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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 25 mai 1999 - Vol. 36 N° 18

Interpellation : Le développement de l'emploi et de la main-d'oeuvre


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Table des matières

Journal des débats


(Dix heures)

Le Président (M. Geoffrion): Bienvenue, Mme la ministre, Mmes les députées, M. le député. Donc, le mandat de la commission pour cette séance est de procéder à l'interpellation adressée à Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi et ministre responsable de l'Emploi par le député de Robert-Baldwin sur le sujet suivant: Le développement de l'emploi et de la main-d'oeuvre.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Côté (La Peltrie) remplace M. Bédard (Chicoutimi) et Mme Beauchamp (Sauvé) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion).

Le Président (M. Geoffrion): Merci. Alors, je me permets de vous rappeler brièvement les règles de déroulement d'une séance d'interpellation. Dans un premier temps, l'interpellant, M. le député de Robert-Baldwin, aura un temps de parole de 10 minutes, suivi de Mme la ministre, pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante: un député de l'opposition officielle, Mme la ministre, un député du groupe ministériel. Vingt minutes avant midi, soit la fin de cette séance, j'accorderai 10 minutes de conclusions à Mme la ministre et un temps de réplique égal à M. le député de Robert-Baldwin. De plus, si un intervenant n'utilise pas entièrement le temps qui lui est alloué, ceci évidemment ne réduit pas pour autant la durée de l'interpellation. Donc, M. le député de Robert-Baldwin, votre temps de parole de 10 minutes commence.


Exposé du sujet


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie bien, M. le Président. Remercier vous, mais aussi remercier tous ceux qui participent à cette interpellation ce matin; en plus de la ministre, je vois plusieurs hauts fonctionnaires, membres de cabinets, des recherchistes, alors je voudrais remercier tous ces gens. Je voudrais aussi rappeler pourquoi nous avons demandé une interpellation à ce moment-ci. La raison est bien simple: nous trouvons, nous, notre formation politique, la formation libérale, qu'il y a de sérieuses difficultés dans tout le dossier du transfert de la main-d'oeuvre, transfert du gouvernement fédéral au gouvernement du Québec.

Et je voudrais rappeler cette rare unanimité que nous avons eue ici même, en cette Chambre: tous les députés, nous avons été d'accord pour qu'on puisse reprendre ou exercer les droits de gestion de la main-d'oeuvre au Québec. Alors, c'était une rare unanimité, et nos attentes, suite à cette entente fédérale-provinciale, étaient à l'effet que le gouvernement du Québec devrait être en mesure de bien gérer ce transfert de la main-d'oeuvre.

Le résultat est tout autre. Pourquoi le gouvernement du Parti québécois... Parce que je voulais faire la spécification, là. Ce n'est pas le Québec qui n'est pas capable, c'est le gouvernement du Parti québécois qui a de sérieuses difficultés à gérer cette entente. Mais on connaît un peu la philosophie ou la doctrine péquiste: c'est toujours l'État qui doit se mêler de tout, philosophie interventionniste, gouvernement de structures. Et, M. le Président, je pense que c'est là peut-être une des raisons fondamentales pourquoi nous avons de sérieuses difficultés à gérer cette entente maintenant.

Beaucoup de questions ont été posées et demeurent toujours sans réponses. La première, c'était de retrouver sous le même toit deux missions: une concernant l'assurance-emploi, l'autre concernant la sécurité du revenu. On a essayé de faire un guichet unique avec ces deux missions et on a des difficultés sérieuses et certaines.

Autre question sans réponse: Pourquoi le Québec a-t-il diminué ses subventions au moment même où le gouvernement fédéral les a augmentées? C'est un peu comme si le fédéral ajoutait des ressources dans le dossier du transfert de la main-d'oeuvre et que le Québec en profitait pour se retirer. Alors, il y a des interrogations extrêmement importantes pour lesquelles nous sommes toujours sans réponses, M. le Président.

Autre question importante pour nous, c'est: Les cibles, ou les objectifs si vous permettez, qui sont prévues à l'entente ont été modifiées en cours de route. Alors, pourquoi est-ce qu'elles ont été modifiées, bien, évidemment, modifiées dans le sens de bien faire paraître le gouvernement? Alors, là aussi, on a de sérieuses difficultés, M. le Président.

Autre question qui concerne davantage les bénéficiaires de la sécurité du revenu, les assistés sociaux – et ma collègue la députée pourra en parler davantage – mais c'est: Pourquoi la chute du nombre de bénéficiaires de l'aide sociale qui sont inscrits aux mesures d'employabilité? Alors, c'était 17 % en octobre dernier, 22 % l'année précédente. Comment ça se fait, ça, tout à coup, que les gens ne peuvent pas en bénéficier davantage?

Autre question: les organisations sans but lucratif. Et je rappelle à la ministre que, dans sa vie précédente, elle était très sensible aux organisations communautaires, aux organisations sans but lucratif. Alors, pourquoi est-ce que ces organisations sans but lucratif éprouvent toutes sortes de difficultés à obtenir leur budget? On sait que l'année financière a commencé le 1er avril dernier et l'ensemble, la majorité de ces organisations n'ont pas encore leur budget finalisé.

M. le Président, d'autres questions: Pourquoi tant de structures à Emploi-Québec? Pourquoi est-ce que c'est la ministre qui dirige Emploi-Québec, alors qu'on sait que nous avons une commission des partenaires du marché du travail?

Et je n'ai qu'à rappeler le malheureux incident, on peut dire, soit du congédiement, ou soit prise forcée d'une retraite, ou fin du contrat, ce n'est pas tellement sur le terme mais davantage sur: Comment ça se fait que c'est la ministre qui décide de ça? Pourquoi Mme Diane Bellemare a-t-elle perdu son emploi alors que les partenaires – par définition un partenaire, c'est un associé – n'ont pas du tout été consultés?

Et enfin, M. le Président, il y va de la crédibilité et de la réputation du gouvernement du Québec. Alors, pourquoi le gouvernement du Parti québécois nous fait-il perdre notre crédibilité dans ce dossier? Qu'est-ce qu'on fait de la réputation du Québec? On sait qu'il y aura d'autres ententes à être négociées. On n'a qu'à penser aux bourses du millénaire et sûrement à d'autres en devenir. Si on n'est pas capable de vraiment gérer, si le gouvernement du Parti québécois n'est pas capable de gérer une entente, que va-t-il arriver des autres ententes?

Et vous pourrez me dire – c'est toujours l'argument facile – bien, ça, c'est parce que c'est un discours partisan. Mais ce n'est pas seulement les libéraux ou les députés qui disent cela, M. le Président. On n'a qu'à regarder récemment différents articles qui ont été publiés dans les journaux.

Je prends celui assez récent de M. Vastel, au milieu de mai, le 12 mai dernier, qui dit: «En Outaouais, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, dans la région Chaudière-Appalaches ou en Abitibi, et même à Montréal, une marmite s'apprête à sauter. Ce qui se murmure un peu partout et dont on débattra bientôt publiquement procède d'un constat navrant: le Québec ne mérite pas la confiance que lui a fait le Canada en lui transférant la mise en oeuvre des mesures actives d'emploi financées à même le compte d'assurance-emploi.»

Alors, ce n'est pas un député de l'opposition qui avance cela, c'est aussi plusieurs journalistes et éditorialistes chevronnés qui, au cours des derniers mois, ont fait largement état des difficultés de la gestion de cette entente. M. Vastel du journal Le Soleil poursuit en disant: «Comment demander au gouvernement fédéral de faire preuve de souplesse et de transférer au Québec d'autres responsabilités après la pagaille qui a présidé au transfert de 1 084 employés du ministère fédéral du Développement des ressources humaines au ministère provincial de l'Emploi et de la Solidarité?»

Alors, M. le Président, c'est navrant de voir le spectacle auquel on assiste aujourd'hui. Et il termine son article en disant: «Si le transfert d'un petit service de 560 000 000 $ et d'un millier de fonctionnaires s'avère aussi laborieux, comment fera-t-on, le lendemain du grand soir référendaire [...]? Pour le moment, la crédibilité du Québec en a pris un sérieux coup, surtout dans les régions... Là où le Parti québécois prétend pourtant gagner son prochain référendum...»

(10 h 10)

M. le Président, je pense qu'il existe au Québec un autre consensus. Il y en a eu un lorsque nous avons voulu obtenir du gouvernement fédéral, et avec succès, ce transfert de la main-d'oeuvre. Maintenant, il y a un autre consensus, et c'est celui de dire que c'est un gâchis, que c'est un cafouillage, cette gestion du transfert de la main-d'oeuvre. Et la difficulté que nous avons est vraiment la réaction de la ministre dans le dossier, où, dans une lettre qu'elle adressait à La Presse : «Emploi-Québec, des premiers résultats très prometteurs»... Et c'est la ministre, là, qui défend son dossier. Puis ça me rappelle tellement, dans le terme précédent, le ministre de la Santé, le député de Charlesbourg, qui disait que tout allait bien, que c'était formidable, la santé, au Québec; vous voyez les résultats qu'on a aujourd'hui. J'ai l'impression que les mêmes stratèges du député de Charlesbourg sont rendus avec la ministre de l'Emploi et lui suggèrent la même mauvaise stratégie.

Alors, M. le Président, j'aimerais surtout demander à la ministre, si elle a l'intention de redresser la situation, de redonner au Québec la crédibilité à laquelle nous avons droit, crédibilité que nous avons bâtie au fil des ans, les syndicats, les patrons, la population en général, les organismes communautaires en particulier, tous les groupes, même tous les députés, la députation complète de l'Assemblée nationale; cette rare unanimité, on aimerait ça la retrouver et faire en sorte qu'on pourrait vraiment mieux gérer cette entente de décentralisation.

Je vois que le temps achève, M. le Président, et j'aimerais, comme première question, demander à la ministre, si elle a l'intention de redresser la situation, quels seront les moyens qu'elle a sous sa gouverne qu'elle veut mettre en place pour donner un sérieux coup de barre à tout le dossier de transfert de la main-d'oeuvre et d'en faire ce qui aurait dû être une priorité, sinon la priorité importante du gouvernement du Parti québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, M. le député. Mme la ministre, vous avez un temps de parole de 10 minutes.


Réponse de la ministre


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, merci. Alors, je salue les collèges qui sont ici et je leur signifie qu'au cours des deux prochaines heures je vais, avec mes collègues députés, situer les véritables enjeux de cette réorganisation des services publics d'emploi et départager parmi les critiques ce qui constitue les véritables défis et ce qui relève de la démagogie. Alors, pour moi, c'est une interpellation importante, et je dirais même que j'y participe avec un certain enthousiasme.

Une première évidence qu'il m'apparaît important de rappeler, c'est que, dans cet univers économique en profonde effervescence, dans un marché du travail perturbé, à l'échelle québécoise mais aussi à l'échelle de la planète – on est donc dans un contexte de mutation continuelle – les besoins d'adaptation de la main-d'oeuvre sont colossaux. C'est vrai pour les travailleurs en emploi qui doivent s'adapter à des changements constants. C'est aussi vrai pour les chercheurs d'emploi à qui le marché du travail pose des exigences de plus en plus élevées pour accéder à l'emploi.

Dans un tel contexte, M. le Président, les budgets des gouvernements ne seront jamais suffisants. Et j'invite le député de l'opposition à ne pas défoncer une porte déjà ouverte. Je suis d'accord avec vous, il n'y a pas suffisamment d'argent pour répondre à toutes les demandes, pour satisfaire tous les besoins, pour souscrire à toutes les sollicitations, et cette vérité vaut pour l'emploi, comme elle vaut pour la santé, pour l'éducation, l'environnement et toutes les missions de l'État. On disposerait de plusieurs autres milliards de dollars par année qu'il resterait encore des besoins à satisfaire.

La deuxième évidence que je voudrais porter à votre attention, c'est la portée somme toute limitée de l'entente Canada-Québec relative au marché du travail. Évidemment, à entendre le représentant de l'opposition, on a un peu l'impression que le gouvernement fédéral aurait donné au Québec, par cette entente, les moyens de régler tous les problèmes de la main-d'oeuvre et que, si nous n'y parvenons pas, ce serait donc la faute des péquistes à qui on l'attribuerait. La réalité est tout autre. L'entente Canada-Québec constitue véritablement un déblocage majeur dans le domaine de la main-d'oeuvre et de l'emploi, et je ne veux pas en minimiser la portée, mais – et dis bien mais – les crédits qui nous sont transférés de la caisse d'assurance-emploi et qui sont gérés par Emploi-Québec depuis un an ne peuvent servir qu'aux chômeurs de courte durée.

Et ces budgets fédéraux, qu'on présente dans certains milieux comme d'une grande générosité, ils sont en réalité plus faibles que ce que le gouvernement fédéral investissait il y a 15 ans au Québec. Quand on regarde, par exemple, à l'année 1984-1985, on constate que le gouvernement fédéral consacrait 274 000 000 $ en formation des chômeurs, des assistés sociaux et des personnes en emploi, auxquels s'ajoutaient 309 000 000 $ pour la création d'emplois à l'intention des chômeurs de toute catégorie. C'est donc, pour l'année 1984-1985, un investissement total de 583 000 000 $ en budget d'intervention de la part du gouvernement fédéral. Or, l'an dernier, 15 ans plus tard, le gouvernement fédéral a transféré au Québec un budget d'intervention de 525 000 000 $, soit 58 000 000 $ de moins qu'il y a 15 ans.

Alors, c'est important de le rappeler, d'autant plus que, depuis cette dernière quinzaine d'années, les besoins des personnes sans emploi ainsi que de celles qui sont en emploi se sont considérablement accrus sous l'effet de la mondialisation de l'économie. Alors, lorsqu'on laisse croire que le gouvernement fédéral investit massivement dans la main-d'oeuvre et l'emploi, ce n'est pas juste, de faire cette affirmation sans nuances.

Il faut donc en déduire que le gouvernement du Québec doit défrayer seul les mesures actives d'aide à la formation et à l'emploi offertes aux prestataires de la sécurité du revenu qui n'ont pu se rendre admissibles à l'assurance-emploi. Et, pour ce, nous n'avons eu aucun sou pour favoriser le retour au travail de ces milliers de personnes qui ne sont ni prestataires de la sécurité du revenu ni prestataires de l'assurance-emploi et qui aspirent à intégrer le marché du travail.

Le gouvernement du Québec doit aussi financer seul le développement des services aux entreprises à Emploi-Québec, la participation des travailleurs et des travailleuses à des activités de formation et de recyclage, au-delà de ce que les entreprises investissent elles-mêmes pour former leur main-d'oeuvre. Oui, il manque d'argent, mais on pourrait au moins convenir que les responsabilités sont partagées.

Je termine aussi en modulant, en modérant un peu cette contribution fédérale, en soulignant que les effets des réformes successives apportées au régime d'assurance-emploi au cours des dernières années sont très présents. Tout le monde sait que les critères pour accéder à l'assurance-emploi sont beaucoup plus restrictifs. En 1989, 94 % des personnes sans emploi touchaient des prestations d'assurance-emploi; en 1997, ce ne sont que 50 % des chômeurs qui ont accès à l'assurance-emploi. Un travailleur sur deux n'y a pas droit et, dans une forte proportion, ce travailleur sur deux est exclu de l'assurance-emploi et n'a pas plus droit à des mesures actives qui sont financées par la caisse d'assurance-emploi.

