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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 18 mars 2004 - Vol. 38 N° 34

Consultation générale sur le document intitulé Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures dix minutes)

Le Président (M. Paquet): Avant de débuter, je demanderais à tous ceux et celles qui ont un téléphone cellulaire de bien vouloir en éteindre la sonnerie afin de ne pas perturber nos travaux.

Je rappelle le mandat de la commission: la Commission des finances publiques est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bernier (Montmorency) est remplacé par M. Blackburn (Roberval).

Le Président (M. Paquet): Merci, Mme la secrétaire.

Alors, je fais d'abord lecture de l'ordre du jour pour aujourd'hui, jeudi 18 mars. Nous recevons, ce matin, dans un premier temps, un groupe d'hommes d'affaires du Saguenay?Lac-Saint-Jean à qui je souhaite la bienvenue; nous recevrons par la suite l'Union des municipalités du Québec; ensuite, la Fédération québécoise des municipalités; et finalement nous conclurons l'avant-midi en recevant une délégation de la Société de diversification économique de l'Outaouais. Cet après-midi, après la période des affaires courantes, nous recevrons des gens de CanUsa Capital, suivis de Skypoint Capital Corporation; à 16 h 30, nous finirons avec... ou aux alentours de 16 h 30, nous finirons en rencontrant M. Louis Bélanger.

À la fin des consultations et des auditions, nous procéderons à une période de remarques finales dont j'expliquerai la procédure cet après-midi, ce qui nous amènera à l'ajournement de nos travaux à la fin de la journée. Alors donc, ceci est l'ordre du jour pour la journée.

Auditions (suite)

Alors, au nom de la commission, je souhaite la bienvenue à la délégation du groupe d'hommes d'affaires du Saguenay?Lac-Saint-Jean, M. René Brassard, qui est le porte-parole du groupe, accompagné de... et qui peut peut-être nous présenter les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.

Groupe d'hommes d'affaires
du Saguenay
? Lac-Saint-Jean

M. Brassard (René): Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, merci d'avoir accepté de nous entendre ce matin. Évidemment, j'aimerais peut-être dire qu'on est ici plus à titre individuel que représentants de qui que ce soit, on se représente nous-mêmes. Ça me permet de vous dire que... de vous introduire les gens par leurs noms, tout simplement, et non pas par leurs organisations. M. Yvan Morin, je peux vous dire ce qu'il fait, c'est un agriculteur du Saguenay?Lac-Saint-Jean; M. Bernard Lapointe est un entrepreneur qui est président d'une minière, une junior listée en Bourse; à ma droite, Luc Boivin, qui est un jeune entrepreneur du Saguenay?Lac-Saint-Jean, qui est un transformateur laitier, qui est le plus jeune de la génération des Boivin qui font du fromage depuis presque...

M. Boivin (Luc): 65 ans.

M. Brassard (René): ...65 ans. Nous représentons, monsieur, aussi un certain nombre de personnes que j'identifierai un petit peu plus loin pour permettre de mieux cadrer un peu qui nous sommes.

J'aimerais peut-être, dans un premier temps, M. le Président, déposer à la commission quatre résolutions de support à notre mémoire qui n'avaient pas été déposées avec le document, puisque ça fait déjà presque trois semaines, là, qu'on a déposé le papier. Il s'agit du support de Promotion Saguenay, qui est l'organisation de promotion économique de ville Saguenay. La Chambre de commerce du Saguenay nous a aussi émis un document de soutien. L'UPA du Saguenay?Lac-Saint-Jean supporte notre mémoire, et la Société des fabricants régionaux.

Documents déposés

Le Président (M. Paquet): D'accord. J'accepte le dépôt de documents.

M. Brassard (René): Alors, je vous remercie.

Peut-être vous faire un petit peu la perspective des gens qui sont assis ici, en avant. C'est, dans le fond, des gens qui sont des régionaux au sens le plus précis du terme, c'est des citoyens du Saguenay?Lac-Saint-Jean. On a constitué un groupe de représentants dans le fond des quatre secteurs importants de notre économie régionale. Deux personnes viennent du secteur alimentaire ? Luc Boivin, à ma droite, et M. Yvan Morin, qui est ici ? deux personnes du groupe ont plutôt leurs liens avec l'industrie forestière ou minière ? M. Richard Harvey, qui est président du Syndicat des producteurs de bois du Saguenay?Lac-Saint-Jean, et M. Bernard Lapointe, qui est ici, à ma gauche. Le secteur des entreprises de transformation et équipementiers du Saguenay?Lac-Saint-Jean, deux personnes s'étaient jointes à notre groupe, M. Maurice Duperré, qui est président de Pedno, en fait qui est une entreprise de métallurgie, et M. Jean Paré, qui est président de la compagnie Spectube. Et deux représentants du monde du commerce, M. Frédéric Gagnon et M. Dubé. Ces personnes-là se sont, dans le fond, assises ensemble pour discuter de la problématique qu'on voudrait vous commenter ce matin.

Évidemment, on a été invités à commenter le rapport Brunet, le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois. Ce qu'on a constaté du rapport Brunet malheureusement, c'est qu'il y a un certain nombre d'éléments qu'on aurait aimé voir évaluer dans cet exercice-là. Malheureusement, on n'a pas pu couvrir... Il y a certains aspects qui n'ont pas été couverts, probablement pour des raisons de temps, étant donné l'urgence de... ou du délai que ce comité-là avait.

Ça aurait été probablement intéressant que la commission nous parle des outils comme le REA, par exemple. Le rapport Brunet n'aborde pas une question comme celle-là. Tout le domaine des accréditives minières, qui est un abri fiscal important qui stimule le développement minier au Québec, il n'a pas été non plus touché par le rapport. Au niveau des fonds de travailleurs, par exemple, le rapport l'effleure à peine, tout simplement pour noter qu'il y a eu 1 milliard d'impôts de mis dans les fonds de travailleurs, mais il n'y a pas vraiment une critique ou il n'y a pas vraiment une analyse du travail des fonds de travailleurs. Ça aurait probablement permis un éclairage un peu plus complet si ces domaines-là avaient été couverts, et peut-être d'autres. Ce n'est pas un reproche qu'on fait, remarquez bien, c'est simplement qu'on pense que, dans ces autres éléments là du capital de risque, il y aurait peut-être eu des solutions qui auraient pu être apportées. Ceci dit, on en prend bonne note et, nous, on voudrait...

Sur la question du rapport lui-même ou de ce qui est donné dans le rapport, on soutient un certain nombre de points de vue, particulièrement le point de vue de renvoyer en région un certain nombre de centres de décision au niveau du capital de risque. On soutient le point de vue du comité, qui parle de consolider, par exemple, les filiales de la SGF. On pense qu'il y a peut-être une rationalisation à faire dans ce domaine-là. On soutient aussi le point de vue de l'implication des partenaires public-privé dans la notion du capital de risque.

Il y a d'autres aspects par contre qui nous apparaissent un petit peu plus discutables et sur lesquels, nous, on émettrait peut-être des commentaires, particulièrement la... Il n'est pas certain que les recommandations relativement à la création des fonds, comme le rapport le suggère, vont vraiment diminuer... ou améliorer l'efficacité du réseau du capital de risque. Ça nous apparaît compliqué, ça nous apparaît des structures de partenariat qui sont difficiles à... en tout cas à voir comment ça va fonctionner. Ça nous apparaît lourd, en d'autres termes, et cet aspect-là nous pose une question.

Et, lorsqu'on parle de créer des sociétés en commandite qui vont être capitalisées sur la base de 1 $ de mise de fonds des partenaires versus 2 $ de prêt dans un cas ? dans l'autre cas, c'est l'inverse, c'est 1 $-2 $ ? ça, ça nous apparaît comme compliqué, difficile et lourd, et on ne règle pas le problème du dollar, qui, lui, est vraiment le dollar de capital de risque lui-même. Ce qu'on dit à propos du premier dollar de mise de fonds, dans le fond, de ces sociétés-là, c'est qu'on va faire un autre comité pour étudier comment est-ce qu'on va adresser la fiscalité sur ce point-là. Alors, c'est un petit peu... Globalement, la notion de partenariat public-privé, c'est une notion qui est... En tout cas, moi, ça fait pas mal d'années que j'en entends parler. Les modèles précis... On parle de la 407, en Ontario, qui va mal. On a un peu de difficultés avec des partenariats public-privé. C'est une notion qui... On se demande comment ça peut se traduire concrètement pour faire fonctionner et améliorer dans le fond l'efficacité de ce domaine-là.

Je pense que les joueurs très importants dans le domaine du capital de risque, c'est les fonds de travailleurs. Ils ont joué un rôle déterminant depuis 1986. Je pense que le premier fonds de travailleurs a été créé en 1986. Le capital de risque de ces fonds-là nous apparaît être un peu difficile, dans le sens que ces fonds-là ont pris des envergures importantes, et on se demande jusqu'à quel point les problématiques auxquelles ils s'adressent, de démarrage d'entreprises entre autres, peuvent être adressées. Je pense que... en tout cas, de notre point de vue, les fonds de capital de risque nous apparaissent avoir des difficultés à se préoccuper des projets plus petits ou des projets en région.

n (9 h 20) n

Un des aspects du rapport qui un petit peu nous chatouillent aussi, c'est le fait qu'à plusieurs occasions, dans le document, on parle de limiter un peu la concurrence, hein? On parle de maillage, la chaîne financement, on parle de chaîne de financement et on va limiter la contribution des fonds spécialisés à des montants maximaux de manière à ne pas concurrencer directement les fonds entre eux. On veut limiter les FIR, par exemple, à 300 000 $ pour ne pas qu'ils rentrent en concurrence directe avec d'autres joueurs dans le capital de risque. Alors, il y a une espèce de notion d'éviter la concurrence qui ne nous apparaît peut-être pas souhaitable, puis on pense qu'au contraire il devrait y avoir concurrence dans le capital de risque puis au grand bénéfice des entrepreneurs et de ceux qui ont besoin de capital.

Si on est ici, du Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est parce qu'on a une expérience, et on voulait vous en faire part. Et le Saguenay?Lac-Saint-Jean est probablement une des... en tout cas, à ma connaissance, la seule région au Québec qui a, au fil des années, mis en place des capitaux de risque locaux. On se souvient des SODEQ, dans le début des années quatre-vingt. Les SODEQ ont déjà été, au départ, le premier outil de capital de risque qui a été créé. Je vois Karl Blackburn. J'ai contribué, au début des années quatre-vingt, avec son père à mettre en place la première SODEQ au Saguenay?Lac-Saint-Jean. L'expérience des SODEQ n'a pas été très concluante. En 1985, le gouvernement abrogeait la Loi des SODEQ. C'était un premier abri fiscal qui était consenti à l'époque.

Au Saguenay?Lac-Saint-Jean, ça nous a permis, par contre, les SODEQ, d'aller à une deuxième génération de capital de risque où on a mis en place, avec les grandes multinationales, Alcan et les papetières, une société en commandite qui s'appelait Soccrent. Vous avez peut-être déjà entendu parler de Soccrent, qui a généré un capital d'une vingtaine de millions de dollars, qui a contribué, dans les années quatre-vingt-dix, au capital de risque régional. Alors, l'expérience du Saguenay?Lac-Saint-Jean est un peu particulière, dans le sens qu'on a vraiment contrôlé et mis en place des fonds de capitaux de risque qui étaient d'origine de la région et qui étaient contrôlés par des gens de notre région. Ces capitaux de risque là étaient un peu particuliers, au sens qu'ils étaient dans le fond des promoteurs aussi des projets. Ils ne se comportaient pas, en termes d'investissement, de la façon d'un capital de risque standard, ils étaient carrément des partenaires, des promoteurs, et leur investissement était fait et est encore fait en termes de permanence.

On sait que, les capitaux de risque, souvent, la première clause qu'ils discutent, c'est: Comment est-ce que vous nous rachetez?, en entrant. Nos capitaux de risque régionaux ont réussi à faire démarrer des projets majeurs, et Karl est au courant de ça. MDF La Baie, par exemple, des projets importants de la région sont venus au monde grâce à ces fonds-là locaux. Et c'est des fonds qui ont été faits avec une philosophie particulièrement différente des capitaux de risque conventionnels qu'on connaît. Et, de ce point de vue là, le modèle de société en commandite qui a été proposé dans le rapport a été utilisé, en 1986, dans la mise en place de Soccrent, par exemple, qui est une société en commandite, de sorte qu'on a une certaine expérience, dans la région, et le succès de ces projets-là a été important.

Combien est-ce qu'il me reste de temps? Ça va vite, hein? On va continuer.

Le Président (M. Paquet): Il reste...

M. Brassard (René): La politique d'investissement de ces fonds-là évidemment a eu pour conséquence, étant donné que ces fonds-là ont investi comme partenaires permanents, que ces fonds-là se sont épuisés avec le temps. Et malheureusement ce qu'on voit aujourd'hui, c'est que ces fonds-là n'ont plus nécessairement de liquidité pour continuer d'investir.

Quand on regarde les argents investis par les épargnants dans les fonds de travailleurs particulièrement, ce que l'on trouve de génial dans les fonds de travailleurs, c'est qu'ils font le plein chaque année et que chaque année ils recapitalisent les fonds et ils obtiennent de l'argent frais qui leur permet d'investir. Le problème de ces fonds-là, c'est un problème qui est dû à leur grosseur, mais c'est le problème du fait que c'est...

Sans vouloir faire, M. le Président, de commentaires contre Montréal, c'est que c'est dirigé de Montréal, avec une politique globale pour la province qui est adaptée à leurs priorités nationales, si on veut, pour l'ensemble du Québec et qui a des stratégies carrément... Même s'il y a des fonds régionaux, ces fonds régionaux là, qui sont dans le fond des filiales des fonds de travailleurs, agissent, en termes de politique, selon les instructions qui viennent du bureau-chef, dans le fond. Et, à ce moment-là, les opportunités ou les possibilités que ces fonds-là offrent ne correspondent pas toujours aux besoins des entrepreneurs. Et en ce sens on pense aussi que les sommes qui sont investies par les gens de nos régions dans ces fonds-là ne reviennent pas toutes en région. On pense, on estime, nous, à peu près qu'il y a 0,20 $ dans le dollar investi par les gens de la région qui reviennent dans nos régions. Le reste, c'est envoyé, comme nos jeunes et maintenant nos retraités qui quittent les régions vers les grands centres.

Ce que nous proposons ? et on voudrait éviter de rentrer dans des modèles spécifiques parce que ça devient technique, et puis je ne suis pas certain qu'on serait productifs dans nos débats ? ce que l'on propose... On pense qu'il y a moyen, avec les outils financiers existants, de simplement régler la question des mises du capital de risque avec un abri fiscal, d'éliminer le rôle des partenariats public-privé lourds et compliqués, simplement utiliser la fiscalité comme outil pour permettre d'obtenir des investissements par des entreprises privées qui sont des entreprises qui utilisent les outils financiers connus. On élabore de façon préliminaire, dans le document, une approche, puis ça peut en être une. Il y a probablement d'autres approches.

Dans le fond, ce qu'on recommanderait au gouvernement, de notre point de vue, c'est de limiter, dans un premier temps ? on va vous faire part de nos principales recommandations ? c'est de limiter l'importance des fonds de capitaux de risque qui reçoivent l'aide de l'État. L'envergure de ces fonds ne devrait jamais les rendre à l'étroit dans le marché du Québec. On pense qu'il y a des fonds... Quand ils atteignent des niveaux de 4, 5, 6 milliards, les problématiques changent et les gestionnaires de ces fonds-là probablement doivent subir une dérive par rapport à leur mission initiale.

On pense qu'on devrait créer, au Québec, mettre en place deux types de fonds privés, des fonds régionaux et des fonds sectoriels. On devrait consentir un abri fiscal à ces fonds régionaux là qui seraient des entreprises de capital de risque qui seraient... Et puis le plus bel exemple de l'abri fiscal pur, c'est les accréditives minières, par exemple. Les mines, l'exploration minière est stimulée au Québec strictement par un abri fiscal et...

Le Président (M. Paquet): ...moins d'une minute, s'il vous plaît. J'ai un petit peu de temps...

M. Brassard (René): Je conclus. Je conclus dans mes recommandations, puis on va pouvoir passer aux questions. On suggérerait deux types de fonds, les fonds régionaux et les fonds sectoriels. On pense que la fiscalité de chaque fonds devrait être ajustée au niveau de risque. On pense qu'il y a deux niveaux de fiscalité qui devraient être consentis. On pense que ces fonds-là devraient être limités entre 20 et 200 millions, éviter les super grands fonds. On pense qu'ils devraient être publics, listés en Bourse et être en compétition. On pense que ces fonds-là devraient se compétitionner l'un l'autre. Je pense que les entrepreneurs y trouveraient un profit certain. Et nous pensons que ça devrait être... La meilleure façon de mesurer la performance de ces fonds-là serait de les lister en Bourse.

J'arrête ici, M. le Président, je vous remercie, puis on va répondre à vos questions. Peut-être qu'on va en soulever quelques-unes.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Brassard. Merci. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Alors, merci beaucoup. M. Brassard, M. Boivin, M. Lapointe, M. Morin. C'est un plaisir de vous rencontrer ce matin. Et j'ai trouvé fort intéressante votre présentation et très originale parce que, effectivement, vous avez plusieurs éléments qui rejoignent les préoccupations exprimées depuis le début de la commission, mais en même temps en le traitant de façon assez originale effectivement dans des propositions assez concrètes.

Je vais peut-être juste faire une mise en situation, au départ, à l'égard du mandat du rapport Brunet. Évidemment, on avait effectivement donné un mandat de regarder le rôle de l'État dans le capital de risque. Cependant, on n'a pas été jusqu'à leur proposer évidemment de réévaluer les REA, comme vous dites, l'action accréditive et même les SPEQ, puisque ça faisait partie d'une consultation que menait en parallèle effectivement le ministre des Finances, comme vous le savez, qui a fait une tournée des régions et qui a consulté les gens là-dessus. Donc, on voulait éviter évidemment... Donc, il est allé chercher lui-même le pouls, et je pense que vous avez eu l'occasion certainement, probablement, de le rencontrer là-dessus. Donc, juste signaler que ce n'était pas pour mélanger... On ne voulait pas effectivement avoir deux consultations sur le même sujet. Donc, la partie fiscale, ou la partie des instruments fiscaux, a fait l'objet d'une consultation parallèle de la part de mon collègue des finances.

Deuxième remarque, évidemment c'est à l'égard de l'ensemble de votre proposition, où vous dites effectivement... Vous partagez l'idée qu'un ménage est intéressant et même souhaitable dans les regroupements, notamment la SGF et même les Innovatech. Alors, là-dessus j'aurai peut-être une question tout à l'heure parce que c'est assez nouveau par rapport à d'autres présentations.

n (9 h 30) n

Ma question porte plutôt... porterait cependant sur un peu le cadre de ce que vous proposez pour la région en regard de la situation actuelle justement qui existe aussi dans la région. Vous l'avez noté, il y a eu des propositions qui sont en marche évidemment avec la Soccrent, qui a effectivement fait un travail là-dessus. Vous parlez d'Amisk également. Et le lien que je voudrais faire... la question que je vous poserais, c'est le lien entre ces organismes-là et ce que vous proposez. En d'autres termes, il y a déjà, dans la région, une mobilisation de gens et des capitaux qui ont été mobilisés, qui ont donné des effets, et vous le mentionniez tantôt. Et déjà il y a également une autre mobilisation en cours actuellement, on le sait, avec notamment... L'Alcan a offert de participer à la création de... justement l'implication encore dans le capital de risque avec peut-être d'autres entreprises de la région. Et donc est-ce qu'il n'y aurait pas, à la base, puisque vous parlez de fonds régionaux qui s'apparentent un peu aux fonds d'investissement régionaux... Je comprends qu'on peut en changer les modalités, là, du FIR qui était proposé par le rapport Brunet, mais est-ce qu'il n'y a pas la base... est-ce que la région n'est pas une base justement exceptionnelle pour partir de ces fonds-là?

À partir du moment où il y a une capitalisation déjà qui existe, il y a peut-être la possibilité de développer d'autres genres de fonds dans la région ou de grossir ceux qui existent, et j'essaie de faire le lien entre justement ce qu'il y a déjà puis la proposition que vous faites. Est-ce que c'est parce que vous voulez avoir de nouveaux instruments, ou, ces instruments-là, vous voulez les compléter? Ça, j'ai de la misère un peu à suivre qu'est-ce que... en regard de ce qui existe déjà, comment ça changerait puis pourquoi justement changer le cap alors qu'il y a déjà un modèle qui existe, là, puis qui a quand même eu un certain succès.

Le Président (M. Paquet): M. Brassard.

M. Brassard (René): Merci. M. le ministre, vous touchez au coeur du problème, je pense. La question que vous soulevez est fondamentale, et c'est vraiment le coeur de l'activité. Ces fonds-là ont eu une stratégie, on l'a expliqué, complètement différente des capitaux de risque normaux. Le problème de ces fonds-là, c'est qu'ils ne sont pas recapitalisables facilement, O.K.? Si je prends le cas de Soccrent, c'est une première mise de fonds de 10 millions qui est venue d'Alcan, des Abitibi-Price, des grandes entreprises et dont un des partenaires était Amisk, qui, lui, est devenu une entreprise en Bourse. Et qu'est-ce qu'on offre de différent, c'est que ces deux outils-là régionaux, actuellement ils n'ont plus de capital, ils sont épuisés. Du côté de la société en commandite, on ne pense pas que les grands partenaires ont exprimé le souhait de continuer de réinvestir dedans. Moi, je n'ai pas entendu Alcan dire qu'il souhaiterait, par exemple, continuer à réinjecter des fonds dans Soccrent. Dans le cas d'Amisk, l'entreprise a un capital de 31 millions qui est, à toutes fins pratiques, investi et qui n'a plus les liquidités nécessairement pour le faire. Et une des caractéristiques justement qu'on retient des fonds de travailleurs, c'est sa capacité de régénérer des fonds chaque année. Donc, ces outils-là ont fait leur temps.

Moi, je pense que les capitaux devraient venir beaucoup plus de l'endroit d'où viennent les capitaux des fonds de travailleurs, c'est-à-dire des individus, que de partenaires industriels majeurs. Et dans ce sens-là on pense qu'un outil qui répondrait à ces critères-là de recapitalisation annuelle venant de l'épargne via un abri fiscal serait un outil intéressant. Je ne sais pas si ça répond bien à votre question.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre.

M. Audet: Oui. Oui. Oui, bien justement j'aurais une deuxième question qui est reliée, que vous venez vous-même d'aborder. Évidemment, ça implique, vous en êtes bien conscient, qu'on ouvre évidemment... que le gouvernement ouvrirait la fiscalité à une concurrence en quelque sorte au fonds de... au FTQ, à Fondaction et, dans une certaine mesure, également à Desjardins. Quand ces gens-là sont venus, on a discuté de cet aspect-là. Évidemment, inutile de vous dire qu'il y a une forte opposition à ce que l'on crée des fonds semblables dans les régions du Québec, vous vous en doutez bien. Alors, est-ce que vous avez eu l'occasion d'en discuter avec ces organismes-là et de trouver avec eux peut-être une façon d'allier en quelque sorte les points de vue et de voir comment est-ce que vous ne pourriez pas... les régions ne pourraient pas tirer plus parti de ces fonds-là justement plutôt que d'en créer d'autres? Est-ce que vous avez eu des discussions, en d'autres termes, avec les fonds en question?

Le Président (M. Paquet): M. Boivin?

M. Boivin (Luc): Oui, c'est ça. Bien, ces fonds-là, premièrement, n'ont pas un rôle d'être promoteurs de projets. Dans notre cas à nous, ce qu'on prétend vouloir faire, c'est de promouvoir des projets. Ils disent qu'il n'y a pas de promoteur au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Bien, nous, on dit: Oui, il y a des dossiers, puis, si on avait de l'argent, on partirait les dossiers. On ne rentre pas en compétition avec ces fonds-là parce qu'on va probablement les approcher quand même pour soulever les dossiers, mais on va avoir le rôle de promoteurs. Maintenant, oui, il y a eu même des commentaires qui se sont faits dans les journaux, il y a eu des sorties médiatiques de ces fonds-là. On leur a expliqué par la bande, disons, qu'on ne voulait pas les attaquer. Oui, on devient en compétition avec eux sur le marché pour aller chercher l'argent des contribuables en placements, mais d'un autre côté c'est la concurrence, là. Ce qu'on vous dit, c'est: Amenez de la concurrence, puis on va performer.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le député de Blainville, s'il y a consentement. Il y a consentement.

M. Legendre: Merci, M. le Président. M. Brassard, messieurs, bienvenue à cette commission. M. Brassard, plus je vous écoutais, au fur et à mesure de votre présentation, et plus je trouvais que vous étiez en désaccord avec beaucoup d'éléments du rapport Brunet. Par ailleurs, vous le disiez si poliment et délicatement que ce n'était pas trop brutal, là, mais vous mentionniez qu'évidemment il y avait plusieurs aspects qui n'avaient pas été couverts. Vous nous disiez que la création des fonds, ça vous apparaît plutôt lourd, pas tout à fait adapté non plus aux plus petits projets puis à ce qui se fait en région. Partenariats public-privé, vous émettiez certaines réserves aussi. Notion de concurrence, pas tout à fait souhaitable. Et ce que j'ai beaucoup aimé dans votre commentaire, c'est quand vous dites: Au bout du compte, le dollar, le fameux dollar qu'il faut aller chercher, de capital de risque, ça ne règle pas ce bout-là parce que, il faut bien en convenir, le capital de risque, en particulier en région ? et on l'a entendu beaucoup depuis quelques jours ? ce n'est pas simple, ce n'est pas facile.

Qu'est-ce que vous pensez ? puis vous êtes des gens qui êtes les mieux placés pour en parler, là, vous êtes des gens du milieux, du terrain ? qu'est-ce que vous pensez que ça prend pour que capital de risque il y ait en région? Vous avez fait référence beaucoup à la fiscalité, là. Est-ce que vous pensez que c'est ça, la principale voie?

Le Président (M. Paquet): M. Brassard.

M. Brassard (René): Pour répondre... Écoutez, depuis 20 ans, qu'est-ce qu'on a fait? On a créé des outils, on a créé des outils privés avec les fonds de travailleurs, essentiellement, qu'on peut appeler privés mais qui sont supportés par une fiscalité. On a mis en place une série de corporations publiques qui ont joué le rôle d'investisseurs de... Les Innovatech, c'est exactement l'objectif qu'elles visaient.

Moi, ce que je trouve difficile dans... Lorsque vous faites un projet, vous investissez dans un projet de 1 million de dollars, il y a 25 % qui doit être de la vraie argent, qui ne doit pas être de l'argent de qui que ce soit d'autre que des promoteurs. Lorsque Innovatech est introduite comme un partenaire, par exemple, dans un projet, ça devient de l'argent, du point de vue du Conseil national de la recherche du Canada, du point de vue de Développement économique Canada, ça devient de l'argent public. Alors, le ratio est vicié par des capitaux de risque.

Alors, on a essayé, dans le fond, depuis une quinzaine d'années, les modèles de capital de risque, à toutes fins pratiques, public. Donnons donc une chance au privé. Puis il n'y a pas 25 façons de le faire, il faut amener... Actuellement, là, on constate qu'il y a 30 % de crédit d'impôt, ce qui est ce que les fonds de travailleurs offrent, hein, 10 500 $ pour 5 000 $ de crédit d'impôt. Ces fonds-là ne peuvent pas investir dans le démarrage d'entreprises, ils disent: C'est trop risqué. Ou ils ne veulent pas aller en région parce qu'il n'y a pas des beaux projets.

À l'autre bout du spectre, on a les accréditives minières où on dit: Tu vas mettre ton argent dans une mine d'or puis, si on trouve un filon, tu vas avoir gagné à la loterie. Alors ça, c'est l'autre bout du spectre. Alors, entre le 30 % et le 65 % des accréditives minières, il y a un niveau de fiscalité qu'il faudrait atteindre, qui va permettre de créer des entreprises privées qui vont investir et qui vont être capables de générer des capitaux chaque année. Et, cet exercice-là, on dit: Il faudrait que ça se fasse dans un contexte de concurrence et il faudrait que ça se fasse dans un contexte de Bourse et avec les outils financiers qu'on connaît.

Alors, on n'a pas contre... En fait, l'exercice que le ministre... ou le gouvernement fait, c'est d'essayer de faire toute l'évaluation de ces choix-là. Et on n'est pas nécessairement en désaccord avec un certain nombre de propositions, mais on ne pense pas que... On pense que, nous, il faudrait qu'on essaie la voie du privé vraiment. Et le partenariat public-privé que, nous, on verrait, c'est que le gouvernement accorde un abri fiscal à des entreprises, avec un mandat spécifique de faire des investissements avec des fonds limités, et qu'il devrait mettre quelques fonds en compétition entre eux. Ça va déranger du monde, c'est évident. On le sait parce qu'il y a déjà eu des téléphones chez nos entrepreneurs pour dire: Qu'est-ce que c'est que vous faites là, là, vous autres? Vous touchez à des affaires qui ne vous regardent pas. Bien, nous, on est les gens qui ont des entreprises à l'autre bout. C'est nous qui avons les lettres d'offre de ces capitaux-là, puis on dit: Ce n'est pas intéressant, là, parce que, en entrant, ils disent: Comment est-ce qu'on sort? Tu sais, ce n'est pas de ce genre de partenaires là qu'on a besoin pour faire démarrer des entreprises. Alors, ce n'est pas la question d'être pour ou contre l'opinion du rapport; nous, on voudrait l'adapter à ce qui est la réalité sur le terrain.

n (9 h 40) n

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Et qu'est-ce que vous pensez d'abolir... Par exemple, vous en avez parlé de la Société Innovatech Régions ressources. Qu'est-ce que vous pensez de l'abolition de ça?

Le Président (M. Paquet): M. Brassard.

M. Brassard (René): Je pense que le travail qui a été fait par les Innovatech est intéressant, mais je pense que le problème des Innovatech, c'est du public et ce n'est pas considéré comme de l'équité par certains investisseurs dans les projets. Alors, pour nous, les Innovatech, ce n'est pas du capital de risque au sens des différents partenaires, de la fameuse règle du 25 %-75 % que vous connaissez sans doute. Alors, dans ce sens-là, deuxièmement, c'est une...

Innovatech Régions ressources a fait un très bon travail, et je pense qu'ils ont... J'écoutais M. Blanchet, ici même, dire qu'il y avait jusqu'à deux dossiers par semaine qui rentraient. Je pense qu'ils ont démontré... Innovatech Régions ressources, entre autres, a démontré qu'il y a des besoins importants. Maintenant, actuellement on comprend que l'État, qui est l'actionnaire qui investit dans ça, dise à un moment donné: Bien, il faudrait trouver une autre façon de le faire.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson, en une minute.

M. Boucher: On va essayer d'aller au fond de ça, là. Ce qui nous est dit ici généralement, c'est qu'en période d'amorçage et de démarrage il n'y a pas de capital de risque privé possible, surtout encore moins, encore moins en région. Alors, ce capital-là, il faut bien que quelqu'un le fournisse, là. Qui le fournit, sinon l'État et par des instruments étatiques?

M. Brassard (René): La proposition qu'on fait, c'est de mettre en place des entreprises privées, à laquelle on va accrocher un abri fiscal suffisant. Et, nous, dans notre proposition, si vous la lisez en détail, il y a moyen de le faire.

M. Boucher: L'État, ce ne sera pas...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson.

M. Boucher: ... ? excusez ? ce ne sera pas des fonds publics, ça?

M. Brassard (René): Privées, listées en Bourse, capitalisées.

M. Boucher: Et pourtant, dans le rapport Brunet, là, quand ils parlent du 70 % de fonds publics, ils incluent les fonds des travailleurs, donc ils incluent ces crédits d'impôt, etc.

M. Brassard (René): Je ne comprends pas la question.

M. Boucher: Bien, dans le rapport Brunet, quand ils parlent de 70 % des fonds qui viennent du public, là, ils incluent les fonds des travailleurs comme celui-là de la FTQ, enfin des fonds où il y a des crédits d'impôt, etc. Alors, vous, votre proposition, là... Vous n'améliorez pas la...

Le Président (M. Paquet): M. Brassard.

M. Brassard (René): Entendons-nous, là. Public dans le sens: c'est toujours des capitaux publics. Public, dans mon esprit, c'est... Public, c'est l'État. O.K.? Moi, Innovatech Régions ressources, c'est une corporation de capital de risque publique qui est l'État.

M. Boucher: Le Fonds de solidarité?

M. Brassard (René): Amisk, par exemple, dans la région chez nous, est une compagnie publique, listée en Bourse, avec des capitaux privés.

M. Boucher: Mais le Fonds de solidarité, vous, c'est-u des fonds de l'État, ça?

M. Brassard (René): C'est un capital... Dans mon esprit, c'est des fonds privés sur lesquels il y a un abri fiscal.

M. Boucher: Puis c'est ce que vous proposez, autrement.

M. Brassard (René): Nous, on pense que le véhicule qui devrait être utilisé, c'est un abri fiscal supérieur à ça puis qui permettrait d'aller dans les domaines qui ne sont pas couverts, de l'aveu même de ces fonds-là.

M. Boucher: O.K.

Le Président (M. Paquet): M. Boivin, je crois, voulait compléter. Oui?

M. Boivin (Luc): Oui, c'est ça. En gros, ce qu'on demande, c'est... On dit: On est des promoteurs, on a des projets. Dans le passé, on a réussi des tours de force. Entre autres, M. Bertrand a participé au démarrage de Saint-Fidèle. Le démarrage de Saint-Fidèle s'est fait à partir de fonds qui provenaient de Fromagerie Boivin, Laiterie de La Baie, et un capital de risque qu'on a créé, qui s'appelle Alliance lait. Mais on a une capacité limitée à lever des projets à partir de nos fonds propres. Fromagerie Boivin a besoin de ses sous pour continuer sa croissance. Ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est qu'on a besoin... Le 25 %, le 20 % de cash, on en a besoin, comme promoteurs, pour soulever des projets. On a des idées, on a des projets, et ce n'est pas le rôle de tous les capitaux de risque actuels de promouvoir les projets. Donc, ce qu'on vous dit, c'est: Donnez-nous l'abri fiscal pour aller convaincre les gens d'acheter des actions de notre compagnie listée en Bourse. Puis ce qu'on vous dit, c'est qu'on va se servir de cet argent-là pour investir dans des projets structurants dans les régions.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, M. Brassard, M. Lapointe, Luc, Yvan, je suis très, très, très heureux de vous accueillir ici, à Québec, aujourd'hui et bien sûr je suis très fier d'entendre le mémoire que vous nous proposez. Vous savez, il y a une différence ? puis je pense que c'est important de le comprendre pour les gens de l'opposition ? entre un entrepreneur qui a une mentalité d'affaires, qui veut créer des emplois ? et on a eu l'occasion d'en parler cette semaine et on a eu l'occasion d'en parler au cours des dernières semaines ? et des gens qui sont là pour gérer de l'argent, tu sais. Alors là, il y a un mariage à faire, et souvent on voit que ce n'est pas nécessairement évident.

Puis on a eu l'occasion, au cours des derniers mois, même au cours de la dernière année, de travailler dans des projets qui nous ont amenés souvent à sortir des sentiers battus, à proposer des choses différentes parce qu'à quelque part les méthodes traditionnelles ne suivent plus. Pour toutes sortes de raisons, là, c'est trop risqué et puis... C'est souvent la réponse qu'on se fait donner par rapport aux régions puis par rapport aux régions ressources puis aux régions éloignées. Et, dans ce contexte-là, je vous avouerai que votre mémoire, il est particulier, il propose des nouvelles alternatives qui sont très intéressantes.

Vous avez parlé, tantôt, M. Brassard, de Soccrent, d'Amisk, mais j'ai rencontré, il y a quelques semaines, Pluri-Capital, des gens que vous connaissez bien aussi, qui, eux, ont dans leur mentalité aussi d'aller chercher des fonds, des fonds qui proviennent de caisses de retraite puis qui proviennent... Il a été question, il y a quelques semaines, d'Alcan qui était prête à mettre 20 millions dans un fonds régional pour justement tenter de donner un coup de main à lever des différents projets, ces choses-là. Et, dans ce contexte-là, moi, je vous avouerai que c'est des alternatives qui sont extrêmement intéressantes. Et c'est le but de la commission parlementaire, c'est justement de nous aider à trouver des alternatives qui vont nous permettre de faire les choses différemment puis de tenter de trouver des solutions pour que ça aille mieux. Et, dans ce contexte-là, bien ce que vous proposez, je pense, c'est tout à fait louable, c'est tout à fait intéressant et ça mérite bien sûr qu'on ait une grande, grande, grande réflexion à ce niveau-là.

Tantôt, vous avez eu l'occasion d'en parler avec M. le ministre au niveau des... On a eu l'occasion de rencontrer le Fonds de la solidarité de la FTQ, Fondaction, de la CSN, et bien sûr que, eux, ils ne voyaient pas nécessairement d'un bon oeil la venue de fonds privés comme ceux-là que vous mentionnez, pour toutes sortes de raisons. Ils prétendaient qu'ils allaient perdre la capacité de lever du capital, ce qui ne semble pas être le cas, parce que, effectivement, semble-t-il qu'il y en a beaucoup de disponible. Et, dans ce contexte-là, pourriez-vous élaborer davantage sur des mesures qui pourraient être mises de l'avant justement pour permettre aux gens de contribuer à un fonds comme celui-là, sachant que souvent, dans les phases d'amorçage ou de démarrage, ce n'est pas nécessairement évident d'aller investir dans le privé là-dedans?

Le Président (M. Paquet): M. Brassard.

M. Lapointe (Bernard): Je pourrais peut-être...

Le Président (M. Paquet): M. Lapointe.

M. Lapointe (Bernard): O.K. Bon, vous avez mentionné que les fonds, que ce soit FTQ, etc., ne veulent pas qu'il y ait d'autres fonds. Je ne suis pas surpris, évidemment. Nous autres, quand on est en affaires puis qu'on veut partir une business nouvelle, il y a toujours un mot qui nous arrive: Qui est le compétiteur? On vit dans la compétition à la journée. Donc, à toutes les fois qu'on veut partir un projet, on dérange quelqu'un et il faut se battre. Pourquoi on dérange? Parce qu'il y a de quoi à faire, il y a de l'argent à faire, puis, si on prend un profit, on risque ? je dis bien «on risque» ? de l'enlever à l'autre ou bien donc les deux grossissent. Donc, le fait que la FTQ ne veuille pas nous voir, ou le groupe... ou tous les autres, Desjardins et compagnie, je suis très content de savoir ça, c'est parce que l'idée est bonne.

Puis le fait qu'on voudrait mettre le fonds à la Bourse, ce n'est pas parce que le fonds, rendu à la Bourse, ça va être payant, ça va performer puis... Le fait d'être à la Bourse, ce n'est pas une panacée, parce que, moi, je suis le président junior, la compagnie est en Bourse, c'est une petite compagnie puis on se bat. Le problème n'est pas là, c'est parce que la Bourse, c'est un beau véhicule connu de tous, avec des organismes réglementaires. Donc, pour entrer à la Bourse, le gouvernement n'a pas vraiment besoin de vérifier si tout est clean, tout est beau. Pour être à la Bourse, il faut qu'on montre patte blanche maintenant, puis on a quasiment... Tu sais, là, c'est très, très réglementé. Donc, le fait d'être coté avec la CVMQ et toutes les autres, c'est que vous n'avez pas vraiment à vérifier le cadre légal. On postule que, si on est à la Bourse, on doit rouler pas trop pire. Après ça, le marché, lui, il jugera. Donc, c'est vraiment ultime, là. C'est privé à l'extrême, ce qu'on va... Donc, peut-être que le compromis est en quelque part.

Le Président (M. Paquet): M. Brassard.

M. Brassard (René): Si vous permettez, M. le Président, on va donner un petit peu un petit coup à Montréal, là. Écoutez, on ne veut pas faire de... Mais honnêtement, si j'étais en charge d'un grand fonds à Montréal, je dirais: Bon, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est quoi, les projets? 15, 20 bons projets par année, mettons. Sur les 15, 20 projets, je dirais à mes gens: Allez m'en chercher trois, quatre, cinq, les meilleurs. Écrémez-moi ça, trouvez-moi les meilleurs, puis, le reste, on n'en veut pas. Puis c'est ça que je ferais si j'étais en charge d'un fonds à Montréal puis si je faisais la province: j'irais écrémer les bons dossiers. Mais, les dossiers un petit peu plus compliqués, un petit peu plus risqués, un petit peu plus problématiques, on ne va pas là. C'est de valeur, mais on ne peut pas aller là, c'est trop risqué. Bien, M. le ministre, il faut régler ça, il faut régler ça puis il faut le régler de façon à ce que les gens qui sont là soient jugés. Puis, nous, on propose: mettez quatre, cinq fonds de taille moyenne en place puis laissez-les se compétitionner sur la place publique, et ils vont devoir performer, ils n'auront pas le choix.

n (9 h 50) n

C'est sûr que ça dérange. Il y a eu des coups de téléphone de donnés aux banquiers de nos membres ici, là... dire: C'est quoi, ça, ces commentaires-là? Il faut quasiment être un petit peu téméraire pour parler comme on parle ce matin, M. le ministre, hein? Ce n'est pas évident, là. Alors, ce qu'on dit, c'est... Je ne voudrais pas faire de politique, mais j'ai quasiment le goût de vous dire: On a quasiment pris ça dans le programme du Parti libéral. Rapetissons l'État, donnons au privé le choix, donnons-leur les outils pour qu'ils réussissent. C'est copié dans le programme du parti, M. le ministre.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Merci. J'ai de la misère à situer de façon vraiment pointue et précise comment on peut atteindre l'objectif. D'une part, c'est loin d'être évident qu'on va assister, dans le prochain budget, à une augmentation d'abris fiscaux. Si oui, tant mieux; sinon, on ramène à la question, dans l'analyse que le ministre fait actuellement... Parce qu'on veut tous améliorer la situation, des deux côtés de la Chambre. Alors, vous autres, vous axez beaucoup sur de nouveaux abris fiscaux ou augmenter ceux qui existent déjà. Je simplifie, là, mais c'est beaucoup ce point-là.

Moi, j'ai un doute sérieux que c'est ce à quoi on va assister prochainement et je me demande comment, par rapport aux structures existantes... Vous le dites carrément dans votre mémoire, que vous acceptez la recommandation du rapport qui est d'éliminer les Innovatech. Vous êtes à ma connaissance le seul groupe qui est venu appuyer de façon précise... Il y en a qui ont dit: Bien, les Innovatech, par rapport à la façon dont elles procèdent, il faudrait tout au moins modifier certaines structures. C'est hier, je pense, de façon particulière que ça a été mentionné. Mais à peu près tout le monde, particulièrement des régions, ont insisté sur le fait que les Innovatech devaient rester parce qu'elles étaient beaucoup plus proches de vous autres, beaucoup plus proches des gens qui ont des besoins. Même chose pour les FLI des CLD, et évidemment tout le monde s'accorde pour dire: Si on peut améliorer encore davantage, on peut le faire. Alors, moi, j'aime mieux partir du principe qu'il y a des choses qui existent, il y a des choses qui fonctionnent.

