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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 1 décembre 1999 - Vol. 36 N° 42

Étude détaillée du projet de loi n° 67 - Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement


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Table des matières

Amendements déposés

Étude détaillée


Intervenants
Mme Denise Carrier-Perreault, présidente
M. Guy Lelièvre, président suppléant
Mme Diane Lemieux
M. Jean-Claude Gobé
M. Jean-Sébastien Lamoureux
M. Mario Dumont
Mme Nathalie Normandeau
M. François Beaulne
M. Stéphane Bédard
M. Pierre-Étienne Laporte
M. Bernard Brodeur
Mme Manon Blanchet
M. Rémy Désilets

Journal des débats


(Quinze heures quatre minutes)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je déclare donc la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte, vous rappelant que nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement.

Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Laporte (Outremont) remplace M. Marsan (Robert-Baldwin); M. Lamoureux (Anjou) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion); et M. Beaulne (Marguerite-D'Youville) remplace M. Kieffer (Groulx).

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vous remercie. Alors, hier, quand nous avons ajourné les travaux, il y avait une entente à l'effet qu'il y aurait un dépôt, par l'opposition, des amendements à l'ouverture de cette séance-ci. Alors, M. le député de LaFontaine.


Amendements déposés

M. Gobé: Oui. D'accord, Mme la Présidente, vous avez tout à fait raison, et parole donnée, parole tenue, comme on dit. Alors, il me fait plaisir de déposer les amendements. La numérotation aura peut-être à évoluer selon les débats que nous aurons à faire en cette commission. Elle est donc à titre indicatif, mais les textes, eux, vont rester. D'accord? Et je les transmets donc – un, deux, trois, quatre, cinq, six et sept amendements. D'accord? Alors, voilà, je les dépose officiellement à la commission, faisant ainsi...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Vous les déposez à la présidence, M. le député de LaFontaine...

M. Gobé: À vous-même, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...qui demandera de faire faire des copies pour l'ensemble des membres de cette commission.

M. Gobé: Voilà. Tout en souhaitant, bien sûr, que, bon, nous puissions les regarder à leur mérite et en face même de l'objectif que nous recherchons, qui est celui de faire en sorte qu'on ait une législation qui soit la plus étanche possible en ce qui concerne la discrimination des jeunes au travail et des nouveaux employés, et, bien sûr, qu'elle puisse agir dans l'objectif de réduire ou d'annihiler complètement le coût que certains nous font valoir qu'une telle législation peut apporter à l'économie du Québec, particulièrement aux entreprises qui connaissent ce problème-là. Alors, c'est le but de l'opération. Et aussi, le but de l'opération est de démontrer notre volonté à nous, de l'opposition, de trouver une solution juste et équitable rapidement pour les jeunes du Québec.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord, M. le député de LaFontaine. Alors, vos amendements sont donc déposés, et les membres pourront en disposer dans quelques...

Une voix: Est-ce qu'on peut avoir les photocopies?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Ils sont à la photocopie présentement.

Alors, écoutez, je comprends aussi qu'il y a eu des discussions entre la ministre et l'opposition officielle. Donc, on peut donc poursuivre, puisque les amendements ne s'adressent pas nécessairement à l'article où on était en particulier. C'est ce que j'ai compris hier.

M. Gobé: ...résumer rapidement, succinctement, à sa manière, les raisons de l'échange que nous avons eu, parce qu'il ne faut pas qu'on ait l'air de tenir des secrets devant tout le monde.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, Mme la ministre, avez-vous des explications, commentaires...

M. Gobé: Les gens de la commission sont des gens qui méritent de savoir qu'est-ce qui se passe et qu'est-ce qui se dit. Si vous êtes d'accord, madame.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Mme la Présidente, merci. Alors, oui à quelques explications. En fait, ce dont nous avons convenu, c'est de continuer l'étude article par article du projet de loi, mais, lorsque nous serons rendus à l'article 87.3, considérant qu'il y a encore des discussions en cours et qu'il y a donc des possibilités, j'appellerais ça «d'ajustement» – je ne peux pas les évaluer à ce moment-ci, je vais le savoir dans les prochaines heures – de 87.3 eu égard aux amendements qui ont été déposés par l'opposition, il y a un travail qui se fait en parallèle. Alors, lorsque nous serons rendus à cet article-là, nous pourrons peut-être procéder à l'article suivant, le temps de poursuivre et les discussions et le travail qu'impliqueraient d'éventuels changements à 87.3.


Étude détaillée


Loi sur les normes du travail


Disparités de traitement (suite)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, il y aura des demandes de suspension, donc, pour différents articles. Nous poursuivons donc, si je comprends bien, l'étude de l'article 87.1, c'est-à-dire des amendements qui ont été déposés et qui étaient en discussion lors de la séance d'hier. Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur les amendements qui sont apportés à l'article 87.1?

M. Gobé: Peut-être nous rappeler le temps qu'il restait de disponible pour parler...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Un moment, je vous prie.

M. Gobé: ...parce que, là, on avait tellement de choses. Peut-être que je n'ai plus de temps, peut-être qu'il m'en reste. Je ne voudrais pas...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, effectivement, il y a quelqu'un qui comptabilise le temps, et c'est heureux. M. le député de LaFontaine, je vous annonce donc qu'il vous reste, à vous, une minute de temps de parole sur les amendements de l'article 87.1. Par ailleurs, le député d'Anjou, lui, n'a aucun temps d'enregistré, bien sûr, parce que... En fait, oui, parce que M. le député d'Anjou se trouve à remplacer M. Sirros. D'accord. Le député de Laurier-Dorion n'avait pas, lui non plus, pris son temps. Alors, M. le député d'Anjou, vous avez donc droit à 20 minutes d'intervention par rapport aux amendements qui sont déposés sur 87.1.

Il vous reste une minute, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, mais, avant de prendre la minute, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, on est dessus, là.

M. Gobé: J'ai parlé 20 minutes, hein, je pense. C'est ça?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Dix-neuf minutes.

M. Gobé: Étant donné qu'il y a deux amendements, est-ce que c'est 20 minutes par amendement? Je pense. C'est ça, le règlement. Donc, je repars pour mon 20 minutes, là.

(15 h 10)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, en fait, normalement, je pense que oui, il y a possibilité de scinder, de couper sur paragraphes, effectivement. Par ailleurs, vous comprendrez que ça n'avait pas été demandé, hier non plus, cette chose-là...

M. Gobé: Oui, mais connaissant...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...mais il n'en reste pas moins que je pense que vous avez quand même encore plusieurs autres articles où on pourra, à ce moment-là, procéder de la façon dont vous l'entendez.

M. Gobé: Non, mais regardez, Mme la Présidente... vous avez fêté 10 ans de vie politique avant-hier?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, le 25 septembre.

M. Gobé: Le 25 septembre. Excusez-moi. Donc, vous avez une grande expérience de cette Chambre, des commissions – c'est là que je veux en venir – et vous savez qu'il n'y a pas besoin de demander de... C'est deux paragraphes, hein: c'est 1°, on discute du premier, 2°, on discute du deuxième. Alors, sans vouloir faire de la polémique puis de la procédurite pour rien, j'ai peut-être quelques autres affaires à dire, et puis...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, oui. Écoutez, on me dit que la ministre, hier, considérait elle-même que c'étaient deux amendements...

M. Gobé: Oui, oui, c'est ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...on parlait d'un premier et d'un deuxième. Alors, à la lueur de ces informations-là, M. le député de LaFontaine, vous pouvez donc procéder.

M. Gobé: Oui. Il y avait hier, Mme la Présidente, une préoccupation qui était très, très forte pour mon collègue le député Pierre Marsan qui est ici, c'était l'application de ce projet de loi là, de cet article-là en ce qui concernait certains travailleurs du secteur de la santé. Et moi, plus particulièrement, ce qui m'inquiète dans ce deuxième amendement, c'est: ajouter, à la fin de l'article 87.1 de la Loi sur les normes du travail, les mots: «et qui, lorsqu'il s'agit d'un salarié assujetti à une convention collective, sont assujettis à la même convention collective que lui». J'ai l'impression que c'est réducteur, c'est-à-dire qu'antérieurement le projet de loi se lisait: «condition de travail moins avantageuse que celle accordée à d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement.» Là, on parle de convention collective.

Si je comprends bien, ça voudrait dire qu'on pourrait avoir, dans le même établissement, pour des gens qui font la même tâche, deux accréditations syndicales, deux unités d'accréditation, et on se retrouverait, à ce moment-là, avec deux conventions collectives qui pourraient être différentes. Et c'est peut-être une manière, là, détournée, une porte qu'on ouvre aux organisations syndicales pour aller s'entendre pour faire une nouvelle accréditation pour des nouveaux travailleurs qui rentreraient dans l'entreprise. C'est un peu le même principe que certains nous reprochent, du côté syndical, lorsqu'ils nous parlent du fameux article 45, là, sur la cession ou l'aliénation d'entreprise, la faillite en particulier puis la vente par syndic: il repart une autre compagnie, enfin, vous savez ce que je veux dire.

Il y a une problématique de jeu de chaise musicale ou de compagnie musicale. C'est un terme qui a été employé, je pense, dans un document de la CSN il n'y a pas longtemps. Je pense qu'ils parlaient de l'article 45. Et là je me pose la question si on n'assistera pas à un jeu d'accréditation syndicale musicale. En d'autres termes, je ne sais pas si, Mme la ministre, vous l'avez vu. Je suis certain, si je ne me trompe pas, que, si vous l'aviez vu, vous ne l'accepteriez pas. C'est qu'on est en train d'ouvrir la porte, de légaliser une nouvelle façon d'organiser le travail à l'intérieur des entreprises en termes d'accréditation syndicale, ce qui permettrait une échappatoire très, très large pour traiter des travailleurs différemment au sein d'une même entreprise.

Le Président (M. Lelièvre): Si vous permettez, pour que le président puisse bien suivre votre temps de parole, vous parlez sur le premier amendement?

M. Gobé: Non, le deuxième. Le premier, c'était hier. Je suis sur le deuxième, maintenant.

Le Président (M. Lelièvre): Il vous restait une minute et quelques secondes sur le premier?

M. Gobé: Oui, c'est ça, mais je...

Le Président (M. Lelièvre): Mais le premier, vous l'avez épuisé, votre temps, si je comprends bien?

M. Gobé: Bien, il me reste une minute. Je la garde au cas où une idée me reviendrait dans la tête.

Le Président (M. Lelièvre): Pour pouvoir aller dans l'ordre et que la présidence, les gens qui prennent le temps... parce que vous êtes...

M. Gobé: Ah oui! il faut le mentionner.

Le Président (M. Lelièvre): C'est très important qu'on sache combien de temps vous prenez, pour ne pas que vous soyez pénalisé. Alors, on va dire que nous allons procéder dans un certain ordre, et il faut qu'on sache maintenant si vous procédez sur le deuxième depuis le début ou sur le premier. Si vous avez procédé sur le premier, votre temps est écoulé; si vous procédez sur le deuxième, vous avez déjà amorcé le deuxième. Mais, tout à l'heure, j'ai cru comprendre que nous procédions sur le premier.

M. Gobé: Bien, moi, j'étais rendu sur le deuxième.

Le Président (M. Lelièvre): Je comprends que vous allez sur le deuxième, mais la commission avait commencé l'étude sur le premier.

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Lelièvre): Bon. Donc, avez-vous parlé sur le premier?

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Lelièvre): Donc, votre temps est épuisé.

M. Gobé: Ça a l'air que oui. Il me reste 1 min 15 s, me dit-on.

Le Président (M. Lelièvre): Bon. Alors, ça fait amplement le temps. Vous avez même dû emprunter sur votre capital sur le deuxième, mais on ne vous tient pas rigueur. Ha, ha, ha!

M. Gobé: J'espère.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, maintenant, étant donné que votre temps est écoulé sur le premier amendement, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le premier amendement?

M. Gobé: Oui, mon collègue...

M. Lamoureux: Moi, si je dois intervenir, je dois intervenir sur le premier amendement seulement. C'est ce que je comprends.

Le Président (M. Lelièvre): Vous remplacez M. le député de Laurier-Dorion?

M. Lamoureux: De Laurier-Dorion, qui n'avait pas écoulé de temps, lui.

Le Président (M. Lelièvre): C'est ça. Vous disposez donc du temps du député de Laurier-Dorion. Vous avez 20 minutes pour faire votre intervention.

M. Lamoureux: Parfait. Merci, M. le Président. Concernant le premier amendement au niveau de 87.1, juste peut-être pour comprendre et m'assurer, là... Cet amendement-là, ça vise, si on veut, à corriger ce que certains groupes avaient soulevé comme inquiétude, à savoir qu'il y avait des gens qui n'étaient pas nécessairement exclusivement régis par la Loi sur les normes du travail, que leurs conditions de travail pouvaient être à l'extérieur. Est-ce que cet amendement-là vise à faire en sorte qu'on aille non seulement couvrir ceux qui sont évidemment couverts par la Loi sur les normes du travail, mais... entre autres, je pense, est-ce que c'est les policiers ou les jeunes médecins qui sont à l'extérieur de la Loi sur les normes au niveau de leurs conditions de travail, salariales, et ainsi de suite? Est-ce que cet amendement-là vise à couvrir l'ensemble, dans le fond, des normes de travail qui existent au Québec et non pas seulement se limiter, comme le projet de loi initial, à ce qu'il y avait dans la Loi sur les normes?

Le Président (M. Lelièvre): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, pour répondre à cette question, comme je l'ai indiqué hier, les clauses de disparités de traitement sont introduites dans la Loi sur les normes du travail, et les personnes couvertes par ces clauses de disparités de traitement seront les personnes qui sont couvertes par l'ensemble de la Loi sur les normes du travail. Dans le cas des médecins, comme je l'ai identifié hier, les médecins résidents sont couverts par la Loi sur les normes du travail parce qu'ils sont jugés salariés au sens de la Loi sur les normes du travail. Les autres ne le sont pas.

M. Lamoureux: Parfait. Ça répond amplement à ma question là-dessus. Je n'ai pas l'intention d'abuser indûment de mon temps pour ce qui est du premier amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Vous avez terminé?

M. Lamoureux: Oui. J'étais rapide, je pense. C'était une question, j'ai eu ma réponse.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, est-ce que le premier amendement à l'article 1, qui se lit comme suit: 1° remplacer, dans les deuxième, troisième et quatrième...

Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le premier amendement? Excusez-moi, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, merci.

Le Président (M. Lelièvre): Est-ce que vous aviez épuisé votre temps? Je l'ignore, je vais vérifier.

M. Dumont: Vérifiez, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, il vous reste 17 min 75 s.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): Trente-cinq secondes.

M. Dumont: Vous avez des méthodes de calcul, M. le Président...

Le Président (M. Lelièvre): Ah! M. le député de Rivière-du-Loup, si vous voulez intervenir, vous avez la parole. On parle bien de l'article 1, premier amendement.

M. Dumont: On parle de l'amendement à l'article 1 qui vise à remplacer, dans les deuxième, troisième et quatrième lignes... C'est bien ça?

Le Président (M. Lelièvre): Voilà.


Amendements déposés

M. Dumont: Mais, si vous me permettez un peu de latitude, M. le Président – je sais que l'opposition officielle l'a déjà fait pour le bénéfice des travaux de la commission – je pourrais déposer aussi à la commission des amendements qui vont suivre. La construction du projet de loi ne rend pas nécessairement facile la préparation d'amendements. C'est comme si c'était un projet de loi qui a été conçu dans sa forme pour continuer à permettre un certain nombre de clauses orphelin.

Ça étant dit, on a quand même fait du travail là-dessus. Alors, je pourrais les déposer à la commission pour que ça puisse circuler, si vous le permettez.

Le Président (M. Lelièvre): Je comprends que...

M. Dumont: Avec le consentement, évidemment, des autres parlementaires.

Le Président (M. Lelièvre): Regardez, je comprends que vous avez des amendements à déposer. Nous sommes en train d'étudier le premier amendement. Est-ce que vous avez des amendements qui portent sur le premier paragraphe?

M. Dumont: Ah! Je n'ai pas de problème, moi. Si, M. le Président...

Le Président (M. Lelièvre): C'est parce que je veux juste comprendre la séquence qu'on va suivre parce que, tout à l'heure, le député de LaFontaine avait commencé à parler sur le premier amendement et, mine de rien, il était sur le deuxième amendement. Alors, je voudrais qu'on puisse faire le travail qu'on a à faire sur chacun des amendements et qu'on le fasse dans l'ordre avec amendement ou sous-amendement, etc. Maintenant, je comprends que vous offrez de déposer à la commission les amendements que vous avez. Je crois qu'on peut les recevoir comme amendements. Maintenant, la question que je vous pose: Est-ce que vous en avez un sur le premier paragraphe?

M. Dumont: Non, je n'en ai pas sur l'amendement qui est...

Le Président (M. Lelièvre): Bon, alors, à ce moment-là, la commission devra gérer et tenir compte de vos amendements. Vous les ferez, à ce moment-là, verbalement, mais vous nous en remettez une copie à la commission, et je vais l'apprécier. Vous les déposez ou...

(15 h 20)

M. Dumont: Entendons-nous. Moi, ce que j'offre à ce moment-ci, c'est d'en faire le dépôt. Je suis tout à fait conscient qu'on va les prendre au fur et à mesure qu'ils vont arriver, dans l'ordre du texte.

Le Président (M. Lelièvre): Voilà. C'est ça.

M. Dumont: Je comprends très bien qu'on ne va pas se lancer à l'article 2 immédiatement parce que je viens de déposer des amendements. Moi, mon dépôt visait à informer l'ensemble des membres de la commission.

Le Président (M. Lelièvre): Ça va. C'est ça que j'ai compris.

M. Dumont: Je suppose que tous les amendements vont venir dans l'ordre normal, donc...

Le Président (M. Lelièvre): Vous allez devoir les présenter au fur et à mesure quand même, tout à l'heure, mais vous nous les déposez.

M. Dumont: Tout à fait.

Le Président (M. Lelièvre): Parfait. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup, sur l'article 1, premier paragraphe, est-ce que vous avez des interventions à faire encore?

M. Dumont: Non, je n'ai pas d'autres commentaires sur l'article 1.

Le Président (M. Lelièvre): Est-ce qu'il y a d'autres observations à faire sur l'article 1, premier paragraphe?

M. Gobé: M. le Président, on est sur l'amendement, là, on n'est pas sur le premier paragraphe.

Le Président (M. Lelièvre): C'est-à-dire sur l'amendement, oui. Est-ce qu'il y a encore des personnes qui veulent s'exprimer sur l'amendement? Est-ce que l'amendement est adopté, à l'article 1, paragraphe 1°? Adopté?

Une voix: Adopté.

M. Gobé: Division.

Le Président (M. Lelièvre): Sur division. Alors, nous sommes prêts à passer au deuxième paragraphe de l'article 1 de l'amendement: 2° ajouter, à la fin de l'article 87.1 de la Loi sur les normes du travail, les mots «et qui, lorsqu'il s'agit d'un salarié assujetti à une convention collective, sont assujettis à la même convention collective que lui».

Fin de l'amendement. Est-ce qu'il y a des parlementaires qui veulent s'exprimer sur le sujet?

Mme Lemieux: Peut-être que je peux en dire quelques mots, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Lemieux: Est-ce qu'on est bien au bon endroit? Est-ce que je suis au bon endroit: Ajouter, à la fin de 87.1, les mots... O.K. Ouf! Non, il faut se suivre, hein.

Le Président (M. Lelièvre): C'est pour ça que j'ai demandé qu'on le fasse dans l'ordre.

Mme Lemieux: Voilà. Alors, dans le projet de loi que j'appellerai initial, le projet de loi n° 67 déposé au mois de juin, nous avions prévu un aménagement qui, en substance, disait – je me permets de faire un petit retour en arrière pour qu'on comprenne bien le sens de l'amendement actuel – que ne sont pas prises en compte les conditions de travail d'un salarié qui, suite à une fusion d'entreprises ou à une réorganisation interne d'une entreprise, «sont temporairement plus avantageuses que celles applicables à d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement». Alors, c'était donc dans le projet de loi initial n° 67, à l'article 87.3. Vous aurez remarqué que, dans les amendements, nous avons modifié de manière relativement importante 87.3. Et cet élément-là, cette allusion aux situations de fusion d'entreprises, par exemple, elle est reprise dans cet amendement, ce deuxième amendement de 87.1.

En gros, ce que ça veut dire, ou en simple, ce que ça veut dire, c'est lorsqu'il y a... Peu importe le geste, mais on peut très bien imaginer. La fusion d'entreprise étant la situation la plus prévisible, ça veut dire qu'il peut y avoir des conventions collectives différentes. Puisqu'il s'agissait de deux entreprises, s'il s'agissait de deux entreprises syndiquées, cette entreprise fusionnée peut donc se retrouver avec deux conventions collectives différentes.

Ce que cet amendement-là dit, c'est que les gens qui sont touchés par ces dispositions au sujet des disparités de traitement sont ceux qui sont assujettis à une même convention collective. En d'autres mots, on ne peut pas assimiler le fait qu'il y ait des conditions de travail différentes, parce qu'il y a des conventions collectives différentes, à une clause de disparité de traitement. Mais, dans le cas, évidemment, où cette entreprise fusionnée commencerait à négocier une seule convention collective alors qu'elle était régie par deux conventions collectives, bien évidemment, cette convention collective qui réunirait deux conventions collectives ne devrait pas contenir de clause de disparité de traitement.

Alors donc, on ne peut pas assimiler une fusion d'entreprises qui a pour effet d'introduire deux conventions collectives dans une entreprise à des clauses de disparités de traitement. Ce n'est pas un traitement différent en fonction de la date d'embauche, c'est un traitement différent parce qu'il y a deux entreprises qui ont fusionné. Alors, j'essaie de l'illustrer le plus concrètement possible, mais c'est le sens de cet amendement.

Et je rappelle, bien sûr, parce qu'on peut imaginer qu'en général les entreprises qui se retrouvent avec deux conventions collectives peuvent vivre un certain temps avec ça, mais qu'en général, surtout lorsqu'il s'agit d'entreprises syndiquées, il y a un processus qui s'engage pour unifier les conditions de travail de l'ensemble des travailleurs et des travailleuses d'une entreprise. Alors, je rappelle que, dès qu'on s'engage dans un processus de convention collective unique, il ne doit pas y avoir... enfin, cette convention-là, cette entreprise-là est soumise à la loi et à ses dispositions au sujet des clauses de disparités de traitement. Voilà.

Le Président (M. Lelièvre): Merci, Mme la ministre. Est-ce que les membres du côté de l'opposition veulent s'exprimer?

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, M. le Président. Alors, c'est bien ce que nous pensions. Ça modifie substantiellement le projet de loi. Mme la ministre, peut-être une question. Comment en êtes-vous arrivée à ce changement-là? Je sais qu'on a eu beaucoup de mémoires que nous avons reçus, beaucoup de gens sont venus devant nous. C'est quelle partie de ce processus-là qui vous a amenée à faire ces changements-là en ce qui concerne... en particulier «sont assujettis à la même convention collective»? D'où ça vient, ce changement?

Le Président (M. Lelièvre): Mme la ministre.

Mme Lemieux: M. le Président, je pense qu'il y avait des raisons... je peux convenir que l'opposition sourit, va peut-être sourire à mon explication, mais il y avait des raisons d'essayer de simplifier le texte, même si ça demeure une opération extrêmement difficile. Par exemple, il y a plusieurs intervenants qui nous ont parlé: Qu'est-ce que vous voulez dire par «réorganisation interne»? Qu'est-ce que vous voulez dire par «fusion d'entreprises»? Quoique, ça, c'est plus facile à illustrer, mais on parle-tu d'une fusion... à quelle moment c'est une fusion, bon, etc.

Alors, comme on voulait éviter d'ouvrir toutes sortes de parenthèses – si vous me permettez l'expression – dans la loi, on a plus essayé d'identifier l'effet que ce type de mouvement là, fusion d'entreprises, réorganisation quelconque, pouvait entraîner. Alors, c'est donc pour des questions de simplification qu'on l'a introduit de cette manière-là et qu'on a évacué les concepts de fusion d'entreprises, de réorganisation.

Dans le fond, ce qu'on a voulu dire, c'est: Si, pour une raison ou pour une autre, dans une entreprise, dans un milieu de travail, il y a deux ou trois conventions collectives qui se retrouvent à gérer des employés non pas en fonction de la date d'embauche, mais en fonction de leur histoire – où étaient-ils avant et auprès de quelle organisation syndicale étaient-ils représentés? – s'il y a des mouvements de ce type-là, oui, il peut y avoir des conditions de travail différentes mais qui n'ont rien à voir avec la date d'embauche. Bon. Alors, c'est ça qu'on a essayé de prévoir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: C'est parce que le projet de loi s'adresse uniquement à la discrimination en fonction de la date d'embauche et non pas à d'autres critères.

Mme Lemieux: C'est ça. Voilà.

M. Gobé: Les municipalités, on parle beaucoup actuellement de fusions de municipalités. On sait que ça va entraîner des changements au niveau de l'organisation du travail de ces municipalités-là. On fait quoi avec deux municipalités qui se fusionnent et qui ont des conventions collectives différentes? Est-ce que c'est couvert? Est-ce que c'est pour ça que vous mettez ça là-dedans?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

(15 h 30)

Mme Lemieux: Oui, Mme la Présidente. Je pense que c'est une question très intéressante de la part du député de LaFontaine, alors je vais me permettre d'ouvrir une parenthèse, même si c'est un autre dossier. Mais je pense qu'il n'y a pas de secret d'État sur le fait qu'il y a une démarche actuellement au gouvernement. Il est question d'un livre blanc, je pense que tout le monde est bien au clair là-dessus.

Une voix: ...

Mme Lemieux: Enfin, d'un livre d'une couleur quelconque.

M. Gobé: Vert, c'est l'espoir.

Mme Lemieux: Mettons jaune.

M. Gobé: Mais là, pour les travailleurs, ce n'est pas une belle couleur, ça, le jaune.

Mme Lemieux: En fait, il est question, au gouvernement – ce n'est pas un secret d'État – d'encadrer un processus assez large au Québec qui pourrait provoquer des regroupements de municipalités. Je peux assurer le député de LaFontaine que le ministère du Travail a été mis à contribution là-dedans et que ce processus-là va contenir des éléments qui vont prévoir comment va se gérer, dans le cas où il y aurait des regroupements de municipalités où il y aurait des syndicats, des syndicats différents entre autres, que le processus que le gouvernement va proposer contienne des éléments pour pouvoir gérer ça correctement en fonction des règles que nous connaissons, mais vraiment que ce soit planifié, la gestion de ces opérations de regroupements de municipalités qui entraîneraient donc aussi la jonction d'un ou de plusieurs syndicats.

Vous savez que, par exemple – on a quand même de l'expérience positive à notre actif – dans le cas de toute l'opération de l'organisation – là, je ne rappelle plus le nom du projet de loi, mais vais-je le trouver? – le regroupement de commissions scolaires, la loi qui prévoyait le regroupement de commissions scolaires en fonction de certains critères prévoyait un processus: qu'est-ce qu'on fait lorsque la commission scolaire x a une convention collective x, et que la commission scolaire y a une convention collective y, et que ces deux commissions scolaires se fusionnent? Il y a eu un processus qui a été prévu dans la loi, qui a bien fonctionné. Ces dossiers-là sont d'ailleurs tous traités, ils sont réglés.

Alors, pour revenir à votre question de base, dans le cadre d'opérations plus intenses de regroupements de municipalités, il y aura un processus de prévu. Mais je termine mon intervention aussi en disant une chose fort simple, j'ai eu des questions en ce sens-là et honnêtement je ne saisis pas d'où peut venir cette compréhension-là, mais les municipalités sont des employeurs. Les gens qui travaillent dans les municipalités sont des salariés qui sont tenus de respecter les dispositions de la Loi sur les normes du travail, et ce n'est pas vrai qu'il y a une exclusion de ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Excusez-moi, Mme la ministre. Je m'excuse, je n'ai pas bien compris votre dernière partie, lorsque vous avez dit, les municipalités, là, vous ne compreniez pas pourquoi il y avait eu une question sur l'exclusion. Peut-être me reprendre ça, j'étais un peu distrait, là.

Mme Lemieux: Mais c'est parce que j'ai eu... Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, ces derniers jours, Mme la Présidente, il y a certaines personnes qui ont dit que ce qu'elles comprenaient de ce projet de loi sur les clauses de disparités de traitement et des amendements que j'ai présentés hier, c'est que les municipalités étaient exclues de l'application de la loi. Ce que je dis, c'est que ce n'est pas vrai.

M. Gobé: Ah! O.K. Je comprends. Je vais revenir à ça, là. Mais, Mme la ministre, lorsque les commissions scolaires se sont fusionnées, c'était parce qu'il y en avait certaines qui étaient très petites, d'autres, plus grosses, mais ce n'était pas forcément dans la vision ou l'objectif de faire des économies, alors qu'actuellement on sait très bien que, au niveau des municipalités, l'argument principal qui est amené, c'est de faire des économies, l'économie d'échelle en termes de services, en termes d'utilisation de matériel ou de construction d'infrastructures. Et on sait aussi qu'il y a des syndicats dans ces municipalités dont certains ont des conventions collectives qui sont assez élevées, assez fortes, assez riches, puis d'autres qui en ont moins.

Moi, ce que je crois comprendre avec cette loi-là, c'est qu'on pourrait avoir... Prenons la ville de Montréal – c'est à la mode, là, M. le maire veut faire une île, une ville – la ville-centre qui est Montréal actuellement, avec des conditions de travail extrêmement intéressantes, avec les cols bleus de la ville de Montréal, que vous n'êtes pas sans connaître d'ailleurs. Je parle des conditions de travail, je ne parle pas des cols bleus. Ne prenez pas pour acquis de sous-entendu là-dedans, il n'y en avait pas. Si j'ai à en faire un jour, je vous les ferai plus tard, mais pas maintenant, ce n'est pas le but, bon. Et prenons les travailleurs de la ville de Lachine, ou de ville d'Anjou, tiens. Advenant une fusion, est-ce que les gens qui enlèvent la neige pour ville d'Anjou, ou ramassent les poubelles, ou enfin font différentes activités vont conserver leur convention collective qui les paie moins que celle des cols bleus de Montréal, d'accord? Et est-ce que, dans votre esprit, cette situation-là peut durer longtemps? On aura deux conventions collectives dans la même municipalité pour le même genre de service. Combien de temps ça peut durer? Est-ce que c'est limitatif ou ça va rester comme ça?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, alors, Mme la ministre.

M. Gobé: Parce que c'est ça qui est prévu. Et on peut calculer à la limite que les cols bleus de ville d'Anjou seront les nouveaux engagés de ville de Montréal. Vous savez, quand on parle de la date d'embauche, légalement, juridiquement, ils deviendront les derniers engagés de la ville de Montréal. Donc, ils seront, ayant un salaire différent, victimes de clauses orphelin, techniquement et juridiquement. Et c'est ça que ça permet, la double convention collective. Alors, si on parle d'une même entreprise, on prend pour acquis que la nouvelle municipalité est une même entreprise. Donc, l'article du projet de loi faisait dire que, en fonction de sa date d'embauche, une condition de travail moins avantageuse qu'elle a accordée à d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement... Dans la Charte des droits, on parle de la même entreprise. Est-ce qu'on peut alléguer que la ville de Montréal, où il y a les camions d'ordures puis les travailleurs de ce service-là, c'est un établissement, puis que ceux de l'ancienne ville d'Anjou qui nouvellement seraient engagés sur le chèque de paie de Montréal, juridiquement, changent d'employeur, sont dans le même établissement? Oui. Par contre, n'ayant pas la même convention collective, il y a un recul de leur salaire, et ils gardent le salaire à 15 $ de l'heure, alors que ceux de Montréal sont à 22 $.

Donc, ils sont victimes d'une clause orphelin en fonction de leur date d'embauche, juridique, même s'ils ont toujours le même camion à conduire. Et c'est pour ça que je vous demande: Qui vous a demandé ça? Est-ce que c'est Mme Harel qui vous a demandé ça?

Mme Lemieux: Pardon?

M. Gobé: C'est pour ça que je vous posais la question: Qui vous a demandé ça? Est-ce que c'est Mme Harel qui vous l'a demandé?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

M. Gobé: Non, non, mais elle est votre voisine, des fois, entre deux questions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, mais là j'aimerais qu'on... Est-ce que vous avez terminé, M. le député de LaFontaine?

M. Gobé: Oui, je m'excuse de mon indiscipline, madame.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, d'accord. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Bon. Il y a plusieurs niveaux, là...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je suis là pour vous rappeler à l'ordre.

Mme Lemieux: ...d'interrogation dans votre question. La première, qui est la plus facile à répondre, quand j'ai une collègue qui s'engage dans une démarche quand même assez importante, qui va impliquer que des employeurs risquent de se regrouper en grand nombre sur une certaine période, je suis la ministre du Travail et je dis à ma collègue: Il faudra planifier comment ça se fera. Et, effectivement, j'ai fait des recommandations à ma collègue sur le fait que, dans cette grande démarche, les grandes discussions que nous avons actuellement sur la pertinence de favoriser des regroupements de municipalités, il faut qu'il y ait une méthode, une procédure, des lignes directrices – appelez ça comme vous voulez – qui vont prévoir cette situation où une municipalité qui sera le résultat de la fusion ou du regroupement de plusieurs municipalités pourrait se retrouver avec plusieurs unités d'accréditation, plusieurs conventions collectives, plusieurs syndicats, et il faut planifier comment cette situation peut être gérée. À ce moment-ci, vous allez comprendre que ça ne me gêne pas de dire qu'il y aura une procédure de prévue, mais je n'en dirai pas plus. On la débattra en temps et lieu, puis il y aura un lieu pour la débattre puis un processus pour la débattre. Mais je veux vous assurer que ça, ça a été planifié.

(15 h 40)

Ceci étant dit, dans les conditions actuelles des choses, que se passe-t-il lorsqu'il y a, supposons, fusion d'entreprises? Ça peut être une entreprise publique, comme une municipalité, mais ça peut être tout aussi bien une entreprise privée. Ce que ce deuxième amendement dit, c'est qu'on ne peut pas associer le fait qu'il y ait des conditions de travail différentes dans deux conventions collectives qui se retrouvent maintenant à être vécues, si je peux m'exprimer ainsi, dans une seule entreprise à une clause de disparités de traitement, parce que ce n'est pas en fonction de la date d'embauche qu'il y a des conditions différentes, c'est en fonction que les travailleurs proviennent d'un univers syndical et patronal différent. Bon.

Qu'est-ce qui se passe à ce moment-ci lorsque – vous prenez l'exemple des municipalités – c'est d'autres que des entreprises ou publiques ou privées qui fusionnent et qu'il y a plusieurs conventions collectives à gérer? Mais vous connaissez ce qui se passe, comme moi. Il peut soit, dans le meilleur des mondes, y avoir une négociation assez rapide où l'employeur et les syndicats en présence vont s'entendre rapidement sur une seule unité d'accréditation, sur un seul contenu de convention collective, etc. Ça, c'est dans le meilleur des mondes. Mais sinon ce sont les règles habituelles du Code du travail qui rentrent en cause. Par exemple, il peut arriver que ce soit au moment du renouvellement de conventions collectives, c'est-à-dire que l'entreprise accepte, des fois de bon gré, des fois un peu plus difficilement, de vivre quelque temps avec des conventions collectives différentes dans une même entreprise et que c'est au moment du renouvellement d'une de ces conventions collectives qu'il y a du maraudage, puis là les gens essaient d'unifier des choses. Alors, il se passe ce qu'il se passe habituellement.

Mais ce que je dis, c'est que, bien que nous disions dans cet amendement qu'on ne peut pas assimiler ce genre de mouvement dans une entreprise à des clauses de disparités de traitement, dès que, à l'horizon, il est en train de se négocier une seule convention collective, donc des échelles salariales qui vont ramasser l'ensemble des travailleurs, peu importe par qui ils étaient couverts, la convention collective a ou la convention collective b, alors, dès que se pointe à l'horizon un processus d'unification, eh bien, là, c'est bien clair que toutes les dispositions que nous tentons d'adopter vont entrer en jeu.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine, avez-vous d'autres questions sur le même sujet?

M. Gobé: Oui, un peu comme hier encore. Je dois vous dire que je préférais encore la première mouture du 87.1. Franchement, la première mouture de cet article était tout à fait explicite, claire, avait l'avantage de bien cerner les enjeux, de bien indiquer les chapitres auxquels ça pouvait s'appliquer, et puis c'était assez clair. La nouvelle approche met de la grande confusion. On est en train de changer complètement cet article-là, puis c'est le coeur du projet.

Mme Lemieux: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Un instant, Mme la ministre.

M. Gobé: Et je trouve ça dommage parce que, comme je vous disais hier, Mme la ministre, moi, mon plus grand souhait, ce n'est pas de répondre «sur division» à chaque fois qu'on va me poser une question dans les quatre, cinq, six prochains jours ou dans les prochaines heures sur chacun de ces articles. Ça serait de dire oui. C'est ça qui me fatigue, moi. Et je trouve ça dommage. Il n'y a pas moyen qu'on puisse mettre ça simple? Plus ça va être compliqué, plus on va avoir des problèmes avec ça, plus les gens ne vont rien comprendre, plus on va donner l'impression qu'on essaie de noyer quelque chose ou de... On complique les choses. Vous l'aviez mis clair, les gens qui l'ont écrit en tout cas, je ne parle pas des autres articles, mais celui-là, là, il était clair, tout le monde l'avait bien compris. Les autres, c'est comme si on avait voulu rabouter quelque chose: Un tel, une telle a dit ci, on va essayer de le mettre à l'intérieur.

Je suis rendu à me demander si on ne devrait pas demander à entendre à nouveau le président de la Commission des normes pour qu'il nous explique comment il va gérer tout ça, lui, là. On l'avait mentionné au début des audiences que peut-être on lui demanderait de venir nous expliquer. Parce que je ne sais pas comment il va se retrouver avec tout ça, mais vous allez voir, ce n'est pas un bon cadeau que vous lui faites là, madame. Alors, moi, je n'ai pas fini avec mes questions, mais je pense que ma collègue... Non, ma collègue a des questions par rapport à cet article-là, je pense que mes autres collègues aussi.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce que vous aviez une question suite à ce commentaire, M. le député de LaFontaine? Est-ce que vous attendiez...

