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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le lundi 3 juin 1996 - Vol. 35 N° 16

Étude détaillée du projet de loi n° 27 - Loi modifiant le Code du travail


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Table des matières

Motion proposant d'entendre l'Association des policiers provinciaux du Québec (suite)

Étude détaillée


Autres intervenants
M. François Beaulne, président
M. Bernard Brodeur
M. Robert Benoit
M. Jacques Baril
M. Michel Côté
M. Benoît Laprise
M. Daniel Paillé
Mme Cécile Vermette
M. Réal Gauvin
M. Yvon Charbonneau
* M. Gaston Nadeau, ministère du Travail
* M. Jacques Chevrier, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Vingt et une heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Beaulne): Chers collègues, nous allons commencer nos travaux.

M. Rioux: Tu n'oublieras pas qu'un ascenseur, ça se retourne, hein. On t'a attendu.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, j'ouvre la séance. Alors, nous allons continuer de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 27, Loi modifiant le Code du travail.

Pour le bon fonctionnement de nos discussions, je vous rappellerai que, la dernière fois, nous avions ajourné sur une motion du député de Montmagny-L'Islet invitant l'Association des policiers provinciaux du Québec à venir exposer son point de vue sur ce projet de loi à la commission. Les temps de parole des collègues qui voulaient intervenir avaient, à ce moment-là, été utilisés. Je demanderais maintenant s'il y a d'autres interventions sur cette motion.

Mais, avant, je demanderais à notre secrétaire d'annoncer s'il y a des remplaçants.

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Charbonneau (Bourassa) remplace M. Cherry (Saint-Laurent); et M. Benoit (Orford) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion).


Motion proposant d'entendre l'Association des policiers provinciaux du Québec (suite)

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, avant de passer au vote sur la motion du député de Montmagny-L'Islet, je demanderais, encore une fois, s'il y a des désirs d'intervention sur la motion?

M. Gobé: Oui, oui, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député de LaFontaine, vous avez la parole.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci. Tout d'abord, je tiens à remercier les collègues qui m'ont attendu et à m'excuser de ce retard, mais j'arrive de Montréal. Comme député, je sais qu'à l'occasion on a des activités de financement, entre autres, qu'on doit faire et que ce n'est pas facile. Alors, voilà. Je vous remercie de la compréhension, pour ceux qui ont attendu.

M. Rioux: On va essayer d'être compréhensif. Je viens de Matane, moi, puis ça ne pose pas de problème, je suis là.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député de LaFontaine, nous accueillons vos remarques de manière constructive, et je vous cède la parole.

M. Gobé: Merci, M. le Président. En effet, nous avons déposé la semaine dernière plusieurs motions préliminaires qui demandaient à la commission de bien vouloir recevoir la demande de différents représentants de corps policiers et de pompiers du Québec. Alors, nous l'avons fait pour la raison suivante, c'est que ces gens s'étaient adressés à l'opposition nous faisant savoir qu'ils n'avaient pas été consultés par rapport à ce projet de loi là. Ils avaient, avaient-ils dit, été consultés antérieurement sur des politiques générales ou des choses plus générales par M. Boivin – on sait que M. Boivin est maintenant un conseiller au bureau du premier ministre – et ce qu'ils voulaient, eux, c'est se faire entendre par les parlementaires, par les députés. Ils disaient qu'ils étaient en droit d'expliquer à leurs élus qui siègent dans les commissions parlementaires les raisons qui sont les leurs pour faire opposition ou bonifier ou faire changer certaines choses dans ce projet. Alors, le ministre n'a pas jugé utile, à date, de donner suite à ces demandes. Je pense que, comme opposition, nous le déplorons. Je pense que, comme députés, nous devons le déplorer.

Je répète que, lorsque des groupes responsables et raisonnables comme les policiers et les pompiers, et je pense que tout le monde en cette Chambre doit reconnaître que ce sont des gens qui ont des responsabilités très lourdes dans notre société, soit d'assurer la sécurité physique des édifices et des personnes et aussi d'assurer la sécurité publique pour les policiers... Alors, je pense que, lorsque ces gens, par l'entremise de leur organisation, ont des choses à nous dire, bien, nous devrions, comme députés, les entendre.

Alors, voilà, nous avons reçu toutes ces demandes. D'autres nous sont parvenues aussi, plus tard. Ces gens nous ont dit s'être adressés aussi au cabinet du premier ministre, s'être adressés aussi, encore une fois, au ministre, dernièrement. C'est, je pense, tout ce que nous pouvions faire à ce stade-ci pour faire valoir leur point.

Nous pourrions encore, comme opposition, présenter d'autres motions préliminaires, le règlement permet à d'autres membres de la commission de le faire, mais nous jugeons maintenant que nous avons entendu les arguments de plusieurs députés qui représentaient les demandes de différents organismes et que cela vaut pour l'ensemble des organismes, pompiers ou policiers, qui ont demandé à être entendus.

Alors, je pourrais parler encore un autre quatre, cinq minutes, M. le Président, mais je pense que l'essentiel a été dit, et je tenais à clore, peut-être, cette dernière motion préliminaire en disant, encore une fois, que nous regrettons, nous, de ce côté-ci de la Chambre, de l'opposition, que nous n'ayons pas pris le temps de prendre trois heures, quatre heures du temps de la commission, les députés, pour dialoguer, pour discuter, pour écouter des citoyens ou leurs représentants, alors qu'on va légiférer dans un domaine qui va les toucher directement.

Voilà, M. le Président, c'est l'essentiel des choses que j'avais à dire en ce qui concerne cette motion.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, puisqu'il n'y a... M. le ministre.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: Oui, je voudrais juste enchaîner pour faire suite aux propos du député de LaFontaine.

Je voudrais juste rappeler aux parlementaires ici présents que, si on a devancé l'échéancier prévu à la clause crépusculaire de 1993, c'est que, précisément, l'arbitrage qui remplace la négociation, ce régime d'arbitrage est, aux yeux des partenaires qui ont été consultés, un mécanisme qu'ils n'ont pas jugé suffisamment crédible. La preuve, c'est qu'ils ne s'en servaient à peu près pas, à peu près pas. Et, même, la partie surtout patronale, les villes n'ont pas investi véritablement suite à ces amendements qui ont été apportés en 1993.

Alors, c'est pour ça que, même s'il y a une clause crépusculaire, on a décidé, suite aux témoignages qui ont été entendus par la commission Boivin, le comité Boivin, on a décidé d'intervenir plus rapidement, parce que les parties n'en voulaient pas, du régime, et elles souhaitaient le voir amendé, amélioré, et elles souhaitaient que le gouvernement agisse là-dessus plus rapidement qu'en septembre ou octobre 1997. Alors, ce qui fut fait. Voilà.


Mise aux voix

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions sur la motion, je vais mettre aux voix la motion du député de Montmagny-L'Islet qui se lit comme suit:

«Que, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la commission de l'économie et du travail, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 27, Loi modifiant le Code du travail, tienne des consultations particulières relativement à ce projet de loi et qu'à cette fin elle entende l'Association des policiers provinciaux du Québec.»

Mme la secrétaire, voulez-vous appeler les députés, s'il vous plaît?

(21 h 40)

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gobé (LaFontaine)?

M. Gobé: Alors, je suis pour.

La Secrétaire: M. Brodeur (Shefford)?

M. Brodeur: Pour.

La Secrétaire: Et M. Benoit (Orford)?

M. Benoit: Pour.

La Secrétaire: M. Rioux (Matane)?

M. Rioux: Contre.

La Secrétaire: M. Baril (Arthabaska)?

M. Baril (Arthabaska): Contre.

La Secrétaire: M. Côté (La Peltrie)?

M. Côté: Contre.

La Secrétaire: M. Laprise (Roberval)?

M. Laprise: Contre.

La Secrétaire: M. Paillé (Prévost)?

M. Paillé: Contre.

La Secrétaire: Mme Vermette (Marie-Victorin)?

Mme Vermette: Contre.

La Secrétaire: Et M. Beaulne (Marguerite-D'Youville)?

Le Président (M. Beaulne): Abstention.

La Secrétaire: Alors, 3 pour, 6 contre et 1 abstention.


Étude détaillée

Le Président (M. Beaulne): Bon. Nous avons donc disposé de cette motion. Alors, M. le ministre, vous pouvez procéder avec l'article 1, à moins qu'il y ait des propositions de motions de l'opposition, mais je n'en vois pas à l'horizon. Alors, vous avez la parole pour nous présenter l'article 1.


Du règlement des différends et des griefs


Des policiers et pompiers

M. Rioux: Alors, M. le Président, l'article 1, j'en ai parlé abondamment dans mon discours d'ouverture, on a eu l'occasion d'en débattre dans d'autres endroits. Cette disposition a pour objet de remplacer la médiation obligatoire, qui n'a pas été un succès dans le régime que nous connaissons présentement, de remplacer la médiation obligatoire par une médiation volontaire et consensuelle. Ça, c'est bien important. Et voici pourquoi on en est arrivé là.

C'est que tous les témoignages qui ont été recueillis, à ce jour, de personnes qui ont été consultées non seulement par le comité Boivin mais par d'autres organismes, particulièrement auprès des médiateurs qui ont été appelés à intervenir, et, ça, c'est intéressant... Les médiateurs qui ont été appelés à intervenir puis à travailler à l'intérieur du cadre qui est le nôtre disent: Ce mécanisme-là est rarement utilisé avec sérieux. On a débordé le cadre de la consultation ordinaire puis on est allé voir des gens qui ont travaillé à l'intérieur du régime et qu'ils l'ont, comment dirais-je, exploré dans toutes ses coutures. Alors, il semblerait que la médiation obligatoire n'a jamais rien changé, au fond, au processus de négociation, tant et si bien qu'elle ajoutait à la durée du processus, à sa lourdeur, puis, finalement, on se ramassait quand même en arbitrage et on était obligé de tout recommencer.

Il semblerait également, M. le Président, et c'est peut-être important pour les collègues, que, pendant cette période de médiation obligatoire, les parties n'ont jamais trouvé des raisons sérieuses de négocier. Alors, quand on regarde ça, les coûts associés à un non-règlement, des délais qui se poursuivent, on est devenu vite conscient que les objets sur lesquels on est assuré de faire des gains en arbitrage, on s'est dit: Pourquoi en traiter pendant la période de médiation? On s'assoyait lentement, on se disait: On va attendre l'aboutissement; quand les délais seront terminés, bien, on ira allégrement vers l'arbitrage, et puis l'arbitre va nous donner ce qu'on n'a jamais réussi à arracher soit en négociation directe ou en médiation obligatoire.

Alors, de là l'article 1, M. le Président. C'est une observation non seulement des spécialistes qui ont été consultés, mais aussi des parties patronale et syndicale qui n'y croyaient plus. Donc, l'obligation du législateur est maintenant de proposer quelque chose de nouveau qui semble rejoindre la pensée d'à peu près tout le monde.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, M. le Président. Étant donné que le ministre n'a pas pu recevoir les groupes qui voulaient se faire entendre, peut-être pourrait-il nous expliquer quelle était leur position, à ces groupes-là, en ce qui concerne l'article 1, vu qu'ils ont été consultés, et ce qui fait qu'ils ont encore des choses à nous dire.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: J'ai fait la nomenclature, l'autre jour, des organismes qui ont été appelés à comparaître devant le comité Boivin, ils sont tous venus: Association des policiers municipaux; les villes, le regroupement des municipalités, des MRC du Québec, les cités et villes sont venus se faire entendre; tout le monde est venu devant le comité Boivin pour dire jusqu'à quel point il était devenu impérieux de changer le régime. Alors, on peut bien vous en faire la nomenclature.

La CUM est venue le 1er novembre. L'Union des municipalités du Québec est venue le 3 novembre. On pourrait également vous souligner qu'il y a d'autres organismes aussi importants que l'UMRCQ, qui est venue également dans la journée du 1er novembre. L'association des pompiers et policiers provinciaux, ils sont venus se faire entendre également au mois de novembre; l'Association des policiers provinciaux; la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal; le Syndicat des pompiers du Québec. On pourrait tous vous les énumérer. Et ils sont tous venus, ils ont expliqué leur point de vue, ils ont fait leurs suggestions. Ces suggestions-là ont été compilées dans un rapport synthèse et ça a donné les recommandations du comité Boivin.

Ce mécanisme-là, de médiation, vous le savez, ça exige une bonne volonté, de part et d'autre. Alors, les gens qui ont vécu l'expérience ont dit – bien, c'est pourquoi le projet de loi qu'on vous propose aujourd'hui vient répondre... C'est un retour à la médiation volontaire, au fond, parce qu'on dit: La médiation obligatoire, ça ne nous a pas donné ce qu'on espérait comme résultat, on veut autre chose. Ils n'ont jamais demandé le droit de grève, évidemment, mais il fallait leur proposer un nouveau mécanisme qui fait appel à la bonne foi puis à la bonne volonté des parties.

M. Gobé: Il y a combien de cas qui ont été répertoriés comme n'ayant pas marché avec l'ancienne manière, la manière actuelle?

M. Rioux: Je ne pourrais pas vous donner des chiffres exacts, mais, quand il se dégage un consensus comme celui qu'on a pu constater à la lumière des études du rapport Boivin, c'est que ça a dû être un échec assez retentissant. Parce que le constat du rapport Boivin, c'est de dire: C'est un échec; il faut donc repenser le système. Ils n'ont pas inventé ça. C'est venu de l'Union des municipalités, c'est venu des MRC et c'est venu des associations syndicales.

M. Gobé: Parce que j'ai...

Le Président (M. Beaulne): Oui, allez-y, M. le député.

M. Gobé: Ça va aller plus vite, peut-être...

Le Président (M. Beaulne): Oui, oui.

M. Gobé: C'est parce que certaines personnes nous ont fait valoir qu'elles n'avaient pas eu le temps d'expérimenter ce qui était prévu dans la loi 74 du fait de l'imposition de la loi 102, et là on nous dit: Ça ne marche pas. Alors, comment est-ce qu'on peut concilier les deux en même temps?

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Je faisais référence, tout à l'heure, à la Fédération des policiers municipaux qui intervenait puis qui disait: Bon, on trouve incroyable que le ministre du Travail agisse de façon si précipitée alors qu'il aurait pu le faire seulement en octobre 1997. C'est simple, la clause crépusculaire n'obligeait pas le ministre à se rendre jusqu'en octobre 1997, il pouvait le faire avant, et c'est justement parce qu'on a décidé d'agir rapidement qu'on a créé le comité Boivin, qui a fait son étude, qui a rencontré les parties, et qu'on en arrive aux recommandations qui sont devant nous. Si on avait vu là-dedans qu'il y avait des possibilités de succès, il n'y aurait pas de nouvelle loi sur la table aujourd'hui. C'est parce que ça ne marche pas. Puis les acteurs principaux ont constaté que ça ne marchait pas. C'est pour ça que le gouvernement n'avait pas le choix d'agir.

(21 h 50)

Le Président (M. Beaulne): M. le député...

