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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 25 janvier 2000 - Vol. 36 N° 49

Examen du plan stratégique 2000-2004 d'Hydro-Québec


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Table des matières

Remarques préliminaires

Présentation thématique d'Hydro-Québec: Mieux servir les clients

Présentation thématique d'Hydro-Québec: Assurer la croissance rentable de l'entreprise au Québec


Autres intervenants
Mme Denise Carrier-Perreault, présidente
M. Christos Sirros, vice-président
M. Guy Lelièvre
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Rémy Désilets
M. Jean-Claude Gobé
Mme Manon Blanchet
M. Stéphane Bédard
*M. Thierry Vandal, Hydro-Québec
*M. Yves Filion, idem
*M. Roger Lanoue, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-trois minutes)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission de l'économie et du travail est réunie ce matin pour procéder à l'examen du plan stratégique 2000-2004 de la société Hydro-Québec.

Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Jutras (Drummond) remplace M. Kieffer (Groulx) et Mme Houda-Pepin (La Pinière) remplace M. Marsan (Robert-Baldwin).

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vous remercie.

Alors, comme vous avez pu le constater sur l'ordre du jour, ce matin, nous avons bien sûr les remarques préliminaires de part et d'autre, puis une présentation d'Hydro-Québec, et ensuite, bien sûr, les échanges vont pouvoir démarrer.


Remarques préliminaires

Alors, là-dessus, M. le ministre, je serais prête à vous donner la parole pour vos remarques préliminaires.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés, je voudrais commencer par une citation d'un historien qui écrivait ceci: «Les défis, écrivait-il, qu'a relevés Hydro-Québec au cours de son premier demi-siècle d'existence reflètent des aspects importants de l'histoire du Québec. D'abord chargée de fournir aux Québécois toute l'électricité qu'ils demandaient, elle s'est acquittée de cette mission avec efficacité et ceux-ci en ont tiré une fierté légitime. Elle a aussi contribué de façon considérable à l'essor économique du Québec et à la promotion des francophones. Pendant la seconde moitié de son existence, Hydro-Québec a dû s'adapter à un nouvel environnement économique et social dans lequel les tensions étaient plus nombreuses et où la conservation de l'énergie, le respect de l'environnement et la reconnaissance des droits autochtones occupaient une place inédite. Là aussi, son évolution est à l'image de celle du Québec.»

C'est justement à cause de l'importance de l'exercice que nous avons à mener que j'ai choisi ce commentaire du professeur Linteau en guise d'introduction de mon allocution d'ouverture des travaux de la commission de l'économie et du travail qui portent sur l'étude du plan stratégique d'Hydro-Québec pour les années 2000-2004.

Nous sommes réunis ce matin d'abord et avant tout parce que le gouvernement est l'actionnaire d'Hydro-Québec, l'actionnaire unique, et que, comme tout bon actionnaire, nous nous devons d'évaluer et d'autoriser les orientations corporatives de notre société d'État. Ce sont nous, les députés de l'Assemblée nationale, les élus, tous partis confondus, qui avons adopté l'article de la Loi d'Hydro-Québec qui fixe les paramètres de cet exercice. Aux deux ans, à tous les deux ans, la société d'État doit se présenter devant les élus pour soumettre et faire approuver par le gouvernement ce qu'il est maintenant convenu d'appeler son plan stratégique. Comme vous le savez, le plan stratégique est d'abord rendu public par Hydro-Québec, et une commission parlementaire suit dans les 90 jours de sa publication.

C'est bien sûr au regard du passé et de l'avenir que nous devrons questionner Hydro-Québec, mais je crois qu'il est nécessaire de rappeler ici, comme l'indiquait le professeur d'histoire Linteau, qu'Hydro-Québec évolue dans un monde en perpétuelle mouvance. Les questions que nous sommes en droit de poser doivent essentiellement nous permettre de voir si Hydro-Québec respecte le pacte social qui est à l'origine même des mandats qui lui ont été successivement confiés par les gouvernements qui se sont succédé, que ce soient le gouvernement Godbout qui a créé Hydro-Québec, les gouvernements Duplessis, Lesage, Bourassa, Lévesque, Bouchard, tous les gouvernements.

En quelque sorte, nous devrons, au cours des deux prochains jours, évaluer si Hydro-Québec travaille bien, si elle travaille au mieux-être collectif et si elle se donne les moyens pour atteindre tous les objectifs que lui fixe le gouvernement actionnaire.

J'estime, pour ma part, qu'il est sage que cet examen soit mené par des députés, par des élus, qui ne sont ni des experts dans le domaine de l'énergie ni des représentants attitrés d'un groupe, d'une association ou d'un organisme. Comme députés, nous représentons nos communautés locales et régionales – nous représentons la population – qui, dans nos comtés ou autrement, nous expriment leurs besoins, leurs attentes, leurs espoirs de développement, leurs appréciations et leurs réserves et parfois même leur méfiance sur les orientations ou sur les activités d'Hydro-Québec. Cette population devant qui nous sommes imputables nous offre, par les questions ou les réflexions qu'elle nous transmet, une chance inestimable, celle d'interroger Hydro-Québec à partir de notions simples, de faits concrets et, je dirais, de gros bon sens.

Comme députés, nous avons une double responsabilité. Il nous faut d'abord ramener le débat à travers les préoccupations quotidiennes de nos concitoyens et concitoyennes. Il nous faudra très certainement parler des opérations terrain, de la fiabilité du service, de la sécurité des approvisionnements, des projets à venir. Nous ne pourrons rester silencieux sur les activités névralgiques que sont les lois et le jeu du marché de l'électricité, les orientations en matière de recherche et développement, les grands enjeux continentaux et internationaux, la rentabilité de l'entreprise et l'appétit légitime de l'actionnaire.

Convenons donc ce matin que notre objectif doit être celui de comprendre et de saisir toutes les nuances de ces questions tout aussi fascinantes les unes que les autres. Il ne s'agit pas ici de faire valoir une thèse au profit de l'autre, pas plus qu'il ne s'agit d'opposer les intérêts des uns aux intérêts des autres. Notre travail, je le répète, c'est de s'assurer que les orientations que nous propose Hydro-Québec s'appuient effectivement sur l'ensemble des objectifs confiés et fixés par l'actionnaire. Il nous faut savoir comment Hydro-Québec conçoit sa mission, comment elle demeure fidèle au pacte social qui a amené sa création, comment elle compte mieux servir ses clients actionnaires. Il m'apparaît pertinent de voir comment notre société d'État favorisera le développement économique du Québec et de ses régions. Nous voulons savoir quels moyens Hydro-Québec mettra de l'avant pour prendre en compte les problèmes de ses clients démunis.

Une série d'autres questions inspirées de la lecture de l'actualité et des commentaires publiés après le dévoilement du plan stratégique me viennent encore en tête: Hydro-Québec a-t-elle un rôle à jouer sur le plan international? et lequel? Les réorganisations successives ont-elles donné les résultats escomptés? Qu'en est-il de l'interfinancement? Le gel des tarifs, est-ce la meilleure façon de garantir des bas tarifs? Comment Hydro-Québec compte-t-elle s'associer aux entrepreneurs québécois et à leurs projets? Y a-t-il un processus de formation permanente au sein d'Hydro-Québec? Le régime d'intéressement améliorera-t-il réellement les relations de travail? Y a-t-il de l'eau dans les réservoirs? Vaste question. Payons-nous pour exporter? Question qui revient avec récurrence dans l'actualité aussi. Certains répondent oui, d'autres non. En investissant du capital de risque à l'étranger, Hydro-Québec pénalise-t-elle nos entreprises québécoises? Une question que j'ai déjà entendue. Pourquoi ce virage gazier? Parce que, dans le plan stratégique, il est question, je pense, de ce qu'on peut appeler un virage gazier. Nos chercheurs sont-ils en panne sèche? Toute la question de recherche et développement et des réalignements majeurs qu'Hydro-Québec a opérés dans ce secteur crucial de la recherche-développement.

(9 h 40)

À mon sens, les travaux de la commission de l'économie et du travail doivent donc nous permettre d'éclaircir et de clarifier ces questions et d'apporter aussi les nuances qui s'imposent. À la fin de cette première étape, les députés devraient être en mesure d'apprécier comment Hydro-Québec incarne tout cela dans les orientations qu'elle nous propose pour ce deuxième plan stratégique. Parce que c'est important de le signaler, c'est son deuxième plan stratégique. Hydro-Québec a défilé annuellement devant les commissions parlementaires, mais elle le fait pour la deuxième fois seulement relativement à son plan stratégique. Auparavant, on le sait, c'était particulièrement pour examiner sa proposition tarifaire avant que le gouvernement ne prenne une décision à cet égard. Le gouvernement aura, lui aussi, à juger de la chose et à trancher parce qu'il demeure de sa responsabilité d'actionnaire de bonifier, d'améliorer, d'autoriser le plan stratégique et de contribuer aussi à sa mise en oeuvre.

Ce que je veux faire saisir aux membres de cette commission comme au public qui s'intéresse au plan stratégique d'Hydro-Québec, c'est qu'en bout de piste nous sommes conjoints et solidaires d'un pacte social qui, lui, s'appuie sur un très large consensus des Québécois et des Québécoises.

Je voudrais, Mme la Présidente, remercier tous mes collègues députés pour le sérieux avec lequel ils se sont préparés pour les travaux de cette commission. Je sais qu'hier vous avez discuté avec des experts indépendants et que vous avez aussi reçu, d'ailleurs, les représentants d'Hydro-Québec. Je salue aussi votre décision de publier les documents de MM. Dunsky et Neuman dès la fin de cette commission. Je crois qu'à travers le regard des experts les Québécois et les Québécoises pourront se faire une idée plus précise de ces choses parfois complexes mais combien enracinées dans leur quotidien.

À la fin de nos travaux et après l'adoption d'un décret autorisant le plan stratégique, avec peut-être des modifications, la tâche reviendra à la société d'État, à ses dirigeants et à ses employés de concrétiser l'objectif qui nous est proposé aujourd'hui et qui, avouons-le, est fort ambitieux: mieux servir la clientèle. Il faut que de part et d'autre s'établisse une relation de confiance qui permette d'atteindre la réussite, parce qu'il me semble que l'ensemble des actionnaires d'Hydro-Québec en ont le goût et le souhaitent.

À sa façon, M. Robert Boyd, ex-président de la Société de développement de la Baie James et ex-président d'Hydro-Québec, nous indiquait la route à suivre quand il déclarait, en 1978, et je cite: «Mais cette liberté de manoeuvre est aussi tributaire d'un équilibre à atteindre entre la sauvegarde des intérêts de groupes particuliers et les exigences du mandat d'Hydro-Québec qui lui impose d'agir en fonction des besoins de l'ensemble de la population. S'il importe que les individus puissent faire entendre leur voix sur les projets de l'entreprise, il importe aussi de conserver à cette dernière une liberté d'action sans laquelle elle ne pourrait remplir son mandat.» Fin de la citation.

En terminant, Mme la Présidente, parce que j'accorde une très grande importance au travail que nous amorçons et que je ne suis pas partisan du mélange des genres, je crois pertinent de confirmer ici, cependant, que j'ai reçu, le 14 janvier dernier, dans sa version anglaise, le rapport de M. Charles Trabandt, de la firme Merrill, Lynch. Je vous rappelle que le mandat confié portait sur deux questions majeures: déterminer les conséquences tarifaires pour toutes les catégories de consommateurs associées à la loi actuelle de la Régie de l'énergie, évaluer en particulier les risques d'augmentation des tarifs de la clientèle résidentielle, compte tenu de l'interfinancement actuel en faveur de celle-ci; et proposer, tel qu'énoncé dans la politique énergétique du Québec, des avenues de déréglementation de la production d'électricité au Québec compatibles avec le pacte social.

Merrill, Lynch procède actuellement à la traduction et à l'impression du document. Je compte le rendre public d'ici la mi-février et, comme je l'ai déjà dit, tous les documents ayant servi à cette étude le seront aussi. De plus, il est de mon intention de rendre disponibles les travaux des quatre autres experts consultés en regard de l'avis de la Régie de l'énergie portant sur le tarif de fourniture.

Comme l'ont pressenti plusieurs observateurs du domaine des ressources naturelles, l'année 2000 apportera un certain nombre de réponses aux grandes questions de l'heure. L'énergie n'échappera pas à cette réalité. Le gouvernement devra disposer de l'avis sur le tarif de fourniture et faire connaître ses intentions quant au développement de la filière éolienne et quelle place il compte faire à la petite hydraulique. Le gouvernement dispose d'ailleurs de deux avis de la Régie sur ces deux filières. Le dernier, sur la petite hydraulique, est tout récent. J'ajoute à cela que j'ai aussi demandé au ministère de me brosser un tableau complet quant aux diverses utilisations de la biomasse forestière. Voilà de beaux sujets pour l'année en cours.

Ce qui nous réunit aujourd'hui, c'est l'étude du plan stratégique d'Hydro-Québec, et je souhaite sincèrement, Mme la Présidente, que c'est bien à cette étude que nous consacrerons nos énergies.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. le ministre. Alors, Mme la députée de Bonaventure, pour vos remarques préliminaires.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, d'entrée de jeu, vous me permettrez, au nom de mes collègues ici, de l'opposition, de souhaiter la bienvenue à M. Jacques Ménard, président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, et à M. André Caillé, président-directeur général, également à l'ensemble de leurs collaborateurs et collaboratrices qui les accompagneront au cours des deux jours d'audiences qui occuperont nos travaux. Évidemment, nous tenons également à souhaiter la bienvenue aux groupes et aux personnes qui se sont déplacés pour assister à nos travaux.

Mme la Présidente, le mandat de notre commission, qui consiste à examiner et étudier le plan stratégique d'Hydro-Québec pour 2000-2004, est ambitieux, ambitieux parce que les orientations et les stratégies retenues et priorisées par la société d'État couvrent un vaste et large domaine d'intervention. Deux journées d'audiences à tous les deux ans pour qu'Hydro-Québec justifie ses choix à la population en tant que société publique nous apparaissent nettement insuffisants. Si les parlementaires que nous sommes déplorent cet empressement de la part de la société d'État à expliquer ses choix, nous déplorons également le fait que nous possédons bien peu d'outils pour contre-expertiser Hydro-Québec. Et je dois vous avouer que nous sommes animés, de ce côté-ci, d'un certain sentiment d'impuissance pour questionner de façon satisfaisante Hydro-Québec.

Certains parlementaires se souviendront que la société d'État a déjà déposé, dans un passé qui n'est pas si lointain, toute une série de documents qui offraient des résultats beaucoup plus détaillés que ce que contient le plan stratégique 2000-2004. Et, à preuve, Mme la Présidente, j'ai devant moi le fameux plan de développement qu'Hydro-Québec déposait en 1993, en 13 volumes, qui contenait à l'époque des centaines de pages. Et aujourd'hui donc, dans l'exercice auquel nous sommes conviés, Hydro-Québec nous présente un document de 60 pages qui, à mon sens, contient évidemment beaucoup moins de détails que tous les documents, dans le passé, qu'Hydro-Québec a déposés ici, devant la commission parlementaire et devant les parlementaires qui ont été appelés à se prononcer sur les orientations et les stratégies d'Hydro-Québec.

Mme la Présidente, cette information très générale qui est contenue dans le plan stratégique ne nous permet pas de dresser un portrait clair de la situation réelle qui prévaut à Hydro-Québec. Dans le contexte, on comprendra bien les difficultés auxquelles nous sommes confrontés comme parlementaires dans notre responsabilité et notre tâche d'interroger Hydro-Québec. En fait, les moyens et les outils dont nous disposons ne sont d'aucune mesure – d'aucune mesure – par rapport à toute l'artillerie que possède notre société d'État pour nous convaincre du bien-fondé de ses orientations.

Mme la Présidente, à la croisée des chemins, à l'heure où les pressions se font de plus en plus fortes en faveur de la déréglementation de l'ensemble du secteur de l'énergie, il est primordial que le débat qui s'enclenche soit fait de façon transparente et claire, et la population doit faire partie intégrante du processus visant à faire progresser le pacte social sur l'électricité. Compte tenu de la place importante qu'occupe Hydro-Québec dans le coeur des Québécois et du rôle important d'Hydro-Québec pour l'avenir de notre collectivité, la population mérite bien sûr une plus grande attention de la part des gestionnaires de cette richesse collective qui a fait et qui continuera de faire notre force et notre fierté.

Évidemment, Mme la Présidente, ce n'est pas d'hier que les Québécois se préoccupent de toute la question de l'électricité, et je pense qu'à ce stade-ci il y a lieu de faire un bref retour dans l'histoire pour mieux comprendre ce qui se passe aujourd'hui dans le secteur énergétique.

(9 h 50)

Tout comme le ministre en a fait mention dans ses remarques préliminaires, la toute première nationalisation d'un réseau électrique a eu lieu le 14 avril 1944, alors que le gouvernement d'Adélard Godbout créait la Commission hydroélectrique du Québec par l'expropriation de la Montreal Light, Heat and Power. Cette première nationalisation a été l'aboutissement de plus de 10 ans de pressions populaires et politiques pour que le gouvernement mette fin à l'exploitation des consommateurs d'électricité par ce qu'il était convenu à l'époque d'appeler le «trust de l'électricité».

En 1934, une commission d'enquête a constaté les abus des compagnies privées aux dépens des consommateurs et recommandait à l'État d'établir une forme de contrôle de celles-ci. C'est ainsi qu'est venue au monde la Commission de l'électricité, qui est devenue par la suite la Régie provinciale de l'électricité. Quel était le mandat, au juste, de cette Régie? Fixer les tarifs et réglementer la production et la distribution de l'électricité afin de mettre un terme à l'exploitation des consommateurs par le trust de l'électricité. Il a fallu attendre bien sûr le début des années soixante, sous le gouvernement libéral de Jean Lesage, pour que se complète la nationalisation de l'électricité et qu'Hydro-Québec, telle qu'on la connaît aujourd'hui, voie le jour.

Cependant, Mme la Présidente, à la lecture de ces brefs éléments historiques, nous avons parfois l'impression que l'histoire se répète. Lorsque les Québécois se sont donné une première Régie de l'énergie, à l'époque, dans les années trente, c'était pour mettre un terme à l'exploitation honteuse des consommateurs par le trust de l'électricité. Aujourd'hui, nous nous retrouvons dans une situation semblable où les Québécois, lors d'un débat public sur l'énergie, ont décidé de se doter d'un organisme indépendant pour réglementer les tarifs, la production et la distribution de l'électricité.

On assiste aujourd'hui à une lutte semblable ou qui ressemble étrangement à celle qui a dû faire la manchette dans les années trente, alors que des groupes populaires exigent actuellement d'Hydro-Québec des baisses de tarifs. La seule différence cependant réside dans le fait que l'adversaire n'est plus le trust de l'électricité, formé de compagnies privées, mais un monopole d'État qui refuse de se soumettre à l'autorité de la Régie de l'énergie, avec la complicité, malheureusement, du gouvernement qui ne veut pas laisser une tierce partie gruger dans les dividendes anticipés.

Les explications, Mme la Présidente, de cette situation viennent peut-être du plan stratégique 2000-2004, dans lequel plusieurs éléments de faiblesse ont retenu notre attention. Tout d'abord, le manque de transparence dans les informations qui sont contenues dans ce plan. Nous déplorons le caractère opaque des informations qui y sont contenues, notamment au niveau des résultats financiers, des activités dites réglementées et non réglementées ou encore au niveau des filiales et des participations d'Hydro-Québec dans d'autres entreprises. Ce silence est étonnant, puisqu'il ne donne aucun moyen de distinguer les coûts et revenus des différents services et filiales de la société. Ainsi, on ne peut différencier la part des bénéfices attribués à la clientèle captive de celle des autres activités.

Une autre lacune tient au manque de données prévisionnelles au niveau des activités, par exemple, d'achat-revente et des projets de construction envisagés par Hydro-Québec. Quels sont ces projets? Sont-ils justifiés par les besoins énergétiques des Québécois? Comment se fait-il, par exemple, que le plan ne fait aucune mention du projet du Bas Churchill? Bref, autant de questions qui demeurent sans réponse.

Le refus pour la société d'État de soumettre ses activités en matière de production à la compétence de la Régie de l'énergie est aussi problématique. Nous constatons qu'Hydro-Québec déploie, dans les faits, énormément d'efforts pour se soustraire à l'autorité de cette instance qui est investie des rôles de surveillance et de régulation de ses activités. Hydro-Québec – et c'est ce qui est surprenant – va même jusqu'à ignorer l'existence, en fait, de la Régie dans sa rétrospective historique incluse dans l'introduction du plan stratégique, une attitude qui s'explique mal dans le contexte de la Loi sur la Régie de l'énergie, laquelle, rappelons-le, a fait l'objet d'un large consensus en 1996 entre tous les intervenants du secteur de l'énergie. Dans ce contexte, une question fort légitime se pose: Pourquoi ce refus qui mine aujourd'hui la crédibilité de toute la politique énergétique du Québec?

Il est important, Mme la Présidente, de rappeler qu'en 1995 le gouvernement du Québec initiait la Table de consultation du débat public sur l'énergie dont les recommandations ont donné naissance à la politique énergétique du Québec. Adoptée en 1996, cette politique énergétique a marqué un tournant majeur dans le domaine de l'électricité au Québec en préconisant la création d'une régie de l'énergie qui aurait notamment pour mandat d'étudier les demandes tarifaires d'Hydro-Québec. Le ministre des Ressources naturelles de l'époque, en présentant la politique énergétique, affirmait, et je cite, que «la création d'une régie de l'énergie dotée de pouvoirs décisionnels apportera transparence et équité dans le fonctionnement du secteur énergétique québécois, dans la définition des tarifs des entreprises réglementées. Sa mise en place garantira que les choix d'investissements sont effectués en connaissance de cause et surtout – surtout – que le public y participe pleinement.»

L'un des rôles majeurs dont devait hériter la Régie de l'énergie est celui d'étudier les demandes tarifaires d'Hydro-Québec, qui était auparavant dévolu à la commission permanente de l'économie et du travail de l'Assemblée nationale. Des changements s'imposaient à cette procédure car, comme il est mentionné dans la politique énergétique, cette situation a cependant abouti à une certaine confusion dans les rôles assumés simultanément par l'État, le gouvernement étant à la fois régulateur et actionnaire.

Le gouvernement du Parti québécois tarde maintenant, aujourd'hui, à céder ses pouvoirs de régulateur de tarifs de l'électricité à la Régie de l'énergie. Prétextant le gel des tarifs annoncé dans les plans de 1998-2002 et 2000-2004, le ministre des Ressources naturelles affirme qu'il n'y a pas d'urgence pour l'État à intervenir afin de donner à la Régie les pouvoirs qui lui manquent pour appliquer sa loi. D'après plusieurs experts, cette hésitation s'expliquerait par le refus d'Hydro-Québec et du gouvernement de concéder des baisses de tarifs que pourrait lui imposer la Régie de l'énergie si elle était en pleine possession de ses pouvoirs.

Force est donc de constater, Mme la Présidente, que la situation qui prévaut actuellement est pire que celle qui prévalait avant la création de la Régie de l'énergie, puisqu'elle comporte un chevauchement entre l'ancien et le nouveau régime, et, comme l'expliquait hier un expert aux membres de cette commission, il existe un vide qui fait que la réglementation en vigueur actuellement est encore moins rigoureuse, moins transparente et moins crédible, ce dont profite largement Hydro-Québec.

Mme la Présidente, revenons au plan stratégique. Deux autres éléments ont également retenu notre attention, soit celui de l'apparent abandon de tout le volet efficacité énergétique et l'abandon de ce qu'il est convenu d'appeler la recherche fondamentale. A-t-on fait le choix, à Hydro-Québec, d'être productif plutôt qu'innovateur? Qu'en est-il de la capacité extraordinaire qu'avait notre société d'État d'innover et de développer de nouvelles technologies, capacité qui faisait la fierté des Québécois?

Cependant, Mme la Présidente, un point que nous apprécions dans ce plan stratégique couvrant la période 2000-2004 est la décision prise par Hydro-Québec de se concentrer sur les activités dites traditionnelles en mettant l'accent sur la qualité du service. Ce que nous constatons de façon générale à la lecture de ce deuxième plan stratégique, c'est que nous avons un plan qui ne regarde que l'avenir et qui, étonnamment, ne fait aucune référence aux objectifs passés, ne fait aucune référence aux échecs du plan précédent, un plan qui ne fait aucune référence aux changements majeurs effectués par la direction d'Hydro-Québec depuis le dernier plan stratégique, et ces changements, ils sont nombreux.

En fait, les questions qui se posent, Mme la Présidente, c'est: Est-ce qu'Hydro-Québec tente de cacher des choses? Pourquoi ne pas expliquer ces résultats et ce qui motive les changements d'orientation entre le premier et le dernier plan stratégique et celui qui est déposé et étudié aujourd'hui? Évidemment, il serait intéressant et nécessaire d'avoir des réponses claires à ces questions.

Plus spécifiquement, le plan stratégique 2000-2004 ne fait aucune référence, par exemple, à Hydro-Québec International, qui a été démantelée en 1999 et qui pourtant était au coeur du dernier plan stratégique. Un autre changement majeur qui n'est pas expliqué est l'abandon des efforts d'exportation massive d'électricité aux États-Unis. C'est une décision très surprenante dans la mesure où le dernier plan stratégique était très largement axé sur une croissance fulgurante de ses ventes à l'étranger.

Bien que les parlementaires aient déploré à plusieurs reprises le manque de transparence d'Hydro-Québec dans le passé, on constate malheureusement que les recommandations découlant du mandat de surveillance qu'a exercé la commission, en 1997, sont malheureusement restées lettre morte. Il y a donc lieu de s'interroger aujourd'hui sur l'importance qu'accorde Hydro-Québec à l'exercice que nous amorçons aujourd'hui.

(10 heures)

Le manque de transparence dont fait preuve la société d'État dans son plan stratégique 2000-2004 est aussi l'apanage du gouvernement, puisqu'il refuse d'entendre de nombreux groupes qui ont formulé une demande d'audition à la commission de l'économie et du travail. Et, malgré les efforts qui ont été déployés par l'opposition, qui a réitéré la pertinence et la nécessité d'entendre ces intervenants, le gouvernement a opposé une fin de non-recevoir à ces demandes. Évidemment, nous n'avons toujours pas compris les motifs qui sont à l'origine de ce refus, et il serait intéressant que le ministre des Ressources naturelles puisse nous livrer ce qui motive son gouvernement à refuser l'accès à des groupes à l'Assemblée nationale.

Mme la Présidente, bien que nous ne disposions que de deux jours pour examiner et étudier le plan stratégique d'Hydro-Québec, nous souhaitons que cette dernière fasse preuve d'ouverture et de transparence. Les questions que nous poserons sont le reflet de nos préoccupations et des inquiétudes de la population en général quant aux choix qui sont effectués pour le futur.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée, je regrette, c'est tout le temps dont vous disposiez pour cette présentation.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente, j'avais terminé. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé, M. Ménard, bienvenue à cette commission et, tel que prévu dans l'ordre de la Chambre, vous disposez maintenant de 45 minutes pour faire une première présentation.


M. Louis-Jacques Ménard, président du conseil d'administration d'Hydro-Québec

M. Ménard (Louis-Jacques): Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, M. le ministre des Ressources naturelles, Mmes et MM. les membres de la commission, c'est avec fierté que nous vous présentons aujourd'hui le deuxième plan stratégique d'Hydro-Québec, qui porte sur la période 2000-2004. Le plan stratégique que nous vous avons proposé il y a deux ans visait à remettre Hydro-Québec sur le chemin de la croissance et de la rentabilité. À ce sujet, nous pouvons dire que nous sommes engagés sur la bonne voie. Le défi, évidemment, est de taille. La situation s'est déjà beaucoup améliorée, mais, pour devenir une des entreprises énergétiques les plus performantes en Amérique du Nord, il faudra encore beaucoup d'efforts.

L'évolution du taux de rentabilité de l'entreprise nous donne la mesure du défi. De 3,3 % en 1995, il est passé à 5,8 % en 1998, et notre objectif pour l'horizon du présent plan est de 9,8 %. En termes concrets, cela signifie que le bénéfice net est passé de 390 000 000 $ en 1995 à 679 000 000 $ en 1998, l'année de la tempête du verglas. Pour l'année 1999, notre bénéfice net affichera une croissance d'environ 30 % par rapport à 1998 et sera de l'ordre de 900 000 000 $. L'exercice de vérification comptable est en cours, et le résultat final sera connu sous peu, à l'occasion du dépôt de notre rapport annuel 1999. Cet effort de rentabilité, Hydro-Québec le doit à tous, actionnaires, clients, employés ou partenaires.

Les progrès réalisés par Hydro-Québec depuis la présentation du dernier plan stratégique ne se limitent pas à l'augmentation du bénéfice net, ils touchent à tous les secteurs de notre activité.

D'abord les employés. Après une longue négociation, Hydro-Québec a conclu avec ses employés un contrat de travail d'une durée de cinq ans. Ce contrat innovateur fixe pour nos employés, quant à la nouvelle rémunération incitative, les mêmes objectifs de rentabilité et de satisfaction des clients québécois que ceux de la haute direction de l'entreprise – d'ailleurs, ils sont en tous points identiques aux objectifs de performance de leur P.D.G., André Caillé – car, chez nous comme ailleurs, améliorer la rentabilité ne peut se faire sans tenir compte des attentes de nos clients.

De là le thème principal ou la considération majeure du plan stratégique que nous vous présentons aujourd'hui: Mieux servir nos clients. Le plan 2000-2004 se veut donc d'abord et avant tout une réponse aux attentes de nos clients québécois, des attentes concrètes qui visent la satisfaction de leurs besoins, un réseau fiable et l'assurance de ne pas manquer d'électricité, pas d'augmentation de tarifs et un service à la clientèle rapide et à l'écoute. Ces attentes, nous les avons entendues et elles sont à la base même de nos actions.

Ainsi, d'une part, nous confirmons le gel tarifaire jusqu'en 2002 et nous mettrons tout en oeuvre pour maintenir ce gel au-delà de 2002. Par ailleurs, depuis 1998, nous avons réalisé d'importants travaux de renforcement du réseau québécois et nous poursuivons nos efforts d'amélioration de la fiabilité de l'alimentation électrique au cours des prochaines années.

Hydro-Québec a également progressé dans le sens des orientations fixées dans le plan stratégique 1998-2002. L'entreprise a poursuivi son objectif de parachever le développement du potentiel hydroélectrique rentable. De nouveaux projets sont entrepris aux mêmes trois conditions de réalisation, soit la rentabilité, le respect de l'environnement et l'accueil favorable des communautés locales. À ce chapitre, les ententes conclues avec les conseils de bande de Betsiamites et d'Essipit et les MRC de La Haute-Côte-Nord et du Saguenay en rapport avec les projets de la Betsiamites et de la Toulnustouc marquent un tournant majeur dans l'approche de partenariat pour les nouveaux projets hydroélectriques au Québec. Des ententes similaires de partenariat ont également été conclues dans le cadre des projets de réfection des centrales Sept-Chutes et Chute Bell.

Par ailleurs, les avantages que nous confère la filière hydroélectrique quant à la compétitivité et à la flexibilité d'opération ont permis de profiter de la volatilité des prix de l'électricité sur les marchés voisins. En effet, en plus des ventes régulières associées aux contrats à long terme, l'entreprise a pu profiter des conditions favorables des marchés externes pour réaliser des transactions à court terme. Il s'agit, dans ce cas, de ventes à court terme à partir de la capacité de production de l'entreprise au Québec, de l'achat et de vente d'électricité dans un contexte d'arbitrage de prix entre les périodes de forte et de faible consommation. L'ensemble de ces transactions hors Québec permettent de valoriser de manière plus complète les actifs de production de l'entreprise grâce notamment à une utilisation plus soutenue des capacités de transport contractées sur le réseau et les interconnexions de transénergie.

Sur les marchés internationaux, nous avons développé de nouveaux partenariats. Hydro-Québec est présente dans plusieurs pays en tant qu'opérateur, entrepreneur et fournisseur d'assistance technique. En 1999, nous avons ajusté notre modèle d'affaires à l'égard d'HQI pour maximiser les retombées de nos engagements internationaux sur l'industrie électrique québécoise et pour rapprocher nos interventions de nos métiers de base. Ainsi, nous avons rapatrié au sein d'Hydro-Québec les activités d'analyse de projets, de recherche de partenaires québécois, d'analyse de risque et de financement pour confier à Hydro-Québec International le mandat de se concentrer essentiellement sur les activités de démarchage à l'international.

Hydro-Québec demeure une force dans l'activité économique du Québec, que ce soit dans les centres urbains ou dans les régions. De façon générale, les activités d'Hydro-Québec contribueront à soutenir, en plus de sa propre force de travail, environ 42 000 emplois au Québec d'ici 2002. À notre volonté de soutenir l'activité économique et les emplois au Québec s'ajoute notre détermination à préparer la relève et à créer des opportunités d'expérience et de développement pour ceux et celles qui arrivent sur le marché du travail. C'est pourquoi nous nous sommes fixé l'objectif d'intégrer 1 500 nouveaux employés au sein de l'effectif d'ici 2004.

Le plan stratégique que nous vous proposons aujourd'hui a largement profité de la contribution du conseil d'administration d'Hydro-Québec, et je tiens à remercier mes collègues pour leur travail assidu à cet égard. D'ailleurs, le conseil entend faire un suivi des objectifs et des moyens retenus pour les atteindre afin de s'assurer de la réalisation de ces orientations. Comme c'est notre devoir comme conseil d'administration, nous devons nous assurer d'une saine gestion et garantir le respect des intérêts de l'actionnaire, des employés, des clients et des communautés. C'est pourquoi le conseil d'administration apporte une attention particulière à l'évaluation des risques d'affaires et aux mécanismes de reddition de comptes et de mesures de contrôle.

Le plan stratégique 2000-2004 s'inscrit non seulement dans la continuité du plan précédent, il réaffirme avec vigueur les valeurs et les principes fondamentaux qui ont conduit à la création d'Hydro-Québec et aux nombreux succès qu'elle a connus. Ce plan met particulièrement l'accent sur les métiers de base d'Hydro-Québec, sur ses activités traditionnelles.

À titre de représentant de l'actionnaire, le conseil d'administration veille particulièrement à ce que les orientations stratégiques de l'entreprise respectent la mission d'Hydro-Québec de même que son devoir de service public. Rappelons que cela consiste à servir les besoins de la clientèle partout au Québec avec la même qualité et aux mêmes conditions, soit des tarifs bas, stables et uniformes sur tout le territoire. Les grands principes qui ont conduit à la nationalisation de l'électricité au début des années soixante sont toujours présents. Dans un contexte d'ouverture des marchés et de bouleversement de l'industrie électrique, le plan stratégique vient garantir que les acquis de la nationalisation seront préservés.

(10 h 10)

Je vous remercie de votre attention et je cède maintenant la parole à mon collègue André Caillé qui abordera avec vous plus en détail les orientations et les stratégies du plan stratégique 2000-2004. André.


M. André Caillé, président d'Hydro-Québec

M. Caillé (André): Merci. Mme la Présidente, M. le ministre, mesdames et messieurs membres de cette commission. Je suis très heureux aujourd'hui de me trouver devant vous pour répondre à toutes vos questions, très fier également de le faire, parce que le plan qui vous est proposé a été préparé dans une perspective de satisfaire d'abord et avant tout les attentes de nos clients québécois. Ces attentes visent essentiellement la fiabilité du réseau et la qualité du service. Elles excluent, comme on le sait, toute augmentation de tarifs, mais incluent un service rapide et efficace. Ces attentes, Mme la Présidente, à Hydro-Québec, nous les avons entendues, le message a été reçu et nous agissons. Voilà qui renvoie à la nécessité de mobiliser tous nos employés.

Nous comptons sur le fait, ici, bien sûr que l'entreprise et ses employés syndiqués se sont entendus en 1999 sur un contrat de travail d'une durée de cinq ans, contrat qui par ailleurs a été approuvé par les employés dans des proportions variables selon les groupes, variables entre 70 % et 85 %. De plus, ce contrat de travail prévoit un régime d'intéressement, c'est-à-dire, pour tous nos employés syndiqués, que ça représente une rémunération incitative liée aux résultats annuels de l'entreprise, lesquels sont évalués en fonction de l'atteinte des objectifs corporatifs. En ce qui concerne nos employés cadres et spécialistes, le support qu'ils ont apporté à l'entreprise durant l'année 1999 ne nous autorise simplement pas à douter de leur motivation.

Encore une fois, Mme la Présidente, nos clients ont des attentes faciles à comprendre: fiabilité et sécurité d'approvisionnement, stabilité des prix, qualité du service. Ce plan vise à répondre à ces attentes. Bref, nous mettons de l'avant l'objectif de satisfaire au mieux nos clients en leur donnant un service qui répond à leurs attentes et à leurs besoins, ceci aux mêmes bas prix, ceci en leur rendant également la fierté d'une entreprise bien gérée et performante. Voilà pour ce qui est de mes remarques d'ouverture, Mme la Présidente. Avec votre permission, j'enchaînerais sur mes remarques couvrant le premier thème des discussions de cette commission.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Pas de problème, monsieur.


Présentation thématique d'Hydro-Québec: Mieux servir les clients

M. Caillé (André): Merci. La stabilité tarifaire, Mme la Présidente, est une préoccupation centrale d'Hydro-Québec. C'est pourquoi Hydro-Québec confirme le gel de ses tarifs jusqu'en 2002 et se donne pour objectif de poursuivre ce gel, de l'étendre jusqu'en 2004. Les clients québécois devraient ainsi réaliser un gain réel de l'ordre de 10 % en 2004 par rapport à l'évolution de l'indice des prix à la consommation, l'IPC, sur la période du plan. Ceci n'est pas négligeable, puisque cela correspond à 2 200 000 000 $ d'économie pour nos clients sur la période du plan, dont 740 000 000 $ pour la seule dernière année, l'année 2004.

Nous nous engageons à faire tout ce qui est possible pour prolonger le gel jusqu'en 2004. C'est, à notre avis, la meilleure stratégie tarifaire, ceci pour deux raisons: d'abord, parce que c'est une stratégie qui vise tous les clients et, par conséquent, les avantage tous, y compris nos clients résidentiels; deuxièmement, parce que cette stratégie – pour avoir été 20 ans dans ce métier – c'est encore le meilleur signal que l'on peut donner à des investisseurs industriels, d'autant que la compétitivité de nos tarifs est déjà bonne, comme en témoignent les tableaux qui vous ont, à ma connaissance, déjà été remis. Le gel, selon nous, conduira à l'amélioration de cette compétitivité et stimulera l'investissement au Québec.

Il existe par ailleurs une situation d'interfinancement entre les différentes catégories tarifaires, entre les différentes catégories de clients. Les clients résidentiels bénéficient d'un avantage d'une vingtaine de pour cent par rapport aux autres catégories de clients, c'est un fait. D'ailleurs, ce n'est pas surprenant, c'est même naturel, c'est la conséquence directe du pacte social. Et, conformément à l'engagement pris devant cette commission, le plan 2000-2004 ne propose aucun changement à la situation de l'interfinancement. Rappelons qu'il en était de même pour le plan 1998-2002 après avoir été amendé à la demande de cette même commission.

Par ailleurs, depuis le début des années quatre-vingt-dix, Hydro-Québec a maintenu la satisfaction de sa clientèle à un degré très élevé, au-delà de 90 %, atteignant parfois jusqu'à 95 %. Et, sur ce 90 % de clients satisfaits, il y en avait 42 %, ça pouvait aller jusqu'à 42 % de ces clients qui étaient très satisfaits.

On observe, c'est réel, un fléchissement depuis l'été dernier. Ce qui nous amène à la deuxième orientation du plan et non la moindre, celle d'améliorer la qualité du service. En fait, les pannes causées notamment par les violents orages de 1999 ou encore les difficultés encourues quant à la relève des compteurs et à la facturation peuvent expliquer ce fléchissement. Mais, au-delà de cela, il n'en reste pas moins que c'est dans l'ensemble de leurs contacts avec l'entreprise que les clients ont les plus grandes attentes. Les clients veulent parler rapidement à du personnel qui peut résoudre leur problème. Nous, notre première stratégie: améliorer la qualité du service en fonction des attentes prioritaires de la clientèle.

Hydro-Québec entend améliorer ses services par divers moyens. Les mots-clés sont rapidité, exactitude et courtoisie. Et nous visons plus spécifiquement bien sûr à améliorer nos communications avec notre clientèle ainsi qu'avec les municipalités lors d'événements climatiques qui entraînent des pannes, et a fortiori lors de pannes planifiées pour des besoins d'entretien de nos réseaux de transport ou de distribution. Deuxièmement, nous visons à favoriser l'établissement de partenariats de qualité pour répondre aux besoins de nos clients d'affaires; troisièmement, à offrir à nos clients de la grande entreprise une certaine flexibilité quant aux options tarifaires mises à leur disposition. Finalement, nous considérons venir en aide aux ménages les plus démunis qui éprouvent des difficultés de paiement, notamment des difficultés de paiement par rapport à des arrérages.

La deuxième stratégie d'intervention quant à l'amélioration de la qualité du service touche la fiabilité de l'alimentation électrique. À ce chapitre, nous proposons des investissements majeurs qui sont les suivants: 750 000 000 $ par année pour l'entretien des équipements, ce qui équivaut, je tiens à le préciser, à ce qui a été fait au cours des dernières années – pas de réduction ici; 620 000 000 $, c'est-à-dire ce qui reste à dépenser du 815 000 000 $ prévu pour boucler les réseaux de transport et pour en augmenter la robustesse; 175 000 000 $ pour augmenter la robustesse du réseau de distribution – ça, ça se fera sur trois ans; 200 000 000 $ sur cinq ans, soit une augmentation de 50 % des sommes allouées à la maîtrise de la végétation et à l'élagage des arbres.

Finalement, nous proposons 500 000 000 $ sur cinq ans pour enfouir le réseau de distribution. À ce sujet – au sujet de l'enfouissement du réseau de distribution – et suite à une étude menée par le Centre d'expertise et de recherche en infrastructures urbaines, le CERIU, un programme est en voie d'élaboration en collaboration avec les municipalités, les compagnies de téléphone et les câblodistributeurs.

Au total, il s'agit d'investissements effectivement très importants que nous croyons justifiés compte tenu des expériences de 1997, avec le verglas de Lanaudière, de 1998, avec le verglas que vous connaissez, et de 1999, avec les orages qu'on a connus à l'été, au mois de juillet.

(10 h 20)

Par ailleurs, Mme la Présidente, je souhaite réaffirmer ici qu'Hydro-Québec considère la sécurité d'approvisionnement des Québécois comme un impératif. Il en a toujours été ainsi, d'ailleurs. Et c'est notre intention ferme de continuer à fournir une garantie à cet égard aux Québécois. C'est notre stratégie. Depuis toujours, Hydro-Québec maintient en place des moyens suffisants pour combler un déficit éventuel d'apport d'eau correspondant aux plus grands écarts connus de faible hydraulicité, et nous continuerons à le faire. Qui plus est, nous tenons compte dans ce plan de la volatilité des apports d'eau, ce qui nous permet déjà, pour des sécheresses futures, d'identifier, par prudence budgétaire, des ressources financières nécessaires qui pourraient, si requis, servir pour acheter de l'électricité ou pour faire fonctionner la centrale de Tracy ou encore pour combler le manque à gagner de ventes qu'on aurait écartées.

Le choix des moyens pour faire face à des périodes de sécheresse futures. Pour ce qui est des périodes de sécheresse passées, des moyens ont déjà été pris, bien entendu. Pour ce qui est du futur, le choix des moyens, il va être fait en temps opportun et bien sûr en tenant compte de la meilleure option, ou des meilleures options, celles qui coûtent le moins cher, celles qui représentent le moins de coûts pour les Québécois.

