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Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mardi 26 février 2008 - Vol. 40 N° 23

Consultation générale sur le rapport du ministre du Travail sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, bonjour, tout le monde. Même s'il nous manque une porte-parole, on va commencer, le temps que je fasse mes annonces... De toute façon, on a quorum. Alors, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, s'il vous plaît.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du rapport du ministre du Travail sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Gosselin (Jean-Lesage) est remplacé par M. Therrien (Terrebonne); M. Merlini (Chambly) est remplacé par Mme Lapointe (Groulx); M. Dufour (René-Lévesque) est remplacé par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve); et Mme Morasse (Rouyn-Noranda?Témiscamingue) est remplacée par Mme Maltais (Taschereau).

La Présidente (Mme Morissette): Merci. Donc, ce matin, nous avons la Centrale des syndicats démocratiques avec nous, ensuite nous aurons l'Union des municipalités du Québec et, en fin d'avant-midi, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux.

Auditions (suite)

La façon de fonctionner est que vous disposez de 15 minutes pour nous faire la présentation de votre mémoire. Ensuite, les différents groupes parlementaires auront chacun un bloc de temps pour vous adresser leurs questions. Moi, je vais vous faire des signes, lorsque le temps réduira, pour vous indiquer combien de temps il vous reste. Et puis en gros, moi, je vais jouer à la police pour couper quand le temps achève. Malheureusement, je m'excuse à l'avance de ça. Donc, M. Faucher, est-ce que c'est vous qui allez parler?

Centrale des syndicats démocratiques (CSD)

M. Faucher (Claude): Oui.

La Présidente (Mme Morissette): Donc, s'il vous plaît, si vous voulez vous présenter et présenter les gens avec vous, puis vous disposez de 15 minutes.

M. Faucher (Claude): D'accord. Alors, j'aimerais, d'entrée de jeu, me présenter. Je suis Claude Faucher, vice-président de la Centrale des syndicats démocratiques. Et, pour faire la présentation de la CSD, je suis accompagné, à ma droite, de Renée Rodrigue, qui est responsable provinciale de la condition féminine à la CSD, et, à ma gauche, de Francine Richer, qui est responsable de la formation à la CSD.

Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mme la présidente de la Commission de l'équité salariale, mesdames messieurs, il nous fait plaisir, au nom de la Centrale des syndicats démocratiques, de venir exprimer notre point de vue concernant le rapport du ministre du Travail sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale, donc rapport de novembre 2006.

La CSD, c'est une centrale syndicale qui regroupe 65 000 membres à travers le Québec, principalement des travailleuses et des travailleurs oeuvrant dans le secteur privé et pour un grand nombre dans des petites et moyennes entreprises.

C'est donc avec beaucoup d'intérêt que la CSD s'acharne et s'attaque à la question de l'équité salariale. D'ailleurs, depuis sa fondation en 1972, il s'agissait là d'une des très grandes préoccupations de la centrale. Et effectivement on a salué, en 1975, bien sûr par l'adoption de la Charte des droits et libertés de la personne, l'article 19 en particulier, qui prévoit que toute personne a droit à un salaire égal pour un travail équivalent. Cependant, force est de constater avec le temps que l'article 19 de la charte, bien qu'il protège un droit fondamental, a été un moyen bien peu utilisé ou mal compris pour faire en sorte que les femmes aient l'accès a l'égalité dans leur traitement pour des emplois qui sont équivalents à des emplois dits de catégorie masculine. En 1996, c'est avec aussi beaucoup d'enthousiasme qu'on a applaudi l'arrivée de la Loi sur l'équité salariale, bien qu'on considérait à l'époque que c'était une loi qui était certainement très perfectible.

La CSD est active depuis longtemps, ne serait-ce que par les programmes de formation qu'on offre à l'intention de nos syndiqués, ne serait-ce que par notre contribution aux journées de l'équité salariale du 21 novembre, que par notre rapport aux différents comités de la commission, de même que nos interventions, que ce soit ici, en commission parlementaire, ou dans les consultations privées que conduit la Commission de l'équité salariale.

Dans un premier temps, la CSD voudrait saluer haut et fort les entreprises du Québec et les syndicats qui ont accompli les démarches d'équité salariale de manière conforme aux dispositions de la Loi sur l'équité salariale. On pense qu'il s'agit d'un effort important de ces groupes-là et qu'ils doivent être salués haut et fort.

Cependant, notre enthousiasme dégringole passablement rapidement quand on voit les résultats qui nous sont rapportés dans le rapport du ministre sur la mise en oeuvre de l'équité salariale. Ce qu'on constate en fait, c'est que, plus de quatre ans après l'échéance du 21 novembre 2001, donc date butoir pour les entreprises de se conformer à la Loi sur l'équité salariale, il y a seulement 47 % des entreprises qui ont terminé leur exercice. Ce qu'on note aussi par rapport au rapport précédent de 2002, qui concernait les entreprises de 10 à 49 salariés, c'est que seulement 5 % d'entreprises additionnelles comptant 10 à 49 salariés se sont conformées à la loi entre 2002 et 2006, ce qui laisse entendre, à la CSD, qu'à ce rythme-là, ça va prendre 40 ans pour atteindre l'équité salariale au Québec, ce qui est tout à fait inadmissible.

n (9 h 40) n

Pire encore, seulement 32 % des entreprises qui ont accompli les exercices d'équité salariale ont constaté des écarts, 32 % ont constaté des écarts, alors que la discrimination salariale à l'endroit des femmes est reconnue comme une discrimination systémique. Ce sont là les mots mêmes de la Loi sur l'équité salariale. On trouve ça très étonnant. Pire encore, on constate que 80 % des entreprises de 100 salariés et plus seulement ont formé un comité d'équité salariale, alors qu'ils avaient l'obligation légale de le former. Seulement 81 % des grandes entreprises ont identifié des catégories féminines, ce qu'on trouve totalement inacceptable. Et on pense qu'il y a des problèmes majeurs dans la compréhension et l'application de la loi: seulement 81 % ont déterminé des outils, une méthode, une façon de faire pour faire de l'évaluation des tâches, et la même proportion ont évalué et comparé les catégories.

Ce que le document ne nous dit pas, c'est que les 19 % qui se sont mêlés ou qui n'ont pas appliqué correctement les dispositions de la loi, est-ce que ce sont les mêmes 19 % qui, sur toute la ligne, sont dans l'erreur ou si ce sont un amalgame d'entreprises qui font que 19 % n'ont pas fait telle affaire ou 19 % n'ont pas fait telle autre? Ça, on ne le sait pas, mais néanmoins on considère que, 19 % de programmes mal faits parmi le peu d'entreprises qui ont fait les démarches d'équité salariale, on trouve ça inacceptable.

Dans les entreprises de 10 à 49 salariés, ce qu'on constate, c'est encore pire: seulement 56 % ont trouvé des catégories à prédominance féminine. Donc, ce qu'on peut dire, c'est que, dans les entreprises, que ce soient les 10 à 49 ou les 100 et plus, les secrétaires sont disparues des entreprises, les réceptionnistes sont disparues des entreprises. C'est quand même étonnant. Ça nous dénote, quant à nous, à la CSD, qu'il y a eu un problème majeur d'incompréhension, de méconnaissance et d'application des dispositions de la Loi sur l'équité salariale quant à la détermination des catégories et à la détermination des prédominances des catégories féminines et masculines. Parce que, des catégories neutres, il ne devrait à peu près pas y en avoir dans notre société, quand on sait que les femmes sont concentrées dans un très petit nombre d'emplois au Québec. Donc, seulement 30 % de constats d'écarts pour une discrimination systémique: un signal, une lumière rouge, un problème majeur d'application de la Loi sur l'équité salariale.

La CSD d'ailleurs ne comprend pas le ton plutôt jovialiste du rapport de mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale, qui semble mettre de l'avant les vertus des entreprises qui ont fait un certain nombre d'efforts, alors que, quand on analyse les chiffres, on trouve ça dramatique, la situation au Québec. Il est clair qu'il y a eu des vices dans l'application de la loi. Il est clair que les catégories d'emploi à prédominances féminine et masculine n'ont pas été comprises par les entreprises. Pourtant, on est très désolés de constater que rien, dans le rapport, n'indique un changement dans la loi pour faire corriger ces erreurs-là, qui ont été commises de bonne foi pour plusieurs probablement mais qui ont été commises dans l'établissement des programmes d'équité salariale.

Les affichages, un autre problème qu'on constate. Il y a des affichages déficients et il y a même bon nombre d'entreprises qui n'ont tout simplement pas fait d'affichage. Donc, on a fait une démarche d'équité salariale dans le bureau et on n'a pas informé les salariés de cette démarche-là. À plus forte raison, 54 % des entreprises qui disent avoir informé les salariés, seulement 54 % ont informé les salariés de leurs droits et recours. Alors, déjà, les salariés qui sont dans les milieux de travail, ce n'est pas des juristes, ce n'est pas des gens qui maîtrisent sur le bout des doigts les lois et en particulier la Loi sur l'équité salariale. Comment voulez-vous qu'ils déposent des plaintes et qu'ils obtiennent justice quand ils ne connaissent pas leurs droits et recours alors que la loi était claire là-dessus? Quand l'employeur affiche la démarche d'équité salariale, il devait également afficher les droits et recours des salariés pour leur permettre justement de faire valoir leurs droits.

Maintenant, notre constat, c'est qu'avec toutes ces erreurs, toute cette démarche mal comprise, on n'est pas surpris que les retombées économiques soient si minces pour les entreprises qui disent... Bien, finalement, on s'en sert un peut comme pour dire: Ce n'est pas si mal, la Loi sur l'équité salariale. Ça coûte grosso modo 1 % de la masse salariale, mais il y a un nombre d'employés qui ont des ajustements de l'ordre d'à peu près 6,5 %. Mais, pour nous, ça, c'est un signe majeur, un signe majeur que l'équité salariale est loin d'être atteinte. Parce que, s'il y a une discrimination systémique et qu'on constate que, dans les catégories d'emploi, celles qui ont droit à des ajustements, parce que la démarche, prenons pour acquis qu'elle a été bien faite, ont droit à des ajustement de 6,5 %, nous pensons que l'effet global sur la masse salariale devrait être passablement plus important si la démarche aurait été bien faite.

Concernant les voies de développement maintenant, bien on va passer vite sur les voies de développement, avec lesquelles on est d'accord. Par exemple, plus de soutien auprès des entreprises, plus de support, d'information, ça, on est bien d'accord. Puis on est d'accord que la commission explique davantage aux entreprises et aux petites entreprises la question de la démarche d'équité salariale. Mais on pense qu'il faut qu'on mette beaucoup, beaucoup, beaucoup d'emphase et d'accent sur la compréhension de ce que c'est qu'une catégorie d'emploi, selon les critères élaborés par la loi, et de ce que c'est que la prédominance, comment on peut la définir, la prédominance, en fonction des quatre lignes directrices prévues à la loi et non pas uniquement la règle du 60 %.

On est d'accord que la commission tente de rejoindre les salariés les plus vulnérables, en particulier dans les PME. Mais nous pensons que, dans les grandes entreprises aussi, il y a encore beaucoup de travail à faire. Et nous souhaitons que la commission soit très vigilante et fasse aussi son boulot, qu'on ne néglige pas les grandes entreprises uniquement parce qu'on veut faire plus d'interventions dans les petites et moyennes entreprises.

L'importance de l'affichage est capitale. Il faut que les affichages soient complets, détaillés, qu'on traite des recours. Et ça, la loi n'est pas claire là-dessus: on ne le dit pas et on n'apporte aucune correction pour nous assurer que les affichages soient compréhensibles et compris des salariés.

Il faudrait aussi ? puis, s'il y a un manque dans le rapport, on n'en parle pas ? prévoir un moyen, une façon de revenir en arrière pour corriger les programmes d'équité salariale qui ont été faits de bonne foi mais qui, en raison de la méconnaissance de l'application de la loi, ont provoqué des erreurs. Donc, l'inéquité persiste encore, et on voudrait pouvoir corriger ces erreurs-là par une révision des programmes de temps en temps. Ce n'est pas tout de vouloir faire le maintien, mais maintenir un programme mal fait, ça n'apporte pas grand-chose, hein? Alors, il faut être capable de corriger les erreurs.

Pour ce qui est de l'assujettissement des entreprises qui atteignent 10 salariés, on est tout à fait d'accord avec ça. La question de la taille d'une entreprise un jour qui serait considérée comme étant de cette taille la vie durant, ça, ça n'a pas de bon sens, c'est une lacune à corriger.

On propose que la commission mette sur pied une ligne 1 800 pour permettre aux travailleuses du Québec de pouvoir poser des questions, porter des plaintes, avoir un accès facile et gratuit à la Commission de l'équité salariale pour faire valoir nos droits puis que la commission sache un peu quels genres de questions se posent parmi les salariés.

Sur la question de l'utilisation des données, on est bien surpris parce qu'entre le rapport initial, le projet de rapport initial, et celui-ci, il y a des choses qui sont disparues et qui nous apparaissaient fort importantes, comme, par exemple, la présomption quant à la taille de l'entreprise si les données sont disparues et l'imposition d'infractions pénales pour une entreprise récalcitrante. Nous, ce qu'on dit, c'est que, si les données sont perdues, il faut soit qu'on prenne les données qu'on aura convenu avec les travailleuses et les travailleurs et les syndicats, quand ils sont syndiqués, ou à défaut qu'on prenne les données les plus favorables aux salariés de l'entreprise parce que ce n'est pas de la faute des salariés si l'employeur a perdu ces données.

La question de rejoindre les travailleurs, le rapport laisse entendre que l'employeur doit prendre des mesures raisonnables. Nous, on pense que ce n'est pas assez insistant. Si l'employeur a été récalcitrant, qu'il a dépassé son délai, c'est plus que des mesures raisonnables, il est tenu de tout faire ce qui est en son pouvoir pour rejoindre les travailleurs, pour leur rendre justice et leur remettre finalement les ajustements salariaux qu'ils ont droit.

On pense que la loi devrait préciser la durée de l'affichage ? durée de 60 jours, qui est le délai prévu pour la contestation. Mais, comme la durée de l'affichage n'est pas prévue, l'employeur ne peut pas afficher quand même juste une journée puis dire: Contestez dans les 60 prochains jours. Ce serait un non-sens. Alors, ce qu'on souhaite, c'est que l'affichage soit de 60 jours, qu'il soit détaillé: qui a fait la démarche, comment on l'a faite, qu'est-ce que ça a donné, quels sont les recours pour les salariés.

n (9 h 50) n

Concernant le maintien, rapidement, je termine là-dessus, il faut qu'il y ait un examen périodique. Ça va de soi. On est tout à fait d'accord avec ça. Mais on pense qu'il faut que la loi prévoie la participation des salariés. Quand il y a eu des comités d'équité salariale, il faudrait que les comités reprennent vie, qu'ils reçoivent toute l'information pertinente pour assurer le maintien de l'équité salariale; là où il n'y a pas eu de comité, que les salariés soient impliqués. D'ailleurs, le Bureau international du travail le dit lui-même que, quand les salariés sont impliqués, c'est un excellent moyen de faire en sorte que l'équité soit atteinte.

Donc, que les recours pour les salariés soient inscrits dans la loi quant à une démarche de maintien d'équité salariale, que les membres des comités, que les syndicats ou que les salariés puissent faire des plaintes, mais pas faire une plainte un jour, puis, si j'ai dépassé mon délai, je perds mon recours. Ça, pour nous, c'est un non-sens. Il s'agit d'un droit fondamental. Si on réalise que l'équité salariale n'est pas atteinte, on doit pouvoir en tout temps faire une plainte, ne serait-ce que de réduire la période rétroactive d'ajustement si nécessaire, un peu ce qu'on appelle, en droit du travail, des griefs continus. Donc, si on a laissé écouler le délai, on a moins de rétroactivité, mais on ne perd pas notre droit à un ajustement pour le futur. Ça, on pense que c'est capital. Ce n'était pas écrit dans notre mémoire, mais c'est important de le faire.

Bon. Quant à la conciliation, on est tout à fait d'accord. Le rôle de la commission devant la CRT, on est tout à fait d'accord. Les entreprises récalcitrantes à notre avis devraient faire l'objet d'une attention toute particulière, et on devrait les forcer à créer un comité d'équité salariale et les forcer à accepter que la Commission de l'équité salariale les suive de très près dans l'accomplissement de leurs démarches puisqu'elles sont récalcitrantes depuis déjà beaucoup trop longtemps.

Donc, ce qu'on veut, c'est des moyens plus appropriés, une véritable volonté de faire respecter un droit fondamental des femmes d'avoir un salaire égal pour un travail équivalent. Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, M. Faucher. Donc, on irait tout de suite du côté du bloc appartenant au ministre. Alors, M. le ministre, à vous.

M. Whissell: Alors, merci, M. Faucher, Mmes Richer et Rodrigue. Alors, vous avez fait une excellente présentation, je dois vous l'avouer. Beaucoup de choses ont été dites, vous avez ratissé large ce matin, sûrement histoire de bien nous réveiller en cette journée de commission. Mais, tout d'abord, je tiens à saluer le... lorsque vous reconnaissez qu'il y a un bon bout de chemin qui a été fait, je pense, nonobstant qu'il en reste encore beaucoup à parcourir, de reconnaître qu'au nom des travailleurs et de la société la loi justement a permis de faire un bout de chemin, je pense que c'est honorable de le faire.

Vous avez beaucoup parlé sur les catégories d'emploi, et vous avez donné en exemple que, dans certaines entreprises, la catégorie de secrétaire avait disparu. J'aimerais ça vous entendre un peu, parce que ça semble être assez important dans votre présentation. Parce que c'est la première étape pour faire un processus d'équité, de bien identifier nos catégories d'emploi.

Et d'ailleurs vous avez dit, bon, que de le revoir d'une façon périodique, ce serait certainement sage, compte tenu du fait que peut-être que le premier exercice n'a pas été fait dans sa juste valeur. Mais tout ça, bien, si je peux dire ainsi, la définition qu'on va donner aux catégories d'emploi et à savoir qui on va inclure dans les catégories d'emploi, alors j'aimerais vous entendre davantage, puis dans une perspective à savoir comment qu'on peut renforcir la loi ou la bonifier pour justement s'assurer que les employeurs, puis vous l'avez dit, à tort ou à raison, là, de bonne foi certainement dans certains cas... puissent avoir une meilleure compréhension de la loi et établir les meilleurs catégories d'emploi.

Mme Richer (Francine): Oui. Alors, si vous permettez, M. le ministre, ce qu'on a fait, ça a été de vous présenter les points sur lesquels à notre avis il peut y avoir des difficultés fondamentales d'application de cette loi-là. Alors, le premier principe, il faut qu'on y aille au niveau de la participation. On s'aperçoit que, quand les femmes sont capables de participer, quand les femmes ont leur mot à dire dans la catégorie dans laquelle elles se retrouvent ou, pour les très petites entreprises, sur les résultats qui sont affichés, on note une différence au niveau des scores finaux. Ça, pour nous autres, c'est important, la participation. Donc, plus que notre loi va permettre une participation, que ce soit en termes de comité ou d'information sur l'affichage, plus qu'on va se donner des chances d'atteindre l'objectif qu'on s'est donné comme société, c'est-à-dire d'atteindre l'équité salariale pour les femmes.

Une autre grande difficulté qu'on a rencontrée, et ce, même auprès des entreprises qui prétendent avoir terminé la démarche, et je pense que c'est de bonne foi, c'est l'identification des catégories. C'est un nouveau phénomène, on fonctionne, dans nos conventions collectives ? et là je parle pour les syndiqués bien sûr ? avec des titres d'emploi, on ne fonctionne pas avec des catégories. Tout de suite, au départ, on l'a dit qu'il y avait un problème d'application. Ce qu'on a constaté, c'est que, plutôt que d'essayer de construire des catégories comme la loi le prévoyait, on est allés souvent dans du poste par poste pour ne pas se casser les pieds. Mais on trouve étonnant, dans une société comme la nôtre, où les femmes sont cantonnées dans des postes féminins, comme vous l'avez dit, M. le ministre, dans certains postes féminins, et que les hommes ont des jobs de gars, on trouve étonnant qu'il y ait autant de catégories neutres. Ça sort d'où, toutes ces catégories neutres là? Pour nous, ça, c'est un problème d'application. Ce n'est pas normal qu'il y en ait autant dans les entreprises. Ce n'est pas ça, la réalité du travail, M. le ministre. Alors, ou bien il y a des consultants qui ont joué large et qui ont promis des scores qui ne coûteraient pas cher, ou bien il y a eu une incompréhension. Mais de toute façon il faut qu'on se donne des moyens pour corriger ça. Ce n'est pas normal, les catégories neutres sont tombées dans la craque, on n'est pas capable de les utiliser pour corriger ou pour se comparer. Or, il faut que ça change, ça.

Dans les catégories d'emploi à prédominance féminine, comment se fait-il qu'on n'a, dans une entreprise de 10 à 49, que 56 % des entreprises qui nous disent qu'ils ont trouvé des jobs de femmes? Que 56 %. Je veux croire qu'on est minoritaires, là, dans ces entreprises-là, mais, quand le vice-président de la CSD vous dit: Mais ils sont où, les secrétaires puis les réceptionnistes, dans ces entreprises-là? Comment ça se fait qu'on n'a même pas su trouver une seule job de femme dans ces entreprises-là? 44 % des petites entreprises de 10 à 49 qui prétendent avoir fait l'équité salariale correctement n'ont pas trouvé une seule job de femme, messieurs, mesdames.

Dans les grosses entreprises, 100 et plus, 81 % seulement des entreprises ont trouvé au moins une job de femme. Mais je ne sais pas, mais j'ai l'impression qu'on ne vit pas sur la même planète, là. Il y a quelque chose qui ne marche pas, il ne faut pas être tordu... et je peux continuer. Les petites n'étaient pas obligées de faire des catégories, certaines l'ont fait. Chapeau! comme vous l'avez dit. Mais je préférerais, M. le ministre, vous entendre dire: Il faut donner un coup de barre pour améliorer cette situation-là, plutôt que de se flatter, se flatter et se flatter pour remercier celles qui ont fait plus que nécessaire.

S'il y a des gens qui ont déjà une conscience, tant mieux, mais ce sont de droits, les droits des femmes, dont on parle. Puis, si, au niveau déjà de la catégorie d'emploi, c'est mal fait, s'il n'y a pas de comité où est-ce que les femmes peuvent se faire entendre, c'est sûr que, les droits, par la suite on va arriver au bout, puis il ne va pas y avoir beaucoup d'entreprises qui vont être capables de dire qu'ils ont trouvé des écarts salariaux, puisque c'est ça qui démarre la démarche.

M. Whissell: Alors, Mme Rodrigue, vous...

Mme Richer (Francine): Richer.

Une voix: Richer.

M. Whissell: Richer, pardon.

Mme Richer (Francine): Ça va, M. le ministre.

M. Whissell: Écouter... Vos solutions, c'est quoi: plus d'affichage ou un meilleur affichage, plus pertinent?

Mme Richer (Francine): Ça nous prend... Pour les entreprises qui ne l'ont pas fait, là, il faut serrer la vis. Moi, je pense que, là, c'est assez que de dire que ce n'est rien qu'un manque d'information, il faut serrer la vis. Pour les entreprises qui prétendent l'avoir déjà fait mais que ce n'est pas fait correctement, il faut donner aux gens en place la possibilité de demander des vérifications. Mais, pour ça, il faut que les gens sachent de quoi il s'agit.

M. Whissell: Puis, quand vous dites...

Mme Richer (Francine): Donc, il faut donner de l'information puis il faut donner le pouvoir de contester, même si l'affichage est terminé et même si c'est supposé être réglé. On part avec deux chiffres, M. le ministre. Vous avez travaillé avec deux chiffres: 68 % des entreprises prétendent l'avoir fini. Or, quand on leur pose des questions sur ce qu'ils ont fait, on s'aperçoit que finalement ce n'est rien que 47 % que vous nous avez dit. Là, il y a un 21 % qui pense l'avoir fait, mais ce n'est pas fait, et ça, c'est vous qui me le dites, là, hein? Qu'est-ce qu'on fait avec eux autres? Ils n'y toucheront plus, ils considèrent qu'ils l'ont fini. Si, nous autres comme société, on ne se donne pas les moyens pour faire réouvrir ça, là, ça ne bougera plus, cette partie-là. C'est canné pour eux autres.

M. Whissell: Vous m'amenez sur une question...

Mme Richer (Francine): C'est aux gens à la base qu'il faut donner les moyens, qu'on s'adresse à la commission, que la commission nous permette de revoir. Les entreprises qui ont fait la démarche, là, de bonne foi entre 1997 puis 2001, si aujourd'hui on se dit que les catégories, ce n'est pas clair, imaginez comment c'était en 1997. Est-ce qu'on va maintenir ça, c'est ça qu'on veut maintenir, ou si ce qu'on veut, c'est rétablir l'équité salariale?

M. Whissell: C'est certainement la deuxième partie: rétablir l'équité salariale.

Vous avez fait mention... puis vous venez de l'aborder, mais votre vice-président l'avait fait, sur les recours. Vous avez dit qu'il faudrait inscrire des recours dans la loi. O.K.? Présentement, il y en a un certain nombre, là, il y a quand même des sanctions qui sont prévues. Mais vous faisiez référence à quoi? Parce que plus de rigueur, ça veut dire aussi certainement des recours de la part des travailleurs. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Et après ça peut-être que j'irais avec mes collègues, et, s'il reste du temps, je reviendrais avec une autre question.

M. Faucher (Claude): Alors, sur la question des recours, bien, il y a divers moyens qui peuvent être mis de l'avant. Effectivement, il y a déjà un certain nombre de recours, dans la loi, pour les gens qui sont en processus de démarche d'équité salariale. La Commission de l'équité par ailleurs n'a à peu près pas, sinon jamais, utilisé de recours pour serrer la vis aux employeurs, à ma connaissance. Donc ça, ce serait un moyen à entreprendre.

Mais aussi, à partir du moment où on constate qu'il y a eu de l'incompréhension puis des erreurs dans les programmes, il faut d'une part qu'on ait révision de programmes, si on a révision de programmes, il faut un nouvel affichage et il faut qu'il y ait des recours, il faut qu'il y ait une renaissance des recours qui ont pu être expirés à la suite des affichages qui ont été faits. Mais tous les affichages incomplets qui ne permettaient pas aux salariés de comprendre ce qui avait été fait, tous les affichages incomplets qui ne permettaient pas aux salariés de savoir qu'il y avait un recours... il faut qu'un salarié aujourd'hui qui réalise qu'il s'est fait flouer, qu'une salariée qui s'est fait flouer puisse déposer une plainte et obtenir justice. Parce que le droit qu'elle recherche, cette salariée-là, c'est un droit fondamental. Ce n'est pas un petit droit qu'on peut laisser aller, là, c'est un droit fondamental. Charte des droits et libertés de la personne, moyen de mise en oeuvre par la Loi sur l'équité salariale, ce n'est pas peu, ça, ce n'est pas peu dire, c'est beaucoup. Alors, il faut lui donner ce moyen-là.

Quand on dit que c'est un recours qui pourrait être de la nature de ce qu'on appelle en droit du travail un grief continu, on est en droit du travail quand l'employeur ne respecte pas la convention collective à répétition mais que le délai prévu pour faire un grief est expiré, on ne perd pas notre droit pour autant. On fait un grief, mais, si on avait un délai de 60 jours pour faire un grief, notre rétroactivité dans notre réclamation sera de 60 jours, mais au moins on réussira un jour à obtenir justice. Alors ça, c'est des petits moyens qui pourraient être ajoutés facilement à la loi.

n (10 heures) n

Sur le maintien, il n'y a rien dans la loi. Sur le maintien, on ne prévoit pas d'affichage, on ne prévoit pas de contenu d'affichage, on ne prévoit pas de participation des salariés, on ne prévoit pas d'information aux salariés quant à qui a fait le travail, comment s'est fait le travail, quel résultat a donné ce travail-là et quel recours j'ai ensuite. Ça, il faut le prévoir, que ce soit, si on crée des comités, comme on le propose, le comité d'équité salariale, un membre, un membre du syndicat, un dirigeant du syndicat. Une personne salariée qui se croit lésée, qu'elle puisse déposer une plainte à la commission, mais que celle-ci intervienne avec rigueur et vigueur pour faire respecter la loi. On parle d'une loi fondamentale.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Mme la députée de Laporte, vous avez une question?

Mme Ménard: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, monsieur, mesdames. Alors, selon votre proposition, une entreprise qui n'a pas toujours fait un exercice d'équité salariale, en 2008, et qui n'a pas les registres nécessaires devrait démontrer que son défaut est justifié, sans quoi une présomption de sa taille serait faite et elle serait passible d'une infraction pénale. Donc, vous avez effleuré le sujet tantôt.

Ma question est la suivante: Selon vous, quelle serait la façon la plus simple, la plus juste, pour les salariés et les entreprises, de procéder, étant donné que les entreprises pourraient avoir perdu des données avant de passer à la nouvelle année, le nouveau siècle? Alors, d'après vous, quels seraient les moyens les plus... les façons les plus simples, les plus justes pour...

M. Faucher (Claude): Bon. Disons, quant aux détails, que je vais laisser ça à la batterie d'avocats que le gouvernement peut avoir, qui sont en mesure de réfléchir à bien des choses. Mais ce que je dirais tout simplement, c'est que, moi, je ne crois pas à la perte de données avec l'an 2000, là. Il n'y en a pas eu, de bogue de l'an 2000, comme tout le monde avait si peur que ça arrive, là, il n'y en a pas eu, de ça. Mais il est clair qu'une entreprise, plus elle tarde à rencontrer ses obligations, plus les probabilités sont fortes pour que ses données soient disparues, et ça, c'est inacceptable. Et, si on n'a pas un message clair pour qu'ils comprennent qu'ils doivent agir puis qu'ils comprennent que l'inaction a des coûts... Bien, c'est ça, le problème de la loi actuelle, il n'y a rien. Alors, c'est pour ça qu'on dit, nous...

Puis la proposition de recours pénaux, là, est la proposition qui avait été faite... c'est une proposition qui venait du rapport initial de la commission, là, en préparation du rapport du ministre. Ces propositions-là, on ne les a pas inventées, là, c'était dans les documents de consultation. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on trouve étonnant qu'elles soient disparues entre les deux, nous, on aurait aimé les voir dans le projet de loi.

Mme Ménard: O.K.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Mont-Royal.

M. Arcand: Comment vous expliquez le fait que ce soit si compliqué que ça? Qu'est-ce que vous trouvez finalement dans ça qui rend la chose si complexe, si difficile? Moi, j'étais dans une entreprise auparavant qui relevait cependant du fédéral et dans laquelle on a, au cours des années, établi certaines normes, on faisait venir des consultants, la détermination des emplois, etc. Et ça avait coûté quand même assez cher, en bout de ligne, à l'entreprise, parce qu'évidemment le nivellement ne se fait pas par le bas, ça se fait par le haut, là, je veux dire, en général. Pourquoi on n'avance pas plus vite, à votre avis?

M. Faucher (Claude): Parce que les entreprises ne veulent pas avancer plus vite, les entreprises l'ont dit. Dans le rapport, on le mentionne, les entreprises se sont conformées à la loi parce qu'elles y sont obligées. Si on ne les pousse pas dans le dos, ça ne bouge pas, il n'y a pas d'autodiscipline, dans le domaine, parmi les entreprises du Québec. Donc, l'équité salariale, c'est pourtant un droit fondamental.

Et, quand on parle des coûts, ça me choque un petit peu quand on parle des coûts d'une démarche d'équité salariale parce que, les coûts, ça fait longtemps que les employeurs les ont économisés sur le dos des femmes, ce serait le temps qu'on corrige le tir. Mais une démarche d'équité salariale, c'est peut-être compliqué pour certains; pour moi, ce n'est pas compliqué. Si on se donne la peine de vouloir faire une démarche d'équité salariale puis qu'on prend le temps de travailler sérieusement, on réussit à démystifier bien des choses. Puis ce n'est pas si compliqué que ça, il faut vouloir le faire, cependant. Ça prend une volonté ferme de l'atteindre.

M. Arcand: Donc, vous, vous croyez que c'est une question de mauvaise volonté de la part des employeurs.

M. Faucher (Claude): Bien, à partir du moment où, quatre ans après la date limite prévue dans la loi, il n'y a que 47 % des entreprises qui s'y sont conformées puis que, parmi celles-ci, il y a un paquet d'erreurs, regardez, poser la question, c'est y répondre, hein? Si les syndicats étaient en infraction d'une loi pendant quatre ans, ça ferait combien de temps qu'on se serait fait taper sur les doigts?

M. Arcand: O.K. Dans votre...

La Présidente (Mme Morissette): Il vous reste environ 20 secondes.

M. Arcand: Bon. Alors, écoutez, je vais terminer là-dessus.

La Présidente (Mme Morissette): Désolée.

M. Arcand: Bon. D'accord.

M. Whissell: Moi, je vais vous poser une question dans le 20 secondes. Vous êtes un syndicat, vous représentez plusieurs entreprises. Quel pourcentage des entreprises que vous représentez ont fait l'équité salariale?

M. Faucher (Claude): Ça fait un bout de temps qu'on n'a pas fait de sondage à l'interne, mais, dans les premières années d'application de la loi, on avait fait un sondage. Je pense d'ailleurs qu'on avait communiqué les résultats à la Commission de l'équité salariale. Les démarches étaient entreprises et bien avant la date butoir du 21 novembre, et c'était au-delà de 80 % que les démarches étaient entamées à l'époque. Mais on n'a pas revérifié ça récemment.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup...

M. Whissell: ...réalisé à quel pourcentage?

M. Faucher (Claude): Pardon?

M. Whissell: Vous devez avoir une compilation des entreprises dans lesquelles vous avez fait vos exercices.

M. Faucher (Claude): Ah! je ne suis pas en mesure de vous donner une compilation actuelle des résultats. Mais ce que je vous dis, et il me semble, de mémoire, que c'était autour de 2000, 1999-2000, et le taux d'avancement était au-delà de 80 %.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au temps du côté ministériel. On est rendus tout de suite du côté de l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: Merci. Je vais continuer sur la piste du ministre, je trouve ça intéressant. Vous dites dans votre réponse qu'il y a des entreprises qui avaient entrepris le processus. Pour vous, là, quand ils ont fait le calcul de qui l'a fait et qui ne l'a pas fait, là, quelqu'un qui l'a commencé, son exercice, est-ce que vous considérez que c'est un exercice qui est complété? Et, dans un deuxième temps, si la personne arrive à la conclusion qu'il n'y a pas eu d'écart salarial, est-ce que vous considérez aussi qu'elle n'a pas fait d'exercice salarial?

n (10 h 10) n

Mme Richer (Francine): Oui, moi, je vais répondre. À l'unanimité, les députés, au Parlement, ont voté cette loi-là en disant qu'il y avait un problème systémique. Ça, ça veut dire qu'il y a quelque part autour de 15 %, 20 % des salaires des femmes qui ne leur sont pas donnés. Ce n'est pas nécessairement de la mauvaise volonté de la part des employeurs ou de la part des syndicats, mais il y a une injustice criante qui fait qu'on va reconnaître l'effort physique puis qu'on va le payer, mais qu'on a plus de misère à reconnaître les relations interpersonnelles, par exemple, qui est une qualité grandement féminine dans notre société.

Alors, on s'est dit, n'est-ce pas: Ça prend une loi proactive pour essayer de faire une démarche puis essayer de trouver c'est où qu'on ne les paie pas, les femmes. Qu'il y ait quelques entreprises, des perles rares, où il n'y en a pas, de discrimination, ça se peut. Tant mieux. Mais là, quand on parle d'un problème systémique, ça veut dire, là, que c'est répandu dans un système. Ce n'est pas des accidents de parcours, ce n'est pas 10 méchantes entreprises puis huit méchants syndicats, là, c'est dans notre système économique. Il faut qu'on s'assoie puis qu'on fasse la démarche. Si on ne se donne pas des outils pour le vérifier, si nos catégories ne sont pas bien faites, si le plan d'évaluation qu'on prend pour comparer les emplois des femmes avec les emplois des hommes est biaisé au départ parce que les salariés ne sont pas assis autour de la table pour dire elles sont où, les qualités des jobs qu'on fait, nous autres, les filles, elles sont où dans ton plan, comment ça se fait qu'il y a 30 % pour l'effort physique, comment ça se fait que tout va aux diplômes, si les femmes ne sont pas assises autour de la table pour faire ça, on va faire toute notre démarche, bien qu'elle soit finie, on va arriver au bout puis on va dire: Bien non, il n'y en avait pas, d'écart, chez nous. C'est ça qui n'est pas acceptable.

Moi, je peux vous citer le cas ? l'entreprise, elle est fermée, mais, croyez-moi, c'est vrai ? d'un consultant qui est allé voir un employeur puis qui lui a promis que ça lui coûterait zéro puis une barre. Ce n'est pas si compliqué que ça à taponner, ces affaires-là, hein? Quand on a des tailleurs puis des dames dans la couture, on va donner des points, tout ce qui vaut, à ce que les gars font. Puis les couturières qui s'éreintent, là, à la pièce, une en arrière de l'autre, ça ne vaut rien. On arrive au bout, il n'y en pas, de modification. Comment ça se fait que 80 % du staff de cette entreprise-là, ce sont des femmes qui font de la couture? Pourquoi leur salaire est correct tout d'un coup? Qu'est-ce qu'on s'est donné comme élément pour le regarder?

Alors, qu'il y en ait, des entreprises, moi, je n'ai pas de problème avec ça. Puis, si vous voulez nous retourner la question des entreprises que nous autres ont a terminées, on peut regarder ça. Mais le vrai débat aujourd'hui: Qu'est-ce que vous allez nous donner comme moyen pour que, dans les milieux de chez nous puis d'ailleurs où ça n'a pas été fait comme il faut, on puisse revenir puis dire: On va se rasseoir? 10 ans plus tard, on en a plus, d'information, on comprend plus qu'est-ce que ça veut dire de la discrimination systémique. Pour nous, c'est plus clair, qu'est-ce que doit être une catégorie d'emploi. Ça ne l'était pas en 2001. Reculez à 2001, vous allez voir. On avait de la misère à en discuter en groupe, ce n'était pas quelque chose de simple, là. On a un bout de chemin de fait comme société. On va s'asseoir, on va regarder. Les entreprises qui l'ont fait de bonne foi avec les syndicats ? ou sans syndicat même dans certains cas ? peuvent avoir fait des erreurs. Aujourd'hui, on a une connaissance qu'on n'avait pas. Donnez-nous des outils qu'on aille corriger ça, qu'on puisse aussi faire un bond de l'avant avec cette partie-là. C'est ça qu'on vient vous demander.

Puis n'oubliez pas le maintien, ça presse. On parle de faire le maintien à partir de 2008, un exercice obligatoire. On est en 2008, qu'est-ce qu'on a fait circuler comme information, là, sur le maintien? Les moyens pour le faire, qu'est-ce qu'on maintient? Une entreprise qui a fait une démarche 10-49, l'employeur tout seul, le syndicat rentre dans cette entreprise-là après, on maintient quoi, nous autres? Des boîtes noires puis pas d'information, comment est-ce qu'on va faire pour faire un maintien d'équité avec ça? C'est de ça dont on a besoin et c'est de ça dont on vient vous parler. Il y a eu des erreurs de bonne foi ou pas, on ne veut même pas le savoir. Quand c'est «booké», là, on va se rasseoir, puis donnez-nous des moyens, on va aller corriger ce qu'on peut aller corriger. Pour le maintien, il faut éviter de refaire les mêmes erreurs qu'on a faites pour l'équité, ça urge. On est supposés être en maintien depuis 2001, et ça, je peux vous le dire, même dans notre milieu CSD, on a de la misère à les faire bouger. Ils ne veulent pas, ils ne comprennent pas, ils nous disent tous qu'il n'y en a pas eu, de changement. Il faut qu'on passe des messages comme société, et c'est l'heure, là, M. le ministre et compagnie.

M. Therrien: À la lecture de votre mémoire, vous contestez les chiffres qui nous sont fournis. Est-ce que vous contestez la méthodologie dont ça a été fourni?

M. Faucher (Claude): Non, non, on ne conteste pas les chiffres, on les prend, les chiffres, et on vous les donne comme on les comprend. On ne les conteste pas. 47 % seulement des entreprises qui ont fait leur job, c'est le rapport qui le dit. Les entreprises qui n'ont pas affiché, les entreprises qui n'ont pas expliqué les recours, les entreprises qui n'ont pas trouvé de catégorie féminine, c'est tout indiqué dans le rapport, ce sont les chiffres du rapport. On ne conteste pas ces chiffres-là. On les constate avec beaucoup de désolation, cependant.

M. Therrien: À un autre endroit, vous souhaitez, à la lecture de votre rapport, une meilleure collaboration avec les syndicats. Je ne veux pas faire de comparaison, là, mais tous les groupes syndicaux qui sont venus nous voir jusqu'à présent étaient très représentatifs au sein des comités. Et je vous dirais même qu'il y a un syndicat qui nous a dit qu'il avait libéré 17 employés à temps plein pendant 38 mois pour faire l'exercice. Est-ce que vous n'avez pas été invités ou vous ne vous êtes pas impliqués parce que...

M. Faucher (Claude): Je ne sais pas de quoi vous parlez, là, parce que, nous, dans les entreprises où on est présents puis qu'il y avait des comités, on a contribué, là. Je ne sais pas de quoi vous parlez.

M. Therrien: Bien, comment vous dites que vous voulez une meilleure collaboration avec le syndicat à ce moment-là? Vous êtes impliqués dans le processus systématiquement.

M. Faucher (Claude): Non, non, non. Non, regardez bien, là, on va revenir un petit peu aux bases de la loi. La loi prévoit des comités pour les entreprises de 100 salariés et plus. En bas de ça, s'il y a un syndicat pour une entreprise de 50 à 100 puis que le syndicat le demande, ça, on l'a fait. 10-49, l'employeur fait sa démarche tout seul. Pourquoi on ne prévoit pas la participation des salariés dans les 10-49 et dans les autres entreprises, qu'il y ait ou non un syndicat? C'est ça qu'on demande.

Ensuite, quand la démarche est faite, il n'y a rien qui prévoit la continuité du Comité d'équité salariale ? un trou dans la loi. Nous, ce qu'on dit, c'est que, si on veut être capable de réviser des démarches d'équité salariale qui ont peut-être été même de bonne foi erronées, ça prend du monde puis ça prend la participation des salariés, ne serait-ce que pour leur permettre de comprendre la démarche puis éventuellement de l'accepter plutôt que de la contester. Les employeurs devraient voir ça comme un avantage et non pas comme un inconvénient. C'est ça qu'on dit.

Dans le maintien de l'équité salariale, il n'y a rien qui dit que le maintien de l'équité salariale va être fait en collaboration avec les salariés. La seule disposition, c'est: quand on renouvelle les conventions collectives, on doit s'assurer qu'on ne crée pas d'écart, de discrimination. C'est insuffisant. Il faut faire une démarche de maintien de l'équité salariale périodique. La commission le propose, le ministre le propose, on est d'accord avec ça. Il faut que ça se fasse avec du monde, du monde du côté des salariés aussi. C'est ça qu'on demande.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, madame, mes collègues, bonjour. Bonjour et bienvenue. Vous avez un discours dynamique, ça fait du bien. Ça réveille le matin. Vous avez parlé tantôt des catégories neutres qui ont tombé comme dans la craque. Ces catégories sont peut-être le reflet des progrès qu'on a faits dans les programmes d'équité. Je fais juste vous mettre «possiblement». Est-ce que le fait de catégoriser les emplois selon qu'ils sont féminins ou masculins n'est pas un retour en arrière sur les progrès faits par la loi? Je vous pose cette question-là.

Mme Richer (Francine): Non, non, non. La loi nous dit que, pour trouver l'injustice au niveau des salaires des hommes puis des femmes, après avoir créé un comité, là, quand c'est obligatoire, là, la première étape, il faut regarder ce qu'on a comme emplois dans notre milieu de travail puis il faut les regrouper. Il y a des critères dans la loi qui nous disent comment on doit les regrouper. Il y a trois critères qui nous permettent de regrouper les emplois ensemble. Une fois que les regroupements sont faits, il faut se demander: Ce regroupement-là, selon la loi, selon les définitions que j'ai dans la loi, est-ce qu'il s'agit d'un regroupement féminin, masculin? J'ai quatre critères.

Premier critère, et c'est le seul critère qui a été utilisé largement, que je sache, c'est le 60 %. Alors, j'ai 10 salariés dans cet emploi-là. Est-ce que six sur 10 sont des hommes ou des femmes? Si je réponds oui à ça, c'est six femmes sur 10, ça devient une catégorie d'emploi à prédominance féminine. C'est la loi qui nous dit de faire ça. Parce qu'à la fin, quand je vais avoir fini d'évaluer tous mes groupes d'emploi, je vais prendre les groupes de femmes, les groupes d'emploi de femmes, les groupes d'emploi d'hommes, puis je vais me demander: Cette job de femme là, ça vaut combien de points finalement? Ça vaut 500. Cette job-là, qui est une job de gars qu'on a dit au début, ça vaut combien de points? Ça vaut 500 aussi. Est-ce qu'ils ont le même salaire? Puis, si la réponse, c'est non, il faut qu'on augmente le salaire des jobs de femmes.

Ça va? Donc, ce n'est pas un retour en arrière qu'on fait, là. La loi nous impose une démarche comme celle-là afin d'aller vérifier si, dans nos entreprises, il n'y aurait pas une discrimination de cachée. Toutes les entreprises de plus de 50 salariés doivent créer des catégories comme celles-là pour ensuite se demander: C'est-u justifié, les salaires qu'on donne aux emplois qu'on a appelés des emplois de femmes?

Le problème qu'on a, c'est que les quatre critères n'ont pas toujours été utilisés correctement. Celui qui a été très utilisé, c'est le quantitatif: Y a-tu 60 % d'un sexe ou de l'autre? Puis, les trois autres critères, j'ai essayé en formation, et je suis convaincue qu'il y a des gens qui ont essayé autour de la table, mais ce n'était pas clair. Le libellé de la loi dit aussi: Peut aussi être considérée comme étant une catégorie à prédominance féminine ou masculine si... et là il y a trois autres critères, trois autres par en dessous. On a eu une difficulté, là, avec ce texte-là, nous autres, c'est comme s'il y avait un concept qui était plus fort que les trois autres. Alors, il a fallu débattre beaucoup de ça. Une fois que ça, c'est fait, il y a des emplois qui ne correspondaient pas ni à des emplois d'hommes ni à des emplois de femmes, c'est eux autres qui tombaient dans la craque.

n (10 h 20) n

Mme Lapointe (Groulx): Vous semblez dire qu'il y en a beaucoup qui ont tombé dans la craque et en même temps vous suggérez...

Mme Richer (Francine): Je peux vous les donner, les chiffres, madame, c'est le ministre qui nous les a donnés.

Mme Lapointe (Groulx): ...vous suggérez que les critères étaient appliqués de façon subjective, si je vous comprends bien.

Mme Richer (Francine): Bien sûr! Bien sûr! Ou parce qu'on a mal compris le sens des trois autres façons de définir ce qu'était un emploi d'homme ou de femme. Oui, ce n'est pas normal qu'il y en ait autant, il y en a trop, il y en a trop par rapport à la réalité de notre monde du travail. Les femmes, on est cantonnées dans 20 types de postes au Québec, 20 jobs, 20 sortes de jobs. Les autres, là, ce sont des exceptions comme vous, mesdames, comme moi. Mais la plupart des femmes, là, elles sont secrétaires, réceptionnistes, hôtesses de l'air, et j'en passe, ce qu'on ne voulait pas faire, là, tu sais, quand on était petites. Alors, ce n'est pas normal. Si on est comme ça cantonnées dur, dur sur des postes, qu'il y en ait autant qui ne se définissent pas d'un sexe ou de l'autre, il y a une erreur d'interprétation ou il y a une façon d'éviter de corriger, une manipulation. Puis je ne peux pas vous dire le pourcentage, demandez-moi-le pas, je ne le sais pas, je ne suis pas assise à toutes les tables. Mais ce n'est pas normal, ces chiffres-là, et M. le ministre l'a dit, d'ailleurs.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, ça met fin au temps du côté de l'opposition officielle. Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour la deuxième opposition.

Mme Harel: Merci. Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Faucher, Mme Rodrigue, Mme Richer, bienvenue, de ma part et de celle de mon collègue le député de Jonquière. Je vous remercie de votre mémoire, ça commence bien cette dernière journée d'examen de l'application de la Loi sur l'équité salariale. Votre mémoire et vos propos ont l'extrême bénéfice d'être clairs, d'être concrets et pratiques. En fait, ce que j'en retiens, c'est que vous nous dites que, pour une grande majorité d'employeurs, tout a consisté à rechercher l'objectif suivant: comment échapper à la loi. Est-ce que je résume à peu près votre mémoire?

M. Faucher (Claude): Ça ressemble beaucoup à ce qu'on pense.

Mme Harel: Il y a toujours cette question qui revient, Mme la députée de Groulx l'a reposée à maintes reprises à l'occasion des travaux de la commission: Est-ce que le fait d'identifier des emplois à prédominance masculine et à prédominance féminine, cela même alimente les stéréotypes? Alors, je pense que la réponse n'a pas dû être claire parce qu'elle repose la question à chaque... ou presque à chaque groupe. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, Mme Rodrigue.

Une voix: ...

Mme Richer (Francine): Bien, on m'invite. Non, je ne pense pas. J'ai eu un exemple dans une des entreprises. Moi, on m'appelait...

