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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mercredi 8 septembre 2004 - Vol. 38 N° 48

Consultations particulières sur le projet de loi n° 195 - Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures trente-six minutes)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Avant de commencer, je demanderais à toutes les personnes qui sont présentes dans la salle de bien vouloir s'assurer d'avoir éteindu la sonnerie de leurs téléphones... d'avoir éteint, pardon, la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. Excusez-la.

Une voix: ...le retour des vacances.

Le Président (M. Paquet): Retour des vacances, effectivement. Mais je me suis autocorrigé, donc l'important est là. Alors donc, de bien vérifier d'avoir éteint la sonnerie de leurs téléphones cellulaires afin de ne pas gêner les travaux de la commission.

Je souhaite bien sûr la bienvenue à l'ensemble des membres de la commission et je souhaite la bienvenue aussi à notre collègue le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille qui est membre de la commission pour la durée de ces travaux. Et je souhaite bien sûr la bienvenue aussi à notre assistance et à tous ceux qui ont soumis des mémoires et qui participeront à nos auditions sur le projet de loi n° 195. En effet, la Commission des finances publiques est réunie afin d'entreprendre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 195 intitulé Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Aucun remplacement. Alors, je ferai donc lecture de l'ordre du jour pour aujourd'hui, mercredi le 8 septembre 2004. Nous débuterons d'abord nos travaux par les remarques préliminaires. Ce sera suivi ensuite de la présentation de représentants de l'Institut canadien des actuaires, suivi ensuite de représentants du Conseil du patronat, et nous prévoyons ajourner nos travaux à 12 h 30.

Alors, pour les remarques préliminaires, nous avons convenu qu'il y a une période de 30 minutes au total séparée ainsi: 15 minutes pour le côté gouvernemental et 15 minutes du côté de l'opposition, ou des oppositions. Donc, du côté des oppositions, il y aura 12 minutes pour l'opposition officielle et trois minutes pour le député indépendant, le député des Chutes-de-la-Chaudière.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, maintenant je cède la parole à M. le député de Verdun pour des remarques préliminaires. Je crois qu'il bénéficiera d'environ 12 minutes pour laisser trois minutes au ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille et député de Kamouraska-Témiscouata. Alors, M. le député de Verdun.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Il y a toujours un caractère inusité, quoique non anormal, lorsqu'un projet de loi est discuté en commission, projet de loi qui est présenté par un député qui n'est pas membre du Conseil des ministres. Ce n'est pas la première fois que ça arrive, il y a régulièrement des projets de loi de cette nature. Dans le passé, on a déjà adopté un projet de loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes qui avait la même... d'ailleurs le même parrain, en l'occurrence le député de Verdun. Le caractère inusité de cette démarche ne veut pas dire qu'elle n'est pas endossée à l'heure actuelle par le gouvernement. Le premier ministre, le gouvernement, les différents comités ministériels et le Comité de législation ont approuvé ce projet de loi. Donc, ce n'est pas quelque chose qui n'a pas l'aval en quelque sorte du gouvernement actuellement.

n (10 h 40) n

Il faut situer ce projet de loi aussi dans son contexte historique. C'est un projet de loi qui vient modifier une loi qui avait été présentée par le gouvernement précédent, la loi n° 102, et je voudrais essayer de situer du moins ces articles de la loi n° 102 dans une perspective plus historique.

Suite au jugement ? et ça, c'était dans les années quatre-vingt ? au jugement qui était ce qu'on appelle dans le milieu le jugement Singer... Et le jugement Singer a grosso modo reconnu qu'en fin de régime ? et il est important de bien comprendre que c'est en fin de régime ? lorsqu'il y avait apparition de surplus actuariels dans un régime, ces surplus actuariels devaient être partagés entre les participants actifs et non actifs au régime. D'ailleurs, en 1990, si je ne m'abuse, M. Bourbeau, qui était ministre responsable, à l'époque, de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, avait modifié la loi pour tenir compte de ce régime et inclure dans la loi, lorsqu'il y avait fin de régime, ce partage des surplus lorsqu'il y avait fin de régime.

Ceci avait créé une certaine insécurité auprès des employeurs qui prenaient déjà des congés de cotisation, et le gouvernement d'alors, en 1998, a senti le besoin de préciser, dans les articles 146 et suivants, 146.1 à 146.8, préciser ou baliser le droit de l'employeur à prendre des congés de cotisation dans un régime. À l'époque, le parti qui est ministériel aujourd'hui mais qui siégeait dans l'opposition alors, nous étions non pas opposés à toute la portée de la loi n° 102, mais à ces articles de la loi n° 102 parce qu'ils ne tenaient pas compte de ce que nous considérions comme un droit des participants non actifs, c'est-à-dire des retraités et des participants non syndiqués, à donner leur accord lorsqu'il y avait une prise de congés de cotisation par l'employeur.

Il n'est pas inutile de rappeler qu'un régime de retraite est essentiellement un contrat, un contrat qui lie plusieurs parties au contrat, à savoir les participants actifs ou non actifs et un employeur, et qu'une modification à un contrat, dans la jurisprudence et dans l'approche qui est la nôtre, ne peut se faire sans l'accord des parties au contrat. Ça, c'était un des premiers arguments.

D'autre part, il semblait clair que, s'il y avait surplus actuariel ou excédent d'actif dans un régime, le droit... Il est évident et je suis parfaitement conscient qu'un excédent d'actif en cours de régime est un élément virtuel, mais, s'il devait y avoir partage de cet excédent d'actif, ça hypothéquait en quelque sorte le droit que les retraités pouvaient avoir, en fin de régime, sur le partage de l'excédent d'actif, si jamais il se réalisait en fin de régime.

Tout ceci pour dire qu'il nous semblait, du moins il nous a semblé important de donner une voix aux retraités et aux participants non syndiqués lorsqu'il y avait une modification du contrat pour permettre à l'employeur de prendre un congé de cotisation. Il nous semblait que ces personnes qui sont directement concernées aussi par cette prise de congé de cotisation devaient pouvoir avoir la possibilité de donner leur accord.

Maintenant, je voudrais signaler que nous avons donc déposé, lorsque nous étions dans l'opposition, le projet de loi qui, à l'époque, portait le nom de 193. Nous avons réitéré, devenus ministériels, le dépôt du même projet de loi qui devient le projet de loi n° 195 actuellement, et c'est ce projet de loi qui est aujourd'hui soumis à consultation.

Je voudrais situer aussi l'esprit dans lequel nous abordons ces consultations. Il est clair que nous voulons, par ce projet de loi, corriger ce qui nous semble être une inéquité, corriger ce qui nous semble être quelque chose d'injuste, c'est-à-dire le fait que l'on puisse modifier, modifier un contrat sans l'accord de toutes les parties au contrat. Nous sommes néanmoins ouverts ? et nous ne voulons pas nous situer dans une situation où il n'y a pas de possibilité de certains aménagements, et c'est la raison pourquoi nous tenons aujourd'hui ces consultations ? nous sommes ouverts à nous assurer que ces corrections qui nous semblent nécessaires à la loi ne créent pas d'effets pervers et, si jamais elles créaient des effets pervers, à voir comment on peut les aménager ou voir à éventuellement les corriger ou adapter la loi pour faire en sorte qu'on en amenuise la portée.

Alors, il faut bien ne pas penser que... On pourrait être tenté de dire: Cette consultation serait inutile. Non. Il est clair, de notre côté, qu'il y a une inéquité à corriger, il y a des droits aux retraités à reconnaître, il y a des principes fondamentaux que nous voulons voir dans la loi, mais il est aussi clair ? et ça, c'est le pendant ? qu'il ne s'agit pas non plus de créer une situation ou de créer des bouleversements qui créeraient des effets tout à fait pervers dans les régimes de retraite. Alors, nous sommes là pour écouter. Nous allons le faire avec beaucoup, beaucoup d'ouverture et d'ouverture de pensée, et soyez assuré que ces consultations sont loin d'être inutiles. Mais un principe demeure, il est important que, lorsqu'on touche à ce qui est essentiellement une épargne, l'épargne des retraités, et si on a à toucher à cette épargne, ils ont le droit absolu de pouvoir donner leur point de vue sur l'utilisation de ces épargnes. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le...

