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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 14 août 2002 - Vol. 37 N° 79

Consultations particulières sur le projet de loi n° 107 - Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente et une minutes)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des finances publiques est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Williams (Nelligan).

Le Président (M. Paré): Merci. Bienvenue, M. le député de D'Arcy-McGee.

Donc, l'ordre du jour aujourd'hui. À 9 h 30, l'Institut québécois de planification financière; à 10 h 30, Mme Madeleine Plamondon, Mme Nathalie St-Pierre, M. Yves Michaud; à 11 h 30, l'Option des consommateurs; et, à 12 h 30, il y aura suspension. Nous reprenons nos travaux à 15 heures avec la Compagnie d'assurance Standard Life, suivie à 16 heures du Bureau d'assurance du Canada et, à 17 heures, finalement, le Conseil interprofessionnel du Québec, et ajournement à 18 heures.

Auditions (suite)

Donc, bienvenue, madame, monsieur. Si vous voulez vous présenter, s'il vous plaît, et vous aurez 20 minutes pour votre présentation et des échanges avec les parlementaires pendant 40 minutes. Merci.

Institut québécois
de planification financière (IQPF)

M. Pilotte (Richard): Merci, M. le Président. M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. membres de la commission des finances publiques, bonjour, bonne journée. Mon nom est Richard Pilotte, président de l'Institut québécois de planification financière et porte-parole de l'ensemble des diplômés en planification financière au Québec. J'exerce en planification financière personnelle depuis 15 ans, à titre de conseiller honoraire seulement, au sein d'un cabinet comptable ayant place d'affaires à la grandeur du Québec. J'ai été chargé de cours au certificat en planification financière personnelle pendant quatre ans à l'Université Laval et suis coauteur d'un livre sur la retraite et la planification successorale. Je suis accompagné aujourd'hui de la directrice générale de l'Institut, Mme Jocelyne Houle-LeSarge.

Nous sommes très heureux de saisir l'opportunité qui nous est offerte pour vous présenter la position de l'Institut québécois de planification financière quant au projet de loi n° 107. Nous vous exprimons notre vision de ce que doit être la place de l'Institut au sein du projet de loi et ce qu'est le rôle du planificateur financier en tant que protecteur du patrimoine financier des Québécois. Alléger le fardeau administratif pour les assujettis, offrir un guichet unique aux consommateurs, voilà deux leitmotiv auxquels l'Institut adhère, soucieux que le gouvernement préserve les acquis du Québec en ce qui a trait à la planification financière.

Le gouvernement québécois a été le premier à légiférer, en 1989, sur des normes relatives à la planification financière et a accrédité l'IQPF comme seul organisme voué à la planification financière personnelle. Treize ans plus tard, le Québec est encore le seul à bénéficier des normes réelles grâce à l'expertise de l'IQPF. Le reste du Canada cherche encore à établir une norme minimale. Le gouvernement du Québec a donc agi avec sagesse dans le passé, et il faut, pour le bien-être collectif, conserver ces acquis dont l'IQPF est le maître d'oeuvre et le détenteur.

Si le projet de loi n° 107 ne remet pas en question notre rôle quant à la formation de base et à l'émission du diplôme, le libellé des articles 383 et 386 donne bien peu d'indications sur la mise en application des règles de formation continue. La planification financière est un acte professionnel qui consiste à offrir des conseils et à rédiger des recommandations. Cet acte exclut spécifiquement la vente de produits financiers. La planification financière est un domaine en constante évolution, et il est essentiel que nos planificateurs financiers demeurent à la fine pointe des derniers développements et des tendances dès leur entrée dans la carrière.

Nous demandons aujourd'hui à nos législateurs de reconnaître notre expertise et de nous confier l'encadrement de tous les aspects de l'exercice de la profession, incluant le pouvoir de réglementer la formation continue des planificateurs financiers. Qui mieux que l'Institut peut déterminer ces règles de formation et encadrer la profession? Nous avons derrière nous 13 ans de recherche et de développement en planification financière, nous avons formé près de 6 000 planificateurs financiers à ce jour, selon les standards les plus élevés en Amérique du Nord.

Nous proposons de tenir ce rôle à l'intérieur d'un nouvel organisme qui travaillera en étroite collaboration avec le milieu et lui assurera un droit de représentation à son conseil d'administration. Notre proposition représente une opportunité de regrouper tous les planificateurs financiers au sein d'un même organisme et d'harmoniser l'encadrement de la profession. Mme LeSarge.

Le Président (M. Paré): Mme LeSarge.

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): M. le Président, depuis 10 ans, l'Institut québécois de planification financière joue un rôle primordial dans le paysage financier québécois. Créé en 1989 à la suite de l'adoption de la Loi sur les intermédiaires de marché par l'Assemblée nationale, l'Institut est agréé par le ministre pour établir les conditions relatives à la délivrance du diplôme de planificateur financier. La loi 134 confère également à l'IQPF le droit de déterminer et le droit de percevoir une cotisation obligatoire relative au port du titre. L'initiative du gouvernement vise essentiellement la protection des consommateurs et fait du Québec la première instance canadienne, et la seule encore à ce jour, à adopter une loi relative à la planification financière.

En 1998, la Loi sur la distribution des produits et services financiers remplace la Loi sur les intermédiaires de marché. La nouvelle loi reconnaît le rôle de l'IQPF comme seule institution décernant le diplôme et déterminant les règles de formation continue obligatoire pour les planificateurs financiers. Le gouvernement pose ainsi un geste sans équivoque pour assurer la protection des consommateurs. Il reconnaît la nécessité d'encadrer la formation des planificateurs financiers, de favoriser de façon continue la mise à jour de leurs connaissances et donne l'aval aux règlements sur la formation continue obligatoire pour les planificateurs financiers.

Lors des négociations qui ont entouré l'adoption du projet de loi n° 188, l'IQPF, à la demande du gouvernement, accepte d'abandonner son droit de cotisation, ce qui implique l'abandon des activités associatives. Cette absence de cotisation obligatoire aura conséquemment un effet important sur les revenus de l'Institut. La cotisation donnait, sous la Loi des intermédiaires de marché, non seulement droit aux services associatifs, mais également droit de porter le titre. Le diplôme de planificateur financier décerné par l'IQPF demeure par ailleurs l'une des conditions obligatoires pour l'exercice de la pratique de la planification financière. Le rôle de l'IQPF est de former et de diplômer les planificateurs financiers, de favoriser leur perfectionnement professionnel selon une approche intégrée de la planification financière.

Nous avons maintes fois et depuis nombre d'années fait des représentations auprès du gouvernement et des différents intervenants concernés pour que tous les planificateurs financiers, quelle que soit leur provenance, soient régis de façon homogène dans un seul et même organisme. Nous comprenons que la volonté du législateur pour le projet de loi n° 107 rejoint cette évidence et confirme que tous les planificateurs financiers doivent être regroupés au sein d'un même organisme. Il en va, sans contredit, de la protection du public.

L'Institut doit veiller à la formation des planificateurs financiers. À ce jour, il a diplômé près de 6 000 planificateurs financiers répondant aux plus hauts standards de formation, et près de 5 000 candidats au titre sont inscrits dans l'un ou l'autre des programmes universitaires en planification financière personnelle. D'ici peu, il y aura plus de 11 000 planificateurs financiers assurant le rayonnement de la profession sur l'ensemble du territoire québécois, autant dans les régions que dans les grands centres.

L'Institut est un organisme sans but lucratif qui ne reçoit aucune subvention, de quelque source que ce soit. Ses revenus proviennent de ses activités de formation et d'accréditation. Ils sont réinvestis dans la recherche et le développement en planification financière intégré, et ce, sans duplication avec le système universitaire. Grâce à ses investissements, l'IQPF se maintient à la fine pointe de l'évolution et des tendances qui touchent les différents métiers financiers.

M. Pilotte (Richard): M. le Président, provenant de divers milieux professionnels, le planificateur financier possède des compétences dans les sept domaines d'intervention de la planification financière personnelle: finances, fiscalité, aspects légaux, retraite, succession, placements et assurances. De ce fait, il occupe une position centrale au sein d'un réseau de spécialistes et il fait appel à leur expertise lorsque la situation l'exige. Le planificateur financier doit adopter une approche intégrée, c'est-à-dire transdisciplinaire, pour favoriser l'optimisation du patrimoine de son client, tout en gardant à l'esprit les aspects humains essentiels à l'établissement d'une relation client durable.

n (9 h 40) n

La qualité des services-conseils donnés par le planificateur financier est garante de la protection du consommateur. Le Québec est le seul à avoir légiféré sur les normes relatives à la planification financière et il est toujours à l'avant-garde en ce qui a trait à la qualité de la formation et la protection du public.

L'Institut est fier de ses actifs en ce qui concerne le développement des programmes de formation et des nombreux partenariats qu'il a développés au cours des ans avec les intervenants compétents. Citons les principaux jalons dans l'évolution de l'Institut et ses réalisations les plus marquantes: établissement des critères d'admissibilité pour les différents cheminements; élaboration du cours synthèse et mise à jour ponctuelle; développement de programmes de formation universitaire en planification financière personnelle avec l'Université Laval, l'Institut des banquiers canadiens, l'Université du Québec et ses composantes, l'École des hautes études commerciales et l'Université de Sherbrooke; rédaction et édition de la Collection de l'IQPF, seul ouvrage en Amérique du Nord réunissant les sept domaines de la planification financière personnelle intégrée.

Aujourd'hui, toutes les personnes qui s'inscrivent à l'examen unique pour obtenir le diplôme de planificateur financier détiennent un diplôme universitaire. C'est donc dire que les planificateurs financiers du Québec sont des professionnels qui ont un solide bagage académique dépassant les critères exigés ailleurs au Canada. Les consommateurs québécois disposent donc de professionnels hautement qualifiés pour assurer la protection de leur patrimoine financier.

Chef de file en planification financière, l'IQPF met tout en oeuvre pour maintenir l'avance que le Québec s'est donnée dans le domaine des finances personnelles. Tel que nous l'avons mentionné précédemment, de nombreux partenariats ont été conclus au cours des ans avec les institutions d'enseignement. Le cours de formation professionnelle de l'Institut a été implanté à partir de 1996 en collaboration avec les institutions d'enseignement universitaire, dans le respect de leurs structures et de leurs besoins. En plus d'avoir évité le dédoublement des ressources, ces collaborations ont stimulé la recherche de l'excellence académique par le biais de nouveaux programmes répondant à de hauts standards de qualité. À titre d'exemple, un programme de maîtrise avec option en planification financière est disponible à l'Université de Sherbrooke et, dès l'automne 2002, l'Université Laval offrira un baccalauréat des métiers financiers. Nous sommes informés, Mme la ministre, d'une correspondance qui vous fut transmise en mai dernier par la direction générale de l'Université Laval pour appuyer nos dires.

Outre les liens que l'Institut a tissés dans le milieu de l'enseignement, il a également établi des partenariats avec différents organismes. À cause de son caractère distinct et de son impartialité, l'Institut est un partenaire privilégié par la Régie des rentes du Québec depuis plusieurs années. D'autre part, des discussions sont en cours avec les représentants de la Chaire en planification financière de l'Université Laval en ce qui concerne la Collection de l'IQPF. Le partenariat avec la Chaire en planification financière vise l'accroissement de la recherche et du développement dans les différents domaines d'intervention, l'adaptation du contenu aux exigences fiscales et législatives des autres provinces et la traduction en anglais pour élargir la diffusion au reste du Canada. Ainsi, le Québec imposera sa norme à l'échelle du Canada, et non le contraire, grâce à la recherche et au développement effectués par l'IQPF.

L'Institut a également été attentif aux besoins manifestés par l'industrie et a offert des cours de formation adaptés à la réalité des entreprises, leur permettant par le fait même des économies substantielles. L'Institut a ainsi dispensé des cours auprès de plus de 1 500 personnes en 2001, entre autres pour le Mouvement Desjardins, la Banque Nationale, la Banque Laurentienne, le Groupe Investors et Sun Life du Canada. Depuis sa création, l'IQPF a constamment amélioré la formation dispensée sur le marché et en a assuré la diffusion dans 15 villes du Québec.

Nous croyons sincèrement que l'objectif visé par l'introduction d'un programme de formation continue obligatoire, dont le premier cycle a pris fin en décembre 2001, a été atteint. Les intervenants de l'industrie ont fait des investissements financiers importants pour mettre à la disposition de leurs planificateurs financiers les ressources nécessaires à l'accomplissement de leur formation continue. Il va donc sans dire que la formation continue est prise au sérieux par l'industrie et s'avère une nécessité. C'est un pas de géant en matière de protection du public.

Cependant, nous avons des leçons à tirer de ce premier cycle de formation continue obligatoire. Force nous est de constater que le système de formation continue mis en place pour répondre aux exigences de la Loi sur la distribution de produits et services financiers a été source de nombreux irritants. À la lueur de cette expérience, nous sommes disposés à réévaluer le règlement dans un esprit d'ouverture et d'harmonisation. Par ailleurs, le manque d'uniformité des exigences de formation pour les praticiens constitue également une lacune pour l'offre de services homogènes au consommateur. En effet, les planificateurs financiers membres d'un ordre professionnel ayant signé une convention avec le Bureau des services financiers n'étaient pas soumis aux mêmes exigences. Il nous apparaît évident que l'expertise de l'IQPF, en tant que principal organisme de formation en matière de planification financière personnelle intégrée, eut été valable pour tous les planificateurs financiers, quelle que soit leur provenance.

Cela étant dit, l'Institut est disposé à proposer des assouplissements nécessaires pour alléger le fardeau administratif de la formation continue et pour adapter celle-ci aux besoins réels du marché, et ce, en collaboration étroite avec les intervenants du milieu. Il n'en demeure pas moins qu'il faut s'assurer que tous les planificateurs financiers, quel que soit leur champ d'expertise, aient accès à des cours de formation continue respectant une approche intégrée de la planification financière.

Comme vous le savez, la planification financière est en constante effervescence, tributaire des changements pouvant survenir partout dans le monde. À titre d'exemple, les incertitudes reliées aux fluctuations boursières des dernières années et les attentats terroristes du 11 septembre ont eu des impacts majeurs au niveau de la demande de services-conseils. Par ailleurs, toute modification de loi ayant des incidences fiscales ou juridiques, la présentation des budgets des gouvernements sont autant de facteurs qui influent directement sur la planification financière, notamment dans le domaine de l'assurance, des placements, des finances, de la fiscalité, de la retraite, des aspects légaux de la succession. C'est pourquoi nous insistons, M. le Président, sur le fait que la planification financière est un domaine d'expertise où on ne peut pas se permettre de négliger les mises à jour des connaissances le temps que l'Agence soit établie et qu'un nouveau système de réglementation soit en force. Il est donc urgent de clarifier le libellé des articles 383 et 386 du projet de loi n° 107.

Dans le mémoire qu'il a présenté au Groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier en juin 2001, l'Institut reconnaissait le bien-fondé de simplifier la structure d'encadrement du secteur financier. Il était favorable à la démarche initiée par la vice-première ministre, démarche qui visait une protection accrue des consommateurs québécois et l'allégement du fardeau administratif du secteur financier. L'Institut avait proposé des aménagements qui respectaient l'esprit du mandat dévolu au groupe de travail tout en favorisant l'avancement de la pratique de la planification financière au Québec et l'homogénéité de la formation pour tous les planificateurs financiers.

La principale recommandation émise par le groupe de travail en décembre 2001 a été de créer un organisme unique d'encadrement, l'Agence d'encadrement du secteur financier du Québec, afin d'offrir aux consommateurs des produits et services financiers ainsi qu'à l'ensemble des assujettis du secteur financier un véritable guichet unique. Nous croyons que le législateur devrait profiter du projet de loi n° 107 pour maintenir et peaufiner les avances et percées effectuées au Québec en matière de planification financière intégrée. Comme nous l'avons mentionné à plusieurs reprises déjà, nous croyons que les articles 383 et 386 sont matière à interprétation, ce qui nous fait craindre que l'IQPF perde le droit de déterminer les règles de formation continue pour ses diplômés.

En effet, à l'article 383, on mentionne que, et je cite: «L'Agence peut, pour chaque discipline, déterminer par règlement les règles relatives à la formation continue obligatoire à l'égard des planificateurs financiers.»

Et l'article 386, on peut lire ce qui suit, et je cite: «L'Agence détermine, par règlement [...] les règles relatives à la formation continue obligatoire de chaque discipline ou catégorie de discipline autre qu'en planification financière.»

Nous croyons fermement que l'absence de règles claires en ce qui concerne la formation continue du secteur financier est un élément qui fragilise sérieusement tous les gestes posés précédemment par le législateur pour assurer la protection du consommateur.

M. le Président, en conclusion. Depuis sa création, en 1989, l'Institut québécois de planification financière a collaboré étroitement avec tous les intervenants. À la suite de la publication du rapport du Groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier, le conseil d'administration de l'Institut a entamé une profonde réflexion sur l'encadrement de la planification financière au Québec. Cette réflexion nous porte naturellement vers les principaux intervenants impliqués dans le secteur des produits et services financiers et vers la nécessité de faire front commun pour accroître la protection du consommateur, conserver l'esprit du rapport Martineau et rallier les intervenants de la profession et de l'industrie sur une base commune.

Au cours des dernières semaines, nous avons donc rencontré des représentants de plusieurs organismes touchés par le projet de loi n° 107 et nous avons partagé avec eux nos préoccupations à l'égard de la formation. Nous percevons une volonté commune tournée vers la protection des consommateurs québécois et l'apport des aménagements nécessaires à la satisfaction de l'ensemble des intervenants. Rappelons-nous que, dans son mémoire présenté au Groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier en août 2001, l'Association des banquiers canadiens recommandait de confier à un organisme unique la régie du planificateur financier de toutes les provenances, et ce, pour tous les aspects de l'exercice de la profession. De plus, hier, devant les membres de cette commission, l'Association des banquiers canadiens réitérait cette position, et je cite: «L'Agence pourrait décider de déléguer certains de ses autres pouvoirs en matière de planification financière à d'autres organismes d'autoréglementation comme, par exemple, l'Institut québécois de la planification financière.»

Nos échanges avec l'ensemble des partenaires nous confirment que, étant donné les changements annoncés par le projet de loi n° 107, la création d'un conseil national de la planification financière est maintenant une nécessité incontournable et une innovation digne de l'avance que le Québec s'est donnée dans le secteur en Amérique du Nord. Nous proposons donc à cette fin que l'IQPF soit reconnu comme seul organisme d'encadrement pour la planification financière au Québec sous le nom du Conseil national de la planification financière. Nous recommandons que, en plus de la formation de base et la diplomation, le projet de loi nous confère les droits suivants, et ce, pour tous les planificateurs financiers: l'émission du permis, le port du titre, la formation continue, les règles de pratique, le droit de cotiser.

n(9 h 50)n

Pour respecter l'esprit du guichet unique, l'Agence serait le seul recours direct du consommateur. Le Conseil national de planification financière unirait officiellement les principaux partenaires de la profession, de l'industrie et les consommateurs au sein d'un conseil d'administration qui permettrait à tous les intervenants de se consacrer à la protection du public et à l'avancement de la planification financière. L'expertise de l'Institut québécois de planification financière serait préservée et mise au profit de tous les intervenants pour le mieux être des consommateurs québécois.

M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. membres de la commission des finances publiques, nous vous remercions de votre attention et nous serons heureux de répondre maintenant à vos questions.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Pilotte, merci Mme Houle-LeSarge. Maintenant, pour vos 20 minutes, Mme la ministre.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, bienvenue à la commission. Je veux d'abord vous remercier et vous féliciter pour le travail que vous avez accompli déjà depuis un bon moment. Et mes questions d'ailleurs vont aller dans ce sens-là pour vous permettre un peu de nous expliquer quel est l'impact de votre institution sur la qualité du travail accompli au Québec, et, à ce titre-là, je réitère mes félicitations à votre organisation.

Vous mentionnez dans votre mémoire que: «Le Québec est le seul à avoir légiféré sur les normes relatives à la planification financière et il est toujours à l'avant-garde en ce qui a trait à la qualité de la formation et à la protection du public» ? et je veux qu'on le demeure. Alors, en ce sens, la loi qui est devant nous fait un pas de plus, je crois, dans ce sens-là, dans cette perspective-là.

Alors, moi, ce que j'aimerais d'abord vous poser comme question... Bon, peut-être un premier commentaire ensuite... un autre commentaire, ensuite une question. Vous nous faites un certain nombre de suggestions, nous allons les regarder, les discuter avec vous, voir s'il y a lieu de préciser des choses. Parfois, vous savez, dans une loi, la notion de «peut», comme on l'a mentionné à certains articles, signifie simplement que ce n'est pas nécessairement l'Agence, par exemple, qui pourrait faire, mais ça pourrait lui créer l'obligation à partir du moment où il y a une demande ou un souhait exprimé par les différentes personnes concernées. Alors donc, il y a matière bien sûr à interprétation, puis on pourra le regarder ensemble... on pourra regarder ensemble ces aspects-là.

Moi, une des premières questions que je voudrais soulever avec vous, c'est celle de la qualité des planificateurs financiers. Est-ce que vous croyez que l'Institut, qui est responsable d'établir les conditions de base pour les planificateurs financiers, rôle que nous vous conservons dans la loi... On propose un changement de nom, mais évidemment c'est la même institution qui se transforme. Est-ce qu'on peut dire que la qualité des planificateurs financiers du Québec que nous connaissons maintenant est liée au rôle que vous avez joué? Et, en ce sens-là, pouvez-vous nous en parler un petit peu plus?

Le Président (M. Paré): M. Pilotte.

M. Pilotte (Richard): Mme la ministre, merci beaucoup de vos commentaires. L'Institut est un organisme, comme vous le savez, à but non lucratif. Il est dirigé par des membres qui sont des gens qui servent l'Institut à des fins de la profession et à la fin de la pratique. Ce sont tous des gens qui travaillent à but non lucratif, des gens qui sont dans le milieu de la planification financière, et ces gens-là y croient énormément, avec le travail que nous avons accompli au cours des 13 dernières années. Nous avons effectivement réussi grâce à toutes ces équipes-là au fil des années, grâce aussi à être des gens qui aimons s'allier avec des gens du milieu, entre autres les universités, qui est impératif pour permettre d'avoir un encadrement d'enseignement intégré, pour s'assurer qu'on a la fine pointe de la formation, et nous croyons que l'Institut a permis de maintenir au fil des années cette ligne directrice là sans imposer nécessairement toujours qu'on a la seule voie disponible mais en concertation avec les universités.

Et, grâce à cela, comme vous le savez, nous avons réussi, avec l'ensemble des universités, à instaurer ce programme-là. Et, à l'automne prochain, le premier bac des métiers financiers est en route à compter du 1er septembre, ce qui est une première encore en Amérique du Nord, et c'est vraiment une grande réussite. Et nous aurons aussi à l'automne prochain les premiers maîtres en planification financière, qui est réellement encore une première. Et c'est fantastique, en 13 ans, ce qu'on a réussi à faire pour atteindre ces niveaux-là, et on veut les garder. Et, comme vous le savez, pourquoi que nous sommes un peu préoccupés par la loi n° 107, c'est, entre autres, sur l'incertitude de la formation continue obligatoire qui, selon nous, crée un vide pour une période, tant et aussi longtemps que l'Agence ne sera pas en place. Et on le perçoit actuellement dans le milieu, parce que les gens prennent un recul, parce qu'ils se disent: On va peut-être attendre de faire la formation continue, parce qu'il y a, semble-t-il, une attente qui n'est pas encore confirmée: Est-ce qu'on devra la faire ou pas? Et ça nous préoccupe énormément, parce que, vous le savez, si vous avez 5 000 personnes qui arrivent en même temps dans un délai très court, dans une fenêtre très, très restreinte, pour compléter leurs heures de formation continue, on va avoir un sérieux problème. Il faut arriver à faire cela.

Et, en conclusion de ma réponse, vous savez, c'est un champ de pratique qui est en évolution constante à tous les jours, parce qu'on touche à l'être humain, et l'être humain est partie des nouvelles, des impacts financiers, des impacts humains. Et c'est important que les planificateurs financiers, pour préserver notre avance et pour les conseils qu'ils donnent, qu'ils soient à jour de façon constante. Mais il est vrai aussi que ça a été un peu plus difficile au cours des deux dernières années, et nous en sommes très conscients.

Mme Marois: Vous le mentionnez d'ailleurs dans votre mémoire, hein, vous y faites référence.

M. Pilotte (Richard): Tout à fait. Et c'est pour cette raison, Mme la ministre, mesdames, messieurs, M. le Président, que nous allons, avec vous, réaménager éventuellement ces règles-là, pour permettre à l'industrie de rester compétitive, d'avoir des gens qui sont sur des bancs d'école à parfaire leurs connaissances sans perdre de temps et de coûts abusifs. Et ça, oui, Mme la ministre, nous sommes prêts à réaménager tout ça, je vous en fais une parole.

Mme Marois: Dans la perspective du projet de loi, l'implantation de l'Agence, pour vous, c'est un progrès par rapport à ce que nous connaissons maintenant. Je pose la question, je mets un point d'interrogation au bout.

M. Pilotte (Richard): Alors, nous croyons, oui. Ça va permettre au consommateur d'avoir une seule porte d'entrée lors d'un litige, d'une plainte ou peu importe les doléances qu'un consommateur pourrait avoir. Ça va permettre à ce nouvel organisme là de diriger la personne au bon endroit et non pas dans trois, quatre portes différentes. De là l'importance, comme je mentionnais dans notre mémoire, que l'Agence soit effectivement la ligne directrice, et nous serons son bras qui va permettre de pouvoir réglementer la planification financière au Québec.

Mme Marois: C'est très intéressant de vous entendre. D'abord, il y a une volonté très claire de notre part de nous assurer qu'il y ait de la formation continue. Et ça, s'il faut le marquer mieux, le marquer au sens de l'indiquer mieux, de le signifier mieux dans la loi, on le fera, mais c'est clair que, pour nous, c'est absolument essentiel. Les résultats... Et c'est un peu là où je voulais qu'on s'amène ensemble dans l'entonnoir, c'est un peu le sens de ma question tout à l'heure. Le rôle que vous avez joué a fait en sorte qu'on a maintenant des gens de plus en plus compétents, parce que bien formés, parce que préparés à assumer leurs fonctions-conseils comme planificateurs financiers, et que ces avancées qu'on a connues, on ne doit pas, par l'apparition de l'Agence, les perdre. Au contraire, on doit les consolider et aller encore plus loin, si possible.

Donc, en ce sens-là, il y a une volonté de notre part de nous assurer qu'il y ait de la formation continue, qu'il y ait une obligation qui soit créée en ce sens. Et cependant je crois que maintenant, avec la création de l'Agence ? et là ce sera aussi l'objet d'une de mes questions ? je crois qu'il devrait y avoir une collaboration entre l'Agence et votre institution pour arriver à définir des règles et des exigences en matière de formation continue. Ensuite, comment et à qui déléguer ces responsabilités? Moi, je pense que c'est une discussion qui peut avoir lieu entre l'Agence et votre institution, de même que, je dirais, mes directions au ministère, dans la préparation évidemment de la loi et éventuellement des règlements qui l'accompagneront.

Le Président (M. Paré): M. Pilotte.

Mme Marois: J'aimerais avoir vos commentaires.

M. Pilotte (Richard): Alors, Mme la ministre, nous sommes très heureux, effectivement, avec vous, de vous accompagner dans ce projet de loi pour que l'Institut demeure toujours le chef de file en formation pour le Québec. Et nous avons même l'intention de vous demander, dans un nouveau règlement, éventuellement d'ouvrir la porte à différents intervenants pour pouvoir donner de la formation continue au Québec. Tout ce qu'on vous demande, c'est qu'on soit l'organisme qui est en mesure de pouvoir accréditer ces cours-là en planification financière.

Mme Marois: Je pense que mon collègue voudrait poser une question, monsieur.

Le Président (M. Paré): Oui, M. le député de La Prairie, la parole est à vous.

n(10 heures)n

M. Geoffrion: Oui, merci, M. le Président. Bienvenue à cette commission. Un petit peu sur la lancée de Mme la ministre: actuellement, il y a 6 000 planificateurs financiers; bientôt, il y en aura 11 000. Donc, c'est une bonne nouvelle en soi. Ça veut dire que de plus en plus de gens se préoccupent de leurs finances personnelles et de leur retraite, et, en même temps, ça veut dire que, en quelque part, si les gens se préoccupent de leurs avoirs, c'est parce que l'économie aussi va bien. Donc, il y a toute une séquence intéressante qu'on peut constater là-dessus. Et, évidemment, c'est une carrière que plusieurs maintenant veulent embrasser. Donc, on va avoir bientôt 11 000 planificateurs financiers. Donc, ces gens-là sont en quelque sorte en concurrence. C'est un petit peu comme... les gens se cherchent une clientèle.

Il y a la formation continue. Mais moi, j'aimerais savoir: Au niveau de l'encadrement de ce que j'appellerais un petit peu les méthodes, l'approche avec la clientèle. Bon, c'est sûr que, lorsqu'on recherche une clientèle, bien, on est plus agressifs, etc. Donc, ce nombre important maintenant, d'ici quelques années, qu'il y aura sur le marché au Québec, comment ? c'est le cas de le dire ? vous planifiez cet aspect de ce que j'appellerais la concurrence entre les planificateurs? Le marché n'est pas illimité, mais il est quand même maintenant assez nombreux. Est-ce que vous encadrez aussi cette façon de faire pour que les consommateurs ne soient pas appelés à tous les jours? Est-ce que c'est par territoire? J'aimerais savoir un petit peu comment ça fonctionne, toute cette machine-là.

Le Président (M. Paré): M. Pilotte

M. Pilotte (Richard): M. le Président, M. le député, alors, évidemment, nous savons que la population vieillit. Les gens ont effectivement besoin de plus en plus de conseils. Évidemment, c'est une profession qui est très populaire. Beaucoup de gens y adhèrent. Les critères maintenant sont beaucoup plus élevés qu'ils étaient voilà 10 ans. Ça va nous amener éventuellement, sur les 11 000, à en avoir une certaine partie de ces gens-là qui vont probablement abandonner la profession et devront évidemment transposer leur clientèle vers de nouveaux planificateurs financiers qui seront membres de leur équipe, éventuellement.

Ce qu'on a voulu évaluer dans le marché, c'est le besoin, la transmission du savoir, et s'assurer de la continuité de la clientèle au sein de ces planificateurs financiers là. Les marchés universitaires eux aussi ne peuvent capter qu'une partie de clientèle. Donc, par ce fait même là, il n'y aura pas nécessairement des gens qui pourront avoir accès à plein volume à la planification financière, et le programme devient de plus en plus allongé parce que, au niveau du bac, ça va prendre quatre ans maintenant avant de devenir planificateur financier. Donc, nous croyons qu'avec la séquence que nous avons nous allons maintenir un nombre raisonnable de planificateurs financiers au Québec pour ne pas, effectivement, qu'il y ait une saturation. Mais c'est surtout et avant tout un rôle de services-conseils. C'est une chimie entre un client, quelqu'un qui a cette notion-là de bien communiquer avec le client va réussir à se monter une clientèle et va la maintenir. Donc, c'est ouvert à tout le monde.

L'avantage de cette pratique-là, cependant, c'est que vous pouvez donner des conseils à toute la population, à tous les niveaux. C'est le seul praticien auquel vous pouvez avoir accès à tous les niveaux, à cause de l'industrie. C'est un gros avantage. Que vous soyez dans le domaine des institutions financières ou dans le domaine privé ou dans tout autre domaine, vous avez accès à ce service-là ? c'est un gros avantage ? à différents niveaux.

Donc, à cette fin, évidemment, on va demander à notre gouvernement de nous aider à s'interroger sur le nombre de praticiens qui vont arriver dans le marché et comment on peut éventuellement arriver à diminuer, si c'est le cas. Mais ce n'est pas notre mandat actuellement.

Le Président (M. Paré): M. le député de La Prairie.

M. Geoffrion: Bien, enfin, ce n'était pas tellement le sens de ma question. Ce n'est pas tellement au niveau des planificateurs comme du public. Je vous donne un exemple un peu tiré par les cheveux, là. Bon, les agents immobiliers, par exemple, qui vous appellent. Votre maison n'est pas à vendre, mais ils vous appellent quand même pour essayer de la vendre, même si vous n'avez manifesté aucune intention de la vendre. Vous voyez ce que je veux dire. C'est que les planificateurs qui, évidemment, sont assez agressifs vis-à-vis d'une clientèle potentielle... Donc, c'était cet encadrement-là que je voulais m'assurer que ce soit fait dans l'éthique et dans les formes et que les gens ne soient pas tout d'un coup inondés d'appels pour absolument vouloir placer ou, enfin, s'occuper de leurs avoirs. C'est un petit peu... Enfin, ce n'est pas un danger, mais c'est une précaution que j'aimerais que nous puissions prendre.

Le Président (M. Paré): M. Pilotte.

M. Pilotte (Richard): M. le Président, membres de la commission, notre rôle est avant tout un rôle de formation, hein, on est un institut de formation et on aimerait arriver à pouvoir faire ça un jour aussi. Dans nos cours que nous donnons aux planificateurs financiers, on les informe de la déontologie, des règles de pratique, mais notre rôle avant tout est un rôle de formation. On n'a pas les pouvoirs pour aller au-delà de cela. Cependant, on agit toujours en bon père de famille, à savoir: faites attention, etc., mais c'est avant tout notre rôle de formation.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Peut-être une dernière question, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Il vous reste six minutes.

Mme Marois: Ah bon! Je suis correcte. Il n'y a pas de problème. Bon. Vous appuyez l'orientation du projet de loi qui vise à assujettir l'ensemble des planificateurs financiers à l'Agence. C'est très clair. Mais vous savez que d'autres personnes ou d'autres organisations s'opposent à cela, entre autres, certaines corporations professionnelles. J'aimerais ça vous entendre un peu sur cela, parce que, évidemment, le rapport Martineau et ce que nous avons retenu va dans le sens de ce que vous proposez aussi, mais il faut être capable de répondre aussi par ailleurs à ceux qui présentent des oppositions, des objections dans l'autre sens.

Le Président (M. Paré): M. Pilotte. Mme Houle-LeSarge.

Mme Marois: Ça me fera plaisir.

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): Merci. Mme la ministre, nous comprenons très bien la position des ordres professionnels, étant moi-même membre d'un de ces ordres-là concernés, et, dans le but de protéger le public et de garder toujours en tête un seul et même endroit, il faut aussi penser à harmoniser. Il faut avoir des mêmes règles pour tout le monde, pour tous les planificateurs financiers, autant au niveau des règles de pratique que de la déontologie, que de l'inspection et au niveau de la formation continue obligatoire.

Alors, je pense que, dans l'esprit de protéger le public, pour ne pas qu'il y ait de malentendu dans la tête du public, il faut que les normes soient standard et harmonisées pour tous les planificateurs financiers.

Mme Marois: Et vous ne voyez pas de problème au fait qu'un membre d'un ordre professionnel ait, bien sûr, à respecter aussi le code de sa profession et, en même temps, à devoir respecter les exigences ou les règles de déontologie que les planificateurs financiers doivent aussi... auxquelles les planificateurs financiers doivent aussi se soumettre.

Le Président (M. Paré): Mme Houle-LeSarge, oui, allez-y.

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): Merci. Non, je n'en vois pas et je crois qu'un professionnel, par sa formation, est apte à se plier aux règles d'un code de déontologie. Il y a plusieurs professionnels qui ont plus d'un titre professionnel.

Mme Marois: Ça va. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): Merci. Merci, Mme la ministre. D'autres membres du côté ministériel? Non. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique de l'opposition en cette matière.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Pilotte, bienvenue madame. Dans votre mémoire, en page 2, vous mentionnez quelque chose dans le deuxième paragraphe à l'effet que l'acte de planificateur financier exclut spécifiquement la vente de produits financiers. Par conséquent, vous percevez le rôle du planificateur financier comme étant exclusivement un rôle-conseil divorcé de quelque produit que ce soit. Vous imaginez que, dans certains endroits ou dans certaines régions, il y a des personnes qui ont quand même beaucoup d'habilités et qui, pour survivre, ne peuvent pas exclusivement donner des conseils. Ils doivent, parce qu'il n'y a pas suffisamment de monde autour d'eux pour limiter leurs activités à donner des conseils et, par conséquent, doivent également parfois vendre des produits financiers. Votre mémoire semble voir là une lacune et, dans le fond, divorcer, empêcher ces gens de devenir des planificateurs financiers.

Est-ce que vous avez des recommandations à faire à ce sujet?

Le Président (M. Paré): M. Pilotte.

n(10 h 10)n

M. Pilotte (Richard): M. le Président, Mme la députée, membres de la commission, nous croyons que la planification financière est un gros avantage. Le planificateur financier, son permis, avant tout, c'est de donner du conseil. Comme vous le mentionnez, en région, si éventuellement le conseil ne permet pas de gagner sa vie de façon raisonnable, c'est la seule pratique qui permet d'aller chercher d'autres permis pour la distribution de produits et services financiers. C'est un gros avantage. Que vous soyez d'ordre professionnel ou planificateur financier non d'ordre professionnel, les deux ont le droit d'aller chercher d'autres permis. C'est un choix de carrière. C'est un gros avantage, parce que vous avez là, maintenant, le choix de pouvoir faire une double pratique ou de faire une seule pratique, comme moi, uniquement honoraire. C'est un choix de carrière. C'est un gros, gros avantage. Et, en plus, vous avez accès à ces services en région.