M. Rioux: Puis je l'ai dit tout à l'heure, M. le député. Je voudrais dire au député de LaFontaine que, quand les médiateurs eux-mêmes viennent nous dire que ce mécanisme-là est sans effet, sans résultat, inefficace, ça pèse lourd, ça. Ce n'est pas des gens qui ont un parti pris patronal ou syndical, ça; c'est des médiateurs qui viennent là intervenir avec la meilleure bonne volonté du monde, avec toute leur compétence. Et ces médiateurs-là sont venus nous dire, après une vingtaine – et, ça, ça répondrait peut-être mieux à votre question... Après une vingtaine d'exercices, ils ont dit: On ne s'en va nulle part avec ça, il faut donc changer. Alors, c'est pour ça qu'on a devant nous le projet de loi n° 27.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: C'est parce que là on parle d'une vingtaine de cas. À titre d'exemple, lesquels cas l'on pourrait citer? C'est quand même récent, on ne parle pas d'il y a 10 ans en arrière.

M. Rioux: S'il faut les préciser, on va les préciser.

M. Gobé: Pas tous. Je ne vous demande pas de faire la nomenclature.

M. Rioux: Non, mais...

M. Gobé: Donnez-nous quelques cas qu'on puisse visualiser, peut-être.

M. Rioux: ...si tel est là votre voeu, on va l'exaucer. Il y a eu une vingtaine de cas, à votre souvenance...

(Consultation)

M. Rioux: Oui. Les médiateurs ne nous ont pas dit, dans la vingtaine de cas: Voici lesquels. Ils nous ont dit: Il y en a eu 20. Moi, je me contente de recevoir qu'il y en a eu 20 puis que ça n'a pas marché. Alors, si vous voulez la nomenclature, on peut essayer de vous la trouver, mais je ne l'ai pas dans ma poche.

M. Gobé: C'est parce que ce n'est pas le son de cloche que j'ai pu entendre des représentants des corps de police et de pompiers. Ce n'est pas ce qu'ils disent. Ils nous disent que la loi n'a pas été testée, qu'on n'a pas eu le temps de la mettre en application. Et probablement que c'est ça qu'ils seraient peut-être venus nous dire, je ne le sais pas, je ne peux pas présumer de leur parole. Mais ce que j'ai retenu, moi, des gens, c'est que ça n'avait pas été testé et que le gouvernement agissait précipitamment sans avoir donné la chance à ce qui existait avant de fonctionner. En plus, disaient-ils...

M. Rioux: Je ne sais pas, M. le Président, si le député de LaFontaine... Il ne se souvient pas de ça certain. C'est qu'à un moment donné on avait la conciliation obligatoire. Mais le député de Bourassa, lui, se souvient de ça très, très bien. Puis, aujourd'hui, pour les mêmes motifs... On a aboli, dans les années soixante-dix, la conciliation obligatoire. Aujourd'hui, pour exactement les mêmes raisons, on nous demande d'enlever la médiation obligatoire parce que ça ne donne pas de résultat. Les parties s'assoient, puis il n'y en a pas, de conciliation lorsqu'elle est forcée. Lorsqu'elle est obligatoire, imposée par le ministre, à toutes fins utiles, les gens disent: Non, ce n'est pas ça, le véritable esprit d'une négociation ou d'une médiation qui a des chances de succès, c'est lorsqu'elle est consensuelle et voulue par les parties.

M. Gobé: O.K.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Gobé: À ce moment-là, si une médiation obligatoire ne fonctionne pas, comment peut-on penser qu'une médiation non obligatoire va être demandée par les gens puis qu'elle va fonctionner?

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Voilà! Ça, c'est intéressant. Si elle n'est pas obligatoire, qu'elle est voulue par les parties et que, par hypothèse, elles n'en veulent pas, il leur est loisible de choisir cette voie-là et de s'en aller à l'arbitrage, avec les conséquences que ça comporte, avec le nouvel encadrement dont on va parler tout à l'heure, avec les nouveaux critères, qui étaient facultatifs et qui sont maintenant obligatoires. Mais, aller en arbitrage, il y aura désormais des risques, ce ne sera plus le gros lot comme avant, parce qu'il est encadré, l'arbitrage, il y a des critères. Les gens qui ne voudront pas s'en prévaloir parce que c'est facultatif, ce sera leur choix, mais ils vivront avec la décision arbitrale aussi. Parce que c'est bon, quand un mécanisme est là, de l'utiliser et de l'utiliser à bon escient, en toute bonne foi.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Rioux: Je ne sais pas si ça vaudrait la peine que je revienne sur deux, trois éléments dont j'ai parlé tout à l'heure. Ce nouvel attrait qu'on doit avoir pour la médiation, ça comporte des avantages évidents lorsqu'on choisit librement les choses, lorsqu'on est capable de calculer l'absence de perte de temps parce qu'on a choisi de se parler, et ça permet aussi non seulement de diminuer les coûts, ça empêche les pertes d'énergie et ça aplanit un certain nombre de difficultés qu'on n'a pas pu réussir en négociation directe.

Et c'est ce que j'appelle, moi, donner sa chance et ses lettres de noblesse à de la négociation. En médiation volontaire, ce qui est intéressant, c'est que les parties continuent à négocier. Ça, M. le Président, ce n'est pas rien. En médiation obligatoire, il n'y en avait pas, de négociation. Je ne sais pas si on se comprend, là. C'est ça, toute la différence. Je pense que les gens de relations de travail sont sensibles à ça. Et, là-dessus, on ne peut pas être indifférent à un processus aussi important que la négociation.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, M. le ministre, comment expliquer qu'une des parties s'oppose farouchement à l'adoption de ce projet de loi?

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Rioux: Une des parties?

M. Gobé: Bien oui, la partie représentée par les syndicats s'oppose au projet de loi. Alors, il y a deux parties dans ce projet de loi: il y a les municipalités, et il y a les pompiers et les policiers, que je sache, qui sont touchés. Et là une des parties, que sont les pompiers et les policiers, s'oppose à ce projet de loi là. Alors, s'il était si bon, s'il permettait de dénouer les situations que vous décrivez, il me semble qu'il y aurait consensus – je ne parle pas d'unanimité, au moins consensus – sur le bien-fondé de faire les changements que le gouvernement amène.

(Consultation)

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le ministre, nous attendons votre réponse.

M. Gobé: Non, mais j'aime mieux qu'il écoute ses fonctionnaires...

M. Rioux: M. le Président, moi, je ne sais pas si j'ai bien décodé le langage de la Fédération des policiers municipaux. Je n'ai pas compris qu'ils s'opposaient à ce projet de loi. Ce que j'ai compris, c'est qu'ils s'objectaient à ce que le ministre procède aussi rapidement. C'est ça que j'ai bien compris dans le langage de la Fédération des policiers municipaux. Et ce qu'ils auraient aimé, c'est que je prenne tout le temps prévu à la clause crépusculaire de quatre ans, alors qu'on a décidé comme gouvernement d'agir un peu plus vite. C'est ce que j'ai compris comme reproche et comme contestation de la part de la Fédération. Mais qu'on améliore le mécanisme de médiation et d'arbitrage, moi, je n'ai pas compris qu'ils étaient opposés à ça, au contraire.

M. Gobé: O.K. Peut-être, M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Gobé: Oui, pour l'éclairage des membres de la commission et dans un but de, c'est-à-dire, rapidement travailler, mais, quand même, qu'on ait toutes les informations. Je vais vous lire une résolution qui a été passée, de l'Association des policiers provinciaux du Québec à leur dernier congrès:

«Attendu que le gouvernement du Québec a déposé le projet de loi n° 27 intitulé Loi modifiant le Code du travail;

«Attendu que ce projet de loi a pour effet de modifier les règles de médiation et d'arbitrage des policiers municipaux et des pompiers du Québec;

«Attendu que ces modifications visent à imposer à l'arbitre des critères obligatoires dont il doit tenir compte dans sa décision;

«Attendu que ces critères ont pour effet d'enlever son sens au processus d'arbitrage;

«L'Association des policiers provinciaux du Québec appuie les policiers municipaux et les pompiers du Québec dans leur opposition à ce projet de loi et demande au gouvernement de le retirer du feuilleton de l'Assemblée nationale.»

Alors, quand je parle, je dis au ministre qu'il y a des parties qui s'opposent au projet de loi, là, on ne parle plus seulement de le bonifier, on parle d'opposition. C'est une résolution que je pourrais déposer à cette Chambre...


Document déposé

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le député, j'allais justement vous inviter à déposer la résolution pour le bénéfice des autres collègues...

M. Gobé: Oui, oui.

Le Président (M. Beaulne): ...pour pouvoir suivre de façon plus serrée vos échanges avec le ministre.

M. Gobé: Oui, absolument, absolument.

M. Rioux: M. le Président.

(22 heures)

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le ministre.

M. Rioux: J'aimerais savoir, sur le plan méthodologique, si on discute de tout le projet de loi d'un coup ou bien si on étudie le projet de loi article par article.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Bien, nous en sommes...

M. Rioux: Parce que l'intervention du collègue de LaFontaine, c'est une intervention un peu océanique qui dit: Bon, bien, les policiers municipaux sont contre. Bon. Moi, je lui réponds qu'ils sont peut-être contre parce qu'ils auraient voulu se faire entendre, puis, en tout cas, votre invitation n'est peut-être pas venue assez vite. Ce n'est pas ça, le débat. Le débat, c'est l'article 1. Vous avez appelé l'article 1. Moi, je dis: On va en débattre. C'est le bien-fondé d'une médiation qui était obligatoire jusqu'à ce jour et qu'on veut rendre facultative et consensuelle. C'est ça, le débat.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Gobé: Le débat, en effet, est là, mais le ministre nous a amenés, dans ses commentaires, à comprendre que les parties souhaitaient unanimement... ou les parties souhaitaient...

M. Rioux: Hein?

M. Gobé: ...feu l'article 1 et ce projet de loi là, bien sûr, parce que, disaient-elles, ça ne fonctionne pas. Il nous a parlé de 20 cas; une vingtaine de cas que ses gens lui auraient rapportés. Moi, mon argument était le suivant, j'ai dit: S'il y avait unanimité ou si les gens étaient d'accord, comme le ministre le mentionne – avant même d'aller plus loin dans le projet de loi – pourquoi des groupes s'opposent au projet de loi?

Le Président (M. Beaulne): Ah!

M. Gobé: Et là, bon, il me dit qu'on est océanique, qu'on est déjà rendu plus loin. On y reviendra après, lorsqu'on touchera l'arbitrage. Dans cette résolution, on parle d'ailleurs de médiation et d'arbitrage. Mais ceci était pour imager et appuyer mon argumentaire à l'effet que ce n'est pas vrai que le projet de loi fait consensus et que le fait de vouloir changer l'arbitrage obligatoire, à l'article 1, était voulu par l'ensemble des parties. C'est tout.

Maintenant, j'ai demandé au ministre combien de cas n'ont pas marché. J'aurais aimé avoir une réponse, avoir quelques cas. Il m'a dit: Il y en a 20. Mais c'est quoi? Donnez-moi... C'est quels corps de policiers ou quels corps de pompiers avec quelle municipalité? J'aimerais ça, en avoir au moins deux, trois, là. Il me semble que, lorsqu'on parle de 20 cas sur une période aussi courte que nous connaissons, les fonctionnaires qui sont assis autour du ministre – derrière aussi, pour certains – devraient être capables de nous donner des exemples frappants. J'aimerais ça savoir, moi, à quel endroit, où ça n'a pas marché et pourquoi. En avez-vous ou vous n'en avez pas? Si vous en avez 20, donnez-m'en au moins trois.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Gobé: Ce n'est pas beaucoup.

M. Rioux: Ce qu'on a voulu savoir surtout des médiateurs qui ont été appelés à intervenir dans ces dossiers-là, c'est combien il y avait eu de cas, et on a dit: Une vingtaine. Moi, personnellement, ça m'a satisfait. Mais, quand j'ai lu le rapport Boivin et qu'on nous a dit – parce qu'il fallait la lire, cette affaire-là – qu'il était nécessaire, pour nos fins, de les attribuer... Il dit: Ce qui est bien important aux fins de notre étude, c'est de les attribuer à un groupe en particulier.

Quatre expressions d'opinions sont revenues avec assez de régularité pour qu'il vaille la peine d'en faire état. Tout d'abord, il semble acquis que la médiation n'a d'avenir que si elle redevient volontaire; ça, c'est l'opinion du monde. S'agissant de l'intervention médiatrice, l'opinion des médiateurs est tranchée. La médiation obligatoire n'a absolument rien changé, si ce n'est qu'elle a ajouté à la durée de l'ensemble du processus menant à la sentence arbitrale. À cet égard, ce n'est pas tant la démonstration statistique qui convainc les médiateurs, mais la nature et le niveau des échanges qu'ils ont avec les parties dans ce secteur, lorsque comparés à leurs interventions dans d'autres secteurs d'activité. Moi, je me dis: Ça tombe comme du plomb.

Le Président (M. Beaulne): M. le député?

M. Rioux: Ça peut bien ne pas convaincre le député de LaFontaine, mais, quand on connaît ça un peu, on se dit: Aïe! ce n'est pas l'opinion de gens qui viennent de nulle part. Les municipalités qui sont venues témoigner, ce n'est pas des extraterrestres. Moi, je comprends, par exemple, les syndicats des policiers. Ça, on peut faire un débat là-dessus, qui peut être très long, d'ailleurs. O.K.? Quand on a décidé d'inclure les critères dont on parlera à un article plus loin...

M. Gobé: L'article 6.

M. Rioux: ...là on va comprendre tout le sens des interventions des syndicats de pompiers et de policiers. Mais ça ne veut pas dire qu'en principe ils sont contre le projet de loi n° 27. Ah non! ça, c'est autre chose.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Écoutez, M. le Président, je pense que le ministre nous parle de cas. Après ça, il nous lit une partie du rapport Boivin. Il dit que les policiers ne sont pas contre le projet de loi n° 27. On verra par la suite. En ce qui me concerne, sur l'article 1, moi, je n'ai plus de question à poser.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Sur division?

M. Gobé: Oui, bien sûr, sur division.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, je vous invite à nous introduire l'article 2.

M. Rioux: L'article 2. C'est abrogé, c'est un article de concordance avec l'article 1. Compte tenu, dorénavant, que le caractère volontaire de la médiation sera dans la loi, il s'avère donc inutile de maintenir cette obligation. Alors, il faut faire... C'est juste un article de concordance.

Le Président (M. Beaulne): Y a-t-il des commentaires ou des questions sur l'article 2?

M. Gobé: Non, concordance.

M. Rioux: La concordance.

M. Gobé: C'est évident que, s'il n'y a plus de médiation obligatoire, les gars ne sont plus obligés de...

M. Rioux: Voilà.

M. Gobé: Par contre... Excusez. Mais, lorsqu'il y a médiation volontaire, ça va de soi qu'ils y vont...

M. Rioux: C'est ça.

M. Gobé: ...ou ils n'y vont pas. Sinon, il n'y a plus de médiation.

M. Rioux: Il y a consensus. C'est consensuel.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Gobé: Sur division, bien sûr.

Le Président (M. Beaulne): L'article 3, M. le ministre.

