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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 20 octobre 1999 - Vol. 36 N° 29

Consultation générale sur la réduction de l'impôt des particuliers


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Table des matières

Auditions


Intervenants
M. Sylvain Simard, président
M. Bernard Landry
M. Serge Geoffrion
Mme Monique Jérôme-Forget
M. Robert Benoit
Mme Diane Leblanc
M. François Gendron
Mme Fatima Houda-Pepin
*M. Jean-Marc Hébert, GPB
*M. Claude Bissonnette, idem
*M. Guy Thivierge, idem
*M. Gaston Perreault, idem
*Mme Marie Grégoire, ADQ
*M. Marc-André Gravel, idem
*M. Serge Roy, SFPQ
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Nous commençons nos travaux. La commission des finances publiques, vous le savez, est réunie afin de poursuivre la consultation générale portant sur la réduction de l'impôt des particuliers.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des modifications, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Nous avons un remplacement, M. le Président. M. Benoit (Orford) remplace M. Williams (Nelligan).

Le Président (M. Simard, Richelieu): Bienvenue, M. Benoit, parmi nous.


Auditions

Le premier groupe que nous allons écouter ce matin, il s'agit d'un groupe de pensionnés de Bell que nous allons avoir en direct, sans intermédiaire, et je vais leur demander, je vais demander à leur porte-parole – je pense que c'est M. Bissonnette – de bien vouloir nous présenter ceux qui l'accompagnent et de présenter leur mémoire. Vous le savez, vous avez une vingtaine de minutes, vous n'êtes pas obligés de les prendre, mais ensuite c'est un dialogue qui va s'instaurer entre les représentants ministériels d'un côté et ceux de l'opposition. Alors, nous vous écoutons.


Groupe Pensionnés Bell inc. (GPB)

M. Hébert (Jean-Marc): Merci, M. le Président. Mmes et MM. les députés, mon nom est Jean-Marc Hébert, c'est moi qui serai le porte-parole ce matin. J'aimerais vous présenter M. Claude Bissonnette...

M. Bissonnette (Claude): Bonjour.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...

M. Hébert (Jean-Marc): ... – pas de problème, je vous l'assure – M. Guy Thivierge, qui est président du chapitre de Québec de notre association, et M. Gaston Perreault, président sortant du chapitre de Québec. Je suis président du chapitre de Montréal, j'ai 71 ans et j'ai pris ma retraite en 1984.

D'abord, j'aimerais un peu vous dire qui nous sommes, l'Association des pensionnés de Bell Canada. Nous avons été formés il y a plusieurs années pour représenter nos droits à la suite du dépôt du bilan de la Confédération-Vie, qui détenait les obligations que les employés avaient achetées lors de leur vie active en prévision de leur retraite. Et on a dû faire des représentations assez fortes et on continue, depuis ce temps, à représenter nos membres pour faire respecter les droits et bénéfices acquis lors de notre vie active de travail.

Pour ce qui est des travaux de la commission, nous voudrions plaider pour le scénario 1 que vous avez élaboré dans vos documents de travail, d'abord, pour alléger le fardeau fiscal de 26 000 retraités de Bell, dont une bonne partie sont parmi les moins fortunés. Il y en a, parmi ces 26 000 retraités, 1 200 qui ne bénéficient que de la pension minimale, qui est de 480 $ par mois. Pour des gens qui ont donné beaucoup de services, ça n'est pas beaucoup. La moyenne, d'ailleurs, des pensions versées par le fonds de retraite est inférieure à 19 000 $ par année.

Heureusement, il y a plusieurs des employés qui se sont prémunis ou prévalus de l'offre de la compagnie, à ce moment-là, qui encourageait les employés à se bâtir un fonds de retraite supplémentaire en achetant des actions, car il y en a un bon nombre qui auraient besoin de l'aide de l'État, si ça n'avait pas été de ces plans d'achat de suppléments de retraite.

Nous demandons de plus l'exemption des impôts prélevés sur les remboursements versés par Bell pour les dépenses en soins de santé payés par les retraités pour médicaments, soins dentaires et oculaires ou, sinon, le retour de la gratuité des médicaments pour les retraités de plus de 65 ans. Nous croyons que cette mesure corrigerait une aberration dans la formule de calcul des bénéfices imposables pour les doyens des retraités. Nous demandons également le retour au calcul des allégements fiscaux basé sur le revenu individuel plutôt que sur le revenu familial. Et on aimerait également voir le retour des indexations pour les exemptions personnelles, qui sont gelées depuis 1993.

Pour supporter nos demandes, on aimerait vous faire part du prélude à la décision de prendre une retraite, de se retirer du marché du travail pour faire de la place aux jeunes. Ce n'est pas toujours facile. Il y a tellement de facteurs qui entrent dans la prise de décision qu'à certains moments il faut plonger. D'autant plus que l'employeur – la rationalisation oblige, n'est-ce pas – exerce souvent des pressions qui vont carrément jusqu'au renvoi, prêt ou pas. Et ce n'est pas un jeu de cachette.

Même si on avait à décider aujourd'hui, quand les conditions sont relativement stables, ça n'est pas très rassurant, car on se demande sur quelle base on peut appuyer une planification de retraite. Le taux d'inflation a été de 26 %, au cours des 10 dernières années. Le rajustement au coût de la vie de la pension de Bell a été de 17,2 % pour les moins de 65 ans et de 20,2 % pour les plus âgés.

(9 h 40)

Pour les impôts et les taxes, ce n'est guère mieux. Au cours de la même période, les exemptions personnelles n'ont augmenté que de 11,7 %, passant de 5 280 $ à 5 900 $. La taxe de vente s'est étendue aux services et, bien qu'elle soit passée de 8 % à 7 %, à ce moment-là, pas tellement longtemps après, elle est revenue à 7,5 %. Et on pourrait même passer, suivant les scénarios 5 et 3 exposés dans votre document de travail, jusqu'à 8,27 % ou 8,66 %. C'est épeurant.

Les exemptions pour les personnes âgées et les revenus de retraite sont basées sur le revenu familial, et ça diminue encore les bénéfices et ça augmente les impôts. Le taux d'imposition pour les gagne-petit est passé de 16 % à 20 % en 1996, de 19 % à 20 % pour les revenus imposables inférieurs à 25 000 $. Alors, quand on fait une planification de retraite, quand on se prépare, vous admettrez qu'avec tout ça la marge d'erreur dans la planification est plutôt large et que le niveau de risque est passablement élevé.

À force d'en mettre toujours un petit peu plus, bien, ça finit par en faire beaucoup. Nos parents nous auraient probablement dit: Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se brise ou elle se casse. Bien, c'est ce qui est en train d'arriver, et c'est nous autres qui sommes en train d'être cassés.

On avait accepté des hausses d'impôts alors que le gouvernement prenait en charge les budgets scolaires. Etait-ce à la fin des années soixante-dix ou au début des années quatre-vingt. Les taux de taxes scolaires étaient tombés à 0,01 %. On ne sait pas ce qui est arrivé, mais ça fait plusieurs centaines de dollars d'augmentation de taxes scolaires parce que les taux sont maintenant rendus à leur maximum, à 0,54 %. Et, qu'on soit propriétaire ou locataire, en fin de compte, c'est le contribuable qui aboutit à ramasser la note.

C'est inquiétant aussi quand on voit les discussions sur les taxes, quand on repense à la polémique qu'il y a eu lors des changements à la TPS et à la TVQ, quand on discutait – et je pense que c'était fait sérieusement – de l'application de ces taxes aux aliments et aux médicaments. Ce n'est pas très rassurant.

Et, si ça arrivait qu'on ne peut encore se payer une automobile, avec tout ça. On paie une taxe sur l'assurance; service oblige. Les taxes sur l'essence qui sont passées d'un montant fixe à un pourcentage du prix vendu. Et on veut maintenant établir un prix plancher pour cette commodité. Était-ce pour s'assurer que le montant de taxe demeure toujours élevé?

On a beaucoup parlé et on parle encore beaucoup de pelletage de déficit. On n'aime pas ça non plus, car, en bout de ligne, c'est nous qui recevons le plat. Et je vous raconte une anecdote récente. Un retraité qui demeure sur une route rurale dont les fossés ont été canalisés par le service de la voirie publique, quand ça s'est bloqué, il a reçu la visite d'un inspecteur de la voirie qui l'informait que maintenant on lui faisait cadeau de la canalisation, mais que c'est lui qui devrait payer pour l'entretien de cette canalisation. C'est peut-être ça, du pelletage. Et on est trop gêné pour le dire au téléphone, on le fait par visite.

On a vu que les retraités n'ont pas d'autre choix que de vivre l'appauvrissement devant les hausses de taxes, les hausses d'impôts et autres stratagèmes pour augmenter les revenus du gouvernement. Nous espérons grandement que ces audiences mèneront véritablement à une baisse significative du fardeau fiscal et qu'on puisse se remettre à vivre de façon décente. Il peut y avoir des erreurs de bonne foi, on l'admet, mais, vous savez, les retraités sont des gens vieillissants, et on peut même admettre dans certains cas une diminution des facultés.

J'ai l'occasion de travailler, de tenter d'aider de mes confrères plus âgés qui croient que la déclaration d'impôts simplifiée sera corrigée, si ça ne les avantage pas. Il y en a qui ont déclaré des dividendes reçus sur des actions de Bell Canada, les mêmes actions qu'ils ont achetées lors de leur vie active et, quand ils font leur rapport d'impôts, ils déclarent les dividendes reçus à 125 % du montant des dividendes, le montant réel, et pourtant il n'y a pas de déductions pour eux autres. Et, même si les dividendes déclarés dépassent le montant forfaitaire de 2 350 $, la déclaration n'est pas amendée ou corrigée par ceux qui la reçoivent.

On a mentionné plutôt l'exemption d'impôts sur les remboursements versés par Bell pour les soins de santé des retraités du Québec pour corriger une aberration dans le calcul pour les aînés. Bell Canada rembourse une partie des dépenses autorisées pour les soins de santé de ses employés, de ses retraités ainsi que de leurs dépendants. Une moyenne de coût est faite chaque année pour les employés actifs et les retraités, deux groupes séparés, et le montant en question est déclaré bénéfice imposable. Le montant est le même pour les retraités âgés de plus de 65 ans que ceux qui sont plus jeunes. Or, les retraités de plus de 65 ans, doivent, par la force des lois du gouvernement, contribuer 175 $ au système de santé du gouvernement. Pour nous, ça consiste en une double taxation que de payer un impôt sur un montant de bénéfice taxable et de payer en plus la prime de 175 $.

En terminant, je résume les points principaux que nous avons soumis pour votre considération, non pas qu'il faille ignorer les autres, mais ceux-là sont nos principales recommandations et suggestions pour soulager l'impôt des contribuables les plus âgés. Nous croyons qu'en général les impôts prélevés chez les aînés moins fortunés, dont sont un grand nombre de retraités de Bell Canada, devraient être abaissés. Le scénario n° 1 nous semble le plus propice à atteindre cet objectif.

Nous croyons que les gens prévoyants qui se sont mieux préparés pour leurs vieux jours ne devraient pas être pénalisés pour leur prévoyance et nous demandons une réduction du taux d'impôts prélevés sur les retraits d'économie soit de REER ou de FERR.

Nous croyons que les gens mariés vivant encore en couple, et Dieu sait qu'il n'y en a pas beaucoup, c'est de plus en plus rare... Alors, on demande qu'ils ne soient pas pénalisés par des calculs les forçant à combiner leurs revenus pour le calcul des exemptions des personnes âgées et des revenus de retraite. Et ça arrive bien souvent qu'il n'y a qu'un des conjoints qui reçoive des revenus de retraite; les deux sont pénalisés.

Que les impôts soient réduits pour retourner aux retraités un revenu net qui leur permette de jouir un peu des jours qui leur restent; que, pour restaurer la bonne volonté et l'engagement des retraités qui sont engagés dans toutes sortes d'activités de bénévolat, qui supportent la société en général et souvent épargnent de fortes sommes au gouvernement, on devrait voir leurs impôts abaissés et peut-être même à travers ou par la voie d'une franchise d'impôts, à un certain moment.

Et finalement, le réservoir de connaissances, de savoir que constituent les connaissances accumulées de ces retraités, il faudrait que ce soit encouragé à une contribution au développement de l'économie du savoir, particulièrement dans le domaine des télécommunications – c'est là que nos expertises résident – la téléinformatique, le télétravail, le télécommerce. Ce sont des domaines dans lesquels plusieurs de nos retraités sont devenus des experts.

Alors, là-dessus, je voudrais remercier les membres de la commission d'avoir accepté de nous entendre pour présenter nos points de vue. Et nous souhaitons que l'expression de la situation de la plus grande partie des retraités de Bell Canada vous éclairera et vous aidera à prendre les bonnes décisions pour soulager les retraités. Merci.

(9 h 50)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je vous remercie beaucoup M. Hébert. Et nous avons effectivement écouté avec beaucoup d'attention votre mémoire, et c'est nous qui vous remercions. Évidemment, les membres de la commission ont des questions à vous poser, peut-être même remettre en question certaines choses que vous avancez. En tout cas, de la discussion jaillit la lumière et le progrès. Alors, j'invite d'abord le ministre des Finances à lancer la première question ou le premier commentaire.

M. Landry: Bon. D'abord, je veux vous assurer que votre mémoire a été analysé de fond en comble et qu'il le sera davantage à la lumière de ce que vous allez nous dire ce matin. Je vais commencer par votre anecdote. J'habite, moi, sur les bords d'une route rurale. J'ai toujours entretenu mes fossés. Alors, dites donc à votre gars de me téléphoner pour qu'on compare nos expériences, comment est-ce qu'une telle chose peut lui arriver. Moi, je pense qu'il y en a d'autres qui habitent le long des routes rurales, ici. La tradition, c'est qu'on entretient nos fossés. Puis, même s'ils débordent puis qu'il y a des accidents, on est responsables.

M. Hébert (Jean-Marc): Je pense que M. Claude Bissonnette aimerait avoir votre numéro de téléphone, M. Landry. Ha, ha, ha!

M. Landry: Je vais vous le donner avec joie, celui de mon bureau, en tout cas.

M. Bissonnette (Claude): C'est la route provinciale, il faut s'entendre.

M. Landry: C'est ça. Moi aussi, c'est la 132. Alors, ne faisons pas dévier sur la route rurale. Mais j'aimerais ça qu'on vide ça par téléphone, autrement.

