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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 7 mai 1997 - Vol. 35 N° 60

Étude détaillée du projet de loi n° 79 - Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives


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Table des matières

Remarques préliminaires (suite)

Étude détaillée


Autres intervenants
M. François Beaulne, président
M. Normand Cherry
M. Claude Boucher
M. Michel Côté
* M. Yves Tremblay, Commission de la santé et de la sécurité du travail
*Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats


(Seize heures vingt-huit minutes)

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'économie et du travail siège cet après-midi pour continuer l'étude du projet de loi n° 79, Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives. Lorsque nous avons suspendu nos travaux la dernière fois, nous avions convenu que les députés qui le souhaitaient avaient fait leurs remarques préliminaires. Je crois comprendre qu'avant de procéder directement à l'échange le porte-parole de l'opposition officielle voudrait faire une brève intervention. Mais, avant de vous céder la parole, M. le député d'Argenteuil, je vais demander à notre secrétaire, conformément à nos règlements, s'il y a des remplacements.

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ciaccia (Mont-Royal) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion).

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, allez-y, M. le député d'Argenteuil.


Remarques préliminaires (suite)


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. J'avais mentionné lors de la première partie de la commission, la semaine dernière, que j'aimerais que ce soit ouvert comme discussion, et je crois que le ministre avait accédé à cette démarche-là, donc d'être moins rigide sur les affaires de temps afin qu'on puisse vraiment, pendant la discussion sur ce projet de loi qui soulève beaucoup d'inquiétudes, avoir vraiment des échanges francs, de sorte qu'on puisse, si c'est possible, améliorer le projet pour servir les citoyens, c'est-à-dire les travailleurs qui sont accidentés. C'est ça qui est notre but. Qu'on arrête de s'accrocher dans les fleurs du tapis parce que ça fait une minute ou l'autre minute. Je pense que ce n'est pas ça qui est important. C'est vraiment de servir, ce pourquoi on est ici comme législateurs.

(16 h 30)

Dans cette démarche, suite à la présentation et à la soumission des 65 amendements que le ministre nous a donnés, il y a beaucoup de gens qui nous ont appelés, il va sans dire, et je suis sûr que le ministre aussi a eu beaucoup d'appels, d'échanges et de rencontres, ce que nous avons eu, nous aussi. Dans ces rencontres, il y a eu beaucoup d'inquiétudes qui ont été soulevées. Vous allez comprendre, devant le nombre d'amendements projetés et soumis, que les questions soulevées sont quasiment aussi importantes que pour le projet de loi qui avait 64 articles. Alors, devant cette démarche-là, j'aimerais savoir, avec toutes les inquiétudes soulevées par les groupes qui sont impliqués, si le ministre est prêt à se soumettre à leur demande de venir en commission parlementaire nous exposer leur point de vue sur les amendements.

Je ne veux pas qu'on reparte avec une grande commission pendant trois mois, mais peut-être prendre une journée de notre période de travail pour se limiter vraiment à quelques groupes, les plus importants parmi ceux qui sont là, qui s'objectent au projet ou qui sont d'accord avec le projet mais qui, avec des nouveaux amendements, ont d'autres points de vue à venir partager avec les membres de la commission. Le ministre a eu ces interventions-là parce qu'il les a eus directement avec les groupes concernés. J'ai eu ces mêmes interventions. Mais on n'est pas seuls. Il y a d'autres députés qui ne les ont pas. On peut les partager, mais on devient une tierce personne. On est un intermédiaire. Ce n'est peut-être pas nécessaire d'avoir un intermédiaire, mais de les avoir directement.

Dans cette démarche-là où j'ai reçu des lettres, des demandes, qui ont été envoyées au ministre ou au premier ministre, lui demandant d'avoir une commission, je pense qu'il ne faudrait pas qu'on s'en aille vers une commission élargie. C'est une commission restreinte, un très petit groupe, quelques heures, mais qu'on puisse les entendre. J'aimerais savoir de la part du ministre s'il est ouvert à cette démarche d'entendre ces quelques groupes. On pourrait décider ensemble lesquels et écouter leur point de vue sur les amendements qui ont été déposés et sur le cheminement que le ministre suit actuellement. Suite à sa réponse, on réagira.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Je pense que votre demande est très claire. M. le ministre, comment réagissez-vous?


M. Matthias Rioux

M. Rioux: J'aimerais rappeler, M. le Président, d'abord, que les quatre objectifs majeurs qui nous amènent à étudier ce projet de loi là article par article ont toujours été pour moi les mêmes. C'est de réduire les délais engendrés par les multiples structures: CSST, Bureau de révision, CALP, etc.; prioriser l'action du médecin traitant dans le dossier de l'accidenté, deuxième élément; le troisième, c'est déjudiciariser, par une intervention plus efficace au BEM, une intervention plus respectueuse aussi des travailleurs, et aussi protéger le droit du retour au travail fixé, qui est un maximum de deux ans. Ça, c'est les priorités de base.

Quant à la demande du député, j'aimerais lui souligner que, lors des audiences publiques qu'on a tenues, audiences auxquelles il a assisté d'ailleurs, tous les groupes qui ont voulu se manifester ont été entendus. Ça nous a fait plaisir de les entendre et ça a été un exercice, à mon avis, démocratique et très fructueux. On a essayé de respecter toutes les étapes de consultation requises avec des résultats que j'estime satisfaisants, et c'est ce qui a amené les amendements dont parlait le député tout à l'heure. Soit dit en passant, j'aimerais préciser que les amendements, à peu près 80 % de ces amendements, sont des amendements de concordance, pas des amendements qui modifient substantiellement les choses.

Alors, à la question du député, je réponds non. Je pense qu'on l'a fait, cet exercice-là de consultation et d'écoute, et là, maintenant, je pense que les principaux groupes ont été rencontrés: la CSN l'a été trois fois; on a rencontré le patronat, on a rencontré la FTQ, tous les groupes et on les a revus après les audiences de la commission. Je pense que, comme exercice, on a fait ce qui devait être fait et j'évalue que c'est correct comme ça.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, M. le député.

M. Beaudet: M. le Président, je ne peux pas faire autre chose que de me soumettre au ministre, étant donné qu'il a la majorité et qu'il est du côté ministériel. Alors, j'accepte sa décision. Je ne peux que la déplorer, parce que je pense que les groupes importants auraient aimé partager avec nous leurs inquiétudes, parce que, ayant parlé à la grande majorité des groupes importants, j'ai entendu des pour, des contre, mais tous avaient des inquiétudes qu'ils ont soulevées.

Tout ce que je peux souhaiter à ce moment-ci, c'est que le ministre soit ouvert à nos interventions par lesquelles j'essaierai de faire valoir le point de l'un et de l'autre; pas nécessairement d'un seul groupe, mais de l'ensemble, parce qu'il y a des aspects qui m'apparaissent souhaitables dans le projet de loi, et qu'on puisse, chemin faisant, bonifier ce projet de loi, qui est d'une importance capitale, bien que l'urgence avec laquelle le ministre nous l'a soumise, cette loi-là, n'existe plus, parce qu'au fond, les délais, qui étaient le problème important, n'existent pratiquement plus: on est rendu à 10,3 mois, si je ne me trompe; en tout cas, on est dans le coin de 10 à 12 mois. Alors, je pense que l'urgence n'existait pas. Mais je suis convaincu de l'ouverture du ministre à partager avec nous sur les différents points litigieux et qu'il y ait une concession de part et d'autre, qu'on puisse arriver à vraiment améliorer le projet de loi.


Étude détaillée


Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles


Interprétation

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, M. le ministre, nous revenons à nos travaux d'aujourd'hui. Donc, nous en étions rendus à la présentation du premier article. Alors, je vous donne la parole pour nous expliquer l'article 1 du projet de loi.

M. Rioux: Alors, M. le Président, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est modifié à l'article 2 par l'abrogation de la définition «Commission d'appel». Alors, l'abrogation de cette définition est rendue nécessaire en raison du remplacement de la CALP par le nouveau tribunal administratif qui est créé, qui s'appellera désormais la Commission des lésions professionnelles. Alors, voilà, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil...

M. Beaudet: Oui.

Le Président (M. Beaulne): ...avez-vous des commentaires?

M. Beaudet: Oui. M. le Président, j'en ai parlé l'autre jour au ministre lorsque nous étions en commission, je ne voudrais pas qu'on s'accroche sur une situation puis en discuter pendant des heures de temps alors qu'éventuellement on va revenir sur cet article-là par un autre article. Alors, sur celui-là, j'aimerais qu'on suspende parce que, quand on discutera de la CLP, bien, à ce moment-là, on fera la redondance puis on reviendra à l'article 1, de sorte que ce sera plus simple. Au lieu de s'engueuler encore deux fois, on discutera simplement juste une seule fois. Si le ministre est d'accord, je voudrais qu'on suspende celui-là puis qu'on continue vers l'article 2.

M. Rioux: Ça va.

Le Président (M. Beaulne): Alors, on suspend l'étude de l'article 1. L'article 2.

M. Rioux: Alors, l'article 43 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la deuxième ligne, de «415 et 415.1», par «429.23, 429.24 et 429.30». Il s'agit d'une modification de concordance, vous l'aurez deviné, compte tenu que la numérotation des articles 415 et 415.1 est changée par celle dont je viens de parler, c'est-à-dire 429.23, 429.24 et 429.30.

M. Beaudet: Je demanderais la même chose que dans le cas de 1 parce qu'on va le rejoindre plus loin.

Le Président (M. Beaulne): Bon, alors, on suspend également l'article 2. L'article 3.


Procédure d'évaluation médicale

M. Rioux: À l'article 3, M. le Président, il y a un amendement.

Le Président (M. Beaulne): Oui, allez-y, M. le ministre, lisez-nous votre amendement.

