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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mercredi 2 février 2005 - Vol. 38 N° 47

Consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec - Contexte, enjeux et questionnements


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Bachand): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, messieurs madame de la Fédération des chambres de commerce du Québec, vous êtes les bienvenus à la commission. Vous pouvez prendre place, messieurs madame de la Chambre de commerce. En fait, les reproches devraient s'adresser à nous, puisque nous n'étions pas prêts lorsque vous l'étiez. La séance de photos est terminée.

Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous rappelle donc le mandat de la commission pour le bénéfice de nos invités et pour le bénéfice des membres de la commission aussi: l'objet de cette séance est de poursuivre la consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.

Donc, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Soucy (Portneuf) remplace Mme James (Nelligan); M. Ouimet (Marquette) remplace M. Paquin (Saint-Jean); et M. Tremblay (Saguenay?Lac-Saint-Jean) remplace M. Jutras (Drummond).

Le Président (M. Bachand): Donc, je vais vous demander bien sûr de fermer vos cellulaires pour permettre à tout le monde d'avoir une séance qui va se passer dans la quiétude, surtout dans l'attention de nos invités.

Je vais vous donner rapidement la lecture de l'ordre du jour pour aujourd'hui, donc mercredi 2 février 2005: à 9 h 30, la Fédération des chambres de commerce du Québec; à 10 h 30, Conseil innu de Betsiamites; 11 h 30, la MRC de Mékinac; et, à 12 h 30, suspension des travaux pour l'après-midi.

Auditions (suite)

Donc, messieurs madame, chers collègues, je vous souhaite la bienvenue à la commission ce matin. On a fait d'excellents travaux hier, fort intéressants par la présentation. Je n'en doute pas, qu'aujourd'hui nous allons être aussi agréablement surpris par la qualité des présentations qui vont nous être faites. Donc, madame messieurs de la Fédération des chambres de commerce du Québec, au nom de mes collègues, je vous souhaite la bienvenue et je vais vous demander, pour le bénéfice de mes collègues, de vous présenter, s'il vous plaît.

Fédération des chambres
de commerce du Québec (FCCQ)

Mme Bertrand (Françoise): Alors, je suis Françoise Bertrand, la présidente-directrice générale de la Fédération des chambres de commerce du Québec.

M. Bouchard (Mathieu): Alors, bonjour. Je m'appelle Mathieu Bouchard, je suis président du bureau de direction de la Fédération des chambres de commerce, aussi vice-président chez Alcan.

M. Demers (Steeves): Bonjour. Steeves Demers, économiste à la Fédération des chambres de commerce du Québec.

M. Desrochers (Pierre): Et Pierre Desrochers, président du comité énergie de la Chambre de commerce du Québec et directeur des affaires publiques, compagnie Pétrolière Impériale.

Le Président (M. Bachand): Bienvenue, madame messieurs. Allez-y, Mme Bertrand, là, on vous écoute.

Mme Bertrand (Françoise): Alors, mesdames messieurs, bonjour et merci de l'invitation de venir discuter avec vous d'un sujet qui nous tient fort à coeur, comme vous le verrez par notre présentation de ce matin.

Dès le printemps 2004, la Fédération des chambres de commerce du Québec demandait une révision de la politique énergétique, et ce, tout en entamant un processus de consultation auprès de ses membres. C'est donc au nom des entrepreneurs et des gens d'affaires en provenance de toutes les régions du Québec que la FCCQ a participé au processus de réflexion sur l'avenir énergétique du Québec et qu'elle vous présente, aujourd'hui, les conclusions de son comité de travail formé d'une trentaine d'experts sur la question énergétique, de représentants de chambres de commerce et de représentants d'entreprises québécoises.

Au XXe siècle, la production d'électricité par le biais de l'exploitation du potentiel hydraulique du territoire québécois a été l'une des plus importantes sources de développement économique que le Québec ait jamais connues. Cette exploitation a donné naissance à d'importantes industries et sociétés sur lesquelles s'appuie le développement du Québec. Cependant, ces dernières années, les aspects environnementaux, aussi importants soient-ils, portant sur l'exploitation des petites centrales hydroélectriques et plus récemment sur la centrale thermique du Suroît et des ports méthaniers ont obnubilé les éléments cruciaux du développement économique du Québec. Cette position place à nos yeux le développement énergétique du Québec en quasi-opposition plutôt qu'en appui à l'objectif de développement économique et d'enrichissement collectif que nous poursuivons et dont nous avons si grand besoin.

C'est dans ce contexte que la FCCQ souhaite intervenir pour rappeler au gouvernement et aux intervenants les principes et avenues pour faire de la politique énergétique un moteur de développement et d'enrichissement collectif pour les Québécois. Comme vous le constaterez, l'élément central de notre vision est certainement la nécessité de faire de cette politique un instrument de levier en faveur du développement économique et industriel. De plus, selon nous, la politique énergétique du Québec devrait également soutenir vigoureusement la réalisation de projets structurants que sont la construction de grands barrages, de petites centrales, de ports méthaniers et l'aménagement de parcs éoliens. Parallèlement à cela, le gouvernement doit rétablir graduellement une structure tarifaire qui favorise, d'une part, le développement industriel et, d'autre part, permettre un partage équitable des coûts de production, de transport et de distribution de l'électricité.

Évidemment, la FCCQ désire souligner l'importance d'assurer notre sécurité énergétique, notamment en diversifiant à la fois les formes d'énergie, les modes de production d'énergie électrique, tels que l'hydroélectrique, éolienne, thermique et les sources d'approvisionnement, qu'elles soient québécoises, canadiennes ou d'importation. De plus, dans une perspective de développement durable, nous favorisons les modes de production et d'utilisation d'énergie les moins dommageables pour l'environnement, et ce, notamment en proposant d'intégrer le coût des mesures d'efficacité énergétique dans le prix de chacune des formes d'énergie, comme c'est déjà le cas pour l'électricité.

Cependant, notre priorité en tant que représentants du milieu des affaires et notre préoccupation principale en matière de politique énergétique est de vous démontrer l'importance de maximiser l'utilisation de notre plein potentiel énergétique pour que ce dernier agisse comme véritable moteur de création de richesse. En effet, comme la main-d'oeuvre, les ressources naturelles et la technologie, l'énergie est un facteur de production essentiel à notre économie. Dans une économie ouverte et fortement exposée à la concurrence étrangère, l'impact d'un enjeu, telle l'utilisation de notre potentiel énergétique, peut devenir et doit devenir un facteur décisif de réussite et non pas de déclin économique. Nous pensons fortement que le gouvernement a un rôle à jouer pour assurer aux entreprises québécoises un approvisionnement suffisant et à des prix concurrentiels sur la scène nord-américaine et mondiale.

n (9 h 40) n

De plus, il est à noter que, pour répondre à l'augmentation de la demande en énergie au cours des prochaines années, la FCCQ privilégie les filières et les projets d'équipement de production présentant les meilleurs coûts de revient, tenant compte des coûts environnementaux. Selon nous, l'exploitation de la filière hydraulique constitue toujours, à cet égard, une avenue des plus compétitives.

La présente réflexion doit être l'occasion d'amener la politique énergétique sur le sentier de la création de richesse. Celle-ci passe notamment par le soutien d'industries, l'émergence d'entreprises créatrices d'emplois et le développement d'expertise permettant dans certains cas le passage à une industrie de deuxième ou de troisième transformation, à d'autres d'être plus compétitifs sur les marchés internationaux. En outre, le développement d'une marge de manoeuvre énergétique adéquate fera en sorte que le Québec prendra une place plus grande sur les marchés d'exportation d'énergie, permettant ainsi d'augmenter le bénéfice collectif associé à l'exploitation de la richesse que nous possédons.

Historiquement, la disponibilité d'énergie électrique à des prix extrêmement compétitifs a façonné le tissu industriel dans plusieurs régions du Québec. Le Québec en a profité pour développer la première transformation des métaux, les pâtes et papiers et la chimie inorganique. Dans certaines régions comme la Côte-Nord et le Saguenay?Lac-Saint-Jean, les industries intensives en énergie comptent pour une large part de l'activité industrielle. Les emplois créés par ces industries offrent souvent une rémunération nettement supérieure à la moyenne régionale. Autour de ces grandes industries gravitent aussi un ensemble de fournisseurs et d'entreprises spécialisées qui sont responsables d'une part importante de l'activité économique en région. Ainsi et en raison des autres retombées économiques qui les accompagnent, la population et les entreprises commerciales de ces régions sont attachées à ces industries et se préoccupent de leur pérennité.

On est aussi parvenus à implanter en région des activités économiques connexes, à valeur ajoutée, aux activités de première phase. Dans ce contexte, les milieux d'affaires et les intervenants des régions du Québec dont l'économie est centrée sur des industries grandes consommatrices d'électricité sont très préoccupés par la disponibilité et le prix de l'électricité dans le futur. Représentant les intérêts des milieux d'affaires dans toutes les régions du Québec, la FCCQ demande au gouvernement du Québec de continuer de s'assurer que les grands consommateurs industriels disposent de l'électricité à prix compétitifs, nécessaires à leur développement en région périphérique. Nous le répétons, l'électricité doit demeurer un levier de développement industriel et régional.

Parlons maintenant de l'efficacité énergétique. Hydro-Québec Distribution déposait récemment, pour approbation, son plan global en efficacité énergétique 2005-2010 auprès de la Régie de l'énergie. Les investissements d'Hydro-Québec Distribution contenus dans ce plan global représentent 1 milliard de dollars, soit quatre fois plus que l'ancien plan. Selon Hydro-Québec Distribution, ce plan permettra des économies de 3 TWh à l'horizon 2011, soit un niveau comparable à la quantité d'énergie éolienne qui sera produite à partir du premier appel d'offres. Or, d'après le plan, l'essentiel des gains sera réalisé vers la fin de l'horizon, soit 2008 à 2010.

Si l'adhésion fait défaut, les gains seront moindres et le coût unitaire va grimper. Compte tenu de l'augmentation prévue des besoins, la recherche d'une plus grande efficacité énergétique ne constitue bien évidemment qu'une seule partie de la solution. C'est le prix qui indique aux consommateurs la valeur d'un bien et s'il vaut la peine d'en ménager la consommation. Le prix demeure donc l'instrument selon nous le plus puissant pour infléchir des comportements sous-optimaux. Ainsi, nous croyons que c'est par le biais d'un meilleur signal de prix au consommateur domestique que les initiatives en matière d'efficacité énergétique pourront véritablement aboutir aux économies d'énergie visées. Sans ce signal de prix et une prise de conscience salutaire, on peut craindre que le plan global en efficacité énergétique n'atteigne pas ses objectifs.

D'autre part, pour plusieurs industries et sociétés, notamment celles dont les coûts d'énergie représentent une part importante des coûts totaux, l'amélioration de certains procédés a déjà entraîné d'importantes économies. Le potentiel d'économie d'énergie demeure extrêmement variable selon le type d'entreprise et les équipements présents. Avec pour objectif de réduire les coûts et d'accroître leur compétitivité, les entreprises sont sensibles à la nécessité de réduire la consommation d'énergie.

Parce qu'ils nécessitent souvent d'importants investissements, les efforts des entreprises doivent faire l'objet d'un soutien financier qui soit véritablement incitatif. À cet égard, la FCCQ estime que le gouvernement et les organismes chargés de la promotion de l'efficacité énergétique doivent accroître les mesures stimulant une plus grande efficacité énergétique dans les milieux industriels, commerciaux et institutionnels. C'est pourquoi la FCCQ collabore avec l'Agence de l'efficacité énergétique pour promouvoir l'efficacité énergétique auprès de tous les utilisateurs d'énergie, en particulier dans les milieux d'affaires et institutionnels. Ainsi, la FCCQ demande au gouvernement de confier à l'Agence de l'efficacité énergétique la responsabilité première de coordonner l'ensemble des actions requises pour aboutir au résultat souhaité. C'est pourquoi l'Agence de l'efficacité énergétique devrait être confirmée dans sa mission qui est d'assurer, dans une perspective de développement durable, la promotion de l'efficacité énergétique pour toutes les formes d'énergie dans tous les secteurs d'activité, et ce, au bénéfice de l'ensemble des régions du Québec.

Selon la FCCQ, l'agence pourrait se voir confier la responsabilité de coordonner l'ensemble des actions requises pour aboutir aux résultats souhaités. De plus, la FCCQ estime que les programmes de l'agence devraient être financés par les différentes sources d'énergie mais que son fonctionnement devrait être assuré par le gouvernement. De plus, à l'instar d'Hydro-Québec et des distributeurs de gaz naturel, l'industrie pétrolière devrait aussi être en mesure de participer activement à des programmes d'efficacité en facturant les coûts à ses clients de façon transparente et équitable.

Revenons maintenant à la question des prix. L'actuelle grille tarifaire favorise les consommateurs domestiques aux dépens des autres catégories de consommateurs et en particulier des petites et moyennes entreprises. L'interfinancement a pour effet de réduire le tarif domestique à un niveau tel que le revenu perçu de cette catégorie de clients ne couvre que 80 % du revenu qui serait requis pour couvrir le coût de service. En contrepartie, les autres clients comme les industries, les commerces et les institutions doivent payer des tarifs permettant de percevoir entre 118 % et 132 % du revenu requis établi par les distributeurs. Une politique tarifaire visant l'atteinte de prix reflétant les véritables coûts de production, de transport et de distribution d'électricité est à notre avis incompatible avec la notion d'interfinancement actuellement en vigueur et qui est un choix de société pour l'instant.

Tout en maintenant l'uniformité territoriale des tarifs d'électricité, la FCCQ recommande que le gouvernement permette à Hydro-Québec Distribution et à la Régie de l'énergie d'éliminer graduellement l'interfinancement qui prévaut actuellement entre les différentes classes tarifaires. En pratique, la FCCQ demande au gouvernement de supprimer la disposition, dans la Loi sur la Régie de l'énergie, selon laquelle la régie ne peut modifier le tarif d'une catégorie de consommateurs afin d'atténuer l'interfinancement entre les tarifs applicables à des catégories de consommateurs. Tout en préconisant la fin de l'interfinancement, bien sûr la FCCQ souhaite éviter un choc tarifaire trop grand. Elle préconise donc une transition graduelle vers la situation cible qui pourrait s'étendre sur plusieurs années, comme cela a notamment été le cas dans le secteur de la téléphonie.

Selon la FCCQ, la politique énergétique du Québec doit viser à optimiser un meilleur usage de l'électricité pour combler les besoins des consommateurs, notamment en matière de chauffage. Le chauffage de l'espace est le grand responsable de la variation saisonnière dans la demande d'électricité. Hydro-Québec doit déterminer sa capacité de production et de transport en fonction de la charge de pointe hivernale. La substitution du chauffage à l'électricité de source thermique par du chauffage direct au gaz naturel ou au mazout, en écrêtant la demande de pointe, permettrait de réduire la croissance du coût marginal de production et de transport d'électricité.

D'autre part, la production éolienne permet de réduire les volumes d'eau turbinés dans les centrales hydroélectriques avec réservoir et favorise l'accumulation de réserves hydrauliques. Ces réserves améliorent notre sécurité énergétique et peuvent éventuellement être exportées au moment opportun à bon prix sur le marché du gros. Mais, en dépit de cette perspective fort intéressante, la production éolienne s'accompagne d'un niveau de fiabilité qui varie en fonction du vent, bien sûr, et sa fidélité est donc grandement variable. De plus, comme la production éolienne est intermittente, elle doit être associée à un service d'équilibrage.

n (9 h 50) n

Bien que la filière hydroélectrique, avec sa capacité de stockage, soit adéquate pour offrir un tel service, tout service d'équilibrage affecté à des parcs éoliens vient réduire la puissance disponible pour d'autres fins. Bref, tout en appuyant le développement de cette filière, la FCCQ désire souligner que l'engouement actuel pour cette filière ne saurait à nos yeux justifier que l'on mette au rancart les autres méthodes de production d'énergie.

Le coût de revient des grands projets hydroélectriques actuellement en chantier ou en voie d'autorisation approche du double du coût de l'énergie patrimoniale. Les projets futurs, dans une décennie, seront encore plus chers. Ils seront néanmoins rentables dans la mesure où le prix de référence pour la nouvelle capacité électrique, déterminé par le prix du gaz, croît, lui aussi. C'est pourquoi la FCCQ estime que la filière hydraulique reste un bon pari comme base de création de richesse et qu'il vaut le coup d'en poursuivre le développement.

En 2001, le gouvernement du Québec adoptait un nouveau régime d'octroi et d'exploitation des forces hydrauliques du domaine de l'État pour les centrales hydroélectriques de 50 MW et moins. La FCCQ reconnaît plusieurs avantages à la petite hydraulique: cette filière ne pollue pas et ne change pas la qualité de l'eau; elle ne modifie le cours d'eau que localement, sans en modifier le régime hydraulique; elle utilise peu d'espace par mégawatt généré, soit 68 fois moins que l'éolien; elles ont des retombées économiques significatives dans le milieu où elles sont implantées et constituent un facteur de développement pour certaines MRC bien pourvues en ressources hydrauliques; de plus, le développement de la petite hydraulique fait appel à des compétences purement québécoises ainsi qu'à une technologie d'implantation et de fabrication bien maîtrisée; l'essentiel des équipements est fabriqué au Québec et la totalité de la main-d'oeuvre nécessaire à la construction est issue des régions.

Compte tenu de ces avantages, la FCCQ souhaite que la présente révision de la politique énergétique soit l'occasion pour le gouvernement de relancer le développement des petites centrales. Par ailleurs, nous estimons que le gouvernement pourrait rehausser de 50 à 100 MW le seuil en deçà duquel le développement d'un site hydroélectrique serait confié à des producteurs privés.

Dans une perspective de sécurité énergétique, la FCCQ estime que le Québec a intérêt à se doter d'une plus grande capacité de production d'électricité de source thermique. Contrairement à la production d'électricité de source hydraulique et éolienne, la production de source thermique n'a pas besoin d'être localisée en fonction de caractéristiques physiques du territoire. Il ne s'agit pas ici de tenter de ressusciter le défunt projet du Suroît sur un autre site, mais bien de faire valoir la pertinence pour le Québec de recourir davantage à la cogénération dans le cadre d'un bouquet énergétique diversifié, comme le projet de Bécancour qui est actuellement en cours de réalisation.

Avantageuse du point de vue environnemental en raison de la plus grande efficacité, une telle substitution serait aussi avantageuse du point de vue de la sécurité des approvisionnements. Par exemple, en freinant l'érosion de la part de marché du mazout dans le marché de la chauffe, on assure le maintien au Québec des infrastructures de raffinage, de stockage et de distribution des produits pétroliers, lesquels constituent la seule alternative à l'électricité dans nombre de régions. Soulignons aussi que cette infrastructure fournit 100 % du carburant consommé par le parc ? je pense que j'ai... non, ça va; par le parc ? de véhicules québécois.

Une voix: ...une page qui était avant...

Mme Bertrand (Françoise): C'est une page qui était avant, hein? Oui, c'est ça, là, je viens de... Je m'excuse. Je m'excuse beaucoup. Alors, désolée. C'est ça que je me disais: ça n'a pas de sens, ce que je suis en train de dire. Vous êtes bien patients. Je vous en remercie.

Le Président (M. Bachand): Allez-y.

Mme Bertrand (Françoise): Dans son avis d'expert, l'économiste Pierre Fortin ? je vais parler d'exportation; Pierre Fortin ? a recommandé de porter la réserve énergétique cible de 10 à 20 TW afin d'accroître notre sécurité énergétique. De plus, quand cette réserve n'est pas utilisée pour répondre aux aléas de la demande de l'hydraulicité et du développement industriel, Hydro-Québec Production pourrait s'en servir pour accroître ses exportations. Hydro-Québec Production n'a quasiment pas ajouté à sa capacité de production durant les années quatre-vingt-dix, si bien qu'Hydro-Québec rate, aujourd'hui, des occasions de tirer profit de la hausse du prix de l'électricité sur le marché américain. Ceci ne doit plus se produire. L'état des finances publiques, dans un contexte de vieillissement de la population, exige du gouvernement qu'il tire profit du potentiel hydraulique et de la richesse qui l'accompagne.

Comme à l'occasion du Forum des générations en octobre 2004, la FCCQ réitère son appui en faveur de l'exportation d'électricité, mais rappelons-nous que celle-ci ne doit pas se faire au détriment du développement de nos régions. Les interconnexions servent à la fois à exporter et à importer l'énergie, et toutes sortes de combinaisons sont possibles, étant donné la gamme des contrats que l'on retrouve sur le marché du gros de l'électricité.

Le Président (M. Bachand): ...que vous prenez un petit peu d'eau, est-ce que vous pouvez conclure? Il vous reste beaucoup de temps ou...

Mme Bertrand (Françoise): Ah! bien, je croyais que j'avais 30 minutes. Ce n'est pas le cas?

Le Président (M. Bachand): C'est 20 minutes.

Mme Bertrand (Françoise): Ah! Bon! Bien, écoutez, je vais rapidement dire que, dans le cas du gaz naturel ou dans le cas d'une diversification, on est certainement en faveur de poursuivre et que nous croyons à l'installation d'un port méthanier. Par ailleurs, on croit beaucoup aux processus en place qui permettent les audiences et qui permettent, ce faisant, de prendre les meilleures décisions, et on invite les groupes de pression, dont nous sommes, à utiliser ces moyens et non pas à bloquer les processus et à bloquer les projets avant même qu'on sache de quoi il est question, et conséquemment on invite les promoteurs et le gouvernement à partager l'information et à accroître la communication à ce sujet.

Accroître les bénéfices revenant en région aussi. Si l'Approche commune a permis un rapprochement avec les leaders de la nation innue, on croit que cette approche est aussi très importante pour les régions et que l'impact des investissements d'Hydro-Québec dans les projets majeurs est considérable pour les régions. Et il faudrait ajouter à cette approche-là que le gouvernement doit accroître les redevances versées aux régions en réservant une part du dividende qui leur est versé par Hydro-Québec au financement des fonds régionaux. On peut également imaginer une mesure semblable s'appliquant aux lignes de transport, aux gisements d'hydrocarbures et aux éoliennes. On croit que c'est important qu'il y ait un retour dans les régions lié à l'exploitation de l'énergie.

Et vous me permettrez deux petites pages rapides où il est très important pour nous de vous dire que présentement, au-delà des chiffres, des statistiques et des prévisions, la Fédération des chambres de commerce du Québec souhaite profiter de l'occasion qui lui est donnée aujourd'hui pour faire appel à l'esprit d'initiative et d'entrepreneurship qui est par tradition omniprésent dans la nature des Québécois et des Québécoises. Ainsi, dans les prochaines minutes, je me ferai le porte-parole d'un cri du coeur du milieu des affaires québécois ainsi que de nos membres qui sont de plus en plus inquiets des tendances que nous sommes en train de prendre en tant que société. Je veux faire un plaidoyer en faveur d'une action commune dirigée vers la création de richesse pour la société québécoise, une action s'appuyant sur l'utilisation et la commercialisation de notre plein potentiel de production et de distribution énergétique, une action qui pourrait permettre au Québec de reprendre le flambeau du développement hydroélectrique là où il l'a laissé il y a maintenant trois décennies.

Plus que jamais, en ce début 2005, notre société accorde trop d'importance à certaines lois qui trop souvent dénaturent les faits pour offrir une vision tronquée de la réalité, notamment lorsqu'ils parlent de PPP ou de notre véritable potentiel énergétique. Ceci a pour conséquences un certain conservatisme et un immobilisme qui maintenant réussissent à freiner les initiatives de développement, incluant celui de notre richesse principale, l'hydroélectricité, comme si les grands barrages qui ont fait notre fierté et notre renommée au niveau mondial étaient des vestiges d'un passé glorieux auquel nous ne pourrions plus aspirer. À force de se faire marteler par des discours défaitistes comportant un manque flagrant de vision, les entrepreneurs et les bâtisseurs du Québec craignent maintenant pour notre avenir. C'est pourquoi le message que le milieu des affaires veut vous livrer aujourd'hui est clair, sans équivoque: refuser de s'engager à fond dans le développement économique du Québec, et plus précisément dans celui des grands barrages hydroélectriques, serait une erreur fatale pour la richesse collective de tous les Québécois.

Et nous souhaitons que vous retrouviez l'énergie comme moteur de notre développement économique, et ce, dans le but d'en faire profiter l'ensemble des régions et des communautés du Québec et de reprendre haut et fort le flambeau de l'entrepreneurship. Merci.

Le Président (M. Bachand): Merci, Mme Bertrand. Désolé de vous avoir un peu bousculée.

Mme Bertrand (Françoise): Non, excusez, c'est nous. Nous étions sur une autre grille horaire. Mais l'essentiel est dit.

Le Président (M. Bachand): Bon, excellent. Donc, j'ai senti dans vos propos qu'il y avait beaucoup d'enthousiasme.

n (10 heures) n

Je vous rappelle rapidement les règles: donc, 20 minutes de présentation de votre part, 40 minutes de la part de chacun... du côté de cette Assemblée, donc, pour l'opposition, 20 minutes, 20 minutes pour le côté ministériel. Et je vais donner l'opportunité dans l'immédiat au ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs, M. le ministre, de vous poser ses questions.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Moi, je ne suis pas surpris de la qualité de votre présentation, connaissant très bien la fédération et étant un ancien vice-président de la fédération. Encore une fois, une très belle présentation et un bon mémoire. Je vais vous donner le temps peut-être pour permettre de récupérer un petit peu ce que vous avez.

Vous avez parlé de développement régional et vous avez parlé aussi, comme l'entente avec les communautés innues, d'avoir des retombées régionales. Vous savez, vendredi, avec le premier ministre, nous avons annoncé une entente entre Hydro-Québec et la communauté jamésienne ? ça veut que dire tous les Jamésiens de la Baie-James... ? une entente de 310 millions de dollars sur plusieurs années, et ça, c'est une autre retombée. Dans la région de mon collègue le député de Roberval, vous savez, on a un projet, Péribonka, 350 millions de dollars de retombées dans la région immédiate de Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Comment vous voyez ça, le développement régional, les retombées, le développement énergétique et le lien avec le développement régional?

Mme Bertrand (Françoise): Bien, pour nous, c'est extrêmement important et on est tout à fait dans l'esprit de la commission Arsenault à l'époque qui avait fait des recommandations et qui faisait des études comparatives, quantitatives. Mais, au-delà de ça, je pense que ce que nous prônons, c'est de dire: Là où l'extraction se fait, là où l'énergie se trouve, d'une part de faire du développement alentour de cette énergie est déjà un acquis important. Et que les forces vives d'une région donnée qui se donne un plan et une vision par rapport à son développement puissent avoir des moyens, soit par le biais de fonds régionaux, pour être capables d'être des acteurs et des décideurs dans leur développement, ça nous apparaît essentiel. C'est un peu, j'imagine, dans la foulée de ce dont on parle depuis plusieurs années, la décentralisation, l'appropriation par les régions de leur devenir économique, et donc d'avoir des outils pour pouvoir le faire, de ne pas devoir revenir vers Québec constamment, mais, puisqu'ils ont un foyer propice à l'extraction de l'énergie, bien qu'ils puissent en avoir des bénéfices, tout à fait dans l'esprit de ce qui avait été fait dans l'Approche commune, de dire: Si c'est bon pour les Innus, ça devrait être bon pour l'ensemble des Québécois. Et en ce sens les gestes que vous citez nous semblent tout à fait dans la bonne direction, et c'est ce qu'on veut voir multiplier.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Vous avez parlé du rôle accru de l'Agence d'efficacité énergétique, et vous avez parlé aussi de financement de l'agence, et vous avez mentionné un point important, c'est: on devrait inclure les pétrolières. Je vois que M. Desrochers, il fait partie du comité ? votre comité, en fait ? et...

Mme Bertrand (Françoise): ...le président du comité.

M. Hamad: Oui, c'est le président du comité. C'est ça. Ça n'a pas changé, c'est ça, il est toujours là. Et en fait, là, que les pétrolières financent aussi, fassent partie du financement. J'aimerais ça que vous le développiez davantage.

Le Président (M. Bachand): M. Desrochers, allez-y.

M. Desrochers (Pierre): Oui. Merci. Oui, effectivement, on croit qu'à l'instar d'Hydro-Québec et Gaz Métro, qui, eux, peuvent réinclure, dans leur base tarifaire, les coûts engendrés par leurs programmes d'efficacité énergétique, ce que l'industrie pétrolière ne peut pas faire, on croit qu'il y aurait possibilité que l'industrie pétrolière puisse aussi le faire. Maintenant, ce serait en collaboration avec l'Agence d'efficacité énergétique et ce seraient peut-être des programmes qui pourraient être développés et par la suite approuvés autant par la régie pour la tarification, pour savoir combien ça pourrait coûter soit au litre... et que ce coût du litre là puisse être, comme ça l'est fait pour les clients d'Hydro ou pour les clients de Gaz Métro, que ce soit rajouté à la facture de chauffage de façon transparente et claire. Et on croit qu'il y aurait possibilité, à ce moment-là, nous aussi, de s'impliquer dans ces programmes d'efficacité énergétique là.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Vous n'avez pas eu le temps malheureusement de parler des ports méthaniers, des ports méthaniers au Québec, et vous avez commencé à discuter d'une approche en fait où vous souhaitez au moins que les promoteurs aient le temps de présenter leurs projets, permettre à la population après d'avoir un échange, les groupes de pression ainsi que la population, d'avoir le temps d'échanger puis... Pourriez-vous développer davantage là-dessus?

Mme Bertrand (Françoise): En fait...

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand, allez-y.

Mme Bertrand (Françoise): Pardon?

Le Président (M. Bachand): Allez-y, Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise): Merci. En fait, pour nous, d'abord, on croit que la question d'un port méthanier, ce serait extrêmement opportun pour le Québec parce qu'on est en bout de ligne. On est comme présentement avec une seule source d'approvisionnement, donc on est un peu prisonniers d'une situation monopolistique, et conséquemment on estime que, si on pouvait avoir un port méthanier, on pourrait diversifier notre source d'approvisionnement, ce qui aurait un bon effet. On le sait, la concurrence, on est pour la concurrence, du côté des chambres de commerce. Conséquemment, on dit: Il nous apparaît qu'un port méthanier, ce serait un bon choix de société.

Maintenant, à savoir où, quand, comment, évidemment on n'a pas les éléments pour pouvoir faire une recommandation à ce moment-ci, mais on dit: De toute manière, la société québécoise, par le biais du gouvernement, s'est dotée de mécanismes et de processus extrêmement performants qui nous permettent d'analyser les situations, qui permettent aux groupes de pression, dont nous sommes, de se présenter, de donner leur avis, afin que par la suite une décision la plus judicieuse soit choisie.

Il nous semble que, dans ce qui s'est passé dans les derniers mois, on n'a pas eu l'occasion d'entendre et de comprendre les faits qui auraient permis de forger vraiment une opinion, et on invite le gouvernement et les promoteurs de faire en sorte que l'information puisse se rendre, qu'on ait un partage de l'information, qu'il y ait une large communication et que par la suite on s'en remette au processus dûment établi en ce sens pour permettre d'écouter les uns et les autres et de tirer les conclusions appropriées. Alors, c'est ça, notre point de vue. Je regarde mes collègues, là, mais c'est...

Nous, on pense que c'est important d'en avoir un parce qu'on pense que, du côté concurrence, ça nous aiderait. Mais, dans le processus, on a été... Vous savez, on n'est pas des experts comme probablement plusieurs d'entre vous, vous pouvez être de chaque question, puis on se dit: Même si on avait voulu dire où, quand, comment, on n'aurait pas pu parce que l'information n'est pas arrivée jusqu'à nous. Donc, on dit: La population non plus n'a pas eu cette information-là. Donc, il y a une responsabilité de la part du gouvernement et des promoteurs.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Les petites centrales, vous avez mentionné, les centrales privées, de rehausser en fait le critère ou la loi qui stipule que c'est de 50 MW et moins que le privé peut être un promoteur. Maintenant, vous demandez de le remonter, rehausser à 100 MW. Quel est le but de votre suggestion?

Mme Bertrand (Françoise): Je laisserais probablement l'économiste de la fédération, que j'appelle souvent en riant l'économiste en chef de la fédération...

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Demers.

M. Demers (Steeves): Écoutez, l'argumentaire est assez simple: nous, on croit qu'il y a un potentiel qui est inexploité, oui, au niveau des 50 MW et moins, mais qu'aujourd'hui, technologie aidant et la situation étant ce qu'elle est, il y a des opportunités pour jusqu'à 100 MW qui pourraient être exploitées. Et donc cette question-là qui a été peut-être évacuée ? on avait fixé, si vous voulez, la limite à 50 ? pourrait être relevée à 100 MW, et on y voit un potentiel de création de richesse de développement qui serait tout à fait approprié et qui tiendrait compte des préoccupations de développement durable et environnementales. Et nous pensons qu'il est possible d'avoir cohabitation donc avec ces projets-là et Hydro-Québec, et tout ça.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Dernière question ? je laisserai mes collègues après compléter ? l'exportation. Vous savez, notre objectif, comme gouvernement, nous, c'est répondre aux besoins du Québec, besoins résidentiels, commerciaux, institutionnels et grande entreprise, évidemment faire le développement régional, et aussi après permettre d'avoir une marge de manoeuvre pour faire l'exportation, et profiter de cet argent-là pour amener au Québec... payer nos services de santé, éducation, compléter notre développement régional. Comment vous voyez ça, l'exportation? Vous en avez parlé un petit peu, mais...

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise): Bien, il est clair pour nous que d'abord les besoins du Québec... et là-dessus on vous rejoint complètement, puis je pense qu'on va rejoindre tous les Québécois, d'abord nous, puis pas d'abord nous dans une vision figée de ce que sont nos besoins aujourd'hui ou «back to the future», mais regarder en avant et ce dont on souhaite et rêve pour notre devenir.

n (10 h 10) n

Par ailleurs, on pense que donc il faut d'abord faire ça. Et, comme on croit à un portefeuille de moyens pour l'énergie, c'est sûr que dans ça l'efficacité en fait partie, mais on se dit: Il est intéressant puis il y a une opportunité... On a des voisins qui ont des besoins, et on peut, et on l'a fait dans le passé. Il faut le faire de façon orchestrée. Il ne faut pas le faire à notre détriment. Et, s'entend, à notre détriment, notre détriment au plan économique, donc de servir les autres plutôt que nous au plan économique mais aussi environnemental. Il est clair que, dans une perspective de développement durable, on ne voudrait pas le faire et s'appauvrir à jamais pour les futures générations. Mais on pense qu'il y a possibilité de produire suffisamment pour nos besoins et d'avoir un excédent dont on pourrait bénéficier en termes de profiter des coûts du marché, et on pense que, dans une économie mondiale, bien, a fortiori, si c'était vrai il y a 30 ans, c'est encore d'autant vrai aujourd'hui. Et donc on souhaite et on recommande non pas de produire strictement pour l'exportation, mais de produire plus que nos besoins stricts et d'exporter à de bons coûts.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre, merci infiniment. M. le député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue, à vous la parole.

M. Bernard: Merci, M. le Président. Bonjour. Je suis content de vous accueillir aujourd'hui. Premier commentaire, je suis très heureux que vous rameniez la commission sur les retombées économiques sur l'exploitation des ressources naturelles. On a tendance à moins en parler, mais, en tant que député de région, c'est un sujet qui nous préoccupait beaucoup lors de la commission. Alors, je suis content que vous rameniez ces points-là. Puis d'ailleurs les choses s'en vont tranquillement vers de meilleures redevances envers les régions qui produisent et exploitent les ressources naturelles.

Un sujet que vous n'avez pas abordé, puis j'aimerais avoir votre point de vue, que les autres... beaucoup de groupes nous ont interpellés au cours de la commission, les municipalités, le transport urbain, le transport en commun dans les municipalités, plusieurs recommandent de s'en aller peut-être vers des biocarburants ou aussi développer le transport par énergie électrique pour justement combattre l'effet de serre. Vous n'en parlez pas beaucoup, mais, étant donné que vous êtes situés dans les grands centres comme Montréal et Québec, avez-vous une position de développement?

Une voix: ...

M. Bernard: Oui, mais...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Desrochers.

M. Desrochers (Pierre): Je dois admettre que c'est un sujet qu'on n'a pas abordé comme tel, à savoir: Est-ce qu'on devrait favoriser un carburant par rapport à un autre, là, certainement pour la question de ça? Donc, au point de vue, là, de comité, ça va être difficile de vous faire une position. La position ne serait que très personnelle, et ce n'est pas le cas ici.

Mme Bertrand (Françoise): Puis les chambres de commerce... Parce que notre comité, je pense que c'est important de le répéter, était fait vraiment d'un ensemble de membres, incluant donc les chambres de commerce ? on en a 170 dans la fédération ? et donc ça n'a pas été soulevé non plus. Puis, comme vous le savez, dans d'autres occasions, nous venons avec les chambres de commerce, et cette fois-ci elles ne nous ont pas alertés sur ces questions-là. Alors, c'est une question intéressante, mais, désolée, on ne peut pas aller plus loin sur ça.

M. Demers (Steeves): J'ajouterais: c'est-à-dire que c'est des mesures d'efficacité énergétique, donc elles peuvent s'inscrire dans un grand programme d'efficacité énergétique. Il reste que le changement de culture, le changement d'habitudes ne se fera pas tout seul, il faut des incitatifs. Si on souhaite que certaines entreprises, ou que le milieu d'affaires, ou que les consommateurs soient plus efficaces, aillent vers des modes d'énergie, des modes de consommation qui sont différents, il faut les soutenir. Donc ça, c'est des idées qui sont très intéressantes, là, mais il faut soutenir le changement de culture et les nouvelles habitudes si on veut qu'ils les adoptent.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue...

M. Bernard: O.K. Bien, merci. C'est parce que je me demandais quand même si vous aviez abordé le sujet... avoir vos commentaires là-dessus.

Parlant d'efficacité énergétique, vous abordez, entre autres, le sujet des centrales au gaz. Effectivement, pour tout le secteur de la chose, vous en parlez beaucoup puis effectivement vous dites que, les centrales thermiques, leur manière, c'est peu efficace au niveau énergétique, mais par contre vous parlez beaucoup de la cogénération. Alors, vous l'abordez. Vous n'allez pas en détail, mais j'aimerais quand même, pour les bénéfices des gens qui nous écoutent, avoir un peu vraiment votre point de vue un peu plus en détail sur la cogénération. Puis également quand même vous parlez du taux d'efficacité de rendement de 70 % que vous dites peut-être qu'il est trop élevé. Alors, moi, j'aimerais quand même vous entendre à nouveau là-dessus, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bachand): M. Demers. M. Desrochers.

M. Desrochers (Pierre): Oui, je vais y aller. On croit que, un, il y aurait peut-être considération à avoir pour la cogénération dans certains cas, ce qui permettrait le développement aussi industriel d'entreprises en région en aidant les entreprises consommatrices de vapeur à réduire leurs coûts de vapeur, ce qui permettrait également, dépendamment de quelle est leur source de production de vapeur, de réduire les gaz à effet de serre tout en... Je pense qu'au point de vue global il y aurait des avantages au point de vue des coûts pour ces entreprises-là et également au niveau environnemental et que ça pourrait être quelque chose, dans une perspective, là, de développement industriel, qu'on devrait favoriser. On croit qu'il y a une opportunité là. À savoir sur l'efficacité, on croit qu'il y a peut-être des opportunités. Peut-être que le taux de 70 % nous apparaît élevé, il y a peut-être des opportunités qui nous apparaîtraient aussi rentables si l'efficacité était un petit peu plus basse, mais on n'a pas fixé un niveau qui serait peut-être le niveau optimal. On n'a pas discuté de ça.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le député. M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. Mme Bertrand, bonjour. Messieurs, bienvenue chez nous. Ce ne sera pas une cachette pour personne si je vous dis que je trouve votre mémoire pas mal intéressant. Et je vous avouerai qu'il y a des éléments extrêmement importants là-dedans, concernant d'abord tout l'aspect économique que le développement énergétique peut procurer au Québec, ce qu'il a procuré dans le passé et ce qu'il peut procurer dans le futur. Mais, lorsque je vous entendais, tout à l'heure, présenter votre mémoire, il m'est venu une question à l'esprit par rapport aux aires protégées. Parce que vous savez, par rapport aux aires protégées, vous savez que, de plus en plus, on doit arriver puis être en mesure d'avoir un certain pourcentage de notre territoire en aires protégées. En sachant que ce certain pourcentage d'aires protégées là se trouve généralement dans les régions, parce que ce n'est pas sur le mont Royal qu'on va avoir des aires protégées, comment peut-on arriver à concilier cet aspect-là où on va prendre une partie importante d'un territoire sur lequel il pourrait y avoir du développement économique important qui pourrait être fait avec la transformation de la ressource, d'une part, et, d'autre part, se priver de ce potentiel-là? Avez-vous pensé à cet élément-là? Avez-vous questionné vos organisations, vos chambres de commerce un peu partout dans les régions pour savoir voir s'il y avait des mesures concrètes à prendre ou...

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise): J'aimerais bien vous répondre là-dessus, surtout que, moi, j'ai une maîtrise en environnement. Donc, j'aurais aimé vous apporter une réponse de ce qui semble difficile à réconcilier, mais j'avoue que...

M. Desrochers (Pierre): Non, mais en fait c'est toujours le débat, là. Je pense que ce sera toujours le débat, à savoir comment vous conciliez l'environnement avec le développement économique, et qu'il y aura toujours un équilibre difficile à faire entre les deux. Et je pense que, dans le contexte, ce qu'on fait, on ne veut pas nécessairement sacrifier le développement durable, aucunement. Je pense qu'on le fait, puis de prime abord on l'a dit clairement. Mais on croit qu'également on ne peut pas tomber non plus dans l'immobilisme de développement économique parce qu'on ne veut pas toucher... ou on doit favoriser un côté par rapport à l'autre. On croit que, dans le développement durable, il y a trois éléments: vous avez l'environnement, vous avez le social et vous avez l'économique. Et de créer cet équilibre-là, ce n'est pas nécessairement facile, mais je pense que les régions comprennent qu'on peut atténuer certaines mesures, et ce seront toujours des mesures d'atténuation plutôt que de... mais qu'on doit quand même favoriser le développement économique.

Mme Bertrand (Françoise): Et on voit dans les régions qu'elles sont capables elles-mêmes, quand vient le moment d'avoir de la vision pour leur devenir, de donner un nouvel équilibre, parce que le mieux est l'ennemi du bien parfois et que donc, dans l'équilibre, justement c'est un équilibre. Et ce n'est pas nécessairement toujours égal, et parfois il faut accepter certaines entorses à ce qu'on aurait cru être le mieux pour notre société pour permettre au total de garder une société vibrante dans les milieux de régions périphériques. Et je pense que, quand on redonne beaucoup de décisions près des lieux de vie, on a plus de chances peut-être de trouver le meilleur équilibre que de le faire un peu théoriquement dans une salle comme celle-ci, d'une certaine manière.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci. C'est beau.

Le Président (M. Bachand): Merci infiniment. Une question très rapide, Mme Bertrand. Vous savez que le ministère des Transports a augmenté le taux d'immatriculation pour les grosses cylindrées puis les véhicules et les camionnettes, compte tenu du fait qu'il y a une quantité de GES qui sont émis par ces véhicules-là, surtout pour les PV. Qu'est-ce que vous pensez au niveau des gens qui sont propriétaires de commerces qui ont aussi ces véhicules-là?

Mme Bertrand (Françoise): Nous avons écrit à ce sujet-là. Nous avons écrit et nous avons dit que, dans la mesure où ces véhicules-là, en région périphérique surtout, étaient extrêmement importants, ils faisaient partie de la chaîne de production pour ces commerces-là, on voyait qu'ils étaient indirectement taxés par rapport à d'autres entreprises et que...

Le Président (M. Bachand): Mais pensez-vous que les commerces ont aussi leur part à faire dans l'émission des gaz à effet de serre?

Mme Bertrand (Françoise): Tous les Québécois ont à faire, mais pas de façon inéquitable, et je pense que c'est ça qu'on voulait soulever.

Le Président (M. Bachand): Merci beaucoup. Mme la députée porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, madame messieurs, bonjour et bienvenue. Je vais vous poser des petites questions assez brèves et j'aimerais ça avoir des réponses brèves, parce qu'il y a des choses qui ne sont pas là. Et peut-être que vous avez des raisons, là, vous ne pouviez pas tout couvrir, mais vous êtes assez silencieux sur la recherche et le développement. Est-ce qu'il y a une raison pourquoi vous n'avez pas abordé cette question-là? Dans toute la dynamique d'une politique énergétique, il me semble que pour l'avenir c'est important.

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand. M. Desrochers.

n (10 h 20) n

M. Desrochers (Pierre): Effectivement, ça n'a pas été abordé de façon spécifique, mais pas parce qu'on n'y croit pas; au contraire, on y croit. Mais ça n'a pas été abordé, il n'y a pas eu de recommandations spécifiques qui ont été faites en ce sens-là. Mais je peux vous dire que je ne crois pas que les gens autour de la table ? sans me prononcer, parce que la question n'a pas été directement posée ? que les gens ne sont pas en faveur de la recherche et développement, bien au contraire.

Mme Dionne-Marsolais: Je suis contente de vous l'entendre dire. Vous n'avez pas non plus abordé la question de l'exploration gazière dans le golfe, et, hier... Je dis ça parce qu'hier soir, en fin de journée, on a eu une présentation assez exhaustive d'un potentiel et des entraves apparemment à au moins cette reconnaissance de ce potentiel-là. Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle vous n'avez pas abordé cette question-là?

Le Président (M. Bachand): M. Desrochers.

M. Desrochers (Pierre): Sauf pour vous dire que... Vous absolument raison, on n'a pas abordé la question, et principalement parce qu'il n'y avait aucun acteur autour de la table, là, qui voulait l'aborder. Mais on a plutôt regardé la question de la consommation et de la production d'énergie sans parler vraiment d'où était la ressource. Certainement pas au niveau des hydrocarbures, là, comme tel. Et, comme vous dites, je pense que vous l'avez exprimé, il y avait tellement de sujets qu'à un moment donné on ne pouvait pas toucher à tout, et on s'est plutôt concentrés, considérant les expertises qu'on avait, à parler des éléments qu'on a touchés, là.

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha! Venant de vous, M. Desrochers, l'expertise en pétrole et gaz, elle existe, quand même, là. Non, mais je vous pose la question parce qu'un de vos objectifs au niveau de la sécurité énergétique, c'est de s'assurer que les consommateurs québécois auront à leur disponibilité tous les choix, toutes les sources possibles et dans le temps. Et on sait qu'il n'y en aura pas une, solution pour l'avenir.

Vous avez aussi mentionné dans votre texte, là ? puis vous n'êtes pas les premiers à mentionner ça ? qu'il faut augmenter la marge de manoeuvre et la réserve. Je comprends qu'Hydro-Québec a fait un bon lobby partout, mais en quoi est-ce que les taux auxquels vous arrivez sont fondés? Pourquoi ce n'est pas 5 %, 10 %, 15 %, 20 %, 25 %? Pourquoi vous dites qu'il faut augmenter la réserve de x %? Je pense que je l'ai vu dans votre texte. Ça vient d'où, ça? Tout le monde nous sort ça. Mais c'est basé sur quelles normes, quelles règles?

Le Président (M. Bachand): M. Demers.

M. Demers (Steeves): Je vous rassure, ce n'est pas la Fédération des chambres de commerce qui a fait l'analyse de ces chiffres-là. Nous, le message principal qu'on veut passer, c'est que ça nous prend une marge de manoeuvre. Je pense que, les taux qui ont circulé, il y a un certain consensus sur une marge entre 12 et 20 TWh. Donc, on pourrait sortir des chiffres, mais l'important pour nous, c'est d'avoir une marge de manoeuvre. Ça prend cette marge-là. Laissons les experts déterminer quelle est la marge optimale, et les économistes aussi, parce qu'on a notre mot à dire. Mais ça en prend une. Et actuellement cette marge-là, si elle existe, elle est très difficile à trouver, disons.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée, allez-y.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Mais, pour votre information, il existe un conseil nord-américain de fiabilité en énergie qui prescrit les marges de manoeuvre requises et les taux requis. Donc, quand une fédération comme la vôtre vient nous présenter des informations qui sont visiblement... qui viennent d'un de ses membres, ce serait peut-être intéressant d'appuyer un peu cela, parce que ça fait un peu gratuit. Et jusqu'à ce jour l'Hydro nous a toujours dit qu'elle respectait les exigences de la North American Electric Reliability Council. Alors, si vous dites: Il faut augmenter les réserves pour augmenter la marge de manoeuvre, ce n'est pas la même chose. Les réserves, ça fait partie des exigences de l'exploitation des réseaux nord-américains. La marge de manoeuvre, ça fait partie des intérêts d'Hydro-Québec pour faire son commerce d'électricité, ce qui n'est pas une mauvaise chose. Mais il ne faut pas donner l'impression qu'un certain taux de réserve, tel que présenté là, c'est une exigence pour la fiabilité du réseau aussi. Et, moi, je trouve ça important de le préciser parce que ça fait plusieurs fois qu'on entend ça. C'est peut-être malheureux que je vous le dise à vous, mais je pense qu'une fédération comme la vôtre devrait être documentée là-dessus de manière peut-être un peu plus complète.

Le Président (M. Bachand): M. Demers.

M. Demers (Steeves): Si je peux me permettre, nous, on n'a pas fait le lien direct entre réserve et fiabilité du réseau de transport. Et, lorsqu'on parle dans un contexte de sécurité énergétique, nous, la marge, c'est... Pour une sécurité énergétique, ça prend une marge suffisante. Et, pour exploiter le potentiel hydroélectrique et accroître la richesse, ça nous prend une marge et il faut l'utiliser. C'est un peu dans ce sens-là, et on ne faisait pas de relation entre le réseau de transport et la réserve ou la marge, là.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Mais, sur le plan d'une politique énergétique, vous comprenez que la sécurité, ça veut dire avoir une réserve qui nous permette d'assurer la fiabilité du réseau. Je pense que c'est dans ce sens-là que je pose ma question.

Vous avez aussi parlé de l'Agence de l'efficacité énergétique, mais vous n'avez pas fait de remarques quant à son statut. Est-ce qu'à votre avis cette agence-là aurait avantage à être une entité autonome, ou si son assujettissement au ministre des Ressources naturelles vous satisfait?

Le Président (M. Bachand): Madame.

Mme Bertrand (Françoise): Bien, chose certaine, en tout cas, ce qu'on souhaite, c'est quelle soit indépendante du point de vue d'une source d'énergie, c'est-à-dire l'Hydro-Québec. Et on ne croit pas que ce doit être l'Hydro-Québec. Tu sais, ça prend une distance d'une des sources de l'énergie, puis on dit... Comme on parlait que toutes les sources de l'énergie devraient être le propos de cette agence-là, donc on voyait la nécessité de cette distance-là.