M. Gobé: Bien, ma question, c'était, madame, pourquoi... J'ai plein d'autres trucs à vous dire, d'autres choses, pardon. Mais pourquoi on ne revient pas à l'article tel qu'il est, là? Pourquoi on ne le garde pas pareil? Il me semble que ça a l'avantage d'être clair. C'est peut-être ça la chose la plus claire du projet de loi, avec laquelle tout le monde était d'accord. C'est l'énoncé: «Une convention ou un décret ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié, au regard des matières visées par les normes du travail prévues aux sections I à VI et VII du présent chapitre et uniquement en fonction de sa date d'embauche, une condition de travail moins avantageuse que celle accordée à d'autres salariés qui effectuent les même tâches dans le même établissement.»

Ça, là, c'est clair, net, précis. Juste ça, là, le projet de loi aurait juste cet article-là, puis je pense qu'il y aurait unanimité aujourd'hui avec ça. Mais il y en a d'autres que vous rajoutez, on comprend. Mais là vous le changez, en plus. Vous nous enlevez le seul truc, je pense, qu'on trouvait qui correspondait à nos engagements d'origine dans ce projet de loi là. Moi, je suis triste de voir ça. Alors, y a-tu moyen, madame... Ma question, c'est: Pourquoi on ne le garde pas?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous avez terminé? Donc, Mme la députée de... Non, Mme la ministre. Pardon.

Mme Lemieux: Je suis députée aussi. J'aime beaucoup d'ailleurs ce rôle.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, députée de Bourget, ministre...

Mme Lemieux: D'abord, je suis très heureuse de constater qu'a posteriori le député de LaFontaine aimait l'article 87.1. C'est vraiment extraordinaire qu'on fasse une grande déclaration au sujet de cet article-là.

Écoutez, je dirais deux choses à ce moment-ci. Je vous rappelle que nous retirons des notions pour lesquelles il y aurait eu besoin de développer tout un argumentaire et qui auraient mis pas juste de la lourdeur, mais qui auraient créé aussi beaucoup de confusion; que nous retirons donc les notions de fusion d'entreprises et des réorganisations internes. Qu'est-ce qu'une fusion d'entreprises, une fusion d'entreprises qui a été consacrée en vertu de l'article 45, puis on a utilisé l'article 46, puis le bureau du Commissaire général du travail a statué là-dessus, puis tout le tralala? Bon. Qu'est-ce qu'une réorganisation interne? En fait, nous avons donc évacué ces questions-là pour ne pas entrer dans cet univers-là, et ce que nous avons voulu clarifier, c'est l'effet. L'article, il est très simple. Il dit: On ne peut pas accorder de conditions de travail moins avantageuses en fonction de la date d'embauche pour un salarié dans un même établissement assujetti à une même convention collective, point à la ligne. C'est tout ce que ça dit, cet article-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui. Simplement une question. Pour revenir justement à l'exemple que mon collègue de LaFontaine vous servait tout à l'heure sur deux municipalités, par exemple, qui décident de se regrouper et où il y a deux syndicats qui sont différents, donc deux conventions collectives différentes, tout à l'heure vous nous avez servi l'exemple des commissions scolaires où, suite à une fusion de commissions scolaires, il y a un processus qui s'est mis en branle justement pour éviter des disparités de traitement. Vous nous avez dit: Ce genre de processus. Là, je ne vous en dirai pas plus long là-dessus.

Alors, moi, ma question, c'est: Mais quel est-il, le processus? Dans un contexte comme celui-là, qui va initier le processus? De qui relèvera le processus? De quelle nature sera le processus en question pour éviter justement que les salariés aient à vivre des situations qui pourraient causer évidemment, là, je vous dirais, des problèmes quant aux désirs des salariés en question d'être impliqués ou d'être favorables à un projet de fusion, à un projet de regroupement entre deux municipalités, donc pour éviter que deux municipalités aient, à l'interne, à combattre justement le fait que des salariés, parce qu'ils ne sont pas protégés par cette menace-là en termes de disparité de traitement, disent non à un processus de regroupement? Bien, j'aimerais ça que vous puissiez nous en dire un peu plus sur le fameux processus auquel vous faisiez référence tout à l'heure.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, je veux être bien, bien au clair ici. La députée de Bonaventure dit: Il y a eu un processus lorsqu'il y a eu des fusions de municipalités, dans le but d'éviter des disparités de traitement. Cette affirmation est fausse.

Mme Normandeau: Juste, Mme la Présidente, si vous permettez, je fais référence aux propos que vous avez tenus il y a quelques secondes...

Mme Lemieux: Oui, mais je n'ai pas dit ça.

Mme Normandeau: ...quand vous nous parliez de processus et que vous avez dit: On verra à ce moment-là. Alors, c'est ce que vous avez dit, là: Si on est confronté à une situation de deux municipalités qui décident de se regrouper. Et vous avez fait le parallèle avec le monde scolaire suite aux fusions dans les commissions scolaires.

(15 h 50)

Mme Lemieux: Mme la Présidente, j'ai donné l'exemple des fusions des commissions scolaires en disant que, dans la loi – dont j'oublie le numéro – qui prévoyait les conditions, les modalités des fusions des commissions scolaires, il y avait des articles qui prévoyaient – je le redis dans mes mots pour qu'on se comprenne simplement – comment on gère le fait que, dans le nouvel établissement qui est créé par la fusion de deux ou trois commissions scolaires, on peut se retrouver avec plusieurs unités d'accréditation, plusieurs organisations syndicales, plusieurs conditions de travail. La loi qui prévoyait les fusions des commissions scolaires prévoyait une procédure pour gérer cela, en gros, je vous le dis en substance, là. Évidemment, il pouvait y avoir entente entre les parties, l'employeur et le et les syndicats impliqués. S'il n'y avait pas entente, il y avait un vote qui était pris au sein de l'ensemble des salariés regroupés dans cette nouvelle unité, ce nouvel établissement, un vote sur l'unité d'accréditation, sur les conditions de travail, etc. J'ai illustré ça puis j'ai donné un exemple passé, comment ça s'est passé dans les commissions scolaires.

Maintenant, si j'ai parlé des municipalités, c'est parce qu'évidemment le député de LaFontaine s'est interrogé... comment nos dispositions sur les disparités de traitement, tout ça s'articulerait dans le contexte municipal, sachant qu'il n'est pas impossible qu'il y ait des regroupements de municipalités dans un horizon plus ou moins rapproché. Ce que je dis, c'est que, si le gouvernement – mais je pense que, ça, c'est connu – veut mettre en place une démarche pour favoriser le regroupement de municipalités, que cette démarche-là va comprendre aussi une démarche pour gérer l'arrivée dans une seule municipalité de deux, trois conventions collectives, de deux, trois unités d'accréditation et que nous allons faire des propositions à ce sujet-là, qui seront débattues dans le cadre du livre je ne sais de quelle couleur sur ce dossier des municipalités.

Ce ne sera pas des dispositions, par exemple, de se prévoir une méthode comment on gère le regroupement sur une base assez large dans plusieurs municipalités au Québec, comment on gère les questions de conventions collectives qui arrivent en grand nombre dans un seul établissement. Ça ne dispose pas du tout du dossier des clauses orphelin, des clauses de disparités de traitement. Je dis que la loi va s'appliquer dès qu'évidemment il y aura une seule convention collective qui sera en cause. Mais ce n'est pas l'objectif premier, on se comprend. L'objectif, c'est de faciliter ce regroupement-là et de faire en sorte qu'il y ait, dans les meilleurs délais possibles, des règles du jeu applicables à l'ensemble des salariés dans les établissements municipaux.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui. J'essaie vraiment de comprendre puis de visualiser évidemment où nous conduirait justement l'exemple de deux municipalités qui désirent se regrouper. Il me semble qu'il y a une espèce d'incertitude quand même qui continue de planer malgré vos explications. Quand vous nous reportez au livre blanc, jaune orange, bleu marine, enfin, qui sera adopté dans l'avenir, il y a quand même là quelque chose qui n'est pas défini, ou qui est mal défini, ou qui est à définir, qui m'échappe.

Mme Lemieux: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Puis mon collègue aussi peut ajouter des éléments d'explication. Écoutez, moi, j'ai répondu très honnêtement à une question du député de LaFontaine: Que va-t-il se passer dans le cas des municipalités? Je réponds très honnêtement que nous aurons des propositions en ce sens. Mais ce n'est pas vrai que je vais faire tout le débat de cette méthode, de cette procédure que nous proposerons dans le cadre de cette commission parlementaire.

Mme Normandeau: Mme la Présidente, je tiens à rassurer la ministre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: De notre côté, on l'apprécie effectivement puis on ne met pas du tout en doute l'honnêteté de la ministre dans ses explications, qui sont, somme toute, très...

Mme Lemieux: Pas pires. Ha, ha, ha!

Mme Normandeau: ...pas pires, oui, effectivement, pas pires, ça a bien du bon sens, comme on dirait en bon français. Mais, ceci étant dit, je soulève quand même, sur la base d'explications que vous venez de nous donner, qu'il me semble qu'il y a comme une incertitude ou une espèce de vide qui reste en quelque part, qui est dans les airs encore. Mais, si évidemment le député de Chicoutimi peut nous donner encore un peu plus d'explications, moi, ça me fera plaisir de l'entendre.

M. Bédard: Non, bien...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, bien, là, j'avais un autre collègue aussi. J'ai le député de Marguerite-D'Youville qui a demandé aussi la parole.

M. Beaulne: Oui. Bien, écoutez, sur ce sujet de discussion là, moi, je pense que les règles ne sont pas arrêtées, ne sont pas fixées. C'est quelque chose qui est à développer au Québec. J'arrive de diriger, la semaine dernière, une délégation de nos collègues à l'Association parlementaire Ontario-Québec, et, au cours de nos discussions avec nos collègues ontariens, on a parlé assez abondamment de toute la problématique de la superville à Toronto où, presque deux ans après, ce n'est pas encore réglé. Ils ont dû gérer l'intégration de 98 conventions collectives. La plupart ont été reconduites.

Peut-être qu'une piste de solution intéressante, ça serait d'examiner beaucoup plus proche de nous puis beaucoup plus récemment ce qui pourrait se passer à l'annonce qui vient d'être faite de la fusion de ville Saint-Pierre et de Lachine, qui sont quand même deux villes d'une taille assez respectable. On pourrait peut-être leur demander et voir de quelle manière ils ont prévu soit l'harmonisation ou l'intégration de leurs conventions collectives à ce niveau-là, mais ce n'est pas quelque chose de facile.

Et on a discuté justement avec les députés ontariens aussi de l'aspect des clauses discriminatoires. Dans leur esprit – et ça, c'était une opinion qui était partagée par les trois partis politiques représentés – lorsqu'il y avait fusion de municipalités, de corps publics et que différentes conventions collectives s'appliquaient avec différentes échelles salariales, le fait que perdurent pendant un certain temps différentes échelles qui sont rattachées aux conventions initiales ne consistait pas, dans leur esprit, en une clause discriminatoire dans le sens où on l'entend dans le projet de loi ici.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, est-ce que vous avez d'autres questions, Mme la députée de Bonaventure? J'ai aussi un de vos collègues qui m'a demandé la parole.

Mme Normandeau: Oui, bien, simplement un commentaire, peut-être.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée.

Mme Normandeau: Les explications du député effectivement sont très intéressantes et très pertinentes. Mais, cependant, si le gouvernement peut s'inspirer des expériences des villes auxquelles vous venez de faire référence, en termes d'harmonisation, il ne faut pas oublier quand même que c'est des municipalités de petite taille, toutes choses étant relatives. Il y a quand même un défi qui va se présenter pour des municipalités ou des villes de plus grande taille, auquel, si je comprends bien, à l'heure actuelle, on n'a pas de réponse. Mais, évidemment, si l'expérience de l'Ontario peut être d'une quelconque inspiration pour le gouvernement, bravo! Mais n'empêche qu'il y a quand même un vide. Comme vous le dites, pour utiliser votre expression, il y a quand même un aspect à développer.

M. Gobé: On pourrait peut-être donner l'information à la commission. Ville Saint-Pierre, je pense, c'est 2 500 habitants, puis Lachine, c'est 50 000 et quelques en termes de... Ce n'est pas une remise en question de ce que vous dites, mais le rapport de conventions collectives est à peine perceptible parce qu'il y a très peu d'employés à ville Saint-Pierre qui vont se fondre dans la grande masse des employés de ville de Lachine.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui, simplement pour compléter, très rapidement, pour revenir principalement sur la modification, là, ce qui est très clair... Parce qu'on peut parler du cas des fusions des villes, mais c'est le cas de toute fusion d'entreprises. Toute fusion d'entreprises souvent va occasionner l'existence de deux conventions collectives différentes dans la même entreprise. Ça, on vit ça tous les jours en droit du travail. Ce qui arrive, c'est que le Code du travail prévoit déjà un mécanisme qui fait en sorte que ces deux conventions-là peuvent coexister. Or, ces clauses-là ne sont pas des clauses... Je veux dire, les clauses qui vont régir les différents salariés qui vont faire un même travail et qui vont avoir une disparité de traitement ne sont pas des clauses orphelin au sens du projet de loi, c'est simplement le résultat d'une fusion. Lorsqu'il y a signature d'une nouvelle convention qui va englober l'ensemble de l'accréditation, parce que le commissaire, en vertu de l'article, sans tomber au niveau juridique, a des droits de façon à faire en sorte qu'il va y avoir une seule accréditation à ce moment-là, donc il va y avoir une seule signature à une convention, donc des clauses uniformes.

Donc, le projet de loi, tel que je le comprends, et la modification ont pour effet de... Pendant ce délai-là, tel qu'il existe actuellement et qui n'a rien à voir avec une clause orphelin, pendant le délai où les conventions collectives vont expirer et le commissaire va intervenir, eh bien, ces disparités vont exister, et c'est normal. Ce n'est pas un employeur qui a négocié des clauses de disparités face à ses employés, c'est deux employeurs qui avaient des clauses différentes et qui se fusionnent. Alors, tout simplement, à ce moment-là, il va y avoir unification comme dans un processus normal. C'est pour ça que c'est important, cette modification-là, de façon à maintenir le statu quo actuel, à faire en sorte que, tout simplement, dans un processus normal de négociation, il y ait à ce moment-là entente entre les salariés regroupés des deux entreprises et l'employeur unique de négocier des conditions de travail qui vont être uniques pour tous les salariés, tout simplement.

(16 heures)

Alors, c'est pour ça que, cette modification-là, moi, je la trouve pleine de bon sens et je peux vous dire, je vais l'appuyer, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Merci, Mme la Présidente. Peut-être juste au niveau d'une inquiétude. Je comprends les explications de mon collègue de Chicoutimi, mais, dans la réalité aussi, il y a des fois des situations qui peuvent se produire. L'exemple, moi, qui me vient en tête, c'est Métro-Richelieu. C'est un domaine dont on a beaucoup entendu parler au niveau des clauses orphelin. Ils sont venus nous expliquer que, dans leur milieu, dans le genre d'entreprise qu'ils opéraient, bon, ils se trouvaient eux autres un peu pris entre l'arbre et l'écorce. Je reviens sur Métro-Richelieu parce que, entre autres, au niveau, je pense, des camionneurs, c'est revenu encore en fin de semaine, je pense que c'est la CSN qui se plaint un peu, disant que l'employeur veut favoriser la convention collective de la FTQ. Ça fait que, dans le fond, l'idée, puis je pense que c'est le souhait de tout le monde qui participe à la commission, puis tous les parlementaires, nous autres, ce qu'on vise, par le projet de loi, c'est de faire en sorte que le résultat ultime du projet de loi, une fois qu'il sera appliqué, c'est de s'assurer que, peu importe la méthode qui est utilisée, la façon qui est pensée, on n'ait plus de clauses orphelin, il n'y ait plus de ces attitudes-là. C'est l'idée, et on en est très heureux.

Seulement, vous comprendrez qu'on veut quand même s'assurer que, de la façon dont les articles sont rédigés, de la façon dont ça va s'appliquer dans la vie de tous les jours, s'assurer qu'un esprit, je ne dirai pas tordu, mais un esprit imaginatif ne puisse pas contourner. Puis je veux juste, moi, me faire rassurer que, de la façon dont l'amendement est amené, on ne puisse pas avoir d'autres accréditations ou faire en sorte qu'un employeur et un syndicat qui pourraient le faire... Je veux dire, à part chez McDonald's, je pense qu'une accréditation, c'est assez facile à avoir au niveau d'un syndicat, quand on décide de le faire.

Moi, je veux juste m'assurer, dans le fond, puis je veux juste être sûr que le projet de loi soit suffisamment étanche pour qu'il n'y ait pas d'employeurs et des syndiqués qui décident d'avoir une nouvelle accréditation puis que, ah! par hasard, les nouveaux employés se retrouvent tous régis par la même convention collective qui est une autre convention collective avec d'autres échelles. À l'intérieur de cette convention collective là, je suis bien d'accord, il n'y aura pas ce qu'on peut appeler des clauses orphelin, mais le résultat net, c'est que, dans l'entreprise, tu vas avoir une personne à droite qui va être visée par la convention collective x qui va lui prévoir des conditions salariales, différentes conditions de travail, et la convention collective y à côté qui va avoir une échelle différente.

Puis j'ai compris les explications au niveau de la fusion, là, puis ça, là-dessus, moi, je n'ai pas de problème avec ça. Je suis bien d'accord. Deux entreprises qui fusionnent ou deux villes qui fusionnent, tu sais, tu ne peux pas commencer à crier aux clauses orphelin, parce que tu as deux conventions collectives négociées complètement une à côté de l'autre. Ce n'est vraiment pas ça, moi, que je vise. Je veux juste m'assurer qu'on ne pourra pas utiliser de façon détournée des accréditations syndicales, négocier des conventions collectives à l'intérieur même... qui va avoir... Parce que, moi, c'est ce que je vous ai dit tantôt, c'est le résultat qui nous importe, tu sais, être sûr qu'en bout de ligne... Je veux dire, on ne peut pas tout le temps se fier aux gens en place pour le faire. On l'a vu avec les jeunes professeurs. C'était impensable de penser qu'un syndicat pouvait sacrifier impunément les plus jeunes salariés, et ils l'ont fait. Je veux juste m'assurer que cet amendement-là n'ouvre pas la porte à des manoeuvres. Peut-être entendre la ministre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Simplement pour rassurer mon collègue. Ça ne peut être le cas effectivement, parce que les règles d'accréditation sont prévues – je regardais rapidement dans le Code – au Code et ne changent pas. Les salariés peuvent se regrouper selon certains critères dont, entre autres, le fait qu'ils forment, bon, la même communauté d'intérêts. Il y a des critères, et cela ne change pas. Donc, ça ne met pas en cause le régime universel d'accréditation et de convention collective. Tout ce que ça prévoit, c'est dans le cas effectivement où il existe de façon temporelle, tel qu'il arrive actuellement, deux accréditations par le biais d'une fusion. Mais on ne pourrait en aucune façon l'invoquer pour dire qu'on veut faire en sorte de changer le Code du travail actuel. Le Code du travail prévoit un mode d'accréditation qui est unique dans le cas d'un corps d'emploi. Donc, ça, ça ne peut être modifié, et c'est réel, et, je veux dire, c'est...

Une voix: ...

M. Bédard: ...voilà, c'est impossible à changer. Bien, c'est impossible, ce n'est que par le biais d'une loi, mais actuellement cette modification-là ne peut avoir pour effet de changer le régime actuel. Alors, le régime, il est très bien balisé. Donc, il n'y a personne qui pourrait l'invoquer.

M. Lamoureux: ...accréditation.

M. Bédard: Une autre accréditation.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous avez terminé, M. le député de Chicoutimi?

M. Bédard: Oui, oui, oui, j'ai terminé. Mme la ministre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre, vous voulez ajouter? Oui.

Mme Lemieux: Je vais juste me permettre d'ajouter quelque chose. Je comprends très, très bien la préoccupation du député d'Anjou. Je suis parfaitement d'accord aussi quand il dit qu'à terme il faut arriver à éliminer les clauses de disparités de traitement. Mais, effectivement, cet article-là dit: On ne peut pas accorder une condition de travail moins avantageuse que celle accordée à d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement. Dans un établissement, si des gens effectuent les mêmes tâches, il y a une unité d'accréditation. Et la seule occasion où il peut y en avoir plus qu'une, c'est dans le cas d'une fusion d'entreprises. Là, ce que nous disons, dans le fond, c'est: Il ne peut pas y avoir de condition de travail moins avantageuse pour un salarié, dans un même établissement, assujetti à une même convention collective.

Alors, moi, je ne pense pas qu'il puisse y avoir – je comprends que vous vous interrogiez là-dessus, là, puis c'est très légitime de le faire – de passe-passe – on se comprend, là – un truc pour générer des unités d'accréditation qui ferait en sorte que des clauses de disparités persisteraient et de manière presque systémique, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Oui, bien, c'est ça. Écoutez, oui, j'ai entendu des explications, entre autres celles de mon collègue de Chicoutimi quant à l'accréditation. Je suis bien d'accord avec ça. Seulement, comme je vous dis, c'est le résultat qui doit être le guide, je pense, de tous les parlementaires dans la recherche de ce projet de loi là.

On parlait tout à l'heure des fusions, et le député de Marguerite-D'Youville faisait allusion à ce qui s'est passé à Toronto avec la mégacité. D'ailleurs, on peut même pratiquement dire: Ils ne voient pas l'heure où ils vont réussir à faire une fusion des conventions collectives, si je peux m'exprimer ainsi. Puis c'est un peu ma préoccupation. Je ne veux pas entrer dans le débat nécessairement d'une île, une ville, qu'est-ce qu'on va faire demain matin s'il y a une fusion à Montréal, et la ministre tout à l'heure y a fait allusion au niveau des mécanismes, mais je veux juste qu'on s'assure, là...

Parce que ces conventions collectives là, et puis le député de Marguerite-D'Youville y faisait allusion, ont été reconduites. Parce que c'est impossible, là, 98 conventions collectives. En dedans de deux ans, ils n'ont même pas été capables, évidemment, de faire ces fusions-là. Mais ça persiste. Puis, quand on mentionnait qu'à terme... Mais, quand on est rendu... Une convention collective, ça a pris deux ans. On reconduit les 98. Ça dure, mettons, un autre trois ans, un autre quatre ans. Je veux juste savoir: Là-dessus, est-ce qu'il y a des mécanismes qui sont prévus pour s'assurer que temporairement, justement, ça n'étire pas trop dans le temps puis que, par ce genre de mécanismes là, on puisse faire perdurer?

Parce que, dans le fond, je le mentionnais tout à l'heure, mettons une fusion de municipalités, tu as deux taux horaires pour les mêmes tâches qui sont effectuées. Tout est beau. Puis je ne mets pas en cause le fait que c'est une clause orphelin parce que c'étaient ces deux conventions collectives là. Mais, si je reconduis les conventions collectives, pas capable de les fusionner, ça, ça veut dire que, pendant quatre ou cinq ans, comme ville, je me retrouve avec des employés qui sont là – ça fait peut-être bien mon affaire – puis avec des employés qui sont à un autre plancher. Le résultat net en bout de ligne, c'est que tu vas avoir une disparité, un écart entre les deux employés, dans le fond. Je veux juste savoir si on a pensé à cette façon. Parce que, je veux dire, en repoussant, et en reconduisant, et en ne formant pas qu'une seule, bien là on se retrouve avec un résultat qui n'est peut-être pas nécessairement celui qu'on souhaite, ici, autour de cette table.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: D'abord, Mme la Présidente, ça me fait plaisir de donner un certain nombre d'explications, mais nous convenons qu'il y aura un débat là-dessus. Il va y avoir un processus là-dessus. Et la proposition que nous avons dégagée pour gérer – c'est ce que vous venez d'illustrer comme situation potentiellement présente dans le cas de regroupement de municipalités – ça va être mis au jeu puis ça sera discuté.

(16 h 10)

Je peux vous assurer d'une chose, par ailleurs. C'est que, pour dégager des propositions en ce sens-là, pour bien gérer, dans le cas où il y a des regroupements de municipalités, comment on gère bien ces opérations-là, ce que ça veut dire, comment on va gérer les superpositions d'unités d'accréditation, de syndicats, et tout ça, alors, avant de mettre ça au jeu, on a regardé ce qui se passait ailleurs. On a regardé ce qui a été vécu ailleurs, on a regardé nos propres expériences, parce qu'il y a des expériences ici dont on peut tirer des leçons. Alors, avant de dégager une proposition, on a fait un très bon tour de piste de ce qui s'était passé en théorie, en pratique, qu'est-ce que ça a amené comme changements législatifs, etc. On a fait le tour, et là on a donc dégagé une proposition qui sera débattue au moment où ce livre, dont je ne qualifierai pas la couleur, sera déposé.

Par ailleurs, je rappellerai au député d'Anjou – et ça, nous allons le voir plus tard – qu'on ne peut pas traîner indéfiniment des clauses de disparités de traitement, parce que vous avez vu que ce que je vous propose comme amendement, contrairement à la version originale, c'est que toute nouvelle convention ou toute convention renouvelée, il ne pourra pas y avoir de clauses de disparités de traitement. On parle des conventions même qui sont en train de se négocier, d'où le délai de 60 jours. On dit: Tout ce qui est en train de se négocier, là, vous pouvez continuer à négocier, mais vérifiez vos affaires, parce que, dans 60 jours, vous ne pourrez pas conclure une convention collective qui comporte des clauses de disparités de traitement.

On a aussi, mais ça, on en reparlera, les amendements qui sont proposés à l'article 3, je crois. Mais on a évité ça, là. On ne peut pas être sur le pilote automatique, renouveler une convention collective qui comporte des clauses de disparités de traitement. Ça, c'est clair dans les amendements que je propose.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Là-dessus, peut-être juste pour préciser ma pensée, au niveau de l'amendement, ça, je ne le remets pas en cause. L'amendement que vous apportez, effectivement, empêche ce genre de situation là. Ce que je mentionnais, c'est que, sans qu'il y ait de clauses orphelin à l'intérieur même d'une convention collective – qu'on ne pourra pas reconduire, ça, je vous l'accorde – la résultante, c'est que je pourrais à la limite maintenir deux conventions collectives.

En dedans de cette convention collective là, il n'y en a pas, je vous le dis, il n'y a pas de clauses orphelin à l'intérieur des deux, mais j'en maintiens deux qui s'en vont et qui sont... Comment je pourrais dire? Au niveau des conditions qu'il y a à l'intérieur, si je les compare une avec l'autre, j'ai des conditions différentes, situation que je peux qualifier d'acceptable ou de tolérable dans la mesure où on parle d'une fusion puis que les deux arrivent et puis reviennent ensemble. Mais, dans la mesure d'une fusion de municipalités, qui est beaucoup plus complexe que deux entreprises qui peuvent se fusionner, de l'ampleur de ce qu'on a pu voir à Toronto ou de ce qu'on pourrait voir à Montréal, si vous allez dans ce sens-là, ce que je vous dis, c'est que ça peut durer quatre, cinq, six ans. On reconduit, on consulte, on fait des comités pour essayer d'arrimer tout ça, mais, en attendant, tu te retrouves avec deux conventions collectives, puis il y a un écart.

Je veux juste savoir si ce genre de situation là est prévu ou, en tout cas, s'il y a des aménagements qui sont prévus pour empêcher ce genre de situation là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Bien, écoutez, d'abord, je pense que le député d'Anjou cherche à avoir plus d'information sur le livre dont je tairai la couleur, mais je n'en donnerai pas plus. Je vous le dis, on a prévu le coup. On a mis quelque chose au jeu, puis ça se discutera à ce moment-là.

Deuxièmement, on peut bien rêver en couleur, mais vous avez vous-même fait allusion à certaines situations. Deux entreprises qui fusionnent, ça n'a aucun sens qu'on leur demande que, dans le 24 heures qui suit la fusion, elles fusionnent les conditions de travail puis... Voyons donc! Il faut leur donner une chance que les choses se passent au moment où elles doivent se passer.

Alors, moi, je pense que... En tout cas, pour ce qui est des entreprises privées, ce n'est pas vrai que des entreprises privées peuvent vivre des années et des années – d'ailleurs, si jamais vous avez des cas, vous me les soumettrez – avec deux conventions collectives qui gèrent le même personnel. En tout cas, dans l'entreprise privée, là, ce n'est pas gérable, ça. Mais, comme je le dis, dans le cas des municipalités, c'est un processus qui va être prévu.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Oui, je suis d'accord, Mme la Présidente, avec la ministre que, dans une entreprise privée, effectivement, en pratique, tu ne peux pas vivre longtemps avec la situation que je décrivais. Moi, la situation que je décrivais visait spécifiquement le cas de fusion municipale. C'est évident là-dessus. Bon, peut-être que c'est hypothétique. Je sais que la ministre nous dit: On a paré le coup, on y a pensé, on étudie. Elle ne veut pas nous livrer cette politique-là, c'est de bonne guerre, mais, moi, c'était vraiment dans le cadre de cette politique-là au niveau des fusions municipales.

Une voix: Mme la Présidente, juste un, peut-être un...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mais un instant, je ne sais pas... Est-ce que vous avez une réponse à donner?

Mme Lemieux: Ça va.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va? D'accord.

M. Lamoureux: Bien, il n'y avait pas de question vraiment, non plus.

Mme Lemieux: Non. Je voulais juste vous dire, on n'étudie pas, là. Je vous dis que, dans ce qui s'en vient, on a une proposition claire qui nous donne un processus et une méthode pour gérer les situations dont on parle actuellement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. Alors, Mme la députée de Bonaventure, vous avez un ajout à...

Mme Normandeau: Oui. Simplement un commentaire justement sur la dernière question de mon collègue, justement au niveau des fusions des municipalités. On comprend effectivement qu'on est un petit peu, on nage un petit peu dans une certaine incertitude ou enfin tout un processus à définir. Mais, dans le projet de loi, si je comprends bien, il y a un rapport qui va être produit en 2004. Et, dans les exemples au niveau des fusions de municipalités en Ontario, on sait que le processus, effectivement, avant que ce genre de situation là soit réglé, peut être très, très long.

Alors, ma question, c'est: Est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver, en 2004, avec des municipalités regroupées puis on n'aura pas trouvé, à ce moment-là, en 2004, de solution, là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Non.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Chicoutimi, vous aviez... Bon.

M. Bédard: Ce n'était pas pour les fins des notes sténographiques.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Gobé: ...son avis juridique.

M. Bédard: Non. Ce que j'ai compris des commentaires de la ministre, c'est que ça va être inclus...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: O.K. Excusez-moi, Mme la Présidente. Tout simplement, ce que j'ai compris, moi, c'est que ça va être inclus effectivement dans cette démarche-là. Déjà, il va y avoir un processus qui va être soumis et qui va régir l'ensemble des fusions. Donc, on ne pourra pas attendre à 2004. Dans le livre, on va y inclure un processus qui va être déterminé à ce moment-là. Donc, on ne peut pas supposer effectivement qu'il puisse s'étendre.

M. Gobé: Mais, juridiquement, il faut qu'on modifie le Code du travail.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Juridiquement, il faudrait modifier le Code du travail.

M. Bédard: Non, non. On peut prévoir toute modification particulière par rapport... On l'a fait pour les commissions scolaires, on peut le faire pour...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Bédard: Mais on s'éloigne de notre sujet, hein, Mme la Présidente. Excusez-moi, effectivement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Rivière-du-Loup, c'est à vous la parole.

M. Dumont: Merci, Mme la Présidente. Il y a, dans cet article-là, avec la discussion, où est-ce qu'on en est rendu, plusieurs problèmes majeurs.

D'abord, il s'en vient une politique sur les regroupements municipaux. La ministre, et je le comprends, se fait discrète là-dessus, mais on est en train de discuter et on n'aura pas, je pense, d'autres occasions de le faire, où les projecteurs vont être tournés sur la question des clauses orphelin.

Là, la ministre semble laisser entendre que, quand il va y avoir une mécanique ou une législation sur les fusions municipales, elle serait comme au-dessus, elle viendrait se superposer à la loi sur les clauses orphelin. Alors, s'il n'y avait pas, parce qu'elle va... Ce que je comprends de la ministre, elle dit: On va en débattre plus tard. Ça va peut-être amener des situations. Et là l'article qu'on a devant nous, bien il vise justement à préparer le terrain, préparer la piste d'atterrissage pour ça. La ministre nous dit: En temps et lieu, on va en débattre. Parce que, moi, j'ai une expérience différente des affaires municipales par le gouvernement du Parti québécois, parce que le projet de loi n° 414, on n'en a pas débattu longtemps. Ça s'est fait sur le bâillon.

Alors, là, on est en commission parlementaire, on a l'opportunité d'étudier un projet de loi de fond en comble sur les disparités de traitement, sur des clauses orphelin. On arrive à un article où on dit: Oups! il y a un problème au niveau de cet article-là, sur ce que ça pourrait signifier. La ministre nous dit: Effectivement, dans le monde municipal, cet article-là pourrait être comme le lien, la jonction où va se raccrocher notre politique municipale. Ça va nous ouvrir une porte, parce qu'on va avoir, dans le cas d'une fusion, des conventions collectives parallèles. Bon. Je pense que le député d'Anjou et d'autres ont bien compris que, dans le cas de fusions municipales multiples, ce n'est pas évident que, au premier renouvellement, tout ça va se fusionner; ça peut être beaucoup plus long.

Mais qu'on ait une autre occasion d'en discuter, moi, j'en doute, parce que la dernière fois que j'ai parlé de monde municipal et de clauses orphelin, c'était le bâillon sur la loi n° 414. Puis je pense que le député de LaFontaine s'en souvient. Alors, je ne peux pas présumer que, là, on va laisser passer un article comme celui-là dans l'esprit que: Ah! bien, s'il arrive des choses plus tard au niveau municipal, on aura l'occasion d'en débattre. Il ne faudrait pas non plus que...

(16 h 20)

La dernière fois que le gouvernement, en matière municipale, a voulu avoir une politique liée à la main-d'oeuvre, il l'a fait sur le dos des jeunes. L'article central du règlement de son dernier dossier municipal, ça a été les clauses orphelin. Alors, de présumer que, dans une prochaine action, on prépare déjà le terrain comme ça, moi, ça me fait peur. Est-ce que c'est les jeunes qui vont être victimes des regroupements municipaux? La question se pose, là.

Si on avait la confiance que le gouvernement a une vision d'ensemble, on pourrait sentir dès maintenant qu'ils vont assurer la cohérence de tout ça. Mais elle n'est pas là, la vision d'ensemble, parce que la loi n° 414 que je viens de décrire, le gouvernement s'en vante encore. La ministre des Affaires municipales y réfère encore, la loi n° 414, comme à une bonne loi. Moi, je ne peux pas présumer que la même ministre des Affaires municipales, quand elle va préparer un mode de règlement, un mode d'insertion de différentes conventions collectives dans les fusions qui pourront arriver, qui pourront survenir ou qui pourront être proposées ou imposées, n'appliquera pas les mêmes principes.

Cette semaine, pendant que, nous, on préparait notre commission parlementaire sur le projet de loi n° 67, la ministre des Affaires municipales écrivait aux journaux pour dire que le projet de loi n° 414, c'est un bon projet de loi. Les mots veulent dire ce qu'ils veulent dire. Ce n'est pas Pierre, Jean, Jacques qui le disent, c'est la ministre des Affaires municipales, collègue, d'ailleurs une inspiration pour la ministre du Travail, semble-t-il.

L'autre question que je me pose. Bon, on nous dit: Dans le monde municipal, la ministre a laissé la porte entrouverte. Effectivement, s'il y avait plusieurs conventions collectives, ça se pourrait qu'on arrive au premier terme de renouvellement et qu'on ne soit pas capable de faire l'intégration des différentes conventions collectives. Ça se pourrait qu'il y ait des conventions collectives qui roulent en parallèle, avec des discriminations durant plus de trois ans, peut-être cinq ans, sept ans, on ne sait pas combien.

Alors, là, la ministre traite ça avec beaucoup de détachement aujourd'hui, mais je ne sais pas comment ça va être. On dit: Dans le secteur privé, bon, ce n'est pas gérable de maintenir deux conventions collectives. Effectivement, mais on ne pourra pas non plus arriver dans une règle du deux poids, deux mesures, où la règle du gouvernement, c'est une règle x contenue à l'article 87.1 des normes du travail, sauf pour le cas des municipalités qui, elles, auraient une marge de manoeuvre supérieure, une marge de manoeuvre supplémentaire due à la loi sur les fusions municipales ou sur l'organisation municipale. Là, on pourrait arriver dans une situation complètement aberrante où les municipalités qui, elles, n'ont pas de compétitivité... On s'entend, là, que les municipalités sont peut-être en compétition les unes avec les autres pour offrir le terrain puis les taxes foncières au meilleur prix, mais elles ne sont pas en compétition à travers le monde. Il n'y a pas de municipalités au Québec qui vont disparaître. C'est le secteur commercial, c'est le secteur industriel qui est venu nous voir pour nous dire qu'il fallait regarder les règles de compétitivité, puis, bon, on en a discuté avec eux. Finalement, moi, j'arrive à la conclusion, je pense, qu'ils doivent faire partie de l'effort collectif de redressement de la condition économique de la nouvelle génération.

Mais l'aberration des aberrations, ce serait que le monde municipal se retrouve avec une marge de manoeuvre supplémentaire au secteur privé, avec une possibilité de contracter des clauses discriminatoires ou de maintenir des conventions collectives qui roulent en parallèle, donc prolongeant des conditions de travail, prolongeant des conditions salariales parallèles qu'on dirait que le secteur privé ne pourrait pas, lui, faire. Je comprends qu'on peut me dire que, dans la pratique... Bon, ça, dans la pratique, on ne sait jamais ce qui peut arriver. Mais, même si on me dit que, dans la pratique, c'est difficilement vivable pour une entreprise de renouveler une telle convention collective, moi, j'aurais un sérieux problème sur le plan des principes à ce que ce soit le message que l'État envoie: l'État donne à ses municipalités, qui, elles, gèrent avec des fonds publics, des fonds de taxes, une marge de manoeuvre en matière de double échelle salariale que les entreprises privées n'ont pas. Ce serait assez spécial, ce serait assez particulier. Alors, tout ce raisonnement-là pour arriver à dire: Peu importent les processus de fusion qu'on aura, si on n'a pas l'intention de donner au monde municipal des conditions différentes...