Cependant, ce qui est important, c'est que ces gens-là sont tous formés de la même façon: il faut qu'ils aient tous l'obligation de la formation continue pour maintenir leur haut standard; l'importance de bien les encadrer.

Mme Jérôme-Forget: Donc, ça n'exclut pas le rôle de... Le titre de planificateur financier n'exclut pas la possibilité de pouvoir vendre des produits financiers. C'était la façon avec laquelle c'était rédigé ici, dans le texte, ça semblait exclure ou vouloir exclure.

M. Pilotte (Richard): C'est deux gestes qui sont distincts.

Mme Jérôme-Forget: Qui doivent être distincts.

M. Pilotte (Richard): Alors, quand vous êtes planificateur financier, le premier geste que vous devez poser, c'est un geste de conseil. Si vous décidez de distribuer un produit ou d'aller chercher un autre permis qui est régi par un autre organisme, c'est un gros avantage. Au même titre que le C.A., le C.G.A, le notaire ou l'avocat qui décide d'exercer la planification financière va chercher son titre en planification financière puis décide de vendre des produits financiers, va chercher un permis de distribution de produits financiers. Et ça existe dans toutes les sphères de la société.

Mme Jérôme-Forget: Très brièvement, est-ce que vous proposez un ordre professionnel?

M. Pilotte (Richard): Alors, ce qu'on souhaite, c'est que l'Institut, avec ses 13 ans d'expérience, puisse être l'organisme qui va permettre au gouvernement de nous aider à cheminer vers un chapeau planificateur financier. C'est ce qu'on vous demande de nous aider à faire. On ne connaît pas la vraie réponse. Ce qu'on vous dit: Nous sommes les gens qui avons encadré ces gens-là depuis 13 ans. On a des accords avec les universités. Je pense qu'on peut, ensemble, nous aider, nous, à prendre la meilleure décision pour l'ensemble de l'industrie. Et c'est ce qu'on veut faire, comme table de concertation, avec le conseil national.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Pilotte. Madame?

Mme Jérôme-Forget: Je vais laisser mes collègues...

Le Président (M. Paré): Oui. Mme la députée de Beauce-Sud, suivie du député de D'Arcy-McGee.

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, Mme Houle-LeSarge et M. Pilotte. Vous avez mentionné, à la page 10 de votre mémoire, que le système de formation continue, qui a été mis en place suite à la Loi sur la distribution des services financiers, la loi n° 188, a été source de nombreux irritants. J'aimerais ça vous entendre, que vous élaboriez un peu sur ces irritants-là et comment vous croyez, par la création de l'Agence, qu'on pourra régler ces irritants-là.

Le Président (M. Paré): Mme Houle-LeSarge.

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): Merci. Au niveau de la formation continue obligatoire, la façon que ça avait été fait, c'est encore comme ça sous 188, il y avait trois niveaux de formation. Et, déjà là, le fait d'avoir trois niveaux représentait beaucoup de confusion dans la tête des gens. L'exigence était de 60 unités de formation continue, qui est un nombre ? même nous le constatons ? qui était trop élevé sur une période de deux ans. Alors, nous avons, à la lumière des deux premières années d'expérience, réévalué et nous avons des propositions à faire pour réaménager tout ça autant au niveau du nombre d'heures qu'au niveau de la façon dont la formation était partagée entre les différents niveaux. Il ne devrait plus y avoir de niveaux comme on a connu sous 188. Et la formation continue obligatoire devrait refléter encore plus les besoins du milieu en travaillant en collaboration avec les intervenants.

Le Président (M. Paré): Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Vous avez... Vous suggérez la création d'un conseil national de la planification financière qui prendrait la place de l'IQPF sous la création de l'Agence. Est-ce que par là vous souhaitez devenir un organisme d'autoréglementation?

Le Président (M. Paré): Madame.

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): Merci. Comme M. Pilotte vous a dit tout à l'heure, nous souhaitons être l'organisme qui est le maître d'oeuvre en planification financière au Québec, pour garder la place d'avant-garde que nous avons dans le moment. Alors, si c'est la forme d'un OAR, que ce soit sous la forme d'un ordre professionnel, l'important pour nous est que l'IQPF, en collaboration avec le législateur, garde sa place de premier rang en Amérique du Nord.

Mme Leblanc: Alors, finalement, si je comprends bien, vous ne demandez pas qu'il y ait des précisions dans la loi n° 107 à ce propos-là, mais vous souhaitez que, lors de la création de l'Agence au moment de l'année de transition, il y ait des avantages qui soient accordés au Conseil national de la planification financière.

Le Président (M. Paré): Mme Houle-LeSarge.

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): Nous souhaitons que, dans les prochaines semaines, nous puissions nous asseoir avec les gens du gouvernement pour discuter plus en détail de ce que sera le statut légal de l'Institut québécois de planification financière.

Mme Leblanc: Donc, il pourrait y avoir des amendements apportés à la loi n° 107, si les pourparlers avec le gouvernement vont bien?

Mme Houle-LeSarge (Jocelyne): Certainement.

Mme Leblanc: Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, madame. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Pilotte, Mme Houle-LeSarge, merci pour votre présentation. Vous savez, au Québec, on a un des meilleurs systèmes professionnels dans le monde et nous sommes très fiers de notre système professionnel sous le Code des professions avec un Office des professions et le Conseil interprofessionnel et les 45 ordres professionnels. Je ne dois pas vous dire ça, vous savez ça. Et, dans votre mémoire, vous souhaitez que le projet de loi vous confère les droits suivants, et vous parlez de l'émission du permis, du port du titre, de la formation continue, des règles de pratique, de droit de cotiser, et toujours avec le but principal de la protection du public. Et vous employez le mot «profession» souvent dans votre mémoire. Il me semble, si on étudie le Code des professions, que vous entrez dans le domaine du Code des professions. Et je me demande comment on peut, dans un projet de loi comme le projet de loi n° 107, créer, comme vous le demandez, presque un système parallèle professionnel?

Et, deuxièmement, si on étudie le projet de loi n° 107, on voit qu'il y a un silence dans ce projet de loi à l'égard de notre législation professionnelle sous le Code des professions. Et, comme vous le savez, la planification financière est une composante de l'exercice de plusieurs ordres professionnels, comme les administrateurs agréés, les avocats, les comptables agréés, les comptables en management accrédités, les comptables généraux licenciés et les notaires. Alors, je me demande comment on peut éviter notre système professionnel, même avec un projet de loi tellement important que le projet de loi n° 107? Alors, on ne peut pas faire indirectement, en droit, ce qu'on ne peut pas faire directement. Et, moi, je pense qu'on doit essayer de régler les problèmes, régler vos demandes sous et en vertu de notre système professionnel. Autrement, on nie ce qu'on a. On a bâti depuis 35 ans un système professionnel qui est la fierté du monde, on a des personnes de tout le monde qui viennent pour consulter notre système professionnel. Et si vous créez un système parallèle, alors, vous niez l'existence d'un système qui est tellement important, Mme la ministre.

Le Président (M. Paré): M. Pilotte.

M. Pilotte (Richard): M. le Président, M. le député, membres de la commission, vous savez, la planification financière est un geste professionnel, un geste de conseil. Cependant, vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a une pluralité de planificateurs financiers autant dans les ordres professionnels que membres de la Chambre ou du Bureau des services financiers ou ailleurs dans d'autres organismes de nature publique autant dans l'enseignement. Il faut ensemble trouver une avenue qui permet de rassembler tous ces gens-là sous un seul et même chapeau. Vous savez, si on décide ensemble de créer un ordre professionnel pour tout planificateur financier, vous en avez qui sont actuellement dans des ordres et d'autres ne sont pas dans des ordres. Notre rôle, c'est d'homogénéiser tous ces gens-là et de les amener sous un seul et même chapeau avec leur collaboration, autrement dit, avec tous les ordres professionnels, avec tous les membres des autres organisations, dans un seul et même conseil, pour qu'ensemble on puisse travailler tous dans la même direction avec, tous, les mêmes règles. Alors, je pense que nous pouvons réussir à faire cela grâce à l'Institut et la création de ce Conseil national là.

Le Président (M. Paré): M. le député, oui.

n(10 h 20)n

M. Bergman: M. le Président, le but de ma question ? en fait, les détails, on est d'accord sur les détails et sur vos buts ? le but de ma question, c'est d'être certain qu'on ne contourne pas ? c'est le bon mot? ? notre système professionnel. Nous avons un système professionnel, on doit le respecter. Si on ne respecte pas notre système professionnel, c'est négatif. Alors, moi, je pense que la seule manière pour atteindre vos buts, c'est par l'entremise de notre système professionnel, d'une manière ou l'autre, suivant les règles du Code des professions et suivant les articles 24 et 25 ou 25 et 26 qui font référence à la constitution des nouveaux ordres professionnels ou l'admission aux ordres professionnels, etc. Mais le but de ma question, c'est que le projet de loi n° 107 ne crée pas un système parallèle à notre système professionnel.

Le Président (M. Paré): M. Pilotte ou madame. Madame? Monsieur.

M. Pilotte (Richard): Alors, M. le Président, M. le député, membres de la commission, alors, il est évidemment de notre intérêt ? et nous demandons au gouvernement de nous aider, nous, l'Institut, avec eux ? de prendre la meilleure décision, qui ne viendra pas heurter le Code des professions, tout en maintenant toujours les mêmes hauts standards. Mais une chose qui est certaine, il faut que tout le monde soit sur les mêmes règles. Tous les praticiens en planification financière, peu importe leur appartenance, il faut qu'ils soient régis par un seul et même organisme, avec les mêmes règles de pratique et les mêmes règles de formation continue obligatoire.

On ne souhaite pas créer deux classes de citoyens ou deux classes de planificateurs financiers. Il faut qu'il y en ait une seule classe. Sous quel chapeau elle va se retrouver? On souhaite que ce soient nous qui puissions, avec le gouvernement, réussir à harmoniser tout ça, mais sans heurter aucune loi, et que tout le monde soit sous le même chapeau. C'est important pour nous. Pas deux classes de planificateurs financiers.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de D'Arcy-McGee? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys?

Mme Jérôme-Forget: J'ai terminé, merci.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre? Donc, il me reste à vous remercier de votre contribution ici, à la commission. Merci.

Des voix: Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): J'appellerais, s'il vous plaît, Mme Madeleine Plamondon, Mme Nathalie St-Pierre et M. Yves Michaud.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Bienvenue, mesdames, bienvenue, monsieur, à cette commission. Vous aurez 20 minutes pour exposer votre ou vos témoignages, et par la suite les parlementaires auront 40 minutes pour échanger avec vous, donc, questions et réponses. Donc, bienvenue. Je ne sais pas qui va prendre la parole. M. Michaud en premier.

Mmes Madeleine Plamondon et
Nathalie St-Pierre et M. Yves Michaud

M. Michaud (Yves): Oui, je tirerai les premières salves, je vais sortir mon livre rouge et, contrairement à l'accoutumée, je serai d'une brièveté exemplaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paré): Merci, monsieur.

Une voix: C'est moi qui lui ai demandé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Oui, on a tellement insisté. Nous sommes les trois mousquetaires de la défense et de protection des consommateurs au Québec, à la fois Nathalie St-Pierre et Madeleine Plamondon qui est à la fois Athos, Porthos, Aramis et d'Artagnan, dans son cas, parce qu'elle s'occupe de cela depuis à peu près une quarantaine d'années.

Alors, M. le Président, Mme la vice-première ministre et ministre des Finances, Mme le porte-parole de l'opposition officielle de Sa Majesté, Mmes et MM. les députés, d'entrée de jeu, je n'oserais vous dire: Je vous remercie de m'avoir reçu, je n'oserais m'adresser à vous comme futurs collègues de l'Amicale des anciens parlementaires du Québec, insigne que je porte avec fierté, pour deux raisons: premièrement, parce que les lendemains qui me sont comptés sont plus rarissimes que les vôtres; et la deuxième, n'étant ni devin ni prophète, il serait souverainement inconvenant et fort malséant que je devise sur les caprices du hasard ou la bonne ou mauvaise fortune issue du secret des urnes. Je n'ai d'autre qualité ? au singulier ? pour m'adresser à vous que celle d'un honnête homme ? au sens classique du terme, bien sûr, au sens où Molière l'entendait ? à la libre parole que confère parfois la sagesse des ans et un homme totalement indépendant du secteur financier, quoique ayant glané çà et là ces derniers temps quelques expériences à titre de vice-président du Bureau des services financiers et, surtout, ayant fondé l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec et en cette qualité de militant de la démocratie actionnariale au sein des institutions à capital ouvert.

Réserve étant faite pour les poncifs d'une nouvelle économie terriblement vieillissante qui ont pour nom «rationalisation», «restructuration», «fusion», «décloisonnement», «déréglementation», dont l'application s'est soldée la plupart du temps par de retentissantes faillites et la perte de millions d'emplois, mes remarques se limiteront à un seul aspect qui est celui de la direction de la nouvelle Agence. Je laisserai de côté mes appréhensions pour tout ce qui est mégastructure, administration babylonesque, construction pharaonique, administrative, bien sûr, dans lesquelles souvent une chatte ne retrouve pas ses petits.

Dans ma lettre du 24 mai 2002, dont vous avez sûrement pris connaissance, je faisais part à la ministre des Finances de mon inquiétude suite à certains aspects du projet de loi n° 107, notamment le choix du gouvernement d'opter pour une structure de direction de l'Agence par une seule personne. Il me semblerait, écrivais-je alors, dans l'intérêt général que l'on optât pour une gestion d'un président-directeur général et des commissaires, modèle que l'on retrouve dans la plupart des autorités réglementaires en valeurs mobilières et autres organismes apparentés non seulement en sol québécois, mais outre-frontière.

Ce que je qualifiais il y a plus de trois mois d'inquiétude est devenu depuis un danger appréhendé, tant mon opinion s'est raffermie devant le fait que le futur P.D.G. de l'Agence pourrait à la fois instituer une enquête, tenir une audience et rendre jugement. Cela me semble contraire à tous les principes élémentaires du droit de régie d'entreprise et de bonne gouvernance, entre guillemets, mot à la mode que je n'aime guère, mais qui fait florès dans le monde des secteurs financiers. Dans ce monde complexe, comme ailleurs, il importe que tout pouvoir ? et celui du P.D.G, si je m'en fie au projet de loi, sera immense ? il importe que des mécanismes de contrepoids et de contre-pouvoir soient mis en place pour assurer une collégialité des décisions dans une industrie dont le volume annuel d'affaires représente près, sinon plus, du quart du budget du Québec, environ 10 milliards par rapport à 40, 44 milliards. Et ce n'est pas à des parlementaires aguerris que j'expliquerai les vertus de ce que nos confrères britanniques appellent le «check and balance», principe fondamental de la démocratie tout court. Me référant à un principe non moins important du droit ? Quid custodiet custodes? Qui surveillera nos surveillants? ? il me paraît de plus en plus risqué et contraire à l'intérêt public que le projet de loi accorde à une seule personne une concentration déraisonnable des pouvoirs. La concentration des pouvoirs engendre infailliblement les abus de pouvoir. Il devrait y avoir un compromis raisonnable, ce me semble, entre les conseils d'administration obèses dans lesquels le processus décisionnel est souvent paralysé par les coteries, l'intérêt personnel ou corporatif, les vestibules d'intérêts ? ce qui est la version française des «lobbies» ? qui bourdonnent autour des pouvoirs politiques et financiers.

n(10 h 30)n

Les consommateurs des produits financiers seraient mieux servis si la nouvelle Agence était dirigée par un président-directeur général avec cinq ou sept commissaires, au choix, dont la majorité totalement indépendante du secteur financier. Tout commissaire se verrait reconnaître un droit de dissidence dans la prise de décision et rendu public s'il le juge à propos. Les décisions devraient être rendues par un quorum formé d'un minimum de commissaires, de trois personnes, le P.D.G. s'abstenant de siéger dans des cas de nature quasi judiciaire, compte tenu de ses fonctions de superviseur des dossiers dans lesquels à la fois il pourrait être juge et partie.

M. le Président, le monde financier se meurt d'opacité, de secrets, de silence, de jeux de cache-cache, d'absence de transparence et d'imputabilité de la part des managers salariés qui trônent sur des empires financiers et qui n'ont souvent, hélas, pour reprendre les célèbres vers de Victor Hugo, dont nous célébrons cette année le 200e anniversaire de sa naissance, qui n'ont d'autres intérêts que de remplir leurs poches et de s'enfuir après ? c'est dans Ruy Blas.

Donc, investis de la souveraineté populaire, je trouve que les députés de l'Assemblée nationale ont l'occasion belle d'accoucher d'une loi avant-gardiste, équilibrée, lumineuse dans tous ses aspects, sans pouvoirs régaliens entre les mains d'une seule personne, et cela, pour le plus grand bénéfice des citoyens et des citoyennes du Québec. Mon souhait le plus fervent est qu'il en soit ainsi, avec mes remerciements pour la bienveillante attention que vous avez bien voulu porter à mes propos.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Michaud. Mme St-Pierre ou Mme Plamondon? Mme Plamondon.

Mme Plamondon (Madeleine): Je n'ai pas présenté de document puis c'est avec un certain scepticisme que je me présente ici parce que, ayant fait partie... L'expérience peut nous servir, mais, en même temps, ça nous donne beaucoup de leçons. J'ai fait partie de tout ce qui s'est passé autour de la loi n° 134, la loi n° 188, j'ai assisté à la réglementation des deux, j'ai assisté à toutes les commissions parlementaires de 188, et c'est avec un certain désenchantement vis-à-vis les décisions politiques que je me présente ici aujourd'hui, mais en même temps avec un certain espoir que peut-être ça peut être un peu mieux cette fois-ci.

D'abord, j'ai quatre points que j'aimerais vous faire remarquer. J'ai lu tout le projet de loi, je ne m'en irai pas dans le détail du projet de loi avec les virgules puis les alinéas, mais j'aimerais plutôt vous laisser avec des impressions.

D'abord, je me suis prononcée en faveur d'un guichet unique. Et, quand je dis «je me suis prononcée», on nous a dit que j'étais invitée ici à titre personnel et non pas à titre de présidente de mon organisme, mais je dois vous dire que, à titre de présidente de l'organisme, j'ai dirigé plusieurs études, autant dans le domaine bancaire que dans le domaine des assurances, et ça fait plusieurs années que notre organisme intervient sur la scène fédérale autant que la scène provinciale. On a fait partie de comités, de conseils d'administration, etc., nommés par un palier ou par l'autre, et c'est à ce titre-là qu'on a acquis une certaine expérience, pour ne pas dire une expérience certaine, dans des sujets, par exemple, de la structure des organismes, de l'information aux consommateurs, des mécanismes de recours et de la formation qui devrait être donnée à ceux qui sont en contact avec les consommateurs québécois.

J'aimerais parler, pour commencer, du guichet unique, parce que je me suis prononcée en faveur d'un guichet unique. Toutefois, quand on parle avec plusieurs personnes, le terme «guichet unique», ça revêt des sens très différents. Si on regarde un consommateur, le consommateur, un guichet unique, c'est: Je m'adresse à vous et vous me prenez en charge. Si je m'adresse à une institution financière, on va dire, si c'est un guichet unique: Vous allez commencer par la personne qui vous a servi la première, ensuite vous allez suivre la hiérarchie du mécanisme de recours. Et, si on s'en va au-delà de ça, bien, on pourra avoir des instances qui vont pouvoir avoir un pouvoir de surveillance sur les institutions financières et, au-dessus de ça, ce que j'espère la chance, établir des normes et non pas les laisser établir, les normes, par les institutions financières.

Donc, le guichet unique, j'aimerais que votre groupe clarifie ce que c'est pour que le consommateur ne soit pas déçu dans ses attentes quand il sera aiguillé vers un autre organisme. Parce que, à moins de le prendre en charge dès le premier appel, ce n'est pas un guichet unique dans le sens où l'entend le consommateur. Donc, il va falloir définir, quand il y aura de la publicité, quand il y aura des campagnes d'information, ce qu'est le guichet unique, qu'est-ce que ça fait ce guichet unique là.

La transparence, c'est dans la référence aussi. Est-ce que ça va être une référence, si les gens s'adressent au guichet unique, qui est l'Agence? Est-ce qu'il va y avoir seulement une référence, et une bonne référence? Est-ce que ça va être la qualité de la référence ou si ça va être référence et suivi, et surveillance aussi, surveillance à partir de normes qui ont été faites par l'Agence? Ce que je crains, c'est que les institutions financières qui devront être régies, si vous voulez, ou s'adresser à l'Agence, fassent leurs propres normes et que ce soit accepté comme ça tant qu'il n'y aura pas de plainte. J'aimerais que ce soit l'Agence qui fasse les normes et qui soit responsable de l'application des normes quant aux mécanismes de recours.

L'information au consommateur. Quand je vous disais que j'étais déçue ? j'ai rencontré Mme Marois; j'ai rencontré, une heure et demie, M. Legault; j'ai été appuyée par 25 groupes de consommateurs; je siège au Bureau des services financiers: 188 avait mis dans sa loi un article qui me semblait le coeur de 188 et qui n'a jamais été mis en application. Je vous le lis, ça vous guidera à ce moment-là quand vous laisserez à des OAR le soin de dire qu'est-ce qu'il faut dire au consommateur. «Un représentant ? l'article 28 ? en assurances doit, avant la conclusion d'un contrat d'assurance, décrire le produit au client, lui préciser la nature de la garantie et lui indiquer clairement les exclusions de la garantie.» Ça n'a jamais été mis en application.

Jour après jour ou semaine après semaine, on voit dans les journaux des conseillers, ceux qui sont responsables de chroniques dire: S'il arrive telle chose, demandez donc à votre agent ou à votre courtier si ce ne serait pas dans les exclusions, parce qu'il ne sait pas. Donc, c'est le journal qui dit: Demandez donc si c'est dans les exclusions. J'ai fait l'expérience d'appeler un courtier, et la personne m'a répondu à l'autre bout: Vous savez bien, Mme Plamondon, il y a bien trop d'exclusions au contrat, je ne suis pas pour toutes vous les lire. J'ai dit: D'abord, dites-moi les pages dans le contrat. Ah bien! là, il faudrait que j'aille regarder dans mon guide parce que je ne sais pas les pages. Tu sais? Non, ça veut dire... J'ai dit: Coudon, est-ce que vous êtes certifiée pour me donner un conseil? Puis j'ai dit: Attends un petit peu, là, je vais dire qu'est-ce que je fais, je siège au Bureau des services financiers, puis tu n'es pas en train de me répondre comme du monde, tu sais. Bon.

C'est renouvelé automatiquement, donc il n'y a personne qui va aller dire les exclusions à un contrat, on le sait. Quand je siégeais au niveau du Conseil des assurances de personnes, il y avait... ça ne s'appelait pas le conseiller en sécurité financière, dans ce temps-là, ça s'appelait d'autre chose, mais, je veux dire, la seule personne qui connaît bien sa police, c'est la veuve parce que c'est là qu'elle l'apprend, au moment... Parce qu'on déballe toujours une police d'assurance dans un moment pénible dans la vie. Donc, c'est à ce moment-là qu'on en apprend la portée. Il faut absolument que l'article 28 rentre en vigueur. Vous auriez beau faire une agence, multiplier les projets de loi, restructurer, agiter les drapeaux des consommateurs, si vous ne mettez pas en application l'article 28, vous oubliez de mettre un coeur dans votre loi. L'information, c'est ça, ça commence par le représentant et ça va jusqu'à des contrats clairs vis-à-vis de ceux qui font les produits.

n(10 h 40)n

Quant aux OAR maintenant. Les OAR sont, en majorité... ou, si vous en retenez, parce que je vois qu'il y en a deux qui sont déjà retenus, les deux Chambres, si vous les retenez, il faudra changer la composition des conseils d'administration. Il y a deux personnes qui représentent le public là-dessus et, au premier conseil d'administration d'une de ces deux Chambres-là, les deux personnes provenaient du milieu de l'assurance, qui représentaient le public. Une était active et l'autre était à sa retraite.

Mais c'est pour vous dire que des gens totalement indépendants, avec tous les scandales financiers qu'on voit, avec tout ce qu'on voit qui se passe aux États-Unis, il ne faut pas penser que, nous, on peut continuer à avoir deux personnes qui siègent là. Il faut avoir une majorité d'indépendants si vous voulez garder une crédibilité non seulement sur le plan québécois, sur le plan canadien, sur le plan mondial. C'est tout.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Plamondon. Mme St-Pierre.

Mme St-Pierre (Nathalie): M. le Président, Mme la vice-première ministre, ministre des Finances, membres de la commission. Alors, je suis invitée ici à titre individuel, mais je tiens quand même à dire que les vues que je vais exposer sont évidemment les vues de l'Union des consommateurs. Évidemment, accompagnée de personnes qui ont éminemment plus d'expérience que moi dans le domaine, je vais tenter modestement de vous faire part de certaines préoccupations que nous avons.

D'abord, par exemple, j'aurais voulu, si j'avais eu le temps, vous parler des consommateurs. J'aurais voulu vous parler des 17 000 Québécois qui ont en ce moment une police d'assurance de la Société coopérative d'assurance funéraire et pour laquelle ils ne sont pas capables à l'heure actuelle d'exercer le bénéfice. Comme disait Madeleine tout à l'heure, c'est toujours la veuve qui se rend compte qu'il y a un problème. Bien, dans ce cas-ci, ce sont les parents qui tentent de faire enterrer... c'est-à-dire les enfants ou la succession qui tente de faire enterrer les parents et qui ne sont pas capables d'avoir le bénéfice qu'ils pensaient avoir droit de recevoir. Personne ne sait où est l'argent, personne ne sait quel type de produit. Pourtant, ça s'est vendu pendant de nombreuses années.

J'aurais voulu aussi prendre le temps de vous parler des 5 000 Québécois qui ont aussi tenté de s'acheter un produit pour couvrir un bénéfice quand ils allaient... Encore là, ils voulaient un capital pour se faire enterrer. Ils voulaient avoir environ 5 000 $ et on leur a dit: On va vous vendre un petit produit pas cher, pas cher. Et évidemment, comme l'a dit Madeleine tout à l'heure, la divulgation a mal été faite et on a dit: Ce n'est pas cher, ce n'est pas cher, mais on a oublié de leur dire qu'il y avait une petite disposition qui permettait d'augmenter de 15 % à chaque année le coût du produit. Et on a oublié aussi de leur dire que finalement, en bout de piste, le produit avait été mal conçu et que, si vous ne mourriez pas assez tôt, bien, ça allait vous coûter le double de ce que vous aviez pensé recevoir à la fin de votre vie. Mais il y a 5 000 Québécois, à l'heure actuelle, qui ont payé plus du double du bénéfice qu'ils vont recevoir, et il n'y a personne... Tout le monde dit: Bien, excusez-nous, il y a eu une erreur dans la conception du produit. Et il n'y a personne qui répond à l'appel des consommateurs.

J'aurais voulu aussi vous parler des 500 000 Québécois qui ont acheté ce qu'on appelle les «vanishing premiums», c'est-à-dire les primes qui étaient supposées de s'autofinancer. Encore là, une belle publicité qui disait aux consommateurs qu'au bout de 10 ans ils n'auraient plus à payer, parce que les intérêts générés par le placement, finalement, qu'ils faisaient, eh bien, il serait suffisant pour payer les primes annuelles. Mais ce n'est pas ça qui s'est passé. Il y a un consommateur qui a reçu une lettre qui l'informait qu'il y en avait pour 43 ans encore à payer, alors qu'on lui avait dit qu'en tout il aurait eu 10 ans à payer.

Bien, il en a 600 000 Québécois environ qui ont un produit similaire et pour lequel ce monsieur-là, frustré et évidemment tenace, a décidé d'intenter un recours collectif. Il y a eu une transaction. Il y a eu évidemment une certaine reconnaissance, finalement, qu'il y avait un problème de la part de l'assureur pour 100 000 Québécois, dans ce cas-ci. Mais, comme il n'y avait personne au bout de la ligne pour aider les consommateurs, eh bien, ce qui est arrivé, c'est qu'il y a seulement que 25 % de ces 100 000 Québécois là qui ont eu finalement un règlement adéquat pour le problème qu'ils avaient. Donc, on peut gagner, mais, même là, comme il n'y a pas personne pour nous aider, on se retrouve à ne plus avoir de support et à ne pas être capable d'exercer un choix.

J'aurais voulu vous parler de problèmes qu'il y avait en assurance invalidité, en assurance habitation, maisons avec la MIUF, qui ne peuvent plus trouver d'assureur, etc. Il y en a. On n'a pas le temps malheureusement.

Évidemment, quand le rapport du groupe Martineau est venu confirmer ce qu'on disait depuis longtemps, que c'est un labyrinthe et que les consommateurs sont incapables de trouver réponse à leurs questions, évidemment qu'on était assez content. On ne pouvait pas ne pas être d'accord. Donc, la mise en place de l'Agence, qui vient finalement bonifier tout ça, c'est un jalon important pour nous dans la protection des consommateurs. Mais la crédibilité dont on parle d'ailleurs depuis hier, elle se gagne par des actes et par des actions. Elle ne viendra pas toute seule. Et cette Agence-là donc ne peut pas être crédible s'il ne se passe rien de plus que ce qui se passe actuellement. On constate que l'Agence peut devenir crédible rapidement pour l'industrie, qu'il y aurait moins de réglementation, qu'il y aura un allégement du fardeau administratif pour l'industrie. C'est bien. Mais on aimerait qu'elle devienne aussi crédible pour les consommateurs.

C'est donc pourquoi ce qu'on veut par-dessus tout aujourd'hui, c'est qu'il y ait une volonté, qu'on comprenne qu'il y a une volonté de s'assurer que cette Agence-là va vraiment protéger les consommateurs et qu'on ne va pas juste continuer d'administrer les lois actuelles mais qu'on va rendre ces lois-là vivantes et capables de répondre aux attentes des consommateurs.

Les lois actuelles qui encadrent le marché ne sont pas parfaites, évidemment. Madeleine en a mentionné des exemples, il y en a eu d'autres qui en ont parlé depuis hier, qu'il y a certaines lacunes. Et évidemment que, comme d'autres, on aurait aimé que ces lois-là soient revues immédiatement. Mais, dans le fond, finalement, on se dit que peut-être que c'est préférable, effectivement, d'attendre que l'Agence soit en place, si l'Agence a le leadership nécessaire, puisqu'ainsi on évitera peut-être le tiraillage de couverture et qu'on pourra enfin, effectivement, harmoniser et mettre en place des protections intéressantes pour les consommateurs.

Mais, déjà, au sein des lois actuelles, il y a des protections, il y a des mécanismes, et ils ne sont pas mis en vigueur ou souvent ils manquent d'argent, parce que, effectivement, quand vient le temps de décider où on alloue le budget, eh bien, il n'y a pas de ressources financières disponibles en quantité suffisante pour les mettre en pratique. C'est ça, c'est de ça qu'on parle quand on parle de volonté. Et c'est pour ça que, de notre avis, à l'heure actuelle, on peut attendre, pour revoir les lois, que l'Agence prenne une place.

Évidemment, on sait déjà que les mécanismes qui sont sous-utilisés devraient l'être davantage. On en a assez d'entendre se faire dire: Oups! désolé, le produit n'est pas bon; on a fait une erreur et puis on ne peut rien faire pour vous; c'est un vieux produit, ça fait 50 ans, donc on ne peut plus rien faire. On a le goût de dire aux consommateurs qu'il y a quelqu'un de crédible qui va pouvoir répondre à leurs préoccupations.

Hier, Mme Crépin a fait référence à une nouvelle tendance, qu'elle a nommée le «Twin Peaks». J'avais peur qu'elle parle du «Twilight Zone» mais, bon. Elle a dit: Le «Twin Peaks»... Là, je m'amusais à traduire ça un peu dans ma tête en l'écoutant parler puis l'image qui me venait, c'est celle des sommets, hein? les montagnes. Bon, évidemment, je pense qu'on a probablement tous pensé à la même chose. Et je me suis dit que, nous, on avait cinq sommets, on n'en avait pas deux mais on en avait cinq. Dans la loi, il y a cinq directions ou, en tout cas, cinq aspects qu'on pense couvrir. Alors, je me suis dit: Mon Dieu! mais on est en train de faire face au mont Everest, rien de moins. Et, dans ce sens-là, je pense qu'on a un défi assez incroyable. Monter le mont Everest, ça a pris du temps, mais, bon, on y est parvenu. Alors, je pense que le Québec est capable de... La société québécoise est capable de faire face à ce défi-là.

On l'a vu, on l'a fait. En matière de protection du consommateur, en général, le Québec est vraiment à l'avant-garde. Partout, on est reconnu pour offrir une de meilleures lois de protection des consommateurs. Est-ce qu'on serait enfin à l'aube de faire la même chose dans le secteur financier?

Il faut donc continuer. Il faut continuer d'être visionnaire et de donner tout ce qu'il faut à cette Agence pour qu'elle exerce le leadership nécessaire, pas juste dire: Il y a un problème, désolé, on ne peut pas rien faire; mais se dire: Bon, mais qu'est-ce qu'on peut faire? Et puis, même si on ne peut pas régler le problème individuellement, eh bien, peut-être qu'à moyen et à long terme on peut faire en sorte que les lois, les règlements, les directives ou même les comportements de l'industrie puissent changer tranquillement. Et là le consommateur pourrait y voir un gain et être rassuré. Ce qui mine la confiance, à l'heure actuelle, des consommateurs, c'est de savoir qu'il n'y a jamais personne qui répond à l'appel qui est placé, qu'on dit toujours: Excusez-nous, on ne peut pas vous aider.

Évidemment, plus spécifiquement, je voudrais faire trois petits commentaires rapidement, un peu comme Mme Plamondon l'a fait. Je pense que, d'abord, en matière d'information des consommateurs, je dois appuyer Mme Plamondon. L'article 28, entre autres, doit entrer en vigueur, et on doit permettre aux consommateurs de mieux comprendre. Il faut quand même ne pas penser que l'éducation des consommateurs va remplacer tout. Ce n'est pas... On ne demandera pas aux consommateurs de devenir des planificateurs financiers, des notaires, des avocats et de pouvoir tout comprendre; comme on ne leur demande pas d'être des plombiers non plus. Quand on parle d'éducation des consommateurs et d'information, je pense qu'on doit d'abord axer ces programmes-là sur aider les consommateurs à savoir ce à quoi ils ont droit, à quoi devraient-ils s'attendre.

n(10 h 50)n

En matière de règlement de différends et de traitement des plaintes, une mise en garde: Je pense qu'il vaut peut-être mieux ne pas perdre trop de temps à tenter de faire en sorte que l'industrie se dote d'un bon système de service à la clientèle. Parce que je pense qu'il faut quand même distinguer entre un service à la clientèle et un traitement des plaintes et du règlement de différends. On peut tous recevoir un appel et essayer de satisfaire le consommateur lorsqu'on est une entreprise, je pense que cela va de soi. Mais, dès lors que ça devient une plainte et qu'on cherche à obtenir gain de cause, eh bien, il faut se tourner vers un tiers qui va pouvoir, de façon neutre, nous fournir l'information pour qu'on puisse exercer nos recours.

Alors, on ne peut pas dire que c'est l'entreprise qui va, d'un bout à l'autre, concevoir le produit, le mettre en marché et régler notre différend à la fin quand on a un problème et penser que, de cette façon, le consommateur va être satisfait. Je pense qu'il faut mettre quand même ce qu'on a appelé des «checks and balances», il faut mettre quand même des protections adéquates à ce niveau-là. Donc, dans ce sens-là, je crois qu'il faut faire attention avant d'impartir le système, par exemple, de traitement des plaintes, règlement de différends, médiation à des organismes, alors qu'on ne maîtrise même pas cet aspect-là encore au Québec. Je pense qu'on a du travail à faire et que l'Agence devrait le faire elle-même, d'avoir la direction de l'assistance au consommateur évidemment et par la suite voir comment ça fonctionne avant de confier ça à d'autres. Ce qui a été fait jusqu'à maintenant, les centres de renseignement et tout ça, je pense qu'il y a quand même certaines lacunes à l'heure actuelle. Et, finalement...

Le Président (M. Paré): En terminant, Mme St-Pierre.

Mme St-Pierre (Nathalie): Oui. En conclusion, donc, je pense qu'il faut garder le cap, il faut s'assurer que les consommateurs puissent être mieux protégés. Et je pense qu'on a des outils, là, qui commencent à être intéressants, mais il faut une volonté d'agir, et c'est ce qu'on souhaite trouver ici aujourd'hui.

Le Président (M. Paré): Merci, mesdames, merci, monsieur. Mme la ministre.

Mme Marois: Bon. Alors, merci, M. le Président. Je vous remercie, Mme Plamondon, Mme St-Pierre et M. Michaud, de l'excellent travail que vous avez fait, de réflexion, évidemment qui s'appuie sur de l'expérience, longue dans tous les cas ou sûrement en profondeur dans bien d'autres, et ça apporte à la commission des témoignages particulièrement importants. Pourquoi? Parce que l'objectif que nous poursuivons, c'est de nous assurer que l'intérêt public va d'abord et avant tout être protégé, être au coeur de cette nouvelle loi et que c'est en vertu de cela qu'on va la modifier, l'amender de telle sorte qu'elle réponde encore mieux à ces préoccupations.

