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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 1 mai 1997 - Vol. 35 N° 59

Étude détaillée du projet de loi n° 79 - Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats


(Quinze heures quarante-neuf minutes)

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît. La commission de l'économie et du travail va débuter son mandat d'aujourd'hui qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 79, Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion).

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, sans plus tarder, M. le ministre, vous avez la parole pour vous prévaloir de votre prérogative de nous livrer des remarques préliminaires.

(15 h 50)


Remarques préliminaires


M. Matthias Rioux

M. Rioux: Oui, M. le Président, chers collègues, ça me fait plaisir parce que la reprise des travaux de la commission nous permet, surtout en ce 1er mai, fête des travailleurs et des travailleuses, de constater qu'on a franchi bien des pas depuis un certain nombre d'années au Québec dans l'amélioration du sort des travailleurs et particulièrement le sort des travailleurs accidentés.

Le projet de loi n° 79 fait l'objet de discussions – il a fait l'objet de discussions – parfois assez vives, parfois houleuses même, mais ça s'est toujours soldé par des débats constructifs. Les auditions publiques nous ont permis d'entendre 37 groupes pendant plus de 36 heures. Le moins qu'on puisse dire, c'est que les groupes intéressés se sont exprimés avec toute la liberté et tout la franchise qui les habitaient. Ça se comprend parce que la santé et la sécurité au travail, ça concerne tout le monde. Pour ma part, je suis fier qu'autant du côté patronal et syndical que dans les milieux médicaux, juridiques, chez les groupes sociaux, on ait alimenté le débat puis qu'on ait participé avec beaucoup d'intensité et beaucoup de sérieux. Et ça, c'est très sain.

On peut donc dire que tout a été passé au peigne fin et ça démontre un grand sens du devoir de la part des groupes puis des personnes qui sont venues s'exprimer devant la commission. J'ai pu constater qu'il y avait, bien sûr, des pour et des contre, mais, au-delà des divergences, on s'entend tous sur la nécessité d'améliorer le système. Sur cette base, à partir de cet accord quant à la nécessité d'une amélioration, j'ai poursuivi ma réflexion, mes consultations. J'ai pris bonne note des propos que j'ai entendus lors de la commission et j'ai étudié très attentivement les propositions qui nous ont été faites. J'ai aussi fait une lecture complète des autres mémoires et j'ai déposé notamment certains amendements, certaines dispositions, quant aux médecins spécialistes et aux omnipraticiens. Je vous ai dit, tout au long du débat, que ce qui me guidait dans ma réflexion, c'était la nécessité de maintenir les acquis, d'assurer le mieux-être des travailleurs. C'est là un devoir que je partage avec toutes mes consoeurs et confrères députés, que ce soient des libéraux ou des péquistes.

Les travailleurs et les travailleuses accidentés se présentent souvent dans les bureaux de comté. J'en ai reçu plusieurs à Matane, découragés, épuisés, et très souvent en raison de la longueur des délais. Ils sont épuisés par les délais et l'incertitude qui résulte de ces délais-là. J'ai pris l'engagement de m'attaquer à ce problème. Et c'est encore ça que je fais aujourd'hui en maintenant ce projet de loi et en amorçant l'étape article par article.

Je le répète: C'est un projet de loi important qui comporte des avantages marqués pour tout le monde et avant tout pour les travailleurs et les travailleuses. Je conçois qu'il fallait discuter de la réforme proposée, permettre à tous d'exprimer leur malaise et surtout comprendre les motifs réels des insatisfactions. Vous verrez que nous avons fait d'importants compromis et les amendements que je propose tiennent compte des opinions que nous avons entendues devant cette commission. Vous verrez également comment les témoignages nous ont permis d'ajuster le projet de loi.

À la lumière des mémoires déposés, trois éléments majeurs ont fait l'objet d'une réflexion et d'amendements et ce sont aussi les trois points qui ont soulevé le plus de commentaires. Il s'agit, vous l'aurez bien deviné, du paritarisme, du processus d'évaluation médicale et du Bureau d'évaluation médicale. J'ai la conviction que les amendements rejoindront les attentes de la majorité et qu'ils n'altèrent en rien les fondements de la loi ni les objectifs qu'on veut atteindre.

D'abord, le paritarisme. Sur cette question, j'ai toujours eu une position très ferme: Je crois au paritarisme, tel qu'on le pratique en santé et sécurité au Québec. C'est un modèle qui mérite d'être perfectionné, certes, mais qui mérite d'être conservé. Je trouve intéressantes aussi les pratiques qu'on a au Québec en santé et sécurité et c'est une bonne chose. Je trouve intéressant, notamment, d'étendre le Tribunal d'appel sous une forme paritaire. Par contre, j'ai bien compris les inquiétudes de plusieurs qui ont exprimé des réserves quant à la formation du Tribunal. On a également accordé, devant cette commission, beaucoup d'attention à toute la question de l'indépendance et de l'impartialité. Pour plusieurs, la Commission des lésions professionnelles, telle qu'on la proposait, soulevait de sérieuses questions quant à ses critères. Ce n'est pas tant la présence au Tribunal de membres syndicaux et patronaux qu'on a critiquée, mais plutôt le rôle qu'on voulait leur faire jouer.

Au-delà de toutes les nuances et parmi les nombreux commentaires entendus, il y en a certains qui ont particulièrement retenu mon attention. Je dois vous dire d'abord que j'ai été impressionné par l'intervention du Protecteur du citoyen et aussi par la présentation de l'Association des juristes de l'État – il s'agit de spécialistes qui travaillent pour le gouvernement du Québec. Ils nous ont fait une mise en garde concernant la forme de paritarisme qu'on préconisait à la nouvelle Commission des lésions professionnelles, principalement sur le rôle des représentants patronaux et syndicaux. Non seulement leur démonstration était claire, mais elle était aussi très pertinente. Ils ont fait un parallèle avec le rôle de jury et du juge dans les causes criminelles. Selon eux, à la Commission des lésions professionnelles, on doit réserver toute la question de droit aux commissaires, en l'occurrence un juriste, ce qui n'empêche pas de faire intervenir dans le débat des personnes compétentes qui connaissent le milieu et qui sont sensibles aux problèmes exposés. Il ne fait pas de doute que ces personnes peuvent contribuer à éclairer le débat, particulièrement dans l'examen des faits et l'appréciation de la preuve. Sur toutes ces questions, nous avons prévu d'amender le projet de loi.

On a redéfini le rôle et le mode de nomination des membres issus des associations patronales et syndicales. Sans participer à la décision, ils siégeront auprès du commissaire afin de le conseiller. C'est au commissaire que reviendra la décision. Je pense que ça répondra aux attentes du plus grand nombre, j'en ai d'ailleurs interrogé plusieurs sur cette avenue lors des échanges devant cette commission. Pour nous, cet apport de gens du milieu rejoint l'optique du paritarisme. On crée ainsi un Tribunal administratif avec un nouvel esprit, une nouvelle culture. Et je crois que ce sera profitable autant aux travailleurs qu'aux employeurs, comme l'a été l'expérience du paritarisme dans le milieu de travail.

Avant d'aborder le volet médical, je veux vous rappeler notre principal objectif dans toute cette réforme. Il s'agit de la nécessité de réduire les délais de contestation et d'appel des décisions de la CSST. Je l'ai dit à plusieurs reprises, ça demeure un objectif crucial malgré les améliorations qu'on a constatées au cours des derniers mois.