Moi, je partage plutôt l'opinion du député de LaFontaine sur le maintien de l'article 87.1 dans sa forme présente, dans sa forme initiale. Là, je me suis référé... Là, je pense qu'on a tous étudié les amendements avec sérieux. En étudiant les amendements point par point, on est un peu référé à ce que les commissions parlementaires, entre autres la dernière commission parlementaire, nous avaient fourni comme éclairage. Là, ça ne se bat pas dans les autobus pour des arguments dans le sens de ce que la ministre nous propose, hein. Moi, je n'ai pas vu de mémoires qui ont identifié ce point-là comme étant problématique, à mon souvenir. Je n'ai pas relu chacun des mémoires point par point, mais je pense que personne, dans les mémoires, a soulevé cette problématique-là.

Quand je n'ai pas une impulsion à un amendement, quand je ne trouve pas l'impulsion dans les consultations publiques, j'essaie de trouver l'impulsion ailleurs, puis je pense que, là, on l'a, c'est dans tout le processus de fusions municipales. Je pense que c'est de là que vient l'impulsion de cet amendement-là. C'est pour ça que je décortique tout ce qui pourrait se passer en matière municipale. J'essaie de voir, historiquement, comment le gouvernement a agi en regard des municipalités, comment le gouvernement a traité les jeunes, et, quand je dis «le gouvernement», ce gouvernement-là du Parti québécois, comment il a traité les jeunes quand est venu le temps de parler affaires municipales. Jusqu'à date, son bilan n'est pas rose. Bien, je suis obligé de vous dire que le regret, le repentir – pour prendre un terme propre à la charité chrétienne si profondément ancrée dans le terroir québécois – n'est même pas là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Attendu que c'est parlementaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Tant que c'est parlementaire, on peut y référer. Mais le repentir n'est même pas là, parce que le premier ministre – c'est quand même le chef de ce gouvernement-là – il y a quelques jours, à l'Assemblée nationale, il répondait au député de LaFontaine puis il lui disait: Oui, j'ai fait quelque chose, j'ai fait la loi n° 414. Puis la ministre des Affaires municipales, elle a écrit aux journaux. Elle ne s'en cache pas. C'est de la transparence. Elle dit: Nous autres, les clauses orphelin, là, on a fait ça puis on l'a fait parce que les municipalités, on voulait qu'elles réduisent leurs coûts, puis on leur a proposé de le faire sur le dos des jeunes. Puis elle signe ça, des lettres aux journaux, pour montrer qu'on a fait quelque chose pour...

Là, c'est dans le contexte d'un gouvernement comme ça, en face de nous autres, qu'on doit approcher cet amendement-là. Et c'est pour cette raison-là, Mme la Présidente, que, moi, je me vois dans l'obligation... Je ne sais pas combien de temps il me reste. Peut-être qu'on pourra arriver avec un sous-amendement, ou si la ministre veut nous faire des suggestions, ou si on peut... Mais, dans sa forme actuelle, là, je fais la colonne des plus, la colonne des moins, la colonne des gains et la colonne des risques, et je suis obligé de m'opposer à l'amendement en question.

Beaucoup d'explications ont été d'ailleurs données par des membres, dont certains députés qui ont tenté de venir à la rescousse de la ministre dans ses explications sur l'amendement. Mais, compte tenu de l'article 87.3 qui prévoit déjà les cas de fusions... Tout à l'heure, on nous a expliqué pourquoi, dans le cas de fusion d'entreprises privées, on a une obligation de prévoir une disposition particulière, une disposition transitoire pour le temps que la fusion soit vraiment intégrée puis que les conventions collectives se réunissent.

Je ne vois pas ce que cet ajout à 87.1 fait de plus que ce qu'il y avait déjà à 87.3, à moins, et peut-être que là on pourrait arriver à quelque chose... Si le gouvernement nous dit que son intention est de retirer 87.3, tout le nouveau 87.3, puis d'arriver à un projet de loi beaucoup plus clair, bien là peut-être qu'on pourrait travailler sur une formulation. Mais, si ce n'est pas ça, l'intention, ça me paraît être simplement une complication du projet de loi, une porte supplémentaire ouverte, et il n'est pas du tout de mon intention d'appuyer ça.

Comme je vous dis, je me garde un peu de temps au cas où on puisse, dans des délibérations futures, s'approcher, par des sous-amendements ou par des réflexions, d'un consensus.

(16 h 30)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre, avez-vous des commentaires suite à cette intervention?

Mme Lemieux: Oui, Mme la Présidente. D'abord, je mettrais en garde le député de Rivière-du-Loup qui tente de détecter mes intentions profondes. Ah, là, il est disparu; il vient de me dire trois, quatre choses extraordinaires, Mme la Présidente, puis il est disparu, mais je vais le dire quand même.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, là, c'est parce qu'on ne peut pas souligner... Vous savez qu'on ne peut, Mme la ministre, souligner la présence ou l'absence de quelqu'un. Oui, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Je suis désolée d'avoir souligné l'absence du député de Rivière-du-Loup. J'en suis vraiment désolée.

Alors donc, je rappellerai au député de Rivière-du-Loup que je ne pense pas qu'il puisse prétendre pouvoir détecter mes intentions. Les intentions, c'est quelque chose qui est très intime, qui est dans notre tête, c'est nos valeurs, c'est nos manières de travailler, et il n'y a personne, il n'y a pas un être humain qui peut détecter les intentions de l'autre. Là, le député de Rivière-du-Loup fait toute une interprétation qui s'approche de la fabulation, alors, je veux juste le mettre en garde contre ça.

Deuxièmement, je voudrais rappeler que les salariés municipaux – parce que c'est de ça dont le député de Rivière-du-Loup a beaucoup discuté – sont couverts par la Loi sur les normes du travail. Je ne sais pas comment le dire plus clairement que ça. Ils sont couverts. Donc, si les salariés municipaux sont couverts, les employeurs municipaux le sont aussi. Je tiens à le rappeler. Je tiens aussi à rappeler que d'aucune manière on cherche à faire quelque chose de spécial pour qui que ce soit.

Nous avons eu cette longue discussion, c'est vrai, tout à l'heure, avec deux ou trois députés de l'opposition officielle, sur les municipalités, parce qu'il y a eu une question. On sait tous qu'on s'engage dans une grande discussion autour du regroupement de municipalités. On n'est pas fous, on travaille tous dans le même État, on voit ça. Et il y a eu des questions autour de ça: Comment on va gérer ça? Comment va s'agencer la Loi sur les normes avec ce phénomène-là qui risque de se passer? Mais d'aucune manière ce projet de loi là n'a pour objet d'écarter les uns par rapport aux autres. Alors, ça, je tiens à le rappeler. Je tiens à rappeler que même les employés municipaux vont être tenus de ne pas négocier de nouvelles conventions collectives, et, évidemment si nous acceptons ces amendements au moment du renouvellement des conventions collectives, bien, s'il y a une présence de clauses de disparités de traitement dans leurs conventions collectives, il devra y avoir un fichu de boulot pour les éliminer. Elles vont être tenues de la même manière que n'importe quel autre employeur au Québec est tenu de respecter les dispositions de la Loi sur les normes du travail.

L'autre chose aussi qu'on peut dire, c'est...

(Consultation)

Mme Lemieux: On me rapporte même, d'ailleurs, dans la Loi sur les normes, l'article 97 qui dit que: «L'aliénation ou la concession totale ou partielle de l'entreprise, la modification de sa structure juridique, notamment, par fusion, division ou autrement n'affecte pas la continuité de l'application des normes du travail.»

Alors, écoutez, là, les municipalités ne passeront pas à travers ça, là; elles sont des employeurs comme les autres, et les salariés municipaux sont couverts comme les autres. Et puis nous savons très bien qu'il y a eu une problématique particulière dans le monde municipal – il n'y en a pas que là – il y a eu une particularité dans le monde municipal, et d'aucune manière nous n'avons exclu le monde municipal des dispositions aux disparités de traitement que nous proposons.

Par ailleurs, je tiens aussi à rassurer le député de Rivière-du-Loup que – et, s'il le faut, on pourra faire creuser ça – la grande majorité des conventions collectives conclues dans le milieu du municipal sont d'une durée d'environ trois ans, ce qui n'est pas une durée exceptionnelle. On ne peut pas juger ces conventions collectives là comme étant de longue durée. C'est vraiment dans la moyenne. Donc, on peut supposer que d'ici deux, trois ans, s'il y a – parce que, oui, il y en a, des clauses de disparités de traitement dans le monde municipal – bien, les correctifs vont être apportés dans un laps de temps tout à fait raisonnable.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? Oui, M. le député de Laporte.

M. Laporte: D'Outremont, madame, d'Outremont.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'Outremont.

M. Laporte: C'est un sacré problème, ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est vrai. Pourtant, c'est ça.

M. Laporte: J'aimerais commencer, Mme la Présidente, par juste un petit commentaire grammatical. Je voudrais m'assurer que – moi, je ne suis pas un spécialiste du droit du travail – les expressions «convention ou décret» sont des équivalents. Ça désigne la même chose? Oui, bien, là, on a un problème parce que, dans le cas d'une conjonction disjonctive qui est «ou», lorsque ça ne désigne pas des équivalents, c'est le singulier qu'il faut adopter et non le pluriel. Donc, il faudrait dire «ne peut avoir pour effet».

M. Gobé: Ah, ça prend un amendement.

M. Laporte: Enfin, je fais juste... Enfin, le dictionnaire est assez clair là-dessus. Si ce sont des équivalents, il n'y a pas de problème, mais, si ça ne désigne pas la même chose, vous avez un petit problème grammatical.

Une voix: Ce n'est pas la même chose.

Mme Lemieux: Alors, Mme la Présidente, on me dit que c'est une formulation – et je vais essayer d'en trouver des exemples – qui se retrouve ailleurs dans la Loi sur les normes du travail. Alors, cette erreur, donc, se répète.

M. Laporte: Ça, c'est les usagers de la langue française qui ne seront pas contents.

Mme Lemieux: Mais il y a peut-être une question... On me dit aussi, parce qu'il y a les règles de la langue française, j'en conviens, mais il y a aussi les règles d'interprétation juridique, et ce qu'on m'indique, c'est que le «ou»...

M. Laporte: C'est le juge Robert Auclair qui ne sera pas content. Pauvre homme qui se débat là-dessus depuis 20 ans.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je connais bien Me Auclair. Effectivement, il regarde attentivement les projets de loi que nous étudions en commission et qu'on adopte aussi ici. Par ailleurs, il s'occupe surtout des termes. Alors, oui, Mme la ministre, vous pouvez poursuivre.

Mme Lemieux: Alors, est-ce que je peux me permettre de... C'est possible, hein, qu'au niveau des règles de la langue française ça soit problématique, mais, d'abord, premier élément, c'est que c'est une formulation qui, visiblement, est assez classique dans la Loi sur les normes. Par exemple, dans l'article 53 de la Loi sur les normes, il est indiqué, au sujet de l'étalement des heures de travail: «Une convention collective ou un décret peuvent prévoir...». Alors, bon. Deuxièmement, on me dit qu'au niveau de l'interprétation légale le «ou» dans ce sens-là est interprété comme un «et», juridiquement parlant. Mais, bon.

M. Laporte: À ce moment-là, on pourrait dire «et», n'est-ce-pas? Ça serait beaucoup plus clair. Là, on satisferait tout le monde, à la fois la grammaire française et la loi, si on disait «une convention et un décret».

Mme Lemieux: Mais, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la ministre.

Mme Lemieux: ...je ferai remarquer que très honnêtement – je ne veux pas le faire à la blague – si nous changeons de formulation dans la même loi, supposons qu'il y ait une plainte quelconque qui est devant un tribunal, peu importe qui, on pourrait imaginer, donc, qu'un juge ou un commissaire prétende qu'il y avait une intention différente du législateur parce qu'il l'a formulé d'une manière différente que dans d'autres articles de la Loi sur les normes du travail. Alors, ça m'apparaîtrait très risqué. Peut-être parfait au point de vue des règles de la langue française, mais pouvant nous occasionner d'énormes problèmes en termes d'interprétation juridique.

M. Laporte: En tout cas, Mme la Présidente, je tiens à ce que ce soit très clair que j'ai fait ce commentaire, parce que, si Robert Auclair me prend en sachant que j'ai été dans cette commission-là....

Une voix: Robert Auclair le hante.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député d'Outremont, vous pouvez être rassuré, vos propos sont enregistrés.

M. Laporte: Une autre question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Est-ce que j'ai compris qu'advenant une fusion nous pourrions nous retrouver en situation d'avoir deux conventions collectives prévoyant des disparités de traitement?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Non. Bien, c'est à dire que... Prenons un exemple. Qu'est-ce qui peut se passer lorsqu'il y a une fusion? Il peut se passer que, dans un même établissement, ce nouvel établissement qui est le résultat de la fusion de deux établissements, il y ait deux conventions collectives qui déterminent les conditions de travail de travailleurs et de travailleuses qui font à peu près les mêmes tâches.

(16 h 40)

Il est possible que ceux qui proviennent de l'établissement a avaient des conditions de travail d'un certain niveau et ceux qui proviennent de l'établissement b avaient des conditions de travail différentes. Ça, ce n'est pas une disparité de traitement parce que ce n'est pas en fonction de la date d'embauche. La vie fait en sorte que, parce qu'il y a une fusion, pendant un certain temps cohabitent deux conventions collectives qui gèrent des conditions de travail, mais à partir d'une histoire différente.

Alors, ce que l'article dit, c'est qu'on ne peut pas associer ça à une clause de disparités de traitement. Mais, dans le cas où l'entreprise, qui provient de la fusion de l'établissement ou de l'entreprise a et de l'entreprise b, s'engage dans un processus pour n'avoir qu'une seule convention collective, il ne pourra pas y avoir de traitements différents en fonction de la date d'embauche.

M. Laporte: La raison pour laquelle je pose ma question, Mme la Présidente, c'est que... enfin je m'interroge sur la compatibilité de cet article 87.1 amendé avec l'article 19 de la Charte des droits et libertés de la personne qui dit, je le cite: «Tout employeur doit, sans discrimination, accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent au même endroit.

«Il n'y a pas de discrimination si une différence de traitement ou de salaire est fondée sur l'expérience – l'expérience personnelle ou l'expérience professionnelle – l'ancienneté, la durée du service, l'évaluation au mérite, la quantité de production ou le temps supplémentaire, si ces critères sont communs à tous les membres du personnel.»

Les ajustements salariaux ainsi que les... Donc, il y a quelque chose, là. Ces gens-là vont travailler dans un même endroit, et la Charte des droits et libertés est claire là-dessus, elle édicte que dans ces situations-là il ne doit pas exister de disparités de traitement. Donc, est-ce qu'il y a une compatibilité ou une incompatibilité, là? Je pose la question sans avoir la réponse.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Oui, si vous me donnez deux secondes, parce que je vais... Je veux juste être bien sûre d'avoir les bons éléments. Comme on est inondé de papier... Voilà. Ça va, je l'ai.

D'abord, je tiens à rappeler au député d'Outremont que le projet de loi n° 67 ne se substitue pas à la Charte des droits. Le projet de loi n° 67, c'est une intervention complémentaire. La Charte existera toujours, elle aura toujours préséance et la Charte – vous avez repris des éléments de l'article 19 – dit, par exemple: Il ne peut pas y avoir de discrimination basée sur des motifs de l'âge. Enfin, ce n'est pas l'article 19, mais c'est les fondements de la Charte, l'article 10, et c'est vraiment la base avec laquelle tout le monde doit composer.

Donc, notre projet de loi ne porte pas sur la discrimination basée sur l'âge, parce que la Charte prévoit ce qu'il faut. Notre projet de loi intervient de manière plus large et notre projet de loi pose comme postulat qu'il y a des clauses de disparités de traitement à partir du moment où il y a une condition différente et moins avantageuse en fonction de la date d'embauche. Alors, c'est une intervention, donc, complémentaire à la Charte des droits de la personne.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Bien, c'est-à-dire que, là, moi, je ne suis pas convaincu. Je fais confiance à la ministre, ce n'est pas sur ce terrain-là qu'est mon insatisfaction, mais je pense qu'il faudrait avoir un avis juridique là-dessus. Il faudrait avoir...

Une voix: Ce serait prudent.

M. Gobé: Un avis juridique.

M. Laporte: Il faudrait s'assurer qu'il n'y a pas une incompatibilité, parce que, s'il y en a une, incompatibilité, en vertu de la Charte, il y a des gens qui vont faire des plaintes, et vous allez vous retrouver avec des problèmes d'application.

M. Gobé: Est-ce que les gens du cabinet...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Bien, écoutez, une fusion d'entreprises et les résultats, les effets d'une fusion d'entreprises, évidemment que ça ne doit pas comporter des éléments de discrimination en fonction de l'âge, du sexe, de l'origine – on connaît tous les motifs. Alors, honnêtement, on n'est pas du tout dans cet univers-là.

M. Laporte: Oui, mais, Mme la Présidente, on parle de l'évaluation au mérite, la quantité de production...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Avez-vous terminé, Mme la ministre? Oui. Alors, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: ...ou le temps supplémentaire. Bien, écoutez, là, ce n'est pas simplement l'âge, le sexe et l'origine ethnique, l'article 19, c'est beaucoup plus large que ça.

(Consultation)

Mme Lemieux: Bon, Mme la Présidente, est-ce qu'on peut avoir une suspension d'une dizaine de minutes?

M. Gobé: Oui, je pense que c'est mieux, parce qu'on ne se comprend plus, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Je vais suspendre. Il y a consentement, donc nous suspendons les travaux pour 10 minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 47)

(Reprise à 17 h 16)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Nous allons reprendre les travaux. Alors, oui, monsieur...

M. Gobé: ...Laporte, d'Outremont, qui était intéressé par cette question, arrive; il était sur une discussion avec notre leader, là, pour cette affaire-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Pour que tout le monde entende les explications.

M. Gobé: Oui, c'était pour lui que madame a pris la peine de... D'ailleurs, le voici.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Puisque M. le député d'Outremont est des nôtres, nous allons donc poursuivre. Alors, Mme la ministre, vos explications.

Mme Lemieux: D'abord, je voudrais me permettre de donner une explication qui a rapport à un autre sujet, mais je vais le faire très rapidement.

Le député de Rivière-du-Loup a exprimé plusieurs préoccupations tout à l'heure sur le secteur municipal, et j'ai fait sortir de l'information. Il y a actuellement 860 conventions collectives dans les municipalités: 458 sont échues au moment où on se parle, donc c'est des conventions collectives qui sont dans des processus de renouvellement, donc, dans le cadre de ce renouvellement-là, ces conventions collectives ne pourront pas comporter de clauses de disparités de traitement; 205 d'entre elles seront échues en l'an 2000, ça concerne à peu près 9 000 travailleurs; et 138 en 2001. Alors, il y a donc 458 conventions échues dans le milieu municipal au moment où on se parle. Il en reste 400 autres, et le plus gros, le plus grand nombre de ce 400, sera échu en l'an 2000 et en l'an 2001.

Pour revenir à la question du député d'Outremont, nous avons fait un certain nombre de vérifications. Finalement, c'est assez simple, mais quelquefois on est dans des discussions très denses puis on a besoin d'un petit peu de recul. Alors, il est clair... On a aussi vérifié au niveau de la jurisprudence. Reprenons la formulation de l'article 19. L'article 19 de la Charte nous dit que «tout employeur doit, sans discrimination, accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent au même endroit». Le député de Laporte a soulevé un problème: Que se passe-t-il dans le cas où il y a une fusion, donc où il y a, on peut supposer, deux...

Supposons, prenons un exemple où il y aurait deux conventions collectives, donc des traitements qui pourraient être différents. Alors, l'interprétation est très claire, c'est que le fait d'être régi par deux conventions collectives ne constitue pas en soi de la discrimination, parce que ce fait, le fait qu'il y ait donc deux conventions collectives, n'implique pas qu'il y ait discrimination selon l'article 10. Alors, quand on dit, à l'article 19: «Tout employeur doit, sans discrimination...», on doit se référer aux motifs de discrimination qui sont décrits à l'article 10. Et je rappelle qu'il est considéré comme de la discrimination les motifs fondés sur «la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge – et, bon, il y a d'autres motifs que je vais éviter d'énumérer – sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap».

Alors, l'interprétation... Par exemple, j'ai un extrait ici d'un jugement, l'état de la jurisprudence, où on dit: «Après considération de l'ensemble de la question, le tribunal ne peut que conclure que l'expression "discrimination" utilisée dans les articles 13, 16 et 19 de la Charte ne peut que référer à la notion de discrimination telle que définie à l'article 10, c'est-à-dire la distinction, l'exclusion doit être fondée sur l'un des motifs énumérés à cet article.» Donc, la situation qui est soulevée par le député d'Outremont ne semble aucunement problématique.

(17 h 20)

M. Laporte: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député d'Outremont.

M. Laporte: ...ça pourrait être un cas de discrimination indirecte, parce que la corrélation avec l'âge va être à mon avis pas mal forte. Donc, si c'est vrai ce que nous dit, nous répète le député de Rivière-du-Loup, la corrélation avec l'âge va être forte. En tout cas, moi, je ne suis pas au gouvernement, donc ce n'est pas ma tasse de thé de m'assurer de la compatibilité des lois avec la Charte des droits et libertés de la personne, mais est-ce qu'on ne pourrait pas demander un avis à la Commission des droits?

M. Gobé: Oui, je pense qu'il y a matière peut-être, hein?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Un instant, là. Est-ce que vous avez terminé, M. le député d'Outremont?

M. Laporte: Non, je n'ai pas terminé. J'ai une autre question, mais...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Pour l'instant, oui. Alors, M. le député de LaFontaine, vous voulez ajouter?

M. Gobé: Oui. Il va pouvoir revenir, mon collègue. C'est parce que j'ai devant moi l'arrêt qui a été rendu par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, et, dans leur arrêt ils invoquent l'article 19, obligation pour l'employeur «d'accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent au même endroit».

Et là on se retrouve avec des travailleurs qui accomplissent le travail équivalent au même endroit. Alors, si la Commission des droits de la personne a cru bon de se baser sur cet article-là pour rendre une décision que Mme la ministre s'est engagée à considérer, bien, c'est que son gouvernement, en ce qui concerne les jeunes enseignants, je crois qu'on devrait pour le moins vérifier cet amendement et cet article avec la Commission des droits de la personne pour être certain que, suite à l'avis qu'elle a donné, on ne refait pas la même erreur dans le projet de loi qu'on est en train de faire. Avant de le voter puis de l'écrire... bien, il est écrit, mais de le voter final, il serait peut-être bon de les consulter.

Alors, moi, je suggérerais, Mme la Présidente, que Mme la ministre réfère rapidement à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour lui soumettre son amendement, son article tel qu'il est réécrit puis avoir son opinion là-dessus, parce qu'il vaut mieux qu'elle nous le donne maintenant que nous le donner après. Je l'ai devant moi, sa première décision, puis c'est non équivoque, hein? Alors, pour aller dans le sens de mon collègue, que je vais laisser parler – il a peut-être d'autres questions à poser – je vous demanderais, moi, je vous encourage tout le monde à être très prudent.

Puis c'est vraiment un cas de discrimination. «Un traitement ou salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent au même endroit». Au même endroit, on parle d'une entreprise. L'endroit, le terme large de l'endroit est l'établissement. On dit qu'il peut y avoir plus d'une convention collective pour des gens qui font le même travail à l'intérieur d'un même établissement. Donc, on en revient à accepter et à mettre dans la loi une discrimination basée sur une accréditation syndicale.

C'est une manière de trouver un autre véhicule pour faire des clauses orphelin. Ça veut dire qu'on va dire: Voilà, maintenant, l'accréditation syndicale n° 125, bien, il y aura les nouveaux travailleurs qui vont être là-dedans, et puis, dans l'autre, précédente, la 701 ou la 200 et quelque chose – je ne sais pas comment est le local... – eh bien, eux, c'est les anciens, puis ils sont payés 15 $ de l'heure, puis les nouveaux, bien, eux autres, ils sont payés 12 $ de l'heure. Puis on négocie la convention collective de ces gens-là, 12 $; la prochaine fois, ça va être 13 $. Puis, les 15 $, ça va être 16 $ ou 17 $. Et c'est comme ça qu'on va avoir au sein d'une même entreprise, pendant des années et des années, puis d'une municipalité peut-être aussi, des disparités de traitement pour des gens qui vont faire exactement le même travail dans le même endroit, l'espace.

Je ne sais pas si la ministre avait vu ça. C'est pour ça que je lui ai demandé qui a amené ça: Est-ce que c'est la ministre des Affaires municipales? J'ai l'impression que c'est ça. Et je crois qu'à ce moment-là c'est un artifice. Si j'étais méchant avec la ministre, je dirais: C'est une entourloupette. Mais je ne le dirai pas parce que je suis certain que ce n'est pas dans ce sens-là qu'elle l'a vu. Non, non, je ne le dirai pas s'appliquant à vous, parce que je ne crois pas que vous ayez voulu faire ça. Mais les gens qui vous ont amené ça, s'ils ne l'ont pas fait dans ce sens-là, d'après moi ils vous mettent dans une très mauvaise position puis ils ont manqué de vision. C'est le moins qu'on puisse dire.

Alors, je souhaiterais, Mme la ministre, que vous puissiez vous pencher... demandez à la Commission des droits, puis, s'ils nous reviennent en disant: C'est correct, on va l'adopter. Mais j'aimerais ça qu'ils le disent, eux autres, M. Filion, qui est venu devant cette commission nous parler puis qui émet des savants avis, là.

M. Dumont: ...

M. Gobé: Comment?

M. Dumont: Contre le gouvernement?

M. Gobé: Bien, oui...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...parole, monsieur. Vous voulez parler?

M. Gobé: Pas forcément contre, mais pour les travailleurs et pour les jeunes enseignants. Mais ça touche le gouvernement, c'est sûr. Alors, moi, j'abonde dans ce sens-là. Je ne sais pas qu'est-ce que mon collègue de Rivière-du-Loup, mon collègue d'Outremont puis ma collègue pensent de ça, mais je l'ai devant moi, là, s'il y en a qui veulent une copie. M. Bédard. Mais il sait, il le connaît par coeur, il l'a lu, je suis certain, lui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce que vous avez terminé, M. le député de LaFontaine?

M. Gobé: Oui, oui, j'ai terminé, madame, je pense que mon point a été fait.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors, oui, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Bien, je voudrais dire deux choses là-dessus. La première chose, je rappelle qu'en déposant le projet de loi n° 67 et ses amendements nous faisons là une intervention complémentaire, supplémentaire, additionnelle – utilisez les qualificatifs que vous voulez – à la Charte. La Charte, elle est là, les motifs de discrimination sont bien campés dans la Charte, et l'intervention du projet de loi n° 67, c'est en ajout et c'est une intervention complémentaire à la Charte. Parce que la discrimination basée sur l'âge, elle est bien couverte par la Charte. L'objet de notre projet de loi, c'est d'interdire des différences de traitement en fonction de la date d'embauche. Que ce soit perçu ou non discriminatoire, nous faisons le choix d'interdire cette pratique-là. Donc, je le rappelle, c'est une intervention complémentaire, la Charte aura toujours préséance.

Parce que le point de départ de l'interrogation du député d'Outremont, c'est cette illustration: Que se passe-t-il lorsqu'il y a une fusion d'entreprise, lorsqu'il y a dans une même entreprise plus qu'une convention collective? Écoutez, si une de ces conventions collectives comporte des clauses discriminatoires ou qui pourraient prêter à une interprétation quant à la discrimination prévue par la Charte, c'est interdit. Ça ne sera pas moins ou plus avec notre loi, ça le sera toujours.

Et, lorsqu'on fusionne une entreprise et qu'on se retrouve donc avec une ou plusieurs conventions collectives, qu'est-ce que ça veut dire dans les faits? Ça veut dire que des gens de tous âges, de tous sexes – enfin il n'y en a que deux – des gens d'univers différents se retrouvent dans un même milieu de travail, et, s'il y avait dans leur propre convention collective d'origine des clauses qui portent à interprétation quant à la discrimination, ils sont toujours tenus de respecter la Charte. Ça ne dispense personne de ça. Le projet de loi qu'on dépose est un projet de loi complémentaire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Bien, écoutez, Mme la Présidente, je manque un peu de temps, parce que j'ai devant moi un avis de la Commission des droits de la personne datée du... je ne sais pas trop quand, mais la Commission me semble avoir déclaré que, pour ne pas être discriminatoire, il fallait se conformer à l'obligation, pour l'employeur, d'accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent au même endroit. Là, j'ai l'impression que ça ne serait peut-être pas une mauvaise chose que demander un avis.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, oui, M. le député d'Outremont, est-ce que vous aviez...

M. Laporte: De toute façon, j'ai... Enfin, je croyais... Il me semble qu'il y a un avis, là, qui élargit l'interprétation de l'article 10 qui a été mentionnée tantôt par la ministre. Je ne suis ni juriste ni ministre; je suis un pauvre parlementaire qui essaie de comprendre.

(17 h 30)

J'aurais une autre question, Mme la Présidente, si vous permettez. Moi, je ne veux surtout pas connaître les intentions de la ministre, là – elle l'a dit tantôt, on ne peut pas connaître les intentions d'autrui – mais j'aimerais tout de même connaître un peu ses motifs, les motifs qui lui ont fait décider de changer, d'apporter cet amendement. Parce que, là, écoutez, si je ne peux ni connaître les intentions ni les motifs de la ministre, je vais devenir paranoïaque, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laporte: Ha, ha, ha! Parce que je trouve que mon collègue de LaFontaine et le député de Rivière-du-Loup me paraissaient avoir raison en disant que l'article 87.1, tel qu'écrit ici, me semblait plus clair et plus transparent que l'article modifié par l'amendement, quoi. Alors, la ministre doit bien avoir des motifs pour...

Mme Lemieux: Certainement.

M. Laporte: Est-ce qu'on pourrait les connaître?

Mme Lemieux: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Oui. On ne peut pas présumer des intentions. Mme la Présidente, je l'ai un petit peu expliqué tout à l'heure, écoutez, c'est un projet de loi qui, même s'il ne comporte pas énormément d'articles, a demandé un travail important, beaucoup de recherche, beaucoup d'essais. Nous avons travaillé sans filet, je tiens à le dire. En général, je pense qu'il y a des gens ici qui ont beaucoup d'expérience comme parlementaires; lorsque le gouvernement du Québec, dans son rôle, lorsque le législateur s'engage dans un processus d'adoption d'une loi, en général, on n'est pas toujours les premiers et on peut s'appuyer, se baser, s'inspirer d'expériences qui ont été vécues ailleurs. Et, véritablement, je veux que les parlementaires soient conscients à quel point nous avons travaillé sans filet, parce qu'à ma connaissance il n'y a aucune législation au monde, même pas similaire; il n'y a pas le début d'une législation de ce type-là dans le monde. Et, si jamais ça nous a échappé et qu'il y en avait une, je suis prête à...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...

Mme Lemieux: C'est ça. Je suis prête à, je ne dirais pas à payer, quand même, mais... Mais, honnêtement, c'est donc un exercice que nous avons fait, donc, sans filet. Donc, l'intention, en amendant l'article 87.1 et en ajoutant ce deuxième élément, est un objectif de fluidité, de tenter de simplifier au maximum, même si, on le sait, ce n'est pas simple, ce que nous avons à codifier. Alors, nous avons voulu, dans le fond, retirer les concepts qui étaient dans le projet de loi initial à l'article 87.3, les concepts de fusion d'entreprises et de réorganisation interne, parce qu'il y a eu des représentations ici et ailleurs. Évidemment, les gens se sont exprimés dans le cadre des audiences publiques et ils ont été nombreux à le faire, mais, vous savez, on parle et on a des discussions aussi avec toutes sortes d'organisations. Il y a eu beaucoup d'interrogations sur qu'est-ce qu'une fusion d'entreprises, qu'est-ce qu'une réorganisation. Alors, on a voulu éviter d'être obligé d'ouvrir – c'est l'expression que je trouve la plus appropriée, là, j'espère que tout le monde va la saisir – d'autres parenthèses, c'est-à-dire d'être obligé d'inclure des définitions de l'article et de certaines portions de l'article 87.1. On a voulu éviter de faire ça.

Alors, ce qu'on voulait donner comme signal, c'est très simple, c'est qu'il ne peut pas y avoir de clause de disparités de traitement, c'est-à-dire il ne peut pas y avoir de conditions de travail moins avantageuses en fonction de la date d'embauche, accordées à un salarié qui effectue les mêmes tâches dans un même établissement et qui est assujetti à la même convention. C'est ça qu'on a voulu identifier comme réalité.

Alors, voilà, très simplement, l'intention, là, derrière cet amendement à 87.1.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Mme la Présidente, le collègue de la ministre du Travail, le vice-premier ministre, ministre des Finances et de l'Économie, nous dit souvent que nous prenons des décisions et que nous menons des projets qui sont les meilleurs au monde, n'est-ce pas. La ministre ne nous a pas dit ça, elle a dit que c'est unique au monde, et je ne voudrais pas que ça soit ce qu'il y a de pire au monde, là. Je voudrais que ça soit encore ce qu'il y a de meilleur au monde.

Et là j'ai pris connaissance du jugement de la Commission des droits de la personne, qui dit: «La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, tenant compte de l'intérêt public et de celui des victimes, propose au gouvernement du Québec, soit plus particulièrement au ministère de l'Éducation et au Conseil du trésor ainsi qu'au comité patronal de négociation et à la Centrale de l'enseignement du Québec, comme mesure de redressement, d'admettre que la clause de la convention collective, telle que modifiée suite à l'accord conclu le 3 juillet entre le comité patronal de négociation et la Centrale de l'enseignement du Québec, est discriminatoire.» Et la clause, on parle de l'obligation pour l'employeur d'accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent au même endroit.

Donc, je conviens bien avec la ministre que c'est un projet de loi unique en son genre, mais il ne faudrait pas tomber dans le pire, là, il faudrait tomber dans le meilleur. Puis là ça me paraît que, sans avis de la Commission, le risque est grand qu'on tombe dans le pire. Alors, ce n'est pas moi qui aurai à vivre avec ça, c'est la ministre. Donc, nous...

Une voix: ...

M. Laporte: Oui, c'est vrai, c'est vrai. On est tout de même... S'il fallait que mes petits-enfants me reprochent d'avoir participé... Non seulement le juge Auclair va-t-il me reprocher d'avoir laissé passer une conjonction disjonctive mal employée, mais là c'est mes petits-enfants qui vont me reprocher d'avoir voté pour des projets discriminatoires. Vous voyez l'air que j'ai quand je retourne à Montréal mardi matin.

Mme la Présidente, ce que je suggère à la ministre, c'est de demander un avis sur ce projet-là, de sorte qu'on soit en toute sécurité.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous avez terminé, M. le député d'Outremont. Alors, j'ai Mme la députée de Bonaventure qui avait demandé la parole avant la suspension.

Mme Normandeau: Oui.

Une voix: Le député de Rivière-du-Loup a demandé la parole.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Le député de Rivière-du-Loup? Je ne sais pas.

Mme Normandeau: Si je comprends bien, Mme la Présidente, donc, la demande qui est formulée, je devrais dire, unanimement, par l'opposition ici, de demander un avis à la Commission des droits de la personne, ne trouve pas d'écho favorable, ou aucun écho, du côté de la ministre. Est-ce qu'on doit comprendre que son silence se traduit par un refus de demander un avis à la Commission des droits de la personne? Alors, ça vient d'être clairement dit.

Mme la Présidente, j'aimerais revenir sur l'exemple qu'on servait tout à l'heure au niveau des fusions de municipalités. La ministre nous servait l'article 97 des normes du travail. Et je suis allée voir l'article 97. Évidemment, c'est un article qui nous dit que: «L'aliénation ou la concession totale ou partielle de l'entreprise, la modification de sa structure juridique, notamment, par fusion, division ou autrement n'affecte pas la continuité de l'application des normes du travail.»

Alors, par «entreprise», Mme la Présidente, je me suis demandé si on parlait ici de municipalités. Je suis allée vérifier dans le Code précédemment. Effectivement, une entreprise au sens de la Loi des normes du travail est un organisme qui embauche tout salarié. Donc, je comprends que les municipalités sont qualifiées d'entreprises dans le contexte. Là, je lis cet article-là, et en même temps la ministre, advenant le cas où effectivement on aurait des municipalités ou deux municipalités ou plusieurs municipalités qui se fusionnent, et où on aurait des accréditations syndicales différentes, donc des conventions collectives différentes, nous sert cet article-là dans un premier temps, mais rajoute que, pour régler, évidemment, s'assurer qu'il n'y a pas de disparités de traitement dans ce qu'on aura comme nouvelle convention collective ou ce qui débouchera sur une convention collective, elle nous dit: On va régler ça dans un laps de temps raisonnable.

Alors, sur la base de cet article 97, sur la base du laps de temps raisonnable pour régler un problème de disparités de traitement qui pourrait se présenter, je pense qu'il y a là une incohérence. Enfin, quand on parle de continuité de l'application des normes du travail, il me semble que... Je ne comprends pas, là. Je ne comprends pas, ici, sur la base de l'argument que nous sert la ministre au niveau de l'article 97 et du laps de temps raisonnable qu'elle nous sert, pour régler les cas qui pourraient se présenter...

Bon, on est clair ou on n'est pas clair. Lorsque la ministre nous sert l'argument suivant, qu'on va régler ça dans un court laps de temps ou dans un laps de temps qu'elle qualifie de raisonnable, moi, je me réfère à l'argument qu'elle nous a servi précédemment au niveau de l'article 97, et pour moi il y a comme un décalage entre les deux, là. Bon. On fait référence à quoi exactement par rapport à deux municipalités qui souhaiteraient se regrouper? À l'article 97 ou au laps de temps raisonnable, pour régler le problème qui pourrait se produire? C'est une fusion de municipalités où on serait devant le fait suivant: c'est-à-dire que, suite à une intégration de conventions collectives, on se retrouverait devant des disparités de traitement qui pourraient affecter, évidemment, des salariés du monde municipal.

(17 h 40)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Mme la Présidente, il y a des questions qui concernent la réalité de maintenant et la réalité de demain. Je vois bien que l'opposition cherche à avoir plus d'information sur la suite des choses dans le dossier municipal. Je pense que j'ai été limpide par rapport à ça, mais au-delà de ça, franchement, on n'est pas au bon endroit. Je pense que ça se discutera en temps et lieu.