Et, compte tenu que M. Boivin a mentionné que j'avais été impliqué avec lui dans un dossier, je vais m'adresser un petit peu plus à lui. Vous êtes une entreprise prospère, vous avez besoin de vos capitaux, vous l'avez dit. Mais, si on accepte la recommandation que vous faites de façon précise, qu'est-ce qui arrive à ceux qui veulent vraiment partir puis qui ne l'ont pas, le 25 %, ou à ceux qui pensent à une entreprise puis qui partent, mais que financièrement... Dans nos petits milieux, vous le savez, personne n'ose le dire trop, trop fort, mais on a des problèmes bancaires importants. Vous le savez, je vous en ai parlé en dehors tantôt, je pense qu'on ne se mettra pas la tête dans le sable, là, si on va aussi privé, aussi... Puis on sait que le privé, il demande des retours, là, hein? On a eu du privé, hier, quelqu'un qui nous dit: Ça nous prend des revenus, puis c'est vrai pour le privé.

Alors, je demanderais à M. Boivin, parce qu'on se connaît plus puis on a travaillé ensemble: Mais comment vous faites ça, sachant très bien ce que vous vivez, là, dans votre progression? Mais vous, comme jeune, savez très bien aussi que ce n'est pas tout le monde qui a financièrement l'opportunité que...

Le Président (M. Paquet): En une minute, M. Boivin.

M. Boivin (Luc): C'est ça qu'on vous dit aujourd'hui, là. Les Innovatech puis les CLD n'ont pas le rôle de promouvoir les projets. Souvent, ils vont endosser des prêts. Je suis administrateur à Promotion Saguenay, puis Promotion Saguenay, on endosse, puis c'est des petits prêts. Il y a un manque flagrant de liquidités fraîches pour injecter dans des projets. On a un projet qui va s'annoncer bientôt au Lac-Saint-Jean, c'est un tour de force d'aller chercher l'argent. La première piastre, là, c'est le promoteur qu'il faut qui la mette. Innovatech, ils n'embarqueront pas puis le CLD n'embarquera pas si le promoteur ne fait pas un chèque. C'est ça qu'on vous dit aujourd'hui.

Dans mon cas, pourquoi que je fais ça? Tu sais, je n'ai pas de job à défendre aujourd'hui, là. Mais ce que je vous dis, c'est qu'au Saguenay?Lac-Saint-Jean ? puis c'est le problème dans toutes les régions puis notre cousin proche, Charlevoix ? on s'aperçoit que, la grande entreprise, ce n'est pas elle qui va venir créer des jobs, dans le futur, dans nos régions. La plus grande menace de la Fromagerie Boivin, c'est que tantôt on va être juste des vieux puis il n'y aura plus de monde. Ça fait que qui va manger mon fromage? Qui va m'assurer la prospérité qu'on peut prétendre avoir aujourd'hui? Je ne pense pas que c'est les fonds de travailleurs, je ne pense pas que c'est les Innovatech, je ne pense pas que c'est les CLD qui vont assurer justement le démarrage puis le développement d'entreprises.

On est conscients que l'État a une capacité limitée à nous donner des avantages fiscaux, mais ce qu'on vous parle, ce n'est pas des centaines de millions, là, on parle de fonds de 20 millions. Si on prend le modèle où des avantages fiscaux sont donnés, le fédéral va sûrement embarquer. Donc, avec 20 millions, par exemple, par année, on peut lever... Si on met la base du principe qu'on met 0,20 $ d'injection, on peut lever 1 $ de projets.

Le Président (M. Paquet): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Boivin (Luc): 20 millions, on peut lever 100 millions de projets. Donc, à 100 millions de projets, on a des idées, là. Je vous dirais que, des projets, on en a. Ce qu'il nous manque, c'est de l'argent.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre, brièvement. 50 secondes.

M. Audet: Alors, encore une fois je vous remercie, messieurs, pour votre présentation. Je pense que ça a été rafraîchissant, particulièrement le fait que vous dites: Au fond, on est des entrepreneurs, on a des idées, on a besoin d'un coup de pouce pour effectivement mobiliser du capital pour démarrer des entreprises. Je pense que c'est une excellente perspective et je m'engage à transmettre vos recommandations, particulièrement celles qui touchent les aspects fiscaux, à mon collègue des Finances. On est justement dans cette période, donc, ça, je m'engage à le faire. Je ne m'engage pas sur le résultat, mais je m'engage au moins sur ce bout-là.

Deuxième élément sur lequel je pense qu'il faut noter votre contribution, c'est que vous... Ce que je signale, et c'est très important... Vous dites: Effectivement, on est conscients que l'État a un bout de chemin à faire, mais l'entrepreneur privé, l'entreprise privée a le rôle crucial pour démarrer une entreprise. Ça, je pense, c'est fondamental. Et c'est un message que j'aime entendre parce que ce n'est pas l'État qui va créer les projets, c'est les entrepreneurs privés. Et je pense que c'est rafraîchissant d'entendre ça et je vous en remercie beaucoup. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, MM. Brassard, Boivin, Lapointe et Morin, au nom de la commission, je vous remercie de votre participation à nos travaux. Je suspends très brièvement et je demanderais aux gens de l'Union des municipalités du Québec de s'approcher de la table pour qu'on puisse reprendre rapidement nos travaux.

(Suspension de la séance à 9 h 57)

 

(Reprise à 9 h 59)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, au nom de la commission, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Union des municipalités du Québec, représentée par Mme Nicole Appleby, qui est mairesse de New Richmond et présidente de la Commission politique de l'UMQ. Bonjour, Mme Appleby. Si vous voulez nous présenter aussi les gens qui vous accompagnent. Et vous disposez d'un maximum de 15 minutes pour votre présentation.

Une voix: Non, non, non. 20.

Le Président (M. Paquet): Pardon. Excusez. 20 minutes. Je m'excuse. Vous avez 20 minutes, pardon. Entre 15 et 20 minutes, si possible. Merci.

Union des municipalités
du Québec (UMQ)

Mme Appleby (Nicole): Alors, M. le Président de la commission, M. le ministre Audet, Mmes, MM. les députés ? entre autres, bonjour aux deux députés de la Gaspésie ? nous vous remercions d'offrir, ce matin, à l'Union des municipalités du Québec l'opportunité de vous présenter ses commentaires sur le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque.

Permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent: d'abord, M. Claude Larose, à ma gauche, conseiller à la ville de Québec, de même que Mme Peggy Bachman, conseillère en fiscalité à l'Union des municipalités du Québec.

n (10 heures) n

L'Union des municipalités du Québec représente le monde municipal dans toute sa diversité. Ses membres comptent plus de 6 millions de citoyens et gèrent plus de 90 % des budgets municipaux. Couvrant près de 75 % du territoire des municipalités au Québec, son poids et sa légitimité lui permettent d'intervenir dans le débat public au nom de plus de 80 % de la population québécoise. Voilà pourquoi, lorsqu'on parle du rôle des municipalités dans le développement économique et régional au Québec, l'Union des municipalités se sent particulièrement interpellée.

Le projet de loi n° 34, adopté il y a quelques semaines, a reconnu clairement le rôle des élus et des municipalités dans le développement économique du Québec. Nous avons alors exprimé notre satisfaction à ce qu'il établisse que les conférences régionales des élus, communément appelées les CRE, reposeront sur une structure allégée et que les maires des municipalités d'influence, qui jouent un rôle de premier plan dans le développement économique de leurs régions, y siégeront d'office, tout comme les préfets. Ça confirme la nécessité d'imputabilité maintes fois défendue par l'UMQ lorsqu'il est question de la gestion des fonds publics.

Nous appuyons également la décision du ministre Audet d'accorder une plus grande responsabilité aux administrateurs des centres locaux de développement, les CLD. La disposition du projet de loi qui prévoit d'inclure des personnes issues du monde des affaires et des milieux associatif et communautaire dans la composition des conseils d'administration de ces organismes nous rassure, car la vitalité de nos communautés repose sur la prise en charge par les acteurs locaux de leur propre développement.

L'Union des municipalités du Québec a toujours fait valoir l'importance du rôle que jouent les municipalités dans le développement économique de leurs communautés et de leurs régions. Il s'agit là d'un dossier qui interpelle les élus municipaux, pour qui la création de la richesse est une prémisse de base tant pour la qualité de vie de leur milieu que pour la rétention de leur population. C'est sur cette base que l'UMQ a participé au Rendez-vous national des régions en 2002, en y défendant l'importance du rôle des élus locaux dans le développement local et en y rappelant que nos villes demeurent le moteur principal de l'activité et de la croissance économique du Québec.

La plupart des intervenants de la société québécoise reconnaissent que le palier municipal est le mieux placé pour répondre aux impératifs du développement économique local et régional. L'évolution de la société et de l'économie a fait en sorte que les municipalités sont appelées à assumer de plus en plus de responsabilités. Elles deviennent ainsi des acteurs majeurs au niveau du développement et ne demandent pas mieux que d'être outillées pour assumer leur rôle de leaders.

Récemment, en novembre dernier, l'UMQ a organisé un forum sur le rôle des municipalités dans le développement économique. Plus de 200 participants ont échangé sur les thèmes de l'amélioration de la compétitivité et de la diversification de l'économie ainsi que sur les moyens à mettre en oeuvre pour aider les municipalités à assumer leurs responsabilités en matière de développement économique. Ce forum était le premier pas d'une démarche intégrée, créative et innovatrice pour répondre aux défis que nous lance le développement économique de nos municipalités au Québec. Il a fait ressortir à quel point le rôle de l'élu municipal avait changé. L'élu est devenu un acteur incontournable en matière de promotion et de développement économique. Il n'est plus seulement celui qui délivre les permis de construction, mais bien plus un agent de développement dont le rôle s'est considérablement amplifié et complexifié également au fil des années. Ils se sont interrogés sur les moyens pour attirer et retenir les entrepreneurs dans leurs communautés.

C'est dans ce contexte que l'UMQ a souhaité émettre des commentaires dans le cadre des consultations de la commission. Ils portent sur les forces et les faiblesses des outils de financement actuels dans une optique de développement régional endogène. Dans cette approche, nous commentons plus particulièrement les propositions du rapport Brunet relatives à l'abolition des fonds locaux d'investissement et leur remplacement par des fonds d'initiatives régionales. C'est sur ce volet-là que nous nous sommes surtout arrêtés et avons voulu commenter ici, à cette commission.

Afin de mieux expliquer la logique du développement régional et local que nous souhaitons mettre de l'avant, nous voudrions d'emblée introduire une nuance importante entre la notion de capital de risque et celle de capital de développement. C'est à la lumière de cette distinction cruciale qu'il faudra interpréter nos commentaires et les recommandations qui en découlent.

Les fonds régionaux et locaux de développement ont des accointances avec le capital de risque dans la mesure où ils offrent tous deux aux entreprises un financement qui ne repose pas sur des garanties mais sur le potentiel de l'entrepreneur et de son projet d'entreprise. Par contre, il y a des distinctions importantes entre ces deux modes de financement, notamment au niveau des finalités.

Par rapport au capital de risque, le capital de développement régional et local se distingue d'abord par le fait que, pour leurs investissements, les fonds régionaux et locaux de développement se limitent aux entreprises situées dans un territoire bien circonscrit, alors que le capital de risque ne se donne pas a priori de limites territoriales, ensuite par la taille de leur capitalisation et de leurs investissements, qui est plus modeste que celle de la plupart des fonds de capital de risque ? alors, ça ne va pas à l'encontre de ce que les autres ont dit avant, mais c'est un peu différent; en effet, les fonds régionaux et locaux donnent habituellement priorité aux petites et moyennes entreprises, alors que les fonds qui interviennent à l'échelle nationale et internationale mobilisent des capitaux beaucoup plus élevés ? également par le fait qu'ils sont pour la plupart des fonds généralistes qui investissent dans une grande diversité de secteurs, alors que les fonds de capital de risque sont plutôt spécialisés dans un secteur donné, voire un sous-secteur de la nouvelle économie.

Enfin, la plupart des fonds régionaux et locaux s'alimentent en capitaux auprès de divers paliers de gouvernement ou encore d'entreprises collectives. Autrement dit, le secteur privé est très peu présent dans le domaine du capital de développement, alors qu'il est prépondérant dans le financement de type bancaire et dans le capital de risque spécialisé dans la nouvelle économie. Et on sait parfaitement bien, lorsqu'on vient des régions et des régions, par exemple, comme celle que je peux représenter au sein de l'UMQ, que le capital de risque n'est pas nécessairement évident. Les grandes entreprises prêtes à y injecter des sous non plus ne sont pas nécessairement nombreuses et multiples.

Avant de laisser la parole à M. Larose, j'aimerais insister, bien sûr en tant que présidente de la Commission de développement économique de l'UMQ mais aussi et surtout en tant que mairesse d'une ville en région, sur l'importance, lorsqu'il est question de penser au financement d'entreprises dans les régions, de toujours le faire dans une perspective de développement régional et local. On se souvient qu'à partir du milieu des années quatre-vingt s'est graduellement imposé au Québec un modèle de développement local reposant sur une vision endogène du développement qui allait dans le sens d'une revalorisation du local et d'une prise en main du développement par les collectivités.

En partie inspiré par les expérimentations socioéconomiques des CEDC en milieu urbain et des SADC en milieu rural, le gouvernement du Québec créa, en 1997, par sa Politique de soutien au développement local et régional, le ministère des Régions et les CLD. Ce dernier organisme a notamment permis d'arrimer une gouvernance locale et des outils financiers pour mettre en application le plan local de développement, a contribué à la création d'entreprises et a induit des effets structurants dans certains secteurs économiques. En cela, le CLD est souvent au coeur d'un système local d'innovation.

n (10 h 10) n

Cette vision du développement est conforme à une vision de développement mise de l'avant par l'UMQ, comme en témoignent ses interventions au Rendez-vous national des régions et ses commentaires relatifs au projet de loi n° 34. Cette vision est également conforme aux orientations stratégiques 2002-2007 de l'UMQ, qui visent notamment à promouvoir l'autonomie des municipalités et mettre en oeuvre des partenariats gouvernement-municipalités, des partenariats souples et variés qui soient mutuellement avantageux et qui contribuent au progrès économique, social et culturel des collectivités locales. L'UMQ prend donc le parti du développement régional et local et réitère l'importance du capital de développement.

Je cède maintenant la parole à M. Claude Larose, qui vous présentera deux enjeux liés au rapport Brunet qui selon nous devront faire l'objet d'une vaste réflexion. M. Larose.

Le Président (M. Paquet): M. Larose, vous avez 4 min 30 s.

M. Larose (Claude): Oui. Alors, on va y aller rapidement, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés.

Premier sujet. Malgré les succès qu'il a connus, un des bons outils à la disposition du CLD, le FLI, selon le rapport Brunet, est aujourd'hui menacé d'extinction. On est d'accord que le secteur privé doit prendre sa juste place; mais ça ne veut pas dire de prendre toute la place mais celle qui lui revient dans la chaîne de financement et celle où il sera le plus efficace. Or, rien n'indique actuellement que le privé puisse prendre le relais et avoir les effets structurants pour le milieu local, comme ceux qui ont été démontrés par le FLI. Les fonds privés, d'une part, sont préoccupés de rentabilité financière, et on ne peut pas leur demander d'investir dans des entreprises et dans des activités qui ont souvent un effet structurant mais dont les rendements sont parfois faibles, voire quasi nuls, et ça, c'est extrêmement important dans le développement local et régional. De plus, le secteur privé n'est pas efficace et souvent n'est même pas intéressé dans le créneau des petits financements, des petits prêts.

Étant donné que les CLD devraient rembourser, selon les règles actuelles, à partir de 2005, les sommes qui leur ont été versées sous forme de prêts par le ministère des Régions, le rapport Brunet y voit une occasion à saisir pour changer la dynamique actuelle. Nous croyons plutôt qu'il faut maintenir les FLI et ne pas les faire disparaître, et au contraire accentuer leur capitalisation. Si les FLI étaient abolis ? c'est actuellement près de 118 millions qui y étaient consacrés, alors qu'avec les fonds d'investissement régionaux on parle d'une somme de 51 millions ? ça voudrait dire une perte nette au niveau du capital de développement aux niveaux local et régional.

Je passe maintenant à l'autre aspect, qui est le fait que le gouvernement à notre avis ferait une erreur en donnant suite à la proposition du rapport Brunet de délaisser les FLI au profit des nouveaux FIR. Nous croyons que les FLI doivent continuer d'exister; c'est l'outil de développement au niveau local qui est extrêmement important, qui est performant, qui est bien géré par les CLD, qui assure un bon suivi, et les pertes sont relativement minimes parce que les CLD sont très près des entrepreneurs et suivent les entreprises de très près. La performance des CLD à ce niveau-là, au cours de leurs cinq années d'existence, est évidente, elle est très performante. Donc, si le gouvernement veut quand même mettre sur pied les FIR au niveau régional, ils devraient être complémentaires aux FLI, qui sont au niveau local, et ils devraient à notre avis être gérés par les CRE, c'est-à-dire que le gouvernement devrait déléguer aux CRE la responsabilité de décider comment ils vont être gérés en région, les FIR.

On vient de créer les CRE, on vient de dire que c'est important que les élus municipaux soient imputables, on vient de dire que les CRE doivent donner une vision puis un plan de développement régional, puis, le principal outil qu'on créerait pour développer les FIR, on le donnerait à quelqu'un d'autre. Ça n'a pas d'allure au niveau de la cohérence, ça n'a pas d'allure au niveau de la cohésion dans l'action. Nous, on pense que, si on crée les FIR, ce qui n'est pas une mauvaise idée et ce qui permettrait d'associer le privé puis d'avoir des fonds plus importants pour des projets régionaux, il faudrait que la gouvernance des FIR soit faite par la CRE, et, si la CRE décide, selon la conjoncture régionale, de la confier à quelqu'un d'autre, elle pourra le décider, mais elle pourra le superviser.

Donc, en finale, nos quatre principales propositions sont: un, de maintenir les FLI pour les cinq prochaines années, car il s'agit d'un instrument de développement fort efficace qui ne pourrait pas être remplacé par du capital de risque sans une perte importante au niveau local, au niveau des projets structurants puis des petits projets; deuxièmement, si on crée un fonds d'investissement régional qui s'inscrirait dans le prolongement des FLI pour financer des projets entre 50 000 $ et 300 000 $, ce nouveau fonds devrait être géré par la région, par... La décision devrait être donnée à la CRE pour qu'elle décide si elle le gère elle-même ou si elle le fait gérer par l'instance la plus appropriée en région.

On devrait aussi assurer une continuité dans le modèle de développement local en place en confiant aux CLD la gestion de fonds locaux, et on devrait confier la gouvernance du FIR aux CRE.

Voilà, M. le Président, mesdames et messieurs, l'essentiel des propositions qu'on voulait vous faire aujourd'hui.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Larose. 20 minutes exactement. Je vous remercie. M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Audet: Alors, Mme Appleby, M. Larose, qu'on voit pour la seconde fois et qu'on salue à son nouveau titre d'aujourd'hui, et Mme Bachman, écoutez, je pense que je suis très heureux de votre présentation et des contenus de votre présentation parce que d'abord vous y réaffirmez ? je pense que c'est important de le répéter ? que le projet de loi n° 34 reconnaît clairement le rôle des élus et des municipalités dans le développement économique, et Mme Appleby a insisté beaucoup là-dessus. Je pense que c'est très important de le rappeler, c'était le coeur du débat et de l'imputabilité qu'on voulait refléter en raccrochant les CLD vraiment aux MRC et aux municipalités, et donc évidemment les CRE au niveau régional.

Et je retiens également le commentaire qui a été fait à l'égard de la responsabilité au niveau régional, que M. Larose vient d'évoquer également. Je pense qu'il y a quelque chose là qui est certainement... Comme vous dites, au fond les CRE devraient être impliquées davantage dans la promotion notamment ou le développement des FIR sans être nécessairement impliquées directement dans la gestion, j'imagine. Là, je pense qu'il y a certainement des bonnes pistes intéressantes de ce côté-là.

Donc, vos propositions sont très constructives et s'inscrivent justement dans la dynamique de ce que l'on a proposé avant les Fêtes avec la loi n° 34 et de ce qu'on est en train de faire dans les prochains mois. J'invite d'ailleurs de façon très constructive l'opposition à nous appuyer dans ce qu'on veut faire dans les prochains mois pour la mise en place précisément des conférences des élus et également de la démarche qu'implique la loi n° 34, parce que, au-delà des positions partisanes, on a tous, je pense, le même objectif ? du moins, je l'espère ? d'appuyer le développement économique local. Et, comme vous l'avez noté, c'est très important que les municipalités, les instances locales se sentent en quelque sorte mises à contribution, et c'est ce qu'on a essayé de faire avec la loi n° 34, et j'apprécie, je dois le dire, au plus haut niveau vos commentaires à ce sujet.

Pour ce qui a trait à la question que je poserais ? et je pense que c'est très important; je l'ai évoqué, l'autre jour, en hypothèse quand M. Larose est venu ? vous évoquez justement le maintien des FLI pour les cinq prochaines années. Si je comprends bien votre recommandation, c'est qu'au fond vous dites: À compter de 2005, normalement il y a des remboursements de prévus, donc normalement les FLI doivent retourner les 120 millions en quelque sorte qui vont avoir été investis. Est-ce qu'on ne devrait pas avoir un moratoire de cinq ans là-dessus pour permettre donc aux FLI non seulement de compléter leur travail, mais de réinvestir? Je pense que c'est ce que je comprends de votre hypothèse qu'on a évoquée la dernière fois, et donc je pense que c'est quelque chose certainement qu'on pourra regarder.

Est-ce que vous avez pu, au niveau de l'Union des municipalités ou de vos organismes, faire un flux? Je sais qu'au ministère également on est en discussion là-dessus avec les organismes. Est-ce que vous avez pu imaginer combien de capital, de cette façon-là, pourrait être réinvesti sur la période? Évidemment, il y en a qui viennent à échéance, j'imagine qu'il y a des remboursements qui viennent régulièrement à échéance dans les prochaines années. Est-ce que vous avez pu faire l'impact, analyser un peu l'impact de cette proposition-là justement que vous mettez de l'avant, soit M. Larose soit Mme Appleby?

Le Président (M. Paquet): M. Larose.

M. Larose (Claude): On ne connaît pas la situation de l'ensemble des FLI des CLD, mais on peut imaginer que les CLD avaient prévu, parce que c'est l'obligation que la loi leur faisait, rembourser, au cours des cinq années suivantes, l'ensemble des sommes. Donc, les prêts doivent venir à échéance à l'intérieur de cette période-là. Donc, ça veut dire que, sur les cinq prochaines années, la totalité des sommes pourrait être réinvestie. Les sommes qui sont actuellement investies, qui sont prêtées et qui devaient venir à échéance dans les cinq prochaines années, donc ça pourrait tout être réinvesti. Mais on pense, en tout cas si je regarde la situation dans certains CLD que je connais, que ce n'est probablement pas suffisant pour la première et la deuxième année. Il y aurait lieu, je pense, de recapitaliser un peu davantage les FLI pour s'assurer que, dans les deux prochaines années, les CLD aient suffisamment d'argent pour répondre aux nombreuses demandes qu'ils ont. On sait que, depuis un an, il n'y a pas d'argent qui a été ajouté, puis les CLD sont beaucoup en surplace actuellement parce que plusieurs n'ont pas d'argent à prêter actuellement.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre.

n (10 h 20) n

M. Audet: Oui. Je pense que c'est une bonne piste en tout cas qu'on va certainement regarder attentivement.

Le deuxième volet, quand vous parlez évidemment du rôle des CLD et comme pierre angulaire, au fond, du système local d'innovation en fournissant les moyens d'agir, je pense que c'est très important comme instrument d'appui donc aux initiatives locales, et je pense particulièrement aux régions, là où vous savez qu'on a non seulement confirmé donc la mission des CLD, mais on les a rattachées justement à des instances politiques qui vont avoir justement à nous fournir... et avec qui on va travailler, donc, et je pense que c'est en train de se mettre en place de façon, je dois dire, très positive dans toutes les régions du Québec, là, à quelques exceptions près.

Est-ce que, madame... Et là je sais que vous vivez très près de cette situation-là. Quelles sont les... Est-ce que vous avez ajouté des suggestions, comme vous dites, pour appuyer l'entrepreneurship local et l'innovation locale? Parce que je sais que... J'ai déjà eu l'occasion d'avoir une discussion d'ailleurs avec Mme Appleby, qui m'avait invité d'ailleurs déjà à aller là-bas, et malheureusement je n'avais pas pu y aller, dans une vie antérieure, et je sais que vous êtes très préoccupée par cette stimulation de l'initiative locale et de l'entrepreneurship local. Est-ce qu'il y a des programmes, ou de l'aide, ou du support particuliers qu'on pourrait... des mesures qu'on pourrait faire pour essayer de faire en sorte que les CLD soient davantage en appui aux entrepreneurs locaux? On disait, tantôt, des gens qui vont ont précédés, des gens du Saguenay: C'est important que les entrepreneurs locaux se sentent appuyés, qu'on puisse les supporter effectivement dans des mesures. Est-ce que vous avez... Il y a déjà des instruments qui existent, il y a déjà du support. Est-ce qu'il y a d'autres mesures auxquelles vous avez pensé qui pourraient être ajoutées à ça?

Le Président (M. Paquet): Mme Appleby.

Mme Appleby (Nicole): Oui. Nous, si on prend, en région... Moi, je vais prendre... Bon, pour ma région, pour les CLD de la région puis, entre autres, celui-là de notre MRC, je pense que d'abord on a l'infrastructure, on a également les ressources pour venir en aide, pour supporter, mais je ne vous dirais pas que les ressources ont toujours été assez omniprésentes puis assez nombreuses pour répondre aux nombreuses demandes qu'on a en région.

Maintenant, moi, j'ajouterais, quand je parle des FLI par rapport au capital de risque, qui est plutôt... Moi, je considère le capital de développement local et régional. Je pense que, pour une région comme la nôtre ? puis je ne voudrais pas faire de cas d'espèce, mais je n'ai comme pas le choix ? où on a des réels besoins... Puis je connais la philosophie du Parti libéral puis je la partage à bien des égards, mais là je leur dirais, là-dedans: Épargnez-nous puis donnez-nous un «phasing out» au moins de cinq ans. Consolidez les FLI afin qu'on ait les outils pour se préparer.

Même comme municipalité on est en train d'assumer des nouveaux rôles. Bon, comme je l'ai dit tantôt, on n'est plus là juste pour les calvettes, puis les bouts de route, puis l'aqueduc et les égouts, mais il faut mettre en place ? d'ailleurs, vous allez être interpellés, je pense que je vais vous rencontrer la semaine prochaine ? mettre des infrastructures locales pour assurer une économie durable afin qu'on ne revive pas les cas de Chandler puis de Murdochville, mais qu'on soit visionnaires, qu'on planifie pour mettre un développement durable dans chacune de nos municipalités. Mais on ne peut pas le faire seuls, on peut le faire en partenariat avec vous, puis, nous autres, on va travailler également, les MRC, pour le faire avec le privé.

Mais, les CLD, on va consolider nos CLD, mettre des ressources additionnelles et... Bien, ne nous enlevez pas les fonds. Je vais dire comme M. Larose, ajoutez-en un peu de façon temporaire pour donner la chance aux régions, parce que, tu sais... Posons-nous la question: Pourquoi le développement régional est là depuis des années puis notre région, on est encore à ce point-là? Il a manqué quelque chose quelque part. Alors, c'est ensemble qu'il faut essayer de le trouver.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui. Merci. Merci, M. le Président. Et, en réponse peut-être à l'invitation du ministre... Mais avant vous saluer, Mme Appleby, Mme Bachman et M. Larose. Mais, à l'invitation de participer aux CRE, on ne demande pas mieux, M. le ministre, sauf qu'il va falloir nous inviter pour qu'on puisse y aller, hein? Jusqu'à maintenant, on ne l'a pas été. Et des fois, quand on l'est, le député pourra en parler, il est invité puis après ça bien il est obligé de partir parce qu'on lui demande de quitter. Mais ça va être difficile de contribuer, par ailleurs, M. le Président. Ça va être difficile de contribuer parce que, là, il y a... On entend beaucoup parler d'imputabilité, hein, mais c'est de l'imputabilité à géométrie variable, parce que, là, l'imputabilité pour les députés, ça ne marche pas. Il va falloir contribuer, mais sans droit de vote. Alors, on essaiera de conseiller. On ne sera pas décisionnels, on essaiera de contribuer.

M. Audet: C'était le cas avant.

M. Legendre: Non, ce n'était pas le cas avant du tout, M. le ministre. Ce n'était pas le cas avant du tout. J'ai siégé au CRD avec droit de vote.

Alors, maintenant qu'on a fini de se chamailler, chers amis, bienvenue parmi nous. Mme Appleby, vous avez, je pense, distingué, tout à fait à raison d'ailleurs, entre le capital de risque puis le capital de développement local et régional, et vous avez beaucoup insisté sur justement l'importance d'analyser plutôt le capital de développement local et régional, et je pense que vous avez tout à fait raison. Il faut bien le reconnaître, là, ce n'est pas ça, la force du rapport Brunet. Peu importe c'est quoi, les raisons, mais ce n'est pas... En tout cas, vous nous apportez pas mal plus de contribution avec votre présentation aujourd'hui, l'Union des municipalités du Québec, que ce que le rapport Brunet a pu faire.

Et je regardais, dans vos recommandations, votre tout premier texte, et je pense que c'est important de le redire parce que, oui, il faut chercher à améliorer... Mais ce que vous dites aussi, c'est que vous invitez le gouvernement à assurer une certaine continuité ? je ne peux pas vous cacher que le mot me fait plaisir ? une certaine continuité au niveau du modèle de développement afin de ne pas freiner le développement régional et local par une orientation exagérée vers le privé. Il est toujours intéressant de voir dans une même matinée, hein, les deux côtés de la médaille. Vous étiez sûrement dans la salle, tout à l'heure, où on disait: Uniquement du privé. Et là vous nous dites, vous: Faisons attention, ce n'est peut-être pas tout à fait réaliste. Alors, la solution, bien on la cherche tous ensemble. Elle est probablement dans le milieu de tout cela.

Et vous avez mentionné quelque chose, et j'aimerais que vous me parliez un peu plus en détail quand même des FLI, des fonds locaux d'investissement. M. Larose, je pense, a mentionné même que vous souhaitiez qu'ils soient renforcés, améliorés, bonifiés, et même ? vous en parlez beaucoup, des FLI ? même en lien avec la création d'un fonds régional. Alors, j'aimerais ça que vous me parliez... Quelle est l'évaluation que, vous, dans votre organisme, vous faites des FLI, qui, soit dit en passant, sont encore tout jeunes aussi, là? Quand on parle de continuité, on ne parle pas d'une continuité de 20 ans, là, ça a cinq ans.

Le Président (M. Paquet): Mme Appleby.

Mme Appleby (Nicole): Dans le fond, je pense qu'on a quand même prouvé une certaine efficacité des FLI. Et, quand on dit qu'on veut diversifier l'économie dans les régions et dans les plus petites municipalités... Alors, nous, on a déjà une entreprise, par exemple, qui offre 300 emplois, mais, le jour où elle ferme, j'aime autant en avoir 15 de 20 emplois qu'en avoir une autre à 300 qui risque de fermer le lendemain. Alors, qui va soutenir les petites entreprises de 15, 20, 30 employés? C'est beaucoup plus les FLI que les gros fonds de capital de risque. Bon, je ne dis pas qu'on n'en a pas besoin puis que je n'en veux pas. Le partenariat des deux est l'idéal. Mais je pense qu'on ne peut pas juste baser une économie régionale sur la force de ses grandes entreprises. Le jour où elles ferment... Bien, on a vu qu'est-ce que ça a fait dernièrement. Alors, moi, je me dis: J'aime autant en avoir 20 à 15 emplois que d'en avoir juste une à 300. Mais les 15 à 20, bien là c'est bien de valeur, mais j'ai besoin des FLI pour leur donner le coup de pouce pour démarrer. M. Larose.

Le Président (M. Paquet): M. Larose.

M. Larose (Claude): Merci. Je voudrais ajouter que les FLI sont souvent le levier dont a besoin la communauté locale pour démontrer l'importance d'un projet puis convaincre les partenaires privés puis les institutions financières d'embarquer. Moi, j'ai été président, dans les trois premières années, du CLD de Québec, qui est probablement le plus gros CLD au Québec, qui avait un budget de près de 5 millions de dollars, et, dans les trois premières années, on a utilisé au complet le FLI pour démarrer des projets d'entreprise ? pas des projets qui ne sont pas des projets d'entreprise, des projets d'entreprise qui n'auraient jamais vu le jour si on n'avait pas eu le FLI ? parce que les promoteurs n'avaient soit pas suffisamment de fonds pour démarrer avec leurs fonds propres puis aller aux institutions financières et aux fonds de capitaux de risque... Donc, le FLI permettait d'ajouter ce que le promoteur n'avait pas pour permettre au projet de démarrer, et la caution du CLD puis le suivi que le CLD accordait au projet à toutes les semaines puis à tous les mois étaient un atout pour aller chercher de l'argent dans les institutions financières puis dans les fonds, le Fonds de solidarité et les autres fonds.

n (10 h 30) n

Et l'expérience, même si elle est courte, de cinq ans démontre ? et je regarde le cas du CLD de Québec que je connais très bien ? démontre qu'il y a eu très peu de pertes. Le pourcentage de pertes, dans les CLD, sur des fonds de développement, qui sont des fonds qui sont très risqués parce que c'est des démarrages d'entreprises, est très faible, il est inférieur à 20 %, alors qu'on sait que de façon générale, dans ces fonds-là, les pertes s'élèvent plutôt à 30 % et 40 %. Les FLI, je pense, ont fait la démonstration qu'en suivant de près les dossiers, en s'impliquant dans des entreprises qui étaient bien connues, avec des entrepreneurs qui étaient bien connus dans la collectivité puis en étant collés sur l'entreprise, ils ont des taux de perte beaucoup plus faibles que la moyenne des fonds.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Une petite question, M. Larose, et je ne sais pas, Mme Appleby, si vous avez une réponse là-dessus précise. Quand on dit, par exemple, que les FLI servent de levier, aident donc à ce qu'il y ait du privé qui arrive, la proportion entre le levier et la participation du privé, ça donne quoi environ? Est-ce que vous avez une idée là-dessus?

Le Président (M. Paquet): M. Larose.

M. Larose (Claude): Moi, dans les CLD que je connais, la part du FLI dans les projets est une part minime qui dépasse rarement 10 % dans les projets. C'est le levier qui permet d'aller chercher le financement en institution financière puis l'implication d'autres fonds qui, eux, sont des capitaux de risque et qui veulent du rendement.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Et donc il y a de l'investissement privé qui vient compléter.

M. Larose (Claude): Toujours. Il n'y a jamais un projet... C'est des projets d'entreprise que le FLI soutient, et il y a toujours de l'investissement privé, une mise de fonds du promoteur, et il y a toujours des capitaux de risque associés, puis il y a toujours une institution financière. Le FLI est le petit complément, le petit levier qui vient ajouter à ce que le promoteur ne peut pas mettre tout seul comme capital de départ du promoteur.

Le Président (M. Paquet): Mme Appleby.

Mme Appleby (Nicole): Finalement, c'est le coup de pouce qu'il a besoin pour faire lever le projet, puis souvent l'institution financière est en attente de voir: Est-ce qu'il va avoir le montant qu'il a besoin pour démarrer le tout? Puis on a regardé... Les CLD ont défilé ici, cette semaine, puis ils doivent vous l'avoir confirmé, là, tout ce que le FLI...

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Bonjour, Mme Appleby, Mme Bachman et M. Larose. Dans un premier temps, je voudrais mentionner que ce qui est intéressant de votre présentation, c'est que vous représentez l'ensemble des municipalités du Québec, donc l'ensemble des réalités du Québec. Et à cet effet-là on a rencontré, il y a quelques instants, le groupe du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui nous parlait de la dynamique de leur région et de leur possibilité de pouvoir lever des fonds privés notamment parce qu'ils ont des industries importantes dans leur région, ce qui permet à certains citoyens de faire de l'épargne, et de faire de l'épargne en faveur de la région. Mais, comme on le sait, Mme Appleby, parce qu'on est toutes les deux de la même région, la réalité en Gaspésie n'est pas la même, et M. Larose peut le confirmer sûrement dans d'autres régions du Québec. Ayant été au CLD de Québec, vous avez sûrement vu aussi différentes situations économiques dans différentes régions du Québec.

Ma question est donc de savoir: Dans une réalité comme celle de... la nôtre, parce qu'on la connaît bien, en Gaspésie, où plus de 40 % des citoyens ont un revenu qui provient de l'assurance-emploi ou de la sécurité du revenu ? on a un taux de chômage de 20 %, donc la possibilité d'épargne, chez nous, elle est peu probable ? est-ce que... Vos propositions nous demandent de maintenir les FLI. Elles demandent également de créer un fonds additionnel ? je réfère à la page 15 ? un fonds d'investissement pour prendre le relais du FLI. Ce fonds d'investissement, vous le voyez comment? Et est-ce que vous avez pensé à une approche au niveau de la mise en marché? Parce qu'on sait que plusieurs de nos entreprises, dans lesquelles on a investi des fonds importants et qui ont su mettre un projet dans sa forme de réalisation, ont, à un certain moment donné, une problématique au niveau de la mise en marché, l'éloignement, chez nous, étant un fait qu'on a tous à vivre. Est-ce que, dans cette demande d'aide additionnelle, la dimension de support à la mise en marché est aussi considérée? Et est-ce que d'autre part ? un troisième aspect de ma question ? vous voyez que la contribution... ou l'apport gouvernemental dans chacune des régions pourrait revêtir une forme différente, compte tenu des réalités dont je vous ai parlé?

Le Président (M. Paquet): Mme Appleby.

Mme Appleby (Nicole): Oui. Moi, je vais reprendre les propos que m'amenait mon ancien patron dans une autre vie, soit Gérard D. Levesque, qui était l'ardent défenseur des régions, puis il disait toujours: M. Duplessis me disait: Mon petit gars, on ne met pas le même habit sur tout le monde. Bien, dans le fond c'est vrai qu'on ne met pas le même habit sur tout le monde. Donc, qu'on soit à Québec, à Montréal, en Abitibi ou en Gaspésie, c'est très différent. Alors, moi, je n'ai pas de difficulté à voir l'ensemble parce que j'ai travaillé à Québec au niveau du Québec, mais, quand je suis en Gaspésie, je vis ce qui se passe là-bas. Je ne voudrais pas qu'on pense que ça se passe partout pareil, bien qu'il y a quand même des similitudes un peu partout, un peu dans toutes les régions du Québec.

Mais j'ai écouté tantôt avec beaucoup de ferveur ceux qui ont parlé avant nous, qui étaient de l'entreprise privée, puis je trouvais ça très intéressant. Je trouvais ça un peu, comme les jeunes diraient, tripant de voir qu'il y a des régions qui ont des gros investisseurs qui ont de l'argent à mettre dans des fonds. Je me disais: Si on pouvait en dire autant chez nous, on serait en arrière d'eux autres. Ce n'est pas le cas.

Alors, la forme que ça pourrait prendre, je vais vous dire honnêtement, je ne sais pas si nos penseurs à l'UMQ sont allés jusque-là, mais, nous, dans notre région, on n'est pas allés jusque-là. C'est sûr qu'on dit: Ça prend ça comme outil. Quelle est la forme que ça prendra? À l'heure actuelle, on est tous, comme vous et nous, en remue-méninges. On pense, on essaie d'analyser puis de voir comment ça va se passer. Mais, au moment où on parle, on n'a pas toutes les réponses. Mais on est ici pour essayer de vous amener un petit peu plus pour qu'ensemble on les trouve, les réponses. Mais ce qu'on dit: ça, ça manque. On va devoir avoir des fonds qui vont plus loin que le FLI et qui... Bon.

Moi, je pense que même chez nous on doit demander à certaines entreprises d'embarquer. On en a quand même... on a des institutions financières, on a des gens, bon, qui sont capables, qui n'ont pas la même capacité que dans certaines autres régions, mais, à un moment donné, aide-toi puis le ciel t'aidera. Il va falloir que les gens de la Gaspésie aussi, à un moment donné, se prennent en main puis disent: Le gouvernement, il a fait beaucoup. Bien, tu sais, on doit dire, à un moment donné: Qu'est-ce que le gouvernement fait pour moi, mais qu'est-ce que, moi, je peux faire pour ma région? Alors, je pense qu'on va devoir aller jusque-là.

Quand on dit que les CRE vont avoir un rôle à jouer, je pense que ça va être une des réflexions que devront faire les CRE dans les différentes régions du Québec si on ne veut pas que ce soit mur à mur, entre autres chez nous. Alors, c'est toute une réflexion. Même si on est bien alimentés, à l'UMQ, je pense qu'on devra la calquer sur notre réalité régionale, continuer notre réflexion, et vous arriver, et dire: Oui, ça prend ça, ça va certainement prendre l'implication du gouvernement. Sous quelle forme? On vous en parlera.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Mme Appleby, Mme Bachman, M. Larose, bonjour. Oui, le développement local, c'est important parce que c'est un développement de proximité, hein? C'est ça que vous nous faites comprendre, et j'espère que le ministre... Pour s'éclairer davantage sur les CLD et le développement qu'ils ont fait, il serait intéressant qu'il prenne connaissance des bilans.

Moi, je regarde, dans ma région, ce que les CLD ont fait et les entreprises, les petites entreprises, parce qu'on parle de développement de petites entreprises, là. On n'est pas dans la macroentreprise, on est dans la microentreprise, parfois deux employés, trois employés, mais c'est des nouvelles technologies ou différentes choses. C'est important de l'avoir, d'avoir ce fonds-là et même de l'améliorer, et je partage certainement votre avis là-dessus.

D'autre part, j'aurais une question à vous poser. Elle est un peu délicate, parce qu'on va peut-être tenter de nous accuser qu'on est contre les élus. On n'est pas contre les élus du tout. J'essaie de comprendre, de voir comment le FIR pourrait être géré par les CRE alors que le privé va mettre de l'argent. Est-ce que vous avez pensé à une forme de gestion ou à une structure de gestion de ce fonds-là? Parce que vous demandez que les CRE soient impliquées directement, dans les régions, à la gestion du fonds. Donc, c'est deux pour un, deux de l'État, un du privé, et on va confier à l'organisme ou à un comité de gestion de l'organisme ce fonds-là. Alors, je pense que ce serait important d'avoir des clarifications sur la façon que vous voyez la gestion de ce fonds-là.

Le Président (M. Paquet): Oui, M. Larose.

M. Larose (Claude): Alors, la prémisse de base, c'est qu'on dit: S'il y a un fonds qui est institué au niveau régional, ça doit être un outil qui serve à mettre en place la vision régionale qui va être définie par la CRE, parce que, la CRE, c'est son mandat, de définir une vision, de faire un plan de développement de la région, de signer des ententes spécifiques puis dans le fond d'être l'organisme visionnaire de la région. Et le FIR, le fonds d'investissement régional, serait son principal outil spécifique d'intervention. Alors, on pense que c'est intéressant qu'on incite et qu'on mobilise le capital privé dans ce fonds-là, si c'est possible, en région. Je pense que ça va être variable selon les régions. C'est très intéressant. Et la CRE devrait avoir la responsabilité de décider comment le fonds va être géré en région.