Mme Harel: Mme Richer, excusez-moi, d'accord?

Mme Richer (Francine): ...on m'appelait pour intervenir quand il y avait la catastrophe prise dans un milieu, là. Moi, je ne faisais que des situations catastrophe, hein? Je ne suis pas négociatrice, alors je ne faisais que ça, là, de l'équité. Un emploi, un seul titulaire et un homme. Et le comité syndical qui avait fait la démarche arrivait à la conclusion qu'il s'agissait d'un emploi à prédominance féminine. Ah que le monsieur était insulté! Pauvre con. Ce n'était pas une claque sur la gueule qu'on lui donnait, on lui disait: Historiquement, quand ton poste, il a été créé et depuis, sauf toi, c'est toujours des femmes qui ont été là-dessus. Ça fait qu'on va dire que peut-être, dans ce salaire-là, il y a une discrimination puis on va se donner des outils pour aller voir. Puis, si jamais on trouve qu'il y en a une, discrimination, bien on va s'organiser pour que ce soit corrigé. Toi et tous les autres qui suivront, hommes ou femmes, n'auront plus à vivre cette discrimination-là.

Mme Harel: Merci. Je pense que, Mme Richer, vous nous avez donné un exemple qui nous explique très bien que, lorsque ce sera plus payant, les emplois à prédominance féminine seront beaucoup plus occupés par des hommes, et vice et versa, n'est-ce pas? Alors, en fait, c'est que le choix, c'est de pouvoir en faire un, hein? Jusqu'à maintenant, vous le disiez, il y a à peu près 20 catégories d'emploi, et le seul choix pour que ce soit payant: il fallait que ce soient des emplois à prédominance masculine. Puis c'est ce qui nous a permis, nous, les femmes parlementaires et d'autres dans d'autres métiers que l'on dit, comment... non traditionnels, en fait non traditionnels parce qu'il y en avait des traditionnels, donc des métiers non traditionnels, c'est les métiers plus payants, si on peut dire ainsi. Alors, l'équité, c'est de rendre payants également les métiers traditionnellement féminins pour que ce ne soit pas considéré comme dévalorisé, le fait de faire ce métier-là. C'est ça, le fondement, là. Alors, l'idée justement, c'est qu'il n'y ait plus de stéréotypes. Parce que, quand c'est payant, c'est tout le monde qui veut l'occuper.

Je ne sais pas, là, si la réponse sera considérée comme satisfaisante. Mais enfin, quoiqu'il en soit, sur le maintien, je voudrais vous entendre, parce que dans le fond est-ce que je comprends bien, M. Faucher, que tout votre mémoire, c'est pour dire: Si vous voulez que ça marche, faites participer les salariés? Est-ce que c'est un peu à ça que ça revient?

M. Faucher (Claude): La CSD, depuis sa fondation, en 1972, réclame que, dans les milieux de travail, les travailleuses et travailleurs aient accès à la gestion des entreprises, donc qu'on fasse de la participation dans les milieux de travail, et ce n'est pas compliqué. Moi, j'ai déjà fait de l'évaluation des emplois dans les années soixante-dix, et souvent les travailleurs, s'ils n'étaient pas impliqués dans la démarche d'évaluation des emplois... On n'appelait pas ça de l'équité salariale dans le temps, c'était de l'évaluation des emplois. Mais c'est un peu la même affaire. Il suffit juste de s'ouvrir l'esprit puis d'avoir des critères, de développer dans le fond des critères qui permettent aux femmes d'avoir accès à l'égalité. Mais, quand les gens participent, comprennent la démarche, apportent leur argument quant au contenu de leurs tâches, quant aux efforts qu'ils doivent y consacrer, quant aux qualités qui sont nécessaires à l'exercice de leurs tâches, ça éclaire les membres du comité ou les décideurs de ce qu'est réellement cette tâche-là comparativement à une autre. Et ensuite le retour est bénéfique parce que, quand on arrive aux résultats, la personne qui a apporté sa contribution comprend mieux la démarche et accepte généralement beaucoup mieux les résultats.

Donc, c'est pour ça que je dis qu'en bout de piste les employeurs devraient voir ça comme un avantage, la participation des salariés, parce que non seulement ils apportent leur connaissance, leur expertise, mais, en plus, en retour, il y a de bonnes chances qu'ils acceptent mieux les résultats, en tout cas qu'ils les comprennent, les résultats, quand ils leur sont retournés.

Mme Harel: Bon. Vous l'affirmez dans votre mémoire, puis je pense que c'est important de le réaffirmer, cette question est d'ordre public, n'est-ce pas? C'est dans la charte mais aussi dans la loi. Les lois d'ordre public, on ne peut pas y renoncer, hein, on ne peut pas renoncer à des dispositions d'ordre public. Comme, par exemple, le salaire minimum, on ne peut pas renoncer au salaire minimum. On ne peut pas renoncer à l'équité salariale. On ne peut pas renoncer au salaire minimum, on ne peut pas dire: Moi, je vais accepter moins que le salaire minimum.

Alors, il y a des lois d'ordre public, et donc la question est bien plus maintenant de savoir comment on va renforcer l'application dans l'établissement des programmes et dans les programmes. Parce que la loi comme telle n'est pas remise en question, même pas par les employeurs, contrairement à il y a 10 ans. Maintenant, il n'y a plus personne qui est contre dans le fond la loi comme telle, mais ce qu'on dit, c'est que ça a fait son temps, on devrait passer à autre chose maintenant, tu sais. On contourne, finalement.

Mais je comprends que, pour vous, là, ce à quoi on... l'étape qui vient, là, la deuxième génération... Et ça va être un bon test pour l'ADQ, parce que, quand on a voté la loi il y a 10 ans, il y a un député qui n'est pas venu voter, c'est le député de Rivière-du-Loup, l'actuel chef...

Une voix: On ne peut pas soulever l'absence...

Mme Harel: Je ne soulève pas son absence aujourd'hui, je précise simplement le vote, c'est d'ordre public aussi.

Alors donc, là, la question, c'est de savoir comment on va dorénavant corriger les problèmes majeurs d'application dans l'établissement des programmes, dans l'application de la loi, d'accord? Et, à cet égard, j'aimerais aussi vous entendre sur les programmes distincts. Ils ont été acceptés jusqu'à un certain moment. Est-ce qu'on devrait, à partir des modifications qui seront introduites dans la loi, pour l'avenir, changer ça ou rétroactivement?

Mme Richer (Francine): Depuis le début, nous autres, à la CSD, ce qu'on a dit concernant les programmes distincts, et on le maintient, et je pense que c'est important, je vais essayer d'être claire: On ne peut pas empêcher un syndicat qui ne le désire pas de... on ne peut pas l'empêcher de s'exclure, parce que de toute façon l'utilité et son apport quant à la question des femmes, si c'est comme ça que c'est pris, ce sera nul. On s'entend-u? Donc, un syndicat fait la demande pour s'exclure. Il peut s'exclure, il va faire la démarche envers ses membres, dans ses affaires.

Cependant, en ce qui concerne la question des femmes ? et ça, c'est important pour nous ? l'ensemble des postes devraient servir de comparateurs pour la démarche de l'entreprise. Autrement dit, si le syndicat veut évaluer ces postes tout seul avec le boss, parce qu'il fait une demande pour s'exclure tel que c'est prévu dans la loi, il veut s'exclure ? on ne peut pas les forcer, ça ne donnera rien de bon ? alors, qu'il s'exclue, mais les emplois qui appartiennent à cette association accréditée là devraient être remis sur la table du grand comité et servir de comparateurs avec le plan que le grand comité aura développé.

Mme Harel: La loi permet présentement de comparer...

Mme Richer (Francine): Oui. Mais on est en attente d'une décision, là, quant au fait qu'un groupe qui se retire sans femme... il peut-u se retirer? Il y a des décisions, là, qui s'en viennent, on attend ça éminemment, là.

Mme Harel: Mais, vous-même, vous dites: Oui, il devrait pouvoir le faire comme la loi le lui permet. Sauf que la comparaison pour l'ensemble de l'entreprise doit se faire avec...

Mme Richer (Francine): L'ensemble des postes.

Mme Harel: ...l'ensemble des postes à prédominance masculine et à prédominance féminine. C'est ce que je retiens. D'accord.

Mme Richer (Francine): Oui, autour de la grande table, ce qui est en fait le comité d'équité salariale de l'entreprise. Puis, s'il veut avoir un comité sur la bande à côté, pour différentes raisons, hein... Puis je vous en donne une, bonne raison. Un syndicat a décidé de faire la grève, dans le milieu de travail, il y a un autre syndicat où il y a des non-syndiqués, il y a eu des barrières de franchies, les relations ne sont pas au zénith, le syndicat dit: Non, moi, je n'irai pas m'asseoir autour de cette grande table là, il n'en est pas question. On ne peut pas le forcer.

n (10 h 30) n

Mme Harel: Alors, parmi les suggestions que vous avez faites, il y en a une qui devrait et mériterait d'être examinée, c'est celle du 1 800. Il y a quelque chose qui est intéressant dans cette idée de pouvoir transmettre et faire valoir les droits. Parce qu'évidemment on va nous dire qu'on peut toujours appeler à la commission, mais un instant, là. J'aimerais ça vous entendre sur la difficulté que ça peut représenter pour un ou une travailleuse.

Je regardais les chiffres d'alphabétisation fonctionnelle, là, au Québec, ce n'est pas simple de faire tous ces numéros de téléphone, boîtes vocales, etc. Là, vous dites, vous: Il devrait y avoir un numéro 1 800 avec une information directe, là, qui pourrait, à ce moment-là, être largement publicisée.

La Présidente (Mme Morissette): Une réponse extrêmement rapide parce que le temps est terminé.

Mme Richer (Francine): Je suis très rapide. On veut une campagne d'information, on veut une campagne d'information sur le maintien lié au changement. Donc, pourquoi ne pas en profiter en même temps pour lancer un 1 800 lalalala? Voilà, je terminerais là-dessus.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Alors, ça met fin au temps. Merci au Syndicat des centrales démocratiques. On va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 32)

 

(Reprise à 10 h 35)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, si vous êtes prêts, on va commencer afin de ne pas accumuler de retard et que vous puissiez optimiser tout le temps qui vous est alloué. Donc, bienvenue à l'Union des municipalités du Québec. La façon de fonctionner est que vous allez avoir 15 minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, les différents groupes parlementaires auront chacun un bloc de temps pour vous adresser leurs questions. Moi, je vais vous faire des signes quand il va rester cinq minutes et deux minutes, vous indiquer le temps restant. Donc, M. Fauteux va prendre la parole ou M. Gendron?

Union des municipalités du Québec (UMQ)

M. Fauteux (Arthur): Oui.

La Présidente (Mme Morissette): M. Fauteux. Donc, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent également. Vous disposez de 15 minutes.

M. Fauteux (Arthur): Bien. M. le ministre, Mme la Présidente de la commission, Mme la députée de Charlesbourg, MM. et Mmes les députés, permettez-moi de vous présenter Mme Aline Laliberté, conseillère aux politiques à l'Union des municipalités du Québec, de même que M. Gendron, de la firme Gendron Conseil inc.

Évidemment que l'Union des municipalités vous remercie, les membres de la commission, de nous permettre de participer à cette consultation. Il n'est pas superflu de vous rappeler, là, que l'Union des municipalités du Québec est là depuis 1919 et qu'elle a comme principal mandat la prise en charge de son action au plan régional. Et on comprend pourquoi on est maintenant structuré en fonction des caucus régionaux, en fonction de caucus d'affinités. Et ça nous permet aussi, les caucus d'affinités, de respecter la mosaïque que représentent les municipalités du Québec d'abord en communautés métropolitaines, en grandes villes, les villes d'agglomération, les municipalités de centralité de même que les municipalités locales et MRC. On vous en parle parce qu'on va revenir aussi sur quel type d'employeurs nous sommes en fonction des emplois, et ainsi de suite. Mais nos commentaires seront d'abord inspirés des expériences vécues par nos membres dans la réalisation de leurs démarches pour l'équité salariale. Ils visent avant tout à identifier des avenues pour répondre aux objectifs de la loi et recommander des mesures qui permettront aux employeurs municipaux de disposer de moyens réalistes efficaces pour assurer le maintien de l'équité salariale, tel que vous l'avez vu dans notre mémoire.

Évidemment, là, puisqu'on regroupe quelque 250 municipalités, qu'on représente à peu près plus de 70 % de la population québécoise et que l'Union des municipalités, le regroupement de ses membres représente 66 % des salariés du secteur municipal, on considère, et je suis sûr que vous le considérez, que le monde municipal québécois a toujours représenté un secteur important de notre système de relations de travail et que les municipalités emploient actuellement un peu plus de 80 000 personnes. Ces travailleurs, travailleuses municipaux reçoivent environ 4,1 milliards de dollars annuellement en rémunération et en avantages sociaux, ce qui représente 44 % de nos budgets municipaux, soit environ 9 milliards. Le taux de syndicalisation de nos employés municipaux est d'environ 70 %, soit plus que le double du taux qui prévaut dans le secteur privé.

On profite donc, comme je le disais, de cette présentation en matière de relations de travail pour mettre en évidence que, depuis plusieurs années, le déséquilibre de rapports de force entre les parties patronales et syndicales... Et on veut vous rappeler qu'on revendique toujours le pouvoir pour les municipalités de gérer les services publics de manière concurrentielle en fonction de la capacité de payer de nos citoyens. Certains dossiers cependant nous préoccupent plus particulièrement, notamment: la notion de maintien de services essentiels ? on en a déjà parlé à d'autres forums et à d'autres occasions; dans les municipalités et les sociétés de transport, un mécanisme de la meilleure offre finale; l'application aux travailleurs municipaux des conditions de travail s'appliquant aux travailleurs du secteur de la construction lorsque nos travailleurs exécutent des travaux de construction et de rénovation à l'égard de nos immeubles municipaux.

Les employeurs municipaux doivent composer avec des conditions qui grugent le droit de gérance. L'union considère toujours que certains irritants de l'application de la Loi sur l'équité salariale doivent être corrigés par le législateur pour aider les municipalités à gérer dans le meilleur intérêt de ces citoyens.

n (10 h 40) n .

Lors de l'adoption de la loi, l'UMQ s'était prononcée en faveur de l'interdiction de la discrimination fondée sur le sexe mais avait aussi également manifesté des appréhensions quant aux effets de la loi sur le niveau et la structure de rémunération du secteur municipal. Après plus de 10 années de travaux souvent imposants réalisés par quelque 400 municipalités assujetties à la loi, l'union maintien son adhésion, et vous comprendrez qu'après avoir été témoins des propos des gens qui nous ont précédés qu'on maintient... et tout à fait à l'aise de réaffirmer notre adhésion et notre soutien à la loi qui vise à éliminer toute forme de discrimination salariale à l'endroit des femmes au Québec, sans quoi il serait inutile de parler de justice et même de liberté.

On estime par ailleurs qu'il faut simplifier et assouplir, à partir de notre expérience vécue des 10 dernières années, des règles d'application. Après la mise en place des programmes d'équité salariale, le plus grand des défis qui se posent aux municipalités est le maintien de cette équité. Pour y arriver, l'application de la loi doit être plus souple, et le mémoire... on y fera référence un peu plus tard de même que sur des questions un peu plus pointues, que la loi doit être plus souple.

À la lumière des expériences terrain et de l'implantation des programmes d'équité salariale au sein des municipalités, voici les irritants majeurs qui méritent d'être soulevés et corrigés.

D'abord, au chapitre de la composition des comités d'équité salariale, les groupes syndiqués ont contribué, pour presque la totalité des municipalités, la majorité des membres représentant les salariés au sein du comité d'équité salariale, car le secteur municipal est fortement syndiqué. On ne dit pas que c'est nécessairement une faiblesse lorsqu'on regarde ça, on dit juste qu'il faut, à un moment donné, aussi regarder comment on peut créer les équilibres là où il faut les recréer. Certainement que les employés non syndiqués, des cadres pour la plupart, ont pu participer activement aux travaux du comité d'équité salariale. Mais, en raison des règles de décision prévues par la loi, ils n'ont pas vraiment été en mesure de faire valoir leurs préoccupations, celles-ci étaient largement subordonnées à celles des employés syndiqués.

Cette absence d'expertise et de pouvoir a constitué et constitue toujours un désavantage important pour un groupe de personnes pour lesquelles la loi impose les mêmes obligations et confère les mêmes droits. Par ailleurs, la Loi sur l'équité salariale exclut les cadres supérieurs, mais ne fournit aucune définition de la notion de cadre supérieur ni aucune précision quant aux critères à utiliser pour déterminer ce qu'est un cadre supérieur. La Commission sur l'équité salariale a produit un document dans lequel elle propose des paramètres permettant d'établir qu'est-ce qu'un cadre supérieur dans une entreprise. Toutefois, l'interprétation de la commission ne correspond pas à la réalité des organisations municipales caractérisée notamment par un processus décisionnel politique.

En effet, l'analyse des fonctions et des pouvoirs des cadres, de même que l'analyse de la structure des municipalités, son mode de fonctionnement, sa taille et le caractère municipal de la gestion démontrent que les cadres de ces municipalités participent activement, en tant que cadres supérieurs, aux orientations et décisions du conseil municipal. Certaines des décisions rendues par la Commission de l'équité salariale dans les dossiers impliquant les municipalités font présentement l'objet de contestation devant les tribunaux justement en raison du fait de l'absence de précisions. Si l'orientation définie par la commission était confirmée par les tribunaux, qu'adviendra-t-il des programmes d'équité salariale établis depuis plusieurs années et qui excluent des emplois que la commission estime ne pas être des cadres supérieurs?

Déjà, la commission a obligé un employeur municipal à inclure des emplois de direction dans un programme d'équité salariale sans qu'on lui ait soumis une plainte ou fait part d'un différend à la suite de l'établissement d'un programme par un comité d'équité salariale. Or, l'exclusion de certains emplois-cadres a été décidée par le comité d'équité salariale, le plus souvent constitué de personnes représentant des salariés syndiqués qui bénéficient d'une expertise en matière d'équité salariale fournie par leur centrale syndicale. Les décisions d'exclure certains emplois-cadres du programme d'équité ont été prises d'un commun accord et, pour la plupart, n'ont pas fait l'objet de différends ou de contestations. Si ces employeurs étaient tenus d'intégrer à leurs programmes d'équité salariale des emplois additionnels, il faudrait, à toutes fins utiles, reprendre les exercices d'équité salariale.

J'ai constaté, dans les propos antérieurs de ceux qui nous ont précédés, comment ça pouvait être difficile pour des organisations lorsqu'on estime que tout n'a pas été fait avec la rigueur nécessaire. Imaginez qu'est-ce que ce serait, pour ceux qui estiment avoir travaillé à la satisfaction de leur personnel, d'être obligés de reprendre tous les exercices alors que les gens ont été d'accord sur la façon dont ça avait été géré et convenu. Il s'agit de contraintes extraordinaires et inacceptables dont l'ampleur et les effets risqueraient de déstabiliser l'organisation pour une période prolongée. Et rien n'indique que l'inclusion d'emplois de direction aurait des effets favorables aux emplois féminins, alors que la Loi sur l'équité salariale a été adoptée dans le but d'éliminer la discrimination salariale fondée sur le sexe.

Au chapitre des programmes distincts cette fois, notre analyse porte sur trois volets. Premièrement, qui peut demander un programme distinct? Un syndicat peut exiger à certaines conditions qu'un programme d'équité salariale distinct soit établi pour les membres qu'il représente au sein d'une entreprise. En vertu des dispositions actuelles de la loi, comme vous le savez, seule une association accréditée peut demander un programme distinct qui, au demeurant, doit lui être accordé par un employeur. Nous avons soulevé, un peu plus tôt, le fait que les employés non syndiqués du secteur municipal se retrouvent très souvent et fréquemment à la remorque des positions et décisions des syndicats lorsque vient le temps... lorsque vient le moment de faire valoir les positions des employés au sein du comité d'équité salariale. Nous suggérons que tout groupe d'employés visés par la Loi sur l'équité salariale soit autorisé à demander qu'un programme distinct soit appliqué à ce groupe.

Le deuxième volet de notre analyse porte sur l'absence de catégories à prédominance féminine et la possibilité de demander un programme distinct. Advenant que les tribunaux confirment la décision de la Commission de l'équité salariale et de la Commission des relations du travail voulant qu'un programme distinct ne puisse s'appliquer à un groupe d'employés où on ne retrouve aucune catégorie d'emploi à prédominance féminine, quel serait l'impact pour l'employeur qui a permis l'application d'un tel programme distinct? La Commission de l'équité salariale exigerait-elle de ces employeurs qu'ils reprennent leurs exercices d'équité salariale? L'Union des municipalités du Québec est très préoccupée par les conséquences d'une application rétroactive d'un jugement qui supporterait cette interprétation. Aussi, elle estime que les employeurs qui ont réalisé un exercice d'équité salariale et qui n'a pas fait l'objet de contestation ne devraient pas être tenus de reprendre cet exercice en raison du fait qu'ils ont permis l'application d'un programme distinct à un syndicat qui ne représente aucune catégorie d'emploi à prédominance féminine.

Enfin, le troisième volet concerne l'établissement d'un programme distinct après qu'une démarche d'équité salariale ait été conclue. Actuellement, la loi ne permet pas d'établir un programme distinct, pour un groupe qui en ferait la demande, alors que la démarche d'équité salariale a déjà été complétée. L'Union des municipalités du Québec souhaite qu'il soit possible de détacher d'un programme d'équité salariale déjà terminé un groupe d'employés, à condition que cette mesure ait fait l'objet d'un accord entre l'employeur et les groupes d'employés visés.

Abordons maintenant la question de la méthode d'estimation des écarts salariaux, qui à notre avis est trop souvent appliquée sans nuance, par absence de compréhension ou de compétences. Même si la loi offre une certaine marge de manoeuvre dans le choix et l'application de la méthode d'estimation des écarts salariaux, il y aurait lieu de prévoir davantage de souplesse, particulièrement dans les cas où le nombre de comparateurs masculins est limité.

Au chapitre des difficultés d'application, lorsqu'un programme d'équité salariale trouve peu de comparateurs féminins, il arrive fréquemment que ni l'une ni l'autre des deux méthodes d'estimation des écarts salariaux permises par la loi ne mène à des résultats logiques. Le règlement sur l'équité salariale en l'absence de comparateurs masculins introduit deux comparateurs masculins. C'est peu, mais au moins on dispose d'une alternative à la règle de trois. De plus, lorsque le nombre de comparateurs masculins est limité, l'ajout ou la disparition d'emplois masculins entraîne généralement des changements importants dans les résultats. Il devient alors extrêmement difficile d'assurer la stabilité de la structure de rémunération en raison des fluctuations engendrées par l'obligation de maintenir l'équilibre salarial.

Par ailleurs, les règles d'interprétation fournies par la Commission de l'équité salariale indiquent que le maintien de l'équité salariale doit s'effectuer au moyen des mêmes paramètres que ceux utilisés lors de l'exercice original. Cela signifie que la méthode d'estimation des écarts salariaux retenue à l'origine ne peut être modifiée à moins qu'elle ne permette plus d'assurer l'équité. Il serait certainement indiqué de permettre le changement de méthode d'estimation des écarts salariaux dans le cadre des opérations de maintien de l'équité.

Nous conclurons cette présentation en vous présentant notre position en regard du maintien de l'équité salariale. La Loi sur l'équité salariale exige que l'employeur assure le maintien de l'équité salariale. Cette obligation est continue et sans limite dans le temps, c'est-à-dire qu'elle constitue maintenant une des composantes de la gestion de la rémunération de l'entreprise.

Bien que la Loi sur l'équité salariale contienne des dispositions précises quant aux étapes et aux modalités d'application d'un programme d'équité salariale, il en va tout autrement du maintien. À notre avis, les interprétations et positions de la commission à ce sujet s'inscrivent dans ce qu'elle considère être l'objet et l'objectif de la loi, puisque le législateur a préféré se limiter à des indications générales.

Selon nous, exiger des employeurs de procéder à un nouveau calcul de l'estimation des écarts salariaux à chaque fois que survient un événement ou un changement susceptible d'affecter le calcul équivaut à imposer un fardeau administratif et potentiellement financier injustifié.

n(10 h 50)n

La Présidente (Mme Morissette): Je vous demanderais de conclure.

M. Fauteux (Arthur): Voilà l'essentiel de la réflexion de l'UMQ quant au rapport du ministre du Travail sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Morissette): C'est parfait, c'est exactement ça que j'allais vous demander. Alors, M. le ministre, à vous la parole pour votre bloc de temps.

M. Whissell: Merci, M. Fauteux. Mme Laliberté, bonjour, également M. Gendron. Sur le maintien, je pense que c'est probablement une des parties, je vous dirais, les plus importantes de votre mémoire. Vous dites, bon, que vous n'êtes pas contre un examen périodique à tous les quatre ans. Sur le maintien, vous dites que, puis je reprends un peu les propos de votre mémoire, «l'application du maintien sur une base continue est incompatible avec la réalité des municipalités». Pouvez-vous nous expliquer en quoi le maintien sur une base continue est incompatible avec les municipalités?

M. Fauteux (Arthur): Bien, évidemment, au niveau de la lourdeur et de ce qui pourrait venir changer dans la structure de rémunération. Mais allez-y, M. Gendron.

M. Whissell: Gênez-vous pas si vous avez des exemples, là, concrets, si vous en avez.

M. Gendron (Claude): Bien, je pense que, sur ces aspects-là, ce serait peut-être plus facilement, là, qu'on pourrait procéder par des exemples pour vous fournir une illustration des difficultés qui peuvent être rencontrées et anticipées aussi.

Alors, mesdames et messieurs, bonjour. La problématique qui est posée par le fait qu'on doive assurer sur une base continue le maintien de l'équité salariale pose une difficulté, par exemple, lorsqu'il y a plusieurs événements qui surviennent et de façon très rapprochée. La problématique, c'est avec les comparateurs masculins. Lorsqu'une organisation, suite à son exercice d'équité salariale, n'a pas procédé à ce qu'on appelle, dans le jargon, une relativité pour corriger les situations inappropriées que l'exercice d'équité salariale a entraînées ? je ne veux pas entrer trop dans les détails là-dessus parce que j'imagine que ça vous a déjà été exposé ? il y a une instabilité dans la structure de rémunération. Si j'ai des nouveaux emplois qui arrivent, je peux les positionner correctement par rapport à une référence, que ce soit une droite ou une courbe salariale ou autre chose. Mais, si ce n'est pas fait, et ce n'est pas nécessairement le cas de tout le monde, là, si ce n'est pas fait et que je n'ai pas donc de structure établie, j'ai des résultats d'équité salariale, et qu'il faut par la suite ajouter des emplois masculins qui sont de nouveaux comparateurs... Si je les positionne correctement par rapport à mes références salariales, il n'y a pas de difficulté, le maintien va être assuré de façon assez aisée.

La difficulté, essentiellement elle arrive lorsque des emplois disparaissent. Là, dans une structure de rémunération qui est imposée ou qui découle de l'exercice d'équité salariale, c'est le positionnement des emplois masculins qui fait la différence. Alors, s'il y a des emplois masculins qui disparaissent, et surtout pour des organisations où il n'y a pas beaucoup d'emplois masculins ? et, dans les municipalités, ce ne sont pas tous des employeurs où il y a des centaines ou des milliers de travailleurs, il y a beaucoup de petites municipalités, ou des municipalités de taille moyenne, ou des municipalités où il y a des programmes distincts où le nombre de comparateurs masculins est plus limité ? alors, à partir du moment où il arrive des situations où des emplois disparaissent, il y a un changement dans les comparateurs. Et ça peut occasionner soit une baisse soit une hausse, bien une baisse théorique parce qu'on ne peut pas baisser les salaires en équité ou en maintien, mais la référence salariale pour les emplois féminins est changée.

Et là je vous donne un exemple. Supposons que, le 19 juin d'une année donnée, il y a disparition, abolition d'un emploi masculin. Peu importent les motifs, l'emploi disparaît, et ça a pour effet d'augmenter... il faut refaire les calculs. Si on le fait sur une base continue, on refait les calculs. On refait les calculs, et là ça engendre, pour certains ou tous les emplois féminins, peu importe, un ajustement salarial. C'est correct si c'est l'exercice. C'est ça que prévoit le maintien. Un mois après, il y a un autre emploi, et là on doit ajuster les salaires instantanément. Il n'est plus question, là, d'étalement. Donc, on procède aux ajustements. Un mois après, il y a un autre emploi qui disparaît. Dû à la disparition de cet emploi-là, là on refait les calculs, et là, les emplois féminins, leur cible salariale en équité, elle baisse, elle diminue. La cible équité est changée. Mais là, les salaires, il faut les maintenir. Autrement dit, de faire un calcul dans le maintien de l'équité salariale à l'occurrence de chaque événement nous amène une situation où on va avoir obligation d'augmenter des salaires, mais on ne pourra pas les baisser.

L'idée, ce n'est pas de vous dire qu'on devrait les baisser, on ne veut pas préconiser des mesures pour baisser les salaires féminins, on n'est pas en train de venir vous raconter ça, là. Mais on veut s'assurer qu'il y ait une stabilité dans les structures de rémunération et qu'on ne se retrouve pas à jouer au yoyo, puis là qu'est-ce que je fais avec les employés en place, les nouveaux emplois, là, il y aurait des salaires différents pour les nouveaux par rapport aux anciens. Tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas un exercice de relativité où on reconfigure la structure salariale, que ce soit fait par l'employeur de façon unilatérale si c'est non syndiqué ou... En milieu municipal, c'est moins fréquent parce qu'essentiellement c'est du personnel syndiqué, donc ça se fait en collaboration avec les syndicats. Mais il y a des coûts associés à ça, il y a des délais, c'est dans le cadre des négociations des conventions collectives, et plusieurs municipalités n'ont pas encore réalisé cet exercice, et on vit cette période d'instabilité.

Ce qu'on préconise, c'est qu'il y a ait, oui, des périodes, certaines périodes où on fasse les calculs, mais qu'on ne vienne pas refaire les calculs au mois, ou aux trois semaines, ou aux 15 jours selon l'occurrence des mouvements de personnel. Les organisations sont des structures dynamiques, et les emplois, ça bouge. Les municipalités ne sont pas différentes des autres employeurs à cet égard-là.

M. Whissell: Alors, votre solution face à la problématique du maintien?

M. Gendron (Claude): C'est qu'au lieu que ça se fasse à l'occurrence de chaque mouvement de personnel, bon, on a préconisé qu'il y ait, oui, une périodicité, là, pour l'affichage des résultats, et tout ça, là, comme c'est suggéré. Mais, pour ce qui est des calculs, ça pourrait être, par exemple, une fois l'an, ça pourrait être au renouvellement des conventions collectives. Et là on réajuste, on réajuste les salaires en fonction des changements qui sont intervenus et de l'ensemble des changements qui sont intervenus, l'idée étant d'assurer une stabilité dans la structure de rémunération tout en maintenant le principe que les emplois féminins ne doivent pas être discriminés par rapport aux emplois masculins. Mais il ne faut pas que ça devienne un exercice mathématique purement qui nous amène dans une espèce, excusez l'expression, de «roller coaster» ou de montagnes russes des salaires.

M. Whissell: Mais, advenant qu'en cours, je vous dirais, entre deux périodes d'évaluation, comme vous le proposez, là, il y ait la création d'une nouvelle catégorie d'emplois qui seraient féminins...

M. Gendron (Claude): La création d'emplois féminins ou même d'emplois masculins pose moins de difficultés parce qu'on a le contrôle du niveau de rémunération qu'on peut déterminer. Alors, il s'agit juste de s'assurer d'agir intelligemment puis de positionner les salaires correctement, et on va maintenir l'équité, il n'y aura pas de difficulté. C'est principalement la disparition des emplois masculins qui pose difficulté, et particulièrement lorsqu'il n'y a pas beaucoup d'emplois masculins. Quand on a un nombre important d'emplois masculins, la disparition d'un emploi a généralement peu ou pas d'effet parce qu'on a beaucoup de comparateurs, il y a une stabilité dans les comparateurs. Mais, lorsqu'il y a un nombre restreint de comparateurs masculins, bien c'est plus problématique et ça peut nous mener à des résultats des fois qui sont farfelus.

n(11 heures)n

M. Fauteux (Arthur): Je pourrais juste rajouter, là, que ça varie selon les tailles de municipalités. Il y a des municipalités qui ont des ressources, il y a d'autres municipalités qui vont beaucoup en sous-traitance, ils ont moins de ressources. Ce qu'on veut, c'est d'être capables... d'abord, on veut rencontrer ces objectifs-là, c'est une valeur de société maintenant, l'égalité entre les hommes et les femmes. On veut être très clairs que ce n'est pas là une façon de dire: Bien, quand on y pensera, on reviendra. On veut juste être clairs sur le fait qu'il y a des temps statutaires pour examiner les choses, pour éviter qu'un événement vienne poser problème. Mais il faut être clair que, quand ça sera regardé... pour éviter justement qu'on n'est pas en train de l'oublier, mais rendons ça clair aussi qu'il y a une structure, qu'il y a des résultats à obtenir, qu'il y a des mandats, et on ne peut pas être en constante réorganisation parce qu'il y a un événement parmi d'autres, là.

M. Whissell: Peut-être juste une dernière question avant de laisser la parole à mes collègues. Quel pourcentage de vos municipalités ont réalisé l'équité salariale? Puis ça représente quelle proportion des emplois dans l'ensemble du monde municipal que vous couvrez, c'est-à-dire à l'UMQ?

M. Fauteux (Arthur): Allez-y, Mme Laliberté, là, le bilan est fait, là.

Mme Laliberté (Aline): Bien, pour les municipalités, il y a des municipalités qui ont complété leur exercice parce qu'il n'y a pas eu de réorganisation administrative. Et, pour celles qui ont subi des fusions ou défusions, alors elles sont dans le processus. Elles ont obtenu un délai, qu'on était venu chercher auprès du législateur, pour procéder à leur exercice. Mais c'est dans un processus, alors on ne peut pas dire que nos municipalités n'ont pas entamé ou n'ont pas terminé leur exercice. Elles ont toutes fait des travaux: pour certaines, elles ont terminé; pour d'autres, elles sont en cours de processus.

M. Fauteux (Arthur): Mais on n'a pas de chiffre. Tous ceux terminés, on n'a pas de chiffre. O.K.? Ça va. Donc, vous comprenez la question, là.

M. Whissell: Vous n'êtes pas capables de nous dire si c'est 25 % 50 %, 75 % des municipalités que vous représentez qui ont réalisé et complété un exercice d'équité salariale?

Mme Laliberté (Aline): Non, malheureusement. C'est comme on disait dans notre mémoire, il y a à peu près quelque 400 municipalités qui sont assujetties à la loi parce qu'elles ont 10 employés et plus, sur les 1 100 quelques, là, qui existent au Québec, mais toutes ont entamé des processus d'équité.

M. Whissell: Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Mont-Royal, il reste environ 3 min 30 s.

M. Arcand: Bon. On a beaucoup de temps. C'est bien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Arcand: Écoutez, vous avez parlé tout à l'heure, là, de certaines dispositions précises à propos de ce programme d'équité salariale. Vous êtes d'avis que les changements qui interviennent dans une organisation comme une municipalité peuvent justifier le maintien; entre autres, que le maintien doive se faire selon des paramètres différents de ceux qui ont prévalu au moment de l'exercice d'équité salariale original. J'aimerais juste que vous expliquiez un petit peu votre position par rapport à ça.

M. Gendron (Claude): Bien, par exemple, s'il y a eu utilisation d'une méthode d'estimation des écarts lors de l'exercice original d'équité, qu'une méthode différente pourrait être utilisée parce qu'elle sied davantage, qu'elle permet de maintenir l'équité et elle correspond davantage à la réalité de l'organisation, présentement les orientations qui sont définies à cet égard-là, c'est qu'à moins qu'une méthode ne permette pas de maintenir l'équité les paramètres qui ont servi à l'exercice original d'équité doivent être utilisés.

Nous, on pense que ça prendrait... En fait, l'objectif visé, c'est d'assurer le maintien avec une souplesse dans les règles qui permette d'atteindre et de maintenir les objectifs, le cap qui est visé par la loi, tout en permettant aux organisations de disposer de moyens qui offrent davantage de souplesse et de facilité d'application. Pour la majorité des municipalités, en tout cas, moi, personnellement, j'ai accompagné plusieurs municipalités dans leur exercice d'équité, et, pour la majorité, là, ça a été des processus extrêmement lourds. Pas futiles, ça a été, pour la majorité, des exercices qui ont abouti à des ajustements salariaux en forte majorité, mais extrêmement lourds.

M. Arcand: Une des questions que j'aimerais vous poser, c'est que j'ai été évidemment dans une entreprise, ma collègue ici, la députée de Laporte, a également fait partie d'une grande entreprise où on a appliqué les principes d'équité salariale. Ce que nous avions en commun, c'est que les deux entreprises étaient sous juridiction fédérale. Et donc, vous qui êtes consultant, est-ce que vous avez des entreprises qui sont sous juridiction fédérale que vous représentez? Et, si c'est le cas, est-ce que c'est plus simple au fédéral que ça l'est au provincial? Parce que, nous, le processus, nous, on n'a pas vécu ça, là, la question, là, des fonctions, là, pour hommes, pour femmes, il n'y avait pas ce genre de... dans les entreprises dans lesquelles ont était impliqués. Est-ce que c'était plus simple, l'expérience que vous avez? Ou, en discutant avec d'autres consultants comme vous, est-ce qu'il y a des méthodes d'application qui auraient avantage à être simplifiées?

M. Gendron (Claude): Bien, il y a une raison pour laquelle vous n'avez pas eu tout ce processus de comparaison, c'est qu'il n'y a pas de loi, au fédéral, sur l'équité salariale. Les entreprises qui l'ont fait, ils l'ont fait de façon volontaire ou il y a eu des... celles qui ont été médiatisées fortement, c'est celles de Bell Canada et du gouvernement fédéral, qui ont été l'aboutissement de plaintes en vertu de la Charte des droits et libertés, et qui ont mené à des correctifs salariaux mais en vertu de la charte canadienne des droits de la personne et non pas en vertu d'une loi. Le fédéral planche sur une loi présentement. Mais des entreprises sous juridiction fédérale ne sont pas assujetties à une législation quelconque en ce qui concerne l'équité salariale, ne sont pas encore assujetties. Alors donc, il n'y a pas eu d'exercice de même type, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu des choses qui ont pu se faire, mais il n'y a pas eu de contrainte légale.

M. Arcand: Il n'y a pas eu de contrainte légale, mais il y a eu quand même... les entreprises ont été... une obligation morale, disons.

M. Gendron (Claude): Oui, mais comme...

La Présidente (Mme Morissette): Ça met fin...

M. Gendron (Claude): ...comme Bell Canada, si vous... Je m'excuse, là, si j'ai coupé la parole à quelqu'un.

La Présidente (Mme Morissette): Le temps est terminé, malheureusement. J'essaie d'attirer votre attention, mais ce n'est pas facile quand vous ne me regardez pas. Donc, je vous aurais arrêté avant que vous posiez votre dernière question. Alors, on va aller tout de suite du côté de l'opposition officielle, peut-être qu'ils iront dans la même ligne. Je ne peux pas présumer. Alors, M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: On va sûrement continuer dans une bonne lignée. M. Fauteux, M. Gendron, Mme Laliberté, ça me fait plaisir. Bienvenue. Vous venez de souligner que, justement, au fédéral, on n'avait pas de législation, et certaines entreprises se sont soumises à cette règle-là. Dans les chiffres qui nous sont fournis et qu'on a vérifiés... pas qui nous sont fournis, mais on s'aperçoit qu'il y a des provinces canadiennes qui sont arrivées avec un résultat comparable à ceux du Québec sans avoir une loi qui les oblige: exemple, la Colombie-Britannique, qui arrive avec un écart de 2 % aujourd'hui. Donc, en tant que consultant, vous, qu'est-ce que vous pouvez nous dire à ce sujet-là?

M. Gendron (Claude): Ce que je peux vous dire, c'est que l'Ontario, qui a précédé le Québec d'une dizaine d'années, peut-être un petit peu moins, là, tout près d'une dizaine d'années, lorsqu'on a amorcé les travaux d'équité salariale au Québec, l'Ontario, ils n'avaient pas cheminé beaucoup en termes de rattrapage salarial des femmes par rapport au reste du pays, au reste du Canada. Et c'était un argument important qui était utilisé par les personnes qui estimaient qu'une loi sur l'équité salariale n'était peut-être pas le moyen ou l'outil, le meilleur outil pour atteindre l'élimination de la discrimination. Mais je pense que le moyen, peut-être qu'il est imparfait; nous, on pense qu'il est imparfait. Vous savez, il y a des choses pour lesquelles on demande qu'il y ait des correctifs. Mais l'objectif demeure tout à fait louable et tout à fait souhaitable, là. Je pense qu'on doit aller dans ce sens-là.

M. Therrien: Non, c'est sûr que, sur l'objectif, on est en accord avec vous. Vous parlez de complexité, d'assouplir et de simplifier cette loi-là. Vous, en étant représentant des municipalités, par où commenceriez-vous? Quelle serait votre première action pour justement créer cet assouplissement-là, là, qu'on vit la complexité de la loi, là, qui est dure à appliquer, là?

M. Gendron (Claude): O.K. Évidemment, il y a certains éléments qui sont soulignés dans le mémoire qui font référence à des programmes d'équité. Et on peut nous dire: Bien, écoutez, des programmes d'équité, on est presque, à toutes fins pratiques, rendus à la fin. Et, à partir d'aujourd'hui, c'est plus le maintien que l'exercice d'équité. Il faut comprendre qu'il y a des municipalités qui sont en processus ou même qui débutent leur équité parce qu'elles ont eu à vivre une période de fusion et d'harmonisation de conventions collectives et elles amorcent, là, les processus d'équité salariale.

Mais, au niveau du maintien de l'équité salariale plus concrètement, certainement la question... je reviens pour compléter une réponse sur une question qu'on a abordée tantôt en ce qui concerne la méthode d'estimation des écarts. Il nous apparaît très important d'assouplir les règles par rapport à la méthode d'estimation des écarts pour permettre l'utilisation de méthodes plus flexibles, l'idée n'étant pas encore de soustraire des emplois à l'équité, mais d'assurer une plus grande flexibilité. Et je vais vous donner un exemple précis.

Si je fais, par exemple, un exercice d'équité salariale avec trois comparateurs masculins, trois emplois masculins de comparaison, et que j'ai deux emplois masculins qui disparaissent en cours de route, il m'en reste un seul, le seul élément qui me reste de comparaison avec... ou la seule méthode, le seul moyen qui me reste, c'est de faire une règle de trois. Je ne veux pas entrer dans le discours trop technique de la question de la règle de trois, mais ça peut nous mener à des aberrations en termes de rémunération. Alors, il serait peut-être intéressant de considérer de pouvoir faire une ligne salariale des emplois féminins, puis de la comparer avec cet emploi masculin là et de faire un ajustement global plutôt que de faire un ajustement sur une règle de trois, à titre d'exemple.

n(11 h 10)n

M. Therrien: C'est sûr qu'au niveau des aberrations, juste le cas des typographes, qui était ressorti, à un moment donné, au début de la loi, je pense que c'était un très bon exemple.

Au niveau des programmes distincts, vous n'êtes pas sans savoir que justement la loi ontarienne prévoit une obligation de créer un programme distinct. Est-ce que vous jugez que cette mesure, elle serait applicable? Et donnez-nous votre avis si oui ou non. Et puis l'adaptation nécessaire, si vous n'êtes pas en accord avec ça.

M. Fauteux (Arthur): Non, on est d'accord... Allez-y... Mais on est d'accord avec le programme distinct, mais allez-y.

M. Gendron (Claude): C'est sûr que les programmes distincts assurent... Dans la vague, là, dans la foulée de nos demandes pour assouplir l'application de la loi, les programmes distincts, ça demeure fondamental. Et c'est pour ça qu'on suggère, même au niveau du maintien de l'équité salariale, qu'on puisse appliquer des programmes... bien des programmes ou des exercices de maintien ? parce qu'on devrait plutôt les appeler comme ça ? distincts, malgré le fait que l'exercice original d'équité salariale n'aurait pas été fait en programmes distincts, si les parties sont d'accord qu'on puisse le faire.

On estime qu'il y a des groupes d'employés qui n'ont pas eu la possibilité d'exiger ou de demander des programmes distincts dans l'exercice d'équité. Et ces groupes-là n'ont pas bénéficié des mêmes opportunités que d'autres, et se sont retrouvés généralement minoritaires dans les comités d'équité salariale, et n'ont pas vraiment pu faire valoir... Je veux dire, ils étaient subordonnés ? c'est le terme qu'on a utilisé ? aux objectifs et aux préoccupations d'autres groupes. Et c'était difficile pour eux autres de faire valoir leurs préoccupations de façon concrète parce qu'ils n'étaient pas en mesure d'influencer quantitativement les décisions des personnes qui ont représenté les employés au sein des comités d'équité salariale. Donc, on pense que...

Et il y a aussi, je pense, une conscience, il y a eu une conscience qui s'est faite de la part des parties, les employeurs, les syndicats, si je parle du monde syndical, qu'originalement on a voulu beaucoup procéder en programme unique, c'est-à-dire programme d'entreprise. Mais les expériences de maintien de l'équité salariale, qui parfois sont douloureuses un petit peu lorsqu'on doit considérer tous les groupes d'employés ensemble, mènent à des conclusions où il peut y avoir des intérêts, de part et d'autre des parties, à vouloir assurer le maintien sur une base de groupe plutôt que sur une base collective, là, de l'ensemble des employés, tout en maintenant le cap sur le fait qu'on doit éliminer ou éviter toute forme de discrimination salariale.

M. Therrien: Merci. Peut-être que ma question va être plus portée à M. Fauteux. Au niveau des coûts associés à faire l'exercice d'équité salariale complet, donc est-ce que vous avez évalué, une municipalité, là, petite ou moyenne, là, 50 employés et moins, combien ça pouvait coûter en frais de temps et d'argent, donc en conseillers, si vous avez eu des besoins ou que ce soit? À combien vous évaluez le coût d'un exercice complet?

M. Fauteux (Arthur): On n'a pas de chiffre sur le plan municipal. Moi, je suis d'une municipalité où c'est fait, c'est fait depuis trois ans maintenant. C'est même M. Gendron, là. Et, contrairement à ce qu'on imaginait au tout début, on a mis pas mal plus de temps... on ne l'a pas regretté par la suite, là, mais on a mis pas mal plus de temps qu'on l'avait prévu dès le départ. Parce que vous comprendrez que les gens ? bien, chez nous, ils étaient syndiqués ? ont vu là une opportunité de ramener sur la table des choses que les renouvellements de convention n'avaient pas permises. Et, le temps de tout clarifier ça, le temps de s'entendre sur la valeur d'un emploi... Le syndicat, avec raison, n'était pas méfiant mais parcimonieux, prenait beaucoup de précautions. Chez nous, moi, j'estime, là, avec les frais au consultant, l'opération pour un peu moins que 100 employés, quand je regarde le temps libéré, là, que c'est une opération de 70 000 $, 75 000 $ pour moins de 100 emplois, là.

M. Therrien: Dans le même ordre d'idées, quand vous parlez justement de renouvellement des conventions collectives où est-ce que les parties ont ramené des points qui pouvaient avoir resté en litige, est-ce que vous jugez bon aujourd'hui que, justement au niveau du maintien, ce soit fait, comme monsieur parlait plus tôt, au niveau du renouvellement de la convention collective où on fait rentrer l'instance de la commission à l'intérieur de tout ça? J'aimerais vous entendre à ce niveau-là.

M. Fauteux (Arthur): À ce moment-là, ça peut être plus souvent qu'au renouvellement. Nous autres, dans le mémoire, on vous dit: Ça peut être aux quatre ans, ça peut être aux années. Je ne veux pas mettre uniquement le renouvellement parce que, dans les dernières années, vous voyez qu'il y a des renouvellements de cinq ans, de sept ans, puis on les souhaite, et ça, sept ans, ça m'apparaît une période longue, là. Moi, je vous dirais que, depuis qu'on s'est apprivoisés avec ça, là... Puis je ne dis pas que c'était conflictuel. Cowansville, je parle toujours de ma propre expérience, depuis qu'on s'est apprivoisés avec ça, depuis qu'on a mis clair que la relativité salariale, c'est une chose, l'équité salariale, c'en est une autre, le renouvellement de conventions collectives en est une autre, que les comités de relations de travail peuvent aborder des sujets qui ne sont pas uniquement des sujets d'opération mais de clarification... puis on se comprend, puis on comprend qu'il faut regarder puis on regarde, puis on comprend que ce n'est pas le temps de regarder, mais déçus, mais c'est acceptable, ça nous permet, là, de voir comme ça évolue. Puis, là comme ailleurs, tout ce qui est clair a l'avantage d'aider à l'harmonie, et ça aussi, ça a aidé dans l'harmonie, là.

M. Therrien: Dernière question pour ma part. Au niveau de la gouvernance de la commission, beaucoup de groupes nous ont fait part de leur opinion sur le fait que la commission agissait comme juge et partie. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Fauteux (Arthur): Bien, c'est clair que, nous autres, on a en tête une municipalité, là, où la commission s'est pointée sans même, sans même une plainte. Ce qu'on se dit, tu sais... ce qu'on dit, nous autres: c'est assez, c'est assez rare, dans ces situations-là, où, quand on s'entend, là, bien... Si on s'est entendus, là, est-ce qu'on peut faire d'autres choses que de revenir sur ce qui est réglé?