Bon. J'en viens à des choses plus fondamentales. Globalement, vous nous dites qu'il faut mieux traiter les retraités et les personnes âgées sous l'angle fiscal. Moi, je le vous dis, globalement – on se l'est dit ce matin quand vous êtes arrivés – nous autres, ce qu'on veut faire, c'est baisser les impôts puis on veut les baisser pour tout le monde puis le plus équitablement possible.

Mais j'ai deux sujets de réflexion à vous soumettre qui ne vont pas tout à fait dans le sens de ce que vous nous avez dit ce matin. Le premier est un peu général et un peu philosophique. Moi, j'ai l'âge que plusieurs de vos retraités n'ont pas, c'est-à-dire qu'il y a des retraités plus jeunes que moi; je ne suis pas retraité mais, donc, je parle dans un groupe d'âge de plus de 60 ans. Et je regarde ceci.

Le gouvernement du Canada, dont nous sommes des contribuables, est endetté de 600 000 000 000 $. Le gouvernement du Québec est endetté de 100 000 000 000 $. Et ça, ça a été dépensé pour notre génération. Moi, l'essentiel de ma vie est derrière moi, là. Même si la médecine allonge la durée de la vie, le taux de mortalité de l'espèce humaine est toujours de 100 %. Alors, ça voudrait-u dire qu'on a eu plus de services que ce pourquoi on a payé? Et ça voudrait-u dire qu'on est en train de repousser vers mes enfants et mes petits-enfants les excès de notre propre consommation? Vous voyez ce que je veux dire? Sans parler de culpabilité, les gens de notre âge, on a dû dépenser en maudit pour repousser 700 000 000 000 $ sur nos enfants et nos petits-enfants. Donc, il faut faire attention, à mon avis. C'est une question d'équité, là. On ne va pas quitter cette terre en ayant endetté à mort ceux qui vont nous suivre.

Deuxième question, d'après nos calculs, ce sont les personnes âgées qui sont déjà les plus favorisées par notre fiscalité. Ça ne veut pas dire que, sur un point ou l'autre, vous n'auriez pas débusqué une injustice. Puis on regarde ça puis, si on peut aider à corriger techniquement... Mais, globalement, les 65 ans et plus, c'est 15,9 % des contribuables, c'est 13,4 % de la richesse puis c'est 10,6 % des impôts. Alors, globalement, indépendamment des cas individuels, on ne peut pas dire que les personnes âgées sont des surcontributeurs à la fiscalité.

Puis, au cours des dernières années, ça s'est amélioré. J'ai les chiffres entre 1994 et 1998. Parce que vous savez qu'on a modifié la fiscalité puis on a changé des choses puis on a baissé déjà les impôts. Pour les couples de personnes âgées de 65 ans ou plus, avec un revenu privé, ils ont tous gagné net des réformes fiscales. Ceux qui ont le plus gagné, c'est ceux qui sont à 25 000 $ par année, ils ont gagné 1 202 $; ceux qui sont à 30 000 $ ont gagné 960 $; ceux qui sont à 50 000 $ ont gagné 567 $. Maintenant, si on va aux personnes âgées vivant seules, elles ont toutes gagné aussi, sauf celles qui sont en haut de 50 000 $ par année. Alors, vous m'avez parlé du revenu moyen de vos retraités, ça veut dire que tous vos retraités y ont gagné, à peu près, là. Je dis tous... 95 % paient moins d'impôts en 1998 qu'ils en payaient en 1994.

Alors, tout ça pour vous dire que je suis un peu surpris de vos demandes. Je vous le dis en toute amitié, peut-être qu'on va vous donner satisfaction pour certains détails, mais, sur le global, ça a l'air de dire: Toujours plus pour mon groupe, qui en a déjà plus que les autres.

Le Président (M. Simard, Richelieu): M. Hébert.

M. Hébert (Jean-Marc): Les chiffres que vous mentionnez sont très probants. Cependant, dans la recherche que j'ai faite, les augmentations d'impôts de 1993...

M. Landry: De quelle année?

M. Hébert (Jean-Marc): ...de 1993, les manques d'ajustement ou, enfin, la perte de l'indexation, les passages d'impôts en 1996 de 16 % à 20 % pour les revenus inférieurs et de 19 % à 20 %...

M. Landry: Mais là je vais vous dire tout de suite que ce que j'ai dit, moi, évidemment s'applique de 1994 à nos jours. Parce que, dans les quatre années qui ont précédé 1994, il y a eu 10 000 $ de hausse d'impôts au Québec. Alors, c'est sûr que ça a pu tomber sur la tête d'un certain nombre de vos membres.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Vous avez complété, M. le ministre?

M. Landry: Oui.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, j'inviterais le député de La Prairie à prendre la parole.

M. Geoffrion: Bonjour, messieurs. Merci de votre mémoire. Avant de poser ma question, j'avais quelques petites questions techniques. L'âge moyen de vos membres, c'est quoi?

M. Hébert (Jean-Marc): L'âge moyen de nos membres est de 57 ans.

M. Geoffrion: De 57 ans. Et là il semble y avoir comme deux groupes. Vous avez parlé de 26 000 retraités de Bell, mais vous, vous en représentez 4 200 qui sont regroupés dans une association. C'est bien ça?

M. Hébert (Jean-Marc): Ceux qui sont capables de payer une cotisation annuelle de 20 $.

M. Geoffrion: Ceux qui sont capables de payer une cotisation, c'est les 4 200 que vous évaluez sur les 26 000?

M. Hébert (Jean-Marc): C'est ça. Mais il y en a évidemment qui pourraient le faire sans doute, mais qui ont préféré ne pas se joindre à nous.

M. Geoffrion: D'accord. Et puis, bon, 57 ans. Donc, le pourcentage de ceux qui sont en bas de 65 ans par rapport à ceux qui sont en haut de 65 ans, est-ce que vous avez cette statistique-là?

M. Hébert (Jean-Marc): Malheureusement, non.

M. Geoffrion: Non. À l'oeil, là, c'est la moitié, c'est un tiers?

M. Hébert (Jean-Marc): À l'oeil, c'est à peu près moitié-moitié.

M. Geoffrion: Et, dans la moitié qui ont en bas de 65 ans, est-ce qu'il y en a qui travaillent, qui ont un travail à temps partiel ailleurs ou, enfin, qui... Je ne parle pas de bénévolat, là.

M. Hébert (Jean-Marc): Il y en a effectivement dont l'expertise dans les domaines des télécommunications et téléinformatique, etc., comme je le mentionnais tantôt, est mise à contribution, et ils ont réussi à vendre cette expertise-là.

M. Geoffrion: D'accord. Cette semaine, il y a de vos collègues, si on peut s'exprimer ainsi, de l'Association des retraités d'Hydro-Québec qui sont venus devant la commission qui avaient à peu près un petit peu les mêmes doléances. Ils allaient un petit peu plus loin, en disant dans leur mémoire que, pour eux, il serait intéressant que le gouvernement reconnaisse cette catégorie de préretraités, de retraités comme une catégorie spécifique de contribuables. Est-ce que vous iriez jusque-là?

M. Hébert (Jean-Marc): Moi, je ne vois pas la nécessité de faire un groupe séparé pour les gens... Tout le monde, je pense bien, devrait être traité sur un pied d'égalité quand il s'agit de la fiscalité.

M. Geoffrion: D'accord. Bien, ça va. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci, M. le député de La Prairie. Alors, je me tourne maintenant vers l'opposition et j'invite la porte-parole, madame...

Une voix: Il y a encore des questions...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Il y a encore du temps, mais... Ah bon! Est-ce qu'il y a une question? Parce qu'on m'indiquait qu'il n'y en avait pas. Est-ce que...

M. Geoffrion: Ça va.

(10 heures)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Non. Alors je me tourne du côté de l'opposition et j'invite la porte-parole, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, à prendre la parole.

Mme Jérôme-Forget: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, messieurs. Le point que je voulais faire, c'est que l'impression que vous avez de payer plus d'impôts, depuis quelques années, c'est effectivement ça. En dépit du fait des livres, de ce qu'on écrit, le gouvernement, au niveau de l'impôt des particuliers, depuis quatre ans, a pris dans les poches des contribuables 2 200 000 000 $ de plus. Et bien sûr, étant complètement intègre dans ma façon de calculer les chiffres, j'enlève la croissance économique. Il en reste quand même 1 300 000 000 $, 1 400 000 000 $ en quatre ans. Alors, c'est clair que l'impression que vous avez d'être plus pauvres par toutes sortes de façons où il y a eu des taxes ajoutées, où il y a des choses qui se sont passées – c'est clair que vous payez plus d'impôts – ce n'est pas une impression, c'est une réalité, premièrement.

Deuxièmement, il y a un point que je veux faire. Et je vais laisser plusieurs questions à mon collègue, ici, le député d'Orford. Mais il y a un point que vous faites qui est très intéressant, en page 5 de votre mémoire. Vous dites, dans le fond, que les entreprises vous ont invités, incités à prendre des retraites anticipées et que souvent cette approche-là... vous étiez mal préparés pour juger de la pertinence de prendre une retraite anticipée. Autrement dit, vous n'aviez peut-être pas tous les éléments en main pour faire les calculs, combien ça vous prendrait d'argent pour vivre raisonnablement et confortablement. Parce qu'un des dangers dans la société, c'est précisément d'avoir bien du monde qui prend des retraites anticipées, qui est encore plein de santé, capable de fournir un travail à la société et qui est capable de contribuer de façon positive, énergique, intelligente à la société.

Vous savez, je vais donner seulement un chiffre, en 1976, il y avait 72 % des gens qui travaillaient, au Québec, entre 55 et 65 ans; aujourd'hui, il y en a 49 %. C'est donc dire qu'on a toute une main-d'oeuvre à qui on a donné des retraites anticipées et qui est capable encore aujourd'hui de contribuer. Au contraire, les gens qui vieillissent aujourd'hui sont plus en santé qu'ils ne l'ont jamais été. Et on dit que les gens qui vont vieillir plus tard vont être encore plus en santé que nous à cause de tout le style de vie qu'on vit. Alors, c'est clair qu'on est en train de tomber dans le piège des retraites anticipées et que les gens vont faire la dure découverte que la vie peut être moins rose qu'elle apparaissait.

Maintenant, vous proposez quelque chose d'intéressant, vous dites: Est-ce qu'on ne devrait pas avoir une façon d'estimer les revenus qu'on va avoir dans l'avenir, de bien les calculer, de bien les mesurer? Vous proposez même, si j'ai bien compris votre mémoire, d'avoir une ressource qui serait à la disposition. Est-ce que ça vous a été offert, quand les gens ont pris leur retraite anticipée, d'avoir un conseiller qui aurait regardé justement votre bilan pour évaluer avec vous: si vous vivez encore pendant 30 ans, voici ce qui va se passer? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui a fait ça? Est-ce que la compagnie vous a offert ça?

M. Hébert (Jean-Marc): Dans mon cas, je peux vous dire non, mais je vais demander l'opinion de mes confrères parce que je ne leur avais pas posé cette question. Claude.

M. Bissonnette (Claude): Dans mon cas à moi, oui, mais pas sur un long terme, strictement au point de vue: Qu'est-ce que tu as comme REER? T'es-tu équipé? Bon, c'était sur un court terme. Parce qu'il y a un élément qui est majeur dans les pensions de Bell, c'est qu'avant 65 ans la plupart de nous avons une hausse de la pension. Dans mon cas, je reçois 1 100 $ de plus jusqu'à 65 ans, mais je perds ce 1 100 $ là à 65 ans. Il est évident que, si tu n'es pas préparé, si tu n'as pas mis des sous de côté, quand va arriver 65 ans, tu vas avoir l'air fou. Et, dans le cas qui nous occupe ici, il y a beaucoup, beaucoup de retraités de 65 ans qui ont un problème actuellement dû au fait que l'anticipation des revenus qui étaient pour être générés dans leur fonds ne s'est pas matérialisée au même rythme, et là ils se ramassent avec une diminution. Et, quand on dit qu'il y a une pension qui est à 19 000 $ comme moyenne, ça, nos pensionnés de 65 ans, eux, comme on dit en français, ils mangent la claque.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Je vais laisser...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci. Est-ce que vous voulez poser une autre question?

Mme Jérôme-Forget: Non, je vais laisser mon collègue d'Orford...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, j'invite le député d'Orford à prendre la parole.

M. Benoit: Oui. Messieurs, merci d'être avec nous aujourd'hui. M. Hébert, dans votre mémoire, à la page 5, vous prenez les mots «forcé à une retraite moins bien planifiée». Y a-t-il eu beaucoup d'employés qui effectivement, chez Bell, ont été forcés de prendre leur retraite, pas des gens qui ont voulu prendre leur retraite, mais qu'on a obligé à prendre leur retraite?

M. Hébert (Jean-Marc): C'est une question à laquelle il est assez difficile de répondre pour quelqu'un qui est parti depuis 1984. Cependant...

M. Bissonnette (Claude): Je peux...

M. Hébert (Jean-Marc): Oui. Je pense que Claude veut intervenir.

M. Bissonnette (Claude): Chez Bell, il y a eu une formation; ça s'appelait CAC. C'est un centre où on donnait de la formation. Donc, on disait aux gens: Tu t'en vas, tu es parti, voici le package qu'on t'offre. Voici, tu as trois mois où tu vas avoir des cours pour te retrouver une autre job, t'écrive un c.v. puis «that's it». Et ça, ça a été fait sur une échelle assez élevée, je dirais, au cours des quatre dernières années. C'est-à-dire pas les deux dernières années, mais peut-être les quatre ou cinq années avant. Ça a été beaucoup, beaucoup de tordage de bras, dans ça. Et ça, ça contribue à faire qu'il y a des gens qui, dans le moment, n'ont pas pu se recycler ou se trouver des places. Et il y a beaucoup de femmes d'impliquées là-dedans aussi, qui étaient secrétaires ou autres. Puis se relocaliser puis retrouver un autre emploi quand vous avez 52, 53, 54, ce n'est pas évident. Et, de ce côté-là, ça n'a pas été un cadeau.

M. Thivierge (Guy): Pour renchérir le point de Claude, la période de forçage, si on peut l'appeler ainsi, a débuté aux alentours de 1992, où l'employeur a beaucoup insisté pour les départs. Et ces départs-là n'ont pas été prévus, ils ont été anticipés. Alors, les gens n'étaient pas préparés. Certaines personnes les ont bien accueillis et n'ont pas été forcées comme tel, mais étaient plutôt heureuses de changer de carrière. Mais, je dirais, un bon nombre et probablement plus de la moitié n'étaient pas préparés à une retraite anticipée et ont dû faire face à différentes contraintes pour essayer de s'ajuster. Et je dois vous dire qu'à partir de 1992 les choix étaient de moins en moins présents en termes de possibilité de rester ou de partir. Définitivement, c'était partir. Ce n'était pas une option de rester, en d'autres mots.