Ceci étant dit, soyons clairs sur les problèmes potentiels. J'ai redonné tout à l'heure des informations, et je vais les redonner. Il y a environ 860 conventions collectives dans les municipalités actuellement, il y en a 458 qui sont échues au moment où on se parle, donc on peut supposer que ces conventions collectives sont dans un processus de renouvellement. Vous connaissez la nature des amendements que je propose au sujet des délais d'application de la loi. Vous savez que je propose que toute nouvelle convention ou toute convention renouvelée doit se conformer aux dispositions sur les clauses de disparités de traitement. Alors, au moment où on se parle, c'est 458 conventions collectives dans les municipalités. Il commence à y avoir le signal que, dans le renouvellement, il ne devra pas y avoir dans la nouvelle convention collective de clauses de disparités de traitement. On règle ici plus de la moitié des situations.

Et, en plus... en fait, que je n'ai même pas dit tout à l'heure et qui m'apparaît extrêmement fondamental, ce ne sont pas 860 conventions collectives dans les municipalités qui comportent des clauses de disparités de traitement; il y a une portion d'entre elles qui en comportent, toutes n'en comportent pas. On l'a documenté dans différentes études d'impact du ministère. Alors, si, dans les 458 conventions collectives échues actuellement, il y a un certain nombre d'entre elles qui comportent des clauses de disparités de traitement, bien, dans la convention qu'ils sont en train de négocier, ils doivent tenir compte du projet de loi n° 67 que nous avons bien l'intention d'adopter d'ici la fin de cette session.

Pour le reste, il y en a 402 autres qui ne sont pas échues au moment où on se parle. Il y a une portion d'entre elles qui comportent des clauses de disparités de traitement, il y a une portion qui n'en comportent pas. Donc, pour le reste, il y en a 205 qui vont venir à échéance en l'an 2000. L'an 2000, là, ce n'est pas si loin, hein. Considérant que le premier scénario, rappelons-nous, c'est qu'on prévoit une période d'adaptation de trois ans pour tout le monde, il y a des gains, là. Alors, il y en a 205, donc une certaine portion de ces 205 conventions collectives dans le milieu municipal qui comporteraient des clauses de disparités de traitement, qui seront échues en l'an 2000. Donc, il y a des problèmes qui vont se régler en l'an 2000. Et il y en a 138 qui sont échues à l'an 2001. Le reste est à coup de 14, 2, 1, 40. Alors, le gros, l'ensemble, la majorité des conventions collectives dans le milieu municipal vont être renouvelées d'ici l'an 2001, et, dans les cas où certaines de ces conventions comporteraient des clauses de disparités de traitement, elles seront soumises à la loi et les problèmes seront donc corrigés dans cet horizon-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que la ministre peut nous dire, sur les 458 conventions qui sont en renouvellement, combien de ce nombre-là touchent des municipalités qui sont en regroupement? Des municipalités qui sont en processus de fusion ou de regroupement, sur les 458 conventions qui sont en renouvellement, est-ce qu'on a des données là-dessus?

Mme Lemieux: Non, il n'existe pas d'information là-dessus, et je ne pense pas que c'est de l'information qu'on puisse retracer facilement.

Mme Normandeau: Mme la Présidente, dans le fond, la ministre tente de nous sécuriser dans l'optique où, effectivement, des municipalités se retrouveraient en processus de fusion, s'assurer qu'il n'y ait pas de disparités de traitement, mais je comprends difficilement le fait qu'on ait superposé deux arguments, c'est-à-dire l'article 97 des normes du travail et le fameux laps de temps raisonnable qu'on prendrait pour s'assurer que, dans le contexte d'un regroupement de municipalités, on ne soit pas en face d'une situation de disparités de traitement.

Je veux juste comprendre le lien entre les deux, parce qu'il me semble que 97 nous dit une chose, et l'argument que vous invoquez au niveau du laps de temps raisonnable nous semble être une autre chose, un autre argument. Il me semble que c'est deux choses différentes, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Mme la Présidente, la seule chose – j'en ai presque le regret – que j'ai dite... L'article 97, il est clair: «L'aliénation ou la concession totale ou partielle de l'entreprise, la modification de sa structure juridique, notamment, par fusion, division ou autrement, n'affecte pas la continuité de l'application des normes du travail.» C'est clair. La seule chose que j'ai ouverte tout à l'heure, hein, c'est quand le député de LaFontaine a dit: Que va-t-il se passer – en général, là, dans la vie – s'il y a un certain nombre de fusions de municipalités? Et là j'ai ouvert. Oui, j'ai ouvert. J'ai dit: Écoutez, c'est sûr qu'on sait qu'on a tout ce chantier de travail là qui s'en vient au Québec, et d'ailleurs, dans le livre – dont je tairai la couleur, on devrait le savoir bientôt – c'est le genre de chose qu'on a prévue.

Mais ça, qu'on ait des dispositions au sujet des disparités de traitement ou pas, écoutez, c'est une autre discussion, ça. J'ai simplement ouvert là-dessus en disant: Oui, on le sait qu'il y a quelque chose d'important qui s'en vient, il va falloir se donner des procédures, des méthodes, un processus pour que les choses se passent correctement. J'ai ouvert là-dessus, point à la ligne. C'est tout.

M. Gobé: C'est parce que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Mme la ministre, ce qui interpelle les députés de ce côté-ci, seulement avec ce que vous avez dit puis ce que nous supposons par rapport aux fusions municipales, c'est que tout le monde nous dit que ces fusions municipales vont être faites dans un but d'économie. D'accord? Et on sait très bien qu'un certain nombre de municipalités qui actuellement paient des taxes moins élevées que d'autres ont des travailleurs qui sont payés moins cher que d'autres, et que c'est une des raisons directes du fait, dans beaucoup de cas, qu'ils paient des taxes moins élevées. Nous savons aussi que, si on les regroupe, eh bien, il va devoir y avoir fusion de conventions collectives, ou alors pas de fusion. S'il y a fusion, il va falloir, comme vous dites, faire une loi d'accompagnement ou modifier le Code du travail, et, s'il n'y a pas de fusion, eh bien, on va se retrouver avec deux conventions collectives, hein, au sein d'une même ville, donc d'un même établissement – large, mais c'est un même établissement, qui fait le même travail. Donc, il y a discrimination.

Vous dites que, dans quelques années, jusqu'en 2002 à peu près, 2001, 2002, à peu près l'ensemble de ces conventions vont être renouvelées. Ce qu'il nous intéresse de savoir, c'est: Est-ce qu'elles vont être renouvelées en tenant compte des conventions les plus élevées de la nouvelle entité, de la nouvelle entreprise? À ce moment-là, où est l'économie? Il n'y en a pas, parce qu'on prend les employés qui gagnent moins cher pour donner les services, puis on les met au même salaire que d'autres qui déjà coûtent plus cher, hein, et on alourdit le fardeau fiscal de ces citoyens-là, ou alors on va continuer à conserver, pour des raisons d'économie, des unités d'accréditation dont les employés seront payés moins cher que les autres. Et c'est ça qui nous interpelle. La question que l'on se pose: Est-ce qu'on n'est pas là en train d'institutionnaliser un système de rémunération à double palier, là – on parle d'échelles, tout ça – au sein de deux municipalités? C'est ça qui interpelle nos gens.

Et on le voit parce que... regardez, actuellement, prenons l'exemple des employés de la ville de Montréal qui font le travail à Emploi-Québec. On sait que les salariés contractuels ont été congédiés – on parle de 254 employés – et puis c'est...

Une voix: ...

M. Gobé: Combien?

Une voix: C'est 69, à Montréal.

(17 h 50)

M. Gobé: Soixante-neuf? Oh! excusez-moi. Oui, 69 à Montréal, et c'est des auxiliaires qui font ça, hein, qui sont payés moins cher. Donc, c'est là un cas de discrimination qui est basé sur la date d'embauche ou sur des critères qu'on... Bon. Si on est capable de faire ça pour des raisons économiques à Montréal actuellement, si on a été capable d'adopter la loi n° 414... puis je vais vous lire l'article 9: «La proposition prévoit ensuite des mesures d'économie permettant de réaliser, avec celles visées au premier alinéa de l'article 8, une réduction de dépenses d'un montant équivalent à celui prévu par la résolution. Ces mesures d'économie doivent avoir un effet et ne peuvent porter que sur les objets suivants: la modification des conditions de travail prévues à la convention collective en vigueur ou applicables aux salariés en vertu de l'article 59 du Code du travail ou d'une convention collective expirée, sauf – et c'est là que... – les taux, les échelles de salaire applicables aux salariés qui sont alors à l'emploi de l'organisme.»

Là, le gouvernement vient de légiférer, à ce moment-là, pour dire: Vous pouvez appliquer d'autres taux de salaire, d'autres conditions de travail, sauf pour ceux qui sont actuellement à l'emploi, donc, de la ville – c'est pour la ville de Montréal en particulier – de Montréal. Ce qui nous inquiète, nous, c'est que, dès le moment où on va se retrouver avec votre projet de loi, vu qu'il y a du précédent, comment on va faire? Qu'est-ce qui nous garantit qu'on ne va pas se retrouver dans un système à deux vitesses, deux paliers? Parce que, si ce n'est pas ça, qui va payer la note? Il va falloir que quelqu'un assume les coûts, là. Et qui va assumer les coûts? Est-ce que c'est les payeurs de taxes montréalais qui vont assumer les coûts de remonter ces conventions collectives, d'accord, au niveau de la plus basse vers la plus haute, donc avec un supplément de coût à payer? Ou alors, est-ce qu'on va garder deux systèmes de rémunération? Donc, c'est de la discrimination sur la date d'embauche que, juridiquement...

Je prenais l'exemple de ville d'Anjou, tout à l'heure. Lorsque les employés de ville d'Anjou... Ça n'arrivera pas, j'espère, pour mon collègue le député. Je connais son maire qui est un personnage très dévoué à ses citoyens, M. Luis Miranda. Le jour où le gouvernement forcerait ou réussirait à faire une fusion entre ville d'Anjou et Montréal... bien, ce n'est pas Montréal qui se fusionne à ville d'Anjou, c'est Anjou qui se fusionne à Montréal, hein. Ce n'est pas le plus gros qui va vers le plus petit. Alors là les employés de ville d'Anjou, techniquement, vont perdre leur emploi comme employés de la ville d'Anjou. Techniquement et juridiquement, ils ne seront plus à l'emploi de ville d'Anjou. Ils vont être transférés comme employés de Montréal, mais ils seront des nouveaux employés de la ville de Montréal. À partir de ce moment-là, on peut dire que, s'ils n'ont pas la même convention collective et le même salaire, ils seront victimes de discrimination par rapport à la date d'embauche, entre autres.

On pourrait invoquer d'autres raisons aussi, certainement, comme la Commission des droits de la personne, des citoyens et de la jeunesse l'a fait. Et c'est ça qui nous inquiète. C'est pour ça que ça nous inquiète, parce que le premier article, tel qu'il était mis, il faisait notre affaire, il recevait l'assentiment très large des gens. On n'y voyait pas d'artifices. On ne voyait rien là, quelque chose de capable d'avoir des idées ou des buts cachés. Puis, dans celui-là, moi, madame, je vais vous dire ce que je pense. Après le nombre d'années que j'ai été dans cette Chambre, ici, en cette commission, des deux côtés, pouvoir, opposition...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): En conclusion, M. le député de LaFontaine. Vous n'avez presque plus de temps.

M. Gobé: Oui. Chaque fois que j'ai vu un projet de loi dont les articles faisaient consensus entre les parties, qui était changé par le ministre après avoir été déposé...

Une voix: ..

M. Gobé: Non, non. Je parle d'un article... d'un projet de loi dont un article ne faisait pas l'objet de récrimination ou de contestation. Je parle d'un article. D'accord? À chaque fois qu'il a été changé par le ministre, quel que soit le temps où j'étais... dans le temps où nous étions là, dans le temps où vous êtes là, c'est parce qu'il y avait des desseins autres, cachés, dont on s'était rendu compte en cours de route, et on profitait du projet de loi pour les amener.

Et le meilleur exemple, c'est lorsque le gouvernement a voulu amener un article de loi dans un projet de loi qui n'avait pas rapport avec ça, qui permettait de baisser – oui, je termine – les taxes du Centre Molson de 6 000 000 $ par année et que personne n'avait pu voir et...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Moi, je l'avais vu et je n'ai pas donné mon accord. Donc, je suis inquiet.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine, c'est terminé, ça fait déjà plusieurs secondes.

M. Gobé: Merci de votre tolérance, madame. Je vous le revaudrai une autre fois.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Une voix: On va finir à minuit moins une.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: Non, non. Elle fait bien son travail, ce n'est pas facile, hein.

Mme Lemieux: Je dirais une seule chose, Mme la Présidente. On prend pour acquis qu'il y avait un consensus autour de la formulation de 87.1 dans le projet de loi initial. Ça demeure très hypothétique. Alors, on présente ça ici comme une vérité, mais c'est très hypothétique.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Merci, Mme la Présidente. Là, je suis un peu renversé parce qu'on a assisté à une commission parlementaire et, il n'y a pas à dire, le projet de loi a été passé, là, sous les feux de tous les groupes, sauf un article. Moi, j'ai vu tous les autres articles se faire démolir, groupe après groupe, puis la ministre dit: Il n'y a pas consensus sur celui-là. Je comprends qu'il y avait une contestation large de son projet de loi, mais c'est peut-être l'article qui a été, de très loin, celui qui a été le moins attaqué, celui sur lequel les gens étaient plutôt d'accord.

Je veux particulièrement insister sur un point que la ministre a mentionné plus tôt, qui me rend encore plus perplexe à l'idée d'appuyer l'amendement. Elle a dit: Le débat sur les municipalités, c'est un autre débat qui va devoir se faire dans un autre lieu. Bien, en ce qui nous concerne, nous, à l'ADQ, c'est le même débat. Le débat qu'on a à faire, c'est celui des disparités de traitement, des discriminations faites aux nouveaux travailleurs, des clauses orphelin, et il faut le faire une fois pour toutes. Ce n'est pas un autre débat, c'est le même débat. Et le gouvernement, je pense, va devoir, là-dessus, tracer une ligne claire qui va s'appliquer à l'ensemble des salariés, à l'ensemble des situations, à l'ensemble des contextes.

Et, quand j'entends la ministre nous dire: C'est un autre débat, j'entends déjà la ministre des Affaires municipales préparer un projet de loi ou présenter un projet de loi sur les processus de fusion, puis elle nous dira: Bien, là, vous avez déjà quelque chose, mais, dans le cas précis de l'organisation des fusions, peut-être qu'il y aura, pendant des années et des années, des conventions collectives parallèles. Mais, quand la ministre nous dit que les conventions collectives vont venir à échéance, puis tout ça, c'est vrai que, pour les conventions collectives d'une même municipalité, ça règle le cas. Ça ne règle pas le cas des fusions parce que, dans le cas des fusions, le jour où on acceptera l'amendement, bien, il n'y aura rien de réglé. Je comprends que, dans la première version du projet de loi, on parlait de fusion, on parlait de réorganisation, ça avait été questionné par certains groupes, mais les groupes qui sont venus – et là il faut être honnête envers les gens qui sont venus en commission parlementaire – les gens disaient: On a peur que les mots «fusion», «réorganisation»... on n'est pas sûr que ça ne pourra pas être interprété un petit peu trop largement. Ils avaient peur, les gens, que ce soit utilisé, ça, comme mécanisme pour inclure trop d'affaires.

Bien là, imaginez, maintenant on est rendu encore plus large, on ne parle même plus des fusions ou des réorganisations, on parle simplement de la présence de deux conventions collectives. Il me semble qu'on élargit encore plus la portée potentielle, et tout ça d'une façon qui n'est pas du tout circonscrite dans le temps. Parce que, si, effectivement, l'échéance des conventions collectives nous restreint dans le temps lorsqu'une seule convention collective s'applique, si on accepte l'amendement, ça veut dire qu'avec deux conventions collectives on ouvre la porte à des conditions à double palier qui peuvent continuer en parallèle au sein de la même entreprise. Je m'excuse, ce n'est pas vrai que ce n'est pas le même débat, c'est le même débat.

Dans le fond, on discute de cet amendement-là, mais le débat de principe qui est derrière ça, c'est: Est-ce que, oui ou non, on va avoir une élimination des clauses orphelin? Quand on me laisse entendre qu'il y aura un autre débat qui ira sur le monde municipal... Si on n'avait pas l'intention d'ouvrir une porte aux clauses orphelin dans le débat sur le monde municipal, on ne sentirait pas le besoin d'y préparer une petite piste d'atterrissage dans le projet de loi n° 67. On dirait: On adopte le projet de loi n° 67; le projet de loi n° 67 va s'appliquer à tout le monde, tout le temps, dans toutes les situations, incluant dans le cadre des fusions municipales. Et ce n'est pas ce que la ministre nous a dit. Elle nous a dit qu'il fallait qu'elle se garde cet amendement-là parce qu'elle en avait besoin pour des raisons de fluidité, entre autres à la veille des fusions. On est obligé...

Mme Lemieux: Non. Je m'excuse, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est parce que c'est M. le député de Rivière-du-Loup qui a la parole.

Mme Lemieux: Non, mais il cite...

M. Dumont: Non, j'ai terminé. Je veux entendre la ministre répondre à ça. Elle nous a dit...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, alors, il vous reste une minute, Mme la ministre.

M. Dumont: La ministre dit que ce n'est pas le même débat, moi, je dis que c'est le même débat. Je veux l'entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Une minute, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Bien. D'abord, je vous mets au défi de dire que je... L'affirmation que vous venez de faire, elle est fausse. Deuxièmement, les salariés municipaux sont couverts par la Loi sur les normes du travail, donc les employés municipaux sont couverts par la Loi sur les normes du travail, donc les dispositions au sujet des clauses de disparités de traitement vont s'appliquer de la même manière à ces employés et ces employeurs. Point à la ligne.

Vous pourrez bien trouver 52 interprétations, c'est ça, la réalité: les salariés municipaux sont des salariés au sens de la Loi sur les normes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, sur ces paroles, nous allons donc suspendre les travaux jusqu'à à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 11)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, la commission va donc reprendre ses travaux pour poursuivre l'étude détaillée du projet de loi... Pardon? À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: ...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. La commission a donc repris ses travaux, la séance est maintenant ouverte. Nous continuons donc l'étude détaillée du projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement. Quand nous avons suspendu les travaux à 18 heures, il restait quelques minutes à faire pour le député de Rivière-du-Loup, le député de LaFontaine ayant complété son temps sur l'amendement. Il reste aussi donc encore... Je vais vous donner les temps précisément. Le député de Rivière-du-Loup, il lui reste trois minutes sur l'amendement; le député de d'Outremont, il lui reste 10 min 20 s. Alors, voilà.

Est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut prendre la parole ou est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'amendement? Alors, je comprends donc que les... M. le député Rivière-du-Loup, vous voulez prendre la parole, alors...

M. Dumont: Oui, bien, j'avais fait des commentaires brefs, compte tenu de l'horaire où on se trouvait en fin d'après-midi, pour permettre à la ministre de répondre. Et je veux revenir sur cet enjeu-là, c'est un enjeu très important, à savoir est-ce que c'est le même débat, le débat qui est en cours à l'heure actuelle, et le débat sur ce qui pourrait venir comme mode de réorganisation de conventions collectives dans le cas de fusions de municipalités? Parce que, pour moi, c'est le même débat. C'est la volonté ferme, sincère du gouvernement d'éliminer les clauses orphelin et de les éliminer dans toutes les circonstances, incluant de les éliminer même s'il y a des fusions de municipalités.

Et je pense que, des explications qu'on a eues, il n'y a pas de doute que cet amendement à cet article-là, il a comme effet que deux conventions collectives vont pouvoir perdurer, donc emmenant deux types de conditions de travail dans une même entreprise, dans une municipalité pendant une période. La question est de savoir quelle est cette période. La ministre nous a dit deux choses. Elle nous a dit, dans un premier temps: Normalement, au renouvellement des conventions collectives, tout ça devrait se fusionner, tout ça devrait se régler. Par contre, quand elle a été questionnée plus à fond, elle a avoué – et ça, il faut se rendre à l'évidence – que, dans une fusion de municipalités où ça se fait difficilement, ce serait imaginable que le gouvernement dise aux municipalités: O.K. On va tolérer, là, que vous reconduisiez des conventions collectives doubles, triples, quadruples, quintuples, et, s'il y avait, par exemple, une fusion de 20, 25 municipalités, les 29 de l'île de Montréal, qu'on permette le maintien de plusieurs conventions collectives. Et l'article en question permettrait... il ouvre la porte à faire ça.

Et ma question à la ministre... Bon, elle s'est insurgée, là, elle a dit que j'ai mal interprété certains de ses propos. Ça peut être arrivé, peut-être... Mais elle a quand même parlé des fusions de municipalités, il n'y a pas de doute qu'elle en a parlé. Et ce que je voudrais entendre comme explication de sa part: est-ce qu'elle ne pense pas que, alors que, dans son premier article, elle nommait «fusion» clairement, elle identifiait... Là, maintenant, elle a un article sur le maintien général, sans circonstances... le maintien au sens le plus général de deux conventions collectives dans une même organisation comme étant acceptable. Le député d'Outremont, lui, est allé plus loin en disant que ça pouvait même, à terme, reconnaître à l'intérieur du texte d'une loi... aller jusqu'à l'encontre de la Charte des droits et libertés. Moi, je demande: Au moins, est-ce qu'on ne prend pas le risque, selon certaines circonstances bien particulières, entre autres les fusions de municipalités, de rater l'objectif qui est supposé être le nôtre au moment des travaux de cette commission?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Mme la ministre.

(Consultation)

Mme Lemieux: Alors, Mme la Présidente, premièrement, je réitère que les employés municipaux, les salariés municipaux sont des salariés couverts par la Loi sur les normes du travail – ça, peu importe, fusion, pas fusion, la réalité actuelle, c'est ça, les salariés municipaux sont couverts par la Loi sur les normes du travail; que nous savons également que plus de la moitié des conventions collectives dans le milieu municipal sont échues au moment où on se parle, donc qu'ils devront, dans le cadre du renouvellement de leurs conventions collectives, se conformer aux dispositions des disparités de traitement contenues dans la Loi sur les normes que nous avons l'intention d'adopter; et que, pour l'autre moitié, d'ici 2001, et le plus important nombre aura lieu en l'an 2000, ces conventions collectives dans le milieu municipal seront échues.

Deuxièmement, dans le cas où il y aurait un regroupement de municipalités qui provoquerait donc une situation de fusion d'une municipalité, les dispositions du Code du travail sont toujours applicables. Il y a un processus qui est prévu, je ne veux pas réexpliquer en long et en large, dans le Code du travail actuellement, lorsqu'il y a une fusion, et ces dispositions-là continuent de s'appliquer.

Ça veut dire que, à un moment donné, lorsque ces dispositions-là s'appliquent, on doit en arriver à une seule unité d'accréditation, et les unités d'accréditation, par définition, ça couvre des employés qui sont dans un secteur similaire, qui exercent des tâches similaires. Donc, au moment où se dessine cette unité d'accréditation, que ce soit de manière consensuelle entre les parties ou par l'intervention des mécanismes prévus par le Code, s'il n'y a pas d'entente... Mais, évidemment, à partir du moment où il y a une unité d'accréditation, il y a une convention collective, il doit y avoir une échelle salariale applicable à l'ensemble des salariés. Donc, là encore, la négociation de cette unité d'accréditation devra respecter les dispositions au sujet des clauses de disparités de traitement contenues dans la Loi sur les normes du travail.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci. À ce moment-ci, comme je n'ai pas d'autre demande, est-ce que... Oui, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Mme la Présidente, j'aimerais déposer un amendement à l'article 1, 87.1: Remplacer, dans la première ligne de l'article 87.1, le mot «ou» par le mot «et».

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je comprends donc que c'est un amendement que vous déposez, le mot «ou» par le mot «et». C'est compliqué. Je pense qu'on aurait besoin du texte. M. le député d'Outremont, ce serait un sous-amendement que vous êtes en train de nous proposer, là.

M. Laporte: Vous avez raison.

(Consultation)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais attendre d'avoir le texte parce que j'ai une question que je me pose. Alors, je vais suspendre, oui, quelques instants. N'allez pas trop loin, j'ai suspendu quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 20)

(Reprise à 20 h 26)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, nous allons reprendre nos travaux. M. le député d'Outremont, j'ai effectivement pris connaissance de l'amendement, je cherchais exactement où c'était dans l'article, et je me rends compte que ce n'est pas du tout dans l'amendement qu'on est en train d'étudier. La proposition que vous nous faites, ce serait au début de l'article 87.1...

M. Laporte: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...mais évidemment on n'est pas à discuter de l'article 87.1, on est encore à discuter du deuxième amendement. Alors, à ce moment-ci, je ne peux donc pas recevoir cette proposition d'amendement ou de sous-amendement, ça aurait été un sous-amendement, mais ça ne peut pas fonctionner, on n'est pas rendu à la bonne étape pour le faire.

M. Laporte: Pourrez-vous le recevoir plus tard?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, écoutez, c'est à vous de décider si vous voulez toujours le représenter, mais là, à ce moment-ci, je pense que c'est clair que je ne peux pas accepter cet amendement-là, puisque ce n'est pas dans le texte qu'on est en train d'étudier.

M. Laporte: Vous êtes bien gentille, Mme la Présidente.

Une voix: ...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, on est sur le deuxième paragraphe, là. Vous comprendrez qu'il faut disposer de cet amendement-là avant de revenir à l'ensemble de l'article 87.1.

M. Gobé: Moi, je ne comprends pas. Pouvez-vous m'expliquer ça, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Dans l'amendement dont on est en train de discuter, on ne retrouve pas le mot que le député de Laporte voudrait changer. Alors là, il faut donc disposer de cet amendement-ci, sur lequel on est à discuter, avant de pouvoir représenter un autre amendement sur l'ensemble de l'article.

Alors, là-dessus, est-ce que l'amendement à l'article 87.1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Adopté sur division. Alors, l'amendement est donc adopté sur division. Nous allons donc maintenant passer à l'étude de l'article 87.1 tel qu'amendé. M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Mme la Présidente, est-ce que je peux vous soumettre un amendement?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est à ce moment-ci que vous nous soumettez l'amendement?

M. Laporte: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, d'accord. Je comprends que c'est le même amendement, il s'agit de l'amendement que vous aviez présenté tout à l'heure, donc les membres de la commission ont en main l'amendement, et à ce moment-ci effectivement cet amendement-là, il est recevable. Alors, j'accepte donc qu'on discute de l'amendement. M. le député d'Outremont, vous pouvez nous expliquer le sens et nous donner des explications concernant votre amendement.

M. Laporte: Non, je ne veux pas recommencer, je pense que j'ai été clair tantôt, mais il me semble que ça serait plus grammaticalement correct qu'on utilise «et» plutôt que la particule disjonctive. Comme je l'ai mentionné tantôt...

Une voix: ...

M. Laporte: Tu ne veux tout de même pas que je parle 20 minutes là-dessus, non?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, c'est ça qu'il veut.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député d'Outremont, nous vous écoutons.

M. Laporte: Allez me chercher un dictionnaire, s'il vous plaît! Ça va m'aider.

Non, mais, comme je vous le disais tantôt, Mme la Présidente, ou bien convention, décret sont des équivalents et, si c'est le cas, la particule «ou» est tout à fait grammaticalement correcte, ou bien ce sont des alternatives, et là, à ce moment-là, il faut utiliser la particule «ou», mais avec le singulier plutôt que le pluriel. Il faudrait dire... J'ai perdu la copie du projet de loi, vous voulez me l'apporter?

Une voix: Une convention ou un décret.

(20 h 30)

M. Laporte: Il faudrait dire: «une convention ou un décret ne peut». À ce moment-là, on est dans l'incertitude, là. Si c'est «ou», bien... On m'a dit tantôt que «convention» et «décret» n'étaient pas des équivalents. Alors, s'ils ne sont pas des équivalents, ce sont des alternatives, n'est-ce pas? Si ce sont des alternatives, il faut utiliser le singulier. Mais, pour éliminer toute ambiguïté, tout problème grammatical, ce que je vous propose, c'est d'utiliser la particule «et»: «une convention et un décret ne peuvent». À ce moment-là, il n'y a absolument aucune ambiguïté grammaticale. Donc, ça a pour effet, d'une part, de clarifier le texte. Ça a aussi pour effet, d'autre part, de satisfaire les usagers de la langue française et en particulier son président, le juge Robert Auclair, que vous pourriez d'ailleurs décider de consulter. Et, si vous êtes encore dans l'incertitude, écoutez, Mon Dieu! demandez un avis à l'Office de la langue française. Ils sont là pour ça. Ce sont les spécialistes de la question. Moi, je ne voudrais surtout pas m'endormir dans l'insécurité linguistique, sachant que j'aurais pu, Mme la ministre, vous induire en erreur. Alors, à ce moment-là, vous devriez ou bien accepter, désambiguïser totalement la proposition en utilisant «et», ou bien prendre le risque de commettre une erreur grammaticale, ou, tout simplement pour vous assurer que vous êtes dans le bon chemin grammatical, demander à l'Office de la langue française un avis.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, alors...

M. Laporte: Non, mais vous m'avez dit, Mme la ministre, que, compte tenu des antécédents, des cohérences, de la logique générale de la loi, on utilisait cette tournure dans d'autres circonstances et que ça pouvait être mal interprété par un juge, et ainsi de suite. Mais je ne peux tout de même pas, au nom, disons, de l'intégrité de la grammaire, laisser passer des... Ce n'est tout de même pas à cause d'un argument légal que vous allez me forcer à trahir la grammaire française.

Des voix: ...

M. Laporte: Non, non, mais là je vous demande... J'utilise «trahir» entre guillemets. Je vous répète que je suis dans l'incertitude, dans l'indécision grammaticale, dans l'insécurité linguistique...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Dans l'ambiguïté totale.

M. Laporte: ...et que, pour éliminer toute ambiguïté, vous pourriez demander un avis à l'Office de la langue française, à la Commission de terminologie de l'Office qui statue d'ailleurs sur des questions grammaticales et non pas seulement sur des questions terminologiques, ce que je leur ai longuement reproché d'ailleurs. J'aurais cru toujours qu'en fonction de leur mandat ils ne statuent que sur des questions terminologiques. Ils ont étendu leur mandat pour statuer sur des questions de syntaxe, de grammaire, et ainsi de suite. Voilà un beau cas où on pourrait leur demander de faire leurs devoirs.

Maintenant, si vous jugez que... Parce que c'est ainsi que je vous ai compris, Mme la ministre, vous sembliez affirmer que, pour vous, le légal prédomine sur le grammatical. Écoutez, moi, personnellement, je ne suis pas de cet avis. Je vous propose justement de concilier les deux objectifs en utilisant «et» plutôt que «ou». Là, si vous vous acharnez à défendre le légal au nom du grammatical, c'est une autre chose. Mais je trouve que vous prenez le risque de continuer l'habitude. Et je peux avoir tort, n'est-ce pas? Je ne dis pas que j'ai raison; je peux avoir tort. À mon âge, on s'est suffisamment trompé pour admettre qu'on puisse se tromper encore, n'est-ce pas? Je ne suis pas comme ces jeunes gens qui, des deux côtés de la table, ont la certitude d'avoir raison. Ce n'est pas mon cas. Mais je me dis tout de même: Ça serait peut-être opportun, pour éviter tout danger, de demander un avis ou d'utiliser «et». Et c'est dans cet esprit-là que je fais un amendement, puis je pourrais même, disons, élaborer là-dessus longtemps.

Voyez-vous, le dictionnaire là-dessus est tout de même assez clair. Si vous me permettez, je vais vous le citer: «Ou, une conjonction disjonctive qui unit des termes, membres de phrases ou propositions ayant même rôle ou même fonction, mais sépare les idées.

«1° Équivalence de formes désignant une même chose.»

Dans ce cas-ci, on utilise un exemple qui est... laissez-moi vous le lire: «Son père ou sa mère pourront l'accompagner.» C'est vraiment une question d'équivalence dans ce cas-là: «Son père ou sa mère pourront l'accompagner.» Il pourra être accompagné ou bien par son père ou bien par sa mère; donc, c'est l'équivalent. Mais, dans le cas où c'est une alternative, donc où il y a un choix à faire entre les deux mots, on utilise l'expression «le père ou la mère aura la garde de l'enfant». Dans ce cas-ci, ce n'est pas une équivalence, c'est une alternative.

Dans ce cas-ci, vous me dites que «convention» et «décret» ne sont pas des équivalents. Donc, je dois comprendre que ce sont des alternatives, ce n'est pas la même chose. Donc, à ce moment-là, il faudrait dire: «une convention ou un décret ne peut» ou «une convention et un décret ne peuvent». Et vous me direz qu'il y a un enjeu, là, qui n'est pas aussi, disons, majeur que je le crois. Mais je continue à penser que lorsque... Écoutez, au Québec, on nous reproche, dans une étude récente du Conseil de la langue française, aux journalistes et aux parlementaires, de ne pas faire en sorte que la qualité de la langue française soit respectée en tout temps. Donc, écoutez, compte tenu de ce reproche, je me dis: Ne pourrions-nous pas satisfaire à la fois un objectif légal et un objectif grammatical et utiliser à cet effet la particule «et»?

Je peux vous citer de quoi ça vire, la particule «et», n'est-ce pas. On peut toujours s'informer, se renseigner. Bon, alors ici, il s'agit d'une «conjonction de coordination qui sert à lier les parties du discours, les propositions ayant même fonction ou même rôle et à exprimer une addition, une intersection, une liaison, un rapprochement». C'est exactement ce qu'on a, c'est exactement dans l'esprit du texte. On n'est pas en présence d'une conjonction disjonctive mais d'une conjonction de coordination. Donc, il faudrait dire: «une convention et un décret ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié», etc.

Si, vous, Mme la ministre, vous êtes d'avis qu'il vous faut prendre la responsabilité de commettre une autre erreur de grammaire qui aura encore pour effet de contaminer la qualité linguistique de nos textes de loi, ce que le juge Robert Auclair vous reproche et nous reproche, n'est-ce pas, depuis au moins 10 ans, et là, à ce moment-là, si vous voulez vous rendre, je dirais – je le dis en tout respect – complice de ces écarts, eh bien, madame, vous en porterez les conséquences. Moi, ce que je peux vous dire, c'est qu'éventuellement ça pourrait devenir des conséquences graves. Ça peut être très important parce que, dans l'éventualité où un Québec devenu souverain créerait un tribunal de la qualité de la langue, ce qui ne m'apparaît pas être complètement impossible, qui serait une espèce de tribunal du peuple, n'est-ce pas, vous vous retrouveriez, si vous êtes toujours en politique à ce moment-là, parce que ça pourrait être encore très long, dans une situation embarrassante, étant accusée d'avoir au cours de votre carrière, qui aurait été à ce moment-là très longue, n'est-ce pas, de vous être abstenue de prendre une décision qui aurait contribué à améliorer la qualité du français de nos lois.

Donc, je n'ai pas besoin de... Écoutez, je pourrais élaborer là-dessus encore tout le temps qu'il me reste. Mais je pense que c'est de bon sens que de vous proposer d'utiliser dans le temps présent une conjonction de coordination plutôt qu'une conjonction de disjonction. Donc, pourquoi ne pas dire: «une convention et un décret ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié, au regard des matières visées par les normes du travail – mais là je reconnais bien votre amendement – une condition de travail moins avantageuse que celle accordée à d'autres»? Le reste du texte est parfaitement correct, à mon avis, grammaticalement. Mais il y a ici un... je ne dis pas que c'est une erreur, je dis que, pour quelqu'un qui a, comment dirais-je, l'esprit de la langue, et je ne me qualifie pas comme étant de ceux qui l'ont, et il y en a qui l'ont à un niveau très supérieur, il me semble que cette tournure est choquante.

(20 h 40)

Alors, il faudrait donc que... Enfin, Mme la Présidente, la ministre portera une lourde responsabilité si elle s'abstient d'accepter l'amendement que je propose. Elle dit: Ah! vous savez, ce qui prédomine finalement, c'est la tradition légale ou la tradition jurisprudentielle. Peut-être, mais c'est exactement pour cette raison que nos lois continuent, année après année, à être fautives du point de vue du français, parce qu'on s'acharne à dire que c'est toujours le légal qui prédomine sur le grammatical. Le juge Robert Auclair a écrit de nombreux textes là-dessus, il a fait de nombreuses représentations, il m'a envoyé de nombreuses lettres lorsque j'étais président de l'Office, et malgré tout on continue à s'entêter à ne pas vouloir reconnaître la prédominance de la grammaire ou de reconnaître tout simplement qu'on pourrait harmoniser les deux en utilisant la conjonction de coordination.

Donc, que dire? Eh bien, écoutez, c'est ça, on voit donc que c'est l'autorité politique qui contribue à la reproduction des carences – c'est carentiel, Mme la Présidente – du français québécois, une si belle langue, une langue si riche, une langue qui nous fait tant d'honneur, dont nous sommes tant fiers. Mais, malgré tout, on continue à l'abandonner à des délires qui ne sont pas dans sa nature mais qui découlent néanmoins des décisions qui sont prises par l'autorité politique. C'est très grave. Évidemment, le Québec, contrairement à la France, n'a pas ces organismes de surveillance que sont l'Académie française, et ainsi de suite. Donc, on peut, compte tenu de ce contexte d'absence d'une surveillance aussi rigoureuse que celle de l'Académie, se permettre ce genre de liberté.

Ça peut paraître insignifiant, mais c'est très grave, parce que ce que la ministre, en s'abstenant de suivre ma recommandation d'amendement, fait, c'est de s'inscrire, et je le dis, officiellement dans la logique reproductive des carences de la langue française au Québec. Et je vous le répète, Mme la Présidente, il se peut que j'aie tort, et je souhaite avoir tort, mais, pour que je sache si j'ai tort d'une façon qui me rende serein, qui me permette de vivre sans ce sentiment d'insécurité qui m'habitera tant et aussi longtemps que ce texte demeurera ce qu'il est, pour cela, il faudrait, pour arriver à me libérer de ce joug, de cet inconfort, que la ministre décide de demander à l'Office de la langue française un avis.