M. Therrien: ...laisser l'autonomie nécessaire pour agir. Je vais laisser ma consoeur de Groulx...

La Présidente (Mme Morissette): Il reste deux minutes. Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): Merci. Bonjour et bienvenue. J'ai une petite question que je reviens assez souvent, puis c'est toujours intéressant et enrichissant d'obtenir les réponses de d'autres groupes. On parle beaucoup de discrimination systémique dans les postes, stéréotypes sexistes, est-ce que le fait de segmenter les professions de prédominance masculine et féminine, selon vous, ne renforce pas justement les stéréotypes?

M. Fauteux (Arthur): Indépendamment du monde municipal, je vous dirais oui, là, mais je fais référence beaucoup plus à ma première vie que ma deuxième vie, là.

Mme Lapointe (Groulx): C'était quoi, votre première vie?

M. Fauteux (Arthur): Dans les services correctionnels. Ça fait que...

Mme Lapointe (Groulx): O.K. À Cowansville. À Cowansville.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fauteux (Arthur): ...vous comprendrez que j'étais à prédominance masculine, et ça n'a pas été facile de pouvoir faire voir d'autres réalités très importantes dans notre monde, là. Mais c'est clair que, les stéréotypes, les médias les entretiennent, les discussions de famille les entretiennent, les discussions à la pause-café les entretiennent. Donc, c'est clair que plus on souhaite la mixité, plus on s'estime enrichis de la mixité que les stéréotypes ne sont pas aidants là-dedans, là, et ça nous empêche de voir la valeur objective de quelque chose.

Mme Lapointe (Groulx): Merci. Est-ce qu'il nous reste encore du temps?

La Présidente (Mme Morissette): 30 secondes.

Mme Lapointe (Groulx): 30 secondes. On a parlé, un petit peu tantôt, simplifier, assouplir. Vous avez parlé des méthodes, des estimations des écarts à assouplir, mais est-ce que vous avez d'autres suggestions rapidement où est-ce qu'on pourrait assouplir les règles de l'application de la loi?

M. Gendron (Claude): Bien, la possibilité des programmes distincts... pas programmes parce que ce ne sont plus des programmes, mais l'application, de manière distincte, par groupe, qui en fait la demande et avec lequel l'employeur... s'il y a un accord entre l'employeur et le groupe, pour assurer un maintien, tout en s'assurant qu'il n'y a pas de discrimination salariale qui en découle. Mais c'est clair qu'on devrait s'orienter vers ce type de fonctionnement, parce que de maintenir, dans une organisation, une structure de rémunération où tous les groupes avec des caractéristiques différentes doivent être pris en compte, ça rend l'exercice relativement lourd.

n(11 h 20)n

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Donc, on serait rendus du côté de la deuxième opposition. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, merci, Mme la Présidente. M. Fauteux, Mme Laliberté, M. Gendron, bienvenue de ma part et de la part de mon collègue de Jonquière. Mme Laliberté, si vous me permettez, M. Fauteux...

M. Fauteux (Arthur): Oui?

Mme Harel: ...à moins que vous vouliez répondre, il y a aussi des programmes d'accès à l'égalité distincts de ceux de l'équité à l'UMQ, lesquels programmes d'accès à l'égalité ne doivent pas être confondus parce qu'en fait ce qu'ils favorisent, c'est le recrutement féminin dans des emplois traditionnellement masculins ou l'inverse, hein? J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Laliberté (Aline): Bien, nos municipalités sont assujetties à la loi sur l'accès à l'égalité à l'emploi dans les organismes publics, ce n'est pas juste au niveau de l'embauche des femmes, par exemple, là, il y a d'autres catégories à être reconnues. Mais elles doivent effectivement prévoir l'embauche, faire une espèce de discrimination positive lorsqu'elles sont en recherche d'emploi. Actuellement, on n'est pas beaucoup en pénurie de main-d'oeuvre au niveau de cette catégorie-là. Mais il paraît, selon toute vraisemblance, les démographes nous le prédisent, qu'on devrait être en pénurie de main-d'oeuvre, alors, bientôt. Mais il reste aussi qu'il faut voir le bassin aussi qui font des applications. Chez nous, dans les municipalités, supposons, pour un emploi non traditionnel col bleu, peut-être que M. Fauteux pourra en témoigner, mais elles ne sont pas légion à cogner à la porte, là. Elles se retrouvent plus dans des emplois traditionnels féminins.

Mme Harel: Ça vaut pour les pompiers, j'imagine?

Mme Laliberté (Aline): Oui.

Mme Harel: Est-ce qu'on dit «pompières»?

Mme Laliberté (Aline): Oui, on dit «pompières».

Mme Harel: On dit «pompières».

Mme Laliberté (Aline): Mais elles doivent rencontrer certaines exigences du poste. J'ai siégé, moi, déjà, à des programmes d'accès à l'égalité pour les postes de pompières, et, elles non plus, elles ne sont pas légion, à l'école, à suivre cette formation-là.

Mme Harel: Donc, c'est vraiment la combinaison à la fois des programmes d'accès à l'égalité dans les emplois non traditionnels... Remarquez qu'on pourrait souhaiter aussi qu'il y ait plus d'hommes infirmiers, hein, ou de femmes pompières, mais ça, il faut distinguer ça des programmes d'équité, comme vous le mentionniez, qui sont dans le fond de corriger la sous-rémunération.

M. Fauteux (Arthur): ...

Mme Harel: C'est ça, exactement.

M. Fauteux (Arthur): Évidemment, quand on parle des municipalités, on parle beaucoup de cols bleus, ce qui n'est pas nécessairement le cas, mais on en parle... Pompiers, même chose. Moi, j'estime, là, qu'avec la mécanisation aujourd'hui, là, on n'a plus à se retrancher, je veux dire, vis-à-vis la force physique, là, pour déterminer, là, à qui devrait être donné l'emploi.

Pour les emplois plus techniques, et c'est le cas, moi, j'ai dit à mon monde: Intéressez-vous à l'avenir parce que c'est là que vous allez passer la balance de votre vie. Avec un taux de décrochage de 79 % chez nos jeunes garçons, quand on a des emplois avec des diplomations, bien notre recrutement, il va se faire chez les femmes, là.

Mme Harel: Comment ça, M. Fauteux, 79 %...

M. Fauteux (Arthur): Le décrochage, qui est le propre des gars, quand les emplois demandent cégep et université, bien ça va être chez les femmes. Elles persévèrent sur le plan académique. Donc, c'est sûr qu'il y a des distinctions, là, au niveau de emplois. Je ne dis pas que les...

Mme Harel: Oui. Vous avez dit 79 %. Je m'inquiète beaucoup, moi, du décrochage des garçons.

M. Fauteux (Arthur): Non, c'est 79 % du 35 % de décrochage.

Mme Harel: Ah oui! d'accord. D'accord. En fait, c'est aux trois quarts...

M. Fauteux (Arthur): Oui. Oui.

Mme Harel: ...vous avez raison, là, même un peu plus, 81... oui, c'est ça...

M. Fauteux (Arthur): Oui. Oui.

Mme Harel: ...les garçons qui, parmi ceux qui décrochent, effectivement.

Concernant le programme distinct, je veux bien comprendre en fait que ce que vous voulez, c'est toujours la possibilité...

M. Fauteux (Arthur): De recourir au programme distinct.

Mme Harel: Distinct non seulement pour l'association accréditée, mais éventuellement pour les non-syndiqués.

M. Fauteux (Arthur): Pour le maintien...

Mme Harel: Mais vous n'êtes pas en désaccord que le comparateur reste l'ensemble, là, des emplois au sein, disons, de l'entreprise ou, dans votre cas, au sein de la municipalité.

M. Gendron (Claude): Bien, peut-être, si je me permets? La loi, quand il y a un programme distinct, c'est: les emplois contenus dans un programme distinct sont exclus du programme d'entreprise, donc, qui ne sont pas considérés comme comparateurs. C'est le cas présentement, là. Je sais que tantôt il y a eu une discussion entre vous et les personnes qui nous ont précédés. L'effet d'un programme distinct, c'est de retirer les emplois couverts par ce programme du programme global de l'entreprise, qu'ils soient des emplois féminins ou des emplois masculins. On doit aller chercher l'ensemble des emplois masculins dans l'entreprise lorsque, dans un programme d'équité salariale, il n'y a pas de comparateur masculin. On doit aller les chercher ailleurs dans l'entreprise s'il y en a, mais autrement ils sont évacués. Alors, ça veut dire qu'on ferait l'équité par groupes plutôt qu'en grand groupe.

Mme Harel: Mais vous comprenez qu'à ce moment-là, comme c'est au sein d'une seule et même entreprise, si on retire le groupe principal, disons les cols bleus, là, si on retire le groupe des cols bleus et qu'il peut difficilement y avoir une comparaison parce qu'il y a plus d'emplois à prédominance masculine, on se retrouve avec, disons, l'ensemble du personnel de bureau, personnel administratif seulement, il faut pouvoir comparer. Alors, la loi prévoit qu'on puisse comparer même à l'extérieur.

M. Gendron (Claude): Oui...

Mme Harel: Vous préférez la comparaison à l'extérieur.

M. Gendron (Claude): Non. Non. C'est non, on n'ira pas à l'extérieur s'il y a des comparateurs masculins à l'intérieur.

Mme Harel: Mais, s'ils se sont retirés du fait d'avoir un programme distinct, par exemple, pour les cols bleus?

M. Gendron (Claude): Bien, prenez un groupe d'emplois manuels, cols bleus, et un groupe d'emplois de bureau, cols blancs, comme on les appelle communément. Alors, à l'intérieur des cols blancs, il y a des emplois féminins et des emplois masculins. À l'intérieur des cols bleus, il y a des emplois masculins; des fois un, deux, trois emplois féminins, des fois il n'y en a pas. Mais ce qu'on préconise, c'est qu'il y ait un exercice d'équité salariale qui se fasse à l'intérieur de chacun des groupes, lorsque les groupes et l'employeur sont d'accord pour procéder ainsi.

Mme Harel: Oui, mais vous comprenez bien que, si c'est fait entre chacun des groupes... Ça me fait toujours penser, ça, à cette décision de la Cour suprême américaine à l'effet qu'il n'y avait pas de discrimination raciale entre femmes noires parce qu'elles étaient toutes comparées entre elles puis elles étaient égales. Alors, on ne les comparait pas entre femmes blanches et noires, mais juste entre femmes noires, puis la cour avait conclu qu'il n'y en avait pas, de discrimination raciale.

Alors là, si c'est par groupes, on va conclure qu'il n'y a pas de discrimination systémique par groupes parce que les femmes, disons, section bureau sont payées pareil comme les autres femmes de section bureau. Mais c'est toujours le fait que c'est moins valorisé, moins rémunéré que, par exemple, la force physique dans le temps, là. C'est ça, la comparaison.

M. Gendron (Claude): Oui. S'il n'y a pas de comparateur masculin à l'intérieur de leur groupe, effectivement il faudrait aller chercher les autres comparateurs masculins de l'entreprise. Mais, à partir du moment où il y a des comparateurs masculins dans leur groupe, il y a des références salariales masculines qui existent à l'intérieur de ce groupe-là, et ça a pour effet de simplifier...

Mme Harel: Toujours dans un groupe à prédominance féminine. Si, par exemple, un groupe à prédominance féminine a la chance d'avoir eu quelques hommes, là, là, on ne pourra pas aller chercher la comparaison ailleurs, il faut la reprendre dans le groupe. Mettons, les infirmières, hein, dans un sens: si elles ont quelques hommes infirmiers, alors là on les comparait entre elles et non pas, par exemple, avec les inspecteurs en bâtiment, ou avec les policiers, ou avec quiconque d'autre. Ça, ça veut dire qu'on les laisse dans leur groupe en comparaison de leur groupe?

M. Gendron (Claude): Bien, même s'il y a 10 % d'infirmiers puis 90 % d'infirmières, l'emploi est féminin, donc les infirmières ne sont pas comparées aux infirmiers, elles sont comparées à d'autres emplois à prédominance masculine.

Dans les emplois de cols blancs, travail de bureau, municipaux, ces emplois-là, dans le secteur municipal, il y a généralement un certain nombre d'emplois à prédominance masculine parce que ces groupes-là englobent généralement des emplois techniques ? génie civil, arpentage, laboratoire, enfin, pour donner ceux-là ? et, fréquemment aussi, des professionnels ? agents d'information, ingénieurs, comptables, architectes, etc. Alors, on retrouve, au sein de ces catégories d'emploi, des catégories masculines, ce qui permet d'avoir, à l'intérieur du groupe, des comparateurs pour s'assurer de la non-discrimination.

Ce qu'on dit, c'est qu'à ce moment-là est-ce que c'est vraiment nécessaire d'aller chercher le chauffeur de camion ou le contremaître? À partir du moment où on a, à l'intérieur d'un groupe, des comparateurs masculins et qu'on peut aller chercher une source de comparaison de manière à éviter ou enrayer la discrimination. Et ça a pour effet de simplifier la vie à tout le monde dans l'organisation, incluant celle du groupe d'employés visés. Souvent, ils sont syndiqués, là.

Mme Harel: Oui. Évidemment...

La Présidente (Mme Morissette): Un petit peu plus d'une minute.

n(11 h 30)n

Mme Harel: Oh! d'accord. Bon. Bien, alors, on va tout de suite passer aux cadres supérieurs, d'accord, parce que, là, si j'ai bien compris votre mémoire, page 8 et suivantes, ça repose sur un «si» seulement: si et seulement si une décision était à l'effet... Est-ce que je comprends que c'est de ça dont il s'agit?

M. Gendron (Claude): Bien, il y a deux éléments.

M. Fauteux (Arthur): Oui. Bien, nous autres, on estime qu'un cadre supérieur, ça ne se limite pas au directeur général...

Mme Harel: ...compris, mais vous dites: «Devant une telle...» Oui.

M. Fauteux (Arthur): ...et on espère que ça ne se limitera pas à ça.

Mme Harel: Ah! c'est devant les tribunaux, là, c'est devant...

M. Gendron (Claude): Présentement, oui.

M. Fauteux (Arthur): Oui.

Mme Harel: ...la Commission municipale? C'est devant qui?

M. Gendron (Claude): Non, c'est devant la Commission de l'équité salariale et d'autres instances pour certains cas.

Mme Harel: Commission des relations de travail?

M. Gendron (Claude): Oui.

Mme Harel: Ah! d'accord. Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Alors, merci beaucoup. On va suspendre quelques instants pour vous saluer et accueillir le groupe suivant.

(Suspension de la séance à 11 h 31)

 

(Reprise à 11 h 33)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, bonjour. Bienvenue à l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Donc, vous allez disposer de 15 minutes pour nous faire la présentation de votre mémoire. Suite à ça, les groupes parlementaires auront chacun un bloc de temps pour vous adresser leurs questions. Je ne sais pas qui est Mme Verreault, alors... Bonjour, madame. Donc, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent, et puis vous disposez de 15 minutes.

Alliance du personnel professionnel
et technique de la santé
et des services sociaux (APTS)

Mme Verreault (Dominique): Alors, merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les commissaires, alors, avec moi pour la présentation de notre mémoire, Mme Marie-Josée Leroux, qui est membre du comité de l'équité salariale depuis plus de 20 ans, une de nos expertes; Mme Luce Leblanc, première vice-présidente et également responsable politique du dossier de l'équité salariale; et Mme Noëlaine Allard, à mon extrême-droite, qui est la conseillère coordonnatrice au dossier.

Alors, l'APTS, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, est une organisation syndicale qui regroupe 26 000 membres, professionnels et techniciens, qui oeuvrent uniquement dans le réseau de la santé et des services sociaux. Alors, notre mémoire, vous avez pu le constater à sa lecture, s'est attardé vraiment à l'expertise que nous avons développée au cours des ans dans ce dossier d'équité salariale. L'APTS regroupe plus de 97 titres d'emploi différents, et une soixantaine sont à prédominance féminine, notamment, bon, pour vous donner quelques exemples, des technologues en radiologie, technologistes médicales, physiothérapeutes, ergothérapeutes, travailleuses sociales. Ce sont tous des emplois à prédominance féminine.

Alors, les professionnelles et techniciennes représentées par l'APTS exercent des fonctions qui renvoient à des stéréotypes féminins. Elles offrent des soins et des services dans un milieu reconnu comme étant féminin, le réseau de la santé et des services sociaux, et leurs emplois sont peu connus du public. On connaît très bien les médecins et les infirmières dans un réseau comme celui de la santé et des services sociaux. Mais les professionnelles et techniciennes que nous représentons sont très peu connues, ce qui fait qu'elles ont dû, au fil des ans, se battre pour être connues et reconnues comme travailleuses du réseau de la santé.

Ce n'est donc pas un hasard si elles ont dû mener des luttes salariales sur tous les fronts depuis les années soixante-dix. Lorsque les chartes ont permis que les employeurs cessent la discrimination salariale sur la base du sexe, elles avaient de bonnes raisons de se plaindre. Au moment du dépôt des plaintes, en 1986, il y avait un écart de 6 000 $, donc 13 % entre le salaire annuel maximal des physiothérapeutes, ergothérapeutes, diététistes, emplois à prédominance féminine, versus les analystes en informatique, emplois à prédominance masculine, dans le réseau de la santé et des services sociaux. Les gouvernements qui se sont succédé ont toujours nié la discrimination. Ils cautionnaient le bas salaire des emplois féminins en invoquant les vocations, le salaire d'appoint. C'étaient les arguments qu'on a entendus lorsqu'on s'est présentés devant la Commission des droits de la personne et de la jeunesse ainsi que lors de nos nombreuses périodes de négociation.

Les organisations syndicales fondatrices de l'APTS ou leurs membres, sur une base individuelle, ont déposé des plaintes à la Commission des droits de la personne entre 1986 et 1996. Elles invoquaient la discrimination salariale sur la base du sexe en vertu de l'article 19 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. De cette saga judiciaire à la Commission des droits de la personne jusqu'au recours en nullité du chapitre IX déposé en Cour supérieure, les femmes n'ont pas lésiné. Il leur aura fallu beaucoup de détermination, des moyens financiers et la force syndicale pour mener cette longue bataille sans répit, mais elles ont eu raison de s'entêter. Au sein de l'APTS, pas moins de 44 catégories d'emploi ont obtenu des correctifs salariaux en moyenne de 5,5 %. Au total, 23 000 de nos 26 000 membres ont bénéficié d'ajustements salariaux par l'application pleine et entière de la Loi sur l'équité salariale.

Il est, pour nous, indéniable qu'au-delà du principe inscrit dans la charte c'est grâce à une loi proactive, qui a forcé l'employeur à convenir d'évaluations d'emplois en comité paritaire et qui prévoit des droits et des recours aux personnes salariées, que nous avons pu obtenir ces résultats en 2006. Notre mémoire... Nous avons choisi de nous attarder, comme je vous disais tout à l'heure, sur notre expérience et notre expertise et sur la lecture qu'on a faite de cet exercice au fil des ans. Alors, nous avons choisi de nous attarder aux modalités de façon à assurer le maintien de l'équité salariale. C'est d'ailleurs... on en a fait le titre de notre mémoire: Maintenir l'équité pour une loi accomplie.

Alors, nous retenons de cet aspect qu'il s'avère fondamental dans l'atteinte de véritables objectifs d'une loi accomplie et parce que malheureusement cela nous apparaît négligé dans la loi, actuellement. Les entreprises se transforment perpétuellement, ce qui entraîne des modifications dans les méthodes de travail et, par extension, dans le contenu du travail, de la structure de rémunération, également. C'est pourquoi, au-delà de l'étape ponctuelle et limitée dans le temps qu'est l'élimination de l'iniquité, il faut penser à la continuité, c'est-à-dire au maintien de l'équité salariale. D'ailleurs, l'ensemble des experts en ce domaine s'entendent sur l'importance du maintien de l'équité salariale lorsqu'un programme a été complété.

La loi québécoise, à l'article 40, prescrit le principe général et précise certaines situations où le maintien doit être assuré, notamment lors de la création de nouveaux emplois, de nouvelles catégories d'emploi, lors de la modification des emplois existants ou lors de négociation ou de renouvellement de conventions collectives. Nous constatons donc que la loi exprime correctement l'obligation du maintien, mais elle demeure très imprécise quant au processus, et c'est à ce niveau qu'elle est fragile. En effet, en évitant de préciser des exigences détaillées qui permettent une application rigoureuse, le caractère obligatoire de la loi pourrait en quelque sorte basculer vers le volontarisme. Il ne faudrait surtout pas que la phase de maintien, une étape essentielle dans le processus imposé, soit négligée, ce qui serait le cas si on s'appuie seulement sur la bonne volonté des entreprises. On risquerait alors de voir réapparaître la discrimination et d'anéantir une grande partie des efforts qui ont été déployés pour corriger une situation de discrimination.

n(11 h 40)n

Alors, nous recommandons non seulement le maintien de la Loi sur l'équité salariale, mais bien de la modifier de façon à y inclure des modalités et des critères explicites afin d'assurer un réel maintien de cet acquis social qu'est l'équité salariale. Alors, pour nous les critères, et je vais les élaborer un peu plus longuement, ce sont la périodicité, un comité de maintien permanent et la reddition de comptes.

Alors, la périodicité. Le rapport ministériel suggère de prévoir un examen périodique de l'équité salariale convenable, tout en maintenant l'obligation d'assurer le maintien de l'équité salariale sur une base continue. Alors, nous sommes d'accord avec cet énoncé et faisons nôtre cette suggestion. Il est primordial de prévoir une périodicité parce qu'elle permettra de constater ponctuellement et de façon globale la situation de l'équité salariale dans une entreprise et ainsi s'assurer de sa pérennité. Alors, dans notre mémoire, nous recommandons une périodicité variant entre trois et cinq ans. Donc, quatre ans, là, nous apparaît très convenable.

Un comité de maintien permanent. Alors, outre la périodicité, il faut prévoir une continuité qui puisse assurer le maintien de façon constante et d'éviter de créer de possibles détériorations entre deux périodes. La transmission continue de l'information et la présence d'un comité permanent de maintien de l'équité salariale assureraient cette continuité. Alors, notre recommandation va dans le sens d'inclure dans la loi une disposition transformant le comité d'équité salariale en comité de maintien de l'équité salariale permanent au terme de la réalisation d'un programme. La reconnaissance, dans la loi, de ce comité sur une base permanente s'avère une condition sine qua non pour garantir un maintien valable de l'équité salariale. L'obligation du maintien de l'équité salariale devrait donc s'effectuer avec la participation des salariés au sein d'un comité de maintien. Les dispositions légales applicables à ce comité de maintien devraient être celles qui visent le comité d'équité salariale.

En ce qui concerne l'obligation de rendre des comptes, notre prochaine recommandation devrait également s'appliquer à l'étape de la réalisation de l'équité salariale et vise à permettre à la commission d'exercer une surveillance accrue sur l'ensemble du processus, tant pour la réalisation que pour son maintien. Alors, nous recommandons donc d'inclure une disposition obligeant les comités d'équité salariale ou les employeurs, lorsqu'il n'y a pas de comité, à faire rapport à la Commission de l'équité salariale de leurs activités reliées au maintien.

Finalement, pour nous, il reste un défi, celui de l'équité interne. L'atteinte de l'équité salariale pour les catégories d'emploi féminines a pour effet malheureusement de laisser des catégories d'emploi qu'on identifie sans prédominance, c'est-à-dire celles qui se situent entre 40 % et 60 %, là, de membres féminins ou masculins, hors du nouveau système de rémunération et de même que tous les emplois à catégorie à prédominance masculine qui se situeraient en deçà de la courbe des emplois masculins. Nous avons, dans notre exercice à l'APTS, constaté que des membres de ces catégories, là, d'emploi masculines qui se situaient en deçà de la courbe, nous avons pu constater leur fort niveau d'insatisfaction et de frustration, et, comme ce sont des hommes, ils nous l'ont fait savoir de façon très large. De cela évidemment découle pour eux du scepticisme et voire même du cynisme par rapport aux bienfaits de cette loi.

Nous pensons que de compléter la réalisation de l'équité interne le plus tôt possible après la réalisation d'un programme d'équité salariale non seulement harmoniserait la structure de rémunération, mais aussi constituerait une prémisse au maintien de l'équité salariale dans une entreprise. C'est d'ailleurs l'opinion des experts cités dans le rapport du groupe de travail sur l'équité salariale. Il n'est peut-être pas nécessaire d'apporter des modifications à la loi pour réaliser l'équité interne. La Commission de l'équité salariale pourrait, par la voie de ses publications, sensibiliser les employeurs aux avantages de remplacer ces anciennes méthodes d'évaluation et de pratiques de rémunération par celles utilisées en équité, et ce, pour l'ensemble des salariés de l'entreprise. Nous vous demandons donc d'apporter une attention particulière à cette problématique d'équité interne.

Alors, en conclusion, il nous apparaît impératif de toujours se rappeler les fondements légaux qui ont guidé l'atteinte de ce droit qu'est l'élimination de la discrimination systémique basée sur le sexe. La Commission sur l'égalité de rémunération, une convention adoptée en 1951 par l'Organisation internationale du travail, la Charte des droits et libertés de la personne et la Loi de l'équité salariale et ses engagements sont trois fondements légaux qui nous obligent à articuler la loi de manière à assurer le maintien effectif de l'équité salariale. Nous considérons que de conserver la loi telle que rédigée actuellement nous ferait glisser d'une obligation de résultats vers une obligation de moyens, ce qui ne correspond pas à nos objectifs comme société. Il ne faudrait pas perdre toutes les retombées positives déjà acquises.

Alors, l'équité salariale doit être atteinte et elle doit être maintenue. Nous ne pourrons nous accorder collectivement le mérite de l'élimination d'une discrimination systémique que lorsque ces deux objectifs seront atteints. Alors, je vous remercie de votre attention. Nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Morissette): J'espère bien. Merci, Mme Verreault. Donc, M. le ministre, vous avez un bloc de temps devant vous.

M. Whissell: Bonjour, mesdames, Mme Verreault. Merci pour votre présentation. Également, on voit que c'est une bataille qui dure depuis longtemps, puis vous avez certainement, au fil des années, fait avancer la cause, et je vous en remercie au nom du gouvernement mais au nom de la population, surtout.

Vous avez effleuré la question de l'équité interne. Je vais vous poser la question. Je vais vous donner peut-être deux, trois questions, puis vous pourrez répondre en bloc. Équité interne, vous ne pensez pas que ça relève plus du cadre de la négociation en général? Alors, vous entendre là-dessus parce que ce n'est pas nécessairement l'objectif qui est visé par la loi actuelle.

Sur la périodicité, bon, vous dites, trois à cinq ans, ça peut vous sembler intéressant. Est-ce qu'il n'y aurait pas un arrimage à faire avec les renouvellements de convention collective? Parce que ce serait peut-être plus simple pour les deux parties, patronale et syndicale, dans un contexte de renouvellement de convention.

Également... Bien, je vais vous laisser répondre à ces deux-là, puis je reviendrai avec une autre question.

Mme Verreault (Dominique): Je vais peut-être répondre à la première question, puis laisser une de mes collègues répondre à la suivante. Alors, l'équité interne, dans le cadre de la négociation générale, évidemment, là, on est très conscients que la Loi sur l'équité salariale, les objectifs de la loi qui visent à éliminer la discrimination basée sur le sexe, ne répond pas à la question de l'équité interne. Mais je vous dirais que, dans ce qu'on a vécu, nous, depuis le règlement de 2006, ce qui nous apparaît comme résultat pour les emplois à prédominance masculine, c'est une... on a créé une autre iniquité.

C'est-à-dire que, et sans rentrer dans les détails techniques, peut-être essayer d'imager la chose, c'est qu'à partir du moment où, dans l'entreprise, qui est le gouvernement, on a identifié les emplois à prédominance féminine et ceux à prédominance masculine, qu'on a tracé la courbe, qu'on a comparé, qu'on a fait tout l'exercice, on s'est retrouvés dans la situation où de nos travailleurs, des emplois à prédominance masculine, les techniciens en génie biomédical, qui sont des gens qui, dans un hôpital, réparent les appareils technologiques, se sont retrouvés, avec l'outil qui a servi à évaluer les emplois masculins-féminins, à un rangement ? je dis un chiffre, là ? 17. Et actuellement ils sont à 15. Et, comme la loi ne s'applique pas à eux, ils n'ont pas eu d'ajustement salarial à ce jour, donc ni rétroactivement ni à partir du moment où on a constaté que leur emploi devrait valoir 17 plutôt que 15. On nous ramène à la négociation.

Vous savez qu'on a eu un décret. Vous savez qu'on ne négociera pas avant 2010, qu'il n'y a pas non plus une volonté actuellement de négocier ces choses-là parce que ça va coûter de l'argent encore à l'État. Alors, pendant ce temps-là, nous, on a des... Et puis, bon, malgré notre très grande sensibilité aux femmes, on est un syndicat de femmes, hein, on est des professions de femmes, ça ne nous apparaît pas non plus plus logique de faire en sorte qu'on maintienne ou qu'on crée, par une loi, des effets pervers qui amènent finalement une catégorie à prédominance masculine qui est moins bien payée que ce qu'a donné le résultat de l'évaluation de leur emploi. Alors, dans ce sens-là, il nous apparaît qu'il pourrait y avoir, par toutes sortes d'outils, de moyens, la possibilité aux parties de discuter des effets qu'a donnés un exercice d'équité salariale et finalement d'en arriver à un processus de rémunération qui corresponde, là, aux critères qu'on s'est donnés, autant pour les hommes que pour les femmes.

Pour ce qui est de la périodicité, arrimage avec la convention, peut-être que je laisserais Luce répondre à cela.

n(11 h 50)n

Mme Leblanc (Luce): Bien, ce n'est pas quelque chose qu'on privilégie, nous, de relier ça nécessairement au renouvellement de la convention collective, parce qu'on a entendu tout au cours des deux semaines des audiences qu'il y a toutes sortes de réalités dans ça, donc on pourrait peut-être prendre bien du temps avant d'assurer le droit des personnes qui sont visées par une discrimination salariale.

Nous, ce qu'on propose plutôt, c'est d'avoir, tel que le prévoit l'obligation de la loi, un mécanisme permanent de surveillance du maintien de l'équité salariale. Donc, quand survient l'apparition d'une nouvelle catégorie d'emploi féminine, par exemple, bien on devrait l'évaluer selon les mêmes barèmes et le même système d'évaluation qui a eu cours pendant l'établissement du programme d'équité salariale et de faire le point. Là, nous, on proposerait entre trois et cinq ans. Trois ans, c'était la recommandation du groupe de travail fédéral, c'était leur recommandation de le faire aux trois ans. Dans le rapport du ministre, on lit plutôt quatre ans, et, quand on pense à la réalité de ce que ça imposerait dans le secteur où, nous, on est présents, dans le secteur de la santé et des services sociaux, donc dans le réseau public, ça nous apparaît une grosse entreprise, de faire ça aux trois ans, donc on allait jusqu'à cinq ans.

Mais, si la décision était d'aller vers quatre ans pour faire le point sur tout ce qui est les autres aspects, autres que l'instauration d'une nouvelle catégorie d'emploi féminine par exemple, qu'est-ce qui, au niveau de la reconsidération de la prédominance des catégories d'emploi, pourrait se faire, à ce moment-là, de façon périodique, faire le point de façon précise là-dessus, le calcul des écarts salariaux... On comprend que, dans la présentation des municipalités, qui nous ont précédées, qu'il y avait une grande préoccupation par rapport à ça. Effectivement, ça pourrait être assez cacophonique et assez lourd à gérer pour les entreprises. Mais, si on était capables de faire le point, par exemple, aux quatre ans, qu'on refait le calcul des écarts aux quatre ans mais en préservant les droits bien sûr des personnes salariées qui ont subi de la discrimination, donc de rétroagir au moment où la nouvelle situation s'est produite, bien là on vient corriger le tir mais sans le faire au quotidien.

Et un autre élément qu'on pourrait faire aussi aux quatre ans, c'est de s'assurer que le système d'évaluation des emplois et toute la méthode qu'on a mise en place dans l'établissement du programme est encore conforme, là, pour assurer le maintien de l'équité dans une entreprise.

M. Whissell: Bon. Vous, dans le fond vous avez juste un employeur, c'est le gouvernement du Québec. Mais, dans votre mémoire vous indiquez que, dans un amendement législatif éventuel, il devrait y avoir obligation plus forte des employeurs de faire rapport à la commission sur autant l'application de la loi et l'établissement d'un premier exercice d'équité salariale ou encore dans l'exercice du maintien. Comment voyez-vous, vous qui dans le fond avez juste un employeur, qui est le gouvernement, mais vous parlez au nom de l'ensemble du secteur, comment voyez-vous que les entreprises devraient être contraintes à faire rapport, et qu'est-ce qu'on devrait inclure dans le rapport qu'une entreprise devrait soumettre à la Commission de l'équité salariale ou au gouvernement?

Mme Leroux (Marie-Josée): D'abord, oui, on a un seul employeur, mais ça nous a beaucoup surpris, à l'issue de notre exercice d'équité salariale, de constater que même un fonctionnement en comité, qui est très, très formel, n'avait pas à remettre de comptes, en vertu de la loi, à la Commission de l'équité salariale. C'est sûr que notre programme, le programme des employés du secteur parapublic, a été tellement bien médiatisé que ce n'était peut-être pas nécessaire d'aviser la commission, mais on comprend que ce n'est pas le cas de la majorité des employeurs au Québec et des entreprises au Québec.

Nous, ce qu'on pensait, c'est sûr qu'il y a différentes formules qui pourraient être utilisées pour faire rapport à la commission. Ça pourrait être un formulaire standardisé que la commission ferait parvenir aux entreprises ou ça pourrait tout simplement être la copie des affichages qui sont déjà prévus à la loi, c'est-à-dire premier et deuxième affichage, copie de ces deux affichages, qui donnerait une indication à la commission de où sont rendus les travaux dans les différentes entreprises du Québec et qui lui éviterait de dépenser ses pauvres moyens à faire des sondages pour savoir où en sont rendues les entreprises dans l'application de la loi. Donc, ça pourrait être strictement d'envoyer une copie des affichages qui sont déjà une obligation pour certaines entreprises du Québec, et, pour celles qui ne sont pas visées par un affichage, bien, évidemment, il faudrait possiblement prévoir étendre cette obligation-là à l'ensemble des entreprises visées par la loi.

M. Whissell: Je vais laisser le temps restant à mon collègue.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Mont-Royal.

M. Arcand: Oui. J'étais en train de lire votre mémoire, comme tel, tout à l'heure, et vous disiez une phrase ici, c'était basé sur un rapport d'experts, là, quand vous parlez du défi de l'équité interne. Et vous avez fait une traduction d'un rapport d'experts qui dit que, «pour ce faire, le mieux est d'intégrer les emplois féminins et masculins dans une même structure salariale et surveiller la reclassification du système pour s'assurer que les emplois masculins ne sont pas, avec le temps, classés à des niveaux [...] supérieurs au détriment des emplois féminins». Et vous terminez en disant entre autres: «...pourrait, par la voie [...] sensibiliser les employeurs aux avantages de remplacer ses anciennes méthodes d'évaluation [...] par celles utilisées en équité, et ce, pour l'ensemble des salariés de l'entreprise.» Pouvez-vous m'expliquer un peu ce que vous voulez dire par ça? Y a-tu des exemples concrets, là, d'anciennes méthodes versus les méthodes plus... Expliquez-moi un peu ce que ça veut dire.

Mme Leroux (Marie-Josée): On peut vous donner l'exemple concret qu'on vit, nous, a posteriori d'un programme d'équité salariale fait selon l'application de la Loi de l'équité et qui répond aux critères de la loi tout à fait conformément. On se retrouve avec différentes problématiques qu'on vous a exposées, c'est-à-dire des emplois dits sans prédominance, c'est-à-dire les emplois qu'on appelait mixtes, là, à l'origine de la rédaction de la loi, mais toutes les catégories sans prédominance, qui ne sont pas très nombreuses dans notre cas étant donné qu'on est un milieu dont le bassin est fortement féminin, mais aussi dont les emplois sont très typés féminins dans la majorité des cas.

Donc, on a quelques emplois sans prédominance, moins d'une dizaine pour ce qui est des catégories qu'on représente à l'APTS, en tout cas. Il y en a plus dans le programme, mais, pour nos catégories, représentées au syndicat, il y en a moins d'une dizaine. Donc, ces personnes-là, toutes les personnes qui relèvent de ces catégories d'emploi là... Pour vous imager un petit peu peut-être, pour que ça donne un petit peu plus un portrait des personnes de qui on veut parler, on pourrait parler dans notre cas des récréologues et des organisateurs communautaires, qui sont sans prédominance dans le programme du secteur parapublic.

Donc, il y a ces personnes-là, qui ont été évaluées avec une ancienne méthode d'évaluation, la même méthode qui a servi à déterminer le salaire de l'ensemble des salariés de la santé et services sociaux et de l'éducation avant que n'arrive l'application du programme d'équité salariale. Et de même non seulement les catégories sans prédominance, mais aussi les catégories masculines ont été évaluées avec la même méthode d'évaluation des emplois. Dans notre cas, on appelait ça, au niveau du gouvernement, le 16 sous-facteurs, c'est-à-dire une méthode qui était différente, qui comprenait 16 sous-facteurs d'évaluation et qui ne correspondait pas au... en tout cas qui n'a pas été jugée applicable dans le cadre du programme d'équité salariale.

Donc, les emplois à prédominance féminine... féminins et masculins maintenant sont évalués en fonction de la grille d'évaluation ou le plan d'évaluation qui a servi à faire l'équité salariale, mais les emplois sans prédominance sont toujours évalués, rangés et payés avec les conclusions d'une ancienne méthode d'évaluation, qui était antérieure à l'équité.

M. Arcand: Bien, moi, j'ai juste une dernière question en ce qui me concerne: De vouloir catégoriser les emplois hommes et femmes, est-ce que c'est encore souhaitable?

n(12 heures)n

Mme Verreault (Dominique): Oui. On pense que ça peut... Comment peut-on faire un exercice comparatif entre des emplois à prédominance masculine et féminine si on ne peut pas en faire une lecture, un portrait? Et, pour nous, il n'est pas question de ghettoïser des emplois ou des secteurs, mais plutôt de tracer un portrait, hein, fidèle de la réalité et, à partir de là, par des outils le plus justes possible, en concédant qu'il n'y en a pas, d'outil parfait, bien de s'assurer qu'il n'y a pas d'iniquité salariale.

Et je vous dirais que, dans le constat qu'on a fait... En fait, on est, je crois, comme organisme, comme groupe de travailleuses, un exemple qu'il y avait des iniquités salariales puisqu'on a eu droit, pour 23 000 de nos 26 000 membres, à des réajustements salariaux à la fin de cet exercice-là. Bien, il faut croire qu'il y en avait une, discrimination. Il a fallu pour cela identifier les emplois, les prédominances et s'assurer, là, que l'évaluation des emplois et la reconnaissance également des compétences, de ce qu'on appelle les compétences féminines versus masculines, alors soient bien évaluées. Alors, pour nous, c'est finalement un exercice qu'on doit faire, là, que d'identifier les prédominances.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Mme la députée de Laporte, il reste deux minutes environ.

Mme Ménard: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme Verreault, mesdames. Mais comment voyez-vous en général le rôle de la commission et quels aspects devrait-on prioriser?

Mme Leblanc (Luce): Bien, nous, pour nous, c'est clair qu'on ne s'est pas prononcées dans le mémoire, mais on est tout à fait favorables aux conclusions du ministre à l'effet que la commission doit demeurer et les rôles qui sont prévus dans la loi doivent aussi être préservés clairement. Il y a un aspect de la loi qu'on n'a pas abordé, qui est ce que la commission a mis en place au fil des ans, qui est tout l'aspect de la conciliation. On pense que peut-être que ça, c'est un des éléments qui devraient être inclus et précisés maintenant à l'intérieur de la Loi sur l'équité salariale. Mais, pour le reste des rôles, on pense que la commission a déjà bien fait. Même si elle est critiquée à certains égards, elle a déjà bien fait, et il faut lui donner les moyens de poursuivre dans ce sens-là.

Mme Ménard: Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Donc, ça met fin au temps du côté ministériel. Du côté de l'opposition officielle, M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Verreault, Mme Leblanc, Mme Allard et Mme Leroux. Le ministre en a parlé un petit peu plus tôt, est-ce que vous pensez qu'il serait illusoire, en tant qu'instance syndicale, qu'il ne serait pas possible ou plausible que le maintien soit sous la responsabilité de l'instance syndicale et l'instance patronale, et que ce serait inclus dans une convention collective, et puis, à ce moment-là, qu'on pourrait prédéterminer la périodicité au niveau de la convention collective?

Mme Leblanc (Luce): Je pense que, là, on tombe dans un jeu de négociation, si jamais tel était le cas. Nous, on croit en la nécessité d'avoir un organisme neutre, spécialisé dans le respect de l'application de la Loi sur l'équité salariale. Il ne faut pas laisser les parties négociantes oeuvrer seules dans ce domaine-là. Pour nous, c'est important de préserver la Loi sur l'équité et ainsi que la commission. Et qu'en serait-il, à ce moment-là, de toutes les personnes qui ne sont pas syndiquées au Québec? Ça prend un organisme pour s'assurer de cette gestion-là.

M. Therrien: Je ne suis pas sur la remise en question de l'organisme, mais je vous parle en tant qu'instance syndicale, là, on ne parle pas du privé, là. Et, quand vous parlez de neutralité, est-ce que vous jugez que le rôle de la commission présentement est neutre et impartial?

Mme Verreault (Dominique): Bien, pour compléter peut-être, là, au niveau de l'égide des conventions collectives, écoutez, je crois, puis Luce l'a bien exprimé, qu'il y a déjà de multiples sujets à négocier entre un employeur et un syndicat. Et, particulièrement dans le réseau de la santé et des services sociaux, je vous dirais que les sujets ne manquent pas. Et il nous apparaît que toute la question du maintien puis de la périodicité devrait être prévue dans la loi, et on s'assurerait, à ce moment-là, qu'il y ait des mécanismes, qu'il y ait des modalités de prévues pour permettre que l'exercice se fasse et qu'on détache ça d'un pouvoir, d'un rapport de force entre des syndiqués et leur employeur.

M. Therrien: Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Mme la députée de Groulx va prendre le relais.

Mme Lapointe (Groulx): Merci. Bonjour, mesdames. Bienvenue. Pour mon information, vous dites que vous représentez 26 000 membres. Dans la loi, il est prévu qu'il y a des catégories de 10 à 49 pour les employés, après ça, 50 à 99, 100 et plus. Puis, encore là c'est pour mon information, vous représentez des syndiquées, sont-elles dans des groupes distincts, dans différents établissements ou ensemble? Puis c'est des groupes de combien?

Mme Leblanc (Luce): C'est un groupe de...

Mme Lapointe (Groulx): Ensemble?

Mme Leblanc (Luce): Oui, parce que, dans la loi, il est prévu que, l'employeur des gens du secteur parapublic, c'est le gouvernement du Québec qui est l'employeur. Donc, il y a un seul groupe et il y a eu un seul programme d'équité qui a été réalisé.

Mme Lapointe (Groulx): C'était pour mon information personnelle. Vous savez qu'en Ontario il y a le programme distinct, là, qui est géré différemment qu'ici au Québec. Vous, j'aimerais vous entendre parler là-dessus. Qu'est-ce que vous pensez de ça, les programmes distincts? Est-ce que ça devrait être avec les accréditations syndicales? Et comment vous voyez ça sur l'ensemble de tous les employés de l'État?

Mme Verreault (Dominique): Je vais vous donner un début de réponse, et peut-être que Luce aura des choses à ajouter. Pour nous, il faut qu'il y ait un seul programme dans l'entreprise pour permettre la comparaison de l'ensemble des emplois à prédominance féminine et à prédominance masculine. Au départ, avant que la loi soit changée, nous avions droit à des programmes distincts, hein, avant mai 2006, et notre groupe avait un programme distinct. Nous fonctionnions donc avec d'autres syndicats indépendants dans un programme distinct, alors qu'il y avait un autre programme, qu'on appelait l'intersyndicale, qui regroupait de grandes centrales représentant des gens du milieu de l'éducation, et santé et services sociaux, et fonction publique.

Ce qu'on a pu constater, parce que finalement on a vécu le programme distinct et un seul programme, c'est que les comparateurs ne sont pas les mêmes et c'est que ça amène des biais quand on arrive à faire l'exercice et à évaluer les emplois. Alors, pour nous, il était... En tout cas, dans ce qu'on a vécu et malgré que c'est un employeur, hein, qui représentait plusieurs centaines de milliers personnes, de nombreux titres d'emploi et de catégories d'emploi différentes, il nous apparaît important qu'il y ait un seul programme pour que l'exercice soit fait avec l'ensemble des travailleurs d'une entreprise et s'assurer qu'il y ait équité entre les emplois à prédominance masculine et féminine dans l'entreprise, sinon il risque d'y avoir des biais qui viennent finalement, là, avoir des impacts sur le résultat de l'équité salariale.

Mme Lapointe (Groulx): Merci. Je sais qu'Éric avait une question. Je pourrais...

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Johnson.

M. Charbonneau: ...bienvenue. Dans le cadre des professionnels et techniciens que vous représentez, je constate que certains titres d'emploi, comme par exemple physiothérapeute, ergothérapeute, travailleuse sociale, se retrouvent aussi dans le privé. Avec la pénurie de main-d'oeuvre appréhendée ? on le constate un peu, mettons, avec les infirmières, puis j'imagine que, dans ces autres domaines là, il va sûrement y avoir un manque de main-d'oeuvre aussi ? on sait qu'on peut offrir des primes de rareté pour attirer la personne. Vous allez être en concurrence avec le privé versus le public. Dans le cadre du maintien de l'équité salariale puis de la structure salariale à long terme, comment vous appréhendez cette problématique?

Mme Leblanc (Luce): Dans la loi, il est prévu qu'on peut donner, on peut prévoir des primes particulières pour des cas de pénurie de main-d'oeuvre. Et ça ne doit pas être pris en considération dans le calcul de la rémunération, donc dans le calcul des écarts salariaux à long terme parce qu'on comprend que normalement ça devrait être une prime qui a une durée de vie ? en tout cas, nous, on l'espère drôlement pour les gens qui vivent des pénuries de main-d'oeuvre ? temporaire, pour le temps que la pénurie se résorbe, et après c'est les salaires déjà prévus, déterminés par le programme qui devront s'appliquer. Ça n'a pas d'incidence dans le cadre du maintien de l'équité salariale.

M. Charbonneau: ...combien de temps pour vous, temporaire? Un an, deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans?

Mme Leblanc (Luce): Aussi longtemps que dureront les pénuries.

M. Charbonneau: Donc, quand même, quand il va y avoir le renouvellement du maintien ou bien donc une autre analyse, exemple si la physiothérapeute, elle a 2 $ de prime, vous ne pensez pas que ça va dire: Bien là, ça fait cinq ans qu'ils ont 2 $ de prime, nous autres aussi, on veut avoir notre prime? Parce que présentement, là, j'ai déjà des appels pour me dire ça, là, pour des personnes qui ont des primes puis que les autres disent: Ah, bien là elle a une prime, moi, je veux l'avoir aussi, là.

n(12 h 10)n

Mme Verreault (Dominique): Bien, écoutez, ce que vous nous donnez comme exemple est finalement plutôt un exemple qui se réfère à la loi du marché, à toute la question de la pénurie de main-d'oeuvre et à la rémunération qui est offerte aux gens dans le réseau de la santé et des services sociaux. L'exercice d'équité salariale a été fait dans le cadre de l'employeur réseau de santé et services sociaux. Alors, on a comparé des emplois à prédominance féminine, masculine dans ce réseau-là. Alors, l'exemple que vous nous donnez, les physiothérapeutes qui travaillent dans un milieu privé, ce sont quand même des emplois à prédominance féminine mais qui ne faisaient pas partie de nos emplois comparatifs, là. On ne compare pas des emplois féminins, on les compare avec des emplois masculins. Alors, oui, il y a une réalité. Ce que vous...

M. Charbonneau: ...à même le réseau, là, je parle à même le réseau, sans nécessairement... on laisse le privé. Présentement, dans le réseau présentement, il y a de la distorsion, puis on a...

Mme Verreault (Dominique): O.K. Oui. Oui. Il y a des primes qui sont accordées dans certaines régions, par certains employeurs, ou des bénéfices à l'emploi qui sont donnés en raison de la pénurie. Mais on comprend que ça, c'est quelque chose qui ne fait pas partie de l'équité salariale. C'est sûr que, dans un exercice de maintien, si on se retrouvait en maintien dans quatre, cinq ans, et qu'on faisait ce constat-là, et qu'on faisait les comparaisons ? parce que, là, il faut quand même comparer hommes-femmes, en termes d'emploi ? et que ça nous amenait à dire: Bien, il y a un manque à gagner, bien il faudrait rétablir la situation. Mais ce serait plutôt du domaine de la négociation et de la reconnaissance des emplois, là, plutôt que de l'équité, le problème que vous nous soulevez, selon moi.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: J'aimerais revenir, vraiment pour vous prouver qu'on est ici pour faire la lumière, là... C'est le ministre qui m'a fait l'observation, puis je pense que c'est une très bonne remarque. L'article 40 prévoit qu'il y a une imputabilité à l'employeur et aussi à l'instance syndicale. Donc, est-ce que vous remettez l'article 40 en cause dans la loi?

Mme Verreault (Dominique): Pas du tout. Pas du tout, dans le sens que, je veux dire, on est partie prenante de cet exercice-là et je crois qu'on doit être imputables. Et en tout cas, nous, dans ce qu'on a fait, on a été imputables dans ce qu'on a fait, là, tant au comité d'équité salariale qu'envers la commission.