Alors, on voit donc ici l'effet domino extrêmement important. Il faut aussi se rappeler que le resserrement de ces critères crée une situation encore plus grave pour les jeunes. Alors qu'en 1997 24 % seulement des jeunes réussissent à se rendre admissibles à l'assurance-emploi, ils étaient 78 % il y a une bonne dizaine d'années qui avaient accès à l'assurance-emploi.

Alors, on peut bien reprocher au gouvernement du Québec un certain nombre de choses, mais il ne faudrait quand même pas se tromper de cible. Vous savez comme moi que le régime d'assurance-emploi cause des problèmes énormes à des milliers de travailleurs québécois. Vous connaissez les conditions que pose le gouvernement fédéral quant à l'admissibilité au financement des programmes d'assurance-emploi, alors il faut faire ici la part des choses.

L'autre élément que je voudrais aborder, c'est un peu dissiper cette impression que laisse planer l'opposition au sujet des services offerts aux prestataires de la sécurité du revenu. Alors, malgré les limites imposées par cette entente, il reste que, l'an dernier, nous avons rejoint plus de 97 000 prestataires de la sécurité du revenu qui ont participé à une mesure active d'Emploi-Québec. C'est une performance tout à fait honorable. L'an dernier, donc, 56 % de l'ensemble des participants aux mesures étaient des prestataires de la sécurité du revenu. Alors, je pense qu'il faut arrêter de répandre l'idée qu'Emploi-Québec ferme la porte aux prestataires de la sécurité du revenu. Ils sont traités comme les autres chômeurs.

Je voudrais également, pendant les minutes qu'il me reste, peut-être préciser un certain nombre de choses. D'abord, revenir un peu sur cette idée que, oui, il y a quand même plusieurs millions de dollars qui sont affectés aux mesures d'emploi. S'il y en avait plus, on en ferait plus, c'est bien évident, mais il nous faut être très vigilants et très performants dans nos manières de décerner ou d'accorder des mesures d'emploi. Prenons l'exemple des activités de formation. Il faut comprendre que ce n'est pas parce que les gens disent «je voudrais avoir accès à telle formation» qu'on y adhère automatiquement. Il faut que ces activités de formation s'inscrivent dans un processus et dans un parcours, il faut que ça ait un sens.

Et on s'est rendu compte à l'usage, suite à certaines études d'évaluation, qu'une bonne portion des prestataires qui participent à des activités de formation abandonnent ou subissent des échecs, d'où l'importance de bien sélectionner les personnes, de les référer à la mesure qui répond davantage à leurs besoins, qui tient compte le mieux possible de leurs possibilités, de leurs aptitudes et aussi des besoins du marché du travail. En ce sens-là, Emploi-Québec a développé un mécanisme de repérage qui permet de bien identifier les personnes qui ont réellement besoin d'une mesure active de longue durée, et il faut mettre en place ce type de mécanisme pour pouvoir bien identifier la bonne mesure pour la bonne personne, et on doit en arriver à ce niveau de raffinement.

(10 h 20)

En conclusion, je dirais que jamais je n'ai prétendu qu'Emploi-Québec était une organisation parfaitement rodée. Il y a un an que nous sommes en route. Nous sommes donc dans une première phase d'implantation des centres locaux d'emploi. Déjà, une bonne soixantaine sont localisés de manière permanente et sont fonctionnels. Il y en aura 142 en décembre, à la fin de l'année présente, qui seront localisés de manière permanente, et j'invite l'opposition à aller visiter un de ces CLE permanents. Moi, je l'ai fait.

Vous allez voir qu'il s'agit là de lieux accueillants, accueillants tant physiquement que par les personnes qui y travaillent. Vous allez visualiser des services d'aide à la recherche d'emploi, des banques d'information disponibles pour les personnes qui sont en recherche d'emploi, des espaces et des équipements qui permettent aux chercheurs d'emplois de progresser dans leur recherche d'emploi. Vous allez trouver des conseillers qui donnent des explications aux gens, qui essaient de bien les diriger. Vous allez constater qu'il n'y a pas de personnes stigmatisées, qu'elles soient prestataires de la Sécurité du revenu ou de l'assurance-emploi ou sans chèque. Elles sont traitées sur le même pied d'égalité. Alors, on peut bien jouer les gérants d'estrade, mais il reste qu'il faut aller sur le terrain et voir à quel point les CLE répondent aux besoins que nous avons identifiés au moment de cette réforme.

Et je le rappelle, c'est une réforme qui est complexe, pour laquelle plusieurs sont devant nous. Mais j'aime bien parler aussi de défi. Et, quand le député de l'opposition me parle de redresser la situation, je ne veux pas redresser la situation, je veux continuer, intensifier nos actions pour arriver à terme, c'est-à-dire d'ici trois ans, à un réseau complexe et convivial pour les gens en recherche d'emploi.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la ministre. Nous en sommes... Oui, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Au moment où vous alliez dire que nous en sommes aux échanges, je voulais vérifier l'existence d'un consentement – étant donné que je ne suis pas membre de cette commission-là – pour que je puisse y participer.

Le Président (M. Geoffrion): D'accord. Donc, est-ce qu'il y a un consentement pour que M. le député de Rivière-du-Loup puisse participer à ce débat?

M. Marsan: M. le Président, il y a sûrement consentement. Ce que nous voulons protéger cependant, c'est le temps qui est dévolu à l'opposition. On a la moitié du temps comparativement au gouvernement et on souhaite avoir les interventions qui sont prévues à notre agenda, nous souhaitons pouvoir les faire. Et, dans ce sens-là, nous appuyons la demande du député de Rivière-du-Loup.

Le Président (M. Geoffrion): Bon. Écoutez. Je pense que la règle veut que, s'il y a consentement, c'est l'opposition qui doit laisser, si je comprends bien, un temps de parole au député de Rivière-du-Loup. Enfin, c'est ce que j'ai devant moi, mais je pose la question à l'ensemble de la commission. Oui, M. le député.

M. Marsan: Juste un commentaire. Vous savez que, dans une interpellation, la ministre a toujours un cinq minutes, plus un député ministériel, 10 minutes à chaque fois que l'opposition a cinq minutes. Alors, ça serait beaucoup plus logique qu'on puisse prendre un cinq minutes, si c'est le souhait du député de Rivière-du-Loup, sur le temps des députés ministériels.

Le Président (M. Geoffrion): Alors, je pose la question aux membres de ce côté-ci. Est-ce qu'il y a consentement pour laisser une période de cinq minutes au député de Rivière-du-Loup?

Mme Lemieux: M. le Président, je suis quelqu'un, en général, de très bonne foi, mais je respecte aussi les règles du jeu. Et je crois comprendre que la règle, c'est que le temps de l'opposition, il est partagé entre les différents partis. Alors, j'aimerais que ça procède de cette manière.

Le Président (M. Geoffrion): Je comprends que je n'ai pas le consentement?

Mme Lemieux: Non.

Le Président (M. Geoffrion): Désolé, M. le député. Donc, la parole est maintenant au député de Robert-Baldwin, pour cinq minutes.


Argumentation


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Je regrette vraiment que la ministre refuse aux gens de l'opposition un cinq minutes additionnel.

Je voudrais, M. le Président, revenir sur une affirmation de la ministre concernant l'octroi du gouvernement fédéral. Et elle semble nous dire que, bon, c'est toujours le fédéral. C'est à cause du fédéral si tout va mal pour un gouvernement péquiste. Eh bien, j'ai avec moi un mémoire qui a été présenté au comité de gestion d'Emploi-Québec tenu le 4 mars dernier, mémoire qui vient du gouvernement du Québec et du ministère de la Solidarité et qui confirme que le gouvernement fédéral a augmenté la subvention aux fonds de développement de la main-d'oeuvre. En fait, les chiffres exacts, M. le Président, c'est que c'est passé de 486 000 000 $ à 555 000 000 $ – près de 70 000 000 $ d'augmentation – alors que le gouvernement du Québec, lui, a vu fondre sa subvention, qui était de 204 000 000 $ l'an passé, à 182 000 000 $ cette année, pour une diminution de 21 000 000 $. Alors, ça, ce sont les chiffres du ministère de la Solidarité sociale, du ministère de l'Emploi, et nous sommes certains que c'est la vérité, M. le Président. Alors, de nouveau, il fallait faire cette rectification.

Je voudrais rappeler toujours le beau discours péquiste: Pauvreté zéro, économie sociale, protéger les plus démunis, défendre la veuve et l'orphelin. Ça, c'est le discours. Mais, dans les faits, vous voyez la coupure qui a été faite au niveau de la sécurité du revenu, au niveau des assistés sociaux. Plus que...

Mme Lemieux: ...

Le Président (M. Geoffrion): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Je vois le député indépendant qui s'en va puis j'ai l'impression...

M. Marsan: Mais, M. le Président, je pense que...

Une voix: ...

Mme Lemieux: Bon. Je m'excuse, je voulais juste faire une petite mise au point.

Le Président (M. Geoffrion): D'accord. M. le député, s'il vous plaît.

M. Marsan: Alors, le premier point étant clairement fait: diminution de la subvention du gouvernement péquiste à la sécurité du revenu, augmentation de la subvention du gouvernement fédéral à l'assurance-emploi.

Le deuxième point, ce sont les fameuses cibles ou les objectifs qui sont prévus. Et ici j'aimerais tout simplement citer – ce n'est pas long, M. le Président – un article de M. Denis Lessard, qui est un journaliste chevronné de la Tribune de la presse, et qui est très factuel, alors: «Or, un document de la Direction générale du développement de l'emploi daté du 16 mars montre que, pour l'obtention d'un emploi, le ministère avait atteint ses cibles à 67,5 % avec 43 261 placements. Mais ça ne faisait pas l'affaire de la ministre et du gouvernement péquiste, 67 %. On a baissé les cibles en cours de route parce qu'on avait sous-estimé le nombre de participants à l'assurance-emploi, écrivait candidement un fonctionnaire du gouvernement du Québec. Une sous-estimation de plus du tiers. En rebrassant ces chiffres, Emploi-Québec soutient qu'avec les mêmes 43 261 placements, on a atteint 100 % de l'objectif.» Alors, ça, c'est... je ne veux pas reprendre le terme non parlementaire, je vais me limiter à dire que, du côté ministériel, on joue avec les chiffres, M. le Président.

Je voudrais aussi souligner l'impact que peut avoir la décision du gouvernement du Parti québécois sur les fonds pour la réinsertion au travail. Et c'est un article de La Presse de vendredi dernier. Eh bien, ces organisations-là, des organisations sans but lucratif, voient leur budget diminuer de l'ordre de 41 %. Ce qui veut dire, M. le Président, que c'est presque une organisation communautaire sur deux qui est appelée à disparaître dans l'année qui vient. Alors, M. le Président, ne soyez pas surpris si les milieux communautaires réclament l'argent nécessaire à l'intégration des sans-emploi au travail.

Nous avons reçu la semaine passée des communiqués de presse. Un an après la création d'Emploi-Québec, la Coalition des organismes communautaires pour le développement de la main-d'oeuvre ainsi que plusieurs organismes oeuvrant dans la réinsertion des personnes sans travail dénoncent les coupes du gouvernement québécois qui empêcheront, dès juillet – c'est juillet qui s'en vient, quand le gouvernement ne siégera pas, on ne sera pas à l'Assemblée nationale – les assistés sociaux d'avoir une chance d'accéder au marché du travail.

M. le Président, la question à la ministre est bien simple: Est-ce que, une fois pour toutes, on peut avoir la véritable situation financière à Emploi-Québec? Est-ce qu'on peut avoir de la transparence, du respect? Et est-ce qu'on peut dévoiler l'ampleur du cafouillage?

Le Président (M. Geoffrion): M. le député. Mme la ministre, vous avez un droit de réplique de cinq minutes.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je voudrais juste faire une précision. Je crains malheureusement avoir été mal comprise. Moi, je n'avais pas d'objection à ce que le député indépendant puisse intervenir. Et, quand je disais que je voulais que ça se fasse selon les règles, c'est que ça se fasse sur le temps qui est attribué à l'opposition. Alors, je voulais juste être bien comprise sur cette question.

(10 h 30)

Je vais reprendre deux éléments dans les affirmations un peu raccourcies du député de l'opposition. D'abord, sur les fonds fédéraux. Oui, il y a une augmentation de l'ordre d'environ 50 000 000 $ des fonds fédéraux pour l'année 1999-2000. C'était prévu d'ailleurs dans l'entente. Mais je tiens à rappeler que cette entente, elle est extrêmement intéressante pour le Québec; ça a été un déblocage extrêmement important.

Mais là je vais faire un peu de pédagogie, il y a des limites aussi à cette entente-là et je l'ai expliqué tout à l'heure. D'abord, il y a 15 ans, le fédéral investissait 583 000 000 $ en formation des chômeurs, des assistés sociaux, en création d'emplois et, 15 ans plus tard, le début de cette entente, il a versé au Québec 525 000 000 $, soit 58 000 000 $ de moins. Et depuis 15 ans, je le répète, les besoins des personnes sans emploi et en emploi se sont considérablement accrus. Je pense que je n'ai pas besoin de faire la démonstration à quel point le marché du travail s'est complexifié.

Alors, oui, c'est une entente qui est intéressante pour le Québec; mais, écoutez, ce n'est pas de la charité, là, que le gouvernement du Québec a eue. Et je vais vous dire, si on tient compte de la valeur de ces argents-là 15 ans plus tard, c'est beaucoup moins, ce dont le Québec dispose actuellement, que ce qui était dépensé il y a une quinzaine d'années.

L'autre chose aussi qu'il est important de situer dans les limites de cette entente-là, c'est que cette entente-là se situe aussi dans le cadre de la réforme de l'assurance-emploi. Or, je le rappelais tout à l'heure, les critères de l'assurance-emploi se sont extrêmement resserrés. Et vous savez que le coeur de l'entente, c'est que le gouvernement du Québec peut utiliser les sommes du compte de l'assurance-emploi dans la mesure où les personnes ont eu recours à l'assurance-emploi ces trois dernières années. Or, on le sait, actuellement c'est un chômeur sur deux qui a accès à l'assurance-emploi. Alors, l'autre chômeur qui n'y a pas accès, c'est donc par des fonds du Québec que nous devons absorber les mesures qui lui sont destinées. Et ça, c'est une limite particulièrement importante.

Même chose du côté des jeunes. Il y a à peu près le quart des jeunes qui ont actuellement accès à l'assurance-emploi comparativement aux trois quarts il y a une bonne dizaine d'années. Alors, ces trois quarts de jeunes qui n'ont pas de contact avec l'assurance-emploi, on ne peut pas utiliser les sommes du fédéral pour les mesures qui leur sont destinées. Ce sont des limites extrêmement importantes et des limites avec lesquelles nous devrons composer de plus en plus, puisque les effets les plus pernicieux du resserrement des critères de l'assurance-emploi vont se faire sentir de manière beaucoup plus intense au fur et à mesure que le temps va passer.