M. Rioux: L'article 3. D'abord, dans un premier temps, cette disposition a pour objet de restreindre à l'article 96 les informations que doit contenir le rapport du médiateur, en les limitant aux matières qui ont fait l'objet d'un accord et à celles faisant encore l'objet d'un différend. Ça, c'est bien important. C'est en lien avec l'article 96. À 97... On peut les passer les trois parce qu'ils sont intimement liés, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y! Vous pouvez présenter...

M. Rioux: C'est ça.

Le Président (M. Beaulne): ...l'ensemble des articles qui sont touchés par l'article 3 et nous pourrons les discuter dans leur ensemble.

M. Rioux: Alors, le nouvel article 96, si on regarde ça d'un peu plus près, ça restreint les informations qui doivent apparaître au rapport du médiateur. Dorénavant, le rapport n'a plus à indiquer la position respective des parties sur les matières qui ont fait l'objet d'un différend et le médiateur n'a plus à inclure non plus ses commentaires. Ça, c'est très important.

Ces exigences, vous vous en souviendrez, étaient nettement rattachées au processus de médiation obligatoire. C'étaient des pratiques avec une médiation obligatoire, évidemment. Le médiateur faisait ses commentaires, il faisait état de ce qui avait fait l'objet d'une entente, de ce qui était resté un différend fondamental. Alors, leur finalité était de forcer un règlement. Quand un médiateur met tout ça dans son rapport, c'est d'essayer d'enclencher et de faire en sorte que ça provoque un règlement. Et, aussi, il y avait le fait que, dans certains cas, on les rendait publics, ces... Ça mettait encore davantage de pression.

Alors, dans ce cas-ci, c'est sur une base volontaire. Ce n'est plus du tout le même pattern, ce ne sont plus du tout les mêmes finalités. Et la médiation volontaire, bien, c'est un processus qui est complètement différent, c'est une approche... Je dirais que c'est la médecine douce des relations de travail.

Le Président (M. Beaulne): Avez-vous, M. le député... MM. les députés de l'opposition, avez-vous des questions ou des commentaires sur cette disposition, à l'article 96? Alors...

M. Gobé: C'est ça. C'est parce qu'on ne veut pas en discuter globalement, puis, après ça, aller sur chacun.

M. Rioux: Oui, ce serait peut-être qu'on enclenche tout de suite... Je pense que le député de Bourassa a bien saisi, là.

Le Président (M. Beaulne): L'ensemble des trois sous-articles.

M. Rioux: Parce qu'on arrive... Après la médiation voulue par les parties, facultative, consensuelle, on aborde un nouveau mécanisme qui est la médiation arbitrale. La médiation arbitrale, c'est à l'article 87.

Le Président (M. Beaulne): L'article 97.

M. Rioux: C'est 97, je m'excuse. C'est un nouveau mode d'arbitrage qui s'ajoute au seul mode actuel et n'est accessible qu'à la demande conjointe des parties. Il y a des gens qui vont sortir de la médiation volontaire et qui ont fait une démarche qui n'est peut-être pas arrivée à la conclusion d'une convention collective, mais ils ont fait un beau bout de chemin. Ils ont appris à se parler. Ils ont appris à se connaître. Ils ont appris à se respecter. Ils arrivent à un tournant, puis là ils se disent: Avant d'y aller, à l'arbitrage, avant de prendre le risque que comporte un arbitrage, parce que, souvent, ça tombe favorable à un côté et défavorable à l'autre, on introduit ici la médiation-arbitrage.

(22 h 10)

Les partenaires ont fait valoir devant le comité Boivin que certains dossiers se prêtaient à un exercice de médiation-arbitrage où c'est la même personne qui peut agir. C'est les mêmes personnes qui sont au dossier, mêmes spécialistes. Alors, le médiateur, plutôt que d'être un arbitre qui tranche, il écoute les parties et il peut régler, il peut régler complètement la convention collective. Et, si ce bout-là n'a pas donné les résultats qu'on pensait que ça allait donner, il se transforme en arbitre, il peut trancher. C'est de la souplesse, mais, en bout de piste, ça règle. Ça vise donc à rendre plus efficace, plus complet le processus de résolution des différends. Puis ça vise également à assurer une plus grande continuité entre la médiation volontaire et l'arbitrage.

Moi, personnellement, quand j'ai regardé ça, j'ai trouvé ça séduisant, surtout que ce n'est pas un mécanisme où tu t'en vas en négociations, puis tu dis: Bien, si ça ne marche pas, on va déclencher la grève. Non, on s'en va en arbitrage; ce n'est pas pareil. L'arbitrage, c'est une autre façon de voir les choses. Et, avec les critères qu'on introduit, c'est une chance qu'on donne aux parties d'aller plus loin dans leur démarche et peut-être de trouver le règlement qu'elles recherchent.

Mais il faut dire aussi – on a eu l'occasion d'en parler dès le départ, le député de LaFontaine va s'en souvenir – que ça prend le consentement des deux parties. Ça demande aussi une compétence particulière. Et le projet de loi assujettit ce recours à l'entente conjointe des parties dont on a toutes les raisons de croire que ça va porter également... Parce que ça porte également sur la désignation de l'arbitre. Les parties choisissent, ont le loisir de choisir leur arbitre. Si elles ne s'entendent pas, c'est sûr que le ministre va le nommer. Mais elles ont le loisir de partir dans une dynamique où elles choisissent la médiation volontaire, où elles choisissent la médiation-arbitrage, puis elles choisissent même leur arbitre. Ça, c'est l'article 98. Alors, c'est pour ça que je vous disais que c'était un continuum, c'était un bloc, et on pourrait le discuter comme tel, si c'est là la volonté de l'opposition ou du président.

Le Président (M. Beaulne): Oui, effectivement, M. le ministre. Je crois comprendre des collègues de l'opposition que c'était la façon dont on souhaitait procéder. Alors, maintenant, M. le député de LaFontaine, les collègues de l'opposition, le ministre a terminé ses explications sur les sous-articles 96, 97 et 98 de l'article 3. Alors, la parole est à vous pour des commentaires ou des questions.

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, M. le Président. Tout d'abord, ce que j'aimerais savoir... Actuellement, à peu près 70 % – on va revenir, ça a à voir un peu, mais une petite question préliminaire – des conventions collectives sont échues, dans le domaine policiers-pompiers. C'est à peu près ça, là?

M. Nadeau (Gaston): Bon, je ne le qualifierais peut-être pas de 70 %, mais un très bon nombre.

M. Gobé: Un bon nombre, bon.

Le Président (M. Beaulne): Pour les fins de la transcription, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. Gobé: Excusez-moi, vous êtes monsieur...

M. Rioux: On parlait de 60 %...

Le Président (M. Beaulne): Bien, M. le ministre...

M. Nadeau (Gaston): Je suis Gaston Nadeau. Je suis fonctionnaire à la Direction des politiques...

M. Gobé: Ah!

M. Nadeau (Gaston): ...du ministère du Travail.

M. Gobé: Bonjour, M. Nadeau.

M. Nadeau (Gaston): J'étais secrétaire du comité Boivin. Il y a effectivement un très bon nombre de conventions – je ne saurais pas vous dire quel nombre, là – échues depuis décembre 1995, à ma connaissance. Parce que les cycles font que...

M. Gobé: C'est ça.

M. Nadeau (Gaston): ...ça survient presque systématiquement aux trois ans, vers la fin de décembre.

M. Gobé: On nous parle de près de 70 %, à peu près. Ça peut être 68 %.

M. Nadeau (Gaston): C'est possible, c'est possible.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Ce que j'aimerais savoir, c'est: Ces conventions qui sont échues, elles vont être traitées sous quelles normes, sous quel régime? Sous le régime actuel ou sous le nouveau régime? Vu qu'elles sont déjà échues, est-ce que le projet est rétroactif, à cet effet-là?

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: C'est ça. C'est sous le régime de la nouvelle loi. Oui, s'il y a une loi qui est votée par l'Assemblée nationale, on l'applique. Je voudrais savoir si le député de Bourassa veut dire qu'on va rendre l'application de la loi...

Le Président (M. Beaulne): C'est le député de LaFontaine.

M. Gobé: Non, mais c'est bon, j'aime ça qu'il m'explique, parce que c'est important que...

Le Président (M. Beaulne): Oui, c'est ça, mais je fais simplement rectifier, pour les fins de la transcription, qui posait la question. Là, c'était le député de LaFontaine.

M. Rioux: Oui, mais c'est ça. Moi, ce que je veux savoir: Est-ce qu'il veut savoir si la loi entre en force le jour de sa sanction ou bien s'il pense qu'on va avoir une loi qui va entrer... On peut la voter, mais la rendre opérationnelle 10 mois ou un an plus tard.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député de LaFontaine, quel est exactement le sens de votre question?

M. Gobé: Bien, le sens, c'est simple. C'est parce que, selon les lois d'interprétation, l'arbitrage, c'est des procédures, ça. Il y a différentes opinions qui peuvent être émises, d'accord. Il y a des droits acquis, entre autres. Mais regardez ce qui se lit ici: «Les procédures intentées sont continuées, les infractions commises sont poursuivies et les prescriptions commencées sont achevées sous ces mêmes dispositions en tant qu'elles sont applicables.»

Est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver dans une situation où il y a des gens qui peuvent plaider que leur situation, ayant été mise en vigueur sous l'ancien système, devrait être continuée sous ce système-là? Est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver avec des procédures qui peuvent embouteiller à nouveau tout le processus?

Le Président (M. Beaulne): La question me semble...

M. Gobé: C'est une question, hein, ce n'est pas...

Le Président (M. Beaulne): ...très claire, M. le ministre.

M. Rioux: Pouvez-vous préciser ça, pour ne pas qu'on soit...

M. Gobé: Peut-être, les...

M. Rioux: ...pris sous l'empire de deux régimes.

Le Président (M. Beaulne): Oui. Pouvez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. Chevrier (Jacques): Jacques Chevrier, Direction des affaires juridiques du ministère du Travail. Le projet de loi n° 27, c'est une loi qui est en partie une loi de pure procédure ou une loi qui est en partie une loi relative à la preuve comme telle. Or, les principes de droit transitoires qui s'appliquent dans ce genre de loi là font en sorte – et c'est la jurisprudence qui le veut – que la nouvelle loi prend effet immédiatement à toute procédure en cours d'instance, au moment de l'entrée en vigueur de la loi comme telle.

Donc, les dispositions du projet de loi n° 27 prennent effet immédiatement. Alors, ça, c'est valable autant pour la médiation, c'est valable autant pour la nouvelle formule de médiation-arbitrage, évidemment, dans la mesure où l'arbitrage n'a pas été déféré par le ministre, et c'est valable également pour les nouveaux critères et le critère à teneur économique également. Donc, ça s'applique immédiatement. Ça a un effet pour les procédures à venir. Ça ne régit pas les procédures qui sont complétées.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. Chevrier.

M. Gobé: Oui, mais c'est parce que...

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: O.K. Je pense que c'est intéressant, puis je crois qu'on doit clarifier ça, parce qu'il y a deux avis, là, qui sont faits: un par les policiers, leurs conseillers juridiques, ce sont les gens qui se sont penchés sur la question; l'autre par l'UMQ, les municipalités, leurs conseillers juridiques. Et chacun d'entre eux a une interprétation différente appuyée sur des arguments qui sont peut-être un peu plus poussés que ceux que de simples législateurs comme nous, ici, pouvons amener.

Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu pour le ministère... Est-ce que vous avez demandé des avis juridiques, vous, au ministère des Finances, par exemple... pas des Finances, de la Justice? Je m'excuse, la langue m'a fourché.

M. Chevrier (Jacques): On a eu...

Le Président (M. Beaulne): M. Chevrier.

M. Chevrier (Jacques): On a fait l'étude nous-mêmes à la Direction des affaires juridiques...

M. Gobé: Est-ce qu'il y a des avis juridiques, là? Est-ce qu'on s'est penché là-dessus?

M. Chevrier (Jacques): On a fait, nous...

M. Rioux: Puis de la Justice aussi.

M. Chevrier (Jacques): Oui, et je suis de la Justice, en passant.

M. Rioux: De la Justice aussi.

M. Chevrier (Jacques): On a regardé la question à la Direction des affaires juridiques. On a également consulté les juristes au Bureau des lois et ils sont du même avis que nous. Alors, en soi, c'est une loi qui prend effet immédiatement à la date d'entrée en vigueur du projet de loi.

M. Rioux: Alors, on va fonctionner avec ces avis-là.

M. Gobé: Si une des parties n'est pas d'accord avec ça...

M. Chevrier (Jacques): Bien, écoutez, on n'est pas quand même...

M. Gobé: ...c'est quoi, la procédure, là?

(22 h 20)

M. Chevrier (Jacques): On ne peut pas contrôler les débats devant les tribunaux. C'est sûr que, si les parties veulent soulever la question à l'arbitre, l'arbitre a la compétence pour trancher cette question-là, et c'est lui qui aura le dernier mot dans cette histoire-là, indépendamment des avis juridiques. C'est évident qu'on va probablement se retrouver avec des avis contradictoires. Le droit transitoire, ce n'est pas quelque chose qui est coulé dans le béton. D'ailleurs, la jurisprudence est très abondante, par rapport à ce genre de problème là, comme tel.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Gobé: Mais est-ce qu'on peut se retrouver avec des contestations devant les tribunaux? C'est ça que vous disiez?

M. Chevrier (Jacques): C'est plausible.

Le Président (M. Beaulne): M. Chevrier.

M. Chevrier (Jacques): Je ne suis pas garant de l'avenir.

M. Gobé: À la limite, les gens peuvent y aller.

M. Chevrier (Jacques): Je ne suis pas garant de l'avenir. Écoutez, si les parties veulent soulever la question devant l'arbitre, elles le feront.

M. Gobé: C'est ça. On me dit que c'est déjà arrivé en 1993, hein?

M. Chevrier (Jacques): Dans quel cas?

M. Gobé: L'article 9, dispositions applicables. Telles qu'elles sont modifiées par la présente, s'appliquent à toutes différentes corporations municipales... Ça c'est... expirent après le 30 décembre 1992. Est-ce que vous avez tenu compte de ce qui s'est déjà passé. Puis, votre avis juridique, est-ce qu'on pourrait peut-être en avoir copie, les membres de la commission? Vous avez dû prendre un avis écrit, là. Il a dû y avoir une consultation, pas seulement avec vous, entre différents fonctionnaires. Ça ne doit pas être un secret public, cette affaire-là. Je demanderai que peut-être... C'est important. Les policiers ont une vision, un avis...

M. Rioux: Moi, j'aimerais qu'il précise ce qu'il veut, là.

M. Gobé: ...l'UMQ en a un autre. Alors, je souhaiterais, pour éviter tout quiproquo en cette commission... Le monsieur nous dit qu'il travaille au ministère de la Justice, qu'il a des avis juridiques. Peut-être pourrions-nous en avoir une copie, de l'avis juridique?