M. Rioux: L'article 204 de cette loi est modifié par le remplacement du premier alinéa par le suivant:

«204. La Commission peut exiger d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle qu'il se soumette à l'examen du professionnel de la santé qu'elle désigne parmi les trois professionnels de la santé choisis par le médecin qui a charge du travailleur à partir de la liste dressée selon l'article 205. La Commission obtient du professionnel de la santé ainsi désigné un rapport écrit sur toute question relative à la lésion. Le travailleur doit se soumettre à cet examen.»

Alors, on insère aussi, après le premier alinéa, les suivants:

«Si elle l'estime opportun, la Commission peut demander au médecin qui a charge du travailleur de lui transmettre les noms de trois autres professionnels de la santé choisis à partir de la liste dressée selon l'article 205, aux fins de procéder à la désignation prévue au premier alinéa.

«À défaut par le médecin qui a charge du travailleur de transmettre par écrit à la Commission, dans les cinq jours d'une demande de celle-ci, les noms des professionnels de la santé, celle-ci peut en désigner un, à partir de la liste dressée selon l'article 205.»

Par le remplacement, aussi, dans la deuxième ligne du deuxième alinéa, des mots «cet examen» par le mot «l'examen».

(16 h 40)

Alors, les articles 3, 4 et 5, vous vous souviendrez que ça avait fait l'objet d'un gros débat, ça. Les gens disaient: on n'est pas d'accord que le médecin traitant soit soumis, soit obligé de choisir un spécialiste à partir d'une liste dressée par la CSST. Alors, l'orientation qui a été prise à ce moment-là, ça a été de dire – et on en a tenu compte dans nos amendements – que le médecin traitant pourra choisir le spécialiste de son choix. Alors, on maintien l'article 204 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles et on retire l'article 3 du projet de loi. Vous vous souvenez de ce débat-là, n'est-ce pas? Alors, c'est une amélioration sensible qui a été voulue à peu près par tout le monde.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Dans l'article 204 qui nous est soumis, il est évident que c'est une amélioration par rapport à l'initial. J'accepte ça d'emblée. Par ailleurs, c'est bien dit: «La Commission peut exiger d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle qu'il se soumette à l'examen du professionnel de la santé qu'elle désigne parmi les trois professionnels de la santé choisis par le médecin qui a charge du travailleur.» Est-ce qu'il ne serait pas possible, au lieu d'avoir les mots «qu'elle désigne», c'est-à-dire que la CSST désigne, que ce soient les mots «choisi par le médecin qui a charge»? Il vous soumet trois noms mais il vous les donne dans l'ordre. Je vous choisis puis je vous donne...

M. Rioux: M. le Président, je voudrais faire remarquer à mon collègue qu'on retire cet article-là.

M. Beaudet: Au complet?

M. Rioux: Au complet, oui. Alors, je pense que ça répond à votre voeu. On maintient le statu quo, au fond.

M. Beaudet: O.K.

M. Rioux: O.K.?

M. Beaudet: Même dans le statu quo, là, il reste que «qu'elle désigne», c'est encore là, c'est la CSST qui le désigne.

M. Rioux: «La Commission peut exiger d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle qu'il se soumette à l'examen d'un professionnel de la santé qu'elle désigne, pour obtenir un rapport écrit de celui-ci sur toute question relative à la lésion. Le travailleur doit se soumettre à cet examen.» La Commission assume les coûts.

M. Beaudet: Pourquoi ça ne pourrait pas être le médecin traitant plutôt que le médecin qui est désigné par la CSST? Tout le long, M. le ministre, vous avez voulu favoriser cette ouverture-là vers le médecin traitant puis, là, à l'article 204, si je lis bien, ce n'est pas ça. Là, c'est la CSST qui nous le désigne. Alors, on va un peu à l'encontre de la tendance que vous avez voulu nous ouvrir.

M. Rioux: Mais je pense que ce qu'il faut comprendre, c'est que la CSST peut choisir le médecin de son choix si elle conteste la décision du médecin traitant.

M. Beaudet: Oui, c'est le contexte, il n'y a pas de problème là.

M. Rioux: On n'a pas à imposer à la Commission de la santé et de la sécurité du travail que ce soit le médecin traitant qui nomme son médecin. Je pense qu'on se comprend facilement là-dessus. O.K.?

M. Beaudet: Ça marche.

M. Rioux: Bien.

Le Président (M. Beaulne): Y a-t-il d'autres commentaires sur l'article 3? Sur l'amendement?

M. Beaudet: Mais il est retiré.

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'amendement est adopté?

Une voix: L'amendement, oui.

M. Rioux: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'article 3, tel qu'amendé, est adopté?

M. Rioux: Adopté.

Une voix: L'article est retiré.

Le Président (M. Beaulne): L'article complètement est retiré?

M. Rioux: Il est retiré.

Le Président (M. Beaulne): Donc, on passe à l'article 4.

M. Beaudet: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Oui.

M. Beaudet: À cet article 204, il n'y a pas de délai qui est soumis pour le médecin qui est choisi par la Commission? «Un rapport écrit de celui-ci sur toute question relative à la lésion», est-ce qu'on lui demande un délai? Pourquoi est-ce que vous ne demandez pas de délai à lui, parce qu'il est choisi par vous? Alors que vous demandez aux autres, quand ils sont choisis par le médecin traitant, d'avoir un délai. Est-ce qu'on peut lui mettre un délai à lui aussi, dans les 30 jours, comme on demande au médecin traitant de soumettre son rapport dans les 30 jours?

M. Rioux: Mais voyez-vous ça nécessaire, étant donné que c'est la CSST qui administre le régime?

M. Beaudet: Bien, là, pourquoi c'est nécessaire pour l'autre puis ça ne le serait pas pour le médecin qui est responsable pour la CSST? Pourquoi est-ce qu'on l'exige de l'autre puis qu'on ne l'exigerait pas pour celui de la CSST? On l'exige du médecin traitant et de ses consultants.

M. Rioux: Vous aimeriez voir introduire un délai à l'intérieur duquel la Commission ne pourrait pas déroger.

M. Beaudet: C'est parce que, quand le médecin traitant demande à un spécialiste de voir son malade, il a 30 jours pour soumettre son rapport. Quand la CSST va demander à un spécialiste de voir le malade, lui, il n'a pas de délai, il peut prendre six mois, là. Non, mais, dans la loi, il pourrait prendre six mois, il n'y a rien qui l'oblige. Par ailleurs, vous mettez des délais partout sauf pour le médecin que la CSST aura choisi, ce qui va faire que le travailleur va être pénalisé si le médecin est négligent à soumettre son rapport; tout ce temps-là, le travailleur, lui, il attend. Vous comprenez?

M. Rioux: C'est une question qui est bonne.

Le Président (M. Beaulne): Alors, étant donné que c'est une bonne question...

M. Rioux: Je l'examine.

Le Président (M. Beaulne): Écoutez, si on l'examine...

M. Beaudet: Alors, on passe dessus, puis...

Le Président (M. Beaulne): ...on suspend l'adoption de l'amendement...

M. Beaudet: Non, non, il va nous revenir avec.

M. Rioux: Oui, oui.

M. Beaudet: Le contentieux va revenir avec. Alors, on suspend l'adoption.

Le Président (M. Beaulne): C'est ça que je dis.

M. Beaudet: O.K. Pas de problème.

Le Président (M. Beaulne): On suspend l'adoption de l'amendement à l'article 3.

M. Rioux: À l'article 4, il y a un amendement. On retire l'article 4.

Le Président (M. Beaulne): L'amendement, c'est de retirer l'article 4.

M. Rioux: C'est le même commentaire que tout à l'heure, hein.

M. Beaudet: Oui, on est d'accord avec ça.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'amendement est adopté. Donc, l'article 4 est retiré. L'article 5. Il y a un amendement là aussi.

M. Rioux: De retirer l'article 5. C'est le même commentaire qu'à l'article 3.

M. Beaudet: Oui, d'accord, c'est une concordance.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'amendement est adopté. L'article 5 est retiré. L'article 6.

M. Rioux: L'article 6. Remplacer l'article 205.1 par le suivant: «Si le rapport du professionnel de la santé désigné aux fins de l'application de l'article 204 infirme les conclusions du médecin qui a charge du travailleur quant à l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, ce dernier peut, dans les 30 jours de la date de réception de ce rapport, fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport complémentaire en vue d'étayer ses conclusions et, le cas échéant, y joindre un rapport de consultation. Le médecin qui a charge du travailleur l'informe, le cas échéant, sans délai du contenu de son rapport.

«La Commission peut soumettre ces rapports, incluant, le cas échéant, le rapport complémentaire au Bureau d'évaluation médicale prévu à l'article 216.»

Alors, la modification, M. le Président, vise à abroger les dispositions qui avaient pour objet de permettre au médecin désigné et au médecin du travailleur de concilier les opinions divergentes. Cette abrogation fait suite aussi à des craintes qui ont été exprimées en commission parlementaire qu'un tel processus puisse conduire à exercer des pressions indues sur le médecin du travailleur afin de l'amener à changer son point de vue. Il y en a qui disaient pendant la commission, par exemple, que le médecin de la CSST donnait des coups de fil au médecin du travailleur puis que ça l'influençait, ça l'intimidait, etc. On a tenu compte de ces remarques-là puis on l'a traduit par l'amendement qu'il y a devant nous.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Oui. J'aimerais peut-être avoir des éclaircissements – plus que des objections – de la part du ministre. Quand il dit: Le médecin qui a charge du travailleur l'informe. Informe qui? Le «l'» tient pour qui?

M. Rioux: Le travailleur. Ce qu'on a dit, c'est que le médecin traitant, s'il a besoin d'aller chercher de l'information – et on l'a dit tellement souvent – s'il a le goût de bonifier son diagnostic, il fait appel à une ressource, il juge bon de s'en servir ou pas. C'est lui qui pilote le dossier du malade, du patient. Et c'est ça que vise le projet de loi dans ses amendements, c'est de faire du médecin traitant celui qui pilote le dossier, qui l'administre et qui, autant que possible, gère et décide.