L'autre chose que j'aimerais clarifier, c'est cette espèce d'affirmation que les indicateurs qui ont été inscrits à l'entente entre le Québec et le Canada ont été l'objet de tripotage. Je pense qu'il faut cesser cette affirmation-là. D'abord, les formules utilisées – et je vais vous éviter le détail – c'est les mêmes formules qui ont été utilisées pour calculer les résultats de Développement des ressources humaines Canada. On ne les a pas inventées.

Deuxièmement, on le sait, le Québec et le Canada se sont entendus sur les trois critères, ils se sont entendus sur les cibles. À ce que je sache, là, ce que vous appelez du tripotage, ça a été l'objet de signatures, de négociations et de discussions entre les gens du Québec et les gens du fédéral qui siègent au comité de suivi de cette entente. Il n'y a pas de tripotage. On a utilisé les formules d'usage lorsqu'on a besoin d'identifier ce genre de critères là. Et je vous rappelle que les trois critères étant les trois indicateurs étaient le nombre de participants à l'assurance-emploi, le nombre de personnes qui ont bénéficié d'un emploi suite à l'intervention d'Emploi-Québec et les économies générées au compte de l'assurance-emploi.

Et je vous rappelle que, pour ces trois indicateurs, le Québec a parfaitement livré la marchandise, puisqu'il a atteint l'ensemble de ses objectifs. Je dirais même qu'on est au-delà de 10 % de ce que DRH Canada avait effectivement réalisé l'an dernier alors qu'il était tout seul à intervenir. Maintenant qu'on a donc une intervention consolidée, on sait qu'on a atteint nos cibles et, je dirais même, de manière un peu plus performante. On doit en être fiers, puisque nous sommes dans une année d'implantation.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la ministre. Je donne maintenant la parole à la députée de Crémazie.


Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. L'interpellation d'aujourd'hui sur les services de main-d'oeuvre et d'emploi me fournit l'occasion de faire le point sur l'évolution du marché du travail au Québec depuis le Sommet sur l'économie et l'emploi qui s'est tenu en novembre 1996. Depuis ce Sommet, donc, des améliorations tangibles ont pu être constatées sur le plan de l'emploi. En cette matière, les performances du Québec méritent d'être soulignées. Ainsi, il faut rappeler que plus de 172 000 emplois ont été créés au Québec, ce qui constitue un gain de 5,4 % et un taux de croissance annuel de 2,2 %. Il faut aussi souligner que ce taux se compare avantageusement à la croissance annuelle moyenne observée de 1976 à 1996, qui était de 1,2 %.

S'il est vrai que le marché de l'emploi au Québec s'est amélioré en quantité, force est de constater qu'il s'est aussi amélioré en qualité. En effet, l'emploi à temps plein s'est accru de façon encore plus significative depuis le Sommet. La croissance de ces emplois à plein temps s'est soldée par un ajout de 205 000 postes, ce qui constitue un gain de 7,8 % par rapport à novembre 1996 ou un gain annuel de 3,2 %.

Par ailleurs, au cours de la même période, le pourcentage d'emplois à temps partiel a reculé, passant de 17,7 % à 15,8 % de l'emploi total. Il faudrait souligner qu'au Canada, pour les mêmes types de postes à temps partiel, ces postes-là représentent une part plus importante de l'emploi total, soit 17,8 %, 2 % de moins pour le Québec.

En réalité, le taux de croissance de l'emploi, depuis le Sommet sur l'économie et l'emploi de 1996, a été près de trois fois plus rapide que celui de la population de 15 ans et plus et quatre fois plus élevé que celui de la population d'âge actif qui est celle de 15 à 64 ans. D'autre part, il faut préciser que le taux d'emploi a progressé presque autant au Québec que dans l'ensemble du Canada, soit 1,8 point de pourcentage par rapport à 2,1 points, ce qui constitue une amélioration notable.

Pour ce qui est du chômage, il faut se réjouir du fait qu'il a reculé de 15,3 % depuis le Sommet sur l'économie et l'emploi. En effet, en avril 1999, le Québec comptait 70 600 chômeurs de moins qu'en novembre 1996. Au Canada, la réduction du nombre de chômeurs a été de 12,7 %, soit 2,6 points de pourcentage de moins qu'au Québec. La performance remarquable du Québec représente 36,5 % de la réduction du nombre de chômeurs au Canada.

Le Sommet et l'important consensus qui en a découlé y sont pour beaucoup dans cette baisse appréciable du chômage. Dans les faits, la baisse la plus marquée du nombre de chômeurs au Québec s'est traduite par une réduction plus significative du taux de chômage, qui s'établissait à 2,2 points de pourcentage de moins comparativement à 1,7 point de moins dans l'ensemble du Canada. Malgré la hausse qui est survenue au cours des derniers mois et qui était due à un afflux massif de la population sur le marché du travail, le taux de chômage est tout de même passé de 12,6 % à 10,4 % au Québec.

Ces résultats plus que satisfaisants ont été obtenus en dépit du fait que le gouvernement du Québec procédait au même moment, et, rappelons-le, avec l'appui de ses partenaires, à l'assainissement des finances publiques. Les mesures mises de l'avant se sont traduites, entre autres, par le départ à la retraite à l'été 1997 de 37 000 employés de l'État, soit 1 % de la population active québécoise. Cela n'a pas empêché cette population de se gonfler de plus de 101 000 personnes, ce qui représentait une progression deux fois plus rapide que celle de la population d'âge actif.

En conclusion, M. le Président, toutes les Québécoises et tous les Québécois peuvent se réjouir de l'amélioration sensible de la situation de l'emploi au Québec depuis le Sommet sur l'économie et l'emploi de novembre 1996. Le consensus entre les différents intervenants et l'esprit de solidarité qui habite les Québécoises et Québécois ont contribué à relancer le marché de l'emploi et sont porteurs d'espoir pour l'avenir. L'amélioration de la situation de l'emploi résulte également des efforts déployés par le gouvernement du Québec dans la lutte contre la pauvreté, l'exclusion sociale et le chômage.

Certes, il reste encore du travail à accomplir. Néanmoins, nous sommes sur la bonne voie. La conjoncture favorable pour l'emploi nous encourage à redoubler d'efforts pour aider le plus de personnes possible à retourner sur le marché du travail. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la députée. La parole est maintenant à la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. On a entendu bien des statistiques. Permettez-moi de vous faire part de quelques autres moins réjouissantes.

(10 h 40)

J'aimerais vous parler de la circonscription de Sauvé que j'ai l'honneur de représenter ici, à l'Assemblée nationale du Québec. La circonscription de Sauvé est la partie est du territoire de la ville de Montréal-Nord. Or, la ville de Montréal-Nord compte, à chaque mois, 7 000 à 8 000 prestataires de la sécurité du revenu. Une grande majorité d'entre eux sont prestataires depuis plus de cinq ans. Et, autre fait, la circonscription de Sauvé a le plus grand nombre de familles monoparentales au Québec, soit 3 000 familles monoparentales, très souvent, trop souvent, donc, des femmes chefs de famille monoparentale trop souvent prestataires de la sécurité du revenu. Ça, c'est pour vous dresser un peu un portrait de la situation, parce que c'est des femmes qui ont fait le choix d'avoir un ou des enfants et qui ont de la difficulté à concilier accès au marché du travail et famille, mais on ne peut pas considérer que ces femmes sont des personnes inaptes au travail.

Or, en ce moment, le message qu'on leur envoie, c'est un message de démission totale de la part de ce gouvernement face à leur situation. La ministre nous faisait part du fait que le gouvernement du Québec doit assumer seul la charge financière pour les mesures d'insertion à l'emploi, de formation touchant les assistés sociaux. Mais, en fait, le gouvernement du Québec n'assume pas seul ces charges financières; il ne les assume pas du tout, il a fermé la porte aux assistés sociaux. Et permettez-moi de lire une directive provenant du centre local d'emploi de Montréal-Nord. J'ai déjà fait la lecture de quelques items lors d'une période de questions, mais permettez-moi de compléter un peu l'information.

Dans cette directive provenant du centre local d'emploi de Montréal-Nord, on dit: «Dans la situation budgétaire actuelle, nous devrons adopter des lignes de conduite plus strictes.

«1. Étant donné que les budgets s'avèrent insuffisants pour les prestataires de la sécurité du revenu, les nouvelles participations aux mesures suivantes seront réservées, pour les quatre prochains mois, de mai à août 1999, aux prestataires de l'assurance-emploi, PAE, et FIRH. Les mesures sont les suivantes: formation, soutien individuel à la formation, projets de préparation à l'emploi, projets d'insertion sociale, projets locaux de développement des compétences, subventions salariales d'insertion à l'emploi.» On ajoute une note: «Nous réévaluerons la situation dans le courant du mois d'août.» Donc, on n'a aucune assurance que les prestataires auront de nouveau accès à ces mesures au mois d'août.

«2. Les références aux ressources externes d'aide à l'emploi continueront de se faire, mais les mises en mouvement des prestataires de la sécurité du revenu seront éventuellement retardées dans l'attente d'argent neuf en provenance de la sécurité du revenu.

«3. Considérant le manque d'argent pour les prestataires de la sécurité du revenu dans la mesure Soutien au travail autonome – c'est une autre mesure, M. le Président – nous aviserons les SAJE, Services d'aide aux jeunes entrepreneurs, de n'accepter qu'exceptionnellement cette clientèle – on parle des prestataires de la sécurité du revenu.

«4. Nous ne ferons pas de maillage financier avec le Fonds de lutte.

«5. Compte tenu du fait que les prestataires de la sécurité du revenu ne pourront bénéficier des mesures de formation, nous essaierons de faire financer, par le Fonds de lutte contre la pauvreté, des projets de formation et d'insertion à l'emploi réservés aux prestataires de la sécurité du revenu.»

Et je voudrais vous faire part d'une autre note également sur cette directive; ça concerne les cibles de participation et cela dit: «Notre cible de participation est de 2 531; les budgets actuels ne nous permettent de financer que 1 605 participations. L'écart, 926, devra être comblé par les sessions de groupes et les suppléments de retour au travail qui seront comptabilisés.» Ça, ça veut dire, M. le Président, que ceux qui reçoivent 500 $ parce qu'ils ont accès au marché du travail, on va maintenant comptabiliser ça dans les cibles de participation par le gouvernement. Nous, on n'a pas employé tantôt le mot «tripotage», c'est la partie ministérielle qui l'a employé. Nous leur laissons ce mot, mais je pense qu'ici nous avons une démonstration.

Lorsqu'on a posé des questions tant à la ministre de l'Emploi qu'au ministre responsable de la Solidarité sociale, on nous a parlé de turbulences en ce moment dans leurs ministères. Je pense que, pour employer leur image de turbulences dans un avion, on n'est pas juste en face de turbulences, mais il n'y a pas de pilote dans cet avion de l'emploi au Québec.

Ma question à la ministre, c'est: Quand allez-vous redonner espoir aux prestataires de la sécurité du revenu – et je pense à mes citoyens et citoyennes de la circonscription de Sauvé – quand allez-vous mettre de l'argent pour qu'ils aient accès aux mesures de formation et d'insertion? Merci, M. le Président.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la députée. Mme la ministre, votre droit de réplique.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, la première chose que j'aimerais dire, c'est: Oui, j'ai pris connaissance de la note que la députée de Sauvé avait en main, dont elle a déjà parlé, il y a quelques semaines, ici, en Chambre. Vous savez, ça fait partie de la vie, il y a quelquefois des initiatives de ce type-là qui sont prises. Évidemment, chaque directeur, directrice de CLE a à gérer un budget avec son lot de tensions et de difficultés. Cette note-là demeure une initiative personnelle et a une compréhension personnelle.

J'ai rencontré la semaine dernière l'ensemble des cadres, les directeurs régionaux d'Emploi-Québec. On a réajusté un certain nombre de choses, et, non, la présente période que nous traversons ne doit pas avoir pour effet d'exclure les prestataires de la sécurité du revenu, mais nous avons un grand défi, un défi politique, mais un défi aussi en termes de gestion.

Et ce n'est pas simple, quand je parlais des limites de l'entente Québec-Canada, ce n'est pas simple non plus de la gérer parce qu'elle crée aussi des effets pervers, elle nous amène à faire des calculs un peu cartésiens où on classe les gens en fonction du chèque, et bien sûr ça nous entraîne des fois dans des situations malheureuses. Mais ce n'est pas ma volonté ni la volonté de ceux qui dirigent Emploi-Québec d'exclure les prestataires de la sécurité du revenu.

Et d'ailleurs, quand je regarde ce qui s'est passé, en cette première année de mise en place d'Emploi-Québec, il faut comprendre – je l'ai dit souvent en cette Chambre – qu'on cherche à identifier la mesure la plus pertinente auprès des personnes, qui va répondre le mieux à leurs besoins. Et un des critères importants, c'est d'évaluer le risque prolongé de chômage des personnes.

Évidemment, pour faire une image, plus les gens sont près du marché du travail... Par exemple, ils viennent de perdre leur emploi pour toutes sortes de raisons, mais ils sont relativement formés, bien formés, dans des secteurs où il y a un besoin de main-d'oeuvre, ils ont une expérience de travail pertinente. Alors, auprès de ces gens-là, on ne va pas intervenir de la même manière qu'auprès des gens qui sont sortis du marché du travail, du circuit du marché du travail, depuis deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans. Alors, c'est sûr que là les interventions sont beaucoup plus intenses. On ne fait pas la même chose – ce n'est pas un livre de recettes, ça – il faut moduler les interventions en fonction des réalités des personnes et de leurs besoins.

Et, quand je regarde donc les résultats, les faits saillants de la dernière année, on a rejoint particulièrement des gens qui ont des risques prolongés de chômage. Par exemple, au moins tout près de 40 % de l'ensemble des participations aux mesures qui ont été mises en place par Emploi-Québec rejoignent des jeunes, et ça, ce n'est pas banal, c'est très important dans le contexte actuel. Les jeunes ont certaines difficultés pour acquérir un emploi, avoir accès à un emploi. Alors, heureusement on arrive à bien intervenir auprès de ces jeunes-là, puisque au moins 40 % de l'ensemble de nos mesures rejoignent les jeunes de moins de 25 ans.

On a aussi dénombré un bon, si ce n'est pas plus, là... Évidemment, l'année financière n'est pas encore... tous les chiffres de l'année 1998-1999 ne sont pas encore disponibles, mais on parle d'au plus 30 000 participations effectuées par un membre d'une famille monoparentale. Et ça non plus, ce n'est pas banal, ce sont souvent des femmes qui sont en dehors du circuit de l'emploi depuis un certain temps, mais on rejoint ces gens-là et on va continuer à le faire.