Et je suis d'accord avec vous que, si on invite le privé à y investir des fonds, on devrait l'associer à la gestion. Mais je regarde la région de Québec, ce qu'on ferait si on avait ? on en a déjà discuté ? si on avait un fonds comme celui-lui. Probablement qu'on en confierait la gestion à l'organisme qu'on a créé, qui est majoritairement composé de gens d'affaires, pour s'occuper du développement économique dans la région, qui est PÔLE Québec Chaudière-Appalaches, qui définit la stratégie mais qui fait rapport aux élus à chaque année, qui reçoit un budget des élus pour son fonctionnement mais qui fait rapport aux élus. Et donc on s'assure que notre organisme agit dans les orientations qu'on a définies.

n (10 h 40) n

Si on crée un fonds qui n'est pas du tout lié à la CRE puis qui n'a pas de rapport à faire à la CRE, comment on va s'assurer qu'il va agir en cohérence avec les orientations puis les priorités définies par la CRE? C'est ça, la question de base. On n'a pas d'objection à ce qu'au niveau de la gestion du fonds la CRE s'associe des gens du privé pour le gérer, mais il faut que le fonds soit redevable à la CRE au niveau des orientations, au niveau de ses priorités.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: C'est dans le même sens, M. le Président. Je vais essayer de... On va aller encore dans ce sens-là parce que je pense qu'on touche ? puis le ministre semble être d'accord ? on touche un point, là, qui est extrêmement important pour les... puis on s'en va surtout vers la conclusion. On sait que, cet après-midi, ce seront les dernières rencontres.

Si je comprends bien, on s'entend pour que les CLD, ça demeure, les Innovatech, ça demeure. S'il faut les améliorer, qu'on les améliore. Si j'ai bien compris ce que vous avez dit, les fonds des FLI non seulement devraient demeurer, mais pourquoi pas en mettre un petit peu plus? Parce que tout le monde... Et ça, on a eu beaucoup, beaucoup d'interventions ici pour dire que tout le monde est capable de justifier que ça a bien été jusqu'à maintenant et que, si le gouvernement ? parce qu'on a eu beaucoup de représentations de différents milieux, là, l'économie sociale, les hautes technologies, puis il y a quand même des besoins qui sont différents ? que, si jamais le gouvernement crée un autre fonds, contrairement à ce qui est dit dans le rapport Brunet, quand il est dit «une grande prise en main par la communauté d'affaires régionale»... C'est là où je veux insister davantage. Vous autres, vous dites: Si le gouvernement crée un fonds, il faudrait que la définition des besoins... l'administration reste sur le plan de la région. Vous avez créé une CRE, ça pourrait être par elle, mais ce ne serait pas un fonds centralisé, exemple, à Montréal, où on doit aller continuellement se battre.

Je m'entends très bien que votre fédération, c'est... Parce que, vous autres, vous parlez au nom de tout le monde, là, puis en région on a eu beaucoup, beaucoup d'inquiétude manifestée. Et, pour le ministre, là, je pense que vous êtes des éléments majeurs, avec l'Union des municipalités tout à l'heure. Alors, est-ce que ma compréhension est exacte?

Le Président (M. Paquet): Mme Appleby ou M. Larose?

M. Larose (Claude): Tout à fait. L'élément le plus important, là, c'est: si le gouvernement va de l'avant avec la recommandation de créer des fonds au niveau de la région, les FIR, ils doivent être des vrais fonds régionaux puis être redevables aux élus de la région. Puis l'instance qui est créée, là, pour que les élus donnent les orientations en région, c'est la CRE. Alors, ils doivent être redevables à la CRE, et c'est la CRE qui doit décider comment on gère puis comment on associe le privé dans la région pour le gérer.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix, en 1 min 30 s.

M. Bertrand: O.K. On a eu, particulièrement dans la journée d'hier, des gens qui nous ont parlé beaucoup d'économie sociale, et je sais que, vous autres aussi, les deux unions, évidemment vous êtes concernés directement par l'économie sociale. Avez-vous une recommandation? Parce que je ne l'ai pas vue nulle part dans le mémoire, là. Mais avez-vous quelque chose que vous pourriez nous recommander par rapport à l'économie sociale? Parce qu'on sait jusqu'à quel point, particulièrement peut-être dans les plus grands centres, là, mais même dans des petits centres... Moi, je suis dans Charlevoix, puis on fait face à ça aussi. Alors, est-ce que vous avez des recommandations à faire?

Le Président (M. Paquet): M. Larose.

M. Larose (Claude): Oui. Je pense que l'approche qui a été prise jusqu'à maintenant de confier un fonds aux CLD, dans toutes les régions du Québec, pour soutenir le développement des entreprises d'économie sociale, c'est une excellente approche parce que les entreprises d'économie sociale, c'est d'abord très local, ça naît des milieux, c'est enraciné dans les communautés, et je pense qu'il faut clairement voir que les entreprises d'économie sociale, ce sont d'abord des entreprises. Il faut sortir des préjugés à l'effet que les entreprises d'économie sociale, c'est des groupes communautaires qui ne visent pas à créer des emplois puis une certaine rentabilité. Il faut que ce soient des entreprises qui visent une rentabilité mais qui ont aussi des objectifs sociaux, des objectifs dans la communauté. Mais ce sont d'abord des entreprises.

Et il y a beaucoup de champs d'activité qui s'ouvrent actuellement pour ce type d'entreprises là, dans toutes les communautés, et c'est important qu'on les supporte. Je pense à tout le champ du recyclage et de la récupération. Avec la loi gouvernementale qui oblige les municipalités à doubler puis à tripler les objectifs de recyclage et de récupération d'ici 2008, il s'ouvre un champ très intéressant pour le secteur de l'économie sociale, là, et il faut soutenir la création et le démarrage de ces entreprises-là. À Québec, c'est ce qu'on a commencé, et je pense que dans toutes les régions il faut le faire.

M. Bertrand: Est-ce que votre fédération est prête à en faire une recommandation?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix, je regrette...

M. Larose (Claude): Moi, je pense que le rapport Brunet ne parlait pas de ce volet-là, mais je pense... C'est pour ça qu'on n'en parle pas. Mais, moi, je prenais pour acquis... Et je pense qu'on doit continuer à soutenir les fonds d'économie sociale. Le gouvernement doit doter les fonds d'économie sociale dans les CLD encore parce que c'est un champ d'action extrêmement important qui permet de créer des emplois à très faible coût. Et je pense que c'est un investissement pour le gouvernement parce que, quand on regarde les retombées fiscales, le gouvernement récupère une grande partie de sa mise dans l'économie sociale.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le ministre du Développement économique et régional, en une minute.

M. Audet: Alors, écoutez, il me reste à peine le temps de vous remercier de votre présentation. Peut-être quelques brefs commentaires en conclusion et peut-être une petite question.

D'abord, je voulais juste dire encore à mes collègues que, le bilan des CLD, on l'a fait précisément au moment de la loi n° 34, et c'est ce qui nous a conduits d'ailleurs à reconduire le mandat des CLD. Il y avait une défaillance qu'on a notée, c'est qu'il n'y avait pas de rattachement clair à une autorité politique, et c'était très clair. Alors, c'est pour ça qu'on a décidé de les rattacher à l'autorité politique locale que sont les MRC et que sont les municipalités. Donc, ça, c'était très clair, il n'y avait pas... ce n'était pas évident. Donc, la responsabilité, maintenant elle est claire.

Deuxièmement, au niveau des CRE, on avait également cette... Le bilan a été fait au niveau des CRD. C'est un organisme qui est fort utile, de concertation, mais là aussi on a voulu donner une responsabilité politique plus grande aux élus locaux. Et je retiens votre suggestion de faire des liens avec les organismes financiers qui seront mis en place à ce moment-là.

Peut-être ma dernière, dernière question, très brève. Donc, merci de votre présentation. Et je veux signaler au député, en passant, de Blainville que, dans sa région, le député avait le droit de vote, mais le président de la commission va vous dire que, lui, à Laval, il n'avait pas le droit de vote. Donc, ce n'est pas une pratique qui était généralisée dans les CRD au Québec.

Dernier point, une dernière question. On a parlé tantôt des Innovatech. Est-ce que vous pouvez brièvement nous dire comment vous évaluez l'Innovatech Régions ressources dans votre communauté, Mme Appleby? Est-ce que c'est quelque chose... Elles ont été très utiles pour vous?

Le Président (M. Paquet): Mme Appleby.

Mme Appleby (Nicole): Oui, je pense qu'Innovatech... Je vous dirais que je ne me suis pas tellement penchée sur ce dossier-là, mais je sais qu'il a été important dans des régions ressources. Tous les outils que vous pouvez mettre en place pour nous aider sont fort utiles parce que, je vous dirais, contrairement aux grands centres, on est éloignés des fonds généraux, on est éloignés, vous l'avez vu dans certains dossiers et on l'a vu dans le dossier Gaspésia. Je ne ramènerai pas ça ici, mais quand tu es en région, tu es en région. Alors, les moindres outils que vous pouvez mettre à notre disposition et surtout dans les régions ressources, je pense que ça a été apprécié. On n'a peut-être pas exploité à sa juste valeur... à ce jour, mais je pense que ça devrait être maintenu.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, Mme Appleby, M. Larose, Mme Bachman, merci beaucoup pour votre participation à nos travaux. Je suspends les travaux très brièvement et j'inviterais les représentants de la Fédération québécoise des municipalités de s'approcher, s'il vous plaît, de la table.

(Suspension de la séance à 10 h 48)

 

(Reprise à 10 h 50)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant la Fédération québécoise des municipalités. Donc, nous vous souhaitons la bienvenue à la commission. Je vous présente M. Michel Belzil, qui est président de la Fédération québécoise des municipalités. Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Vous disposez d'une période maximale de 20 minutes. Étant donné qu'on est un petit peu contraints dans le temps, s'il est possible de le faire entre 15 et 20 minutes, on apprécierait, mais on veut bien vous entendre, et le temps restant sera alloué pour un échange avec les membres de la commission. Alors, M. Belzil, vous avez la parole.

Fédération québécoise
des municipalités (FQM)

M. Belzil (Michel): Merci, M. le Président. Alors, je suis accompagné par M. Jean Maurice Latulippe, directeur général à la Fédération québécoise des municipalités depuis quelques semaines, et de Mme Marie-Joëlle Brassard, conseillère en recherche et politique.

Alors, une petite précision suite à la période de questions que j'ai entendue tantôt. La Fédération québécoise des municipalités représente 915 municipalités sur le territoire du Québec, alors sur l'ensemble du grand territoire du Québec, et représente également la presque totalité des MRC au Québec, c'est-à-dire 86 MRC sur ce qu'il reste de MRC, quand on exclut les villes-MRC. Alors, pour dire comment nous sommes pénétrés dans toutes les régions du Québec, tout à fait.

Alors, je vous remercie de nous donner l'occasion, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, de nous adresser à vous ce matin. C'est une consultation qui est d'autant plus judicieuse que le contexte actuel de réorganisation des institutions régionales, avec la loi n° 34, avec le projet de loi n° 34 présenté par votre gouvernement, interpelle au premier chef la FQM.

Notre mémoire suggère des pistes visant à assurer une cohérence entre les actions entreprises par le gouvernement, dans le cadre de sa réforme des institutions locales et régionales, et les propositions émises dans le rapport du groupe de travail, groupe Brunet. Notre intérêt portera principalement sur la proposition du groupe de travail consistant à régionaliser les fonds de capital de risque par la création de 17 fonds d'initiatives régionales, appelés FIR, au Québec.

Aux vues de la FQM, la proposition du groupe de travail consistant à créer un fonds d'initiatives régionales permettant des investissements de l'ordre de 300 000 $ est intéressante dans la mesure où l'offre serait complémentaire aux fonds locaux actuels. Le FIR pourrait être une réponse à des besoins de financement au niveau de la région administrative et pour des projets de plus grande envergure. Cependant, la FQM a des réserves par rapport à ce que suggère le rapport du groupe de travail. Nous sommes persuadés que la gestion du capital de risque local ne doit pas être régionalisée, puisque cela contribuerait à éloigner du citoyen un service de proximité qui s'appuie sur la présence de réseaux locaux et sur des expertises et des savoir-faire développés par ces mêmes acteurs locaux au fil des années. En effet, les fonds de capital de risque qui sont gérés localement, soit les fonds locaux d'investissement, les FLI, et les sociétés locales d'investissement et de développement de l'emploi, les SOLIDE, répondent au principe de subsidiarité.

Les fonds locaux permettent de répondre aux besoins variés en fonction des réalités de chaque milieu tout en mobilisant les réseaux d'acteurs locaux concernés. Ils font appel au partenariat et mobilisent les acteurs du développement social et économique qui apprennent ensemble à gérer du capital de développement. Les acteurs locaux assument ainsi leurs responsabilités face à leur destinée. Ainsi donc cette gouvernance locale, sur le plan de la gestion du capital de développement, est un acte d'apprentissage collectif porteur d'une culture entrepreneuriale en évolution. Ce savoir-faire en matière de gestion du capital de risque est un gage à l'effet que l'entrepreneuriat local s'apprend dans l'action sur le terrain. Ces initiatives ne doivent pas être freinées si on veut que les acteurs du développement se responsabilisent et qu'ils partagent ces acquis auprès d'autres acteurs de leur communauté locale. En ce sens, les réseaux locaux sont fondés et mobilisés autour d'enjeux concrets dont le capital de risque fait partie. C'est là un patrimoine à valoriser et à reconnaître.

Vous l'aurez compris, départir les acteurs locaux du pouvoir de gérer localement leurs leviers financiers de capital de risque, soit la SOLIDE et le FLI, s'oppose à une prise en charge locale promue par votre gouvernement. En effet, votre gouvernement, avec le projet de loi n° 34, a réalisé une avancée pour que les élus prennent la responsabilité de leur développement. Le transfert de la gestion du développement économique local aux MRC ainsi que la création des conférences régionales des élus sont des changements reçus par la FQM comme une amorce pour mettre en place les conditions à une réelle décentralisation. C'est pourquoi la FQM veut s'assurer d'une cohérence dans le contexte de la réforme actuelle des institutions régionales, quelle soit de nature sociopolitique ou économique.

L'objectif des FLI comme des CLD consiste à favoriser le développement économique et social et à créer des emplois durables. Or, contrairement à ce que laisse entendre le rapport, nous ne percevons pas d'incompatibilité entre l'objectif de rendement des fonds de capital de risque et la création d'emplois, qui s'inscrit dans une perspective de développement économique local et régional. Il a déjà été démontré que les FLI présentent un rendement économique et social structurant sur le développement local. Par ailleurs, en ce qui a trait aux SOLIDE, il est inexact de croire, comme le suggère le rapport, qu'elles constituent du capital de risque public. Les 87 SOLIDE au Québec découlent d'un partenariat entre le monde municipal, le gouvernement, le monde des affaires, le monde des travailleurs et des organismes de développement économique local. Elles proposent aux entreprises des solutions de financement complémentaires, et ce, sans entrer en concurrence avec le secteur privé.

Sur le plan du rendement économique, les FLI occupent une position stratégique, puisque l'effet levier des investissements réalisés est d'importance. Chaque dollar investi par le FLI génère environ 10 fois son investissement. Le nombre d'emplois créés ou maintenus annuellement par le FLI atteint un total de 7 040 emplois au Québec par année. Par ailleurs, le coût par emploi créé ou maintenu est relativement bas, soit 3 700 $ par emploi pour les FLI.

Les sociétés locales d'investissement dans le développement de l'emploi, les SOLIDE, jouent également un rôle stratégique sur le plan du capital de développement local. En font foi les retombées locales majeures des 87 SOLIDE, soit un financement en capital de risque atteignant près de 47 millions de dollars, 14 298 emplois créés, des investissements moyens par emploi de l'ordre de 3 290 $, principalement dans des entreprises en démarrage et en expansion.

Sur le plan social, les SOLIDE sont un levier qui, tout comme les FLI, permet de développer une culture fondée sur le goût d'entreprendre, en plus de constituer un réseau et de renforcer la capacité d'action locale. Par conséquent, dans une optique de cohérence, la FQM propose ainsi une intégration locale des FLI et des SOLIDE pour en alléger les structures et améliorer l'accès local de la gestion du capital de risque. Concrètement, la FQM propose que cette intégration se traduise dans l'entente de gestion conclue entre les MRC et leurs CLD et que la responsabilité de la SOLIDE et du FLI soit octroyée aux CLD.

Par ailleurs, pour assurer une réelle harmonisation de la gestion des fonds de capital de risque et garantir l'arrimage entre le financement et les interventions de tous les acteurs locaux, la FQM verrait d'un bon oeil que chaque MRC nomme un représentant de la SOLIDE au sein du conseil d'administration du CLD. Cette façon de faire est d'ailleurs acquise chez les acteurs locaux. Nous insistons cependant sur la nécessité de rendre complémentaire l'offre de capital de risque entre les différents paliers de gouvernance, soit les échelles de la région administrative et de la MRC qui répondent à des réalités différentes. Selon nous, le projet de création d'un fonds régional de capital de risque peut être porteur dans la mesure où la démarche est complémentaire avec les fonds locaux déjà existants, soit les FLI et les SOLIDE.

En accord avec la position du gouvernement qui a manifesté sa volonté de soutenir le renforcement des régions, la FQM croit que le mode de financement du fonds régional de capital de risque devrait tenir compte de la précarité et de la situation d'ensemble de certaines régions. Un mode de financement fondé sur l'apport et le poids économique de chaque région, comme le propose le rapport du groupe de travail, contribuerait à renforcer la précarité économique d'une région et à enrichir celles qui sont mieux nanties. Selon nous, le mode de financement suggéré dans le rapport, c'est-à-dire du deux pour un, doit être revu pour tenir compte d'indicatifs incluant la capacité économique de la région. De plus, la FQM considère que la gestion d'un fonds régional qui serait sous la responsabilité du monde des affaires porterait atteinte aux efforts de cohésion régionale que les élus mettent en place actuellement. En effet, à l'aube où le gouvernement lance un signal clair aux élus régionaux pour qu'ils assument leur rôle de leaders dans le développement régional avec la création des conférences régionales des élus, à l'aube aussi où le gouvernement transfère les responsabilités du développement local aux élus des MRC, il serait tout à fait navrant que nos leviers financiers de développement soient gérés sans tenir compte de la diversité des acteurs concernés par le développement économique local.

n (11 heures) n

En ce sens, la FQM croit qu'un fonds régional doit être géré par des élus et des représentants du monde socioéconomique mandatés par leur CRE. L'objectif est d'assurer une intégration des acteurs régionaux, qui doivent constituer un réseau fort, intégré sur la base d'enjeux territoriaux. Ces représentants élus et du monde socioéconomique seraient également mandatés par les membres de la Conférence régionale des élus.

Alors, je me permets, je vais reprendre les recommandations, là, d'une façon plus précise.

D'abord, que le gouvernement mette en place, comme il le propose dans le rapport Brunet, les FIR au palier de la région administrative, et ce, pour du capital de risque atteignant des montants plus élevés que ceux financés par les SOLIDE et les FLI, soit au-delà de 100 000 $, de sorte qu'il complète l'offre locale;

Que le gouvernement reconnaisse la nécessité de maintenir les fonds actuels de capital de risque sur la base de leur proximité, de leur accessibilité et de l'expertise qu'ils représentent;

Qu'il y ait intégration locale des FLI et des SOLIDE pour alléger les structures et améliorer l'accès local de la gestion du capital de risque. D'ailleurs, 83 % des SOLIDE sont gérés actuellement par les CLD;

Que cette intégration se traduise dans l'entente de gestion conclue entre les MRC et leurs CLD;

Que la responsabilité de la SOLIDE-FLI soit octroyée au CLD;

Que le remboursement des fonds locaux d'investissement prévu à partir de 2006 soit reporté en 2011 pour permettre aux acteurs locaux de réinvestir les revenus en nouveaux prêts aux petites entreprises;

Que le gouvernement lève le moratoire imposé aux FLI en juin 2003 et qu'il poursuive ses visées;

Que la contribution publique dans le mode de financement des fonds d'initiatives régionales, les FIR, soit fondée sur des critères tenant compte de la précarité économique de la région et des objectifs de création d'emplois, la proposition du rapport Brunet contribuant à intensifier la pauvreté des régions plus pauvres;

Que le gouvernement élargisse la représentation au sein des FIR en y ajoutant des élus et des représentants socioéconomiques plutôt que de les limiter aux seuls gens d'affaires;

Et que cette représentation soit décidée au sein des conférences régionales des élus.

Alors, rapidement, M. le Président, c'est les propositions que nous soumettons à la commission ce matin.

Le Président (M. Paquin): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Audet: Alors, merci beaucoup, M. Belzil et vos collaborateurs, donc M. Poirier et M. Latulippe, donc... Mme Poirier, pardon, M. Latulippe. Alors, écoutez, je suis très heureux de lire votre présentation.

J'ai remarqué que votre approche est, je dois dire, imprégnée de la connaissance du terrain. C'est ce qui me frappe. C'est que vos recommandations sont très concrètes, peut-être les choses les plus concrètes qu'on a eues, les propositions les plus concrètes qu'on a eues jusqu'à présent, parce qu'on voit que vous vivez sur le terrain. Et c'est très apprécié, je pense, que d'avoir justement des propositions de cette nature-là, même si certaines d'entre elles évidemment vont devoir être discutées. Mais je pense que, dans l'ensemble, il y a des pistes fort intéressantes là-dedans.

Ce qui me frappe, évidemment c'est que vous partagez ? c'était très important ? l'objectif évidemment visé par la loi n° 34 bien sûr de donner aux élus locaux donc la responsabilité sur les CLD et également qu'on confie aux élus régionaux évidemment la responsabilité du développement et la coordination de développement régional. Je pense que c'est très important.

Il y a peut-être un commentaire que je ferais sur votre présentation puis peut-être une question qui s'y ajouterait. Vous notez évidemment la création de 17 fonds d'initiatives régionales proposée dans le rapport Brunet. En réalité, il n'y a pas de limite aux fonds, il pourrait y avoir plus qu'un fonds par région. C'est très clair, c'est qu'on veut... Je pense que là-dedans il n'y a pas de plafonnement de fonds, comme il n'y a pas de plafonnement de montants. Le montant, on a parlé beaucoup, jusqu'à présent, du 3 millions, mais en fait c'est le minimum, le 3 millions. Ça peut être 10 millions, 20 millions, dépendamment de la capacité de lever les fonds. Je ne dis pas ça pour défendre, là, la proposition comme telle, mais juste pour refléter quand même l'esprit qui était dans ce rapport-là.

Vous notez cependant, et je pense que c'est très important, que ces fonds-là n'auront pas... on n'a pas la même capacité de lever ces fonds-là dans certaines régions par rapport à d'autres. Donc, là-dessus vous dites: Il faut être conscient de ça. Je pense que c'est votre point que vous soulevez à la fin, et c'est le sens de ma question.

Quand vous dites: Effectivement, il faudrait éviter d'intensifier la pauvreté des régions plus pauvres, là, comment est-ce que vous voyez... quelles propositions... ou comment est-ce qu'on peut contrer cette disposition qui ferait en sorte que, par exemple, évidemment les régions plus riches vont peut-être avoir la capacité de le faire, mais les régions plus pauvres n'auront pas peut-être cette capacité-là? Est-ce que vous avez des suggestions pour justement contrer ce piège en quelque sorte qui est véritablement une bonne, je pense, qui est une bonne question, une préoccupation très légitime?

Le Président (M. Paquin): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Bien, d'abord je suis content que vous souleviez le point, et je pense que vous pouvez être relativement en accord avec ce questionnement, hein, que ce n'est pas évident pour l'ensemble des régions que de pouvoir lever les mêmes montants d'argent d'une à l'autre. Et, vous l'avez dit, M. le ministre, tantôt, ce n'est pas limité à 17. Alors, les régions très riches, très prospères pourraient se monter un fonds d'interventions régionales à 3 millions, 10 millions, 20 millions, alors que d'autres auront de la difficulté à aller chercher le million du secteur privé. Or, c'est ça qu'est le sens de notre présentation. Mais on pense qu'il pourrait y avoir un modèle basé sur certains indicateurs, indicateurs régionaux, je ne sais pas, moi, les taux de chômage, dépendance économique, des capacités économiques. Alors, il y aurait un modèle à développer. On n'a pas réfléchi précisément là-dessus.

Mais est-ce qu'on doit exiger la même chose pour chacune des régions au Québec? Alors, c'est un peu ça, sans aller plus loin, là. On n'est pas allés dans les détails, mais, nous, ce qu'on dit, je le répète: Il y aura inévitablement un déséquilibre ou un accroissement du fossé si on se limite aux seuls critères comme c'est là. Alors, définissons donc d'autres critères ou une autre approche pour donner une chance aux régions ? comment je dirais ça? je n'aime pas utiliser le nom, mais ? moins nanties, sous différentes formes, mais donner une chance à toutes les régions du Québec.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

M. Audet: Oui. Une deuxième question. Évidemment, vous parlez de l'importance d'une meilleure coordination sinon d'une intégration évidemment avec des fonds locaux et des SOLIDE. Je pense que c'est une question qui préoccupe beaucoup. D'ailleurs, le Fonds de solidarité a eu, au départ, beaucoup de réserves sur justement le développement des FLI parce qu'il y voyait une compétition. On travaille maintenant de plus en plus à essayer justement de bâtir une meilleure coordination et même intégration pour éviter justement cette situation-là.

Est-ce que déjà, avec... Comme vous dites, il y en a un certain nombre de cas où c'est réglé. Les ententes qui sont en train d'être créées et qu'on espère évidemment multiplier, est-ce que ça a permis de bâtir justement une complémentarité? Puis est-ce que ça peut être vraiment complémentaire, les FLI et les SOLIDE peuvent travailler en complémentarité et travaillent en complémentarité dans les ententes auxquelles vous faisiez allusion?

Le Président (M. Paquin): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Oui. C'est certain que les ententes, oui, sont, d'une façon informelle, dans les CLD qui gèrent les deux fonds. Souvent, ça passe par le biais du même analyste qui analyse les dossiers. Mais ce qu'on vise, nous, c'est d'aller encore plus loin et de le faire d'une façon formelle, de le faire d'une façon contractuelle. Et ça peut aller même jusqu'à dire, là: Écoutez, normalement, SOLIDE, FLI, les deux investissent dans un projet, selon certains critères. Écoutez, nous, la FQM, on est partenaires de la FTQ dans les SOLIDE depuis déjà au-delà de 12 ans, et la FQM, on représente les MRC finalement qui ont la responsabilité des CLD depuis le projet de loi n° 34. Alors, moi, quand je vous dis que c'est la volonté de fusionner ça ensemble, oui, c'est un fait. Je pense que, étant donné maintenant qu'il y a un porte-parole en région, c'est beaucoup plus facile ? qui sont les MRC ? et on voudrait le faire d'une façon formelle, une entente formelle qui garantirait, là... qui garantirait, autrement dit, la non-compétition entre les fonds même si chacun peut garder ses objectifs et ses critères, alors un esprit de cohérence dans tout ça.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le ministre.

M. Audet: Oui. 10 secondes?

Le Président (M. Paquin): Allez-y.

M. Audet: Oui. Alors, j'apprécie beaucoup vos commentaires et j'en prends bonne note, et on va essayer de trouver des pistes de solution à partir de cette hypothèse-là. Je pense qu'on va... Veux-tu intervenir tout de suite ou au prochain bloc?

Le Président (M. Paquin): M. le député d'Iberville, rapidement.

n (11 h 10) n

M. Rioux: Merci. Donc, je reviens un petit peu dans la continuité de votre recommandation 7 sur la distribution des fonds disponibles, dans les régions, qui ne sont pas proportionnels. Mais ce qu'on entend dans les différents groupes qui sont venus jusqu'ici, c'est qu'il ne semble pas y avoir un problème de capitaux qui sont disponibles en région, mais c'est un problème d'accessibilité, que les gens ne peuvent pas les avoir, qu'on nous dit. Une hypothèque, exemple, en région, les gens vont demander davantage. On trouve, les projets, qu'ils sont plus risqués. Et il y a un groupe qui est venu ce matin et qui nous a parlé que, pour eux, ils avaient... Au Saguenay, ils nous disaient qu'il y avait une rétention des capitaux d'à peu près 20 % et que les capitaux partaient des régions et retournaient davantage dans les grands centres.

Est-ce que vous pensez que ça pourrait être une piste de solution s'il y avait un encadrement au niveau des différents fonds de travailleurs que l'on a, et même aller plus loin, les REER, où est-ce qu'on obligerait finalement... qu'il y aurait un pourcentage de ces fonds-là qui doivent rester disponibles en région? Et aussi d'avoir des critères d'attribution qui soient pour des projets d'amorçage ou que ce soit pour le secteur secondaire, est-ce que ça ne pourrait pas être un moyen d'avoir des capitaux disponibles et accessibles en région?

Le Président (M. Paquin): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Si je saisis bien la question, oui, c'est certain que la problématique des capitaux qui fuient les régions, hein, on la constate. Et je l'ai constaté, moi, personnellement, chez nous puis je suis dans les Cantons-de-l'Est. Je ne suis pas dans une région ressource, où je vis. Et ce n'est pas évident, même dans les petits milieux, que nos institutions financières assument des prêts, même des prêts si minimes soient-ils. Les institutions financières sont de plus en plus... Les décisions sont centralisées, que ce soit à Sherbrooke ? je parle pour les Cantons-de-l'Est, que je connais ? ou à Montréal. Alors, il y a beaucoup de difficultés d'avoir des capitaux en région.

Moi, je me rappelle, il y a cinq ans, je faisais partie d'un comité de travail qui se réunissait une fois par mois, et on réfléchissait sur toutes sortes de questions et de problématiques liées au développement économique, et on avait invité les gérants des trois institutions financières dans la petite ville de Coaticook pour savoir: Comment se fait-il que nos entrepreneurs étaient obligés, à bien des égards, d'aller faire des emprunts, contracter des emprunts dans des institutions dans la grande capitale régionale chez nous? Je ne veux pas aller trop loin là-dessus. On m'informe aussi que, dans les CLD, il y a certains CLD qui, comme politique d'investissement, subventionnent ou garantissent du fonds de roulement que nos institutions financières ne font plus dans nos régions aujourd'hui. Alors, pourquoi plaide-t-on, vous pensez, là... Peut-être que je ne réponds pas exactement à votre question, là, mais pourquoi plaide-t-on sur le maintien, dans nos milieux locaux, de nos petits fonds à capital de risque, hein? Moi, je pense que ça prendrait peut-être une sensibilisation très forte au domaine privé dans nos petits milieux. Alors, nos entrepreneurs, là, c'est fort compliqué, chez nous, d'obtenir un prêt, ne serait-ce que de 150 000 $, pour une expansion d'entreprise. Ils sont obligés d'aller vers des gens qu'ils ne connaissent souvent pas.

Alors, je ne veux pas être alarmiste, mais, quand on dit que, d'obliger les fonds à demeurer en région, on pourrait peut-être par un autre moyen informer nos entreprises privées: S'il vous plaît, investissez donc aussi en région, même dans des petits investissements pour nos entreprises, nos petites entreprises.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. Belzil. On va passer la parole à l'opposition, au député de Johnson.

M. Boucher: Merci, M. le Président. Alors, M. Belzil, Mme Brassard et M. Latulippe, bienvenue. Je suis d'autant plus heureux de vous accueillir que M. Belzil est un homme extrêmement impliqué dans sa municipalité, dans sa MRC, dans la région et dans tout le Québec et un homme dont on est fier de côtoyer... régulièrement en région.

Vous venez de faire la démonstration claire d'une chose, là. Vous avez ajouté un élément assez intéressant en parlant du fait que les institutions privées ne financent même plus les fonds de roulement, puis ça, on l'a observé, puis ce n'est pas juste en Estrie, hein? Un peu partout, c'est rendu comme ça. Alors, la dictature du capital de rendement à tout prix, là, hein, on va repasser. Il faut envisager d'autres choses que les conclusions du rapport Brunet, de toute évidence, là. On a besoin... Et ce n'est pas incompatible, le capital de risque, et le développement économique, et la création d'emplois durables, puis vous l'avez faite, la démonstration, je crois.

Il y a une chose qui... Je reprends une remarque de notre ministre, là, quand il a dit que les fonds, là, de 3 millions, c'était un minimum, que ça pouvait... Imaginez-vous si son ministre des Finances avait entendu ça, lui, hein? Comment il pourrait budgéter ça, lui, hein? Peut-être qu'une région, ça va être 100 millions. Donc, le gouvernement va en mettre les deux tiers. Comment ça va être budgété, ça? C'est vraiment incroyable, ce cas-là. J'espère que notre ministre des Finances... ils vont se parler, les deux, là, parce que c'est assez sérieux. Et ça me démontre que ce n'est pas sérieux, justement, l'idée de dire que ça peut varier comme ça, selon le cas, tu sais. Ce n'est pas vraiment sérieux.

Moi, il y a une question que je me pose, c'est que vous avez fait un rapport, et puis le rapport Brunet en faisait rapport, c'est que ça a été fait à 30 000 pieds d'altitude, ce rapport-là, hein, et puis M. Brunet lui-même d'ailleurs l'a confirmé, et, vous, vous arrivez, là, sur le terrain. Mais il y a une chose dont vous n'avez pas parlé, qui me préoccupe beaucoup. Dans notre région, on a une société Innovatech sud du Québec dont on est très fiers, qui a un capital de 100 millions potentiels, puis on veut remplacer ça par 3 millions variables, hein, variables. Pourquoi vous n'en avez pas parlé? Puis est-ce que vous êtes en accord avec le fait qu'on doive maintenir la société Innovatech sud du Québec, compte tenu qu'elle intervient beaucoup dans l'amorçage, là où le capital privé ne veut pas aller, de toute évidence?

M. Belzil (Michel): Bien, écoutez, on s'est concentrés, nous, sur les SOLIDE et les FLI. Bien sûr, les sociétés Innovatech, à ma connaissance, la proposition du rapport Brunet, c'est de les regrouper au sein d'une Innovatech. C'est ma compréhension. On me corrige si... Je ne suis pas allé dans... Alors, en tout cas, si c'est le sens, là, du rapport Brunet, nous, on se dit que de prendre les quatre Innovatech, les scinder dans une... Je ne suis pas en mesure, moi, d'évaluer, l'efficacité de la réorganisation.

Mais ce qu'on se dit, c'est que le mandat qui était dans chacune de ces Innovatech-là qui portaient fruit, c'était un outil de développement important et intéressant, et je le sais pour être en Estrie. Alors, je me dis, il faut absolument conserver ces mandats-là, conserver les objectifs, conserver la hauteur du financement, etc. Alors, pour nous, sans s'être penchés comme organisation nationale, c'est certain que tout ce qui peut soutenir le développement dans nos milieux, les Innovatech aussi, c'est important d'en conserver le mandat et l'investissement.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Oui. Il y a juste un petit problème avec la fusion de tout ça dans un seul, c'est que ça éloigne les Innovatech, notamment la nôtre, de la région et de la proximité des décideurs et des investisseurs.

M. Belzil (Michel): C'est un peu comme ce que je dis pour les SOLIDE et les FLI si on veut les transférer.

M. Boucher: C'est ça.

M. Belzil (Michel): Mais je n'ai pas évalué cette question-là.

M. Boucher: Je vous remercie.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. M.  Belzil, monsieur... pas Poirier, M. Latulippe et madame, dont je n'ai pas pris en note le nom malheureusement, bienvenue ici, à cette commission.

Oui, le point 7... la recommandation 7 de votre mémoire est très pertinente, et même je pense qu'il faut absolument que des mesures modulées, compte tenu des réalités régionales, soient mises en application.

Moi, je suis de la Gaspésie. Donc, vous connaissez la réalité. On peut bien nous parler d'un taux de chômage qui baisse, de façon statistique, de 18 %, 19 %, mais en réalité, si on prend tous ceux qui ne sont pas inscrits nulle part, on atteint des sommets, là, de 25 %, 30 % en période d'inactivité touristique ou autre.

Alors, moi, je fais mienne votre recommandation, et ce que je souhaite ? dans le fond, c'est un commentaire plus qu'une question, tout ce qui a été mentionné ? c'est que le gouvernement reconnaisse la spécificité des MRC. On parle des régions, mais on nous disait, hier, du côté de la Côte-Nord, qu'il y a deux pôles: il y a Sept-Îles, Baie-Comeau; les autres municipalités, c'est des petites municipalités. Puis, le développement, il ne faut pas penser que ça va se faire facilement, puis qu'ils vont lever des fonds, puis qu'ils vont aller chercher des investissements. Alors, il y a peut-être une façon de regarder...

Est-ce que, par territoires de MRC, si on parle des FLI, par exemple, hein, il n'y a pas lieu de... Tout en ayant une vision régionale, comment on peut augmenter l'investissement? Parce que ce que vous disiez tout à l'heure, c'est vrai. Des fois, pour un 1 000 $, les institutions financières ne veulent même pas y aller, parce qu'elles regardent le projet puis elles disent: Ça va créer une job, ou encore, tu sais... Ce n'est pas assez important. Elles n'ont pas de temps à mettre là-dessus. Alors, qui va faire le travail? Si tu as deux emplois, qui va faire le travail? Qui va les aider, ces entreprises-là, à démarrer, si ce n'est pas l'instance locale de proximité que sont les CLD?

n (11 h 20) n

Alors, moi, c'est plus un commentaire. Si vous avez des choses à rajouter là-dessus, sur des suggestions pour amener le gouvernement à retenir les propositions qui ont été faites... Parce que, quand on parle des Innovatech, il y a des intervenants qui sont venus ici puis qui sont prêts à racheter des actifs, puis on sait qu'est-ce qui va se passer au niveau des actifs: ils vont prendre les meilleurs puis, le reste, ils vont le rayer de leurs livres, ça va finir là, ça va se terminer, et les projets vont tomber dans le néant. Alors, c'est là-dessus que je pense que le gouvernement doit faire une réflexion et tenir compte des réalités régionales, comme le mentionnait à juste titre M. le député de Johnson.

Le survol, là, à 30 000 pieds, ce n'est pas au-dessus des régions qu'ils ont pu voir exactement la réalité. S'ils étaient allés sur le terrain, ils auraient compris c'était quoi. Alors, à mon avis à moi, le rapport Brunet escamote, évacue totalement la réalité régionale avec une compréhension qui est faite à partir de paramètres qui ne tiennent aucunement compte des régions ressources, des réalités régionales.

Le Président (M. Paquin): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Bien, écoutez, moi, là-dessus, là... Nous, dans notre rapport, on plaide pour la cohérence, hein? Alors, la réalité locale, c'est par les SOLIDE, les FLI ou d'autres outils de développement.

Quand je dis, moi... quand je fais la suggestion au gouvernement sur les FIR, comme vous l'avez dit, de les moduler, bien, écoutez, j'en suis convaincu, que ce n'est pas la même chose en Montérégie, ou en Gaspésie, ou ailleurs. Alors, c'est une recommandation que j'espère qui va être considérée très sérieusement. D'ailleurs, quand on analyse le financement des CLD, on se rend compte que les CLD ne sont pas tous financés à la même hauteur, ils sont financés selon des indicateurs économiques, ou de difficulté, ou de chômage. Alors, c'est un peu la même chose qu'on veut dire par région, hein: qu'on transpose ce qui se passe dans les CLD dans les régions. Et c'est la recommandation à la proposition qu'on fait, nous, à la commission.

Le Président (M. Paquin): Merci. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Oui. Comment vous voyez, M. Belzil, l'intervention de l'État pour inciter le secteur des institutions financières privées à mieux collaborer dans le financement des régions?

M. Belzil (Michel): C'est une grande question, hein? Je vous ai prêté le flanc à cette question-là tantôt.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Belzil (Michel): Mais, O.K., je conçois que c'est fort difficile. Je n'ai pas la réponse, moi, là-dessus ce matin, là, mais, moi, j'ai voulu faire état d'une situation, mais ça m'apparaît compliqué. Mais j'imagine que, en y pensant bien, il y a des possibilités. Je ne sais pas de quelle façon, mais je ne peux pas vous répondre, là, clairement ce matin là-dessus.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Oui. Y voyez-vous, par exemple, au niveau de certains incitatifs fiscaux qui pourraient être accordés aux institutions qui, par exemple, s'impliquent davantage en région... Est-ce que vous croyez que ce seraient des éléments qui pourraient à la rigueur donner un aval au genre de financement régional?

M. Belzil (Michel): Je pense que ce n'est pas évident, là, que d'en rajouter sur des profits énormes, hein, par des incitatifs fiscaux... Mais je ne le sais pas. Peut-être quand on parle d'incitatifs fiscaux ailleurs, là...

Moi, il y a la Loi sur les banques. Je ne sais pas, je ne suis pas un spécialiste de la fiscalité, je ne pense pas que le gouvernement va être intéressé à s'en aller jouer dans les lois. Je ne sais pas par quel truchement, par quel moyen, mais, moi, j'ai constaté quelque chose, c'est constaté dans toutes les régions du Québec, il va falloir qu'il y ait une prise de conscience, puis je pense que les banquiers ou... l'entreprise privée est capable de se conscientiser là-dessus. Mais je n'ai pas de moyen, moi, là, ce matin, à vous suggérer.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, est-ce que vous avez une autre question?

M. Audet: Oui. Bien, écoutez, très brièvement, on a évoqué tantôt la question des fonds d'investissement régionaux, effectivement. Je veux citer, dans le rapport, qu'on dit clairement que, ces fonds, les montants pourraient toutefois être plus élevés ? c'est ça qui est mentionné ? puisque, là, ces FIR pourraient atteindre une plus grande taille dans certaines régions et plus d'un FIR pourrait être créé par région. Donc, je reprends les termes du mémoire.

Et, pour répondre à la question du député de Johnson, oui, il y a un matching de prévu, si on peut employer cette expression-là. Donc, il y aurait un prêt qui serait fait. Pour chaque dollar qui serait souscrit, il y aurait 2 $ du gouvernement. C'est ce qui est marqué. Donc, tant mieux! Si effectivement il y a plus de fonds souscrits, il y aura plus d'appui du gouvernement. C'est ça qui est l'idée de base de la proposition. Je veux juste faire cette mise au point pour compléter l'information qui a été fournie.

Et, deuxièmement, si vous me permettez 10 secondes, on mentionne également que le fonds pourrait s'inscrire dans l'action, justement, dans une perspective de concertation régionale acquise grâce aux efforts de concertation que les projets ACCORD ont établis, donc en favorisant... Donc, ça fait un lien avec les ACCORD, donc avec les conférences régionales des élus. Donc, le lien, il est établi, il y a déjà une piste là-dedans, et je pense que ce qui a été mentionné par vous et par vos prédécesseurs de l'Union des municipalités, je pense qu'il n'y a pas d'incompatibilité avec... contrairement à ce qui a été mentionné.

La question qui a été posée tantôt par le député de Johnson par contre est... pardon, par le député de Gaspé: Est-ce qu'on peut imaginer que la gestion de ce fonds-là est privée alors qu'effectivement c'est le public qui serait le coordonnateur?, bien je pense qu'il y a un lien à établir probablement sur la supervision générale régionale. Mais la gestion? Évidemment, étant donné que ce sont des fonds à risque privés, je pense que la question est pertinente. Je ne sais pas si vous avez des commentaires là-dessus, mais je pense que là-dessus je reprendrais un peu la préoccupation qui a été exprimée tantôt. Je ne sais pas si, vous, vous y avez pensé. On l'a posée à vos prédécesseurs. Comment est-ce qu'on fait le lien entre justement ces deux aspects-là?