M. Gautrin: Il me restait quand même...

Le Président (M. Paquet): Il vous reste encore six minutes, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Ah! Bien, voyez-vous comme je suis généreux avec toi?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet): M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. J'ai hâte de voir ce que le député de Verdun veut en retour. Bonjour à tous. Bienvenue. Je veux bien sûr saluer les membres de la commission, saluer le président, M. le député de Verdun, M. Henri-François Gautrin, qui est à l'origine de ces deux projets de loi, autant le 193 que le 195, saluer aussi, je dirais, les représentants des groupes de retraités qui sont là, qui nous ont amené depuis plusieurs années les problématiques reliées au projet de loi n° 102 qui avait été adopté. Alors, je suis bien content de vous voir ici. C'est une belle suite qu'on donne au travail que vous avez fait et que vous avez mené dans les dernières années.

Donc, c'est avec beaucoup de plaisir que je prends part aux travaux de la Commission des finances publiques qui a le mandat d'étudier le projet de loi n° 195, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. On se rappelle que la loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et d'autres dispositions législatives, entrée en vigueur en 2001, prévoyait notamment l'instauration d'un processus de confirmation du droit de l'employeur de prendre des congés de cotisation. Ce processus, lorsqu'il est utilisé, permet à l'employeur d'éviter des poursuites pour les congés de cotisation qu'il prendra.

Il s'agissait et il s'agit toujours d'un processus qui est facultatif, soumis à l'accord des syndicats, mais le consentement des retraités et des autres participants non actifs et des travailleurs non syndiqués n'est pas requis. L'adoption de la loi n° 102 a suscité d'ailleurs plusieurs réactions. Alors que les syndicats et employeurs pour leur part semblaient y voir un compromis acceptable, les retraités et les participants non syndiqués y ont perçu une injustice puisqu'on les écartait des décisions relatives à la modification de leur régime portant sur la confirmation du droit de l'employeur au congé de cotisation. Le projet de loi n° 195 qui a été déposé par mon collègue de Verdun prévoit donc modifier le processus facultatif de confirmation instauré en 2001 pour y ajouter l'obligation d'obtenir l'accord des retraités et des autres participants non actifs ainsi que de celui des participants non syndiqués.

n (10 h 50) n

Aujourd'hui, ce qui est important pour nous, c'est de connaître la position des différents intervenants quant aux propositions de modification qui sont avancées dans le projet de loi. Le projet de loi a l'avantage certain de donner aux retraités le droit de parole qu'ils demandent depuis plusieurs années. Certains peuvent cependant y voir l'inconvénient d'ajouter un nouveau joueur dans le processus déjà complexe de la négociation des avantages sociaux dont font partie les régimes de retraite. Donc, compte tenu des intérêts divergents des intervenants impliqués, nous sommes ici, comme l'a mentionné mon collègue de Verdun, pour écouter, pour entendre les commentaires, les propositions, pour mieux comprendre les préoccupations, les réalités de chacun des groupes, ce qui nous permettra dans les circonstances de prendre la meilleure décision possible. Notre approche est raisonnable, notre solution sera aussi raisonnable.

Je profite aussi de l'occasion pour saluer l'appui que nous avons reçu de certains membres de l'opposition officielle, dont Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qui nous a écrit, en avril dernier, pour nous demander, et je cite, de dire finalement que nous allions agir, dans le cas du projet de loi ? à l'époque, 193... Et elle nous disait: «Dans le document intitulé Un gouvernement libéral au service des Québécois, vous preniez l'engagement de permettre aux retraités de jouer un rôle actif dans les décisions entourant l'utilisation des surplus actuariels des caisses de retraite.» Et elle nous indiquait aussi qu'on avait réitéré cet engagement-là dans une lettre du 27 janvier 2003, en nous disant: «N'est-il pas temps de respecter cet engagement?» Alors, je veux simplement dire à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, Mme Harel, que nous respectons cet engagement de donner une tribune et de donner la parole aux gens qui veulent se faire entendre sur des modifications à apporter au projet de loi n° 102.

Donc, c'est avec beaucoup d'ouverture que nous entreprenons ces travaux. C'est aussi avec un souci d'en arriver à une solution, comme je le mentionnais, qui sera raisonnable et de faire en sorte que nous puissions améliorer et rendre plus justes les positions et les propositions qui seront amenées dans le cadre de cette commission. Et effectivement je veux confirmer que, de la part du gouvernement, l'intention est là, le projet de loi est là et a franchi toutes les étapes des comités ministériels. Donc, nous sommes là pour apporter des modifications, s'il y a lieu, au projet de loi mais surtout pour faire en sorte de réparer certaines des injustices qui avaient été amenées avec l'adoption du projet de loi n° 102.

Alors, c'est avec beaucoup de plaisir que nous prendrons part aux travaux de la commission et c'est avec beaucoup d'intérêt que nous lirons chacun des mémoires et écouterons chacune des présentations qui seront faites. Alors, merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le ministre. Est-ce que d'autres membres du gouvernement ? il reste une minute ? désireraient faire des remarques? Ça va? Alors donc, je reconnais maintenant Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite. Mme la députée.

Mme Denise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. J'aimerais tout d'abord saluer les membres de la commission, le personnel de l'Assemblée nationale et tous ceux qui auront un intérêt à participer et à suivre nos débats.

Il faut bien l'admettre, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite constitue un enjeu de taille. Cette loi encadre plusieurs centaines de régimes de retraite au Québec dans lesquels il y a plus de 100 milliards de dollars d'actif, soit plus de deux fois le budget de l'État québécois. Donc, la présente commission parlementaire à l'égard du projet de loi libéral tant attendu parmi plusieurs groupes qui composent notre société représente un enjeu assez important. Vous me voyez par contre désolée de constater que plusieurs groupes malheureusement se sont désistés, et plusieurs groupes. L'occasion était pourtant belle pour eux de faire valoir leur point de vue.

Je suis également heureuse de voir que le ministre responsable de cette loi mais qui n'est pas le parrain du projet de loi sera parmi nous tout au long de la commission. Peut-être cela témoigne-t-il de la volonté réelle de ce gouvernement d'aller de l'avant rapidement avec cet engagement électoral. Je dis bien «rapidement», car il a fallu quelques mois pour en arriver à la consultation qui s'amorce aujourd'hui.

M. le Président, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite, j'ai déjà indiqué à mon collègue de Verdun que j'aborderai ce débat avec beaucoup d'ouverture et je dis, et je le répète, avec beaucoup d'ouverture.

Si nous sommes ici aujourd'hui, ce n'est pas pour refaire le débat d'il y a à peine quatre ans mais plutôt pour le faire évoluer. Faut-il rappeler que cette fameuse loi n° 102 n'avait pas été revue depuis plus de 10 ans et qu'elle était nécessaire, compte tenu que le nombre de salariés couverts par un régime privé diminuait de façon très inquiétante? À peine un travailleur sur quatre profite d'un tel régime de retraite dans le secteur privé. Ce nombre passe d'un travailleur sur 10 dans les PME québécoises. C'est ce constat accablant qui a motivé le gouvernement précédent à modifier la loi. Nous croyons toujours qu'il était dans l'intérêt de tous de renforcer la place des régimes de retraite dans notre système de sécurité de revenu à la retraite. Il est de la responsabilité de l'État de mettre en place les conditions propices à la sécurité financière de l'ensemble des contribuables lorsqu'ils atteignent l'âge de la retraite. J'ose croire que le parti ministériel pense la même chose.

Mais que changeait exactement la loi n° 102? D'abord, elle contenait des améliorations aux droits des jeunes travailleurs mobiles, elle simplifiait l'administration des régimes de retraite, elle prévoyait une information plus complète sur la gestion des régimes de retraite. À ce chapitre, je peux dire sans me tromper que ces éléments ne comportaient pas de problème aux yeux de l'opposition, à l'époque, puisque ces éléments ne font pas partie du projet de loi n° 195. Cette loi permettait aussi d'assurer la crédibilité des régimes complémentaires de retraite en levant les incertitudes juridiques qui entourent la question de l'utilisation des excédents d'actif, ou plus communément appelés les surplus, et c'est précisément là-dessus que la bât blesse toujours.