M. Benoit: Une fois que vous avez quitté, vous embarquez, j'imagine, sur un fonds de pension quelconque chez Bell. Est-ce que ces fonds de pension là, chez Bell, sont indexés? Est-ce qu'il y a des surplus aux fonds de pension? Est-ce que c'est indexé? Et est-ce que vous savez à qui appartiennent les surplus, s'il y a des surplus?

M. Hébert (Jean-Marc): Le fonds de pension est indexé. L'indexation est du niveau de l'index ou l'augmentation de l'index du prix au consommateur jusqu'à un maximum de 2 %.

Des voix: 2 %?

M. Hébert (Jean-Marc): 2 %. Pour les personnes qui sont âgées de plus de 65 ans, l'indexation est un peu différente. On donne 60 % de l'augmentation de l'index du prix à la consommation jusqu'à 2,4 % net, ou encore, si le montant est moindre, jusqu'à 2 %, comme pour les personnes moins âgées.

M. Benoit: Est-ce qu'il y a des surplus actuariels dans le fonds de pension de Bell?

M. Hébert (Jean-Marc): D'abord, le fonds, présentement, les actifs du fonds se chiffrent aux environs de 9 000 000 000 $. Il y a un surplus de 1 000 000 000 $. Vous demandiez à qui appartient le surplus. Pour le moment, on pense que le fonds de retraite appartient aux retraités. On est inquiets au sujet des surplus. On ne sait pas si l'entreprise peut mettre la main dessus. On nous dit qu'il y a une législation pendante pour contraindre l'entreprise à obtenir un vote de 65 % ou 66 % des membres du fonds de retraite actifs et retraités avant de disposer de ce surplus, mais on n'en sait pas plus pour le moment.

M. Benoit: Très bien. Dans une vie antérieure, j'ai été courtier en valeurs mobilières, et bon nombre de gens qui passaient dans nos bureaux étaient des employés de Bell qui venaient y vendre leurs actions, soit qu'ils les avaient gardées, soit qu'ils venaient de les recevoir et qu'ils les revendaient immédiatement. Quelle est, sur ces plans d'actions, la taxation qu'on vous accorde? Est-ce que vous avez certains privilèges ou est-ce que les employés actuels ont encore ces plans-là?

M. Hébert (Jean-Marc): Le plan d'encouragement de l'entreprise pour l'accumulation d'actions de la compagnie était que la compagnie fournit un certain montant pour la contribution de l'employé. Ce sont des contributions qui varient sur le temps. Dans mon temps, la compagnie fournissait 1 $ pour chaque 3 $ que l'employé contribuait. On était taxés sur la contribution de la compagnie comme un bénéfice imposable. C'était inclus dans les relevés 1 et T4.

M. Benoit: Et c'est encore le cas, en ce moment?

M. Hébert (Jean-Marc): C'est encore le cas, excepté que les montants sont différents. Et je ne pourrais pas vous donner les chiffres pour le moment.

(10 h 10)

Une voix: ...est à 6 % du salaire.

M. Hébert (Jean-Marc): 6 % du salaire.

M. Benoit: La première fois que vous êtes entrés en communication avec moi, que j'ai entendu parler de vos problèmes, c'était, comme bien d'autres citoyens qui nous ont appelés, sur la formule abrégée, où vous vous disiez pénalisés au niveau des dividendes. Qu'est-ce que vos employés ont décidé de faire avec le problème de la formule abrégée?

M. Bissonnette (Claude): Bien, voici. Ce qui s'est passé, c'est que, certains de nos membres qui sont les moins fortunés dans le coin de Sherbrooke, il y en a qui se sont occupés de faire les rapports pour ces gens-là. Et ils se sont aperçus qu'il y en avait qui avaient des 500 $ ou 1 000 $ de dividendes de corporations qui rentraient. C'est ce qu'ils ont dans leur compte de banque. Et, à ce moment-là, il n'y avait pas de ligne pour mettre ce montant-là comme tel. Ils devaient mettre à la ligne 128 les dividendes de corporations canadiennes majorés de 25 %. Et là, bien, ils font leur rapport d'impôts bien sûr et ils se ramassent avec 20 %, taux minimum sur ce montant-là.

Alors, moi, je me suis viré de bord puis j'ai dit: O.K., je vais appeler au ministère puis je vais appeler à Impôt Québec. Et là j'ai appelé puis j'ai demandé des informations pour savoir: Bien, je suis mal pris. J'ai-tu un trou, j'ai-tu une place? Parce que, j'ai dit, je n'en veux pas... Si je prends la simplifiée, je n'ai pas le droit aux crédits d'impôt. Donc, je voudrais mettre le montant réel des dividendes reçus et non pas les montants majorés. Là, la jeune fille qui m'a répondu, m'a dit: Bien, on va te passer le technicien, lui, il va être en mesure de te dire quoi faire. Ça fait que là je l'ai appelé. Il m'a dit: Écoutez, il n'y a rien de prévu, il faut que vous mettiez le montant, puis ça finit là. J'ai dit: Bien, qu'est-ce que je vais faire avec ça? Il a dit: Ah! bien, vous pouvez toujours aller aux petites créances ou bien non consulter le Protecteur du citoyen.

Ça s'est arrêté là. Je n'ai pas poursuivi plus loin parce que là on était en train de travailler, et tout ça, puis mon intention, c'était de faire revenir des feuillets de correction. Mais je n'ai pas de place pour le mettre dans le feuillet, je ne sais pas où. Parce que, ça, ça devient, pour moi, une injustice. Parce que, si mon citoyen avait reçu 1 000 $, exemple, de la Caisse populaire sur un CPG, il aurait été taxé sur 1 000 $. Mais là, en prenant une formule simplifiée, si j'ai 1 000 $ de dividendes de corporations que j'ai reçus dans mon compte de banque, bien là il est majoré à 1 250 $, puis là je paie 20 % dessus, ce qui fait qu'automatiquement ça me coûte 50 $ de taxes de plus que le voisin. Et ça, c'est un problème qui est mineur peut-être, mais, pour les gens qui n'ont pas beaucoup d'argent, il est gros.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Si vous permettez, une information technique, sur...

M. Landry: Parce que j'ai été en rediscuter, ça m'avait intrigué, ce que vous avez dit. Ils ont le choix des formules. Ils ne sont pas obligés de prendre la formule abrégée. Ils peuvent prendre l'autre. Mais on ne peut pas jouer sur tous les tableaux, pendre le crédit d'impôt pour dividendes et puis la déduction en plus. Il faut...

M. Bissonnette (Claude): Non, non, écoutez...

M. Landry: Je vous ai déjà dit que, d'après moi, les personnes âgées sont déjà privilégiées par notre régime fiscal. Puis ce qu'on a maintenu, c'est le statu quo. Tu ne prends pas une formule, tu prends l'autre. Tu es libre.

M. Perreault (Gaston): Je pense, monsieur...

M. Landry: Oui.

M. Perreault (Gaston): M. le ministre, je pense que, dans le cas, ce n'est pas une question d'avoir le crédit d'impôt et de prendre le crédit pour dividendes. C'est la question d'avoir la déclaration du montant exact reçu. Je reçois 1 000 $ de dividendes, je déclare 1 000 $. Mais, parce que mon formulaire que je reçois de la compagnie qui me paie les dividendes... elle m'envoie un formulaire qui, lui, inscrit 1 250 $, qui inscrit une majoration de 25 % au niveau de l'impôt, ça m'oblige à déclarer 1 250 $. C'est une fausse déclaration de ma part. Je déclare que j'ai reçu des dividendes de 1 250 $ quand j'en ai eu 1 000 $. Et, à ce titre-là, ça majore mon revenu de 250 $, que je n'ai pas eus, sur lesquels je paie de l'impôt.

M. Landry: Prenez le régime général, alors.

M. Perreault (Gaston): Oui, je pourrais toujours prendre le régime général, mais, à ce moment-là, ce que vous avez fait... il n'est pas inscrit, nulle part dans votre – comment je dirais bien ça donc – présentation de formulaire, que, si je prends le régime simplifié, je laisse aller mes crédits d'impôt.

M. Landry: Si vous prenez le régime général, vous ne perdrez pas 0,50 $. Alors, ce que je pourrais faire... Puis c'est à regarder...

M. Perreault (Gaston): C'est une injustice.

M. Landry: ...ça serait peut-être utile. On pourrait rajouter une ligne d'information pour bien expliquer aux gens qu'ils ont le choix de l'un ou de l'autre et qu'ils ne seront pas pénalisés.

M. Perreault (Gaston): Que ceux qui reçoivent des dividendes, s'ils ne veulent pas être pénalisés, doivent prendre le régime général. Et, à ce moment-là, on saura que le régime simplifié pénalise ceux qui reçoivent des dividendes.

M. Landry: Bon, bien, c'est une bonne suggestion pratique. Ça coûte juste l'encre pour l'écrire sur la formule. Puis on va y réfléchir. Je vous remercie beaucoup.

M. Bissonnette (Claude): M. le ministre, c'est que, dans le fond...

M. Landry: Si ça ne coûte rien, moi...

M. Bissonnette (Claude): Non, non, c'est juste...

M. Landry: ...ça fait mon affaire.

M. Perreault (Gaston): ...coûte rien au gouvernement, ça me coûte quelque chose à moi.

M. Bissonnette (Claude): Mais, M. le ministre, moi, le point que j'aimerais soulever là-dessus, c'est que, si je suis capable de faire le simplifié en laissant tomber certains bénéfices du général... Exemple: si j'ai des frais médicaux et je décide de prendre le formulaire simplifié, je les laisse tomber, je les laisse dans mon tiroir puis je ne m'occupe pas de ces reçus-là, je voudrais, si je prends le simplifié et que j'ai des dividendes de corporations et que, le fait que j'ai des dividendes de corporations, le gouvernement me donne un bénéfice quelconque parce que j'ai contribué de l'argent dans une entreprise, j'aimerais être capable de dire: Non, non, M. le président, je ne veux pas avoir d'argent, je ne veux pas avoir ça, je veux tout simplement que mes dividendes de corporations canadiennes soient considérés comme des intérêts. Mais je veux avoir l'opportunité de faire ça. C'est rien que ça.

C'est-à-dire, lorsqu'on regarde le formulaire envoyé par les compagnies qui nous envoient les dividendes, être capable de prendre la colonne C, qui est le montant réel, pour faire mon rapport d'impôts simplifié plutôt que d'être forcé de prendre la colonne A, et me laisser, moi, le choix de dire: Je n'en veux pas de votre escompte sur les dividendes de corporations canadiennes, je vais prendre ça comme si c'était des intérêts. C'est là mon point.

M. Landry: Encore une fois, si ça ne nous coûte pas plus cher, nous autres, on ne demande pas mieux que d'accommoder le monde.

M. Bissonnette (Claude): Ah! oui, ça, ça va coûter plus cher, M. le ministre.

M. Landry: Ah, si ça coûte plus cher, bien là, moi...

M. Bissonnette (Claude): Ça va vous coûter 20 % des montants majorés.

M. Landry: Je ne peux pas monter les services, baisser les impôts puis avoir un budget équilibré en même temps. Ça va me poser des problèmes, ça.

M. Bissonnette (Claude): Non, non, M. le ministre...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je m'excuse, j'ai accepté cette intervention parce qu'il y avait des aspects techniques qui pouvaient être... et qu'il restait quand même du temps à la partie ministérielle. Mais maintenant nous retournons aux questions de l'opposition. Est-ce que le député d'Orford a terminé? Donc, j'invite la députée de Beauce-Sud maintenant à poser la prochaine question.

Mme Leblanc: Alors, bonjour, MM. les représentants de Bell. Je veux d'abord vous féliciter pour la présentation de votre mémoire. Je pense qu'il reflète bien la réalité des gens, de vos membres, je pense que c'est tout à fait exact. Vous savez, notre régime fiscal doit d'abord reposer sur les principes d'équité et de répartition de la richesse. Alors, moi, je suis assurée que les problèmes de justice et d'équité sont au coeur des préoccupations des citoyens et je pense que c'est ce que vous venez nous dire ici, aujourd'hui.

Toutefois, l'exercice auquel nous nous sommes livrés depuis déjà quelques jours de consultations sur la réduction des impôts est basé seulement sur cinq scénarios, et ces cinq scénarios-là ne permettent pas de nous arrêter sur notre façon de taxer. Alors, on nous propose différentes réductions d'impôts, des paliers d'imposition, et tout ça, mais jamais on ne nous parle vraiment des fameux crédits, du fameux revenu familial net, qui a été si coûteux pour vos membres, je pourrais dire.

Alors, on sait que, depuis 1997, vous avez subi d'importantes augmentations de vos impôts ou plutôt d'importantes réductions des crédits auxquels vous aviez droit. On parle des crédits, par exemple, en fonction de l'âge, on parle de vos frais médicaux, qui sont à peu près tous annulés, et on parle aussi des revenus de retraite. Or, je sais, pour avoir entendu aussi à mon bureau de comté nombre de mes concitoyens qui vivent principalement de leurs revenus de retraite, que vous avez été pas mal amochés depuis 1997. Et c'est des effets pervers, finalement, de cette nouvelle façon-là de taxer, qui n'a été à peu près pas annoncée par le gouvernement. Ça, c'est sûr que ça a affecté votre décision que vous aviez prise déjà depuis quelque temps de prendre votre retraite.

Et il y a toutefois, par exemple, des tableaux auxquels j'aimerais que vous vous référiez à un moment donné, si vous en avez l'occasion. Le ministre nous a déposé au début de la commission, ici, un document qui s'appelle Les taux marginaux implicites de taxation . Et je ferai référence à la page 20, le tableau 6, et le tableau 10, à la page 32. Alors, on voit que, par exemple, pour des revenus similaires, si vous avez des gains, des revenus entre 10 000 $ et 15 000 $, votre taux marginal implicite de taxation sera de 34,1 %. Pour le même revenu, si vous avez plus de 65 ans, il sera de 63,2 %. Alors, il est clair et net qu'il y a presque le double d'imposition pour les mêmes revenus, dépendamment de votre âge. Alors, on peut réellement dire, réellement affirmer que les personnes à la retraite sont vraiment mises à contribution plus qu'elles ne devraient l'être.