Maintenant, en dehors du ministère, ce n'est pas vraiment ça qui nous apparaissait important. On pensait qu'elle devait avoir un fonctionnement assuré, au plan budgétaire, par lui-même de telle sorte qu'on puisse s'assurer, année après année, et non pas selon les fluctuations du marché ou des réserves, justement, mais s'assurer qu'il y ait un regard qui soit neutre par rapport à l'ensemble des sources d'énergie et qui fasse de façon constante la promotion des mêmes valeurs.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que justement, tant qu'elle est assujettie au ministère des Ressources naturelles... La tentation de financer l'agence, comme ça a été le cas depuis deux ans, par le biais d'Hydro-Québec plutôt que par un financement gouvernemental, entre guillemets, plus neutre a été très grande, et effectivement le gouvernement y a cédé. Donc, est-ce qu'on peut comprendre que, sans vous prononcer sur le lien avec le ministère des Ressources naturelles, un financement qui soit assuré avec une planification peut-être quinquennale... Je ne vous en ai pas parlé, mais j'imagine que ça va dans...

Mme Bertrand (Françoise): C'est ce qu'on recommande.

Mme Dionne-Marsolais: C'est ça? Bon.

Mme Bertrand (Françoise): On recommande vraiment d'être financé à part.

Mme Dionne-Marsolais: Très bien. Autre chose, le cadre réglementaire, vous n'avez pas beaucoup exploré cela, sauf pour dire que vous souhaiteriez la modification de la loi pour permettre une modification de l'interfinancement. On a eu deux écoles de pensée ici quant à l'interfinancement, une qui dit: Il faut baisser... En fait, elle ne dit pas ça, mais elle arrive à la conclusion qu'il faut baisser les tarifs du résidentiel parce qu'ils contribuent trop à l'ensemble des revenus de l'Hydro. C'est la position Fortin. Puis, on a la position du Conseil du patronat qui dit: L'interfinancement pénalise beaucoup les industries parce qu'elles paient... pardon, les consommateurs résidentiels ne paient pas suffisamment, donc la position inverse. Quelle est votre position à vous là-dessus?

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise): Plutôt celle du Conseil du patronat.

Mme Dionne-Marsolais: C'est celle du Conseil du patronat. D'accord.

Mme Bertrand (Françoise): Ceci dit, c'est pourquoi... Comme vous savez, je connais la réglementation dans d'autres domaines, et on a fait le parallèle ici sur la téléphonie en disant: Par ailleurs, c'est évident qu'on ne peut pas aspirer à une modification de la tarification à l'intérieur d'une année donnée, il faut que ce soit graduel. Et ce pour quoi on recommande cette position-là aussi, c'est pour voir, dans le prix, la valeur du bien consommé. Il nous semble que présentement, si on veut être efficace au chapitre de l'efficacité énergétique, il faut qu'il y ait un juste prix.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, on comprend que vous ne voulez pas abroger nécessairement la loi n° 116 mais la modifier. Ça rejoint ce que vous venez de nous dire.

Une dernière question, de mon côté à moi, sur la production éolienne. Il y a des gens qui sont venus nous dire ici qu'il faudrait une société du type SEBJ, là, ou même indépendante d'État pour la production éolienne. Quel est votre avis là-dessus? Actuellement, la production éolienne, elle est privée, parce qu'on ne connaît pas les coûts d'Hydro-Québec Production, avec une ignorance totale quant à la justification des différents coûts qu'Hydro-Québec charge, notamment au niveau du coût des services d'équilibrage. Quelle est votre position sur l'éolien? Est-ce que vous croyez qu'on aurait avantage, pour optimiser l'exploitation ou la mise en valeur de notre potentiel, d'avoir une société d'État qui se concentre là-dessus, avec des coûts plus bas que ce qu'on connaît actuellement?

Mme Bertrand (Françoise): Je m'en remets au président du comité, là, sur cette discussion-là.

Le Président (M. Bachand): M. Desrochers.

n (10 h 30) n

M. Desrochers (Pierre): Malheureusement, il n'y a pas eu de discussion à savoir quelle forme devrait prendre... J'étais, hier, ici lorsque, je crois que c'était l'Ordre des ingénieurs, a proposé cette recommandation-là d'avoir peut-être un organisme de coordination. Je pense qu'il l'appelait plus autre chose. Nous, on croit certainement qu'à l'intérieur... Et là je vous dirais que c'est plutôt le credo général, je pense, de la fédération. C'est que le secteur privé devrait être impliqué absolument à l'intérieur de la production, il ne devrait pas être exclu, parce qu'éventuellement on pourrait créer un organisme qui pourrait le faire. Je pense que ce n'est pas l'apanage d'un organisme public. S'il est nécessaire d'avoir peut-être un organisme de coordination qui pourrait mieux, à l'extérieur d'Hydro-Québec... peut-être. Mais ça, c'est plutôt un commentaire tout à fait personnel plutôt qu'un commentaire de la fédération, là.

Mme Bertrand (Françoise): Oui. Puis le commentaire de la fédération serait: On n'est pas très forts sur la création de nouvelles sociétés d'État. Donc, de trouver une manière de le faire qui soit plus dans des régimes privés nous intéresserait davantage, c'est clair.

Le Président (M. Bachand): Merci, Mme Bertrand. Il y a trois des collègues qui désirent intervenir, donc je vous le dis, à toutes fins pratiques, pour votre information: M. le député de Saint-Jean, M. le député de René-Lévesque et M. le député de Vanier.

M. Tremblay: Oui. O.K. Merci. J'aurais deux courtes questions. La première est celle: Si vous avez 1 kW à gérer, est-ce que vous l'exportez, ou vous tentez de faire de la création d'emplois avec? C'est ma première question.

Deuxième question. L'OCDE citait récemment que l'intensité énergétique de l'économie canadienne était trop élevée, et à cet égard il y a une quarantaine d'entreprises dans l'Est du Québec ? probablement qui sont membres de votre chambre ? qui ont fait une démarche de développement durable avec le Centre québécois de développement durable, et elles ont réalisé qu'à partir d'un investissement initial quand même important, au cours des quelques années qui suivaient cet investissement, ils parvenaient à faire des gains environnementaux mais aussi des gains économiques. Donc, on s'aperçoit que protéger l'environnement, ça peut être payant. Est-ce que cette philosophie est présente dans votre organisation? Et comment en faites-vous la promotion à travers vos membres?

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise): Alors, sur la première question, peut-être que je laisserais...

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Demers.

M. Demers (Steeves): Attendez. Mon Dieu! j'ai échappé la première question, la deuxième était tellement intéressante aussi!

Une voix: 1 kW.

M. Tremblay: Création d'emplois ou exportation.

M. Demers (Steeves): 1 kW, oui. O.K. Bon, effectivement, écoutez, nous, c'est clair que création d'emplois mais aussi développement d'expertise, valeur ajoutée, pour nous c'est primordial. On n'exclut pas le deuxième, par ailleurs, mais cet élément-là nous accroche beaucoup. En région, on voit les effets, il y a de la création d'emplois, mais plus que ça, des centres de recherche, de l'expertise, de la valeur ajoutée et de la richesse en région, littéralement. Mais l'exportation aussi, c'est un... Donc, c'est un portefeuille suffisant. Création de richesse multidisciplinaire, on y va de différentes approches, mais, à choisir, si on avait à choisir, c'est clair que, nous, on pense que le dollar investi en région, dans la communauté, est très fort.

Mme Bertrand (Françoise): Mais c'est pourquoi par ailleurs on propose plus que ce dont nous avons immédiatement besoin pour permettre... Pourquoi se priver? Une chose et l'autre, c'est pour nous l'idéal.

Maintenant, sur la question de la promotion du développement durable, c'est clair que c'est une préoccupation non seulement de petites entreprises en région, de toutes les entreprises et, je dirais, surtout la grande entreprise, très liée aux exigences de la mondialisation. De plus en plus, on voit les grandes entreprises comme les petites entreprises... Il y a une économie en soi. On voit tout ce qui s'est fait au chapitre de l'éolienne, c'est une économie. Il y a eu de la recherche et du développement, il y a la possibilité d'exportation, c'est en soi une économie. Mais la grande entreprise, pour être compétitive aujourd'hui et pour pouvoir répondre à des appels d'offres, est dans une philosophie de développement durable et, dans cette philosophie, amène ses fournisseurs à entrer dans ce qu'on appelle ? comment on appelle ça? ? le cycle de vie. Le cycle de vie. Et à cet égard la fédération a participé, avec la firme nationale, à l'automne, au Mont-Tremblant, au premier colloque sur le développement durable et la responsabilité sociale, et Daniel Audet, qui était l'instigateur de cette initiative, est membre de notre conseil d'administration, et nous avons l'intention de nous associer à la récidive annuelle de cette initiative.

Et bien sûr, que ce soit sur notre portail ou dans des activités, on aura un colloque régions ressources à la fin février, ici, à Québec. On va parler de développement durable. Il est clair que c'est important. Maintenant, on le répète, dans développement durable, il y a les considérations environnementales, mais il faut que ce soit avec un équilibre pour qu'on avance et qu'il y ait un réel devenir pour le Québec.

Le Président (M. Bachand): Merci, madame. M. Bouchard, vous vouliez ajouter quelques mots, peut-être?

M. Bouchard (Mathieu): Non. Écoutez, je n'avais pas plus de choses à ajouter. Peut-être un point, je pourrais peut-être ajouter un point au niveau du développement durable en disant que ce que j'entendais tout à l'heure... Par exemple, on parlait de la vapeur, l'utilisation de la vapeur, puis on parlait de la recherche et développement. Écoutez, l'utilisation de la vapeur peut être prise, par exemple, par des serres, par des entreprises qui ont vraiment des notions très, très fondamentales au niveau de l'environnement. Donc, on peut voir... Dans le cycle de vie d'une cogénération, le facteur du développement durable peut vraiment jouer un rôle principal.

D'autre part, j'entendais... Au niveau de la recherche et développement, c'est également une des solutions à adopter dans tout ce qu'on peut faire par rapport aux aires protégées. Lorsqu'on vient pour choisir une aire protégée, faire un choix par rapport à une entreprise à établir dans un certain endroit, il est évident que les efforts qu'on va faire du côté de la recherche et développement vont nous aider à améliorer... du moins à avoir plus d'alternatives devant nous pour faire le genre de choix dont vous parliez, M. Blackburn, tout à l'heure.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Bouchard. M. le député de René-Lévesque, il nous reste quatre minutes, puis j'aimerais donner l'opportunité ? vous aussi, j'en suis convaincu ? au député de Vanier de se prononcer et de poser ses questions. Donc, allez-y, M. le député.

M. Dufour: Alors, je vais essayer d'y aller très rapidement. Alors, je tiens d'abord à vous souhaiter la bienvenue et à vous féliciter pour votre mémoire parce que vous êtes la Fédération des chambres de commerce qui regroupe 170 chambres de commerce, et je pense que vous reflétez, dans votre mémoire, ce qui se passe réellement sur le terrain des régions, et vous en faites la nomenclature en page 10. La grande industrie en région est le donneur d'ouvrage au niveau des sous-traitants. Ça crée la richesse et l'économie.

Vous mettez, dans votre première proposition, votre première recommandation, de continuer de s'assurer que les grands consommateurs industriels disposent de l'électricité à un prix compétitif nécessaire à leur développement en région périphérique. Alors, moi, ça répond à ma question. C'est oui à l'exportation, mais on se sert avant, par rapport au développement économique des régions.

Là où est-ce que je veux vous entendre, c'est que vous parlez, en page 32, d'accroître les bénéfices revenant aux régions. J'aimerais que vous élaboriez davantage sur ça.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise): C'est un peu la discussion qu'on avait entamée, puis je laisserais peut-être notre président, M. Bouchard, en parler. Il a une grande fougue, lui aussi, pour cette question.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Bouchard.

M. Bouchard (Mathieu): En fait, le point qu'on voudrait faire par rapport à ça, c'est que, lorsqu'on alimente des industries, dans les régions du Québec, avec l'énergie qui nous est propre, ici, au Québec, ces entreprises sont entourées de fournisseurs et aussi éventuellement d'entreprises qui vont produire un certain nombre de produits à partir du produit qu'elles produisent eux-mêmes au niveau de la première transformation, et ça, c'est vrai non seulement au niveau des métaux, mais c'est vrai au niveau du bois, c'est vrai aussi au niveau de la chimie inorganique, comme on en a fait la démonstration tout à l'heure. Or, ce qu'on pense, c'est qu'il faut s'appuyer sur le développement de ces grandes entreprises et aussi sur ces petites et moyennes entreprises pour réussir à aller chercher les nouveaux créneaux qui se présentent actuellement dans le marché international, et on pense que c'est une belle façon de faire face à la mondialisation actuellement, de vraiment construire autour de ces pôles d'attraction qu'on retrouve dans les régions du Québec actuellement. Donc, c'est un peu la thèse que nous développons actuellement et certainement une qui nous tient à coeur actuellement chez plusieurs des membres au sein de la Fédération des chambres de commerce.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Bouchard.

Mme Bertrand (Françoise): Une approche systémique.

Le Président (M. Bachand): Merci, madame. Merci, M. le député de René-Lévesque. M. le député de Vanier.

M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour. J'ai bien aimé votre présentation. Vous touchez à plusieurs aspects, gaz, pétrole, et puis tout ça. Ça a été très intéressant. Vous parlez aussi de choc démographique quand vous parlez d'exportation. Alors, vous avez une vision, et puis, moi, j'ai bien aimé cette partie-là.

J'ai posé la question à quelques interlocuteurs précédemment et puis je vous la repose, ma question. L'augmentation des prix, lorsqu'on parle d'efficacité énergétique évidemment ? je crois que vous êtes aussi d'accord ? passe directement par une augmentation des coûts. Je veux vous entendre là-dessus. Est-ce qu'on parle uniquement d'inflation? Est-ce qu'on parle d'augmentation, vraiment de s'approcher du coût de nos voisins? Moi, je pense aux familles. J'ai rencontré des gens hier, dans mon comté, puis, lorsque je leur mentionne une augmentation des coûts au niveau hydroélectricité, la discussion devient assez féroce. Alors, je veux vous entendre là-dessus. Est-ce que vous mettez un temps, une augmentation sur un terme? Parce qu'hier on entendait des gens parler d'un cinq ans, puis tout ça. Alors, peut-être vous entendre là-dessus, sur un sujet qui est extrêmement important.

Le Président (M. Bachand): Madame.

Mme Bertrand (Françoise): Qui est vraiment sensible.

M. Légaré: Oui.

Mme Bertrand (Françoise): Pour avoir été responsable d'augmentations tarifaires en téléphonie, je peux vous dire qu'on a fait ça sur six ans, puis une année comportait une augmentation de 4 $. C'est aussi sensible. Peut-être que l'énergie l'est encore plus, il n'y a aucun doute.

n (10 h 40) n

Nous pensons qu'il faut se rapprocher... On ne pense pas que c'est la seule manière qu'on va, disons, arriver à une efficacité énergétique, mais on pense que le signal de prix doit être présent. On doit prendre sûrement quatre, cinq, six ans, et certainement doucement, faire voir l'importance que ça revêt. Parce que ce qui peut être le mécanisme d'équilibre ou de régulation, c'est de faire en sorte: je consomme moins, donc, au bout de la ligne, ça ne me coûtera pas, la première ou la deuxième année, beaucoup plus cher parce que je vais apprendre à réduire ma consommation.

Par ailleurs, en termes aussi de choix de société, il est clair que, pour certaines familles, pour certaines personnes, le prix, même aujourd'hui, est important, et à cet égard on a choisi, comme société, un filet social qu'on donne et qu'on va continuer à donner, j'imagine, et c'est par ces biais-là et non pas par le biais du prix de l'électricité comme tel.

M. Légaré: Vous dites: Quatre, cinq, six ans. J'ai mon opinion. Je veux entendre la vôtre. Est-ce qu'on parle d'un choc tarifaire?

Mme Bertrand (Françoise): Pas pour nous. Mais évidemment toute augmentation peut être vue et... Je vois déjà des titres de journaux à cet égard-là. Mais le choc tarifaire, ce serait de dire: Le juste prix en une année ou en deux ans. On pense que ça doit être graduel pour laisser le temps au consommateur, au citoyen québécois d'ajuster son comportement pour absorber l'impact de la hausse du prix.

Le Président (M. Bachand): Mme Bertrand, M. le député de Vanier, merci infiniment. M. Bouchard, M. Demers et M. Desrochers, merci de vous être présentés à cette commission. Vous êtes toujours les bienvenus chez nous. Merci et bon retour. Je vais donc demander au groupe... le Conseil des Innus de Betsiamites.

(Changement d'organisme)

n (10 h 42 ? 10 h 49) n

Le Président (M. Bachand): Donc, messieurs...

Des voix: ...

Le Président (M. Bachand): À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais inviter le Conseil des Innus de Betsiamites de prendre place, s'il vous plaît.

Donc, mesdames messieurs, c'est un plaisir pour la commission de vous recevoir ici, aujourd'hui. Je vais vous rappeler rapidement les règles de la commission. Vous parlez bien français? Je vous entendais... Oui? Absolument? Parfait. Donc, je vais prendre quelques instants pour vous rappeler les règles de la commission, qui sont fort simples: 20 minutes pour vous, pour la présentation de votre mémoire, 20 minutes du côté de l'opposition pour la période des questions et 20 minutes du côté ministériel pour la période des questions. Donc, par le fait même, je vous demanderais, pour le bénéfice des membres de la commission, de vous présenter.

Conseil innu de Betsiamites

M. Picard (Raphaël): (S'exprime en innu).

n (10 h 50) n

Des voix: (S'expriment en innu).

M. Picard (Raphaël): M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. Je vais commencer du côté matriarcal, qui est un ordre de gouvernance assez important dans notre tradition de gouvernance: à l'extrême droite, Mme Elisabeth Bacon, qui est vice-chef à l'emploi et au développement social; Mme Marielle Vachon, qui est vice-chef à la santé et au logement; il manque Mme Germaine Riverin, qui s'excuse parce qu'elle a une obligation de réunion aussi à Sept-Îles, Mme Germaine Riverin qui est vice-chef au développement culturel et à la langue; et, du côté patriarcal, M. Pierre-Pître Picard, vice-chef au développement économique et des ressources; M. Adélard Benjamin, vice-chef à la planification et au développement communautaire; et M. Mathieu Paul, à l'extrême gauche, qui est vice-chef à l'éducation et à la jeunesse.

J'essaierai de faire un résumé un peu plus succinct de ce qu'on vous a présenté comme mémoire ? je suis sûr que vous avez lu tout le contenu de notre mémoire ? pour vous dire que je souhaitais beaucoup participer à cette commission parlementaire sur le secteur énergétique au Québec, au nom de notre première nation de Betsiamites, et cela, pour plusieurs raisons, la première étant que l'avenir énergétique rime également avec l'avenir économique de notre région. Le développement de l'hydroélectricité comme le développement de nouvelles sources d'énergie signifient le développement économique et l'avènement d'une certaine prospérité pour la Côte-Nord, souhaitée ardemment par l'ensemble de sa population.

Pour certains qui aiment entretenir le doute et cultiver la division, je tiens à réaffirmer à nouveau devant cette commission que la nation innue de Betsiamites, et l'ensemble de ses membres, est favorable au développement et à l'exploitation des ressources naturelles. Cependant, ce développement ne peut se faire n'importe comment et à n'importe quel prix. Nous ne pouvons plus tolérer que se perpétuent les erreurs commises par les non-autochtones dans le passé, qui consistaient à profiter, aujourd'hui, de l'abondance de la ressource sans se préoccuper des conséquences pour les générations futures. Dorénavant, tout projet d'exploitation d'une ressource naturelle devra obligatoirement se faire dans une perspective de développement durable.

Le développement de la Côte-Nord et l'exploitation de ses ressources doivent aussi se faire en harmonie avec une autre réalité incontournable: la présence des Innus comme nation bénéficiant de droits sur le territoire, droits reconnus par les tribunaux et acceptés par la majorité des Québécois. C'est d'ailleurs la deuxième raison qui me motivait à venir vous rencontrer ce matin. Encore une fois, beaucoup de préjugés circulent concernant nos prétentions à cet égard. Je prendrai donc quelques minutes pour rappeler à la commission la réalité autochtone, nos droits et nos aspirations face à l'exploitation des ressources naturelles, source d'énergie et de richesse à partager équitablement, selon certains principes reconnus.

Finalement, je souhaitais vous entretenir des projets de minicentrale hydroélectrique que nous sommes à développer ainsi que du potentiel éolien présent sur notre territoire. Comme vous le voyez, le présent débat est fort important puisqu'il en va de l'avenir non seulement de nos ressources, mais aussi de l'avenir de nos régions, de nos descendants et surtout des relations entre tous les peuples qui cohabitent sur le territoire québécois. Vous trouverez, à l'intérieur du mémoire que vous avez entre les mains, les principaux éléments que je vais tenter de résumer dans le temps qui m'est imparti ce matin.

En 1995, les peuples autochtones du Québec ont participé à un débat public sur l'énergie. Cette participation n'a toutefois pas amené le gouvernement du Québec à adopter une politique qui tienne compte des autochtones. Dans sa politique énergétique publiée en 1996, le gouvernement accordait moins d'un chapitre à cette question, intitulé Un nouveau partenariat avec les nations autochtones. Ce titre était toutefois beaucoup plus ambitieux que le texte lui-même, car la politique ne permettait pas d'établir le nouveau partenariat souhaité par les nations autochtones. Le Conseil des Innus de Betsiamites souhaite que le gouvernement aille donc beaucoup plus loin qu'il ne l'a fait en 1996. Surtout, il doit se rappeler le constat, qui était d'ailleurs le sien au moment du dévoilement de sa politique énergétique: l'État québécois doit établir un véritable partenariat avec les nations autochtones. À cet égard, les représentants gouvernementaux doivent se rappeler de l'importante contribution des nations autochtones au débat public sur l'énergie au Québec. Depuis de nombreuses années, les nations autochtones ont souligné l'importance que représente pour elles le développement énergétique, à la fois source de bouleversements et occasion de développement économique.

Lors de la création de la Table de consultation sur l'énergie, le gouvernement avait désigné des représentants autochtones. Lors de sa tournée de consultation, la table a pu mesurer l'ampleur des défis que représente la gestion des ressources sur les territoires ancestraux. Dans toutes les régions du Québec, des autochtones ont exprimé leurs craintes mais aussi leurs attentes. Au terme de sa tournée, la table a d'ailleurs recommandé que le gouvernement accorde une place aux nations autochtones à titre de partenaires du développement énergétique.

La première nation de Betsiamites occupe son territoire traditionnel, ou Nitassinan, depuis des milliers d'années, soit bien avant l'arrivée des Européens. Elle a nommé les lacs, les rivières, les montagnes dans une langue toujours vivante qu'elle a enseignée à ses enfants. Chaque génération a transmis le Nitassinan à la suivante dans un profond respect de l'environnement naturel dont ils se considèrent responsables et dont ils ont le privilège de bénéficier. Les anciens ont accumulé un savoir étendu, une sagesse inestimable dans la gestion du cycle naturel et dans la connaissance de la faune et de la flore de leur territoire. Leur subsistance a traditionnellement été assurée par la pêche, la chasse et la cueillette. Aujourd'hui, les Innus sont en mesure d'assumer pleinement leur propre développement, particulièrement leur développement économique, dans l'esprit d'ouverture sur le monde qui les a toujours caractérisés. Cela peut se faire à la condition que leurs droits sur le Nitassinan soient pleinement respectés. Les ancêtres innus n'ont jamais renoncé à leur territoire. La présente génération et celles qui suivront ne fléchiront pas dans l'affirmation de leurs droits.

n (11 heures) n

Le Nitassinan de la première nation de Betsiamites a une superficie d'environ 140 000 km². À partir de la rive nord du fleuve près de Baie-Comeau et Forestville, il s'étend au-delà des monts Groulx jusqu'au réservoir Caniapiscau inclusivement, dont les environs étaient un important lieu traditionnel de rencontres entre différentes communautés autochtones. Les familles innues se sont réparti et se sont transmis le territoire selon leurs propres règles foncières que la Cour suprême du Canada n'hésite plus à considérer comme un système juridique antérieur au droit canadien.

L'antériorité de l'occupation historique du Nitassinan a produit d'importants effets juridiques. Les Innus de Betsiamites détiennent un titre sur l'ensemble de leur Nitassinan. En 1888, le Conseil privé, alors le plus haut tribunal de l'Empire britannique, a décidé que, lorsque les provinces avaient reçu la propriété des terres publiques en 1867, ce droit de propriété était subordonné au titre autochtone. La Cour suprême du Canada a réaffirmé cette règle de droit en 1997, dans l'affaire Delgamuukw.

En 1888, le Conseil privé avait également mis en doute, dans l'affaire St. Catherine's Milling, la capacité des provinces de tirer des revenus des ressources naturelles sur les terres publiques là où le titre autochtone n'avait pas été éteint. La Cour suprême du Canada a repris cet énoncé dans l'affaire Nation haïda, en novembre 2004. Étant donné que le titre des Innus n'a jamais été éteint, on peut s'interroger sur la capacité juridique du gouvernement du Québec de prélever des revenus des ressources naturelles, hydroélectriques, forestières, minières et éoliennes, tirées de l'exploitation du Nitassinan.

Dans l'affaire Delgamuukw, la Cour suprême du Canada a rejoint partiellement, avec beaucoup de retard, la conception que la première nation de Betsiamites a toujours eue de sa relation avec son Nitassinan. Pour la Cour suprême, le titre aborigène est le droit au territoire lui-même. La Cour suprême a défini le titre aborigène comme étant le droit d'utiliser et d'occuper de façon exclusive les terres visées. Depuis 1982, ce titre est garanti par la Constitution du Canada.

Dans ce jugement, la Cour suprême a établi une échelle des obligations constitutionnelles d'une province qui cherche à porter atteinte à un titre autochtone. Cette échelle est graduée en fonction de la gravité de l'atteinte projetée. Occasionnellement, dit la cour, lorsque l'atteinte est moins grave ou mineure, il n'existe qu'une obligation de consultation, mais celle-ci doit tenir réellement compte des préoccupations des peuples autochtones. Selon la jurisprudence qui a suivi l'arrêt Delgamuukw, l'obligation de consulter à ce niveau comprend le droit à un dialogue véritable avec les autorités publiques, le droit à toute l'information pertinente et le droit à une justification écrite des décisions gouvernementales eu égard aux préoccupations autochtones. Dans la plupart des cas, ajoute la Cour suprême, l'obligation fiduciaire exigera beaucoup plus qu'une simple consultation. D'autres tribunaux, notamment la Cour d'appel de Colombie-Britannique, ont précisé qu'à ce niveau il s'agissait d'une obligation de consulter, d'accommoder et de porter atteinte le moins possible au titre autochtone.

Enfin, selon la Cour suprême, lors des atteintes les plus graves au titre autochtone, l'obtention du consentement de la nation autochtone pourrait être exigée. La Cour suprême donne ici l'exemple de règlements provinciaux de chasse et de pêche qui visent les territoires autochtones. Les Innus considèrent que des projets massifs de développement hydroélectrique ou forestier portent atteinte à leur titre autochtone dans une mesure plus considérable que les règlements de chasse et de pêche, car ces projets anéantissent très souvent toute perspective de chasse, de pêche et de toute autre utilisation de grandes parties de leur territoire. Le consentement de la première nation de Betsiamites devra donc être obtenu pour de tels projets.

Dans sa pratique actuelle, le gouvernement du Québec est très loin de respecter ses obligations constitutionnelles telles qu'elles ont été définies dans l'arrêt Delgamuukw. Il se comporte comme s'il s'agissait, dans tous les cas, d'une simple obligation de consulter, qui pourtant, selon la Cour suprême, ne se présente qu'occasionnellement, dans le cas d'atteintes mineures. De plus, la consultation ne porte que sur des aspects périphériques ou secondaires aux projets. La première nation de Betsiamites a clairement le droit d'exiger que toute atteinte significative à son titre fasse l'objet d'une entente négociée et qu'une forme de cogestion en amont des prises de décision importantes relatives à son Nitassinan soit instaurée. Il doit en être ainsi avant l'émission d'un contrat d'aménagement et d'approvisionnement forestier ? CAAF ? l'autorisation de construire un barrage ou le début de tout autre projet de développement et d'exploitation des ressources naturelles.

Dans le récent arrêt Nation haïda, la Cour suprême a clarifié davantage sa position. Elle a établi une distinction entre la situation juridique qui prévaut avant et après la preuve définitive d'un titre devant le tribunal. Avant la preuve définitive, si le titre est vraisemblable et crédible, il existe une obligation d'accommoder substantiellement les préoccupations de la première nation concernée. Les Innus de Betsiamites estiment qu'après plus de 25 ans de négociations avec les gouvernements en vue d'un traité, après une entente de principe, après d'autres formes de reconnaissance de leur titre par l'État, leurs revendications sont particulièrement étoffées. Les gouvernements fédéral et québécois n'auraient pas investi autant de ressources sur une aussi longue période pour en arriver à un traité si la revendication territoriale n'avait pas été très sérieuse à leurs yeux. Il en résulte une obligation d'accommoder substantielle qui équivaut à une forme de cogestion sur les ressources naturelles du Nitassinan de Betsiamites.

L'impact des projets hydroélectriques sur les Innus de Betsiamites. La première nation de Betsiamites a connu, au fil des ans, de nombreuses expériences relatives au développement hydroélectrique. Certaines expériences furent enrichissantes, mais la grande majorité d'entre elles ont eu des effets négatifs majeurs et irréversibles. Les relations avec Hydro-Québec en particulier ont causé et causent toujours des irritants importants. Contrairement à la perception populaire, les Innus de Betsiamites n'ont pas été privilégiés par les grands projets d'Hydro-Québec et encore moins par les autres projets privés. Les Innus de Betsiamites ont subi des dommages importants et les gouvernements doivent en tenir compte dans les projets de développement futurs.

Au total, on dénombre pas moins de 13 barrages hydroélectriques construits sur notre territoire ancestral. Aucune compensation équitable ne nous a été versée pour ce développement. Ce développement hydroélectrique, qui s'est produit depuis la moitié du siècle dernier sur le Nitassinan, a eu lieu au mépris des droits ancestraux et du titre aborigène des Innus. Ce développement s'est fait sans leur consentement et sans entente avec eux. Il a ennoyé plusieurs territoires familiaux, accéléré la sédentarisation et modifié leur mode de vie. Les barrages qui ont été construits sur leur territoire, sur le territoire innu, ont encore des effets cumulatifs négatifs sur la communauté de Betsiamites. Des sites patrimoniaux ont été endommagés et des sépultures ont été inondées. Les Innus n'ont plus accès à de grandes parties de leur territoire ancestral.

Les relations entre les autochtones et Hydro-Québec ont toujours été difficiles. Dès l'annonce du grand projet de la Baie James, le gouvernement du Québec a réalisé qu'inonder de grands territoires ne se ferait pas sans tenir compte des autochtones. Il aura néanmoins fallu une décision d'un tribunal pour amener le gouvernement à écouter les autochtones. Les recours aux tribunaux ont d'ailleurs parsemé le chemin des relations entre Hydro-Québec et les autochtones. La raison en est bien simple, Hydro-Québec est une entreprise qui cherche à maximiser ses profits. Les droits des autochtones sont quant à eux perçus comme des freins à l'enrichissement de la société d'État. Les peuples autochtones ont donc subi et subissent encore les contrechocs des volontés des développeurs d'Hydro-Québec.

Les Innus veulent s'affranchir définitivement de la dépendance et entrer dans des relations de partenariat économique fondées sur le respect mutuel et la volonté commune d'innover et de réussir. À cet égard, le partenariat avec Hydro-Québec est incontournable, ne serait-ce qu'en raison de son poids économique et de sa présence massive sur notre Nitassinan. Après de longues années pendant lesquelles Hydro-Québec a participé activement à la dépossession du territoire innu, le discours a changé. La haute direction de la société d'État a jugé que le temps était venu de redorer son blason.

n (11 h 10) n

Il est décevant de constater qu'au-delà des mots et des ententes la culture d'entreprise n'a pas changé en profondeur. Les Innus ne sont toujours pas considérés comme de véritables partenaires par Hydro-Québec, ils continuent plutôt d'être perçus comme des entraves à un développement qui est défini unilatéralement par quelques décideurs en manque de profits. Les relations sont encore loin de la cogestion des ressources naturelles à laquelle les Innus ont droit et qu'ils obtiendront malgré la résistance d'Hydro-Québec et de plusieurs de ses gestionnaires.

Les projets de développement énergétique des Innus de Betsiamites. Dans le cadre des négociations territoriales globales, le gouvernement du Québec a offert à trois communautés présentes à la table ? Mashteuiatsh, Essipit et Betsiamites ? l'opportunité de cibler des sites pouvant atteindre une capacité totale de 30 MW. La communauté de Betsiamites est la seule qui s'est montrée intéressée et a sélectionné les sites des Mille 4 et Mille 6 de la rivière Sault aux Cochons comme sites de développement potentiel de petites centrales. Les sites ont été réservés sous le Programme d'octroi des forces hydrauliques du gouvernement du Québec, en mars 2002, mais ledit programme a été suspendu en novembre de la même année.

Le Conseil de bande de Betsiamites a investi des sommes importantes en vue de réaliser une étude de préfaisabilité. Cette étude a permis d'identifier de façon préliminaire que le projet nécessiterait des investissements de l'ordre de 35 millions. Les ouvrages comprennent des centrales au Mille 4 ainsi qu'au Mille 6 sur la rivière Sault aux Cochons. La rivière est déjà harnachée, tant en aval qu'en amont, ce qui limite les impacts environnementaux liés au projet.

Ayant rencontré les conditions posées par le gouvernement du Québec, le Conseil de Betsiamites a déposé, en janvier 2004, un avis de projet au ministère de l'Environnement du Québec. Une rencontre, au printemps 2004, avec le ministre des Ressources naturelles, M. Sam Hamad, a permis de confirmer la réservation des sites des Mille 4 et 6 de façon exclusive pour la communauté de Betsiamites.

Le conseil a confié à une firme d'ingénierie la réalisation des études d'impact environnemental. Cette étude permettra de préciser le projet final, de déterminer les impacts et les mesures d'atténuation tout autant que de préciser la structure financière qui y sera associée.

Le Président (M. Bachand): Excusez-moi. Il vous reste quelques minutes. Est-ce que c'est possible d'arriver à la conclusion?

M. Picard (Raphaël): Oui, oui.

Le Président (M. Bachand): Allez-y.

M. Picard (Raphaël): Je vais sauter cette étape-là. Et aussi on a fait une étude du potentiel éolien sur le Nitassinan et nous sommes en train de voir l'opportunité de déposer au conseil un projet d'énergie éolienne de l'ordre de 200 MW, dont le promoteur serait le conseil de bande.

Vous allez voir que notre préférence se porte sur l'énergie éolienne, dont la maturité de la technologie et la croissance exponentielle qui lui est associée partout dans le monde, les impacts environnementaux et sociaux minimes et le support des organismes environnementaux et acteurs du développement durable en font une filière énergétique à la fois dynamique et bien acceptée de la population.

En conclusion, les Innus veulent, à l'occasion de cette commission, rappeler publiquement leur volonté de participer pleinement au développement énergétique du Québec et à la gestion des ressources naturelles non seulement afin d'exercer leurs droits ancestraux, y compris le titre, mais également afin d'éviter des drames écologiques irréparables. Les autochtones, et les Innus plus particulièrement, appliquent le principe du développement durable depuis des temps immémoriaux.

La première nation de Betsiamites travaille actuellement au développement de deux petites centrales hydroélectriques sur la rivière Sault aux Cochons et a procédé à une étude sur le potentiel éolien de son Nitassinan. Le développement de ces projets énergétiques sera rentable pour les Innus de Betsiamites et pour l'ensemble de la région de la Côte-Nord. C'est également tout le Québec qui sortira gagnant de l'exploitation, de façon écosystémique et durable, de ses sources d'énergie propres et renouvelables.

Quant aux futurs grands projets, la participation des premières nations est maintenant essentielle. Le Conseil des Innus de Betsiamites juge que, s'il y a de grands projets hydroélectriques sur le Nitassinan, le consentement des Innus est nécessaire. La première nation de Betsiamites considère aussi nécessaire la réalisation de partenariats financiers et économiques négociés de manière transparente et limpide. Les Innus de Betsiamites sont donc très certainement en faveur du tournant vert qu'envisage le gouvernement. Il doit cependant le faire en respectant pleinement les droits ancestraux, y compris le titre, des premières nations sur les ressources naturelles. Il est important que les autochtones soient partie prenante à la gestion des décisions les concernant. L'implication des autochtones favorisera l'atteinte des objectifs du développement durable et permettra également de bâtir des liens durables entre la nation québécoise et la nation innue. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bachand): C'est nous qui vous remercions, M. Picard. Pour le bénéfice des membres de la commission et surtout pour le bénéfice des auditeurs de M. Picard, est-ce que c'est possible de nous expliquer la signification de votre introduction avant même la présentation de votre mémoire?

M. Picard (Raphaël): En innu?

Le Président (M. Bachand): Parce que vous aviez parlé en innu. Honnêtement, je n'ai pas cette compétence-là, et les auditeurs, peut-être dans les membres de cette Assemblée... Mais les auditeurs qui nous écoutent sur le canal de l'Assemblée nationale aimeraient peut-être partager, là, ce que vous avez dit.

M. Picard (Raphaël): Oui. J'ai dit qu'on venait encore une fois s'asseoir avec vous dans un esprit d'ouverture, et on a demandé que nos travaux puissent être efficaces et qu'il y ait un bon rendement dans nos discussions, dans nos échanges. Et on a demandé aussi l'éclairage de notre Créateur pour que ces échanges soient utiles et profitables à tous.

Le Président (M. Bachand): Merci. Et, au nom des auditeurs et de mes collègues, je vous remercie, M. Picard. Donc, je vais privilégier M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. Allez-y, M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Chef Picard, bienvenue à Québec et bienvenue à votre communauté. Je vais vous le dire dans votre langue: kuei.

Nous avons eu plusieurs rencontres à date, chef Picard, vous le savez, on s'est rencontrés. J'ai toujours remarqué votre volonté de développement. Vous voulez développer votre communauté. Vous voulez développer des projets et surtout dans mon domaine, dans mon secteur des ressources naturelles, c'est-à-dire dans le domaine de la forêt, dans le domaine des ressources hydriques. Et évidemment vous avez parlé que vous avez des projets.

Maintenant, dans votre mémoire, à la page 6, vous dites... Et j'ai été surpris un petit peu, honnêtement, mais on va en discuter. Alors, vous avez souhaité qu'elle soit une discussion claire, et on va en faire une. Vous dites dans votre mémoire: «Jusqu'à présent, le gouvernement du Québec n'a pas fourni la preuve qu'il souhaitait agir de manière à favoriser le développement durable de concert avec les nations autochtones, à l'exception peut-être des nations cries ? "Paix des Braves" ? et inuite ? entente Sanarrutik ? signataires de la Convention de la Baie James.» C'est ça qui était dit dans votre mémoire, à la page 6. Et actuellement, vous le savez très bien, vous faites partie des négociations de l'Approche commune, et ça fait quelques années. On continue ces négociations-là avec votre communauté et les autres communautés innues dans le but d'avoir une entente équitable pour les deux parties et dans le but évidemment de développer vos communautés, les communautés non autochtones et de développer le territoire au Québec.

En quoi vous pensez que les autres ententes sont... D'ailleurs, il n'y a pas encore une entente avec vous. Mais pourquoi vous dites ça, qu'actuellement il n'y a pas de... On est en négociation pour une entente et on travaille ensemble, les deux parties, alors on est en... En fait, l'objectif, c'est avoir une entente équitable, deux parties. Donc, on est en cours. Alors, c'est quoi, votre idée, là?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): Je n'ai pas trop saisi. En cours? En cours de négociation?

M. Hamad: Vous comparez les ententes, «Paix des Braves», les ententes avec les Inuits, et vous dites que... Vous, ce que vous dites dans votre mémoire, là, ce que vous dites ici: «Jusqu'à présent, le gouvernement du Québec n'a pas fourni la preuve qu'il souhaitait agir de manière à favoriser le développement durable de concert avec les nations autochtones...» Bien, en fait notre objectif, c'est ça, on le travaille. Et d'ailleurs les négociations avec vous, c'est dans ce but-là et dans un but aussi de développement des communautés autochtones et non autochtones.

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

n (11 h 20) n

M. Picard (Raphaël): M. le ministre, l'Entente de principe d'ordre général a été paraphée par les négociateurs, nos trois négociateurs, en avril 2002. Il y a eu une commission parlementaire qui s'est tenue ici, en mars 2003. Il y a eu changement de gouvernement. On a eu presquement une quinzaine de rencontres avec le ministre responsable des Affaires autochtones pour partager les conclusions de l'entente de principe. Ça a été difficile de lui faire avaler les compromis qu'il y avait dans cette entente de principe. Nous avons eu des discussions assez fermes. Il voulait nous faire signer une lettre d'accompagnement qui était complètement l'opposé des compromis qu'on a eus dans l'entente, dans les grandes lignes de l'entente. Nous n'avons pas signé cette lettre d'accompagnement.

Nous avons conclu, au cours des mois précédant la signature de l'entente de principe, que le présent gouvernement tardait à émettre une volonté ferme pour accélérer les négociations vers un traité. Et de même, après la signature de l'entente de principe et avec tout le réaménagement des participants potentiels à la table de négociation, notamment les délégués des régions et les représentants des régions, aujourd'hui, à l'heure où on se parle, il n'y a pas de négociation vers le traité. Des fois le ministre se lève, il dit qu'il y a une négociation à neuf, et d'autres fois il dit: C'est peut-être à quatre ou à sept.

Nous avons une table conjointe des neuf, mais certaines de nos communautés n'ont pas encore le mandat de négocier par leurs pairs. Alors, vous verrez qu'à un moment donné, nous, on est disposés, la communauté de Betsiamites, puis on a fermement reconduit la volonté de négocier vers un traité. Et, s'il y a un manque de volonté de la part du ou des gouvernements, nous, nous ne contrôlons pas ça. Nous ne contrôlons pas ça. Et j'espère que plus les choses avancent, plus les événements font en sorte que, nous, du côté innu, il y a aussi des événements qui se passent à l'interne de nos communautés et à l'interne de la nation, au niveau des neuf.

Alors, moi, je me dis: Est-ce que, là, après 25 ans... On a été d'une docilité, depuis 25 ans, M. Hamad, puis d'une tolérance... On voyait passer les grosses caravanes de bulldozers, des camions de bois sur notre territoire, 11 caches chez nous, 13 barrages, développement minier, de la prospection un peu partout. On a été très dociles. Maintenant, il va falloir, comme je le dis, ne pas brûler le bâton par les deux bouts. Là, il y a un manque de volonté, il y a des événements où le Québec ne respecte pas sa parole donnée dans certains autres cas.

Nous, on est prêts. On est prêts du jour au lendemain. Nos ressources techniques et professionnelles sont prêtes, sont prêtes à négocier. Ce qu'on exige, c'est que la formule de négociation soit la même qu'avant et qu'il n'y ait pas une estrade de gérants extérieure à cette table-là.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Picard. M. le ministre.

M. Hamad: Vous savez, notre gouvernement a une volonté ferme de maintenir des bonnes relations avec les communautés autochtones. Et d'ailleurs, au printemps dernier, il n'y a pas longtemps, nous avons signé une entente historique avec les Cris, suite à la «Paix des Braves» évidemment qui est une entente importante et historique où l'Hydro-Québec et les communautés cries réglaient tout le passé, puis on travaille pour l'avenir. Alors, pour nous, l'Hydro-Québec, c'est un instrument de développement important qui doit travailler avec les communautés autochtones, et je pense qu'Hydro-Québec... Cette volonté-là est traduite dans toutes les démarches qu'Hydro-Québec font, ça, c'est clair pour nous.

Et parlez-moi de vos projets de minicentrale ou petite centrale. Vous en avez parlé un petit peu, mais peut-être... Vous, évidemment vous avez deux projets, dans votre communauté, que vous voulez développer, de minicentrale de 30 MW à peu près.

M. Picard (Raphaël): 16 MW, là. C'est deux minicentrales de 16 MW dont nous avons fini les études d'impact environnemental. Elles vont être déposées au ministère de l'Environnement. Et nous essayons de conclure, tant bien que mal, une entente avec Hydro-Québec. Le 2 décembre, nous nous entendions sur le principe, sur un protocole d'entente avec Hydro-Québec, et, suite à certains événements, le 15 décembre dernier, l'Hydro-Québec ne respectait plus la parole donnée et manifestait à établir de nouvelles conditions dans ce protocole d'entente là d'achat d'électricité. Et là nous sommes encore en attente de confirmation, mais sauf qu'on s'était entendus sur le principe pour un protocole d'entente sur l'achat d'électricité, pour les deux minicentrales, par Hydro-Québec.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Comment vous voyez le développement dans votre région, la Côte-Nord globale, là, avec évidemment les deux communautés, autochtone et non autochtone? Comment vous voyez ça dans les années à venir?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): On a consulté la population régionale des MRC de la Haute-Côte-Nord et les élus, et la MRC de Manicouagan. Nous avons rencontré des gens. On a fait une assemblée publique à Forestville. C'est là que, moi, à mon avis, le développement, il va falloir aller le prendre en charge. Il est révolu, le temps où des multinationales ou des grandes compagnies qui sont extérieures aux intérêts de la région viennent prélever les ressources. Une fois qu'il y a des coûts bas ou les actionnaires n'ont plus les bénéfices qu'ils devraient avoir, ils quittent la région et laissent le monde avec leurs problèmes. Il est révolu aussi.

Puis, quand je vois les maires faire des pèlerinages, aller voir le ministre responsable de ci ou de ça, ou des préfets, puis aller quémander des petites subventions, moi, ça me désole d'avoir une approche que je considère petite, là, à la pièce. Moi, je pense plus gros que ce que les élus municipaux pensent. Il est fort possible de coordonner nos efforts entre les promoteurs de la région et les entités municipales dans la région, avec nous.

Notre croissance démographique, elle est très importante, elle est de 90 pour 1 000, aux dernières analyses démographiques qu'on a faites. Et n'oublions pas que, d'ici quelques années, les Innus vont être les 2/5 de la population de la Côte-Nord. Nous, on est en croissance constante. Alors, c'est là où on dit, là: Il va falloir mettre notre innovation, notre créativité ensemble. Il va falloir penser gros, grand, penser pour... Il est révolu, le temps, là, où les gens sortent avec tout le bois, l'hydroélectricité, etc. Il va falloir qu'il y ait une rétention de la richesse en région.

Si les régions veulent avoir un pouvoir économique, elles doivent mettre en commun leurs richesses et se constituer un patrimoine financier, sinon on va être toujours à la remorque de d'autres décideurs. Et là où on s'en va, c'est que la prise en main de nos affaires dans la région, non autochtones et autochtones, ça doit se faire dans un protocole socioéconomique qui devra autant préserver la pérennité des ressources qu'avoir une exploitation mesurée, basée sur le développement durable des ressources.

n (11 h 30) n

Moi, à mon avis il est fort probable qu'on doive enlever le concept de mono-industrialité dans les régions ressources. Puis, quand on dit «régions ressources», moi, ça m'affecte quand on dit ça. C'est le bordel du coin, là. N'allez pas dans un... Tu sais, rentrez dans le bordel du coin et ressortez, là. Tu sais, une petite vite... Mais ça, ce qui est important pour moi, là... Si nos députés, nos élus, nos intervenants socioéconomiques se concertaient, et si on imaginait, et si on rêvait, et si on mettait ensemble nos patrimoines financiers dans le but d'investir nous-mêmes et de se donner des sûretés auprès des institutions, je pense qu'on est capables de faire de grandes choses.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: ...mes collègues, M. le Président.

Le Président (M. Bachand): Oui. M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. Chef, vice-chefs, kuei. Je vous avouerai que je suis très heureux de pouvoir avoir le privilège d'avoir ce genre de discussion là, je dirais, entre nous, franche, sans intermédiaire. Vous savez, on a souvent des groupes qui peuvent nous représenter et servir d'interlocuteurs ou même, je dirais, à la limite, de conseillers qui n'ont pas nécessairement les mêmes intérêts qu'on souhaite, nous, comme communauté, et souvent ça peut créer de la distorsion. Alors, d'avoir le privilège de le faire ensemble, ce matin, face à face, je pense que c'est pour nous un moment important dans la continuité des échanges dans lesquels nous sommes en train de travailler.

J'aimerais juste faire un petit retour, chef, sur l'élément de la volonté de notre gouvernement bien sûr d'aller de l'avant dans la poursuite des négociations dans lesquelles nous avons eu, je pense, comme geste important, l'an passé, la signature de l'entente de principe. Pour toutes sortes de raisons, il y a peut-être un peu des fois des mécanismes qui sont au ralenti, mais je pense que ça démontre qu'il y a une volonté mutuelle d'arriver à une entente qui va faire en sorte que votre communauté et notre communauté vont pouvoir justement partir sur des bases solides. Et, dans ce contexte-là, moi, je suis convaincu que l'avenir est plus rose que certaines personnes ne le laissent prétendre.

Et, dans cette perspective-là, on a eu l'occasion de se rencontrer il y a quelques semaines, et bien sûr nous sommes à la préparation du Forum économique sur les communautés autochtones, et je suis convaincu qu'ensemble le sujet de l'énergie d'après moi peut être une porte importante en ce qui a trait au développement économique.

Mais j'aimerais juste revenir, chef, sur des ententes qui fonctionnent bien, je pense, concernant, entre autres, du développement hydroélectrique avec Hydro-Québec et Mashteuiatsh qui est une communauté autochtone qui est dans mon comté, qui est ma voisine, qui est située très près de Roberval. Vous savez, il y a eu des ententes négociées qui font en sorte qu'il y a des retombées importantes d'abord pour la communauté de Mashteuiatsh ? on parle de 80 millions sur une cinquantaine d'années ? d'une part, mais, d'autre part, il y a aussi tout l'aspect des contrats pour permettre à la communauté, aux entrepreneurs de cette communauté-là de pouvoir travailler. Il y a au-delà d'une quarantaine de millions de dollars actuellement qui ont été donnés à des entrepreneurs de Mashteuiatsh pour faire bien sûr la réalisation de cet ouvrage-là qui est extrêmement important. On parle de retombées économiques, dans le milieu, d'au-delà de 350 millions de dollars que des hommes et des femmes vont pouvoir, grâce à leur travail, grâce à leur ingéniosité, pouvoir faire retomber dans le milieu. Alors, il y a des choses intéressantes qui se font.