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Avant de procéder, on a travaillé, du côté du ministère, avec nos spécialistes, on a consulté le ministère de la Justice et on a pensé qu'avec les avis que nous avons reçus – ce n'était pas des avis écrits, hein, c'était verbal – on était suffisamment solides pour procéder. Alors, c'est ça qui est devant vous. Je ne pense pas qu'on puisse aller plus loin que ça ce soir, là-dessus.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Rioux: Le député de LaFontaine prend des avis, lui, de la Fédération des policiers du Québec, même des policiers provinciaux qui n'ont rien à voir dans le débat que nous avons ce soir. Moi, je lui dis que c'est correct, c'est des avis, c'est respectable. Les avis qu'on a du ministère du Travail et de la Justice... Je pense qu'on est en bonne compagnie.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: M. le Président, je prends les avis des citoyens qui sont concernés par cette législation et qui me font valoir des points qui, pour eux, sont importants.

M. Rioux: Oui.

M. Gobé: Maintenant, le ministre a à sa disposition le ministère de la Justice. Il nous dit que – c'était des questions que j'ai posées à monsieur – il y avait eu des avis juridiques. Maintenant, on apprend que c'est des avis verbaux. Moi, j'aimerais aussi qu'on soit un peu raisonnable. Il y a des corps de police qui ont des conseillers juridiques qu'ils doivent payer très cher pour avoir des avis qui leur disent qu'ils seront certainement encore sous l'ancien régime...

M. Rioux: M. le Président...

M. Gobé: ...qu'ils auront le droit d'y aller. Il y a maintenant des conseillers juridiques des municipalités qui, eux, disent le contraire. Le ministre dit qu'il a des avis juridiques. Moi, je dis que, comme législateurs, on devrait au moins s'assurer par écrit, là, qu'on est dans la bonne direction...

M. Rioux: Oui...

M. Gobé: ...sinon on risque de se retrouver en contestation. Et puis je ne vois pas comment, là, on va pouvoir faire appliquer la loi. Qu'on passe une...

M. Rioux: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, je trouve difficile de suivre le député de LaFontaine dans sa logique. Mais comment on peut avoir une contestation d'une loi qui n'existe pas?

Une voix: Pour le moment.

M. Rioux: Pour le moment. Deuxièmement, ce que j'aimerais dire au député de LaFontaine, c'est qu'il intervient sur des dispositions de la loi qu'on va retrouver à l'article 10, qu'on va toujours débattre à l'article 10. Il est complètement hors d'ordre.

M. Gobé: Pas du tout.

M. Rioux: Alors, essayez donc de voir, là, si on ne pourrait pas travailler...

M. Gobé: M. le Président...

M. Rioux: ...de façon efficace sur les articles, comme on vient de les énumérer, comme on vient de les discuter et comme on vient de les expliquer.

M. Gobé: M. le Président?

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, je ne suis pas ici pour me chicaner avec le ministre, moi. J'ai des citoyens qui me font des représentations. Les citoyens, d'abord, demandent à venir les faire eux-mêmes. On ne veut pas les recevoir. Sans que je prenne parti sur le fond du problème, je pose des questions que des citoyens auraient voulu peut-être pouvoir poser ou qu'ils nous ont posées, à nous, voulant obtenir des réponses du ministre. Il ne faut pas qu'il prenne ça personnel, là, premièrement.

Deuxièmement, quand il dit que je parle d'un projet de loi qui pourrait être contesté, qui n'est pas adopté, bien, c'est évident. Mais il faut être sérieux, là. Nous sommes des législateurs en train de faire un projet de loi. Avant de le voter, on pose des questions à savoir s'il pourrait être contestable ou pas. Ses fonctionnaires disent oui ou non. Je ne le sais pas, mais tout peut arriver. Et là il est en train de nous dire que je présume que le projet de loi qui n'existe pas pourrait être contesté. On va être sérieux.

La question est simple, pas plus compliquée que ça: Est-ce que, oui ou non, vous avez pris un avis juridique pour répondre à la question que je vous pose, c'est-à-dire: Est-ce qu'il est possible qu'une partie qui est prenante dans ce projet de loi puisse demander à un tribunal de pouvoir continuer sa négociation selon l'ancienne loi, selon l'ancien régime?

Et ça représente à peu près 70 % des cas. Pourquoi je l'amène maintenant et pas à l'article 10? Parce que, dans l'article 3, vous amenez le nouveau processus, le nouveau mode d'arbitrage qui n'existe pas dans l'ancien. C'est pour ça que je l'amène maintenant. Alors, si vous me répondez à la question, au moins on va passer au suivant. Je ne veux pas m'amuser, moi, à faire des cas personnels, là-dedans, dans cette affaire-là.

C'est important pour les gens qui vont vivre avec, c'est important pour le législateur, c'est important pour le gouvernement qui va devoir aller en cour, puis les avocats peut-être. Peut-être aussi que c'est important parce que ça risque de peut-être bloquer le processus d'application du projet de loi. Alors, c'est pour ça. La voilà la raison pour laquelle je pose la question. Il ne faut pas que le ministre prenne ça personnel, pour lui. Je comprends qu'il y a 40 ans qu'il est dans les affaires publiques, puis, moi, je suis peut-être un petit nouveau là-dedans. En attendant, j'essaie de faire mon travail le mieux que je peux, dans les intérêts des citoyens qui nous posent des questions, et je n'y vois pas mal. Et je souhaiterais que le ministre, au contraire, au lieu de vouloir compliquer la vie, bien, fasse en sorte de nous la rendre plus facile et plus compréhensible, lui qui a cette grande expérience, dont il nous parle, depuis 40 ans.

M. Rioux: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Je pense qu'il faut bien interpréter la pensée du gouvernement là-dedans. Le gouvernement décide de présenter une loi, de débattre d'une loi. Et il est évident qu'après les analyses que nous avons faites au ministère du Travail et à la Justice on peut voter ce projet de loi. Il est applicable dès son entrée en vigueur. Et, s'il y en a qui soulèvent une contestation, il y a des tribunaux pour trancher ça. Nous, on pense qu'on est solides et qu'on va gagner. Les policiers peuvent penser le contraire, libre à eux. Nous, on pense qu'on est en terrain solide et que cette loi-là, dès son entrée en vigueur, va régler, va gérer une nouvelle disposition de négociation, de médiation et d'arbitrage chez les policiers et les pompiers...

Le Président (M. Beaulne): À vous la parole, M. le député de LaFontaine.

M. Rioux: ...municipaux. Municipaux!

M. Gobé: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Oui, allez-y, M. le député.

M. Gobé: Une des raisons pour lesquelles je porte un peu d'attention particulièrement à cela, parce que... Je ferai un rappel historique de deux ans, trois ans. Nous avons voté, alors que nous étions de ce côté-là, une loi, qui s'appelait la loi 145, qui établissait une surtaxe sur les immeubles à Montréal. C'est bien la 145? En tout cas, la loi qui...

Le Président (M. Beaulne): La loi 145.

M. Gobé: La loi 145, c'est ça.

Le Président (M. Beaulne): Qui permettait.

M. Gobé: Qui permettait...

Le Président (M. Beaulne): ...d'établir la surtaxe.

M. Gobé: Et, lorsqu'on a posé la question à nos savants chefs de cabinet et fonctionnaires du ministre de l'époque, on nous a dit: C'est blindé, pas de problèmes, ça va bien aller; pas contestable en cour. On s'est retrouvé avec un avocat, pas un gros bureau d'avocats, un avocat d'un petit bureau, un dénommé Jérôme Choquette, qui a été en cour, puis qui a gagné, puis la loi a été rendue non valide. Ça a coûté combien au gouvernement? Ça a coûté combien aux nouvelles législations? Ça a coûté combien en imbroglios? Et la question que je pose, c'est: Est-ce que cette fois-ci on a un avis écrit, un avis juridique qui nous permet d'éviter ce genre de situation là? Ce n'est pas plus compliqué que ça. Pourtant ce qui est sûr...

Le Président (M. Beaulne): Monsieur...

M. Gobé: On est même allé en appel, sur la 145, parce qu'on était sûr de gagner et on a perdu.

(22 h 30)

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine, je comprends très bien votre préoccupation, mais, si on fait la comparaison avec la loi 145 et la surtaxe qu'elle permettait, la contestation de la surtaxe était basée sur la non-constitutionnalité de cette disposition, sous prétexte qu'il s'agissait d'une taxe directe, alors que les taxes indirectes, selon la Constitution canadienne, relevaient de la juridiction exclusivement fédérale.

Alors, votre comparaison... Je saisis très bien votre demande et votre intervention, mais... Alors, si la question, c'est: Est-ce que vous pensez qu'il y aurait des dispositions là-dedans qui pourraient permettre une contestation sur la base de la constitutionnalité... Parce que, si vous comparez à la loi 145 et à la dimension de la surtaxe...

M. Gobé: M. le Président, s'il vous plaît, on va être sérieux, là. Vous savez très bien que j'ai pris ça comme un cas de figure pour vous démontrer qu'une loi qui avait été amenée par un ministre, qui était censée être blindée de tous les côtés ne l'a pas été. Je ne parle pas de Constitution là-dedans. S'il vous plaît!

Le Président (M. Beaulne): Non, non, mais j'essaie de faire le partage des choses.

M. Gobé: Ce que je vous dis, c'est... La question que je pose au ministre, c'est: Est-ce qu'il a un avis écrit, un avis juridique qui nous assure de l'étanchéité, qui nous assure qu'on ne pourra pas, basé sur des avis juridiques et des demandes de groupes mécontents ou insatisfaits, aller en contestation qui pourrait tout bloquer? Je ne parle pas de Constitution là-dedans, puis ne mélangez pas les affaires, là.

Le Président (M. Beaulne): Non, non, je ne mélange pas les choses, sauf qu'on aimerait bien se comprendre ici, parce qu'il me semble que, depuis un certain temps, il y a une sorte de dialogue de sourds entre le ministre et le porte-parole.

M. Gobé: Non, il n'y a pas de dialogue de sourds. Ma question est claire: Est-ce que, oui ou non, on a un avis juridique qui nous assure que cet article de loi ne peut pas être contesté d'une manière positive en cour, premièrement, au risque de paralyser l'application du projet de loi? Et je demande qu'on le dépose.

Le Président (M. Beaulne): La question est très simple.

M. Gobé: C'est clair, c'est aussi simple. Le reste, c'est des exemples, c'est des discussions. Vous avez peut-être raison.

M. Rioux: M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Rioux: ...j'écoutais le député de LaFontaine puis j'avais un flash qui me venait à l'esprit, puis on pourrait peut-être valider ça avec nos spécialistes. Ici, on n'est pas sur un débat de fond des droits des citoyens puis on ne peut pas évoquer la cause de Choquette. Ici, on est en train, par une loi, d'établir une procédure conduisant à l'exercice d'un droit, n'est-ce pas? Est-ce que ça va? Oui?

M. Chevrier (Jacques): Oui, c'est ça.

M. Rioux: Alors, on est à établir une procédure conduisant à l'exercice d'un droit. Nous, on pense, avec les consultations qu'on a eues, puis on n'a pas de document à déposer du ministère de la Justice ou du ministère du Travail... On s'est consultés puis on a dit: Dans ce processus qu'on est en train de mettre en place et la loi qu'on va voter, dès son entrée en vigueur, est-ce qu'on pense que ce sera opérationnel et qu'on va pouvoir établir la procédure, le processus qu'on va remettre entre les mains des parties? Mais il n'y a personne... Ce n'est jamais garanti que quelqu'un ne se lèvera pas, à un moment donné, pour contester ça. Et ce sera son droit, puis on ira devant le tribunal. On ne peut pas empêcher quelqu'un d'amorcer un débat judiciaire, pas dans une société de droit comme la nôtre. Je pense que le député va comprendre ça aussi.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Gobé: Oui. La seule différence – en terminant, rapidement – c'est qu'on sait déjà qu'il y a des groupes qui ne sont pas d'accord. Ce n'est pas quelqu'un qui pourrait, un jour, soulever un débat. Ils nous le disent, là. Bon. Maintenant, pourquoi, à ce moment-là, ne pas – ou c'était peut-être l'intention du ministre de le faire plus tard – faire des clauses transitoires? Dans la loi 74, il y en avait, des clauses transitoires. Bien, monsieur, vous regarderez, article 9.

M. Rioux: ...transitoire, une clause crépusculaire.

Une voix: Crépusculaire.

M. Rioux: Crépusculaire.

M. Gobé: Article 9, regardez. Vous l'avez, là? On peut vous le montrer.

M. Rioux: Il disait qu'on se donnait de 1993 jusqu'à 1997 pour étudier ou faire une analyse de ce qu'ont donné les résultats.

M. Gobé: Regardez, votre fonctionnaire, vous allez voir.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Gobé: C'est la loi qui s'appliquait en fonction de l'échéance des conventions collectives, c'est une clause transitoire. Alors, c'est peut-être ça que vous pourriez rajouter dans le projet de loi, pour faire en sorte de le bonifier et de le clarifier.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, on va regarder ça un peu, là, quelques secondes.

M. Gobé: Ah! est-ce que vous voulez qu'on suspende, peut-être, cet article-là...

Le Président (M. Beaulne): Je peux suspendre...

M. Gobé: ...pour permettre...

Le Président (M. Beaulne): Je suspends quelques instants pour permettre aux deux parties...

M. Gobé: Mon but n'est pas de faire...

Le Président (M. Beaulne): Non, mais, M. le député...

M. Gobé: C'est de bonifier le projet de loi.

Le Président (M. Beaulne): Oui, oui. Dans cette commission, il n'y a personne qui passe de jugement sur les intentions de qui que ce soit, je pense que nous sommes tous de bonne foi, et c'est la raison pour laquelle on va suspendre.

(Suspension de la séance à 22 h 35)

(Reprise à 22 h 41)

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député de LaFontaine, poursuivez votre raisonnement.

M. Gobé: Bien, c'est ça, je pense qu'il devrait être prévu dans le projet de loi n° 27 des clauses transitoires qui clarifient ce qui arrive pour les conventions déjà échues et qui sont déjà en négociations. Sinon, c'est comme sauter – je vais prendre un mot de mon collègue – dans le vide sans parachute, on saute dans le vide puis on ne sait pas ce qui peut arriver.

Le Président (M. Beaulne): La question est tout à fait pertinente. M. le ministre.

M. Rioux: Pour les cas, M. le Président, qui sont inscrits à l'arbitrage, c'est sûr que ça va être le processus qui est en place avant la passation de la loi. O.K.? Ceux qui vont arriver, ceux qui s'en viennent et qui vont vouloir se prévaloir de l'arbitrage vont être gérés par la nouvelle loi, et ceux qui n'y sont pas et qui vont le devenir plus tard, ce sera encore davantage la prochaine loi. O.K.?

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Gobé: Oui. O.K., M. le ministre. Oui, vous voulez parler monsieur? Je m'excuse.

Le Président (M. Beaulne): M. Chevrier...

M. Rioux: M. Chevrier.

Le Président (M. Beaulne): ...vous voulez ajouter un complément d'information? Allez-y.

M. Chevrier (Jacques): Juste un complément d'information. Sur l'article 9, la disposition transitoire que vous invoquez, il était nécessaire, à ce moment-là, de prévoir une disposition transitoire.

M. Rioux: Écoutez bien ça, M. le député de LaFontaine.

Le Président (M. Beaulne): M. Chevrier, vous avez la parole.