Voilà ce qui explique notre présence aujourd'hui. Personne ne pourra nous reprocher d'avoir voulu en finir avec ces multiples batailles juridiques où les syndicats ont livré une lutte acharnée devant les tribunaux afin d'empêcher l'employeur de cesser de cotiser au fonds. Quand on sait que, dans la plupart des régimes, pour faciliter les choses, la question de l'utilisation des surplus est réglée par une entente négociée par l'entreprise et le syndicat, on doit se demander: Pourquoi l'État doit-il intervenir? Est-ce vraiment le rôle de l'État d'intervenir dans un dossier où deux parties discutent, échangent et négocient? La médiation n'est-elle pas souhaitable à l'arbitrage d'un tribunal? Si une chose est claire pour nous par contre, c'est qu'il est dans l'intérêt de tous que les ententes sur l'utilisation des surplus se fassent selon des règles très claires.

Maintenant, l'Assemblée nationale est saisie d'un projet de loi visant précisément à accorder un droit de regard aux retraités quant à l'utilisation des surplus. Je sais que les parlementaires ont eu un débat très consistant, à l'époque, sur ce sujet. Je souhaite que les échanges qui auront lieu au cours des prochains jours puissent être profitables à l'ensemble des participants à des régimes de retraite à prestations déterminées, qu'ils soient actifs ou retraités. Plusieurs m'ont fait part de leur point de vue par des lettres, des courriels, lors des rencontres. Ils ont des choses à dire, et je serai heureuse de les entendre, cette fois-ci, dans l'enceinte du parlement, car c'est ici que nous devons travailler pour le bien commun. Notre rôle, c'est de s'assurer que l'intérêt public sera préservé.

En relisant le dossier ? assez volumineux, je peux le dire ? j'ai mis la main sur une lettre d'appui remise au gouvernement à l'époque, avec copie conforme au chef de l'opposition, maintenant premier ministre du Québec. Je vous en cite quelques passages: «Nous donnons toujours notre appui au projet de loi n° 102. Cependant, nous nous permettons de vous informer que tout autre amendement, notamment celui de donner aux retraités un droit de contrôle sur les surplus dégagés par les régimes, mettrait fin à notre support.» Vous vous demandez bien qui a pu signer une telle lettre d'appui? Je vais poursuivre, car c'est important. «Ce projet de loi lève en partie l'incertitude juridique entourant l'utilisation des excédents d'actif par les employeurs, assortie de nombreuses contraintes, mais il améliore aussi les prestations aux futurs retraités. Avec un tel projet de loi, le Québec se démarque encore des autres provinces canadiennes en ce qui a trait aux régimes complémentaires de retraite.»

Si je vous disais que c'est l'actuel député de Laporte, membre du Conseil exécutif, ministre du Développement économique et régional, surprend un peu, n'est-ce pas? Surprenant. Ce serait donc intéressant que le député de Laporte puisse nous faire part des arguments qui l'ont fait changer d'avis.

Si vous me permettez, je vais continuer à citer ce qu'écrivait l'actuel député de Laporte, toujours concernant le projet de loi n° 102. C'est un peu long, mais c'est extrêmement important. «Cette refonte importante de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite accroît la sécurité financière des prestations et les améliore. Elle exige plus de transparence et permet de dissiper quelque peu les incertitudes quant au congé de cotisation patronale. Surtout, l'État doit encourager les employeurs à développer volontairement des régimes complémentaires de retraite, particulièrement ceux à prestations déterminées, pour ajouter un élément de sécurité pour les futurs retraités. Cela constitue donc un objectif de société important qui complète les régimes de retraite publics, notamment le Régime de rentes du Québec. Sans les régimes complémentaires de retraite privés, les gouvernements n'auraient d'autre choix que d'augmenter les prestations des régimes publics, ce qui imposerait plus tard aux jeunes de la présente génération des obligations financières démesurées pour assurer la vitalité du régime.» Fin de la citation.

n(11 heures)n

Si j'ai pris la peine de lire des extraits de cette lettre, M. le Président, c'est uniquement parce qu'elle fait mention du nécessaire rôle de l'État. Il a un rôle à jouer, il doit encourager les employeurs à développer volontairement des régimes complémentaires de retraite, particulièrement ceux à prestations déterminées, pour ajouter un élément de sécurité pour les futurs retraités. J'espère que le gouvernement partage aussi cet objectif, parce que, voyez-vous, M. le Président, ce qui m'inquiète, ce sont les conclusions auxquelles en arrivent plusieurs experts. Selon eux, les régimes à prestations déterminées sont une espèce menacée de disparition. Les employeurs favoriseraient le recours à d'autres types de placements de retraite, comme les REER collectifs, par exemple. Cela comporte un désavantage non négligeable. Le retraité n'a aucune garantie de voir sa prestation maintenue, peu importe la conjoncture économique.

Ceci dit, nous amorçons un débat qui s'est révélé très vigoureux il y a à peine quatre ans. On conviendra que le contexte a probablement changé depuis. Selon les chiffres fournis par la Régie des rentes, uniquement à l'égard du nombre de régimes à prestations déterminées en surplus, nous en comptions 25 % en 2000-2001, et, l'année dernière, il n'y en avait que quatre sur 1 000. On se rend compte, M. le Président, que l'enjeu n'est peut-être pas tout à fait le même. Il faut se rappeler qu'à l'époque le contexte boursier était tout à fait exceptionnel. C'est ce que disait d'ailleurs l'ancien président de la Régie des rentes, un excellent serviteur de l'État qui s'est fait montrer la porte. Voici ce que disait M. Morneau: «La notion de surplus n'existe qu'en cas de terminaison de régime, parce que, là, on connaît les obligations puis on connaît les engagements. En cours de régime, on parle de surplus. Quant à moi, c'est des modalités de financement, c'est comme une photo qu'on prend à un moment donné.» Fin de la citation.

Maintenant, comme législateurs, comment pourrons-nous concilier les points de vue de chacun des groupes qui viendront se faire entendre? Voilà tout un défi qui nous attend. Sur ce, je vous remercie et je nous souhaite à tous une consultation constructive, empreinte de réalisme et surtout d'ouverture. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme la députée. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. M. le ministre, chers collègues, comme j'ai eu l'occasion de le dire lors du dépôt du projet de loi, il m'apparaît important de souligner que notre groupe parlementaire est très sensible au principe de l'égalité de tous les citoyens et de leur droit de parole. Par conséquent, le projet de loi présenté par notre collègue de Verdun nous semble être un pas dans la bonne direction. En effet, ce projet de loi viendra corriger une inéquité subie par ceux et celles qui pendant des années ont cotisé à un régime de retraite et qui ne peuvent actuellement avoir leur mot à dire sur la gestion du fonds, une fois à leur retraite. Aussi, il y a un groupe d'actif qui permettra... il permettra également à ceux et à celles qui cotisent et qui ne sont pas représentés par une association accréditée au sens du Code du travail et ceux qui ne sont pas liés par un contrat régissant l'utilisation de l'excédent d'actif du régime de donner leur assentiment à une modification du régime. Donc, nous ne pouvons qu'être en accord avec l'orientation de ces modifications.

Nous devrons toutefois être vigilants, quant aux implications et à la mise en place des modifications qu'apporte le projet de loi n° 195, pour ne pas créer d'autres inéquités. Je serai donc très attentif aux idées soumises dans les différents mémoires, et ce, pour bonifier possiblement le projet de loi n° 195. Merci, M. le Président.

Le président, M. Alain Paquet

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Alors, juste peut-être avant de conclure les remarques préliminaires, je vais me permettre d'en faire quelques-unes moi-même en tant que président, mais aussi en tant que député de Laval-des-Rapides.

Je pense qu'effectivement, tous autant que nous sommes, ici, autour de la table, représentants de nos citoyens, nous avons rencontré, au cours des derniers mois, des dernières années, des citoyens qui ont été concernés par la loi n° 102 et que, lorsqu'on parle de la cotisation, lorsqu'on parle d'épargne ? parce qu'on parle d'épargne lorsqu'on parle de fonds de retraite ? bien les gens qui ont cotisé, qui ont mis de l'argent de côté, bien ils ont participé, évidemment, ils ont mis une partie de leurs sommes qui sont là et ils s'attendent, au moment de leur retraite, à retirer un certain montant. Il y a eu une espèce de contrat entre des parties. Mais donc, comme cotisants, les citoyens évidemment disent: Bien, écoutez, lorsqu'il y a une gestion d'un fonds dans lequel nous avons mis de l'argent, on aimerait bien avoir voix au chapitre. C'est ça, la question de principe très simplement à laquelle les citoyens nous demandent de s'assurer, comme parlementaires, que nous puissions mettre en place des dispositifs qui permettent de respecter ce principe-là pour que tous puissent avoir voix au chapitre, et je crois que, du côté de ce principe-là...