(10 h 20)

Vous savez, en plus, que la réduction de 400 000 000 $ qui nous a été annoncée pour juillet de l'an 2000 cache une autre réalité, celle qu'il y aura une augmentation des cotisations à la Régie des rentes du Québec d'environ 250 000 000 $, ce qui vient annuler beaucoup de gains. Je sais que plusieurs d'entre vous n'en paient plus de cotisation, mais il y a certains de vos membres sûrement qui en paient encore.

Ça cache aussi une autre réalité, celle que cette diminution d'impôts là va être annulée par la fameuse facture de 356 000 000 $ que le premier ministre vient de nous annoncer, qui est récurrente pour les municipalités. Alors, je ne sais pas si vous avez lu Le Soleil comme moi ce matin, mais la ville de Baie-Comeau a dit qu'elle transférerait le montant entier de cette facture-là aux contribuables.

Alors, moi, ça me fait dire que la réduction d'impôts qui est annoncée va être financée en grande partie par ce transfert de réduction d'impôts aux municipalités. Et je veux savoir si vous croyez tout comme moi que cette réduction d'impôts là de 1 300 000 000 $ est insuffisante pour régler finalement cette malfaçon de taxer les Québécois.

M. Thivierge (Guy): Difficile de se prononcer sur quelles vont être les conséquences éventuelles de la réduction prévue à partir du mois de juillet 2000, il me semble. Parce que je dois vous dire que, depuis que, nous, on a pris notre pension ou du moins depuis le début des années 1990, c'est impossible de faire une planification quelconque de nos revenus parce que les règlements d'impôts changent constamment, autant du côté fédéral que provincial, et qu'on trouve toutes sortes de mesures pernicieuses pour venir récupérer l'argent en plus de l'augmentation des tables d'impôts. Donc, c'est très difficile pour nous de prévoir, si vous voulez, si on y gagnera. Mais je dois vous dire que l'espoir n'est pas très, très fort.

Mme Leblanc: Nous, on croit que le dividende fiscal devrait s'élever à 5 000 000 000 $, d'ici cinq ans. Or, on nous annonce une réduction de 1 300 000 000 $ sur quatre ans, qui, on vient de le constater, sera annulée par l'effet de l'augmentation des impôts fonciers. Or, je suis à peu près assurée que vos membres paient aussi des impôts fonciers et que leurs revenus n'augmentent pas ou sont indexés au coût de la vie, c'est à peu près tout sur quoi vous pouvez vous fier. Alors, est-ce que vous êtes...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je vais accepter le commentaire que vous avez fait, mais je ne peux pas aller au-delà parce qu'on a dépassé de quelques minutes déjà le temps qui était à notre disposition.

Mme Leblanc: Déjà?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je sais bien que c'est toujours frustrant, mais c'est un exercice auquel on s'astreint, vous le comprenez. Vous êtes des gens de télécommunications, donc de discipline, vous avez compris que, quand l'émission est terminée, quand la conversation téléphonique est terminée, elle est terminée. Ça été un plaisir de vous recevoir, de discuter avec vous. Vous l'avez entendu, nous allons prendre bonne note de vos commentaires.

Et j'invite le prochain groupe, l'Action démocratique du Québec, à venir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci. Nous allons donc poursuivre nos travaux. Nous avons avec nous aujourd'hui, en l'absence du caucus de l'ADQ – en tournée, m'a-t-on dit, à travers le Québec – les représentants de l'Action démocratique du Québec, Mme Marie Grégoire, qui est présidente du Comité sur la fiscalité, et le porte-parole aujourd'hui, je pense, M. Marc-André Gravel, président de la Commission juridique.


Action démocratique du Québec (ADQ)

Mme Grégoire (Marie): ...partager la tâche.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Vous allez partager la parole. Ça me semble d'une grande équité. Nous allons donc vous écouter.

Mme Grégoire (Marie): Parfait. Merci. Bien, premièrement, ça, nous fait plaisir d'être ici et de contribuer à une réflexion sur un sujet qui, pour nous, est fort important. La fiscalité du particulier, c'est pour nous la base même de ce qui lie la confiance entre le citoyen et l'État. On sait que les citoyens envoient à l'État une bonne part des revenus qu'ils gagnent et espèrent en retour obtenir des services, et des choses comme ça. Mais, quand ils confient ça, ils confient ça avec toute la confiance qu'ils ont. Et, pour le citoyen, c'est important qu'il puisse voir une certaine limpidité et une certaine simplicité dans la façon de gérer les sous qu'il envoie à l'État.

Par ailleurs, durant les 40 dernières années, ces citoyens-là ont pu voir que leurs revenus disponibles étaient tout le temps en diminution. Pour ceux qui étaient de la classe moyenne, ils se sont sentis écrasés. Ils ont vu poindre du travail au noir. Ils ont vu finalement les conditions sociales un peu s'affaisser. Et, si on veut rétablir ce lien de confiance là, on pense que la fiscalité, c'est un outil indispensable.

Par ailleurs, on considère qu'il est important d'élargir le débat au-delà des cinq scénarios qui nous sont proposés par le gouvernement. On pense que, si on veut être capable d'avoir un impact positif sur la société, la réforme doit être globale et elle doit s'adresser aussi à des clientèles spécifiques, comme on le verra plus tard. Mais une des choses qui est fondamentale, c'est d'alléger de façon substantielle le fardeau fiscal des particuliers. Marc-André.

M. Gravel (Marc-André): Alors, bonjour. Je vais poursuivre sur cette notion de réduction substantielle du fardeau fiscal des particuliers. Évidemment, je pense que tout le monde au Québec s'entend sur l'importance de réduire au plus vite le fardeau fiscal. C'est criant, particulièrement en ce moment, pour les jeunes, qui veulent démarrer dans la vie dans notre société québécoise, et également pour tous les groupes de la société.

À ce titre-là, quand on regarde la statistique voulant que la société québécoise soit la plus taxée en Amérique du Nord, ça n'a rien de reluisant. Ça nous amène à nous poser des questions très graves, puisque ce fardeau-là a pour effet de contrecarrer les efforts de plusieurs travailleurs et de plusieurs travailleuses dans leur vie quotidienne.

Également, lorsqu'on regarde que l'on pose des questions en ce moment, notamment au niveau du Parti québécois, sur la souveraineté à l'ère de la globalisation, bien il faudrait également se poser des questions sur l'importance du fardeau fiscal au Québec à l'ère de la globalisation. Dans mon métier, on parle souvent des paradis fiscaux à l'ère de la globalisation. Et il ne faudrait pas que le Québec devienne un enfer fiscal à l'ère de la globalisation, lorsqu'on se compare à d'autres États, à d'autres pays, à d'autres sociétés. Et c'est un peu ce qui se produit, malheureusement.

À ce titre-là, le 1 300 000 000 $ de réduction qui est proposé, effectivement, nous apparaît insuffisant. Et c'est un message un peu édulcoré qu'on envoie à la population, si on se compare, encore une fois, à d'autres sociétés qui sont nos concurrents dans l'économie mondiale d'aujourd'hui. Il faut accroître substantiellement le revenu disponible des citoyens afin de leur permettre de recommencer à consommer, particulièrement au niveau d'une jeunesse qui en souffre.

(10 h 30)

Je vous rappelle qu'au niveau de la jeunesse, en ce moment, nous avons un taux de suicide effarant, nous avons un taux de natalité qui n'a jamais eu d'égal par le passé, et toute personne qui est attachée à la social-démocratie doit se poser des questions, à ce moment-là, sur la réussite ou l'échec de notre modèle social et collectif.

Et le fardeau fiscal – je vous le soumets respectueusement – est loin d'être détaché de ces deux éléments-là et de la frustration que vivent plusieurs individus et plusieurs jeunes dans notre société aujourd'hui. Il est, à mon sens, impardonnable que notre jeunesse et que plusieurs groupes de notre société ne soient plus aptes à rêver, à développer, à créer, à entreprendre, limités par un fardeau fiscal qui les agresse, qui les oppresse.

À ce titre-là, les statistiques que l'on voit, notamment dans les manuels qui nous ont été fournis dans le cadre de cette commission, parlent d'eux-mêmes. Lorsque l'on considère que la classe moyenne au Québec... Parlons des gens qui gagnent entre 20 000 $ et 100 000 $ par année; ça constitue 44 % de la population québécoise. Moi, dans mon environnement de travail, ce sont ces gens – pour plusieurs – ce sont toutes ces personnes-là. C'est mon plombier qui vient à la maison, c'est l'entrepreneur en électricité et, très souvent, c'est cette classe moyenne là sur qui on fait reposer 80 % du fardeau fiscal total des Québécois. Ça ne peut pas ne pas avoir d'impact sur la réussite collective d'une société; ça a des conséquences extrêmement graves. Moi, je viens d'une génération qui en souffre énormément.

Ça empêche également l'épargne. Toute personne un peu ferrée en comptabilité vous dira que le niveau d'épargne d'une collectivité est garant de son avenir souvent, de sa capacité à investir en elle-même, de sa capacité à se développer. Eh bien, je vous dirai que lorsqu'une personne entre sur le marché du travail aujourd'hui avec le fardeau fiscal qui est le nôtre, ses capacités à épargner sont très limitées et souvent nulles. Alors, sa capacité à se garantir un avenir et à entreprendre des choses est également souvent nulle.

Je vous rappelle qu'il est connu et fort bien connu que l'État est un moins bon consommateur dans les faits que le citoyen. Le citoyen, puisque c'est son argent, va dépenser de façon fort judicieuse alors que l'État, parfois, peut commettre des impairs. Il est, à notre avis, important et capital que l'État laisse rapidement plus d'argent dans les poches des citoyens afin que ces citoyens-là qui sont des consommateurs puissent le dépenser de façon judicieuse. Et ce ne sera pas mon propos ce matin de vous donner des exemples de dépenses farfelues au niveau public, puisqu'on en entend régulièrement et je n'ai pas besoin de les rappeler, mais il faut enlever sur le citoyen cette tutelle – j'appelle ça une tutelle, avec tout le sens juridique qu'on peut lui donner – qu'il impose au citoyen au niveau économique.

Le consommateur, à ce titre-là – on peut remonter aux bonnes vieilles théories de Keynes – il faut lui redonner le pouvoir d'achat qui va faire en sorte que la société économique va se remettre en marche. Et ça, d'autres sociétés de nos concurrents au niveau mondial l'ont compris depuis longtemps.

Il faut aussi s'assurer que nos créateurs de richesse aient l'envie de rester ici, nos cerveaux, ceux qui sont probablement le plus affectés, dans leur décision de demeurer au Québec, par le fardeau fiscal qui est le nôtre. Je trouve ça anormal, je vous le soumets, que des collègues d'études, au secondaire, au cégep, avec qui j'ai étudié, qui ont complété des études en haute technologie ou en médecine, me parlent régulièrement de leur désir de quitter le Québec. C'est quelque chose d'inacceptable quand on veut se bâtir une société, que l'on soit de ceux qui croient en la souveraineté de l'État ou en d'autres formes d'organisation collective. C'est grave et c'est difficile à contrecarrer rapidement, mais le mouvement est bien engendré.

Alors, pour ce faire, pour les encourager à rester ici, encore faut-il leur donner le goût de rester ici. Il faut que le Québec redevienne séduisant pour ses élites intellectuelles. La séduction, c'est simplement de dire: Moi, j'ai le goût de bâtir ici, j'ai le goût de fonder une famille ici. Je n'ai pas le goût d'aller ailleurs parce que c'est plus valable économiquement, j'ai le goût de le développer, le Québec.

Puisqu'on parle des familles, évidemment, la statistique qu'on a vue récemment voulant qu'on fasse moins d'enfants aujourd'hui que jamais auparavant, et même depuis 1908, doit laisser l'élite politique québécoise songeuse. Qu'est-ce qui amène une société à ne plus faire d'enfants? On peut parler de psychologie collective peut-être, mais je peux vous dire que les gens qui sont en âge d'avoir des enfants, la première raison pour laquelle ils n'en font pas, c'est bien sûr leur situation économique. C'est un mécanisme naturel de ne pas mettre d'enfants au monde lorsqu'on sait qu'on ne sera pas capable de les éduquer convenablement, de les nourrir convenablement et qu'on n'a pas les ressources matérielles nécessaires pour le faire. Et moi, je suis un jeune père, alors, je peux vous en parler peut-être. Et, à ce titre-là, il faut redonner à la famille, via des incitatifs comme celui du crédit sur la première hypothèque qui est décrit dans notre mémoire, il faut donner des incitatifs via le système fiscal.

Simplifier le régime également est une chose importante, et je vous en parlerai rapidement en même temps que le taux fiscal uniforme. Il est évident qu'en ce moment, au Québec, le système fiscal est d'une complexité... Et même les spécialistes le trouvent complexe; alors, imaginez le commun des mortels. Le système fiscal fonctionne sur une base de directives. Les directives au ministère du Revenu changent, on change de directives, on change de façons de traiter, bon, et les citoyens ne s'y retrouvent plus. Les avantages d'un taux uniforme de taxation sont manifestes. Un, il clarifie la situation pour tout le monde; deux, il rend le système fiscal équitable pour tout le monde, en ce sens où, quand les gens le comprennent, le système fiscal, ils s'y trouvent impliqués, ils ne voient pas le ministère du Revenu comme une grosse machine à qui on doit de force transmettre des émoluments de temps à autre, ils le voient comme un partenaire qui voit à la collection et à la redistribution ultérieure de la richesse.

Au niveau du taux uniforme, nous croyons que ce doit être imposé ou mis en place immédiatement à un taux de 20 %, le même pour tous. À ce titre-là, cela créerait une réduction de 1 700 000 000 $ que l'on ne devrait pas compenser par une augmentation parallèle de la TVQ, au niveau du 400 000 000 $ de différence avec le chiffre de 1 300 000 000 $, puisque ça serait finalement de contrecarrer les effets positifs de la mesure. Nous croyons que l'imposition de ce nouveau régime fiscal ferait en sorte que la consommation augmenterait, et donc que ce 400 000 000 $ là serait récupéré de façon indirecte.

Alors, je vais redonner la parole à ma collègue, Mme Grégoire.

Mme Grégoire (Marie): Marc-André a parlé d'un scénario 5 bonifié; ça, ça se tient pas mal dans ce qu'on a vu dans les propositions du gouvernement. Par ailleurs, il y a d'autres clientèles, si on veut avoir une réforme globale, et il y a d'autres sujets qu'on se doit d'adresser. Une clientèle qui est pour moi tout importante, c'est celle des travailleurs autonomes. Certains les calculent comme des travailleurs précaires, mais, moi, je pense que c'est un produit de la nouvelle économie: des gens qui travaillent à leur compte, qui répondent à des besoins ponctuels d'entreprises, qui sont en fait une espèce de force de frappe des entreprises du Québec, qui se promènent avec des spécialités très précises d'une entreprise à l'autre.