Donc, non seulement nos objectifs de rejoindre ceux pour qui une mesure plus souple, plus simple leur permettant de réintégrer le marché du travail, on atteint ces objectifs-là, mais on atteint aussi les objectifs de rejoindre des gens qui sont un peu plus éloignés du marché du travail. Et je vous dirais que c'était ça, c'était ça aussi, la vision de cette réforme-là. C'est de mettre ensemble pas juste du personnel, mais aussi l'ensemble des mesures qui étaient à la disposition de manière plus cartésienne aussi, des mesures pour les assistés sociaux, des mesures pour les gens en assurance-emploi. On a unifié ça. On a unifié aussi le guichet, le lieu où ces gens-là ont accès à de l'information et ont la possibilité de faire des choix pour se diriger de plus en plus vite et de mieux en mieux vers le marché de l'emploi.

(10 h 50)

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de La Peltrie.


M. Michel Côté

M. Côté (La Peltrie): Merci, M. le Président. En rapatriant les budgets de la caisse de l'assurance-emploi – comme l'a mentionné le député de Robert-Baldwin dans ses remarques préliminaires, ça a été adopté à l'unanimité de tous les membres de l'Assemblée nationale – alors le gouvernement du Québec ne s'est pas contenté de reproduire simplement les programmes puis les façons de faire du gouvernement fédéral; notre gouvernement s'est engagé dans une réforme d'envergure qui met fin au fouillis, au dédoublement et au gaspillage qui ont été dénoncés depuis 30 ans au Québec. Le gouvernement est en train de mettre de l'ordre, et cela, de trois manières: de l'ordre dans les programmes qui étaient multiples, contradictoires puis, aussi, qui apportaient de la confusion parmi la clientèle; de l'ordre dans les multiples guichets et les découpages de territoires qui étaient incohérents également; de l'ordre dans les relations avec le secteur de l'éducation et de la formation.

Alors, dans l'ordre concernant les programmes, il y avait 52 programmes de main-d'oeuvre il y a un an; il n'y en a plus maintenant que neuf aujourd'hui. Les programmes de main-d'oeuvre étaient souvent truffés de normes qui restreignaient l'accès de plusieurs clientèles. Les mesures actives d'Emploi-Québec, quant à elles, sont souples et adaptables à la situation particulière des régions et des individus.

Les régions et les localités disposent d'une marge de manoeuvre financière comme elles n'en ont jamais eu dans le passé. En plus, elles n'ont jamais disposé d'outils de développement aussi importants. Emploi-Québec, dans les régions et les localités, collabore avec les autres ministères, les partenaires et les élus du milieu au sein des CLD puis des conseils régionaux de développement, les CRD. Alors, ensemble, ils définissent leurs priorités et y affectent les budgets nécessaires. Donc, c'est en concertation que les budgets sont déterminés dans le milieu et pour la clientèle des différentes régions.

De l'ordre dans les guichets. On a mis fin au triple réseau de services à la main-d'oeuvre. Pour les mesures actives, il y a maintenant une porte d'entrée clairement identifiée et un budget unique. Tous les chercheurs d'emplois sont considérés comme des chômeurs et sans discrimination. Les centres locaux d'emploi sont présents partout sur le territoire du Québec, dans la logique du découpage des MRC puis des quartiers urbains, contrairement à ce qui existait. C'est fini, les découpages des territoires arbitraires et incompréhensifs.

Et nous avons aussi mis de l'ordre dans les relations avec le secteur de l'éducation. Une entente a été signée avec le ministère de l'Éducation quant à la clarification des modes de financement de la formation. Cela met fin aux négociations ad hoc qui avaient lieu entre les deux ministères. À chaque fois qu'un cas se présentait, il fallait avoir des négociations avec les ministères.

Les deux ministères élaborent ensemble la première politique québécoise de formation continue. Les deux ministères travaillent conjointement à l'identification des besoins et des pénuries de main-d'oeuvre afin de mieux adapter leurs interventions en matière de formation.

Le ménage dans le secteur de la main-d'oeuvre s'accompagne de la mise en place graduelle de nouveaux services. Nous allons bien au-delà des services qui ont été rendus disponibles jusqu'ici. Alors, il y a plusieurs nouveautés qui ont apporté autant d'avantages à leurs bénéficiaires. Tout d'abord, des services sont désormais offerts aux sans-chèque et aux travailleuses et travailleurs autonomes. Rappelons que l'accès aux mesures actives leur était pratiquement interdit précédemment. En second lieu, des services intégrés aux entreprises ont été mis sur pied, alors qu'auparavant on intervenait à la demande ponctuellement et de façon désordonnée souvent. Par ailleurs, des investissements de 40 000 000 $ par année sont prévus pour soutenir la réalisation de projets d'investissements majeurs. Ensuite, des services d'information sur le marché du travail ont été implantés, surtout au niveau des régions et au niveau local, là où ça compte pour les clients. Enfin, des services de placement sont rendus disponibles et vont au-delà du jumelage par ordinateur.

Donc, en conclusion, il faut compléter le travail d'envergure, raffiner les processus et parfaire la formation du personnel. C'est à quoi nous nous employons, cette année, à poursuivre. Merci.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, M. le député. La parole est maintenant au député de Robert-Baldwin.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Oui, je vous remercie. Peut-être d'abord juste un mot rapide sur les fameuses cibles de participation. Toujours dans la directive, là, on mentionne: «Nous enregistrerons systématiquement les suppléments de retour au travail comme des participations.» Ça, M. le Président, c'est lorsque quelqu'un réussit par lui-même ou par elle-même à obtenir un emploi. Ils ont droit à un incitatif de 500 $ de la Sécurité du revenu, mais, comme ce n'était pas assez, on va les ajouter aux cibles pour qu'on puisse atteindre les cibles et donner belle jambe au gouvernement du Parti québécois. Alors, c'est ça qu'on voulait dire aussi quand on parlait de jouer avec les cibles.

M. le Président, je voudrais poursuivre sur la Commission des partenaires du marché du travail. Je pense que c'est extrêmement important, le travail qui se fait là, mais encore faut-il qu'ils aient une certaine autonomie. Jusqu'à maintenant, on sait que l'ensemble du dossier d'Emploi-Québec particulièrement était mal géré, qu'il y a des cafouillages. Je pense que c'est reconnu. Aucune région du Québec n'a fait approuver son plan local. Nous, les libéraux, ce qu'on souhaiterait, c'est remettre en cause la décision du gouvernement de ne pas faire confiance aux partenaires du marché du travail. On voudrait le retour du rôle décisionnel des partenaires pour mettre fin aux décisions unilatérales de la ministre, mettre fin à la multiplication de la paperasse, à la multiplication des paliers.

Je rappelle encore l'exemple du départ de la présidente, Mme Diane Bellemare, que ce soit un congédiement ou que ce soit un terme à un contrat. Eh bien, pour nous, ce n'est pas à la ministre de décider ça, c'est aux partenaires. Comment se fait-il que les partenaires n'ont pas été consultés? Aucune consultation dans ce dossier. On voudrait nous souligner que ces partenaires-là vont travailler avec le gouvernement, mais ce n'est pas vrai, ils ne sont pas partenaires du gouvernement. C'est la ministre qui décide, M. le Président.

On aurait deux suggestions à faire à la ministre à ce moment-ci. La première, c'est quant à la composition de la Commission des partenaires du marché du travail. Nous sommes sûrement d'accord à ce qu'il y ait des représentants de la main-d'oeuvre – il y en a six – des représentants du monde des affaires, des entreprises. Là aussi, je pense que c'est important de faire cette jonction. On parle également du milieu de l'enseignement. Il est très important, à notre avis, de prévoir les cours de formation nécessaires aux gens qui veulent aller sur le marché du travail.

On s'aperçoit cependant qu'il y a beaucoup de sous-ministres dans différents ministères. Je pense qu'on peut aller jusqu'à six. On pourrait sûrement revoir si c'est utile d'avoir tous ces gens-là. Mais surtout la suggestion qu'on voudrait faire à la ministre, c'est: Pourquoi n'y aurait-il pas des représentants de ceux qui cherchent de l'emploi, des représentants de ceux qui sont sur la sécurité du revenu, des travailleurs autonomes aussi?

M. le Président, vous savez, au Québec, les travailleurs prennent de plus en plus de place. Alors, c'est la première recommandation que nous faisons à la ministre, peut-être de diminuer le nombre de sous-ministres, le nombre de fonctionnaires, pour augmenter le nombre de représentants de ceux qui vivent la difficulté de trouver des emplois.

La deuxième recommandation, M. le Président, serait de donner une autonomie complète à la Commission des partenaires du marché du travail, c'est-à-dire qu'ils choisissent leur président, qu'ils choisissent leur directeur général, qu'ils décident de leur plan d'organisation, que les partenaires décident eux-mêmes des mesures actives d'employabilité qu'ils veulent prendre, qu'ils décident de leurs politiques. Nous souhaitons que cette recommandation puisse avoir l'écoute de la ministre, ce qui aurait évité des difficultés comme on a pu connaître lors du départ de la présidente, Mme Diane Bellemare.

On retrouve ces modèles-là dans le secteur public, et plus particulièrement dans le secteur parapublic. Je pense aux établissements de santé qui sont gérés par des conseils d'administration. On peut aussi retrouver le même modèle dans les commissions scolaires. Alors, il y aurait sûrement beaucoup d'avantages à ce que la Commission des partenaires du marché du travail puisse avoir cette autonomie-là.

(11 heures)

Si on regarde, dans les faits, la ministre peut nous dire: Ils l'ont, c'est une unité autonome de service. Mais, dans les faits, ce n'est pas vrai, M. le Président. Ces gens-là, on l'a vu, dépendent de la ministre. Ils sont consultés quand la ministre veut qu'ils soient consultés. Et c'est cette division qu'on souhaiterait intégrer à notre recommandation, que la Commission des partenaires du marché du travail puisse avoir l'entière autonomie de gérer le transfert de la main-d'oeuvre. Ce sont eux qui ont l'expérience, surtout si on inclut des représentants des gens qui cherchent de l'emploi, des bénéficiaires de la Sécurité du revenu ou des travailleurs autonomes. Alors, M. le Président, deux suggestions à la ministre. Nous souhaitons qu'elle puisse écouter nos suggestions. Merci.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, M. le député. Mme la ministre, la parole est à vous.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, d'abord, je voudrais peut-être faire une première remarque. C'est assez étonnant que les libéraux nous fassent un grand discours sur le partenariat parce que ce n'est pas eux qui ont eu le plus d'expériences significatives. S'il y a un gouvernement qui a introduit ces modes de travail au Québec dans plusieurs secteurs – certains diraient même qu'on l'a trop fait – c'est bien le gouvernement du Parti québécois.

Ce n'est pas les libéraux qui sont allés chercher l'entente avec le fédéral; ce n'est pas les libéraux qui ont à la gérer. Ils cherchent davantage à la démolir actuellement; j'imagine qu'il doit y avoir des considérations politiques là-dedans. Mais, en ce qui a trait au partenariat, le gouvernement du Parti québécois a fait plus que ce qui s'est fait ces 20 dernières années. Et ça s'est répercuté, ça s'enracine aussi dans ce qui a trait à la gestion des sommes destinées à la main-d'oeuvre et à la gestion aussi du marché du travail. On l'a vu aussi dans les derniers sommets. Ça a été des partenariats pas toujours simples mais qui nous ont permis de développer des consensus extrêmement importants, notamment celui autour du déficit zéro.

Je rappellerais en gros que la loi n° 150 précise les pouvoirs d'un peu tout le monde dans ce grand chantier de l'emploi. La Commission des partenaires a dans la loi plusieurs pouvoirs extrêmement intéressants, notamment de participer à l'élaboration des politiques et des mesures gouvernementales dans les domaines de la main-d'oeuvre, à la prise de décisions relatives à la mise en oeuvre et à la gestion des mesures et des programmes, de conseiller la ministre sur les orientations générales de la politique du marché du travail. Je viens de compléter d'ailleurs – c'est un document que je vais déposer bientôt – le plan annuel d'action d'Emploi-Québec qui est le résultat d'un travail très intense, très précis sur les enjeux quant au marché du travail au Québec. Nous travaillons aussi en collaboration, la Commission et moi-même, à l'élaboration de stratégies des objectifs en matière de main-d'oeuvre et d'emploi. C'est la Commission des partenaires qui identifie les cibles d'intervention. Écoutez. C'est du jamais vu. C'est du jamais vu.

L'opposition dit un certain nombre de choses et, si elle était vraiment sérieuse, elle se rendrait compte qu'il y a aussi des éléments de danger dans ce qu'elle dit. Parce que l'opposition est en train de dire: On devrait tout donner à la Commission des partenaires. Un instant, un instant! Ce sont des responsabilités... D'abord, ce transfert des sommes fédérales au gouvernement du Québec, c'est au gouvernement qu'il appartient, ce transfert-là, et c'est le gouvernement qui en est le premier gardien. Deuxièmement, l'établissement des services publics d'emploi, c'est une responsabilité premièrement publique et une responsabilité gouvernementale, comme les services d'éducation, comme la santé, la même chose pour l'emploi. Alors, tu sais, de tout envoyer comme si c'étaient des responsabilités très légères, ce sont des responsabilités importantes sur lesquelles il doit demeurer une imputabilité.

J'ajouterais aussi que plus on s'approche des acteurs du marché du travail, plus évidemment on se donne des chances d'avoir des bons diagnostics, des bons plans d'action en ce qui a trait au marché du travail, et c'est ce qu'on fait. Mais, vous savez, quand vous dites: On devrait envoyer toute la gestion, là, comme ça, sans trop poser de questions, il n'y a pas de miracle qui se passe non plus. Vous savez que la SQDM, dans ses premières années de vie, entre autres en 1993-1994, n'a pas livré la marchandise. Elle avait un budget d'intervention de 200 000 000 $ et quelques. Eh bien, elle en a périmé près de 60 000 000 $.

Alors, vous savez, ces responsabilités publiques, elles doivent être assumées par le public, mais il est tout à fait vrai – et je pense que j'en ai donné des signes personnellement et ce gouvernement en a donné – qu'il nous faut avoir une grande complicité avec les différents acteurs du marché du travail pour nous permettre d'avoir de meilleurs diagnostics de ce qu'il faut faire. Et nous le faisons. Nous le faisons tous les jours et très concrètement.

Pour ce qui est des suggestions du député au sujet de la composition, je rappelle que la Commission regroupe les acteurs du marché du travail. Il y a, par exemple, des représentants du secteur communautaire ou des syndicats, du monde patronal. Alors, ils doivent eux aussi porter des préoccupations de ceux qui sont sans emploi. Et je rappelle aussi que, oui, il y a un certain nombre de sous-ministres qui sont présents à la Commission des partenaires mais qu'ils n'ont qu'un rôle d'observateurs. Ils sont là pour nous aider à, comme on dit, attacher les fils entre ces interventions que nous devons faire dans différents secteurs, que ce soit l'éducation, l'industrie et le commerce. Mais la Commission des partenaires, ses membres, c'est des gens qui sont à l'extérieur du gouvernement; les autres qui y sont ne sont là qu'à titre d'observateurs.

Le Président (M. Geoffrion): Mme la ministre, votre temps est écoulé. Donc, je cède maintenant la parole à la députée de Crémazie.


Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, ma collègue la ministre d'État au Travail et à l'Emploi l'a déjà mentionné, toute la réorganisation des services publics d'emploi et de sécurité du revenu, qui est un des plus importants chantiers mis sur pied par l'actuel gouvernement, s'échelonne sur trois ans. Depuis le 1er avril 1998, date où démarrait cette importante réforme des services d'emploi et des services de la sécurité du revenu, nous disposons enfin d'un réseau de services intégrés. C'est-à-dire que le réseau des centres locaux d'emploi – c'est-à-dire un CLE par MRC, ou par arrondissement, ou par quartier – a une double mission: favoriser l'insertion et le maintien en emploi des Québécoises et des Québécois et, le cas échéant, procurer l'aide sociale de dernier recours. Nous sommes donc passés, avec cette réforme, de 262 points de services, et tous les dédoublements qui s'ensuivent évidemment, et chevauchements, à 154. Ce n'est pas peu dire.

À ce propos, j'aimerais vous citer le témoignage d'une personnalité importante dans son milieu, c'est-à-dire le maire de Saint-Georges de Beauce et président du Conseil régional des partenaires du marché du travail en Chaudière-Appalaches, M. Roger Carette, je le cite: «C'est un salut, un hommage et un clin d'oeil au gouvernement du Québec qui a réussi à mener à terme ses négociations avec le gouvernement fédéral pour obtenir des transferts que nous méritions jusqu'à ce jour et que maintenant on est en mesure d'influencer. Un deuxième salut que je voudrais faire aux autorités gouvernementales, c'est à l'effet qu'ils ont reconnu la pertinence de toutes les représentations que des personnes d'ici ont faites d'avoir notre propre conseil régional des partenaires du travail, une communauté locale, régionale qui est capable d'assurer son avenir.»

Au 1er avril dernier, M. le Président, il y avait plus de 80 % des CLE qui étaient regroupés; 34 % de ceux-ci sont installés de façon permanente, donc, dans des nouveaux locaux aménagés à travers le Québec. Et ce qu'il faut rappeler, ce qui est important, c'est que, dans toute cette réforme et dans toute cette réorganisation, à aucun moment les différents services aux contribuables n'ont été interrompus, ce qui représente un exploit en soi, puisque, avec cette entente-là, on a dû amener quatre groupes de différents organismes à travailler ensemble, soit la SQDM, DRHC Canada, les centres Travail-Québec et aussi il y a un module de la sécurité du revenu à Montréal qui est géré par des gens de la ville de Montréal. Donc, il y avait quatre façons de travailler différentes, quatre cultures, des systèmes informatiques différents et évidemment 52 programmes et mesures qui sont devenus maintenant neuf mesures depuis le 1er avril dernier.

Non seulement les services n'ont pas été interrompus, mais de nouveaux services et de nouvelles mesures plus performants ont été mis sur pied. C'est ce qui a permis à mes collègues la ministre d'État au Travail et à l'Emploi et le ministre de la Solidarité sociale de tracer un bilan positif le 1er avril dernier. J'aimerais vous citer un court extrait du communiqué émis à ce moment-là: «Un an après la mise en place des centres locaux d'emploi, les CLE, toutes les personnes à la recherche d'un emploi ou déjà en emploi, indistinctement de leur statut, ont accès à des services de mieux en mieux ciblés et adaptés à leurs besoins dans un solide réseau de 154 CLE performants.»

Donc, cette réorganisation, M. le Président, a permis aux chercheurs et aux chercheuses d'emplois d'avoir plus facilement accès aux différents services qui étaient, à l'époque, dans deux, trois structures, comme je le mentionnais tantôt. En somme, les Québécoises et les Québécois ont droit à des services d'emploi performants comme jamais ils n'en ont connu auparavant. La totalité du budget consacré aux mesures d'emploi a été dépensée, ce qui représente 100 000 000 $ de plus que ce qui avait été dépensé l'année précédente.

(11 h 10)

Les services de placement constituent aussi la pierre d'assise des services d'emploi performants. Même si le Québec a éprouvé quelques difficultés dans l'acquisition des guichets info-services, des solutions alternatives ont été rapidement mises en place. D'ailleurs, nous avons en ce moment 302 guichets info-emploi qui sont en place, soit 23 %, mais, d'ici le mois d'octobre prochain, ça pourrait passer à pratiquement 100 % de guichets emplois qui seraient à la disponibilité des gens. Il y a aussi les salles multiservices qui sont disponibles pour les clientèles à la recherche d'emplois. Et, en octobre prochain, il y aura près de 70 % des salles multiservices qui seront offertes aux gens où ils pourront consulter divers dépliants, de l'information et, évidemment, avoir accès à des réseaux informatiques pour aider à la mise en place de c.v., Internet, des télécopieurs et évidemment des téléphones également.

Alors, depuis septembre 1998, 10 CLE ont été inaugurés officiellement par les ministres et les représentants en place. Et puis je terminerais, M. le Président, en disant que c'est quand même un bilan positif pour une réforme qui est quand même majeure à travers le Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir sur un article publié vendredi dernier par le journal La Presse sous la signature de Denis Lessard: «Les fonds pour la réinsertion au travail sont réduits de 41 %. "La diminution des groupes d'aide aux assistés sociaux est inévitable", dit la ministre.» On est devant le fait que la ministre de l'Emploi veut remettre en cause l'existence d'organismes communautaires qui oeuvrent en emploi et en insertion. On a l'impression qu'on veut faire le ménage. D'ailleurs, on disait même, ici il y a une citation: «"C'est sûr que, si on subventionne quatre centres de femmes qui font la même chose dans une région, on peut se poser des questions", souligne-t-on dans son entourage.»

J'imagine que la ministre n'était pas très heureuse de cet exemple de centres de femmes jusqu'à maintenant financés par le fédéral ou le provincial et dont on ne remettait pas en cause jusqu'à maintenant l'existence dans une région donnée. Mais donc on remet en cause l'existence d'organismes communautaires. On dit encore une fois qu'il y a de la turbulence. Mais, pour reprendre cet exemple, là, il n'y a pas juste de la turbulence dans l'avion; les masques à oxygène sont tombés pour les organismes communautaires qui en sont rendus pratiquement à leur dernier souffle, puisque 41 % de leurs budgets sont coupés.

Ces mêmes organismes communautaires étaient assis autour de la table comme des partenaires lors du Sommet socioéconomique et on en faisait des partenaires de premier plan pour la relance de l'emploi au Québec. Je pense qu'ils sont plusieurs d'entre eux, les carrefours jeunesse-emploi, les entreprises d'insertion, les organismes communautaires oeuvrant en insertion auprès des assistés sociaux, qui vont y penser à deux fois avant de s'asseoir de nouveau autour de la même table que ce gouvernement, puisque, trois ans après un effort important de consensus effectué, on remet en cause leur existence propre.

On sait que la ministre de l'Emploi trouve son travail difficile. Elle emploie très souvent ces mots: C'est exigeant, c'est difficile, la situation est complexe, il faut intensifier nos efforts, il y a des limites, ce n'est pas simple, il faut faire de savants calculs, il y a des situations malheureuses, il y a du jamais vu, il n'y a pas de miracles non plus. Ça, on le sait, il n'y a pas de miracles. Effectivement, la ministre de l'Emploi trouve, je pense, son travail difficile, peut-être trop difficile, et peut-être qu'elle ne sait plus qui écouter. Chose certaine en tout cas, elle a l'oreille pour ses fonctionnaires. On la sent très à l'écoute de la machine. Sur le terrain, vous savez ce qu'on dit dans les centre locaux d'emploi? C'est que les fonctionnaires ont gagné vis-à-vis des organismes communautaires. Et les fonctionnaires, dorénavant intégrés dans la grande structure des centres locaux d'emploi, ces fonctionnaires, dorénavant, on s'attend à ce qu'ils fassent du «counseling».

J'aimerais entendre la ministre sur quelle est sa vision du travail des fonctionnaires qui feront du «counseling» auprès des assistés sociaux. Des rencontres de 10, 20, 30, 40, 60 minutes, est-ce que c'est vers ça qu'on s'en va? Est-ce que la ministre, elle, est d'accord avec cette orientation? Est-ce qu'elle considère que, dans ce qu'elle appelait tantôt «la modulation des interventions selon les catégories d'assistés sociaux», du «counseling» fait par des fonctionnaires dans un centre local d'emploi – peu importent leurs compétences, en passant – ça équivaut systématiquement au même cadre de vie que l'on offre aux assistés sociaux dans des organismes communautaires?

J'ai moi-même vécu l'expérience de présider un fonds d'adaptation de la main-d'oeuvre de quartier défavorisé. J'ai examiné de près plusieurs projets pilotés par des organismes communautaires pour favoriser l'insertion, l'employabilité des personnes. Ce que les organismes communautaires proposent, c'est un milieu de vie, c'est un cadre de vie; c'est souvent aussi un réseau social qui redonne de l'espoir aux assistés sociaux. On leur remet en main, on les responsabilise face au fait qu'ils doivent arriver à l'heure, ils doivent rencontrer des objectifs. C'est ça, lorsqu'on parle d'insertion au travail.

En ce moment, donc, la ministre compromet des organismes communautaires, elle compromet aussi l'existence d'entreprises d'insertion qui offrent un cadre d'apprentissage et de travail pour des assistés sociaux ou des sans-chèque. On remet en cause ces entreprises d'insertion qui pourtant ont fait l'objet d'une reconnaissance spécifique par ce gouvernement au cours des derniers mois.

On sait aussi que les carrefours jeunesse-emploi qui s'étaient vu dire par la ministre, dans une lettre, qu'ils auraient une réponse pour le 7 mai pour la reconduction de leur budget pour la prochaine année, on sait qu'ils n'ont toujours pas de réponse en ce moment. Donc, est-ce que la ministre a vraiment l'intention de faire ce ménage dans le milieu communautaire? Est-ce qu'elle va y penser à deux fois? Et est-ce qu'elle est d'accord avec sa machine qui dit que les fonctionnaires peuvent remplacer efficacement le milieu communautaire? Merci.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la députée. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, première précision, il ne faut pas toujours croire ce qui est dans les journaux, hein! Alors, ce n'est pas une diminution de 41 % des fonds du Québec, c'est des disponibilités comparativement à l'année précédente qui sont à 41 % moins élevées. Et cette situation-là va être corrigée, puisqu'on vient de redéployer 30 000 000 $ dans les régions, permettant donc aux centres locaux d'emploi et aux directions régionales de prendre de nouveaux engagements envers des personnes et des organismes pour le reste de l'année 1999-2000. Alors, il faut faire attention à ce qu'on lit dans les journaux.

Deuxièmement, au sujet des ressources externes, je sais que ça inquiète beaucoup les gens, c'est une opération effectivement qui n'est pas simple. Et je vais me permettre de réexpliquer le contexte dans lequel nous devons le faire. Et, oui, je vais faire de la politique de cette manière-là. Quand les choses ne sont pas simples, je vais dire que ce n'est pas simple. Il n'y a pas de baguette magique. Il y a une tonne de personnes qui sont en cause, il y a plusieurs objectifs qui sont en cause, et c'est comme ça que je vais faire de la politique.

Alors, ce qui est particulier cette année, c'est que, l'an passé, lorsqu'il y a eu le rapatriement des sommes du fédéral, on s'est retrouvé avec une série de ressources, d'organismes communautaires et de ressources externes, certaines étant financées par le gouvernement fédéral, d'autres l'étant par le gouvernement du Québec. Évidemment, le financement de ces ressources-là a été fait selon la planification des bailleurs de fonds. Et vous conviendrez avec moi qu'il n'y avait pas toujours une grande planification, mais ça a été fait selon une logique qui était inhérente à chacun de ces deux bailleurs de fonds là. En rapatriant ces sommes et en créant un seul levier d'intervention au sujet de la formation de la main-d'oeuvre, évidemment on s'est retrouvé avec des groupes qui – il arrivait – sur un même territoire, avaient soit des missions qui se ressemblaient soit des clientèles qui se ressemblaient. Nous avons donc le défi actuellement, pour cette année, de la cohérence.

Il y a une politique que j'ai eu grand plaisir à signer, la politique de reconnaissance des ressources externes, qui situe le cadre dans lequel Emploi-Québec et les ressources externes doivent travailler ensemble. Et c'est clair que c'est un cadre de complémentarité, de continuité par rapport aux services publics d'emploi. Et, oui, il est vrai que nous constatons à certains moments que – et là je veux faire attention, je veux que personne ne se situe dans une dynamique de drame – sur des territoires, il y a des organisations qui se pilent sur les pieds. Alors, il nous faut constater ça.

Il ne s'agit pas ici de remettre en cause les fondements des interventions des ressources externes. Ces ressources-là existent depuis très longtemps. Elles travaillent souvent avec des clientèles spécialisées, plus durement touchées par les questions de l'emploi ou de non-emploi, et ça, ce n'est pas du tout mis en cause. Ce qui est en cause ici, c'est de s'assurer qu'il y a une cohérence de l'ensemble des interventions, y compris les ressources externes, y compris les services publics d'emploi, sur un même territoire.

Comme toute cette opération-là ne pouvait pas être complétée au début de l'année financière 1999-2000, j'ai demandé qu'on étende la période pour pouvoir résoudre les difficultés d'arrimage et de reconduction des mandats. Alors, c'est donc au 30 juin, d'ici le 30 juin, que nous allons compléter cette opération-là avec les ressources externes, et non pas en dehors. Et c'est parce qu'on n'était pas prêt à le faire. Et je tenais à ce qu'on ne le fasse pas d'une manière où les gens étaient bousculés. Et je dois vous le rappeler, pour la plupart des ressources externes, ça ne génère pas de changements, cette situation-là. C'est une portion d'entre eux pour lesquels il est important de revoir les dossiers un par un.

(11 h 20)

Je vous rappellerai aussi que la ministre ne peut pas régler tous les problèmes du monde et que nous nous sommes donné une structure régionalisée. Et que, là, les conseils régionaux... Tantôt, vous me disiez: On devrait tout donner ça à gérer à l'extérieur. Écoutez. Juste d'avoir une structure régionalisée, déjà, on ajoute des niveaux d'intervention, mais qui sont extrêmement utiles, et c'est important que le niveau régional, soit la direction régionale d'Emploi-Québec soit les conseils régionaux des partenaires, mette en place ce qu'il faut pour faire en sorte que cette opération-là, de reconduction des ressources externes, soit complétée le plus correctement possible.

J'ai d'ailleurs demandé qu'il y ait, d'ici le 30 juin – parce qu'il y a déjà des indications qui ont été données à certaines ressources externes – un processus de révision régional, avec le conseil régional des partenaires, pour que les groupes qui ont l'impression que les décisions ont été prises ou rapidement, ou brutalement, ou incorrectement puissent être entendus. Et ça, c'est ma première responsabilité comme ministre, de faire en sorte que les processus régionaux fonctionnent bien et que les décisions qui sont prises au sujet des ressources externes ne soient pas arbitraires mais basées sur la cohérence à laquelle nous sommes tous conviés.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la ministre. M. le député de La Peltrie, vous avez la parole.