Et je crois que l'adoption de principe, qui a été à l'unanimité à l'Assemblée nationale, indique déjà que, sur le principe, je ne pense pas, du côté des parlementaires, qu'il y ait beaucoup d'objections.

Maintenant, ce que nous attendons des consultations que nous allons faire au cours des prochaines séances, aujourd'hui et dans les séances qui vont suivre dans les prochaines semaines: nous voulons entendre les gens qui vont se présenter devant nous. Qu'est-ce qu'ils ont à dire? Est-ce qu'ils ont un problème par rapport au principe, d'une part? Ils ont le droit de s'exprimer, de dire oui ou non. S'ils ont un problème avec le principe, qu'ils nous disent pourquoi. S'ils n'ont pas de problème avec le principe, maintenant on passe aux modalités.

Qu'en est-il, en termes de modalités, dans le projet de loi actuel, qui répond au principe que nous avons proposé et quelles sont les modifications, s'il y a lieu, qui pourraient être utiles et intéressantes pour bien respecter le principe d'équité que nous avons mis sur la table? Donc, c'est une consultation qui est très ouverte et une participation très objective et rigoureuse de l'ensemble des parlementaires qui va être faite au cours de cette commission, et nous remercions d'avance évidemment tous ceux, tous les intervenants qui ont présenté des mémoires, et nous serons très heureux de pouvoir participer à cet échange et ce débat dans cette enceinte démocratique. Donc, je vous remercie beaucoup.

Alors, sans plus tarder, maintenant j'inviterais, je convierais à prendre place à la table nos premiers intervenants, qui sont les représentants de l'Institut canadien des actuaires.

Je vais peut-être suspendre les travaux pour une minute pour permettre aux gens de se présenter à la table. Je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 11 h 7)

 

(Reprise à 11 h 8)

Auditions

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission des finances publiques reprend ses travaux. Alors, je souhaite la bienvenue, au nom des membres de la commission, à l'Institut canadien des actuaires, qui est représenté par MM. Lapointe, Lafrance et Simard. Je vous inviterais à vous présenter, et vos titres, s'il vous plaît. M. Lapointe.

Institut canadien des actuaires (ICA)

M. Lapointe (Daniel): Mon nom est Daniel Lapointe. Je suis le directeur général de l'Institut canadien des actuaires.

Le Président (M. Paquet): Merci.

M. Lafrance (Jacques): Mon nom est Jacques Lafrance, et je suis membre de l'Institut canadien des actuaires.

M. Simard (Louis-Georges): Mon nom est Louis-Georges Simard, et je suis membre de l'Institut canadien des actuaires.

Le Président (M. Paquet): Alors, je vous remercie beaucoup. Alors, vous disposez d'une période de 15 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie d'une période d'échange de 30 minutes avec les parlementaires. Alors, M. Simard?

M. Simard (Louis-Georges): Oui. Donc, je voudrais initialement saluer les membres de la commission et vous remercier de l'opportunité qui nous est donnée, ce matin, d'exprimer nos vues sur le projet de loi n° 195.

L'ICA, ou l'Institut canadien des actuaires, compte plus de 2 000 membres au Canada. Plusieurs d'entre eux oeuvrent dans les domaines des régimes de retraite et participent à la conception, à l'administration et au provisionnement des régimes de retraite en collaboration avec les promoteurs et les administrateurs de régime, les syndicats et les fiduciaires. En fait, selon la loi, c'est que les actuaires sont les seuls habilités à certifier le provisionnement des régimes de retraite en accord avec les dispositions de la loi.

n(11 h 10)n

L'un des objectifs de l'Institut canadien des actuaires consiste à aider les législateurs à mettre en place des lois, en matière de régimes de retraite, qui comblent efficacement les besoins de toutes les parties en cause. Par le biais des relations qu'il entretient avec les représentants des gouvernements, l'ICA vise à favoriser l'intervention législative qui est propice à la gestion effective et efficace des régimes de retraite, d'une part, et qui tient compte des intérêts de toutes les parties en cause dans les régimes de retraite, d'autre part. Donc, notre objectif, c'est que c'est la santé des régimes de retraite pour le bien-être des retraités ultérieurs.

D'entrée de jeu, je dois vous dire que l'ICA n'appuie pas le projet de loi n° 195. Nous croyons que le projet de loi sera... ou créera une source de malentendus quant aux droits des retraités relativement aux congés de cotisation. Nous croyons que le projet de loi créera une perception, au niveau des retraités, qu'ils ont un droit de consentement au niveau des congés de cotisation. Également c'est qu'au niveau des employeurs nous croyons que le projet de loi ajoutera à l'incertitude quant à leur droit aux congés de cotisation. Donc, d'après nous c'est que le projet de loi va dans la mauvaise direction. Essentiellement, ce qu'il faut faire, c'est plutôt clarifier le droit aux congés de cotisation.

Et, pour justifier notre position, il faut bien comprendre le fonctionnement essentiel d'un régime de retraite à prestations déterminées. Ce dont on parle, c'est un engagement contractuel de pourvoir au paiement de prestations lors de la retraite ultérieure des participants. Donc, on parle d'une promesse de prestations lors de la retraite, et à juste titre la loi, au Québec, quand la loi a été introduite pour la première fois en 1966, a créé l'exigence de capitaliser cette promesse-là. Le but évidemment de la capitalisation, c'est de s'assurer, dans la mesure du possible, que, lorsqu'il va venir le temps de payer la promesse, il y aura une caisse de retraite pour effectivement pouvoir payer cette promesse-là. Le provisionnement a pour objet de mettre suffisamment de fonds de côté pour verser les prestations promises. Donc, on parle, dans un premier temps, d'une promesse et, dans un deuxième temps, de fonds mis de côté pour pouvoir supporter cette promesse-là.

Dans le cadre d'une évaluation actuarielle, l'actuaire doit établir plusieurs hypothèses pour estimer la valeur des prestations engagées par le régime. Donc, quand on parle d'hypothèses actuarielles pour des périodes allant sur 20, 30, 40 ans, tout ce qu'on peut faire comme ça, c'est des estimés, et nécessairement c'est qu'il y aura des déviations, il y aura des gains ou des pertes d'expérience. Si l'évaluation actuarielle détermine que l'actif de la caisse est insuffisant, la loi stipule que l'employeur est tenu de faire les paiements supplémentaires pour amortir le déficit, et habituellement, dans un contrat typique, les cotisations des participants sont établies en pourcentage de la rémunération et sont établies dans le contrat. Donc, ce qui varie, c'est les cotisations de l'employeur. S'il y a un déficit, l'employeur paie plus; s'il y a un surplus, l'employeur va payer moins.

Il existe évidemment un type de régime où est-ce que les cotisations des employeurs et des participants sont fixes, un régime à cotisation définie. On a référé tantôt à un régime d'épargne-retraite ? donc, c'est semblable ? où est-ce qu'on sait avec certitude quelles seront les cotisations des deux parties. Mais ce qui varie, c'est le montant de rente qui va être produit à la fin de la journée, dépendant des rendements en cours de route. Donc, d'après nous c'est que, lorsqu'un régime a un excédent d'actif, il est normal qu'un employeur prenne un congé intégral ou partiel, autrement la promesse serait différente. Ça, ce ne serait pas une promesse de prestation, ce serait possiblement une promesse qui serait gérée par la grosseur de la caisse. Donc, compte tenu de la promesse fondamentale des régimes à prestations déterminées, on pense qu'il serait souhaitable de préciser ou de clarifier le droit au congé de cotisation dans la loi, sous réserve évidemment des dispositions contractuelles. Je veux dire, il est toujours possible que, dans un environnement contractuel normal, avec un syndicat, qu'un employeur prenne d'autres engagements. Mais, dans le contexte normal, c'est qu'on a une promesse, et l'important, d'après nous, c'est de clarifier le droit au congé de cotisation lorsqu'il y a des surplus évidemment dans le régime.