Ils ont créé plus de la moitié des nouveaux emplois dans les dernières années, on ne peut pas faire comme s'ils n'existaient pas. Le gouvernement a voté des mesures qui mettent des bois dans les roues à ces gens d'affaires là. Qu'on pense, par exemple, au 1 % de frais de représentation qui est somme toute irréaliste quand on sait que la moyenne des travailleurs autonomes fait environ 28 000 $ par année. Imaginez 280 $ par année pour faire du développement des affaires; ne serait-ce que s'inscrire dans un congrès spécialisé pour faire un peu de réseautage, le budget est déjà amplement dépensé. On ne peut pas laisser cette partie-là, qui représente plus de 15 % de la population active du Québec, de côté.

(10 h 40)

Et ça m'amène à parler du revenu minimum, ça m'amène à parler d'un soutien au revenu. On parle, donc on propose dans le mémoire de l'ADQ d'accorder un soutien fiscal adapté aux réalités vécues par les travailleurs autonomes. Et une des pistes de solution qu'on a à ce sujet-là, c'est peut-être le revenu minimum, un revenu minimum qui serait amené de façon graduelle, parce que le scénario 5 s'attarde beaucoup à alléger le fardeau fiscal de la classe moyenne. On doit penser aussi à ceux qui ont un faible revenu, mais on doit penser à eux en voulant leur redonner un peu la dignité par le travail. Enlever l'étiquette. Et on sait que le filet de sûreté actuellement, au Québec, est assez complexe. Il renferme une foule de programmes qui disent que si tu fais telle chose, si tu es âgé entre 20 et 35 ans et que tu décides de participer à la mesure, ça sera bonifié de telle façon; si tu as plus de 45 ans et que tu fais... Ça devient très compliqué pour le citoyen de pouvoir s'y retrouver et de pouvoir réintégrer aussi le marché du travail. Quand on sait qu'une personne bénéficiant d'aide sociale qui gagne plus que 41 $ par semaine est taxée à 100 % et perd tous ses bénéfices, ce n'est pas très encourageant de retourner sur le marché du travail. C'est plutôt décourageant.

Alors, une mesure comme la mesure de soutien au revenu permettrait plutôt d'encourager le retour au travail. Alors, ce dont on parle finalement. Et cette mesure-là, ça ne sort pas d'hier, là. Ce n'est pas l'ADQ qui, tout d'un coup, a rêvé de faire quelque chose de différent, c'était déjà dans les discussions en 1971, à la commission Castonguay-Nepveu, et c'était, tout récemment, la ligne directrice que prenait la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux, qui a décidé de s'investir et de faire des recherches à ce niveau-là pour voir comment pourrait s'implanter une telle mesure.

Ce que ça permettrait de faire finalement, c'est d'avoir un seuil de revenu qui soit établi environ à 15 000 $ – et tout ça, c'est à titre indicatif – avec un crédit remboursable mensuellement fixé à 50 %, un crédit de ménage qui serait environ établi à 7 500 $ annuellement, qui fait une certaine bonification du soutien au revenu qu'on connaît actuellement.

C'est un programme qui serait accompagné aussi de responsabilités partagées. Parce que, quand on parle de réintégrer le marché du travail, c'est bien beau, mais encore faut-il que les opportunités soient présentes, encore faut-il que le système puisse supporter ces gens-là qui veulent réintégrer le marché du travail. Alors, on pense que cette mesure-là, en contrepartie au taux de taxation de 20 %, ferait un plan assez global qui permettrait donc de toucher aux différents groupes de payeurs de taxes dans la société.

Une autre chose qui est importante aussi, c'est qu'il faut se souvenir que le payeur de taxes, qu'il remplisse son rapport d'impôts fédéral, provincial, ou qui ait à s'acquitter de ses taxes municipales, c'est toujours le même payeur de taxes. Et à ce niveau-là il est important, au niveau municipal, que l'État redéfinisse le pacte fiscal le plus rapidement possible. Quand Marc-André nous a parlé de redonner une marge de manoeuvre aux gens dans la société pour qu'ils puissent recommencer à consommer de façon saine et juste, je pense que ça voulait aussi dire qu'on ne pelleterait pas. Le gouvernement du Québec décrit constamment le pelletage de dépenses du fédéral dans la cour du provincial. Il ne serait pas juste de faire la même chose au niveau municipal. Et pour ça, on pense que, tel que promis durant la dernière campagne électorale, le gouvernement se doit d'effacer la facture de 375 000 000 $, tout en redéfinissant le pacte fiscal avec les municipalités.

Un dernier point, ce qui nous permettrait finalement de faire un tour de tableau sur le fait d'avoir une vision globale quant à la réforme fiscale, c'est le fait d'être responsable envers les générations futures. On sait très bien qu'une fois le déficit zéro atteint...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je m'excuse, je vais vous interrompre, là. Je veux d'abord m'excuser. On a fait plusieurs téléphones pour faire cesser ces bruits, ces travaux. Ne croyez pas que de quelque parti que ce soit il y a un boycott de votre présentation.

Mme Grégoire (Marie): Non. Je n'avais pas cru ça.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Nous sommes désolés, nous nous en excusons. Nous faisons des démarches auprès de la direction, ici, pour que ça cesse le plus tôt possible. Je dois dire que je commence à être exaspéré. Je vous prie de continuer, et sachez qu'on vous écoute.

Mme Grégoire (Marie): Bien, quelque part, c'est que ça crée de l'emploi puis qu'il y a un regain, hein? Ça fait que ça veut dire ça, il y a des gens qui travaillent. C'est positif!

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ça travaille trop, peut-être.

Mme Grégoire (Marie): Je disais donc qu'on arrivait au dernier pan qui était pour nous très important, c'est la responsabilité envers les générations futures. Et on sait qu'une fois le déficit zéro atteint, ce n'est pas tout, il reste un déficit évalué à 100 000 000 000 $ qui limite notre marge de manoeuvre de façon importante puisque 20,2 % de chaque dollar perçu par l'État va au remboursement de la dette. Pour nous, là, c'est indispensable de s'attarder à ce remboursement-là. C'est des dépenses qui ont été faites avec une vision de société, on se l'accorde, mais avec une impression d'abondance qui n'était vraiment pas là, puisqu'on se rend compte aujourd'hui qu'on a accumulé une hypothèque importante.

Et on ne croit pas non plus que seulement l'accroissement du PIB va nous permettre d'effacer ça de façon juste et équitable pour les prochaines générations. On sait très bien qu'avec le taux de natalité qui est très bas, avec le vieillissement de la population, le nombre de payeurs de taxes est en décroissance, ce qui fait en sorte qu'on ne peut pas penser que la dette va s'effacer d'elle-même de façon magique.

Alors, on pense qu'il est important que le gouvernement se dote d'une politique, d'un plan précis de remboursement de la dette afin de ne pas laisser un héritage aux générations qui nous suivent. Et ça, c'est important, ce plan-là devra établir un pourcentage des surplus qui seront attribués à la dette, mais aussi un échéancier à respecter. Et là-dessus, je te passe la parole, Marc-André.

M. Gravel (Marc-André): Merci. Alors, je vais terminer avec les deux derniers points de notre mémoire, le premier étant un thème sur le fait de respecter le contribuable. Vous en entendrez souvent parler, les gens ont l'impression d'être traités d'une façon inadéquate par ministère du Revenu du Québec. Le ministère du Revenu, au niveau de la loi, dispose de pouvoirs exorbitants au droit commun. Il peut passer outre notamment, en certaines circonstances, à des règles élémentaires de justice naturelle comme le droit d'être entendu, il peut procéder à des saisies sans convocation ou sans audition préalable. Alors, tous ces pouvoirs-là sont exercés à cause d'une chose, à notre avis, c'est qu'à un moment donné l'État a eu besoin de ressources à tel point qu'il a instauré des moyens, qu'il a donné au ministère des moyens qui lui permettent de s'approprier ou de collecter les ressources en question de façon beaucoup plus facile que des contribuables ordinaires qui sont régis par le droit commun.

Alors, nous sommes en faveur de la création, à ce titre-là, d'un code qui serait inséré à l'intérieur de la Loi sur le ministère du Revenu, d'un code des droits et obligations du contribuable qui évidemment prévoirait les obligations du contribuable, mais aussi les obligations du ministère du Revenu eu égard au respect du contribuable.

On entend souvent parler que le contribuable est considéré coupable avant même d'avoir été entendu. Et, dans la vie de tous les jours, c'est le cas au niveau du ministère du Revenu. Ne serait-ce qu'un petit détail que je vous mentionnerai: au niveau de la fiscalité fédérale, les fonctionnaires fédéraux du ministère fédéral du Revenu ont eu la directive de traiter avec les contribuables sous le vocable «client». C'est une simple appellation. Si vous saviez comment les gens, dans la réalité de tous les jours, l'apprécient: vous êtes le client du ministère du Revenu, nous vous traitons comme un client. Je vous donne cet exemple-là au niveau de l'approche, de la différence d'approche qui se vit dans la réalité quotidienne. À ce titre-là, l'adoption d'un code sécuriserait les contribuables, mettrait les règles uniformes pour tout le monde et ne ferait qu'être en harmonie avec les règles usuelles du droit qui nous gouverne.

En guise de conclusion, nous voulons vous dire ceci. L'État, au cours des 30 dernières années, a évidemment augmenté ses responsabilités, augmenté ses besoins de ressources – j'en ai pour une minute – et à ce titre-là a augmenté la charge qu'il imposait aux contribuables. Dans ce contexte-là, l'État s'est également endetté. Il est important, il est urgent de réduire cette dette-là et il faut le prendre en considération dans le contexte de la présente commission. Également, je lisais – je vais vous laisser là-dessus – le pamphlet qui a été distribué notamment aux institutions financières par la présente commission. J'y lisais que 54,1 % des contribuables québécois déclarent un revenu inférieur à 20 000 $ par année. Ce n'est pas une statistique qui nous satisfait; c'est une statistique, à mon avis, alarmante puisque, quand on connaît le seuil de la pauvreté, cette donnée-là nous démontre qu'on est très proche, au niveau de la majorité de notre population, au niveau des revenus déclarés, du seuil de la pauvreté.

Alors, nous vous laissons là-dessus. Nous sommes prêts à entendre vos questions.

(10 h 50)

Le Président (M. Simard, Richelieu): J'espère qu'on ne relancera pas une discussion sur la définition du «seuil de la pauvreté», parce qu'on prendrait certainement la prochaine heure. Je suis très heureux, comme toute la commission, de vous recevoir aujourd'hui. Je vous signale en passant que votre député et président est toujours le bienvenu dans cette commission. On ne l'a jamais vu, mais c'est une commission importante, alors on en serait très heureux. Faites-lui le message. Je le lui ai fait à quelques reprises. Il a tout à fait le droit de s'asseoir parmi nous.

Et j'invite le député d'Abitibi-Ouest à prendre la

parole.

M. Gendron: Bonjour à vous deux, Mme Grégoire, M. Gravel. Je veux également rapidement vous remercier d'être là. C'est important d'avoir le plus de points de vue possible, quel que soit le mandat de la convocation de cette commission qui porte plus spécifiquement sur l'urgence d'une réduction de la fiscalité. Souhaiter que le débat soit plus large, il n'en tient qu'aux intervenants. On n'empêche pas personne dans leur présentation de l'élargir. Alors, c'est ce que vous avez largement fait.

Rapidement, s'entendre sur quelques consensus. Je pense que ça ne fait aucun doute, là, c'est pour ça qu'on fait la commission. Donc, il n'y a pas de plaidoirie à nous faire que, au Québec, le contribuable, c'est le plus taxé en Amérique du Nord. On est d'accord là-dessus, c'est l'objet de la commission. De nous dire que ça influence, le fardeau fiscal lourd du contribuable, le comportement de la réussite sociale collective, c'est une vérité de la police – je le fais par exprès.

Troisièmement, la fiscalité des particuliers, qui pourrait se distancer davantage de nos concurrents ou de celles et ceux avec qui ont fait des relations d'affaires, que ça soit les États-Unis par notre exportation ou l'Ontario par la proximité, c'est encore une évidence fondamentale, et c'est toujours la même raison pourquoi on fait une commission.

Vous suggérez pas mal d'éléments qu'il faudrait questionner davantage – je vais y revenir – je donne un exemple. Il faut faire attention des fois à des propos qui devraient, d'après moi, être vraiment plus nuancés, étoffés. J'en cite juste un: M. Gravel nous indique pourquoi on ne fait plus d'enfants, c'est lié presque exclusivement à la situation économique. Je trouve ça gros et court. Je veux dire, je trouve ça très gros et très court. J'en ai, des enfants; je jase avec du monde. Je suis obligé de lire et je donne juste un élément de statistique. Quand on sait que tout le monde à peu près est rendu célibataire au Québec – bien non, mais là j'exagère à peine – ça a une petite incidence, à moins que j'ai perdu complètement tout lien avec le vrai vécu, là. Puis là il y a la crise des valeurs puis il y a un paquet d'autres phénomènes que j'ai lus, qui sont liés non pas uniquement à... Si l'économie allait bien, il y aurait beaucoup d'enfants; l'économie va mal, il y a un problème, on n'a plus de taux de natalité. C'est pas mal plus profond que ça au Québec, pour avoir beaucoup lu là-dessus et être très préoccupé par cette question-là.

Mais pour toutes sortes de valeurs de jeunes... Parce que j'en ai trois puis je suis bien placé: Une fille de 31 ans, mais elle n'a pas eu le temps de s'occuper de ça, des enfants, encore. Puis je ne la blâme pas, puis elle m'explique pourquoi: Attends, papa. Je verrai. Un de ces jours. Ce n'était pas tout à fait de même que ça passait dans le passé. Ne pas prendre en compte cette réalité-là, ça fait un peu court comme débat.

Mais, mon propos, j'aimerais mieux échanger avec vous sur trois, quatre réalités que vous nous poussez. Un, une réforme globale de la fiscalité. Moi, j'achèterais ça demain matin. J'achèterais ça demain matin, mais ça ne me tente pas de faire une réforme fiscale de la fiscalité, surtout que vous avez fait une petite allusion au projet que nous portons, c'est-à-dire la souveraineté politique du Québec. Alors, nous, on le porte, mais c'est évident que si nous avions un État complet, est-ce qu'on aurait le même type de fiscalité? Moi, je suis sûr que non. Est-ce qu'on serait aussi étranglé par l'autre palier de gouvernement où 50 % des impôts sont là mais je n'ai pas le retour à cause de toutes sortes de contextes que je ne veux pas débattre ici: coupure de transferts, dédoublage? Je le vivais encore hier avec le CRDAT en région, en Abitibi, où, très facilement, parce que Mme Copps s'est levée un matin pas de bonne humeur ou je ne sais pas quoi, on a décidé qu'il n'y aurait plus de collaboration dans Communication-Québec. Fini. Ils vont avoir leur régime. Il y avait un contrat avant, bon. Fini! Ce n'est pas grave, 1 000 000 000 $ et quelque chose. Arrangez-vous avec vos troubles! J'arrête là, je pose quelques questions que je trouve fondamentales.