Pensez-vous que ce même genre d'entente là, ce même genre de partenariat là peut avoir une alternative, un avenir intéressant avec votre communauté, bien sûr pour le secteur de la Côte-Nord, entre autres?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): Merci de poser cette question-là. Je ne veux pas commenter l'entente de la communauté de Mashteuiatsh, mais par contre je peux commenter celle qu'on a signée avec Hydro-Québec, et je pense que c'est la troisième... C'est peut-être quatre avec Wemotaci maintenant. Ils ont signé ce type d'entente, une entente avec Hydro, une entente de partenariat.

Il est sûr que pour nous on a eu des difficultés au début à cause de l'échéancier brusque de début des travaux que, nous, dans un contrat... On nous a imposé un contrat, là. Ça n'a pas été de gré à gré. Et je pense encore que les impacts de ce contrat imposé là font en sorte qu'on a encore des relents au niveau financier, puis on doit continuellement redresser les choses avec Hydro. C'est quand l'évaluation, le «backup» des travaux est de tant, puis on t'en ampute 10 millions parce qu'ils avaient commencé les travaux avant de signer un contrat. Ça, c'est un autre problème. Or, je pense qu'Hydro-Québec n'a pas été honnête dans cette démarche-là. Et on a eu des dépassements de coûts pour ce contrat-là. Il y a eu un dépassement de coûts de 8 millions qu'on devait assumer, et donc 12 entrepreneurs ? M. Dufour peut en témoigner ? 12 entrepreneurs étaient virtuellement en faillite, et nous avons fermement renégocié le paiement de ce dépassement de coûts avec Hydro, et nous avons pu éviter la faillite aux entreprises, à nos sous-traitants qui étaient de la région.

Moi, à mon avis ça a deux volets, le contrat avec Hydro: il y a le volet, finalement, je n'appellerais pas ça de compensation, là, de participation financière à un projet, où tu as un investissement à faire, et les contrats. Moi, pour ma part la formule que je privilégie, ce serait qu'on puisse être des partenaires financiers à la construction d'un barrage et d'une centrale.

M. Blackburn: ...

Le Président (M. Bachand): M. le député de Roberval, désolé, il n'y a plus de temps. Je vais laisser terminer M. Picard, et puis je pense qu'on va conclure avec ça, là.

M. Blackburn: ...partenaires financiers, est-ce que c'est dans la réalisation des ouvrages, ou c'est comme investisseurs?

M. Picard (Raphaël): Comme investisseurs. Il y a moins de problèmes et tu rentres dans les bénéfices. Et je pense que, nous, on a participé, comme partenaires financiers, à la dérivation de Trois-Rivières, et là, je pense, notre partenariat a été très, très, très concluant, mais pas nécessairement dans les contrats. Il y a toujours un doute, là, à cause... C'est de la gestion de projet, hein?

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Picard, merci, M. le député de Roberval, pour votre collaboration. Donc, Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs mesdames, bonjour et bienvenue. Vos réflexions dans ce mémoire sont extrêmement intéressantes, et vous avez parlé... Enfin, dans le mémoire, vous avez parlé des cultures d'entreprise à changer, et c'est vrai que c'est un long processus de changement, ardu. Et, dans ce contexte-là, la contribution que vous apportez à une commission comme la nôtre est extrêmement importante parce que, nous aussi, on doit absorber des changements, et il faut les comprendre, et le fait d'avoir cette occasion de dialoguer, ça nous aide à comprendre.

Dans votre présentation, puisque la commission ici est sur l'avenir énergétique du Québec, j'ai l'impression que vous avez un potentiel énergétique assez intéressant, au développement duquel vous souhaiteriez contribuer. Vous avez parlé de l'éolien, d'une capacité que vos travaux ou ceux de vos consultants ou de vos conseillers vous ont permis d'établir à 200 MW. Vous avez parlé aussi de biomasse essentiellement forestière. Est-ce que vous avez regardé ça un peu plus attentivement pour voir quel serait le potentiel possible au niveau de la biomasse?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): Il est sûr qu'il y a beaucoup de résidus, hein, des coupes, là, des scieries, etc., qui font en sorte que ça pourrait être un potentiel, mais on n'a pas regardé ça sous cet angle-là. C'est au niveau du recyclage des pneus qu'il y a, je pense, des appels d'offres au niveau de la liquidation par RECYC... ou il peut y avoir un mélange. On essaie d'avoir moins de résidus forestiers parce qu'il faut en couper plus, hein? Il ne faut pas créer un nouvel élément de surexploitation. Alors, nous, c'est l'alliage entre les deux, entre les résidus des coupes et les pneus. C'est un peu ça. Mais on n'a pas encore regardé ça de façon plus... mais on a des promoteurs qui sont venus nous voir.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Donc, il y aurait un potentiel aussi à ce niveau-là. Évidemment, les technologies sont... Moi, je ne connais pas, là, les technologies qui permettraient de prendre les deux, mais peut-être que ça se développe.

Vous avez aussi parlé du potentiel hydroélectrique. Je voudrais juste... Vous avez dit qu'il y avait deux projets de centrale de 16 MW. C'est ça?

Une voix: ...

Mme Dionne-Marsolais: Ou de 8-8? Ah! un total de 16. C'est ça?

n (11 h 40) n

M. Picard (Raphaël): 16 MW.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. Et puis ce que je retiens aussi, puis ça, je pense que c'est important... Je rejoins un peu mon collègue de Roberval. C'est important qu'on comprenne bien votre intention de participer à ce développement-là pour y répondre parce que l'intérêt du développement et de la sécurité énergétiques du Québec, c'est l'intérêt de tous les Québécois. Et je dois vous dire que, moi, j'aime beaucoup vous entendre parler d'ambition parce que je trouve ça intéressant que l'on ait une vision, pour nos deux nations respectives, je devrais dire, qui soit ambitieuse parce qu'on a un potentiel, dans la nouvelle dynamique de l'évolution énergétique, respectant les valeurs de chacun, et je trouve qu'on a beaucoup à apprendre, de part et d'autre, et je suis contente que vous soyez venus discuter avec nous de ça.

Moi, j'ai beaucoup apprécié la lecture de votre mémoire et j'espère que les décisions qui seront prises par la suite permettront de répondre à vos ambitions; je devrais dire à nos ambitions respectives. Et je vais passer la parole à mes autres collègues qui ont des questions peut-être plus pointues.

Le Président (M. Bachand): Merci, Mme la députée. Donc, M. le député de Lac-Saint-Jean, ensuite M. le député de René-Lévesque.

M. Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. J'aurais deux questions. Je me fascine beaucoup pour la diversité culturelle et je me suis beaucoup approché des communautés autochtones pour connaître justement votre culture, votre histoire et vos connaissances ancestrales, qui doivent d'ailleurs être protégées le plus possible, et vous avez une lourde tâche par rapport à ces questions.

Mais, tout à l'heure, vous avez parlé de minicentrales, et la question que je me posais: Selon vos valeurs ancestrales, quelle est selon vous la relation qu'on peut avoir avec une rivière? Parce que, vous savez, il y a un grand débat au Québec. À un moment donné, il y en a beaucoup qui disent: Une rivière, il faut garder ça vierge, il ne faut pas toucher à ça parce que c'est sain. Mais bien souvent ces gens-là n'habitent même pas le territoire ou y vont occasionnellement, alors que, vous, depuis des milliers d'années, vous êtes en relation avec votre territoire. Quand on harnache une rivière pour faire une minicentrale, comment voyez-vous ça par rapport au développement durable ou à l'environnement?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): D'abord, j'aime bien votre question, et je m'y attendais, tout le monde me la pose. D'abord, une chose, la rivière Sault aux Cochons. Quand on nous a dit d'identifier des sites, nous, on n'a pas identifié une rivière vierge, on a identifié une rivière où il y a trois minibarrages, et une rivière où il y a un barrage en amont et une rivière qui a subi les contrecoups de la drave pendant 50 ans. Or, nous, on s'est dit: Entre l'opportunité qu'on nous donnait versus le développement de minicentrales, on a décidé, quitte à avoir des problèmes de rentabilité moindre... Mais on pourra éventuellement aussi avoir une plus-value dans le domaine des impacts, amoindrir les impacts environnementaux.

Alors, cette rivière-là, elle t'a beaucoup donné, et c'est là où on a pu trouver un compromis entre notre ambition de ne pas briser des rivières vierges et l'ambition qui était contenue dans l'entente de principe. Alors ça, c'est très important de le dire. Et, nous, sur le plan technologique, le plan technologique, là, on a pris toutes les précautions d'amoindrir, d'atténuer les impacts environnementaux, surtout au niveau du paysage, en faisant un barrage au fil de l'eau et qu'on procédait un peu... C'est presquement en milieu municipal aussi.

M. Tremblay: Une petite question?

Le Président (M. Bachand): Absolument. Allez-y, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Merci. Dans un autre ordre d'idées, quand on voit qu'il y a des ententes financières entre Hydro-Québec et les communautés autochtones et que ça représente des bons montants d'argent, et considérant aussi que vous avez, dans les communautés autochtones, le taux de natalité le plus élevé puis vous avez des défis sociaux, en tout cas peut-être pas sans précédent, mais énormes comparativement à la population que vous avez, est-ce que les argents qui sont octroyés dans le partage des revenus, est-ce que ça sert justement à lutter contre les inégalités sociales, à lutter contre la criminalité, à travailler pour l'éducation dans les communautés?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): L'expérience qu'on a eue des impacts de notre entente avec Hydro, de 1998... Nous, on essaie d'assurer une pérennité financière des bénéfices qu'on a. On essaie d'utiliser ça éventuellement à du réinvestissement dans le domaine du développement industriel ou du développement hydroélectrique et du développement, là... mais dans une perspective de développement durable.

De plus en plus aussi, on essaie d'avoir une démarche, des interventions par l'employabilité, par la formation, plutôt que de faire des processus de thérapie qui sont temporaires ou... On essaie de changer complètement l'ordre social finalement qui existe au niveau des problématiques pour mettre des mesures plus structurantes et on y investit. Et je pense que, juste dans le domaine du logement, depuis deux ans, on a investi beaucoup dans le domaine du logement et on est en train de réinvestir aussi beaucoup dans le domaine du logement. Et, dans nos écoles, on se donne aussi certains immeubles, là, pour des fins de loisirs.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue, chef Picard et les vice-chefs, à l'Assemblée nationale. Ça nous fait plaisir de vous recevoir. Croyez-moi sincère, j'ai bien pris soin de lire votre mémoire, et je vous dirais qu'à cette commission-là, malgré que c'est la commission sur la sécurité énergétique, quand on regarde l'introduction et l'ensemble de votre mémoire, il y a un peu des messages qui passent là-dedans.

Je regardais au niveau de l'ensemble du courant jurisprudentiel que vous avez mentionné en ce qui a trait au territoire. Juste pour faire une nomenclature courte, quel est le principal message que vous lanceriez à l'ensemble des leaders socioéconomiques chez nous, Hydro-Québec, au niveau des paliers de gouvernement, sur la forme de partenariat, même si vous y avez touché un peu tantôt, là, que vous voyez, vous, dans votre vision de développement économique régional? Et en sous-question, parce que je vais passer la parole à mon collègue, au niveau de l'éolienne, vous parlez de 200 MW, au niveau de l'éolienne. Sur quelle partie du territoire Nitassinan ça se trouve, cette partie de développement énergétique là?

Le Président (M. Bachand): M. Picard.

M. Picard (Raphaël): Merci, M. le député. Pour ce qui est du message, d'abord, moi, je pense que le partenariat doit être aux deux niveaux dans le développement des ressources. Moi, à mon avis on a un titre sur le territoire. Le fait que le gouvernement s'est assis... les deux gouvernement s'assoient pour régler une revendication fait en sorte que notre titre est crédible et qu'il est là.

À mon avis, si on doit changer les façons de faire au niveau processus de décision, il faut qu'avant d'émettre des droits, soit des droits hydroélectriques, des forces hydrauliques, ou des droits forestiers, ou des droits miniers, avant d'émettre ça, dans le processus décisionnel, il faut que les premières nations concernées s'assoient avec les décideurs et émettent conjointement des normes, des conditions pouvant limiter l'atteinte des droits et l'atteinte du mode de vie des premières nations concernées. Ça, moi, je pense qu'il va falloir être clair.

Dans le processus gouvernemental, décisionnel gouvernemental, cette étape qui n'existe pas aujourd'hui, il faut cogérer la décision d'émettre des droits. Il faut cogérer ça. Moi, à mon avis, il n'y aura jamais de litige avec les autochtones si on respecte ce principe basé sur la juridiction du Québec sur les terres et sur notre titre. Et, si on est capables de cogérer une décision en amont de toute émission de droits d'exploitation, je pense qu'on élimine toutes les entraves dans les opérations. Or, ça, c'est le premier partenariat qu'il va falloir... C'est un partenariat d'ordre politique.

n (11 h 50) n

Deuxième type de partenariat qui est très important: dans la mesure du savoir-faire et des capacités financières des premières nations, de les impliquer dans le processus financier, dans le montage du cadre financier, selon leurs capacités et leur savoir-faire, que ce soit dans le domaine forestier ou dans le domaine hydroélectrique ou minier. Il y a, de plus en plus, des prospections qui se font, il y a des possibilités qu'il y a dans nos territoires ancestraux. Or, je pense que nos relations, à partir de cela, à partir de ces deux conditions, nos relations vont être harmonieuses, et je pense que les ententes vont être plus faciles à signer si on a ce respect du titre. Et, nous, mutuellement on peut respecter la juridiction du Québec sur les terres, mais en mettant conjointement des normes d'émission des droits en amont de toute émission de droits. Or, au moindre litige... Et même je pense que nos relations vont être bien mieux fondées sur des bases solides.

Le Président (M. Bachand): Merci, monsieur. Donc, merci, M. le député de René-Lévesque. M. le député d'Ungava, compte tenu que vous n'êtes pas membre de cette commission ? vous connaissez bien les règles de cette Assemblée ? donc je vais demander le consentement de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Allez-y, M. le député.

M. Létourneau: Merci beaucoup. Bienvenue, chef Picard, Mmes, MM. les vice-chefs. J'ai aussi lu avec intérêt évidemment votre mémoire, et vous allez peut-être trouver ça drôle, mais, moi, je suggérerais, quelqu'un qui voudrait le lire, je lui suggérerais de commencer par la dernière page, les cinq dernières lignes. Ça dit: «Il est important que les autochtones soient partie prenante à la gestion des décisions les concernant. L'implication des autochtones favorisera l'atteinte des objectifs du développement durable et permettra également de bâtir des liens durables entre la nation québécoise et la nation innue.» C'est la clé. Ces cinq lignes-là sont extrêmement importantes. Et je rejoins aussi ce que vous avez dit tantôt, les régions n'ont pas à quêter le gouvernement pour leur développement.

Vous avez parlé de pouvoir financier régional qui peut juste venir des retombées des ressources naturelles qui sont exploitées chez vous, et chez nous évidemment, parce que je viens du comté d'Ungava, donc 55 % du Québec. Vous savez aussi que c'est une région importante. Et le ministre a parlé tantôt de la «Paix des Braves» et de l'entente Sanarrutik, et je voudrais peut-être préciser qu'avant de faire cette entente-là, ou ces deux ententes-là, il y a eu 25 ans de procédure judiciaire entre ces deux nations autochtones là et les gouvernements du Québec qui se sont succédé, concernant, entre autres, l'interprétation ? et vous en avez parlé ? de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Et ça, c'est des milliards de dollars qui étaient là. La seule façon dont on a pu régler ça, c'est sur la base d'une relation d'égal à égal, sur la base du respect, et faire en sorte que le chef des deux nations, ou de ces nations-là, incluant la nation québécoise, décide de sonner la fin de la récréation et de dire: Où on va? Est-ce qu'on va continuer, pour le reste de nos jours, à se chicaner et à se voir en cour?

Et, à cet égard-là, comme on parlait de financement et du moteur de l'économie régionale ? et j'imagine aussi qu'autant que moi vous êtes inquiets par la perspective que le gouvernement sabre dans le Fonds de développement autochtone de 125 millions ? est-ce que vous ne convenez pas que, comme c'est le gouvernement du Québec qui est responsable d'Hydro-Québec, comme le premier ministre est aussi responsable du ministre délégué aux Affaires autochtones ? donc, il est sous son autorité ? ne pensez-vous pas que dans votre cas, dans le cas de votre nation, c'est la façon d'envisager l'avenir?

Le Président (M. Bachand): Rapidement, M. Picard.

M. Picard (Raphaël): Vous avez tout à fait raison, à la lumière de ce que vous venez de dire. Mais sachez... Je ne vais pas créer d'antagonisme, il y en a déjà assez. Puis, moi, je suis venu ici pour dire qu'on croit à certaines filières énergétiques, les filières traditionnelles, conventionnelles, sauf à des conditions que... Je pense que, dans le message que j'ai essayé de passer, si ces conditions-là sont respectées, les développements pourront se faire, notamment de consentement, l'élaboration d'un système de gestion de la décision qui serait là, où on impliquerait les premières nations qui sont touchées.

Je pense aussi... N'oublions pas, nous, il faut regarder que, nous, pour l'avenir, là, on regarde l'avenir. On ne regarde pas le passé de dépendance qu'on a eu, le passé de docilité. Ce qu'on regarde, c'est l'avant. Il est fort probable qu'à un moment donné on nous dise: Dans votre philosophie de vie, vous avez donc bien changé!, parce qu'on fait du développement ou parce qu'on est investisseurs. Mais une chose que je peux vous dire: que le concept de développement durable, de la pérennité des ressources, la protection des écosystèmes, avec un développement bien respectueux d'une régénérescence, pas une surexploitation... Je pense qu'il est très... qu'on puisse maintenir de très bonnes relations en rencontrant un certain nombre de conditions, tel que je l'ai précisé tantôt.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Picard. Ça termine un peu... On a malheureusement même dépassé le temps qui nous est imparti. Donc, M. Raphaël Picard, Mme Bacon, Mme Vachon, M. Pierre-Pître Picard, M. Benjamin et M. Paul, merci, et je vous souhaite un bon retour chez vous.

(Changement d'organisme)

n (11 h 56 ? 12 h 1) n

Le Président (M. Bachand): Donc, nous allons commencer. Messieurs, bienvenue à notre commission. C'est toujours un plaisir de recevoir les gens du monde municipal, surtout quand ils sont très prêts de nous. Nous avons d'ailleurs reçu de vos citoyens qui sont venus nous jaser un peu. Donc, c'est intéressant de vous voir aujourd'hui.

Je dois m'excuser auprès du ministre parce qu'il est en point de presse actuellement, mais il va arriver dans les instants qui vont suivre. Donc, je vous souhaite la bienvenue à notre commission. Je vous rappelle un peu les règles de cette commission. Vous êtes familiers quand même avec ces règles-là, M. le préfet. Donc, 20 minutes de présentation de la part de votre groupe, 20 minutes de questions de part et d'autre ? de la part du côté ministériel et de la part de l'opposition. Et, sans plus tarder, donc je vais vous demander de vous présenter et de présenter vos collègues.

M. Paquin (Jules): C'est beau. M. le Président, M. le ministre va arriver, j'espère?

Le Président (M. Bachand): Absolument! Absolument!

Municipalité régionale de comté de Mékinac

M. Paquin (Jules): Distingués membres de la commission, M. notre député de Portneuf, il me fait plaisir de vous présenter mes collègues. Mon nom, c'est Jules Paquin, maire de Notre-Dame-de-Montauban et préfet de la MRC de Mékinac; et j'ai M. Jean-Guy Lavoie qui est ici, au bout, qui est pro-maire de la municipalité de Notre-Dame-de-Montauban; M. Louis Filteau, qui est responsable de l'aménagement à la MRC; M. Jean Morasse, qui est directeur du CLD; M. André Leclerc, qui est au bout, qui est ingénieur, de CIMA; et mon copain et ami André Lemay, avocat, qui est résident, depuis plus de 20 ans, dans notre milieu.

Alors, je vais demander à M. Lemay de nous présenter le projet pour lequel on est présents ici.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Lemay.

M. Lemay (André): O.K. Bonjour, tout le monde. Tantôt, j'écoutais le chef Picard, et puis il nous donnait presque une recette. Je ne dis pas ça parce qu'on est proches de l'heure du repas, là. Je me rends compte que vous allez voir que, notre projet, on a suivi la recette du chef. Quand il nous dit qu'il faut que les bénéfices restent en région, qu'il y ait une participation, qu'on arrête de quémander des subventions et puis qu'on se prenne en main, c'est l'exemple qu'il nous donne au niveau des nations autochtones. Puis je vous dirai que, dans la région de Mékinac, on a commencé à travailler comme ça puis on veut travailler dans le même sens. Donc, le projet s'inscrit vraiment dans une démarche, là, de prise en main par la région.

Vu de l'extérieur, le débat sur les petites centrales, parce que c'est un des volets que vous avez étudiés, ça peut sembler mettre en opposition les écologistes, que je dirai, purs et durs versus les promoteurs avides de profits. En réalité, il faut aller plus loin que ça. Autrement dit, quand on fait une analyse, il faut aller plus loin que la simple perspective initiale. Puis il y a des cas comme le nôtre, pour lequel on travaille depuis des années, et c'est des cas où c'est une conviction profonde du développement régional, la prise en main régionale d'un développement.

Le projet, on le présente brièvement. C'est un projet qui date de 1987. Il va être majeur, là, au cours de l'année, il va avoir 18 ans. Probablement qu'étant majeur il va pouvoir avancer un peu plus vite.

À l'époque, la municipalité avait répondu à l'offre d'Hydro-Québec de céder les terrains. À l'époque, Hydro-Québec voulait se départir des terrains ou des sites pour lesquels il n'y avait pas de potentiel suffisant pour Hydro-Québec. Il y a eu une démarche d'entreprise à l'époque avec la municipalité. Il y a eu évidemment plusieurs échanges qui ont eu lieu, puis, en 1994, le gouvernement du Québec, qui était sur le point de lancer la deuxième vague de ce qu'on appelle les appels de propositions, qui suivait celle de 1991... En 1991, on a eu la première vague des petites centrales qu'on a appelée, ceux qui y étaient assujettis, l'APR-91, puis, en 1994, il y a une nouvelle liste qui est sortie, et le site de Notre-Dame-de-Montauban était sur la liste, la liste de juin 1994 ? on a des lettres des sous-ministres en ce sens-là ? et c'est un site qui devait être libéré, donc qui devait être autorisé, et on a appris la définition du mot «moratoire», des moratoires par-dessus moratoires. Ça a été reporté.

En 2002, le gouvernement aussi, par l'intermédiaire d'Hydro-Québec, lançait un nouvel appel de propositions par l'intermédiaire d'Hydro-Québec. Ça fait que la MRC et la municipalité se sont fait un montage juridique donc pour respecter les règles et présenter une proposition à Hydro-Québec qui était, au niveau des projets présentés, celle qui était la plus acceptable au niveau environnemental, et encore là, à la veille de l'annonce des résultats, nouveau moratoire, les projets sont suspendus.

Ce que le projet présente à Notre-Dame, c'est un projet, au niveau environnemental, quand même exceptionnel. C'est un projet à fil d'eau, donc sans inondation, sans ennoyage, une conduite d'amenée complètement souterraine, une centrale en bonne partie souterraine, tous des éléments qui ont été ajustés, présentés pour s'intégrer à l'environnement. Puis l'objectif, c'est la mise en valeur d'une chute qui est connue aussi comme étant la chute, là, du Cinq Dollars Canadien, de façon peut-être folklorique, là. Donc, côté technique, c'est ça.

Au niveau pratique, ce que les municipalités veulent, c'est évidemment les retombées économiques. Donc, c'est le seul projet ? c'est important ? le seul projet actuellement au Québec où tous les bénéfices, tous les profits vont retomber en région parce que les partenaires financiers sont, d'une part, la MRC, et, d'autre part, une corporation sans but lucratif qui est la Corporation du pont de Mékinac, une corporation mise sur pied par la MRC, qui dans sa charte a l'obligation de mettre tous ses profits ou investissements dans le développement régional de Mékinac. Donc, c'est le seul cas. Il n'y a pas de partenaires privés, au sens de gens de l'extérieur. C'est nécessairement un projet qui va être au bénéfice unique de la région de Mékinac, notamment de la municipalité locale, Notre-Dame-de-Montauban, et également au niveau de la MRC.

Sur d'autres volets, je veux vous souligner un petit point aussi important: en 2003, hiver 2003, on a eu des problèmes d'inondation, à Notre-Dame, qui ont fait un peu les manchettes. On s'est fait connaître ? c'est une façon de se faire connaître comme une autre ? et on s'est rendu compte que, la rivière, qui a ses caprices comme bien des rivières, à l'époque la simple installation d'un fil ou d'un câble d'acier a permis de contrôler en bonne partie la question de formation de frasil. Donc, on dit que notre barrage... ou notre installation va également avoir un effet au niveau sécuritaire, au niveau de la sécurité de la rivière, là, mais l'impact majeur, c'est au niveau économique.

Maintenant, je vais demander à M. Morasse de faire un petit bout, puis je reviendrai un peu plus tard pour la conclusion.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Morasse.

M. Morasse (Jean): Messieurs dames, bonjour. Donc, étant assez nouveau au dossier, moi, je vais vous faire une lecture intégrale des trois sections qui suivent, là, qui ne sont pas longues, la première qui est intitulée Un véritable besoin énergétique? ? avec un point d'interrogation.

Donc, dans le document État d'avancement du plan d'approvisionnement qu'Hydro-Québec Distribution présentait à la Régie de l'énergie du Québec le 22 novembre 2002, l'organisme public anticipait, pour la période 2002-2011, une augmentation des ventes de 24,7 TWh, soit une augmentation moyenne annuelle de 2,75 TWh, en se référant à un scénario moyen. Le constat est donc évident: peu importent les sources et les moyens, cette énergie supplémentaire devra être produite. Alors, face à ce constat, quels sont les choix?

La première option qu'il faut privilégier ? et c'est clairement la nôtre aussi ? ce sont les mégawatts, donc les économies d'énergie. À ce chapitre, des efforts importants sont consentis. Cependant, dans les scénarios d'évaluation des besoins réalisés par Hydro-Québec Production, ces économies d'énergie sont déjà considérées et elles compteront, en 2011, pour 6,1 des 24,7 TWh de production supplémentaire requise. À cet égard, on pourrait anticiper des efforts plus grands, mais l'expérience tend à prouver que le consommateur n'est pas disposé à faire de grandes concessions sur son confort pour une diminution de la consommation d'énergie électrique. On peut concevoir qu'une hausse substantielle des tarifs d'électricité pourrait avoir l'effet souhaité, mais vous comprendrez que ce n'est pas notre option.

n (12 h 10) n

Restent donc les modes de production que sont l'énergie solaire, les éoliennes, les centrales nucléaires, les centrales thermiques au mazout et au charbon et les centrales hydroélectriques.

La question n'étant pas au coeur de notre propos, nous dirons simplement que l'énergie nucléaire, malgré ses potentialités à long terme, ne constitue pas actuellement une solution envisageable. La filière éolienne, elle, elle est intéressante, mais on doit la considérer, à ce moment-ci, comme une solution complémentaire, un peu à l'image des petites centrales hydroélectriques. La filière nucléaire est probablement celle qui provoquerait la plus importante levée de boucliers au Québec. Quant aux centrales thermiques au mazout et au charbon, elles ne constituent pas des solutions attrayantes, d'abord parce que nous ne disposons pas de ressources pétrolières et houillères et d'autre part parce qu'il s'agit de sources d'énergie plus polluantes.

Reste donc l'énergie hydroélectrique. Sans nier que cette filière ait des impacts non désirables, ce qui caractérise toute intervention humaine significative sur son environnement, nous pensons qu'elle est la moins dommageable et qu'elle induit pour le Québec des retombées dont il pourrait difficilement se passer. Il va donc de soi que nous favorisons cette filière, et nous pensons que les petites centrales, malgré l'apport que plusieurs considèrent trop marginal pour en justifier la construction, représentent un atout supplémentaire dans une politique énergétique intégrée et encore davantage un facteur très important de développement local et régional.

On peut d'ailleurs faire l'analogie avec l'énergie éolienne, considérant que le gouvernement du Québec a décidé de soutenir cette filière, malgré sa contribution marginale au bilan énergétique québécois et des coûts de production qui seront probablement non concurrentiels. Il faut donc regarder du côté des retombées économiques locales et régionales pour soutenir ce choix des éoliennes, et notre vision est exactement la même à l'égard des petites centrales hydroélectriques.

Avant d'aborder ces questions de retombées économiques autant québécoises que régionales et locales, considérons l'enjeu environnemental. Donc, section suivante: Un enjeu environnemental? Disons d'abord qu'il nous semble que de traiter du dossier des petites centrales hydroélectriques et plus spécifiquement la nôtre, du strict point de vue environnemental, c'est fausser le débat. D'ailleurs, s'il n'y avait pas d'enjeu de développement, il n'y en aurait pas, de débat. Les préoccupations environnementales ne sont pas le seul lot des groupes écologistes. Nous sommes, nous également, des amants de la nature. Nous rappelons que les chutes du Neuf sont sur notre territoire. Nos parents, nous-mêmes et nos enfants en avons apprécié les charmes et à l'évidence nous ne souhaitons pas voir disparaître cet attrait, mais bien au contraire s'en faire un allié qui nous aidera à poursuivre notre occupation d'un coin de pays que nous apprécions au plus haut point. Notre projet vise la mise en valeur des chutes... de la chute, pardon.

Alors, si ce n'est pas d'un enjeu environnemental dont il est question, c'est que cet enjeu est d'une autre nature et nous ramène plutôt aux notions de développement durable. À cet égard, nous nous référons à un document produit en 2004 par le ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs, intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements. Alors, dans ce document, on précise que ? et j'imagine que vous le connaissez ? «le concept de développement durable vise la conciliation, voire l'arbitrage entre les dimensions sociale, environnementale et économique pour la satisfaction des besoins présents, sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins». Donc, à l'évidence, c'est de ce concept dont il est question ici.

De notre côté, nous cherchons des solutions pour répondre à des problématiques économiques, qui se transposent souvent en problématiques sociales, en aménageant notre milieu, en utilisant nos ressources naturelles, comme nous l'avons fait de tout temps, sans aucunement nier les préoccupations environnementales. Alors, nous répétons que nous sommes ouverts à collaborer positivement avec les citoyens, les groupes porteurs des préoccupations environnementales à trouver les mesures les plus efficaces d'atténuation des impacts environnementaux, en autant que ces citoyens et ces groupes ne nous dépouillent pas de notre volonté de développer notre milieu. À cet effet, nous souhaitons concilier des intérêts et atteler l'ensemble de notre communauté à un projet collectif qui permettra de garder des jeunes chez nous et soutenir socialement des individus et des familles lésés par un environnement économique en déclin. Là-dessus, nous sommes d'accord avec le politicologue Riccardo Petrella qui disait que «tous les conflits qui sont générés dans les communautés à cause des intérêts divergents entre les partisans et opposants laisseront des cicatrices profondes».

Abordons maintenant la question du point de vue des choix énergétiques. Alors, malgré les inconvénients générés par la filière hydroélectrique ? donc, des impacts environnementaux reconnus des grands barrages et des immenses bassins qui y sont associés, le caractère souvent inesthétique des lignes de transport ? on pourrait difficilement nier que cette filière demeure une des plus propres. Incidemment, ces inconvénients sont inexistants dans notre projet, vu l'absence de réservoir, d'une part, et, d'autre part, le raccordement direct à une ligne de distribution électrique déjà existante. Donc, il n'y aurait pas un poteau de plus avec un projet comme celui-là.

Bon, ce choix donc de l'hydroélectricité nous a notamment permis au Québec de limiter le développement de la filière nucléaire et restreindre le recours aux combustibles fossiles qui, outre le fait qu'ils constituent une ressource épuisable, s'avèrent les plus polluants et générateurs de gaz à effet de serre. À ce chapitre, il est important de rappeler que le choix de la filière hydroélectrique a permis au Québec de générer, aujourd'hui, deux fois moins de gaz à effet de serre que le reste du Canada.

Quant aux petites centrales hydroélectriques, le document du ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs nous rappelle que cette production «est une activité à laquelle la majorité des experts associent peu ou pas de polluants... De plus, ce type d'aménagement représente un avantage certain sur le plan des autres impacts environnementaux.» Alors, cette section se conclut sur le constat que le développement des petites centrales peut constituer pour le milieu une occasion intéressante de prise en charge de son propre développement économique, ce que nous expliciterons un peu plus loin.

En conclusion sur l'enjeu environnemental, nous voulons affirmer notre certitude qu'il est possible de réaliser notre projet avec des impacts qui seront esthétiquement acceptables. Il fut un temps où l'ingénierie avait ces préoccupations, à tel point qu'on les qualifiait d'ouvrages d'art. À ce chapitre, on peut sûrement mentionner, là, la centrale hydroélectrique de Grand-Mère qui a été construite en 1916 et dont le style architectural rappelle celui de la cathédrale Sainte-Cécile d'Albi, en France, donc une cathédrale construite entre le XIIe et le XVe siècle.

Comme exemple davantage comparable à notre projet, on peut parler de la région du Limousin, en France, où il existe 90 petites centrales qui non seulement n'ont pas d'effet négatif, mais au contraire constituent des attraits touristiques. Alors, l'organisme public responsable de ces petites centrales, qui est l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, précise que la préservation des paysages incite aux installations les plus discrètes possible, un objectif couramment atteint aujourd'hui avec des petites centrales enterrées, donc invisibles, ou dans des bâtiments anciens dont on préserve le cachet. Le plus souvent, l'installation d'une centrale s'accompagne d'un aménagement du site qui se trouve valorisé en lieu de pêche et de promenade. Alors, si c'est possible dans un pays fortement préoccupé de patrimoine, qu'il soit naturel ou culturel, j'imagine que ce doit l'être chez nous.

Dernière section dans mon cas: Un enjeu de développement pour le Québec. Les Québécois n'en sont pas à leurs premiers balbutiements en matière de production d'énergie. Partant de la construction du tout premier barrage, en 1868, sur la rivière Richelieu, le développement s'est fait de façon constante. Déjà en 1940, plus d'une centaine de centrales hydroélectriques étaient en opération au Québec.

Pour la Mauricie, il est indéniable que l'hydroélectricité a constitué un puissant moteur de développement, en commençant par l'implantation de l'aluminerie Alcan en 1901. Plusieurs autres industries ont suivi, dont un bon nombre dans le secteur de la pétrochimie, faisant de Shawinigan, dans les années cinquante, la ville où le salaire moyen était le plus élevé au Canada.

De sa fondation, en 1898, jusqu'en 1963, année de la nationalisation des compagnies hydroélectriques au Québec, la Shawinigan Water & Power a mis en service neuf centrales sur la rivière Saint-Maurice, alimentant plusieurs grandes industries, dont à une époque sept moulins à papier, dont quatre dans l'agglomération trifluvienne, lui conférant, pendant quelques décennies, le titre de capitale mondiale du papier. Alors, à l'époque, on était fier de ces manifestations de dynamisme, tout comme on l'a été en 1963, quand le Québec a nationalisé les compagnies hydroélectriques, faisant de cette énergie un des fers de lance de la Révolution tranquille.

Les années qui ont suivi ont fait place à de gigantesques chantiers de construction de barrages et centrales hydroélectriques, travaux qui ont frappé notre imagination et fourni au Québec une vitrine inestimable. Ces travaux, il va de soi, ont été pour le Québec l'occasion du développement de l'expertise de l'ingénierie québécoise qui nous a permis et nous permet encore de rayonner sur l'ensemble de la planète en matière de production hydroélectrique.

Autre facette non négligeable, cette nouvelle énergie disponible et à bon marché nous a permis d'attirer des grandes entreprises consommatrices d'énergie dont les alumineries sont le plus bel exemple. Ces entreprises ont favorisé l'essor de plusieurs régions périphériques du Québec, et on peut se demander où elles en seraient sans ces apports industriels.

En ce début de millénaire, le contexte économique a bien changé au Québec. L'industrie manufacturière se délocalise au profit de pays où les coûts de production sont plus bas et où, second facteur attractif, on trouve des marchés gigantesques. Ne mentionnons que la Chine et l'Inde. Alors, pour compenser des pertes d'emplois qui sont pratiquement devenues quotidiennes, le Québec n'a pas une multitude d'options. Il semble bien que la production et la vente d'énergie hydroélectrique, particulièrement à nos énergivores voisins américains, en soit une. Alors, c'est la conclusion que tire Jean-Pierre Sauriol, dans sa conférence de 2003, où il dit: «Compte tenu qu'Hydro-Québec Production doit fournir à Hydro-Québec Distribution jusqu'à 165 TWh par année à un prix de 0,0279 $ du kilowattheure, alors que, sur le marché spot ? donc, en marché de pointe ? le prix de vente de l'électricité peut être 10 à 20 fois plus élevé et parfois plus, on comprend l'intérêt que représente la capacité d'exporter pendant ces périodes.» On comprend bien que c'est à ce moment que l'or bleu prend toute sa signification.

n (12 h 20) n

Alors, on peut évidemment se demander, à ce moment-ci, quel est le lien entre ce plaidoyer pour l'hydroélectricité au Québec et notre petite centrale qui produira un maigre 10 MW. Alors, ce plaidoyer a été fait d'abord pour illustrer que les barrages et les centrales n'ont pas toujours été des symboles de laideur et de destruction de l'environnement. On en a déjà été fiers et pour plusieurs on l'est encore. La filière hydroélectrique a été associée à l'édification du Québec moderne et elle représente actuellement une grande opportunité de développement, une opportunité qui nous permettra de maintenir notamment nos acquis sociaux à un moment où la situation économique les menace sérieusement.

Le Président (M. Bachand): M. Morasse, merci infiniment. Est-ce que ça conclut votre présentation?

M. Morasse (Jean): Oui.

Le Président (M. Bachand): Merci infiniment, Merci, M. Paquin. Donc, je vais donner l'opportunité au ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs de poser ses questions. M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. M. le préfet, messieurs, bienvenue à Québec. Évidemment, votre dossier, je le connais bien, c'est peut-être cinq, six, sept rencontres qu'on a faites. Chaque fois que je vous vois, M. le préfet, vous me parlez de ce dossier-là.

Maintenant, il y a eu une présentation, il y a eu un groupe de citoyens de votre coin qui sont venus nous faire une présentation, la semaine dernière, sur le projet, le même projet que vous parlez, et ce groupe-là disait qu'ils ont fait une consultation informelle. Ce n'est pas un référendum mais plutôt une consultation sur le terrain. Ils trouvaient que 67 % selon eux des gens de votre coin, ils étaient contre ce projet-là. Ça, c'est le premier élément. Qu'est-ce que vous répondez à ces gens-là pour commencer?

Le Président (M. Bachand): M. Paquin.

M. Paquin (Jules): Oui. Bien, ils disent qu'il y a 77 % de la population qui n'était pas en accord avec le projet, mais on a passé un référendum... ou une élection en tout cas sur ça et puis ils ont resté bien déçus parce que c'est nous autres qui l'a remporté, ce n'étaient pas eux autres. Alors, on a viré ça. Ils ont perdu parce qu'ils n'avaient pas donné les bonnes explications à chacun. Ils ont passé de porte à porte. Nous autres, on n'a pas passé de porte à porte, on a fait une élection puis ils sont venus voter. On avait fait une réunion publique pour leur expliquer le projet. Et d'ailleurs M. Lemay y était, M. Leclerc, ingénieur. On a donné les explications nécessaires. Ceux qui sont contre, ils ne sont pas venus, par exemple, à cette réunion-là. Ils connaissaient tout ça, eux autres, là. Ils n'avaient pas besoin de venir là. Ça fait que nos citoyens en général sont venus puis ils sont satisfaits de ça.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Le comité, ou le groupe, là, qui sont venus ici, ils ont parlé de leur volonté de développer un hôtel, développer le tourisme, l'écotourisme. Qu'est-ce que vous en pensez? Il y a un monsieur de CLD, si j'ai bien compris.

Le Président (M. Bachand): M. Paquin.

M. Paquin (Jules): Ça adonne bien, nous autres, l'hôtel qu'on avait était au lac Georges, puis il a passé au feu, puis il n'y a pas personne qui a décidé de reconstruire. Ça fait que, moi, là, quand on me dit ça, ça me passe par une oreille puis ça sort par l'autre. Ils avaient rien que juste à en profiter, de ce terrain-là, il est encore là. Pas de problème.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: M. Paquin, parlez-moi de retombées économiques de votre projet, là, directes dans votre milieu, et qu'est-ce que ça fait. Quelle différence ça ferait sur les revenus de la MRC, sur les revenus chez vous? Et après ça, s'il y a de bonnes retombées, qu'est-ce que vous allez faire avec ça? Qu'est-ce que vous avez l'intention de...

M. Paquin (Jules): Faire du développement économique. On est une région parmi les plus pauvres dans la province. Alors, on a besoin de sous pour être capables de se développer. On a un parc industriel régional, là, puis on a de la misère, on n'a pas rien pour inciter les gens à venir s'établir. Si on est capables d'avoir un peu de sous, à un moment donné, bien, on va être en mesure d'aider puis de développer des choses, améliorer aussi le tourisme, qu'ils viennent chez nous, dans notre milieu, arranger les choses pour que ce soit présentable, mieux, en meilleure position.

Le Président (M. Bachand): M. Morasse, en complément.

M. Morasse (Jean): Ce n'est pas en complément. Tantôt, je m'excuse, M. le Président, quand vous m'avez posé la question si ma présentation concluait notre mémoire, ça concluait ma partie, mais ça ne concluait pas... Je ne sais pas si vous l'avez tous lu. Si c'est le cas, ça ne posera pas de problème. Mais la section suivante, ça répondait un peu à la question du ministre: c'est un enjeu de développement durable et autonome qui parle des retombées du projet et de la possibilité, avec ce projet-là, d'avoir un développement qui devient durable et surtout qui nous appartient à nous, là, dans la même perspective qui vous a été présentée tantôt par la communauté innue.

M. Hamad: Ma question, en fait, si je comprends bien: Quelles sont les retombées, les retombées que ce projet-là peut amener en termes monétaires? Et vous pensez que ce projet-là va vous amener des retombées économiques, c'est-à-dire de l'argent qui va rentrer chez vous? Je comprends, vous êtes la MRC de Mékinac, c'est une des MRC les plus pauvres au Québec. Et, cet argent-là, quel est votre plan de match avec? Qu'est-ce que vous voulez faire avec?

Le Président (M. Bachand): M. Morasse, vous avez l'opportunité de compléter en même temps, là, la présentation de votre mémoire par la réponse, peut-être.

M. Morasse (Jean): O.K. Bien, moi, j'aurais tendance à dire que d'abord on ne le fixera pas pour la communauté, c'est un projet qu'on veut pour la communauté et on va travailler avec cette communauté-là pour établir nos orientations et nos priorités.

Ceci étant dit, il y a deux grandes priorités. Il y a le développement ? c'est ce que disait M. Paquin ? le développement industriel. Ce n'est pas évident, à l'heure actuelle, de développer des petits territoires comme le nôtre. Il y a, depuis plusieurs années... Et j'ai été plusieurs années dans un conseil régional de développement. Il y a eu des mesures, toutes sortes de mesures pour essayer de favoriser le développement de communautés comme les nôtres, et ça n'a pas beaucoup d'impact, c'est très difficile. Donc, cette entrée de fonds là autonome, c'est-à-dire que ce n'est pas des subventions pour lesquelles on ne sait jamais si on va les avoir ou pas, cette entrée de fonds là nous permettrait de soutenir le développement économique, donc le développement de l'emploi, et de l'autre côté répondre à des problématiques sociales qui sont nombreuses. On aurait pu vous les illustrer, là, on est en bout de parcours. On est en queue de parcours sur énormément de données: au niveau du chômage, au niveau de l'assistance-emploi, au niveau des revenus. Alors donc, conjointement, travailler sur la partie active du développement, puis l'autre sur les mesures d'atténuation pour les gens qui sont lésés par l'absence de développement...

M. Hamad: M. Morasse.

M. Morasse (Jean): Oui.

M. Hamad: Ce projet-là va vous amener des revenus.

M. Morasse (Jean): Va nous amener?

M. Hamad: Des revenus.

M. Morasse (Jean): Oui, on parle d'à peu près 1 million par année.

M. Hamad: Alors, là, je vais vous dire ma question. Vous faites ce projet-là parce que vous croyez fermement que ce projet-là va amener des retombées économiques importantes dans une municipalité qui est pauvre. Alors, là, ces revenus-là que vous allez amener, autour de 1 million annuellement, je pense...

M. Morasse (Jean): Oui.

M. Hamad: ...c'est beaucoup. 1 million annuellement, c'est énorme dans un revenu de municipalité... ou MRC comme la vôtre. Qu'est-ce que vous avez l'intention... Qu'est-ce que ça va faire, 1 million? Juste donner un ordre de grandeur pour nous, là. Évidemment, 1 million à la ville de Montréal, ce n'est pas... C'est quelque chose de pas nécessairement gros, 1 million sur 800 millions, le budget de la ville de Québec. Mais chez vous, là, 1 million, ça fait quoi chez vous?

Le Président (M. Bachand): M. Morasse.

M. Morasse (Jean): Oui. Alors, je parlerai pour la partie plus régionale, parce qu'il faut d'abord préciser qu'il y a une partie de 25 % qui va aller à la municipalité et qui fera... Et M. Paquin pourra illustrer, là, là-dessus, à savoir ce qu'ils vont faire.

La partie plus régionale, on en parlait tantôt, on a un parc régional, et déjà c'est un tour de force d'avoir réussi à faire ça dans un territoire, là, que tous les maires s'entendent pour implanter un parc régional. Alors, on a besoin des infrastructures, d'améliorer des infrastructures, entre autres pour la sécurité incendie, et on a besoin d'avoir des outils pour attirer les entreprises, donc leur dire: Venez vous installer chez nous, on a du retour. On va en mettre, des sous. Vous avez besoin de bâtiments?

Par exemple, on a fait la tournée dernièrement des municipalités pour voir s'il y avait des bâtiments industriels. Il n'y en a pas. Donc, c'est bien difficile d'attirer des entreprises chez nous si on n'a pas d'endroit où les installer puis si on n'a pas de mesures incitatives quand on sait que les municipalités aux alentours, elles, en ont, les municipalités plus riches.

M. Hamad: Donc, avec ce million-là, vous allez créer combien d'emplois? Vous allez aider à créer combien d'emplois chez vous?

Le Président (M. Bachand): M. Paquin.

M. Paquin (Jules): C'est difficile à dire. Ça dépend des industries qui vont pouvoir s'établir. Il y en a que ça crée beaucoup d'emplois, d'autres, ça en crée moins. Ça, c'est difficile de répondre. Nous autres, si on peut créer 100 emplois par année, on va être bien contents, mais...

M. Hamad: O.K. Le 250 000 $, 25 % de 1 million, 250 000 $ pour la municipalité de Notre-Dame-de-Montauban, c'est à peu près combien... Votre budget annuel, c'est combien à peu près?

M. Paquin (Jules): Nous autres, notre budget, il est de 900 000 $ par année.

M. Hamad: Donc, sur 900 000 $, vous allez avoir 250 000 $ de plus annuellement.

M. Paquin (Jules): Oui. Oui.

M. Hamad: Pour toute la municipalité, vous ramassez 900 000 $, et là, avec ce projet-là, vous allez avoir 250 000 $ de plus.

M. Paquin (Jules): De plus.

M. Hamad: Autrement dit, c'est presque 27 %, 28 % de plus que vos revenus.

M. Paquin (Jules): Oui, oui. C'est ça. Et avec ça bien on va pouvoir se permettre de refaire notre système d'égout dans la municipalité. Ce n'est pas fait, ça. Alors, il y en a qui envoient ça encore à la rivière, là, puis on n'aime pas ça.

M. Hamad: ...vous allez protéger l'environnement en plus avec ça.

M. Paquin (Jules): C'est ça. Exact.

n (12 h 30) n

M. Hamad: Qu'est-ce que vous dites à un des membres du comité qui disait: Il y a 10 000 touristes qui viennent actuellement, puis, s'il y avait un hôtel, ils resteraient là?

Le Président (M. Bachand): M. Paquin, votre sourire a l'air d'être éloquent. Allez-y.

M. Paquin (Jules): J'ai trouvé ça drôle. C'est pour ça, vous le savez. Il en passe peut-être 5 000 durant l'année. Mais, 10 000, là, ils en ont mis épais sur la beurrée, en tout cas.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Il y a 5 000 touristes chez vous, à peu près, là, qui viennent.

M. Paquin (Jules): Pour moi, là, 5 000, puis ils viennent, ils regardent ça, puis ils rembarquent dans leurs voitures, puis ils s'en vont.

M. Hamad: Mais, vous, avec l'argent, là, pas seulement la municipalité de Notre-Dame-de-Montauban, mais aussi l'ensemble de la MRC, vous pensez aussi au tourisme, vous pensez à l'écotourisme aussi. Vous allez investir pour... Parce que c'est un attrait, c'est un beau coin. Moi, j'y ai déjà été en accompagnant ma collègue Julie Boulet, la ministre responsable de la région, et j'ai eu l'occasion de voir votre municipalité en même temps. Est-ce que vous avez l'intention évidemment d'investir dans le tourisme là-bas aussi pour améliorer ça puis attirer du monde?

M. Paquin (Jules): Oui. Exact. C'est une de nos idées puis de nos projections.

M. Hamad: O.K. Je vais laisser la parole à mes collègues.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le ministre. Donc, M. le député de Portneuf, qui brûle d'envie de vous poser quelques questions, compte tenu de son attachement à son territoire. M. le député de Portneuf.

M. Soucy: M. le Président, je vous demanderais, comme il a été demandé tantôt, le consentement des membres de la commission parce que, n'étant pas membre de la commission...

Le Président (M. Bachand): Vous n'êtes pas membre de la commission, mais vous être remplaçant pour aujourd'hui, donc...

M. Soucy: Alors, je vous remercie. Alors, bienvenue ici, à l'Assemblée nationale. Et, la semaine dernière, on a reçu un groupe, Eau vive Batiscan, je pense, ou Chute libre, Eau vive Batiscan, et le groupe qui s'est présenté la semaine dernière faisait état de problématiques en regard de l'ennoiement, puis plusieurs parties du territoire étaient touchées, là, mais on sait que c'est plus au sud que votre territoire.

Dans le mémoire, vous dites qu'à l'époque trois autres projets avaient été adoptés. J'aimerais ça que vous me parliez de la réalisation de ces trois projets-là puis comment votre projet, vous, qui techniquement s'appelle autrement ? on parle d'une centrale au fil de l'eau ? comment c'est différent, comment ça se fait qu'on a une centrale électrique sans ennoiement, parce que partout ailleurs il y en a. Alors, j'aimerais ça vous entendre sur la technique de ça, parce que...