M. Michel Côté

M. Côté (La Peltrie): Merci, M. le Président. L'opposition utilise un refrain depuis quelque temps, refrain qui est très à la mode, en prétendant, à tort et à travers, qu'Emploi-Québec n'a pas livré la marchandise. Je vous dirais que les chiffres démontrent exactement le contraire, quelques chiffres que je vais vous exposer dans ce qui va suivre. Non seulement Emploi-Québec livre la marchandise, mais Emploi-Québec, à bien des égards, dépasse même les objectifs qu'elle s'était fixés, et c'est ce que je vais vous démontrer à partir des résultats obtenus pour l'année financière 1998-1999. J'aborderai d'abord les résultats qui découlent de l'entente Canada-Québec relative au marché du travail, je vous parlerai ensuite des résultats globaux pour la même période. Cela vous permettra de constater jusqu'à quel point la cible a été atteinte.

Parmi les engagements que le gouvernement du Québec a pris lorsqu'il a signé cette entente, il y a trois objectifs précis qui ont été convenus lors de la signature de cette entente. Le premier objectif était le suivant: 133 410 participations à des mesures actives d'emploi chez les participantes et les participants de l'assurance-emploi. Quel est le résultat? Le nombre de participations a été de 127 745. Emploi-Québec mérite donc une note de 95,8 %; on n'est pas très loin du 100 %, à ce que je sache. Le deuxième objectif de l'entente Canada-Québec, c'est de remettre au travail 43 261 prestataires de l'assurance-emploi. Cette fois, une note parfaite, un 100 %; oui, la cible a été atteinte parce qu'il y a 43 261 chômeurs et chômeuses qui sont retournés au travail. Enfin, le troisième objectif prévu à l'entente, c'était de générer des économies de 116 200 000 $ au compte d'assurance-emploi. Ici, on peut dire non seulement mission accomplie, mais objectif dépassé, puisque ce sont 127 300 000 $ d'économies qui ont été réalisées en 1998-1999, puis ça, grâce aux nombreux retours en emploi. Voilà pour ce qui est de nos engagements dans l'entente Canada-Québec.

Voyons maintenant les résultats globaux d'Emploi-Québec. Je vous donne ici les chiffres fondés sur les données disponibles au 24 mars 1999. Le nombre total de nouveaux participants et participantes aux mesures actives d'emploi a été de 180 165; c'est donc près de 200 000 personnes qu'Emploi-Québec a aidées dans leur démarche d'intégration au marché du travail. Et qui sont, de façon plus précise, ces personnes? Ce sont des jeunes de moins de 30 ans dans une proportion de 40 %, ce sont, ou c'étaient, devrais-je dire, des prestataires de l'assurance-emploi pour 49,7 % d'entre eux, ce sont aussi des chefs de famille monoparentale dans 13 % des cas, et ce sont des femmes dans 49 % des cas.

Au cours de l'année, parmi les personnes aidées par Emploi-Québec, 53 200 ont réussi à décrocher un emploi, donc plus de 50 000 personnes qui contribuent activement à faire avancer l'économie québécoise. L'économie, c'est aussi les employeurs, 2 667 ont profité des mesures actives d'Emploi-Québec au cours de l'année. Les entreprises ont signalé 162 863 postes à combler. Exprimé en pourcentage, cela signifie qu'Emploi-Québec a atteint 105,7 % de son objectif à ce chapitre, parce qu'elle s'était fixé comme objectif 155 000 postes à combler. Et ça, c'était le résultat avant que le transfert de l'assurance-emploi soit effectué au Québec. Alors, c'était le résultat qui avait été atteint l'année précédant le transfert, 155 000. Donc, nous avons dépassé l'objectif.

Je terminerai en vous disant qu'Emploi-Québec n'a pas à rougir de sa performance. La note de passage, Emploi-Québec l'obtient haut la main, et les chiffres que je viens de vous donner le démontrent très clairement. Tous les gens de bonne foi le reconnaîtront, et nous allons continuer, comme gouvernement, à travailler pour l'amélioration de l'emploi au Québec.

Le Président (M. Geoffrion): M. le député de La Peltrie. M. le député de Robert-Baldwin, la parole est à vous.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. C'est quand même drôle d'entendre le député parler d'Emploi-Québec, comme ça va bien. Juste lui rappeler, dans La Presse de jeudi le 20 mai, M. Claude Picher: «Un an après le transfert au Québec de la compétence et du financement dans le secteur de la formation de la main-d'oeuvre, il apparaît de plus en plus évident qu'Emploi-Québec, l'organisation responsable de gérer le dossier, est en train de sombrer dans le ridicule.» Et on pourrait continuer. Je pense qu'il donnait l'exemple d'Intégration jeunesse qui est une organisation bien cotée dans la région de Montréal et qui pourrait aider davantage les jeunes, eh bien, on lui coupe les vivres.

Et, M. le Président, l'objet de ce cinq minutes, c'est de démontrer justement aux députés et au parti ministériel que c'est faux de dire qu'Emploi-Québec, ça va bien, même si c'est la ligne de parti du gouvernement. J'ai une pile de documents provenant d'organismes communautaires qui n'ont pas ou peu de réponses, soit qu'ils sont en difficulté de financement... Certains ont déjà reçu des lettres de la ministre confirmant leur budget mais n'ont pas reçu l'argent. D'autres ont reçu des lettres disant: Vous allez recevoir un budget pour trois mois, mais toujours pas d'argent. Et d'autres n'ont reçu aucune autorisation et ils ont l'obligation, dans certains cas, d'emprunter sur leurs propres marges de crédit.

Quelques exemples, M. le Président. Le centre de recherche d'emploi Côte-des-Neiges: «Depuis le 1er avril 1999, le centre de recherche n'a pas d'entente écrite avec Emploi-Québec, malgré la réception d'une lettre datée du 31 mars de Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi, dans laquelle elle nous informe qu'elle prolonge jusqu'au 30 juin notre contrat. Nous n'avons pas reçu de versements pour la période du 1er avril au 30 juin.»

La Résille, dans un comté de l'Ouest-de-l'Île, le comté de mon collègue de Nelligan, M. le Président, une organisation de l'Ouest-de-l'Île: «Nous avons deux programmes de formation en cours. L'un prendra fin au mois de juillet prochain. Nous n'avons aucune certitude de son renouvellement. La situation de la Résille est précaire, car l'organisme réussit à fournir des services grâce aux subventions octroyées et n'a jamais disposé de budgets de fonctionnement.

On peut continuer. L'Association de fibromyalgie. C'est pour la région de Québec, en particulier: «Le bureau de Québec est le seul existant dans la province. Son existence est éphémère. Il a été rendu possible grâce à une subvention de CAMO, laquelle ne sera pas renouvelée au-delà de septembre 1999. D'autre part, les personnes affectées de fibromyalgie sont habituellement des personnes qui souffrent beaucoup – je pense qu'on le sait. Ces gens-là ne demandent pas des médicaments, ne demandent pas des traitements particuliers; ils demandent d'avoir droit à un emploi, à des mesures d'employabilité.» M. le Président, aucun résultat.

(11 h 30)

Les cadres disponibles d'une autre organisation importante à Montréal – c'est en anglais: «On April 1st, we received a fax contract for $2 000, $80 000 for a period of one year. On the Tuesday just after the Easter weekend, I was invited to discuss and sign the contract, only to find out that the Minister's office has stopped all one-year contracts and they must all be reduced for three months. This not only caught us by surprise, but also upset the CEQ local staff chief executive members.»

M. le Président, je peux poursuivre. Le Centre juif d'orientation et de l'emploi, le service d'emploi pour les jeunes, Youth Employment Service, dont la mission est d'encourager les jeunes de langue maternelle anglaise à retourner au travail.

Un autre – celle-là, c'en est presque une farce maintenant, M. le Président – c'est des cours d'été à Rimouski où c'est la commission scolaire des Phares qui a demandé et redemandé à la ministre et au député local s'ils peuvent avoir leur budget. Il y a même eu, en fin de semaine, un communiqué – je ne sais pas si la ministre en a pris connaissance, si elle n'en a pas pris connaissance, on va lui remettre – pour dire que maintenant un diplôme de secondaire, ce n'est plus important. Alors, c'est le communiqué qui a été dit à Rimouski sur les conseils des gens, évidemment, qui manifestent contre Emploi-Québec, qui ne sont pas d'accord avec la façon dont Emploi-Québec fonctionne. Je peux même vous dire le nom des représentants, c'est M. André Patry et Mme Danielle Leclerc du centre de formation Rimouski-Neigette.

Je peux poursuivre, M. le Président. Des mesures d'employabilité, le Comité interentreprises sur l'intégration au travail des personnes handicapées, là, aussi, il y a des gens qui souffrent parce que Emploi-Québec n'est pas capable de faire son travail; les Petites Mains, qui est une organisation dédiée aux femmes immigrantes, aux femmes monoparentales; l'Association des paraplégiques du Québec; l'Association Montréalaise pour les aveugles; et je voudrais terminer aussi avec une autre organisation dans mon comté, le Trait d'union, M. le Président.

Alors, je termine en demandant à la ministre quand est-ce que vont finir ces coupures et j'aimerais déposer la liste que je viens d'énumérer pour, j'espère, cette fois, qu'elle puisse répondre à ces organisations-là. Avec votre permission, j'aimerais avoir le consentement, M. le Président.


Document déposé

Le Président (M. Geoffrion): Oui, merci, M. le député. Mme la ministre, pour cinq minutes.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Mais d'abord j'aurais peut-être dû déposer les 350 ententes qu'on s'apprête à conclure avec des organismes externes pour une valeur d'à peu près 75 000 000 $, parce que c'est ça qu'on est en train de faire, on en a 350 qui sont en train de se conclure. Et il y a plusieurs des cas qui ont été soulignés par le député dont j'ai déjà eu connaissance, et ce sont des cas où des ententes ne sont pas encore conclues.

Moi, je vais vous dire, le choix que je fais dans ce dossier-là, c'est d'abord de donner un signal que les ressources externes, ça fait partie de notre paysage, ça fait partie de notre histoire et il y a des pratiques là, des clientèles, aussi, qui sont desservies, qui sont tout à fait uniques. Et ça a été redit dans la politique de reconnaissance de ressources externes. C'est redit de plusieurs manières de ma part, de la part aussi des gestionnaires centraux, comme aussi au niveau des régions et des centres locaux d'emplois. On doit compter sur ces ressources-là pour faire en sorte d'avoir des services publics d'emploi sur un territoire qui rejoint bien les clientèles qui en ont le plus besoin.

Mais, oui, actuellement on a donc terminé cette année financière. On en commence une autre et au début, malheureusement, dans un monde idéal... L'an prochain, ça se fera d'une autre manière, mais il m'est apparu assez clair, quelque part en mars, qu'on ne pourrait pas terminer toute cette opération de reconduction des contrats avec les ressources externes pour le début de l'année financière. C'est la raison pour laquelle j'ai écrit et j'ai pris des dispositions auprès de ces groupes pour qu'il y ait une reconduction de leurs mandats pour une période de trois mois, le temps que les échanges se fassent sur les ententes finales à prendre entre Emploi-Québec et ces ressources externes.

Comme je vous le disais tout à l'heure, non seulement on a permis une courte période de transition pour permettre la conclusion de ces ententes-là, permettre le fait qu'elles ne se fassent pas dans toutes sortes de conditions, qu'elles se fassent correctement, parce que, comme je le situais tout à l'heure, il y a un certain nombre d'organisations pour qui il nous faut avoir des discussions franches sur les clientèles, les territoires et le fait que des groupes se situent moins bien dans la conjoncture actuelle où on est en train d'installer des services publics d'emploi...

Par ailleurs, parmi les exemples que vous montrez, il y en a qui témoignent... Bon. Évidemment, il y a des exemples qui concernent des reconductions, et je me permets de préciser qu'à quelques reprises vous vous êtes permis de dire que certains groupes n'ont pas eu d'argent. Vous savez, ces genres d'ententes là, c'est des ententes de services très standards. Vous accueillez tel ou tel type de clientèle et, sur présentation de factures, il y a remboursement de factures, il faut que ça se fasse des deux côtés. Si les organisations n'ont pas fait preuve qu'elles avaient dépensé un certain montant d'argent pour cette période-là, c'est bien évident qu'il n'y a pas d'argent qui a été versé. Alors, il se pourrait que, dans certains cas que vous soulignez, il s'agisse d'une situation comme celle-là.

Par ailleurs, dans la série d'exemples que vous donnez, évidemment il faudrait revenir sur un certain nombre de choses, mais... C'est des citations assez rapides où il y a beaucoup, beaucoup de raccourcis ici. Mais certaines des situations témoignent du défi que nous avons de bien situer les interventions que doit faire Emploi-Québec, et je vais me permettre de prendre une image. Ce n'est pas parce qu'une personne, ou un établissement scolaire même, dit qu'Emploi-Québec devrait payer pour telle chose, qu'automatiquement le compte de banque s'ouvre et le livre de chèques est ouvert et à la disposition de tout le monde.

Et, moi, j'ai vu des cas où il y avait des pratiques, notamment même du côté fédéral aussi, pendant un certain nombre d'années, ils ont été tout seuls dans le champ, ils finançaient toute sorte de choses, bien il y a des pratiques qu'il nous faut réviser aussi parce qu'il y a des limites. L'argent n'est pas à l'infini, et c'est extrêmement important, à ce moment-ci de cette deuxième année dans laquelle on entre, de bien cibler les interventions qu'on veut faire.

Alors, quand vous me dites une affirmation: diplôme secondaire, pas d'importance, il faudrait que je voie l'article. Mais il y a quelque chose qui est sûr, le travail d'Emploi-Québec, ce n'est pas d'être le système d'éducation. Le travail d'Emploi-Québec, c'est de permettre à des gens qui ont des besoins particuliers en termes de formation de les combler. Mais, une fois qu'ils sont rendus à terme et que ces personnes-là ont en main le minimum de formation qu'il faut pour faire face à la musique, bien, il y en a d'autres qui ont un travail à faire.

Alors, je mets en garde le député de l'opposition de prendre, comme ça, à la légère, toutes ces affirmations qui font en sorte qu'on a des exigences envers Emploi-Québec qui n'ont absolument pas lieu d'être.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la ministre. La parole est maintenant à la députée de Crémazie.


Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Bien, la réalité au jour le jour en région, dans le cadre du travail qui est effectué dans la lutte contre le chômage et l'exclusion, contraste vraiment avec ce qu'on peut entendre ici, à l'Assemblée nationale, ou dans certains cercles d'observateurs qui malheureusement ne vont pas assez souvent sur le terrain. À cet effet, la mise en place des CLE et des CLD, même si, on l'a déjà dit, elle comporte certaines difficultés d'implantation, a tissé des liens nouveaux entre les acteurs du développement local et aussi le gouvernement du Québec.

On sait que, pour tout le monde, la préoccupation de l'emploi est très, très, très importante. De là naît la nécessité d'une collaboration étroite et harmonieuse entre le centre local de développement, chargé d'élaborer ce plan d'action, et le centre d'emploi. Ainsi, le personnel du secteur de la main-d'oeuvre et de l'emploi, en synergie avec les partenaires du marché du travail, apporte, à l'élaboration du plan local, l'expertise et les préoccupations de l'emploi pour le secteur, la région concernée.

