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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 30 août 2000 - Vol. 36 N° 72

Consultation générale sur l'avant-projet de loi sur la normalisation juridique des nouvelles technologies de l'information


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures trente-deux minutes)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît. Je déclare donc la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Ce matin, nous poursuivons la consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la normalisation juridique des nouvelles technologies de l'information.

Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Houda-Pepin (La Pinière) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion); M. Brodeur (Shefford) remplace Mme Normandeau (Bonaventure); et M. Maciocia (Viger) remplace M. Gobé (LaFontaine).

Auditions

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors, ce matin, nous rencontrons deux groupes. Je demanderais d'ailleurs au premier groupe de bien vouloir s'approcher. Il s'agit de l'Office de la protection du consommateur. Par la suite, après la rencontre avec le premier groupe, nous poursuivrons jusqu'à 12 h 30 avec le Mouvement des caisses Desjardins.

Alors, Mme Fontaine, je crois. Mme Fontaine, tout simplement vous rappeler que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et que, par la suite, il y a 20 minutes d'accordées à chacun des partis, le ministériel et le parti de l'opposition, pour échanger avec vous. Avant de présenter votre mémoire, j'apprécierais par ailleurs que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent.

Office de la protection du consommateur (OPC)

Mme Fontaine (Nicole): Bien sûr. Mme la Présidente, M. le ministre Cliche, Mmes, MM. membres de la commission et les membres de la fonction publique qui ont travaillé à l'élaboration de ce projet de loi. Mme la Présidente, je voudrais vous présenter d'abord, à ma gauche, Me Jean-Louis Renaud qui est coordonnateur des services juridiques à l'Office de la protection du consommateur et, à ma droite, Me André Allard qui est juriste à l'Office et qui est celui qui travaille le plus assidûment à toutes les questions reliées aux affaires en ligne et à tout ce qui concerne le commerce électronique et qui, avec le reste de l'équipe, a apporté une attention soutenue à l'étude de l'intéressant avant-projet de loi qui est devant nous.

C'est vraiment avec plaisir que nous profitons de l'opportunité qui nous est offerte de nous exprimer sur cet avant-projet de loi qui vise notamment à reconnaître la validité juridique des documents, sans égard au support utilisé et à édicter des règles qui permettent d'établir la fiabilité de ces documents. Nous considérons que c'est une première étape très importante pour sécuriser les transactions en ligne qui, comme nous le savons tous, sont de plus en plus nombreuses, de plus en plus importantes.

Au cours des travaux qui ont précédé le dépôt, nous avons eu l'occasion de nous exprimer à quelques reprises sur certains aspects du projet comme par exemple la question d'équivalence de fonctionnement, le fonctionnel, et nous sommes heureux de voir que nos suggestions, en bonne partie, ont été retenues.

Je veux dire que, dans l'ensemble, l'Office souscrit aux grands objectifs qui sont poursuivis ici par l'État dans la mise en place des paramètres législatifs qui permettent l'utilisation sécuritaire des nouvelles technologies.

Pour notre part, à l'Office, comme vous le savez ? je profite de l'occasion pour le souligner ? nous poursuivons aussi des travaux, d'une part, pour développer un environnement sécuritaire pour les consommateurs et, d'autre part, pour élaborer des règles qui favorisent l'utilisation des nouvelles technologies tout en maintenant un niveau de protection qui soit équivalent à celui dont les consommateurs disposent actuellement via des lois d'exception qui sont la Loi de protection du consommateur et trois autres lois dont nous avons la responsabilité.

Aussi, nous menons des travaux, comme vous le savez, dans le cadre de l'Accord canadien sur le commerce intérieur qui comporte un volet consommation important. Ces travaux visent notamment à harmoniser la législation en matière de protection des consommateurs, dans le cadre du commerce électronique entre autres, entre commerçants et consommateurs.

Et, par ailleurs, troisième volet de nos travaux, nous poursuivons, comme vous le savez, dans le cadre de la politique québécoise de l'autoroute de l'information, des travaux avec le Bureau de normalisation du Québec pour élaborer une norme que nous voulons le plus vite possible internationale et qui vise à régir les pratiques commerciales entre commerçants en ligne et consommateurs, entre autres sur des questions qui touchent l'identification du commerçant, les questions qui touchent des modalités de recours, de plaintes, de formation de contrats, des modalités de livraisons, toute la question qui touche le règlement des litiges en ligne, qui est une question extrêmement importante, et la question aussi de la protection des renseignements personnels, qui est une question ? les sondages nous le montrent ? qui est de plus en plus importante et sujet d'inquiétude de la part des consommateurs.

L'Office, comme vous le savez, a comme mission d'assurer la reconnaissance et le respect des droits des consommateurs. Nous relevons présentement du ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, nous avons le mandat de surveiller l'application de quatre lois: la première que j'ai mentionnée déjà, la Loi sur la protection du consommateur, mais également trois autres lois qui, vous allez le voir, dans le cadre du commerce électronique sont particulièrement importantes: la Loi sur les agents de voyages ? et, comme vous le savez, les gens achètent leurs voyages de plus en plus en ligne ? la Loi sur les arrangements préalables de services funéraires et la Loi sur le recouvrement de certaines créances.

On a aussi comme fonction de recevoir les plaintes des consommateurs ? nous recevons au-delà de 300 000 appels par année ? d'éduquer et renseigner les citoyens, de faire des études et de promouvoir les intérêts des consommateurs par différents moyens et auprès de différents interlocuteurs publics ou privés.

Je voudrais rappeler ici que des droits fondamentaux des consommateurs ont fait l'objet d'une reconnaissance officielle par l'Organisation des Nations unies déjà, en 1985, et ces droits sont, entre autres, le droit à la sécurité ? et on voit que les travaux ici s'adressent à ça ? le droit d'être informé et éduqué, le droit de choisir, le droit d'être entendu, le droit de recours et le droit à un environnement sain. Et l'Office bien sûr travaille en application de ces principes.

Nos commentaires, aujourd'hui, vont porter sur deux volets principaux: le premier, sur l'avant-projet de loi comme tel, sur la question de l'équivalence fonctionnelle et le choix du support, qui nous apparaît important, la question du document et la question de l'harmonisation des systèmes et des normes; et, le deuxième volet, la présentation va porter sur la question d'un support, l'exigence d'un support papier qui est encore nécessaire à l'égard de certains documents que nous vous indiquerons. Nous terminerons en résumant nos recommandations.

Donc, premier volet de notre présentation: la question de l'équivalence fonctionnelle et le choix du support. L'article 2 de l'avant-projet édicte qu'un document peut être sur tout support, sauf si la loi exige l'emploi exclusif d'un support particulier. Cette disposition consacre en quelque sorte le principe de l'équivalence fonctionnelle mais prévoit également que le législateur peut, lorsqu'il le juge opportun, imposer pour un document l'usage d'un support particulier, et l'Office approuve l'insertion d'une telle réserve, ça nous apparaît important. Mais il voudrait, en plus, que ce soit possible de le faire dans la loi, mais aussi dans un texte réglementaire parce qu'il y a là une flexibilité intéressante qui permet de suivre plus facilement, avec plus de flexibilité, l'évolution des technologies qui, comme on le sait tous, va très rapidement.

Donc, nos commentaires portent beaucoup dans ce sens-là. Nous pensons qu'il faudrait... Entre autres, on dit, à l'article 350 de notre loi, qu'on «accorde au gouvernement le pouvoir de faire des règlements pour déterminer la présentation matérielle ainsi que les modalités de distribution de tout document visé par une loi ou un règlement dont l'Office doit surveiller l'application et il est nécessaire que ce pouvoir réglementaire puisse continuer d'avoir effet». C'est notre propos ? je vous le souligne de nouveau ? nous voulons que le gouvernement conserve cette flexibilité de légiférer par règlement.

n (10 h 40) n

Par ailleurs, le deuxième alinéa de l'article 2 stipule, lui, que chacun peut utiliser les supports et les technologies de son choix. Nous pensons que cette disposition consacre un principe général, mais qu'elle trouvera difficilement application ? nous voulons vous le souligner ? dans le cadre des relations contractuelles entre un commerçant et un consommateur. Le choix qu'effectue un consommateur est plus souvent qu'autrement un choix qui est imposé par le commerçant. Il faut garder à l'esprit qu'un contrat de consommation, c'est souvent un contrat d'adhésion, une entente, et donc un contrat dont le contenu ? et c'est un contrat, souvent, qui est à de multiples exemplaires, un contrat-type ? est imposé par le commerçant, dans les faits, et ne peut pas vraiment être négocié par le consommateur la plupart du temps. Donc, on trouve ici qu'il y a une certaine limite à cette liberté, et donc la liberté contractuelle prévue s'en trouve altérée par le déséquilibre des rapports de force qui existe entre les parties à un tel contrat de consommation. Donc, l'intention est bonne; dans la réalité, on voit qu'elle va être limitée.

L'article 34 inspire les mêmes commentaires, dans le fond. Ainsi, les objectifs qui sont visés par cette disposition pourraient être facilement contournés, à l'article 34, puisque le commerçant pourrait fort bien ajouter à son contrat d'adhésion une clause qui déclarerait que les parties conviennent d'utiliser un support ou une technologie spécifique pour la transmission des avis ou documents inhérents au contrat qu'il conclut avec le consommateur. Donc, on peut prévoir que, dans les faits, ça sera ça, sauf peut-être à quelques exceptions près, un consommateur un peu plus costaud, mettons, qui voudrait discuter un peu plus. Mais l'intention générale, étant très bonne, pourra se voir limitée dans la pratique.

O.K. Maintenant, je vais passer à la question du document. La notion de document, nous aimerions y apporter une nuance supplémentaire. Ainsi, l'article 3 précise ce qui peut être considéré comme étant un document. Il nous apparaît toutefois essentiel que, pour être considéré comme étant un document, le contenu de celui-ci ait une existence ? une notion d'existence ? qui se poursuive au-delà de sa création. À notre avis, un document doit pouvoir être conservé pour utilisation ultérieure. Or, la disposition ne traite que de la forme que doit prendre le contenu de l'information pour que celle-ci puisse bénéficier de la qualité de document. Nous considérons qu'un document technologique devrait pouvoir être conservé pour utilisation ultérieure, et cette exigence, à notre avis, devrait être une condition pour que le document puisse être considéré comme tel. Nous aimerions peut-être que ça soit pris en considération.

La fiabilité, maintenant, du document et sa valeur juridique. Là, on a eu un peu de difficulté avec l'article 15 de l'avant-projet de loi. Il nous a surpris dans le contexte d'un projet qui, par ailleurs, dénote un souci d'assurer que l'emploi de supports technologiques pour un document soit aussi sécuritaire que l'emploi des supports traditionnels. On définit ailleurs dans le projet les règles de fiabilité et d'intégrité et celles qui sont nécessaires pour rendre un transfert de support valide, celles sur l'équivalence fonctionnelle et d'autres, et on prescrit aussi, à l'article 8, qu'un document fiable a pleine valeur juridique quel qu'en soit le support.

C'est pour ça que l'article 15 qui prévoit qu'il n'y a pas lieu de faire la preuve de la fiabilité d'un document, sauf si on la conteste... Et on impose à celui qui discute plutôt qu'à celui qui présente la preuve le fardeau de démontrer qu'il y a eu atteinte à l'intégrité du document. Formulée de cette façon-là à l'article 15, sans restriction, la règle semble énoncer une présomption générale de fiabilité pour tout document, que ce soit la version originale ou qu'il résulte d'un transfert de support. Il nous semble qu'elle pourrait affaiblir sensiblement les objectifs de protection que reflètent plusieurs autres dispositions. La règle paraît en outre contradictoire avec certaines dispositions qui semblent indiquer que la fiabilité d'un document doit habituellement être établie, comme les articles 21, 32, 36, 43 et le nouvel article 2837 du Code civil proposé par l'article 76 de l'avant-projet. On propose donc que la règle énoncée à l'article 15 soit reformulée pour peut-être tenir compte des restrictions qui se suivent, là, dans la loi. Ça nous apparaîtrait plus clair et plus facile à interpréter, surtout dans un contexte qui est en changement rapide.

Par ailleurs, les articles 17 et 19 traitent du transfert d'un support à un autre, de l'information contenue dans un document. Ces dispositions imposent certaines conditions aussi à respecter avant d'effectuer la destruction ou le remplacement d'un document en cas de transfert de l'information qui est contenue. Il nous apparaît que ces conditions qui sont imposées à l'article 17 sont lourdes pour le commun des mortels qui ne saura pas comment vérifier ça, avec quelle technologie, puis ça nous apparaît la même chose pour l'article 19. Et donc, on aimerait que ce soit reformulé, proposé autrement, peut-être allégé, peut-être une question d'attestation verbale au moment approprié et de façon diligente, pourrait être retenue, mais ça nous apparaît un peu lourd; personne ne va pouvoir vraiment faire ça dans la réalité.

La question, maintenant, de transmission du document. L'article 33 établit les paramètres qui permettent de déterminer le moment où un document technologique est réputé être transmis et celui où il est réputé être reçu, et ça, c'est très important dans le domaine de la consommation. Cette disposition revêt une importance particulière, entre autres en ce qui concerne la computation de certains délais, entre autres des questions de crédits, le fait du taux d'intérêt qui court, vous allez voir comme c'est important. En effet, dans certains cas, la Loi sur la protection du consommateur prévoit un délai à compter de la réception d'un avis pour poser un acte déterminé, et le non-respect de ce délai peut entraîner la perte d'un droit. L'Office, nous pensons qu'il est opportun d'imposer, dans certaines circonstances qui resteraient à déterminer, qu'un accusé de réception soit envoyé à l'expéditeur pour que le document soit considéré comme ayant été reçu par le destinataire.

L'article 38, lui, établit des règles particulières lorsque des opérateurs automatisés répondent à des communications, et c'est très fréquent. Il est indispensable que de telles règles soient prescrites pour permettre à toute personne de pouvoir signaler l'existence d'erreurs qui auraient pu être commises. Nous pensons qu'il serait également opportun d'ajouter une disposition qui prévoit que le défaut de respecter ces règles pourrait entraîner, à la demande de la personne qui subit un préjudice, outre l'inopposabilité de la communication, l'annulation d'une transaction effectuée.

