, pourrait amener le gouvernement, par quelque parti politique qu'il soit dirigé, à devoir réfléchir à l'implantation de mesures semblables pour les autres régions sur la base d'une autre constante ou d'autres réalités si c'était le cas. Vous êtes bien conscients de ça quand même.

M. Halley: Et pourquoi pas! D'ailleurs, dans notre proposition, nous parlons des régions périphériques. Alors, même si nous présentons un mémoire pour la MRC du Fjord, on parle des régions périphériques qui auraient des potentiels énergétiques situés sur leur territoire dont elles pourraient bénéficier des retombées.

Mme Marois: Mais vous ne rejetez pas non plus, par contre, l'utilisation d'autres outils qui sont en train de naître au Québec.

M. Halley: Absolument pas.

Mme Marois: Même si ces outils-là ont leur limite, j'en conviens, j'en connais dans un certain nombre de régions, il reste que ça répond aussi à des besoins précis et que ça a un impact, en termes d'effet de levier, sur l'emploi et sur l'économie des régions.

M. Halley: On ne les rejette absolument pas et, pour nous autres, ça fait partie de l'ensemble. On a déjà commencé à travailler avec ces différents fonds d'intervention.

Maintenant, moi, je vous dis, par expérience personnelle, qu'on a de la difficulté à développer certains secteurs. Et, si notre région perd ses emplois de la grande entreprise, il faut dire qu'on perd énormément de génies, de techniciens, à l'heure actuelle. Je regarde seulement au niveau, par exemple, de l'usine d'Alcan, à Jonquière; on est rendus à 9 années... des gens de 9 à 10 ans qui sont à l'extérieur de l'usine. Dans le secteur des emplois de cols blancs, on est rendus à 15 ans de service dehors, et ces gens-là ne s'attendent pas d'être réembauchés. Donc, on a besoin de développer d'autres créneaux de développement qui peuvent nous permettre de récupérer ces personnes-là, qui ont une vaste expérience en entreprise. En tout cas, pour moi, pour ma part, à l'heure actuelle, dans les programmes qu'on a présentement, dont on peut bénéficier, soit que les sommes soient très minimes... Parce que je siège aussi sur le Fonds d'interventions régionales où on a à disposer du budget de 125 000 $. Vous vous imaginez ce qu'on fait dans une région de 300 000 avec 125 000 $. Trois projets, l'autre jour, et nos 125 000 $ — on va le dire en bon québécois — étaient pétés. O.K.? On a 750 000 $ au niveau de la région, à l'heure actuelle, en attendant que ce qui avait été promis par le sommet économique puisse être appliqué, mais, encore là, on n'a pas commencé à distribuer ce montant-là dont on sait qu'il est déjà... Les demandes sont le double, le triple, et davantage encore, tu sais. Alors, c'est ça un petit peu qu'on fait.

Mme Marois: Oui.

M. Halley: C'est pour ça qu'on fait cette demande-là.

Mme Marois: Je vous reconnais bien comme ancien responsable de commission de formation professionnelle dans vos préoccupations à l'égard, entre autres, de l'emploi. Je pense que vous soulevez des problèmes réels et je pense qu'on est bien conscients de ça.

Je voudrais vous amener sur un autre aspect. Peut-être d'abord une toute petite question plus pointue. Ça m'étonne un peu quand vous me dites que vous ne pouvez pas avoir accès au Fonds de développement régional, tel que prévu dans le nouveau plan du ministre responsable du développement régional, qui est de l'ordre de 3 000 000 $ par région administrative.

M. Halley: Oui.

Mme Marois: J'avais l'impression que c'était universel, là, peu importe qu'on ait tenu un sommet il y a un an, deux ans, trois ans.

M. Halley: Je pense qu'il y a deux régions au Québec, à l'heure actuelle, qui ont des périodes de temps pour appliquer ce qui a été promis au niveau des sommets économiques. J^es projets, qui avaient été soumis au nombre de 66 chez nous, au niveau de la région, qui ont été approuvés, en fait, ces projets-là vont venir à maturité en l'année 1996. En attendant, en fait, dans la politique gouvernementale, on ne peut pas bénéficier de ces 3 000 000 $ là. Cependant, il faut dire aussi, à la décharge de ça, que les projets qui ont été acceptés au sommet économique se développent graduellement. Il y en a qui tombent en cours de route, et on nous dit que cet argent-là pourra devenir récurrent. C'est bien évident qu'on les surveille énormément aussi, mais, pour le moment, donc, ça va aller jusqu'en 1996, tant et aussi longtemps que l'ensemble des projets ne seront pas...

Mme Marois: Ne seront pas mis en oeuvre. M. Halley: ...mis en oeuvre.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: J'ai...

Le Président (M. Forget): On va revenir.

Mme Marois: Oui, d'accord. Je reviendrai sur une autre question.

Le Président (M. Forget): Merci, Mme la députée de Taillon.

Mme la ministre de l'Énergie.

Mme Bacon: Vous nous demandez que la tarification préférentielle de l'électricité soit réservée à certaines régions du Québec. Je reviens encore là-dessus. On sait que, l'uniformité territoriale des tarifs, ça constitue un des principes fondamentaux de la tarification de l'électricité au Québec depuis que le gouvernement a nationalisé le secteur de l'électricité. Est-ce que vous remettez en cause le principe qui avait été adopté, je pense, par l'ensemble de la population? Et si vous le remettez en cause, pourquoi vous le remettez en cause?

M. Halley: Bon, voici. Je pense qu'on ne veut pas revenir sur le passé, Mme la ministre. Ce que nous avons connu au niveau de la nationalisation de l'électricité, qui a amené, en fait, l'uniformité des tarifs électriques... Parce que nous étions une région privilégiée, même au niveau domiciliaire, auparavant, lorsque Alcan fournissait l'énergie électrique au niveau de la région; on le reconnaît et on ne veut pas revenir là-dessus.

Le seul secteur en particulier qu'on veut toucher à l'heure actuelle est le secteur de développement des petites PME. On chante, on dit à travers le Québec à l'heure actuelle, et, en fait, tous les ministères sont d'accord avec ça, que la nouvelle vision maintenant au niveau des entreprises qui vont créer de l'emploi, c'est les petites PME, les petites PMI. Alors, on se dit: On ne veut pas retoucher à ça au niveau de la population dans son ensemble. Mais on dit: II y a des secteurs en particulier, en fait, au niveau de l'entreprise, de cette petite PME, de cette petite PMI, qui pourraient en bénéficier.

On ne veut pas revenir sur le choix global que les Québécois se sont donné dans le temps sur cette question-là, mais on veut y aller d'une façon plus pointue au niveau de la petite entreprise, ce qui pourrait faire en sorte qu'une région comme la nôtre où, par exemple, un entrepreneur s'établit, où les tarifs de transport sont plus élevés et la concurrence est difficile souvent à cause de ça, bien, ça pourrait permettre, en fait, de compenser pour les coûts additionnels de production en région comme la nôtre.

Mme Bacon: Quand vous parlez de petites et moyennes entreprises, c'est seulement pour le Saguenay—Lac-Saint-Jean?

M. Halley: Ce que je vous ai dit: À l'heure actuelle, on présente le mémoire pour notre région, mais, dans notre proposition qu'on vous a déposée, on parle des régions périphériques.

Mme Bacon: Le tarif préférentiel que vous préconisez s'appliquerait à l'ensemble de votre région, si je comprends bien.

M. Halley: Oui.

Mme Bacon: Est-ce que vous souhaiteriez, sur la base du même principe, que les crédits qui sont reliés à des projets de centrales, de lignes, soient répartis aussi dans l'ensemble de votre région plutôt que d'être réservés aux MRC?

M. Halley: Ça, à l'heure actuelle, c'est bien évident qu'au niveau des régions c'est aussi un débat. Probablement que vous avez eu des mémoires déjà qui vous ont présenté ces choses-là dans notre région même. Alors, c'est évident que nous, ce dont on parle à l'heure actuelle, au niveau de deux MRC, en particulier... Au niveau de la région, quand on parle de ces choses-là, on parle de redistribution régionale. Quand on parle de régional, on parle de la région 02, des régions qu'on connaît à l'heure actuelle au niveau du Québec. Alors, c'est dans cet esprit-là que nous parlons, nous autres, à l'heure actuelle.

Mme Bacon: Quel genre d'initiatives pourraient être retenues pour favoriser le développement économique régional et quels critères devraient être employés pour le choix des initiatives? Parce que ça va prendre des critères pour les choix.

M. Halley: Pour les choix de petites entreprises?

Mme Bacon: Le genre d'initiatives qui pourraient être retenues pour favoriser le développement régional?

M. Halley: Je ne le sais pas. Est-ce que l'initiative que nous vous suggérons à l'heure actuelle n'est pas suffisante pour le développement régional?

Mme Bacon: Non. J'aurais aimé ça que vous soyez plus précis peut-être pour votre région.

M. Halley: Pardon?

Mme Bacon: Peut-être plus précis pour votre région. Quel genre d'initiatives vous voyez? Vous voulez un fonds, vous parlez de 30 000 000 $, et vous-même vous nous demandez que ce soit rétroactif. Il y a beaucoup d'argent là-dedans, M. Halley; vous êtes un peu gourmand. Vous allez faire quoi avez ça? Quelle

sorte d'initiatives vous allez nous proposer si on vous donne demain matin 600 000 000 $, disons?

M. Halley: O.K. Je vais y aller rapidement, puis après s'il y en a d'autres qui veulent ajouter quelque chose... Je sais qu'à l'heure actuelle...

Mme Bacon: M. Blackburn doit avoir des choses à dire pour Chicoutimi. (11 h 40)

M. Halley: Si, à l'heure actuelle, au niveau de la région, on travaille avec l'ensemble de nos commissaires industriels à se développer de nouveaux créneaux d'entreprises reliés directement à nos ressources naturelles qui vont à l'extérieur de la région — et là je vais parler, par exemple, du bois, je vais parler du papier, je vais parler des mines et je vais parler d'autres ressources qu'on laisse aller à l'extérieur à l'heure actuelle et qu'on laisse aller se transformer à l'extérieur de la région et qu'on pourrait transformer chez nous si on avait les moyens financiers nécessaires pour aider les petits entrepreneurs à se lancer dans ces nouveaux créneaux-là — ces nouveaux créneaux-là ne sont pas faciles, c'est des risques que les gens doivent prendre souvent. Ce n'est pas facile de développer et c'est dans ces secteurs en particulier où on oriente notre action régio-nalement, à l'heure actuelle, à partir du CRCD, du Conseil régional de concertation et de développement, où le programme est soumis présentement, et c'est le voeu exprimé par l'ensemble des municipalités.

Je parle aussi au niveau de l'agroforestier. Alors, quand on regarde, par exemple, où il va partir... Dans ma municipalité, on est producteurs de pommes de terre. Notre pomme de terre part de chez nous et va se faire transformer au Nouveau-Brunswick ou ailleurs. Alors, on se dit: Pourquoi on ne serait pas capable de la transformer chez nous? Dans les programmes qui existent à l'heure actuelle au niveau du développement, il n'est pas facile — je le sais, j'en ai marché dernièrement encore — d'aller chercher des subventions. Ce n'est pas reconnu nécessairement dans les grappes industrielles, c'est de nouvelles choses qu'on veut partir chez nous pour recréer de l'emploi et c'est dans ces secteurs-là d'activité, en particulier, qu'on veut avoir des sommes d'argent à placer pour être capables de développer.

Mme Bacon: M. Blackburn, vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Blackburn (Ulric): Je voudrais rajouter. Vous parlez d'initiatives; actuellement, à mon sens en tout cas, il y en a deux. On a, par exemple, avec SOCCRENT, des ententes avec des cégeps pour faire des études justement dans les nouvelles technologies et travailler là-dedans. Ça, c'est une initiative qu'on prend dans notre secteur. Évidemment aussi, il y a des initiatives qui font qu'actuellement on demande à tous ceux qui auraient des idées pour partir de l'industrie, partir n'importe quoi qui donnerait du travail aux gens, de présenter leurs idées; nous autres, on va essayer de travailler avec eux autres. Mais, ça, ça prend de l'argent, ça prend passablement d'argent. Je pense qu'on a deux initiatives qui sont très bonnes, qui vont donner des résultats, mais est-ce qu'on pourra réussir... Évidemment, actuellement, c'est les municipalités qui sont obligées de mettre de l'argent là-dedans; c'est normal, il faut en mettre aussi. On est capables d'en mettre pour une partie, mais ça nous prend d'autres choses qui vont nous aider justement à supporter ces petits et moyens entrepreneurs qui vont arriver avec des idées qu'on va développer ensemble, et surtout par la recherche qu'on fait actuellement.

Mme Bacon: Quand on regarde...

M. Blackburn (Ulric): Sur le plan régional, je pense que M. Halley en a parlé tout à l'heure...

Mme Bacon: Oui.

M. Blackburn (Ulric): ...on a été les initiateurs, nous autres, dans notre secteur, d'une rencontre de tous les maires des villes du Saguenay—Lac-Saint-Jean. On est en train de développer une solidarité dans ce secteur-là. C'est encore des initiatives qui vont faire qu'au bout on va réussir quelque chose. Mais quand on arrive pour partir des projets, vraiment, c'est toujours l'argent qui manque au bout.

Mme Bacon: Quand on regarde la part des coûts de l'électricité dans les coûts de production des PME, par exemple, on constate que c'est souvent inférieur à 5 %. Est-ce que vous croyez que des tarifs préférentiels constitueraient une incitation ou un incitatif suffisant pour rentabiliser la PME en région?

M. Halley: On pense que c'est un des critères sur lesquels on devrait se baser pour la rendre d'abord... je parlais surtout pour la rendre concurrentielle à la même entreprise, par exemple, qui est située aux abords de la métropole. Alors, il est évident qu'il y a des coûts additionnels en région pour n'importe quelle petite entreprise. nous étions en forum encore récemment et il y avait les petits entrepreneurs qui nous donnaient des comparaisons entre des coûts qu'un entrepreneur de montréal peut avoir et un entrepreneur de la région. on n'a qu'à lire un exemple très rapide, et je n'entrerai pas dans les détails. lorsque le type part de chez nous, de la région, d'abord, 85 % doit être exporté à l'extérieur pour n'importe quelle fabrication qui se fait en région. en général, c'est ça, et même jusqu'à 90 %. alors, pour aller trouver les marchés, au départ, juste le billet d'avion, ça lui coûte 400 $; le gars qui est près du marché, à montréal, ça lui en coûte zéro. alors, déjà, au niveau de la concurrence, c'est un problème en région.

C'est ça qu'on dit, c'est ça qu'on demande. L'ensemble de ces coûts-là fait que la petite entreprise chez nous, dans le même genre de produits, n'est pas concur-

rentielle, ou elle est obligée d'abaisser énormément ses profits par rapport à l'entreprise qui est située près des grands centres; et ça tourne toujours autour de ça.

Je voudrais vous dire, Mme la ministre... Je reviens toujours avec mon exemple de la petite municipalité. Savez-vous que chez nous, à l'heure actuelle, on a 20 $ par tête, annuellement, pour du développement industriel dans notre petite municipalité? Et, ça, on le prend à même les taxes des contribuables. Alors, on met déjà 0,20 $ à 0,25 $ des 100 $ d'évaluation pour essayer de se développer et essayer de placer de l'argent pour que les petits entrepreneurs puissent se déprendre. Et, ça, c'est malgré tous les programmes qui existent à l'heure actuelle, parce qu'il y a des programmes très compartimentés où de petites municipalités ne peuvent pas adhérer comme les villes, par exemple. Ça veut dire que ça nous prend de l'argent, il en manque, et c'est pour ça qu'on vient vous voir et qu'on vous fait des propositions.

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, Mme la ministre.

Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Ça va aller essentiellement dans le même sens et ce sera ma dernière question, M. le Président. D'une part, à la page 4 de votre mémoire, vous faites mention du déficit que vous auriez en termes d'emplois en disant: «Laissez-moi vous dire cependant que nous sommes déficitaires d'environ 6000 emplois.» Quand vous dites «déficitaires d'environ 6000 emplois», c'est par rapport à quoi? Par rapport à la situation que vous avez connue dans le passé ou par rapport à la situation de chômage à laquelle vous êtres confrontés maintenant?

D'autre part, dans la foulée des dernières questions de la ministre, et là c'est toujours à la page 7 de votre mémoire, vous dites: «Selon nos commissaires industriels, cette mesure — et là on parle évidemment de la politique tarifaire pour les PME et les PMI — seule rendrait des PME et des PMI compétitives sur le plan mondial.»

J'aimerais ça que vous m'identifiiez nommément des secteurs industriels très précis, avec des entreprises qui pourraient être concernées par une mesure comme celle-là, puisque vous affirmez que, selon les commissaires industriels, cela rendrait les entreprises compétitives au plan mondial.

M. Halley: Je vous ai dit tout à l'heure que je ne voulais pas toucher au plan technique, mais je peux vous donner une chose, par exemple, je peux répéter ce que j'ai répondu tout à l'heure à Mme la ministre. C'est dans le sens de dire que l'ensemble des petites PME chez nous, qui ont besoin d'aller sur le marché mondial pour la compétition, elles sont réellement non compétitives à l'heure actuelle par rapport aux coûts de transport, par rapport aux coûts de déplacement pour la vente.

La semaine dernière, justement, on avait un colloque qui se tenait à Jonquière, et il y avait des jeunes entrepreneurs au niveau d'une autre technologie. Ils sont obligés d'exporter à l'extérieur de la région 95 % de leurs produits. Leur marché présentement est l'Europe, et leur marché, c'est américain. Mais quand tu pars de chez nous et que tu donnes 400 $, et que tu es obligé d'y aller avec trois techniciens pour être capable de faire tes ventes... Alors, c'est tout ça, à l'heure actuelle, le pourquoi d'une telle demande. S'il y avait, pour cette petite entreprise-là qui produit, une facture d'électricité qui était diminuée, à cause d'un service tarifaire, de quelques milliers de dollars par année, c'est ça qui pourrait faire peut-être la compétition, la compétitivité sur le plan mondial.

Mme Marois: Quant au déficit sur l'emploi...

M. Halley: Le déficit de 6000 emplois, c'est une question historique aussi. Je vous disais, par exemple, que notre économiste a sorti dernièrement en région, un économiste du Québec, qu'il y avait eu dans les 18 derniers mois, seulement dans les deux grands secteurs aluminium et papier, une perte de 4500 emplois. Alors, ça, c'est historiquement qu'on peut rappeler qu'on est en déficit par rapport, par exemple, à ce qu'on a déjà connu pendant une certaine période de temps.

Mme Marois: D'accord. Merci.

M. Halley: Par rapport au niveau de l'emploi.

M. Blackburn (Ulric): Peut-être une petite réponse, s'il vous plaît...

Mme Marois: M. Blackburn.

M. Blackburn (Ulric): ...à la question que vous avez posée de vous donner l'exemple d'industries. On va penser à STAS, chez nous, qui fabrique, ce qui a été fait à Alcan, de la machinerie pour d'autres alumineries, qui dépense beaucoup d'électricité. On va penser à Benoît Allard, qui est dans le même genre aussi. C'est à des industries comme ça qu'on pense; on ne pense pas à de la petite industrie qui fait... C'est de la transformation et c'est de la fabrication de matériel ou de...

Mme Marois: ...secondaire donc surtout. M. Blackburn (Ulric): C'est ça.

Le Président (M. Forget): Merci, Mme la députée de Taillon.

M. le député de Laviolette.

M. Joli vet: Oui. Pour peut-être vous encourager — je ne veux pas vous décourager — vous dire que notre région a fait la même demande que vous autres d'une façon différente, dans la mesure où on sait que le plan de mise en valeur environnementale ne touchait que

des dossiers environnementaux. ça débordait un peu sur des dossiers municipaux, on peut le regarder comme tel, d'autant plus que l'offre faite dans le plan de développement d'hydro-québec est de 2 %, incluant la question économique, ce qui n'était pas dans le détail précédent, dans la mise en valeur environnementale. vous savez qu'il y a des problèmes aussi d'ajustements avec la sdi, avec le ministère de l'industrie et du commerce; vous êtes au courant de ça. même chez nous, une question a été posée à ceux qui sont venus pour la corporation de gestion du développement du bassin de la rivière saint-maurice. on leur a dit: vous demandez juste 3 % ; pourquoi faire vous n'en demandez pas plus? us ont répondu: c'est le minimum. c'est le minimum dans la mesure où ils disent, comme vous: hydro-québec est venue utiliser nos rivières. on n'a pas d'objection, vu que c'est fait, mais on veut que dans le futur il y ait un vrai partenariat. (11 h 50)

Ma question va porter sur ça. Est-ce que vous avez compris, dans les discussions que vous avez eues probablement avec Hydro-Québec, du moins les gens de votre région, soit ceux qui étaient pour l'Ashuapmus-huan ou ceux qui sont contre — peu importe, ils ont parlé dans tous les cas, en particulier ceux qui étaient pour la MRC du coin, de la possibilité d'un partenariat avec Hydro-Québec — avez-vous senti chez HydroQuébec un changement de culture? Hydro-Québec est habituée d'arriver — on va prendre des mots bien québécois — avec ses grands sabots et là, aujourd'hui, ils sont obligés de subir certaines autres formes de pression. Est-ce que vous avez compris, dans les discussions avec eux autres, si vous en avez eu, que le vrai partenariat est en train de s'installer?

M. Halley: De ce côté-là, je pense que je l'ai souligné rapidement tout à l'heure lors de la terminaison de mon rapport, il est évident qu'on apprécie les efforts qui sont faits à l'heure actuelle et pour nous, en région — je ne sais pas, je ne connais pas les autres régions du Québec — c'est évident qu'il y a un rapprochement qui se fait; il est tangible et on s'aperçoit qu'Hydro-Québec veut de plus en plus et particulièrement, je pense, au niveau des régions... J'ai eu affaire récemment, l'année dernière, avec la haute direction, et ce n'est pas si évident; mais en région, en tous les cas, avec les gens, il y a un rapprochement qui se fait, puis ils sont intéressés à nous rencontrer, ils sont intéressés à travailler avec nous. Ça, c'est très clair; c'est très clair de ce côté-là.

Maintenant, ça ne nous empêche pas quand même... On leur a exposé ces problèmes-là, à l'heure actuelle chez nous, en région, au niveau du vice-président régional; il est au courant de ces dossiers-là et il est au courant aussi des demandes qu'il y a dans d'autres MRC où on parle, par exemple, du harnachement de l'Ashuapmushuan. On en demande beaucoup plus. Ils sont au courant de ça. Il y a réellement un partenariat qui s'établit à l'heure actuelle. À chaque fois qu'il y a un petit projet, on s'assoit, on en discute; il n'y a pas de problème de ce côté-là.

M. Jolivet: ii y a des gens — là, je vais agir comme, un peu, un avocat du diable — qui disent que le fait de recevoir d'hydro-québec 1 % de mise en valeur environnementale, possiblement 2 % peut-être à un autre niveau, ça a pour effet d'enlever aux élus municipaux, qui voient arriver une belle manne, leur esprit critique quant aux tours de transmission, quant aux travaux sur l'ashuapmushuan plutôt que sur la péribon-ka. est-ce que, pour vous autres, c'est un problème?

M. Halley: Absolument aucun problème. Je peux vous répondre là-dessus chez nous. D'ailleurs, la MRC du Fjord, à l'heure actuelle, s'est prononcée en faveur du harnachement de toutes les rivières possibles dans la région. Alors, tu sais, le problème de ce côté-là ne nous cause aucune inquiétude quant à ça au niveau des revendications qu'on pourrait avoir envers Hydro-Québec. En tout cas, je ne sais pas si d'autres peuvent rajouter... Je pense que M. Blackburn est là pour le dire, ça n'a même pas été apporté au niveau de notre table de la MRC.

M. Jolivet: Alors, je vous pose une question qui me vient à l'esprit parce que, là, je revois des gens de chez vous qui sont venus ici, comme d'autres ailleurs au Québec. Vous considérez que toutes les rivières au Québec devraient être harnachées ou considérez-vous — et l'Ashuapmushuan est un exemple — qu'elles pourraient être conservées comme rivières patrimoniales, pour dire à nos enfants plus tard c'était quoi une rivière? Parce que si elles sont toutes harnachées, on ne pourra jamais le dire. Est-ce que vous croyez qu'il devrait y avoir au Québec des rivières patrimoniales, dont l'Ashuapmushuan pourrait en être une?

M. Halley: Bon! Ça, ça dépend de quelle façon on se place. Il y a possiblement, dans certaines régions du Québec, des choix à faire, mais, pour nous, à l'heure actuelle, au niveau de la région Saguenay—Lac-Saint-Jean et de la MRC du Fjord d'une façon particulière, avec la situation drastique de chômage qu'on vit à l'heure actuelle, on se dit: La Péribonka, c'est déjà prévu; l'Ashuapmushuan, c'est déjà prévu. On se dit: Ça doit se faire.

M. Jolivet: Bon! L'Ashuapmushuan, vous savez que c'est prévu dans 20 ans peut-être, je ne sais pas, mais pas aujourd'hui.

M. Halley: Bien, nous autres, si ça pouvait être prévu dans cinq ans, on pourra l'avancer, si vous avez besoin de nous autres.

M. Jolivet: C'est terminé?

Le Président (M. Forget): II reste une minute.

M. Jolivet: O.K. Non, c'est parce que, à ce

niveau-là justement, si, en temps de chômage, de crise économique, on pense comme vous pensez, c'est peut-être là que des gens disent: Ils ont perdu leur esprit critique. Dans le fond, si on veut qu'au Québec on ait des petits projets, peut-être que ce serait mieux — prenons la Péribonka qui est déjà utilisée — de l'utiliser au maximum, compte tenu qu'elle a été utilisée, et laisser vierge une, deux ou trois rivières au Québec. L'Ashuapmushuan fait partie de celles que les gens envisagent comme étant possible de conserver à l'état naturel. Est-ce que vous croyez que c'est justement ce que vous me dites qui donne peut-être l'impression à des gens de penser que vous êtes «at large» pour tout harnachement sur toutes les rivières?

M. Halley: Votre impression est peut-être juste jusqu'à un certain niveau, mais peut-être pas autant que vous l'avancez à l'heure actuelle, au niveau de cette situation de crise économique.

M. Jolivet: Vous remarquez bien que j'ai dit que je faisais l'avocat du diable.

M. Halley: D'accord. Non, non, c'est correct, j'ai compris.

Le Président (M. Forget): M. le député de La-violette, je vous remercie.

M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Je dois vous avouer qu'à la lecture seulement de la résolution que nous avions et au dépôt de votre document ce matin, vous remettez en question des grands pans de mur de la politique et de la philosophie du développement régional. Je ne pense pas, personnellement, que ça va être ce matin qu'on va être capables d'avoir tous les tenants et aboutissants, c'est quelque chose qui mérite d'y penser, puis ça va être un pensez-y bien. Parce que chez vous — vous l'avez mentionné d'ailleurs très bien — c'est toute la composante électrique. Ailleurs, ce sera au niveau minier. Ailleurs, ce sera au niveau de la forêt. Alors, il y a toute une problématique. Puis quand on remet ça au niveau d'un gars de région comme moi, au coeur du Québec, ce seront d'autres contextes qui vont être là.

D'une façon un peu plus générale, vous avez touché aussi la petite et la moyenne entreprise, les phénomènes d'exportation et de mondialisation des marchés. Je pense qu'on aurait peut-être aussi intérêt à regarder, au niveau d'une politique gouvernementale à ce moment-là, je pense, qui déborde le cadre de cette commission, de regarder un concept de mise en marché qui se rapprocherait peut-être du concept japonais des sociétés d'import-export qui pourraient permettre aussi à des petites entreprises de région d'avoir, par l'entremise d'agents manufacturiers à travers le monde, des représentants. On peut, à ce moment-là, se déplacer de façon bien ponctuelle et utiliser au maximum les dollars qu'on a.

Ceci étant dit, vous avez entendu comme moi le mémoire avant, lorsqu'on parlait d'hydrogène. Ça, quant à moi, c'est l'avenir. On va sortir du pétrole, on va sortir du gaz. Puis quand on regarde un échéancier de 30 à 40 ans, c'est l'hydrogène. C'est à long terme, je l'admets, mais ne pensez-vous pas, à un moment donné aussi, à travers une réflexion, qu'on a fait très peu? Il va falloir regarder ces grandes industries énergivores parce que, si on veut développer de l'hydrogène, il va falloir faire de l'électrolyse en quelque part.

À l'heure actuelle, quand je regarde le plan de développement d'Hydro-Québec, si ma mémoire est fidèle, il y a encore 150 MW pour attirer de la moyenne entreprise qui serait énergivore. Il pourrait y avoir une politique, c'est-à-dire, au lieu de faire la construction des lignes qui passent sur votre territoire, on va déplacer ces usines-là. Puis ça, ça va être dans des régions comme la vôtre, où est-ce qu'on n'aurait pas à utiliser des kilomètres de lignes, et qui créerait toute une nouvelle dynamique au niveau du développement industriel de vos régions.