Deux, je pense que vous avez mentionné à tour de rôle que le Québec était à l'avant-garde en matière de protection du consommateur, de par ses lois, de par ses préoccupations, de par ses institutions. Et notre objectif, c'est non seulement de le demeurer, mais d'aller plus loin, si tant est que c'est possible de le faire. J'étais heureuse d'entendre Mme Plamondon nous dire qu'elle avait certains doutes, mais qu'elle gardait de l'espoir. Évidemment, c'est lourd à porter de notre côté par ailleurs, parce qu'il ne faut pas décevoir cet espoir-là et être capables de répondre aux préoccupations que vous avez mentionnées.

Alors, je vais d'abord reprendre certains éléments pour vous indiquer ce que nous voulons faire et comment nous interprétons la loi qui est devant nous, ensuite qu'est-ce qu'il faudra faire pour la corriger de telle sorte qu'elle réponde bien à cette interprétation que nous en faisons et que notre volonté politique se traduise concrètement par des articles qu'on retrouvera dans la loi. Bon.

C'est vrai qu'on s'était rencontrés, et je retrouve donc dans vos propos plusieurs des commentaires que vous m'aviez faits à ce moment-là, et mes gens ont depuis travaillé déjà sur un certain nombre de choses, et éventuellement, lorsque l'on reviendra en commission parlementaire pour étudier article par article le projet de loi, nous allons retenir un certain nombre de ceux-ci et essayer d'amender en conséquence la loi.

D'abord, sur les questions qui étaient soulevées... Puis je reviendrai après ça sur la gouvernance, n'est-ce pas, et sur les règles de la régie de l'entreprise. Mais prenons d'abord tout l'angle de la protection du consommateur et des attentes que vous avez exprimées et des points de vue que vous avez à cet égard. D'abord, je comprends que vous appuyez le fait que l'on constitue une agence. Vous êtes impatients ou impatientes que cette Agence agisse pour corriger les règles, que ce soient celles de déontologie, d'encadrement ou de traitement de plaintes, ou peu importe, et je suis d'accord avec vous. Mais, en même temps, on sait que le temps ne respecte pas ce qu'on fait sans lui, et, en ce sens-là, je crois qu'il faut constituer l'Agence et lui donner ensuite ce mandat de corriger un certain nombre de choses, d'harmoniser et d'aller plus loin. Bon. Je comprends, entre autres Mme St-Pierre le mentionnait, que vous êtes d'accord avec cette perspective-là.

Maintenant, revenons à des choses plus concrètes. On dit, et c'est Mme Plamondon qui dit: Nous sommes en faveur d'un guichet unique, mais, un guichet unique, ça peut vouloir dire beaucoup de choses, et ce qu'on voudrait que ça veuille dire ? et j'essaie de vérifier avec vous si j'ai la bonne interprétation, la bonne compréhension de ce que vous me dites ? c'est: On veut qu'il y ait vraiment une prise en charge, au sens qu'on ne réfère pas à mais qu'on traite la situation, la demande d'information, la plainte, peu importe, l'objet pour lequel le consommateur s'adressera à l'Agence, qu'on assure un suivi et une surveillance. Et c'est la volonté du législateur, enfin, ou du moins de celui qui propose à ce moment-ci, éventuellement nous verrons si c'est le cas de tous les législateurs autour de la table, mais c'est notre volonté de nous assurer que c'est de cela dont il s'agit.

Ensuite, vous nous dites: L'expérience que nous avons vécue n'est pas toujours intéressante, pensez à l'article 28 dans la loi n° 188 où on ne met pas en application un tel article qui dit que, avant que l'on conclut un contrat d'assurance, on doive décrire au client le produit, préciser la nature de la garantie. Bon, je ne reviens pas sur ce que je vous avais dit, j'avais dit: Nous allons nous préoccuper de cela. Il y a des difficultés dans l'application de cet article, c'est pour ça d'ailleurs que ça ne se fait pas dans l'esprit où on l'aurait souhaité, mais ça veut dire qu'il faut le préciser, il faut le resserrer et il faudra travailler, et ça, ça va rejoindre... Et donc nous sommes d'accord avec vous qu'il faut faire en sorte que l'esprit de cet article se concrétise. Ça ne peut pas rester seulement un souhait, de telle sorte que le consommateur, en bout de piste, se retrouve avec les situations que Mme St-Pierre nous décrivait.

Quand vous dites: Je ne vous parlerai pas de, bien, vous en avez parlé un peu quand même, là. Mais, vous avez raison, il faut être capable de dénoncer de telles situations mais surtout de les changer et puis d'éviter qu'elles ne se reproduisent. Bon. Alors, comment faire en sorte que, réalistement, on l'applique, cet article-là, que ça se concrétise. Bon. Et ça va revenir aussi dans la perspective que vous avez soulevée, de se préoccuper... Ça devra nous amener à nous préoccuper des obligations faites, par exemple, aux OAR, de telle sorte qu'il n'y ait pas, là non plus, d'ambiguïté.

Et puis je vais aller plus loin, là, vous poser une question. Je suis d'accord avec vous que les membres du conseil d'un OAR puissent faire en sorte qu'il y ait de la place pour des représentants de consommateurs. Vous nous dites: On est passé à côté de l'esprit de ce qu'on avait souhaité à cet égard-là. Alors, que nous proposez-vous pour qu'on s'assure que l'esprit soit respecté, concrètement, par exemple?

Le Président (M. Paré): Mme Plamondon.

Mme Plamondon (Madeleine): D'abord, que, s'il y a OAR, puisque vous l'avez mis dans votre projet de loi, il faudrait que la majorité des gens ne soient pas des gens élus par les représentants. Quand les gens se font élire, ils ne diront certainement pas à leurs commettants: Élisez-moi, je veux protéger mieux le consommateur contre ce que vous pourriez faire. Donc, malgré... Je ne mets pas en doute les intentions, je fais juste dire que quelqu'un qui élit quelqu'un d'autre, c'est pour se faire représenter. D'ailleurs, c'est ce que Yves disait tantôt dans la régie d'entreprise. On s'en va vers des conseils d'administration à majorité composés d'indépendants. Donc, que ce soit des commissaires ou d'autres, il faut que ce soit des gens qui sont indépendants, pour garder une crédibilité. Même s'il ne se passait rien, pour garder une crédibilité, il faut que ce soit des gens à majorité indépendants. Bon. La première chose.

n(11 heures)n

Une chose que je disais aussi... Je n'ai pas mentionné la formation, mais ça va aussi dans cet esprit-là parce que la formation, qu'elle soit la formation de base pour devenir représentant ou la formation continue, devrait être contrôlée complètement par l'Agence, et je m'explique: Si ça prend une note de passage de 60 % et quelqu'un passe avec 60, ça veut dire qu'il y a 40 % qu'il n'a pas compris. Les unités de formation continue, est-ce qu'elles s'adressent au 40 % qu'il n'a pas compris ou ce qu'il y a en périphérie des activités du représentant? Donc, il faut qu'il y ait une coordination et il faut que toute la formation, pour que ce soit cohérent, qu'on ait des représentants qui expliquent comme il faut aux consommateurs et qui savent de quoi ils parlent, bon, bien il faut que la formation continue soit greffée sur la formation de base et que ça relève d'un organisme qui va faire des normes.

Et donc, c'est l'Agence qui devrait faire les normes là-dedans. C'est bien clair, parce qu'il y a eu, au Bureau des services financiers, par exemple, il y a eu ? l'impact sur le rehaussement de la formation ? il y a eu un comité. Il n'y en a pas, de rehaussement. Où il est, l'impact? Il n'y en a pas eu, de rehaussement. Il faut que cette entité-là qui est l'Agence soit capable de dire quelles sortes de normes ça prend pour ceux qu'on a bien voulu accepter comme OAR ? parce que c'est ça que vous avez voulu ? et que ça ne réponde pas à des pressions politiques, mais que ça réponde à des pressions de la part des consommateurs, mais il faut que ce soient des normes qui soient plus élevées, il faut que ce soient des normes qui garantissent que le représentant va bien expliquer au consommateur. Ça se greffe de près à l'article 28. Il n'en aura pas de problèmes à l'expliquer si tout est bien compris. Donc, la formation continue, quant à moi, elle devrait être pensée toujours avec ce qui n'a pas été compris dans la formation de base.

Le Président (M. Paré): Merci, madame.

Mme Marois: Je vous remercie. Je veux quand même souligner le fait qu'on a reçu tout à l'heure l'Institut québécois de planification financière et eux soulignaient qu'il y a eu un travail énorme et un progrès très important de ce côté-là. Mais je suis d'accord avec vous qu'il faut aller encore plus loin et qu'il y a encore des lacunes et des trous, et ce sera à nous et, avec la loi que nous adoptons, à l'Agence et a ses partenaires à voir comment corriger de telles lacunes. Mais, en vous disant cela, je ne nie pas qu'il y a un problème, il y en a. Ce que je vous dis, c'est qu'il y a un chemin énorme qui a été parcouru depuis un certain nombre d'années pour améliorer la formation des gens qui offrent des conseils, par exemple, alors que, auparavant, on n'en avait pas. Il y a une uniformité, il y a des exigences qui ont été imposées mais qui ont été aussi acceptées. Et qu'on aille plus loin, je suis d'accord, mais il ne faut pas non plus se dire qu'on n'a pas parcouru un certain chemin.

Bon, je sais que le temps coule. Je voudrais revenir à Mme St-Pierre sur deux questions que vous avez soulevées dans votre présentation, c'est l'éducation du consommateur dans le sens de l'informer de ce à quoi il a droit. Est-ce que vous croyez qu'on ne devrait pas travailler en collaboration avec des associations de protection du consommateur, de défense de droits ou tout simplement d'intervention ou d'action auprès des consommateurs, plutôt que de tout faire à l'intérieur de l'institution que serait l'Agence pour cet aspect-là? Et, d'autre part, sur toute la question des règlements des différends, du traitement des plaintes, on prévoit créer des obligations aux entreprises de répondre à leurs clients ou aux consommateurs. C'est fondamental, il faut que, au moins, l'entreprise ait des obligations à cet égard. Mais il est évident que ce qu'on prévoit, c'est que le consommateur puisse s'adresser aussi à l'Agence et indiquer qu'il n'a pas obtenu satisfaction à sa demande, à sa représentation, à sa plainte ou au problème auquel il a été confronté. Alors, j'aimerais ça que vous me précisiez un petit peu plus cet aspect-là, puis après ça on abordera la régie de l'entreprise.

Le Président (M. Paré): Mme St-Pierre.

Mme St-Pierre (Nathalie): Alors, pour répondre à votre question, d'abord, évidemment, au niveau de ce qui touche l'éducation, effectivement ? et je l'ai mentionné dans les commentaires que je vous ai déposés par écrit, mais je ne l'ai pas dit ici ? à l'Union des consommateurs, on travaille depuis quelques années au niveau d'élaborer un programme national d'éducation des consommateurs en matière de finances personnelles. On a regardé ce qui s'est fait ailleurs dans le monde, on a regardé ce qui s'est fait aux États-Unis, on a regardé, bon, ce qui est offert au Canada, et on a fait un sondage aussi auprès des Canadiens et des Québécois pour se rendre compte que la note de passage était à peu près de 42 % pour des questions tout à fait simples comme: Connaissez-vous même le taux hypothécaire de votre prêt hypothécaire? Et les gens ne peuvent même pas répondre à des questions comme ça, ils ne négocient pas, etc. Bon. Il y a de grands besoins et, pour ce faire, on a créé une initiative et on travaille avec l'Université Laval, on travaille avec l'Association des banquiers, on travaille avec Desjardins, on travaille avec d'autres associations pour tenter de voir ce qui serait possible. Alors, effectivement, oui, je pense que l'Agence peut s'appuyer sur notre expertise et sur notre vouloir. À ce niveau-là, il n'y a pas de problème, et je pense qu'il faut miser sur ceux qui travaillent le plus directement avec les consommateurs dans le quotidien. Tout à fait.

Au niveau du traitement des plaintes, je pense que, et je sais que le groupe suivant, Option consommateurs, va traiter de ce secteur-là plus spécifiquement, mais, ce que je voulais souligner, c'est que, oui, qu'on prenne la peine... Et, dans le projet de loi n° 107, on parle des obligations que les entreprises auront de mettre en place là un certain traitement et puis de rendre des comptes à l'Agence, mais au-delà de ça, il n'y a pas de mesures pour dire que l'Agence... quel est le rôle de l'Agence? Et si, demain matin, on dit que l'Agence devient la figure de proue pour les consommateurs dans le secteur financier, eh bien, comment on va, après ça, répondre à cette attente-là? Et ce n'est pas dans le projet de loi comme tel, clairement, pour moi, de dire: Oui, un rôle de médiation, mais jusqu'à quel point? Qu'est-ce qu'on va faire s'il y a des centaines d'appels, des milliers d'appels? Parce qu'on en a déjà, nous, des milliers d'appels, puis le groupe Martineau en a répertorié quelque 140 000 appels, je pense, par année. Qui va répondre et comment on va répondre en dehors de ce que l'entreprise a à faire qui est, effectivement, le rôle de... L'entreprise doit répondre à son client, mais au-delà de ça, est-ce qu'on va lui fournir les outils? Qu'on prenne un peu ce que l'Office de la protection du consommateur fait, par exemple. Il va dire: Bien, voici, vous devez vous attendre à ce qu'il y ait un permis, vous devez vous attendre à ce qu'il y ait ça, vous devez... Bon. On peut accompagner le consommateur, on peut jouer un certain rôle. Est-ce qu'on peut aller au-delà de ça dans ce secteur-ci? Il faudra voir, mais, ça, pour moi, je pense qu'il y a des choses encore à éclaircir à ce niveau-là.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Marois: D'accord. Évidemment, l'article 4 de la loi, qui d'ailleurs campe la mission de l'Agence, d'abord en se référant au consommateur, pour nous, indique bien aussi l'ordre de priorité, et je reprenais cela tout à l'heure dans mes propos. Mais, bon, peut-être faudra-t-il le clarifier. Nous, ici, on pensait qu'il était assez serré mais, s'il faut le faire, on le fera. Parce qu'on dit: «Prêter assistance aux consommateurs de produits et utilisateurs de services financiers notamment en établissant des programmes éducationnels en matière de consommation de produits et services financiers, en assurant le traitement des plaintes reçues des consommateurs et en leur donnant accès à des services de règlement de différends.»

Oui, oui, je vous écoute.

Le Président (M. Paré): Mme St-Pierre.

Mme St-Pierre (Nathalie): Si je peux juste ajouter: C'est que si on dit «assurer le traitement», ça peut vouloir dire que, si on s'assure que l'industrie le fait, l'Agence serait satisfaite de ça. Est-ce que c'est ça qu'on veut dire? Pour ma part, je voudrais qu'on distingue le rôle de l'industrie, qui peut être d'assurer le maximum ? l'industrie a à faire le maximum, c'est sûr ? mais que les autres plaintes, là, ça devienne du ressort de l'Agence même. Donc, ce n'est pas juste assurer le traitement, mais c'est le faire.

Mme Marois: O.K. Ça va. Je pense qu'il faut préciser un peu ça. Est-ce qu'il me reste...

Le Président (M. Paré): Au niveau de la gouvernance, il vous reste quatre minutes.

n(11 h 10)n

Mme Marois: Ah bien, je suis correcte. Bien, ça me fait plaisir de m'adresser maintenant à vous. Bon. Je veux revenir évidemment sur la direction de cette Agence. Bon. Le fait que le P.D.G., là ? puisque c'est comme ça qu'on le désigne ? va être accompagné d'un conseil pas d'administration, mais un conseil qui va le suivre régulièrement, va poser un certain nombre d'exigences, de questions en ce qui a trait à sa gestion, vous le savez, vous l'avez vu dans la loi... Maintenant, je reviens à ce que vous soulevez. En fait, le P.D.G. peut instituer effectivement une enquête, tenir une audience, rendre jugement et, selon vous et selon ce que je comprends de ce que vous avez présenté, l'Agence peut s'exposer à des contestations à cet égard quant à sa capacité de rendre de façon impartiale des jugements. Et, dans les documents que vous avez préparés, vous référez au jugement de la Cour suprême pour la Régie des permis d'alcool, je crois, hein, de façon plus concrète, mais, dans ce jugement, on établissait que le mode de fonctionnement de la Régie créait des problèmes au niveau de l'impartialité. D'ailleurs, l'Inspecteur général des institutions financières, qui se conforme aux exigences de la loi, se conforme par ailleurs aux exigences de la Loi sur la justice administrative. Mais ni l'Inspecteur général ni le Surintendant des institutions financières fédéral n'ont par ailleurs fait l'objet, jusqu'à maintenant, de contestations judiciaires et se retrouvent exactement, en termes de modèle organisationnel, à utiliser et à appliquer essentiellement les mêmes règles que l'on proposerait pour le ou la responsable de l'Agence. Alors, la Régie des permis d'alcool, qui a une direction collégiale, a été contestée par ailleurs. Est-ce que vous croyez toujours, donc, qu'une direction collégiale au sein de l'Agence pourrait empêcher la contestation de son impartialité? Un. Deux, j'aimerais ça que vous me précisiez un petit peu votre point de vue et votre pensée sur la direction collégiale. Est-ce que vous jugez nécessaire cette direction collégiale prioritairement ou surtout pour la régie d'entreprises ou pour la prise quotidienne de décisions par l'Agence?

Le Président (M. Paré): M. Michaud. Vous avez une minute, M. Michaud, là; c'est un grand défi qu'on vous lance.

Mme Marois: J'imagine que ça va intéresser aussi nos amis, d'accord.

M. Michaud (Yves): Mme la ministre, lorsque je suis horriblement inquiet du fait que tous les pouvoirs sont entre les mains du président-directeur général, je ne suis pas tout à fait en mauvaise compagnie et en compagnie de personnes qui ne sont pas nécessairement de ma famille politique et d'autorité: d'abord, la porte-parole de l'opposition officielle; M. Garcia, de la Standard Life, qui lui aussi est contre ça, c'est-à-dire qu'il voit les dangers d'un P.D.G.; la Bourse de Montréal; l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières; la Banque Nationale ? ce n'est pas de mes amis intimes ? le Barreau du Québec également vous met en garde, met en garde le gouvernement ou les concepteurs du projet de loi contre cette concentration des pouvoirs dans les mains... Vous me dites: Ça ne s'est pas produit, que ça a été contesté à la fois au Surintendant des institutions financières à Ottawa...

Mme Marois: C'est ça, ni l'Inspecteur général.

M. Michaud (Yves): C'est cela, ni l'Inspecteur général. Mais ça ne s'est jamais vu aussi aux États-Unis que l'on menotte actuellement des directeurs, des grands présidents d'entreprises, mais on les menotte aujourd'hui, hein, ils risquent d'avoir la prison parce qu'ils ont fraudé. Ça aussi, ça ne s'est jamais vu. Ce n'est pas parce que la conscience des consommateurs n'est pas rendue au point de contester toutes ces décisions que ? le fait que ça ne se soit jamais produit ? ça ne se produira pas. Les principes de régie d'entreprises sont établis depuis 1980. Il y a quatre grands principes: l'imputabilité, la transparence et, ça, ça vient depuis l'imputabilité, la transparence, la démocratie actionnariale et, le quatrième... Mon Dieu! j'ai un blanc de mémoire, je commence à avoir l'Alzheimer, là. En tout cas, ça va me revenir. Donc, ces principes de régie d'entreprises, ce qu'on appelle la «corporate governance» ? qu'on appelle gouvernance, c'est un mot que je n'aime pas, je le répète, là ? alors ces principes-là établissent que, lorsque la séparation des pouvoirs est un des principes fondamentaux, d'abord, ils recommandent en premier lieu qu'on sépare les pouvoirs de chef de la direction et de président du conseil d'administration. On retrouve mutadis mutandis le même portrait au P.D.G. de l'Agence nationale qui va être créée avec quatre directions, quatre surintendants qui, incidemment, deviennent... qui sont fonctionnarisés, alors qu'aujourd'hui ils ont beaucoup plus de marge de manoeuvre et sont plus à distance du pouvoir politique, ils sont plus à distance qu'ils ne le seront une fois qu'ils seront les surintendants à la fois du Bureau des services financiers, de la Commission des valeurs mobilières, de l'Inspecteur général et de la Régie de l'assurance-dépôts, ils seront sous l'autorité d'un P.D.G ? je signale ça en passant ? ils ne seront plus à, ce qu'on dit en anglais, «arm's lenght» vis-à-vis du pouvoir. Ce seront des fonctionnaires. On les fonctionnarise. Je ne pense pas que ce soit un grand progrès dans la loi.

Et, pour la direction générale ? je reviens là-dessus ? il faut que le P.D.G. préside et soit associé ? l'exemple le plus parfait est celui de la Commission des valeurs mobilières du Québec ? il y a un problème qui se présente, il y a au moins... la présidente ne décide pas toute seule, c'est décidé de façon collégiale, il y a au moins... il y a un quorum de deux ? ça devrait être trois normalement ? de toute décision: imposer une amende de 1 million à Mme Charest, son mari, etc., ces décisions-là se prennent de façon collégiale.

Pour revenir à l'ensemble du projet de loi, vous m'avez demandé... Vous avez présumé que j'étais d'accord avec la création de l'Agence...

Mme Marois: Pas nécessairement.

M. Michaud (Yves): Je répondrai de façon normande: ni oui ni non. Je vais... C'est à l'oeuvre qu'on reconnaît l'artisan; on va voir comment cela va fonctionner. Quant à la protection du consommateur, Mme la ministre, avec toutes les qualités que je vous connais, c'est un peu lénifiant de dire cela, parce que, le consommateur, il n'est pas protégé actuellement, ou faiblement protégé. Tout le monde est pour la vertu, la maternité et les familles nombreuses, hein, alors la protection...

Mme Marois: Ce sera mieux que dans d'autres États à travers le monde, et plus.

M. Michaud (Yves): Ah! ça, oui.

Mme Marois: Bon. Que ce soit parfait, non, je suis d'accord.

M. Michaud (Yves): Nous sommes mieux que les autres. Mais se comparer n'est pas nécessairement se consoler.

Mme Marois: Mais, parfois, ça peut être le cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Non, non, se comparer n'est pas nécessairement se consoler.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Michaud. Je vais donner la parole à la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Marois: Elle va sûrement vous donner l'occasion de revenir sur ça.

Le Président (M. Paré): Madame.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, M. Michaud, effectivement ? d'abord, je veux vous souhaiter tous la bienvenue ? je veux d'abord vous féliciter parce que vous avez été le premier à sonner l'alarme. Votre lettre de trois pages, concise, claire et bien exprimée, illustrait parfaitement les problèmes que vont soulever la nouvelle Agence avec le type de direction que le projet de loi propose actuellement.

Vous proposez par ailleurs un modèle plus orienté vers le modèle de Commission des valeurs mobilières, une approche collégiale, avec des commissaires ? si je comprends bien, cinq à sept ? et la majorité à l'extérieur de la Commission pour pouvoir prendre les pouvoirs d'arbitrage quand il y a des conflits, comme le mentionnait, par exemple, Mme St-Pierre. Parce que, en dépit du fait qu'il y aura une agence et qu'on voudra établir le plus de normes possible, des esprits crapuleux, il va toujours en demeurer, et seul un tribunal qui punit et qui peut sévir va apporter des correctifs à ça. On l'a vu, par exemple, récemment, avec le cas des gens de CINAR notamment, la pénalité, mais je pense que le dossier de Enron et WorldCom a porté à notre attention le besoin non pas de diminuer l'importance de ce tribunal mais de le renforcer.

Et, contrairement au projet de loi qui donne beaucoup plus de pouvoirs, un style de régie et une emphase, je dirais, sur l'Inspecteur général des institutions financières, je pense que vous avez raison de vouloir plutôt mettre l'emphase sur la Commission des valeurs mobilières et de son aspect quasi judiciaire et son modèle d'impartialité.

Par ailleurs, je voudrais savoir de vous ? parce que je suis en complet accord, et vous avez parfaitement raison, vous avez le président de la Standard Life, M. Garcia, qui endosse ce modèle-là, vous avez plusieurs personnes qui ont suivi ? j'aimerais vous entendre davantage, vous avez commencé à discuter de ça: l'Agence. Est-ce que vous croyez qu'une super agence comme ça va répondre aux griefs de Mme Plamondon et Mme St-Pierre notamment en termes de guichet unique et de répondre véritablement aux griefs? Et est-ce que... Je comprends que vous n'avez pas voulu aborder la grosseur de l'Agence et mettre l'emphase sur le côté du tribunal, ce avec quoi je suis parfaitement d'accord, mais est-ce que vous croyez que cette Agence va répondre aux craintes? Et votre modèle notamment, est-ce que, vous croyez ? que j'endosse ? pourrait répondre à ces craintes-là?

n(11 h 20)n

Le Président (M. Paré): M. Michaud.

M. Michaud (Yves): Mme la députée, vous avez bien raison de concentrer vos remarques sur l'aspect, je dirais, de policer les moeurs et de faire en sorte que la dimension juridique de l'Agence soit extrêmement importante, et c'est pour ça que j'ai demandé, je suggère que l'on prenne cinq ou sept commissaires dont la majorité indépendants. Et c'est vrai, c'est vrai: la loi police les moeurs. Il faut éviter les dérapages que l'on connaît actuellement parce que ça risque de vicier profondément toutes les institutions financières, non seulement les institutions financières mais le capitalisme. Il faut...

Vous savez, il y a un essayiste anglais du XVIIe siècle qui prétendait que la perspective d'être pendu concentrait merveilleusement l'esprit du condamné, alors... La peur du gendarme commande souvent la vertu. Vous me posez une question: Est-ce que vous croyez que l'Agence qui est à naître mais dont je ne connais pas tout encore parfaitement les contours, puisque vous aurez à en débattre... Mme la ministre a annoncé qu'en commission parlementaire il y aura des modifications; on tiendra compte des représentations des associations de consommateurs. Elle m'apparaît pour l'instant un peu trop centrée sur les problèmes de l'industrie et pas assez sur les problèmes des consommateurs, bien que, comme la loi n° 188 dit, la loi n° 188... Quand votre prédécesseur, devenu actuellement le premier ministre, m'a demandé, il y a quatre ans, de siéger et de devenir vice-président du Bureau des services financiers, il m'a dit: Yves, nous avons un ombudsman, désormais, des services financiers au Québec. Ça a été vrai en partie; c'est moins vrai dans une autre partie. Ça a été vrai pour le Bureau des services financiers qui, en matière d'accréditation, a fait un grand ménage, qui, en matière de surveillance, de formation ? Madeleine est un peu plus sévère que moi là-dessus ? le Bureau a fait un bon travail. Par ailleurs, il a failli à sa tâche complète d'informer le public de ses droits. Nul n'est censé connaître la loi. Or, il y a une responsabilité du gouvernement, hein. Nul n'est censé...

Mme Marois: Nul n'est censé ignorer la loi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Pardon, nul n'est censé ne pas connaître la loi. Excusez-moi, j'avais fait une inversion, là. Encore que, un homme averti en vaut deux, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Passez-moi cette galéjade, je vous en prie, et j'espère que je ne serai pas l'objet d'une motion de blâme à ce sujet-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Donc, madame, revenons aux vrais principes de la gouvernance, principes établis surtout en Angleterre. Le droit est surtout anglais ? la mère des Parlements est là ? principes établis par le premier président, Sir Cadbury, du nom de la barre de chocolat.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Lord Hampel, lord Greenberg, tous des lords d'ailleurs, tous des sirés, hein, le rapport Viénot, en France et tous ceux là, les 80 membres que constitue le réseau international de régie d'entreprises, l'Association de protection des épargnants ? nous assistons à tous les congrès annuels et nous sommes membres de cela ? et tous insistent pour séparer les postes et, vous, vous mettez un président-directeur général, alors que nous nous battons depuis sept ans pour séparer les fonctions: le chef de la direction qui dirige et un conseil d'administration, mais j'aime mieux un commissaire qu'un conseil, parce qu'ils prendront des décisions de nature quasi judiciaire, des commissaires qui vont décider avec... ça peut être le président ou pas.

Alors, voilà en gros pourquoi ces principes de régie d'entreprises devraient s'appliquer à l'Agence. Et ce serait un mauvais exemple que de revenir à la vieille méthode du président et chef de la direction qui décident tout et...

Le Président (M. Paré): Merci, M. Michaud. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que ces commissaires, de cinq à sept, joueraient également le rôle... parfois ils pourraient diviser le rôle en termes de conseil d'administration et de commissaires ? une proposition, je pense, qui est articulée par M. Garcia ? à savoir que ces cinq, sept commissaires pourraient, dans un premier temps, le matin par exemple, siéger comme commissaires et arbitrer les causes qui leur sont soumises et, dans l'après-midi par exemple, devenir le conseil d'administration pour avoir cette dualité du président-directeur général qui a un conseil d'administration, mais qui est lui-même surveillé par des gens, même au niveau de sa gestion de la boîte.

Le Président (M. Paré): M. Michaud.

M. Michaud (Yves): Là, je suis plus dubitatif, sur la suggestion de M. Garcia, sur le fait que les commissaires puissent également se muer en administrateurs. Là, je trouve qu'il y a un peu confusion des genres dans ce cas-là, et j'aimerais mieux carrément des commissaires qui rendent des décisions quasi judiciaires. Mais se transformer en administrateurs... La loi prévoit un comité consultatif. Or, les comités consultatifs, là, vous savez très bien qu'il y en a partout, des comités consultatifs, et vous savez très bien ce que ça donne: à peu près rien. Ça donne des avis, on en tient compte ou on n'en prend pas compte. Ça n'a pas de dents! Mme la ministre, je vous ai vue sur une photo avec une agence qui n'a pas de dents, alors j'ai été horrifié de voir ça. Et c'est vrai que l'Agence n'a pas beaucoup de pouvoirs, là, c'est-à-dire comme telle. Alors, je limiterais le rôle des commissaires au rôle d'arbitrage dans les cas de nature quasi judiciaire afin que le président ne soit pas le seul.

J'avoue que je n'ai ni compétence ni dossiers pour pouvoir étudier plus à fond la suggestion de M. Garcia à la fois qu'ils agissent également comme conseil d'administration. Mais, quand on dit «commissaires» et «conseil d'administration», mutatis mutandis, ça se ressemble un peu, là. Mais qu'ils entrent dans la mécanique quotidienne de l'administration de l'Agence, du budget, de l'impartition de chaque enveloppe budgétaire à chacune des...

Mme Jérôme-Forget: Par exemple, monsieur, ce pourquoi je posais la question, c'est que vous aurez l'IGIF qui a un rôle, comme vous avez très bien souligné, dans le fond, très confidentiel, qui doit garder secrète cette information qu'il obtient, et vous avez la Commission des valeurs mobilières qui, elle, doit divulguer au contraire et rendre transparente toute information qu'elle obtient.

Ce pourquoi je pensais au conseil d'administration également, ce rôle, c'est qu'il y aura des arbitrages à faire, il y aura des arbitrages à l'occasion entre le rôle de l'IGIF et le rôle à donner à la Commission des valeurs mobilières, et de permettre au président-directeur général, qui aura beaucoup de pouvoirs de toute façon, qui aura beaucoup de pouvoirs, de pouvoir compter sur des avis à un moment donné quand il est aux prises avec un débat où il y a deux interventions possibles. Alors, c'est pour ça que je vous posais la question s'il n'y avait pas lieu que ces commissaires, qui connaissent bien la Commission ou l'Agence, puissent également servir d'arbitrage à l'occasion.

M. Michaud (Yves): Dans ce sens-là, oui, les commissaires, dans ce sens-là, oui, puisqu'ils seraient au-dessus des surintendants, ils pourraient faire l'arbitrage dans des conflits éventuels, alors, justement, que l'Inspecteur général des institutions financières doit préserver la confidentialité, forcément, des données qu'il a, et, d'autre part, la Commission des valeurs mobilières, qui doit être d'une transparence totale. Alors, s'il y a des arbitrages à faire, c'est le rôle des commissaires, ce sera le rôle des éventuels commissaires, si tant est que la loi le prévoit.

Mme Jérôme-Forget: Ce pourquoi je vous posais la question, c'est qu'en Angleterre il y a eu un cas célèbre, justement, où le président-directeur général, où l'agence a été blâmée ? c'est une nouvelle agence, bien sûr ? a été blâmé...

M. Michaud (Yves): Lui aussi?

Mme Jérôme-Forget: Lui aussi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Jérôme-Forget: Parce que, justement, l'inspecteur, le surintendant à l'intérieur de la boîte avait été informé qu'il y avait des problèmes de financement, de capitalisation à l'intérieur d'une compagnie d'assurances, et ce surintendant devait garder cette information confidentielle, et il n'a pas cru bon d'en informer le président-directeur général, d'où le problème de le divulguer ensuite à la Commission des valeurs mobilières qui devait faire enquête. Et donc, il y a eu une cause célèbre et qui a été portée à l'attention de tout le monde. Et un des points soulevés à ce moment-là, c'était le besoin, justement, de peut-être avoir un conseil d'administration qui fait ces arbitrages. C'est pour ça que je vous posais la question, parce qu'il va se poser des problèmes à l'occasion entre l'Inspecteur général des institutions financières et le côté quasi judiciaire de la Commission des valeurs mobilières qui doit arbitrer les différends.

Le Président (M. Paré): M. Michaud.

n(11 h 30)n

M. Michaud (Yves): C'est juste, mais il appartiendra au législateur de décider de la nature de ce que pourraient être ces commissaires et de l'attribution de leurs fonctions. J'avoue que, pour l'instant, là, j'ai fait la proposition. Je vais pousser plus loin les recherches là-dessus et je vous enverrai peut-être éventuellement des notes complémentaires à cet effet.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Michaud. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Mme Plamondon, Mme St-Pierre, M. Michaud, merci pour votre présentation. M. Michaud, vous avez fait référence dans votre présentation à l'impartialité du président-directeur général, et vous faites référence à l'article 23 de la Charte. La Cour suprême, dans l'arrêt auquel vous faites référence, dit que le fardeau d'impartialité du Tribunal administratif du Québec est beaucoup plus élevé que dans d'autres juridictions canadiennes. Il y a une ancienne jurisprudence laissant entendre qu'il y a possibilité qu'un appel devant un tribunal administratif impartial puisse justifier de passer outre des lacunes dans les concessions d'un tribunal administratif. Le juge Lamarre a dit: Non, on ne peut pas. Il a dit que tout citoyen a droit à une audition impartiale par un tribunal indépendant, autant en première instance qu'en appel.

Est-ce que vous êtes d'accord qu'on ne peut pas faire des amendements à ce projet de loi, en fait, pour pallier à ce problème de l'impartialité? Est-ce qu'on peut le corriger d'une manière mineure pour enlever cette problématique?

M. Michaud (Yves): Étant donné la complexité du projet de loi et ses dimensions juridiques, je ne pense pas qu'on puisse prévoir l'impossible. Il y aura toujours une possibilité, pour un citoyen ou une personne morale, d'interjeter appel devant les tribunaux des décisions rendues par le président-directeur général avec les commissaires, avec la direction de l'Agence. Il y aura toujours, toujours cette possibilité-là, si tant est qu'ils croient que leurs intérêts sont mal servis par les décisions rendues. Ça va aller en Cour supérieure et, après, ça pourra aller même jusqu'en Cour d'appel et jusqu'en Cour suprême.

Est-ce que vous pouvez dessiner un projet de loi prévoyant mur à mur qu'il n'y ait jamais de possibilité? Je ne le crois pas. Je ne le crois pas, car dans ce monde extrêmement complexe ? je le rappelle ? il y a 12 lois que l'Agence administrera, qu'elle aura sous sa coupe. Alors, il y aura toujours... Il faut toujours ménager, en tout cas, la possibilité pour le citoyen de s'adresser aux tribunaux pour avoir justice, y compris jusqu'à la Cour suprême.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député D'Arcy-McGee. C'est terminé, madame? Merci, donc, mesdames, messieurs, pour votre contribution. Et j'appellerais l'Option consommateurs, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour. À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous recevons l'Option des consommateurs, représentée par... Si vous voulez vous nommer, s'il vous plaît, et les gens qui vous accompagnent.

Option consommateurs

Mme Rozon (Louise): Oui. Alors, à ma droite, c'est Me Jacques St-Amant, qui est conseiller juridique pour Option consommateurs et Me Jannick Desforges, qui est responsable de notre service juridique. Moi-même, Louise Rozon, qui est directrice d'Option consommateurs.

Le Président (M. Paré): Bienvenue, Mme Rozon. Bienvenue aux gens qui vous accompagnent. Vous aurez 20 minutes pour faire votre présentation, et par la suite il y aura échanges entre les parlementaires. Madame.

Mme Rozon (Louise): Merci beaucoup, M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés. Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de nos commentaires à l'égard du projet de loi visant à établir l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier. Nous souhaitons vous faire part de certaines de nos préoccupations à l'égard de ce projet et vous proposer trois axes selon lesquels il pourrait faire l'objet d'améliorations. Nous sommes d'avis qu'on pourrait simplifier mieux pour protéger plus adéquatement les consommateurs québécois.

Mais d'abord un mot à l'égard de notre organisme. Option consommateurs existe dans sa forme actuelle depuis 1983. L'Association des consommateurs du Québec, qui existait depuis 1948, a procédé en 1999 au regroupement de ses activités avec celles de notre organisme. Nous sommes un organisme coopératif de défense et de promotion des droits des consommateurs. Nous desservons directement près de 10 000 consommateurs par an, notamment en leur fournissant de l'information et des conseils concernant différents problèmes de consommation. Les plaintes que nous recevons régulièrement témoignent abondamment de l'importance que revêtent les questions reliées aux services financiers pour les consommateurs.