Par ailleurs, nous prévoyons des besoins en électricité qui pourront passer, au Québec, de 162 TWh à 182 TWh entre 1999 et 2004. Ainsi, la croissance de la demande d'électricité au Québec amènera d'ici 2004 des ventes additionnelles, au Québec, de 17 TWh par rapport à cette année. Hydro-Québec, je vous le dis, ne prévoit pas de difficultés à satisfaire cette demande additionnelle de 17 TWh. La mise en service de Sainte-Marguerite et les équipements existants, combinés à une réduction des exportations de production au Québec, de production québécoise, permettront de le faire. Toutefois, les ventes hors Québec demeureront de l'ordre de 20 TWh, ce qui signifie en pratique que, au-delà de 7 TWh de contrats de ventes à l'extérieur, ces ventes devront faire l'objet d'achats sur les marchés extérieurs.

Voilà qui complète mes remarques sur le premier thème, Mieux servir. Et j'aimerais, avec votre permission, demander à deux de mes collègues, le vice-président exécutif, Production, Thierry Vandal, et le directeur général adjoint, Yves Filion, de se joindre à nous pour répondre à vos questions ou aux questions de la commission.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, si je comprends bien, la présentation d'Hydro-Québec est terminée, à ce moment-ci.

M. Caillé (André): Elle est terminée.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Parce que, là, on avait les deux orientations, hein. On se comprend? On avait la première orientation et aussi la seconde.

M. Caillé (André): Ah! Vous avez raison. Je vais continuer.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Vous avez la seconde orientation?

M. Caillé (André): J'avais un discours pour chacune. La stabilité tarifaire est une préoccupation centrale pour l'entreprise, c'est pourquoi Hydro-Québec confirme le gel de ses tarifs jusqu'en 2002 et se donne pour objectif de poursuivre ce gel jusqu'en 2004. J'ai déjà couvert ce point-là. Ça va, c'est couvert, c'est complet.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous avez vraiment fait le tour des deux orientations?

M. Caillé (André): Oui, oui, c'est complet, ça couvrait les deux.


Discussion générale

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Nous allons donc passer à la période d'échanges. Et, selon l'habitude... on me dit que l'on procède habituellement par alternance, tout en respectant bien sûr, autant que faire se peut, la période de temps allouée de façon équitable, tant du côté gouvernemental que du côté de l'opposition officielle. Alors, M. le ministre, je serais prête, donc, à vous reconnaître pour la première question.


Situation et perspectives en matière d'interfinancement

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Moi aussi, d'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue à M. Caillé, à M. Ménard, président du conseil d'administration, à ses collaborateurs également.

Ma première question, évidemment, va porter sur le gel tarifaire et la grille tarifaire d'Hydro-Québec. Je pense que, d'abord, c'est une bonne nouvelle qu'on retrouve dans le plan stratégique d'Hydro-Québec pour la population, pour les clients d'Hydro-Québec, que cette confirmation du gel jusqu'en 2002, ce qui évidemment reprend la dernière décision tarifaire prise par le Conseil des ministres mais aussi l'engagement ferme d'Hydro-Québec de faire en sorte que, jusqu'à la fin de son plan stratégique, c'est-à-dire en 2004, ce gel se poursuive. Je pense qu'il n'y a pas un seul client québécois d'Hydro-Québec qui va considérer que ça, c'est une mauvaise nouvelle. C'est certainement une excellente nouvelle que ce gel des tarifs, que cette stabilité tarifaire jusqu'en 2004, ce qui implique, vous le mentionnez, qu'à partir du moment où on tient compte de l'inflation moyenne ça va signifier des gains réels de l'ordre de 10 % à la fin du plan stratégique. Alors, ce n'est certainement pas négligeable.

Mais, quand on aborde la question tarifaire et la grille tarifaire d'Hydro-Québec, on évoque tout de suite – je l'ai fait, vous l'avez fait, la députée de Bonaventure l'a fait aussi – ce qu'on appelle, ce qu'on a l'habitude d'appeler le pacte social, ce pacte social, je pense qu'on peut le dire, issu de la nationalisation de l'électricité en 1962. Même si Hydro-Québec a été créée en 1944 par le gouvernement Godbout, ce pacte social, vraiment, là, il est apparu en 1962, à la suite de la nationalisation de l'électricité.

Et, si on essaie de le définir, je pense qu'on peut dire que ce pacte social, c'est d'abord des bas tarifs pour tout le monde, pour tous les clients, par rapport à d'autres sociétés en Amérique du Nord, des bas tarifs. Et c'était ça d'ailleurs, l'objectif de René Lévesque et du gouvernement Lesage quand ils ont procédé à la nationalisation de l'électricité, c'était pour faire en sorte que les Québécois puissent avoir accès à de l'énergie électrique à bas prix, à des prix convenables.

Des bas tarifs, mais aussi je pense que ça en fait partie, du pacte social, c'est l'interfinancement. Et là vous l'avez abordé dans votre allocution, interfinancement, ce qui signifie et se traduit évidemment par des bas tarifs vraiment substantiels pour une catégorie de consommateurs qui est la catégorie des clients résidentiels. Et, dans votre plan stratégique – on retrouve ça à la page 29 – vous indiquez que l'interfinancement «profite largement à la clientèle résidentielle sans affecter toutefois la grande clientèle industrielle». Je pense que ça va mériter des explications pour qu'on puisse comprendre cette affirmation qu'on retrouve dans votre plan stratégique.

Et vous vous êtes engagés également à ne proposer aucune mesure à la Régie de l'énergie qui viserait à modifier la situation d'interfinancement entre les différentes catégories de consommateurs. Je pense que, ça, ça concerne directement les consommateurs et particulièrement les clients résidentiels. Et je pense que c'est important qu'à l'occasion de cette commission parlementaire on comprenne bien ce concept et ce phénomène d'interfinancement qui fait partie intégrante de ce qu'on appelle tous le pacte social. J'aimerais que vous me décriviez avec le plus de précision possible ce phénomène de l'interfinancement, comment les clients résidentiels en sont favorisés, mais, en même temps, comment la grande clientèle industrielle n'est pas, non plus, pénalisée par cet interfinancement. Comment cet interfinancement se présente-t-il?

Je pense que ça, la question qui vient une fois qu'on a bien configuré ce phénomène de l'interfinancement, la question qui vient après, c'est: Qu'est-ce qui arriverait si on modifiait de façon substantielle cet interfinancement qui est partie intégrante du pacte social? Qu'est-ce qui se produirait, en d'autres termes, si on avait comme objectif, si Hydro-Québec avait comme objectif et, par conséquent, en faisait la demande à cet égard à la Régie lors d'une cause tarifaire, qu'est-ce qui se produirait si on s'engageait dans un processus d'atténuation d'abord et même, à terme, de disparition, d'abolition de l'interfinancement? Alors, autrement dit, c'est quoi, l'interfinancement? Pour ceux qui nous écoutent – il y en a peut-être qui nous écoutent, qui suivent nos travaux – c'est quoi, l'interfinancement? Et il arriverait quoi si on se donnait comme objectif de l'abolir, d'un coup ou graduellement?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

(10 h 30)

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. J'aimerais soumettre, déposer à la commission deux documents: un sur les tarifs dans leur ensemble et un autre, qui tient sur une page, qui décrit la situation sur

l'interfinancement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui.

M. Caillé (André): Je ne sais pas si on a assez de documents.


Documents déposés

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je comprends qu'il y a dépôt de documents.

M. Caillé (André): Il y a assez de documents pour tout le monde. Pendant qu'on les distribue, je vais commencer, débuter déjà à répondre à votre question.

Alors, le pacte social, il faut bien se rappeler, Mme la Présidente, qu'il s'agit de trois facteurs: c'est des tarifs bas – alors, on doit avoir les tarifs parmi les meilleurs – des tarifs stables, c'est-à-dire des tarifs qui présumément n'augmentent pas ou augmentent très peu souvent, et des tarifs uniformes. Ça veut dire les mêmes tarifs aux Îles-de-la-Madeleine, ça veut dire les mêmes tarifs en Gaspésie, ça veut dire les mêmes tarifs dans toutes les régions du Québec qu'ailleurs. Ça veut dire ça, des tarifs, le fameux pacte social. Parce que, avant, à ce que j'ai pu lire, au temps des compagnies, les tarifs étaient très variables d'une ville à l'autre au Québec, et l'objectif visé par les gouvernements d'alors était d'avoir des tarifs bas, stables, mais aussi uniformes.

Alors, quand on fait ça, évidemment on veut les garder bas puis on veut les garder stables. Tout le monde sait que ça coûte plus cher, distribuer de l'électricité dans les régions qu'ailleurs, parce que les coûts sont inversement proportionnels à la densité de la population. Mais, une fois qu'on eut accepté ça au Québec, c'était ça, le pacte social, et qu'on allait le respecter. Les tarifs, ils sont les mêmes dans toutes les régions du Québec, dans les grandes villes du Québec comme dans les régions éloignées au Québec. Alors, ça, c'est le premier point.

La situation actuelle, Mme la Présidente, c'est que les tarifs d'Hydro-Québec se comparent très avantageusement, au niveau résidentiel, avec tout ce qui se passe en Amérique du Nord. On est dans le peloton de tête. Je dois dire qu'il y en a d'autres qui sont avec nous dans ce peloton de tête. On peut parler des tarifs de Manitoba Hydro, de BC Hydro et de Bonneville Power – ça, c'est sur la côte ouest, aux États-Unis. Les écarts entre nous, les gens dans le peloton de tête, sont plus ou moins 2 %. Et le deuxième groupe, lui, quand on parle de clients résidentiels, il vient très loin derrière. Les autres tarifs des autres endroits, c'est plus 25 % en Alberta, par exemple, plus 50 % en Ontario, puis vous pouvez avoir des écarts de plusieurs centaines de pour cent à certains endroits aux États-Unis, par rapport à nous. Alors, le pacte social, c'est ça qui a donné aux Québécois, par rapport à des prix comme on les voit ailleurs... ça a donné des tarifs stables, ça a donné certainement des tarifs bas et ça a certainement donné des tarifs uniformes également.

Maintenant, sur la feuille qui vous est transmise actuellement, remise actuellement, on parle d'interfinancement et on voit que l'ampleur... Peut-être qu'on peut lire l'intro ici: L'interfinancement provient de l'écart... d'abord, d'où ça vient? Ça provient de l'écart entre les revenus générés par une catégorie tarifaire et les revenus cibles nécessaires pour couvrir les coûts de services et un rendement sur l'avoir pour chacune de ces catégories-là. Pour être bien clair, ici, on fait comme si Hydro-Québec n'avait pas un ensemble de clients, qu'il y avait une série de groupes de clients, différents groupes de clients, et qu'on avait une entreprise pour servir chacun des groupes, et là on regarde qu'est-ce qu'il en coûte pour servir chacun d'eux. Après, on regarde les revenus générés par les tarifs; on constate qu'il y a des écarts dans un sens ou dans l'autre.

Pour la clientèle résidentielle, ici, on voit qu'il y a un écart de 22 %, une vingtaine de pour cent – c'est ce que je disais tantôt – où les clients résidentiels, si c'étaient des tarifs basés sur les coûts, sur ce que ça coûte, ce serait plus 20 % et quelques par rapport à ce que c'est maintenant. C'est le résultat du pacte social. Les tarifs, ils sont uniformes, ils sont stables et ils sont bas.

Maintenant, a contrario, dans ce système-là, évidemment, si on regarde les autres catégories de clients, on regarde que, pour le petit commercial et le petit industriel, le moyen commercial et le moyen industriel, c'est l'inverse. Eux paient 20 %, une vingtaine de pour cent de plus qu'ils paieraient autrement. Quant au grand industriel, et c'est là un mythe assez répandu au Québec, le désavantage est de 5 %, selon ceci. Ça, ce sont les faits sur l'interfinancement.

Beaucoup d'études ont été faites au cours des années à Hydro-Québec. La dernière que je connaisse, pour ma part, donne ces résultats-là, parce que ça peut changer au cours du temps selon qu'il y ait plus de développement industriel ou plus de développement résidentiel, que ce développement résidentiel est proche des zones d'urbanisation ou ne l'est pas. Alors, voilà pour ce qui est des tarifs résidentiels.

Maintenant, l'industriel aussi, il faut se poser la question, après tout ça: C'est quoi, le résultat? Quelle est la situation tarifaire? Comme je vous le disais, pour les résidentiels, là il n'y a pas de problème, on est dans le peloton de tête. Si on parle des industriels, maintenant, pour les alumineries, nous sommes dans le deuxième quartile des tarifs. On n'est pas parmi les meilleurs, mais on n'est pas dans le troisième ou dans le quatrième quartile non plus. On est dans le deuxième quartile. On est même en haut du deuxième quartile, près du premier. Nous pratiquons, au Québec, des tarifs attrayants pour l'industrie de l'aluminerie. Évidemment, si on me pose la question: Est-ce que, ça, c'est suffisant pour qu'il y ait des implantations puis des expansions? eh bien, à partir du moment où les alumineries cherchent des tarifs dans le premier quartile et qu'elles les trouvent ailleurs dans le monde, ça se peut qu'elles choisissent d'aller ailleurs, mais ça ne veut pas dire qu'on a des mauvais tarifs pour l'industrie de l'aluminium.

Les papetières et les entreprises de grande puissance, ici, qui utilisent la grande puissance, la situation est qu'on est meilleur qu'en général en Amérique du Nord. Là où on est moins bon qu'eux, c'est par rapport à l'Ouest du Canada. Honnêtement, je ne sais pas c'est quoi, leur situation d'interfinancement, là-bas, dans l'Ouest du Canada, mais on est moins bon que ce qu'on trouve chez Bonneville Power ou dans les... excusez-moi, on est meilleur que Bonneville Power, qui est aussi un hydroélectricien, mais on est moins bon que BC Hydro, par exemple.

Quant à la situation future, qu'est-ce qui va se passer dans le futur par rapport à un gel? Alors... sauf au Manitoba et, d'une façon très limitée, en Colombie-Britannique, du potentiel hydroélectrique aménageable à la fois économiquement et environnementalement, il y en a peu. La seule réelle exception, selon moi, c'est le Manitoba, de sorte que, pour la croissance de leur demande, ces gens-là vont devoir recourir au thermique, et en aucune façon le thermique, avec les prix qu'on connaît pour le gaz naturel, ne pourra concurrencer de l'hydroélectricité. Ce qui n'est pas notre cas, parce que, pour nous, au Québec, on peut encore, grâce au potentiel hydroélectrique non aménagé, poursuivre le développement, ce que nous appelons le parachèvement du développement du potentiel hydroélectrique, de sorte qu'on ne pourra que s'améliorer dans le temps.

Je ne sais pas, monsieur, est-ce que je réponds à toutes vos questions à cet égard à ce moment-ci? Je serais prêt à apporter d'autres précisions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le ministre, des précisions sur le même sujet?

M. Brassard: Oui, parce que je veux bien comprendre. Je regarde votre feuille que vous avez sur l'interfinancement, ce qui signifie que, si on avait comme objectif d'en arriver à éliminer graduellement l'interfinancement puis à faire en sorte que chaque catégorie de consommateurs paie des tarifs qui ont pour effet de couvrir ces coûts – c'est la méthode des coûts – il faudrait à ce moment-là envisager à la fois des réductions substantielles pour certaines catégories, mais envisager une augmentation, elle aussi substantielle, pour la catégorie «clients résidentiels», ce qui veut dire des millions de personnes et de familles au Québec. C'est ça que ça signifie?

M. Caillé (André): De mémoire, on a 3 200 000 clients résidentiels. Ça veut dire pour eux, selon ces chiffres, une augmentation de 22 % des tarifs. En clair, c'est ça que ça veut dire, éliminer l'interfinancement.

M. Brassard: Ce qui fait que, dans votre plan stratégique, et à cet égard, évidemment, je peux vous dire que le gouvernement du Québec est pleinement d'accord avec cette orientation, ce qui signifie qu'Hydro-Québec, dans son plan stratégique et en termes d'orientations sur le plan tarifaire, annonce et énonce que l'interfinancement est là pour demeurer et que, aussi, les bas tarifs sont là pour demeurer. C'est ce qui explique le gel tarifaire que l'on retrouve dans votre plan stratégique.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le ministre. Mme la députée de Bonaventure.

(10 h 40)

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, la question du gel tarifaire, vous comprendrez bien, c'est un élément fort important qui est contenu dans le plan stratégique, et je souhaiterais poser une question également à M. Caillé dans ce sens-là.

À la page 6 du plan stratégique, d'entrée de jeu Hydro-Québec nous annonce qu'un des objectifs premiers de la société d'État est de contribuer à l'enrichissement collectif des Québécois. Alors, dans ce contexte-là, il y a peut-être lieu de croire que la volonté annoncée et affichée d'Hydro-Québec de contribuer à l'enrichissement des Québécois passe nécessairement par des tarifs les plus bas possible. Et, dans ce contexte, l'opposition, il y a plusieurs groupes et intervenants qui croient aujourd'hui qu'Hydro-Québec pourrait faire un effort supplémentaire pour avoir des tarifs qui soient encore les plus bas possible.

À la page 53 de votre plan stratégique, vous nous faites état des rendements sur l'avoir propre, qui sont annoncés, des rendements qui passeront, en 1999, de 6,8 % à 9,8 % en 2004. Alors, ma question, c'est: Compte tenu des objectifs de rentabilité qui sont annoncés à la page 53, est-ce que vous pourriez nous expliquer de quelle façon justement vous prévoyez atteindre les résultats escomptés tout en maintenant un gel tarifaire? Et c'est intéressant de savoir quelles sont les sources de revenus justement qui vont venir combler le gel tarifaire.

Pour la question de l'interfinancement, je dois vous dire que je demeure encore perplexe, sur la base des réponses que vous avez fournies au ministre des Ressources naturelles, parce que le tableau qui nous a été distribué, malheureusement, nous donne très, très peu d'information. En fait, ce qu'on nous dit, c'est que, s'il n'y a plus d'interfinancement, la catégorie de clients qui se retrouve ici va obtenir une charge passant de 22 %, dans certains cas, à 20 %, 21 % et 5 % en diminution. Mais ce qu'on n'a pas, dans le fond, pour se donner une image, une idée très juste de cet impact-là, c'est les revenus, dans le fond, c'est les revenus en provenance des différentes catégories d'affaires... à l'endroit des différentes catégories de consommateurs. Et, dans ce sens-là, je dois vous dire... moi, je veux bien vous croire, mais on doit me convaincre qu'effectivement une abolition de l'interfinancement se traduirait effectivement par une augmentation de charge, par exemple, pour le secteur résidentiel et par une diminution de charge donc pour les autres catégories de consommateurs.

Mais on ne fait pas non plus référence dans vos explications au niveau de l'interfinancement entre les consommateurs et les autres activités de l'entreprise Hydro-Québec. Quand on parle d'interfinancement, en fait, quand je parle d'autres activités de l'entreprise, je fais référence évidemment – vous vous en doutez bien – à toutes les activités liées aux exportations. Et ça, évidemment, pour enlever ou pour évacuer tous les doutes que nourrissent évidemment bien des groupes aujourd'hui, il faudrait nous donner l'heure juste sur cette question-là et le faire vraiment, pas juste avec conviction, mais avec des données, avec des chiffres qui vont nous permettre vraiment de faire véritablement la lumière sur la question de l'interfinancement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, ce que nous allons faire à l'instant même. Nous allons vous remettre des documents. Mon collègue ici, Thierry Vandal, va vous remettre des documents pour régler la question de la rentabilité des exportations. On va vous montrer – ce sont des données qui sont publiques, du reste, c'est les données de l'année 1998 – que les exportations, c'est rentable. Mon collègue va vous expliquer ça. Ça, ça fera une chose.

Pendant qu'on distribue cette documentation, je vais tenter de répondre à la première partie de votre question. Vous dites: Vous allez augmenter le rendement de 6 % et quelque chose qu'il est cette année à 9,8 %. Alors, on peut se poser la question: D'où vient le 9,8 %? J'ai cru croire que c'était ça, votre question. Alors, le 9,8 %, c'est ce que font les entreprises auxquelles nous nous comparons. Si vous prenez la EI, c'est l'association Edison de l'industrie électrique, aux États-Unis, dont ils ont sorti les rapports pour 1998 – c'est pour ça que je compare avec 1998 – les rendements étaient de 9,9 %, sur une structure de capital de 45 % en équité. Alors, pas 25 % comme Hydro-Québec et pas 32 % comme on vise de le faire. Nous visons 9,8 %, pour une structure de capital de 32 % en équité. Il n'y a rien là d'exagéré pour les actionnaires québécois. Que les actionnaires québécois recherchent, très honnêtement et très franchement, une rentabilité de 9,8 % sur 32 % d'équité dans une entreprise comme la nôtre, il n'y a rien d'exagéré.

Alors, voilà pour ce qui est de la croissance. Maintenant, comment on va la réaliser, la croissance, sans augmenter les tarifs? Alors, il y a deux facteurs principaux. Il y en a un ensemble, bien entendu, mais il y a deux facteurs... puis je vais vous parler de trois facteurs.

Premièrement, ce plan prévoit que les ventes vont croître, au Québec, de 17 TWh. Ça apporte des revenus additionnels pour Hydro-Québec. Par ailleurs, ça réduit nos possibilités d'exportation de production faite, hein, produite au Québec, c'est bien sûr, parce que les demandes... Les Québécois, ici, à Hydro-Québec, ils passent en premier. La production, elle va d'abord à eux, selon les tarifs, comme on vient de dire, là, bas, stables et uniformes. Alors, si la demande augmente au Québec, forcément, sans production additionnelle... il y en a un petit peu, là, mais, sans production additionnelle, eh bien, ça veut dire que les exportations de production du Québec vont diminuer. Ça, c'est un effet négatif.

Par ailleurs, deuxièmement – il faut que vous teniez compte de ça – on va acheter, en supposant qu'il en reste sept, de production au Québec à exporter, on va racheter 13 sur le marché américain, en dehors des «peak» – les tableaux que nous allons vous montrer vont vous dire qu'est-ce que ça a l'air, des prix pour acheter de l'électricité en dehors des «peak» – et on va les vendre au «peak», quand la consommation est maximale, et là on va faire l'écart entre les deux. En passant, seule Hydro-Québec est dans une situation de pouvoir valoriser ses actifs de cette façon-là, parce qu'on a la capacité de stocker, sous forme d'eau, de l'énergie.

Le troisième point, le contrôle des coûts. Le contrôle des coûts demeure à l'ordre du jour. Je réponds toujours à votre question, à savoir: Comment vous allez faire pour y arriver sans augmenter les tarifs? Alors, c'est le contrôle des coûts. Qu'est-ce qui pourrait nous empêcher d'y arriver? Mais là, franchement, je vois juste, moi, des changements fondamentaux au niveau des taux d'intérêt, une croissance des taux d'intérêt qui ferait en sorte que nos charges financières augmenteraient beaucoup, et ça, ça échappe à notre contrôle, enfin, on est un joueur dans l'économie, mais, comme vous savez, les taux d'intérêt en Amérique du Nord, ça dépend d'une foule de facteurs et de plusieurs autres joueurs. Alors, c'est l'inconnu. Notre stratégie, c'est... on est en l'an 2000, on va avoir 2001, on va avoir 2002, on saura comment les choses évoluent. S'il n'y a pas de mauvaises nouvelles – je suis plutôt enclin à penser qu'il n'y en aura pas de ce côté-là, au niveau de l'évolution des taux d'intérêt et, par conséquent, de nos charges financières – on devrait être en mesure d'aller jusqu'en 2004. Quand on vous dit qu'on se donne pour objectif de maintenir ce gel jusqu'en 2004, c'est parce qu'on pense qu'on a des très bonnes chances, des très très bonnes chances d'y arriver. Il y a ce seul facteur qui nous retient de le faire maintenant, parce que ce ne serait pas prudent financièrement.

Alors, les tableaux, mon collègue Vandal...

Mme Normandeau: Mme la Présidente, un instant. Il y a une précision, une question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est sur le même sujet, madame?

M. Caillé (André): Thierry pourrait expliquer les tableaux, si vous voulez.

Mme Normandeau: Mais, si vous permettez...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, un instant. Mme la députée de Bonaventure. Je vous reviendrai, M. Vandal.

Mme Normandeau: Merci, M. Caillé. Sur la dernière question, au niveau de l'interfinancement entre les consommateurs, la consommation et les autres activités d'Hydro-Québec, interfinancement entre les activités de consommation et les exportations. Alors, là-dessus, vous n'avez livré aucun commentaire, aucune explication. Plusieurs groupes soutiennent qu'Hydro-Québec se sert de l'interfinancement pour financer des activités au niveau des exportations.

M. Caillé (André): ...ces données qu'on vient de distribuer quant à la rentabilité pour Hydro-Québec de ses exportations. Mon collègue Vandal va vous expliquer ça à l'instant.

Mme Normandeau: O.K.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Merci, Mme la Présidente. Alors donc, on a distribué des fiches qui devraient permettre de jeter un peu plus de lumière sur la rentabilité des exportations et donc répondre à la question de l'interfinancement en propre au Québec versus la rentabilité des exportations.

(10 h 50)

Vous avez une fiche qui distribue les exportations dans trois grands blocs. Je vais vous expliquer. C'est des blocs qui correspondent à la structure de nos marchés actuels. C'est quelque chose qui va évoluer avec le temps. Les trois grands blocs, c'est, d'une part, ce qu'on appelle les ventes régulières, ce que vous retrouvez dans le rapport annuel de 1998, des ventes régulières, donc des contrats long terme. Il y a deux grands contrats long terme. Il y a le contrat avec la Nouvelle-Angleterre, un contrat de 10 ans, où on vend essentiellement à une série d'entreprises à travers une ligne à courant continu qui part de LG 2, donc de la Baie-James, directement jusqu'au Massachusetts. Ce contrat-là représente la plus grande part des ventes régulières. Il y a également un contrat qui a fait la manchette un peu récemment, un contrat extrêmement rentable, le contrat avec le Vermont. Ce n'est pas pour rien que le Vermont voudrait rompre ce contrat, c'est parce qu'il est extrêmement rentable, extrêmement avantageux pour Hydro-Québec et l'ensemble de ses actionnaires.

Donc, ces ventes régulières, les contrats qui sont des contrats long terme représentaient, en 1998, 10,7 TWh d'énergie vendue, des revenus de 490 000 000 $. Un revenu unitaire donc de 0,045 $ le kWh. Si vous comparez à ce qu'aurait été un tarif vendu à la grande entreprise pour un profil similaire, un tarif L, donc le tarif de la grande entreprise, on aurait vendu cette même énergie-là à 0,035 $ ici, au Québec. Donc, on a été capable, à travers ces contrats-là, de dégager une marge, que l'on peut appeler une marge supplémentaire par rapport à une vente équivalente au Québec, de l'ordre de 0,01 $ le kWh. Sur le volume, ça représente, en 1998, 107 000 000 $ de marge supplémentaire par rapport à la même énergie vendue à une grande entreprise ici, au Québec. Donc, c'est des ventes, de ces contrats réguliers, ce sont des ventes qui sont des ventes rentables. C'est très concentré sur le contrat du Vermont, qui est un contrat de long terme. L'autre contrat, c'est un contrat qui arrive à échéance de façon graduelle à partir de la fin de l'année 2000, le contrat avec la Nouvelle-Angleterre.

Le deuxième type de vente – et là on part du long terme, mais on va plutôt vers le court terme – ce sont des ventes qu'on réalise à partir de nos moyens de production propres, c'est-à-dire à partir de la capacité de production de l'entreprise et de ses apports annuels. En 1998, ça a représenté 3 TWh, ces ventes-là. On a réalisé des revenus de 125 000 000 $, une marge supplémentaire – je fais la même analyse – par rapport au tarif L, de l'ordre de 0,06 $. Donc, on a dégagé une marge excédentaire ou une marge supplémentaire, par rapport à la même énergie vendue au tarif L, de l'ordre de 18 000 000 $.

Il reste un troisième bloc, le troisième bloc qui est un bloc plus nouveau chez Hydro-Québec, mais un bloc qui est appelé à connaître une croissance significative pour des raisons que je vais vous expliquer, le bloc C, qui représente les achats-ventes, les activités de courtage court terme. Je vais vous dire, madame, ça fait 18 ans que je suis dans le domaine de l'énergie, j'ai vu bien des commodités, mais la commodité électrique, donc le produit électrique en Amérique du Nord et dans la région qui nous intéresse, présente des perspectives absolument fantastiques pour une entreprise comme Hydro-Québec, compte tenu de ses actifs, compte tenu de la proximité et l'accès à ces marchés pour réaliser ce qu'on appelle le courtage, donc l'arbitrage de prix, la capacité d'acheter quand les prix sont bons pour revendre quand les prix sont supérieurs.

En 1998 – c'était juste le début de cette activité, à toutes fins pratiques, parce que les marchés commençaient à s'ouvrir autour de nous – on a réalisé des achats-ventes de 4,8 TWh et une marge spécifique pour ces activités-là de l'ordre de 20 000 000 $. Au total, donc, sur l'année 1998, si vous faites le total de la contribution des exportations, c'est 145 000 000 $ de contribution au-delà du tarif L, sur un bénéfice qui, cette année-là, représentait 680 000 000 $. Et, si on projette sur les années à venir, et c'est ce que le plan stratégique fait, le premier bloc, les ventes long terme vont arriver à échéance de façon importante avec la Nouvelle-Angleterre, et on va substituer à cette activité-là, de façon croissante sur la période, des activités de courtage, sur le court terme, pour arriver à maintenir un équilibre de présence sur les marchés hors Québec, qui est un équilibre de l'ordre d'une vingtaine de térawattheures, comme André le mentionnait.

Et c'est dans ce contexte-là qu'on vous a passé également une deuxième fiche, la fiche qui représente, ici, en temps réel, si je peux utiliser l'expression, les prix de court terme, les prix qu'on appelle «spot», vous me permettez l'expression, les prix de court terme sur le marché de New York. On a une très grande interconnexion avec le marché de New York, et le marché de New York nous est donc assez facilement accessible. Vous voyez ici la distribution des prix sur le marché qui est directement accessible à Hydro-Québec pour une semaine, la semaine la plus récente, donc la semaine du 17 au 23 janvier 2000. Il faut se rappeler que c'est une semaine où Hydro-Québec avait des ventes significatives au Québec, il faisait très froid au Québec. Durant cette semaine-là, il y a eu énormément de volatilité sur les prix hors Québec, ce qui nous a permis de réaliser, comme vous pouvez le voir... de concentrer nos ventes lorsque les prix sont élevés et de retenir notre énergie dans les réservoirs, derrière les centrales, lorsque les prix sont bas. Une semaine moyenne, c'est une semaine de... dans ce cas-là, c'est une semaine où on aurait pu réaliser des prix de 60 $US le mégawattheure. Donc, c'est largement supérieur à ce qu'un tarif L équivalent pourrait donner.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Vandal. Maintenant, je reconnaîtrais le député de Gaspé.


Gel tarifaire au-delà de 2002

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. Tout à l'heure, dans votre présentation, vous avez mentionné que la stabilité tarifaire était au centre de votre préoccupation et vous avez également mentionné que vous vouliez prolonger le gel au-delà de 2002.

Tout d'abord, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, sur toute la question de la stabilité tarifaire par rapport au gel tarifaire, pourriez-vous nous donner davantage d'explications, et également, dans un deuxième volet, peut-être aborder les possibilités que... Comment Hydro va s'y prendre pour en arriver – tout à l'heure, vous l'avez évoqué – au gel tarifaire au-delà de 2002? Et, advenant qu'il y ait une hausse de l'inflation, comment vous allez vous y prendre, également?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. Alors, la forme la plus évoluée de la stabilité tarifaire, évidemment, c'est le gel, parce que tout reste stable, tout reste au même niveau pour tous les clients, ce que nous faisons jusqu'en 2002 puis qu'on espère faire jusqu'en 2004. Ce qui a été parlé ici, de gel, de stabilité tarifaire, aussi, il y a un autre volet important à ça: notre clientèle ne veut pas être exposée à des grandes variations de tarifs, 10 %, 15 %, parce qu'il est arrivé un événement ponctuel ou parce qu'il est arrivé quelque chose de particulier. Ils ne veulent pas être exposés à ça. C'est ce que j'entends, moi, par «gel tarifaire». Il n'y a pas d'événement majeur comme ça qui se profile, qui pourrait créer de l'instabilité, de sorte que c'est pour ça qu'on parle toujours de... des fois, on les prend pour synonymes, «stabilité» et «gel tarifaire», à Hydro-Québec. Et certainement, en tout cas, quand on parle, dans ce plan, de stabilité tarifaire, c'est qu'on parle de gel jusqu'en 2002 avec un objectif d'y arriver jusqu'en 2004.

Comment? C'est bien sûr qu'il faut contrôler les dépenses, contrôler les dépenses de toutes sortes, incluant toutes les charges d'exploitation, incluant les charges financières également. Alors, c'est un contrôle très rigoureux, une gestion des risques, par exemple – puis on pourrait en reparler, je pense, jeudi – la gestion des risques au niveau financier face à des mouvements rapides qui pourraient se présenter dans le marché, soit sur une base annuelle, soit sur une base d'un horizon de un à trois ans ou soit pas plus que trois ans. Mais, si vous voulez, on pourrait revenir là-dessus vendredi. Voilà sur le comment. Mais il y avait un autre volet à votre question.

M. Lelièvre: La distinction entre le gel et la stabilité, vous l'avez faite. Mais, sur les possibilités réelles d'y arriver, et également sur la question de l'inflation, si l'inflation, par exemple, se mettait à grimper?

M. Caillé (André): Si l'inflation augmentait beaucoup, ça pourrait avoir pour effet d'entraîner des augmentations de taux d'intérêt importantes, et puis Hydro-Québec, évidemment, il y a une grande partie de notre dette... Il ne faut pas croire qu'on va être frappé complètement sur toute la dette par une augmentation des taux d'intérêt; on en a une grande partie qui est fixe, on en a une partie qui est à court terme, puis une partie qui est variable, et c'est surtout sur ces éléments-là de la dette que ça viendrait nous frapper. Alors, il reste à voir de combien ce serait et il reste à voir aussi, nous, bien entendu, comment on va pouvoir faire au niveau de notre gestion pour réduire la composante Variables. Enfin, on a déjà commencé à prendre des actions pour réduire la composante Variables.

(11 heures)

Alors, très honnêtement, puis, évidemment, ça tient compte de la lecture qu'on fait de l'économie actuellement, mais je suis assez confortable quant à la possibilité réelle d'atteindre un gel jusqu'en 2004. Et ça va certainement être une des très grandes priorités, là. Je mets ça au même niveau de priorité: un, il faut améliorer la qualité de service – je suis sûr qu'on en parlera – mais il faut aussi arriver à une stabilité tarifaire, parce que, encore une fois, c'est la meilleure stratégie tarifaire. Après 20 ans dans ce métier-là, on n'a jamais été aussi convaincant en termes commerciaux qu'en maintenant vis-à-vis des clients résidentiels, qu'en annonçant à notre clientèle industrielle...

Au Québec, ici, quand vous vous implantez, le distributeur d'électricité, lui, ce qu'il vise, c'est pas d'augmentation. Il n'y a pas beaucoup d'endroits au monde où ils se font dire ça. C'est très attrayant. Parce que, pour un investisseur qui évidemment est dans une situation où, lui, il regarde son dossier, puis c'est une foule de risques qu'il a à gérer, s'il peut dire, pour l'électricité: Il y a ici une entreprise avec une réputation qui parle de gel tarifaire, ça veut dire beaucoup. Alors, pour moi, c'est très important, le gel tarifaire. Je vais vous dire que ça ne vient pas avant, par ailleurs, mais avec l'amélioration de la qualité de service. Il y a des choses, visiblement, que nous devons faire mieux par rapport à notre clientèle québécoise.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de souhaiter également la bienvenue à tout le monde. On parle du gel tarifaire, puis je vais poursuivre un peu dans cette lignée-là, parce que ça me frappe que vous liiez ça avec l'IPC, l'inflation. Vous dites: Nous, on va geler les tarifs, on va les garder stables, puis le consommateur va se trouver à bénéficier d'un 10 % par rapport à l'IPC. Sauf qu'on sait très bien que l'IPC, l'inflation n'affecte pas beaucoup Hydro-Québec.

Et finalement, ce qui vous affecte beaucoup... Parce qu'on ne paie pas pour l'eau, ce n'est pas le pétrole, donc le coût de l'eau n'augmente pas. Vos coûts sont liés beaucoup à votre équipement, à votre parc d'équipements, qui demeure stable. On est, depuis à peu près huit ans, dans un corridor très baissier des taux d'intérêt. On est passé de 12 %, 13 % à 5,5 %, 6 %. Donc, je comprends que vous êtes confortables avec l'engagement de les garder stables. Sauf que, qu'est-ce qui arriverait pour le consommateur si on faisait un lien plus immédiat entre les coûts pour Hydro-Québec et les taux qu'on charge? C'est-à-dire, est-ce que ce n'est pas vrai qu'il y a une marge pour baisser les tarifs?

M. Caillé (André): Alors, la question est très directe. Je vais y répondre tout aussi directement, Mme la Présidente. Le rendement actuel... Je pense que les Québécois, qui ont investi dans Hydro-Québec entre 12 000 000 000 $ et 13 000 000 000 $, ont droit, dans Hydro-Québec, à un rendement raisonnable. Bon. Après avoir dit ça, on est actuellement à 6,8 %, et puis c'est plutôt, pour être dans la classe de ceux dont on peut parler, quelque chose de l'ordre de grandeur de 9,8 %. Ce n'est pas le bon moment pour parler de baisse tarifaire à cause de cela. Si on atteignait déjà un rendement qui puisse être qualifié de raisonnable, on pourrait peut-être en parler.

Mais, encore une fois, mon expérience me dit que la stabilité, c'est quelque chose que les gens apprécient beaucoup. Une baisse, pour augmenter deux ans plus tard parce qu'il y a eu un revirement au niveau des taux d'inflation, ce n'est pas la meilleure approche pour une entreprise dans notre domaine, parce qu'on fournit une commodité.

M. Sirros: Donc, si je comprends bien, l'engagement d'une stabilité tarifaire, c'est un moyen d'augmenter le taux de rendement.

M. Caillé (André): Et de faire...

M. Sirros: Ce qui m'amène à ma deuxième question.

M. Caillé (André): Je m'excuse, mais... Enfin.

M. Sirros: Oui, allez-y.

M. Caillé (André): Mais ce n'est pas seulement d'augmenter le taux de rendement, c'est aussi la meilleure stratégie commerciale pour Hydro-Québec, notre meilleure relation avec nos clients, parce qu'ils ont confiance en ça.

M. Sirros: En tout cas, qui a comme effet d'augmenter le taux de rendement.

M. Caillé (André): Aussi, en même temps. Mais c'est...

M. Sirros: Aussi, en même temps. Et sur lequel vous mettez une emphase non négligeable et non sans importance non plus. Je ne vous tiens pas rigueur de ça, au contraire.

M. Caillé (André): Et qui a pour effet, Mme la Présidente, de corriger une situation où il n'y a pas un rendement satisfaisant pour les Québécois.


Assujettissement à la Régie de l'énergie

M. Sirros: Voilà. Alors, on s'entend. Le gel des tarifs a comme effet d'augmenter le taux de rendement d'Hydro-Québec. Ce qui m'amène à ma deuxième question: Pourquoi cet acharnement à ne pas vouloir se soumettre à la réglementation de la Régie, qui pourrait également juger du taux de rendement et permettre un ajustement peut-être par la façon que vous proposez, peut-être par d'autres façons? Mais on est passé d'une situation où on ne réglementait rien à un idéal de réglementation indépendante et autonome, dans une situation de réalité où on ne règle même pas les prix maintenant.

Parce que vous avez pris la stratégie de proposer ce gel tarifaire, ce qui à toutes fins pratiques enlève l'opportunité à la Régie d'examiner le tout. Du même coup, Hydro-Québec essaie de se retirer de la possibilité de soumettre ses coûts de production à la Régie. Donc, personne ne sera jamais capable de réglementer quoi que ce soit.

Et, du même coup, on se trouve ici à parler des stratégies d'Hydro-Québec, qui ont fait un zig et un zag, depuis deux ans, assez incroyables. Il y a deux ans, on était ici puis on parlait des dérivations tous azimuts, de la construction pour l'exportation, et là on a tout abandonné ça. À l'époque, c'était comme le chant des sirènes devant nous, il fallait qu'on se rattache au mât comme Ulysse pour résister à ce genre d'attraction pour des milliards qui allaient venir. Là, on est retourné à ce qu'on faisait de façon normale, vendre sur le spot quand on pouvait.

Alors, croyez qu'on a une certaine difficulté, certains d'entre nous, à savoir quand est-ce qu'on va vraiment avoir l'heure juste par rapport à ce qui s'en vient. Et on ne veut pas non plus inutilement critiquer la société d'État, mais on veut certainement représenter les intérêts des consommateurs. Et donc la question: Pourquoi on se voit détournés d'augmenter le taux de rendement en proposant un gel tarifaire plutôt que de tout soumettre honnêtement, ouvertement à la Régie et défendre les positions, ce qui d'ailleurs vous mettrait au même pied que toutes les autres entreprises réglementées en matière d'énergie en Amérique du Nord? Voilà, j'ai tout dit.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, il y a beaucoup de questions ici. Alors, je voudrais vous rassurer, tous, que nous n'avons rien abandonné. Je ne sais pas, vous avez utilisé l'expression «sirènes». Enfin. Et on n'a rien, rien, rien abandonné, vraiment rien abandonné de tous nos projets de parachèvement du développement hydroélectrique. On n'en parle pas de la même manière, ici, j'en conviens, que quand les gens en discutaient par rapport à leur plan de développement, à ce qu'Hydro-Québec appelait son plan de développement parce qu'il s'agissait justement du plan des projets de développement. On fait ici un plan stratégique. On n'en parle pas ici de la même manière.

Notre stratégie à cet égard, c'est de répondre à une attente de nos partenaires. Nos partenaires, ils disent: Vous allez en parler d'abord avec nous. Quand vous en parlez, vous, les premiers publiquement, on a l'impression qu'on est des partenaires de deuxième classe. Vous annoncez vos projets, vous venez nous voir après puis vous allez nous les passer dans la gorge si ça ne fait pas notre affaire. C'est ça qu'ils pensent. Alors, on s'abstient de parler de projets dont on n'a pas déjà parlé avec eux.

Cette année, il y en a certains à qui on a déjà parlé, on pourrait en parler, à tout le moins, un peu plus. Mais quand c'est dans un contexte de négociations, vous comprendrez qu'Hydro-Québec, bien, quand on négocie, négocier sur la place publique, c'est plus difficile pour nous, comme ça serait plus difficile pour eux, qui ne s'y prêtent pas, incidemment, à négocier sur la place publique. Ceci étant dit, rassurez-vous, nous n'avons rien abandonné, vraiment rien abandonné. Même, on est plutôt à la recherche de l'ensemble des projets qu'on pourrait réaliser, dans le parachèvement, au Québec.

Pour ce qui est de la réconciliation des chiffres, Mme la Présidente, entre le plan 1998-2002 et le 2000-2004, on va évidemment vous fournir tous ces chiffres-là au cours de cette commission parlementaire. Je pensais que le bon moment de le faire, c'était au moment où on étudiera les perspectives financières. Vous allez voir ce qu'il en est. Mais, essentiellement, pour l'instant, tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a des hypothèses au niveau des marchés financiers, la situation économique, qui ont changé. Vous allez voir qu'il y a des explications à cet égard.

Et il y a aussi le fait que, pour des sécheresses à venir, pour l'expliquer d'une façon facile à comprendre, on a, par prudence, prévu des sommes au niveau budgétaire pour faire face à ces situations – qui ne sont pas présentées aujourd'hui. Encore une fois, tout le passé, il est prévu, tout est en place. Mais, pour le futur, on a prévu des choses. On vous le dira. Enfin, on va vous réconcilier l'ensemble de ces chiffres-là – entre les deux plans, j'entends. Le dernier volet, c'était de comparer...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Laurier-Dorion, si vous voulez...

Des voix: La Régie.

(11 h 10)

M. Caillé (André): Ah! Pourquoi se soustraire à la Régie? Alors, la position d'Hydro-Québec à cet égard, entre la production, le transport, la distribution, elle est connue depuis très longtemps. Ce que nous avons proposé, quant à nous, pour ce qui est du transport et de la distribution, c'était de réglementer. Pour ce qui est de la production, nous avons proposé un point de départ qui disait: Voici, ça sera tant.