M. Halley: Écoutez, si, à un moment donné, vous voulez ramener des entreprises dans nos régions parce qu'on est plus près des ressources énergétiques, on est parfaitement d'accord avec ça, c'est dans ce sens-là que je le comprends. Maintenant, je vous ai dit tout à l'heure, et je le répète encore, les propositions qu'on fait... On connaît l'envergure des propositions qu'on a sur la table à l'heure actuelle, mais on a toujours en arrière de la tête... En fait, dans notre esprit, pour nous autres, à l'heure actuelle, c'est que, de plus en plus, on remet des responsabilités aux régions, on remet des responsabilités au niveau des municipalités. On n'est pas contre.

Je me souviens qu'antérieurement, même si je n'étais pas au niveau municipal, des municipalités cherchaient à avoir plus de responsabilités. Alors, on se dit: Dans le cadre de responsabilités additionnelles, au niveau des régions, pourquoi ne pas leur donner aussi, avec cette responsabilité-là, des ressources financières ou qu'on arrête au niveau... C'est évident, je comprends. Ce n'est pas facile pour les politiciens au niveau, par exemple, du gouvernement comme tel, de dire: Je vais aller donner de mes pouvoirs; alors, qu'est-ce que je vais faire au niveau de Québec? On ne veut pas aller jusque-là, mais c'est ça pareil. Si on étudie tout le problème, toute l'envergure des propositions qui pourraient nous parvenir de toutes les régions périphériques suivant les ressources qu'elles ont, ça pourrait arriver à une diminution de certains pouvoirs centraux. Ça ne sera pas facile. Mais, en tout cas, on pense que c'est à ce prix-là, à un moment donné, qu'il va falloir que les régions se prennent réellement en main et qu'elles se développent.

M. St-Roch: Un bref commentaire, M. le Président. La décentralisation ne me fait pas peur, même si je suis le député, puis je vais aller plus loin que vous.

M. Halley: Oui, allez!

M. St-Roch: Au niveau du développement régional, au lieu d'être allé au niveau des régions, si j'avais eu à décider, ça aurait été au niveau des MRC.

M. Halley: Merci. C'est ce que nous pensons aussi.

Le Président (M. Forget): M. le député de Drummond, merci.

Au nom des membres de la commission, je vous remercie beaucoup de votre participation à cette commission parlementaire.

Nous allons suspendre pour deux petites minutes la commission, et j'inviterais le groupe Cascades à prendre place à la table des témoins.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 12 h 5)

Le Président (M. Forget): Je rappelle le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échanges: les exposés de l'organisme, 20 minutes, la période d'échanges, 40 minutes. Alors, je demanderais au représentant de bien se présenter et de présenter son invité.

Cascades inc.

M. Lemaire (Bernard): Bernard Lemaire, président du conseil de Cascades, et Me Jacques Gauthier, du groupe Cascades. Je suis ici aujourd'hui pour présenter un mémoire. Je pense que je voudrais qu'on puisse le lire. Au début, Me Gauthier va lire le mémoire et, moi, je voudrais faire un exposé sur les problèmes d'un producteur privé d'électricité au Québec. Je pense que je vous ferai l'exposé sur ça après la présentation. Je pense que j'aimerais vous sensibiliser à ce qu'on a à subir, les frustrations et les problèmes qu'un producteur privé peut avoir dans la production d'électricité dans le contexte actuel. Alors, je vous ferai une démonstration, mais je pense que notre mémoire va dire un peu les contradictions qui arrivent aux producteurs privés, et peut-être les modifications que cette commission pourra peut-être apporter pour nous aider. Comme producteurs privés, on n'est pas encore assez découragés pour ne pas continuer. Alors, on est prêts à continuer de l'avant, avec un peu d'aide.

M. Gauthier (Jacques): Alors, Mme la vice-première ministre, Mme la députée, messieurs. En prenant connaissance de la proposition de plan de développement 1993 d'Hydro-Québec, et compte tenu de l'immense intérêt de la société Cascades inc. dans le développement et l'exploitation de sites hydrauliques et thermiques de production d'électricité, il nous a semblé pertinent de commenter la proposition d'Hydro-Québec à la lueur de notre expérience dans ce secteur au cours des dernières années.

Il ressort clairement du plan que la production privée d'électricité au moyen de centrales thermiques par cogénération ou de petites centrales hydroélectriques constitue pour Hydro-Québec un moyen de production accessoire au moyen principal que continue de «prioriser» la société d'État, soit la mise en place de mégaprojets comme Grande-Baleine, Nottaway-Broad-back-Rupert et Sainte-Marguerite. Selon nous, c'est précisément à la base de cette priorité chez Hydro-Québec que prennent naissance les difficultés des producteurs privés.

La réalisation de petites centrales hydroélectriques passe par des moyens de mise en oeuvre totalement différents de ceux visant la réalisation de mégaprojets et suppose une cohérence entre les différentes instances décisionnelles chez Hydro-Québec, impliquées dans la production privée. Malheureusement, cette cohésion, selon nous, n'existe pas, et il en résulte un laxisme profondément nuisible à la réalisation des projets privés.

J'attire votre attention, à la page 63 du plan, où on peut retrouver la citation suivante: «Parmi toutes les options étudiées, la filière hydroélectrique et certains équipements thermiques utilisant du gaz naturel — en particulier les centrales à cycle combiné ou de cogénération — ressortent comme les plus intéressantes. Les centrales hydroélectriques se divisent en trois catégories: les grandes, les moyennes et les petites. Les centrales construites sur les grandes rivières constituent le fondement de la filière principale. [...] Quant aux petites centrales hydroélectriques, nous favorisons les propositions des producteurs privés portant sur des centrales de moins de 25 MW et offrant un prix d'achat comparable au coût des équipements évités dans notre réseau.»

Or, bien que la direction générale d'Hydro-Québec semble accepter le principe de la production privée au Québec, il est clair, selon nous, que celle-ci va totalement à rencontre de la priorité que s'accorde HydroQuébec et qui consiste à produire de l'électricité à partir des grands complexes, ceux énumérés précédemment. Les gestionnaires régionaux d'Hydro-Québec, le personnel affecté à la construction des barrages et des centrales, les techniciens et ingénieurs affectés à l'intégration des réseaux sont tous des acteurs qui perçoivent chaque kilowatt d'électricité provenant de la production privée comme une menace à leur emploi et à leur expansion.

Les nombreuses étapes que doit franchir un promoteur avant de procéder à l'exploitation de ses installations électriques génèrent également d'énormes contraintes. L'octroi d'un site d'exploitation hydroélectrique par le ministère de l'Énergie et des Ressources ou par un propriétaire privé constitue une formalité essentielle pour un producteur privé. Toutefois, il ne s'agit là que de l'étape la plus simple et la moins contraignante pour le promoteur à l'intérieur du processus de développement d'un projet de production privé.

Outre les exigences environnementales exigées par les ministères québécois et fédéral de l'Environnement, qui peuvent occasionner plusieurs mois de délai avant l'émission des permis sollicités, le promoteur devra notamment négocier avec Hydro-Québec un contrat

d'achat d'électricité. De plus, il devra satisfaire aux exigences de divers départements techniques chez Hydro-Québec, qui s'acharneront à contrôler le respect des nombreuses normes d'exploitation utilisées chez HydroQuébec, et qui sont généralement disproportionnées et inapplicables à un petit projet privé. Ces normes varient souvent d'une région à l'autre et relèvent généralement du responsable régional qui supervise son réseau. (12 h 10)

Et que dire du modèle de contrat d'achat d'électricité qu'Hydro-Québec propose à tous ces producteurs privés? On y retrouve notamment des dispositions qui fixent de nombreuses pénalités pouvant affecter le producteur ainsi que divers frais annuels d'exploitation pour répondre aux normes d'Hydro-Québec. Le contrat oblige également le producteur à obtenir une multitude d'autorisations, tant au plan de la conception et de la construction que de l'exploitation des installations. Bien que l'on invite ces derniers à en négocier le contenu, la société d'État refuse de créer des cas d'exception. Or, tous les contrats doivent se ressembler fidèlement; peu de marge de manoeuvre n'est tolérée et, en définitive, il n'y a guère de négociations. Le contrat devient donc une entente à laquelle le promoteur doit adhérer et, à défaut, il reçoit une fin de non-recevoir à ses revendications. À cet égard, la suprématie décisionnelle dont jouit HydroQuébec sur le contenu du contrat lui permet d'imposer aux producteurs des obligations et des responsabilités souvent irréalistes et contradictoires avec les normes qu'elle s'impose à elle-même.

À titre d'exemple, le producteur s'engage auprès d'Hydro-Québec à produire annuellement un volume de kilowattheures minimal dont il sera garant à même des dépôts sous forme de cautionnement ou de lettres de crédits. S'il fait défaut de respecter cet engagement, il devient en défaut auprès d'Hydro-Québec qui dispose alors d'un nombre considérable de recours contre le producteur. Ce dernier ne peut invoquer que quelques cas de force majeure énumérés limitativement au contrat. Il ne peut, en outre, invoquer le phénomène d'hydraulicité pour se dégager de son obligation de livrer l'électricité auprès d'Hydro-Québec. C'est donc dire qu'il se porte garant de phénomènes naturels ayant parfois des influences sur les débits d'eau requis pour fournir l'énergie prévue au contrat.

Or, à la page 11 du plan, on peut y lire ce qui suit: «Enfin, pour pallier le principal risque associé à nos activités, soit la fluctuation de l'hydraulicité [...] nous proposons la création d'un fonds de stabilisation. Les revenus découlant des ventes d'énergie excédentaire durant les années de forte hydraulicité seraient utilisés pour éponger les charges spéciales des mauvaises années.» Alors, bien que la société d'État reconnaisse le problème pour elle-même, elle le nie pour le producteur privé.

Quant au prix d'achat d'électricité, Hydro-Québec impose au producteur privé une augmentation annuelle équivalente à l'indice des prix à la consommation, mais qui ne pourra jamais excéder 6 % du prix de base et qui ne sera jamais inférieure à 3 %. Les producteurs s'enga- gent ainsi pour une période de 15 à 20 ans, à leurs risques et périls.

Pourtant, à la page 10 du plan, on retrouve la déclaration suivante: «Pour la période 1993-2000, nous entendons aligner l'augmentation de nos tarifs sur l'inflation. Bien que la hausse puisse dépasser le taux de l'inflation certaines années, la progression moyenne des tarifs d'électricité n'exéderait pas la progression de l'inflation pour l'ensemble de la période.»

Les illustrations qui précèdent ne sont que quelques exemples de la contradiction qui prévaut à l'intérieur des politiques d'Hydro-Québec. Bien que nous puissions en énumérer plusieurs autres, nous sommes d'avis que ces contradictions ne peuvent persister indéfiniment puisqu'elles imposent aux producteurs des risques incalculables qui les mettent en péril, en plus de décourager toute une génération d'entreprises susceptibles de créer pour le futur un noyau d'expertise en production privée d'électricité.

Dans un contexte aussi rigoureux, le financement de projets de production privée devient très difficile, voire même impossible. Peu de producteurs au Québec ont les moyens financiers pour payer comptables, ingénieurs, avocats et spécialistes de toutes formations nécessaires à l'analyse et à l'élaboration d'un projet de production privée dans la forme qu'exige Hydro-Québec.

Or, avant même de pouvoir discuter avec une institution financière, le promoteur devra avoir reçu l'aval de la société d'État, à la condition, bien sûr, d'avoir respecté toutes ses exigences. Il est donc fréquent que le producteur n'atteigne pas cette étape ou que l'institution financière sollicitée décline l'invitation en raison des nombreuses contraintes légales, techniques, écologiques, financières qu'impose Hydro-Québec. D'ailleurs, plusieurs projets ont été jusqu'à maintenant octroyés à un nouveau promoteur, puisque celui à qui le site avait été alloué initialement n'a pu réaliser son projet. Si Hydro-Québec veut réellement encourager la formation d'un réseau de producteurs privés au Québec, elle doit lui accorder des chances de se développer; elle doit, selon nous, lui permettre de bénéficier des mêmes opportunités qui ont permis à la société d'État de progresser au cours des 30 dernières années.

À cet effet, Hydro-Québec doit cesser d'imposer son monopole à l'intérieur de toutes les décisions qui mènent à l'élaboration d'un projet de production privée. Elle doit également accepter les recommandations des producteurs privés, assouplir les rigueurs techniques habituellement rattachées à la réalisation de mégaprojets.

Elle doit notamment amender les lois pertinentes afin que l'électricité produite privément puisse être vendue directement à l'entreprise privée à qui elle pourrait bénéficier. Cette mesure aurait pour effet d'équilibrer le prix de l'électricité, qui devrait normalement découler de l'offre et de la demande.

À ce stade-ci de la réflexion d'Hydro-Québec sur la production privée au Québec, nous souhaitons que la société d'État accorde davantage d'importance à la fourniture d'électricité produite privément au Québec.

Nous recommandons qu'Hydro-Québec revoie en profondeur sa politique de développement de la production privée en s'inspirant davantage de l'expertise du secteur privé et des recommandations qu'il pourrait formuler. Nous souhaitons l'harmonisation et l'assouplissement des normes de conception et d'exploitation des sites de production d'électricité imposées par Hydro-Québec.

Le Présidait (M. Forget): Je vous remercie.

M. Lemaire: Mme la ministre et MM. les députés, comme vous le savez, Cascades est le seul producteur d'électricité à base de gaz de cogénération. On a un plan qui opère depuis trois ans. On en a mis sur papier plusieurs, mais aucun ne s'est réalisé. On a réalisé le plan peut-être parce qu'on a pris de vitesse Hydro-Québec qui ne s'était pas préparée à un contrat de production d'électricité. On a construit. Ils nous ont soumis, après, entre 10 et 15 contrats pour la fourniture d'électricité. Les avocats, les techniciens révisaient, et révisaient, et révisaient pour en arriver aujourd'hui, après trois ans et un peu plus de production, à ne pas avoir de contrat avec Hydro-Québec, et à produire sans contrat, à produire sans financement et à produire sans approvisionnement de gaz. Cascades est l'otage d'Hydro-Qué-bec dans le moment, dans sa cogénération.

Hydro-Québec dit: Moi, pour que je t'accorde un contrat de cogénération, tu dois me fournir un contrat de gaz, ferme, de 15 ans. Tu veux avoir un contrat de 15 ans, tu dois me fournir un contrat ferme de 15 ans. Hydro-Québec me met immédiatement otage des fournisseurs de gaz qui savent bien que, moi, avec une centrale, je dois, pour avoir un contrat d'Hydro, avoir un contrat de gaz. Si je signe un contrat de gaz à ce moment-ci avec les fournisseurs de gaz qui, pour 15 ans, voient des choses mirobolantes pour eux dans le gaz et veulent me charger un prix où l'installation sera en faillite, parce que les coûts du gaz... Comme je ne peux pas avoir de contrat d'Hydro qui ne veut pas me donner de contrat parce que je n'ai pas de contrat de gaz, je ne peux pas me financer. Alors, vous pouvez voir la frustration qu'on a quand Hydro-Québec essaie de ne pas laisser les forces économiques aller seules. Les forces économiques: Hydro-Québec achète mon électricité; moi, je veux négocier mon gaz. Si je veux négocier à un an parce que le gaz «spot», dans le moment, est très bon marché, je peux acheter du gaz «spot», mais comme je ne peux pas faire, si je veux financer... Parce qu'Hydro me dit: Je ne te donnerai pas de contrat d'électricité, comme tu n'as pas de gaz. Alors, voyez-vous, on tourne en rond. On tourne en rond, parce qu'on ne laisse pas faire les forces économiques. Pourquoi Hydro demande un contrat à long terme de fourniture de gaz? Pour s'assurer que nous allons fournir de l'électricité: 30 MW! 30 MW d'électricité dans un réseau de 40 000 MW.

On a des entreprises qui ferment à droite et à gauche, qui font ces 30 MW là peut-être une fois par mois, à tous les mois, de ce temps-ci. Alors, quelle est l'influence de 30 MW sur cette obligation? On nous oblige en disant: Aïe! nous voulons signer un contrat avec toi; nous voulons être certains que tu vas nous fournir l'électricité pour laquelle tu as signé un contrat. Et, comme on l'a dit dans notre mémoire, on nous oblige à fournir tant de kilowatts par année, en sûreté, dans la période d'hiver, où, eux, dans le mémoire, ne veulent pas s'engager envers le public à être capables de fournir ça à des bons coûts. (12 h 20)

Alors, vous voyez l'attitude d'Hydro qui se mêle et qui essaie par tous les moyens de nous gérer, de gérer notre manière d'entreprise privée, comment elle doit agir. On nous demande de voir le financement. Ce sont des experts du financement, à Hydro, peut-être, mais dans des mégaprojets et non dans des petites centrales où on peut faire jouer le court terme avec le long terme, et tout. Alors, on nous demande d'approuver le financement du projet. alors, c'est tout ça qui fait des frustrations et qui fait que, des projets, il y en a un seul au québec, de cogénération, c'est celui de cascades. c'est un projet qui est l'otage d'hydro-québec parce que, demain matin, elle peut me dire: tu n'as pas de contrat, je ne prends plus ton électricité. peut-être que les forces politiques feront qu'elle ne fera peut-être pas ça, mais, légalement, elle serait en droit de ne pas acheter notre électricité dans le moment. elle serait en droit de nous dire: vous n'avez pas de contrat de gaz, je n'achète pas votre électricité à long terme. si cascades, avec son partenaire, n'avait pas pu financer le projet à 100 %, bien, on n'aurait pas pu faire ce projet-là. alors, on l'a fait. et pourquoi il n'y en aura peut-être pas d'autres? pourquoi c'est très difficile d'en faire? ce sont les exigences d'hydro-québec.

Une autre fustration qu'on a subie dans la cogénération: on avait construit une centrale de cogénération de 16 MW; on voulait l'augmenter à 30 MW. On a eu affaire au ministère de l'Environnement. Comme on ajoutait plus de 10 MW, il fallait passer par une étude d'impact. Comme vous le savez, une production de plus de 10 MW: étude d'impact. On augmentait de 15 MW, on voulait nous faire faire une étude d'impact. On prenait des turbines qui n'étaient pas efficaces et on installait des turbines neuves. Les turbines neuves prenaient moins de gaz, utilisaient moins de gaz pour produire 15 MW d'électricité de plus. Alors, les émissions atmosphériques n'avaient pas augmenté du tout — pas du tout — mais on nous demandait une étude d'impact quand même, parce que la loi étant faite comme elle est faite, augmentation de 10 MW: étude d'impact. Alors, avec le ministre Paradis, on a eu des rencontres. On a dit: M. le ministre de l'Environnement, on pollue moins l'air. La seule chose que l'on crée de plus, ce sont des mégawatts d'électricité qui passent par les mêmes fils installés, sans aucun changement physique, électrique. S'il y a plus de mégawatts qui passent dans les fils, est-ce qu'on augmente le danger de pollution? Alors, parce qu'on mettait des outils efficaces, on ne pouvait pas. Alors, c'est pour cette raison qu'on a eu des frustrations dans notre cogénération.

Hydraulicité. Nous sommes producteurs d'électricité à base d'hydraulicité à East Angus. Nous avons mis en marche il y a deux mois une petite centrale de 2 MW. Nous envisageons de mettre en marche, sur la rivière du Cochon, deux autres centrales — nous avons pris des droits — et sur la rivière Jacques-Cartier aussi, et quelques autres endroits. Cascades énergie veut devenir un producteur en hydraulicité. Mais, encore une fois, on se heurte à Hydro-Québec dans un autre domaine. Si vous avez une petite centrale de 1 MW ou 2 MW, vous savez que ça peut produire entre 400 000 $ et 700 000 $ d'électricité par année. C'est très peu. Mais quand on va voir les gens d'Hydro-Québec, il semble que, pour eux, ces fameux 1 MW ou 2 MW peuvent faire que la province dé Québec sera dans un black-out parce qu'on produit 1 MW, 2 MW. On nous oblige à avoir des protections. Nous voulons ajouter au réseau, à Forestville, 1 MW. Nous allons le faire. On exige que le total de nos coûts de protection soient de 500 000 $; 500 000 $ pour une production de 1 MW!

Alors, c'est pour ça que, dans notre mémoire, on dit que c'est disproportionné par rapport à la capacité de production de ces petites centrales là. Dans la cogénéra-tion, quand on parle de 30, 50, 75 MW, si ça change, s'il y a un arrêt, ça peut causer quelques problèmes. Mais quand on parle de 1 MW, 2 MW et 5 MW dans le réseau d'Hydro-Québec... Mais on nous oblige à cette fameuse protection qui est à l'épreuve de tout et on ne prend aucun risque. Alors, c'est pour nous très difficile de...

Le Président (M. Forget): Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Lemaire: Pardon?

Le Président (M. Forget): Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Lemaire: Oui.

Le Président (M. Forget): Le temps est écoulé.

M. Lemaire: Alors, je pense que ce sont les frustrations qu'on a.

Je voudrais ajouter un point aussi, c'est que, comme je suis de la région de Drummondville, il y a des barrages qui sont à Drummondville, M. le député, qui devaient être privatisés; peut-être qu'Hydro-Québec voulait remettre ces barrages-là. Je voudrais, madame, qu'on voie la production qui a été faite dans ces barrages-là dans les 5 ou 10 dernières années à Drummondville, dans les deux barrages à Drummondville. Quels sont les coûts des études qu'on a faites pour remettre ces barrages-là en production, plus modernes? Quelle sera la rentabilité de ces barrages-là dans le futur? Hydro-Québec a décidé que ce serait elle qui les ferait maintenant, et non de les remettre à l'entreprise privée. Alors, je pense que c'est un économique... On verra où Hydro-Québec... Les entreprises privées seraient beau- coup plus efficaces en prenant les sites, les petits sites d'Hydro-Québec, et en les rendant privés. Alors, c'est un peu ce que je voulais dire dans ce mémoire-là, et la frustration des entrepreneurs privés, les problèmes des producteurs privés d'électricité.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup. Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: M. Lemaire, M. Gauthier, je vous remercie d'être venus nous rencontrer et de nous faire part de vos frustrations. On essaie de vous comprendre, je pense, tant vous que les petits producteurs de petites centrales hydroélectriques aussi. Il n'y a pas que la cogénération où il y a certaines frustrations. Par contre, les petites centrales de 25 MW et moins nous demandent d'augmenter à 100 MW. Alors, peut-être que la cogénération a des débuts plus lents, et plus difficiles, et plus pénibles. Quand vous parlez de 40 MW, moi, je le mettrais sur 760, parce que, en ce moment, la cogénération, Hydro-Québec accepte d'en faire pour 760 MW. J'aimerais mieux ça que 40 MW; je pense qu'on va rester dans les proportions de la cogénération.

Mais est-ce que vous trouvez qu'il serait sage, quand même — je n'essaie pas de défendre Hydro-Québec — pour Hydro-Québec d'acheter l'électricité d'un fournisseur sans s'assurer qu'il va être en mesure de produire, de livrer tout au cours de la période de son contrat? Et, malgré l'absence de contrat avec HydroQuébec, vous vendez — ce que j'ai compris — quand même votre électricité à Hydro-Québec?

M. Lemaire: Oui. On l'accepte. On me paie.

Mme Bacon: Sans contrat?

M. Lemaire: Sans contrat.

M. Gauthier: Ça fait plus de trois ans.

Mme Bacon: Mais est-ce que vous acceptez quand même, M. Lemaire, qu'il faut s'assurer que les gens vont être en mesure de produire? Parce que vous disiez tantôt: Ils veulent qu'on s'assure, pendant une période de 15 ans, qu'on va avoir le gaz nécessaire pour produire.

M. Lemaire: Mais, madame, le risque...

Mme Bacon: Vous trouvez que, 15 ans, c'est trop long?

M. Lemaire: Les 760 MW que vous dites, ça représente 1,5 % de toute la production d'Hydro-Québec. Alors, est-ce que le risque est si important pour Hydro-Québec qu'elle fasse des exigences semblables? Est-ce que tout le monde, ces 760 MW là vont tomber en même temps? Je ne crois pas. Et ça représente 1,5 % de toute la production qu'Hydro-Québec fait. Alors, vous voyez l'impact. Les mesures comparées à l'impact

que ça pourrait avoir qu'un petit 1 MW soit... Je pense que si vous me disiez dans des régions bien définies, peut-être que ça pourrait avoir un impact pour HydroQuébec; une centrale importante dans une région éloignée, ça pourrait avoir une influence. Mais quand on est au coeur, comme nous, au coeur du Québec, et tout, quelle est l'influence d'un petit producteur qui s'arrêterait pour un manque, je ne sais pas, un problème technique? La rivière Saint-François... On a un été très sec, on ne produit pas. On nous demande de garantir la production, ce qu'eux ne s'engagent pas à faire, et ils ont un parc de centrales énorme que, nous, on n'a pas; on est dans une région bien définie.

Alors, je ne sais pas si ces 760 MW doivent avoir toutes ces exigences, et surtout sur Fhydraulicité. Vous savez que vous dites 25 MW, mais il n'y en a pratiquement pas à 25 MW; c'est tous des plus petits que ça. C'est encore plus petit. Hydraulicité. C'est que ça fait un impact économique dans les régions, l'investissement dans les régions, un peu partout à travers la province de Québec. Ce n'est pas centralisé. Alors, je pense qu'on pourrait être beaucoup moins sévère sur l'hydraulicité. Quand on parle des projets de cogénération de 140 MW ou 200 MW, je comprends un peu que ça peut avoir une certaine influence. Dans l'hydraulicité, ils ont mis 25 MW, mais la plupart sont de 5 MW. Alors, je ne pense pas que ça ait une influence qu'on devrait avoir les mêmes exigences des producteurs privés et développer l'expertise. On verra un peu plus tard.

Mme Bacon: C'est parce que, quand on parle en termes de cogénération, Hydro-Québec va utiliser ça comme possibilité de réserve utile de pointe. Et je pense qu'à ce moment-là c'est peut-être pour ça qu'ils sont plus exigeants. Je ne dis pas que je suis d'accord avec tout ce qu'ils vous demandent, mais c'est peut-être que les exigences sont plus sérieuses par rapport à la pointe dont ils ont besoin, et ils vont se servir de la cogénération pour leur pointe. (12 h 30)

Vous mentionnez à plusieurs reprises dans votre mémoire que les normes d'exploitation d'Hydro-Québec sont disproportionnées et inapplicables à des petits projets. Vous avez donné des exemples qui vous semblent excessifs, mais avez-vous des solutions plus simples qui pourraient garantir la qualité des services à l'ensemble des utilisateurs d'électricité?

M. Lemaire: On a de l'expérience. C'est qu'on est en Europe, comme vous le savez, et on en produit, de l'électricité, en Europe. Et on voit que c'est beaucoup moins compliqué. J'espère qu'à notre prochaine visite les gens d'Hydro-Québec vont rencontrer des gens qui sont dans la région où on opère, en Savoie, et où il y a beaucoup de petits barrages. À cause des montagnes, on fait des petits barrages, les producteurs privés. On est loin de demander les protections qu'on nous demande ici pour l'exploitation de ces choses-là. Alors, on veut collaborer avec eux pour leur montrer.

On pense que c'est complètement exagéré de demander ces protections-là. On est en production de cogénération dans nos usines en Europe, cogénération, hydraulicité, gaz, biomasse. On a tout. On fabrique. Quand on n'opère pas, on livre à EDF et on n'a pas ces contraintes, cette peur, cette phobie de faire tomber le réseau dans ces périodes-là. Alors, je pense qu'on devrait être moins exigeant. Ce n'est pas facile pour un petit producteur privé d'aller dire aux gens d'Hydro-Québec: Voyons donc! on ne peut pas avoir cette influence-là sur votre réseau. On nous dit oui, et on nous sort des grandes théories, mais je sais que ça ne se fait pas à cette échelle-là ailleurs. Mais ici...

Mme Bacon: Est-ce qu'ils vous parlent de réserve de pointe, M. Lemaire, quand ils...

M. Lemaire: Non. Mme Bacon: Non.

M. Lemaire: Les réserves de pointe, je pense que c'est important quand on parle de produire en période de pointe. C'est un problème d'Hydro ici, peut-être parce qu'on ne donne pas assez d'avantages aux industriels. C'est un des points que je voulais mentionner tout à l'heure, les avantages aux industriels. Je vous l'ai appris, à la dernière commission parlementaire, quand j'ai dit: Donnez à l'entreprise privée, et vous allez voir ce qu'on va pouvoir faire pour Hydro-Québec. Vous avez vu le programme qui s'est fait dans les pâtes et papiers. Il a été souscrit à plus que ce dont Hydro avait besoin pour certaines périodes.

Alors, il y a beaucoup d'autres choses qui peuvent être faites de cette manière-là pour éviter les pointes. Mais certainement qu'Hydro veut la garantie d'une certaine hydraulicité en période de pointe. Mais, encore une fois, avec l'hydraulicité maximum qu'on nous a dit qu'on pourrait avoir, c'est près de 400 MW qui pourraient être produits. Alors, l'influence est tellement peu importante... Ils n'arrêteront pas tous en même temps, parce que c'est réparti sur un parc énorme. Il va y en avoir 40, 50, alors on va peut-être en avoir une, mais pourquoi pénaliser parce qu'il y a une période et quelque chose? On exagère cette chose-là.