Option consommateurs s'intéresse activement et depuis plusieurs années à ces questions. Entre autres, elle a participé aux discussions qui ont mené à l'adoption de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et de la nouvelle législation bancaire fédérale. Elle a publié, au cours de la dernière décennie, de nombreuses études relatives aux services financiers. Des membres de l'équipe d'Option consommateurs participent à plusieurs instances qui se penchent sur des questions reliées à ce domaine. En particulier, je siège au conseil d'administration de l'Office de la protection du consommateur tandis que M. St-Amant siège à titre de représentant du public au conseil d'administration de la Chambre de la sécurité financière. Bien sûr, nos propos ce matin reflètent exclusivement la position propre à Option consommateurs.

Alors, le contexte. Avant d'aller plus loin, rappelons quelques éléments du contexte de cette réforme. L'Assemblée nationale a procédé à une première réorganisation des organismes d'encadrement du secteur financier en 1989. Elle a restructuré ce cadre en 1998. En l'an 2000, le régime gouvernant le Mouvement Desjardins, qui, comme nous le savons tous, constitue la principale institution financière au Québec, a été entièrement remanié. Nous nous lançons maintenant dans ce qui serait la quatrième réforme structurelle d'envergure en moins de 15 ans.

Les règles de fond encadrant les services offerts par les institutions financières québécoises ont toutefois évolué beaucoup moins vite. Ce sont pourtant celles qui importent le plus pour le consommateur. L'a-t-on informé adéquatement au moment de souscrire une assurance automobile? L'a-t-on conseillé adéquatement lorsqu'il a acquis des actions de Nortel? Son contrat d'assurance est-il compréhensible? Bref, dans une situation donnée, quels sont les droits du consommateur et ont-ils évolués au rythme du marché? S'il a dû subir une perte, pourra-t-il être certain d'être indemnisé? Les incompétents ou les fraudeurs seront-ils punis? C'est d'abord cela qui importe pour le consommateur. Le reste, s'il doit s'adresser ici ou là, s'il y reçoit ou non un service adéquat, ce sont des irritants qui peuvent bien sûr être importants mais ce n'est pas l'essentiel.

n(11 h 40)n

Nous souhaitons donc que l'Assemblée nationale puisse se pencher, à l'avenir et dès que possible, sur les questions de fond pour s'assurer que notre droit reflète bien les besoins de protection du public dans le contexte de l'évolution rapide des services financiers qui deviennent de plus en plus complexes. On ne choisit pas la police d'assurance vie sur laquelle compteront nos proches comme on achète un réfrigérateur. On n'investit pas ses épargnes en vue de la retraite comme on renouvelle sa garde-robe. Les conséquences des choix que font les consommateurs en matière de services financiers sont en effet beaucoup plus graves et parfois irréversibles. Invoquer le besoin de protection des consommateurs de services financiers, ce n'est pas manquer de respect à leur égard, c'est plutôt prendre acte de la complexité considérable de ces questions et donc éviter qu'ils ne soient dupes de ceux qui voudraient les flatter en prétendant qu'ils peuvent s'aventurer seuls dans la fosse aux lions.

Nous invitons par conséquent l'Assemblée nationale à s'intéresser le plus rapidement possible aux questions de fond relativement à l'encadrement des services financiers et nous émettons l'hypothèse qu'il aurait été utile d'effectuer d'abord cet exercice pour aider à déterminer de quelle structure d'encadrement les institutions financières et leurs clients ont besoin en ce début de millénaire. Nous sommes toutefois conviés à examiner dès maintenant les structures et, donc, le contenu du projet de loi n° 107.

À la première analyse, nous éprouvons des inquiétudes à l'égard des effets qu'aurait la mise en oeuvre des propositions contenues dans ce projet. Nous sommes donc d'avis qu'il devrait faire l'objet d'une révision afin qu'il mette encore davantage l'accent sur trois préoccupations fondamentales: La première, la protection des consommateurs de services financiers dans toutes les dimensions que comporte cet aspect; deuxième préoccupation, l'adéquation fonctionnelle des mécanismes structuraux mis en place aux activités qu'il vise à régir; et, troisièmement, la stabilité du cadre réglementaire.

Voyons le premier de ces aspects. La protection des consommateurs dans le secteur financier comporte de nombreuses dimensions. Les institutions financières doivent être stables. On parle de réglementation prudentielle. Les produits, les services et l'information qu'elles fournissent doivent être de qualité et accessibles. Parlons de réglementation des marchés. Les personnes qui offrent des services aux consommateurs doivent être compétentes et honnêtes. Parlons de la réglementation de la distribution. Nous le disions à l'instant, le projet fait assez peu de chose dans ce domaine. La seule initiative importante a trait au mécanisme de traitement des plaintes que devraient créer les institutions financières québécoises et au rôle que jouerait l'Agence dans ce domaine. On signalera, dans quelques minutes, pourquoi nous demeurons sceptiques quant à l'effet réel qu'auraient ces mesures.

Par ailleurs, le projet confie ces trois types de réglementation à une seule agence dirigée par une seule personne. Nous croyons cette orientation malheureuse. Comme d'autres intervenants l'ont déjà exprimé, cela nous paraît institutionnaliser le risque de conflit de mission, sinon de conflit d'intérêts. Cela mettra aussi l'Agence dans la délicate position d'agir à la fois comme policier de tous les secteurs financiers, comme procureur et comme juge. Il y a donc un risque réel que cette architecture fasse rapidement l'objet de décisions des tribunaux qui pourraient renvoyer le législateur à sa planche à dessins.

Cela dit, nous admettons sans peine qu'on pourrait simplifier l'encadrement actuel du secteur financier québécois. La réglementation prudentielle y est partagée au Québec entre trois organismes. La réglementation des marchés, selon la définition qu'on en donne, est partagée entre trois ou cinq organismes. L'encadrement de la distribution l'est entre six. On pourrait aisément songer à remplacer tout cela par un organisme chargé de l'encadrement prudentiel, par un second chargé de la réglementation des marchés et par le plus petit nombre possible d'organismes chargés d'encadrer la distribution en limitant strictement les chevauchements de juridiction entre eux. Ce serait simplifier en confiant à chaque organisme une mission précise et en lui donnant les outils qu'il faut pour la mener à bien sans qu'il lui manque de moyens ou qu'il soit embarrassé par des objectifs divergents. C'est en ce sens que nous parlons d'adéquation fonctionnelle. Il nous paraît aussi qu'un tel régime réduirait les risques de contestation judiciaire qui menace l'Agence et qu'on augmenterait par conséquent la stabilité du cadre réglementaire. Bref, ce serait, à notre avis, simplifier mieux. On pourrait aussi simplifier et donner plus vite davantage de stabilité au cadre réglementaire en éliminant le bureau de transition proposé dans le projet.

Dans une perspective d'adéquation fonctionnelle, il nous paraît d'autre part heureux que le projet de loi fasse en sorte que l'encadrement déontologique de tous les planificateurs financiers soit concentré à un seul organisme et non éparpillé au sein de plusieurs et que l'encadrement du courtage hypothécaire soit rapatrié au sein des organismes régissant le secteur financier.

D'autre part, et pour en revenir à l'objectif de protection des consommateurs, le mandat législatif de l'Agence, si on la crée effectivement, devrait refléter davantage un souci profond de protection des épargnants, des investisseurs et des autres consommateurs de services financiers et être formulé en des termes qui ne limitent pas ses activités. La proposition actuelle paraît, à cet égard, assez peu inspirante. On devrait également envisager de doter l'Agence qu'on entend créer, sinon de commissaires ou d'un conseil d'administration, à tout le moins de structures consultatives permettant au consommateur de se faire entendre. Voilà un domaine où malheureusement on ne s'est pas inspiré du modèle britannique lors de la rédaction du projet de loi.

Le traitement des différends. Toujours en matière de protection des consommateurs, le projet de loi innove en imposant aux institutions financières l'obligation de se doter de politiques de traitement des différends avec la clientèle. On ne peut que se réjouir de cette orientation, mais il faut malheureusement constater, à l'analyse, que les mécanismes proposés risquent de s'avérer inefficaces. On ne formule en effet aucune balise claire quant au contenu de ces politiques.

L'Agence n'est pas non plus chargée de les approuver. Notre expérience dans le domaine nous incite à nous inquiéter de cette absence de points de repère. Présumons néanmoins qu'une politique tolérable a été adoptée puis appliquée par une institution financière à l'occasion d'une plainte. Le consommateur demeure malgré tout insatisfait du sort qu'on a fait à son grief. L'institution financière en cause sera alors obligée de transmettre à l'Agence une copie du dossier concernant la plainte. D'abord, il faut comprendre que l'Agence risque ainsi d'être submergée par plusieurs centaines de plaintes par année. Ensuite on lui communique une foule de renseignements personnels déterminés par l'institution et concernant un consommateur qui n'a en aucune manière consenti à l'opération. Tertio, l'Agence se trouve dès lors automatiquement saisie du point de vue de l'institution, tous documents à l'appui, mais on ne sait rien de la manière dont elle consultera le consommateur plaignant dont rien n'exige qu'il soit même informé de ce transfert de son dossier ni de la faculté qu'on lui accordera de consulter ou réfuter ces éléments de preuve. Bref, le projet fait en sorte que l'Agence aura fort à faire pour réfuter une appréhension de la part du consommateur qui n'aura pu être traité équitablement.

Mais présumons malgré tout que l'Agence a su se mériter la confiance du consommateur. Elle ne peut néanmoins agir comme médiateur entre les parties que si toutes deux en conviennent. L'institution financière conserve un droit de veto à l'égard de la saisine effective de l'Agence à ce titre. De toute manière, l'action d'un organisme public, à titre de médiateur entre une entreprise et son client, est compliquée par l'obligation élevée qui lui incombe d'agir équitablement et, dans le cas de l'Agence, par les possibles chevauchements de compétences. Consciente de ses vulnérabilités, l'Agence pourra vouloir en quelque sorte accréditer un tiers médiateur. Il faut toutefois obtenir à cet égard l'autorisation du gouvernement. Le formalisme atteint donc ici son comble. En s'inspirant notamment de l'expérience britannique dans ce domaine depuis une quinzaine d'années, nous sommes convaincus qu'il serait possible de faire nettement mieux en matière d'encadrement du traitement des différends. Pour l'instant, nous appréhendons que les mesures proposées n'aient pratiquement aucun effet réel sur les pratiques commerciales.

Dans un autre registre, le projet permettrait à la nouvelle Agence de déléguer pratiquement toute partie de ses pouvoirs à des organismes d'autoréglementation ou OAR. Disons d'abord que nous n'avons, jusqu'à maintenant, vu aucune démonstration qu'il y aurait une utilité réelle à recourir à des OAR au Québec. Entre autres, le rapport du Groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier formule bien quelques balises quant aux règles qui devraient les régir, mais il n'en recommande pas l'accréditation. Or, le recours à de tels organismes constitue sinon une privatisation, du moins une impartition de la définition et de l'application de la règle de droit dans le secteur financier. Il nous paraît qu'il s'agit d'une voie semée d'embûches.

Pour éviter les dérapages, l'Agence serait dotée de pouvoirs de contrôle très étendus sur ces organismes qu'elle accréditerait, quoique les critères d'accréditation que le projet formule sont pour leur part clairement insuffisants. On peut craindre que l'ampleur de cette surveillance découragera beaucoup de candidats au statut d'OAR, et cela pourrait avoir un effet pervers. En vertu de l'article 57 du projet, une entité ne peut en effet encadrer la conduite de ses membres à l'égard d'une activité réglementée par le secteur financier que si elle est reconnue à titre d'OAR. Or, on sait que des organismes tels que l'Association des banquiers ou le Bureau d'assurance du Canada invitent souvent leurs membres, et les obligent même parfois, à adhérer à des normes, à des codes de conduite. Devraient-ils devenir des OAR? Le voudront-ils? Sinon, ils ne pourront rien imposer quant aux activités québécoises de leurs membres. Comme l'Agence pourrait ne pas se pencher immédiatement sur ces vides normatifs, l'article 57 pourrait produire ce résultat curieux que certaines normes protégeraient des consommateurs hors Québec mais pas ici.

Il nous paraît par conséquent qu'on devrait envisager de retirer le titre III du projet quitte à conserver les articles 169 et suivants et les autres dispositions de la Loi sur les valeurs mobilières qui permettent dans ce domaine d'avoir recours de manière limitée aux OAR.

n(11 h 50)n

D'autre part, il paraîtrait plus simple de maintenir le statut actuel de la Chambre de l'assurance de dommages et de la Chambre de la sécurité financière sous réserve de quelques aménagements techniques. Ces organismes d'encadrement de la distribution répondent actuellement de leur mission à l'Assemblée nationale, sous la surveillance du Bureau des services financiers, et il suffirait de transmettre cette dernière responsabilité à l'Agence ou à un autre organisme chargé de l'encadrement prudentiel. On maintiendrait ainsi un régime assez semblable à celui de l'encadrement professionnel au Québec.

En conclusion, il s'agit de fabriquer de bons outils réglementaires, solides et bien conçus. Il faut disposer du bon outil pour la bonne fonction. Et il paraît peu probable qu'un outil unique puisse être vraiment utile à toutes les tâches. Il faut garder à l'esprit qu'on en est à la quatrième réforme d'importance de l'encadrement du secteur financier québécois en moins de 15 ans. Pour les consommateurs, les retombées positives de ces réformes n'ont pas toujours paru manifestes. Certes, on jugera l'arbre à ses fruits, mais, au premier examen, il nous faut, hélas! nous inquiéter de ce que sera la récolte. Bien entendu, il nous fera plaisir de répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Rozon. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je vous souhaite la bienvenue. Ça me fait plaisir de vous recevoir à notre commission. Vous semblez vous éloigner un peu de l'analyse qui a été faite par à peu près tous les autres groupes qui sont venus là, au sens où... ? peut-être est-ce une mauvaise impression que j'ai de votre mémoire là, et vous pourrez me corriger en ce sens-là. Parce que vous semblez beaucoup minimiser le fait qu'on se trouve dans une situation très complexe ou d'une très grande lourdeur en termes d'organisation institutionnelle, si on veut, en ce qui a trait à l'encadrement et aux institutions du secteur financier, autant vue sous l'angle de la protection du consommateur que sous l'angle des entreprises. Vous ne semblez pas considérer que c'est là un vrai problème, que le problème est d'un autre ordre. C'est un peu le sentiment que j'ai en vous écoutant et en lisant votre document.

Et vous nous dites: Bien, attaquez-vous aux questions réglementaires, peut-être regrouper un peu les organismes, mais là n'est pas le vrai problème. Alors que, jusqu'à maintenant, autant les gens qui ont présenté des mémoires à la commission Martineau, autant ceux et celles qui sont venus ici, on nous a dit: Bien, écoutez, c'est très complexe; c'est lourd, et il est nécessaire, effectivement, de simplifier, par exemple: l'accès pour le consommateur, le traitement de la plainte pour le consommateur, la possibilité d'avoir de l'information pour le consommateur, et l'Agence, même si ce n'est pas parfait, parce qu'on sait que, dans un second temps, il faudra revoir toutes les questions réglementaires et toutes les lois d'encadrement, mais l'Agence est un pas dans la bonne direction, et il faut le franchir, quitte à améliorer le projet de loi qui est devant nous. Et, ça, je n'en disconviens pas.

Alors, j'aimerais un peu saisir ce qui vous amène à cette conclusion-là, si je comprends bien votre conclusion ou si j'interprète bien vos propos.

Le Président (M. Paré): Mme Rozon.

Mme Rozon (Louise): ...compléter. En fait, ce que, nous, on dit c'est que c'est effectivement important de simplifier l'encadrement du secteur des services financiers au Québec. Mais il faut simplifier mieux que ce qu'on propose dans le projet de loi. On ne dit pas que c'est inutile de procéder à une réforme de l'encadrement des services financiers, mais on n'est pas obligé de simplifier en regroupant toutes les fonctions essentielles au sein d'un seul organisme. On propose la création de trois organismes ou peut-être un petit peu plus en fonction de l'encadrement qui touche la distribution, mais on ne dit pas que c'est inutile de procéder à ça.

Ce qu'on dit, par ailleurs, c'est qu'il y a des questions de fond qui touchent la protection des consommateurs qui ne sont pas abordées dans le cadre d'une réforme de cette nature qui touche effectivement les structures et non pas le fond. Et on dit: Bien, je pense qu'il va être important que l'Assemblée nationale se penche, à très court terme, sur ces questions de fond qui touchent la protection des consommateurs. Donc, on ne croit pas que notre message soit si différent du message des autres associations qui ont exprimé leurs points de vue.

Le Président (M. Paré): M. St-Amant.

M. St-Amant (Jacques): Oui, bien, effectivement, on aura beau avoir les meilleurs outils, si les règles de fond qu'ils ont à appliquer ne sont pas adéquates, les consommateurs ne seront pas plus heureux, pas plus satisfaits, de un.

De deux, le projet ne règle rien au cloisonnement du secteur financier. Un groupe financier, par exemple, qui oeuvre en assurance, en activités bancaires, en planification financière va encore devoir faire face à une série de règles différentes. Le projet n'y règle rien. On va simplement se retrouver avec un seul organisme qui va avoir une mission d'essayer d'appliquer tout ça d'une façon cohérente. Nous l'avons dit... et nous sommes parfaitement d'accord à cet égard avec M. Michaud, entre autres, et je n'aurais pas la prétention de faire une démonstration avec autant de panache qu'il peut le faire. Nous avons des appréhensions à l'égard de la stabilité du cadre réglementaire qu'on veut créer parce qu'il risque d'y avoir des conflits de mission, il risque d'y avoir une appréhension de partialité et il va y avoir de plus en plus des intervenants qui vont avoir des intérêts très considérables à utiliser des arguments de ce genre pour échapper à des décisions qui leur déplairaient.

En fait, quand on parle de guichet unique, il faut voir de quoi on parle et, là-dessus, je rejoins ce que disait Mme Plamondon: Il faut s'entendre sur le sens des termes. Et on aurait beau dire que l'Agence qu'on veut créer serait un guichet unique, est-ce qu'on s'imagine vraiment que le consommateur va pouvoir arriver à l'Agence et dire: Voici ? par exemple ? j'ai vu un représentant en assurance de personnes qui m'a offert une police d'assurance qui ne correspondait absolument pas à mes besoins et qui va remplir un seul dossier, une seule fiche? Et que, de là, ça va gouverner tous les processus à l'égard de l'enquête que l'Agence va faire concernant le cabinet auquel est rattaché ce représentant et les sanctions pénales qui pourraient suivre, s'il y a eu contravention, que ça va aussi mener automatiquement au processus déontologique et disciplinaire concernant ce représentant, que ça va mener automatiquement à une décision de l'indemniser par le Fonds d'indemnisation? Ça nous paraît peu probable.

Chacun de ces processus-là répond à des impératifs juridiques, procéduraux, à des impératifs de preuves différentes. Croire qu'une seule personne ou un seul secteur pourra gérer tout ça, ça me paraît difficilement défendable au plan juridique. Mais, si on dit que l'Agence... enfin qu'il y aura des coupe-feux à l'intérieur de l'Agence, de toute façon, on reproduit la nécessité que plusieurs personnes, plusieurs fonctionnaires s'adressent aux consommateurs, qu'il y ait plusieurs dossiers. Dans une notion de guichet unique, c'est un idéal. Dans la pratique, il nous paraît difficile de croire que ça va effectivement se traduire parce que nous souhaiterions qu'il soit offert aux consommateurs.

Mme Marois: Mais, bon, je comprends votre point de vue mais, par ailleurs, nous partons d'une situation actuellement où c'est... vous le dites vous-même d'ailleurs, le titre de votre mémoire principal c'était du labyrinthe au minotaure, mais vous parlez d'un labyrinthe, hein. Mais cependant, le labyrinthe avait été construit volontairement pour garder la bête dans le labyrinthe. Tandis que, là, le labyrinthe s'est constitué sans que personne ne le veuille par la superposition d'organismes, d'institutions et l'adoption de lois. Alors donc, nous avons un certain pouvoir de changer les choses.

M. St-Amant (Jacques): Tout à fait.

Mme Marois: Et, en ce sens-là, là où je vous suis moins, c'est là où vous nous dites: Il y a différentes lois qui s'appliquent, différents cadres réglementaires. Et ça, qu'est-ce que vous voulez? tant qu'on ne décidera pas de les changer, et l'Agence et la loi que nous adoptons créant l'Agence ne prévoient pas à ce moment-ci ces changements, vous avez raison sur cet aspect-là. Mais cependant, que se retrouvent à l'intérieur d'une même institution toutes ces missions et ces fonctions et que le consommateur ayant accès à une direction dont la seule préoccupation sera l'information, l'éducation et la protection des droits de ce même consommateur, là, l'Agence aura une obligation de faire cheminer, à l'intérieur des différentes directions ou responsabilités ou missions de l'Agence, un dossier avec ce consommateur, bien sûr, et en lui évitant d'avoir à frapper à 10 portes différentes et à tout connaître ? un peu ce que nous expliquaient tout à l'heure les gens qui vous ont précédés ? et à tout connaître des lois, règlements, pouvoirs des uns et des autres. Et là l'Agence aura un rôle d'accompagnement.

Je ne me leurre pas quant aux difficultés que ça posera, quant aux changements qu'on devra progressivement apporter, là. Je suis consciente de ça. Mais au moins, la volonté, elle est claire, elle est là et les outils qu'on se donne devraient nous permettre d'améliorer, en tout cas, le sort des consommateurs par rapport à ce que nous connaissons maintenant.

n(12 heures)n

M. St-Amant (Jacques): J'ai en tête, ce qui se produit présentement dans les processus de traitement des plaintes au sein des institutions financières. Au sein d'une même institution, le consommateur qui est mécontent doit souvent passer à travers trois ou quatre paliers avant d'obtenir une décision. En pratique, en général, en tout cas, souvent, il se décourage en cours de route. C'est tout simplement trop lourd.

Alors, qu'on ait, au sein d'une seule agence, cinq répondants pour le consommateur, parce qu'il y a cinq fonctions différentes au lieu que ce soient cinq organismes différents, je ne suis pas certain que ça va représenter un progrès si fondamental pour M. et Mme Tout-le-monde. Et, d'autre part, notre appréhension est simplement que, en essayant de combiner, dans un même organisme, des fonctions de réglementation prudentielle et d'encadrement des marchés, en essayant de donner à une même personne des fonctions quasi judiciaires réglementaires d'inspection, on impose à cet organisme, à cette personne un fardeau considérable et on crée une structure qui est juridiquement si fragile que vous risquez fort, à court terme, de revenir à votre table à dessin, ce qu'on souhaite surtout éviter.

Donc, oui, simplifions, mais simplifions d'une façon qui soit vraiment efficace.

Le Président (M. Paré): Merci. Mme Rozon, vous voulez ajouter?

Mme Rozon (Louise): Oui, je pourrais peut-être ajouter une petite information. On pourrait atteindre le même objectif en créant plus qu'un organisme. On pourrait avoir un bureau d'information, un numéro de téléphone unique où le consommateur pourrait appeler s'il a un problème avec un produit financier et qu'ensuite ce bureau-là réfère la personne au bon organisme, tout dépendant de la nature de la plainte qu'il a à formuler. J'émets cette hypothèse, ça peut être une autre formule. Mais je pense qu'il ne faut pas penser qu'un guichet unique pour le consommateur, un numéro de téléphone égale nécessairement un seul organisme qui doit accomplir plusieurs missions, comme on le souligne dans notre mémoire, qui peuvent être contradictoires à certains égards. Donc, je pense qu'on peut pallier à ce problème-là tout en créant plus qu'un organisme.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Dans la loi, on crée une direction. Alors, on le voit bien, là: la direction de l'encadrement, de l'assistance au consommateur, l'encadrement de la solvabilité, l'encadrement de la distribution. On ne remet pas en question les lois et règlements actuels, si ce n'est que pour des fins de concordance très, très structurelles et administratives. Donc, chacune des lois devra continuer à s'appliquer, puisque là je traite aussi de la question de la gouvernance que vous abordez. À partir du moment où on ne change pas les lois, on ne change pas les responsabilités, les rôles, les devoirs de chacune des institutions qui sont regroupées au sein de l'Agence, dans un premier temps. Le directeur général ou la directrice générale ne pourra pas faire ce qu'elle veut, là, il va falloir que les lois s'appliquent. Et, en plus, on crée un mécanisme de révision, puis, évidemment, on a toujours les mécanismes d'appel et de recours aux tribunaux réguliers, là.

Alors donc, j'ai écouté attentivement toutes les discussions que nous avons depuis le début sur cette question avec d'autres groupes et avec vous, et je me dis: Il faut être conscient qu'il y a des balises et que ce n'est pas vrai que, demain matin, tout d'un coup, on met sur les épaules d'une seule personne autant de responsabilités et la possibilité de faire n'importe quoi, absolument pas. Comme on ne change pas les lois, il faudra appliquer les lois qui sont là. Alors, attention sur toute la question, là... parce que je trouve qu'on porte un jugement à l'emporte-pièce en disant: Ça met le responsable de l'institution dans une condition de partialité, et il y a des risques de ceci et de cela. Il peut y avoir des risques, mais ils sont balisés, encadrés. Et il ne pourra pas faire n'importe quoi demain matin, il doit gérer et administrer les lois qui sont là, puis il y a des personnes nommées pour le faire, puis il y a des mécanismes de révision.

Je reviens maintenant ? parce que vous aviez abordé cette question-là ? à la question du consommateur. Les formules peuvent être différentes selon l'objet de la demande du consommateur. Dans certains cas, ça peut être une référence. Mais ce qu'on nous a dit et que l'autre groupe de défense des droits du consommateurs avant vous nous a dit, c'est qu'il faut qu'il y ait un suivi, parce que, souvent, ce consommateur ou cette consommatrice, qui va être référé à une organisation, n'aura pas complètement réponse à sa question, ou ça concernera, comme vous le mentionniez, une autre des responsabilités à l'intérieur de l'Agence assumée par une autre direction, et là, la direction de la protection du consommateur, à l'intérieur de l'Agence, aurait cette responsabilité de faire le suivi du dossier et d'accompagner le consommateur si c'est nécessaire, pas nécessairement d'infantiliser puis de déresponsabiliser les gens. Mais je pense que c'est ça, les mécanismes nouveaux à implanter et à rendre disponibles pour les consommateurs pour leur éviter d'avoir à aller frapper à 10 autres portes et puis que la plainte traîne pendant des mois sans qu'ils puissent avoir réponse à leurs questions. Alors, sur les mécanismes, les façons de faire, les procédés, les approches, moi, je pense que toute la panoplie devrait être disponible et, selon l'importance de la question, selon les institutions en cause, là, accompagner, s'il y a lieu et si nécessaire, le consommateur.

M. St-Amant (Jacques): C'est précisément là que se situe le défi sinon le risque. Mieux l'Agence accompagnera le consommateur dans le traitement d'une plainte plus il lui sera difficile ensuite de juger de façon impartiale quand elle aura à déterminer si l'entreprise contre laquelle une plainte a été portée a commis une faute ou pas. On ne peut être à la fois l'avocat d'une des parties et le juge. Et là, il va y avoir une série d'échanges et ça n'a rien à voir avec les pouvoirs qui sont dévolus à l'Agence, ça a à voir avec l'exercice.

Mme Marois: C'est exactement la situation actuelle à la Commission des valeurs mobilières, les commissaires ont tous les pouvoirs.

M. St-Amant (Jacques): Les commissaires justement.

Mme Marois: Non mais est-ce que c'est vrai ou pas?

M. St-Amant (Jacques): Et c'est exact, sauf qu'il y a justement une petite différence structurelle fondamentale: les pouvoirs quasi judiciaires sont exercés par des commissaires qui sont relativement peu liés à l'administration courante, qui ne sont pas les gens qui rendent les services.

Mme Marois: Pas dans la législation.

Mme Jérôme-Forget: Le président ne siège pas aux différends souvent. Je pense que vous avez raison.

M. St-Amant (Jacques): Dans la pratique, il y a des mesures coupe-feu. Et je reprends ce que M. Michaud disait: Ce n'est pas parce que, dans le passé, cet aspect-là du fonctionnement des commissions n'a pas été contesté qu'il ne serait pas opportun de faire mieux.

Mme Marois: Effectivement. Il me semble que dans la pratique l'Agence devrait procéder de la même façon. S'il faut... Mais je ne disconviens pas là, j'argumente avec vous, puis je ne disconviens pas qu'il faut réfléchir à cette question-là. D'ailleurs, c'est ce pour quoi on consulte. Puis il faut essayer de voir, s'assurer qu'il y a impartialité et qu'on a des mécanismes de recours, de révision, etc. Je suis consciente de ça, mais, en même temps, on ne peut pas faire dire à la loi ce qu'elle ne dit pas ou l'interpréter en pensant qu'on va permettre à n'importe qui de faire n'importe quoi, ce n'est pas vrai.

La loi que étudions et que nous allons éventuellement adopter prévoit la constitution d'une agence qui ne remet pas en cause les responsabilités assumées par l'une ou l'autre des organisations qui seront regroupées au sein de l'Agence et qui ne réécrit pas les lois appliquées par ces mêmes institutions. Alors là, il faut être de bon compte. Mais, en même temps ? je suis consciente ? il faut prévoir que, à l'intérieur de l'agence, les rôles et responsabilités soient peut-être mieux campés, mieux départagés entre le P.D.G., les superintendants et le conseil ? actuellement, c'est un conseil ? un organisme-conseil, et éventuellement cet organisme-conseil ou une autre modalité dans l'organisation allant vers soit des commissaires ou soit un conseil d'administration. Je ne suis pas fermée à cela. Je pense qu'il faut débattre, mais il ne faut pas faire dire non plus à la loi ce qu'elle ne dit pas.

M. St-Amant (Jacques): Notre appréhension vient tout simplement de la lecture de quelques décisions de la Cour suprême et des balises qu'elle a posées. Je pense, entre autres, à l'affaire concernant les permis d'alcool. Nous sommes entièrement d'accord avec la volonté de simplifier. Ce que nous disons, c'est: Assurons-nous qu'on simplifie d'une façon qui va être stable. Et nous ne voyons pas, dans le projet de loi, les balises claires qui garantiraient cette stabilité-là.

Mme Marois: Je comprends.

Le Président (M. Paré): Merci. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

n(12 h 10)n

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, d'abord, je vais vous souhaiter la bienvenue, et j'ai écouté attentivement vos propos, en plus d'avoir lu vos mémoires. Ce que je voulais souligner: je pense que vous avez parfaitement raison de soulever le problème du guichet unique. On veut nous faire croire ou on veut croire ? pas nous faire croire, je pense bien qu'il n'y a pas de mauvaise intention ? que le guichet unique va répondre aux griefs, que vous avez soulevés, du consommateur. Je pense, moi, que, dans la loi actuelle telle qu'elle est rédigée, le guichet unique va favoriser l'approche de normalisation des normes, à savoir que vous aurez maintenant une possibilité d'harmoniser les normes dans chacun des secteurs de sorte qu'il n'y ait pas possiblement de dédoublement. Le guichet unique, ça apparaît vertueux, ça a l'air très beau. Ça fait des années qu'on parle de ça dans différents secteurs. Sauf que, si on ouvre une porte et que, l'autre côté, c'est là, le labyrinthe, je pense qu'on n'a rien gagné. Vous avez mentionné, madame, que peut-être qu'avoir un bureau d'information, à cause de la complexité de tous les produits qui nous sont offerts aujourd'hui, la complexité et le nombre des intervenants, des différents intervenants, il y a lieu d'avoir un endroit où on nous explique comment ça fonctionne. On m'expliquait qu'un agent dans le domaine de l'assurance, ce n'est pas la même chose qu'un agent dans le domaine du secteur bancaire. Ce sont deux personnes tout à fait différentes. Ça porte le même nom. Alors, je pense qu'il y aurait lieu d'avoir un endroit où on a de l'information.

Est-ce que vous croyez que, dans l'Agence actuellement, il y aurait une possibilité de nous assurer que le consommateur aura effectivement une porte pour obtenir cette information-là et que ça pourra répondre aux problèmes que vous avez soulevés plus tôt dans votre exposé notamment?

Le Président (M. Paré): Mme Rozon ou M. St-Amant? Mme Rozon.

Mme Rozon (Louise): Je pense qu'effectivement, si on a une seule Agence, le consommateur va appeler à cette Agence-là. Mais ça ne veut pas dire nécessairement que sa plainte va être traitée rapidement et par la même personne du début à la fin, parce que ça demande des compétences extrêmement précises même pour le personnel qui va travailler au sein de l'Agence. Ce qu'on dit, c'est que: Oui, c'est utile pour le consommateur d'avoir un seul endroit où s'adresser, lorsqu'il a un problème, parce qu'il ne comprend pas nécessairement les différentes fonctions que peut jouer là un professionnel dans ce domaine-là. Mais ce n'est pas parce que c'est utile pour le consommateur d'avoir un endroit où appeler qu'il faut nécessairement créer un seul organisme qui peut avoir, par ailleurs, des conflits de mission et voir, comme on le soulignait, des conflits d'intérêts.

Donc, il y a peut-être moyen de répondre aux besoins du consommateur, dans le sens d'avoir un seul endroit où appeler, puis avoir une information complète et impartiale sans nécessairement créer un seul organisme. Donc, c'est un peu le message qu'on veut lancer.

Le Président (M. Paré): Vous voulez ajouter, M. St-Amant?

M. St-Amant (Jacques): Au fond, c'est tellement simple. Le consommateur, qui a un problème, veut que le méchant soit puni. Il veut être indemnisé s'il a subi une perte et il veut que ça lui pose le moins de problèmes possible. Le reste, que ce soit une agence ou 22, jusqu'à un certain point, il n'en n'a cure. Il faut que le processus soit simple. Est-ce que créer une agence, c'est la seule, la meilleure façon de simplifier le processus, l'interface, entre guillemets, avec le consommateur? Pas nécessairement. Une seule agence peut être terriblement bureaucratique, lourde et, là, on ne peut pas présumer de ce que serait évidemment l'Agence, mais ce n'est pas une solution miracle.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, vous comprendrez avec moi que les gens veulent que ce soit simple, quand ils se sont fait vendre quelque chose qui n'était pas conforme à ce qu'ils estimaient, que le vendeur soit puni. Vous comprendrez que, dans un marché libre, il y a toujours des gens qui vont vendre des produits, des gens qui vont vouloir entendre quelque chose. D'accord? Vous avez un consommateur qui veut, lui, que ça lui coûte le moins cher possible puis en avoir le plus pour son argent. Très souvent, quand vous en avez plus pour votre argent puis vous payez le moins cher possible, vous en avez moins pour votre argent.

Alors, ce que je veux soulever, c'est qu'il n'y aura pas de solution miracle dans tout ça. Je veux dire: Il y a ? il va falloir ? également le volet éducation du consommateur à l'effet qu'il doit apprendre à reconnaître justement les points cachés, que les volets cachés d'une police d'assurance notamment soient bien articulés, parce que, dans le moment, en tant que consommateurs, on a tendance à vouloir payer le moins cher possible et la personne, juste avant vous, qui nous exposait ? je pense que c'était Mme St-Pierre ? nous racontait toutes les histoires qui se sont passées dans le cas de décès, par exemple, et on nous disait: Seule la veuve est capable de dire si le produit est bon ou pas bon. Alors, moi, j'aimerais connaître votre opinion sur ça.

M. St-Amant (Jacques): Il y a effectivement un travail éducatif colossal à faire auprès des consommateurs, mais, en même temps, il ne faut pas s'illusionner. De la même façon qu'on a beau présumer en matière pénale que nul n'est censé ignorer la loi, on ne s'attend pas de tous les citoyens qu'ils soient des avocats. On ne peut pas non plus s'attendre de tous les citoyens qu'ils maîtrisent les produits des services offerts dans le secteur financier. C'est tout simplement impossible. Donc, on peut faire du travail à ce niveau-là, mais il y a des limites.

L'autre aspect où on peut aussi avoir des interventions fort utiles, c'est la formation et l'encadrement des gens qui offrent ces produits. Il y a déjà, de la part des deux chambres créées par la Loi sur la distribution pour les services financiers, du travail qui se fait en matière de formation continue obligatoire. On pourra faire plus et mieux. Il y a également du travail qui se fait en matière de déontologie. Il y a tranquillement des habitudes qui vont peut-être entrer dans les moeurs. Mais, il y a environ deux ans, nous avons fait une étude terrain dans la région de Montréal. Nous sommes allés voir une trentaine de conseillers dans le domaine financier avec un profil donné pour voir un petit peu ce qui se passait. Nous avons effectivement constaté, chez beaucoup des représentants que nous avons vus à l'époque, des carences extrêmement troublantes.

Avec les efforts qui se font depuis, on peut espérer que les choses vont aller en s'améliorant. Il va y avoir des efforts importants à continuer à faire à ce niveau-là aussi. Et, peut-être, en un sens, ça risque d'avoir plus d'impact réel que le travail qu'on pourra faire en matière d'éducation des consommateurs.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Jérôme-Forget: Mon collègue, M. Bergman...

Le Président (M. Paré): M. le député de D'Arcy-McGee, la parole est à vous.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Pour faire suite à vos remarques, vous invitez... Dans l'introduction de votre mémoire, vous semblez réagir aux questions de fond relativement à l'encadrement des services financiers. Et vous faites référence aux incompétents, aux fraudeurs, et vous faites référence au besoin de protection du public dans le contexte de l'évolution rapide des services financiers. Dans quels domaines est-ce que vous suggérez que l'Assemblée agisse immédiatement, qui ont des besoins dans le domaine de prévention? Est-ce que vous pouvez détailler un ou deux domaines qui seront prioritaires?