M. Beaudet: O.K. Comment a-t-il l'obligation d'informer le travailleur? Par téléphone, par télégramme, par lettre, par visite personnelle? Comment?

M. Rioux: Nous autres, on pense que l'éthique professionnelle, ça doit bien faire en sorte qu'un médecin qui s'occupe de quelqu'un l'informe de ce qu'il a l'intention de faire, où il est rendu dans l'évolution de son dossier.

M. Beaudet: Je comprends, mais comment? Par téléphone?

M. Rioux: Il peut le convoquer ou il peut l'appeler, il peut lui écrire. Ce n'est pas précisé.

M. Beaudet: Puis ça, vous tenez à ce que ça demeure vague?

M. Rioux: Moi, j'aimerais savoir, M. le Président, du député: dans sa tête, là, est-ce que le téléphone suffit? Est-ce que ça prend une lettre?

(16 h 50)

M. Beaudet: Je ne peux pas répondre, moi. Ça pourrait être juste un téléphone, mais vous devez avoir...

M. Rioux: Nous autres, on présuppose que ça va se faire.

M. Beaudet: O.K.

M. Rioux: On fait quand même minimalement confiance à des professionnels; vous connaissez ça.

M. Beaudet: Et là, vous ne mettez pas de limite en temps, là non plus.

M. Rioux: Non. Mais il y a un esprit là-dedans, par exemple. M. le Président, j'aimerais dire à mon collègue: Il y a un esprit là-dedans. On dit: «Le médecin doit faire rapport à son patient sans délai de ce qu'il a comme information.» Ça veut dire qu'il faut qu'il fasse quand même rapidement, il faut qu'il fasse diligence, et, s'il se conforme... Tu sais, il y a un esprit là-dedans.

M. Beaudet: Oui. Je voudrais juste...

M. Rioux: Peut-être pas la lettre à votre goût, là!

M. Beaudet: Je voudrais juste partager un peu avec le ministre, étant donné que j'ai une certaine compétence et un certain vécu là-dedans. C'est que les délais pour l'un ne sont pas nécessairement les mêmes délais pour l'autre, et, connaissant certaines négligences de certains professionnels, ça pourrait tarder, et ça va toujours se faire au détriment du travailleur accidenté, cette affaire-là. C'est ça qui est le grand problème.

Mais – on en a parlé fréquemment – la réintégration au travail, plus ça dure, plus c'est difficile, et moins on va mettre... Et je le sais, on parle de déréglementer et d'arrêter de mettre des mesures, mais, à un moment donné, moins on va mettre de balises, moins ça va être précis pour le médecin, plus il va l'oublier sur son bureau. Mais moi, je suis prêt à accepter ça, sauf que je ne suis pas sûr qu'on dessert bien le travailleur accidenté en ne mettant pas un... Si on dit «dans les 15 jours»... Tu sais, ce n'est pas compliqué, faire un téléphone. Si on parle du téléphone, ce n'est pas compliqué, hein, prendre ça, on lui donne 15 jours pour faire un téléphone, que ce soit lui ou la secrétaire qui l'appelle, d'ailleurs. La secrétaire peut le convoquer, elle peut le rejoindre: Écoutez, on a eu votre rapport. Ce n'est pas nécessaire que ce soit une relation de personne à personne entre le médecin et le travailleur, ça peut être la personne interposée, qui peut être la secrétaire.

M. Rioux: J'aimerais ça, M. le Président, faire partager aux membres de la commission une discussion qu'on a eue autour de ce sujet-là. C'est qu'on s'est dit: Si on met un délai, supposons trois semaines, O.K., notre crainte, c'est qu'il le prenne.

M. Beaudet: C'est vrai.

M. Rioux: C'était ça, ma crainte. Étant donné que je veux couper les délais et que je veux faire en sorte que ça aille le plus rapidement possible – parce qu'il ne faut pénaliser personne là-dedans, surtout le travailleur – on s'est dit: Si on met des délais et on balise ça de façon blindée, ma crainte, c'est que le professionnel de la santé puisse dire: Aïe! J'ai trois semaines devant moi, il n'y a rien qui presse; alors qu'on aimerait peut-être qu'il grouille un peu plus vite. Mais je comprends très bien aussi la réticence du député. Il connaît mieux sa confrérie que moi.

Le Président (M. Beaulne): Mais, M. le ministre, sur cette question-là, je comprends que c'est pour faciliter les délais et ainsi de suite, mais, advenant que, pour une raison ou pour une autre, le professionnel de la santé, pour des raisons qui lui sont propres, tarde un peu trop, quel est le recours à ce moment-là?

M. Rioux: Mais, si on lui fixe un délai... O.K., formulons l'hypothèse qu'on lui fixe un délai et qu'il ne le respecte pas; on est devant quoi, là?

M. Beaudet: C'est un problème, je suis conscient du problème.

M. Rioux: C'est un problème, ça.

M. Beaudet: On est aussi devant le même problème que si le médecin est parti en vacances quand il reçoit le rapport: il est parti pour trois semaines; bien, il ne l'aura pas avant trois semaines. Je suis conscient de ça aussi. Et, si on lui fixe un délai de 15 jours, il va dire: Moi, je n'étais pas là. Arrange-toi avec ton problème. Je suis très conscient de ça. C'est limitatif, c'est bureaucratique; on rentre dedans, là, j'en suis conscient. Je suis très conscient de la démarche, et je suis aussi conscient, connaissant ma confrérie, que si on dit: C'est 15 jours, ils vont appeler le 14e jour, probablement. Je suis aussi très conscient de ça. Il y en a plusieurs qui vont appeler au début, mais il y en a qui vont attendre jusqu'au 14e jour.

M. Rioux: Moi, je me suis dit...

M. Beaudet: Je n'ai pas la réponse, là.

M. Rioux: Bien honnêtement, je me suis dit: Bon, s'ils savent lire, ils vont comprendre. Et la loi, à ce moment-là, est claire: «sans délai du contenu de son rapport». «Sans délai», ça veut quand même dire quelque chose, ça, là; il n'y a pas de date là-dessus mais il y a quand même urgence d'agir, sans délai, puis le travailleur a besoin d'être informé.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil, M. le député de Saint-Laurent voudrait intervenir.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Je suis convaincu qu'on veut tous faire ça dans le but d'aider les gens. Je ne sais pas comment le faire, mais je veux juste attirer l'attention du ministre que la loi, une chose sur laquelle elle est bien claire, c'est que le lien de travail qu'a l'accidenté avec son employeur, ça, ça se termine à une date fixe, dépendamment du nombre d'employés. Je pense que c'est un peu ça la préoccupation du président, dire: J'ai un droit, je suis un travailleur accidenté, mon employeur est obligé de me reprendre soit après un an ou deux ans, dépendamment du nombre d'employés. Mais, si on ne trouve pas moyen d'obliger l'accélération de ça, les conséquences, on les connaît d'avance. C'est que ce travailleur-là, il y a quelqu'un qui, éventuellement, va en prendre soin, mais il n'y aura plus de lien d'emploi, son employeur ne sera plus obligé de le reprendre. Et ça, on sait ce que ça a comme conséquence. Comment est-ce qu'on peut faire pour aider ceux-là? Je prends pour acquis que ça va être les exceptions, que, règle générale, les professionnels vont répondre rapidement, quitte à donner un coup de téléphone, puis dire: Écoutez, on a eu vos résultats, voici ce qui arrive, on vous confirmera ça lors de votre visite.

Mais il faut toujours se souvenir qu'à chaque fois qu'il y a quelqu'un de délinquant... Je reprends l'exemple du ministre, si on met une limite puis le médecin, lui, il a décidé qu'il avait un congrès à Hawaï puis il est parti dans cette période-là puis, quand il revient, c'est sa fille qui accouche puis il ne s'en occupe pas encore. Mais, tout ce temps-là, notre travailleur accidenté, lui, il a une chose: le cadran est monté puis il va sonner telle date, puis à partir de ça, bonne chance, qu'on s'occupe de toi avant cette date-là. Comment est-ce qu'on peut faire pour mettre maintenant les objectifs qu'on veut, comment est-ce qu'on peut faire pour mettre toutes les chances possibles du bord de l'accidenté? Je pense que c'est ça notre objectif. On ne fait pas des lois pour nous autres, on fait des lois pour ces gens-là. Comment est-ce qu'on peut faire? Et je pense que je rejoins une des préoccupations que le président vient de se permettre d'interroger. Merci.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, je ne sais pas si c'est un acte de foi, mais je me fie un peu à la relation privilégiée qu'a le médecin avec son patient qui est le travailleur. Ça, ça m'apparaît être important sur le plan professionnel, sur le plan de l'éthique, sur le plan de la gestion d'un dossier, je trouve ça important. Si on met des dates, bien là, il y a des sanctions pénales. Est-ce qu'on veut s'embarquer là-dedans? C'est un problème. Moi, je vous le dis – puis ce n'est pas de la naïveté, hein – on a regardé ça sur tous les bords, puis je me suis dit: Est-ce qu'on en met, des délais, est-ce qu'on n'en met pas? Moi, je suis parti avec l'idée que c'étaient des professionnels, ces gens-là. Tu as un travailleur qui est accidenté, qui est en attente de soins, il veut guérir, on a des délais à respecter pour son retour au travail. Comme le disait le député de Saint-Laurent, il me semble que, quand on a un minimum de conscience, on exerce son métier convenablement.

Mais il est vrai que ça peut se produire, l'hypothèse soulevée par le député. Mais j'ai hésité, puis j'hésite encore, en tout cas, à introduire des délais puis rentrer là-dedans des sanctions pénales. C'est pour ça qu'on a bien pris soin de mettre dans le texte «sans délai».