Dans le contexte, je pense, on ne laisse pas assez à l'entreprise privée. Si vous dites: À 100 MW, bien, là, on pourra peut-être être un peu plus exigeant, car ça peut affecter. Mais pour aider au développement des petites, on ne doit pas être si exigeant de ces petits producteurs là. On traite pareil une cogénération à Montréal-Est, de 200 MW, qu'un petit producteur de 0,5 MW ou de 1 MW. C'est traité de la même manière. On les traite de la même manière: sur les influences, sur la garantie, et c'est tout. On leur demande les mêmes choses, et ça n'a pas d'influence sur leur réseau, cette chose-là. Alors, c'est pour ça que je dis qu'il y a de l'exagération.

M. Gauthier: Si vous me permettez, je voudrais...

Mme Bacon: Oui, allez, M. Gauthier.

M. Gauthier: ...ajouter un élément. Vous avez demandé s'il y avait des solutions plus simples que ce qu'Hydro exige présentement. À titre d'exemple, lorsque l'on commence à négocier le contrat d'achat d'électricité, il y a des études de faisabilité technique que le promoteur, bien entendu, a réalisées avant de se lancer dans une affaire comme ça. Mais parce que c'est prévu dans la bible d'Hydro-Québec que la même étude de faisabilité technique doit être refaite par Hydro-Québec, par une firme d'ingénierie de son choix et aux frais du producteur, parce que c'est écrit, on doit la refaire, que ce soit 1 MW, 2 MW ou 100 MW.

La même chose pour les études d'intégration au réseau. Lorsqu'on envisage de mettre en exploitation une centrale de 2 MW d'électricité, on doit produire un rapport d'intégration. Quel sera l'impact de l'intégration de cette centrale-là dans le réseau? Alors, les études d'ingénierie qui doivent être complétées à la base de ces études-là sont des études aussi complexes et aussi complètes pour une centrale de 1 MW ou 2 MW que pour une centrale de 50 MW.

Alors, c'est vraiment dans la philosophie — c'est pour ça qu'on faisait référence à l'attitude — de base que le problème naît. C'est qu'on ne «ségrègue» pas la différence entre un projet qui a vraiment un impact majeur dans l'intégration du réseau d'avec un projet de moindre importance comme ceux dans lesquels la plupart des producteurs se lancent. Et jamais, soit dit en passant, on ne nous a indiqué que l'électricité produite éventuellement par les producteurs privés serait une électricité destinée à la demande de pointe. Jamais. Au contraire, on nous fait référence toujours à des plans dans lesquels la production d'Hydro-Québec dans une telle région représente un pourcentage x, et l'apport du producteur privé va le combler. Alors, c'est pour ça qu'on ne fait pas de différence entre les deux.

Mme Bacon: Quand vous faites la comparaison, M. Lemaire, avec vos contrats que vous signez en Europe, par exemple, est-ce qu'on exige de vous la même durée de contrat qu'on exige ici? Moi, j'aimerais que vous m'en disiez davantage, si on peut faire les comparaisons.

M. Lemaire: Non.

Mme Bacon: Parce que vous me semblez dire que c'est beaucoup plus facile là-bas de produire qu'ici.

M. Lemaire: Non, on n'exige pas... Dans nos usines, ça a été intégré avec les usines, alors c'est beaucoup plus facile. Ce n'est pas des productions... Ce qui arrive, c'est qu'on est payé au coût évité. Alors, c'est une chose séparée. On s'était intégré à même l'usine; le coût de vente est le même que le coût qu'on paye. Alors, c'est beaucoup plus facile. On n'a pas de contrat vraiment si l'opération est intégrée. Parfois, c'est nous qui utilisons l'électricité de notre production; parfois, bien, si on en a en surplus, on la leur revend. Mais ils acceptent de racheter les surplus d'électricité sans des contraintes de l'ordre et des exigences de longueur de 15 ans qu'on peut avoir parce que, parfois, c'est la période de remboursement des prêts.

Mais c'est pour ça que je disais: Laissons les forces économiques du marché faire les choses. Hydro nous dit: Tu dois avoir un contrat, un financement de 15 ans ou tu dois avoir un contrat de base de 15 ans. Le financier, si je suis capable de négocier avec mon financier, il va se contenter d'un contrat de cinq ans, renouvelable après cinq ans. C'est moi qui vais me financer, c'est moi qui ai à me financer, et non Hydro-Québec qui doit me dire comment je dois me financer et comment je dois faire la chose. Moi, je veux continuer à produire de l'électricité, certainement pour 15 ans, mais dans les conditions les plus favorables économiquement pour moi. Pourquoi? Dans le moment, si je signais aujourd'hui, avec ma cogénération, un contrat de gaz, nous serions en perte pour les 15 prochaines années. Avoir un financement de 15 ans dans le moment, si je l'avais fait il y a trois ans, je n'aurais pas de rentabilité, parce que je me serais financé, environ pour 15 ans, à 13 %. Aujourd'hui, parce que j'attends, je vais probablement avoir un financement aux alentours de 8 %.

Alors, voyez-vous, si on laisse faire... Si Hydro avait exigé que j'aie mon contrat, elle m'aurait forcé à me financer immédiatement et à signer mon contrat de gaz immédiatement. Mais, si je n'avais pas eu les moyens financiers d'attendre, on aurait une cogénération qui ne serait et qui n'aurait jamais été rentable. On aurait été en perte le reste de nos jours, et ça aurait été... Tandis que, là, on va probablement avoir un projet... Dans le moment, notre projet est rentable, même très rentable parce qu'on a pour nous le gaz «spot» qui n'est pas cher, et on a des taux d'intérêt flottants, qu'on pourrait financer. Alors, on a un projet très rentable parce qu'on laisse faire les forces économiques seules. Voyez-vous, c'est ça que je dis: Laissons faire les forces économiques toutes seules et, nous, industriels, c'est à nous de régler nos problèmes.

Mme Bacon: Une dernière, une petite rapide. Est-ce que vous préféreriez des conventions d'interconnexion, par exemple, au lieu d'un contrat à long terme avec Hydro-Québec?

M. Lemaire: Le contrat à long terme, certainement que le financier l'aime, mais on pourrait dire que les taux fixés pourraient être fixés pour une période de cinq ans, et dire: Bien, on va l'acheter. Je pense qu'Hy-dro-Québec, au commencement, avait un contrat de ce type-là. Elle s'engageait à l'acheter. Mais, maintenant, c'est passé dans les mains de plusieurs avocats et de plusieurs techniciens. Alors, vous savez, les avocats, ce que ça peut faire...

Mme Bacon: Ça aurait été mieux? Ha, ha, ha! (12 h 40)

M. Lemaire: Ça peut dire: Bien, certain que tu ne

seras pas seul. Parce que le technicien dit: J'ai besoin de ceci. Bien, là, on va te faire un autre règlement supplémentaire. Alors, le contrat épaissit, épaissit, parce que le technicien et l'avocat qui travaillent ensemble, ça vous fait tout un contrat! Parce que, lui... Alors, on se protège l'un de l'autre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Forget): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Là, je comprends mieux les propos qu'Hydro-Québec avait tenus en nous disant qu'à long terme la cogénération ne serait pas si rentable que ça au Québec, puis qu'il y avait une différence avec celle aux États-Unis. Vous avez probablement des contacts ou des gens qui travaillent à ce niveau-là. Et on nous disait que l'entreprise qui fabriquait la cogénération était à la merci, d'une certaine façon, des prix d'achat de gaz. Je ne parlerai pas de biomasse, parce que ça peut être une possibilité. Et, en arrière, celui qui vend la vapeur est aussi à la merci de celui qui va la vendre. Alors, à ce moment-là, souvent, dans des entreprises comme les pâtes et papiers, même si l'entreprise de pâtes est participante à l'entreprise qui fait la cogénération, elle n'est pas nécessairement la seule.

Et, dans ce contexte-là, Hydro-Québec nous disait que ce n'était pas si rentable que ça. Alors, ce qui me reste, avec ce que vous dites aujourd'hui, c'est la réflexion suivante: Est-ce qu'Hydro-Québec veut avoir la cogénération? Est-ce qu'Hydro-Québec veut avoir des petits barrages? Est-ce que ça la dérange, autrement dit, d'avoir ça, avec les exigences qu'elle vous pose?

M. Lemaire: Je pense que, oui, ça les dérange. C'est l'incursion des privés dans leur domaine qui était une chasse gardée. Je comprends. Naturellement, je les comprends. Mais je pense qu'économiquement, pour le Québec, pour être compétitifs, il faut toujours laisser des forces, d'autres forces. Les monopoles, et tout, font qu'on n'arrive pas à être compétitifs. La productivité diminue d'année en année quand on n'a pas de compétition. Alors, certainement que ce n'est pas vu d'un bon oeil.

Pour ce qui est de la cogénération au gaz comparée à l'hydraulicité, Hydro-Québec a certainement un peu raison. Je vais toujours favoriser l'hydraulicité par rapport au gaz, à la cogénération. Mais c'est peut-être un avantage dans les pâtes et papiers, la cogénération, quand on peut utiliser la vapeur. d'une manière ou d'une autre, vous savez qu'on utilisait à peu près des quantités de gaz pareilles sans cogénérer. alors, c'est un avantage dans les usines de pâtes et papiers, parce qu'on est un utilisateur de vapeur et qu'on peut augmenter la rentabilité à tout près de 80 %. alors, dans les pâtes et papiers, la cogénération, quand on peut utiliser la vapeur, je pense que c'est un avantage qu'on devrait utiliser. mais fabriquer de l'élec- tricité par cogénération avec condensât, je ne pense pas. Je pense que, notre hydraulicité, on doit la pousser au maximum. Ça, c'est mon point de vue.

M. Jolivet: Donc, ça veut dire que vous n'êtes pas, à moins que je me trompe, de ceux qui pensent qu'on doit avoir la cogénération tous azimuts. Toute possibilité, on doit tout apprendre...

M. Lemaire: De la cogénération? M. Jolivet: Oui.

M. Lemaire: Non, moi, je ne suis pas de ceux-là. Je préférerais voir l'hydraulicité se développer plus que la cogénération. Moi, c'est ma vision. La cogénération, c'est utile à certains endroits où on peut utiliser le maximum de l'énergie, où on brûle quand même... Quand on brûle notre vapeur, à moins de la faire électriquement... On a besoin de vapeur dans une usine de pâtes et papiers. Alors, on peut combiner les deux. Et je pense que, dans ces points précis, ça peut être un avantage.

M. Jolivet: Avec les États-Unis, avez-vous des discussions, des rencontres avec des gens qui parlent, justement, de la cogénération américaine par rapport à celle au Québec? Est-ce qu'il y a une différence dans votre esprit?

M. Lemaire: Oui, oui. Je suis allé voir. Je suis allé en voir justement il y a deux semaines. Je suis allé en Californie voir un site qui est en vente, et tout ça. Oui, j'ai pu voir ce que c'est. Mais l'électricité était vendue à 0,11 $. Alors, comparez à ici. On a besoin, en Californie... C'est tout complètement contraire à nous. Ils utilisent... Cette usine-là opérait pratiquement seulement l'été, parce que c'est pour l'air climatisé, alors que le gaz peut être meilleur marché, puis elle vendait l'électricité à 0,11 $. Alors, on n'est pas du tout dans un contexte pareil à ici où on veut préserver notre avantage de l'électricité qui est bon marché. Je pense que c'est ça qu'il faut regarder. Et, pour faire ça, peut-être que les producteurs privés peuvent aider à garder ça.

Vous avez eu le mémoire de l'industrie des pâtes et papiers, où on se plaint qu'on a perdu cet avantage-là. Peut-être qu'en faisant du privé un peu, on va pouvoir garder cet avantage qu'on avait de production de l'électricité à bon marché au Québec. Il ne faudrait pas le perdre. Et je pense que c'est un peu en mettant une contrepartie privée qu'on va réussir à garder cet avantage-là qui a diminué de beaucoup dans les 10 dernières années.

M. Gauthier: Je voudrais simplement préciser qu'il y a une firme d'ingénierie actuellement, américaine, qui a été sélectionnée par un prêteur avec lequel on travaille actuellement, qui est venue faire une vérification des installations qu'on voulait financer, et on m'a dit ceci: À 0,05 $ le kilowattheure, avec un prix de gaz de 1,50 $ le gigajoule au Québec, il n'y aura jamais de

cogénération. Et le type était renversé de voir les exigences qu'Hydro-Québec nous imposait, et sa réaction a été de dire: Si vous passez à travers ça, vous êtes à peu près le seul projet qui va se réaliser.

Imaginez, le gigajoule, actuellement, aux États-Unis, est à 1 $, et l'électricité est à 0,10 $. Nous autres, c'est à 1,50 $ ou 2 $ actuellement, contre 0,05 $ le kilowattheure.

M. Lemaire: L'article 5... Moi, je dis, en tout cas, de la cogénération, à l'article 5, ça peut se faire comme on a fait à Kingsey, où la vapeur est tout utilisée dans l'usine immédiatement, et non de condensât. On ne condense pas du tout. Autrement, il y a beaucoup de projets d'annoncés, mais, moi, j'ai de la misère à y croire.

M. Jolivet: Donc, pour répondre, peut-être, à l'objection qu'Hydro-Québec peut amener, à l'effet de dire: Si vous avez x kWh de production par rapport à ce qui est prévisible... Ce que l'on sent, en tout cas... On a même remarqué, je pense, que Kruger a laissé tomber à cause de l'«environnemental» de son projet. Ça veut dire qu'ils n'atteindront jamais l'objectif de quelque 700 kWh demandés.

M. Lemaire: À moins qu'on ait un revirement. Vous savez qu'on creuse des puits au Québec. Intermont est après... Bow Valley en fait dans le moment et, s'il y a une découverte de gaz, on aura du gaz très bon marché; peut-être que ça pourrait avoir lieu. Mais, au prix du gaz dans le moment, c'est impossible. C'est absolument impossible au prix... Négocier un contrat de 15 ans, dans le moment, c'est absolument impossible de faire quelque chose au Québec.

M. Jolivet: Ça, là, c'est le contexte. Là, vous avez un contexte d'un contrat demandé par Hydro-Québec sur une longue durée, dans un contexte, comme vous dites, actuellement, où, là, je peux en vendre sans avoir aucun contrat. Donc, je peux suivre les forces du marché. Vous dites que ce serait possible, à ce moment-là.

M. Lemaire: Bien dans le moment, parce qu'on en a un. Mais je vous dis franchement, c'est une aventure qu'on a faite. On a fait une aventure qui va réussir. On a diminué beaucoup ies coûts de construction. On est efficace. C'est fini. C'est rentable dans le moment, à la condition qu'on paie le gaz environ 1,40 $.

M. Jolivet: Le contrat qui vient d'être signé avec Tembec, avec d'autres, avec de la biomasse, est-ce que ce serait une des solutions, dans la cogénération, à ce moment-là?

M. Lemaire: La biomasse, ça peut être rentable, mais le problème de la biomasse, c'est le financement. Comment on peut garantir qu'on aura des écorces pour 15 ans? C'est le problème de faire un projet biomasse.

M. Jolivet: C'est la même sorte de contrat dans l'un comme dans l'autre, à ce moment-là? C'est ça?

M. Gauthier: C'est la même chose. C'est la même structure. Dans le cas de biomasse, Hydro-Québec nous dit: Amenez-nous un contrat de fourniture d'écorces ou de débris forestiers pour une durée de 15 ans ferme. Imaginez! il n'y a pas une espèce d'entreprise qui peut garantir ça.

M. Lemaire: Les scieries ferment, les usines de papier produisent moins d'écorce.

M. Gauthier: C'est ça.

M. Lemaire: Est-ce qu'on peut avoir 15 ans? Quelqu'un qui peut penser sur 15 ans, vous savez, ce n'est pas facile. C'est une intégration qui doit se faire avec une usine, et c'est possible d'en faire, quand même.

M. Jolivet: Mais, pour revenir à une des parties de votre réponse, tout à l'heure, au niveau de l'Association des industries forestières, qui représente l'ensemble des industriels, eux autres disaient qu'il fallait aller vers la cogénération. Donc, c'est un peu comme une sorte de panacée. On a l'impression que la cogénération va régler les problèmes des pâtes et papiers. Vous êtes en train de me dire aujourd'hui: Avec les contrats qu'Hydro-Québec nous demande, avec les difficultés à long terme, ce n'est pas sûr que ce soit la solution d'avenir. Comment va-t-on résoudre ce problème-là?

M. Lemaire: Le résoudre avec... Le prix du gaz va être un facteur très important. Si on n'a pas du gaz meilleur marché que 1,50 $, on n'a pas d'avantages — si les coûts d'Hydro-Québec n'augmentent pas. C'est ce qu'on a vu, ce que les pâtes et papiers ont vu. C'est parti d'environ 0,02 $ à 0,036 $ en l'espace de 10 ans. Et, si on a la même progression, peut-être que la cogénération va arrêter cette... On rencontre le point où la cogénération devient rentable. C'est peut-être le moyen. Et, si on était capable de signer un contrat de gaz de 15 ans, on pourrait dire: Les contrats d'Hydro, ça va arrêter là; il n'y aura plus d'augmentation. On pourrait arriver à faire ça. C'est un peu la panacée que ça pourrait apporter; on pourrait corriger un peu ce qu'Hydro s'est laissée aller à dire: On augmente nos coûts sans être restreints. Parce que ça allait bien dans les pâtes et papiers, alors, on a laissé augmenter les coûts. Mais, aujourd'hui, on paie le prix de ce manque de productivité. (12 h 50)

M. Jolivet: Passons à la deuxième partie qui est celle des petits barrages, maintenant, de quelques mégawatts. Ce que vous dites, c'est que les conditions qui sont posées dans votre contrat par Hydro-Québec, c'est des conditions qu'elle ne se pose pas à elle-même. Donc, prenons l'exemple de faire l'hydroélectricité. Ça veut dire que, dans ce contexte-là, qu'est-ce que vous

proposeriez pour ces formes de contrat là, qui pourrait permettre d'avoir une forme de rentabilité pour vous autres sans nuire à Hydro-Québec?

M. Lemaire: Elle l'a automatiquement. Elle nous paie plus cher en période où elle a besoin d'électricité de pointe. Si le pauvre gars n'est pas capable de produire, a un trouble en période des quatre mois d'électricité de pointe, ne peut pas produire, il perd assez d'argent sans avoir la pénalité d'Hydro par en arrière. Parce que le gars fait son argent dans ces quatre mois-là. On fait notre argent dans les quatre mois. Alors, c'est ça que je dis des forces du marché: le propriétaire d'un barrage, s'il y a de l'eau, il va la faire toute passer à cette période-là. S'il a un barrage de réserve, il va la faire s'écouler en cette période-là pour pouvoir collecter plus d'argent d'Hydro. Mais, en plus de ça, on nous met une pénalité parce qu'on n'a pas rencontré cette chose-là, soit que ça a été un bris mécanique, soit qu'il y a eu quelque chose. Alors, c'est un poids supplémentaire quand ça arrive à un financement. Le financier regarde: Ouais, si tu arrives... Qu'est-ce qui va te garantir? Prends une police d'assurance. Alors, encore augmenter un coût. À cause d'une demande d'Hydro, on fait augmenter le coût parce qu'on va prendre une police d'assurance de bris, de ci, de ça, qui nous coûte de l'argent, probablement pour rien, mais c'est toutes ces choses-là qui font qu'on n'est pas...

M. Jolivet: Ce que vous dites, c'est qu'Hydro-Québec, 1 MW, 2 MW, 25 MW, ça ne serait pas alarmant pour elle si elle ne les avait pas. C'est ce que vous dites? Et Hydro-Québec va prendre l'argument inverse: Si j'ai un contrat avec toi, c'est parce que je ne l'ai pas produit ailleurs ou parce que j'ai décidé de te laisser produire, et c'est moi qui en subis le contrecoup.

M. Lemaire: oui, et c'est pour ça que je dis que ça représente 1 % de tout. en hydraulicité, ça représente 1 %, même pas 1 % de tout ce qu'hydro produit. alors, l'impact sur hydro qu'il y en ait un qui a eu une badloque... parce qu'il veut toujours produire dans ces périodes-là. il veut toujours produire, parce qu'on nous paie plus cher. alors, il veut tout le temps produire. ce n'est pas une volonté de ne pas fournir hydro, mais il va être un producteur. alors, ils ont seulement à dire: sur tant, ils vont nous produire 90 %. et je pense qu'ils ne se tromperont pas, parce que les barrages sont situés un peu partout dans la province. alors, l'hydraulicité n'est pas toujours pareille à travers la province. alors, le risque pour eux que, dans les cantons-de-1'est, il y ait eu moins de pluie qu'en abitibi, bien, là, je pense que c'est ce qui arrive; ce n'est pas certain qu'ils vont avoir ça. alors, eux partagent le risque que nous autres on n'est pas capable de partager.

M. Jolivet: Dans vos discussions avec HydroQuébec, vous avez certainement apporté des expériences de l'extérieur, de telle sorte qu'il y a une expérience plus vaste qui permettrait de savoir, à long terme, si c'est profitable ou pas profitable, à peu près comme un gars qui, une année, fait un contrat de déneigement, et ça adonne que cette année-là il n'y a pas beaucoup de neige; il fait de l'argent. L'année suivante, par exemple, il y a des méchantes tempêtes, et c'est lui qui en baise un coup, comme on dit en québécois. Ce que vous dites, c'est qu'il faudrait permettre ces fluctuations-là — possibles — tout en garantissant que ça ne nuira pas à la santé financière d'Hydro-Québec et au besoin de produire de l'électricité pour la population. C'est ce que j'entendrais.

M. Lemaire: Je pense que oui, puis Hydro-Québec a construit déjà ses unités de pointe. Us viennent de faire une centrale au gaz pour l'électricité de pointe. Il y a Tracy qui est pour l'électricité de pointe. Us les ont, ces garanties-là. Peut-être qu'ils sont obligés de les répartir, mais c'est tellement minime, encore une fois, pour le producteur privé, que je pense que ce n'est pas les pénalités... Dans toute entreprise, il y a des risques. Quand on essaie de prévoir tout... Ça serait tellement facile d'administrer si on était capable de tout prévoir. Et si Hydro avait été capable de prévoir, dans sa sagesse... Je pense qu'elle peut voir aujourd'hui où elle en est. Elle a des surplus. Elle ne sait plus. Elle n'a plus besoin.

Alors, eux aussi, ils ne sont pas capables de prévoir 5 ans d'avance. Ils ont fait des erreurs. C'est humain. C'est la nature des choses, mais c'est les forces économiques. C'est que, quand on est en affaires, il faut penser à ces choses-là. Il faut réagir. Mais, là, si on laisse à l'entreprise privée, elle réagit peut-être mieux qu'une boîte de la grosseur d'Hydro-Québec. On peut prendre des décisions plus rapides pour corriger des défaillances ou quelque chose. On est capable. Et c'est pour ça que je dis, même, que dans l'entreprise on devrait être capable de laisser à l'entreprise... Si on donne une «incentive» à l'entreprise, elle va en trouver, des moyens d'économiser l'électricité en période de pointe, je peux vous le garantir. On le vit ailleurs. Il y en a, des moyens «incentive»; on est obligé de ne pas utiliser l'électricité à certains moments pour aider à...

Le Président (M. Forget): Alors, M. le député de...

M. St-Roch: Merci, M. le Président. À vous écouter, M. Lemaire, j'ai le goût de vous lire la maxime anglaise: «There is several ways to skin a cat». Parce qu'avec toutes les exigences qu'on peut mettre, à un moment donné, ce n'est pas une bonne manière de garder les compétiteurs qui sont à l'extérieur. Je comprends peut-être un peu mieux aussi pourquoi HydroQuébec, dans son plan de développement, nous a dit qu'à partir de l'an 2000, la cogénération, ça ne serait plus rentable. C'était une des raisons pour lesquelles elle donnait 740 kW.

Vous avez mentionné aussi les coûts de réfection des barrages sur la Saint-François. Il y en a un, les études sont terminées. Il a été annoncé. C'est

27 000 000 $ que ça va coûter pour le remettre ultramoderne et l'utiliser le plus près possible de 90 % du temps.

Ce que j'aimerais toucher avec vous, c'est un peu cette problématique-là, parce que lorsqu'on parle de gaz on parle aussi de cogénération et on parle aussi de chauffage. Comme vous le savez, ici, on a eu toutes sortes de mémoires. On est au dernier; c'est le quatre-vingt-cinquième, et non le moindre. On nous a dit que le coût du gaz, il y avait tellement de réserves que les prix seraient stables — l'inflation — à peu près d'ici jusqu'à l'an 2000. Est-ce que c'est ça que vous percevez? Parce que ceux qui nous font les propositions d'aller vers le chauffage au gaz au niveau du résidentiel, c'est ce qu'ils nous disent, que ça serait beaucoup plus avantageux, même lorsqu'on regarde dans le temps. Est-ce que, d'après votre expertise, c'est ce qu'on peut prévoir d'ici la fin de l'an 2000, le prix actuel du gaz plus l'inflation?

M. Lemaire: D'après mon expérience des hydrocarbures, je me dis qu'on n'a pas à s'y fier. C'est dépendant d'une guerre dans le Golfe, c'est dépendant de toutes sortes de choses. Les hydrocarbures ont leurs fluctuations, vont avoir leurs fluctuations. Celui qui pourrait dire que ça va être prévu... C'est pour ça qu'on nous charge si cher si on veut avoir un contrat de 15 ans, parce qu'on pense qu'il peut y avoir des moments, des «peaks». Alors, c'est pour ça que, moi, j'ai toujours, dans ma société, voulu vivre avec le moment présent. Cascades, chez nous, on n'a jamais fait des emprunts à long terme. On a toujours le taux flottant. Moi, je me suis toujours battu. Dans les 30 ans que j'ai été là, taux flottant. Alors, on subit, dans ces périodes-là. Habituellement, les prix augmentent. Mais quand tes prix sont bas, et les taux d'intérêt sont bas, et, toi, tu es pris avec un taux d'intérêt, là, bien, tu t'en vas en faillite. Tandis que, quand tu es haut, bien, ça ne va pas mal; tu es comme les autres. Mais quand tu es bas... C'est pour ça que j'ai toujours voulu qu'on suive...

Alors, s'il y avait une augmentation des prix des carburants ou du gaz, certainement qu'il y aurait une augmentation des prix de l'électricité, de tout, comme ça s'est fait. Ça s'est fait pourquoi? On a augmenté l'électricité parce que la force... Alors, ça se balance. Il y a plusieurs sources d'énergie. On va peut-être à l'huile lourde. Pourquoi on a arrêté d'utiliser le «bunker C» quand Hydro-Québec a eu des surplus? On a complètement arrêté. Chez nous, on était complètement électrique, pour l'électricité. On a profité de ce qu'Hydro avait; elle pouvait nous vendre de l'énergie à bon marché, on en a profité. Maintenant, on a le gaz. On prend du gaz au lieu de prendre du «bunker C». Il y a toujours un moyen de s'en sortir, mais est-ce que ça va être stable? Les réserves de gaz ont augmenté beaucoup. C'est vrai qu'il y a des réserves importantes qui ont été découvertes dernièrement, et il y en a peut-être beaucoup d'autres à être découvertes. Mais on va voir, avec les années.

Je pense que le principe d'utiliser le gaz, c'est d'éviter les pointes d'Hydro-Québec. À ce moment-là, c'est quelque chose qui peut... Si on peut éviter ces fameuses pointes qui coûtent une fortune au réseau pour fournir de l'électricité pour 8 jours ou 10 jours par année, où on construit un réseau qui coûte une fortune pour les pointes... Alors, c'est d'éviter ça. Et si on peut utiliser le gaz ou une autre source pour éviter ces fameuses pointes là, je pense que c'est la formule à utiliser.

M. St-Roch: Et si je vous entends bien, le contrat type, autant pour les petits barrages que pour la cogénération, ça ne serait pas un contrat de 15 ans; peut-être un contrat de 5 ans, j'imagine, comme vous l'avez mentionné.

M. Lemaire: Cinq ans, renouvelable. M. Gauthier: Renouvelable.

M. St-Roch: ...au niveau des prix, et renouvelable après ça. Et Hydro s'engage à s'acheter des...

M. Lemaire: Qui engage à l'acheter pour 15 ans, par exemple.

M. St-Roch: Et on ne met pas d'obligation au niveau du financement ni au niveau de l'approvisionnement dans le cas de la cogénération?

M. Gauthier: Si vous me permettez. La difficulté, actuellement, c'est qu'on s'engage avec Hydro-Québec pour 15 ans, à un tarif déterminé qui s'«inflationne» de 3 % à 6 %. Et, déjà, l'inflation, on ne sait pas ce qu'elle va être dans 15 ans. Alors, nous, on se lie automatiquement avec un contrat de gaz de 15 ans qui, lui, peut parfois... On a vu des clauses d'inflation de 7 % dedans. Quand tu arrives devant le financier avec ça, le financier regarde ton «économique», et il dit: Ça ne marche pas. Alors, ce qu'on dit, c'est: Allons-y pour une période plus courte; marions-nous et laissons le temps arranger les choses, finalement. C'est ce qu'on dit. Une période de 5 ans, ça nous permet de prévoir. Ça nous permet aussi d'être responsables et de voir à ce que nos engagements soient sécurisés, mais pas pour 15 ans. C'est impossible.

Le Président (M. Forget): M. le député de Drummond, on vous remercie. Au nom des membres de la commission, MM. Lemaire et Gauthier, on vous remercie beaucoup de votre participation à cette commission parlementaire.