Donc, d'après nous l'incertitude quant à la capacité de prendre des congés de cotisation a généré également une érosion des marges de provisionnement qui entraîne une diminution de la sécurité des participants. Parce qu'il faut bien comprendre que, si l'employeur n'est pas confortable, ultimement, lorsque la situation du régime va être meilleure, lorsqu'il va y avoir un surplus, si on n'est pas confortable, on va pouvoir utiliser ce surplus-là pour prendre un congé de cotisation. À ce moment-là, c'est qu'on va être tenté de capitaliser sur le minimum de la loi ou encore d'avoir un peu moins de marge dans les hypothèses utilisées aux fins de la capitalisation.

Au fédéral et également dans les autres provinces, depuis le jugement d'Air Products contre Schmidt, la Cour suprême avait clarifié le droit de l'employeur de prendre des congés de cotisation. Donc, il y a seulement qu'au Québec, depuis l'affaire Singer qu'on a mentionnée tout à l'heure, que ce droit-là était problématique.

Donc, comme je l'ai mentionné tantôt, normalement c'est que beaucoup d'employeurs préféreraient réduire le risque d'une hausse imprévue de cotisation requise en cotisant d'une façon plus conservatrice sur le régime de retraite. Par ailleurs, c'est que, à cause de l'incertitude, aujourd'hui, quant à la validité des congés de cotisation, de plus en plus d'employeurs ont décidé de faire preuve de moins de conservatisme dans leur provisionnement, y compris d'amortir les déficits sur une période plus longue, donc de payer réellement selon le minimum de la loi. Bien entendu, un tel changement dans la politique de provisionnement a réduit la sécurité des prestations. Cette conséquence n'est pas dans le meilleur intérêt des participants en général. À long terme, le droit des employeurs de prendre des congés de cotisation profitera à la fois aux participants et aux employeurs, d'après nous.

Donc, la situation des régimes aussi a changé beaucoup depuis les années 2000. Dans ce cas-là, c'est que les régimes étaient surtout en surplus. Aujourd'hui, on parle à peu près des trois quarts des régimes au moins qui sont en déficit au 31 décembre 2003, et cette situation-là, en 2004, ne s'est pas réellement améliorée. Donc, aujourd'hui, si on regarde un régime moyen, on parle d'exigences de cotisation en moyenne de l'ordre de 15 % de la masse salariale au moins. Donc, il y a un effort considérable qui a à être fait, aujourd'hui, par les employeurs pour pouvoir financer ces promesses de retraite là quand elles vont arriver plus tard. Et, d'après nous, d'après nous, c'est que la cessation éventuelle d'un régime avec un déficit important qu'un employeur insolvable ne peut combler est une source de préoccupation de politique publique qui est beaucoup plus grave que le désavantage perçu des congés de cotisation pour les participants. Il est juste de présumer que bon nombre de participants apprécieront les avantages d'une politique de provisionnement plus conservatrice, même si cela veut dire que l'employeur a le droit inconditionnel de prendre des congés de cotisation.

Donc, essentiellement c'est qu'on a quelques situations malheureuses, aujourd'hui, où est-ce qu'il y a des participants à la retraite, et malheureusement c'est qu'ils ne peuvent pas avoir leurs prestations à cause de situations d'employeurs qui ont failli. Et, aujourd'hui, avec la quantité de régimes où est-ce qu'on a des déficits importants, à cause de l'environnement économique en particulier, on pense que c'est ça, la préoccupation, et de clarifier la situation quant au congé de cotisation...

Donc, je laisse Jacques continuer la présentation.

M. Lafrance (Jacques): Bonjour à tous.

Le Président (M. Paquet): M. Lafrance.

M. Lafrance (Jacques): Oui. D'après nous, les règles régissant les congés de cotisation ne devraient pas être examinées de façon isolée; on devrait plutôt regarder l'ensemble de ces règles-là, les règles de provisionnement dans leur ensemble avant de changer les règles concernant les congés de cotisation. D'ailleurs, la Régie des rentes du Québec a annoncé qu'elle tiendra, vers la fin de l'année, une consultation sur ce sujet-là. Donc, d'après nous il serait probablement plus opportun d'attendre les résultats de cette consultation-là avant d'entreprendre les changements à la loi. Nous croyons qu'avec les modifications qui sont proposées dans le projet de loi n° 195 il sera beaucoup plus difficile de confirmer le droit au congé de cotisation. Cela nuirait à l'élimination de l'incertitude quant au droit de prendre des congés de cotisation.

n(11 h 20)n

Pour de nombreux régimes, il nous semble logique d'exiger l'assentiment des syndicats pour apporter une modification au régime. En exigeant également l'assentiment des participants non actifs et des participants non syndiqués, cela créerait un précédent dont les répercussions seraient très importantes. Par exemple, l'adoption des modifications proposées mènera éventuellement à la nécessité de déterminer s'il faut exiger l'assentiment des participants pour toute amélioration aux régimes provisionnés au moyen d'un excédent d'actif, voire même toute modification qui aura un effet sur le degré actuel ou éventuel de provisionnement du régime de retraite. Nous pouvons aisément imaginer tous les différends éventuels que pourra créer cette question. Chose certaine, l'adoption du projet de loi n° 195 n'encouragerait pas les employeurs à hausser ou à rétablir le conservatisme dans leurs politiques de provisionnement. Dans le contexte où le sous-provisionnement des régimes de retraite est une préoccupation d'envergure, cela produirait vraisemblablement un résultat non souhaitable.

Comme il a été mentionné antérieurement, nous croyons aussi que la proportion des travailleurs participant à des régimes de retraite est trop faible. Une participation accrue devrait être un facteur primordial, au moment d'adopter des changements à la législation sur les régimes de retraite. Un changement fondamental qu'il convient d'apporter pour maintenir et favoriser la couverture des régimes est d'atteindre un équilibre entre la propriété de l'excédent et la prise en charge du risque. Le fait que les employeurs doivent payer les déficits de provisionnement sans être assurés de profiter des avantages des excédents a grandement contribué au niveau décevant de la couverture des régimes de retraite.

J'ai terminé notre exposé.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Lafrance. Donc, nous procédons maintenant à la période d'échange. Alors, j'inviterais M. le député de Verdun à commencer cette période.

M. Gautrin: On a un peu de temps, on aura probablement la chance d'échanger. Je vous remercie d'abord d'être venus présenter votre mémoire ici. Je suis d'accord avec vous qu'il y a peu de personnes qui contribuent actuellement dans des régimes de retraite, qu'il faut augmenter en quelque sorte la participation, c'est une question qu'on ne discutera pas ici. Je suis d'accord avec vous aussi qu'il y a un problème de provisionnement dans les régimes de retraite. Je pense qu'on n'en débattra pas ici non plus.

Je veux soumettre quand même une question qui pour moi me semble importante, que vous n'avez pas abordée. En fin de régime, lorsqu'il existe un excédent ? donc, à ce moment-là, c'est un véritable excédent ? la loi précise ? et c'est la loi actuelle ? précise que cet excédent est partagé entre les participants en principe actifs et non actifs au prorata de leurs cotisations, etc. Est-ce que vous ne pensez pas que, si actuellement l'employeur peut prendre des congés de cotisation, ça risque, si jamais il veut, par exemple, mettre fin au régime, de faire disparaître ce droit qu'ont les retraités actuellement sur la partie des excédents qui peut arriver si on mettait fin au régime?

Le Président (M. Paquet): M. Lapointe.

M. Simard (Louis-Georges): Simard.

Le Président (M. Paquet): M. Simard, pardon. Excusez-moi.