S'il est vrai que la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, la CALP, a réduit ses délais, comme l'ont fait d'ailleurs les bureaux de révision de la CSST, ce n'est pas suffisant. La CALP est la dernière étape du processus. Il y a toutes les autres: la reconsidération, le Bureau d'évaluation médicale, le bureau de révision, sans compter les multiples paliers de conciliation. En gros, ce qui pose problème, c'est l'existence de deux auditions, en somme, deux procès. Ça, c'est ça qu'il fallait corriger. On évalue qu'un procès, c'est assez. Finalement, peu importe comment on regarde ça, de façon générale, l'ensemble des délais dépasse encore deux ans et, parfois, ça dépasse deux ans. C'est beaucoup trop.

Deux ans, vous le savez, c'est la limite, pour un travailleur, pour faire appliquer son droit de retour au travail. Dans les PME, c'est un an seulement. Pour être clair sur une chose, pour nous, ce n'est pas seulement une limite légale qu'il suffirait d'étendre pour régler le problème, c'est beaucoup plus un seuil psychologique. Deux ans avant d'avoir une décision finale et de savoir à quoi s'en tenir, pour un travailleur accidenté, c'est trop long, c'est traumatisant et, souvent, c'est ça qui crée la déprime. Et, on le sait, ils sortent du système bien poqués.

D'ailleurs, sur ce point, le Dr Patrice Montminy, qui travaille en tant que médecin traitant avec les accidentés du travail, nous a fait, devant la commission, un témoignage assez percutant, et vous me permettrez de reprendre quelques-unes de ses expressions. Pour lui, «la notion de temps n'est pas une notion légale, mais une notion médicale. C'est un fait démontré que, lorsqu'on retire un employé de son travail, après deux ans, le taux de retour au travail est de zéro.» Le Dr Montminy est clair: on doit agir à l'intérieur de ce délai-là. Il connaît ça.

(16 heures)

Il ne faut pas se leurrer non plus. C'est ça, le vrai drame que vivent nos travailleurs. Et nous devons trouver, nous, en tant que législateurs, des moyens pour protéger, dans son intégrité, la capacité de travail et la capacité de gain de nos travailleurs et de nos travailleuses accidentés. La CSST, comme les bureaux de révision et la CALP, ont pris des mesures extraordinaires pour s'attaquer au problème des délais excessifs. On a mobilisé toutes les énergies, aussi bien à l'intérieur des organismes que chez les parties. Par l'ajout d'effectifs, par des blitz, par la révision des façons de faire, on a réussi à améliorer la performance et à réduire les délais.

Mais, je le répète, ce n'est pas suffisant. Ça prend, à mon avis, des mesures permanentes. Et la solution qu'on propose pour régler la question des délais, c'est l'abolition d'un palier intermédiaire, soit le bureau de révision. D'ailleurs, la majorité des groupes qui sont venus devant cette commission s'entendent sur la pertinence de cette mesure. Nous allons pouvoir ainsi réduire l'ensemble des délais de révision et d'appel d'au moins un an. Il s'agit, selon nous, de la seule façon réaliste d'atteindre cet objectif. Et, bien sûr, l'abolition du bureau de révision nous a obligés à revoir le Tribunal d'appel, tant dans sa composition que dans son fonctionnement.

Maintenant, revenons au processus d'évaluation médicale qui a fait couler pas mal d'encre pendant la commission – ça a fait jaser, ça, c'est sûr – une question de toute première importance qui a retenu l'attention de la majorité des députés et des intervenants. D'abord, comme je l'ai dit, j'admets que le processus d'évaluation médicale n'est pas simple pour nos travailleurs accidentés. Il y a une raison à cela, une raison fondamentale – je reviens là-dessus parce que c'est d'une importance capitale dans notre débat – ce n'est pas simple parce que, au Québec, on a décidé d'attribuer un rôle unique au médecin choisi par le travailleur accidenté. Ça, il faut garder ça bien en tête.

Cette reconnaissance de la primauté du médecin traitant résulte d'une entente longuement discutée entre les employeurs et les travailleurs au Québec. La Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles, adoptée en 1985, reflète cette entente. Je me rappelle que ça faisait suite, d'ailleurs, à une des plus longues... de la commission parlementaire dans notre histoire. C'est assez intéressant. Donc, la CSST est liée par les conclusions du médecin traitant. On ne peut retrouver ce phénomène nulle part ailleurs en Amérique du Nord. Si ça comporte des avantages pour les travailleurs, ça représente aussi des contraintes, entre autres tous les mécanismes de gestion des questions médicales, car, s'il est vrai que le diagnostic et le choix des traitements appartiennent au médecin, la gestion du régime, elle, revient à la CSST.

Depuis quatre ans, vous le savez, la CSST a opéré un important virage destiné à mieux servir ses clients. On a revu toutes les façons de faire, et, notamment, sur le plan médical, la CSST a plus de contacts avec les médecins traitants. On se parle, et ça, ça ne pose pas de problème; des médecins nous l'ont dit devant cette commission, il n'y a pas de problème avec ça. Mais il reste beaucoup de choses à améliorer, je le sais, et le personnel de la CSST aussi en est bien conscient. C'est justement à ça qu'on veut contribuer par le projet de loi. Nous pensons que la réforme va améliorer le processus d'évaluation médicale, qu'elle va donner un pouvoir accru au médecin traitant et, cela, dans le but de donner des chances égales aux travailleurs. Nous ne sommes pas les seuls à le croire, des groupes qui proviennent du milieu médical, comme la Centrale des professionnels de la santé, nous l'ont dit clairement.

Sur ce point de l'évaluation médicale, nous avons apporté des amendements avec le projet de loi n° 79 qui, vous verrez, sont assez importants. J'ai pris bonne note des commentaires entendus lors des auditions. C'est clair qu'il y avait un malaise avec la réforme proposée, principalement avec la possibilité d'une participation du médecin traitant au choix de trois médecins spécialistes: on craignait des délais et un excès de procédure. Nous avons retiré cette étape-là. Par contre, nous conservons l'essentiel, c'est-à-dire la possibilité pour le médecin du travailleur de soumettre un rapport complémentaire, et nous l'appliquons non seulement lorsqu'il y a contestation de l'employeur, mais aussi lorsque la CSST conteste ou lorsqu'elle demande un avis – c'est la majorité des interventions de la CSST auprès du BEM.

On comprend bien, je l'espère, que cette mesure vise à rétablir l'équilibre. C'est un changement devenu essentiel à la lumière des expériences passées. Le déséquilibre, souvent au détriment du travailleur, était connu de tout le monde. Plusieurs groupes nous en ont parlé, à commencer par la CSN. Par ce changement législatif, nous visons une bonification de l'information médicale, une bonification qui s'impose, croyons-nous.

Passons maintenant au troisième aspect sur lequel nous avons apporté des amendements: le Bureau d'évaluation lui-même. Plusieurs en ont fait le procès et ça continue. On en a entendu des vertes et des pas mûres, c'est sûr. J'admets que certaines critiques étaient largement justifiées. Vous me permettrez ici de prendre un peu de recul pour vous rappeler pourquoi le BEM a été créé. Aucun autre assureur ne recourt à un bureau d'experts médicaux indépendants pour trancher dans les cas de litige sur des questions médicales. Au Québec, nous avons fait ce choix lorsque nous avons décidé de reconnaître la primauté du médecin traitant. C'est une garantie d'indépendance et de compétence. Je pense encore qu'il est préférable, pour des questions médicales, de recourir à des médecins plutôt qu'à des avocats pour trancher.