Puis, quand on me dit: On n'a pas les données, nous publions, Mme la Présidente, un rapport financier à chaque année, vérifié par deux firmes qui ont des licences qu'elles pourraient perdre si ces chiffres n'étaient pas bons, dans lequel vous trouvez toutes les réponses à des questions comme: Combien on a vendu par catégories de clients? Combien ça coûte? Quels sont les investissements dans chaque catégorie d'activité pour produire, transporter et distribuer?

Je vous assure, à Hydro-Québec, des vérificateurs, ça ne manque pas, on en a plus que n'importe quelle grande entreprise que je connais. On a un conseil d'administration qui exerce une régie exemplaire sur les activités de la direction. La transparence d'Hydro-Québec, les chiffres d'Hydro-Québec, on ne les invente pas, ils sont connus, nous les publions à chaque année. Prochainement, on va publier un autre rapport annuel qui va vous donner une mise à jour de tout ça, avec des notes qui sont extrêmement détaillées au niveau des états financiers. Alors, moi, quand on me parle de l'argument de la transparence, je me demande qu'est-ce qui n'est pas encore transparent.

M. Sirros: Je n'ai pas parlé de l'argument de la transparence... Je peux terminer, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est sur le même sujet, M. le député de Laurier-Dorion?

M. Sirros: Oui. Je n'ai pas parlé de l'argument de la transparence, mais je vous ai posé la question: Pourquoi Hydro-Québec propose de faire ce que vous dites que vous voulez faire? Et vous m'avez répondu en disant: On propose de faire de ce que je vous dis qu'on va faire, c'est-à-dire de proposer un point de départ plutôt que de soumettre à la Régie l'analyse des coûts de production pour avoir une réglementation de départ, pour pouvoir par la suite juger. Alors, je n'ai pas eu de réponse à ça.

Et, deuxième point, vous m'inquiétez quand vous dites que vous n'avez rien abandonné. Moi, j'ai cru que vous aviez abandonné la notion de construction pour l'exportation et qu'on s'embarque dans la notion, très acceptable, d'exporter nos surplus sur le spot, etc. Mais, il y a deux ans, on parlait de dérivation de rivières, on parlait de création de potentiels supplémentaires à nos besoins pour l'exportation. Est-ce que vous l'avez abandonnée, cette stratégie-là?

M. Caillé (André): On a pour stratégie de développer tous les projets hydroélectriques qui peuvent l'être au Québec, dans les délais les plus courts possible. On sait déjà que, dans notre domaine, ça prend plus de temps que dans d'autres filières énergétiques. À titre d'exemple, pour produire de l'électricité à partir de ressources thermiques, ça prend deux à trois ans; puis, dans notre cas, bon, enfin, c'est cinq, six ans, etc. Alors, il faut tenir compte de la réalité, c'est ainsi, je ne pense pas que celle-là changerait. Nos projets ont, par conséquent, glissé – c'est peut-être à ça que vous faites référence – ils ont certainement glissé ici d'une année. C'est le temps de s'entendre avec des partenaires.

On aura l'occasion, je suppose, au cours de cette commission, de regarder les questions d'équilibre d'offre et de demande. Vous allez voir qu'essentiellement ce qui se produit – ce qu'on vous dit quand on dit qu'on exportait 20 à partir du Québec, on va exporter encore 20, mais il va falloir en acheter 13 sur les marchés extérieurs – eh bien, ça diminue. Ce n'est pas nouveau pour Hydro-Québec, ça, je pense que ça a toujours été ainsi. Quand on construit quelque chose, l'ajout de production, surtout si c'est un grand projet, est élevé; pendant un temps, les exportations de production du Québec augmentent; par la suite, elles vont diminuant, avec la demande québécoise.

Je pense que, compte tenu des délais de construction... on ne peut pas dire qu'on construit juste pour les marchés extérieurs. Parce que, éventuellement, avec la croissance de la demande au Québec, s'il n'y a pas d'autres constructions, quelqu'un pourrait faire l'argument que ça va tout finir par être utilisé au Québec, c'est évident, comme ça a toujours été le cas depuis, je pense, le début des années quatre-vingt, quand on a parlé de projets d'exportation ou de devancement de projets de construction. Je pense aussi que d'autres pourront dire: Oui, mais, pendant un temps, vous allez exporter plus de la production du Québec. Ça va être vrai aussi. Ce n'est pas une affaire qui est tranchée au couteau, pour dire: Ceci, c'est tout pour l'exportation, ceci, c'est tout pour le marché québécois.

Mais il y a une affaire certaine, tous ces équipements-là, le développement hydroélectrique, c'est l'affaire la plus avantageuse en termes économiques, c'est l'affaire la plus avantageuse en termes environnementaux. On est bien placé, on est très, très bien positionné au Québec, on a une ressource extraordinaire. On ne peut pas en même temps parler de gaz à effet de serre puis de pollution atmosphérique par les pluies acides puis se dire qu'on n'a pas la bonne filière. Je pense qu'on ne l'a pas assez dit, puis je pense que vous-même l'avez déjà dit, qu'on devrait insister là-dessus. Alors, on a un très, très bon produit, on va le développer. Éventuellement, c'est les Québécois qui vont être gagnants, parce que, économiquement, c'est le meilleur, puis environnementalement, c'est plus acceptable. On ne sait pas, hein, personne ne sait exactement ce que feront les gouvernements pour rencontrer les accords de Kyoto. Ce qu'on sait, c'est que, quoi qu'ils fassent, ça ne peut pas faire autrement que d'être à notre avantage. On va être des gagnants.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé, je vous remercie. M. le ministre.

M. Brassard: D'abord, quelques remarques, suite aux propos du député de... Laurier-Dorion – je suis plutôt habitué de l'appeler par son prénom, c'est pour ça. Ha, ha, ha! Il n'y a pas de vide actuellement sur le plan tarifaire. C'est la Régie. Il n'y a pas de cause tarifaire devant la Régie. Il n'y en aura pas. Hydro-Québec, en annonçant le gel tarifaire et en annonçant même que son intention, c'est de le poursuivre jusqu'en 2004, à la fin du plan stratégique, ça a comme signification qu'Hydro-Québec n'a pas l'intention de se présenter devant la Régie avec une cause tarifaire, puisque son orientation, c'est de les geler, les tarifs. Alors, ça a ça comme conséquence.

L'autre remarque que je voulais faire, Mme la Présidente, c'est que, quand on parle du taux de rendement d'Hydro-Québec puis de son intention de l'augmenter, on a l'air d'insinuer que ce n'est pas tout à fait souhaitable, que c'est même répréhensible d'avoir ça comme objectif. Je pense qu'il faut le dire, puis, M. Caillé, vous l'avez mentionné tantôt, quand on compare Hydro-Québec à d'autres entreprises de même nature puis qui ont la même mission puis qui oeuvrent dans le même secteur, quand on compare les taux de rendement, c'est évident que le taux de rendement actuel d'Hydro-Québec n'est pas acceptable. Et l'actionnaire qu'est le gouvernement, c'est-à-dire la population du Québec, doit aussi reconnaître que ce n'est pas acceptable que la société d'État Hydro-Québec obtienne un taux de rendement aussi faible.

Il faut, au contraire, se réjouir – se réjouir – du fait qu'Hydro-Québec, dans son plan stratégique, ait comme objectif d'augmenter substantiellement son taux de rendement et de se rapprocher autour de 10 %, ce qui est un taux de rendement tout à fait normal, légitime, acceptable et qui est loin d'être exagéré. Et c'est évident que ça se traduit par des bénéfices nets plus élevés et par des dividendes plus élevés versés au gouvernement.

Mais il faut bien se dire, il faut que les citoyens soient bien conscients que, quand Hydro-Québec verse en dividendes 300 000 000 $, ou 400 000 000 $, ou 500 000 000 $, ou 800 000 000 $ dans le trésor public, dans le fonds consolidé, bien, ça veut dire que, ça, c'est de l'argent que le gouvernement puis que le ministre des Finances n'est pas obligé d'aller chercher sous forme de taxes et d'impôts. C'est ça que ça signifie. Ce 700 000 000 $ de plus dans le fonds consolidé, ça veut dire qu'on n'a pas à aller chercher 700 000 000 $ de taxes et d'impôts chez les contribuables. Il faut faire ce lien, à partir du moment où cette société d'État a comme unique actionnaire le gouvernement, c'est-à-dire la population, ça a ça comme effet. Alors, atteindre un taux de rendement raisonnable, c'est un objectif souhaitable et légitime et ça n'a rien de répréhensible et de malséant, dans les circonstances. Je pense qu'il faut l'établir très clairement au départ.


Compétitivité des tarifs proposés à la grande industrie

La question que je voudrais poser concernant les tarifs... Parce qu'on en est là, puisque, pour tout ce qui est du développement de projets, que ce soit le projet du bas de Churchill ou les autres projets de développement hydroélectrique envisagés par Hydro-Québec, je pense qu'on va l'aborder en long et en large cet après-midi. Mais, moi, je reviens aux tarifs et je reviens particulièrement aux tarifs concernant la grande industrie, parce que je pense que c'est intéressant de voir... On va regarder ça plus en détail, mais je pense que c'est un document important que vous venez de remettre aux membres de la commission, Comparaison des prix de l'électricité dans les grandes villes nord-américaines .

(11 h 20)

Vous l'admettez d'emblée que, si on regarde ça dans une perspective historique, l'avantage comparatif du Québec par rapport à d'autres territoires environnants, à d'autres administrations qui nous environnent, que ce soit le Nord-Est des États-Unis, les autres provinces du Canada également, semble s'être détérioré au fil des années. On n'est pas à la queue, là. Vous l'avez mentionné, c'est évident, on n'est pas à la queue. Mais il semble que, même dans certains secteurs, on n'est plus à la tête, on n'est plus à la tête du peloton. Donc, ça veut dire qu'au fil des années l'avantage comparatif s'est détérioré, concernant particulièrement les grands secteurs industriels, la grande industrie.

Et donc, il y a certains secteurs puis certains porte-parole aussi d'organisations économiques qui jugent que le Québec a déjà perdu son avantage comparatif au plan des prix de l'électricité – toujours en comparaison évidemment avec d'autres administrations – en tout cas que cet avantage s'est suffisamment dégradé pour les placer dans des situations difficiles.

On le sait, c'est le cas, par exemple, de toute l'industrie forestière. Ciblons une industrie en particulier. Puis ce n'est pas banal, l'industrie forestière, c'est une industrie majeure dans l'économie québécoise, sur le plan des exportations des produits, ce n'est pas rien. Ils considèrent qu'ils ont perdu cet avantage comparatif.

Est-ce qu'Hydro-Québec est consciente de cette problématique? Et comment entend-elle, je dirais, aborder cette problématique, comment entend-elle la régler aussi, la résoudre? Et qu'est-ce que vous entendez faire avec ces grands groupes industriels qui s'inquiètent, et je pense que c'est un fait, d'une certaine dégradation... je ne veux pas dire qu'ils ont les tarifs les plus élevés en Amérique du Nord, mais qui sont préoccupés puis inquiets d'une certaine dégradation d'un avantage comparatif qui autrefois était l'évidence même, ne faisait absolument aucun doute?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, à cet égard, d'abord, les faits sont vrais, par rapport à l'Ouest du Canada, pas ailleurs en Amérique du Nord, ni dans l'Est du Canada. Si on prend l'exemple des pâtes et papiers, les tarifs sont meilleurs là-bas. On a une situation qui n'est pas aussi avantageuse au Québec. Il faut voir à corriger cette situation sans changer les tarifs, en faisant preuve de flexibilité. Je m'explique.

Premièrement, Hydro-Québec a eu, depuis quelques années à tout le moins, des programmes de rachat de puissance des producteurs, comme les gens... Ça s'appliquerait aux pâtes et papiers, ça pourrait s'appliquer à d'autres, bien entendu. On avait des programmes universels s'appliquant à tous.

Il faut savoir ici que de racheter, Mme la Présidente, de la puissance de nos clients, ça a une valeur pour nous. Si on rachète quelque chose à sa valeur, ça veut dire que ça n'aura pas d'impact négatif sur le reste de la clientèle ou sur les bénéfices de l'entreprise. Alors, c'est ça qu'on essaie de faire, racheter de la puissance de nos clients qui sont dans cette situation, où ce serait souhaitable d'améliorer notre position concurrentielle. On le faisait globalement. On l'a demandé...

Puis il y a une étude en cours avec l'Association de l'industrie des pâtes et papiers, où on va aller chez chaque client – parce que, ça, ça peut être variable d'un client à l'autre, la capacité qu'ils ont de nous revendre de la puissance – et on va la valoriser, cette puissance-là. Hydro-Québec a la capacité de la valoriser. Ce n'est pas parce qu'il va y avoir un coût additionnel que les tarifs de quelqu'un d'autre vont augmenter. On va avoir la capacité de la valoriser, cette puissance-là, ce qui va faire en sorte que, pour ces usines-là, elles vont pouvoir baisser, baisser leurs coûts d'énergie. Première piste. Et, encore une fois, c'est en cours, il y a de nos gens qui visitent les usines une à une.

Deuxièmement, on peut leur vendre de la puissance interruptible. Encore une fois, c'est la même chose, c'est quelque chose qui a une valeur pour nous. Alors, on va aller chercher cette valeur-là, on peut donner cette valeur-là aux clients qui appartiennent à ces catégories-là.

Troisièmement, on a un produit qu'on appelle la tarification en temps réel. C'est une tarification qui est basée sur les prix dans les marchés voisins. Ils ont raison quand ils vous disent que la valeur de cette tarification-là a diminué au cours des années, parce que, contrairement à tout ce qui a pu être dit, les prix dans les marchés voisins, ils ont augmenté. À partir du moment où notre tarif était indexé à quelque chose qui augmente, bien, ça a augmenté. Alors, la valeur, pour eux, est moins grande. Ça peut fluctuer. Ça peut fluctuer, comme mon collègue l'a dit, dans le temps. Ça fluctue beaucoup dans le temps, selon les heures. Alors, on peut regarder au niveau de la TTR, par exemple, voir quels avantages. Sans qu'il nous en coûte, on pourrait apporter aux entreprises de pâtes et papiers. Mais là ça va prendre beaucoup plus de rapidité dans la communication.

M. Brassard: M. Caillé, est-ce que...

M. Caillé (André): Oui. Excusez-moi.

M. Brassard: C'est une exigence pédagogique. Est-ce que vous pourriez expliquer, là, parce qu'il y a bien des profanes qui nous écoutent, qu'est-ce que c'est, le tarif en temps réel?

M. Caillé (André): Le tarif en temps réel, c'est un tarif où on va faire la facturation de la valeur de l'électricité basée sur le coût qu'on peut lire en temps réel, sur un ordinateur, dans les marchés voisins. Si on a un avantage parce qu'il y a un prix bas, à un moment donné, dans ces courbes, M. Vandal va dire: Bon, bien, je peux vous l'offrir à tel moment, en autant que tout ça puisse être géré. Ça, c'est tout de la gestion en temps réel, ça prend beaucoup d'informatique, ça prend de l'équipement pour que l'information soit disponible rapidement. Ce n'était peut-être pas faisable au cours des années passées, on peut le faire maintenant.

En pratique, retenez, pour la définition – j'espère que ma pédagogie est suffisante ici – on va facturer le client selon un prix pas convenu autrement que par le prix qui va exister dans le marché. Alors, voilà. Puis là on pourra faire différentes modalités, bien entendu, pour s'adapter. Encore une fois, l'esprit, ici, est lequel? L'esprit, c'est d'amener un avantage chez notre client sans qu'il en coûte à Hydro-Québec et, par conséquent, sans qu'il en coûte aux autres classes tarifaires et que ça ne vienne modifier l'interfinancement.

Au niveau de l'interfinancement, bon, on l'a dit, nous, on ne veut pas le changer. Incidemment, les grands clients industriels – l'interfinancement, c'est dans le réseau de distribution qu'il se trouve – comme ils n'utilisent pas ou très peu le réseau de distribution, c'est pour ça qu'eux ils ne contribuent pas à l'avantage du marché résidentiel. Ça fait que ce n'est pas une piste retenue par nous puis ce n'est pas une piste qui peut être retenue, parce que ça changerait peu de choses.

Toujours au niveau de l'implantation de nouveaux clients industriels qui, sans être des papetières, seraient dans la catégorie visée par les tarifs de grande puissance ou de moyenne puissance, on a mis en place un programme, en octobre 1996, je crois. Il a été annoncé – je me souviens de cela – au sommet économique qui a été tenu à Montréal. Et là on vient en aide à des gens qui veulent investir ou agrandir ici.

Ce qui est prévu dans ces programmes-là, c'est de leur donner une garantie un peu plus longue au niveau de la stabilité, de la non-augmentation des prix ou de différentes formules d'indexation à l'IPC ou autrement – toujours le même principe – sans qu'il en coûte nécessairement ou à Hydro-Québec ou aux autres classes de tarifs, comme je le disais tantôt. L'esprit, ici, c'est que, dans ces cas-là, on le sait, on le réalise et qu'on va chercher des moyens, on va offrir de la flexibilité à ces clientèles-là pour pouvoir réduire leur facture d'électricité.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Sur le même sujet, M. le ministre?

M. Brassard: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Dernière question.

M. Brassard: Évidemment, là, je comprends que ce qu'Hydro-Québec cherche à faire avec les grands secteurs industriels, ce n'est pas de modifier la grille tarifaire, mais c'est de recourir à la flexibilité en offrant un certain nombre de moyens, un éventail de mesures aux industries pour faire en sorte que la facture, elle, soit réduite.

M. Caillé (André): Voilà.

(11 h 30)

M. Brassard: Au fond, c'est ça qui compte, en fait. Quand j'ai des échanges avec l'industrie forestière, en particulier, par exemple, ce qui leur importe, c'est d'en arriver à réduire leur facture énergétique. Et c'est ce que vous comprenez. Maintenant, la question que je pose – je comprends très bien l'orientation et ce qu'entend faire Hydro-Québec en cette matière; je regarde la situation économique et financière, par exemple, de l'industrie des pâtes et papiers et j'ai comme réaction de vous dire que le temps presse – c'est: Est-ce que vous comptez, là, dans des délais relativement brefs, mettre en oeuvre ces mesures-là et pouvoir les offrir à la grande industrie?

M. Caillé (André): Oui. Bien sûr, on va agir ici avec diligence, comme je le disais, sur le rachat de puissance. Nos gens visitent déjà les responsables de l'approvisionnement dans les usines pour établir ce qui peut être fait, puis on le fait d'une façon optimale pour chacun, parce que encore une fois on est en situation... C'est nos vendeurs qui rencontrent les clients, mais ils se transforment en acheteurs.

M. Brassard: C'est du cas par cas, dans ce cas-là.

M. Caillé (André): C'est du cas par cas, pour être sûr qu'on va jusqu'au mieux qu'on peut faire sans, encore une fois, qu'il y ait de coût pour Hydro-Québec.

Tantôt, Mme la Présidente, j'ai oublié de mentionner une chose: Il y a quelques semaines, on me parlait d'un tarif pour les autoproducteurs. Plusieurs, notamment dans l'industrie des pâtes et papiers, ont souhaité, souhaitent ou produisent de l'électricité à partir de la matière végétale. Les équipements qu'ils ont ont besoin d'entretien annuel, de sorte qu'ils doivent les arrêter pendant certaines périodes. Et puis, il peut y avoir aussi des bris; et, s'il y a des bris, ça peut avoir des conséquences économiques et financières pour eux très importantes, de sorte qu'ils demandent à Hydro-Québec un tarif...

Une voix: D'équilibrage.

M. Caillé (André): ...d'équilibrage. Merci pour le terme français. Un tarif d'équilibrage, ça veut dire qu'on va fournir quand ça ne pourra pas fonctionner de leur côté. Si on leur fournit un tarif dit d'équilibrage à n'importe quel moment de l'année, on est obligé d'en établir le prix en tenant compte que cette livraison pourrait avoir eu lieu, par exemple, la semaine dernière, quand il faisait à Montréal -25 °C. On s'est rendu compte que l'industrie ne demande pas nécessairement ça, elle voudrait d'un tarif d'équilibrage lui-même interruptible. Elle comprend – les spécialistes comprennent tous la même chose – c'est sûr, que, si on veut alimenter la journée où il fait le plus froid, dans les pires circonstances, le tarif d'équilibrage, il va être très élevé. Mais, si on se dit que ce tarif peut être interrompu, peut-être qu'on va couvrir 95 % des situations où elle va avoir besoin de nous en relève, et puis ça va être très satisfaisant pour elle. Enfin, il y a des discussions à cet égard également. Ça aurait deux effets: baisser leurs coûts et puis permettre le développement de la filière de production à partir de matières végétales.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. Alors, merci. Mme la députée de La Pinière. Là, je vous dis, j'ai plusieurs intervenants qui veulent vous poser des questions. Alors, j'apprécierais que, si possible, on puisse restreindre aussi sur le temps des réponses, pour vous rappeler que le temps des réponses compte sur le temps de chacun des groupes parlementaires, aussi.


Gel tarifaire au-delà de 2002 (suite)

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je reste sur le gel des tarifs. M. Caillé, vous nous avez confirmé qu'il y aura gel des tarifs jusqu'en 2002 et que, au-delà, du moins pour la période couverte par le plan stratégique, jusqu'en 2004, vous avez dit qu'on a des très, très bonnes chances. Alors, entre «confirmé» et «des très, très bonnes chances», il y a des grosses nuances. Je voudrais savoir: Pourquoi est-ce que vous n'êtes pas capable de nous annoncer aujourd'hui et de nous confirmer le gel jusqu'en 2004, période couverte par le plan stratégique? Et sur quoi est-ce que vous vous basez en fait réellement pour déterminer le gel tarifaire sur une période de cinq ans?

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. Alors, la raison pour laquelle je ne peux pas confirmer aujourd'hui, c'est qu'il y a un facteur qui échappe à notre contrôle, c'est ceux, les facteurs, qui résultent du contexte économique. Si on devait connaître une grande inflation, non prévue aujourd'hui – on ne la prévoit pas, nous non plus – on pourrait se retrouver avec une croissance importante de nos charges financières et des ajustements possibles également au niveau de nos charges d'exploitation. On ne le sait pas. On ne le sait pas et, par conséquent, on se dit: Ici, soyons prudents. N'avançons pas des choses sur des facteurs qui ne sont pas sous notre contrôle. Très honnêtement, c'est juste les facteurs qui appartiennent au contexte économique qui nous empêchent d'être capables de confirmer aujourd'hui jusqu'en 2004.

Pourquoi «des bonnes chances»? Bien, des bonnes chances, c'est que notre lecture à nous... Notre vice-président aux finances me disait encore la semaine dernière sa théorie quant à l'évolution de la situation financière; il pourra vous en parler lui-même jeudi. Ça fait beaucoup de sens et ça ne prévoit pas, justement, d'événements au niveau économique qui fassent en sorte qu'on ne soit pas capables de prolonger jusqu'en 2004, d'où mon expression: On a de très bonnes chances. Mais il n'y a pas de vice-président aux finances d'aucune entreprise, dans toute mon expérience, qui donne des garanties à cet égard.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.


Calcul de la croissance de la demande

Mme Houda-Pepin: Oui, merci beaucoup. L'un des critères sur lesquels vous reposez votre estimation de gel des tarifs, c'est la croissance de la demande. Je pense, à la page 7, vous dites: «La croissance de la demande d'électricité au Québec amènera des ventes additionnelles de 17,4 TWh par rapport à 1999, soit une augmentation de 12 %.» Donc, on se base sur une augmentation de 12 %.

Un peu plus loin dans le même Plan stratégique , à la page 16, vous dites: «Au cours des 15 prochaines années, la demande d'électricité au Québec devrait croître à un rythme moyen de 1,4 % par an, ce qui nous donnerait une croissance de 7 % sur cinq ans.»

Comment expliquez-vous la différence entre les deux données qui sont contenues dans le même rapport? C'est quoi, le chiffre sur lequel on doit se baser, qui est fiable, de façon réaliste?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, je suis à la page 16. Mme la Présidente, entre 1984 et 1999, alors que c'était 3,2 % par année – je vois ce chiffre – à partir de 1999, nous, on prévoit...

Mme Houda-Pepin: Non, je suis au paragraphe 4: «Au cours des 15 prochaines années...» Vous avez le chiffre qui est indiqué.

M. Caillé (André): O.K. C'est ça. «De 1999 à 2014 – j'y arrivais – ce sera 1,4 %.» Enfin, on essaie d'être réaliste, de tomber sur une mesure... finalement faire des prévisions qui correspondent à la réalité. Dans le passé, vous le savez, Hydro-Québec a déjà fait des prévisions de demande, par exemple, puis elles ne se sont pas réalisées.

Dans le secteur résidentiel, de mémoire, on prévoit une croissance beaucoup moins grande de la demande dans le futur que celle qu'on a connue dans le passé. Ça tient, entre autres...

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente, ma question est très précise.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Dans le rapport, il y a deux chiffres...

M. Caillé (André): Ah!

Mme Houda-Pepin: ...qui sont donnés par Hydro-Québec. À la page 7, on nous dit que le taux de croissance, la croissance de la demande se chiffrerait à 12 %, et pour la même période, à la page 16, on nous dit que le taux de la demande, la croissance de la demande, c'est 1,4 % par année, ce qui nous donnerait 7 % sur cinq ans. Alors, je veux savoir: C'est quoi, le chiffre qui est bon dans ce rapport?

(Consultation)

Mme Houda-Pepin: Et j'ajouterais, pour le complément d'information: Dans le document qui a été distribué hier, Plan stratégique 2000-2004 , ce n'est pas paginé, mais c'est: Marché du Nord-Est: Prévision de la demande électrique. La croissance annuelle, c'est 1,9 %, pour le Québec toujours, là. Alors, je voudrais juste qu'on se comprenne sur les chiffres, parce que je ne veux pas vous comparer à d'autres agences ou d'autres institutions. Mais, à l'intérieur d'Hydro-Québec, est-ce que ces chiffres ont été colligés par différentes personnes qui ne se sont pas parlé, ou quoi?

M. Caillé (André): Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): ...il y a une réconciliation des chiffres qui se produit en ce moment, juste à ma droite. Quand les chiffres auront été réconciliés les uns avec les autres, il semble, enfin, ce que j'entendais de mon oreille droite, c'est que ce n'est pas exactement les mêmes périodes. Enfin, on va vous réconcilier tous ces chiffres-là et, avec votre permission, Mme la Présidente, on fournira une réponse ultérieurement dans le cours de la session.

Mme Houda-Pepin: C'est la même période.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.

(11 h 40)

Mme Houda-Pepin: Oui. Pour le bénéfice de M. Caillé, on parle ici de la même période: 1999-2005. On parle ici d'une croissance de 1,4 % par année, à la page 16, et on parle, à la page 7, d'une croissance de 12 %, et je parle plus spécifiquement de la demande au Québec. Donc, on ne parle pas d'autre chose, mais de la même chose: la croissance de la demande au Québec, et on a trois chiffres différents. Alors, comment on peut se fier aux prévisions et aux analyses que vous faites si, au fond, les chiffres que vous nous donnez ne sont pas conciliés, comme vous dites? Et, moi, je vous dirais: Ils ne sont pas crédibles.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Je n'ai pas dit qu'ils n'étaient pas conciliables, Mme la Présidente, les chiffres. On va vous fournir l'explication quant à la conciliation de ces chiffres, période pour période, etc., ultérieurement dans le cours de cette session de la commission.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'ici la fin ou en début d'après-midi.

M. Caillé (André): Non, non, le plus rapidement possible.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Est-ce qu'il y a d'autres questions, Mme la députée de La Pinière?


Taux de satisfaction de la clientèle

Mme Houda-Pepin: Dernière, dernière question, Mme la Présidente, pour laisser du temps à mes collègues. Vous avez dit dans votre présentation, M. Caillé, qu'il y a un taux de satisfaction très élevé des clients vis-à-vis d'Hydro-Québec, et je n'en doute pas. Et vous nous avez donné le chiffre de 90 % de taux de satisfaction. Il faudrait féliciter tous les employés d'Hydro-Québec pour les services qu'ils rendent à la population.

Mais, en même temps, vous avez dit: Depuis l'été dernier, Hydro-Québec a noté un fléchissement. Alors, selon vos sondages internes, que dit le fléchissement?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, la clientèle qui est très satisfaite, c'est toujours au-dessus ou très près de 90 %, de mémoire. Peut-être qu'il y a eu un 89 %. C'est au niveau de la clientèle des très satisfaits. Alors, les très satisfaits plus les satisfaits, ça donne plus que 90 %. Ça varie entre 90 % et 94 %. Donc, c'est plutôt de 94 % à 90 %, si on parle de fléchissement.

Si on parle des très satisfaits, on a déjà été à 42 %, et le fléchissement, c'est jusqu'à 37 % ou 38 %. 38 %, de mémoire. C'est ça que j'entends par «fléchissement». On est toujours à 90 % de clients satisfaits ou très satisfaits, mais reste que ce fléchissement, selon nos données, de la façon dont les données sont prélevées, il est significatif. Il a une signification. Ce n'est pas juste des variations statistiques qui n'ont pas de signification, là. La précision de la mesure est assez grande pour dire qu'il y a, ici, une signification.

À quoi c'est dû? Bien, ça dépend en partie des ouragans qu'il y a eu à l'été 1999, alors qu'on a perdu plusieurs dizaines de milliers, voire centaines de milliers de clients qui ont perdu le service de l'électricité, des difficultés de communication avec les municipalités et avec la clientèle, à ce moment-là, des difficultés au niveau de la prévision exacte quand les gens allaient être raccordés. Je pense qu'ils ont été raccordés un jour puis parfois deux jours plus tard que ce qu'on avait anticipé deux jours auparavant.

Il y a eu aussi parce que, durant l'été, on a eu la période que vous connaissez, c'est-à-dire une période de conflit de travail où il y avait une difficulté pour nous à lire les compteurs et à faire la facturation basée sur des factures réelles. Comme tous les clients, comme tout consommateur, les clients d'Hydro-Québec préfèrent obtenir une facture qui soit basée sur une lecture que pas sur une lecture. Je suis heureux de vous dire aujourd'hui que ça a pu être corrigé, cette situation, quant à la lecture, pour le mois de décembre, comme j'en avais informé le ministre, mais il reste qu'il y a eu des événements qui ont eu un impact négatif sur la satisfaction. On constate le fléchissement et on se dit: Nous allons agir. Mon collègue, Yves Filion, pourra vous dire ce qu'il fait pour améliorer nos communications avec les citoyens et avec les municipalités en cas de panne, planifiée ou non planifiée, là, des événements exceptionnels.

Mme Houda-Pepin: Sur le plan des communications, je sais ce que vous faites au niveau des municipalités et des MRC.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée, est-ce que c'est sur le même sujet? C'est vraiment la dernière, là.

Mme Houda-Pepin: Dernière, oui, sur le même sujet. Concernant les sondages, vous les faites à quelle fréquence? Qui les fait? Selon quelle méthodologie? Et est-ce qu'on peut avoir des exemplaires de ces sondages-là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. C'est l'entreprise SOM qui les fait, c'est une fois par mois, et les valeurs ont une précision de 3,5 %.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci.

Une voix: Ça coûte combien?

Mme Houda-Pepin: Oui, ça coûte combien? Parce que c'est fait par mois.

M. Caillé (André): Je prends note de la question. On vous fournira la réponse. Je ne sais pas.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, M. le député de Maskinongé.


Tarif pour les serristes et les stations de ski

M. Désilets: Tantôt, M. Caillé, vous avez parlé de flexibilité ou de modulation des tarifs pour l'entreprise. Pour vous, est-ce que les entreprises comme les «serriculteurs» et les stations de ski, qui vous ont rencontré d'ailleurs pour obtenir des tarifs adaptés à leurs besoins et à leur profil d'entreprise, est-ce que ces entreprises, en fait, font partie de votre stratégie face à la modulation ou encore à leur rythme? Et allez-vous en tenir compte et à quelle vitesse? Vous avez dit tantôt que vous étiez pour faire ça avec diligence pour la grande entreprise. Mais, ça, c'est des plus petites. À quelle vitesse ces gens-là peuvent-ils espérer avoir une modulation, si jamais il y en a une?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, justement, le cas des serristes est intéressant, il montre la flexibilité qu'Hydro-Québec a par rapport à ses tarifs. Alors, il y a eu entente. J'ai des données ici qui nous disent: En mai 1995, il y a eu une entente pour une réduction par rapport au tarif BT – M. Filion va vous dire de quoi il s'agit pour le tarif BT plus tard – on a enlevé 25 %. Ça a commencé avec une escompte de 25 % valide jusqu'au 30 septembre 1997. Par la suite, Hydro-Québec a fait un premier compromis et le 25 % s'est étendu jusqu'à 1998. Et on a proposé à ce moment-là que le 25 % devienne 16 % jusqu'en septembre 1999 et qu'il reste encore un escompte de 8 % jusqu'en septembre de l'an 2000, donc en septembre qui vient. À partir de septembre de l'an 2000, il ne devrait plus y avoir, selon le programme qui est en place, d'escompte par rapport au tarif BT, qui est déjà avantageux pour les serristes. L'information que j'ai à cet égard-là, c'est que les tarifs pour les serristes au Québec sont compétitifs avec les tarifs pour les serristes – voire même très compétitifs – avec les tarifs qu'ont les serristes ailleurs, dans d'autres provinces canadiennes. Voilà où on est.

Mais, ici, la question, c'est qu'Hydro-Québec a vu ses escomptes pour les serristes comme une façon de les aider à démarrer en affaires, avec un escompte qui allait diminuant. Ça a duré plusieurs années, c'est depuis 1995 que c'est ainsi, et présumément, au moment où, en 1995, les gens ont fait l'engagement sur ce genre de tarif, ils savaient que les escomptes allaient aller en diminuant, voire disparaître à terme. Voilà où nous en sommes.

Pour ce qui est des stations de ski, je ne connais pas la réponse. Mon collègue Filion pourra certainement vous la dire et compléter en ce qui concerne les serristes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. D'abord, sur le tarif BT, il s'agit d'un tarif biénergie. Donc, c'est un tarif qu'on offre à notre clientèle résidentielle et clientèle d'affaires, et l'objectif de ce tarif-là est d'effacer de la demande de charge en période de pointe. Alors, ce tarif-là est offert aux «serriculteurs», et je dois admettre que ça représente, je dirais, une interprétation assez large du tarif biénergie pour l'offrir aux serriculteurs. Donc, je pense que nous avons fait un effort pour lui donner une interprétation flexible pour offrir cet avantage-là aux «serriculteurs». Alors, ils bénéficient donc d'un tarif, selon nous, très avantageux. Et quand on compare, par exemple, au marché autour de nous, c'est un avantage d'au moins 30 % par rapport à la compétition, plus particulièrement en Ontario.

En ce qui concerne les stations de ski, il y a eu il y a quelques années des tarifs également avantageux. Mais, comme vous comprendrez, les stations de ski, ça fait un appel de puissance surtout l'hiver. Alors, ce tarif-là créait une difficulté importante sur la gestion du réseau en fonction d'un appel de puissance en période de pointe. Donc, on a finalement démontré, je pense, qu'il n'était pas nécessairement économique d'accorder un tel tarif, au niveau du principe d'équité pour l'ensemble de la clientèle québécoise.

M. Désilets: O.K.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui. Est-ce que vos «serriculteurs», s'il en arrive un nouveau, est-ce qu'il bénéficie du même plan, ou le plan s'est établi de 1995 à aujourd'hui à peu près et c'est fini?

M. Filion (Yves): Nous avons l'intention de maintenir...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

(11 h 50)

M. Filion (Yves): Excusez-moi, Mme la Présidente. Nous avons l'intention de maintenir le tarif biénergie pour les «serriculteurs» pour, je dirais, au moins la période du plan stratégique. Ce qui sera enlevé, c'est la réduction de 25 % du tarif biénergie. Celle-là, elle doit disparaître graduellement, tel que M. Caillé vous l'a expliqué tout à l'heure, et on n'a pas l'intention de modifier ce programme-là de réduction graduelle de la réduction de 25 % du tarif BT.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui, merci. Dans un autre ordre d'idées, avez-vous des tarifs ou une philosophie pour favoriser la deuxième ou troisième transformation au Québec? On parle de la grande entreprise, on parlait d'aluminium tantôt. Ça serait intéressant d'avoir une deuxième, une troisième transformation au Québec pour créer de l'emploi chez nous. Est-ce qu'il y a une philosophie? Est-ce qu'il y a une politique pour favoriser ce genre d'entreprises?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente, et c'était pour l'essentiel l'objectif du programme de 500 MW annoncé à Montréal en octobre 1996. Alors, par exemple, ça peut s'appliquer à la transformation de l'aluminium ou à d'autres types de transformation. Je n'ai pas d'états, de résultats du programme, mais je vous parle d'un rapport que j'ai eu il y a quelques mois déjà. Il y a déjà plusieurs entreprises qui en ont profité soit pour accroître leur production, soit pour implanter une nouvelle entreprise.

M. Désilets: C'est beau.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député de Maskinongé. M. le député de LaFontaine.


Situation et perspectives en matière d'interfinancement (suite)

M. Gobé: Merci, Mme la Présidente. M. Ménard, M. Caillé, M. Filion, bonjour. La dernière fois qu'on a eu à se parler, c'était dans un débat sur une ligne à haute tension dans le nord-est de Montréal. M. Caillé, les experts que nous avons entendus hier longuement nous ont sensibilisés à une situation un peu particulière qui caractérise la détermination des tarifs. En effet, il semble que les états financiers présentés par Hydro-Québec ainsi que les rapports annuels sont consolidés, avec l'ensemble des secteurs réglementés et non réglementés d'Hydro-Québec et des entreprises qui sont de l'extérieur, comme Hydro-Québec USA et les autres participations et filiales qu'Hydro-Québec peut avoir, ce qui fait en sorte qu'il est très difficile de déterminer qui paie quoi, qui paie qui, et quand un fait de l'argent, quand l'autre en perd, ce qui nous amène à poser la question suivante: Est-ce que les consommateurs québécois ne paieraient pas dans leur tarif, même s'il est gelé, une partie d'équipement qui sert à faire de la production d'exportation ou de vente sur le marché spot et non pas seulement l'électricité qui est produite pour leur consommation? C'est clair?

Parce que je vois que vous parlez beaucoup et longtemps, j'essaie de synthétiser ma question. Je pourrais vous la détailler plus, si vous voulez, on a abondamment de documentation là-dessus de la part des experts.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, pour ce qui est des données du rapport sur l'année 1998, les clients québécois ne paient pas pour les exportations, les clients québécois dans leur ensemble bénéficient des exportations. Pour ce qui est des ventes dites régulières – ça, c'est les fameux contrats à long terme – on a des revenus, ici, au-delà du revenu du tarif L. Au-delà du bénéfice qu'engendrerait le tarif L, de 107 000 000 $, pour les ventes à court terme, elle a des bénéfices, l'ensemble de la collectivité québécoise, de 18 000 000 $ au-delà de ce que rapporterait le même tarif L. Et, pour ce qui est des transactions où on achète de l'énergie sur les marchés à l'extérieur du Québec – on achète de l'électricité qu'on ne produit pas nous-mêmes – que l'on stocke, on achète hors pointe, on achète bas – comme diraient les anglophones – et on revend haut, eh bien, là ils font 20 000 000 $ par année.

Les Québécois sont avantagés par les exportations. En aucune façon on ne peut dire, sur la base de ces données-là, que des clients québécois supportent par leurs tarifs les exportations; c'est plutôt le contraire. C'est le contraire. Ce sont les données de 1998. C'est basé, ces chiffres-là, sur des résultats vérifiés par deux firmes de comptables. Dès que les résultats de 1999 auront été publiés puis qu'ils auront été, par conséquent, vérifiés, nous allons rendre les mêmes choses publiques, ce que nous faisons régulièrement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, M. Caillé, à ce moment-là, peut-être vous allez pouvoir nous dire si vous avez étudié les coûts qu'Hydro-Québec encourt pour desservir uniquement le marché québécois, les coûts fixes, les coûts d'exploitation, les coûts d'entretien. En dehors des autres secteurs d'opération. En d'autres termes, est-ce que vous avez isolé le secteur production et distribution au Québec pour les Québécois des autres activités? Et pouvez-vous me donner les chiffres?

M. Caillé (André): Au Québec pour les Québécois.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. Au Québec et pour les Québécois, je pense que tous les investissements qui ont été faits, incluant les interconnexions, ont été faits, à ma connaissance – enfin, ça date de plusieurs années, on n'en a pas ajouté – pour les Québécois. C'était pour le marché québécois et c'était pour profiter de coûts moindres en devançant des travaux de construction. On devançait des travaux de construction, on créait de l'emploi. Jadis, à l'époque, les gens disaient: Maintenant, on bénéficie de coûts de construction plus faibles pour de l'électricité que, dans un premier temps, on va vendre aux États-Unis et que, en deuxième temps, on va rapatrier sur le Québec à un coût moindre, puisque les coûts de construction auront été moindres. Je ne vois pas là-dedans comment puis quelles catégories d'actifs d'Hydro-Québec, transport ou autres, n'ont pas bénéficié aux Québécois.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, M. Caillé, ma question était pourtant très précise. C'est: Combien ça coûte à Hydro-Québec pour desservir les Québécois en électricité? Je ne vous parle pas des interconnexions, je ne vous parle pas des revenus de l'extérieur. Au Québec, les 3 600 000, je pense, ou quelque chose comme ça, que vous avez dit tout à l'heure, les 3 200 000 clients résidentiels, combien ça coûte à Hydro pour les desservir?

M. Caillé (André): Alors...

M. Gobé: En termes de barrages, en termes d'infrastructures, en termes de distribution et d'entretien. C'est ça que je veux savoir. Pas le coût global qui est réparti sur l'ensemble. C'est ça: Combien ça coûte? Combien, eux autres, ça coûte? Quand ils paient leur tarif, d'accord, le coût de production, là-dedans, là...

M. Caillé (André): Ils paient...

M. Gobé: ...réel qu'ils paient, c'est quoi?

M. Caillé (André): Ils paient des tarifs, Mme la Présidente, pour couvrir tous les coûts, O.K., tous les coûts moins les bénéfices qu'on fait sur les marchés extérieurs. Ils paient moins cher, les Québécois, parce que nous exportons, parce que nous faisons des bénéfices avec les exportations, bénéfices que, pour un même rendement, nous n'avons pas à faire au Québec. Ils ne paient pas plus cher, ils paient moins cher.

M. Gobé: Si je comprends bien, M. Caillé, vous êtes en train de me dire que le consommateur québécois, avec son tarif, paie tous les coûts d'immobilisation et tous les frais fixes ou d'exploitation d'Hydro-Québec.

M. Caillé (André): Non, je ne suis pas en train de vous dire ça, je suis en train de vous dire qu'ils paient moins que tous les coûts, parce qu'il y en a une partie qui est supportée par les clients à l'extérieur.

M. Gobé: Bon. Est-ce qu'on peut avoir le...

M. Caillé (André): Ils sont avantagés.

M. Gobé: O.K. Est-ce qu'on peut avoir la ventilation? Les coûts qui sont supportés par les clients extérieurs: les barrages, les turbines, le coût des turbines, le coût des lignes de distribution, qui sont supportés par les ventes extérieures, et le coût des barrages, des turbines et de la distribution qui est supporté par les clients domestiques. Vous venez de nous dire qu'il y en avait une partie qui était payée par l'extérieur. On veut savoir quelle partie, combien ça rapporte et est-ce que c'est rentable.

M. Caillé (André): L'ensemble de ces ouvrages-là ont été conçus pour les Québécois. Il y en a une partie qui est exportée, maintenant sur laquelle on fait un bénéfice, et ça vient rabaisser les coûts. Bien, si vous prenez le rapport annuel, c'est l'ensemble des coûts.

Mais il y a une précision que je veux apporter, parce qu'il y a d'autres activités dites... qui sont connexes à notre métier, des activités dans le domaine de la technologie, etc., qui sont autre chose. Je pensais que peut-être que vous faisiez référence à ça aussi. J'imagine vous y faisiez référence aussi. Ça, c'est une autre partie.