Si cet avis devait me discréditer, je ne souffrirais pas une blessure narcissique pour la bonne et simple raison que j'aurais tout de même voulu agir de bonne foi, dans le sens du meilleur intérêt du français, en essayant d'en défendre la grammaire; et, si je m'étais trompé, si on devait me faire comprendre que, non, j'ai un défaut de comprendre la grammaire, j'en conviendrais, je ferais amende honorable, je serais prêt à m'excuser auprès de ceux dont j'aurais fait perdre le temps précieux. Mais, dans la situation actuelle, je dois dire qu'il m'apparaît inconvenant – ou inconvenu, dois-je dire – que l'autorité publique, que l'État que représente la ministre, consente aussi aisément, aussi naturellement à se livrer à des potentiellement fautes grammaticales, puis-je dire, ou à des fautes de grammaire potentielles, sans vouloir prendre toutes les mesures de prévention qui feraient qu'on s'exempte de reproduire dans des textes de loi, et dans des textes de loi qui sont des textes votés ou qui seront votés, comment dirais-je, à l'aurore ou à l'orée...

Une voix: ...à l'orée du crépuscule.

Une voix: ...à l'aube.

M. Laporte: ...à l'aube de l'an 2000, à l'aube du IIIe millénaire, de voter comme ça des textes qui contribueront à, je dirais, alimenter le sentiment d'insécurité linguistique des Québécois et peut-être à... Vous, du Parti québécois, qui êtes tous tellement soucieux de la bonne image du Québec à l'étranger, eh bien, vous allez vous retrouver devant la situation inconvenante, inconfortable de devoir porter l'odieux d'avoir comme ça, dans un projet de loi, accepté une forme grammaticale qui est peut-être une forme incorrecte – je ne dis pas qu'elle l'est. Donc vous devriez, au nom du respect que vous affichez continuellement pour le français, sa qualité, son développement et son intégrité, faire preuve, disons, d'un sentiment de responsabilité ou bien accepter ma suggestion d'utiliser la conjonction de coordination «et» ou, pour vous assurer que vous êtes dans le droit chemin, demander, dans les plus brefs délais, à l'Office de la langue française, qui est là pour ça, qui est compétent pour le faire, un avis sur l'usage correct de la grammaire dans ce texte de loi.

Alors, disons, je n'en tiens pas rigueur à la ministre, je sais qu'elle agit en toute bonne foi. Je sais que ses intentions ne sont pas des intentions méchantes, mauvaises, n'est-ce pas?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Laporte...

M. Laporte: Mais je dois convenir, en terminant, Mme la Présidente... Je pense que la ministre doit réfléchir parce qu'elle prend une décision pleine de conséquences.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député de Laporte.

M. Laporte: Et voilà, madame, j'aurai dit ce que je sentais devoir dire...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Laporte, je suis désolée...

M. Laporte: ...sur cette question. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...je sais que vous avez énormément de choses à dire sur ce «et», mais... Oui, Mme la ministre?

M. Laporte: Mon nom, c'est le député d'Outremont...

Mme Lemieux: Je voudrais...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ah! Je vous ai encore appelé «de Laporte», je suis désolée. Est-ce que c'est aussi grave que les erreurs de grammaire qu'il y a dans le projet de loi? Alors, Mme la ministre.

M. Laporte: Mme la Présidente, nous vivons dans une société profondément sécularisée, qui a perdu tout sens du péché, mortel ou véniel, et qui peut, comme ça, prendre des risques d'erreurs grammaticales.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, oui, merci, M. le député d'Outremont. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, Mme la Présidente, d'abord, je dirais, malgré le plaidoyer extrêmement convaincant et soutenu, intense, du député d'Outremont, que nous avons devant nous deux chemins possibles que nous pouvons emprunter: le bon chemin grammatical ou le bon chemin légal. Je vais choisir le bon chemin légal. Ceci étant dit, je suis prête à vivre avec les foudres du juge Auclair, qui, me dit-on, visiblement est un personnage extraordinaire, j'en conviens. Et d'ailleurs, lorsqu'on a commencé à travailler sur ce projet de loi et qu'on a eu à trouver l'appellation juste pour désigner les clauses, parce qu'on parlait de clauses orphelin, de clauses discriminatoires, etc., il y a beaucoup de gens, c'est ce que je comprends, qui sont un peu de l'école du juge Auclair, qui ont eu une influence marquée dans le choix de l'expression pour désigner ce que nous voulions désigner par ces clauses, et notre choix s'est porté sur les clauses de disparités de traitement. Et c'est vraiment des gens de cet univers-là qui ont été de très bon conseil.

(20 h 50)

Alors, nous choisissons le bon chemin légal, et non pas grammatical, pour un certain nombre de raisons. La première, pour une raison de cohérence. Il y a plusieurs dispositions dans la Loi sur les normes du travail qui comportent cette même expression: «une convention ou un décret». Je vous donne quelques exemples. À l'article 53 – c'est un article qui parle de l'étalement des heures de travail – il est dit: «Une convention ou un décret peuvent – au pluriel bien sûr – prévoir, aux mêmes conditions», etc. On utilise aussi cette même expression à l'article 64, où on parle du congé compensatoire, et on parle d'une journée fixée «à une date convenue entre l'employeur et l'intéressé ou fixée par une convention collective ou un décret». L'article 70 nous parle de la période de congé, et il y a un principe: «Le congé annuel doit être pris dans les douze mois qui suivent la fin de l'année de référence, sauf si une convention ou un décret permettent de le reporter.»

Alors, c'est donc une expression qui est utilisée abondamment – je n'ai pas épluché toute la Loi sur les normes, j'en ai repéré quelques-unes – dans la Loi sur les normes du travail, et il y a un principe de base. Quand on rédige une loi, il est important de respecter les concepts, le langage qui est utilisé dans cette même loi pour ne pas créer d'instabilité. Il faut qu'il y ait une stabilité juridique, et, si on introduit ce type de nuance que vous proposez, de mettre le «et» à la place du «ou», ce que ça pourrait créer comme problème, c'est que ça pourrait donner l'impression à ceux qui auront besoin d'interpréter cette loi, et je pense notamment bien sûr au premier niveau, la Commission des normes, et à d'autres niveaux – on peut se rendre aux tribunaux de droit commun – ça peut laisser comme impression que le législateur, en introduisant cet élément différent, voulait dire quelque chose de différent de la formulation qui est généralement utilisée dans la loi.

Or, je crois que c'est clair que ce n'est pas ce que nous voulons faire. Et je vous rappelle d'ailleurs que l'article 1 définit la convention comme un contrat individuel de travail, une convention collective ou toute autre entente relative à des conditions de travail. Nous avons fait le choix d'intervenir au sujet des clauses de disparités de traitement dans la Loi sur les normes du travail, parce qu'on voulait intervenir non seulement auprès des salariés syndiqués, mais également auprès des salariés non syndiqués. Et je termine en disant que le dernier motif qui me porte à croire que nous devons prendre aussi le bon chemin légal, c'est qu'il est clair que les règles d'interprétation nous disent assez clairement que, dans certaines circonstances, le «ou» peut avoir le sens du «et», et l'inverse. Alors, voilà les quelques remarques que je voulais faire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Bien, merci, Mme la Présidente. On m'a appelé à mon bureau me disant qu'il y avait un débat très important qui se déroulait ici, ce soir, en commission, et, devant un discours si percutant du député d'Outremont et surtout devant l'expérience qu'il possède, je pense qu'il est important pour le gouvernement d'écouter vraiment les experts. On sait que le gouvernement consulte des experts de temps à autre concernant la rédaction des lois, mais il faut être conscient que même les juristes aussi attachent une grande importance au style de rédaction et à la justesse des mots. Et, dans le cas qui nous occupe, la justesse des mots occupe une place primordiale, particulièrement dans ce projet de loi là.

J'écoutais le député d'Outremont, qui possède une vaste expérience, qui a déjà été président de l'Office de la langue française, qui est diplômé de Berkeley, une université reconnue mondialement, et, Mme la Présidente, pour avoir pratiqué longtemps le droit, les mots «ou» ou «et» sont très importants dans toutes les lois, puisqu'ils peuvent changer une connotation. Souvent, à l'occasion, on pourrait aussi employer... Je me posais la question lorsque la ministre faisait son intervention, juste avant moi, si on pourrait peut-être utiliser les mots «et» tiret «ou» qui pourraient peut-être...

M. Laporte: Barre oblique.

M. Brodeur: ... – barre oblique, excusez, M. le député d'Outremont – qui pourraient, en fin de compte, peut-être régler le problème et faire en sorte que les travaux de la commission ne soient pas étirés de façon indue. Mme la Présidente, j'ai appris, dans mes cours de français... Vous savez que la langue française est une entité autonome d'indépendance interne...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Excusez, Mme la Présidente, mais tout ça pour vous dire...

(Consultation)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Shefford, vous pouvez poursuivre votre intervention.

M. Brodeur: Oui, merci, Mme la Présidente. Tout ça pour vous dire que, lorsque vous vous retrouvez devant des causes, devant un tribunal, souvent ces petits mots là peuvent faire une différence sur la décision finale que rendra le juge.

Donc, lorsque le député d'Outremont nous disait il y a quelques instants qu'il est primordial de s'attacher aux mots, je pense qu'ici les parlementaires ont à jouer avec ces mots-là quotidiennement, mais aussi les avocats. J'ai pu assister, au cours de ma carrière, à plusieurs causes où on a joué sur des petits mots, sur des ententes entre plusieurs parties, sur des contrats, sur des conventions, sur des décrets. Et d'ailleurs l'article nous parle d'une convention ou d'un décret. Je me demande même, sans apporter un amendement immédiatement, Mme la Présidente, si, dans le cas qui nous occupe, on ne pourrait pas utiliser les deux mots, «et» et «ou», à ce moment-là, par souci de clarté. On pourrait couvrir justement toutes les occasions, toutes les plaidoiries que pourrait apporter un juriste en rapport avec cet article-là de la loi. C'est pour cette raison-là que, nous, au caucus, on a souvent eu l'occasion de consulter le député d'Outremont, qui a une grande expérience dans la langue, qui a une grande expérience aussi dans la défense des intérêts de la langue française ici, au Québec. Le député a voyagé partout dans le monde, je crois, et a pu lui-même discuter avec des grands linguistes, et c'est pour cette raison-là que je lui donne le bénéfice de son expérience, et on pourrait tout simplement s'en rapporter à son jugement. Le gouvernement actuel, vous vous souvenez, Mme la Présidente, vous avez été élue, je crois, vous, en 1981, mais auparavant...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, non.

M. Brodeur: Non?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): En 1989.

M. Brodeur: En 1989? Excusez-moi, Mme la Présidente. Mais le gouvernement du Parti québécois, qui a été élu en 1976, entre 1976 et 1985, avait adopté la loi 101, sûrement dans un souci de protéger la langue française.

(21 heures)

Mme la Présidente, il est évident que, dans la même foulée, je pense qu'il est important, à partir des lois que nous adoptons ici, à l'Assemblée nationale, d'avoir un souci très spécial de cette langue française et de faire en sorte que nos lois soient claires et surtout comprises de tout le monde, y compris du monde juridique. Je pense que c'est la responsabilité du législateur d'adopter des lois claires. Et, lorsqu'une ambiguïté peut se présenter dans un projet de loi, à ce moment-là, il est du devoir de chacun des parlementaires, autant de l'opposition que du gouvernement, d'ajuster un projet de loi pour faire en sorte que les justiciables, les gens qui ont, en fin de compte, à se présenter devant les tribunaux pour plaider chacun des articles de n'importe quelle loi puissent avoir un projet de loi qui est clair.

Donc, Mme la Présidente, sans abuser du temps qui m'est accordé, j'aimerais tout simplement accorder mon appui au député d'Outremont. Puis, je pense, se basant sur sa longue expérience de la langue... On sait que le député d'Outremont sait jouer avec les mots, on a vu tantôt qu'il a fait une allocution qui était très convaincante. Moi, de toute façon, il m'a convaincu. Et c'est pourquoi je pense qu'il est impératif à chacun de nous...

Je pense qu'il n'y a pas d'expert en langue ici, sur cette commission, sauf le député d'Outremont. Je pense qu'on doit s'en rapporter à son bon jugement et peut-être amender tout simplement cet article-là en acceptant cet amendement de changer le mot «ou» par un «et» pour englober les deux concepts, soit la convention ou le décret. Ou peut-être encore, si le député d'Outremont avait du temps, j'aurais aimé lui poser une question, voir si le «et/ou» pourrait être préférable tout simplement au «ou», puisqu'on engloberait les deux circonstances, soit le «et»... Vous savez, Mme la Présidente, si vous allez à un mariage et qu'on vous demande: Êtes-vous prêt à accepter cet homme et vivre avec lui pour le restant de vos jours, ou vivre avec le restant des jours, ça peut être totalement différent. Mais, avec un «et/ou», de cette façon-là vous engloberiez toutes les possibilités.

Je sais que l'exemple est peut-être un peu, entre guillemets, gros, sauf qu'il est réel. Il est réel. Et, pour faire en sorte que cet article-là soit plus clair, le «et/ou» pourrait peut-être être préférable à l'amendement qui nous est apporté. Mais, encore là, Mme la Présidente, moi, je m'en remets au député d'Outremont, qui est un expert. Est-ce que le député d'Outremont a quelques minutes en réserve pour peut-être nous expliquer si ce projet d'amendement là, le sous-amendement, pourrait être acceptable? Sinon, je me verrai dans l'obligation peut-être d'en discuter dans un moment ultérieur. Sauf que, lorsque nous avons la possibilité d'avoir une personne qui a de l'expérience, qui a la qualité du député d'Outremont et surtout la façon dont il a su gérer la langue française dans plusieurs années, je pense qu'il serait important peut-être de s'en rapporter à lui pour l'étude de cet article-là.

Donc, Mme la Présidente, j'ignore si l'allocution du député d'Outremont a peut-être ébranlé la ministre. Je vois qu'elle est peut-être un petit peu ébranlée par l'allocution du député d'Outremont et que, malgré son intervention précédente, elle pourrait peut-être... Je ne le sais pas, on pourrait peut-être suspendre l'étude de cet article-là pour voir si on ne pourrait pas changer l'article par le «et/ou» ou par seulement le «et», parce que le «et/ou» engloberait toutes les possibilités qu'un juriste pourrait éventuellement... faire de cet article un article qui ne serait pas applicable en droit, faire un article aussi qui pourrait être mal interprété par les juristes et faire en sorte que peut-être des jurisprudences ou bien des documents ou bien des écrits de juristes pourraient être faussés par un manque de clarté de l'article.

Donc, Mme la Présidente, je ne voudrais pas abuser du temps qui m'est confié. Vous savez que sûrement il y a d'autres collègues qui sont intéressés à intervenir sur le sujet, peut-être des collègues ministériels, qui sont aussi intéressés par la langue, aussi intéressés par la linguistique et intéressés par la façon dont on rédige des projets de loi.

Je me demande, M. le Président, si le projet de loi en question a fait l'objet d'une étude exhaustive au comité de législation. Parce que, lorsque l'opposition apporte des amendements de type tout à fait linguistique ou sur la langue, je me demande si à ce moment-là le comité de législation a une ou plusieurs personnes qui ont pour objet de vérifier ces lois-là et faire en sorte que nos projets de loi soient toujours aussi justes.

M. le Président, je pense qu'il serait important aussi que la commission se munisse de plusieurs livres, de dictionnaires qu'on pourrait peut-être... que chacun des articles soient révisés au dictionnaire, au Grévisse. Je pense qu'il serait important que la commission parlementaire puisse se procurer tous ces livres. Je sais qu'il est très facile de se procurer... Ha, ha, ha! Excusez-moi, M. le Président. Moi, je pense qu'il est important, M. le Président, sérieusement...

Le Président (M. Lelièvre): ... M. le député de Shefford.

Une voix: Mme la Présidente.

M. Brodeur: Mme la Présidente, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): Il va falloir ajuster vos verres de contact. Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Bien, j'imagine que les députés ministériels sont plus au courant de la vie privée des députés de leur...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): Je pense, M. le député de Brodeur, que vous dépassez les bornes du décorum de cette commission.

M. Brodeur: Shefford, Shefford, M. le Président, je n'ai pas encore de comté à mon nom. Peut-être un jour que ça viendra, mais pour l'instant je suis le député de Shefford.

Le Président (M. Lelièvre): Ah! vous êtes député de Shefford. C'est parce que tout à l'heure on mélangeait le député de Laporte avec le comté d'Outremont.

M. Brodeur: Tout simplement, M. le Président, en terminant, préciser que chaque projet de loi se doit d'être clair, et c'est pour cette raison-là qu'on se doit d'apporter une attention particulière à la rédaction de la langue française. On se doit d'apporter une attention à la rédaction de chacun des textes, autant les textes législatifs que possiblement des questions référendaires. Donc, on se doit d'avoir un article clair pour avoir une réponse claire autant du législateur que des juristes que des magistrats.

M. le Président, une intervention de l'opposition est gouvernée...

Mme Lemieux: ...sagesse.

M. Brodeur: ...par cette sagesse, comme dit Mme la ministre, afin que le législateur en vienne à la longue... Je m'aperçois que, depuis des années, on se soucie très peu de la clarté des lois. On se soucie excessivement peu de la clarté des lois. J'ai eu l'occasion de siéger dans d'autres commissions parlementaires, M. le Président – comme vous savez, on a siégé ensemble dans d'autres commissions parlementaires – et la mésentente ou souvent la non-compréhension d'une loi peut mener à des coûts très élevés.

On sait que, M. le Président, vous êtes avocat vous-même, vous avez sûrement représenté des clients qui ont peut-être gagné ou perdu des causes à cause de lois qui n'étaient pas claires, des mots étaient imprécis. Donc, je pense qu'à la première occasion qui nous est présentée ce soir, au premier article que l'on étudie, on s'est aperçu immédiatement qu'il y avait déjà des mots qui n'étaient pas clairs et je pense qu'il est de notre devoir de préciser, de faire en sorte que chacune des lois soit précise, que chacun des mots soit précis, et à ce moment-là on a une occasion de modifier le projet de loi pour faire en sorte que ce projet de loi là ne soit pas soumis à des avocats qui ont l'habitude de jouer sur les mots, de torturer un projet de loi. Il faut faire en sorte que chacun des projets de loi soit à l'abri de ce genre de plaidoirie.

Je suis convaincu, M. le Président, qu'à Montréal ou même en Gaspésie – vous avez eu l'occasion de plaider en Gaspésie – vous avez sûrement eu des clients, vous avez gagné des causes à cause de lois imprécises. Je pense que la grammaire est souvent claire, le sens des mots est clair. Le député d'Outremont a été très éloquent dans son allocution, et, comme je vous disais tantôt, la langue française s'analyse de façon interne. Chaque mot a un sens, et on se doit de faire en sorte, surtout dans ce projet de loi là où un «et» et un «ou»...

(21 h 10)

Le «et» englobe beaucoup plus de choses que le «ou». Le «et» est très certain. Le «ou» est moins sûr, M. le Président. Et, dans chaque phrase dans la vie de tous les jours, si vous dites que vous faites une chose ou l'autre, c'est certain que vous ne ferez pas les deux, mais, si vous faites «et», vous allez faire les deux choses.

Donc, M. le Président, je pense que probablement la ministre devient de plus en plus convaincue que le «et» pourrait faire au moins l'objet, je dirais, d'une suspension afin qu'on puisse regarder. Et je suis prêt, moi, je tends la main à la ministre pour qu'on puisse regarder vraiment la grammaire, la syntaxe du premier article. Et je suis convaincu que le député d'Outremont pourrait apporter son support remarquable à l'amélioration de ce projet de loi là.

Donc, M. le Président, moi, ce que je vous dis, c'est qu'on pourrait soit amender l'article de cette façon-là ou bien je suggère encore, sans faire une proposition formelle, d'ajouter le «et/ou», qui ferait en sorte que ça pourrait satisfaire la partie ministérielle et que ça pourrait satisfaire les députés de l'opposition. Donc, il y en aurait pour tous les goûts. Il y aurait le «ou» du gouvernement et le «et» de l'opposition.

Donc, je disais qu'il y en aurait pour tous les goûts. La ministre serait satisfaite avec le «ou», l'opposition officielle avec le «et», et possiblement le député de Rivière-du-Loup.

Le Président (M. Lelièvre): On vous écoute, monsieur. Vous avez toujours la parole.

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Vous savez que c'est un sujet qui me touche particulièrement...

Le Président (M. Lelièvre): Il n'y a pas de doute, ça vous émeut.

M. Brodeur: Donc, M. le Président, comme je vous le disais, nous attachons une attention toute particulière à la langue française qui, je le disais au début, est une entité autonome de dépendance interne. Et, pour cette raison-là, M. le Président... M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Oui, M. le député de Shefford, je vous écoute religieusement.

M. Brodeur: Combien reste-t-il, M. le Président?

Le Président (M. Lelièvre): Il vous reste exactement, au moment où on se parle, peut-être 15 secondes.

M. Brodeur: Et c'est pour cette raison-là...

Le Président (M. Lelièvre): Mais j'attends qu'on me donne le signal de vous dire qu'il ne vous reste plus de temps.

M. Brodeur: ...que je suis convaincu que la ministre est sûrement presque convaincue qu'il faut apporter cet amendement-là au projet de loi et à l'article 87.1. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. le député de Shefford, on vous remercie de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'amendement qui a été soumis? M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Je pense que le député d'Outremont a quand même soulevé dans la construction un problème grammatical, et le fait qu'il ait existé précédemment dans les normes, en ce qui me concerne, ça ne le règle pas. Mais je pense que dans l'utilisation qu'il fait du «et» plutôt que du «ou», le député d'Outremont, sur le fond des choses, a protégé l'Assemblée ou, en tout cas, a averti l'Assemblée contre une erreur. Et le député de Shefford a fait sa contribution pour essayer que tout le monde mette un peu d'eau dans son vin pour réconcilier les tendances. Mais, moi – et je comprends que la ministre est assez rébarbative aux suggestions de l'opposition même quand il s'agit d'améliorer le texte lui-même – je pense que le sens – et j'ai eu l'occasion de vérifier dans le dictionnaire, moi aussi – profond, c'est la négative, hein? On veut dire que l'un ne le fera pas et l'autre ne le fera pas. L'un n'aura pas pour effet et l'autre n'aura pas pour effet. Alors, si vraiment on veut utiliser un verbe au pluriel puis laisser la construction de base comme celle-là, il faudrait peut-être dire «ni une convention ni un décret ne peuvent». Alors, si on dit «ni une convention ni un décret ne peuvent», à ce moment-là le pluriel du verbe est approprié, et il n'y a plus d'erreur de construction.

Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres endroits dans la Loi sur les normes du travail où le même problème se pose? Si oui, bien, là, je ne suis pas sûr que c'est à cette commission-ci de le corriger à tous les endroits, malgré que, si on nous le demande, on peut prendre le temps, mais peut-être que ça peut être une concordance qui soit corrigée. Mais, moi, je pense que, dans cette construction-ci, «une convention ou un décret», l'un étant exclusif de l'autre, avec un verbe au pluriel, c'est une erreur de grammaire, en tout cas, c'est le risque d'une erreur de grammaire. Je comprends que la ministre... Puis je pense qu'elle a le même souci que nous que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible, elle ne veut pas attendre d'avoir un avis de l'Office de la langue. Mais, à ce moment-là, il vaudrait peut-être mieux jouer la carte de la prudence et y aller avec une construction pour laquelle on est certain.

Je vois, là, que, depuis que le député d'Outremont a fait son intervention tout à l'heure, dans l'entourage de la ministre on s'active, on a l'air à travailler sur des versions. Alors, je pense que le problème a été soulevé. Les suggestions qui viennent de l'opposition semblent rendre la ministre rébarbative. Ah, c'est bien évident qu'on ne pourra pas laisser le texte comme c'est là. Si l'argumentation du député d'Outremont est refusée, on va être dans l'obligation de trouver d'autres formules, bien, de pousser un peu plus loin la réflexion puis de trouver vraiment la formule adéquate.

Le Président (M. Lelièvre): Avez-vous terminé, M. le député de Rivière-du-Loup?

M. Dumont: Oui, j'ai terminé. Je ne veux pas prolonger inutilement le débat.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): Ha, ha, ha! Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'article 87.1?

M. Gobé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Je vous remercie, M. le Président. Que dire de plus devant tous ces brillants exposés? On a la chance d'avoir avec nous non seulement l'ancien président de la Commission de protection de la langue française, qui est le député d'Outremont, un homme qui a certainement, durant son mandat à cette Commission, marqué la protection et l'évolution du français... Alors, pourquoi ne pas en profiter? Pourquoi nous priver alors que nous avons avec nous cette personnalité qui pourrait être un jour considérée parmi les grandes personnalités qui, au Québec, ont cherché à faire respecter cette langue, à la moderniser, à faire en sorte qu'elle s'appuie sur des standards internationaux?

Je vais vous donner un exemple. Je discutais dimanche avec le vice-président d'une très grosse compagnie d'informatique québécoise – je tairai le nom ici de cette compagnie – une discussion privée à ma résidence, et il me mentionnait que, lorsqu'une compagnie vient installer au gouvernement du Québec des progiciels, ou enfin certains systèmes de gestion, ils sont obligés de les adapter, même s'ils ont déjà une version française internationale, à certaines expressions ou certains mots ou certaines tournures de phrase qu'on retrouve dans nos papiers, dans nos documents officiels, dans nos lois, qui ne correspondent à aucun autre critère de la langue française, en tout cas en dehors du Québec.

(21 h 20)

Alors, c'est certainement là, alors que nous sommes à l'époque de la mondialisation, à l'époque d'Internet, à l'époque de la communication instantanée à travers le monde, une barrière importante pour le Québec. Puis je m'explique. Car, si nous sommes les seuls – et encore, semble-t-il, on a des difficultés nous-mêmes entre nous – à comprendre la langue que nous écrivons et que nous parlons, bien, un jour ou l'autre, peut-être plus tard que tôt ou plus tôt que tard, elle deviendrait une langue régionale parlée par 7 000 000 de personnes uniquement et comprise par peut-être 2 000 000, 3 000 000 autres de plus ou 1 000 000 de plus à travers le Canada, peut-être, mais elle serait certainement une langue qui ne sera pas dans le courant des grandes langues comprises d'un bout à l'autre du monde.

Je m'explique. Elle ne sera pas dans les critères et les standards de langue française internationale. Et ça risquerait de nous marginaliser, de nous mettre dans un camp retranché en termes linguistiques. Car, si on les seuls à comprendre, qui va s'intéresser à cette langue si ce n'est quelques chercheurs pour faire quelques travaux à un moment donné? Alors, je vois là un danger, un danger de marginalisation du Québec et de paupérisation de notre culture québécoise. D'accord?

Je ne veux pas faire un débat, non, un débat pour le débat, mais j'ai vu tellement de projets de loi comme ça, toutes sortes de projets de loi, des projets de loi en matières fiscales. Précédemment, notre collègue le député de Chicoutimi me disait qu'on pouvait avoir, nous, des fois des lois avec 1 000 articles alors que peut-être avec 200 ou 300 on pourrait régler peut-être la situation. Mais j'ai vu tellement de lois incompréhensibles, même contradictoires, à un point tel qu'au Québec nous avons le championnat probablement de la contestation juridique de lois, de règlements, d'ententes basée des fois sur des mauvaises compréhensions ou des mauvais libellés. On n'emploie pas forcément les bons mots aux bons endroits, les bonnes conjonctions aux bons endroits, les bons adjectifs aux bons endroits.

Ce que notre collègue le député Laporte nous montre, c'est tout à fait symbolique, parce qu'on a là un projet de loi qui s'adresse à la jeunesse québécoise, et certes il n'est pas parfait. On dit qu'il s'adresse à la jeunesse québécoise, mais pour moi il s'adresse plutôt à faire croire à la jeunesse québécoise qu'on s'occupe d'elle. Puis on essaie maintenant de boucher des trous, puis tant mieux si on arrive à les faire boucher, le député de Rivière-du-Loup, le député d'Outremont, de Shefford, ma collègue, moi aussi, tant mieux.

Mais le symbolique, c'est qu'un projet de loi qui est fait pour les nouvelles générations on n'est pas capable de le libeller dans un français moderne, un français clair, un français international. Puis on dit à ces jeunes-là: Préparez-vous, là, c'est le monde de l'Internet puis c'est le monde de l'international; surtout n'apprenez pas l'anglais trop tôt. Parce qu'il ne faut pas que vous le parliez au Québec trop, hein? À l'école primaire, on vous empêche de l'apprendre avant la troisième année, puis une fois par 15 jours, puis trois heures de temps en temps. Enfin, c'est tout à fait compliqué, à un point tel qu'on se retrouve avec des gens qui parlent mal ou qui possèdent mal cette deuxième langue qui est la langue nord-américaine – je ne dirai pas la langue du Canada pour déplaire à nos amis d'en face. Puis, en même temps, on ne leur apprend pas une bonne langue française.

Puis, pour leur montrer l'exemple, nous, les parlementaires qui leur mettons toutes ces lois-là, ces barrures-là, ces empêchements-là, on rédige nos projets de loi dans une langue qui n'est pas non plus la langue française. On a l'occasion, là, de montrer l'exemple. C'est une loi pour la jeunesse, pas une loi pour l'âge d'or. Ce n'est pas une loi fiscale. Ce n'est pas une loi pour les fiscalistes des grands cabinets ou les fonctionnaires qui, eux, sont habitués à travailler dans ce jargon-là.

Mme la ministre nous disait, puis là j'ai un peu de misère, des fois, je trouve qu'elle fait preuve de grande ouverture puis elle semble être une femme progressive, ouverte à différents courants, différentes évolutions, puis d'un seul coup, pouf! elle referme ça, là. On dit: Qu'est-ce qui s'est passé? Elle retourne dans son quartier, là, puis elle bouche ça bien raide, puis elle dit: Hop! C'est moi qui regarde. Elle nous dit: Vous avez peut-être raison sur le point de vue linguistique, mais, sur le point de vue légal, vous avez tort, donc, je vais m'en tenir au point de vue légal ... une question de cohérence. C'est qu'elle reconnaît que, d'un point de vue grammatical de la facture de la langue française, on devrait probablement le changer, mais elle dit: Vu que c'est ailleurs, ils se sont trompés ailleurs aussi, bien, on va continuer à se tromper.

Au lieu d'évoluer puis de changer, puis dire: Pourquoi pas, on fait un amendement puis je demande à mes fonctionnaires – il y en a plein en arrière, là, qui lisent les journaux, ou je ne sais pas quoi, des documents, ils ne sont pas tous très occupés, comme on peut voir – d'aller faire un recensement ou d'appeler au cabinet, les faire venir avec leurs ordinateurs, recenser tous les mots qu'il peut y avoir, ces expressions-là, dans les normes – il y en a peut-être 25, 30 – identifier les articles puis faire un amendement global qui dirait: Voilà, les mots «ou» sont remplacés par «et un» décret, sont maintenant les articles 1, 2, 3, x, y, z, et amender l'ensemble donc de ces articles du projet de loi, ce qui n'est pas compliqué à faire et ce qui serait là un message intéressant à envoyer. Non, vous ne faites pas ça. Mme la ministre...

Une voix: ...

M. Gobé: Oui. Oui. Ou même, là, prendre la suggestion de notre collègue le député de Rivière-du-Loup, qui est tout à fait adaptable aussi, hein? Qui s'adapte et avec laquelle on est très, très à l'aise pour fonctionner, tout à fait. Il pourrait en amener, un amendement, c'est certain qu'on pourrait le supporter.

Mme la ministre, je crois que vous étiez occupée, pendant que je disais cela, je disais que c'était un projet de loi qui a une valeur symbolique, c'est un projet de loi pour les jeunes, oui. Un projet de loi de la facture de la langue française. On leur demande, à ces jeunes-là, je le disais précédemment, madame, puis je vais me permettre de le répéter, des fois que je me serais mal expliqué, pour que vous me compreniez, vous aussi, madame.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: Non, non. J'aurais pu dire d'autre chose, mais je vous le dis parce que peut-être que je veux être certain que vous puissiez le comprendre, l'ayant dit précédemment. Nous nous évertuons à dire à nos jeunes Québécois et Québécoises que l'on doit, au Québec, parler une langue qui s'appelle la langue française, qui est une langue internationale. Nous nous évertuons à leur dire qu'il faut qu'ils se préparent pour l'ouverture à travers le monde, la technologie des communications, des télécommunications instantanées. Nous ne nous forçons pas beaucoup pour leur apprendre d'autres langues comme la langue anglaise. Alors, le véhicule qu'ils ont, ces jeunes-là, devient la langue française.

Le problème, c'est qu'on leur apprend une langue française, un ersatz de langue française, une langue française un peu dévalorisée, la langue française la plus commune dans certains cas qu'on peut trouver, parce que la plus facile à apprendre, qui ne demande pas l'effort, qui ne demande pas la recherche, qui ne demande pas l'application, hein? Et ce n'est pas juste au Québec, on retrouve ça dans d'autres endroits. Mais on est chez nous ici, alors on va parler de chez nous. On ne commencera pas à amender les projets de loi dans les autres pays s'il y en a à amender; on va s'occuper des nôtres, montrer l'exemple à nos jeunes à nous autres.

Eh bien, je crois qu'alors que ce projet de loi est un projet de loi qui s'adresse à la jeunesse – c'est de ça dont nous parlons – nous devrions leur montrer l'exemple et faire en sorte de leur faire l'honneur, au moins – si on ne bouche pas les trous de toutes les clauses orphelin pour eux là-dedans alors que le gouvernement s'est vanté de faire cela – qu'on leur livre un projet de loi d'une facture de qualité de français impeccable. Ça serait la moindre des choses. Et c'est ça que je disais, Mme la ministre, précédemment, et je vois que maintenant vous avez pu l'entendre.

Notre collègue de Shefford, avec son brio et sa verve habituelle, a su nous montrer justement quasiment le ridicule de ces situations. Il a su le démontrer, il l'a fait de la meilleure manière, par la raillerie, et c'est là bien souvent la façon de passer les messages, que nous ne pouvons pas accepter ça. On ne peut pas l'accepter. On n'est pas sur le fond du projet, là, on n'est pas sur le... mais on est sur la forme. Mais la forme a aussi d'importance que le fond.

Et, moi, je souhaiterais, Mme la ministre, que vous révisiez ce que vous avez dit. Vous avez dit: Vu qu'il y a des erreurs partout, il y en a d'autres, là, on va aller dans la légalité, c'est plus facile. Il ne faut pas aller dans la facilité, Mme la ministre, lorsqu'on est ministre.

Une voix: ...

M. Gobé: Mais non, il ne faut pas y aller. Il faut résister à la facilité, parce que vous avez un devoir d'exemplarité comme ministre. Si, vous, là, vous tombez dans la facilité, que dire des parlementaires, des fonctionnaires, tout le monde? Vous savez ce qu'ils vont dire, les gens? On s'en fout, la ministre a dit que, s'il y a d'autres erreurs, on peut continuer à en faire, ce n'est pas grave. Alors, non seulement ils légalisent les clauses orphelin dans le projet de loi, mais là ils légalisent les erreurs grammaticales.

Une voix: Oui. On va voir des «t'sé veux dire» dans les lois...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: Alors, là, moi, j'en suis tout...

Le Président (M. Lelièvre): ...s'il vous plaît! J'aimerais cela que l'intervenant puisse intervenir...

M. Gobé: Non, non, mais j'en suis...

Le Président (M. Lelièvre): ... en toute quiétude, que le député de LaFontaine puisse s'exprimer quand même, qu'on ne le dérange pas.

(21 h 30)

M. Gobé: J'en suis estomaqué, M. le Président, vous comprendrez qu'il y a là quand même une situation assez paradoxale où le projet de loi arrive à faire dans deux cas le contraire de ce qu'il devrait faire. Bon, c'est vrai que les fonctionnaires de Mme la ministre, depuis qu'hier des amendements ont été déposés, ce matin en particulier officiellement par l'opposition, on essaie de trouver des améliorations. Là, le député de Rivière-du-Loup a aussi déposé des amendements. On sait qu'il y a des groupes de jeunes qui veulent encore se faire entendre auprès de Mme la ministre, des groupes patronaux, différentes personnes. Puis c'est très bien. Et ça nous donne le temps justement de regarder, vu que le fond se discute encore, puis c'est ce que nous croyons – c'est ce qu'on nous dit, alors on va le croire – ça nous donne un peu de répit pour regarder au moins la forme du projet de loi en attendant d'avoir de meilleures nouvelles sur le fond, ce qui nous permettra de statuer. Parce que, aujourd'hui, statuer sur le fond maintenant, ça serait peut-être de statuer sur des choses qui demain auront évolué, ce qui ferait en sorte que Mme la ministre dirait: Bien, on ne peut plus, on l'a adopté hier.

Quand on sait que les gouvernements ont beaucoup de difficultés à revenir sur leurs erreurs, à les reconnaître, il vaut mieux protéger Mme la ministre ce soir d'une tentative de vouloir adopter rapidement un certain nombre d'amendements, alors que peut-être demain elle pourrait nous proposer d'autres amendements. Et je vous dis ça parce que vous savez comme moi que, lorsqu'elle a déposé son projet de loi la première fois, eh bien, elle voulait le faire adopter tel quel, hein, puis elle disait que c'était un bon projet de loi, et tout ça, et aujourd'hui on se retrouve avec des changements qui amènent ce problème, entre autres, d'écriture grammaticale et qui demande des modifications. Mais on voit qu'elle a décidé de le faire évoluer. Ce n'est pas, dans certains cas, bien pour nous, mais quand même. Alors, demain, ça peut être la même chose.

Alors, prenons donc le temps, ce soir. Il y a, dans ce projet de loi là, un certain nombre de coquilles, un certain nombre de facilités linguistiques, entre autres. Bon, on voulait demander un avis à la Commission de protection de la langue française. On a l'ancien président ici. Alors, peut-être qu'on pourrait prendre son avis. Il vient de nous le donner. Peut-être que nous pourrions l'écouter. Peut-être que nous pourrions, en faisant ça, aussi donner l'exemple à toutes les autres commissions parlementaires qui étudient des projets de loi et qui sont confrontées à ces problèmes-là. Malheureusement – je dis bien malheureusement – ce n'est pas toutes les commissions parlementaires qui ont la chance d'avoir un spécialiste comme le député d'Outremont, qui, du premier coup d'oeil, sans coup férir, a vu, là, tout de suite, quelque chose qui, pour lui, met la compréhension du projet de loi en péril, amène un flou, une zone grise, une zone dans laquelle il y a place à interprétation. Bon.