La question maintenant de l'harmonisation des systèmes et des normes. Ici, en résumé, nous avons deux préoccupations: nous aimerions, nous souhaitons que, si vous créez un comité pour examiner ces questions-là, les intérêts des consommateurs soient représentés au sein du comité. Il peut y avoir différentes façons, on pourrait y être ou d'autres instances, mais on pense que ça serait important, et c'est souhaité d'ailleurs de la part des consommateurs. Aussi, au niveau du suivi auprès de l'organisation internationale qui serait choisie, soit ISO ou d'autres, de notre expérience récente pour avoir assisté à une rencontre internationale dans ce domaine-là, je vous inviterais à être très vigilants et insistants pour vous assurer que ces organisations-là prennent en compte l'urgence d'établir des normes dans ce domaine-là parce que, de notre expérience récente, ça n'est pas nécessairement acquis, hein! On l'a vu récemment. Donc, je nous inviterais à être très, comment je dirais, insistants dans ce domaine-là, possiblement parce que, actuellement, je pense que, au Québec, on exerce un certain leadership dans la question des normes là-dedans, et il m'apparaît utile de conserver ce leadership. D'autres pays commencent à penser dans ce sens-là, mais peut-être qu'on est ceux qui semblent le plus, je dirais, convaincus. Il nous resterait à être très convaincants. Alors, ça termine notre partie 1.

Le volet 2 maintenant. On voudrait vous sensibiliser à la nécessité dans certains cas de maintenir l'exigence d'un support papier à l'égard de certains documents que nous avons voulu peu nombreux mais qui, tout de même, demandent encore un support papier. n(10 h 50)n

Alors, l'avant-projet de loi vise à établir des règles juridiques générales qui permettront de reconnaître, selon les conditions qui y sont prescrites, la validité des documents, sans égard à leur support. Il s'agit de règles qui s'appliquent lorsque des règles particulières ne sont pas autrement prévues. De même, les règles prévues au Code civil pour régir les relations contractuelles entre les parties, un contrat, sont des règles qui s'appliquent dans la mesure où des règles particulières ne sont pas autrement prévues pour une situation spécifique. Or, en ce qui concerne la Loi sur la protection du consommateur, le législateur a reconnu qu'il était nécessaire d'adopter des règles d'exception qui dérogent aux règles générales du droit civil québécois afin de pallier le déséquilibre qui existe entre les parties à un contrat de consommation, et c'est important de le rappeler ici. Et, parmi les règles d'exception, le législateur a notamment prescrit, pour certains documents, des conditions de forme particulières. Ainsi, la Loi sur la protection du consommateur exige que soit constatés par écrit certains contrats de consommation ? j'en ai toute une liste qu'on pourrait vous remettre, si vous voulez, ou je pourrais les énumérer tout à l'heure ? et la loi prévoit également qu'un bon nombre d'avis ? et il y en a toute une liste aussi ? et autres documents doivent être faits par écrit.

Il faut bien penser que la loi a été adoptée en 1978 ? il y a plus de 20 ans ? et qu'à cette époque les écrits ne pouvaient être que sur support papier. Et nous pensons que si le législateur à cette époque entendait imposer, comme condition de forme à certains contrats, qu'ils soient constatés par écrit sur support papier, c'est parce qu'il considérait que cette condition attribuait au consommateur une protection qu'il n'aurait pas autrement. Et, l'Office, nous voulons nous assurer que l'application éventuelle de l'avant projet de loi ne viendrait pas dépouiller le consommateur de cette protection que le législateur voulait lui attribuer à ce moment-là, spécifiquement. Donc, nous en avons fait un examen et, parmi les autres règles, notons l'obligation de rédiger le contrat en double ? il y a ces protections-là ? de permettre au consommateur d'en prendre connaissance avant de signer ? donc, d'où l'importance d'un certain support ? d'apposer des signatures à la dernière page du contrat, de remettre un double du contrat, bon, tous éléments qu'il nous apparaît difficile... Il nous apparaîtrait difficile d'atteindre les objectifs visés par le législateur autrement qu'en exigeant de fournir au consommateur un écrit sur support papier. Deux minutes?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Deux minutes, Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Oui? On va y arriver. Et donc, l'avant-projet de loi comporte, à l'article 87, une modification à la Loi sur la protection du consommateur qui a ça pour effet, de permettre ce support papier, et nous souhaitons vivement que ce soit conservé jusqu'à la fin des audiences et au moment de l'adoption de la loi.

Il y a d'autres documents aussi pour lesquels un écrit est exigé, et il y en a un en particulier. On les a examinés pour essayer ? compte tenu qu'on est très favorables aux nouvelles technologies ? de voir lesquels demandaient un support papier, pour lesquels c'est encore essentiel. Il y en a un ? on attire votre attention sur celui-là ? c'est l'article 34, paragraphe 1, qui dit:

«Un titulaire de permis ou son représentant ne peut:

«1° communiquer oralement avec un débiteur avant de lui avoir fait parvenir un avis de réclamation conforme au modèle prescrit par règlement.»

Alors, on voudrait encore qu'il soit envoyé obligatoirement sur support papier pour la bonne raison que ça permet au consommateur un délai. C'est uniquement pour cette raison-là. Et on trouve ça plate qu'on ait besoin d'un écrit papier pour permettre le délai mais c'est que, temporairement, tant que notre loi ne sera pas modifiée pour donner ce délai-là au consommateur, il faut utiliser le papier. Donc, on suggérerait, on aimerait que l'avant-projet de loi permette le support papier dans ce cas-là précis quitte à, ultérieurement, lorsque, à un autre moment, notre loi sera modifiée, prescrire justement le délai qui est nécessaire. En gros, c'est ça.

Un dernier élément, une suggestion qu'on voudrait faire, c'est au niveau de l'adresse. Dans l'avant-projet de loi, vous mentionnez le nom, l'adresse, et ça veut dire à ce moment-là l'adresse du domicile. On voudrait que vous ajoutiez la notion d'adresse électronique pour permettre au consommateur de recevoir toutes sortes de correspondances à son adresse au choix, à l'adresse physique ou encore électronique et on souhaiterait que ça soit au sein de l'avant-projet.

Je vous laisserai lire la synthèse des recommandations. En fait, tous mes propos se résument à une dizaine de recommandations qu'on retrouve à la fin du texte. Je vous remercie de votre attention.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme Fontaine. Nous allons donc poursuivre avec les échanges. M. le ministre.

M. Cliche: Mme la Présidente, Mme Fontaine, bonjour. Ça me fait plaisir de vous parler encore, parce qu'on a eu l'occasion de travailler ensemble et on va avoir encore l'occasion de travailler ensemble.

Je vais être bref dans mes remarques, et j'aurai une question, parce que je note l'intérêt de mes collègues ce matin qui, comme hier, veulent poser des questions. Alors, je ne veux pas occuper tout le temps.

Mais je veux d'emblée vous rassurer parce que les objectifs que vous poursuivez et les énoncés que vous avez faits, à mon point de vue, je les partage en très grande partie, je les partage. Et c'est une question de libellé et de s'assurer que le libellé reflète vos objectifs. Je veux vous rassurer parce que, on en parlait ce matin en réunion de travail à mon cabinet, selon nous, lorsqu'on parle... Par exemple à l'article 2, lorsqu'on dit «la loi», ce que les juristes me disent, c'est que c'est à la fois les lois et les règlements qui y sont afférents. Donc, c'est couvert.

Je veux vous rassurer, à l'article 34, qu'il est évident que ce sera le consommateur, dans le cas d'un achat, mais également le citoyen ou l'entreprise qui désire avoir de l'information ou des services gouvernementaux, qui aura le choix du support. Si la personne veut recevoir de l'information du gouvernement sur le mode électronique, soit. Mais, si la personne tient à ce que ce soit en mode papier... Donc, c'est celui qui demande ou qui achète qui demeure celui qui impose, entre guillemets, le support qu'il veut bien. Donc, il n'est pas question qu'un commerçant puisse dire: Je t'envoie ça par électronique même si tu veux du papier. Bref, c'est le consommateur qui a le gros bout du bâton dans ce domaine. Quant aux autres aspects plus techniques, on va certainement les évaluer et on va s'assurer que, possiblement, il y ait un meilleur libellé.

Mais j'aimerais vous entendre sur deux aspects, très rapidement. Est-ce qu'il y a beaucoup de lois et de règlements qui prévoient que les transactions doivent seulement être faites en mode papier? Je comprends, c'est beaucoup les ventes itinérantes, le porte-à-porte. Et ma première question ? après ça, une deuxième très courte ? c'est: Je sais qu'il y a d'autres mémoires qui aimeraient que ces dispositions soient amoindries et il y a une proposition qui nous est venue ? je ne sais pas formellement, par mémoire, mais elle est parvenue à mon bureau ? à l'effet qu'une vente itinérante, il pourrait y avoir un support électronique qui soit celui du marchand avec une signature électronique du consommateur, une attestation, une reconnaissance électronique et que, éventuellement, il pourrait y avoir une impression papier de ce document-là sans qu'on retrouve la signature écrite du consommateur. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous tenez vraiment à ce que, toujours, sur le support papier, il y ait la signature manuscrite du consommateur? C'est ma première question.

La deuxième question ? puis je n'en poserai plus, je vais laisser la place à d'autres ? ça porte sur une question qui a été évoquée hier, notamment par la députée de La Pinière, c'est sur la protection des consommateurs, sur la consommation en ligne. Je sais que nous sommes à l'avant-garde. Je sais notamment que vous avez reçu au printemps dernier, à Québec même, des représentants des offices de protection des consommateurs de l'ensemble de beaucoup d'États. Je sais que vous êtes très avancés avec le BNQ, le Bureau de la normalisation du Québec, pour dégager des normes qui pourraient éventuellement être codifiées et possiblement devenir des normes ISO, entre guillemets, ou de reconnaissance de portails. J'aimerais que vous nous fassiez le point sur l'avancement de ces travaux et peut-être que vous nous fassiez voir un peu comment vous voyez l'échéancier qui ferait en sorte que, éventuellement, un portail de commerçants pourrait rassurer les consommateurs, parce que l'objectif de notre législation, c'est de créer un climat de confiance. Quelle est la perspective de temps et de moyens pour faire en sorte qu'un portail d'un commerçant puisse dire aux consommateurs: Si vous faites affaire chez nous, on vous assure qu'on respecte un code d'éthique qui protège le consommateur? Ça, essentiellement, ce sont mes deux questions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors, Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Merci, M. Cliche. D'abord, le nombre de contrats et autres qui auraient besoin d'être sur support papier, on en a au moins une douzaine ici dont le législateur avait prévu qu'ils devraient être sur support papier pour des raisons de protection du consommateur. Je vous en donne quelques-uns: il y a celui du contrat du commerce itinérant, c'en est un, contrat de crédit, contrat de prêt d'argent, contrat de crédit variable, contrat de vente à tempérament ? vous allez voir, c'est surtout autour de questions d'intérêts ou de crédit ? contrat de louage à long terme, contrat de vente de véhicules d'occasion, de services à exécution successive, de studios de santé, bon, un ensemble de ce genre de contrats-là. Il est probable que les consommateurs vont encore avoir besoin du papier pendant un certain temps. Je pense qu'il faudra qu'on examine ? il est peut-être trop tôt aujourd'hui pour dire quelles modalités, avec quelle signature électronique ? il va falloir examiner, je pense, dans un premier temps, le degré d'informatisation et d'accessibilité de ces outils dans ces commerces, parce que les commerçants itinérants, actuellement, ils sont probablement plus format papier qu'autre chose, et ça va demander qu'on examine de plus près certaines modalités et comment la transition peut se faire. Il est sûr que le papier là-dedans va sécuriser le consommateur encore pendant un bon bout de temps.

n(11 heures)n

Je pense qu'il va falloir garder une flexibilité pour permettre d'évoluer dans les prochaines années vers une formule plus basée sur les technologies électroniques. Mais, à ce moment-ci, il faudrait examiner la question de plus près que ce qu'on peut faire autour de la table aujourd'hui. Ce sont des éléments pour lesquels le législateur, à l'époque, avait voulu prévoir une plus grande sécurité, une plus grande protection parce que souvent on fait affaire dans ces cas-là avec des consommateurs qui peuvent être vulnérables. Et ça, c'est un grand nombre dans notre société. Ce n'est pas seulement une frange. Ce ne sont pas seulement ceux qui sont pauvres, mais c'est un assez grand nombre de consommateurs. Et je souhaite qu'on prenne le temps d'examiner ça plus en profondeur. O.K.

Maintenant, pour la question des travaux que nous faisons actuellement avec le BNQ et du portail de commerçants, ce que nous avons examiné depuis un certain temps déjà à l'aide d'un groupe de travail, autant avec les autres collègues canadiens qu'au niveau québécois ? on a commencé d'abord au niveau québécois ? on a créé un groupe de travail avec des commerçants, des consommateurs et certains experts pour voir comment adresser ces questions de commerce en ligne, de sécurité, d'identification du commerçant, où est situé le commerçant, parce que, ça, c'est très important, parce que ça détermine quelle loi s'applique. Même si on a déterminé quelle loi s'applique pour protéger le consommateur... Si le consommateur québécois a acheté d'un commerçant qui se trouve être situé au Japon mais qui fait affaire ici, bien sûr, en ligne, parce qu'il fait affaire partout dans le monde, la question de quelle loi s'applique et la question aussi de l'exécution du jugement, ce sont des questions qui sont encore très importantes et qui montrent que, dans ces situations-là, pour ces questions de pratique commerciale, comme dorénavant elles sont mondiales et elles vont l'être de plus en plus pour un plus grand nombre d'entreprises, les lois ne sont plus le véhicule approprié pour réglementer ou baliser, codifier les pratiques commerciales.

Et donc, il a fallu envisager d'autres moyens, dont celui d'établir une norme. Et l'établissement de normes, dans notre système actuel, fonctionne sur une adhésion volontaire de la part des commerçants et de la part aussi des consommateurs, et donc, l'adhésion volontaire à la fois à la formulation des normes qu'à leur adhésion et leur mise en application. Alors, on a examiné, avec nos partenaires, entre autres le BNQ, le Bureau de normalisation du Québec, quelles étaient les possibilités: Est-ce que les entreprises seraient prêtes à adhérer à la préparation de cette norme?

Notre groupe de travail réunissait, au Québec, le Conseil québécois du commerce de détail, plusieurs grandes entreprises, comme Sears qui a déjà une longue expérience de vente par catalogue et donc de vente en ligne, qui est un leader dans la vente en ligne présentement, d'autres entreprises, comme Air Canada, comme Desjardins. On avait plusieurs partenaires qui se sont dit non seulement intéressés mais prêts à collaborer à l'établissement d'une norme comme celle-là.

En même temps que nos partenaires nous disaient ça, ils nous disaient: Oui, mais une norme ne peut pas être une norme élaborée par un État seulement, parce qu'il faut qu'elle puisse être applicable ailleurs, et donc, qu'elle ait une large base de consensus, ce qui nous a amené à travailler avec nos partenaires des États voisins: le Conseil canadien du commerce au détail, l'Association de ? Internet providers ? fournisseurs de sites Internet et d'autres grands partenaires comme ceux-là, BCE, entre autres. Il y a actuellement un consensus sur l'élaboration d'une norme, une norme qu'on va vouloir voir devenir internationale le plus rapidement possible. On en est aux travaux d'élaboration de cette norme, à partir de principes autant de l'OCDE, qui ont été élaborés au Canada, pour encadrer la question des pratiques commerciales, commerçants et consommateurs.