Mais, si on parle de produire, de transporter de l'électricité, on a un système, on a l'ensemble des coûts de ce système. Si on n'exportait pas, les Québécois paieraient l'ensemble des tarifs qui correspondent à l'ensemble des ces coûts. Puisque nous exportons, puisque nous faisons des bénéfices, ça vient en réduction de ce que paient les Québécois. Parce qu'on fait du bénéfice avec ça. On le démontre ici, pour l'année 1998, pas sur des chiffres qu'on prend en l'air, c'est sur des résultats vérifiés par deux vérificateurs externes.

M. Gobé: O.K. M. Caillé, vous comprendrez bien que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de LaFontaine.

(12 heures)

M. Gobé: ...la polémique, la discussion se fait. Selon ce que les experts nous signalent et l'opacité avec laquelle vous dévoilez vos états financiers, et la consolidation de toutes les entreprises, de tout ce qui dépend d'Hydro-Québec, on jette un voile là-dessus qui semble confirmer ça ou nous indiquer ça, que c'est évident que, si l'on fait payer par les consommateurs québécois les parties de barrages qui servent, entre autres, à faire de la production pour l'exportation, eh bien, vous pouvez déclarer des profits à l'autre bout, à ce moment-là. Mais, dans la réalité, vous ne faites pas vraiment des profits, parce que vous faites supporter le coût de production subventionné par le consommateur. Si ce n'est pas ça, je serais content que vous me le disiez.

Donc, j'aimerais que vous puissiez nous déposer des résultats par secteur. Alors, le secteur domestique – d'accord? – c'est quoi, les revenus du secteur domestique par année? Une question rapide, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Vandal.

M. Gobé: Cette année, c'est quoi, ou l'année dernière aussi?

M. Vandal (Thierry): Si vous me permettez...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Vandal.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, j'aimerais que M. Vandal donne une réponse.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Mme la Présidente, la fiche qu'on a déposée un peu plus tôt donne non seulement les revenus, mais également les coûts qui sont associés à l'ensemble des marchés d'exportation. Ces coûts-là, les coûts complets, les coûts tarif L, génèrent et couvrent non seulement les besoins, mais ils génèrent en plus, à travers les revenus, une marge excédentaire additionnelle de 145 000 000 $. Alors, prenez les coûts pour les 13,7 TWh qui génèrent des revenus à partir de notre production, ajoutez à ça 145 000 000 $, ça vous donne l'ensemble des coûts qui sont supportés. Mais ce que cette fiche-là démontre, c'est que le secteur d'exportation ne supporte pas uniquement ses coûts propres sur un équivalent tarif L, mais supporte un excédent de coûts. Donc, comme André le mentionnait, c'est à l'avantage des clients québécois, qui, par définition, supportent moins que les coûts qui seraient les coûts moyens.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, pourquoi, lorsque vous déposez vos états financiers, ne pas faire en sorte, comme ça se faisait avant et comme ça se fait dans d'autres entreprises, que chacune des divisions ou des entreprises ou des filiales d'Hydro-Québec le fasse d'une manière indépendante, afin de voir une plus grande clarté et d'éviter peut-être cet imbroglio qui semble se dessiner? Lorsque les gens qui sont venus nous voir hier nous mentionnent ça – et ils le documentent abondamment – ils ne le font pas d'une manière futile ou frivole, ils le font certainement avec des raisons et des inquiétudes légitimes. Et je ne suis pas convaincu, moi, qu'aujourd'hui vous répondiez à la vraie question des Québécois. C'est un gel de tarif, oui, mais quel tarif on gèle? Est-ce que c'est le tarif réel que les Québécois devraient payer ou est-ce que c'est un tarif consolidé qui comprend d'autres coûts d'activités qui sont faites à l'extérieur et que les Québécois se trouvent à subventionner? Vous ne répondez pas à notre question. Et je suis sûr que vous ne répondrez pas non plus, sinon ça serait déjà dans les documents.

Je déplore grandement que ça ne soit pas fait et je dois vous dire, M. le président d'Hydro-Québec, que, comme député, comme parlementaire, je trouve que vous devriez le faire dans les prochains exercices financiers, faire en sorte qu'il y ait une clarté sur cela. Jusque-là, vous nous permettrez, à moi comme à d'autres personnes, d'être dans le doute et de penser qu'en effet le consommateur québécois subventionne des activités déficitaires d'Hydro-Québec ou des activités dans lesquelles on fait porter, assumer des coûts pour pouvoir justifier des profits sur papier au retour, à l'extérieur, ce qui permet de construire des nouveaux barrages ou simplement même d'assumer des constructions excédentaires qui ont été faites dans les décennies ou les années passées.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, les états financiers, ce sont des documents qui sont préparés par des vérificateurs externes, qui les signent – c'est des gens qui, sous licence, exercent ce métier – et ce sont des documents qui servent aux investisseurs. Dans Hydro-Québec, il y en a beaucoup, d'investisseurs, incluant des investisseurs dans la dette d'Hydro-Québec.

Alors, ceci étant dit, suite à cette demande, je verrai avec les vérificateurs s'ils veulent mettre une note comme celle-là. Ce n'est pas le président d'Hydro-Québec qui en décide, ce sont les vérificateurs. Deuxièmement, encore une fois, enfin, je ne sais pas comment répondre plus. On vous dit aujourd'hui, avec des chiffres basés sur des résultats vérifiés – pas par nous, par des vérificateurs externes – que les clients hors Québec – Ontario, Nouveau-Brunswick, États-Unis – paient plus que leur part des coûts; les coûts sont établis au tarif L. Alors, là, je veux dire, selon moi, la voilà, la réponse. Mais je prends en considération le fait qu'il est demandé de faire une note aux états financiers à cet égard à chaque année. Ça sera demandé à nos vérificateurs et, eux autres, ils pourront décider ce qu'ils veulent faire avec ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Je vous remercie. Alors, Mme la députée de...

M. Gobé: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, mais là je pense que.. Ça fait déjà 12 minutes...

M. Gobé: ...qui concerne les gens dans le nord-est de Montréal.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça prend le temps sur les autres.

M. Gobé: Le programme d'enfouissement que vous avez mis en place, M. le président, que vous annoncez mettre en place...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine, on n'est pas du tout sur le même sujet, et le temps de votre intervention – parce qu'on procède par alternance – a duré quand même suffisamment longtemps. Alors, je vais vous réinscrire pour une autre question. On poursuit aussi cet après-midi.

M. Gobé: D'accord.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Crémazie.


Ententes avec les clients en difficulté de paiement

Mme Blanchet: M. Caillé, moi, je voulais vous parler un peu. Vous faites allusion dans votre plan stratégique au fait de conclure des ententes équitables avec les différents clients qui ont des problèmes financiers, qui sont démunis, soit à la sécurité du revenu ou même qui ont des problèmes financiers à rembourser soit une dette antérieure, une vieille dette ou le compte régulier, tous les mois.

Je sais que vous avez un projet-pilote en Mauricie et dans un quartier à Montréal – c'est Hochelaga-Maisonneuve, si je ne me trompe pas – alors, j'aimerais avoir un peu de détail sur l'évolution de ce projet-là et aussi justement les ententes, habituellement le type d'ententes que vous réussissez à conclure avec ces clients-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Je vais donner, Mme la Présidente, une partie de la réponse. Mon collègue Filion complétera. Nous menons actuellement un projet-pilote qui s'appelle Budget éclairé, parce que, comme on le sait tous ici – je sais que beaucoup de nos clients se sont adressés à leur député, se sont adressés aux médias, etc. – nous avons, à Hydro-Québec, des clients qui comptent évidemment parmi les familles les plus démunies, qui sont dans des situations extrêmement difficiles et ont de la difficulté à payer les arrérages, simplement les arrérages. Puis évidemment, si on ajoute la consommation courante, ça rend la chose encore plus difficile.

Ce que nous avons fait dans ce projet-pilote, c'est de regarder comment on pourrait d'abord s'entendre sur l'arrérage. Ici, rien de très, très nouveau, parce qu'il y avait déjà à Hydro-Québec la capacité de s'entendre sur l'arrérage – peut-être qu'on pourrait le mettre un peu plus long, etc., en tout cas – s'amener à des sommes que les familles peuvent supporter.

Deuxièmement, on voudrait prendre en considération, bien sûr, la consommation courante et la facturation pour ladite consommation courante. Le programme, lui, ce qu'il ferait, c'est que, pour un paiement de 1 $, ça serait équivalent à un paiement de 2 $. C'est à l'essai, c'est sous forme de projet-pilote. On va évaluer, au cours de l'été, quels sont les résultats atteints avec un programme de cette nature-là qui est toujours à l'échelle pilote. Ce que j'espère – mais je ne peux pas vous le confirmer aujourd'hui – c'est qu'on pourra mettre en place quelque chose de ce type, comme ceci ou de ce genre-là, parce que, nul doute, quand on conduit un projet-pilote, qu'on trouve des façons meilleures de faire, etc., des ajustements à apporter, tout ceci...

Ce qu'on essaie de respecter ici, c'est deux principes: premièrement, il faut, je pense, qu'Hydro-Québec montre qu'on a de l'empathie, comme vous tous, pour nos clients démunis, d'une part, démontrée d'une façon concrète; et, deuxièmement, que soit respecté ici le principe, pour l'ensemble des autres clients, que ce système est équitable. Alors, il va falloir passer par l'identification des bénéficiaires d'un tel programme. Je termine là-dessus, quant à moi.

(12 h 10)

Quant à l'identification des bénéficiaires, je veux vous rassurer, tout le monde, qu'on va le faire ici avec les données qui sont accessibles, à Hydro-Québec. On n'essaiera pas d'obtenir des données qui ne peuvent pas être accessibles ou rendues disponibles, à Hydro-Québec. Sur cette base-là, il y a de la collaboration qui pourrait être établie avec les ACEF, les associations de consommateurs, il n'y a pas de doute. Il y en a avec qui ça va bien, il y en a avec qui ça va moins bien, comme on sait. On fera avec ceux qui voudront travailler avec nous de même qu'avec tous les gens – ça inclut, je le comprends, les députés dans leurs comtés, et il y en a d'autres – qui s'occupent des démunis puis qui peuvent nous fournir une information pour qu'on puisse agir en connaissance de cause. Tout ça basé sur le principe que ça sert à bien peu de chose, à Hydro-Québec, d'exiger des paiements que les gens, à l'évidence, ne peuvent pas payer. D'un autre côté, il faut faire attention que l'électricité soit le dernier service payé, puisque Hydro-Québec a une ouverture que possiblement d'autres n'ont pas. Alors, voilà la problématique au moment où on se parle. Et j'espère que le plus rapidement possible on pourra mettre quelque chose en place.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Je pense que M. Caillé a couvert largement la réponse à la question. S'il y a d'autres précisions, ça me fera plaisir de les donner.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Oui, Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Bon. M. Caillé, vous avez parlé, comme partenaires, des ACEF, mais est-ce qu'il y a d'autres... Bon. Il y a les bureaux de comté, effectivement. Je pense qu'on peut vous alimenter. Justement, je sais qu'il y a une ligne, il y a un numéro de téléphone qui est offert aux bureaux de comté, où on peut appeler et rejoindre rapidement quelqu'un chez vous et faire part d'une situation vécue par un de nos commettants ou une de nos commettantes, si cette situation-là n'est pas déjà connue chez vous. Mais est-ce qu'effectivement il y a d'autres organismes avec lesquels vous faites affaire?

Puis j'aimerais aussi savoir: Pour ce qui est des gens à la sécurité du revenu, est-ce que vous y allez aussi selon la capacité de paiement ou, si effectivement les gens ont aussi une autre dette, qu'ils ont déjà une ponction soit directement pour le ministère ou pour un autre organisme... est-ce que vous y allez aussi comme ceux qui sont à faibles revenus et pas à la sécurité du revenu, vous regardez tout l'ensemble du dossier? Vous faites un échange de renseignements, si c'est possible et si vous avez l'autorisation?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. Vous avez plusieurs questions, je vais essayer de toutes les couvrir. D'abord, pour les députés, nous avons mis sur pied il y a quelques mois un numéro, une ligne, un numéro de téléphone dédié, dans chacun des territoires, pour qu'il y ait un contact qui puisse s'établir au sujet, je dirais, de la situation des clients à faibles revenus qui ont des difficultés de paiement. D'autre part, c'est une problématique difficile à régler pour nous, difficile à gérer aussi. Elle met, je dirais, en contradiction deux valeurs: celle d'avoir un traitement juste et équitable pour tous les clients, mais celle aussi d'offrir – et des clients l'expriment comme attente – une flexibilité à l'égard des clients à faibles revenus. Donc, pour ce faire, nous, effectivement, entretenons des relations étroites avec les organisations de consommateurs.

Alors, pour répondre à votre deuxième question plus précisément, nous avons des contacts avec la Coalition des associations de consommateurs du Québec, avec la Fédération des ACEF, avec Action Réseau Consommateur, avec Option consommateurs et avec les services d'aide au consommateur. Donc, ce sont à peu près tous les organismes de niveau provincial qui, je dirais, se préoccupent de la situation des consommateurs. Avec eux, nous avons justement tenu une réunion. On tient des réunions régulières. Il y en a eu une qui s'est tenue hier; on me dit que ça a été une bonne rencontre. On veut continuer de maintenir avec eux des relations étroites pour surtout bénéficier de leur collaboration pour nous aider à traiter de façon juste et équitable mais aussi de façon flexible ces clients en difficulté de paiement.

Donc, je pense que ça couvrait... Je ne sais pas s'il y a un volet que je n'ai pas couvert? Excusez-moi, je pense que j'ai échappé le dernier volet.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de Crémazie, ça faisait le tour?

Mme Blanchet: Non. Bien, l'autre volet, c'était que, si jamais, pour ce qui était des gens, entre autres, à la sécurité du revenu qui avaient déjà une ponction sur leur chèque pour une dette x, y, vous teniez compte de ça ou si vous aviez un montant vraiment défini ou pas.

M. Filion (Yves): Nous avons, avec les clients sur la protection du revenu, des modalités de paiement très flexibles, plus flexibles que ce qu'on retrouve en général, et nous avons avec le ministère des Services sociaux des ententes particulières pour appliquer ces modalités-là.

Mme Blanchet: Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci.

M. Brassard: Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Sur le même sujet?

M. Brassard: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui.

M. Brassard: Une précision. Est-ce que vos échanges avec les différentes organisations de protection ou de défense des consommateurs que vous avez énumérées, est-ce que ces échanges ont donné lieu à des ententes formelles? Avez-vous conclu et négocié des ententes avec ces organisations?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui. Dans le cadre de Budget éclairé, nous avons eu des ententes effectivement avec des associations de consommateurs. Plus particulièrement dans la région de Montréal avec Option consommateurs, et dans la région de Shawinigan avec le Service d'aide au consommateur de Shawinigan. Nous en avons eu dans le passé aussi, dans des programmes spécifiques d'efficacité énergétique. Et nous sommes actuellement, je dirais, à la recherche de leur contribution pour être capables de bien identifier les clients démunis ou à faibles revenus qui doivent obtenir de l'aide pour réussir à retrouver une situation normale versus ceux qui – si vous me permettez cette expression – exploitent un peu le système et profitent de la situation pour éviter de payer leurs comptes. Et ils connaissent beaucoup mieux le milieu que nous, donc ils peuvent nous aider à ce sujet-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Filion. Alors, M. le député de Laurier-Dorion.


Évaluation du taux de rendement

M. Sirros: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, le format de nos interventions a fait en sorte qu'on passe à plusieurs sujets pas nécessairement en lien les uns avec les autres. Alors, si vous permettez, moi, j'aimerais qu'on pitonne un peu sur le «rewind» puis qu'on retourne à l'avant-dernière intervention du ministre, quand il nous confirmait que, comme Hydro-Québec propose un gel tarifaire, il n'y aura pas de nécessité pour Hydro-Québec d'aller devant la Régie.

Et j'aimerais aussi constater un certain nombre de choses. On se dit tous d'accord supposément avec le maintien du pacte social qu'on a conclu, avec la nationalisation d'Hydro-Québec dans les années soixante, avec comme objectif de fournir les tarifs les plus bas possible aux consommateurs québécois de façon uniforme à travers le territoire, etc. On est tous revenus sur ça ce matin.

Je vous rappelle que, ça, c'était dans un contexte où Hydro-Québec n'avait pas à verser de dividendes au gouvernement. Ça, c'est arrivé seulement en 1981, adopté par bâillon par le présent gouvernement, et on avait à ce moment-là aussi indiqué que ça changeait fondamentalement, que ça pouvait toucher fondamentalement le pacte social qu'on avait conclu, parce que l'objectif n'est pas de verser des taxes indirectes... Parce qu'il s'agit justement de taxes indirectes. Et je pense que vous l'avez confirmé. Le ministre l'a confirmé, le ministre a dit: Les argents qu'on va avoir d'Hydro-Québec vont être autant de taxes qu'on n'aura pas à prélever. Et, moi, comme payeur de taxes, j'aime savoir ce que je paye vraiment pour des taxes, je veux payer ce qu'il faut que je paye pour avoir des services que je veux me donner, que ce soit en santé, en éducation, etc., et je veux savoir si on change le fondement du pacte social qu'on a changé.

Et le ministre, en même temps qu'il dit tout ça, il nous dit aussi qu'il est préoccupé par l'interfinancement, qu'il y a des catégories de consommateurs qui voient leur compétitivité glisser, qu'ils sont inquiets. Il faut dire que je crois que vous vous êtes parlé un petit peu. Il y avait une question, vous avez une réponse immédiate. C'est quelque chose qui est dans le décor depuis un bout de temps, l'interfinancement. Et vous, vous nous dites finalement: On va geler les tarifs pour augmenter le taux de rendement, pour donner plus d'argent au gouvernement, donc des «en lieu» de taxes en quelque sorte, ce qui m'amène à poser la question suivante: Est-ce qu'une autre façon de faire, si à ce moment-ci vous n'aviez pas à vous préoccuper de comment vous allez verser au gouvernement, mais beaucoup plus d'appliquer le pacte social, ne serait pas, par exemple, de maintenir un gel au niveau du résidentiel, de protéger tout le monde et, avec l'augmentation de l'argent qu'Hydro-Québec va avoir par ce gel-là – ce que vous avez admis tantôt – peut-être baisser d'autres catégories de tarifs pour justement stimuler la compétitivité ou consolider la compétitivité, stimuler l'économie, créer de l'emploi, etc.?

Pourquoi vous avez choisi d'axer vos orientations sur l'augmentation du taux de rendement, ce qui va générer plus d'argent dans les coffres d'Hydro-Québec, ce qui sera transféré au gouvernement en taxes indirectes? À ma connaissance, les taxes indirectes, ce n'est pas quelque chose dont on doit être très fier, du côté gouvernemental. Normalement, on taxe puis on justifie nos taxes ouvertement, et c'est de la même façon qu'Hydro-Québec évite d'aller devant la Régie. Quand est-ce qu'on va pouvoir vraiment examiner, à quel moment est-ce qu'on va pouvoir vraiment examiner tous les éléments: taux de rendement, coûts de production, tout ça? Si vous nous dites «pendant quatre ans, Hydro-Québec n'aura pas à aller devant la Régie», pourquoi on a créé la Régie?

(12 h 20)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, le gel des tarifs a été proposé par Hydro-Québec. Soyons clairs: c'est l'objectif visé, c'est une saine gestion financière. Avec un tarif qui n'est pas acceptable, qui n'est pas raisonnable, je ne pense pas qu'on traite, premièrement, les Québécois actionnaires de cette entreprise équitablement. Ce n'est pas parce qu'ils sont Québécois qu'ils n'ont pas le droit à un rendement dans leurs placements dans Hydro-Québec. Premier point.

Deuxièmement, si on ne fait pas une saine gestion financière, si c'est une entreprise qui n'est pas gérée sainement, on commence à prendre des risques importants. En 1995 – mon collègue y faisait référence plus tôt, je pense que le bénéfice était de 380 000 000 $ – on sait ce qui s'est passé. Là, la situation devient critique. On commence à avoir des difficultés avec la couverture des intérêts, avec toutes sortes de critères, et là on dit: Il faut couper drastiquement dans les dépenses. Pourquoi? Une mauvaise gestion financière aboutit à des gestes extrêmes. Ça a fait ça, avec les conséquences que ça a eu sur l'entreprise. Il y avait je ne sais plus combien d'employés, 25 000, l'ordre de grandeur. On a dû réduire et réduire rapidement – je pense que c'est de 3 000 et quelques employés – pour arriver au fameux 19 500.

Quand on fait une mauvaise gestion financière, quand une entreprise n'atteint pas son rendement raisonnable, elle s'expose à toutes sortes de discontinuités, comme des grands plans de rationalisation, comme le changement drastique à toutes sortes d'égards. Ce qu'on essaie de faire ici, ce qu'on a proposé au gouvernement, honnêtement – c'est nous qui l'avons proposé au gouvernement – c'est simplement une saine gestion financière. Il n'y a pas d'exagération, rappelons-le, avec le 9,8 % de rendement; il n'y a vraiment pas d'exagération. On se situe dans la classe, on est dans la classe, mais on est à la fin de la classe à cet égard-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Ménard.

M. Ménard (Louis-Jacques): Juste pour compléter, Mme la Présidente. M. le député, lorsque vous posiez votre question, tout à l'heure, en enchaînant avec celle-ci: Quant au coût que nous devions récupérer, que nous avions le devoir de récupérer dans notre tarification et dans notre exploitation, lorsqu'on fait ça évidemment on réalise que dans notre secteur le coût le plus important, c'est le coût associé au capital, pour des raisons évidentes qu'on connaît.

Alors, sur nos actifs totaux, il y a à peu près, au moment où on se parle, 40 000 000 000 $ de notre capital qui représente la dette, dette qui est due à des tiers. Vous comprendrez évidemment que notre première responsabilité est de s'assurer que ces bailleurs de fonds, ces créanciers soient rémunérés. Pour vous donner une idée, pour l'année 1999, on me confirmait tout à l'heure que le coût moyen de cette dette-là, incluant le taux de change, les effets de taux de change, va être de l'ordre de 9 %. On ne se pose pas la question à savoir si on devrait ou non gérer notre entreprise pour être capable de rémunérer et de payer ce coût de capital là.

De la même manière, l'équité, les fonds propres auxquels vous faisiez référence tout à l'heure, qui, eux, appartiennent aux Québécois, qui sont de l'ordre de 13 000 000 000 $, ils n'ont pas un coût de zéro. Je m'étonne de vous entendre apparenter toute rémunération à ce capital-là comme une taxe. Je pense que lorsque, nous, on examine Hydro-Québec et qu'on a à prendre nos responsabilités, nous avons à nous assurer que dans le temps l'exploitation, à Hydro-Québec, soit telle que ce capital-là, ce patrimoine, soit adéquatement également rémunéré. Parce qu'il a un coût effectivement, si ce n'est qu'un coût opportunité.

Alors, au moment où on se parle, nous ne sommes pas particulièrement satisfaits de ce rendement qu'on attribue à ce capital, à ce patrimoine-là, il est de l'ordre de quelque 6 %. Pour se donner une cible qui est de l'ordre de 9,8 %, qu'on vous a évoquée tout à l'heure, on n'a pas pris ça dans les airs, on s'est inspiré d'autres sociétés analogues à la nôtre qui exploitent, qui sont à toutes fins pratiques dans la même industrie, d'autant plus que celles auxquelles on s'est référé ont, en général, un taux de capitalisation même plus élevé que le nôtre.

Nous, je vous rappelle qu'à peu près 25 % de l'actif total est représenté sous forme d'avoir propre, qui est l'avoir des Québécois. Dans les sociétés auxquelles on se compare, cette contribution au capital est de l'ordre de 40 %, parfois même 45 %. Ça veut dire qu'on compare, à certains égards même, des pommes et des oranges, parce que, si on les mettait à 25 %, le rendement de ces sociétés auxquelles on se compare serait plus de l'ordre de 15 % ou 16 %. Alors, ce n'est pas héroïque de même contempler. Au contraire, c'est un minimum de responsabilités, selon nous, au conseil d'administration, de faire en sorte que dans un horizon prévisible du plan d'affaires et du plan stratégique qu'on vous propose aujourd'hui on rémunère de façon responsable le capital, le patrimoine qui nous est confié.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Mme la Présidente, moi, je ne mets pas en doute la volonté de gérer les fonds de façon responsable, loin de là, mais il faut que je revienne sur la notion du taux de rendement, parce que je ne veux pas non plus laisser croire aux gens que je suis contre un taux de rendement raisonnable, entre guillemets.

M. Caillé a fait presque l'équivalence entre la saine gestion puis le taux de rendement, tout en disant, tu sais: Oui et non. Parce que finalement, si le taux de rendement est bas parce qu'il y a des dépenses somptueuses ou trop de cadres ou trop de personnes, etc., ça, c'est une chose. Si le taux de rendement est bas parce qu'on n'est pas une société privée et que vous vous comparez à des sociétés privées, puis que, comme société, on a décidé de redonner directement aux consommateurs le bénéfice de notre avoir propre comme société, ça, c'est autre chose.

Alors, c'est un peu faux de toujours comparer une société d'État qui est issue de la Révolution tranquille, etc., avec un pacte social, à des sociétés privées qui sont réglementées. Ici, nous avons une société d'État, un monopole qui n'est pas réglementé du tout, et c'est ça qui inquiète beaucoup. Ce n'est pas réglementé. Dans le sens que, si vous n'avez pas à aller devant la Régie, qui, elle, pourrait également regarder le côté des dépenses et dire: Écoutez, là, vous avez trop de vice-présidents, vous avez trop de cadres, trop de ci. Avant de demander une augmentation de tarifs, réduisez ça, etc. Ça, c'est une chose.

Donc, d'un côté, on voit qu'il y a, depuis la création de la Régie, une volonté d'éviter qu'Hydro-Québec dévoile tout devant la Régie, donc devienne comme le reste des entreprises semblables auxquelles vous vous comparez. Une entreprise réglementée parce que c'est un monopole et qu'il faut qu'on change cette façon de faire qui est de régler les questions entre le président d'Hydro-Québec et le bureau du premier ministre, où on règle... Avant, on réglait le tarif. Là, on a gelé le tarif, on règle le taux de dividendes, le taux de rendement. Alors, pourquoi ne pas le faire ouvertement, correctement, de façon transparente, devant la Régie, en mettant les chiffres sur la table comme le font toutes les autres entreprises ou presque de semblable taille et objectif?

Et, deuxièmement, est-ce que finalement le taux de rendement n'est pas une façon déguisée de donner des taxes au gouvernement? Étant donné que vous n'avez pas à justifier rien devant personne, à partir du moment où vous le justifiez devant la Régie – et la Régie doit aussi tenir compte du taux de rendement, c'est dans son mandat – personne n'a rien à dire. Alors, pourquoi cette insistance à esquiver ce que d'autres subissent sinon volontairement... enfin subissent: une réglementation d'une entreprise monopolistique qui a une clientèle captive?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé, il y a à peine une minute. Je sais qu'on va reprendre, là.

M. Caillé (André): Très rapidement, madame. On pourrait vous fournir un document, ici, des entreprises réglementées sur la production et celles qui ne le sont pas. La tendance, comme il a été dit par un des membres de votre commission, c'est à la déréglementation, ce n'est pas à la réglementation.

Deuxièmement – je vais très vite, je m'en excuse – en ce qui concerne le transport et la distribution, c'est ailleurs comme ici; on n'a jamais dit que ça ne devait pas être réglementé. D'ailleurs, il y a des causes, notamment la cause sur le transport qui est devant la Régie. La Régie a son utilité à cela, puisque, à l'évidence, c'est comme ça partout en Amérique du Nord. Le transport ainsi que la distribution, incidemment, sont réglementés.

On pourrait vous fournir aussi, Mme la Présidente, les rendements obtenus des sociétés d'État, par d'autres sociétés d'État dans le domaine, notamment Ontario Hydro, qui vise un rendement de 15 % et qui appartient, comme on le sait, au gouvernement de l'Ontario. Alors, notre 9,8 % peut vous apparaître peut-être timide, j'en conviens à l'avance avec vous.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Caillé. On se retrouve donc à 14 heures. Je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 14 h 5)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission va donc reprendre ses travaux. À ce moment-ci, j'aimerais quand même faire rapport du temps qui a été utilisé par chacune des formations politiques. On m'informe qu'il y a 56 minutes qui ont été prises par la partie gouvernementale et 1 h 9 min par la partie de l'opposition officielle. Je voudrais aussi avoir un avis de la commission...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît! À ce moment-ci, j'aurais besoin d'un avis de la commission. Ce matin, il y a eu un 20 minutes qui n'a pas été utilisé par Hydro-Québec pour faire sa présentation. On a cinq minutes de retard. Donc, il y a 15 minutes d'écart entre le fameux...

M. Brassard: ...partagé.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est ça, justement, M. le ministre, c'est là-dessus que je voulais un avis. Est-ce que vous préférez qu'on le partage, qu'on partage l'enveloppe entre les deux formations, pour poursuivre les échanges jusqu'à 15 heures de toute façon, pour entamer l'autre bloc à partir de 15 heures, comme c'était prévu à l'ordre de la Chambre? Alors, je comprends qu'il y a consentement. On va donc utiliser le temps pour poursuivre les échanges. Alors, là-dessus, on a comme 13 minutes d'écart effectivement entre les deux formations politiques. Et le rôle de la présidente étant celui d'être le plus équitable possible, je vais donc vous donner la parole. Oh non!

J'ai eu une demande, aussi. Pardon! M. Caillé et les gens d'Hydro voudraient donner un complément de réponse à ce moment-ci suite aux questions qui ont eu lieu ce matin. On a aussi une demande de dépôt de certains documents dont j'ai pris connaissance.


Documents déposés

Le dépôt est donc accepté. Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, voilà, Mme la Présidente, nous déposons deux documents. Le premier concerne les sondages qui sont effectués pour mesurer la satisfaction de la clientèle. Un document qu'il y a devant vous, qu'il devrait y avoir devant vous en ce moment vous dit que ces sondages sont réalisés par la firme SOM, qu'ils le sont auprès de 800 clients et qu'il y a en moyenne 40 questions qui sont posées, que la marge d'erreur est de 3,5 % dans les résultats et que le coût de cela est de 7 200 $ à chaque mois. Ça, c'est mensuel.

Deuxièmement, il y a eu beaucoup de questions sur le retour sur l'avoir propre des entreprises. Je me suis engagé à déposer un document, que je dépose. On voit ici les rendements sur équité de BC Hydro, à 17,4 %, Manitoba Hydro, à 16,3 %, Ontario Hydro, la production, à 15 %, et la moyenne des entreprises qui fournissent leurs données à Edison Electric Institute, qui est de 9,9 %. Comme je le disais ce matin, il devrait ici y avoir entre parenthèses que c'est sur une équité de 45 %.

Quant à nous, vous le savez, on vise – et c'est là l'information additionnelle ou en complément de réponse – 9,5 % sur cinq ans. Et voilà pourquoi on dit qu'il n'est pas opportun puis qu'on ne peut pas baisser les tarifs maintenant, parce que... Et ce qu'il faut faire dans un premier temps, c'est ramener notre rendement à tout le moins à la limite inférieure du raisonnable, et bien sûr, puisqu'on dit qu'on gèle les tarifs, il faut prendre d'autres moyens pour y arriver. Voilà pour mon complément d'information, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Caillé. Alors, M. le ministre.

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente, étant donné qu'il y a...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Un instant! Oui, Mme la députée de La Pinière, je comprends que c'était sur une de vos questions.


Calcul de la croissance de la demande (suite)

Mme Houda-Pepin: Voilà, exactement. Étant donné que M. Caillé vient de répondre à un certain nombre de questions que j'ai posées, il reste la question sur la conciliation des chiffres concernant la croissance de la demande, qui, à la page 7, est évaluée à 12 % et, à la page 16, elle est à 1,4 % par année, ce qui nous donnerait un 7 %. Alors, d'où vient cet écart? Et comment est-ce qu'on peut expliquer la différence?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. Alors, nous sommes prêts à fournir ce document également. Mon collègue, ici...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Donc, c'est un autre dépôt?

M. Caillé (André): C'est un autre dépôt, si c'est acceptable.


Document déposé

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord.

M. Caillé (André): Ça va être déposé et expliqué par mon collègue, ici, Thierry Vandal.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Alors, l'information effectivement montre que, de 1999 à 2014, la moyenne annuelle est de 1,4 %. Sur les cinq premières années, les années du plan, la moyenne est plus élevée; on est à 2,3 %. Et donc, ça chute par la suite, de 2004 à 2014, pour redescendre à 0,9 %.

Pourquoi c'est plus fort durant les cinq premières années que les 10 dernières? On bénéficie, durant les cinq premières années, d'un effet assez fort du côté de grandes implantations industrielles, notamment à Alma, l'aluminerie du côté d'Alma, et également Magnola, des dossiers comme Magnola. Donc, ça a un effet de monter un peu la croissance sur les premières années. Mais, par la suite, par souci de conservatisme et de prudence, on s'est... à un niveau qui nous amène, sur la période complète, à 1,4 %, ce qui est inférieur à la période des 15 années précédentes. Donc, ce sont des prévisions qui sont, on le croit, prudentes et qui reflètent, disons, un conservatisme de circonstance.

(14 h 10)

Mme Houda-Pepin: Alors, si je...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière, toujours sur le même sujet?

Mme Houda-Pepin: Toujours en rapport avec la clarification des chiffres d'Hydro-Québec. Vous avez dit: Pendant les cinq premières années, c'est 2...

M. Vandal (Thierry): 2,3 %.

Mme Houda-Pepin: ...2,3 %. Et, les autres années subséquentes, ça revient à 1,4 %.

M. Vandal (Thierry): À 0,9 %, pour donner, sur la période complète, 1,4 %.

Mme Houda-Pepin: Comment expliquez-vous que les experts, en fait tous ceux qui gravitent autour de ce dossier-là et qui le connaissent bien situent justement la croissance de la demande à 1,4 % et non pas à 2,3 %, comme vous dites? Et je parle des cinq premières années, là, des cinq premières années de référence.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Mon collègue vient de me confirmer l'écart que vous soulignez. Au mois d'avril, quand ça a été préparé, cette première information là, on n'avait pas autant d'informations qu'aujourd'hui sur les prévisions du côté de l'industriel. L'industriel, ce sont des dossiers assez discrets. Donc, on est aujourd'hui mieux à même de prévoir la croissance de l'industriel. Donc, elle est bien de 2,3 % sur la période complète, pour nous donner 17,4 % de croissance. Donc, les chiffres qui nous paraissent être les chiffres exacts aujourd'hui sont ceux de 2,3 % pour la première période de cinq ans et de 0,9 % sur les 10 dernières années. Et, je répète, sur les 15 ans, ça nous donne 1,4 %, ce qui est inférieur aux 15 années précédentes. Donc, ce sont des prévisions qui, pour les 15 ans à venir, nous paraissent être conservatrices, prudentes. On n'est pas en train, ici, de surestimer la croissance au Québec.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. Alors...

Mme Houda-Pepin: Je conclus que vous convenez que les estimations que vous faites dans votre plan stratégique sont discutables au niveau de la fiabilité des données, puisque vous venez d'avouer vous-même que jusqu'à tout récemment vous n'aviez pas, par exemple, les informations exactes sur la demande du secteur industriel. Alors, on doit lire les autres chiffres qui sont dans votre rapport à travers la précision que vous venez de nous donner, c'est-à-dire avec beaucoup de suspicion, si je peux dire, parce que ce n'est pas nécessairement des chiffres qui sont validés.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, ça serait la dernière question, Mme la députée. Oui, M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): ...que les prévisions, il faut les faire, disons, avec une certaine prudence. Il n'y a pas de certitude, puisqu'on parle de l'avenir. Mais, à 1,4 % de croissance sur 15 ans, un chiffre qui est inférieur aux 15 dernières années, on croit qu'on a ici une base, une fondation solide pour faire des prévisions qui sont des prévisions prudentes, conservatrices, comme toutes les bonnes prévisions doivent l'être.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors là, l'écart est rendu à 22 minutes, à peu près. Alors, vous comprendrez que je vais passer tout de suite...

M. Brassard: De 22 minutes en faveur de...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, c'est en faveur du gouvernement, parce qu'il y a 22 minutes de plus de faites par l'opposition officielle. Alors, M. le ministre.


Évaluation du taux de rendement (suite)

M. Brassard: Mme la Présidente, je voudrais revenir sur les propos du député de Laurier-Dorion au moment où on s'est quittés, à 12 h 30, parce que j'avais un peu de misère à le suivre et à déceler de la cohérence dans son discours.

D'abord, il a fait un rappel historique pour dire que l'introduction dans la loi d'Hydro-Québec concernant le versement de dividendes, ça date de 1981, ce qui est vrai, ce qui est exact. C'est M. Parizeau, ministre des Finances d'alors, qui a annoncé ça dans son discours du budget et c'est M. Duhaime, ministre des Ressources naturelles à l'époque, qui a présenté un projet de loi en ce sens.

Il est vrai que le Parti libéral, à l'époque, en tant qu'opposition, a voté contre. Mais il n'en reste pas moins que, de 1985 à 1994, le Parti libéral s'est retrouvé aux commandes et qu'il n'a pas jugé pertinent de modifier ou d'abolir cette disposition de la loi référant au versement de dividendes, d'autant plus qu'il s'en est versé, des dividendes, à l'époque. En 1988, par exemple, Hydro-Québec a versé 300 000 000 $ de dividendes au trésor public, en 1989, 182 000 000 $ de dividendes, puis après, bien, plus rien.

Il faut aussi indiquer qu'en même temps – et à cette époque-là le pouvoir de fixer les tarifs appartenait au Conseil des ministres – il y avait des hausses parfois substantielles de tarifs, supérieures au taux d'inflation, durant ces années-là: 1990, 7,5 % d'augmentation, alors que le taux d'inflation était de 4,4 %; 1991, 7 % d'augmentation, avec un taux d'inflation de 6,2 %; 1986, 5,4 % d'augmentation, 4,6 %... À chaque année, des augmentations substantielles et, pour un bon nombre d'années, pas de dividendes, en plus.

Donc, vous voyez, je pense que le député de Laurier-Dorion est peut-être en mauvaise posture pour faire la leçon sur cette question de versement de dividendes et sur cette question tarifaire. Le passé à cet égard et l'histoire de leurs deux mandats de gouvernement les plus récents ne sont pas très édifiants. Ils ne sont pas très édifiants, hein. Non seulement les dividendes, pendant plusieurs années, ont disparu, mais les hausses de tarifs, elles, ont toujours eu lieu à chaque année. À chaque année, bon an mal an, hausse de tarifs, la plupart du temps dépassant le taux d'inflation. Bien, je veux dire, quand on fait des références au passé, il faut les faire au complet. Et ils n'ont pas jugé utile d'amender la loi pour éliminer de la loi toute cette question de versement de dividendes.

Ceci pour dire... Parce que j'écoutais le député de Laurier-Dorion puis j'avais de la misère à déterminer dans quel camp il se trouvait. À un moment donné, il avait l'air de dire qu'un taux de rendement de 9,5 %, tel qu'on le retrouve dans le plan stratégique, c'était raisonnable, convenable, mais à un autre moment donné il semblait vouloir dire que, plutôt que de verser des dividendes puis d'avoir un rendement à cette hauteur-là, il aurait été préférable de baisser les tarifs. Je ne sais pas où vraiment il se situait. Est-ce qu'il se situait... Parce qu'à la fin il semblait vouloir dire: Rendement faible ou nul et baisse de tarifs et non versement de dividendes. Bon. Ce n'est pas le choix qu'ils ont fait au moment où ils étaient au gouvernement. Quand ils ont pu obtenir des dividendes d'Hydro-Québec, il les ont reçus avec beaucoup de plaisir, puis ils n'ont pas protesté, puis ils ne les ont pas retournés non plus à l'envoyeur, ils les ont gardés dans le fonds consolidé. Puis, en même temps, ils ne se sont pas gênés pour monter les tarifs.

Alors là il faut, dans ce débat-là et sur des questions aussi majeures, faire preuve d'un minimum de cohérence. Moi, je dis, et je suis pleinement d'accord avec Hydro-Québec à cet égard: gel des tarifs, ça, c'est une mesure importante, souhaitable, et il faut s'en réjouir. Gel des tarifs. Pas d'augmentations comme on en a connu pendant des années, à l'époque où M. le député de Laurier-Dorion était aux commandes, et au gouvernement, et même au Conseil des ministres, de 1989 à 1994, et même ministre des Ressources naturelles à la fin du deuxième mandat. Donc, gel des tarifs, je pense qu'il faut s'en réjouir.

Et en même temps il faut dire aussi, et c'est ce que disait M. Parizeau à cette époque-là, en 1981, c'est ce qu'il disait: Ce n'est pas normal, après avoir investi tant d'argent dans Hydro-Québec – la population, le peuple québécois, les Québécois ont investi des sommes considérables dans Hydro-Québec – qu'il n'y ait pas un retour convenable de leurs investissements. Et ça, ça prend la forme d'un bénéfice net qui se compare à des sociétés du même genre, dans le même secteur. C'est ce qu'on peut voir avec les données que vous nous soumettez. Et ça veut dire aussi des dividendes, des dividendes versés au gouvernement. Ce n'est pas scandaleux, ça. Ça n'a rien de scandaleux ni d'indigne.

(14 h 20)

Alors, je ne vois pas pourquoi on s'indignerait qu'Hydro-Québec ait comme objectif d'avoir un rendement convenable, alors que pendant des années ce n'était pas le cas, c'était même zéro. En 1988, il y a eu 300 000 000 $; en 1989, il y a eu 182 000 000 $ de dividendes; après ça, zéro, zéro, zéro, zéro, jusqu'en 1997. Pas un sou de dividendes, ce n'est pas normal, ce n'est absolument pas normal. Et je trouve ça tout à fait légitime et non seulement souhaitable, mais nécessaire qu'Hydro-Québec ait dans son plan stratégique un objectif de cette nature-là, de dire que 6,8 % de taux de rendement... 6,4 %, c'est ça qu'est le taux de rendement actuel d'Hydro-Québec? 6,4 %, c'est en dessous du taux d'intérêt sur la dette. Vrai ou faux? C'est inférieur au taux d'intérêt sur la dette. Alors, s'il y a de la péréquation actuellement, quand on regarde le taux de rendement puis le taux d'intérêt de la dette, c'est plutôt la population du Québec qui pratique la péréquation à l'égard d'Hydro-Québec, et ça, ce n'est pas normal.

Il faut que le taux de rendement soit supérieur et se rapproche du 10 %, qui est le taux de rendement normal, convenable de toute entreprise qui oeuvre dans ce secteur-là. Les comparaisons sont faciles à faire puisqu'on a toutes les données à cet égard. Et, en même temps, ça s'accompagne d'un engagement ferme de geler les tarifs. Alors, écoutez, moi, je pense que là on a une situation tout à fait acceptable, à la fois pour les Québécois en tant que consommateurs et pour les Québécois en tant que contribuables. Sous les deux angles, je pense qu'ils y trouvent leur compte. Comme contribuables, ils y trouvent leur compte, parce que la société d'État a un rendement raisonnable puis qu'elle verse des dividendes à des hauteurs raisonnables. Comme contribuables, on y trouve notre compte, mais comme consommateurs on y trouve aussi notre compte, parce que les tarifs sont gelés et qu'il n'y a pas d'augmentation de tarifs, comme c'était le cas présentement.

Alors, je pense que ça méritait d'être clarifié, ces choses-là, pour qu'on évite de passer d'une position à l'autre, de faire semblant de s'indigner parce qu'on vise un taux de rendement s'approchant du 10 % puis, en même temps, de faire très populaire en évoquant des baisses de tarifs. Il faut faire des choix, puis des choix qui doivent demeurer cohérents. Alors, ceci étant dit, Mme la Présidente, ces remarques étant faites, je voudrais passer, moi, à l'orientation 2.

M. Sirros: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Laurier-Dorion, oui.

M. Sirros: ...l'article 35, je pense, me permet au moins de rectifier des choses.

M. Brassard: Non, non, on n'est pas dans un débat, là, on est avec des invités.

M. Sirros: Ha, ha, ha! Si on n'est pas dans un débat, le ministre vient de parler des commentaires que j'ai faits, il n'a pas questionné Hydro-Québec. Alors, vous me permettrez de rectifier.