(17 heures)

M. Cherry: Alors, M. le Président, je lance ça comme hypothèse au ministre: comment on pourrait, dans un cas où on reconnaîtrait que ça a pris trop de temps, ou c'était une expertise bien particulière – mettons ça comme vous voulez – est-ce qu'il y a moyen de ne pas comptabiliser ces périodes d'attente là dans la période maximum qu'a l'accidenté pour son lien de retour à l'emploi? Supposons que le médecin, on dit qu'on va lui donner deux semaines ou trois semaines, mais il ne le fait pas; ça peut être de la négligence comme ça peut être une bonne raison. Mais est-ce qu'on pourrait s'entendre que, quand on arriverait dans un cas comme ça, on va cesser de comptabiliser ces périodes-là pour ne pas que ça nuise au travailleur, parce que lui, il n'est que la victime? Ce n'est pas de sa faute, lui, il aurait souhaité l'avoir plus rapidement. Parce que – et je termine avec cette remarque-là, M. le Président – j'ai échangé récemment avec des gens de l'Institut de physiatrie du Québec – on sait que des physiatres, il n'y en a pas beaucoup au Québec – puis ils me disaient qu'à part les cas de la CSST – puis c'est ça qui nous occupe, ils les passent plus vite que les autres et puis les accidentés de la route, la SAAQ – pour quelqu'un qui était recommandé chez eux, dans certains domaines, à l'hôpital Notre-Dame, la période d'attente, c'est 27 mois – aïe! écoute! – avant qu'on commence à s'occuper de lui. Ce n'est pas drôle! Heureusement que les accidentés du travail, on les traite en priorité. Mais entre 27 mois puis... «C'est-u» six, sept, huit mois par rapport aux autres? Quand on est dans des situations comme celle-là, indépendante de l'accidenté mais dont il subit les conséquences, est-ce que c'est quelque chose d'envisageable dans l'esprit du ministre qu'on pourrait cesser... En d'autres mots, le cadran arrêterait dans son cas parce que ce n'est pas de sa faute, puis l'objectif, ce n'est pas de le pénaliser, tout en ne mettant pas de période pour ne pas s'emprisonner ou s'enferrer.

M. Rioux: Juste pour ma compréhension, j'aimerais demander au député: Dans son esprit, comme il disait tout à l'heure, on fait commencer le cadran à quel moment? Encore là, on revient à une date. À quel moment on décide de comptabiliser les jours ou les heures parce qu'un médecin...

Une voix: Au moment de l'accident.

M. Rioux: Au moment de l'accident?

M. Cherry: Non, non, mais je reprends. Le ministre dit: On ne veut pas leur donner deux semaines ou trois semaines parce qu'on sait que, dans certains cas, ils vont utiliser le maximum en disant: C'est ce que la loi m'oblige à faire, je le fais à l'intérieur du délai. Est-ce que, dans un cas comme celui-là, il n'y a pas moyen... Et je reviens toujours à l'objectif premier, c'est qu'en plus d'être accidenté il ne faut pas le pénaliser, il ne faut pas qu'on ajoute à son problème. Alors, pour ne pas ajouter, comment est-ce qu'on peut faire ça? Je vous avoue que je soulève un problème auquel je n'ai pas de... À moins que le ministre me dise que j'invente un problème qui n'est pas vrai. Mais, à partir du moment où l'accidenté, parce qu'il est dans le système qui dit qu'il doit être traité comme ça, a comme résultat qu'il va utiliser le maximum de la période de ses droits en attente de toutes sortes de décision, comment est-ce qu'on fait pour s'assurer que, parce que ce n'est pas de sa faute, le résultat net ne sera pas qu'il n'aura plus de lien d'emploi? Y a-t-il moyen ou s'il me dit que c'est une fatalité puis ça fait partie des travailleurs qui tombent entre les craques, puis «that's it, that's all», on les perd? «C'est-u» ça qu'il me dit ou s'il me dit qu'il est prêt à regarder quelque chose?

M. Rioux: M. le Président, moi, je ne suis pas fermé à toute suggestion heureuse qui nous permette d'améliorer le projet de loi puis le sort des travailleurs. Mais l'obligation d'informer, l'obligation pour un médecin d'informer son patient, ça relève de sa pratique professionnelle. Tu sais, j'ai cru ça, moi. Moi, je fais partie d'une corporation professionnelle puis il me semble que mon éthique puis ma façon de protéger le public, c'est de l'exercer convenablement. Alors, est-ce qu'on peut mettre dans la loi une contrainte de cette nature-là? D'abord, est-ce qu'on règle la question? J'essaie de voir si on va judiciariser davantage. Parce que, vous savez, j'ai une obsession contre ça. Je ne veux pas qu'on judiciarise, surtout pas. Mais, introduire un article créant l'obligation à un professionnel d'informer son patient, ça commence à être lourd, ça commence à être difficile, en tout cas. Ça veut donc dire que ceux qui disent que les professionnels de la santé ne sont pas des gens sérieux puis ceux qui sont venus se plaindre, là, ça accréditerait leur thèse. Ils ne sont tellement pas sérieux qu'on est obligé de leur mettre leur délai pour informer leur patient, ce qui est, à mon avis, l'enfance de l'art.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Je sais qu'on ne veut pas tomber dans des procédurites épouvantables, mais si on définissait ce qu'on entend dans notre esprit par «sans délai» et qu'on faisait appel au professionnalisme du professionnel qui sait qu'il ne peut pas rencontrer la définition qu'on en a et qui doit à ce moment-là référer à un autre médecin. Parce que, là, «sans délai», dans l'esprit du ministre, c'est très rapidement. Très rapidement, ça veut dire quoi, là? Ça veut dire dans les jours qui suivent, les heures. Notre collègue, lui, il dit: Le «sans délai», ça peut s'étirer beaucoup, ça dépend de l'esprit dans lequel on travaille dans ce secteur-là. Il n'y a pas moyen de le définir dans notre tête sans en arriver à avoir des pénalités qui suivent ça?

Le Président (M. Beaulne): Ça, c'est une bonne question, M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, si «sans délai», ça veut dire ce que ça veut dire, c'est que c'est dans les heures qui suivent immédiatement. Le médecin informe son patient, son travailleur qui est accidenté. Moi, je peux bien regarder ça, définir ce que ça veut dire, «délai», mais on aurait l'air brillant de dire ce que ça veut dire «sans délai». Ça veut dire immédiatement.

M. Beaudet: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Johnson, aviez-vous terminé? Juste à la remarque? Bon, M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Je comprends très bien le point de vue, puis l'élément qui a été soulevé par le député de Johnson, quand on dit «sans délai». Mais, si on finit par définir «délai» puis qu'on dit que «sans délai», c'est 15 jours, on va avoir la même date encore et on ne sera pas plus avancé. Puis je ne veux pas non plus mettre encore plus de règlements. On n'est pas plus avancé. Alors, il faut qu'on évite de mettre une date butoir parce qu'à ce moment-là on entre dans la procédurite puis dans du fonctionnarisme additionnel, dans de la réglementation additionnelle. Puis ce n'est pas ça qu'on cherche.

Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de demander, quand la commission reçoit les rapports, qu'elle malle les rapports au travailleur accidenté en lui marquant, au bas, une formule standard: Si, dans les cinq jours suivant la réception de cette lettre, vous n'avez pas eu d'appel de votre médecin, s'il vous plaît veuillez le contacter. Au moins, lui, il est informé. Bien, il n'est peut-être pas informé de la bonne façon – et je suis d'accord avec le ministre – ça devrait être le médecin qui appelle le malade ou l'accidenté.

Pardon?

M. Rioux: Répète ça.

M. Beaudet: La Commission reçoit le rapport. C'est envoyé d'abord avec un formulaire, le médecin consultant l'envoie à la Commission, puis l'envoie aussi au médecin traitant. Le médecin traitant a l'obligation de contacter le travailleur accidenté. Puis, ça m'apparaît normal; votre procédure m'apparaît être comme ça doit se faire. Mais, connaissant aussi les responsabilités des médecins, qui sont débordés, qui ont de l'ouvrage par-dessus la tête, bien, ça va traîner sur le coin du pupitre, ça va tomber en dessous, dans la filière 13, puis il va le retrouver trois semaines plus tard.

Par ailleurs, si, en même temps que la Commission reçoit le rapport du médecin consultant, elle en envoie une copie au travailleur accidenté, puis là, il y a une lettre standard que si, dans les cinq jours suivant la réception de cette lettre, il n'y a pas eu un contact avec son médecin traitant, de bien vouloir le contacter, lui, le médecin traitant, là, il va établir la connection. À ce moment-là, le médecin traitant va avoir l'obligation d'expliquer au travailleur accidenté les rapports, parce que les rapports, ça ne lui dit rien, lui. Ça m'apparaît normal que le travailleur accidenté, s'il se met à lui parler avec toutes sortes de termes médicaux, lui, il ne suivra pas.

Alors, le médecin traitant va pouvoir lui expliquer, suite au contact qui aura été fait par l'accidenté, à son bureau, la teneur des rapports transmis, alors que ça aurait été, normalement, au médecin d'appeler le patient. Et je conviens avec le ministre là-dessus: il a tout à fait raison. C'est ça, une relation d'un professionnel par rapport à son client ou à son patient. Sauf que, dans la vraie vie, ce n'est pas nécessairement comme ça que ça se passe.

Puis, je ne voudrais pas que le travailleur accidenté, encore une fois, par la négligence de qui que ce soit, soit encore la personne pénalisée. Alors, si on a un mécanisme, au moins, on prévient. Ce mécanisme-là va coûter, je ne sais pas, moi, 0,45 $ ou 0,50 $ à la Commission pour l'envoyer – un timbre – mais je sais que le travailleur va recevoir le rapport comme quoi le rapport du consultant a été transmis, votre médecin traitant l'a reçu, puis, si vous n'avez pas eu un appel de votre médecin traitant dans les cinq jours, appelez-le, vous. Alors, il n'y a pas la contrainte légale de dire: Si tu n'es pas venu en dedans de tel délai, on va avoir une prime. Ce n'est pas ça. Sauf que, là, le travailleur a l'obligation, lui, d'appeler son médecin si le médecin n'a pas eu le bon sens et l'éthique de l'appeler.