M. Belzil (Michel): Bien, nous, nos recommandations sont...

Le Président (M. Paquin): Rapidement, s'il vous plaît. Rapidement, s'il vous plaît, il reste peu de temps pour nous.

M. Belzil (Michel): Nos recommandations sont claires là-dessus: nous plaidons pour que le gouvernement agisse en toute cohérence. Le projet de loi n° 34, création des conférences régionales des élus, on leur donne le mandat du développement et particulièrement du développement économique. Alors, les fonds d'investissement régionaux, ce sont des outils de développement. Alors, on se dit: Il faut absolument qu'il y ait un lien entre la Conférence régionale des élus et cet outil-là, et, nous, on plaide pour que ce soient les conférences régionales des élus qui décident de la représentation au sein de ce groupe qui va gérer le capital de risque, et on pense que oui, l'entreprise privée doit être là, mais aussi les élus et d'autres représentants.

Le Président (M. Paquin): Merci beaucoup. M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Merci. Justement, en parlant de cohérence, le groupe juste avant vous, l'Union des municipalités, faisait la recommandation, s'il y avait création d'un FIR, qu'il soit très, très régional et non centralisé et que ce soit la responsabilité de la Conférence régionale des élus d'en établir un petit peu le fonctionnement, pour rester justement cohérent. Est-ce que vous êtes prêts à faire vôtre... Parce que, je lis votre recommandation 8, elle n'est pas tout à fait dans le... Elle est dans le même sens, mais pas dite de la même façon. Est-ce que vous seriez prêts à modifier votre recommandation 8 et qu'elle soit à peu près dans le même sens pour justement garder cette cohérence? Vous dites, vous autres: Que le gouvernement élargisse la représentation au sein des FIR, mais ce n'est pas encore établi. Alors, on peut se faire des recommandations en y ajoutant des élus et des représentants socioéconomiques plutôt que de le limiter aux seuls gens d'affaires. Eux autres y vont beaucoup plus pointu, plus précis en disant: Nous, ce qu'on voudrait, c'est que ce soit à la Conférence régionale des élus qu'il appartienne de... Bon. Alors, est-ce que vous... C'est juste d'aller un peu plus précis que la vôtre. C'est tout.

M. Belzil (Michel): Écoutez, en 9, là, regardez en 9, il y a une petite ligne qui dit: Que cette représentation soit décidée au sein des conférences régionales des élus. Alors, ça veut dire que ça met donc la place... La responsabilité, c'est à la Conférence des élus de décider.

M. Bertrand: Donc, on s'entend, pour M. le ministre, que...

M. Belzil (Michel): Oui.

M. Bertrand: ...les deux, fédération et union, ont la même recommandation.

M. Belzil (Michel): Oui.

M. Bertrand: J'ai toujours pensé, moi, que c'est important. Plus il y a unanimité sur certaines choses, mieux c'est.

M. Belzil (Michel): Et nous aussi.

n (11 h 30) n

M. Bertrand: Je nous invite, tout le monde, quand on parle des régions, à être extrêmement prudents parce que, bon, il y a des régions ressources, il y a des régions non ressources. Vous y avez fait allusion. Même dans les régions dites riches, non ressources, il y a des MRC très pauvres. L'exemple de la région de Québec en est un flagrant. Moi, dans mon comté, j'ai deux des MRC, hein, dans les 20 quelques plus pauvres au Québec et je voudrais qu'on prenne plutôt l'habitude de parler de MRC. Quand il va se faire quelque chose, il va falloir qu'on s'assure que nos MRC dites les plus pauvres soient vraiment protégées. Et, on en parle depuis quelques jours, c'est celles où il y a le plus de difficultés d'aller chercher de l'argent, c'est celles où il y a le plus de difficultés d'aller chercher des gens qui veulent aussi s'impliquer parce que les gens ont à travailler très, très, très fort, et, si, nous, comme gouvernement, si, vous, comme organisme majeur, on ne s'organise pas pour les protéger, à mon sens elles vont continuer à être, dans votre structure, les dernières, et puis je pense qu'on a tous cette responsabilité-là. Alors, sachant très bien que vous êtes en partie responsables de la délégation aux élus, parce qu'on en a déjà parlé, vous et moi, vous avez travaillé très, très fort là-dessus, je vous invite à exercer aussi ce rôle-là pour s'assurer que le respect se fait.

J'ai aussi... Vous m'avez vu et entendu tantôt quand j'ai dit: Si je comprends bien ? j'ai dit ça à l'union, je le dis à vous autres aussi ? si je comprends bien, vous voulez qu'on maintienne les FLI dans les CLD; si c'est possible, même d'augmenter leurs montants parce que le rôle qu'ils ont est majeur. Si je comprends bien, les Innovatech, même si vous n'y avez pas touché tellement, vous êtes prêts à dire: Les Innovatech au Québec ? parce qu'il y en a huit ou neuf, si ma mémoire est bonne, et non quatre ? mais les Innovatech au Québec, quitte à modifier un petit peu dans les structures s'il le faut, mais elles remplissent un rôle. Nous, comme fédération, on veut les protéger. S'il y a création d'un FIR, bon, on s'entend sur ça, que ce soient les CRE qui en soient les majeurs.

L'économie sociale n'a pas fait partie du rapport. On s'entend, elle n'est pas là. Mais il y a des gens qui sont venus nous voir hier et qui nous ont... en tout cas quant à moi qui m'ont sensibilisé sur le fait que, comme gouvernement, on se doit d'en tenir compte. Alors, je vous demande la même question que j'ai demandée à l'Union des municipalités tout à l'heure, même si vous n'en avez pas parlé, même si ce n'était pas dans le rapport: Êtes-vous prêts à recommander au gouvernement, comme on l'a fait tantôt avec l'Union des municipalités, que le domaine de l'économie sociale, dans les mesures qu'ils sont en train de préparer, soit tenu en compte?

Le Président (M. Paquin): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Écoutez, moi, avec mon expérience sur le terrain, l'économie sociale fait partie maintenant d'un des mandats des CLD, hein, et c'est compris par l'ensemble des intervenants. Alors, moi, je suis tout à fait favorable à ce que l'économie sociale ? la vraie économie sociale, hein, il faut bien s'entendre, là, création d'une entreprise et pérennité par la suite, là ? fasse partie tout à fait du canevas pour ? comment je dirais ça? ? pour être un des objets, là, de tous ces fonds de capital de risque. Tout à fait.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Donc, même si ce n'est pas dans votre mémoire, vous recommandez au gouvernement ? recommandation ferme ? d'en tenir compte.

Une dernière question. Après, le député de Johnson aura une dernière question, lui aussi, pour le groupe. On fait, depuis quelques jours, mention beaucoup du rôle du député. Dans certains endroits, dans certains CLD, exemple, il a le droit de vote; dans d'autres, il ne l'a pas. Au niveau des conférences régionales des élus, à moins que je me trompe, mais il n'aura pas le droit de vote.

Vous qui avez travaillé très fort pour en venir là, vous qui êtes favorables aux élus, vous n'êtes pas prêts à faire une recommandation pour que les députés aient un rôle à peu près ou tout au moins très respectable dans ces instances-là?

Le Président (M. Paquin): M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Moi, je ne me compromettrai pas, ce matin, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Belzil (Michel): ... ? bonjour ? mais ça fait des années qu'on discute du rôle des députés. Anciennement, sur les CRT, sur les CRE, les députés ont été, par périodes, très présents, par d'autres périodes, moins présents. C'est les attachés politiques qui se présentaient. En tout cas, ça dépend peut-être de chacune des régions, là.

Moi, ma position là-dessus, dans toute la mise en place des conférences régionales des élus, c'est que c'était à chacun des groupes de faire sa propre réflexion et de prendre ses décisions. Au niveau des députés, voulaient-ils ou veulent-ils voter? Veulent-ils faire partie de la conférence? Alors, il y a eu des discussions, j'imagine, parce que, au départ, le projet, là, incluait les ministres régionaux aussi à l'intérieur des CRE, l'ensemble de la députation, et finalement il y a eu des choix qui ont été faits par les députations... par les députés, puis ils ne se retrouvent pas là.

Le Président (M. Paquin): Merci, monsieur.

M. Boucher: Très rapidement...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Johnson, oui, en une minute, s'il vous plaît.

M. Boucher: ...très, très rapidement, il y a un moratoire sur les FLI depuis un an. Est-ce que ça a eu des impacts négatifs dans notre région ou dans d'autres régions au Québec?

M. Belzil (Michel): Oh! je n'ai pas fait cette analyse. Marie-Joëlle, as-tu...

Mme Brassard (Marie-Joëlle): Bien, en fait il faut surtout considérer les impacts positifs de l'intervention des FLI au moment où ils ont opéré. On ne peut pas avoir l'impact de ce qui n'est pas là.

M. Boucher: Oui, mais ça a dû être évalué, ça?

Le Président (M. Paquin): M. le député de Johnson.

Mme Brassard (Marie-Joëlle): Allons-y par la positive: ce qui a été évalué, c'est l'impact positif, et, dans le mémoire, c'est clair.

M. Belzil (Michel): Non, non, mais on s'entend...

M. Boucher: Les conséquences.

M. Bertrand: L'union est venue dire le contraire.

M. Belzil (Michel): ...on s'entend que, nous, on plaide pour l'importance de ces outils de développement. Alors, le moratoire, étant donné qu'il n'y a pas eu de possibilité d'encourager les entreprises, sûrement que ça a eu des influences. Mais je n'ai pas fait l'analyse, je vais vous dire franchement.

Le Président (M. Paquin): Ça va?

Une voix: ...

Le Président (M. Paquin): Très rapidement, M. le ministre. 10, 15 secondes maximum.

M. Audet: Alors, juste pour remercier Mme Brassard ? je m'excuse, tantôt je n'avais pas votre nom exactement ? M. Belzil, M. Latulippe. Merci beaucoup.

Un tout petit mot peut-être pour consoler nos collègues: effectivement, tout le monde est invité à participer aux CRE et à la création des CRE. Il y a eu un grand débat effectivement sur ce sujet-là, et la question, c'est que, quand on croit à l'imputabilité et à la responsabilité locales... On a voulu laisser aux élus locaux le soin de prendre des décisions et de ne pas leur faire des chaperons qu'étaient les ministres ou les députés de régions. C'est ça, le coeur du...

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le ministre. Merci beaucoup.

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): Oui. Excusez, mais...

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): Donc, M. Belzil, Mme Brassard, M. Latulippe, merci de votre intervention. On va suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 36)

 

(Reprise à 11 h 40)

Le Président (M. Paquin): Donc, nous recevons maintenant la Société de diversification économique de l'Outaouais. M. Patrick Duguay, si vous voulez bien nous présenter la personne qui vous accompagne. Et vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire.

Société de diversification économique
de l'Outaouais (SDEO)

M. Duguay (Patrick): Parfait. Merci infiniment. Merci et bonjour à tous les membres de la commission. Alors, je vous présente le directeur général de la Société de diversification économique de l'Outaouais, Laurent Lampron, qui va faire la deuxième partie de la présentation de notre mémoire, c'est-à-dire les questionnements et les recommandations quant au rapport Brunet. Et vous allez me permettre, dans un premier temps, donc de rappeler à votre mémoire quels sont les... ou quelle est l'organisation qu'on représente, la Société de diversification économique de l'Outaouais, dont je suis le président depuis 2000.

Je veux souligner d'entrée de jeu qu'en Outaouais on a une approche consensuelle et que le mémoire qu'on vous présente aujourd'hui a été partagé à la fois par l'ensemble des membres de notre conseil d'administration, qui comprend les quatre préfets des MRC rurales de l'Outaouais, ainsi que les représentants de la ville de Gatineau, a été réalisé en collaboration avec la Chambre de commerce de Gatineau ainsi qu'avec la Corporation de développement économique de la ville de Gatineau et la Coopérative de développement régionale Outaouais-Laurentides. Donc, tout à l'heure il y a eu des questions sur l'économie sociale. La SDEO intervient dans toutes les formes de l'activité économique outaouaise.

Devant les crises économiques qu'on a connues dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, l'Outaouais a réfléchi, autour d'une commission présidée par Marcel Beaudry, sur la dépendance de la région de l'Outaouais à l'économie ontarienne de la capitale fédérale. Alors, dans ce rapport, on a identifié des avenues de sortie des crises qui nous affectaient d'une année à l'autre. Avec la réduction de la taille de la fonction publique, on a identifié une intervention nécessaire de diversification économique et industrielle de l'Outaouais. À partir de ce consensus régional autour de la commission présidée par M. Beaudry, en 1993, la SDEO a été officiellement créée et a reçu un premier mandat quinquennal qui couvrait la période de 1997 à 2002.

À partir de 2001, on a enrichi les outils de la SDEO d'un fonds de mesures d'appui pour les MRC rurales donc qui nous permettait d'intervenir sur l'ensemble du territoire de l'Outaouais et plus simplement sur le territoire de la ville de Gatineau, autrefois la Communauté urbaine de l'Outaouais.

Alors, depuis 1997, la SDEO s'est positionnée comme un acteur au niveau du capital de développement qu'elle offre aux entrepreneurs de la région de l'Outaouais. Alors donc, la SDEO est un fonds régional d'investissement reconnu et apprécié par l'ensemble de la communauté outaouaise.

À l'automne 2002, suite à une grande campagne d'appui organisée par la Chambre de commerce de Gatineau, 91 entreprises privées et 87 organisations du milieu ont adopté des résolutions d'appui à l'intervention de la SDEO. Nous sommes en demande de renouvellement de mandat auprès du gouvernement du Québec depuis maintenant trois ans. Nos interventions portent principalement sur les secteurs prioritaires de développement de l'économie de l'Outaouais, soit la haute technologie, l'agroalimentaire, la foresterie, le tourisme, la culture, et que ce soit dans les différentes phases de l'amorçage, du prédémarrage au démarrage, de la consolidation et surtout de l'expansion des entreprises de l'Outaouais... l'objectif étant que nos entreprises disposent d'un capital suffisant pour lancer leurs opérations et avoir des retombées économiques en termes de création d'emplois et de diversification de l'activité économique chez nous.

La SDEO, c'est un partenariat particulier entre le gouvernement du Québec, les élus de la région de l'Outaouais et la société civile chez nous. Alors, le conseil d'administration est composé de quatre représentants nommés par le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche, trois administrateurs par la ville de Gatineau, donc représentant le conseil municipal de Gatineau, et quatre par le Conseil régional de développement, donc des organisations du milieu, ainsi qu'un représentant pour chacune des MRC rurales de l'Outaouais.

Ce partenariat-là n'est pas simplement destiné à voir aux interventions de la SDEO, mais également à les financer, puisque l'ensemble des sommes dévolues à l'opération de la SDEO est pris en charge par le milieu régional et municipal. Donc, pour le gouvernement du Québec, c'est une opération à coût zéro en termes de budget de fonctionnement, c'est la région qui assume ces frais-là. Alors, notre budget de fonctionnement est de l'ordre de 750 000 $ par année dont 600 000 $ viennent des instances municipales et régionales, le reste étant des revenus autogénérés par les engagements dans les entreprises.

Chez nous, la SDEO se présente déjà comme un forum décisionnel et d'échange entre le milieu rural et le milieu urbain, et ce, depuis plusieurs années. Donc, dans les prochaines semaines, on aura à revoir la composition du conseil d'administration de la SDEO pour faciliter l'arrimage avec la Conférence régionale des élus, mais notre configuration est déjà de cet ordre-là depuis longtemps.

La SDEO, c'est une expérience qui a permis de renverser la vapeur d'une coupure entre le milieu rural et le milieu urbain, alors une ville à très forte densité de population: 80 % de la population de l'Outaouais réside dans la ville de Gatineau. Alors, de quelle façon est-ce que la ville de Gatineau allait être un leader pour le développement de l'ensemble de la région? Alors, on est aussi une région où on compte parmi les MRC les plus défavorisées du Québec dans un territoire global qui est particulièrement favorisé. Donc, comment on allait travailler cette dualité-là? Bien, la SDEO est un instrument privilégié, consensuel, en Outaouais.

Au niveau des résultats, très rapidement je vous indique... Vous l'avez dans le mémoire. Au cours de notre premier mandat, donc de 1997, si on prend nos périodes transitoires, jusqu'en 2003, on a réalisé 246 projets en engageant des investissements de 22,5 millions, donc les montants dont on disposait, mais pour des projets qui au total se situaient à 135,6 millions de dollars et qui ont eu un impact direct sur la création et le maintien d'emplois, de 3 980 emplois, chez nous, dans les nouveaux secteurs qu'on avait identifiés comme étant porteurs pour le développement de l'économie outaouaise.

Alors, voilà à grands traits donc nos interventions autour de trois programmes: un fonds de mesures d'appui, donc, et des contributions non remboursables qui servent à préparer le terrain pour l'arrivée d'investissements au niveau du développement économique dans la ville de Gatineau; un fonds des MRC qui nous permet de faire sensiblement la même opération dans les MRC rurales de l'Outaouais; et un fonds d'investissement qui nous permet des prises de capitaux à l'intérieur des entreprises dans les différentes phases de leur développement.

Et ce qui est à retenir et ce qui est l'objet de nos commentaires sur le rapport Brunet, c'est qu'on travaille dans une perspective de développement. Alors, on travaille dans cette perspective de développement, on se définit comme étant un fonds de développement évoluant dans un univers de capitaux de risque qui sont généralement concentrés dans les grands centres, hein, où le capital accessible... sauf celui qui peut correspondre au fonds de solidarité régional de la FTQ. On doit donc jouer ce rôle d'attirer l'attention des investisseurs sur des projets porteurs dans notre région. Alors, c'est un défi particulier qu'on a expérimenté souvent, ce qui fait que toutes ou presque toutes nos interventions se font en partenariat avec des capitaux privés qui interviennent généralement dans une deuxième ronde ou une troisième ronde de financement, après qu'on ait été là pour accompagner l'émergence des nouveaux projets d'investissement.

Alors, je passe la parole, si vous me permettez, M. le Président, à Laurent Lampron, qui va vous résumer les grandes lignes de nos recommandations pour bonifier le rapport Brunet.

Le Président (M. Paquet): M. Lampron.

n (11 h 50) n

M. Lampron (Laurent): Alors, merci, M. le Président. Merci, M. Duguay. M. le ministre, M. le député de Papineau, Mmes, MM. les députés, alors nous avons souhaité orienter notre mémoire sur le dernier chapitre du rapport Brunet, c'est-à-dire le chapitre qui traite du développement régional, bien sûr en tenant compte des recommandations en ce qui concerne la Société générale de financement, Investissement Québec et les quatre Innovatech. Mais délibérément nous avons choisi d'orienter notre mémoire principalement sur la proposition du rapport Brunet concernant le Fonds d'interventions régionales.

Alors, on rappelle les grands points de la proposition du rapport Brunet. Bien sûr, nous avons lu, et entendu, et vu, au cours des derniers jours, des dernières semaines, quelques commentaires et aussi quelques réactions autour de cette table concernant la proposition du FIR. Nous essaierons d'en tenir compte, là, au fur et à mesure du cheminement, notamment la possibilité que chacun des FIR dispose d'une enveloppe de 3 millions et davantage.

Alors, une préoccupation pour nous bien sûr en Outaouais, c'est le respect des particularités régionales, et il nous apparaissait, au moment où nous lisions le rapport Brunet, que la solution proposée par un FIR était une solution mur à mur appliquée à la grandeur du Québec. L'expérience de la Société de diversification économique de l'Outaouais démontre au contraire qu'il faut s'adapter et savoir adapter nos outils à nos réalités et particularités régionales, ce que la SDEO a fait depuis plusieurs années. Et dans ce sens-là la proposition d'un FIR accrédité par Investissement Québec nous apparaît comme une solution mur à mur qui exige réflexion.

Un autre élément qui exige réflexion est bien sûr la limite, par investissement, de l'ordre de 300 000 $. Nous souhaitons bien sûr que nos recommandations soient perçues comme étant extrêmement constructives, dans le sens où l'expérience que nous avons accumulée depuis sept ans nous démontre qu'il faut aller au-delà de certains plafonds proposés par le rapport, notamment en ce qui concerne la limite d'investissement par projet.

La SDEO avait, au début de son existence, un plafond de l'ordre de 500 000 $, et l'expérience nous a démontré que c'était insuffisant. Par une décision de son conseil d'administration au cours de l'année 2000-2001, le plafond a été revu jusqu'à 1 million de dollars, et encore là nous vivons parfois les conséquences de ce qu'on appelle la dilution, c'est-à-dire lorsqu'il y a des réinvestissements qui se font. Même si nous avons investi jusqu'à des sommes aussi importantes que 1 million, il nous arrive d'être dilués dans nos positions d'investissement dans les entreprises. Alors, nous établissons donc le constat que le plafond proposé pour les FIR, à 300 000 $ par entreprise, ne correspond pas à notre expérience en Outaouais, non seulement dans le secteur des technologies, mais aussi dans les secteurs traditionnels. Ce plafond limite les capacités d'appuyer... et de réinvestir dans les entreprises qui désirent consolider leurs opérations ou accroître leur production pour cibler de nouveaux marchés.

La SDEO est un centre de décision régional développé en Outaouais et adapté à la réalité outaouaise. Dans ce sens-là, nous sommes en collaboration constante avec nos partenaires, qu'ils soient en amont ou en aval de l'intervention, et j'entends bien sûr les centres locaux de développement par leurs FLI, le Fonds régional de solidarité et plusieurs autres partenaires, dont Innovatech. Alors, nous avons bien sûr collaboré au développement de l'accord sur le territoire de l'Outaouais.

Je vois le président, là, qui me montre deux minutes, alors on va accélérer un petit peu. Nous désirons bien sûr partager notre expérience et dans ce sens-là communiquer le message que les intervenants sur le terrain doivent partager le risque. L'expérience de la SDEO le démontre, en ce sens-là.

On souhaite bien sûr que l'investissement en région reflète la double réalité de ce milieu, c'est-à-dire une réalité axée ou orientée vers un volet qui est guidé par le rendement et guidé par des critères de rentabilité. Un second volet qui s'inscrit bien sûr dans la logique du développement économique régional à moyen et long terme, qui, elle, est caractérisée par un niveau de risque supérieur et un rendement financier moindre à court terme, c'est la réalité du développement régional. Plusieurs l'ont dit autour de cette table.

Alors, je vais me rendre directement, à ce moment-là, à la page sur les recommandations. La SDEO, dans un esprit extrêmement constructif, propose bien sûr la mise sur pied de fonds de développement régionaux, ces fonds devant reconnaître la double réalité d'investissement en région: le rendement est une réalité, c'est un objectif auquel on pourrait s'associer le secteur privé et dans lequel nous croyons ? et là on s'inscrit par rapport, là, au rapport Brunet et à l'orientation qui y est proposée ? dans lequel le gouvernement du Québec devra s'engager à partager les profits, et les risques, et les pertes proportionnellement à son niveau de participation par rapport à celle du secteur privé, la deuxième étant bien sûr le développement économique régional. C'est un volet qui présente un niveau de risque élevé, qui soulève peu d'intérêt pour le secteur privé. Et on peut vous parler de l'expérience des sociétés régionales d'investissement avec lesquelles nous avons collaboré depuis notre existence, les SRI ? S-R-I ? qui avaient vu le jour, comme vous le savez, à la fin des années quatre-vingt.

Nous proposons également d'utiliser les structures existantes de financement régional adaptées à chacune des particularités de leurs régions pour l'opérationalisation des fonds d'interventions régionales, ce fonctionnement permettant la synergie recherchée entre les différents partenaires impliqués, comme le démontre l'expérience de la SDEO, dont le budget de fonctionnement, et nous le répétons, est assumé entièrement par ses partenaires municipaux.

Que les fonds soient dotés d'une enveloppe minimale annuelle de 5 millions de dollars. Nous croyons que, pour être viable, à 3 millions ce n'est pas suffisant. Le fonds devrait être doté d'au minimum une enveloppe annuelle de l'ordre de 5 millions de dollars à laquelle on pourrait allouer une partie de l'enveloppe à la diversification économique régionale ? c'est le deuxième volet dont je vous parlais tantôt ? et une autre partie qui serait allouée au Fonds d'interventions régionales ? c'est le premier volet dont je parlais tantôt ? et que la capacité d'investissement soit de l'ordre de jusqu'à 1 million de dollars et non pas de 300 000 $, tel que le propose le rapport. Voilà.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Lampron, M. Duguay. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Alors, merci beaucoup, M. Duguay, M. Lampron. Très heureux de vous rencontrer à nouveau, puisqu'on s'est salués hier.

Écoutez, si j'essaie d'aller à l'essentiel de votre présentation, au fond vous êtes d'avis que le caractère mixte, là, privé-public des fonds proposés par le rapport Brunet constitue une piste à explorer. Vous dites cependant que le niveau du fonds est trop faible à 3 millions et 300 000 $ également. Donc, vous proposez de le monter à la fois respectivement à 5 millions et 500 000 $ puis vous êtes prêts à travailler à l'élaboration d'un fonds régional. Et là, sur ce plan-là, vous voyez même des possibilités de collaboration où il y aura à la fois une possibilité de tenir compte bien sûr du rendement, mais également... Et c'est intéressant de voir qu'effectivement il faut tenir compte de là où le risque est élevé, effectivement, où on pourrait y associer notamment la Société de développement ou des fonds davantage... Des fonds de diversification économique donc seraient associés.

Comment pouvez-vous... Ça, c'est le sens de ma question. Comment voyez-vous cet arrimage s'établir? C'est-à-dire que déjà vous intervenez comme actionnaires, au fond. Quand vous intervenez, vous intervenez au capital déjà. Est-ce que vous voyez un inconvénient au fait qu'on baisse, par exemple... qu'un maximum de 50 % de capital de risque public soit mis dans les fonds dans lesquels vous investissez? Est-ce que, pour vous autres, c'est un... Parce que, étant entendu que le fonds de la SDEO est à la fois municipal, bien sûr, mais également d'autres sources, mais essentiellement public, est-ce que vous y voyez, là-dessus, des... J'apprécierais que vous nous décriviez un petit peu comment vous voyez le rôle de jouer la société de diversification en regard de la création de ces fonds et comment on pourrait faire, justement, comment on pourrait faire ce mariage ou... cette complémentarité pourrait s'exercer.

Le Président (M. Paquet): M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): Bon, en fait on va se partager la réponse parce que la question est importante, effectivement. Je pense que vous avez bien repris les éléments de notre mémoire, mais peut-être pas celui qui l'encadre au complet, c'est-à-dire la nécessité d'une complémentarité de présence en région de fonds de développement, en plus des fonds de capitaux de risque.

Le titre du rapport, hein, était sur la contribution ou la participation de l'État québécois au capital de risque en région, et malheureusement je pense qu'on a regardé cet aspect-là de la question sur les capitaux de risque sans le prendre dans sa globalité. C'est-à-dire, lorsqu'on accompagne le développement d'une région en difficulté ou, dans notre cas, d'une région où les indicateurs de santé économique sont plutôt positifs... Mais on a vu, dans les périodes difficiles avec la fonction publique fédérale, que notre dépendance nous mettait dans une position de danger incroyable, donc la nécessité de la présence des capitaux de développement qui nous permettent de préparer des investissements où ensuite on aura besoin d'un apport de capital de risque plus traditionnel, impliquant le privé, et qui seront légitimés d'avoir une préoccupation de rendement.

Alors, sur l'opérationalisation, je vous laisse avec M. Lampron.

Le Président (M. Paquet): M. Lampron.

n (12 heures) n

M. Lampron (Laurent): À votre question, M. le ministre, j'y vois deux niveaux de réponse, là. C'est-à-dire, en tant que fonds nous-mêmes, la Société de diversification économique, jusqu'à présent, était dotée par des fonds du gouvernement du Québec en ce qui concerne son budget d'investissement. Bien sûr ? et on le dit dans notre mémoire ? nous sommes disposés à être un projet pilote, dans un certain sens, vis-à-vis la mise en place d'une expérience d'un fonds d'interventions régionales et à collaborer à ce projet pilote. Donc, en tant que fonds nous-mêmes, c'est une proposition qui est faite.

Mais également il faut regarder ? et c'est le deuxième niveau de la réponse ? en tant que partenaire au montage financier d'une entreprise. Quand la question nous est posée de la manière que vous venez de le faire, M. le ministre, je regarde le montage financier d'une entreprise et je me pose la question: Quelle est l'intervention du secteur privé dans l'ensemble du montage financier du projet ? appelons-le un hôtel ? dans le secteur touristique? Quelle est la participation du secteur privé? Quelle est la participation du secteur public? Et je peux vous affirmer par expérience que la participation du secteur public dans l'ensemble du montage financier est relativement petite, que nous sommes souvent la pierre angulaire qui fait en sorte que le projet démarre. Sans nous, sans notre pierre angulaire, le projet n'aurait pas vu le jour. Et je pourrais vous citer des cas que nous avons vécus en Outaouais, là, de projets très concrets qui ont pu voir le jour parce que nous, en tant que Société de diversification économique, avons pris le premier risque, avec des montants parfois petits.

Bien sûr, notre montant à nous, petit, il est 100 % gouvernement du Québec, mais, quand je regarde l'ensemble du montage financier pour l'entreprise, notre proportion est à peu près de 5 %, 10 %, 20 %, et je partage votre point de vue qu'idéalement, quand on tient compte du passif et de l'équité investie dans l'entreprise, de la dette et de l'équité qui est mise par des sociétés comme la nôtre ou encore par des investisseurs privés, idéalement on ne devrait pas dépasser 50 % de fonds publics dans un projet. Mais là on parle de l'ensemble du montage financier du projet. Que la contribution de la SDEO, qui représente 10 %, 15 %, 20 % du montage financier, soit, elle, composée de fonds provinciaux, du gouvernement du Québec, c'est un débat en soi, c'est un sujet en soi, mais maintenant notre quote-part est toute petite dans l'ensemble du montage financier. C'est ça, l'important.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Bonjour, M. Lampron et M. Duguay. Je trouve la structure et la forme de capital et de financement que vous avez mises sur pied très, très brillantes. Je pense que, même au niveau de la composition de votre conseil d'administration, on voit que vous devez allier des intérêts qui ne sont pas toujours des intérêts qui vont pour des mêmes finalités mais qui voient souvent aussi à leur propre intérêt personnel.

Ma question est de savoir: Est-ce que, au niveau de cette structure-là, où vous alliez à la fois le gouvernement, les municipalités, le monde du développement économique et les gens d'affaires, est-ce qu'il y a un bon arrimage? Est-ce qu'il y a une bonne entente sur la répartition des risques que vous devez prendre? Est-ce que, par exemple, certaines municipalités avec beaucoup plus d'apport financier et d'impact économique se marient très bien avec celles qui ont moins peut-être d'impact économique avec les gens d'affaires? Comment vous avez, dans vos expériences passées, vécu cette réalité-là?

Le Président (M. Paquet): M. Duguay, en une minute.

M. Duguay (Patrick): Oui. Il faut dire que la SDEO, c'est un... tout à l'heure je disais «un forum décisionnel», mais c'est d'abord un forum de débats où on doit s'entendre ensemble sur les grandes priorités. Une fois que ce travail-là a été fait ? et il a été difficile, hein, à faire ? maintenant je dirais que le fonctionnement se fait sur la base de la solidarité entre la ville et les territoires ruraux. Et il faut bien comprendre qu'aucun des collèges électoraux qui nous composent n'a le contrôle de la société. Alors, ce n'est pas le rural, ce n'est pas l'urbain. Même, il y a plus de rural que d'urbain, malgré le poids démographique, mais on devait refléter les disparités et les besoins des différentes régions.

Ce qui a évolué, chez nous, en Outaouais, c'est la conscience qu'on ne peut pas avoir une grande ville en santé si son arrière-pays est en difficulté. Alors donc, on doit composer ensemble puis s'entendre sur des pistes de développement.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui. Merci, M. le Président. Alors, M. Duguay, M. Lampron, bienvenue à cette commission. C'était intéressant, M. Duguay, de vous entendre dire, au début, que vous devez travailler dans une perspective de développement local et régional mais dans un univers de capital de risque, et je pense que c'est ce qui est arrivé avec le rapport Brunet. Le rapport Brunet, bien c'est l'univers du capital de risque où on ne retrouve pas le développement régional. Et votre politesse vous honore quand vous dites que ça exige une réflexion.

Mettons de côté le rapport Brunet et regardons plutôt vos recommandations, et c'est là-dessus que j'aimerais vous entendre un petit peu plus en détail ? parce qu'on manque toujours de temps ? vous entendre sur ce que vous recommandez. C'est-à-dire, vous parlez, dans votre recommandation, de mise sur pied de fonds de développement polyvalents régionaux. Alors, cette notion de polyvalence, bon, vous parlez de rendement et de développement, vous parlez de 5 millions. Est-ce que vous iriez même jusqu'à peut-être donner des indications? Le 5 millions, si vous aviez à le répartir entre le rendement et le développement, vous le répartiriez comment, d'une part?

Et, l'autre chose aussi que je trouve très intéressante dans vos recommandations, vous insistez pour que l'on utilise les structures existantes. Donc, vous souhaitez une forme évidemment de continuité, ce que vous avez commencé à faire, au cours des dernières années, chez vous. Visiblement, vous sentez que ça peut marcher, dans la mesure où on lui donne encore de plus en plus de temps et de plus en plus de moyens. Alors, j'aimerais vous entendre un petit peu plus sur tout ça.

Le Président (M. Paquet): M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): Je pense que, dans cette recommandation-là, ce qu'il faut lire, c'est la nécessaire adaptation des structures ou des mécanismes d'investissement puis de développement régional aux réalités des régions. À l'étude du rapport Brunet, on a porté la crainte qu'on porte... À chaque fois qu'il y a un rapport qui sort au gouvernement du Québec, la crainte qui vient, c'est une application mur à mur dans l'ensemble des régions du Québec sans tenir compte des disparités régionales. Et, pour avoir lu les travaux de plusieurs intervenants à la commission, pour en avoir entendu hier soir puis ce matin, je pense que c'est une préoccupation généralement partagée par les gens issus des régions. Alors, pour nous, le débat va devoir se situer à ce niveau-là.

Est-ce qu'on peut utiliser les capacités et l'expertise développées en région? C'est d'ailleurs notre crainte aussi. On n'a pas été très explicites là-dessus, sur le regroupement des Innovatech au sein d'un seul et même chapeau. On a vécu, chez nous... Et la SDEO joue ce rôle-là. On est, de fait, le doigt qui tape sur l'épaule des investisseurs de Montréal puis de Québec puis des investisseurs étrangers en disant: En région, il y a aussi des projets d'entreprise qui sont porteurs et qui seront porteurs de rendements intéressants et qui doivent être accompagnés pour qu'on les rende jusqu'à cette étape-là où ils vont rapporter un revenu financier intéressant. Mais déjà, pour la région, ces projets-là auront payé en termes de diversification, en termes de création d'emplois, en termes de mouvement dans l'économie que ça va générer. Alors, pour nous, ça, c'est important.

Maintenant, sur la répartition des fonds, de quelle façon est-ce qu'on peut l'arrimer? C'est certain que, nous, dans des efforts assez récents, hein, si on regarde la période ? on parle des 10 dernières années ? où on a réfléchi sur cette question-là, on n'est pas encore arrivés à se désengager des entreprises et à être remplacés par le capital de risque plus traditionnel. Parce que l'approche qui nous est proposée est une approche relativement traditionnelle pour encadrer la contribution de l'État avec l'entreprise privée. On n'est pas rendus, après 10 ans, encore à cette étape-là de désengager nos fonds et de pouvoir les revendre. Donc, on a besoin d'une période supplémentaire parce qu'on a pris des risques importants, parce qu'on a été dans des créneaux d'innovation, qu'on a dû accompagner les entreprises, qui étaient souvent en phase de recherche et développement avec des produits qui ont un potentiel extrêmement intéressant, mais il faut les accompagner.

Le capital de risque traditionnel... Et, dans la préparation de notre rapport, on s'est associés avec les gens d'affaires, et ce que les gens d'affaires disent, c'est: nous, on ne peut pas avoir cette patience-là, nos investissements doivent nous rapporter sur un horizon beaucoup plus court. On sait que, parmi les députés, plusieurs ont commencé, dont notre honorable Norm... Comme hommes d'affaires, ils n'auraient pas pu attendre 10 ans avant que ça rapporte pour... Tu sais, on ne peut pas avoir cette patience-là. Donc, il y a cette complémentarité-là.

n (12 h 10) n

Est-ce que ce sera moitié-moitié? Est-ce que ce sera un peu plus? Un peu moins? On ne le sait pas. Mais ce qu'on sait, c'est qu'on a des projets qui sont prêts, avec un capital... et qui sont prêts à apporter des rendements, des entreprises qui ont besoin d'injection de nouveaux capitaux, et ça, on pense que cette proposition-là d'associer le privé, ça pourrait répondre, ça pourrait donner une extension au rôle de la SDEO pour que chez nous on puisse appuyer nos entreprises, et ça, c'est la dimension la plus importante, de maintenir les leviers de décision en région, à partir des gens de la région.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui. Donc, le 5 millions, il serait plutôt majoritairement sur le développement.

Le Président (M. Paquet): M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): Ah, si on a un choix, c'est certain que, là où on est, à l'étape où on est rendus, on doit encore investir énormément en développement. Mais ce qu'on voit, je vous le rappelle, c'est que, dans certaines entreprises, on serait rendus à cette étape où des rendements peuvent être au rendez-vous, et des entreprises ont des besoins de capitaux nouveaux pour accompagner leur croissance, leur expansion particulièrement.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Johnson, deux minutes.

M. Boucher: Bonjour, messieurs. Vous affirmez, là, dans votre mémoire, jouer un rôle complémentaire par rapport aux grands acteurs nationaux, telles Innovatech, la Société générale de financement. C'est quoi, votre position par rapport à la proposition du rapport Brunet d'abolir les sociétés Innovatech telles qu'elles sont?

Le Président (M. Paquet): Alors, M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): En fait, c'est plus une inquiétude, hein, l'inquiétude étant: lorsqu'on a centralisé les opérations, c'est très rare qu'on les a centralisées et localisées à Gatineau, ou à Papineauville, ou...

M. Boucher: À Sherbrooke.

M. Duguay (Patrick): ...à Sherbrooke, ou à Trois-Rivières, et donc on a toujours un effort supplémentaire à faire en région pour aller attirer l'intérêt, la compréhension des investisseurs quant aux projets qu'il y a chez nous. Alors, on pourrait embaucher des lobbyistes à plein temps pour aller sensibiliser les investisseurs aux réalités de la région, au potentiel de notre région, les intéresser à ce qu'on fait chez nous. Alors, pour nous, on désire toujours le maintien des centres de décision le plus près de la région. Alors ça, c'est notre position.

Bon, à savoir: Est-ce qu'il y a de l'efficacité qui pourrait être gagnée?, peut-être, mais il est important... Déjà, on vient de le voir, hein, le Fonds régional de solidarité de l'Outaouais a été fusionné avec celui de Montréal. Ça nous préoccupe, ça nous inquiète parce qu'on avait des habitudes de travail avec ces gens-là. En même temps, il reste une cellule régionale forte. Alors, de quelle façon? Mettons qu'avec le projet de création des FIR, avec ce qui bouge au niveau des fonds régionaux de solidarité et du fonds national aussi, chez nous ça fait beaucoup d'inquiétude en même temps pour des projets qui sont en cours, hein? Actuellement, je vous le disais tout à l'heure, on est dans notre troisième année transitoire, et il y a plusieurs projets d'entreprise importants qui sont retardés parce que le climat d'insécurité et d'instabilité retarde les investissements.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Papineau.

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Merci de me donner la chance de pouvoir, premièrement, remercier les gens qui sont devant vous, messieurs et madame, de les féliciter de leur présence en région. Et je veux signaler surtout ça et signaler à M. le ministre l'importance de la SDEO en région parce que c'est des gens de la région, c'est des gens de la région qui prennent les décisions et c'est les gens qui connaissent les hommes et les femmes d'affaires de notre propre région.

Souvent, dans des dossiers que je ne voudrais pas mentionner mais qu'on connaît, l'intervention de la SDEO ? les banques ne voulaient absolument pas s'investir, et même Investissement Québec, à des petits montants ? a fait virer et a sauvegardé je ne sais pas comment d'emplois dans l'Outaouais, et dans le beau comté de Papineau sûrement. Alors, je pense qu'il faut le signaler. Moi, je pense que, dans les régions, les futures décisions de notre gouvernement, ce serait peut-être le modèle à prendre pour l'avenir de chacune des régions et surtout les régions comme nous, dans l'Outaouais.

J'ai une petite question à vous demander... ou à vous poser, M. Lampron ou monsieur... Moi, c'est, depuis 2001, votre implication dans le rural qui m'a impressionné chez nous, qui nous a aidés à développer. Est-ce que vous pourriez me donner le montant approximatif d'investissement qui a été fait sur le côté rural, dans l'Outaouais? Comme vous avez mentionné tantôt, ce qui est important, c'est le partenariat qui existe entre la grande ville et toutes les MRC de notre région. Alors, les montants qui ont été investis, juste pour le signaler aux gens ici, à cette table, et le nombre d'emplois que ça a pu créer à cause de ce partenariat-là et à cause de la SDEO.

Le Président (M. Paquet): M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Alors, si vous me permettez, dans le cadre de nos trois programmes, nous avons investi, dans les quatre MRC rurales de l'Outaouais, par le cadre ou par le biais du fonds des MRC, plus de 2,5 millions de dollars qui ont généré 16 millions de dollars d'activités. Et, par le biais de notre volet investissement, je vous dirais que nous en sommes rendus à plus de 3 millions de dollars qui, eux, ont généré des investissements de l'ordre facilement, là, d'une quinzaine de millions de dollars dans des entreprises du tourisme, dans des entreprises de la foresterie, dans des entreprises des technologies de l'information, dans des entreprises d'exploitation agroalimentaire. Et c'est dans ce sens-là qu'on parlait de fonds polyvalents, dans le sens où on s'adresse à différents secteurs d'activité économique et non pas à un secteur spécialisé de l'activité économique. Alors, grosso modo, c'est plus de 6 millions de dollars qui ont été investis dans le milieu rural.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Papineau.

M. MacMillan: Je vous posais la question, je connaissais la réponse, là, mais je voulais vraiment que ce soit...

Une voix: ...

M. MacMillan: Oui. Je n'en suis pas un. Mais l'importance du partenariat, le rural et urbain, que ça a créé dans notre région, alors c'est remarquable, puis je ne le dis pas en politicien, si tu veux, je le dis en ex-homme d'affaires. L'aide que vous avez apportée dans notre région est formidable et remarquable même. Alors, j'espère que... je n'espère pas, notre gouvernement sûrement va regarder la possibilité de continuer ça et peut-être prendre ce modèle-là pour d'autres régions du Québec. Merci. Continuez le bon travail.

Le Président (M. Paquet): Merci. Donc, M. le ministre ou...

M. Audet: Bien, écoutez...

Le Président (M. Paquet): En deux minutes.

M. Audet: ...après ce que vient de dire mon collègue député et ministre de la région, évidemment vous comprendrez que je suis tout à fait, moi aussi, impressionné par le travail qui a été fait.