Mémoires déposés

Je dépose les mémoires des 83 organismes qui se sont présentés devant la commission ainsi que les 5 mémoires reçus pour dépôt, soit le Comité de la protection de la santé et de l'environnement de Gaspé inc., Mme Estelle Lacoursière et la Municipalité régionale de comté de Manicouagan, Natural Resources Defence Council, l'Ordre des ingénieurs du Québec.

La commission suspend ses travaux jusqu'à après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 20)

Le Président (ML Gobé): Mesdames et messieurs, bonjour, bon après-midi. La commission de l'économie et du travail va donc maintenant reprendre ses travaux. Je vous rappellerai brièvement le but de notre séance de cet après-midi qui est de procéder à une consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 de la compagnie Hydro-Québec.

Je vous ferai aussi lecture rapide de l'ordre du jour pour cet après-midi de nos activités. Alors, dès maintenant, nous allons entendre les commentaires et conclusions d'Hydro-Québec sur les interventions du public, ceci pour une période de 45 minutes. Par la suite, nous entendrons, jusqu'à 18 heures, les commentaires et questions des parlementaires, tant du côté du gouvernement que de l'Opposition et, bien entendu, une période de temps sera réservée aussi à M. le député de Drummond.

Alors, M. le Président d'Hydro-Québec, il me fait plaisir de vous saluer. Je vous demanderai de bien vouloir présenter les gens qui vous accompagnent et vous pourrez par la suite commencer votre intervention.

M. Drouin (Richard): Merci, M. le Président. J'ai, à ma droite, le président et chef de l'exploitation, M. Armand Couture, et le vice-président planification générale, à ma gauche, André Delisle. Au fur et à mesure que des sujets pourront être soulevés relativement à différents secteurs de l'entreprise, j'aurai l'occasion d'introduire les personnes habilitées à répondre à certaines des questions.

Documents déposés

Vous me permettrez, M. le Président, avant de passer à notre réflexion sur la commission parlementaire, de procéder à un dépôt de documents, avec votre permission. Les documents que nous désirons déposer sont en réponse à des demandes de certains membres de la commission, au cours de notre première journée de comparution devant la commission. Alors, il y aura peut-être, après que j'aurai fait ma présentation, certaines interventions pour expliquer certains de ces documents-là. Il y en a qui parlent par eux-mêmes, d'autres qui méritent un peu d'explications. Alors, je fais la liste des documents que nous déposons: Un document sur la situation concernant les centrales hydroélectriques de moyenne envergure, document qui avait été demandé; un deuxième sur les investissements des producteurs privés pour chaque combinaison de la proposition de plan de développement 1993; un troisième document, c'est les investissements de la clientèle et d'Hydro-Québec en économies d'énergie pour chaque combinaison de la proposition de plan de développement 1993; un autre document, prévision d'économies d'énergie par marché. On nous avait demandé également le dépôt du dossier Robertson. Alors, ça fait l'objet d'un dépôt cet après-midi. Un autre document sur le bilan des impacts des contrats à partage de risques et de bénéfices; un document sur les prévisions des prix de l'aluminium; un document sur des explications sur la marge bénéficiaire, et un dernier document sur les économies d'énergie réalisées et le coût par secteur.

Le Président (M. Gobé): M. le président, j'accepte le dépôt de ces documents au nom de la commission. Ils seront numérotés à partir du chiffre séquentiel 7d et chiffres subséquents. Alors, les documents sont donc déposés. Je vous remercie.

M. Drouin: Alors, je vous remercie, M. le Président. À la suite de la présentation que je ferai, nous aurons l'occasion de commenter quelques-uns de ces documents-là.

Commentaires et conclusions d'Hydro-Québec sur les interventions du public

Alors, M. le Président, Mme la vice-première ministre, M. ou Mme de l'Opposition, mesdames et messieurs, l'étude de la proposition de plan de développement d'Hydro-Québec s'achève aujourd'hui. Après un mois de travail, les membres de cette commission ont pu approfondir les orientations proposées par Hydro-Québec et entendre les représentations des divers groupes et organismes sur le sujet. Personnellement, je me réjouis du fait que 87 mémoires sont venus apporter un éclairage différent à nos propositions sur l'avenir électrique du Québec. Ces interventions témoignent de l'intérêt que portent un grand nombre d'organismes et nos concitoyens aux orientations proposées par Hydro-Québec. La qualité et la sérénité des interventions témoignent également de la pertinence du processus de consultation publique mis en place pour l'élaboration de la proposition de plan de développement. Ce processus aura en effet permis de fournir aux groupes intéressés les données utiles pour tirer leurs propres conclusions sur le développement de l'électricité au Québec.

Les questions soulevées par ces mémoires correspondent généralement aux grands thèmes abordés dans la proposition de plan de développement. Cela indique également que la consultation nous a permis de bien cerner les préoccupations de la société, même si les solutions que nous proposons ne font pas nécessairement l'unanimité.

Les mémoires ont aussi fait ressortir plusieurs attentes spécifiques. Certaines visent des programmes tarifaires, d'autres des fonds de recherche et d'autres, encore, des partages de retombées économiques. Ceci démontre que, pour un grand nombre d'intervenants, le rôle et les activités d'Hydro-Québec ont des répercussions qui dépassent largement la fourniture du service électrique. Nous en sommes très conscients et vous

assurons que les contributions contenues dans ces mémoires ainsi que les représentations faites en commission alimenteront nos réflexions et nos décisions. Nous désirons néanmoins souligner que les ressources dont nous disposons ne sont pas illimitées, tout spécialement dans le contexte de notre engagement à maintenir la croissance des tarifs au niveau de l'inflation. Il y a donc des choix à faire.

Au cours de ces travaux, plusieurs questions ont été soulevées quant à notre vision et à plusieurs des 32 orientations de notre proposition de plan de développement. Nous souhaitons profiter des quelques heures qui viennent pour répondre à vos principales préoccupations.

Une des questions soulevée par plusieurs mémoires est celle de la substitution de l'électricité par d'autres sources d'énergie. Le Québec devrait-il abandonner le chauffage électrique et favoriser le mazout et le gaz naturel? Rappelons que le chauffage électrique s'est avéré un choix judicieux pour notre clientèle tout en augmentant l'autonomie énergétique du Québec et la qualité de notre environnement.

Dans des cas précis, ces formes d'énergie offrent certains avantages pour quelques marchés particuliers concentrés surtout dans le secteur commercial, institutionnel et industriel. Cependant, même dans ces secteurs, l'électricité occupe une part du marché de plus en plus en croissance, car ces clients semblent considérer d'autres facteurs que le seul prix de l'énergie.

En dehors des mesures entreprises par HydroQuébec favorisant la substitution dans des cas spécifiques, comme par exemple notre programme biénergie, l'entreprise ne pense pas qu'elle doit s'engager plus à fond dans des programmes de substitution, car, en général, il nous semble qu'une substitution importante offrirait peu d'avantages au Québec. Nous demeurons ouverts à diverses possibilités, mais nous pensons qu'il appartient à nos clients de décider de leurs sources d'énergie en disposant de toute l'information pertinente. En fait, le véritable enjeu soulevé par cette question est celui de l'utilisation rationnelle des différentes sources d'énergie possibles. À notre avis, la rationalisation de la consommation énergétique passe surtout par l'économie d'énergie.

Différents mémoires ont également fait ressortir l'importance de planifier le développement en y intégrant l'ensemble des ressources et en tenant compte des externalités. Notre proposition de plan constitue un pas important vers la planification intégrée des ressources. L'efficacité énergétique y est pleinement incluse comme moyen d'équilibrer l'offre et la demande. De plus, la proposition présente et évalue plusieurs scénarios en tenant compte de leurs répercussions environnementales autant que leurs impacts économiques pour l'entreprise et pour le gouvernement du Québec. Nous reconnaissons la pertinence de poursuivre dans cette voie et avons même fait de l'étude des externalités une orientation de notre proposition de plan de développement.

Jusqu'à présent, le concept des externalités a surtout été utilisé aux États-Unis pour évaluer les meil- leures options pour produire l'électricité. Comme la production d'électricité aux États-Unis est principalement d'origine thermique, l'évaluation des externalités porte essentiellement sur la pollution de l'air. Au Québec, compte tenu de l'importance des ressources hydrauliques, il faudra de nouvelles études pour bien évaluer les externalités propres à ce mode de production. (15 h 30)

Hydro-Québec apporte d'ailleurs toute sa collaboration et son expertise aux travaux entrepris sur cette question par le groupe-conseil en énergie mis sur pied à l'initiative de la ministre de l'Énergie et des Ressources. Au cours de vos travaux, il a aussi été beaucoup de questions de nos activités de recherche, développement et démonstration. Hydro-Québec investit des sommes importantes en RDD et certains souhaiteraient de notre part une implication plus soutenue dans des domaines comme l'efficacité énergétique, la protection de l'environnement et les énergies nouvelles.

Nous avons décidé d'augmenter nos efforts dans ces domaines et de le faire avec des partenaires industriels et universitaires, principalement québécois, en favorisant des projets à effet de levier. Dans l'ensemble de nos secteurs de recherche, nous avons mis en marche neuf projets de maillage représentant pour Hydro-Québec des investissements de 46 000 000 $ au cours des cinq prochaines années. Ces projets font appel à un réseau de 38 partenaires qui y investiront avec nous environ 211 000 000$.

Le contenu des mémoires en matière de développement régional a soulevé des questions de partenariat avec le milieu et de la planification intégrée de l'ensemble de nos activités dans une région. Plusieurs mémoires prônent une plus grande ouverture de l'entreprise aux attentes régionales. On souhaite qu'Hydro-Québec privilégie la coopération et la concertation régionales. Les suggestions en ce sens sont nombreuses. On suggère, par exemple, que l'entreprise crée un fonds de développement économique régional, financé soit par le programme de mise en valeur de l'environnement, soit par des royautés provenant de revenus générés par les projets hydroélectriques dans la région concernée.

Dans notre proposition de plan de développement, nous nous sommes déjà engagés à réviser le programme de mise en valeur de l'environnement, à l'intérieur des enveloppes budgétaires déjà prévues, pour y intégrer un volet économique en concertation avec les organismes régionaux.

Hydro-Québec devra donc développer des outils et des modes de gestion lui permettant d'établir une approche plus globale et mieux intégrée de concertation avec le milieu pour l'ensemble de ses activités en région.

Nos coûts de fourniture ont aussi fait l'objet de plusieurs interrogations. Comme ces coûts sont à la base même de notre politique et de nos structures tarifaires, nous croyons qu'il est essentiel que tous nos clients en comprennent les éléments constitutifs et entendons tenir des discussions très franches à ce sujet lors des prochains mois.

La réglementation de l'industrie de l'électricité et

les institutions qui la gouvernent ont aussi été l'objet de plusieurs mémoires et recommandations. Bien qu'il ne nous appartienne pas de définir les encadrements qui doivent régir nos orientations et activités, nous demeurons disposés à collaborer avec le gouvernement à toute réflexion qu'il pourrait poursuivre sur ce sujet.

En terminant, j'aimerais rappeler que le plan de développement qui a fait l'objet de vos travaux depuis un mois est une proposition. Nous croyons toutefois qu'il s'agit d'une proposition réaliste et solide, fondée sur 32 orientations claires qui devraient nous permettre de répondre aux attentes de notre clientèle tout en contribuant au maximum au développement économique et durable du Québec.

Nous y avons intégré les principales attentes et préoccupations exprimées lors de notre consultation publique. En tant qu'actionnaire d'Hydro-Québec le gouvernement du Québec doit maintenant prendre des décisions qui orienteront nos activités des prochaines années.

Nous entreprendrons, au cours de la prochaine année, un second cycle de consultation qui nous conduira au dépôt d'une nouvelle proposition de plan de développement en 1995. Nous profiterons des prochains mois pour discuter avec les intervenants du processus et des modalités qui nous permettront d'améliorer les conditions de réalisation de cette consultation.

Nous aurons aussi l'occasion de définir avec eux le prochain agenda de nos discussions dont les travaux de cette commission nous permettent déjà d'identifier certains thèmes.

Le plan de développement d'Hydro-Québec doit donc être un instrument dynamique et souple, car la conjoncture énergétique est influencée par de nombreux facteurs. Il doit permettre au gouvernement de statuer sur nos orientations et à nos concitoyens et partenaires de participer à leur définition. Nous souhaitons en outre qu'il nous fournisse les moyens de réaliser notre vision qui correspond aux attentes de nos clients et de la société que nous desservons.

Alors, M. le Président, avant de prononcer ce court discours, j'avais mentionné que nous pourrions donner quelques explications relativement aux documents que nous avons déposés cet après-midi. Le premier document sur lequel nous pourrions faire quelques commentaires serait celui de la situation concernant les centrales hydroélectriques de moyenne envergure. Il y avait eu une question à ce sujet-là et on nous avait demandé d'en produire la liste. Je vais demander à M. Yves Filion, vice-président exécutif par intérim du groupe équipement, de commenter le document.

Le Président (M. Gobé): Alors, merci M. le président. Je rappellerai aux autres intervenants que vous désignerez de bien vouloir s'identifier afin que les services de transcription puissent prendre votre nom en note. Alors, vous avez la parole.

M. Filion (Yves): Bien. M. le Président, le document qu'on dépose vise à répondre à la question de l'état des connaissances d'Hydro-Québec dans le domaine des centrales de moyenne envergure. Nous vous présentons un document sur lequel j'aimerais d'abord faire un à-propos sur la définition des centrales de moyenne envergure qui, dans le plan de développement, ont été définies comme des centrales dont la puissance installée variait entre 25 et 100 MW. Alors, nous désirons élargir un peu cette définition pour plutôt parler d'un aménagement dont le potentiel peut satisfaire en partie le besoin de puissance additionnelle dans une année donnée.

Alors, je pense que c'est un point important puisqu'il y a des aménagements, dans la liste qui suit, dont la puissance installée dépasse de quelque peu 100 MW, et on n'a pas voulu exclure ces aménagements-là d'une liste sur une notion arbitraire d'une limite qui se situait à 100 MW.

Nous vous présentons aussi trois niveaux d'études qui correspondent à des niveaux différents des connaissances. D'abord, les études sommaires qui visent à définir si un site présente un potentiel aménageable intéressant. Alors, c'est une étude qui se fait assez rapidement et sur la base de paramètres généraux.

Ensuite, une étude préliminaire qui va beaucoup plus en détail, qui analyse les aspects techniques, économiques et environnementaux, et qui permet de comparer un site par rapport à un autre, donc, un niveau de détail plus intéressant.

Finalement, un avant-projet qui, lui, vise à répondre à un besoin identifié dans le plan des installations ou dans le plan de développement, si vous voulez, et qui, à ce moment-là, implique que l'on enclenche un processus avec le ministère de l'Environnement du Québec, c'est-à-dire une demande de premier décret et des consultations au niveau des publics concernés.

M. Drouin: Alors, je pense que ça complète les informations sur ce document. Le prochain document que nous pourrions commenter est celui du dossier Robertson et je demanderais à M. Couture de bien vouloir faire quelques commentaires.

Le Président (M. Gobé): M. Couture.

M. Couture (Armand): M. le Président, Mme la ministre, madame, messieurs, je vous réfère au document qui a été déposé et qui débute par un avant-propos. Cet avant-propos fait l'historique des décisions qui ont amené la réalisation du projet du lac Robertson. Alors, il y a enfin cinq résolutions, soit du conseil d'Hydro-Québec, soit du comité exécutif, qui vont du 20 décembre 1989, alors que le projet avec sa solution hydraulique du lac Robertson avait été approuvé, des revues qui ont été faites en 1991, qui ont fait l'objet de résolutions en 1992 — il y en a eu plusieurs — et qui ont confirmé le choix de la solution hydraulique. (15 h 40)

Alors, en cours de route, il y a deux facteurs qui ont augmenté les coûts considérablement, soit la soumission pour les travaux de génie civil et la logistique de

chantier, et la préparation des plans et devis détaillés du système de transmission, c'est-à-dire les lignes et postes qui doivent desservir la région. Alors, il en est résulté une autorisation de négocier avec le plus bas soumissionnaire conforme pour réduire les prix de la soumission reçue, et, d'autre part, une revue de l'étude économique qui voulait savoir si la justification du choix du projet hydraulique était toujours valable. Alors, à ce moment-là, des études ont été refaites et, dans un premier temps, il est apparu qu'il pourrait être remis en cause, c'est-à-dire qu'on pourrait retourner à une solution diesel et le conseil a demandé que des études soient poursuivies sur une période plus longue, soit 50 ans, la durée de vie d'une installation hydraulique, pour voir la sensibilité du choix au prix du carburant, aux paramètres économiques et à la durée de l'étude.

Alors, suite à ces revues, il a été décidé de confirmer la solution du lac Robertson en solution hydraulique et c'est ce qui apparaît à la dernière résolution. Et vous avez, attachés à ces résolutions, les documents qui ont été soumis au conseil pour prendre ses décisions. Merci.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Couture.

M. Drouin: Alors, M. le Président, le prochain document que nous pourrions commenter, c'est celui du bilan des impacts des contrats à partage de risques et de bénéfices. M. Pierre Bolduc, vice-président exécutif, commercialisation et affaires internationales.

Le Président (M. Gobé): Vous avez la parole.

M. Bolduc (Pierre): M. le Président, le document intitulé «Impacts des contrats à partage de risques et bénéfices 1984-1992» apporte des réponses à des questions qui avaient été soulevées par cette commission. On y présente, pour la période en question, tout d'abord les investissements associés à l'ensemble des 13 contrats à partage de risques qu'Hydro-Québec a signé et qui incluent les activités d'Hydro-Québec elle-même pour ses équipements de production, transport et autres équipements associés aux besoins d'électricité de ses consommateurs de grandes entreprises et les investissements effectués par les clients eux-mêmes dans la construction des installations en question.

Au total, pour la période 1984 à 1992, on y voit des investissements de presque 10 000 000 000 $, 9 980 000 000 $, et on présente, par la suite, les emplois soutenus par ces investissements qui, encore une fois, sur la période 1984 à 1992, totalisent 146 000 personnes-année. On a tenté d'évaluer de façon aussi précise que possible les retombées fiscales associées à ces contrats et on obtient, au niveau du gouvernement fédéral, des retombées de 560 000 000 $ et, du gouvernement du Québec, des revenus de 930 000 000 $ pour la période en question. Quant aux pertes et aux gains associés aux contrats d'électricité eux-mêmes, par rapport au tarif normalement applicable, l'ensemble des contrats se solde par un déficit de 366 000 000 $ sur la même période.

Le Président (M. Gobé): Merci. M. le président.

M. Drouin: Merci. Et maintenant sur les prévisions du prix de l'aluminium, M. André Delisle.

M. Delisle (André): également, c'est un document qui répond à des questions qui ont été posées lors de notre première comparution. au graphique a, en fait, on peut voir qu'il y a eu une assez grande volatilité au niveau de l'industrie de l'aluminium dans les dernières années. plusieurs raisons expliquent ça. d'abord, du côté de la capacité mondiale de production, elle s'est accrue de 14,7 millions de tonnes à 15,9 millions de tonnes entre 1989 et 1992. du côté de la demande, également, il y a eu une croissance, mais de seulement 2 % entre 1989 et 1992, si bien qu'à l'année 1992 on a fait les inventaires mondiaux de l'aluminium qui se sont accrus à 3,2 millions de tonnes, ce qui se situe à deux fois la norme qui est environ de six semaines d'inventaire. une des raisons qui expliquent cette situation, bien entendu, c'est l'écoulement de la production provenant de la communauté des états indépendants.

En termes d'évolution prévisible, ce que vous voyez, c'est qu'on prévoit un retour à l'équilibre d'ici 1996. L'année passée, au niveau du suivi du plan de développement, l'équilibre, on le voyait plutôt à l'année 1994. Ce qui provoquerait cet équilibre-là, c'est, d'une part, une rationalisation du côté des capacités en production — il y a actuellement, d'arrêté temporairement, 1 600 000 tonnes de capacité — et, aussi, la reprise économique. Au graphique B, vous pouvez voir nos prévisions en termes de prix. Comme je mentionnais, on prévoit un retour à l'équilibre à l'année 1996 avec un prix à 0,75 $ US la livre en dollars de 1988. Par contre, on peut voir qu'il y a d'autres prévisions que nous, et il y a des prévisions qui sont beaucoup plus... qui amènent le prix de la livre à 1,20 $ en l'an 2000 alors que d'autres sont inférieures.

Quant à la question spécifique de savoir quelle était notre vision de ce qui se passerait du côté de la Communauté des États indépendants, leur capacité de production est d'environ 4 400 000 tonnes annuellement et la prévision qui est ici présume une stabilisation de la situation dans ces pays-là. D'une part, suite aux réformes économiques, il y aurait des capacités pour à peu près 1 500 000 qui seraient fermées et, également, la reprise un peu graduelle de l'économie dans ces pays ferait en sorte que la demande augmenterait. Donc, la prévision qui est ici présume une stabilisation de la situation à court terme du côté de la Communauté des États indépendants.

Le Président (M. Gobé): Merci. M. le président, vous avez la parole.

M. Drouin: Alors, un dernier commentaire sur un document, celui de la marge bénéficiaire. M. Pierre Bolduc.

Le Président (M. Gobé): M. Bolduc.

M. Bolduc: on nous avait posé la question à savoir comment s'expliquait la différence entre la marge bénéficiaire de 17 % associée à l'ensemble des ventes d'hydro-québec, compte tenu que certains contrats, en particulier les contrats à partage de risques et les exportations, ne sont pas comptabilisés sur la même base que les ventes assujetties au règlement tarifaire d'hydro-québec. les ventes assujetties au règlement tarifaire, en 1992, donnaient une marge bénéficiaire de 17 %. en introduisant l'effet des contrats à partage de risques et des exportations, cette marge bénéficiaire est réduite à 10,7 %. l'explication de ce phénomène provient du déficit des contrats à partage de risques dont nous avons déjà parlé, qui baisse la marge bénéficiaire globale de 4 %, et aussi d'une rentabilité négative en 1992 sur les contrats d'exportation, qui baisse la marge bénéficiaire de 2,3 %. donc, ceci explique le passage de 17 % à 10,7 %. il est opportun de situer le phénomène de baisse de marge bénéficiaire associé à l'effet des contrats d'exportation, qui est un phénomène de nature plutôt comptable qu'économique. c'est que les activités d'exportation d'hydro-québec sont évaluées en fonction d'amortissements de tous les investissements d'intercon-nections et de lignes de transport, qui se font sur une base linéaire à long terme. ceci veut dire que, pendant les années où nous avons des surplus importants, évidemment, il se dégage des marges bénéficiaires très élevées. durant les années d'hydraulicité moins forte, où nous exportons beaucoup moins, la marge bénéficiaire diminue, d'une part.

Un autre élément qui explique cette marge bénéficiaire réduite, c'est qu'un de nos principaux contrats actuels, qui est la vente d'énergie en Nouvelle-Angleterre, se fait en fonction de prix indexés au coût des sources thermiques d'énergie, qui sont actuellement à un niveau très bas, donc, qui produisent des revenus relativement moins élevés. (15 h 50) dans une perspective à plus long terme, vous avez, avec le document, un tableau qui montre l'évolution de la marge bénéficiaire des exportations d'hydro-québec depuis 1983. et on voit que cette activité a produit des bénéfices nets cumulatifs de 1 200 000 000 $ sur la période et des marges bénéficiaires dépassant généralement 30 % lorsque nous exportions des quantités importantes. donc, les équipements que nous amortissons, sur le plan comptable d'année en année, ont déjà été payés bien des fois. en termes économiques, la rentabilité est évidente. en termes comptables, l'année 1992 présente cette rentabilité réduite, à cause des facteurs que je viens d'expliquer.

Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup. M. Drouin, vous avez la parole.

M. Drouin: Alors, M. le Président, ça termine les commentaires que nous voulions faire à l'égard du dépôt de documents que vous nous avez autorisés à faire au début de la séance.

Le Président (M. Gobé): Alors, je vous remercie beaucoup. Est-ce que je dois comprendre que cela met fin à votre présentation, et que nous pouvons passer à la période de discussion?

M. Drouin: C'est exact.

Le Président (M. Gobé): Alors, c'est très bien. Donc, avant de passer à cette période, je rappellerai que, suite à une entente intervenue entre les membres de la commission, au début de la séance, chacun des groupes disposera de 50 minutes environ, par tranches de 30 minutes, pour commencer par le gouvernement, ensuite, l'Opposition. Le député indépendant de Drummond aura, lui, 10 minutes. Par la suite, nous reviendrons du côté du gouvernement. À ce moment-là, je regarderai le temps qui reste jusqu'à 18 heures, pour le répartir équi-tablement, en tenant compte des intérêts de l'Opposition et du gouvernement, et en tenant compte aussi que M. le député de Drummond a demandé aussi à avoir quelques minutes par la suite. Alors, vu qu'il y a consensus sur cette entente, on va pouvoir maintenant commencer, et je demanderais à Mme la vice-première ministre de bien vouloir prendre la parole.

Période de questions

Contribution des intervenants à la consultation

Mme Bacon: Merci, M. le Président. Il y a certains intervenants qui remettent en cause le processus de consultation qui a mené à la proposition du plan de développement, dans la mesure où les participants n'avaient pas nécessairement les connaissances requises pour porter un jugement éclairé en la matière. Après l'expérience que vient de vivre Hydro-Québec, quel jugement portez-vous sur la contribution des intervenants et sur le processus de consultation, notamment en ce qui concerne la permanence d'un tel processus?

M. Drouin: Ma réponse instantanée, c'est: Positif, une expérience positive, dans le sens où, premièrement, nous avons pu, à Hydro-Québec, permettre un échange très fructueux entre les différents intervenants et le personnel d'Hydro-Québec chargé de la consultation. J'ai, pour ma part, M. le Président, assisté aux séances préliminaires de mise en place du processus de consultation. Nous avions invité une centaine de groupes à participer à cette consultation. Il y en a près de 70 qui y ont participé très activement, et je dois vous dire que l'atmosphère et la convivialité se sont développées au fur et à mesure que la consultation s'est déroulée.

Nous avons commencé, si je me rappelle bien, en novembre 1991; ça s'est déroulé jusqu'au mois de juin 1992, et on a eu l'occasion de les rencontrer, d'abord au début, et, par la suite, dans la présentation de certains mémoires qu'ils ont voulu faire directement à la haute direction d'Hydro-Québec. Nous en retenons donc qu'il s'agit d'une expérience positive; positive, parce qu'elle

a permis, tant du côté des groupes consultés, d'échanger, d'obtenir de l'information d'Hydro-Québec sur les différents sujets consultés. Et, à ce sujet-là, le simple fait que nous ayons mis de l'avant quatre sujets importants de consultation, à savoir: l'efficacité énergétique, les industries à forte consommation, les exportations, les moyens de production, ça a développé une crédibilité à l'égard du processus.

Finalement, en toute dernière ligne, au mois de novembre dernier, une heure avant de présenter au grand public notre proposition de plan de développement, nous nous sommes présentés pour faire part du résultat de la consultation aux groupes consultés. D'abord, ils y étaient en très grand nombre, et ils nous ont manifesté sans équivoque, pour la très grande part d'eux, leur très grande satisfaction relativement au processus. Donc, en conclusion sur la question de Mme la ministre, je dois dire que c'est positif; nous croyons au processus; nous croyons que nous pouvons en tirer un grand avantage en obtenant des suggestions de la part de ceux qui sont consultés, et nous croyons également qu'Hydro-Québec a avantage à faire connaître mieux à ces groupes sa façon de planifier, sa façon de prévoir l'offre et la demande et sa façon de faire des études économiques et de les faire comprendre par ces groupes-là.

Planification intégrée des ressources

Mme Bacon: II y a beaucoup d'intervenants à cette commission qui se sont exprimés sur la question de la planification intégrée des ressources, comme voie privilégiée pour satisfaire les besoins énergétiques au moindre coût et de façon plus acceptable socialement. Ces intervenants rappelaient que l'approche en question est maintenant employée par Ontario Hydro, ainsi que par plusieurs utilités publiques américaines.

J'ai plusieurs volets dans ma question, mais je pense que vous êtes capable de réunir une bonne réponse. Quels sont les moyens envisagés par Hydro-Québec pour intégrer davantage cette approche à ses mécanismes de planification, et dans quelles mesures les divers intervenants intéressés au domaine des external ités seront intégrés au processus d'études et d'analyses d'Hy-dro-Québec?

M. Drouin: M. le Président, j'ai l'occasion, sur une base régulière, de participer à un comité mis en place par Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources, qui est un groupe-conseil qui s'est penché sur le dossier de l'efficacité énergétique et qui a reçu un mandat additionnel relativement à la planification intégrée des ressources. Au premier chef, je l'ai mentionné dans l'énoncé que j'ai fait en début de séance, nous sommes d'accord avec le concept de la planification intégrée des ressources. Nous aurions voulu mettre dans notre texte que nous nous sommes conformés au concept de la planification intégrée des ressources, mais ça aurait été trop, que de dire ça, parce que nous n'avons pas encore atteint le degré de connaissance et de raffinement qui nous permet de dire que nous avons produit un plan de développement ou une proposition de plan qui répond à tous les concepts de la planification intégrée des ressources. La planification intégrée des ressources, pour nous, est la voie de l'avenir, en termes de planification, parce qu'elle ne consiste pas uniquement à planifier un produit d'électricité au moindre coût, mais à tenir compte de tous les coûts, y inclus les coûts sociaux reliés au développement des ressources.