M. Gobé: Je l'écoute, certain.

M. Chevrier (Jacques): Il était nécessaire de prévoir une disposition transitoire si le législateur voulait que les dispositions d'une nouvelle loi ne s'appliquent pas aux procédures en cours à ce moment-là. Or, comme le législateur voulait que les dispositions de la nouvelle loi ne s'appliquent qu'aux procédures postérieures à l'entrée en vigueur du projet de loi, il fallait prévoir une disposition transitoire, et c'est ce qu'on a fait. Dans notre cas à nous, le projet de loi n° 27, il n'est pas nécessaire d'en prévoir une, parce qu'on veut que les dispositions de la loi n° 27 aient un effet immédiat aux procédures en instance devant un arbitre. C'est ça, la différence entre les deux.

M. Gobé: Si je comprends bien, même les cas qui sont actuellement en arbitrage vont être arrêtés...

Une voix: Et assujettis à la loi.

M. Gobé: ...et assujettis à la loi. Vous me reprenez, c'est important ce qu'on dit là. Parce que je ne sais pas si on se comprend.

M. Rioux: Parles-tu de ceux qui sont en procédure actuellement?

M. Gobé: Oui.

M. Chevrier (Jacques): Oui, bien...

M. Gobé: Parce que là vous allez voir qu'il y en a qui vont aller en contestation juridique, puis vite.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine, effectivement, moi... Le président comprend un peu ça dans le même sens. La question, c'est: Qu'est-ce qui arrive aux causes qui sont présentement en instance?

M. Gobé: C'est comme changer la loi, ça.

M. Gauvin: Une question de compréhension, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y.

M. Gauvin: Pour nous, députés de l'opposition, il n'est peut-être pas important de savoir ce que comprend bien le président. Il est important de savoir, pour avoir des réponses claires, ce que comprend le ministre. Personnellement, j'aimerais savoir si le ministre suit la présentation, le questionnement du député de LaFontaine. C'est cette partie-là qui nous intéresse.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, à la lumière de ce que vient de dire M. Chevrier, les dossiers qui vont aboutir à l'arbitrage, les dossiers qui vont aboutir à l'arbitrage vont être soumis à la loi qui va être votée par l'Assemblée nationale, la loi n° 27. Les critères, qui étaient facultatifs jusqu'à maintenant, vont devenir obligatoires.

Une voix: Les mêmes critères.

M. Rioux: Les mêmes critères vont devenir obligatoires.

M. Gobé: Comme on va parler à l'article un peu plus tard. O.K.

M. Rioux: Ça va?

M. Gobé: D'accord.

M. Rioux: Ça, c'est important. Mais je rappelle que le droit à l'arbitrage est maintenu dans son intégralité. C'est le processus qui conduit les parties vers l'arbitrage que l'on modifie.

M. Gobé: Ça, je comprends, M. le ministre, bien sûr. Je n'ai pas de gros arguments à vous amener, c'est une décision de fonctionner que vous décidez. Vous nous avez répondu il y a quelques minutes... Où sont les notes?

Une voix: ...

M. Gobé: Pour qu'on se comprenne bien, vous avez dit: Les cas en arbitrage seront soumis à l'ancienne loi; les nouveaux, à la nouvelle loi.

M. Rioux: Les cas qui sont présentement à l'arbitrage, la loi n'est pas passée, on est soumis à l'ancien régime.

M. Gobé: Disons qu'elle passe dans une semaine, trois jours, quatre jours.

M. Rioux: Si la loi n'est pas votée, c'est l'ancien régime; si la loi est votée, c'est la nouvelle loi qui s'applique.

M. Gobé: Même pour les cas déjà en arbitrage?

M. Rioux: Les cas qui sont en démarche?

M. Gobé: Non, qui sont déjà en arbitrage. Bien, en démarche. On va employer les mêmes mots.

M. Rioux: Ceux qui sont en arbitrage au moment où l'on se parle...

M. Gobé: Oui, c'est ça que...

M. Rioux: ...évidemment, c'est la loi actuelle qui s'applique. La nouvelle loi n'est pas votée.

M. Gobé: Et est-ce qu'elle va continuer à s'appliquer même lorsque celle-là sera votée?

M. Rioux: Lorsque cette loi-là, lorsque la loi n° 27 sera votée, c'est elle qui s'appliquera, et la sentence qui sera rendue, ce sera les critères qui seront prévus à la nouvelle loi qui vont s'appliquer. C'est ma compréhension des choses.

M. Gobé: O.K. Alors, prenons un cas concret, là...

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine, oui.

M. Gobé: ...parce que là on dit des choses...

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, oui.

M. Gobé: ...vous comprendrez, M. le Président, qui peuvent porter à mauvaise interprétation, hein, de la part des gens...

M. Rioux: M. le Président, pour en avoir le coeur net, on va suspendre cinq minutes.

M. Gobé: Oui, je pense que c'est mieux, oui.

M. Rioux: On va ajuster nos choses, là.

M. Gobé: Oui, oui.

M. Rioux: Moi, la compréhension que j'ai, je l'exprime. S'il y a des choses qu'il faut préciser, on va le faire.

M. Gobé: Je pense que ça vaut la peine.

M. Rioux: Il faut avoir la lucidité de regarder ça attentivement.

M. Gobé: C'est important.

Le Président (M. Beaulne): Oui, c'est une bonne suggestion. Alors, je suspends les travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 47)

(Reprise à 22 h 56)

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre nos travaux. Alors, M. le ministre, à vous la parole.

M. Rioux: Alors, M. le Président, en ce qui a trait au débat que nous avons en ce qui a trait aux dispositions transitoires, on pourrait reporter ça à l'article 9 et on pourra en débattre davantage, et ça nous permettrait d'avancer dans nos discussions. Moi, je reconnais qu'il y a un débat à faire là. À l'article 9, ce serait plus approprié, et ça nous permettrait de continuer nos travaux.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, l'article 9, il est très limité, c'est-à-dire, c'est vraiment une clause crépusculaire, même pas, c'est une obligation de faire rapport. Une clause crépusculaire réelle, c'est une disposition qui annonce la fin d'une loi, à partir de certains moments et à certaines conditions. Ici, ce n'est même pas ça, c'est une modalité où on s'oblige à faire rapport. C'est déjà pas mal, c'est intéressant, c'est introduit de plus en plus dans des lois, mais c'est une petite porte pour un grand sujet. C'est-à-dire, la question apportée par mon collègue de LaFontaine, c'est une question, je dirais, de l'ordre de l'architecture de la mise en oeuvre de la loi et du régime de travail derrière pour cette catégorie. Vous nous offrez une petite porte puis ça nous prendrait une assurance que vous allez accepter, en passant à 9, de discuter de bien d'autres choses que ce qui est prévu à 9. C'est autre chose.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, j'écoute le député de Bourassa, je pense qu'il y a du vrai dans ce qu'il dit. Mais ce qu'on pourrait faire, c'est, à l'article 10, lorsqu'on dit que la présente loi entre en vigueur, la date, là, on pourrait examiner cette possibilité-là. Moi, je garde la porte ouverte, en tout cas. Si ça convient aux députés de l'opposition.

Le Président (M. Beaulne): Votre proposition est sur la table, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, M. le Président, c'est parce que je me demande si l'article 10 est vraiment l'article bien, bien déterminé pour faire ça. J'ai l'impression que, si on veut vraiment régler ce problème-là, ou se blinder contre un vide ou un flou, on devrait peut-être le faire ailleurs. Ce que l'article dit, c'est que le projet de loi, une fois qu'il a été adopté... Est-ce que le projet de loi est adopté? On dit: Oui. Là, on dit: «La présente loi entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction...).» Ce n'est pas le meilleur endroit. Par contre, je suis d'accord avec le ministre qu'on peut peut-être suspendre ça pour l'instant...

M. Rioux: M. le Président...

M. Gobé: ...quitte à revenir avec un amendement, un article, je ne sais pas, un ajout, quelque chose. Moi, je suis prêt à regarder ça.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, moi, j'ai pris au sérieux l'intervention du député de Bourassa et je lui dis qu'à l'article 10 je fais une ouverture et je lui dis qu'on va en débatte à ce moment-là. Il n'y a pas de piège, là. Je reçois cette intervention-là comme étant constructive.

Une voix: Ce n'est pas à la bonne place.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, j'aurais une suggestion pratique. Ce serait que le ministre reconnaisse qu'entre 9 et 10 il y a place pour un débat sur la question soulevée par mon collègue de LaFontaine. Ça donnera lieu à un nouvel article et, éventuellement...

M. Rioux: Si nécessaire.

M. Charbonneau (Bourassa): ...s'il est reconnu par le ministre qu'il y a un trou à combler...

M. Rioux: Ça va.

M. Charbonneau (Bourassa): ...entre 9 et 10.

M. Rioux: Ça va.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que la proposition du député de Bourassa fait consentement?

Une voix: Oui, oui.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, y a-t-il d'autres interventions sur l'article 3?

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, il y a d'autres interventions, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Alors, nous sommes sur l'article 3, n'est-ce pas, M. le Président?

Le Président (M. Beaulne): C'est ça, avec les sous-sections 96, 97 et 98.

(23 heures)

M. Charbonneau (Bourassa): Question de méthode de travail, parce que j'ai beaucoup de respect pour votre approche, mais, comme j'arrive à la commission... Est-ce que vous concevez qu'il y a un débat sur 96, 97 et 98 ou si c'est les trois ensemble?

Une voix: Différemment.

Une voix: C'est global.

Une voix: Les trois.

Le Président (M. Beaulne): Les trois. Dans notre commission, selon les projets de loi, nous avons procédé différemment, selon les intentions manifestées de part et d'autre. J'ai cru comprendre qu'en ce qui concernait l'article 3 on souhaitait avoir la présentation d'ensemble du ministre et discuter de cet article dans son ensemble avec les trois sous-articles.

M. Charbonneau (Bourassa): J'avais bien compris que nous souhaitions avoir une présentation d'ensemble, mais, quant à en discuter tout ensemble, ça, ça ne m'a pas paru aussi clair.

Le Président (M. Beaulne): Mais vous pouvez faire vos commentaires sur l'un ou l'autre des sous-articles.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, je comprends que, moi, je peux choisir, mais est-ce que je peux revenir sur les trois?

Le Président (M. Beaulne): Oui, effectivement. Effectivement.

M. Charbonneau (Bourassa): Sur la partie qui traite de 96, je cherche à comprendre la raison ou l'intérêt qu'il y a à restreindre les matières faisant l'objet du rapport aux matières qui ont fait l'objet d'un accord plutôt que ce qui existe dans le texte actuel, les «positions respectives sur celles». Donc, l'objet d'un accord, d'accord, mais aussi les «positions respectives sur celles faisant encore l'objet d'un différend». Là, on a tout simplement un compte rendu: d'accord avec ceci, pas d'accord avec ça; d'accord, pas d'accord; d'accord...

M. Rioux: C'est réglé.

M. Charbonneau (Bourassa): C'est le genre de rapport. Tandis que, dans la loi actuelle, même si un objet demeure un objet de différend et non pas un objet d'accord, il y a obligation de nous faire rapport sur les positions quant à cet objet.

Par exemple, on ne s'entend pas sur, disons, la banque de congés-maladie – s'il y en a dans ces conventions, il y en a certainement – eh bien, non seulement on nous dit: C'est un objet de différend, mais on nous dit: Voici, la partie syndicale veut ceci, la partie patronale soutient cela, et ceci éclaire les intervenants à l'étape suivante, à l'étape de l'arbitrage, par exemple, ou de la médiation-arbitrage. Ils n'ont pas besoin de commencer à requestionner ou essayer de reconstituer à partir de je ne sais quoi les positions des parties.

À mon avis, ça responsabilise les parties que de savoir que les positions qu'elles tiennent vont être communiquées à l'arbitre, tandis que, si on ne sait pas trop quelles sont les positions, que tout ce qu'on a, c'est: Ceci est un objet de désaccord... Eh bien, un objet de désaccord, je me vois arbitre, je vois le ministre du Travail devenir arbitre, c'est un objet de désaccord, c'est le seul éclairage qu'il a. Il faut remonter la chaîne du désaccord à ce moment-là puis essayer de trouver, par une méthode d'enquête ou je ne sais trop quoi, de consultation de registres de je ne sais pas où, arriver à savoir pourquoi il y a un désaccord.

Parfois, il y a un désaccord qui est lié aussi à deux ou trois articles, ou il y a un désaccord qui porte sur des objets liés. On n'a pas accepté un certain package, comme on dit dans le métier, puis il se fait que, voici, on est en désaccord sur sept articles. Alors qu'on était, M. le Président, parfois, là, à un cheveu d'un accord global, mais il y a une question, dans les sept qu'on avait mises en package, qui bloque. On est obligé d'enregistrer «désaccord», «sept désaccords», alors que, en réalité, on était peut-être d'accord très, très largement sur six, mais on a bloqué à la septième. On les avait liées, en négociations, comme ça se fait souvent. Moi, je pense que l'arbitre serait pas mal plus éclairé s'il avait accès aux positions respectives sur chacun des points, il serait pas mal plus avancé que de juste se faire informer qu'il n'y a pas d'accord sur ces sept points-là. Je ne vois pas l'utilité pratique de cette restriction, ça ne me saute pas aux yeux. Si M. le ministre peut me l'expliquer, je ne dirai pas que je ne serai pas touché, mais je dis que je vais l'écouter.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Rioux: Tout à l'heure, j'ai bien expliqué que la médiation, dans sa période dite facultative, consensuelle, s'il y a accord sur un certain nombre de dispositions, il y a accord, on n'en parle plus, c'est réglé.

M. Charbonneau (Bourassa): Mais s'il n'y a pas accord?

M. Rioux: S'il persiste des différends, bien sûr, les différends sont bien inscrits, bien identifiés, et, lorsque arrive le moment de l'arbitrage, je pense que le député de Bourassa le sait, c'est que les parties se présentent à l'arbitrage puis elles y vont sur le fond du débat, expliquant la nature de leur différend, pourquoi il n'y a pas eu entente. Alors, elles ont à s'expliquer devant l'arbitre. Alors, je ne vois pas trop, trop où est le problème.

Dans le système qui prévaut présentement, c'est un peu différent, vous le savez. Les matières qui font l'objet d'un différend, ce n'est pas la même chose. La médiation était obligatoire, bon, etc. Nous, on introduit, en plus, la médiation-arbitrage où les parties se transportent devant un médiateur-arbitre où elles ont à expliquer leur point de vue puis à faire valoir le bien-fondé de leur argumentation. Et, si elles peuvent s'entendre après le débat, comme le disait le député... C'est vrai qu'il arrive qu'il y ait des moments où les parties viennent très près de s'entendre, très, très près, et, avec la proximité d'un arbitrage rapide, souvent, ça provoque l'entente qui est recherchée et ce dont parlait le député tout à l'heure, le député de Bourassa. Mais, si on s'en va dans un arbitrage classique, ordinaire, elles vont avoir l'occasion de s'expliquer. Alors, je pense que l'arbitrage est bien servi et les parties aussi.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, question de fonctionnement. Si on veut introduire...