Tantôt, on a évoqué un peu le rôle des Innovatech dans la région. D'abord, par quelle Innovatech êtes-vous desservis? Quel lien entretenez-vous avec les Innovatech, formellement?

Le Président (M. Paquet): M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Nous sommes en collaboration avec deux Innovatech, avec Innovatech du Grand Montréal, qui intervient surtout dans le secteur des technologies de l'information et des biotechnologies, mais aussi, depuis quelques années, avec Innovatech Régions ressources, dans laquelle nous sommes en partenariat dans quelques projets. Il y a donc là des collaborations d'installées, et ça va très bien. J'étais avec eux d'ailleurs en début en semaine, par rapport à un projet particulier. Ce sont les deux Innovatech qui interviennent sur notre territoire. Mais, comme vous le voyez, eux interviennent par secteurs spécialisés, alors que, nous, nous intervenons au niveau polyvalent.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. M. Duguay, M. Lampron, bonjour. Je voudrais aller avec vous à l'élément 7 de votre mémoire, concernant la SDEO. Dans votre présentation, vous nous avez mentionné que vous alliez faire un arrimage de votre organisme selon les critères qui sont prévus à la CRE. Lorsque je regarde au point 7, il y a des nominations qui sont faites par le gouvernement à cet organisme et il y a des représentants de la ville de Gatineau et également les préfets ou les représentants des MRC.

J'aimerais savoir: Dans le modèle que vous nous parlez dans ce mémoire, est-ce que ce sera le modèle de la CRE qui arrivera, ou que les maires seront majoritaires au conseil de décision, au conseil de la CRE?

Le Président (M. Paquet): M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): C'est déjà notre cas. La configuration que vous avez dans le mémoire, c'est notre configuration actuelle. Donc, c'est la raison pour laquelle je vous disais: L'arrimage avec la CRE sera relativement simple puisqu'on est déjà organisés avec une majorité d'élus.

Cependant, il est clair pour nous que les modifications qu'on fera à nos règlements vont devoir tenir compte de la volonté de maintenir un partenariat extrêmement fort entre les acteurs du développement économique, qu'on appelle la société civile, le milieu des affaires. Je suis moi-même issu du milieu de l'économie sociale donc et président depuis quatre ans de la société. Alors, il y a une volonté de maintenir cette complémentarité-là, et ça, l'ensemble des intervenants de la SDEO s'entendent là-dessus. Donc, pour nous, c'est un arrimage qui est assez naturel et facile.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

n (12 h 20) n

M. Lelièvre: Oui. Donc, si je comprends bien, quand on parle de représentants municipaux, ce n'est pas nécessairement les maires, ça peut être des conseillers municipaux qui sont délégués par le conseil municipal, etc.

Au niveau du FLI, ce matin, on a eu l'occasion d'entendre les unions municipales qui eux-mêmes nous suggéraient... ou suggéraient au gouvernement et au ministre de regarder la possibilité de moduler par territoires de MRC la hauteur des fonds qui sont consacrés, là... de financement des FLI. Est-ce que c'est quelque chose qui vous apparaît être une bonne idée, ou il faudrait avoir, je dirais, une enveloppe régionale par... ou encore une enveloppe régionale qu'on répartirait entre les différentes MRC, selon différents critères? Est-ce que le gouvernement pourrait... Devrait-il regarder sérieusement la possibilité de supporter davantage des MRC, les cibler, celles qui sont plus en difficulté?

Le Président (M. Paquet): M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): En fait, là-dessus, je dirais, on a toujours été les partisans d'une intervention modulée aux besoins des milieux, à la configuration des différents milieux. Ça, je pense que c'est pour nous une évidence depuis toujours. La difficulté qu'on a cependant, c'est de s'assurer que, pendant qu'on s'occupe de celui qui est le plus en difficulté, on ne laisse pas de côté le bien portant pour que lui-même se retrouve en difficulté ensuite, hein? Si on mettait tous nos oeufs dans le même panier...

C'est l'exemple du bon père ou de la bonne mère de famille, hein, qui regardent trois enfants, deux qui ont de la difficulté à l'école puis un qui performe, puis qui concentrent toutes leurs énergies sur ceux qui sont en difficulté sans continuer de s'occuper de celui qui va bien. Je pense que c'est souvent le réflexe qu'on a, hein, d'aller au plus urgent. Mais je ne pense pas qu'on doit intervenir, en développement économique, à partir du seul critère de l'urgence, mais en s'attaquant aux choses qui sont importantes.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Je ne sais pas si mon collègue avait une question?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson, donc?

M. Lelièvre: Moi, j'en aurais une rapidement, peut-être la joindre à...

Le Président (M. Paquet): Il reste deux minutes.

M. Lelièvre: Vous pourriez répondre aux deux en même temps.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: La présence des fonds de capital de risque, Fondaction, FTQ, tous les autres, j'aimerais ça, dans la réponse que vous allez donner au député de Johnson, que vous nous en parliez un peu pour savoir quelle est leur implication, leur engouement pour investir dans vos dossiers.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Bien, je ne sais pas, moi, personnellement, je sais que vous avez exprimé beaucoup de réticences quant aux FIR. J'aimerais ça que vous nous parliez des FLI et de leur importance.

Le Président (M. Paquet): M. Duguay.

M. Duguay (Patrick): Bon, il y a justement... Lorsqu'on regarde l'ensemble du capital de risque qui est chez nous ou du capital de développement, Laurent a élaboré une espèce de modèle de présentation où on dit: De fait, il y a une espèce d'escalier, hein, au financement, et les FLI sont certainement les premières marches.

Et, dans notre cas, ce qu'on peut dire, c'est que généralement les projets qu'on va traiter ont, dans plusieurs cas, été appuyés par des FLI au départ, hein, dans la phase de la très petite entreprise ou de la petite entreprise. Lorsque les produits ont fait leurs preuves ou qu'ils commencent à avoir un intérêt plus marqué, on a besoin de capitaux plus importants. Donc, c'est là généralement qu'on ouvre une société par actions où on va vendre du capital, et le rôle de la SDEO, c'est d'être le premier preneur de capital. Mais ce qu'on peut dire, c'est donc que, dans les dossiers de la SDEO, dans les petits projets, on est généralement avec les CLD locaux. Alors ça, c'est dans à peu près tous les cas. En milieu rural, c'est dans tous les cas.

Au niveau des projets qui prennent plus d'ampleur, ce qu'on fait généralement, ce qu'on constate dans notre portefeuille, c'est que, là, on va retrouver, à l'intérieur de nos participations, la participation des Innovatech, la participation du fonds régional de solidarité, de la Caisse de dépôt, de la SGF, de Fondaction, alors, parce qu'on est dans un autre palier de l'escalier du financement. Moi, je pense que c'est la façon dont on doit le concevoir, hein? Il faut être capable d'accompagner nos entreprises de la naissance jusqu'à leur expansion. Et là-dessus, au Québec, c'était notre intérêt à regarder la question des FIR, en disant: On sait qu'on a une faiblesse pour accompagner les entreprises qui ont des besoins de capitaux extrêmement importants, sauf que les plafonds prévus dans les FIR ne nous permettent pas de jouer ce rôle-là. Le plafond du FIR doit être de beaucoup inférieur au plafond de la SDEO. Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Duguay. Alors, M. le ministre.

M. Audet: Alors, brièvement, merci beaucoup, M. Duguay, M. Lampron, pour votre présentation. Je pense que vous avez une approche extrêmement constructive, en même temps évidemment avec des propositions d'amendement qui sont également très intéressantes.

J'aurais peut-être une question, puisque vous êtes sur une frontière et que donc vous êtes en compétition. Vous vivez la concurrence, justement. Ce serait ma question à la fin. Comment vous vivez la concurrence avec la région de l'autre côté de la rivière des Outaouais, justement dans l'appui au capital de risque qui se fait de l'autre côté? Est-ce que vous êtes compétitifs? Et est-ce qu'il y a des choses qui sont faites et qui mériteraient qu'on regarde attentivement de notre côté... de l'autre côté de la rivière?

Le Président (M. Paquet): En 1 min 30 s, M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Alors, M. le ministre, nous nous voyons comme un instrument justement au niveau de la concurrence que le Québec... ou des outils que le Québec a pour attirer sur son territoire des entreprises qui sont basées du côté d'Ottawa.

La SDEO aura, dans le passé, réussi à attirer de nombreuses entreprises, surtout des technologies de l'information et des télécommunications, qui sont venues s'installer sur le territoire de la ville de Gatineau. On est un élément de la concurrence québécoise en cette matière-là. Ce n'est pas facile, elle se vit tous les jours, les moyens sont grands du côté d'Ottawa, et c'est pour ça qu'il ne faut pas réduire les moyens du côté du Québec, qui sont plus modestes.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, au nom de la commission, M. Duguay, M. Lampron, de la Société de diversification économique de l'Outaouais, nous vous remercions pour votre participation aux travaux. Je suspends les travaux de la commission jusqu'après les affaires courantes.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

 

(Reprise à 15 h 14)

Le Président (M. Paquet): Alors, nous reprenons nos travaux. Encore une fois, avant de débuter, je demanderais à tous ceux et celles qui ont des téléphones cellulaires de bien en éteindre la sonnerie afin de ne pas gêner nos travaux.

La Commission des finances publiques est réunie afin de poursuivre et terminer, cet après-midi, les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État dans le capital de risque.

Alors, nous accueillons d'abord... Après entente avec les groupes que nous allons entendre cet après-midi, nous avons fait un changement à l'ordre du jour que j'ai lu ce matin, nous avons interverti les deux premiers groupes que nous devions rencontrer. Alors, nous commençons en rencontrant les gens de Skypoint Capital Corporation, représentés par M. Louis Desmarais, associé principal, et Mme Natalie Giroux, associée.

Vous disposez d'une période de 15 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie ensuite d'une période d'échange avec les membres de la commission. Nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous remercions de participer à nos travaux. Alors, M. Desmarais.

Skypoint Capital Corporation

M. Desmarais (Louis): Merci, M. le Président. Comme vous avez dit, mon nom est Louis Desmarais. Je suis associé principal de Skypoint Capital. Je suis accompagné par Mme Giroux, associée. Nous remercions la commission de nous avoir invités à les rencontrer. Nous espérons que notre intervention contribuera à votre réflexion.

Pour mettre notre intervention en perspective, je vais d'abord consacrer quelques instants à présenter Skypoint Capital. Je vais également vous parler du métier d'investisseur de risque tel que nous le vivons chez Skypoint. Je vais ensuite aborder la question de la politique gouvernementale en matière de capital de risque.

Skypoint Capital crée et gère des fonds de capital de risque qui investissent dans des entreprises du domaine des télécommunications. Skypoint existe depuis 1998. La compagnie a été fondée à Kanata, en banlieue d'Ottawa. Kanata est parfois appelée la Silicon Valley du Nord. Skypoint a ouvert un bureau à Montréal en 2001 pour investir davantage de fonds québécois et pour investir dans plus de projets québécois. Depuis notre fondation, nous avons créé deux fonds et nous avons fusionné un troisième, Venture Coaches. Nous avons en sous-gestion 250 millions de dollars et nous avons investi dans plus de 30 projets. En termes d'expérience professionnelle, les dirigeants de Skypoint sont intervenus dans plus de 100 démarrages d'entreprises au cours de leur carrière. À ce jour, nous avons investi dans trois projets de démarrage au Québec, et deux compagnies québécoises se trouvent actuellement dans notre portefeuille d'investissement, Conexions virtuelles et Wavesat sans fil. Nous sommes établis au Québec précisément pour en faire davantage ici. Nous pourrons faire davantage d'investissement au Québec si nous pouvons lever davantage de capitaux, notamment au Québec.

Ceux qui investissent dans nos fonds sont des caisses de retraite, des gestionnaires de fonds, des institutions financières ou des institutions privées. Notre univers d'investissement est pointu. Nous investissons dans un seul secteur, celui des télécommunications. Nous investissons seulement dans des compagnies qui en sont au stade du démarrage. D'ailleurs, notre intervention d'aujourd'hui se limite au stade du démarrage. C'est vraiment dans ce créneau que nous pouvons contribuer à votre réflexion.

Il y a une raison à avoir un champ d'investissement restreint, c'est que, dans le capital de risque, l'expertise est encore plus importante que l'argent. Le capital de risque, ce n'est pas juste l'argent, c'est des gens. L'argent, c'est bien; l'argent intelligent, c'est mieux, et de deux façons. D'abord, dans le choix des projets où nous investissons en capital de risque, le premier gage d'une bonne moyenne au bâton, c'est de bien évaluer les chances de succès d'un projet. On n'investit bien que dans un domaine qu'on connaît bien. Ensuite, parce qu'un investisseur de risque ne peut pas être passif, il doit accompagner l'entrepreneur qu'il finance. Le capital de risque, c'est une forme de mentorat. D'ailleurs, les entrepreneurs qui nous approchent ne recherchent pas que des fonds, ils recherchent de l'expertise, une expertise propre à leur industrie mais aussi propre au stade de développement d'une entreprise. Une entreprise en démarrage n'a pas les mêmes enjeux qu'une entreprise qui en est à sa deuxième ou troisième ronde de financement. Il existe une telle chose que l'expertise spécifique en démarrage d'entreprises...

Le mentorat, ça ne se fait pas à distance et cela implique la construction d'une relation à long terme. Les contacts entre l'investisseur et l'entrepreneur doivent être fréquents, autant que possible doivent être face à face. Natalie et moi, on rencontre nos entrepreneurs une, deux, parfois trois fois par semaine. Ça va vous paraître étrange, venant d'une entreprise qui est spécialisée dans les télécommunications, mais le courrier électronique, le téléphone et les fax ne sont pas suffisants pour assurer un bon mentorat. Ottawa, ce n'est quand même pas loin de Montréal. Pourtant, Skypoint a tenu à ouvrir un bureau à Montréal quand elle a voulu investir davantage au Québec parce que, en capital de risque, au stade du démarrage, la proximité n'est pas seulement importante, elle est fondamentale. Règle générale, quelqu'un qui est en Californie ou même à Boston n'investira pas dans le démarrage d'une entreprise québécoise parce qu'il veut jouer son rôle de mentor et ne pas avoir à prendre l'avion toutes les semaines. C'est aussi simple que cela.

n (15 h 20) n

Donc, trois éléments essentiels pour une entreprise qui finance des entreprises en démarrage: l'expertise, la proximité et la continuité. Si on veut que le capital de risque se développe au Québec, en particulier au stade du démarrage d'entreprises, il faut attirer, former et retenir des bons gestionnaires puis leur donner accès au capital. La continuité de la relation est importante pour créer une relation avec les entrepreneurs permettant une véritable valeur ajoutée que la structure des fonds institutionnels et des travailleurs ne favorise pas. Elle est également importante pour assurer l'imputabilité des gestionnaires qui prennent des décisions d'investissement et accompagnent l'entreprise jusqu'à la réussite.

Attirer au Québec les gestionnaires appropriés, c'est-à-dire ceux ayant à la fois l'expertise d'une industrie spécifique ainsi que l'expertise en démarrage d'entreprises, cela peut se faire par incitatifs fiscaux, tel qu'il en existe au Québec pour certains immigrants stratégiques ou ceux consentis en Irlande ces dernières années, par exemple. Au-delà des congés fiscaux personnels, ceux-ci pourraient aussi inclure l'exemption de taxe sur les gains en capital.

Concernant l'accès au capital, le rapport Brunet recommande la création d'un fonds mixte spécialisé en haute technologie. La mécanique proposée est intéressante, à savoir la réunion de fonds privés et publics au sein d'un fonds. Par contre, les règles de gouvernance devront être appropriées et ne pas imposer de restriction au secteur privé pour que le fonds poursuive des objectifs clairs de rentabilité, donc de choix de projets viables qui auront le maximum de chances de créer de la valeur pour l'économie québécoise. Toutefois, nous sommes d'avis que le mécanisme public-privé serait plus approprié pour créer non pas un fonds de capital de risque, mais bien un ou plusieurs fonds de fonds, je veux dire un fonds qui investit dans des fonds de capital de risque. Le président d'Innovatech du Grand Montréal, Hubert Manseau, vous en a parlé ici, lors de son intervention la semaine dernière, et nous appuyons ses propos.

Un tel fonds disposerait d'une expertise distinctive non pas dans le capital de risque, mais dans le choix de fonds de capital de risque et dans l'évaluation de leur performance. Ce fonds de fonds recevrait initialement son argent du gouvernement, auquel des investisseurs institutionnels qui désirent investir dans des fonds de capital de risque mais qui ne disposent pas de l'expertise suffisante pour le faire de façon efficace pourraient se joindre par la suite.

Il existe au Canada des centaines de caisses de retraite de taille relativement petite ? disons moins de 1 milliard d'actif ? qui voudraient participer au marché du capital de risque mais qui n'ont pas la masse critique suffisante. Selon sa politique d'investissement, une caisse de retraite de 1 milliard peut peut-être investir jusqu'à 25 millions dans le capital de risque. 25 millions, ce n'est pas la masse critique nécessaire pour gérer un programme d'investissement dans des fonds de capital de risque. Un fonds de fonds mixte qui investirait non pas dans des projets mais dans des fonds de capital de risque serait plus productif pour le Québec qu'un simple fonds mixte de capital de risque. En plus, un fonds de fonds stimulerait le développement de l'industrie privée du capital de risque. Ce que je vous suggère, c'est que Skypoint aurait plus de concurrents au Québec et que ce serait mieux pour l'économie québécoise que d'avoir un seul fonds mixte.

D'autres mesures seraient susceptibles de favoriser la canalisation de fonds vers le capital de risque. Au-delà d'incitatifs fiscaux pour attirer les gestionnaires et de la création d'un fonds de fonds, il serait opportun d'examiner les règles qui contraignent les politiques de placement de certaines institutions financières, tels les fonds de travailleurs et Desjardins. De nouvelles règles pourraient les encourager à investir dans des fonds de capital de risque, dans un premier temps, et aussi leur permettre d'investir dans des entreprises de plus grande taille. Un assouplissement des règles à cet égard pourrait accroître l'offre de capital de risque pour les entreprises en démarrage et assurer le financement de l'expansion de ces entreprises.

Le Québec ne manque ni d'entrepreneurs ni de projets. Comme le souligne le rapport Brunet, toutefois il manque des capitaux dans un des maillons de la chaîne de financement des entreprises, précisément celui dans lequel nous sommes actifs. Je souligne qu'à l'étape du démarrage il manque aussi des gestionnaires spécialisés. Pourtant, Skypoint croit qu'il pourrait se développer au Québec un groupe de firmes de capital de risque spécialisées dans le démarrage d'entreprises, notamment, mais pas seulement dans le secteur des télécommunications. Il suffirait de prendre quelques mesures de nature à stimuler l'acheminement de capitaux privés dans cette direction.

Parmi les mesures envisageables, trois nous paraissent particulièrement intéressantes: d'abord, l'adoption d'incitatifs fiscaux ayant pour effet d'attirer au Québec les gestionnaires de fonds possédant à la fois une expertise sectorielle et une expertise en démarrage d'entreprises; en deuxième lieu, la création de fonds de fonds qui permettraient à un plus grand nombre d'investisseurs institutionnels ou individuels de consacrer une partie de leur portefeuille au secteur du capital de risque; en troisième lieu, un assouplissement des règles régissant les investissements des institutions qui sont sous la juridiction du gouvernement du Québec.

Je vous remercie de votre attention. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Desmarais. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Merci, M. le Président. Alors, M. Desmarais, madame, j'ai écouté avec attention votre présentation et j'y remarque évidemment particulièrement... Ce qui m'a frappé particulièrement, c'est votre insistance à avoir justement un mentorat, une expertise pour un suivi en quelque sorte sur les projets ? je pense que c'est important ? mais c'est aussi le fait que vous mentionniez qu'effectivement il semble y avoir manque de... Il y a des projets, il semble donc y avoir manque de fonds. En même temps, vous nous dites donc qu'il y a manque de fonds de capital privé qui limite la possibilité de formation et de croissance de nouvelles entreprises. Et en même temps votre entreprise, finalement, vous dites, n'a pris que quelques participations finalement au Québec.

Comment conciliez-vous ça? Pourquoi votre entreprise, qui oeuvre justement dans le capital de risque, qui a dû avoir des opportunités, puisqu'il y a beaucoup de projets, vous nous dites... Qu'est-ce qui fait que vous n'avez pas plus de placements? Puisque vous avez parlé de quelques-uns actuellement que vous avez au Québec, il y a donc une terre fertile pour des participations. Qu'est-ce qui fait que vous n'avez pas pu investir plus, dans plus d'entreprises actuellement, jusqu'à présent?

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Merci, M. le Président. Normalement, nous regardons environ 100 projets pour en prendre un, et ça, ça explique qu'on en a vu, depuis... On est au Québec depuis à peu près deux ans maintenant...

Une voix: ...

M. Desmarais (Louis): ...oui, depuis deux ans, et puis on en a choisi un, Conexions virtuelles. Et on en regarde d'autres et on est à veille d'en faire un autre maintenant. Alors ça, c'est un des points, c'est que ça en prend beaucoup pour en choisir un.

Deuxièmement, on se cherche toujours des partenaires d'investissement et on a de la misère au Québec à se trouver des partenaires d'investissement pour investir avec nous dans des projets. Les projets qu'on regarde, normalement c'est des projets d'à peu près 20 millions de dollars, des projets en télécommunications. On ne peut, nous, les financer tout seuls, il faut absolument avoir des partenaires de financement. Puis on doit dire qu'on les cherche, on présente nos dossiers à toutes les autres institutions financières, et à date on a eu de la misère à trouver des partenaires financiers.

Natalie, est-ce que tu veux rajouter à ça?

Le Président (M. Paquet): Mme Giroux.

Mme Giroux (Natalie): Oui. Je pense que c'est clair que, nous, on est prêts à faire les investissements initiaux, mais on cherche des partenaires qui sont prêts à aller jusqu'aux rondes finales avec les compagnies qui travaillent avec nous. Nous, on prêts à se spécialiser dans le mentorat du démarrage, mais c'est clair que, surtout dans la dernière année, là, les gens avec qui on peut travailler se font de plus en plus rares.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre.

n (15 h 30) n

M. Audet: Dans ce contexte-là, évidemment vous évoquez que vous partagez nombre d'orientations qui sont dans le rapport Brunet. Une de ces orientations-là, c'était les fonds d'investissement régionaux, où, bon, il était prévu que, si des investisseurs privés, supposons, privés comme vous et d'autres, mettaient ensemble, rassemblaient ensemble 1 million, évidemment il pourrait y avoir un prêt du gouvernement pour 2 millions, ou, si c'est 5 millions, il pourrait y avoir un prêt pour 10 millions pour permettre un effet de levier, pour permettre de prendre plus, justement d'avoir un impact plus grand pour investir davantage dans le capital de risque.

Est-ce que, dans ce contexte-là, c'est pour vous une option ou un scénario que d'investir de cette façon-là et d'utiliser cet effet de levier là plutôt que d'investir directement? Qu'est-ce que vous pensez, puisque vous l'évoquez très peu? Je n'ai pas vu tellement vos commentaires sur cet aspect-là du rapport Brunet.

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): M. le Président, merci. L'effet de levier, vous parlez de fonds régionaux. Vous parlez de fonds régionaux. Nous, on est impliqués uniquement, pour le moment, à Montréal, et, avoir à créer avec la masse critique en technologie et en télécommunications dans les régions, on trouve ça difficile. Il faudrait personnellement que, nous, on déménage là-bas puis qu'on puisse attirer la masse critique, tant intellectuelle qu'en argent, pour créer des projets en région. Alors, ce n'est pas quelque chose qu'on regarde, on se spécialise dans une région particulière, celle de Montréal.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre... M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. J'ai deux questions à vous poser, monsieur. Bien, la première, c'est une remarque que vous faites. Vous souhaitez avoir des allégements fiscaux, enfin des incitatifs fiscaux pour amener les gestionnaires de fonds à résider au Québec. Est-ce que vous pourriez préciser un peu ce que vous avez dans l'esprit? Est-ce que c'est analogue, par exemple, à ce qui a été développé pour inciter les entreprises à pouvoir accueillir plus de chercheurs en ayant des dégrèvements fiscaux sur les impôts personnels pendant une période de cinq ans? Est-ce que vous pensez à des choses de cette nature-là pour les gestionnaires de fonds?

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Oui. M. le ministre, exactement. Exactement. Justement, en préparation d'aujourd'hui, j'ai appelé certains de nos partenaires financiers aux États-Unis. J'ai dit: Ce qu'on a besoin au Québec, c'est non pas nécessairement votre argent, c'est vous. C'est de l'expertise qu'on a besoin. C'est vous qui avez passé 20 ans, 25 ans de votre carrière dans le domaine des télécommunications et c'est ces connaissances-là qu'on a besoin pour transmettre à nos entrepreneurs ici. Qu'est-ce que ça prendrait pour vous inciter à déménager des États-Unis puis à venir vous installer au Québec? Et puis, effectivement, là on parle de capitalistes pur-sang dans les gens de capital de risque. Ils cherchent des dégrèvements fiscaux personnels. Si on pouvait éliminer la taxe sur le gain en capital, comme font certains États... Au Nevada, par exemple, ils ont réduit le gain en capital pour les gestionnaires qui vont s'installer là, et effectivement pour la réduction des impôts personnels.

M. Gautrin: J'ai encore le temps pour une autre question, oui?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Alors, je comprends qu'on aura probablement à échanger sur ça parce que... Et l'idée existe déjà dans le domaine de la recherche, de la science et de la technologie pour attirer en quelque sorte les cerveaux ou... C'est un peu de même nature dans le domaine du développement financier.

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): ...on en bénéficie dans nos compagnies, et puis c'est ça. Oui.

M. Gautrin: O.K. Deuxième...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Pardon. Deuxième question. Ça touche les caisses de retraite. Qu'est-ce que vous voulez essentiellement suggérer dans ce que vous parlez en augmentant l'allocation maximale pour les placements alternatifs? Vous connaissez à quel point des gestionnaires de fonds de retraite doivent être, disons, pas risqués... Enfin, le capital de risque n'est pas nécessairement la chose dans laquelle les gestionnaires de fonds de retraite doivent investir le plus. Est-ce que vous voulez augmenter la part de capital de risque dans les gestionnaires de fonds de retraite... dans la gestion des fonds de retraite? C'est ça que vous avez en tête, ou vous avez...

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Oui. Quand nous avons levé notre deuxième fonds chez Skypoint, un fonds de 100 millions US, j'ai rencontré peut-être une quarantaine de gestionnaires de fonds de pension, de caisse de retraite, et je leur ai demandé d'investir chez nous. Alors ça, c'étaient les plus petites caisses de retraite. Les grosses, ça, il n'y a pas de problème, il y a des équipes de gestion qui gèrent les placements alternatifs, il y a des experts en capital de risque qui sont résidents là. Ils m'ont répondu qu'ils aimeraient investir dans des fonds de capital de risque, mais ils ne peuvent pas le faire directement, ils n'ont pas la masse critique à l'interne pour gérer des placements comme ça. Alors, ils cherchent des outils comme un fonds de fonds, mais il n'y en a pas au Canada.

M. Gautrin: Et un fonds de fonds, c'est quoi?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun, rapidement, s'il vous plaît.

M. Gautrin: Un fonds de fonds, ça consiste en quoi, dans votre esprit. C'est-à-dire, un fonds dont les membres sont des fonds et, à ce moment-là, dans lequel vous pourriez prendre une partie donc de cet argent qui serait accumulé pour faire des placements en capital de risque, est-ce que c'est ça?

M. Desmarais (Louis): Oui. C'est un fonds dans lequel...

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): ...les investisseurs investissent, et ce fonds-là investit non pas dans des compagnies ou dans des nouveaux projets, mais investit dans des fonds de capital de risque. Alors, dans son portefeuille, il y a des investissements dans différents fonds de capital de risque, non pas dans des compagnies directement.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Gautrin: ...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun, le temps est... Très rapidement.

M. Gautrin: Est-ce que la Loi sur les RCR l'empêche actuellement? Les RCR, c'est les régimes complémentaires de retraite. La Loi sur les RCR l'empêche?

M. Desmarais (Louis): N'empêche pas des investissements dans des fonds de fonds, c'est juste...

M. Gautrin: Alors, vous voulez quoi comme modification? Vous suggérez quoi?

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Moi, je suggère que... Quand on parle de créer un fonds mixte de capital de risque, je pense que ce serait beaucoup plus productif pour le Québec d'avoir non pas un fonds de capital de risque mixte, mais un fonds de fonds mixte.

M. Gautrin: ...

M. Desmarais (Louis): Oui.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Merci, M. le Président. M. Desmarais, Mme Giroux, en fait ma question allait un petit peu dans la même direction, alors on aura peut-être un petit peu plus de temps pour votre réponse, M. Desmarais. Parce que, quand vous mentionnez, dans votre mémoire, que «la participation directe du gouvernement [...] dans l'industrie du capital de risque est problématique à cause du risque élevé associé à de tels investissements. D'autre part, l'établissement de fonds de fonds permettra de confier l'argent aux meilleurs gestionnaires», alors j'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu plus là-dessus, là, surtout en regard... Vous dites: Bon, bien le risque est élevé, donc la participation directe du gouvernement est problématique. Mais est-ce que la participation du privé non plus n'est pas problématique quand le risque justement est élevé?

Et après ça vous faites référence à la notion, là, de confier l'argent à de meilleurs gestionnaires. Alors, j'aimerais ça que, sur l'ensemble de cette affirmation-là... Et le rôle du gouvernement dans cette approche de fonds de fonds, ce serait... Le rôle ou la participation, la contribution, vous voyez ça comment?

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Oui. Je vois la participation en termes... J'aime beaucoup l'idée d'avoir un fonds mixte. Alors là, on pourrait dire à ces institutions financières, les caisses de retraite, par exemple: Investissez dans ce fonds de fonds là. Vous mettez 1 $, le gouvernement en met 2 $, ou, l'inverse, vous en mettez 2 $, le gouvernement en met 1 $, peu importe la formule, là. Mais il y a une formule d'allégement du risque. Alors, le gouvernement mettrait 1 $ et dirait: Moi, je veux avoir un rendement minimal ? disons 6 %, 8 % ? et ensuite, les profits, je ne partagerai pas avec vous, vous allez les partager entre vous. Alors ça, ça encouragerait les caisses de retraite de regarder un fonds comme ça puis de dire: Bon, là, je baisse mon risque directement parce que je partage les risques que le gouvernement nous laisse. Alors ça, ce serait un avantage énorme, je pense, pour ces caisses de retraite là.

n (15 h 40) n

Et, pour attirer les gestionnaires expérimentés, c'est critique. Quand on voit, dans les fonds au Québec, des fonds qui investissent dans le démarrage, et la personne responsable du dossier, c'est une personne qui n'a pas d'expérience dans le domaine dans lequel il investit, ça, c'est... Là, c'est une personne qui veut devenir un mentor d'un entrepreneur, mais ce mentor-là n'a pas d'expérience. C'est ce qu'il manque, d'après nous.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Justement, M. Desmarais, quand vous parlez d'expertise, bon, dans votre cas à vous, c'est beaucoup relié, si j'ai bien compris, aux télécommunications. Est-ce que vous diriez... Et vous avez mentionné tout à l'heure, bon, que, du point de vue des régions, vous pensez que c'est un peu difficile de réussir à aller chercher du capital de risque en région, par exemple dans le domaine des télécommunications. L'expertise, est-ce qu'elle doit être sectorielle en termes, par exemple, de télécommunications ou est-ce qu'elle doit être plus au niveau justement de la capacité à lever du capital de risque? Et, quand vous parlez d'amener des gens ici, c'est quoi surtout qu'on recherche comme expertise?

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Ce qu'on recherche, c'est deux choses: c'est l'expertise sectorielle, l'expertise d'une industrie... Pour développer une compagnie, pour être un mentor pour un entrepreneur qui veut commencer une compagnie en télécommunications, il faut avoir l'expertise en télécommunications, un. Deux, il faut avoir l'expertise en démarrage d'entreprises. Ce n'est pas la même chose, c'est une autre expertise. Développer des compagnies à partir du jour 1 jusqu'à la réussite, ça prend une expertise spécifique. Alors, il y en a des experts en télécommunications qui ont passé toute leur vie chez Nortel, par exemple, mais ils n'ont pas d'expérience en démarrage d'entreprises. À l'inverse, il y a des gens qui ont fait beaucoup de démarrage, mais ils n'ont pas d'expertise sectorielle. Il faut combiner les deux dans un seul fonds, puis ça, d'après mon expérience, c'est très rare de trouver des personnes comme ça. Alors, quand on en trouve dans des fonds, peu importe où ils se trouvent, il faut les attirer pour avoir des fonds en démarrage au Québec.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Et est-ce que conséquemment vous pensez que les fonds doivent, eux aussi, avoir une approche sectorielle? C'est-à-dire, ce que vous proposez, est-ce qu'il faudrait qu'il y ait un fonds de télécommunications et de différents secteurs?

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Le fonds de fonds, lui, investirait dans tous les domaines. Si on transformait, par exemple, Innovatech... C'est une idée qu'on parle, là, c'est de transformer Innovatech en fonds de fonds. Alors là, Innovatech pourrait investir certains fonds dans des fonds de démarrage de télécommunications, certains fonds en TI, certains fonds en biotech. Alors, c'est comme ça qu'ils le feraient.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Blainville. Ça va? Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Tout à l'heure, vous parliez, M. Desmarais, que vous investissez presque... ou exclusivement à Montréal ou dans la région de Montréal, vous concentrez vos efforts à Montréal, pour ce que j'ai compris, au niveau des entreprises en démarrage. Au niveau des entreprises existantes qui représentent des potentiels à l'extérieur de Montréal, parce que ce n'est pas nécessairement «en dehors de Montréal, point de salut», des régions ressources aussi présentent maintenant des projets intéressants. Il y a des entreprises qui s'y installent, pour toutes sortes de raisons ? qualité de vie ? dans le domaine des TCI, et on vend, on exporte nos connaissances à l'extérieur du Québec, dans d'autres pays. Je prends l'exemple de la Gaspésie où, à Port-Daniel, je crois qu'il y a un type qui est venu s'installer, puis, bon, il fait des affaires. Et j'aimerais essayer de comprendre, dans le fond, dans ce contexte-là, si c'est dans un domaine très spécifique comme les télécommunications et les technologies de l'information, pourquoi que, à l'extérieur de Montréal, vous ne pouvez pas y aller, puisque c'est un domaine spécifique, là, c'est dans vos connaissances précises.

Le Président (M. Paquet): M. Desmarais.

M. Desmarais (Louis): Je vais demander à Natalie, qui en fait beaucoup, de mentorat, de répondre à cette question-là.

Le Président (M. Paquet): Mme Giroux.

Mme Giroux (Natalie): Je pense qu'un des points importants, c'est qu'on soit assez près des compagnies. Donc, on regarde définitivement les compagnies à Québec parce qu'il y a beaucoup d'expertise, dans le domaine de l'optique, qui est très intéressante pour nous. On regarde aussi des compagnies à Trois-Rivières qui ont beaucoup d'expertise dans le sans-fil, par exemple. Mais l'important, c'est qu'on puisse facilement se rendre à eux, et leur parler, et les voir au moins une fois par semaine, au minimum. Donc, là, si on regardait des compagnies qui sont en Gaspésie ou des régions tellement éloignées, ça rendrait notre mentorat beaucoup plus difficile. Quand Louis parlait plus tôt que... On ne peut pas seulement faire ça par téléphone ou par courriel, il faut vraiment être là, avec les entrepreneurs, à tous les jours, à toutes les semaines, pour les aider. On fait partie de leur équipe, finalement.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui, mais ma question n'était pas vraiment sur les entreprises en démarrage, mais en expansion. Ils ont déjà un produit, ils offrent déjà quelque chose. Peut-être que maintenant ils veulent prendre de l'expansion. Alors, est-ce que vous avez les mêmes contraintes ou les mêmes processus à l'effet que, une fois par semaine, vous allez les voir, même s'ils sont en expansion?

Le Président (M. Paquet): Mme Giroux.

Mme Giroux (Natalie): C'est parce que, une fois qu'ils sont rendus à ce stade-là, le problème vient à lever les capitaux pour l'expansion. Donc, on regarde à des rondes de financement qui sont beaucoup plus avancées et beaucoup plus grosses, et, à ce moment-là, on va souvent chercher du financement aux États-Unis, puis là c'est les investisseurs des États-Unis qui ont des contraintes à avoir des compagnies où ils peuvent, eux, facilement accéder, où est-ce qu'il y a un aéroport assez gros, donc c'est facile pour eux d'avoir accès... Donc, Québec, la ville de Québec, c'est une région qui est propice à ça, Montréal, évidemment. Les autres régions, c'est de plus en plus difficile.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé, ça va? Alors, M. le ministre.

M. Audet: Je voudrais, M. Desmarais, madame, vous remercier de votre présentation. Je pense que ça nous permet de voir un peu mieux comment fonctionne la dynamique d'une entreprise comme la vôtre effectivement quand vous intervenez. Et ce que je pense qu'il faudrait souhaiter, c'est que vous trouviez la façon de... Je comprends que vous êtes intéressés essentiellement à Montréal, mais, à partir de Montréal, on peut certainement aller chercher des projets aussi dans des régions. C'est un peu le défi qu'on s'est donné ici, alors il faudrait peut-être voir un peu comment justement vous pourriez peut-être, vous, avoir plus d'information sur les entreprises en région.

Et je suis tout à fait d'accord avec vous qu'il y a peut-être un bassin plus important à Montréal, mais je trouve un petit peu surprenant qu'on ne puisse pas trouver une façon d'aller chercher justement plus d'information sur les projets qui existent en région. Surtout quand on en choisit un sur 100, évidemment ça ne fait pas une proportion importante, donc... Et en même temps bien ça montre en même temps que le capital de risque, c'est un défi considérable, particulièrement quand on veut élargir, comme on veut le faire, la base du capital privé. Alors, moi, je vous remercie beaucoup de votre participation.

Le Président (M. Paquet): Au nom de la commission, M. Desmarais, Mme Giroux, nous vous remercions ? de Skypoint Capital Corporation ? pour votre participation à nos travaux. Je suspends les travaux quelques instants pour permettre aux prochains invités de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 15 h 46)

 

(Reprise à 15 h 51)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant M. Serge Lapierre, président de CanUsa Capital. Alors, M. Lapierre, vous disposez d'environ 15 minutes pour faire votre présentation, qui sera ensuite suivie d'une période d'échange avec les membres de la commission. M. Lapierre, vous avez la parole.

CanUsa Capital

M. Lapierre (Serge): Je vais débuter par une présentation de CanUsa juste en ouvrant une parenthèse. Pour nous, l'aspect monétaire, ce n'est pas le problème en tant que tel au niveau de l'entrepreneurship québécois. CanUsa Capital est une firme spécialisée dans le développement et le financement d'entreprises. CanUsa s'implique aussi dans le démarrage, et nous participons à l'expansion d'entreprises existantes. Notre firme a des tentacules auprès de 71 firmes en capital de risque aux États-Unis et quatre en Asie. De plus, trois banques américaines, deux banques étrangères et une dizaine d'investisseurs privés font partie de nos partenaires.

Durant cette présentation, vous constaterez que les pratiques québécoises en capital de risque sont différentes de celles pratiquées aux États-Unis et en Asie. Au cours des 54 derniers mois, nous avons transféré pas moins de 79 projets à l'extérieur du Québec. En termes d'emplois actualisés au 10 mars 2004, nous comptabilisons 6 011 emplois perdus pour le Québec. De ce nombre, nous n'avons pas été en mesure de comptabiliser les emplois transférés par deux firmes montréalaises spécialisées dans ce domaine.

Actuellement, CanUsa Capital tente de réaliser quatre projets dans notre province, qui représenteront, à moyen terme, 323 emplois. Nous croyons que le succès escompté à la réalisation de ces projets au Québec sera mitigé. Pourtant, au cours des huit dernières années, nous constatons que Québec a dilapidé pas moins de 8,4 milliards de dollars dans la gestion et la mise en application de programmes d'aide et l'aide directe dans divers projets, dont 91 % d'entre eux n'existent plus. Que ce soit la Cité du multimédia, la Gaspésia, Magnola, secteur des mines, ADF et les 408 millions des Innovatech et sociétés de capital de risque satellites, Québec a tenté de s'approprier le capital de risque, mais le rendement des investissements s'avère négatif. Même le Fonds de solidarité est particulièrement fier de son rendement de 3 %, dont ses fonds proviennent aussi du gouvernement du Québec. Cependant, aux États-Unis et en Asie, les firmes de capital de risque ont un rendement moyen net de 8 %.

Du capital de risque, Québec contribue aussi à la mise en application de plus de 408 programmes d'aide à l'entreprise privée distribués dans plus de 191 organismes, sociétés de développement et ministères voués au développement économique. Ici, l'éditeur CCH, c'est très connu, ça fait 24 ans qu'il recense les programmes d'aide à travers le Canada. Voici tous les programmes d'aide du gouvernement du Québec. Chaque page correspond à un programme d'aide et sous différents organismes. On a arrêté de compter à 408 parce que, là, on trouvait que c'était beaucoup. C'est pour ça qu'on peut établir facilement qu'il y en a plus que 408.

La cause de ces échecs économiques est le processus d'attribution de l'aide financière, qui est dépassé et déficient. Comme nous le verrons, elles empêchent même l'émergence de projets avant-gardistes élaborés par des Québécois au Québec. À l'intérieur de cette structure gigantesque, tous ces programmes d'aide ne correspondent plus aux besoins de l'entrepreneurship québécois. Ainsi, que ce soit pour une aide de 100 millions, de 100 000 $ ou de 1 000 $, les acteurs du développement économique au Québec vont exiger un document aussi dépassé qu'inutile, soit le plan d'affaires. Imaginez, un individu qui n'a aucune expérience et compétence en finances, marketing, ressources humaines, en production ou management décide de produire son propre plan d'affaires. Quelle sera la valeur de ce document?

Ce qui est troublant est qu'un ou des analystes appartenant à l'un des 191 organismes, sociétés et ministères utiliseront ce même document pour établir leur décision d'attribution de l'aide financière. Qu'elle soit négative ou positive, quelle sera la valeur de cette décision?

La procédure d'analyse et d'attribution est la même pour tous les acteurs voués au développement économique, ce qui explique le nombre incalculable de programmes d'aide pour éviter les dédoublements. On verra ça tantôt. Par contre, nous constatons qu'il n'en est rien. Que les projets soient du domaine touristique, manufacturier, transports, haute technologie, ils ont tous un point en commun, ce sont des entreprises. Il est inconcevable d'investir du capital de risque dans une entreprise en faillite technique sans y changer quoi que ce soit. On peut parler de la Gaspésia. Il est dépassé de croire que nous pouvons attribuer de l'aide à n'importe qui, à n'importe quoi afin que les budgets des 191 organismes soient intacts pour l'année financière suivante et surtout au nom du développement économique.