Il est essentiel que cet arbitrage se fasse en début de processus. D'ailleurs, même parmi les plus fermes opposants du Bureau d'évaluation médicale, on reconnaît la pertinence pour la CSST d'avoir un droit de regard sur les questions médicales. Normal. D'autres, comme le Collège des médecins, sont plus fermes. Pour eux, c'est essentiel. Le Dr Montminy a même déclaré que, en tant qu'agent payeur, la CSST doit poser des questions, et que ça ne fait pas de problème, dans sa pratique à lui, même comme médecin de travailleurs. La grosse difficulté avec le BEM, c'est sa crédibilité. On connaît tous l'opinion très ferme de la Confédération des syndicats nationaux à ce sujet. Mais, quand la CSN parle de musée des horreurs en parlant du Bureau d'évaluation médicale, elle critique avant tout les façons de faire. Là-dessus, rappelez-vous que j'ai pris des engagements. Je l'ai fait et je le fais de nouveau aujourd'hui. En tant que ministre du Travail, je suis en charge du Bureau d'évaluation médicale. J'ai prévu des mesures administratives majeures qui permettront d'améliorer le fonctionnement de ce bureau, autant sur le plan administratif qu'en ce qui concerne les rapports humains.

Je vais aussi regarder de près certaines propositions qui ont été faites, notamment sur le recours à des équipes ou à des cliniques multidisciplinaires. Plusieurs centres spécialisés ont développé des approches intéressantes, qui favorisent le retour au travail. Ça semble donner de bons résultats. C'est une avenue qu'on continue de regarder. En outre, nous nous sommes inspirés de ces expériences pour amender la loi dans le début, afin d'ajouter plus de flexibilité au fonctionnement du BEM. Il y aura dorénavant une possibilité de confier l'étude d'un dossier à plusieurs médecins, pour des cas complexes, difficiles à examiner. Or, pour ce qui est de notre engagement à améliorer le BEM, nous allons très loin. Et, en effet, on a inscrit dans la loi une clause spéciale qui prévoit une réévaluation du BEM par le ministre du Travail dans trois ans, à partir des résultats et des mesures d'amélioration. On jugera alors de la pertinence de maintenir ce bureau. Le rapport d'évaluation du ministre devra être déposé à l'Assemblée nationale. Ça veut dire qu'on va suivre l'évolution et l'amélioration du BEM de façon sérieuse.

Enfin, je voudrais faire une dernière parenthèse au sujet du Bureau d'évaluation médicale. Bien sûr, on a tous entendu des histoires – il y en a qui sont allés très loin dans leur analyse et leurs critiques – elles ont été médiatisées. Mais le BEM ne fait pas que des mauvaises choses. Plusieurs, y compris les médecins de travailleurs, en témoignent. Au cours des derniers mois, le BEM s'est déjà amélioré sur plusieurs points, entre autres sur les délais. On a actuellement un délai moyen de 22 jours. Les fédérations médicales nous ont demandé de maintenir cette instance en s'appuyant sur la raison d'être et l'historique du BEM. L'Alliance des manufacturiers en fait un plaidoyer très intéressant. Le Collège des médecins reconnaît la nécessité des expertises. C'est administrativement qu'il y a des problèmes et ça, je vous le dis, je m'en occupe. Quant aux règles d'éthique et de déontologie médicale, elles s'appliquent à tous les médecins du Québec. Il existe encore là des mécanismes de contrôle. Nous verrons à les faire appliquer comme il se doit. Et le collège des médecins est prêt à nous appuyer là-dedans.

(16 h 10)

Pour finir, je veux vous parler d'une disposition transitoire qu'on a ajoutée au projet de loi pour tenir compte des revendications qui nous ont été formulées. Ça concerne la possibilité de transfert au niveau tribunal des présidents du Bureau de révision. Ils seront déclarés aptes, en vertu de leur expérience, même s'ils ne sont ni avocats, ni notaires. Ce sont des personnes compétentes et expérimentées et nous avons tout intérêt à les récupérer, au même titre que les commissaires de la CALP. Il est important pour nous de donner cette garantie au personnel.

Je pense sincèrement que le projet de loi n° 79, avec les amendements qu'on propose aujourd'hui, est d'un intérêt capital pour le monde du travail et pour l'ensemble des travailleurs accidentés du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre.

M. le député d'Argenteuil et porte-parole de l'opposition, c'est à votre tour de nous faire des remarques préliminaires, si vous le souhaitez.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je remercie le ministre d'avoir bien voulu nous partager beaucoup d'information qu'il avait dans les dernières 48 heures. Il va sans dire que j'aurais aimé avoir les amendements un peu plus avant pour pouvoir non seulement les lire et les étudier, mais les comparer avec le projet de loi initial qui avait été soumis. Mais, quand même, je le remercie de nous les avoir remis hier après-midi, à 16 h 30. Aussi, en même temps, il nous a soumis, il y a deux jours, les changements administratifs, qui sont multiples mais qui, évidemment, ne se retrouveront pas dans le projet de loi.

Ceci dit, M. le Président, nous nous retrouvons ici, en commission, aujourd'hui, pour étudier le projet de loi avec les amendements que le ministre va nous soumettre au cours des délibérations. Ce projet de loi avait été basé en grande partie sur le rapport Durand, qui visait à la déjudiciarisation de la CSST. Après avoir entendu 36 groupes, pendant 36 heures – ou 37 groupes pendant 36 heures – force nous est de nous rendre compte aujourd'hui, après la lecture des amendements, que le projet de loi, tel qu'il sera modifié au cours des jours et des semaines qui s'en viennent, ne sera quand même pas conforme au rapport Durand.

Il y a plusieurs des éléments qui... Le rapport Durand, rapport sur lequel le ministre a basé beaucoup de ses interventions, est un rapport qui avait quand même été remis dans les années 1992-1993 et, à ce moment-là, les délais étaient évidemment de façon beaucoup plus marquée qu'on ne les retrouve aujourd'hui. Les délais ont été modifiés au cours des années par l'intervention du ministre, en mettant plus de gens en disponibilité, en demandant à la CSST de faire diligence, de sorte que les délais de deux ans qu'on retrouvait se sont retrouvés à 10,3 mois. On a les données qui nous confirment que le délai moyen, actuellement, est à 10,03 mois, à Montréal, et je pense qu'on est loin de justifier une intervention aussi massive afin de corriger les délais puisque, dans un des quatre points majeurs justifiant le projet de loi, le ministre nous a très bien illustré que le premier était d'abord de raccourcir les délais, à cause du temps important perdu par les employés et des ressources perdues par les employeurs.

Mais je dois dire aujourd'hui que ces délais-là n'existent plus, pas à cause de la nouvelle loi, parce qu'elle n'est pas encore en force, mais à cause des modifications qui ont été apportées à l'intérieur de la CSST et des modifications qui ont été apportées par les dirigeants de la CSST à être plus diligents, à voir à ce que les travailleurs et les travailleuses blessés, accidentés, soient orientés plus rapidement et que leur dossier soit traité de façon diligente.