M. St-Amant (Jacques): Hélas! il ne nous reste qu'une dizaine de minutes. De toute évidence, tout ce qui a trait à l'information est un élément important. Mais je pense que la réflexion devrait même aller plus loin que ça. Compte tenu de ce qu'on voit depuis quelques années, par exemple: est-ce que... Les obligations de divulgation continue périodique en matière de valeurs mobilières, est-ce que c'est la manière d'aider le consommateur à faire des choix adéquats? Je ne le sais pas.

Il est certain qu'il y a des problèmes importants en matière de contenu des produits financiers, en matière de visibilité. Il y a des problèmes de plus en plus importants en matière d'accessibilité aux produits financiers, que ce soit l'assurance, que ce soit l'accès d'aide aux services bancaires de base qui est encore un problème, mais qui devient un problème de plus en plus important au Québec. Il faut revoir, je pense. Il faut se payer une réflexion d'ensemble. Quels sont les besoins des consommateurs? Quels sont les services qu'ils utilisent? Dans quelle mesure on leur offre de la pacotille? Dans quelle mesure les gens qui leur offrent des biens, des services sont effectivement compétents? Comment faire pour les rendre plus compétents? Qu'est-ce qu'on fait avec la distribution directe? Internet? Il y a une série de questions qui requièrent, je pense, une réflexion vraiment fondamentale. Ce n'est pas seulement un ajustement d'une mesure ici ou là. C'est de se dire: Au fait, quel est l'état de ce marché? Qu'est-ce qu'il se passe? Qu'est-ce que les consommateurs peuvent faire et quels sont les endroits où il faut les protéger?

Alors, je n'ai pas de solution facile. En y repensant, on pourrait sans doute vous faire une liste plus ordonnée. Je ne sais pas si mes collègues ont des éclairs plus...

Une voix: ...

Le Président (M. Paré): Merci. Mme Rozon, avez-vous quelque chose à ajouter? Ça va. M. le député de D'Arcy-McGee?

M. Bergman: Merci.

Le Président (M. Paré): Ça vient compléter notre échange. Je vous remercie de votre contribution à la commission. Nous suspendons les travaux jusqu'à 15 heures, où nous recevrons la Compagnie d'assurance Standard Life. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 19)

 

(Reprise à 15 h 3)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons débuter nos travaux en recevant cet après-midi le groupe Standard Life représenté par M. Garcia, M. Dufour et M. Bernier. M. Garcia, veuillez, pour la forme, présenter les gens qui vous accompagnent. Et vous avez 20 minutes pour votre présentation, et les parlementaires se réservent 40 minutes d'échanges avec vous. Merci.

Compagnie d'assurance Standard Life

M. Garcia (Claude): Alors, merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, je veux vous présenter, à ma droite, Maxime Bernier, qui est directeur à la conformité des ventes et la qualité des affaires à la Standard Life, et Michel Dufour, qui est directeur des relations publiques chez nous.

Le Président (M. Paré): Merci.

M. Garcia (Claude): Je veux d'abord vous remercier de m'avoir invité pour participer à cette consultation sur le projet de loi n° 107. Et vous avez certainement lu mon mémoire, je n'en prendrai pas copie... je n'en ferai pas la lecture complète. Mais je veux d'abord commencer en disant, au départ, que la Standard Life est favorable à l'objectif ultime de la loi n° 107, qui est de créer une seule agence de réglementation pour l'ensemble du secteur financier au Québec.

Et, si je dis ça, c'est parce que, dans le moment, on est soumis, comme compagnie, à énormément de lois. Je vais vous donner un exemple. Quand on achète des actions, par exemple, pour un client, supposons que c'est des actions de Bombardier, bien, selon qu'on les achète pour un client de pension, un client de fonds de placement, qu'on appelle communément fonds mutuels, ou encore client d'assurance, on est soumis à trois lois différentes, et ça, au Québec comme dans d'autres provinces. Donc, ça devient extrêmement compliqué de gérer nos affaires.

Et c'est pour ça d'ailleurs que, parce qu'on tient à ce que cette Agence voit le jour et qu'elle soit bien reçue, qu'on suggère un certain nombre d'améliorations dont on va vous parler tantôt. Alors, je pense qu'on veut appuyer le leadership du gouvernement à cet égard, mais, évidemment, on veut que le produit final soit le plus approprié possible pour les besoins du marché.

J'entends couvrir les trois points suivants: l'inefficacité du système réglementaire au Canada dans le moment, les coûts reliés à la complexité du cadre réglementaire et nos principales recommandations.

J'aimerais commencer en vous situant notre entreprise sur la scène provinciale et au niveau pancanadien. Les opérations canadiennes de Standard Life sont une division des opérations internationales de Standard Life qui a été fondée à Édimbourg en Écosse en 1825. Le groupe Standard Life est une institution financière d'envergure internationale qui compte plus de 12 000 employés et on gère un actif d'environ 187 milliards de dollars canadiens. On exerce des activités au Royaume-Uni, au Canada, en Irlande, en Allemagne, en Autriche, en Espagne, aux Indes et à Hongkong, et on est sur le point de conclure des ententes en Chine. Nous sommes l'un des cinq groupes d'assurance vie au monde à détenir une cote triple A de Moody's et de Standard & Poor's, les deux plus importantes agences indépendantes d'évaluation de crédit au monde.

Les opérations canadiennes de Standard Life constituent les plus anciennes et les plus importantes activités que mène la compagnie hors du territoire britannique. On a ouvert notre première succursale ici, à Québec, en 1833, et on est devenu la première compagnie d'assurance de personnes à exercer nos activités au Canada. Enfin, à l'époque, ce n'était pas le Canada en 1833. Donc, on a connu des changements constitutionnels. En 1846, on a établi notre siège social canadien à Montréal et on est encore là aujourd'hui.

Au cours des trois dernières années, les activités canadiennes de Standard Life ont représenté environ 17 % des nouvelles affaires du groupe et on gère ici un actif d'environ 28 milliards de dollars, un chiffre d'affaires de 3,7 milliards, avec 2 200 employés répartis dans 21 bureaux à travers le Canada. Maintenant, sur 2 200, il y en a 1 700 au Québec seulement. Parce qu'on fait plus que 75 % de notre chiffre d'affaires en dehors du Québec, au Canada, donc on peut se classifier comme un important exportateur de services financiers.

Le premier produit qu'on a commercialisé en 1863 était de l'assurance de personnes, mais, depuis ce temps-là, on est devenu un chef de file dans le domaine des produits et services financiers et on propose aujourd'hui une gamme croissante de produits et de services afin de répondre aux besoins changeants des personnes et des collectivités. Notre gamme de produits comprend les produits d'assurances, de retraite, l'épargne collective, les produits d'assurances vie, d'épargne et de rente individuelle. Nous offrons aussi, par l'intermédiaire de sociétés affiliées en propriété exclusive, des fonds communs de placement, des services de gestion de portefeuille et des services de gestion de titres de caisses de retraite.

L'an dernier, nos produits d'assurance représentaient 11 % de notre chiffre d'affaires; les produits d'épargne et de retraite, les fonds communs de placement et les fonds, 70 %; la gestion d'actifs de caisses de retraite et la gestion de portefeuilles comptait, elle, pour 19 %.

Comme vous le constatez, nous touchons à plusieurs des aspects du secteur des marchés des services financiers, et notre clientèle qui dépasse le million d'individus, au Canada seulement, exprime des besoins diversifiés et complémentaires, c'est-à-dire que nous devons offrir à un même client une multitude de produits, bien souvent réglementés de façon différente. Le consommateur, évidemment, a de la difficulté à s'y retrouver et, nous, on a de la difficulté à gérer tout ça. De là à conclure à l'inefficacité du système actuel, il n'y a qu'un pas. Plusieurs, évidemment, souhaitent que la solution soit de créer un cadre réglementaire unique pour l'ensemble du Canada en éliminant les régulateurs provinciaux. Cette approche nous semble, à nous, difficilement réalisable dans la mesure où les assurances, les valeurs mobilières, les rentes, les institutions de dépôt et les fiducies sont des domaines de compétence provinciale et plusieurs provinces ont indiqué qu'elles ne sont pas disposées à abandonner, par les temps qui courent, ce champ de compétence au fédéral.

Alors, à défaut d'avoir un régulateur canadien unique, on se dit: En avoir un par province, c'est déjà une étape extrêmement intéressante, et c'est pour ça qu'on appuie l'initiative de Mme Marois de créer au Québec l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier.

Évidemment, à partir du moment où on crée une telle agence, si on veut vraiment atteindre une plus grande efficacité du système, il faut que le gouvernement du Québec permette à cette Agence de conclure avec les autres régulateurs provinciaux et fédéraux des ententes de reconnaissance mutuelle comme il est proposé par la porte-parole de l'opposition dans ce domaine. Cette reconnaissance mutuelle ferait en sorte que les institutions financières à charte provinciale, pour leurs activités canadiennes, seraient soumises à un seul régulateur, pour ce qui concerne les règles de prudence et les pratiques commerciales, et à un seul ensemble de normes.

n(15 h 10)n

Pour ce qui est des institutions financières à charte fédérale ou à charte étrangère opérant à l'échelle du Canada, comme c'est le cas pour nous, elles seraient soumises à deux régulateurs, au lieu de plus de 30, comme c'est le cas à l'heure actuelle ? on est soumis à 30 régulateurs à l'échelle du Canada pour nos opérations canadiennes ? un régulateur provincial pour toutes les questions touchant les pratiques commerciales et un régulateur fédéral, c'est-à-dire le Bureau du surintendant des institutions financières pour les règles de prudence. Je réitère que cette approche sera possible en vertu des ententes de reconnaissance mutuelle entre les différents régulateurs. Et j'ajouterai que la signature de telles ententes ne représente pas une perte de compétence pour le Québec, mais plutôt un gain, car le régulateur québécois exercera vraisemblablement sa compétence au niveau pancanadien pour les entreprises dont la principale place d'affaires se trouve au Québec. Dans cette optique, chaque province aura un régulateur correspondant à la taille de son marché.

La conclusion d'ententes de reconnaissance mutuelle éliminerait les duplications et en réduirait les coûts directs ainsi que les coûts liés à l'observance de la réglementation. Cette approche permettrait d'assurer aussi une certaine équité concurrentielle entre les différents intervenants du secteur financier au sein d'une même juridiction; entre autres, entre les banques, par exemple, et les autres institutions parce que les banques prétendent qu'elles ne sont pas soumises à la juridiction des provinces. Il y a un débat à l'heure actuelle en Colombie-Britannique devant les tribunaux là-dessus, mais c'est clair que, dans la mesure où les banques nous concurrencent dans les mêmes domaines, on ne trouve pas ça juste que les banques ne soient pas soumises à la même réglementation.

Dans un système où les institutions financières non bancaires et les banques seraient soumises à un seul régulateur uniquement pour la surveillance de leur solvabilité, ce régulateur exercerait une compétence pancanadienne et les intervenants du secteur financier bénéficieraient alors d'un passeport leur donnant accès aux autres provinces. La prémisse serait que, pour être soumis à un seul régulateur, les institutions financières obéiraient à un certain nombre de critères les rattachant à une compétence territoriale donnée, comme le lieu de leur siège social, ou encore leur origine d'incorporation provinciale ou fédérale.

Il est primordial de préciser que le succès du système de passeport que nous proposons aux intervenants du secteur financier oeuvrant sur la scène canadienne est tributaire des efforts que le gouvernement du Québec déploiera pour bien structurer le fonctionnement de l'Agence nationale d'encadrement. L'Agence doit bénéficier de moyens d'action dont la portée et l'exercice seront suffisants, efficaces et comparables à ceux des autres régulateurs provinciaux et canadiens. La structure de fonctionnement de l'Agence permettra de gagner la confiance des autres régulateurs, confiance qui se trouve à la base même de la signature de ces ententes de reconnaissance mutuelle. L'Agence ne doit pas être placée en situation défavorable par rapport au régulateur dont elle désire obtenir l'exercice d'une délégation de pouvoirs, ce qui irait à l'encontre du système de passeport. Et j'insiste, il ne faut pas doter l'Agence d'une structure de direction complexe, indéchiffrable et disparate des autres régulateurs canadiens.

Parlons maintenant des coûts du système. Ce système est de plus en plus complexe pour les consommateurs et les entreprises qui offrent des produits et des services financiers. Selon évidemment la Constitution, la compétence dans le domaine des assurances, etc., est du ressort provincial, ce qui n'empêche pas le gouvernement fédéral d'incorporer les institutions financières à charte fédérale, entre autres: des fiducies, des sociétés d'assurances et les différentes coopératives de crédit et des sociétés de secours mutuel. Toutes ces entreprises doivent se soumettre aux lois et à la réglementation dans chaque province où elles désirent vendre leurs produits.

La Standard Life, une institution financière à charte étrangère reconnue par le gouvernement fédéral qui offre des produits d'assurances de valeurs mobilières et de rentes, qui oeuvre au niveau pancanadien, est soumise à une multitude d'organismes de réglementation. Nous devons rendre des comptes à plus de 30 organismes de réglementation qui administrent 60 lois, et sans compter la réglementation plus ou moins harmonisée découlant de ces législations.

Il n'y a pas de doute que cette multiplicité de régulateurs, de lois, de règlements engendre des coûts dont les entreprises distributrices de produits financiers et les consommateurs pourraient se dispenser. Là-dessus, je citerai deux études qui tendent à prouver que les coûts associés au maintien de plusieurs organismes réglementaires et à l'observance des règles par les institutions financières atteignent des proportions hors de l'ordinaire au Canada. Une étude du Financial Services Authority au Royaume-Uni compare les coûts de la réglementation en l'an 2000 dans divers pays et révèle que les coûts directs de la réglementation du secteur financier au Canada était d'environ 499 millions de dollars. En Angleterre, où la population est le double à peu près de la population canadienne, ces mêmes coûts totalisent 493 millions de dollars, à peu près le même montant. Cette étude nous apprend aussi qu'au Canada 3 780 personnes sont affectées à la réglemen-tation du secteur financier, alors que l'Angleterre n'en emploie que 2 765. Ainsi, 1 000 personnes de moins sont capables d'encadrer un secteur financier qui représente quatre fois la capitalisation boursière du marché canadien, parce que le marché financier au Royaume-Uni est beaucoup plus développé que le marché financier au Canada, en termes d'importance par rapport au produit national brut. Donc, 1 000 personnes de moins, mais un marché financier de trois à quatre fois plus important que le marché canadien.

Pour sa part, l'Association des banquiers canadiens affirme qu'en 2000 nous avons dépensé, toutes proportions gardées, plus que l'Angleterre ou l'Australie en matière de réglementation financière. Les dépenses réglementaires, par tranche de 1 000 $ du produit intérieur brut, liées au secteur financier, totalisent 10,83 $, 10,83 $ par 1 000 $ de produit intérieur brut du secteur financier. En d'autres termes, pour chaque 1 000 $ de valeurs générées par le secteur financier, il en coûte 10,83 $ en coûts réglementaires. Les dépenses réglementaires d'Angleterre sont de 4,26 $ et, en Australie, 6,85 $. Et l'Australie est un système fédéral qui a à peu près la même structure que le Canada. Alors, si on pouvait atteindre la même efficacité, les consommateurs canadiens épargneraient entre 180 et 297 millions de dollars par année seulement en coûts de réglementation, sans compter les coûts des institutions financières elles-mêmes pour voir à s'assurer qu'on respecte cette réglementation. Évidemment, on ne veut pas plaider en faveur de l'élimination de la supervision, mais on veut vous demander d'instaurer un cadre réglementaire moins dispendieux, mieux organisé, plus efficace et plus concurrentiel.

Nos principales recommandations portent donc sur l'amélioration de la structure du fonctionnement de l'Agence d'encadrement. En premier lieu, nous sommes d'avis que les pouvoirs de supervision, soit les pouvoirs d'inspection, d'enquête, d'adjudication ainsi que les pouvoirs de réglementation du secteur financier et l'émission générale de lignes directrices aux institutions financières doivent être conférés à l'Agence et exercés par le corps collégial comme c'est présentement le cas à la Commission des valeurs mobilières. Mais je tiens à répéter que la création de l'Agence est une étape essentielle si on veut arriver à cette simplification.

Nous pourrions aussi avoir une agence qui respecterait les critères d'impartialité édictés par la Cour suprême, puisque la collégialité ferait en sorte de répondre aux problèmes de cumul de fonctions portant sur l'institution bancaire, la réception de rapports d'enquête et la prise de décisions dans les mains d'une seule personne. Cette recommandation correspond aux tendances internationales de l'heure. En effet, la plupart des pays développés qui ont fusionné leurs organismes de réglementation prudentielle avec celui qui supervise le marché des valeurs mobilières ont adopté une structure de direction collégiale formée d'une majorité d'administrateurs non membres du personnel de direction. C'est aussi l'orientation choisie par l'Ontario et la Saskatchewan dans des projets de loi qui ne sont pas adoptés mais qui sont quand même dans le domaine public. Cette division des responsabilités est fondamentale à la reconnaissance mutuelle que nous avons évoquée plus tôt.

Par ailleurs, étant donné que l'Agence se doterait d'une direction collégiale, que le Vérificateur général et le ministre responsable exerceraient des activités de contrôle de l'Agence, nous ne voyons pas la nécessité de créer un conseil consultatif de régie administrative. L'Agence, si elle le désire, pourrait évidemment mettre sur pied un tel comité composé de membres possédant une connaissance du secteur financier mais en étant... à condition qu'ils soient non actifs au sein de l'industrie pour la conseiller, comme le fait le Bureau du Surintendant des institutions financières. Et si je demande que ce soient des non-actifs, c'est parce qu'on ne veut pas avoir des compétiteurs là, O.K. il faut que ça soit clair. Alors, comme plusieurs intervenants, on se rappelle que M. Bouchard, l'ancien Surintendant des institutions financières, a arrêté d'être Surintendant puis, le lendemain, il travaillait chez Desjardins. Alors, vous savez, on n'a pas aimé ça beaucoup parce que ces gens-là ont accès à de l'information très confidentielle sur nous.

Comme plusieurs intervenants, nous estimons qu'une agence administrée par un président-directeur général, qui peut, en valeurs mobilières, instituer une enquête, tenir une audience et rendre jugement, soulève un doute raisonnable de partialité et ouvre la porte à un risque de contestation judiciaire des décisions de l'Agence, fondé sur le non-respect de l'article 23 de la Charte des droits et libertés du Québec. D'autres évoquent qu'il est reconnu au Canada et dans la plupart des pays développés que l'organisme, qui a pour mission unique de s'assurer de la solvabilité des institutions financières, doit être dirigé par une seule personne. En effet, les pouvoirs d'octroyer et de révoquer le permis d'une institution financière appartiennent à une seule personne et sont exercés par cette dernière. Il nous semble que, entre ces deux positions, il est possible d'arriver à un compromis. Nous suggérons d'isoler certains pouvoirs de l'Inspecteur général des institutions financières, les pouvoirs actuels en matière de solvabilité, et de les transférer en vertu de la Loi de l'Agence nationale d'encadrement au surintendant de l'encadrement de la solvabilité nommé par le président-directeur général de l'Agence.

n(15 h 20)n

Je vous souligne que les pouvoirs de solvabilité s'appliquent à la décision d'octroyer et de refuser, de suspendre ou de révoquer un permis d'exercice à une institution financière ainsi que la décision de mettre en liquidation une telle institution. Ces pouvoirs comprennent aussi le pouvoir de donner des instructions écrites aux institutions financières concernant la suffisance de leur capital et de leur liquidité de même que les pouvoirs d'ordonnance.

Nous croyons qu'il serait préférable de permettre au P.D.G. de l'Agence de nommer ses surintendants et ses directeurs dans la mesure où c'est le P.D.G. de l'Agence qui est en dernier ressort imputable des actions de l'Agence aux yeux du public. La suggestion que ces surintendants puissent être nommés par le gouvernement soulève plusieurs questions. Comment le P.D.G. pourra-t-il s'assurer d'administrer efficacement l'Agence s'il ne peut choisir ses principaux collaborateurs? Quelle autorité pourra-t-il exercer sur les surintendants ou directeurs si c'est le gouvernement qui les a choisis? Et en vertu de quels critères? N'oublions pas que ces directeurs seront chargés d'administrer des activités de direction de l'Agence tout comme les directeurs de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

De plus, bien que nous soyons en faveur d'une harmonisation et d'une simplification de la réglementation sur les institutions financières, il n'est pas dit pour autant que cette réglementation sur les produits d'assurance doit être identique à celles des autres produits financiers. Toute harmonisation de la réglementation doit respecter les caractéristiques de chaque produit financier. Présentement, le consommateur a de la difficulté, par exemple, à faire la différence entre un fonds commun de placements et un fonds distinct. À cet égard, il est important que l'Agence favorise la simplification de la réglementation des produits essentiellement similaires.

On assiste à une convergence prononcée de plusieurs produits financiers. Mais ce qu'il faut entendre ici par convergence, c'est la similitude des objectifs visés par la réglementation et non pas nécessairement la similitude des normes. Cela permettrait de réduire les coûts de conformité assumés par l'industrie. L'agence qui édictera la réglementation et le gouvernement qui l'approuvera devraient être conscients de cette réalité.

Enfin, nous proposons, comme le fait le rapport Martineau, que le volet... que les régimes complémentaires de retraite soient également sous la supervision de l'Agence. Les institutions financières qui seront régies par l'Agence sont des fournisseurs de services importants pour les caisses de retraite. Par exemple, le marché des régimes de retraite à prestations déterminées est surtout entre les mains de gestionnaires de portefeuilles, et plusieurs de ces gestionnaires font partie de groupes financiers importants ? comme il y en a un qui fait partie de notre groupe à nous.

Quant au marché des régimes de retraite à cotisation déterminée, il est dominé exclusivement par les assureurs ? j'ai d'ailleurs des tableaux ici ? et il reste une seule compagnie de fiducie dans ce marché-là, une compagnie de fonds de placements et une compagnie de valeurs mobilières. Mais le marché est presque exclusivement entre les mains des assureurs.

Alors, on signe des ententes avec des gestionnaires de portefeuilles, des gestionnaires de fonds communs de placements afin d'offrir aux membres de ces régimes un grand éventail de choix de placements. Mais chacun de ces types de placements là est réglementé différemment. Alors, ça devient... C'est extrêmement compliqué et c'est pourquoi nous croyons que toute la question de la réglementation des régimes complémentaires de retraite soit ajoutée à la responsabilité de l'Agence.

D'ailleurs, j'ajouterais que, en Ontario et en Colombie-Britannique, deux provinces qui n'ont pas eu le courage de faire ce qu'on propose ici, la réglementation des régimes de retraite est assimilée à la réglementation des produits d'assurance; c'est le même régulateur. Donc, on a commencé cette intégration. Alors, je vois mal pourquoi, au Québec, on ne ferait pas ça.

En terminant, j'attire votre attention sur le fait qu'il est essentiel de s'aligner sur les grandes tendances observées en Europe et aux États-Unis en matière de réglementation, particulièrement dans le domaine des services financiers. Aux États-Unis, on affirme que les exigences réglementaires appliquées aux entreprises de services en général doivent être objectives et transparentes.

Pour sa part, l'Union européenne, dans le cadre des négociations entourant la libéralisation des services, ajoute, à la transparence deux autres exigences, celles de nécessité et de la proportionnalité de la réglementation. Au lieu des organismes internationaux européens, il appert en effet que la réglementation interne d'un état ou pays ne doit pas être plus restrictive que nécessaire, l'objectif étant de toute évidence de ne pas offrir de barrière à la libéralisation des services.

L'enjeu de la mondialisation du commerce est d'atteindre un équilibre entre l'accès aux marchés étrangers et le traitement qui doit être accordé aux entreprises nationales tout en favorisant la protection des consommateurs. Dans ce contexte, la proposition formulée par l'European Service Forum à l'Union européenne contribue à diminuer le fardeau réglementaire supporté par les entreprises qui seront alors assujetties uniquement aux normes réglementaires nécessaires et raisonnables.

Nous suggérons fortement au gouvernement du Québec de s'inspirer de cette tendance internationale, d'autant plus que le premier ministre Landry a affirmé à plusieurs reprises que, sur le plan économique, le Québec se devait de jouer un rôle de premier plan sur l'échiquier du commerce international et de participer pleinement au processus de mondialisation des échanges commerciaux.

M. le Président, je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Garcia. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Garcia, de même que vos collègues, pour cette présentation et cette participation à nos travaux. Comme je l'ai fait à quelques reprises depuis les débuts de ces mêmes travaux, j'ai indiqué à ceux et celles qui sont venus faire des représentations que nous partageons ensemble un certain nombre d'objectifs. Le premier est de mieux servir l'intérêt public ? je pense que c'est le fondement même de la loi qui est là ? mais aussi, bien sûr, de faire en sorte que nous soyons plus efficaces, pour reprendre vos propos, mieux organisés et permettre à nos entreprises d'être plus concurrentielles. En ce sens, la proposition, devant nous, qui nous permet de regrouper sous une même responsabilité l'ensemble des institutions liées à l'encadrement, à la régulation, à la réglementation du secteur financier et de tous les produits accessibles au consommateur, je pense, est un bon choix qui va dans cette direction. Et, si je vous lis bien et je vous entends bien, vous êtes d'accord avec cette orientation générale que nous proposons à l'intérieur du projet de loi, premièrement.

Deuxièmement, évidemment, vous proposez un certain nombre de changements dans les remarques que vous nous faites. Un premier commentaire sur une recommandation que nous n'avons pas retenue, qui était au rapport Martineau, que vous nous faites maintenant: c'est que ce qui concerne les régimes complémentaires de rentes, toute la régulation de ce secteur, qui est actuellement sous la Régie des rentes du Québec, passe à l'Agence, et nous ne l'avons pas retenue pour différentes raisons. Mais l'une, entre autres, c'est qu'il y a ? et c'est seulement au Québec qu'on a cette institution ? une Régie des rentes du Québec qui a développé une longue expertise, qui applique une série de règlements, qui applique des lois concernant les régimes complémentaires et qui nous semblent jusqu'à maintenant satisfaire les personnes concernées, autant les institutions que les individus. Et, comme l'Agence aura déjà une fonction importante et significative et devra s'assurer que l'intégration se fasse progressivement d'un bon nombre d'autres institutions, il ne nous apparaissait pas pertinent à ce moment-ci de retenir cette recommandation. Alors, pour moi, c'est important de le dire maintenant, parce que, sur ça, je n'ai pas l'intention de revenir avec des amendements.

Sur un certain nombre d'autres de vos propositions, par exemple, ou d'autres remarques, nous allons les étudier attentivement, et sûrement qu'un certain nombre de celles-ci viendront influencer les choix que nous ferons pour la suite des choses et pour l'adoption définitive de la loi.

Je vais venir avec l'une de vos dernières remarques comme première question, puis après ça, j'irai à du plus général. Vous souhaitez l'abolition du Conseil consultatif de régie administrative. Et est-ce que je comprends bien que vous recommandez que l'Agence soit dirigée par un corps collégial ou que l'une des composantes de l'Agence soit dirigée par un corps collégial, qui serait plutôt tout ce qui concerne l'encadrement des valeurs? Et, en même temps que vous proposez l'abolition de ce Conseil consultatif, vous nous dites qu'il faudrait quand même que l'Agence puisse se créer un comité consultatif composé de membres ayant une connaissance du secteur financier et étant non actifs au sein de l'industrie. Si on constituait notre Conseil consultatif sur la base de ces critères-là, est-ce que ça répondrait à une partie de vos inquiétudes? Et, pour l'autre volet, évidemment, c'est un petit peu plus large quant à l'organisation de l'Agence.

Le Président (M. Paré): M. Garcia.

M. Garcia (Claude): M. le Président, Mme la ministre a beaucoup de questions. Alors, je vais essayer de... Écoutez...

Mme Marois: J'essaie de les ramasser pour vous laisser plus de temps après, plus d'espace, évidemment. Ha, ha, ha!

n(15 h 30)n

M. Garcia (Claude): Oui, oui, je comprends. Sur le comité consultatif, c'est parce qu'il y en a qui... On nous a vendu ça comme si ça remplacerait le conseil d'administration. Alors, vous savez, ça nous inquiète beaucoup parce qu'il va y avoir des gens de l'industrie là-dessus. Bien, des gens de l'industrie, j'ai beaucoup de respect pour eux, mais c'est des compétiteurs, hein. Alors, mes compétiteurs, moi, j'essaie de les battre à tous les jours sur le terrain, ça fait que... puis, eux autres aussi, ils essaient de me battre, et c'est la vie. Et je ne veux pas qu'ils aient accès à de l'information confidentielle. Maintenant, si l'Agence... Non, ce qu'on dit... Je pense que ce que j'ai dit, c'est que ce qu'on souhaitait, c'est: si l'Agence veut en avoir, un comité consultatif, il pourra s'en former un, mais il faudrait que ce soit... C'est clair que ça pourrait être ad hoc ou ça pourra être constitué de gens qui n'ont pas de conflit avec... C'est parce que, là, la manière que c'était créé, ces gens-là étaient dans l'industrie.

Mme Marois: D'accord. Oui, mais si on constitue un conseil consultatif en tenant compte des critères que vous énoncez, qui serait donc composé de membres qui ont une connaissance du secteur financier mais étant non actifs au sein de l'industrie, est-ce que ça répondrait un peu à vos inquiétudes? Parce que je les comprends, vos inquiétudes. Puis je fais une petite parenthèse, ce ne serait plus possible, ce que vous avez décrit tout à l'heure, hein, que quelqu'un parte de la tête d'une institution financière pour aller vers une institution, c'est-à-dire d'encadrement public vers une institution privée, parce que, avec la dernière loi que nous avons adoptée, il faudrait qu'il y ait un délai de temps, etc.

M. Garcia (Claude): Je le sais. Oui. On n'a pas encore digéré celle-là, vous savez.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Oui, mais ça! Il y a, comme ça, de la mémoire qu'on peut avoir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garcia (Claude): On a la mémoire. Oui, oui. Et c'est sûr... Non, je le sais, que ce n'est pas possible maintenant; la loi a été changée.

Mme Marois: Oui, c'est ça. Revenons donc aux questions de régie et d'encadrement.

M. Garcia (Claude): Bien, écoutez, c'est clair que s'il y a un comité consultatif, moi, je ne veux pas... pour moi ce n'est pas le point le plus important de mon mémoire. Comme je vous dis, nous, on veut que ça marche, l'Agence, parce qu'on y croit. O.K. Pour moi, l'Agence, c'est une première étape essentielle vers la simplification de la réglementation du service financier au Canada pour rendre ça plus facile pour les entreprises mais surtout plus facile pour les consommateurs de se retrouver, O.K. On veut protéger les consommateurs, puis c'est important de le faire parce que les produits financiers, c'est compliqué, O.K., puis l'informatique les a rendus encore plus compliqués. Donc, c'est clair qu'il faut protéger les consommateurs contre les abus possibles. Il y en a tout le temps. Et ça, on n'a pas de problème avec ça. On n'a pas peur d'un régulateur fort puis ça prend une Agence forte. Alors, on souhaite qu'une agence au Québec, il y en ait une et on veut que ça marche.

Maintenant, le comité consultatif, moi, qu'il soit créé par le gouvernement, j'aimerais mieux qu'il soit créé par l'Agence. Mais, vous savez, en autant que c'est clair que ce n'est pas des gens qui sont dans l'industrie, là, activement, que ce n'est pas des compétiteurs qui sont là, bien, je n'ai pas trop de problèmes. O.K. C'est qu'on ne veut pas... Ce n'est pas comme au Bureau des services financiers où on a des gens de l'industrie puis, là, on donne des permis. Bien, là, ce n'est pas grave, là, tu sais. Il n'y a pas d'information confidentielle qui circule sur les institutions autant là que... Alors là, les rôles sont très, très différents. C'est beaucoup plus délicat. L'information qui va être au niveau de l'Agence est beaucoup plus délicate, cette information-là. Donc, il faut protéger cette information-là le plus possible.

Y avait-il une autre question, Mme la ministre?

Mme Marois: Bien, c'est pour toute la question, dans le fond, de la direction de l'Agence. Est-ce que suggérez qu'à la direction de l'Agence on retrouve la notion d'un corps collégial ou vous le suggérez seulement pour l'une des directions qui serait responsable du travail qu'assume actuellement la Commission des valeurs mobilières, par exemple?

M. Garcia (Claude): Écoutez, c'est ce qu'on suggère. Moi, vous savez, je ne suis pas avocat; je suis un homme d'affaires. Mais ça m'inquiète beaucoup, ce que j'ai lu puis les conseils que j'ai eus à l'intérieur de mon organisation, sur l'Agence. Alors, on tient à ce que ça marche. Comme je vous dis, on y tient beaucoup. O.K. Et alors, on veut que ça marche, et, moi, ce que je souhaite, c'est que le gouvernement entende ces représentations-là, et ça peut être un P.D.G. avec un conseil d'administration, il y a d'autres formules.

Il y a la question des valeurs mobilières qu'il ne faut pas oublier. Je pense que c'est souhaitable qu'on fusionne les valeurs mobilières et les assurances, tout ça, là, évidemment, les régimes de retraite, mais on en reparlera plus tard. C'est important que ça fonctionne et qu'on donne les garanties prévues par les chartes, etc. Maintenant, on a suggéré une formule. Il y en a peut-être d'autres. Est-ce que c'est un conseil d'administration avec des commissaires ou c'est un vrai conseil puis il y a un tribunal en dessous ou un tribunal indépendant qui entend les choses?

Mme Marois: Tenter un peu l'approche quasi judiciaire, dans le fond, ça, c'est une de vos préoccupations.

M. Garcia (Claude): Bien, c'est ça, là, Moi, je ne suis pas un expert là-dedans. Tout ce que je vous dis, c'est que j'entends bien du monde qui me disent: Ça va être contesté. Ça fait que, nous, si c'est contesté, c'est encore pire que ce qu'on a à l'heure actuelle parce que, au moins, à l'heure actuelle, les gens l'acceptent. Si l'Agence, dès qu'elle est en place, elle est contestée, bien là on va avoir une période d'incertitude. Et tout ce qu'on souhaite, toute l'espèce de... on voit la lumière dans le tunnel, puis ce n'est pas un train qui s'en vient. Alors, la lumière va s'éteindre là.

Mme Marois: Mais je suis contente de vous entendre quand même nous dire ? et puis ça rejoint ce que beaucoup d'autres gens ont dit jusqu'à maintenant ? qu'on souhaite l'implantation de l'Agence. On fait un certain nombre de recommandations, de commentaires pour modifier certains aspects de ce qu'on retrouve dans le projet de loi soit sur l'encadrement, la gestion et le quasi-judiciaire, mais vous rejoignez aussi beaucoup d'autres de vos confrères ou collègues dans d'autres institutions, qui souhaitent que nous procédions, et nous avons l'intention de le faire.

Mais nous avons le même intérêt que vous, hein, comme gouvernement, pas tout le temps et en tout, mais que l'Agence soit fonctionnelle, qu'elle réponde aux missions que nous lui confions, qu'elle soit... permettre plus d'efficacité. Bon, je me répète là, mais je pense que, sur ça, là, on se rejoints aussi très bien. Et c'est pour ça que je veux bien vous dire, à vous, comme je dis à d'autres depuis le début de nos consultations, que vos éclairages sont importants et que nous allons évaluer le projet de loi à la lumière des commentaires que vous nous faites, et on verra. Évidemment, nous avons ensuite la responsabilité de décider; nous le ferons mais aidés en cela par vos commentaires.

Bon. Maintenant, moi, j'aimerais revenir sur un autre aspect de ce que vous proposez, c'est la question de la reconnaissance mutuelle. D'abord, il y a une première chose que je veux vous dire: Tous les efforts qui ont été faits dans nos institutions, de régulation, que ce soit à la Commission des valeurs mobilières ou ailleurs, pour nous permettre d'avoir des règles compatibles avec les régulateurs ailleurs dans les autres provinces, tous ces efforts, nous les avons faits, nous les faisons et nous continuerons de les faire ? on s'entend? bon ? pour faire en sorte que, évidemment, le marché soit plus facilement accessible pour tous ceux qui veulent y avoir accès.

Maintenant, là, je reviens à la notion de reconnaissance mutuelle en matière d'assurances. Est-ce qu'il n'est pas vrai que le Québec, et cela de façon générale, c'est l'endroit ou la seule province qui a des assurances à charte provinciale et qu'à ce moment-là la reconnaissance mutuelle ferait en sorte que les assureurs à charte fédérale ne seraient plus assujettis au Québec, alors que la responsabilité en matière d'assurances est, elle, de compétence provinciale? Si vous voulez consulter vos conseillers, parce que moi-même à l'occasion je consulte les miens aussi, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garcia (Claude): Non, mais regardez, si... C'est certain que le Québec aurait juridiction sur toutes les institutions financières... Si vous choisissez le siège social, ce seraient toutes les institutions qui ont leur siège social ? dans notre cas, c'est une place d'affaires ? leur principale place d'affaires au Québec. On est assureur canadien, nous autres, là, quand même. Enfin, au Canada, on est Canadiens. O.K.?

Mme Marois: Vous êtes Québécois aussi.