M. Therrien: L'article 40 prévoit que l'employeur doit, après les ajustements salariaux, après que les ajustements salariaux ont été déterminés ou qu'un programme d'équité salariale a été complété, maintenir... Donc, c'est au niveau du maintien qu'on donne l'imputabilité à l'employeur et aux instances syndicales.

Mme Verreault (Dominique): Oui. Vas-y, Marie-Josée.

Mme Leroux (Marie-Josée): ...que je me trompe, mais c'est dans les cas de négociation ou de renouvellement de convention collective seulement. Ce n'est pas...

M. Therrien: ...ma question, plutôt voir si c'était possible, puis vous avez dit non, mais là, ici, c'est prévu par la loi, là, qu'il ne fallait pas mêler le maintien de l'équité salariale avec la négociation, le rapport de force, etc. C'est ce que vous disiez plus tôt. Là, ici, c'est prévu par la loi, puis vous me dites que vous êtes en accord avec l'article 40.

Mme Leroux (Marie-Josée): On parlait de périodicité tout à l'heure puis on parlait du fait qu'il faut la faire autant en continu, donc hors négociation de convention collective aussi. Donc, à un moment donné, si on est imputable tout le temps, pourquoi ne pas fonctionner en comité d'équité salariale comme on a réussi à fonctionner dans le cadre du premier exercice d'équité?

La Présidente (Mme Morissette): Il n'y a pas d'autre question? Parfait. Alors, on irait tout de suite du côté de la deuxième opposition. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Mme Verreault, Mme Leblanc, Mme Allard et Mme Leroux, alors bienvenue. C'est avec beaucoup d'intérêt, là, que je prenais connaissance et de votre mémoire et des échanges que vous avez eus parce que vous avez bien clarifié une question qui est extrêmement importante, qui est le coeur même finalement de tout cet objectif d'équité, c'est que ça ne se négocie pas. C'est un droit, c'est d'ordre public, un peu comme le salaire minimum. La Commission des normes du travail ne peut pas être neutre dans l'application du salaire minimum, elle ne peut pas le négocier. Un employeur ne peut pas dire à son employé: Je vais discuter avec toi si je ne peux pas te le payer. Ce n'est pas non, ce n'est pas non, la société a décidé que c'était d'ordre public, que ça doit être appliqué. Et on a donc une Commission des normes du travail qui doit le faire appliquer. Ça vaut pour l'équité. L'Assemblée nationale, à l'unanimité des députés présents, a décidé que c'était d'ordre public. Alors, on a une commission qui le fait appliquer. Je ne vois pas cette idée de demander à la commission d'être neutre. Elle ne peut pas être neutre par rapport à un droit. Il faut qu'elle fasse appliquer ce droit.

Alors, je vous remercie tantôt parce que, de votre position syndicale, vous avez aussi rappelé, à l'article 40, en fait ce que ça impose. Ça impose au patronat et au syndicat de ne pas modifier, dans la convention subséquente, l'entente intervenue en matière d'équité salariale. Parce que parfois l'entente intervenue n'a pas toujours, disons, fait l'affaire de toutes les catégories à prédominance masculine. Alors, la convention qui suit ne peut pas changer ça. C'est ça dans le fond, l'idée de fond, c'est qu'il faut... c'est imputable pour ne pas revenir en arrière, dans le fond, en regard de l'équité salariale.

Ce qui m'intéresse, vous avez fait un historique extrêmement intéressant de la longue bataille que vous avez menée. Vous avez mentionné, à la page 11 de votre mémoire, les résultats pour le secteur parapublic: 740 millions de dollars de correctifs à 326 000 personnes de 130 catégories d'emploi à prédominance féminine. Et ça m'a rappelé incidemment une publicité en 1972 ? il y en a qui sont trop jeunes parmi nous pour s'en rappeler ? pendant les négociations dans le secteur public. C'était la négociation du 100 $ par semaine. Est-ce que vous étiez là?

Mme Verreault (Dominique): Oui, madame.

Mme Harel: Oui? C'était la négociation du 100 $ par semaine à l'époque et à l'époque c'était M. Bourassa qui était premier ministre. Puis le gouvernement mettait des grandes annonces dans les médias ? je pense que j'en ai gardé ? des annonces qui montraient des employés du secteur public qui étaient des femmes, comme principalement elles le sont toujours, qui portaient un manteau de fourrure. Et l'idée, c'était: Pourquoi 100 $ par semaine quand ce n'est que pour un salaire d'appoint? L'idée qui était... Le message, c'était, dans le fond: un salaire d'appoint pour s'acheter un manteau de fourrure. Alors, disons qu'au moins là-dessus les choses ont beaucoup changé. En tout cas, je pense qu'on n'oserait plus faire une telle sorte de publicité.

Vous êtes allés devant les tribunaux, n'est-ce pas, et certains pensent qu'on devrait revenir à l'article 19 de la charte, un peu comme au fédéral, là, avec des poursuites interminables qui durent 15, 20 ans devant les tribunaux en vertu de la loi canadienne des droits et libertés. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Verreault (Dominique): Oui, on est allés devant les tribunaux. De nos membres sont allés, sur une base individuelle, déposer des plaintes. Évidemment, on les a soutenus dans ça pour réclamer, là, l'équité. La Commission des droits de la personne malheureusement n'a pas eu, selon nous, tous les moyens qu'il fallait pour être capable d'enquêter dans ces dossiers-là. On a pu constater des changements, là, d'enquêteur dans nos dossiers, de façon régulière. On a vu aussi un manque de moyens financiers pour faire l'analyse, pour faire l'enquête complète, souvent mises en dessous de la pile, comme travaux, par la Commission de l'équité salariale, ce qui fait qu'entre...

Une voix: Des droits...

Mme Verreault (Dominique): ... ? des droits de la personne, excusez-moi, excusez mon lapsus, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse ? ce qui fait que, nous, pour les groupes qu'on représente, on a commencé à déposer des plaintes en 1986, mais, n'eût été de la Loi d'équité salariale, je crois qu'on serait encore malheureusement devant la Commission des droits de la personne, là, pour essayer de défendre notre point de vue. Alors, malgré que cette charte et que cette commission sont bien importantes, il n'en demeure pas moins, et on le dit dans notre mémoire, là, que la Loi de l'équité proactive doit demeurer. C'est une loi proactive, c'est un choix social qui a été fait au Québec, et on doit lui donner les moyens d'être mise en application selon nous, pas juste dans notre réseau, mais bien dans toutes les entreprises au Québec.

Mme Harel: Je comprends que, quand, dans votre mémoire, vous nous parlez du défi de l'équité interne, en fait ce sont pour les catégories, vous le mentionniez, je pense, hein, neutres, hein, celles qui sont ni à prédominance masculine ni à prédominance féminine et qui n'ont pas fait l'objet de la relativité salariale?

Mme Verreault (Dominique): Tout à fait. Pas juste celles-là. Celles aussi à prédominance masculine, l'exemple que je donnais en début de présentation, n'ont pas fait l'objet d'un ajustement en fonction des résultats qu'a donnés, là, le questionnaire. Parce que, dans le cas des prédominances masculines, on a dû leur faire compléter le questionnaire et évaluer leur emploi pour être capable de le comparer à celui des femmes. Mais le résultat que ça a donné n'a pas été mis en opération ou actualisé, O.K.? On n'a que réglé la situation des femmes, ce qui est très bien, là, et c'est l'objectif de la loi, mais on a créé quand même une certaine iniquité en termes de rémunération. Et, oui, ça, c'est un volet qui appartient, hein, plus...

Mme Harel: ...créée ou on l'a constatée?

Mme Verreault (Dominique): On l'a, bien, constatée, oui, parce qu'on a utilisé l'outil, le même outil, là, pour évaluer.

Mme Harel: ...juste le parapublic. Dans le public, il y avait déjà eu la relativité salariale, hein?

Mme Verreault (Dominique): Oui, mais...

Mme Harel: Dans la fonction publique, il y avait déjà... Est-ce que je me trompe? Dans la fonction publique?

Mme Leblanc (Luce): C'est avant l'instauration de la Loi sur l'équité salariale, oui.

Mme Harel: Oui, c'est ça.

n(12 h 20)n

Mme Leblanc (Luce): Le gouvernement avait fait unilatéralement un exercice de relativité salariale et disait, par ce biais-là, avoir réglé l'équité salariale, alors ce qui nous a entraînés dans toutes sortes de dédales juridiques pour conclure qu'effectivement ce n'était pas conforme à la Loi sur l'équité salariale. Et preuve en est qu'il y a eu 6,5 % d'augmentation pour les gens du secteur parapublic, là, suite à l'application rigoureuse de la loi et des mécanismes qui y sont prévus.

Mme Harel: Mais, à ce moment-là, c'était au début des années quatre-vingt-dix qu'il y a eu cet exercice dit de relativité salariale. Et il a eu lieu unilatéralement, disiez-vous, seulement dans la fonction publique ou aussi dans le parapublic?

Mme Leblanc (Luce): Dans le parapublic aussi.

Mme Harel: Ah! d'accord. Mais les outils n'étaient pas aussi à point que ceux qui ont été utilisés et mis au point dans la fonction publique et parapublique pour l'équité salariale.

Mme Leblanc (Luce): N'étaient pas conformes aux exigences actuelles de la loi.

Mme Harel: De la loi, ce qui permettrait, par exemple, en utilisant l'exercice de relativité salariale, cette fois de réexaminer l'ensemble de la politique salariale. C'est ce que vous voulez dire? Certains travaux ont pu être faits et évaluer différemment les emplois.

Mme Verreault (Dominique): À partir du même outil d'évaluation qu'on a utilisé dans la loi... devrait être appliqué à l'ensemble des travailleurs et travailleuses et on devrait, à ce moment-là, réajuster en fonction du résultat, ce qui nous permettrait d'entrer, selon nous, dans une phase après ça de maintien d'équité salariale.

Mme Harel: D'accord. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Morissette): Oui, M. le député de Jonquière, une question? Allez-y.

M. Gaudreault: Oui. Alors, merci. Bonjour. Vous dites, à la page 11 de votre document, en parlant de la Commission de l'équité salariale: «Cette dernière doit non seulement être maintenue, mais elle doit avoir des ressources afin de réaliser les mandats qui lui sont dévolus par la loi.» Alors, j'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus. Avec votre expérience importante en matière d'équité salariale, qu'est-ce que vous avez constaté qui serait manquant avec les ressources actuelles de la commission, et qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus, et quelles ressources additionnelles on pourrait lui accorder? Et j'imagine que vous parlez de ressources humaines en termes d'employés, là, à la commission.

Mme Leroux (Marie-Josée): ...ressources humaines et financières. Notre proposition vise, on ne vous le cachera pas, à contrer la vague de suggestions qui viennent demander à la commission, par le biais de ces auditions, d'atrophier la commission, d'atrophier ses mandats, de l'atrophier, voire de l'éliminer. Pour nous, ce n'est pas une option. Et c'est pour éviter de revenir à la situation des premières années d'existence de la commission, où, chaque mandat ou chaque demande qui était faite à la commission, dans le fond on avait des réponses pas dans les mois qui suivaient, mais dans les années qui suivaient. On pense que, si on fait le bilan collectif et social aujourd'hui, au Québec, la Loi de l'équité doit être maintenue, qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire ? pour nous, il est hors de question de revenir à la situation des premières années d'existence de la commission ? et que, pour les mandats additionnels qui pourraient lui être confiés, il faudra qu'il y ait des ressources suffisantes pour être capable de les accomplir.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Il vous reste du temps, il vous reste deux minutes.

M. Gaudreault: Ah oui? Alors, sur cette lancée, quand vous dites qu'il reste encore beaucoup de travail à faire, bien on le voit aussi, les chiffres sont probants, là, que le chantier de l'équité n'est pas terminé, loin de là. Mais cependant, avec votre expérience, avez-vous une réflexion pour le travail qui est à faire, par exemple dans d'autres secteurs que le vôtre? Mais quand même est-ce que vous êtes en mesure de vous servir de votre expérience au fond pour faire des recommandations à l'égard du secteur privé, ou des petites entreprises, par exemple, ou des secteurs émergents... bien, émergents mais des secteurs, par exemple, à très forte prédominance féminine, mais dans des secteurs, des petites entreprises, peut-être même chez des employés féminins d'origine multiethnique et où finalement on est en train de recréer une autre discrimination systémique, là?

Mme Verreault (Dominique): Bien, écoutez, loin de nous de prétendre que nous sommes des experts dans le domaine. Nous avons suivi les travaux de la commission, nous avons lu également le rapport du ministre, également les mémoires de d'autres organisations. Nous sommes également sensibles au fait que, dans beaucoup d'entreprises, au Québec, on n'a pas encore réalisé cet exercice parfois à peine entrepris. Moi, ce que j'aurais le goût de vous répondre, c'est de dire qu'il est quand même reconnu que le Québec a une longueur d'avance au niveau international, en termes de d'équité salariale. Nous avons, au cours des 10 dernières années plus particulièrement, développé une expertise dans ce domaine-là. Vous avez vu passer ici des experts dans le domaine. Et je vous dirais qu'on devrait, comme société, utiliser cette expertise-là pour développer des outils, pour faciliter les choses au niveau des entreprises, petites entreprises, moyennes entreprises, qui utilisent la main-d'oeuvre multiculturelle, de façon à se donner, comme société, l'objectif d'atteindre l'équité salariale partout au Québec, là. Et je crois qu'on est un leader dans le domaine et qu'on doit utiliser ces ressources-là.

On a entendu des groupes de d'autres origines venir dire que ça coûtait très cher, cet exercice-là, dans certaines entreprises. Je vous dirais que, nous, comme organisation syndicale, on peut vous dire qu'au cours des 25, 30 dernières années on a mis également beaucoup d'argent et de ressources humaines dans ce dossier-là. Et, oui, il faut qu'il y ait une volonté de le faire, il faut mettre l'épaule à la roue. Oui, ça a un coût, un coût comme n'importe quelle autre loi d'ordre public ou loi sociale qu'on se donne. Mais je pense qu'il y a aussi des bienfaits à cela, et on a vu des rapports d'expertes qui viennent dire les bienfaits qu'une entreprise peut obtenir une fois que l'équité salariale est faite et est atteinte.

Alors, dans ce sens-là, de façon générale, je vous dirais: Utilisons l'expertise qu'on a ? on en a quand même développé beaucoup ? et aidons, supportons, par toutes sortes de moyens, les petites entreprises pour y arriver parce que, oui, c'est un exercice qui n'est pas simple à faire.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, Mme Verreault. Je ne voulais pas vous couper, mais je n'ai pas le choix. Alors, merci de votre présence, mesdames.

Alors, nous allons suspendre les travaux pour l'heure du dîner, jusqu'à... Nous reprenons à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

 

(Reprise à 14 h 2)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, bon après-midi, tout le monde. Puisque nous avons quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demanderais, comme à l'habitude, à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du rapport du ministre du Travail sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale.

Donc, nous avons avec nous, cet après-midi, la Centrale des syndicats du Québec. Bienvenue. La façon de fonctionner est que vous disposez de 15 minutes pour nous présenter votre mémoire. Suite à ça, les groupes parlementaires auront chacun un bloc de temps pour vous poser des questions. Donc, Mme Chabot qui va nous parler? Si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne, puis il y a 15 minutes devant vous pour nous présenter votre mémoire.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Mme Chabot (Louise): Merci beaucoup. Louise... Merci de nous accueillir. C'est vraiment un plaisir d'être là. Je vous présente, à ma gauche, M. Luc Bouchard. Luc s'occupe particulièrement de nos dossiers en équité salariale qui ne sont pas dans le programme gouvernemental. Devait m'accompagner aussi Mme Martine Gagnon, qui, elle, était plus notre artisane du côté de la réalisation de l'équité dans le secteur public.

Bien, d'abord vous dire que la CSQ représente plus de 150 000 personnes dont la majorité sont des femmes. Nous sommes principalement dans le secteur public, éducation, santé et services sociaux, services de garde. Mais aussi, dans l'exercice d'équité salariale, on a à peu près une centaine de groupes qui sont visés par l'application de la loi générale: on pense à Héma-Québec, l'Institut national de la santé publique, l'ensemble de nos centres de la petite enfance bien sûr, aussi au niveau des universités, l'université en Outaouais d'ailleurs, du personnel de soutien, donc plusieurs groupes qu'on a accompagnés au cours de l'exercice, des exercices qui ne sont pas tous complétés.

Ça fait que l'objectif aujourd'hui, c'est de vous faire part d'abord de notre appréciation. C'est quand même un privilège de pouvoir être en commission parlementaire pour saluer plus de 10 ans de luttes, 10 ans où on a eu, au Québec, comme société, une loi proactive en équité salariale qui vise comme finalité à enrayer la discrimination systémique faite aux femmes. Je pense qu'on peut être fiers comme groupes syndiqués, comme parlementaires d'avoir contribué à la mise en place de cette loi-là, et on tient à saluer que, dans le rapport du ministre... Le titre du rapport le dit: La Loi sur l'équité salariale, un acquis à maintenir. Donc, on tient à saluer que le cadre des travaux vise à améliorer ce qui est fait puis aussi à saluer le fait qu'on ne remet aucunement en question la présence et le rôle de la Commission de l'équité salariale, qui a un rôle majeur à jouer toujours dans l'application, l'interprétation de cette loi. Donc, ça nous arrive de venir en commission parlementaire de façon plus controversée, mais là ça nous fait plaisir de vous livrer le fruit de nos réflexions sur les pistes que vous amenez.

Vous avez une longue introduction. En 15 minutes, ce sera un vrai défi pour celles et ceux qui suivent notre mémoire jusqu'à la page 10, parce qu'on ne pouvait pas passer sous silence, je pense, dans ces pages-là, tout le travail qui a été accompli pour en arriver à adopter cette Loi d'équité salariale là, pour saluer les efforts faits jusqu'à maintenant, même si ça a été parsemé d'embûches, ça n'a pas toujours été facile. On le voit d'ailleurs dans les statistiques, il y a une partie des entreprises qui n'ont toujours pas réalisé l'équité. Le programme gouvernemental n'a pas été facile non plus à conclure. On a dû aller devant les tribunaux, on a dû faire valoir des chapitres de la loi qui ne nous semblaient pas conformes. Il a fallu aussi intervenir pour bien distinguer que, lorsqu'on fait un exercice d'équité salariale, on ne fait pas une négociation. On sait que c'est au confluent de ces droits-là, donc. Mais je pense que notre objectif, c'est de regarder vers l'avant et non pas dans le rétroviseur pour voir comment on peut améliorer les choses.

Ça fait que je suis déjà rendue à la page 10 pour vous dire à notre avis qu'une des principales difficultés concerne la situation des travailleuses non syndiquées. Pour nous, je pense que, si on vise à améliorer la loi, puis sans remettre en question le travail qui se fait déjà par la commission, on doit renforcer puis accentuer la sensibilisation, la publication d'outils qui permettent à ces travailleuses de mieux comprendre la loi, et aussi renforcer ses liens avec les groupes de femmes qui travaillent avec elle.

Je pense qu'on doit aussi intensifier les vérifications auprès des entreprises de petite taille. On voit souvent que c'est ces entreprises-là qui ont moins d'obligations en termes de résultats devant la commission. Donc, ça faciliterait la tâche, parce que, de ce côté-là, on voit que l'équité avance à pas de tortue. C'est les employeurs qui contrôlent la démarche dans les petites entreprises où on retrouve la majorité des non-syndiquées, et il y a plusieurs études qui démontrent qu'il y a une grande partie de ces femmes-là qui méconnaissent leurs droits inscrits dans les lois du travail.

Et on attirait votre attention, dans ce chapitre-là, particulièrement sur deux groupes plus vulnérables. Toutes celles... Bien, si on parle des adultes analphabètes, donc l'analphabétisme, on sait que c'est un adulte sur trois au Québec. Puis on sait que, pour ces personnes-là, ne serait-ce que des outils, la compréhension de ce qu'on marque dans les publications, dans les outils, des fois il faut prendre les... il faut avoir des approches peut-être un peu plus particulières.

Et aussi, pour les femmes immigrantes, on sait que 50 % de ces femmes-là se retrouvent dans des secteurs très précaires, dans les quatre branches les moins rémunératrices: l'hébergement, la restauration, le commerce de détail, l'industrie manufacturière. Donc, on pense qu'il y a un effort de ce côté-là pour rejoindre ces femmes-là puis en même temps pour demander aux employeurs, on le verra tout à l'heure, plus de transparence dans le processus et la démarche d'équité.

Notre propre expérience. Même nous, auprès, je vous dirais, de la mise en oeuvre des programme d'équité dans nos écoles ethniques et confessionnelles, on a pu voir là aussi qu'il y a des difficultés, ne serait-ce que par les biais culturels qui justifient des comportements: pour certains groupes, bien les femmes, c'est comme normal qu'elles ne soient pas égales aux hommes, donc déjà de... On le sait, quand on dit qu'il y a de grandes avancées, mais ça peut être ancré dans nos sociétés, les stéréotypes ou les biais sexistes, puis des fois ce n'est pas toujours la même volonté. Même nos propres salariés des fois se demandent, se disent: Bien, c'est peut-être correct comme ça. Donc, on a un gros travail à faire de ce côté-là.

Ça fait qu'on conclurait là-dessus en vous disant qu'on va appuyer les engagements qui sont pris par le ministère, particulièrement dans la section 7, la partie C, soit un soutien consolidé auprès des entreprises de toutes tailles, des actions pour les travailleuses en situations vulnérables, une approche de partenariat renouvelée qui va être axée sur la recherche de solutions adaptées et novatrices dans le partage de l'expertise.

n(14 h 10)n

Les difficultés d'application de la loi dans les entreprises de 10 à 49 personnes salariées. Avant d'aborder peut-être les pistes de réflexion, la commission soulignait dans son rapport le fait que l'existence de la loi est largement connue maintenant, alors que la compréhension du concept d'équité salariale l'est beaucoup moins. Même le nombre d'appels de travailleuses non syndiquées au cours de l'année 2005-2006 s'expliquerait particulièrement par la difficulté constante de susciter l'intérêt des travailleuses pour l'exercice d'un droit mal connu.

Le rapport annuel de gestion qui était publié par la Commission de l'équité salariale en 2005-2006 nous apprenait que près des deux tiers des entreprises visées par la loi déclarent avoir terminé leur exercice. Mais, chez les 10-49, il y avait un retard plus important, on parle de plus d'une sur deux.

Donc, je pense qu'il y a une attention particulière. La commission disait, à ce moment-là, qu'elle devait souvent recourir à des sondages ou des appels téléphoniques pour être en mesure de vérifier. Alors, on ne voit pas de pistes particulières, il pourrait y avoir d'autres moyens là-dessus. Mais je pense qu'effectivement c'est peut-être en demandant aux entreprises de transmettre ou de faire des comptes rendus plus régulièrement à la commission sur l'état des travaux, la démarche, comment elle a été faite, qui permettrait peut-être à la commission de soutenir ces entreprises-là.

Au niveau du changement de taille et de... Oh! ça, ce n'est pas facile à dire, vous l'avez compris, c'est écrit en caractères gras à la page 13. On peut y perdre des minutes, hein? On voit que 6 000 entreprises, ce n'est pas rien, hein, qui, depuis l'application de la loi, ont maintenant 10 personnes salariées ou plus. Sur 43 000 entreprises, on dit qu'à ce rythme-là, 850... je pense que c'est utile qu'on fasse quelque chose. Donc, nous serons en accord finalement avec la piste de réflexion qui dit que, durant une période de 12 mois, un organisme qui aurait atteint 10 personnes salariées et plus pourrait être assujetti à la loi.

Au niveau du calcul de la taille de l'entreprise, je pense qu'il faut faciliter le calcul. Vous soumettez comme piste de solution... Et on pense que le fardeau de la preuve aussi doit appartenir à l'employeur s'il n'a pas gardé les documents ou validé les informations. Le délai de cinq ans pour garder les renseignements nous apparaît raisonnable, et le fardeau doit reposer sur l'employeur. S'il ne peut démontrer qu'il a moins de 10 personnes salariées, il devrait être considéré assujetti à la loi.

Les données qui devraient être utilisées pour les fins de l'exercice. La commission avançait dans son rapport en 2006 une modification de la loi de façon à ce que les employeurs soient obligés de conserver les registres jusqu'à ce que l'exercice soit réalisé et d'y jumeler une infraction pénale. On a vu dans le rapport du ministère qu'il n'a pas retenu cette proposition. Nous, on irait de l'avant avec la conservation des registres et aussi le mécanisme d'infraction pénale. Et on irait... Le cinq ans nous semble correct, mais on irait plus loin, c'est-à-dire pas jusqu'à temps que l'exercice soit fini, mais jusqu'à temps que tous les recours prévus, avec les délais prévus à la loi, soient épuisés.

Au niveau de l'identification des catégories d'emploi et leur prédominance, toujours dans le rapport de la commission... on s'en est appuyé beaucoup aussi pour faire le parallèle avec les pistes de réflexion du ministère. Des fois, il y a des confusions, on a pu observer des confusions entre les catégories, les classes ou titres ou regroupements d'emploi de même que l'identification de la prédominance. Souvent, le critère qui est utilisé, c'est le critère mathématique du 60 %, mais ça occulte souvent d'autres critères comme l'évolution historique ou la présence de stéréotypes occupationnels. On pense que ça peut priver des femmes d'une réelle correction de la discrimination. Donc, il y aurait des correctifs à proposer pas nécessairement du côté d'une modification législative, mais dans le sens que les employeurs aient l'obligation de déposer un rapport sur leur démarche, comme je le disais tout à l'heure, de manière à ce que la commission puisse en valider la conformité ou non.

Au niveau de l'évaluation des emplois dans une perspective d'élimination de biais sexistes, à l'instar de la Commission de l'équité salariale, la CSQ avait souligné dans son mémoire de septembre 2006 que la compréhension de la discrimination systémique, son caractère historique et son enracinement socioculturel constituaient encore aujourd'hui un exercice difficile et que le refus de considérer ces biais est parfois bien involontaire, car, pour plusieurs, les outils d'évaluation devraient suffire à appliquer la loi, puis on sait que ce n'est pas toujours ça.

Pour les entreprises entre 10 et 49 personnes salariées, on sait que les exercices ne répondent pas à des critères précis dans la loi. À titre d'exemple, la collecte de données ne permet pas tout le temps de dresser l'inventaire des tâches ou de bien comprendre les facteurs ou les sous-facteurs. Donc, pour notre part, il nous apparaît que, pour être en mesure... on va favoriser bien sûr la mise en place de comités, mais on pense aussi que, du côté de la formation des employeurs, il faut que ce soit renforcé. Et même on avait avancé une piste à l'effet qu'on sait que les employeurs parfois font appel à des firmes de consultants. Et on voulait permettre aux personnes salariées des fois qui sentent que leur exercice va être compromis parce que l'expert consultant ne semble pas faire l'exercice selon la conformité de la loi au moins de pouvoir le signifier à la Commission de l'équité salariale.

Il me reste trois minutes. Je savais que c'était un vrai défi. Je vais y aller... je vais me sortir du texte pour vous dire qu'essentiellement, quand on parle de mécanismes de renforcement de la loi, on souhaiterait que des comités puissent exister pas seulement obligatoires pour les entreprises de 100 salariés, mais aussi 50 à 99 salariés et pour les entreprises de 10 à 49 salariés là où il y a des associations accréditées qui demandent que ça pourrait s'exercer.

On va plaider le même recours pour le maintien de l'équité salariale. Ça, ça nous apparaît une clé majeure, le maintien de l'équité salariale. Ce n'est pas vrai de dire que... Même s'il y a beaucoup d'entreprises qui ont réalisé l'équité, je pense qu'il faut tabler sur le maintien pour continuer puis s'assurer que la discrimination ne sera pas de retour. Et, pour ça, on sera d'accord avec l'idée de mettre une périodicité au niveau du maintien, mais on soutiendrait aussi qu'il y ait des comités de maintien qui pourraient être les comités d'équité salariale existants et à venir pour faire l'exercice.

Il y a un défi là. On regarde juste dans le secteur public, là, actuellement, l'équité réalisée, le maintien doit être fait depuis le 22 novembre 2001. Puis déjà on sait qu'il y a, dans les conventions collectives, la classification des emplois pour le personnel d'éducation, les nouvelles nomenclatures en santé et services sociaux. Ça fait que comment s'assurer que toutes ces révisions-là de types d'emploi, de classes d'emploi... on va s'assurer de maintenir l'équité? Pour nous, les comités de maintien seraient vraiment une solution, puis en plus les salariés ont développé des expertises dans les exercices d'équité, parce que ça nous apparaît probant qu'ils puissent faire le même exercice en maintien.

Et, en conclusion, deux choses. Je pense que, pour faire avancer le droit des femmes et continuer à travailler pour enrayer la discrimination systémique, il faut travailler aussi sur d'autres champs, comme accentuer la syndicalisation, voir au Programme d'accès à l'égalité en emploi, je pense que c'est toutes des mesures qui peuvent enrichir et permettre l'égalité, et s'assurer, pour celles qui ont obtenu l'équité, qu'il n'y ait pas deux poids, deux mesures. Ça fait que, dans ce sens-là, on inviterait M. le ministre à regarder sérieusement l'idée que, pour nos travailleuses en services de garde, l'équité salariale puisse se réaliser en 2001. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, Mme Chabot. Donc, je cède la parole immédiatement au ministre pour le bloc de temps qui lui appartient.

M. Whissell: Merci, Mme la Présidente. Mme Chabot, M. Bouchard, merci de la présentation. Vous l'avez souligné, bon, réaliser l'exercice de l'équité, c'est une chose, la maintenir, c'est un autre défi en soi. Dans votre rapport, vous semblez vouloir dissocier les opérations de maintien de l'exercice de renouvellement de convention collective, de négociation. Il y a une disposition dans la loi actuelle, l'article ? de mémoire, c'est 52, 42 ? 40, pardon, qui donne une obligation aussi au syndicat de maintenir justement l'équité salariale, et, lorsqu'il y a le renouvellement de convention collective, vous avez une obligation. Alors, pourquoi dissocier ou chercher à dissocier justement le maintien de la négociation?

n(14 h 20)n

Mme Chabot (Louise): Parce qu'on pense que l'équité salariale et le négociation de la rémunération doivent être deux choses différentes, qui ne visent pas les mêmes finalités. Mais, de façon plus concrète, c'est des questions qu'on se pose parce qu'en cours de route, même en dehors des périodes de négociation, comme je vous disais, il y a toutes sortes de travaux qui se font sur les types d'emploi. Et on se disait: Comment être proactifs là-dedans et s'assurer qu'au fur et à mesure les exercices qu'on fait, qui sont corrects, ne viennent pas défaire ce qu'on a pu réaliser en équité?

Et une autre problématique qui se pose, on sait que c'est une responsabilité de l'employeur, le maintien, et ça devient une responsabilité de l'association accréditée en période de renouvellement des conventions collectives, de... Mais là on se pose des questions. Je vais prendre le programme gouvernemental. On a réalisé ce programme-là, Santé et Services sociaux, Éducation, donc un programme large. Ça nous apparaît difficile de concevoir que le maintien pourrait être seulement par association accréditée. Donc, c'est pour ça qu'on le dissocie, pour être plus proactifs, de dire: Si on réussit à maintenir, même en dehors des périodes de négociation, un comité sur le maintien de l'équité salariale qui verrait justement, peut-être pas à tous les mois, là, mais à faire les exercices nécessaires au niveau des nouveaux types d'emploi, des nouvelles évaluations, puis voir si ça a un effet sur ce qu'on a réalisé, ça nous apparaissait plus probant. Puis on disait: Les équipes qui ont réalisé ces travaux-là ont acquis une grande connaissance soit justement pour débusquer des biais sexistes quand on fait l'évaluation ou dans les travaux de rémunération. Donc, tant au niveau des entreprises, des comités, qu'au niveau du programme gouvernemental, ça pourrait être un plus.

Et, dans nos conventions, on en a actuellement, là. Dans les groupes, on les met par absence dans le fond, que la loi n'a pas vraiment beaucoup d'articles pour nous dire comment on fait ça, le maintien. Mais, s'il y avait des articles prévus dans la loi, très clairs, on serait prêts à enlever les dispositions des conventions collectives de comité de maintien.

M. Whissell: Parce que, sur le maintien, il n'y a pas vraiment de chemin qui a été parcouru.

Mme Chabot (Louise): Non, mais, là où on a réalisé des exercices ? Luc peut en témoigner ? parfois on a mis des comités dans les conventions collectives, les comités de maintien. L'employeur ne veut pas nécessairement les activer. Et... parce qu'il y a des exercices où déjà on pourrait faire du maintien en cours, là, mais dans le fond, vu que c'est sa responsabilité, il n'y a pas vraiment de participation du salarié ni d'appropriation par le syndicat de ces travaux-là. Nous, on devrait, je pense, encadrer ça un peu mieux. D'ailleurs, la commission, on l'a repris un peu à la page 21, c'est déjà ce qu'elle suggérait, en 2006, dans ses orientations. On soutenait ça, là.

M. Whissell: Vous avez mentionné, au niveau des catégories d'emploi, qu'il devrait y avoir certains correctifs. Vous avez dit: Pas nécessairement dans la loi. Qu'est-ce que vous aviez en tête? Lorsqu'il est temps d'évaluer les catégories d'emploi, la loi, bon, dicte certains éléments. Il y a la règle du 60 %. Vous avez dit: Trop souvent, on s'arrête à la règle du 60 %. Comment on pourrait améliorer justement, lorsqu'on fait l'étape de la catégorie d'emploi, que ça se fasse de la façon la plus juste possible, la plus simple aussi, en même temps?

Mme Chabot (Louise): Bien, la plus simple...

Une voix: ...un des deux.

Mme Chabot (Louise): C'est un défi. Là, ça va peut-être être avec la philosophie puis le principe de cette loi-là. Des fois, d'aller au plus simple peut nous faire perdre de vue l'essentiel de ce qu'on a à corriger comme exercice. Et donc l'identification des catégories d'emploi, dans cet exercice-là, nous apparaît essentielle comme leur prédominance. Et ce qu'on voulait souligner surtout, c'est... C'est assez difficile pour les 10-49 ou les 50... les entreprises de moins de... de voir comment a été réalisé cet exercice-là puis de s'assurer que les démarches ont été conformes. La loi prévoit déjà... On ne veut pas modifier, comme je le disais, ce n'est pas une modification législative, mais c'est comment, en termes de formation puis de processus plus transparents de la démarche, qu'on pourrait améliorer. Ce n'est pas tout, d'afficher, là. Comment, juste par un affichage, des salariés peuvent s'assurer, surtout s'ils n'ont pas été impliqués dans le processus, que la démarche est faite correctement? Comment, juste pour un affichage, la Commission d'équité salariale peut être en mesure de juger de l'exercice ou du résultat? Il me semble que, sans alourdir le processus... que, pour une entreprise qui fait le travail correctement... parce que là où il y a des comités, il y a des obligations, là, plus... ce serait correct de rendre compte de ça, puis on pense que ça viendrait améliorer les résultats.

M. Whissell: Sur les 10-49, il reste quand même pas mal de chemin à parcourir, vous demandez ou vous proposez dans le fond qu'il y ait la formation systématique de comités, si j'ai bien compris. Dans le fond, c'est d'étendre la formule pour les grandes entreprises vers les petites entreprises?

Mme Chabot (Louise): Ah bien, actuellement, c'est à géométrie variable. On demande d'appliquer aux 10-49 ? Luc, tu me corrigeras ? mais la même règle qu'aux 50-99, dans le fond. C'est que, là où une association accréditée le demande, les comités puissent se mettre en place. Donc, la même règle que les 50-99. Et, pour les 50-99, on demande qu'automatiquement il y ait un comité comme les 100 salariés et plus.

M. Whissell: Et s'il n'y a pas d'unité d'accréditation?

Mme Chabot (Louise): Parce que, là, on a voulu prendre le même libellé de la loi. Écoutez, s'il y a un groupe qui est non accrédité puis des salariés le demandent, c'est bien sûr qu'on sera d'accord à ce qu'il l'obtienne. On s'était appuyés dans le fond sur l'élargissement du texte législatif actuel aux 10 salariés et plus.

M. Whissell: Pour le rôle de la commission à l'égard de son implication à la CRT, quelle est votre position? Est-ce que la commission doit continuer à aller vers la CRT ou pas?

Mme Chabot (Louise): En tout cas, on peut voir que c'est très controversé. La position de la CSQ, écoutez, pas langue de bois, très clairement, on ne souhaite pas que la commission devienne juge et partie de ses propres décisions, qu'elle puisse à la fois devenir soit une alliée ou un adversaire. On a vu les décisions de la CRT, de la Cour supérieure, les deux autres décisions de la CRT, on le sait que ce n'est pas clair. Donc, quand il est demandé une modification législative, c'est pour le clarifier. Une fois qu'on a dit ça, je pense que c'est notre point de vue de principe sur la question. C'est sûr que l'argumentaire qui a été développé, et qu'on appuie nous-mêmes, de dire que, pour les non-syndiqués ou les salariés plus vulnérables qui se retrouvent devant... comment les représenter, je pense que c'est des questions que nous sommes sensibles, mais ce n'est peut-être pas par cette proposition-là parce qu'il y a d'autres forums qui se retrouvent devant la même situation. Je vous invite à ce qu'on ouvre peut-être un nouveau chantier pour regarder, particulièrement pour ces travailleuses-là, comment...

M. Whissell: Parce qu'honnêtement, je pense, à moins que je ne me trompe, vous êtes le seul syndicat qui plaide en cette faveur. Pourquoi?

Mme Chabot (Louise): Ça se crée en cohérence avec ce qu'on a toujours défendu au niveau de l'indépendance, de l'indépendance des tribunaux ou des commissions devant les... Même si ça existe dans d'autres forums, je pense que ça a toujours été notre principe qu'à partir du moment où on appelle d'une décision on puisse avoir l'indépendance requise pour le faire valoir.

La Présidente (Mme Morissette): Mme la députée de Laporte, allez-y.

Mme Ménard: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, Mme Chabot, M. Bouchard. Vous proposez que les entreprises soient tenues de déposer un rapport à la Commission de l'équité salariale afin de valider la conformité de leurs démarches d'équité salariale. Alors, que devrait contenir ce rapport et comment la commission pourrait s'assurer d'un suivi?

Mme Chabot (Louise): Bien, les principales étapes d'une démarche que devrait contenir le rapport, donc comment s'est fait le processus, est-ce qu'on a fait enquête, les descriptifs d'emploi? Ça pourrait être assez sommaire, mais quand même expliquer le processus, donner les catégories d'emploi, identifier leur prédominance, donc expliquer comment la démarche s'est faite avec un comité, pas de comité, je pense, des éléments essentiels pour voir si les étapes de la loi ont été respectées dans le processus. Luc, veux-tu compléter? Tu as eu à le vivre.

M. Bouchard (Luc): Oui, effectivement. Finalement, c'est ce que la commission demande déjà lorsqu'elle a à faire enquête. Lorsqu'elle reçoit une plainte, elle doit faire enquête et, pour faire enquête, elle demande un certain nombre de documents pour bien comprendre la démarche qui a été utilisée. Donc, on souhaiterait que c'est ça qui soit remis à la commission.

Mme Ménard: Est-ce que ça n'irait pas dans le sens contraire de la déréglementation? Est-ce que ça ne pourrait pas être perçu comme une contrainte additionnelle ou laisser croire que le seul fait de déposer un rapport serait gagnant de la qualité des exercices?

Mme Chabot (Louise): Ça se peut que ce soit perçu comme une contrainte additionnelle, mais en tout cas, nous, on ne le propose pas dans ce sens-là. On propose juste de faciliter aussi le travail de la commission puis de s'assurer, surtout pour les entreprises qui ont moins d'obligations, les petites, donc de s'assurer que le processus soit correct, effectivement. La commission peut le demander, ils doivent le fournir, ça fait que... Pourquoi ne pas, en toute transparence, dire: L'exercice d'équité est réalisé, voici les étapes pour la démarche qu'on a faite? Nous, on le veut juste dans un souci... On a vu que c'était... Chez les petites entreprises qui ont le plus de difficultés, écoutez, il y a quand même 50 % ? nous sommes en 2008 ? qui n'ont pas ni commencé ou réalisé de programme d'équité salariale. On pense que ça peut être un outil additionnel pour être en mesure d'accélérer les choses là où ce n'est pas fait puis de rendre compte. C'est simplement l'objectif. C'est possible que des entreprises voient ça comme une contrainte. Mais à notre avis la Loi d'équité salariale est venue pour régler un droit fondamental donc de prendre toutes les mesures nécessaires pour que ce soit transparent, ce processus-là.

n(14 h 30)n

Mme Ménard: Merci. J'aurais peut-être une deuxième question. Pouvez-vous nous expliquer les inconvénients que vous voyez dans l'encadrement législatif de la conciliation?

Mme Chabot (Louise): Aucun, aucun. Sur la conciliation, en autant que le processus demeure volontaire, je pense que c'est une pratique qui a été reconnue, qui a eu ses effets, puis un des rôles de la commission, qu'on trouve très important, et qu'on n'a aucune objection à ce que la conciliation soit ajoutée, mais en autant que ? le processus le dit ? le processus demeure volontaire.

Mme Ménard: Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Une question, M. le député de Mont-Royal? Il reste un petit peu plus de deux minutes.

M. Arcand: O.K. J'avais juste une recommandation que vous avez faite et je voudrais juste avoir vos commentaires là-dessus, parce que ce matin la CSD disait évidemment que les employeurs demeuraient extrêmement réticents à aborder ces questions-là, enfin plusieurs employeurs demeuraient extrêmement réticents à aborder ces questions-là. Et, dans votre recommandation 10, vous parlez d'experts et vous dites, à un moment donné, qu'on recommande que les personnes salariées aient droit de recours devant la commission advenant qu'elles estiment que l'expert ne fait pas preuve de professionnalisme ou ne respecte pas l'esprit de la loi. Est-ce qu'il y a beaucoup de cas comme ça, à votre connaissance?

Mme Chabot (Louise): Chez nous, combien? Si on le veut en nombre, on ne l'a pas chiffré, mais c'est arrivé.

M. Bouchard (Luc): C'est arrivé à plusieurs reprises qu'effectivement il y avait des consultants qui dénigraient directement les gens ou qui refusaient de reconnaître les caractéristiques féminines mais reconnaissaient abondamment les caractéristiques masculines.

M. Arcand: Donc, dans cette industrie-là, il y a beaucoup de consultants dont le seul travail, c'est de dire à l'employeur: Vous allez payer le minimum, et puis... Parce qu'en bout de ligne il y a un coût attaché à ça, et c'est un peu ce que vous semblez dire.

Mme Chabot (Louise): C'est ça. Et, pour les salariés ? qui ne font pas partie du processus souvent ? bien, questionnent, parce que souvent c'est... Puis là on ne les met pas tous dans le même panier, là...

M. Arcand: Non, non.

Mme Chabot (Louise): ...parce qu'il y a des consultants, on le sait, qui ne connaissent pas du tout la nature de l'entreprise, la mission, les tâches, les fonctions. Donc, s'il y a une impression que ce travail-là est bâclé en quelque sorte, bien il y a une impression que le résultat peut être faussé, aussi. Ça fait qu'on a déjà même pensé à faire une liste, mais là ça allait peut-être un peu loin, notre affaire. Ça fait que c'est pour ça qu'on a dit: Mais au moins...

M. Arcand: ...des bons et des mauvais consultants.

Mme Chabot (Louise): ...s'il y a cette perception-là que le seul but, c'est de le faire à moindre coût puis que le professionnalisme ne serait pas... je pense, pourrait être entaché par l'exercice, mais au moins que les salariés puissent aviser la commission de ça, là. On ne demande pas des recours très...

M. Arcand: Et j'avais juste une question, parce que ça touche beaucoup mon comté, c'est les travailleurs immigrants et les travailleuses immigrantes. Est-ce que vous avez des situations que vous connaissez qui sont encore évidemment plus dramatiques? Est-ce qu'il y a des cas où les gens... Les employeurs n'ont pas nécessairement toujours bonne réputation dans ces industries-là. Est-ce que vous avez des cas où vraiment il y a des reculs importants au cours des dernières années, ou enfin ça n'a pas avancé auprès de vos membres?

La Présidente (Mme Morissette): Réponse très rapide, s'il vous plaît.

Mme Chabot (Louise): Bien, premièrement, on n'a pas... Les cas où on rencontre le plus de... c'est le personnel dans nos établissements privés d'enseignement ou chez les garderies. Bon. Dans les CPE, il y a eu un autre exercice, mais ce n'est pas toujours jojo de voir les réactions effectivement des employeurs dans ce cadre-là. Puis, quand je vous disais: Ça mérite encore beaucoup de sensibilisation, bien parce que même le personnel des fois a de la difficulté à faire valoir ses droits. Donc, c'est un travail important à faire, mais qui concerne la commission mais qui ne concerne pas juste la commission.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au temps du côté ministériel. On irait immédiatement du côté de l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: Merci. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Ça me fait plaisir. On est contents d'entendre votre position sur le rôle de la commission. Je pense qu'il y a plusieurs groupes qui ont démontré le même intérêt que vous.

Par contre, à la page 20 de votre mémoire, dans le premier paragraphe, quand vous dites avoir été interpellés... «aussi directement la pratique de plus en plus répandue [qui] [...] certaines modalités de maintien de l'équité salariale incorporées dans les conventions collectives, ce qui pourrait ouvrir la porte aux griefs et déplacer l'interprétation [des] dispositions essentielles de la loi devant l'arbitre de grief», est-ce que vous ne jugez pas qu'un arbitre de grief peut être une personne qui est impartiale pour faire le jugement de la cause?

Mme Chabot (Louise): Bien, pour nous, ce n'est pas une question d'impartialité. Je pense que le maintien de l'équité salariale doit s'inscrire dans la même idée puis dans le même travail que l'exercice d'équité salariale. Un ne se détache pas de l'autre, et à notre avis on ne peut pas... On vise les mêmes finalités en maintien d'équité salariale qu'en équité salariale. Ça fait qu'à notre avis ça devrait être les mêmes exercices et le même forum qui devraient exister pour ça. Mais, à défaut, on l'inscrit dans les conventions collectives. Puis, tu sais, c'est...

M. Therrien: Au niveau de l'instance décisionnelle, on va se ramasser à la même place, là. On va arriver à la CRT d'une manière ou d'une autre, là.

Mme Chabot (Louise): Voilà.

M. Therrien: Donc, c'est les mêmes personnes qui vont rendre le jugement, sauf qu'en première instance on se retrouve avec un arbitre de grief qui est impartial aussi.

Mme Chabot (Louise): Oui. Mais, si on confère dans la loi que le maintien de l'équité salariale appartient à des comités et que la commission peut être chargée de la surveillance des exercices de maintien, bien on va se retrouver dans le même processus qu'on vit actuellement au niveau de l'équité, et c'est ce qu'on souhaite.

M. Therrien: Merci. Dans votre préambule de votre mémoire, à la page 7, vous présumez que les employeurs ont utilisé plusieurs subterfuges. Ne pensez-vous pas plutôt que la résistance que vous présumez serait liée à la complexité de l'application de la loi et/ou au manque d'information?

Mme Chabot (Louise): Les deux, mais je pense qu'il y a aussi... La complexité de la loi, écoutez, je pense qu'il y a eu beaucoup d'efforts de faits. Je pense que les entreprises ont été en mesure de regarder ça. Mais il y a des entreprises ou des employeurs effectivement qui ont... Bien, écoutez, on l'a même vécu. On l'a même vécu dans des grands secteurs comme au gouvernement, de reconnaître que les relativités salariales... ou que l'exercice de relativité salariale qui avait été fait constituait un exercice valide d'équité salariale. Bien, c'en est un, exemple. Ça fait que, oui, il y a eu des tentatives soit pour diminuer les coûts soit pour ne pas vouloir faire l'exercice. Il y a eu des exemples comme ça, je pense qu'il faut le reconnaître. On le cite dans notre mémoire comme étant une situation d'une oeuvre inachevée. Parce que ce n'est pas vrai que des mentalités, des cultures se changent comme ça et que, 10 ans après la loi, comme on a déjà entendu, 60 % des entreprises qui l'ont réalisé, bien c'est bien correct, ça devrait être fini, puis que la loi devrait être maintenue juste pour ceux qui ne l'ont pas fini, puis, le maintien, bien on n'a pas besoin de ça.

Nous, ce qu'on vient dire, c'est qu'il y a eu des grands pas de faits, mais il y a aussi des exercices qui ont été bâclés, il y en a qui n'ont pas voulu s'inscrire. Puis c'est encore vrai aujourd'hui: il y en a qui ne sont pas commencés dans nos écoles ou dans nos établissements, puis il y en a effectivement qui veulent que ça coûte le moins cher possible puis ils mettent ça dans un cadre budgétaire. Ça fait que, oui, il y en a eu, des situations comme ça, ce n'est pas juste un. Puis il y a eu des situations où on peut reconnaître que ça va peut-être être plus difficile de mettre en oeuvre la loi. Puis ça, on est prêts à le reconnaître puis à dire: Bien, si ça prend plus d'outils, on est prêts à soutenir dans ce sens-là.

M. Therrien: Quand vous dites qu'il y en a que c'était le moins cher possible, est-ce que vous êtes en mesure d'évaluer le coût d'un exercice complet pour une entreprise de 50 employés et moins? Donc, ça ne serait peut-être pas un...

Mme Chabot (Louise): On n'a pas fait ce calcul-là.