Alors, les travaux progressent bien. Vous vous doutez bien qu'il y a plusieurs difficultés, enjeux et embûches, parce que c'est du développement, il faut innover, il faut inventer dans beaucoup de cas, et que ça se fait sur une base consensuelle et volontaire. Il est à peu près impossible pour un gouvernement de l'imposer, les entreprises doivent y adhérer et les consommateurs doivent aussi y adhérer pour la définition. Alors, le progrès se fait bien.

Quant à votre question, votre intérêt pour les portails de commerçants, certains portails en élaboration, entre autres, Desjardins qui veut, avec les entreprises pour lesquelles il fournit les services de crédit, Desjardins a communiqué avec nous, a travaillé avec nous à quelques reprises et se dit très intéressé à pouvoir utiliser une norme largement reconnue pour dire aux gens qui font partie de son portail: Voilà, nous, nous adhérons à cette norme-là qui définit des pratiques commerciales qui font largement consensus et qui fait en sorte que ce sont des pratiques qui sont saines, qui sont sécuritaires pour les consommateurs et auxquelles les consommateurs vont pouvoir faire confiance. Et cette norme-là, pour terminer, serait assortie d'un sceau qui pourrait être utilisé sur l'écran et qui ferait en sorte que les gens qui font affaire sur le portail, par exemple, de Desjardins, pourraient se dire: Ah oui! bien, ce sceau-là, il est solide et on peut avoir confiance. Voilà.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, Mme Fontaine. Écoutez, je vais faire un peu comme hier, je vais procéder par alternance. C'est sûr que le temps file. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente, de notre côté, sentez-vous bien à l'aise.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, non, c'est correct. On a fait ça comme ça hier, alors, Mme la députée de La Pinière, pour vos questions.

Mme Houda-Pepin: O.K. Parfait, merci beaucoup. Mme Fontaine, Me Allard et Me Renaud, merci beaucoup pour votre présentation. C'est, en fait, le premier mémoire qui parle des droits des consommateurs, de la protection des consommateurs, et on le comprend bien parce que vous représentez l'Office de la protection du consommateur. C'est très intéressant, ce que vous nous exposez comme analyse et aussi comme perspective également de changement. Je constate que vous avez fait une étude fouillée du projet de loi, article par article, et puis vous avez décelé les embûches, les difficultés, l'irréalisme parfois de l'applicabilité de certaines dispositions qui sont dans le projet de loi, et je trouve ça très rafraîchissant.

Hier, nous avons écouté le Barreau du Québec qui... Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de leur mémoire. Alors, en gros, évidemment, c'est un mémoire aussi très fouillé, et comme le Barreau est toujours habitué à faire des analyses très, très en profondeur, j'ai retenu un certain nombre d'éléments. Je voudrais vous en soumettre, en tout cas, avoir votre avis sur quelques aspects.

Ce que le Barreau dit ? et sur ce point-là, il n'est pas le seul à le dire ? il dit que le projet de loi embrasse trop. Ça touche le secteur public, le secteur privé, les individus, et ça serait peut-être mieux de focaliser davantage soit sur le commerce électronique parce que toute la question du privé, ça serait trop encombrant, en fait, et ça serait difficile au niveau de l'application. Et ils ont évidemment proposé, même, la possibilité de réécrire le projet de loi.

Sur cet aspect, parce que vous parlez des consommateurs, donc, des individus, est-ce que vous êtes d'avis que ça serait utile et nécessaire de soustraire ou de réécrire le projet de loi de façon à ce que tout ce qui touche les individus soit aussi modifié dans les lois existantes?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Oui. Je vais vous dire, ce que nous avons aimé, en examinant cet avant-projet de loi, c'est sa portée générale. Nous pensons que c'est un premier jalon important pour baliser l'utilisation de l'inforoute et des transactions en ligne. Il s'adresse à quelques éléments qui sont de fond, la question du document, la question de la transférabilité, la question de la signature, entre autres, pour ne nommer que ceux-là, et nous pensons qu'à ce moment-ci il est important d'avoir un avant-projet qui ait plutôt une portée générale plutôt que de s'adresser à des aspects très particuliers comme le secteur public, le secteur privé, individu. Bon, c'est mon premier point.

Mon deuxième point, je tendrais d'abord ? et c'est mon opinion personnelle ? dans une législation, à d'abord avoir un avant-projet de loi qui ait une portée générale et essayer de voir qu'est-ce qui est généralisable entre le public, le privé et l'individu, parce que je pense qu'il y a des choses qui sont d'application générale et qui peuvent être partagées. Je pense que cette approche-là est plus productive que, d'entrée de jeu, d'aller tout de suite dans un secteur très, très spécifique. Donc, je pense que l'approche utilisée, que je qualifierais de systémique, m'apparaît plus porteuse, plus englobante que d'aller avec une approche analytique très pointue.

Et mon troisième point serait de dire: Il est probable que, dans les années qui viennent, compte tenu de l'évolution rapide, il faille, dans des modifications de lois, entre autres, celle de la Loi sur la protection du consommateur, aller sur des aspects très précis mais, au moins, on pourra s'asseoir sur un cadre général.

n(11 h 10)n

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Je pense que, dans les explications que vous avez données tantôt, vous avez soulevé un point très pertinent quand vous avez parlé de la législation comme instrument pour baliser le commerce international par rapport aux normes internationales. Et j'ai entendu ce discours aussi d'autres personnes qui me disaient, du moins celles qui se préoccupent du respect de la vie privée et des renseignements nominatifs, que finalement la législation, ce n'est pas nécessairement la balise sur laquelle on peut s'appuyer pour assurer, à coup sûr, la protection de la vie privée parce que c'est les informaticiens qui sont devenus, entre guillemets, les législateurs, parce que ? je vois votre conseiller en rire, il a peut-être entendu la même chose que moi ? dans la mesure où ce sont les informaticiens qui définissent les architectures technologiques, c'est eux qui définissent les paramètres finalement de la conservation de l'information, de sa transmission, etc., et finalement, nous, comme parlementaires, on a vraiment très peu de pouvoir réel pour exercer une véritable influence sur ce nouveau champ qui s'ouvre à nous sur le plan mondial, parce que la législation va s'appliquer ici, mais l'Internet, c'est sans frontière. J'aimerais vous entendre là-dessus, puisque vous avez abordé également cette perspective-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Oui. Votre propos est très juste. Plusieurs pays et plusieurs États actuellement ont adopté des législations dans des domaines semblables à celle qu'on regarde aujourd'hui: la question du document, de la signature et tout ça et, à ce moment-là, les États vont aller vers une harmonisation. Ça se fait déjà avec d'autres provinces canadiennes, je sais qu'en France, ils ont adopté aussi, ou sur le point d'adopter, leur projet de loi dans ce sens-là et il devra y avoir nécessairement des travaux d'harmonisation. À la fois ça, mais, en même temps, il faut bien voir qu'en préparant la législation il y a des carrefours, des tables de travail mondiales présentement, entre autres, sur ces aspects-là qui font en sorte que chacun s'en inspire ou essaie de faire mieux de ce qui se discute autour de la table. Donc, on peut penser qu'en amont autant qu'en aval il y a de l'harmonisation qui se fait, qui va faire en sorte que les législations sur certains aspects vont se rejoindre.

Mais la législation n'est pas tout dans ce domaine-là et, comme vous le signaliez justement, elle n'est pas tout pour des questions, entre autres, de l'applicabilité et c'est pour ça que le recours aux normes, à mon avis, est une voie essentielle et qu'il faut prendre le plus rapidement possible et, si possible, il serait intéressant que le Québec continue à exercer un leadership, à influencer ou participer à l'élaboration de ces normes-là parce que ces normes-là non plus ne régleront pas tout. Les normes vont s'élaborer en consensus entre les principaux partenaires que sont les consommateurs, les entreprises et d'autres partenaires importants, gouvernementaux et autres. Et, évidemment, ce que les consommateurs veulent ce n'est pas nécessairement ce que les commerçants ou les grandes entreprises veulent donner. Ça, c'est sûr. Sur quoi on va réussir à s'entendre? Bien, ça demeure à voir. Tout le monde est en train de travailler là-dessus. Jusqu'où ça va pouvoir aller? On peut penser qu'il y aura des normes minimales. À mon avis, ce sera la première étape et, après expérience concrète, les gens vont se dire: Ce n'est pas suffisant, il va falloir aller plus loin. Donc, il y aura d'autres étapes. Mais ce qui m'apparaît important, c'est de commencer par quelque chose, quitte à avoir une norme qu'on va trouver pas très englobante, mais ce sera peut-être la première marche sur laquelle s'appuyer.

Mon collègue me signale, ici, aussi un autre élément qui est important et qui fait que les législations sont difficilement applicables d'un pays à l'autre parce que le consommateur qui achète d'un commerçant d'ailleurs, s'il est en litige, s'il est en problème, en désaccord avec le commerçant, il y a toute une question très difficile actuellement à résoudre, de résolution des litiges et de comment on va résoudre ça. Il y a plusieurs organismes, quelques-uns, je dirais, qui se mettent en place actuellement pour développer des approches alternatives de résolution des litiges en ligne. Il y en avait un à Montréal qui avait un leadership fort intéressant à l'Université de Montréal, mais qui maintenant est allé plus vers la résolution de litiges, mais concernant les noms de domaine seulement. Par ailleurs, il y a une ouverture à développer de nouveau la résolution de litiges en ligne. C'est certain que, sur le plan international, c'est ça qui est important, c'est ça qui va faire en sorte que les consommateurs vont avoir plus confiance, vont avoir un recours avec un mode alternatif. Il y a quelques endroits où ça se fait actuellement dans le monde. Les consommateurs, à date, y ont encore peu recours, on est au début de ça, mais c'est certainement un des enjeux importants.

Mme Houda-Pepin: Allez-y, madame...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Là, du côté de parti ministériel, il reste environ 6 min 30 s. Alors, si les questions sont courtes et que les réponses vont à l'avenant, on devrait être bon pour avoir du temps pour les deux députés. Alors, M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Merci, Mme la Présidente, ça va être difficile. Je vais faire des efforts.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kieffer: Mme Renaud, messieurs les avocats ? je prends la peine de préciser avocats vous allez me voir venir.

Une voix: Mme Fontaine.

M. Kieffer: Pardon. Mme Fontaine, je m'excuse, et Me Renaud et Me Allard. Je trouve effectivement votre mémoire et sa présentation non seulement très fouillé, mais aussi très proactif. Vous voulez participer, vous voulez être là, vous êtes là pour défendre les intérêts des consommateurs, vous apportez dans votre présentation des recommandations, des suggestions, des critiques quant à l'avant-projet de loi que vous souhaitez voir apparaître dans le projet de loi final. Alors, ça, ça me satisfait beaucoup parce que je vous avoue qu'au sortir de la journée d'hier, le dernier groupe qui est venu se présenter ? c'est pour ça que je mentionnais qu'il y avait des avocats qui vous accompagnaient ? c'était le Barreau. Et, moi, je suis sorti de là, j'étais très déçu parce que je m'attendais à beaucoup d'autres choses de la part du Barreau mais, entre autres, au fait que le Barreau nous suggère, nous recommande, nous fait des critiques positives, alors que tout ce qu'on a reçu comme commentaire, c'était que votre projet de loi ne valait rien, qu'il était inutile et que nous aurions beaucoup mieux fait de modifier les lois existantes, comme la députée vous posait la question tantôt et à laquelle vous avez répondu d'ailleurs. Alors, je suppose que les avocats qui vous accompagnent partagent votre point de vue, puisqu'ils sont ici, qu'ils ont réfléchi eux aussi et qu'ils considèrent que l'avant-projet de loi a ses mérites.

Ceci étant dit, le ministre tantôt a soulevé, et vous l'aviez soulevé, l'article 2 et l'article 34. Vous avez hoché de la tête quand il a dit: Écoutez, ce n'est pas exactement la perception que nous avons, ce n'est pas nos intentions. Mais j'aimerais que vous m'expliquiez: Lorsque vous dites, par exemple, que vous considérez que l'article 34, c'est des voeux pieux, donc ça signifie en général que ça n'a pas d'effet, que ça n'a pas de portée, puis ça ne protègera pas, est-ce que vous êtes satisfait de la réponse du ministre ou est-ce que vous y verriez des modifications ou des ajouts qui vous permettraient ou qui nous permettraient ou qui permettraient aux citoyens et citoyennes consommateurs de s'assurer que ce ne sont pas des voeux pieux?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Fontaine. C'est bien, M. le député de Groulx.

Mme Fontaine (Nicole): Mme la Présidente, M. le député, je crois comprendre que votre question s'adresse aux avocats.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fontaine (Nicole): Demandez à Me Allard et peut-être...

M. Kieffer: Il vous est loisible de répondre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fontaine (Nicole): Je vais les mettre à contribution.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Me Allard.

n(11 h 20)n

M. Allard (André): Mais écoutez, avec respect j'ai compris très bien les propos qui ont été tenus et de quelle façon on a justifié l'article 34. C'est exact de dire qu'il y a une liberté qui est accordée au cocontractant pour déterminer quels seront les moyens utilisés. Ce qu'il faut toutefois se rappeler et garder à l'esprit et ce que Mme Fontaine a souligné, c'est que, dans un contexte de contrat de consommation, on est, plus souvent qu'autrement, soumis à un contrat d'adhésion, donc qui est déjà rédigé et dans lequel contrat il pourrait y avoir des clauses indiquant que tel et tel autre support sera dorénavant utilisé pour les communications ultérieures, de sorte que, ce qu'on voulait juste illustrer, c'est la nécessité de laisser au gouvernement ou au législateur la possibilité de déterminer, dans certains contrats, des supports donnés. Alors, ce n'est que pour déterminer précisément que pour un contrat précis des conditions de forme devraient être respectées. Alors, il ne faut pas penser que... parce que évidemment cette clause-là s'applique ou cet avant-projet de loi s'applique de façon générale, il s'agit de déterminer si, dans des circonstances très particulières, un niveau de protection supérieur devrait être accordé à une partie qui se retrouve dans une situation de vulnérabilité.

Alors, c'est dans ce contexte-là que la recommandation est faite.

M. Kieffer: Je suppose...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Petite question... Je suppose que vous avez pensé à ces cas-là et que vous allez nous les transmettre. Est-ce que vous verriez que ça apparaisse au projet de loi ou par règlement, par exemple?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Me Allard.

M. Allard (André): Bon. Ce qu'il faut considérer, c'est que dans l'ensemble l'Office est tout à fait favorable à permettre aux parties, dans un contrat de consommation, de transiger autrement que sur support papier. Toutefois, il faut considérer que, dans un certain cas, le législateur a, dans le passé, déterminé que certains documents devraient être constatés par écrit. À l'époque ? Mme Fontaine l'a souligné ? ça ne pouvait être fait que sur support papier. Pour pouvoir permettre un niveau de protection aussi élevé que ce que représentait le support papier à ce moment-là, il faudra déterminer des conditions de forme que prendront les communications sur d'autres supports.