Quand vous lancez l'introduction d'un revenu minimum, ce n'est pas la première fois d'abord que ça vient, puis là c'est porté davantage par une formation politique qui veut nous introduire dans des sillons nouveaux. Tant mieux, j'adore ça. Mais l'introduction d'un revenu minimum, tous ceux qui l'ont fouillée, c'est des dollars, s'il vous plaît! Parce que là, à la hauteur que vous l'avez mise, c'est le double de la commission Fortin-Bouchard qui, eux autres, l'avaient mise alentour de 6 000 $ à 9 000 $, puis ils parlaient de 1 500 000 000. Alors, la question très simple: Avez-vous fait une petite évaluation des coûts de votre suggestion intéressante d'instaurer un revenu minimum avec un impôt négatif – premier élément de question?

Deuxième élément. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y a là le problème des taux marginaux? Parce que, quand on introduit un revenu minimum, on est obligé d'avoir ce qu'on appelle un plancher. Quelque part, il va y avoir un plancher de revenu. Et là, il y a toute l'incitation travail avec la question des taux marginaux, puis il y a du monde qui est venu dénoncer ça. Parce que, quand on est à la marge, là, on échappe des affaires. Avez-vous regardé ça? Avez-vous analysé ça? J'aimerais vous entendre là-dessus, comme première question.

Mme Grégoire (Marie): Oui. Premièrement, moi, je pense qu'il est important pour le Québec d'au moins s'attarder sur ce qu'on contrôle. Puis je pense que c'est ce que vous faites avec la commission. Mais effectivement, le 50 % qu'on ne contrôle pas, il faut essayer de s'entendre pour essayer d'aller en chercher une partie, mais il faut travailler sur ce qu'on contrôle. Et je pense qu'au Québec on a encore beaucoup de travail à faire sur ce qu'on contrôle avant de dire que les autres ne font pas leur travail.

Mais pour ce qui est de l'évaluation, pour ce qui est du revenu minimum qu'on a regardé, c'est important de dire que, premièrement, ça serait une introduction progressive qui serait non universelle. Alors, ce n'est pas le projet de Mme Harel, qui était de 6 000 $ avec aucun retour d'impôts là-dessus, c'est quelque chose qui serait un plancher, donc de 15 000 $, tel qu'on le dit, mais pour des groupes spécifiques dans la société.

L'évaluation qu'on en fait. Oui, on en fait une, évaluation, parce que vous savez que, pour nous, une gestion saine, c'est fort important. Alors, on a regardé ça, on a regardé ce que M. Fortin, aussi en disait – Pierre Fortin, l'économiste – et on considère que, selon le système actuel, qui coûte environ 3 200 000 000 $, au niveau du revenu, on est assez près de l'évaluation de M. Fortin qui est à 4 200 000 000 $. Si on y rajoute une partie des prêts et bourses, parce que les étudiants pourraient être touchés en première ou en deuxième vague, et qu'on prend la balance des 600 000 000 $, bien, on pense que ça peut se combler avec une saine gestion de l'État et par le fait aussi qu'il y aura des effets bénéfiques au niveau du retour au travail et tout ça, donc un encouragement à la consommation.

M. Gendron: Mme Grégoire, rapidement, parce que je pense qu'il y a une petite confusion, là, vous me prouvez que vous l'avez évalué, bravo! Mais est-ce que c'est un impôt minimum pour tous les contribuables que vous proposez ou des catégories de contribuables?

Mme Grégoire (Marie): Non. Des catégories de contribuables. De façon graduelle.

M. Gendron: Ça va.

Mme Grégoire (Marie): Puis, de toute façon, si on regarde les modèles qui sont actuellement en train de faire cette implantation-là, comme par exemple l'Irlande, c'est de la façon dont ils fonctionnent, ils s'en vont de façon graduelle parce que c'est quelque chose qui est très dur à absorber, pour un État, tout d'une bouchée, mais c'est quelque chose qui pourrait se faire de façon graduelle.

M. Gendron: Merci. En tout cas, j'espère qu'il y a des gens qui vont se corriger parce que, moi, j'ai lu partout que l'ADQ proposait l'instauration d'un revenu minimum pour les contribuables québécois. J'ai lu ça partout...

Mme Grégoire (Marie): Mais de façon graduelle.

M. Gendron: Bien, ce n'est pas ça que vous m'avez dit, vous avez dit «certaines catégories», alors...

Mme Grégoire (Marie): Oui, pour commencer. Oui.

M. Gendron: Bien oui, ce n'est pas pareil. En tout cas, ce n'est pas grave, là, mais ce n'est pas pareil.

Mme Grégoire (Marie): O.K.

M. Gendron: Deuxième question que je trouve importante, vous parlez d'instaurer un crédit d'impôt pour l'accès à la propriété des jeunes familles ou avoir un crédit pour la première hypothèque. Il y a des États qui ont essayé ça. On me dit qu'entre autres aux États-Unis on a déjà fait ça, sauf qu'il y a une taxe sur le gain de capital, sur la vente de la maison unifamiliale. Est-ce que vous avez regardé ça? Étiez-vous au courant de ça? Et est-ce que ça veut dire qu'il faudrait, ici, rester quand même avec un crédit additionnel, donc de l'argent de moins dans les coffres du gouvernement – parce que je vais avoir une troisième question tantôt – et ne pas adopter la politique américaine d'aller chercher de l'impôt sur le gain de capital quand il y a vente de la première maison qui aurait bénéficié d'un avantage hypothécaire? Est-ce que vous avez évalué ça?

(11 heures)

M. Gravel (Marc-André): Oui, effectivement, il y aurait lieu d'harmoniser ces deux données-là. Mais ce qui est important au niveau de cette donnée-là, c'est que, évidemment, il y a deux aspects: on encourage l'accès la propriété et, dans un second temps, on croit que ça pourrait contribuer à donner un nouvel essor à l'industrie de la construction unifamiliale. Bon, évidemment, lorsqu'on encourage... Parce que, bon, c'est connu, l'industrie de la construction, quand elle va bien, normalement l'économie va bien. Deuxièmement, l'industrie de la construction est un bon pourvoyeur fiscal pour l'État. Donc, si on augmente le volume de construction au Québec, on augmente par le fait même le volume fiscal remis à l'État. Alors, quand on parle au niveau de la taxe sur le gain de capital et du crédit d'impôt sur l'hypothèque, évidemment, il y aurait lieu d'harmoniser ça pour qu'il y ait un véritable incitatif au niveau de l'accès à la propriété.

M. Gendron: Oui, mais, M. Gravel, vous ne croyez pas que, pour l'accès à la propriété, tout ce que ça fait, ça devance la décision, mais que ça ne reconstruit pas plus de maisons, ça, là? Quand on relance la construction, souvent, c'est ce que j'appelle donner un signal parce qu'on veut qu'il y ait injection dans l'économie d'une activité qui ne démarre pas. Mais je ne crois pas que ça créerait plus de ménages puis qu'il se bâtirait plus de maisons que le besoin parce qu'il y aurait un incitatif sur une hypothèque.

M. Gravel (Marc-André): Bien, écoutez, là-dessus, je reprends votre exemple de tantôt. Vous avez dit: J'ai une fille de 31 ans qui est célibataire, puis vous avez dit: Aujourd'hui, tout le monde est célibataire.

M. Gendron: Bien, à peu près là, j'ai dit.

M. Gravel (Marc-André): Non, non, mais vous avez...

M. Gendron: À peu près. Il y en a beaucoup en tout cas, c'est ça que ça voulait dire.

M. Gravel (Marc-André): En tout cas, c'est encourageant pour les célibataires. Mais ce que je veux dire, c'est que... Je reprends votre exemple. Vous me dites: Ça n'encouragera pas le monde à aller en ménage. Bien, je ne suis pas sûr de ça, moi. Écoutez, moi, personnellement, quand j'ai acheté ma maison, bien, en même temps je me suis investi en ménage, et probablement que, si je n'avais pas fait cette démarche-là, monsieur, je n'aurais pas... je veux dire, il y a un lien. Tout ce que je veux vous dire, c'est que le but de la démarche, le but de la mesure est d'inciter les jeunes, notamment les jeunes familles, les inciter à effectivement accéder à la propriété. Au niveau de l'harmonisation avec d'autres mesures, évidemment, ce sont des choses qui doivent se faire, mais, au niveau de votre propos, quand vous me dites: Je ne crois pas que ça va encourager des gens à fonder une famille ou à aller en ménage, bon, ça, c'est des données sociologiques, puis c'est très discutable, à mon avis.

M. Gendron: O.K. Une dernière question pour laisser mon collègue également vous questionner, le ministre des Finances, parce que, moi, je dois quitter, excusez.

Moi, j'ai regardé plusieurs de vos suggestions, puis le problème de fond qui est le mien, ce n'est pas que j'ai du trouble avec vos suggestions, j'ai du trouble avec la balance. Parce qu'à un moment donné je dis: Il faudrait que je sache si, sincèrement, ces gens-là sont en même temps d'accord avec deux règles, que je pensais, de société: de vivre selon nos moyens, parce que, ça aussi, ça fait partie de la génération qui nous pousse dans le dos – moi, ça ne m'intéresse pas de léguer à mes trois enfants une dette qui n'a pas de sens, puis c'est déjà mon cas, en passant, comme membre de cette société québécoise, compte tenu de la hauteur de la dette, pas du déficit – et le déficit zéro, puis l'équilibre financier, puis éviter de refaire ce qu'on a trop fait dans le passé. Moi, je voudrais savoir: Est-ce que vous achetez ça? Et si oui, bien là, moi, j'ai juste chiffré rapidement vos demandes, puis il y a du fric, là, pour donner suite à votre réforme de la fiscalité avec tous les paramètres intelligents – sérieusement – que vous avez inclus, une fiscalité qui propose les principes suivants – puis là je tournais la page – qui donne ça, ça, ça, ça, ça. Dans certains cas, c'était ce qu'on appelle l'augmentation de toute la question de la progressivité – je donne juste un petit exemple, on l'a fait tantôt: l'accès à la propriété, ça coûte quelque chose, ça, ce crédit d'impôt là – puis évidemment ne pas toucher à la TVQ, puis ne pas faire ci, puis ne pas faire ça.

C'est quoi, la facture ou la hauteur de la facture de vos suggestions eu égard aux deux principes que je pensais que vous achetiez: équilibre zéro, puis vivre selon nos moyens, puis tenter de vous suggérer même de commencer à rabaisser le niveau de la dette qui est trop élevé? Puis vous n'avez pas tort, mais on va avoir du trouble, là: baisser les impôts, baisser la dette, plus de services, plus de crédits d'impôt. On fait ça comment?

Mme Grégoire (Marie): Bien, en partie, on pense que le surplus estimé par le gouvernement actuellement est sous-estimé, il y a une partie, je pense... Si on regarde la Banque Royale qui dit que normalement on devrait avoir environ 5 100 000 000 $ en 2004-2005, on pense que, graduellement, dans le mandat, il y a une marge de manoeuvre pour être capable de faire ça. L'autre chose qui est importante, c'est qu'en fait on adhère effectivement au principe du déficit zéro – je pense qu'il n'y a pas de problème là-dedans, je pense... je ne pense pas, je suis certaine, c'était dans le programme de fondation de notre formation politique – ...

M. Gendron: Mais vu que les fondateurs sont partis.

Mme Grégoire (Marie): ...et on adhère à une gestion saine, par ailleurs. On considère fondamentalement que, si, un, on veut soulager le fardeau fiscal, il faut par ailleurs gérer sainement, et on pense qu'il y a encore beaucoup d'efforts à être faits au niveau de l'État. Et quand on parlait de réduire dans la fonction publique, il y a une optimisation des services à être faite, et on pense que, ça, ça veut dire de sortir des cadres actuels qu'on a de réflexion, de faire les choses comme on les a toujours faites, puis d'essayer de les faire autrement. Et on pense que, là, il y a un gain puis il y a une marge de manoeuvre à aller chercher. Alors, on pense que, réalistement, oui, c'est possible.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup. Je passe maintenant la parole au ministre des Finances. Il vous reste cinq minutes.

M. Landry: Il nous reste cinq minutes? Bon, mon collègue a bien fait son travail, je dois dire, il y a eu un bon dialogue. Nous allons évidemment noter soigneusement tous les points d'accord de votre mémoire et nos politiques, puisqu'on pourra compter sur l'appui de votre chef en Chambre et l'appui de votre parti pour aller de l'avant, au moins avec les points qui nous sont communs. Par ailleurs, mon collègue a fait preuve d'un certain scepticisme quant au coût de ce que vous avancez. Vous avez répondu par la progressivité; je pense que c'est sage. Et, à ce sujet, je dois vous dire que, si la marge de manoeuvre est ce que dit que la Banque Royale sera, nous demandons aussi votre appui pour que l'essentiel de cette marge de manoeuvre supplémentaire soit consacré aux baisses d'impôts. Je peux présumer que c'est ce que vous voulez. Si on a plus d'argent, plus de baisses d'impôts, c'est ça?

Mme Grégoire (Marie): En contrepartie, nous autres, on va vous demander d'avoir un plan de remboursement de la dette avec un pourcentage défini.

M. Landry: Ah! si les marges sont au rendez-vous, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas.

Mme Grégoire (Marie): Puis, là-dessus, on va vous appuyer aussi.

M. Landry: Mais il y a peu de gens qui nous ont demandé ça, quand même, dans l'immédiat. Mais, dans l'avenir, il faudra y penser.

Deux points, par ailleurs, rapidement. Vous avez, dans votre introduction, mentionné «souveraineté» et «globalisation». Moi, je suis un militant des deux. Je pense que la modernité pour les peuples et les nations, c'est d'être souverains, indépendants et libres et être liés par des accords vastes, comme l'Union européenne. Quand le président Clinton est venu dire que les tribus et les groupes ethniques ne doivent pas tous aspirer à la souveraineté, je suis parfaitement d'accord. Le Québec n'est ni l'un ni l'autre; le Québec est une nation. Et vous nous avez appuyés quand on a voulu que cette chose se fasse, et on a failli gagner, il nous a manqué une trentaine de milliers de voix.