Je pense que ce sont des éléments importants à manifester d'entrée de jeu, que les motifs qui ont été utilisés pour mettre ce projet de loi sur pied, une justification d'urgence, compte tenu des chiffres qui nous étaient donnés dans le rapport Durand, n'existent vraiment plus en 1997. Les délais sont grandement améliorés. Il y a beaucoup de cas, au BRP, qui sont réglés par conciliation, donc il n'y a plus de confrontations, il y en a de moins en moins, et il en va de même à la CALP. Alors, je pense que ce sont des points importants à soumettre d'emblée.

Il y a aussi un élément important que je vous ferai remarquer, c'est qu'il y a des amendements qui sont volumineux – il va sans dire, on n'envoie pas ça par fax tous les jours, ça va coûter cher, on aime mieux faire des photocopies, c'est plus économique – il y a plus d'amendements que d'articles dans la loi. Alors, ou il y avait une loi qui était improvisée puis on l'a revue à fond, mais il y a une démonstration qui nous est faite aujourd'hui, avec autant d'amendements proposés, suite à l'écoute des groupes qui sont venus nous rencontrer et nous partager leurs inquiétudes. Je pense que, si cette consultation avait été faite plus en profondeur initialement, on n'aurait pas, aujourd'hui, à introduire dans le projet de loi 65 amendements qui vont se révéler presque aussi importants que tout le projet de loi.

En ce qui a trait au médecin traitant, il y avait des objections majeures qui ont été soulevées; dans les amendements, nous allons retrouver une certaine souplesse, qui a été ajoutée par le ministre. Je suis sûr que les groupes qui ont insisté pour que le rôle du médecin traitant soit valorisé vont apprécier cette démarche. Je pense que c'est de bon aloi de reconnaître les choses qui ont été modifiées dans le bon sens. Par ailleurs, le travailleur n'aura plus la possibilité d'avoir de contestation. Dans la déjudiciarisation, évidemment, il y allait de diminuer le nombre de paliers. Bon, on enlève le BRP, et on espère que, par cette situation, on va diminuer le nombre de contestations.

Permettez-moi, M. le Président, de manifester au ministre mes inquiétudes quant à la diminution du nombre de contestations. Au lieu de les retrouver au niveau du BRP, on va les retrouver au niveau de la CLP, et au lieu d'avoir 8 000 cas par année, on va en retrouver 21 000 ou 22 000 ou 23 000, parce que l'échelon qui est enlevé va se retrouver plus loin. Alors, on a fait comme on fait souvent dans ce gouvernement: on a pelleté en avant, on a déplacé, on a passé la charrue puis on a envoyé à l'autre niveau, ce qu'on reproche à d'autres de faire, il va sans dire. Mais il faut quand même qu'on reconnaisse ce qu'on fait soi-même.

La clause crépusculaire de trois ans m'inquiète aussi, M. le Président. Elle m'inquiète parce qu'elle va inciter à la contestation pendant les trois années que l'on va vivre jusqu'à la révision de la loi, parce que, étant incluse dans la loi, bien, on sera obligé de la revoir dans trois ans, par nécessité. Alors, il y aura des contestations pendant trois ans, parce que les gens vont vous dire: Ça n'a pas d'allure, ce projet de loi là, pourquoi est-ce qu'il ne l'a pas modifié? Parce qu'on sait que, dans trois ans, on recommence. Et il me semble que, au lieu d'en arriver à refaire une consultation dans trois ans et à refaire toute la démarche, il eût été préférable de la faire plus à fond maintenant et de régler tous les problèmes. Parce que, quand le ministre me dit qu'il met une clause crépusculaire de trois ans, c'est qu'il doit avoir des inquiétudes. Il ne me les partage pas nécessairement, mais il doit en avoir, autrement on ne fait pas ça. Ce n'est pas tous les projets de loi qu'on soumet d'emblée à une clause crépusculaire puis, dans trois ans, on les revoit, par loi. C'est dans la loi, on ne pourra pas passer à côté, elle devra être révisée.

Alors, c'est que déjà le ministre, avant de faire adopter son projet de loi, a des inquiétudes. S'il a des inquiétudes, il devrait nous les partager puis, à ce moment-là, bien, peut-être qu'on pourrait l'aider à les régler, puis on n'aurait pas besoin d'avoir cette loi crépusculaire de révision dans trois ans, qui va devenir essentielle et obligatoire parce qu'étant dans la loi. Le travailleur qui est malade va avoir tendance à contester la loi, parce qu'il connaît la possibilité d'avoir la révision dans trois ans. Par ailleurs, l'autre insécurité, qui est de l'employeur, ce sera de dire: Bien, qu'est-ce qui m'attend dans trois ans? Alors que, vous le savez, les gens n'aiment pas l'insécurité. On en vit déjà assez au Québec sans en ajouter une autre qui va rendre et l'employeur et l'employé insécures, ne sachant pas ce qui va les attendre. Et comment serons-nous capables d'harmoniser la révision de la loi dans trois ans avec ces nouvelles entrées qui seront soumises à ce moment-là, avec la position actuelle qui sera adoptée éventuellement pendant ces trois années là, qui sera en force de loi? Pour moi, la déjudiciarisation, M. le Président, ce n'est pas ça.

(16 h 20)

Pendant l'audition des groupes en commission parlementaire, quelques groupes nous avaient mentionné des cliniques multidisciplinaires de médecine du travail, ce à quoi j'ai souscris d'emblée parce que ça m'apparaissait la solution la plus sage, la plus saine et la plus équitable pour le travailleur. Je peux comprendre aujourd'hui que le ministre ne pourrait pas dire: Bien oui, on s'en va dans cette direction-là, parce qu'il n'aurait pas les ressources médicales appropriées pour meubler, sur le plan humain, ces cliniques médicales là parce qu'il n'y a pas assez de spécialistes en médecine du travail. Mais j'aurais aimé que, dans un de ses amendements, le ministre nous en parle parce que, à ce moment-là, il nous aurait traduit un message comme quoi c'est peut-être une orientation qu'il souhaite, qu'il ne peut pas réaliser aujourd'hui mais, lorsque le contexte sociomédical ou médicosocial sera favorable, c'est l'orientation que la CSST aimerait prendre: avoir des cliniques multidisciplinaires de médecine du travail où le travailleur serait pris en charge dès la plus rapprochée des possibilités, après l'accident aigu, l'urgence, par un groupe multidisciplinaire, et être suivi, traité, diagnostiqué, évalué et réintégré au travail par un groupe d'experts compétents dans lequel il n'y a pas de consultant, il n'y a pas de contestation, ce sont des experts, tous sont experts à l'intérieur de cette boîte et tous participent au traitement, au suivi et à l'évaluation du patient.

Ceci dit, on a discuté mardi, lors de notre rencontre, de la possibilité d'inclure des groupes qui ne sont pas des groupes médicaux, comme les physiothérapeutes, les ergothérapeutes, les chiropraticiens. Permettez-moi aujourd'hui de vous souligner que je trouve un peu amusant que, sur le plan professionnel, on ait une faculté de chiropractie à l'Université du Québec à Trois-Rivières et que, en même temps, on ne puisse pas, si je suis un accidenté du travail, avoir recours à ce même professionnel. Il y a une aberration et probablement que c'est le reflet, encore une fois, que les ministres responsables de chacun de leur dossier ne prennent pas le temps de se parler. Il faudrait qu'il y ait une articulation entre le responsable de l'université qui dit «oui, on donne un cours en chiropractie» et le ministre du Travail qui dit «nous, on va traiter les gens qui ont des accidents de travail, mais ils ne peuvent pas aller voir un chiropraticien». Vous allez peut-être me dire que ça a l'air drôle venant de la bouche d'un docteur, mais il y a quand même un sens commun que je dois utiliser. Combien de personnes dans la population font appel aujourd'hui aux soins d'un chiropraticien? Ce n'est pas banal comme nombre.