M. Brassard: Quand vous aurez votre temps de parole, vous pourrez...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien là, écoutez, s'il vous plaît, je suis supposée encore présider cette commission. Alors, je pense, M. le député de Laurier-Dorion, que vous savez qu'il y a des articles – on a à peu près le même règlement qu'en Chambre, vous êtes très bien au courant – cependant qui s'appliquent surtout quand on est à l'Assemblée nationale. Alors, moi, à ce moment-ci, compte tenu du déficit, je pense que vous allez avoir votre droit de parole aussi tout à l'heure.

M. Sirros: Mme la Présidente, si les mêmes règles s'appliquent, je trouve que le ministre, qui vient de commenter mes commentaires, a mal interprété mes propos, les a dénaturés. Et j'aimerais donc, sur la base de notre règlement, à l'article 35, je crois, dans le respect de la commission, rectifier, parce qu'il y a un élément que le ministre a oublié de mentionner dans tout le...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mais là, un instant, M. le député de Laurier-Dorion, c'est parce que je vais vérifier. Est-ce que vous en faites une question de fait personnel?

M. Sirros: Non, Mme la Présidente. C'est l'article qui me permet de rectifier tout de suite après l'intervention de quelqu'un d'autre...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est de poser une question au ministre? Excusez, je vais le lire.

M. Sirros: De tout façon, le temps que vous cherchez, j'aurai terminé.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le ministre.

M. Brassard: Mme la Présidente, si c'est pour permettre au député de Laurier-Dorion de nous dire que 9,8 % de taux de rendement comme objectif pour Hydro-Québec, c'est tout à fait convenable et souhaitable puis qu'il est d'accord avec ça, je veux bien lui laisser la parole.

M. Sirros: Est-ce que vous me laissez la parole, si je veux vous dire autre chose, M. le ministre?

M. Brassard: Non, mais, sur le taux de rendement comme tel, est-ce que c'est scandaleux 9,8 %?

M. Sirros: ...à la question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. Écoutez, un instant, s'il vous plaît!

Une voix: Mme la Présidente, question d'ordre. Il y a une présidente, c'est elle qui donne la parole...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, c'est ce que je trouve aussi, Mme la députée.

Une voix: ...ce n'est pas lui. O.K.?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, mais, sauf que, regardez, là...

M. Brassard: Bon, d'accord. Alors, je la garde, la parole. Je la garde.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, mais là, à ce moment-ci, j'ai une question de règlement qui m'est apportée par le député de Laurier-Dorion. Et, quand je vérifie dans le règlement par rapport à l'article 35, M. le député de Laurier-Dorion, je ne vois pas en quoi vous me faites une question de règlement sur l'article 35. Alors, vraiment, je ne suis pas capable de me raccrocher à ça pour...

M. Sirros: ...212 ou 213, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon, un instant, ça serait peut-être 212.

M. Sirros: Mais je vous répète, le temps que vous cherchez, j'aurai terminé.

Une voix: Le ministre est d'accord.

M. Sirros: Et le ministre est d'accord.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, mais là, en attendant, normalement, vous seriez supposé attendre...

M. Sirros: Sauf que, lui, il met des balises. Il dit: Si tu dis ce que je veux bien que tu dises, tu peux le dire, sinon tu ne le diras pas. Alors, pendant que vous cherchez, Mme la Présidente, tout ce que je veux dire au ministre, c'est: toute cette envolée qu'il a faite par rapport aux augmentations de tarifs, etc., il l'a faite dans le contexte... Je ne me suis jamais indigné d'un taux de rendement. Je me suis indigné du fait qu'Hydro-Québec, dans le nouveau contexte réglementaire...

Parce que nous avons voté comme vous pour l'installation d'une régie, mais, nous, on y croyait, contrairement à vous. Alors, je m'indigne qu'Hydro-Québec ne veuille pas aller devant la Régie pour expliquer pourquoi il faut avoir un taux de rendement de tel niveau: Voilà les dépenses, voilà les coûts, voilà le taux, le tarif que ça prendrait. Alors, j'invite donc le ministre, dans un défi que je lui lance, de transparence, à inviter Hydro-Québec à aller devant la Régie pour expliquer pourquoi c'est magnifique et bon pour tous les Québécois de voir leurs tarifs gelés. Si c'est vrai, il n'y aura pas de problème, la Régie va dire bravo à Hydro-Québec, puis nous, on va applaudir...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député...

M. Sirros: ...et on va accepter un taux de rendement que la Régie va déterminer également. Voilà!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. M. le député de Laurier-Dorion, je pense que votre point est fait. Peut-être qu'on a débordé un petit peu de l'article 212, hein? On a débordé considérablement. Alors, M. le ministre, là-dessus, je vous recède la parole.


Collaboration avec l'Agence de l'efficacité énergétique

M. Brassard: Oui, alors, je passe à l'orientation 2, parce qu'il ne faudrait quand même pas qu'on oublie certains éléments de cette orientation qui concerne la qualité de service. Ma question porte précisément sur l'efficacité énergétique, les économies d'énergie. Depuis que l'Agence de l'efficacité énergétique est en place et qu'elle est opérationnelle, il y a, je dirais, une certaine opinion qui circule et qui voudrait qu'Hydro-Québec, à partir de ce moment-là, se soit complètement désintéressée de toute cette question d'économie d'énergie et ait laissé tout ça à l'Agence de l'efficacité énergétique.

À la page 32 de votre plan stratégique, vous mentionnez qu'«Hydro-Québec entreprendra une évaluation rigoureuse du potentiel résiduel d'économies d'énergie au Québec» et qu'elle se propose, à cet égard, «de travailler à cette révision avec l'Agence de l'efficacité énergétique».

Je voudrais savoir peut-être... que vous informiez cette commission sur la forme que prend cette collaboration. Comment cette collaboration avec l'Agence de l'efficacité énergétique a-t-elle pris forme? Comment, concrètement, apparaît-elle? Quelle forme pourrait-elle prendre et quel rôle vous entendez jouer? À partir du moment où il y a une agence dont c'est le mandat et la mission de travailler à une plus grande efficacité énergétique, quel rôle vous entendez jouer à cet égard, compte tenu, encore une fois, de l'existence de l'Agence?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, Hydro-Québec est présente à l'Agence de l'efficacité énergétique, comme les autres fournisseurs, du reste, en énergie du marché québécois. Alors, nous y sommes présents. Nous continuons présentement dans des programmes qui visent l'efficacité énergétique, par exemple dans la bioénergie, où il y a usage de la thermopompe qui fait en sorte que ça réduit à la fois les tarifs des clients puis que ça rend l'utilisation de l'énergie efficace. Nous continuons ces programmes-là, qui sont appréciés, incidemment, du public. Il y a beaucoup de demandes dans ce secteur-là.

(14 h 30)

Comme vous venez de le signaler, ou que nous le signale le plan stratégique, on a l'intention de poursuivre les études, l'examen de la situation pour savoir exactement quel potentiel peut encore être réalisé d'économies. Parce que, vous savez, au Québec, on est une des sociétés qui en a réalisé le plus. Hydro-Québec est une des sociétés qui a réalisé le plus d'investissements dans le secteur de l'efficacité énergétique. Mais, même à cela, on va conduire les études qui sont requises pour savoir exactement ce qu'on pourrait faire, bien entendu, de plus et, de la même manière, on maintient les activités au LTEE pour le développement de technologies. Et, bien sûr, quand on développe de nouvelles technologies, on fait en sorte que ce soient des technologies les plus efficaces possible du point de vue de l'utilisation de l'électricité.

Ceci étant dit, mon collègue est plus directement concerné par la relation que nous entretenons avec l'Agence de l'efficacité énergétique, et je vais lui demander de rajouter à ce que je viens de donner comme éléments à votre question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, certainement, Mme la Présidente. Hydro-Québec, il y a, je dirais, plus de cinq ans, a fait une étude assez exhaustive du potentiel d'économie d'énergie au Québec, et, de ce potentiel-là, on a réalisé à date un équivalent de 2,5 TWh d'économie d'énergie récurrente, ce qui a exigé un investissement de plus de 320 000 000 $.

Je pense que la problématique à laquelle on fait face aujourd'hui est... d'une part, Hydro-Québec, il n'y a pas beaucoup de potentiel d'économie d'énergie rentable sur la base du coût évité, mais il demeure qu'il y a une étude à faire du potentiel hydroélectrique qui pourrait alimenter le mandat de l'Agence de l'efficacité énergétique d'identifier des programmes spécifiques d'économie d'énergie à l'échelle du Québec. Donc, ça implique bien sûr de revoir ce potentiel-là avec eux.

Comme M. Caillé l'a mentionné au début, nous sommes présents à l'Agence de l'efficacité énergétique, et c'est prévu au cours des prochains mois de regarder avec eux ce potentiel-là, de l'analyser et, ensuite, finalement de viser à préciser le programme d'efficacité énergétique qu'Hydro-Québec pourrait présenter à la Régie de l'énergie et sur lequel la Régie de l'énergie aura à se positionner, dans le sens s'il est opportun ou non de considérer le coût de l'efficacité énergétique dans la base tarifaire ou dans une façon, je dirais, de compenser le coût de cette efficacité énergétique là au bénéfice des Québécois.

M. Brassard: Je comprends que c'est à peine amorcé, là...

M. Filion (Yves): C'est à peine amorcé, vous avez raison.

M. Brassard: ...avec l'Agence.

M. Filion (Yves): Oui. Toutefois, je tiens à préciser que, pendant ce temps-là, Hydro-Québec n'est pas inactive au niveau de l'efficacité énergétique. Nous continuons. Nous avons plusieurs actions qui visent à supporter les économies d'énergie, plusieurs actions qui touchent, par exemple, à des interventions ciblées dans le marché, où on donne une expertise concrète dans la clientèle commerciale-institutionnelle, aussi des actions où nous fournissons des caractéristiques au niveau de la consommation à la population, des conseils, dont, entre autres, de l'information soit dans les pamphlets joints aux factures à nos clients ou encore sur notre site Internet.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le ministre.

M. Brassard: 2,5 TWh d'économie d'énergie, est-ce que je décode mal vos propos en disant que ça peut peut-être être augmenté, mais à la marge? C'est que c'est pas mal le maximum?

M. Filion (Yves): Je dois vous admettre que, du côté rentabilité uniquement d'Hydro-Québec, nous ne croyons pas que ça soit possible d'aller plus haut. Donc, ça demeure maintenant, à savoir: Est-ce que c'est un potentiel qui mérite d'être regardé, évalué, combien ça coûterait et qu'est-ce que ça représenterait comme coûts additionnels par rapport aux coûts évités pour en réaliser? Et, à ce moment-là, il y aura donc des décisions à prendre, qui sont dans le mandat d'ailleurs de la Régie de l'énergie.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Filion. Alors, Mme la députée de Bonaventure.


Gestion des réservoirs

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, je souhaiterais aborder maintenant la question, si vous permettez, de tout le débat entourant le niveau des réservoirs d'Hydro-Québec et je vais me référer à un article qui est paru dans le journal Le Devoir , par le journaliste Louis-Gilles Francoeur, samedi dernier. L'article s'intitule de la façon suivante, et c'est un titre, je dois vous dire, qui est assez alarmiste, et vous serez, j'imagine, à même de confirmer ou d'infirmer les propos que rapporte M. Francoeur. Alors, l'article s'intitule Les réserves d'eau d'Hydro-Québec pourraient s'avérer insuffisantes d'ici 2002 . L'information nous vient d'un rapport d'experts américains qui a été commandé, en fait, par la Régie de l'énergie. On nous dit, dans cet article-là, que ce rapport-là va «jusqu'à recommander impérativement à la Régie de mettre en place des mesures de contrôle ou de gestion de la demande en électricité pour compenser la baisse des réserves hydroélectriques». Alors, c'est un rapport qui a été rendu public par le Regroupement national des conseils régionaux en environnement. On souligne également que le niveau des réservoirs est passé à 69 %, 70 %, 55 %, 51 %, 52 % et, en 1998, à 45 %. Donc, on est passé d'un niveau, même, en 1992, de 79 %, et aujourd'hui on arrive à un niveau de 45 %. C'est des données, je dois vous dire, qui sont inquiétantes. Il y a plusieurs groupes évidemment qui nourrissent plusieurs appréhensions quant à une réduction du niveau des réservoirs.

Ma question serait la suivante: Pourquoi Hydro-Québec refuse de dévoiler le niveau de ses réservoirs? C'est surprenant qu'Hydro-Québec se bute à justement refuser de dévoiler son niveau, d'autant plus que, M. Caillé, dans une déclaration que vous avez faite à une journaliste du journal La Presse , Mme Lisa Binsse, qui date donc du 1er juin 1999, vous vous êtes montré ouvert éventuellement donc à divulguer le niveau des réservoirs, puis de façon pluriannuelle. Et je vais citer l'article, la journaliste. On nous dit: «M. Caillé a indiqué qu'il tenterait de convaincre ses vis-à-vis, BC Power, Bonneville Power et Tennessee Valley Authority, à une plus grande transparence sur le niveau de leurs réservoirs. S'ils acceptent, le secret sera levé au Québec.»

Alors, évidemment, je souhaiterais aujourd'hui comme parlementaire, et le ministre l'a souligné dans ses remarques préliminaires, c'est une question fort importante... cet après-midi, je souhaiterais que les membres de cette commission puissent quitter avec effectivement des données qui soient valides, qui soient vérifiées, et avec le sentiment qu'on ne tente pas de nous cacher quels sont ces niveaux de réservoirs. Alors, est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi Hydro-Québec tient tout ça caché, comme si c'était un secret d'État, finalement?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, Mme la Présidente, encore il n'y a pas longtemps, pas la semaine dernière, la semaine d'avant, donc il y a deux semaines, j'ai rencontré mon collègue de BC Hydro, on a eu l'occasion d'en discuter, et, ma foi, il ne m'a pas laissé beaucoup d'espoir. Alors, ça, c'est pour ce qui est de nos collègues.

Maintenant, la question plus fondamentale: Pourquoi les gens dans le commerce refusent de donner les données quand elles ont une valeur commerciale? Première chose que je voudrais dire, c'est que, à Hydro-Québec, quand les données n'ont pas de valeur commerciale, on les rend publiques. Nous l'avons fait. Nous l'avons fait pour ce qui est des données, je pense, jusqu'en 1998, les mêmes données dont parlent les spécialistes américains, et on a expliqué à la presse exactement comment on avait fait la gestion. On a fait la démonstration qu'en tout temps – en tout temps, parce que c'est ça, notre critère – nous avons toujours conservé des moyens pour alimenter la population québécoise, tout en faisant l'hypothèse qu'on ferait face à 24 mois de sécheresse en avant de nous. On a fait ça pour les données de 1998 parce qu'on a pensé, on a conclu qu'elles n'avaient plus de valeur commerciale.

(14 h 40)

Pourquoi les données de 1999 ne sont pas publiques? Pourquoi est-ce qu'elles ne le sont pas? Je vais vous l'expliquer, et avec des hypothèses seulement, parce que je pense que ce n'est pas à l'avantage des Québécois que je révèle, moi, le président d'Hydro-Québec, les chiffres. Alors, si – je dis bien «si» – les réserves ont beaucoup augmenté, la seule conséquence qu'il peut y avoir sur les marchés, c'est une baisse de prix. Les Québécois sont perdants. Si les réserves ont baissé, les seules conséquences qui vont arriver, c'est que le prix va augmenter sur le marché. Et il y a des moyens pour satisfaire les besoins qui feraient justement appel au marché, et ça coûterait plus cher. Dans tous les cas d'espèce, les Québécois sont perdants à rendre publiques les données en temps réel sur l'état des réservoirs. Ce n'est pas un manque de transparence d'Hydro-Québec ici, c'est, je pense, une responsabilité que nous avons parce qu'on gère des actifs qui appartiennent à d'autres. Ce n'est pas des actifs qui appartiennent à nous, les gestionnaires. On a la responsabilité de faire en sorte que ça coûte le moins cher possible aux Québécois. Alors, on ne fera pas ça. Dès que ces données de 1999 n'auront plus de valeur commerciale – ça va arriver un jour – on n'aura aucun problème à rendre compte publiquement de notre gestion des réservoirs à l'ensemble du public. Bien entendu, entre-temps et en temps réel, j'informe le ministre de l'Énergie de la situation au fur et à mesure qu'elle évolue. Ça, il n'y a pas de problème, parce que là ça se fait sur une base confidentielle. Voilà la raison.

Je voudrais aller plus loin, Mme la Présidente, et je voudrais que mon collègue ici explique exactement c'est quoi, nos critères de gestion des réservoirs, pour qu'on puisse aujourd'hui, à l'aide d'exemples, vous donner une réponse très, très, très complète des moyens que nous mettons en place pour justifier ce que l'on dit quand on dit, nous, à Hydro-Québec: La sécurité d'approvisionnement des Québécois n'est pas ici en jeu; jamais on ne l'a mise en jeu; jamais on ne la mettra en jeu. On considère que c'est un impératif de fournir de l'électricité à la clientèle québécoise, c'est une obligation, et nous leur en donnons la garantie, Mme la Présidente.

Alors, passons maintenant à des exemples précis qui montrent l'application de nos critères de gestion des réservoirs. Mon collègue Vandal va faire ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Alors, Mme la Présidente, d'abord souligner que les critères en question, les critères que je vais décrire ne sont pas nouveaux. C'est les critères qui sont appliqués dans l'entreprise depuis plusieurs, plusieurs années. On remonte ici aux années quatre-vingt.

Les critères couvrent deux grands volets: la réserve énergétique, s'assurer qu'il y a de l'énergie électrique disponible pour servir en tout temps les Québécois dans un contexte et dans un scénario qui est un scénario extrême d'un point de vue des apports, et la réserve de puissance, c'est-à-dire qu'on a de façon instantanée la capacité d'alimenter les foyers, les industries, les commerces québécois dans un contexte où on fait face à des pointes de consommation, comme ça a été le cas le 14 janvier dernier.

La réserve d'énergie, donc s'assurer qu'il y aura ici toujours de l'énergie disponible pour servir l'ensemble des besoins des Québécois. Ce que l'on fait, et c'est, encore là, une pratique qui n'est pas une pratique nouvelle, c'est une pratique qui a été maintenue dans l'entreprise depuis plusieurs années, c'est de s'assurer qu'en tout temps on a les moyens, les outils pour faire face à un déficit d'hydraulicité par rapport à la moyenne, la moyenne des apports depuis 1943, un déficit donc de 64 TWh. 64 TWh, ça vient d'où? Ça vient essentiellement d'une décision – puis une décision, là, de conservatisme dans la gestion – de couvrir tous les scénarios jusqu'à 98 % de probabilités. Donc, on couvre ici une plage de probabilités qui est une plage de probabilités qui couvre tous les scénarios, sauf les 2 % de scénarios extrêmes. Ce 64 TWh est donc toujours disponible, en moyen dans l'entreprise pour faire face à un déficit d'hydraulicité sur une période de deux années. Ce 64 TWh, ça correspond également, sur une base historique, à ce qui a été la probabilité, donc de 98 %, basée sur des données réelles, des données que l'on accumule depuis 1943.

Ces moyens-là, on les a sous plusieurs formes. On peut les avoir sous forme d'eau dans les réservoirs. C'est en général la première forme et la forme la plus importante. On peut les avoir dans le contexte de la capacité de produire à partir des équipements qui ne sont pas des équipements qui sont utilisés de façon régulière. La centrale de Tracy est un exemple. Tracy peut produire 2,5 à 3 TWh de façon annuelle sans difficulté. Donc, Tracy correspond également à de la réserve de puissance. Et finalement, et de façon importante également et de façon plus facile aujourd'hui que par le passé, la capacité pour l'entreprise soit d'acheter des réseaux avoisinants, dans un contexte où le marché de l'énergie est aujourd'hui un marché très liquide, c'est-à-dire un marché où il est facile de transiger, ou la capacité d'arrêter des ventes qui sont des ventes qui se font sur des contrats de court terme. Et, encore là, le contexte pour les années à venir va être un contexte encore plus facile, dans le contexte où on se dégage de contrats et d'engagements de long terme pour s'orienter vers des transactions de court terme.

Donc, tous ces moyens, des moyens de production comme Tracy, de réserve énergétique sous forme d'eau dans les réservoirs, des capacités d'acheter, des capacités de retarder, voire d'interrompre des ventes sur des marchés court terme, tous ces éléments-là doivent en tout temps représenter une capacité, sur une période de deux années consécutives, de 64 TWh. Ce critère-là est appliqué, il était appliqué par les années passées, il a été appliqué l'année dernière, il est appliqué au moment où on se parle et il continuera d'être appliqué pour les années à venir. Ça, c'est la réserve énergétique.

Le deuxième volet, c'est la réserve de puissance, donc la capacité de faire face de façon instantanée aux besoins de l'ensemble des Québécois, et ça, c'est donc de faire face aux pointes de consommation qui sont les pointes que l'on connaît généralement durant le mois de janvier – notre pointe cette année a été le 14 janvier. On a atteint, cette journée-là, si je me rappelle bien, à peu près 31 500 MW de demande sur le réseau – en plus, bien sûr, des contrats d'exportation qui étaient des contrats fermes. La pointe historique chez Hydro-Québec a été de près de 32 000 MW, le 14 janvier 1999. Et ce que l'on maintient dans le parc des installations de production d'Hydro-Québec, c'est en tout temps, sur une base de planification long terme, c'est environ 10 % de réserve. Donc, on maintient 10 % de réserve de puissance par rapport à l'ensemble des besoins sur le réseau québécois. Ce critère-là est un critère qui découle d'une application, là, commune à l'industrie en Amérique du Nord, de prudence dans les moyens d'offre et de gestion de la demande de façon instantanée, donc, en termes de puissance. C'est des critères qui sont communs donc à l'ensemble des compagnies en Amérique du Nord, notamment les compagnies du Northeast Power Coordinating Council dont Hydro-Québec fait partie.

Ces critères-là, encore là, ne sont pas des critères qui sont nouveaux, c'est des critères qui sont appliqués depuis bien des années, qui sont appliqués au moment où on se parle et qui continueront d'être appliqués. Donc, tant en puissance de façon instantanée qu'en énergie sur des périodes qui sont des périodes pluriannuelles, on maintient ici une gestion qui est une gestion tout aussi rigoureuse aujourd'hui qu'elle l'a été par les années passées.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Vandal. Alors, Mme la députée de Bonaventure, je suis désolée, mais ça met fin à l'enveloppe qui était allouée. Il reste à peu près 15 minutes et il y a un déficit de 15 minutes du côté du parti gouvernemental. C'est ce qu'on me donne, comme le temps est calculé. Alors, M. le député de Gaspé, vous m'aviez demandé une question?

Mme Normandeau: Mme la Présidente, un instant. Est-ce qu'il y a du temps alloué à l'ensemble de mes collègues?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): En fait, on a essayé de diviser de façon égale le temps, et présentement il y a un déficit de 15 minutes à peu près pour le parti gouvernemental. Alors, ça veut dire qu'on a un petit peu dépassé, largement de ce côté-ci. Alors, je vais voir s'il y a d'autres questions.

M. Sirros: ...question de règlement sur le temps de ma collègue?

Une voix: C'est ça, question de règlement...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ce n'est pas calculé, à ce qu'on me dit. Non, M. le député de Laurier-Dorion. Alors, M. le député de Gaspé, vous aviez demandé la parole.


Amélioration du service à la clientèle

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais revenir un petit peu en arrière, parce que, comme vous voyez, on a des sujets qu'on veut couvrir et d'autres qui sont couverts à des temps différents. Tout à l'heure, vous avez parlé de l'Agence de l'efficacité énergétique, et également Hydro-Québec, dans son plan stratégique, prévoit offrir différents services à sa clientèle. J'aimerais ça, voir exposées ici à cette commission quelles sont les avenues qu'Hydro-Québec a envisagées et également les modalités de paiement et de facturation, si c'est dans les cartons d'Hydro-Québec, je pense que ça a été mentionné dans le plan stratégique. Alors, j'aimerais ça, vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Mon collègue, encore une fois, complétera, mais on travaille sous plusieurs volets ici. Disons d'abord qu'il y a beaucoup à faire dans l'amélioration de la relation, de la communication avec nos clients et avec les municipalités au moment de pannes, qu'elles soient, ces pannes, consécutives à des événements climatiques extrêmes ou encore qu'il s'agisse d'interruption de service pour faire l'entretien des systèmes. M. Filion va vous donner plus de détails sur ce que nous avons mis en place versus ce qui existait avant, et du résultat que ça a donné, je pense c'est au milieu de décembre, et là, quand il y a eu la grosse bordée de neige humide dans la région de Montréal.

Autre avenue d'amélioration, c'est à travers les technologies, O.K.? qui peuvent nous aider à faciliter la relation avec notre clientèle.

On ne néglige pas, finalement, troisièmement, le travail qu'on doit faire ou qu'on peut faire puis que nos employés peuvent faire eux-mêmes, en s'engageant à améliorer, dans leur travail quotidien, notre relation avec notre clientèle.

(14 h 50)

Alors, Yves, M. Filion, avec votre permission, madame... M. le Président, avec votre permission, Yves Filion va donner des compléments de réponse à ce que je viens de dire.

Le Président (M. Sirros): D'accord. M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, M. le Président. Écoutez, je pense qu'il est dans notre objectif de faire les efforts qu'il faut pour améliorer la qualité de service à nos clients, et plus particulièrement pour améliorer la continuité de services. On a mis des actions en place, après le grand verglas de 1998, qui visaient à renforcer notre réseau et à réduire notre indice de continuité. Et puis on a connu aussi un événement assez important en juillet dernier, où on a fait face à des grands vents qui ont entraîné une panne d'électricité qui a duré jusqu'à cinq jours, cinq, six jours, ce qui était relativement long. Suite à ça, on a donc mis des actions en place pour, d'une part, mieux prévoir le délai de rétablissement de nos clients, parce qu'on considère qu'un des éléments majeurs que nos clients souhaitent... je pense qu'ils comprennent qu'il puisse y avoir des pannes lors de conditions climatiques extrêmes, mais ce qu'ils souhaitent, c'est savoir combien de temps ça va durer, pour prendre les mesures qu'ils croient pouvoir prendre, en étant bien informés, pour décider de leur propre sécurité ou d'autres actions qu'ils souhaitent prendre.

Alors, on a donc mis beaucoup d'énergie pour mieux prévoir notre processus de durée de rétablissement des pannes. On a aussi mis beaucoup d'efforts pour améliorer la collaboration avec les municipalités sur plusieurs volets: d'abord, pour les informer, pour leur demander de nous aider à réaliser le diagnostic des dommages suite à un événement climatique extrême, et également, dans certains cas, pour réaliser certains travaux connexes pour nous permettre de rétablir plus rapidement, et voire même d'informer, dans certains cas, des clients qui sont privés de tout autre moyen de communication.

Alors, comme M. Caillé le mentionnait, on a eu, dans la région des Laurentides, une panne quand même importante qui a touché 50 000 clients en décembre dernier, une neige mouillée qui, bien sûr, a entraîné plusieurs bris de branches. Il y avait quand même 50 000 clients privés d'électricité. On a mis en place le nouveau processus. Finalement, c'est un événement qui a commencé le soir, la veille vers 21 heures, qui s'est terminé vers minuit. Avant midi le lendemain, on était en mesure de prévoir exactement combien de clients resteraient à 18 heures et de prévoir que, avant minuit de la même journée, tous les clients seraient rétablis. Finalement, c'est ce qui s'est produit, et notre diagnostic a été réalisé dans les délais et on a rétabli les 50 000 clients en dedans de 24 heures. Alors, ce qu'on veut vous dire, c'est que ça fait partie des éléments qu'on veut mettre en place et qu'on est en train de mettre en place pour s'améliorer.

Donc, nos discussions avec les municipalités ne sont pas complètes, elles se poursuivent, et nous comptons bien conclure avec elles des ententes concrètes au cours de l'an 2000, avant la fin de l'an 2000.

M. Lelièvre: M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Oui, M. le député de Gaspé, allez-y.

M. Lelièvre: On sait qu'Hydro-Québec a mis en place des centres d'appels pour que sa clientèle puisse la rejoindre. Mais j'aimerais savoir quelles mesures vous envisagez mettre en place pour diminuer le temps d'attente, parce qu'on nous disait que ça pouvait aller jusqu'à cinq minutes d'attente au bout du fil pour avoir une réponse.

M. Caillé (André): Mon collègue donnera la réponse au député, M. le Président, avec votre permission.

Le Président (M. Sirros): D'accord. M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, M. le Président. Alors, je peux peut-être vous mentionner que les centres d'appels, c'est un projet important. Nous sommes actuellement en voie d'implanter des centres d'appels à Hydro-Québec qui visent, je dirais, à mieux desservir nos clients. Alors, les centres d'appels sont en phase d'implantation. Nous avons vécu certains problèmes d'implantation et, plus particulièrement, ces problèmes-là, je dirais, ont été affectés par le dernier conflit de travail, puisque ça a retardé l'implantation des centres d'appels. Nous avons donc, comme vous le mentionnez, M. le député, constaté une diminution de notre performance au niveau de la réponse téléphonique. Je tiens à vous dire que, à l'automne dernier, nous avons réalisé un bilan de la situation au niveau des centres d'appels avec une firme externe qui nous a aidés et nous avons implanté toute une série de mesures qui visent à améliorer la réponse téléphonique, le taux d'attente de réponse téléphonique et le taux de réponse téléphonique, incluant également des activités de formation au niveau de notre personnel qui visent à répondre du premier coup aux demandes du client.

Alors, vous avez raison de souligner ce point-là. C'est un des éléments de notre performance vis-à-vis les clients qui s'est détérioré, mais je peux vous assurer que nous avons pris les moyens pour améliorer la situation, et déjà on a constaté, en décembre dernier, une tendance à l'amélioration. Donc, on voit là qu'on est sur la voie de s'améliorer, et c'est ce que nous allons continuer à faire en 2000. D'ailleurs, des objectifs très précis ont été donnés à la vice-présidence responsable du service à la clientèle pour améliorer ce volet du service à la clientèle.

Le Président (M. Sirros): Merci. M. le député de Gaspé, il reste encore cinq minutes à votre formation sur ce volet.

M. Lelièvre: Oui. J'aimerais savoir: Le temps moyen d'attente était de combien avant que vous mettiez les mesures en place?

M. Filion (Yves): Un petit instant. J'ai la donnée, là. Alors, le temps moyen d'attente se situait environ à 65 secondes.

Une voix: ...

M. Filion (Yves): Oui, environ. Toutefois, je tiens à vous dire que c'est plus long que ce qu'on souhaite réaliser, et puis on vise, en l'an 2000, à atteindre au moins 50 % de nos appels avec un délai d'attente égal à 20 secondes.

M. Lelièvre: Vos centres d'appels sont-ils à Montréal ou ils sont...

M. Filion (Yves): Non, ils sont situés à plusieurs endroits. Comme je vous disais tout à l'heure, c'est un projet qui n'est pas encore terminé, l'implantation n'est pas encore terminée. Nous avons sept sites en opération actuellement. Je peux vous les nommer très rapidement: un site à Saint-Hyacinthe, un site à Montréal, à Saint-Antoine-des-Laurentides, un site à Hull, un deuxième site à Montréal mais pour la clientèle d'affaires, un site à Joliette et un site à Trois-Rivières. Il nous reste six sites à implanter, qui vont s'implanter d'ici à la fin de l'an 2000.

Le Président (M. Sirros): Ça va?

M. Lelièvre: Merci beaucoup.

Le Président (M. Sirros): Alors, Mme la députée de Bonaventure, à moins qu'il y ait quelqu'un du côté... Oui, allez-y, M. le député de...

M. Bédard: Simplement pour compléter. Comme indicateurs de performance, pour votre clientèle, à ce moment-là, vous dites: C'est le nombre de secondes et de minutes que vous prenez effectivement. Est-ce qu'il y a d'autres mesures? Parce que je voyais, les sondages, vous les faites – je voyais le résumé – auprès des gens en particulier, en général, parce que tout le monde a affaire à Hydro-Québec, à partir du moment où tu paies ta facture. Mais est-ce que vous en faites plus particulièrement avec ceux qui ont un contact direct avec des gens de votre service? Par exemple, quelqu'un qui a un problème de facturation, quelqu'un qui a un problème de raccordement, est-ce que le taux de satisfaction est calculé par rapport à ça ou – ce que je vois, en tout cas il semble, vous me corrigerez si ce n'est pas le cas – c'est un sondage qui est général auprès de la population du Québec?

M. Filion (Yves): Nous avons un sondage qui touche – ce qu'on vous a parlé tout à l'heure, cet avant-midi – la satisfaction de la population en général, mais nous avons aussi d'autres sondages beaucoup plus précis. Il y en a un, entre autres, qui touche la satisfaction globale à l'égard des contacts.

M. Bédard: O.K.

M. Filion (Yves): Donc, exactement ce que vous venez de mentionner, M. le député: les clients d'Hydro-Québec qui ont eu affaire à Hydro-Québec soit pour un déménagement, un problème de facturation, etc. Nous mesurons cette performance sur 10, une cote sur 10. Dans la clientèle résidentielle, nous sommes généralement situés autour de 8,5 à 8,4 sur 10. Mais, au cours de 1999, nous avons vécu une situation où cette performance-là s'est détériorée à cause des éléments que je vous ai expliqués tout à l'heure, plus tôt. La performance a diminué à 7,9, au lieu de 8,4. Pour nous, c'est un signe qui nous a alertés et c'est la mesure de cet indicateur de performance là qui nous a alertés pour nous amener à prendre des actions correctives le plus rapidement possible, qui ont été implantées dès l'été mais qui ont commencé à porter effet vraiment à partir du mois de novembre, décembre 1999.


Pratiques en matière de courtage

M. Bédard: Une toute petite avant de passer à un autre thème, parce que je veux bien comprendre, et ça n'a pas rapport avec la clientèle, c'était plus par rapport au premier thème qu'on a abordé, au niveau du courtage. Je veux bien comprendre le système du courtage. J'ai vu le graphique un peu, je voyais les ventes à court terme, mais le courtage en tant que tel, par achat-vente d'électricité, c'est le gain que vous réalisez entre les deux. Est-ce que c'est ça comme...

(15 heures)

M. Caillé (André): Avec la déréglementation des marchés, notamment de la production, ce qui arrive, c'est que le prix de la commodité varie durant la journée, parce que, pendant la journée, il y a des heures de pointe de consommation puis des creux dans la consommation; la même chose durant un mois; la même chose durant l'année. Dans un marché libre, en pointe, évidemment, quand il y a plus de demande, le prix augmente. Quand c'est hors pointe, le prix diminue parce qu'il y a plus d'offre que de demande. C'est ce qu'on appelle la volatilité. Ça veut dire que c'est la fréquence sur laquelle les prix changent, la volatilité, et l'écart qu'il y a entre les hauts et les bas.

Nous, à Hydro-Québec, comme on a des réservoirs, on n'a pas «peut-être» l'opportunité d'acheter quand c'est bas, on le sait quand c'est bas, on connaît ces cycles-là. On est sûr d'acheter quand c'est bas. Puis on n'est pas obligé de revendre en même temps, comme un compétiteur à nous qui serait un entrepreneur avec de l'équipement de production thermique. Lui, il n'est pas capable d'arrêter sa machine. Il l'achète, il faut qu'il la revende tout de suite, il n'a pas de place pour la stocker. Nous, ce n'est pas notre cas. Alors, on peut acheter bas et vendre haut parce qu'on a des réservoirs.

M. Bédard: Ce n'est pas par rapport à une journée en particulier, c'est par rapport à un temps de l'année en particulier.

M. Caillé (André): Ah! C'est sur toute l'année.

M. Bédard: Parce qu'il faut que ça soit une période... Pour stocker, il faut le prévoir sur une période. Ce n'est pas en nombre de jours. Je veux dire, ce n'est pas: une journée, tu peux stocker, puis, une journée, tu ne peux pas. On s'entend que...

M. Caillé (André): Non, non, non, non.

M. Vandal (Thierry): Il y a la volatilité sur une base annuelle. Donc, les consommations sont fortes aux États-Unis l'été, moins fortes en période d'hiver, mais c'est également – et c'est ça qui est intéressant à Hydro-Québec – à l'intérieur d'une journée même. Tous les jours. Et c'est ce qui rend cette commodité-là fantastique pour quelqu'un avec des actifs comme Hydro-Québec. Tous les jours et tant que les gens vont dormir la nuit et travailler de jour, il y aura une pointe le matin, quand les gens se préparent pour aller travailler, et il y aura une pointe en fin de journée. Et, la nuit, les prix seront très, très bas.

Pour vous donner un exemple, la semaine dernière, il y a eu dans le marché de New York, un marché qui nous est directement accessible, des moments où on pouvait trouver de l'énergie à 10 $ le mégawattheure – ça, c'est environ 0,01 $ le kilowattheure – et d'autres moments où ça valait en haut de 1 000 $ le mégawattheure, en haut de 0,10 $ le kilowattheure.

Le Président (M. Sirros): Comme on commence à parler de dollars, je pense que c'est peut-être le bon moment d'entamer les troisième et quatrième orientations. On parle d'assurer la rentabilité de l'entreprise, et je pense qu'à ce stade-ci on pourrait entamer la présentation d'Hydro-Québec afin de permettre la poursuite des discussions sur ce volet-là. Alors, M. Caillé, la parole est à vous.


Présentation thématique d'Hydro-Québec: Assurer la croissance rentable de l'entreprise au Québec

M. Caillé (André): Très bien. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission. Hydro-Québec contribue largement au dynamisme économique du Québec et compte augmenter sa contribution en assurant la croissance rentable de ses opérations au Québec. Cet objectif de croissance rentable est fondé dans une large mesure sur l'opportunité de parachever l'aménagement du potentiel hydroélectrique québécois, parachèvement qui correspond d'ailleurs aux approvisionnements futurs requis à terme pour les mêmes marchés québécois. La croissance rentable de l'entreprise au Québec passe également par l'innovation technologique soutenue au niveau des métiers de base que sont la production, le transport et la distribution de l'électricité. C'est dans cette optique que l'entreprise énonce les troisième et quatrième orientations de son Plan stratégique 2000-2004 .

La troisième orientation vise à poursuivre la mise en valeur du potentiel hydroélectrique rentable. À cet égard, l'une des bonnes nouvelles – incontestablement l'une des bonnes nouvelles de l'année 1999 – a été la conclusion d'une entente de partenariat avec les conseils de bande de Betsiamites et d'Essipit ainsi qu'avec des MRC de la région du Saguenay et de la Côte-Nord. Cette entente prévoit la réalisation des projets Betsiamites et Toulnustouc. Ce sont des aménagements qui fourniront 3 TWh d'énergie par année à compter de 2005, ce qui est comparable incidemment à l'énergie qui sera fournie par la centrale Sainte-Marguerite-3. C'est une excellente nouvelle, parce que cela démontre que l'approche de partenariat proposée par Hydro-Québec et mise de l'avant dans le Plan stratégique 1998-2002 , c'est la bonne, et que finalement ça marche.

Je souhaite préciser ici – c'est très important, je pense – que ces partenariats assurent, premièrement, une participation concrète des communautés locales autochtones et non autochtones; deuxièmement, des retombées économiques régionales au moment de la construction; et, troisièmement, des bénéfices non seulement pour les générations présentes, qu'elles soient autochtones ou non autochtones, des bénéfices pour les générations futures et présentes.

Nous travaillons à d'autres projets, à des projets qui sont connus de nos partenaires potentiels. Ces projets-là, vous le savez, ce sont les projets de dérivation partielle de la rivière Romaine – on parle ici de 4 TWh; le projet d'aménagement du bas Churchill, au Labrador, qui compte pour 13 TWh; et le projet de la centrale Eastmain combiné avec une dérivation partielle de la rivière Rupert – ceci, c'est à la Baie-James – pour une production qui pourra varier entre 10 TWh et 12 TWh. Ces projets-là sont connus de nos partenaires. Je n'ai pas de difficulté à vous les présenter, à les identifier, plutôt, aujourd'hui.

Nous travaillons, M. le Président, également à d'autres projets potentiels que nous allons proposer à des partenaires dans les années qui viennent. Ces projets, évidemment, tout ça ensemble, ça totalise des productions importantes – je l'ai déjà indiqué avec les projets qui sont connus – et des investissements très, très importants pour le Québec. Tous ces projets, encore une fois, comme je l'ai déjà dit, doivent satisfaire les trois critères connus. Premièrement, la rentabilité: le coût de 0,03 $ par kilowattheure demeure la référence. Deuxièmement, ces projets doivent être acceptables du point de vue de l'environnement. Et, troisièmement, ces projets doivent pouvoir faire l'objet de partenariats avec toutes les communautés locales, les communautés locales autochtones comme les communautés locales non autochtones.

Je tiens à rappeler à cette commission qu'Hydro-Québec continue à privilégier le développement hydroélectrique. C'est à la fois pour des raisons économiques et aussi pour des raisons environnementales. Tous les environnementalistes devraient être d'accord avec nous pour dire que les problèmes de pollution atmosphérique sont des problèmes d'ordre continental, voire d'ordre planétaire. Ils seront aussi d'accord pour dire que l'hydroélectricité comme solution à ces problèmes est la filière, et de loin, la plus avantageuse, beaucoup plus que les filières thermiques, évidemment, qui utilisent le charbon, le mazout et même le gaz naturel comme combustibles, même si cela peut paraître étrange dans ma bouche. Ainsi, nous prévoyons communiquer davantage les qualités environnementales de l'hydroélectricité. Hydro-Québec a plus de 25 ans d'expérience dans l'étude et la compréhension des conséquences sur l'environnement des projets hydroélectriques.

Passons maintenant à la quatrième orientation, qui vise à stimuler l'innovation technologique dans l'entreprise. La qualité technologique des installations, des activités, des produits et des services d'Hydro-Québec est une source de fierté. Elle a été et sera aussi une source de croissance et de rentabilité à l'avantage de tous les Québécois. Mais nous savons tous – et cela est vrai pour n'importe quelle entreprise – que les risques augmentent lorsque celle-ci s'éloigne de ses compétences de base. Or, au fil des années, une partie des ressources que nous consacrons à la recherche a été allouée à des projets qui se situaient en dehors de nos activités de production, de transport et de distribution, avec des conséquences, comme on le sait aujourd'hui, pas toujours heureuses.

C'est pourquoi Hydro-Québec entend recentrer sa recherche et développement dans neuf champs d'activités directement associés à ses activités de base. Ainsi, en production, nous comptons sur nos chercheurs pour développer des nouveaux concepts de construction des ouvrages pour augmenter la durée de vie de ces ouvrages et accroître la productibilité de notre parc de production.

En transport, les défis que nous proposons à la recherche et développement sont d'augmenter la durée de vie des équipements, d'accroître la capacité du réseau en rendant, par exemple, plus concurrentiel le transport souterrain, et aussi de réduire l'impact des événements climatiques majeurs.

Enfin, en distribution et clientèle, nos équipes de scientifiques viseront à réduire le coût du souterrain, de l'enfouissement, des réseaux de distribution, à accroître la durée de vie également ici des équipements et à améliorer l'efficacité énergétique.

(15 h 10)

Voilà des exemples qui ne nous conduiront pas à la réduction des dépenses en recherche et développement, ce n'est pas le but. Ce n'est pas le but ici, le budget sera maintenu à environ 100 000 000 $ par année. Ils conduiront plutôt à l'amélioration de la qualité du service et à l'amélioration de notre rentabilité globale, et ça, c'est bel et bien le but.

Heureusement, plusieurs de nos projets sont bien sûr déjà centrés sur la rentabilité, des projets de recherche et développement, j'entends. Les exemples les mieux connus sont la technologie MATH, M-A-T-H, qui permet d'améliorer le rendement des turbines de nos centrales, la stimulation des réseaux de transport pour en optimiser l'exploitation; troisièmement, le système MONITEQ de surveillance en continu des disjoncteurs; quatrièmement, le transformateur de distribution à isolation solide pour des réseaux souterrains, développé en collaboration avec le CITEQ.