Puis en plus j'ai bien compris aussi que votre municipalité, M. le maire, ne répondait pas aux normes environnementales à l'égard du traitement des eaux usées. Alors, j'ai compris que les revenus pourraient vous aider à adresser cette problématique-là. Mais j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Paquin (Jules): On va demander à M. Leclerc, notre ingénieur, de répondre.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Leclerc, rapidement parce qu'il reste fort peu de temps.

M. Leclerc (André): En fait, c'est que c'est un barrage au fil de l'eau, comme la majorité des petites centrales au fil de l'eau. Donc, on ne crée pas de réserve, on utilise l'eau au fur et à mesure qu'elle passe. Quand il n'y en a pas, on ne turbine pas. Donc, c'est comme tous les petits barrages, on a un léger ennoiement pour créer un tête d'eau au niveau de la prise d'eau pour favoriser l'introduction, mais ça se limite à ça. On ne crée pas de réserve, on élève le niveau de l'eau pour alimenter notre prise d'eau, point.

M. Soucy: Puis est-ce que ça peut arriver qu'en période d'étiage il y ait plus d'eau qui sorte à l'autre bout?

M. Leclerc (André): Non, parce qu'on a un déversoir. On contrôle le débit. On peut contrôler le débit qu'on va laisser couler dans la rivière. Donc, en étiage d'été, par exemple, il y a des périodes où on ne pourra pas turbiner. Comme en hiver, souvent, si le débit d'eau, il est trop bas, tu ne turbines pas.

M. Soucy: Puis en regard des autres projets qui avaient été adoptés dans le passé?

M. Leclerc (André): Bien, c'étaient des projets de même type.

M. Soucy: De même type aussi?

M. Leclerc (André): Oui.

M. Soucy: Des centrales au fil de l'eau?

M. Leclerc (André): C'est des petites centrales au fil de l'eau sur des rivières, oui, qui ne créent pas de réservoir.

M. Soucy: O.K. Puis est-ce que vous savez qu'est-ce qui a fait que le projet de Notre-Dame-de-Montauban n'a pas été accepté s'il était du même type, là, que les autres?

M. Leclerc (André): Je n'ai aucune idée pourquoi il a été mis de côté.

M. Lemay (André): Peut-être...

Le Président (M. Bachand): En complément, rapidement, M. Lemay. Allez-y.

M. Lemay (André): Oui. Ce à quoi M. le député fait référence, c'est que, dans notre texte, on réfère qu'en 1994 il y avait des sites sur la liste du gouvernement, des sites qui devaient être libérés ou autorisés, dont le site de Notre-Dame, et il y avait trois autres sites qui impliquaient des municipalités, qui, eux, ont passé. Puis ces sites-là, il y a le site, par exemple, près de Québec, la municipalité de Saint-Ferréol, avec les Sept Chutes. On a un autre site qui a passé dans le coin d'Argenteuil, qui s'appelait la chute à l'Ours, je pense. Donc, il y a des projets qui avaient été acceptés par autorisation spécifique après le moratoire, mais celui de Notre-Dame...

Il faut savoir qu'à Montauban on est à... à Notre-Dame, on est dans Portneuf, puis la MRC, on est dans Laviolette, puis il y a des fois que, disons, ce n'était pas la même couleur partout. Ça fait que ça causait des problèmes. Mais là...

Le Président (M. Bachand): Vous parlez de la couleur de l'eau, vous, M. Lemay? Vous parlez de la couleur de l'eau, j'imagine.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lemay (André): Oui, oui, oui, la couleur de l'eau. Oui, oui, la couleur de l'eau. Ça fait que ça pouvait varier, mais... Et donc c'est un projet qui curieusement, là, avait été accepté, il était sur la liste, puis on a des documents officiels en ce sens-là. Et on dit: Écoutez, on avait été acceptés à l'époque, puis c'est le dernier à réaliser. Puis c'est particulier parce qu'évidemment c'est le seul, je le répète, c'est le seul qui n'a pas d'investisseur privé, là, qui va sortir de l'argent à l'extérieur. C'est vraiment la MRC qui est là-dedans, avec la Corporation du pont.

Bien, cet exemple-là, je pense que c'est important de le rappeler. La Corporation du pont, on a fait, en 1994, un pont sur la rivière Saint-Maurice, à la hauteur de Matawin, pour remplacer un ancien système de bac, là, qui était plus ou moins efficace. Il embarquait, je pense, une ou deux autos à la fois. Ce pont-là, en collaboration avec les deux gouvernements, a coûté 4,2 millions et quelques, dont 800 000 $ payés par la MRC, hein, il y a 800 000 $ qui a été payé, et c'est un pont payant qui rapporte des revenus, puis, avec ces revenus-là ? ça, c'en est le plus bel exemple ? on a fait le parc industriel de Saint-Tite qui est le premier au Québec qui est un parc régional. Il y en a eu d'autres par la suite, là.

Et un des exemples qu'on donnait... M. Paquin disait: Au niveau des locaux, la Corporation du pont, avec les profits qu'ils font avec le pont, ils ont construit une bâtisse dans le parc industriel. Cette bâtisse-là est louée à une industrie qui a un bail avec option d'achat, puis, au bout de cinq ans, ils vont acheter. Autrement dit, c'est un peu des incubateurs qu'on crée pour faire démarrer nos petites entreprises. Donc, les argents qui vont provenir de la centrale, ça va aller dans le même sens, autrement dit, dans la même politique qui a été utilisée par la MRC depuis 10 ans, mais là il va y avoir plus d'argent. C'est bien certain que le projet de minicentrale, dans les conditions qu'il a été présenté, c'est 1 million de profit par année. Avec ça, tu es en voiture.

Mais, quand on se pose la question, on dit: Qu'est-ce que vous allez faire au juste, quels projets exacts?, bien on va attendre d'avoir l'argent pour commencer, hein, dans le sens qu'on ne le dépensera pas avant de l'avoir. Mais, les projets, c'est les élus municipaux puis les élus régionaux, en concertation avec les gens, qui vont mettre sur pied des projets, puis ils vont choisir des projets en fonction des besoins. Les besoins qui vont exister dans cinq ans ou dans 10 ans, on ne les connaît pas, mais c'est certain que ça va appartenir à des gens.

Les gens qui vont décider, ça va être des gens élus. Puis, des gens élus, vous le savez, vous l'êtes tous, c'est bon d'écouter ce que le monde pense parce que c'est dangereux qu'au bout de quatre ans... Des fois, il faut prendre son journal, Le Soleil ou Le Devoir, pour trouver des emplois. Donc, les élus, c'est des gens qui sont imputables devant la population. Ça fait que, si on donne à ces gens-là les outils de pouvoir décider, bien ils vont décider pas mal plus proche de leur population que n'importe quel homme d'affaires qui ? puis c'est correct aussi ? pense à ses propres intérêts au lieu de penser aux intérêts du public. Donc, c'est vraiment la particularité du projet.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Lemay. Merci, M. le député de Portneuf. Désolé, le temps est écoulé. Donc, Mme la députée de Rosemont, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, à vous la parole, Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Justement, j'aimerais peut-être... D'abord, messieurs, bonjour et merci d'être là. J'aimerais apporter un petit peu de clarification à vos documents. À la page 6 de votre mémoire, vous parlez du véritable besoin énergétique et vous faites référence à un document d'Hydro-Québec Distribution qui date du 22 novembre 2002, avec des chiffres de 2,75 TWh d'augmentation. Ces chiffres-là ont été revus à la baisse, hein? Je ne sais pas si vous en êtes conscients, mais les chiffres que vous donnez, là... Ce chiffre-là, en janvier 2004, l'Hydro a déposé un nouveau plan...

Une voix: En novembre 2004.

Mme Dionne-Marsolais: ...pardon, en novembre, oui, merci, excusez, à la fin de l'année dernière, là, un nouveau plan dans lequel son augmentation moyenne passait à 2 TWh par année. Et aussi ses prévisions de ce que vous appelez les négawatts, là, donc les économies d'énergie, elles n'étaient plus de six mais bien de 10,3.

n (12 h 40) n

Pourquoi j'attire votre attention là-dessus? On convient que ces chiffres-la peuvent varier dans le temps. C'est parce qu'effectivement, quand on fait des prévisions de demande, il y a une série de considérations à tenir en compte, et, dans cette commission-ci, ce qu'on essaie, c'est de définir la politique énergétique du Québec. Ça veut dire qu'on comprend, là, la préoccupation que vous avez et la demande que vous nous faites aujourd'hui, qui est très pointue, très spécifique, mais, si je me reporte à la responsabilité que nous avons comme parlementaires au niveau de la sécurité énergétique du Québec, il y a quand même un certain nombre de balises et de principes sur lesquels il faut travailler, et un de ceux-là, vous l'avez dit, c'est le développement durable, et il y a des choix que le gouvernement doit faire entre différentes options possibles.

À ce jour, corrigez-moi si je me trompe, on est venu nous dire que votre rivière n'avait aucun barrage à date sur cette rivière-là. Est-ce que vous pouvez nous dire si c'est oui ou si c'est non?

Le Président (M. Bachand): M. Morasse. M. Paquin.

M. Paquin (Jules): Il y a un barrage. Il y en a un, barrage à Saint-Narcisse. C'est sur la rivière Batiscan, ça.

Mme Dionne-Marsolais: Où exactement sur la rivière Batiscan, Saint-Narcisse?

M. Paquin (Jules): Pardon?

Mme Dionne-Marsolais: Où est-ce exactement sur la rivière Batiscan?

M. Paquin (Jules): À Saint-Narcisse.

Mme Dionne-Marsolais: Bien, Saint-Narcisse par rapport à chez vous, là, on se trouve à combien...

M. Paquin (Jules): C'est à peu près 40 km plus bas, à peu près ça, là.

Mme Dionne-Marsolais: Plus bas, donc en s'en allant vers le fleuve.

M. Paquin (Jules): C'est ça.

Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Est-ce que ce barrage-là est encore en exploitation?

M. Paquin (Jules): Oui, il a été rénové même il y a à peu près sept, huit ans.

Mme Dionne-Marsolais: Et il est de quelle capacité?

M. Paquin (Jules): Il est de?

Mme Dionne-Marsolais: De quelle capacité?

M. Paquin (Jules): Oh! là, je ne peux pas vous...

Mme Dionne-Marsolais: Vous ne savez pas?

M. Paquin (Jules): Je pense que c'est 20 MW, mais je ne suis pas sûr.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. L'autre question que j'ai, c'est: Dans votre évaluation du potentiel économique de développement, vous avez investi combien dans ce projet-là à ce jour?

M. Paquin (Jules): Ah! à ce jour, on n'a pas investi beaucoup, là. Écoutez un peu, l'investissement, on en a un aujourd'hui, là, c'est le temps qu'on vient passer ici.

Mme Dionne-Marsolais: Non, mais le sens de ma question, c'est: quand vous avez évalué le potentiel de retombées, vous avez quand même investi un peu d'argent pour savoir que ça rapporterait 250 000 $ à votre municipalité, là. Est-ce que ça a été financé par la Corporation du pont... pas du pont, là, mais...

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Lemay.

M. Lemay (André): Quand l'étude a été présentée, au départ, au niveau des avant-projets, la MRC avait eu des subventions, là, dans le cadre de différents projets. Il y a eu, je pense, un montant de 100 000 $ ou 125 000 $ qui a été utilisé pour des firmes professionnelles, mais tout le travail qui s'est fait subséquemment s'est fait bénévolement, tant par les ingénieurs que les procureurs, là. Tout le monde travaille... Évidemment, quand on met sur pied un projet comme ça, s'il se réalise, il se réalise. Puis, s'il ne se réalise pas, évidemment il n'y a pas d'argent pour combler...

Mais à votre question, madame, quand vous le mettez en relation avec l'avenir énergétique du Québec, c'est certain que le projet de la MRC Mékinac, ça ne changera pas l'avenir énergétique du Québec, hein, c'est une quantité infime. Ce à quoi on veut sensibiliser la commission, c'est que, dans l'analyse de votre mandat, qui est beaucoup plus large, il faut que vous gardiez à l'esprit que l'énergie hydroélectrique notamment ? puis je comprends que l'éolienne aussi ? c'est un moyen de développement des régions. Donc, indépendamment des grands projets puis des etc., il faut, je pense, laisser une place... Puis je vous dirai que c'est peut-être une place qui est quand même petite au niveau de l'ampleur des quantités d'énergie, mais on ne peut pas penser au développement du Québec sans se poser la question en disant: En région, qu'est-ce qu'ils ont en région pour se développer? Alors, ils ont des richesses naturelles, mais qu'est-ce qu'il reste? Qu'est-ce qui est accessible?

Un peu comme le chef Picard disait tantôt, nous, on a ça, là. La forêt a été grugée pas mal, etc., les mines, avec les difficultés que ça comporte, donc il nous reste le vent, il nous reste les ressources naturelles et ces moyens-là. Si on n'a pas les outils pour les prendre en main... Donc, dans votre politique ou dans votre recommandation, il m'apparaît que la commission, au-delà... Puis vous avez une tâche importante. Vous devriez vous garder un petit dessert, si vous me permettez l'expression, pour dire: Bien, il faut conserver un moyen pour les régions de tirer un bénéfice de se développer avec cette ressource-là, indépendamment des quantités totales qui pourraient être nécessaires pour Hydro-Québec.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, ici ? bonjour, messieurs ? il y a 153 personnes qui gèrent le réseau. Au niveau du Syndicat de réseau des employés, il y a 153 personnes qui, 24 heures sur 24, surveillent le réseau d'Hydro-Québec, notre réseau, quoi, et ils sont venus nous dire ici qu'on n'avait pas besoin d'aller vers les minicentrales si on prenait les bons gestes, les bonnes actions, maintenant et pour les années... en efficacité énergétique, par exemple. Alors, moi, j'ai dans mon comté, à la MRC de La Mitis, un projet qui est sur la table depuis plusieurs années, où on a deux barrages d'Hydro-Québec, le barrage de Mitis et le barrage Mistigougèche, dont il faut faire la réfection depuis des années, et on a besoin de quelques millions, puis c'est urgent parce qu'il y a des impacts environnementaux, il y a des impacts économiques, il y a des impacts pour l'eau potable, par exemple, de la ville de Mont-Joli, et ça ne se règle pas.

Moi, ma question, messieurs, c'est: Est-ce qu'Hydro-Québec ne serait pas mieux de prioriser, de s'occuper de ses propres barrages qui sont dans le décor? Et, moi, c'est une MRC aussi comme vous. Vous, vous êtes une MRC. De ce que je comprends, vous êtes les promoteurs. Vous voyez un impact économique positif pour votre milieu. Mais, moi, j'ai une MRC qui est prise avec des infrastructures d'Hydro-Québec qui ne s'en occupe pas, qui veut le remettre au milieu. Ils vont le remettre au milieu. Ça fait des années qu'on essaie de régler le dossier, et il ne se règle pas. Moi, je me dis: C'est quoi, là? Des fois, peut-être que vous allez vers une patate chaude aussi que vous allez ramasser, là. C'est peut-être un cadeau de Grec. Et, si on n'en a pas besoin, pourquoi aller... Parce que les gens qui sont venus la semaine passée nous disaient: Ça brise notre tissu social, ça fait des chicanes de famille et tout. Alors, moi, il y a ça, d'une part.

Et tantôt, quand vous disiez qu'avec ce million-là... Puis je le comprends parce que je le sais, que les MRC... Je pense que vous êtes 13 000 personnes, hein? Ce n'est pas beaucoup effectivement puis c'est difficile de faire du développement économique. Alors, moi, j'ai eu des difficultés économiques dans la Matapédia, puis on a eu des emplois municipaux sur deux ans. On avait besoin ? et on l'a eu ? de 850 000 $ une année, 1 million l'autre année, et ça a créé à peu près 50, 70 emplois temporaires d'à peu près 15 à 20 semaines. Alors, il ne faut pas non plus voir ça comme un Klondike qui nous arrive.

Puis en même temps je respecte votre volonté de développer votre milieu, mais qu'est-ce qu'elle doit prioriser, Hydro-Québec, entre ces deux choix-là, là? S'occuper de ses affaires ou laisser aller vers des minicentrales?

Le Président (M. Bachand): M. Morasse, qui s'impatiente. Et M. Lemay, qui désire aussi parler. Allez-y, M. Morasse.

M. Morasse (Jean): Moi, j'aurais tendance à dire que c'est deux choses. Moi, je suis d'accord qu'Hydro-Québec s'occupe de ses affaires. De l'autre côté, moi, je reviens à l'analogie qu'on faisait tantôt entre les petites centrales et les éoliennes. Alors, si les nouvelles données qu'on amenait tantôt illustrent qu'on n'a pas besoin d'énergie supplémentaire, pourquoi est-ce qu'on fait des éoliennes en Gaspésie? Et je pense que c'est clair pour tout le monde, on le fait comme mesure de développement régional, et c'est tout à fait correct. Et, nous, ce qu'on dit: c'est la même chose pour nous. Et, une petite centrale, la différence pour nous, c'est que c'est des revenus autonomes. Alors, c'est la même préoccupation qu'on a que les représentants, et, nous, tantôt on ne veut pas quémander, venir ici régulièrement pour demander des subventions, on veut des revenus autonomes pour prévoir nous-mêmes notre développement et le planifier, ce qu'on peut difficilement faire quand on ne sait pas les revenus de subvention qu'on va avoir d'une année à l'autre.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui. Parce que les gens, là, le Syndicat des employés de réseau d'Hydro-Québec sont venus nous dire, puis plusieurs, hein, qu'avec les projets existants, dont ceux issus de la filière éolienne, on aurait suffisamment d'énergie pour nos propres besoins et pour en exporter aussi. Alors, on n'a pas besoin des minicentrales. C'est ça que plusieurs sont venus nous dire.

Le Président (M. Bachand): M. Morasse, M. Lemay et M. Paquin.

M. Morasse (Jean): O.K. D'abord, je vais vous poser la question: Si on n'a pas ça ? et on n'en a pas, des opportunités énormes, là ? si on n'a pas ça, qu'est-ce qu'on fait pour aider des territoires comme le nôtre qui sont des territoires... M. Paquin tantôt disait qu'on est défavorisés. Dans la section qu'on n'a pas lue, là, on vous l'aurait illustré, à quel point on est défavorisés. Alors, c'est une mesure, c'est une possibilité que vous nous donnez de se développer. Puis, si on n'a pas ça, on va penser à faire comme on a fait, il y a quelques années, en Gaspésie, on va dire: On le ferme-tu, notre village? C'est quoi, nos options de développement, si on n'a pas des choses comme ça?

Le Président (M. Bachand): M. Lemay, vous vouliez ajouter... Allez-y.

M. Lemay (André): Très brièvement. Mme la députée, je lisais un article, là, du maire d'Amqui récemment où, lui, il se posait la question au niveau des projets d'éolienne en disant: Pourquoi qu'on ne donne pas ça aux municipalités ou aux organismes régionaux afin de pouvoir en tirer bénéfice? Il se posait la question en disant: Est-ce qu'on devrait donner ça au secteur privé, ou on ne devrait pas plutôt, ces ressources naturelles ? c'est des ressources naturelles ? les donner aux gens des régions? Ça fait que c'est dans la même perspective que celle qui est analysée chez vous.

Mme Doyer: Inquiétez-vous pas, avec le maire d'Amqui, on a des bonnes discussions, puis dans le sens de... Par exemple, certains villages de Gaspésie ou même de mon coin, le Bas-Saint-Laurent, vont n'avoir de retombées que 2 000 $, ou 10 000 $, ou 20 000 $, des pinottes. Et, les agriculteurs sur lesquels les terres passent, c'est 2 000 $ par année de redevances. Alors, il faut revendiquer ça aussi. Mais... Comment je dirais ça? Vous, vous nous dites: Il faut faire feu de tout bois, hein, de tout côté. Alors, moi, je sais que ma collègue... Mais ce sont des questionnements fondamentaux dans le sens des besoins, et de quelle façon on va assurer les besoins de l'ensemble du Québec, et de quoi on peut se passer. Si on dit: On peut se passer des minicentrales, je pense qu'il faut se questionner là-dessus. Mais c'est légitime, je le redis, c'est légitime pour vous de les revendiquer aussi. Mais ce sont des gros débats de société.

n (12 h 50) n

Le Président (M. Bachand): M. Paquin.

M. Paquin (Jules): Madame, vous êtes députée, vous? Vous êtes députée, vous?

Mme Doyer: Oui.

M. Paquin (Jules): Oui? Vous savez qu'on est endettés au coton au Québec.

Mme Doyer: Bien, là, c'est un autre débat, monsieur. Je voudrais qu'on donne...

M. Paquin (Jules): C'est épouvantable, être endettés de même. En Alberta, eux autres, ils ont de l'huile, puis ils la vendent, leur huile, puis ils n'ont plus de dette. Puis, nous autres, on a de l'eau, on est capables de faire de l'électricité puis on est mieux de ne pas en faire?

Mme Doyer: Ce n'est pas ça que je dis, monsieur. Vous ne m'avez pas bien comprise si vous avez compris ça.

M. Paquin (Jules): Bien, moi, je prends ça de même.

Le Président (M. Bachand): Bon. Donc, est-ce qu'il y a d'autres questions? Mme Champagne, vous connaissez bien nos règles. Compte tenu du fait que vous n'êtes pas membre de la commission, donc je vais demander le consentement. Y a-t-il consentement?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Bachand): Je comprends qu'il y a consentement. Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: O.K. Merci beaucoup. Écoutez, je vais terminer par une question la plus légère possible, même si c'est un dossier très prenant et très lourd. Je viens de cette région-là d'origine, donc je connais bien la rivière Batiscan, je connais bien également les intervenants qui sont ici, là, pour la plupart personnellement. Alors, moi, je ne vois aucune mauvaise foi dans chacun des intervenants qu'on a vus tant aujourd'hui que la semaine dernière. Chacun défend son point de vue, chacun a ses bonnes raisons de le défendre, et le commun des mortels s'y perd dans ça.

Par contre, ce que je peux faire comme constat, c'est qu'il y a eu beaucoup de charriage dans tous ces dossiers-là. J'ai vécu le dossier Boralex à Saint-Stanislas. Là, on a le dossier avec Eau vive Batiscan, à Sainte-Adèle, puis le dossier bien sûr avec Chute libre, et puis la chute du Neuf à Notre-Dame-de-Montauban. Alors, on peut reconnaître que les gens ont le droit de défendre leurs projets, leurs opinions et que, peu importe qu'il y ait référendum, qu'il y ait consultation ou pas, il arrive ? on a fait tous un peu de la politique, ici, autour de la table ? que parfois les arguments ne sont pas toujours saisis comme on le voudrait et que les résultats ne sont pas toujours ceux non plus qu'on voudrait. La preuve, c'est, tout à l'heure, M. le préfet qui le disait, dans un premier sondage, ou sollicitation, par les gens de Chute libre, ça semblait majoritairement contre, et, à partir du moment donné où la municipalité elle-même en fait un, ça vire de bord. Alors, c'est très délicat. Puis, il existe, sur cette terre, des moyens très officiels comme un BAPE qui vient parfois sortir les vrais enjeux de façon plus pointue.

Alors, moi, ce que j'en ai et ce que j'en comprends, c'est bien simple, là, s'il n'y avait pas 1 million, au bout de ça, d'intérêts ? puis ce n'est pas loin d'être intéressant, hein, n'est-ce pas? ? je pense qu'on ne penserait même pas à harnacher ces rivières-là. Or, M. le préfet dit: Écoutez, là, autant il y en a qui font de l'argent en vendant de l'huile, pourquoi qu'on ne vendrait pas notre eau? Et on le dit clairement dans le document que j'ai là: Bien, les États-Unis sont gourmands, ils n'en ont plus, eux autres, d'eau, donc ils se revirent du côté du Québec puis ils veulent avoir notre eau. Alors, la question qu'on se pose en tant que commission sur l'énergie: Est-ce que véritablement on en est rendus là, à harnacher tout ce qui bouge parce qu'on n'a pas assez d'argent? Est-ce qu'également ? et je vous pose la question ? Hydro-Québec, même si vous n'êtes peut-être pas là pour y répondre personnellement, ne devrait pas, de toutes les sommes d'argent qu'elle recueille en vendant l'énergie qu'elle a en quantité suffisante présentement, voir à donner des retombées au niveau des régions?

Le débat est beaucoup plus large que le harnachement de la petite chute du Neuf à Notre-Dame-de-Montauban. Alors, tout à l'heure, on disait qu'il y a eu peut-être un 100 000 $ et quelques de mis pour faire des études sur le projet, mais la vraie question, c'est: Est-ce qu'il y a d'autres moyens de se ramasser des sous dans la MRC Mékinac, que je connais bien, dont je connais tous les enjeux économiques et les déficiences qu'on a, la démographie qui nous lâche, nous échappe? Est-ce qu'il y a d'autres moyens qui ont été regardés par la MRC, M. le préfet et vos collègues du conseil de ville, là? Puis je sais que l'effort a peut-être été fait. J'aimerais que vous m'en donniez un petit bout là-dessus afin d'éviter de heurter autant de gens, là, parce que, là, c'est toute la rivière Batiscan qui semble être ramassée par ce débat-là, et ça fait des chicanes de village, c'est le cas de le dire.

Le Président (M. Bachand): Messieurs, en conclusion et très rapidement. M. Lemay.

M. Lemay (André): Sur le volet impact environnemental, au Québec, on a, depuis plusieurs années, institué un mécanisme de Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. C'est les spécialistes, c'est les gens qui analysent les projets, qui demandent des modifications, des ajustements, s'il y a lieu, qui peuvent refuser des projets, et notre projet va être soumis à ça. Alors, il va falloir qu'on passe par là, puis on n'aura pas le choix, puis on va y aller avec plaisir. Puis, s'il y a des ajustements à apporter, bien on les fera. Donc, sur la question de l'impact environnemental, il y a un mécanisme, il y a un processus où la population peut participer, les opposants peuvent participer à ça, puis ils vont avoir voix au chapitre. Ça fait que donc ce volet-là, il ne me préoccupe pas, dans le sens qu'on va avoir un arbitre, on va avoir quelqu'un qui est indépendant, qui n'est pas d'un côté ou de l'autre puis qui va avoir une décision à prendre. Ça fait que je pense que c'est une garantie, à tout le moins, là, au niveau environnemental.

Le Président (M. Bachand): Très rapidement, M. Lemay, parce que...

M. Lemay (André): Dans les autres projets que Mme Champagne nous invite... c'est que ça fait un bout de temps qu'on en parle, de ce projet-là, puis les gens nous ont posé la même question en 2002 quand on a fait les assemblées publiques: Avez-vous cherché autre chose? Oui, on a cherché autre chose. Puis on leur a dit: Vous autres, si vous avez des idées, amenez-en. Ils n'en ont pas amené. Ça fait que les moyens, là...

On a eu un exemple, on a fait le pont. Ça, c'en est un, projet qu'on a fait. Mais on ne peut pas faire un pont de deux étages. On en a un, pont de fait. Il est fait. C'est une réalisation extraordinaire qui a été reprise, quelques années plus tard, par le secteur La Tuque qui a fait un même système à Rivière-aux-Rats. Le secteur Rivière-aux-Rats, je ne sais pas si les gens le connaissent, c'est... avec la rivière Saint-Maurice. Ils ont comme pris à peu près les mêmes plans. Ils ont déménagé ça puis ils ont pris le même concept, avec pont payant, et avec ça, eux autres aussi, ils ont des retombées. Mais des solutions accessibles et rentables, si on en avait plein les bras, tout le monde, on ne serait pas ici, personne. On cherche ensemble.

Le Président (M. Bachand): M. Lemay, merci infiniment. M. Paquin, M. le préfet, merci infiniment de vous être présentés à la commission, M. Leclerc, M. Morasse, M. Filteau et M. Lavoie. Vous êtes toujours les bienvenus à la Commission de l'économie et du travail. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 56)

 

(Reprise à 14 h 6)

Le Président (M. Bachand): Donc, messieurs mesdames, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons débuter les travaux. Je vais inviter les Manufacturiers et exportateurs du Québec à prendre place, s'il vous plaît.

Simplement vous mentionner que nous avons omis de suspendre la séance. Assoyez-vous. Prenez place, messieurs. C'est une question de procédure.

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand): Absolument. Donc, simplement vous dire que c'était explicite, que la séance était suspendue et que nous allons reprendre les travaux, simplement.

Donc, messieurs, je vous souhaite la bienvenue à cette Commission de l'économie et du travail. Je vous rappelle rapidement la façon dont se déroulent les travaux: donc, il y a 20 minutes pour votre présentation, 20 minutes du côté ministériel, 20 minutes du côté de l'opposition pour leur permettre... pour permettre en fait aux parlementaires de vous poser les questions sur le mémoire que vous présentez. Donc, je vous souhaite la bienvenue et je vais vous demander de vous présenter pour le bénéfice des membres de la commission.

Manufacturiers et exportateurs
du Québec (MEQ)

M. Charron (Daniel): Bien, merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, je me présente, mon nom est Daniel Charron, je suis président-directeur général par intérim de l'Association des manufacturiers exportateurs du Québec. Je suis accompagné, à ma droite, de M. Jean-Michel Laurin, qui est analyste Politiques économiques et environnement chez nous, chez l'Association des manufacturiers exportateurs, et, à ma gauche, de M. Luc Lachapelle, qui est vice-président chez Bowater, un manufacturier, là, que je présenterai un peu plus loin dans cette présentation.

D'abord, un petit mot sur l'Association des manufacturiers exportateurs du Québec. Les Manufacturiers exportateurs du Québec, c'est, au Québec, 650 membres, une bonne représentation de la structure industrielle du Québec. 20 % à 30 % de notre membership est composé de grandes et de très grandes entreprises, le reste de petits et moyens manufacturiers. On s'est donné un agenda industriel très précis chez les Manufacturiers exportateurs, on travaille sur cinq enjeux que l'on juge prioritaires. L'énergie en fait partie. C'est parce qu'on est concernés qu'on a déposé un mémoire à la commission et c'est parce qu'on se sent concernés par le débat actuel qu'on est ici, aujourd'hui.

Un petit mot sur le secteur. Le secteur, c'est 630 000 emplois directs au Québec, 21 % de notre produit national brut, et c'est sans conteste la locomotive de notre développement économique et régional. 85 % des exportations proviennent du secteur manufacturier. Les exportations, bien c'est 1,1 million d'emplois qui en dépendent directement et indirectement au Québec.

Vous avez lu notre mémoire, je vous ferai grâce d'une lecture intégrale de celui-ci. Ce que je veux que vous reteniez de notre passage ici, c'est quatre choses, c'est quatre choses sur lesquelles on va parler, premièrement, ce que ça représente dans un contexte d'une entreprise manufacturière, l'énergie. En d'autres mots, quand on parle de politique énergétique, d'énergie, de tarifs d'approvisionnement, ce n'est pas abstrait, ça a des effets bien concrets, et c'est M. Lachapelle qui, par son expérience, pourrait nous en parler un peu. Ensuite de ça, on va parler des tarifs. On va voir que, quand on se compare avec ce qui se fait ailleurs, Québec ne fait pas de cadeau en matière de prix lorsqu'il s'agit d'électricité. On va parler, troisièmement, de l'urgence de développer agressivement notre potentiel électrique. Et finalement on va démontrer qu'il est de loin préférable de transformer la ressource électrique ici, au Québec, plutôt que de l'exporter sans transformation.

Bien, je vais céder la parole à M. Luc Lachapelle. Encore une fois, il est vice-président Opérations papier chez Bowater. C'est un manufacturier qui opère des scieries à Dégelis, Price, Maniwaki, Saint-Félicien, Girardville et Mistassini et qui produit des pâtes et papiers à Gatineau, Donnacona et Dolbeau. C'est notamment grâce à des entreprises comme Bowater qu'on produit au Québec le papier qui va dans les livres de poche à travers l'Amérique du Nord, sur lequel sont écrites les histoires de Harry Potter. Bowater a son siège social en Caroline du Sud et possède des installations dans six États américains, quatre provinces canadiennes et trois pays. Ses produits sont vendus dans une vingtaine de pays à travers le monde. La concurrence internationale, chez Bowater, ils connaissent ça. M. Lachapelle nous expliquera ce que ça représente, l'énergie, dans un contexte manufacturier et nous parlera de l'importance de l'efficacité énergétique dans le milieu industriel.

n (14 h 10) n

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Lachapelle.

M. Lachapelle (Luc): Merci bien. Bon, pour ceux qui ne sont pas familiers avec Bowater, en gros c'est 2 000 emplois au Québec répartis un peu partout à travers la province. Et surtout nous sommes une organisation intégrée verticalement qui va de la cueillette du bois jusqu'à la production du papier, en passant par les scieries. En gros, nous sommes une compagnie qui vendons à peu près 1 milliard de... qui avons 1 milliard de chiffre d'affaires au Québec. Nous vendons à peu près 75 % de notre production aux États-Unis, à peu près 10 % en Europe et 15 % à travers le Canada. Mais surtout Bowater, c'est une compagnie ? même si c'est une compagnie américaine ? c'est une compagnie qui a fait le pari d'investir au Québec. Au travers des 10 dernières années, on a investi plusieurs centaines de millions pour moderniser nos opérations à travers la province, pour prendre en ligne de compte ce qu'on voyait à l'époque comme les avantages comparatifs du Québec, ce qui était en gros l'énergie de l'électricité et les ressources ligneuses.

En gros, notre industrie, malgré les nombreux investissements qu'on a faits, comme vous le savez, a été frappée, de façon relativement importante, par la hausse du dollar américain. Évidemment, quand on subit une augmentation de 33 % du dollar canadien versus le dollar américain, quand on va vendre notre production en dollars américains, ça veut dire une baisse de revenus relativement sensible. En plus, nos opérations forestières ont été affectées par les droits compensatoires, qui ont réduit de façon significative la rentabilité de nos scieries. Et finalement, avec les réductions à venir des allocations forestières, c'est sûr que nos opérations vont être affectées par des hausses de prix du bois. Donc, quand on regarde ça dans un contexte global, on va subir et on a subi des augmentations substantielles de coûts de production et on va aussi subir des baisses de revenus.

Pour faire face à ça, évidemment la solution facile serait d'augmenter nos prix de vente. Malheureusement, dans le contexte global où on opère, Bowater, même si c'est une compagnie majeure en Amérique du Nord, on est tout de même relativement un petit joueur au niveau global, et notre compétition, elle est mondiale, elle est globale. Donc, à toutes fins pratiques, il est impossible pour nous d'augmenter nos prix de vente pour être capables de refiler aux clients ces augmentations-là. Donc, nous sommes obligés de faire face à ces augmentations-là en essayant de réduire, par tous les moyens possibles, nos coûts de production.

Évidemment, au niveau de l'énergie, dans une usine de papier, dans les scieries, la vapeur et l'électricité, c'est deux des composantes importantes au niveau énergétique. À titre d'idée, juste en électricité, Bowater paie environ 100 millions de dollars d'électricité, achète pour environ 100 millions de dollars d'électricité d'Hydro-Québec. Donc, c'est sûr que, depuis plusieurs années, on travaille pour essayer de réduire de façon significative l'impact de l'énergie sur nos opérations. À titre d'exemple, à Dolbeau, on a installé des bouilloires à biomasse qui, combinées avec des turbines, ont un système de cogénération, génèrent de l'électricité et de la vapeur. Alors, on se prépare à installer le même type d'équipement à notre usine de Gatineau pour essayer d'améliorer l'efficacité énergétique de nos opérations. Et finalement on a installé aussi des usines de recyclage à Gatineau pour essayer de réduire nos coûts. Mais globalement l'électricité et l'énergie représentent toujours une composante importante pour nous, et, comme vous pouvez vous en douter, avec 100 millions de dollars de facture, une augmentation significative du coût de l'électricité aurait un impact très important sur nos opérations.

Le Président (M. Bachand): Oui, M. Charron.

M. Charron (Daniel): Comme deuxième point, je voulais qu'on discute des tarifs. Évidemment, on va parler davantage des tarifs d'électricité parce que, dans la réalité manufacturière québécoise, 70 % de l'énergie consommée, c'est l'électricité, et c'est sur le tarif d'électricité que les travaux de cette commission pourraient avoir ultimement, ou en tout cas plus rapidement, un impact.

Aux Manufacturiers et exportateurs du Québec, on croit que les tarifs industriels qui sont pratiqués au Québec ne sont ni uniques, ni injustes, ni discriminatoires envers les clients résidentiels, au contraire. Est-ce que c'est injuste que le secteur industriel québécois consomme 43 % de l'électricité produite alors qu'il ne représente que 32 % des ventes d'Hydro-Québec? Est-ce que c'est injuste que les clients résidentiels paient 0,063 $ le kilowattheure alors que l'entreprise industrielle, en particulier la grande, paie 0,038 $? Notre réponse à ça, c'est non. Et sur quoi on se base? C'est que les Manufacturiers et exportateurs du Québec, nous, ce qu'on a fait, c'est qu'on a regardé ce qui se passait ailleurs dans le monde, et ce dont on s'est rendu compte, c'est que, lorsqu'on regarde l'écart entre le tarif résidentiel et le tarif industriel, le Québec, surprenamment, en tout cas par rapport à ce qu'on aurait pu le croire, est un des endroits où cet écart est le plus faible au monde. Le client résidentiel paie 1,66 fois plus cher que le client industriel. Aux États-Unis, c'est 1,73 fois; la moyenne de l'Union européenne, 1,90; en Allemagne, 1,98. Même en Suède, qui est reconnue comme étant un pays en tout cas progressiste, 2,36, cet écart. Mats Naslund paie son électricité 2,36 fois plus cher que Volvo.

Pourquoi qu'il y a un écart comme celui-là? D'abord, coût de distribution. On est tous d'accord avec le fait que ça coûte moins cher de livrer une quantité d'électricité à un seul client par rapport à livrer la même quantité d'électricité à plusieurs clients. Dans d'autres domaines de la vie économique, on appelle ça un prix de gros, et c'est normalement une règle acceptée.

Autre élément qu'on développe dans le mémoire, c'est au niveau de l'utilisation. Qu'est-ce qui explique cette différence? L'utilisation. Le client industriel et le client résidentiel ne font pas la même utilisation de la ressource énergétique. Dans le cas d'une entreprise manufacturière, on se sert de l'énergie comme d'un intrant de production pour produire quelque chose qui ultimement a plus de valeur. Ce sont des retombées économiques qui en découlent, de cette utilisation. Dans le cas d'un client résidentiel comme vous ou nous, l'utilisation génère en général moins de retombées économiques. Donc, deux arguments pour expliquer un écart entre le tarif industriel et le tarif résidentiel: d'abord, le coût de distribution, il ne faut pas l'oublier; et, deuxièmement, l'utilisation et les retombées qui sont générées.

Qu'est-ce qu'on fait donc pour assurer que les tarifs soient maintenus, en particulier dans le secteur industriel, à des niveaux concurrentiels? Ça m'amène à parler de la nécessité de développer l'approvisionnement. La solution ? puis j'imagine que plusieurs le partageront ? pour assurer que les tarifs soient maintenus à des niveaux compétitifs, que la sécurité de l'approvisionnement soit assurée et que la rentabilité de la société d'État qu'est Hydro-Québec soit maintenue: il faut développer l'approvisionnement électrique.

Au cours des prochaines années, la demande d'électricité au Québec sera en croissance. Hydro-Québec parle de 2,5 TWh par an. Ce sera largement dû au secteur industriel. Pourquoi la consommation énergétique du secteur industriel augmente? Bien, comme M. Lachapelle nous l'a démontré, ce n'est pas pour la gaspiller, cette ressource, c'est pour produire plus, employer davantage de gens et exporter davantage que cette consommation d'électricité ira en augmentant. C'est donc une bonne nouvelle.

Ce qui est arrivé au cours des dernières années, c'est que l'offre n'a pas suivi. Quand on regarde la courbe des investissements qui ont été faits dans la construction de centrales ou de capacité de production d'électricité, dans les années quatre-vingt-dix, bien cette courbe va en descendant pour ne remonter qu'au début des années 2000. Bien, ça nous a placés dans une situation qu'on connaît maintenant depuis deux ou trois ans, où notre marge de manoeuvre est très, très mince. Ça force même le recours à l'importation. Puis qui dit importation dit impact sur les coûts, éventuellement impact sur les prix, et ça, c'est un risque que l'industrie québécoise ne veut pas prendre. Il nous apparaît donc évident qu'il faut développer agressivement la production, car cela assurera à Hydro-Québec qu'elle peut satisfaire à la demande à des tarifs concurrentiels et permettra à Hydro-Québec d'exporter ses surplus si elle en a, et cela rapportera au Trésor québécois. On reviendra, tout à l'heure, sur l'exportation.

Les Manufacturiers et exportateurs du Québec, nous, on priorise le développement hydroélectrique lorsqu'on parle de production d'électricité. Pourquoi? En raison de cette optimisation, à notre sens, du rapport entre les coûts économiques et les coûts environnementaux. Il y a des filières de production électrique qui permettraient d'avoir de l'électricité probablement à des coûts plus bas ? le charbon et le nucléaire ? mais on croit que ça n'optimise pas ce rapport entre le coût économique et le coût environnemental.

Bien entendu, qui dit nécessité de développer l'approvisionnement, nécessité de développer agressivement cet approvisionnement, bien il va falloir que les projets bien se réalisent et se réalisent rapidement. Beaucoup de projets, que ce soient hydroélectriques ou encore dans d'autres filières comme le gaz naturel ? qu'on pense au projet de port méthanier ? font face à des oppositions qui nous empêchent d'avoir toute les données en main avant de déterminer si ce projet est bon ou non. Je crois qu'il faut laisser le temps à ces promoteurs, qui ont le devoir en fait de présenter les impacts de leurs projets, pour avoir toutes les données en main pour prendre ces décisions. À ce moment-ci, on se prive des éléments nécessaires à la prise de décisions qui encore une fois auront des impacts sur toute l'économie du Québec et non seulement sur les régions qui sont concernées.

n (14 h 20) n

Avant de finir, je voulais qu'on parle un peu d'exportation. On est une association d'exportateurs, il faudrait... vous me le reprocheriez. Moi, il y a quelque chose que je ne comprends pas. Quand on parle d'aluminium, on se bat pour attirer ici de la deuxième, de la troisième transformation. Quand on parle d'électricité, il semblerait que ce serait plus rentable de l'exporter directement sans la transformer. Même, certains prétendent qu'il vaudrait mieux monter le tarif, contraindre la demande intérieure pour être sûr d'en avoir plus à exporter sans la transformer. À notre avis, c'est un peu deux poids, deux mesures. Nous, aux Manufacturiers et exportateurs, on a fait un petit calcul qui est davantage explicité dans notre mémoire. D'ailleurs, tout ce que je dis est davantage explicité dans notre mémoire. Quand on regarde les exportations du secteur manufacturier québécois, on fait le calcul que chaque kilowattheure consommé par le secteur manufacturier génère en exportation 0,69 $. 0,69 $ du kilowattheure en exportation du secteur manufacturier, ça me semble mieux que les 0,06 $, 0,07 $, 0,08 $, 0,09 $, 0,10 $ ce même kilowattheure qu'on pourrait obtenir en l'exportant directement.

Évidemment, la question qu'on se pose, c'est: Est-ce que... Dans la mesure où on ne pourra pas tout la transformer ici, la ressource, il y a place à l'exportation, puis l'exportation devient payante lorsqu'on a des surplus. Donc, en développant agressivement la construction de nouvelles capacités, on va développer des capacités à générer des surplus qui intelligemment peuvent être exportés de manière très payante, pas des contrats sur de nombreuses années qui rapporteront un taux fixe dans le temps. Mais, dans les dernières années, je pense qu'Hydro-Québec a démontré un savoir-faire certain dans sa capacité à profiter des opportunités de marché, que ce soit aux États-Unis ou en Ontario. En d'autres mots, ce qu'on dit, c'est que la ressource énergétique au Québec, en particulier hydroélectrique, doit servir le développement économique et non pas être vue strictement comme un élément de politique fiscale.

On parle beaucoup des effets qu'aurait une augmentation des tarifs ou des exportations sur le bénéfice de la société d'État et donc de sa ristourne au gouvernement du Québec. On a très peu parlé des impacts économiques qu'aurait une augmentation des tarifs. Je n'ai pas d'étude en main, je ne sais pas... À ma connaissance, je n'en ai pas vu, d'étude qui détermine quel serait le coût d'une augmentation de x % ou y % des tarifs d'électricité, en particulier dans le secteur industriel, secteur dans lequel, nous, on a concentré notre analyse.

En conclusion, s'il y a une chose dont on veut que vous vous rappeliez, suite à notre passage, c'est que les orientations et les décisions que vous allez prendre quant à l'énergie et à la politique énergétique vont avoir un impact significatif sur le développement économique actuel et futur du Québec. Encore une fois, nous, ce dont on voulait vous parler aujourd'hui, c'était de quatre choses, qu'est-ce que ça représente, l'énergie, dans la réalité d'une entreprise manufacturière, et je pense que M. Lachapelle en a fait, du moins brièvement, la démonstration. On a parlé des tarifs. Ce n'est pas étrange, ce qui se passe au Québec en termes de tarifs industriels d'électricité. Quand on se compare avec ce qui se fait ailleurs dans le monde, on se rend compte que... on remarque clairement que le Québec ne fait pas de cadeau à son industrie.

Comme troisième élément, on a parlé de l'importance de développer notre approvisionnement, de le rendre disponible, suffisant, à prix compétitif, et on a parlé finalement qu'il est de loin préférable de transformer l'énergie ici plutôt que de l'exporter à l'état brut. L'économie du Québec ne peut se passer d'un secteur manufacturier qui soit fort et dynamique, qui génère la forte majorité de ses exportations. Bien, le secteur manufacturier, pour rester fort et dynamique, a besoin d'un approvisionnement énergétique qui soit fiable, disponible, à des prix compétitifs. J'espère que ça aura apporté un éclairage utile à vos réflexions.

Le Président (M. Bachand): Absolument, M. Charron. Merci infiniment de votre contribution. Donc, je vais céder la parole au ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation J'ai beaucoup de questions, et c'est l'objectif, d'ailleurs, parce qu'il y a des affirmations qui sont intéressantes, mais on va en discuter.

La première, à la page 12, si ma mémoire est bonne, vous dites: Il faut... Je vais vous lire, là, pour... Il faut éviter de glisser vers une stratégie du tout-exporter en électricité. Et là vous avez fait un peu de démonstration qu'on exporte 0,69 $, dans une entreprise, pour 1 kWh par rapport à 0,08 $, 0,09 $. Je vous donne le temps de l'expliquer de nouveau, là, mais plus en détail, puis après ça j'ai des questions là-dessus.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Charron.

M. Charron (Daniel): Bien, ce qu'on dit dans le mémoire, c'est un peu en réponse à ce qu'on avait lu et entendu sur les exportations. Puis, nous, ce qu'on dit, c'est: Bien oui, il faut une stratégie à l'exportation de la ressource électrique. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut éviter d'avoir une stratégie du tout exporter. Encore une fois, il ne faut pas accroître les tarifs, contraindre la demande intérieure pour avoir un plus gros pot à exporter et l'exporter sans la transformer.

Ce qu'on a calculé, nous, c'est: en prenant les exportations du secteur manufacturier uniquement et la consommation en kilowattheures de ces entreprises manufacturières, on arrive à un chiffre qui présente de manière générale l'effet de l'un sur l'autre. Donc, chaque kilowattheure génère 0,69 $ d'exportation dans le secteur manufacturier. Nous, on a comparé ça très bêtement au prix qui peut être obtenu en vendant, disons, l'électricité sur les marchés aux États-Unis et on s'est dit: Bien, il me semble qu'il y en a un qui nous apparaît plus profitable que l'autre et de loin plus profitable que l'autre.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Là, je veux être sûr qu'on parle des mêmes choses. 0,79 $ du kilowattheure, c'est votre coût de production du produit exportable. Et, quand vous exportez l'électricité, c'est le coût net qui rentre là, là. On comprend-tu la différence? Elle n'est pas pareille, là.

M. Charron (Daniel): Évidemment, c'est sûr...

M. Hamad: Il y a 10 fois de différence entre les deux.

M. Charron (Daniel): Et c'est pour ça qu'on ne fait pas la comparaison directe. Puis je n'ai pas dit que c'était six fois plus...

M. Hamad: Non, non, mais, quand vous dites «0,79 $ le kilowattheure pour produit exporté», c'est votre coût pour exporter à l'extérieur. C'est un coût. Et, quand j'exporte l'électricité puis j'amène des revenus de...

40 % des profits d'Hydro-Québec viennent de l'exportation en 2003. On parle de milliards, là, de profits qui viennent de là, et ce n'est pas pareil. Mais je veux juste vous poser la question...

M. Charron (Daniel): 0,69 $, c'est un revenu, ce n'est pas un coût. C'est nos revenus d'exportation, les entreprises manufacturières, leurs revenus d'exportation par rapport à la quantité d'énergie exprimée en kilowattheures qui est consommée.

M. Hamad: Mais, quand 70 % de vos coûts de production sont en énergie dans une entreprise manufacturière ? c'est l'électricité ? c'est tout à fait normal, en kilowattheures, que les coûts soient élevés. Ça devient un revenu dans votre produit. Je veux dire, le lien est... Là, je ne veux pas rentrer dans le détail pour ne pas perdre du monde, là, mais on se comprend-tu que, quand vous exportez un produit, là, 70 % de vos coûts d'énergie sont en électricité?

M. Charron (Daniel): 70 % de ce que les entreprises manufacturières consomment, par rapport aux autres sources énergétiques, c'est de l'électricité. Par rapport au coût de production, c'est 4,3 % en moyenne, le coût de l'énergie. Dans certains secteurs comme dans les pâtes et papiers ou l'aluminium, ça peut représenter jusqu'à 35 %, dans des secteurs comme l'électrochimique, jusqu'à 90 %, mais la moyenne est autour de, disons, 5 %.

M. Hamad: Expliquez-moi votre compréhension de l'exportation de nouveau, là. Vous savez, là... O.K. Je vais aller direct, là, hein? Écoutez, au Québec, là, on a Hydro-Québec Distribution, on a Hydro-Québec Production. Hydro-Québec Distribution, son mandat, c'est répondre à la demande du Québec. C'est une obligation. On ne coupera pas un fil nulle part, on va fournir tout le monde. Quand on dit: On va fournir à tout le monde, ça veut dire: On va fournir aux résidents, on va fournir aux commerces, on va fournir aux industriels, tout le monde. Ça, c'est Hydro-Québec Distribution. Et Hydro-Québec Distribution va faire des appels d'offres, va aller chercher de l'énergie partout pour aller la vendre.