M. Rioux: D'ailleurs, j'ai oublié de dire que les rapports, ce n'est pas pour le ministre, hein, c'est pour alimenter l'arbitre.

M. Charbonneau (Bourassa): On faisait un cas de fiction où le ministre devenait arbitre.

M. Rioux: Ah oui! C'est-à-dire dans le moment où il est... Ha, ha, ha!

M. Charbonneau (Bourassa): Ha, ha, ha! Pour introduire un amendement, M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le député.

M. Charbonneau (Bourassa): ...c'est le temps maintenant?

Le Président (M. Beaulne): Oui, vous pouvez...

M. Charbonneau (Bourassa): Je me réserve la possibilité de vous fournir un amendement sur...

Une voix: L'article 96.

M. Charbonneau (Bourassa): L'article 96...

Le Président (M. Beaulne): L'article 96.

M. Charbonneau (Bourassa): ...pour revenir au texte antérieur, en fait. C'est l'idée, là.

Le Président (M. Beaulne): Oui, vous pouvez déposer un amendement, si vous le voulez, à cette étape-ci.

M. Charbonneau (Bourassa): Exigez-vous un libellé écrit?

Le Président (M. Beaulne): Oui, oui. Nos règlements exigent une motion écrite en bonne et due forme pour que les autres membres de la commission puissent en prendre connaissance. Alors, vous souhaitez faire un amendement...

M. Charbonneau (Bourassa): Oui.

Le Président (M. Beaulne): ...à l'article 96? D'accord. Je vais vous permettre de déposer votre amendement.

M. Rioux: Un amendement?

Le Président (M. Beaulne): Oui, à l'article 96.

M. Gobé: Vous voudriez rajouter quelque chose, peut-être?

M. Rioux: J'attends l'amendement.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le député de Bourassa, lisez-nous votre amendement.

M. Charbonneau (Bourassa): Bien, c'est de modifier l'article 3 par le remplacement, à l'article 96, des mots «et celles faisant encore l'objet d'un différend» par – c'est l'ancien texte – «ainsi que leurs positions respectives sur celles faisant encore l'objet d'un différend». Autrement dit, on tend à garder l'ancien texte.

Le Président (M. Beaulne): Bon. On va faire des photocopies.

M. Rioux: On peut répéter, s'il vous plaît?

Le Président (M. Beaulne): Oui, si vous voulez le transmettre à la présidence. Alors, pour le bénéfice des collègues, nous allons...

M. Rioux: La lecture serait comment?

Le Président (M. Beaulne): Bon, la lecture: L'article 3 du projet de loi est modifié par le remplacement, à l'article 96, des mots «et celles faisant encore l'objet d'un différend» par les mots suivants: «ainsi que leurs positions respectives sur celles faisant encore l'objet d'un différend».

M. Rioux: Je ne comprends pas.

Le Président (M. Beaulne): Question de nuance. Alors, on va faire faire des photocopies.

M. Rioux: Alors, ça se lit comment?

Le Président (M. Beaulne): Pouvez-vous faire des photocopies? On va faire circuler ça. Alors, M. le député, votre amendement est reçu. Expliquez-nous un peu la teneur de cet amendement?

(23 h 10)

M. Charbonneau (Bourassa): Bien, la teneur, c'est dans le but de changer le moins possible ce qui ne nécessite pas d'être changé. Moi, c'est ma pratique en relations de travail. Vous allez vous en rendre compte pendant l'étude de ce projet de loi là ou en d'autres occasions, on ne change pas quelque chose si ce n'est pas absolument indispensable de le changer. On y va par des microchangements. On retouche quand c'est indispensable. Si ce n'est pas utile, si on n'est pas sûr, si ce n'est pas absolument prouvé qu'il y a un avantage, on laisse ça là.

Ça m'apparaît, de toute façon, sage, en l'occurrence. Ce qui m'apparaît ici, c'est que c'était sage d'avoir la position des parties, les positions respectives sur les objets de différend, et on retranche un élément, à mon avis, de sagesse, là. Donc, ce n'est pas utile de se priver de cet éclairage-là. Je ne vois pas pourquoi on cherche à se priver de cet éclairage-là. C'est sûr que les gens peuvent s'expliquer en d'autres lieux, mais ça ne fait qu'allonger les choses. On m'a dit tout à l'heure, M. le Président, M. le ministre...

M. Rioux: Est-ce qu'on a le texte?

Une voix: Il est parti à la reproduction.

Le Président (M. Beaulne): Oui, le texte... Je vais suspendre quelques instants en attendant qu'on ait la copie pour tout le monde, parce que, au fond, il s'agit d'une nuance... Mais c'est mieux d'avoir le texte sous les yeux. C'est mieux d'avoir le texte, parce que ce n'est pas évident, évident, là, juste un...

(Suspension de la séance à 23 h 11)

(Reprise à 23 h 14)

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député de Bourassa, on me fait signe que, du côté ministériel, on saisit la portée de l'amendement.

M. Rioux: Si le député de Bourassa me lit le texte au complet, ça va aller. Qu'il me lise le texte au complet, y compris son amendement.

Le Président (M. Beaulne): Bien, moi, je vais vous le lire, en attendant. Peut-être qu'on a noté... Alors, je vais vous lire l'article comme il se lirait, tel qu'amendé.

M. Rioux: C'est ça.

Le Président (M. Beaulne): C'est ce que vous souhaitez.

Une voix: S'il est amendé.

Le Président (M. Beaulne): S'il est amendé, il se lirait, l'article 96, de la manière suivante:

«À défaut d'entente à l'expiration de la période de médiation, le médiateur remet aux parties et au ministre un rapport dans lequel il indique les matières qui ont fait l'objet d'un accord – et c'est là où l'amendement entre en ligne de compte – ainsi que leurs positions respectives sur celles faisant encore l'objet d'un différend.» Voilà le sens de l'amendement.

M. Charbonneau (Bourassa): Et j'étais en train de le présenter lorsque...

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député, continuez votre présentation.

M. Charbonneau (Bourassa): Je vais essayer de convaincre M. le ministre, d'abord, qu'on ne change pas une disposition minime ou importante si on n'est pas assuré qu'on va en retirer un avantage, que les parties vont en retirer un avantage, ou que le processus dans lequel on s'engage sera accéléré ou amélioré. Si on n'est pas sûr de ça, pourquoi changer?

Moi, je regarde ça ici et je m'aperçois que la loi actuelle fait obligation de rapporter les positions respectives sur des objets de différend. Je l'ai expliqué tout à l'heure à l'aide d'un exemple, et, parfois même, il y a des objets liés. Moi, je me dis, pour la facilité des étapes suivantes... Quelle est l'étape suivante? Médiation-arbitrage ou arbitrage.

Alors, le médiateur-arbitre, et on reviendra sur cette conception, à mon avis, bâtarde de la notion de médiateur-arbitre, on reviendra là-dessus, mais, en tout cas... Mettons-nous dans la position du médiateur-arbitre ou de l'arbitre qui reçoit un rapport. S'il connaît déjà la position des parties, les positions respectives des parties sur des objets de différend à l'aide du rapport qu'il reçoit, moi, je vous soumets, M. le Président, que ça va accélérer et ça tend à accélérer le processus par rapport à la situation suivante où il n'a pas les positions respectives.

Qu'est-ce qu'il va faire s'il n'a pas les positions respectives? Il va être obligé de convoquer les parties puis de leur dire: Écoutez, sur l'article 5, 18, 22, 29, voici, j'ai un rapport où on me dit qu'il y a un différend. J'aimerais – il va être obligé de demander aux parties – savoir: Qu'est-ce que vous pensez de ceci? Qu'est-ce que vous pensez de cela? Je n'ai pas d'information là-dessus. Il va être obligé de questionner, et, si, dans leur patron de négociation, les parties avaient, de plus, lié un certain nombre d'articles, ce qui se fait toujours, en général, vers la fin d'une négociation, là elles vont être obligées d'expliquer à l'arbitre aussi qu'elles avaient lié des choses entre elles. Et, quand on a une certaine pratique de ça, bien, on sait qu'il y a des moments chauds, puis, à un moment donné, une assemblée syndicale peut se mettre à délier ce qu'elle avait lié aussi.

Moi, je pense que, pour la clarté ou, si vous voulez, le caractère sain du processus, de l'étape suivante du processus, on a tout intérêt à garder ceci. Je ne vois aucun avantage à éliminer cette notion de «positions respectives» pour le bénéfice du reste du processus. Ça ne peut que lui nuire ou tendre à lui nuire, tendre à le ralentir, tendre à l'alourdir.

C'est déjà assez long, tout ça, dont on parle, toute cette séquence d'étapes, c'est déjà assez long, ça. Une fois qu'une convention arrive à échéance, M. le Président, il y a une période de négociations. Elle dure combien de temps, la période de négociations? Il n'y a personne qui le dit. Ça peut durer six jours, six mois ou un an et demi. Deuxièmement, quand ça ne va pas en négociations, on s'engage dans un autre couloir qui s'appelle médiation, médiation-arbitrage, médiation volontaire, etc., puis, ensuite, arbitrage. Ça fait du temps, ça.

Alors, moi, je me dis que, si on peut sauver un peu de temps dans tout ce grand corridor, bien, bravo! essayons. Puis le fait d'enlever les positions respectives, ça me paraît un facteur qui va faire perdre du temps à quelqu'un quelque part. Parce que, le quelqu'un, l'arbitre ou le médiateur, il va être obligé de questionner, lui. Il ne tranche pas ça les yeux fermés. Il écoute ça. Il va écouter les positions des parties. Ça va être des convocations, des audiences avec des avocats à gauche puis à droite puis des conseillers en relations de travail, des coûts pour la société. «Positions respectives», c'est dans le rapport, il est informé au point de départ.

Puis ça responsabilise les parties. Je reviens là-dessus, je l'ai dit au ministre tout à l'heure. Si les parties savent à l'avance que leurs positions sur les objets seront reflétées dans le rapport, moi, je vous dis, M. le Président, qu'elles vont faire davantage attention à leurs positions. Si leurs positions s'effacent lorsque le rapport est produit, il n'y en a plus, de positions, elles ne sont plus rapportées. Moi, je vous soumets que les parties vont avoir une tendance à modifier à la marge leurs positions. Elles n'auront pas nécessairement le même langage, en phase finale, qu'elles ont eu en phase intermédiaire, parce que là elles vont dire: C'est l'arbitre, maintenant, ce n'est plus nous; c'est l'arbitre, on va lui organiser une plaidoirie. C'est comme ça que ça se passe.

Ça les responsabiliserait davantage en sachant que ce qu'elles disent à la phase précédente va être reproduit dans la phase finale. Elles ne pourraient pas changer de discours, d'un côté comme de l'autre, s'ajuster pour des fins stratégiques, sauter une saison, par exemple, sauter une période. Elles ne pourraient pas faire ça, c'est marqué dedans. Alors, voyant tout ça, je dis: Laissez la dynamique actuelle, elle est déjà porteuse d'un certain bon sens.

(23 h 20)

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député, vos explications sont fort claires. Alors, M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, je pense qu'il faut situer ce débat-là dans un contexte de changement, dans un contexte d'une nouvelle philosophie que nous déposons dans ce projet de loi n° 27. C'est une nouvelle conception, une nouvelle façon de faire, une nouvelle méthode respectueuse des parties. O.K.? Ça, c'est bien important à comprendre.

Sur l'amendement. Les parties, devant l'arbitre, ont à s'expliquer, et c'est ça qu'il faut bien saisir. Pendant l'audition devant l'arbitre, les parties ont le loisir de changer d'idée. Elles ont le loisir de changer d'idée, et, ça, c'est très important, ça fait partie de la dynamique que l'on veut introduire. Ce qu'il faut aussi retenir – on ne fera pas un long discours là-dessus – c'est que ce qui est important devant l'arbitre, c'est la preuve qu'on dépose et non n'importe quel rapport qu'on peut introduire ou n'importe quelle preuve puis n'importe quel document qui peut émerger de la médiation. Ça, c'est fort important. Et c'est ça, l'esprit de notre démarche, et c'est encore ça, l'esprit du Code.

Alors, M. le Président, l'amendement du député de Bourassa est inutile parce que ça vient contredire ce que nous voulons mettre en place. Parce que, nous, on répond aux attentes d'un milieu qui nous a exprimé des volontés et c'est ça qui doit primer. Alors, l'amendement, on va le rejeter sûrement de notre côté. Si les parties savent que leurs positions seront dévoilées dans un rapport, il y a quelque chose qui cloche au départ, et c'est ça qu'on veut corriger. Et ne prévaut devant l'arbitre que la preuve qui est déposée, c'est ça qui est à retenir.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre, de ces précisions. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement?

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine et porte-parole de l'opposition en cette matière.

M. Gobé: Merci, M. le Président. Moi, je pense qu'on devrait plutôt être d'accord avec l'amendement du député de Bourassa.

Premièrement, les principes qu'il évoque sont fondamentaux, me dit-on, en relations de travail: moins les choses changent pour rien, mieux ça fonctionne. Les gens sont habitués à fonctionner avec certains principes, avec certaines manières, et changer pour changer, ça peut, à l'occasion, juste amener plus de problèmes et de complications dans le règlement qui peut exister entre les gens. Les gens sont habitués à fonctionner d'une certaine manière.

Le ministre parle d'une nouvelle philosophie, une nouvelle méthode, une nouvelle façon de faire respectueuse des parties. C'est des beaux mots, ça. Mais, dans la réalité concrète, est-ce que ça va permettre de régler plus rapidement le conflit? Moi, il me semble que non. Le député de Bourassa a essayé de l'expliquer. Je pense que le fait que l'arbitre puisse connaître les faits, les raisons pour lesquelles ça a achoppé avant, ça ne peut qu'être productif parce que, dès le départ, ça permet de cerner les enjeux principaux et qui peuvent, des fois, être minimes. On le mentionnait précédemment, il peut y avoir un ou deux items qui ne fonctionnent pas et qui font en sorte que le reste de l'ensemble traîne. S'il ne le sait pas au départ, en effet, il peut y avoir, par la suite, gain.

On voit dans différentes négociations actuellement, pour d'autres corps de métiers ou d'autres accréditations syndicales que policiers et pompiers, que les gens attendent, pour différentes raisons: changement de température, changement de saison ou d'autres. Et, plus c'est simple, meilleur c'est. Lorsque la personne qui a à prendre la décision, elle, est en connaissance des points, deux, trois, quatre, cinq ou 10 points sur, des fois, une cinquantaine, une centaine ou autres, qui peuvent achopper, eh bien, il semblerait que ce serait plus facile, plus rationnel. Alors, je ne sais pas pourquoi le ministre le change. Je ne vois vraiment pas. Je ne vois pas de raison à part peut-être une nouvelle philosophie, une nouvelle méthode. Quelles sont ses garanties que ça va mieux fonctionner, que ça va aller plus vite?