J'essaie de trouver un mécanisme par lequel on contourne cette situation-là sans encore plus réglementer. Je ne sais pas. Je cherche un trou, là.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

(17 h 10)

M. Rioux: Je voudrais souligner à mon collègue que, si on suit cette réflexion-là, supposons qu'on s'engage dans cette voie-là, la CSST sera donc appelée à faire l'ouvrage du médecin alors qu'on veut, dans le projet de loi, responsabiliser le médecin, lui dire: C'est toi, le responsable. On est devant un dossier médical. On est devant une personne humaine qui a le goût de s'en sortir. Alors, la CSST ferait le travail du médecin. Je trouve qu'on enfreint, à toutes fins pratiques, la relation privilégiée qu'il est censé avoir avec son patient.

M. Beaudet: Ce n'est pas tout à fait ça, M. le ministre. La CSST ne ferait pas tout à fait le travail du médecin mais elle mettrait le travailleur au courant en lui envoyant les rapports auxquels il a droit et le droit d'avoir accès. C'est à lui. Même s'il n'y comprend rien, il les recevrait et se dirait: Mon docteur a reçu les rapports; moi, je ne comprends rien là-dedans; je vais l'appeler parce qu'on me dit dans la lettre que si je ne l'ai pas appelé dans trois jours ou cinq jours... il faut que je l'appelle. Alors, il va l'appeler. Et là, par nécessité, le médecin va lui parler. Je n'ai pas la réponse, moi. Je cherche avec vous une piste de solution qui va faire, parce que je connais trop comment ça se passe dans les bureaux des docteurs. Ça finit sur le bureau, il y a 18 lettres, ça prend trois semaines, ça prend trois mois – aujourd'hui, je vais faire tout ça, je n'opère pas, je n'ai pas ci, je n'ai pas ça, je vais te «cleaner» ça, ça fait trois mois que c'est là – alors, je cherche une solution avec vous.

M. Rioux: Quand on a écrit ce texte et qu'on a parlé d'inscrire l'expression «sans délai», je me suis informé aux avocats qui travaillent avec moi. J'ai dit: Est-ce que c'est utilisé dans des lois, ça? Est-ce que ça se comprend bien, cette expression-là? Ils ont dit: Oui, c'est très courant; c'est une expression abondamment utilisé et tout le monde comprend ce que ça veut dire et le dictionnaire dit bien aussi ce que ça veut dire. Mais j'ai de la difficulté à voir la CSST faire le travail du médecin, du professionnel de la santé. Il y a des gens qui, certainement, se bidonneraient un peu du peu de confiance qu'on fait aux médecins en disant: On a tellement peu confiance en ce monde-là qu'on prend une précaution et on demande à la CSST d'être le chien de garde du médecin traitant pour qu'il achemine l'information à son patient.

M. le Président, je n'ai pas l'impression qu'on est sur la voie de l'évolution quand on fait ça. Et on n'est pas sur la voie de la responsabilisation des gens qui doivent travailler dans le dossier. Mais il reste que le débat est intéressant.

M. Beaudet: On est réalistes.

M. Rioux: Il y en a, hélas, il y en a certainement qui auraient peut-être tendance, si on mettait des délais, à les utiliser et même à les dépasser. Mais c'est une infime minorité, j'imagine, qui a des tendances semblables. Moi, ils ne sont pas venus me faire la preuve que les professionnels de la santé étaient des gens pas sérieux, qui ne s'acquittaient pas de leurs fonctions convenablement. Il y en a certainement qui ont peut-être été encrassés par le système quelque part, mais ce n'est pas de pratique courante.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de La Peltrie.

M. Côté: Merci, M. le Président. Je pense qu'il faut quand même avoir confiance au professionnel de la santé, le médecin qui a charge du travailleur. On sait que, de par la loi, le travailleur a le choix de son médecin. Alors, le travailleur aussi est en relation avec son médecin, normalement, donc il va questionner son médecin si vraiment il y a un retard qui se produit parce qu'il demeure en relation avec son médecin, parce que c'est lui qui l'a choisi, le médecin. C'est son choix. Donc, le médecin n'a pas avantage à ne pas répondre sans délai auprès de son client qui est le travailleur. Je trouve que c'est très bien attaché.

M. Rioux: D'ailleurs, M. le Président, j'aime beaucoup ce que mon collègue raconte. Parce que, dans la loi actuelle, l'expression «sans délai» est utilisée très souvent. Très souvent. Si on suivait la logique ou la suggestion que met de l'avant le député d'Argenteuil, ça veut dire qu'il faudrait revoir tous les articles du projet de loi, ou à peu près, et aussi de la loi. Alors, on s'embarque dans un processus qui serait assez complexe. D'autre part, c'est assez humiliant pour des professionnels de la santé de se voir inscrire dans une loi un droit de surveillance de la CSST sur leur pratique et, en plus, sur leur lenteur à transmettre l'information au premier intéressé. Comme le disait mon collègue de La Peltrie: Il l'a choisi, son professionnel. Il doit y avoir un lien de confiance entre les deux, tout au moins un lien de respect aussi entre les deux. C'est pour ça que j'hésiterais beaucoup à m'aventurer sur une piste comme celle-là.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: M. le Président, je peux comprendre le ministre. Je ne veux pas insulter personne et je veux respecter les responsabilités et les ordres professionnels. Mais, sur le terrain, dans le quotidien, il y a des gens qui – permettez-moi l'expression – tombent entre les craques parce qu'il y a quelqu'un à quelque part qui n'a pas fait ce que nous, les législateurs, on souhaitait qu'il fasse. Mais c'est parce que ce n'est pas celui qui commet la faute qui en subit les conséquences, c'est le travailleur. Alors, quand je lis ce texte-là – j'essaie des pistes avec le ministre – il dit: «dans les 30 jours de la date de la réception de ce rapport, fournir à la Commission...» Est-ce qu'il est pensable que la Commission pourrait, elle, fournir aussitôt qu'elle la reçoit cette information-là au patient? Peut-être que ça va lui faire deux fois, si son médecin lui a dit. Mais, si son médecin ne lui a pas dit, on s'assurerait, comme législateurs, qu'il sait qu'il y a eu une décision de rendue, parce que la Commission doit l'informer. Ça, c'est la première chose, au moins pour s'assurer qu'il le sait. Comme je le dis, si le médecin lui a dit, ça fait la deuxième fois; mais, si le médecin ne lui a pas dit, là, au moins, il apprend c'était quoi.

Dans un deuxième temps, et c'est peut-être encore plus délicat, pour s'assurer qu'on veut bien clarifier ce qu'on veut dire: et, le cas échéant, y joindre «un rapport complémentaire en vue d'étayer ses conclusions». Par expérience, je dis au ministre que, quand on ne précise pas ce qu'on entend par «un rapport complémentaire», si la Commission n'indique pas au professionnel ce à quoi on s'attend, c'est ça qui fait que, quand la Commission reçoit le rapport, la Commission le juge incomplet; et là on recommence; puis, là, ravoir une date pour une autre rencontre avec le médecin, parce que... Comment va-t-on faire pour s'assurer que, quand cet exercice-là aura été fait, ça sera clair dans l'esprit du médecin traitant à quoi s'attend la Commission pour que ça réponde à ça? On va dire qu'un délai raisonnable, ça serait deux semaines, immédiat. Il l'appelle au téléphone, et il lui envoie ça par écrit et il envoie la copie à la Commission. Quand la Commission décide de le traiter, elle dit: Ce n'est pas complet. Il manque encore quelque chose. Docteur, vous n'avez pas fait ça comme il faut. Bien, là, il dit: Si vous exigez ça, moi, il faut que je revoie le patient. Garde, mettez-le donc sur l'agenda pour que je le revoie. Ça prend quoi? Une couple de semaines encore.

Mais, pendant tout ce temps-là, c'est le gars qui est ballotté. Est-ce qu'il n'y a pas moyen qu'on profiterait de ça pour dire: Quand on veut avoir un rapport de consultation, puis un rapport complémentaire, c'est quoi un rapport complémentaire qui ferait que ça, une fois, «one shot deal», et la Commission est satisfaite de ça? Y «a-tu» moyen de le dire le au médecin traitant, ce qu'on attend? J'ai eu des rencontres avec des médecins qui nous reprochaient: Vous voulez que je vous fasse un rapport complet. Vous avez un espace grand comme ça sur le formulaire. Mon Dieu! Dites-nous le avant. Ne faites pas attendre le monde pour ça. On va agrandir l'espace et vous écrirez ce que vous avez à écrire. Mais, tout ce temps-là, ils ont des bonnes raisons, il y quelqu'un qui paie pour au bout et c'est le patient. Y «a-tu» moyen qu'on profiterait de l'occasion pour dire: Qu'est-ce qui serait satisfaisant pour la Commission et que le médecin ne pourrait pas éviter? Je lance ça.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

(17 h 20)

M. Rioux: Définir un rapport complémentaire, dans la loi, définir ce que serait un rapport complémentaire. Je comprends bien ce que vous dites, hein? Un rapport complémentaire. Deuxièmement, on pourrait y introduire également une obligation faite à la Commission de dire au médecin d'informer son patient. Attends un peu! On est en train de vouloir intégrer à la loi un code de déontologie médicale. J'ai l'impression que, si on s'en allait trop avant dans cette voie-là, il y en a qui se chargeraient de nous ramener à l'ordre. Je pense à l'Office des professions ou encore à la Corporation des médecins. Je fais juste vous dire ça comme ça. Est-ce que c'est vraiment dans la loi?