M. Simard (Louis-Georges): En fait, c'est un peu ça, la problématique, puis c'est très intéressant que vous posiez la question comme ça. Il faut se demander c'est quoi, après tout, l'engagement d'un régime à prestations déterminées. Est-ce que c'est la promesse de pension à la retraite ou est-ce que c'est ça plus peut-être, s'il y a des surplus, à un moment donné, dans le provisionnement qui s'accumulent, que les participants vont avoir droit à ces surplus-là? Et c'est là que ça ne fonctionne pas bien, parce que, je pense que tantôt on a cité M. Morneau qui l'a mentionné, pendant l'existence d'un régime, à cause comme ça des hypothèses à long terme qu'on a à faire, il va y avoir nécessairement des situations où est-ce qu'il va y avoir des surplus, d'autres qui vont avoir des déficits. Quand il y a un surplus, c'est que la loi est bien claire, il faut que l'employeur paie très rapidement. On parle de cinq ans pour combler le déficit. Donc, c'est dans la vie d'un régime que ça se passe, ça.

C'est certain que, si, au cours de la vie d'un régime, il y a moins d'argent qui est cotisé, c'est qu'il va y en avoir moins à la fin. Mais ça, on parle de questions un peu idéologiques, là. À ce stade-ci, la vraie préoccupation, c'est de pouvoir capitaliser de façon à rencontrer les promesses de rente qui vont être payées lors de la retraite, et c'est là-dessus, je pense, qu'il faut... c'est ça qu'il faut regarder. Et c'est pour ça qu'il faut établir, je pense, des règles du jeu claires qui vont permettre à l'employeur de ne pas hésiter à mettre un peu plus d'argent que requis par la loi ou à capitaliser d'une façon un peu plus conservatrice, selon les hypothèses actuarielles établies avec l'actuaire, de façon, comme ça, à ce qu'il y ait une meilleure assurance pour les participants d'avoir leurs prestations à la fin de la journée.

Maintenant, si un régime se rend à la fin de la journée puis s'il en reste effectivement, de l'argent, à ce moment-là, au Québec c'est qu'on a trouvé une solution qui n'est pas débattue aujourd'hui, c'est qu'on partage l'argent qu'il reste. C'est dans la loi, puis on n'en débat pas aujourd'hui. Mais, en cours d'existence d'un régime, c'est que les surplus puis les déficits, c'est normal.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Ça, je comprends que les surplus et les déficits, c'est normal. Je comprends aussi qu'il faut avoir peut-être une vision sur le long terme, etc. Ça, je comprends tout ça. Mais, si on prend des congés de cotisation, vous comprenez qu'on hypothèque, à la fin, la possibilité éventuellement, si jamais on met fin au régime, la possibilité de se partager un surplus qui devient réel, à ce moment-là.

M. Simard (Louis-Georges): Bien oui, mais la question, c'est ça, c'est que...

Le Président (M. Paquet): M. Simard.

M. Simard (Louis-Georges): Excusez, oui. Si l'objectif, c'est d'avoir le plus d'argent possible, c'est évident que, si on en met le plus possible, il va y en avoir, à la fin de la journée, le plus possible. Mais la vraie problématique aujourd'hui... Puis, quand ton employeur a en moyenne, comme j'ai dit, à cotiser, pour les régimes à prestations déterminées, plus que 15 % de la masse salariale, c'est extrêmement exigeant. C'est difficile déjà pour les employeurs de faire ça. Donc, si on dit: Bien, écoutez, là, ça va continuer à être comme ça, ce n'est pas compliqué, ce qui va arriver, les régimes à prestations déterminées n'ont pas d'avenir, dans ce contexte-là, c'est bien clair dans mon esprit. Donc, pour qu'il y ait de l'avenir, c'est que ça prend des règles claires. C'est que les employeurs présentement font des efforts énormes, financiers, pour supporter ces régimes-là. On a des situations malheureuses qui se passent, et, si on n'a pas des règles claires, ce n'est pas vrai que les employeurs vont pouvoir réalistement compétitionner dans l'environnement actuel et cotiser 15 % des régimes de retraite.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je comprends la question que vous posez. Je voudrais poser... Vous êtes quand même, vous, de l'Institut des actuaires, garants des paramètres et vous dites à l'heure actuelle des paramètres des évaluations actuarielles... Je sais qu'il y a une certaine fluctuation quant au conservatisme des paramètres, mais est-ce que vous avez remarqué, à l'heure actuelle, après l'adoption de la loi n° 102, s'il y a eu modification significative des paramètres? Avant évidemment la modification qu'on fait ici, est-ce qu'il y a eu des changements? C'est-à-dire, lorsque vous avez précisé... Autrement dit, si je comprends votre élément, vous dites: L'incertitude a tendance à être conservatrice par rapport aux paramètres des évaluations actuarielles. Est-ce que je comprends votre proposition?

Le Président (M. Paquet): Monsieur...

M. Gautrin: Et, ceci étant dit, est-ce que, après l'adoption de la loi n° 102, c'est-à-dire, je pense... est-ce que vous avez vu des changements significatifs à cet effet-là?

Le Président (M. Paquet): M. Lafrance.

M. Lafrance (Jacques): Oui. Merci. Ce que nous avons remarqué, la baisse... Effectivement, nous avons remarqué une baisse de conservatisme dans le provisionnement des régimes de retraite, mais ça date d'avant la loi n° 102. C'est le contexte général, si on veut, des régimes de retraite, l'incertitude quant au droit de l'employeur de prendre des congés de cotisation et aussi même son droit à l'excédent en cas de terminaison du régime, qui ont amené beaucoup d'employeurs à dire: Écoutez, moi, qu'est-ce que ça me donne de payer mes déficits plus rapidement que prévu par la loi si, en bout de ligne, je ne suis même pas sûr de pouvoir utiliser ces excédents-là plus tard? Donc, ça date d'avant la loi n° 102.

La loi n° 102 d'après moi n'a pas changé grand-chose de ce côté-là. Ça a aidé un peu à stabiliser un peu le contexte, mais ce que, nous, nous mettons de l'avant, c'est que ça ne va pas assez loin. Beaucoup d'employeurs sont très réticents à mettre sur pied un régime de retraite présentement seulement sur cette base de question là: Est-ce qu'un jour, si je mets de l'argent dans mon régime de retraite et si ça va mieux que prévu, est-ce que je vais pouvoir ralentir mon rythme de cotisation? Avec ce point d'interrogation là qu'on a présentement, les employeurs sont réticents à mettre sur pied des régimes de retraite ou à maintenir leurs régimes de retraite.

M. Gautrin: Je pense que mon collègue de...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun, oui.

M. Gautrin: Mon collègue de...

Le Président (M. Paquet): Montmorency.

M. Gautrin: ...Montmorency avait une question.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. le député de Montmorency.

M. Bernier: O.K. Merci. Moi, je comprends bien, là, tout l'aspect technique que vous apportez ici, l'aspect de la fluctuation des marchés, la froideur des employeurs à créer de nouveaux régimes de retraite ou à en mettre en place, puis ce que je crois, hein, c'est que ces éléments-là peuvent faire l'objet d'une négociation. O.K.? Moi, ce que j'aimerais connaître ? premièrement, merci d'être ici, ce matin, merci de nous éclairer ? c'est votre position sur le fondement même, sur le principe même de la participation des retraités au processus, parce que ces gens-là, hier, étaient actifs et avaient un droit de participer. Le lendemain, au moment où ils prennent leur retraite, ils n'ont plus le droit de participer. Pourtant, ce sont toujours leurs cotisations. En prenant pour acquis que toute la problématique de la technologie, des lois, des négociations, de la participation se réglerait, dans le cadre d'une négociation, sur le principe même, moi, j'aimerais vous entendre, là, sur ça, sur le droit de ces gens-là qui ont contribué, qui ont payé au fond à pouvoir émettre leur opinion, et prenant pour acquis qu'ils ne sont pas nécessairement non plus...

Vous avez beaucoup parlé du congé de cotisation. Eux aussi ont tout intérêt à ce que l'entreprise se poursuive, à ce que l'entreprise se développe et à ce que l'entreprise ait des liquidités. O.K.? Ils n'ont pas intérêt à ce que cette entreprise-là ait des difficultés financières majeures, parce qu'à ce moment-là eux aussi vont être en difficulté. On connaît plusieurs entreprises qui malheureusement aujourd'hui ont quitté, et les retraités se sont retrouvés dans des situations difficiles. Prenons, exemple, compagnie Paquet ou des choses comme ça, hein? Donc, moi, j'aimerais vous entendre sur le fondement même de ça, de ce droit-là, mis à part tout l'aspect technique.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. Simard, en 1 m 30 s environ.

n(11 h 30)n

M. Simard (Louis-Georges): Les retraités ont un intérêt, mais ils n'ont pas le même intérêt que les employés actifs dans la continuité de l'entreprise. Essentiellement, si un régime est terminé, en équilibre ou encore avec un surplus, c'est que les retraités vont avoir leurs promesses de rente qui vont être achetées auprès d'un assureur et ils vont avoir aussi un partage de surplus. Donc, est-ce que les retraités ont un intérêt? Ils ne reçoivent pas le même intérêt que les employés actifs dans la continuité de l'entreprise.