M. Garcia (Claude): Mes compétiteurs ne sont pas au Québec. J'en ai cinq, j'en ai quatre ici, là, puis ils ne sont pas au Québec. Mais vous savez, le Québec, dans l'épargne, c'est 20 % du marché canadien. D'accord? On a 25 % de population, mais on n'est pas aussi riches. Alors, c'est une question de...

Mme Marois: Mais ça s'améliore. Ça s'améliore.

M. Garcia (Claude): Ah oui, oui, oui! Ça va bien, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garcia (Claude): On l'espère, parce qu'on a une part de marché un peu plus grande au Québec qu'ailleurs. Alors, si le... C'est sûr que ce serait le cas, mais la Banque de Montréal a son siège social à Montréal. Alors, elle serait soumise à...

Mme Marois: Mais là, on n'a pas de pouvoir sur les banques, là.

M. Garcia (Claude): Bien, je ne suis pas sûr. L'ACCAP ne pense pas ça, parce que l'ACCAP est intervenante dans le dossier en Colombie-Britannique. Alors, on ne pense pas... Parce que, nous, on souhaite... Nous, comme je vous dis, quand les banques vendent de l'assurance, on prétend que les banques font de l'assurance, ne font pas de la banque. Les banques disent qu'elles font de la banque. Ce n'est pas vrai. Quand les banques vendent des fonds de placement, elles ne font pas de la banque. Ce n'est pas de la banque, ça. O.K.? Les banques prétendent que c'est de la banque. On n'est pas d'accord avec ça. Alors, c'est tout ça.

Nous, on n'accepte pas ça parce que ça donne aux banques un avantage concurrentiel. Elles ont des coûts de conformité moins élevés que les nôtres. Tantôt, j'ai parlé des coûts de conformité, j'ai parlé des coûts, là, que le gouvernement nous charge. Je n'ai pas parlé des gens comme Maxime qu'il faut payer, hein, pour surveiller tout ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garcia (Claude): On le paye bien, sans ça, il ne serait pas chez nous. Je ne me plains pas, on en a besoin, mais, vous comprenez, on a des coûts de conformité importants.

Une voix: Ça coûte cher.

n(15 h 40)n

M. Garcia (Claude): Ça coûte cher. Alors, les banques n'ont pas autant de coûts parce qu'elles ne sont pas soumises, elles ne se soumettent pas à la... Alors, toute cette question-là, il faut que ce soit vidé une fois pour toutes parce que, avec le décloisonnement, on crée un avantage compétitif aux banques, on donne aux banques un avantage compétitif, et ça, on ne l'accepte pas.

Mme Marois: Mais nous pensons, nous, que, pour les activités qui sont du domaine de l'assurance et qui ne sont pas du domaine bancaire, elles sont soumises à nos lois, à nos règlements et à nos institutions, n'est-ce pas. Vous le savez.

M. Garcia (Claude): Vous le pensez, mais est-ce qu'elles le font?

Mme Marois: Bien, elles devraient, normalement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Est-ce qu'il y a d'autres questions de mes collègues? À ce moment-ci, je laisserai la parole à l'opposition, je pourrai revenir s'il y a des choses que je...

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. le président, et vos associés. Je voulais revenir, moi, sur le volet... Parce que je n'ai pas complètement compris ce pourquoi vous tenez tellement à incorporer les régimes complémentaires de retraite. Et vous y tenez beaucoup. Et je comprends que la ministre n'a pas l'intention de changer sur ça, on ne sait jamais à l'avenir. J'aimerais ça vous entendre dire pourquoi vous y tenez, pourquoi c'est important pour vous, à titre de personne d'affaires.

Le Président (M. Paré): M. Garcia.

M. Garcia (Claude): M. le Président, si on demande ça, c'est que, d'abord ? je l'ai dit tantôt ? il y a déjà deux provinces qui ont intégré le régulateur d'assurances au régulateur de régimes de retraite: l'Ontario et la Colombie-Britannique. En plus de ces expériences qu'on a vécues, dans le moment, il y a une proposition, il y a un groupe de travail à l'échelle canadienne, dirigé par la Colombie-Britannique, par le Surintendant des pensions et des assurances de la Colombie-Britannique, qui revoit les règles en matière des régimes de retraite à cotisations déterminées. Et Standard Life avec la Sun Life, un de nos compétiteurs, sont les deux compagnies qui sont les plus actives pour s'assurer que la réglementation va respecter les produits qu'on offre, c'est-à-dire qu'on pense que nos produits sont très compétitifs, et s'assurer que le fardeau réglementaire qui va nous être imposé éventuellement, parce qu'il n'y a pas de réglementation dans le moment sur les régimes à cotisation déterminée... Et j'ai fait distribuer un tableau aux membres de la commission, qui démontre les statistiques du nombre de membres assurés par les six assureurs ? là, il en reste cinq parce que Clarica et Sun Life ont fusionné récemment, mais vous voyez que les cinq plus gros joueurs de ce marché sont tous des assureurs ? et on souhaite évidemment que la réglementation soit la plus simple possible. Et, pour nous, à Standard Life, les régimes de retraite, ça représente plus de 50 % de notre chiffre d'affaires. Donc, si on est soumis à la juridiction, là encore, de la Régie des rentes là-dedans, bien on va avoir un organisme de plus. Et on souhaite évidemment que toute cette réglementation soit intégrée le plus possible.

Au Québec, dans le moment, il y a trois lois, il y a trois façons différentes de réglementer les placements selon que c'est un régime de retraite, un régime d'assurances ou un fonds de placement. Alors, il y a trois règles différentes. Et c'est pour ça qu'on veut avoir une agence, parce qu'on veut que ce soit simplifié, et il n'y a pas rien qu'au Québec: c'est comme ça dans beaucoup de provinces. Alors, on veut simplifier tout ça parce que, dans un cas, c'est la valeur au marché, dans l'autre cas, c'est la valeur aux livres et, dans le troisième cas, c'est la règle du bon père de famille.

Alors, vous savez, ça devient extrêmement complexe, de suivre tout ça. Nos systèmes administratifs doivent transporter toute cette information-là selon qu'on travaille... Et, surtout, si on a des produits ou on offre des produits... Dans un régime de pension, on va offrir des fonds d'un gestionnaire de placement, d'un fonds de placement, un produit de fonds mutuel. Donc, on est soumis aux deux lois, là, quand on a ces produits-là. S'il y a des erreurs qui se font, comme c'est arrivé chez nous il y a deux ans, on a eu une erreur, là, quelqu'un qui a triché et on est obligés de rembourser les gens, bien la règle tombait entre deux chaises parce que selon qu'on respectait la règle des valeurs mobilières ou... Alors, ce n'est pas un caprice de notre part; c'est vraiment quelque chose. Parce que ce sont des assureurs qui sont les gros joueurs dans ce domaine-là, on dit: Bien, écoutez, il faut mettre la juridiction à la bonne place pour simplifier les choses. Maintenant, si ça ne se fait pas, écoutez, on va continuer à vivre comme à l'heure actuelle, mais on n'atteindra pas les objectifs de simplification aussi grande que ce qu'on a prévu.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que actuellement ? parce que peut-être que la ministre, ça l'intéresserait de le savoir ? est-ce que la Régie des rentes, à cause de ses exigences, pose des requêtes exagérées par rapport à ce qui se passe ailleurs? Parce que si vous avez la réglementation de la Régie des rentes par opposition à l'Agence, c'est quatre vingt-cinq sous pour une piastre, là. Alors, je ne sais pas si vous estimez qu'avec la Régie des rentes vous êtes vraiment pénalisés par rapport à ce pourrait offrir l'Agence.

M. Garcia (Claude): M. le Président, non, je ne dirais pas qu'on est pénalisés. C'est parce que pour nous, dans un premier temps, on regroupe les organismes de réglementation puis, dans un deuxième temps, bien, là, on va aller les rencontrer, on va leur dire: Maintenant, s'il vous plaît, simplifiez ça. O.K.? Choisissez une règle, mettons, pour mesurer les placements, choisissez-en juste une, mais on va l'appliquer à tout le monde, parce qu'il n'y a pas beaucoup de différences, là, entre... Les gens, les gens ne savent pas la différence entre un fonds de placement, un fonds distinct puis un régime de retraite à cotisation déterminée. Pour le monde, c'est tout pareil, ça, O.K. Alors, pour le consommateur c'est tout pareil puis il y a des règles différentes qui s'appliquent. Alors, nous, ça complique notre gestion. Et la Régie n'est pas pire qu'ailleurs. Je veux dire, la Régie est aussi raisonnable que les autres. Ce n'est pas parce que la Régie en soi est déraisonnable, elle est correcte, mais... Je ne me plains pas de la Régie, mais je me dis: Si on fait une agence, bien, allons jusqu'au bout, allons jusqu'au bout de la logique et assurons-nous que, de façon générale, on fasse ça. J'admets que la Régie a développé une expertise, mais cette expertise-là ne serait pas perdue si elle était transférée à l'Agence. Et c'est quand même un service qui est quand même très différent de l'autre mandat qu'ils ont, qui est de payer les rentes de retraite des citoyens du Québec, les rentes d'invalidité des citoyens du Québec. C'est dans le même organisme; c'est deux missions différentes. O.K. On les a rattachées à la Régie. Ça avait bien de l'allure à l'époque, mais les choses ont changé depuis ce temps-là. Et c'est surtout à cause du décloisonnement et de la concurrence entre les institutions et la mondialisation, c'est tous ces facteurs-là qui jouent, qui font qu'il faut changer les règles du jeu aujourd'hui. Enfin, on souhaite qu'elles soient changées.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, vous recommandez également que le Fonds d'indemnisation soit exclu de l'Agence. Est-ce que vous n'avez pas... Non? Ce n'est pas dans votre mémoire?

M. Garcia (Claude): Je ne me souviens pas avoir parlé de ça.

Mme Jérôme-Forget: O.K., d'accord.

Mme Marois: Je sais que quelqu'un l'a proposé mais pas ici.

Mme Jérôme-Forget: O.K., d'accord. Je m'excuse.

Mme Marois: On en voit tellement.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Maintenant pour...

M. Garcia (Claude): Ah! Le Fonds d'indemnisation, ça, ce n'est pas énervant trop, trop. Ce n'est pas quelque chose qui nous tracasse au jour le jour.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, pour revenir à la formule que vous proposez, parce que vous êtes en accord pour avoir une agence, vous souhaitez qu'on maintienne par ailleurs qu'il y ait une séparation de pouvoirs, dans le fond, entre les pouvoirs de l'IGIF principalement et la Commission des valeurs mobilières qui a une rôle quasi judiciaire. Vous avez parlé plus tôt que ça ne vous dérangeait pas que ce soit un conseil d'administration ou des commissaires rattachés à ce volet quasi judiciaire. Pour vous, quant à vous, donc, vous seriez heureux d'avoir un président-directeur général qui, sans avoir officiellement un comité aviseur, mais potentiellement s'organiserait un comité aviseur quelconque, pourvu que ce ne soient pas des compétiteurs, avoir, par ailleurs, à l'intérieur de la boîte... conserver le côté de la Commission des valeurs mobilières, et c'est là que vous souhaitez absolument conserver des commissaires. Autrement dit, les commissaires... Vous ne proposez pas la formule ontarienne où les commissaires jouent le double rôle d'être commissaires et conseil d'administration à la fois.

Le Président (M. Paré): M. Garcia.

M. Garcia (Claude): M. le Président, vous savez, là-dessus, je n'ai pas... Je pense que ce qui est important, c'est que... Vous savez, si c'est un P.D.G. puis, bon, il est nommé par le gouvernement puis, une fois qu'il est nommé, il a les pouvoirs, mais si on s'assure... Parce que, voyez-vous, dans le domaine des valeurs... La raison pour laquelle on veut que les valeurs mobilières soient incluses, c'est à cause des fonds de placement. Les actions, c'est encore important, mais, vous savez, si vous regardez ce qui se passe sur les Bourses, les gros acheteurs de Bourse sont des institutions, O.K., au nom des consommateurs, au nom des fonds qu'on gère. Donc, c'est le volet fonds mutuels ou fonds de placement ? fonds mutuels, c'est un anglicisme ? fonds de placement qui fait qu'on souhaite cette intégration. Ça, le rôle de la Commission des valeurs mobilières là-dedans. Le Québec, d'ailleurs avec la loi n° 188 ? même si j'étais contre pour d'autres raisons, mais là-dessus on était d'accord ? sur la loi n° 188, on a fait du chemin parce qu'on a mis la même agence au niveau de la réglementation. Le Québec... C'est plus simple faire des affaires au Québec que dans les autres provinces, là, au niveau de la distribution, dans le moment, à cause de la loi n° 188. Donc, c'est à cause de la notion de fonds de placement. Mais, pour ce qui est du marché de la Bourse elle-même, tous les pouvoirs de la Bourse, je pense que c'est là qu'il est important de maintenir, si on veut, cette dimension-là, de pouvoirs quasi judiciaires, de cette indépendance, pour s'assurer que les marchés financiers vont bien fonctionner. O.K.? Donc, c'est pour ça qu'on favorise, d'une part, l'Agence, puis, d'autre part, on dit: Bien, écoutez, les spécialistes nous disent que ça ne marchera pas. Maintenant, il y a différentes formules pour arriver à ça et, nous, on en a suggéré une dans notre mémoire. Mais, vous savez, si le gouvernement en a une autre, je n'ai pas de problème, moi, avec ça, en autant que ça fonctionne. On veut que ça fonctionne, on y tient, à l'Agence, pour les raisons que j'ai données, et on veut que ça fonctionne.

n(15 h 50)n

Mme Jérôme-Forget: Parce que pour revenir un peu sur ce volet, je me rappelle d'un cas, le cas d'Alternative vie, dont la distribution des produits, où il y a eu manifestement des abus, c'était une compagnie d'assurances un peu comme la compagnie anglaise... en tout cas. Et ce qui s'est passé, c'est que c'est la Commission des valeurs mobilières qui a fait enquête. C'est l'IGIF qui avait donné le permis à Alternative vie. Mais, par ailleurs, quand on a découvert qu'il y avait eu des irrégularités, il revenait à la Commission des valeurs mobilières d'aller faire enquête et, possiblement, de sévir, faire du «enforcement», comme on l'appelle là-bas.

Alors, c'est pour ça que c'est important de garder le volet quasi judiciaire parce que, à l'intérieur d'une même boîte ? même à l'intérieur ? quant aux responsabilités de l'Inspecteur général des institutions financières, bien, la Commission des valeurs mobilières ou son rôle quasi judiciaire peut être appelé à porter un jugement sur la façon dont s'est acquitté l'Inspecteur général des institutions financières pour octroyer ou surveiller un permis, notamment.

M. Garcia (Claude): Là, M. le Président, je ne suis vraiment pas en mesure de commenter parce que je ne suis pas assez au courant de ce dossier-là, l'Alternative. Je sais que c'est un scandale qu'il y a eu à un moment donné, là, mais je n'ai pas fouillé ça. Alors, je ne suis pas capable de commenter sur les paroles.

Le Président (M. Paré): Oui, Mme la députée de Beauce-Sud, c'est... À vous la parole.

Mme Leblanc: Merci. M. Garcia, M. Bernier, M. Dufour, bienvenue à la commission des finances publiques. Peut-être pour poursuivre un petit peu sur la lancée de ma collègue de Marguerite-Bourgeoys: vous avez clairement exprimé votre appui au projet de loi n° 107 pour regrouper, sous un même toit de l'Agence, l'IGIF, la CVMQ, tous les services financiers finalement. Vous avez même ajouté que vous souhaitiez que les régimes complémentaires de retraite soient sous l'égide aussi de l'Agence. Qu'en est-il des fonds d'indemnisation et de la Régie de l'assurance-dépôts? Est-ce que vous trouvez que c'est correct qu'on inclue aussi, sous le chapeau de l'Agence, les responsabilités qui sont dévolues présentement au Fonds d'indemnisation et à la Régie de l'assurance-dépôts du Québec?

Le Président (M. Paré): M. Garcia.

M. Garcia (Claude): Bien, M. le Président, la Régie de l'assurance-dépôts, on n'est pas soumis, là; ça fait que ça ne me dérange pas beaucoup, là. Et, pour ce qui est du Fonds d'indemnisation, bien, il y a quelque chose qui fonctionne au niveau des assureurs à l'échelle canadienne avec l'ACCAP; c'est-à-dire que ce n'est pas l'ACCAP, mais c'est indépendant, c'est la SIAP qu'on appelle, la Société d'indemnisation des assurances de personnes et tout le monde... Ça fonctionne bien. Ça, ce n'est pas... Et je pense que, à l'heure actuelle, il y a une distinction entre ces fonds-là et le régulateur de prudence, si on veut, parce que... Mais ils sont informés de ce qui se passe, pour pouvoir intervenir en temps et lieu. Alors, il faut qu'il y ait une certaine collaboration. Je ne vois pas l'intérêt que ce soit... Je pense que ça fonctionne bien, ça; ce n'est pas un problème pour nous, en tout cas, dans le moment.

Mme Leblanc: Est-ce que ça doit être sous le chapeau de l'Agence ou ça pourrait rester indépendant, vu qu'ils ont quand même un créneau très particulier, ils ne se sont pas étendus? Ce ne sont pas des gens qui oeuvrent publiquement dans...

M. Garcia (Claude): Le Fonds d'indemnisation, il intervient quand l'entreprise est en faillite, O.K.? Il intervient pour indemniser les consommateurs de cette entreprise-là, et ce sont les institutions financières qui l'alimentent. Alors, ce n'est pas quelque chose... Vous savez, moi, toute la préoccupation de notre mémoire, c'est essentiellement au niveau de ce que j'appelle le quotidien, la gestion des choses au jour le jour, les choses... Quand j'ai 60 lois puis 30 régulateurs, la moindre faute qu'on commet, l'expérience m'a enseigné que c'est ma photo qui est dans le journal, comme président; puis on n'aime pas ça, quand ils mettent notre photo avec une accusation, enfin, quelque chose qui a mal été, parce que, dans n'importe quelle compagnie, il va y avoir des problèmes de temps en temps. Mais vous savez, le Fonds d'indemnisation, à moins de faire faillite, on n'a pas affaire à ça. Alors, on n'a pas l'intention de faire faillite, on a une cote AAA. Alors, vous voyez, ce n'est pas quelque chose qui... Pour moi, ça fonctionne bien comme ça. Je ne sais pas exactement en vertu de quelle loi c'est créé au Québec, mais ce n'est pas quelque chose qui nous... Je n'ai vraiment pas d'opinion là-dessus.

Documents déposés

Le Président (M. Paré): Merci, M. Garcia. D'autres questions? Je voudrais, au nom de la commission, vous dire que nous acceptons le dépôt des documents complémentaires que vous nous avez passés. Et je me permets... À la fin de votre exposé, le dernier paragraphe, vous dites: «Les recommandations qui précèdent sont formulées à titre préliminaire. La Standard Life se réserve le loisir de formuler d'autres commentaires.» Est-ce que vous en avez d'autres?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garcia (Claude): Non, non, non!

Le Président (M. Paré): Merci, M. Garcia et votre groupe, de votre témoignage.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons le Bureau d'assurance du Canada. M. Guay, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent. Vous aurez 20 minutes de présentation et, par la suite, 40 minutes d'échange avec les parlementaires. La parole est à vous, M. Guay.

Bureau d'assurance du Canada (BAC)

M. Guay (Louis H.): Merci, M. le Président. Alors, Mme la ministre, mesdames, messieurs, membres de cette commission, je me présente: mon nom est Louis Guay. Je suis vice-président adjoint et porte-parole du BAC au Québec. J'aimerais remercier tout d'abord les membres de la commission de nous avoir invités à participer à ses audiences.

Je vous présente mes collègues: Immédiatement à ma droite, M. Jacques Valotaire qui est président, région du Québec, de ING Canada et du Groupe Commerce compagnie d'assurances; M. Valotaire est aussi le président du Comité BAC-Québec. À l'extrême-droite, M. Normand Brunet qui est vice-président principal, région du Québec, pour CGU, compagnie d'assurance. Et, à ma gauche, Mme Marie-Josée Blanchette qui est présidente-directrice générale de SSQ, Société d'assurances générales, basée ici à Québec.

Le Président (M. Paré): Bonjour madame, bonjour messieurs. Bienvenue.

M. Guay (Louis H.): Alors, je vais laisser tout d'abord la parole à M. Valotaire qui va vous présenter brièvement le BAC et l'industrie de l'assurance.

Le Président (M. Paré): M. Valotaire.

M. Valotaire (Jacques): M. le Président, Mme la ministre, mesdames, messieurs, membres de cette commission, créé en 1964, le Bureau d'assurance du Canada, BAC, est l'organisme qui représente les assureurs de dommages. Le BAC représente la majorité des assureurs de dommages au Québec. Au Québec comme ailleurs, le BAC travaille continuellement avec ses membres afin d'améliorer les communications avec le public, le gouvernement, les médias et d'autres organismes liés à l'industrie des services financiers. Les activités du BAC contribuent à améliorer la qualité de vie de la société québécoise par des programmes de prévention de sinistres, d'éducation des consommateurs et de prévention du crime. Tous les assureurs du Québec participent aux activités du Centre d'information sur les assurances du BAC. Ce Centre répond annuellement à plus de 60 000 appels de consommateurs désirant obtenir de l'information et de l'assistance pour mieux comprendre leurs produits d'assurance, pour souscrire un nouveau contrat ou pour régler une demande d'indemnité.

n(16 heures)n

Le BAC, via des échanges réguliers avec les assureurs et les différents paliers de gouvernement, cherche aussi à améliorer les pratiques d'affaires et l'équité de ces pratiques. L'industrie de l'assurance de dommages, dont les origines remontent à 1804, constitue la plus ancienne industrie de services financiers du Canada et sa plus distinctive. Le rôle de l'assurance de dommages et les caractéristiques de cette industrie diffèrent de toutes les autres industries de services financiers. L'industrie de l'assurance de dommages fournit un filet de sécurité qui facilite la poursuite et l'innovation de l'investissement.

Notre industrie est très distincte des autres industries du secteur financier, puisque ses produits ? assurance auto, assurance habitation, assurance des entreprises ? ne sont pas des produits ayant pour but d'offrir un service de gestion du patrimoine. Le consommateur achète un produit d'assurance de dommages afin de se protéger durant une certaine période de temps, habituellement un an, deux ans, contre les possibilités de faire face à une situation imprévue susceptible de mettre en péril sa situation financière. Malgré cette distinction, l'assurance de dommages est aussi un produit financier essentiel à la bonne gestion et protection du patrimoine d'un assuré.

J'oeuvre personnellement dans une société qui, en plus de distribuer des produits d'assurance de dommages, distribue, depuis quelques temps, des produits bancaires et des produits de fonds communs, et je vous assure que le domaine des services d'assurance de dommages est totalement, totalement différent de la gestion des services bancaires, la gestion des fonds communs, qui ont été bien décrites par le groupe qui nous a précédés.

En l'an 2001, au Québec, les assureurs de dommages ont versé à leurs assurés plus de 3,2 milliards de dollars afin de les indemniser à la suite de dommages subis à leur véhicule, leur habitation ou leur commerce. De plus, l'industrie de l'assurance de dommages compte parmi les employeurs les plus importants de la province en générant plus de 23 000 emplois directs dans le secteur privé.

Une autre caractéristique de notre industrie est qu'il s'agit du secteur le plus compétitif de toute l'industrie des services financiers. En effet, plus de 100 assureurs et groupes d'assureurs se font activement concurrence au Québec pour combler les besoins à la fois diversifiés et changeants des consommateurs d'assurance. De plus, pour des raisons de positionnement d'affaires, certains assureurs ont fait le choix de se nicher dans des créneaux bien particuliers.

L'industrie québécoise n'est dominée ni par une seule société ni par un petit groupe d'entreprises. De fait, une vingtaine d'assureurs contrôlent environ 80 % du marché de l'assurance de dommages au Québec. Même si la part de marché détenue par les 10 plus importants assureurs de dommages au Québec est passée de 45,5 % en 1981 à 62,4 % en 2000, cela est toujours beaucoup moins élevé que ce que l'on peut observer, par exemple, dans le secteur bancaire canadien où les six plus grandes institutions détiennent plus de 95 % de l'actif de cette industrie. La vive concurrence qui existe au sein de notre industrie permet aux consommateurs de bénéficier d'un large choix de produits et d'un niveau de services élevé. Le choix offert aux consommateurs repose également sur un nombre croissant de canaux de distribution dont les principaux sont la vente par courtiers représentant au moins deux assureurs ou plus et la vente directe par agents qui distribuent les produits d'un seul assureur. La concurrence a aussi des effets bénéfiques sur l'image de l'industrie de l'assurance de dommages. Un récent sondage d'opinion, mené par le BAC, révèle, en effet, une perception favorable des consommateurs à l'endroit des assureurs de dommages. Il est important de mentionner que ces sondages sont d'autant plus positifs qu'ils concernent l'évaluation d'un service en temps de crise ou à tout le moins en période de perturbations, soit le règlement d'un sinistre.

Un autre trait caractéristique de l'industrie de notre secteur d'assurance est que la très grande majorité des transactions entre l'assuré et le courtier ou l'assureur directement se déroule au téléphone et sur une base annuelle. Cette situation doit être prise en considération par le gouvernement dans l'élaboration de la structure et surtout de la réglementation destinée à encadrer les personnes qui procèdent à la distribution des produits.

Merci, mesdames, messieurs. Je laisse maintenant la parole à mon collègue, M. Louis Guay.

Le Président (M. Paré): M. Guay.

M. Guay (Louis H.): Merci, M. Valotaire. Alors, maintenant que M. Valotaire vous a présenté le BAC et l'industrie, je vais vous parler plus directement du projet de loi et de notre mémoire. Alors, d'entrée de jeu, on veut vous dire que le BAC a reçu favorablement l'annonce de la création de l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier. Toutefois, nous souhaitons que des modifications soient apportées au projet de loi, afin que la mise en place de cet organisme permette véritablement d'atteindre l'objectif ultime de simplification de la structure et d'allégement du fardeau administratif, et ce, tant pour les consommateurs que pour les institutions financières. Alors, notre mémoire contient donc un certain nombre de recommandations qui visent à bonifier le projet de loi, faire en sorte que l'encadrement des assureurs, de notre point de vue, soit vraiment allégé et simplifié.

La première partie de notre mémoire justement porte directement sur la façon dont on voit que cet encadrement-là pourrait être simplifié. Alors, pour mieux comprendre ce qu'on demande, il nous semble important de faire quand même un bref survol de la façon dont nous sommes encadrés pour mieux identifier les lourdeurs. Alors, nous, les assureurs de dommages, sommes encadrés par trois organismes au Québec: l'Inspecteur général des institutions financières; le Bureau des services financiers; et la Chambre de l'assurance de dommages.

Alors, tout d'abord, quand on regarde la Loi sur les assurances et les mandats de l'Inspecteur général, alors, par le biais de cette loi, l'Inspecteur général encadre vraiment, là, toute la vie des assureurs. C'est vraiment la loi-cadre pour les assureurs de dommages et c'est là qu'on y trouve toutes les règles de solvabilité, de régie interne pour ce genre d'entreprises. La loi contient vraiment une série de règles d'opération détaillées pour faire en sorte que ce type d'institutions financières puissent à tout moment ? et c'est ça l'objectif ultime ? fournir aux consommateurs le produit qu'il a acheté, pour lequel il a payé.

Quand on regarde maintenant du côté du Bureau des services financiers et de la Chambre de l'assurance de dommages, leur mandat vient de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, la loi n° 188. Cette loi-là touche les assureurs de deux façons. Bon. Comme on l'a mentionné précédemment, les assureurs distribuent au public leurs produits par courtier qui est un professionnel indépendant de l'assureur qui va distribuer les produits de deux ou plusieurs assureurs, ou bien l'assureur distribue ses produits via un réseau d'agents qui sont, généralement dans notre domaine, des agents salariés, des employés de la compagnie et, eux, ne distribuent évidemment que les produits de ce seul assureur-là.

Alors, la loi n° 188 touche les assureurs qui distribuent les produits par agents, ce qu'on appelle, dans notre jargon, nous, les assureurs directs. Alors, ces assureurs-là doivent s'inscrire, tout d'abord s'inscrire au Bureau des services financiers comme cabinets, inscrire leurs employés et, ensuite, s'assurer aussi que leurs employés sont inscrits à la Chambre de l'assurance de dommages. La loi touche aussi les assureurs qui ont à leur emploi ce qu'on appelle les experts en sinistre. Ce sont des gens, ça, qui, dans leur travail... Le travail de l'expert en sinistre, c'est d'accompagner le client, le consommateur suite à un sinistre dans le cadre de l'indemnisation, afin que le client, le consommateur puisse revenir à une vie normale le plus rapidement possible. Ces assureurs-là aussi doivent s'inscrire en cabinet, inscrire leurs employés au Bureau des services financiers et à la Chambre.

Donc, la loi n° 188, quand on regarde ça, touche environ 95 % des assureurs parce qu'ils ont à leur emploi, soit des agents ou des experts en sinistre. Nulle part au Canada, même en Amérique du Nord, les assureurs de dommages sont soumis à un encadrement aussi lourd avec trois organismes de réglementation. Et, surtout, l'encadrement de nos employés, ici, une des problématiques, c'est qu'il est partagé, dans le fond, entre deux organismes qui sont le Bureau des services financiers et la Chambre.

n(16 h 10)n

Donc, première problématique, nous sommes soumis à, disons, plusieurs organismes d'encadrement. Nous, nous considérons que ce n'est pas efficace. Comme si la structure ? parce qu'avec chaque structure vient une réglementation ? en elle-même n'était pas assez lourde, la réglementation qui vient avec cette structure-là est aussi très lourde. Je comprends que ce n'est pas le but du projet de loi n° 107 à l'heure actuelle d'attaquer ce morceau-là, mais on vous passe le message tout de suite. À titre d'exemple, juste la Loi sur les assurances et ses règlements d'application compte 700 articles, la loi n° 188 et ses règlements d'application en compte 1 100. Ça, ce sont des lois spécialisées. Je ne vous fais même pas état des 2 000 ou 3 000 et quelques articles du Code civil, de la Loi sur les compagnies, de la Loi sur l'assurance automobile, du Code de la sécurité routière, de la Loi sur la sécurité incendie, sur la sécurité civile et j'en passe. Il ne s'agit pas de prétendre que toutes ces lois-là sont inutiles, loin de là, mais c'est surtout que, souvent, elles ne tiennent pas compte de la réalité de notre industrie, surtout de l'encadrement des employés que les assureurs font chez eux. Donc, deuxième problématique: la réglementation qui vient avec la structure est souvent mal adaptée et lourde pour les employés.

J'en arrive aux coûts. Depuis 15 ans, le coût de l'encadrement des assureurs a plus que doublé, incluant l'inflation. On est passé de 2 130 000 $ en 1989-1990 à près de 4,4 millions de dollars en date d'aujourd'hui. Comment ça se répartit? Ces frais-là se répartissent de la façon suivante: 2,3 millions sont les frais qu'on doit assumer pour les services de l'Inspecteur général des institutions financières et il y a un 2 millions presque 100 000 $ qui provient des coûts directs liés à la loi n° 188. Donc, troisième problématique: l'encadrement coûte cher et, comme l'assurance, vous savez, est un partage des coûts entre les assurés, c'est bien évident que tous les coûts finalement assumés par les assureurs sont repassés aux assurés dans la prime.

Quand on regarde l'encadrement que nous propose la loi n° 107, disons que, pour nous, la mise en place de l'Agence pour remplacer surtout le BSF et l'IGIF ne signifie pas nécessairement et automatiquement que le fardeau administratif va être allégé. En théorie, ce sera mieux. On espère et on est confiant que ça pourra être mieux. Mais, en pratique, il pourrait continuer à y avoir, au sein même de l'Agence, des dédoublements et des lourdeurs qui vont être pires que ce qu'on connaît. Pourquoi? Parce que les assureurs devront faire affaire ou, en tout cas, traiter d'une façon ou d'une autre avec quatre des cinq divisions de l'Agence, plus la Chambre de l'assurance de dommages, ça fait cinq. On est à trois en ce moment. Donc possiblement, si l'Agence, il n'y a pas une bonne coordination qui est faite au niveau des divisions, on pourrait se retrouver dans une situation pire que ce que l'ont vit actuellement et, en plus, le projet de loi ne corrige pas vraiment la question du partage, si vous voulez, de la séparation de l'encadrement qui est fait au niveau des employés, qui sera toujours partagé avec l'Agence et la Chambre au lieu du BSF, du Bureau des services financiers.

On veut être clair sur un point. La problématique n'est pas au niveau du travail que font le Bureau des services financiers ou la Chambre. Ces organismes-là, dans le contexte de la loi n° 188, qui est une loi complexe et nouvelle, font un très bon travail. Cependant, ce qu'on veut souligner, c'est que, comme l'encadrement est partagé, évidemment c'est plus complexe et plus coûteux et notre expérience, en fin de compte, depuis 15 ans, c'est que, plus il y a d'organismes de réglementation, plus c'est complexe, plus ça coûte cher et c'est ce qu'on veut simplifier.

Alors, ce qu'on propose pour améliorer le produit, c'est d'avoir un guichet unique pour les institutions financières. Ce qu'on veut dire par guichet unique, en fin de compte, et on l'avait vu dans le rapport Martineau plus clairement: disons que, dans la loi, ce qu'on entend par guichet unique, c'est surtout que, pour nous, il sera très important qu'il y ait une culture, là, à l'intérieur de l'Agence, une culture de coordination et d'intégration des services pour que les différentes divisions, qui vont être des anciens organismes de réglementation avec chacun leur culture, ne continuent pas d'opérer en vase clos. Donc, ça va prendre une Agence forte, un P.D.G. fort. Ça, c'est très important.

Deuxièmement recommandation au niveau... Disons que, ça, c'est une recommandation plus philosophique. Plus concrètement, une recommandation au niveau de l'encadrement des employés: pour nous, comme on l'a mentionné, le projet de loi ne corrige pas la problématique de l'encadrement des employés. Alors, nous recommandons... il nous semblerait, en fait, que l'encadrement pourrait être simplifié s'il était concentré à l'Agence. Et pourquoi on recommande... on fait cette recommandation-là? Parce que toutes nos activités ou presque vont être là. Alors, ce serait beaucoup plus simple pour nous d'être encadrés à 100 % par l'Agence, et nous recommandons que le projet de loi soit modifié dans ce sens-là.

Comprenons-nous bien ici. Il ne s'agit pas d'éliminer l'encadrement des employés d'assureurs. Ce n'est pas du tout ce que nous demandons. Ce que nous demandons, c'est que ce soit centralisé. Il est bien évident que, nous, comme organisme qui représentons les assureurs qui, vous l'avez ici, à la table, distribuent à la fois leurs produits via des agents ou des courtiers, il n'est pas question d'avoir une double règle du jeu entre un réseau de distribution par rapport à un autre. Il faut qu'il y ait un «level playing field», il faut qu'il y ait une harmonisation, mais ce sera le rôle de l'Agence, évidemment, de faire ce travail-là, pour s'assurer qu'il n'y a pas de régime à deux vitesses.

La deuxième partie de notre mémoire porte sur le mécanisme de traitement des plaintes. Le projet de loi n° 107 modifie la Loi sur les assurances afin d'obliger les assureurs à se doter d'une politique portant sur l'examen des plaintes, et le BAC ici tient à souligner les efforts qui ont été faits par le gouvernement pour harmoniser les différentes lois qui touchent cette question-là. Et d'ailleurs, ça répond à une de nos demandes. Toutefois, la loi exige la production d'un rapport annuel sur les plaintes à l'Agence et, nous, ça nous semble contraire, ça nous semble lourd et ça nous semble contraire aux objectifs mêmes de la loi qui sont de simplifier les procédures. Alors, nous recommandons que cette disposition-là soit supprimée et remplacée plutôt par une disposition qui va tout simplement autoriser l'Agence à aller vérifier les rapports ou les registres de plaintes des assureurs, un peu comme le Bureau des services financiers le fait actuellement.

Troisième élément de notre mémoire, c'est la troisième partie de notre mémoire, ça porte entre autres sur la reconnaissance par l'Agence disons de mécanismes d'autoréglementation qui existent déjà dans notre industrie. C'est que, au fil des ans, différents facteurs ont fait que les assureurs se sont autodisciplinés et ont mis en place des mécanismes qui fonctionnent très bien. Selon nous, un des autres défis de l'Agence... Je vous concède qu'il y en aura plusieurs, mais disons qu'un des autres défis pour nous, pour l'assurance de dommages, de l'Agence, ce sera effectivement de faire preuve d'assez de souplesse et d'ouverture d'esprit pour reconnaître ces mécanismes-là, sans nécessairement les obliger à se constituer en OAR, en organismes d'autoréglementation. Un exemple qui décrit bien ce qu'on veut dire ici, c'est justement ? M. Valotaire en a parlé ? notre centre d'information pour les consommateurs: 60 000 appels par année, des services complets aux consommateurs qui désirent obtenir de l'assistance, de l'information pour bien comprendre leurs produits à l'achat, au moment d'un sinistre. Je vous le dis, c'est selon nous une des plus belles réalisations sinon la plus belle réalisation du BAC au fil des ans. Et je pense que le centre d'information du BAC est véritablement devenu, au fil des ans, une référence en matière d'assurance de dommages. Et on offre aussi de multiples services. Ce n'est pas que limité à l'information: nous offrons aussi aux assurés des mécanismes d'accès à des produits d'assurances quand c'est difficile de se procurer différents produits, et aussi un service de médiation indépendant.