Deuxièmement, je pense que, cette partie-là, nous en avons tenu compte d'une façon bien complète dans notre plan, celui de tenir compte du dossier d'efficacité énergétique et d'intégrer dans l'offre que nous planifions tout notre dossier d'efficacité énergétique comme faisant partie des moyens de l'offre de l'entreprise.

L'autre aspect qui fait partie de la planification intégrée des ressources qui nous apparaît très important, c'est la consultation parce qu'une planification intégrée des ressources sans consultation empêche l'entreprise d'obtenir les intrants justement sociaux, économiques, environnementaux qui peuvent nous parvenir de l'extérieur.

Finalement, vous l'avez mentionné, celui du dossier des external ités. Je l'ai évoqué également dans l'énoncé du début. Sur le plan des externalités, je pense qu'il y a beaucoup de travail à faire parce que ce qui a été fait en Amérique du Nord ne répond pas nécessairement à notre conception des externalités sur le plan de la fourniture de l'électricité à même les ressources hydrauliques. Là où on a tenu compte des externalités, dans la plupart des cas, c'est au niveau, bien sûr, des émissions de CO2 dans l'atmosphère et, par conséquent, de la pollution, et on attribue un facteur à cette source d'énergie, entre guillements, polluante, de façon à ce que le prix en soit plus élevé et que les argents consacrés à l'efficacité énergétique soient plus élevés aussi et, par conséquent, donnent de meilleurs résultats. Ça, cette partie-là, M. le Président, ça reste pour nous à définir, à bien concevoir comment on peut ajuster le dossier des externalités à celui d'une production hydroélectrique. (16 heures)

Évaluation des programmes d'efficacité énergétique

Mme Bacon: Tout en souscrivant à l'objectif d'économie d'énergie d'Hydro-Québec, l'Association des ingénieurs-conseils du Québec a souligné, devant les membres de la commission, l'importance d'un suivi rigoureux de ce programme d'économies d'énergie et, à ce titre, les activités d'Hydro-Québec laissent perplexes certains intervenants. Moi, j'aimerais savoir de vous quelles sont les démarches que vous avez entreprises en ce qui concerne les économies d'énergie?

M. Drouin: Je vais demander à M. Bolduc de répondre à cette question, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): M. Bolduc, si vous voulez prendre la parole.

M. Bolduc: M. le Président, il est tout à fait exact que l'évaluation des résultats d'un programme d'efficacité énergétique pose un défi majeur. Les kilowattheures économisés ne peuvent pas être mesurés sur un compteur comme les kilowattheures vendus. Ils sont le résultat d'une série d'efforts qui dépasse plusieurs disciplines, à partir des communications, de la formation, de la sensibilisation aux comportements des consommateurs et, évidemment, tout le volet technique des appareils et des matériaux qui servent à augmenter l'efficacité énergétique et dépendent beaucoup du comportement et de l'utilisation que les gens vont faire des résultats des programmes commerciaux d'Hydro-Qué-bec, ainsi que de leur permanence, c'est-à-dire: est-ce que les gens vont continuer, pendant des périodes aussi longues que prévues, d'utiliser et de mettre en application les mesures d'efficacité énergétique préconisées?

Hydro-Québec a suivi de très près l'évolution de la nouvelle science qu'on peut appeler de cette façon, de l'évaluation d'impacts des programmes d'efficacité énergétique. Plusieurs États américains ont développé quelques années d'avance sur nous, et le savoir-faire le plus respecté et le plus universellement accepté dans ce domaine est maintenant disponible. Pour mesurer le résultat de nos programmes actuels, nous avons préparé, depuis environ six mois, un appel de proposition à des firmes qui seraient formées de consortium des entreprises américaines les plus avancées dans le domaine et d'entreprises québécoises capables d'accepter un transfert technologique pour devenir des experts en évaluation impartiale et scientifique de l'efficacité énergétique.

Nous avons reçu, il y a trois semaines, les propositions des firmes intéressées à effectuer ce travail et nous allons adjuger les contrats dans les quelques semaines qui viennent. À partir de ces contrats, neuf de nos principaux programmes d'efficacité énergétique vont être évalués scientifiquement et objectivement d'ici la fin de l'année 1993 pour venir confirmer ou ajuster nos évaluations provisoires de résultats. Et, en même temps, tous les nouveaux programmes qui sont maintenant lancés vont être adaptés, au moment même du développement et du lancement des programmes, à une méthodologie d'évaluation qui va être prévue à l'avance dans le déroulement de ces programmes.

C'est évident que c'est un défi majeur. Je pense que toutes les entreprises québécoises qui vont participer à cet ensemble de contrats et à ce transfert technologique vont nous amener des résultats dans lesquels, l'an prochain, nous seront à même, je pense, de vous donner une évaluation et un degré de satisfaction et de confiance aussi élevé que n'importe quelle autre entreprise en Amérique du Nord là-dessus.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Bolduc. Mme la ministre.

Mme Bacon: Merci, M. le Président. La Fédération nationale des associations des consommateurs du Québec a présenté, dans son mémoire, ses préoccupations à l'égard de la proposition du plan de développe- ment sous l'angle des familles à faibles revenus. Elle mentionnait, notamment, l'impact important des coûts de l'énergie sur les revenus de ces familles, faisait état, aussi, de la condition souvent précaire de l'enveloppe thermique de leur logement, et elle parlait même de la salubrité énergétique des logements. Dans le cadre de son projet d'efficacité énergétique, est-ce que vous pourriez nous indiquer de quelle façon Hydro-Québec a pris en compte la question de l'amélioration de l'enveloppe thermique des logements et, peut-être, nous préciser si une attention particulière a été portée aux parcs de logements loués à des fins résidentielles?

M. Bolduc: M. le Président, nous avons exploré différents programmes d'efficacité énergétique en fonction de catégories particulières de clientèles et il y a eu des expériences de cette nature également mises en place aux États-Unis. Et, dans le cadre de la planification plus complète des prochains programmes d'efficacité énergétique, nous comptons regarder de très près, d'une part, la priorité, la priorisation des secteurs où nos programmes d'efficacité énergétique vont être amenés à apporter le plus rapidement des résultats. Nous voyons, actuellement, une préférence, en termes de stratégie et d'optimisation, vers des programmes universels, mais nous pensons que les programmes peuvent être amorcés et mis en place en priorité dans les secteurs où les besoins sont les plus forts en termes de certains quartiers ou de certaines régions du Québec où le potentiel d'économie d'énergie va très rapidement donner des résultats. Et souvent, dans la plupart des cas, ces priorisations coïncident avec des clientèles de milieux moins favorisés qui vont leur permettre d'en bénéficier plus rapidement.

Ce ne seront donc pas des programmes axés spécialement sur une catégorie de clientèle, mais axés sur des secteurs ou des régions qui vont en bénéficier le plus rapidement. Et, dans le cadre d'isolation de maisons, je pense que nous avons déjà constaté qu'il ne serait pas très rentable d'avoir des programmes massifs d'isolation de maisons en maçonnerie ou en brique et ainsi de suite, mais les maisons, surtout dans les secteurs ruraux, qui sont en bois ou en matériaux moins difficiles à modifier feront l'objet de programmes qui devraient amener des résultats dans le sens qui est demandé ici.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Bolduc. Combustibles fossiles

Mme Bacon: L'École polytechnique nous a fait remarquer qu'Hydro-Québec avait négligé, dans sa proposition du plan, la substitution d'électricité par les combustibles fossiles. Selon l'École polytechnique, la structure tarifaire actuelle continue d'encourager la pénétration du chauffage à l'électricité qui est responsable d'une forte demande en énergie, en puissance à installer, et des problèmes d'appoint. Avec un coût marginal de l'électricité pour le chauffage de 0,092 $ du kilowattheure et un prix de vente de 0,054 $, l'École

considère que la poursuite d'une telle approche est coûteuse socialement et s'effectue au détriment des producteurs d'hydrocarbure et de l'ensemble des contribuables. Est-ce que vous pourriez nous exposer les motifs qui ont conduit Hydro-Québec à ne pas retenir la substitution comme étant une option valable à son plan?

M. Bolduc: Oui. M. le Président, Hydro-Québec a tenté, au cours des derniers mois, d'évaluer de façon très, très poussée, en tenant compte des plus récentes tendances des prix des combustibles, la rentabilité d'une substitution ou la rentabilité comparative des différentes formes d'énergie pour la société, c'est-à-dire en ne prenant pas en compte seulement le tarif payé par le client mais en tenant compte du coût marginal de chacune des formes d'énergie, donc en tenant compte d'un chiffre correspondant aux 0,092 $ du kilowattheure pour le chauffage résidentiel. Et, en incorporant à l'ensemble de cette étude-là, évidemment, des coûts d'installation qui sont toujours relativement plus élevés pour des formes de chauffage autres qu'électriques, nous arrivons à la constatation que les résultats sont pratiquement égaux, c'est-à-dire qu'il est très difficile d'affirmer avec certitude qu'une solution est plus rentable que l'autre pour la société et, évidemment, tout ça dépend d'une très grande dépendance de la variation future des prix des combustibles.

Pour cette raison-là, nous ne nous sentons pas, à Hydro-Québec, capables ou nous ne pensons pas qu'il serait responsable de notre part de trancher, au nom de nos clients, dans une situation quasi égale et avec beaucoup d'incertitude. Nous préférons laisser les lois du marché jouer en fonction des signaux de prix que nous tentons d'améliorer constamment. Nos recommandations, en tarification différenciée dans le temps, en tarification saisonnière dans certains secteurs et en augmentant la dernière tranche du tarif résidentiel, vont justement dans le sens de donner à la clientèle un meilleur signal de prix. (16 h 10)

Nous remarquons cependant que, dans le secteur commercial où le signal de prix est déjà très, très clair, où le coût de chauffage électrique est beaucoup plus élevé pour un client que le coût de chauffage au gaz naturel, par exemple, ça n'amène pas de façon massive les clients à substituer le gaz naturel à l'électricité. Et les autres avantages que le client perçoit dans le chauffage électrique semblent l'amener à maintenir quand même son choix dans ce sens-là.

L'autre volet qui nous est de plus en plus évident, c'est que, dans la nouvelle construction, surtout la nouvelle construction résidentielle, les promoteurs, les entrepreneurs ne veulent pas ajouter au coût des maisons les 20 % ou 30 % additionnels que représente, au niveau du chauffage, l'installation de systèmes centraux de chauffage parce que le marché résidentiel n'accepterait tout simplement pas d'acheter des maisons à ces prix-là. Donc, il est extrêmement difficile de forcer une substitution et, pour l'ensemble de ces raisons-là, la seule forme de substitution que nous continuons à promouvoir, c'est celle de la biénergie qui, en général, s'adresse à des clientèles qui, sans nos programmes et nos subventions en biénergie, deviendraient des clientèles à chauffage électrique. Donc, par la promotion de la biénergie dans les résidences et les installations existantes, nous pratiquons une forme de substitution, mais c'est la seule qui nous paraît raisonnablement à conseiller et rentable autant pour le client que pour la société.

Mme Bacon: Dans le cadre, encore une fois, des travaux de la commission, l'Association de l'huile à chauffage du Québec, l'Association des distributeurs indépendants des produits pétroliers ont présenté une offre de partenariat faite à Hydro-Québec dans le cadre du programme biénergie résidentielle. Et cette offre-là s'inscrivait dans le programme actuel d'Hydro-Québec et impliquait une participation financière des membres de ces associations pétrolières. Et, selon elles, HydroQuébec a rejeté — je m'excuse de vous le dire, M. le président — de façon cavalière leur offre. C'est ce qu'on nous a dit.

Alors, pourriez-vous expliquer à cette commission les raisons qui motivent la décision d'Hydro-Québec? Et, du point de vue des clients, est-ce que l'offre faite par les associations pétrolières aurait présenté certains attraits, même si vous n'aviez pas envie de les accepter?

Le Président (M. Gobé): M. le président. M. Bolduc?

M. Bolduc: Nous sommes très intéressés à un partenariat avec les distributeurs de produits pétroliers et nous avons, pendant plusieurs années, fonctionné sur la base de ce partenariat. Récemment, les distributeurs de produits pétroliers ont exercé beaucoup de pression pour que nous modifiions les conditions du programme biénergie, de façon à augmenter sensiblement la consommation de mazout, c'est-à-dire qu'au lieu d'avoir une consommation de mazout correspondant à nos périodes de pointe où, en termes énergétiques globaux, pour la société, ça constitue une solution optimale, ils suggéraient que nous augmentions la température à laquelle la transition se fait vers le chauffage au mazout. Ça voudrait dire, par exemple, qu'une journée où il fait à peu près zéro degré, comme aujourd'hui, on chaufferait encore au mazout au lieu de chauffer à l'électricité.

Cet ajustement des programmes démolit pratiquement toute la rentabilité et le sens économique d'une formule biénergie telle que nous la préconisons. Beaucoup de tests et d'analyses de marché ont indiqué que, dans des conditions comme celle-là, les clients préféraient s'en aller au tout à l'électricité. Donc, ça serait, je dirais, autodestructeur pour le marché des distributeurs pétroliers parce que, plus on pousse les gens vers une solution qui utilise moins d'électricité et plus de mazout, plus ils ont tendance, à cause des autres avantages, à s'en aller tout électrique, ce qui éliminerait complètement le marché des pétrolières dans ce sens-là.

Alors, nos discussions avec les pétrolières ont malheureusement achoppé sur ce point-là qui nous paraît

extrêmement crucial et stratégique dans tout le déroulement d'un programme comme celui de la biénergie. Nous espérons reprendre le dialogue sur une base, disons, de respect mutuel de certains principes de base et je pense que, compte tenu de l'énoncé que nous faisons maintenant et que nous avons répété, on pourra reprendre avec eux le dialogue pour un certain partenariat dans les années qui viennent.

Mme Bacon: D'accord.

Le Président (M. Gobé): Merci. Madame...

Mme Bacon: J'ai encore du temps?

Le Président (M. Gobé): II vous reste cinq minutes.

Aménagement de l'Ashuapmushuan et fonds de développement régional

Mme Bacon: Au niveau des moyens de production, on a eu le Regroupement pour la protection de l'Ashuapmushuan qui, évidemment, s'oppose fermement à tout développement hydroélectrique de cette rivière et mentionne l'existence d'alternatives. Et une de ces alternatives consiste à optimiser le potentiel de production hydroélectrique de rivières déjà harnachées.

Dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, on nous a parlé de la rivière Péribonka qui répond à cette condition et présente encore un potentiel hydroélectrique à exploiter évalué à 392 MW. Et le Regroupement a fait d'ailleurs état du peu d'études qui ont été réalisées sur la Péribonka: environ 700 000 $ qui ont été dépensés en études, quand on les compare à 30 000 000 $ qui ont été consacrés à l'Ashuapmushuan. Alors, qu'est-ce qui a incité Hydro-Québec à concentrer ses études sur la rivière Ashuapmushuan tout en délaissant d'autres rivières qui semblent aussi avoir un potentiel intéressant?

M. Drouin: Je vais demander à M. Couture de répondre à cette question.

Le Président (M. Gobé): M. Couture, vous avez la parole.

M. Couture: M. le Président, Mme la ministre, nous poursuivons des études sur les deux rivières et l'intérêt plus grand, peut-être, pour l'Ashuapmushuan est qu'il nous apparaît, au moment précis d'aujourd'hui, que l'énergie produite par cette rivière serait sensiblement plus économique que celle qui pourrait être produite par la Péribonka. Mais nous poursuivons les études sur la rivière Péribonka également. Il y a un site qui est disponible et qui s'insère à l'intérieur de centrales qui sont la propriété d'Alcan. Alors, pour être capable d'opérer une centrale sur la Péribonka de façon raisonnable, il faut prendre des arrangements sur l'utilisation de l'eau en différents temps de l'année. Et les contraintes d'Alcan et les contraintes d'Hydro-Québec ne sont pas les mêmes, c'est-à-dire qu'on gère surtout la Péribonka actuellement en fonction des niveaux d'eau du lac Saint-Jean. Alors, ça nous crée des contraintes et ça augmente, en fait, le prix de revient moyen du kilowattheure de cette rivière. Mais, tant que nos études ne seront pas terminées, nous n'aurons pas un signal exact du prix de revient de l'énergie qui pourrait être développée sur la Péribonka.

Alors, lorsque nous aurons ces chiffres-là, bien entendu, nous allons considérer un tel développement à l'intérieur d'un programme d'équipement en fonction de l'ordre de priorités, selon le prix de revient. Et si l'Ashuapmushuan, dont les études d'avant-projet sont en cours, continue de montrer un coût de revient très bas, à ce moment-là, il y aura des décisions à prendre parce que, notre compréhension, c'est que, comme il y a beaucoup de gens qui s'y opposent, il y a beaucoup de gens aussi qui aimeraient qu'on la développe. Alors, il y aura une décision sans doute difficile à prendre, à savoir si l'avantage économique de développer l'Ashuapmushuan devra être fait en priorité par rapport à d'autres rivières au Québec.

Mme Bacon: Au niveau du développement régional, encore au cours de cette commission parlementaire, il y a plusieurs groupes qui ont indiqué la nécessité de créer un fonds de développement régional et il y en a certains qui ont demandé la création d'un fonds permanent qui serait autogéré par le milieu, alimenté par une mise de fonds initiale, des entrées récurrentes provenant de revenus qui sont générés par le projet comme, par exemple, Ashuapmushuan.

L'argumentation sur laquelle ces gens-là s'appuient est à l'effet de privilégier un développement économique de long terme pour leur communauté plutôt qu'un baume économique fini dans le temps et suscité par la construction des moyens de production. Les intervenants jugent aussi que la proposition actuelle d'Hydro-Québec, en regard de l'élargissement du champ d'application du programme de mise en valeur pour englober des mesures liées au développement régional, est insuffisante. Comment accueillez-vous cette proposition et comment pourrait-elle, par exemple, s'insérer au sein d'une composante de développement économique du programme de mise en valeur? (16 h 20)

M. Drouin: D'abord, premièrement, M. le Président, c'est clair qu'Hydro-Québec veut s'impliquer davantage et s'intégrer davantage dans le développement régional et être partie un peu avec les différents milieux impliqués, que ce soient les MRC, que ce soient les municipalités ou, enfin, tous les intervenants régionaux. Seulement, il faut bien comprendre — et je pense que je l'ai souligné au début — qu'il y a certaines limites et beaucoup de limites à ce qu'Hydro-Québec peut faire dans l'ensemble de la société québécoise. Certains, au cours de cette commission parlementaire, nous ont fait la suggestion de nous occuper uniquement de l'électricité, de la fourniture de l'électricité et d'agir comme une compagnie d'électricité, point. D'autres ont dit que nous

devrions être plus impliqués dans les milieux culturels et artistiques, à certains moments donnés. on vient avec le développement régional; on vient avec des subventions aux industries. il y a une série de choses. et je regardais à tous les jours les demandes qui sont faites ou les suggestions qui sont faites. rien ne se perd, puis rien ne se crée dans ce bas monde. et c'est clair que si nous devions mettre 2 %, 3 %, 5 % des coûts des projets dans un fonds de développement régional, bien, évidemment, c'est parce qu'on va récupérer ces 2 %, 3 % ou 5 % de notre société québécoise, soit par la tarification ou par d'autres moyens pour percevoir des fonds. jusqu'où on veut qu'on aille, hydro-québec, en termes de la mission de développement économique? on reconnaît qu'on a un rôle à jouer et qu'on doit s'intégrer dans cette dynamique de développement régional. mais je pense qu'il y a des limites à ça, sinon, c'est la société québécoise qui va payer pour. peut-être que c'est ça, mais on croit que c'est mieux de générer des fonds additionnels pour le gouvernement du québec qui, à son tour, avec les élus, peuvent en faire la redistribution à bon escient, suivant les politiques de ce gouvernement-là. vous savez, nous générons 1 300 000 000 $ de profits à l'intérieur de la société hydro-québec, actuellement. nous en versons, comme vous le savez, quelque 600 000 000 $ au gouvernement sous forme de redevances, taxes et droits. évidemment, dans les équilibres du gouvernement, les 700 000 000 $ de profits nets sont, bien sûr, des profits comme dans n'importe quelle autre entreprise, mais c'est clair, que si on verse 5 % ici, 3 % là, ça va diminuer quelque part et, à ce moment-là, le tarif va augmenter ailleurs, et puis on va être dans une situation où, finalement, on jouera le rôle d'agent de développement économique parallèle à celui de fournisseur de l'énergie hydroélectrique.

Nous, on pense que c'est intéressant dans la mesure où on a mis 1 % ou 2 % au niveau de la valeur environnementale qu'on veut élargir au niveau du développement économique, parce qu'on pense que, au cours des dernières années, on a eu des suggestions intéressantes de la part des régions sur des projets qui dépassent les projets à nature environnementale. Mais, aller participer à un fonds de développement régional, on aurait beaucoup d'hésitation, je pense, à cause des implications financières que ça occasionne pour l'entreprise et pour le Québec.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Drouin. Cela met fin à la première période de 30 minutes allouée du côté du gouvernement. Je vais donc maintenant passer du côté de l'Opposition et c'est Mme la députée de Taillon qui va donc être la porte-parole pour l'Opposition. Madame.

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Ça me fait plaisir de vous saluer à mon tour. Je voudrais, bien sûr, d'abord, excuser mon collègue, le député de Joliette, leader de l'Opposition et porte-parole en matière énergétique, parce qu'il est retenu en Chambre, à ce moment-ci, ce qui explique qu'il ne soit pas là.

M. Jolivet: II critique le gouvernement.

Mme Marois: Qui en a bien besoin! Cela étant dit, je vais donc tenter de prendre la relève avec mes collègues et voir avec vous à soulever un certain nombre de questions qui nous préoccupent de ce côté-ci de la table et sur lesquelles nous aimerions pouvoir revenir avec vous. Je pense que, le président de la société me connaissant un peu, il ne va pas s'étonner de ma première remarque. Et ce sera une remarque, parce que je sais que, demain, on va aborder la question, mais je ne peux pas m'empêcher de la faire. Je regarde la liste des personnes qui l'accompagnent. Je vois 11 personnes qui semblent toutes aussi compétentes et représentatives de l'institution, je n'ai aucun doute à ce sujet, mais qui sont tous bien cravatés, puisque ce sont tous des vice-présidents et, dans ce sens-là, je trouve que d'une année à l'autre, parce que j'ai eu l'occasion d'être là à d'autres moments, aussi, à cette commission, il n'y a pas beaucoup de changement. Je sais qu'on va revenir sur cette question demain. Peut-être que le président pourra nous parler longuement des programmes qui s'appliquent au sein de la société et qui permettent à des femmes d'occuper des postes de responsabilité dans son organisation. N'est-ce pas? Je pense que ce serait intéressant que les gens de la commission sachent ce qu'il fait à cet égard au sein de son organisation.

Consensus issus de la consultation

Cela étant dit, j'aimerais revenir un petit peu sur les consensus qui se sont dégagés par les différents mémoires qui ont été présentés. Je vais juste rapidement en mentionner un certain nombre et, par la suite, je viendrai avec des questions un petit peu plus pointues.

D'abord, je pense que ça fait quasi unanimité, je dirais, le fait qu'on souhaite un débat élargi sur toute la problématique énergétique. Je suis bien consciente qu'Hydro-Québec a une grande responsabilité, bien sûr, dans la contribution à ce débat que nous pourrions avoir, mais, évidemment, un certain nombre de groupes qui sont venus ont mentionné — et je pense que c'était légitime de le faire — que ça risquait de mettre la société, jusqu'à un certain point, dans un conflit, si on lui demandait à elle de tenir ce débat-là ou de l'engager, et, donc, qu'on devait le dégager peut-être de la société, mais que ce débat ait lieu, sur tout ce qui concerne notre avenir énergétique.

Un deuxième élément a fait largement consensus — consensus, disons... oui, consensus, mais pas unanimité, bien sûr — la création d'une commission sur l'énergie. Là aussi, ça a été présenté par un bon nombre d'organismes qui ont défendu des mémoires devant nous.

Vous avez abordé tout à l'heure la planification intégrée des ressources. Ça, c'est venu d'une façon à peu près systématique, de la part des groupes qui se préoccupent, bien sûr, d'environnement, mais d'économie d'énergie, de planification en général, au plan énergétique. J'y reviendrai; je sais que vous l'avez

abordé dans votre présentation avec la ministre, mais j'aimerais qu'on pousse un petit peu plus loin.

Une certaine incrédulité vis-à-vis les objectifs d'efficacité énergétique. On nous a redéposé des documents aujourd'hui. Évidemment, vous comprendrez qu'on n'a pas pu les lire. Vous nous les avez présentés sommairement. Je reviendrai avec des éléments un petit peu plus précis. Évidemment, l'impopularité du tarif saisonnier pour la grande industrie, on l'a abordée un petit peu. L'isolation thermique des bâtiments, la ministre y faisait référence tout à l'heure. Plusieurs mémoires ont appelé au renforcement de normes d'isolation qui serait un des meilleurs moyens d'économiser l'énergie. Vous avez parlé du fait qu'on ait une approche peut-être plus ciblée qu'universelle à cet égard-là. Ce serait intéressant, peut-être, d'y revenir. La question de la rentabilité des contrats à partage de risques. Je sais que vous nous avez déposé, là encore, des documents. Mais, si je ne m'abuse, la demande portait — et là, évidemment, je suis arrivée à la commission après qu'elle eut débuté ses travaux, à titre de porte-parole en matière environnementale, donc il y a peut-être un certain nombre d'informations qui m'ont échappé au départ. Mais il me semble que mon collègue avait souhaité qu'on ait des prévisions quant à l'impact des contrats jusqu'à l'an 2000, si je ne m'abuse. Alors, ce serait intéressant que vous nous en reparliez. Je vais revenir avec des questions précises sur cela.

Évidemment, le président de la société, M. Drouin, en faisait état, les ponctions gouvernementales qui sont faites, soit sous forme de taxe sur le capital, ou frais de garantie imposés par le gouvernement, qui ont un impact sur la marge de manoeuvre d'Hydro-Québec. Des doutes ont été exprimés aussi quant au maintien des tarifs sur le niveau d'inflation. Ce sont, je pense, un certain nombre de consensus ou d'éléments qui sont revenus très largement appuyés par un certain nombre de groupes. Sur chacune de ces questions, je pourrai revenir.

Ma première question, plus globale, c'est évident qu'Hydro-Québec ne peut pas répondre à toutes les demandes qui sont présentées là, et on peut le comprendre aussi. Mais, ce que je voudrais savoir, puisque c'est évident que vous avez procédé à l'analyse de chacun des mémoires et, de toute façon, c'est votre responsabilité de le faire et ça va de soi: Qu'est-ce que vous avez l'intention — si vous avez l'intention de le faire — de modifier très concrètement — et je dis «très concrètement» — dans votre proposition de plan de développement pour tenir compte, justement, de certaines des recommandations des groupes qui sont venus nous faire des propositions ici? (16 h 30)

M. Drouin: Écoutez, ce que j'ai mentionné au début de notre présentation, c'est que nous avons, bien sûr... Notre proposition était sur la table, il y a des suggestions qui sont faites. Bien sûr, le gouvernement doit réagir à ces commentaires qui ont été faits et à notre proposition. Nous, on se dit prêts, et nous examinons l'ensemble des suggestions qui sont faites pour s'assurer que, dans la mesure du possible, les suggestions qui peuvent être faites à des coûts acceptables seront incorporées dans la mesure où on y croit.

Il y a des choses sur lesquelles on a répondu très clairement. La substitution, on n'y croit pas. Si la politique gouvernementale en matière d'énergie devait changer et nous amener à la substitution, on devra réviser notre position. Mais il y a des choses sur lesquelles c'est clair en termes de position qu'on a prise. Sur le reste, nous demeurons tout à fait ouverts à des discussions avec la ministre de l'Énergie et le gouvernement relativement à des dossiers qui ont été présentés ici, en commission parlementaire. Nous en ferons l'étude, nous compléterons cette étude à l'aide des présentations qui ont été faites, parce que plusieurs des présentations ajoutaient aux mémoires qui avaient été d'abord présentés, et on fera, à ce moment-là, le nécessaire pour s'assurer que l'on puisse implanter ce qui est possible d'implanter et ce qui, bien sûr, est utile d'implanter.

Mme Marois: Je comprends bien votre réponse, mais elle ne me satisfait pas. Bon. Vous nous dites: II y a des choses auxquelles on ne croit pas: la substitution. Parfait, c'est clair. On n'y croit pas; la démonstration ne nous apparaît pas suffisante, etc. C'est ce que vous nous dites. Parfait. Mais il y a des choses précises, et je vais revenir sur un des points que je soulevais tout à l'heure dans mon intervention, l'impopularité du tarif saisonnier pour la grande industrie.

M. Drouin: On ne l'a pas implanté. Alors, il n'est pas question pour nous autres, à ce moment-ci... On a dit qu'on en ferait la discussion avec la grande industrie et qu'il n'était pas question pour nous autres de l'implanter au mois de mai tel que prévu. Donc, c'est un dossier qui est tout à fait, tout à fait en discussion. Pour nous, ce serait très malaisé d'implanter un tarif qui ne serait pas accepté par un groupe de consommateurs. On pense qu'il y a quelque chose d'intéressant, on pense qu'il y a une neutralité dans ce tarif-là et qui permet de replacer certaines charges dans le temps à travers l'année. Mais, écoutez, si ce n'est pas possible, on ne le fera pas. Par conséquent, nous, on l'a mis dans le plan comme étant une possibilité et on a renoncé à l'implanter compte tenu de la consultation qu'on a faite par la suite.