Quand il y a place à interprétation à cause de l'écriture, à cause de la manière dont est libellé un texte, surtout un texte juridique qui va avoir force de loi, donc qui va être interprété par des avocats, par des tribunaux, par des représentants syndicaux, par plein de personnes dont c'est la spécialité ou la profession de chercher des moyens de contester ou de déjouer les textes, hein... Il s'agit de voir dans nos tribunaux le nombre de griefs qu'il y a dans certaines entreprises. On voit actuellement qu'il y a des entreprises où ils se retrouvent avec 3 000 griefs d'un côté, 2 000 de l'autre. On se rend compte qu'il y a une industrie du grief très importante au niveau même de la fonction publique, hein.

Alors, imaginons que peut-être une partie de ces griefs-là sont dus à la mauvaise facture des projets de loi en terme grammatical et que ça porte à confusion, ça porte à interprétation. Et c'est là, Mme la ministre, un des points principaux, en plus, en dehors de la beauté de la langue française. Mais la beauté de la langue française... Elle est belle quand elle explique ce qu'elle veut vraiment dire. C'est pour ça qu'elle est belle, la langue française, ce n'est pas parce qu'on la lit comme une musique. Elle se lit comme une musique quand elle est bien écrite, elle se lit comme une musique, mais une musique dont les notes veulent dire quelque chose, une signification, ce qui n'est pas le cas là. Ça ne veut rien dire. Ça veut dire une chose et son contraire.

Alors, comment pourrions-nous faire pour essayer de vous convaincre? Madame, j'avais une question: Comment pourrions-nous faire pour vous convaincre?

Une voix: ...

M. Gobé: Oui, oui. Comment pourrions-nous faire pour vous convaincre que nous pourrions peut-être donner suite à la proposition de notre collègue le député d'Outremont? Regardez bien ce que nous pourrions faire. Nous pourrions suspendre cette partie-là...

Une voix: ...

M. Gobé: Laissez-moi finir, vous allez voir. Vous savez comme moi, madame, qu'on peut suspendre et on peut adopter très rapidement après, hein, comme on peut discuter longtemps de quelque chose qui n'est pas suspendu.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...

M. Gobé: Oui, c'est vrai. Vous allez voir que la vie parlementaire et la procédure parlementaire, heureusement, ont été faites pour permettre justement aux députés de langue française, en particulier, que nous sommes et qui la possédons bien tous autant que nous sommes d'avoir de multiples façons de faire valoir un point.

Alors, peut-être pourrions-nous le suspendre et demander à vos fonctionnaires, d'ici demain matin, demain après-midi, de faire l'inventaire, à l'intérieur du recueil de la Commission des normes, des endroits où se situent ces erreurs que vous avez mentionnées – merci, Mme la Présidente, pour le deux minutes – de les inventorier et de nous préparer un amendement qui verrait, avec un seul amendement s'appliquant à l'ensemble de ces choses-là, à le régler.

Peut-être pourrions-nous faire ça, et puis nous revenir et dire: Bien, on ne peut pas. Puis là, au moins, vous l'auriez essayé. Vous diriez: On a essayé, puis ce n'est pas possible. Il faudrait trouver une autre solution. Et peut-être vous allez nous arriver, et je crois que certainement vous allez nous arriver, parce que, quand vous voulez, vous êtes capable et vous avez un devoir d'exemplarité, vous arriveriez et vous diriez: Mmes les députées, MM. les députés, nous avons trouvé une solution. Je vous propose donc une première depuis que je suis ministre – parce que vous, ce serait la première fois que vous faites ça – eh bien, nous allons donc corriger cette coquille, cette erreur, et rédiger le projet de loi de façon à ce qu'il soit clair, net, précis et compréhensible. Et vous auriez là un vote unanime de l'opposition, d'après moi, parce que, à entendre les plaidoiries de tout un chacun – il en reste une, ma collègue, qui n'a pas parlé, qui va certainement vouloir parler – à date, il me semble que...

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, en conclusion, Mme la Présidente, étant donné que vous faites très bien votre travail et que vous nous donnez la chance de finir sans nous couper, je veux vous dire que j'ai fini de parler.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député de LaFontaine. Effectivement, Mme la députée de Bonaventure avait demandé la parole. Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, devant tant d'éloquence de la part de mes collègues, évidemment, je me sens interpellée, hein, sur un sujet d'importance comme celui-là.

Évidemment, je pense que personne ne va questionner la pertinence, l'importance et la nécessité de l'amendement qui est proposé par mon collègue d'Outremont. Évidemment, à voir la façon dont la ministre se comporte, je sens que la réceptivité, l'ouverture dont elle fait preuve donne un certain espoir à l'opposition. Je vais vous le dire très sincèrement. Évidemment, j'essaierai d'ajouter une certaine façon de voir les choses qui peut-être finira par vous convaincre définitivement d'abonder dans le sens de l'amendement qui vous est proposé par le député d'Outremont.

Tout d'abord, deux choses me frappent entre le mot «ou» et le mot «et». Tout à l'heure, le député de Rivière-du-Loup soulignait que le mot «ou» faisait référence, avait une connotation négative. Effectivement, je lui concède que le terme «ou» a une connotation négative, mais j'ajouterais qu'il fait référence à la notion d'exclusion. Et, dans le contexte, c'est une notion importante, la notion d'exclusion. Évidemment, je me réfère ici au Petit Robert , qui est une référence importante dans le domaine de la langue française, et vous me permettrez de vous faire part de ce qu'on entend par «exclusion».

Alors, à la définition d'«exclusion» – et il y en a plusieurs – on nous dit: «Action d'exclure quelque chose d'un ensemble.» Et, lorsqu'on parle de personne, Mme la Présidente, on souligne même: «Action d'exclure quelqu'un en le chassant d'un endroit où il avait précédemment sa place ou en le privant de certains droits.» Alors, ici, évidemment, lorsqu'on prive, on fait référence à la notion de privation de droits, je pense qu'on ne peut pas prendre à la légère tout ce que peut comporter un terme comme celui-là.

Le mot «et», lui, évidemment, à mon sens, me semble être le contraire du mot «ou» et fait référence, conséquemment, à la notion d'inclusion. Je me réfère toujours au Petit Robert , Mme la Présidente, et je vous fais brièvement lecture de la définition du mot «inclure», en fait, qui se rapproche du mot «inclusion», qui en est le verbe. On fait référence à des notions de... Bon, on donne des synonymes comme: enfermer, insérer, introduire ou encore impliquer, intégrer, renfermer.

(21 h 40)

Alors, vous comprendrez que, pour éviter les incertitudes, pour éviter que la ministre prenne le chemin de l'imprudence, il serait évidemment fort pertinent, dans le contexte, d'accepter l'amendement qui est proposé. C'est un amendement, effectivement, qui est très pertinent. Et on a su ce soir bénéficier et profiter de l'expertise de certains de mes collègues. Évidemment, on l'a souligné à maintes reprises, le député d'Outremont étant l'ancien président de l'Office de la langue française, donc je pense que c'est une expertise à laquelle on peut se fier.

Évidemment, c'est un amendement important, puisqu'il ne laisse finalement aucun vide ou aucune incertitude, en fait, c'est un amendement qui ne laisse aucune place à l'interprétation quant à la nécessité de changer le mot «ou» par le mot «et». Et, Mme la ministre, j'espère que ces quelques commentaires et la référence que je fais avec cet outil précieux qu'est le Petit Robert sauront vous convaincre, évidemment, de la pertinence d'accepter un amendement comme celui-là. Et, tout comme mon député – j'allais dire mon député préféré, ha, ha, ha! – ou mon collègue plutôt...

Une voix: Merci.

Mme Normandeau: ...l'opposition vous tend la main, Mme la ministre. En femme d'expérience que vous êtes, je suis convaincue que vous n'êtes pas du tout insensible aux arguments qui vous sont apportés depuis – quoi? – bientôt une heure.

Donc, Mme la Présidente, tout comme mon collègue de LaFontaine l'a souligné, si la ministre a besoin d'une quelconque période de réflexion pour statuer sur la pertinence et la nécessité d'adopter un amendement comme celui-là, je l'invite à le faire, évidemment pour le bénéfice non pas seulement des membres de cette commission, mais bien sûr pour le bénéfice des gens, des jeunes en particulier qui profiteront de la prudence qu'aura affichée la ministre en acceptant bien volontiers et dans un souci de collaboration et de construction, dans le but toujours de bonifier et de faire en sorte que ce projet de loi n° 67 soit un projet de loi presque parfait, finalement.

Alors, Mme la Présidente, mes remarques s'arrêtent ici. Évidemment, nous attendons avec impatience quelle sera la réponse et le verdict que nous servira la ministre sur cette proposition d'amendement que nous jugeons fort importante et que je qualifierais d'impérative dans le contexte. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, Mme la députée de Bonaventure. Comme il n'y a plus de demande d'intervention, est-ce que l'amendement proposé...

M. Dumont: Je n'ai pas terminé. Est-ce qu'il me reste du temps?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: À ma connaissance, il me reste encore...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Est-ce que vous aviez demandé la parole? C'est parce que je ne vous ai pas vu.

M. Dumont: Oui, j'ai...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, oui, il vous reste encore du temps, vous, M. le député. Oui, alors je suis prête à vous reconnaître, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: O.K. La ministre n'avait pas d'autres commentaires suite aux demandes incessantes de la députée de Bonaventure. Parce qu'un des arguments de la ministre depuis le début des travaux, c'est que son gouvernement va être un des premiers au monde à légiférer en ce sens-là.

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Comment le gouvernement peut se citer en exemple à travers le monde et ne pas donner lui-même l'exemple au niveau de la langue?

Je vais arriver avec un autre amendement tout à l'heure. Je pense qu'il y a beaucoup d'éléments, il y a beaucoup de matière dans le projet de loi. L'opposition va travailler pour essayer de l'améliorer. Et, s'il n'y a pas d'espace dans le dialogue, s'il n'y a même pas d'espace... Écoutez, là, non seulement sur le plan des idées, on ne sent pas de souplesse, mais même sur le plan de ce qui paraît évident, de dire: On va essayer de construire le texte comme il faut, il n'y a même pas d'ouverture, il n'y a pas de réflexion. J'ai peur que, si on entreprend de cette façon-là les travaux, si on se cantonne dans une attitude comme celle-là, ça va être long. On risque de passer beaucoup de temps...

Je prends l'exemple de ce que le député d'Outremont a amené comme suggestion. Je connais le député d'Outremont un peu. Ça fait quelque temps qu'on siège ensemble à l'Assemblée. Je suis convaincu que ce n'est pas une personne d'entêtement. S'il avait senti de l'ouverture de la part du gouvernement, même si ça n'avait pas été sa formulation à lui, une autre formulation qui aurait permis de corriger la même inquiétude de langage, je suis convaincu que le député d'Outremont aurait été prêt... Ça, ça s'appelle de la discussion. On aurait pu suspendre... Je ne sais pas combien ça fait de temps qu'on est là-dessus, mais, si on avait suspendu dès les deux premières minutes où le député d'Outremont a soulevé le problème, peut-être qu'à l'heure où on se parle on serait rendu à un autre article. Mais là on est encore le nez rivé sur un problème de rédaction, un problème pressenti de langage, de choix des mots.

En tout cas, moi, j'invite la ministre à faire preuve d'ouverture d'esprit là-dessus. Je l'ai souligné tout à l'heure avec beaucoup de transparence, j'ai annoncé un amendement qui viendrait autrement corriger la même problématique. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'on n'amende pas pour amender, là. S'il y avait un vote favorable, moi, mon amendement, je le retirerais, il ne serait pas déposé, puis on passerait à autre chose.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce que vous avez terminé votre allocution, M. le député de Rivière-du-Loup?

M. Dumont: Bien, je la termine en espérant que la ministre va réagir puis qu'elle ne nous obligera pas à replonger dans un autre débat sur la même première ligne du même article.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, nous sommes donc prêts à voter sur l'amendement. Est-ce que l'amendement proposé par le député d'Outremont est adopté?

Mme Lemieux: Rejeté.

Des voix: Adopté.

M. Gobé: Vote nominal.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Donc, vote nominal. Alors, Mme la secrétaire, voulez-vous procéder au vote?

La Secrétaire: Alors, M. Laporte (Outremont)?

M. Laporte: Pour. Favorable.

La Secrétaire: Mme Normandeau (Bonaventure)?

Mme Normandeau: Pour.

La Secrétaire: M. Gobé (LaFontaine)?

M. Gobé: Pour.

La Secrétaire: Mme la ministre?

Mme Lemieux: Contre.

La Secrétaire: Mme Blanchet (Crémazie)?

Mme Blanchet: Contre.

La Secrétaire: M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre: Contre.

La Secrétaire: M. Bédard (Chicoutimi)?

M. Bédard: Contre.

La Secrétaire: M. Désilets (Maskinongé)?

M. Désilets: Contre.

La Secrétaire: M. Beaulne (Marguerite-D'Youville)?

M. Beaulne: Contre.

La Secrétaire: Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Abstention. Alors, l'amendement est donc rejeté.

M. Gobé: M. Dumont n'a pas droit de vote?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non. Les députés indépendants ont droit de parole dans une commission parlementaire, mais il n'y a pas de droit de vote effectivement, tout comme le député de Shefford qui n'est pas membre de cette commission.

Alors, l'amendement est donc rejeté. Nous pouvons donc, à ce moment-ci, poursuivre les débats sur l'article... Oui, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Juste une question pour quelqu'un qui vient d'être surpris comme moi, là. J'ai un peu de difficulté à comprendre que les députés qui participent aux travaux, député de Shefford, député de Rivière-du-Loup, ne puissent pas avoir un droit de vote. Le député de Rivière-du-Loup, indépendant, n'a pas droit de vote parce qu'il est indépendant.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine, je m'excuse, ce n'est pas une question de règlement. Vous connaissez très bien notre règlement.

M. Gobé: Je fais valoir mon étonnement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je pense que le député de Rivière-du-Loup et le député de Shefford ne sont pas autrement étonnés de la décision.

Alors, nous poursuivons donc nos travaux sur l'article 87.1 tel qu'amendé. Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur 87.1 tel qu'amendé?

Une voix: ...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, on l'a amendé deux fois, là, alors nous poursuivons sur l'ensemble.

M. Gobé: Mme la Présidente, vous avez une demande...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Mais là je me vois, Mme la Présidente, contraint de reprendre, et là je vais laisser faire tout l'argumentaire fort à propos sur l'identification de la problématique, l'argumentaire fort à propos que le député d'Outremont nous a livré sur l'article 87.1, oui, à la première ligne. Je pense qu'on se voit contraint par peut-être un manque d'ouverture d'esprit du gouvernement, peut-être parce qu'on défend un texte... Je ne sais pas s'il y a objection à travailler le texte, si on voit le texte comme étant sacro-saint. On ne veut pas y toucher. Mais, quoi qu'il en soit, je pense qu'il est de notre devoir, comme parlementaires, d'aller jusqu'au bout de ça.

Je vais proposer l'amendement qui suit, et, si vous reprenez le texte: Ajouter, dans la première ligne, avant les mots «une convention», le mot «ni» et remplacer le mot «ou», avant les mots «un décret», par le mot «ni».

Ce qui ferait que le nouvel article se lirait comme suit: «Ni une convention ni un décret ne peuvent...» Et là, juste pour montrer la bonne foi, on ne veut pas s'attaquer au verbe. Le verbe est au pluriel. Je cherche une formulation qui va nous garder le verbe au pluriel. Donc: «Ni une convention ni un décret ne peuvent – et là il n'y a plus de doute sur le verbe au pluriel, "ne peuvent", parce que, avec le "ne", c'est une négation, donc le "ni" est beaucoup plus précis – avoir pour effet d'accorder à un salarié visé par les normes du travail, uniquement en fonction de sa date d'embauche...»

(21 h 50)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Rivière-du-Loup, est-ce que vous pouvez nous déposer votre amendement?

M. Dumont: Oui. Non, mais je veux juste le lire pour qu'il soit bien compris. Et je l'ai prêt à déposer, effectivement. Malheureusement, je n'ai pas pu en avoir de copies pour tous les membres de la commission.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On va en faire faire des copies, M. le député de Rivière-du-Loup. Rassurez-vous. Alors, vous déposez donc votre amendement. Est-ce que je pourrais...

M. Dumont: Non, mais là je comprends les collègues qui sont déçus que je n'aie pas déjà les photocopies. C'est que, bien honnêtement, je m'attendais à ce qu'on adopte l'amendement du député d'Outremont. Je ne pensais pas avoir besoin d'y recourir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous comprendrez que, avec des amendements aussi complexes, j'ai besoin de voir et d'avoir la copie de l'amendement.

Alors, on va suspendre pendant quelques instants, le temps de recevoir les copies de l'amendement.

(Suspension de la séance à 21 h 51)

(Reprise à 21 h 57)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): À l'ordre, s'il vous plaît! On va recommencer les travaux. Alors, M. le député d'Outremont, s'il vous plaît, est-ce qu'on peut poursuivre?

On a devant nous l'amendement du député de Rivière-du-Loup, qui se lit comme suit: Ajouter, dans la première ligne, avant les mots «une convention», le mot «ni» et remplacer le mot «ou», avant les mots «un décret», par le mot «ni».

Alors, voilà, M. le député de Rivière-du-Loup. C'est un amendement qui est recevable. Si vous voulez nous donner des explications sur votre amendement, sur le sens de votre amendement.

M. Dumont: Oui. Le sens est quand même relativement simple. Tout à l'heure, on était dans des amendements qui avaient trait à ce que le projet de loi couvre, les gens que le projet de loi couvre, les gens que le projet de loi ne couvre pas. Là, on est davantage dans des amendements sur la construction du texte.

Je l'ai dit tout à l'heure, le député d'Outremont a mis le doigt sur un élément de construction de l'article 87.1 qu'il a identifié comme étant inquiétant, comme n'étant pas nécessairement conforme aux usages sains et normaux de la langue française. À la surprise générale, non seulement son amendement n'a pas été adopté, il a été défait par la majorité ministérielle, mais on n'a pas non plus cherché de solution alternative du côté ministériel pour corriger autrement le même problème.

Donc, dans cet esprit-là, je vais essayer de rapprocher les parties, essayer de chercher une voie qui puisse unir tout le monde. Je pense qu'il n'y a pas de doute, tout le monde va reconnaître que ce qu'on veut dire dans l'article 87.1, c'est une négation, c'est-à-dire qu'on identifie: Une convention ou un décret ne peuvent pas – on ne met pas le mot «pas», mais c'est qu'est-ce qu'on veut dire – ne peuvent pas avoir tel effet. Alors, dans l'amorce d'une phrase où il y a une négation, l'une des formes qui est reconnue, c'est d'utiliser le «ni». À ce moment-là, il n'y a pas d'ambiguïté sur l'intention, il n'y a pas d'ambiguïté dans l'interprétation si c'était formulé...

(22 heures)

Et là je vous relis le nouvel article tel qu'il apparaîtrait: «Ni une convention ni un décret ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié visé par une norme du travail, uniquement», et là la phrase se continue.

J'essaie de voir toutes les possibilités, tous les aspects, mais je pense que ça ne laisse place à aucune interprétation. Si l'objectif du gouvernement est de bonifier, d'optimiser le projet de loi dans sa portée comme dans sa construction, je m'attendrais à obtenir une oreille attentive à un celui-là.

Je serais tenté... Parce que, là, je sais qu'on ouvre toute une autre problématique, et je suis très sensible aux arguments de la ministre, sensible au mandat que ça représente quand elle nous dit: Ailleurs dans la construction de la Loi sur les normes du travail, ailleurs dans d'autres articles – je ne me souviens pas, je pense à l'article 50 puis d'autres articles – la même formulation était utilisée. Alors, je comprendrais une prudence de sa part s'il fallait changer plus d'articles, mais je ne pense pas que ce soit un argument. Au moment où on adopte une nouvelle législation, je ne pense pas que ce soit un argument suffisant. C'est peut-être un argument suffisant pour qu'elle réfléchisse un peu plus, peut-être un argument suffisant pour qu'elle ait laissé passer la première version, qu'elle ait laissé passer quelques intervenants, mais le fait que ça existe ailleurs, ce n'est sûrement pas un argument suffisant, à terme, arrivé à l'échéance où, là, on prend la décision finale quant à la version du projet de loi qui va être inscrite dans les législations permanentes du Québec. Le fait qu'il y ait des erreurs passées n'est sûrement pas un argument suffisant pour perpétuer l'erreur.

Et la recherche des textes de loi les plus justes possible, la recherche des textes de loi les plus précis, la recherche des textes de loi les plus, je dirais, faciles à interpréter et à comprendre pour la population et limpides à interpréter pour les tribunaux qui auront à les appliquer, ce n'est pas un objectif qui est futile, c'est un objectif qui est à la base même de la législation: être compris par le monde et être bien interprété par ceux qui appliquent les lois. Et c'est l'objectif qui est visé par cet amendement.

Alors, je ne vous cacherai pas que je pense qu'on a reconnu précédemment les expériences passées du député d'Outremont. Certainement que, dans le cadre de la discussion, son opinion méritera d'être entendue, comme celle de tous les collègues. Je suis convaincu que du côté ministériel autant que dans l'opposition il y a des gens qui s'intéressent à ces questions-là, qui sont minutieux dans la construction des lois du Québec. Et je me réserve, évidemment, en tant que proposeur, le droit de revenir pour fournir des explications supplémentaires ou pour éclairer les gens qui auraient des questions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je comprends que, pour l'instant, vous avez terminé, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Pour l'instant, j'ai terminé. De toute façon, après être intervenu quand même quelques minutes, je pense que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous savez, M. le député, que vous avez la possibilité d'intervenir 20 minutes sur un amendement.

M. Dumont: Non, non. Je le sais. C'est que de prendre tout le 20 minutes, alors que selon toute vraisemblance on n'aura probablement pas besoin d'aller plus loin si la ministre accepte l'amendement, ça ne sera pas nécessaire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup.

Mme Lemieux: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Mme la Présidente, les éléments que j'ai évoqués au député d'Outremont au sujet de son propre amendement sont les mêmes, je ne les redirai pas. Alors, je persiste à croire qu'il faut trouver le bon chemin légal, alors les arguments sont les mêmes. Donc, voilà.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme la ministre. Alors, je serais prête à reconnaître le député d'Outremont. M. le député.

M. Laporte: Merci, Mme la Présidente. J'entends la ministre avec étonnement, parce que ce qu'elle affiche, finalement, c'est un conservatisme qui se dérobe, qui se cache derrière une argumentation, disons, d'opportunité voulant que le légal doive l'emporter sur le grammatical. Mais, derrière ça, il y a un conservatisme: on ne veut pas changer les choses, on refuse de changer les choses. Et, comme le disait tantôt mon collègue de LaFontaine, c'est d'autant plus grave que cette législation, si j'ai bien compris, s'adresse, entre autres, à la jeunesse, n'est-ce pas, que la loi aurait, à mon avis, avantage à pouvoir viser à éduquer, à instruire, et on est devant un conservatisme qui prive le gouvernement d'une occasion de faire avancer, une occasion de perfectionner le parler et l'écrit d'une clientèle extrêmement importante.

Quant à la suggestion du député de Rivière-du-Loup, je la trouve tout à fait recevable compte tenu de l'objectif qui est le sien de clarifier le texte de loi, de rendre le texte de loi plus clair. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il ne fait aucun doute que la proposition qui nous est faite, l'amendement qui nous est présenté qui ferait que l'article 87.1 se lirait: «Ni une convention ni un décret ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié...» – et je vous fais grâce du reste – m'apparaît comme une formulation beaucoup plus claire que celle qu'on trouve dans le projet de loi initial. Mais, évidemment, encore là, la ministre réagira en invoquant l'opportunité de maintenir, comment dirais-je, l'habitude ou l'habitus légal. Mais je lui répète qu'en le faisant elle s'accroche à une tradition et elle fait preuve d'un conservatisme qui ne m'apparaît pas être à l'honneur d'une ministre récemment nommée ministre et qui, de toute façon, appartient à une génération qui devrait et qui fait preuve de progressisme.

Donc, on se retrouve ici devant un paradoxe, on se retrouve devant une ministre qui... D'ailleurs, je dois souligner qu'il s'agit d'une ministre qui, dans ses antécédents professionnels, a fait preuve de progressisme à bien des égards. Elle a été, si je me rappelle bien, présidente du Conseil du statut de la femme, qui était un organisme à la fine pointe du mouvement féministe québécois, donc progressiste. Et voilà maintenant que, réincarnée dans son rôle de ministre, elle devient une défenderesse du statu quo au nom de ce qu'elle appelle un jugement d'opportunité. Et je l'ai entendue antérieurement parler de stabilité. Ça m'a rappelé ce que disait le premier ministre lui-même, qui motivait son refus de modifier certains articles du Code du travail au nom de la stabilité. Et on entend ce mot de «stabilité» prononcé par un chef de parti qui vise à créer de l'instabilité politique de par sa propre option.

(22 h 10)

Donc, on est devant de nombreux paradoxes. Disons que je souscris entièrement à l'amendement qui est proposé par le député de Rivière-du-Loup, en autant que l'objectif qui est poursuivi est un objectif de clarification d'un texte. Sauf que, Mme la Présidente, on se retrouve ici devant – et si la ministre pouvait m'écouter, j'en serais ravi – une situation qui frise la catastrophe parce que – et je reviendrai là-dessus plus tard par un amendement que je proposerai moi-même – avec tout le respect, toute l'admiration, toute l'amitié, toute la sympathie, toute l'affection que j'ai pour le député Rivière-du-Loup, je dois lui dire que, si son amendement me paraît totalement justifié du point de vue d'un objectif de clarté, on se retrouve néanmoins devant un vrai problème grammatical.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Laporte: Problème grammatical que je vais essayer de vous exposer d'une façon, comment dirai-je, vulgarisatrice, n'est-ce pas, sans tomber dans la pédanterie ou dans les accrocs ou les mauvaises habitudes des linguistes pédants. Le ni... ni... Et j'en cite le Multidictionnaire de mon ancienne collègue Marie-Éva de Villers qui est maintenant devenue professeure à l'École des hautes études commerciales où elle fait un travail excellent du point de vue de l'apprentissage d'un français de qualité chez nos futures élites manageriales. Alors, l'usage du ni... ni... est un exemple de ce qu'on appelle une conjonction de coordination à valeur négative. Et avec grande indulgence, j'ajoute à cela que cette conjonction de coordination à valeur négative se distingue fort de la conjonction de coordination à valeur positive, dont on est parti, d'ailleurs, qui était le «ou», n'est-ce pas. C'est la raison pour laquelle je vous dis, Mme la Présidente, que nous sommes vraiment devant une situation extrêmement douloureuse pour qui vise au respect de la grammaire française et à la qualité du français.

Le problème, Mme la Présidente – et j'y reviendrai plus tard – c'est que – et je pense que Mme de Villers est là pour qu'on lui fasse confiance – lorsqu'on se retrouve devant une conjonction de coordination à valeur négative, la construction ni... ni... s'emploie avec la négation simple «ne», et Mme de Villers nous dit bien qu'avec cette locution le verbe se met au singulier. Alors que dans le cas de... Et je le dis sans aucun manque de respect à l'égard de mon collègue de Rivière-du-Loup, mon collègue de Rivière-du-Loup qui me disait tantôt s'être d'ailleurs soumis plusieurs fois aux dictées de Pivot, n'est-ce pas. Et je l'écoute en Chambre, et je suis toujours émerveillé par la qualité de son français. Il est un peu comme notre premier ministre, n'est-ce pas, il sait jouer sur plusieurs registres.

Quoique, dans le cas du premier ministre... je pense que le député de Rivière-du-Loup nous fait le plaisir de jouer comme ça sur des registres allant du plus populaire au plus distingué, mais sans tomber dans le préciosité, ce qui est parfois le cas du premier ministre. Je suis un observateur quotidien des propos du premier ministre, et j'utilise fréquemment le dictionnaire pour pouvoir me rassurer sur ce qu'il dit, et parfois je dois vous avouer, en toute consternation, que certains de ses propos pèchent par préciosité. Il y a certains mots que le premier ministre utilise, qui ne sont pas des mots distingués mais des mots précieux.

Une voix: Par exemple?

M. Laporte: Écoutez, monsieur, je reviendrai là-dessus ultérieurement, si vous le souhaitez. J'ai des choses dans mon journal...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous devez garder la pertinence. Vous avez raison, il faut être pertinent.

M. Laporte: Mme la Présidente... enfin, pour répondre à mon... il faudrait que je retourne à mes écrits de journaux qui sont dans mon bureau. Je le ferai si... mais, comme le dit la présidente, ça ne serait peut-être pas pertinent. Bon.

Mais, ce qui est très pertinent ici, c'est qu'on se retrouve devant un texte qui nous est fourni avec la meilleure intention de clarification, mais qui pose un problème incontournable du point de vue de la grammaire. C'est une raison de plus, Mme la Présidente, pour se sentir justifié de demander un avis à l'autorité linguistique québécoise qui est l'Office de la langue française. Je ne demande pas qu'on demande un avis à l'Académie française. Nous nous sommes créé un organisme de régulation linguistique qui est à la fois – je l'ai écrit déjà dans des textes que j'ai publiés – un négociateur de changements linguistiques, mais aussi une académie de la langue.

D'ailleurs, cette académie de la langue, avec ses pouvoirs coercitifs, ses pouvoirs étendus, est une créature du Parti québécois. C'est le Parti québécois qui a créé l'Office en éliminant d'un trait ce que le Parti libéral avait créé antérieurement, à savoir la Régie de la langue. Donc, le Parti québécois est maintenant devant la situation de s'abstenir de se référer à l'académie de la langue qu'il a lui-même créée. À mon avis, c'est très imprudent, ce qu'on est en train de faire maintenant, là.

Donc, d'une part, je reviens là-dessus, le député de Rivière-du-Loup nous fait une contribution remarquable du point de vue de la clarification d'un texte légal. Et il serait inutile de revenir sur les propos de mon collègue de Shefford qui nous a bien fait comprendre que des textes qui ne sont pas clairs sont des textes qui nous entraînent dans des méandres juridiques épouvantables, n'est-ce pas. Évidemment, ça peut faire l'affaire des avocats, j'en conviens, mais nous, comme parlementaires, nous devrions sûrement avoir, au nom de l'intérêt général, au nom de l'intérêt public, des préoccupations comme celles dont mon collègue de Shefford a fait état tantôt. D'ailleurs, je reviens là-dessus, si... Comme il l'a dit, et je pense qu'il a raison, s'il s'agit... Comme il le disait, si le français est une entité autonome de dépendance interne, on se retrouve donc devant une situation qui est grave.

Je reviens au texte de Mme de Villers qui dit bien: «Conjonction de coordination à valeur négative, elle est l'équivalent de la conjonction "et" dans la phrase affirmative et sert à lier des adjectifs, des noms, des pronoms et des propositions.» Donc, ce que nous dit Mme de Villers, c'est que, finalement, entre le texte de mon collègue, du député de Rivière-du-Loup, qui vise à clarifier... l'amendement qui vise à clarifier le texte et l'amendement dont on a discuté plus tôt, qui était celui de changer la conjonction «ou» par la conjonction... par «et», on se retrouve devant, dans un sens, des suggestions qui sont quasiment équivalentes, puisqu'elle le dit: «Conjonction de coordination à valeur négative, elle est l'équivalent de la conjonction "et" dans la phrase affirmative et sert à lier des adjectifs».

Là où on a, Mme la Présidente – je vous le soumets – un problème grammatical ou stylistique grave, c'est que Mme de Villers nous dit que la conjonction «ni... ni...» s'emploie avec la négation «ne», ce que le député de Rivière-du-Loup a fait avec justesse. Mais elle ajoute qu'avec cette locution – ni... ni... – le verbe se met au singulier. Donc, on se retrouve devant une difficulté.

(22 h 20)

Mais je dois vous dire, par ailleurs, Mme la Présidente, que je ne suis pas un puriste et que je conviendrais, disons, sans me sentir outragé, de la justesse de l'amendement du député de Rivière-du-Loup parce que, dans ce cas-ci, en tout cas, l'un des deux objectifs, qui est un objectif essentiel et dont on a débattu longuement, un objectif de clarification, a été atteint, alors que, dans le cas du texte de loi tel que formulé, on se retrouve non seulement devant un texte qui risque d'être grammaticalement incorrect, mais qui aussi, du point de vue de la clarté, comme le disait mon collègue de Shefford, est loin d'être un texte satisfaisant. Donc, au moins, on aura fait un bout de chemin en clarifiant le texte. Ça aurait pu être atteint d'une autre façon en acceptant mon amendement à l'effet qu'on dise «une convention et un décret», mais je pense que, dans ce cas-ci, la clarification est atteinte à un niveau supérieur et qu'on se retrouve devant une formulation qui dit bien ce qu'elle veut dire, à savoir que ni une convention ni un décret ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié, au regard des matières visées... et il y a un amendement là-dessus. Je vous fais grâce de la suite.

On se retrouve donc devant une formulation plus claire, et je pense que l'usage du singulier ou du pluriel pourrait, à ce moment-là, être, comment dirais-je... on pourrait évidemment faire un autre texte qui dirait: «Ni une convention ni un décret ne peut...» Mais on pourrait aussi, disons, à la suite d'une analyse coûts-bénéfices, pour ne pas nécessairement passer, disons, le reste de notre temps à en discuter, de ce problème grammatical, tout simplement convenir que la formulation proposée par le député de Rivière-du-Loup est tout à fait acceptable.

Donc, finalement, je conclurai là-dessus. Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il vous reste quatre minutes, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: Ah bien! j'ai amplement le temps. Disons, ma première conclusion sera conforme aux propos que j'ai tenus au début de mon exposé. Je suis, Mme la Présidente, renversé, étonné. Je dirais que je suis même un peu scandalisé, Mme la Présidente, de me retrouver devant une ministre qui, de par ses antécédents, a su faire preuve de progressisme, et qui, au nom du conservatisme, affirme que le texte ne peut pas être modifié.

Bien, Mme la Présidente, s'agit-il d'entêtement? Je n'en sais rien. La ministre elle-même nous a prévenus qu'il était de mauvais aloi de vouloir, comment dirais-je... de tenir des propos sur les intentions des gens. Elle nous a dit que les intentions sont inconnaissables. Bon. Alors donc, je ne sais pas quelles sont ses intentions, mais je sais, en l'écoutant parler, en écoutant son argumentation, qu'elle argumente qu'il ne faut pas changer, au nom d'une volonté de conserver ce qui est une tradition d'écriture des textes de loi. Donc, si vous n'appelez pas ça le conservatisme, vous pouvez peut-être vouloir appeler ça de l'efficacité ou de la cohérence ou, comme elle le disait tantôt, une volonté de maintenir la stabilité d'une pratique d'écriture. Mais, à mon avis, ces mots de «stabilité», et ainsi de suite, sont autant de manifestations d'une attitude que j'appelle conservatrice.

Donc, dans un premier temps, je suis déboussolé, puisque j'avais de la ministre une image tout à fait autre que celle qu'elle me communique ce soir. Je l'écoute en Chambre avec énormément d'attention, de plaisir. Je savais qu'elle avait des antécédents qui allaient la faire, à certaines occasions, la défenderesse du progrès, et voici qu'on se retrouve, là, devant un blocage. Maintenant, je ne veux certainement pas élaborer là-dessus. Je veux dire, il y a peut-être aussi des raisons inconscientes pour lesquelles ce blocage-là se manifeste. Derrière ce conservatisme, il y a peut-être une résistance, un transfert négatif, comme diraient les psychanalystes. Il y a peut-être même ce que certains psychanalystes appellent une identification projective, en ce sens qu'elle est là, face à une opposition face à laquelle elle souhaite exprimer, disons, une certaine hostilité, et plutôt que de le faire carrément, voici qu'elle le fait de façon voilée en faisant preuve de conservatisme.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député d'Outremont, je suis désolée, mais c'est tout le temps que le règlement nous permet, malheureusement...

M. Laporte: Mais, Mme la Présidente, je vous remercie. Mais je termine en vous disant que la réaction de la ministre me désole et...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. le député d'Outremont. Alors, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Merci, Mme la Présidente. Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'ai remarqué, depuis le début de cette Législature, que les droits d'expression des députés sont quelque peu brimés.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Shefford, je suis désolée, là, mais j'essaie d'accorder tout le temps aux parlementaires que le règlement leur permet.

M. Brodeur: Laissez-moi terminer, vous êtes sur la mauvaise piste.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, vous étiez mal parti.

M. Brodeur: Le droit d'expression d'un député doit comprendre aussi le droit de vote, parce que le vote est aussi l'expression d'un député. Et j'ai remarqué, Mme la Présidente, et ce n'est pas la première fois, et je pense qu'il y a deux articles du règlement qui sont contradictoires... On s'est aperçu que la première chose qu'un député doit faire à l'Assemblée nationale, c'est de s'exprimer, défendre les intérêts de son comté et voter. Et je ne crois pas que ça soit divisible, le droit d'expression et le droit de vote. J'ai constaté tantôt que le député de Rivière-du-Loup n'a pas pu s'exprimer par vote et que le député de Shefford n'a pas pu non plus s'exprimer par vote. Et je crois, Mme la Présidente, que c'est un droit fondamental d'un député.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Shefford, j'aimerais comprendre. Est-ce que vous parlez sur l'amendement, ou si vous êtes sur une question de règlement?

M. Brodeur: Oui, on peut faire les deux en même temps.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Disons qu'on va essayer quand même d'être pertinent, s'il vous plaît.

M. Brodeur: Est-ce qu'il y un règlement qui interdit de parler à la fois...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, disons que le règlement, généralement, prescrit qu'il faut être pertinent dans nos interventions. Alors donc, je m'interrogeais sur l'intervention que vous étiez à faire, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Tout simplement, non, je voulais souligner cet état de fait, et peut-être que vous pourriez transmettre mon message aux autorités concernées. Je pense qu'il y a incohérence dans le règlement et je suis offusqué. Je suis offusqué, Mme la Présidente, que mon droit d'expression par mon droit de vote soit brimé par votre décision. Je comprends que votre décision est peut-être...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On ne pourra pas changer ça ici. Vous comprenez, M. le député de Shefford?

M. Brodeur: Votre décision est peut-être inspirée par des directives que vous avez reçues, mais vous pouvez transmettre aux personnes qui vous ont donné ces directives que le règlement est injuste, restrictif. Et je suis choqué, Mme la Présidente, de ne pas pouvoir m'exprimer comme j'aurais voulu m'exprimer, et ce, en particulier par mon droit de vote. C'est comme une clause orphelin. On est orphelin. Donc, Mme la Présidente, je pense que la ministre pourrait se pencher aussi sur ces orphelins de la politique que nous sommes par la façon que vous avez de procéder dans cette commission.