Qui qui exporte? Ce n'est pas Hydro-Québec Distribution, c'est Hydro-Québec Production. Hydro-Québec Production, elle a une obligation légale de fournir à Hydro-Québec Distribution 165 TWh d'énergie à 0,279 $. Ça, c'est une obligation. Puis après ça Hydro-Québec Production, si elle a une marge de manoeuvre, elle peut exporter. Mais, en exportant, on n'enlève pas 1 kWh ou 1 Wh à personne au Québec. On se comprend-tu? Donc, il n'y a pas un qui va contre l'autre.

Quand vous avez un surplus et vous avez rempli la demande du Québec, alors c'est clair que le plus rentable, c'est exporter votre surplus. Donc, vous pouvez tout exporter votre surplus, quand l'autre voisin en a besoin, à un prix très bon pour aller faire de l'argent, puis le ramener, puis payer des programmes de développement régional, puis payer la santé, payer l'éducation. Donc, il faut faire la distinction entre une obligation de fournir aux gens... Puis, si, à un moment donné, il y a une industrie dans une région et elle a besoin d'électricité, le gouvernement va être le premier à dire à Hydro-Québec: Il faut leur en fournir parce que c'est des emplois de chez nous, parce que c'est fait pour ça, Hydro-Québec Distribution.

Donc, là, je ne vois pas votre théorie de ne pas tout exporter. En fait, c'est comme si vous disiez à l'Alberta: Une fois que tout le monde a utilisé le gaz pour faire marcher leurs autos, là il ne faut pas tout exporter votre pétrole parce que c'est plus stratégique de garder le pétrole en Alberta.

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

n (14 h 30) n

M. Charron (Daniel): Lorsqu'on dit ? et je pense qu'on est d'accord, M. le ministre; je veux juste préciser notre réflexion là-dessus ? quand on dit «une stratégie à l'exportation», c'est une stratégie à l'exportation des surplus. Ce qu'on veut dire quand on dit: On n'est pas d'accord avec une stratégie de tout exporter, c'est par rapport à certaines personnes qui prétendent qu'il faudrait contraindre la demande intérieure pour être sûr d'en avoir plus à exporter. Le surplus, là, allons-y, exportons le tout. On est d'accord avec ça. Mais ce qu'on dit, c'est: Priorisons la vente d'électricité à ces entreprises qui transforment la ressource et qui en génèrent une valeur ajoutée.

M. Hamad: Je comprends, Hydro-Québec Distribution, elle est là pour répondre à la demande. Et en plus ce qu'on a décidé, on a dit: On va te fournir, Hydro-Québec Distribution, une électricité à 0,0279 $ le kilowattheure. C'est ce qui est en bas d'un coût de production, aujourd'hui, de 0,06 $ marginal, donc un bloc de 165 TWh. Évidemment, avec les années, on va dépasser le bloc patrimonial parce que la demande augmente, puis là Hydro-Québec Distribution fait des appels d'offres. Autrement dit, elle va dire à Hydro-Québec Production: J'ai besoin d'un bloc énergétique, fournis-moi un prix. Puis d'autre monde peuvent fournir un prix pour Hydro-Québec Distribution. Donc, il y a deux games, il y a deux choses, il y en a une pour régler la demande à l'intérieur puis l'autre...

Donc, si, mettons, Hydro-Québec Production, elle a bâti un surplus énergétique à côté, ce serait niaiseux de garder ça puis regarder ça passer pendant qu'on peut faire de l'argent puis l'amener, payer nos dépenses puis aider, maintenir une compétitivité de nos entreprises au Québec, créer la richesse, ramener ça au Québec puis continuer à développer les régions. Ce qui peut arriver par contre, et ça, il faut réfléchir, c'est qu'on peut, par exemple, rendre des blocs énergétiques disponibles dans les régions pour encore rendre les entreprises encore plus compétitives pour développer le Québec. Ça, ça peut être fait, mais le lien n'est pas automatique. Je pense que c'est important. En fait, je fais l'éclaircissement, pas pour vous nécessairement, mais pour l'ensemble, parce que souvent, malheureusement, la structure Hydro-Québec est complexe et des fois ce n'est pas évident de la suivre.

Parlez-moi de votre augmentation des tarifs. Donc, 4 % de vos... Là, je fais l'avocat du diable pour le fun, là. 4 % de vos coûts de production dans le manufacturier, une augmentation de tarifs, je ne sais pas, de 2 %, c'est 2 % de 4 %, c'est 0,08 % à peu près des coûts d'entreprise. Est-ce que c'est...

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

M. Charron (Daniel): Le problème, c'est que le 4 %, c'est une moyenne avec la tête dans le four puis les pieds dans le frigidaire.

M. Hamad: Je prends le chiffre que vous me donnez, là, hein?

M. Charron (Daniel): Non, non. On est tout à fait d'accord, mais, dans le mémoire, c'est ce qu'on explique, c'est que justement... C'est-à-dire que c'est une moyenne, une petite moyenne qui... Elle est rare, l'entreprise manufacturière qui est à 4 %. Il y en a qui vont jusqu'à 90 %, il y en a que c'est en deçà de ça. Donc, c'est difficile à trouver. Mais, tout à l'heure, M. Lachapelle nous l'a bien dit, 100 millions de dollars sur la facture d'électricité par année, 1 %, bien c'est 1 million, 2 %, c'est 2 millions, et, ces coûts-là, il ne peut pas les refiler à son client. Ce qu'on explique dans le mémoire, c'est que le coût de l'électricité, ça fait partie d'un ensemble, hein? Et ce qu'on remarque aujourd'hui, c'est qu'avec cette concurrence de la Chine qui crée une pression à la baisse sur les prix... Et, on le sait, il y a une pression également à la hausse sur les coûts, que ce soit le prix des matières premières, que ce soit le prix du transport en raison de l'essence, etc., qui fait que ce que, nous, on appelle... ce qui fait que les manufacturiers sont dans ce qu'on appelle l'étau des coûts ou, en anglais, le «cost squeeze». En d'autres mots, quand on parle d'augmentation d'un coût comme celui de l'électricité, ça fait partie de ce tout-là.

Est-ce que l'entreprise sera en mesure ou non de l'absorber? Ça, c'est une autre question. Dans une entreprise comme Bowater, mais comme combien d'autres qui sont une filiale d'une multinationale, qui ont des endroits de production un peu partout dans le monde et qui se battent, comme établissements, pour obtenir du capital, ça peut faire en sorte que des projets d'investissement ne se réalisent pas ici. Donc, encore une fois, le coût de l'électricité fait partie d'un tout, et, ce tout-là, on l'appelle, aujourd'hui, le «cost squeeze», et c'est la situation dans laquelle les entreprises sont présentes. On ne peut pas refiler la facture au consommateur.

M. Hamad: Je peux vous le dire parce que vous parlez de Bowater. On ne va pas faire un cas spécial, mais Bowater fait partie des entreprises qui sont dans les grandes puissances. Il peut vous le confirmer, n'est-ce pas?

M. Lachapelle (Luc): ...papier journal, effectivement.

M. Hamad: Alors, les grandes puissances, les entreprises de grande puissance ? et je vends le Québec parce que je suis convaincu qu'on est la meilleure place au monde ? les grandes puissances ne paient pas 0,06 $. Eux autres, ils paient le moins cher dans leurs tarifs, c'est 0,04 $ point quelques. Et, les chiffres que j'ai ici, en 2002, Montréal, c'est une des villes les plus basses. On paie le plus bas l'électricité pour le tarif grande puissance en Amérique du Nord. Donc, là, c'est vrai que c'est 30 % de consommation. Cependant, Bowater paie moins cher que Chicago, que New York, que Seattle, Edmonton, Halifax, etc. O.K.? C'est vrai qu'ils consomment beaucoup, mais ils ont un avantage en termes de tarifs.

Je m'en vais vers la moyenne puissance parce que la moyenne puissance, c'est l'ensemble des manufacturiers. J'avais une entreprise manufacturière, je sais qu'est-ce que c'est, puis je savais que, ma facture d'électricité, il fallait la surveiller. Et, en termes de moyenne puissance, malgré tout on est encore les plus bas. Il demeure que l'électricité au Québec, sans aucun doute c'est actuellement les tarifs les plus bas en Amérique du Nord. Il faut le reconnaître, c'est un avantage. Et d'ailleurs, en termes résidentiels, on est les plus bas. On est un petit peu avec la Colombie-Britannique puis le Manitoba, ils sont un petit peu... mais c'est des pinottes, là, des vraies pinottes avec ça. Donc, on est encore très concurrentiels.

Alors, écoutez, au Québec, là, je veux dire, Bowater, quand elle vient ici, on est très heureux, bien sûr, surtout quand elle paie de l'impôt. C'est excellent pour nous, c'est ça qu'on veut. Puis ils créent des emplois, mais ils viennent aussi... on a des avantages au Québec. Alors, là, maintenant, pour l'exportation, parce que vous êtes là, vous représentez les Manufacturiers et exportateurs, notre électricité, c'est un avantage au Québec. D'ailleurs, c'est historique, là, on vous parle des années cinquante, c'est là qu'on a attiré les grosses entreprises. Depuis 1900 jusqu'à aujourd'hui, premier élément, c'était notre électricité; aujourd'hui, c'est notre main-d'oeuvre. Par contre, comme une entreprise, on sait pertinemment que le coût de la vie augmente et le coût de la vie augmente partout. Je veux dire, quand on exporte un produit ailleurs, vous avez raison que le dollar nous affecte énormément, mais l'euro, de l'autre côté, a augmenté aussi. Donc, ça nous donne un avantage quand même, malgré tout, pour être un homme optimiste, là. Quand même, on a subi moins d'augmentation en pourcentage que l'Europe. C'est sûr que l'Europe n'exporte pas, c'est 2 % à peu près du marché américain en termes de bois d'oeuvre, si on parle de bois d'oeuvre, mais il commence y à avoir plus de place dans le marché.

Vous, vous voyez comment les augmentations des tarifs à ce niveau-là, une fois qu'on a placé les choses à la bonne place?

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

M. Charron (Daniel): Merci. Sans rester sur le cas de Bowater, quand on parle de la concurrence que vivent les entreprises manufacturières aujourd'hui, bien ça vient moins de l'Europe que de la Chine ou que de l'Inde. Vous savez, la part de marché, aux États-Unis, de la Chine est passée de 3 % à 12 %, de 1991 à 2003. Celle du Québec est partie de 3,6 %, donc à peu près au même niveau, elle a terminé à 2,9 %. Donc, la concurrence se fait avec des pays comme la Chine qui placent les entreprises, comme je le disais tout à l'heure, dans un contexte de «cost squeeze».

On parle de l'électricité qui est, pour le secteur industriel, à un coût avantageux, je suis d'accord avec vous, M. le ministre, mais les entreprises manufacturières ont d'autres coûts aussi, et le Québec, au niveau d'autres coûts, que ce soit au niveau de sa fiscalité, au niveau de sa réglementation, n'est peut-être pas le meilleur endroit du monde, donc ce qui fait que, notre électricité, le bas prix devient un avantage qui compense certains désavantages que le Québec peut avoir. Donc, c'est pour ça que, nous, on dit: Les tarifs bas d'électricité, oui, je pense que c'est une chose dont les manufacturiers sont contents, mais, à partir du moment où on considère que les coûts d'une entreprise ne sont pas que des coûts d'électricité, puis qu'on considère les autres coûts, puis que, là, quand on se compare, ce n'est peut-être plus aussi avantageux, bien ça fait en sorte qu'on met un bémol aux volontés d'accroître les tarifs.

Une chose qui est importante, je pense, à comprendre ? puis, dans notre mémoire, on a bien circonscrit notre champ de compétence, là ? au niveau des tarifs, on s'est concentrés sur le secteur industriel. À part mon expérience personnelle, je ne me sens pas compétent pour parler de la dynamique dans le résidentiel. Comme association représentant les intérêts des industriels et des exportateurs, on s'est concentrés là-dessus. C'est dans cette dynamique-là que, nous, on regarde l'augmentation des tarifs. Encore une fois, l'utilisation de la ressource énergétique par une entreprise manufacturière génère des retombées économiques. Deuxièmement, les coûts d'électricité s'insèrent dans un ensemble de coûts qu'il faut considérer. Donc, encore une fois, quand on parle d'un pourcentage x ou y, ce n'est pas abstrait, l'effet que ça va avoir sur une entreprise, ça va être bien concret.

Je ne sais pas la réponse à la question, qu'est-ce qu'on dit des augmentations de tarifs. J'aimerais bien qu'on me fasse la démonstration, l'étude d'impact sur ce que ça représente sur notre économie puis sur notre industrie. Si on avait des chiffres qui nous démontraient qu'une augmentation de 2 %, de 3 % ou de 4 % du tarif industriel, sur une période donnée, aurait tel ou tel impact sur notre économie et tel et tel impact sur le bénéfice, disons, de la société d'État, bien, là, on pourrait comparer. Mais il me manque une partie de l'équation pour pouvoir avoir, si on veut, un portrait juste et un portrait fiable en fait de la réalité pour pouvoir me positionner.

n (14 h 40) n

M. Hamad: Je vais laisser après mes collègues... Actuellement, au Québec, la balance d'exportation par rapport aux États-Unis, le Québec, il est à peu près à 8,4 milliards, et le 8,4 milliards correspond par hasard au volume qu'on fait dans le domaine de la forêt, c'est-à-dire les papetières, les scieries. Ce qu'ils exportent, c'est à peu près 8,4 milliards. Ça donne à peu près la balance commerciale positive pour nous autres avec les États-Unis. Et donc c'est une situation très délicate parce qu'évidemment on sait que la forêt, avec la crise du bois d'oeuvre avec les États-Unis, ça fait mal, 1 milliard de dollars retenus sur la frontière américaine pour notre industrie de la forêt. Bowater, ils savent très bien qu'est-ce que c'est. Moi, je vous demanderais une question: Qu'est-ce qu'on doit faire dans notre stratégie énergétique pour favoriser nos entreprises manufacturières à faire mieux? Une recommandation.

Le Président (M. Bachand): Très rapidement, monsieur.

M. Charron (Daniel): Assurer un approvisionnement fiable, disponible, à des prix et à des niveaux compétitifs. Et, quand on dit «compétitifs», c'est qui tiennent compte des retombées que génère l'activité d'une entreprise manufacturière et qui se comparent à l'ensemble des coûts et à l'ensemble de notre positionnement, si on veut, par rapport à nos concurrents, par rapport à ces coûts-là.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le ministre. Donc, ça vient conclure le bloc. Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Je dois vous dire que votre mémoire est extrêmement intéressant, et vous avez une approche très innovatrice pour présenter ces données-là, et j'aimerais ça qu'on s'y attarde un peu parce que vous avez des réflexions qui devraient nous ébranler.

D'abord, vous êtes les seuls qui avez fait un peu état de l'enjeu de monsieur, je pense que c'est le vice-président de Bowater, qui a fait cette réflexion-là, les aléas de la valeur du dollar canadien vis-à-vis le dollar américain. Dans toute stratégie d'exportation, il faut en tenir compte, bien qu'aujourd'hui, je dirais, ce qu'on nous a présenté ici, en particulier le Pr Fortin, des données sur la rentabilité de l'exportation, c'était peut-être vrai quand le dollar était à 0,60 $ et quelques, là, mais, rendu à 0,80 $, 0,85 $, et certains prétendent un peu plus, peut-être que les opportunités d'affaires sont plus restreintes. Alors, je trouve ça intéressant.

Puis, vous faites une analyse extrêmement pertinente de l'avantage comparé que nous avons au Québec au niveau de la variable, là, de l'électricité. Ce que vous avez dit, je pense que ça devrait faire réfléchir bien des gens. Le revenu des exportations des manufacturiers québécois par kilowattheure consommé, j'imagine que vous avez pris ça au prorata de la production dans son ensemble, là, les kilowattheures, pour faire l'équivalence pour arriver à ça. Vous avez l'air assez rigoureux, là. J'en déduis que vous avez dû faire ça. Moi, c'est la première fois que je le regarde sous cet angle-là, bien qu'on en lise souvent, là, des travaux comme ça, mais je trouve que ça, c'est très percutant, parce que, si, dans l'ensemble de l'industrie du Québec, on commence à réfléchir à... Comme le disait mon collègue du Lac-Saint-Jean tantôt, si j'ai un kilowattheure de trop ou de plus, à qui est-ce que je devrais l'offrir?

Je pense que votre priorité au développement du Québec, au développement du secteur manufacturier est quasiment évidente, puis il y a plusieurs raisons pour ça, et je ne pense pas, moi, que cette donnée-là soit une donnée avec laquelle on puisse jouer bien, bien longtemps, parce que c'est assez concret. Des biens transformés, exportés, qu'ils soient première, deuxième ou troisième transformation, ils demeurent transformés, et je pense que ça, c'est très important. Je trouve ça très intéressant.

Un autre point. Vous n'avez pas abordé la question du cadre réglementaire. J'écoutais, tout à l'heure, le ministre qui nous parlait de la responsabilité d'Hydro-Québec Production et du mandat d'Hydro-Québec Distribution, et ce qui me préoccupe, moi, c'est que, dans les chiffres d'Hydro-Québec qui datent du mois de novembre dernier, déjà en 2005, au Québec, nous allons dépasser le 165 TWh qui était prévu comme... ou qui était réservé comme énergie patrimoniale, ce qui veut dire que, dans les prochains appels d'offres d'Hydro-Québec Distribution, Hydro-Québec Production peut même ne pas s'y intéresser, et, à ce moment-là, on pourrait même avoir des prix de fou pour Hydro-Québec Distribution... Hydro-Québec Production décidait de ne pas s'y intéresser.

Dans ce contexte-là ? et ça, c'est très inquiétant, je pense, pour l'activité économique ? dans ce contexte-là, est-ce que vous pensez qu'il est sage de continuer d'exclure Hydro-Québec Production de la juridiction de la régie?

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

M. Charron (Daniel): Merci, Mme la députée, pour les bons mots que vous avez eus sur notre mémoire. Je répondrai à la question, puis... Nous, les Manufacturiers et exportateurs du Québec, comme association, on est des experts en économie. On est à l'aise quand on parle en dollars. On n'est pas des experts en énergie. Donc, ce qui a trait au cadre réglementaire, ce qui a trait au fonctionnement de la société d'État, on se sent peu... bien on pense qu'il y a des gens mieux informés et mieux aptes à en parler. Lorsque ça nous préoccupe, c'est lorsque ça peut avoir un impact sur les prix, et, à ce niveau-là, on se positionnera, à ce moment-là. Mais, en termes de quelle est notre position sur le cadre réglementaire, on se sent moins bien, si vous voulez, compétents pour en discuter, étant donné qu'encore une fois on est des experts en économie. On est plus à l'aise quand on parle en dollars qu'en énergie, que quand on parle en térawattheures.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, je vois que vous développez une expertise en diplomatie également, et, cela dit, c'est à votre avantage, mais ça ne nous éclaire pas beaucoup. Je vais donc parler dollars.

Quand on regarde la juridiction de la régie, quand elle étudie une proposition d'Hydro-Québec Distribution, elle doit autoriser l'augmentation de tarifs qui découle de l'augmentation des coûts d'Hydro-Québec Distribution. Si Hydro-Québec Production ne fournit pas à Hydro-Québec Distribution des kilowattheures à son coût à elle ? et je vous rappelle qu'elle a le monopole du développement des ressources hydrauliques à des fins de production d'électricité ? si elle ne les fournit pas, il est clair que le coût d'Hydro-Québec Distribution va être plus élevé que si Hydro-Québec Production avait été un de ses fournisseurs.

Je répète ma question: Serait-il dans l'intérêt de l'économie du Québec de connaître les coûts de production d'Hydro-Québec Production et que celle-ci soit obligée de fournir Hydro-Québec Distribution en tout temps?

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

M. Charron (Daniel): À partir du moment où cela risque d'avoir un impact sur les prix... Et, sur les prix qui seront pratiqués pour le secteur industriel, il est clair que c'est une situation donc qui pourrait créer cette pression-là. C'est une situation qu'on ne pourra pas, nous, accepter.

Ça me fait penser à une autre question. On parle beaucoup en ce moment de coût marginal versus coût moyen. C'est intéressant parce que, dans mes vieux cours d'économie, on m'expliquait que le coût marginal, c'était dans une situation de concurrence pure et parfaite où une entreprise va tendre à vendre au coût marginal. Dans le cas d'un monopole, si je me rappelle bien, on parlait du coût moyen. Évidemment, Hydro-Québec, comme plusieurs sociétés qui évoluent dans le domaine des ressources naturelles, a un coût marginal qui a tendance à augmenter. Mais, pour répondre encore une fois à votre question, au niveau du cadre lui-même ? vous savez ma non-position là-dessus ? au niveau de son effet sur les prix, est-ce qu'il serait souhaitable qu'on laisse sur pied un cadre réglementaire qui pourrait ultimement entraîner une hausse importante et significative sur les tarifs industriels? Bien, je vous répondrais non.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, je comprends que vous partagez notre point de vue à l'effet qu'il faudrait assujettir Hydro-Québec Production à la réglementation de la régie parce que... enfin pour des raisons strictement financières et dans l'intérêt du développement du Québec.

Il y a une autre question que vous avez soulevée et que d'autres ont soulevée, c'est cette idée de marge de manoeuvre qu'on souhaiterait avoir à... ou voir à Hydro-Québec. Encore est-il que, comme ces données ne sont pas disponibles à la régie, il faut souvent faire des actes de foi. Mais vous pensez... Dès qu'on fait un projet hydroélectrique, on a, pendant un certain temps, une marge de manoeuvre durant la période où le projet est mis en service, on a le maximum de sa capacité jusqu'à ce qu'on en ait besoin par la demande. C'est le principe de l'escalier versus la courbe continue. Et donc, dans ces conditions-là, vous estimez cette marge de manoeuvre à quel niveau?

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

Mme Dionne-Marsolais: Parce que vous ne le dites pas dans votre mémoire.

M. Charron (Daniel): Encore une fois...

Mme Dionne-Marsolais: Vous dites: Plus de marge de manoeuvre. Mais elle en a eu, de la marge de manoeuvre, et en aura toujours. Tant que la demande va augmenter moins que ce qui est prévu, ça va toujours lui donner une marge de manoeuvre.

Le Président (M. Bachand): M. Laurin, désire intervenir. Allez-y.

n (14 h 50) n

M. Laurin (Jean-Michel): Oui. Certain qu'au niveau de la marge de manoeuvre on n'a pas spécifié de chiffres. Dans le fond, je dirais que, comme M. Charron l'expliquait tout à l'heure, on est très favorables à l'exportation d'électricité chez les marchés voisins du Québec. D'abord, une marge de manoeuvre suffisante nous permet, dans un premier temps, lors des années où il y a une faible hydraulicité, de satisfaire la demande intérieure puis d'assurer qu'on n'importe pas d'énergie de nos voisins, parce que souvent, quand on importe, ils nous la vendent à gros prix. Donc ça, c'est la première raison pour laquelle on est favorables à une marge de manoeuvre, là, un coussin le plus grand soit-il. Disons que c'est ça, la première raison, c'est pour assurer, là, de réduire les risques d'une faible hydraulicité.

Puis, advenant qu'on n'en ait pas besoin au Québec, que l'hydraulicité soit plus forte que ce à quoi on s'attend, bien on est capables d'exporter ces surplus-là. Donc, au niveau de fixer un montant, un nombre de térawattheures exact, non, on ne s'est pas aventurés là-dedans. Il nous apparaît que bien, dans le fond, au Québec, on a la chance d'avoir une énergie qui est propre, qui est renouvelable, on a la chance d'avoir une très grande expertise en termes de développement notamment hydroélectrique. Pourquoi ne pas en profiter puis dans le fond avoir une marge de manoeuvre qui soit suffisante puis qui nous permette d'exporter la ressource lorsqu'on n'en a pas besoin à l'intérieur?

Donc, au niveau de fixer un nombre de térawattheures précis, je le répète, là, on ne veut pas s'engager là-dedans, mais il nous apparaît que, tant et aussi longtemps que le secteur industriel soit fourni à un tarif compétitif, qu'Hydro-Québec ait des surplus puis qu'elle soit en mesure de les exporter sur les marchés voisins, à des prix à l'exportation qui soient toujours intéressants, on est très favorables à ça, là.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Très bien. Je pense que c'est assez clair.

Quand vous parlez aussi, à la page 18 de votre mémoire, de l'exportation, vous êtes aussi parmi ceux... les premiers en tout cas qui parlent de l'évolution projetée des prix de l'énergie aux États-Unis, notamment par rapport à ? un peu plus loin aussi ? le nombre de centrales qui vont se construire dans la région, et je pense que c'est très pertinent de prendre connaissance de ça. D'ailleurs, il s'en est déjà construit quelques-unes dans les dernières années. Et donc, ce marché de l'exportation, votre message, si je le comprends bien, soyons prudents parce que nous ne serons plus les joueurs qui pourraient dicter un peu les prix dans l'avenir, il y a d'autres concurrents qui trouveraient leur intérêt à vendre «at cost», à la limite, ou peut-être même, dans certains cas, un peu en bas pour des raisons financières strictement, là, temporaires, et il faudrait faire attention à cela. Donc, ce qu'on comprend, c'est que de l'exportation, oui, c'est intéressant, mais la priorité doit être donnée au développement du Québec et aux occasions d'affaires qui peuvent se présenter si on a une certaine marge de manoeuvre, mais ne pas construire un plan... ne pas prévoir un plan d'approvisionnement qui tienne compte de l'exportation en masse. Bon. Ça, je comprends ça puis je partage votre avis là-dessus.

Par contre, quand vous parlez du gaspillage d'énergie à la page 15, surtout dans le contexte des industries, là je dois vous dire que j'aimerais ça vous entendre, peut-être plus même les gens de l'industrie, parce que, pour avoir essayé à plusieurs occasions d'encourager les entreprises à faire des investissements en efficacité énergétique dans une vie antérieure, et pas seulement au niveau du gouvernement, c'est très difficile. Ça a peut-être changé, parce que ça fait 10 ans que j'ai quitté l'industrie, mais c'est difficile de décider, dans une entreprise, d'investir pour des dépenses en efficacité énergétique qui dépassent 12 à 24 mois de période de «payback».

Pouvez-vous me dire si ça a changé dans l'industrie? Est-ce qu'aujourd'hui on est plus agressif? Autrement dit, même si ça prend plus qu'un an ou deux pour se rembourser, on va le faire pareil?

Le Président (M. Bachand): M. Charron.

M. Charron (Daniel): D'abord, un commentaire sur votre première partie, là, sur notre page 18, je pense, sur le tableau. Ce qu'on voulait montrer par là, c'est que ? vous avez parlé du dollar tout à l'heure ? les opportunités d'exportation aux États-Unis, il y en a, mais on ne peut pas fonder une stratégie de développement énergétique fondée seulement là-dessus parce que c'est un marché où le prix ne va pas continuer à s'accroître de manière aussi rapide qu'on le pense, puisqu'il y a énormément de nouvelles capacités de production électrique qui sont en train de se faire aux États-Unis, et ces nouvelles capacités de production, bien elles vont entraîner une pression à la baisse sur les prix, d'autant plus que, si Hydro-Québec arrive avec des niveaux, là... Je pense que je lisais jusqu'à 18 ou 20 TWh qui pourraient être exportés aux États-Unis. Bien, ce 20 TWh, il va avoir un effet sur le prix aussi, il va le faire diminuer. En d'autres mots, quand on regarde les données du Département de l'énergie américain sur les projections au niveau du prix, on remarque que dans le temps, d'ici 2020 ou 2025, si je ne me trompe, le prix moyen ne va pas en s'accroissant.

Sur votre deuxième partie de question qui concerne l'efficacité énergétique, et c'est intéressant que vous en parliez, on n'a pas de chiffre québécois, mais on a un chiffre canadien. Au cours des six dernières années, le secteur manufacturier canadien a accru sa production de 23 %, et sa consommation d'électricité a diminué de 0,2 %. Pour moi, c'est ça, de l'efficacité énergétique.

Mme Dionne-Marsolais: Des chiffres pour le Québec?

M. Charron (Daniel): Non, je ne les ai pas pour le Québec, malheureusement.

Mme Dionne-Marsolais: ...

M. Charron (Daniel): Donc, au Canada, six dernières années, 23 % d'augmentation de la production, 0,2 % d'augmentation de la consommation.

Mme Dionne-Marsolais: Pour l'électricité, mais, si vous tenez compte...

M. Charron (Daniel): Non, d'énergie, d'énergie.

Mme Dionne-Marsolais: Ah! l'énergie!

M. Charron (Daniel): D'énergie.

Mme Dionne-Marsolais: Ah bon! D'accord. Ça, ça a plus de sens. O.K. Parce que vous avez dit «électricité» tantôt.

M. Charron (Daniel): Bon, on parlait, tout à l'heure, en roulant vers Québec, avec M. Lachapelle, puis il disait: Pour nous, l'efficacité énergétique, ce n'est pas forcément de diminuer notre consommation d'électricité ou d'énergie, c'est de fabriquer plus de valeur avec. Donc, à la fin de l'année, si mon chiffre d'affaires augmente d'un pourcentage plus grand que mon pourcentage de dollars ou de kilowattheures que j'ai achetés, bien c'est ça, de l'efficacité énergétique. C'est d'ajouter plus de valeur pour le même kilowatt, pour le même dollar investi en énergie. Et, dans ce sens-là, les entreprises, je pense que, dans le contexte concurrentiel dans lequel nous vivons, bien elles le font.

Il y a certaines technologies qui enfin nous limitent dans nos capacités de pouvoir réduire notre consommation, mais rares sont les entreprises qui veulent performer, qui veulent garder leur part de marché puis qui veulent faire face à la compétition, qu'elle vienne des États-Unis, de la Chine ou de l'Inde, qui ne cherchent pas à ajouter de la valeur à leurs produits et à ultimement augmenter leur efficacité énergétique exprimée en dollars gagnés par rapport à quantité donnée d'énergie consommée.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont, je le sais, qu'il y a une de vos collègues qui veut intervenir. Allez-y, Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Bachand): Simplement pour vous en avertir.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, d'accord. O.K. Bon, dans ce que vous dites, c'est vrai et c'est sans doute plus vrai pour des gros consommateurs d'énergie ? je pense aux papeteries, je pense aux alumineries, etc. ? mais, dans les entreprises moins intensives en consommation d'énergie, l'effort doit être peut-être guidé. Est-ce que l'Agence de l'efficacité énergétique, par exemple, à votre avis, pourrait être ou devrait être plus agressive, plus d'appui? Est-ce que vous avez déjà travaillé avec l'agence pour améliorer la performance des entreprises?

M. Charron (Daniel): Malheureusement, non.

Mme Dionne-Marsolais: Non? Est-ce que c'est quelque chose qui vous apparaît intéressant?

M. Charron (Daniel): C'est une avenue certainement intéressante, puisqu'elle s'inscrit directement dans ce qu'une entreprise en général cherche à faire pour demeurer compétitive, accroître sa plus-value. La plus-value, comment on accroît ça? Bien, d'une part, en augmentant la valeur ajoutée de notre produit final. Et d'autre part, bien, comment on augmente ça? Bien, c'est en diminuant le coût des intrants, l'énergie en faisant partie. Donc, il est clair que, vous le disiez, dans le cas des entreprises où la consommation énergétique est plus intense, l'incitatif à entrer dans de tels programmes ou en tout cas à se développer soi-même des stratégies, il est là. Mais il n'y a plus beaucoup d'entreprises manufacturières qui pourront continuer à demeurer compétitives si elles gaspillent.

Vous savez, quand on dit, en anglais, «lean manufacturing», c'est ça, le manufacturier nouveau. Le manufacturier traditionnel, lui, se concentrait à réduire les coûts, donc il se concentrait à réduire les coûts les plus importants, puis des fois, bien, quand l'électricité, bien c'était 2 %, 3 %, bien, avant de s'y rendre, ça prenait plus de temps. Aujourd'hui, on parle de «lean manufacturing». L'objectif du manufacturier qui veut rester compétitif, c'est de réduire ses gaspillages, et, en ce sens-là, des travaux de l'Agence de l'efficacité énergétique en vue de travailler à trouver des façons de rendre les entreprises plus efficaces, au niveau de leur consommation d'énergie, évidemment je regarde ça d'un oeil très favorable.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Vanier, très, très, très rapidement parce qu'on...

M. Légaré: Je serai très, très rapide.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, monsieur Légaré.

M. Légaré: Bonjour. J'ai le goût de vous poser la question que j'ai posée à plusieurs autres interlocuteurs, peut-être même à vous, peut-être: Est-ce que l'augmentation des prix et est-ce que l'efficacité énergétique, ça passe directement par une augmentation des coûts pour atteindre un certain résultat en termes d'efficacité énergétique? Il y a eu beaucoup d'interlocuteurs qui ont dit oui. J'aimerais aussi vous entendre là-dessus parce que c'est un sujet qui est aussi très important. Rapidement.

Le Président (M. Bachand): M. Lachapelle.

n (15 heures) n

M. Lachapelle (Luc): Bien, disons, tout simplement, dans notre cas, la réponse est non, pour une raison fort simple. Comme je le mentionnais un peu plus tôt, qu'on achetait pour environ 100 millions de dollars d'électricité du Québec, c'est évident que c'est un coût important pour nous, puis grosso modo, dans le type de marché dans lequel on travaille, on doit trouver des moyens de réduire tous nos coûts d'utilisation, ainsi de suite. Donc, automatiquement, je veux dire, juste le montant d'argent que l'on parle, c'est une composante sur laquelle on travaille de façon constante.

Quand je mentionnais plus tôt qu'on avait fait des investissements à notre usine de Dolbeau puis qu'on est en train de préparer des investissements à notre usine de Gatineau pour installer une turbine à cogénération, bien c'est en théorie sur le coût d'électricité qu'on a au Québec, ce n'est pas des investissements sur lesquels on devrait peut-être investir. Toutefois, on le fait parce que, notre montant de 100 millions, il faut travailler dessus. C'est une composante importante de notre coût. Une augmentation de coût ne fera pas de différence, demain matin, dans notre approche.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le député de Vanier. Merci, M. Lachapelle. M. Charron, M. Laurin, merci infiniment de vous être présentés à la commission. Vous êtes toujours les bienvenus. Donc, je vais tout de suite appeler l'Association canadienne de l'énergie éolienne.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bachand): Donc, nous allons reprendre nos travaux. Donc, messieurs de l'Association canadienne de l'énergie éolienne, on vous souhaite la bienvenue. Je vous rappelle rapidement les règles de cette commission: c'est donc 20 minutes pour votre présentation, 20 minutes du côté ministériel pour les questions et 20 minutes du côté de l'opposition pour les questions. Donc, les gens qui sont présents, mes collègues, vont vous écouter fort attentivement comme ils le font pour la présidence. Et sur ce allez-y, messieurs, je vous permets de vous présenter aussi pour le bénéfice des membres de la commission.

Association canadienne
de l'énergie éolienne (ACEE)

M. Painchaud (Guy): Merci. Alors, mesdames et messieurs, bonjour. Mon nom est Guy Painchaud, ancien président de l'Association canadienne d'énergie éolienne; à ma droite se trouve M. Daniel Charrette, membre du conseil d'administration de l'association et directeur des ventes d'un turbinier majeur implanté au Canada; et à ma gauche se trouve M. Jean-Michel Parrouffe, analyste-expert chez une firme de consultation majeure en éolien au Canada, chez GPCo. Ces deux personnes pourraient être appelées à intervenir dans le cadre de la période d'échange avec les membres de la commission.

Je vous remercie de donner à l'association l'opportunité de présenter sa position vis-à-vis du questionnement et des enjeux actuels relatifs au secteur énergétique au Québec. En tout premier lieu, je tiens néanmoins à présenter sommairement l'association.

L'ACEE est une association commerciale sans but lucratif qui favorise le développement et une application appropriée de tous les aspects de l'énergie éolienne au Canada. Établie en 1984, l'association représente la communauté de l'énergie éolienne, c'est-à-dire les entreprises publiques, privées, les institutions, les organismes et les particuliers qui sont directement impliqués dans le développement et l'application de la technologie, des produits et des services liés à l'énergie éolienne. L'association est un chef de file et un porte-parole actif de la communauté. Elle a d'ailleurs tenu son 20e congrès annuel en octobre dernier, à Montréal, attirant plus de 600 professionnels de l'énergie.

L'association agit concrètement pour l'élaboration de politiques énergétiques progressistes. Elle agit aussi à titre de centre de référence et d'information sur l'éolien. Alors, au nom de ses membres, elle appuie l'industrie éolienne dans sa marche vers la croissance et une intégration plus poussée à l'économie locale et nationale.

Dans le contexte du questionnement et des enjeux actuels relatifs au secteur énergétique du Québec, l'association estime que la mise en valeur du potentiel éolien à grande échelle peut contribuer à diversifier les sources d'énergie au Québec, à accroître la fiabilité des approvisionnements, à assurer l'équilibre entre l'offre et la demande, à favoriser l'atteinte d'un prix juste de l'énergie et à concilier développement énergétique et développement durable. L'association tient aussi à répondre de manière qualitative au questionnement des enjeux soulevés par le document du ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. Par exemple, en matière de sécurité énergétique, l'association évalue que l'éolien peut diversifier significativement les modes de production d'électricité au Québec tout en respectant l'intégrité du réseau de transport. Cette sécurisation d'approvisionnement énergétique produit localement pourrait si nécessaire être combinée avec une stratégie ciblée de gestion des impacts du chauffage sur les installations de production électrique de pointe.

Enfin, pour supporter un développement structurel d'énergie éolienne au Québec, l'association est d'avis que le cadre réglementaire en vigueur devrait être amendé mais aussi que le Québec continue à supporter le développement de l'énergie éolienne en spécifiant la quantité d'énergie éolienne qu'Hydro-Québec doit acheter tant et aussi longtemps que l'éolien n'est pas considéré à sa juste valeur technique, économique, environnementale et sociale.

L'énergie éolienne constitue une opportunité de développement économique régional et industriel crucial pour le Québec. En effet, le développement de l'énergie éolienne permet de réaliser des investissements importants en région, d'y créer de nombreux emplois et de garder l'énergie propre comme élément de politique industrielle à l'échelle de la province. D'autres attributs tout aussi importants découlent d'une stratégie énergétique axée sur l'éolien, soit le fait que l'éolien favorise la participation des régions et des autochtones, ouvre des opportunités en matière d'exportation d'électricité et d'éoliennes et favorise l'émergence de nouvelles technologies de l'innovation et des savoir-faire.

Tout en renforçant la pénétration des énergies renouvelables dans le bilan énergétique québécois, la mise en valeur du potentiel éolien québécois supportera aussi l'émergence du Québec comme chef de file en développement durable dans le nord-est de l'Amérique. Le très large consensus populaire favorable à l'éolien est à même de constituer la pierre d'assise d'un large consensus politique au Québec autour de la mise en valeur du potentiel éolien à grande échelle. D'un point de vue spécifique, l'ACEE tient à répondre de manière quantitative aux questionnements et enjeux soulevés par le document du ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs.

Selon les trois principales dimensions du développement durable, l'énergie éolienne représente le meilleur choix pour le Québec. En particulier en termes d'acceptabilité sociale, l'énergie éolienne fait l'objet d'un très large consensus au Québec. Un sondage réalisé en novembre 2004 par Léger Marketing a montré que 76 % de la population supporte le développement de l'éolien. De plus, 95 % des touristes interrogés dans les régions d'installation ont une bonne perception des centrales éoliennes. Ceci devrait grandement faciliter le développement des centrales éoliennes en région.

En termes économiques, l'énergie éolienne représente actuellement le mode de production d'électricité dont les coûts sont parmi les plus faibles, soit de 0,056 $ à 0,065 $ le kilowattheure. Dans le futur, ces coûts devraient baisser de 18 % à 34 % d'ici 2013, et ce, d'autant plus que les coûts annoncés d'intégration au réseau électrique sont apparemment nettement surévalués.

n (15 h 10) n

Les centrales éoliennes présentent aussi un avantage déterminant vis-à-vis des autres options de production d'électricité au Québec. En effet, elles peuvent être mises en place en moins de trois ans pour répondre à l'augmentation de la demande d'électricité, qui est de l'ordre de 1 à 3 TWh par année. Rappelons que, par tranche de 1 000 MW, les centrales éoliennes peuvent produire plus de 3 TWh d'énergie électrique, soit environ 1,7 % de la production annuelle. L'intégration de plus de 10 % d'énergie éolienne permettrait de diversifier significativement la production d'énergie électrique qui est actuellement dépendante à plus de 96 % de l'hydroélectricité. Une telle diversification des sources d'énergie pour la production d'électricité permettrait de mettre celle-ci à l'abri des variations des apports hydrauliques.

D'ailleurs, l'intégration de plus de 10 % d'énergie éolienne au réseau électrique du Québec n'affectera pas sa stabilité ou sa fiabilité. En effet, dans tous les grands pays de l'éolien ? le Danemark, l'Allemagne et l'Espagne ? il est reconnu que le réseau électrique est stable et fiable. Stabilité et fiabilité du réseau sont atteintes malgré le fait que l'énergie éolienne produit de 4 % à 20 % de l'énergie électrique de ces pays et de l'ordre de 12 % à 23 % de la puissance électrique installée. Pour mettre ces chiffres en perspective, l'association tient aussi à rappeler que l'objectif du Danemark est de produire 50 % de son énergie électrique avec l'éolien en 2025 et que ce pays produira 29 % de son électricité avec l'éolien en 2008.

Dans le même ordre d'idées, soulignons qu'Hydro-Québec a suggéré un déficit annuel d'hydraulicité de l'ordre de 13 TWh chaque année, de 2000 à 2003. Par conséquent, les 18 TWh que produirait l'énergie éolienne en 2015, au Québec, suite à la mise en place des recommandations de l'ACEE, pourraient être gérés par Hydro-Québec.

En termes d'investissement, l'énergie éolienne au Québec génère 1,5 milliard de dollars d'investissement par tranche de 1 000 MW d'éoliennes fabriquées et opérées pendant 25 ans. Grâce au renouvellement du Programme fédéral d'encouragement à la production d'énergie éolienne, le Québec pourrait aussi aller chercher environ 250 millions de dollars de transfert aux provinces sur une période de 10 ans. Pour le gouvernement du Québec, 1,5 milliard de dollars d'investissement représente la réalisation de plus de 11 millions en taxes indirectes, 215 millions en revenus d'impôts sur salaire et gages, de taxe de vente et de revenus parafiscaux.

En plus des investissements, l'industrie éolienne créerait nettement plus d'emplois directs par térawattheure produit que toute autre option de production d'électricité actuellement envisagée au Québec où il y a l'exploration et l'exploitation des ressources pétrolières et gazières. De manière plus spécifique, l'éolien génère plus de 15 650 emplois directs et indirects, exprimés en années-personnes, par tranche de 1 000 MW d'éoliennes fabriquées et opérées pendant 25 ans. Ainsi, la mise en valeur du potentiel éolien québécois à grande échelle permettra au Québec de garder l'énergie propre comme élément de politique industrielle. En effet, l'éolien est un facteur de stabilisation des prix d'électricité, car son coût de revient est déjà compétitif et en continuelle décroissance, contrairement aux nouveaux approvisionnements électriques achetés au prix du marché, lequel est en hausse. Nous sommes, à l'inverse du thermique ou des nouveaux développements hydroélectriques, un facteur de maintien de tarifs avantageux et prévisibles.

L'éolien a aussi une vocation naturelle à favoriser le rôle des régions et des autochtones, car c'est sur le territoire que les centrales éoliennes sont installées. Dans ce contexte, la réponse efficace de l'industrie éolienne aux exigences du gouvernement du Québec démontre concrètement que l'industrie éolienne est prête à relever le défi du développement économique régional tout en demeurant une option économique de production d'électricité. D'ailleurs, les coûts actuels de l'éolien au Québec permettent d'envisager l'exportation rentable d'électricité éolienne à 0,088 $ le kilowattheure, soit le prix moyen de l'électricité vendue, en 2003, par Hydro-Québec. De plus, l'exportation de produits et services en éolien pourrait aussi permettre de créer et maintenir sept à neuf emplois directs et indirects et de générer des ventes de 1,1 million de dollars par mégawatt d'éolienne exporté.

En plus du potentiel d'exportation, l'industrie éolienne est une industrie à fort contenu technologique dans les domaines de la météorologie, l'offshore, l'aérodynamique et l'aéroélasticité, la fabrication d'équipement mécanique et électrique, l'électromécanique, l'électronique de puissance et les matériaux composites. C'est pourquoi une augmentation à 5 millions de dollars par année du budget de recherche et développement en éolien au Québec est indispensable pour maximiser les retombées de l'industrie et faciliter son intégration à l'industrie énergétique québécoise.

Dans un autre ordre d'idées, l'association est d'avis que la mise en valeur du potentiel éolien québécois à grande échelle permettra au Québec de continuer à se distinguer comme chef de file par l'importance des forces hydrauliques et éoliennes de la production d'électricité, par rapport à la majorité de la production électrique de source thermique dans la région du Nord-Est de l'Amérique. L'ACEE estime aussi que l'énergie éolienne constitue un atout que le Québec devrait mettre en valeur à grande échelle pour renforcer encore la pénétration des énergies renouvelables dans son bilan énergétique. En effet, l'importance de la ressource éolienne disponible, la compétitivité et la décroissance du coût de production du kilowattheure éolien vis-à-vis des autres filières énergétiques, dont les coûts sont en croissance, la rapidité de déploiement des centrales éoliennes, les retombées économiques importantes qui y sont associées, le large consensus social sur le développement de l'éolien au Québec ainsi que le caractère environnemental bénin et essentiellement réversible de son développement militent, aujourd'hui, pour un développement accéléré de l'industrie éolienne au Québec. Ce développement accéléré de l'industrie éolienne permettrait d'ailleurs au Québec de poursuivre sa contribution à l'amélioration du bilan des gaz à effet de serre et des autres émissions atmosphériques tant à l'échelle canadienne, continentale que mondiale.

Pour conclure, l'association émet les recommandations suivantes: l'Association de l'énergie éolienne du Canada recommande que le Québec privilégie l'éolien comme source d'énergie pour desservir ses futurs besoins en énergie et qu'à cette fin le gouvernement du Québec s'engage dans la mise en valeur du potentiel éolien québécois à grande échelle. L'ACEE recommande d'ailleurs que le Québec se fixe un objectif minimal de produire 7,5 % de son électricité par énergie éolienne en 2012 et 10 % en 2015. L'ACEE recommande aussi que le Québec continue à supporter le développement de l'énergie éolienne en spécifiant la quantité d'énergie éolienne qu'Hydro-Québec doit acheter tant et aussi longtemps que l'éolien n'est pas considéré à sa juste valeur technique, économique, environnementale et sociale. Dans ce contexte, l'association recommande que le Québec lance les appels d'offres suivants: 1 000 MW en 2005, 1 000 MW en 2006, 1 000 MW en 2007, 600 MW en 2008, 500 MW en 2009 et les années suivantes. À partir de 2011, ces appels d'offres de 500 MW à être installés à compter de 2016 permettront de maintenir l'équilibre en l'offre et la demande ou d'accroître la marge de manoeuvre du Québec;

Finalement, l'association recommande que le Québec ouvre l'ensemble du territoire québécois aux projets éoliens pour limiter au strict minimum les coûts d'intégration et de raccordement. Mesdames et messieurs, je vous remercie pour votre attention.

Le Président (M. Bachand): Merci infiniment, M. Painchaud. Donc, allons-y effectivement, M. le ministre. Donc, le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. Allez-y, M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. D'abord, juste avoir une idée. Selon vous ? vous êtes, dans le domaine, des spécialistes ? quelle est la capacité pratique, demain matin, là, qu'est-ce qu'on mettrait au Québec comme éolien, pas théorique, là, pour être intégré dans le réseau... On a eu d'ailleurs, juste pour vous donner la piste, là, on a eu un spécialiste qui est venu ici, puis il nous a parlé de 10 % de la capacité totale du réseau.

M. Painchaud (Guy): À notre sens, la ressource est abondante, alors ce ne sera pas un facteur limitatif de la capacité. Le facteur limitatif ne sera pas les coûts aussi, ça va être la capacité du réseau à intégrer un taux de pénétration sans nécessiter de changements majeurs, et puis le baser sur les expériences, là, qui se sont faites dans des pays où la pénétration de l'éolien est beaucoup plus avancée qu'au Canada. On juge qu'on pourrait installer jusqu'à 20 % de la capacité du réseau sans nécessiter de remodelage, là, si on veut, des installations existantes. Alors, 20 % grosso modo de 35 000, on parle de 7 000 à 8 000 MW d'éolien au Québec.

M. Hamad: Vous parlez de spécificité de notre réseau. Pourriez-vous spécifier davantage?

M. Painchaud (Guy): La spécificité du réseau, là, c'est ce qu'il y a un petit peu de particulier au Québec, de très particulier, en fait. C'est un réseau hydraulique en grande partie ? 96 % ? qui est supporté par de grands réservoirs, et puis il y a une synergie, si on veut, entre les sources éoliennes et l'existence de barrages. Comme vous le savez, l'éolien va souffler, là, de façon intermittente, alors il y a un besoin à storer l'énergie lorsque possible, et puis on est particulièrement privilégiés au Québec parce que justement on dispose de barrages énormes qui peuvent constituer en fait des batteries, là, de la même façon que les apports hydrauliques sont modulés par des barrages.

n (15 h 20) n

M. Hamad: Vous avez parlé, par 1 000 MW, de la création des emplois, sur 25 ans, de 15 000 personnes, 15 000 quelques, là.

M. Painchaud (Guy): ...

M. Hamad: Pardon?

M. Painchaud (Guy): C'est 15 000 années-personnes.

M. Hamad: Années-personnes. Pourriez-vous me donner le détail de vos calculs d'emploi? Parce que 15 000 années-personnes pour 1 000 MW... Le dernier appel d'offres qu'on vient de faire, là, d'octroyer le contrat, en fait, il y avait deux usines à 100 quelques personnes plus 100 personnes en permanence. Ça, c'est directement sur l'usine. On exclut évidemment le fabricant, là, GE, par exemple. Mais 15 000 par année pendant 25 ans?

M. Painchaud (Guy): Ce n'est pas 15 000 par année, c'est 15 000 années-personnes. Grosso modo, c'est 700 personnes par année pendant 25 ans. Puis je vais laisser M. Parrouffe élaborer sur la source du 700.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Parrouffe.