Alors, si ce n'est pas banal et que ces gens-là ne sont pas tous des imbéciles, ce n'est pas parce que, aujourd'hui, je ne suis pas capable de vous expliquer comment fonctionne la chiropractie que je ne peux pas en tirer un bénéfice, un bien-être, duquel d'ailleurs pourrait bénéficier le travailleur accidenté en particulier, et, en particulier les maux de dos, qui sont l'un des malaises les plus fréquents, les plus douloureux, les plus difficiles à traiter, à soigner, à évaluer et à réintégrer au travail. On sait que, dans d'autres provinces, cette situation est acceptée et il y a une économie importante qui se retrouve là, sur le plan financier, pour l'employeur, mais en grande partie et surtout un bien-être important pour le travailleur qui en est affecté. Et on ne peut pas négliger cet aspect-là. Ça m'apparaît important que le ministre prenne cette situation en délibéré, qu'il y réfléchisse, parce qu'on a encore plusieurs heures à débattre sur ce terrain et j'aimerais qu'à un moment donné, s'il est d'accord, il puisse transmettre à son contentieux de rédiger le texte qu'il faudra pour inclure certaines spécialités paramédicales, professionnelles, qui pourraient bénéficier aux travailleurs et aux travailleuses du Québec qui sont atteints d'un accident du travail.

Vous avez mentionné tantôt le lien d'emploi. Ce n'est pas compliqué à changer, pour le lien d'emploi. Il fallait l'allonger et je comprends le problème du Dr Montminy qui nous dit qu'après deux ans un travailleur n'a plus le goût de retourner travailler. Avoir les deux pieds dans le fourneau pendant un certain temps, à se faire chauffer parce qu'on a mal, on n'a plus le goût de retourner, on peut comprendre ça. Mais il y a aussi une situation où, il l'a bien dit, c'est une question médicale. Vous faites tous les efforts pour retourner ce travailleur accidenté au travail avant deux ans – parce qu'on finit par avoir l'expérience, c'est un chiffre magique – mais, si le travailleur, pour une raison x, y, z, n'est pas remis de son malaise suite à son accident, puis que ça fait deux ans, qu'advient-il de ce travailleur-là? Il se retrouve éventuellement sur la sécurité du revenu. Comme on ne peut pas – en tout cas dans mon esprit et avec les connaissances médicales que j'ai, qui sont bien minimes, j'en conviens – d'emblée assumer qu'à chaque fois le travailleur va récupérer son lien d'emploi à l'intérieur d'un délai prescrit de deux ans, je ne pense pas que c'est dans un projet de loi qu'on décide ça.

Ce n'est pas dans un projet de loi qu'on va me guérir d'un accident que j'ai eu et qu'on va me dire: C'est en-dedans de deux ans, si tu n'es pas guéri, «tough luck»! Je pense que je ne peux pas accepter cette situation-là. Je pense que c'est manquer d'équité à l'égard du travailleur parce qu'à ce moment-là, bien ou mal, on l'oblige à réintégrer son travail. Il retourne au travail dans une condition qui n'est pas nécessairement favorable ni pour l'employeur ni pour l'employé et, dans une période de temps relativement brève, il se retrouve à nouveau sur les accidents de travail. Et on recommence le processus à zéro au lieu d'avoir poursuivi pour l'aider à cheminer vers une guérison totale. Alors, j'ai un peu de difficulté à comprendre pourquoi on fixe dans un temps, dans une boîte, et si ce n'est pas à l'intérieur de ça, bien, advienne que pourra. Je pense que le ministre doit réfléchir à cette situation-là et, lorsque l'article viendra, on verra sûrement à en discuter plus à fond.

Tantôt, je mentionnais le travail des cliniques multidisciplinaires et le ministre est sûrement au courant de l'étude-pilote qui se poursuit en Estrie où, sur un groupe de 104 travailleurs qui ont été traités par ce groupe bien précis, ils ont évalué que, si ces gens-là avaient été traités par les méthodes conventionnelles avec le secteur paramédical exclu, ça aurait coûté à la CSST 1 400 000 $ de plus que ce que ça a coûté. Je pense que ce ne sont pas des chiffres à traiter à la légère. Je pense que ce sont des chiffres qu'on doit prendre en considération. C'est pourquoi, je vous le mentionnais, j'espérerais que le contentieux puisse nous rédiger un petit texte nous disant que c'est l'orientation que le ministre souhaite prendre.

Le ministre aussi va sûrement comprendre qu'étant donné que je suis nouveau dans le dossier je vais lui demander son indulgence parce qu'il y a sûrement des éléments avec lesquels je suis moins familier. Je lui promets et je prends l'engagement de faire mon possible pour me familiariser le plus vite possible avec tous les dossiers et tout le contexte du Travail, qui n'est pas un territoire facile, qui amène des partenaires qui ont des intérêts divers et multiples. À l'occasion, il est fort possible que je demande des explications qui paraîtront au ministre banales mais qui, pour moi, seront du nouveau.

(16 h 30)

On a revu les amendements en ce qui a trait au paritarisme. Il s'y est adressé tantôt en ce qui a trait aux deux représentants. J'ai déjà mentionné au ministre que nous aimerions, dans cette démarche, étant donné l'implication de l'article 23 de la Charte des droits et libertés, que les deux représentants, patronal et syndical, puissent avoir leurs recommandations consignées afin que les deux groupes supportant chacun leur représentant puissent être mis au courant de la démarche qui est suivie par le représentant, soit-il syndical, soit-il patronal. Cette situation pourra permettre au milieu de savoir comment ça se passe, comment se comporte l'individu qu'ils ont délégué comme leur représentant. Ça ne serait pas souhaitable que le représentant syndical soit toujours d'accord avec le patron et vice versa. Comme ces délibérations actuellement ne sont pas colligées, il n'y a aucun moyen de savoir la position du représentant. Ça m'apparaît important que chaque groupe qui se fait représenter sache ce que son représentant fait et puisse porter un jugement sur les recommandations qu'il fait au commissaire, bien que le commissaire demeure indépendant de la prendre ou de la laisser, la recommandation, parce qu'il est le seul juge, mais il n'en reste pas moins qu'il est intéressant pour les groupes impliqués participant de savoir comment ça se passe. Je pense que ça m'apparaît un minimum.

Il y a aussi la nomination des délégués ou des conseillers pour une période de deux ans, une période de deux ans qui peut être très favorable étant donné que le délégué fait bien sa job. Mais, advenant que le délégué ne fasse pas bien son travail et qu'il soit nommé pour deux ans, le corps représenté par le délégué en question se verra pénalisé, se verra mal représenté auprès du tribunal et, à ce moment-là, je pense qu'il y aurait avantage à revoir cette période de deux ans pour s'assurer que le représentant joue bien son rôle. Qu'il ait un mandat maximum de deux ans, c'est une chose, mais qu'on lui donne jusqu'à deux ans, c'est une autre chose.