En conclusion, ce qu'on souhaite vous dire, c'est encore une fois réitérer qu'on accueille favorablement la création de l'Agence et le projet de loi n° 107, vous sensibiliser au fait que, en théorie, la structure proposée va améliorer notre sort mais qu'il va falloir être vigilants parce qu'il y aura des embûches et des pièges dans la mise en place de l'Agence.

Et, pour nous, en réalité, si on résume ça à la chose suivante, la recette est assez simple: ce qu'on souhaite, c'est avoir une implantation de l'Agence et de ses divisions pour faire en sorte que les assureurs de dommages n'aient à rendre compte qu'à un seul organisme de réglementation qui sera l'Agence nationale d'encadrement pour toutes leurs activités. Et, évidemment, pour éviter le dédoublement des formalités, et selon une réglementation qui va prendre en compte le caractère distinctif de l'assurance dont M. Valotaire a parlé et aussi l'encadrement que les assureurs font de leurs employés, agents et experts. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Guay. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je vous remercie de votre présentation. Je pense que vous avez un mémoire qui ramasse bien vos préoccupations. Je comprends aussi que vous appuyez ? vous l'avez dit à quelques reprises ? la création de l'Agence. En fait, est-ce que je dois aussi comprendre que, un des éléments qui continuent de vous préoccuper dans le projet de loi qui est devant nous, c'est la question des organismes d'autoréglementation? Et j'interprète votre point de vue en soulignant que ce que vous croyez, c'est que les employés des assureurs ne devraient plus être assujettis à la Chambre de dommages. Hein? c'est ça que vous souhaitez.

n(16 h 20)n

Moi, j'aimerais que vous expliquiez les problèmes que l'assureur rencontre. Parce que la Chambre, en fait, elle est en relation avec l'individu, comme un comptable agréé qui est à l'emploi d'un assureur, si je prends un exemple, qui est en relation avec l'Ordre des comptables. Qu'est-ce que c'est le lien entre la Chambre et l'assureur? Et j'aimerais que vous me réexpliquiez là vos objections un petit peu plus concrètement. Parce qu'on a eu des discussions assez, je pense, complètes avec les représentants des chambres, et il nous est apparu que c'était une avenue qui nous permettait de respecter les apports spécifiques des chambres puis, en même temps, de mettre quand même plus d'efficacité dans le système, parce qu'il reste qu'elles seront assujetties à l'Agence, etc.

M. Guay (Louis H.): Pour mieux comprendre notre position, je vais vous faire un bref historique de la raison pour laquelle nous avons la position que nous avons exposée aujourd'hui. À l'origine, il y a une quinzaine d'années, toutes nos activités étaient encadrées par l'Inspecteur général des institutions financières. Ça ne posait absolument aucun... Il n'y avait pas de problème vraiment avec cette façon de faire là. On en était heureux: toutes nos activités encadrées au même endroit.

Est arrivée la Loi sur les intermédiaires de marché, la loi n° 134, où on a décidé d'assujettir les employés d'assureurs, les agents en fait, au Conseil des assurances de dommages. Et, dès ce moment-là, on a commencé à réclamer un retour à la situation, si vous voulez, qui prévalait avant.

Alors, ensuite, la loi n° 188 est venue assujettir une autre sorte d'employés chez nous, qui sont les experts en sinistre. On n'a pas digéré cette situation-là non plus. On pense que ce n'était pas nécessaire et ce n'était surtout pas dans la bonne loi. Il ne fallait pas encadrer les experts dans une loi qui porte sur la distribution, parce qu'ils n'ont rien à voir avec cette question-là.

Donc, ça fait une quinzaine d'années qu'on réclame, disons, que notre encadrement soit recentralisé, si vous voulez. Et, dès le rapport Martineau, dès le mémoire qu'on a fait au rapport Martineau... Et notre position a évolué depuis, parce qu'on n'était pas nécessairement favorables, il y a un an, à la fusion d'organismes comme l'IGIF, le Bureau des services financiers, et la création d'une superagence. On souhaitait plutôt qu'il y ait un statu quo amélioré qui soit mis en place par le gouvernement. Mais on souhaitait, dès le rapport, le mémoire qu'on a fait au rapport Martineau, que notre encadrement soit ramené dans son intégralité à l'IGIF. Parce que, pour nous, les assureurs de dommages, tout se résume à la solvabilité, la solvabilité et le service à la clientèle. C'est ça l'essentiel de notre business.

Et ce qu'il faut regarder, c'est non pas... On n'a aucun problème, on n'est pas contre la Chambre d'assurances de dommages. On n'est pas du tout opposés à cet organisme-là, mais ce qu'on regarde, c'est, dans le fond... C'est l'esprit même du projet de loi, dans le fond, qu'on voudrait pousser à sa limite. On veut simplifier. On veut concentrer à un endroit, à l'Agence. Il y a des bénéfices. Il y en aurait pour nous; c'est ce qu'on vous dit. Et c'est vraiment, en fait, le but poursuivi par nos représentations. C'est donc d'aller... de simplifier et, pour simplifier, il faut centraliser à l'Agence. C'est notre propos.

Mme Marois: Donc, il y a vraiment eu... C'est intéressant que vous fassiez l'historique. Dans le fond, vous avez vraiment évolué dans votre façon de voir les choses et de penser. Parce que, au départ, dans le fond, si je comprends bien, vous ne souhaitiez pas nécessairement qu'apparaisse une agence.

M. Guay (Louis H.): Tout à fait. Je dois dire, on a considéré... Bon, Comme je vous dis, au niveau du rapport Martineau, on avait vraiment une approche un peu plus conservatrice. Pourquoi? Parce que notre industrie venait de passer à travers ? bien, pas juste la nôtre ? des changements assez importants avec la loi n° 188, mise en place du Bureau des services financiers, et on souhaitait un peu digérer ça, si vous voulez, avant d'aller à une autre étape. Mais on s'est ralliés au projet et on pense que la création de l'Agence sera une bonne chose en fin de compte.

Mme Marois: D'accord. Bon. Je veux revenir maintenant à la question du traitement des plaintes. Bon. Vous dites: le BAC appuie les modifications suggérées par le projet de loi au niveau du traitement des plaintes mais recommande d'éliminer la production systématique des rapports annuels. Vous dites: Le centre d'information du BAC devrait être reconnu par l'Agence comme organisme officiel de traitement des plaintes et des différends des consommateurs en assurances de dommages. Bon. Évidemment, il y a des associations de consommateurs qui sont venues ce matin et qui ont des attentes très grandes à l'égard de l'Agence. Je les comprends aussi, parce que, quand même, un des objectifs que nous poursuivons, c'est d'assurer la protection du consommateur et un guichet unique pour celui-ci, etc.

D'abord, un, sur la question des rapports annuels, je comprends que ça peut être un peu lourd, mais est-ce que vous ne pensez pas que ça peut... Là, remarquez que je ne devrais même pas discuter de ça, parce que c'est éventuellement qu'on reviendra sur chacune des missions ou chacune des exigences des nouvelles directions de l'Agence, mais je pose quand même la question. Est-ce que vous ne croyez pas qu'on peut trouver plutôt une façon de rendre le tout moins lourd, mais que l'obligation demeure quand même? Parce que ça donne une connaissance de l'état réel des difficultés que rencontrent les consommateurs, pour ensuite être capables, nous, de corriger, d'intervenir et de faire en sorte qu'on améliore la relation de l'entreprise avec le consommateur. Et c'est autant à votre avantage qu'à l'avantage du consommateur et, je dirais, de la crédibilité des institutions aussi.

Le Président (M. Paré): M. Guay.

M. Guay (Louis H.): Je vais répondre à votre question, mais...

Mme Marois: Ça sécurise les consommateurs, comme me le soulève mon adjoint parlementaire.

M. Guay (Louis H.): ...je vais aussi laisser mes collègues renchérir sur cette question-là.

Mme Marois: D'accord.

M. Guay (Louis H.): Ce que l'on dit au niveau de cette obligation-là de produire un rapport annuel, finalement, c'est que c'est une façon d'encadrer une institution financière qui est archaïque, ce n'est pas moderne. Ce qu'il faudrait faire, selon nous, c'est plutôt imposer à l'assureur le fardeau de mettre le registre en place et tout ça. D'ailleurs, les assureurs de dommages, écoutez, ils servent des clients. Ils veulent les garder, ils veulent savoir ce qui se passe dans leur entreprise, ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas. Ils ont eux-mêmes, à l'interne ? ils pourront vous le confirmer ? des registres de plaintes qui suivent à la trace les récriminations de leurs clients. Ils veulent savoir qu'est-ce qui fonctionne, qu'est-ce qui ne fonctionne pas.

Alors, nous, tout ce qu'on dit, c'est que, à l'heure actuelle, la loi n° 188 a déjà une obligation faite aux cabinets de maintenir un registre et de le transmettre au Bureau des services financiers. Après discussion avec les gens du Bureau des services financiers, ceux-ci ont dit: Écoutez, on va surseoir à l'obligation de transmettre le registre. Vous devez le faire, et on va aller vous vérifier quand on pense que c'est nécessaire. C'est ça, la façon, selon nous, qui devrait être privilégiée ici.

Je vais laisser mes collègues parler de la relation qu'ils ont avec leurs clients, comment ils suivent justement à la trace les plaintes des consommateurs.

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Paré): M. Valotaire.

M. Guay (Louis H.): M. Valotaire.

M. Valotaire (Jacques): Juste question de sémantique, chez nous, on n'appelle pas ça des «plaintes», on appelle ça des «opportunités».

Le Président (M. Paré): On en a eu quelques-unes cet avant-midi de M. Michaud.

Mme Marois: Oui. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Valotaire (Jacques): J'en suis sûr.

Le Président (M. Paré): La définition du lobbyiste, vous avez...

M. Valotaire (Jacques): Les institutions financières, comme nous et comme celles de mes collègues ici à la table, sont maintenant évoluées à un point tel qu'on a des codes d'éthique pour nos employés, on a des systèmes élaborés pour suivre les opportunités qui se présentent à nous. On a aussi ? et on en a parlé tout à l'heure ? le bureau du BAC, qui reçoit beaucoup d'appels et qui sert un peu de coordonnateur de beaucoup de ces plaintes-là.

On est tout à fait d'accord avec le besoin, peut-être, de systématiser, à travers l'industrie, la gestion des plaintes, la gestion des opportunités dans toutes les entreprises, surtout si on a une agence qui a la responsabilité de venir regarder ce qui se fait régulièrement dans toutes les entreprises. Alors, d'assurer que, dans l'industrie, les choses se font de façon relativement similaire, c'est important et ça va créer de l'efficacité.

Préparer des rapports, on en prépare à la tonne. On trouve ça onéreux, on trouve ça long. Il y a plus de 100 assureurs au Québec présentement qui vont préparer des rapports. Ça va prendre une série de personnes pour les réaliser, les analyser, poser des questions. Encore là, c'est très onéreux. Pourquoi ne pas nous demander d'avoir un système qui gère ça et avoir un régulateur, quelqu'un de responsable qui a la possibilité régulièrement de venir chez nous et de dire: Montrez-moi ce que vous faites, et, s'il voit des irrégularités, de les regarder de façon un peu plus pointue? C'est un peu ça, notre position. Encore là, efficacité et réduction des frais. O.K.? Un rapport, ça n'a pas l'air onéreux, mais, quand on commence à regarder la gestion de ça, il faut le préparer, il faut le soumettre, il faut qu'il y ait quelqu'un qui l'analyse, qui le regarde. Et, bien souvent, on sait très bien qu'il est préparé, il n'est pas analysé.

n(16 h 30)n

Le Président (M. Paré): Merci, M. Valotaire. Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui voudraient... M. Guay.

M. Guay (Louis H.): Peut-être un mot pour compléter ce que M. Valotaire a dit. C'est que, en plus d'avoir... de suivre à la trace les plaintes de leurs clients, les assureurs font des sondages auprès de leur clientèle régulièrement pour savoir qu'est-ce qui va, qu'est-ce qui ne va pas. Donc, il y a une forme d'autoréglementation à ce niveau-là aussi. Et ce n'est pas l'obligation de produire ce rapport-là qui est un problème, c'est que ça, c'est le 18e rapport qu'on doit soumettre. Vous comprenez? C'est l'ajout de tous ces rapports-là, de toutes ces obligations-là qui fait mal, en bout de ligne. Donc, c'est pour ça que nous croyons qu'il y a une façon plus moderne de le faire.

Maintenant, vous aviez une question sur le Centre d'information, je crois, qui faisait référence à une intervention qui a été faite ce matin par un groupe de consommateurs. Nous, tout ce qu'on veut vous dire, c'est que, nous, notre Centre d'information, on le gère comme si c'était une entreprise entièrement indépendante de nos membres, et on procède régulièrement justement à des sondages auprès des gens qui ont appelé, et 90 % de ces gens-là nous disent qu'ils reviendraient, qu'ils rappelleraient au Centre d'information du BAC pour avoir de l'information, parce qu'ils s'y fient et qu'ils ont été satisfaits du service rendu.

Maintenant, en plus de ça, au-delà de l'information, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, les assureurs, via le Centre d'information, ont accepté des procédures et des mécanismes qui vont au-delà de ce que la loi leur impose. On parle d'ententes entre les assureurs par lesquelles ils s'engagent à fournir des produits d'assurance, dans certaines circonstances, à des gens qui ont de la difficulté à s'en trouver. On parle de service de médiation. La loi voudrait nous imposer la médiation. On est prêts, on le fait déjà depuis deux ans. Le gouvernement fédéral a institué un mécanisme copié sur le mécanisme qu'on avait au Centre d'information du BAC au Québec. Alors, je peux vous dire que, s'il faut faire la démonstration de la qualité du travail qu'on fait, on n'a aucune hésitation à vous inviter chez nous pour vous montrer comment on fonctionne.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Marois: Merci beaucoup. Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Merci. Bienvenue, M. Guay, M. Valotaire, M. Brunet et Mme Blanchette. Moi, j'aurai deux questions: une plus globale et une qui va toucher effectivement le mémoire que vous avez proposé et les recommandations que vous avez proposées plus spécifiquement.

Au niveau de votre mémoire, vous abordez très peu, en termes d'organisme important au niveau des assurances, le fonctionnement de cette Agence. Et donc je voudrais savoir pourquoi vous avez négligé ce volet-là, et peut-être avez-vous une opportunité aujourd'hui de nous dire ce que vous pensez de la formule actuelle qui est proposée dans le projet de loi.

Le Président (M. Paré): M. Guay.

M. Guay (Louis H.): Je vais vous dire, nous, ce qu'on a vu dans l'Agence, le fonctionnement de l'Agence, qui va nous toucher... Je pense qu'on a fait part de certaines craintes avec la question des quatre divisions auxquelles on devra répondre, mais essentiellement ce qui nous est proposé dans le projet de loi n° 107 nous convient, à part pour la question peut-être de l'encadrement des employés.

Alors, si on n'a pas soumis de commentaires particuliers à ce niveau-là, c'est parce qu'on est assez confortable avec la structure, avec la question du rôle et des pouvoirs du président-directeur général aussi. Donc, je pense que c'est pour cette raison-là qu'on n'a pas abordé de points spécifiques dans notre mémoire.

Mme Jérôme-Forget: Vous êtes quand même dans la business de l'assurance.

M. Guay (Louis H.): Oui, de l'assurance de dommages.

Mme Jérôme-Forget: L'assurance de dommages. Donc, vous, une fois que vous avez une plainte ou que quelqu'un s'est comporté de façon cavalière, un assureur s'est comporté de façon cavalière, il va y avoir un recours à un moment donné, il va y avoir des plaintes. Non seulement il va y avoir une opportunité, mais il risque d'y avoir des poursuites à un moment donné. Ces poursuites-là, où est-ce qu'elles sont entendues? Est-ce que l'inspecteur... Est-ce que la Commission des valeurs mobilières serait impliquée à ce moment-là ou ce sera d'autres tribunaux? Qui va être impliqué à ce moment-là? Les tribunaux généralement?

M. Guay (Louis H.): La Commission des valeurs mobilières ne sera pas du tout impliquée dans nos affaires. Nous, nos membres, ce qu'ils distribuent ? ils ne sont actifs que dans un domaine particulier ? ce sont les produits d'assurance, ce sont les produits automobile, habitation, assurance commerciale. On ne touche pas à la distribution de valeurs mobilières. Donc, dépendant de la nature de la plainte...

Mme Jérôme-Forget: Oui, les tribunaux ordinaires.

M. Guay (Louis H.): ...si c'est une plainte contre un individu, il y a des recours qui sont là, qui existent parce que les lois comme telles que l'Agence va avoir à superviser sont les mêmes que ce qu'on a là. Alors, tous les mécanismes sont là pour traiter les plaintes ou les différends ou bien carrément si c'est un litige qui porte sur l'étendue d'un contrat, ça c'est plus du recours d'un tribunal civil.

M. Valotaire (Jacques): Si vous permettez...

Le Président (M. Paré): M. Valotaire.

M. Valotaire (Jacques): ...vous avez prononcé le mot poursuite, c'est important. Je n'ai pas les statistiques avec moi. Dans notre domaine, en assurances de dommages, le nombre de poursuites sont relativement rares. On règle les cas problèmes avant que ça se rende là. Ça se rend là, mais de façon rare, O.K. Je pense que c'est bien important. Les mécanismes sont en place pour gérer la majeure partie des problèmes avant que ça détériore à un tel point.

Le Président (M. Paré): Mme la députée.

Mme Jérôme-Forget: ...de vos opportunités, comme vous les appelez. J'ai été très impressionnée par l'explication que vous avez donnée de la lourdeur de devoir tenir un registre et d'en informer l'Agence, des plaintes. Par ailleurs, à titre de consommateur, moi, j'aimerais bien savoir, connaître une entreprise qui a beaucoup de plaintes ou d'opportunités. Est-ce qu'il n'y a pas lieu, pour informer le public, parce qu'il y a des gens qu'on dira qu'ils sont des opportunistes, des déviants, des entreprises qui vendent des produits qui ne sont pas conformes à ce qu'ils estiment donner ? peut-être que ça se passe moins dans votre secteur, mais quand même, il doit y en avoir... Est-ce que les plaintes, ça ne devrait pas être l'objet d'une information publique pour que, à titre de consommateur, je sois informé et que, par conséquent, si je sais qu'une compagnie d'assurances a beaucoup de plaintes et tout à coup ça se sait qu'une compagnie a beaucoup de plaintes et il y a des griefs, etc. à l'endroit de cette compagnie-là, quelqu'un va choisir un autre assureur? Je voulais connaître votre opinion sur ça.

M. Valotaire (Jacques): C'est certain que, comme il y a beaucoup d'assureurs, il y a beaucoup de compétition dans notre domaine. Si un consommateur, un client n'est pas satisfait des services qu'un assureur offre, il a tout le loisir possible de cogner à une autre porte. Même la loi de l'assurance automobile prévoit que tous les assureurs doivent offrir, faire une offre à un assureur qui demande une soumission. De rendre tout ça public, moi, je pense que le bouche à oreille c'est quelque chose qui fonctionne très, très bien dans notre société québécoise. Je pense qu'il y a des associations de consommateurs très efficaces, très dynamiques qui se chargent de faire connaître les abuseurs dans notre société. Il y a des médias spécialisés dans ce domaine-là, et la plupart des grands médias d'information au Québec ont des journalistes spécialisés dans ce domaine. Il y a quand même énormément de sources d'information qui diffusent ces choses-là à coeur de jour.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Je pense que Diane, tu avais une question.

Le Président (M. Paré): Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Oui. Bonjour, M. Guay et tous vos collègues. Ce matin, on a rencontré Mme Nathalie St-Pierre, de l'Union des consommateurs, qui est venue nous déposer un cahier d'opportunités.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Leblanc: Alors, je vous invite à aller la consulter. Si vous voulez des cas non réglés, vous allez en trouver plusieurs là-dedans.

Et, moi, ce qui me chatouille un peu, c'est que le Bureau d'assurance du Canada est là pour représenter les assureurs. Et vous, représentant les assureurs, je comprends mal comment vous pouvez aussi représenter aussi bien les consommateurs, puisque les assureurs vous paient, en fait paient une cotisation chez vous pour que vous assuriez des services et, en même temps, représenter les consommateurs qui eux ne vous paient pas. Alors, tu sais, on se met dans la peau du consommateur puis on dit: Quand j'appelle le BAC, je ne suis pas sûre, moi, qu'il me donne l'information que j'aimerais avoir comme... pas nécessairement l'information mais la protection que je suis en droit d'attendre, là. Et, vous, vous proposez dans votre mémoire que le Centre d'information du BAC devrait être reconnu comme l'Agence, comme organisme officiel de traitement des plaintes et des différends. Alors là, j'ai un petit peu de difficulté avec ça, je vais vous avouer, et j'aimerais que, peut-être pour répondre à la question, vous m'indiquiez comment vous régleriez la plainte suivante qui est dans le cahier des opportunités de ce matin et qui a trait à l'assurance automobile. Bon. On fait rapport à un M. X qui est assuré avec la même compagnie d'assurances depuis 10 ans et, comble de malchance, il a eu sept accidents dont cinq non responsables et puis, bon, c'était du vandalisme. Il y a eu des choses comme ça et la compagnie d'assurances refuse de continuer à l'assurer. Mais, comme la loi l'oblige, finalement, elle a dit: Je vais t'assurer mais je vais t'augmenter de 45 %, ta prime. Alors, c'est un petit peu exagéré. On considère que c'est de l'abus. Monsieur porte plainte et il n'y a pas de règlement au Bureau d'assurance du Canada pour ce genre de... C'est ce qu'on nous dit. C'est un cas non réglé. Qu'est-ce qu'on fait? Comment vous traitez ça, cette plainte-là?

n(16 h 40)n

M. Guay (Louis H.): Je vais vous dire deux choses. Premièrement, premier volet de votre question en ce qui concerne la qualité du service qu'on offre au consommateur, je vous fais la même invitation que j'ai faite à Mme la ministre de venir chez nous voir comment ça se passe. Et vous allez voir que, de toute façon, en ce qui concerne le service qu'on donne, on ne peut tout simplement pas se permettre, pour notre crédibilité, d'avoir un service impartial ou qui favorise l'assureur. C'est aussi simple que ça. C'est notre crédibilité qui en dépend. Et on a mis en place des mécanismes pour gérer cette situation-là et les sondages auxquels je faisais état tout à l'heure, je pense, le confirment.

Deuxième volet de votre question. C'est un cas d'espèce assez précis qui implique... Ce que vous me dites, jusqu'à un certain point, ça a du sens. J'ai de la difficulté à me l'expliquer. Par contre, je vais vous dire une chose: Quand on répond fréquemment à ce genre de demande là, je peux vous dire qu'il y a souvent deux côtés à la médaille et les informations qui vous sont rapportées ne sont peut-être pas complètes. Alors, je vous lance une autre invitation: c'est de discuter de ce cas-là de façon privée parce que, de toute façon, il risque d'avoir de l'échange d'information qui porte sur une personne qui est un assuré qui a droit à la protection de ses renseignements personnels et ce n'est pas, je pense, le forum, ici, pour discuter d'une question comme ça. Ça déborde le projet de loi n° 107 aussi.

Mme Leblanc: C'est un cas type là. C'est parce que vous avez abordé la question de transférer présentement la juridiction du traitement des plaintes de la CHAD à chez vous, et donc c'est une façon... Moi, ça m'intéresse beaucoup de savoir comment vous traitez les plaintes et comment vous pouvez avoir... Parce que, là, on parle même juste d'apparence de conflit d'intérêts. Vous représentez les assureurs et les consommateurs vous appellent, ils veulent un traitement de plaintes. Comment ils peuvent être sûrs qu'ils sont bien traités et que vous n'êtes pas là plutôt pour défendre les compagnies d'assurances? Alors, moi, je trouve que... C'est un point qui me chatouille et je voulais vous en faire part.

M. Guay (Louis H.): Je voudrais juste clarifier une chose: On ne souhaite pas prendre le rôle de la Chambre au niveau du traitement des plaintes. Parce que, ce dont la Chambre s'occupe pour le traitement des plaintes, ce sont les plaintes de nature déontologique. Nous, ce n'est pas de ça dont on s'occupe. Ce ne sont pas les plaintes, mais les opportunités qui concernent un assureur. Alors, chacun a sa juridiction, et je pense qu'il appartiendra à l'Agence de déterminer quel genre de contrôle elle voudra mettre en place pour s'assurer qu'on fait un bon travail. Moi, ce que je vous dis, c'est qu'on est persuadé qu'on peut le faire et on souhaite avoir la chance de se faire entendre là-dessus, et c'est ce qu'on fait.

Dernier point: L'Inspecteur général des institutions financières a déjà opéré un centre d'information sur les assurances. Il nous a délégué la responsabilité de le faire ainsi que le Bureau des services financiers avec qui on a eu une entente pour agir de cette façon-là. Alors, il y a déjà deux organismes de réglementation, je pense crédibles, qui nous ont confié le travail et je n'ai jamais entendu parler que le travail n'était pas fait à leur satisfaction. Alors, je pense que c'est la preuve qu'on souhaite avoir.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Guay. Mme la députée de Beauce-Sud, d'autres...

Mme Leblanc: Non, ça va pour moi.

Le Président (M. Paré): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: ...

Le Président (M. Paré): M. le député de La Prairie. Oui, il reste quatre minutes.

M. Geoffrion: Bien, ça déborde peut-être effectivement le projet de loi, mais je veux prendre l'opportunité justement de vous poser cette question-là. Depuis le 11 septembre, on entend beaucoup, de la part des municipalités, des entreprises privées, enfin à peu près tout le monde: Il y a comme une espèce d'explosion au niveau des primes. J'aimerais savoir comment vous réagissez à ça et comment vous vous assurez justement, sans jeu de mots, que cette explosion-là ne soit pas démesurée. Parce que, d'après ce qu'on entend, elle est carrément démesurée dans certains cas et il n'y a pas vraiment de liens directs avec des attentats ou... Vous savez ce que je veux dire. Donc, j'aimerais ça vous entendre là-dessus quelques instants.

Le Président (M. Paré): M. Guay.

M. Guay (Louis H.): Quand on parle du 11 septembre, on parle d'un événement catastrophique sans précédent qui a surtout affecté, dans notre domaine, ce qu'on appelle les réassureurs, donc les compagnies d'assurances, les assureurs qui sont ici, là, et c'est un marché qui est mondial. D'accord? Alors, je vous le dis, là, on pourrait passer l'après-midi ici, sans problème, à discuter de tous ces rouages assez complexes là qui existent au niveau mondial, qui est dans le fond ni plus ni moins qu'un mécanisme de répartition des risques mais à l'échelle mondiale. Et c'est passablement complexe. Les traités mêmes de réassurance qui sont signés entre les assureurs primaires qui font affaire avec le public et les réassureurs, il y en a une panoplie qui couvrent différentes choses et qui ne couvrent pas certaines choses. Et ce qui est arrivé avec le 11 septembre, c'est que ça a mis une pression sur l'industrie de la réassurance, une pression qui était déjà là, et c'est ce qui fait que, dans certaines lignes d'affaires, un assureur qui doit aller chercher de la réassurance ? parce qu'il veut se protéger lui aussi contre des pertes catastrophiques ? va faire face à des augmentations de primes assez faramineuses et même va faire face à des refus de couvrir certaines choses, tout simplement parce que ces grandes institutions financières là n'ont plus la capacité financière de couvrir certains risques. C'est là où on en est rendus.

Alors, on parle de 40 milliards, là, le World Trade Center. Alors, je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter quelque chose là-dessus.

Le Président (M. Paré): M. Valotaire.

M. Valotaire (Jacques): Le sinistre du mois de septembre l'an passé a réduit sensiblement la capitalisation des assureurs ou de l'industrie de l'assurance dans le monde. Si tu as moins de capital, tu es moins en mesure de prendre des risques. C'est aussi simple que ça. Par contre, au Québec, en assurance automobile, en assurance habitation, il n'y a pas de hausse générale des prix depuis le 11 septembre. Il y a des cas individuels pour toutes sortes de raisons qui provoquent des fluctuations à la hausse ou à la baisse, mais il n'y a pas d'augmentation systématique en automobile et en habitation. En assurance des entreprises, il y en a. Ça avait commencé avant le 11 septembre, les augmentations, parce qu'il y avait carence de revenus dans ce secteur-là de l'assurance de dommages depuis plusieurs années, et les assureurs commençaient à augmenter les tarifs. Évidemment, le 11 septembre est venu accentuer toute l'affaire.

Autre phénomène qui se passe et qui est très, très important dans notre domaine: une énorme partie de nos revenus proviennent des revenus de placements. Vous savez ce qui se passe présentement sur le marché financier. Alors, les revenus de placements et les revenus d'assurances sont des vases communicants. Si on n'a pas de revenus de placements ? et on avait des beaux revenus dans les dernières années, ce qui nous permettait de maintenir une certaine stabilité au niveau des primes ? on n'a plus de revenus de placements, et c'est difficile au niveau réassurance. Ça met de la pression sur les primes en général. Et je pense que ça va continuer encore, malheureusement, pour un certain temps.

Le Président (M. Paré): Merci, monsieur. Est-ce qu'il y a d'autres questions, de part et d'autre? Non? Merci de votre contribution à cette commission.

n(16 h 50)n

J'inviterais le Conseil interprofessionnel du Québec à s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Nous accueillons maintenant le Conseil interprofessionnel du Québec. M. Beaulieu, voulez-vous nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît. Vous aurez 20 minutes pour votre présentation et des échanges de 40 minutes avec les parlementaires de part et d'autre.

Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

M. Beaulieu (Louis): Avec plaisir, M. le Président. Mme la vice-première ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour.

Je suis Louis Beaulieu, orthophoniste et vice-président du Conseil interprofessionnel du Québec, le CIQ. Je préside la délégation des ordres professionnels en remplacement du président du Conseil, Me Jean-Paul Dutrisac, retenu impérativement à Montréal par sa pratique notariale. À la table de comparution, je suis accompagné aujourd'hui, à ma gauche immédiatement, Me André Gariépy, avocat, directeur général du Conseil; toujours un peu plus à gauche, M. Pierre Landry, directeur général de l'Ordre des administrateurs agréés du Québec; et, à ma droite, M. Gérard Caron, président-directeur général de l'Ordre des comptables agréés du Québec.

Le Président (M. Paré): Bienvenue, messieurs.

M. Beaulieu (Louis): Aussi, dans la salle avec nous, nous avons des représentants de l'Ordre des comptables généraux licenciés du Québec, de la Chambre des notaires du Québec également.

Je vous remercie de nous recevoir et de nous permettre d'échanger avec vous sur le contenu de notre mémoire. Je ne vous en ferai pas lecture en présentation cet après-midi. Vous-mêmes et vos collaborateurs ont certainement eu l'occasion d'en prendre connaissance. Je n'en dresserai ici que les grandes lignes.

Le projet de loi n° 107 entend modifier l'encadrement d'une variété d'activités du secteur financier. Le CIQ concentre son intervention auprès de vous uniquement sur l'encadrement de la planification financière. Soulignons que le mémoire est le fruit de la table de planification financière qui, sous les auspices du Conseil, réunit depuis plusieurs années les six ordres professionnels concernés par l'encadrement de la planification financière. Contrairement à ce que certains peuvent croire ou affirmer, les ordres professionnels sont en accord avec les principes du projet de loi qui reprennent essentiellement les principes directeurs du rapport Martineau. C'est toutefois dans la mise en oeuvre que les questions se posent. Nous sommes ensemble aujourd'hui pour rappeler au législateur une réalité incontournable: la planification financière est une composante de l'exercice de six professions réglementées ou une activité qui leur est connexe comme une extension naturelle dans le service aux clients.

Aussi, la planification financière est difficilement détachable de la pratique de plusieurs professionnels et donc, de leur encadrement. Les six professions concernées sont les suivantes: administrateur agréé; avocat; comptable agréé; comptable en management accrédité; comptable général licencié; notaire. Les détenteurs des permis professionnels concernés, aussi détenteurs du diplôme de l'IQPF, représentent aujourd'hui environ le tiers des quelque 4 000 planificateurs financiers du Québec. Ce sont des professionnels formés à l'université qui répondent en tous points aux exigences de la protection du public.

Les institutions du système professionnel sont des partenaires depuis le début des réflexions et des interventions successives en matière d'encadrement de la planification financière. Par le passé, les législations dans le secteur financier leur ont toutes reconnu la capacité et le mandat d'encadrement déjà assumé en vertu du Code des professions. Cela est normal puisque ce sont des institutions créées et pleinement outillées par l'État pour procurer un encadrement de certaines activités à risque de préjudice. On a vu que, même l'Association des banquiers canadiens reconnaît, dans son mémoire, à la présente commission, la qualité de l'encadrement offert par le système professionnel québécois.

Forts de leur mandat de protection du public et de leur expertise, les ordres professionnels ont fait oeuvre utile en développant des normes et des outils particuliers à cette activité de leurs membres. Malheureusement, dans l'espoir, dit-on, de gains d'efficacité et de simplicité, le projet de loi n° 107 fait fi de la réalité professionnelle dans le domaine de la planification financière. Pourtant, la législation professionnelle et ses institutions demeurent. Le silence qu'apporte le projet de loi à leur égard constituerait donc un dédoublement inutile d'un régime juridique pour les détenteurs de permis professionnels. Ce dédoublement générerait inévitablement une perte d'informations pertinentes pour le consommateur, une injustice envers les détenteurs de permis professionnels et un manque de transparence, la confusion des normes et des obligations applicables, la confusion des juridictions et des recours et l'augmentation des coûts.

Voilà une illustration que la simplification ne s'apprécie pas seulement par un organigramme, mais aussi par ses effets concrets dans le quotidien des personnes visées: au premier rang, les consommateurs. Comme mandataires de l'État en pareille matière, nous croyons que le dédoublement de régime du projet de loi jettera les consommateurs dans la confusion. Enfin, la crédibilité de l'action de l'autorité publique dans le secteur risque d'être sérieusement altérée. Il faut reconnaître le vrai problème, qui n'est pas la présence de la législation professionnelle adoptée par l'Assemblée nationale du Québec, mais la volonté de la dédoubler par le projet de loi n° 107 pour des gains qui ne sont pas au rendez-vous. Pire, on peut démontrer que le dédoublement va à l'encontre des principes directeurs du groupe de travail Martineau, tout particulièrement à l'égard des consommateurs.

La solution à un tel problème doit prendre appui sur une cohérence de l'action et des institutions publiques et une simplification qui s'apprécie avant tout dans la perspective des consommateurs. Notre mémoire présente trois principes qui doivent présider à l'élaboration d'une solution. Nous croyons que cette solution réside dans la reconnaissance et la prise en compte par le projet de loi de la présence de la législation professionnelle et de ses institutions en matière d'encadrement de la planification financière. La solution doit aussi comprendre une concertation formelle entre les ordres et l'Agence au regard de l'élaboration des normes et de leur mise en oeuvre.

Notre premier objectif, aujourd'hui, est d'exposer aux membres de cette commission la nature et la réalité des problèmes qu'engendrerait le projet de loi. Notre objectif, qui interpelle tout particulièrement la vice-première ministre, est de susciter une collaboration entre mandataires de l'État afin d'identifier les arrimages qui permettraient au projet de loi n° 107 d'atteindre ses objectifs dans le respect de la juridiction des institutions sans générer d'autres problèmes. Il ne fait aucun doute que le projet de loi n° 107 atteindrait réellement ses objectifs s'il évitait le dédoublement et s'il faisait de l'Agence et des ordres professionnels concernés des alliés. En somme, soyons plus efficaces ensemble.

Je vais m'arrêter ici pour nous laisser le plus de temps possible pour les échanges. Vous comprendrez bien que, en qualité d'orthophoniste, la planification financière n'est pas mon domaine principal d'activité, alors je référerai certainement à mes collaborateurs plus que moins pour éclairer la commission. Je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Beaulieu. Merci aux gens qui vous accompagnent. Maintenant, nous débutons la période des échanges avec Mme la ministre.

n(17 heures)n

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je remercie le Conseil de sa présentation. J'ai eu l'occasion de travailler avec ses membres déjà dans une autre vie, lorsque j'occupais d'autres fonctions ministérielles. Ça me fait plaisir de vous retrouver aujourd'hui.

D'abord, je veux vous assurer que l'Agence va travailler avec ses principaux partenaires dont vous êtes, et, en ce sens-là, soyez assurés que notre intention n'est pas de dédoubler quoi que ce soit ou de faire fi de vos points de vue ou de vos façons de voir les choses, et ça, c'est important. Donc, ce dialogue devra exister et devra, je dirais, permettre à l'un et l'autre des partenaires de donner leur point de vue, d'expliciter ses attentes, ses objectifs, etc. Mais, par ailleurs, je dois vous dire que, après avoir entendu un certain nombre de commentaires depuis une journée et demie, presque deux jours que nous sommes ici... Beaucoup d'intervenants sont venus dire comment, pour eux, le fait qu'on ait reconnu le statut de planificateur financier mais non seulement le statut au sens de reconnaître qu'il y a des gens qui s'occupent de planification financière et puis qui sont conseillers à cet égard, mais qu'il y ait une base commune de connaissances qui soit reconnue comme telle par les institutions, par le milieu, a permis à nos institutions, à nos régulateurs, à nos associations, je dirais, d'être à l'avant-garde finalement dans le secteur des produits financiers, d'être à l'avant-garde de ce qui se fait, du moins, autour de nous ? ne nous prenons pas pour d'autres, là ? et pas nécessairement à l'avant-garde de ce qui se fait dans le monde entier, mais ce qui se fait autour de nous. Et, en ce sens-là, je peux comprendre vos préoccupations et comprendre aussi qu'il fallait éviter des dédoublements, mais cependant, à partir du moment où cela non seulement vous permet d'exercer des activités dans différents champs d'intérêts, cela vous donne un plus, que d'être reconnus comme planificateurs financiers, à condition de remplir certaines exigences qui, dans le cas de chacune de vos professions, chacune des professions concernées, ne sont pas des exigences très lourdes à rencontrer, hein: on parle d'un certain nombre d'heures de cours et un certain nombre, je dirais, de règles à respecter. Et c'est un plus pour vous, me semble-t-il, en ce sens-là, sans nier l'existence des principes et des règles qui encadrent chacune de vos professions.