M. Parrouffe (Jean-Michel): En fait, il s'agit des données qui ont été rapportées dans l'étude qui a été présentée par Hélimax donc au mois de mai, juin 2004. Cette étude a été réalisée par Jean-Claude Thibodeau qui a déjà réalisé lui-même de nombreuses études de retombées économiques pour Hydro-Québec dans le cadre des projets, notamment celui de la Baie James. Donc, M. Jean-Claude Thibodeau a calculé effectivement le nombre d'emplois qui seraient générés par tranche de 1 000 MW dans le contexte de deux scénarios, un scénario à 1 000 MW et un scénario à 4 000 MW, et les chiffres qui sont rapportés dans le mémoire de l'ACEE proviennent effectivement du mémoire qui a été déposé par Hélimax à la Régie de l'énergie dans le contexte des audiences sur le projet du Suroît.

M. Hamad: J'essaie de suivre les chiffres, là. Une fois qu'on a bâti l'éolienne, là on a des gens qui opèrent, puis il y a les gens d'entretien. Les gens d'entretien et ceux qui opèrent: autour de 100 personnes par année. Il est clair que, les premières années, c'est normal, pendant qu'on produit et on fabrique l'éolienne, les poteaux, etc., les travaux de génie civil, il y a beaucoup de monde. Mais, une fois qu'on a installé les éoliennes et on les a mises en service, là on parle des gens qui font juste l'opération et l'entretien, qui sont autour de 100 personnes, en tout cas selon ce que les soumissionnaires à qui on a octroyé des contrats, ils nous ont dit, là. 15 000 divisé par 25, ça fait, quoi, 400? Même plus. 700? Moins, là.

M. Parrouffe (Jean-Michel): Ce que vous donnez là, c'est la moyenne. Mais en réalité, un projet éolien, effectivement la majeure partie des emplois sont des emplois que l'on retrouve en usine. Donc, ils se retrouvent, les premières années, au moment où on fabrique les machines. Ce qu'on a calculé, c'est le nombre total d'années-personnes impliquées dans la fabrication, l'opération et l'entretien de ces machines, et ça, ça a été fait avec le modèle qui a été développé par l'Institut de la statistique du Québec, compte tenu de la structure industrielle du Québec et des caractéristiques propres à l'économie québécoise. Ça n'a pas été fait avec un modèle autre que celui qui est utilisé au Québec pour réaliser le calcul des retombées économiques.

M. Hamad: O.K. On se comprend que peut-être c'est 100 personnes par année pendant 25 ans. C'est 2 500. Il en reste 12 500 pour compléter votre chiffre. 12 500, on a des usines à 400 personnes, il reste encore 12 000 emplois à quelque part. Je suis d'accord qu'il y a beaucoup d'emplois à être créés, mais 15 000... En tout cas, c'est des modèles. Les modèles, tout dépend comment les chiffres qu'on rentre... O.K. Je vais aller à d'autres volets, là.

M. Parrouffe (Jean-Michel): Bien, c'est essentiellement le même modèle qui a déjà été utilisé.

M. Hamad: Pardon?

M. Parrouffe (Jean-Michel): C'est essentiellement le même modèle qui a déjà été utilisé pour calculer les retombées économiques des projets hydroélectriques au Québec.

M. Hamad: Évidemment, là, on parle du Nord du Québec. Il y a un potentiel éolien important au Nord du Québec. Le Nord du Québec, il y a une influence du climat. On a un climat qui est évidemment dur. Comment vous voyez ça dans votre expérience ailleurs au monde par rapport à ici? Est-ce que la technologie va suivre? Est-ce qu'elle est prête?

Le Président (M. Bachand): M. Charrette.

M. Charrette (Daniel): Rapidement, je peux vous dire que la plupart des grands manufacturiers du monde ont des machines d'installées en Mongolie intérieure, en Suède, en Norvège, à des endroits où les températures sont sensiblement semblables à ce qu'on trouve au niveau du cercle arctique. C'est sûr qu'actuellement certaines éoliennes, de façon économique, vont s'arrêter de fonctionner autour de moins 30 °, moins 40 °, mais c'est seulement qu'une question de recherche et développement et de coûts pour aller plus loin.

Il faut voir un peu ce qui se passe au niveau des données, combien de fois par année ou combien d'heures par jour ou par année le froid va en bas de moins 30 °. Dans le cas du Manitoba, où il y a un projet actuellement qui se bâtit, on a trouvé qu'il y aurait environ neuf heures par année où l'éolienne serait arrêtée s'il y avait du vent puis s'il faisait en dessous de moins 30 °. Donc, il s'agit vraiment d'étudier l'endroit où ça va être installé.

M. Hamad: Quand il vente, il fait froid?

M. Charrette (Daniel): Pas nécessairement.

M. Hamad: Pas nécessairement?

M. Charrette (Daniel): Quand il fait trop froid, il ne vente pas.

M. Hamad: ...il y a plusieurs personnes, comment vous répondez à ces gens-là qui disent que la pollution visuelle... Évidemment, lorsqu'on va mettre tant de tours en face avec... Maintenant, on est rendu avec des dimensions... Une pale, ça peut être 37 mètres. Avec les deux pales, là, c'est une longueur d'un avion quasiment. Alors, comment vous répondez à ça, là?

M. Charrette (Daniel): L'impact visuel, c'est le principal désavantage de l'éolien. La beauté de la chose, c'est que c'est visuel justement par rapport à d'autres centrales qui vont avoir des émissions qui sont un petit peu plus cachées, dans le sens que c'est des particules que l'on ne voit pas. Et puis, les bonnes pratiques de développement vont faire en sorte qu'on va préférer s'installer dans un endroit avec une faible densité de population. On a parlé du Nord du Québec ou encore des grands coins en Gaspésie où c'est relativement faible, et je pense qu'encore une fois il faut se fier aussi... Il y a beaucoup de ouï-dire et de mythes. Je pense qu'il faut parler aux gens qui les ont vus, et puis justement il y a un sondage qui a été mené auprès des touristes suite aux visites de parcs éoliens. 95 % de ces gens-là ont apprécié l'impact visuel des éoliennes.

M. Hamad: Dernière question... laisser le tour à mes collègues. Là, actuellement, on a un taux... J'ai le temps, oui?

Le Président (M. Bachand): Absolument, M. le ministre. Allez-y.

M. Hamad: On parle de 35 %, 38 %, facteur d'efficacité. Est-ce que selon vous, évidemment, si, un jour, on peut trouver une batterie qui peut... Évidemment, il y en a actuellement, il existe actuellement des batteries qui peuvent prendre un peu la charge temporairement, là, l'entreposer pour l'utiliser plus tard. Dans l'avenir immédiat, là, c'est-à-dire entre cinq et 10 ans, quelle est l'efficacité du système d'éolien que ça va devenir dans quelques années?

Le Président (M. Bachand): M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Je crois que les facteurs de capacité sont en train d'augmenter parce que les... en fait les rotors d'éolienne deviennent plus gros par rapport aux génératrices. Ça peut être une mesure aussi qui est galvaudée, dans le sens, là, que c'est une question de dimensionnement des machines. Je pense qu'en bout de ligne, là, il faut juger tous nos jugements sur le prix par kilowattheure. On peut artificiellement monter le facteur de capacité sans descendre le prix par kilowattheure. Et puis, il reste que le prix par kilowattheure a descendu significativement. À chaque doublement de la capacité éolienne mondiale, on assiste à une baisse, là, de 9 % à 13 %, je crois, du prix par kilowattheure. Et puis, on prévoit que la capacité mondiale actuelle va avoir doublé encore une fois en 2008 et une autre fois en 2013. Alors, on a deux cycles, là, de... un quadruplement en fait de la capacité qui s'en vient d'ici huit ans, qui devrait amener ces coûts-là à la baisse, là, sans égard au facteur de capacité.

M. Hamad: ...décision, au gouvernement du Québec, d'aller en appel d'offres, un deuxième appel d'offres de 1 000 MW. Il y en a un déjà, 2 000. Il y a quelques petites entreprises... On est à peu près autour de 2 400; 2 300, 2 400. Le Québec se situe où, selon vous, actuellement?

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Charrette.

M. Charrette (Daniel): Je pense que le Québec, et le Canada entier, est très loin derrière à peu près tout ce qu'il y a comme pays. Le Canada a un pays de près de 10 millions de kilomètres carrés, le Québec, 4,5 millions de kilomètres carrés, population d'autour de 7 millions de personnes, 400 MW de pénétration éolienne, alors que le Danemark a près de 4 000 MW déjà pour une population de 6 millions sur 45 000 km². Donc, le Québec a sûrement la possibilité de développer un peu plus d'éolien par rapport à la dimension de son territoire, c'est clair.

M. Hamad: Je m'attendais à cette réponse-là d'un fournisseur d'équipement, me dire que le marché est encore là, mais tantôt vous avez dit: La capacité du Québec est 7 000. 20 % de 35 000, c'est 7 000 MW, et on est à 2 400. En fait, on est le premier au Canada actuellement comme producteur. On a fait un pas de géant depuis très peu de temps.

M. Charrette (Daniel): Effectivement. Mais, par rapport aux autres pays du monde, on se situe encore... On est sur la bonne voie. Ce qu'on dit, c'est qu'on recommande actuellement au gouvernement du Québec de continuer dans sa lancée pour demeurer le leader, et, par le fait même, je pense que la base industrielle va suivre. L'exemple de l'Espagne est un des meilleurs exemples au monde. En demandant à ce que les manufacturiers s'installent en Espagne, l'Espagne, depuis huit ans ou 10 ans, est passée de zéro à 8 000 MW installés. On y fabrique maintenant pas seulement des pales ou des tours, mais on y fabrique aussi les génératrices, on y fabrique aussi des transmissions. Donc, plus la base industrielle va être établie, plus les commandes sont certaines à long terme, plus les manufacturiers vont venir s'installer.

M. Hamad: À quel prix en Espagne? 0,12 $? 0,15 $?

M. Charrette (Daniel): Sûrement, mais l'Espagne a fait quelque chose.

n (15 h 30) n

M. Hamad: Il faut le dire, le prix, avec, là.

M. Charrette (Daniel): Oui, mais, comme l'Espagne entre plusieurs fois dans le Québec, encore une fois... C'est que l'Espagne a été encore plus loin que ça, a demandé à ce que les manufacturiers installent des fabrications de tours et de pales dans presque chacune des provinces en Espagne. Donc, ça augmente le coût de l'éolien.

M. Hamad: 0,15 $ par rapport à 0,06 $ au Québec, hein?

M. Charrette (Daniel): Oui, oui.

Le Président (M. Bachand): M. Painchaud, vous vouliez intervenir? Allez-y, M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Je voudrais compléter une réponse qui a été donnée précédemment, là, au sujet de la position du Québec. D'abord, je tiens à remercier le gouvernement, là, pour l'approche qu'ils ont eue, le travail qui a été fait depuis quatre, cinq ans. Effectivement, on est en train de se positionner comme un leader en Amérique du Nord. On fait l'envie de toutes les autres provinces au Canada et de bien des États en Amérique du Nord. On s'est donné une politique compréhensive, une fenêtre d'opportunité. Pardonnez-moi l'expression, mais les Américains branlent dans le manche un petit peu au niveau des politiques. Je pense que pour nous ici, là, c'est le temps un petit peu de voler la pole, et de continuer dans ce qu'on a commencé, et d'être conséquent. Et puis les 2 000 MW, c'est une bonne base, mais on est en train de créer une industrie qui va se comparer à l'industrie du transport ferroviaire ou encore de l'automobile. Une fois que les usines ou encore une fois que l'industrie est partie, là c'est difficile à changer. Mais il y a une masse critique qui est en train de se mettre en place puis il ne faut surtout pas la ralentir, mais il faut l'accélérer.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Painchaud. M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. J'aimerais juste peut-être faire un peu de chemin sur ce que vous avez commencé à faire avec le ministre, parce que, dans votre mémoire, vous mentionnez que le prix du kilowattheure va continuer de baisser de 9 % à 17 %, là, à chaque fois qu'on va doubler la capacité d'installer des éoliennes. C'est ce que je comprends, grosso modo. Mais, à un moment donné, on va atteindre un certain niveau plancher, le prix du kilowattheure ne baissera certainement pas en bas de ça.

Et par la suite, dans une sous-question relative à ça, le prix du kilowattheure produit ici, au Québec, comparativement à d'autres endroits ? parce que c'est relativement jeune, le projet éolien, ici, au Québec ? par rapport à d'autres endroits dans le monde ? on parle de l'Espagne, on parle de la Norvège ? ça ressemble à quoi, les comparatifs?

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Effectivement, le prix va, pas plafonner, là, mais va atteindre un plancher. C'est une courbe asymptotique. Alors, on est encore dans la phase où le prix descend, puisque c'est une industrie relativement jeune ici et dans le monde, là, toutes proportions gardées, avec les sources conventionnelles d'énergie. Et puis, les raisons qui font descendre le prix, d'abord c'est la production de masse, mais aussi c'est beaucoup le savoir-faire qui augmente, dans le sens où ce n'est pas seulement la technologie, mais c'est le positionnement des parcs. On réussit à trouver de meilleurs endroits, des façons d'intégrer aussi... Les coûts diminuent. Alors, il y a encore du potentiel de ce côté-là.

Et puis, pour revenir à la question, là, du prix québécois de l'éolien, si on veut, par rapport à d'autres pays, je dirais que les grands facteurs qui vont aboutir sur un prix final, ça reste la ressource, la qualité de la ressource. Le financement des parcs aussi est un facteur extrêmement important ? le prix des machines, en fait. Et puis, dans les deux premiers facteurs, au Québec on dispose d'une ressource de très, très bonne qualité et puis il existe des mécanismes fiscaux maintenant en place au Canada qui font qu'il est possible de financer l'éolien, avec des incitatifs fiscaux, à un prix très, très compétitif. Alors, on a vu les résultats des appels d'offres récents qui ont donné un prix de production moyen de 0,065 $. C'est très compétitif et ça a surpris beaucoup de gens, là. Mais c'est dû, entre autres, je dirais, aux différents facteurs qui se trouvent à être réunis ici, au Québec.

Le Président (M. Bachand): Oui, M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Mais, si on veut comparer, au Québec on parle de 0,06 $ plus un certain nombre de sous du kilowattheure. La Norvège, c'est quoi? Ceux qui font déjà de la production importante de l'éolien, c'est quoi, le tarif? Tantôt, vous avez abordé un peu la question de l'Espagne, vous parliez de 0,14 $, 0,15 $. Ça ressemble à quoi, la comparaison avec les autres pays?

M. Painchaud (Guy): Les meilleurs contrats dont j'ai entendu parler, qui se signent aux États-Unis, se font, là, grosso modo, un peu en bas de 0,03 $US le kilowattheure. Mais par contre le producteur va chercher un crédit d'impôt remboursable d'environ 0,018 $US auprès du gouvernement fédéral. Alors, 0,018 $ est pour 10 ans, ça fait que grosso modo ça équivaut, là, peut-être à 0,017 $ sur la vie du projet. Alors, aux États-Unis, dans les meilleurs sites, les meilleures conditions, des économies d'échelle, il y a des contrats qui se donnent, là, à peu près à l'équivalent de 0,037 $US à 0,038 $US du kilowattheure, des contrats de 20 à 30 ans.

En Europe, les conditions de financement, entre autres, sont beaucoup différentes, c'est difficile d'emprunter à long terme, alors les gens empruntent auprès de banques sur 10 ans, ce qui vient monter le prix. Et il y a d'autres facteurs, là. Je ne sais pas si, Daniel, tu as des idées.

M. Charrette (Daniel): Bien, peut-être renchérir. Quand on fait appel à des développeurs privés, c'est sûr qu'eux autres vont regarder plusieurs facteurs. Donc, ils vont regarder, un, la ressource de vent, combien j'ai de mètres par seconde de vent qui souffle, le facteur de capacité qui doit être le plus élevé possible et les coûts d'intégration au réseau le moins chers possible, donc le plus près d'une ligne électrique. C'est sûr qu'en tant que développeurs mes membres vont vouloir vendre l'électricité le plus cher possible pour avoir un rendement sur leurs investissements.

Le coût de l'éolien, finalement c'est simple, c'est le coût d'achat de l'équipement et de construction. Ensuite de ça, le vent, bien c'est quelque chose qui est gratuit, donc le «fuel» va rester constant, il n'a pas de coût. Donc, c'est sûr que, si je suis un développeur puis je veux installer... sur un site en Gaspésie à 7 m/s, à 40 % de facteur de capacité, je calcule mon prix puis je dis: O.K., moi, à 0,065 $ le kilowatt, je fais de l'argent. Mais, si je m'en vais à Pincher Creek, en Alberta, puis j'ai un vent de 9 m/s avec un facteur de capacité de 54 %, je ne le vendrai pas 0,065 $ parce que là-bas ils sont prêts à m'en donner 0,15 $, le kilowatt. Le coût des machines est le même partout à travers le monde. C'est le coût de construction, la ressource de vent.

En Allemagne principalement, pourquoi c'est cher? Bien, ils n'ont pas de vent. Ils ont 12 000 MW d'éolien, mais ils n'ont pas de vent. La moyenne des vents en Allemagne est autour de 5 à 6 m/s. Donc, c'est pour cette raison-là qu'on trouve les plus grosses machines au monde en Allemagne, pour ramasser le plus d'énergie possible avec un vent moyen qui est quand même assez faible.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le député de Roberval. Donc, M. le ministre, rapidement.

M. Hamad: Juste pour la dernière remarque que vous avez faite sur les contrats aux États-Unis, il faut évidemment faire attention au type de contrats qu'on a, parce que, lorsqu'on demande un contrat ferme avec un volume garanti, le prix est plus haut et, lorsqu'on ne demande un contrat que de temps en temps, le prix peut être bas. Alors, c'est pour faire la distinction, là. Donc, le prix aux États-Unis, 0,037 $ plus ça, c'est à peu près 0,05 $. Si c'est un prix qui n'a pas de garantie, il devient concurrentiel à notre prix ici. Et, pour compléter la réponse, on est actuellement dans le moins cher au monde, là, dans les prix de l'éolien.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le ministre. Donc, désolé, M. le député de Portneuf, on y reviendra. On a terminé le bloc. Je vais donner l'opportunité à la députée de Rosemont, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie. Allez-y, Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci beaucoup. Alors, messieurs, bonjour. Je vous remercie d'ailleurs d'avoir souligné que l'engagement du gouvernement envers la production éolienne remontait à plus de deux ans. Effectivement, vous étiez partis d'ailleurs de ces réflexions-là. Ça a été un grand moment pour tout le monde.

Justement dans ce contexte-là, je vois, à la page 15 de votre mémoire, que vous parlez des appels d'offres qui sont en cours. Est-ce que vous avez des informations concernant ce qui se passe actuellement avec ces appels d'offres là? La raison pour laquelle je vous pose ça, c'est parce que visiblement on a beaucoup de suggestions de continuer à augmenter notre capacité en éolien, puis, aujourd'hui, à Radio-Canada, on a une sortie concernant le retard dans la construction des usines de fabrication, et ça ne semble pas aller aussi vite qu'on le pensait. Est-ce que vous avez... Je cite ici la députée de Matane qui dit qu'elle s'inquiète beaucoup des retards qui sont pris et du délai déraisonnable à son avis quant à la livraison. Qu'est-ce que c'est qui ne marche pas, là? Qu'est-ce que c'est qui se passe? Êtes-vous au courant?

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Non, pas vraiment.

Mme Dionne-Marsolais: Vous n'êtes pas au courant? Donc, vous ne suivez pas ça tant que ça?

M. Painchaud (Guy): J'imagine que ça se passe au niveau du turbinier gagnant et des développeurs gagnants, et puis ils ne sont pas à la table, ici, aujourd'hui. C'est un petit peu difficile pour nous autres.

Mme Dionne-Marsolais: Ah! O.K. Donc, en fait, ce n'est pas une question de technologie, là, c'est une question, comme le ministre a dit, une question privée, à votre connaissance.

M. Painchaud (Guy): Oui. Je n'ai aucune idée pourquoi ça...

Mme Dionne-Marsolais: O.K. Bien, j'espère que ça va débloquer, parce que sinon ça risque d'être stâlé pas mal.

n (15 h 40) n

Vous faites un constat, à la page 15 aussi, sur le coût du service d'équilibrage, et vous dites que vous mettez en doute la valeur élevée d'Hydro-Québec pour le coût du service d'équilibrage, et vous nous donnez des chiffres, à la page 16, qui sont des chiffres comparatifs avec ce qui se fait ailleurs. Hydro charge cher, d'après ce qu'on a vu dans les journaux, 0,009 $ du kilowattheure, et, selon votre comparaison, votre analyse, ces coûts-là ailleurs seraient de l'ordre de 0,0018 $ à 0,0068 $ du kilowattheure en dollars canadiens. Vous expliquez ça comment, donc?

Le Président (M. Bachand): M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Effectivement, ce que vous rapportez là, c'est ce qu'on a constaté en regardant ce qui est fait un petit peu ailleurs et le coût qui nous a été annoncé. Nous trouvons que le 0,009 $ par kilowattheure semble, pas prohibitif, là, mais très élevé. On a du mal à s'expliquer d'où ce coût vient et puis en fait on souhaiterait le savoir et avoir une démonstration, là, de la part d'Hydro-Québec Production, que c'est effectivement ce que ça représente, le coût réel d'équilibrage. Je pense que l'intégration d'une si grande capacité d'éoliennes au Québec, c'est une première, il va y avoir un apprentissage à faire, là, de la part de tous et chacun. Et puis là on parle d'un gros bloc, alors ça vaut la peine justement de faire cet apprentissage et faire les études pour voir vraiment, là, si le coût devrait être plus bas. Et puis on est conscients qu'un coût aussi élevé va nous causer du tort, alors on serait prêts, là aussi, à en débattre avec les gens qui ont fixé le coût.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que le cadre réglementaire actuel, qui soustrait Hydro-Québec Production ? vous me voyez venir ? à l'autorité de la régie, est-ce que cela vous permet d'aller connaître le détail de ce coût du service d'équilibrage, à savoir comment il est déterminé et sur quoi il est basé?

Le Président (M. Bachand): M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): À ma connaissance, ce ne sera pas possible puisque ce n'est pas un coût qui vient de Distribution, c'est un coût, je pense, qui a été donné par Production, et puis, dans la mesure où Production n'est pas soumise à la régie, je ne suis pas certain, là, si ça va être débattu sur la place publique ou devant la régie. Je ne pourrais pas vous dire, là. On ne sait pas si on va le savoir. Bien franchement, là, on aimerait en savoir plus, mais je ne suis pas certain que les mécanismes actuels permettent de faire un débat public sur ce point-là.

Mme Dionne-Marsolais: Mais, si ça peut vous rassurer, là, l'organisme actuel n'est pas en mesure de faire cette évaluation-là. Dans ce contexte-là, est-ce que vous pensez qu'Hydro-Québec Production devrait être assujettie à la régie...

M. Painchaud (Guy): Nous sommes une association... Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: ...pour qu'on ait une...

M. Painchaud (Guy): Je vais prendre la réponse du monsieur avant moi, là. Ha, ha, ha! Je dirais que, si on regarde l'avenir de l'éolien à moyen terme, on court un risque au Québec de se buter à un plafond lorsqu'on va arriver... et de se faire dire que la capacité d'équilibrage du réseau a atteint un maximum. Alors ça, ça va faire l'objet de débats. Et puis, cette capacité-là d'équilibrage est connue et contrôlée, là, je dirais, par Production. Alors, l'éolien est une source qui a des caractéristiques différentes des autres sources, et puis, pour en tirer la meilleure valeur, il faut que ce soit intégré dans un réseau. Dans un réseau, tu as de la distribution, tu as du transport puis de la production. S'il reste un aspect, là, un volet tout à fait indépendant, si on veut, qui ne fait pas partie de l'optimisation de tout ça, possiblement que l'éolien va être intégré de la meilleure façon, mais possiblement que non pour différentes raisons qui ne seraient pas la recherche de la meilleure efficacité énergétique. Je pense, entre autres, à des appels d'offres de Distribution ou à des appels d'offres pour le thermique en fait où on demandait un facteur de capacité quand même assez élevé.

L'éolien n'a pas pu compétitionner parce qu'on n'avait pas accès à de la capacité d'équilibrage, et puis l'équilibrage au Québec, bien il y a un monopole, c'est Hydro-Québec Production, et on peut se dire aussi que, dans certains appels d'offres, Production aussi va compétitionner pour la capacité sur le réseau et peut se trouver à compétitionner la production privée en éolien. Ça fait que, dans cette mesure-là, si le risque s'avère, pour nous on aurait un intérêt à voir la régie se pencher sur les coûts d'équilibrage, là, au moins, si ce n'est pas sur Production, mais au moins les coûts d'équilibrage, là, et de faire en sorte que ce service-là devienne réglementé, si on veut.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, madame.

Mme Dionne-Marsolais: D'ailleurs, la recommandation que vous faites à la page 11 est assez claire là-dessus, là. Quand vous dites: «Que les lois applicables fassent l'objet d'une analyse approfondie», c'est une manière détournée de dire que vous souhaiteriez que ces conditions de réglementation là soient revues, si je me fie en tout cas à ma lecture, là.

Et la dernière question que j'ai ? parce qu'après ça je vais passer à mes collègues ? c'est: Le prochain 1 000 MW qui a été annoncé par le gouvernement, est-ce qu'à votre avis il devrait être concentré ou avoir les mêmes priorités au niveau du développement de la Gaspésie si on veut vraiment développer une industrie là-bas?

Le Président (M. Bachand): M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Oui. Je vais faire une distinction, là, entre le développement de la Gaspésie et la... Il y a la localisation des parcs et le contenu manufacturier, si on veut. À notre sens, la localisation des parcs ne devrait pas être limitée à la Gaspésie parce que ça implique, là, des coûts supplémentaires. Je pense qu'on l'a fait pour de bonnes raisons. Maintenant, on va arriver avec un produit sur le marché qui va être à meilleur coût si on a accès à tout le réseau du Québec.

Pour ce qui est du contenu manufacturier, l'association n'a pas de consensus parmi ses membres, alors elle n'a pas de position quant au contenu gaspésien, là, des équipements.

Le Président (M. Bachand): Merci, Mme la députée de Rosemont. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue. Puis, moi, je suis une assez fanatique de l'éolien, vous comprenez bien, avec le comté de Matapédia. Nous, on est à la porte de Matane et de la Gaspésie et ça fait deux ans qu'on fait des représentations pour entrer dans cette filière, ce giron de l'énergie éolienne. Et on a M. Raymond Gilbert ? c'est bien ça? oui, Raymond Gilbert ? qui nous a présenté un mémoire extrêmement intéressant qui faisait deux propositions. Bon, il disait: Pour obtenir les résultats escomptés, nous devrons créer la Société québécoise des éoliennes, qui aura comme mandat de construire un groupe de parcs d'éoliennes pouvant générer, d'ici 2030, 92 TWh d'énergie. Là, il parlait d'un conseil supérieur de l'énergie ou... En tout cas, il avait un autre objectif. Mais, celui-là, je voudrais vous questionner par rapport à celui-là puis en même temps vous questionner sur comment faire pour que les milieux, disons, les individus qui ont les terrains sur lesquels passent les éoliennes ? je partirais de la base, aller jusqu'à monter au Québec ? comment faire pour qu'à chaque niveau on ait le maximum de retombées économiques de l'implantation des éoliennes.

Le monsieur ou la madame, l'agriculteur qui a un lot sur lequel passent les éoliennes, la municipalité qui parfois ne récolte que 10 000 $, 15 000 $, 20 000 $, le petit village, la MRC, hein ? parce qu'on en a vu ici, des MRC qui veulent aller vers des énergies puis qui ont besoin d'argent; on peut le comprendre ? et le Québec, le Québec... Comment faire pour qu'on aille chercher le maximum de retombées? Et, par rapport à la proposition de M. Gilbert, qu'est-ce que vous pensez de ça?

Le Président (M. Bachand): M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Oui. Je vais commencer par les retombées les plus locales, au niveau du particulier qui possède un lot sur lequel des éoliennes sont installées. Alors, je pense qu'il y a un mécanisme en place présentement en vertu duquel il va toucher une redevance d'utilisation. C'est un contrat qui est négocié de gré à gré. Alors, c'est le marché qui joue. Après ça, si je monte au niveau de la municipalité, on a constaté, à travers le premier appel d'offres ? ça, c'est mon expérience personnelle ? qu'effectivement, particulièrement sur les terres publiques, les MRC, les municipalités ne touchaient aucune redevance. Alors, s'il n'y a pas beaucoup de propriétaires privés, il n'y a pas beaucoup de redevances concrètes. À mon sens, c'est dû à ce que l'en-lieu de taxes municipales, si on veut, est payé au fonds consolidé de la province. Il y a un 3 % qui part, qui s'en va à la province, alors que la MRC et la municipalité ne touchent rien alors que c'est eux autres qui en souffrent, si on veut, qui sont les hôtes du projet. Alors, s'il pouvait y avoir un changement à ce niveau-là, ça nous faciliterait la vie comme développeurs éoliens. Autrement, si les MRC s'adressent aux développeurs et leur demandent de toucher certains paiements, alors ça rajoute aux coûts du développeur, là. C'est comme un autre pot, là, où il faut payer pour faire de l'éolien.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée... Oui, M. Charrette.

M. Charrette (Daniel): J'aimerais en rajouter un peu. L'association, actuellement ce qu'on tente de faire aussi, c'est de standardiser ces genres de coûts de taxation là aussi à travers le Canada, parce que, d'une province à l'autre, on rencontre les mêmes problèmes. Ce qu'on rencontre maintenant, ce que les développeurs rencontrent aujourd'hui, en Gaspésie, ce sont, dans chacune des municipalités... Et certains parcs vont couvrir jusqu'à trois municipalités, donc chacune des municipalités va avoir une demande différente quant au niveau de taxation. Donc, je pense que ce serait important que le Québec arrive avec une politique fixe, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas une municipalité...

À Matane, nous autres, on va charger 3 000 $ par éolienne, puis, à Cap-Chat, on va charger 6 000 $ par éolienne, puis, à L'Anse-à-Valleau, bien 1 000 $ par éolienne par année, ça va faire notre affaire. Donc, stabiliser tout ça, les niveaux de taxe... Sur des terres publiques, il devrait au moins, comme il est dit, y avoir des redevances aux municipalités environnantes. C'est quand même eux qui ont besoin des infrastructures autour pour faire ça.

n (15 h 50) n

Mme Doyer: Parce que vous savez que, dans chaque communauté, ils sont obligés de faire des arbitrages. Il y a des gens qui sont pour, il y a des gens qui sont contre et on ne peut pas subir juste les inconvénients. Et vous avez raison dans ce que vous dites parce que la MRC de Percé, entre autres, a des exigences, justement se plaint de ne pas avoir suffisamment de retombées. Et, moi, j'ai le maire d'Amqui, comme il a été cité ce matin, qui en veut, qui veut qu'on concentre ça sur notre territoire. On veut bien participer à la filière éolienne, mais on veut aussi être partie prenante des redevances, et je crois que c'est légitime.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Charrette. Donc, merci, Mme la députée. M. le député de Vanier.

M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Pour revenir tantôt au prix qu'on parlait sur, bon, la construction d'éoliennes, et, à un moment donné, on va atteindre un prix qu'on pourrait dire plancher, autrement dit on ne descendra pas beaucoup plus que ça, compte tenu, bon, des achats en masse qu'on va faire, puis tout ça, ça, je comprends bien ça.

Je veux aussi que vous me parliez sur les budgets de recherche et développement. Vous avez mentionné tantôt que bon les budgets avaient été coupés, puis tout ça. Est-ce qu'on va avoir une deuxième génération d'éoliennes? Pourquoi recherche et développement? Bien, parlez-moi aussi des budgets, évidemment. J'aimerais vous entendre sur ça.

Le Président (M. Bachand): M. Charrette.

M. Charrette (Daniel): La durée de vie actuelle d'une éolienne, à partir du moment où elle est mise en marché et vendue sur le marché, est environ de 18 mois, de 18 à 24 mois. Donc, à chaque 18 à 24 mois, il y a des nouveaux produits qui entrent, donc des éoliennes plus puissantes, plus performantes. Le cycle de vie d'une éolienne est autour actuellement de 18 à 24 mois.

M. Légaré: Donc, il se fait de la recherche et développement. C'est vraiment pour être compétitif, améliorer l'efficacité et puis justement arriver avec des... être compétitif là-dessus, là.

M. Charrette (Daniel): Exactement. Donc, les besoins en recherche d'une entreprise qui serait établie au Québec...

M. Légaré: Parce que le prix ne descendra pas beaucoup plus. Même si on met énormément d'argent en recherche et développement, on a atteint quand même un...

M. Charrette (Daniel): Juste pour vous donner un exemple, la nouvelle compagnie Vestas, qui est la fusion des deux compagnies, des deux types d'éoliennes qu'on a principalement au Québec, on est maintenant 9 500 employés et on emploie 950 personnes au niveau seulement de recherche et développement. Donc, 10 % de la masse salariale s'en va en recherche et développement, principalement actuellement basée au Danemark.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Vanier.

M. Légaré: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand): Oui. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Oui. Merci. Vous mentionnez à la page 13 que le Québec doit accélérer sa production d'énergie éolienne pour aller chercher les subventions fédérales, mais, moi, ce qu'on m'a dit à un moment donné, c'est que le Québec n'avait pas pleinement droit aux subventions fédérales, dû à certaines raisons, notamment par le fait qu'Hydro-Québec est une société d'État. Vous dites que ce n'est pas le cas? Je vous vois dire non.

Le Président (M. Bachand): M. Charrette ou M. Painchaud.

M. Painchaud (Guy): Oui. Ce qui arrive, c'est que les subventions fédérales sont assurées à un projet à partir du moment où le projet a tous ses permis pour commencer à construire. Alors, au Québec, on a un processus environnemental assez rigoureux qui prend de 18 mois à deux ans. Ça fait qu'à partir du moment où un développeur va vouloir faire de l'éolien il va aller chercher son contrat d'abord avec Hydro-Québec, et puis, seulement deux ans plus tard, il va commencer sa construction, grosso modo. Alors, au moment où il va chercher le contrat, il ne le sait pas, s'il va avoir ses permis, il ne peut pas demander la subvention fédérale. Alors, dans son prix de soumission, il ne peut pas en tenir compte. Ça fait qu'il va pouvoir y toucher, mais il ne peut pas en tenir compte dans son prix de soumission, et puis, si elle arrive, tant mieux, plus tard. Alors, ça nous désavantage, dans le sens où nos prix de construction, là, si on veut, nos prix de soumission se retrouvent à être grosso modo, là, 0,01 $ plus élevé que les autres participants dans d'autres provinces peuvent soumissionner parce que...

M. Tremblay: ...à travers le BAPE ou bien par une audience comme le BAPE?

M. Painchaud (Guy): Il y a des endroits... Je comprends qu'en Alberta, entre autres, là, ça peut être accepté assez rapidement ? une question de quelques mois, là ? au niveau de l'environnement, et puis, la plupart des autres provinces aussi, les processus sont beaucoup plus rapides. Alors, ces gens-là, au moment où ils soumissionnent, où ils construisent, là, ont déjà l'environnement dans leur poche, si on veut. Alors, à ce moment-là, ils peuvent tenir compte du crédit de la production fédéral.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Bien, en fait, je ne ferais qu'un complément de...

Le Président (M. Bachand): M. Charrette, oui.

M. Charrette (Daniel): Ce qu'on peut dire, c'est qu'actuellement l'incitatif fédéral est de 1 000 MW, et donc il y a un cap de 300 MW par province qu'on va maintenant atteindre. L'association a fait beaucoup de représentations au niveau du fédéral pour augmenter l'incitatif à 4 000 MW et mettre un cap beaucoup plus élevé. Donc, actuellement, le 1 000 MW ne pourra pas bénéficier probablement de l'incitatif, mais tous les projets qui sont actuellement annoncés ou en construction...

M. Tremblay: ...le ministre des Ressources naturelles devrait faire des représentations au fédéral pour justement qu'on puisse aller chercher notre part du gâteau à ce niveau-là.

Juste une autre petite question.

Le Président (M. Bachand): Allez-y.

M. Tremblay: Tout à l'heure, ma collègue a parlé des gens sur le terrain. Imaginons que, dans une région du Québec quelconque, hors de la Gaspésie, un groupe d'agriculteurs réalisent qu'ils sont sur un gisement éolien. Quelles seraient les étapes pour éventuellement dire: Bien, nous, agriculteurs, on va se prendre en main? Puis j'ai vu ça dans un reportage au Point, au Danemark, où un agriculteur justement est devenu un autoproducteur. Donc, au Québec, éventuellement, est-ce qu'on pourra en arriver là?

Le Président (M. Bachand): M. Charrette.

M. Charrette (Daniel): Oui. L'association ne représente pas seulement que les grosses éoliennes, mais aussi les petites éoliennes. Donc, un cultivateur qui déciderait de s'installer une éolienne de 60 kW ou de 100 kW pourrait, avec une entente avec Hydro-Québec, ce qu'on appelle en anglais faire du «net metering», c'est-à-dire donc produire de l'énergie éolienne quand il vente. S'il n'en consomme pas, il vend, donc le compteur tourne à une puissance lente, et, quand il ne vente pas, bien il consomme. Puis, à la fin de chaque mois, bien soit qu'il reçoit un chèque d'Hydro-Québec ou qu'il paie Hydro-Québec. Ça, c'est une chose qui s'en vient dans les autres provinces. Il y a actuellement 29 États américains qui font ça. Donc, on fait aussi des représentations au niveau fédéral et au niveau provincial, dans toutes les provinces, pour établir ce type de production là.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Non, c'est correct, je pense que ça répond à ma question.

Le Président (M. Bachand): Merci infiniment. Donc, messieurs, merci de vous être présentés à la commission. Donc, M. Painchaud, M. Charrette, M. Parrouffe, vous êtes toujours les bienvenus à notre commission. Bon retour! Donc, je vais demander à M. Nicolas Boisclair et Mme Véronique Ponce de venir s'installer, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

n (15 h 57 ? 16 h 2) n

Le Président (M. Bachand): Donc, M. Nicolas Boisclair, Mme Véronique Ponce. On prononce bien votre nom, Mme Ponce? C'est ça?

Mme Ponce (Véronica): ...

Le Président (M. Bachand): Pardon?

Mme Ponce (Véronica): C'est Véronica et non Véronique, mais, bon, ça va.

Le Président (M. Bachand): Ah! Alors, voyez-vous, je me suis attardé au nom de famille, mais là, faute de... Non, désolé, Mme Ponce.

Donc, bienvenue à cette commission. Je vous rappelle rapidement les règles: donc, 20 minutes de présentation pour vous et 20 minutes de questions. En fait, 40 minutes en tout: 20 minutes de la part de l'opposition et 20 minutes du côté ministériel. Donc, allez-y, nous sommes à l'écoute.

M. Nicolas Boisclair
et Mme Véronica Ponce

M. Boisclair (Nicolas): M. le Président, Mmes et MM. les députés, M. le ministre, je m'appelle Nicolas Boisclair. Je me présente ici en tant que citoyen québécois très préoccupé par l'avenir énergétique du Québec. Je travaille par ailleurs au programme d'efficacité énergétique pour les ménages à revenus modestes chez Équiterre, à Montréal.

Mme Ponce (Véronica): Je m'appelle Véronica Ponce. Je me présente également en tant que citoyenne très préoccupée par l'avenir énergétique du Québec. Je suis par ailleurs enseignante au cégep Marianapolis, à Montréal, et, cette session, j'enseigne, entre autres, un cours d'éthique environnementale.

Merci aux membres de la commission d'avoir bien voulu recevoir nos propos en tant que citoyens aujourd'hui. Après tout, n'est-ce pas pour les citoyens et les citoyennes du Québec qu'existent tous ces moyens de production d'énergie, ces entreprises installées au Québec, qui la consomment, de même que cette commission qui réfléchit sur son avenir?

Notre mémoire comporte neuf recommandations qui à notre avis serviront durablement l'intérêt des citoyens à tout point de vue, c'est-à-dire au point de vue pratique, économique, écologique, social, culturel et historique. Nous nous proposons, aujourd'hui, de brièvement vous présenter ces recommandations ainsi que certains des nombreux arguments en leur faveur.

M. Boisclair (Nicolas): Alors, première recommandation: interrompre la construction de centrales au gaz naturel; deuxième recommandation: démanteler les centrales thermiques actuellement en opération dès que l'énergie provenant de sources plus écologiques sera disponible.

Nous sommes bien heureux qu'André Caillé ait déclaré qu'on n'investira plus dans le thermique. Mais il a oublié de dire qu'on investit chaque jour dans le thermique. Chaque jour, on importe des quantités colossales de mazout pour les brûler dans les centrales de Tracy, La Citière, Cadillac et plusieurs autres plus modestes. Refuser de fermer une centrale thermique, c'est comme accepter d'en construire une. Combien de temps encore va-t-on accepter les émissions toxiques des centrales thermiques sous prétexte qu'elles sont déjà en fonction?

Bientôt, la centrale de Bécancour sera inaugurée. André Caillé affirme qu'il s'agit d'une centrale de cogénération pour mêler les gens. Une centrale de cogénération, c'est une centrale thermique. La centrale thermique de Bécancour produira des gaz à effet de serre équivalant à 400 000 voitures. Comme nous le démontrerons dans un instant, les alternatives existent, elles sont rentables.

Mme Ponce (Véronica): Mais parlons d'abord de cette fameuse hydroélectricité qui évite supposément tous les problèmes du thermique. Notre troisième recommandation: terminer les centrales hydroélectriques actuellement en construction, entretenir celles existantes puis ne plus jamais en construire de nouvelles. Quatrième recommandation: suréquiper les centrales hydroélectriques existantes pour coupler efficacement leur production à celle des éoliennes.

Lorsqu'on demande à André Caillé de réagir au fait que l'hydroélectricité n'est pas une énergie verte, il répond qu'il s'agit d'une énergie renouvelable. L'énergie hydroélectrique est une énergie renouvelable, c'est vrai, chaque goutte d'eau tombant dans le réservoir sera éventuellement remplacée par une autre goutte d'eau. Mais les rivières, elles, ne sont pas renouvelables. Qu'est-ce qui remplacera la rivière harnachée, les forêts maintenant inondées, les écosystèmes à présent déréglés?

M. Boisclair (Nicolas): Cette photo, c'est le barrage en construction Eastmaiquej'ai vu à l'été 2004. Quel Québécois ou Québécoise, voyant cette photo, serait porté à dire qu'il s'agit d'une énergie verte? Une énergie verte ne ferait jamais quelque chose comme ça. Les gens ont tendance à croire que, lorsque c'est loin, à des heures de route, c'est moins important, que personne n'y va de toute façon. Eh bien, moi, je veux vous montrer aussi la rivière Rupert, rivière patrimoniale s'il en est une. Ce que vous verrez est situé juste en aval d'où Hydro-Québec veut effectuer son détournement.

(Présentation audiovisuelle)

M. Boisclair (Nicolas): La rivière est puissante. Que voyez-vous? Une exceptionnelle occasion de produire des électrons pas cher ou plutôt un endroit exceptionnel, un des rares qu'il nous reste encore, quasiment inviolé, quelque chose à léguer aux générations futures? Moi, la rivière m'a parlé. Elle m'a donné de l'énergie, l'énergie pour venir vous dire qu'il existe d'autres façons plus rentables, plus respectueuses de la nature de répondre à nos besoins énergétiques.

Mme Ponce (Véronica): Ceci nous amène aux recommandations suivantes: développer, sur un horizon de 15 ans, toutes les mesures d'efficacité énergétique offrant un coût de revient de moins de 0,06 $ le kilowattheure. Sixième recommandation: s'assurer que toutes les tranches de la population, incluant les locataires et ménages à revenus modestes, puissent bénéficier des programmes d'efficacité énergétique.

M. Boisclair (Nicolas): La rivière Rupert, en chiffres froids et insensibles, c'est 0,0444 $ le kilowattheure pour 7,7 TWh par an. Hydro-Québec a annoncé 3 TWh en efficacité énergétique. Bravo! Mais le gisement était estimé à 7 TWh par Philippe Dunsky pour à peine 0,028 $ le kilowattheure. L'efficacité énergétique comporte donc un avantage de 0,0164 $ le kilowattheure pour une production de mégawatts équivalente au détournement de la Rupert. Imaginez combien de térawattheures on pourrait générer par l'efficacité énergétique pour 0,0444 $ le kilowattheure, bien plus que tout ce que la Rupert pourrait donner si on lui arrachait le coeur. De plus, contrairement au détournement de la Rupert, cette efficacité énergétique servirait l'intérêt des citoyens en diminuant leurs factures d'énergie.

Mme Ponce (Véronica): Outre l'efficacité énergétique, il existe un autre moyen de produire l'énergie de façon plus rentable et plus écologique que ne le pourraient tous les projets hydroélectriques à l'étude. Vous l'aurez deviné, il s'agit de la production éolienne. Nous recommandons de développer la filière éolienne produite au Québec pour les besoins futurs des Québécois et des Québécoises. Conjointement, nous recommandons de suréquiper les centrales hydroélectriques existantes pour coupler efficacement leur production à celle des éoliennes.

n (16 h 10) n

Nous aimerions ne plus jamais entendre dire que l'énergie éolienne est moins fiable que l'hydroélectricité parce qu'il ne vente pas nécessairement quand il fait froid. C'est tout simplement faux. Le vent est mieux distribué dans l'année que les pluies. En effet, l'apport d'eau des réservoirs se fait essentiellement durant la crue printanière, alors qu'il vente toute l'année. Actuellement, l'énergie au Québec, c'est essentiellement une batterie que l'on charge au printemps avec la crue des rivières, puis on se croise les doigts pour que cette batterie ait assez d'énergie pour passer l'hiver.

M. Boisclair (Nicolas): Grâce aux éoliennes, lorsqu'il vente, nous aurons moins besoin des centrales hydroélectriques pour combler nos besoins énergétiques. Le niveau d'eau peut ainsi gentiment grimper dans les réservoirs et demeurer disponible. Puis, à l'aide de centrales suréquipées, il sera possible de produire une très grande puissance pour répondre aux pointes élevées, et ce, même s'il ne vente pas cette journée-là. En somme, le suréquipement des barrages, couplé à l'énergie éolienne, résout les problèmes d'énergie et les problèmes de puissance. La bonne nouvelle, c'est que le prix de l'éolien ne cesse de baisser, alors que le prix de l'hydroélectricité ne cesse de croître. Pourquoi? Parce que l'industrie éolienne fait de nouvelles avancées technologiques chaque année alors que, du côté de l'hydroélectricité, les rivières les plus propices ont déjà été harnachées.

Mme Ponce (Véronica): Nous avons affirmé que l'hydroélectricité n'était pas une énergie verte et nous avons recommandé de ne plus construire de nouveaux barrages hydroélectriques. Certains pourraient croire que nous serions donc favorables à une augmentation des tarifs d'électricité qui pourrait selon certains inciter des citoyens et citoyennes à réduire leur consommation d'énergie. Bien que nous croyions qu'il est important de sensibiliser les gens en vue de leur faire réduire leur consommation électrique, nous ne croyons pas qu'une augmentation uniforme des tarifs soit la voie à suivre. Nous recommandons plutôt, d'une part, d'abolir les tarifs préférentiels offerts aux nouvelles industries et de progressivement abolir les tarifs préférentiels dont bénéficient actuellement certaines entreprises. Nous recommandons d'autre part de créer une augmentation significative du tarif de l'électricité de fin avril à fin octobre, c'est-à-dire du moment où on avance l'heure jusqu'au moment où on recule l'heure, et ceci, pour la tranche de consommation résidentielle dépassant 30 kWh par jour, et de créer un système équivalent pour les entreprises.

M. Boisclair (Nicolas): Si nous proposons cette tarification, c'est que nous croyons qu'il faut, d'abord et avant tout, hausser le tarif de l'électricité superflue, c'est-à-dire de l'électricité employée pour chauffer nos piscines, climatiser exagérément nos logements, éclairer l'extérieur des bâtisses en plein jour, faire fonctionner les ordinateurs pendant la nuit, etc. La raison principale pour laquelle nous ne croyons pas que nous devons augmenter les tarifs de l'électricité pendant l'hiver, c'est que nous croyons qu'une telle mesure défavoriserait injustement les citoyens et citoyennes les moins bien nantis.

Je travaille au programme d'efficacité énergétique chez Équiterre, à Montréal. Chaque jour, je visite des gens qui paient 50 %, 60 %, voire 70 % de leurs revenus pour se loger. Les gens qui connaissent la problématique les appellent les mal-logés. Il y en a plusieurs milliers au Québec. Leurs logements sont mal isolés, peu étanches et donc froids. Ils leur coûtent une fortune en énergie. Et on voudrait augmenter les tarifs de 2 % à 3 % par année pour assurer la viabilité d'une société faisant, chaque année, des profits bien au-delà de 1 milliard? Est-ce que c'est une farce?

Que ce soit bien clair, il y a une portion de l'énergie consommée qui, malgré les meilleures habitudes des citoyens, est incompressible. À moins de mesures solidaires pour permettre aux locataires et aux ménages à revenus modestes d'obtenir les mêmes systèmes performants que les propriétaires, on ne contribuera qu'à rendre leur vie un cauchemar. Les personnes à revenus modestes ne paient pas le même taux d'imposition que les plus fortunés. C'est une question de justice. Pourquoi la justice ne s'applique-t-elle plus lorsqu'on parle de l'électricité? Pourquoi vouloir réduire les impôts, qui sont équitables, et les transformer en impôts universels via le coût de l'énergie? C'est le luxe qu'il faut taxer, pas les besoins essentiels.

Mme Ponce (Véronica): Nous vous avons offert certains arguments d'ordre économique pour soutenir quelques-unes de nos recommandations. Or, en tant que citoyens, nous croyons qu'aux arguments économiques s'ajoute un autre argument tout aussi décisif. Chers membres de la commission, nous aimerions vous poser la question suivante: Préféreriez-vous donner à vos enfants des pommes fraîches ou des boissons édulcorées à saveur de pommes? Des vraies pommes, n'est-ce pas? Même si c'était plus cher? Évidemment. C'est la même chose pour l'énergie. L'énergie éolienne et l'efficacité énergétique sont les vraies pommes à léguer aux générations futures, alors que le thermique et l'hydroélectricité sont la malbouffe de l'énergie.

Bien que nous soyons persuadés que les énergies vertes sont plus rentables que les énergies polluantes, en tant que citoyens, nous serions prêts, s'il le fallait, à ce que notre société d'État paie plus cher nos kilowattheures pour le bien des générations futures. Nous sommes convaincus que la vaste majorité des Québécois et des Québécoises pensent ainsi. Après tout, 63 000 personnes ont signé la pétition contre la centrale thermique du Suroît; 4 000 personnes ont manifesté contre ce projet dans les rues de Montréal, par un froid polaire; jusqu'à présent, 11 000 personnes ont signé la pétition contre la centrale thermique de Bécancour; et des milliers de Cris se sont opposés et s'opposent toujours à la «Paix des Braves», et ce ne sont que quelques exemples.