Je pense qu'on veut gagner du temps, là, hein. Le ministre, il veut gagner du temps. Il veut que le conflit se résorbe rapidement, facilement. Donnons donc à celui qui aura la décision à prendre les éléments qui vont lui permettre de prendre sa décision rapidement. Qu'il ait le rapport de tout ce qui s'est dit à l'étape à laquelle les parties en sont rendues lorsque le dossier arrive, le cas lui arrive, je pense que ce serait pertinent. C'est un peu comme un médecin qui, avant d'opérer, dirait: Bien, je ne prends pas le rapport des médecins précédents parce que je recommence.

Une voix: ...questionner le patient.

M. Gobé: Oui, on va questionner le patient. Mais je pense qu'il est bon, à ce moment-là, de prendre le bilan de santé depuis deux, trois ans, et les différentes étapes qui ont été faites, les différents traitements et ce qui n'a pas assuré la guérison. Et là ça permet de mieux cerner, à ce moment-là, le mal et d'opérer d'une manière peut-être plus rapide et peut-être plus chirurgicale, plus directe, plus petite, sans créer d'autres dommages, sans permettre de rouvrir d'autres complications, peut-être, qui pourraient survenir. C'est une drôle de manière de l'imager, mais je pense que ça correspond bien à ce qu'on essaie de faire.

Alors, moi, je pense que le ministre devrait, en ce qui concerne l'amendement, le considérer. Même, je serais prêt à ce qu'on suspende 96 pour l'instant pour permettre au ministre et à ses savants associés à côté de lui...

Une voix: ...

M. Gobé: Oui, oui, pour leur permettre de, bien sûr, regarder les implications de cela.

M. Rioux: M. le Président...

M. Gobé: Oui, mais je n'ai pas fini, M. le ministre.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, le député a 20 minutes d'intervention, s'il le souhaite, sur l'amendement.

(Consultation)

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine, les travaux ne sont pas suspendus, alors je vous demanderais de continuer votre intervention sur l'amendement.

M. Gobé: Oui, absolument, M. le Président. Alors, je ne vois pas d'argument pour ce changement particulier, pas d'argument positif. Au contraire, je n'y vois que des arguments philosophiques ou, je ne le sais pas... Mais c'est une nouvelle manière, ça, de confier un dossier à quelqu'un pour qu'il prenne une décision dessus sans lui transmettre les causes qui l'ont amené à ce point-là. On recommence: nouveau processus, nouvel interrogatoire, nouvelle situation dans laquelle les gens – puis le député de Bourassa le disait bien – peuvent commencer, pour des raisons stratégiques, à se repositionner. Et là on repart. C'est reparti. D'ailleurs, je pense que c'est...

(Consultation)

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: C'est parce que je pense que je respecte... Comme moi, un peu, le ministre respecte des fois... Je parle avec mes collègues à côté, puis je parlais à Mme Marseille, qui est toujours de bon conseil, d'ailleurs, semble-t-il.

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais je pense que... Veuillez continuer.

M. Gobé: Alors, je n'ai pas fini, mais ça parle de ça, M. le Président. Ce serait un peu comme prendre un patient, pour en revenir au patient, on le change d'hôpital puis on recommence tout à zéro. On recommence les tests d'urine, on recommence tout et on repart. Sauf que, quand on se rend là, le patient est pas mal... Quand on a fini tout ça, il est pas mal plus faible, il est pas mal plus malade, puis il a d'autres maladies. Et là il faut le réopérer pour l'affaire pour laquelle on l'a amené là et pour d'autres choses aussi, parce que le cas a empiré. Et, ça, ça peut arriver aussi. Alors, il me semble qu'on devrait faire, dans des cas comme ça, comme dans un hôpital... le patient, il part avec son médical, son dossier, et puis, dès qu'il arrive à l'étape suivante, dans un nouvel endroit, la personne responsable le prend et regarde l'état général pour pouvoir procéder plus vite, plus facilement.

Moi, je ne comprends pas. C'est antiproductif. C'est contre-productif. Pas anti, c'est contre-productif en termes d'efficacité. En quoi le fait de communiquer – prenons-le autrement – les raisons de l'échec peut-il nuire au bon fonctionnement de l'étape suivante? En quoi? Au contraire, elles ne peuvent que donner un éclairage de départ, de base.

C'est un peu comme... J'ai vu dernièrement une électrice, à mon bureau, qui me disait: J'avais fait une entente hors cour et puis on m'a interdit de l'amener devant la cour. Mais elle a dit: On s'était presque entendus. En effet, selon ce qu'elle me montrait, ils s'étaient presque entendus, ça a achoppé pour une petite affaire, et ça lui a coûté presque 10 000 $ de frais d'avocat, parce que la cause a été... Alors que le juge, si le savant juge avait pu avoir la lettre signée, presque signée, écrite par les deux parties, il aurait eu à statuer sur un point, ça lui aurait pris 10 minutes peut-être, ça aurait sauvé le temps de ces gens-là, les déchirements dans la famille qui ont eu lieu à cause de cette chose-là, les frais d'avocat, 10 000 $ d'un côté, puis 6 000 $, 7 000 $ de l'autre, l'administration de la justice... C'est un cas de droit familial. C'est vrai que ce n'est pas pertinent, je ne veux pas, non plus, mélanger tout, mais c'est un exemple que je donne. Si le dossier avait pu suivre, bien, on aurait rendu justice mieux, plus rapidement, moins cher.

(23 h 30)

Et là on retombe à peu près... C'est un cas qui peut, à la limite, être semblable. On dit: Non, ce qui s'est fait avant, on l'oublie, on repart. Alourdissement du processus, risque de changement de volonté des parties, longueur, dégradation de la situation, conséquences pour les citoyens dans ce temps-là, parce que, lorsque ça traîne comme ça, il ne faut pas penser que le travail se fait dans la joie puis dans la meilleure efficacité.

Alors, je ne comprends pas qu'on ne puisse pas, là, ensemble, voir le bien-fondé de la remarque du député de Bourassa, qui, on va le souligner, n'a pas 40 ans, lui, dans les affaires publiques, mais a au moins une trentaine d'années – si ce n'est pas 40 ans, au moins 30 ans – qui a vécu et connu de nombreuses situations comme celle-là, dont la sagesse en termes de négociation et l'expérience ont été reconnues par l'ensemble de nos concitoyens et de nos compatriotes – appelez-les comme vous voudrez, pour faire consensus autour de cette table – et aussi par les gens du ministère, et, même, je pense, par le ministre, à une occasion, parce que, si je me souviens bien, le ministre était tellement satisfait de la manière dont le député de Bourassa avait négocié, et de ses connaissances, qu'il l'avait appuyé comme président d'une centrale syndicale, alors que lui voulait être son vice-président.

Il devrait au moins dire: J'ai la chance d'avoir ce soir, en face de moi, pour appuyer le député de LaFontaine, un spécialiste qui, après... n'a peut-être pas 40 ans comme moi, mais quand même un certain nombre d'années, et qui me fait une suggestion intéressante. Et peut-être que, vous, vous pourriez vous remémorer – vous n'étiez pas resté là tout le temps, comme lui – le temps où vous étiez dans ces postes-là, et vous vous rendriez compte que, certainement, son amendement ne pourrait que bonifier ce projet de loi là. Et peut-être que l'idée de le changer, ça partait d'une bonne idée, d'un bon principe. Peut-être aviez-vous pensé, ou vos fonctionnaires, que cela pourrait peut-être simplifier les choses, alors qu'au contraire tout semble démontrer que ce n'était peut-être pas le plus productif.

Alors, moi, je vous suggérerais humblement, dans un but de collaboration, et je sais que, les commissions parlementaires, c'est fait pour ça – il n'y a pas de gagnants, il n'y a pas de perdants, d'un côté ou de l'autre, du gouvernement ou de l'opposition, dans une commission parlementaire; le seul gagnant, c'est le citoyen du Québec – arriver avec un projet de loi bonifié. Ce n'est pas le député de Roberval, le député de LaFontaine. Il n'y a pas de personnalité là-dedans. Ici, notre travail, c'est de bonifier les projets de loi, faire en sorte qu'il n'y ait pas de coquille, faire en sorte que nos concitoyens puissent avoir les projets les mieux adaptés à leurs besoins puis que le législateur puisse donner aux gens quelque chose qui fait fonctionner les institutions.

Alors, M. le ministre, humblement, je vous soumettrai l'idée de bien vouloir, peut-être, donner une suite positive à cet amendement de notre collègue le député de Bourassa, qui, pour une fois, est sur cette commission. Et on ne pourra pas ravoir toute son expérience avec nous, là, parce qu'il a d'autres commissions, lui aussi, d'autres travaux. Alors, profitons-en. Je pense que c'est très positif, puis nous pourrons ainsi procéder par la suite, bien, commencer à adopter le reste, aller plus vite, pour terminer ça à un moment donné.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, quand on a décidé de changer ce mécanisme-là, c'est parce que le constat, c'est que ça ne marchait pas dans le cadre d'une médiation ou dans le cadre d'un processus conduisant à l'arbitrage chez les pompiers et policiers. Il faut se situer dans le contexte. Si on a décidé de procéder de la sorte, c'est que les parties n'iront pas en médiation si le médiateur dévoile contre leur gré ce qui a fait l'objet d'un différend. Il y a un caractère confidentiel là-dedans qu'il faut respecter, et, ça, là-dessus, je n'enseignerai pas ça au député de Bourassa, il connaît ça très certainement. Or, il faut donc éviter de demander des informations qui ne seront utiles à personne.

Vous voyez ça, s'en aller en arbitrage, devant un arbitre, où le médiateur aura livré ce qui a fait l'objet de tractations, de négociations... mais qu'elles ont persisté dans leur volonté de ne pas régler parce qu'elles n'étaient pas d'accord? Alors, si le médiateur va livrer ça contre leur gré, elles n'auront pas recours à l'arbitrage, elles n'auront pas recours à la médiation. C'est ça qu'il faut comprendre et c'est ça qui est la nouvelle dynamique, parce que c'est ça... C'est l'ancien régime qui n'a pas marché, c'est pour ça que nous le changeons. Ce n'est pas par caprice. Alors, c'est vouloir perpétuer les vestiges de la loi 93 que d'agir de la sorte, puis ce n'est pas être offensant pour le député de Bourassa, pas du tout.

M. Gobé: C'est vous qui l'aviez faite.

Une voix: C'était nul, comme entente.

M. Rioux: Il s'agit de comprendre ce qui nous anime dans notre volonté de changement.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): À partir d'un amendement qui suggère de s'en tenir au texte actuel, le débat prend un certain envol et amène le ministre à rappeler ce qu'il considère être le fond du changement et il prétend que même cette petite disposition ci est essentielle. Le changement qu'il propose à cette disposition de l'article 96 actuel, il le plaide comme si c'était l'essentiel du changement qu'il propose, alors qu'à mon avis c'est une mesure accessoire, utile, mais au titre d'un accessoire. Il en fait un plat, comme si c'était le coeur, pratiquement. Si l'amendement qu'il propose, lui – parce que c'est lui, au fond, qui propose un amendement, moi, je propose un amendement sur le sien – ne passe pas, n'était pas là, on dirait que c'est l'esprit même de son projet de loi qui s'évanouit. Je crois que c'est exagéré passablement l'argumentation. Je peux comprendre que, quand on va arriver à 97, il pourra dire qu'il est au coeur de son changement, mais, à 96, il n'est pas encore au coeur de son changement, là. Le nouvel esprit commence à souffler surtout à compter de 97. À 96, c'est à peine un soupçon de changement qui est là.

Écoutez, moi, ce que je pense, M. le Président, là-dedans – je vois faire l'affaire, puis je vais revenir sur 97 avec force aussi – c'est qu'on s'en va vers une judiciarisation accrue du dispositif de règlement. C'est ça. L'esprit du changement du ministre, s'il veut en parler, on peut en parler. Plus je vois ça aller, moins les parties vont se sentir responsables de leur règlement, puis plus ça va s'en aller à l'arbitrage, sur un processus qui est quasi automatique. Pas automatique à cause de la loi, je veux dire, pas obligatoire, ce ne sera pas un arbitrage qui va être désiré, mais la mécanique, l'esprit de l'affaire, finalement, ça déresponsabilise les parties. On avait la médiation obligatoire, M. le Président, puis il nous propose la médiation volontaire, alors... On avait la médiation obligatoire.

(23 h 40)

Tant qu'on est en médiation, M. le Président, c'est les parties qui sont responsables de leur règlement. Le jour où on n'est plus en médiation, c'est un tiers qui est responsable du règlement. Là, ça change, on change de registre complètement. Alors, le ministre cherche à rendre ni plus ni moins optionnel, c'est une partie... alors la médiation devient volontaire. Il suffit d'une partie. Il me semble qu'on tend à déresponsabiliser, on tend à exiger moins l'accord des parties le plus longtemps possible, parce que c'est ça, la dynamique des relations de travail qui tend à des règlements satisfaisants et à des règlements durables, c'est lorsque les règlements surgissent de la volonté des parties. Quand ça surgit d'une loi spéciale, c'est rarement bon, puis, quand ça surgit d'un arbitrage, ça peut être bon ou pas bon, mais, seulement, ce n'est pas les parties qui sont responsables en définitive, c'est un tiers qui a tranché, un tiers extérieur à la volonté des parties.

Alors, le ministre dans son esprit nouveau, ici, il diminue la portion, il accorde moins d'importance à la portion du processus qui impose, autant que faire se peut, autant qu'humainement possible, la responsabilité des parties de s'exercer, puis on passe à l'arbitrage. Là, il vient d'invoquer cet esprit nouveau pour refuser notre pauvre petit amendement qui dit qu'au moins on connaisse les positions respectives. Là, il a invoqué l'esprit nouveau. Ça mène directement à l'arbitrage.

Tout à l'heure, il s'est échappé, M. le ministre, en disant: Ne compte devant l'arbitre que la preuve. C'est grave, ça. Ça a une portée très, très lourde de conséquences, ce qu'il a dit, le ministre, à ce moment-là; «que la preuve», ça veut dire qu'on change de système, M. le Président. Dans la médiation, dans la conciliation, on cherche à s'entendre. Il n'y a pas trop de procédures, c'est du bona fide. On marche sur la bonne foi, les échanges sont informels, et puis, à l'aide du tiers... Ce n'est pas le tiers qui a la responsabilité, c'est toujours les deux parties, mais le tiers aide, c'est une aide, c'est un facilitateur. La responsabilité reste sur les parties. Ça, c'est des vraies relations de travail.

Tout d'un coup, arbitrage. Là, l'arbitrage c'est un tiers. Là, on vient de tomber dans du judiciaire ou du quasi-judiciaire, M. le Président. La preuve, c'est que le ministre a utilisé le mot «preuve». C'est là, la preuve. Ça, ça veut dire que c'est d'autres règles du jeu qui entrent en ligne. Les parties sont traînées par le système judiciaire, elles sont arnaquées, des fois, aussi par toutes sortes d'arguties d'avocats pour qui c'est un gagne-pain professionnel, et ça accompagne...

Une voix: ...

M. Charbonneau (Bourassa): ...les assesseurs, puis là c'est un tribunal, M. le Président, on est devant un tribunal. Le règlement va surgir du tribunal. Ce n'est plus la même «guéguerre» qui se mène, si vous me passez l'expression. Ce n'est plus la même partie qui se mène de part et d'autre, entre le syndicat et le patron. C'est une autre affaire.