Par ailleurs, pour la même raison que celle pour laquelle elle devait recentrer ses activités de recherche, Hydro-Québec doit repositionner son activité de capital de risque, ce qu'elle fera par l'entremise d'Hydro-Québec CapiTech, une filiale en propriété exclusive.

Dans l'ensemble des pays industrialisés, le secteur privé investit de plus en plus en recherche et développement. Il se développe dans ces petites entreprises des champions, des experts mondiaux dont les activités résultent en percées sur le marché mondial. À l'échelle de la planète, le capital de risque est à l'affût de ces petites entreprises performantes. Le capital de risque est donc un moyen d'accéder aux meilleures innovations. C'est pourquoi Hydro-Québec CapiTech investira de façon prudente dans des entreprises en émergence dont les produits technologiques et les services sont en lien direct avec les activités de ces unités d'affaires. L'investissement total en capital de risque sera limité à un maximum de 100 000 000 $ et pour lequel nous visons un rendement de l'ordre de 20 %.

Enfin, M. le Président, pour favoriser tout cela, Hydro-Québec compte mettre en place une gestion intégrée de son cycle d'innovation technologique fondée sur les enjeux de ces unités d'affaires. Le défi pour nous consiste à mettre à contribution les chercheurs, beaucoup plus que par le passé, d'une façon beaucoup plus directe que par le passé, avec les représentants des unités d'affaires pour qu'ensemble ils constituent des portefeuilles de projets d'innovation. Un premier geste a été posé dans le but d'atteindre cet équilibre, celui de confier la responsabilité de l'activité de recherche au vice-président planification stratégique, dont la fonction comporte déjà un rôle intégrateur.

Lors d'une réunion avec nos chercheurs il y a deux semaines, ceux-ci me faisaient part des projets de thèmes, soumettaient un rapport préparé par eux sur des thèmes de recherche qui pourraient être envisagés à Hydro-Québec. Je dois dire que j'ai été très encouragé de voir que, oui, il y avait des différences, mais qu'il y avait très, très peu de différences entre ce que nos chercheurs identifient comme thèmes de recherche par rapport à ce que nous identifions nous-mêmes. Bien évidemment, il faut articuler tout cela, il faut mettre ça en opération, il faut passer aux actes, programmer, préparer un plan directeur, choses qui ne sont pas encore faites. Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas des différends qui vont surgir à ce moment-là, mais, en tout cas, au niveau des thèmes, pour l'essentiel, nous nous entendons.

Il y a un nouvel équilibre – je suis très conscient de ça – qu'il doit y avoir entre le poids de ce qu'apportent les chercheurs et le poids de ce qu'apportent les spécialistes des unités d'affaires dans les décisions, un équilibre dans les décisions que nous prenons pour investir dans un projet plutôt que dans un autre. Mais je pense que globalement l'entreprise ne peut sortir que très gagnante, dans la mesure où on réussit à recentrer nos activités de recherche dans nos domaines de compétence que sont la production, le transport et la distribution. Un exemple évident de ça, une démonstration évidente de cela, c'est que, quand on aura fait des découvertes – nouvelles technologies ou façons de faire – dans les domaines de production de transport et de distribution, nous saurons clairement qui est le client, qui sera le premier client: Ça sera nous. Je vous remercie.


Discussion générale

Le Président (M. Sirros): Merci, M. Caillé. Il n'y a pas d'autre intervention de votre part? Alors, je vais passer la parole au ministre pour la suite des choses, ici; en alternance par la suite, Mme la députée de Bonaventure. M. le ministre.


Participation au développement hydroélectrique du Labrador

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je pense – en tout cas, c'est certainement mon cas – je croirais que tout Québécois va tomber d'accord avec Hydro-Québec pour dire et affirmer que l'hydroélectricité, c'est une filière énergétique que nous devons continuer de privilégier, de soutenir et de développer, particulièrement à une époque où on met beaucoup l'accent, avec raison sans doute, sur les impacts, qu'on n'a pas fini de mesurer encore, que les scientifiques continuent de s'acharner à évaluer, où les impacts des gaz à effet de serre, plus particulièrement sur le plan climatique, sont de plus en plus présents sur le plan planétaire, je dirais.

D'ailleurs, je dirais, les événements climatiques extrêmes qui semblent vouloir se multiplier depuis un certain temps sont interprétés ou sont considérés par plusieurs comme étant le résultat de ce qu'on appelle le réchauffement de la planète, conséquence évidemment de l'augmentation considérable des gaz à effet de serre suite à l'activité humaine et à l'activité industrielle particulièrement.

Dans cette perspective, dans un tel contexte, je pense que les Québécois devraient être très fiers de ce qui s'est fait dans le passé, des choix qu'on a faits dans le passé et qu'on continue de soutenir, des choix qu'on continue de soutenir pour l'avenir, c'est-à-dire de privilégier et de développer la filière hydroélectrique, d'autant plus qu'il y a encore du développement. Vous l'indiquez dans votre plan stratégique, vous venez d'en faire état, il y a encore du développement à un coût acceptable, économique, de sites hydroélectriques sur le territoire québécois.

On pourrait évidemment – je ne pense pas qu'on ait le temps – les aborder un par un. Mais il y en a un surtout, bien sûr, qui fait beaucoup les manchettes depuis un certain temps, c'est l'aménagement du bas Churchill, qui implique des pourparlers, des négociations avec un autre gouvernement – celui de Terre-Neuve – puis une autre entreprise également, la Newfoundland & Labrador Hydro. Ces négociations se poursuivent présentement.

(15 h 20)

Vous savez très bien qu'il y en a certains – ça apparaît parfois dans la presse – qui s'inquiètent de l'impact éventuel de ce projet d'envergure sur les coûts d'approvisionnement d'Hydro-Québec et par conséquent aussi sur les tarifs des consommateurs québécois – les deux sont étroitement liés; si les coûts d'approvisionnement d'Hydro-Québec augmentent de façon substantielle, ça va finir par avoir des impacts réels et concrets sur les tarifs, forcément – et qui prétendent, qui affirment même que ce que vous avancez comme coûts, ça ne correspond pas à la réalité, que c'est beaucoup plus élevé. Parce que je fais référence aussi évidemment à vos trois critères que vous mentionnez fréquemment, que vous répétez très souvent, de façon très pédagogique sur toutes les tribunes qui vous sont offertes: le 0,03 $ du kilowattheure, ce que j'appelle le mantra du 0,03 $, l'acceptabilité environnementale et l'appui des communautés locales et régionales.

J'aimerais, pour le bénéfice de la commission et des membres de la commission, que vous nous indiquiez, dans toute la mesure du possible, compte tenu de l'état des négociations, compte tenu de la configuration qu'a pris le projet aussi – il a été réduit d'une certaine façon, peut-être qu'il y a un lien avec les coûts; vous pourrez nous le dire, à ce moment-là – donc que vous nous indiquiez les avantages pour Hydro-Québec et aussi pour les Québécois et les Québécoises, forcément, de s'associer à ce considérable, à ce gigantesque développement hydroélectrique du Labrador, et particulièrement en ce qui a trait aux coûts d'approvisionnement et puis, forcément aussi, aux tarifs.

M. Caillé (André): Voici, M. le Président, comment nous abordons la question. Premièrement, dans tous les investissements qu'on pourra faire en partenariat avec un autre gouvernement, comme le ministre le signalait, on vise la rentabilité, bien sûr. Qui plus est, on vise la création de valeur, une création de valeur. Ce n'est pas simplement une rentabilité sur le capital investi qu'on cherche, on veut aussi réaliser une valeur additionnelle. Et c'est dans ce sens-là que ces projets-là, comme ça a été le cas pour le projet de la basse Churchill puis de la dérivation partielle de la rivière Romaine, sont amenés à être optimisés. Premièrement, faire son rendement; deuxièmement, créer le plus de valeur.

Alors, au fur et à mesure qu'on réalise les études, s'il y a des moyens pour créer plus de valeur, bien, c'est le choix qu'on va choisir. C'est très exactement ce qui est arrivé dans le cas du projet Churchill, avec dérivation partielle de la rivière Romaine. On a trouvé une façon. Plutôt que de prendre la rivière Saint-Jean – je pense que c'était l'autre – et la rivière Romaine, on a pris seulement la rivière Romaine et on a trouvé une façon d'optimiser pour créer plus de valeur. En créant plus de valeur, évidemment, ça rend notre projet – je vous le dis dans d'autres termes – encore plus rentable. Bien sûr qu'on vise les mêmes critères pour accepter ou ne pas accepter, au Québec.

Je reviens sur cette question, débattue longuement ce matin, de stabilité tarifaire. Je pense, ici, si on gère bien nos affaires, on a une ressource, encore une fois, extraordinaire. On est choyé. D'autres ont déjà dit – puis, aujourd'hui, je peux dire que je serais d'accord avec eux – qu'on a été chanceux d'avoir l'eau quand les autres ont eu le pétrole. On a été choyé de ça, puis c'est encore vrai. On peut faire beaucoup, beaucoup, avec ça. On peut créer beaucoup de valeur pour l'ensemble de la population québécoise, comme entreprise, nous, Hydro-Québec, puis c'est bien ça qu'on va chercher à faire.

Du point de vue de l'environnement, comme vous le dites, pour avoir dans une vie antérieure oeuvré dans ce domaine, je pense qu'on aura été confronté jusqu'ici, dans la société industrielle, à deux grands problèmes. Le premier a été celui du déversement direct des eaux sanitaires dans les cours d'eau. Au début des années soixante-dix, la situation avait atteint des proportions relativement catastrophiques non seulement dans les pays sous-développés, mais également dans les pays développés. Pour ceux qui ont connu le domaine, déjà, au début des années soixante-dix ou fin des années soixante, en Europe, des pays développés dans le domaine de l'eau, la situation devenait critique.

Ça arrive, des problèmes d'environnement qui finissent par prendre des dimensions importantes. Ce n'est pas juste une affaire de mode. Quelques années plus tard, bien, c'est un autre problème. Le problème sanitaire, qui a commencé à se poser à peu près après la fin de la première guerre, a fini par amener les gouvernements à agir. Vous vous souviendrez qu'ici, au Québec, on a agi, avec le Programme d'assainissement des eaux, parce qu'il n'y avait pas d'alternative.

Le deuxième problème en importance, je pense, puis de même nature, c'est celui de la pollution de l'atmosphère, celui de l'émission de gaz à effet de serre puis de pollution chimique de toutes sortes qui résultent de l'utilisation de combustibles plus ou moins propres. Je pense ici que la même situation va se répéter. Ça va finir par être la même approche pour ce deuxième problème que ça a été pour la question sanitaire.

Encore une fois, ici, au Québec, nous serons les grands, grands, grands gagnants de ça, les grands gagnants. Non seulement à cause de ce qu'on a déjà fait, mais, si on veut être encore plus gagnants, bien, il faut compléter, il faut parachever le développement du potentiel hydroélectrique du Québec. On va être encore plus gagnants.

Bien sûr, il ne faut pas mettre de côté la question économique, comme vous le dites, M. le ministre, et il faut contrôler nos coûts quand on fait nos projets de développement, que ce soit Churchill ou que ce soit un autre. À cet égard, j'aimerais demander à mon collègue de vous apporter des précisions et des réconforts quant aux chiffres qui circulent ou ne circulent pas sur la rentabilité du projet Churchill.

Le Président (M. Sirros): Oui, M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Si vous me permettez, M. le Président, peut-être, tout juste avant de passer aux chiffres, de parler un peu du processus, où on en est dans le processus, pour éclairer la commission. C'est un projet qui, comme tous les autres, passe par un partenariat important. C'est un partenariat complexe parce qu'il a plusieurs facettes. D'abord, un partenariat entre Hydro-Québec et la Newfoundland & Labrador Hydro. On a une relation de partenaires dans un grand investissement au Labrador, la plus grande centrale non développée en Amérique du Nord, la centrale de Gull Islands, un projet d'au delà de 3 000 000 000 $ dans lequel Hydro-Québec sera présente dans l'équité, donc aura de l'avoir propre. On sera propriétaire en partie de cette centrale-là. Mais on sera plus que propriétaire, on sera également l'acheteur exclusif de cette énergie. Donc, Hydro-Québec va jouer le rôle d'intermédiaire complet de la production de cette centrale-là. Elle va pouvoir utiliser cette énergie-là avec toute la flexibilité que le réseau nous permet pour servir à la fois des besoins au Québec, des besoins hors Québec, et s'ajuster, comme ça, en fonction de l'évolution future. Donc, c'est une source future d'approvisionnement qui sera extrêmement valable. C'est un partenariat donc avec Newfoundland & Labrador Hydro, en premier.

C'est un partenariat également avec les communautés locales. Du côté du Québec – André le mentionnait – on parle aujourd'hui d'une seule dérivation partielle de rivière, la rivière Romaine. On souhaite travailler, bien sûr – et on a des contacts d'initiés – avec les gens de la MRC de la Minganie, les gens de la Minganie. Donc, il y a des rencontres, et on espère pouvoir poursuivre ces échanges-là dans un contexte où on arriverait à des ententes, à des arrangements qui sont similaires à ceux qu'on a pu mettre de l'avant pour les projets de Betsiamites.

Il y a également des partenaires du côté des communautés innus. Il y a plusieurs communautés innus présentes dans la région. On souhaite également pouvoir en arriver à un partenariat, encore là, similaire au partenariat qu'on a pu mettre en place avec les communautés innus de la région du Saguenay et de la Haute-Côte-Nord. Donc, partenariat avec des Innus, partenariat avec la MRC de la Minganie et partenariat entre les deux compagnies pour lesquelles les actionnaires sont le gouvernement de Terre-Neuve et le gouvernement du Québec.

Ces projets-là, dans le contexte où Hydro-Québec en est à la fois investisseur et acheteur exclusif, ces projets-là peuvent se réaliser – et c'est fondamental dans le contexte de la stabilité à long terme des tarifs – sans en faire porter le prix ou le poids par la clientèle québécoise. Or, s'il est établi... Il est connu qu'aux sites de production ces projets sont absolument intouchables, ce sont des projets d'une qualité pour laquelle il n'y a pas d'équivalent en Amérique du Nord.

L'infrastructure de transport, bien sûr, est significative. On parle d'investissements en transport sur l'ensemble de la région qui représentent 2 500 000 000 $. Attention, dans ce 2 500 000 000 $ là, on va en profiter pour boucler les approvisionnements du Labrador, qui représentent pour le Québec des approvisionnements extrêmement significatifs. En ce moment, on parle de plus de 5 000 000 MW qui servent, à la pointe d'hiver, pour approvisionner l'ensemble des Québécois. On va en profiter, en réalisant ces projets-là, pour renforcer l'infrastructure de transport. Donc, il y aura un avantage déjà là.

Mais, au-delà de cet avantage, il y a moyen de réaliser ça – c'est ce qu'on est en train de discuter avec nos partenaires – sans faire porter le poids, le prix de quelque infrastructure que ce soit sur une catégorie de clientèle ou une autre, donc de le faire dans un contexte où on va réaliser de la valeur. Et ce n'est pas une valeur qui est réalisée sur le dos ou en faisant porter un poids à quelque catégorie de clientèle que ce soit. C'est l'objet des discussions en ce moment. Ces discussions-là avancent d'une façon favorable et on espère, au cours des prochains mois, pouvoir avoir pas mal avancé sur le volet commercial.

(15 h 30)

Le Président (M. Sirros): Merci. Une dernière question, M. le ministre.


Partenariats avec les communautés locales

M. Brassard: M. le Président, une dernière question pour qu'on puisse davantage préciser quelle forme ce partenariat va prendre et a déjà pris dans certains projets. Je pense à la Toulnustouc, le projet de la Toulnustouc, où il y a déjà des ententes de conclues. C'est parce que c'est important pour ceux qui nous écoutent de savoir quelle est maintenant la façon que privilégie Hydro-Québec pour s'associer aux communautés locales en particulier, qu'elles soient autochtones ou que ce soient des communautés non autochtones ou québécoises.

Votre véhicule, c'est la société en commandite. J'aimerais ça que vous expliquiez comment, prenant appui, par exemple, sur ce que vous avez fait, les ententes que vous avez conclues avec certaines MRC et certaines communautés innues en Haute-Côte-Nord, pour qu'on puisse voir comment ça se concrétise, comment vous discutez, qu'est-ce qui intervient comme mise de fonds des communautés locales, c'est quoi, le retour que ça peut donner au fil des ans en étant partenaires par le biais d'une société en commandite.

Le Président (M. Sirros): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): M. le Président, c'est une question importante. C'est une question qui est au coeur de l'approche du projet du bas Churchill et de La Romaine. L'approche qu'on met de l'avant... Et on parle de partenariat. Donc, qui dit partenariat parle également d'ouverture. Il y a des formes de partenariat qu'on a mises de l'avant. Je parlerai un peu de la société en commandite, mais je vous dirais qu'aujourd'hui c'est une approche, il pourrait y en avoir d'autres.

C'est un partenariat, donc on sera extrêmement ouvert à des idées qui seraient des idées équivalentes, mais avec un principe, un principe qui est un principe fondamental, celui de faire coïncider les périmètres d'intérêt des parties, autrement dit de faire en sorte que ces projets-là soient bons à court terme, qu'on les étudie ensemble avec les partenaires, l'entreprise et les gens de la région, qu'on les réalise ensemble en faisant en sorte de faire profiter au maximum de retombées économiques les régions, les gens qui voient ces aménagements réalisés chez eux et – et ça c'est plus nouveau – de faire en sorte également que les avantages économiques de ces projets-là soient durables, autrement dit que – et c'est un des autres facteurs ou une des autres caractéristiques de l'hydroélectrique – c'est là pour le très long terme.

Ce qu'on vise, c'est que les avantages, les bénéfices soient là également pour le très long terme. Et ça, on peut le réaliser. On l'a fait avec l'approche de sociétés en commandite, où les argents qui auraient été, par le passé, consentis sous la forme de redevances à l'origine des projets sont plutôt transformés en propriété de ces ouvrages-là pour les MRC, de telle sorte que les ouvrages réalisant des revenus, des bénéfices, ces bénéfices-là reviennent dans la communauté.

Et la communauté peut utiliser ça. Et ça a été un des avantages dans les projets qu'on a réalisés la dernière année. Ces revenus-là, par la suite, peuvent être utilisés par les communautés pour faire d'autres types de développement, donc ça peut servir de levier. Le développement hydroélectrique peut être un levier de développement récréotouristique, de développement dans d'autres activités économiques qui sont des activités économiques importantes en région.

Donc, l'approche de société en commandite, c'est une approche de propriété commune. Par le passé, on consentait des argents. Ces argents-là sont transformés sous forme de propriété. Et, au-delà de ça, on le dit bien franchement, il y a une opportunité de création de valeur. Si les MRC souhaitent ou les partenaires autochtones souhaitent y aller d'investissements propres, bien, nous, on est tout à fait disposés à accueillir cet investissement-là également, de telle sorte que les pourcentages de propriété peuvent évoluer.

Et je peux vous dire que, dans les discussions qu'on a eues, ça a été extrêmement agréable de voir jusqu'à quel point les partenaires du milieu, les partenaires des MRC, les préfets étaient des gens, un, extrêmement avisés et des gens qui voyaient bien les avantages et qui ont fait une négociation qui était une bonne négociation, de telle sorte que les avantages seront durables pour leur MRC tout comme pour les communautés autochtones.

Alors, le projet du Labrador, le projet Romaine, c'est un projet qu'on espère faire réaliser selon la même approche. Et on verra. C'est initié avec la Minganie, avec les gens de Havre-Saint-Pierre et avec certaines communautés autochtones. Je vous dirais qu'aujourd'hui il n'y a pas consensus dans les communautés autochtones, mais il y a un démarrage. Il y a un démarrage, il y a une écoute. Et je crois qu'en parallèle avec d'autres négociations qui touchent le territoire on peut être confiants aujourd'hui d'arriver au but.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Vandal. Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, puisqu'on discute des ententes de partenariat entre Hydro et les communautés locales, je souhaiterais peut-être aborder également cette question-là. Tout à l'heure, M. Caillé, vous avez souligné que ces ententes-là, qui d'ailleurs étaient annoncées dans la politique énergétique en 1996, vous réjouissaient. Puis, effectivement, c'est une bonne nouvelle. Et je dois vous dire que, si j'étais mairesse d'une communauté et que je voyais débarquer chez moi Hydro-Québec et m'offrir la possibilité de convenir d'une entente de partenariat qui allait se traduire par des dizaines de millions qui allaient être versés à ma communauté pendant x années, je serais très, très heureuse et j'accepterais volontiers évidemment de me lancer dans l'aventure.

Lorsqu'on regarde d'un peu plus près ces deux projets, c'est-à-dire Toulnustouc et celui des ententes avec les Montagnais pour le projet de Betsiamites, effectivement, on constate qu'il y a des montants importants qui seront versés à ces deux communautés-là. Dans le premier projet, on dit que 13 200 000 $, donc, seront versés de la part d'Hydro-Québec à la MRC de Manicouagan. Et, pour le projet Betsiamites, on nous souligne, en fait, que c'est 120 000 000 $ en bénéfices sur 50 ans que les Montagnais, donc, de Betsiamites recevront. Évidemment, c'est des bonnes nouvelles, comme je le soulignais tout à l'heure.

Et, M. Vandal, vous avez bien pris le soin de nous expliquer quels avantages pourraient tirer les communautés sur le plan récréotouristique, sur le plan des loisirs d'une entente comme celle-là. Cependant, du côté de l'opposition, je dois vous dire qu'on a certaines interrogations. Évidemment, avant que le ministre saute sur l'occasion de nous dire qu'on est contre ce genre de projet là, je tiens tout de suite à le rassurer et à lui dire évidemment qu'on est d'accord et qu'on se réjouit également de ces ententes.

Cependant, ce qui est un peu difficile à comprendre, c'est que, dans la mesure où des opposants, des opposants à ces projets-là évidemment, contesteraient les ententes entre Hydro et les communautés en question, on se demande évidemment quelles seront les mesures ou les moyens qui seraient pris par Hydro-Québec pour justement entendre ces opposants. En fait, qui va entendre les opposants dans des projets comme ceux-là? Est-ce que ce sera la MRC ou les Montagnais, par exemple, qui vont être un petit peu pris pour gérer, finalement, un mouvement d'opposition qui pourrait se créer à l'intérieur de la communauté ou encore à l'extérieur de la communauté? Est-ce qu'Hydro-Québec sera impliquée dans un processus pour entendre les opposants? Est-ce qu'il y a une mécanique, en fait, qui est prévue dans ces nouvelles ententes?

Et, en parcourant certains articles, je lisais un commentaire qui a été formulé par un représentant de la communauté innue, M. Armand Mckenzie, je pense, qui résume assez bien, dans le fond, le sentiment qui est partagé par plusieurs qui sont très critiques par rapport aux projets d'ententes qui sont convenus entre Hydro et ces communautés, qui nous dit la chose suivante: «Hydro-Québec achète la paix avec son argent et en particulier avec les autochtones de Betsiamites. Ce genre d'ententes crée de sérieux malaises en région en opposant développeurs et protectionnistes. Hydro fait miroiter argent et profits aux municipalités et aux chambres de commerce pour mieux liguer les forces économiques contre les forces sociales. Il faut que les Québécois soient de plus en plus critiques sur cette façon d'agir.»

Et, cependant, M. Caillé, si vous permettez, le ministre nous a déjà dit que cette forme de partenariat était une forme qui était incontournable et que ça allait être une voie d'avenir, en fait, pour Hydro-Québec et le gouvernement. Cependant, on a l'impression que tout se fait évidemment... On entend juste des bonnes nouvelles. On a l'impression qu'Hydro convient des ententes et que, finalement, on a comme tout ça en vase clos. Est-ce qu'il y a un processus qui assure une transparence et qui permet justement à ces opposants de pouvoir se manifester, de se faire entendre?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Je vais donner, Mme la Présidente, un début de réponse, mon collègue complétera. Alors, il y a, on peut dire, un long processus pour Hydro-Québec de consultation et d'information – j'aurais dû le dire d'ailleurs en sens inverse, d'information, consultation – sur tous ces projets-là. Les communautés locales autochtones ont leur propre mode de consultation, comme on le sait. Et je reviendrai là-dessus.

(15 h 40)

En ce qui nous concerne, il s'agit dans un premier temps d'informer les gens sur un projet potentiel. On rencontre un partenaire potentiel, on lui dit: On a peut-être un projet à faire ensemble ici. Bien sûr, on a fait quelques études pour savoir si ça faisait du sens et si ça valait la peine qu'on s'en parle. C'est ainsi qu'au cours de l'été 1998, je crois, j'ai rencontré, avec M. Vandal, les communautés. Cette fois-là, c'était en territoire cri. Je pense qu'on en a rencontré cinq ou six. Puis on y a été au moins deux fois. Alors, tout ça, c'était pour informer les gens et pour les entendre. Et j'y ai été, parce que je pense que la haute direction d'Hydro-Québec, elle a un rôle à jouer à cet égard-là, d'aller expliquer ce que nous tentons de faire, quelles sont nos intentions, qu'est-ce que pourrait être l'avenir. Ce processus de consultation là se poursuit, puis M. Vandal va vous donner plus de détails tantôt.

Quant aux consultations dans les milieux locaux, il y a un exemple qu'il me fait plaisir de rapporter, c'était une entreprise qui leur appartenait. Le conseil de Betsiamites, peut-être que vous l'avez su, a tenu un référendum avant de signer une entente avec Hydro-Québec, référendum qui a été favorable à 79 %, presque 80 %. Alors, il y a eu, il y a une véritable...

M. Brassard: Une majorité claire.

M. Caillé (André): Oui? Bon. Ha, ha, ha! Il y a eu une véritable consultation, là. Puis c'était organisé par eux. D'autres peuvent choisir d'autres moyens. Je sais qu'à Essipit, au conseil de bande d'Essipit, le chef m'expliquait qu'il avait fait... Enfin, sa communauté est plus petite, et, lui, ce qui seyait mieux chez eux, il m'a expliqué de quoi il s'agissait, puis qu'il a conduit pareille consultation, puis qu'il y avait aussi chez lui un support considérable. Incidemment, la même chose, j'entends les mêmes commentaires des communautés non autochtones.

Parce que, n'oubliez pas, on ne fait pas seulement des ententes avec les communautés autochtones, on fait des ententes avec les communautés non autochtones, très exactement de même manière. Alors, tout ça conduit à l'élaboration, à la conception de projets dans un processus de consultation que j'appellerais continuel. Mon collègue va apporter des précisions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Et, encore là, Mme la Présidente, l'approche de partenariat change un peu la donne. Ce n'est plus Hydro-Québec et le projet d'Hydro-Québec qui fait l'objet... avec l'entreprise seule, qui va faire de l'information et de la consultation. La réalité d'un projet comme Betsiamites, c'est que la consultation... il y a eu des discussions, il y a eu des négociations. Et, quand on est arrivé à une entente commerciale, on a tout mis ça de côté. Et là le chef, le conseil a dit: Maintenant, je dois aller – il l'avait fait durant – avec les résultats de nos discussions, faire une large consultation, avec des séances d'information pour toute la population. Et ça s'est fait vraiment d'une façon extrêmement ouverte et extrêmement transparente. Et ça a conduit à un référendum. Hydro-Québec n'a pas été impliquée à ce moment-là. Ça s'est fait à l'intérieur de la communauté, et on a laissé le processus suivre son cours. Et, le jour où on nous a dit: La communauté a accepté que l'on signe, essentiellement, on s'est exécuté, on a signé les ententes et on a mis en place, après ça, des structures de suivi sur les ententes. Et je peux vous dire que les communautés sont extrêmement soucieuses d'assurer le suivi.

La clé, c'est que, dans cette communauté-là, le lien a été fait entre le volet – vous les décriviez, je crois – social et le volet développement. Oui, il y a un projet de développement. Mais la réalité, c'est que ce projet de développement là va donner à une communauté comme Betsiamites des argents significatifs pour adresser des problèmes de logement, des problèmes sociaux importants dans la communauté. Et ce lien-là est fait dans un contexte qui est un contexte où, parce qu'on est là ensemble au départ, il y a moyen d'orienter les projets d'une façon qui est respectueuse des partenaires, du territoire et des objectifs, qui demeurent les objectifs également d'une rentabilité économique.

Donc, c'est beaucoup plus long à l'amont, j'en conviens. Ça peut expliquer, soit dit en passant, pourquoi les chiffres qui apparaissent dans le plan 2000-2004, d'un point de vue de la nouvelle production, sont un peu plus conservateurs que les chiffres du plan précédent. Mais c'est parce qu'il y a un travail important qui se fait à l'amont, qui assure que, quand un projet est lancé, il va réussir, et il va réussir avec tous les partenaires impliqués.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Des petites questions techniques avant d'aborder un plus grand principe qui se rattache toujours à ces projets-là. Quand on tient un référendum, il y a toujours un camp du Oui et un camp du Non. Évidemment, dans le contexte, j'imagine qu'Hydro-Québec avait tout intérêt à promouvoir l'option du Oui. Pour ce qui est des opposants – et je pense en particulier au projet de Betsiamites, parce qu'on constate qu'il y a de l'opposition – est-ce que, Hydro-Québec, vous avez versé des sommes pour justement permettre la tenue du référendum? Comment le camp du Non a pu s'organiser? Est-ce que tout se faisait en régie interne, c'est-à-dire à l'intérieur même de la communauté? J'aimerais peut-être en savoir un peu plus et savoir également si, dans le cas de la MRC Manicouagan, ils ont été tenus également de faire un exercice comme celui-là, avec un référendum. Et, le référendum, est-ce que c'est un exercice dans le contexte de l'établissement d'un partenariat entre la société d'État et ces communautés-là? Est-ce que c'est un procédé qui est formellement admis? Est-ce qu'on doit absolument passer par un référendum pour qu'Hydro-Québec puisse arriver à une conclusion d'une entente comme celle-là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): À l'évidence, Mme la Présidente, s'il n'y a pas d'obligation de passer par un référendum, la communauté de Betsiamites, compte tenu du passé des relations entre la communauté et le développement hydroélectrique, a jugé qu'il était préférable d'engager un long processus de consultation qui se terminait par un exercice qui est un exercice de vote, dans ce cas-là, un exercice de référendum. D'autres communautés, où il y avait, disons, des pratiques plus établies de développement, comme la communauté d'Essipit, ont jugé qu'un débat interne dans la communauté était suffisant pour engager des signatures.

Mais, je peux vous dire, mon expérience, c'est que, s'il y a un doute qu'on ne doit pas avoir, c'est quant à la capacité à l'intérieur de ces communautés-là de voir les débats se faire. J'ai assisté moi-même depuis trois ans dans bien des communautés, chez les Cris, chez les Innus, les Algonquins, à des débats extrêmement vigoureux où tout le monde s'exprime. Et je pense qu'on doit respecter les processus qui sont les processus mis de l'avant par nos partenaires.

Ce que l'on souhaite, nous, c'est que les conseils de bande puissent s'engager, parce que les engagements, ici... et on parle d'ententes commerciales, il y a un volet commercial à ces ententes-là. On a des obligations commerciales qui sont des obligations de très long terme. Il va y avoir des argents investis. Donc, on s'assure, dans la négociation... Et les communautés sont bien conseillées, d'un point de vue légal, là-dessus. Il y a eu un travail vraiment impressionnant et important qui s'est fait par les conseillers légaux des communautés. Certaines des idées qui étaient celles de ces communautés ont vraiment fait cheminer l'approche. Donc, il y a eu un travail important pour s'assurer que les structures soient des structures qui soient solides pour le très long terme et que ça se fasse d'une façon très ouverte, transparente dans les communautés.

Mais Hydro-Québec n'est pas présente dans les communautés, à moins qu'on nous le demande. Elle n'est pas présente dans les communautés, ou ne l'a pas été, dans le cas de Betsiamites et Essipit, pour elle-même faire la promotion de ce projet. C'est une promotion qui s'est faite par les membres de la communauté. Dans ce cas-là, si je me rappelle bien, dans le cas de la communauté de Betsiamites, c'était par le conseil, avec un consensus fort établi au sein du conseil.

Mme Normandeau: La MRC, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée.

Mme Normandeau: ...de Manicouagan s'est livrée au même exercice, en termes de consultation auprès de la population via un référendum...

M. Caillé (André): À la MRC de Manicouagan? Pas à ma connaissance.

Mme Normandeau: ...dans le projet de Toulnustouc?

M. Caillé (André): Alors, c'est chacune des communautés locales qui choisit la façon de consulter ses gens. Et il ne faut pas oublier ici que les gens, je pense, sont conscients qu'ils se prononcent sur deux choses. Ils se prononcent sur l'opportunité d'un projet et sur l'opportunité, en même temps, d'en être des partenaires. Alors, les consultations se font à l'échelle de la municipalité, à l'échelle de la MRC, à l'échelle des conseils de bande.

Je pense qu'Hydro-Québec a un rôle important à jouer dans l'information, dans une première étape – information, consultation – puis informer sur c'est quoi, nos intentions. Mais, dans un second temps – c'est le troisième critère – c'est aux gens de dire: Oui, ce projet a de l'intérêt pour notre communauté et, oui, nous avons de l'intérêt à être des partenaires. Et, moi, c'est ce qu'on m'a dit ici il y a deux ans déjà, c'est une condition nécessaire pour avoir du succès dans le développement hydroélectrique.

Et, plutôt que de pousser ou de tirer pour essayer de gagner du temps – un an de plus, un an de moins – on préfère que ce processus-là prenne le temps qui est requis. Je pense qu'on gagnera, dans les étapes subséquentes, on pourra gagner le temps perdu – si on peut appeler ça du temps perdu – on pourra raccourcir les autres étapes, par la suite, qui vont devoir être là de toute manière. Je pense ici aux permis qui doivent être émis, dépendant des cas, par les autorités. Si on parle de Churchill, il y a Terre-Neuve, il y a le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec, alors on forme un comité, etc. Alors, il y a tout ça qui va devoir se poursuivre par la suite, quand nous, promoteurs, nous aurons un projet défini.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de Bonaventure.

(15 h 50)

Mme Normandeau: Mme la Présidente, compte tenu que la nature des ententes entre Hydro et les communautés locales, il est certain qu'il y a plusieurs régions au Québec qui n'auront jamais accès à la chance, au privilège qu'ont les communautés dont il est question ici. Moi, je viens d'une région qui est la Gaspésie, et ça m'étonnerait évidemment que la Gaspésie, compte tenu de sa géographie, puisse un jour espérer conclure une entente avec Hydro de la nature de l'entente qui a été convenue entre Betsiamites et la MRC de Manicouagan.

Dans ce sens-là, je me demande, je me questionne sur s'il n'y a pas une brèche, en fait, qui est faite, sur la base de ces partenariats, sur le principe de la répartition de la richesse. En fait, est-ce qu'il n'y a pas une espèce d'iniquité qui va s'installer entre les différentes régions du Québec, celles qui auront, parce qu'elles ont une géographie qui le permet, des ententes avec Hydro et d'autres régions qui malheureusement vont être absentes, vont être exclues de ces partenariats-là? Il me semble que là il y a un principe important. Et, compte tenu de votre rôle social, je pense qu'il y a vraiment une brèche non négligeable qui peut être faite.

Et je vais vous dire que, comme députée de Bonaventure, lorsque je prenais connaissance des informations relatives à ces projets-là, c'est la première question, c'est le premier réflexe qui m'est venu tout de suite, et je me suis dit: Bien, évidemment, en Gaspésie, jamais on n'aura la chance d'avoir des retombées comme celles-là. Et il y a plusieurs régions comme ça qui vont être exclues de ces nouvelles ententes de partenariat.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, moi, la première des choses qu'il faut qui soit dite, c'est que, avant 1998, en octobre 1996, quand je suis arrivé à Hydro-Québec, il existait un programme qui s'appelait PMVI, Programme de mise en valeur intégrée, qui est une sorte de compensation, quelque chose qui était offert aux communautés locales pour les amener à supporter – à supporter plus, en tout cas – les projets, programme de toutes sortes de natures, je dirais.

Et ce que nous faisons ici en introduisant un partenariat, c'est que, pour nous, la valeur économique de ce qu'il y avait dans le PMVI, on la retrouve maintenant dans le partenariat. Alors, dans un sens, la position n'est pas changée. Il n'y a pas beaucoup plus avant qu'après, si on regarde juste des chiffres. Par ailleurs, il y a beaucoup plus, dans un autre sens. Et ça, je trouve que c'est légitime de la part des régions où il va y avoir du développement, c'est qu'elles vont y être associées à ce développement. Elles ne regarderont pas quelqu'un d'autre faire le développement. Elles vont y être associées plus directement. Et ça, bien, ça n'enlève rien à qui que ce soit dans d'autres régions.

Je peux vous dire que, depuis trois ans, ce que j'entends surtout, c'est les gens des régions où il y a du potentiel de développement nous dire tout ce qu'on devrait y faire puis tout ce que... surtout des critiques par rapport à ce qu'on aurait dû y faire dans le passé, disons, puis, tout ça, sur les 50 ans d'Hydro-Québec. J'entends peu de critiques dans des régions où il n'y a pas ce potentiel de développement hydroélectrique. Honnêtement, j'en entends peu. Par ailleurs, ce que j'entends dans ces régions-là, c'est d'autres attentes de la part des communautés locales par rapport à d'autres choses: Nous sommes une région qui...

Par exemple, en Gaspésie, j'ai entendu parler de l'éolien: Nous, c'est l'éolien. Pourquoi ne feriez-vous pas pour l'éolien quelque chose de semblable à ce que vous faites pour l'hydraulique? Dans d'autres régions, c'est complètement différent: Nous sommes une région agricole, ici, le support, ça devrait être à l'agriculture. À Montréal, ils disent: Nous sommes la grande région qui consomme toute cette énergie-là, on devrait avoir un avantage par rapport aux autres qui ont la chance de travailler sur la construction de ces projets.

Hydro-Québec, à vrai dire, c'est une grande entreprise qui fait des grands travaux, qui a un poids lourd dans l'économie québécoise. Selon les endroits, la relation s'établit au niveau d'un paramètre, d'une chose, c'est-à-dire la participation dans des projets. Ailleurs, c'est d'autres choses. Ce qui est important, je pense, et j'en suis convaincu, c'est que chacun y trouve son compte. Évidemment, si on essaie de tout séparer ça puis que chaque région ait sa propre affaire, bien là, je veux dire, il n'y a pas possibilité d'avoir une Hydro-Québec comme on la connaît aujourd'hui.

C'est sûr que, sous certains angles, des régions sont privilégiées; qu'est-ce que vous voulez, il s'y trouve des rivières. Sous d'autres angles, d'autres pourraient l'être privilégiées parce que le potentiel éolien est plus grand. Sous d'autres angles, bien, les autres pourraient être privilégiées parce qu'il y a des tarifs pour faire je ne sais pas quel développement industriel, et ça serait intéressant. Bon.

Mais c'est sûr que j'entends ce genre de critiques là, puis j'ai toujours la même... Quand on va sur la Côte-Nord puis qu'on pense aux tarifs pour produire de l'aluminium à Bécancour, ils disent: Qu'est-ce que c'est que cette chose? Avec notre électricité venant d'ici! Ça, j'entends ça. Puis, quand on va à Bécancour, ils disent: C'est nous autres qui consommons tout ça, c'est nous autres qui avons créé la justification pour construire ça. Alors, ils devraient, ces gens-là, nous remercier beaucoup parce que c'est nous qui avons fait en sorte que ce projet ait pu être fait, puis ils ont eu beaucoup, beaucoup d'emplois, etc., des retombées économiques énormes que nous avons finalement créées. Il y a un équilibre à garder dans tout ça. Mais, si vous y regardez sur une période de 50 ans, je pense que toutes les régions du Québec, ça, j'en suis convaincu, ont été avantagées par la présence d'Hydro-Québec.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors là, j'essaie de maintenir une certaine équité. Alors, une dernière question, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Si je comprends bien, M. Caillé, vous êtes en train de nous confirmer qu'effectivement il y a une brèche qui va s'installer entre les régions, donc, en ce qui concerne le partage de la richesse. Vous nous dites que, si on regarde sur une période de 50 ans, effectivement, l'ensemble des régions auront eu quand même certains avantages, et c'est assez équitable. Mais là il faut comprendre qu'Hydro se lance dans une nouvelle forme de partenariat qui va être présente pour, quoi, les 25, 30 prochaines années. Et je vais vous dire que, quand, en fait, on donne les profits qui sont payés par l'ensemble des Québécois à certaines communautés, il ne faut pas s'étonner effectivement qu'il y ait d'autres communautés qui revendiquent ou qui déplorent le fait qu'on ait privilégié d'autres communautés plutôt qu'elles.

Et j'aimerais simplement, si vous permettez... Le programme de mise en valeur des investissements, si j'ai bien compris, c'est un programme qui n'existe plus, qui est transféré dans ces...

M. Caillé (André): Toutes les formes sont conservées. On n'a pas voulu mettre un x sur le Programme de mise en valeur intégrée, parce qu'il y a peut-être des communautés qui vont souhaiter qu'il y en ait encore une partie qui soit comme ça. Alors, on n'a pas fait un x sur le Programme de mise en valeur.

Ce que j'essayais de faire, là, ce n'était pas de vous dire qu'il y avait une brèche, parce que, selon moi, il n'y en a pas, de brèche. Mon argumentaire allait dans le sens inverse. Ce que j'essaie de dire, c'est, voyez-vous, les gens de la Côte-Nord pourraient dire: Ces gens-là à Montréal, ils bénéficient de tarifs extraordinaires pour l'hydroélectricité, comme il en existe peu en Amérique du Nord – c'est vrai – les développements ont eu lieu chez nous, on devrait en bénéficier plus. Bon, on peut toujours dire... on peut faire toutes sortes d'arguments comme ça, mais, selon moi, ça ne mène nulle part pour les uns et les autres.

Ce que je leur dis, c'est: Non, non, il y a une seule entreprise ici. Et là je suis très tenté – assez tenté que je vais le faire – de vous ramener au fameux pacte social: tarif uniforme, partout pareil. Tout le monde a été gagnant de ça. C'est sûr que, dans une région, les raisons qui ont fait que les gens ont été gagnants sont différentes que dans une autre, mais les gens ont tous été gagnants de ça, et depuis 50 ans. Moi, je ne suis pas en train de vous dire qu'il y a une brèche, ici. Je ne pense pas que ça va faire une brèche. D'ailleurs, je n'ai pas entendu cette critique-là dans les rencontres que j'ai pu avoir avec des gens qui habitent dans des régions où il n'y a pas ou peu de potentiel de développement hydroélectrique.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Caillé. Alors, M. le député de Gaspé.


Mise en valeur des filières alternatives

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, je profite des questions précédentes pour enchaîner sur les filières différentes de production énergétique. Vous savez qu'en décembre dernier le ministre a autorisé la Régie de l'énergie à rendre public son avis concernant les modalités de mise en oeuvre de la contribution de la filière de la petite hydraulique. Comment vous percevez le rôle de cette filière dans l'approvisionnement énergétique du Québec?

(16 heures)

M. Caillé (André): Alors, l'avis de la Régie, je crois que c'est pour 150 MW à 0,04 $ à 0,045 $ par kWh, bon, et c'est 150 MW. C'est une production, par rapport à Hydro-Québec, évidemment qui est sensiblement, très, très, très sensiblement... beaucoup plus petite, là. Par ailleurs, il ne faut pas penser que c'est négligeable pour autant, parce que 150 MW d'électricité, c'est pas mal d'électricité. Je constate que, dans leur avis, on parle, ici, de 0,045 $. J'étais habitué à l'inverse dans ces chiffres, à 0,054 $. Alors, j'ai trouvé ça mieux, 0,045 $, que 0,054 $, puisque, à la fin, je pense que c'est Hydro-Québec qui va devoir acquérir cette électricité-là. Avec un volume comme celui-là, ça ne devrait pas avoir une pression à la hausse sur nous par rapport à l'ensemble, une pression à la hausse sur nos tarifs, d'autant que les frais de raccordement sont à la charge des développeurs. Bref, je vis assez bien avec l'avis de la Régie à cet égard-là.