M. Boisclair (Nicolas): M. le Président, nous sollicitons la possibilité d'offrir une pomme du Québec ainsi qu'un sachet de boisson aromatisée à chacun et chacune des membres de la commission afin qu'ils puissent choisir ce qu'ils désirent s'offrir et offrir aux générations futures. On pourrait peut-être les faire circuler pendant la période des questions.

Mais auparavant, en conclusion, nous allons nous permettre de rajouter quelques lignes au discours que le ministre des Ressources naturelles, M. Sam Hamad, a prononcé dernièrement. Ses petits-enfants auraient été fiers de ce qu'il aurait contribué à préserver. Alors, ça va comme suit: Suroît, terminé.

Mme Ponce (Véronica): Suroît, terminé.

M. Boisclair (Nicolas): Dérivation Rupert, terminé.

Mme Ponce (Véronica): Dérivation Rupert, terminé.

M. Boisclair (Nicolas): Bécancour, terminé.

Mme Ponce (Véronica): Bécancour, terminé.

M. Boisclair (Nicolas): Tracy, terminé.

Mme Ponce (Véronica): Tracy, terminé.

M. Boisclair (Nicolas): La Romaine, terminé.

Mme Ponce (Véronica): La Romaine, terminé.

M. Boisclair (Nicolas): Les petits barrages, terminé.

Mme Ponce (Véronica): Les petits barrages, terminé.

M. Boisclair (Nicolas): Vive l'efficacité énergétique!

Mme Ponce (Véronica): Vive l'énergie éolienne!

M. Boisclair (Nicolas): Vive Kyoto!

Mme Ponce (Véronica): Merci beaucoup.

M. Boisclair (Nicolas): Merci.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Boisclair, Mme Ponce. C'est fort rafraîchissant comme présentation. Petite question: Est-ce que les pommes sont bios?

M. Boisclair (Nicolas): Malheureusement, non, car le développement de l'agriculture biologique est laissé aux citoyens, c'est essentiellement l'agriculture soutenue par la communauté.

Le Président (M. Bachand): Ne prenez pas mes propos au sérieux, M. Boisclair, c'était une blague.

M. Boisclair (Nicolas): Non. Mais on aurait bien aimé pouvoir en trouver, par contre...

Le Président (M. Bachand): J'en suis convaincu. J'en suis fort convaincu. De toute façon, votre geste vous honore, de toute façon. Donc, M. le ministre, je vais vous donner l'opportunité... M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs.

M. Hamad: Je vais embarquer dans votre jeu. D'abord, bienvenue à Québec. Et donc votre présentation est terminée aussi?

Les coûts de l'efficacité énergétique, vous avez dit, c'est 0,022 $?

M. Boisclair (Nicolas): 0,028 $...

M. Hamad: Combien?

M. Boisclair (Nicolas): ...pour 7 TWh, selon Philippe Dunsky.

M. Hamad: Combien?

M. Boisclair (Nicolas): Combien quoi? 0,028 $.

M. Hamad: 0,028 $. Actuellement, ce que l'Hydro-Québec a présenté à la Régie de l'énergie, on parle de 0,05 $. Dans le 0,05 $, il y a 0,03 $ d'Hydro-Québec et 0,02 $ des partenaires, des clients qui vont participer. Donc, juste pour ramener les pendules un petit peu, là, on est à 0,05 $ du kilowattheure pour le programme d'Hydro-Québec, on n'est pas à 0,028 $. Je comprends que vous ne pouvez pas tout avoir l'information, ce n'est pas grave, c'est juste pour vous aider.

M. Boisclair (Nicolas): Effectivement, c'est possible que vous ayez des chiffres différents. Il faudrait, à ce moment-là, communiquer avec M. Dunsky qui a fait cette étude-là.

M. Hamad: C'est correct. C'est pour vous aider un petit peu. D'ailleurs, ça, c'est présenté dans le plan d'Hydro-Québec. Ils étaient présentés, les chiffres, à la régie. Alors, ce n'étaient pas des chiffres, là, des calculs dans les... c'est vraiment présenté à la régie. Vous pouvez vérifier puis peut-être demander à votre référence de vérifier. C'est juste de vous aider un petit peu à voir les chiffres un petit peu. Quand même, c'est le double, presque le double, là. Un petit peu différent. Donc, 0,05 $, la production actuellement marginale. Ce qu'on produit, c'est à peu près 0,06 $. Donc, juste vous replacer un petit peu dans le contexte. Surtout une personne comme vous qui travaille dans l'efficacité énergétique, c'est important d'avoir les vrais chiffres.

Vous parlez de suréquiper. Pourriez-vous m'expliquer comment vous voulez faire le suréquipement des centrales?

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Évidemment, ça comporte des coûts, hein, c'est sûr, mais... Bon, imaginons qu'on fait une performance lamentable en efficacité énergétique et qu'on a des pointes de 45 000 MW éventuellement, dans cinq ans, à un froid polaire comme l'année dernière. Il nous manque à peu près 8 000 MW pour combler ça. Si les éoliennes produisent, elles produisent évidemment des térawattheures. Mais, comme on a souvent entendu des porte-parole d'Hydro-Québec, il ne vente pas nécessairement lorsqu'il fait très froid. Par contre, en suréquipant les barrages, on peut produire plus de mégawatts à la fois.

n (16 h 20) n

Par exemple, je vais citer une centrale, la centrale Robert-Bourassa, là, appelée communément LG 2 aussi. Elle produit 5 500 MW en pointe, elle a un facteur d'utilisation de 80 %. Il y a 33 turbines de 165 MW chacune. Si on en mettait plus, évidemment on pourrait vider plus vite le réservoir, ce qui pourrait être un danger, sauf que ça arriverait beaucoup moins souvent parce qu'il vente tous les jours ou presque ? le vent est bien distribué dans l'année, là, il vente à chaque mois de l'année, c'est sûr ? tandis que, si on fait seulement rajouter des barrages sur des rivières qui n'ont pas encore été harnachées, bien on met tous nos oeufs dans le panier de l'hydraulique. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Hamad: Oui, c'est très bien. Juste pour votre information encore une fois, LG 2, c'est Robert-Bourassa, 5 600 MW, effectivement, mais elle a été suréquipée, il n'y a pas longtemps, pour 2 100 MW. C'est LG 2A, pour votre information.

M. Boisclair (Nicolas): Ah! Je m'en réjouis.

M. Hamad: Non, non, tant mieux, mais, quand vous voulez équiper... Parce que vous avez pris le bon exemple. Bravo! Vous avez pris la plus grosse centrale en fait au Québec, 5 500 MW, 5 600. Elle est déjà faite. Le travail est fait. Vous pensez à quoi d'autre et à combien, là? Regardez, restez vague un petit peu, parce que ce n'est pas évident, là, il y a beaucoup de chiffres et il faut être... ça prend beaucoup d'information. Mais, quand vous parlez de suréquiper, on va aller où, là? On va-tu... C'est fait, effectivement, c'est 2 000 MW de plus, LG 2A, et donc on est rendu à 8 000 MW.

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Je trouve ça très intéressant qu'on soit rendu à près de 8 000 MW. Notre présence ici, ce n'est vraiment pas pour essayer de débattre sur des chiffres, là. C'est pour ça qu'on vous a présenté la pomme et le sachet de jus.

Le Protocole de Kyoto entre en vigueur dans deux semaines au Canada puis au Québec, tout partout dans le monde, sauf les pays qui ne l'ont pas ratifié. On doit donc réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Donc, il faut trouver un moyen de réduire notre consommation d'énergie, remplacer des centrales thermiques par des centrales moins polluantes. Si on fait seulement ajouter des nouveaux barrages...

On le sait, selon Dunsky toujours, il y a 15 kilotonnes de gaz à effet de serre qui sont produites par térawattheure via les barrages en environnement nordique comme le nôtre. Donc, ça augmente notre bilan, ça fait un bilan moins bon au niveau des changements climatiques. Puis, les changements climatiques, ce n'est pas un paquet de chiffres, c'est quelque chose qu'on vit, qu'on va vivre de plus en plus au quotidien. C'est ça que j'ai à répondre à ça, M. le ministre.

Et peut-être que je pourrais rajouter que le suréquipement des barrages... Oui, on est rendu à 7 700 MW, là. Vous avez dit: On a rajouté 2 100 MW à LG 2. Mais est-ce que ça a été calculé, jusqu'à combien qu'on pourrait aller? Moi, ça ne me semble pas avoir été fait, compte tenu du fait qu'on a de l'énergie éolienne qui sert de rivière virtuelle. Parce qu'au moment où elle fonctionne on n'a pas besoin de turbiner, à ce moment-là, autant parce qu'elle fournit son 1 000 MW, 2 000 MW, 10 000 MW.

M. Hamad: En fait, je pense qu'on s'entend pour dire que l'efficacité énergétique, c'est un élément important, il faut le faire, il faut aller au maximum de nos capacités pour aller chercher cette énergie-là. Ça, je pense qu'on est d'accord là-dessus.

En termes de gaz à effet de serre, je suis d'accord avec vous, il faut évidemment amenuiser les gaz à effet de serre au Québec. Vous le savez, on est bons au Québec. Malgré tout, on est bons. On pourrait être encore meilleurs. Et pourquoi pas? Je suis d'accord. La moyenne d'émissions de gaz à effet de serre par habitant au Québec, c'est 11,6 tonnes par CO2 équivalent par habitant au Québec, et la moyenne canadienne, c'est 24, et on s'en va à la moyenne américaine, 25, par rapport à d'autres pays, beaucoup plus élevée. Donc, on a un bon record et nous sommes tous, comme Québécois, fiers. Évidemment, il faut continuer à en faire plus, bien sûr.

Mais, quand je reviens à l'efficacité énergétique, on a annoncé, comme vous le savez ? d'ailleurs, vous êtes reconnaissants de ça ? que notre Programme d'efficacité énergétique, c'est un des plus ambitieux depuis des années. D'après vous, combien faisable, là? Faisable parce qu'on peut dire 30 TWh, mais, à un moment donné, il faut peut-être payer 0,10 $, 0,15 $ le térawattheure. À un moment donné, il y a une marge de faisabilité du point de vue économique, mais technique aussi, parce qu'on peut théoriquement dire: On est capables d'aller chercher ces kilowattheures-là, mais, techniquement parlant, ça devient plus difficile, compte tenu de plusieurs facteurs ? habitudes, etc. ? parce qu'évidemment, avec l'efficacité énergétique, il faut changer de mentalité aussi et il faut faire des changements majeurs aussi dans notre société. Ces changements-là pourraient être faits, sauf que ça prend du temps pour les faire.

Alors, selon vous, combien de térawattheures qu'on peut aller chercher de plus que le 3 TWh? Et, rappelons-nous, hein, le 3 TWh, c'est un objectif minimum, ce n'est pas un objectif maximum. Nous, comme gouvernement, ce qu'on dit avec l'Hydro-Québec: c'est un objectif minimum qu'on vise pour le faire. Évidemment, on veut faire plus. Mais selon vous, là, on peut aller à combien?

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Je n'ai aucune idée, combien de térawattheures, M. le ministre. Ce qu'on propose, c'est d'aller jusqu'à un coût de revient de 0,06 $ le kilowattheure, ce qui est quand même un coût de revient supérieur au chiffre que vous avancez.

En passant, je viens de me souvenir d'une donnée. L'Agence de l'efficacité énergétique, ce qu'ils mentionnent, c'est que c'est 0,028 $ aussi, le coût moyen, selon les chiffres que j'ai entendus, 0,028 $ le kilowattheure pour le programme des dernières années. Peut-être que vous avez d'autres données. Ça reste à voir.

Évidemment, Hydro va dépenser 1 milliard en efficacité énergétique comparativement au détournement de la Rupert qui va en coûter 4, au harnachement de la rivière La Romaine qui va en coûter 6,5. Puis là je cite les chiffres qui ont été déposés, la semaine dernière, par André Caillé. J'ai téléchargé la feuille.

Mais, au-delà de tout ça, la moyenne d'émissions de gaz à effet de serre du Québec et du Canada, je pense qu'il faut se comparer à nous-mêmes, il faut arrêter de prendre la pire donnée d'un endroit, puis de se comparer à eux autres, puis de ne jamais prendre la meilleure. Il faudrait se comparer, dans 10 ans, à qu'est-ce qu'on faisait en 1990 puis en 2005 puis voir de quelle façon on a amélioré notre production de gaz à effet de serre, notre production de pollution. Je pense que c'est plus à ce niveau-là qu'il faudrait déplacer le débat.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Oui, effectivement. Mais, lorsqu'on est bons, il faut être fiers de l'être puis continuer à maintenir notre position. Je pense que c'est bon pour les générations futures de garantir qu'on soit encore meilleurs pour nos...

Savez-vous combien de rivières au Québec? Juste un chiffre. Il y a 4 500 rivières.

M. Boisclair (Nicolas): Oui, effectivement.

M. Hamad: Il y a 4 500 rivières actuellement au Québec. Combien de rivières harnachées au Québec? 65. Là, c'est difficile, c'est des chiffres, il faut aller les trouver. C'est 65 rivières harnachées au Québec.

Le Président (M. Bachand): C'est un bon politicien, quand il pose des questions, c'est parce qu'il a les réponses, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boisclair (Nicolas): Oui, tout à fait. Moi, j'attendais que vous me donniez la permission de parler.

M. Hamad: Non, non, mais c'est parce que...

M. Boisclair (Nicolas): Tout à l'heure, j'avais interrompu M. le ministre.

Le Président (M. Bachand): Allez-y. Allez-y, M. le ministre.

M. Hamad: Oui, parce que je ne veux pas vous... En fait, mon but, ce n'est pas de vous coincer, c'est plutôt de vous donner de l'information. Pour ça, je vous donne les réponses aussi. Donc, c'est un point quelques pour cent, en pourcentage, des rivières au Québec, 65 divisé par 4 500. Et, si, mettons, on suit votre recommandation demain matin, on arrête tout le développement hydroélectrique, les minicentrales, tout le... ? d'ailleurs, Tracy, elle ne marche pas à l'année, elle marche avec des heures autorisées par le ministère de l'Environnement, par son permis ? et donc on arrête tout ce développement-là au complet, comment vous allez faire pour répondre à la demande? Il y a des spécialistes qui nous disent que l'éolien...

On est d'accord pour un développement éolien. Vous avez vu, là, on a démontré qu'on est d'accord. Ils nous disent que, 10 % actuellement, il y en a qui vont aller jusqu'à 20 %. Comment vous allez faire, comment on fera, après ? mettons qu'on suit vos recommandations ? comment on va faire pour répondre à la demande du Québec dans... Nos enfants, là, il faut qu'ils mangent des pommes, hein? Pour manger des pommes, il faut qu'il y ait de l'électricité aussi. Et comment on va répondre à ces enfants-là? Comment on va garder notre croissance dans 20 ans si on arrête tout le développement?

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Première chose, vous avez mentionné qu'à peine 1 % des rivières sont harnachées, mais, si on calculait au débit des rivières, en termes de quantité d'eau, là, c'est beaucoup plus que ça. Beaucoup de grandes rivières ont été harnachées, et récemment des petites aussi, dans les années quatre-vingt-dix, là, les programmes sur les petites centrales. Des fois, c'étaient juste des remises en service. Je vais vous laisser le soin de calculer ça.

n (16 h 30) n

Par rapport à la centrale de Tracy, j'ai été étonné de constater, dans le document Contexte, enjeux et questionnements, qu'on mentionnait, de 1998 à 2002, qu'elle avait été utilisée à 20 %, et on ne mentionnait pas 2003-2004. Parce que, moi, Parce que, moi, ce que j'ai entendu, c'était beaucoup plus que ça qu'elle avait été utilisée comme production de base, là, pour une longue période, parce qu'on était en période de faible hydraulicité depuis une dizaine d'années. Mais je ne pense pas que la centrale de Tracy ait été utilisée seulement pour dépanner dans des situations d'urgence ou des choses comme ça. Moi, à mon sens la centrale de Tracy, elle a été utilisée pour exporter de l'électricité alors qu'on manquait d'eau dans nos barrages. Donc, on n'a pas du tout exporté de l'électricité moins polluante parce qu'on n'aurait pas été en mesure, seulement avec l'hydroélectricité, d'exporter peut-être autant d'électricité, à ce moment-là.

Et, pour votre question par rapport à qu'est-ce qu'on pourrait faire pour garder la croissance économique, et tout ça, moi, ce que j'ai à dire par rapport à ça, c'est... Je vais citer André Caillé. La semaine dernière, il vous a dit que, dans le domaine des alumineries, il y a un emploi de créé pour environ 1 MW ? même, ce n'était pas tout à fait un emploi, il arrondissait à la hausse ? tandis que, dans le domaine agricole, c'est 234 emplois. Bien, l'agriculture biologique, ça crée beaucoup d'emplois pour pas beaucoup d'énergie, entre autres. Donc, je pense qu'il faut faire des choix quand on accepte des nouvelles entreprises, tout ça.

Quel va être son impact, son empreinte écologique? Est-ce qu'on a besoin de toujours plus d'énergie, ou on a besoin des emplois sensés? Moi, les chiffres que j'ai, toujours de Philippe Dunsky, on parle de 12 000 emplois par milliard de dollars investi. C'est beaucoup plus que pour l'hydroélectricité. Donc, je pense que, dans ce type d'emplois là, il y aurait beaucoup de place à...

Le Président (M. Bachand): Oui, en complément, Mme Ponce, allez-y.

Mme Ponce (Véronica): Bien, je voulais vous demander une question. Vous avez parlé: Comment est-ce qu'on va répondre à la croissance? Je comprends bien que vous parlez de la croissance de nos besoins énergétiques?

M. Hamad: Comment on va répondre dans 20 ans, parce qu'il y a une croissance, là. Actuellement, il y a une croissance. Évidemment, elle est industrielle et aussi résidentielle. Alors, il y a aussi la demande. On a beaucoup de permis de construction actuellement, c'est très bon pour la construction. Donc, la demande augmente avec les années, et, dans 20 ans... Parce que, dans 20 ans, c'est nos enfants, vos enfants, et on dit: Nos enfants, on va préparer un avenir. Alors, dans 20 ans, la demande va être augmentée, bien sûr. Comment on va répondre aux besoins de nos enfants?

Mme Ponce (Véronica): Bien, c'est le «bien sûr» qui me...

Le Président (M. Bachand): Mme Ponce.

Mme Ponce (Véronica): Oh pardon! C'est le «bien sûr» qui me fait me questionner. Je me demande jusqu'à quel point cette croissance-là est inévitable. C'est-à-dire, oui, il y a une croissance maintenant, mais, si on met en place des mesures d'efficacité énergétique, si on sensibilise les gens, est-ce que c'est nécessaire? J'ai l'impression qu'on est dans un contexte où est-ce qu'on pense tout le temps plus, plus, plus. Pourquoi est-ce qu'il faut que ça croisse tout le temps? Ce n'est pas nécessaire.

M. Hamad: ...société. Il faut générer d'autre monde qui vont suivre. On a des enfants qui vont nous suivre, et, dans quelques années, l'être humain va faire en sorte qu'on en ajoute.

Je vous donne un exemple concret, là. Depuis 10 ans, si vous regardez n'importe quelle maison, regardez combien d'outils qu'on a aujourd'hui, qui sont devenus indispensables. Voyez votre portable à côté de vous, il a été rempli par l'électricité, et il y a plein d'outils à côté de vous que vous utilisez aujourd'hui, qui utilisent l'électricité, que, il y a 15 ans, 20 ans, on n'avait pas autant, et tous ces éléments-là font en sorte que la consommation augmente. Et c'est comme ça que ça se passe aujourd'hui, les téléphones cellulaires et plein de choses, le nombre de télévisions dans une maison, les ordinateurs qu'on utilise à la journée longue, la recherche Internet, etc. Alors, tous ces moyens-là que l'être humain a créés évidement font en sorte... Évidemment, on peut dire: Bon, bien, on va tout arrêter pour réduire la consommation, mais il n'est pas facile pour tout le monde... Il y a peut-être certaines personnes qui peuvent faire ça, mais pas tout le monde. C'est ça, la croissance.

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair, vous alliez intervenir.

M. Boisclair (Nicolas): Cette croissance-là de demande, évidemment qu'elle est importante. Comme vous dites, les ordinateurs, ça consomme même en mode veille. Il y a des choix qui ont été faits par des fabricants, de faire en sorte... Par exemple, une télévision, ce n'est pas ce qui consomme le plus, mais, lorsqu'elle est fermée, elle consomme encore. Puis, dans les années soixante-dix, bon, moi, j'ai grandi, on avait la même télé, là, pendant des années, puis, à un moment donné, est arrivée une télé à télécommande. Ma vieille télé, il fallait que je me lève, que j'aille peser sur le bouton, puis elle consommait zéro quand elle était fermée. On a une multitude d'appareils qui consomment même en mode fermé, en mode veille. Ça, c'est vraiment de l'inefficacité énergétique. Pourtant, on permet encore la vente d'appareils inefficaces.

Il existe le logo ENERGY STAR qui oblige ceux qui veulent apposer leurs logos à ce que ça consomme moins en mode veille. Je pense qu'on pourrait en faire une loi. Je pense que c'est en train d'être mis en place dans une des Provinces atlantiques, justement.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Dernière question. Vous parlez profits d'Hydro-Québec. Avez-vous une idée, les profits vont où?

M. Boisclair (Nicolas): Les profits vont où?

M. Hamad: D'Hydro-Québec.

M. Boisclair (Nicolas): Bien, je sais que vous les mettez dans le budget général du gouvernement et que dernièrement, bien, on entend parler, depuis les dernières années, de baisse d'impôts. Puis ça, je l'ai dit tout à l'heure, les impôts sont équitables, on veut les baisser, alors que les tarifs d'électricité, bien ce n'est pas toujours équitable, comme je l'ai mentionné aussi. Donc, cet argent-là rentre dans le budget général du gouvernement. Ce qu'on fait avec...

M. Hamad: Si on n'a pas ces profits-là, là...

M. Boisclair (Nicolas): Bien, moi, là, je pense que...

M. Hamad: Ce que vous recommandez, là, en fait, c'est de dire: On ne fait pas de profit, on va tout baisser puis on va arrêter le développement.

M. Boisclair (Nicolas): Non, pas du tout. On parle d'augmenter la tarification en été parce qu'on parle vraiment de...

M. Hamad: Oui, mais la baisser l'hiver.

M. Boisclair (Nicolas): Ça fait en sorte qu'on demande moins de térawattheures en hiver, donc on garde les réservoirs plus hauts. Donc, on a peut-être moins besoin de nouveaux barrages pour fournir cette énergie-là qui est nécessaire. Parce qu'un térawattheure consommé en été, il compte autant, là, au niveau de la réserve d'un barrage, qu'un térawattheure consommé en hiver et... Excusez, je n'ai pas noté votre question, là.

Mme Ponce (Véronica): Mais, moi, je veux ajouter...

M. Hamad: C'est l'argent d'Hydro-Québec. Si on ne fait pas...

Mme Ponce (Véronica): Mais on n'a pas recommandé de baisser les tarifs d'électricité. J'ai cru que vous aviez suggéré... On n'a jamais parlé de baisser les tarifs hydroélectriques, on a juste parlé de ne pas les augmenter de façon uniforme. C'est ça, notre proposition.

M. Hamad: Mais là j'ai compris que, l'été, vous voulez les augmenter, les tarifs.

Mme Ponce (Véronica): Oui.

M. Hamad: Bon. Puis, l'hiver, vous le maintenez au même prix?

Mme Ponce (Véronica): On fait juste pas l'augmenter.

M. Boisclair (Nicolas): À moins...

M. Hamad: O.K. Mais les gens qui ont un faible revenu, l'été, ils vont payer pareil, là, parce qu'ils...

M. Boisclair (Nicolas): C'est pour la portion qui dépasse 30 kWh par jour, c'est-à-dire la portion... Et en fait c'est une recommandation. Vous pouvez fixer ça à 40, 50, mais il s'agit de la portion considérée comme luxe.

M. Hamad: Puis le travailleur autonome?

M. Boisclair (Nicolas): C'est ça qu'il faudrait établir. L'hiver, c'est très difficile à établir parce que ça dépend beaucoup de la technologie qu'on peut se payer, puis, un locataire, bien ce n'est pas lui qui est responsable de...

M. Hamad: Oui, mais je reviens à ma question. Ma question, c'était sur les profits d'Hydro-Québec. Alors, qu'est-ce que vous faites avec les profits? Mettons qu'on ne fait plus de profit à Hydro-Québec.

Le Président (M. Bachand): En conclusion, Mme Ponce. En conclusion.

Mme Ponce (Véronica): On fait des profits. On n'a jamais dit qu'il ne fallait plus faire de profit, on faisait juste suggérer... Parce qu'Hydro-Québec, manifestement, avec les tarifs qu'on a maintenant, fait des profits. On est d'accord? Donc, là, on dit: On garde ces profits, on continue à faire ces profits, même on accepte que les tarifs soient à la hausse pendant l'été, pour la portion qui dépasse 30 kWh. Alors, on n'est pas en train de suggérer qu'Hydro-Québec baisse ses tarifs pour ne plus jamais faire de profit, loin de là notre intention.

Le Président (M. Bachand): Merci, madame. Oui, très, très rapidement. Vous aurez l'occasion... Oui, M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Et, comme on l'a mentionné dans notre présentation, ce qu'on disait, c'est que, si les technologies n'étaient pas disponibles autant pour les personnes à revenus modestes puis les locataires, c'est là que ça allait causer un grand problème. Si les tarifs sont augmentés de façon uniforme, il faut prendre bien soin de respecter les familles à faibles revenus aussi.

Le Président (M. Bachand): De toute façon, M. Boisclair, ce n'est pas terminé. Vous allez avoir l'occasion de livrer votre message, puisque Mme la députée de Rosemont, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, a beaucoup de questions à vous poser. Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue et merci de votre mémoire qui me laisse à certains égards un peu perplexe. Je comprends que vous êtes contre les augmentations de tarifs, sauf avec une certaine modulation, comme vous venez de l'expliquer, pour les périodes d'été, où la consommation pourrait être établie pour les besoins de base et après ça faire l'objet de variations. Donc, vous êtes pour une tarification variable, en somme. C'est ça? O.K.

n (16 h 40) n

Ensuite, je comprends aussi que vous êtes favorables à l'éducation populaire, puisque, quand vous avez... Vous, vous travaillez à Équiterre, donc vous savez qu'on fait beaucoup d'efforts au niveau de l'efficacité énergétique pour que les gens comprennent qu'ils ont la possibilité de modifier leur consommation évidemment dans un certain intervalle. Est-ce que vous croyez, par exemple, que la facturation d'énergie devrait être incluse ou non dans le logement? Est-ce que ça améliorerait la capacité... Une fois qu'on a bien fait comprendre aux gens la possibilité de jouer, là, sur leur consommation d'énergie, est-ce qu'on devrait inclure la facture d'énergie dans la facture locative?

M. Boisclair (Nicolas): Je ne pense pas que ce soit une bonne idée parce que, là, ça pourrait permettre des abus. Les gens qui chauffent à 26 °C, des choses comme ça, sur le dos du propriétaire, ce ne serait pas plus équitable. Je pense que chacun doit payer sa facture. Mais il y a des gens qui ont besoin, disons, d'un coup de pouce pour savoir comment ils pourraient la réduire. Mais, comme nous le disions tout à l'heure, il y a une portion qui est incompressible.

Chez Équiterre, on donne des conseils sur toutes sortes d'habitudes qui peuvent réduire la consommation. D'ailleurs, c'est nous qui faisons les visites dans votre comté. Vous êtes dans Rosemont? Donc, on leur donne des conseils, on installe aussi des petits dispositifs, comme par exemple des coupe-froid, puis on leur explique qu'est-ce qu'on a fait, qu'ils devraient les vérifier chaque automne, et tout ça. Mais ça ne fait pas nécessairement en sorte que quelqu'un qui est chauffé au gaz avec une fournaise qui a un rendement de 60 % puis dont la fournaise est en plein milieu du logement... Ça ne le rend pas confortable puis ça ne fait pas en sorte... On n'améliore pas vraiment son confort parce que soit qu'il doit s'installer des petits radiateurs ou des choses comme ça.

Mais, ceci étant dit, je ne pense pas que l'énergie devrait être incluse dans le loyer «at large». Elle l'est déjà, incluse chez certaines personnes. Mais je pense qu'il faut responsabiliser les gens. Donc, je pense qu'à ce niveau-là, que ce ne soit pas inclus dans certains cas, je suis tout à fait d'accord avec ça.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Je ne suis pas certaine si je... Est-ce que le chauffage électrique, à votre avis c'est un luxe au Québec?

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Non, je ne considère pas que c'est un luxe, le chauffage, ni électrique ni autre, je pense que c'est un besoin essentiel d'être chauffé. Je saisis mal où vous voulez en venir avec votre question.

Mme Dionne-Marsolais: Bien, je veux savoir, parce que j'essaie de comprendre. Je comprends très bien, là, les... enfin en partie les réponses que vous avez données au ministre et j'essaie de comprendre. Si on arrête tout, un peu dans le sens de ce que vous recommandez, là, puis qu'on se repositionne pour une consommation qu'on pourrait qualifier de plus encadrée, peut-être plus rigide, il y aura quand même, par l'accroissement de la population normal, des besoins de chauffage. Alors, la raison pour laquelle je vous demande: Est-ce que le chauffage électrique est un luxe?, vous savez qu'une grande partie de la croissance de la demande électrique au Québec repose sur le chauffage. Alors, ça m'apparaît essentiel, non?

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Effectivement. On propose un développement d'éoliennes. On n'a pas mis de chiffres parce que ce n'est pas dans notre compétence de chiffrer ça, mais effectivement on pense qu'il devrait y en avoir beaucoup plus que ce qui a été annoncé. Si on parle de 10,5 milliards pour détourner ou harnacher deux rivières, la Rupert et La Romaine, je pense que 10 milliards de dollars, c'est beaucoup plus que qui a été investi... Ce qu'il a été proposé d'investir dernièrement pour l'efficacité énergétique et l'énergie éolienne, c'est 2 milliards. Je pense qu'on a du chemin à faire si on veut un Québec exemplaire en énergie, un Québec plus vert.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, Mme Ponce.

Mme Ponce (Véronica): C'est une question de priorité aussi et c'est de dire: Bon, bien, si, au bout de la ligne, après qu'on ait fait tout ce qu'on a pu faire en efficacité énergétique, tout ce qu'on a pu faire en éolienne, tout ce qu'on a pu faire en sensibilisation de la population, on a vraiment tout mis en place ce qu'on pouvait faire puis, au bout de la ligne, les gens ont froid dans leurs logements l'hiver, bien c'est clair qu'on ne va pas dire: Non, harnachez pas la rivière, qu'ils meurent de froid dans leurs logements. C'est sûr qu'on ne dira pas ça. Mais c'est une question de priorité puis c'est une question de faire les bons choix au bon moment, puis là on pense qu'il y a des choix qui s'imposent.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que vous vous êtes favorables à ce que l'Agence de l'efficacité énergétique soit une entité autonome, c'est-à-dire à l'extérieur du ministère des Ressources naturelles?

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): En fait, j'aimerais bien qu'elle ne soit pas dans le ministère des Ressources naturelles, peut-être plus dans un ministère comme l'Environnement. Mais je n'ai pas réfléchi à la question plus que ça, là, j'y ai réfléchi dans les quelques dernières secondes. Évidemment, elle va avoir besoin de financement. J'imagine que ça vient avec du financement, votre question, votre proposition. Je pense qu'il faut qu'elle soit financée adéquatement pour faire les recherches sur où sont les kilowattheures les plus facilement économisables, à un coût de revient le plus faible, puis aller les exploiter. Et, au fur et à mesure que le prix de l'électricité augmente dans les marchés voisins, ça devient de plus en plus rentable parce que, si on a des surplus, si les réservoirs sont très hauts, les éoliennes roulent à pleine capacité, bien, en fait, on peut exporter, à ce moment-là, puis faire de l'argent, parce que c'est de ça qu'on parle aussi à l'Assemblée nationale. Hydro-Québec pourra faire de l'argent, à ce moment-là.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: ...à mon collègue.

Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque, Mme la députée de la Matapédia et M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, Mme Véronica Ponce ? je l'ai bien prononcé? ? ...

Le Président (M. Bachand): Merci, M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: ...Nicolas Boisclair, alors bienvenue à cette commission et merci pour votre mémoire comme citoyens du Québec. Je vous dirais que ça fait deux semaines qu'on est commencé ici, en commission, et, à ma connaissance à moi, on va avoir comme 138 mémoires de déposés, donc on rencontre 138 groupes. Tout chacun a sa vision, il y en a qui viennent faire la promotion de leurs produits. Je proviens d'une région, le comté de René-Lévesque, qui est un beau coin de pays en soi, où est-ce que, sur les 65 rivières qui sont harnachées, il y en a quelques-unes chez nous qui sont harnachées, alors la rivière Outardes, Manicouagan, la Toulnustuc.

Je regarde vos recommandations et je m'arrête à la recommandation 8, je ne peux pas faire autrement: «Abolir les tarifs préférentiels offerts aux nouvelles industries et progressivement abolir les tarifs préférentiels dont bénéficient actuellement certaines entreprises.» Ça me rappelle le printemps dernier par rapport aux tarifs d'électricité. Mais je veux juste comprendre le pourquoi de cette recommandation-là. Je regarde au Centre-du-Québec, le Saguenay?Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord où est-ce que c'est des milliers d'emplois qui sont reliés au niveau de la grosse industrie, donc ils bénéficient de tarifs préférentiels. Alors, je vous dirais que, bon, quand on apporte des recommandations, ça a des conséquences, bien entendu, et j'espère que vous avez des pistes de solution pour remplacer tous ces emplois-là. Là, je parle des emplois directement liés à la grande entreprise, mais il y a des sous-emplois indirects, par rapport que ces entreprises-là, c'est des donneurs d'ouvrage.

Alors, ma question n'est pas compliquée: Est-ce que vous êtes au courant du pourquoi il y a des tarifs préférentiels par rapport à ces grandes industries là, pourquoi ça a été donné, ces tarifs préférentiels là? Et les solutions que vous avez pour remplacer ces emplois-là.

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

M. Boisclair (Nicolas): Bon, pour répondre à votre question, je suis au courant du pourquoi il y a des tarifs... Moi, ce que j'ai souvent entendu, c'est qu'on avait des grands surplus il y a 10, 15 ans, puis on voulait attirer des entreprises pour passer ces kilowatts-là, ces kilowattheures-là, ces térawattheures-là. J'imagine que ce n'est pas une réponse complète et je ne peux pas répondre plus que ça, à part dire: Il y a certaines entreprises qui sont extrêmement énergivores pour très peu d'emplois créés. Ça, il faut penser à ça.

Puis, peut-être que ces gens-là aimeraient bien travailler dans d'autres emplois. Moi, je connais quelqu'un qui travaille dans une compagnie forestière, puis il aimerait bien ça changer d'emploi, mais il cherche dans sa région, il se demande... puis les subventions ne sont pas là pour qu'il puisse faire autre chose. Donc, je pense qu'il faut réfléchir à ces choses-là aussi, qu'est-ce qu'on fait donc pour que les gens puissent... les citoyens du Québec puissent travailler dans des domaines un peu moins énergivores qui créent plus d'emplois. Comme par exemple, en efficacité énergétique, si ça crée beaucoup d'emplois, ça va en créer dans toutes les régions du Québec aussi.

Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque.

n (16 h 50) n

M. Dufour: Bon, par rapport aux tarifs préférentiels, bon ça a été donné voilà plusieurs années par rapport à la concurrence qui se passait avec nos voisins. Alors, il fallait attirer des compagnies ici. C'est pour ça que les tarifs, ils étaient ce qu'on appelait dans le temps des tarifs secrets. Aujourd'hui, ils sont le tarif L, donc c'est plus ventilé.

Par rapport à l'environnement, je vous donne un exemple bien concret, là. Puis là on parlait de la grande industrie qui est importante dans certaines régions, je vous en ai nommé trois tout à l'heure. Regardez un dossier comme Alcoa Baie-Comeau. Bon, dans le coin de Deschambault, c'était un agrandissement. Dans le cas d'Alcoa Baie-Comeau, c'est une modernisation, et la modernisation faisait en sorte qu'on réglait le problème environnemental par rapport aux gaz à effet de serre. Alors, d'un côté, oui, effectivement la compagnie a des tarifs préférentiels, par rapport que c'est le tarif L. O.K.? On règle le problème environnemental. On crée de l'emploi ou on consolide de l'emploi déjà existant, donc on crée de la richesse en région. Alors, c'est ça que je vous disais tout à l'heure, là: Qu'est-ce qu'on fait s'il n'y a plus de tarif L pour remplacer ça dans des régions données?

Chez nous, ce n'est pas compliqué, là, seulement la modernisation d'Alcoa, si elle ne se fait pas, on perd 5 000 personnes avec les jobs directes et indirectes. Je ne parle pas d'Abititi-Consolidated, je ne parle pas de Kruger. Il y a Hydro-Québec qui est un grand employeur aussi, mais tu as toute la petite PME qui gravite autour de tout ça. C'est des éléments qui sont importants.

Le Président (M. Bachand): Oui. Allez-y, Mme Ponce.

Mme Ponce (Véronica): Mais je suis d'accord avec vous, c'est juste qu'en tant que citoyen c'est souvent extrêmement difficile de savoir quand c'est vraiment une question de: On doit fermer si on n'a pas ces tarifs-là parce que vraiment on fait faillite, ou c'est vraiment: Bien, en fait, notre marge de profit n'est pas autant que ce qu'on voudrait qu'elle soit, donc on va fermer. Tu sais, si Wal-Mart décide que, si les gens se syndiquent, ils ne pourront pas, ils vont fermer, on prend ça un peu avec scepticisme. On dit: C'est-u vrai vraiment, ou les entreprises... Je veux dire, je donne des exemples ici, mais c'est la même chose avec les entreprises en Argentine qui décident qu'elles vont fermer parce qu'elles ne peuvent pas arriver, alors que ce n'est pas vraiment vrai. Elles pourraient arriver, c'est juste que leurs profits seraient moindres. Alors, moi, de la perspective...

Moi, je suis juste une citoyenne, je n'ai pas accès à toutes les données. Alors, nous, on se dit: Bien, si les tarifs préférentiels sont abolis, peut-être que ces entreprises-là justement vont mettre en place des mesures d'efficacité énergétique pour arriver dans leurs frais puis peut-être que ce n'est pas vraiment le cas que c'est une situation de vie ou de mort. Alors, c'est naïf, ma réponse, je suis d'accord, mais c'est vraiment de la perspective d'une citoyenne. C'est comme ça que je réfléchis.

Le Président (M. Bachand): Donc, merci, M. le député de René-Lévesque. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui. Merci, M. le Président. Alors, je vais vous poser la question que j'aurais voulu poser tantôt à l'Association des manufacturiers et exportateurs du Québec, mais je pense que vous êtes capables d'y répondre. Puis ça va être intéressant de voir quelle va être votre réponse aussi, parce que M. Boisclair parlait...

D'abord, je vous salue, Mme Ponce et M. Boisclair. Tantôt, vous disiez que vous avez un ami travailleur forestier. Moi, je n'ai pas un ami travailleur forestier, j'en ai plusieurs. Ils ne sont pas tous mes amis, mais ils sont mes électeurs et ils sont les gens de mon comté à peu près au quart. Sincèrement, j'ai une grande partie des travailleurs de mon comté qui sont, de façon directe et indirecte, reliés à l'industrie du bois d'oeuvre: bon, Bowater qui était ici tantôt.

Alors, ma question. C'est parce que tantôt ils sont venus nous parler des coûts, de l'ensemble des coûts, et, moi, je vous invite à aller aux pages 14 et 15 de leur mémoire où est-ce qu'ils nous brossent un portrait des tarifs domestiques versus les tarifs industriels en Europe, ils nous en donnent une bonne comparaison: Suède, Royaume-Uni, France, Espagne. Et, dans l'autre page, ils comparent un ratio entre le prix domestique et le prix industriel, ils nous en font un ratio, et on se rend compte que le Québec est en bas au niveau des coûts du tarif domestique versus le prix industriel de l'énergie électrique. Moi, je regrette, je vais toujours me positionner pour faire en sorte de maintenir les emplois chez moi, des emplois industriels de haut niveau qu'on a bien de la difficulté à avoir.

J'ai été professeure de cégep puis je sais c'est quoi, un salaire de professeur de cégep, je sais c'est quoi, un salaire de travailleur forestier à 20 000 $, 25 000 $, 30 000 $ par année au maximum, à travailler cinq mois par année, et je sais ce qu'est un emploi industriel, comme mon collègue en a et comme, moi, j'en ai dans mon comté. Ils sont tous à maintenir, ces emplois-là. C'est ça un peu, le message, et, moi...

Qu'est-ce que c'est, l'enjeu? Quel est l'enjeu pour le Québec? Et quel est l'enjeu surtout pour les régions? Quel est l'enjeu? Parce que, moi, là, votre recommandation, la huitième, je ne suis pas d'accord avec parce qu'à un moment donné c'est aussi la preuve... Ils nous ont fait la preuve, et, moi, j'en suis convaincue, mes industries chez moi sont en lutte contre d'autres industries: l'Europe, l'Asie, les États-Unis. Ils sont sur les mêmes marchés. Gino Ouellet ? je vais le nommer, je vais le nommer parce que c'est correct que je le nomme ? il est dans mon comté puis il va sur les mêmes marchés que... En Grande-Bretagne, il vend son bois d'oeuvre, là... Son plancher de bois franc, il va le vendre en Grande-Bretagne. Puis là on voit qu'en Europe ils ont un avantage, hein, par rapport à l'hydroélectricité, puis, nous, on n'en donnerait pas? Non, je ne suis pas d'accord. Puis, moi, je n'enverrai pas mon monde faire des petites jobines, là. Il y en a déjà suffisamment, des petites jobines. Je veux maintenir des emplois de qualité dans mon comté, je ne veux pas les perdre. Qu'est-ce que c'est, l'enjeu? Dites-nous ça.

Le Président (M. Bachand): M. Boisclair.

Mme Doyer: Le ou les enjeux.

M. Boisclair (Nicolas): Il y a un enjeu qui s'appelle la diversification du secteur manufacturier, du marché du travail. Il y a des régions qui malheureusement ont été laissées à elles-mêmes, et peut-être qu'il faudrait qu'il y ait des gens qui ont beaucoup de vision qui aillent les conseiller ou des gens... Il y a sûrement des gens très compétents chez vous qui sonnent souvent à votre porte, votre bureau de député. Il faudrait aussi les écouter, parce qu'évidemment... À Huntingdon, là, c'en est un, exemple: une usine ferme, c'est pratiquement la moitié des emplois qui est perdue. C'est un exemple de mauvaise diversification des emplois.

Il y a une chose. Acheter local, c'est quelque chose que, moi, ça fait de plus en plus de sens pour moi d'acheter local, acheter produit au Québec. L'ouverture des marchés internationaux, c'est peut-être une belle chose pour plusieurs, ceux qui font de l'argent avec ça, tant mieux, mais il y a des emplois qui partent à cause de ça. On a peut-être fait des erreurs par rapport à la façon qu'on a participé aux échanges internationaux. Il y a une surenchère à la baisse, dans certains pays, du salaire horaire qui leur cause de graves problèmes, puis, nous, bien nos emplois s'en vont pour du «cheap labor» d'exploitation dans d'autres pays. Ça fait que je pense que ça, c'est le rôle d'un gouvernement de réfléchir à ça, là. C'est ce que je peux répondre. Je n'irai pas plus loin, je ne connais pas assez le secteur manufacturier.

Le Président (M. Bachand): Oui, Mme Ponce.

Mme Ponce (Véronica): J'ajouterais peut-être une chose. Il y a peut-être moyen, puis je lance ça comme ça, il y a peut-être moyen d'aider ces entreprises-là sans le faire par le biais de tarifs bas en électricité.

Mme Doyer: En conclusion...

Le Président (M. Bachand): Oui, allez-y, Mme la députée.

Mme Doyer: Très vite. Mme Ponce, ces entreprises-là luttent contre des tarifs imposés par les Américains dans le bois d'oeuvre, elles luttent contre le renforcissement du dollar américain et en même temps elles lutteraient contre la hausse des tarifs d'électricité qui sont un avantage comparatif? Et, en passant ? je conclus là-dessus ? dans mon comté, on a eu la première stratégie de diversification industrielle du Québec pour une MRC, hein? Mon travail pendant 10 ans... Ça fait 10 ans que je suis députée. On a mobilisé tout le milieu justement parce qu'on a eu une crise aiguë au niveau de la baisse des possibilités pour le bois d'oeuvre.

Le Président (M. Bachand): Merci, Mme la députée de Matapédia. Malheureusement, on n'a plus de temps, M. le député de Lac-Saint-Jean. Donc, il me reste, au nom de mes collègues, à vous souhaiter un bon retour. Merci de votre participation, Mme Ponce, M. Boisclair.

(Changement d'organisme)

n (16 h 58 ? 17 h 2) n

Le Président (M. Bachand): Donc, messieurs, bienvenue à la commission, messieurs du Regroupement des citoyens et citoyennes pour l'environnement de Beauharnois et Comité du non à la centrale thermique du Suroît. Donc, MM. Trottier, Laviolette et Florence, bienvenue à la commission. Je sais que vous êtes un peu des habitués des allures parlementaires et de ce que ça peut comporter comme responsabilités et aussi comme attitude. Donc, je vous souhaite la bienvenue, messieurs. Je vous rappelle les règles, que vous connaissez déjà: donc, 20 minutes de votre part pour présenter votre mémoire et 40 minutes de part et d'autre de cette Assemblée pour vous poser des questions. Donc, sans plus tarder, messieurs, pour le bénéfice des gens qui sont ici, de mes collègues, s'il vous plaît, vous présenter.

Regroupement des citoyens et citoyennes
de Beauharnois pour l'environnement
et Comité du non à la centrale
thermique du Suroît

M. Laviolette (Marc): Oui. Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais remercier la commission d'avoir accepté d'entendre le Comité du non à la centrale du Suroît et le Regroupement des citoyens de Beauharnois. Je présente les... Moi-même, Marc Laviolette. Je suis le porte-parole du Comité du non à la centrale au gaz du Suroît. Je suis accompagné par, à ma gauche, donc à votre droite, André Trottier, qui est le président du Regroupement des citoyens de Beauharnois pour l'environnement, et, à ma droite, donc à votre gauche, Jean-Claude Florence, qui est docteur en chimie et qui est membre du Comité pour le non.

Mais, peut-être avant de commencer, comme contribution à notre patrimoine politique québécois sur l'hydroélectricité, on a amené avec nous une publicité du Parti libéral lors de la campagne électorale référendaire de 1962 sur la nationalisation de l'électricité. C'était la publicité qui était à cette époque-là, et je voudrais juste attirer votre attention. Bon, c'était maintenant ou jamais qu'il fallait être maîtres chez nous, et on voit: «Il nous faut être complètement propriétaires de cette source d'énergie pour la gérer au meilleur intérêt du Québec», la source d'énergie étant l'électricité, bien entendu. Ça fait qu'il faudrait peut-être faire comme au baseball, c'est-à-dire ne pas quitter la balle des yeux, la balle étant l'objectif de nationalisation de l'électricité pour le développement du Québec. Et, vous verrez, au cours de mon exposé, je vais expliquer pourquoi que c'est toujours pertinent que cette déclaration politique là d'être propriétaires, pourquoi c'est important.

D'abord, le Comité du non à la centrale au gaz du Suroît a été formé par le Regroupement des citoyens de Beauharnois pour l'environnement. C'est comme un sous-comité du Comité de citoyens de Beauharnois pour lutter contre le projet de centrale au gaz Suroît à l'époque qui était mis de l'avant par le gouvernement libéral. Ce comité-là draine à peu près une centaine de citoyens de Beauharnois, a développé des activités de sensibilisation de l'opinion publique, a tenu des assemblées publiques d'information sur les enjeux de la centrale au gaz du Suroît, diffusé de l'information largement à la population, fait signer une pétition qui était véhiculée d'ailleurs par Héritage Saint-Bernard, et le comité a été supporté par un ensemble de groupes écologistes québécois qui a mené la campagne contre cette centrale au gaz là.

Je pense que d'abord on tient à souligner la décision du gouvernement d'abandonner ce projet-là et de l'avoir abandonné avant la commission. Je pense qu'il y avait un signal fort de la part du gouvernement comme quoi que le gouvernement avait décidé de ne plus s'engager dans cette filière thermique là. Mais en même temps le Suroît a été, je pense...

Tantôt, j'écoutais M. le ministre parler du changement des mentalités. La campagne contre la centrale au gaz du Suroît a réellement fait un bond en avant dans la conscience populaire des Québécois et aussi dans la conscience d'Hydro-Québec par rapport aux énergies alternatives, et ce qui fait que, depuis ce temps-là, on parle beaucoup plus d'économies d'énergie, on parle de développement éolien, on parle de développement durable de façon beaucoup plus en tout cas respectueuse qu'on en a entendu parler dans la dernière période. D'ailleurs, c'était une grande contradiction, la centrale au gaz du Suroît augmentait de 3 % les émissions de gaz à effet de serre, alors que l'objectif du Québec par rapport à Kyoto est de les diminuer de 6 %. Ça fait qu'on venait d'annuler la moitié de l'effort, ou doubler, si on aime mieux, ou d'augmenter de 50 % l'effort qu'on avait à faire pour rencontrer l'objectif.

Mais il y a une chose qu'il est important que la commission saisisse, c'est que jamais le non à la centrale au gaz du Suroît, pour les citoyens de Beauharnois, n'était un syndrome du «pas dans ma cour». Ça n'avait absolument rien à voir avec ça. Ça avait plutôt tout à voir avec le rejet de la filière thermique comme solution de production d'énergie électrique alternative. Pourquoi? Bien, à cause ? et je fais référence à la page 2 de notre mémoire ? des impacts négatifs sur la santé, la sécurité puis la qualité de vie dans la communauté, des impacts négatifs sur l'environnement général, des effets désastreux désormais mesurés sur les changements climatiques de la planète, des dangers permanents qu'elle fait peser sur la communauté et qui risquent de coûter très cher en termes de mesures de sécurité puis parce qu'elle représentait une option pauvre en création d'emplois et que ses impacts économiques étaient discutables. C'est les raisons du pourquoi du rejet par la population de Beauharnois, puis qui était largement appuyé par la population du Québec, puisque la campagne a été tout à fait nationale sur cette question-là.