Permettre sans aucune condition de forme les transactions électroniques entre un commerçant et un consommateur pourrait entraîner des préjudices pour le consommateur. Ce qui fait que ce qu'on recommande, c'est que les contrats qui actuellement doivent être constatés par écrit le demeurent sur support papier, et nous allons, nous, entreprendre une réflexion sur quelles seront les conditions de forme qui pourront être imposées au contrat électronique ou un contrat sur d'autres supports dans l'avenir. De sorte qu'il n'est pas impossible que, parmi les contrats qui ont été énumérés ou qui sont énumérés au mémoire, il puisse y en avoir quelques-uns qui pourront désormais être constatés sur un autre support à la condition toutefois que, par règlement, des conditions de forme particulières soient imposées, compte tenu encore du déséquilibre qui existe entre les parties dans un tel contrat.

Et il faut également comprendre que le consommateur se voyait, par le fait qu'il avait un écrit sur support papier, attribuer un certain niveau de protection. Il pouvait utiliser les documents que le commerçant lui remettait pour pouvoir éventuellement entreprendre des recours.

De quelle façon cela serait-il possible dans l'avenir si ces transactions-là étaient sur un autre support, c'est ce que le gouvernement devra déterminer par règlement. Alors, ce sont évidemment des conditions de forme excessivement précises qui, je ne pense pas, devraient être imposées par un avant-projet de loi à ce stade-ci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors, M. le député de Gaspé, il vous reste à peu près deux minutes.

M. Lelièvre: Oui, Mme la Présidente, merci beaucoup. Mme Fontaine, vu que le temps est court puis la réponse ? je préfère l'entendre de vous au lieu de vous la donner ou de tenter de l'élaborer ? au niveau de la sécurité des transactions entre un commerçant et un consommateur ? et je parle ici des cartes de crédit et autres façons de paiement ? on sait que, bon, les gens qui ont des serveurs emmagasinent l'information et, par la suite, la revendent. On sait qu'aux États-Unis il y a certaines firmes qui sont spécialisées là-dedans même dans la revente de cartes de crédit, j'ai lu ça récemment. Est-ce que vous avez réfléchi, à l'Office, sur cet aspect-là? Parce que, au Québec, quand même, les consommateurs sont protégés, si on fait affaire au Québec.

Et, deuxième volet: Comment, au Québec, on peut imposer des normes pour faire en sorte que tous les recours soient assurés, d'autre part, et que les conditions de forme dans un contrat, s'il n'y a pas de support papier, ne soient pas modifiées? Parce que, à l'autre bout, il peut y avoir des divergences. Le consommateur qui reçoit un contrat sur son ordinateur, est-ce qu'il peut modifier le contrat par rapport à l'expéditeur et vice versa?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je demanderais à ce moment-ci, s'il y a consentement, qu'on puisse dépasser un petit peu le temps pour permettre au groupe de donner une réponse.

Une voix: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Merci, Mme la Présidente. Il y a deux volets principaux, là, à votre question, compte tenu que le temps nous est compté, il y a la question de la sécurité et la question de qu'est-ce que devrait comporter un contrat pour assurer... est-ce que le consommateur peut le modifier, comment et tout ça.

La question de la sécurité. Il y a plusieurs technologies qui sont utilisées présentement, la cryptographie, de sécurité au niveau financier qui sont disponibles sur le marché et assez largement utilisées surtout par les grandes entreprises, les banques entre autres et d'autres qui font que les transactions financières sur Internet, lorsque ces technologies-là sont utilisées, sont sécuritaires. Elles ne sont pas utilisées par tous. Les plus petites entreprises peut-être les utilisent moins, mais la technologie existe. C'est une question d'utilisation maintenant et de vérification par le consommateur que c'est vraiment utilisé qui est la question au niveau de la sécurité.

Je demanderai peut-être, dans un deuxième temps, à mon collègue Me Renaud qui, sur le plan technique, est plus versé d'aller plus loin là-dedans. O.K.

Votre deuxième volet de question touche les modalités de contrat. Actuellement, quand c'est au Québec, c'est la Loi de la protection du consommateur qui s'applique et qui définit les modalités de contrat, mais ce n'est pas le cas pour d'autres pays ou si le consommateur achetait des États-Unis ou d'ailleurs. Là, le consommateur se trouve un peu mal pris parce que, et même s'il veut voir notre loi appliquée, ce n'est pas celle-là qui s'applique nécessairement ou que le commerçant a utilisé pour définir ses modalités du contrat. C'est pour ça que, entre autres, les normes sur lesquelles on veut travailler vont toucher certaines modalités de contrat qu'on voudrait voir très généralisées quant à, par exemple l'identification du commerçant, où est-ce qu'il réside, les modalités d'un retour ou de bris de contrat ou de livraison, de paiement, de douane ou autres, que tout ça sera vraiment accessible pour le consommateur pour qu'il puisse regarder à quoi il s'engage s'il achète un bien qui est le moindrement d'une plus grande ampleur qu'un livre chez Amazon, par exemple, qui coûte 10 $, 15 $ peut-être.

Alors, ça, ce sont des choses qu'on va vouloir essayer de déterminer plus précisément par normes non pas qu'elles ne sont pas dans la loi, elles y sont déjà, mais pour qu'il y ait une applicabilité plus large pour que le consommateur sache à quoi s'en tenir. Ce à quoi on va tenir aussi sur lequel on travaille présentement, c'est que le contrat, le consommateur puisse y avoir accès par Internet, mais qu'il puisse aussi l'imprimer et donc que ça lui soit loisible de garder une copie, d'examiner ça et de voir comment il est protégé, quels sont ses recours. Peut-être Me Renaud, s'il y a un complément?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Très rapidement, s'il vous plaît.

M. Renaud (Jean-Louis): Complément très court. C'est qu'au niveau de la protection du consommateur québécois nous sommes quand même assez bien dotés en vertu de la loi, parce que le consommateur québécois doit... c'est-à-dire le commerçant qui émet des cartes de crédit au Québec doit respecter certaines normes. Donc, en cas de perte, de vol ou de mauvaise utilisation, il y a une protection qui est déjà dans la Loi sur la protection du consommateur et elle s'applique même ici, si ce sont des achats en ligne qui sont faits au niveau international.

Je pense que l'aspect qui est le plus important que vous souleviez au niveau de la vente de numéros de cartes, ces choses font beaucoup plus appel à la notion de la protection des renseignements personnels et on sait que certains serveurs ne gardent pas les numéros de cartes de crédit une fois la transaction terminée, d'autres le font. Et je pense que, lors de discussions de normes internationales qui pourront s'appliquer, la question de la protection des renseignements personnels est un aspect très important qu'il faudra considérer et on pourrait, dans certaines circonstances, ça peut être une des normes, réglementer la question de transmission des numéros de cartes, en fait, qui sont gardés sur les serveurs. Je pense que cet aspect-là devrait être considéré de façon très précise.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Me Renaud. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. J'espère que vous allez être aussi généreuse avec nous, si jamais mes collègues ont besoin de quelques secondes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...qui décide. Mme la députée, je suis persuadée qu'il y aura la même générosité.

Mme Houda-Pepin: Bien sûr, bien sûr. Très bien. Mme Fontaine, dans votre mémoire, vous avez soulevé une question primordiale, notamment à la page 6, lorsque vous avez parlé de l'exigence à un support papier à l'égard des documents. Et, en effet, j'ai regardé la Loi sur la protection du consommateur, l'article 25, qui dit: «Le contrat doit être clairement et lisiblement rédigé au moins en double», et cela se trouve dans le chapitre qui porte sur les Règles de formation des contrats pour lesquelles le titre I exige un écrit.

n(11 h 30)n

Donc, la Loi sur la protection du consommateur, comme vous l'avez dit, c'est une loi qui date de plus d'une vingtaine d'années. Aujourd'hui, nous sommes en train de parler des transactions électroniques. L'avant-projet de loi notamment l'article 97 stipule que l'article 25 de la Loi sur la protection du consommateur est modifié par l'addition à la fin des mots «et sur support papier». Donc, nous sommes toujours dans la civilisation du papier comme seule et unique référence juridique. Or, si on veut analyser ça dans la perspective des transactions électroniques, bien il faut se mettre à jour peut-être, n'est-ce pas? Il est peut-être temps. Est-ce que vous envisagez que la Loi sur la protection du consommateur, compte tenu qu'on est à l'ère électronique, puisse être modifiée de façon à ce que le papier ne soit pas l'unique point de référence au point juridique?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Oui, Mme la députée, effectivement, nous avons suggéré qu'à l'article 25 de notre loi l'avant-projet de loi vienne préciser de rédiger au moins en double mais aussi sur support papier. Il faut bien voir que cet article 25 s'applique à peu près à une dizaine de contrats, 10, 12 contrats à peu près, seulement. Et donc on va obliger ceux qui transigent ce type de contrat pour une dizaine de contrats à encore avoir le support papier. Je pense que ça permet quand même de passer à l'ère électronique parce que tous les autres types de contrats vont pouvoir se faire sur une base électronique, en utilisant le support électronique. Ça n'est que pour cette dizaine-là, cette douzaine-là que nous maintenons le support papier, pour le moment, à l'occasion de cet avant-projet de loi.

Toutefois, nous voulons favoriser aussi le recours aux technologies pour les consommateurs parce que c'est, dans la plupart des cas, très avantageux pour eux. Si bien que, lorsque nous allons réviser la Loi sur la protection du consommateur ? ce que nous souhaitons faire bientôt ? nous regarderons la pertinence de maintenir encore dans la loi ces exigences-là.

Vous noterez peut-être que, un de mes derniers commentaires dans le mémoire, nous avons déjà examiné, entre autres, la question des délais, et, dans plusieurs cas, on demandait que la question des délais soit sur support papier. Or, nous n'en retenons qu'un, cas, et de façon temporaire, c'est le cas de communiquer avec un débiteur, le titulaire de permis dans le cas du recouvrement de certaines créances. C'est seulement un cas que nous retenons et que nous suggérons de maintenir le support papier, et ce, parce que ce n'est pas à ce moment-ci qu'on peut prévoir un amendement à notre Loi de la protection du consommateur pour inclure dans notre loi la notion de délai que par ailleurs l'utilisation du papier impose.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Mais vous conviendrez peut-être avec moi qu'il est urgent que ça soit modifié. Parce que, si on veut encourager le commerce électronique, il faut éliminer toutes les barrières structurelles et les barrières juridiques qui sont devenues caduques, éventuellement là. Sinon, évidemment ça ne marchera pas.

Tantôt, vous avez dit: Cette disposition de la protection du consommateur s'applique uniquement à certains documents. Est-ce que les factures et les cartes de crédit sont parmi ces documents qui sont compris? Parce que dans le secteur financier, par exemple, qui est un secteur hautement branché au niveau du commerce électronique, ça demeure une préoccupation, ça demeure une barrière réelle.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Je suis d'avis aussi avec vous qu'il faut éliminer le plus de barrières possible. Toutefois, je suis certaine que vous partagez qu'il ne faut pas que ce soit au détriment des consommateurs. Alors...

Mme Houda-Pepin: Non, ce n'est pas ce qu'on dit. Non.

Mme Fontaine (Nicole): ...comme on le dit, il y a seulement dans une dizaine de cas qu'on maintient le papier, et on va vouloir réexaminer ces questions-là le plus rapidement qu'on va pouvoir.

Pour la question des cartes de crédit...

Mme Houda-Pepin: Et les factures.

Mme Fontaine (Nicole): ...et les factures, ça, ce sont des pratiques commerciales. Il est toujours intéressant que le consommateur, lorsqu'il paie une facture ? et plusieurs le font maintenant... On a la plupart du temps la possibilité d'en imprimer une copie papier, et beaucoup le font parce que c'est une sécurité. Il faut que ce soit conservé comme pratique commerciale, le loisir pour le consommateur d'avoir une copie papier, d'avoir l'information sur support papier.

Et je signalerai, peut-être en terminant, qu'en examinant les différentes lois sur la question des délais de signification, ou tout ça, ou des demandes, où on demandait que la demande soit faite par écrit avec l'intention que ce soit sur papier, en l'occurrence, un aspect qui est très important pour le consommateur, c'est la demande d'obtention de crédits. Il y avait une pratique largement utilisée dans ce domaine-là qui faisait en sorte que les compagnies de crédit sollicitaient très fortement les consommateurs et leur envoyaient presque des papiers seulement à signer. Alors, la Loi de la protection du consommateur demande que l'obtention du crédit ne puisse s'obtenir que sur demande expresse et écrite de la part du consommateur.

Alors, on a examiné ça avec attention. Dans un premier temps, on optait pour une demande écrite sur support papier, mais on ne l'a pas retenue se disant que, bon, la demande pouvait très bien être écrite mais sur support électronique ou papier, selon le choix du consommateur. Et c'est pour juste vous montrer par cet exemple qu'on s'est quand même bien attaché à ne pas mettre des freins indus non nécessaires à la protection du consommateur, de façon à permettre que la technologie se répande le plus rapidement possible.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme Fontaine, j'apprécie beaucoup vos commentaires parce qu'ils sont très, très pertinents. On est à court de temps, on me dit qu'il reste seulement trois minutes, alors je vais vous poser mes deux dernières questions ensemble, comme ça vous y répondrez à votre guise.

Premièrement, dans votre mémoire, vous avez touché à la question de l'harmonisation des législations. Vous, l'Office de la protection du consommateur, vous êtes participant au niveau des discussions sur l'Accord canadien sur le commerce intérieur. Je voudrais savoir si vous avez analysé l'avant-projet de loi à la lumière de l'harmonisation des législations en matière de commerce électronique pour l'ensemble de la perspective pancanadienne et internationale et si cet avant-projet de loi, dans sa rédaction actuelle, s'harmonise avec ce qui existe déjà ou qui est en cours d'étude. Ça, c'est ma première question.

Et la deuxième: Vous avez collaboré, je crois, l'Office de la protection du consommateur, à l'implantation du projet des bornes télématiques avec le ministère des Relations avec les citoyens. Je crois vous avez déjà été impliqué là-dessus. J'ai eu l'occasion d'avoir un échange avec vous dans une autre commission parlementaire il y a à peu près un an et demi, deux ans, et vous m'avez dit que vous étiez impliqué dans ce dossier.

Je veux savoir si les bornes télématiques qui ont été implantées par le gouvernement sont sécuritaires au niveau des transactions électroniques. Ce serait peut-être ma dernière question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, écoutez, il reste à peine une minute, je demanderais donc, encore une fois, le consentement pour que le groupe puisse répondre entièrement aux deux questions. Alors, voilà. Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Oui, Mme la députée, Mme la Présidente, oui, nous avons examiné l'avant-projet de loi à la lumière des autres avant-projets de loi qui sont déposés également dans d'autres législations, entre autres en Saskatchewan, si je me souviens bien, en Ontario, et il y a des similarités. Je pense que l'harmonisation s'est faite en bonne partie en amont et je pense qu'il y aura d'autres travaux d'harmonisation possiblement après coup, parce que les projets ne sont pas encore adoptés dans certains cas, dans d'autres législations, et on verra qu'est-ce qui sera adopté. Mais, oui, je pense que ça s'harmonise bien.