Le Président (M. Beaulne): Ça va, M. le député de Saint-Laurent?

M. Cherry: C'est parce que je reviens toujours à mon approche. Le but de cet exercice-là, c'est de faciliter l'identification des besoins qu'a cet accidenté-là pour qu'il réintègre le marché du travail. On ne siège pas ici pour se faire plaisir aujourd'hui. On peut trouver d'autres occasions pour faire ça. Si c'est ça, notre but, là, c'est que l'accidenté, on le prenne en charge et que le plus rapidement possible on identifie tous les soins dont il a besoin, tout ce que ça fait pour qu'il réintègre le plus vite possible son ancienne job. On est là-dedans. Y «a-tu» moyen qu'on regarde ce qu'on peut faire pour s'assurer que notre objectif est atteint? Et, je vous le dis tout de suite, si j'ai le choix entre ne pas froisser la susceptibilité de certains professionnels puis les travailleurs qui tomberaient entre les craques parce qu'il n'a pas bien fait sa job, moi, je vous le dis, mon choix, il est tout de suite du côté du travailleur.

M. Rioux: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Dans ce projet de loi là, l'accent est mis sur la valorisation du médecin traitant dans son rôle comme professionnel de la santé auprès des accidentés du travail. À mon avis, il me semble que, si j'étais un médecin, ça serait à moi de décider si je dois demander un rapport complémentaire. C'est moi, le professionnel. C'est moi qui travaille avec le patient. C'est moi qui connais son cas. Je l'ai examiné. Si j'apprécie, si j'évalue que j'ai besoin d'un rapport complémentaire, c'est à moi, comme professionnel, d'apprécier cette chose-là. On ne peut pas demander ça à la CSST, je vous le dis; sinon, moi, je me dis, l'obligation d'informer, ça fait partie, ça, de la pratique médicale, qu'un médecin informe son patient sur son état, sur l'évolution de son dossier, sur ce qu'il a eu comme information supplémentaire quant au traitement possible à lui appliquer.

Moi, j'ai beaucoup de misère, je vous le dis, strictement au plan professionnel, à embarquer dans un scénario semblable. Puis c'est juste une question d'éthique. Moi, je suis animé par ça, et on s'est engagé à valoriser le rôle du médecin traitant. On n'ira pas l'installer avec des béquilles, il me semble, sans jeu de mots.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Même les médecins en ont besoin, si je comprends bien.

M. Beaudet: À l'occasion. C'est ça, le progrès. Ha, ha, ha!

Une voix: On l'a, on l'a, la solution. Ha, ha, ha!

M. Rioux: Alors, M. le Président, on est au niveau ici de la déontologie, au niveau de l'éthique, et j'ai de la difficulté à inclure dans une loi comme celle-là des dispositions qui auraient pour effet d'amener la CSST à définir ce que veut dire un rapport supplémentaire. Non. Là, là, moi, je reconnais au député de Saint-Laurent un énorme mérite et je sais qu'il a, tout comme moi et comme tout le monde ici, l'intérêt du travailleur, pour ne pas le pénaliser, mais d'autre part on ne peut pas dire au médecin: Vous allez pratiquer ça. Désormais, vous allez pratiquer de cette façon-là, cette profession.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: M. le Président, j'apprécie, là, ce qu'on vient de débattre. Il y a un seul élément sur lequel j'accroche, là, puis je répète au ministre: Je n'ai pas la réponse. Je ne l'ai pas, j'essaie de trouver une réponse qui va faire que le but que nous recherchons tous, tant que nous sommes, qui est de favoriser le travailleur accidenté pour qu'il puisse réintégrer son travail le plus rapidement possible... Il ne faut pas, dans cette démarche-là, tout en étant idéaliste de penser à l'éthique médicale et au code de déontologie, il ne faut surtout pas mettre de côté la réalité des choses.

Tantôt, vous avez soulevé le commentaire: Il y en a quelques-uns. Si ces quelques-uns là ou ce quelqu'un là, en l'occurrence, c'est votre docteur, vous allez en manger une bonne parce que votre docteur, ça s'adonne qu'il est négligent. Vous ne voulez pas mettre une loi qui va le contraindre, j'accepte ça aussi, c'est pour ça que je vous dis: Je n'ai pas la réponse. La réponse c'est: Bien, on met une loi puis, si tu ne le fais pas, tu vas avoir une pénalité. Bon, ce n'est pas là qu'on veut aller.

Je cherche la solution avec vous autres, je n'ai pas la réponse. Puis je sais qu'en demandant à la Commission de faire parvenir le rapport ou les rapports qu'ils ont reçus – que la Commission a reçus – au travailleur accidenté, et avec une lettre ci-jointe lui demandant de contacter son médecin traitant s'il ne l'a pas fait dans les cinq jours qui suivent – si le médecin ne l'a pas appelé – c'est à lui de l'appeler, au moins, il va le réveiller. Je me dis: Est-ce que justement ce quelqu'un qui est négligent... Puis que je ne veux pas, comme dit si bien le député de Saint-Laurent, qu'il tombe entre les deux chaises, celui-là. Mais c'est celui-là qui va payer, au bout de la ligne, celui qui tombe entre les chaises, pas celui qui est assis dessus. Et c'est ça que je cherche avec vous comme solution et je ne l'ai pas.

J'ai compris tantôt que... puis j'accepte et j'admets d'emblée que la responsabilité est au médecin traitant d'appeler son malade. Je peux vous le dire, j'ai vécu personnellement un incident dans ma famille, où un membre de ma famille a été opéré pour une intervention grave. Je peux vous dire que ça fait déjà 10 jours qu'on essaie de se rejoindre, le médecin et moi, parce qu'il veut me donner des détails sur l'intervention. Je pourrais très bien l'appeler à 11 heures le soir chez lui. Ça ne me semble pas trop, trop correct. Je veux lui laisser son break à lui. Mais on essaie de se rejoindre dans la journée, là, mais on n'est pas capables. Ça fait 10 jours au moins.

Alors, je me dis que peut-être ça va arriver dans le cas du travailleur accidenté, pour toutes sortes de raisons: lui est parti pour un traitement de physiothérapie, il se fait appeler, bon, le docteur l'appelle et il est parti voir... puis finalement il ne le rejoindra pas et il va se tanner et... Bon, écoute, appelle-le la semaine prochaine. Vous savez combien le temps passe vite. Puis, tout ce temps-là, c'est lui qui va payer pour, tandis que, si la commission lui envoyait une lettre, bien, lui, il aurait la possibilité de dire: Dans cinq jours, s'il ne m'a pas appelé, moi, je vais l'appeler.

Alors, je me dis: Au moins on se garde un mécanisme par lequel on ne tombera pas nécessairement entre deux chaises. Est-ce que c'est l'idéal? D'emblée, je dis au ministre: Non. D'emblée, je vous dis: Non. Mais est-ce que c'est pratique et réaliste de penser aussi que le médecin, dès qu'il va recevoir les rapports, va pogner le téléphone, puis va appeler le travailleur accidenté? Ma réponse, encore une fois, M. le Président, au ministre, c'est «non». Quand j'ai ces réponses négatives, je me dis: Trouve-moi un moyen. C'est un pis-aller, j'en conviens, ce n'est pas ça, la réponse, mais c'est la moins pire des solutions, qui ne sera pas contraignante sur le plan des délais. Puis, les délais, j'en conviens, quand on dit dans les plus brefs délais, c'est les plus brefs délais. Dès que tu as reçu le rapport, tu pognes le téléphone, t'appelles. Mais on le sait que ce n'est pas ça qui se passe dans la réalité.

C'est ça que je cherche, un moyen. Ça peut être une avenue, puis il y en a peut-être d'autres. Ça en est une que je mets de l'avant, mais il y en a peut-être 10 autres. Je ne l'ai pas, la bonne.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, voulez-vous réagir?

(17 h 30)

M. Rioux: Oui, oui. M. le Président, l'obligation d'informer, ça n'a pas pour effet de retarder l'envoi du dossier au BEM et ça n'a pas pour effet de retarder le processus. Ce n'est pas ce que j'évalue. Je me répète. Le devoir et l'obligation d'informer – l'obligation qui est faite au médecin d'informer son patient – ça n'a pas pour effet de retarder l'envoi du dossier au BEM, puis le traitement rapide du dossier. Dans ma tête, ça va de soi. C'est normal que ce soit fait comme ça.

Quant au rapport complémentaire, si je me remémore un tout petit peu ce qu'on disait en commission parlementaire, on disait: Le rapport complémentaire, ça a pour effet de permettre au médecin traitant d'étayer son opinion; ça permet de bonifier son diagnostic ou son opinion médicale, d'ajouter des notes personnelles au dossier – il y a des gens qui sont venus nous dire des choses semblables – et de soumettre un rapport de consultation qu'il a fait. Si on s'en va dans cette voie-là, on va devoir négocier avec les fédérations médicales. Il va falloir définir nos termes.

M. Beaudet: Peut-être que le ministre va m'éclairer, là. Je ne sais pas pourquoi on va aller négocier avec les fédérations médicales parce que la commission va envoyer une copie des rapports au travailleur accidenté, lui demandant: Si vous n'avez pas eu de nouvelles de votre médecin dans les cinq jours qui suivent, veuillez le contacter. Pourquoi est-ce qu'ils vont aller voir la fédération? On n'a pas besoin d'ajouter à ça, là.

M. Rioux: On m'a demandé tout à l'heure, on m'a posé la question s'il n'y aurait pas lieu de définir dans la loi ce qu'est un rapport complémentaire. Alors, si vous retirez ça, tant mieux.

M. Beaudet: Bien, on n'a pas fait d'amendement là-dessus. C'est un éclaircissement que le député de Saint-Laurent cherchait, puis il avait raison.