Mme Marois: Donc, dans ce sens-là, vous nous dites, par exemple sur ça: On va être attentifs aux représentations qui ont été faites, et cela nous amène déjà à dire: On ne l'implantera pas maintenant. Vous gardez en tête, cependant, que vous pourriez le faire, mais suite à des discussions.

M. Drouin: Oui, et ça, Mme... M. le Président, pardon...

Le Président (M. Gobé): ...M. le président. Mme Marois: Moi, ça ne m'embarrasse pas

tellement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Drouin: Et ça, dès l'énoncé que nous avons fait lors de la publication du plan de développement, nous avions déjà annoncé nos couleurs là-dessus. On fait une expérience-pilote dans le domaine de cette tarification au niveau domiciliaire et, au niveau industriel, on consulte et on veut s'assurer que l'on puisse soit convaincre nos clients que c'est une bonne chose ou soit réajuster notre tir.

Planification intégrée des ressources

Mme Marois: D'accord. On va passer à un autre élément qui a aussi été, à chaque fois je pense, présenté par tous les groupes préoccupés par les questions environnementales, mais préoccupés aussi par les questions d'économies d'énergie et d'alternatives au choix que l'on pourrait faire, et c'est cette fameuse planification intégrée des ressources.

Tout à l'heure, vous avez répondu à la ministre à cette question-là en mentionnant — là, j'ai pris un certain nombre de notes — que vous étiez engagés dans cela, dans le domaine des external ités: Nous sommes d'accord, on n'a pas cependant atteint tous les degrés de recherche utiles que l'on souhaiterait avoir pour répondre vraiment aux exigences. Mais vous êtes restés assez vague. Je vais reprendre l'exemple que vous donniez tout à l'heure, ou c'était un de vos vice-présidents qui parlait de l'Ashuapmushuan et du choix par rapport à la Péribonka, que soulevait d'ailleurs la ministre. Est-ce que pour vous, dans une approche intégrée de planification des ressources, cela va de soi que, si on est confrontés à cette réalité-là dans la région à laquelle on songe... la possibilité, avec des contraintes, de se tourner vers la Péribonka versus le harnachement de l'Ashuapmushuan, avec, aussi, toutes les contraintes qu'on y rencontre, présentées, bien sûr, par les groupes, mais qui sont des contraintes réelles dans le sens où on veut conserver un domaine patrimonial important dans ce secteur-là qui peut avoir des retombées touristiques... ça rentre, entre autres, dans l'évaluation, évidemment, des externalités, à mon point de vue, et dans la planification intégrée des ressources. Mais, par exemple, dans la perspective du projet qui est là, est-ce que vous êtes prêts ou est-ce que vous allez le faire, déposer, par exemple, les études qui pourraient concerner la Péribonka, en termes d'alternatives à un choix entre l'Ashuapmushuan, rien ou la Péribonka?

M. Drouin: M. Couture.

Mme Marois: C'est à titre d'exemple que je pose la question, sauf que c'est un cas réel auquel vous êtes confrontés.

M. Couture: M. le Président, c'est un très bon exemple de problème de planification que nous rencon- trons et, dans chaque cas de projet, nous allons de plus en plus vers ce qui est appelé la planification intégrée des ressources. Nous n'osons pas dire actuellement que nous le faisons de façon intégrale, parce qu'il y a des problèmes qui sont associés à la valeur patrimoniale, à la beauté des sites, à la pêche, à l'utilisation pour d'autres fins que des ressources...

Mme Marois: Oui, à des fins touristiques, à des fins de loisirs, etc.

M. Couture: ...énergétiques, le canot, tout ce que voulez, et qui sont très difficiles à chiffrer ou à balancer, si vous voulez, dans un bilan avantages et inconvénients, contre d'autres données qui sont de nature technique et économique. Mais nous poussons cette analyse le plus loin possible actuellement et nous faisons des comparaisons entre les projets.

C'est sûr que, dans notre approche, nous essayons tout d'abord de faire une mitigation des impacts environnementaux. Alors, si vous avez des problèmes reliés à la pêche, nous avons des approches techniques pour s'assurer que la productivité du territoire est maintenue même, si vous voulez, avec le développement des ressources. Si nous regardons l'aspect patrimonial, il y a des endroits, des rivières qui sont réservées pour fins patrimoniales et qui comportent des développements hydroélectriques. Alors, ce n'est pas tout à fait incompatible, quoique, à première vue, on pourrait peut-être penser que ça l'est.

Alors, nous essayons de mettre tout ça en balance pour avoir une image complète. Et vous savez que vous avez un processus qui se veut une étude d'impact et qui doit mettre tous ces éléments-là sur la table pour en discuter publiquement. La plupart des grands projets aujourd'hui sont l'objet de discussions avec le public, de sorte qu'on puisse avoir une décision qui est une décision, parfois, de société, à savoir si la rivière peut être l'objet d'un aménagement hydroélectrique. Mais nous croyons que, pour prendre la décision, il faut surtout attendre le résultat des études. Pour l'Ashuapmushuan, les études de l'avant-projet phase II ne sont pas terminées, donc nous n'avons pas mis sur la table, si vous voulez, tous les éléments qui nous permettraient, de façon rationnelle, de prendre une décision et de comparer tous les aspects qui doivent être considérés dans une approche de planification intégrée, si on va jusque-là... regarder, entre autres, les mesures de mitigation qui sont proposées et qui font l'assentiment des experts, des experts en pêche ou en valeurs patrimoniales, et qu'on puisse apporter un jugement avec tous les éléments de ce problème-là sur la table. Alors, nous allons faire ça pour l'Ashuapmushuan avec les études de l'avant-projet phase II et nous ferons la même chose, si c'est intéressant, avec la Péribonka, de sorte qu'on puisse comparer, qu'on puisse avoir tous les éléments et prendre les décisions appropriées.

M. Drouin: M. le Président, si je peux juste

ajouter un élément en réponse à la question. Le Président (M. Gobé): Oui.

M. Drouin: La planification intégrée des ressources, pour nous, et, dans ce sens-là, c'est ce à quoi nous voulons adhérer, c'est qu'au lieu de tenir compte uniquement de la valeur économique d'un projet il y a d'autres valeurs dans notre société à tenir compte, et c'est là-dessus que nous sommes disposés à travailler à l'intégration de ces valeurs-là. Je disais que, par exemple, dans l'étude des externalités, qui est une partie intégrante de la planification intégrée des ressources, l'on tient compte, aux États-Unis, par exemple, des émissions de gaz carbonique. Bien, on pourrait trouver, à l'égard des projets hydroélectriques, des valeurs à respecter et qui amèneraient une quantification plus précise du préjudice causé par un projet de cette nature-là. Alors, ce qui est bien clair dans tout ce qui est ressorti des mémoires, c'est qu'on doit s'en aller vers la planification intégrée des ressources, tenir compte des valeurs autres qu'économiques, c'est-à-dire les valeurs environnementales et les valeurs sociales, et aussi tenir compte de l'ensemble des ressources disponibles pour satisfaire les besoins, c'est-à-dire les économies d'énergie ou l'efficacité énergétique, et les autres sources d'énergie: qu'on parle du gaz, du charbon, de l'huile ou de quelque autre source d'énergie, qu'on parle des énergies renouvelables: les éoliennes, le solaire, etc., et d'intégrer l'ensemble de ces disponibilités-là pour que le choix de société soit à son meilleur.

Mme Marois: Je vous suis tout à fait, je suis tout à fait d'accord avec ce que vous nous apportez et je pense que ça rejoint les points de vue qui ont été émis ici auxquels nous croyons aussi. Maintenant, est-ce qu'on peut s'entendre, ou est-ce que je peux vous entendre sur cela, à savoir que, dans tout nouveau projet qui pourrait se présenter, il y aura cette étude des externalités et cette véritable planification intégrée des ressources, en termes d'alternatives, projet par projet?

M. Drouin: Évidemment, l'intention est de s'en aller vers la planification intégrée des ressources, mais tout est relié au degré de connaissance qu'on a relativement aux projets qui sont envisagés ou aux externalités reliées à ces projets-là, qui nous permettrait d'avoir une quantification plus précise. Dans ce sens-là, je pense que l'intention est là. Mais, de dire que nous serons là demain matin, je pense qu'il y a un chemin à parcourir. M. Dubeau, qui est notre vice-président à l'environnement, pourrait peut-être ajouter à l'élément que je viens de mentionner.

M. Dubeau (Daniel): M. le Président...

Le Président (M. Gobé): M. Dubeau, vous avez la parole. (16 h 40)

M. Dubeau: Merci. M. le Président, il est impor- tant de rappeler qu'Hydro-Québec réalise ses projets d'équipements conformément aux directives émises par le ministre de l'Environnement du Québec et, dans le cadre des avant-projets, donc, nous étudions les impacts potentiels d'un projet, nous tentons, bien sûr, de les quantifier en fonction de les atténuer, et les budgets requis pour les mesures d'atténuation font partie des coûts des projets, de sorte que beaucoup d'externalités sont déjà internaiisées. Il reste, cependant, des choses comme, par exemple, le paysage. Il n'existe pas une façon connue, selon nous, une méthodologie crédible pour évaluer la valeur d'un paysage. Donc, il y a des choses comme ça qui sont difficilement quantifiables et sur lesquelles nous voulons travailler pour tenter de définir des méthodes qui seraient crédibles aussi pour l'opinion publique, pour qu'ils puissent suivre le raisonnement selon lequel on va tenter également de tenir compte de ces choses-là, qui n'ont pas en soi, a priori, une valeur économique.

Mme Marois: Alors, c'est intéressant, ce que vous soulevez là, parce que, effectivement, il y a eu des groupes qui sont venus, entre autres, sur les questions... c'est-à-dire de s'assurer d'avoir de l'énergie disponible par des moyens alternatifs, et, entre autres, la question des éoliennes, évidemment, est venue à quelques reprises. Et un certain nombre de questions qui ont été soulevées ici ont fait état du fait que l'on changerait un peu le paysage et que ça risquait peut-être de créer un certain nombre d'encombrements visuels qui n'étaient pas nécessairement, non plus, souhaitables.

M. Dubeau: Et du bruit.

Mme Marois: Bon. Alors, ça, c'est bien évident aussi. Mais, dans ce sens-là, c'est d'autant plus important qu'on commence à développer et qu'on consolide les outils qu'on a pour être capables d'évaluer de tels impacts, avec, bien sûr, des limites, tout étant relatif, dans un certain nombre de secteurs, je suis bien consciente, mais, au moins, on en tient compte. Et, quand on a à prendre la décision, on la prend dans un contexte où on a la meilleure information possible, compte tenu des données que l'on possède à ce moment-là.

M. le Président, si vous permettez, j'ai un certain nombre d'autres questions. Comme il reste peu de temps, j'ai mon collègue qui voudrait prendre quelques moments sur cette demi-heure, maintenant, et je reviendrai sur un autre thème...

Le Président (M. Gobé): Oui.

Mme Marois: ...lorsque j'aurai à nouveau la parole après la deuxième séance de débat.

Le Président (M. Gobé): Oui. D'autant plus qu'à la lecture de l'horloge je vois qu'il vous reste à peu près cinq minutes, ce que M. le député Laviolette pourrait faire. Par la suite, le député de Drummond a 10 minu-

tes, ça nous amène vers 17 heures. Donc, nous pourrons recommencer après, 25, 25, 10, pour le député de Drummond...

Mme Marois: Ça va.

Le Président (M. Gobé): Quelques mots, pour terminer, Mme la ministre... Ça va très bien comme ça.

Mme Marois: D'accord.

M. Jolivet: II reste à peu près huit minutes?

Le Président (M. Gobé): Donc, M. le député de Laviolette, je vous passe la parole.

M. Jolivet: Huit minutes à peu près? Vous m'avez dit: Cinq minutes.

Le Président (M. Gobé): Sept minutes et demie à huit minutes.

Programme de cogénération

M. Jolivet: O.K. Moi, je vais aller sur un dossier qui a terminé la matinée, la cogénération. Moi, j'ai cru comprendre qu'on parlait, à Hydro-Québec, de la difficulté de la cogénération dans la mesure où, en termes de coûts, on ne possède pas, pour quelqu'un qui est une compagnie qui utilise la cogénération — je parlerai du gaz à ce moment-là — la possibilité de déterminer le prix du gaz à long terme. Puis, d'un autre côté, à côté de ça, le fait que la compagnie qui produit, à partir de ça, la vapeur n'est pas nécessairement la compagnie qui est celle qui l'achète. Alors, à partir de ça, on arrive, aux deux extrémités, à avoir un non-contrôle, à la fois au niveau de l'achat et de la vente.

Dans ce contexte-là, les gens sont venus nous dire ce matin que, là, Hydro-Québec demandait tellement de choses compliquées par rapport à ce qui existe ailleurs qu'effectivement vous avez raison de dire que ça ne marchera peut-être pas à long terme au niveau du Québec. Ils nous disaient que, dans les contrats, on les obligeait à obtenir de la part du vendeur de gaz un long terme de 15 ans et qu'en conséquence il est évident qu'ils ne peuvent pas agir de cette façon-là. Alors, il y a des gens qui ont parti la cogénération et qui, au bout de la course, se retrouvent à n'avoir aucun contrat avec vous autres, puis ils sont toujours sur la question fluctuante quant au prix «spot» du gaz.

Alors, moi, j'aimerais avoir votre avis. Vous avez certainement eu un rapport de ça ce matin. J'aimerais savoir quelles sont les raisons pour lesquelles HydroQuébec demande de telles conditions pour si peu en termes de mégawatts ou de kilowatts.

M. Drouin: M. Bolduc va répondre à cette question.

M. Bolduc: Oui. M. le Président, le but du programme de cogénération dans lequel Hydro-Québec a choisi d'évoluer, tel que décrit au plan de développement, c'est d'en faire une source d'appoint à son programme de centrales hydroélectriques. Ce choix-là a été fait à partir de représentations, et d'études, et de promesses de différents organismes associés au gaz naturel aux entreprises qui utilisent la vapeur associée à la cogénération, et à partir de l'exemple qui nous est donné un peu partout en Amérique du Nord à l'effet que cette source d'énergie peut être concurrentielle au coût évité d'Hydro-Québec dans ses projets hydroélectriques. Sur la base de ces attentes qui ont été créées par les promoteurs de la cogénération, nous avons indiqué un prix, un tarif auquel Hydro-Québec serait également, au point de vue économique... serait égal quant à un choix de développement hydroélectrique ou de cogénération. Et c'est sur cette base-là que le tarif offert aux cogéné-rateurs a été établi. Déjà, les paramètres économiques ont évolué et, avec la baisse des taux d'intérêt et la baisse des prévisions d'inflation, le tarif que nous offrons aux cogénérateurs comporte un certain avantage, un certain bénéfice additionnel. Parce que, si nous avions à refaire aujourd'hui le calcul, nous aurions probablement à ajuster, à la baisse même, quelque peu ce tarif-là.

M. Jolivet: Mais ma question va bien plus...

M. Bolduc: Mais une des bases de cette approche-là, c'est que les développeurs, les promoteurs de la cogénération nous ont dit: Nous pouvons obtenir un prix du gaz à long terme garanti, et c'est à cause de ça que c'est concurrentiel à un projet hydroélectrique où tous les coûts sont dans la construction, et qu'il n'est plus sujet, puisqu'il n'y a pas de combustible, par la suite, ou il y a de très faibles frais d'exploitation, il n'est plus sujet aux aléas des fluctuations futures des prix de combustible. Et la plupart des grands développeurs actuellement en négociation avec nous ont négocié ou continuent de négocier, comme ça s'est fait ailleurs en Amérique du Nord, des contrats où le gaz est indexé de façon très limitée et très contrôlée et qui leur permet de nous offrir un tarif qui est concurrentiel avec une source comme l'hydroélectricité.

M. Jolivet: Mais qu'est-ce qui vous oblige à demander d'avoir un contrat de 15 ans sur l'achat du gaz, au moment où les gens disent: On peut jouer sur la fluctuation des prix plutôt que sur un taux fixe qu'on ne peut pas nous garantir, d'une certaine façon, parce qu'il y a des gens qui ne pensent pas de même? (16 h 50)

M. Bolduc: Tout ce que nous demandons aux promoteurs, c'est de nous garantir, à nous, un tarif fixe pour l'électricité qu'ils vont nous vendre. S'ils sont prêts à prendre le risque d'acheter le gaz sur un marché fluctuant et que les institutions financières et les banques peuvent les financer sur cette base-là, Hydro-Québec ne les oblige pas à avoir un contrat de gaz fixe. Tout ce-

qu'on les oblige à faire, c'est de s'engager et donner des garanties financières de pouvoir nous livrer pendant 15 ans l'énergie à un prix prédéterminé, à ne pas venir, dans 5 ans ou dans 10 ans, si les prix du gaz explosent, voir Hydro-Québec en demandant: Voulez-vous doubler vos tarifs parce qu'on n'arrive plus? Si on s'expose à ce genre de situation là, toute notre politique de cogénéra-tion devient faussée en termes de choix économique par rapport à des projets hydroélectriques où le coût est garanti. Pour nos clients, on ne peut pas prendre de chances. On fait un choix qui implique les combustibles et on offre un prix qui va permettre de garantir à nos clients qu'on n'aura pas des hausses subites de tarif de cogénération qui vont se retrouver dans les tarifs d'électricité.

M. Jolivet: Dans leur argumentation, ils vont plus loin en disant... Ils demandent de garantir des choses que même Hydro-Québec ne garantit même pas, puisque Hydro-Québec, sur Fhydraulicité — l'eau dans les barrages, ces choses-là... ça fait en sorte qu'ils nous demandent de garantir, sur une rivière qui pourrait avoir un problème une année, de le garantir pendant 15 ans. Ils disent: On ne peut pas faire ça, c'est impossible de garantir ce qu'Hydro-Québec ne peut pas même nous garantir.

M. Bolduc: On essaie de rendre les deux propositions égales, c'est-à-dire que, dans le cas des projets hydroélectriques, on inclut, dans nos programmes et dans nos coûts, des réserves pour couvrir les risques associés à ces projets-là, et, dans le cas du gaz, on ne demande rien d'autre qu'un service égal à un prix compétitif, autrement on ferait, encore une fois, subventionner par nos clients un choix non compétitif, et on est obligés d'amener des conditions que la plupart des promoteurs, actuellement en négociation avec nous, sont prêts à nous offrir. Je sais qu'il y en a certains qui ont des difficultés, mais les promoteurs qui ont négocié, qui ont planifié leurs projets sur la base d'une expérience et d'une ouverture aux différentes possibilités, actuellement... Et ce n'est que quelques promoteurs qui nous reprochent ces conditions-là. Les autres sont prêts à les rencontrer.

M. Jolivet: Mais vous imposez une pénalité s'ils n'entrent pas dans les conditions. Alors, ça veut dire que vous avez un moyen de tordre le bras.

M. Bolduc: C'est exact... Une voix: ...

M. Bolduc: ...mais, comme nous avons à peu près trois fois plus de propositions que nos besoins, je pense qu'il est sain, comme saine gestion, d'utiliser cette situation de concurrence pour obtenir les meilleurs contrats pour nos clients...

M. Jolivet: On reviendra.

M. Bolduc: ...puis les meilleurs tarifs à long terme.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Bolduc. Merci, M. le député de Laviolette. M. le député de Drummond, je vous passe la parole pour une dizaine de minutes.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, dans mes remarques préliminaires, j'avais dit que j'abordais cette commission-là en tant que représentant pas simplement des clients, mais des actionnaires aussi, de la circonscription de Drummond, d'Hydro-Québec. J'avais établi, d'entrée de jeu aussi, l'importance pour nous, les parlementaires, de faire en sorte qu'au sortir de cette commission Hydro-Québec ait encore de meilleures chances de devenir le vaisseau amiral du Québec comme elle a toujours été.

Il y a différentes facettes que j'aimerais toucher, j'aurais besoin de plus que 10 minutes, mais je vais essayer de mettre ça par blocs.

De la consultation à la concertation

Si je compare à 1990, lorsqu'on a eu la même commission, Hydro-Québec était dans un mode d'information. Je l'ai vue évoluer, à travers les mémoires qui nous ont été présentés, dans un mode de consultation de plus en plus, même s'il y a encore des imperfections. Mais elle devra aller plus loin, elle devra se mettre dans un mode de concertation. À partir de ces trois critères-là, c'est de cette analyse-là que j'essaierai de partir puis de regarder différents mémoires qui ont une importance, je pense, stratégique sur Hydro-Québec.

Alors, quand je regarde au niveau de votre plan de développement soumis, il y a un des paramètres qui est excessivement important, c'est le contrôle des coûts d'Hydro-Québec. Pour maintenir le point 8, c'est tout un défi. D'ailleurs, plusieurs mémoires nous l'ont fait remarquer, c'étaient surtout des gens venant de l'industrie qui sont habitués aux réductions de coûts, au contrôle des opérations. Ils nous ont admis que c'était excessivement difficile. Lorsqu'on veut contrôler les coûts, c'est-à-dire, il y a un outil qui est plus important, ce qui fait la force vive, finalement, d'une organisation, ce sont ses ressources humaines. Dans les mémoires qui nous ont été présentés ici par les porte-parole des cadres, ou des salariés, ou des employés d'Hydro-Québec, j'ai cru dénoter deux tendances: une qui était au niveau de l'information seulement, lorsqu'on descend de plus en plus vers le bas de l'organisation, puis il y en a une autre qui se dirigeait plus vers la consultation, lorsqu'on regardait les ingénieurs et les cadres. Moi, il m'apparaît que c'est un point faible dans le plan de développement d'Hydro-Québec au niveau des moyens de communication et au niveau des techniques qui auront à être utilisés pour faire en sorte que, du plus petit niveau jusqu'au P.-D.G. d'Hydro-Québec, tout le monde soit dans la même chaloupe à ramer dans la même direction. Alors, on a eu des mémoires ici qui nous ont présenté cette faiblesse-là. Je dois

vous dire que ça me préoccupe, peut-être par déformation professionnelle parce que, lorsque j'avais, un jour, un chapeau de privé dans des multinationales, aussi, j'ai toujours cru que la base, notre organisation, c'était notre force vive. Et si on n'est pas capables d'avoir un consensus à l'intérieur, puis un partage des objectifs à aller chercher, on se met dans une position de confrontation. Et si ça arrivait à Hydro-Québec, moi, je vois une vulnérabilité vers le maintien d'un de ces points majeurs qui est le maintien de 8.

Alors, j'aimerais savoir, M. le Président, à ce moment-ci, quelle action... Vous avez entendu les mémoires. Je sais que vous les avez lus. On vous en a fait la synthèse. Quels sont les moyens d'action qu'Hydro-Québec va s'assurer pour que tous, à l'intérieur de l'organisation, hommes et femmes d'Hydro-Québec, aient cette fierté de l'organisation et contribuent aux grandes réalisations de cet objectif-là?

M. Drouin: M. le Président, je pense qu'on est conscients des mémoires qui ont été présentés. On a eu même l'occasion de rencontrer le syndicat ou les deux syndicats qui ont présenté un mémoire au nom des ingénieurs et des chercheurs. C'est clair, et vous l'avez souligné, je veux dire, vous avez énoncé notre intention en posant votre question. On a parlé beaucoup de l'écoute des clients. On a systématiquement implanté l'écoute des clients. On a parlé de la Table des tables. On a parlé des consultations, de la consultation publique. Mais, au-delà de ça, il y a l'écoute des employés. Et c'est clair que ça fait partie de nos intentions au cours des prochaines années, comme ça l'a été dans le passé, de descendre plus bas dans la structure — tout notre dossier Défi performance, qu'on aura probablement l'occasion d'évoquer dans les journées qui suivent, contient les éléments très importants d'amélioration des processus — et, par conséquent, de retourner vers la base qui est la plus près de nos clients, et que ces employés-là de première ligne et ces cadres-là de premier niveau soient ceux et celles qui, au premier chef, sont à l'écoute de notre clientèle et nous permettent de satisfaire les besoins de la clientèle.

Alors, oui, notre intention et notre volonté, c'est de continuer cette écoute de nos employés, de s'assurer une plus grande collaboration de nos syndicats et de collaborer nous-mêmes avec eux dans toute la démarche. Si on devait — vous l'avez mentionné — faire un parallèle avec 1990, je pense qu'on verrait une nette amélioration, et on y voit une nette amélioration par rapport à la situation qu'on a vécue dans les années qui ont précédé le règlement du conflit de travail en 1990 et qui faisait en sorte que l'entreprise était dans un état très difficile. Alors, je pense qu'on a fait un grand progrès là-dessus, mais on doit continuer.

M. St-Roch: Un autre volet, c'est au niveau de l'image d'Hydro-Québec. Je pense qu'il y a eu de l'amélioration aussi au niveau de la diffusion et de la vulgarisation de l'information, surtout au niveau de la protection de l'environnement et au niveau des connais- sances accumulées. Moi, je demeure encore convaincu qu'il va falloir qu'Hydro-Québec fasse davantage encore pour vulgariser cette information-là, pour qu'on soit mieux en mesure de départager, à travers les groupes d'écolos, qui dit blanc, qui dit noir.

Mais il nous est apparu aussi et surtout à l'intérieur de cette planification intégrée et des externalités qui vont être de plus en plus en vogue... moi, je crois détecter qu'il y a une faiblesse. D'ailleurs, le Groupe de recherche en éthique environnementale nous l'a clairement indiqué, plus on va s'éloigner vers les externalités, plus on va vouloir dessiner, évaluer ce que c'est, une rivière patrimoniale, ce qu'elle va valoir dans 75 ans ou 100 ans, alors qu'il nous manque énormément de connaissances à l'heure actuelle au niveau des comportements des sociétés... Ce qu'on remarque, et je pense que vous le remarquez aussi à travers votre consultation, c'est une fragmentation de l'opinion des collectivités et des consensus... réunissent de moins en moins de personnes. Si vous avez le plus gros pourcentage à 38 %, ça va être difficile de faire un consensus, d'avoir un projet. Alors, il nous est apparu qu'il faudrait qu'il y ait de la recherche de faite. On nous a mentionné des sommes, 500 000 $ sur une période de 10 ans, pour être capable d'aller détecter, puis être capable de se développer des outils qui pourraient être avantageux pour le Québec. Alors, je sais que ce n'est pas simplement la responsabilité d'Hydro-Québec, mais, au niveau de la recherche, c'est un domaine sur lequel j'aimerais vous entendre réagir, puis combinez à ça aussi... (17 heures)

Lorsque nous avons eu le mémoire de l'Université de Montréal, il nous a été mentionné qu'une des critiques qu'on faisait envers Hydro-Québec, malgré qu'il y ait de très bonnes relations, encore là, qui étaient peut-être celles du député de Drummond aussi, en même temps... c'est que vous avez tellement de connaissances accumulées que, dans bien des domaines, bien des secteurs, vous étiez les chefs de file, mais que c'était excessivement difficile d'avoir accès à ces banques de données pour être capable de former d'autres jeunes. En admettant, puis ils l'ont faite, la réserve, puis on l'a fait faire aussi, qu'il y a des choses qu'Hydro-Québec se doit de garder, parce que c'est quand même son patrimoine industriel, puis qu'elle est quand même en compétition, alors que c'est normal qu'il y ait des avantages, mais qu'il y aurait beaucoup plus d'ouverture, puis, là, je ne parle pas simplement d'environnement, je parle d'une façon globale au niveau des acquis d'Hydro-Québec.

Le Président (M. Gobé): M. Drouin, si vous voulez répondre à la question du député de Drummond.

M. Drouin: Je pense que le député de Drummond a dit des choses qui sont tout à fait exactes, et Dieu sait que les ententes que nous avons avec les universités à travers le Québec, et pas juste l'Université de Montréal... On a des chaires dans différents secteurs: en environnement; à Sherbrooke, le béton; à l'Université

de Montréal, c'est autre chose. Je pense qu'Hydro-Québec ne demande pas mieux que de partager énormément ses connaissances avec les universités et l'ensemble des écoles spécialisées du Québec, soit en environnement, soit en génie. Je suis surpris un peu de l'énoncé de l'Université de Montréal, mais, tu sais... Je regarde toute la collaboration qu'on a avec l'École polytechnique, je veux dire, c'est presque en constante communication à tout point de vue et à tout niveau. Avec l'Université du Québec à Montréal. Avec McGill, on a plusieurs projets en éthique environnementale, en santé environnementale, on a énormément de projets. Avec l'Université Laval.

Alors, moi, je ne peux que répondre très positivement à ce que vous avez énoncé en disant: Oui, nous sommes tout à fait disposés à partager les connaissances, puisque, dans notre mission, c'est justement de s'assurer que notre «know-how» québécois puisse être exporté via les universités, via les maisons d'enseignement ou encore les firmes d'ingénierie ou toutes les industries qui sont installées au Québec et qui travaillent avec nous dans des domaines très spécialisés.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, M. Drouin. Le temps est dépassé, M. le député de Drummond, mais vous aurez l'occasion de revenir pour un autre 10 minutes, un peu plus tard. Je vais donc maintenant passer la parole à Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources et vice-première ministre. Il vous reste, madame, 23 minutes environ.