La question des bornes télématiques, oui, il y a eu... Les bornes s'adressent, en fait, à un échange de transactions et d'information entre le gouvernement et les citoyens. À ce titre, l'Office donne aussi beaucoup d'information aux citoyens, sauf que l'information que l'Office donne aux citoyens est plutôt axée commerçant-citoyen. Et, à ce titre-là, on a été impliqué, mais plus marginalement, à l'implantation des bornes. Il est possible qu'on y participe davantage, mais l'optique est fort différente. L'Office de la protection du consommateur est à l'interface du citoyen et des entreprises et non pas nécessairement, peut-être un peu mais à la marge, entre les citoyens et le gouvernement. Donc, l'optique est différente.

Mme Houda-Pepin: Mais, vous conviendrez avec moi que le commerce électronique, bien que ça s'appelle...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît, Mme la députée de La Pinière, on a eu un consentement pour prolonger, j'aimerais que la personne qui a la parole présentement puisse terminer sa réponse.

Mme Houda-Pepin: Bien, justement, c'est en rapport avec ça, vous ne m'avez pas écoutée, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, mais c'est parce que, regardez, là, vous ne m'avez pas demandé la parole...

Mme Houda-Pepin: Ah oui!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...et à ce moment-ci... Vous savez qu'il y a de la transcription de nos travaux. Alors, de façon très claire, il faut toujours que ce soit la personne qui puisse finir son intervention.

Mme Houda-Pepin: Est-ce que je peux avoir la parole, Mme la Présidente? Parce que c'est en rapport avec ce que la présidente vient de dire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon, là, le consentement de la commission, je l'ai sur la réponse, là, à ce moment-ci, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Bon. Est-ce que nous avons dépassé notre temps?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui.

Mme Houda-Pepin: Nous avons dépassé notre temps.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, nous avons dépassé notre temps.

Mme Houda-Pepin: Bon, excusez, je pensais qu'on était encore dans notre temps.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non.

n(11 h 40)n

Mme Houda-Pepin: Mais, quoi qu'il en soit, je continuerai la discussion avec vous après la commission, parce que c'est intéressant.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je pense que ça sera toujours possible. Alors, Mme Fontaine, s'il vous plaît.

Mme Fontaine (Nicole): Donc, je clorai mon propos en rappelant que les interfaces que l'Office a, c'est beaucoup entre... on est à l'interface des relations vraiment entre les consommateurs et les entreprises, commerçants et autres. C'est là que notre loi vient baliser certaines pratiques commerciales, vient assurer une protection aux consommateurs, mais vis-à-vis les entreprises beaucoup plus que vis-à-vis les services offerts par le gouvernement. Et, lorsque nous intervenons auprès du gouvernement ou d'une instance gouvernementale, c'est toujours dans ses relations soit vis-à-vis les entreprises ou le consommateur. Mais notre interface est réelle et constante, c'est vraiment entreprises-consommateurs.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme Fontaine.

Mme Houda-Pepin: ...Mme la Présidente, d'avoir une petite question très rapide?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous connaissez la procédure, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Oui, exactement. Je m'adresse à vous.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, on est déjà sur une période où il y a eu consentement. Je redemande donc: Est-ce qu'il y a consentement pour que les échanges se poursuivent?

Une voix: Très rapidement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci.

Mme Houda-Pepin: Très rapidement. Je voulais vous dire, Mme Fontaine, que, pour la nuance que vous avez apportée, je ne pense pas qu'elle soit pertinente, parce que le commerce électronique, ça ne s'applique pas seulement au secteur privé, ça s'applique aussi dans les relations entre le gouvernement et les citoyens. Le gouvernement a des services aussi à offrir à la population, et, dans ce sens, quand je vous ai posé ma question sur la sécurisation des transactions dans le rapport État-citoyens par rapport aux bandes télématiques, c'était vraiment par rapport aux transactions électroniques. Donc, la réponse que vous m'avez donnée ne correspond pas nécessairement à ce que je m'attendais comme explication. Très rapidement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, très rapidement, Mme Fontaine.

Mme Fontaine (Nicole): Vous avez raison, le commerce électronique touche l'ensemble de ces volets-là. Ma réponse a porté plus sur la dimension entreprises et consommateurs parce que c'est là notre mandat. Nous n'avons pas le mandat de nous occuper du commerce électronique gouvernement-citoyens. Alors, notre mandat touche vraiment au commerce, et c'est ce à quoi nous nous sommes attachés, commerçants-consommateurs. Mais vous avez tout à fait raison, le commerce électronique transcende tout ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, Mme Fontaine, M. Allard, Me Renaud, de votre présentation et de votre participation à cette commission. Je vais suspendre quelques instants, le temps de permettre à l'autre groupe de s'installer.

(Suspension de la séance à 11 h 43)

 

(Reprise à 11 h 45)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, nous allons donc reprendre les travaux. À ce moment-ci, je vais prévenir, je vais faire de la prévention. Compte tenu des consentements qui ont été alloués de part et d'autre pour poursuivre les échanges, je vais vous demander tout de suite... parce qu'on voit que l'autre groupe n'aura pas le temps si on n'a pas consentement pour dépasser de 15 minutes la période qui leur est allouée. Alors, je comprends donc que c'est correct, il y aura consentement et on pourra prolonger de 15 minutes pour pouvoir entendre et échanger avec le groupe.

Alors, nous accueillons maintenant le Mouvement des caisses Desjardins. Je pense que c'est Me Brun qui est le responsable du groupe.

Une voix: M. Morency.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est M. Morency. Alors, si c'est possible de vous identifier. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire et que, par la suite, les différents groupes parlementaires pourront échanger pendant 20 minutes chacun avec vous.

Mouvement des caisses Desjardins

M. Morency (Yves): Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. membres de la commission, je me présente: Yves Morency. Je suis vice-président aux Relations gouvernementales à la Confédération Desjardins. Ce matin, je suis accompagné, à ma gauche, de M. Éric Lemieux, qui est vice-président aux Services d'accès et de paiements électroniques à la Confédération Desjardins; à mon extrême droite, de Me François Cholette, qui est directeur principal aux Affaires juridiques de l'Assurance vie Desjardins-Laurentienne; et, à ma droite, c'est Me Bernard Brun, également des Affaires juridiques à l'Assurance vie Desjardins-Laurentienne.

Alors, sur ce, le Mouvement Desjardins tient à remercier la commission de l'économie et du travail de lui donner l'occasion de contribuer au développement du Québec en l'invitant à partager avec elle ses réflexions sur l'avant-projet de loi sur la normalisation juridique des nouvelles technologies de l'information.

Desjardins est un utilisateur important des technologies de l'information et doit constamment se tenir à la fine pointe des développements dans ce domaine. Il le fait à la fois pour répondre aux besoins de plus en plus complexes de ses membres et de ses clients et pour contenir également la pression concurrentielle. Nous devons donc entretenir et améliorer constamment notre site Internet et nos outils de commerce électronique pour le bénéfice des particuliers et des entreprises.

Nous gérons le site financier le plus fréquenté au Québec, et le nombre d'utilisateurs augmente de façon exponentielle. Compte tenu de la nécessaire relation de confiance qui doit exister entre un utilisateur et son institution financière, nous veillons sans relâche au maintien et à l'amélioration de la fiabilité, de la sécurité et de la confidentialité des milliers d'opérations transactionnelles et d'échanges électroniques effectués chaque jour.

Cependant, des contraintes de nature juridique limitent actuellement notre capacité à offrir des services réclamés par nos membres et clients comme, par exemple, une demande de carte de crédit, la présentation de factures électroniques. À cet effet, nos membres ne comprennent pas comment il se fait qu'en 2000... Ils nous demandent de renvoyer des factures sur une base électronique, puis ils ne comprennent pas pourquoi on est obligé à nouveau de leur envoyer sur support papier. Donc, ce sont les consommateurs qui nous disent: Écoutez là, il me semble que ça ne fonctionne pas à l'heure où nous sommes rendus.

Et je vous dirais que, chez nous, il y a au-delà d'un demi-million de membres qui utilise de façon active des services en ligne, que ce soit par AccèsD, Internet ou encore la ligne téléphonique AccèsD. Donc, dans les mentalités, on s'en va vers ces genres de services là, et les gens nous posent des questions à l'égard des limites législatives auxquelles nous devons faire face.

Les perspectives illimitées qu'offre la numérisation du texte, de l'image et du son transforment la vie quotidienne des individus, des organisations. C'est pourquoi Desjardins accueille favorablement l'initiative du gouvernement du Québec et considère de la plus haute importance les consultations que vous tenez présentement. Nous estimons que tout retard à adopter une législation à la fois simple, sensible aux progrès qui ont cours dans ce domaine et soucieuse de la protection de la vie privée pénalisera les entreprises québécoises de même que les consommateurs.

Pour ce qui est de l'uniformité et des garanties légales, nous considérons que la validité juridique des transactions générées grâce aux technologies de l'information et la reconnaissance légale des ententes qui surviennent sur ce vaste réseau de communications sont fondamentales pour le développement d'une institution financière comme la nôtre. Dans ce contexte, les consommateurs et les entreprises doivent pouvoir compter sur les mêmes garanties légales pour leurs communications électroniques que celles dont ils bénéficient sur tout support papier.

Permettez-nous en toute modestie de suggérer un titre qui serait peut-être plus évocateurs pour le projet de loi. On a fait une suggestion. Tant qu'à vous dire que peut-être on devrait lui trouver un autre nom, alors on s'est permis de le faire. Ça pourrait être la Loi sur la reconnaissance des documents faisant appel aux nouvelles technologies et visant à faciliter le commerce électronique. En effet, il s'agit moins de normaliser les nouvelles technologies que d'assurer une stabilité dans leurs utilisations en établissant des règles sur la reconnaissance, le support, la transmission et la reproduction de documents.

Malgré tous ses mérites, que nous reconnaissons d'emblée, l'avant-projet de loi nous apparaît, dans sa forme actuelle, complexe, contient trop de considérations technologiques et réfère à des technologies spécifiques. Il serait souhaitable d'éviter les exemples, entre autres, et les spécifications particulières dans un secteur qui, vous vous doutez, est en perpétuelle mutation, et ça se fait sur une base quotidienne. Une telle approche risque de rendre la loi inopérante en raison d'une évolution trop rapide de la technologie.

D'ailleurs, ce fut le cas du Utah Digital Signature Act qui est entré en vigueur le 1er mai 1995. Par ailleurs, cette loi, une des premières dans son genre à établir des normes spécifiques en matière de signature électronique ? trop spécifiques, malheureusement, et trop strictes ? est devenu rapidement difficilement utilisable.

Concernant les renvois et règlements, nous considérons que le texte actuel accorde trop de latitude au gouvernement, principalement sur les questions des règles complémentaires, des normes et la création de comités. Nous croyons que cela pourrait altérer la flexibilité nécessaire aux organisations pour appuyer leur développement. Vous savez, une expression courante dans le milieu, qui malheureusement est en anglais mais qui est très évocatrice, on appelle ça «time to market», c'est un élément quand même fort important pour les organismes du milieu.

n(11 h 50)n

Selon nous, les définitions doivent être utilisées avec prudence dans les lois et elles ne devraient être là que pour préciser des notions et éviter des répétitions. À titre d'exemple, la notion de document dans l'avant-projet de loi, on la retrouve à différents articles: l'article 1, l'article 3, l'article 4 et l'article 70. Selon nous, elle devrait être soit supprimée ou, à tout le moins, être définie à un seul endroit.

Concernant la fiabilité des documents, l'article 5 stipule qu'un document est fiable si son intégrité est maintenue tout au cours de son cycle de vie. Nous nous interrogeons sur la notion de fiabilité, puisqu'il s'agit de maintenir l'intégrité du document en tout temps. À cet égard, la notion d'intégrité est claire et bien établie. Pourquoi alors ne pas s'en tenir à celle-ci, d'autant plus qu'on y fait référence dans le Code civil à la section sur la preuve portant sur la reproduction des documents? Bref, nous proposons le retrait de la notion de fiabilité pour ne s'en tenir qu'à la notion d'intégrité d'un document.

Au sujet de l'importante question de l'expédition et de la réception de documents, l'avant-projet de loi crée une présomption de réception dans certaines circonstances. Ainsi, l'article 33 exige que le document soit intelligible au destinataire pour être réputé avoir été reçu. Nous croyons que cette exigence doit être supprimée, puisque l'expéditeur n'a aucun contrôle sur les outils dont dispose ce dernier pour faire la lecture de documents. Tel que rédigé, nous sommes d'avis que la disposition ouvre la porte à de nombreux litiges. La présomption de réception devrait s'appliquer dès que le document devient accessible. Pour l'expéditeur, il n'est pas simple de démontrer que le document est intelligible à la réception. Par contre, si celui-ci n'est pas intelligible à la réception, le destinataire pourra aisément démontrer que le document, bien que reçu, n'est pas intelligible.

Les questions de réception et d'intelligibilité sont distinctes et ne doivent pas être confondues dans une présomption. Quant à la détermination de la valeur juridique du document, l'avant-projet de loi devrait se limiter à établir les principes généraux. Pour fins de simplification, nous croyons que l'intégrité est une condition essentielle et qu'elle doit être maintenue en tout temps pour que le document ait une valeur juridique.

Le chapitre III aborde non seulement la question du lien entre la personne et le document, mais consacre aussi une part importante à la signature. Il ne s'agit donc pas simplement d'assurer une transmission fiable des documents, mais d'être certain qu'un consentement puisse être transmis, et c'est là que se trouve le grand défi de cet avant-projet de loi là. Celui-ci consiste à baliser sans restreindre, d'où l'importance d'éviter de faire référence à des technologies spécifiques qui paraissent aujourd'hui très avancées, mais qui seront vite dépassées au rythme auquel évolue la technologie.

Le principe de base du chapitre a l'avantage et le mérite d'être très clair, simple et reste ouvert en stipulant que le lien entre une personne et un document technologique peut être établi par tout moyen. Cependant, l'article qui introduit la notion de document technologique, selon nous, ne devrait toutefois pas se limiter à ce type de document, d'abord parce que la notion de document technologique n'est pas définie dans le texte et ensuite parce que le document technologique est fréquemment reproduit sur un support traditionnel comme le papier.