Les délais que nous connaissons, qui sont de 10,03, d'après les informations que nous avons pu prendre, il nous apparaît difficile de les diminuer en bas de cela. Difficile, parce qu'il y a quand même un processus à suivre; il y a quand même des visites à faire chez le médecin; il y a quand même des rapports à faire et des rapports à recevoir; il y a des consultations à faire auprès de différents spécialistes; il y a le retour de la consultation; il y a toujours la réaction du médecin traitant. Et j'ai beaucoup de difficulté à voir comment on pourra – et tant mieux si le ministre peut réussir – abaisser les délais en bas de 10 mois à cause de cette situation.

Je peux, évidemment, assurer le ministre dès maintenant... Mes confrères vont faire sûrement des remarques préliminaires et je suis sûr que le ministre a déjà remarqué que l'ancien ministre du Travail est avec nous – loi d'ailleurs qu'il a connue intimement pour y avoir participé activement – et je suis assuré que le ministre va pouvoir bénéficier de l'expérience, de l'expertise du député de Saint-Laurent qui va sûrement participer activement à nos travaux et qui va nous faire bénéficier sans doute de son expérience. Et je peux assurer le ministre de notre collaboration. Il peut la compter toujours lorsqu'elle ira dans le sens de protéger l'intérêt du travailleur et de la travailleuse lésés, accidentés, tout en sachant que la CSST est un milieu de support pour les accidentés du travail. À l'origine, la CSST, comme le partageait mon confrère de Saint-Laurent tantôt, avait été mise en place pour protéger le travailleur parce que les entrepreneurs faisaient faillite, puis le travailleur n'avait rien.

Aujourd'hui, les entrepreneurs, les employeurs contribuent à un fonds par des contributions bien réglementées qui permettent aux travailleurs d'en bénéficier, et cet argent qui est contribué par l'employeur doit aussi être utilisé à bon escient. Et, dans le but de ne pas le dilapider, bien, on peut s'assurer que et l'employeur bénéficie des démarches de la CSST et les employés, de façon équitable et juste. Tant et aussi longtemps qu'on ira dans ce sens-là, le ministre peut être assuré de mon support tout entier dans le projet de loi, tant et aussi longtemps que ça ira à la rencontre du bien-être du travailleur et de la travailleuse accidentés. Et si ça va à l'encontre, il me trouvera sur sa route. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres députés qui veulent faire des remarques préliminaires? Alors, M. le député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. M. le Président, la loi, telle qu'on la connaît, la Loi sur les accidents du travail, ce n'est pas une vieille loi. C'est quelque chose qui a été modifié dans le premier mandat du Parti québécois et qui a installé la parité. On sait que, quand on commence un exercice comme celui-là, il y a toujours une période de méfiance qui s'installe. Il y a toujours une période de positionnement, chacun veut s'assurer de sa représentativité, chacun veut s'assurer de... Mais il me semble que, même si elle est jeune, elle a quand même suffisamment de maturité pour qu'on puisse être capables, tout le monde autour de la table, de n'avoir qu'un seul objectif. Je suis convaincu que c'est ça, la volonté du ministre. Qu'est-ce qu'on va faire qui va améliorer le sort des travailleurs et des travailleuses? C'est juste ça, notre loi. On ne fait pas une loi pour nous autres, pour se parler, pour se voir un jeudi après-midi, le 1er mai, ce n'est pas ça qu'on fait. Notre objectif, c'est: ce qu'on fait, là, de quelle façon, ça, ça va amener le mieux-être des gens qu'on veut protéger.

Ça ne fait pas bien, bien longtemps, j'avais la responsabilité du ministre et ma collègue, qui avait l'opposition, était députée de Chicoutimi – Mme Blackburn pour ne pas la nommer – et je lui avais dit: Je vous inviterai à m'accompagner quand vous aurez l'occasion, dans Montréal, et vous allez voir, on va aller au bureau de la CSST le matin, quand tout le monde est au restaurant en bas et que c'est plein d'avocats, et puis, comme c'est ce matin-là qu'ils vont passer, là, tout le monde commence à s'échanger et à se dealer des cas et des affaires. Et là, l'accidenté du travail qui, lui, a attendu de nombreuses semaines et de nombreux mois pour qu'enfin quelqu'un parle de son affaire, là, il faisait face à un paquet d'avocasseries ce matin-là et il avait encore une fois le sentiment qu'il était passé dans la machine – permettez-moi l'expression – à saucisses et qu'il y avait encore quelqu'un qui parlait de lui. Et j'avais dit à ma collègue de Chicoutimi: Si vous avez l'occasion, incognito, essayez un matin, en passant, d'aller voir ça, c'est un spectacle désolant que de voir ça.

Ça, c'était un système qui avait fait que, de bonne foi – tout le monde était bien intentionné – on avait, tout le monde, judiciarisé le système. C'est quoi, les conséquences de ça? C'est bien simple, le ministre en a parlé tantôt et mon collègue en a parlé: la loi prévoit que, si ton employeur a moins de 50 employés, après deux ans, tu n'as plus de droit de retour au travail, et, s'il en a plus que 50, c'est un an. En tout cas, c'est un an ou deux ans, maximum. Alors, les conséquences faisaient que, plus on prenait du temps à s'adresser au cas de l'accidenté du travail pour trouver une solution, quand les délais étaient expirés, l'employeur pouvait légalement dire: Moi, je m'en lave les mains, je n'ai plus d'obligation légale envers cet individu-là, que la société s'en occupe autrement, on paie des taxes pour d'autres choses. Mais, dans les faits, non seulement lui, il était diminué parce qu'il était accidenté, ça l'a dévalorisé sur le plan personnel et sur le plan familial parce que, bien souvent, la perte du revenu a des conséquences dramatiques dans certains cas.

Donc, pour être capable de protéger cette situation-là, tout le monde avait voulu placer toutes sortes de barrières, toutes sortes de précautions, mais le résultat net faisait que, bien souvent, on commençait véritablement à s'adresser aux besoins de ce travailleur-là pour le réadapter et le retourner au travail quand les délais faisaient qu'en pratique il n'en avait plus, de droits. Et, bien souvent, entre-temps, aussi – et c'est ça qu'il fallait découvrir – c'est que l'employeur, lui, n'avait pas laissé le poste inoccupé jusqu'à temps que l'employé revienne, et, loin des yeux, loin du coeur, ceux qui aimaient bien celui qui était accidenté et qui est parti, il est remplacé par un autre ou une autre qui, finalement, on s'en accommode, de son arrivée. Donc, non seulement tu es dévalorisé parce que tu as été accidenté, mais, quand tu vas pour y retourner huit, neuf, 12 ou 15 mois après, tu as le sentiment que tu n'es même plus le bienvenu dans certains cas, parce qu'on apprécie la personne qui a pris ton emploi. Ça aussi, ça a joué dans bien des cas.