Le rapport avec la fiscalité de cette grande question nationale n'est pas mince. Si le gouvernement fédéral ne nous avait pas comprimés au cours des dernières années, y compris, sous les mandats libéraux, ce qu'il a fait, nous aurions, cette année même, 5 000 000 000 $ de plus. Ça veut dire que, si on divisait en deux, on pourrait en mettre 2 500 000 000 $ aux baisses d'impôts puis il resterait pour l'éducation et la santé 2 500 millions de dollars disponibles. Est-ce que votre formation politique nous appuie toujours dans cette lutte, à l'effet que les Québécois devraient contrôler leurs impôts, leur richesse collective, et les consacrer aux priorités qui sont les nôtres?

M. Gravel (Marc-André): C'est intéressant, M. le ministre, les points que vous soulevez. Évidemment, ce n'est pas le but de la présente commission, que vous avez vous-même convoquée, que de répondre à cette question. Toutefois, je vous dirai ceci.

M. Landry: Si vous ne l'aviez pas mentionné, je ne vous en aurais pas parlé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gravel (Marc-André): Non. Je n'ai parlé, moi, que de globalisation et d'impact fiscal de la globalisation, de l'impact des systèmes fiscaux de chacun des États sur la globalisation. Mais je vous dirai ceci, et ce qui m'interroge dans votre propos, c'est ce qui suit: Comment se fait-il... Alors, vous avez parlé des sept dernières années. Si je ne m'abuse, le Québec, il y a sept ans, constituait également la société la plus taxée au Canada et en Amérique du Nord. Alors, les sept dernières années n'ont rien changé à ce titre.

M. Landry: Ce n'est pas sûr.

M. Gravel (Marc-André): Deuxièmement, comment se fait-il, M. le ministre – dans ma question, je vais répondre à votre question – que, s'il est vrai que le Québec souffre à ce point des démarches fédérales, comment se fait-il que nos partenaires des autres provinces aient quand même réussi, eux, à réduire substantiellement déjà leurs impôts? Il doit y avoir une réponse à ma question, j'en suis certain.

Toutefois, lorsqu'on se compare... Il y avait un vieux dicton qui disait: Lorsque je me regarde, je me désole; lorsque je me compare, je me console. Mais, dans le cas de la comparaison avec les autres provinces, ce n'est pas vrai. On ne peut pas se consoler en se comparant, malheureusement.

M. Landry: Ça dépend quelle province.

M. Gravel (Marc-André): Alors, je m'interroge sur ce qu'il y a eu de différent, effectivement, au niveau du traitement que le fédéral a fait de la province de Québec, avec la province de Québec, de ce qui est arrivé dans les autres provinces et de l'excuse qu'on peut en tirer pour expliquer notre situation de société la plus taxée en Amérique du Nord.

Quant à votre question finale sur la globalisation et le système fiscal et sur les propos de M. Clinton, M. le ministre, je vous rappellerai que ce que M. Clinton a dit, ce n'est pas que les tribus ne devraient pas accéder à la souveraineté. Il a plutôt dit...

M. Landry: Oui, oui, il a dit ça: Les tribus puis les groupes ethniques, ça en ferait trop.

M. Gravel (Marc-André): J'ai plutôt compris le contraire. Au niveau du droit international strict, M. le ministre, ce droit-là, selon une certaine conception doctrinale, est réservé, le droit à l'accession à la souveraineté, aux pays, aux sociétés qui font l'objet d'oppression. Et c'est à ça, il me semble – je peux me tromper – que M. Clinton a référé. Quant à notre position comme parti politique sur ce point, ce n'est pas l'objet de la présente commission.

(11 h 10)

M. Landry: Alors, restons aux questions d'argent. J'en ai une, thèse, moi, à l'effet que certaines provinces du Canada – pas toutes, tout ce qui est à l'est est plus pauvre que nous – certaines provinces du Canada s'en tirent mieux. D'abord, le Québec a les paiements de transfert par tête de loin les plus bas. On est 7 000 000, les transferts qu'ils nous font sont loin de correspondre à notre poids démographique. Rien que là, il y a des milliards de pertes. Puis on nous demande de courir le marathon avec une hémorragie interne. Mais là je n'ai pas encore compté les subventions aux entreprises; on a 15 %, on est 25 % de la population. La R & D, mêmes chiffres. Les immobilisations du gouvernement du Canada, les dépenses globales, vous avez parlé de l'ordre de 15 %; les dépenses globales, si on avait notre part des dépenses fédérales, si on avait 25 % au lieu de 15 %, on serait plus keynésiens.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Considérez que c'est la conclusion, M. le ministre.

M. Landry: Alors, c'est un début de réponse. J'espère que l'Action démocratique va réfléchir à ça, puis qu'on se reverra sur d'autres terrains pour d'autres questions, comme il nous est arrivé de le faire dans le passé.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Nous avions eu un léger dépassement de l'autre côté tout à l'heure, alors voilà, c'est terminé pour la partie ministérielle. Merci beaucoup. Je passe la parole maintenant à la porte-parole de l'opposition officielle.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. D'abord, je vais vous remercier, j'ai beaucoup apprécié votre présentation. D'abord, je vais vous dire que j'ai trouvé ça très bien fait et extrêmement professionnel.

Le point que vous faites à l'effet que vous avez trouvé que c'était réducteur, disons, la proposition qui est contenue dans le document du ministère des Finances, et je suis parfaitement d'accord avec vous... Moi, ce que je trouve déplorable aujourd'hui, c'est de faire un exercice d'une telle envergure, d'autant d'importance où on fait défiler des groupes l'un après l'autre, alors qu'on n'a pas mis sur la table les chiffres, les chiffres exacts, qu'on devrait avoir en main, notamment le surplus cette année, les surplus qu'on peut estimer d'ici cinq ans et les surplus qu'on peut même estimer d'ici huit ans. Je veux dire, on doit fonctionner... Si on pense faire une analyse en profondeur de ce qu'il faut faire, c'est l'exercice qu'il faut faire. Et, à juste titre, vous vous êtes inspirés du travail fait par la Banque Royale, John McCallum, où il estime que, d'ici l'an 2004-2005, il y aura un surplus de 5 000 000 000 $, et d'ailleurs, trois ans plus tard, il évalue le surplus à 8 000 000 000 $. 5 000 000 000 $, là, ça veut dire, avec ceux qui paient de l'impôt, 1 600 $ de plus dans leurs poches en moyenne. Ça, c'est comme en gagner 3 000 $ de plus, c'est comme avoir automatiquement une augmentation de salaire de 3 000 $. Alors, c'est très important et c'est bien dommage qu'on n'ait pas saisi cette opportunité de discuter en profondeur, d'ouvrir toutes les avenues pour qu'on soit capable de juger quelle sorte de réforme on pourrait envisager.

Le ministre des Finances parle du 5 000 000 000 $ qu'il n'a pas eu d'Ottawa. Effectivement, le gouvernement fédéral avait également un déficit de 600 000 000 000 $. Et, d'autre part, si je comprends bien, le ministre des Finances, ça fait des années qu'il nous corne aux oreilles que le fédéral ne devrait pas s'immiscer en éducation puis en santé. Alors, je vois mal qu'il soit en train de se plaindre d'avoir perdu 5 000 000 000 $. On ne peut pas avoir le beurre et... qu'est-ce que c'est l'expression, là?

Une voix: Et l'argent du beurre.

Mme Jérôme-Forget: Et l'argent du beurre.

Au niveau de la tutelle, vous avez utilisé un terme très intéressant: dans le fond, les citoyens sont en tutelle, et ça, c'était très révélateur, et vous avez encore là raison, parce qu'il y a des études qui ont été faites à l'OCDE démontrant qu'une dépense de 1 $ que le gouvernement fait, ça coûte au fait 1,40 $, donc il y a une perte. Et je vous invite à essayer de... Je n'ai pas la référence, mais, si vous regardez sous «turning», à l'OCDE, l'article devrait sortir.

L'autre point que je voulais faire suite à votre commentaire, à votre mémoire, c'est au niveau de l'impôt négatif. Ça, c'est une idée qui est à la mode depuis 1970 et, comme le disait très bien le député d'Abitibi-Ouest, c'est quelque chose qu'on soupçonne qui pourrait être coûteux. C'est d'ailleurs un programme qui a déjà été essayé au Manitoba durant les années soixante-dix. Et le résultat de cette étude-là... Parce que ce pourquoi on propose l'impôt négatif, c'est pour essayer d'emmener des gens à rentrer sur le marché du travail, d'accord? et donc qu'il y ait un incitatif à retourner au travail, c'est l'objectif, et qu'il n'y ait pas de pénalité suffisamment grande entre la dépendance et retourner sur le marché du travail. Les résultats préliminaires qui avaient été faits à ce moment-là, parce que ça a été mis en place, ça, durant les années soixante-dix, c'était que, s'il n'y avait pas de travail, s'il n'y avait pas une disponibilité de travail dans un endroit, l'impôt négatif avait à peu près peu d'impact. Il faut qu'il y ait quelque chose qui se passe. Par ailleurs, il y a deux expériences dans le moment – vous les connaissez peut-être – au Nouveau-Brunswick et en Colombie-Britannique, d'impôt négatif, avec un seuil assez élevé d'ailleurs. Alors, ça va être intéressant de voir quel est l'impact de ces deux programmes-là qui sont mis en marche. Je ne suis pas au courant, vous avez parlé d'un programme en Hollande, je pense. C'est ça?

Mme Grégoire (Marie): En Irlande et aux Pays-Bas, effectivement.

Mme Jérôme-Forget: En Irlande. Pardon.

Mme Grégoire (Marie): Il y a les deux. Les deux sont en train d'implanter le programme.

Mme Jérôme-Forget: Et, effectivement, il y a probablement des vertus à encore examiner les bienfaits de l'impôt négatif, vu les effets pervers de tous les crédits d'impôt que l'on donne et qui, parfois, engendrent une taxation à plus de 100 %. L'étude de Laferrière et Chartrand a très bien démontré ce point qui est désastreux justement, qui incite effectivement les gens à ne pas travailler davantage.

Vous proposez un crédit d'impôt pour une première hypothèque. Et là je me demande si, en plus du point qui a été soulevé par le député d'Abitibi-Ouest à l'effet que: Est-ce qu'on a ça puis est-ce qu'on a également le gain de capital? Est-ce qu'on est taxé sur le gain de capital? mais est-ce que ce n'est pas un incitatif à garder une hypothèque élevée sur une maison, si c'est l'hypothèque qui est déductible? Parce que c'est ça qui s'est passé aux États-Unis. Il y avait ce même programme d'ailleurs en Angleterre, qui existe d'ailleurs en Angleterre, qui a été réduit et qui existe encore, l'idée de rendre les gens propriétaires, au moins d'avoir une épargne, de partir avec une épargne. C'est très séduisant comme idée parce que la première chose que les jeunes couples veulent, c'est d'avoir une maison. Ils ne sont pas capables de s'acheter autre chose, mais ils pensent que, pour bâtir leur famille, ils peuvent s'acheter une maison. Est-ce que vous avez pensé à des façons de non seulement favoriser d'avoir une hypothèque, de déduire l'hypothèque... Mais cette épargne-là, c'est de l'épargne, c'est important. Et donc, si les gens repaient leur hypothèque, il y a quand même beaucoup de vertus à épargner pour vrai, pas simplement à acheter une maison. Est-ce que vous avez pensé à une façon?

M. Gravel (Marc-André): Bien, à ce niveau-là, madame, évidemment, le point que vous soulignez, je le trouve effectivement intéressant parce que, si l'avantage fiscal est par la suite contrecarré par une perte d'épargne au niveau d'une dépense, par exemple d'intérêts excédentaires, on ne va pas rejoindre l'objectif recherché. Alors, effectivement, la façon que ça a été étudié, ces différents programmes là, c'est qu'il y avait à un moment donné une limite là, on ne pouvait pas majorer, si on veut, ou augmenter ad vitam aeternam le montant d'hypothèque susceptible de cadrer dans le programme. Effectivement, c'est un élément qu'il faut prendre en considération, sinon on vient enlever l'effet bénéfique du programme à moyen et long terme. Là-dessus, je suis d'accord avec vous.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Vous avez mentionné également quelque chose de bien intéressant, vous avez dit que le Québec devait devenir intéressant, devait être un endroit où on se sent bien, où il y a des opportunités pour les jeunes, où il y a de l'avenir, où les gens ne sentent pas le besoin de quitter. Vous avez mentionné vos amis justement qui, tout à coup, regardent ailleurs parce qu'il y a plus d'opportunités. Est-ce que vous croyez qu'il y a autre chose à part de l'impôt qu'il faudrait faire pour rendre un climat plus attrayant, plus séduisant, où il y aurait plus d'opportunités? Est-ce qu'il y a d'autres choses auxquelles vous avez pensé?

(11 h 20)

Mme Grégoire (Marie): Bien, une des choses que les chercheurs puis que les sommités nous disent quand on les rencontre, c'est qu'il faut qu'ils aient l'impression que c'est là que ça se passe, qu'on ait l'impression qu'il y a une quantité suffisante d'activités pour avoir l'impression d'être en train de réaliser quelque chose, et, pour ça, il y a des choses à faire au niveau de la R & D, je pense, au niveau du développement, au niveau du partenariat entreprises-écoles, entreprises–universités, pour être capables de faire en sorte de créer des masses critiques intéressantes pour que les chercheurs non seulement aient le goût de rester, mais soient capables d'en recruter outre-mer puis outre-frontières. Et on se rend compte que, dans des secteurs... Par exemple, à l'Université de Montréal, à l'École polytechnique, il y a une équipe de chercheurs au niveau de la scoliose, et on se rend compte qu'ils sont devenus des sommités et que les gens à travers le monde savent que, si tu veux t'intéresser à cette recherche-là dans le monde, c'est ici qu'il faut que tu sois, et on se rend compte qu'ils sont capables d'aller chercher des gens, d'aller motiver des gens. Alors, on pense qu'il faut avoir plus de créneaux d'excellence comme ceux-là pour être capables de créer une dynamique intéressante pour faire en sorte justement que les gens qui sont les cerveaux puissent rester ici parce qu'ils génèrent énormément. Ils génèrent non seulement le travail qu'ils font, mais, une fois que la recherche aboutit sur quelque chose, ça génère sur des entreprises, ça génère sur des nouveaux emplois. Alors, on pense que c'est à la base même d'une économie qui a une vision à long terme.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, j'ai un autre point sur la taxe, la «flat tax», la taxe à taux uniforme que vous proposez à 20 % pour commencer, si je comprends bien. Est-ce que vous avez estimé l'impact au niveau de tous les groupes de revenus? Ce pourquoi je soulève ce point-là – vous êtes sûrement au courant – c'est que justement Pierre Fortin s'est rendu compte, dans sa proposition, qu'il y avait un groupe qui était très pénalisé, donc les moins fortunés. Est-ce que vous avez pensé à quelque chose justement pour corriger ça?