M. Therrien: ...ce ne serait pas un motif raisonnable pour une entreprise qui a une santé financière précaire?

Mme Chabot (Louise): Non, pas du tout. Ce ne serait pas un motif raisonnable de troquer un exercice d'équité salariale en raison du coût que cela exige. Puis en plus on a démontré souvent... Ce que je dis: Il n'y a pas de corollaire à faire, puis en plus, même s'il y a un coût à faire l'exercice, c'est parce que probablement que, dans l'entreprise, il n'y avait pas de politique de rémunération, pas de politique de dotation ou... pour plusieurs raisons. Mais, à partir du moment où on vient renforcer, on a vu aussi tous les avantages que pouvait comporter un exercice d'équité salariale. Puis il y a même des entreprises qui le reconnaissent, au plan de la gestion des ressources humaines, au plan de la meilleure connaissance des emplois, de comment justement revoir les emplois pour s'apercevoir des fois qu'on confie des rôles, mais que les fonctions... Je pense qu'il y a plus de bénéfices que de pertes à faire l'exercice de l'équité salariale pour une entreprise. Et, non, ce n'est pas une bonne idée.

M. Therrien: Qu'est-ce que vous avancez présentement, là, je pense que vous remettez même en doute dans votre rapport les chiffres et la méthodologie qui nous sont fournis à la page 12.

Mme Chabot (Louise): De notre mémoire?

M. Therrien: Oui, à la page 12. Dernier paragraphe: «L'application de la loi dans les entreprises est difficile à établir d'une manière» nous permettant, etc. Je vous ferai grâce de la lecture au complet. Vous, vos membres, à quel pourcentage êtes-vous arrivés aujourd'hui?

n(14 h 40)n

Mme Chabot (Louise): Nos réalisations de l'exercice?

M. Therrien: Oui.

Mme Chabot (Louise): 75... bien 100 % bien sûr dans le secteur public. Mais, pour nos autres groupes, à 75 %, l'équité réalisée, l'exercice est complété.

M. Therrien: Et, quand vous dites que vous remettez en doute les chiffres fournis et surtout la méthodologie qui a été utilisée, c'est à quel niveau?

Mme Chabot (Louise): Bien, c'est parce que ça apparaissait difficile, là, d'avoir les chiffres exacts, mais je ne pense pas qu'on remette en doute. Ce n'est pas ça qu'on voulait dire, là, dans ce qui est proposé. Si tu veux y aller, Luc.

M. Bouchard (Luc): Oui. Ce qu'on voulait signifier là-dedans, c'est que, dans les entreprises 10-49, souvent l'employeur refuse de nous remettre les documents ou de nous expliquer comment la démarche a été faite. Donc, à ce moment-là, ça devient presque impossible de s'assurer ou de valider la démarche entreprise, et la seule porte de sortie qu'il reste à ce moment-là, c'est de faire systématiquement des plaintes. Or, on trouve ça dommage d'avoir à procéder comme ça, et ce n'est pas la meilleure approche qu'on pense qui devrait être. Il devrait y avoir une ouverture de la part de l'employeur, sauf que, dans plusieurs cas, il n'y a pas cette ouverture-là. Donc, à défaut de pouvoir valider, on doit demander à la commission de le faire.

Mme Chabot (Louise): Puis ce qu'on a voulu reproduire là, c'est ce que la commission des fois, si vous avez revu son rapport en 2006, devait faire, qu'il y avait des fois un écart entre... soit parce qu'elle est obligée de vérifier par sondage téléphonique, ou tout ça, qu'il y avait un écart entre ce qui était dit puis ce qui a été fait. Bien ça, c'est comme une réalité. Mais ça, c'est à partir de seulement des renseignements qui peuvent être fournis qu'on sera en mesure de, là.

M. Therrien: Donc, on peut conclure que le sondage par téléphone, ce n'est pas fiable.

Mme Chabot (Louise): Bien, les sondages en soi comportent...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Therrien: ...d'accord avec vous ce matin.

Mme Chabot (Louise): ...comportent... Ce matin... Oui, bien, c'est ça...

M. Therrien: ...moins d'accord avec vous aujourd'hui.

Mme Chabot (Louise): Je n'ai pas fait ça spécialement pour vous.

M. Therrien: Une dernière question: Vous notez, à la page 14, que «l'obligation soit assortie d'une pénalité si elle n'est pas respectée». À partir de quelle séquence, dans l'application de l'exercice, vous pouvez conclure que l'on devrait pénaliser l'entreprise?

M. Bouchard (Luc): O.K. C'est tout simplement... Il y a clairement des employeurs qui n'ont pas conservé les données, qui n'ont pas fait leur exercice d'équité salariale et qui arrivent, là, en 2008 et on n'est plus capable de rien retrouver. Et, s'il n'y a pas moyen de pouvoir s'assurer que l'employeur va conserver les données de façon à pouvoir appliquer son programme comme le prévoit la loi, ça cause des problèmes, puis il y a eu certains milieux pour qui ça a causé des problèmes, des difficultés. Donc, on pense que, s'il y avait effectivement une obligation et une obligation assortie d'une conséquence possible, là, les employeurs seraient plus enclins à conserver les données, exactement comme ça se fait au niveau des impôts, au niveau des vérifications comptables, et tout ça.

M. Therrien: Merci. Est-ce que vous pouvez conclure... Est-ce que vous pouvez arriver à une conclusion qu'à certaines entreprises il n'y aurait pas d'écart après un exercice complet de bonne foi de l'employeur?

Mme Chabot (Louise): Un exercice complet de bonne foi, selon les règles de l'art, je pense que ça peut arriver. Ce n'est pas arrivé souvent. Même, justement, j'en parlais avec Luc. Ça nous est arrivé dans certaines entreprises, puis ça a été fait correct, puis il n'y avait pas d'écart. Mais je dirais que c'est très minime. Mais c'est possible.

M. Therrien: Merci. Je vais laisser la parole à ma consoeur de Groulx.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Mme la députée de Groulx, il reste environ trois minutes.

Mme Lapointe (Groulx): Merci. Bonjour et bienvenue. J'aurais une question. À la page 15, vous faites allusion à la discrimination systémique. C'est toujours intéressant et enrichissant d'obtenir plusieurs points de vue sur ce sujet-là. S'il y a discrimination systémique partout, c'est des stéréotypes sexistes. Est-ce que le fait de segmenter les professions selon la prédominance féminine ou masculine ne renforce pas les stéréotypes sexistes?

Mme Chabot (Louise): Pour moi, non, c'est... Pour nous, c'est deux choses, parce que de déterminer une prédominance dans l'exercice d'équité salariale, c'est très important parce qu'on sait que d'enrayer la discrimination, c'est à l'égard des emplois majoritairement masculins ou de catégories d'emploi. Parce que justement, pour détecter ça, la loi, elle a prévu, pour déterminer la prédominance, qu'on puisse avoir des caractères pour reconnaître qu'un type d'emploi est féminin. Puis, à partir de ça, évaluer, pour ces emplois-là, est-ce qu'il y a eu, dans l'évaluation, comparativement à des emplois jugés équivalents masculins... c'est le seul but de l'exercice. Ça fait qu'au contraire je pense que de pouvoir bien déterminer les catégories d'emploi féminines et leur prédominance nous permet, et avec des outils d'évaluation, de bien déterminer ces biais-là. Je pense qu'au contraire...

Mme Lapointe (Groulx): ...c'était plus savoir... Ma question, c'était: Est-ce que ça n'encourage pas justement à ce que ça continue et que ça reste, cette... Non?

Mme Chabot (Louise): Non. Je pense que ça vient justement mettre en évidence quelque chose d'historique, qu'on a toujours, de façon bien involontaire, hein, probablement, mais plus donné de valeur à des caractéristiques particulièrement masculines plutôt qu'à des caractéristiques d'emploi particulièrement féminines. Ce n'est pas par hasard dans les correctifs où les emplois les moins bien rémunérés ont reçu aussi des correctifs plus importants... Parce qu'on a vu, que ce soient des emplois de bureau ou des emplois... ou des fortes catégories féminines qu'au niveau des biais dans la reconnaissance du travail, ce n'est pas compliqué, là, l'effort physique a déjà pris beaucoup plus d'importance que les relations ou que les communications interpersonnelles, et tout ça. Il y a les caractéristiques d'emploi qui sont encore plus subtiles et très féminines qui permettent de corriger la discrimination. C'est obligatoire de faire ça, ça, à notre avis.

Mme Lapointe (Groulx): Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Ça met fin au temps, effectivement. Merci beaucoup. Alors, du côté de la deuxième opposition, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Chabot, M. Bouchard, bienvenue. J'avais l'occasion de vous dire à quel point, comme d'habitude, la Centrale des syndicats du Québec a un mémoire fouillé, étoffé, qui pourra nous servir lors de l'étude article par article d'un projet de loi qui devrait suivre évidemment cette étude en commission parlementaire.

Il y a une question de fond, j'y reviens parce qu'elle est comme sous-jacente, c'est la suivante: Est-ce que, par exemple, une entreprise dont la santé financière serait précaire pourrait ne pas payer le salaire minimum, ou bien donc faire travailler les enfants, ou utiliser le travail en dehors des heures légales? Évidemment, non, parce que l'environnement du marché du travail doit se faire dans le cadre des lois du travail existantes. Et ça m'étonne depuis le début de la commission, c'est comme si cette Loi sur l'équité salariale ne faisait pas partie des lois de notre... comment vous dire, tu sais, de notre patrimoine de lois existantes au même titre que le salaire minimum, l'interdiction du travail des enfants, la réglementation sur le travail de nuit, la santé et sécurité au travail. Ça prend du temps avant qu'une loi finisse par s'imposer comme faisant partie du cadre des lois que l'on ne peut pas négocier à la baisse, si vous voulez, où on ne pourrait pas... Tu sais, on ne peut pas penser qu'une entreprise viendrait ici puis dirait: Bien, moi, ma santé financière est précaire, je pense que je ne paierai pas le salaire minimum cette année. Tu sais, ce n'est même pas envisageable. Puis pourtant on pose la question: Est-ce qu'au nom de la santé financière précaire l'équité salariale ne pourrait pas être écartée? Je ne sais pas si vous avez, dans votre pratique, constaté la même chose que moi?

Mme Chabot (Louise): Oui. J'ai même entendu dire: Je ne serai pas capable de... Bien, en tout cas, une fois que... Au niveau du salaire minimum, beaucoup s'opposent à la hausse. Une fois que c'est adopté, oui, c'est fait, mais beaucoup s'opposent en raison d'arguments comme ça. Écoutez, c'est vrai, puis ça peut peut-être nous faire un peu de peine de voir que, 10 ou 12 ans plus tard, ce qui fait partie dans le fond de notre patrimoine, comme vous l'avez dit, qui devrait effectivement permettre aux entreprises de croître et de grandir et non pas d'être diminuées par cet exercice-là...

Mme Harel: Autant...

Mme Chabot (Louise): Il y a encore des embûches, mais ce qui nous fait quand même plaisir à voir, c'est le chemin parcouru.

n(14 h 50)n

Mme Harel: Bon. Puis ça nous fait plaisir aussi de constater qu'au 1er avril le salaire minimum va passer à 8,50 $.

Mme Chabot (Louise): C'est ça. Donc, on va revendiquer trois semaines de vacances dans la Loi des normes.

Mme Harel: Bien oui.

Mme Chabot (Louise): Le 1er mai, là, il y a plein de revendications.

Mme Harel: C'est sûr que... Vous le disiez à juste titre, et votre mémoire d'ailleurs en parle, c'est bien avant 1996, c'est bien avant il y a 10 ans. En fait, il y a eu d'abord les conventions internationales. Ensuite, vous rappeliez, à la page 6 de votre mémoire... Je trouve ça vraiment intéressant que vous rappeliez ce colloque qui avait eu lieu au Y des femmes de Montréal sur Les femmes et l'équité salariale: un pouvoir à gagner, en 1989, et suite auquel, colloque, il y avait eu la création de la Coalition en faveur de l'égalité salariale avec au-delà de 40 organismes qui en ont fait partie. Puis je pense que c'étaient des dizaines de milliers de signatures... Est-ce que c'était 75 000 ou 100 000 signatures qui ont été recueillies et qui ont été déposées ici, à l'Assemblée? Des fois, j'ai l'impression que les réformes qui réussissent, en tout cas au moins en partie, finissent par faire oublier les causes qui les ont produites. Et parfois on a l'impression qu'on recommence à zéro dans des domaines qui pourtant ont un passé, disons, de mobilisation d'opinion publique, du mouvement des femmes très, très important.

Alors, revenons donc à votre mémoire, à la page 19 et 20. Vous nous dites, à la page 19: «...la loi devrait être immédiatement modifiée de manière à confirmer explicitement l'interdiction des programmes distincts sans catégorie d'emplois [féminins].» Vous savez qu'il y a eu beaucoup d'intervenants qui ont plaidé pour que, lorsqu'il y a des catégories à prédominance masculine, ils puissent, si ce sont des salariés syndiqués, en fait qu'ils puissent s'exclure. D'autres sont venus nous dire: L'important, c'est que de toute façon dans la même entreprise les autres catégories puissent toujours faire référence à des comparateurs qui sont emplois à prédominance masculine même s'ils se sont exclus. Vous, vous voyez ça comment?

Mme Chabot (Louise): Bien, nous, c'est clair que la loi devrait prévoir d'exclure... quand il n'y a pas de comparateur masculin, donc de prévoir des programmes distincts seulement lorsqu'il n'y a pas d'emploi masculin. Je pense que ça devrait être exclu puis être très explicite.

Au niveau des programmes distincts, on va soutenir en général qu'il y ait un programme d'entreprise. Parce qu'effectivement les programmes distincts peuvent nous amener dans des exercices d'équité salariale des fois qui sont... Mais il arrive parfois que c'est le contexte qui fait en sorte qu'on demande des programmes distincts. Mais en aucun cas ? c'est ce qu'on affirme à la page 19 ? on ne propose que la loi devrait être modifiée pour confirmer l'interdiction s'il n'y a pas de catégorie d'emploi féminine. Pardon, j'ai dit «masculine» tout à l'heure.

Mme Harel: Est-ce que je comprends que ce que vous nous dites, il y a deux choses, là, la première étant: pas de rétroactivité cependant, on ne va pas fouiller dans le passé. Le passé, heureux ou malheureux, hein, c'est passé. Mais, pour l'avenir, dorénavant, ce que vous recommandez, c'est que la loi soit claire que, lorsqu'il y a des catégories à prédominance masculine sans catégorie d'emploi distinct, il n'y ait pas...

Mme Chabot (Louise): Pas de demande de programme distinct, que ce ne soit pas permis.

Mme Harel: Pas de demande de programme distinct. Ça, c'est dans la même entreprise. D'autres vont dire, en cherchant le même objectif que vous par d'autres moyens peut-être, je ne sais pas ce que vous en pensez, d'autres vont dire: On pourrait le permettre, de toute façon ça n'a pas d'importance en autant que le programme qui va résulter pour les autres catégories va utiliser un comparateur qui va prendre en compte l'ensemble des emplois de l'entreprise, y compris les emplois masculins. M. Bouchard.

M. Bouchard (Luc): O.K. Ce que je vous dirais là-dessus, c'est la première idée qui me vient, moi, quand on parle d'un programme, de permettre à des accréditations syndicales de demander un programme distinct quand ils ne représentent que des emplois masculins, c'est de contourner la loi en excluant ces comparateurs-là. Et souvent ce sont les comparateurs qui sont bien payés, qui apporteraient un plus. On peut facilement penser aux emplois de métier par rapport aux emplois de bureau qui sont souvent comparés.

Mme Harel: Merci, parce que c'est... Mais en même temps certains vont dire: C'est vrai, ça peut tout simplement permettre un dérapage pour s'exclure de la comparaison. Mais, s'ils veulent s'exclure, qu'ils s'excluent, mais ils ne pourront pas s'exclure de la comparaison parce que ceux qui restent, eux, pourront utiliser l'ensemble des emplois de l'entreprise comme comparateurs, y compris les emplois de ceux qui sont exclus. Vous pensez quoi de ça, vous?

Mme Chabot (Louise): Bien, c'est particulier parce que normalement tu participes au processus d'évaluation. Ça fait que tu ne seras...

Mme Harel: Au pire, si tu ne veux pas y participer ? les absents ont toujours tort, vous me direz...

Mme Chabot (Louise): On ne serait pas en accord.

Mme Harel: ... ? mais au moins qu'ils ne sortent pas leur emploi mieux payé, si vous voulez, de la comparaison au sein de l'entreprise. Je ne sais pas, là, si vous avez un...

Mme Chabot (Louise): Ce n'était pas notre opinion première.

Mme Harel: Ce n'était pas votre opinion. Bon.

Mme Chabot (Louise): Ce n'était pas notre opinion première.

Mme Harel: Mais votre opinion, c'est qu'il faut que ce soit réglé mais sans que ce soit rétroactif.

Mme Chabot (Louise): Et voilà.

Mme Harel: Bon. Ça, c'est une autre dimension, là, je pense, qui est utile aussi.

Mme Chabot (Louise): C'est un autre débat.

Mme Harel: Bon. Sur le maintien de l'équité, vous nous rappelez que la loi ne va pas assez loin là-dessus, là, hein? Vous nous dites: La loi, comment faire respecter les articles, quels sont les recours possibles, quels mécanismes les salariés peuvent-ils utiliser pour s'assurer du respect de l'équité? J'ai cru comprendre que le ministre semblait transmettre comme message: Bien, par la convention collective, là où c'est syndiqué. Mais évidemment, dans le privé, 80 % des femmes ne sont pas syndiquées. Mais, même dans la convention collective, c'est la bonne question, je pense.

À la page 20 d'ailleurs, vous rappelez que la commission interpellait la pratique de plus en plus répandue qui maintient l'équité... qui incorpore dans les conventions collectives «ce qui pourrait ouvrir la porte aux griefs et déplacer l'interprétation de dispositions essentielles de la loi devant l'arbitre de grief, une instance dont ce n'est pas le champ habituel d'intervention, et ce, au détriment de la reconnaissance de l'expertise de la commission en matière de discrimination».

En d'autres termes, dans la mesure où ça devient... Mettons ? je reprends ma comparaison de salaire minimum ? le salaire minimum viendrait dans la convention collective puis là pourrait être arbitré par un grief et auquel cas l'arbitre de grief pourrait ne plus en donner le caractère d'ordre public. Alors, est-ce que vous partagez ou pas cette opinion de la commission?

Mme Chabot (Louise): Oui, on la partage puis on allait un peu plus loin, tu sais, dans le sens où on voulait comme intégrer les concepts. Ce qu'on a essayé de faire valoir dans le maintien ? puis d'ailleurs on a cité... c'était très intéressant comme article, on n'a pas tout cité M. Yves Hallée, de la Direction de la recherche puis de l'évaluation au ministère du Travail ? c'est à quel point l'expertise qui a été développée dans le cadre des exercices d'équité où on a fait appel à la participation des salariés, à des processus qui ont habilité des personnes au travail de rémunération, de compréhension des emplois, comment c'est précieux, puis, vu que le maintien vise dans le fond à ne pas défaire ce qui a été réalisé, comment soutenir, dans le fond, dans le même esprit l'exercice de maintien que celui qui a été fait de l'équité.

Puis la commission, à la page 21, là, ce n'est pas nous, c'est la commission qui proposait alors de modifier la loi aussi pour dire qu'il faut améliorer l'information, qu'il faut prévoir une formule de participation qui était modulée selon la taille des entreprises et de privilégier l'expertise de la commission. Sans ça, on va recommencer.

Là, tout à l'heure, on se questionnait, à savoir: c'est drôle de se demander, après tant d'années... qu'il y ait du monde qui pensent encore que, parce que c'est coûteux, on ne peut pas réaliser l'exercice. Mais, si on ne systématise pas l'exercice de maintien puis qu'on ne le met pas plus rigoureux... On peut comprendre que la loi à l'époque, là, l'équité n'était pas réalisée, que le maintien, c'était... Mais je pense que la périodicité de prévoir des comités puis que ce soit sous la gouverne ou sous l'enseigne de la commission, de vérifier avec un mécanisme d'affichage ? d'ailleurs, dans le maintien, on va le proposer ? je pense que, pour nous, c'est une façon de s'assurer qu'on ne se retrouvera pas, dans 10 ans, en se disant...

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup.

Mme Chabot (Louise): Ça a été un bel exercice, ça nous a demandé beaucoup d'efforts, mais malheureusement il faut reprendre à zéro.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au temps qui vous était alloué.

Donc, on va suspendre quelques instants pour vous saluer.

(Suspension de la séance à 14 h 59)

 

(Reprise à 15 h 4)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, bon après-midi. Bienvenue aux gens du Barreau du Québec. Bonjour. Donc, la façon de fonctionner est que vous disposez de 15 minutes pour nous faire la présentation de votre mémoire, et ensuite les groupes parlementaires auront chacun un bloc de temps pour vous adresser leurs questions. J'imagine que ça va être... bien, j'imagine, je ne présumerai pas à votre place. Ça va être Me Tremblay peut-être qui va faire la présentation. Si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent, puis vous disposez de 15 minutes pour nous faire votre présentation.

Barreau du Québec

M. Tremblay (Gérald R.): Bien, merci. Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, comme vous l'avez demandé et comme je voulais le faire de toute façon, je voudrais vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui. D'abord, je suis vice-président du Barreau du Québec. Et normalement c'est le bâtonnier, M. Doyon, qui devrait y être, mais il a dû s'absenter et me déléguer ce devoir et ce plaisir de vous adresser la parole aujourd'hui. Parler dans un groupe comme le vôtre est pour moi un honneur, et, sur un sujet aussi important, c'est également un honneur, un plaisir et, pour le Barreau, un devoir de participer à un débat de société aussi important. Alors, à ma droite, Me Annick Desjardins, qui est membre du groupe de travail sur l'équité salariale; à mon extrême gauche, Me Fanie Pelletier, conseillère à l'équité, Barreau du Québec; et Me Marc Sauvé, directeur du Service de recherche et de législation du Barreau du Québec. Il est le cerveau, je suis la voix.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: La barre est haute. Ou elle est basse.

M. Tremblay (Gérald R.): Alors, d'abord, je voudrais vous remercier de nous donner l'occasion de vous faire part de notre point de vue et de nos observations sur cet important sujet. Nous devons d'abord souligner la qualité du rapport du ministre, qui est bien documenté, qui comporte de nombreuses données, des analyses utiles pour tous les intervenants concernés et intéressés à la question de l'équité salariale. Je voudrais vous dire aussi que les quelques minutes où je suis entré ici, avant d'être invité à m'asseoir ici, j'ai été très impressionné par la qualité des questions posées et la qualité des réponses données.

Au milieu des années quatre-vingt-dix, le gouvernement du Québec s'est engagé à combattre la discrimination systémique fondée sur le sexe dans des systèmes de rémunération et les méthodes d'évaluation des emplois. Dans la poursuite de cet objectif, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité, le 21 novembre 1996, la Loi sur l'équité salariale. Il faut rappeler que l'adoption... sur l'équité salariale correspondait à une promesse à l'endroit des femmes du Québec. La loi devait faire en sorte que soient enrayés les écarts salariaux entre emplois féminins et emplois masculins dus à la discrimination systémique. En effet, avec l'adoption de la loi, on supprimait le recours pour discrimination salariale fondée sur le sexe autrefois énoncé à la Charte des droits et libertés de la personne pour le remplacer par le régime proactif qui devait assurer le respect de cette composante du droit à l'égalité qu'est le droit à une rémunération exempte de discrimination.

Il n'est pas sans intérêt de noter que, la semaine passée, j'étais ici partie d'une délégation du Barreau pour parler sur le projet de loi n° 63 et à l'occasion duquel on a parlé largement de ce droit à l'égalité entre les hommes et les femmes. Et ça m'a frappé de voir qu'on parlait de ce sujet extrêmement important, on a pris une position qui disait: Bien, c'est peut-être mieux de ne pas y aller à la pièce puis de faire plutôt une analyse globale de la question, tout en ayant ce petit chatouillement au coeur qu'à toutes les fois qu'on dit non il ne faut pas y aller à la pièce... Comme le Code civil, ça a pris 30 ans à le réformer, alors espérons que ça va aller un peu plus vite. Et je me disais: C'est assez extraordinaire de voir que le débat a eu lieu sur cette question-là il y a une semaine.

Et l'historique du présent débat, c'est de sortir l'égalité hommes-femmes en milieu de travail pour en faire l'objet d'une législation spéciale. Et c'est intéressant parce qu'on déplaçait ce débat qui était... en fait, ce principe qui était des droits de la personne pour, entre guillemets, l'enlever de la Charte des droits et libertés et le mettre à l'égard d'un système qui, lui, protège plutôt des groupes, c'est des catégories d'emploi hommes, catégories d'emploi femmes, et qu'il doit y avoir égalité entre les deux. Et la composante droits individuels a été un tout petit peu évacuée pour plutôt l'incorporer dans un système heureusement proactif, mais plutôt un groupe de salariés ou d'employés plutôt que le droit d'une personne. Alors, est-ce qu'on a perdu au change, est-ce qu'enlever le recours à un endroit pour le mettre à l'autre, mais dans un autre contexte, est-ce que ça maintenait le principe de l'égalité hommes-femmes ou si c'était une mise en application particulière, dans un domaine particulier, de ce grand principe général de l'égalité hommes-femmes? C'est un débat qui est extrêmement intéressant, mais il faut se poser la question si quelqu'un n'a pas un peu perdu au change et si, pour favoriser un système, on n'a peut-être pas un petit peu affaibli l'autre.

Avec les développements jurisprudentiels, notamment suite au jugement Julien et suite aux affaires Terre-Neuve et Air Canada, il ne fait plus de doute maintenant que l'équité salariale ou le droit à une rémunération exempte de discrimination systémique fondée sur le sexe constitue un droit fondamental. La Loi sur l'équité salariale est donc une loi qui vise la mise en oeuvre d'un droit fondamental de la personne et non simplement une norme de travail. Et j'ai aimé l'échange de Mme Marois lorsqu'elle...

n(15 h 10)n

Une voix: ...

M. Tremblay (Gérald R.): Pardon? Harel, lorsqu'elle indiquait... Il ne faut pas se laisser influencer par les manchettes trop, trop, je faisais allusion à Mme Harel. Et j'ai aimé ce type de débat. Comment se fait-il que ce n'est pas encore ancré dans les moeurs, dans les esprits, dans les mentalités comme le reste, et qu'on est encore en train de parler de délais pour mettre en oeuvre telle politique, mettre en oeuvre telle autre? Si c'est vrai, comme l'ont dit les tribunaux jusqu'à présent, il s'agit d'un droit fondamental.

En fait, ce droit est une composante du droit à l'égalité des femmes en emploi. L'approche de droit fondamental implique que l'on considère la salariée comme titulaire d'un ensemble de droits corollaires. Un de ces droits corollaires, le droit d'être pleinement informée pour s'assurer que son droit à l'égalité est respecté; le droit d'intervenir comme partie dans toute procédure touchant l'équité salariale, etc.

Par ailleurs, avec le temps, la Commission de l'équité salariale a développé une expertise qui est nécessaire dans justement cette recherche de l'équité salariale au sein des entreprises assujetties. Par son rôle de conseil, de conseiller privilégié, la commission contribue de façon significative à l'intégration sociale et dans les mentalités de cet objectif d'équité salariale. Selon l'information contenue au document de consultation de 2006 de la Commission de l'équité salariale, il semble cependant qu'il y ait encore beaucoup de travail à faire avant de pouvoir prétendre que l'objectif poursuivi par le législateur est réalisé. À peine la moitié des entreprises assujetties ont réalisé la mise en oeuvre de l'équité salariale, à peine la moitié. Dans les entreprises où les relations de travail sont peu organisées et développées, l'équité salariale est plus difficilement appliquée ou respectée. Le Barreau tient à souligner l'importance d'accorder les ressources suffisantes à la commission pour lui permettre d'atteindre les objectifs prévus dans la législation.

Sur un tout autre registre, le Barreau du Québec constate un manque d'information détaillée et précise sur les statistiques concernant la mise en oeuvre de la loi, les activités de contrôle et d'enquête de la commission et sur l'application de la loi aux diverses catégories d'entreprise et de salarié.

Du point de vue du Barreau, une série de difficultés reliées à l'application de la loi découlent, entre autres, de l'ambiguïté du statut de la commission. S'agit-il d'un organisme purement administratif ou d'un organisme mi-administratif, mi quasi judiciaire? C'est peut-être du jargon pour plusieurs d'entre vous, mais c'est une réalité vécue pour ceux qui sont habitués au mécanisme judiciaire. Ces différences peuvent amener des complications considérables lorsqu'il s'agit de plaider ces questions. Quelles sont les règles d'accès ou de confidentialité applicables? Sans pour autant judiciariser inutilement les activités de la commission, la loi devrait, selon nous, baliser davantage ses pouvoirs et attributions en qualifiant le statut de l'organisme judiciaire, quasi judiciaire, etc., ou administratif.

Comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner dans notre mémoire de 1996, il faut favoriser une approche de partenariat, de médiation et de consultation. Le dépôt de plainte ne devrait intervenir qu'en dernier ressort, en cas d'abus ou de mauvaise foi. Les conseillers en relations industrielles et les avocats spécialisés dans les relations de travail ont un rôle à jouer à ce niveau: favoriser les ententes plutôt que la chicane.

Le Barreau, comme institution, fait la promotion évidemment de la primauté du droit et défend traditionnellement les droits fondamentaux dont le droit à l'égalité. Le droit à l'égalité salariale se rattache au droit à l'égalité pure et simple et doit être traité comme tel.

On parle beaucoup, comme je le disais tantôt, avec le projet de loi visant des amendements à la charte québécoise, de l'égalité hommes-femmes et du droit des femmes à l'égalité. De l'avis du Barreau, l'égalité réelle passe notamment par une rémunération exempte de biais sexistes et par l'équité salariale.

Le Barreau, comme employeur lui-même, a procédé à l'établissement d'un programme d'équité salariale avec la participation des salariés. Par ailleurs, un poste de conseillère à l'équité salariale a été créé en 2006 afin de sensibiliser la profession et promouvoir les meilleures pratiques en matière d'égalité dans l'ensemble des milieux de travail des quelque 22 500 avocats et avocates du Québec, ce qui comprend l'équité salariale au sein de la profession juridique. Le Service de la formation continue d'offrir des formations aux avocats sur les exigences de la Loi sur l'équité salariale, permettant ainsi aux membres du Barreau de mieux conseiller leurs propres clients en cette matière et incidemment de mieux également gérer cette question dans leur propre cabinet. À part les très grands cabinets qui sont équipés de toutes sortes de choses, il y a des centaines et des centaines de cabinets de taille moyenne ou de petite taille, où il y a 10, 15, 20 employés, et il est extrêmement important que les avocats, à titre d'employeur, soient également sensibilisés à cette question en ce qui concerne leurs propres employés. Et, s'ils le sont, bien ils le seront davantage quand il s'agira de conseiller leurs propres clients en ce qui concerne les politiques à suivre au sein de leur propre entreprise.

L'équité salariale ne doit pas être traitée comme une simple exigence administrative, elle doit entrer dans notre culture et dans nos moeurs comme une composante essentielle du droit fondamental à l'égalité.

Le rapport du ministre comporte diverses pistes de réflexion qui font l'objet de commentaires de la part du Barreau. Nous sommes disponibles pour répondre à vos questions à ce sujet. Nous vous remercions de votre attention et vous assurons de notre collaboration pour toute continuation de vos travaux futurs. Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, Me Tremblay. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Whissell: Alors, maîtres ? au pluriel ? merci de vous joindre à nous. C'est toujours agréable d'avoir le Barreau qui, je dois l'avouer, au fil des années, dans mes différentes commissions parlementaires, a toujours eu, je vous dirais, une vision rafraîchissante, neutre et dans le fond qui bonifiait les travaux des députés en commission parlementaire. Je tiens à le souligner.

J'ai beaucoup de questions. Je ne sais pas si je vais avoir assez de temps. Sur l'affichage. On en a parlé avec plusieurs groupes, principalement les groupes qui défendent le droit des femmes, les non-syndiquées, à savoir qu'est-ce qu'on devait afficher, surtout dans des compagnies ou des entreprises qui sont non syndiquées. On le sait, lorsqu'il y a une convention collective, c'est pratiquement du domaine public. Les conventions collectives sont publiques à mon ministère. Mais par contre, lorsqu'on tombe chez les non-syndiqués, là, l'information est plutôt...

M. Tremblay (Gérald R.): Parcellaire.

M. Whissell: Oui, effectivement. Alors, à partir du moment où on veut afficher la bonne information, mais également suffisamment d'informations pour que l'employé puisse porter un jugement puis dans le fond vérifier jusqu'où son employeur a été dans l'établissement de son programme d'équité salariale, vous, comme instance, comment voyez-vous qu'on peut à la fois rendre publiques certaines informations qui permettraient indirectement de connaître le salaire d'autrui et en même temps de protéger le droit de l'employé à avoir suffisamment d'informations pour porter un jugement sur l'exercice qui a été fait dans son entreprise?

M. Tremblay (Gérald R.): C'est un exercice d'équilibre extrêmement intéressant et difficile. Et je vais laisser Me Desjardins en parler.

n(15 h 20)n

Mme Desjardins (Annick): C'est un sujet qui a fait l'objet de discussions au groupe de travail qui s'est penché sur le rapport du ministre. Effectivement, c'est délicat parce qu'il y a des droits, le droit à la vie privée qui peut entrer en ligne de compte lorsque, comme vous l'avez souligné, on peut déduire le salaire d'une personne indirectement. Par contre, il reste que d'abord il y a une question de hiérarchie des droits ici. Quand on parle de mettre en parallèle un droit fondamental et une autre composante d'un autre droit, il faut respecter, si vous voulez, la hiérarchie des droits dans l'examen de l'équilibre, du juste équilibre.

Évidemment, il demeure que ce sont des catégories d'emploi qui sont évaluées et non des personnes. Toujours, il faut revenir à ça, parce que le salaire qui est associé dans la démarche d'équité salariale, c'est le salaire d'une fonction et non le salaire d'une personne. Donc, il ne faut pas perdre de vue cet aspect-là. Si évidemment il y a une seule personne qui est titulaire d'un emploi, on déduit son salaire. Mais c'est vrai aussi dans tous les cas où les échelles salariales sont connues, en milieu syndiqué ou ailleurs. Et ça ne relève pas de la vie privée d'une personne qu'on connaisse l'échelle salariale associée à une fonction. Puis ça, c'est...

M. Whissell: Donc, ce que vous dites, si je comprends bien...

Mme Desjardins (Annick): Peut-être que tu voulais ajouter...

M. Whissell: Me Sauvé.

M. Sauvé (Marc): Oui, peut-être juste ajouter: c'est qu'advenant qu'un renseignement nominatif était nécessaire pour établir si, oui ou non, l'exercice d'équité a été respecté ou pas il reste quand même la règle du consentement. La personne peut donner son consentement. C'est prévu, une personne peut donner son consentement. Donc, il ne faudrait pas tout bloquer parce qu'un renseignement nominatif serait nécessaire, il y a la règle du consentement aussi qui peut être appliquée.

M. Whissell: Mais en même temps il s'agirait qu'une personne ne veuille pas donner son consentement, dans l'ensemble de l'entreprise, pour qu'on vienne de limiter l'information.

M. Sauvé (Marc): Mais, comme Me Desjardins disait, ce n'est pas des renseignements nominatifs, pour l'essentiel, là, c'est...

M. Whissell: Au niveau de l'information qui peut être affichée, jusqu'où vous seriez prêts à aller ou, à tout le moins, qu'est-ce qui vous apparaît du domaine du possible puis du respect des droits des individus?

Mme Desjardins (Annick): Du point de vue du groupe de travail qui s'est penché sur la question, ce qui est essentiel, c'est que la personne ait accès à l'information qui est nécessaire pour savoir si son droit est respecté, parce que c'est un droit fondamental. Alors, quand on se trouvait avec l'article 19 de la charte, si une personne se plaignait de discrimination salariale, elle avait un processus qui lui donnait accès à la preuve, elle avait un recours qui lui donnait accès à l'information pour savoir si son droit était respecté. Et la Loi sur l'équité salariale n'a pas retiré d'aucune manière cette possibilité-là, ne devrait pas la retirer, parce qu'il faut qu'on puisse avoir... Un droit n'est plus un droit s'il est sans recours, n'est-ce pas?

M. Whissell: Dans votre mémoire, vous utilisez le mot «sur demande», c'est-à-dire que l'information pourrait être soumise sur demande. C'est donc que vous venez... Entre l'affichage et ce que l'employeur pourrait avoir à fournir sur demande, vous faites une distinction.

Mme Desjardins (Annick): Oui, il y a des mécanismes qui permettent effectivement de baliser ce qui va être public, connu ou non.

M. Whissell: O.K. Sur les délais, vous considérez que le délai de 120 jours pour contester est trop court. Vous êtes quand même dans les rares groupes qui se rendent plus loin que 60 jours, 90 jours. Vous dites... Vous suggérez 180 qui... à toutes fins pratiques, presque six mois, cinq mois... six mois, excusez.

Mme Desjardins (Annick): Encore une fois...

M. Whissell: Alors, pourquoi six mois de délai de contestation?

Mme Desjardins (Annick): Bien, en fait, c'est plutôt la suggestion dans le rapport qui nous semblait insuffisante, parce que l'affichage, là, pour en prendre connaissance... Et le Barreau d'ailleurs suggère qu'on avise les salariés de la tenue de l'affichage, parce que ce n'est pas dans toutes les entreprises où c'est une habitude d'afficher des informations sur les murs, puis que les gens passent dans le couloir et regardent les... Je veux dire... Alors, pour savoir qu'il y a de l'information à aller chercher, on croyait que c'était une avenue très facile de dire aux salariés: Vous avez... Voilà, on vous avise qu'il y a un affichage. Et les entreprises qui sont informatisées peuvent le faire par courriel; les autres peuvent le faire avec le bulletin de paie. Il y a toujours une facilité de communication d'un petit avis: Il y a un affichage, vous pouvez aller voir à tel endroit. Alors ça, c'est une chose.

Ensuite, dans la mesure où c'est des informations qui ne sont pas faciles à déchiffrer, surtout en milieu non syndiqué, ce n'est pas évident, pour une personne, de comprendre juste de l'affichage, là, toute la démarche qui a été entreprise. Alors, c'était de s'assurer que le délai était suffisant pour que la personne aille chercher conseil.

M. Whissell: Sur le statut juridique de la Commission de l'équité, question fondamentale, si jamais il y a une mise à jour de la loi, probablement que c'est une avenue qui sera regardée. J'aimerais ça vous entendre davantage.

M. Tremblay (Gérald R.): Bien, là-dessus, je vais peut-être mettre la table et demander à Me Sauvé d'élaborer davantage. Mais c'est évident qu'il s'agit d'un animal différent de ce qu'on connaît dans d'autres secteurs...

Une voix: ...

M. Tremblay (Gérald R.): Si c'est pour moi, je vais être un peu en retard, Mme Harel.

M. Whissell: Mme Marois.

M. Tremblay (Gérald R.): Je ne voulais pas réécrire l'histoire.

M. Whissell: À l'intérieur de ma question, vous pouvez faire le parallèle par rapport à, par exemple, la Commission des normes du travail, il y a peut-être un parallèle à faire.

M. Tremblay (Gérald R.): Bien, voici. D'abord, l'approche qui a été adoptée, c'est que c'est un organisme qui est proactif plutôt que comme un tribunal qui attend que les gens le saisissent, puis il est l'arbitre de deux, là. Quand on voit, par exemple, des plaintes à l'effet que... l'histoire de juge et partie, là, bien, «it's the nature of the beast», le but de l'organisme, c'est précisément de faire la promotion de l'équité en milieu de travail et d'être proactif là-dedans.

Là où on a un problème d'arrimage dans le sens qu'une fois l'enquête... Par exemple, si vous prenez la Commission des droits de la personne, la Commission des droits de la personne, elle, a le droit de se lever un beau matin puis de dire: Je me lève, et je représente les victimes devant les tribunaux, et je suis capable de mouvoir... Bon. Alors, en ce qui concerne cette commission-là, elle n'a pas le pouvoir de représentation automatique, entre guillemets, des victimes. Alors, par contre, le débat qui se pose, c'est que... lorsque ça va devant la CRT, est-ce qu'on va suivre le modèle traditionnel qu'un organisme décisionnel, lorsqu'il est devant un tribunal administratif autre que lui-même, ne peut pas faire autre chose que de défendre sa propre compétence? Dans ce cas-ci, on dit ? je pense qu'il y a deux cas devant les tribunaux actuellement là-dessus, là: Est-ce qu'ils ont le droit d'avoir un statut, d'être partie, est-ce qu'ils ont le statut de partie à part entière? Alors, il y en a qui disent: Bien non, ils ne devraient pas parce qu'à ce moment-là ils se trouvent à défendre leurs propres décisions puis ça les met comme adversaire devant une des parties. Alors que d'autres disent: Bien non, ils continuent leur travail de tenter de faire la promotion de l'équité en milieu de travail et ils ont le droit d'intervenir activement devant les instances supérieures. Me Sauvé, peut-être que vous pouvez ajouter quelque chose, vous avez réfléchi à la question.

M. Sauvé (Marc): Il est certain qu'il s'agit là d'un organisme qui joue un rôle collectif, un rôle social dont les décisions ne sont pas exécutoires. Alors, c'est sûr que là il y a un indice important qu'on n'a pas affaire à ce qu'on appelle habituellement un tribunal où les décisions sont exécutoires. Quand on la lit, cette législation, quand on regarde les dispositions de la loi, on a vraiment l'impression qu'il s'agit d'un organisme administratif. Par contre, ceux qui vivent avec peuvent penser, malgré la lecture qu'on peut faire à première vue des dispositions, que des décisions sont prises et qui sont de nature à affecter des droits.

Donc, je pense qu'il est difficile, à ce moment-ci, de trancher clairement, de dire: Voici, c'est un tribunal administratif ou un organisme administratif. Et c'est pour ça qu'on pense qu'on devrait pouvoir participer à un comité. Je pense que ça a été suggéré, certains groupes ont suggéré un comité de révision de la loi. Je pense que le Barreau pourrait offrir sa collaboration pour apporter des précisions à ce niveau-là dans la législation pour s'assurer principalement que les garanties procédurales sont bien présentes et que les gens ont vraiment l'impression que justice peut découler de l'exercice de ces dispositions.

M. Tremblay (Gérald R.): Parce qu'il nous semble contraire à l'esprit de la loi que de passer un an à débattre devant les tribunaux à savoir si l'organisme a un statut de partie ou non, là, avant de toucher au fond de la question.

La Présidente (Mme Morissette): Oui, M. le député de Mont-Royal.

n(15 h 30)n

M. Arcand: Dans le témoignage du Conseil du patronat, on a parlé, à un moment donné... ils parlent beaucoup du fait que, bon, tout le monde est d'accord évidemment avec le principe de la loi. Mais essentiellement, à un moment donné, le Conseil du patronat a dit que les choses auraient avancé plus rapidement s'il n'y avait pas autant de contraintes dans la loi ou enfin dans ce qui s'est fait au cours... Et c'est ce qui semble indiqué en tout cas dans ce que je lis ici, et, vous, vous faites une déclaration, à un moment donné, où vous dites essentiellement que vous faites appel beaucoup à la médiation, une approche de partenariat, de médiation, de consultation. Est-ce que je dois comprendre que ce que vous voulez, c'est qu'il y ait un peu moins de balises? Je voulais juste comprendre exactement ce que vous voulez dire par ça.

M. Tremblay (Gérald R.): Bien, écoutez, c'est toujours un exercice difficile d'équilibre: d'une part, on veut que le rôle, en fait que le statut soit clarifié pour ne pas qu'on en débatte pendant 10 ans devant les tribunaux puis qu'on sache comment fonctionner. Mais, d'autre part, on voudrait que l'esprit de base n'en soit pas un qui incite à la judiciarisation excessive, mais au contraire incite à un milieu de travail où il y a de l'harmonie plutôt que de la confrontation.

Et l'organisme, je pense, a un taux de succès assez intéressant lorsqu'il est impliqué dans de la médiation active en milieu de travail, parce que c'est rare que les gens vont dire: On est contre la vertu, là; c'est très rare. Et, quand on leur dit: Oh, vous voyez, dans tel secteur, là, je pense que vous ne pensiez pas... vous ne vouliez pas que ça ait ce résultat... il n'y a personne qui veut ça volontairement, mais ça mène à ça, là, alors est-ce qu'on peut vous aider à avoir une politique? Et là il y a une entente.

Ça, c'est rare aussi où on a un secteur où il y a une entente sur les droits fondamentaux. Tu ne dirais pas ça sur le droit à la vie, là, hein? Est-ce que j'ai une entente sur le droit à ma vie? Mais c'est assez intéressant qu'en ce qui concerne un droit comme celui-là on dit: Il peut y avoir entente. Pourquoi? Parce que c'est un milieu dynamique où des gens évoluent ensemble possiblement pendant des années. Alors, on aime mieux qu'il y ait un peu d'harmonie entre eux que toujours de la chicane, de la confrontation. Et la commission a développé une bonne expertise. Je pense que vous aviez des... vous êtes assez, vous, optimiste quant au... ou satisfaite du rôle de la commission dans ce secteur-là.

Mme Desjardins (Annick): Effectivement, notre pratique le révèle, la conciliation qui est faite à la commission, elle est très aidante. Il y a beaucoup de défauts ou de difficultés qu'on a en milieu de travail qui sont liés à la méconnaissance des mécanismes, à la méconnaissance des obligations. Et, en conciliation, les conciliateurs de la commission, ils ont cette expertise et ils peuvent la partager pendant la conciliation avec les parties.

Malheureusement, il y a des plaintes aussi qui sont faites par manque d'information. Justement, on a parlé de transparence dans les travaux des comités. Il manque d'information aux salariés pour savoir si leur droit est respecté. Ils se sentent obligés de déposer une plainte à cause de ça, et, en conciliation, on réussit à les informer, et c'est dommage que ça prenne une plainte pour avoir accès à cette information-là.

Mais la conciliation, effectivement elle aide. C'est sûr que c'est un peu délicat en milieu non syndiqué, s'il n'y a pas de représentation des salariés non syndiqués. Alors là, il faut faire la nuance: milieu syndiqué, milieu non syndiqué.

M. Arcand: Vous dites d'ailleurs, je pense...

La Présidente (Mme Morissette): M. le député de Mont-Royal.

M. Arcand: Oui. Vous dites d'ailleurs, pour ce qui est des milieux, là, où il y a une dizaine d'employés seulement, etc., que la commission devrait avoir un rôle plus important. C'est-u ça que j'ai cru voir dans votre mémoire à un moment donné, ou un rôle de consultation, ou d'expert, ou enfin de...

Mme Desjardins (Annick): En fait, le Barreau a salué le fait que la commission ait créé un comité de travail pour les travailleuses non syndiquées qui sont dans des situations où leur droit est plus vulnérable, là. Et ça, le Barreau a salué cette initiative et considère que ça doit aller de l'avant, ça doit continuer dans le même chemin, la commission doit continuer à développer des bonnes idées, de bonnes pratiques pour rejoindre les milieux non syndiqués.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au temps du côté ministériel. Alors, du côté de l'opposition officielle, M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: Merci, Mme la Présidente. Mesdames messieurs, ça fait plaisir. Bienvenue. Dans un premier temps, j'aimerais continuer sur le rôle justement de la commission. Les représentants de la Fédération des travailleurs du Québec, la FTQ, la semaine passée, suite à une question, si on allait dans le sens de créer un conseil d'administration paritaire, nous disaient: Peut-être pas un conseil d'administration, mais des comités paritaires. Donc, est-ce qu'on peut vous entendre à ce niveau-là, si ce ne serait pas bénéfique de créer des comités paritaires, exemple, au niveau de la médiation et de la conciliation, puis par la suite on tomberait dans les instances, là, plus... au niveau de la CRT?

M. Tremblay (Gérald R.): C'est sûr que, pour utiliser un langage à la mode et utilisé dans le... c'est une piste de réflexion. Mais ce qui m'inquiète dans cette approche, c'est cette... c'est comme s'il y avait deux personnes qui sont en principe en opposition et qu'on essaie de les forcer à être ensemble. Et évidemment ça évacue tout le secteur de ceux qui sont non syndiqués, alors qu'on aimerait, nous, que, si on le considère comme un droit fondamental, il soit au-dessus des règles générales de négociation de droit du travail, ça devrait être... D'ailleurs, ça ne devrait pas être permis, par exemple, qu'un syndicat et un employeur, parce que ça facilite le travail de l'un et de l'autre puis ça facilite le règlement, on dise: Bon, bien, celle-là, on va la passer de côté, c'est plus facile de ne pas rentrer dans l'équité salariale, là, au cours de cette convention collective, il faudrait que ça s'impose aux deux. Alors, il ne faut pas promouvoir les «sweet deals», comme on dit, là, les ententes qui...

Alors, je ne suis pas contre en principe, mais je pense qu'on doit plutôt y aller du côté de droits qui dépassent et sont en dehors du droit syndical proprement dit. Je ne sais pas ce que vous en pensez, vous.

Mme Desjardins (Annick): Oui, je suis tout à fait d'accord. C'était d'ailleurs le point de vue des membres du groupe de travail, là, si on peut... Oui.

M. Therrien: Mais, quand vous dites que vous excluez complètement l'approche syndicale... Par contre, quand on dit: On favorise la médiation... Si j'ai bien compris, au niveau de la médiation, vous voyez comme médiateur simplement la commission?