Ainsi, j'aimerais vous présenter un patenteux typiquement québécois. Ici, le mois dernier, dans Le Devoir, bon, il y avait un article qui nous résumait le résultat d'une recherche qui disait que, lorsqu'on réchauffe une automobile durant cinq minutes durant l'hiver, les gaz à effet de serre équivaudraient à cinq heures sur une autoroute, le même véhicule. Depuis trois ans, dans la région de Québec, ce problème est réglé. Il y a un Québécois qui a inventé un système qui... Quand vous prenez votre voiture le matin, l'intérieur de la voiture est chaud et le moteur est chaud sans que le moteur ait démarré. Celui qui a inventé ce système-là, il est ici, M. Yvon Morin. M. Yvon Morin, ça fait quatre mois qu'on travaille ensemble, et il est incapable de créer une usine ici ou de créer le développement de son produit ici. Que ce soit dans n'importe... Que ce soit en région, que ce soit à Montréal, que ce soit à Québec, le problème est le même.

Ce que j'aimerais aussi... Malheureusement, le vidéo ne fonctionne pas ici, c'est inscrit «sécurité parlementaire». C'était un extrait d'émission de MétéoMédia qui présentait une éolienne unique au monde. Ça ne se fait pas, cette éolienne-là, dans le monde. Hydro-Québec était supposée de développer cette éolienne-là, mais ils ont engagé un effaceur pour ne pas que cette éolienne voie le jour. La principale caractéristique de cette éolienne est que, lorsque toutes les batteries sont pleines, elle vend l'électricité au réseau à 0,03 $ du kilowattheure. C'est-à-dire que, dans votre maison, si vous avez cette éolienne-là, vous pouvez vendre de l'électricité à Hydro-Québec pour 0,03 $ du kilowattheure. C'est une éolienne qui est capable de prendre 156 km/h de vent sans aucun freinage, sans prendre aucun moteur. C'est un système à turbine. Mais, croyez-le ou non, d'ici deux mois, je vais transférer cette éolienne-là en Californie parce que, ici, c'est impossible de créer ce genre d'usine, ici. Que ce soit en Gaspésie, que ce soit à Rivière-du-Loup ou à Montréal, c'est le même problème. Le problème, c'est qu'il y a beaucoup trop d'incompétence à l'intérieur de ceux qui attribuent l'aide financière. Je parle d'incompétence, c'est-à-dire qu'on n'a pas les ressources. Et elles sont présentes, les ressources.

On va commencer par la petite présentation que j'ai ici sur PowerPoint, mais on n'a pas ce vidéo, malheureusement. Pourquoi nous sommes ici? Le Québec est à un tournant de son histoire. Il y a quatre événements problématiques qui vont collaborer à la détérioration économique du Québec. On parle de la Chine. On sait qu'ils produisent moins cher que nous. Ce n'est pas ça, le problème. Le problème, c'est qu'ils ne reconnaissent aucune propriété intellectuelle. Si vous voulez développer le marché chinois, il faut que vous alliez installer en Chine...

n (16 heures) n

L'application de la ZLEA, c'est que la ZLEA permettra au Brésil d'envahir le marché nord-américain, et le Brésil est le plus gros exportateur de biens agricoles. Fabricants d'aéronefs, ils ont grugé 54 % de Bombardier Aéronautique, et c'est un début. Et ce qui est très problématique pour le Québec, et il va falloir qu'on s'adapte: le Brésil a misé sur l'eucalyptus. C'est un arbre qui produit une pâte et papier équivalente au Québec. Mais le problème, c'est que l'arbre prend de neuf à 12 ans pour être prêt à exploiter. Ici, ça prend de 48 à 50 ans.

L'article 45, c'est deux premiers événements problématiques. Je lance un appel à M. Charest, qu'il modifie au plus tôt l'article 45 sur la sous-traitance, parce qu'on va réussir à sauver 15 % des emplois qu'on va perdre d'ici cinq ans.

Le fleuve Saint-Laurent. Nous sommes liés directement au projet américain de fermer les douanes, entre le Canada et les États-Unis, au transport par camion. Ils veulent creuser le fleuve. Un membre de la commission me posera la question: Qu'est-ce qu'est le développement de l'entreprise?, et on ira là-dessus.

Projets inactifs. Selon nos estimations ? ce n'est rien de scientifique ? il y a entre 48 000 et 49 000 emplois qui traînent dans des tiroirs de cuisine, dans des sous-sols, dans des garages, au Québec. Il faut aller chercher ces projets-là. Il faut aller les chercher. Ce n'est pas à s'asseoir en arrière d'un bureau qu'on va attendre des plans d'affaires, parce qu'à 99,9 % les entrepreneurs québécois ne savent pas faire un plan d'affaires. O.K.?

Au deuxième, voici nos recommandations. Nos recommandations au niveau de l'aide du Québec, ça comprend aussi... On va parler par la suite du capital de risque, proscrire les chevauchements en éliminant tous les programmes d'aide à l'entreprise privée et centraliser à un seul niveau, à l'intérieur d'une seule entité le développement économique. Cette entité n'offrira en partenariat que trois types de financement. Actuellement, il y en a quatre.

Les garanties de prêts devront être converties. Cette conversion va permettre aux Américains de transférer des fonds américains ici. Il faut contourner la Loi des banques canadiennes, par la suite éliminer toute forme de subvention, qui crée plus de dépendance que de développement économique, retrancher les crédits d'impôt aux sociétés de capital de risque FTQ, CSN parce que ces gens-là ne font pas pire mais ils ne font pas mieux que qu'est-ce qui se passe actuellement, ils investissent à la Bourse.

Ensuite, dans une vision d'investissement selon laquelle ce ne sont pas les entrepreneurs mais l'entreprise qui est la source de rendement... C'est ça, le problème, au Québec. C'est qu'on donne de... On se fie sur un plan d'affaires, sur des gens qui ont des intérêts autres probablement que le rendement. C'est que la source de rendement, c'est-à-dire le profit, pour une société de capital de risque, c'est l'entreprise, ce n'est pas l'entrepreneur.

Concentrer le capital de risque vers la rentabilité, calquer le système américain, peut-être l'améliorer un peu. Développer en partenariat le financement d'actif et non d'équité. C'est un gros problème qu'il y a au Québec. Et ensuite les décisions d'affaires dont... va être le résultat d'un processus de développement d'entreprises. C'est-à-dire, comme ceux qui étaient avant moi, il y a des patenteux au Québec, il y a des génies au Québec, mais, le problème, ils n'ont aucune expérience en quoi que ce soit. Et, le problème, on leur donne de l'argent puis on leur dit: Go! vas-y, mon grand! C'est pour ça que tous les projets tombent. C'est pour ça qu'il y a autant de pertes. Il y a 500 millions de pertes de... Et, toutes les autres entités qui font des pertes, c'est qu'on donne de l'argent à des gens qui n'ont aucune expérience.

Le chevauchement. Si on prend la définition, du HEC, du développement économique, ils disent que le développement économique a pour objectif de créer la richesse en consolidant les industries présentes au Québec ? ainsi, le développement de son entrepreneurship. Si on prend deux ministères, le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec et le ministère du Développement économique des régions du Québec, je m'excuse, mais ces deux ministères sont identiques.

Ce n'est quoi, deux?

Le Président (M. Paquet): Deux minutes.

M. Lapierre (Serge): O.K. Bien, c'est... Oui? O.K. On va aller un peu plus vite. Ça fait que, si on prend ces deux ministères, ils sont identiques, c'est-à-dire que les seuls qui diffèrent, ce sont les programmes d'aide au niveau des critères d'admissibilité, et aussi les budgets alloués, et ensuite les 191...

Voici la structure qui coûte 811 millions au gouvernement par année. C'est-à-dire que vous avez des ministères, vous avez 191 organismes, sociétés de développement et autres et vous avez quatre formes: subventions, garanties de prêts, prêts à terme et capital de risque. C'est beaucoup trop.

Pour vous donner une idée comme la structure est énorme, on a rencontré Mme Nathalie Normandeau, M. Jean-Philippe Normandeau et Me Manon Lecours, du cabinet du ministre des Finances et du ministre du Développement régional, au Centre de commerce mondial. Nous avions deux projets pour la Gaspésie d'un total de 462 emplois. Savez-vous ce qu'ils nous ont répondu après une demi-heure? «Nous ne pouvons rien vous apporter à ce stade-ci ? c'est textuel. Il serait préférable de rencontrer les intervenants en Gaspésie. Je vous suggère d'aller voir les CLD, la MRC, les maires de la région, le ministère de l'Industrie et du Commerce, les SADC, le ministère du Développement économique et régional, les députés, les carrefours jeunesse-emploi et autres intervenants de la région.» Pour ce qui est de l'investissement ? parce qu'on demandait un capital de risque de 7,5 millions sur un projet de 37,8 ? ils nous ont dit: «Investissement Québec, la SGF et la BDC combleront la différence.»

Je dois vous avouer qu'on n'avait pas le temps de prendre un mois de vacances en Gaspésie. Et, à partir de ce moment-là, voici ce qu'on propose au niveau de la structure: une seule entité. Une seule entité. Tous les programmes d'aide dans une seule entité, et les seuls critères d'admissibilité pour les entreprises, c'est le rendement. Ce n'est pas au niveau de...

Le problème au Québec, c'est qu'un entrepreneur va dire: Ah! ils donnent 50 000 $ pour ce programme-là. Il a besoin de 300 000 $ pour partir, mais il va adapter son projet, son plan d'affaires pour embarquer dans le 50 000 $. Il a besoin de 300 000 $. Au bout de six mois, ça ne marche plus, il déclare faillite. Vous venez de perdre 50 000 $ au lieu de lui donner le 300 000 $. Toutes, toutes les décisions d'affaires doivent être faites en développement d'entreprises.

Si vous remarquez, il y a trois sortes de financement. Vous avez les garanties de prêts converties. C'est qu'il faut... Comment je pourrais vous expliquer ça? Il faut détourner la Loi sur les banques canadiennes et amener les Américains à investir ici. Ils ne peuvent pas le faire. Par exemple, à Wells Fargo, la banque de Wells Fargo, on a fait ça la semaine dernière, j'ai réussi à avoir 1,7 millions à 3 % d'intérêt. Ça n'existe pas au Canada, vous n'aurez jamais ça au Canada. Mais c'est la seule façon qu'on va être capables d'aller chercher...

Le financement spécialisé, il y a des firmes spécialisées en financement au Québec qui font fortune dans les maisons de facturage, et sociétés de crédit-bail, et tout. Les banques se sont retirées de ça. Et le capital de risque, bien, comme je vous dis, même si on mettait 1 milliard, 500 millions, 300 millions, si le mode d'attribution ne change pas, vous allez avoir des pertes par-dessus des pertes et par-dessus des pertes.

Quand on donne un crédit d'impôt à un contribuable qui investit à la FTQ puis que le Fonds de solidarité investit à la Bourse, c'est quoi qui se passe? C'est quoi, là? Et, quand on donne un crédit d'impôt à un contribuable qui prend un REER à la Banque de Montréal, la Banque de Montréal prend les REER du Québec puis va l'investir à Shanghai, c'est quoi, le problème? Où est le problème dans tout ça? C'est ça, le problème, au Québec.

Maintenant, voici la structure que doit avoir la nouvelle entité. Si vous regardez en haut à gauche, le développement d'entreprises, le développement des entreprises, on n'a pas besoin d'expertise américaine pour dire comment démarrer une entreprise. Ce n'est pas de ça qu'on a besoin. On a besoin des... Les Innovatech nous ont démontré qu'elles sont incapables d'analyser des projets scientifiques. Bien, pourquoi on ne fait pas comme aux États-Unis, incorporer les institutions postsecondaires à l'intérieur d'analyses de projets scientifiques?

À Innovatech de Montréal, il y en avait trois pour analyser les programmes de...

Une minute? O.K., j'ai presque fini, monsieur.

Le Président (M. Paquet): ...consentement des deux partis, on va vous donner un petit peu plus de temps, mais je vous demanderais, s'il vous plaît, dans une minute, de pouvoir compléter. Merci.

M. Lapierre (Serge): O.K. En fin de compte, le financement du développement des entreprises, si vous regardez en bas, les banques américaines sont prêtes à embarquer, on parle à tous les jours à ces gens-là. Les sociétés de capital de risque américaines sont prêtes à venir ici, parce qu'à toutes les semaines il y a un Américain qui atterrit à l'aéroport de Dorval. On appelle ça des éclaireurs. Ils viennent chercher des expertises ici, ils viennent chercher des idées ici. Ils font juste ça. Le Nouveau-Brunswick, ils sont extrêmement actifs par l'entremise d'Albert Girard et Jacques Dubé, le ministre des Développements économiques. Il y a entre 15 et 20 entreprises par année qui partent au Nouveau-Brunswick. On est en retard de 15 ans sur les plans d'affaires des Américains. Les Ontariens aussi sont en avance sur nous autres. Bien là il faut faire quelque chose.

n(16 h 10)n

Moi, quand je vois, dans le journal, les pertes, il faut enlever le capital de risque... Si vous sortez du capital de risque, c'est terminé, le développement économique au Québec, parce qu'un Américain qui va venir ici mettre du capital de risque, il va l'emmener aux États-Unis ou il va l'emmener au Japon.

Et voilà, je n'ai plus de temps.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Merci, M. Lapierre. Alors, je cède la parole au ministre du Développement économique et régional et de la Recherche. M. le ministre.

M. Audet: Alors, merci beaucoup. Alors, écoutez, évidemment je suis un petit peu embêté de commenter, puisque, effectivement, il y a eu beaucoup de choses, des choses qui n'ont pas toujours d'ailleurs... pour lesquelles il n'est pas toujours facile de suivre le cours, parce que vous passez d'un sujet assez...

M. Lapierre (Serge): En 15 minutes, c'est très difficile. Ça, c'est une présentation...

M. Audet: Oui, c'est ça. Non, ça va. Ce n'est pas un reproche, là, c'est simplement pour vous dire que c'est...

Ce qui m'a frappé cependant dans votre présentation, c'est qu'il y a des choses où il y aurait peut-être ? c'est une remarque que je vous fais, là ? des mises à jour à faire, parce que vous avez raison. Quand vous avez dit, par exemple: Le ministère des Régions, le ministère de l'Industrie et du Commerce, ça a à peu près les mêmes fonctions et les mêmes programmes, je vous signale que, depuis décembre dernier, la loi a été passée, mais, depuis qu'on est élus, on a fait un seul ministère qui regroupe Industrie et Commerce, le ministère des Régions, également la Recherche, Science et Technologie et le Tourisme. Donc, je pense qu'il y a eu donc ce travail-là... il y aura donc pratiquement un an que ça a été corrigé.

L'article 45, l'opposition nous le reproche, mais il y a eu un amendement avant les Fêtes également qui a été fait. Donc, il faudrait ajuster la présentation.

Il y a également la simplification, vous avez raison, dans les programmes. On est en train de le faire. Mais une des choses importantes, quand vous notez capitale, effectivement Québec, ça va être un peu le sens du portail précisément qu'on est en train de mettre en place. À défaut de faire un seul guichet unique avec tous les fonctionnaires dans le même édifice, on va le faire sur une base virtuelle, via un site justement qui va regrouper tous les programmes justement et faire en sorte que les entreprises, les entrepreneurs aient accès aux services gouvernementaux via ce site.

Ce qui me frappe cependant, c'est que... Là où j'ai de la misère un petit peu plus, c'est que vous avez dit: On demande effectivement de faire des plans d'affaires, les entrepreneurs ne peuvent pas le faire, et vous dites qu'à la fin, aux États-Unis, ils sont beaucoup en avance sur nous autres sur les plans d'affaires. Donc, est-ce qu'il n'y a pas un travail de support qu'il faut faire? C'est le sens de ma question. J'ai de la misère à comprendre. Nous, on pense qu'il faudrait justement appuyer les entrepreneurs pour bâtir des plans d'affaires, pour intéresser des entreprises de capital de risque précisément ou de financement pour les aider, pour les financer, en quelque sorte. Et bien sûr qu'ils n'ont pas la capacité de le faire eux-mêmes, mais ils peuvent avoir du support. Il y a des programmes qui existent d'ailleurs au ministère pour les aider et qui existent au niveau également des CLD. Est-ce que vous ne pensez pas que c'est un programme... et ce n'est pas bien utiliser les ressources, que de mettre l'accent là-dessus, plutôt que de dire: Les plans d'affaires, c'est dépassé? J'ai de la misère à comprendre. Je voudrais que vous expliquiez un peu plus, là. Je n'ai pas compris ce bout-là.

M. Lapierre (Serge): Je vais vous donner un exemple des CLD.

Le Président (M. Paquet): M. Lapierre, vous avez la parole.

M. Lapierre (Serge): Oh! excusez. Je vais vous donner un exemple des CLD, monsieur. À un moment donné, j'ai une cliente qui m'a dit: Moi, je ne veux pas partir, je veux rester au Québec. C'est une dame de Montebello. Elle dit: Moi, j'aimerais que tu passes... Parce que la dame... O.K., on va aller par étapes, vous allez comprendre qu'est-ce qui se passe.

Mme Raymonde Chartrand, elle est classée troisième comme fromagère de lait de chèvre sur la planète. Ce n'est pas des farces, là. Et, Mme Chartrand, ça fait quatre ans qu'elle se tourne les pouces parce qu'elle n'est pas capable de partir sa fromagerie. Ce serait long à vous expliquer. Elle est venue nous voir. Elle a dit: Serge, tu vas aller au CLD, je veux que tu passes tous les dédales. À un moment donné, on se rend au CLD, on fait le plan d'affaires. C'est-à-dire qu'il fallait faire le plan d'affaires pour le CLD, c'est la clientèle qui paie. Le jeune, c'est un petit jeune à peu près de 24 ans. Bien, il sortait de l'université. Mais je n'ai rien contre les jeunes qui sortent de l'université. Nous, ce qu'on avait fait comme première étape, on a dit: On va partir la fromagerie puis la ferme de 1 000 chèvres.

Le client était World Import Distributor. C'est un des plus grands importateurs aux États-Unis. Le jeune, après une semaine, il appelle la dame, il dit: Votre projet n'est pas viable, madame. Moi, j'étais à Trois-Rivières. Elle m'appelle, elle dit: Serge, elle dit, le projet n'est pas viable. Je m'en vais voir le jeune au CLD, je lui dis: C'est quoi, ton problème? Ah, il dit, écoute, il dit, ton projet n'est pas viable parce qu'il y a juste un client pour ton entreprise. Puis, si le président meurt, qu'est-ce qui va se passer? Je lui ai dit: Écoute-moi bien, mon grand. J'ai dit: Cette entreprise-là, elle est inscrite au Dow Jones. Ce n'est pas une marque de bière, ça. Puis j'ai dit: Même si le président meurt, ça vaut des milliards de dollars. J'ai dis: Informe-toi.

Comprenez-vous ce que je veux dire? Dans tous les CLD, ils n'ont aucune expérience des entreprises. Quand vous dites qu'ils ont des aides pour faire des plans d'affaires, je suis pleinement d'accord avec vous, il vont au carrefour jeunesse-emploi, ils vont lui donner une pile de feuilles. C'est ça, un plan d'affaires. Le monsieur, il n'a pas d'expérience puis il ne connaît pas la finance, monsieur. Comment voulez-vous... Qu'est-ce qu'il va faire? Il va copier les tableaux qu'il y a là puis il va inscrire...

Moi, monsieur, j'ai vu des centaines de fois, au ministère de l'Industrie et du Commerce à Saint-Jérôme: Change le chiffre là, parce qu'à la fin de ton mois tu es négatif. Ce ne sera pas bon pour le comité. Ce n'est pas ça, le développement économique, monsieur. Comprenez-vous ce que je veux dire?

Et les CLD, je m'excuse, mais ça ne sert strictement à rien. Et, le pire, savez-vous ce qui m'enrage le plus? C'est qu'en novembre ils n'ont plus de budget pour personne. Ça fait qu'on paie, de novembre à mars, strictement pour rien, on paie les salaires de ces gens-là. Je n'ai rien contre les gens des CLD, mais ils n'apportent strictement rien au niveau développement économique ? c'est ça que je veux vous faire comprendre ? tandis qu'une seule entité...

Par exemple, quand monsieur est arrivé avec ses inventions, il dit: Serge, je ne sais pas par où commencer. Parce qu'il a d'autres inventions incroyables, cet homme-là. C'est incroyable. J'ai dit: Bon, on va commencer par le commencement. Mais allez donc voir un CLD pour dire: Bien là on veut construire une usine de 50 millions. Vous allez à la SGF. Qu'est-ce qu'ils vont vous dire? Bien, il y a plein de programmes d'aide, va voir. Comprenez-vous ce que je veux dire? Il n'y a personne qui a l'expertise pour dire: Viens-t'en, mon grand, on va partir ça, ce projet-là.

Puis, avant de partir, nous, on ne part pas avec notre baluchon pour faire le tour des États-Unis pour trouver des clients. Ce n'est pas ça, ça ne marche pas de même. On a des contacts partout. Le fameux projet de fromagerie de 1,4 million, il est devenu 38 millions parce qu'on a trouvé trois autres clients pour le lait et pour la viande. La viande, c'est un groupe japonais qui est prêt à acheter la viande, puis, le lait, bien, c'est le Département américain de la santé américaine qui est prêt à prendre le lait. Ils attendent après nous autres depuis un an. On a été obligés de transférer le projet au Nouveau-Brunswick. OCIA, il n'a pas accepté qu'on coupe des arbres. Il est rendu à l'île du Cap-Breton. Bien, le problème, on a...

Il y a un gros problème, au niveau des douanes, qui s'en vient ici. Jack Schwartz a été nommé par George W. Bush pour fermer la frontière transport par camion à travers le Canada. Le fédéral est au courant, tout le monde est au courant puis ils veulent creuser le fleuve pour éliminer le port d'entrée de Montréal puis Halifax pour les transports par camion. Informez-vous. Le fédéral est au courant, M. Paul Martin est au courant.

Mais toutes ces choses-là, c'est que, si on revient au tout début, c'est qu'un monsieur comme lui... Puis il y en a des milliers au Québec. Ils ne savent pas où aller. Je m'excuse, je parle beaucoup, là. Dites-moi-le, si je parle beaucoup.

Le Président (M. Paquet): Oui. Alors, peut-être... Ça va aller? O.K. Alors, M. le député de Johnson.

M. Boucher: Alors, M. Lapierre, bienvenue à notre commission. Vous êtes vraiment unique, là, parce que vous êtes le seul, je pense, qui avez mis en cause le rôle et l'importance des CLD.

M. Lapierre (Serge): ...avec les 191...

M. Boucher: J'aimerais terminer, là. C'est parce que vous avez dit qu'ils étaient tous comme ça. Vous avez parlé d'un jeune de 24 ans. Il peut effectivement y avoir un jeune, mais, tu sais...

Moi, les expériences que j'ai, là, dans ma région ? puis il y a cinq CLD qui couvrent mon comté ? c'est qu'il y a beaucoup de projets qui sont nés par les CLD, et qui sont très viables, et qui vont bien. J'ai cette expérience-là. Je pense que M. le ministre, ici, puis mes collègues députés ont des expériences semblables.

Alors, moi, ma question n'est pas là. Ma question, c'est que vous proposez une centralisation de toutes les sociétés et organismes en une seule entité. Ça veut dire qu'il n'y en aurait qu'une seule?

M. Lapierre (Serge): Une seule.

M. Boucher: Une seule où?

Le Président (M. Paquet): M. Lapierre.

M. Lapierre (Serge): Peu importe la région.

M. Boucher: O.K., une seule. Donc, dans le fond vous enlevez les instruments de développement économique des mains des décideurs et des élus régionaux. Je pense que, là, si le ministre appliquait votre recommandation, il perdrait le pouvoir aux prochaines élections.

M. Lapierre (Serge): Je vais vous expliquer. Dans les régions...

M. Boucher: En tout cas, c'est...

M. Lapierre (Serge): Je peux-tu... Est-ce que je peux répondre?

Le Président (M. Paquet): ...vous adresser à moi lorsque le député a posé une question. Ça va?

M. Boucher: C'est correct, j'ai terminé.

M. Lapierre (Serge): Je m'excuse, je ne suis pas habitué au protocole. C'est pour ça...

Une voix: ...

M. Boucher: Pas du tout! Je ne le souhaite pas, évidemment.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet): Merci, beaucoup, M. le député de Johnson. Alors, c'est enregistré aux galées. M. Lapierre.

M. Lapierre (Serge): Écoutez, les régions, comme je vous... Les projets les plus intéressants qu'on a trouvés, c'est en région. En Gaspésie, là, on va faire un tour en Gaspésie, puis le développement économique, monsieur, ne se fait pas assis en arrière d'un bureau, il faut aller voir les gens. Nous, on n'a même pas un grand bureau, on a un petit bureau de travail, on est quatre, puis on traverse la province de Québec au complet, on parle à tout le monde.

n(16 h 20)n

C'est que, en région, ce n'est pas l'argent, ce n'est pas les décisions, ce n'est pas ça, en région. En région, il y a des gens qui ont des projets, ils n'osent pas parce qu'ils ont un secondaire II, ou ils ont un secondaire III, ou ils n'ont pas de secondaire pantoute puis ils ne savent pas où aller ou comment le faire. Ils sont gênés d'aller au CLD, ils sont gênés d'aller à tel endroit parce qu'ils se sentent inférieurs, ils ne se sentent pas prêts à aller là. Quand un jeune lui dit: Fais-moi un plan d'affaires puis reviens-moi, qu'est-ce que vous voulez qu'il fasse? Qu'est-ce qu'il arrive? Bien, il n'arrive rien. Puis, s'il ne nous connaît pas ou s'il ne connaît pas qui, quoi, comment, ça va arrêter là, il ferme les livres. Dans les structures...

Aux Îles-de-la-Madeleine, il y a un monsieur qui a inventé un nouveau véhicule. Bien là il était pris avec huit programmes, cinq organismes puis trois ministères. Il a fermé les livres puis il a mis ça dans son... on appelle ça des magasins, aux Îles, là, puis ça s'est terminé là.

Le génie en informatique qu'on est en train de... On est en train de sauver l'histoire des douanes avec un M. François Dubuc, de Saint-Hyacinthe, un génie en informatique. Il a créé un nouveau protocole de communication sur Internet. Bien, lui, là, il ne savait pas... Lui, c'est un gars qui est assis devant un ordinateur. Bien, à partir de ce moment-là, lui, une entreprise... Il a créé Active Media, mais ça n'allait pas bien. Pourquoi? Parce qu'il ne connaît pas ça. Tu sais, pas besoin de faire un mentorat, c'est la question que ça prend une société au Québec pour dire: O.K., tu as créé ça, on s'en occupe.

Aux États-Unis, c'est comme ça que ça marche. Cisco Systems, c'est venu au monde comme ça. C'est que c'est parti dans un petit trois et demie. C'est un couple qui a parti ça. Il y a une société en capital de risque qui est arrivée là. Ils ont dit: Nous autres, on prend 50 %, tu prends 50 %. Quand tu ne seras plus capable de suivre, tu t'en vas avec tes 50 %. Aujourd'hui, Cisco Systems vaut des milliards de dollars. Bien, c'est comme ça que ça fonctionne, et, nous, on fonctionne comme ça. Mais, quand on est pris dans des dédales bureaucratiques à n'en plus finir, on prend le projet puis on le shippe ailleurs, on le shippe aux États-Unis.

Il y en a un qui est parti au Japon, il y en a un qui est parti en Chine, qui a créé 600 emplois à Beijing. Pourquoi qu'on ne l'a pas fait ici, le 600 emplois? Pourquoi, après sept mois, j'ai dû me résigner puis dire: Bien, tu t'en vas? Dans deux mois, je vais le transférer aux États-Unis, son projet, puis il en a deux autres. L'éolienne s'en va en Californie. En deux mois, j'avais réussi à aller chercher des ventes de 500 millions canadiens, en deux mois, pour cette éolienne-là. Ça ne finissait plus parce qu'il n'y a personne qui avait l'expertise de dire si cette éolienne-là fonctionnait ou pas. Mais c'était déjà en marche au Brésil. Comprenez-vous ce que je veux dire? Quand on va voir Hydro-Québec, dire c'est quoi, cette éolienne-là, quand Hydro-Québec sait qu'il va produire de l'électricité à 0,03 $ du kilowattheure... Qu'est-ce que vous pensez qu'il s'est passé? Ça ne marche pas, ça. Comprenez-vous ce que je veux dire?

M. Boucher: Je pense que c'est complet, là. Votre réponse me satisfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Bien, moi, j'ai une interrogation à l'égard de votre suggestion concernant... de créer un seul lieu de concentration de tout le capital de risque. Éventuellement, ça va être un monstre qu'on va créer. Il n'y aura pas personne, nulle part, qui sera en interrelation avec les régions.

Vous parlez de la Gaspésie, puis je connais très bien la Gaspésie, j'en viens, et je connais aussi certaines autres régions du Québec. Par ailleurs, nous, on avait mis sur pied, chez nous, pendant que le ministère des Régions existait, des comités de pilotage, c'est-à-dire qui réunissaient tous les intervenants, puis les décisions se prenaient là, et, à ce moment-là, on avait une structure efficace. Autrement dit, lorsqu'on avait à intervenir dans un projet, tous les acteurs de tous les gouvernements ? municipaux, Québec ou central ? étaient présents et les décisions se prenaient là.

Je comprends que vous avez beaucoup de griefs à l'égard du fonctionnement à l'heure actuelle.

M. Lapierre (Serge): ...

M. Lelièvre: Bon, ça peut être justifié lorsqu'on a des problèmes avec un dossier en particulier. Parce que je pourrais vous en apporter, des dossiers aussi qui ont besoin de capital pour décoller. Mais, moi, ça m'est arrivé de demander à quelqu'un: Bien, es-tu prêt à me faire au moins un historique puis une présentation de ton projet, tu sais, pour au moins le présenter en quelque part? Il ne voulait pas, il avait peur de se le faire voler. Bien, tu sais, il y a toujours des éléments, à un moment donné, qui rentrent en ligne de compte, qu'on ne peut pas avoir de contrôle dessus.

Mais j'aimerais ça m'entretenir éventuellement avec vous, là. On pourrait, après la fin de la commission, on pourrait peut-être prendre quelques minutes puis discuter davantage.

Le Président (M. Paquet): Il reste 20 secondes. Ça va?

M. Lelièvre: J'arrête là.

Le Président (M. Paquet): En 20 secondes, M. Lapierre.

M. Lapierre (Serge): 20 secondes? On ne peut pas faire grand-chose en 20 secondes.

M. Lelièvre: Mais on peut réfléchir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lapierre (Serge): Écoutez, quand vous parlez de décisions, O.K., le processus décisionnel dans les régions, que ce soit Montréal, les régions, c'est une question d'argent, c'est une question d'attribution d'argent. On dit: Ça va-tu marcher ou ça ne marchera pas? Puis on donne de l'argent. Ce n'est pas de ça que les régions ont besoin. Je pense que le plus bel exemple, c'est Gaspésia. O.K.? Pour moi, là, ça illustre tout le problème énorme du financement au niveau québécois. O.K.?

Moi, je m'en vais à Trois-Pistoles, là. Samedi, il faut que je sois à Trois-Pistoles. Il y a un monsieur qui m'appelle: J'ai inventé une patente qui fait telle affaire, telle affaire, telle affaire. Le monsieur n'a pas de plan d'affaires, là. Il n'a rien. Il m'appelle ? ça a l'air d'un monsieur assez âgé: J'ai inventé une affaire qui fait telle affaire, telle affaire, telle affaire.

Le Président (M. Paquet): Si vous pouvez conclure. On a déjà dépassé...

M. Lapierre (Serge): Je pars, il faut que j'aille voir.

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Il faudrait que vous concluiez, s'il vous plaît.

Une voix: ...

Le Président (M. Paquet): D'accord. Merci. Alors, au nom de la commission, je remercie M. Lapierre, de CanUsa capital, pour sa participation à nos travaux. Je suspends les travaux de la commission brièvement pour permettre au prochain intervenant, le Pr Louis Bélanger, de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

 

(Reprise à 16 h 29)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant M. Louis Bélanger, qui va procéder à sa présentation. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et ce sera suivi d'une période d'échange avec les membres de la commission. Alors, M. Bélanger, vous avez la parole.

M. Louis N. Bélanger

M. Bélanger (Louis N.): Alors, merci de l'invitation. Est-ce que vous m'entendez bien?

Une voix: Oui.

M. Bélanger (Louis N.): Oui? O.K.

Une voix: Très bien. Merci.

M. Bélanger (Louis N.): Alors, la présentation, elle est... Je viens juste de préparer quelques acétates qui supportent un peu le document que je vous ai fait parvenir. Si vous l'avez parcouru, vous vous êtes rendu compte que c'était assez léger comme présentation, à savoir qu'il y a trois pages, mais... Alors, j'ai essayé de concentrer en quelques pages des observations qui viennent de 20 ans d'expérience dans le domaine de la technologie, mais vues du côté de l'entrepreneur. Alors, j'étais de l'autre côté de la barricade, si on veut, et puis...

n(16 h 30)n

Peut-être un peu de background sur moi-même pour vous donner peut-être un peu d'indices sur l'industrie dans laquelle j'ai travaillé puis qu'est-ce que j'ai fait.

Brièvement, j'ai démarré la compagnie il y a 20 ans. À cette époque-là, j'étais impliqué fortement dans le domaine de la technologie électronique. J'ai beaucoup travaillé dans le domaine du développement, par exemple, des cartes de son. J'ai travaillé beaucoup avec la compagnie Ad Lib, qui est une compagnie de la région de Québec, que vous connaissez peut-être. À cette époque-là, on a donc commencé à travailler avec Ad Lib, et on a par la suite collaboré avec l'entreprise Yamaha. Et, avec Yamaha, bien on a réussi à conclure un travail où est-ce qu'on a développé une puce audio qui a été vendue jusqu'à 100 millions d'unités.

On a beaucoup travaillé aussi pour le Centre de recherches de la défense de Valcartier, au fil des années, et on a récemment conclu des ententes telles que maintenant notre entreprise travaille en Asie, et maintenant les travaux qu'on a faits pour le CRDV nous permettent maintenant d'aller chercher des travaux en Asie que l'on sous-traite au CRDV. Alors, ça vous indique un peu...

La mise en matière que je voulais faire, c'était de vous expliquer un peu d'où je viens. C'est que j'ai beaucoup travaillé dans le domaine, et, maintenant on travaille... On a beaucoup travaillé en Asie, on travaille encore en Asie, encore plus, et tout ce qui fait que l'entreprise existe maintenant aboutit à des ententes de partenariat qui sont très intéressantes.

D'ailleurs, j'arrive d'un voyage en Asie, et la chose que je voulais vous dire... Et je sais qu'on entend beaucoup les gens ici qui arrivent puis qui disent: Bien, il y a tels problèmes puis il y a un paquet de problèmes. Enfin, il y a plein de problèmes, c'est certain, mais la chose que je peux vous dire, c'est que... Avant d'entrer en matière, ce que je veux vous dire, c'est que je reviens ici, au Québec, puis je voulais uniquement vous communiquer le fait que je pense qu'on est une société qui a énormément de potentiel. On est peut-être, je dirais, une des meilleures sociétés au monde en termes de qualité de vie, en termes d'endroit où est-ce qu'on peut vivre.

J'arrive de ma tournée d'Asie. J'ai fait le Japon, Taïwan, la Chine, Séoul et Pékin. C'est fantastique, ce qui se passe là, mais je peux vous dire que je crois qu'ici on est privilégiés. Et j'irais même jusqu'à dire que, si on réussit à faire quelque chose, à garder le fil conducteur, je pense qu'on est vraiment bien placés pour tirer notre épingle du jeu. Alors, malgré toutes les critiques, malgré toutes les choses négatives et méchantes que je vais peut-être dire ou que vous sentirez que je veux dire, ce que je veux dire, c'est que, ma contribution, je la fais avec un espoir ou un positivisme, dans le sens que je crois qu'on est vraiment bien placés pour tirer notre épingle du jeu. Alors, c'était l'entrée en matière.

Peut-être pour vous donner un peu de background, j'ai beaucoup travaillé dans le domaine. Les programmes avec lesquels j'ai travaillé, j'ai marqué «expérimenté». Je suis un ingénieur, donc j'ai expérimenté un certain nombre de ces programmes-là.

Le premier programme avec lequel j'ai travaillé, c'est un programme qui était l'AQVIR, qui était une agence qui a été fondée au début des années quatre-vingt, qui finalement a été par la suite intégrée à la SDI, qui est devenue Investissement Québec. J'ai aussi travaillé avec les programmes fédéraux, au programme PDME, des programmes au niveau du Québec, le Fonds de développement technologique, un autre programme qui est peut-être peu connu mais qui est un programme qui s'appelle le programme TSAR et qui est le... C'est un programme de contrats de technologie. Et vous verrez que... Je vais revenir un peu sur une suggestion que je propose à la fin de ma présentation mais qui s'inspire beaucoup, là, de ce type de programmes là.

J'ai travaillé pas mal avec la BDC, ou c'est la BDC qui a travaillé avec moi. Je ne sais pas comment on peut le dire exactement, mais en tout cas. BDC, ça a été une expérience intéressante mais parfois difficile. Fonds de solidarité, on a discuté, on a beaucoup négocié, on n'a jamais rien conclu. Finalement, j'ai conclu des ententes avec Innovatech.

Et par la suite bien on est allés à la Bourse, donc notre entreprise est cotée en Bourse. Alors, vous pouvez voir que... ou vous pouvez peut-être juger que je vais probablement avoir un faible pour le capital privé, parce que, là où on a réussi à avoir du financement, ça a été avec du financement à la Bourse. Par contre, vous pouvez imaginer que ça a été très difficile les deux dernières années parce que ce qui est arrivé, c'est qu'on est allés à la Bourse, mais là, comme la Bourse a un peu comme tombé sous nous, alors on a eu le problème qu'on était entre deux chaises: on était à la Bourse, mais il n'y avait pas de capitaux disponibles à la Bourse à cause des marchés, et les entreprises de capital de risque publiques n'étaient pas intéressées à investir chez nous parce qu'on était à la Bourse. Alors, on était entre deux chaises. Alors, on a eu une passade très difficile, au cours des deux dernières années, à cause de cette situation-là.

Donc, c'est à peu près tout, je dirais, comme présentation, ou mise en situation, et je voulais, dans mon document, aller tout de suite à l'essentiel, si vous voulez, pour vous présenter des recommandations qui viennent des observations que j'ai pu faire, là, au fil des années.

En passant, j'ai deux versions de mon mémoire. Si c'est marqué «Version 2» en bas...

Une voix:«Version révisée».

M. Bélanger (Louis N.):«Version révisée»? O.K. Parce que, sur la première version, il y avait quelques petites coquilles qui s'étaient glissées dans le document.

Bon. Alors, au fil des années, là, les meilleures interventions, je dirais... J'ai envie de me comparer à un patient. On était le patient, donc on subissait des interventions, si on veut. Les meilleures expériences que j'ai eues, c'est lorsqu'il y avait un intervenant qui avait eu de l'expérience dans le domaine d'affaires. O.K.? Et puis, le dernier intervenant l'a dit, je n'étais pas là au début de sa présentation, mais... c'est bête à dire, mais quelqu'un qui arrive chez un entrepreneur puis qui arrive avec du capital ou quoi que ce soit... Ce que j'ai vu, c'est que, s'il n'a pas un background d'entrepreneur, il a comme un problème, il ne comprend pas la situation de l'entrepreneur.

Évidemment, l'intervenant idéal ? c'est ce que j'ai marqué là ? c'est un ex-entrepreneur qui a travaillé dans le même domaine d'intervention. Alors, c'est lui qui, je dirais, est l'intervenant principal. C'est un peu idéaliste, mais c'est l'intervenant idéal. Mais ce n'est pas évident, j'en conviens, de trouver ce genre de personne là, mais c'est, je dirais, l'intervenant qui est celui qui devrait être favorisé.

Et puis, dans mes conclusions, bien peut-être que j'ai un peu d'avance, mais c'est ça qui m'amène à penser que je serais assez d'accord avec l'idée de simplifier l'offre du capital de risque parce que, si on simplifie, ça veut dire qu'on va «pooler» les meilleurs. Je pense que, si on veut que les interventions soient bien faites, c'est bête à dire, mais ça va être sur la qualité des personnes qui font l'intervention. Alors, ça prend les bonnes personnes, puis il n'y en a pas beaucoup, donc c'est mieux de les «pooler» dans un organisme, et la qualité des interventions va être reliée à la qualité des personnes qui vont intervenir sur différents dossiers. Parce que, on l'a vu, on a tous nos histoires d'horreur de personnes qui arrivent pour intervenir sur un dossier, puis l'entrepreneur, il dit: Bien, il ne comprend rien, ça ne se peut pas, tu sais, je veux dire. Mais il arrive avec un autre background, il n'arrive pas avec le background de l'entrepreneur. Il ne comprend pas.

Le légalisme, c'est mon deuxième point. Au fil des années, j'ai vu évoluer, là... C'est comme exponentiel, la complexité des ententes qu'on a à avoir avec les firmes de capital de risque. C'était 10 pages en 1980, au début des années quatre-vingt, et puis après c'est devenu un binder ça d'épais pour un prêt de 500 000 $ avec un organisme que je ne nommerai pas et pour lequel finalement il y a un niveau de complexité et de légalisme qui était faramineux, qui était inexplicable. Des «closings», là, où est-ce qu'on signe 3 000 pages de papier pour un prêt de 500 000 $, ce n'est pas des blagues, je l'ai vu. O.K.? Donc, il y a une enflure de ce genre d'affaires là.

J'ai même vu pire que ça. J'ai vu des ententes de financement avec trois, quatre organismes publics, chaque organisme public avait son groupe d'avocats, et puis il fallait signer comme si on faisait quatre «closings» en même temps, même si on en faisait un. Alors, c'était 3 000 fois quatre pages à signer... initialer toutes les pages. Donc, tout ça pour vous dire qu'il faut simplifier ce genre d'affaires là, ça n'a pas d'allure. O.K.?

n(16 h 40)n

C'est pour ça que mon troisième point, c'est... C'est pour ça que je proposerais qu'il y ait probablement, dans chaque dossier, un seul intervenant de capital de risque, un seul intervenant public de capital de risque pour limiter les situations où est-ce que j'ai vu qu'ils étaient plusieurs intervenants en capital de risque publics, et puis ça compliquait plus que d'autre chose, puis je dirais que ça ne donnait pas grand-chose d'avoir une diversité parce qu'ils se parlaient entre eux autres. Donc, la diversité ou la compétition qu'on pourrait imaginer dans différents organismes publics, elle n'existe pas, elle créait juste de la complexité.

Jumeler les interventions publiques-privées, c'est un peu l'évidence. Mais comment est-ce qu'on pourrait jumeler ça? C'est que, dans mon texte, j'ai suggéré une couple d'approches où finalement le... C'est-à-dire que, toute intervention, il devrait y avoir un jumelage, c'est-à-dire qu'il devrait y avoir une firme de capital de risque publique qui prend une partie, qui prend peut-être plus de risques, mais dans laquelle on a un jumelage avec une firme privée qui, elle, va amener une autre dynamique. Alors, s'il y a un jumelage à faire, s'il y a un dédoublement, bien c'est peut-être un seul public et puis le nombre qu'on veut de privé, mais ils vont tendre à être un ou deux. J'irais jusqu'à dire que, si on veut parler de jumeler public et privé, je proposerais peut-être même d'imaginer que les interventions privées pourraient être jumelées avec des gens qui ne sont pas nécessairement des investisseurs privés. Ça peut être un distributeur étranger, ça peut être quelqu'un qui est dans le domaine, qui va être impliqué puis qui pourrait avoir un intéressement au dossier. Ça, c'est quelque chose qui pourrait peut-être être d'intérêt.