Par ailleurs, l'avant-projet de loi soutient, et je cite, qu'afin de «permettre d'établir la provenance, le parcours ou la destination du document [...] les certificats de clés publiques, les algorithmes, les serveurs, les routeurs, les aiguilleurs doivent pouvoir être identifiés et localisés». L'expérience que nous avons jusqu'à ce jour nous amène à vous indiquer qu'il est plutôt difficile d'y parvenir car Internet est déjà beaucoup trop vaste, et il le sera davantage au cours des prochaines années.

Nous vous avons mentionné au début de notre intervention que la présentation de facture électronique et la demande d'adhésion à une carte de crédit sont parmi les opérations que nos membres et clients veulent pouvoir exécuter de façon électronique. Cependant, celles-ci sont régies par la Loi sur la protection du consommateur adoptée à une époque où la technologie était peu avancée. Elle impose donc des mécanismes qui ne sont plus adaptés aux besoins de nos membres et clients ainsi que de la société en général.

La nomenclature des termes associés à un document à l'article 70 nous laisse croire qu'à l'exception d'un contrat visé par l'article 25 de cette même Loi sur la protection du consommateur tout autre document requis ou régi par cette loi peut être sur tout autre support. De plus, l'article 2 édicte que, et je cite: «À moins que la loi n'exige l'emploi exclusif d'un support particulier, un document peut être sur tout support.» Cependant, encore une fois, considérant que la Loi sur la protection du consommateur, d'une part, est une loi d'ordre public visant la protection du consommateur et que, d'autre part, elle a été adoptée il y a déjà un bon bout de temps, certains pourraient conclure que l'emploi exclusif du support papier est exigé. Dans ces circonstances, nous vous proposons d'apporter une modification à la Loi sur la protection du consommateur afin de préciser que, sous réserves du contrat visé à l'article 25, tout autre document requis ou régi par cette loi peut être sur tout support.

Dans la même veine, afin d'éviter toute ambiguïté interprétative au niveau des articles relatifs à la transmission des documents de l'avant-projet de loi et de la Loi sur la protection du consommateur, nous sommes d'avis que cette dernière devrait également comporter une modification en ce qui a trait au mode de transmission. Ces deux modifications permettraient selon nous l'évolution en toute légalité des produits et services offerts par le biais des nouvelles technologies.

En conclusion, Mme la Présidente, nous saluons encore une fois les efforts déployés par le gouvernement du Québec dans la préparation de cet avant-projet de loi que nous considérons essentiel au développement du commerce électronique. Cependant, nous réitérons notre souhait de pouvoir compter sur une législation plus souple et mieux adaptée à la réalité de l'évolution rapide des technologies de l'information.

Globalement, le document déposé contient des éléments intéressants, mais la longueur du texte et la multiplicité des normes ne correspondent pas aux réalités des nouvelles technologies. Nous sommes convaincus qu'un texte de loi énonçant les grands principes pourrait suffire. Nous craignons que la multiplicité des normes contenues dans ce texte ne forcent toutes les entreprises québécoises en général, et Desjardins en particulier, à ralentir leur cadence de développement du commerce électronique, et ce, au détriment des Québécois et Québécoises.

Enfin, nous sommes conscients qu'il s'agit là d'un avant-projet de loi et que la commission a eu l'ouverture de rencontrer divers organismes, associations et experts afin de recueillir leurs commentaires et de procéder par la suite, nous en sommes très conscients, aux adaptations requises. Ainsi, dans ce contexte, nous vous offrons notre entière collaboration, à la fois aux membres de la commission de même qu'aux personnes qui sont responsables de rédiger le projet de loi, afin de bien positionner la société québécoise à l'égard des technologies de l'information et de leur utilisation.

Alors, je vous remercie de votre attention, et mes collègues et, je vous dirais, spécialistes en cette matière se feront un plaisir de répondre à vos questions et de clarifier parfois nos positions, si nécessaire, de même que les commentaires que nous avons formulés à la fois dans notre mémoire... et aussi nous avons tenu à vous remettre un texte assez détaillé sur chacun des articles, encore là pour faciliter notre compréhension du projet de loi et aussi vous faciliter la tâche dans la mesure du possible. Alors, je vous remercie.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Morency. M. le ministre.

M. Cliche: M. Morency, représentant de la Fédération des caisses, merci. C'est un mémoire très fouillé, très documenté. J'aurais uniquement deux questions de clarification, si vous me permettez, comprenant que sur le fond vous appuyez nos intentions. Nous recevons avec beaucoup d'ouverture vos recommandations de nous assurer que la loi éventuelle soit technologiquement neutre et qu'elle soit peut-être plus simple, plus compréhensible et qu'elle enlève les irritants que vous avez identifiés, et nous recevons votre mémoire à cet effet.

J'aurais une question technique puis une question peut-être plus large. D'abord, la première, c'est la question technique. Je dois dire que là où vous m'avez perdu, c'est sur la présomption de réception. J'aimerais peut-être que vous élaboriez rapidement sur comment vous voyez ça.

En ce moment, quand vous envoyez un état de comptes par mode électronique et que vous êtes obligés d'envoyer un document papier, c'est parce que cette loi-là n'est pas encore en vigueur. Elle le sera éventuellement, donc vous pourrez enlever le document papier. J'aimerais que vous m'expliquiez, dans le monde papier actuel, quel est le principe de base sur la présomption de réception? Je reçois votre Visa Desjardins à tous les mois. Est-ce que, lorsque vous le mettez à la poste, il y a présomption que je le reçois? Expliquez-moi comment vous percevez les règles de l'art en la matière dans le domaine papier et comment on pourrait transposer les règles de l'art des pratiques commerciales dans le monde électronique. Ça, c'est un.

Deuxièmement, lorsqu'on fait référence à la notion de certification et d'homologation éventuelle de tiers certificateur qui certifierait des individus ou des personnes morales, l'identité de cette personne-là. Ce que nous avons à l'esprit, c'est qu'il y ait minimalement un lien de fait entre le registre d'état civil du Québec et un lien de fait avec le registre équivalent des personnes morales au ministère de l'Industrie et du Commerce, mais nous sommes prêts à reconnaître des tiers qui pourraient éventuellement donner une identification électronique, éventuellement une carte électronique, qui pourraient éventuellement l'utiliser. Et, à cet égard, je sais que vous avez démontré ? on en a discuté au forum de l'inforoute ? de l'intérêt à ce que vous soyez éventuellement un tiers certificateur.

n(12 heures)n

Alors, j'aimerais que vous me disiez, pour approfondir ça: Lorsque quelqu'un se présente chez vous pour ouvrir un compte ou lorsque vous reconnaissez, dans le monde actuel du papier, un individu qui ouvre un compte chez vous ou quelqu'un qui ouvre un compte de crédit, une entreprise qui vient chez vous pour faire des affaires, quelles sont les procédures de reconnaissance que vous avez? Est-ce que vous faites un lien avec nos registres? Et comment vous voyez la perspective que je vous ai décrite de reconnaître des tiers qui pourraient, à ce moment-là, certifier à la fois un individu et donner... Vous savez la perspective qu'on a, on en a discuté souvent au forum de l'inforoute avec M. Lemieux, d'avoir une carte éventuellement qui donnerait accès à l'ensemble des réseaux ouverts, au lieu qu'on se retrouve avec un trousseau de clés, avec une multitude de clés, que nous ayons une seule carte, avec une clé qui nous permette d'avoir accès à l'ensemble des réseaux ouverts. Alors, ce sont une première question plutôt technique et une deuxième peut-être plus large.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Morency.

M. Morency (Yves): Oui. Pour la question de la présomption de réception, je vais laisser Me Brun vous répondre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Me Brun.

M. Brun (Bernard): Merci, Mme la Présidente. Même si c'est technique, je vais évidemment répondre plutôt sous l'angle juridique. Au niveau de la transmission, les documents, actuellement, bon, ça va bien, évidemment, lorsque c'est remis en main propre, il n'y a pas vraiment de problématique; lorsque c'est la mise à la poste, il y a des présomptions qui existent lors de la mise à la poste.

Là, ce qu'on retrouve dans la loi, évidemment, on crée une nouvelle mécanique, parce qu'il y a tout le cheminement, il n'y a pas un organisme tiers, là, comme la Société canadienne des postes, qui se retrouve en chemin. Alors, on fait une présomption de transmission lors de l'envoi ? puis là, je le cite ? «lorsque le geste qui marque le début du parcours vers le destinataire est accompli.» Donc, on fait une présomption d'envoi, mais, ça, ce n'est pas la présomption de réception. Alors, pour la réception, là, vraiment, on introduit un concept supplémentaire, soit la notion d'intelligibilité. On dit: Pour qu'il soit présumé reçu, le document doit être intelligible. Et, à ce moment-là, bien, nous, on trouve que, pour qu'il y ait une présomption de réception, on ne devrait pas imposer à l'expéditeur de démontrer que le document est intelligible à la réception puisqu'il n'est pas vraiment en mesure de dire que, lors de la réception, ce document-là a été intelligible.

Nous, on recommande plutôt de créer la présomption, et, si la personne qui le reçoit, reçoit un document qui n'est pas intelligible pour une raison technologique quelconque, elle sera en mesure de démontrer, dire: Écoutez, le document que j'ai reçu, il n'est pas intelligible, je ne suis pas capable de le lire. Alors, ça, c'est le premier aspect.

Le deuxième volet, c'est-à-dire toute la question du cheminement aussi qu'on avait soulevé, c'est-à-dire qu'on demande également d'avoir un document qui peut indiquer sa provenance, son parcours, sa destination ou les date, heure, minute, seconde de son envoi et sa réception. Là, c'est une question purement technique, les gens plus dans le domaine technologique pourront nous le confirmer, à savoir que, justement, lorsque l'information transite sur un réseau public qui n'est pas fermé, c'est à peu près impossible de déterminer exactement quel a été le trajet emprunté ou chacun des routeurs. Et ce serait selon nous une erreur d'imposer ça à l'expéditeur pour qu'il puisse jouir d'une présomption d'envoi et de réception.

Alors, nous, ce qu'on en conclut, c'est que, mettons une présomption carrément de réception lorsque certains gestes ont été posés. Si le document n'est pas intelligible pour une raison quelconque, le récepteur, le destinataire, lui, va pouvoir s'y opposer et va avoir les éléments en main. Quant au cheminement, pour nous, le trajet emprunté, c'est une dimension qui est technologique qui risque d'embourber tout le processus légal et d'empêcher même l'utilisation de cette présomption-là.

M. Morency (Yves): Est-ce que ça vous va pour cette partie-là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, monsieur Morency.

M. Morency (Yves): Oui. Pour la question de la certification, je vais laisser M. Lemieux.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Lemieux.

M. Lemieux (Éric): Merci Mme la Présidente. M. le ministre, par rapport à votre question ? on a déjà eu l'occasion d'échanger au niveau des certificats ? nous autres, on est tout à fait ouverts à avoir par exemple un certificat à étages. Alors, on dit: Pour faire affaire avec le gouvernement, voici, il y a des exigences qui sont d'être reliés, d'avoir une certification avec l'IGIF ou avec le Directeur de l'état civil. Ça, on n'a pas de problème, mais, pour moi, c'est un lien avec le gouvernement.

Pour nous, lorsque quelqu'un devient un membre de Desjardins, un membre particulier, un membre entreprise, je ne vais pas vérifier, on ne va pas, à Desjardins, vérifier auprès de l'IGIF ou auprès du Directeur de l'état civil. Vous me direz: On demande une preuve qui peut peut-être venir ou avoir été au préalable certifiée par là, mais, pas nécessairement; ce n'est pas de la même façon. Pour nous, c'est une relation de membre et une relation de client. On n'emmène pas cette notion-là et on ne veut pas non plus l'imposer à nos membres particuliers ou membres entreprises. Par contre, évidemment, si, la personne, elle, dit: Si vous voulez, en plus, faire affaire avec le gouvernement, voici l'étape supplémentaire qu'on doit amener et si vous vous identifiez avec un registre d'état civil ou au niveau de l'Inspecteur général des institutions financières, ou de l'IGIF, on vous emmène cet élément supplémentaire là, moi, je suis très à l'aise. Mais ce que je dis: Ce n'est pas le genre d'information, le genre d'éléments qu'on devrait retrouver dans la loi.

Alors, aujourd'hui c'est parce qu'on vient par rapport à la loi. Puis, par rapport à la loi, il semble, il nous apparaît, nous, à Desjardins, que ce n'est pas à l'endroit où on devrait retrouver ce genre d'exigence là. Je ne pense pas nécessairement où on le retrouve mais ce dont on parle, c'est de clés publiques ou de façons qu'on peut gérer les clés. Et là, le risque, c'est d'avoir ? comment dire ? des contraintes qui vont nous empêcher d'aller à la vitesse qu'on veut. Donc, nous sommes très à l'aise avec l'esprit de la loi, mais, dans son application ou dans certains articles, ça devient beaucoup plus restrictif et nous avons une crainte de ne pas atteindre ce qu'on voulait atteindre mais que l'esprit général de la loi veut atteindre. Alors, c'est ça.

Puis là, bien, vous me posez des questions un petit peu plus précises par rapport à la certification et l'homologation. Bien là, c'est ce dont je vous ai un petit peu parlé mais, pour moi, c'est un dossier qui est comme en parallèle.

M. Cliche: C'est clair.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci M. Lemieux. M. le ministre, vous aviez terminé?

M. Cliche: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup Mme la Présidente. Alors, M. Morency, M. Lemieux, M. Cholette et Me Brun, merci pour la présentation du mémoire très fouillé, bien documenté, bien argumenté. Je l'ai lu avec grand plaisir.

J'ai noté que vous avez trouvé que le projet de loi, dans sa facture, était assez lourd, qu'il y a trop de considérations technologiques, qu'il réfère beaucoup à des termes trop spécifiques alors que la technologie ou les technologies de l'information sont en perpétuelle évolution. Vous avez d'ailleurs illustré ça avec le cas de l'État de l'Uttar en Inde qui a adopté une législation très restrictive qui était dépassée. On dit, dans ce domaine, notamment dans le domaine de ce logiciel, que, lorsqu'on invente un logiciel, il est déjà dépassé. Alors, ça nous donne une idée pour mesurer le temps technologique en fait dans lequel on vit.

n(12 h 10)n

Et vous avez exprimé le souhait qu'un projet de loi sur cette question-là pourrait se limiter à des principes d'ordre général qui pourraient mieux camper les enjeux. Vous trouvez que l'approche adoptée dans le projet de loi mène davantage vers l'incertitude que la création de la confiance qui est à la base justement du débat qu'on mène sur les transactions électroniques. Il faut donner confiance aux citoyens, il faut donner confiance aux entreprises pour qu'ils puissent effectuer des transactions en ligne en sécurité.

Vous avez également mentionné que, tel que libellé, le projet de loi pourrait même engendrer des coûts additionnels pour les entreprises. Ce sont des commentaires qui sont d'ailleurs partagés par d'autres groupes que nous avons entendus à ce jour. Et j'imagine que vous faites ces commentaires-là parce que vous avez le souci d'avoir une pièce de législation qui va aider le développement du commerce électronique et non le freiner.