Donc, Mme la Présidente, pour en revenir à l'amendement du député de Rivière-du-Loup, j'aimerais vous dire qu'à première vue cet amendement-là est, je crois, une solution entre le premier amendement qui a été apporté par le député d'Outremont et le refus catégorique de la ministre... Est-ce qu'on suspend, Mme la Présidente?

Mme Lemieux: Non, non, continuez, continuez.

Une voix: C'est parce qu'on a besoin de vous pour parler, madame.

M. Brodeur: Oui, justement, j'étais pour vous adresser une question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, bien, écoutez, là, je pense qu'il n'y a aucun problème. Vous savez très bien, de toute façon, que les propos sont enregistrés, et tout ça, et vous savez qu'on ne peut pas non plus souligner l'absence d'un parlementaire. C'est les mêmes règles qu'en Chambre. Alors, je vous prierais de continuer, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Mais, Mme la Présidente, c'est l'absence de la ministre. C'est aussi important que si vous aviez à subir l'absence de celui qui parle.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mettons que je ne ferai pas de commentaires là-dessus. Alors, M. le député de Shefford, s'il vous plaît, pour votre intervention.

(22 h 30)

M. Brodeur: O.K. Donc, Mme la Présidente, l'opposition fait son travail de bonifier les lois. Souvent, on s'y oppose. Ce soir, on veut la bonifier. C'est une attitude responsable de la part de l'opposition, et je demande au parti ministériel, particulièrement à la ministre, d'avoir la même attitude responsable et de bien vouloir écouter ces amendements que je qualifierais d'essentiels pour la protection de la langue française. Je suis convaincu, moi, que la ministre – bienvenue, Mme la ministre – a la volonté nécessaire pour accepter ces amendements-là. On sait que la ministre n'a pas froid aux yeux. On l'a vu dans la campagne électorale l'an dernier, lors de nouvelles d'un journal télévisé, qu'elle s'est adressée à son chef de façon agressive. Elle a pris sa place. Elle a réinventé l'expression «Toé, tais-toé» de Maurice Duplessis et a pu en fin de compte s'affirmer.

Et je suis convaincu que cet amendement-là est beaucoup plus facile à défendre. Elle pourrait facilement accepter cet amendement-là déposé par le député de Rivière-du-Loup, malgré les interrogations du député d'Outremont. Je vous avoue, Mme la Présidente, que j'ai été secoué par les propos du député d'Outremont. À prime abord, je trouvais la proposition du député de Rivière-du-Loup une proposition vraiment coulée dans le béton, proposition très opportune, une proposition que je qualifierais... qui pourrait mener à une entente finale sur cet article-là entre l'opposition et le parti ministériel. Et cette intervention-là du député d'Outremont, qui s'est inspiré de textes d'une amie personnelle, Marie-Éva de Villers, qui a, je crois, fait des études avec le député d'Outremont... Et, comme dit le député d'Outremont, c'est une éminence dans son domaine, tout comme est le député d'Outremont aussi dans le domaine linguistique.

Et j'aimerais reprendre la citation ou les informations du député d'Outremont, qu'il a prises à la page 851, concernant la construction des phrases avec le «ni... ni...» Et c'est pour ça que je voudrais que le gouvernement, que le parti ministériel, la ministre et les députés soient très attentifs pour qu'ils puissent faire leur nid. Donc, à l'expression «ni», c'est une «conjonction de coordination à valeur négative – comme l'a dit si bien le député d'Outremont – elle est l'équivalent de la conjonction "et" dans la phrase affirmative et sert à lier des adjectifs, des noms, des pronoms ou des propositions. La conjonction marque l'union entre deux éléments dans une phrase négative. "Elle n'est pas aimable ni même polie". "Elles ont fait du ski sans bonnet ni gants".»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Donc, c'est des exemples qui sont frappants. Je vous en donne un autre, ça vient du dictionnaire. Ces exemples sont très sérieux, Mme la Présidente, puisqu'ils sont écrits dans le dictionnaire: «Le directeur n'a convoqué ni ceux-ci ni ceux-là», pour donner des exemples. Donc, la construction «ni... ni...» s'emploie avec la négation simple «ne». «Ni l'un ni l'autre»: locution pronominale indéfinie, avec les deux. «Ni l'un ni l'autre ne viendra.»

Donc, la partie importante de cet exposé – et le député d'Outremont l'a si bien soulevé: avec cette locution, le verbe se met au singulier. Donc, quel est le problème? Si on reprend l'amendement du député de Rivière-du-Loup, l'article se lirait ainsi... excusez-moi, M. le député d'Outremont: «Ni une convention ni un décret ne peuvent». Donc, est-ce qu'il faudrait dire: «Ni une convention ni un décret ne peut»? Donc, Mme la Présidente, devant des interrogations aussi importantes, je pense qu'on aurait à réfléchir plus amplement sur le sujet. Ça prendrait évidemment un avis, un avis de l'Office de la langue française. Je suis convaincu que la ministre s'apprêtait à accepter comme tel l'amendement du député de Rivière-du-Loup, tout comme l'opposition officielle, mais, à partir des révélations faites par le député d'Outremont...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: ...il m'apparaît pertinent et nécessaire de demander cet avis à l'Office de la langue française. Mme la Présidente, on sait que le député d'Outremont a déjà été président de ce même office. Son opinion, pour nous, est très importante. Il se pose lui-même la question. Je pense que c'est une question qui demande une certaine réflexion ou une réflexion certaine, et je ne pense pas que, dans le court temps qui m'est accordé ici, nous puissions réfléchir correctement sur l'opportunité d'enlever le «nt» à «peuvent». Donc, pour toutes ces raisons, je crois qu'il est impératif de demander cet avis à l'Office de la langue française.

Donc, comme je le disais au début de mon intervention, l'objectif fondamental, je dirais très fondamental, de l'opposition, dans ce cas-ci, dans la première ligne de l'article 87.1, est de bonifier le projet de loi. Et, lorsque l'opposition tend la main au gouvernement de bonne foi pour bonifier un projet de loi, je pense qu'il est dans l'intérêt collectif, l'intérêt du Parlement, l'intérêt de la population, d'accepter une proposition qui est exprimée de cette façon-là, une proposition très intelligente du député de Rivière-du-Loup. Et, à ce moment-là, trouvant la proposition, je crois, plus que recevable, il faut se questionner sur le reste du texte qui devrait accompagner cet amendement-là.

Mme la Présidente, le député d'Outremont nous l'a dit tantôt, le député de Rivière-du-Loup fait preuve d'un français exemplaire à l'Assemblée nationale. Je l'écoute moi aussi avec attention. D'ailleurs, en campagne électorale, j'ai eu l'occasion de l'écouter à plusieurs reprises dans mon comté. Il a toujours fait preuve d'un français exemplaire. Pour cette raison-là, je crois qu'on doit porter une attention toute particulière à toute amélioration à la loi qui a pour objet de perfectionner les écrits qui émanent des décisions législatives, qui émanent ici du Parlement. Et donc, lorsqu'on a comme premier objectif de clarifier les lois, je crois que nous sommes tous et chacun interpellés afin de permettre cette clarification-là. Donc, pour moi, il serait plus évident, pour n'importe quel légiste d'ailleurs aussi, n'importe quel avocat... Je vois le député de Gaspé ici, devant moi, le député de Gaspé qui désirera sûrement intervenir à titre de juriste, puisque c'est le seul avocat ici, je crois, sur la commission. Il désirera sûrement intervenir...

Une voix: ...

M. Brodeur: ...seul avocat présent à la commission.

Une voix: C'est Désilets qui est avocat...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous pouvez poursuivre, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Ah! Excusez-moi, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Nous vous écoutons avec beaucoup d'attention.

(22 h 40)

M. Brodeur: Donc, je disais que sûrement le député de Gaspé désire intervenir. On l'a vu à l'Assemblée nationale à quelques reprises. Aujourd'hui, il s'est probablement senti interpellé. Je l'interpelle à nouveau pour qu'il puisse vraiment nous donner son expertise de juriste sur la proposition amenée par le député de Rivière-du-Loup.

Donc, pour que chacun de nous saisisse très bien la nouvelle rédaction de l'article 87.1, je vous la lis avec l'amendement apporté par le député de Rivière-du-Loup. L'article se lirait ainsi: «Ni une convention ni un décret ne peuvent – ou ne peut, c'est à venir – avoir pour effet d'accorder à un salarié, au regard des matières visées par les normes du travail prévues aux sections I à IV et VII du présent chapitre et uniquement en fonction de sa date d'embauche, une condition de travail moins avantageuse que celle accordée à d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement.»

Donc, on se retrouve avec un article plus clair, naturellement nonobstant tout amendement qui pourrait être apporté aux autres lignes de l'article. Naturellement, dans le but encore de bonifier le projet de loi, il est possible que l'opposition et même les députés ministériels puissent apporter des amendements pour bonifier à nouveau, faire en sorte que le projet de loi n° 67 soit un modèle d'écriture qui pourrait servir aux autres commissions parlementaires, à l'étude d'autres projets de loi, et cela, Mme la Présidente, vous en seriez sûrement très fière à titre de présidente de la commission de l'économie et du travail.

Donc, je pense qu'il faut en profiter, il faut profiter de l'occasion qui nous est donnée pour donner l'exemple à nos collègues, et vous pourriez en profiter pour passer le message à vos collègues présidents et présidentes d'autres commissions parlementaires pour faire en sorte que leurs projets de loi à l'avenir soient des modèles de rédaction de langue française. Modèles de rédaction. Mme la Présidente, je disais que, si on continue comme ça encore quelque temps, on va trouver des «t'sé veux dire» dans les lois. Donc, je pense qu'il est impératif qu'on se prenne en main, qu'on mette nos culottes et puis qu'on mette les points sur les i, les ni, qu'on fasse notre nid, et que, même si le «ni» signifie la négation, il faut penser positivement, madame.

Donc, Mme la Présidente, l'esprit de la loi se voulant toujours de plus en plus clair, on se doit de contribuer à cette clarification qui est si nécessaire à la législation moderne. À l'aube de l'an 2000, je pense que, en tant que législateurs, il faut donner l'exemple à toute cette jeunesse. Le député d'Outremont le soulignait tantôt, le député de LaFontaine aussi, que ce projet de loi est destiné à nos jeunes, et pourquoi ne pas en profiter pour donner l'exemple? On se plaint partout au Québec, le système d'éducation reçoit toutes sortes de reproches à l'effet que les cours de français et les cours de langues ne sont pas adaptés aux besoins actuels, soit de préserver notre langage, préserver la langue française. Et je suis très honoré d'être juste à côté du, peut-être, plus éminent président de l'Office de la langue française que le Québec a eu, une sommité internationale qui est connue en France, connue aux États-Unis.

M. Gobé: À la Sorbonne.

M. Brodeur: Connue à la Sorbonne, comme me dit le député LaFontaine, qui a fait ses études à Berkeley, une université excessivement cotée, Mme la Présidente. J'ai eu l'occasion d'aller visiter l'université...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: ...et je suis convaincu, Mme la Présidente, que ces gens-là se souviennent encore du député d'Outremont.

Donc, Mme la Présidente, je tends la main encore une fois, M. le Président, à la ministre...

Le Président (M. Lelièvre): Vous avez vu juste.

M. Brodeur: ...pour qu'elle accepte cet amendement tout en tenant compte de l'intervention du député d'Outremont qui a cité une de ses amies personnelles, Mme Marie-Éva de Villers. Vous la connaissez aussi?

Une voix: Tout à fait.

M. Brodeur: Oui? Et elle-même, disons qu'on reprend ses propos... Donc, si nous acceptons l'amendement du député de Rivière-du-Loup, ce que s'apprête à faire le parti ministériel, l'opposition, nous sommes tout à fait d'accord. Mais, tout en acceptant l'amendement du député de Rivière-du-Loup, il faut aussi se pencher sur le nouveau problème soulevé par Mme de Villers que, avec cette locution, le verbe se met au singulier. Donc le problème surgit par la suite à, et je vous relis l'article: «Ni une convention ni un décret ne peuvent.» À ce moment-là, faudrait-il dire «ne peut»? Là est la question, M. le Président.

Donc, en terminant, j'aimerais vous rappeler un peu le contexte du point de départ, parce que je sais que, immédiatement ou peu de temps après mon temps de parole, nous aurons encore un vote. Et je vous dis, M. le Président, que le premier devoir d'un député est de s'exprimer à l'Assemblée nationale, d'étudier des projets de loi, de défendre les intérêts de son comté. Et je suis convaincu, lorsque le premier législateur a adopté ce règlement-là, l'esprit de la loi, l'esprit du règlement permettait aussi aux députés de s'exprimer, le droit de vote faisait partie de son droit d'expression. Et, M. le Président, je vous rappelle que notre droit d'expression ici, les députés, a été brimé, le droit d'expression du député de Rivière-du-Loup, le droit d'expression du député de Shefford, et j'ai déjà été témoin, dans d'autres commissions, qu'on a brimé le droit d'expression de députés de l'opposition. On a brimé...

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Shefford, je dois comprendre que ce soir, ce n'est pas le cas. Vous avez tout le loisir de vous exprimer dans le temps qui vous est imparti.

M. Brodeur: Si vous me permettez de voter sur cet amendement et si vous permettez au député de Rivière-du-Loup de voter, j'en conclurai que nous n'avons pas été brimé dans notre droit d'expression. Mais, advenant le contraire, soyez certain, M. le Président, et je vous avertis immédiatement, que je me lèverai à nouveau pour dénoncer cette injustice.

Une voix: En autant que vous parliez assis.

M. Brodeur: Debout ou assis, moi, ce n'est pas bien... Donc, M. le Président, je vous demande bien humblement, peut-être, de reconsulter votre règlement, de reconsulter les autorités ici, en cette matière, peut-être aller voir le Secrétaire général, aller le consulter sur le règlement et sur l'opportunité de faire voter légitimement tous les députés qui ont droit de parole dans une commission parlementaire, parce que le droit de parole entraîne, je crois, automatiquement, le droit de vote, ce qui fait partie du droit de s'exprimer. Et je vois le député de Chicoutimi qui suit, comme il le dit, mon plaidoyer avec beaucoup d'intérêt.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Shefford, je dois malheureusement vous interrompre. Votre temps de parole est totalement épuisé, et même vous avez dépassé. Alors...

M. Brodeur: Est-ce que je peux conclure tout simplement?

Le Président (M. Lelièvre): Votre conclusion a été amplement faite et...

M. Brodeur: Et je conclus que vous brimez encore mon temps de parole, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, votre temps de parole est épuisé. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'amendement? M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, M. le Président. J'ai écouté avec énormément d'attention les propos du député d'Outremont. D'abord, je pense que, sur la question de la clarté, le débat semble clos. On a un consensus sur la clarification de l'enjeu, mais il reste un enjeu sur le verbe, sur le nombre en vertu duquel on va accorder le verbe.

Aux poids lourds que sont le député d'Outremont et Marie-Éva de Villers dans le Multidictionnaire de la langue française, je me dois, M. le Président, de souligner – ou en tout cas pour les ramener dans une zone de confort – que le pluriel peut aussi, dans d'autres contextes, d'autres instruments de référence, être utilisé. Et j'allais dire, aux poids lourds que sont Marie-Éva de Villers et le député d'Outremont, je dois moi aussi opposer des poids lourds pour justifier l'emploi du pluriel, entre autres Stendhal. Dans Le Robert d'abord. Le Robert place le pluriel comme étant la règle générale. Or, Stendhal dit: «Ni l'un ni l'autre n'avaient le caractère endurant.» Je ne sais pas s'il parlait de la ministre. «N'avaient», a-i-e-n-t. Roger Martin du Gard, un auteur prolifique connu, disait: «Une mission à laquelle ni moi, ni vous, ni lui ne pouvons plus nous dérober.» Emploi du pluriel encore.

(22 h 50)

Et je ne viens pas de simplifier l'affaire, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Rivière-du-Loup, on vous écoute attentivement.

M. Dumont: ... je pense que ce qu'il nous reste comme option – ha, ha, ha! – raisonnable et responsable, c'est de recourir à un avis de l'Office de la langue française parce que... Je serais, M. le Président, tenté de poser la question: Qui sommes-nous pour trancher entre Stendhal...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): On vous écoute.

M. Dumont: ...et Roger Martin du Gard, et Marie-Éva de Villiers?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): Je comprends que vous voulez trancher la question et non les auteurs. Ha, ha, ha!

M. Dumont: J'ose faire appel à notre humilité pour adopter l'amendement de clarté mais référer l'accord du verbe à l'Office de la langue française.

Le Président (M. Lelièvre): Ça termine votre intervention, M. le député de Rivière-du-Loup? On vous remercie. Est-ce qu'il reste du temps au député de LaFontaine? Oui?

M. Gobé: Vingt bonnes minutes, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Vingt minutes?

M. Gobé: Eh oui!

Le Président (M. Lelièvre): Ah! Excusez-moi. Alors, parce que là, je remplace la présidence... Alors, vous avez la parole pour 20 minutes.

M. Gobé: Je vois que vous avez une tendance à vouloir non seulement brimer le député de Shefford et le député de Rivière-du-Loup, mais, même avant que je commence à parler, vous vérifiez si des fois il ne me resterait plus de temps.

Le Président (M. Lelièvre): Vous savez, M. le député de LaFontaine, vous avez tellement le verbe facile qu'on ignore à quelle période vous êtes.

M. Gobé: Ah oui! mais, en attendant, je suis à la période du départ.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, vous avez tout le loisir de vous exprimer. Ha, ha, ha!

M. Gobé: Puis vous êtes à la période de l'écoute. Alors, peut-être que je vais commencer à parler, puis, vous, vous allez écouter.

Le Président (M. Lelièvre): Je vous rappelle que votre temps de parole est commencé.

M. Gobé: Oui, j'espère qu'on déduit le vôtre que vous prenez sur le mien.

Le Président (M. Lelièvre): Mais pas du tout.

M. Gobé: Ah bien, là, je m'excuse, M. le Président, mais le règlement ne prévoit pas que le temps de parole du président est déduit du temps de parole d'un parlementaire. On pourrait demander un avis au président de la Chambre, ce soir, si vous voulez, mais je peux vous assurer que ce n'est pas comme ça que ça se passe. Votre ex-collègue M. Garon, député de Lévis, avait fait trancher ça par le président Saintonge ou le président Lemieux, de commission, comme vous, Jean-Guy Lemieux, le gars qui a failli être votre maire dans la région de Québec, pas le vôtre, mais enfin, les gens de Québec.

Une voix: ...

M. Gobé: Oui? Il n'est pas parent avec vous. Il était intervenu dans une allocution du député de Lévis, et on lui avait retranché ce temps de son discours et, suite à une demande de la présidence...

Le Président (M. Lelièvre): Soyez rassuré, M. le député de LaFontaine, votre temps est préservé. La présidence en est chargée.

M. Gobé: Ça, je n'en doute pas. Vous allez nous montrer votre grand esprit de démocratie. Bon, écoutez, je pense, Mme la ministre, que nous sommes devant une situation extrêmement délicate, oui, très délicate parce que, plus nous avançons, plus nous nous rendons compte que le projet de loi est mal écrit à un point tel que même nous, dans l'opposition, on a de la difficulté à comprendre nous-mêmes. Alors, imaginez les avocats, imaginez les spécialistes de griefs dans les compagnies, les entreprises, les municipalités, ça va être un capharnaüm complet et total. Les gens ne vont plus savoir de quel côté se prendre, quoi vouloir décoder. Le député d'Outremont a parlé à certains députés en disant qu'eux ils avaient appris à décoder et d'autres à comprendre. Alors, ils ne sauront ni comprendre ni décoder. Ici, il n'y a pas d'avocat... Bien, notre collègue qui généralement nous sert de conseiller juridique bénévole... Mais peut-être que, vu que les avocats ont de la difficulté à trancher... y aurait-il un prof dans la salle, un professeur?

Des voix: ...

M. Gobé: Ah! M. le professeur de Maskinongé, est-ce que vous pourriez nous donner votre avis de professeur, à savoir qui a raison entre le «ni» du député d'Outremont et celui du député de Rivière-du-Loup? Parce que peut-être vous pourriez nous dire, peut-être trancher sur ce noeud gordien que nous avons.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lelièvre): Alors, je rappellerais au député de LaFontaine qu'il est seul à avoir la parole et au député de Shefford que son temps est épuisé.

M. Gobé: Mais je serais prêt à concéder quelques minutes de mon temps de parole au député de Maskinongé, s'il veut nous exprimer un côté... Êtes-vous professeur à l'université ou au collège?

M. Désilets: .... le député de LaFontaine.

M. Gobé: Ça ne marche pas.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine, je vous rappellerais à la pertinence de vos propos en regard de l'amendement qui est sous étude.

M. Gobé: Je m'excuse, M. le Président, mais c'est parce que j'aurais aimé ça avoir un avis professoral sur... Parce que, là, on parle de grammaire, et là on a des juridiques qui nous parlent de grammaire, puis des fois ils peuvent être pris un peu dans une tendance un peu judiciaire. En tout cas, on va se contenter de ce qu'on a actuellement et on va donc devoir se fier uniquement à l'avis de la sommité que nous avons, qui est le professeur...

M. Brodeur: Tout ce qu'on a, c'est une sommité.

M. Gobé: ...Laporte, en vous rappelant que le député d'Outremont a déjà fait de nombreuses conférences en France, à la Sorbonne et à différents instituts linguistiques francophones à travers le monde, à l'observatoire linguistique de la francophonie...

M. Brodeur: De Lac-Mégantic.

M. Gobé: ...et qu'à ce titre-là on pourrait donc... Ha, ha, ha! Il est fou! On pourrait donc, M. le Président... Ha, ha, ha! Bon.

Le Président (M. Lelièvre): ...surtout pas les enregistrements, parce que ces propos-là sont très intéressants. Ha, ha, ha!

M. Gobé: Alors, voilà. Bon. On va donc devoir se contenter de cette lumière-là. Et, malheureusement, M. le Président, la ministre, elle, refuse toujours de nous écouter, toujours de faire preuve de cette grande ouverture qui a semblé caractériser son entrée en politique. Je me souviens, lorsqu'elle a fait sa conférence de presse pour annoncer sa candidature, elle avait même pris la parole à la place du premier ministre pour lui dire: Tasse-toi de là, moi, je vais leur expliquer, vous allez voir comment ça marche. Et ça avait démontré tout de suite à la population qu'il y avait là une femme d'énergie, directe, d'ouverture, qui n'était pas gênée de sortir des sentiers battus et du carcan que les partis mettent sur les candidats à l'occasion, surtout les nouvelles candidates ou les nouveaux candidats, lorsqu'ils arrivent. Et là on avait dit: Bien, voilà au moins quelqu'un qui va bouger les colonnes du temple, qui ne sera pas gêné...

M. Brodeur: Qui va accepter nos amendements.

M. Gobé: ...de faire preuve d'ouverture, qui n'aura pas cette attitude moyenâgeuse qu'on rencontre, de certains ministres ou certains politiciens du gouvernement actuel, qui est d'empêcher l'évolution des gens, un peu comme les moines, au Moyen Âge, gardaient la culture pour eux afin de maintenir le peuple dans l'obscurantisme et d'éviter ainsi...

Une voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est l'holocauste.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, vous pouvez continuer, M. le député de LaFontaine, on vous écoute.

M. Gobé: Excusez, mais ma grippe m'empêche de parler par quelques moments.

Le Président (M. Lelièvre): Je comprends que vous avez une forte grippe ce soir.

M. Gobé: Dans l'obscurantisme. Et donc, nous étions en droit d'attendre d'elle ce genre d'ouverture. Particulièrement lorsqu'elle a été nommée au ministère du Travail, on a dit: Voilà enfin quelqu'un qui va révolutionner ce monde-là, qui est un monde conservateur, un monde de rapports quasiment coutumiers entre les syndicats, les patrons, certaines clientèles, un peu comme dans un cercle un peu fermé. On a dit: Voilà, quelle chance nous avons! Et on a eu le projet de loi que nous avons, entre autres sur les clauses orphelin, et là on se serait attendu à ce que, découvrant un certain nombre d'imprécisions...

Je ne parle pas sur le fond. Je sais qu'elle est en négociations encore, il y a des rencontres qui vont se faire, elle nous l'a dit, avec les partenaires encore, avec les jeunes – le député de Rivière-du-Loup s'occupe de ça aussi – avec le patronat, demain. Eh bien, donc sur le fond, on va attendre qu'elle ait fini ses consultations, ce qui est prometteur, certainement, parce que, si elle a déposé ses amendements hier en grande pompe, on aurait pu s'attendre à ce que ça soit les derniers, mais, devant un certain nombre de possibilités de bonifier le projet de loi et de l'amener plus conforme aux voeux de l'opposition, des gens que l'opposition représente, en particulier le député de Rivière-du-Loup et nous aussi du Parti libéral, eh bien, elle a décidé de faire ses consultations, et donc on présume que ça va ouvrir demain.

(23 heures)

Alors, on s'attaque ce soir, je le disais précédemment, à la facture du projet de loi, à la manière dont il est rédigé, et, plus on avance, plus on découvre des imprécisions, plus on le lit, plus on se rend compte qu'il est écrit pour dire beaucoup de choses et puis rien en même temps. Je vais donner un exemple. Alors, avec l'amendement, bien sûr avec lequel je suis d'accord, on dirait: «Ni une convention, ni un décret – il se lirait – ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un salarié...» Là, je reviens, et vous allez voir pourquoi.

«Ni une convention ni un décret ne peuvent avoir pour effet»: qu'est-ce que ça veut dire «ne peuvent avoir pour effet»? Ce n'est pas du français, ça. Si on voulait être direct, si on ne voulait pas qu'il y ait d'équivoque, si on voulait que le projet de loi soit direct, qu'il dise exactement ce qu'il veut dire, ce que le gouvernement a dit, ce que la ministre a dit, il ne devrait pas être écrit de cette façon-là. Parce que les mots «ne peuvent avoir pour effet», un «effet», «peuvent avoir», ça ouvre la porte largement à beaucoup d'interprétations, et je suis certain qu'il y a des avocats, de brillants avocats – à l'image du député de Chicoutimi quand il aurait été peut-être plus dans son comté, après une élection – qui vont chercher à se faire des carrières ailleurs et auront beaucoup de plaisir à décortiquer ces projets pour y trouver des failles afin de pouvoir défendre leurs clients, et là bien sûr gagner leur vie honorablement.

Alors, moi, je le réécrirais... Si vraiment elle avait voulu l'écrire d'une manière claire et précise, et ... le but d'un amendement, si... Bon, mes collègues, il y a une petite suspension qu'on va demander tout à l'heure peut-être pour en discuter afin d'être certains d'être sur la même longueur d'onde. Elle était d'accord. Quand j'aurai fini de parler, je vous dirai pourquoi le «ni» et le «ni» nous amèneraient à faire ça. Eh bien, pour que ce soit cohérent avec «ni» et «ni», il faudrait dire «ni une convention ni un décret ne peut avoir pour effet». Et là on enlève «pour effet». Alors, on dirait: «ne peut accorder à un salarié visé par une norme du travail uniquement en fonction de sa date.»

Puis là on n'est pas rendu aux phrases suivantes, hein, il va falloir les réécrire aussi parce que là aussi elles portent à confusion. C'est un peu comme une tartine où on a mis trop de confiture dessus: ça déborde de partout, puis, là, on en a plein les mains puis on ne sait plus trop quoi faire avec puis on la repose sur la nappe, puis on s'est chicané parce que ça fait une tache sur la nappe. C'est un peu le même principe: il y en a trop, on tombe dans le superlatif.

Je ne sais pas qu'est-ce que les gens qui écrivent ces projet de lois pensent. Est-ce qu'ils pensent aux citoyens ou est-ce qu'ils pensent à... Je ne sais pas. Ils écrivent, ils mettent une ribambelle de mots les uns après les autres, quitte à amener des amendements. La pauvre ministre qui porte ça, elle, quand elle lit ça, elle dit: S'ils l'ont écrit, ces gars-là, au prix où ils sont payés... C'est censé être des gars qui ont de l'expérience, qui ont 15, 20 ans d'ancienneté pour certains. Je ne parle pas des sous-ministres, là, je parle des autres qui les écrivent pour eux, hein? Les sous-ministres, eux autres aussi, ils les voient. D'accord?

Eh bien, on se retrouve avec une espèce de salmigondis, de macédoine de mots et de...

Une voix: De sal quoi?

M. Gobé: De salmigondis. Eh oui. Et pour approcher plus proche du peuple, et vous avez raison, je vais prendre un conseil de notre conseiller juridique, que j'aime beaucoup d'ailleurs parce qu'il apporte toujours des bons points à cette commission, de pâté chinois.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: Vous avez raison, monsieur...

Une voix: C'est ma première contribution à cette commission.

M. Gobé: Non, non, ce n'est pas votre première. Mais le député de Chicoutimi a raison, et on se retrouve avec ça. Alors là on commence les premières phrases. «Ni une convention ni un décret ne peut avoir», déjà, voyez-vous, ça nous a pris quelques heures pour arriver là. La ministre commence à être convaincue, on le voit, là, à son sourire. La lumière arrive, je suis certain qu'elle va arriver. Après ça, il va falloir passer aux autres mots. Puis je vois – on en a combien? – on a six lignes. Alors, dans les six lignes, il y a peut-être cinq, six corrections à faire, aménagements ou reformulations, et on va se retrouver, là, avec un projet de loi, le premier article du projet de loi... D'ailleurs, le premier article qui était l'autre, le fond de l'article nous convenait, hein? Le député de Rivière-du-Loup, le député d'Outremont, le député de Shefford, ma collègue la députée de Gaspé...

Des voix: Bonaventure.

M. Gobé: ...excusez-moi, de Bonaventure, et moi-même étions en accord avec sa facture, sa formulation, quelques mots à corriger puis on était d'accord. Là, il a été changé, et on se retrouve avec un article qui est – on aura l'occasion d'en parler tout à l'heure quand on va parler sur l'article – un peu alambiqué, différent, mais là on voudrait le clarifier avant.

Alors, Mme la ministre, pourquoi ne prendrions-nous pas tout de suite, vous, les députés qui sont ici, le député d'Outremont, votre sous-ministre qui est ici d'ailleurs, qui est un homme d'expérience aussi... On voit que les fonctionnaires en arrière de vous, là, sont partis, ceux qui vous donnent les mauvaises habitudes probablement, ils ne sont plus là, on peut en profiter. On s'installe tous ensemble, on peut même couper les micros mais rester ici, en séance de travail...

Le Président (M. Lelièvre): Ah! Nous allons continuer à enregistrer vos propos, vous savez, ils sont très pertinents, ils sont très éloquents.

M. Gobé: ...et on se met à corriger le projet de loi ensemble.

Une voix: Oui. Ça serait le fun.

M. Gobé: Il nous reste du temps. En une heure, là, on peut corriger le premier article. Ça serait tout à votre honneur. Et je suis certain, quand vous repartiriez ce soir, rentreriez chez vous, que vous diriez à votre adjointe parlementaire: Eh bien, voilà, on a fait oeuvre utile, on a fait quelque chose qui va faire en sorte que ce premier article du projet de loi va vraiment dire ce que nous voulions dire puis va vraiment indiquer à la jeunesse québécoise quelles sont vraiment nos intentions. Et ceci dans un langage clair, simple, mais quand même académique, et avec un vocabulaire beaucoup moins flou et un peu pâté chinois, comme mon collègue de Chicoutimi disait. Alors, vous devriez nous écouter. J'essaie de...

Mme Lemieux: Je vous écoute. Je ne fais que ça

M. Gobé: Oui, mais vous devriez non seulement nous écouter, mais vous devriez nous entendre aussi, madame.

Une voix: Et surtout nous comprendre.

M. Gobé: Vu que vous nous écoutez et nous entendez, vous devriez maintenant agir et donner suite à nos revendications qui sont légitimes et qui sont tout parti politique confondu. Tout parti politique. Vous avez cette chance, vous, d'être la première à réussir un consensus...

Une voix: 55 % de la population.

M. Gobé: Oui. 55 % de la population est ici, de ce côté-ci, madame. Et vu que vous dites que c'est une première mondiale, le député de Rivière-du-Loup l'a dit avec grande justesse tout à l'heure, vu que vous dites que votre projet de loi est une première mondiale, bien, montrez donc l'exemple une première fois, pas dans le monde parce que ça se fait ailleurs, mais au moins au Québec, à vos autres collègues, dire: Moi, j'ai un projet de loi qui est une première mondiale puis j'ai aussi été la ministre qui est la première au Québec à ne pas avoir eu peur de m'asseoir avec les députés, des gens qui sont élus par le peuple, des gens qui sont élus par les citoyens pour les représenter, donc m'asseoir avec eux pour réécrire un projet de loi.

Parce que les fonctionnaires qui vous l'écrivent, là – ah! ils sont revenus en arrière – sont bien gentils, mais, eux autres, ils ne sont pas élus par le peuple. Ils ne sont pas élus. Eux autres sont payés par les taxes du peuple pour écrire des projets de loi, puis d'après moi ils les écrivent dans leur langage habituel. Puis bon ça a été comme ça tout le temps puis on continue. C'est leur dialecte à eux, c'est leur patois, un peu, là. Ils parlent de choses et d'autres avec des termes et des codes qui leur conviennent, avec lesquels ils sont habitués. Des fois, c'est dérivé de l'anglais, des fois, ça tient de traductions; ils ont pris ça à quelque part puis on essaie de faire un peu, là... Puis ils ne le font pas méchamment, je suis certain, là, je veux dire, ils ne s'amusent pas à faire ça exprès, je présume. Sauf qu'à la fin les gens ne comprennent plus rien. Puis, quand les gens ne comprennent plus rien, eh bien, le projet de loi est contesté, il n'atteint pas son objectif, les citoyens se désintéressent.

Moi, je vous mettrais au défi ce soir, ici, de ramasser, d'appeler une quinzaine de citoyens, de faire un peu comme certains animateurs font à la radio le midi, M. Proulx, Gilles Proulx, à titre d'exemple, puis les asseoir ici, puis, au lieu de leur donner la dictée Pivot, on va leur donner les quatre, cinq articles du projet de loi de Mme la ministre, puis on va leur dire: Qu'est-ce que c'est que vous voyez là-dedans, vous autres? Bien, je peux vous assurer que ça ne serait pas évident, j'ai l'impression, comme vous pouvez voir déjà les discussions qu'il y a entre nous.

On ne peut pas, dans ce règlement, même si on a la majorité de la population, faire valoir le poids de la population. Ça, c'est malheureux, et ça, c'est... Non seulement les droits du député de Shefford et de Rivière-du-Loup sont brimés en termes de vote, ce à quoi je me suis inscrit en faux dès le début... Et je crois que c'est une iniquité que cela soit comme ça, parce qu'en ce Parlement on est tous égaux les uns les autres. Et je le dis sans arrière-pensée. Nous sommes tous égaux, et le député de Rivière-du-Loup qui vient passer une journée complète en cette commission, le député de Shefford qui passe une journée complète à cette commission, qui sont mandatés par leurs concitoyens, eh bien, ne pourront pas dire à leurs concitoyens: J'ai voté contre le projet de loi en commission parlementaire parce que d'après moi il ne correspondait pas à vos intérêts. Et là ils vont dire: Pourquoi tu n'as pas voté contre? Bien, je n'avais pas le droit, je ne pouvais pas. Et là les gens de Rivière-du-Loup puis de Shefford vont dire: Écoute bien, écoute donc, toi, là! Es-tu un vrai député ou tu n'es pas un vrai député? Tu n'as pas les mêmes droits que les autres? Ça fait que, là, ils vont écrire dans le journal local: Le député Brodeur n'a pas de droit de vote en commission parlementaire.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine, je vous inviterais à...

M. Gobé: Le député de Rivière-du-Loup...

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine, je vous inviterais à désigner le député de Shefford par son nom de circonscription.

M. Gobé: Excusez-moi. Le député de Shefford, M. Brodeur, n'a pas le droit de vote dans sa circonscription. Le député de Rivière-du-Loup, M. Dumont, n'a pas le droit de vote. C'est les journaux qui vont titrer ça. Et que pensez-vous que les gens vont penser?

Une voix: Je ne pense pas que les gens vont dire ça.

M. Gobé: Dans Rivière-du-Loup? Bien, je suis certain que les gens vont dire ça. Ils vont dire: Comment se fait-il que notre député, il n'a pas les mêmes droits que les autres? On paie les mêmes taxes. On l'a élu majoritairement. On paie les impôts, là, encore au Québec.

(23 h 10)

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine ... à l'article 132 et 133 de notre règlement.

M. Gobé: Vous avez raison, M. le Président, mais c'est parce qu'on a là un député qui amène un amendement, il amène l'amendement lui-même, le député de Rivière-du-Loup a amené l'amendement, c'est lui qui veut modifier le projet de loi, puis il ne peut pas voter dessus. Il ne peut pas, il n'a pas le droit. Alors, là, il y a un scandale quelque part. C'est une iniquité, et je sais que vous n'en êtes pas responsable, M. le Président. Je sais que M. le sous-ministre n'en est pas responsable, je comprends ça, mais il n'en reste pas moins que l'organisation du Parlement devrait prévoir ce genre de situation. Et on est obligé à ce moment-là, nous, de nous substituer et de collaborer bien sûr avec les députés qui n'ont pas droit de vote, mais on ne peut pas voter deux fois, on peut voter seulement une fois.

Alors, qu'est-ce qu'on va faire?

Le Président (M. Lelièvre): Il vous reste une minute, M. le député de LaFontaine, pour conclure.

M. Gobé: Il me reste une minute, M. le Président? Alors, dans une minute, Mme la ministre... Il me reste une minute pour essayer de vous incanter. Je vous demande, je vous supplie presque...

Une voix: À genoux.

M. Gobé: Ah non! Pas à genoux, parce que je ne me mets jamais à genoux, je reste debout. Mais je fais un peu comme le roseau, hein? Je plie, mais je me redresse tout de suite, puis, quand je me redresse, ça donne une claque des fois, mais il y a un rebond. Mais, je vous en prie, rendez-vous donc à l'évidence, constatez donc qu'ici il y a un consensus à l'effet que le projet de loi est mal écrit, qu'il faut absolument préciser vos intentions, préciser les actes d'intervention auxquels vous voulez aller...

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de LaFontaine, vous avez bien exprimé votre pensée, et je dois vous dire que votre temps est écoulé.