Et donc, je regarde, qui... enfin, beaucoup d'associations qui sont venues, je pense à l'Association des banquiers canadiens, bien sûr, l'Institut québécois de la planification financière, mais, dans tous les cas, ce qu'on a reconnu, c'est que le Québec avait progressé en termes de crédibilité dans l'ensemble du marché à cause de l'existence de ces obligations qui sont faites à ceux et à celles qui s'identifient comme planificateurs financiers. Alors, d'entrée de jeu, là, je vous renvoie la balle en ce sens-là.

Le Président (M. Paré): Me Gariépy, si je comprends bien?

M. Gariépy (André): Oui, merci. Alors, M. le Président, les propos de la vice-première ministre nous donnent l'occasion peut-être d'attaquer certains mythes véhiculés, pour toutes sortes de raisons peut-être, par certaines personnes, sur la compétence des membres d'ordres professionnels.

Premièrement, avant 1989, avant toute première intervention législative sur la planification financière, les ordres encadraient la planification financière de leurs membres. Ils le font toujours. Et il faut se dire: Effectivement, donner un plus, d'être reconnus... Nous sommes reconnus, effectivement. Nous avons une formation qui a fait ses preuves à cet égard. Et, dès le départ, dans l'intervention législative de 1989, l'ajout, effectivement, que la vice-première ministre évoquait pour pousser plus loin la dimension de compétence, on y a adhéré, et tous les planificateurs financiers membres d'ordres professionnels détiennent le diplôme de l'IQPF. Ils ont donc adhéré, ils se sont inscrits dans cette démarche-là. Et je dois vous dire que ce n'est pas la première fois que le système professionnel est sensible à la notion de la compétence, c'est la base même du système: 380 programmes de formation du milieu de l'enseignement au Québec mènent aux 49 permis des ordres professionnels. La base même de notre intervention est la compétence, à l'admission et tout au long de la vie professionnelle, et ça commence au départ par une formation orientée vers la pratique. Il ne faut pas oublier une chose, que la formation en planification financière s'abreuve à des disciplines qui sont les disciplines des six ordres professionnels qui sont présents aujourd'hui. Le droit, l'administration, la comptabilité, ce sont toutes des disciplines qui, dans ce qu'on appelle une formation transdisciplinaire, vous ont dit certains intervenants ces jours-ci, bien, ce sont des disciplines qui sont les nôtres à certains égards et qui abreuvent la formation en planification financière. La plupart des formateurs, que ce soit en formation de base ou en formation continue dans le domaine de la planification financière, sont des membres d'ordres professionnels. Les institutions d'enseignement avec lesquels fait affaire l'IQPF pour constituer ces programmes, les professeurs, ces institutions d'enseignement, les départements, ce sont aussi nos interlocuteurs. La base commune que vous parlez, je pense qu'on y a adhéré très tôt, et nous étions d'ailleurs les premiers à reconnaître, lorsqu'il y a eu les premières discussions sur l'application de la loi n° 134, qu'il y avait un apport positif à cet égard en termes de formation.

Donc, le mythe à l'effet que les membres d'ordres professionnels seraient réticents à quoi que ce soit, en termes de compétence, à la planification financière, j'espère que, dorénavant, il sera crevé.

M. Beaulieu (Louis): M. le Président, si vous permettez, je demanderais à M. Caron...

Le Président (M. Paré): L'avis du comptable.

M. Beaulieu (Louis): Pardon?

Le Président (M. Paré): L'avis du comptable.

M. Caron (Gérard): Oui, oui, oui. À titre de président-directeur général de l'Ordre des comptables agréés du Québec, j'aimerais reprendre certains des propos, si je les ai bien compris, relativement à la facilité, semble-t-il, d'accéder ? en tout cas, en ce qui nous concerne ? au titre de comptable agréé. Je pense que notre réputation est là.

Mme Marois: Pas comptable agréé, planificateur financier.

M. Caron (Gérard): Pour devenir planificateur financier. C'est à ça que vous référez. À ce moment-là, je n'ai pas de problème, parce que j'allais vous dire...

Mme Marois: Non, non pas comptable agréé, là, je fais bien la distinction.

M. Caron (Gérard): Très bien. Et, dans ce sens-là, pour un comptable agréé, de devenir, de porter le titre de planificateur financier et d'y accéder, ce n'était pas nécessairement quelque chose qui était difficile pour lui, et les normes, déjà, qui étaient les nôtres, qu'il devait respecter en matière, à titre d'exemple, d'apprentissage permanent et de formation continue sont telles que dès 1995, alors qu'il n'y avait même pas d'exigences, voyez-vous. Nous avions déjà des exigences à cet égard-là et exigences qui se continuent, d'ailleurs. Toutefois, j'oserais dire qu'au-delà de tout ça, c'est... Un des problèmes... Je vais essayer d'illustrer un des problèmes qu'on peut avoir, quand vous dites qu'il y aurait peut-être avantage d'avoir à la fois la reconnaissance par l'agence puis à la fois la reconnaissance par la profession. J'essaie de m'imaginer un investisseur qui, à cause d'une faute qui a été commise par un planificateur financier, planificateur financier qui serait membre d'un ordre professionnel, dans quelle situation il se retrouvait, alors qu'il y a deux possibilités pour lui, hein. Il va se plaindre ou à l'Agence, et il peut se plaindre également à l'ordre professionnel. Alors, que va-t-il faire? Il ne prendra pas de chance, il va se plaindre aux deux. Les chances sont qu'il se plaigne à l'un et à l'autre et qu'on génère un conflit, un débat entre, probablement...parce qu'il va y avoir certainement un avocat du côté de l'Agence, il va certainement y avoir un avocat du côté de l'ordre parce que, en tout cas, c'est comme ça que ça fonctionne; et là, on va tomber dans des conflits de juridiction, des débats juridiques, et je ne suis pas certain qu'à travers ça on va faciliter la protection du public et qu'on va rendre plus facile la protection du consommateur à des coûts moindres. Alors, ça m'apparaît que ces conflits-là vont venir alourdir la protection du public et le coût de cette protection-là.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Caron. D'autres remarques? Oui. M. Landry.

n(17 h 10)n

M. Landry (Pierre): Oui, j'aimerais peut-être profiter de l'occasion pour enchaîner sur l'élément de compétence à laquelle on fait un peu allusion. Je ne pense pas que les ordres professionnels aient de difficulté à voir apparaître, si on veut, des standards qui ont été évoqués, comme par l'IQPF ce matin. Ce n'est pas à vous que je vais apprendre que, dans les 10 prochaines années, on va assister à un transfert intergénérationnel de richesses comme sans précédent et que la planification financière, la profession ou, en tout cas, l'activité de planification financière va mériter d'être très, très sérieusement encadrée. On assistera ? on assiste déjà ? à des choses pas faciles, on assistera probablement à des micro-WorldCom à des micro-Enron peut-être. Donc, les ordres professionnels ont été sensibles, déjà, à ces dimensions, et je pense que, en parallèle avec les travaux qui ont été menés par l'IQPF ? et on doit reconnaître qu'ils ont permis d'uniformiser, de rendre, de façon horizontale, si on veut, un certain standard, certaines normes ? les ordres professionnels ont fait le travail aussi en parallèle de leur côté.

Nous avons élaboré, notamment, au cours des dernières années des chartes de compétence en planification financière qui nous sont communes, nous avons développé de l'outillage ? parce qu'on a relevé ça aussi dans certains propos ? de l'outillage pour être en mesure de faire de l'encadrement, et je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'intervenants qui soient équipés au moment où on se parle pour faire ce qu'on appelle vraiment de l'encadrement professionnel. Et, quand on parle de compétence, on parle aussi de l'encadrement professionnel. La formation continue, c'est important; la formation de base, c'est important. Mais vous connaissez les composantes de la compétence, qui sont de la connaissance, du savoir-faire mais aussi un comportement, un comportement professionnel. Les ordres se sont mis ensemble justement pour évoquer, pour élaborer des outils d'inspection professionnelle, des outils, des éléments de formation continue, pour savoir exactement de quoi les gens ont besoin.

Alors, je pense qu'on n'a pas de réserves sur dire: Oui, il faut que tout le monde ait une compétence en quelque part. Je pense qu'il n'y a pas de difficultés de ce côté-là. On voit les choses un peu de façon peut-être différente et la formation, la formation continue, pour nous n'est pas le seul gage de la compétence et de l'assurance qualité, si on veut, dont le consommateur a besoin et aura besoin dans les prochaines années.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Landry. D'autres...

Mme Marois: Je pense qu'on ne dit pas de choses contradictoires, là, vous et moi et vous et nous. Dans le fond, ce qu'on dit, c'est que, quand on regarde chacune de vos professions, prenez les administrateurs agréés, les CGA, les notaires, quand je regarde les membres de l'Ordre, par exemple prenons les notaires, il y a 3 200 membres de l'Ordre et 146 d'entre eux s'identifient comme planificateurs financiers ou ont obtenu la reconnaissance nécessaire pour s'identifier ainsi. Je dirais que ce n'est pas le corps principal d'action des notaires, que de faire de la planification financière. Et donc, en ce sens-là... Et je répète que ce n'est pas pour moi un dédoublement, c'est un plus qu'on ajoute, et à ce moment-là, c'est l'Agence de sécurité financière qui sera responsable d'appliquer les codes de déontologie pour ce qui est de l'aspect planification financière, mais ce qui n'enlève pas l'obligation pour chacune des professions de contrôler, sous l'angle spécifique et propre à sa profession, les actes de notariat, par exemple.

M. Beaulieu (Louis): Je me permettrai peut-être simplement, sur une dimension très générale, d'indiquer que, dans plusieurs... Bon, vous parlez des notaires. Allons sur ce cas particulier. L'activité de planification financière est souvent un prolongement de l'activité notariale, notamment en matière successorale, et le client qui est devant le notaire va souvent avoir besoin de conseils. Alors, est-ce qu'on peut présumer que l'activité du notaire, en termes de planification financière, est plus élaborée que les 146 qui se sont identifiés comme planificateurs financiers? Probablement. Je vais demander à M. Gariépy de poursuivre ou d'ajouter.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Beaulieu. M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui, merci, M. le Président. Lorsqu'on regarde les domaines d'intervention de la planification financière, nous retrouvons des éléments des professions qu'on retrouve, qu'on parle de la fiscalité... Ne venez pas me dire, Mme la ministre, que la messe que vous officiez à chaque année lors du budget... si jamais l'Ordre des comptables est absent ou les comptables du Québec n'y assistaient pas, ce serait de l'apostasie.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Ne me prêtez pas tant de pouvoir.

M. Gariépy (André): Donc, il y a des dimensions fiscales en planification financière, dans un des domaines, il y a des dimensions qu'on dit juridiques aussi, des dimensions successorales, tout ça sont des éléments de la pratique des professions. Mais je mets en garde contre une certaine vision qui dit que parce qu'il n'y en a que certains dans la profession, ça ne fait pas partie de la définition de la profession. Je vous mets en garde contre ça parce qu'il y a des définitions de professions qui comportent des éléments, même s'ils sont exercés par quelques-uns des membres de la profession; ça fait partie du tout concret, du tout dynamique d'une démarche auprès du client et supporté par une compétence.

Alors, il ne faut pas y aller avec des proportions dans ces choses-là parce que c'est trompeur. Ça peut être séduisant, là, pour servir certains discours, mais c'est trompeur parce que certaines professions incluent des éléments qui ne sont pas exercés... Comme la profession de chimiste. J'imagine qu'il y a de la chimie ? là, je m'en voudrais, là, j'ai 45 ordres professionnels, je m'en voudrais d'en définir un plus qu'un autre ? j'imagine qu'il y a des éléments de pratique du chimiste qui ne sont exercés que par un certain nombre. Ça ne fait pas en sorte que la démarche et les connaissances fondamentales en chimie, la démarche scientifique du chimiste s'en trouve altérée et qu'il faut sortir cette pratique-là de la définition de la profession de chimiste. Alors, je vous mets juste en garde un peu sur ces aspects-là.

Le Président (M. Paré): Merci, Me Gariépy. M. Beaulieu, vous voulez ajouter avant de...

M. Beaulieu (Louis): M. Caron souhaiterait...

Le Président (M. Paré): M. Caron.

M. Caron (Gérard): Pour faire suite à ce que Me Gariépy vient de dire, M. le Président, j'aimerais ajouter le fait qu'il faut absolument distinguer s'identifier comme planificateur financier versus exercer la planification financière. Il faut absolument faire une distinction sur ce plan-là parce que c'est majeur. À ce que je sache, il n'y a pas d'experts comptables ? puis je ne mentionne pas uniquement les comptables agréés parce qu'il y a d'autres ordres comptables ? il n'y a pas d'experts comptables qui ne connaissent pas et qui n'exercent pas, d'une façon ou de l'autre, la planification financière. Ils ont une formation pour ce faire à la base. Ils ont des diplômes universitaires et ils sont formés pour faire ça. Même, plusieurs maintenant ont des diplômes de deuxième cycle; en tout cas, c'est notre cas. Et je pense qu'on mêle ces deux concepts-là. Et si je regarde, moi, ce que j'ai fait quand j'ai fait mon stage, quand j'ai pratiqué, quand j'ai rencontré des clients, j'ai nécessairement fait de la planification financière, ne serait-ce que de répondre à un individu: Comment je vais me comporter, de quelle façon je vais planifier, organiser ma retraite? Il n'y a pas d'expert comptable qui est en cabinet qui ne fait pas ça et il y a des notaires qui le font. Tous ne portent pas le titre de planificateur financier et ne s'identifient pas comme planificateur financier, n'empêche qu'ils font et qu'ils exercent la planification financière et qu'ils sont formés pour le faire.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Caron. Mme la ministre.

Mme Marois: Mais, dans ce qui définit chacune de vos professions ou dans le contenu des exigences propres à votre code, il n'y a pas cette fonction de planification financière.

M. Caron (Gérard): Oui. Elle est là. Elle en a toujours fait partie.

Mme Marois: Pour les notaires et les avocats?

M. Caron (Gérard): Non. Je parle pour les comptables. Je parle pour les experts comptables.

Mme Marois: Ah oui! O.K.

M. Caron (Gérard): Je parle pour les experts comptables, pour l'ensemble des experts comptables, comptables agréés et autres. Je ne parlerai pas pour les notaires et les avocats.

Mme Marois: O.K. Oui. C'est ça. Non, mais je suis d'accord qu'il y a certaines professions où c'est peut-être plus près et ça comporte ces exigences. Mais je pense que, dans d'autres cas, c'est moins vrai.

M. Caron (Gérard): Si vous permettez, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Allez-y, M. Caron.

M. Caron (Gérard): Pour répondre à Mme Marois, répondre à Mme la ministre: Il y a une espèce d'extension naturelle de prolongement, si vous voulez, professionnel. Je ne veux pas parler pour la profession d'avocat, la profession de notaire en particulier, mais, même dans leur cas, j'imagine mal qu'un notaire exerçant en cabinet et rencontrant des personnes qui veulent organiser leur succession, qu'il ne puisse pas, même s'il ne porte pas le titre à certains égards, faire de la planification financière. Il n'en fera pas peut-être de la même façon qu'un expert comptable pourra en faire, mais il en fait à certains points de vue, définitivement. Et je pense qu'on ne peut pas s'empêcher... Et la question qu'on peut peut-être se poser ? mais ce n'est pas l'objet ici ? c'est: Est-ce que la planification financière est une extension d'activités professionnelles ou c'est une profession en soi? On pourrait avoir un long débat très philosophique là-dessus, mais ce n'est pas l'objet.

n(17 h 20)n

Mme Marois: Parce que... Mais non, mais... Sauf que ça pourrait sortir rapidement de la philosophie puis nous amener à dire: Est-ce qu'on crée un ordre? Puis je ne suis pas certaine que c'est nécessairement l'avenue qu'on doit choisir. Je vous le dis, là. Alors donc, en ce sens-là, entre je crée un ordre formellement ou je reconnais qu'il y a certains professionnels qui, en vertu de leur formation, des exigences que leur impose leur profession, ont déjà naturellement ou ont déjà certains éléments leur permettant de, rapidement, aller acquérir les formations supplémentaires pour exercer la responsabilité de planificateur financier, il me semble que c'est quelque chose qui est raisonnable et qui, en même temps, est rassurant pour les consommateurs, de savoir qu'ils font affaire avec des gens qui ont une formation à cet égard-là, et encore plus parce qu'ils sont CGA, parce qu'ils sont administrateurs agréés, parce qu'ils sont notaires, parce qu'ils sont avocats. Et c'est ça que j'ai un peu de difficulté à comprendre, parce qu'on ne demande pas aux gens de faire un cours de trois ans, là, ni de rencontrer des exigences telles qu'ils recommencent ce qu'ils ont déjà acquis dans leur profession. Enfin, je ne veux pas aller plus loin, là, j'ai fait valoir mon point de vue et les questions, et je pense que vous y avez bien répondu. On peut rester en désaccord aussi, vous voyez, ce n'est pas obligé qu'on soit d'accord.

Le Président (M. Paré): M. Caron.

M. Caron (Gérard): Je voulais simplement vous dire que, dans le fond, on se rejoint sur plusieurs points. Je pense que, en matière de protection du public, on a les mêmes intentions. On parle davantage des moyens, des encadrements, des structures pour le faire, et on dit essentiellement: Nous les avons déjà et nous voulons continuer à s'en servir. Est-ce que, si on les dédouble, on ne rend pas les choses un peu plus complexes, d'une part? D'autre part, il y a aussi une dimension, à travers ce que vous avez dit, qui nous préoccupe, qui est celle de: Pourquoi n'en profiterait-on pas pour bien définir ce qu'est la planification financière? Parce que, pour nous...

Mme Marois: Pourquoi... Excusez-moi.

M. Caron (Gérard): Pourquoi n'en profiterait-on pas pour définir ce qu'est la planification financière? Et, là-dessus, on a des problèmes, comme profession. Je vous dis: Parmi nos membres, plusieurs font de la planification financière corporative depuis toujours, puisqu'ils conseillent les entreprises, les organisations, et on n'a jamais dit qu'elle était exclue, quand on parlait de planification financière. On ne l'a jamais définie en clair, ce qui fait qu'on ne sait pas très bien ce que ça comprend et ce que ça ne comprend pas. Alors, moi, je pense que l'occasion de 107 est une belle occasion d'en profiter pour aussi clarifier ce qu'est, ce qu'on entend par la planification financière. Voilà.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Caron. M. Gariépy, vous voulez ajouter?

M. Gariépy (André): Oui. Dans les propos de la ministre, effectivement, il y a des choses avec lesquelles on est foncièrement d'accord. Mais le problème du projet de loi... Il faut revenir au projet de loi. Les membres d'ordres professionnels font de la planification financière depuis des années. Ils sont encadrés bien avant toute réglementation qui a pu arriver en 1989 et par la suite, et nous avons d'ailleurs travaillé assez positivement depuis ce temps-là. Le problème, c'est que le projet de loi n° 107 nous dit: Bien, ce n'est plus votre encadrement originel qu'on a reconnu successivement par les deux lois précédentes comme étant valable. Et même l'Association des banquiers dit: Vous savez, le système professionnel, c'est une moses de bonne affaire! Il est reconnu à l'étranger. Je peux vous dire que je siège à des comités internationaux ? nord-américains, foncièrement ? de réglementation professionnelle, et je peux vous dire: Ça salive beaucoup quand on leur parle du système professionnel québécois intégré, compétent, avec les outils qu'on a. Vous ne pouvez pas vous imaginer le désert moyenâgeux, en termes réglementaires, auquel on fait face en dehors du Québec en termes de la variété des outils qu'on a. Alors, ça, je peux vous en faire des démonstrations.

Mme Marois: Je suis très fière, d'ailleurs, de notre système.

M. Gariépy (André): Alors, ce qu'il faut comprendre, c'est que le projet de loi impose aux professionnels un autre chemin pour dire ce qu'ils font déjà depuis des années à certains égards et auquel, d'ailleurs, ils se sont pliés en termes d'exigences supplémentaires avec le diplôme de l'IQPF depuis une dizaine d'années, il empêche les membres d'ordres professionnels de le dire, et, par le chemin qu'impose le projet de loi n° 107, arrive, avec le certificat de l'Agence, aussi la juridiction de l'Agence. Alors, sur les mêmes objets, il y aura deux syndics, il y aura deux inspections, il y aura deux fonds d'indemnisation, il y aura deux régimes de normes. Ça n'a pas de bon sens, et c'est le silence qu'apporte votre loi qui génère ce dédoublement-là.

Nous, ce qu'on vous propose ? écoutez, on a déjà travaillé ensemble. Nous sommes des mandataires de l'État, nous faisons très bien notre travail, au point aussi que le même système gère des chirurgiens, quand même, ce n'est pas rien ? pourquoi ne pas travailler ensemble et arrimer les deux régimes juridiques plutôt que de les laisser sur le terrain dans la confusion où, là, le consommateur va se dire: Qu'est-ce qui se passe? Où, là, les deux syndics vont débarquer dans le bureau du professionnel, l'un en vertu de la loi sur l'Agence, l'autre en vertu des lois professionnelles, et les deux risquent de se nuire dans l'enquête. On sait ce que c'est, quand deux corps de police débarquent au même endroit, quand la Sûreté du Québec et les bleus débarquent dans un bureau des Hell's et que, malheureusement, il y en a un qui a été trop vite et qui a saboté l'enquête de l'autre. Alors, ça s'est déjà vu.

Mme Marois: Et quand les gens ont deux professions, les deux...

M. Gariépy (André): Ça dépend de la connexité. Encore là...

Mme Marois: Parce que si vous me dites qu'il n'y a pas... Dans le fond, on essaie qu'il y ait des exclusivités, mais ce n'est pas nécessairement toujours le cas, hein. Vous nous en faites la démonstration aujourd'hui, puisque vous dites que tous peuvent en faire, là, et en font. Alors donc, s'il n'y a pas exclusivité, le même problème se pose pour un administrateur agréé ou un avocat qui est notaire ou un administrateur agréé qui est notaire. Je veux dire, les deux.

M. Gariépy (André): Non. En fait, ce qu'il faut comprendre, Mme la ministre, c'est: Il n'y a pas de problème à ce qu'un médecin soit aussi avocat ? c'est un des exemples que nous servait Option consommateurs ce matin ? parce qu'il n'y a pas de recoupement, il n'y a pas de connexité, sauf sur les questions d'éthique peut-être, bon, à moins que ce soit un prof d'université. Bon. Mais, en termes de pratique concrète, face à un consommateur, la planification financière, historiquement ? et c'est toujours la réalité professionnelle, même vos gens nous l'ont dit ? c'est difficilement détachable de plusieurs professions. Alors, lorsqu'il y a connexité, il y a recoupement des juridictions; lorsqu'il n'y a pas connexité, il n'y a pas de problème. Le médecin et l'avocat, franchement, il n'y a pas de connexité.

Le Président (M. Paré): Merci, Me Gariépy. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Je dois dire...

Mme Marois: Je pense que ça se résout, ça. Tout en conservant les obligations liées à la reconnaissance du planificateur financier, je pense que ça se résout, pour ne pas qu'il y ait deux syndics.

M. Gariépy (André): Nous vous le proposons, d'ailleurs. Ce serait plus efficace pour le consommateur d'avoir un guichet unique. Tout le monde parle de guichet unique, on vous en propose un qui est bien ancré dans la culture des Québécois. Quand je fais affaire avec un notaire, je vais à la Chambre des notaires. Depuis 150 ans que c'est comme ça.

Mme Marois: Bien là, vous avez plusieurs guichets uniques à ce moment-là.

M. Gariépy (André): Non.

Mme Marois: Bien oui.

M. Gariépy (André): Parce qu'on vous propose une harmonisation à ce moment-là. Et on vous l'a dit dans le mémoire: On vous propose une concertation formelle qui sera...

Mme Marois: Une concertation qui fait qu'on travaille avec plusieurs guichets.

M. Gariépy (André): Bien non, pas pour le consommateur.

Mme Marois: Enfin!

Le Président (M. Paré): Excusez. Excusez, on va... Maintenant, c'est le temps de notre loyale opposition, comme le disait ce matin M. Michaud.

Mme Jérôme-Forget: De Sa Majesté la reine.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paré): Oui. Madame.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je dois dire que j'avais les mêmes craintes qu'a soulevées la ministre à l'endroit de la proposition que vous faites, mais je dois dire que votre présentation ne m'a pas complètement convaincue. Mais disons que je trouve ça séduisant, l'argumentation que vous évoquez.

Peut-être que si vous nous expliquiez comment vous procédez pour compléter la formation d'une personne qui va se dire planificateur financier et comment vous allez déterminer, par exemple, le contenu de ce programme. Parce que vous avez parlé «avant 1989». Le monde était bien différent avant 1989, et le nombre de produits, la diversité de produits, la diversité des intervenants dans le milieu font en sorte que le planificateur financier, si son titre doit avoir quelque valeur que ce soit, doit représenter quelque chose quand même d'assez spécifique, qui change d'une année à l'autre et qui se modifie avec le temps à cause des exigences du marché. Bon.

Vous nous dites, vous, à titre d'ordre professionnel, par exemple le notariat, vous dites: Bien, nous, on offre un cours et nos planificateurs financiers qui s'identifient comme tels ? il y en a 130 ou 140 sur les 3 000, je pense, que vous avez mentionnés, Mme la ministre ? bien, ce sont, eux, des planificateurs financiers. Bon. Alors, vous, vous avez l'obligation, à titre d'ordre professionnel, pour garder ce titre, d'apporter, j'imagine, une formation continue pour être sûrs que cette personne-là représente bien les exigences du titre.

Alors, peut-être que si vous nous disiez comment vous procédez. Parce que vous avez dit quelque chose plus tôt, que j'ignorais, que vous oeuvrez avec l'IQPF, n'est-ce pas, pour assumer la formation. Alors, peut-être que vous pourriez nous dire, en plus d'être notaire ou avocat, qui n'est pas, comme le disait Mme la ministre, la vocation première d'être un planificateur financier ? au contraire, souvent, les avocats disent qu'ils ne comprennent rien ou à peu près rien aux chiffres, hein, puis on le voit souvent, qu'ils ne comprennent rien ou à peu près rien aux chiffres ? alors...

Une voix: Sauf les honoraires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Jérôme-Forget: Pour moi, il y en a une couple dans la salle. Alors, peut-être que vous pourriez nous éclairer avec la façon que vous utilisez pour, justement. élaborer un programme, le garder à jour, et nous convaincre finalement qu'il n'y a pas lieu d'avoir cette formation, ces deux têtes-là dans une entreprise.

n(17 h 30)n

Le Président (M. Paré): M. Landry.

M. Landry (Pierre): Je vais essayer de répondre à votre question. Tout d'abord, la première chose ? on va commencer un petit peu en arrière ? quand on devient planificateur financier, qu'on veut porter le titre de planificateur financier, qu'on soit chez les administrateurs agréés, chez les comptables, chez les notaires, il faut joindre deux choses, c'est-à-dire il y a une formation ? je vais parler pour les administrateurs agréés, mais le modèle est valide ? il y a un niveau d'acceptation, d'admission chez les administrateurs agréés. Bon. C'est un bac en administration plus telle chose. Si je veux porter le titre de planificateur financier, je dois me présenter... Je suis directeur et secrétaire de l'Ordre. On doit me présenter donc un bac en administration, d'une main, et le diplôme de l'IQPF, de l'autre main. O.K.

Alors, au point de vue... au point de départ, au niveau de la formation initiale, ce n'est pas déjà nous qui avons imaginé, si on veut, les programmes et tout ça. Dans le fond, on accepte ou on prend comme telle la formation décernée par l'IQPF. Donc, mon planificateur financier administrateur agréé, il a exactement la même formation que le planificateur financier inscrit au BSF et qui n'est pas membre d'un ordre professionnel, au point de départ.

Deuxièmement, on s'en va sur la formation continue. À l'heure actuelle, les critères en formation continue sont équivalents à ceux de l'IQPF, et même supérieurs jusqu'à un certain point, en tout cas, en termes de nombre d'heures. Chez nous et chez d'autres ordres, on exige plus d'heures de formation continue même qu'il n'est exigé au Bureau des services financiers. Et on a même accepté, dans les conventions, d'inclure, dans cette formation, c'est-à-dire d'exiger de notre professionnel, un certain nombre d'heures, sept heures et demie, si je me souviens bien, en planification financière intégrée. Pas en n'importe quoi, en planification financière intégrée. Alors, c'est comme ça que la formation continue, que nos gens suivent, si on veut, le cours, le fil du marché comme tous les autres.

Maintenant, une des questions, une des choses, c'est: Comment contrôlez-vous cette chose? Bien, on le contrôle, dans un ordre professionnel, par des déclarations annuelles, d'une part, mais, aussi, on peut aller le vérifier par l'inspection professionnelle. Et, donc, quand on s'en va en inspection professionnelle... Et, comme on dit des fois, quelqu'un qui a tendance à ne pas suivre sa formation continue, ses chances statistiques d'apparaître dans le programme d'inspection professionnelle croissent de façon vertigineuse. Alors, c'est là qu'on dit aussi: Il y a non seulement la formation, mais il y a aussi les mécanismes d'encadrement qui sont là aussi.

Donc, je pense... En tout cas, moi, pour conclure, je ne voudrais pas vous fermer la chose, mais, je veux dire, là-dessus, je pense qu'effectivement on se rejoint, Mme la vice-première ministre, de dire: Oui, on a, je pense, quelque chose qui est tout à fait équivalent. Je pense que la question qui, pour nous, est fondamentale ou, en tout cas, préoccupante, c'est de dire: Bien, il y a comme deux régimes, si on veut, qui viennent... qui arrivent sur la tête de L'assujetti. À notre avis ? puis je pense qu'on en a mis des pistes ? ce n'est pas absolument quelque chose d'incontournable, et c'est pour ça qu'on est là pour en parler. Sauf qu'à première vue, quand on voit arriver le projet de loi tel qu'il est, il vient dire: Bien, écoutez, il y a comme deux régimes; il y a comme un assujettissement d'un à l'autre; on ne sait pas trop; il y a quelque chose qui n'est pas clair.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Landry. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Moi, je vais laisser ma place à mes collègues.

Le Président (M. Paré): M. le député de D'Arcy-McGee m'a demandé la parole.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Comme je disais ce matin ? et je sais que je me répète, mais ? au Québec, on a, en ce moment, un des meilleurs systèmes professionnels au monde sous l'égide du Code des professions, l'Office des professions, à votre Conseil, les 45 ordres professionnels. Et, moi, je vois le silence de ce projet de loi devant nous... non seulement un dédoublement, mais la création d'un quasi-système professionnel parallèle; et je ne vois pas comment, avec, sur un côté les détenteurs de permis professionnels et, sur l'autre côté, les professionnels qui ont un certificat de l'Agence ou les personnes qui ont un certificat de l'Agence n'étant pas professionnels... Et, moi, en lisant le projet et en lisant votre mémoire, je ne vois pas comment on peut arriver... Qui aura la priorité dans la question d'inspection, de discipline, formation. Dans un cas de réclamation, comme vous avez soulevé, contre le Fonds des indemnisations, lequel va décaisser envers le public? Le consommateur va se tourner vers un ordre. Est-ce qu'il va se tourner vers l'Agence? Et lequel finalement va être responsable pour le décaissement envers le consommateur? Et, moi, je vois que, par silence, on crée en fait un aspect négatif envers notre système professionnel. Comme je l'ai dit ce matin, on nie l'existence d'un système qui peut être imbriqué avec ce projet de loi n° 107, et je ne pense pas que ça rendrait quelque chose négatif contre le projet de loi si on laissait notre système professionnel prendre sa propre place dans le projet de loi n° 107. Alors, vos commentaires et comment simplement est-ce que notre système professionnel peut prendre sa propre place dans le projet de loi n° 107?

Le Président (M. Paré): M. Beaulieu.

M. Beaulieu (Louis): Oui. Ce que vous amenez, M. Bergman... Je pense que je voulais me permettre un commentaire peut-être à la question du dédoublement pour le consommateur. Je pense que les ordres professionnels dont on parle ici ont démontré leur responsabilité et leur capacité de gérer l'activité de planification financière et le titre de planificateurs financiers quand il est appliqué à leurs membres. Donc, le consommateur qui va se présenter à un notaire, qui serait aussi planificateur financier, je pense qu'il serait très, très bien servi, puisque tous les mécanismes au niveau de l'admission, au niveau de la formation continue, au niveau de l'inspection et de la discipline pour la déontologie existent. Donc, je ne crois pas qu'il serait en situation de dédoublement. Le consommateur, il suffit de l'informer comme il faut et il est capable, je pense, de faire des choix éclairés si on lui donne les garanties. Et je crois que le système professionnel les fournit. M. Bergman l'a bien illustré, je crois bien que Mme Marois partage aussi cette opinion sur la qualité de l'encadrement du système professionnel. À mon avis, je ne crois pas que le consommateur serait en situation d'être en confusion. Ce qu'on suggère, dans le fond, c'est de s'asseoir et approfondir avec vous ces éléments-là autour d'un élément de concertation qui doit être concerté avec l'Agence pour justement éviter des difficultés ou des conflits dans le futur. Et c'est notre souhait le plus profond.

Je ne sais pas si M. Gariépy veut ajouter quelque chose à cet égard-là.

M. Gariépy (André): Bien, c'est le sens effectivement de notre démarche, nous n'avons pas le choix: il y aura un dédoublement juridique. Ce n'est pas: l'un est meilleur que l'autre, là. D'ailleurs, dois-je noter que 188 et 107 reprennent beaucoup les dispositions du Code des professions? 107 ajoute même le comité de révision. Alors, tout ça, ce sont des importations du système professionnel. Alors, nous faisons tous très bien notre travail.

Le problème, c'est que, pour le consommateur, quand il fait affaire avec un détenteur de permis d'ordre professionnel, il va avoir deux systèmes et, si on les arrime pas comme il faut, premièrement, on s'en va en culottes courtes, comme organismes d'encadrement, à la fois l'Agence et les ordres professionnels. Et, nous, ce qu'on veut, c'est d'avoir les mêmes règles, on les a, dans un sens, la même rigueur, sauf que, il faut que ce soit géré par les ordres professionnels en harmonie, en concertation avec l'Agence. Mais pour le consommateur, ce sera beaucoup plus simple que, lorsqu'il fait affaire avec un professionnel, d'avoir un seul endroit et ce sera tout naturellement, puisque c'est dans la culture des Québécois, l'ordre professionnel qui régit ce professionnel-là.

Et, nous, ce qu'on veut établir, c'est cette concertation formelle avec l'Agence. Et vous savez une chose, tous nos règlements sont approuvés par le gouvernement avec recommandation de l'Office des professions en vue justement de la cohérence. Et ce gouvernement, qui reçoit aussi les règlements de l'Agence, sera tout à fait habilité d'assurer, avec tous les conseillers qu'il y a au Conseil exécutif, d'assurer aussi cette cohérence. L'Agence pourrait même intervenir sur l'adoption de certains règlements qui auraient un impact, comme c'est toujours loisible de le faire. Il n'y aurait pas de problème d'harmonisation et de cohérence, ce qui est l'objectif du rapport Martineau. Et ce que je vous dis, c'est que, depuis 1988, le Conseil interprofessionnel l'a toujours dit, si vous voulez faire du parallélisme, il doit y avoir de l'harmonisation et de la concertation. Depuis 1988, depuis le rapport Fortier qu'on dit la même chose, j'ai fait les recherches historiques. Alors, ce qu'on vous dit aujourd'hui: Évitez les dédoublements inutiles de structure, de juridiction, de syndic, et de ci de ça. Faisons notre travail auprès des gens que nous accréditons respectivement, mais harmonisons-nous, établissons la concertation formelle entre l'Agence et les ordres professionnels pour atteindre cet objectif d'harmonisation et cette vision globale. Parce que ce que je retiens de la plupart des prestations, notamment les prestations des consommateurs ce matin, Option consommateurs, on voit dans leur mémoire, ils disent: Vous savez, ce n'est pas très simple, la situation des ordres professionnels. Mais ce qu'on retient de leur prestation, c'est qu'ils veulent une approche globale, pas une structure unique mais une approche globale. Nous vous proposons cette approche globale.

n(17 h 40)n

Le Président (M. Paré): Merci, Me Gariépy. M. le député de D'Arcy-McGee? Vous avez complété. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys?

Mme Jérôme-Forget: Ah, pardon, excusez-moi. Non, merci, j'ai terminé.

Le Président (M. Paré): Donc, terminé. Donc, il me reste à vous remercier de votre contribution et à ajourner les travaux de la commission au jeudi 15 août 2002, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 41)


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