J'ai trouvé intéressant que vous suggériez un titre au projet de loi. Vous êtes le seul groupe qui est allé jusque-là...

M. Morency (Yves): On a osé beaucoup, vous savez.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: Ha, ha, ha! Oui. On vous a fait travailler beaucoup. J'ai trouvé ça très intéressant en effet de parler de la reconnaissance de technologies de l'information, bien qu'hier on a entendu des groupes qui nous disaient que le concept de technologies de l'information était trop vaste, trop insécure dans le sens de sa validité dans le temps et que ça serait mieux de parler de documents électroniques. Je vous le soumets peut-être à votre réflexion.

Également, vous avez soulevé une question que j'ai abordée ce matin avec le groupe qui s'est présenté avant vous sur la référence au support papier, et vous souhaitez que ça puisse être élargi aux documents électroniques. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quels problèmes que ça vous pose actuellement, les dispositions législatives de la Loi sur la protection du consommateur, par rapport à cette question des factures et des cartes de crédit?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Morency.

M. Morency (Yves): Dans un premier temps, oui, je reprends les paroles que vous avez dites et qui se retrouvent dans notre commentaire. Mais je voudrais quand même préciser que, pour nous, il est de la plus haute importance que le gouvernement se penche sur cette question-là. Et je pense qu'il a fait un devoir louable qui mérite notre appui, mais également quand même, c'est dans l'optique où le ministre l'a déposé: que nous puissions faire des commentaires et travailler ensemble. Et dans ce sens-là, je pense que c'est très encourageant de le faire et c'est assez novateur également. Mais il reste un fait: qu'on devait vous faire part de ces commentaires-là à l'effet qu'on trouvait quand même qu'il pouvait y avoir place à amélioration, et je pense que c'est l'ouverture que le ministre a manifestée.

Pour ce qui est de votre question plus précise à l'égard des modifications à la loi de la protection du consommateur ? et je reviendrai sur la question des documents électroniques, Me Brun pourra compléter ? vous savez, pour nous qui oeuvrons dans ce domaine-là ? ça fait déjà quand même plusieurs années que nous y sommes ? on se bute régulièrement à ces questions de frein non voulus quand même, je vous dirais, dans la Loi de la protection du consommateur, et c'est la raison pour laquelle on dit: Écoutez, la loi devrait être adaptée à la situation présente et profiter de cette loi, ici, qu'on veut mettre de l'avant ou cet avant-projet de loi qui sera un projet de loi et une loi, pour corriger dès maintenant certains éléments qui se retrouvent dans la loi de p.c.

Alors, pour ce qui concerne toute la question des documents électroniques, support papier, je vais laisser Me Brun vous répondre.

M. Brun (Bernard): Merci. Tout simplement, par rapport aux documents électroniques, pour nous, on devrait garder un concept plus général, celui des technologies de l'information, tout simplement pour ne pas par contre être limitatif au niveau des documents électroniques. Si on regarde d'ailleurs dans la loi, on parle des documents, oui, mais, après ça, on va parler d'authentification, de certification. On ne sait pas nécessairement de quelle façon la technologie va évoluer à ce niveau-là. Et même on rentre dans certaines spécifications lorsqu'on parle des données biométriques par exemple. Alors jusqu'où ça va aller et est-ce qu'on doit se mettre tout de suite un carcan pour se limiter à «électronique» ou même à «informatique»? À notre avis, non. On devrait vraiment garder une avenue plus large, qui réfère aux technologies de l'information puisque c'est vraiment plus les technologies de l'information qu'on vise, c'est-à-dire la communication.

On voit que, dans le projet de loi, c'est tout le concept d'échanges, c'est-à-dire de reconnaissance de documents puis d'authentification et de consentement. Donc, vraiment, on fait appel à des technologies de l'information et non pas uniquement à la dimension électronique. Alors, on devrait garder cette dimension plus large.

M. Cholette (François): Je pourrais vous donner un exemple aussi avec...

Le Président (M. Kieffer): Oui, un instant, un instant. Me Cholette, allez-y.

M. Cholette (François): Oui. Avec la notion de documents technologiques, on est en train, chez nous, de penser à comment est-ce qu'on pourrait un peu révolutionner l'assurance. Puis on se demandait s'il ne serait pas possible, par exemple, de rencontrer un client et de compléter une transaction d'assurance puis de remettre au client, en partant, un cédérom avec sa police d'assurance qui est gravée sur le CD, la proposition d'assurance. On pourrait même enregistrer, quand les questions de nature médicale sont posées aux clients: Bon. Est-ce que vous avez souffert de telle maladie? Avez-vous consulté un médecin? on pourrait enregistrer les questions posées par le représentant et les réponses données par le client, et ça pourrait être gravé sur le CD. Puis, en s'en allant, on laisse le CD au client, s'il le désire, et ça constitue son contrat puis l'ensemble des documents de nature contractuelle.

Alors, c'est pour ça que, la loi, on est content qu'elle réfère à la reconnaissance des documents de nature technologique puis qu'on ne pense pas seulement au commerce électronique et au document électronique.

Le Président (M. Kieffer): Alors, c'est tout. Oui. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Vous avez aussi dans votre mémoire signalé que le gouvernement se donne trop de latitude, notamment en ce qui a trait aux renvois et règlements et les règles complémentaires, les normes, la création de comités, ce qui pourrait mettre en danger la flexibilité finalement qu'on recherche dans ce type de dossiers. Est-ce que vous pouvez élaborer davantage sur les inquiétudes que vous exprimez par rapport à ça?

Le Président (M. Kieffer): M. Morency.

M. Morency (Yves): Oui. À l'analyse même du document et les réflexions que nous partagions, nous nous sommes interrogés à un moment donné en disant: Est-ce que le législateur ou ceux qui ont conçu le projet de loi voulaient baliser les relations de transaction électronique ou de commerce ou de transfert des technologies entre le gouvernement et ses commettants ou les citoyens? Et là, quand même, on se disait: Bien, peut-être que ces normes-là, ces contraintes-là, peuvent servir correctement un gouvernement dans ses relations avec les citoyens parce qu'il veut davantage se baliser. Mais, par contre, on disait: D'un autre côté, si on veut faire une loi de nature générale, bien là, on trouvait quand même des contraintes de marché dans lequel on est, l'évolution de la technologie, et aussi par rapport aux besoins du consommateur.

Tout à l'heure, je vous signalais d'entrée de jeu que souvent les consommateurs ne comprennent pas, nos membres ne comprennent pas qu'on ne puisse pas, à l'ère technologique, aller plus loin, qu'il y a des freins. Bon. Après explication, ils viennent qu'à bien se résigner. Mais, à tout le moins, c'est souvent eux qui nous poussent à aller plus loin, eux aussi, quand même, s'il y a des problématiques au niveau de la confidentialité; bien, ceux-là sont les premiers à nous appeler puis à être inquiets. Et là il faut aussi les rassurer en leur disant que nos technologies sont à la fois à la fine pointe, sont sécures, fiables et respectueuses de la confidentialité. Mais il y a une dynamique là qu'on pense que la loi, telle que rédigée, pourrait freiner et je dis ça en même temps, pas strictement par rapport aux institutions québécoises ou mais par rapport à l'évolution de ce commerce-là.

Il ne faudrait pas que le Québec se ramasse en marge du commerce électronique puis, en même temps, c'est heureux qu'un projet de loi le fasse. Je veux bien qu'on se comprenne: ce n'est pas dans le sens de ne pas avoir de projet de loi, je pense qu'on n'en est pas là. Je pense que les objectifs du projet de loi sont sains, sont bons. C'est peut-être juste dans les modalités d'application. C'est un peu dans ce sens-là qu'on avait cette réflexion-là à l'égard... On était un peu incertain, alors on dit: Comme c'est un avant-projet de loi, bon, on va le soumettre puis on pourra en débattre par après.

Le Président (M. Kieffer): Me Cholette, vous aviez des éléments à ajouter.

M. Cholette (François): Un petit commentaire à faire. On se demandait, par ailleurs, si au lieu de procéder par le biais d'un règlement, il n'y aurait pas beaucoup plus de souplesse si on y allait par ligne directrice puis, bon, des comités qui se rencontrent puis l'industrie participe, on discute avec les intervenants du gouvernement puis on s'entend sur des choses, on fait des lignes directrices. Est-ce qu'on n'atteindrait pas la souplesse nécessaire avec ça? Parce que, un règlement, c'est toujours plus lourd, plus technique puis, pour le modifier, bien, c'est long puis ça prend des publications, des consultations publiques, etc., on rentre dans tout le processus législatif et réglementaire. Alors, est-ce qu'on ne pourrait pas se créer, dans ce domaine-là, des façons de fonctionner, bref, qui pourraient être plus souples? En tout cas, on soumet ça à votre considération.

Le Président (M. Kieffer): Me Brun.

M. Brun (Bernard): Juste un commentaire justement peut-être un peu plus technique. Au niveau de la réglementation ou du pouvoir réglementaire qu'on retrouve dans la loi, on le retrouve à plusieurs endroits, on le retrouve aux articles 11, 16, 20, 23, 27, 28, 57, 68. Alors, il y a beaucoup de pouvoir réglementaire et, en plus, il est disséminé un peu partout dans la loi tant par rapport aux procédés technologiques qui peuvent être déterminés dans un décret du gouvernement que certaines règles concernant la conservation du document, la consultation du document, le maintien de la fiabilité, des trucs sur la certification, enfin sur l'harmonisation des systèmes puis des normes. Alors, pour nous, évidemment, ça alourdit. Et évidemment, c'est dans le cadre de ces réflexions-là, même si ce n'était pas inscrit dans le mémoire, qu'on avait pensé peut-être justement que les lignes directrices seraient plus à même de servir de guides sans alourdir l'avant-projet de loi.

Tout ça finalement, ça revient un petit peu au commentaire général à savoir que, nous, on trouve que peut-être il y a trop de dimension technologique, mais c'est cette dimension-là, technologique, lorsqu'on rentre dans des détails techniques... le gouvernement se sent un petit peu coincé là-dedans et doit se donner plus de balises, des pouvoirs réglementaires. Et c'est pour ça qu'on dit: Restons plutôt dans des principes généraux en éliminant trop de considérations techniques et sans doute on va pouvoir éliminer beaucoup d'aspects réglementaires à ce niveau-là. On va simplifier puis c'est le consommateur ou l'individu qui va justement pouvoir en sortir gagnant.

n(12 h 20)n

Le Président (M. Kieffer): Dernière remarque, Me Cholette?

M. Cholette (François): Oui. Il y a un parallèle intéressant avec la Loi sur la protection sur les renseignements personnels dans le secteur privé où, par exemple, il y a un article général qui dit qu'une entreprise doit prendre et appliquer des mesures de sécurité propres à assurer la confidentialité des renseignements personnels qu'elle détient sur ses clients.

On a uniquement un principe général et, à partir de ça, la Commission d'accès à l'information a élaboré des guides très intéressants pour développer un petit peu plus sur ce qu'elle considère être des mesures de sécurité appropriées dépendamment des technologies puis, entre autres, un document qui a été produit pour toute la confidentialité des renseignements détenus sur support informatique. Alors, on a un exemple de norme générale avec laquelle on vit assez bien puis vous savez qu'une entreprise qui ne prendrait pas des moyens appropriés pour protéger les renseignements sur ses clients, bien, elle risque de se retrouver sur la place publique, des plaintes à la Commission d'accès à l'information, etc. Personne, on ne vise ça.

Alors, en matière de transactions électroniques, si on se met à dire: Bon, bien, voilà, pour que la sécurité soit assurée, il faut agir de telle façon, puis faire ceci, faire cela, bien là, il me semble qu'on se met dans un carcan alors que, si on a une norme générale puis, éventuellement, un organisme qui a des lignes directrices, des discussions, bien tout le monde on va pouvoir s'entendre. Puis, après ça, en cas de litige, un consommateur qui a été lésé ou quoi que ce soit va pouvoir porter plainte à quelque part, ou encore aller devant les tribunaux puis dire: Bien, écoutez, il y a une ligne directrice qui dit que, dans telle situation, on devrait normalement faire ceci, cela, cela, l'entreprise ne l'a pas respecté, donc, il y a faute, j'ai subi un dommage, bien vous devez payer. Puis là, c'est nos principes généraux de responsabilité civile qui s'appliquent. Mais vous voyez, il y a beaucoup plus de souplesse avec une façon de fonctionner comme celle-là.

Le Président (M. Kieffer): Je vous remercie. Je retourne maintenant la parole à la partie gouvernementale. M. le ministre.

M. Cliche: Bien, les questions que vous soulevez sont fondamentales parce qu'on en a amplement discuté puis, suite à cette commission, on va en rediscuter. En fait, ce qui est l'objectif, ça va être d'obtenir un bon équilibre. Lorsque vous dites qu'idéalement ce serait des lignes directrices, des pratiques déterminées par les gens du milieu, pour encadrer, y donner une saine pratique qui respecte nos lois, c'est l'objectif que l'on vise nous aussi. Et, aux articles 67 et 68 où on parle de l'harmonisation des systèmes et des normes, on parle de mettre en place un comité où vous serez éventuellement parce qu'on parle que ça ferait appel à des personnes possédant une expertise relative au domaine des technologies de l'information. Et l'objectif de ce comité-là, c'est de déterminer effectivement des pratiques qui portent sur l'ensemble des sujets couverts par les technologies de l'information, la compatibilité, l'interopérabilité, éviter la multiplication de procédures, favoriser une forme de standardisation, garantir la fiabilité des documents, établir des règles et des pratiques uniformes pour qu'il y ait harmonisation.

Ceci étant dit, ce qu'un vaste sondage auprès de la population québécoise qui date de l'an dernier nous a révélé, auprès de 2 000 Québécois et autant d'internautes, 90 % des internautes interviewés nous ont dit spontanément qu'ils voudraient que les lois d'application générale sur le territoire du Québec qui encadrent les transactions papier s'appliquent aux transactions électroniques.

Alors, la balance, c'est: Oui, faire appel à l'industrie, oui faire appel à des normes et des balises, que des comités où on aurait des représentants de l'industrie et possiblement du gouvernement se mettent ensemble pour déterminer, oui, en principe, mais on a également une responsabilité de législateur. C'est pour ça que le pouvoir réglementaire est toujours un pouvoir résiduel, qu'on s'est gardé.

Alors, ce dont je discutais avec mes gens ce matin, puis je vous entends, je suis en réflexion aussi là-dessus: Est-ce qu'il est possible de baliser l'espèce de contexte qui ferait en sorte qu'à un certain moment donné le gouvernement passerait à une étape réglementaire, jugeant que les lignes directrices ou que l'élaboration, par consensus, de lignes directrices avec des adhésions spontanées de l'entreprise n'a pas été suffisante pour protéger soit les consommateurs soit les individus dans leur protection de renseignements privés? Voyez-vous, c'est ça, tout l'équilibre, que l'on vise et qu'on aura l'occasion de rediscuter, j'imagine, au niveau du projet de loi. Mais je veux juste que vous compreniez ça, là.