Les retraités, c'est que leur vraie préoccupation, aujourd'hui, je pense, là ? puis on a des vraies situations; vous mentionnez Paquet; je ne sais pas s'il y avait un régime de retraite, mais on a des vraies situations, aujourd'hui; on a parlé de mine Jeffrey, il y a d'autres situations ? c'est d'avoir leurs prestations de pension, d'avoir leur rente promise par le système, et, quand on a un régime qui est capitalisé, aujourd'hui, à 80 %, à 75 %, donc c'est ça, la vraie préoccupation. Puis, dans la mesure où cette préoccupation, elle est rencontrée, c'est que les retraités, je veux dire, ont la promesse qu'on leur avait faite.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. M. Lapointe, M. Lafrance, M. Simard, bienvenue. Merci de votre participation, qui est très appréciée. Moi, je rejoins un peu mon collègue d'en face concernant l'absence de suggestions quant aux retraités dans votre mémoire. La question est simple. Vous parlez de capitalisation. Mais comment on pourrait les impliquer? Comment on pourrait les intégrer un peu plus? Vous n'en parlez pas du tout dans votre mémoire. Je sais que vous avez parlé de leurs préoccupations. Est-ce que vous avez d'autres suggestions?

Le Président (M. Paquet): M. Simard ou M. Lafrance. M. Lafrance, donc.

M. Lafrance (Jacques): Évidemment, on est tous sensibles aux intérêts des retraités. Les retraités ont déjà certains mécanismes qui sont à leur disposition. Entre autres, au Québec on doit tenir une assemblée à tous les ans de tous les participants du régime de retraite. Donc, on invite les retraités à ces assemblées-là, donc ils ont l'occasion, au moment des assemblées, de faire valoir leur point de vue sur, en fin de compte, l'administration du régime de retraite et également sur la gestion de la capitalisation du régime de retraite. Et aussi la loi prévoit déjà qu'au sein du comité de retraite qui administre le régime de retraite ils ont la possibilité d'avoir un représentant au sein de ce comité-là.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Oui. Merci, M. le Président. Vous croyez que c'est suffisant, selon vous?

M. Lafrance (Jacques): Pour faire écho à mon collègue, M. Simard...

Le Président (M. Paquet): M. Lafrance.

M. Lafrance (Jacques): ...oui, en fait les retraités... Moi, mon expérience est, entre autres, aux assemblées annuelles de régime de retraite. La préoccupation des retraités, c'est: Est-ce que je vais recevoir ma rente de retraite demain matin? Et aussi: C'est quand, la prochaine fois qu'elle va être bonifiée? C'est principalement les préoccupations de nos retraités à l'heure actuelle. À ce moment-là ? on parlait de contrat tantôt ? le contrat garantit une rente de retraite. Est-ce que le contrat prévoit une augmentation ensuite future des rentes de retraite? La plupart des contrats, en fin de compte, une majorité de contrats ne le prévoient pas, c'est à la discrétion de l'employeur. Est-ce que le contrat prévoit que les retraités ont un mot à dire sur l'administration des régimes de retraite ou sur la gestion de la capitalisation? La plupart du temps, le contrat ne le prévoit pas.

Si effectivement les retraités avaient un droit de regard sur les décisions concernant les modifications au régime de retraite, où on s'en irait? C'est la question qu'il faut se poser. À ce moment-là, un employeur, lui, ne pourrait plus dorénavant faire de modification à son régime de retraite sans consulter des retraités ou les participants non actifs. À ce moment-là, on serait probablement dans une situation où il ne se passerait rien. Et la seule décision qui pourrait être prise plus tard, si jamais un employeur trouve qu'en fin de compte ça coûte trop cher: on va fermer le régime de retraite.

Donc, il faut être conscient du désir et, en fin de compte, de l'intérêt public si on veut le maintien des régimes de retraite. Et, en fin de compte, les retraités, ce qu'ils ont comme droit principalement, c'est de recevoir leur rente de retraite. Si leur rente de retraite n'est pas versée, là effectivement ils ont un problème.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Pouvez-vous expliquer pourquoi il serait sage que le législateur connaisse les intentions gouvernementales, quant aux modifications du Régime de rentes du Québec ? là, je parle d'exigences de capitalisation minimale ? avant de procéder à des changements à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite? Est-ce qu'il y a vraiment un lien à faire avec tout ça?

Le Président (M. Paquet): En réponse.

M. Lafrance (Jacques): Oui. Ce que nous anticipons dans ces discussions-là: une forte possibilité que la Régie des rentes mette de l'avant un resserrement des normes d'approvisionnement, donc des règles plus sévères pour les employeurs concernant le paiement des déficits. C'est une possibilité. On ne sait pas exactement où est-ce qu'on s'en va présentement pour l'instant, mais c'est quelque chose qui va être probablement débattu.

Alors, un compromis pourrait être: si jamais vous exigez un paiement des déficits actuariels plus rapide, à ce moment-là donnez-nous plus de certitude quant au droit de prendre des congés de cotisation. Alors, c'est l'ensemble du provisionnement qui devrait être regardé dans son ensemble. Dès aujourd'hui, par exemple, de mettre des bâtons dans les roues ou des conditions plus sévères pour les congés de cotisation pourrait, en fin de compte, nuire dans la discussion qu'on va avoir plus tard cette année. Donc, c'est un ensemble, d'après nous, c'est un ensemble qu'il faut regarder, de réapprovisionnement, et, nous, nous sommes ouverts, l'institut a discuté de plusieurs possibilités de changements par rapport à ça. Effectivement, le système présentement n'est pas parfait au niveau du paiement des déficits, et il y aurait probablement des améliorations à faire de ce côté-là.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Je vais permettre à mes collègues de poser des questions.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. le député de Charlevoix et vice-président de la commission.

M. Bertrand: Merci, M. le Président. J'aurai quelques questions d'ordre un peu plus général pour nous amener à toujours mieux saisir et mieux comprendre la problématique des retraités actuels.

D'abord, quand vous dites que la préoccupation des retraités vous semble être due parce qu'il y a des entreprises qui ont failli ou des entreprises qui, dans les derniers temps, ne sont pas capables de remplir leurs obligations, moi, j'ai l'impression que ce n'est pas de ça qu'on parle, ici. Puis je veux être bien sûr qu'on s'entend bien, surtout pour les gens qui nous écoutent et qui suivent les débats. Si j'ai bien compris, moi, on parle de la préoccupation des retraités actuels qui sont concernés par la loi actuelle, autrement dit des gens qui ont contribué il y a cinq, 10, 15, 20 ans et qui ne voient pas en danger leur projet. Mais ils disent: Bien, on aimerait participer davantage aux décisions parce qu'on est directement concernés, premièrement.

Deuxièmement, moi, je suis ici, aujourd'hui, pas pour réparer une injustice. Moi, je me dis qu'on a amélioré, en 2002, on a amélioré la loi qui existait à l'époque, qui s'appelait la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et qui avait été présentée par un gouvernement de l'époque, qui était en 1989. En 2002, on l'a améliorée. Et à l'heure actuelle, si je comprends bien le projet de loi déposé par mon collègue, c'est pour continuer de l'améliorer.

Alors, ma première question est la suivante. Vous y avez touché un tout petit peu tout à l'heure, mais pas à ma satisfaction. La 102, après trois ans... Elle visait au départ, en 2002, à améliorer le système. Vous y avez touché, mais j'aimerais vous entendre davantage. Est-ce que la 102... Parce qu'on y a mis beaucoup d'efforts, puis, quand je dis «on», ça inclut tous les parlementaires, tous les groupes qui sont venus, tout le monde qui est intervenu. Est-ce que la 102 a, après trois ans, amélioré, ou on n'est pas capable encore, parce que c'est récent, trois ans, on n'est pas capable encore de vraiment mettre le point sur... Ce n'est peut-être pas assez longtemps, là.