M. Lelièvre: Maintenant, on sait que les industries forestières veulent profiter aussi d'autres filières, et la valorisation énergétique de la biomasse forestière pourrait permettre aux industries forestières d'améliorer leur compétitivité par un approvisionnement énergétique à des coûts avantageux pour répondre, en fin de compte, à des problèmes de disposition de matières premières, telles les écorces. Alors, quelles mesures Hydro-Québec peut mettre de l'avant pour favoriser le développement de telles filières énergétiques?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, au niveau de la biomasse forestière telle qu'utilisée... pourrait être utilisée pour développer des projets de production d'électricité chez les papetières, Hydro-Québec, actuellement, nous regardons un tarif de support qui soit interruptible, un nouveau tarif. Parce qu'une des difficultés que les producteurs ont, c'est qu'ils ne peuvent pas être sûrs qu'ils vont pouvoir toujours produire pour eux. Alors, ça leur prend un tarif qui vient... nous, on appelle ça un tarif d'équilibrage de la charge, c'est-à-dire que c'est Hydro-Québec qui garde la responsabilité de produire plus quand il y a besoin de plus, puis de recevoir... mais c'est surtout produire plus quand il y a besoin de plus, parce qu'ils font leur conception en deçà de leurs besoins. Alors, on leur faisait jusqu'ici un tarif d'équilibrage en basant ce tarif sur nos coûts en pointe, en fine fine pointe, quand ça coûte le plus cher, mais il n'était pas, ce tarif, interruptible. Il suffisait pour eux de le demander pour le recevoir.

Des discussions que nous avons eues avec elles, les papetières, surtout le groupe intéressé, il serait satisfait d'un tarif d'équilibrage, même chose, mais qui pourrait être interrompu. Bref, ils sont réalistes, l'industrie est réaliste, ils réalisent très bien qu'il y a une très grande valeur à l'énergie puis à la puissance, si on parle du moment de l'année où la demande est la plus élevée, la journée à 32 000 MW. Mais ce n'est pas ça qu'ils demandent. Ils disent: Si c'est interruptible cette journée-là, probablement qu'on pourrait vivre avec un tarif d'équilibrage interruptible. Et ça, c'est beaucoup moins cher parce que ça fait appel à beaucoup moins d'équipements, pour servir la clientèle qu'ils sont.

Alors, spécifiquement, c'est là-dessus que nous travaillons, et j'espère qu'un tarif comme ça, réduit par rapport à ce qu'ils connaissent déjà, tarif d'équilibrage toujours, ça permettra à des projets de voir le jour. Ça fait même partie de ce que j'appelle la flexibilité d'Hydro-Québec au point de vue tarifaire pour faire en sorte... quand j'ai dit ce matin que, les tarifs grande puissance, on bat l'Amérique du Nord et puis l'Est du Canada, mais l'Ouest du Canada est meilleur que nous, alors, ça, ça pourrait être un des moyens pour rattraper les gens de l'Ouest du Canada. Pas le seul, ça va en prendre d'autres, mais un des moyens quand même.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. Tout à l'heure, vous avez parlé de... Sur des questions de la députée de Bonaventure, vous avez évoqué que certaines régions demandaient des investissements à Hydro-Québec. On a parlé de la Gaspésie ou d'autres régions, peut-être de la Côte-Nord, qui recherchent aussi des formes de partenariat avec Hydro-Québec. Dans les filières de production, l'éolien veut s'installer. J'aimerais savoir, moi, comment vous voyez les perspectives de développement de l'éolien au Québec.

M. Caillé (André): Je vais vous dire, Mme la Présidente, le fond de ma pensée: je suis perplexe. Je suis perplexe, parce que ce que j'ai entendu dans mon bureau, quand on fait des propositions, c'est quelque chose qui est de l'ordre de 0,06 $ puis 0,08 $ pour rendre la chose faisable. Et puis, ça, même à 0,06 $, ça prend encore toutes sortes de concessions au plan fiscal pour arriver à produire. Ça, c'est une chose. Ça, c'est le point négatif, si vous voulez.

Par ailleurs, d'autres gens pensent, s'il y a croissance de la demande pour de l'énergie éolienne, s'il y avait une croissance de l'activité, que le prix, que les coûts pourraient diminuer. Évidemment, entre 0,06 $ à 0,08 $ puis 0,03 $ dont je parlais plus tôt, l'écart est très grand. On a un projet en cours, il est de cette nature, c'est un projet qui coûte aux alentours de 0,06 $, à ma connaissance, et puis qui a nécessité toutes sortes de concessions au plan fiscal pour finalement pouvoir se réaliser. Or, dans l'éolien, je pense que là où on peut placer sa confiance, c'est sur une réduction des coûts, une réduction considérable des coûts pour être en mesure de compétitionner avec l'hydroélectrique.

On dit aussi, troisième volet, qu'une partie de notre clientèle – c'est un sondage qui a été réalisé non pas par nous, mais par un promoteur de la production éolienne – qu'une partie de nos clients seraient prêts à payer plus pour de la production faite à partir de l'éolien. Alors, nous, d'un point de vue facturation, évidemment, ça présente toujours quelques difficultés. Mais supposons qu'on peut les surmonter, ces difficultés-là, ça voudrait dire, par exemple, que le client qui aurait accepté recevrait une facture d'électricité selon son tarif d'Hydro-Québec, plus, sur une autre ligne, un ajout, une addition à faire pour x cents par kilowattheure parce qu'il a acheté de l'électricité éolienne. Il semble qu'au Québec, encore une fois, cette étude-là montre qu'il y aurait des clients qui seraient prêts à faire ça. Enfin, quand on leur demande, je suppose, dans un sondage s'ils seraient prêts, oui ou non, ils disent que oui.

Alors, voilà où j'en suis. C'est pour ça que je vous dis: je suis perplexe, parce qu'il me semble que les coûts sont encore pas mal élevés. Mais on n'est pas, à Hydro-Québec... nous, ce n'est pas une question de ne pas aimer ou d'avoir quelque chose contre l'éolien a priori. Si on était capable de faire de l'éolien à 0,03 $, on ferait de l'éolien à 0,03 $ demain matin. Ce qu'on cherche, c'est de trouver des moyens pratiques, concrets, avec des vraies garanties qu'on va arriver à des coûts qui correspondent à ce que c'est qu'on peut supporter, à ce que nos clients sont prêts à supporter, avec toutes les nuances que je viens de dire, qu'il semble que certains soient prêts à supporter des prix plus élevés.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous avez terminé. Mme la députée de La Pinière.

Mme Normandeau: Juste une petite question, Mme la Présidente, si vous permettez.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Pour faire suite à la question de mon collègue, dans Gaspé, au niveau de l'énergie éolienne, effectivement, il y a un parc important qui a été inauguré dernièrement, le parc Le Nordais, dans la région de Matane. Effectivement, sur la base des études de sites éoliens qui ont été effectuées par le ministère des Ressources naturelles, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine sont des régions qui sont très, très propices, où il y a des sites d'importance en termes de potentiel de développement de l'énergie éolienne. Si j'ai bien compris... parce que la ligne d'Hydro-Québec, ça a toujours été la suivante: on n'achètera pas d'énergie éolienne en haut de 0,03 $ du kilowattheure. Alors, j'aimerais savoir si c'est toujours évidemment votre politique, à Hydro-Québec.

Et l'autre chose: en Gaspésie, il serait intéressant de connaître le coût de production conjugué au coût de transport et, sur la base de ces coûts-là, il serait peut-être intéressant de se demander si le développement de l'énergie éolienne, le coût de production ne serait pas en fait plus avantageux pour Hydro-Québec, compte tenu de la distance, donc, de la Gaspésie. Là-dessus, j'aimerais vous entendre. Parce que, évidemment, lorsqu'on parle de développement de l'énergie éolienne, vous savez qu'il y a des chefs de file dans le monde qui sont en train de prendre une place importante et, de toute évidence, si le Québec ne fait pas les choix qui s'imposent aujourd'hui, on risque vraiment de perdre notre position, et ça pourrait être regrettable dans le futur puisque c'est une énergie qui représente, qui contient un potentiel de développement qui est important.

Alors, plus spécifiquement deux choses: la politique d'Hydro-Québec en termes d'achat au niveau du kilowattheure et, deuxièmement, au niveau de la Gaspésie, compte tenu des coûts de production conjugués aux coûts de transport versus ce qui en coûterait pour l'énergie éolienne en termes de coûts de production, il peut y avoir, il me semble, un avantage certain. Mais encore faudrait-il connaître les coûts de production pour la Gaspésie, conjugués aux coûts de transport.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

(16 h 10)

M. Caillé (André): Oui. Alors, Mme la Présidente, au niveau des coûts de transport pour Hydro-Québec, il faut... pour la Gaspésie comme partout, c'est tarif uniforme, qualité de service uniforme. Alors, des économies, il peut y en avoir, mais il ne faut pas penser qu'elles vont être très grandes, les économies, au niveau du coût de transport. Parce que, si on arrive en pointe, très froid... Je ne sais pas s'il ventait, la semaine dernière, ou s'il ne ventait pas en Gaspésie, mais supposons qu'il ne ventait pas, s'il ne ventait pas puis qu'il faisait très froid, bien, les éoliennes, ça ne produit pas, puis nous, ça prend le réseau de transport pour apporter l'électricité, de toute manière. Parce que, encore une fois, tarif uniforme, service uniforme. Alors, il peut y avoir des économies, mais ce n'est pas aussi direct que ça. Mais ça mérite peut-être... non seulement peut-être, mais certainement d'être regardé. Mais il ne faut pas s'attendre à des grosses économies, parce que ce n'est pas une filière, l'éolien, qui peut nous donner une production à 100 %. Les réservoirs, on sait qu'on peut produire, on ouvre les vannes puis ça produit quand on a besoin. L'éolien, bien, il faut qu'il y ait du vent cette journée-là. On ne peut pas accumuler le vent; l'eau, oui, mais pas le vent. Alors, il y a peut-être quelques économies, mais, encore une fois, elles seraient très petites.

Et il faut faire attention aussi quand on dit: Vous êtes près du réseau de transport, bien, ça coûte moins cher, O.K., parce que telle production est près du réseau de transport. Je me souviens, moi – c'est dans une vie antérieure, le gaz naturel – il y avait la possibilité d'amener le gaz par la rive nord ou par la rive sud du Saint-Laurent, pour amener le gaz à Québec, deux projets. La décision finit par être du côté nord. Le client du côté nord, il a dit: Ça devrait me coûter moins cher, moi, parce que le tuyau est juste à côté de chez nous. Et celui de la rive sud, de Drummondville, de dire: Ça, c'est votre décision de l'avoir mis de l'autre bord; si vous aviez fait comme je vous avais dit, vous l'auriez mis de mon côté, c'est moi qui l'aurais à pas cher puis c'est lui qui paierait plus cher. Alors, il faut faire attention que ça ne finisse pas dans des débats comme ça. Parce que, dans un service d'utilité publique, les clients finalement ont une communauté d'intérêts. C'est particulièrement vrai dans toutes les questions reliées au transport et à la distribution. Puis quand on dit: Bien, ceux-là, on va leur charger un petit peu moins cher, ils sont plus proches, bien, l'autre, il va vous dire tout de suite: Vous auriez dû faire vos lignes de transport ailleurs – quoique c'est rare qu'ils nous les amènent chez eux – puis là c'est à nous que ça coûterait moins cher.

Alors, encore une fois, il peut y avoir une petite différence, mais les différences ne sont pas si grandes que ça. Moi, je pense que les solutions ne sont pas là. Les solutions, il faut surtout les rechercher au niveau de la réduction des coûts. L'éolien, là, ça va gagner quand ils vont réduire leurs coûts en bas du thermique. Rejoindre l'hydroélectricité, ce serait beaucoup leur demander, mais il faut qu'ils arrivent à se placer dans l'ordre de grandeur du thermique, au moins. Puis là on pourrait faire, là où il y a du potentiel, avec le vent, où il y a du vent. Il y a des pays dans le monde où il y a beaucoup de vent, beaucoup plus de vent qu'ici. Je me souviens d'avoir demandé à HQI de trouver cela, puis de dire: On pourrait essayer là où il y a encore plus de vent que chez nous et là où les tarifs sont deux fois plus élevés que chez nous. Il y avait au moins deux facteurs, là, qui nous auraient aidés. Enfin, pour toutes sortes de raisons, ça ne s'est pas encore produit.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de La Pinière.


Partenariats avec les communautés locales (suite)

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je voudrais revenir sur cette discussion autour du partenariat, la nouvelle formule de partenariat d'Hydro-Québec qui l'amène en fait à partager la propriété des ouvrages, notamment des barrages, avec des communautés locales, avec des MRC, et tout ça. Dans les réponses que vous avez données, M. Caillé, au questionnement de ma collègue la députée de Bonaventure, vous avez dit, à juste titre, que les régions avaient des profils économiques différents, et, par conséquent, c'est dans la nature des choses, ce qui est tout à fait vrai. Vous avez aussi dit que parfois on vous reproche de donner des tarifs préférentiels pour développer telle ou telle industrie dans telle ou telle région et ce n'est pas équitable par rapport à d'autres régions, ce qui est aussi vrai.

Mais là où je reste un peu sur ma faim dans la réponse que vous avez donnée, c'est que nous sommes vraiment face à une nouvelle formule de partenariat où Hydro-Québec n'agit pas seulement de façon indirecte sur le développement régional, mais de façon directe. Parce que le pacte social électrique qui prévoyait qu'Hydro-Québec soit le seul maître d'oeuvre et l'unique propriétaire des barrages construits au Québec est modifié de façon majeure. Et, moi, ça m'amène à questionner l'impact de cette décision-là, l'impact de la décision sur les régions et aussi sur les tarifs. Parce que, ce matin, vous nous avez bien expliqué que les tarifs étaient uniformes par souci d'équité. Tout à fait. Mais, si Hydro-Québec n'est pas le seul propriétaire parce qu'elle partage la propriété avec un autre partenaire, qu'est-ce qui nous garantit que les tarifs ne seraient pas différenciés à l'avenir? Et, deuxièmement, par rapport à la rente électrique qui va bénéficier à certaines localités, à certaines municipalités et pas à d'autres, j'aimerais savoir si vous avez fait une étude d'impact là-dessus, parce que ça me semble majeur.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, premier élément de réponse: Hydro-Québec demeure majoritaire dans tous ces projets-là. Premièrement. Et, deuxièmement, à partir du moment où les gens d'une région sont partenaires dans un projet, donc reçoivent leur part du bénéfice, la tentation de réduire les tarifs devient beaucoup, beaucoup moins grande, même pour les clients de la région. Alors, c'est ce premier élément de réponse, mais mon collègue, ici, va vous donner un complément.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Merci, Mme la Présidente. D'abord, il faut préciser les choses. L'approche de société en commandite, c'est une approche où Hydro-Québec conserve le rôle – et là ça peut être un peu technique, je m'en excuse – de commandité. Donc, c'est Hydro-Québec qui est à la fois le propriétaire des actifs au sens de leur exploitation. Il n'y a donc pas ici de crainte à y avoir quant à un transfert de pouvoir de décider des prix. Ça n'a rien à voir. Il n'y a aucun impact sur les tarifs; il n'y a aucun geste qui a été posé ici qui pourrait avoir comme conséquence d'engager des changements tarifaires.

Dans l'approche de société en commandite, il y a plusieurs commanditaires, et c'est une opportunité de capter une certaine valeur – je vais revenir là-dessus – mais le rôle de commandité, donc de gestionnaire des ouvrages, d'un point de vue de la sécurité, de l'intégrité, de l'exploitation, au niveau du personnel, etc., ça demeure chez Hydro-Québec, par son rôle de commandité. Donc, pas d'impact tarifaire; il n'y a pas de lien ici entre l'approche et des impacts tarifaires éventuels.

Ce qui est mis de l'avant dans l'approche de partenariat, et, dans ce sens-là, ça reflète une certaine évolution de l'approche de PMVI... L'approche de PMVI, c'était essentiellement des concessions, c'était un dédommagement, si je peux utiliser l'expression, un dédommagement qui était concentré durant la période des premières années d'un projet. Ce que l'on a fait avec l'approche de société en commandite, c'est qu'on a essentiellement transféré la même valeur, le même pourcentage de valeur, mais dans une forme de participation qui est échelonnée sur le très long terme par l'entremise de pourcentages de participation à une société en commandite.

Au-delà de ça – et c'est là où on n'a pas ici passé les profits de l'entreprise ou les profits de l'actionnaire à des régions ou à des municipalités – ce que l'on a dit, on a dit: Si des MRC – et ça a été le cas en Haute-Côte-Nord, si je me rappelle bien – souhaitent prendre des fonds qu'elles auraient pu utiliser pour faire des investissements dans le secteur d'autres aménagements sur leur territoire, par l'aménagement du territoire non organisé, si ces MRC là veulent prendre ces mêmes fonds là, qui sont des fonds qui ne viennent pas d'Hydro-Québec mais des fonds qui sont les fonds propres de la MRC, pour les concentrer dans ce type de développement là, bien, nous autres, on accueille ça. Mais, essentiellement, c'est leur argent qu'elles investissent. Il a fallu qu'elles paient le coût d'emprunt, et donc il y a un coût d'opportunité. Ce n'est pas nos profits qu'on leur donne. Essentiellement, on leur permet, à titre de partenaires, de participer à un investissement avec des fonds qui sont leurs fonds.

Et c'est la même approche avec les autochtones. Les autochtones, on n'a pas pris l'approche de société en commandite, c'est plutôt une transaction commerciale, mais où ils mettent leurs argents en jeu. Et, dans ce sens-là, on n'est pas en train d'augmenter de façon significative les argents qui étaient essentiellement consentis avec l'approche passée de PMVI. Mais c'est une approche qui a l'avantage de faire coïncider nos intérêts d'une façon plus complète. On a les mêmes intérêts à ce que les projets soient réalisés correctement en essayant de minimiser les coûts pour qu'il y ait le plus de valeur qui soit créée, et par la suite il y a un intérêt qui est un intérêt durable, parce que le projet et sa qualité dans 10 ans est aussi importante que sa qualité la première année. Dans ce sens-là, on pense que ça va être extrêmement bénéfique pour tout le monde: pour Hydro-Québec, bien sûr – on ne fait pas ça pour se nuire – mais également pour l'ensemble des partenaires locaux. À date, je dois dire que ça semble être bien accueilli, puis on espère pouvoir poursuivre.

(16 h 20)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Le point le plus important ici – je me permets de répéter pour insister – c'est que, dans la société en commandite, c'est Hydro-Québec qui est le commanditaire, et c'est le commanditaire qui prend toutes les responsabilités. Donc, par rapport à ces ouvrages, quel que soit l'angle sous lequel on les regarde, on n'aura pas moins ou plus de responsabilités que par rapport à des ouvrages qui ont été construits dans le passé.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.


Ligne Hertel–des Cantons

Mme Houda-Pepin: Pour revenir à votre stratégie de parachèvement de développement hydroélectrique, lorsque vous vous êtes présentés, il y a deux ans, pour le plan stratégique 1998-2000, il a été beaucoup question des suites du verglas et surtout de la ligne Hertel–des Cantons. Vous comprendrez que, comme députée montérégienne, c'est un dossier qui me préoccupe beaucoup. Je voudrais savoir où est-ce que vous en êtes avec cette ligne-là, parce que Hydro-Québec s'était déployée en force au niveau de sa stratégie de communication partout pour nous dire que c'était l'urgence nationale, qu'il fallait absolument agir et immédiatement. D'ailleurs, le gouvernement a procédé par décret, dans le mépris de la démocratie. On connaît la suite. La Coalition du Val-Saint-François conteste toujours la loi n° 42 à ce jour.

Mais, par rapport à la sécurisation du réseau et par rapport à la fameuse boucle montérégienne qui était supposée être une priorité nationale, je constate que des poteaux de bois qui ont été plantés temporairement lors de la crise du verglas sont encore là, sur certaines lignes de la Montérégie, et on n'a pas encore procédé à la consolidation et à la sécurisation du réseau. Alors, est-ce que vous pouvez nous donner des informations pour savoir où est-ce que vous en êtes dans ce dossier?

M. Caillé (André): Tout d'abord, Mme la Présidente, les améliorations ont été apportées à la fiabilité du réseau déjà. La ligne en question, elle est construite depuis des Cantons jusqu'à Saint-Césaire. Alors, il y a un lien là qui peut être établi en quelques heures. Pourquoi il n'est pas complété? C'est que la demande de stopper les travaux est arrivée quelques heures avant qu'on ait fini de rattacher cette ligne avec la ligne de Saint-Césaire. On peut donc dire, madame, que, l'hiver dernier tout comme cet hiver, pour la Montérégie, il y avait une police d'assurance ici, en ce sens que le poste qui se trouve à Saint-Césaire pouvait être alimenté en quelques heures par un autre chemin si jamais il y avait eu catastrophe ou un événement climatique extrême qui nous aurait privé des lignes qui vont de Boucherville jusqu'au même endroit, à Saint-Césaire.

Ce qui n'a pas été fait et qui s'est arrêté je ne me souviens plus à quelle date, mais, quand les travaux ont été arrêtés, c'est le lien entre Saint-Césaire et Hertel, et ça, ça fait en sorte que, au moment où nous nous parlons, le poste Hertel n'est pas bouclé. C'est un poste qui se situe sur la boucle qui entoure Montréal et il n'est pas bouclé par un autre chemin venant d'ailleurs. Des travaux sont en cours pour arriver à le faire. Mon collègue va vous dire exactement où nous en sommes et qu'est-ce qui reste à faire avant d'arriver... en quelle année la police d'assurance sera en place.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. Je tiens à vous dire que le dossier de la ligne à 735 kV qui doit se compléter pour se raccorder au poste Hertel est actuellement à l'étape de l'analyse au ministère de l'Environnement. Nous ne contrôlons pas les étapes qui vont suivre, c'est-à-dire un mandat au Bureau d'audiences publiques, la réalisation du mandat du Bureau d'audiences publiques et, bien sûr, ensuite, les décisions qui doivent s'ensuivre, d'émission des décrets, et des décisions de la Commission de protection du territoire agricole du Québec. Nous prévoyons que nous aurons obtenu les autorisations, je dirais, avant la fin de l'an 2000, plus particulièrement au début de décembre de l'an 2000, et nous prévoyons donc une période de cinq à sept mois environ pour la construction de la ligne, ce qui fait qu'elle pourrait être disponible en juillet 2001. Pour le poste, malheureusement, la durée de construction est plus longue, puisqu'il y a des délais d'approvisionnement plus longs. Le poste pourrait être, lui, prêt pour le mois d'octobre 2002.

Maintenant, je tiens à répéter que nous ne contrôlons pas les délais pour démarrer les travaux. Il y a tout un processus qui doit s'exercer au niveau des... potentiellement, audiences publiques, etc.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Actuellement, le réseau en Montérégie, il est sécurisé à quelle hauteur?

M. Filion (Yves): Actuellement, on a réalisé, en 1998, la construction d'une ligne 735 kV qui se rend à proximité du poste Saint-Césaire. Nous, en cas de crise majeure comme celle qu'on a connue en janvier 1998, dans un délai inférieur à une journée, nous pourrions raccorder cette ligne-là, faire des travaux au poste Saint-Césaire pour sécuriser l'alimentation, en partie, de cette région-là. Donc, la situation est meilleure qu'avant le verglas. Donc, ce qui a été fait actuellement offre une fiabilité de service supérieure, mais ce n'est pas une fiabilité de service complète, parce que, pour réaliser les nouveaux projets à 120 kV qui vont venir sécuriser les postes de répartition dans la Montérégie, ça prend le poste Montérégie qui, lui, sera en service seulement en l'an 2002.

Mme Houda-Pepin: Et pourquoi ça prend autant de temps pour sécuriser le réseau, alors que vous avez dit, en fait, qu'il était déjà sécurisé, lorsque vous avez fait vos présentations, à hauteur de 75 %, sinon plus? Pourquoi aujourd'hui on est moins sécurisés que ce que vous avez annoncé il y a deux ans?

M. Filion (Yves): Bien, écoutez, actuellement, je peux vous dire que le réseau est plus sécure qu'avant le verglas de janvier 1998. Il est à un niveau de fiabilité supérieur.

Mme Houda-Pepin: C'est-à-dire?

M. Filion (Yves): C'est-à-dire, en fonction d'une condition de verglas équivalente, nous aurions moins d'impact sur les clients.

Mme Houda-Pepin: Avec les poteaux de bois?

M. Filion (Yves): Au niveau des poteaux de bois, je tiens à vous dire que des poteaux de bois peuvent être aussi solides que des pylônes en acier, parce que, dans des poteaux de bois, nous n'avons pas la même distance entre les poteaux. Dans les pylônes en acier, les distances, les portées sont beaucoup plus longues, ce qui fait qu'ils sont construits, les poteaux de bois, selon des critères de conception équivalents et ils peuvent être aussi solides. Donc, il n'y a pas de problème de fiabilité parce qu'il y a un bout de la ligne qui est en poteaux de bois. Je tiens à vous le répéter. Donc, il n'y a pas de problématique à ce niveau-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Les poteaux de bois en question, ils sont entre le futur site du poste Montérégie et Saint-Césaire et, par définition, temporaires, parce que, quand le poste Montérégie aura été construit, il n'y aura plus besoin du lien entre le nouveau poste Montérégie et le poste Saint-Césaire. Alors, c'est pour ça qu'ils sont en bois, parce qu'ils sont temporaires jusqu'en 2002.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Moi, à ce moment-ci, je suspendrais pour quelques minutes les travaux. Je sais que ça fait déjà un certain temps qu'on est tous ici, en commission. Alors, je vais suspendre pour une dizaine de minutes à peu près.

(Suspension de la séance à 16 h 28)

(Reprise à 16 h 47)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, la commission va donc reprendre ses travaux. M. le ministre, on est rendu du côté de l'équipe ministérielle. M. le ministre.


Orientations en matière de recherche et développement

M. Brassard: Oui! Excusez-moi, Mme la Présidente. Je voudrais aborder une question, je pense, que tout le monde doit considérer comme majeure à la fois dans les activités d'Hydro-Québec et aussi dans son plan de stratégie, c'est tout ce qui concerne la recherche-développement. On le sait, je pense que tout le monde reconnaît qu'Hydro-Québec a toujours assumé un certain leadership de la recherche-développement dans le domaine électrique au Québec et qu'elle y a consacré des sommes considérables, bon an mal an.

Ce que vous prévoyez pour les années qui viennent dans le cadre du plan stratégique, c'est des investissements de l'ordre de 100 000 000 $ par année. Certaines années auparavant, c'était même plus élevé. J'ai déjà connu des années de 130 000 000 $ d'investissements en recherche-développement. Donc, on constate qu'Hydro-Québec a bien l'intention de poursuivre ses investissements en matière de recherche-développement et de maintenir le niveau des investissements à une hauteur assez élevée.

Cependant, ce qui a attiré l'attention de tout le monde quand vous avez rendu public votre plan stratégique, c'est une espèce de virage – je pense qu'on peut l'appeler comme ça – un réalignement majeur en matière de recherche-développement, un virage qui consiste à concentrer vos efforts dans des secteurs qui font partie de la mission même d'Hydro-Québec, donc production d'électricité, transport et distribution. Ce qui vous amène à délaisser d'une certaine façon des activités de recherche qui ne se retrouvent pas dans ces secteurs-là.

(16 h 50)

Je voudrais savoir d'abord, dans un premier temps, comment vous en êtes arrivés à adopter, à faire ce virage et à réaligner de façon aussi majeure vos travaux de recherche-développement. Comment vous êtes arrivés à ça? Pourquoi vous avez fait ce réalignement, les motifs, la justification d'un tel virage? On pourra aller dans plus de détails par la suite. D'abord, je pense que ça m'apparaît important qu'on puisse prendre conscience de ce qui vous a motivés et des justifications d'un réalignement de cette ampleur.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, Mme la Présidente, les raisons sont les suivantes. Premièrement, tout le monde en conviendra, 100 000 000 $ par année dans la recherche et développement, c'est beaucoup. C'est beaucoup d'argent. Deuxièmement, ça nous amène à vouloir aller chercher le plus de valeur possible de cette recherche et de ce développement.

Si on compare les avantages qu'on peut tirer dans l'amélioration de nos métiers de base, de notre efficacité, dans notre performance au niveau de nos métiers de base, que ce soit en production, que ce soit en transport, que ce soit en distribution, on se rend compte qu'on peut facilement justifier 100 000 000 $ d'investissement par année, voire qu'il se pourrait – puis, dans le fond, ce serait souhaitable – que l'imagination de nos chercheurs aille jusqu'à établir des projets en plus grand nombre que ce qu'on a prévu ici au plan stratégique, parce que c'est extrêmement intéressant pour l'entreprise dans la mesure où les projets se font en production, transport, distribution.

Je vais vous donner un exemple. Le projet MATH, par exemple, augmente la capacité de production de 1 % de l'ensemble du parc existant. Quand on regarde – je ne me souviens pas des chiffres exacts – ce que ça a coûté pour le projet MATH, ce que ça coûte pour implanter la technologie identifiée puis ce que ça donne comme résultat, c'est extraordinaire. On peut améliorer de beaucoup la performance d'Hydro-Québec par des projets comme ceux-là. Imaginez ce que ça peut faire si on peut augmenter la durée de vie de nos équipements, faire passer des équipements, par exemple, de 40 ans à 50 ans parce que, en faisant de la recherche, on découvre des façons de les concevoir ou qu'on découvre de nouvelles façons de les entretenir.

Il y a ici beaucoup, beaucoup d'avantages pour l'entreprise, des améliorations de performance à tous égards, au niveau de la qualité du service comme au niveau de la performance financière, qu'on peut aller tirer de ces projets-là. C'est pour ça qu'on s'est dit: Concentrons ici nos investissements dans nos métiers de base. Faisons en quelque sorte – puis ça, ça m'a beaucoup inspiré, en tout cas quant à moi – l'histoire, la grande histoire de la ligne à 735 000 V, où la question qui a été posée par la direction d'Hydro-Québec à l'époque, c'est: Nous avons l'intention, messieurs dames les chercheurs, de développer des projets de production éloignés des centres de production. Nous avons besoin, c'est une nécessité incontournable que vous développiez une technologie pour transporter le courant à haute tension. Ils l'ont fait. C'est ça qui a rendu possible le développement, entre autres, de la Baie-James. On a beaucoup à gagner à faire cela. La rentabilité des investissements n'est même plus questionnable compte tenu des avantages.

Autre point intéressant. Puisque c'est dans notre métier, Mme la Présidente, évidemment, quand on fait une découverte, c'est facile de l'appliquer, parce que, comme je l'ai dit plus tôt ici, le client est facile à trouver, c'est nous, et on peut en faire la démonstration chez nous même. Je compare ça avec de la recherche dans des domaines connexes. Alors, ce n'est pas nos activités, on ne connaît pas les marchés puis on n'a pas nécessairement l'expertise pour fabriquer, passer à l'état fabrication en usine des technologies, les risques augmentent beaucoup. On a été dans ces domaines-là et puis on a connu des succès – je ne veux pas critiquer outre mesure quiconque – appelons ça des succès relatifs.

Donc, essentiellement, ce qui nous amène à nous orienter sur nos métiers de base en ce qui concerne la recherche et le développement, c'est des questions de performance en termes de qualité. Trouver des moyens pour réduire, par exemple – ça me vient à l'esprit – les coûts d'enfouissement de moitié. Ça nous met dans les affaires en ce qui concerne l'enfouissement des réseaux de distribution. Ça nous amène en affaires. On sait tous qu'au cours du prochain siècle tous les réseaux de distribution dans les pays développés vont finir par être des réseaux enfouis. Ça donne un avantage considérable à Hydro-Québec, c'est dans nos métiers de base, c'est des affaires qu'on connaît, des choses que l'on fait, des choses que l'on peut produire pour nous, des choses que l'on peut exporter.

Voilà, Mme la Présidente, l'essentiel du raisonnement qui nous a amenés à se dire qu'on devrait concentrer nos investissements dans les domaines qui sont nôtres, nos domaines de base: produire, transporter et distribuer de l'électricité. Bien sûr qu'on va prendre soin d'aller chercher la plus grande valeur possible des investissements qui ont été faits en recherche dans les domaines connexes. C'est déjà fait. Les investissements sont faits. Alors, on va essayer d'aller chercher la plus grande valeur possible des investissements déjà faits dans ces domaines-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. M. le ministre.

M. Brassard: Ce virage-là, est-ce que vous avez évalué les impacts sur l'IREQ et ses ressources humaines? Comment ça va se traduire concrètement? Quels effets ça va avoir, cette réorientation, ce réalignement en matière de recherche-développement, quels effets ça va avoir sur l'IREQ, sur l'Institut de recherche en électricité?

M. Caillé (André): Je vais vous donner, Mme la Présidente, une première partie de la réponse et je laisserai mon collègue, Roger Lanoue... Je m'excuse, je ne vous l'ai pas encore présenté. Il est vice-président, planification stratégique, et s'occupe également de la recherche et développement à Hydro-Québec depuis deux mois.

Alors, l'impact sur les chercheurs à Hydro-Québec. Très heureusement, la très grande majorité de nos chercheurs travaillent, oeuvrent actuellement à des projets qui se situent justement dans nos domaines de compétence: produire, transporter, distribuer. De sorte que, pour ceux-là, évidemment, ça n'aura en pratique pas d'impact, peut-être même des impacts positifs parce qu'ils vont avoir un support, des investissements de la part de l'entreprise qui pourraient être encore plus grands que ce qu'ils ont été dans le passé.

Pour ceux qui sont dans des domaines connexes, eh bien, il faut voir pour faire en sorte que le changement soit harmonieux pour eux. On veut prendre ça en considération. Ça a déjà été identifié comme un enjeu. Il ne s'agit pas, du jour au lendemain, de dire ici: Bon, bien, vous n'êtes plus dans le bon domaine, nous vous remercions pour vos services. On va faire ça d'une façon beaucoup plus harmonieuse que cela. Je n'exclus évidemment pas que les gens s'intègrent dans des programmes, voire les dirigent, les programmes, ou des projets de recherche qui sont dans nos activités de base, parce que dans leur carrière passée plusieurs d'entre eux, c'est ce qu'ils faisaient. Je n'exclus pas non plus la possibilité de poursuite de carrière dans des domaines où on ferait une liaison avec les universités, avec d'autres centres de recherche dans les universités.

Je pense que les chercheurs à Hydro-Québec ont été, comment dire, trop placés dans des situations où c'est exclusivement l'IREQ et que l'IREQ. Il n'y avait pas assez d'ouverture. On ne leur a pas donné assez d'ouverture sur autre chose. Alors, justement, je suis en consultation avec des représentants d'universités pour voir comment on pourrait travailler mieux ensemble et faire en sorte qu'une carrière de chercheur à Hydro-Québec, ça puisse comporter également des activités qu'on retrouve normalement dans les universités; bref, comment on peut, nous, collaborer mieux avec les universités.

(17 heures)

Chose certaine, en cette matière, en ce qui concerne la gestion des ressources humaines, comme on l'a fait pour la gestion des ressources humaines dans le cadre de notre programme de réduction de main-d'oeuvre, ça va se faire d'une façon harmonieuse. On l'a fait pour 3 000 et quelques cents personnes, la réduction qui a eu lieu depuis 1996; on va faire de la même façon, c'est-à-dire très harmonieusement.

M. Brassard: Ça veut dire que ça va se traduire par une réduction du personnel de chercheurs à l'IREQ? C'est ce que je comprends.

M. Caillé (André): Non, pas nécessairement. Dépendant de ce qu'on pourra conclure avec d'autres organismes de recherche, ça peut prendre toutes sortes de formes. Mais on a le souci ici d'assurer une continuité de carrière à ces gens-là. Ce n'est pas parce que, nous, nous changeons d'idée que leur carrière scientifique doit s'arrêter abruptement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lanoue.

M. Lanoue (Roger): Si je peux ajouter, ça ne devrait pas forcément être difficile, puisque les chercheurs ont une formation, un domaine d'expertise qu'ils peuvent appliquer à plusieurs domaines, souvent. Donc, évidemment, la première orientation, c'est de faire en sorte que les équipes qui s'occupent des domaines qui intéressent les unités d'affaires soient performantes et grossissent, et donc qu'il y ait plus de monde de l'IREQ et du LTEE qui soit affecté à ces équipes-là. Par ailleurs, dans les autres domaines de recherche, il y a plusieurs chercheurs, sans doute, qui peuvent changer de domaine pour être affectés à ces nouvelles équipes de travail.

En ce qui concerne ceux qui désireraient... – soit parce que leur expertise n'est pas aisément applicable aux domaines d'affaires, soit par intérêt professionnel, parce qu'ils se sont bâti quelque chose durant plusieurs années – on va chercher avec eux des moyens de partenariat, soit avec, comme on disait, des entreprises intéressées à leurs technologies ou des universités. Alors, il y a plusieurs démarches en cours de discussion avec des représentants de recherche dans les diverses universités du Québec.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le ministre.

M. Brassard: Vous indiquez également dans votre plan stratégique que vous comptez maintenir des liens avec les principaux centres de recherche de classe mondiale et des partenariats au sein de la communauté internationale de capital de risque. Est-ce que vous pouvez préciser ce que ça signifie, ce que ça va signifier concrètement en termes, par exemple, de répartition de votre 100 000 000 $ d'investissement en recherche-développement?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, sur les chiffres, je vais laisser un collègue préciser. Ce que ça signifie, par ailleurs, en termes d'objectifs, c'est que nous cherchons à être informés des développements technologiques qui peuvent se produire ailleurs et dont il pourrait être d'un grand intérêt pour nous d'en être informés le plus tôt possible. La bonne façon de faire ça, c'est d'être à l'affût et d'investir dans des entreprises qui – en général, il s'agit de petites entreprises – ont des chercheurs qui ont produit de bonnes idées et qui ont déjà une démonstration. Mais on veut arriver assez tôt dans le processus pour ne pas devoir obtenir des participations, payer des multiples extraordinaires, de très, très, très grands multiples.

Alors, l'idée, ici, c'est: Bien sûr qu'on veut réaliser un rendement, puis c'est normal, dans ces domaines-là, de réaliser un rendement de 20 %. Puisque c'est de l'activité à capital de risque, alors, 20 %, ça devra être la moyenne du rendement en équité sur les placements qu'on aura pu faire. Mais, en même temps, ce qu'on cherche, c'est d'avoir accès, d'être informés, d'avoir de l'information de première main en ce qui concerne l'émergence de nouvelles technologies dans notre domaine.

Ce que ça change par rapport au passé, ici, c'est que ça veut dire que ça pourrait être à l'international, ça pourrait être ailleurs qu'au Québec, parce qu'on est à l'affût de tout ce qui se fasse, il faut aller là où ça se passe. Ce qui change ici, c'est que le rendement que nous recherchons est un rendement, comme n'importe quelle autre entreprise de capital de risque, de l'ordre de grandeur de 20 %, en pratique. Mon collègue va compléter la réponse.

M. Lanoue (Roger): Oui. Bien, au point de vue chiffres, ce que ça peut vouloir dire, sur le 100 000 000 $ à investir en capital de risque, une des idées premières, un exemple que je peux utiliser, c'est une compagnie de capital de risque basée à San Francisco, qui s'appelle Nth Power, dans laquelle on a fait un placement il y a quelque 18 mois. C'est une compagnie de capital de risque spécialisée dans le domaine de l'électricité, par laquelle on peut comprendre l'ensemble des quelques centaines de propositions qui leur sont faites en termes de développement de petites ou moyennes entreprises, généralement en Amérique du Nord.

Par ce biais-là, Hydro-Québec et donc les chercheurs aussi d'Hydro-Québec peuvent savoir qu'est-ce qui bouge technologiquement parlant, qu'est-ce qui a abouti, qu'est-ce qui n'a pas abouti. Les chercheurs, par définition – et ça a toujours été le cas à l'IREQ – sont en réseau au Québec, en réseau international, pour savoir qu'est-ce qui se passe, quelles sont les technologies significatives et quelles sont les prochaines étapes à développer pour que la technologie puisse aboutir commercialement.

Alors, une façon de le faire, bien sûr, c'est via Internet, par exemple, ou par les réseaux universitaires. Une autre façon de le faire, c'est par les groupes, les compagnies de capital de risque comme ça, où on veut bâtir ces liens-là. Évidemment, les compagnies de capital de risque dans le domaine de l'électricité, il y en a en Asie, il y en a en Europe, il y en a en Amérique du Nord, ce n'est pas une spécialité québécoise en soi. Alors, sur le 100 000 000 $, ce qu'on vise, c'est qu'il y ait 30 000 000 $ d'investis dans ce genre de compagnie de capital de risque, comme multiplicateur, si je peux utiliser l'expression. L'autre 70 % sera utilisé pour des investissements plus directs ou dans des technologies auxquelles les unités d'affaires d'Hydro-Québec sont particulièrement intéressées à expérimenter au Québec, ou encore parce que c'est des développements naturels d'inventions qui auraient pu être faits par les équipes d'Hydro-Québec, soit l'IREQ, LTEE, ou encore dans des unités...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Maintenant, j'aurais des questions du côté de l'opposition officielle. Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Avant d'aborder la question recherche et développement, j'aimerais brièvement revenir sur la question des sociétés en commandite et vous demander s'il serait possible de déposer les ententes qui ont été convenues entre la MRC Manicouagan et la communauté des Montagnais pour le projet Betsiamites, alors déposer les ententes pour le bénéfice de l'ensemble des membres de la commission. Est-ce que c'est possible?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Oui, Mme la Présidente. Hydro-Québec pourra déposer. Si vous permettez toutefois, encore là par souci de partenariat, on va vérifier avec les contreparties à ces ententes-là si elles sont également disposées à rendre l'information publique. Je crois qu'il n'y a pas de difficulté, mais vous me permettrez de faire une vérification auprès à la fois de la communauté de Betsiamites et des MRC impliquées. Mais je crois qu'il n'y aura pas de difficulté.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui, merci, Mme la Présidente. Effectivement, il pourrait être intéressant de négocier des ententes qu'on puisse rendre publiques presque automatiquement finalement pour le bénéfice donc des parlementaires et de la population dans son ensemble.

Quelques petites questions pour les activités de recherche et développement. Évidemment, nous nous réservons toujours le droit de pouvoir revenir sur l'orientation précédente, la stratégie précédente. De toute évidence, lorsqu'on regarde le recentrage de vos activités liées à la recherche et développement, on se rend compte qu'Hydro-Québec abandonne d'une façon assez évidente toute la recherche qu'on pourrait qualifier de recherche fondamentale. Il y a des projets majeurs, évidemment, qui ont fait beaucoup parler d'eux. Je pense notamment à la pile ACEP, au moteur-roue, également au projet du Tokamak. Compte tenu du recentrage des activités en recherche et développement, quel sort sera réservé à ces trois projets d'envergure, soit: la pile ACEP, le moteur-roue, également le Tokamak?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Pour ce qui est du recentrage, Mme la Présidente, et de l'abandon de la recherche fondamentale, j'aimerais préciser ici que j'ai beaucoup de difficulté à faire la différence entre ce qui est recherche fondamentale, recherche appliquée et recherche et développement. Je pense, quand on fait de la recherche dans un centre de recherche sur l'électricité, qu'on doit faire les recherches qui sont nécessaires pour arriver à nos buts. Alors, je ne suis pas capable de confirmer qu'Hydro-Québec va abandonner la recherche fondamentale, pas plus que je suis capable de dire que ça va augmenter la recherche fondamentale.

(17 h 10)

Tout ce que je peux vous dire, c'est que nos projets de recherche, ils devront nous permettre de conduire toutes les activités de recherche qui sont nécessaires pour arriver à nos buts. Est-ce qu'il y en aura plus ou est-ce qu'il y en aura moins? Il semble, en tout cas, dans la communauté des chercheurs, que l'idée, que certaines des recherches fondamentales... Eux-mêmes voient que certaines des recherches fondamentales qui se produisent actuellement à l'IREQ n'ont pas beaucoup de lien avec production, transport et distribution, d'où, je pense, leur inquiétude. Mais avec des projets qui en auraient, des liens forts avec production, transport et distribution, ils ne devraient pas avoir les mêmes inquiétudes. Bref, c'est difficile de faire un catalogue très, très précis de qu'est-ce qui est recherche fondamentale et de qu'est-ce qui est autre recherche. Alors, on va le découvrir en cours de route. Mais le principe ici, c'est de conduire les recherches dont on a besoin.