Le développement de la main-d'oeuvre au Québec trouve donc son essor dans le développement économique de chacune des régions. D'ailleurs, notre gouvernement a saisi les importants enjeux qui y sont reliés en mettant en place un réseau public intégré et décentralisé de services à la main-d'oeuvre et au marché du travail, soit les centres locaux d'emploi, et en créant des services destinés aux promoteurs de projets qui ont une incidence sur l'économie sociale par les centres locaux de développement, les CLD.

Les CLD, donc, et le module Emploi-Québec du CLE dégagent une vision commune des problèmes, des enjeux et des stratégies d'intervention pour la mise en oeuvre locale de la politique active du marché du travail. Pour ce faire, il faut que la dynamique entre les CLE et les CLD soit au coeur même de l'action planifiée conjointe sur le terrain. La prise en charge du développement économique d'une région s'effectue prioritairement évidemment au plan local. C'est à cet égard que le CLD est la porte d'entrée qui s'ouvre à tous les promoteurs de projets susceptibles de créer de l'emploi.

(11 h 40)

Sur le terrain, nous trouvons d'autres acteurs acharnés qui, au jour le jour, s'affairent à lutter contre le chômage et l'exclusion sociale dans les CLE. Le mandat principal des CLE est de permettre aux chercheurs et aux chercheuses d'emploi, on l'a déjà dit, de retourner sur le marché du travail ou de favoriser l'amélioration de leur employabilité en leur offrant des mesures et des programmes qui augmenteront leurs champs de spécialisation. La création de ces deux types d'organisation crée une nouvelle dynamique locale et régionale qui se trouve à l'étape du rodage. Il reste encore, bien sûr, des précisions à apporter au sujet de l'articulation des rôles de chacun tant au plan local que dans le partage des responsabilités de coordination régionale et nationale.

Le fondement de cette réalité apparaît au travers de la collaboration au jour le jour entre les CLE et les CLD. Les conflits appréhendés par plusieurs entre ces organisations n'ont pas du tout éclaté. Les gens ont appris à travailler ensemble et à connaître les balises de leurs interventions respectives. L'important, c'est de mettre en place une infrastructure locale et régionale qui favorise la mise en commun des moyens et des ressources de chacune de ces organisations. Il s'agit de créer une véritable concertation entre tous les partenaires et les diverses institutions publiques.

Ainsi, la mise en commun des avoirs de chacun contribuera à faire diminuer le taux de chômage et bien sûr enrichir le marché du travail. Nous avons d'ailleurs des exemples concrets d'étroite collaboration entre les CLD et les CLE. M. Jean Blanchet, président du CLD de Beauport, disait à ce propos, lors de l'inauguration du CLE de Beauport, que l'étroite collaboration souhaitée dans la politique initiale du gouvernement s'est développée dès les premiers instants. Effectivement, lors de l'incorporation du CLD de Beauport, il y a de ça environ un an, déjà Mme Évelyne Dumais du CLE et toute son équipe étaient en contact avec l'équipe du CLD de Beauport pour voir à consolider un certain nombre de projets. C'est aussi dans un exercice d'élaboration des priorités, des actions et des choix que les CLD et les CLE doivent s'engager dans le milieu. On arrive ainsi à une plus grande cohérence des actions entreprises localement et régionalement.

Comme le disait d'ailleurs ma collègue la ministre d'État au Travail et à l'Emploi récemment: Le gouvernement auquel j'appartiens n'a plus à faire la démonstration qu'il croit au partenariat. Alors, en matière de main-d'oeuvre et d'emploi où l'action du gouvernement doit nécessairement être prolongée par celle des employeurs et des autres acteurs du marché du travail, le partenariat s'impose presque par lui-même.

Enfin, M. le Président, le partenariat ne se décrète pas. Il faut une volonté commune de joindre nos forces, de se faire mutuellement confiance et tendre vers des objectifs communs. C'est dans cette façon de faire que le Québec sera la force de ses régions. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la députée. Avant de laisser la parole à M. le député pour un dernier cinq minutes, j'aurais besoin du consentement des membres pour aller au-delà de midi si on veut compléter les 20 minutes de conclusions, soit jusqu'à 12 h 12, 12 h 15. Est-ce que c'est possible?

M. Marsan: Consentement de l'opposition.

Mme Lemieux: Pourquoi on dépasse, là? Y a-tu une raison pour laquelle on dépasse?

Le Président (M. Geoffrion): Bien, parce qu'il reste cinq minutes au député de Robert-Baldwin et ensuite, en conclusion, vous avez chacun 10 minutes. Donc, ça mène à peu près à 12 h 10. Est-ce qu'il y a un consentement pour aller jusqu'à 12 h 10?

Mme Lemieux: Oui.

Le Président (M. Geoffrion): Merci. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Alors, dans le dernier cinq minutes mais non le moindre, M. le Président, j'aimerais discuter avec la ministre de la situation des carrefours jeunesse-emploi du Québec.

Vous vous souvenez, je pense, qu'il y a eu là aussi l'unanimité de l'Assemblée nationale pour mettre en place ces carrefours jeunesse-emploi. On a vécu beaucoup de difficultés dans les dernières années, que ce soit en termes de décrochage scolaire, aussi au nombre de suicides qui a pu augmenter chez les jeunes. Eh bien, nous avons convenu ensemble, et nous le pensons toujours, que les carrefours jeunesse-emploi sont vraiment un outil indispensable pour nos jeunes.

Nous recevions, tous les députés, une missive du réseau des carrefours jeunesse-emploi qui était adressée à tous les députés du Québec. Ils nous donnent le titre également de cofondatrices et cofondateurs des carrefours jeunesse-emploi. Et l'objet de la missive – c'est une situation d'urgence: décrochage de la mission des carrefours jeunesse-emploi du Québec, et en gros titre L'appareil administratif d'Emploi-Québec est en train d'étouffer ce beau grand projet communautaire . Ils ajoutent: «Si rien n'est fait d'ici les prochaines semaines, l'un des plus grands mouvements de solidarité des cinq dernières années n'aura d'autre issue que de décrocher, victime de la machine gouvernementale, de sa culture incompatible avec celle du monde communautaire. Ce tragique événement engloutirait alors avec lui les efforts de milliers de Québécois bénévoles, fondateurs des carrefours du Québec et mettrait en péril l'accessibilité des services communautaires d'emploi pour les jeunes adultes de 16 à 35 ans.»

Et, quand vous lisez la missive, qui a quelques pages, six ou sept, M. le Président... Elle est signée, en passant par, je pense, un représentant de chacune des régions, il y en a au moins 16 sur 17 régions. Alors, c'est quelque chose qui est quand même important, lorsqu'on est député et qu'on reçoit cette missive-là, encore plus lorsque tous les députés, nous l'avons reçue.

Alors, ce sont des critiques vraiment importantes: une formule trop gagnante pour certains dirigeants d'Emploi-Québec, et au cours des derniers mois les carrefours ont plutôt eu droit à des menaces. C'est ce qu'on nous dit dans la lettre. Ce n'est pas le député de l'opposition, ce n'est pas d'autres personnes, ce n'est pas des journalistes, ce n'est pas le gouvernement fédéral, ce n'est pas l'ancien gouvernement, ce sont les signataires des régions qui nous disent: «Au cours des derniers mois, les carrefours ont plutôt eu droit à des menaces de réduction par le financement, d'intégration par le syndicat de la fonction publique du Québec, de transformation par la fonction publique. Quel climat de frustration pour ces équipes d'administratrices et d'administrateurs bénévoles du milieu. Formule trop gagnante pour le Syndicat de la fonction publique du Québec, grand risque de dérapage.»

On souhaite... De toute évidence, la volonté politique était d'assister la naissance des carrefours en respectant leur autonomie. Et respecter l'autonomie, ça ne veut pas dire d'être absent comme législateur ou comme grand responsable de la façon dont les deniers sont dépensés. Au contraire, c'est de faire confiance à ces partenaires-là qui sont tout près du marché du travail, particulièrement les jeunes. Il est crucial que vous agissiez rapidement, efficacement et avec leadership dans ce dossier.

Ils proposent un plan de redressement extrêmement intéressant à notre avis, qui mérite l'écoute et, j'espère, l'assentiment de la ministre. La première chose: procéder au transfert des carrefours, les enlever à la ministre de l'Emploi pour les redonner au Secrétariat à la jeunesse. Il doit y avoir une bonne raison, Mme la ministre, pourquoi ces jeunes veulent retirer de votre ministère ce genre de responsabilité: parce qu'ils n'ont plus confiance dans le ministère de l'Emploi et de la Solidarité. On veut établir de nouveaux protocoles financiers, on veut assurer la reconnaissance par l'appareil administratif du rôle incontournable des carrefours. En fait, les carrefours sont là et ils ont les moyens, ils veulent tout simplement être appelés à grossir, à bâtir leur mission, à permettre à plus de jeunes de trouver de l'emploi.

M. le Président, le temps passe, je pense que la ministre ne peut pas être insensible à l'appel qui vient des jeunes du Québec. De nouveau, ce n'est pas une demande qui est partisane, c'est vraiment des gens qui sont sur le terrain, qui savent de quoi ils parlent, qui ont une expérience et qui sont très souvent des bénévoles. Alors, que va répondre la ministre au réseau des carrefours jeunesse-emploi? Est-ce qu'elle a l'intention de couper leur budget? Et a-t-elle l'intention de faire relever les carrefours jeunesse-emploi d'Emploi-Québec?

Le Président (M. Geoffrion): Merci, M. le député. Nous en sommes à la conclusion de nos travaux. Mme la ministre, vous avez 10 minutes pour conclure.


Conclusions


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, que l'opposition fasse part de certaines inquiétudes soulevées par les uns, les autres, certaines frustrations, c'est une chose; que l'opposition s'appuie sur des demi-vérités, c'est une autre chose. Je vois bien qu'on veut dégager la plus mauvaise impression possible sur ce que le gouvernement du Parti québécois est en train de faire. Alors, c'est la vie!

Je préciserais, avant, vraiment, d'entreprendre ma dernière intervention, au sujet des carrefours jeunesse-emploi, je ne reprendrai pas chacun des éléments, mais je veux juste vous dire que je suis en action dans ce dossier-là depuis que je suis arrivée. Je les ai rencontrés, j'ai rencontré les représentants du réseau des carrefours jeunesse-emploi. Je suis allée sur le terrain. J'ai réactivé un comité conjoint des carrefours jeunesse-emploi avec Emploi-Québec. Nous sommes en train de renouveler... Écoutez, il y a 27 000 000 $ dans les carrefours jeunesse-emploi, 91 carrefours jeunesse-emploi qui seront financés cette année. On pense pouvoir en ajouter quatre autres au cours de l'année 1999-2000.

Alors, écoutez, moi, je suis dans l'action, et les problèmes, je les prends un après l'autre. Je parle aux personnes et je ne pense pas que c'est juste par des réactions à des papiers... D'ailleurs, ça me fera plaisir d'envoyer la réponse que j'ai faite à ce document-là. Mais, pour moi, j'ai un dialogue extrêmement intéressant avec les carrefours jeunesse-emploi que je compte bien poursuivre.

Ceci étant dit, l'opposition a donc soulevé un certain nombre de choses, des inquiétudes qui sont quelquefois légitimes, mais beaucoup, beaucoup, beaucoup de demi-vérités. Parmi les préoccupations légitimes, je réitère qu'il ne s'agit pas de prétendre qu'Emploi-Québec est à l'abri de tout. C'est une organisation qui commence. On s'est donné un délai de trois ans pour développer ces services publics d'emploi et je dirais que c'est une organisation, ainsi que le gouvernement et moi-même personnellement, qui met les bouchées doubles pour atteindre un niveau d'excellence auquel la population du Québec a le droit de s'attendre quant à des services publics d'emploi.

(11 h 50)

Vous avez énormément parlé des ressources externes, ces groupes qui accompagnent différentes catégories de travailleurs et de gens en recherche d'emploi. Je vous l'ai dit, ces ressources externes existent depuis longtemps. Elles ont eu des liens contractuels avec le gouvernement fédéral, le ministère de la Sécurité du revenu ou la SQDM à l'époque. Et, à ce moment-ci, il faut se rendre compte qu'en regroupant le financement au sein d'une même organisation on se rend compte de problèmes de cohérence et de dédoublement. Alors, il y a un peu d'ordre à mettre. Mais, comme je le disais, on s'apprête à reconduire au moins 350 ententes pour une valeur de 75 000 000 $. Alors, qu'on ne vienne pas me faire croire qu'il ne s'agit pas d'un appui concret aux ressources externes en main-d'oeuvre.

Je vous rappellerais aussi que le gouvernement fédéral lui aussi contractait avec des organismes externes. Il lui est arrivé de poser des gestes pas mal plus dramatiques que les agencements et les ajustements qu'on est en train de faire. Il y a quelques années, il y avait une trentaine d'organismes qui travaillaient en main-d'oeuvre féminine; il n'y en a plus que 17 sur le territoire québécois. Alors, tu sais, de parler du passé, c'est une nostalgie qui est un peu trompeuse.

Je vous ai aussi indiqué que les budgets du Québec sont plus limités que ceux du fédéral et que nous venons de dégager, à même les ressources internes du ministère, un montant de 30 000 000 $ qui sera réparti entre les régions, qui permettra d'accroître notre capacité d'offrir de nouvelles mesures à des personnes et de bonifier, dans certains cas, le financement de contrats via des ressources externes.

Je vous rappelle aussi qu'il faut être conscient aussi de ce dont on dispose. Il y a quand même 638 000 000 $ qui sont répartis entre les régions à partir d'un certain nombre de critères. C'est quand même un budget majeur d'intervention. Et, même, comme je vous le disais, s'il est majeur, il reste que les besoins sont très grands. Il nous faut bien repérer les clientèles que nous voulons desservir, il nous faut avoir beaucoup plus de finesse, de raffinement, dans les manières de bien détecter les besoins auxquels il nous faut répondre, des personnes qui sont en recherche d'emploi.

Vous avez parlé à différentes reprises de la question du partenariat. Je ne croyais vraiment pas être obligée de reparler, notamment, de la non-reconduction du contrat de Diane Bellemare. Ça a l'air que ce n'est pas clair. Quand quelqu'un a un contrat avec le gouvernement, ce n'est pas un contrat à vie, et il arrive que ces contrats ne soient pas reconduits. Dans ce contrat, il était non seulement prévu, mais il était aussi fair play que, dans des délais raisonnables, à la fin du contrat, des indications lui soient données. Alors, voici ce qui a été fait.

Pour ce qui est du partenariat, je vous rappellerais que le gouvernement auquel j'appartiens n'a pas du tout à faire la démonstration qu'il croit au partenariat, et personnellement non plus. Je pense que c'est un plus dans cette réforme des services publics d'emploi que nous soyons accompagnés de manière très concrète par les différents acteurs du marché du travail. Oui, actuellement nous avons besoin de revoir nos modes de collaboration, mais en aucun cas ça ne remet... Ce n'est pas parce qu'on revoit nos modes de collaboration que ça remet en cause les fondements mêmes de cette collaboration.