Mme Bacon: Au niveau des retombées économiques, l'Association de la construction du Québec s'est montrée préoccupée par les retombées économiques générées par les projets d'Hydro-Québec et cette Association-là nous a souligné alors l'importance qu'Hydro-Québec prenne en considération l'organisation fragmentée des entrepreneurs en construction et s'adapte à leur réalité. Une des pistes pour ce faire réside dans le fractionnement des contrats et, selon l'Association, cette façon de procéder permettrait de qualifier un nombre plus important d'entrepreneurs se trouvant présentement exclus des processus d'adjudication en raison de la taille même des contrats, et c'est une approche qui accentuerait considérablement les retombées économiques régionales. Concrètement, est-ce que vous pourriez nous préciser de quelle façon Hydro-Québec prend en compte la réalité exposée par cette Association et comment vous pouvez adapter vos pratiques?

M. Couture: M. le Président, nous avons ces demandes de fractionner les contrats pour, entre autres, privilégier les petits entrepreneurs et les entrepreneurs en région. Nous avons des demandes, aussi, de la part des entrepreneurs un peu plus forts qui voudraient que nous ayons une industrie de la construction au Québec qui soit robuste et qui puisse s'attaquer à des projets, disons, entre 50 000000$ et 100000000$. Lorsque nous regardons un grand projet, nous essayons de répartir, si vous voulez, les contrats pour être capables de satisfaire l'industrie en général. Ça prend des contrats de plus grande envergure pour une quantité d'entrepreneurs québécois qui se servent de nos projets comme base pour aller travailler à l'extérieur et développer une expertise québécoise, et on ne peut pas négliger, si vous voulez, cette classe d'entrepreneurs, et ça prend aussi beaucoup de contrats, peut-être plus petits, pour que certains des bénéfices restent en région et pour qu'on encourage d'autres entrepreneurs à progresser graduellement vers des contrats plus gros. Alors, nous faisons un effort concerté de regarder l'ensemble d'un projet pour être capable de satisfaire à la fois les différentes classes d'entrepreneurs qui existent au Québec.

La rivière Saint-Maurice

Mme Bacon: Vous connaissez la Corporation de gestion du développement du bassin de la rivière Saint-Maurice.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bacon: C'est un organisme de concertation qui regroupe les principaux intervenants économiques et sociaux associés au développement de cette rivière. Vous saviez bien que vous ne vous en échapperiez pas, de cette question-là. Alors, il y a des députés, des municipalités, des MRC, des communautés autochtones, des entreprises. Des porte-parole de la Corporation, évidemment, sont venus nous faire part, à cette commission, de leur mécontentement à l'égard du comportement d'Hydro-Québec et, selon eux, Hydro-Québec agit de mauvaise foi en plus de semer la zizanie dans la région. On nous a dit qu'on jouait le nord contre le sud, le sud contre le nord. Nous avons été assez sensibles, quand même, aux propos tenus par la Corporation en raison des échanges sur le sujet, à l'occasion de la commission, et aussi avec les députés qui représentent la région et la direction d'Hydro-Québec. Le ton des conversations et des discussions était loin de refléter l'harmonie, ce qui semble être encore le cas un an plus tard, parce que ça fait longtemps que ça discute dans la Mauricie. Moi, j'aimerais savoir si vous êtes en mesure de commenter les déclarations qu'on a eues ici, à cette commission, là-dessus?

M. Drouin: M. Couture va répondre. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bacon: Oui, oui. Je m'attendais bien à ce qu'il le fasse.

M. Couture: M. le Président, nous avons fait beaucoup d'efforts pour rencontrer la corporation de développement régional du Saint-Maurice au cours des derniers mois et, de fait, nous avons ajusté nos actions à l'écoute de ce groupe qui représente quand même une importance considérable dans la région. Entre autres choses, nous avons suspendu les travaux de réfection du

projet La Gabelle, à la demande de la corporation de développement régional, pour étudier une alternative qui était de développer à la place un nouveau barrage, un nouveau site, au Rapide-des-Forges. Ces études sont en cours présentement, à la demande de la corporation. Nous avons rencontré aussi les gens qui sont plus concernés par le barrage La Gabelle, nous avons rencontré les gens qui sont concernés par le Haut-Saint-Maurice et nous essayons d'arrimer nos actions de telle manière qu'on puisse, à partir de la concertation avec le milieu, trouver des solutions raisonnables.

La difficulté est que le langage public est un petit peu différent du langage que nous avons en privé avec ces représentants du milieu. C'est bien entendu qu'actuellement il y a une demande ou des attentes considérables de la part de la corporation de développement régional pour que nous augmentions, si vous voulez, les montants de mises en valeur, que nous puissions les mettre à la disposition de la région même avant l'approbation des projets, ce qui nous crée certains problèmes, et qui voudrait que nous adoptions comme politique de rendre la rivière Saint-Maurice navigable. Alors, nous avons certaines hésitations, évidemment, à rencontrer toutes ces attentes qui impliqueraient des centaines de millions de budget pour Hydro-Québec. Alors, nous procédons aux études pour satisfaire la demande de la corporation et nous espérons qu'avec l'avancement de ces études le dialogue continue, qu'on pourra en venir à concilier des attentes sans doute raisonnables de la part du milieu, mais qui n'entraîneront pas nécessairement des centaines de millions de dollars en dépenses pour nous. (17 h 10)

Alors, nous continuons la concertation, nous discutons avec eux. Nous procédons, entre-temps, à certaines études. Nous essayons de faire plaisir à la corporation et nous essayons d'éviter certaines actions qui pourraient les mettre en rogne.

Mme Bacon: Peut-être une sous-question: Est-ce qu'il est vrai que les contrats qui sont donnés ne sont pas donnés dans la région de la Mauricie, mais sont donnés ailleurs, comme à Montréal, par exemple?

M. Couture: Nous avons une politique, évidemment, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pour les entrepreneurs, de répartir les contrats et de toujours regarder l'aspect régional lorsque nous sommes à l'intérieur d'une région donnée. Alors, les contrats, normalement, pour un projet donné, tiennent compte des capacités des firmes de la région et des compétences que nous retrouvons à travers toute la province. Nous évitons de vouloir cloisonner, si vous voulez, les régions, parce que, dans la région de Trois-Rivières en particulier, lorsqu'on regarde l'ensemble de la province, la quantité de contrats qui sont accordés aux firmes régionales est un peu plus élevée que la moyenne provinciale. Alors, dans l'ensemble, les firmes de la région travaillent partout en province. Mais quand on a un projet particulier comme, par exemple, l'étude du Rapide-des-Forges, on regarde en fonction des compétences, et je pense que M. Filion pourrait nous dire comment, dans ce cas précis, les contrats ont été répartis.

Mme Bacon: J'aurais envie de vous demander : Avez-vous trouvé des compétences dans la région? Parce que eux disent qu'ils en ont, des compétences.

M. Couture: Oui. Si je vous dis, au point de vue provincial, la moyenne de la région obtient plus de contrats...

Mme Bacon: Non, mais pour ces dossiers spécifiques, M. Couture.

M. Filion (Yves): Je peux répondre, M. le Président, à la question de façon plus précise. Nous avons, il y a deux ans, rencontré les intervenants de la région pour leur faire part de notre programme dans le Saint-Maurice et leur faire part également de quelles pourraient être les possibilités au niveau des firmes de la région et des entrepreneurs au niveau de la région. Alors, c'est évident qu'à l'étape où nous sommes actuellement dans le déroulement des travaux on ne peut pas parler, pour l'aménagement du Saint-Maurice, de retombées au niveau des entrepreneurs parce que les travaux ne sont pas commencés.

Mme Bacon: Au niveau des études.

M. Filion (Yves): Nous sommes à l'étape des études. Maintenant, à l'étape des études, je peux vous dire qu'il y a plusieurs firmes régionales qui, suite aux rencontres que nous avons faites et suite aux nombreuses offres de service qui nous ont été faites, à partir de l'expertise qu'elles ont, ont été amenées à collaborer aux études, et j'en ai ici une liste assez longue que je pourrais vous transmettre. Sur le complexe Shawinigan seulement, ça dépasse les 2 000 000 $ en termes d'études réalisées dans la région. Alors, c'est quand même, je pense, une contribution importante.

Maintenant, on essaie de le faire, ça, dans le domaine des expertises qui sont déjà existantes au niveau régional. Alors, je pense qu'on ne veut pas, non plus, mettre une firme dans une situation où elle va devoir développer une expertise pour un mandat particulier et que, par la suite, il n'y aura pas de continuité dans ce domaine-là, ce qui, au point de vue affaires, n'est pas nécessairement rentable et profitable. Donc, c'est clair qu'il y a une partie du travail qui va devoir être faite par des firmes à l'extérieur de la région, mais nous faisons également beaucoup d'efforts pour pouvoir retenir au maximum les firmes régionales. Dans certains cas, il y a même des consortiums qui se sont formés pour nous faire, de façon plus précise, augmenter leur force de travail et nous transmettre leur possibilité de participer au développement futur du Saint-Maurice. Alors, je peux vous dire qu'on est très, très ouverts et nous apportons beaucoup d'attention à cette réalité-là.

Projet de centrale thermique de Canatxx

Mme Bacon: Merci beaucoup. Si on regarde certains scénarios par rapport aux moyens de production, et encore et toujours dans le cadre de la commission parlementaire, il y a la société Canatxx Energy Ventures qui est venue ici exposer un projet de centrale thermique qu'elle propose à Hydro-Québec, et je pense que, si ma mémoire est fidèle, c'est depuis trois ans qu'elle nous dit être en discussion avec Hydro-Québec. Comment conciliez-vous l'analyse des coûts thermiques envers l'hydroélectricité, que vous faites en page 50 de la proposition du plan de développement, compte tenu des prétentions de la société Canatxx de produire de l'électricité à partir d'une centrale thermique au coût évité d'Hydro-Québec qui est basé sur le coût de l'hydroélectricité?

M. Drouin: M. Filion.

M. Filion (Yves): Je pense que ça dépend beaucoup de l'utilisation du projet en question de Canatxx. Je peux vous répondre aujourd'hui au niveau de l'utilisation du projet de Canatxx sur la base d'une réserve énergétique. Alors, je n'oserais pas aller dans les autres détails, dans les autres rôles, par exemple, fourniture d'énergie de base ou centrale de pointe, puisque nos études n'ont pas été faites.

De façon globale, je dirais qu'une centrale thermique qui est utilisée pour fins de réserve énergétique n'est pas tellement avantagée pour compétitionner un aménagement hydroélectrique qui, lui, est utilisé comme réserve énergétique. Et la raison est bien simple, c'est qu'une centrale hydroélectrique utilisée comme réserve énergétique permet de disposer, en période de forte hydraulicité, de surplus qui peuvent être vendus sur les marchés comme énergie excédentaire, ce qui entraîne une source de revenus intéressante, alors qu'une centrale thermique qui a comme vocation uniquement d'agir en termes de réserve énergétique implique un investissement important dès le début et un facteur d'utilisation qui est relativement faible, soit entre 20 % et 30 %, ce qui fait que ça prend vraiment, je dirais, un projet qui est très fortement optimisé et qui peut compter sur des coûts de carburant à très bon marché pour pouvoir compétitionner une centrale hydroélectrique au niveau réserve hydraulique.

Alors, cela étant dit, ce sont les grandes lignes, c'est sûr que le projet de Canatxx va devoir être évalué dans tous ses détails en fonction des différents paramètres et du rôle qu'il pourrait jouer éventuellement dans le réseau d'Hydro-Québec.

Mme Bacon: Mais, après trois ans, M. Filion, vous n'avez pas terminé votre évaluation?

M. Filion (Yves): Je pense que c'est plutôt Canatxx qui est aussi en évolution, dans le sens que le produit qu'elle offre à Hydro-Québec évolue en fonction de la définition ou en fonction des possibilités qui se clarifient et en fonction aussi de ce qu'Hydro-Québec est prête à payer en fonction du produit qui est offert. On sait que, dans les relations qu'il y a actuellement avec Canatxx — peut-être que M. Bolduc pourrait ajouter tout à l'heure — il y a une évolution au niveau de Canatxx en fonction de son produit également qui se fait actuellement.

Mme Bacon: Quand Hydro-Québec sera-t-elle en mesure de statuer sur les besoins de ce dossier-là?

M. Filion (Yves): II faudrait voir où en est le dossier. Je ne sais pas si...

M. Bolduc: Les propositions de Canatxx évoluent continuellement, et nous l'avons vu récemment, en fonction d'approches à l'approvisionnement en gaz. Le projet de Canatxx est intéressant dans la mesure où il pourrait offrir de l'électricité produite à partir de gaz, mais sur une base interruptible, c'est-à-dire seulement lorsque nous sommes en période d'hydraulicité faible, par exemple, et rester quand même rentable sans rien produire peut-être pendant un certain nombre d'années lorsque nous sommes en forte hydraulicité. Alors, Canatxx étudie, entre autres, des stockages de gaz dans certaines régions, entre autres au Michigan, et, à chaque fois que nous les rencontrons, ils nous amènent des possibilités nouvelles ou peut-être plus intéressantes. C'est un dossier en évolution constante qui, dans le cadre actuel de nos programmes, n'est pas perçu chez nous comme urgent, c'est-à-dire que le remplacement que ce projet pourrait faire dans nos programmes hydroélectriques se situe vers la fin de la décennie. C'est un projet qui, même selon Canatxx, pourrait se construire en trois ans. Donc, notre perception à nous, c'est qu'il faut prendre le temps de le voir évoluer, de l'analyser, et il se peut que dans les deux ou trois prochaines années — ça peut être aussi long que ça — nous puissions convenir d'un intérêt. Mais il n'y a pas une urgence en termes du besoin d'Hydro-Québec d'un projet comme celui-là.

Mme Bacon: Mais est-ce que vous donnez l'heure juste à Canatxx, parce qu'on n'a pas eu l'impression qu'ils l'avaient... Parce que, après trois ans... Je comprends que vous dites que le dossier évolue. Nous, on avait l'impression que vous gardiez ça dans votre petite poche en arrière et de dire: Si on en a besoin, on le prendra; à un moment-donné, on dira oui. Ce n'est pas ça?

M. Drouin: Je veux juste mentionner que j'ai eu l'occasion, M. le Président, de rencontrer moi-même les gens de Canatxx tout récemment. Il faut dire très clairement que le projet qui nous a été présenté dans l'appel d'offres que nous avons fait en 1991... dans ce cadre-là, ce projet-là ne se qualifiait pas parce que ce n'était pas un projet de cogénération. Par la suite, ils ont modifié régulièrement leur approche. Moi, je les ai rencontrés il y a presque deux mois. On a, à ce moment-là, convenu

qu'il y aurait des échanges additionnels, qu'ils nous feraient part des nouvelles propositions qui permettraient peut-être de rentabiliser un tel projet dans le cadre de ce que M. Bolduc vient de mentionner.

Je voudrais juste demander à M. Delisle d'apporter une précision additionnelle.

Mme Bacon: M. le Président, mon temps s'écoule, et je voulais vous questionner sur une autre question importante.

M. Delisle: Une façon de réconcilier les coûts aussi, c'est que le projet que vous avez dans le plan, c'est en l'an 2000, avec des prix du gaz qui sont plus élevés, alors que Canatxx, c'est maintenant et, à ce moment-là, l'écart, comme vous dites, n'est pas très loin de nos coûts évités.

Le Président (M. Gobé): Merci. Mme la ministre.

Expertise dans le domaine nucléaire

Mme Bacon: Bien qu'un consensus assez important existe au Québec sur les mérites de l'option hydroélectrique ou hydraulique par rapport à tout autre moyen de production d'électricité, plusieurs intervenants ont fait ressortir l'importance pour le Québec de maintenir une expertise dans le domaine du nucléaire. Dans ce contexte-là, j'aimerais savoir si la réalisation d'une centrale nucléaire supplémentaire sur le site de Gentilly pourrait représenter un intérêt pour le Québec?

M. Drouin: M. Filion.

M. Filion (Yves): M. le Président, comme vous le savez probablement, Hydro-Québec possède déjà une expertise dans le domaine du nucléaire, puisqu'elle a elle-même réalisé la gérance de projet et la construction de la centrale nucléaire de Gentilly II qui a été mise en service en 1982. De plus, il y a, à Gentilly II même, un noyau d'expertise dans le nucléaire important, puisque Hydro-Québec est entièrement responsable de l'exploitation et de la maintenance de cette centrale. Alors, nous avons actuellement dans nos rangs des spécialistes, je dirais, qui sont en mesure de bien évaluer l'option nucléaire pour la comparer aux autres filières de production d'énergie électrique. (17 h 20)

Je dirais que la considération principale est que le nucléaire ne compétitionne pas les projets disponibles actuellement au point de vue hydroélectrique. Je pense que le nucléaire, actuellement, dans une évaluation relativement... peut-être pas très optimiste, mais à tout le moins très réaliste, se situe autour de 0,057 $ le kilowattheure, alors que nous pouvons compter sur plusieurs projets dont le coût varie entre 0,038 $ et 0,041 $ le kilowattheure. Alors, uniquement sur la considération économique, il y a là une évidence.

D'autre part, je pense que, éventuellement, il va falloir aussi... il faudrait aussi regarder d'autres considérations qui sont plus de nature environnementale et sociale. Mais je dirais que c'est un débat qui pourrait se présenter lorsque nous serons, à ce moment-là, au niveau décisionnel.

Centrales hydroélectriques de 25 MW et moins

Mme Bacon: Au niveau encore et toujours des moyens de production, dans le cadre de la commission, il y a l'Association des producteurs privés d'hydroélectricité qui nous a dit s'inquiéter de l'intérêt que semble porter Hydro-Québec au regard du développement des petites centrales hydroélectriques, et l'Association fait référence à la possibilité, évoquée dans l'annexe des moyens de production, qu'Hydro-Québec aménage de telles centrales. Le mémoire de l'Association recommande aussi que tous les sites de 25 MW ou moins soient réservés au secteur privé, exception faite des sites déjà en exploitation, ceux d'Hydro-Québec exploités d'ici deux ans ou de ceux qui s'intègrent dans l'aménagement des complexes hydrauliques plus importants. Quel serait l'impact de l'adoption de cette recommandation sur la planification et l'opération d'Hydro-Québec?

M. Filion (Yves): M. le Président, je ne suis pas certain d'avoir bien compris la question. Est-ce qu'on parle des centrales de moins de 25 MW?

Mme Bacon: Oui, les petites centrales de 25 MW et moins. C'est parce que l'Association n'a pas l'impression qu'Hydro-Québec les regarde avec beaucoup de sérieux. C'est un programme avec lequel on doit composer. Ils aimeraient bien être pris plus au sérieux par Hydro-Québec.

M. Filion (Yves): Disons que je vais donner, M. le Président, une première partie de la réponse et M. Bolduc pourra compléter.

Hydro-Québec a réalisé, au cours des dernières années, une évaluation d'à peu près tous les sites de petites centrales, pour se positionner, à savoir si ces sites-là étaient intéressants pour Hydro-Québec ou non. Il y en a plusieurs sur lesquels nous avons statué qu'ils n'étaient pas intéressants et qui ont été, finalement, remis au ministère de l'Énergie et des Ressources pour qu'ils puissent être offerts à des promoteurs privés. Il y a quelques sites encore sur lesquels les études ne sont pas terminées. Mais dans un horizon, je dirais, d'ici un an et demi, deux ans, nous aurons, à toutes fins pratiques, terminé les études sur tous les sites de moins de 25 MW qui appartiennent à Hydro-Québec et qui sont en exploitation ou qui ont été désaffectés il y a quelques années. Alors, ça permettra de clarifier et de finaliser la position d'Hydro-Québec sur les sites de moins de 25 MW.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, M. Filion. Cela met fin, madame, au temps qui vous était imparti.

Mme Bacon: Oui.

Le Président (M. Gobé): Je passerai maintenant la parole à M. le député de Joliette. M. le député, vous avez la parole pour 24 minutes.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je m'excuse à nouveau, j'étais pris de l'autre côté.

Le Président (M. Gobé): Nous vous excusons. Nous comprenons ça.

M. Chevrette: J'ai lu en diagonale votre énoncé de départ qui ressemble étrangement au plan de développement. Il y a beaucoup d'intentions, mais très peu de choses arrêtées et concrètes, de réponses directes aux attentes. Je prends, entre autres, un point précis, c'est le programme de développement régional. Vous parlez d'améliorer le plan de mise en valeur environnementale. Mais les demandes concrètes faites par les municipalités de la Haute-Mauricie, de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean en ce qui regarde un programme de développement régional, non pas ponctuel à partir d'un pourcentage x donné une année et, après ça: Bonjour, Luc, débrouillez-vous avec ça... vous ne répondez pas du tout à cela. Vous répondez partiellement en fonction du besoin des clients en ce qui regarde la chauffe ou le chauffage à l'hydroélectricité, en disant que c'est à vos clients à décider. Sauf que, dans une politique énergétique globale, il pourrait y avoir une attitude différente: plutôt que de faire de la promotion pour un type d'énergie, par exemple, si on recherche un équilibre... Je comprends que ce n'est peut-être pas le rôle d'Hydro-Québec comme tel, et c'est pour ça qu'on demandait, nous, un débat plus large sur le plan énergétique. Mais vous répondez et vous donnez raison implicitement et explicitement à tous ceux qui disent que vous n'avez pas une vision de l'énergie globale... Vous parlez de votre énergie en fonction de vos préoccupations hydroélectriques, mais vous n'allez pas dans le sens précis des demandes des citoyens qui se disent inquiets de l'utilisation des différentes sources énergétiques ou des énergies alternatives.

Contrats à partage de risques et de bénéfices

Je voudrais m'attarder sur deux points en particulier, l'efficacité énergétique et les contrats à partage de risques, et, soit dit en passant, je vous avais demandé vos projections jusqu'en l'an 2000 et plus, et vous me répondez jusqu'en 1992 alors que, dans un autre document — j'ai eu le temps de fouiner assez rapidement — en ce qui regarde le prix de l'aluminium, d'autre part, vous vous permettez de faire une ligne droite entre différentes courbes de cinq ans. Ça aurait été intéressant de voir la même projection des pertes ou des revenus par rapport aux courbes que vous avez décidées, parce que vous prenez la pointe de 1993, si je comprends bien, 1994, et vous tirez une ligne en disant: Nous, c'est à peu près ça notre global au bout. Je ne suis pas certain qu'avec les courbes de cinq ans, dans le prix de l'aluminium en général, on puisse faire ça, parce qu'on escompte des choses qui peuvent être très variables par la suite.

D'abord, prenons les contrats à partage de risques, puisque je viens d'y faire allusion. Vous faites beaucoup d'états, vous développez... vous développez sur les emplois, vous développez sur les retoipbées fiscales et vous vous rendez jusqu'en 1992. Est-ce que vous avez des évaluations de faites à l'interne — je pèse mes mots... À l'interne, avez-vous des évaluations de faites jusqu'en l'an... quelle année?

M. Drouin: On en a au moins jusqu'en... Vous parlez de l'évaluation du prix de l'aluminium ou de...

M. Chevrette: Non, des pertes éventuelles ou des revenus bruts, des revenus nets.

M. Drouin: On en a jusqu'en 1995. On a une évaluation jusqu'en 1995 à peu près. Les chiffres: pour 1993, c'est de l'ordre de 300 000 000$ et quelques; pour 1994, c'est 271 000 000 $; pour 1995, c'est 237 000 000 $. Quant à la courbe, est-ce que vous permettez à M. Delisle de vous donner...

M. Chevrette: Oui, mais, avant, pourquoi vous ne l'avez pas fait tout autant que votre courbe de l'aluminium, puisque c'était facile à faire? Si vous vous permettez de faire une évaluation des prix de l'aluminium, il était facile de faire une évaluation des pertes ou des profits.

M. Delisle: Je pense que la raison pour laquelle on ne l'a pas fait, c'est justement un peu celle que vous avez évoquée vous-même dans votre préambule. C'est que c'est la valeur de ça. Si vous regardez le graphique B dans l'historique, on voit qu'il y a une très, très grande volatilité des prix de l'aluminium. Nous, pour les fins de confection de notre cadre financier, on doit se référer à une valeur et on doit avoir une valeur un peu conservatrice, donc on met 0,75 $ en termes réels en dollars de 1988. Ça vaut pour un certain temps et ça vaut pour les fins de notre cadre financier. Mais de véhiculer dans le public des chiffres qui seraient fonction de cette hypothèse-là noircirait probablement indûment la rentabilité pour Hydro-Québec des contrats à partage de risques et de bénéfices, parce que, autant on vient de connaître dans le cycle économique un prix très, très bas compte tenu des déséquilibres qu'on a vus dans le marché, autant on peut anticiper en toute logique dans les années qui viennent d'avoir une augmentation des prix de l'électricité qui va suivre les cycles économiques et qui va, à ce moment-là... les prix de l'aluminium qui vont en fonction des cycles économiques, et qui va, à ce moment-là, permettre, en fait, une vue plus intéressante de la rentabilité de ces contrats-là. Donc, pourquoi véhiculer indûment des chiffres qui n'ont pas

une grande valeur? C'est un peu ça, je pense, qui est notre réserve.

M. Chevrette: Non, mais vous comprendrez que, pour nous, c'est drôlement important, et pour les citoyens qui ont à assumer une facture d'hydroélectricité, de savoir quels sont... C'est basé sur quoi, votre histoire? Par exemple, il y a quelqu'un du ministère de l'Énergie qui me disait dernièrement qu'il y a une double erreur dans la question des contrats à partage de risques. Une erreur, d'abord, sur le tarif L. On me dit qu'Hydro-Québec parle de dérapage du tarif L parce qu'il n'y avait pas... il y a eu une augmentation plus forte dans les années 1990-1992 — 1986 peut-être même, je ne me souviens pas des années précises — et ceci constitue, à ce moment-là, par rapport au tarif L, un premier dérapage. Et le deuxième dérapage, c'est précisément le fait que vous n'avez pas prévu ça. Vous ne pouviez peut-être pas le prévoir, mais il y avait un problème également du fait que le dumping russe est arrivé et qui a changé des données par la suite, d'où deux gros problèmes majeurs face aux contrats secrets. Est-ce que vous partagez ce point de vue? (17 h 30)

M. Delisle: Effectivement, en fait, là, le tarif L, dans les dernières années, a augmenté plus rapidement que ce que l'entreprise avait à l'esprit quand elle a signé ces contrats-là il y a quelques années. Donc, ça explique quand on compare la rentabilité par rapport au tarif L, puis c'est les chiffres que M. Drouin vous a donnés. Effectivement, en fait, si le tarif L s'était comporté comme on anticipait au moment de la signature de certains de ces contrats-là, les pertes seraient moins importantes. Par contre, on vous a effectivement, ici, présenté dans le petit document sur les prix de l'aluminium l'impact qu'on sent durement dans le marché de l'aluminium de l'excédent de production dans les pays de la Communauté des États indépendants, et on voit qu'actuellement, en fait, à la fin de 1992, il y avait un surplus égal à 3 200 000 tonnes dans le marché, et ça a fait que les prix sont allés à des niveaux anormalement bas, et c'est, encore là, ce qui explique les pertes qu'on encourt.

M. Chevrette: En fait, vous avez changé... vous avez recouvré tout d'un coup une prudence, parce que, quand vous êtes passés la première fois, c'était facile de faire les projections, et là on arrête à 1992, en ce qui regarde les pertes, entre autres.

M. Delisle: Là, M. Drouin vous a donné jusqu'en 1995.

M. Chevrette: Oui, il vient de m'en donner trois. Si je continue à le questionner, est-ce qu'il va m'en donner trois autres, puis est-ce que je vais me rendre à 2010, trois par trois? C'est ça que je veux savoir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Drouin: Je pense que M. Delisle vous a donné la réponse, à savoir comment on doit traiter ces chiffres-là et même ceux que j'ai donnés. Je veux dire, là on est dans le court terme. Évidemment, on peut faire toutes sortes de... Quand on regarde le tableau auquel a référé M. Delisle et qu'on regarde les dents de scie qu'il y a dans ce tableau-là pour le passé, je veux dire, c'est clair que, quand on essaie d'extrapoler des prix de l'aluminium pour le futur, ce n'est pas aussi précis.

M. Chevrette: Mais, M. Drouin, vous comprendrez que les dents de scie depuis 1972, c'est ça qui devait guider la prudence pour la signature des contrats. Si les dents de scie sont aussi prononcées, de 1972, dans votre tableau —j'ai mis mes verres pour bien les voir... Il y a des dents de scie faramineuses; par exemple, en 1978-1980, une dent de scie qui est pas mal haute, là; en 1988, il y en a toute une. C'est à partir de là, c'est à partir de ces dents de scie là que ça doit servir de prudence. S'il y avait une ligne droite comme vous faites là, vous ne risquez pas de... C'est peut-être pour ça que vous n'osez pas me donner trop de chiffres. Vous avez peur que, d'une année à l'autre, je vous assomme avec ça, je suppose?

M. Drouin: Oui. Sauf que la ligne droite qu'on tire, là, c'est une ligne conservatrice. C'est une ligne qu'on considère comme conservatrice pour la planification financière de l'entreprise, et on pense que ça va se réaliser... au pire, ça va se réaliser là, et que ça peut aller au-delà de ça.