Pour ce qui est du projet Tokamak, comme vous le savez, nous y avons mis fin, c'est du domaine public depuis déjà quelques mois. La problématique, c'est que nos partenaires dans ce projet ont tous abandonné le projet: il s'agissait du gouvernement fédéral de même que de l'Institut de recherche scientifique, l'INRS, ici, au Québec. Ils ont abandonné le projet. Les données résultantes, de l'avis des analystes qui les ont faites: le poids de ce projet dans l'ensemble de la recherche sur la fusion nucléaire devenait très, très, très, très relatif. Alors, c'est ce qui nous a amenés à abandonner le projet Tokamak.

Le projet ACEP n'est pas du tout abandonné. Dans le cas du projet ACEP, c'est un projet connexe. Ce n'est pas de la production, du transport, de la distribution d'électricité, mais c'est un projet dans lequel on a investi des sommes considérables. Je vais demander à mon voisin, ici, de se préparer pour vous les donner. On a investi des sommes considérables, il s'agit maintenant de valoriser. Et, pour valoriser, comme nous ne sommes pas une entreprise de fabrication – Hydro-Québec, c'est une entreprise de services, ce n'est pas une entreprise de fabrication – la poursuite de ce projet, bien, il faut fabriquer des piles. Nous sommes à la recherche de partenaires pour se joindre à nous dans ce projet, des partenaires qui vont amener l'expertise complémentaire.

À cet égard, il y en a déjà un, un partenaire, qui est 3M, qui est déjà là depuis le début, l'américaine 3M. Il devrait y avoir aussi, je pense, dans notre groupe, un partenaire qui a un besoin d'utilisation de ce type de pile et qui saura les intégrer dans de l'équipement pour commercialisation. Mais je suis assez encouragé quant à ce projet.

Quant au troisième, le moteur-roue, on avait, il y a deux ans de cela déjà, établi un partenariat avec deux entreprises québécoises, Sofinov, un fonds de la Caisse de dépôt et placement, et le Fonds de solidarité des travailleurs, qui avaient l'option, au bout de deux ans justement, je pense, de sortir du projet. Hydro-Québec avait à ce moment-là l'obligation de leur rembourser 85 % des dépenses faites par elles dans ce projet au cours des deux années. Ce que nous avons fait, puisque la demande a en été faite de la part de ces deux partenaires qui, par ailleurs, ne sont pas désintéressés pour autant du projet et de sa poursuite et qui reviennent à la charge, à ce que l'on m'a dit.

Ils pourraient donc, l'un et l'autre, réinvestir dans le projet. Ça ferait déjà une étape de franchie. Ça nous amènerait à tout le moins là où nous en sommes avec ACEP. Resterait à convaincre un partenaire qui, lui, serait dans la fabrication; celui qui va fabriquer le moteur-roue pour exploitation de la technologie. Ça, c'est toujours sur la table à dessin. On n'a pas réussi, malgré plusieurs tentatives venant de nous ou venant de ces deux partenaires que nous avons eus – il y avait la Société générale de financement également dans le projet – à date, on n'a pas réussi à intéresser un manufacturier, quelqu'un qui fabrique des choses en usine, mais on maintient probablement – les dernières nouvelles que j'ai, c'est ça – l'intérêt, au niveau de Sofinov à tout le moins et du Fonds de solidarité, de sorte que, bon, on pourra repartir de là puis voir comment ensemble on pourra intéresser un partenaire industriel manufacturier. Voilà où nous en sommes.

Pour nous, beaucoup d'argent a été investi là-dedans. Mon collègue va vous dire combien dans Tokamak – Tokamak, ACEP et TM4 – d'argent a été investi, combien a déjà été radié. Vous allez voir qu'il peut en coûter pas mal cher quand on fait des investissements aussi importants sans nécessairement avoir attaché tout le projet jusqu'à la fin.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lanoue.

M. Lanoue (Roger): Oui. Dans Tokamak, ce qui a pu être investi par Hydro-Québec depuis le début, et donc a été radié avec la fermeture il y a quelques mois, c'est quelque 55 000 000 $. Pour les piles ACEP, pour le projet ACEP au complet, les travaux réalisés au Québec se chiffrent à 122 000 000 $, dont 75 000 000 $ ont été fournis par Hydro-Québec. La différence, le 50 000 000 $, à peu près, a été fourni par des partenaires américains, surtout USABC, qui est un consortium de Ford, Chrysler et GM dans le domaine des technologies supports, dans le domaine automobile. De cette somme, il y a quelque 40 000 000 $ qui ont été passés aux pertes, sur le 75 000 000 $ financé par Hydro-Québec. Passés aux pertes, c'est-à-dire sous forme de dépenses annuelles ou comme investissements amortis.

Pour le moteur M4, il y a quelque 50 000 000 $ qui ont été investis jusqu'ici par Hydro-Québec, avec le rachat à 87 % de l'ensemble de ce qui a été investi par les partenaires il y a deux ans. C'est ce qui explique les quelque 50 000 000 $ qui ont pu être mis là. Et, jusqu'ici, de passer aux radiations, il y a entre 25 000 000 $ et 28 000 000 $ – je n'ai pas le chiffre précis sous la main – qui sont passés aux pertes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci. Est-ce que c'est possible d'avoir plus de détails? Où est rendue la vente précise du Tokamak? Parce qu'à un moment donné, évidemment, il y a une information qui est sortie à l'effet que le projet, enfin, pourrait être vendu à l'Iran. Ça a été stoppé. Enfin, une grosse histoire presque à la James Bond, finalement, là. Et j'aimerais savoir précisément, à l'heure où on se parle, où est rendue la vente du Tokamak.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. On pourrait vous préparer une fiche – peut-être pas pour ce soir mais pour jeudi matin, je crois – qui va vous dire exactement ce qui en était du total des actifs et quels actifs ont été cédés à cette date et pour quel montant.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci. À la page 44 de votre plan stratégique, vous soulignez que le niveau des budgets de la recherche et développement sera maintenu à environ 100 000 000 $ par année. Mais, évidemment, pour avoir un comparatif et pour mieux comprendre les efforts qui sont faits par Hydro-Québec, il serait intéressant qu'on puisse avoir un tableau des investissements qui ont été faits par la société d'État depuis à peu près 10 ans. Donc, est-ce que c'est possible d'avoir un tableau sur les investissements faits par Hydro-Québec en R & D depuis 10 ans, pour qu'on puisse effectivement voir l'évolution des investissements qui ont été consacrés de la part de la société d'État dans les activités de R & D?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, on pourrait présenter un tel tableau. Je pense bien que, s'il n'est pas fait, on peut le préparer dans la journée de demain, et on pourrait même ajouter à ça une comparaison avec les autres entreprises dans notre domaine quant à l'évolution de leurs investissements en recherche et développement, quelques-unes, à tout le moins.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, d'autres dépôts pour jeudi. C'est ça?

M. Caillé (André): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Bonaventure.

M. Caillé (André): À moins qu'on ait la réponse tout de suite.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Lanoue?

M. Lanoue (Roger): J'ai des ordres de grandeur. Je ne les ai pas sur 10 ans, là, mais j'ai quelques ordres de grandeur de frais d'investissements qui ont été réalisés à Hydro-Québec. J'ai 1995, ce n'est pas 10 ans. Donc, en 1995, l'ordre de grandeur était de 140 000 000 $, de 130 000 000 $ en 1996, de 115 000 000 $ en 1997, de 101 000 000 $ en 1998, de prévu à la fin de l'année 1999 – ce n'est pas consolidé totalement – c'est du même ordre de grandeur, de 98 000 000 $. Alors, ça vous donne l'ordre de grandeur qui correspond à l'ensemble des efforts, tant dans les domaines de production, transport et distribution que dans les autres domaines, qui ont pu être soutenus avec l'aide souvent de partenaires autres.

(17 h 20)

En termes de comparaison avec ce qui se fait dans le domaine de l'investissement en recherche et développement – j'ai quelque chose – si on se compare, en 1998, aux autres compagnies dans le domaine de l'électricité, en recherche et développement, en pourcentage des revenus des entreprises, mondialement parlant, Hydro-Québec se situe au deuxième rang, c'est-à-dire qu'on investit 1,3 % de nos revenus. Le seul qui nous bat internationalement, c'est EDF, à 1,7 %. Suivent: Hydro-Québec; TEPCO, à Tokyo, à 1,2 %; Kansai Electric, au Japon aussi, à 1,1 %; Ontario Hydro, 0,8 %; Italie, ENEL 0,8 %; et Afrique du Sud 0,8 %; et, très loin après ça, Iberdrola, en Espagne, à 0,3 %.

M. Bédard: Hydro Ontario?

M. Lanoue (Roger): Hydro Ontario, à 0,8 % des revenus dans le domaine de la recherche et développement, alors qu'à Hydro-Québec c'est 1,3 %. Ce qu'on observe par ailleurs, c'est que, dans le domaine électricité et certainement aux États-Unis, il y a une baisse graduelle significative de l'effort de recherche qui est fait par EPRI, qui est l'organisme consolidant une partie très importante de la recherche et développement des compagnies américaines dans le domaine de l'électricité. Et, à cause du phénomène dont on a parlé tout à l'heure, à savoir que beaucoup de recherche et développement se fait maintenant par le capital privé dans les compagnies de capital de risque, EPRI a de moins en moins de contrats ou de mandats de diverses compagnies américaines pour faire de la recherche et développement... par ce centre de recherche. Alors, la baisse relative des argents qu'il a pu y avoir depuis six ans à Hydro-Québec est beaucoup moins importante que ce qu'il a pu y avoir chez nos correspondants aux États-Unis ou ailleurs.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui, merci. À part les projets moteur-roue et le Tokamak, est-ce qu'il y a d'autres projets qui ont été carrément mis sur la tablette compte tenu de vos activités de recentrage? Et une autre question: Dans votre rapport, ici, recherche et développement – c'est les faits saillants de 1998 – on fait état de deux projets qui me semblent d'importance: le projet MATH et le projet MONITEQ. En fait, c'est des projets qui ont débuté depuis plusieurs années et qui, de toute évidence, rapportent des économies importantes à la société d'État.

J'aimerais savoir: Sur la base du recentrage justement de vos activités, est-ce que, si aujourd'hui Hydro-Québec avait à relancer ou à lancer des projets comme ceux-là, vous accepteriez de vous lancer dans une aventure comme celle, bon, des efforts qui ont été faits dans le projet MATH ou dans le projet MONITEQ? Est-ce que, pour vous autres, ça demeurerait encore une priorité? Parce que je dois vous faire remarquer qu'il y a plusieurs analystes qui s'entendent pour dire que, sur la base des activités de recentrage d'Hydro-Québec, ces projets-là, aujourd'hui, ne verraient pas le jour, compte tenu des investissements qui ont été consacrés, compte tenu également de la durabilité ou, en fait, de la longévité, dans le temps, qui a été consacrée à ces projets-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Non, il n'y a pas d'autres projets qui ont été mis sur... Je ne me souviens plus de votre expression, madame.

Mme Normandeau: La voie d'évitement ou encore la tablette.

M. Caillé (André): ...la voie d'évitement. Et même ceux-là dont vous parlez, encore une fois, je ne sais pas si on peut dire «voie d'évitement», mais on peut le dire si ça signifie qu'on conserve ici, à Hydro-Québec, toute la responsabilité de valoriser les sommes dont mon collègue a parlé ici à l'instant.

Pour ce qui est de la question posée – oui ou non, on investirait aujourd'hui dans un projet MATH – c'est que, à Hydro-Québec, il y a une discussion qui a cours actuellement entre des projets de recherche de court terme et de long terme. Les gens font un débat, à savoir: Est-ce qu'on fait de la recherche à long terme ou à court terme? De la recherche fondamentale ou de la recherche appliquée? Enfin, tout ceci est débattu présentement. Entre le court terme et le long terme, ma réponse, c'est la même que tantôt pour ce qui est de la recherche fondamentale: On fait ce qui est nécessaire en fonction des objectifs que l'on a pour améliorer notre performance en production, transport et distribution. Il y avait une tendance, et j'en conviens, à ne pas voir de projets de long terme.

J'ai aussi dit qu'il faut changer les choses. Parmi les choses qu'il faut changer, il y a eu, dans l'histoire de la recherche à Hydro-Québec, un grand mouvement de pendule. Au point de départ de la recherche, il y a de ça plusieurs années, plusieurs décennies, c'était, la recherche, quelque chose de conduit, de géré totalement au niveau de l'organisation de la recherche. L'encadrement de recherche, oui, je pense, a joué un rôle, et les chercheurs, beaucoup, ont joué un rôle très important. Les unités d'affaires étaient, disons, moins reliées, moins liées ou pas liées du tout avec les décisions qui s'y prenaient, avec le résultat que la recherche a pu prendre des voies qui n'étaient pas nécessairement reliées avec le métier de base, disons.

Correction, grand mouvement de pendule. Mon avis, O.K., a été au moins de l'autre côté de la position du centre du pendule, pour dire: À partir de maintenant, les unités d'affaires et que les unités d'affaires décideront des projets de recherche. Et ça, c'est une époque contemporaine. Dans le sens que j'ai entendu ça, moi, à Hydro-Québec. Ce qui s'est produit à ce moment-là, c'est que les chercheurs, enfin, les gens dans les unités d'affaires ont demandé des projets pour régler leurs problèmes immédiats: J'ai un problème avec telle pièce d'équipement. Aïe! vous allez, vous autres, au Laboratoire, trouver la solution à ceci, puis là vous avez évidemment – parce que le problème est là, il est immédiat – quelques mois, au mieux quelques mois, puis ce serait mieux si c'était rien qu'une semaine, évidemment.

Bon. Alors, ça a amené, ça, beaucoup de considération sur le fait que les projets devaient être à court terme. Les gens des unités d'affaires apprécient parce que ça règle leurs problèmes; les gens de la recherche vont vous dire: Il n'y a plus moyen d'avoir des projets de long terme. Quand je parlais, ce matin ou cet après-midi, de rééquilibrer les choses et que je le disais en utilisant les mots suivants: Notre défi, c'est de faire en sorte d'amener les chercheurs – ceux qui gèrent la recherche – à contribuer au développement des projets, je vous ai dit aussi qu'au niveau des thèmes, sauf quelques rares exceptions, là, on s'entend, mais il faut aussi préparer un plan directeur de la recherche puis préparer de la programmation de la recherche. L'exercice de la planification, ici, est loin d'être fini. Alors, il faut amener plus d'équilibre.

Moi, ce à quoi je vais travailler avec mon collègue ici, qui, lui aussi, travaille au niveau de l'ensemble de l'entreprise, puisque son autre fonction, c'est la planification stratégique, on va travailler à amener ça au centre, en ce qui concerne les décisions. On va aller chercher toute la contribution des chercheurs, beaucoup plus de contribution des chercheurs dans la définition de ce qu'il y a à faire qu'avant. Mais on ne veut pas perdre du même coup la contribution des unités d'affaires.

Les projets qui vont résulter de ça, il y en a qui vont être à court terme, il y en a qui vont être à long terme puis il y en a qui vont comporter des volets, je suppose, de recherche fondamentale, puis d'autres n'en comporteront pas. Tous les projets auront quelque chose en commun et vont tous viser... puis on va se faire une idée sur la faisabilité de ces projets-là. Quand on se lance en recherche, ce n'est pas juste se lancer en recherche pour dire: C'est merveilleux, ce que nous cherchons, donc c'est ça qu'on cherche. Il faut aussi avoir une idée de comment on va y arriver, sans le savoir exactement, évidemment, parce que, si on le savait, on n'aurait pas besoin de faire de recherche. Alors, il faut faire un équilibre dans tout ça. Ce qu'on cherche, c'est un équilibre dans la contribution des uns et des autres, un équilibre dans ce qui est le court puis ce qui est le long terme, donc juste un point commun, un ancrage: il faut que ça contribue à améliorer notre performance, que ce soit une performance au plan qualitatif ou quantitatif, de ce que ça coûte en termes de production, de transport et de distribution.

J'ai la conviction que, si on fait ça, on va connaître des résultats semblables à ce que nos prédécesseurs ont connu avec la ligne à haute tension. C'est quand ils ont été au laboratoire puis qu'ils ont dit: On a besoin d'une ligne. Ce n'est pas «peut-être» on veut une ligne. On veut la capacité de transporter de l'électricité à haute tension. Ils ont fait un grand succès de ça. Je pense qu'on est encore capable de faire ça, mais il faut équilibrer des choses. Il ne faut pas que ça aille tout d'un côté ou tout de l'autre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Moi, à ce moment-ci, compte tenu du temps qui reste, il faudrait que normalement je passe la parole au député de Chicoutimi.

M. Bédard: Est-ce que c'est ce que vous faites? Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. C'est ce que je pensais avoir fait, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Alors, je peux y aller, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui.

(17 h 30)

M. Bédard: Oui? O.K. Alors, merci. On n'était pas sûr, oui. Simplement pour compléter, de toute façon, on est dans un domaine évidemment très précis. Je veux bien comprendre, aussi. Quand vous parlez des trois domaines, maintenant, dans lesquels vous allez orienter la stratégie de recherche et développement, je vois qu'auparavant l'encadrement était différent et suivait plutôt un mode de gestion que des cibles. C'est ce que j'ai compris un peu. Est-ce que ça élimine tout partenaire stratégique, toute entente avec des partenaires stratégiques? Parce que les domaines que vous identifiez, évidemment, c'est des domaines où vous vous complétez par vous-même, là. Est-ce que, dans l'avenir, il peut arriver que des partenaires vous intéressent à certains projets de développement? C'est ma première question.

La deuxième, c'était, très rapidement, savoir... Tantôt, vous parliez des compagnies qui investissent plus que vous. Il y en avait une, et je n'ai pas réussi à noter le nom de la compagnie. Peut-être simplement la noter.

La troisième, très rapidement aussi: j'aimerais avoir un petit bilan, au niveau de la recherche et du développement, des travaux que vous avez faits et qui ont abouti à des choses qui sont intéressantes pour Hydro-Québec et pour des partenaires, j'imagine, mais principalement pour Hydro-Québec. Peut-être faire un bref sommaire.

Et la dernière, vous comprendrez, elle m'intéresse encore au plus haut titre, c'est celle qui traite plus particulièrement au niveau... On sait qu'à l'Université du Québec à Chicoutimi il y a actuellement une chaire industrielle qui fait de la recherche, principalement au niveau du givre. Et je sais que vous êtes effectivement partenaire dans cette chaire. Et j'aimerais savoir un peu quel est votre apport. Est-ce que vous participez? Et d'autant plus qu'il y aura, comme vous le savez, un congrès international qui va se dérouler à la fin de février à Chicoutimi et qui va réunir les plus grands experts dans le monde. J'aimerais savoir quelle est votre contribution et de quelle façon vous faites le suivi par rapport à cette chaire-là, par rapport évidemment aux travaux de dégivrage des câbles haute tension.

M. Caillé (André): Alors, premier volet de votre question, oui, la réorientation de la recherche, ça va toujours permettre des partenariats avec d'autres entreprises. On a, au Québec, ici, fort heureusement plusieurs entreprises en fabrication, que ce soit dans le domaine de la distribution ou que ce soit dans le domaine de la production. Ça ne sera pas neuf, ça existe déjà. Mais ces partenariats-là pourront certainement se développer. Ça n'exclut pas du tout, au contraire – ce n'est pas visé, évidemment – des partenariats.

Le deuxième volet de votre question, à savoir qu'elle était cette entreprise qui dépense plus que nous en termes de pourcentage de ses revenus bruts, c'est Électricité de France, qui est à 1,7 %, je pense, versus...

Une voix: 1,8 %.

M. Caillé (André): 1,8 %, versus, nous, 1,3 %. Et, après, il y en a une longue liste qui sont en-deçà de 1,3 %.

M. Bédard: Excusez-moi. Est-ce que c'est une société...

M. Caillé (André): Une société d'État.

M. Bédard: D'État aussi? O.K.

M. Caillé (André): Électricité de France, oui. Je vais répondre d'abord à la quatrième puis je vais laisser mes collègues ensemble faire un bilan de... parce qu'il y a beaucoup de... On me parle souvent des projets qui ont moins bien été à l'IREQ ou à Hydro-Québec, incluant LTEE, mais il y a beaucoup, beaucoup de projets qui ont bien été aussi. Alors, je vais demander à mes collègues, ici, qui ont une longue expérience à Hydro-Québec, de faire le bilan.

Mais je réponds à la quatrième de vos questions, pour ce qui est de la collaboration entre Hydro-Québec et l'Université du Québec à Chicoutimi. On défraie les coûts d'une chaire à Chicoutimi. J'ai visité les gens, j'ai visité le laboratoire dont vous parlez. On est très heureux de la collaboration qui a été établie avec eux. Et je pense qu'ils ont atteint un niveau de compétence mondial à cet égard-là. Il se donne même, vous le savez sûrement, des diplômes de second cycle, voire – je ne suis pas sûr – de troisième cycle, mais enfin, il se donne à tout le moins, pour sûr, des diplômes de deuxième cycle. Hydro-Québec contribue ici, comme on le fait avec plusieurs universités, et ça, c'est inchangé, à supporter les universités en payant pour des chaires de recherche universitaire. Il y en a plusieurs, on pourra vous faire un bilan de ça, de telles chaires. Alors, je laisse à mes collègues, ici, le soin...

M. Bédard: Là-dessus, peut-être pour compléter un peu sur les travaux qui sont réalisés, est-ce que vous faites un suivi par rapport aux travaux qui sont faits dans le cadre de ces...

M. Caillé (André): Oui. Vas-y donc, Yves.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. Je tiens à dire que les travaux qui sont réalisés à la chaire universitaire de l'Université du Québec à Chicoutimi sont très importants pour nous parce qu'ils s'inscrivent dans des travaux qui visent à être moins vulnérables à des conditions climatiques extrêmes, dont des verglas importants.

Alors, on a confié des projets à l'Université du Québec à Chicoutimi qui étaient un peu plus reliés à la compréhension fondamentale des phénomènes. Sans être trop technique, là, ils travaillent sur des modèles de givrage des équipements de ligne. Ils travaillent aussi sur des études de délestage des conducteurs et des câbles de garde, donc les câbles qui servent de parafoudre au-dessus des lignes, et également sur la distribution du potentiel et du champ électrique le long des surfaces de glace. Donc, ce sont des éléments fondamentaux qui nous permettent, à nous, d'approfondir nos recherches sur des moyens de délestage de nos lignes par différentes méthodes thermiques. Alors, c'est un complément à notre recherche, sur laquelle nous avons mis beaucoup d'efforts, et nous comptons continuer à mettre de l'effort au cours des prochaines années pour être moins vulnérables à des conditions climatiques extrêmes telles que des verglas.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. le député de Chicoutimi. Vous aviez terminé?

M. Bédard: Il y avait une autre partie.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Excusez-moi. M. Lanoue.

M. Lanoue (Roger): Relativement à la question sur les succès qui ont pu être faits, alors, j'ai toute une liste de succès qui ont été faits par les gens de recherche et développement à Hydro. Je vais en nommer quatre ou cinq comme exemples, mais il y a tout un rapport qui est fait annuellement sur les faits saillants de l'année, qu'on pourra rendre disponible aux membres de la commission – dans la mesure où ça vous intéresse – qui s'appelle Les faits saillants de l'année et qui explique, domaine par domaine, ce qu'on a réussi à faire.

Je donne quelques exemples. Dans le domaine de la production, l'IREQ a mis au point un robot sous-marin d'inspection et caméra géologique servant à identifier les travaux de réfection récemment réalisés au barrage Daniel-Johnson. Il y a évidemment des programmes informatiques de gestion de réservoirs et des apports hydrauliques tenant compte du contexte de faible hydraulicité et des changements climatiques – on en a parlé tout à l'heure. Modèle de simulation numérique des écoulements fluides dans les turbines – ça, c'est le modèle MATH dont on parlait tout à l'heure – qui permet d'améliorer les rendements: gain de 36 000 000 en 25 ans dans notre centrale de LG 3 seulement. Méthode de détection de cavitation dans les roues de turbines et un robot, qu'on a appelé SCOMPI, pour les réparer. Dans le domaine du transport, technologie de déglaçage thermique sous charge des lignes de transport lors d'un verglas et d'un commutateur concentrant le courant sur l'un des conducteurs d'une phase de multiconducteurs pour le déglacer. Détecteur de ligne ouverte et d'un système de mesure rapide en réseau qui fournissent des informations indispensables à la bonne marche des automatismes de réseau.

C'est sûr qu'il y a plusieurs éléments qui touchent des réseaux de transport compliqués, parce que nous avons, à Hydro-Québec, un des réseaux de transport complexes à opérer dans le monde. Et cetera, il y a plusieurs exemples de technologies. Mais, si ça vous intéresse, je pourrai obtenir des copies de ce rapport qu'on fait annuellement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. le député de Maskinongé.


Avenir du Laboratoire des technologies électrochimiques et des électrotechnologies

M. Désilets: Merci, Mme la Présidente. Je vais être assez direct. Je viens de la Mauricie. Et vous avez parlé tantôt du LTEE. Chez nous, il y a des rumeurs comme quoi il ne ferait plus partie des plans. Ça fait que, carrément, est-ce que le centre de Shawinigan, chez nous, fait encore partie des plans?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Carrément, Mme la Présidente, le centre LTEE fait partie des plans. C'était la question. C'est un centre qui se spécialise dans le développement, entre autres, des électrotechnologies. C'est important pour nous. Si on veut mettre sur le marché des appareils qui vont être compétitifs en utilisant l'électricité comme source d'énergie, c'est important pour nous, le point de vue efficacité énergétique. Puis, des fois, c'est la même chose, les appareils, ils sont compétitifs parce qu'ils sont efficaces à utiliser l'électricité. Et il s'y conduit également toutes sortes de recherches, disons, qui sont dans l'intérêt de notre clientèle, en termes d'isolation, en termes de comment gérer l'énergie à l'intérieur d'une résidence.

Alors, le LTEE est là, je pense que sa mission est la bonne. Je n'ai rien à redire par rapport à sa mission. Et, tant et aussi longtemps que nos clients y trouvent leur compte, finalement, tant et aussi longtemps qu'on réussit à produire des choses, et c'est le cas, c'est le cas présentement, nos clients sont heureux de la collaboration qu'ils ont pu établir avec le centre LTEE. Je me souviens, moi-même, d'avoir rencontré des gens qui travaillent dans la réfrigération. Ils fabriquent des réfrigérateurs pour les marchés d'alimentation, pour la vente de la viande. Et ils ont collaboré avec le LTEE. Ils sont très heureux, ils ont amélioré leur efficacité, etc. Alors, c'est certainement un actif pour Hydro-Québec, le LTEE, dans l'entretien d'une bonne relation avec sa clientèle.

M. Désilets: Moi, je suis content de votre réponse, parce que j'avais eu des commentaires contraires. Et les commentaires que j'avais eus avec les entrepreneurs qui vont vérifier, c'était tout le temps positif. Alors, je me demandais: Ça cadre comment? Je ne comprends pas, là. C'est pour ça que...

(17 h 40)

M. Caillé (André): J'ai visité le LTEE il y a quelques mois, un an à peu près, et j'ai beaucoup aimé, honnêtement, ce que j'y ai vu. Voici des gens très orientés vers des objectifs très, très, très spécifiques. Quant aux rumeurs à Hydro-Québec, le fait qu'il y en ait, c'est une constatation. Le moyen de les contrôler, c'est encore du domaine de la recherche.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Désilets: J'espère que c'est de la recherche à court terme, pour éclairer tout le monde.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Gaspé, vous aviez une question?

M. Lelièvre: Oui, Mme la Présidente. En fait...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il reste 10 minutes à votre formation.


Pile ACEP

M. Lelièvre: Je pense que je vais suivre la stratégie du député de Chicoutimi, je vais les poser toutes en ligne. Tout à l'heure, vous avez parlé de la pile ACEP. Mais c'est quoi, au juste, la pile ACEP? On en parle, mais, là, pour le commun des mortels, ça semble être un objet bizarre non identifié.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Caillé (André): La pile ACEP, c'est une pile qui, pour la même quantité d'énergie stockée, a un poids beaucoup moindre. C'est un des gros avantages. Deuxièmement, c'est une pile qui a une meilleure efficacité, en ce sens qu'elle peut subir plusieurs cycles, charges et de décharges, beaucoup plus que la concurrence, c'est-à-dire la pile au plomb. Alors, moins de poids, plus de cycles. Pour le même poids, stocker plus d'énergie, ça veut dire.

Alors, ça peut représenter des avantages importants du point de vue transport automobile. Parce qu'on sait que l'électricité au niveau du transport automobile, un des facteurs limitants, c'est le poids des piles. Il y a là un avantage pour cette pile-là. Aussi, parce qu'elle a une bonne longévité, ça représente un intérêt dans le domaine des télécommunications. Parce qu'il y a des postes de télécommunications qui doivent être alimentés en électricité, et, si la pile a une meilleure longévité, une plus grande fiabilité, bien là ça représente un grand intérêt pour les compagnies de télécommunications.

Je vous parle de ces deux qualités-là, on pourrait parler de beaucoup d'autres choses. Mais, quand on parle de la qualité, de la fiabilité, c'est pour ça que, dans un premier temps, en termes de commercialisation, parce que ça existe, c'est présent, la demande est présente, on parle de développer le marché des télécommunications. Ça ne veut pas dire qu'on exclut puis qu'on abandonne le marché du transport. Ça veut juste dire qu'on commence par le marché des télécommunications parce que c'est là que la demande se manifeste en premier.

M. Lelièvre: L'état d'avancement des travaux sur cette pile, est-ce que c'est complété, c'est sur le marché? Est-ce que...

M. Caillé (André): On est à l'étape du projet-pilote au niveau de la fabrication des piles, sur la rive sud, à Montréal, un endroit que je ne nomme pas parce que j'ai peur de me...

Une voix: ...

M. Caillé (André): Boucherville. On fabrique déjà des piles à une échelle industrielle réduite au moment où on se parle. Peut-être, mon collègue, ici, voudra vous donner d'autres détails.

M. Lanoue (Roger): Une autre qualité de la pile ACEP, c'est le fait qu'elle soit solide plutôt que liquide. Alors, pour diverses utilisations, le fait que ça soit solide, tant au point de vue environnemental qu'au point de vue contrôle, c'est des avantages jugés importants par les clients éventuels. Il y a trois grands domaines d'éventuels marchés: le premier et le plus court terme étant celui des batteries stables dans des aires souterraines pour les équipements de télécommunications. Effectivement, on en a déjà placé quelques-uns qui sont en expérimentation commerciale actuellement au sud des États-Unis.

Le deuxième élément, c'est pour les véhicules hybrides, d'une part, et les véhicules électriques, d'autre part, les deux autres marchés potentiels qui sont regardés de façon très soutenue par les grands de l'automobile. Et donc, en particulier, c'est pour ça que je vous parlais du USABC, le centre de recherche des trois grands de l'automobile américains, qui ont contribué beaucoup d'argent à l'effort qui a pu être fait au Québec dans le domaine des piles ACEP.


Orientations en matière de recherche et développement (suite)

M. Lelièvre: Au niveau de l'hydrogène, est-ce que vous poursuivez toujours des recherches dans ce domaine-là?

M. Lanoue (Roger): Actuellement, il y a toujours l'investissement fait par... Je pense qu'Yves Filion, de qui j'ai pris la relève il y a maintenant deux mois, semble être plus prêt que moi à répondre en détail à votre question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. Bon. Hydro-Québec était déjà présente dans H2T, mais je dirais que cette participation, pour toutes sortes de raisons, c'est terminé actuellement. Mais nous sommes toujours impliqués de façon, je dirais, indirecte dans l'hydrogène, et plus particulièrement dans des réservoirs de stockage à hydrure métallique. Alors, ce sont des réservoirs qui peuvent stocker une très grande quantité d'hydrogène de façon sécuritaire et qui peuvent être, donc, utilisés éventuellement soit pour alimenter des piles à combustible ou soit pour alimenter une combustion à l'hydrogène dans des moteurs à hydrogène. Alors, c'est une technologie qui est assez avancée. Et nous sommes intéressés actuellement à regarder des partenariats possibles au niveau industriel pour aller à une étape plus avancée de cette technologie-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci. Bon, écoutez, il reste quelques minutes. Moi, à ce moment-ci, j'aurais besoin d'un consentement pour qu'on puisse prolonger les travaux jusqu'à 18 heures, parce que, selon l'enveloppe qui nous était allouée par ordre de la Chambre, on aurait comme terminé, ou dans quelques minutes, dans deux minutes, à toutes fins pratiques. Alors, est-ce qu'il y aurait consentement pour qu'on puisse poursuivre? Alors, on fait comme à midi, je comprends qu'il y a consentement.

Alors, j'ai des questions. J'ai la députée de La Pinière et le député de Laurier...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée.

M. Sirros: Est-ce que je pourrais juste poursuivre directement sur la dernière question, si la députée le permet?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ah! bien, si vous avez un accord, alors...

M. Sirros: Et peut-être M. Filion pourrait revenir... Je ne sais pas. Moi, je voulais poser la question – on parlait de piles – sur les piles à combustible. On sait tous qu'il y a une technologie qui se développe de façon très radicale et très rapide, au niveau de la production énergétique, par le biais des piles à combustible. Il y a des millions puis des millions qui sont investis, des compagnies qui sont en train de faire l'application de cette technologie au niveau du transport. Mais elle est déjà plus avancée, si je comprends bien la technologie, au niveau de la production «free standing... stand alone units», pour la production électrique, ce qui peut, dans 10, 15 ans, représenter une réelle concurrence pour la production électrique au Québec.

Et, si on veut contextualiser ça dans le contexte de la construction, par exemple, de Churchill Falls, est-ce qu'Hydro-Québec est en train d'évaluer le risque que, d'ici 10, 15 ans, le temps à peu près que ça peut prendre pour construire un ouvrage comme Churchill Falls pour des milliards et des milliards, on se trouve avec une technologie qui nous devance, en quelque sorte? Et est-ce que, nous, par le biais d'Hydro-Québec, on est impliqués dans la production possible d'électricité par le biais des piles à combustible? Et quel est l'état de recherche sur ça et l'état d'implication d'Hydro-Québec? Et quelle est l'attitude d'Hydro-Québec vis-à-vis les piles à combustible comme source d'électricité?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, Mme la Présidente, voici un domaine de recherche-développement fort intéressant pour Hydro-Québec. On l'appelle, nous, la production distribuée, la capacité qu'on entrevoit que la production dans le futur, dans une dizaine d'années par exemple, puisse être décentralisée. Alors, ça pose effectivement plusieurs questions. Ça pose la problématique technologique de relier de la production décentralisée avec de la production centralisée. Ça va être vrai pour nous comme c'est vrai pour les autres, mais particulièrement vrai pour nous, pour les raisons que l'on sait tous, compte tenu de la très grande centralisation de notre capacité de production.

Quand on regarde l'état actuel de notre analyse, c'est de dire: Il y a deux technologies ici qu'il faut regarder. C'est la production décentralisée à l'aide de petites... – de micro, on les appelle – des microturbines à gaz et microgénératrices, ou encore la technologie que vous venez de mentionner, les piles à combustible. On pense, à Hydro-Québec, que, dans un premier temps, ce qui semble le plus près du marché, c'est les microturbines à gaz avec les génératrices, mais que par ailleurs, à terme, il ne faut pas négliger que ça pourrait être également les piles à combustible. Alors, dans le développement de notre plan directeur de recherche, c'est sûr qu'on va vouloir considérer cette problématique-là. Ça, c'est une problématique entièrement Hydro-Québec. Je la situe justement dans le contexte de nos affaires de base, de nos connaissances de base.

Il serait intéressant, par exemple, qu'Hydro-Québec développe la technologie d'intégration de la production distribuée avec la production centralisée, parce que, ça, ça n'existe pas encore. Alors, ça, c'est quelque chose qui est d'un grand intérêt pour nous autres et puis quelque chose qu'on peut faire parce qu'on a des connaissances puis on a les personnes, les hommes puis les femmes dans le laboratoire pour être en mesure de faire ça.

(17 h 50)

On sait qu'au Québec nous – on en parlera, je pense, plus tard; je pense que c'est jeudi, ça – la production thermique, ce n'est pas un besoin immédiat, parce qu'on a tellement d'avantages avec la filière hydroélectrique qu'il faut d'abord commencer par ça. Mais, à terme – à terme, là, je veux dire dans sept, dans huit, dans 10 ans – est-ce qu'on n'aura pas besoin ici d'avoir recours au thermique? Et, si oui, un des gros avantages qu'Hydro-Québec pourrait avoir, qui vient directement du fait que le potentiel hydroélectrique, c'est la première chose à faire, c'est qu'on pourrait peut-être sauter une génération de technologie au niveau thermique pour passer directement à la production décentralisée, ce que les gens en Nouvelle-Angleterre ne peuvent pas faire parce que le besoin est immédiat puis qu'ils doivent travailler avec la technologie de production au gaz naturel, les grandes turbines que l'on connaît. Alors, tout ça, c'est une problématique qui est très importante puis qu'il nous faut approfondir.

M. Sirros: Est-ce qu'on s'entend pour dire que ça représente une...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, écoutez, c'est parce que là j'ai un problème. Il y a la députée de La Pinière qui a aussi une question. Il reste quelques minutes à peine. Alors, Mme la députée de La Pinière.


Situation des chercheurs de l'IREQ

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, on est au terme de cette journée d'échanges avec Hydro-Québec. Sur le dossier de l'IREQ, je vous entends parler, M. Caillé, et vous en parlez comme si tout allait bien dans le meilleur du monde et que les chercheurs sont bien intégrés, sont bien outillés et qu'ils ont des contrats, en fait, qu'ils ont des projets sur lesquels ils travaillent.

Moi, je viens d'une région où il y a l'IREQ et où se trouvent beaucoup de chercheurs, dans mon comté, sur la rive sud de Montréal, en Montérégie, que j'ai rencontrés. Et ils sont très malheureux, les gens de l'IREQ, les chercheurs de l'IREQ. Et je ne suis pas sûre qu'ils soient fiers aujourd'hui, s'ils nous entendent, des explications que vous avez données, comme s'il n'y avait pas de problème.

Ces gens-là qui ont travaillé depuis des années, qui ont acquis des expertises et des expériences extrêmement importantes dans des domaines de pointe, aujourd'hui ne savent pas vraiment qu'est-ce qui va arriver de leur avenir. Vous parlez de recentrage, c'est-à-dire évidemment de redéployer ces ressources à l'intérieur de l'organisation, au lieu de leur donner les ressources et les outils pour faire de la recherche-développement.

Alors, je voulais dire cela pour que vous compreniez qu'il y a une autre réalité, qui ne transparaît pas dans les paroles que vous avez tenues devant cette commission-là et qui me touche, qui préoccupe ces gens-là. Et je suis peinée de voir qu'Hydro-Québec, qui s'est toujours vantée de dire que les ressources humaines sont au coeur de son développement, sont au coeur de son action, soit amenée dans les faits à marginaliser une institution comme l'IREQ. Parce que c'est de ça qu'il s'agit.

Si les projets de recherche sont donnés en sous-traitance ou en partenariat avec d'autres organismes de recherche, alors qu'ici on nous parle de l'orientation corporative n° 4, Stimuler l'innovation technologique dans l'entreprise , alors, «dans l'entreprise», je comprends par là Hydro-Québec. Je vous dis ça parce que ça me touche beaucoup, et je ne vous ai pas entendu exprimer les préoccupations de ce qui se passe et de l'avenir de l'IREQ, de ce qui se passe dans l'IREQ.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Excusez-moi, là, Mme la députée de La Pinière, je n'ai malheureusement plus de temps sur l'enveloppe qui était allouée à votre formation politique. Alors, il faut que je passe la parole à M. le ministre.

Mme Houda-Pepin: Vous pourriez peut-être permettre au président de donner une réponse, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour qu'on ait une réponse, très courte?

M. Caillé (André): Très, très rapidement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, s'il vous plaît.

M. Caillé (André): Mon intention n'est pas ici de dire qu'il n'y a de problème en recherche puis qu'on ne doit pas s'en occuper. Je ne pas pense que... enfin, si c'est ça qui a été compris, je dois corriger. Il y a eu ici des pertes, des pertes par dizaines et dizaines de millions de dollars. Je dis qu'il y a quelque chose à faire pour éviter qu'il se produise dans le futur ce qui s'est passé dans le passé. Je dis qu'il y a un recentrage à faire de l'activité et que ce n'est pas sans conséquence sur les chercheurs. J'ai dit comment on allait traiter le sort des chercheurs.

Ici, je veux vous rassurer et vous réassurer vous-même, Mme la Présidente, et tous les membres de votre commission, que l'idée n'est pas de marginaliser l'IREQ. On en fait un outil au centre de notre stratégie pour améliorer notre performance au niveau de la production, du transport et de la distribution. Qu'il y ait des inquiétudes à l'IREQ, que les gens aient été insatisfaits du rôle prépondérant accordé aux unités d'affaires dans le choix des programmes, j'en suis. Que ça, ça les rende malheureux, j'en suis. Ce que je vous ai dit, c'est qu'on allait recentrer les choses pour leur donner une voix, mais pas toute la voix, donner une voix également aux unités d'affaires.

Il y a une seule chose finalement à laquelle j'ai de la misère à me résoudre, à laquelle je ne peux pas me résoudre, parce que c'est ma responsabilité de le faire: on ne peut pas simplement donner l'argent puis dire: Faites au mieux avec. Parce qu'il y a une responsabilité ici à prendre. Nous allons la prendre, pas contre les chercheurs ni contre les unités d'affaires, on veut la prendre, cette responsabilité-là, avec les gens. On veut aller chercher leur contribution.

Je termine très rapidement. Je dis: au niveau des thèmes de recherche, je les ai rencontrés, les chercheurs, un groupe de chercheurs syndiqués, une vingtaine alentour de la table, ça fait deux semaines, sur les thèmes de recherche – je ne dis pas sur le reste, mais sur les thèmes de recherche – puis il n'y avait pas grand différence entre ce qu'ils pensent et ce que je pense moi-même.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Caillé. M. le ministre, il vous reste à peu près le temps de faire un commentaire. J'espère qu'il n'y a pas de question.


Projet du moteur-roue électrique

M. Brassard: Oui, oui. C'est une question très rapide. On permettra peut-être... la réponse est peut être brève aussi. Je reviens sur le moteur-roue pour que vous précisiez davantage pourquoi il est si important, avec un projet comme celui-là, d'avoir un partenaire. Parce que, quand on est rendu à l'étape... Est-ce qu'on est rendu à l'étape d'être en mesure d'envisager la commercialisation? Sinon, le partenaire, dans le cas du moteur-roue, il est important à cause, sans doute, des coûts que ça implique pour mener tout ça à terme. C'est peut-être important d'avoir une idée de l'ampleur de ce que ça représente en termes de coûts, si on veut aller plus loin puis franchir les étapes et compléter les étapes.

M. Caillé (André): Deux éléments, et très rapides, à la réponse. Oui, nous sommes à l'étape d'un partenaire, parce qu'on est rendus à l'étape de solutionner les problèmes de fabrication et de réduire les coûts avec la fabrication en série, en masse du produit pour le rendre par la suite commercialisable. Donc, à cet égard-là, c'est le bon moment.

Mais on n'est pas au bout de nos peines. La mise en marché du frein ABS, les gens me disent que, ça, ça a coûté, du point de départ en recherche et développement jusqu'à la mise en marché, 2 000 000 000 $. On m'explique en même temps que la technologie du moteur-roue, c'est plus compliqué – pas moins compliqué, plus compliqué. Supposons que c'est 2 000 000 000 $ que ça prend encore pour se rendre au marché, on en a 50 000 000 $ de dépensés, 35 000 000 $ d'effacés. La route est longue. On aimerait avoir des compagnons de route. Je pense que c'est...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Caillé. À ce moment-ci, j'ajournerai donc les travaux à jeudi, 27 janvier 2000, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 59)


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