M. Gravel (Marc-André): Bien, à ce titre – et je pourrai laisser Mme Grégoire en parler – les gens qui seraient couverts par le revenu minimum évidemment seraient sous un régime fiscal différent. Alors, les moins bien nantis finalement seraient sous ce régime-là, et les autres sous le régime de la taxe uniforme ou «flat tax». Il faut comprendre que la «flat tax» telle qu'elle est proposée dans notre mémoire correspond déjà au niveau d'imposition le plus bas de la classe moyenne. Alors, à ce titre-là, l'incidence entre avant et après serait à tout le moins marginale, sinon nulle pour la classe moyenne inférieure.

Puis là-dessus, permettez-moi de revenir au dépliant qui en a fait sursauter plusieurs. Je pense que, quand on regarde le tableau – pour ceux qui l'ont – de ce petit dépliant là et qu'on constate, au niveau du régime, du fameux régime progressif... Alors, ce qu'on constate, et je suis d'accord à ce titre-là avec le médecin qui était devant vous hier, lorsqu'il est venu témoigner, qu'il ne faut pas que le système fiscal soit un incitatif à ne pas faire d'argent.

Mme Jérôme-Forget: C'est ça.

M. Gravel (Marc-André): Je ne sais pas si vous me suivez, là. Mais c'est un peu particulier. Je ne connais pas de sociétés dans le monde qui, finalement, n'encouragent pas la prospérité. Et c'est un peu ça, ce tableau-là, qu'on a devant les yeux. Je veux dire, moi, dans les 35 ans de vie active qu'il me reste comme contribuable, j'aimerais ça, moi, que mon système fiscal favorise la prospérité. Je veux que le même système fiscal, évidemment, prenne soin des moins bien nantis, mais puisse leur donner tous les incitatifs possibles pour devenir des mieux nantis, pas pour avoir de la protection comme moins bien nantis ad vitam aeternam, mais pour, au contraire, accéder à une tranche supérieure de revenus pour devenir des mieux nantis, des beaucoup mieux nantis et des bien nantis. Et tant mieux.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. J'ai terminé, M. le Président. Alors, vous pouvez continuer.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Alors, Mme Grégoire, M. Gravel, bonjour. Je veux vous féliciter pour votre présentation, elle est très intéressante. Je suis contente de voir que vous êtes du même avis que moi à l'effet qu'on ne doit pas refiler la facture de la réduction des impôts aux municipalités qui, elles, vont la retransmettre aux contribuables du Québec. On a vu ce matin dans le journal – je pense que vous m'avez entendue tantôt – que la ville de Baie-Comeau a cette intention-là clairement annoncée et probablement que cette annonce-là va faire boule de neige aussi.

Je constate aussi, au même titre que vous, dans votre recommandation 1, que le gouvernement s'est arrêté à un cadre à cinq scénarios finalement, qui sont très limitatifs, et qui ne nous permettent pas vraiment de se prononcer sur la façon dont le Québec taxe les Québécois. Alors, nous aussi, on aurait aimé... moi, en tout cas, j'aurais aimé une révision plus en profondeur de notre régime fiscal, particulièrement tous ces taux marginaux implicites qui font de la distorsion, qui créent des effets pervers chez les contribuables.

Je voulais revenir cependant à votre recommandation 6 dans laquelle vous proposez un seuil de revenu minimal à 15 000 $ éventuellement. Si j'ai bien compris, et vous me corrigerez, ça veut dire que vous supposez une hausse du seuil d'imposition nulle à 15 000 $. Bon. Toutefois, vous dites aussi, dans votre présentation, qu'il faut redonner de l'oxygène à la classe moyenne. Or, l'augmentation importante du nombre de contribuables qui ne paient pas d'impôts au cours des dernières années a augmenté l'importance relative du fardeau fiscal supporté par les autres contribuables. Alors, dans ce cas-là, comment pouvez-vous soutenir cette argumentation-là?

Mme Grégoire (Marie): Bien, pour nous, ça va un peu avec la question de Mme Jérôme-Forget qui dit: Bon, vous allez surtout vers la classe moyenne. Là, vous dites effectivement que, finalement, on déleste autre chose sur la classe moyenne. On considère que la classe moyenne a été celle qui a effectivement contribué le plus à l'effort collectif de l'atteinte du déficit zéro et on pense que la «flat tax» à 20 % permet de donner de l'oxygène.

Par ailleurs, on considère que le système de sécurité du revenu, qui nous coûte actuellement 3 200 000 000 $, est inefficace dans le goût de redonner... en fait, dans les incitatifs à redonner le goût au travail. Et c'est là qu'on va chercher les sommes nécessaires pour cette chose-là et non pas en mettant un fardeau supplémentaire. C'est de l'argent déjà, actuellement, pratiquement existant, là. C'est des sommes qui sont déjà allouées au budget et qui nous permettraient... C'est une façon différente justement de voir les choses, qui permettrait de redonner le goût au travail plutôt que d'avoir des incitatifs qui t'incitent plutôt à rester à la maison parce que le programme fait en sorte, le filet social fait en sorte que c'est plus intéressant, parce qu'on sait que, quand on gagne 41 $ par semaine, après ça on est imposé à 100 %.

Mme Leblanc: Est-ce que vous avez chiffré cette diminution du taux d'imposition de 20 % alliée à l'augmentation du seuil d'imposition nulle à 15 000 $? Qu'est-ce que ça va coûter? Est-ce que ça rentre dans le cadre budgétaire de 1 300 000 000 $ sur quatre ans?

Mme Grégoire (Marie): Non, définitivement pas. Et c'est pour ça qu'on dit que, selon nous, les surplus seront au-delà de ça. Alors, on dit qu'effectivement la «flat tax» à 20 % représente 1 700 000 000 $, tel que proposé dans le scénario 5, sauf qu'on ne voit pas d'augmentation de TVQ, ce qui fait que le 1 700 000 000 $ demeure là, et on pense que le manque à gagner au niveau du revenu minimum, dans la première implantation, serait aux alentours de 400 000 000 $. Donc, il y a un manque à gagner de 800 000 000 $, mais on considère que les surplus seront suffisants pour couvrir ça dans le cadre du mandat.

Mme Leblanc: Je vous remercie beaucoup.

Mme Grégoire (Marie): Merci.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Quelques minutes encore à la députée de La Pinière pour une question.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, j'ai lu votre mémoire avec grand intérêt, puis un des aspects qui me préoccupe aussi, vous l'avez souligné, c'est les travailleurs autonomes. J'ai eu l'occasion, en mars 1998, d'organiser un forum sur les travailleurs autonomes dans mon comté qui a attiré des gens de la grande région de Montréal, et c'est vrai que la fiscalité est au coeur de la problématique qui touche cette catégorie de travailleurs.

Votre recommandation 5 va dans le sens d'accorder un soutien fiscal adapté aux réalités vécues par les travailleurs autonomes. On sait que les travailleurs autonomes ne constituent pas nécessairement un groupe homogène ni dans leur façon de travailler ni dans leurs revenus. Apparemment, il y en a qui ont des revenus de 80 000 $ à 100 000 $ et plus, et une grande partie aussi, autour de 20 %, qui ont des revenus de moins de 20 000 $. Comment va s'appliquer votre recommandation 5 à cette catégorie qui n'est pas homogène?

(11 h 30)

Mme Grégoire (Marie): Non, effectivement... Une des choses dont on parlait, c'était effectivement au niveau des frais de représentation qui, à ce moment-là, touchent quand même les gens. 1 % de frais de représentation, même si on fait 80 000 $, ça demeure que c'est 800 $, et ce n'est pas réaliste parce qu'il y a supposément un volume d'affaires supplémentaire qui t'oblige à faire du développement des affaires autrement. Alors, ça, c'était une des mesures.

L'autre mesure, on disait: Au moins pour ceux qui gagnent moins, il y avait au moins le revenu minimum qui leur permettait...

Une des choses qui est intéressante avec le travail autonome et qui répond à la nouvelle économie, c'est la flexibilité, et je pense que c'est une des choses qui fait en sorte que les travailleurs autonomes ne sont pas une catégorie d'entrepreneurs uniformes. Parce que, effectivement, si je suis, et je l'ai été, une jeune maman qui décide de passer plus de temps à la maison, comme travailleur autonome j'ai cette flexibilité-là. Alors, ce qu'on voulait, c'est au moins avoir un filet pour ceux qui gagnaient moins et avoir certaines mesures au moins pour le développement des affaires.

Mme Houda-Pepin: O.K. C'est terminé.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup, Mme Grégoire, M. Gravel. Votre mémoire a été lu et analysé, et je pense que le dialogue que nous venons d'avoir a été fructueux pour tout le monde.

J'invite maintenant le représentant du Syndicat de la fonction publique du Québec, M. Serge Roy, son président, à se joindre à nous, immédiatement après ce groupe.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, nous reprenons nos travaux. Ainsi que je l'indiquais tout à l'heure, le mémoire que nous allons maintenant étudier est celui du Syndicat de la fonction publique du Québec. M. Roy, auriez-vous la gentillesse de nous présenter ceux qui vous accompagnent et nous présenter votre mémoire?


Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ)

M. Roy (Serge): Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, je me présente, Serge Roy, président général du Syndicat de la fonction publique du Québec. Je suis accompagné de Mme Joanne Barabé, secrétaire générale, et de M. Gilles Lavoie, vice-président.

Nous sommes venus aujourd'hui devant cette commission parlementaire pour vous faire part de vive voix de notre déception et de notre désapprobation quant aux limites imposées à la consultation lancée par le gouvernement sur la réduction des impôts des particuliers. En effet, nous considérons que cette question ne constitue qu'un aspect d'une question plus vaste qui est celle de l'utilisation des surplus budgétaires. D'ailleurs, à l'occasion de la Conférence sur le devenir social et économique de mars 1996 et au Sommet d'octobre de la même année, l'espoir avait été lancé de pouvoir faire un tel débat à l'approche du déficit zéro. Le gouvernement a fait le choix d'éviter ce débat plus large pour des raisons qui s'expliquent très mal, particulièrement après toutes ces années au cours desquelles la société s'est vu imposer une médecine de cheval pour éliminer le déficit.

Or, cette fameuse politique pour atteindre le déficit zéro nous a conduits un an plus tôt que prévu à l'atteinte de l'objectif, si bien que la vraie question qui se pose à la société est de savoir si nous continuons à endosser des choix budgétaires qui répondent à la logique et aux exigences des marchés internationaux ou si nous optons pour le progrès social et la souveraineté populaire. Depuis plusieurs années, les services publics et les programmes sociaux ont subi des compressions extraordinaires. Les dernières années ont été particulièrement éprouvantes. Nous avons vu les plus démunis de notre société privés de centaines de millions de dollars à chaque année. Nous ne pouvons continuer à tolérer que la situation dans laquelle se trouve une partie importante de nos concitoyennes et concitoyens ne soit pas prioritaire.

La fonction publique, tout comme les réseaux de la santé, des services sociaux et de l'éducation, a dû faire des efforts incroyables pour arriver à maintenir les services à la population le mieux possible. Le gouvernement a pris des décisions qui ont fait en sorte que des ministères et des organismes gouvernementaux, comme celui de l'Environnement, ne sont plus en mesure d'intervenir efficacement parce qu'on les a privés des ressources essentielles à leur fonctionnement. Le gouvernement a décidé de réduire considérablement sa contribution directe à la recherche et au financement public de la recherche universitaire. Ce choix n'est pas sans conséquences pour la société.

Plus récemment, la présidente du Conseil des arts et des lettres a lancé un cri d'alarme afin que des ressources financières suffisantes soient prévues pour pouvoir venir en aide efficacement au milieu de la culture. Et que dire du cas d'Emploi-Québec qui vit encore des limitations budgétaires telles que l'on n'arrive plus à rendre à la population les services auxquels elle a droit et que l'on va même jusqu'à congédier 250 personnes pour boucler le budget. C'est le résultat de choix budgétaires trop contraignants. Le SFPQ est d'avis que cela doit cesser.

Pendant ce temps-là, nous apprenons que le gouvernement a décidé d'imposer une limitation insoutenable au budget de dépenses pour l'année 2000-2001. Dans le cadre de ce prochain budget, certains organismes se verraient imposer des compressions allant jusqu'à 15 %. Une telle approche est maintenant intolérable et injustifiable et nous refusons de la cautionner. C'est la raison pour laquelle nous ne voulons pas débattre de la réduction des impôts des particuliers avant d'avoir disposé de la question principale qui se pose à la société, celle de l'utilisation des surplus budgétaires qui permettent d'envisager un réinvestissement indispensable dans les services publics et les programmes sociaux. Telle est notre priorité. Le mémoire que nous vous avons fait parvenir va dans ce sens. Notre point de vue rejoint celui élaboré par la grande coalition Solidarité populaire Québec et d'autres organismes sociaux du Québec.

D'autre part, comment pouvons-nous croire que ce débat et cette consultation puissent se faire dans un contexte d'ouverture lorsque le gouvernement va jusqu'à laisser entendre qu'il ne serait pas possible de réduire les impôts s'il fallait augmenter davantage les salaires des travailleuses et des travailleurs des secteurs public et parapublic?

Plusieurs déclarations de représentants du gouvernement indiquent qu'ils ne cherchent qu'à manipuler l'opinion pour faire croire à un nouveau consensus sur la réduction des impôts des particuliers. À notre avis, il n'y a pas donc de véritable consultation. En conséquence, avec tout le respect que nous devons à cette commission et aux institutions démocratiques de notre pays, nous refusons de participer à votre consultation et, dans le but d'éviter de vous faire perdre votre temps, nous nous retirons immédiatement.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je suspends cette séance pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 39)

(Reprise à 11 h 41)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Si nous sommes d'accord, le cinq minutes est écoulé. Alors, nous reprenons nos travaux, pour constater que nous ne pouvons pas, contrairement à l'ordre de la Chambre, discuter avec le dernier groupe, qui était le Syndicat de la fonction publique. Alors, nous ajournons nos travaux à mardi, 9 heures.

(Fin de la séance à 11 h 42)


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