M. Chevrette: O.K.

M. Drouin: C'est pour ça qu'on a tiré cette ligne-là.

M. Chevrette: Mais prenons votre ligne. Quels sont les revenus bruts et les pertes nettes ou les bénéfices nets à partir de votre ligne d'ici un horizon de 2010?

M. Delisle: On n'a pas les chiffres avec nous actuellement. Les chiffres qu'on a arrêtent à 1995.

M. Chevrette: Est-ce que vous pourriez nous les faire parvenir, s'il vous plaît? À partir de votre hypothèse de ligne droite, si vous en faites une hypothèse...

M. Drouin: Tout en vous mettant en garde... Bien sûr qu'on peut vous faire parvenir des chiffres, mais tout en vous mettant en garde que ces chiffres-là, pour des fins de planification financière, sont des chiffres minimums. On peut très bien véhiculer ces chiffres-là et les diffuser, mais ça peut créer une impression qui est tout à fait fausse par rapport à ce qui va se réaliser dans la réalité. Alors, si vous voulez qu'on les produise, on va les produire.

M. Chevrette: Mais, M. Drouin, vous planifiez, à Hydro-Québec. Vous planifiez en fonction d'une

donnée que vous vous fixez, en tout cas, d'une projection que vous vous fixez. Moi, ce que je veux savoir... C'est que vous avez planifié à partir d'un taux de rendement moyen sur la durée du contrat. Vous devez savoir, sur la durée du contrat, à ce moment-là, comment, au net, ça peut faire, ou des pertes ou des profits. Voyons! Sinon, ce ne serait pas sérieux à Hydro-Québec.

M. Delisle: M. le Président, c'est que, effectivement, on planifie et, quand on regarde le passé pour servir d'exemple pour le futur, on voit des cycles importants. Donc, par rapport au futur, quand ces contrats-là sont signés, on estime un prix moyen qui est le prix moyen des hauts et des bas de cycle. Le problème qui arrive maintenant, c'est qu'on sort du bas de cycle et, quand on regarde le futur, nous, on fait l'hypothèse encore du prix moyen alors que, suivant nos hypothèses historiques, on devrait plutôt éventuellement, au fur et à mesure que la reprise économique va se produire, connaître des prix de l'aluminium qui vont aller au-delà des 0,75 $ en dollars de 1988, et donc, là, commencer à permettre de combler les pertes qu'on a connues dans le passé.

M. Chevrette: Je ne doute pas de ça.

M. Delisle: Mais, par hypothèse, nous, c'est très difficile de prévoir, entre 1996 et l'an 2000, un cycle du prix de l'aluminium. Vous l'avez dit vous-même tout à l'heure: Qu'est-ce qui va se passer dans les pays de la Communauté des États indépendants? Dépendant de ce qui va arriver dans les jours qui viennent, les semaines qui viennent, ça a des impacts très importants sur le genre de...

M. Chevrette: Oui, mais oublions les États indépendants. Exclusivement sur les pointes existantes depuis 1972, M. Delisle, vous avez tiré une ligne — oubliez-le, le deuxième facteur, si vous avez peur, là — exclusivement à cause du premier qui est cyclique, vous le savez, le prix de l'aluminium est cyclique, et, quand on regarde les pointes, c'est à peu près cinq ans.

M. Delisle: Mais on peut...

M. Chevrette: Vous avez tiré une ligne pour faire votre planification stratégique et financière. Dans votre grande stratégie, vous avez fixé au moins un minimum de taux de rendement de ça, ces contrats-là? Vous l'avez planifié, non seulement en fonction de 1992, mais vous l'avez planifié pour la durée du contrat, parce que ça a une incidence sur la santé financière d'Hydro. Ce que je veux savoir, c'est: Est-ce que vous escomptez, au bout de la course, des profits ou des pertes, et basé sur quelle pointe que vous avez choisie pour tirer votre... Est-ce que c'est la pointe de 1993, en passant?

M. Delisle: Deux choses, et c'est très difficile d'oublier les pays des États indépendants, parce qu'ils produisent pour 4 400 000 tonnes...

M. Chevrette: Non, non, je comprends.

M. Delisle: ...puis c'est ça qui explique le déséquilibre, en grande partie, du marché aujourd'hui. Donc, c'est très difficile, d'un point de vue d'analyse, de les mettre de côté. Par ailleurs, peut-être qu'il y a une façon de répondre à votre question, c'est qu'à l'origine, quand les contrats ont été signés, l'hypothèse et l'objectif, c'était, oui, de mettre en risque nos bénéfices futurs, mais c'était, à ce moment-là, de tirer de ces contrats-là une rentabilité qui était... qui se rapprochait, en fait, de la rentabilité du tarif L. Donc, l'exercice auquel vous nous conviez, il a été fait dans le passé quand les contrats ont été signés. Par contre, maintenant, plusieurs de ces contrats-là ont plusieurs années de passées, et là on vient de se payer un des pires...

M. Chevrette: Mais on vous avait demandé de nous le donner jusqu'en 2010, pour la longueur du contrat, et vous avez arrêté en 1992. Pourquoi?

M. Delisle: Mais la raison, c'est que... En fait, on vous a donné aussi jusqu'en 1995. La raison, c'est une question, en fait, de ne pas...

M. Chevrette: Je veux des réponses à mes questions, là.

M. Delisle: ...véhiculer de l'information qui est inutilement négative à l'égard de contrats comme ceux-là. C'est simplement ça.

M. Chevrette: Non, mais il ne faut pas avoir peur de... C'est une société d'État publique, là. Vous n'êtes pas dans l'entreprise privée, ici, là. C'est les actionnaires, là; c'est les Québécois, ils ont le droit de savoir si, l'an prochain — je vous remercie de la réponse, j'aurais dû continuer à questionner pour 1996... Est-ce que vous avez une réponse pour 1996, M. Drouin?

M. Drouin: Non, je ne l'ai pas, la réponse, pour 1996.

M. Chevrette: Donc, vous allez aller la chercher et vous allez me la donner?

M. Drouin: Non, c'est juste parce que... Je veux dire, c'est clair qu'on ne pourrait pas prévoir le prix de l'aluminium en dents de scie, comme il est prévu, comme on l'a vu dans le passé. Donc, on est obligés de tirer une ligne, vous l'avez dit vous-même, et on a tiré cette ligne-là à partir de 1996 ou 1997, on a tiré cette ligne-là pour jusqu'à la fin. C'est clair qu'avec l'historique vécu et ce qu'on s'attend pour le futur on ne réalisera pas, peut-être, les objectifs qu'on s'était fixés à l'origine, mais, au moins, on peut peut-être s'attendre de faire un «break-even», parce que, dans le tarif L, il y a d'incorporée, bien sûr, la marge bénéficiaire. Alors,

ce qu'on peut souhaiter, c'est qu'on ne soit pas en dessous de nos coûts de fourniture. C'est pour ça qu'on a mis ce type de chiffres là; premièrement, pour être conservateurs dans notre planification et ne pas incorporer, dans notre planification à long terme, des revenus dont on n'est pas sûrs. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on l'a mis là. Et nous, notre objectif, c'est d'essayer — enfin, pas notre objectif — c'est d'essayer de réaliser au moins les coûts de fourniture dans ça.

Je dirai, en plus, que, sur ces contrats-là, M. le Président, il y a ce qu'on appelle des clauses de «hardship» — en français, j'essaie de traduire ça, on me dit que c'est d'«inéquité» — et c'est des clauses qui permettent, à un moment donné dans le temps, de réévaluer s'il y a certaines choses au moins essentielles dans le contrat qui ont été réalisées et, si elles n'ont pas été réalisées, il y a une possibilité de réouverture. Alors, évidemment, ça, ça rend le contrat encore moins à risque. Mais ce que je dis, c'est: Ça paraît évident, à ce moment-ci, qu'on ne réalisera pas ce qu'on pensait être le tarif L sur l'ensemble de la durée du contrat, mais, au moins, qu'on puisse tenter de réaliser l'équivalent des coûts de fourniture avec une marge bénéficiaire qui ne serait pas le 15 % que l'on calcule être, aujourd'hui, normal dans le cas du tarif L, mais qu'on puisse réaliser une certaine marge bénéficiaire et qui ne nous mettrait pas à perte au niveau du contrat.

M. Chevrette: Je suis bien d'accord avec vos explications. C'est la deuxième fois que vous me la servez, parce que je me rappelle ce que vous m'aviez dit la première fois. Mais comment voulez-vous... Si je n'ai pas ces données-là, si je veux les connaître, quel est le moyen que je dois prendre...

M. Drouin: On va vous les transmettre, M. le Président.

M. Chevrette: Bon. C'est ça que je veux savoir. Ce n'était pas plus long que ça.

M. Drouin: On va les faire, puis on va vous les transmettre avec...

M. Chevrette: Les contrats à partage de risques, une dernière question sur ça avant de passer à l'efficacité énergétique. Est-ce que ça fait partie, la portion de ces contrats... Est-ce qu'on a des frais de garantie à payer à l'État en ce qui regarde la portion de ces contrats-là?

M. Drouin: Je ne comprends pas, là. M. Chevrette: En d'autres mots... M. Drouin: La dette...

M. Chevrette: La dette. Vous payez des frais de garantie sur la dette. (17 h 40)

M. Drouin: Écoutez. Poser la question, c'est y répondre. C'est clair que l'ensemble de notre dette est soumise aux frais de garantie.

M. Chevrette: O.K. Est-ce que la portion — et c'est là ma deuxième question — est-ce que les signataires du contrat à partage de risques, dans le tarif qu'ils paient... est-ce que ce 0,5 % est assumé aussi par ces signataires ou si c'est assumé par l'ensemble des autres consommateurs?

M. Drouin: Bien, je pense qu'il faut dire que l'ensemble des coûts reliés à une construction de projet sont assumés par l'entreprise et que, dans...

M. Chevrette: Mais vous répartissez vos tarifs, vous avez signé un contrat... Je vais me réexpliquer plus clairement, M. Drouin, parce que je veux avoir une réponse très claire là-dessus. Vous avez des contrats à partage de risques qui ont été fixes, c'est-à-dire qui évoluent selon le prix de l'aluminium, mais cela a cadré le paiement ou la tarification pour ces gens-là, pour les compagnies énergivores. Quand vous arrivez à une année 1992 où on vous impose des frais de partage de risques — je suppose que ça représente 200 000 000 $, 300 000 000 $, mettons un chiffre rond — est-ce que vous refilez une partie de cette facture des frais de garantie aux alumineries qui ont signé des contrats à partage de risques ou si ce 300 000 000 $ n'est pas assumé par les autres consommateurs?

M. Drouin: II n'est pas assumé par les autres, puis il n'est pas assumé par...

M. Chevrette: II est assumé par l'avoir propre, vous allez me dire.

M. Drouin: Bien, il est...

M. Chevrette: Mais vous allez modifier vos tarifs pour les autres sans pouvoir les modifier pour les grandes compagnies énergivores.

M. Drouin: Bien, c'est clair, parce que c'est des contrats. C'est des contrats qui comportent des clauses, comme vous le savez, qui sont déterminées, mais...

M. Chevrette: Donc, en bout de course, est-ce que je peux affirmer...

M. Drouin: Non, mais ce qui est important relativement à votre question, c'est que l'on ne fait pas assumer les frais de garantie reliés aux projets qui desservent des alumineries. Autrement dit, les frais de garantie font partie de nos coûts de fourniture et les coûts de fourniture des ventes aux alumineries ne sont pas assumés par les autres clients d'Hydro-Québec.

M. Chevrette: M. Drouin, est-ce que les tarifs fixés par les contrats à partage de risques ou découlant

du contrat à partage de risques... À supposer qu'une année, pour la santé financière d'Hydro, à cause de ces frais-là, à cause des surtaxes sur le capital, à cause de l'hydraulicité, vous devez changer les tarifs pour assurer une meilleure santé financière, est-ce que ça affecte également les contrats à partage de risques ou ceux qui les ont assumés?

M. Drouin: La réponse, c'est non.

M. Chevrette: Donc, en bout de course, est-ce que c'est faux de prétendre, devant cette assemblée, ici, que ceux qui ont signé des contrats à partage de risques, eux ne seront jamais influencés par quelque catastrophe que ce soit, puis quelque coût additionnel que ce soit que l'État pourrait imposer, puis ce serait toujours les autres consommateurs qui devraient assurer la santé financière d'Hydro?

M. Drouin: Dès que vous mentionnez une clause de catastrophe, je suis obligé de dire que ces contrats contiennent une clause de catastrophe et...

M. Chevrette: La faible hydraulicité ne fait pas partie des catastrophes?

M. Drouin: Bien, la faible hydraulicité, à long terme, pourrait éventuellement déboucher sur le fait que le tarif... La réalisation des profits ou des revenus dans le cas des alumineries ferait en sorte qu'on pourrait rouvrir ces contrats-là. Alors, dès que vous parlez de ça, oui. Mais, dans le contexte normal, c'est clair que ces contrats-là sont fermés.

M. Chevrette: Ça répond à ma question. C'est ce que je détenais comme information également.

Programme d'isolation des maisons

L'efficacité énergétique. À Hydro-Québec, vous avez fait l'objet de nombreux commentaires sur l'efficacité énergétique. Vous avez lu les mémoires, nous dites-vous, on a même votre synthèse, donc vous les avez lus, c'est certain, vous les avez très bien compilés. Je trouve ça intéressant. Ça m'a évité de l'ouvrage, merci. Mais ceci dit...

M. Drouin: Ça veut dire qu'il y a des choses qu'on vous transmet.

M. Chevrette: Oui, oui. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: C'est parce que c'est public, ça. Ce n'est pas public, ça?

M. Drouin: Certainement.

M. Chevrette: Bon. J'y ai pensé que vous étiez ouvert de même. D'ailleurs...

Pour revenir à l'efficacité, pour être sérieux, vous avez... Je me souviens très bien de ce que M. Bolduc nous a dit le premier soir, qu'il pouvait changer ses objectifs d'efficacité énergétique peut-être dans deux mois, il ne le savait pas... Il y avait des impondérables. Je suis bien d'accord avec tout ça. Mais, ceci dit, il reste que les gens croient peu ou pas au fait que, dans une seule année, vous pensez doubler ce que vous auriez fait pendant quatre ans, d'abord, et maintenir le cap des 9,3 TWh sur l'an 2000 leur apparaît assez aléatoire pour ne pas dire plus, leur apparaît même trop optimiste à cause du manque d'outils de contrôle ou à cause du manque d'évaluation. Pour certains, la gamme des raisons est peut-être différente, selon les mémoires qu'on a lus, mais il y a beaucoup de gens qui doutent personnellement de vos objectifs, d'autant plus que ça a changé tellement souvent que vous leur avez quasiment donné raison de douter, parce que c'est vous autres mêmes, dans vos propres plans de développement antérieurs, qui modifiaient quasi annuellement vos objectifs d'économie d'énergie. Donc, à partir de cela et à cause d'articles aussi qui sont sortis dernièrement, je ne sais pas, qui ont un certain fondement, vous auriez calqué en matière d'économie d'énergie la Florida Power ou je ne sais pas trop quoi...

Une voix: ...

M. Chevrette: ...l'adopter. Mais ce sera plutôt des engagements de performance, puis on les verra probablement demain, si je peux me dégager pour venir.

Ceci dit, avec les sommes d'argent qui sont considérables, c'est 1000000000$, 2000000000$, 3 000 000 000 $, les gens qui regardent ça froidement avec un gros bon sens, ils disent: On vit dans un pays où le climat est très radical; plutôt que de s'amuser à certains petits projets, pourquoi ne pensons-nous pas à un véritable programme d'isolation des maisons, et, à injecter autant d'argent, c'est des emplois extraordinaires, et on s'attaque au vrai problème où il y a des pertes d'énergie épouvantables, dans des milieux même, vous le savez, très défavorisés, et on pourrait contribuer à créer de l'emploi et à répondre à un besoin réel, que tout le monde connaît, à partir du gros, gros jugement et du gros, gros bon sens? Qu'est-ce que vous répondez à ça?

M. Drouin: Je pense que je vais demander à M. Bolduc de répondre à cette question-là. D'ailleurs, la ministre de l'Énergie avait posé la question précédemment.

M. Chevrette: Je m'excuse, je n'y étais pas.

M. Drouin: Non, c'est correct.

M. Chevrette: Je m'excuse.

Le Président (M. Gobé): M. Bolduc, vous avez

la parole.

M. Bolduc: La question de programmes massifs d'isolation des maisons, je pense qu'il faut la placer dans son contexte du parc québécois domiciliaire. M. Boivin, il y a un an et demi, avait fait un discours sur l'efficacité énergétique, à Montréal, qui avait résumé beaucoup...

M. Chevrette: Une phrase qu'il a regrettée. Il s'est fait retrousser vite.

M. Bolduc: ...cette question-là et qui avait soulevé, comme vous le savez, beaucoup d'attentes sur ces différents programmes. Mais un des points qu'il avait mentionnés, c'était que, depuis 20 ans au Québec, les différents programmes d'efficacité énergétique, d'isolation et d'amélioration de la qualité thermique des résidences, ça a fait baisser la consommation moyenne des ménages au Québec, d'énergie totale, de 48 000 kWh à 28 000 kWh. Ça veut dire que notre parc résidentiel, actuellement, est un des mieux isolés au monde. Ça ne veut pas dire que certaines maisons — et c'est des points que je soulevais plus tôt cet après-midi — dans les milieux ruraux, les maisons en bois, des maisons qui n'ont pas été isolées, disons, comme l'ont été des maisons de banlieue, des grandes villes, et ainsi de suite, ne pourraient pas en bénéficier, et nous comptons, dans ces cas particuliers, incorporer et nous sommes à incorporer dans nos programmes d'efficacité énergétique des mesures qui vont s'adresser à cette partie de notre parc résidentiel. Mais, soyons réalistes, il ne s'agit pas d'un pourcentage très élevé du parc résidentiel au Québec. (17 h 50)

Un programme massif d'isolation, si on prend des chiffres assez simplistes... C'est difficile de refaire l'isolation d'une maison normale de banlieue, disons, en maçonnerie, pour moins de 10 000 $ à 20 000 $ par maison. Si on parle de 1 000 000 d'habitations au Québec ou de 1 000 000 de logements qui feraient l'objet comme ça, on ne parle plus de 1 000 000 000 $ ou de 2 000 000 000 $, on parle de 10 000 000 000 $ ou de 20 000 000 000 $ que ça impliquerait. Il n'y a aucun calcul économique qui justifierait des investissements de cet ordre de grandeur là et, étant donné la nature déjà très poussée de la qualité d'isolation des résidences au Québec, ça n'en vaudrait pas du tout la chandelle en termes de calcul d'efficacité énergétique. C'est pour ça que les 2 000 000 000 $ du programme actuel, ce n'est pas pour s'amuser dans des petits projets. C'est pour être le plus efficace possible pour obtenir le maximum de résultats d'un investissement qui se compare, dans une approche intégrée de gestion des ressources, à nos coûts alternatifs. On ne peut pas investir 5 fois ou 10 fois plus cher dans l'isolation que ça coûterait pour produire l'énergie économisée. Je pense que ce serait un gaspillage absolument inacceptable au Québec.

Donc, le programme, tel qu'il est conçu, va, de façon pointue, identifier une certaine partie du parc résidentiel, mais qui est relativement minoritaire, qui va avoir besoin d'un programme d'isolation, mais à l'intérieur des montants et de la rentabilité qui est prévue, et il va se concentrer sur les applications que j'appellerais légères, d'étanchéification des portes et fenêtres, d'étan-chéification de choses aussi simplistes que des prises de courant et des mesures de contrôle par des thermostats plus efficaces qui coûtent assez peu en termes d'investissements et qui rapportent beaucoup en termes d'économies d'énergie. C'est la seule façon que nous allons pouvoir produire nos objectifs d'efficacité énergétique à l'intérieur des budgets qui sont là.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. Bolduc. C'est là tout le temps imparti pour cette intervention. Je passerai maintenant, pour le reste du temps, la parole — tel qu'entendu, d'ailleurs — à M. le député de Drummond. Il vous reste à peu près huit minutes, M. le député.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Je vais me fier à votre diligence pour m'arrêter lorsque mon temps sera écoulé.

M. le Président, j'aimerais attaquer à ce moment-ci le volet qui est toute la petite et moyenne entreprise. Lors des audiences, on a eu plusieurs mémoires, plusieurs regroupements d'associations aussi sont venus nous dire, au niveau de l'efficacité énergétique, que, si on faisait du cas par cas et si on prenait la peine de s'asseoir avec chacune de ces industries-là, il y aurait peut-être des choses fantastiques qu'on pourrait faire, au lieu d'essayer d'introduire des mesures globales. Ça, c'est mon commentaire sur l'efficacité énergétique. Je pense que vous avez eu la chance d'en prendre connaissance.

Tarif pour les PME

Mais il y a deux autres volets aussi, c'est surtout au niveau du développement et ça attaque aussi une partie de votre plan de développement. Il y a deux organisations — pour ne pas les nommer, il y a Eka Nobel inc. et il y a aussi Norton Céramiques qui sont venues nous voir. Dans un cas, je dois vous avouer que j'ai été estomaqué. Lorsqu'on veut se développer pour créer de l'emploi ici, dans le cas d'une de ces organisations-là, on nous a dit, et là c'est la fameuse pointe, que, si on dépasse dans un mois une pointe qui est plus élevée, on est chargé pour le mois au complet, qu'on a voulu faire un essai, qu'on a essayé de s'entendre au niveau de la région. Apparemment, ça va fantastique — ça, c'est un autre commentaire que je ferais à ce moment-ci — au niveau régional, il y a toujours une bonne collaboration. C'est lorsqu'on s'en va, j'aurais le goût de vous dire, en boutade, au piège social, ou au siège social d'Hydro-Québec, que, là, on commence à avoir des difficultés... pour faire en sorte qu'une de ces entreprises n'a pas été capable de faire son essai ici, au Québec, qu'elle a été obligée de le faire en Norvège. On voit tout de suite un transfert de technologie qui s'en va là-bas et, si le procédé est bon, on revient. Alors, il y a toute cette problématique-là. Puis ces deux entreprises-là

nous ont mentionné clairement qu'elles s'en venaient de moins en moins compétitives aussi au niveau de la tarification, et il y a peut-être des projets à coups de 50 000 000 $ à chacun de ces endroits-là qui pourraient être faits si on pouvait s'asseoir et être capables de négocier et avoir une nouvelle vue, une nouvelle tarification et une meilleure compréhension.

M. Drouin: M. Bolduc.

M. Bolduc: Tout d'abord, M. le Président, sur le point des tarifs concurrentiels, nous avons rencontré ces mêmes entreprises régulièrement, et encore il y a à peine deux semaines, pour bien comprendre les comparaisons qui sont faites. Actuellement, il existe un endroit aux États-Unis, qui est le territoire desservi par la Tennessee Valley Authority, où, à cause de surplus énergétiques très.élevés sur plusieurs années — on a construit trop de centrales nucléaires — on a, sur un horizon assez long, la possibilité d'offrir des tarifs excédentaires qui ressemblent un peu aux tarifs excédentaires qu'Hy-dro-Québec a pu offrir dans les années quatre-vingt lorsqu'elle avait elle-même des surplus énergétiques et qui ont amené l'implantation, au Québec, de beaucoup d'industries. Actuellement, cette entreprise-là offre des tarifs qui, dans certains cas, sont compétitifs ou inférieurs aux tarifs réguliers qu'Hydro-Québec peut offrir à ses clients.

Nous n'avons pas actuellement de surplus. Nous venons de terminer une période d'hydraulicité faible et nous espérons, bien sûr, aller, là aussi, dans une pointe vers le haut et se retrouver, dans les années qui viennent, avec certains surplus disponibles. Nous étudions très vite. Nous avons dans nos tiroirs une foule de programmes qui pourraient tirer le maximum de retombées positives de ces surplus-là, qui incluraient des incitatifs, des rabais tarifaires pour des nouvelles entreprises ou des entreprises qui voudraient augmenter leur production. Mais je pense que ce que nous essayons de faire comprendre à ces clients-là, c'est la stabilité à long terme qu'offrent les tarifs d'Hydro-Québec qui, une fois qu'on enlève ces rabais spéciaux, sont encore les plus compétitifs en Amérique du Nord. il y a à peine un an, les mêmes clients nous parlaient des tarifs très bas de bonneville power administration dans le nord-ouest des états-unis. or, en un an, cette situation s'est complètement renversée. bonneville power est en déficit et ils ont dû restreindre à 75 % ou 80 %, selon les cas, la consommation de leurs grands clients industriels parce qu'ils manquent d'énergie. et, il y a un an, on nous citait ça en exemple comme attrait par rapport aux conditions au québec. donc, je pense que ces situations-là, il faut les regarder dans leur ensemble, et nous essayons de faire le mieux possible avec les clients.

M. St-Roch: Vous m'avez répondu aux questions de vérification, mais je n'ai pas eu de réponse encore au niveau de l'industrie qui irait vous voir, qui dirait à Hydro: J'ai une expérience à faire; ma production est stable, mais cette expérience-là, sur une période de 48 heures, va m'amener une pointe; est-ce que je peux faire mon essai sans être pénalisée pour toute la durée du mois? Lorsqu'on regarde ces industries-là, que c'est à coups de millions de dollars par année, on peut comprendre qu'un mois, un essai, ça peut représenter plusieurs dizaines de milliers de dollars, ce qui fait que ce n'est pas concurrentiel. Et moi, c'est ça que je ne suis pas capable de comprendre d'Hydro-Québec — dans un cas comme ça, c'est de la recherche et du développement — qu'on laisse aller faire l'essai en Norvège, et c'est sûr et certain que, lorsque tu envoies l'idée ailleurs, pour avoir évolué sur cette scène-là aussi, il y a beaucoup plus de chances que l'idée va être adoptée ailleurs au lieu d'être adoptée ici. Alors, pourquoi, n'est-il pas possible à ces industries-là d'avoir une permission d'Hydro-Québec: On va payer à taux normal cet excès de consommation sans avoir la pénalité pour surconsommation?

M. Bolduc: Le problème, et nous en sommes très conscients, c'est qu'Hydro-Québec vit dans un contexte de réglementation où ses tarifs font l'objet d'un règlement tarifaire, qui demandent un décret du gouvernement et qui doivent être appliqués avec énormément de rigueur, et tout arrangement particulier qui n'est pas en fonction du règlement tarifaire, ça devient ce qu'on appelle, comme on l'appelait tout à l'heure, un contrat particulier, et c'est extrêmement lourd et compliqué pour nous de pouvoir offrir ça, à des très courts délais, à des clients. Donc, c'est une situation qu'on aimerait pouvoir contourner, nous allons essayer de le faire, mais il faut être conscients que le contexte qui réglemente les contrats d'électricité est quand même assez rigide.

M. St-Roch: Mais je pense qu'il y aurait avantage au niveau de la réglementation à avoir une exception lorsque c'est réellement pour de la recherche et du développement, et qu'on perde une journée ou deux.

Ma dernière question, mon temps s'écoule, malheureusement, rapidement. Au niveau de 1'electrification et de l'utilisation de l'électricité dans le transport en commun, j'ai reçu une lettre qui touche un peu HydroQuébec indirectement. Ce serait plutôt au niveau de la recherche et du développement. Est-ce que vous êtes associés au niveau de la recherche et du développement avec la compagnie Deshaies pour la fabrication ou le développement d'un autobus électrique?

M. Drouin: Avec EDF?

M. St-Roch: Deshaies, oui.

Une voix: Deshaies.

M. Drouin: Deshaies?

Une voix: II n'y a pas d'association.

M. Masson (Louis): II n'y a pas d'association,

bien qu'il y ait déjà eu des contacts pour faire des...

Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous pourriez vous nommer pour les fins d'enregistrement, monsieur?

M. Drouin: M. Louis Masson.

M. Masson: Louis Masson, planification du réseau, vice-président...

Le Président (M. Gobé): C'est bien, M. Masson. Vous avez la parole.

M. Masson: II y a eu des contacts dans le passé pour faire des expertises, mais il n'y a pas d'association dans le moment pour le développement conjoint.

M. St-Roch: Parce qu'on se retrouve encore dans une belle situation où on va acheter encore des autobus conventionnels en utilisant une technologie étrangère qui aurait très peu de retombées au Québec, où une entreprise québécoise qui, peut-être, avec un coup de pouce au niveau de la recherche et du développement, pourrait développer des véhicules qu'on pourrait exporter à partir de cette technologie-là. On y reviendra dans un autre forum.

M. Drouin: Sur ce plan-là, je veux juste vous dire qu'on fait des expériences actuellement relativement à l'utilisation de l'hydrogène dans des moteurs d'autobus et de camion de façon à rencontrer les normes environnementales de Los Angeles. Là-dessus, on est en collaboration avec les communautés européennes et la STCUM à Montréal pour faire des expériences sur un moteur à hydrogène avec gaz naturel.

Le Président (M. Gobé): Alors, ceci met donc fin aux travaux de notre journée. La commission ayant accompli son mandat pour ce jour, je vais donc ajourner les travaux à demain matin, 10 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. Alors, la commission est maintenant ajournée. Bonne soirée à tout le monde!

(Fin de la séance à 18 heures)

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