L'autre point que je voulais amener, c'était le marché de la technologie. Bon, peut-être que la plupart des gens vont être d'accord avec ça, mais j'ai déjà vu typiquement des gens qui arrivaient avec un peu le modèle, que je dirais, classique: Oui, bien, écoutez, développez votre marché au Québec, au Canada, après ça allez aux États-Unis, puis après ça bien vous irez peut-être en Europe et puis peut-être en Asie. Ce modèle-là, moi, je pense que ce n'est pas comme ça qu'il faut travailler. Il faut vraiment viser le monde, et j'irais même jusqu'à dire qu'il faut d'abord viser l'Europe et l'Asie avant les États-Unis. Là, c'est peut-être un peu... les gens vont peut-être vouloir discuter de cette chose-là, mais j'ai vu beaucoup, dans le domaine de la technologie, que les Européens et les Asiatiques sont des adopteurs plus précoces de technologies, plutôt que le marché américain. Est-ce que c'est vrai dans tous les domaines? Bien, dans notre domaine, c'est ce qui s'est passé, j'ai souvent vu beaucoup plus de dynamisme dans les marchés européens et asiatiques. Ce que ça veut dire, c'est qu'il ne faut pas viser le pattern standard qui est: Canada, États-Unis, après ça le monde. Ce n'est pas comme ça qu'il faut fonctionner dans ce que j'ai vu.

Le sixième point, c'est un point que je qualifierais de très important, qui est un peu mon cheval de bataille. C'est ce que je répète depuis des années. J'en ai parlé à des entrepreneurs dernièrement, puis c'est ce qu'ils croient qu'il manque, ou enfin c'est un aspect important qu'il manque, et c'est quelque chose qu'on connaît très peu au Québec. C'est que, dans la plupart des pays où on veut développer une industrie technologique... Et puis c'est un peu ça dont on parle ici. Si on parle de voir le gouvernement du Québec qui investit ou qui met du capital public pour développer les entreprises de technologie dans beaucoup de pays, ou en fait la majorité des pays leaders dans le domaine, que ce soient les États-Unis ou l'Europe, il existe des programmes, je le dis de façon un peu compliquée, là, mais des mécanismes d'intervention indirecte sur la base de contrats de développement technologique pour faire...

Une minute? O.K.

Alors, pour rendre la chose plus claire ou donner un exemple, les Américains ne sont pas allés sur la lune avec des subventions, avec des VC, ils sont allés sur la lune en donnant des contrats de technologie. On a créé la Baie James en donnant des contrats. Alors, si on veut vraiment développer le monde de la technologie ou de l'entreprise technologique ? on parle de l'entrepreneuriat ? sans dire: On passe à une autre approche, on devrait peut-être essayer de mettre en place des mécanismes qui donnent des contrats de technologie, des contrats de développement aux entrepreneurs. Et ça pourrait faire une dynamique intéressante avec les programmes d'investissement public par capital de risque.

Évidemment, c'est un grand dossier qui pourrait prendre beaucoup plus de temps, mais j'ai différents documents que j'ai présentés. J'ai présenté aussi un document, le printemps passé, à cet effet-là. Ceux qui sont intéressés, j'ai des documents qui appuient ou qui explicitent un peu cette demande-là.

Les transitions de politiques, bien, moi-même, j'ai vécu quelques dossiers assez désastreux dans le domaine des transitions. Le gouvernement change, on fait un moratoire et... bien là on met sur la glace un paquet de dossiers. Ça, au moins deux, trois fois dans ma carrière d'entrepreneur, j'ai vécu des histoires d'horreur à ce niveau-là. Alors, je pense que c'est quelque chose qu'il faut vraiment faire attention...

En termes de conclusion...

Le Président (M. Paquet): Très rapidement, s'il vous plaît.

M. Bélanger (Louis N.): Pardon? Oui.

Le Président (M. Paquet): Très rapidement, s'il vous plaît.

M. Bélanger (Louis N.): Bon. Alors, comme j'ai dit, je suis d'accord avec la simplification de l'offre, je suis d'accord avec le rapport Brunet en ce sens-là, il faut le jumeler avec du capital privé. Je suis peut-être moins d'accord avec l'idée de... Dans le cas d'Innovatech, enfin on propose de tout concentrer avec Investissement Québec, puis, Investissement Québec, de ce que j'ai cru, on ferait uniquement des prêts ou des... oui, finalement des prêts participatifs. Peut-être que, moi, je garderais Innovatech pour le capital de risque, mais je simplifierais. Je garderais Innovatech ou un autre, mais un seul organisme qui fait vraiment de l'investissement.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Alors, merci, M. Bélanger. Effectivement, vous avez fait plusieurs suggestions intéressantes. Quelques observations, parce que je voudrais faire quelques petits commentaires, cependant. Quand vous disiez «un seul intervenant public de capital de risque», on a entendu, ce matin, des gens du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui sont venus justement nous dire le contraire, qu'il faut avoir beaucoup d'organismes en concurrence, justement, parce qu'ils disent: C'est de la concurrence que les gens des entreprises ont plus de choix. Je veux dire, c'est un peu ça, ce matin, là, qui a été un peu évoqué. Donc, ce serait intéressant de voir vos commentaires là-dessus, pourquoi est-ce que vous voyez un seul intervenant public de capital de risque. Bien, quand on dit «public», ce matin, on évoquait le fait qu'il y ait plusieurs fonds du type du Fonds de solidarité ou du Fondaction dans les régions, justement avec des bénéfices fiscaux comparables.

L'autre sujet, je remarque qu'effectivement vous êtes assez favorable à l'idée de jumeler les interventions publiques-privées, notamment via les fonds d'investissement régionaux, et donc l'idée de faire un arrimage entre les deux. Je pense que c'est intéressant.

Là, où vous avez... effectivement vous évoquez également des mécanismes pour simplifier l'offre ? bon, bien sûr ? mais également balancer les mécanismes, vous dites, avec les contrats de développement technologique. J'apprécierais un petit peu avoir plus d'explications sur ce que vous entendez par contrats de développement technologique, comment on peut donner des... Évidemment, vous parlez de la Baie James, vous parlez des contrats évidemment dont on connaît le début et la fin. Qu'est-ce que vous entendez par contrats de développement technologique? J'avoue que j'ai de la misère un peu à comprendre comment on peut faire des contrats de développement technologique avec un début, une fin et un devis. Par définition, le développement technologique...

On l'a vu seulement que dans le fameux contrat GIRES où on est parti avec une conception puis on a abouti, à la fin, avec un projet qui n'est pas terminé, finalement, parce qu'il y a justement du développement qui se fait à partir du projet lui-même. C'est cet aspect-là. Puis, comme vous êtes précisément dans ce filon-là, puisque vous êtes entrepreneur technologique, j'ai de la misère à comprendre un peu ce que vous voulez dire par des contrats technologiques.

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Louis N.): Oui. O.K. Bien, justement j'ai un acétate là-dessus. Alors, j'étais prêt à... Pour ce qui est de la compétition entre les entreprises de capital publiques, moi, je vous le dis, elles n'existaient plus. Dans la dernière année, là, elles n'existaient plus, ils se parlaient entre eux autres. Alors, il n'y en avait plus, de compétition. Donc, peut-être que les gens ne sont pas tous d'accord avec ça, là, mais, moi, j'ai vu qu'il y avait une espèce de dialogue entre ces gens-là qui faisait qu'il y avait...

M. Audet: Alors, votre constat, c'est que... Excusez-moi. Donc, votre constat, c'est que les mécanismes actuels font que le capital de risque actuellement... Ces entreprises qui sont dans ce secteur-là se parlent, et c'est le constat qui a été fait par des observateurs un peu externes, finalement, qu'à la fin, quand il y en a un qui a refusé un projet, les autres sont amenés à le refuser. Est-ce que c'est ça que vous voulez dire? Oui?

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Louis N.): Oui. Alors, pour ce qui est des mécanismes de recherche, de contrats de recherche, ce qui se fait beaucoup ? et c'est pour ça que, dans la suggestion que j'avais faite, c'était de créer un genre d'agence de développement régional ? c'est que ce sont des appels d'offres de nature thématique. O.K.? Par exemple, ça se fait beaucoup en Europe, ça se fait sur une base, je dirais... C'est peu connu, là, mais ça se fait sur une base gigantesque aux États-Unis. Quand je dis «gigantesque», là, c'est à coups de milliards, où il y a un organisme qui s'appelle le SBIR ? c'est le Small Business Initiative Research... Industrial Research ? qui donne des contrats thématiques. Alors, ils vont dire: O.K., on va trouver une solution au problème de captage des ondes au niveau de la troisième génération. Je donne un exemple. Alors, ils vont créer un thème, ils vont faire un appel d'offres et dire: Les entreprises qui sont spécialisées dans le domaine, donnez-nous une solution pour ce problème-là. Alors, ça se fait beaucoup en Europe avec le programme ESPRIT, dans le cadre de ce qu'ils appellent les programmes-cadres.

n(16 h 50)n

De façon systématique, ces pays-là financent, si on veut, le développement technologique en donnant des contrats qui sont des contrats assez contrôlés, à savoir que, premièrement, il y a une première phase, une étude de 100 000 $ pour faire l'étude, et puis après ça, si l'étude est bonne, bien après ça il y a un autre concours pour une phase II, typiquement, qui va être de l'ordre de 500 000 $ ou de 1 million, des choses comme ça. Donc, c'est ce que je veux dire. Là, on parle de contrats pour les petites entreprises.

Puis, aux États-Unis, bien c'est vraiment... Actuellement, je dirais, compte tenu de la faiblesse du capital de risque aux États-Unis, le SBIR ? ce sont des programmes financés par DARPA, qui est l'Agence de recherche de la défense ? c'est actuellement la principale source d'argent pour le développement technologique aux États-Unis. C'est le gouvernement qui est redevenu la source du financement technologique. Il ne faut pas oublier que c'est DARPA qui a inventé Internet, qui a inventé... qui a financé, si on veut, le développement d'Internet, etc. Alors, c'est ce que je voulais dire. Ça se fait au Canada anglais. C'est dans la mentalité, je dirais, anglo-saxonne et, je dirais, européenne, de façon générale, de financer, de donner des contrats aux entrepreneurs.

Alors, ce que je voulais dire, c'est que, si on a, d'une part, du capital de risque qui est investi, puis en plus il y a des contrats, bien, à ce moment-là, vous voyez... La problématique qu'il y beaucoup eu dans les dernières années, c'est on investissait dans une entreprise pour développer des produits, mais quel est son marché? Comment on fait pour, par exemple, garder l'équipe en place? J'ai vu souvent... où finalement on faisait du marché puis on disait: On va aller exporter dans des projets qui vont se passer ailleurs. Mais ici, au Québec, il n'y avait pas de marché. Il y a beaucoup de compagnies qui, par exemple... un paquet de compagnies qui ont investi dans les switchs haute vitesse ou des... n'importe quoi, les systèmes de routeurs haute vitesse dans la région de Montréal. Bien, il n'y avait pas de clients ici, il n'y avait pas de possibilité d'avoir des contrats.

Alors, ce que je veux dire, c'est qu'il faut peut-être avoir ce genre de projets là qui vont balancer un peu, qui... C'est un peu la même poche, mais ça va dynamiser de façon autre le genre d'activités. Puis je crois même... On parle actuellement d'une crise d'entrepreneuriat. Bien, ça pourrait peut-être être intéressant de voir l'impact de ça sur l'entrepreneuriat, parce que, par exemple, ce qu'un entrepreneur n'aime pas avec des VC, c'est qu'il arrive: Donne-moi ton plan d'affaires, et puis il investit la compagnie, en fait. Il prend un peu le contrôle de la compagnie.

Si on y va par des firmes, par des contrats de technologie, bien la compagnie va développer au niveau technologique, et puis là ce n'est pas de l'investissement, c'est un contrat. Il y a même des ententes... Aux États-Unis par exemple, le contrat prévoit que, s'il y a des retombées commerciales suite au contrat de développement, bien le gouvernement va avoir des royautés. Alors, tu sais, il y a comme un retour qui peut se faire. Ça fait qu'il peut y avoir un... Oui.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun. Sinon, ça pourrait être au prochain bloc. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je veux bien comprendre, parce que c'est intéressant, ce que vous soulevez comme approche. Ce sont des contrats de recherche. Est-ce que je comprends bien? C'est ça?

M. Bélanger (Louis N.): Oui.

M. Gautrin: Et en quoi c'est différent des subventions de recherche qui sont données? Vous savez qu'on a des organismes subventionnaires pour la recherche. Est-ce que vous plaidez... Est-ce que je comprends bien ce que vous dites? Vous plaidez pour qu'il puisse y avoir des mécanismes pour subventionner la recherche, disons, pas uniquement pour des chercheurs universitaires ou collégiaux, mais aussi pour les entreprises? Est-ce que c'est ça, votre approche?

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Louis N.): C'est ça, mais... C'est très différent. Si on a une subvention du MIC pour développer un bidule, bien c'est à 50 % des coûts, et puis ils vont nous dire: Donnez-moi votre plan d'affaires.

Une voix: ...

M. Bélanger (Louis N.): Donc, quand on... une subvention, c'est une approche vraiment différente.

M. Gautrin: Non, non, je comprends, Mais, moi... Non, non, je fais référence, si vous me permettez, au mécanisme de subvention de la recherche, particulièrement en milieu universitaire, où, là, il n'y a pas évidemment partage de coûts, etc. C'est un ensemble de subventions qui sont données à des chercheurs individuels ou des équipes de recherche. Est-ce que c'est le même type d'approche, mais au niveau industriel, que vous suggérez?

M. Bélanger (Louis N.): Ce serait peut-être...

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger, rapidement, s'il vous plaît, parce qu'on doit changer de côté.

M. Bélanger (Louis N.): Pardon?

Le Président (M. Paquet): Rapidement, M. Bélanger, puisqu'on doit maintenant céder la parole aux gens de l'opposition.

M. Bélanger (Louis N.): O.K. Oui, mais... Oui, c'est des mécanismes similaires.

M. Gautrin: Non, non, ce serait probablement intéressant qu'on puisse continuer à échanger sur ce sujet-là, d'ailleurs.

Le Président (M. Paquet): Oui. Oui. M. le député de Johnson.

M. Boucher: Bonjour, monsieur. Je suis très heureux de vous accueillir ici. Votre présentation est intéressante, d'autant plus que vous avez une expérience terrain, hein? Vous n'êtes pas à 30 000 pieds d'altitude, vous, là; vous êtes sur le terrain et vous avez réussi des belles choses, je pense. Je vous félicite.

Moi, j'aimerais ça que vous me parliez un peu plus du capital de risque en haute technologie. La plupart des intervenants qui sont venus ici nous ont dit: Si l'État est présent dans l'amorçage et le démarrage des entreprises, dans la recherche, c'est que le privé n'est pas là. L'entreprise privée a besoin de gains rapides; le capital de risque qui vient de l'État est plus patient. Alors, le rapport Brunet, lui, propose de créer un fonds mixte public-privé pour les entreprises de haute technologie en phase d'amorçage et de démarrage. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Louis N.): Bien, oui, vous avez raison de dire que, si c'est trop loin, bien le capital privé va peut-être hésiter à investir. Je crois que, si c'est le cas, il faudrait que le public ait la prépondérance si c'est dans les phases préliminaires, je dirais. Il y a peut-être...

M. Boucher: Préliminaires.

M. Bélanger (Louis N.): Oui, c'est ça. Par exemple, si je me base sur notre vécu, on a commencé la compagnie avec une subvention de l'AQVIR, dans le temps, qui était...

M. Boucher: Une subvention de?

M. Bélanger (Louis N.): De l'AQVIR, l'Agence québécoise de... Bon.

M. Boucher: O.K.

M. Bélanger (Louis N.): Et ça, on était vraiment en aval, là, au niveau de la recherche. Donc, je ne suis pas sûr qu'il y a des compagnies privées qui auraient agi à ce niveau-là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson.

M. Boucher: O.K. Oui. Ici aussi, il a été beaucoup question des sociétés Innovatech, et il y a beaucoup d'intervenants, surtout en région, qui souhaitent qu'on garde les sociétés Innovatech, même qu'on les développe davantage. Par contre, le rapport Brunet, lui, il propose de les abolir dans leur forme actuelle et d'en créer une seule éventuellement ou quelque chose qui ressemble à ça. Est-ce que vous... Vous avez fait affaire avec une société Innovatech, vous m'avez dit ça.

M. Bélanger (Louis N.): Oui.

M. Boucher: Et ça a marché?

M. Bélanger (Louis N.): Oui.

M. Boucher: O.K. Alors, compte tenu de votre expérience, compte tenu de la proposition du rapport Brunet, là, pensez-vous qu'on devrait les abolir?

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Louis N.): Moi, je ne pense pas, parce que ce que j'ai vu dans le rapport Brunet, c'est qu'on les abolit puis on transfère la responsabilité à Investissement Québec. Puis ce que j'ai cru comprendre, c'est qu'Investissement Québec va uniquement faire du prêt participatif. Ça fait que, là, il n'y en a plus, d'investissement. Est-ce que j'ai mal compris ou... Ce n'est pas tout à fait... En tout cas, bref ma compréhension, c'est: on devrait garder au moins un organisme public qui investit, qui ne fait pas des prêts, parce que les prêts participatifs, les garanties de prêts, tout ça, c'est une autre affaire, c'est une autre mentalité.

Puis effectivement j'ai eu des garanties de prêts d'Investissement Québec, et puis ils sont un peu comme spécialisés là-dedans. Donc, ça, on travaillait avec les garanties de prêts. Puis les garanties de prêts, bien c'est des programmes plus comptables, tandis que l'investissement, c'est vraiment une autre équipe, là. Donc, c'est une autre approche. Il doit y avoir, que ce soit Innovatech ou que ce soit Investissement Québec-Investissement réel plutôt que... Parce que Investissement Québec devrait s'appeler Garantie de prêt Québec, plutôt, là, tu sais. Ils ne font pas tellement d'investissement, ils font de la garantie de prêt. Est-ce qu'on continue à appeler ça Innovatech, ou on... Enfin, je ne sais pas, mais j'ai cru comprendre que les mécanismes d'investissement ne seraient plus... c'est-à-dire qu'il n'y aurait plus l'équivalent d'Innovatech au niveau de l'action gouvernementale.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson.

M. Boucher: O.K. Moi, une dernière question de ma part, là. Toujours en me référant à votre expérience terrain en pensant à la présence du gouvernement dans le capital de risque, j'aimerais ça que vous me disiez si vous êtes d'accord avec la recommandation faite par certains intervenants de ne plus accorder d'incitatifs fiscaux pour attirer le capital de risque privé.

Le Président (M. Paquet): M. Bélanger.

M. Bélanger (Louis N.): Non, je pense qu'il faut les garder.

M. Boucher: Il faut les garder?

M. Bélanger (Louis N.): Oui.

M. Boucher: Avez-vous une expérience positive dans ce sens-là?

M. Bélanger (Louis N.): Bien, les incitatifs fiscaux qu'on voit, c'est au niveau, par exemple, des crédits d'impôt. Les crédits d'impôt, si c'est ça dont on parle... Peut-être que je me trompe. Est-ce que ce sont des crédits d'impôt? Des incitatifs au niveau des crédits d'impôt, ça, il faut garder ça, je pense. C'est très important. Les incitatifs fiscaux...

M. Gautrin: Bien, c'est des crédits d'impôt.

M. Boucher: Crédits d'impôt?

M. Bélanger (Louis N.): O.K. Pour l'investissement privé, ça n'existe pas, ça, je pense.

M. Boucher: Non, non, mais, par exemple...

M. Bélanger (Louis N.): Un genre de... O.K., un dégrèvement fiscal...

M. Boucher: ...le fonds de la FTQ.

n(17 heures)n

M. Bélanger (Louis N.): Bien, moi, le fonds de la FTQ, honnêtement j'amalgame ça à Innovatech, là.

M. Boucher: Vous, vous amalgamez ça à un investissement public?

M. Bélanger (Louis N.): Oui. Je le vois vraiment comme ça. À mon sens, c'est...

M. Boucher: Pourtant, ce sont des individus, là, qui reçoivent des crédits d'impôt. Ce n'est pas une société, là.

M. Bélanger (Louis N.): Oui, mais c'est géré en fait par...

M. Boucher: Mais une société privée?

M. Bélanger (Louis N.): Oui. Bien, vous parlez de...

M. Boucher: Le fonds de la FTQ.

M. Bélanger (Louis N.): Bien, c'est privé, mais ce n'est privé, je dirais, que de nom, là. Quant à moi, c'est gouvernemental. Ma relation avec ces gens-là était de nature gouvernementale. J'irais même jusqu'à dire que je les appelais mes... Ils avaient une approche très nomenclaturienne en termes d'approche par rapport au capital de risque. Ce n'est pas du capital de risque privé, c'est du capital de risque géré de façon gouvernementale.

M. Boucher: Je vous remercie.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Johnson. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Bélanger. J'aimerais vous entendre parler un peu des SBIR. Ha, ha, ha! Dans le fond, c'est un modèle américain, cette agence régionale de... ou agence de développement régional.

M. Bélanger (Louis N.): Bon, ça, l'agence de développement régional, c'est un peu ce que j'avais proposé, là, l'année passée, de créer une agence de développement régional. Et c'était de régionaliser, si on veut, les contrats de développement technologique qui sont donnés un peu de la façon dont se donnent les contrats SBIR ou le SBIR américain.

M. Lelièvre: Et cette régionalisation... J'essaie de comprendre.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. J'essaie de comprendre comment ça pourrait fonctionner. Actuellement, bon, il y a une centralisation, les appels d'offres se font au fichier central ici, à Québec, puis tout ça. Mais là, à ce moment-là, si on multiplie les fichiers, il faudrait mettre des critères de quelle nature pour privilégier d'abord les régions? Vous parlez de 100 000 à 200 000, bon, puis, à ce moment-là, plus de 1 million à 2 millions pour les investissements ou les phases d'étude, des choses du genre. À ce moment-là, on s'en irait sur un créneau ou un fichier central, là, national à l'échelle du Québec?

M. Bélanger (Louis N.): Ça pourrait être au niveau régional. Je vais vous donner une réflexion qui m'est venue souvent ces dernières années. J'ai beaucoup participé aux organismes régionaux, puis vous avez vécu, là, les...

M. Lelièvre: CRD, CLD.

M. Bélanger (Louis N.): Non, mais un peu comme les forums régionaux et puis toutes ces choses-là qui avaient été organisées, on parle, dans la région de Québec. Honnêtement, je n'ai jamais vu beaucoup de choses sortir de là. J'ai été le fondateur du groupe d'optique photonique de la région de Québec. On a créé un groupe en optique. À un moment donné, ça a été intégré au pôle de développement technologique, etc., mais dans les faits il ne s'est jamais vraiment... Puis on parlait de synergie puis de collaboration entre les entreprises de la région de Québec, puis tout ça, mais... Et là après ça on se faisait dire: Bien, les régions, il faut que vous vous organisiez, il faut que vous trouviez quelles sont vos forces, quelles sont vos thématiques, quels sont les créneaux que vous voulez privilégier. Alors, tout le monde faisaient leurs devoirs, puis on arrivait avec des créneaux, puis tout ça, et puis ça bien ça devenait des voeux pieux.

Ce que j'avais pensé, c'est que, si on ajoutait à ça une espèce de volet de recherche thématique sur une base régionale ? par exemple, la région de Québec veut devenir ou est un pôle dans le domaine de l'optique ? pourquoi est-ce qu'il n'y aurait pas un appel d'offres dans le domaine de l'optique où est-ce qu'on dit: On va résoudre tel problème dans le domaine de l'optique, puis on fait un appel d'offres, puis, les entreprises de la région qui s'y connaissent là-dedans, faites-nous une proposition? Vous seriez surpris du dynamisme, de la dynamisation puis du partenariat que ça créerait.

M. Lelièvre: Dans le but d'aider... Si vous permettez, M. le Président, dans le but d'aider l'entreprise ou les entreprises qui ont un problème particulier, donc on fait un transfert de connaissances et, à ce moment-là, on recherche la meilleure des solutions.

M. Bélanger (Louis N.): C'est ça, exactement. Mais, en attendant, on fait travailler des entreprises dans le domaine de la technologie.

M. Lelièvre: Oui, c'est ça.

M. Bélanger (Louis N.): Exemple, le réseau Synapse qui a été créé, c'est un réseau qui est un réseau optique. Il n'y a jamais personne... Ça a été un réseau qui a été créé à grands frais par l'État. Il n'y a jamais eu vraiment d'expériences qui sont passées dessus. Bien, c'est sûr que ça a été la période difficile, les deux dernières années. Mais, s'il y avait eu des appels thématiques où est-ce qu'on propose de résoudre tel problème de transmission optique sur le réseau Synapse ? les entreprises de la région qui sont capables de soumettre une solution à ça, bien faites-le... Alors, c'est le genre de chose que je voyais.

C'était l'idée de régionaliser, c'était de faire des programmes de nature thématique au niveau de la technologie et de le faire sur une base régionale pour un peu, je dirais, j'appelle ça huiler les engrenages de toute la coopération régionale, etc. Et puis, aux États-Unis, bien ils appellent ça le «trickle-down». Vous savez, c'est qu'il y a deux approches, c'est qu'on peut gérer le développement technologique en essayant de le contrôler. Je dirais que l'État, le gouvernement du Québec, au cours des dernières années, par des investissements en capital de risque, essaie de contrôler. Tu sais, on investit dans la compagnie, puis on dit: C'est quoi, ton plan d'affaires, puis comment est-ce que tu vas travailler?, puis, bon, on prend l'entrepreneur puis on lui dit un petit peu quoi faire, tu sais. Aux États-Unis, ils font ça aussi avec le VC, mais ils ont aussi l'approche «trickle-down»: on met de l'argent en haut, là, puis on fait dégouliner ça dans le système, puis il y a de la technologie qui va sortir de là, des contrats de développement technologique. Et puis c'est comme ça qu'Internet a été inventé. Alors, les contrats de DARPA ont créé Internet, ont créé les premiers transistors, etc.

Ce que je veux dire, ce que j'essayais d'argumenter, c'est que les mécanismes classiques d'intervention sont très valables au niveau développement technologique. Ils peuvent aider l'industrie de la technologie.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Audet: Oui. Très brièvement, un petit commentaire, une mise au point, puis je vais passer la parole à mon collègue de Verdun qui a peut-être... qui a une autre question à poser avant de terminer. Très brièvement, c'est parce que tout à l'heure vous parliez du rôle d'Investissement Québec versus les Innovatech. Ce qui est proposé, c'est plutôt au niveau des fonds d'investissement régionaux, les FIR. Ce n'est pas au niveau des Innovatech, c'est des fonds d'investissement régionaux. C'est que ça correspond un peu à ce que vous vouliez jumeler, les interventions privées-publiques. C'est précisément ça que fait Investissement Québec. La proposition du groupe Brunet, c'est de dire: Il y aurait... D'abord, Investissement Québec prêterait 2 $ pour chaque dollar qui serait souscrit par des gens justement... par le privé dans les régions pour constituer des fonds régionaux. Donc, c'est ça qui est proposé. C'est là qu'intervient en complémentarité l'Investissement Québec, et non pas en substitution aux Innovatech. Ça, c'est une autre approche où effectivement il y aurait, disons... On cherchait la façon d'attirer du capital privé dans les Innovatech, de diverses façons.

Je ne veux pas entrer là-dedans, mais pour vous dire que, Investissement Québec, c'est au niveau du fonds d'investissement régional qu'ils intervenaient. Et je vais passer la parole à mon collègue de Verdun qui avait une question à vous poser.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vais continuer avec vous sur... parce que je pense qu'on est probablement tous, ici, très intéressés par le développement de la recherche industrielle et du potentiel de recherche industrielle. Donc, je voudrais bien comprendre ce que vous nous proposez. Et, je ne sais pas, vous êtes dans le domaine de l'optique ou en partie? Bon. À Québec, l'État a fonctionné en créant l'INO, sur lequel il y a eu beaucoup d'argent qui a été investi et qui après a été utile en quelque sorte pour développer un certain nombre de compagnies.

Une voix: ...

M. Gautrin: Non, mais... ça que je voudrais savoir. Laissez-moi aller jusqu'au bout, puis après vous allez me faire la critique de ça. Pour développer un certain nombre de compagnies. Du moins, c'est la version officielle à l'heure actuelle. Ça a été à la source en quelque sorte des développements de l'industrie de l'optique à Québec. Alors, première question. Je vous laisse la chance de pouvoir avoir une lecture critique peut-être sur l'INO.

Ma deuxième question, c'est: Lorsque vous suggérez ces contrats de recherche, etc., est-ce que c'est un appel... Par exemple, on prendrait tel ou tel problème. Vous avez pris le problème de la transmission sur Synapse à l'heure actuelle. Est-ce que ceci serait un appel d'offres qui serait ouvert? Toutes les compagnies répondraient, et celle qui serait la meilleure aurait le contrat de recherche, à ce moment-là, et les autres auraient, dans le fond, investi du temps et de l'argent, et du temps de chercheurs peut-être pour rien, ce qui serait.... Est-ce qu'il y a une volonté, à ce moment-là, dans le milieu pour participer? Je vous pose la question. Vous avez l'air de connaître beaucoup mieux que moi ce milieu-là. C'est une approche qui pourrait fonctionner, d'après vous?

M. Bélanger (Louis N.): Oui. Ah oui!

M. Gautrin: Et la critique sur INO, c'est quoi, votre...

M. Bélanger (Louis N.): Ah bien, ma critique sur l'INO, c'est qu'on a créé l'INO pour créer un pôle dans le domaine optique, et le problème avec l'INO, c'est qu'on l'a créé, et on a coupé son financement, puis on lui a dit: Autofinance-toi. Et puis ça, ça a créé un drame. Le drame que ça créé, c'est que l'INO, au lieu d'aider les entreprises, va plutôt devenir un compétiteur aux entreprises. Alors, dans le domaine optique...

Puis là, bon, je vais faire un aparté là-dessus. Si vous me partez sur l'INO, là, on n'est pas sortis d'ici.

M. Gautrin: Non, non, mais...

n(17 h 10)n

M. Bélanger (Louis N.): Dans le domaine optique, dans le domaine optique, la réalité, c'est que les entreprises développent un produit. Je connais un paquet de compagnies qui développent dans le domaine optique, mais, pour vivre, elles vont aussi faire des contrats de R & D. O.K.? Ce n'est pas vrai qu'une entreprise développe un produit, puis elle vend le produit, puis uniquement avec son produit elle va vivre, surtout dans le domaine optique, où est-ce que c'est très complexe. On fait un produit, puis, le client, ce n'est pas tout à fait ça qu'il veut, il veut différer: Bien, peux-tu me faire ça? Peux-tu... Bon. Alors, l'activité de services conseil dans le domaine très pointu de l'optique est une activité importante, mais l'INO, parce qu'on lui a dit: Autofinance-toi, bien l'INO, elle va chercher des contrats dans le domaine, et puis ça, ça crée un problème, là, majeur.

M. Gautrin: Vous soulevez le problème de la compétition indue, en quelque sorte.

M. Bélanger (Louis N.): Oui, oui. Puis, moi, quand on a créé l'INO, j'étais le premier à applaudir. J'ai dit: Parfait, ils viennent de créer un deuxième centre de recherche pour la défense, comme on a à Valcartier, dans la région de Québec. Ça va être excellent. Mais le problème, c'est que ce n'est pas ça; au contraire, c'est un anticentre de recherche où finalement...

M. Gautrin: Et vous suggérez en quelque sorte que la recherche puisse se faire réellement par contrats dans les différentes entreprises et...

M. Bélanger (Louis N.): Non, mais parlons de l'INO, puis on parlera de...

Le Président (M. Paquet): 35 secondes environ.

M. Bélanger (Louis N.): L'INO pourrait... Si l'INO n'était pas perçu comme un compétiteur par les gens de l'industrie, bien l'INO pourrait peut-être même être le maître d'oeuvre d'appels d'offres de recherches thématiques en optique, parce qu'ils connaissent le domaine. Alors, l'INO pourrait dire: O.K., on a un budget et puis on donne des contrats dans tel domaine très pointu de l'optique. Alors, c'est un domaine qui pourrait être intéressant... quelque chose qui pourrait être intéressant.

M. Gautrin: À suivre comme question. On n'a plus de temps, mais j'aurais aimé...

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. M. Bélanger, j'ai lu attentivement votre mémoire. Même s'il est bref, il résume une très grande partie de ce que nous avons entendu au cours des dernières semaines, parce que ça fait plusieurs jours que nous sommes là-dessus. Nous avons aussi pris connaissance, là, de beaucoup d'interventions provenant des CLD ou encore d'autres organismes, et je dois constater que la régionalisation est un aspect important de votre proposition, dans le sens que, quand vous nous parlez des SBIR, je trouve ça intéressant, dans la mesure où ces agences régionales là pourraient créer un milieu, un creuset, hein, pour reprendre une expression qui a déjà été utilisée, un creuset où on verrait jaillir des résultats positifs, très positifs et encourageants au niveau du développement régional et en même temps bénéficier du support.

Ce que vous nous dites dans votre mémoire, dans le fond, et que les autres nous ont dit, c'est que la capacité d'intervention d'un industriel seul ou d'un entrepreneur, souvent elle est limitée, et ça lui prend des partenaires. En démarrage ou même à l'amorce, ça prend des capitaux qui sont là pour faire ce travail-là, une fois qu'on veut donner, dans le fond, corps à cette entreprise-là, et on a eu beaucoup de suggestions à cet égard-là de la part des intervenants, et vous semblez aussi aller dans cette direction.

Je regarde au niveau des... Par ailleurs, au niveau des intervenants, vous, vous suggérez un seul intervenant public pour faciliter les choses. Dans les centres locaux de développement, il y a des fonds parfois qui vont aider une petite entreprise à démarrer, même à amorcer le projet, et ce qu'on appelle les SOLIDE va venir se rattacher aussi à ça, et par la suite on s'en va dans les fonds régionaux carrément, là ? on parle des fonds régionaux ? et je trouve que votre intervention ici, devant la commission, résume une très grande partie de ce qu'on a entendu, dans des mots simples, précis, concis, mais c'est clair.

C'est un peu ce que vous demandez aussi lorsqu'on fait des contrats, qu'il faudrait diminuer l'enflure au niveau légal qu'on retrouve dans les... Ça me surprend énormément que vous ayez à signer quand même, là, 3 000 feuilles ou à initialiser 3 000 feuilles sur un contrat pour une transaction, mais c'est quand même très particulier de vivre, dans le domaine des affaires, une bureaucratie aussi lourde. Moi, je ne pouvais pas imaginer que ça se faisait et je suis avocat de formation. Je sais que les notaires ont une certaine habitude à faire beaucoup de papiers dans leurs contrats, les avocats aussi parfois, mais, de là à constater qu'il y a 3 000, dans le même contrat, 3 000 pages, c'est beaucoup à authentifier.

Alors, moi, M. le Président, je vais conclure. Merci beaucoup. Je vais conclure là-dessus en vous disant merci, M. Bélanger, et d'autre part que nous allons certainement réfléchir et regarder les conclusions que le ministre va tirer du rapport de la commission éventuel qui traitait du capital de risque et particulièrement du développement des régions.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Gaspé. Alors, M. le ministre, en 50 secondes.

M. Audet: Je vais prendre quelques secondes simplement pour remercier M. Bélanger. Je pense que c'est une perspective intéressante parce que, vu sous l'angle de l'entrepreneur, c'est intéressant. On l'avait vu, avant, beaucoup vu sous l'angle soit des entreprises qui oeuvrent dans ce secteur-là ou des entreprises elles-mêmes, et, vu sous l'angle de l'entrepreneur technologique, vous nous faites réfléchir effectivement à un modèle, là, qu'il peut être, je pense, intéressant d'examiner justement pour le développement technologique et le développement du capital de risque qui y est lié. Alors, on vous en remercie beaucoup et puis on aura l'occasion certainement de vous revoir prochainement. Merci.

M. Bélanger (Louis N.): Parfait.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Bélanger, pour votre participation à nos travaux. Au nom de la commission, donc nous vous remercions. Je suspends les travaux de la commission pour quelques minutes avant de passer au stade des remarques finales.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

 

(Reprise à 17 h 19)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes maintenant rendus à la période de remarques préliminaires...

Une voix: Non, finales.

Le Président (M. Paquet): ...de remarques finales, pardon. C'est l'enthousiasme pour l'excellent travail que la commission a fait jusqu'à maintenant.

Une voix: On est encore attentifs.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet): Je voulais juste vérifier si vous écoutiez, hein? C'est un vieux truc de professeur.

Remarques finales

Alors donc, nous sommes rendus au stade des remarques finales, et, sans plus tarder, je reconnais le premier intervenant, M. le député de Rousseau, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'économie et de finances. M. le député.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. Bon, d'abord je voudrais remercier tous les groupes qui ont présenté des mémoires. On parle de plus de 80 mémoires. La majorité de ces groupes, on a pu les recevoir ici.

n(17 h 20)n

Je voudrais remercier aussi les collègues pour cette commission, en fait on dit sur le capital de risque. En fait, c'est peut-être un des problèmes, là, qu'on voit, en fait c'est pour parler de l'aide aux entreprises, l'aide aux entreprises qui est donnée via la SGF, via Investissement Québec avec toutes sortes de programmes, via les Innovatech, via les fonds locaux d'investissement.

Écoutez, je pense qu'on est tous d'accord pour dire que de façon régulière il faudrait revoir les programmes, simplifier, préciser les missions parce que les entrepreneurs, quand ils se retrouvent devant tous ces programmes, évidemment parfois ne savent pas par où commencer. Donc, il faut toujours évaluer aussi si l'aide qui est donnée dans les différents programmes est toujours bénéfique, donc s'assurer que les retombées sont toujours supérieures aux coûts des programmes, s'assurer que ce soit géré d'une façon efficace partout, que toutes les entreprises finalement optimisent l'utilisation des ressources.

Mais il reste, M. le Président, qu'il y a quand même, là, je dirais ? puis on s'est concertés entre nous, ici, dans l'opposition ? il y a cinq, je dirais, là, cinq graves problèmes avec le rapport Brunet puis l'approche du ministre du Développement économique et régional. Premier problème, c'est concernant la période de transition. Le Parti libéral est là depuis 11 mois. Or, depuis 11 mois, le ministre du Développement économique et régional est en attente, est en attente, a bloqué des fonds à beaucoup d'endroits, évidemment a inquiété tout le monde, puisqu'il y a toutes sortes de pistes qui sont lancées: de fermer des sociétés d'État, de réduire leur participation.

Donc, on a vu plusieurs groupes venir nous dire que ça faisait très mal, au niveau du développement économique, de voir cette paralysie, ces projets, là, qui sont en attente, et puis je veux peut-être nommer quelques intervenants qui sont venus nous le dire plus précisément, entre autres, à Sherbrooke, l'Université de Sherbrooke qui est venue nous dire qu'il y avait plusieurs projets qui étaient en attente et qu'Innovatech du sud du Québec, depuis un an, ne pouvait plus investir, le Groupe Énergie, jeune entreprise de Shawinigan, qui nous a dit qu'il y avait 12 projets qui étaient en attente, la Corporation de développement économique communautaire de Montréal qui est venue nous dire qu'habituellement la SODEQ Rivière-des-Prairies?Pointe-aux-Trembles?Montréal-Est faisait entre huit et 15 investissements par année ? or, cette année, ils sont à trois investissements dont deux ne sont pas finalisés; pourquoi? parce qu'il n'y a pas d'argent ? le CLD de Lajemmerais qui disait qu'il y avait 22 projets qui étaient en attente, le Centre québécois des valorisations des biotechnologies, un secteur qui est clé au Québec, qui est venu nous dire qu'il faut arrêter, enrayer l'incertitude qui existe présentement. Puis là je pourrais continuer, mais je veux laisser un petit peu de temps à tout le monde. Donc, de ce côté-là, grave problème, premier grave problème, là, la période de transition qui fait très mal au développement économique.

Deuxième problème ? ça, c'est plus fondamental ? c'est que le rapport Brunet est incomplet. Mettons que ça, c'est le mot peut-être le plus poli que je puisse utiliser, puis ce n'est même pas nous qui l'avons dit, là, c'est même M. Pierre Brunet, le président lui-même, qui est venu nous dire: Écoutez, là, je n'ai pas regardé les retombées économiques puis je n'ai pas regardé, moi, si... Parce que ce qui est proposé ici, c'est de couper à peu près 100 millions, là, pour réduire les budgets pour aider le gouvernement du Québec à arriver. Mais il dit: Je n'ai pas évalué, peut-être que les retombées économiques qu'on va perdre avec ça vont peut-être être plus que 100 millions, mais ce n'était pas dans mon mandat. Mais c'est là que je pense qu'il ne faut pas blâmer M. Brunet, il faut blâmer malheureusement le ministre du Développement économique et régional qui, dans son mandat, clairement n'a pas demandé qu'on évalue les retombées économiques, c'est-à-dire les emplois, les investissements, le développement économique. Et c'est pour ça qu'il y a, entre autres, des pans complets, là, comme...

Toute l'économie sociale n'a même pas été examinée, puisqu'on ne regarde pas les impacts dans le développement économique, dans la création d'emplois puis dans les services qu'on peut rendre à la population. Encore là, je pourrais citer beaucoup de personnes, mais je vois le temps filer. Mais ce qui est clair, là, c'est qu'il semblait ? je dis bien «il semblait», là ? y avoir comme un genre de commande très, très pointue de dire: Comment vous pouvez nous couper 100 millions par année de dépenses? Mais ne regardez surtout pas quelles vont être les répercussions sur le développement économique du Québec. Donc, deuxième grave problème, et là ce que ça amène, ce problème-là, c'est que, toutes les conclusions, les recommandations, bien on ne peut pas s'y fier, là. Donc, comme j'ai pu en discuter avec M. Brunet, il faut faire d'autres analyses avant de prendre des décisions.

Là, j'invite le ministre du Développement économique et régional à faire une étude sérieuse des retombées économiques de chacun des programmes des différentes sociétés d'État avant de prendre des décisions.

Troisième grave problème qu'on a, c'est que tout le rapport Brunet est basé sur une prémisse qu'on peut, demain matin, remplacer une partie de ce qui est fait par le secteur public par le secteur privé. Tout le monde souhaiterait ça, M. le Président. Je veux qu'on se comprenne bien, là, moi le premier puis tous ceux qui sont venus ici souhaiteraient, demain matin, que l'État ait moins à investir puis que le privé vienne remplacer... sauf qu'il y a un problème. La question qu'on a à se poser, c'est: Est-ce que c'est réaliste ou non? Et là on a une série d'intervenants qui sont venus nous dire: Ce n'est pas réaliste, ce n'est pas réaliste, là, demain matin, de penser qu'on va pouvoir avoir 100 millions de moins par année qui vient du secteur public puis le remplacer par 100 millions qui vient du privé. Ce n'est pas réaliste, puis en plus les coûts n'ont pas été examinés, parce que, pour en faire une partie, du 100 millions, il faudrait avoir des avantages fiscaux très importants, et nulle part ce n'est évalué, ici. Puis là je pourrais vous nommer des noms: Centre québécois encore une fois de valorisation des biotechnologies, le CLD Laval, Laval Technopole, les 52 intervenants de la région de Québec qui sont venus nous dire... l'Innovatech sud du Québec qui est venue aussi nous dire que ce n'était pas réaliste de penser que le privé remplacerait le public.