M. Rioux: Non. Mais, enfin, on était dans le débat, là.

M. Beaudet: Oui, oui.

M. Rioux: Ce que je sais aussi, c'est que l'expression «sans délai», on l'a à peu près dans 10 articles du projet de loi et de la loi, puis ça fait l'affaire.

M. Beaudet: Je suis d'accord avec le fait de «sans délai» sauf que, dépendant du contexte où ça se présente, des fois le «sans délai»... On n'argumentera pas là-dessus, le «sans délai», dans le cas présent, a une importance capitale sur le fait que le travailleur va avoir l'information au bon moment parce que le médecin a, j'en suis conscient, l'obligation de transmettre cette information-là au travailleur accidenté. Mais, advenant que c'est quelqu'un qui est négligeant, bien, le travailleur va tomber entre les chaises. Puis, quelle va être sa première intervention où il va en prendre connaissance? C'est quand un médecin du BEM va l'appeler puis dire: Viens te présenter ici, on veut te voir. "Some" contact! Là, il va prendre le téléphone, il va appeler son médecin traitant. Aïe! Qu'est-ce qui se passe? Ils m'ont appelé. Ils veulent avoir mon dossier, puis...

Là, ça va être l'enfer, alors qu'on aurait pu prévenir cette situation-là en l'informant. Il a reçu ses rapports chez lui, il en prend connaissance mais ils ne les comprendra peut-être pas tous, là, dépendamment de l'individu, mais il va avoir la petite lettre lui disant: «Si, dans cinq jours, tu n'as pas eu de rapport de ton médecin, tu n'as pas eu de contact avec ton médecin, appelle ton médecin traitant». Et là le médecin traitant va pouvoir lui expliquer c'est quoi, ces rapports-là: Oui, j'ai reçu le rapport d'orthopédiste ou du physiatre ou de je ne sais pas qui, puis ça veut dire ça, puis je pense qu'il y a telle affaire, puis il faut que tu continues tes traitements. Maintenant, s'il y a d'autres choses, on se reparle. Puis j'ai reçu un appel du BEM aujourd'hui. Oui, c'est correct. Le BEM va évaluer l'affaire.

Ça va rassurer le travailleur accidenté. Au lieu de toujours le laisser sur la corde raide tout le temps, là, on va l'asseoir un petit peu et on va dire: Aïe. Décroche, là. On te suit.

Une voix: On s'occupe de toi.

M. Beaudet: C'est ça. Exactement. On s'occupe de toi. C'est ça qu'il va avoir comme sensation. Puis je ne pense pas que ce serait une charge additionnelle exagérée que de demander à la commission, lorsqu'elle reçoit les rapports, qu'elle en fasse une copie, puis qu'elle les envoie au travailleur accidenté avec la même petite lettre qui est toujours glissée dans l'enveloppe. À ce moment-là, je pense qu'on va... J'essaie de trouver une solution par laquelle le travailleur accidenté ne tombera pas entre deux chaises. Vous avez raison quand vous dites que c'est peu de cas. C'est vrai. Mais n'y en aurait-il qu'un seul cas, c'est un cas de trop. Si on peut l'éviter, tentons de prendre les moyens pour l'éviter. C'est tout ce que je cherche.

M. Rioux: Je regarde ça. C'est un manque.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Johnson, ça va?

M. Rioux: On va lever une minute.

Le Président (M. Beaulne): Alors, je suspends pour une minute.

(Suspension de la séance à 17 h 35)

(Reprise à 17 h 46)

Le Président (M. Beaulne): Nous allons reprendre nos travaux. Alors, M. le ministre, allez-y donc, suite à notre petit ajournement, là, notre petite suspension. Avez-vous des commentaires à formuler?

M. Rioux: Alors, M. le Président, l'article 215 de la loi étant assez clair, je pense que ça règle le problème qui a été soulevé par mon collègue d'Argenteuil, d'une part, et, d'autre part, sur le plan administratif, on peut exactement faire ce que le député souhaite; ce n'est pas utile de le mettre dans la loi.

M. Beaudet: C'est déjà dans le 215.

M. Rioux: C'est déjà dedans.

M. Beaudet: Sauf qu'il faudrait ajouter la lettre demandant au travailleur accidenté de contacter son médecin traitant si, dans les cinq jours suivant la réception, il n'a pas eu d'appel. Alors, si vous voulez, on ajoute une feuille avec les rapports, c'est tout.

M. Rioux: Mais ça, c'est administrativement. Je n'ai pas d'objection à ça, moi, aucune objection.

M. Beaudet: Bien non, parce que là on voit bien qu'à 215 ça confirme.

M. Rioux: Parfait. Très bien.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement à l'article 6? Oui, M. le député.

M. Beaudet: Oui. Au deuxième alinéa de l'amendement «La Commission peut soumettre...», on sait qu'en termes de loi «peut», c'est «doit». Mais est-ce que, dans le cas présent, «peut» veut dire «doit»? Ou s'il fait comme il le veut?

(Consultation)

M. Rioux: Bien «peut» c'est «peut», ce n'est pas «doit».

M. Beaudet: Mais en loi le «peut» c'est «doit».

Le Président (M. Beaulne): Mais, M. le ministre, le député a raison. J'ai entendu souvent, moi, dans les travaux parlementaires, les commentaires de ministres, quelle que soit la couleur politique du parti au pouvoir, là, dire que «peut» ça voulait dire «doit». Alors, ça serait peut-être bon de le préciser.

M. Beaudet: Il n'y aurait pas quelqu'un du contentieux, ici, qui pourrait nous éclairer? «Peut» c'est «doit»? Non?

M. Tremblay (Yves): Dans ce cas-là, «peut» c'est «peut» parce que vous avez un article qui est tout à fait l'équivalent, l'article 212.1 qui, lui, dit: «...la commission soumet ces rapports...». Alors, soumet, c'est «doit» soumettre.

M. Beaudet: Alors, on y va avec «peut».

Le Président (M. Beaulne): Pardon, pour les fins de l'enregistrement, pouvez-vous vous identifier?

M. Tremblay (Yves): Yves Tremblay, des services juridiques de la CSST.

M. Rioux: Alors, M. Tremblay, répétez donc ça, là.

M. Tremblay (Yves): Oui. C'est qu'en fait l'article 205.1, ça, c'est les cas où l'expertise est faite à la demande de la Commission. Et l'équivalent, qui est l'amendement suivant, l'article 212.1 – la formulation est strictement la même – ce sont les cas où l'expertise est faite à la demande de l'employeur. Dans le cas où l'expertise est faite à la demande de la Commission, on dit que la Commission peut soumettre ces rapports. L'objectif, c'est de permettre à la commission d'apprécier si... l'objectif de l'article et la raison pour laquelle on a indiqué un «peut», là, plutôt qu'un «doit», c'est de laisser à la commission le pouvoir d'apprécier s'il y a suffisamment de divergences entre les conclusions des médecins pour les soumettre au Bureau d'évaluation médicale.

Parce qu'il peut arriver certaines situations où la commission considère que, entre ce que le médecin désigné par la Commission amène comme expertise et ce que le médecin traitant amène comme expertise, il n'y a pas vraiment matière à pousser la contestation plus loin laisse tomber. C'est ce qu'on appelle, nous, dans notre jargon, l'effet boîte aux lettres. Dans le cas où l'expertise se fait à la demande de la Commission, on veut que la Commission puisse apprécier s'il y a toujours matière à envoyer des conclusions médicales qu'elle considère divergentes auprès du Bureau d'évaluation médicale. La Commission pourrait, carrément, se ranger aux conclusions du médecin traitant, considérer qu'il n'y a pas matière à envoyer ça au BEM et, ensuite, elle est liée par l'opinion du médecin traitant.

Dans le cas de l'article 212.1, ce sont les cas où l'expertise est faite à la demande du médecin de l'employeur, et là, dans ces cas, c'est sûr que c'est l'effet boîte aux lettres. On n'a pas d'appréciation, l'expertise a été faite à la demande de l'employeur, s'il y a des conclusions médicales divergentes entre l'opinion du médecin de l'employeur et l'opinion du médecin du travailleur, on les envoie carrément au BEM, et le BEM voit à rendre un avis sur le problème et cet avis-là lie la CSST.

Alors, dans le cas de 205.1, c'est un «peut» qui est un «peut» vraiment pour le bon motif, pour permettre d'éviter des contestations et faire en sorte que...

(17 h 50)

M. Rioux: ...

M. Tremblay (Yves): Oui, c'est ça, déjudiciariser. La CSST est toujours liée par l'opinion du médecin traitant.

M. Beaudet: Oui. Sauf que ça me laisse un petit arrière-goût d'inquiétude, au sens où, s'il y a un rapport que vous ne voulez pas soumettre pour x ou y raison, vous ne l'enverrez pas. Alors qu'on sait que, en justice, la poursuite est obligée de transmettre toutes les informations au défendeur. Dans ce cas-ci, vous ne les transmettriez pas nécessairement. Ce serait au bon vouloir des gens de la Commission, s'ils veulent le transmettre ou pas. Alors, vous lui enlèveriez des éléments de défense possible, dans une situation du genre.

M. Tremblay (Yves): Mais il n'y a pas vraiment de contestation puisqu'on est lié par l'opinion du médecin traitant. Et on n'envoie pas ça au BEM. Le BEM n'a pas à rendre d'avis, puisqu'on dit: O.K., le médecin traitant, on considère que les divergences étaient tellement marginales entre le rapport de notre expert et le rapport du médecin du travailleur qu'on est prêt à se ranger à l'opinion du médecin du travailleur et à être lié dans nos décisions avec cette opinion-là. Alors, il n'y a pas vraiment matière à envoyer ça auprès du BEM; il n'y a pas de débat à trancher dans une situation comme celle-là.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de La Peltrie.