M. Gobé: ...et la meilleure manière de le faire, c'est d'accepter l'amendement que nous proposons.

Le Président (M. Lelièvre): Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui veulent s'exprimer sur l'amendement? Alors, il n'y a pas d'autres parlementaires. Alors, à ce...

M. Gobé: ...

Le Président (M. Lelièvre): Mais, M. le député de LaFontaine, votre temps est écoulé. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: La seule invitation que je peux faire, pour moi... Parce que, sur le fond, je pense que les arguments en faveur de l'amendement ont tous été mentionnés. On a fait un peu le...

Une voix: ...trouver d'autres. Vous m'épatez.

M. Dumont: Non, je pense que, sur le fond, le débat était circonscrit. Ha, ha, ha! Mais l'inquiétude que j'ai, c'est la ministre qui reconnaît quand même la justesse de ce qui est avancé, mais qui dit: Si je vais dans le sens des suggestions justes et pertinentes qui me sont faites – et là elle arrive avec une série d'articles – je vais devoir modifier l'article 50 qui est construit pareil, puis l'article 60, puis d'autres articles qui sont construits de la même façon.

Le projet de loi qu'on veut adopter, qu'on espère tous, pourrait amener des centaines, des milliers d'entreprises, de municipalités à modifier leurs pratiques, à modifier leur convention collective, à renégocier leurs conditions de travail, parce que l'Assemblée nationale, au nom d'un principe de justice – et, quand je dis «au nom d'un principe de justice», je présume que le projet de loi, demain, après demain, à la suite des discussions que la ministre va avoir, va être modifié en substance, parce que dans sa forme actuelle ce n'est pas un projet de loi de principe – pourrait voter un projet de loi d'envergure, projet de loi qui viendrait inviter – je dis «inviter» mais dans le fond, c'est forcer tout le monde, mais prenons-le par la positive – tout le monde au Québec, entreprises, municipalités, les employeurs de tous acabits, à modifier leurs pratiques.

Et le gouvernement, qui, lui, n'a pas à renégocier quoi que ce soit, aurait à réécrire sept, huit, 12, 15 débuts de paragraphes pour les rendre adéquats au niveau de la langue française, va dire: Non, nous, comme gouvernement, on va demander à la toute la société d'adapter ses pratiques, de changer ses conventions collectives, de renégocier ses affaires, mais, nous, on n'est pas prêt à réécrire huit débuts de paragraphes. Les gens ne peuvent pas croire ça.

Je dis ça parce que j'ai senti que la ministre, sur le fond des choses, s'était rendue aux arguments et que c'était une espèce de... Bon, le député d'Outremont appelait ça du conservatisme, on peut donner toutes sortes de noms à ça, mais le terme qui me vient à l'esprit, c'est comme un laisser-aller. Et on ne peut pas prêcher la modification des comportements des autres, inviter les autres à des grands changements d'attitude et soi-même sombrer dans le laisser-aller le plus sombre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député...

M. Dumont: Je vois le député d'Outremont qui prépare déjà un amendement subséquent. C'est parce qu'on tourne en rond, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Rivière-du-Loup, vous disiez?

M. Dumont: On tourne en rond tant que le gouvernement force l'opposition à retravailler pour corriger un problème de fond qui demeure.

Une voix: De forme, de forme.

M. Dumont: Au même titre que, moi, tout à l'heure, j'aurais préféré ne pas avoir à déposer cet amendement-là, je suis convaincu que le député d'Outremont préférerait qu'on règle le cas tout de suite par un vote responsable.

Une voix: Vote nominal.

M. Dumont: Mais ce que je crois comprendre, c'est que, si le gouvernement persiste, si le gouvernement s'acharne, si le gouvernement s'entête, on va devoir continuer dans la même veine. Et je regarde l'ampleur des enjeux qui sont devant nous, là. Il y en a, des enjeux, devant nous, là: Est-ce qu'on va, oui ou non, permettre le rajout d'échelons par le bas alors que la Commission des droits de la personne a dit que le gel des échelons, ce n'est pas correct? Et toute la question des délais d'application, tous ces enjeux-là qui sont devant nous où l'opposition va continuer à essayer d'améliorer le projet de loi, puis là on n'est même capable d'avancer sur des questions de forme, des questions qui apparaissent toutes simples. Puis je le répète, là... Je pense qu'il était environ 21 h 30, peut-être même pas, quand le député d'Outremont a soulevé la problématique de la rédaction de la première ligne de l'article 87.1; il est 23 h 18, et on est encore là-dessus. Je ne suis pas sûr que c'est fini. Dans quelques minutes, après le vote, je ne serais pas surpris que le gouvernement prenne un tel vote, que le problème demeure entier.

Alors, c'est l'invitation que je fais au gouvernement, à la ministre, surtout aux députés ministériels qui prennent leur rôle à coeur, de corriger ce problème-là pour qu'on puisse passer à d'autres le plus vite possible. Ça complète...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous avez complété votre intervention. Je vous remercie. Oui, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Simplement un commentaire, Mme la Présidente. Évidemment, je peux difficilement rester muette devant les appels qui sont lancés par l'ensemble de mes collègues et par le député de Rivière-du-Loup.

Ce que je comprends du travail qui est fait ce soir par les députés de ce côté-ci de la table, Mme la ministre, c'est évidemment que tout ça se fait dans un souci d'amender et de s'assurer que le projet de loi soit parfait. Et ce que je comprends également, Mme la Présidente, c'est que les questions qui sont soulevées vont au-delà de la simple sémantique. Évidemment, le sous-ministre semble plutôt sceptique, mais je vais tenter de le convaincre au cours des prochaines secondes.

Effectivement, on transcende la sémantique en apportant des amendements de la nature qui ont été proposés, parce qu'évidemment il s'agit d'amendements qui font référence au fond du projet de loi. Et la ministre tout à l'heure, avec beaucoup de fierté et d'éloquence, nous disait comme elle était heureuse de présenter un projet de loi de cette nature. Évidemment, elle l'a présenté avec toute la détermination qu'on lui connaît.

Et, dans ce sens-là, Mme la Présidente, vous comprendrez que l'amendement qui est apporté par le député de Rivière-du-Loup à l'effet d'ajouter, dans la première ligne, avant les mots «une convention», le mot «ni» et remplacer le mot «ou», avant les mots «un décret», par le mot «ni», trouve son importance et sa pertinence dans le contexte actuel.

(23 h 20)

Et, Mme la Présidente, dans notre souci de chercher des solutions alternatives évidemment pour s'assurer que la ministre reçoive l'assentiment de tous les intervenants face à ce projet de loi d'importance, l'opposition et ici le député de Rivière-du-Loup, dans son souci de collaborer à la construction d'un projet de loi sans faille, donc, je pense que la ministre peut difficilement demeurer insensible aux nombreux appels qui lui sont faits ce soir.

Dans ce sens-là, je partage l'avis du député de Rivière-du-Loup qui nous dit: Écoutez, là, depuis quoi, là, depuis 20 h 30, depuis 20 h 00, on tente de convaincre la ministre, mais en vain. Alors, Mme la Présidente, vous comprendrez que l'opposition, dans ce contexte, dans le contexte de fermeture ou du peu de réceptivité dont fait preuve la ministre, se doit, à notre grand regret malheureusement, de se pencher sur d'autres amendements pour tenter de trouver des aménagements qui vont évidemment assurer à ce projet de loi tout le succès et toute la réceptivité en fait auxquels l'ensemble des intervenants s'attendent.

Alors, Mme la Présidente, je joins donc ma voix à celle de mes collègues, à celle du député de Rivière-du-Loup pour inviter la ministre une fois de plus – une fois de plus, Mme la Présidente – pour la convaincre et pour lui démontrer que cet amendement... Loin de nous l'idée évidemment d'apporter des amendements qui soient superficiels. Loin de nous l'idée d'apporter des amendements qui ne soient pas constructifs. Loin de nous l'idée d'apporter des amendements qui ne soient pas pertinents. Loin de nous l'idée d'apporter des amendements qui ne représentent pas un côté impératif.

Alors, dans cette optique, Mme la Présidente, je demande à la ministre, une fois de plus, je n'oserais pas dire «je l'implore», mais enfin, c'est presque ce que l'opposition fait depuis 20 h 00, 20 h 30, donc d'accepter l'amendement qui est proposé évidemment par le député de Rivière-du-Loup. Alors, je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme la députée de Bonaventure. Est-ce que l'amendement proposé par le député de Rivière-du-Loup est adopté?

Une voix: Rejeté.

Des voix: Adopté.

M. Gobé: Adopté. Vote nominal.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la secrétaire?

M. Brodeur: Est-ce que tout le monde a droit de vote, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Shefford, cette question, je pense, est superflue. Vous connaissez très bien notre règlement, et, comme vous n'êtes membre d'aucune commission, c'est pour ça que vous avez droit de parole.

M. Gobé: ...en délibéré, madame?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, non, il n'y a pas de prise en délibéré possible. Je pense que le règlement est très clair à cet effet-là.

Alors, Mme la secrétaire, s'il vous plaît, si vous voulez procéder au vote nominal.

La Secrétaire: Alors, M. Gobé (LaFontaine)?

M. Gobé: Moi, bien sûr, je suis pour l'amendement.

La Secrétaire: Mme Normandeau (Bonaventure)?

Mme Normandeau: Pour l'amendement.

M. Brodeur: Pour.

La Secrétaire: M. Laporte (Outremont)?

M. Laporte: Pour.

La Secrétaire: Mme la ministre?

Mme Lemieux: Contre.

Une voix: Hein?

M. Gobé: Bien, voyons!

La Secrétaire: Mme Blanchet (Crémazie)?

Mme Blanchet: Contre.

La Secrétaire: M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre: Contre.

La Secrétaire: M. Bédard (Chicoutimi)?

M. Brodeur: Il s'abstient, lui.

M. Bédard: Contre.

Mme Normandeau: Il y a eu un moment d'hésitation.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Secrétaire: M. Désilets (Maskinongé)?

M. Désilets: Contre.

M. Brodeur: Contre quoi?

Des voix: Ha, ha, ha!

La Secrétaire: M. Beaulne (Marguerite-D'Youville)?

M. Beaulne: Contre.

La Secrétaire: Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vais m'abstenir, compte tenu du nombre, Mme la secrétaire.

Alors, nous allons donc maintenant poursuivre par rapport à l'article 87.1, tel qu'amendé.

Je vois, M. le député de LaFontaine, compte tenu du geste que vous venez de faire, que vous auriez une proposition d'amendement?

M. Gobé: Oui, c'est ça, Mme la Présidente. C'est parce que malheureusement on va devoir vivre avec le texte tel qu'il est libellé, et là il faut le changer ailleurs parce que ça s'avère encore plus flou que je pensais.

Vu qu'on n'aura ni de «ni» ni de «peut», alors on va se contenter d'un «peuvent», et je fais la proposition suivante: de modifier l'article 87.1 par le remplacement, dans la première ligne, des mots «avoir pour effet d'accorder» par le mot «accorder».

Alors, ça ferait que l'article se lirait de la façon suivante par la suite: «Une convention ou – malheureusement, on va vivre avec le «ou» – un décret ne peuvent accorder à un salarié visé par une norme du travail, uniquement en fonction de sa date d'embauche et au regard d'une matière – on y reviendra sur la matière plus tard – sur laquelle porte cette norme prévue dans le présent chapitre ou dans un règlement, une condition de travail moins avantageuse que celle accordée à d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement et qui, lorsqu'il s'agit d'un salarié assujetti à une convention collective, sont assujettis à la même convention collective.»

Alors, ça se lirait comme ça. Quand je parle d'une matière, on y reviendra. C'est parce que je voudrais savoir si la matière est solide on pas solide, quel genre de matière que c'est, ça. On parle de normes ou je ne sais pas quoi. Alors, voilà. Je vous transmets le...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, alors, vous déposez l'amendement, s'il vous plaît?

M. Gobé: Excusez ma toux, mais j'ai vraiment un peu la grippe. Je demanderais peut-être quelques minutes de suspension pour aller...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Quelques instants?

M. Gobé: Quelques instants, oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce qu'il y a consentement pour suspendre?

M. Gobé: Pour imprimer ça, puis aller...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, d'accord. Alors, nous suspendons les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 23 h 25)

(Reprise à 23 h 31)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de LaFontaine, évidemment, l'amendement que vous avez proposé est recevable. Donc, je présume que vous voulez intervenir... À l'ordre, s'il vous plaît! Les travaux sont recommencés. Alors, M. le député de LaFontaine, je présume que vous voulez intervenir sur votre amendement.

M. Gobé: Oui, Mme la Présidente, certainement. Mme la Présidente, comme je le mentionnais précédemment, le projet de loi a été écrit d'une façon un peu curieuse, et je crois qu'il est de notre intérêt de voir à le clarifier le plus possible.

Alors, je pense qu'il n'est pas nécessaire, lorsqu'on écrit un projet de loi, de rajouter toutes sortes de mots juste dans le but de donner l'impression qu'un article a beaucoup de lignes, alors qu'en peu de lignes et de mots – c'est là un des attraits de la langue française – on peut dire les choses très directement et de manière très précise, qui évite ou éviteront par la suite bien sûr toute polémique, discussion, récrimination vis-à-vis ce qu'il veut dire.

Alors, nous aurions souhaité bien sûr que «ni» soit libellé différemment, «ni une convention ni un décret ne peuvent accorder à un salarié». Là, on va devoir vivre avec «une convention ou un décret ne peuvent». C'est une faute manifeste de grammaire.

Alors, je crois qu'il faut donc simplifier le reste pour éviter, là, que ça porte encore plus à interprétation. Le mot «effet» peut s'employer, en effet, mais il peut dire aussi bien des choses, dont «en effet» que je viens de dire. Et il pourrait, suite au fait qu'il est précédé de «peuvent avoir pour»... peut-être de mauvaises interprétations.

Je vais donner un exemple du mot «effet»: «Il déploya son esprit, il eut des saillies, il fit de l'effet.» «J'avais peur de l'effet que produirait la visite de ce monsieur imposant.» «Agir sous l'effet de la menace, de la colère», «produire un effet de surprise», «son intervention a fait très mauvais effet», «faire effet, faire de l'effet: produire une vive impression», «il déploya son esprit...», je l'ai dit, «il nous a fait l'effet d'un revenant» – ça me fait penser à des gens qu'on connaît. Alors, après ça, on peut aller dans «effet» dit «effectif». Alors, bon, «effectif»: «qui se traduit par un effet»; «croyant que les mots avaient un pouvoir effectif»; 300 000 combattants, effectifs réels et non simplement inscrits sur les rôles.

Alors, voyez-vous, là, ça porte à certaines confusions. Il y a à peu près 36 définitions d'«effet». La manière dont il est libellé, ça peut prêter à interprétation. Alors, je ne ferai pas la lecture du Petit Robert toute la soirée.

Nous pensons donc qu'il serait plus simple de préciser ça et de simplifier. Et la manière dont se lirait l'article aurait un effet beaucoup plus direct, hein! «Une convention ou un décret ne peuvent accorder», voyez-vous, c'est direct. Ça veut dire qu'on ne peut pas donner, c'est impossible, c'est clair. Juste avec ça, là, on sait déjà que le projet de loi qui serait amené dirait, dans sa première phrase: «Une convention ou un décret ne peuvent accorder à un salarié visé par une norme du travail – encore là, c'est alambiqué un peu, c'est pas mal alambiqué, ce projet de loi là; je ne sais pas comment on fait, là, pour...

Une voix: Un projet sans effet.

M. Gobé: ... – uniquement en fonction de sa date d'embauche...» Mais, au moins, la première ligne aurait un effet, d'accord, d'interprétation. Ça veut dire que les gens diraient: Bien, voilà, le gouvernement, c'est cela qu'il veut dire. Et ça nous frappe l'imagination, c'est ce que je disais là, l'effet qu'il nous fait est l'effet d'un message qu'on envoie, qu'il n'est pas question, aucunement, que dans le Québec d'aujourd'hui l'on tolère, l'on accorde à un salarié, en fonction de sa date d'embauche, des conditions de travail et de salaire qui sont disparates par rapport aux autres.

Je me force à essayer de l'expliquer, mais j'ai l'impression que Mme la ministre...

Une voix: N'écoute pas.

M. Gobé: Non, elle écoute, mais elle n'entend pas. Parce que, si elle entendait, c'est certain qu'elle aurait déjà dit: Écoutez, j'ai compris. Ce n'est pas compliqué à changer, cette affaire-là. On va essayer de donner un bon effet au projet de loi, parce qu'on peut employer le mot «effet» aussi dans le sens de «paraître». Alors, on va donner un bel effet au projet de loi. Donc, on va rapidement le modifier.

Alors, si elle ne le modifie pas, on va devoir comprendre que ça l'intéresse peu et que tout ce qu'elle veut faire, tout l'effet qu'elle veut faire avec son projet de loi, c'est de faire croire ou penser aux jeunes qu'on a répondu à leurs préoccupations, à leurs demandes, à leur désir d'être traités comme des citoyens à part entière.

Bon. Elle va peut-être nous dire aussi qu'on retrouve cela dans différentes autres écritures de projets de loi, dans d'autres façons de nommer les choses, mais nous ne croyons pas, Mme la Présidente, que, parce que dans un projet de loi il y a des erreurs, je le disais précédemment, ou parce qu'il est mal écrit, bien, qu'on doive continuer et maintenir la tradition. La tradition de la clarté et de la direction précise dans les lois se doit, d'après moi, d'être la première qualité d'une loi. Une loi doit être claire, nette et précise, sans ambiguïté, à moins que l'on veuille laisser des zones grises, des zones dans lesquelles, encore une fois, les gens vont pouvoir patauger et tripatouiller. Alors, je ne crois pas que ça soit là l'intention de la ministre.

Maintenant, peut-être que, contrairement à notre côté ici, où nous avons de brillants universitaires de notre côté, que ce soit le député d'Outremont, on l'a dit à satiété, mais le député de Shefford, qui est un as du Barreau et du notariat, notre collègue la députée...

Une voix: ...

M. Gobé: ... – du Barreau et du notariat, oui, il est avocat en même temps, alors, je ne vois pas là de contradiction, et j'ai dit «un as», voilà – et bien sûr le député de Rivière-du-Loup qui, lui aussi, a fait des études très sérieuses et a pris une grande expérience dans la vie politique, alors on devrait donc, à partir de là, se rendre à l'évidence qu'il faut retravailler le «wording», retravailler l'écriture du projet.

On ne peut pas arriver et présenter ça à la population. On ne peut pas laisser aux jeunes cet héritage. On veut leur donner une pièce législative qui est unique au monde, qui est un héritage à la démocratie, un héritage à la lutte contre l'exclusion sous toute forme qu'elle soit. C'est ça, un peu, les grands principes qui se présument au projet de loi. C'est à ça, en tout cas, que le premier ministre, le chef d'opposition, les partis politiques, et les députés, et les candidats lors de la dernière élection se sont engagés vis-à-vis les jeunes. On ne s'est pas engagé à d'autre chose, on s'est engagé à faire en sorte de bannir ce qu'on appelle la discrimination chez les jeunes en fonction de l'âge et de la date d'embauche.

(23 h 40)

Je ne comprends pas que le projet de loi ne soit pas clair. Je ne comprends pas pourquoi on est obligés, nous, de le réécrire. Il me semble que la ministre, quand elle l'a lu, dans sa voiture... Je ne sais pas, on me dit que le député de Matane, dans le temps, il l'avait déclaré en Chambre, il lisait les projets de loi dans sa voiture, entre Québec et Matane. Je ne sais pas si elle les lit entre Québec et Montréal. Mais il me semble que n'importe quel ministre qui vraiment, là, croit à ces principes-là n'aurait pas laissé déposer des amendements ou un projet de loi comme ça. Il aurait dit: Wo! un instant, là, ça, ça ne marche pas, il faut que je revoie ça. Ce n'est pas comme ça que j'ai appris à écrire quand j'étais à l'école, ou à l'université, ou dans mon quartier, dans la petite école lorsque j'étais jeune. Ce n'est pas comme ça que j'ai appris à écrire quand j'étais à mes études. Je ne peux pas accepter que, vu que ce n'est pas comme ça que j'ai été formé, eh bien, je sois la responsable et la signataire, la porte-parole d'un projet de loi libellé de cette façon-là. Car le libellé est pauvre, flou, laissant place à de nombreuses interprétations, favorable à des échappatoires, de la contestation, de la frustration dans son application de la part de certaines personnes.

Je me demande si vraiment Mme la ministre nous entend. Parce que, si, comme je le disais, elle nous entendait, elle arrêterait ça. Non seulement elle l'arrêterait, mais elle aurait elle-même proposé des corrections. Elle n'est pas obligée de prendre les nôtres. Mais je crois que tout le monde conviendra en cette Chambre que le libellé, la première phrase de l'article, comme je viens de le mentionner, eh bien, aurait pour but de le clarifier, de le rendre plus direct.

Au départ, est-ce qu'on veut vraiment arrêter d'accorder à des salariés qui font le même travail, le même emploi dans la même entreprise des discriminations en vertu de la date d'embauche? Oui ou non? Alors, si on le veut vraiment, bien qu'on l'écrive de la bonne façon, qu'on écrive «une convention ou un décret ne peuvent accorder à un salarié – d'accord? – visé par une norme du travail...»

Là encore, on revient à quelque chose. On avait, au départ... On a rechangé les mots. On reviendra quand on va étudier l'article, parce qu'on n'a pas étudié l'article encore. Quand on va avoir adopté les amendements, eh bien, il va falloir passer à l'étude de l'article au complet. Donc, on aura chacun – à moins qu'il y ait d'autres amendements – un bon 20 minutes pour expliquer ça. Donc, à cinq, six, ça va faire un bon deux heures pour essayer de convaincre la ministre encore là que, au-delà du libellé, puis de la grammaire, puis du vocabulaire utilisé, il y a d'autres choses avec lesquelles nous ne sommes pas d'accord. Peut-être qu'on veut dire les mêmes choses, mais la façon dont c'est écrit nous amène à nous questionner, et peut-être, à cause de cela, ne pouvons-nous pas faire notre travail correctement.

Alors, je ne sais pas qu'est-ce que mon collègue le député d'Outremont, probablement un des plus grands linguistes que le Québec ait pu connaître depuis longtemps...

Une voix: De ce millénaire.

M. Gobé: Et je ne suis pas précieux dans mes paroles, cher collègue, lorsque je dis ça? J'espère, mais j'essaie d'être précis. Eh bien, j'aimerais ça peut-être, maintenant que je viens de faire un peu la présentation – il me restera un peu de temps pour revenir par la suite – que lui nous explique comment il voit ça et qu'il essaie à son tour, lui aussi, pour quelque temps, de convaincre Mme la ministre. Peut-être qu'elle va être convaincue rapidement, peut-être qu'elle va dire: Oui, vous avez raison. Peut-être qu'elle va même revenir sur les amendements qu'elle a rejetés précédemment. Parce que, n'oubliez pas, Mme la ministre, elle veut nous faire adopter un projet de loi, là. Elle dit: Je suis encore en négociation avec les autres, mais ce n'est pas grave, on va adopter, puis, après ça, on suspendra.

Mais je vous rappellerai, entre nous – et ça, c'est sans acrimonie, sans arrière-pensée négative envers la dame, pardon, envers Mme la ministre – qu'il y a quelques semaines nous avons dû reprendre un projet de loi qui avait été adopté en Chambre, le révoquer et le réadopter parce que nous avions adopté trop rapidement l'amendement – oui, Mme la Présidente, d'ailleurs je pense qu'il va me rester une minute à la fin, vous allez voir – trop rapidement parce que justement on avait péché, l'opposition, nous autres aussi, parce qu'on s'était fiés à ce qu'on nous avait dit.

Lorsqu'on m'a présenté l'amendement, je l'ai regardé. J'ai dit: Oui, c'est très bien, ça correspond. Bien sûr, j'ai consulté mes collègues de la commission parlementaire. Le leader de notre formation politique, qui est un expert, lui aussi, m'a dit: Bien, écoute, est-ce qu'il correspond à ce qu'on t'a dit? Oui, oui, c'est ça. Alors, très élégamment, j'ai donné mon consentement. Parce que, nous, nous donnons les consentements. Nous les donnons. Elle ne nous les donne pas, ses consentements, la ministre. Mais, moi, comme porte-parole et avec l'appui de mes collègues dans mon caucus, lorsque je leur soumets une demande de consentement de Mme la ministre, très, très majoritairement, à l'unanimité, que dis-je, les collègues me délèguent le consentement, et je le donne.

Et là, surprise. À peine rentré dans ma circonscription électorale, je recevais un appel de Mme la ministre. Là, je pensais qu'elle m'annonçait un projet dans mon comté, un projet de garderie, je ne sais pas, j'en ai plusieurs en attente, un carrefour jeunesse-emploi. Pour moi, elle m'appelle pour mon carrefour jeunesse-emploi dans LaFontaine. Mais non, elle ne m'appelait pas pour m'annoncer mon carrefour jeunesse-emploi. Déception de moi, elle m'a appelé pour me dire: Tu sais, je pense qu'il y a quelqu'un qui s'est gouré dans l'amendement qu'on a amené au projet de loi, puis il faudrait qu'on le revoie. Alors, vous comprendrez ma stupeur, hein, devant cet état de fait.

Je ne mets pas la faute sur la ministre, parce que je sais très bien qu'une ministre, avec un dossier comme elle a, que ça soit le travail, Emploi-Québec en particulier où il y a un fouillis, un peu moins maintenant qu'elle nous dit, et je n'ai pas de raison de ne pas la croire, où il y avait un fouillis à l'époque important, eh bien, elle ne pouvait pas être au fournil, puis au fourneau, puis à l'étable en même temps. Il fallait bien qu'elle fasse quelque chose, alors elle le faisait.

Moi, j'aurais préféré qu'elle m'appelle pour me dire: Bravo! tu as donné ton consentement pour le projet de loi. C'est bien. Justement, je t'annonce une bonne nouvelle, ton carrefour jeunesse-emploi est débloqué. Tu vas pouvoir dire à tes citoyens... Tout compte fait, ce n'est pas le député de LaFontaine, hein, qui vit avec le carrefour jeunesse-emploi. Après 14 ans de vie de député, je veux dire, les gens ne font qu'apprécier les efforts qu'on peut faire pour avoir certains équipements, certaines choses. Eh non! elle ne m'annonçait pas ça. Peut-être que ça va venir plus tard, remarquez bien. Je le souhaite pour les citoyens du comté de LaFontaine, je le souhaite beaucoup pour les jeunes. Le comté où il y a le plus haut nombre de jeunes du Canada, c'est le comté de LaFontaine. Oui, le plus haut nombre de jeunes de moins de 25 ans, c'est le comté de LaFontaine. C'est Statistique Canada. Alors, je crois que nous mériterions un carrefour jeunesse-emploi, parce qu'on en a donné un... Et puis l'endroit où il y a le taux de ces jeunes au niveau du décrochage, de la délinquance, de la pauvreté, hein, très important, très, très important, le niveau de décrochage puis de recherche d'emploi. Mais non, elle l'avait annoncé pour le donner à Westmount avant, grosse ville qui avait des gros besoins, Westmount, hein, carrefour jeunesse-emploi, puis, dans LaFontaine, l'est de Montréal, on ne le donne pas. On n'est pas prioritaire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On n'est pas très pertinent, là, M. le député.

M. Gobé: Non, mais excusez-moi, je m'éloigne du dossier, Mme la Présidente, vous avez raison.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous vous emballez, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Ah! je suis désolé. Je regrette beaucoup. Je vais donc revenir en disant que, Mme la ministre, je crois que nous faisons oeuvre utile, à la lumière de ce qui s'est passé par le passé, en étant très sévère ou très attentif à ce qui est écrit dans le projet de loi, car nous ne voudrions pas qu'il se reproduise la même chose, que demain ou dans une semaine, après vos négociations, vous nous appeliez et vous disiez: Aïe, là il faut rechanger ça, parce que ça a évolué.

Nous pensons qu'on doit vous garder toutes les portes ouvertes, toute la latitude d'agir dans les prochaines heures, dans les prochains jours, parce que nous voulons être avec vous pour que le projet de loi soit un projet de loi le plus parfait, le plus efficace, qui rencontre l'objectif pour lequel nous nous sommes engagés à en amener un si nous avions été élus et pour lequel votre chef s'est engagé à en amener un. Alors, vous comprendrez que nous voulons donc vous garder toutes les portes ouvertes, marge de manoeuvre la plus totale. Mais vous pouvez demander. Vous voyez que nous sommes ouverts, nous, vous pouvez demander. Même, vous devriez demander plus souvent. Vous seriez surprise de voir la collaboration que les députés de ce côté-ci sont prêts à vous donner. Notre but dans la vie, nous, c'est de bonifier les choses. Ce n'est pas de les empêcher de tourner. C'est notre but. On a été élus pour ça. Alors, nous voulons remplir notre mandat.

Alors, je vous demanderais, Mme la ministre, de faire preuve d'ouverture en ce qui concerne la correction de ce projet. Et le «rewording»... «Effet» peut être là, mais il n'est pas bien, ce n'est pas sa place, c'est lourd, c'est alambiqué, ça fait un peu tartine. Alors, peut-être, on pourrait le clarifier. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député de LaFontaine. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Oui, Mme la Présidente. Je suis persuadée que le député d'Outremont va intervenir. Si jamais il le fait – évidemment il est libre – j'apprécierais qu'il réponde à la question suivante, parce que l'amendement que nous propose le député de LaFontaine, à mon avis, comporte une grave erreur aussi, là, grammaticale. En fait, la question que je vous pose, c'est la suivante: Est-ce qu'une chose, en l'occurrence une convention ou un décret, peut accorder quelque chose? Alors, si jamais ça vous fait... Mme la Présidente, ça fait un bon...

Une voix: ...

Mme Lemieux: Non, on ne débat pas ici, là. Quand même, il ne faudrait pas prétendre ça. Mais ça ferait tout de même un bon point de départ à une intervention éventuelle du député d'Outremont. J'avoue que mon intervention fait preuve d'une très grande générosité.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Une très bonne collaboration, Mme la ministre. Alors, est-ce qu'il d'autres intervenants? Oui, M. le député d'Outremont.

(23 h 50)

M. Laporte: Oui, Mme la Présidente. Pour répondre à la question de la ministre, il me semble que – évidemment, encore là, je ne parle pas de façon catégorique – si on entend par «accorder» consentir, on peut dire: Consentir à un salarié des conditions de travail, et ainsi de suite. Donc, ça serait la réponse que j'apporterais à la ministre, mais disons que j'y mets un bémol en ce sens que je ne suis pas le dictionnaire. Donc, je reviens toujours là-dessus, c'est-à-dire qu'on aurait des motifs sérieux de faire des consultations là-dessus.

Mais ce que je voudrais dire, Mme la Présidente, en relation avec la modification qui est présentée maintenant, d'une part, on s'est bien amusés – et il n'y a rien de mal là-dedans, n'est-ce pas, s'amuser, c'est bon pour la santé – mais il y a un enjeu ici. Parce que tantôt on nous disait: On va faire circuler ça dans vos comtés, puis vous allez voir de quoi vous allez avoir l'air, et tout ça. Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'on fasse circuler ça dans mon comté, parce qu'il y a un véritable enjeu ici.

D'une part, ce qu'on fait, finalement, ce que nous avons fait depuis 9 h 30, c'est de questionner des conventions d'écriture légale. Il y a des façons d'écrire des lois, il y a des conventions d'écriture légale qu'on peut questionner, sur lesquelles on peut interroger. Le projet s'appelle Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement. Donc, ici, on s'est interrogé sur une convention d'écriture, parce que, comme la ministre le disait avant, on parlait antérieurement de clauses orphelin. Là, on a accepté une expression qui a été, il me semble, si ma mémoire est bonne, suggérée par les usagers de la langue française, le juge Auclair en particulier, sur les disparités de traitement.

Là, on en revient à s'interroger sur d'autres conventions d'écriture. On dit: Faut-il dire «une convention et un décret ne peuvent» ou «ne peut»? Faut-il dire «ni une convention ni un décret ne peuvent»? Je pense que le député de Rivière-du-Loup a bien montré que, sur l'accord du verbe au singulier, au pluriel, il y a un problème réel, puisque Le Robert nous donne des citations de Stendhal et de Martin Du Gard qui ne sont pas les mêmes que celles que nous donne Marie-Éva de Villers. Donc, là, ici, il y a une incertitude. On est devant un problème d'indécidabilité. Puisque nous sommes tous des amateurs face à ces questions-là, ça serait peut-être utile qu'on obtienne là-dessus, sur ces conventions-là, des avis de spécialistes.

Maintenant, dans le cas du projet de loi ici, évidemment, on a remis en question une convention terminologique lorsqu'on a parlé de disparités de traitement plutôt que de clauses orphelin. Là, ce sur quoi on s'interroge, c'est sur des conventions d'écriture grammaticale. Ce n'est pas frivole, ça. Ce n'est pas frivole. C'est légitime. On peut légitimement s'interroger sur les conventions d'écriture qui sont celles des légistes du gouvernement depuis peut-être des générations. C'est sûr que ces conventions d'écriture se sont modifiées à travers le temps. C'est vrai que les lois du Québec sont mieux rédigées maintenant du point de vue linguistique que c'était le cas antérieurement, et ça, c'est grâce à la fois aux pressions qui ont été exercées par des organismes de surveillance ou par des organismes qui ont le souci d'une qualité de la langue française.

Donc, ça n'est pas frivole d'interroger des conventions d'écriture du point de vue de les rendre plus conformes à des normes d'écriture qui sont celles de la qualité du français. Je ne suis pas dogmatique, je ne dis pas que j'ai raison, mais je veux tout de même bien mettre en évidence que le fait de s'interroger sur ces conventions d'écriture, ce n'est pas faire preuve de frivolité.

Je suis tout à fait conscient, comme la ministre, qu'il y a des contraintes à une remise en question de ces conventions d'écriture. La ministre nous l'a dit, Mme la Présidente: Si on réécrit la loi ici, il faudra réécrire d'autres articles ailleurs, et ainsi de suite. Donc, il y a des contraintes en ce sens qu'il y a des obstacles, au sens où les conventions d'écriture étant diffusées à travers un corpus légal qui est considérable, une remise en question de ces conventions dans une loi pourrait entraîner, au nom de la cohérence, qu'on remette aussi les mêmes conventions d'écriture en question dans d'autres lois ou dans d'autres textes de loi qui ont été faits précédemment. Ça, on peut décider de le faire ou ne pas le faire pour des raisons pratiques.

Le député de Rivière-du-Loup nous a dit: Vous demandez à des institutions de remettre en question leurs pratiques. Nous, on vous suggère de remettre en question des conventions d'écriture, parce que, ça aussi, c'est des conventions que les institutions remettent en question. Vous leur dites: Remettez en question, changez vos conventions. Lorsque, nous, nous vous suggérons de changer vos conventions ou de changer les conventions des juristes, vous dites non au nom des contraintes, au nom des difficultés que ça représente, au nom de l'instabilité que cela pourrait entraîner dans des corpus légaux plus larges. On refuse de le faire.

Alors, moi, je dis: C'est une forme de conservatisme. Le député de Rivière-du-Loup nous dit: Écoutez, puisque vous demandez aux institutions, aux municipalités, aux commissions scolaires, aux entreprises de bouleverser leurs conventions, pourquoi est-ce que, vous autres, vous refusez... refusons-nous, nous, les parlementaires, de bouleverser les nôtres? Puisque finalement ces conventions-là, c'est des conventions d'écriture qu'on accepte, puisque ce sont des textes de loi qui nous sont soumis par des légistes.

Moi, je ne veux pas river le fer dans la plaie, je ne veux pas mettre le fer dans la plaie, mais vous savez comment est-ce qu'on appelait ça, il y a 25 ans, des gens qui avaient le souci de parler le français de bonne qualité. Je n'utiliserai pas l'épithète, mais vous le savez, comment est-ce qu'on les appelait, ces gens-là, dans les cours d'école. Vous êtes peut-être trop jeunes, parce que... Mais on les appelait... Vous savez comment est-ce qu'on les appelait, les gens qui s'efforçaient de bien parler le français, pour les stigmatiser, pour les exclure, pour montrer qu'ils étaient, disons, des gens qui voulaient faire preuve de distinction, de...

On ne disait pas seulement qu'ils étaient des snobs, on avait une autre expression pour les désigner, que je ne mentionnerai pas maintenant parce que c'est un peu trop dérogatoire, et je ne veux surtout pas me faire accuser de diffuser des expressions, des qualificatifs qui ont été condamnés. De la même façon que, si j'étais aux États-Unis, j'aurais une hésitation à dire qu'antérieurement on appelait les Noirs «niggers» plutôt que de les appeler tout simplement des Noirs. Donc, peut-être que certains d'entre vous savent comment on qualifiait ces jeunes gens, ces jeunes filles et ces jeunes garçons qui s'efforçaient de bien parler le français dans nos cours d'école.

Mais, disons, ce que je veux dire, c'est qu'il y a un enjeu. On a peut-être tort, nous avons peut-être raison, mais il y a un enjeu qui est celui d'assurer que les conventions d'écriture législative soient conformes aux normes de qualité à la fois terminologiques, de vocabulaire, de grammaire et de syntaxe de la langue française. Si vous êtes en train de nous dire que tout ça, c'est frivole, que finalement on pourrait s'en passer et puis que l'essentiel, c'est, disons, de s'intéresser au contenu des choses sans se préoccuper de la forme, là évidemment vous posez un jugement de valeur. Moi, ce que je dis, c'est qu'il est légitime de poser les questions qu'on pose.

Maintenant, pour conclure sur la question de la ministre, est-ce que la formule qui est proposée en amendement est meilleure que celle qui est proposée ici, est-ce qu'il faut dire «avoir pour effet d'accorder» ou plutôt dire «peuvent accorder une condition de travail», eh bien, ça dépend un peu de ce qu'on entend, comme je l'ai dit, par «accorder». Si on veut dire «consentir», si on veut dire... Ça serait à peu près l'équivalent.

Donc, je termine là-dessus, Mme la Présidente, si vous me permettez. Mais je ne veux surtout pas me faire apostropher ou me faire étiqueter par les gens d'en face en disant que, oui, c'est vrai qu'on s'est bien amusé, on a eu du plaisir à le faire, mais que nos propos ont été frivoles et illégitimes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député, je pense qu'on pourra continuer demain ce débat. Alors, compte tenu de l'heure, je vais donc ajourner les travaux sine die.

(Fin de la séance à minuit)


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