Et, oui, j'entends donner à la Commission des partenaires tout comme aux conseils régionaux des partenaires toutes les marges de manoeuvre pour qu'ils puissent vraiment exercer leurs mandats avec toute la capacité et tout le potentiel que les partenaires nous offrent dans cette question.

Alors, je veux quand même... Quand on disait qu'il nous faut revoir nos modes de collaboration, il s'agit dans le fond d'une chose fort simple qui a l'air bien compliquée pour certains, mais il reste qu'il nous faut avoir des rapports beaucoup plus directs, beaucoup plus conviviaux. Et je vous dirais que j'ai eu la chance d'aller beaucoup sur le terrain, et j'ai été agréablement surprise de la complicité très grande qui s'établit entre les différents acteurs qui sont concernés: les conseils régionaux des partenaires avec les directions d'Emploi-Québec, les conseils régionaux des partenaires, on en a parlé tout à l'heure, avec les CLD, avec les CRD. Alors, cet arrimage entre ces différentes instances se passe beaucoup mieux que ce qu'on aurait pu prévoir.

Je terminerais en disant que le partenariat, ça ne se décrète pas, que c'est une... il nous faut avoir une volonté commune de joindre nos forces. Et, en ce sens-là, j'avoue que je m'attendrais de l'opposition à ce qu'elle soit un partenaire dans cette phase importante d'implantation des services publics d'emploi. C'est très facile d'aboyer après la caravane, comme on disait dans les films de western. La caravane de l'emploi, elle est particulière. Les défis sont grands, le marché du travail est beaucoup plus complexe, les attentes du marché du travail sont grandes, les attentes des personnes qui veulent avoir accès au marché du travail sont aussi grandes. Ce défi de l'emploi ne va être relevé que par des efforts communs des employeurs, des syndicats, des organismes communautaires et du gouvernement, et, j'espérais bien, un jour, de l'opposition officielle.

Vous savez, vous n'avez pas arrêté de nous dire, l'opposition, que c'est grâce à une résolution unanime de la Chambre que nous avons rapatrié ces sommes d'Ottawa. Je m'excuse, mais vous ne pouvez pas juste nous dire ça, vous croiser les bras après puis nous dire: Ah! il y a une petite chose, ici, qui ne fonctionne pas bien. Ça ne marche pas, ça. Et je dois vous avouer, ça ne fait pas longtemps que je suis en politique et je n'aurais jamais cru que l'opposition du Parti libéral ferait autant d'efforts pour attaquer la crédibilité du gouvernement, ferait autant d'efforts pour attaquer la crédibilité d'une organisation qui est jeune, qui est dans une première année, que l'opposition officielle ne ferait pas l'effort de reconnaître ce qui est fait sur le terrain, le fait qu'on a rejoint des personnes. Oui, il y a encore beaucoup à faire, à terme on doit s'améliorer, oui, il faut travailler intensément, mais vous faites l'affaire de bien du monde en attaquant la crédibilité du gouvernement.

Oui, vous pouvez bien vous réjouir. Vous pouvez même ne pas cesser de nous rappeler que vous avez consenti à cette résolution unanime de l'Assemblée nationale. Mais, je m'excuse, il y a une part de contrat que vous absorbez très mal. Et ce n'est pas en attaquant la crédibilité du gouvernement qu'on va avancer. Ce n'est pas en attaquant la crédibilité du gouvernement qu'on va faire en sorte que les effets que nous ne voulons pas de cette entente fédérale-québécoise, on puisse arriver à les contourner. Vous savez pertinemment que le fédéral a fait des choix importants, ces dernières années, au sujet de l'assurance-emploi, qu'ils rétrécissent l'accès à l'assurance-emploi et qu'on en vit les conséquences.

Alors, cessez, s'il vous plaît, de dire que le gouvernement du Québec ne fait pas ci, ne fait pas ça et attaquez les bons éléments qu'il nous faut attaquer. Je n'aurais jamais cru que l'opposition officielle se servirait de l'implantation de ce vaste réseau de services publics de l'emploi. Je ne sais pas si vous réalisez l'opération qu'on est en train de mener, mais, moi, je sais une chose, c'est qu'on doit aller dans cette direction-là, on doit intensifier nos efforts. Les bouchées doubles, on les fait, je les fais, les gens sur le terrain les font, et j'espère que l'opposition officielle va mettre la main à la pâte au lieu de strictement attaquer la crédibilité du gouvernement du Québec.

Le Président (M. Geoffrion): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député, pour votre conclusion, vous avez 10 minutes.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Oui, je vous remercie beaucoup, M. le Président. Tout de suite, pour répondre à la ministre, ce n'est pas seulement l'opposition. J'ai eu beau le répéter pendant cette interpellation, mais je ne pense pas qu'elle ait compris.

M. le Président, les titres des journaux dans les derniers mois, La confusion règne à Emploi-Québec , ce n'est pas l'opposition – ça c'était dans La Presse – Les 1 000 employés fédéraux suscitent la pagaille , c'était dans Le Soleil , Chaos dans les centres d'emploi , La Presse , La grogne monte autour d'Emploi-Québec . M. le Président, il y a eu un article favorable à Emploi-Québec et c'était sous la signature de la ministre de l'Emploi, et c'est la seule qui vraiment a trouvé quelque chose de positif là-dedans. Mais, si on continue, eh bien, Main-d'oeuvre, Québec en a plein les bras , Cafouillage à la main-d'oeuvre , Alerte rouge à Emploi-Québec , Les pestiférés du privé , La ministre accuse , La grogne du printemps , et ça pourrait se continuer comme ça, M. le Président.

(12 heures)

Je voudrais reprendre une dernière fois et j'espère qu'on pourra écouter cette fois-là ces constats de M. Claude Picher, Alerte rouge à Emploi-Québec : «Un an après le transfert des responsabilités en matière de placements, Emploi-Québec a lamentablement échoué dans son objectif de réaliser ses 64 000 placements. Selon les chiffres obtenus par M. Lasarre, on n'a atteint que 43 000, ce qui a été confirmé par la ministre. Pire, les objectifs ont été revus à la baisse, et, comme par hasard, cette révision a diminué les cibles – ce dont on a parlé tantôt, mais on ne voulait pas prononcer les mots "tripotage de chiffres", M. le Président.

«Il était prévu, lors de la signature de l'entente avec Ottawa, qu'Emploi-Québec remettrait son premier rapport couvrant la première année complète des activités en mars 1999 – et là on est dans des délais un après l'autre et ça ne finit plus. Québec profite de l'augmentation des transferts fédéraux pour réduire sa propre contribution, et ça, c'est sur le dos des plus démunis, ceux qui ont besoin de la sécurité du revenu. Les chiffres accumulés sur une base régionale sont compilés à partir d'échantillonnages tellement faibles qu'ils sont tout juste bons à chauffer le poêle.» Mais ça, c'est M. Claude Picher.

M. le Président, j'espère que la ministre a vraiment compris que ce n'est pas seulement l'opposition qui décrit ce qui est fait à Emploi-Québec, qui décrit ce qui est fait au ministère de l'Emploi. Chose importante, c'est aussi la crédibilité du Québec, sa réputation. Parce que, au fil des ans, depuis plus de trente ans, on s'est serré les coudes et on a vraiment essayé de travailler pour obtenir cette gestion des transferts de la main-d'oeuvre et, dans les faits, bien, on assiste plutôt à une véritable faillite.

Je regrette, après cette interpellation de deux heures, il y a beaucoup de questions qui demeurent sans réponse. La coupure de 41 %, je ne sais pas s'il y a des gens... sûrement, des gens ont écouté, et la réponse de la ministre, ça a été de dire: Bien, écoutez, on va réinjecter... Non, ce n'est pas «on va réinjecter», on va redéployer 30 000 000 $ au niveau de ce 41 % là. Vous savez ce que ça veut dire «redéployer»? C'est couper à une organisation communautaire pour le donner à l'autre. Quelle sorte de critère on va prendre? Aucune idée, M. le Président.

Tous les points positifs qui ont été avancés par le parti ministériel, eh bien, si ça va si bien que ça, comment ça se fait qu'on a coupé dans Emploi-Québec? Comment ça se fait que le fonds a été diminué de 21 000 000 $? Où est-ce qu'il est votre discours pauvreté zéro? Où est-ce qu'il est le discours de l'économie sociale? Moi, je me souviens de certaines personnes qui faisaient les gorges chaudes, du côté du Parti québécois, lorsqu'on avait eu ce Sommet de l'emploi et de l'économie.

On a parlé des cibles. Je pense qu'il faudrait... pas y revenir, ça a été documenté, M. le Président, pas nécessairement par l'opposition, mais par plusieurs journalistes chevronnés, par des représentants également de certains centres locaux d'emplois. Ma collègue la députée de Sauvé nous en a donné plusieurs exemples.

Aucune comparaison entre l'efficacité du nouveau système versus l'ancien. On prend une ligne partisane, on dit: Le gouvernement péquiste a une ligne, on va suivre celle-là, puis c'est tout ce qu'on va dire, même si on est à contre-courant. Pareil comme dans la santé, M. le Président. On a connu ça pendant quatre ans, le précédent mandat de ce gouvernement. Donc, manque de leadership certain, philosophie de l'État dirige tout, intervient dans tout, le «faites ce que je dis» plutôt que d'impliquer les employés dans la gestion, M. le Président.

Nous avons fait des recommandations à la ministre. La ministre a même suggéré que l'opposition puisse devenir son partenaire. M. le Président, si la ministre nous traite comme partenaire de la même façon qu'elle a traité la Commission des partenaires du marché du travail, on n'ira pas loin. Je vous assure qu'il y a des députés qui vont être mis à la porte plus vite qu'il faut.

Je ne pense pas que la ministre a bien compris ce qu'on a voulu lui dire. Le fait que Mme Bellemare a quitté son poste, pour les raisons que, seule, elle connaît, c'est qu'elle n'avait pas le droit de faire ça sans consulter les partenaires. Ou bien on travaille avec une équipe, ou bien on ne travaille pas. Et c'est ça qu'on veut dénoncer, parce que, si elle le fait dans le congédiement de la présidente, elle va le faire dans d'autres choses, M. le Président, elle n'écoutera pas. Et, à ce moment-là, pourquoi les syndicats reviendraient à la table? Pourquoi les représentants des patrons? Les représentants des cégeps? Des centres d'enseignement?

M. le Président, nous, ce qu'on a suggéré à la ministre, c'est de donner vraiment une autonomie complète à la Commission des partenaires, mais ça ne veut pas dire que le gouvernement va se retirer complètement d'un champ aussi important. Et je vous ai donné l'exemple des établissements de santé, qui ont des conseils d'administration et ça n'empêche pas le gouvernement d'être en mesure de surveiller quand même la qualité qui puisse être faite. On pense également aux commissions scolaires, qui ont une autonomie, qui peuvent engager leurs dirigeants, qui peuvent écrire leurs politiques. Les mesures de gestion participative, c'est bien important, M. le Président. Et c'est ça qu'on a suggéré à la ministre.

Quant à l'ajout de certains représentants à la Commission des partenaires, eh bien, nous pensons à ceux qui ne font pas partie de syndicats actuellement et qui ne sont pas dans une des catégories que la ministre a bien voulu nous énumérer, et nous pensons qu'ils doivent y être au premier chef. Ce sont eux qui vivent les difficultés sur le terrain et on aimerait bien les entendre. On aimerait qu'ils participent à ces mesures actives d'employabilité là, parce qu'ils savent de quoi ils parlent, eux.

Je peux poursuivre, M. le Président, avec ce que nous avons mentionné au niveau des assistés sociaux. Nous avons eu des exemples évidents de ma collègue de Sauvé et des difficultés qui sont amenées par la ministre dans les coupures aux services des assistés sociaux. Eh bien, il nous faudrait très rapidement redresser la barre et que le discours corresponde à la réalité, qu'on arrête de nous faire des grands discours puis, dans les faits, de pénaliser ceux qui sont les plus démunis dans la société.

M. le Président, la ministre nous disait que ça ne fait pas longtemps qu'elle est en poste. En fait, ça fait cinq mois, les élections ont eu lieu le 30 novembre dernier. Eh bien, son record n'est pas vraiment des plus beaux. En peu de temps... Je me rappelle sa fameuse promesse aux téléphonistes de Bell d'amender le Code du travail. Eh bien, elle est revenue sur sa parole. Je me rappelle les clauses orphelin, en commission parlementaire, ça devait être présenté avant le 15 mai. Là aussi, on revient sur la parole. La gestion de l'entente fédérale-provinciale sur le transfert de la main-d'oeuvre, bien, c'est la faillite. Ça ne fonctionne pas. Et ça ne fonctionne pas parce que c'est le gouvernement du Parti québécois et la ministre de l'Emploi qui gèrent cette entente-là.

On n'a pas eu le temps de parler des régimes de stage, d'apprentissage en entreprise, mais ça aussi ça avait été annoncé en grandes pompes au Sommet de l'emploi, et on en avait promis 5 000 sur cinq ans, 1 000 par année. Avec le résultat net, on l'a vu aux crédits, après deux ans, ce n'est pas 2 000 que nous avons eus, c'est 64.

M. le Président, nos attentes étaient beaucoup plus importantes que ce qui a été avancé aujourd'hui. On aurait souhaité des positions claires, un leadership certain, redresser la situation plutôt que continuer. Ça a été le thème que la ministre a pris: On va continuer ce qui est déjà fait. Imaginez où est-ce qu'on s'en va, M. le Président.

Malheureusement, on n'a pas entendu la ministre sur des dossiers importants. Les pénuries de main-d'oeuvre qui existent au Québec, particulièrement dans les secteurs en émergence: dans le domaine du développement économique, l'informatique, les innovations technologiques. Pénuries aussi dans le domaine de la santé, les médecins, les nombreux médecins qui quittent au moment où le Parti québécois a fait un programme de mise à la retraite – on a eu l'exemple des radio-oncoloques dernièrement à Québec – eh bien, on met les médecins à la retraite, des médecins compétents, puis, de l'autre côté, on n'a plus personne pour soigner les patients, on envoie les patients aux États-Unis. Ça, c'est la planification du gouvernement du Parti québécois. M. le Président, on peut parler des infirmières. On peut parler – je lisais un article, il n'y a pas longtemps – des professeurs, même que, dans quelques années, on va manquer de professeurs. Qu'est-ce que la ministre fait dans ces dossiers-là?

En terminant, j'ai mentionné les difficultés des carrefours jeunesse-emploi. J'espère, j'espère vraiment qu'on va garder les carrefours jeunesse-emploi et qu'on va leur donner toute l'autorité. M. le Président, je termine en mentionnant que nous sommes déçus, vraiment déçus du peu de réponses que nous avons obtenu de la ministre dans le dossier aussi important qui est celui du développement de l'emploi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Geoffrion): Merci. Alors, nous avons complété nos travaux. Je remercie tous les membres de cette Assemblée qui ont pris la parole. Et nous ajournons nos travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 8)


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