M. Côté: Oui. Encore sur le «peut», oui. Je sais que, dans les lois, «peut» peut vouloir dire parfois «doit». Et le «doit» de tantôt, c'est vraiment «peut». Mais, dans le premier paragraphe, lorsqu'on dit: «Ce dernier peut...», là, ce dernier «doit», dans les 30 jours... Là, le «peut» doit vouloir dire «doit».

Une voix: Oui. Comme «sans délai».

M. Tremblay (Yves): Non. Pas vraiment, dans ce cas-là, parce qu'en fait, encore là, on laisse au professionnel, c'est-à-dire au médecin du travailleur, la discrétion de décider si, oui ou non, il y a matière à compléter son rapport. Il pourrait juger que, lui, son rapport est complet et qu'il n'y a pas matière à le compléter; comme il pourrait juger qu'il y a besoin ou qu'il n'y a pas besoin d'un rapport de consultation additionnel. Alors, c'est vraiment un «peut».

M. Rioux: C'est lui qui décide.

M. Tremblay (Yves): C'est lui qui décide. C'est lui qui traite le patient. C'est son patient.

M. Beaudet: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Si j'ai bien compris votre intervention, Me Tremblay, ça veut dire que: Je suis le médecin traitant puis je vous ai transmis un rapport; c'est un rapport qui n'est pas très favorable pour le travailleur, exemple. Puis vous, vous avez obtenu une expertise, puis ce rapport-là, il est favorable au travailleur. Est-ce que cette phrase-là pourrait vouloir dire que, étant donné que c'est un rapport qui est favorable au travailleur, qui est contraire à celui du médecin traitant, vous pourriez ne pas le soumettre au BEM? Ça «veut-u» dire ça?

M. Tremblay (Yves): C'est laissé à l'appréciation de la CSST.

M. Beaudet: Je ne peux pas accepter ça. Vous avez pris un expert qui donne un rapport favorable au travailleur; mais, parce que vous dites que ça ne cadre pas avec le rapport du médecin traitant, qui n'est pas nécessairement très favorable au travailleur: Je ne l'envoie pas, celui-là. Donnez-moi toutes les preuves, si vous voulez que je sois capable d'apporter un jugement éclairé, donnez-les moi toutes.

Puis là, vous vous permettez de ne pas toutes les transmettre. Et c'est pour ça que le «peut» m'inquiète. Normalement, je n'aurais même pas posé la question parce que «peut», pour moi, c'est «doit», en loi. Mais je me rends bien compte que, dans votre cas, ça ne l'est plus.

M. Tremblay (Yves): Non, dans ce cas-là, c'est un «peut».

M. Beaudet: Alors, enlevez-le, puis mettez «soumet». D'emblée, vous allez soumettre les rapports.

M. Tremblay (Yves): Mais, moi, j'avoue que le cas que vous soumettez là, je ne sais pas si c'est un cas qui peut se produire.

M. Beaudet: Non, hypothétique. Mais il peut se produire.

M. Tremblay (Yves): Mais je pourrais vous dire que, règle générale, c'est dans 99 % des autres cas...

M. Beaudet: L'inverse.

M. Tremblay (Yves): Oui, c'est ça.

M. Beaudet: C'est le 1 % qui m'inquiète.

M. Tremblay (Yves): Mais, encore là, je ne sais pas si le 1 % est un 1 % qui existe, là.

M. Beaudet: Je ne le sais pas.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de La Peltrie.

M. Côté: J'aimerais qu'on m'explique, là, lorsqu'on a besoin d'un professionnel de la santé dans un dossier où on a besoin d'une expertise, puis que c'est demandé par le médecin à charge du travailleur, puis qu'une fois que le rapport est produit c'est au médecin de juger s'il va le faire parvenir à la CSST ou pas.

Alors, lorsqu'on dit «peut, dans les 30 jours [...] fournir à la Commission»...

Une voix: ...

M. Côté: Oui. Les détails du rapport.

M. Beaudet: Je suis d'accord avec vous.

M. Côté: Là, j'ai de la misère à comprendre. Il faudrait qu'on m'explique davantage.

M. Beaudet: Oui. Je suis d'accord avec le député de La Peltrie.

M. Côté: Parce que, là, c'est un spécialiste qui a fait une expertise sur un cas où il y avait probablement contestation à quelque part. Donc, moi, je dis qu'il doit, dans les 30 jours de la date de réception de ce rapport, le fournir à la CSST.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, j'écoutais attentivement le député d'Argenteuil mais, si je me rendais à sa demande et que j'incluais, pour régler des cas d'exception, une disposition dans la loi qui oblige la Commission à envoyer tous ses rapports au BEM, là, on tomberait dans le cercle qu'on veut éviter. Ce que les gens veulent, ce n'est pas ça qu'ils veulent, qu'on envoie le monde au BEM, ce n'est pas ça l'orientation.

M. Beaudet: Oui, mais, le cas échéant, c'est celui que vous envoyez au BEM, vous ne les envoyez pas tous au BEM. Celui qui va y aller, vous transmettez tout le dossier au complet.

M. Rioux: Mais vous êtes conscient qu'on va soumettre inutilement un paquet de dossiers au BEM qui n'ont pas d'affaire là, pas du tout. Il faut comprendre ça aussi. Puis là, on judiciarise encore une fois, ce que vous ne voulez pas, vous non plus.

M. Beaudet: Non, je ne vois pas de justice là, je ne vois pas de judiciarisation, on fait juste transmettre tous les rapports de consultation qu'on a eus. Je ne judiciarise pas, j'envoie les rapports qui concernent le travailleur accidenté. Donnez-les-moi, si vous voulez que je porte un jugement ou une décision éclairée, donnez-moi tout ce qu'il faut. Tu sais, il faut bien se souvenir de ce que le président Johnson disait, dans les années 1968 et 1969 – vous vous souvenez de la guerre du Viêt-nam – il disait: «Feed me the right information, I will make the right decision». Puis là, vous voulez que «they make the right decision but without informations». Ça ne marche pas.

M. Rioux: Mais, M. le Président, la question qui est soulevée nous amène à nous poser la question suivante: Est-ce qu'on préfère régler le dossier des travailleurs à partir de l'avis du BEM ou à partir de l'opinion du médecin traitant qu'on privilégie dans la loi? C'est ça que je veux savoir.

M. Beaudet: Ce n'est pas de l'avis du BEM, c'est avant le BEM, ça.

M. Rioux: Est-ce meilleur? M. le Président, je veux que le député et moi, on se comprenne bien. On veut déjudiciariser le système, est-ce qu'on va mettre dans la loi des dispositions qui nous permettent de judiciariser davantage? Ce n'est pas ça, notre projet.

M. Beaudet: Je ne veux pas ça.

M. Rioux: Puis ce n'est pas ça nos objectifs. Mais, M. le Président, je demande au député d'Argenteuil de réfléchir en même temps avec moi.

M. Beaudet: Oui, oui.

M. Rioux: On va obliger la Commission à soumettre un paquet de cas au BEM inutilement et on va judiciariser. Lorsqu'on veut simplement prendre l'opinion du médecin du travailleur, ce n'est pas compliqué, ça. On oublie que, dans tel cas, le médecin de la CSST va parler au médecin du travailleur; ça se parle, ce monde-là. Puis ça, c'est dans le cadre de la nouvelle approche médicale dont on a parlé pendant la commission parlementaire, puis on a entendu des gens venir s'exprimer là-dessus.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Côté: Je suis d'accord avec ce que vient d'exprimer le ministre à l'effet que... je pense que la CSST n'a pas à fournir au BEM tout ce qu'elle reçoit en matière d'expertises. Mais, par contre...

M. Beaudet: Tous les cas ne vont pas au BEM.

M. Côté: ...bien oui, tous les cas ne vont pas au BEM. Donc...

M. Beaudet: Ça, je suis d'accord avec ça.

M. Côté: Oui.

M. Beaudet: Mais, celui qui va au BEM, donne-lui le dossier complet.

M. Côté: Donc, dans certains cas, il va le fournir, selon le besoin.

M. Rioux: Et d'ailleurs, M. le Président, s'il y a quelque chose qui a fait l'unanimité parmi la députation libérale et péquiste, c'est lorsqu'on a dit: Compte tenu du discours entendu sur le BEM, on préfère de beaucoup voir régler nos cas de CSST et de notre travailleur à partir de l'opinion du médecin traitant, et de son opinion étoffée par surcroît; on a plus confiance en ça qu'au BEM. C'est ça que les gens sont venus nous dire; moi, j'en ai tenu compte dans mes amendements.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Beaudet: ...M. le Président. L'article 206...

Le Président (M. Beaulne): Oui.

M. Beaudet: ...dans la loi actuelle: «La Commission peut soumettre au Bureau d'évaluation médicale le rapport qu'elle a obtenu en vertu de l'article 204.» On a juste à ajouter, à «204», «l'article 205.1», puis c'est cuit, ça finit là, parce que 205.1, c'est les cas qu'on soumettra au BEM. C'est tout. Ceux qu'on ne soumet pas au BEM, on n'envoie rien.

M. Rioux: Ça ne fait pas redondant, ça?

(18 heures)

M. Beaudet: Bien, l'article 206 dit bien qu'on soumet au Bureau d'évaluation le rapport obtenu en vertu de 204.

M. Rioux: Je voudrais comprendre du député s'il voudrait qu'on répète ce texte-là. Est-ce que c'est ça qu'il veut dire?

M. Beaudet: Non, mais qu'à l'article 206 on inclura, après «l'article 204», on ajoutera «et 205.1», puis, à ce moment-là, on va régler le problème qu'on discute.

M. Rioux: Alors, M. le Président, je vais prendre bonne note de ça et, lors de notre prochaine séance, je pourrai donner une réponse au député d'Argenteuil, avec plaisir.

Mme Beaudoin: Parce qu'on va régler l'article.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, nous prenons bonne note de vos commentaires et, compte tenu de l'heure, je suspends nos travaux jusqu'à demain matin 9 heures dans la même salle.

(Fin de la séance à 18 h 1)


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