Mais, en même temps que le gouvernement disait non à la centrale du Suroît, on s'est posé sérieusement la question ? excusez l'expression ? mais si les bottines suivaient les babines dans la filière thermique, parce qu'en même temps on annonçait Bécancour, qu'on déguisait en centrale de cogénération, ce qui est totalement faux. D'ailleurs, le président d'Hydro-Québec est venu admettre devant la commission que ce n'était pas une centrale de cogénération du tout, c'était une centrale au gaz de production électrique. Et puis, si on regarde l'avis que le BAPE avait donné sur cette centrale-là, on ne comprend pas pourquoi que le gouvernement a donné le feu vert à la centrale au gaz de Bécancour, parce que le BAPE disait que la centrale dérogeait au Plan d'action québécois sur les changements climatiques, O.K., et que c'était un choix de dernier recours. Ça fait que c'est quoi, l'affaire? C'est quoi, l'affaire? On dit d'un côté puis Hydro-Québec vient dire ici, devant la commission, que, la filière thermique, on ne développera pas ça, mais en même temps on l'accepte.

n (17 h 10) n

Les émissions de gaz à effet de serre de Bécancour, c'est 1,9 million de tonnes par année de gaz à effet de serre, selon le BAPE, et le Suroît, c'était 2,5. Donc, c'est sensiblement les mêmes émissions. Moi, j'ai toujours compris que le respect du Protocole de Kyoto consistait à diminuer les sources d'émission de gaz à effet de serre, pas les augmenter. Là, on les augmente. C'est pour ça que le comité demande au gouvernement de stopper le développement de la centrale de Bécancour, parce que, quand on pense que c'est mieux de stopper ça... Vous allez me dire: C'est commencé, il y a des coûts. Bien oui! C'était au gouvernement de ne pas commencer la construction. Mais on est mieux de la stopper que de causer des torts irrémédiables à l'environnement par les émissions de gaz à effet de serre, parce que, si on donne le feu vert à Bécancour, c'est-à-dire jusqu'au bout, bien ça veut dire que notre objectif de réduction va être augmenté parce qu'on a augmenté la source, on a augmenté le volume de gaz à effet de serre. Donc, ça, je pense que j'aimerais, moi, j'aimerais entendre l'argumentaire du gouvernement là-dessus, et d'autant plus qu'en même temps qu'on donnait le feu vert à Bécancour, si ma mémoire est bonne, on faisait un autre appel d'offres pour... Je ne me rappelle pas si c'est 850 MW. Sûrement que le ministre pourrait me répondre là-dessus. C'est-u 850 MW supplémentaires qu'on a fait comme appel d'offres en filière thermique? Je ne le sais pas. Il me semble qu'on a un problème de cohérence politique par rapport au Suroît, là.

Bien entendu, le comité, dans ce débat-là, s'est positionné clairement pour l'énergie éolienne. On pense qu'un des gros avantages de l'énergie éolienne, c'est qu'on peut utiliser ça... Surtout si on installe les parcs éoliens à proximité des lignes de transport d'Hydro-Québec et des barrages, on peut agir en complémentarité. Je pense que vous avez entendu ces arguments-là. C'est-à-dire, au lieu de prier le ciel que la pluie tombe pour remplir nos réservoirs, l'éolien peut nous servir tout simplement à diminuer le débit de nos barrages et puis à compenser, puis, quand il vente moins, bien, à ce moment-là, on compense par l'hydroélectrique. Le potentiel éolien a été évalué, au Québec, par la firme Hélimax, à 100 000 MW ? c'est sûrement des chiffres que vous avez entendus ? et donc on pourrait développer la contribution optimale, là, de 20 %. Tantôt, je vous entendais, ça peut varier entre 6 000 et 7 000 MW. Donc, il y a du travail à faire.

Oui, on a fait un appel d'offres pour 2 000 MW, mais, le problème qu'on a ? puis c'est là que je reviens avec garder les yeux sur la balle ? quand on fait des appels d'offres au privé pour, à partir de l'éolien, produire de l'électricité puis vendre ça à Hydro-Québec, là, on privatise par la porte d'en arrière la production d'hydroélectricité, et ça, moi, on a un problème avec ça. On pense que, s'il y a des équipementiers privés qui produisent les pièces d'équipement puis qui installent les éoliennes, c'est bien, mais on pense que le parc éolien devrait être géré et devrait être la propriété d'Hydro-Québec, parce que ce qui arrive avec le privé, c'est assez simple à comprendre. Je l'ai entendu encore tantôt. Je veux dire, lui, il fixe son prix comment, par rapport à ce que ça lui coûte, son investissement, plus sa cote de profit qu'il vend à Hydro-Québec qui, elle, va vendre à profit à la population parce qu'il faut que ça rapporte? Et puis je n'ai rien contre ça, là, mais il faut que ça rapporte des revenus à l'État dans la caisse commune pour redistribuer en services. Bien, là, on vient de se mettre un intermédiaire de plus, alors que Maîtres chez nous, c'était pour contrôler totalement l'énergie électrique.

Il me semble que la question doit être posée à ce moment-ci parce qu'on commence le développement éolien, et on pense que le parc éolien devrait être contrôlé et géré par Hydro-Québec et ne pas avoir d'intermédiaires qui vont venir sucer leur part de profits, puis que ça va contribuer à maintenir des prix plus élevés au niveau de l'électricité.

Pour ce qui est de la région où nous sommes, le potentiel éolien en Montérégie est de 12 000 MW, et on pense que le corridor du canal Beauharnois pourrait être un corridor intéressant pour installer un parc éolien propriété d'Hydro-Québec parce que les terrains appartiennent à Hydro-Québec, le long de la bande du canal. Il pourrait y avoir de 40 à 60 éoliennes d'installées là. Et, pour ce qui est des équipements, même on pourrait se servir de l'expertise de TM4, qui fait partie de TM4 Énergie, qui produit des générateurs pour éoliennes. Et c'est déjà dans la synergie, là, d'Hydro-Québec. Il me semble que ça pourrait contribuer à développer cette propriété-là et expertise d'Hydro-Québec au niveau de l'éolien. D'ailleurs, M. Trottier va nous expliquer un peu plus en détail quelles alternatives qu'on a pour la région de Beauharnois.

L'autre bloc que notre mémoire aborde, c'est toute la question du développement durable. Moi, c'est que j'ai trouvé ça assez fantastique quand on a passé une loi spéciale pour protéger les skidoos en disant que c'était du développement durable. Je ne sais pas, là. Je n'ai rien contre les skidoos, je n'ai rien contre ce qui a été décidé par le gouvernement, mais, à un moment donné, là, ça, c'est comme le fédéralisme asymétrique: tu sais, on met «asymétrique» partout, là, on met «le développement durable» partout. Je pense qu'il faut bien comprendre c'est quoi. Le développement durable, ça doit susciter, oui, des changements dans les modes de consommation et de production.

On a entendu, tout à l'heure, les citoyens qui amenaient leur perspective sur ces questions-là. Ça doit assurer la protection puis la gestion des ressources naturelles en vue d'un développement économique et social, bien entendu, puis ça doit avoir une perspective à long terme, puis ça doit favoriser une large participation de la population à la formulation des politiques, puis à la prise de décision, puis à la mise en oeuvre. C'est ça, du vrai développement durable. Et, dans les enjeux de développement durable, toute la question des changements climatiques est très importante, et les changements climatiques sont influencés par les gaz à effet de serre. Et ce qui influence le plus les gaz à effet de serre ou la croissance des émissions qu'ils ont connue au Canada, c'est beaucoup autour du secteur de l'énergie charbon et gaz. Donc, il faut vraiment, si on veut respecter nos engagements envers Kyoto...

Puis on est privilégiés, le Québec. À cause que notre portefeuille est principalement constitué d'hydroélectricité, on est privilégiés. On peut dire que, la filière thermique, on n'en a pas besoin parce qu'on a un gros potentiel éolien. Puis, si on travaille au niveau des mesures d'économie d'énergie, on va être capables d'aller chercher nos objectifs. C'est sûr que, dans des pays où le charbon est très important, où il n'y a presque pas d'hydroélectricité, le gaz est plus propre que le charbon. Mais ici, au Québec, je veux dire, moi, je trouve ça comique souvent quand...

Dans un autre ordre d'idées, tu sais, quand on se compare, quand on veut rationaliser, bien on prend le meilleur, puis on se compare au meilleur, puis on dit: Bon, bien, on va atteindre le meilleur. Mais des fois, pour justifier nos politiques qui sont plus ou moins molles, on se compare au pire, tu sais, en disant: On est mieux que le pire. Je comprends que c'est important d'être fiers de nos réalisations, mais ici, au Québec, on est dans la tête du peloton et il faut se comparer aux meilleurs, pas aux pires. Ça, on le sait, qu'on est mieux, mais il faut s'améliorer, et c'est pour ça qu'il faut mettre un gros X sur les gaz à effet de serre.

Là, je ne sais pas combien de temps qu'il nous reste, mais je passerais la parole à André Trottier qui va nous parler de comment... quelles alternatives pour la région de Beauharnois, parce que, dans la région de Beauharnois, vous allez entendre plus tard le maire venir vous dire qu'il a perdu un investissement, lui, de 500 millions dans la région, là, et qu'il faudrait peut-être essayer de voir, pour le développement économique de Beauharnois qui en a grandement besoin, des alternatives. Mais, nous, on en a, et M. Trottier va nous expliquer ça.

Le Président (M. Bachand): Pour répondre, M. Laviolette, il vous reste quatre minutes. M. Trottier.

M. Laviolette (Marc): Quatre minutes. Bon! Ça fait que deux minutes...

M. Trottier (André): Bonjour, M. le Président. Bonjour aux commissaires. Je voudrais vous faire un bref historique devant vous pour expliquer pourquoi qu'on a refusé le projet de centrale thermique à Beauharnois. On avait deux priorités. Notre première priorité, c'était l'accord de Kyoto sur les gaz à effet de serre menant inévitablement aux changements climatiques. Deuxièmement, c'était la santé publique et communautaire.

n (17 h 20) n

Nous voulons que ça change, et c'est pour cette raison que nous sommes ici aujourd'hui. On veut s'en aller vers le développement des énergies durables. Dans le passé, il y a déjà eu un projet de parc éolien, en 1995, avec York Research, aujourd'hui Vestas. Ce projet avait été parti avec un ancien maire de Beauharnois, un M. Gervais, et ça avait été refusé par Hydro-Québec parce qu'ils disaient, eux autres, que ce n'était pas intéressant pour une usine. On voulait avoir une usine de fabrication de pièces et d'assemblage de pièces d'éoliennes, et ça avait été refusé. Hydro-Québec, ils n'ont jamais voulu embarquer dans cette aventure, et on trouve que ce n'est pas normal qu'Hydro-Québec... On ne veut pas s'en aller avec le privé, on veut s'en aller avec Hydro-Québec parce qu'on croit que c'est Hydro-Québec qui devrait développer ces énergies-là. Et c'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui.

Et aussi, en parlant de fabrication de pièces d'éoliennes qui étaient destinées au marché nord-américain, c'est sûr que, nous autres, nous sommes très proches des lignes qui s'en vont vers les États-Unis ? je parle de la centrale hydroélectrique à Beauharnois ? et l'emplacement pour les éoliennes qu'on demande comme parc éolien, ce serait sur le site d'Hydro-Québec à Beauharnois.

J'ai juste un petit quelque chose à ajouter. Si vous pensez à ce que je vais vous dire, vous pouvez vous contacter avec le Suroît ou bien donc, là, le gaz. En ne regardant la pluie qu'une goutte à la fois, il est difficile d'imaginer l'ampleur de l'inondation. Ce que je veux dire, moi: une seule centrale dans le Québec, ce serait pas pire, mais, s'il y en a 10, 15 ou 20, centrales, la goutte d'eau, elle devient grosse, là. Parce qu'à Beauharnois, la centrale de 800 MW, ça leur prenait 1 000 130 000 m³ de gaz pour la faire marcher. Ça veut dire que les rejets étaient beaucoup, beaucoup plus que celle de Bécancour. Puis, s'il y en a plusieurs dans le Québec, c'est sûr et certain que la goutte de pluie, elle va être grosse, là.

Beauharnois serait un emplacement idéal pour développer cette filière éolienne, vu que nous sommes à proximité des lignes de transport, comme je viens de vous le dire. Au point de vue touristique, ça pourrait beaucoup amener des ressources à la ville de Beauharnois.

En terminant, je remercie tous les commissaires de m'avoir écouté en espérant qu'il y aura des ouvertures à nos demandes sur les projets du carrefour des énergies renouvelables à Beauharnois. Pensons à l'héritage que nous allons laisser à nos enfants et petits-enfants. Merci.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Trottier. Merci, M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): ...du temps un petit peu?

Le Président (M. Bachand): Malheureusement pas, mais, si c'est très court... Mais vous aurez l'opportunité, M. Laviolette, de répondre aux questions puis d'introduire donc un complément dans votre présentation. Donc, M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs.

M. Hamad: Bienvenue, messieurs. Donc, prochaine élection, vous allez passer notre brochure à jour du Parti libéral, si je comprends bien, M. Laviolette?

M. Laviolette (Marc): Bien, j'aimerais la passer authentiquement, mais c'est parce qu'elle a glissé un peu depuis le temps, là. Parce que, comme je l'indiquais tantôt, sur les nouvelles formes d'énergie comme l'énergie éolienne, on donne dans le privé, là. On aimerait garder qu'il faut être complètement propriétaires de la source d'énergie, donc l'électricité, pour la gérer au meilleur intérêt du Québec. Quand on rajoute des intermédiaires, bien ça contribue à faire augmenter l'électricité de façon artificielle. Puis, quand l'électricité se vend plus cher parce qu'il y a plus de monde qui siphonne les profits dessus, bien ça fait augmenter les prix un peu partout, là. Les contribuables paient plus cher, mais aussi les compagnies paient plus cher pour produire, puis elles nous transfèrent ça dans le prix, puis il me semble que ce n'est pas une bonne façon nécessairement de gérer la ressource. Mais ça me ferait plaisir de dire...

M. Hamad: Ça fait changement, en tout cas.

M. Laviolette (Marc): Hein?

M. Hamad: Tu sais, avec le temps, on peut changer aussi, hein? C'est ça, hein, M. Laviolette?

M. Laviolette (Marc): Mais, quand on rempire avec le temps, c'est ça qui m'inquiète, et je pense qu'on n'a pas amélioré avec le temps, puis ça, ce n'est pas... Je parle dans la gestion historique du dossier, là.

M. Hamad: On va revenir à votre première question, Bécancour.

Le Président (M. Bachand): Ha, ha, ha! Allez-y, M. le ministre.

M. Laviolette (Marc): J'attends. Moi, je réponds à toutes les questions, M. le ministre.

M. Hamad: Parfait. Et vous posez toutes les questions ici en même temps.

Bécancour, M. Laviolette, pour répondre à Bécancour, je vous invite à lire la recommandation, l'avis de la Régie de l'énergie. Vous savez, la Régie de l'énergie, on a reçu à peu près entre 50 et 70 mémoires, le débat a été fait et on n'a pas l'intention de refaire ce débat-là aujourd'hui ni plus tard. C'est fait pour nous, c'est une page tournée. L'avis de la Régie de l'énergie, à la page 117... Ce qu'elle dit, en fait, là, vous allez avoir le temps de le lire: «La régie considère qu'une démonstration adéquate a été faite du projet de TCE [Bécancour] dans le cadre du Plan d'approvisionnement du distributeur, tout comme au long du processus public d'appel d'offres et d'octroi du contrat. Le projet TCE est d'intérêt public pour le Québec et nécessaire à l'approvisionnement en électricité des Québécois en 2006.» Et leur recommandation n° 14, elle dit: La régie... C'est la régie qui recommande au gouvernement l'autorisation immédiate du projet de centrale de cogénération à Bécancour par TransCanada Energy afin d'assurer l'approvisionnement en électricité des Québécois. Je vous donne ça. On ne fera pas de débat là-dessus, c'est la recommandation de la régie après que le débat a été fait.

M. Laviolette (Marc): M. le ministre, avec tout le respect...

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Oui. Oh! excusez.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que Bécancour émet presque autant de gaz à effet de serre que le Suroît?

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Moi, je dirai que Bécancour s'est conformée aux recommandations du BAPE, et on a une recommandation de la régie qui dit: C'est nécessaire pour ça.

M. Laviolette (Marc): Oui, je sais, mais ce n'est pas ça, ma question.

M. Hamad: C'est moi qui pose les questions, M. Laviolette...

M. Laviolette (Marc): Ah bon! Ah bon, bon!

M. Hamad: ...pour une fois.

M. Laviolette (Marc): Bien, c'est parce que tantôt...

M. Hamad: Vous savez, à la période des questions, on répond aux questions. Pour une fois, je pose la question. Ma question est plutôt pour l'éolien. En fait, votre projet à Bécancour... M. Laviolette, vous avez parlé d'un projet éolien à Beauharnois. Je reviens à la base, Beauharnois. Vous avez parlé d'un projet éolien où vous avez fait des démarches avec Hydro-Québec. Avez-vous des lettres où Hydro-Québec a dit carrément qu'elle n'est pas intéressée ou des confirmations d'Hydro-Québec par écrit, par exemple, des choses qui... des traces du dossier, de votre dossier avec Hydro-Québec?

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Oui. Ce que M. Trottier faisait référence, c'est... Bien, le maire de Beauharnois à l'époque, il s'appelait M. Hervé Charest. C'est lui qui a piloté le dossier pour la municipalité. Bon, on n'a pas eu accès au dossier écrit, mais, lui, c'est ce qu'il nous a dit, qu'il y avait un projet sérieux, qu'il y avait eu des discussions mais qu'à ce moment-là ce n'était pas dans les plans d'Hydro-Québec de développer ça. Mais ça ne me surprend pas, je pense que c'est tout à fait plausible, parce que ce qui était dans les plans d'Hydro-Québec, c'était de développer la filière thermique. Bon, là, le président d'Hydro-Québec est venu dire qu'Hydro-Québec Production ne développerait pas la filière thermique, mais, si je sais lire entre les lignes, est-ce que ça veut dire qu'on va faire appel au privé dans la filière thermique pour nous vendre l'électricité? J'ai l'impression que c'est oui, puisque Bécancour est là puis il y a un appel d'offres de... Tantôt, je vous demandais si c'est 850 MW, là, encore pour produire ça, à moins que je me trompe, là ? j'y vais de mémoire ? ou 350...

M. Hamad: 350, cogénération.

M. Laviolette (Marc): Oui. C'est ça.

M. Hamad: Mais je reviens. C'était, dans le temps, Melocheville, hein? C'était Melocheville, avant.

M. Laviolette (Marc): Oui.

M. Hamad: Maintenant, elles sont fusionnées, les deux villes. Et, moi, j'aimerais ça si vous pouviez trouver... parce que, nous autres, on a fait la vérification pour voir...

M. Laviolette (Marc): Ils ne se rappellent pas de ça.

M. Hamad: Parce que vous l'avez mis dans votre mémoire, et, selon l'information que nous possédons aujourd'hui, il n'y a jamais eu une demande formelle à Hydro-Québec, il n'y a jamais eu de discussion, à ce niveau-là, écrite par Hydro-Québec, et ça, on parle évidemment des années quatre-vingt-quinze. Donc, depuis 1988 d'ailleurs, la vérification a été faite, il n'y a jamais eu de demande, là. En tout cas, c'est pour votre bénéfice... d'être sûr que...

Vous avez parlé maintenant... Ça vaut la peine de le vérifier parce que d'abord votre mémoire est basé là-dessus pas mal. Vous avez parlé que l'Hydro-Québec doit posséder les parcs éoliens, comme tel, parce que vous pensez que c'est plus rentable économiquement actuellement que si l'Hydro-Québec est le promoteur qui prend tous les risques évidemment à tous les niveaux à ce niveau-là. Peut-être expliquer davantage votre point de vue.

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

n (17 h 30) n

M. Laviolette (Marc): Oui. Le principe est assez simple, c'est que, s'il y a des promoteurs privés qui le font présentement, ça doit être parce que c'est rentable, hein? Sans ça, ils ne le feraient pas. Mais, le problème qu'il y a, quand c'est un privé qui exploite et qui vend à Hydro-Québec, il prend sa part de profit, ce qui est tout à fait normal, là. Je ne remets pas ça en cause. Je dis juste qu'on se met un intermédiaire de plus dans le système, puis Hydro achète son électricité au prix convenu, contracté, puis, bien entendu, le revend soit à l'industrie soit aux consommateurs. Donc, en rajoutant un intermédiaire qui prend sa cote de profit, bien tu contribues à augmenter le prix que tu vends, là. Tu sais, il ne la donnera pas, le producteur privé. Ça fait que c'est tout simplement ça, le principe. Quand tu rajoutes des intermédiaires...

C'est sûr, c'est bon pour l'entreprise privée, ça, je n'en doute pas, mais, moi, je pense que l'entreprise privée devrait se consacrer à vendre de la technologie, à faire un peu comme on fait avec nos barrages, là. C'est des compagnies privées qui soumissionnent puis qui installent tout ça, mais ça appartient à Hydro-Québec, ce barrage-là, puis il est exploité après, puis... Bon. C'est ça. Le principe, ce n'est pas plus compliqué que ça. Puis on pense que ça, ça respecte le principe de la nationalisation de l'électricité qui a été faite en 1962 dans une élection référendaire sur la question, là, et qui a demandé un grand courage politique à l'époque, hein ? il faut se placer à l'époque ? de la part des artisans de la Révolution tranquille pour faire ça.

Il me semble que ça, c'est une chose qu'on ne devrait pas toucher. Puis là on fait rentrer la privatisation par la porte d'en arrière, tu sais, par des petits projets, par des... Mais, quand tu vas faire le total, là... Si, en bout de ligne, mettons, on développe 6 000 à 7 000 MW, on est rendu à 2 000, ça commence à en faire, là. Il me semble que ça devrait appartenir à Hydro-Québec, puis qu'elle développe son expertise. D'ailleurs, TM4, qui fait partie du groupe d'Hydro-Québec, a développé une expertise, TM4 Énergie, là, dans l'éolien aussi. On pourrait mettre ça à contribution, il me semble. Et d'ailleurs les chercheurs de l'IREQ qui sont venus devant vous revendiquaient qu'on augmente les sommes à la recherche. D'ailleurs, dans le projet qu'on a avec l'éolien...

Pour revenir à Beauharnois, le bout qu'on n'a pas fait, pour compléter la discussion, Jean-Claude, j'aimerais ça qu'il explique un peu, parce que ce n'est pas juste d'avoir des éoliennes, le long du canal, qui appartiendraient à Hydro-Québec, ça va un peu plus loin que ça puis ça va chercher, je pense, les revendications de l'IREQ. Si vous permettez qu'on vous donne ce bout-là, là...

Le Président (M. Bachand): Absolument. Allez-y, M. Florence.

M. Florence (Jean-Claude): Bonsoir, messieurs dames. Je voudrais d'abord, avant de commencer à parler du carrefour des énergies renouvelables ? parce que c'est ça qu'on va vous proposer ce soir ? avant de vous parler de ça, j'aimerais contredire M. le ministre sur deux points, premièrement sur le projet de cogénération. Ne parlez pas, M. le ministre, de cogénération dans le cas de Bécancour, vous savez, et Hydro-Québec le sait, que ce n'en est pas un. On ne prendra pas du temps à personne pour expliquer que ce n'est pas un projet de cogénération.

L'autre point que je n'aime pas, c'est qu'on parle de chiffres, mais on ne parle pas d'informer le public de Bécancour de la potentialité des produits chimiques qui vont être déversés dans leur atmosphère, que ce soit au niveau des oxydes d'azote, des oxydes de souffre. Et, tenez-vous bien, le comble de l'opération, c'est qu'à Bécancour, d'après M. Claude Dupuis, qui est le coordonnateur de Bécancour, il faut en plus importer de l'ammoniac pour neutraliser des produits qui pourraient être potentiellement dangereux pour la population au niveau de l'atmosphère.

Et je n'ai même pas parlé encore des gaz à effet de serre. Les gaz à effet de serre qui vont être produits vont contrebalancer tout l'effort de Kyoto. Actuellement, le Québec est en position de tête, comme l'a dit M. Laviolette tout à l'heure. Il faut qu'il la garde, cette position de tête. Donc, ça veut dire que, dans votre esprit, vous devez complètement éradiquer la filière thermique. Si vous ne faites pas ça, vous serez tous responsables du fait qu'en conservant peu ou tout de la filière thermique... Et, dans la filière thermique, j'inclus malheureusement la centrale de Gentilly pour laquelle vous vous posez des questions à savoir s'il faut la réparer ou non. Si vous la réparez, vous serez redevables, pour les générations à venir, d'avoir réparé un outil qui est vraiment dommageable.

Lorsqu'on parle, par exemple, des impôts et de la potentialité de ne pas laisser de déficit à nos petits-enfants, après tout, être pauvre, ce n'est pas grave. Mais être irradié dans 100 ans, ça, c'est beaucoup plus grave parce que ça... On peut être pauvre et en santé, mais on peut être riche et irradié par les centrales nucléaires. Alors, s'il vous plaît, ne parlons plus ni de centrale thermique ni de centrale nucléaire.

Et j'en reviens à la proposition. Lorsque vous faites une centrale éolienne, ce n'est pas un pis-aller à Hydro-Québec. Et, si vous êtes intéressés par mes propos, tout à l'heure, lorsqu'on se verra... Vous avez les papiers que je suis en train de vous faire. Dans mon esprit, il est évident, il est évident que l'éolienne n'est qu'un moyen de formidable développement économique. Je vais vous expliquer rapidement pourquoi. J'ai été devancé à cette table par... Et je les salue ici très fort. Tous les scientifiques de l'IREQ se sont présentés et ont été dans le même sens que celui que j'avais développé avec mes collègues de Beauharnois. Le problème est le suivant: lorsque vous faites des éoliennes, vous ne faites pas des éoliennes pour faire de l'électricité, l'éolienne est là pour compenser. Lorsque vous avez un problème avec un barrage hydroélectrique qui a une surcharge ou une demande excédentaire, à ce moment-là on fait marcher les éoliennes pour fournir de l'électricité.

Que fait-on de l'éolienne quand la situation est contrôlée par Hydro-Québec? Bien, l'éolienne continue de tourner, elle produit de l'électricité. Alors, on peut soit l'arrêter ? c'est stupide, de mon point de vue ? soit aller avec une proposition de l'Université de Trois-Rivières et son Centre de recherche en hydrogène. Et qu'est-ce qu'on fait avec de l'électricité? Eh bien, tout simplement, on prend l'eau du fleuve, et on fait de l'hydrolyse, et on fait des cuves d'électrolyse. On fait de l'électrolyse et on obtient d'un côté un merveilleux carburant qui s'appelle l'hydrogène et un merveilleux comburant qui s'appelle l'oxygène. On vient de se créer trois sortes d'entreprises, les entreprises éoliennes, les entreprises qui vont utiliser de l'oxygène et les entreprises qui viennent d'utiliser de l'hydrogène, et, à partir de là, en prenant l'expression américaine «the sky is the limit», ça veut dire qu'à partir de l'hydrogène bien je vais développer de l'expertise.

Je salue actuellement les gens de l'Hydro-Québec qui ont réussi à imposer leur système TM4 auprès des français Renault, Peugeot et Dassault pour vendre des véhicules utilitaires en Chine. Et on appellerait ça le carrefour des énergies renouvelables. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand): Voilà. Merci. C'était fort intéressant, M. Florence, mais, si vous voulez donner la chance au ministre de vous poser des questions...

M. Florence (Jean-Claude): Oui. Oui, oui. Absolument.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. le ministre.

M. Hamad: En fait, je vais vous le dire très humblement, ça ne me dérange pas d'être contredit. Mais, ce que je viens de dire, je viens de le citer, là, dans le rapport de la Régie de l'énergie, et c'est la régie qui parlait de la cogénération, juste pour votre information, avec toute votre envolée.

Oui? Vous voulez parler? Allez-y.

M. Florence (Jean-Claude): Oui.

M. Hamad: Allez-y. Allez-y.

Le Président (M. Bachand): M. Florence.

M. Hamad: Oui.

M. Florence (Jean-Claude): Oui. Vous et moi sommes des scientifiques, monsieur, et vous savez que «cogénération» n'est pas le mot à employer. C'est un terme qui est marketing. On a vendu la centrale de Bécancour, comme on voulait vendre celle de Beauharnois, sur un argument marketing de cogénération. M. Charlebois, le maire de Beauharnois, se plaisait à dire qu'il y aurait beaucoup de serres qui l'utiliseraient. Si on regarde en termes techniques, vous savez qu'Hydro-Québec, lorsqu'Hydro-Québec va faire sa centrale à Bécancour avec un produit qui est moins polluant que l'autre... Parce que l'autre était vraiment très polluant, hein, le mazout actuel, là. La centrale actuelle est vraiment très polluante.

Lorsqu'on fait... Pardon?

M. Hamad: Quelle centrale?

M. Florence (Jean-Claude): L'ancienne centrale de Bécancour, celle qui travaille au mazout n° 2, là, celle qui est actuellement... Alors, d'après les plans, plusieurs fois on pouvait remplacer l'ancienne centrale par la nouvelle centrale, et elle venait en support à Gentilly. Mais pourquoi venir en support à une industrie que, moi, je condamne? C'est-à-dire, la centrale nucléaire de Gentilly devrait être éliminée de la carte.

Une personne avec qui je travaille beaucoup, M. Reeves, M. Hubert Reeves, vous savez, en tant qu'astrophysicien atomiste, au début de sa carrière, il était un nucléariste convaincu, et maintenant ne lui demandez plus de convaincre le monde qu'une centrale nucléaire, c'est bon. Vous savez, il dit, c'est quelque chose qui est un legs épouvantable à léguer à nos enfants. On parle beaucoup de nos enfants et de nos petits-enfants. De toute façon, si on laisse la centrale de Bécancour et ses consoeurs faire, dans 20 ans on ne se posera même plus la question de savoir si on a des enfants et des petits-enfants parce que la situation sera assez dramatique qu'à ce moment-là on n'aura plus de problème de longévité, de prospérité et de postérité à faire.

n (17 h 40) n

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Florence. M. le ministre.

M. Hamad: Oui. Ça va être ma dernière question probablement, on n'aura pas le temps... En fait, M. Laviolette, qu'est-ce que vous en pensez, de l'exportation?

M. Laviolette (Marc): L'exportation...

M. Hamad: Quelle est votre position, votre comité... votre comité, évidemment?

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Écoutez, on est...

M. Hamad: Je parle de l'exportation de l'électricité, hein?

M. Laviolette (Marc): Pardon?

M. Hamad: L'exportation d'électricité.

M. Laviolette (Marc): Oui, oui.

M. Hamad: O.K.

M. Laviolette (Marc): Je pense que vous posez la bonne question au bon monde. À Beauharnois, la centrale de Beauharnois est branchée directement, par la ligne Châteauguay-Massena, vers les États-Unis pour exporter de l'électricité. Moi, je suis tout à fait d'accord à ce que le Québec exporte de l'électricité, et ça nous permet d'amener des revenus supplémentaires et de contribuer au fonds consolidé de l'État. C'est parfait, en autant que nos besoins soient, bien entendu, répondus.

Et d'ailleurs c'est une des raisons qui militent, comme c'est indiqué dans le mémoire, pour le parc éolien le long du canal Beauharnois. La ligne Châteauguay-Massena, on pourrait exporter aussi, là, mais... Ça fait qu'on n'a absolument rien contre ça, là.

Mais, peut-être sur la cogénération, pour donner un exemple concret, le meilleur exemple, c'est dans l'industrie du bois. Ils ont des projets de cogénération. Ce qu'ils font, c'est que, dans les scieries, tu prends un arbre, tu fais un deux-par-quatre avec, il te reste de la croûte puis des copeaux, avec ça tu brûles pour chauffer ton bois pour qu'il sèche, puis, je veux dire, tu récupères la vapeur d'eau qui, elle, fait tourner une turbine, puis tu vends de l'électricité. Tu sais, c'est ça, de la cogénération. Ce n'est pas chauffer de l'eau pour faire chauffer une turbine, produire de l'électricité puis après ça tu es pris avec la vapeur. Bien, tu dis: O.K., au lieu de la condenser puis de la retourner au fleuve dans son état original, je vais la vendre à quelqu'un d'autre. C'est bien, là. Ce n'est pas mauvais, mais ce n'est pas de la cogénération.

D'ailleurs, M. Caillé l'a admis lui-même, il a dit que c'était une centrale pour produire de l'électricité au gaz. Bien, si c'est bon pour le Suroît de l'avoir liquidé, bien c'est la même chose au niveau... C'est ça, Hydro-Québec a tiré sa leçon de la saga du Suroît. Il faudrait peut-être la tirer politiquement aussi.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre, très, très rapidement.

M. Hamad: Oui. Mes collègues, je ne sais pas si vous avez des questions?

Le Président (M. Bachand): Est-ce qu'il y a des collègues qui auraient des questions à poser? De toute façon, le temps est, à toutes fins pratiques, terminé. Donc, je vais donner l'opportunité à Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie... Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci. Alors, messieurs, bonjour. Concernant l'efficacité énergétique, j'aimerais ça que vous me donniez votre avis sur l'Agence de l'efficacité énergétique, parce que ça fait partie des préoccupations que l'on a ici. Est-ce que vous croyez que cette agence-là devrait être une entité autonome, c'est-à-dire non assujettie au ministère des Ressources naturelles, financée adéquatement avec un plan, et rende des comptes à l'Assemblée nationale?

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Vous me posez une question... À part le principe de l'efficacité énergétique, sur la mécanique, on ne s'est pas vraiment penchés sur cette question-là. C'est difficile pour moi. Je vous répondrais, là, que c'est plus une impression que d'autre chose.

Je pense que ce qui est important au niveau de l'efficacité énergétique, c'est qu'on... Parce que ça fait longtemps qu'on en parle, puis Hydro-Québec en a parlé, puis elle mettait ça dans ses plans, mais on n'était pas tellement efficace sur la livraison des objectifs d'efficacité énergétique. Je pense que ça prendrait un moyen pour s'assurer qu'on est efficace là-dessus. Est-ce que l'agence, c'est la bonne façon? Je n'en ai aucune idée. Il faudrait... Oui?

Le Président (M. Bachand): Oui. M. Florence, moi, j'ai une suggestion à vous faire, d'être très concis dans vos réponses.

M. Florence (Jean-Claude): Oui, je vais être très concis.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Florence.

M. Florence (Jean-Claude): Vous me tendez la perche pour l'efficacité énergétique. J'aimerais ça que, dans vos délibérations, vous teniez compte que, dans les centrales malheureuses thermiques, comme j'ai essayé de vous le démontrer tout à l'heure...

Les centrales au gaz sont vraiment de l'énergie dépensée pour rien, et M. Caillé, qui est docteur en physique, ne me contredira pas. Vous savez que les lois de la physique obligent à dépenser 40 % du gaz naturel strictement pour rien. Alors, soyons efficaces: au lieu de construire des centrales, prenons l'équivalent de 40 % du gaz qui va être brûlé et distribuons-le gratuitement aux citoyens. Le bilan va être identique.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, vous parlez aussi, vous parlez, dans votre document, d'assurer la recherche et le développement dans le domaine des technologies de l'énergie. Vous avez aussi parlé, là, de l'hydrogène qui est certainement un vecteur intéressant et pour lequel il y a beaucoup d'intérêt. Est-ce qu'à votre avis ? vous avez entendu les chercheurs, le Syndicat des chercheurs de l'IREQ ? retirer l'IREQ du giron d'Hydro-Québec en en faisant un institut de recherche national en électricité du Québec et en regroupant l'expertise à tous niveaux, là, pour qu'elle puisse travailler dans le champ d'action de l'électricité, que ce ne soit pas seulement en production, transport, distribution, là, mais aussi l'utilisation, est-ce que c'est une vision qui vous apparaît réaliste aujourd'hui, là?

M. Laviolette (Marc): Je suppose...

Le Président (M. Bachand): Monsieur, vous pouvez y aller. Pardon.

M. Laviolette (Marc): Oui. Je suppose que, si les chercheurs de l'IREQ ont mis ça de l'avant, c'est parce qu'Hydro-Québec, qui avait le contrôle sur eux autres, les a trop restreints. Ils veulent avoir une marge de manoeuvre. Le problème qu'il y a, c'est... Il faut s'assurer aussi que les recherches qu'ils font puissent trouver application, pas parce qu'ils sont désincarnés, là, mais qu'il y ait quelqu'un qui soit chargé de les mettre en application. Le fait que ce soit...

Normalement, dans les entreprises, la recherche et développement fait partie de l'entreprise parce qu'elle influence les gestionnaires, ceux qui sont à la direction, pour faire leur planification stratégique. Là, si on met ça complètement à part, on va dégager des perspectives, mais comment s'assurer que la gestion d'Hydro-Québec prenne en compte ces perspectives-là si on la coupe de la dynamique? Ça pose un problème, là, tu sais.

Et jamais je ne croirai que ça va être l'Assemblée nationale qui va dire à Hydro-Québec: Voici vos perspectives d'avenir. Normalement, Hydro-Québec devrait intégrer sa recherche et développement dans sa planification stratégique puis, quand elle se présente devant l'Assemblée nationale, en tenir compte. Je pense que peut-être que l'Assemblée nationale, dans l'examen qu'ils font... que l'Assemblée fait de la gestion d'Hydro-Québec, hein... Il ne faut pas se conter d'histoires, on était dans un contexte de rationalisation générale dans la société; bien, on a accepté de couper. On a accepté que ce soit coupé, ces crédits-là à la recherche, puis d'en diminuer l'importance. Bien, je peux comprendre les chercheurs de dire: On aimerait bien ça contribuer à 100 % de nos capacités. La question est plutôt: Comment, si ça se fait à part, indépendamment d'Hydro-Québec, Hydro-Québec va tenir compte de ça? Je ne le sais pas, là. Il me semble que...

Le Président (M. Bachand): ...réponse, M. Florence.

M. Florence (Jean-Claude): Oui. Vous savez, quand on est chercheur, il faut des budgets, parce que, par exemple, la recherche sur l'hydrogène, demandez aux gens de Trois-Rivières, ça coûte cher. Donc, il faut des budgets, il faut une certaine indépendance, et par contre il faut être aussi au service de la population. Alors, vous savez, je voudrais avoir le beurre et l'argent du beurre, c'est-à-dire rester au sein d'Hydro-Québec pour profiter de la synergie d'Hydro-Québec, si j'étais chercheur d'Hydro-Québec, et puis j'aimerais aussi avoir de l'argent et de l'indépendance de travail, et c'est peut-être difficilement conciliable, je vous l'avoue. Alors, effectivement, si vous le mettez à l'extérieur, vous allez leur dire qu'ils travaillent pour Hydro-Québec quand même et non pas faire des recherches désincarnées sur l'hydrogène, parce que ce qui est le débat, c'est comment trouver des sources d'énergie.

Tout à l'heure, M. le ministre disait, dans l'intervention précédente: Il faut penser à l'avenir et au développement économique. Alors, pensons-y, mais n'y pensons pas en termes thermiques. Pensons-y en termes d'hydrogène, en termes de solaire. Il faut que les recherches se fassent là-dedans. Si les recherches ne se font pas, le Québec sera à la solde des autres. Si le Québec fait ses recherches, il sera en avant des autres et c'est les autres qui seront des demandeurs des trouvailles qu'on aura faites. Et les intégrations de carrefours des énergies renouvelables comme on vous soumet ce soir, ce serait non seulement pas juste à Beauharnois, mais aussi à Bécancour et dans d'autres parties du Québec pour faire de la synergie d'entreprises, pour arriver à faire des pôles de développement du XXIIe siècle. Vous voyez, nous sautons en plus un siècle.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

n (17 h 50) n

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Moi, je reste dans le XXIe siècle et je suis étonnée de votre réponse par rapport à la recherche. Parce que, quand vous regardez les instituts de recherche des multinationales, ils ont un budget qui est autonome, ils se rapportent bien sûr à un chef de division qui se rapporte au conseil d'administration, ils reçoivent donc leurs fonds, mais leur programmes de recherche sont toujours dirigés par leur directeur de recherche.

Et le point que je soulève, qui m'apparaît extrêmement important, c'est que, quand on dit «sortir l'IREQ de l'Hydro-Québec», on ne dit pas que les fonds d'Hydro-Québec ne devraient pas servir à financer la recherche. Parce que, M. Laviolette, quand vous dites que nous avons accepté la gestion d'Hydro au niveau de la recherche, ce n'est pas tout à fait juste, parce que, quand on questionne et on regarde même le rapport financier d'Hydro, le montant en valeur absolue des efforts de recherche qu'ils nous présentent varie très peu. Pourquoi? Parce que, depuis quatre, cinq ans, ils ont ajouté... même pas quatre, cinq ans, je vous dirais deux, trois ans, deux ans peut-être, ils ont ajouté l'amortissement de leurs travaux dans leur colonne de dépenses, ce qui fait qu'on a l'illusion qu'il se fait une dépense extraordinaire, mais dans les faits ces dépenses de recherche et de développement diminuent énormément depuis deux, trois ans.

Alors, le point que je fais, c'est qu'il me semble que, si nous voulons passer à travers le XXIe siècle, avant d'atteindre le XXIIe, il faut que nous explorions toutes les avenues pour modifier nos façons de faire, trouver de nouvelles sources. Il n'y en aura pas une qui sera la panacée, il y aura une gamme de sources d'énergie qui vont nous permettre de passer à travers des périodes jusqu'à ce qu'on découvre la panacée qui pourra être la fusion nucléaire, je n'en sais rien, et vous non plus probablement.

Alors, cela dit, l'idée d'avoir un institut national de recherche en électricité du Québec financé par bien sûr une partie des fonds qui viennent de l'Hydro, une partie qui viennent aussi des entreprises, comme l'IREQ l'avait avant, je vous ferais remarquer, vous vous rappellerez peut-être, de l'industrie, quand on fait des développements avant la commercialisation pour des entreprises qui veulent développer de nouveaux produits...

On a ici des manufacturiers qui sont venus nous voir, des gens du Conseil du patronat, plein de gens. On le sait, que la recherche est la clé, en tout cas une des clés pour l'avenir dans tous les secteurs. Donc, c'est ça, l'idée que j'ai, là. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Mais j'arrête là-dessus parce que je ne veux pas non plus... J'ai d'autres questions à vous poser et des collègues aussi qui veulent continuer.

Vous m'étonnez quand vous dites que la production d'énergie éolienne devrait être sous Hydro-Québec. Est-ce que vous ne craignez pas que concentrer tout cela à l'intérieur d'une seule société n'accorde une autorité, une force tellement grande à cette société-là? Est-ce qu'une voie comme la SEBJ, par exemple, qui avait un mandat qui lui permettait de réaliser des projets en impliquant l'industrie mais qui demeurait quand même dans l'ensemble du portefeuille d'Hydro, ne permettrait pas d'être plus flexible un peu? Parce que, moi, je crains beaucoup les bureaucraties, et là ça commence à être gros, là, hein? Et, si on regarde l'organisation de l'Hydro aujourd'hui et qu'on lui donne un mandat de développer l'éolien, d'abord il n'y a personne qui connaît ça là-dedans. La plus belle preuve, c'est le résultat qu'on a eu par rapport à leurs estimations. Donc, ils n'ont aucune valeur ajoutée à apporter. L'équipe de recherche qui faisait de l'éolien dans les années quatre-vingt, elle a été démantelée en 1988, si ma mémoire est bonne. C'est ce qu'ils sont venus nous dire ici. Donc, tu sais, c'est quoi, l'avantage? C'est quoi, la valeur ajoutée de faire ça?

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Si on ne l'a pas, il faut la constituer. C'est aussi simple que ça. Pour ce qui est de la formule, là, pour moi ce qui est important, c'est que la propriété du parc éolien et son exploitation soient sous la responsabilité d'Hydro-Québec, que ce soit par une division ou peu importe, là, que ça appartienne au peuple québécois, tandis que, si on laisse ça au privé, bien ils se prennent leur cote de profit, puis c'est normal, et c'est ça, le principe. Mais il ne s'agit pas de constituer des bureaucraties. Moi aussi, j'ai bien peur de ça, puis il y en a déjà beaucoup trop, à mon avis, mais ce n'est pas une raison pour quitter des yeux la balle qui dit que, la meilleure façon, en 1962, ils l'avaient, eux autres.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: L'autre point, c'est le cadre réglementaire. Est-ce qu'à votre avis Hydro-Québec Production devrait être assujettie à la Régie de l'énergie?

M. Laviolette (Marc): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: Oui?

M. Laviolette (Marc): Bien oui!

Mme Dionne-Marsolais: Donc, ce que ça veut dire, là, c'est que vous êtes d'accord à ce qu'on au moins modifie, sinon abroge la loi n° 116.

M. Laviolette (Marc): Tout à fait.

Mme Dionne-Marsolais: C'est bien. Je vais passer la parole à mes collègues.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Merci. Moi, j'aime bien... enfin j'aimerais bien trouver les réponses pourquoi Hydro-Québec ne pourrait justement pas être exploiteur des parcs éoliens plutôt que de les laisser au privé. C'est sûr que, là, pour les 1 000, 2 000, 3 000 premiers mégawatts, laissons le risque courir au privé. Mais éventuellement, quand on en aura beaucoup plus, on se dira: Bien, pourquoi est-ce qu'on ne l'a pas gardé?

Cependant, lorsque vous parlez pour les citoyens de Beauharnois, n'y aurait-il pas justement possibilité d'être eux-mêmes les exploitants d'un parc éolien et les promoteurs? Ça pourrait se faire à travers le Québec où, par exemple, une MRC... Plusieurs MRC sont venues nous voir pour nous dire justement qu'elles voulaient développer une minicentrale pour tirer des revenus. Pourquoi justement on ne pourrait pas faire la même chose si, par exemple, une MRC a, dans son comté, sur son territoire, un gisement éolien? Donc, à ce moment-là, bien, c'est sûr que ce serait peut-être moins du privé, l'argent serait redistribué à la collectivité. Mais, dans le cas de Beauharnois, n'y avez-vous pas pensé?

Le Président (M. Bachand): M. Laviolette.

M. Laviolette (Marc): Oui. On a eu ce débat-là. Dans le fond, ça pourrait être une coopérative communautaire, par exemple. D'ailleurs, dans d'autres pays, là, ça s'est fait.

C'est parce que c'est une ressource patrimoniale qui appartient à l'ensemble du Québec. Le vent, là, ça court à travers le Québec, ça. Ce n'est pas juste: quand ça passe à Beauharnois, ça nous appartient, là. Moi, je pense qu'on doit viser... Parce que, même avec une coopérative, mettons, elle va vendre pour faire des revenus, la coopérative, aussi, là. Et, moi, je suis un partisan, surtout dans la situation actuelle du Québec où la caisse commune, ou, si on aime mieux, les finances de l'État... Tu sais, on est pris au Québec pour régler 100 % des problèmes avec 50 % des outils. Il ne faut pas affaiblir notre caisse provinciale, même si je pense qu'elle devrait être plus grosse que ça, là. Bien, en attendant, disons, on n'est pas obligé de l'affaiblir pour que tout le monde prenne leur petite part, même si c'est communautaire.

Moi, je pense que le vent, ça appartient à tout le monde, c'est comme l'eau, et ça devrait aller dans la caisse de tout le monde. Puis l'État est bien placé pour redistribuer ça à travers ses mesures sociales, à travers son développement régional qu'il va prioriser si on veut vraiment faire du vrai développement régional, tu sais, en impliquant tout le monde des régions, y compris la société civile, pas juste les élus. Mais ça, c'est une autre question, là.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Blackburn: Oui. J'aimerais revenir sur une autre question. C'est-à-dire que vous avez parlé tout à l'heure que des sources de production éolienne pourraient servir à la fabrication d'oxygène et d'hydrogène. À quel moment croyez-vous qu'il y aura un marché ou des opportunités pour ce genre de produits? Dans combien d'années peut-on estimer justement qu'il y aura un véritable intérêt économique pour ces sous-produits, finalement?

Le Président (M. Bachand): M. Florence.

M. Florence (Jean-Claude): J'aimerais d'abord préciser que ce ne sont pas des sous-produits, c'est des produits très nobles, des produits très sérieux. Et, vous savez, depuis 1750 que Lavoisier s'est occupé et de l'hydrogène et de l'oxygène, on a acquis une expertise phénoménale dans le domaine de l'hydrogène et de l'oxygène.

L'oxygène, c'est quelque chose qui sert des hôpitaux à aller jusqu'à plein d'affaires, et l'hydrogène est en plein boom actuellement. Savez-vous, par exemple, que j'applaudis au... Vous parliez des chercheurs d'Hydro-Québec. Je les salue bien bas d'avoir réussi à imposer leur TM4 jusqu'en Chine alors qu'ils avaient ce projet-là depuis je ne sais pas exactement, mais, je pense, dans les années 1985-1987. Ils avaient trouvé le TM4. Le TM4 est quelque chose qui est merveilleux actuellement. Bon.

n (18 heures) n

L'hydrogène, le problème, c'est qu'il faut que vous vous positionniez dans le fait que, si j'abandonne le thermique ? et vous devez penser ça: j'abandonne le thermique ? à ce moment-là il faut que j'aie, pour parler, comme M. le ministre tout à l'heure, de développement économique durable, il faut parler d'une source différente. Or, cette source différente, actuellement la meilleure source, c'est l'hydrogène, et pas pour le XXIIe siècle, pour dans cinq ans, six ans, sept ans. C'est dans la décennie qui s'en vient.

Les plus grands spécialistes, dont M. Reeves, pensent que, d'ici cinq à six ans, on verra des autobus à hydrogène dans les villes. L'IREQ a déjà l'IRH. L'Institut de recherche de l'hydrogène a déjà toutes les potentialités pour stocker de l'hydrogène, et l'adaptation de faire des moteurs avec de l'hydrogène comme carburant est très simple. Demandez aux spécialistes, ils vont vous dire que c'est juste qu'au lieu de mettre du gaz naturel on mettra de l'hydrogène, et le moteur fonctionne bien.

Donc, ce que je sais, moi, c'est que, dans la prochaine décennie, avant même... Ce que j'aimerais, c'est qu'avant même que vous alliez en élection il y ait les premiers autobus à hydrogène qui roulent dans les villes du Québec. Ce serait mon rêve le plus cher, c'est-à-dire d'ici deux ans à peu près. Mais il faut s'y mettre. Il ne faut pas rejeter, rejeter, en disant: Ah! on va faire une centrale thermique. Non, il faut y aller.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Florence. Ça complète un peu avec l'intervention de M. le député de Lac-Saint-Jean. Donc, MM. Laviolette, Florence, Trottier, merci infiniment de vous être présentés à la commission. Ça vient clore les travaux de cette commission pour aujourd'hui. Donc, je vais ajourner les travaux à demain matin, 9 h 30. Merci encore. Bon retour chez vous!

(Fin de la séance à 18 h 1)


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