Bon, mes collègues vont poursuivre sur les deux autres problèmes graves, mais je veux quand même juste les mentionner. Le quatrième problème grave, c'est qu'abolir les Innovatech puis de les remplacer par un grand fonds public-privé à la grandeur du Québec qui serait probablement géré de Montréal, bien ça, c'est très mal accueilli par tous les groupes, en particulier les groupes de Québec puis les groupes des régions. Et de ce côté-là bien il y a beaucoup d'inquiétude aussi, là, qu'on soit à genoux, comme certains intervenants l'ont dit, pour vendre le portefeuille d'Innovatech.

Et le cinquième problème que mon collègue... Le quatrième, ce sera le député de Johnson. Le cinquième, le député de Blainville va en parler comme critique des régions. C'est que la proposition de remplacer les fonds locaux d'investissement, les FLI, par des fonds d'initiatives régionales... D'ailleurs, ça semble être, de façon unanime, mal reçu par tout le monde, qui dit que non seulement c'est mal adapté, mais ce n'est même pas viable, ces FIR. Donc, il y a un problème évidemment avec les recommandations du rapport Brunet.

Lorsque le ministre du Développement économique et régional a commencé la commission, dans ses remarques préliminaires, il avait dit que le groupe de travail ? je reprends ses mots, là ? avait répondu de manière éclairante à la problématique du capital de risque, et que le rapport était fort bien documenté, et que le groupe avait fait un bon diagnostic. J'espère que le ministre du Développement économique et régional, après avoir entendu tous les groupes, a changé d'avis et qu'il va arriver à d'autres conclusions, parce que ça semble être assez unanime au Québec, là.

Je voyais même, il y a quelques semaines, dans le journal Les Affaires, Jean-Paul Gagné, l'éditorialiste, qui habituellement n'est pas le plus souverainiste ou interventionniste, qui disait... Évidemment, il y a un budget qui s'en vient, là, dans quelques jours. Il disait: «Le ministre des Finances devrait avoir une approche très chirurgicale s'il entreprend de réduire encore les mesures d'aide aux entreprises. Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain.» Et il ajoutait: «À en juger par des témoignages entendus dans certaines régions du Québec, au cours des dernières semaines, des projets d'investissement, notamment au stade du démarrage, sont bloqués, bloqués par le manque de soutien financier du gouvernement du Québec.» Donc, M. le Président, c'est grave, la situation, là. C'est grave, c'est inquiétant pour le développement économique et régional au Québec, et il faut que le ministre du Développement économique et régional se rende à l'évidence: les recommandations du rapport Brunet et son approche, là, son approche de retirer à tout prix l'intervention de l'État sans s'assurer qu'il y ait un remplacement qui vient aider les entreprises, bien ça fait très mal à l'économie du Québec. Et j'invite le ministre du Développement économique et régional à revoir son approche pour éviter qu'on continue de frapper de plein fouet l'économie du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Bienvenue. M. le député de Laval-des-Rapides.

n(17 h 30)n

M. Alain Paquet

M. Paquet: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je voudrais souligner l'exercice extrêmement utile que la commission vient de faire au cours des trois dernières semaines ou un peu plus de trois semaines, même, où on a pu rencontrer des intervenants du milieu au niveau des régions, au niveau de l'industrie, et on a pu échanger et faire un débat extrêmement constructif, à partir, là, du rapport de la commission Brunet, du groupe Brunet, qui nous a permis de dire: Bien, voici, c'est dans les éléments qui sont diagnostiqués, il y a peut-être des choses qu'il faut discuter, compléter, mais au moins ça a permis de lancer et d'amorcer une discussion, un échange qui n'avait jamais eu lieu au Québec jusqu'à maintenant.

C'est une première, et je crois que ça doit être souligné. Ça montre certainement une très grande ouverture de la part certainement du gouvernement et de la part, je dirais... aussi de la participation de l'ensemble des collègues à la commission de faire un tel échange, parce que cet exercice fort utile aussi a permis de voir qu'il y a des diagnostics, il y a des choses... Je vais rester avec des remarques plus générales au départ, et M. le ministre sûrement complétera avec des éléments plus spécifiques.

Quand on regarde la réalité du terrain, la situation, M. le Président, hein, on remarque d'une part au Québec que près de la moitié du capital de risque sous gestion au Canada est située au Québec. C'était même un peu plus de 50 % l'année dernière. Pourtant, au même moment, la part des investissements privés en capital de risque ? là, je parle juste du capital de risque ? a chuté de 1999 à 2000, à 2001 et continuait à chuter, au même moment où l'administration précédente, le gouvernement précédent augmentait l'interventionnisme. Ça, c'est la réalité. C'est un choix qu'ils faisaient, ils y croyaient. Je ne mets pas en cause ce qu'ils croyaient et leur vision, mais la réalité, c'est qu'au même moment où il y avait autant d'interventionnisme de plus en plus la part des investissements privés en capital de risque chutait au Québec. Ça, c'est la réalité économique quand on parle de retombées. C'est une réalité.

Et on remarque donc qu'il y a beaucoup de capital de risque, mais il n'y a pas suffisamment d'investissements. Or, une des choses qu'on a entendues souvent, c'est de dire: Bien oui, mais le capital de risque privé ne viendrait pas et ne vient pas, et donc la raison... il faut donc garder autant de capital de risque public ou continuer à l'augmenter, à la limite. Pourtant, il n'y a rien de génétique au Québec qui fait en sorte que le capital de risque privé ne peut pas venir. Je ne crois pas ça. Quand on regarde l'expérience ailleurs dans le monde, en Israël ou dans d'autres pays aussi, en partie aux États-Unis mais aussi dans d'autres pays scandinaves, il y a du capital de risque privé en plus grande proportion que ce qu'on observe au Québec. Alors, il faut se poser la question: Pourquoi le capital de risque privé ne vient pas au Québec, alors qu'il va ailleurs, même ailleurs au Canada, il ne vient pas autant au Québec? Alors, en partie il y a une question de mandats qui ne sont pas clairs entre les différents organismes d'intervention qui viennent du stade public, au niveau du gouvernement. Et je reviendrai là-dessus.

Quand on parle aussi de résultats, il faut certainement faire les choses différemment parce que, lorsqu'on regarde les carences qu'il peut y avoir, il y a des carences justement, dans certains cas, en termes de... tu sais, à certains stades de la chaîne de financement des entreprises. Le rapport Brunet le mentionnait et on a pu le constater, je crois, à partir des présentations des différents mémoires, certainement au niveau de l'amorçage, il y a une problématique qui est là, qui est certainement certaine au niveau de la preuve de concept. Il y a un problème aussi à la fin de la chaîne de financement, au niveau... un gros projet. Par contre, au milieu, il n'y a pas autant un problème. Je n'ai pas entendu, de la part des mémoires, de l'ensemble des mémoires... d'un problème à ce niveau-là. Beaucoup de gens ont dit: Il y a un problème, mais, lorsqu'on gratte un peu plus les mémoires qui ont été présentés, on parlait plus spécifiquement de l'amorçage ou de la fin, pas au milieu, et ça, c'est une nuance qui est très importante à faire dans les conclusions que nous allons tirer des représentations qui ont été faites dans la commission.

Quand on parle aussi de carences, ce qu'on a pu observer, et donc je l'ai dit tout à l'heure, un des éléments importants, c'est: Pourquoi une partie capital de risque privé ne s'est pas manifestée au cours des dernières années? C'est que beaucoup de gens se sont pilé sur les pieds, que ce soit la SGF parfois avec les Innovatech, les Innovatech parfois avec Investissement Québec, avec les fonds de travailleurs. Lorsque tout le monde commence à se piler sur les pieds, à un moment donné, que les conventions d'investissement deviennent très, très complexes, les gens disent: Écoutez, là ça devient bien compliqué de faire des affaires au Québec. Bien, on ne viendra pas.

Mais évidemment on conviendra avec l'opposition qu'il ne se fera pas d'annonce lorsqu'ils ne viennent pas, hein? On va couper des rubans lorsqu'on fait des annonces et qu'on dit: Bien, ils pourraient avoir des intentions de venir, mais s'ils ne viennent pas, on n'en fait pas, d'annonce. Mais, toutes les pertes d'emplois, les pertes de revenus, les pertes de compétitivité que le Québec a connues, on n'a pas eu des annonces chaque fois de la part du gouvernement puis il n'y en aurait pas plus de la part de notre gouvernement parce qu'on ne les voit pas, sauf qu'on voit le résultat final, que le niveau de vie du Québec, des Québécois est plus bas, que la part des investissements privés est insuffisante.

Alors, un autre problème qu'on peut constater aussi, c'est qu'au cours des cinq dernières années, quand on regarde la SGF plus spécifiquement, pour 1,5 milliard environ, si on évalue le coût d'acquisition des placements qui ont été faits par la Société générale de financement ? et on sait qu'il y avait eu des investissements majeurs de faits de la part de l'ancien gouvernement à cet égard ? bien les pertes, les provisions pour pertes, les pertes d'exploitation, les frais d'étude totalisent 1,1 milliard de perdu sur 1,5 milliard de valeurs de placement au coût d'acquisition. C'est 1,1 milliard d'argents qui sont là, qu'on ne peut pas avoir pour mettre en santé, qu'on ne peut pas avoir pour mettre ailleurs dans l'économie, qu'on ne peut pas avoir pour soulager le fardeau fiscal des contribuables québécois.

Dernier problème par rapport à la SGF, pour donner un autre exemple, puis on parle de mandats qui ne sont pas clairs, lorsque la SGF, dans le projet de Mosel Vitelic, qui heureusement a été abandonné, hein, prévoyait une hausse des ventes de semi-conducteurs avant le crash boursier, le crash qu'on a eu au niveau des technologies de l'information, des hausses de vente des semi-conducteurs de 30 % par année en 2001, en 2002, en 2003, et l'industrie ne prévoyait même pas ça... À la SGF, on croyait cela, mais l'industrie prévoyait 25 %, 14 % et 12 %. On était loin du 30 %. Alors, comment se fait-il que, dans la gouvernance, dans la façon de fonctionner... de l'interventionnisme de la SGF dans ce cas-ci, on pouvait être aussi loin de la réalité? Bien, ça, ce genre de mauvaise compréhension de la réalité faisait en sorte qu'on allait faire des mauvais investissements. On en a fait, et ça explique les pertes de rendement qu'on a connues.

En terminant, lorsqu'on parle donc des impacts et des retombées économiques, comme le soulignait le député de Rousseau, effectivement, si on évalue, et on les a évalués, les impacts et les retombées économiques du statu quo... Ça, on les a évalués. Le statu quo veut dire une création d'emplois insuffisante, un déficit d'investissement qui va se perpétuer et augmenter, et une stagnation, et même un recul du niveau de vie des Québécois. Il faut arrêter d'opposer les retombées économiques, la réalité économique des rendements et le développement économique.

Et je terminerais avec une citation. Devant la Chambre de commerce de Québec, M. Henri-Paul Rousseau, le président de la Caisse de dépôt, dans une présentation qu'il intitulait Rendement financier et développement économique vont de pair, disait: «Loin de s'opposer, rendement et développement sont en corrélation étroite et positive. La caisse ne contribue jamais tant au développement économique du Québec que lorsqu'elle cherche le rendement.» Alors donc, il faut arrêter d'opposer rendement et développement économique. On s'entendra pour dire que, à un stade d'amorçage d'une entreprise ou d'un projet, le rendement ne sera pas aussi élevé, qu'il faut avoir une patience pour voir le rendement se matérialiser. Mais, en bout de piste, on ne peut pas complètement distinguer ou dissocier rendement et retombées économiques parce que, si on se met la tête dans le sable et on croit cette position-là, à ce moment-là on condamne le Québec et les Québécois à un niveau de vie qui va aller en se déclinant, et certainement ce n'est pas ce que le gouvernement du Québec, notre gouvernement, préconise, et j'ose croire que ce n'est pas non plus ce que l'opposition officielle veut non plus soutenir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Bienvenue. M. le député de Johnson, vous avez la parole.

M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci. Alors, je dois vous avouer que je suis très heureux d'avoir participé à cette commission et d'avoir entendu tous ces mémoires. Je pense qu'il y a matière, pour le gouvernement, dans tout ce qui a été dit, là, à faire un changement radical dans sa vision du Québec actuellement et du développement économique. Et, quand j'entendais le député de Laval-des-Rapides faire son exposé, j'étais bien content qu'il ne soit ni ministre des Finances ni ministre du Développement économique parce que c'est un exposé qui est à la couleur du rapport Brunet, un exposé de droite, un exposé du rendement, du rendement à tout prix, un exposé qui aurait dû être confronté. Et d'ailleurs j'espère qu'il va lire ce que nous a dit Gérald Larose, qui était une vision, là, formidablement intégrée du développement économique et social du Québec.

Et ça m'horripile d'entendre un député du gouvernement dire que le niveau de vie des Québécois, là... Regarde, il ne faut pas comparer des bananes puis des prunes. Le niveau de vie des Québécois est très beau, est très élevé. Et, quand vous avez un logement à Montréal, là, qui coûte un tiers de ce que ça coûte à Toronto, calculez-le quand vous parlez du niveau de vie des Québécois, là, faites des comparaisons qui ont de l'allure. Ça coûte quatre fois moins d'électricité, le coût d'électricité au Québec, que ça coûte en Ontario. Allez voir les Ontariens puis demandez-leur ça, comment ça affecte leur niveau de vie, de payer plus cher l'électricité. Ça, c'est des choses dont vous ne tenez pas compte. Vous avez une vision obtuse du développement économique et du rendement économique.

Alors, malheureusement... D'ailleurs, non, heureusement il y a eu la commission. Heureusement, il y a eu ici des rapports formidables qui ont mis en doute beaucoup de recommandations du rapport Brunet. Et j'inviterais le ministre et le gouvernement à la plus grande prudence dans l'application des propositions du rapport parce que c'est une vision réductrice, idéologique, selon plusieurs intervenants. Et la vision serait désastreuse, l'application du rapport, notamment pour les régions du Québec.

Je ne sais pas combien de temps on a, M. le... J'ai sorti de mon texte, là.

Le Président (M. Paquet): Environ trois minutes.

n(17 h 40)n

M. Boucher: Trois minutes. Alors, notamment au niveau des sociétés Innovatech sud du Québec, par exemple, des sociétés Innovatech en général, mais... il est venu ici des gens pour nous dire et beaucoup de gens sont venus nous dire: Voici un instrument de développement économique régional formidable. Est-ce qu'on a évalué ce qu'aurait été le développement économique dans les régions sans les sociétés Innovatech? Il y a des entrepreneurs de la ville de Québec qui sont venus nous dire ici: Nous n'existerions pas, n'eût été des sociétés Innovatech. Nous n'existerions pas. Et ça, c'est des entrepreneurs, mais c'est des hommes et des femmes qui vont gagner leur vie et qui reçoivent d'excellents salaires à chaque matin grâce à l'intervention des sociétés Innovatech. Alors ça, c'est une chose dont le gouvernement doit tenir compte, et j'ai la conviction profonde que le gouvernement amorcera ce virage, ce virage qu'il doit amorcer après un an de pouvoir, parce que le Québec lui dit tout entier: Ça ne va pas. Là où vous vous en allez, ça ne marche pas. Vous êtes très bas dans les sondages, les Québécois n'achètent pas vos politiques. Alors, c'est le temps, là, c'est le temps d'amorcer ce fameux virage. Vous avez l'occasion, l'opportunité...

Plein de gens sont venus vous dire ici: Il faut que vous changiez d'orientation. Les recommandations du rapport Brunet, ça a été dit à plusieurs reprises, seraient désastreuses pour les régions du Québec. Désastreuses. Et une application du rendement, de la dictature du rendement, telle que préconisée, là, par des intervenants, et notamment... En tout cas, moi, je ne voudrais pas associer le député de Laval-des-Rapides à la dictature du rendement, mais mon Dieu que des fois je trouve que sa façon de voir les choses lui ressemble!

Ceci étant dit, je terminerai en voulant être évidemment constructif et je voudrais soumettre des recommandations au ministre du Développement économique et régional, soit de maintenir les sociétés Innovatech, de prendre davantage en considération les difficultés vécues à l'étape du préamorçage et de l'amorçage. Beaucoup d'intervenants nous l'ont dit, le capital de risque privé n'était pas là. Voilà pourquoi le gouvernement, par le biais de ces sociétés, est intervenu. Et il ne sera pas plus là demain. Je recommande aussi au ministre de valoriser davantage la recherche et de mettre en place une véritable politique de l'innovation. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Johnson. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Michel Audet

M. Audet: Alors, merci beaucoup. Merci, M. le Président, d'avoir mené effectivement de main de maître cette commission parlementaire et aux collègues également d'y avoir participé. Ça a effectivement été très intéressant.

Juste une petite remarque préliminaire pour répondre à l'intervention du député de Rousseau. Il y a une statistique qui est très claire et qui sort de non pas... même pas d'un sondage, de l'enquête de Statistique Canada, récente, les prévisions d'investissement 2004 donc qui donnent le portrait de la situation telle qu'on la vit maintenant, là, qui vient de sortir en février. Le Québec connaît la plus forte augmentation des investissements privés au Canada, 5,3 % donc d'augmentation, alors que c'est 0,8 % en Ontario, 2 % pour la moyenne canadienne. Le pourcentage des investissements privés en 2004 s'élèvera donc, en vertu de cette augmentation-là, à 18,5 % du Canada, le taux le plus élevé depuis 1992. Donc, effectivement, si tous les projets étaient bloqués, comme vous le dites, bien on n'aurait pas cette statistique-là qui vient d'être sortie en 2002. Donc, je pense que c'est important, c'est la meilleure réponse.

Deuxièmement, quand vous parlez du problème de la transition et du rapport incomplet, du rapport Brunet, je ne veux pas dire que le rapport Brunet, ce n'est pas la position du gouvernement, d'abord. Évidemment, je vous le dis très clairement, c'est un rapport qu'on a demandé à des bénévoles qui ont fait un travail extraordinaire en trois mois justement pour éviter des délais de transition trop grands, nous donner un portrait. Vous dites: D'un côté, il y a une transition, et c'est trop long, puis ça crée des problèmes. D'autre part, c'est incomplet, il aurait fallu étudier tous les impacts économiques, étudier ci, étudier ça, donc avoir un rapport qui aurait duré une année. Je vous dis: On a essayé de faire, dans les circonstances, en faisant une commission la plus courte possible... de nous donner des pistes, de nous donner des pistes de réflexion pour avoir cette réflexion qu'on a eue à la commission parlementaire, et on a eu trois semaines justement où on a entendu 70 experts, 80 mémoires, effectivement, et je trouve que ça a été extrêmement enrichissant. C'est complexe. Moi, je sors de là en voyant que c'est un système complexe. Il y a beaucoup de problèmes, c'est vrai, puis ça nous permet d'avoir des bonnes pistes de réflexion qui débordent. Puis, je suis sûr, c'est très clair, ce qu'avait pu faire le rapport Brunet, ça complète, et c'est ça qui est important, c'est ça que je trouve constructif dans ce qu'on a entendu.

On a abordé plusieurs questions, par exemple selon le type d'entreprise ? on a la question de la valorisation de la recherche, le transfert technologique, l'essor des entreprises de haute technologie, l'expansion des entreprises d'économie sociale, des sujets qui ont été abordés ? selon le type de financement également ? crédit communautaire, fonds de travailleurs, fonds disponibles des caisses de retraite ? selon la localisation ? financement des entreprises en région; on a eu effectivement beaucoup de mémoires, presque la moitié des mémoires qui ont porté là-dessus et le développement local ? selon le stade d'évolution de l'entreprise ? amorçage, preuve de concept, démarrage, expansion. Donc, on a eu une vaste variété.

D'autre part, la question qui a été la question de base qu'on essaie... qu'on doit se poser ? ce n'est pas un luxe, il faut se la poser: Comment attirer au Québec plus de capitaux privés et plus de capitaux étrangers? Ça nous a été dit par beaucoup de monde et ça veut... Et là je pense qu'il faut éviter le simplisme. Il ne s'agit pas de dire que le gouvernement et les capitaux publics ne seront pas là, il ne s'agit pas... qu'ils vont remplacer, comme on a dit tantôt, il s'agit de savoir comment on va essayer d'en attirer plus et comment on va pouvoir utiliser les instruments qu'on a pour en attirer davantage. C'est ça qu'on a essayé et c'est la question d'ailleurs qu'on a posée aux gens qui sont venus, qui sont venus nous rencontrer.

C'est la première fois, nous a dit le Réseau Capital, justement, qui s'en réjouissait, que l'Assemblée nationale débat du capital de risque. Plusieurs membres de la commission ne soupçonnaient pas l'étendue ? j'en suis le premier ? du champ couvert par le capital de risque. J'ai appris beaucoup de choses, je dois le dire, puis je dois dire que le député de Charlevoix l'a reconnu dans plusieurs occasions dans ses présentations, qui ont toujours été très constructives. Je suis convaincu que c'est le cas également de toutes les personnes qui ont suivi nos travaux.

Les personnes que nous avons entendues ont reconnu à des degrés divers l'importance que doit jouer le gouvernement dans le capital de risque. Personne n'a proposé de stratégie de table rase qui consisterait à écarter l'État du capital de risque, c'est très clair, puis ce n'est pas l'intention du gouvernement de prendre cette voie. Je vous le dis, dès le départ, ce n'était pas notre optique. Encore une fois, l'objectif, c'est de savoir comment on va faire en sorte qu'on puisse attirer plus de capital privé. De même, à peu près tout le monde reconnaît le bien-fondé de la présence dynamique du secteur privé. Il y a unanimité quant à la pertinence donc d'une présence accrue au Québec du secteur privé. Mais encore une fois c'est sur les façons d'y arriver qu'on a eu des variantes justement dans les présentations.

Je dirais qu'il y a deux constats qui se dégagent, très clairs. Le gouvernement, par ses sociétés d'État, par ses mesures fiscales, par ses programmes, va demeurer et demeure un acteur dynamique dans le financement des entreprises dans l'innovation, c'est très clair. Je pense qu'il n'y a personne qui a mis ça en cause. Mais le gouvernement va faire la place, autant que possible qu'il pourra, au secteur privé dans le capital de risque parce qu'il n'est pas souhaitable qu'il prenne toute la place effectivement puis qu'il n'en a plus les moyens. Il faut voir aussi, là, il n'en a plus les moyens, de continuer d'alimenter, comme on le faisait dans le passé, à coups de 500 millions par année, la Société générale de financement, 100 millions la... On n'en a plus les moyens, c'est très clair. Donc, il faut le dire aux contribuables québécois, la source a été tarie en grande partie. Vous en savez quelque chose, vous étiez au pouvoir il y a moins d'un an. Donc, vous connaissez la situation des finances publiques.

Donc, comment on peut faire en sorte qu'on utilise justement ce qu'on a pour essayer d'attirer du capital de risque? C'est ça, la question qu'on a posée. Puis on va continuer de le faire. Est-ce que c'est logique qu'on utilise des fonds publics pour financer du capital de risque? On le voit cette année, hier on a annoncé une perte de 500 millions à la Société générale de financement. C'est sûr qu'il y a des pertes là-dedans qui étaient liées au démarrage d'entreprises, qui ne seront pas faciles à redresser, puis le président l'a dit. Donc, encore l'année prochaine, ça va être une année difficile, d'autres pertes qui étaient dues à des investissements qu'on a dû dévaluer, parce que, effectivement, on a dû faire une réévaluation pour des raisons évidentes, c'est que les entreprises n'existaient même plus, parfois, parce qu'on s'était lancé un peu n'importe quoi... ou n'importe comment dans des nouveaux secteurs. On se l'est fait dire ici d'ailleurs par Daniel Paillé, qui a eu une présentation extraordinaire sur les réorientations de la SGF, sur sa mission de base. Donc, je pense, les objectifs, c'est vers ça, qu'on a mentionné... Il y a une convergence qui, je pense, a été dite dans ce sujet-là, et je pense que ça va nous donner des pistes de solution.

Il faut une période de transition ? oui, vous l'avez dit, M. le député de Rousseau ? une période de transition correcte pour éviter que ça provoque des trous, que ça provoque des situations difficiles pour les entreprises. On en est conscients, il y aura une transition harmonieuse qui va être faite dans les propositions qu'on fera prochainement. On va justement avoir du matériel prochainement à déposer sur ce sujet-là, suite au discours du budget.

De nombreux mémoires émanant des régions, des milieux économiques, particulièrement de l'Estrie, de même que les acteurs du développement technologique ont beaucoup insisté sur l'importance de bâtir à partir des sociétés Innovatech actuelles. On l'a mentionné, je le reconnais, ce message a été entendu. La question qu'on s'est toujours posée, c'est: Comment utiliser justement les actifs pour en quelque sorte en faire... en quelque sorte obtenir encore plus de capital de risque? Les témoignages nous ont permis de comprendre à la fois la plus grande disponibilité de capitaux pour des bons projets dans la région et la difficulté que rencontrent les promoteurs justement pour obtenir du financement. Ça a été très clairement exprimé, sur les 80 mémoires, près de la moitié ont porté sur le financement des entreprises en région. Je pense que c'est une préoccupation, et beaucoup de députés, de mes collègues des deux côtés, on a été très sensible à cette question-là. Il y a un problème de disponibilité.

n(17 h 50)n

On dit d'autre part puis on s'est fait dire par certaines entreprises bien connues, dont, je me souviens, le Fonds de solidarité: Ce n'est pas les capitaux qui manquent, c'est les projets, les bons projets. Mais je pense que ce n'est pas la perception qu'on a eue des gens qui sont venus des régions. Donc, il y a une réconciliation à faire, là, c'est évident. On n'a pas la même vision des choses et on va certainement avoir à examiner ça. Donc, on va essayer d'apporter une réponse, dans les prochaines semaines, les prochains mois, à trois questions: donc, à la demande de financement donc au niveau local pour faciliter le démarrage et les premières phases d'expansion des entreprises ? ça a été exprimé effectivement assez clairement ? au financement des projets économiques de plus grande envergure, donc la réforme effectivement et le recentrage de la Société générale de financement et d'Investissement Québec, et à l'offre de capital de risque pour les entreprises de haute technologie. C'est une chose également qui a été amorcée.

Et, puisque le capital de risque est souvent associé à haute technologie, notre commission a reçu plusieurs experts ? on en a eu encore aujourd'hui ? qui nous ont fait part justement de témoignages éclairants. Je veux qu'on se rappelle celui notamment du Dr Labrie qui nous a expliqué très clairement la disproportion entre les efforts financiers consacrés à la recherche universitaire et l'application commerciale des découvertes. 80 % des découvertes, disait-il, qui représentent un potentiel des découvertes universitaires, ne dépassent pas le stade de publication dans une revue scientifique. Il y a un problème à ce niveau-là. Il faut s'interroger sur le travail. Malgré les efforts qui ont été faits par les sociétés de valorisation, il y a des problèmes qui véritablement... On a mis 220 millions dans les sociétés de valorisation, au cours des dernières années, comme vous le savez. Donc, est-ce qu'ils ont été à la hauteur pour qu'on puisse avoir ce constat-là? Je pense qu'il faut...

C'est des choses qui nous ont été dites et qui sont... Je pense que c'est l'avantage d'avoir cette commission, de se faire dire des choses comme ça. Donc, nous sommes ici dans des phases, donc il faut aussi... On l'a mentionné, au niveau du démarrage et donc du capital de risque, il y a des problèmes, on l'a soulevé. Il faut travailler avec notre niveau, au niveau local notamment, avec l'appui pour les CLD. On a évoqué le problème des FLI, donc c'est quelque chose qu'on a noté de façon très claire.

Il y a également le groupe de M. Fortier, Pierre Fortier, du Groupement québécois de la commercialisation, qui a mentionné, lui, qu'il serait opportun de fusionner en une seule organisation les quatre sociétés justement de valorisation de la recherche. Donc, je pense qu'on a entendu, de la part de chacune des sociétés, un point de vue différent, donc on a entendu des points de vue tout à fait opposés. Bernard Coupal, qui nous a fait une présentation extraordinaire là-dessus, qui trouve que le mandat des sociétés de valorisation justement doit être revu... Donc, tout ça pour dire que, dans le domaine de la recherche et de l'innovation, de la valorisation de la recherche scientifique et de la recherche universitaire, il y a du travail à faire. Il y aura aussi donc un examen à faire.

Donc, pour le plan d'action qu'on aura à adopter dans les prochaines semaines, il va falloir certainement... on aura à revoir le plan d'exploitation de la SGF, c'est clair. Donc, d'ici l'automne, on aura à présenter un nouveau plan d'exploitation où vont être précisées les stratégies d'intervention de la Société générale de financement, et donc il y aura un plan quinquennal qui sera déposé à ce sujet-là et qui sera discuté. Et, après les crédits budgétaires et donc le discours du budget, le gouvernement va pouvoir faire connaître les moyens d'action et les priorités d'intervention qui vont toucher certaines des discussions qu'on a eues aujourd'hui. Je veux tout de suite dire au député de Rousseau que nous ne tarderons pas à faire connaître justement ces orientations-là pour éviter justement les problèmes de transition que certains pourraient vivre là-dessus.

On va préciser les règles d'accès aux capitaux au niveau local, je l'ai mentionné tantôt assez rapidement aussi, pour que les CLD aient autant que possible une meilleure disponibilité de capitaux et puissent supporter des projets en région parce que c'est très important d'avoir des instruments, effectivement, et ça, je pense que c'est quelque chose qu'on s'est fait dire très clairement, qu'il faut appuyer davantage les initiatives locales. Le meilleur témoignage, on l'a eu ce matin avec l'Union des municipalités du Québec, la Fédération des municipalités du Québec qui sont tout à fait d'accord avec la stratégie du gouvernement à l'égard de la nouvelle gouvernance à la fois des CLD et des conférences régionales des élus, mais qui nous ont dit en même temps qu'il faut justement avoir un support financier qui les accompagne, notamment au niveau des FLI. Donc, c'était quelque chose, un message qui a été mentionné et que nous avons bien saisi. Donc, il faut...

Je ne sais pas, M. le Président, s'il me reste encore quelques minutes pour conclure.

Le Président (M. Paquet): Oui.

M. Audet: Donc, je voudrais noter à ce sujet-là que, pour l'industrie québécoise du capital de risque, je veux souligner le mémoire de Réseau Capital qui exprimait des consensus de beaucoup de grandes institutions et des entreprises privées, qui a présenté des enjeux et des préoccupations donc à investir au Québec. Il s'agit, comme ça existe dans les pays développés, de faire en sorte que les investisseurs privés contribuent davantage aux besoins de capitaux des entreprises. On sait tous qu'il faudra un bon moment avant d'y parvenir de manière satisfaisante. On ne réglera pas tous ces problèmes-là en quelques jours, quelques semaines. Vous en savez quelque chose certainement, du côté de l'opposition. On est conscients de ça, mais on veut mettre en place un certain nombre de moyens pour corriger un certain nombre de situations et encore une fois essayer de favoriser le développement de nos PME.

Certains doutes ont été semés par nos invités, je voudrais le noter, sur l'efficacité des mesures, des gens qui interviennent dans certains domaines, et sur leur complémentarité d'action. On en a eu cet après-midi, des gens qui disent qu'il faut que le gouvernement arrête de... Les organisations sont trop présentes, se pilent sur les pieds, pour employer une expression claire et peut-être un peu caricaturale. Je pense que c'est un peu... C'est peut-être exagéré, mais il y a du vrai là-dedans. C'est que, pour beaucoup de gens, il y a beaucoup d'intervenants. Je pense qu'il va falloir clarifier les missions de chacun un peu plus. Et particulièrement ? et ça, c'est très important ? nous, on veut miser beaucoup sur justement la nouvelle approche qu'on veut, avec le portail d'entreprises, pour faire en sorte que les moyens, les différents programmes du gouvernement soient mieux présentés et expliqués aux entreprises pour avoir un meilleur accès, une meilleure base pour avoir accès aux services gouvernementaux partout où ils se trouvent et quelle que soit la région où on se trouve.

Alors, je voudrais, M. le Président, remercier, donc, remercier d'abord... vous remercier vous-même et remercier les collègues pour la rigueur et la discipline également qu'on a eues quand même à travers ces travaux-là, malgré parfois des échanges qui sont normaux, donc des blagues qu'on peut se faire ensemble. Mais je veux saluer donc la courtoisie de nos échanges et également, je dois dire, la courtoisie et la grande disponibilité qu'ont eues les gens qui sont venus nous rencontrer, qui, signalons-le, dans la majorité des cas, étaient des bénévoles, les gens qui sont venus, qui n'étaient pas payés pour le faire et qui sont venus parce qu'ils avaient des choses à nous dire, et ça, c'est très important qu'on souligne cette disponibilité de ces gens-là qui sont venus de toutes les régions du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Blainville.

M. Richard Legendre

M. Legendre: Oui. Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de conclure sur le rapport Brunet, mais évidemment sous l'angle des régions. Et ce que j'aimerais dire d'entrée de jeu, peut-être un petit peu dans la veine de ce que M. le ministre vient de dire, c'est qu'essentiellement on n'a pas les moyens de ne pas investir en région. C'est surtout ça dont on a n'a pas les moyens. Et, je vais vous dire, la meilleure nouvelle que j'ai entendue de la part du ministre, c'est quand il nous dit, tout à l'heure: Le rapport Brunet, je vous le rappelle, ce n'est pas la position du gouvernement. Fort heureusement d'ailleurs, parce que la conclusion qui est évidente, au chapitre des régions... Et, quand mon collègue parlait des cinq problèmes graves, bien probablement que ce n'est pas un concours, là, mais le problème le plus grave dans le rapport Brunet, c'est le dernier chapitre. On aurait dû laisser faire le dernier chapitre. Ils ont probablement manqué de temps. Vous savez, c'est comme dans un travail d'école. Le dernier chapitre, des fois, là, on le massacre un peu. Bien, c'est ça qui est arrivé, parce que le rapport Brunet, à l'égard des régions, il est, je l'ai dit plus tôt dans la commission, complètement incomplet.

Mais je vais vous dire plus: à l'égard des régions, le rapport Brunet, il est impertinent dans le vrai sens du mot. Il n'a pas de pertinence par rapport aux régions. C'était assez fascinant. Aussitôt qu'il y avait quelqu'un qui venait nous parler d'un sujet, d'un secteur ou d'un dossier relié aux régions, les recommandations ? les analyses, si on peut appeler ça comme ça ? mais les recommandations du rapport Brunet étaient complètement dans le champ, complètement erronées.

Ça a commencé par les gens responsables du développement local. Ce n'est pas rien, quand même, là. Le développement local, on en a parlé au cours des derniers mois. Les CLD, les FLI, c'est assez remarquable, le rapport Brunet propose d'abolir ça. Bien, évidemment, les gens de l'UMQ, je regarde leur communiqué aujourd'hui: L'Union des municipalités du Québec demande à la commission parlementaire sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque de ne pas donner suite à la proposition du rapport Brunet de remplacer les fonds locaux d'investissement par les fonds d'initiatives régionales, ça produirait des effets catastrophiques pour les régions.

n(18 heures)n

L'incohérence aussi ? c'est assez fascinant ? du rapport Brunet au niveau des FIR, des fonds d'investissement régionaux... propose que ce soit géré par les chambres de commerce. Je ne sais pas s'ils ont pensé faire plaisir au ministre du Développement économique et régional en disant ça, mais ils n'avaient pas vu qu'il y avait eu une loi, à l'automne, une loi n° 34 qui confiait tous les pouvoirs à la Conférence régionale des élus. Et, bien qu'on ait soulevé beaucoup, beaucoup de critiques au sujet de cette loi-là, évidemment qu'en termes de cohérence le rapport Brunet, c'est complètement non seulement impertinent, mais incohérent avec la nouvelle loi n° 34.

Tout le secteur de l'économie sociale, oubliez ça, pas un mot. Tout le secteur de la ruralité, pas un mot. L'économie sociale, c'est important pour les régions. Ruralité, hein, ça va de soi, c'est important pour les régions. Rien, rien dans le rapport Brunet là-dessus. Les régions ressources, rien non plus. Et on a demandé aux gens qui sont venus témoigner ici: Est-ce que le groupe Brunet vous a contactés? Non. Alors, par rapport aux régions, il faudra oublier le rapport Brunet, et ça, je dis ça en tout respect.

M. le ministre vient de parler de bénévoles. Il a tout à fait raison. Le groupe Brunet, c'est un groupe de bénévoles, quatre bénévoles à qui on a donné trois mois pour faire quelque chose d'impossible. Alors, ce n'est pas le groupe Brunet qu'on blâme, c'est le gouvernement par ailleurs qu'on blâme parce que le mandat, là, il n'était pas clair du tout. Et, vous-même, M. le Président, dans votre intervention tout à l'heure, vous parliez de réconcilier le rendement et le développement. Bien, il aurait peut-être fallu y penser au niveau du mandat. Le mandat, ce n'était pas ça. Le mandat, vous avez créé l'opposition en question et ça a donné le résultat en question.

Le Président (M. Paquet): Vous permettez, M. le député? Juste un moment, s'il vous plaît. C'est parce que j'ai oublié de demander le consentement pour qu'on puisse poursuivre un peu après 6 heures. Consentement? Merci.

M. Legendre: Il reste, quoi, deux ou trois minutes?

Le Président (M. Paquet): Vous avez encore trois minutes environ.

M. Legendre: O.K. Alors, si le rapport Brunet ne nous fait pas avancer en termes de régions, par ailleurs ce que je veux dire, c'est que les témoignages qu'on a entendus de tous ceux et celles qui sont venus ici, eux nous font avancer. Évidemment, on veut être constructif, et je voudrais justement souligner les mesures intéressantes qui ont été présentées: d'abord, de lever le moratoire sur les FLI. Et non seulement ça, la plupart des gens sont venus nous dire: Parce que ça marche, on n'est pas obligé de changer des choses quand ça marche. Les FLI, ils nous ont dit: Renforcez-les, parce que les FLI, c'est un excellent levier et c'est un levier pour attirer de l'investissement privé également.

Deuxième chose, s'il y a des fonds régionaux, bien il faut que ça se fasse d'abord en complémentarité ? c'est ce qu'on nous a dit ? avec les fonds locaux et, oui, il faut que ce soit assumé par les nouvelles conférences régionales des élus. Mon collègue en a parlé, maintien des Innovatech et aussi, ce dont on nous a parlé beaucoup, financement adéquat, de la part de l'État, des programmes en économie sociale.

Et à ça viennent s'ajouter deux grandes recommandations qui sont revenues assez systématiquement: d'abord, la très grande importance pour les régions que l'objectif ne soit pas simplement un objectif de rendement, que ce soit d'abord et avant tout un objectif de développement, conséquemment qu'on ait du capital patient, et des gouvernements patients également, et du capital qui peut être utilisé d'abord et avant tout pour les petites et moyennes entreprises. Deuxième chose qu'on a entendu très souvent et qui était en réaction malheureusement au rapport Brunet, c'est d'éviter le mur-à-mur, parce qu'on a dit: Le rapport Brunet, c'est du mur-à-mur, et d'éviter la centralisation, parce que, là aussi, on a vu une tendance à centraliser vers Montréal. Alors, la Capitale-Nationale s'est inquiétée de ça et évidemment toutes les régions du Québec se sont inquiétées de cela également.

Enfin, M. le Président, tous les témoignages, que ce soient les élus municipaux, les leaders socioéconomiques, les experts, tous ces gens-là, à l'égard du développement régional, ils ont tous insisté sur une chose: l'importance de voir l'État investir dans les régions. Et ce qu'ils nous ont dit, ces gens-là, c'est que c'est rentable. Ce n'est pas une dépense. Il ne faut pas voir juste une colonne, la colonne de la dépense, il y a un rendement et social et économique quand on investit en région, et ça va nous coûter pas mal plus cher comme société si on n'investit pas en région.

L'autre chose aussi qu'on s'est fait dire beaucoup, et ça, c'est important, c'est que l'investissement public, il n'éloigne pas l'investissement privé; c'est le contraire, il l'attire. Et il y a même des gens du secteur privé qui sont venus nous dire: Ah, on voudrait moins de fonds, mais des gros avantages fiscaux, par exemple. C'est quoi, ça, les avantages fiscaux, si ce n'est pas de l'implication de l'État? Donc, l'État doit investir dans les régions, M. le Président. Je le répète, on n'a pas les moyens de ne pas investir en région. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. le député de Blainville. M. le ministre, en... S'il y a consentement pour 20 secondes, pour... Vous voulez remercier... Est-ce qu'il y a consentement? M. le ministre.

M. Michel Audet

M. Audet: Bien, écoutez, juste un tout petit mot d'abord pour dire qu'effectivement je pense que, en écoutant les collègues d'en face, je me rends compte que visiblement ils n'ont pas compris, ils n'ont pas... de leurs erreurs, puisque, les dépassements de coûts, ils ne voient pas ce que c'est. Ils voient juste... Ils disent que c'est des rendements positifs. En tout cas.

Ceci dit, je veux terminer là-dessus pour remercier mes collègues, remercier M. le président et tous les participants. Et particulièrement, je veux le dire, c'est très important, on a mentionné les membres du rapport Brunet. Ils nous ont fait un travail qui nous a permis de faire... Si ça a provoqué 70 mémoires et autant de bonnes idées, c'est parce qu'il y avait des choses intéressantes dans le diagnostic qui nous a été présenté et dans les pistes qu'on a pu discuter. Merci beaucoup.

Mémoires déposés

Le Président (M. Paquet): M. le ministre, avant d'ajourner nos travaux, d'abord je veux déposer les mémoires des groupes qui n'ont pas été entendus devant la commission dans le cadre de ce mandat. Donc, ces mémoires sont déposés.

Et je voudrais, avant de terminer, donc remercier sincèrement tous les membres de la commission, autant du côté ministériel que du côté de l'opposition, pour, je pense, l'excellent travail qu'ils ont fait en termes de qualité des échanges et des débats, dans un climat qui est très, très, généralement, très courtois et très convivial, qui a permis quand même avec rigueur de débattre et d'échanger sur des enjeux qui sont importants pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Et je voudrais certainement remercier tous les gens, tous les groupes qui ont participé à nos travaux en envoyant des mémoires, en participant aussi à nos auditions. Ils peuvent être certainement convaincus qu'ils ont été entendus, et leurs présentations auront été prises en compte dans nos délibérations et dans nos réflexions.

Et je voudrais aussi en profiter pour remercier tout le support technique qu'on a de l'Assemblée nationale, remercier certainement le Secrétariat des commissions qui fait un excellent travail pour nous aider et aider la présidence à gérer le temps. Et je veux aussi remercier évidemment sincèrement tous les gens qui travaillent, les pages, les gens aussi qui s'occupent de la diffusion de nos travaux. C'est un élément important pour nos concitoyens pour pouvoir évaluer le travail qui se fait en commission, qui est souvent méconnu par nos concitoyens, qui voient surtout la période de questions, mais il y a tout un reste de travail qui se fait à l'Assemblée et qui se fait en commission, et, certainement, je pense, grâce à eux, ça permet de faire connaître ce travail que nous faisons. Et je remercie aussi évidemment les gens du ministère qui ont accompagné le ministre au cours de ces travaux. Alors, la commission ayant accompli son mandat concernant les consultations générales, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 7)


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