Alors, moi, je dis qu'on a intérêt... Le ministre devrait partager ça. Je sais qu'il le partageait et il l'a partagé longtemps, puis il me semble que, s'il fouille encore dans sa vision, une vision humaniste des relations de travail et non pas judiciaire des relations de travail, c'est important de garder les parties responsables, en maîtrise de leur embarcation le plus longtemps possible avant de la confier à la «coucour» qu'on appelle la cour d'arbitrage, au tribunal. Avant de confier cela, essayons de se guérir soi-même, essayons de trouver une solution entre nous le plus longtemps possible. C'est pour ça qu'on dit: Bien, prenez les conseils, prenez l'éclairage qui découle de l'étape précédente; ne jetez pas ça aux orties, ne jetez pas ça de côté, gardez tout ça. Quand on dit «c'est la preuve», bien, ça veut dire, M. le Président, que le ministre, dans son esprit, il n'est pas prêt à considérer des arguments de contexte, des arguments d'échanges de bonne foi.

Je pense à l'exemple du député de LaFontaine, tout à l'heure, avec son couple en difficultés matrimoniales, et ils étaient sur le point d'une entente. Pas le droit de produire ça devant le juge. Qui a perdu, là? C'est la même chose. C'est exactement la même chose ici.

Une voix: Les deux.

M. Charbonneau (Bourassa): On ne peut pas savoir. Pas le droit de produire ça. Pourquoi? Parce que les «smarts» commencent à nous requestionner puis à refaire l'opération au complet. Qui perd son temps puis de l'argent, là? C'est pour ça que j'ai proposé qu'on tienne compte de ça, comme j'ai proposé aussi la question des commentaires quand viendra le temps d'un autre amendement. C'est important d'avoir tout l'éclairage pour responsabiliser l'étape précédant l'arbitrage, pas parce que c'est un mal, l'arbitrage en soi, mais c'est une opération extraordinaire, c'est une intervention d'un tiers extérieur aux parties. Une dynamique des relations de travail qui veut être saine mise d'abord et le plus longtemps possible sur la volonté des parties. Ça, c'est le plus précieux en relations de travail. Le judiciaire, là, c'est vraiment parce que la dynamique, ici, veut éviter le droit de grève. Ce n'est rien que ça.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Bourassa. M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, l'article 96, c'est au coeur du projet de loi, parce que c'est le projet. On n'entend pas valoriser, dans ce projet, l'arbitrage. Le député de Bourassa a très bien compris le sens de mon discours. Mais c'est le règlement négocié qui est privilégié là-dedans, et toute la logique du processus conduisant à l'arbitrage est bâtie autour de ça. On valorise le règlement négocié avec l'aide, au besoin, d'un médiateur auquel on fait confiance et qu'on a choisi. O.K.? Si la médiation fonctionne, de fait, on vient d'évacuer l'arbitrage, et c'est tout ça, la mécanique qui est devant nous.

J'ajouterai que, si les parties sont d'accord pour faire connaître la nature de leur différend, ce sera leur décision. À ce moment-là, l'amendement du député n'est pas nécessaire. Non seulement il n'est pas nécessaire, il travestit un peu l'esprit de l'article 96, qui est central dans le projet de loi n° 27.

Je voudrais ajouter aussi que, quand j'écoutais le député de Bourassa dire que j'étais un vendu à la judiciarisation, je ne fais qu'obéir à l'article 99.7 du Code, qui est très clair là-dessus: c'est que l'arbitre doit rendre sa sentence à partir de la preuve qui est déposée devant lui. Mais, si les parties s'en vont devant l'arbitre pieds et mains liés parce qu'elles ont permis au médiateur de tout raconter ce qui s'est passé, c'est assez grave. Là, on compromet le mécanisme et là on vient de fausser la procédure, et, à ce moment-là, on ne rend pas justice à ceux qui se sont acharnés à nous faire comprendre que le mécanisme actuel est désuet et dépassé. Alors, voilà, M. le Président, pourquoi on va rejeter l'amendement.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre.

M. Gauvin: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: J'écoute M. le ministre apporter de l'argumentation additionnelle pour rejeter l'amendement tel que proposé. J'aimerais lui rappeler immédiatement que le seul argument qu'avait le ministre dans sa première présentation était: apporter du changement dans le projet de loi. Pour revenir à ses dernières phrases, le ministre a dit: Ne permettons pas, n'obligeons pas à ce que le rapport du médiateur sur les différends soit transmis à l'arbitre. C'est ce que votre projet de loi propose, si on lit les dernières lignes de 98, M. le ministre: «S'il y a eu médiation, le ministre transmet à l'arbitre une copie du rapport du médiateur.» Ce n'est pas qu'une partie du rapport, on présume que le rapport va être complet. Et, s'il y a des différends, ils vont être inscrits dans le rapport. Pourquoi ne pas le mentionner de façon très claire, que le rapport doit aussi tenir compte des différends, d'une part?

Ce que M. le ministre insiste à vouloir conserver dans le projet de loi n° 27, justement, c'est un processus qui nous apparaît moins respectueux que celui qu'on avait autrefois, dans le projet de loi qui est en vigueur au moment où on se parle, d'une part. Et j'essaie de comprendre l'intérêt du ministre, de ne pas... Le ministre ne semble pas intéressé à ce que la teneur des différends soit divulguée, justement. Quel est l'intérêt du ministre, au nom de son gouvernement, comme ministre du Travail, à ne pas accepter, à ne pas vouloir, justement, que les différends soient identifiés dans le rapport du médiateur ou, du moins, préciser sur quoi a achoppé, comme le présentait si bien notre collègue de Bourassa? Donc, on a de la misère à suivre le ministre dans sa position. Et je reprends le dernier paragraphe de l'article 98 qui dit que le médiateur doit faire rapport à l'arbitre. Bien, c'est un rapport complet qu'on présume, M. le Président, et je sais très bien que vous êtes tenu de constater les revendications ou l'argumentation de part et d'autre.

(23 h 50)

Donc, M. le ministre, je pense que, pour revenir, justement, à ce que mes collègues de ce côté-ci développaient comme argument, nous aurions: ne pas s'accrocher uniquement à la volonté de vouloir apporter des changements dans le nouveau texte de loi, conserver ce qu'il y a qui nous apparaît de définition plus claire dans l'ancien projet de loi, et ça peut se refléter dans les prochains articles, et on sera tous heureux d'avoir eu la chance, pour le bon déroulement des négociations futures, de clarifier davantage le projet de loi n° 27.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député.

M. Gauvin: Et c'était ça, M. le Président, que je voulais ajouter comme argument additionnel.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, avez-vous des commentaires sur l'intervention du député de Montmagny-L'Islet?

M. Rioux: Non.

Le Président (M. Beaulne): Non?

M. Rioux: Je voudrais juste dire que, dans ce processus qu'on recommande, on ne tient pas les parties par la main. On leur fait confiance, on leur remet leurs responsabilités, et c'est elles qui, finalement, décident s'il y aura médiation, médiation-arbitrage. Si elles s'en vont à l'arbitrage, elles nomment leur arbitre. C'est ça, responsabiliser les parties. C'est ça, donner une chance à la négociation.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Justement, je pense qu'à ce moment-là il faut faire confiance aux parties. Pourquoi, à ce moment-là, ne pas transmettre les raisons qui ont fait échouer à l'arbitre? Pour quelle raison, si on leur fait confiance? Ce qui se dit devant le médiateur, il me semble que c'est ce qu'elles pensent et c'est des choses sur lesquelles, de bonne foi, elles sont prêtes à s'entendre.

M. Rioux: Je l'ai dit tout à l'heure.

M. Gobé: Bon, alors, qu'est-ce qui vous empêche la divulgation?

M. Rioux: Je dis au député de LaFontaine...

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Rioux: ...on va tuer le processus de médiation si on fait ce qu'il dit. C'est parce qu'on veut donner... C'est un processus qui est ouvert. C'est généreux et respectueux des parties, puis on leur fait confiance.

M. Gobé: Comment va-t-on tuer ça, M. le ministre? Expliquez-nous ça. Comment le fait...

M. Rioux: Parce que, si on accepte l'amendement, c'est qu'on tue purement et simplement...

M. Gobé: Expliquez-nous comment.

M. Rioux: ...le processus de médiation.

M. Gobé: Et pourquoi? De quelle manière?

M. Rioux: Je l'ai dit, je vais le répéter.

M. Gobé: Oui, oui, parce que nous n'avons...

M. Rioux: C'est lent.

M. Gobé: Mais non, il faut prendre le temps. C'est important.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, on est dans une dynamique de négociation avec des pompiers et des policiers dans des municipalités du Québec. On a mis au point, suite à l'échec du processus antérieur, une mécanique de négociation, de médiation, de médiation-arbitrage et d'arbitrage qui fait en sorte que c'est les parties qui décident comment va évoluer leur négociation. C'est juste en bout de piste, si on constate qu'il y a des différends énormes et qu'on ne peut pas s'entendre sur une convention collective, qu'on s'en va en arbitrage. Mais le fameux rapport dont on parle, si on fait en sorte que le médiateur rend public ou remet à l'arbitre un rapport de médiation et qui fait état de la nature des différends, les enjeux des différends, contre leur gré, on vient de tuer le processus de médiation et on vient d'hypothéquer, en plus, l'arbitrage.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Je pense que le ministre, là, ce qu'il ne nous dit pas – puis c'est ça, son truc, là – c'est qu'il suffit qu'une des parties décide, elle, de suivre le processus pour la galerie, pour faire en sorte que ça échoue, pour se retrouver devant un arbitre afin de se faire imposer les critères qui vont être définis plus tard par le ministre aux articles suivants. Il n'y a plus de négociation, là. On sait que l'arbitre doit tenir compte des critères qui sont à 99. Bon, à partir de là... Oui, mais la voilà, l'affaire. Une des parties a juste à dire: Bien, on va y aller en médiation; nous autres, on ne se met pas d'accord. Ça reste secret, personne ne saura pourquoi, personne ne saura si elles l'ont fait exprès ou si elles ne l'ont pas fait exprès. Premièrement..

Deuxièmement, ce qui suit, là, aussitôt après, elles disent: Bien, on se retrouve en arbitrage. Puis, en arbitrage, il est encadré, l'arbitrage, maintenant, dans le projet de loi. Parce que le but du projet de loi du ministre, c'est ce que le premier ministre a dit devant le congrès de l'UMQ, c'est de donner aux municipalités les outils nécessaires pour baisser leur masse salariale qui, disait-il, était de 27,75 % plus élevée. Ça, c'est un point politique.

Mais qu'il ne vienne pas nous raconter, le ministre, que c'est parce qu'il fait confiance à une nouvelle philosophie, une nouvelle manière de procéder, le respect des parties. En somme, ça, ce n'est pas vrai. Le but, c'est d'amener dans l'entonnoir les parties... un arbitre, qui va être nommé bien souvent par le ministre, à appliquer des critères déjà définis dont on sait automatiquement qu'ils peuvent être au détriment de l'une des parties. Puis je ne prends pas seulement sur le fond. C'est comme ça qu'il est, il est fait pour ça, le projet de loi. Alors, qu'on nous donne la vérité puis qu'on nous dise donc: C'est ça, puis ça et ça. Puis, là, bon, on va comprendre. Pas commencer à nous parler, là, de nouvelle philosophie, de nouvelle... Écoutez, on ne réécrira pas l'histoire, là. C'est ça. Le voilà, le projet de loi.

Et c'est pour ça que nous disons, nous, qu'il devrait y avoir plus de clarté. Et, lorsqu'il y aura échec à la médiation, les raisons de l'échec devraient être transmises. On devrait les connaître et les gens devraient en être informés. Ce qui obligerait les parties à la médiation à faire attention un petit peu et à montrer, peut-être, plus de bonne foi pour s'entendre en médiation. On ne pourrait pas faire n'importe quoi. Moi, je pense que...

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, on ne va pas en médiation pour échouer. Elle est voulue par les parties, elle est souhaitée par les parties. On va en médiation dans le but de réussir. On va en médiation, dans le processus qui est proposé, en vue de réussir. Mais, si on rend un rapport de médiation et on dépose ça à l'arbitre, on vient d'hypothéquer le processus lui-même, et la médiation ne fonctionnera pas. Les parties vont se présenter en disant: Oui, on va faire un bout certainement, on peut régler un certain nombre de clauses, de dispositions, de chapitres. Mais, quand tu arrives sur les noyaux durs de la négociation, si on laisse ça en pâturage à l'arbitre, je pense que les parties ne croiront pas à la démarche, puis elles ne l'emprunteront pas de bonne foi, elles ne la voudront pas. Alors, c'est pour ça qu'on dit: Une médiation volontaire, c'est une médiation qu'on fait dans le but de réussir et de privilégier la négociation au lieu de l'arbitrage. C'est de même qu'il faut comprendre les choses.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Gobé: Oui. Je ne comprends pas le ministre lorsqu'il dit: Les parties ne le voudront pas. Pourquoi les parties ne le voudraient-elles pas? Pour quelle raison? Les parties disent: Nous, on ne veut pas que ça sorte, on ne veut pas que le rapport dise pourquoi on ne s'entend pas. Si leur but, c'est de s'entendre, il n'y a pas de cachette, si c'est fait de bonne foi. Pour quelle raison elles ne diraient pas: On est rendu, sur une échelle de un à 20, dans le processus de règlement, on est rendu à 18, hein, 18, ça a marché; il y en a deux qui ne marchent pas, les voilà, puis que l'arbitre aille travailler sur les deux. Mais, s'il ne le sait pas, lui, l'arbitre, il va recommencer à zéro.

Et puis en quoi ça empêche une médiation volontaire, de dire, à la fin: C'est ça, la règle du jeu. Où est-ce que vous allez vous arrêter, si vous vous arrêtez, si ça ne réussit pas. C'est là que l'arbitre va commencer. Bien, là, elles régleront un certain nombre de choses entre elles, puis ce qu'elles ne pourront pas régler, bien, peut-être qu'à ce moment-là un arbitre pourra le régler. Mais ça ne nuit pas du tout à la médiation volontaire. Moi, je pense que le ministre fait fausse route là-dedans. Il devrait écouter le député de Bourassa puis se fier à son expérience, puis sans flagornerie, là. Je crois que ça aiderait beaucoup le processus si on pouvait garder 96 tel qu'il était avant.

(minuit)

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. M. le ministre, vous avez 30 secondes de réplique avant l'ajournement.

M. Rioux: Oui, M. le Président, ce qu'il faut bien comprendre à l'article 96 tel que rédigé, c'est que le médiateur fait un rapport sur ce qui a fait l'objet d'un accord et ce qui fait l'objet d'un différend. Il ne donne pas les arguments des parties. C'est de même qu'il faut comprendre ça, et c'est ça qui est l'essentiel, là. C'est au coeur du projet de loi n° 27. Il ne donne pas les arguments des parties.

Le Président (M. Beaulne): Je vous remercie, M. le ministre.

Alors, sur ce, je me trouve dans l'obligation d'ajourner les travaux de notre commission sine die.

(Fin de la séance à 0 h 1)


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