M. Tremblay (Gérald R.): Oui. C'est la commission qui joue le rôle de rapprocheur entre les parties. Et c'est évident que, dans des endroits où il y a des syndicats, c'est sûr que le syndicat est partie prenante. Mais le brasseur d'idées et le rapprocheur, quant à nous, c'est un organisme comme la commission. Il y a peut-être d'autres solutions, mais disons que notre réflexion nous mène à ça.

M. Sauvé, vous avez des...

M. Sauvé (Marc): Déjà, au niveau de la commission elle-même, il y a du paritarisme. Est-ce qu'on ne répond pas...

M. Tremblay (Gérald R.): Un peu à ça.

M. Sauvé (Marc): ...à votre préoccupation, là? Même si ce n'est pas mur à mur dans tous les processus, c'est déjà là très présent.

M. Therrien: Notre inquiétude, puis les groupes qui sont venus nous parler aussi, c'est que, si le rôle de la commission... Exemple: vous êtes un employeur, puis vous comprendrez très bien que vous avez besoin d'information pour appliquer votre exercice, etc., et, du jour au lendemain, il y a un employé chez vous qui porte plainte. Donc, c'est la même personne qui porte les deux chapeaux. C'est là qu'on dit que la commission agit en tant que juge et partie. Et, oui, c'est un droit fondamental, personne ne l'a nié ici, mais, à ce moment-là, je ne suis pas sûr qu'on est à l'aise avec cette position-là, là.

Mme Desjardins (Annick): Ce qui vous embête, c'est qu'il y ait à la fois un pouvoir d'enquête et un mandat d'éducation, de formation et d'assistance?

M. Therrien: Initialement, là, la commission peut être appelée par l'employeur pour justement un rôle informatif, pour expliquer le programme, mettre en place le programme. Par la suite, au bout de deux mois, trois mois, quatre mois, il y a une plainte qui est formulée. À ce moment-là, la commission doit répondre à l'employé contre l'employeur, lequel elle a formé. Donc, je pense qu'on rentre dans des jeux qui sont un petit peu serrés, là.

Mme Desjardins (Annick): Il y a déjà eu un débat de cette nature-là devant la Cour d'appel du Québec, qui a jugé que les fonctions n'étaient pas incompatibles, et c'était auprès de la Commission des droits de la personne. Ce qui avait été soulevé par l'employeur, c'était qu'il avait l'assistance de la Commission des droits de la personne dans l'établissement d'un programme d'accès à l'égalité, et par ailleurs la même Commission des droits de la personne faisait enquête sur une plainte de discrimination à l'embauche de nature systémique et une autre plainte de discrimination à l'embauche individuelle à l'égard du même employeur. Et la Cour d'appel, là-dessus, a décidé que les fonctions n'étaient pas incompatibles. C'est le seul précédent que j'ai en tête. S'il y a des difficultés du côté de l'apparence, ça peut se faire de façon... on peut avoir des divisions, au sein de l'organisme, qui pourraient rassurer.

n(15 h 40)n

M. Tremblay (Gérald R.): Non, mais, moi, écoutez, comme avocat, là, je suis très sensible à cette préoccupation-là. La personne qui vous a aidé à cheminer jusque-là, à un moment donné, se tourne contre vous, vous avez l'impression qu'elle devient votre ennemie.

Mais il y a des exemples. Par exemple, l'AMF, hein, c'est toujours la même AMF, mais le secteur Enquêtes a une division qui est différente, une autre division que le secteur décisionnel. Alors, on peut penser ? l'expression «muraille de Chine» est souvent utilisée, là ? sur le plan fonctionnel, à avoir des sauvegardes qui permettent de s'assurer que la personne n'est pas soudainement... vous étiez à côté d'elle, puis, le lendemain, c'est votre accusateur devant, là. Ça, je suis très mal à l'aise avec ça aussi. Il faut trouver des mécanismes pour éviter ça, mais sans enlever ce rôle de base qui est de tenter, par la transformation des esprits et des mentalités, à implanter l'équité partout dans les milieux syndiqués comme dans les milieux non syndiqués.

M. Therrien: Merci. Ça, c'est sûr, on ne remet pas ça en cause. Vous parliez de plus de ressources au niveau de la commission, est-ce que vous pouvez nous donner à quel niveau vous voyez plus de ressources ou dans quel département, justement dans la suite des idées, là?

Mme Pelletier (Fanie): Non. Quand on parlait de l'addition de ressources, je pense qu'on parlait simplement de continuer donc à renforcer la Commission de l'équité salariale, qui maintenant, là, après plus de 10 ans, semble être sur son erre d'aller, avoir vraiment développé son expertise. On parlait peut-être aussi en termes de ressources humaines. Je pense que ça a été soulevé ici qu'il y avait, par exemple, des postes vacants, donc peut-être pas tant le nombre de postes, on ne le sait pas, on ne peut pas faire vraiment une analyse, mais du moins que les postes vacants puissent être comblés, que la commission ait toutes les ressources humaines nécessaires pour accomplir ses différents mandats. Puis il faudra voir aussi qu'est-ce qui résultera éventuellement soit d'un projet de loi ou autres, d'un comité de travail. S'il y a des modifications ou des précisions qui sont apportées quant au statut ou au rôle de la commission, il faudra certainement que les ressources suivent aussi en conséquence. C'est soit si on ajoute des rôles ou des compétences à la commission, si on change son statut, il faut certainement que les ressources humaines et financières suivent à ce moment-là.

M. Tremblay (Gérald R.): Ça, je sais que c'est des grands arbitrages toujours très, très difficiles, mais, nous, on pense que, si la commission doit plus souvent prendre le bâton du pèlerin et se promener en région, se promener dans les entreprises pour faire la promotion de l'objectif, bien, ça prend du monde pour faire ça. Puis là ça devient un choix budgétaire et des priorités gouvernementales. Mais, nous, c'est ça. Si on veut atteindre l'objectif, il va falloir faire quelque chose.

M. Therrien: Merci. J'aimerais revenir... Je crois que c'est Me Sauvé, plus tôt, qui... vous avez suggéré un groupe de travail et que, si le ministre arrivait à la conclusion qu'il mettait en place un groupe de travail, vous pourriez apporter des précisions. Est-ce qu'aujourd'hui c'est que vous n'êtes pas en mesure, vous n'avez pas toutes les études pour apporter des précisions nécessaires au rôle de la commission ou si c'est...

M. Sauvé (Marc): Il n'y a pas de réponse catégorique là-dessus. Les questions qui ont été soulevées à venir jusqu'à maintenant devant la commission sont fort légitimes, et je pense qu'il faut y réfléchir. Il faut y réfléchir avant d'opter pour, disons, par exemple, le transfert des pouvoirs décisionnels de la Commission de l'équité salariale à la Commission des relations du travail.

Bon. Est-ce que c'est la formule gagnante? On pourrait s'interroger là-dessus. Nous, ce qui nous préoccupe, c'est le droit à l'égalité, et on pense que la commission fait un excellent travail, et il ne s'agit pas de lui enlever des pouvoirs, mais il s'agit peut-être de préciser davantage pour qu'elle soit davantage efficace, qu'il y ait moins de litiges. Ça a l'air un peu contradictoire, on est tous des avocats, on fait de l'argent avec ça, on pourrait bien vous dire: Allez de l'avant, ça va très bien, puis... Non, non.

M. Tremblay (Gérald R.): Mais l'argent ne fait pas le bonheur.

M. Sauvé (Marc): C'est ça.

M. Therrien: Ça aide, qu'ils disent.

M. Sauvé (Marc): Je pourrais très bien dire: Continuez, il n'y a pas... C'est très bien, il y a des honoraires, il y a des honoraires d'avocat là-dedans. Mais ce n'est pas... Je pense qu'on a un rôle social, on a une responsabilité sociale. On veut mettre de l'avant, on veut faire la promotion du droit fondamental à l'égalité, et ça passe concrètement, entre autres, par l'équité salariale, donc plus de ressources à la commission, bien sûr. Mais avant, avant d'aller de l'avant avec toutes sortes de choses qui pourraient diminuer, je dirais, ou affaiblir la Commission de l'équité salariale, je pense qu'il faut vraiment réfléchir très sérieusement ensemble, et le Barreau offre sa collaboration à un comité de révision sur ces sujets-là.

M. Therrien: Merci. Dernière question peut-être pour ma part, et je vais laisser la parole après à mon confrère. Mais au niveau... Vous êtes tous avocats ici, là. Comment jugez-vous la complexité de l'application de cette loi-là, l'interprétation aussi qu'on en a fait?

Mme Desjardins (Annick): Une des difficultés évidemment, quand on parlait des ressources tout à l'heure, c'est que les plaintes, les différends soient traités plus rapidement. Ça, ça entraîne une complexité pour les entreprises d'avoir à attendre plusieurs mois avant de connaître l'issue d'un dossier et d'être obligées de faire des paiements rétroactifs en conséquence. Alors, là-dessus, la commission a certainement besoin de ressources pour assurer un traitement efficace des dossiers, et rapide.

Maintenant, en ce qui est de la complexité des exercices, je crois qu'il faut un peu dégonfler l'affaire. C'est sûr que ce n'est pas quelque chose que beaucoup de gens connaissent, alors il est beaucoup véhiculé que c'est complexe. Mais, quand on s'assoit et qu'on le fait, on voit que ce n'est pas si complexe que ça. Et là-dessus je crois que ça vaut la peine d'aller voir les outils que la commission a mis à la disposition des entreprises. Il y a un site Web avec des outils très, très, très faciles d'utilisation. Il y a des formations qui sont données par la commission, qui sont gratuites, et c'est ça qu'on devrait véhiculer. Utilisez les services de la commission, ils sont là pour vous.

M. Therrien: Et au niveau de l'interprétation de la loi qui a été faite jusqu'à maintenant, après 10 ans d'exercice?

Mme Desjardins (Annick): 10 ans d'exercice, c'est très jeune. Premièrement, il y a eu des retards dans... Bon. Première chose, c'est que la loi, elle entre en vigueur en 1997 et elle donne quatre ans aux entreprises pour se conformer. Alors, pendant ces quatre années-là, il n'y a pas de litige véritablement qui nous permet d'accumuler une jurisprudence sur l'interprétation de la loi dans le fond des dossiers. Il y a eu d'autres litiges, hein, on les connaît. Mais, sur le corpus jurisprudentiel plus technique, ça a pris beaucoup de temps avant qu'il y ait des dossiers qui soient examinés au fond et qui donnent lieu à de la jurisprudence.

Donc, pendant longtemps, du point de vue des juristes, là, c'était difficile de donner des opinions, les critères nous semblaient flous parce qu'on n'avait pas ce corpus de jurisprudence. Plus ça va, plus il y a des décisions qui sont rendues, plus on commence à avoir des balises, des lignes directrices qu'on peut donner à nos clients. Donc, c'est une question de temps. C'est encore très jeune pour une loi d'avoir 10 ans d'application, surtout dans un contexte où il y avait un certain nombre d'années où il ne se passait pas grand-chose.

M. Tremblay (Gérald R.): Ceci étant dit, dans une perspective de révision, préciser le rôle des uns et des autres pourrait faciliter grandement la progression de tout ce secteur du droit.

La Présidente (Mme Morissette): Il reste une minute.

M. Therrien: Je vais avoir une question, moi. Qu'est-ce que vous diriez, vous, de reporter l'article 130, pour lequel on est ici aujourd'hui, l'obligation du ministre de reproduire, autrement dit, une autre mise à jour dans 10 ans ou dans cinq ans?

M. Tremblay (Gérald R.): C'est un exercice utile, ça. Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de secteurs où ça a lieu, mais, quand ça a lieu... Comme, par exemple, le débat qu'on a eu l'autre jour sur la charte, on n'en serait pas là s'il y avait eu une obligation systématique à tous les 10 ans de voir où on en est. On ne serait pas là à donner l'impression de bloquer quelque chose qui a l'air à avoir du bon sens parce qu'on a retardé ou on n'a pas fait l'exercice global. Alors, je pense que, quand c'est statutaire, bien on se prête à l'exercice. Et, écoutez, c'est quand même un rapport assez considérable, il n'y a pas... c'est un constat qui est extrêmement utile. Si on n'avait pas ça sur le plan... quelqu'un dirait à un moment donné: Bien là, je vais faire un groupe de travail pour qu'il nous produise ça, et on l'aurait dans deux ans.

Alors, je pense que la mise à jour des connaissances et de l'état d'un dossier, moi, je suis parfaitement en accord avec ça. Ce que vous faites aujourd'hui et qui vous est imposé par le schème législatif est extrêmement utile.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au bloc de temps de l'opposition officielle. Alors, du côté de la deuxième opposition, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Me Tremblay, Me Sauvé, Me Desjardins et Me Pelletier, je sais que mes collègues veulent également échanger avec vous. Alors, Mme la Présidente, vous allez répartir le temps en trois cette fois-ci.

La Présidente (Mme Morissette): Je vous arrête après le tiers de votre temps?

Mme Harel: Oui, oui. Faites-le, faites-le, faites-le.

La Présidente (Mme Morissette): Bon. Pas de problème.

n(15 h 50)n

Mme Harel: Alors, oui, des lois proactives, justement parce que c'est des lois d'application, il faut les revoir de manière régulière. Et je pense que ce sera nécessaire de prévoir, autant ici... En fait, moi, pour avoir été marraine de ce projet de loi, je dois vous dire que tous les projets de loi où j'ai pu introduire cette idée de revoir les lois, les lois doivent évoluer comme les sociétés, alors autant en tenir compte.

Tantôt, dans l'exemple que vous donniez, Me Desjardins ou Me Tremblay, ça me faisait penser à la CSST. Parce que la CSST, c'est aussi à la fois un organisme qui reçoit les plaintes des employeurs mais qui en même temps accompagne les travailleurs et qui finalement se trouve à pouvoir cumuler, dirais-je, plusieurs fonctions différentes. Ça vaut pour les normes du travail, en fait ça vaut pour plusieurs des commissions qui à la fois sont administratives mais qui en même temps, dans une certaine partie des lois qu'elles ont à faire appliquer, sont quasi judiciaires, finalement.

Dans votre mémoire, il y a deux choses. Très fermement... Peut-être juste avant, vous aviez l'air nostalgique tantôt, Me Tremblay, vous aviez l'air nostalgique sur le...

M. Tremblay (Gérald R.): C'est l'âge, madame.

Mme Harel: Vous sembliez penser qu'avec une loi proactive on perdait au change, sur le droit individuel. Évidemment, dans les entreprises avec moins de 10 employés, les employés peuvent toujours invoquer l'article 19, mais ça coûte tellement cher, puis c'est sur plainte, puis devant les tribunaux. Au fédéral, ça dure des années, 20 ans, 25 ans. Je ne sais pas si vous avez plaidé dans l'une de ces causes?

M. Tremblay (Gérald R.): Oui.

Mme Harel: Oui.

M. Tremblay (Gérald R.): J'y plaide encore.

Mme Harel: Alors, est-ce que la nostalgie vient de là, non? Oui. Et là vous dites très clairement: «Le Barreau du Québec est d'accord ? à la page 5 ? avec la proposition à l'effet qu'il serait opportun de prévoir le droit [à] la commission [...] d'intervenir comme une partie à part entière devant la Commission des relations de travail ? hein, vous le dites d'une manière très affirmative, là ? dans les recours déposés en vertu de l'article 104 de la loi.» Alors ça, c'est une prise de position du Barreau qui est importante, moi, je la considère importante, là, dans les travaux qui sont menés depuis trois jours.

Puis, en matière également de programmes distincts, parce qu'on a entendu un point de vue puis son contraire, hein, durant toute la commission, là, vous dites: «En raison du fait que la définition des unités de négociation reflète [...] la ségrégation professionnelle [généralement], le découpage de l'entreprise en programmes distincts pourrait compromettre [...] l'atteinte de l'équité salariale dans plusieurs milieux.»«Pourrait compromettre sérieusement», dites-vous même. Alors, vous prenez position en fait, et, moi, j'apprécie et je voulais vous le dire, d'autant qu'il fallait payer notre cotisation cette semaine.

M. Tremblay (Gérald R.): ...

Mme Harel: Bien oui, j'ai trouvé un timbre. Alors, c'est ferme, hein, comme position, vous y avez...

Mme Desjardins (Annick): Sur la question des programmes distincts, je vous ai aussi entendu poser la question, tout à l'heure, là, sur les... sans comparateurs masculins, là. C'est une discussion évidemment qu'on a eue au groupe de travail, et nous savons que c'est devant les tribunaux, et c'est peut-être... Cette question précise là, ce n'est pas approprié, pour nous, de commenter à ce stade-ci. Mais c'est quand même quelque chose qui avait été souligné par plusieurs, le fait que la ségrégation professionnelle était reflétée dans le découpage des unités de négociation. Si on pense, dans les municipalités, on a les cols bleus qui sont masculins, les cols blancs qui sont plus féminins. Dans les entreprises où il y a des employés de production, des employés de bureau, ce n'est pas les mêmes unités de négociation. Donc, oui, c'est certain que c'est une préoccupation dans la mesure où on considère, le Barreau considère que c'est un droit fondamental, mais, s'il est dilué, il y a un danger.

La Présidente (Mme Morissette): Le tiers du temps est passé. C'est vous qui décidez. M. le député de Jonquière, je vous avise quand votre tiers est passé?

M. Gaudreault: Merci. Vous me permettrez de saluer aussi les membres du Barreau, particulièrement Me Tremblay, originaire de Jonquière. D'être un peu chauvin, ça ajoute à sa grande réputation.

M. Tremblay (Gérald R.): ...solidarité...

M. Gaudreault: Je voulais revenir sur la question des travailleuses non syndiquées, j'ai beaucoup apprécié également la prise de position du Barreau. Effectivement, c'est un élément important quand vous dites en page 2: «...le droit à une rémunération exempte de discrimination systémique fondée sur le sexe constitue un droit fondamental.» Un petit peu plus loin, vous dites: «L'approche de droit fondamental implique que l'on considère la salariée comme titulaire d'un ensemble de droits corollaires.» Alors, moi, j'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus parce que, tout à l'heure, vous avez répondu à mon collègue de Mont-Royal en disant que, bon, on pourrait penser à des bonnes idées et à des bonnes pratiques. Moi, ça pique ma curiosité, j'aimerais que vous continuiez dans votre prise de position.

Et, plus loin dans votre mémoire, sur cette question-là, vous remettez en question finalement l'analyse de la commission dans son rapport, là, à la page 89 et 90, concernant l'idée du service de support juridique, là. Et là il y a l'exemple de l'Ontario qui est un peu critiqué, si on veut, venant de la commission. Mais, vous, vous dites, en page 6 de votre mémoire: «...contrairement à ce qui est mentionné au rapport relativement à l'opportunité de mettre en place une organisation vouée au support juridique et à la représentation des personnes non syndiquées, nous croyons que cette avenue mérite d'être explorée.» Alors, pourquoi vous dites ça, alors que la commission dit, en page 90 de son rapport, que «d'autres avenues pourraient être explorées» et semble critiquer un peu ce qui a été fait en Ontario à cet égard? En tout cas, pour aller plus loin, après 10 ans de la Loi sur l'équité salariale, je pense qu'on doit entamer avec un grand pas, là, ce chantier des travailleuses non syndiquées, puis je voudrais vous entendre là-dessus.

M. Tremblay (Gérald R.): C'est une préoccupation majeure, très importante. Et d'ailleurs, au Québec, on a souvent parlé des laissés-pour-compte dans ces secteurs-là, parce que... avec tous les secteurs syndiqués qui sont bien équipés pour se défendre, pour négocier, etc. Mais il y a tous les laissés-pour-compte. Qui s'occupe d'eux? Alors ça, c'est une préoccupation majeure, et peut-être encore une fois vous pourriez en parler, Me Desjardins.

Mme Desjardins (Annick): Sur ce qui s'est fait en Ontario, évidemment ça a été une expérience de courte durée, étant donné que le gouvernement Harris a mis fin à ce service. Par contre, là, je vous référerais à un colloque qui s'est tenu au mois de novembre en collaboration, le Barreau et le Tribunal des droits de la personne, où nous avions comme invités des gens de l'Ontario, qui nous ont parlé du système qui était mis en place maintenant. Ce n'est pas en équité salariale, c'est en droits de la personne, mais on a remis en place un système d'aide juridique pour les personnes qui ne sont pas représentées, malgré qu'il y ait une commission qui fasse son travail.

Donc, si, en Ontario, il a dû y avoir également ce même exercice de se demander si ça avait porté fruit du point de vue de l'équité salariale... Et, là-dessus, il y a un livre qui vient d'être publié, donc je vous réfère... Je n'ai pas la référence avec moi, mais...

M. Tremblay (Gérald R.): Il vient tout juste de sortir.

Mme Desjardins (Annick): Un beau colloque où est-ce qu'on avait ces invités qui nous ont parlé de l'expérience. Donc, au groupe de travail, nous avons traité de cette question-là, et on a dit: Bien, ça mérite d'être exploré, il faudrait voir, en Ontario, ce qu'ils ont fait, pourquoi... Bon. Ça mérite d'être exploré, c'est ce qu'on dit dans le mémoire.

Maintenant, sur la question du droit fondamental et des droits corollaires, c'est très important de ne pas perdre de vue ce droit, le caractère fondamental, là, au sommet de la hiérarchie des droits, du droit à l'égalité des femmes et donc de tous les mécanismes et outils qui sont nécessaires pour sa mise en oeuvre réelle. C'est ce qu'on rapporte... C'est la position qui est prise par le Barreau, bien sûr, mais aussi par les tribunaux. Ce n'est pas simplement le Barreau qui le dit, on a des précédents jurisprudentiels très, très, très clairs sur l'aspect droit fondamental, droits de la personne liés à l'équité salariale.

La Présidente (Mme Morissette): Le tiers du temps serait passé, si vous... Je fais juste vous guider, c'est vous qui décidez, là. Oui, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Bonjour, maître. C'est un plaisir de vous entendre. Votre mémoire est, comme le disaient mes collègues, clair, ferme. Il y a des prises de position là-dedans, et on apprécie, parce que beaucoup de gens sont venus et on a senti vraiment parfois une polarisation. Alors que, le Barreau, n'étant ni des employeurs... vous êtes un employeur... mais ni des employeurs ni des syndicats, ça permet d'avoir quelqu'un qui a un recul.

Concernant ce recul, et toujours au sujet de cette possibilité d'avoir une organisation vouée au support juridique et à la représentation des personnes non syndiquées, vous parlez que le gouvernement devrait la financer, la supporter. Il y a quelque chose qui a été abordé par peu de groupes, mais il y a des gens qui sont venus nous dire: Actuellement, le système, le fait que la loi ne soit pas appliquée fait que les entreprises délinquantes sont favorisées, parce que celles qui ont pris le temps de faire le processus, elles ont investi temps et argent. Bon. On sait qu'il y a quand même... il y a des entreprises qui ont trouvé même quelque chose d'intéressant pour l'avenir, mais on sent que les entreprises délinquantes sont favorisées. C'est un message qu'on a reçu.

Si on veut d'abord éliminer ce travers, parce qu'une loi doit être mise en application, si on veut aussi financer un groupe d'aide aux personnes non syndiquées, est-ce qu'on n'en serait pas rendus à... j'aimerais avoir votre avis sur le fait d'avoir des pénalités. Est-ce qu'une loi peut être appliquée s'il n'y a jamais de pénalité, s'il n'y a jamais un impact sur l'entreprise qui n'applique pas la loi? Et est-ce qu'on ne pourrait pas même penser à venir à ce que ces pénalités puissent servir une organisation comme ça, là?

n(16 heures)n

M. Tremblay (Gérald R.): Alors, je ne sais pas. Peut-être que vous qui avez l'obligation d'instaurer le système chez nous...

Mme Pelletier (Fanie): Oui. Oui, c'est ça, oui... mon mandat. Comme je vous dis, je pense qu'une des difficultés, c'est que ce dont on parle, c'est le droit à l'égalité, puis la dynamique est tellement différente dans le contexte de l'équité salariale. Donc, moi, ça m'apparaît difficilement, là, concevable. Je comprends que... Moi, je pense qu'un des grands acquis de la Loi sur l'équité salariale, c'est justement d'avoir éliminé de beaucoup la nécessité de faire une preuve de discrimination systémique, ce qui est très difficile encore aujourd'hui. Enfin, disons que cette loi-là aide beaucoup parce qu'elle prend la situation complètement par l'autre côté. Donc, c'est certain que ça permet de grands acquis, de vraiment traiter à la base de façon proactive une situation de discrimination systémique.

Mais, là où c'est un peu difficile, je trouve, c'est que, premièrement, il y a toute la dynamique des relations de travail, entre autres patronales-syndicales. Puis, quand on sort du milieu syndiqué, il reste quand même que c'est une dynamique de relations de travail employeur-employé. Donc, ça vient un peu... ça complique un peu les choses... On parle aussi du droit à l'égalité en emploi, dont l'équité salariale est une facette.

Mais là, si on vient ajouter des notions de «pénalité» pour, bon, employeur délinquant, c'est ça, comme je vous dis, quand on... parce que, si on partait à la base d'un droit fondamental, l'important, en tout cas, nous, du point de vue Barreau, c'est qu'il y ait un recours pour les personnes... ou la ou les personnes dont le droit est violé. Donc, dans ce cas-ci, on considère que la loi en est un, est un genre, j'allais dire, de recours préventif...

La Présidente (Mme Morissette): Il faudrait conclure en quelques secondes, s'il vous plaît.

Mme Pelletier (Fanie): Oui, voilà. Alors là, après ça, si vous y allez du côté curatif comme ça, punitif, je ne sais pas, ça m'apparaît... ça m'apparaît... ce n'est pas habituel, là, par rapport à un droit fondamental.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au temps qui était alloué pour le Barreau du Québec.

Donc, nous allons suspendre quelques instants pour vous saluer.

(Suspension de la séance à 16 h 2)

 

(Reprise à 16 h 6)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, on va commencer pour ne pas accumuler davantage de retard. Bienvenue au Syndicat canadien de la fonction publique. Donc, je vais rappeler aux gens de vérifier que la sonnerie de vos téléphones cellulaires est bel et bien éteinte. On a eu un petit incident tout à l'heure; on va faire le rappel. Donc, la façon de fonctionner est que vous disposez de 15 minutes pour nous présenter votre mémoire, et ensuite les différents groupes parlementaires auront un bloc de temps pour vous adresser leurs questions. Alors, je ne sais pas, qui est Mme Valiquette?

Syndicat canadien de la
fonction publique (SCFP)

Mme Valiquette (Louise): C'est moi.

La Présidente (Mme Morissette): C'est vous. Donc, présentez-vous et présentez la personne qui vous accompagne, et vous avez 15 minutes pour faire votre présentation.

Mme Valiquette (Louise): Merci. Alors, bonjour. Je m'appelle Louise Valiquette, je suis directrice adjointe du Syndicat canadien de la fonction publique pour le Québec. Je suis accompagnée de Lise Simard, qui est coordonnatrice de notre service Évaluation, équité salariale et rémunération.

Alors, tout d'abord, juste un petit mot pour vous dire qui nous sommes au SCFP. Alors, c'est plus de 100 000 membres au Québec, tant dans les organismes publics, parapublics que dans l'entreprise privée. On représente des gens dans la santé et services sociaux, dans le secteur de l'éducation, les universités et les municipalités, Hydro-Québec, le transport aérien, le transport terrestre, les sociétés d'État et un petit «etc.», au bout de la ligne. On a, chez nous, une équipe de six personnes qui sont spécialisées en évaluation équité salariale et qui font le travail terrain. Il y a environ 200 programmes qui sont réalisés ou en voie de l'être, et ça inclut évidemment la participation active qu'on a eue au programme du Conseil du trésor pour l'ensemble du secteur public.

Alors, je veux d'abord prendre quelques instants pour vous dire un gros merci de nous recevoir, de prendre la peine d'écouter ce qu'on a à dire, parce que, pour nous, l'exercice que vous faites présentement est important. L'avenir de la Loi sur l'équité salariale nous tient immensément à coeur. Ça a été acquis de haute lutte. On se rappelle encore qu'on les a faites, malgré notre grand âge, et on souhaite que cela se poursuive. Et, quant à nous, un des principes qui guident ce qu'on présente, c'est de se dire: Quand il y a quelque chose qui fonctionne, il n'y a pas de raison de le briser. Alors, ce qui marche, là, gardons-le et, autant que possible, essayons de l'améliorer.

Dans ce contexte-là, pour nous, évidemment le rapport du ministre, on l'appuie de façon générale avec quelques nuances, quelques ajouts dont on va vous faire part. Et, pour nous, la Commission de l'équité salariale doit demeurer ce qu'elle est, là, dans tous ses aspects, et on doit bonifier certains de ces aspects-là. Mais, dans tous ses aspects, ses pouvoirs, on doit conserver la commission que nous avons. L'expertise qui est à la commission, qui est acquise au fil des années, quant à nous, est assez irremplaçable. C'est sûr qu'on en a chez nous puis on n'en a pas du tout honte. Mais cette expertise-là, sur un terrain neutre, plus vaste que ce que, nous, on a, nous apparaît fondamentale pour l'avenir, là, de l'ensemble du dossier d'équité salariale.

n(16 h 10)n

Alors, je ne reviendrai pas sur comment cette loi-là nous est venue, on s'en rappelle un peu tout le monde, puis je pense que vous l'avez entendu de plusieurs groupes, mais tout simplement vous souligner que nous souhaitons, comme beaucoup d'autres avant nous, qu'on ne perde pas de vue que l'équité salariale découle d'un droit fondamental qui est celui de l'égalité des femmes, qu'on ne peut pas perdre ça de vue. On sait que ça n'a pas toujours été facile, dans notre milieu, de faire en sorte que ce... faire respecter des droits fondamentaux et particulièrement, je dirais, ceux des femmes. C'est ceux sur lesquels on a travaillé le plus à ce jour, je dirais. Et ça nous a menés notamment dans des dédales relativement aux programmes distincts quand il n'y a pas d'emploi à prédominance féminine. Alors, chez nous, les syndicats locaux étant très, très autonomes, certains sont allés dans des directions où on n'aurait peut-être pas souhaité les voir aller, mais on a fini par les convaincre de reprendre le chemin qui nous semble être le meilleur.

Alors, je veux revenir bien brièvement sur l'idée de l'information. Ça a été soulevé par plusieurs, plusieurs de vos intervenants, certains sentiments de méfiance évidemment quand on ne sait pas tout, tout ce qui se passe. Donc, revenir... mais je vais vous laisser poser les questions là-dessus. Mais on devra faire un exercice d'amélioration de l'information qui est transmise aux gens au niveau local.

Enfin, évidemment, on veut souligner l'apport de la commission à la formation des membres de comités quand on lui demande. Nous, on a notre propre service d'éducation: on forme nos gens, on a nos spécialistes qui sont là en soutien. N'empêche qu'à plusieurs occasions on a pu utiliser les services de la commission de façon conjointe avec la partie patronale puis ainsi faire cheminer le dossier. C'est quelque chose qu'on ne voudrait pas également perdre.

Un petit mot sur les pouvoirs d'enquête de sa propre initiative de la commission. Il nous semble que ces pouvoirs-là doivent demeurer et que ces pouvoirs-là doivent peut-être même être exercés un peu plus souvent. Évidemment, cela devra se traduire... s'accompagner des moyens qui sont nécessaires pour le faire.

Enfin, bon, les recommandations, on les retrouve à la toute fin de notre mémoire, là. Si je les prends un petit peu plus en ordre: que la commission puisse aller... Quand prima facie il y a des problèmes, on voit tout de suite que le fait de s'être exclu par un programme distinct fait en sorte de perpétuer la discrimination. Prima facie, la commission devrait pouvoir déjà entrer et y aller rapidement. Obligation de divulgation un peu plus détaillée. Pouvoir d'enquête, donc on souhaite confirmer son statut de partie à part entière devant la Commission des relations du travail ou dans tout autre dossier. On a les exemples qui ont été soulevés précédemment mais qu'on va reprendre, là, de la CSST, de l'AMF et d'autres organisations du même genre. Et finalement un régime relatif au maintien de l'équité salariale, donc une façon de revenir de façon périodique, revenir voir si l'équité salariale est maintenue.

Alors, vous avez un petit peu tout le système qu'on préconise, là. Là, je passe par-dessus parce que je veux laisser la parole à ma collègue ici pour nous faire un petit peu un état du dossier chez nous et où on s'en va.

Mme Simard (Lise): Alors, bonjour. Alors, d'entrée de jeu, je vais vous dire que les données que je vous apporte ce soir, ce sont des données réelles, alors on n'est pas sur un sondage. On a l'habitude, chez nous, de tenir en compte l'ensemble des travaux qu'on fait. On a des rapports à faire à notre direction. Par contre, votre commission m'a permis de me mettre à jour dans les dernières semaines, compte tenu que je savais qu'il y avait un intérêt ici, à savoir, d'une façon plus pointue, où en sont l'état des travaux.

Alors, tous les programmes réalisés, à l'exception bien sûr des programmes composés de catégories uniquement masculines, ont mené à des correctifs, au SCFP. Alors, on n'a aucun programme, que ce soit dans une 10-49, une 50 à 99 et une 100 et plus, qui n'a pas apporté de correctif d'équité salariale à certaines catégories féminines. Puis ces correctifs-là, ils sont très variables, et on ne peut pas donner, par exemple, le pourcentage de la masse salariale que ça a pu encourir, tout va dépendre du milieu.

Alors, si je prends à Hydro-Québec, au niveau des bureaux, on avait au-dessus de 4 % de correctifs de la masse salariale pour la démarche d'équité salariale. Mais, si on remettait ça dans l'ensemble de l'entreprise, ça faisait à peine 1 % et même pas. Et c'est bien compréhensible parce que la majorité des membres du 2000, c'est des femmes, alors qu'ailleurs la composition peut être complètement inverse. Or, moi, j'ai fait un programme pour les spécialistes et je vivais la situation contraire. Je vivais qu'il y avait 70 % d'emplois masculins par rapport à 30 %, et, dans l'autre programme du 2000, c'était le contraire. Alors, quand on parle de masse salariale, c'est très difficile.

Concernant les correctifs, bien ils ont pu jouer de 0,7 % jusqu'à 50 %. On a eu des cas... D'ailleurs, aujourd'hui, l'Autorité des marchés financiers, le correctif le plus élevé et sur un emploi à bureau est à 38 %; par contre, le correctif le plus petit est à 1,14 %. Et la grosseur des correctifs, il ne faut pas paniquer, est toujours en fonction de l'ampleur de la discrimination. Alors, si une entreprise payait très, très bien ses emplois masculins et très, très mal ses emplois féminins, les correctifs vont être en proportion de cette réalité-là.

Dans les entreprises de 100 employés et plus, nous avons complété 45 % des programmes. Et je vais diminuer ce chiffre en vous disant que, compte tenu que les programmes justement distincts, composés uniquement de catégories masculines, deviennent aussi des programmes au sens de la loi, alors, dans les faits, les programmes qui pourraient être interprétés comme des réels programmes sont de l'ordre de 33 % complétés. Dans les 100 et plus, tous les autres sont en cours. Là, je vous rappelle que nous avons, chez nous, une situation particulière. On a vécu la fusion, défusion et reconstitution, alors on a pris du retard dans les villes. On a eu aussi, dans le cadre du chapitre IX, des dossiers à revoir dans les organismes publics qui ne relèvent plus maintenant du Conseil du trésor.

Alors, justement en parlant du Conseil du trésor, dans les chiffres que je vous apporte, le secteur de l'éducation compte pour un programme et le secteur de la santé, pour un programme. Alors, en fait chez nous, il y a, en tout, pour les 100 et plus, il y a 45 programmes de complétés. Et, dans le calcul, dans mes chiffres, j'en ai 61. Donc, ça vous donne l'ampleur des programmes distincts composés uniquement de catégories masculines pour les 100 et plus.

Pour ce qui est des entreprises de 50 à 99, 50 % des membres ont bénéficié de correctifs salariaux, et 59 % de nos programmes sont terminés. Et là, dans les 50-99, on a beaucoup moins de programmes distincts composés uniquement de catégories masculines. Dans les 10 à 49, on n'en a pas du tout, c'est toujours les programmes d'entreprise, et là on a seulement 32 % de nos membres qui ont bénéficié des programmes complétés. Et 28 % des programmes le sont, complétés.

Il y a un élément positif dans une petite entreprise, c'est que, là, on n'a pas le choix, on n'a pas de demande d'association accréditée, il faut faire des programmes distincts si on a juste des comparateurs masculins. Donc, règle générale, c'est toujours des programmes d'entreprise. Par ailleurs, le problème est qu'on a beaucoup de ces programmes-là qui sont faits par les employeurs seuls. Et, règle générale, quand on va visiter ou lorsqu'il y a affichage, normalement, quand on affiche qu'il n'y a pas de correctif, on est obligés de faire des plaintes parce que la démarche est mal engagée. On a vu des cas où il y avait des plans d'évaluation où il y avait 28 %, 32 % pour l'effort physique, ce qui en fait remettait tout simplement en cause l'objet même d'enrayer la discrimination à l'égard des emplois féminins. Alors, il y a une plus grande difficulté. Pourtant, le progiciel de la commission est un instrument que, nous, on suggère aux entreprises, on le suggère à nos conseillers qui sont au service. Il est facilement utilisable et fait en sorte que l'entreprise n'a même pas besoin d'engager de consultant même si, nous, nous ne sommes pas là.

À la suite des démarches d'équité salariale, chez nous, nous implantons avec l'employeur des structures de salaire qui respectent à la fois nos résultats d'équité salariale et l'équité interne. C'est une structure avec classes de salaire naturellement et elle devrait permettre à tous et à toutes de faire le maintien de l'équité d'une façon plus quotidienne, plus normale. On privilégie ça au lieu de faire du cas-à-cas. Quand je parle de cas-à-cas, c'est, là, à chaque fois qu'il y a un changement, qu'il y a une modification, qu'il y a une création, il faut revoir l'évaluation, il faut refaire l'estimation des écarts.

Mais par ailleurs nous sommes tout de même d'accord qu'il faille avoir une périodicité pour vérifier les méthodologies et les événements qui ont changé en cours de route, d'une part ou de l'autre, même si le programme est inscrit dans une démarche ou une structure interne. Je pense qu'on m'annonce que j'ai terminé?

n(16 h 20)n

La Présidente (Mme Morissette): Il vous reste moins de une minute.

Une voix: ...questions.

La Présidente (Mme Morissette): Vous allez certainement pouvoir aborder d'autres points à travers les questions.

Mme Simard (Lise): Je vais prendre les questions avec Mme Valiquette.

La Présidente (Mme Morissette): Parfait. Alors, merci beaucoup. Je cède immédiatement la parole au ministre du Travail. Allez-y, M. le ministre.

M. Whissell: Alors, bon, on peut encore dire bonjour. Mme Valiquette, Mme Simard, merci de votre présentation. Dans votre mémoire, vous mentionnez que vous voudriez que le statut de partie soit reconnu aux associations accréditées pour représenter les personnes lorsqu'il y a une plainte qui est déposée à la commission. Pouvez-vous nous expliquer dans le fond le mécanisme que vous voudriez voir mis en place à l'intérieur d'une loi éventuelle?

Mme Valiquette (Louise): La possibilité d'être là pour représenter les gens et non devoir partir cinq, six, sept, huit plaintes en provenance de personnes différentes.

M. Whissell: Mais dans le fond, peut-être pour bien l'expliquer, c'est, si vous avez plusieurs employés qui sont dans votre unité d'accréditation qui ont l'intention de déposer une plainte, au lieu que ce soient des plaintes individuelles, que ce soit une plainte qui soit dans le fond acheminée, un peu comme un grief, auprès...

Mme Valiquette (Louise): Non, ça ne peut pas être autre chose que des plaintes individuelles, présentement.

M. Whissell: Mais...

Mme Valiquette (Louise): Et ça ne devrait pas être autre chose.

M. Whissell: O.K.

Mme Valiquette (Louise): On est en matière de droits fondamentaux, donc il faut que ça demeure des plaintes individuelles. Par contre, ce qu'on souhaite, c'est d'être capables d'être là comme porte-parole de ces personnes-là.

M. Whissell: Parce que présentement la loi ne vous le permet pas, c'est ça?

Mme Valiquette (Louise): C'est plus compliqué.

M. Whissell: O.K. Vous avez mentionné Hydro-Québec. Hydro-Québec, est-ce que l'exercice est complété?

Mme Simard (Lise): Oui, absolument. Il y avait plusieurs associations accréditées qui ont fait des demandes de programmes distincts dont certains étaient composés uniquement de catégories masculines et d'autres qui permettaient de réellement corriger la discrimination salariale. Alors, tous les programmes sont terminés, oui.

M. Whissell: Sur les programmes distincts, c'est quoi, votre position?

Mme Valiquette (Louise): C'est quoi, notre position sur les programmes distincts?

M. Whissell: Oui.

Mme Valiquette (Louise): On parle de ceux quand il n'y a pas d'emploi...

Mme Simard (Lise): L'ensemble des programmes distincts?

Mme Valiquette (Louise): L'ensemble?

M. Whissell: Comme, tantôt, vous avez entendu le Barreau, eux, ils ont exprimé une opinion à l'effet qu'il ne devrait pas y avoir aucune possibilité de programme distinct dans une entreprise. Vous, est-ce que c'est de les maintenir, à tout le moins dans les cas...

Mme Simard (Lise): Bien, au SCFP, la position, c'est de pouvoir avoir la comparaison la plus large possible à l'intérieur de l'entreprise. D'ailleurs, ça va dans le sens de l'objet de la loi.

Mais il faut se rappeler qu'au départ la possibilité pour le choix d'un programme n'était pas très grande. Avant l'amendement de 2004, alors le choix qui nous incombait, c'était soit de décider de faire une démarche avec l'ensemble de l'entreprise ou bien de faire une demande de programme distinct.

En 2004, pour les besoins du Conseil du trésor, celui-ci a demandé un amendement et là a permis qu'un regroupement de plusieurs associations accréditées... d'ailleurs, chose qu'on a utilisée chez nous et qui fait bien notre affaire. Par contre, on est obligés de le négocier avec l'employeur qui, déjà, dans le passé, avait influencé nos associations accréditées composées uniquement de catégories masculines pour s'exclure en tant que comparateurs. Alors, imaginez-vous, encore une fois, en 2004, on n'a pas pensé à l'ensemble, on a pensé Trésor et de soulager ces problèmes... et fait en sorte qu'actuellement on est encore obligés de négocier. Et vous comprendrez bien que l'employeur n'est pas toujours favorable au regroupement de plusieurs associations accréditées.

Or, qu'est-ce qu'on retrouve comme associations accréditées? Prenons l'exemple des villes, les cols blancs et cols bleus, puis on a aussi les non-syndiqués qui restent pour compte même dans cet amendement législatif là. Or, quand des salariés, ce n'est pas dans leur culture nécessairement de se comparer avec des cadres... Par exemple, prenons nos ouvriers, nos emplois manuels n'ont pas nécessairement le goût d'aller évaluer leur emploi avec les cadres, leurs gestionnaires. Et donc il nous reste comme choix, avec nos associations accréditées féminines, de s'en aller du côté du programme de l'entreprise.

Alors, moi, je pourrais vous dire que, dans les 100 et plus, c'est moitié-moitié chez nous. Mais, dans les villes particulièrement, ça peut devenir difficile parce que c'est contre culture d'aller faire l'évaluation des emplois avec... Par exemple, quand on parlait de discrimination ? puis malheureusement on a ce petit problème-là avec la loi ? on parlait secrétaire-peintre, mécanicien, on ne parlait pas secrétaire avec le directeur des finances, ce n'était pas ça, la discrimination, dans notre société. La même chose quand on parlait de la technicienne en garderie, on comparait gardien de zoo et non pas le directeur des opérations du zoo. Alors là, aujourd'hui on s'est retrouvés dans une situation où nos bons comparateurs, les vrais comparateurs des emplois bureau ou des emplois de bas niveau s'excluent de la loi. Donc, vous comprendrez bien qu'on est pour une comparaison la plus large possible.

M. Whissell: Mais vous n'avez pas vraiment répondu à ma question: Êtes-vous pour le fait qu'on maintienne, dans la loi, la possibilité de faire des programmes distincts?

Mme Valiquette (Louise): Oui.

Mme Simard (Lise): Oui. Pour certaines situations, je pense que l'amendement à l'article 11, qui pourrait même être élargi pour donner la possibilité que ce soit automatique, on pourrait se regrouper plusieurs associations puis réussir à avoir une véritable équité salariale avec les bons comparateurs. Ce serait beaucoup facilitant.

M. Whissell: Sur l'affichage, vous êtes dans les rares groupes qui ont demandé que ce soit réglementé. Alors, si je comprends bien, ce serait, dans le fond, dans une éventuelle loi, de donner la possibilité dans le fond au gouvernement de réglementer l'affichage par règlement du gouvernement?

Mme Simard (Lise): Oui. Sur l'affichage, bon, d'abord on a la problématique de l'affichage... Dans les milieux syndiqués ou dans les milieux d'entreprises de 50 et plus, où est-ce qu'on travaille d'une façon beaucoup plus conjointe avec l'employeur, on réussit souvent à faire afficher le pointage, à faire afficher la rémunération, à faire afficher le mode d'estimation des écarts, les écarts, les rangs ou le pointage des emplois masculins. Donc, l'information est très large.

Pour ce qui est des entreprises de 10 à 49, c'était aussi une vue de l'esprit et de... faire taire les commentaires négatifs des employeurs et du Conseil du patronat dans le temps, de dire qu'ils n'auraient pas de programme à faire. Ils ont un programme à faire puisque, lorsqu'on fait une plainte, ils sont obligés de prouver que la démarche qu'ils ont faite était exempte de discrimination fondée sur le sexe. Alors, à partir de là, lorsqu'ils affichent et qu'ils affichent qu'ils ont 2 % pour une catégorie x puis 3 % pour l'autre catégorie, «that's it», qu'est-ce que vous pensez qu'on fait? Une plainte. Et là on s'en va judiciariser le système et là on va embourber la commission pour des cas finalement qui ne devraient pas se retrouver là, sachant qu'on a vraiment tous les instruments pour faire la démarche et que la commission est obligée de dire, parce que la loi est telle quelle, qu'ils n'ont pas une obligation de faire le programme en vertu de l'article 50. Alors, ils sont plusieurs années à croire qu'ils n'ont pas à faire le programme, mais finalement, la journée où ils veulent comparer des catégories féminines-masculines, ils sont vraiment tenus de faire une évaluation et de faire une estimation des écarts.

M. Whissell: Les entreprises que vous représentez... vous l'avez dit tantôt, les entreprises n'ont pas toutes un programme d'équité salariale encore. Il y en a qui ont eu des... bon, compte tenu des fusions municipales, ont eu, bon, une exemption temporaire. Il y en a d'autres, par contre, présentement, que vous représentez qui ont l'obligation, en vertu de la loi, de l'avoir fait. Qu'est-ce que vous avez comme approche présentement, c'est-à-dire celles qui ne l'ont pas fait, est-ce que vous déposez systématiquement des plaintes ou s'il y a une progression ou, à tout le moins, des discussions qui sont entamées? Vous donnez une chance au coureur, malgré que la loi donne l'obligation et vous donne la possibilité de faire une plainte?

n(16 h 30)n

Mme Simard (Lise): On est encore dans la gentillesse. On est des femmes, hein, avant tout. Mais, écoute, on discute et on a beaucoup d'échanges, beaucoup de discussions. Certains employeurs, c'est beaucoup plus facile, mais, tous les employeurs, pour eux autres, c'était quelque chose de complètement nouveau. Et donc il a fallu se sensibiliser, il a fallu se parler, il a fallu prendre en compte qu'est-ce qui était écrit sur le site de la commission, lire, leur demander de lire, leur demander de s'informer, et on en est venues à bout de cette façon-là. Il y en a certains avec qui c'est très, très difficile, qui ont de la misère à comprendre qu'ils vont devoir passer par là. J'ai juste à penser à la ville de Montréal. On a commencé, ils ont arrêté. Là, ils ont de la misère à recommencer. Alors, c'est très difficile avec certains employeurs qui ont une pratique de relations de travail qui ne cadre pas du tout avec la question de la discrimination et l'objectif d'enrayer la discrimination systémique.

M. Whissell: Mais votre gentillesse ira jusqu'à quelle limite?

Mme Simard (Lise): Bien, c'est sûr que, nous, on pense qu'après 10 ans... Malgré qu'il y a eu des délais qui ont fait en sorte qu'on ne pouvait pas faire grand-chose ou qu'il ne s'est pas fait grand-chose. Parce que cette loi-là, elle était très favorisante pour les employeurs. Aïe! on leur donnait cinq ans avant de pouvoir commencer ou avant une échéance, on leur donnait cinq ans pour l'étaler, et même le Conseil du trésor est allé chercher deux ans de plus. Alors, vraiment, là, on a tout donné pour pouvoir l'obtenir, cette loi-là.

Aujourd'hui, bien, je pense qu'avec tout ce qu'on peut retrouver comme informations, comme documents de sensibilisation mais comme aussi méthodologie... Au site de la commission, le progiciel qui est là, et tout le guide, là, on pourrait même le donner, puis ce serait peut-être une bonne idée, à des jeunes étudiants de secondaire V, leur demander de faire une démarche, et je vous avoue qu'avec ces instruments-là ils nous la font. Puis peut-être que ça pourrait les sensibiliser sur les biais sexistes pour l'avenir parce que je trouve qu'on a encore de la misère, tout le monde, on a encore de la misère pour prendre pour acquis que c'est vraiment une loi puis il va falloir l'observer.