(16 h 40)

Donc, notre objectif à tout le monde autour de la table: Comment peut-on s'assurer qu'on va aider le travailleur à réintégrer le plus rapidement possible? C'était quoi, la mentalité, jusqu'à il y a encore quelques années? Et on ne fait pas un rappel pour se faire plaisir; c'était ça, la réalité. Je me souviens, moi, quand les déficits de la CSST montaient année après année, avoir eu des employeurs qui m'ont dit, quand j'avais la responsabilité du ministre: M. le ministre, on s'en sacre! qu'il continue comme ça encore une couple d'années, il va péter, le système, et là, après ça, on pourra avoir des bénéfices ou des compensations qui vont être beaucoup moins, disaient-ils, généreuses – ce n'est pas mon terme, c'est le leur, O.K. Donc, ils souhaitaient quasiment qu'on laisse aller ça jusqu'à ce qu'il ne soit plus financièrement viable, parce que c'était ça, c'était quasiment ça, l'objectif. En tout cas, je vous dis, en rencontre privée, des gens me l'ont avoué.

Et là on fera comme d'autres provinces, on diminuera les avantages, au lieu du 90 % du net... Parce que c'est toujours ça, comme si la façon de sauver de l'argent, c'est de le laisser «buster» – permettez-moi l'expression – qu'il ne soit plus financièrement viable. Puis là, à partir de ça, on diminuerait les bénéfices que les gens retiraient. Comme si c'était ça, la cause. Ce n'est pas ça, la vérité. Ça, c'était le premier constat qu'on faisait.

Le deuxième constat, c'est que la relation entre la CSST et grand nombre d'employeurs... Le mot «CSST», par un employeur, c'est perçu comme quelque chose qui me coûte de l'argent, quelque chose qui est achalant, c'est de la paperasse, c'est embarrassant: Alors, écoute, Qu'est-ce que ça coûte? puis, laissons aller, puis, achale-moi pas avec ça. Donc, le lien n'était pas bon, la CSST, ce n'était pas bienvenu dans une entreprise, ça coûtait juste cher puis c'était tous du monde qui se cachaient derrière, qui n'étaient pas de vrais accidentés. C'est facile, charrier sur le dos de ce monde-là, surtout, comme le disait mon collègue tantôt, quand c'est un mal de dos, tu sais, ce n'est pas une fracture ouverte, ça fait mal, ce n'est pas facile à diagnostiquer. Le seuil de douleur de chacun n'est pas... Alors, finalement, on peut charrier sur le dos de ce monde-là, et là on laisse aller le système. Donc, il ne fallait pas faire ça.

Mais, ce que je rappelle au ministre – ça, c'est l'expérience que j'ai vécue, là – bien souvent, on réussit ce qui est perçu comme l'impossible par du resserrement administratif plutôt que de la législation – ça ne veut pas dire que ça ne prend pas de législation – par de bons resserrements administratifs, par de bons contrôles, par des prises en charge plus rapides de l'accidenté. Il y a plusieurs façons de faire ça. Entre autres, je me souviens d'une chose qu'on avait diagnostiquée rapidement: notre expérience passée fait que, quand tu arrives là, ils ne peuvent pas de conter des chansons bien longtemps, c'est ce que ça causait. On en a défendu, des cas comme ça – je donne ça comme exemple.

M. le Président, la relation entre le médecin traitant et l'employeur de cet accidenté-là. Le médecin traitant, lui, il notait et tenait compte de la situation de l'accidenté du travail dans son milieu de travail, que ce que l'accidenté lui décrivait bien. Il n'avait pas le temps de quitter son bureau pour aller voir le lieu de travail, s'il y a quelque chose qui aurait pu être modifié pour faciliter l'exécution de la tâche pour permettre à cet accidenté-là de réintégrer son milieu plus rapidement. Ça ne se faisait pas. Donc, il y a fallu former des équipes qui sont allées sur les lieux de travail, pas faire la job du médecin, non, non, juste documenter, dans certains cas, filmer le poste de travail, photographier, s'informer, et là ramener dans le bureau du médecin traitant des informations qu'il ne possédait pas, puis dire: Voici, doc, si ça peut vous aider dans votre diagnostic, si ça peut vous aider à mieux traiter ce patient-là. En même temps, on disait à l'employeur – une chose qu'on peut faire comme CSST: Voici ce qu'on a décelé qui a été la cause de l'accident et voici certaines modifications du poste de travail, pas nécessairement dispendieuses dans de très nombreux cas. Il s'agit juste que quelqu'un se donne la peine de regarder comment cet accident-là est arrivé. Si c'est des gestes répétitifs, comment est-ce qu'on peut supporter les parties du corps qui ont à faire ces gestes-là qui font que la personne est accidentée, et corriger le poste de travail. Parce qu'on disait à l'employeur: Les conséquences de ça, on vous le dit, une fois qu'il va avoir dépassé, bien sûr que vous n'avez plus d'engagement de le reprendre, mais ce n'est pas un nuage, il ne s'évapore pas dans la société, il demeure encore un citoyen québécois qui est à la charge de la collectivité, donc, si vous trouvez que vos charges sont trop fortes, aidez-vous à les diminuer puis on va faire notre part là-dessus.

Et, quand ce n'était pas trop dispendieux, souvent les employeurs pouvaient le faire eux-mêmes. Quand ils ne disposaient pas de l'expertise, la CSST la leur fournissait. Quand ils n'avaient pas les moyens, la CSST fournissait même des moyens financiers pour améliorer le poste de travail pour pouvoir le réintégrer. Ça, c'était la relation de la CSST avec l'employeur. Je me souviens, entre autres, d'une rencontre avec – je peux le nommer aujourd'hui – Pierre Shedleur, qui est parti, qui était le président de la CSST. On avait eu une réunion à 7 heures le matin avec des médecins à un hôpital à Montréal et on avait mis sur le tableau, comme entrée: Deux ans de délai, est-ce que ça égale bien-être social? Et là on a expliqué aux médecins que le plus mauvais service qu'ils pouvaient rendre à un travailleur, une travailleuse accidenté, c'était de lui signer ce qui, des fois, pouvait être perçu comme une chose de complaisance. Puis, envoye donc! puis, ça te «fait-u» encore mal, mon Jean-Paul? Oui, envoye donc! un autre deux mois là-dessus, tu reviendras me revoir.

Mais ils ne réalisaient pas qu'en faisant ça, c'était le pire des services qu'ils rendaient au travailleur parce que, après son année ou son deux ans, plus de responsabilité. Donc, il a fallu les conscientiser au plus mauvais des services qu'ils rendaient. Bien sûr, ils nous ont dit toutes sortes d'affaires: Les formulaires de la CSST, c'est trop compliqué; on n'a pas assez d'espace pour remplir nos diagnostics. Alors, il a fallu faire de l'écoute avec eux autres aussi.

Mais je décris tout ça pour dire au ministre que, quand il y a des efforts de consacrés à réviser les façons de procéder, avant d'aller à la législation, il y a moyen de trouver là des pistes qui sont très, très intéressantes. Mais ça ne règle pas tous les problèmes. À un moment donné, quand tu pars une campagne pour régler quelque chose, les cas les plus faciles, ceux-là, tu les réussis en premier; mais, plus ça fait longtemps qu'il y en a qui traînent dans le système, plus ceux-là ont besoin d'une attention spéciale parce que plus ils ont décroché du milieu de travail longtemps, plus les conséquences sont là.