Alors, on a une responsabilité par rapport aux citoyens qui nous disent, à 95 %: On veut que les lois d'application générale s'appliquent aux transactions électroniques. Et lorsqu'on leur demande, sans relance: À quelle loi pensez-vous? bien, 75 % des répondants de ce vaste sondage scientifique, 2 000 répondants disent: La loi qui protège nos renseignements personnels. Alors, une loi qui spontanément, dans la population, a une notoriété de 75 %, ça veut dire que c'est une loi à laquelle tout le monde tient. Alors, voyez-vous, je veux juste que vous compreniez, nous, qu'est-ce qui nous préoccupe, nous motive.

Le Président (M. Kieffer): M. Morency, vos commentaires.

M. Morency (Yves): Je pense, M. le ministre, que votre terme est juste quand vous parlez d'équilibre entre tous ces éléments-là. On a la même problématique au niveau des lois qui nous gouvernent comme institution financière, autant la Loi sur les coopératives de services financiers, qui a été adoptée dernièrement et dans laquelle on retrouve ces éléments-là d'autoréglementation, de normes, de règlements, mais aussi de lignes directrices. Alors, je pense qu'on en est là.

C'est un petit peu aussi le message qu'on voulait vous laisser, puis on ne l'a pas exprimé aussi bien que vous l'avez exprimé ? on s'en excuse ? mais je pense que vous avez un terme juste, c'est l'équilibre qu'il faut obtenir, tout en balisant, en faisant en sorte quand même qu'on n'est pas contraint indûment et que le Québec entre autres, les citoyens au premier chef puissent bénéficier largement des nouvelles technologies, des nouvelles façons de faire tout en ayant à l'esprit qu'à la fois le gouvernement et l'industrie protègent correctement ces informations.

Et c'est pour ça que je vous disais aussi: Pour nous, la relation de confiance entre l'utilisateur de nos services financiers, que ce soit quand il va au comptoir, dans un guichet automatique ou par commerce électronique, c'est la fiabilité qu'il demande et la protection de ses renseignements. Et ce lien de confiance là est à la base même de notre industrie. Aussitôt que le lien de confiance disparaîtrait, du jour au lendemain, c'est fini, là, hein, que ce soit ? même Desjardins, si important soit-il ? Banque Nationale, Banque Royale, on vient de briser l'élément majeur qu'une personne peut avoir avec son institution financière.

Le Président (M. Kieffer): Soyez rassuré, M. Morency. Vous vous exprimez très bien et tous les membres de la commission comprennent très bien vos propos. Sur ce, est-ce que... Il y avait le député de Gaspé... il vous reste quand même suffisamment de temps. Est-ce que vous voulez laisser la parole au député de Gaspé?

Une voix: Oui...

Le Président (M. Kieffer): Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Je dénote, dans votre document de présentation, vos observations, qu'il a deux ordres de remarques: une qui s'adresse à l'accessibilité puis à la transmission des renseignements nominatifs ou des renseignements personnels, des renseignements à l'usage de l'entreprise, et, d'autre part, le commerce en tant que tel.

Lorsque vous faites référence, dans votre mémoire, à la page 8, que le défi se trouve ? à l'établissement qu'un consentement ait été transmis ? sur le deuxième paragraphe, là, 2.4, vous nous donnez une série d'exemples, par la suite. Vous faites référence à de la réglementation, à une signature, etc., ou encore à des clés pour avoir accès à des systèmes. Moi, j'aimerais bien qu'on distingue les deux, parce que ce qu'une entreprise peut détenir comme renseignements nominatifs à l'égard d'une personne et à l'égard de laquelle elle a une autorisation de transmettre à d'autres entreprises, il n'y a aucune assurance que ces documents-là ne seront pas éventuellement transmis à d'autres entreprises.

n(12 h 30)n

C'est pour ça, tout à l'heure, quand je vous entendais parler du cédérom puis de la possibilité, au niveau des assurances, par exemple, de conclure un contrat par cédérom, ça amène une dimension très large en ce qui a trait, par exemple, à toute l'interprétation des questions et des réponses qui sont posées, comme on la retrouve dans la vie de tous les jours, lorsque, par exemple, un client se présente chez Desjardins, va signer un contrat d'emprunt et, par la suite, on va contracter une assurance, on pose une série de questions. Et la jurisprudence l'a démontré à quelques reprises, en tout cas, dans l'ensemble des entreprises qui font ce type de contrats, qu'il peut y avoir aussi des aspects qui sont passés très rapidement. Donc, il y a eu des cas d'annulation de contrat ou de tentative d'annulation de contrat d'assurance.

Moi, ce que je veux voir, c'est que, quand vous dites: On ne veut pas de contraintes puis on ne veut pas que ce soit trop balisé, c'est que... Par exemple, à 2.5, page 9, quand vous disiez tout à l'heure qu'il faut enlever la capacité d'établir la provenance, le parcours, etc., la destination du document, parce que ça va restreindre ou ça va freiner l'évolution du commerce ou des choses du genre, j'ai l'impression que je comprends deux ordres de pensée dans le même document: le commerce et l'échange de documents en ce qui a trait aux renseignements nominatifs ou autres si vous faites affaire avec l'État ou si vous faites affaire avec d'autres entreprises. J'aimerais bien vous entendre là-dessus pour voir quelle serait la solution, parce que vous dites: Il y a suffisamment de normes actuellement pour encadrer tout ça. Alors, comment on va mettre ça en application pour assurer la protection du consommateur? D'autre part, il va rester toujours des gens qui n'auront pas de système Internet, qui vont faire affaire avec des services qui vont se spécialiser. Par exemple, moi, je me rends dans une boutique et je peux utiliser un ordinateur. Il y a des cafés Internet, on peut aller dans des restaurants maintenant ou dans des cafés puis travailler, où, avec nos mots de passe, on fonctionne sur Internet, on fait des transactions. Alors, c'est tout ça. Puis quelle est la sécurité du consommateur là-dedans?

Le Président (M. Kieffer): Je vous avise, M. Morency, qu'il vous reste à peu près trois minutes.

M. Morency (Yves): Alors, je vais tenter de répondre, au début, à votre question, puis peut-être que, François, tu compléteras. Ce que je veux vous dire aussi, c'est que, quand on vous dit ici de limiter la question des contraintes, des normes, ce n'est pas en même temps faire abstraction de tout ce qui existe dans d'autres lois comme le Code civil, la protection de la vie privée ou la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ce n'est pas dans ce sens-là; ce n'est pas une ouverture tous azimuts à laisser faire à tout le monde qu'est-ce qu'il veut, ce n'est pas dans ce sens-là. C'est de faire en sorte d'assurer ? encore là, je reprends le terme, que je trouve intéressant ? l'équilibre interne de la loi, mais l'équilibre aussi de la loi avec tout ce qui existe déjà et qu'on est quand même contraint d'observer.

Dans le domaine de la distribution des produits et services financiers, ça nous prend un avis de consentement du membre. S'il y a des informations sur ses habitudes de vie... ou encore, nos dossiers médicaux, on doit les tenir dans des fichiers séparés. Alors, ça ne veut pas dire qu'on fait fi de tout ça. Alors, c'est quand même pour faire en sorte que la loi ne prévienne pas la progression et tout ce qu'on peut développer en termes de commerce électronique ou de transactions électroniques. Donc, c'est un peu ça, quand même, notre idée. On peut paraître à la fois, je vous dirais, contradictoire, mais, si on l'exprime de façon beaucoup plus générale, c'est cet équilibre-là aussi qu'on cherche, et on ne fait pas fi, quand même, de ce qui existe déjà. Je ne sais pas si, François, tu veux...

Le Président (M. Kieffer): Me Cholette. Il vous reste une minute et quelques secondes.

M. Cholette (François): Je pense que la réponse de M. Morency est assez complète en ce qui me concerne, mais ce n'est pas moi qui ai posé la question. Ha, ha, ha! Alors, je ne sais pas si...

M. Lelièvre: Bien moi, c'est parce que...

Le Président (M. Kieffer): M. le député de Gaspé, il vous reste 50 secondes, et j'y tiens.

M. Lelièvre: Oui, merci, M. le Président. Je comprends votre réponse, vous y allez de façon générale. Mais comment assurer la protection du consommateur? D'une part, je vous disais tout à l'heure que vous faites des affaires avec le commerce électronique et, d'autre part, vous parlez également des renseignements nominatifs et d'accessibilité à l'information. Alors, j'aimerais bien qu'on distingue les deux dans vos... et c'est ça que j'ai de la difficulté à faire, au niveau transactionnel.

M. Cholette (François): Pour moi, la loi sur le...

Le Président (M. Kieffer): Me Cholette.

M. Cholette (François): Oui. Pour moi, l'avant-projet de loi, c'est simplement qu'on vise à faciliter, dans le respect de toute la législation existante, une forme de commerce, qui est le commerce électronique, par rapport au commerce sur des supports plus traditionnels, qu'ils soient papier ou quoi que ce soit, mais le commerce électronique s'insère dans un ensemble législatif où on a toute une série de règles à respecter: la Loi de protection des renseignements personnels ? alors, ça nous prend des consentements, il faut prendre des mesures de sécurité pour protéger la confidentialité des renseignements ? Loi de distribution, etc. Il va falloir qu'on respecte tout ça, même si c'est sur support électronique.

Le Président (M. Kieffer): Sur ce, je vous remercie, Me Cholette. Je repasse maintenant la parole à l'opposition officielle. Mme la députée.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Dans votre mémoire, vous avez abordé beaucoup la définition des termes, parce qu'on sait très bien que, dans ce domaine et dans bien d'autres, d'ailleurs, la sémantique n'est pas très neutre.

Notamment à la page 6, vous avez soulevé la question de la notion de fiabilité des documents versus l'intégrité d'un document et vous avez dit à juste titre que, dans la section de preuve, dans le Code civil, c'est la notion d'intégrité qui prévaut, n'est-ce pas, et cette notion-là est déjà établie, elle est beaucoup plus claire que la question de la fiabilité. J'aimerais que vous puissiez élaborer là-dessus pour nous expliquer qu'est-ce que vous inquiète par rapport à cette notion de fiabilité.

Également, vous avez questionné la notion de «document technique», qui n'est pas définie dans la loi. C'est vrai, ça, j'ai remarqué que «document technique» en tant que tel... ? on parle de «document électronique», mais de «document technique» aussi ? ça, vous avez fait remarquer qu'on n'avait pas une définition claire là-dessus.

Et, à la page 7 de votre mémoire, vous soulevez la question de la réception du document, qui est une notion très importante, et vous questionnez le fait que ça soit l'expéditeur qui porte le fardeau de la preuve que le document a été reçu dans son intégralité. Donc, vous allez jusqu'à dire que ça pourrait ouvrir la voie à des litiges. J'aimerais que vous puissiez nous élaborer un peu là-dessus, parce que c'est une problématique très réelle et très importante, et, comme législateurs, on est évidemment préoccupés de la protection des droits de consommateurs. Alors, la notion que vous nous apportez, comment va-t-elle affecter la protection des droits des consommateurs?

Le Président (M. Kieffer): Me Brun, vous avez trois minutes. Vous n'êtes pas obligé de les prendre. Ha, ha, ha!

M. Brun (Bernard): Ha, ha, ha! Merci bien.

Une voix: Une minute.

M. Brun (Bernard): Au niveau des définitions en général, c'est parce que, évidemment, dans une loi, surtout, qui porte sur des nouvelles technologies, de la même façon qu'on dit: Il faut faire attention de ne pas être trop descriptif dans les technologies, de la même façon, dans les définitions, il faut vraiment y aller prudemment, c'est-à-dire non pas être purement énonciatif ou limitatif. Alors, plus on met de définitions, plus on risque, encore une fois, de se donner un carcan trop sévère et trop défini.

Si on y va plus précisément au niveau du document, notamment, lorsqu'on parlait de la définition de «document», pour nous, c'était une définition qui, somme toute, était très large, mais qui ne réussissait pas nécessairement à cerner tout ce que pourrait être un document malgré tout. Et, après étude des autres différents projets de loi dans les autres juridictions canadiennes, même internationales, on constate que ces termes-là ne sont finalement pas définis. Alors, à tout le moins, il faudrait être plus prudent dans la définition du document ou, sinon, en faire abstraction. Donc, le document technologique, c'est la même chose, on arrive avec une définition et, en plus, on ajoute un autre élément, les documents technologiques. Alors, on vient préciser ou on vient ajouter un élément supplémentaire à une définition, et ça peut être délicat. Quant au concept de fiabilité, que vous avez soulevé, c'est tout simplement...

Mme Houda-Pepin: Que vous avez soulevé. Ha, ha, ha!

M. Brun (Bernard): Oui, que nous avons soulevé dans notre mémoire, merci. Si on regarde la fiabilité, de la façon dont elle est définie dans le projet de loi, la fiabilité, c'est l'intégrité qui est maintenue tout au cours du cycle de vie. Donc, finalement, si le document, son intégrité a été maintenue tout le temps, il est fiable. Eh bien, nous, on soulève certaines interrogations ou on a des inquiétudes par rapport au fait de, justement, ajouter des concepts supplémentaires alors que des concepts comme l'intégrité se retrouvent déjà dans notre loi générale. Pourquoi dire que l'intégrité en tout temps, c'est la fiabilité, puis, après ça, dire, la fiabilité, qu'est-ce que c'est et établir des normes? Pour nous, c'est ajouter des concepts; peut-être dans le but, un petit peu, d'alléger le texte, mais on finit par l'embourber de nouvelles notions qui risquent de confondre, justement, le citoyen.

n(12 h 40)n

Puis, peut-être, le dernier point, vous parliez de la question de réception ou d'expédition. On l'a abordée en premier lieu à la réponse du ministre. La question d'expédition ou de réception se retrouve à l'article 33 de la loi. Ce qu'on retrouve dans cet article, c'est une présomption de transmission et, en même temps, une présomption de réception. Nous, ce qu'on dit, c'est: Mettons une seule présomption, celle de réception. La personne qui envoie n'est pas en mesure de dire si le document est intelligible à l'autre bout. Alors, qu'on établisse la présomption de réception: Lorsque le document a été envoyé, une série de gestes ont été posés. Si le destinataire à l'autre bout n'en est pas satisfait ou le document n'est pas intelligible, il sera en mesure, lui, de venir rétablir les faits en disant: Ce document-là, il n'a jamais été reçu, ou: Il n'est pas intelligible.

Le Président (M. Kieffer): Sur ce, le temps imparti aux deux partis étant écoulé, je vous remercie, messieurs. Je suspends les travaux et j'ajourne jusqu'à demain 14 heures en cette même salle.

(Fin de la séance à 12 h 41)



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