Mme Valiquette (Louise): Et, si vous pouvez me permettre de rajouter, il y a des employeurs qui ont un petit peu peur d'avoir peur. Tu sais, c'est complexe, c'est épouvantable, c'est technique, c'est... Pourtant, ce sont des démarches simples, là. On en a un bon exemple avec les choses qu'on peut retrouver sur le site de la commission. Mais il y a aussi un grand, grand nombre d'entreprises au Québec qui travaillent déjà avec des plans d'évaluation par points et facteurs. C'est documenté, c'est au-delà de 65 %, je pense. Donc, qu'est-ce qu'il y a d'autre que ça, rendu là, à part de traiter de la question des biais discriminatoires, sur lesquels on est capable de se former assez simplement? Ce n'est pas de la matière pour les extraterrestres, là, ça se comprend, ça.

M. Whissell: O.K. Je vais laisser le temps qu'il reste à mes collègues.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. Mme la députée de Laporte, il reste 2 min 30 s.

Mme Ménard: O.K. Merci beaucoup. Bien, je vais... O.K., vous affirmez que les gestionnaires chargés d'évaluer les emplois ne sont pas sensibilisés à la présence de biais sexistes dans l'évaluation des emplois. Donc, ce que vous dites, c'est que la formation à ce sujet offerte par les syndicats, dont le vôtre, est essentielle. Alors, pouvez-vous expliquer davantage et nous donner des exemples?

Mme Simard (Lise): Bien, en fait, là, je ne veux pas accuser les gestionnaires. Moi, je pense que, même de notre côté, les organisations syndicales, on a vraiment besoin aussi de sensibilisation. C'est un problème de société, c'est une reconnaissance de la société. Si on en est là où on a été obligé d'avoir une loi proactive pour corriger la discrimination systémique, c'est parce qu'on sait, tout le monde, que ça ne se serait pas fait tout seul et on sait encore aujourd'hui qu'il y a de la résistance. Il y en a, de la résistance, dans nos milieux, on ne vous le cachera pas, comme il y en a du côté des gestionnaires, puis on doit discuter, échanger puis évoluer.

Oui, il y avait des cours au SCFP. Dès le départ de la loi en 1996-1997, il y a eu des cours qui ont été mis sur pied pour sensibiliser tous nos militants, sensibiliser aussi les conseillers syndicaux sur la question de la discrimination systémique et sur une démarche d'équité salariale. On continue. Moi, je donne des cours à chaque année, encore plusieurs fois par année. Lorsqu'on avait des difficultés avec des employeurs, entre autres à la Société des casinos, on a fait venir la commission parce qu'on s'est dit: Bon, on pourrait vous la donner, la formation, mais on n'est pas neutres pour vous, donc on fait venir la commission, on va faire ça ensemble, on va se sensibiliser ensemble. Ça a très, très bien été, ça a été très apprécié. Et ça portait, oui, sur les biais sexistes, ça portait sur la démarche qu'on aurait à faire et ça portait aussi sur l'évaluation des emplois et même...

La Présidente (Mme Morissette): Si vous pouvez conclure en quelques secondes, s'il vous plaît.

Mme Simard (Lise): ...des emplois avec la commission. Et c'est entièrement gratuit, ça.

Alors, quand le Conseil du patronat vient dire que c'est des coûts administratifs, moi, je pense que les plus gros coûts en équité salariale, c'est les libérations. On libère des personnes pour faire le travail...

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, madame...

Mme Simard (Lise): ...mais souvent l'employeur est très content parce que ça coûte moins cher, libérer une secrétaire, que libérer un...

La Présidente (Mme Morissette): Je m'excuse, madame, ça met fin au temps, mais vous reposerez la question, à ce moment-là, parce qu'on est déjà rendus du côté de l'opposition officielle ou... il continuera parce qu'on termine ce soir...

Une voix: ...va continuer.

La Présidente (Mme Morissette): ...pas faire dépasser le temps, malheureusement.

M. Therrien: Bonjour, mesdames.

La Présidente (Mme Morissette): Alors, M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: Merci. Bonjour, mesdames. Donc, vous disiez que c'est seulement des libérations que les employeurs... que vous disiez que ça coûte. Est-ce que vous avez évalué les coûts que ça peut coûter?

Mme Valiquette (Louise): Non. On n'a surtout pas dit qu'il y avait seulement les libérations. On a mentionné que c'est le principal coût. C'est possible qu'il y en ait d'autres. L'employeur qui s'embauche un consultant, c'est un coût, hein?

M. Therrien: Parce que je pense que ce n'est pas à banaliser, le coût que ça peut engendrer, même si ce n'est pas de l'argent, là, si c'est du temps parce que le Syndicat des professionnels du gouvernement, la semaine dernière, nous disait qu'il avait libéré 17 employés pendant 38 mois. Je pense que, si on fait la multiplication, là, il y a des libérations qui commencent à coûter cher. Mais ce n'était pas mon sujet.

Complexité de la loi, vous citez en page 5, dans votre rapport, que, bon, «la complexité d'une démarche d'équité salariale, en particulier l'estimation des écarts salariaux»... Vous soulignez la complexité. Est-ce que vous pouvez nous entretenir... Parce qu'il y a cinq minutes vous disiez que ce n'était pas compliqué puis que ça allait bien. Donc, dans votre rapport, vous dites qu'il y a une certaine démarche qui peut avoir de la complexité. Est-ce qu'on peut vous entendre à ce sujet-là?

Mme Valiquette (Louise): Bien, il y a des niveaux de complexité, et on ne pense pas, même si on peut qualifier ça de complexe, que ce soit un quatrième niveau de complexité. Ce sont des choses techniques qui s'expliquent et pour lesquelles les employeurs possèdent déjà des outils. Quand ils ne les ont pas, on pitonne, puis on va sur le site de la Commission de l'équité salariale, puis on retrouve les outils dont on a besoin pour le faire. Et, quand on ne peut pas se débrouiller juste avec ça, on peut avoir les conseils également au niveau de la commission. Alors, ce n'est pas... Ce qu'on dit, c'est que cette complexité-là peut se ramener à des choses extrêmement simples.

M. Therrien: Mais j'écoutais votre consoeur qui vient de dire qu'il y a de la formation, puis il y a de la formation, puis vous n'arrêtez pas d'en donner. Il doit y avoir un niveau de complexité peut-être plus élevé pour qu'on n'arrête pas de donner de la formation.

Mme Valiquette (Louise): Parce qu'on ne forme pas quatre fois la même personne généralement, là. Tu sais, on donne notre formation puis on repasse notre monde. Vous savez que, dans les entreprises, il y a des mouvements de personnel. Alors, évidemment, tu as un exécutif syndical puis un comité d'équité salariale ou un comité d'évaluation, et, d'une année à l'autre, on a des nouvelles personnes. Alors, oui, on en voit beaucoup chaque année, mais on ne revoit pas les mêmes personnes d'une année à l'autre, là.

M. Therrien: Ça fait quand même 10 ans que la loi est commencée, là.

Mme Simard (Lise): Oui, mais je pense que la formation, là, porte surtout sur les obstacles parce que cette loi-là, quand on fait...

M. Therrien: C'est ce que je vous dis, c'est qu'il y a une certaine complexité, donc il y a des obstacles.

Mme Simard (Lise): Ce n'est pas... Non, je parle tout simplement de l'obstacle à reconnaître qu'il y a une discrimination systémique dans les emplois féminins. Et on en est encore là aujourd'hui quand on en discute chez nous, avec nos collègues, quand on en discute avec les entrepreneurs, quand on en discute même avec des salariés. Ce n'est pas acquis. Ce n'est pas parce qu'on fait un travail de sensibilisation que c'est terminé du jour au lendemain.

Quant à la complexité des outils, des instruments, et tout ça, et pourquoi on donne de la formation, c'est que, comme dit ma collègue Louise, on change de personnes, on change d'entreprise très souvent, mais les cours portent beaucoup, beaucoup sur la reconnaissance des tâches et caractéristiques féminines, souvent oubliées dans l'évaluation, et ça, ce constat-là, il a été fait depuis longtemps.

Pour ce qui est de votre préoccupation à savoir si c'est très complexe, moi, je vous ramènerais à une étude qui avait été faite en 1991 par le Centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail, qui révélait que 80 % des établissements, au Québec, utilisent au moins une méthode d'évaluation, et 6 % de ces 80 établissements là, c'était une méthode de rangement, six autres pour cent, classification, et 65 % utilisaient déjà, en 1991, une méthode par points et facteurs. Donc, ça veut dire que ce n'est pas une méconnaissance de la part des entreprises du Québec, l'évaluation des emplois. Et, si je ne me trompe pas, il y a Emploi-Québec aussi qui donne de la formation aux entreprises sur la gestion des ressources humaines et leur montre comment décrire des fonctions, des emplois, et c'est très, très utilisé au Québec depuis fort longtemps.

n(16 h 40)n

M. Therrien: Merci. À la page 2 de votre mémoire, dans le bas de la page, et je cite: «...il est impossible de tracer un portrait juste de la situation. Nous demeurons très sceptiques quant à l'utilisation de résultats de sondages pour faire ce bilan.» Est-ce que vous mettez en doute la validité des chiffres qui nous sont fournis dans le rapport ministériel?

Mme Simard (Lise): Absolument. Absolument. Parce que, nous-mêmes, quand je vous donne les chiffres du Syndicat canadien de la fonction publique, je suis obligée de prendre en compte que mes programmes terminés comprennent aussi les programmes qui n'ont pas fait de programme parce qu'il n'y avait que des comparateurs masculins. Or donc, ils ont identifié la catégorie, ils ont affiché, ils ont fermé le dossier. Bien, moi, dans mes chiffres, il est terminé, il n'a pas généré de correctif. Mais, tous les autres programmes que nous avons faits où il y avait des catégories féminines et des comparateurs masculins, nous avons des correctifs. On n'en a aucun qui n'a pas généré de correctif.

M. Therrien: Donc, ça confirme nos dires depuis le début de cette commission, et, étant donné que votre rapport est sensiblement les mêmes recommandations que le Barreau du Québec, pour notre part nous n'avons plus de question. Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Alors, on va être rendus du côté de la deuxième opposition. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, Mme la Présidente. Mme Valiquette, Mme Simard, bonjour, bienvenue à cette commission. Le contenu de votre rapport, bien fait, sérieux, est aussi le contenu, je pense, qui est porté par des femmes qui sont fières, à travers leur syndicat, d'avoir procédé à ce travail de faire appliquer l'équité salariale dans les entreprises où vous êtes, et je le sens dans ce plaidoyer que vous faites pour la loi.

Nous avons beaucoup dit que cette loi était une loi sur un droit fondamental, et on ne peut pas reculer quand on décide que, comme société, nous avons un droit fondamental, et on ne peut pas être lésés au niveau des droits. Mais ce que vous ajoutez dans votre mémoire, vous utilisez une expression que personne d'autre n'a utilisée, vous dites le mot «promesse». Vous dites: C'est une promesse faite aux femmes du Québec. J'ai aimé revoir ce mot, une «promesse». Parce que, bon, il y a un engagement derrière le mot «promesse», mais le mot «promesse» signifie «espoir» aussi. C'est un espoir qui a été porté par des femmes à travers tout le Québec. Alors, il y a quelque chose d'incarné dans ce mémoire, je trouve, qui est toute cette lutte, cette bataille que, je dis, nous, les féministes, les femmes du Québec, avons menée pour atteindre ce droit-là, pour le voir s'inscrire dans une loi, à travers une commission. J'étais contente d'entendre ce mémoire.

Les chiffres qui sont dans le rapport sont assez troublants. Une évaluation rapide faisait qu'on calculait que seulement une entreprise sur deux avait procédé à l'application de la loi. Ensuite de ça, combien de pourcentage d'entreprises dans lesquelles ça avait donné un impact, un effet sur les classes nous amenait à peu près entre 17 % ou 25 %, dans les discussions avec le Conseil du patronat, mais seulement entre 17 % et 25 % peut-être des entreprises ont amené un changement, apporté un changement dans la rémunération à cause de l'application de cette loi. C'est très peu quand on parle de l'espoir que ça nous avait apporté. Si on met le mot «espoir» avec ce résultat, c'est un peu décevant. Alors, évidemment, je pense qu'il va falloir bonifier cette loi.

Vous proposez plusieurs méthodes. L'une d'elles est de faire des dépôts, que les entreprises qui n'ont pas de comité et qui appliquent la loi seraient obligées de déposer, qu'il y aurait même approbation, par la Commission de l'équité salariale, de ce résultat. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, ce qui vous a amenés là, puis comment ça pourrait s'appliquer.

Mme Simard (Lise): Bien, en fait, si on prend l'exemple des 10-49, c'est un peu ce qui se passe actuellement parce que, quand on veut bien faire les choses, nous, la façon dont on procède, compte tenu de l'ampleur du travail, alors la direction du SCFP a confié aux conseillers aux services, donc ceux qui sont normalement au renouvellement de la convention collective, à l'application de la convention collective, de faire la surveillance des programmes d'équité salariale dans les petites entreprises, dans leurs petites sections locales. Donc, ils nous ramènent l'affichage ou ils nous ramènent le problème. En fait, ils vont nous dire que l'employeur ne l'a pas encore fait ou bien...

Et, les dossiers qu'on nous ramène, les vrais dossiers, là, qui ont été affichés, là, on n'en a pas eu un seul qui était correct. Et il y a des firmes de consultants là-dedans. Il y a des firmes qui sont même autorisées par la commission. Et il y a un intérêt, chez l'employeur, d'essayer de réduire les correctifs, de réduire les coûts, puis souvent c'est parce qu'il ne comprend vraiment pas... pas bien ce qu'il est en train de faire. Ça fait qu'on ferme le dossier et on affiche qu'il n'y avait pas de correctif. Mais, nous, à ce moment-là, on renvoie le dossier à la commission. Puis, après avoir parlé au téléphone cinq, six fois avec lui, puis il ne comprend toujours pas, puis il te renvoie au consultant, puis le consultant essaie de te dire qu'il a travaillé dans le cadre d'un budget fermé, bon, alors, nous, qu'est-ce qu'on peut faire? On va renvoyer le dossier à la commission. Donc là, on s'en va dans le processus de plainte.

Heureusement que la commission nous facilite les choses avec la conciliation parce qu'avec la conciliation bien là on peut avoir une approche différente. L'employeur va accepter justement, pour ne pas que le dossier aille en plainte jusqu'au bout, la conciliation. Et là on peut se parler puis essayer de régler le fond du dossier.

Mais je me rends compte que la conciliation dans les 10-49, c'est de la formation, c'est de la sensibilisation. Ils leur expliquent tout ce qui est sur le site. Ils leur sortent ça pour qu'ils le lisent parce qu'ils ne sont pas au courant de rien. Donc, b. a.-ba, on recommence. C'est comme si, bon, ils viennent de comprendre qu'il y avait une loi ou une démarche à faire. Donc, ça manque beaucoup, de ce côté-là.

Mme Maltais: Est-ce que ça veut dire que nous n'avons pas suffisamment informé sur la loi? Pourtant, les firmes de consultants devraient connaître la loi, normalement. Les firmes de consultants, c'est leur travail, elles sont engagées pour ça. Il y a des gens qui sont venus nous dire qu'il y avait peut-être des firmes de consultants un peu délinquantes. Vous partagez cette opinion, à vous entendre.

Mme Simard (Lise): Absolument. Puis on ne les a pas encore dénoncées. Jusqu'à maintenant, on essaie de les éduquer.

Mme Maltais: D'accord. Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Jonquière, il reste quatre minutes.

M. Gaudreault: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, Mmes Simard et Valiquette. Sur la question du maintien de l'équité salariale, hein, vous le dites vous-mêmes dans votre mémoire, là, c'est l'avenir, le maintien de l'équité salariale. Je pense que vous y croyez, nous y croyons tous. Mais il y a quand même un défi important en termes d'opérationalisation. Vous dites, à la page 8, troisième paragraphe: «À notre avis, l'obligation d'assurer le maintien de l'équité salariale au jour le jour, sans périodicité, est vouée à l'échec.» Et, plus loin, dans une de vos recommandations à la page 9, là, au point 1: «Un examen périodique des changements survenus dans l'entreprise; ainsi, à la date retenue pour cet examen...» Et là vous faites une série de suggestions. Donc, vous dites que les dispositions finalement devraient prévoir un examen périodique. Alors, vous parlez d'échec pour la périodicité au jour le jour, vous parlez d'un examen périodique.

Et l'UMQ, qu'on a reçue plus tôt ce matin ? et vous êtes un syndicat qui représentez plusieurs syndiqués dans les villes ? disent, de leur côté: «Selon nous, exiger des employeurs de procéder à un nouveau calcul de l'estimation des écarts salariaux à chaque fois que survient un événement ou un changement susceptible d'affecter ce calcul équivaut à imposer un fardeau administratif et potentiellement financier injustifié.» Alors, l'UMQ dit que les résultats de l'équité salariale peuvent demeurer fragiles parce qu'ils présentent une sensibilité élevée aux changements et particulièrement dans le contexte municipal. Et plus tôt vous avez dit aussi que certains employeurs avaient peur d'avoir peur. Alors, est-ce que vous jugez que l'UMQ a peur d'avoir peur? Et quelle est la périodicité idéale, selon vous?

n(16 h 50)n

Mme Simard (Lise): Oui, je pense que l'UMQ a peur d'avoir peur. D'autant plus qu'on travaille énormément dans les villes et puis qu'on a réussi jusqu'à présent... Tout à l'heure, je vous expliquais, là, l'implantation d'une nouvelle structure de salaires à la suite de l'équité, une structure de salaires exempte de discrimination fondée sur le sexe, avec des classes, et tout, et qu'on va revoir aux quatre ans. Alors, ce que ça amène comme tâche à faire, c'est tout simplement d'évaluer les emplois qui sont nouveaux et qui sont modifiés et de les traduire, je veux dire, de les envoyer dans la classe où ils vont. Puis, oui, au cas-le-cas, ça peut devenir lourd, mais, même si on aura une périodicité, c'est à la date du changement qu'auront lieu les rajustements. Donc, aux quatre ans, on sera encore dans la même situation, actuellement. Puis je salue d'ailleurs le petit calculateur de la commission, qui permet, pour chaque poste, de faire le calcul de tout l'étalement, là, tu sais, là, pour un employeur. Très facile. D'ailleurs, les employeurs, ils l'utilisent, là. Ça, ils nous l'accordent puis ils disent: C'est correct, tout ça.

Et donc, pour les municipalités ? c'est parce que vous me parlez de l'Union des municipalités du Québec ? faire du cas-le-cas ou le faire aux quatre ans va exiger des périodes encore de rétroactivité, et c'est pour cela qu'on dit, nous, notre façon de faire, au SCFP... Puis on a la moitié des dossiers dont je vous ai parlé tout à l'heure qui sont réalisés, qui sont implantés. Donc, il y a une structure de rémunération exempte de discrimination fondée sur le sexe qui aura coûté des sous à l'employeur, là, O.K.? Mais on peut faire des exercices. Si on fait le cas-le-cas, O.K., donc on met des emplois masculins qui ont été modifiés sur la courbe, puis la courbe fait ça, après ça on en a une autre, elle refait ça, tout ce temps-là on donne des correctifs aux catégories féminines. Alors, nous, on le fait en une seule fois avec l'employeur. Ça regénère des coûts. On ferme le dossier, dans le sens que maintenant on peut gérer les modifications des emplois, qu'ils soient féminins, masculins ou mixtes. Et on demande tout de même au législateur, pour s'assurer qu'il n'y aura pas des événements qu'on n'aura pas vus, on demande la périodicité quand même.

Mais gérer au cas-le-cas, ça ne veut pas dire pour une municipalité qu'à chaque fois qu'il y a un emploi qui est modifié, elle va le changer sur sa courbe. Elle peut le faire aux quatre ans, mais elle va devoir payer de la rétroactivité, et ça, ça devient récurrent, là, on va toujours être en rétroactivité dans les dossiers de maintien...

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup.

Mme Simard (Lise): ...alors que, nous, on a une méthodologie qui fait qu'on règle ça là, puis par la suite ça se gère tout seul. C'est ça.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Ça met fin au bloc de temps qui vous était alloué.

Alors, on va suspendre quelques instants pour vous saluer. Merci de votre présence.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

 

(Reprise à 16 h 55)

La Présidente (Mme Morissette): Alors, bonjour. Bienvenue au Mouvement des caisses Desjardins, le dernier groupe à se mettre sous la dent. La façon de fonctionner est que...

Des voix: ...

La Présidente (Mme Morissette): Ah! inquiétez-vous pas, ça ne fait pas mal. On est juste avant le souper, on a tous très faim.

La façon de fonctionner, vous avez 15 minutes pour nous faire la présentation de votre mémoire, ensuite les groupes parlementaires auront chacun un bloc de temps pour vous adresser leurs questions. Je ne sais... M. Dignard qui va nous adresser la parole en premier?

Mouvement des caisses Desjardins

M. Dignard (Jacques): C'est bien ça.

La Présidente (Mme Morissette): Vous vous êtes installé dans le centre pour l'occasion?

M. Dignard (Jacques): Oui, c'est ça.

La Présidente (Mme Morissette): Parfait, ça. Si vous voulez nous présenter aussi les gens qui vous accompagnent, vous avez 15 minutes devant vous pour votre mémoire.

M. Dignard (Jacques): Bien. Merci beaucoup. Mon nom est M. Jacques Dignard. Je suis premier vice-président des ressources humaines dans le Mouvement Desjardins. J'en suis à ma 32e année dans le Mouvement Desjardins. Je vous présente Josée Ouellet ici, qui est notre directrice pour le Mouvement Desjardins de tout le développement des ressources humaines et aussi de toute la question de la diversité dans le Mouvement Desjardins. Je vous présente Josiane Moisan, qui est notre directrice de la relève des cadres supérieurs et surtout la directrice des comités des genres dans le Mouvement Desjardins. Je vous présente Yvan Paré ? j'espère que je me rappelle le nom de mes employés ? qui est notre conseiller en rémunération globale pour le Mouvement Desjardins; Bernard Desrosiers, qui est consultant mais associé à Desjardins depuis au moins 30 ans. Alors, voici notre famille Desjardins aujourd'hui.

Écoutez, rapidement, je n'ai pas l'intention de vous faire lecture du mémoire que nous avons déposé. Ce qui est important, c'est: on voulait prendre l'occasion qui nous est offerte d'aller rapidement au but et de vous expliquer ce qui marche et ce qui ne marche pas pour notre Mouvement Desjardins dans l'application de cette loi-là.

J'ai eu l'honneur de faire présence ici en février 2005 et j'avais présenté un mémoire sur le Mouvement Desjardins, un mémoire sur la Commission des affaires sociales qu'il y avait eu sur le contrat social pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Nous avions présenté une approche Desjardins parce que, pour le Mouvement Desjardins, c'est clair que l'équité, ce n'est pas juste une question de salaire, c'est une question de politique de conditions de travail dans l'ensemble de l'organisation. Et j'avais eu l'occasion, en 2005, de démontrer comment le Mouvement Desjardins, il est élogieux en termes de ses politiques à l'égard de l'ensemble de son personnel. Vous savez, le taux de fidélisation des employés du Mouvement Desjardins est à 96,2 %, et ça, depuis sept ans. Alors, c'est une entreprise qui a fait beaucoup pour davantage le développement de ses employés et les conditions d'équité d'emploi pour le personnel.

Notre parcours relativement à toute la question de la loi, là, est le suivant. On se rappellera qu'en 1998 nous avions fait le dépôt de neuf rapports pour obtenir la conformité de la commission sur nos programmes d'équité salariale. Nous l'avions obtenue. En décembre 2000, nous avions obtenu cette conformité-là partout dans le Mouvement Desjardins. Et évidemment, c'est tout à fait normal, en 2001, il y a eu la contestation des centrales syndicales. Et, nous, on en avait profité... Je dois le rappeler aux membres de la commission, Mme la Présidente, parce qu'à partir du moment où Desjardins a eu sa conformité nous avons bâti un vaste plan des ressources humaines 2002-2005 pour les 40 000 employés du mouvement. Et, ayant eu la conformité de tous nos rapports salariaux, alors on avait pris la décision de repositionner dans le marché tous nos salaires, à l'ensemble du mouvement, 44 millions de dollars, 6,5 % d'augmentation à tous nos employés. On avait mis à jour toute la reconnaissance de nos employés au niveau de la formation et nos positionnements dans le marché externe.

Malheureusement, on s'est fait dire, en 2004... Il y a une décision de la Cour supérieure qui invalidait les rapports du Mouvement Desjardins. Nous avons décidé, le Mouvement Desjardins, de ne pas faire d'appel principalement parce qu'on a été le seul employeur qui à l'époque a reconnu cette loi-là, à l'époque, et qui a favorisé cette loi-là. Donc, on ne voulait pas aller en appel de cette loi-là puis on ne veut pas le faire non plus. Mais malheureusement on a reçu rapidement cette décision. Notre grande tristesse, ça a été que la décision a été rendue en janvier 2004, et, dès février 2004, nous recevions de la Commission de l'équité salariale une lettre comme quoi Desjardins était en très grand retard. On ne l'a pas trouvée acceptable, tu sais, comme organisation, mais on a continué cependant de travailler, de travailler pour faire en sorte que les choses arrivent.

n(17 heures)n

Évidemment, on s'est mis à travailler rapidement. En février... Fin 2004, année 2005, on a révisé ? parce qu'il fallait le faire ? l'ensemble des plans d'évaluation des emplois dans l'ensemble du Mouvement Desjardins pour faire arriver cette loi-là. On a créé 18 comités d'équité salariale, comme tels, et là on s'est retrouvés, dans les années 2006-2007, 2006, cueillette de l'information, affichage des emplois, évaluation des emplois et estimation des écarts salariaux. C'est là où on est rendus actuellement. C'est là où on est rendus. À deux reprises, j'ai déposé des plans d'action à la commission, parce qu'on veut respecter la loi, disant: Voici la progression des travaux.

C'est sûr que, lorsque vous avez une organisation comme le Mouvement Desjardins, vous avez 205 caisses syndiquées, à la fédération il y a 11 syndicats, et vous avez aussi, dans les sociétés, six syndicats, c'est du monde à la table puis c'est 18 comités à gérer. Ça nous a coûté tout près actuellement de 5 millions de dollars. Certains diront: Pour une grande entreprise, c'est cher. Mais on aurait pu se l'éviter sûrement si on avait respecté nos certificats de conformité, mais le travail va être fait correctement par le Mouvement Desjardins. Il y a des choses qui marchent, il y a des choses qui ne marchent pas. Alors, je vais en profiter davantage pour préciser ce qui marche. Il faut le dire aussi parce qu'habituellement une entreprise coopérative regarde des deux côtés: ce qui marche et ce qui ne marche pas.

Alors, le premier élément que je porte à votre attention, je vous amène au mémoire à la page 3. À la page 3, un des premiers éléments que je sensibilise les gens de la commission, c'est: il arrive, dans le Mouvement Desjardins, on a appelé ça l'identification des catégories d'emploi et des prédominances. Dans le grand Mouvement Desjardins, vous avez des caisses, des fédérations et des sociétés filiales. Vous en retrouvez dans le Mouvement Desjardins, des emplois où vous avez une prédominance masculine des emplois puis une prédominance féminine des emplois. Quand c'est des emplois qui existent dans le mouvement, on voudrait les utiliser en disant: Voici les prédominances que nous avons dans le Mouvement Desjardins. Ça, c'est très facile. Parce que vous pouvez arriver après dans une caisse puis une autre société où elle n'a pas de comparateur masculin. On a des prédominances dans le Mouvement Desjardins, on a un certain nombre de fonctions.

Alors, ce qu'on dit, c'est: Essayons, du mieux qu'on peut, que la loi soit modifiée, nous permettant, dans un même grand mouvement, une même bannière comme celle du Mouvement Desjardins, d'avoir la possibilité d'établir des prédominances féminines et masculines au niveau de l'ensemble des entreprises qui font partie de ce regroupement-là. Je pense que ça fait tout à fait partie des grands emplois du Mouvement Desjardins. C'est le premier point que nous voulons porter à votre attention, à la page 3.

À la page 4, un point qui est quand même mineur, ce n'est pas un point majeur, les programmes distincts. On n'a rien contre le fait que les associations accréditées puissent demander les programmes distincts, et, croyez-moi, on en a eu, des demandes, dans le Mouvement Desjardins, puis on les a acceptées. Nous, on pense qu'il peut arriver des situations où l'employeur pourrait aussi demander des programmes distincts, que ce soit dans une organisation où vous avez des employés syndiqués, des employés non syndiqués, des employés... des cadres, il pourrait arriver que c'est intéressant, dans une organisation, de demander un programme distinct pour un groupe non syndiqué ou pour un groupe de cadres dans lequel souvent les positions de rémunération sont très différentes.

Le troisième élément, je suis toujours pour vous faciliter le travail, à la page 4, c'est le volet essentiel, le point C: Le Règlement sur l'équité salariale dans les entreprises où il n'existe pas de catégories d'emplois à prédominance masculine. Et voilà. Nous, dans notre travail actuellement, je vous donne un exemple terrain: on est actuellement en travail structurant et constructif avec les centrales syndicales, on est actuellement dans un milieu de travail où on a tout près de 100 caisses. On a tout fait le travail, tout fait le travail. Et le problème de ces 100 caisses là, c'est qu'il n'y a pas de comparateur masculin. Il n'y en a pas. Alors, ce qu'on doit faire, c'est aller s'inspirer ou aller dans le règlement où on a importé deux emplois qui ne sont pas des emplois du Mouvement Desjardins. Alors, on doit imputer des fonctions. On doit les comprendre. Ensuite, on va s'asseoir avec nos partenaires syndicaux puis négocier des taux pour des emplois qui n'appartiennent pas à Desjardins, qui ne sont pas dans notre cour du tout.

Alors, à cet égard-là, ça fait quelques mois, et je ne dis pas qu'on n'y arrivera pas, mais la situation est que tout a été fait. La job a été évaluée, les emplois déterminés. On n'a pas de comparateur masculin, et, lorsqu'on a ça, c'est qu'on prend des emplois à même le règlement. Et ces emplois-là font en sorte qu'on négocie le taux puis on ne s'entend pas sur le taux, et c'est des taux qui sont importants.

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est que, dans une recommandation qu'on vous fait à la page 5, ce qui serait intéressant aussi lorsque nous sommes dans une situation où on n'a pas de comparateur masculin: de permettre à l'employeur de choisir des catégories d'emploi à prédominance masculine les plus représentatives de l'organisation Desjardins ou de son secteur d'activité. Parce qu'évidemment il y a beaucoup de caisses populaires qui ont entre 40 employés et moins. Il y en a qui en ont 100 et plus. Il y a des sociétés qui ont beaucoup d'employés, mais souvent on pense qu'on pourrait dire: Écoutez, on n'a peut-être pas de comparateur masculin dans cette caisse-là ou dans cette fédération, dans cette entreprise-là, mais on en a dans le mouvement. Et ça devrait nous permettre à mon avis de comparer des emplois à forte prédominance masculine et féminine et tirer nos lignes salariales.

Actuellement, c'est notre problème le plus important. Quand vous vous retrouvez à 39 000 personnes dans le Mouvement Desjardins, puis il y en a 22 000 dans les caisses, il y a 80 % on n'a pas de comparateur, c'est un problème. De se faire dire: Allez voir le règlement, allez voir le contremaître ou l'assistant du contremaître, évaluez-le puis donnez-y le taux, ce n'est pas de la façon qu'on travaille dans Desjardins. Écoutez, c'est une organisation qui, depuis des années et des années, elle a ses systèmes d'évaluation des emplois, ses systèmes de fonctions. Puis je pense que, si on prenait des emplois existants comme ça dans le Mouvement Desjardins, ça pourrait nous éviter évidemment d'avoir des rencontres qui n'en finissent plus sur la question du taux. Évidemment, il ne faut pas se le cacher, lorsqu'on tombe sur la question du taux, bien, évidemment, si on dit, nous, pour ces fonctions-là, ce qu'on voit, c'est à peu près un taux de 15 $ puis le syndicat veut 20 $, on peut se parler longtemps. Et là on est en train de négocier l'équité salariale, puis je ne pense pas que c'était l'essence de la loi que vous nous aviez recommandée à l'époque. Là-dessus, c'est un problème, pour nous, qui est important.

Les méthodes d'évaluation des écarts salariaux. Bien, c'est davantage... On a pu voir tous les mémoires qui vous ont été proposés. Ce qu'on dit dans la méthode des estimations, le point qui est important, c'est que Desjardins, depuis des années, a développé un système ? oui, madame ? d'évaluation des emplois, a développé avec ses comités d'évaluation d'emplois une approche dans laquelle on évalue les jobs, on donne des points, on structure les jobs, on fait des classes. Puis, dans les classes, bien ça part à tant de points, à tant de points. Il y a un minimum puis un maximum d'échelle, puis il y a des hommes et des femmes là-dedans. Alors, c'est ça qu'on fait depuis des années. Et, nous, on pense que c'est la meilleure méthode pour avoir des structures salariales exemptes de discrimination. Et on pense que la structure des classes salariales, c'est une bonne méthode. Et, finalement, il ne faut surtout pas... éviter de se retrouver dans des situations où on a des courbes salariales inéquitables. Ça, Desjardins ne sera jamais d'accord avec ça, puis, s'il y a inéquités, il faut les régler. Mais le système qu'on a mis de l'avant depuis bien des années devrait nous permettre, je pense, de régler ce qu'il nous reste dans le dossier de l'équité salariale.

Je dois vous dire que, dans Desjardins, la constatation générale que je peux faire après deux ans et demi de la loi: là où, dans des organisations, on a pu avoir des comparateurs masculins et féminins, on avance beaucoup. On avance beaucoup, j'ai des exemples où on a fait des estimés, des écarts, puis on va avoir une entente. Dans des organisations où, surtout dans les caisses, on n'a pas de comparateur, on a des problèmes d'application au niveau de cette loi-là.

Je suis maintenant à la page 7 ? il me reste quelques minutes ? pour les pistes de réflexion proposées. La question du maintien de l'équité salariale, évidemment, de par l'envergure de l'entreprise de Desjardins, nous, ce qu'on dit: on pense qu'on devrait permettre aux employeurs de proposer soit le maintien de façon continue de la loi ou à la limite sur une base périodique. Ce qui est important, c'est que, dans notre approche, nous, on pense que, si, au fur et à mesure, dans des mois, dans une année, il y a des nouveaux emplois qui arrivent, on évalue ces emplois-là avec les outils qu'on a, et puis, lorsque les emplois sont évalués, qu'on les affiche, ces emplois-là, on pense que c'est une bonne méthode. Il faut juste s'assurer que, lorsqu'on fait l'affichage de ces emplois-là, nos employés aient suffisamment d'information et qu'on puisse les aider, s'il y a lieu, pour répondre aux questions qu'ils auraient sur les emplois qui ont été évalués. Donc, on préfère une approche d'évolution continue à l'égard de toute la question d'équité, ou à la limite de dire périodiquement, à tous les quatre ans: Faisons un rapport, un rapport principalement sur ce que nous avons fait démontrant qu'il n'y a pas de discrimination au niveau des résultats.

Le dernier point, le rôle de la commission et de la... on n'a pas beaucoup regardé cette question-là. Ça ne nous intéresse pas nécessairement. Nous autres, ce qu'on veut, c'est d'avoir nos certificats d'équité salariale. En ce qui concerne le rôle de la commission, en autant que c'est crédible, c'est neutre puis c'est indépendant, les gens pourront en parler. Mais on voudrait une commission qui a une bonne crédibilité vis-à-vis autant les employeurs que les employés, et, lorsqu'il y a problème, qu'il n'y ait pas de problème pour personne. C'est sûr qu'il peut arriver des situations où les gens disent: Est-ce qu'on va garder notre crédibilité comme entreprise? Nous, ce n'est pas ce qu'on dit, on est d'avis que: respectons les critères d'indépendance, de crédibilité, de neutralité. C'est clair que, dans le rapport, on dit, à un moment donné: Peut-être que la commission devrait fondamentalement demeurer vraiment maître d'oeuvre devant la Commission des relations du travail sur tout ce qui s'appelle aller défendre la compétence de la commission. Mais les critères qu'on retient, c'est que, dans tout ce que fera la commission, c'est qu'elle garde une grande crédibilité à l'égard des organisations, dont le Mouvement Desjardins. Alors, voilà. J'ai essayé de vous résumer ça dans le temps que j'avais. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Alors, je cède la parole à M. le ministre. Allez-y.

M. Whissell: Alors, bonjour, M. Digard?

Une voix: Dignard.

n(17 h 10)n

M. Whissell: ....également pour saluer les gens qui vous accompagnent. Alors, hier, on était ensemble, on a eu un moment assez intéressant, hier, au niveau des entreprises en santé, puis je tiens à saluer votre implication comme mouvement dans l'élaboration de la norme. Je pense que c'est important, puis d'ailleurs on a vu les réactions aujourd'hui, c'était très positif.

Sur l'équité salariale, également saluer, bon, votre présentation parce que dans le fond vous vous présentez à nous en disant que l'équité est une valeur importante chez Desjardins. Alors, je pense que c'est important de le saluer. Vous êtes une entreprise, mais vous avez également des valeurs envers vos membres, mais également envers vos employés, qui sont bien reconnues au Québec.

Dans les points que vous avez soulevés, vous dites: Nous, on serait prêts à ce que l'exercice se fasse de façon périodique. Mais vous n'avez pas souligné qu'une fois que l'exercice serait fait de façon périodique, si vous détectez des anomalies ou dans le fond une inéquité qui se serait développée entre les périodes, s'il y aurait une rétroactivité et comment dans le fond vous apporteriez les correctifs.

M. Dignard (Jacques): La position qu'on a mise dans le mémoire, c'est deux choses. On a d'abord dit: Il faudrait que l'employeur, selon la grandeur qu'il a ou l'importance de l'employeur, ait le choix de dire: Est-ce qu'on y va sur une base continue ou périodique, là, d'abord. Et c'est bien évident qu'avec l'ensemble des systèmes que nous avons comme organisation on préfère davantage y aller sur une base... une structure continue.

M. Whissell: Pourquoi?

M. Dignard (Jacques): Bien, c'est parce qu'on y a travaillé depuis sept ans, à refaire des systèmes d'évaluation des emplois. On y a travaillé depuis sept ans, à refaire l'estimation des écarts salariaux. Donc, avec les 18 comités qu'on a actuellement, on a une expérience à cet égard-là. Donc, ce qu'on dit, c'est que les prochains emplois qu'on va évaluer, on devrait utiliser ces outils-là, sinon on n'aurait pas mis 5 millions pour rien là-dedans.

Alors, normalement, lorsqu'on ferait le travail, bien, on le ferait correctement. Ce qu'on veut faire cependant auprès de la commission... Il n'y a pas de problème à ce qu'on rende des comptes, tu sais, de dire, après quatre ans: Nous, on pense qu'on a un système qui n'est pas discriminant en termes d'inéquité dans l'organisation. S'il l'est, les ajustements auront été faits au fur et à mesure, c'est bien évident.

M. Whissell: Il est possible qu'au bout de quatre ans vous en détectiez, des inéquités. Alors, s'il y en a ou s'il y en avait à ce moment-là, il y aurait une rétroaction qui serait donnée aux employés ou...

M. Dignard (Jacques): Chez Desjardins, il n'y a pas de problème de ce côté-là, là, entendons-nous bien, parce que, écoutez...

M. Whissell: Bien, c'est parce que vous ne l'avez pas dit.

M. Dignard (Jacques): Non. Bien, O.K., vous faites bien de me poser la question. Mais ce qu'on voulait faire connaître à la commission, c'est que tout le travail qu'on a fait depuis le début, tu n'as pas le choix, il faut qu'il continue à s'appliquer, parce que l'équité, au-delà d'une norme, hein, c'est une norme fondamentale pour l'organisation. Alors, si on a un plan d'évaluation, on a des comités d'évaluation. Et puis, à toutes les fois qu'on a des évaluations, qu'on les fait connaître à nos employés ? puis on les met dans nos courbes, hein, on les met dans nos courbes ? on va le faire de façon continue. Je verrais mal une organisation commencer à ne plus vouloir appliquer l'équité après y avoir investi tellement de temps et argent. Ce serait irresponsable.

M. Whissell: Ça fait que, vous, dans le fond, ce que vous nous dites, c'est que l'exercice d'équité, chez vous, il est perpétuel. Il est rendu dans vos moeurs salariales, au niveau de vos ressources humaines. Ils appliquent de facto dans le fond des mécanismes qui font en sorte que l'équité, pour vous, c'est un quotidien.

M. Dignard (Jacques): Bien, c'est-à-dire, on essaie de viser ce que vous dites, M. le ministre, tu sais, on essaie de le faire. Ce que je disais tantôt, c'est qu'il y a des choses qui fonctionnent bien, des choses qui ne fonctionnent pas bien. Mais il reste que, depuis que la loi a été faite, bien on a fait en sorte de travailler dans ce sens-là.

Vous savez, quand on a décidé de le faire... Après la décision, là, de la Cour supérieure, on s'est dit: Bien, il faut le faire. On a refait, pendant un an, avec l'équivalent, là... mettez, là, à peu près, là, 400 employeurs, un plan d'évaluation pour tous. Pourquoi on a fait ça? C'est parce qu'on s'est dit: On va essayer de se donner une forme d'équité dans notre organisation, parce qu'avant les sociétés avaient un plan d'évaluation, les caisses... C'est ce qu'on a fait. Pris du temps, mais on l'a fait. Et puis, maintenant, bien, quand on rencontre nos centrales syndicales, on dépose le plan d'évaluation, on dit: Êtes-vous d'accord avec ce plan d'évaluation là? Alors, c'est un outil qui est... important. Et, ensuite, évidemment, il y a le système d'évaluation des emplois.

Alors, on ne pourrait pas, comme organisation responsable, dire, après quatre ans: On oublie ça. Ce n'est pas dans notre intérêt.

M. Whissell: Vous avez utilisé un terme, M. Dignard, puis il y a juste vous qui l'avez utilisé en trois jours de consultations, c'était «certification». Vous avez dit: Nous, on aimerait ça qu'on se fasse confirmer que ce qu'on utilise comme processus continu pour dans le fond tendre vers l'équité ou faire l'équité salariale... qu'on puisse être certifiés. Qu'est-ce que vous aviez en tête, là? Parce qu'il y a juste vous qui l'utilisez.

M. Dignard (Jacques): Bien... Non, non, mais ce que...

M. Whissell: Aucun autre groupe ne nous a mentionné qu'ils souhaitaient une certification. Certains par contre ont exprimé qu'il devrait peut-être y avoir des comités paritaires ou, à tout le moins, des comités sectoriels qui viennent, dans le fond, avec la commission, outiller, informer, donner une base de travail à des gens dans un secteur économique donné. Mais, vous, vous utilisez le mot «certification».

M. Dignard (Jacques): Ce qu'on voulait davantage faire, c'est que je pense que c'est important, au niveau de l'équité salariale, qu'après une certaine période de temps on rende des comptes à quelqu'un, hein, puis qu'on rende des comptes à l'instance qui sera reconnue, si c'est la commission, et qu'on dise: Voici ce qu'on a fait depuis quatre ans, tu sais. Puis je pense que, pour obtenir cette certification-là, il y a un certain nombre d'étapes à faire puis on les aura remplies. Puis les gens diront: Monsieur, vous avez fait votre job. Ce qu'on veut éviter, c'est tout de refaire ce qu'on va avoir fait depuis quatre, cinq ans, tu sais. À partir du moment où la base est solide puis on a certaines étapes à compléter dans les prochaines années, je pense que c'est tout à fait normal de rendre compte en disant: Voici ce que nous avons fait correctement là-dedans.

M. Whissell: Vous répondez en partie à ma question. Pour vous, c'est, une fois que vous avez votre mécanique d'établie, parce que c'est une mécanique dans le fond, ce qu'on applique, vous voudriez qu'elle soit certifiée, qu'elle soit reconnue, qu'elle ne soit pas contestable?

M. Dignard (Jacques): Non, non, quand je disais «certifiée», c'est que je voulais dire que je voulais rendre des comptes. C'est-à-dire, après quatre ans, à la commission, de dire: Voici ce qu'on a fait depuis quatre ans. Nous avons été reconnus. On va le finir; je pense, en 2008, l'ensemble de nos travaux vont être finis. On va déposer à la commission l'ensemble de nos systèmes de rémunération. L'ensemble de nos employeurs sont conformes à la loi. Ça, c'est clair, c'est ce qu'on veut, c'est ce que j'ai déjà présenté à la commission en termes d'échéancier. Dans quatre ans d'ici, on va dire: On est encore respectueux de la loi, voici ce que nous avons fait. Et la commission pourrait apprécier si le travail a été bien fait. C'est ce que je voulais dire par «certifiée» comme tel.

M. Whissell: Et, dans le fond, rendre une décision sur la conformité de votre plan? C'est ce que vous souhaitez?

M. Dignard (Jacques): Bien, de l'ensemble des étapes qu'on va avoir faites.

M. Whissell: Oui, mais ce que vous souhaitez, c'est que la commission dans le fond reconnaisse la validité, en regard à la loi, de votre plan.

M. Dignard (Jacques): Je ne le dis pas seulement au nom de Desjardins, au nom de l'ensemble des entreprises au Québec, de dire: Bien, écoutez, depuis quatre ans, voici ce que nous avons fait. Il y a eu tant de nouveaux emplois, on les a affichés, ces emplois-là, de plus, des nouveaux emplois à prédominance masculine et féminine. Puis voici les évaluations, voici la communication aux employés, puis voici nos courbes, on est corrects. Sinon, on ne croit pas au concept. Mais, quand j'ai parlé de certification, je voulais donner l'exemple de dire: On veut déposer le rapport de nos activités après quatre ans, on ne veut pas reprendre tous les mécanismes, on ne veut pas reprendre, dans quatre ans, tous les comités, les 18 comités qu'on a là, parce que sinon on n'en sortira jamais.

M. Whissell: Peut-être une dernière question avant de laisser le temps restant à mes collègues. Sur les comparateurs, ça semble être pour vous un irritant fondamental dans l'atteinte de l'objectif de l'équité. Dans votre rapport, bon, vous dites: Ça devrait être étendu aux bannières. Est-ce qu'il y aurait une difficulté d'application? Vous, vous êtes un mouvement qui est bien reconnu, coopératif, la bannière est bien cernée, vous n'avez pas non plus de... Tu sais, vos membres, toutes les instances font partie de la grande famille Desjardins, ce qui n'est pas nécessairement le cas de toute bannière où des fois c'est un propriétaire privé qui utilise une bannière.

Comment on pourrait, dans une éventuelle modification législative, aller justement vous donner les comparateurs que vous recherchez sans nécessairement apporter des distorsions à des chaînes ou des gens qui ont une bannière mais où il y a des opérateurs privés à l'intérieur de la bannière, là?

M. Dignard (Jacques): Bien, je pense que ce serait facile pour le Mouvement Desjardins de bien déterminer, les identifier, ces emplois-là, hein, qui sont à prédominance masculine dans le Mouvement Desjardins: Qui sont-ils? Comment se comparent-ils aux emplois à prédominance féminine pour un même niveau de poste et un même niveau... Ça, on peut le faire, comme tel. Donc, ce qu'on est d'avis, c'est qu'un mouvement comme le Mouvement Desjardins, ça peut être très différent de ce que vous avez dit tantôt au niveau des bannières, pas capable d'identifier rapidement nos postes, hein? Ils sont là, nos postes, ils se comparent très bien, les postes, pour faire ces comparaisons-là. Parce que le grand avantage du Mouvement Desjardins, c'est qu'il y a énormément d'emplois, il y a énormément de jobs, on peut les comparer.

Donc, pour répondre à votre question, soit davantage les identifier, puis vivre avec ce qu'on aura identifié, puis les gens vont comme dire: Oui, ça a du bon sens. C'est une job à 239 points ou 500 points, voici des jobs à prédominance masculine, féminine, c'est dans Desjardins. Vous savez, à titre d'exemple, là, il y a des fonctions déjà à prédominance masculine, dans le Mouvement Desjardins, qu'on peut identifier. Alors, c'est ce qu'on voulait dire, pas partir de façon arbitraire mais à même de ce que nous avons fait.

M. Whissell: Mais est-ce que c'est la loi actuelle qui ne permet pas de le faire ou c'est le règlement?

M. Dignard (Jacques): C'est le règlement.

M. Whissell: Mais la loi, outre le règlement, la loi pourrait le permettre.

M. Dignard (Jacques): C'est-à-dire, la loi pourrait nous aider à élargir, mais il reste que, quand on se retrouve dans cette situation-là, dans 80 % des caisses où on n'a pas de comparateur, ce qu'on fait, c'est qu'on va voir le règlement, puis le règlement nous dit: Allez voir deux emplois. Puis on va voir ces deux emplois-là, on les évalue...

M. Whissell: Pour vous, c'est le règlement qui est plus contraignant que la loi, si je comprends bien? O.K.

M. Dignard (Jacques): C'est ça. C'est ça, actuellement.

La Présidente (Mme Morissette): Oui. M. le député de Mont-Royal.

M. Arcand: Oui, merci. Écoutez, M. Dignard, j'aimerais, dans un premier temps, juste comprendre, là, ce dont vous parliez à propos du quatre ans, là. En fait, ce que vous voulez, c'est un genre de permis, si je comprends bien. Vous dites: J'obtiens un permis. Pendant quatre ans, j'opère, et, au bout de quatre ans, la commission ira évaluer si je continue, si je fais bien, en fait.