Alors, dans ce sens-là, moi, je veux juste dire au ministre que l'approche traditionnelle... Je ne vise aucun groupe en particulier, je me place bien au-dessus de ça, il y a des organismes qui, traditionnellement, s'objectent chaque fois qu'on veut modifier quelque chose à la CSST. Ils étaient contre quand telle modification de la loi est arrivée puis, quand, à l'exercice, on apprend qu'il faut la remodifier, ils sont encore contre qu'on veuille la modifier. Bien, je veux dire: Faites-vous une idée. Vous étiez contre, vous disiez que ce n'était pas une bonne loi. Quand, à l'exercice, on s'aperçoit qu'elle n'était pas aussi bonne qu'on pensait, on veut la remodifier, ils sont encore contre. Comme s'il fallait toujours rester dans l'approche du pire tout le temps. Moi, j'ai vécu des occupations de bureaux à cause de ça. Mais il faut être capable de prendre ce recul-là – c'est ça la responsabilité du ministre – être capable de faire le partage entre ceux qui nous font des pressions pour tenter de protéger des acquis, ou positionner d'autre chose et être capable de dire: Ce qu'on essaie de faire ne doit avoir qu'un seul résultat, comment ça va améliorer le monde qui sont dans ce système-là.

C'est pour ça que la clause crépusculaire que le ministre introduit là-dedans, personnellement, je sais qu'elle peut avoir certaines approches. Les gens vont peut-être se dire: Si ça prend trois ans pour faire la démonstration que ce n'est pas bon, on va essayer de – pardonnez-moi l'expression, M. le Président – focailler le système un peu pour qu'on fasse la démonstration qu'il n'avait pas raison de faire ça. Mais, ça, il doit y avoir des mesures administratives puis de dire à la machine... Il faut qu'on ait les vrais cas, les vraies affaires pour répondre à ça. Une clause crépusculaire avec un rapport déposé à l'Assemblée nationale me semble une approche qui oblige le législateur à regarder si ce qu'il a voulu faire a atteint les objectifs et, si oui, dans quel degré de ce qu'il souhaitait. Ça, ça me semble la meilleure des façons.

Alors, moi, M. le Président, des batailles pour la représentativité puis des batailles pour la parité, ça là, il me semble que ça devrait être derrière nous autres, on n'a plus à se préoccuper de ça, on se préoccupe du monde qui est dans le système et plus les cas sont longtemps, je me répète, plus les cas sont longtemps, plus ils sont difficiles à régler. Mais il ne faut pas abandonner, pour ça, il faut avoir des approches nouvelles, il faut faire des projets-pilotes, il faut essayer des nouvelles choses. Il faut que ces gens-là aient la conviction que le système veut les aider à s'en sortir, veut bien identifier.

(16 h 50)

Alors, moi, ce que je suggère au ministre, dans le cours de notre étude article par article qu'on commencera à faire: s'il y avait moyen d'avoir à sa disposition des gens qui vivent le quotidien de la CSST parce que, si on posait des questions, comme référence, ça irait peut-être plus vite. Je dis ça comme ça parce que je ne veux pas qu'on ait l'air d'un débat... Je suis convaincu que le contentieux du ministère est représenté; ça, c'est correct, ça doit être pour ça, les pièces de législation. Mais, bien souvent, il est important pour nous, comme travail, qui nous penchons sur le projet de loi, de se faire rafraîchir par les gens qui ont à l'appliquer dans le quotidien, pourquoi on veut faire ça comme ça.

Il y a des choses qu'on veut modifier qui ne sont pas si vieilles que ça. C'est quoi, l'expérience qu'on pensait que ça apporterait? Où ça a manqué et à quel degré ça a manqué? C'est quoi, la nature des cas? Parce qu'il ne s'agit pas de traiter de pourcentages, en fonction des gens. Y a-t-il une catégorie de types d'accidents qu'on peut identifier qui est la plus difficile? C'est quoi le véritable problème? Si on est capable de faire ça – il me semble que la CSST est équipée pour faire ça – à ce moment-là, on s'attelle ensemble à regarder comment on peut répondre à ces gens-là.

Encore une fois, j'assure le ministre qu'à chaque fois qu'on pourra faire un bout ensemble... Et je finis avec ces remarques-là: comme ministre du Travail, j'ai eu à piloter 10 projets de loi, trois concernant la CSST, dont, entre autres, réforme administrative et quelques-unes législatives, mais en insufflant une volonté dans la boîte et une meilleure réorganisation, en obligeant ces gens-là régulièrement à un suivi de dossiers dans le bureau du ministre. Il faut qu'ils sentent qu'on s'en occupe. C'est ce qui a permis de prendre une situation comme celle qui existait avant et ce qui fait que, depuis trois ans, la collectivité québécoise est capable de dire que non seulement on a réglé les cas du monde de plus en plus rapidement, mais qu'en plus de ça le taux de cotisation a diminué.

La sécurité financière, la performance de la CSST, pour une troisième année, a amené des résultats. On sait que c'est un item qui est important quand des entreprises décident de rester ou de partir, ou décident de venir s'installer ici ou ailleurs. On sait que ça, c'est un facteur qui joue aussi. Alors, on avait tellement mauvaise réputation, pas qu'on le méritait exactement, mais je suis convaincu que ça a joué contre certaines possibilités d'investissement au Québec, la réputation qu'on avait, la réputation de la CSST. Aujourd'hui, elle n'est plus celle-là. On a l'obligation, à mon avis, ça fait partie du climat, de la protéger, de l'améliorer, en s'assurant qu'à chaque étape qu'on va faire on ne laissera personne tomber entre les craques.

Il faut aider le monde. Les pires, ceux dont le système n'a pas réussi à prendre soin à date, c'est ceux-là qu'il faut cibler. Les autres, je pense que le système jusqu'à maintenant... Parce que le ministre a raison, les cas qui aboutissent dans nos bureaux, c'est bien souvent ceux que ça fait longtemps. Mais, dans 80 %, 90 % des cas, ça s'est réglé et ça s'est bien réglé. Ce n'est pas de ceux-là qu'on entend parler. Donc, notre objectif à nous autres, c'est de cibler sur ceux qui n'ont pas réussi, qui n'ont pas atteint le fonctionnement qu'on voudrait que ça ait, et ensemble de le faire. Là-dessus, le ministre, pas besoin de lui dire, je le répète, comme mon collègue, au nom de notre formation politique, la contribution que je pourrai apporter, ça me fera plaisir de le faire dans ce dossier-là. Merci.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député, de cette très intéressante perspective qui reflète bien votre expérience et votre vécu. Alors, est-ce qu'il y a d'autres députés qui veulent se prévaloir de remarques préliminaires?

Alors, dans ce cas, M. le ministre, c'est à vous la parole pour introduire l'article 1. Oui, M. le député.

M. Beaudet: Compte tenu du fait que je n'ai pas encore eu le temps d'harmoniser tous les amendements avec le projet de loi, qu'on n'a pas eu le temps non plus de consulter tous nos groupes qui nous informent, qui nous font part de leurs inquiétudes, de leurs souhaits et de leur accord avec ce qui nous est proposé, est-ce qu'il serait possible de demander au ministre d'ajourner les travaux et qu'on reprenne mercredi matin, étant donné qu'on s'était entendu que, mardi, on ne siégerait pas, si c'est possible?

Le Président (M. Beaulne): Personnellement, je n'y vois aucune objection.

M. Rioux: Moi non plus.

Le Président (M. Beaulne): Alors, dans les circonstances, j'ajourne les travaux de notre commission sine die. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 16 h 54)


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