M. Dignard (Jacques): Moi, ce que j'ai dit, ce que je veux après quatre ans, c'est de rendre des comptes à une instance comme quoi notre travail a été bien fait pour pas que j'aie une lettre par surprise où on me dise: M. Dignard, vous êtes en retard dans l'équité salariale. C'est ça que j'ai dit, alors que... C'est en plein ça. Parce qu'on a eu des mauvaises expériences là-dessus. On a été pendant trois ans conformes, puis on a eu une lettre, un bon matin, qu'on était en retard. On n'a jamais accepté ça, le Mouvement Desjardins. On a été la seule entreprise au Québec qui a appliqué l'équité salariale, on a eu tous nos certificats, puis on s'est fait dire, en février 2004, qu'on avait des retards importants. On ne veut plus que ça arrive.

Alors, ce qu'on disait, nous, par rapport à toute la question du maintien, ce qu'on va faire, nous, c'est qu'après cette période de quatre ans on rendra des comptes et voici ce que nous avons fait, tu sais, comme tel. Si les gens, en voyant ce que nous avons fait, arrivent à la conclusion qu'il y a des choses qui n'ont pas été bien faites, on nous le dira puis on fera nos devoirs. Mais, pour rendre des comptes, il n'y a pas de problème de ce côté-là. Ce qu'on veut éviter, c'est tout de reprendre cette mécanique-là qui a été très dispendieuse pour nous autres. Et, quand on fait cette recommandation-là, on pense à tout le monde. À partir du moment où on croit à l'équité salariale, bien tout le monde doit, à un certain moment, rendre un certain nombre de comptes.

n(17 h 20)n

M. Arcand: Dans votre mémoire, vous parlez de concurrence et vous dites, à un moment donné: La position concurrentielle des caisses... on fait quand même une certaine concurrence avec les banques qui, elles, relèvent du fédéral, qui n'ont pas, eux, de loi sur l'équité salariale. Et vous parlez, à un moment donné, que, si, éventuellement, ça amène des hausses de coûts importantes, des «coûts de fonctionnement, celles-ci subiront une détérioration de leur position concurrentielle par rapport aux banques qui ne sont pas assujetties à la Loi sur l'équité salariale». Je voulais que vous élaboriez un peu là-dessus.

M. Dignard (Jacques): Bien, vous allez vite comprendre que les taux de rendement du Mouvement Desjardins, c'est entre 12 % et 13 %. Les taux de rendement des banquiers, c'est entre 18 % et 22 %, sauf cette année à cause des PCAA, là, je veux dire. Alors, nous, quand on aborde la... Puis on est partout à travers le Québec, tu sais, à travers le Québec. Alors, nous, ce qu'on dit, c'est que, déjà, dans nos positions salariales, on essaie fondamentalement d'être à la médiane de nos marchés. Mais, à partir du moment où, pour 22 000 employés sur 38 000, vous n'avez pas de comparateur masculin puis vous allez établir votre politique de rémunération à l'égard des fonctions qui existent dans les instances gouvernementales puis, à toutes les années, ça te suit et ça évolue, cette chose-là, tu peux avoir des coûts plus élevés que tu penses. Parce que tu sais que fondamentalement tu l'as, l'équité salariale, dans ton organisation.

Donc, quand vous comparez... Vous avez l'exemple actuellement: on compare des emplois, actuellement on est à 15 $ de l'heure, 14,25 $. On travaille avec les syndicats où on n'a pas de comparateur masculin, les gens nous demandent 20 $, 21 $. On ne peut pas jouer là-dedans trop longtemps. Vite, vite, vite, ça peut amener des inflations sur nos salaires. Puis on peut se mettre en situation, je pense, un peu hors marché par rapport à tout ce qui existe dans le domaine bancaire. Nous, notre position, c'est de se comparer à la médiane du marché bancaire avec des emplois bancaires, pas avec des emplois de contremaître ou d'assistant-contremaître. Et on a crainte qu'en faisant cette comparaison-là pour 80 % de nos gens ça puisse avoir un impact important de nos structures salariales. Alors, c'est ça.

Puis évidemment le Mouvement Desjardins ? puis je dis ça avec beaucoup d'honneur ? nous, on a pris la décision de garder nos régimes de retraite pour nos employés. Ce n'est pas les employés qui vont prendre le risque, c'est nous qui allons le faire. Et ça, on sait très bien ce que ça veut dire dans une organisation comme la nôtre. On veut garder nos régimes, on veut protéger nos employés puis on veut assurer nos retraités, puis on veut avoir une position salariale dans la médiane du marché. Si, en plus de ça, pour 22 000 personnes, il faut se comparer à l'extérieur, il y a comme un problème. Il n'y a pas aucune organisation qui accepterait que sa structure salariale soit en fonction des emplois dans un autre marché. Et ça, Desjardins n'est pas d'accord avec ça du tout.

Mme Ménard: Est-ce qu'il nous reste du temps?

La Présidente (Mme Morissette): Oui, il vous reste 2 min 30 s. Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard: Vous proposez de modifier la loi pour permettre aux employeurs qui font partie d'un même mouvement, par exemple, d'avoir la possibilité d'établir la prédominance féminine ou masculine des catégories d'emploi sur la base de l'ensemble des entreprises. Bon. Vous considérez aussi qu'un tel changement aurait le mérite d'assurer une plus grande stabilisation des prédominances et faciliter le maintien de l'équité salariale. L'article 5 de la loi permet au mouvement d'agir dans le sens que vous souhaitez. Alors, pourquoi vous ne le faites pas?

M. Dignard (Jacques): Bien, nous, lorsque tout le travail a commencé avec la Loi sur l'équité, on a travaillé avec l'article 12 de la loi. Pourquoi à l'époque on n'a pas travaillé avec l'article 5? C'est qu'on savait très bien... Ça, c'était une ouverture qui nous a été faite par le législateur à l'époque, une ouverture qui aurait pu permettre de dire: Le Mouvement Desjardins, c'est un seul employeur pour les 40 000 personnes. Ça, il y avait deux raisons à ça, pourquoi on n'a pas pris ce chemin-là à l'époque.

Premièrement, on l'a bien évalué, puis on s'est dit: Ça ne marchera pas parce qu'on va avoir autant de demandes de programmes distincts. C'est en plein ce qui arrive, hein? Parce qu'on a des programmes distincts. Donc, tu as beau dire: Je vais être à une même table avec tout ce monde-là, s'il y a des programmes distincts qui arrivent, c'est la même chose. Donc, on n'a pas utilisé ce chemin-là, on a davantage utilisé le chemin de l'article 12 qui dit: Travaillez à vous trouver des modalités harmonisantes entre les employeurs d'une même entreprise, puis ensuite faites de l'application employeur par employeur, caisse par caisse. C'est ce que nous avons fait à l'époque.

Puis je ne vous le cache pas, madame, aussi, avec tout le respect que j'ai, c'est qu'on avait beaucoup crainte aussi à l'époque d'une négociation centralisée. Beaucoup de gens ? moi, ça fait ma 30e année, j'en ai eu, des conflits de travail ? voulaient nous mettre à une même table de travail pour avoir des négociations centralisées. J'ai été six ans dans une banque où les négociations étaient centralisées, jamais je ne le recommanderai à n'importe quel employeur, jamais.

Alors, là-dessus, on s'est dit: Prenons l'article 12, essayons de mettre des modalités du mouvement puis allons dans les applications caisse par caisse. Et, à l'époque, pour faire l'article 5, il aurait fallu avoir l'autorisation de toutes les caisses du Québec. Et je peux vous dire, madame, la démocratie étant ce qu'elle est dans Desjardins, les gens auraient dit: Jamais, parce qu'ils avaient peur à ça. Alors, on a pris l'article 12, le chemin le plus long. Mais c'est pour ça que cette année on dit: On est encore dans le 12, puis, si on pouvait aller chercher des comparateurs dans notre organisation, je pense qu'on pourrait vous régler, madame, le dossier de l'équité salariale très rapidement.

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup. Il reste quelques secondes à peine. Alors, ça va mettre fin au bloc du côté ministériel. Donc, du côté de l'opposition officielle, M. le député de Terrebonne.

M. Therrien: Merci. Bienvenue, en cette fin de journée. Je suis content de voir votre dynamisme et l'implication que vous avez eue au niveau de l'application de cette loi-là. Et on voit que ça vous tient à coeur puis vous avez fait les efforts nécessaires. Et je pense que vous êtes l'exception qui confirme la règle à l'effet qu'il existe des employeurs qui ont la volonté que cette loi fonctionne vraiment.

À la page 2 de votre mémoire, à l'automne 2004, vous aviez comme objectif d'obtenir «un outil simple d'application». Un outil simple, question simple: Est-ce que vous avez eu satisfaction?

M. Dignard (Jacques): Excusez-moi, monsieur, je n'ai pas compris la question.

M. Therrien: À la page 2 de votre mémoire, à l'automne 2004 vous aviez comme objectif d'obtenir «un outil simple d'application». Est-ce que vous avez réussi?

M. Dignard (Jacques): Oui, oui. Oui, c'est ce que je parlais tantôt. Et évidemment il fallait avoir un outil d'évaluation des emplois qui s'applique à l'ensemble de nos organisations. On l'a fait, on l'a bâti. Puis, maintenant, bien, on est contents parce que, quand on le présente à une centrale syndicale, les gens, hein, semblent dire: On l'accepte. Donc, c'est un outil... c'est un étalon pour évaluer l'ensemble de nos emplois dans le mouvement. Et je fais un lien avec ce que M. le ministre disait tantôt: une fois que tu as l'étalon, c'est facile d'avoir le maintien dans l'avenir. Mais il est simple, je pense, mais il est accepté par les parties puis il nous permet d'évaluer les emplois dans l'ensemble du Mouvement Desjardins.

M. Therrien: Merci. Pour continuer, le programme distinct, vous en parlez à la page 4, vous souhaitez que l'on ouvre l'opportunité aux employeurs de demander un programme distinct et non seulement aux instances syndicales, comme c'est prévu présentement. Est-ce que vous pouvez expliquer à la commission votre problématique particulière et le pourquoi de cette demande-là au niveau des programmes distincts?

M. Dignard (Jacques): Parce qu'on peut arriver... on peut, dans le contexte où on est actuellement, je regarde la fédération, deux exemples: on a, à la fédération, une dizaine de groupes syndiqués puis on a beaucoup de groupes non syndiqués dans des territoires différents. Alors, quand on fait l'équité salariale dans les programmes distincts, dans les programmes distincts avec les syndicats, on voudrait des fois dire: Écoutez, là, on voudrait avoir un programme distinct pour nos non-syndiqués pour s'assurer d'avoir une bonne harmonisation.

L'autre aspect que je peux vous donner, c'est au niveau du personnel-cadre. Vous savez, le personnel-cadre, nous, on a eu des positions de rémunération particulières. Je vous donne juste un exemple: nous, il y a des cadres, là, dans le Mouvement Desjardins, on ne paie pas 100 % de la médiane. Quand tu viens dans Desjardins, tu n'as pas peur de perdre ta job. Ça vaut bien de l'argent. On ne paie pas nécessairement 100 % de la médiane. Ça, c'est nos cadres. Ils sont contents. Mais c'est notre philosophie: tu ne viens pas dans Desjardins juste pour des options puis des actions. Donc, quand on arrive à regarder l'équité salariale, peut-être que ce serait intéressant que j'aie un programme distinct pour les cadres. Sinon, on risque d'avoir, je pense, une incohérence dans la courbe salariale de tous ces gens-là. Évidement, c'est les positions de l'entreprise. Vous allez dire: Vous n'êtes pas sérieux. Il dit, il paie 90 %... de la médiane. Oui, c'est ce qu'on fait. Les gens, ils restent. Mais on vend autre chose.

M. Therrien: Vous parliez beaucoup tantôt de politique puis justement de rémunération versus le suivi ou le maintien de la Loi de l'équité salariale. Il y a des groupes qui nous ont dit ici que justement le maintien devrait s'effectuer par l'employeur avec une bonne politique structurée.

Et je reviens à votre idée de certification au bout de quatre ans. Est-ce que, vous, vous seriez en accord avec ça, si jamais il y a un changement législatif où est-ce qu'au moment où vous avez une bonne politique structurée salariale et que vous présentez ce projet-là à la commission par la suite on n'aurait pas à revenir tout le temps et recommencer maintes et maintes fois, si vous tenez à jour, bien entendu, votre structure salariale, là?

M. Dignard (Jacques): C'est des choses, je pense, très recevables de ce côté-là. Ce que je voulais m'assurer, c'est que ce qu'on va gagner en 2008 lorsqu'on sera reconnus, il faut le maintenir, tu sais, il faut le maintenir. Et de pouvoir à cet égard-là... Nous l'avons maintenu. On a une obligation, on a une obligation de résultat de ne pas faire de la discrimination en termes d'inéquité salariale. On a une obligation, il faut le faire, donc continuer... On a une politique claire. Qu'on dise c'est quoi, la politique salariale, le système d'évaluation des emplois, notre politique d'affichage, comment on travaille puis qu'on applique cette politique-là. Il me semble, c'est une des solutions intéressantes pour tous les employeurs du Québec. Et, si, des gens, des fois, ont des craintes, ils viendront voir, mais on l'aura appliqué. Ça, il n'y a pas de problème, de ce côté-là.

n(17 h 30)n

M. Therrien: Vous avez parlé amplement avec le côté ministériel au niveau de la prédominance masculine où on n'avait pas de comparatif. Nous aussi, de notre côté, on croit que ce processus est très subjectif et arbitraire. Est-ce que vous avez des solutions ou est-ce que vous avez pensé à des adaptations possibles qui pourraient suppléer à ce processus-là, arbitraire?

M. Dignard (Jacques): Bien, la question souvent, c'est qu'on arrive dans les caisses puis on n'en a pas, de comparateur. Mais on pourra en avoir à la fédération, on pourra en avoir chez notre assureur pour un même niveau de points qu'on a évalués. Et là on pourrait utiliser des comparateurs masculins et féminins dans un nombre de points équivalents ou bien évalués. Alors, notre point, c'est de dire: Essayons, au moins dans les emplois qui sont chez nous, dans notre secteur d'activité, à faire ces comparaisons-là. Puis l'avantage qu'on y verrait, ça fait partie de notre système de rémunération. Tu sais, des hommes d'entretien puis des contremaîtres, là, on n'en a peut-être pas dans les caisses, mais on en a quelques-uns à DSF, puis on a quelqu'un à Assurances générales, puis on a quelqu'un... On pourrait les prendre, puis les évaluer, puis faire ce travail-là entre nous, au lieu d'importer deux fonctions du règlement gouvernemental. C'est ce qu'on dit.

M. Therrien: Vous disiez, d'entrée de jeu, qu'au niveau de la gouvernance vous n'avez pas élaboré ou quoi que ce soit, mais, dans votre mémoire, je pense que vous avez élaboré amplement. Vous disiez: En autant que ce soit crédible. Est-ce que vous jugez présentement que la commission, avec tous les chapeaux qu'elle porte présentement, joue un rôle crédible?

M. Dignard (Jacques): Nous, honnêtement, le Mouvement Desjardins, on n'a pas eu de problème de crédibilité avec la commission. On n'en a jamais eu. Moi, les fois où j'ai appelé à la commission pour les rencontrer, c'est arrivé deux ou trois fois, dans lequel j'ai demandé de les rencontrer puis de déposer notre plan... Parce que le monde disait souvent: Desjardins, le plus gros employeur au Québec, il prend du retard. Vous l'avez sûrement entendu parler. Puis, nous, on disait à la commission: Voici ce qu'on fait, voici notre échéancier, mois pour mois, puis avec qui on travaille. Alors, dans ce sens-là, on a tout le temps eu un excellent accueil de la commission.

La seule affaire qu'on n'a pas aimée, c'est la lettre de février 2004, que malheureusement, malheureusement, mon président D'Amours, qui quitte... Il l'a encore sur le coeur. Parce que, quand le président n'est pas content dans les entreprises, avant d'appeler son comptable, il appelle le gars de RH puis là il dit: Jacques, comment ça se fait qu'on est en retard comme ça? Je dis: Ça fait 29 jours qu'on est en retard, M. D'Amours. Et, mis à part ça, moi, j'ai apprécié effectivement lorsqu'on a cogné à la porte de la commission. Ça a été correct.

M. Therrien: J'extrapole un petit peu vos propos. Vous dites, cette lettre-là, vous ne l'avez pas aimée, puis elle vous soulignait simplement que vous étiez en retard. Mais, si ça avait été une lettre d'appel à la commission pour vous taper plus sur les doigts que ça, est-ce que vous jugez que c'est là la prochaine étape, là?

M. Dignard (Jacques): Oui. Il est bien évident que, si ce serait arrivé comme vous le dites, on se serait opposés à un rôle comme ça de la commission. Tu sais, nous, on pense que la commission fondamentalement, s'il y a une instance ou une difficulté, elle a le rôle, devant la Commission des relations de travail, de bien définir sa compétence et comment elle a fait le travail. Mais, de là... ou de venir défendre des parties, je pense que ça peut enlever de la crédibilité à l'employeur et aussi aux employés. Alors, c'était mon point.

Mais, ce que j'ai voulu aborder aujourd'hui, je vous dis, comme employeur, nous autres, si vous voulez que ça arrive, la Loi sur l'équité salariale, c'est des comparateurs masculins et féminins. Cette question-là a des pouvoirs, mais, quelles que soient les décisions, qu'elle garde une crédibilité d'indépendance. C'est pour ça que j'ai insisté beaucoup là-dessus.

M. Therrien: Je vous remercie infiniment. Merci. Bonne fin de journée.

La Présidente (Mme Morissette): C'est terminé?

Une voix: Oui.

La Présidente (Mme Morissette): Parfait. Alors, du côté de la deuxième opposition, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci. Bonjour, M. Dignard. Mesdames messieurs du Mouvement Desjardins, bienvenue à cette commission. Nous sommes très intéressés à vous entendre, d'autant que vous êtes une immense organisation. Effectivement, tout le Mouvement Desjardins, c'est bien du monde de chez nous.

J'ai déjà plein de questions que j'avais qui ont été posées par le ministre. Je pense à celles sur les bannières, sur la certification. Bon. Je suis satisfaite des réponses, je comprends bien. Mais il y a une chose que vous avez abordée, c'est les bonus. Mais vous l'avez abordée en parlant des autres entreprises...

Une voix: ...

Mme Maltais: Des bonus...

M. Dignard (Jacques): Des bonus? Oui.

Mme Maltais: Oui. C'est-à-dire qu'il y a d'autres modes de rémunération que le salaire, que la rémunération hebdomadaire salariale. Est-ce que vous pensez que, pour les entreprises qui utilisent les bonus ou d'autres types de rémunération, ça devrait être inclus? Parce que vous dites: Nous, on ne fonctionne pas comme ça, on ne veut pas fonctionner comme ça, mais il y en a d'autres qui jouent ça. Est-ce que vous vous sentez désavantagés si on ne joue pas les mêmes règles un peu partout?

M. Dignard (Jacques): On avait déjà sensibilisé à l'époque la commission. À l'époque, on lui avait dit: Il serait peut-être bon éventuellement de mettre quelques critères par rapport... On sait que la rémunération variable va prendre beaucoup d'importance. Évidemment, on a tout le temps fait notre travail, depuis quelques années, sur la base d'une échelle, hein, puis il y a un maximum dans les échelles, puis... l'échelle, il y a un minimum, il y a un maximum, puis il y a un taux maximum. C'est comme ça qu'on l'a fait. On est conscients qu'au Québec actuellement il y a des gens qui ont ça puis ils ont aussi des bonis. C'est quelque chose qui va prendre de l'importance.

Je pense qu'il y a une réflexion sûrement à faire dans les prochaines années. Mais, nous, on l'a abordée dans le contexte: le grand défi du Mouvement Desjardins d'ici deux, trois ans, deux ans, c'est de finir la job avec les... pas les règles, mais la façon qu'on l'a faite actuellement, où ce qu'on fait actuellement, c'est qu'on dit: Voici des fonctions. On les a évaluées, elles sont de prédominance masculine, féminine, puis on va comparer les taux maximums des échelles. C'est ce qu'on fait actuellement. La question des bonis, c'est sûrement une très belle réflexion, mais ça prend beaucoup d'importance.

Mme Maltais: Dans votre conclusion, votre dernier paragraphe dit que vous êtes au coeur de vos travaux, c'est ce que vous nous avez raconté, et que les modifications législatives demandées favoriseraient leur avancement. Mais vous nous avez aussi parlé de 2008. Vous prévoyez la finalisation pour cette année? Desjardins ne pense pas que l'éventualité du dépôt d'un nouveau projet de loi pourrait retarder ses travaux? Vous n'attendrez pas, vous allez procéder?

M. Dignard (Jacques): Non. Il faut le faire. Écoutez, là, il faut le faire, puis c'est... J'aurais aimé beaucoup qu'on le finalise en 2007, tu sais, mais je disais tantôt: Là où ça marche bien, on vient de déposer trois rapports dans lesquels les estimés salariaux sont faits puis c'est réglé. Mais là où on n'en a pas, on a des problèmes. Les problèmes qu'on a deviennent de la négociation. Et puis, nous, on n'est pas intéressés à trouver un rapport de force à une table de négociation, c'est trop. Alors donc, le plan de match qu'on se donne, c'est de finir le travail 2007 ? on a pris un retard un peu ? le finir en 2008, pour faire en sorte qu'on ait fini l'ensemble des travaux, là, milieu ou fin 2008, sur l'ensemble de l'équité salariale. C'est ce qu'on vise. C'est sûr que, s'il y a des modifications à la loi, j'espère juste qu'elles vont être facilitantes. Mais j'avise tous les membres que, si on n'a pas un règlement ou ne facilite pas le travail sur la question des comparateurs masculins là où il n'y en a pas, on va avoir beaucoup de difficultés. Parce que n'oubliez pas aussi que, pendant que je parle du dossier de l'équité salariale, on a à peu près 200, 235 syndicats où on vient en renouvellement de conventions collectives. Faut pas mêler les affaires. Faut pas mêler les affaires.

Mme Maltais: Vous parlez de la difficulté de dissocier négociation versus équité salariale. Comment vous le rencontrez, l'obstacle? Comment ça se retrouve, la difficulté?

M. Dignard (Jacques): Tantôt, je donnais un exemple: 80 caisses actuellement, 80 caisses, madame, tout le travail est fait. Ces caisses-là, là, on a identifié en commun tous les emplois masculins et féminins. On a évalué tous ces emplois-là ensemble, on les a tous affichés à tout le monde et puis là on s'est dit: Maintenant, est-ce qu'il y a un problème d'équité? Et on dit: Oui, là, le problème, c'est que vous n'avez, dans 80 % de ces cas-là et plus, pas de comparateur masculin. Nous, on a pris les deux fonctions qui nous sont imposées dans le règlement, on les a évaluées, puis on a dit: Qu'est-ce que ça vaut, ça? Puis on dit: Nous, dans Desjardins, avec ce qu'on a comme emploi pareil, ça vaut 15 $. Puis les gens nous disent: Ça ne vaut pas 15 $, ça vaut au moins 20 $, 21 $, 22 $. Là, on se bat là-dessus, puis vous avez 22 000 jobs, là. Puis tantôt je répondais à la question sur la comparaison. C'est là où, à un moment donné... Tu peux tirer une affaire, dire: On règle ça pour 18 $, mais ne comptez pas sur le Mouvement Desjardins pour faire ça.

La Présidente (Mme Morissette): Oui, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault: ...

La Présidente (Mme Morissette): Il vous reste huit minutes.

M. Gaudreault: Ah oui? Alors, j'aurai deux questions: une première un peu plus générale parce que nous sommes aussi à l'étude, je dirais, plus une étude bilan. 10 ans après l'adoption de la loi, on a eu le rapport. Et, moi, ce qui me préoccupe beaucoup aussi, c'est l'aspect appropriation, je dirais, par la collectivité québécoise, de l'importance de cet enjeu de l'équité salariale comme droit fondamental. On en a parlé tout à l'heure, entre autres avec le Barreau, et la particularité du Mouvement Desjardins, c'est l'aspect démocratique, l'aspect coopératif. Et, dans chacune des caisses localement, il y a des assemblées générales. J'imagine que la composition des conseils d'administration locaux est assez masculine. Les gens qui fréquentent les assemblées générales, c'est peut-être surtout des hommes.

J'aimerais que vous me disiez... Vous, ça fait 32 ans que vous êtes dans le Mouvement Desjardins. Est-ce que vous avez senti depuis 10 ans, avec l'adoption de la loi, une évolution dans la perception? Est-ce que, par exemple, il y a encore beaucoup de... est-ce qu'il y a eu et est-ce qu'il y a encore de la résistance en disant: Ah, c'est une obligation, on va s'y conformer, ou vous avez senti un changement de mentalité à l'effet que ce n'est pas une question d'obligation à laquelle on doit se conformer, mais c'est une question d'égalité entre hommes et femmes, et on y croit d'emblée? Vous voyez où je veux en venir?

n(17 h 40)n

M. Dignard (Jacques): Oui, je comprends très bien. Là, vous abordez... Écoutez, après 32 ans, je suis capable de vous réciter par coeur les valeurs du Mouvement Desjardins, tu sais, puis il y en a une qui s'appelle la solidarité, l'autre s'appelle l'équité, l'autre s'appelle la prise en charge, tu sais. Donc, l'équité, pour nous autres, là, c'est quelque chose d'important. Alors, je pense qu'une loi comme celle de l'équité salariale a favorisé beaucoup une bonne prise de conscience dans toutes les organisations. Puis Desjardins, à cet égard-là, il doit aller plus loin. Je donne juste l'exemple. Je parlais tantôt des conseils d'administration de caisse. On est actuellement 34 % de nos dirigeants qui sont des femmes membres de conseils d'administration de caisse, dans le Mouvement Desjardins, tu sais. Donc, on avance beaucoup. 55 % de nos gestionnaires sont des femmes. Nos grands cadres supérieurs, là, on en a à peu près 20 % qui sont des femmes. C'est la raison pour laquelle madame est ici: comité d'équité des genres où, à tous les trois mois, cinq hommes cadres supérieurs, cinq femmes cadres supérieurs... Il faut faire progresser les mentalités non pas parce qu'on veut des ratios, parce qu'on croit à la complémentarité, on croit à la richesse de ça. Madame est responsable de la diversité dans notre organisation.

Alors, nous, les gens de caisse, nos dirigeants, ils nous voient souvent, souvent dans le décor, où on travaille des projets soit de diversité et d'équité. À titre d'exemple, je vous donne un exemple qui... Les gens en rient encore. Je suis allé au conseil tout récemment. On a recommandé à tous nos employés, nous, la reconnaissance d'activités physiques pour qu'ils soient en santé. Donc, je suis allé au conseil. Les gens disaient: Bien là, M. Dignard, il faudrait avoir des activités bien, bien concentrées, aller au Club Nautilus faire de l'exercice. Mais, quand vous avez 80 % de femmes dans une organisation: des clubs de marche, n'importe quoi, des clubs de danse... La population a changé ses besoins. Regarde, récemment, l'exemple, les cadres supérieurs chez nous, ils ont tous une allocation pour une automobile. On a dit: On devrait changer ça. Peut-être pour une automobile, mais peut-être pour l'équilibre vie-travail. Le conseil a changé ça. Alors, tu peux utiliser tes allocations pour un équilibre vie-travail: frais de gardiennage, frais d'entretien, ces choses-là.

Alors, moi, je pense que la loi a eu son effet et je le reconnais beaucoup. De l'autre côté, l'organisation comme telle y croit profondément, pas juste dans le dossier de l'équité salariale, mais dans toutes les politiques de conditions de travail de ses employés. Puis là on s'en va faire un sondage auprès des 12 000 employés bientôt, là, on va demander à nos gens: Pensez-vous qu'on est plus diversité, pensez-vous qu'on est plus équité qu'avant? Parce que, si tu n'as pas d'équité dans une organisation, tu n'as pas une bonne gestion ressources humaines, tu sais. Alors, l'équité, je pense, c'est une façon fondamentale de faire une bonne gestion RH.

M. Gaudreault: Alors, je suis heureux de vous entendre parler de ces valeurs parce que je comprends que le Mouvement Desjardins préfère être assujetti à la Loi sur l'équité salariale que d'être comme ses compétiteurs, les banques, et non soumis à la Loi sur l'équité salariale.

Puis j'aimerais faire du pouce un peu sur ce que disait mon collègue de Mont-Royal sur... en haut de la page 5 de votre mémoire, quand vous dites que les caisses risquent de subir une détérioration de leur position concurrentielle par rapport aux banques. Quand je regarde la situation au niveau du droit fédéral, il n'y a pas de loi sur l'équité salariale, alors les contestations se font sur la base de la loi sur les droits et libertés de la personne. Donc, il y a des groupes qui sont venus ici témoigner en disant ? entre autres, des syndicats ? qu'il y a des causes qui sont pendantes devant les tribunaux pendant une vingtaine d'années. Alors, c'est des frais d'avocat sûrement et des honoraires très élevés de la part des banques, j'imagine. Et, quand je regarde le rapport du ministre à la page 79, pour l'impact des ajustements salariaux sur la masse salariale de l'entreprise en fonction du type d'exercice et de la taille de l'entreprise, bon, pour les entreprises de 100 personnes et plus, au niveau des salariés, c'est un impact moyen de 1,2 %. Alors, ce n'est quand même pas majeur en termes d'impact, là, salarial, par rapport aux bénéfices, disons, du Mouvement Desjardins ou... Moi, j'accepte d'avoir un petit peu moins de ristournes, là.

M. Dignard (Jacques): Ouais, ça va. En tout cas, j'irai à votre assemblée, puis vous voterez. Mais ce que je veux juste vous dire, c'est que vous... Je comprends très bien votre point de vue, mais regardez-le, monsieur, dans le point de vue de la rémunération globale des employés. Venez voir chez nous, là. Si vous regardez toutes les banques de congés, de traitement, d'équilibre vie-travail, Desjardins est le meilleur des premiers, au Québec, dans tout ce qui s'appelle congé. Nommez-moi-les: congés sociaux, congés parentaux, congés de maternité, caisse de congés, équilibre vie-travail, travail à distance, tout est là. Quand on fait des comparaisons, les gens ne veulent plus se comparer parce qu'on a une position très forte sur le marché. Quand, en plus de ça, tu prends l'organisation... de dire: Nous, on va continuer à garder nos régimes de retraite, puis on va indexer nos rentes, puis on va assurer toutes les rentes aux retraités, puis les médicaments à nos retraités, ça coûte cher dans... global. Puis, quand tu fais la rémunération puis que tu te mets à la médiane du marché, si tu veux être un bon preneur, c'est intéressant. Alors, vous pouvez en rajouter, mais il y a une limite.

Quand je disais tantôt, quand on a eu nos certificats de conformité voilà quelques années, la première chose qu'on a recommandée, nous autres, c'est d'aller plus loin dans notre rémunération. On a mis 44 millions sur la table, 44! Ce n'était pas de l'équité, c'était de dire aux gens: On va plus loin.

Alors, que vous me disiez: L'équité, ça ne vaut pas cher, à un moment donné, le vase déborde. Et puis il faut juste s'assurer qu'on est compétitifs dans notre rémunération. Mais, si l'exercice d'équité se solde par une dépense, comme vous le dites, je pense que Desjardins peut gérer ça si c'est au nom de l'équité. Mais, si c'est au nom de changer notre politique salariale, notre structure salariale parce qu'il faut se comparer à des emplois qui ne sont pas de Desjardins, jamais! À moins que vous nous l'imposiez.

La Présidente (Mme Morissette): Ça met fin... Il vous reste moins d'une minute. Donc, ça met fin au temps. Merci beaucoup. On va suspendre quelques instants. On revient avec les remarques finales.

(Suspension de la séance à 17 h 45)

 

(Reprise à 17 h 47)

Mémoires déposés

La Présidente (Mme Morissette): Alors, avant d'entamer les remarques finales, je vais déposer les mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas été entendus pendant ces trois jours de commission: Accès conditions vie Lac-Saint-Jean-Est, Assemblée des groupes de femmes d'interventions régionales, Association coopérative d'économie familiale de l'Estrie, Centre d'action bénévole du Granit, Centre de femmes L'Étincelle, Centre des femmes de la Basse-Ville, Centre femmes de La Mitis, Centre-Femmes de Beauce inc., Collectif féministe de Rouyn-Noranda et Centre Entre-femmes de Rouyn-Noranda, Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec, Corporation de développement communautaire du Granit, André Gélinas, Harold Geltman, Illusion-Emploi de l'Estrie, Jeunesse ouvrière chrétienne nationale du Québec, L'Enjeu: cap sur l'emploi inc., PROMIS ? promotion, intégration, société nouvelle ? Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale, Service d'orientation et de recherche d'emploi pour l'intégration des femmes au travail, Solidarité populaire Estrie, Table d'action contre l'appauvrissement de l'Estrie, Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie. Alors, voilà pour les mémoires de gens qui ne sont pas venus nous voir en commission.

Remarques finales

Alors, nous sommes maintenant rendus aux remarques finales. Je vous rappelle que le temps qui est entendu est de cinq minutes par intervenant, un intervenant par groupe parlementaire. Et j'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition à formuler ses remarques finales. Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, Mme la Présidente. Alors, je note que le titre du rapport ministériel, c'est Un acquis à maintenir, mais je pense que, si on a un objectif à se fixer après avoir entendu les groupes qui sont venus ici devant nous, c'est un acquis à partager et à partager particulièrement avec les femmes non syndiquées, les travailleuses immigrantes, qui actuellement ne bénéficient pas de cette loi si importante pour les femmes du Québec. Alors, pour nous, je pense que notre intention, s'il y a présentation d'un projet de loi, ce serait ? et je pense qu'il le faut avec ce qu'on a entendu ? non pas dans le sens d'affaiblir cette loi, mais bien de renforcer cette loi à cause des objectifs qui clairement ne sont pas atteints jusqu'ici.

n(17 h 50)n

Au rythme où vont les choses dans le privé actuellement, l'équité serait atteinte dans 40 ans selon ce que nous a dit la CSD. Je pense qu'on sourit parce qu'on voit comment ça paraît un peu loufoque quand on sait qu'on a adopté cette loi depuis 10 ans. Mais je pense que c'est une situation très sérieuse, à laquelle nous avons le devoir de nous attaquer. Il y a un changement de vitesse nécessaire, il faut accélérer. Donc, il faut réaffirmer, comme l'a fait d'ailleurs le ministre pendant la commission, ce qu'on a apprécié, que la Commission de l'équité salariale est là pour rester, mais je pense que, comme d'autres, nous disons qu'elle doit avoir les ressources pour mieux travailler, ressources humaines et financières, bien sûr.

L'équité salariale est un droit fondamental, et la Loi de l'équité salariale est d'ordre public comme le salaire minimum. La Commission des normes du travail n'est pas neutre. Elle est là pour exiger que sa loi soit appliquée. Elle va défendre les normes du travail. Donc, la Commission sur l'équité salariale, pour nous, ne doit pas être neutre. Elle doit exiger l'application de la loi et la faire respecter, et on en est convaincus surtout après ce qu'on a entendu.

La loi prévoit une obligation de résultat et non seulement une obligation de moyens. Et les chiffres qui ont été dévoilés par le rapport du ministre et que nous avons entendus laissent songeur sur l'application de la loi. Je pense que c'est en ce sens-là qu'on veut bonifier la loi et non pas l'affaiblir. Il n'est pas temps d'affaiblir, à ce moment-ci.

On nous a beaucoup parlé de la délinquance des entreprises comme de la délinquance de certaines firmes de consultants. Là-dessus, je pense que nous allons nous attendre à ce que le ministre nous amène des solutions aux deux niveaux. Je pense qu'il est possible d'agir puis il est possible d'empêcher la délinquance. Est-ce que ce sera... Quel est le meilleur moyen? Je pense que là-dessus nous serons à l'écoute comme nous l'avons dit.

Il y a des correctifs à apporter. C'est un droit fondamental donc pour les non-syndiqués, les travailleurs, travailleuses immigrants. C'est clair que nous nous attendons à ce qu'il y ait action.

L'année de référence quand une entreprise atteint 10 employés, quand elle tombe dans le 10 à 49, je pense que nous serions très, très, très ouverts à avoir une modification en ce sens-là pour voir à ce que les entreprises n'échappent pas indéfiniment à la loi. C'est important.

Les chiffres, l'affichage, le maintien, ce sont toutes des propositions qui sont arrivées ici qui nous semblent intéressantes. Évidemment, on a entendu un peu les deux côtés de la médaille, mais il est possible d'aider les travailleurs, les travailleuses, qu'ils soient syndiqués ou non, à mieux comprendre à quel point cette loi est appliquée dans leur situation, à leur niveau.

Enfin, finalement, il y a des comités de travail qui ont été proposés. Je pense, entre autres, des organisations syndicales sont venues demander... certaines organisations patronales... Je pense que, si on a quelque chose, un message à lancer au ministre, et je le fais très personnellement, une organisation qui conteste une loi qui est proactive ne devrait pas être sur un comité qui est là pour bonifier cette loi. Il devrait y avoir, sur ces comités de travail, adhésion à la loi d'abord, adhésion à la commission, son existence comme telle, et adhésion à sa mise en application sérieuse à travers tout le Québec, dans tous les secteurs. Je pense que, s'il y a un comité de travail qui se met sur pied, moi, je demanderais que les gens qui soient là-dessus adhèrent. Parce qu'il y a ici des organisations qui sont venues nous dire qu'elles adhéraient très faiblement à la loi et à la commission.

Et je dirais une dernière chose. J'ai entendu beaucoup de questions des collègues de l'ADQ sur le coût de la loi. Moi, je pense que le coût de l'injustice, c'est un coût de trop. C'est l'injustice qui coûte quelque chose à une société, et la non-application de la Loi sur l'équité salariale, c'est une injustice criante, et je pense qu'il nous faut pallier à cette injustice. C'est une promesse de l'Assemblée nationale.

La Présidente (Mme Morissette): Merci, Mme la députée de Taschereau. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle à faire ses remarques finales. M. le député de Terrebonne.

M. Jean-François Therrien

M. Therrien: Oui. Merci. Salutations, Mme Marchand, à tous les membres de la commission qui ont assisté pendant ces trois journées-là. Mme la Présidente, M. le ministre, les membres de votre cabinet et les collègues députés, bonsoir.

Donc, nous avons eu, au cours des derniers jours, l'occasion d'entendre plusieurs groupes s'exprimer à propos de la Loi sur l'équité salariale. Je tiens à remercier tous les intervenants d'avoir pris le temps de se déplacer, de nous décrire quel impact cette loi a eu au sein de leurs activités. Cette perception est très importante pour la suite des événements.

Globalement, qu'est-ce que nous avons appris lors de cette commission? D'abord, sur le rapport présenté par le ministre du Travail, nous avons vu nos doutes se confirmer. Plusieurs groupes se sont montrés sceptiques face à plusieurs données contenues dans le rapport. Mentionnons, entre autres, les coûts relatifs à l'implantation d'un programme d'équité salariale, et je cite: «Près du tiers des entreprises privées ayant terminé leur exercice n'ont encouru, outre les ajustements salariaux, aucune dépense [et] ont défrayé moins de 1 000 $.» Drakkar, l'Ordre des conseillers en ressources humaines, la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, l'Union des municipalités du Québec et le Conseil québécois du commerce de détail, pour ne nommer que ceux-là, nous ont tous dit que ces chiffres ne reflétaient pas la réalité. Par conséquent, nous invitons le ministre à être très prudent avec ses propres chiffres et à faire preuve de rigueur. Et nous maintenons notre prémisse de départ que cette commission... à l'effet qu'à prime abord nous devons avoir un portrait crédible et vérifiable pour arriver à un constat viable.

Nous avons été sensibles aux recommandations liées à la gouvernance de la Commission sur l'équité salariale. Le fait de cumuler le rôle de promotion et d'information avec le rôle de trancher les litiges semble être la source d'un malaise. Le modèle de gouvernance de la Commission de l'équité salariale n'a aucun autre équivalent au Québec. Nous invitons donc le ministre a étudier attentivement cette situation, qui place la commission comme juge et partie, et à mettre en place une gouvernance respectueuse des responsabilités de chacun des acteurs concernés.

J'aimerais aussi souligner le fait que le Parti québécois nous parle de droit fondamental depuis le début de cette commission. Nous sommes en parfait accord avec le Parti québécois. Par contre, nous aimerions citer aussi un autre droit fondamental, qui est l'article 23 de la charte québécoise, qui reconnaît le droit à une audition impartiale par un tribunal indépendant.

Ensuite, il est apparu que la complexité de la loi est un irritant majeur, autant pour les entreprises que pour les représentants des employés. De façon générale, la complexité est vue comme un obstacle à l'avancement de l'équité salariale. On nous a fait part de problèmes des travailleuses non syndiquées, qui ont de la difficulté à comprendre si et comment leur droit est respecté. Les représentants des entreprises sont venus nous expliquer les nombreuses démarches nécessaires à l'implantation d'un programme d'équité salariale. On le sait, ce ne sont pas toutes les entreprises qui possèdent la structure ou l'expertise nécessaires pour faire aisément un exercice d'équité salariale. Les syndicats nous ont aussi fait part de leurs démarches, de leurs problèmes, les diverses interprétations des programmes distincts.

Pour nous, il y a réellement un problème avec la grande complexité de l'application de cette loi, mais non avec la volonté réelle d'arriver aux résultats que l'on veut obtenir. Aussi, la phase de maintien a été un sujet de conversation très important durant cette commission. Dans la loi, cette responsabilité est laissée aux entreprises. Nous souhaitons que le ministre précise l'orientation qu'il entend donner au maintien afin que les entreprises et les travailleuses sachent à quoi s'en tenir et qu'il ne persiste plus de doute.

Contrairement à ce qui a été dit ce matin, nous ne pensons pas que l'on doit réviser à la baisse la Loi de l'équité salariale. Par contre, nous croyons que la loi doit être rééquilibrée en tenant compte de critères objectifs et le moins possible subjectifs afin de préserver l'équité de toutes les personnes physiques ou morales impliquées dans ce processus. En somme, nous constatons que la Loi sur l'équité salariale a certainement produit des effets positifs pour les femmes en faisant prendre conscience à plusieurs que le travail des femmes n'était pas toujours évalué à sa juste valeur.

Sans remettre en question le droit à l'équité salariale, il convient maintenant d'en ajuster l'outil, la Loi sur l'équité salariale. Parmi les ajustements à faire, nous croyons pertinent de reconduire l'article 130. À la lumière de ce que nous avons entendu, nous sommes convaincus que la situation de l'équité salariale continuera d'évoluer et qu'il sera utile de se questionner à nouveau afin de s'assurer que les modalités prévues à la loi soient toujours conformes aux réalités du marché du travail constamment en changement.

Nous espérons que le ministre a pris bonne note des diverses problématiques vécues par les travailleuses, les entrepreneurs, les spécialistes des ressources humaines et les syndicats. Nous souhaitons l'assurer que, s'il entreprend d'autres démarches, il pourra compter sur notre collaboration. Merci.

n(18 heures)n

La Présidente (Mme Morissette): Merci beaucoup, M. le député. M. le ministre, je vous invite à faire vos remarques finales pour une durée de cinq minutes parce que les deux autres intervenants ont pris tout leur temps.

M. David Whissell

M. Whissell: Alors, merci, Mme la Présidente. Tout d'abord, au nom de tous les parlementaires qui ont participé à cette commission, permettez-moi à nouveau de les remercier et autant pour la transmission de leur mémoire que pour leur présentation à cette commission. Je pense que c'était très important.

Nous sommes particulièrement reconnaissants pour leur implication également au cours de toutes ces années, pour leur implication pour faire en sorte que l'équité salariale ait pu être réalisée dans plusieurs entreprises du Québec, à l'intérieur du gouvernement, également dans d'autres sociétés, et que l'équité, en bout de ligne, Mme la Présidente, devienne une valeur commune à tous les Québécois.

Il faut rappeler également que l'équité salariale a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, ne serait-ce que par les députés qui étaient présents, à l'exception d'un, et je me permets de le rappeler, le député de Rivière-du-Loup et présentement chef de l'opposition officielle. Nous remercions également les gens qui se sont déplacés pour venir échanger et discuter avec nous.

Donc, à la suite de ces interventions, Mme la Présidente, un certain nombre de constats et même de consensus ont émergé. Par exemple, plusieurs intervenants nous ont souligné que cette loi avait eu des effets positifs non seulement pour les travailleurs et les travailleuses, mais également pour les entreprises et les sociétés.

Ils ont également porté à notre attention leurs principales préoccupations. Et, malgré certains obstacles vécus, nous pouvons constater que la grande majorité demeure en accord avec le principe de l'équité salariale, avec le maintien de la loi et avec le maintien de la Commission de l'équité salariale.

La plupart ont souligné l'importance de veiller à ce que les entreprises qui sont assujetties respectent leurs obligations en réalisant leurs démarches ou leurs programmes d'équité salariale non seulement pour assurer qu'un grand nombre de travailleuses bénéficient de leurs droits à l'équité salariale, mais également pour que les employeurs qui ont déjà réalisé leurs exercices ne subissent pas de préjudice en termes de compétitivité.

Plusieurs ont réclamé qu'un effort particulier soit fait dans le but d'offrir plus d'information et de soutien tant aux travailleurs qu'aux travailleuses ainsi qu'aux entreprises. Il semble en effet que, malgré les 11 ans d'application de la loi, il existe toujours certains questionnements à l'égard même de la notion d'équité salariale et des obligations que cette loi impose aux entreprises. En offrant de l'information plus adaptée, cela permettrait aux entreprises et aux personnes salariées de mieux saisir la signification de ce droit à un salaire égal pour un travail équivalent et de mieux comprendre la portée de leurs droits et de leurs obligations. De leurs propos, nous retenons aussi la nécessité que des outils soient développés de façon additionnelle afin que les entreprises soient en mesure de réaliser cet exercice de la manière la plus adaptée possible.

On a également porté à notre attention une réalité particulière concernant les entreprises employant entre 10 et 49 salariés, qui ont souvent une structure plus flexible dans laquelle les employés doivent être polyvalents en cumulant parfois plusieurs fonctions. De plus, plusieurs groupes ont été entendus et nous informaient de la nécessité de rejoindre les travailleurs les plus vulnérables, notamment les personnes non syndiquées et les femmes immigrantes, pour lesquelles il est souvent difficile de faire valoir leurs droits et d'exercer un recours. Il nous apparaît donc clair que les groupes rencontrés s'entendent sur le fait qu'il serait souhaitable d'apporter certaines modifications à la loi.

Il sera donc nécessaire de procéder à un examen approfondi des difficultés soulevées durant cette commission. Quelques-uns ont souhaité des ajustements visant à apporter plus de souplesse, d'autres ont prôné plus de rigueur dans l'application, mais tous semblent viser un même objectif, soit une application optimale des principes de la Loi de l'équité salariale. De plus, j'ai bien entendu la demande de certains groupes pour la création d'un comité et d'un groupe de travail ? d'ailleurs, la député de Taschereau en faisait état ? sous l'égide du ministère du Travail afin de partager l'expertise développée au cours des 11 dernières années et proposer des améliorations au ministre du Travail. Et je dois réfléchir aux modalités de cette proposition, qui est intéressante.

Je tiens à remercier les députés qui ont participé à cette commission. Je suis persuadé que les échanges que nous avons eus avec les groupes nous ont tous permis de mieux comprendre l'enjeu qu'est l'équité salariale. En tant que gouvernement minoritaire, vous comprendrez également que j'ai besoin de la collaboration des deux partis d'opposition afin de donner suite concrètement à nos travaux.

Je ne saurais terminer, Mme la Présidente, cette commission sans souligner le travail de tous les gens qui ont permis ces trois jours de travaux, je pense à vous, à votre équipe, à l'équipe de l'Assemblée nationale, qui ont permis d'entendre les différents groupes. Je tiens également en terminant, Mme la Présidente, à remercier Louise Marchand, la présidente de la Commission de l'équité salariale, ainsi que toute son équipe, qui ont bien voulu préparer ces trois jours de commission, et également remercier, Mme la Présidente, mon équipe, la sous-ministre, les fonctionnaires de mon ministère, mon personnel politique.

Et nous avons devant nous un défi qui est fort... je vous dirais même emballant. Il y a un bout de chemin qui a été fait. Certains diront ou reprendront les chiffres qui ont été mis dans le rapport du ministre du Travail. Qu'on soit à 50 %, à 60 %, il y a un fait qui est indéniable: nous devons viser 100 % d'équité salariale, et il en revient seulement au législateur, à l'Assemblée nationale de prendre les moyens pour y parvenir. Nous avons entre les mains une loi. Nous pouvons dire après 11 ans: Cette loi doit être mise à jour avec l'expérience qui a été acquise à la fois par les travailleurs, les employeurs et les parlementaires.

Et sachez, Mme la Présidente, que, dans les valeurs qui animent ma formation politique, le Parti libéral du Québec, l'équité est une valeur profonde qui n'est pas négociable. Et nous allons tout mettre en oeuvre avec les partis de l'opposition pour justement pouvoir réaliser l'équité salariale et parvenir justement à ce que, ce droit, qui est fondamental dans notre société, qui est un droit qui revient aux femmes, on puisse l'établir et le mettre en vigueur avec la plus grande force possible pour l'avenir et les générations futures. Merci.

La Présidente (Mme Morissette): Merci, M. le ministre. Alors, la Commission de l'économie et du travail ayant accompli le mandat confié par l'Assemblée, nous pouvons ajourner les travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 6)


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