Et, par rapport à la problématique que je viens de situer pour les retraités, ce que je semble comprendre du problème... Moi aussi, j'aurais aimé, parce que je vous considère... Puis corrigez-moi si je suis dans l'erreur. Tout à l'heure, on recevra le groupe des patrons, représenté par M. Taillon; demain, les syndicats et d'autres. Mais, vous autres, je vous considère comme plus indépendants que tout ce monde-là parce que vous êtes les administrateurs, vous êtes les gens qui, par votre formation professionnelle, allez dans le temps faire des calculs, puis, bon, je me serais attendu à des éléments, pas uniquement dire: On n'est pas en faveur. Mais je me serais attendu à des recommandations plus positives concernant la vraie problématique.

Le Président (M. Paquet): M. Simard.

n(11 h 40)n

M. Simard (Louis-Georges): Notre recommandation, je pense, c'est assez clair, c'est de clarifier, de bien encadrer le droit au congé de cotisation, et on pense que c'est extrêmement important pour la pérennité des régimes à prestations déterminées. Quand vous avez mentionné, au début, à savoir qu'on n'est pas ici pour discuter des situations où est-ce qu'on est préoccupés parce que les prestataires, les rentiers ne recevront pas leur rente de retraite, vous avez dit: Il y a des gens qui se sont retirés il y a cinq, 10, 15 ans puis qui ont cotisé. En fait, j'étais partiellement en désaccord, si vous me permettez, avec ça parce qu'on a des situations aujourd'hui où est-ce qu'il y a des gens qui ont cotisé il y a cinq, 10, 15 ans comme ça et qui vont se voir couper ? mine Jeffrey, c'est un bon exemple ? leurs prestations de retraite parce que, je veux dire, l'employeur a failli et est dans un environnement déficitaire.

Donc, notre recommandation, c'est assez clair, c'est qu'on pense qu'un régime de retraite à prestations déterminées, c'est nécessairement des variations de cotisation au cours de l'existence du régime, et, pour la santé financière de ces régimes-là, nous autres, on le voit et on a à coeur, on a à coeur, on pense que c'est extrêmement important, on a à coeur la survie de ces régimes-là parce qu'on pense qu'ils jouent un rôle extrêmement important dans les prestations de retraite des retraités québécois en particulier.

Pour ce qui est de la loi n° 102, à votre question spécifique, la loi n° 102 a fait des très bonnes choses. L'élimination des terminaisons partielles, c'est quelque chose comme ça qui clarifie une situation au Québec par opposition à ce qu'on a en Ontario présentement. Je ne sais pas si vous avez suivi le dernier jugement Monsanto en Ontario. Donc, on a fait des très bonnes choses dans la loi n° 102, mais il faut finir le travail au Québec, et, pour nous, c'est de clarifier la question des congés de cotisation une fois pour toutes.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la députée de Matane... Il resterait une période de cinq minutes sur le bloc suivant, à moins que vous vouliez l'entamer tout de suite. Il y a 15 minutes de chaque côté. De consentement...

M. Gautrin: On peut consentir à ce que vous preniez vos cinq minutes tout de suite, quitte à ce qu'on revienne après.

Le Président (M. Paquet): Allez-y donc.

M. Bertrand: C'est juste pour continuer dans le même...

Le Président (M. Paquet): Alors, M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Juste pour continuer dans le même ordre, je veux juste éclaircir une chose, là. Les membres de cette commission-ci sont très, très, très conscients que, ce qu'on rencontre au Québec actuellement, on se doit de se pencher dessus, c'est-à-dire l'inquiétude créée par ce qui se passe dans les fonds de pension de façon très générale. Ça, il faut que ce soit très, très clair. On en a encore parlé pas plus tard que ce matin, excepté que pour nous ce n'est pas le débat d'aujourd'hui, là.

Est-ce que je comprends bien? Quand vous y avez fait allusion, là, vous avez parlé des retraites. Vous revenez souvent sur prestations déterminées. Pour avoir travaillé dans ce milieu-là très longtemps, je pense que c'était, à l'époque, ce qui se vendait le plus puis qu'on croyait le meilleur pour tout le monde. Mais, si les régimes étaient à prestations indéterminées au lieu d'être fixes, est-ce que ce serait plus simple et meilleur pour tout le monde? Puis là les gens vont me dire: Bien oui, mais ça ne nous touche pas de façon directe. Je veux juste qu'on comprenne davantage quelles sont les difficultés qu'on rencontre à modifier ce système-là pour arriver à une meilleure satisfaction pour tous ceux et celles qui en bénéficient.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. Simard. Puis, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, je vous reconnaîtrai après. Il reste trois minutes au total. Alors, M. le député de... M. Simard, pardon.

M. Simard (Louis-Georges): Essentiellement, prestations déterminées: promesse de pension à la retraite, l'argent qui est mis de côté pour payer la promesse. C'est comme ça qu'on voit ça. Cotisation déterminée ou définie comme un régime enregistré d'épargne-retraite: on met de l'argent et ça accumule, à la retraite, ce que ça accumule. Donc, le participant, dans ce cas-là, est au risque. Il n'y a pas de problème de congé de cotisation. Le participant et l'employeur sont assurés comme ça d'un même niveau de cotisation, et on n'aurait pas ce débat-là aujourd'hui. Les prestations déterminées, par définition on a des variations de cotisation, et c'est pour ça qu'on a le débat aujourd'hui. Donc, il y a des périodes économiques où ça va mieux, d'autres où ça va moins bien. C'est ça, le défi que les actuaires ont. Mais les actuaires peuvent uniquement estimer le futur mais vont toujours se tromper. Il faut rester humble.

M. Lafrance (Jacques): Pour ajouter un commentaire...

Le Président (M. Paquet): M. Lafrance, rapidement, s'il vous plaît.

M. Lafrance (Jacques): Oui. Pour répondre à la question: Est-ce que l'un est meilleur que l'autre?, nous, on est neutres par rapport à ça. On croit que, dans un environnement d'affaires d'aujourd'hui, on devrait avoir de la place pour les deux. Le problème, ce qu'on a présentement, c'est que les régimes à prestations déterminées ont un encadrement tellement rigide et sévère qu'ils étouffent, et la plupart des employeurs sont obligés d'y mettre fin, ou enfin songent à y mettre fin, à cause de ce cadre-là. Donc, ce qu'on préconise plutôt: ayons une ouverture pour qu'un employeur puisse, et avec ses employés, choisir librement lequel des instruments il veut choisir. Merci.

Le Président (M. Paquet): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, donc deux minutes, question et réponse.

M. Picard: Merci, M. le Président. Dans votre mémoire, vous indiquez que la proportion des travailleurs participant à un régime de retraite est trop faible. Et, un peu plus loin, vous dites: «Un changement fondamental qu'il convient d'apporter pour maintenir et favoriser la couverture des régimes est d'atteindre un équilibre entre la propriété de l'excédent et la prise en charge du risque.»

Est-ce que vous pourriez élaborer cette idée ? parce que l'idée est très claire ? mais l'imager, l'élaborer pour qu'on puisse bien saisir c'est quoi, l'équilibre, pour vous?

Le Président (M. Paquet): M. Lafrance.

M. Lafrance (Jacques): L'équilibre, c'est: si vous prenez un régime de retraite à prestations déterminées classique, si on veut, l'employeur fait une promesse à ses employés: Vous allez avoir un régime de retraite qui va vous permettre des rentes à la retraite, donc vous n'avez pas à vous soucier de qui va payer des déficits, c'est nous, c'est moi, l'employeur, qui vais prendre ce risque-là. Donc, l'employeur assume tous les risques par rapport à la capitalisation du régime de retraite. Si ça va bien, l'employeur va probablement payer moins que prévu et, si ça va mal, l'employeur va payer plus que prévu. Donc, c'est l'employeur qui prend les risques. Donc, c'est normal, dans ce contexte-là, que, si ça va bien, l'employeur puisse librement réduire son niveau de cotisation future pour tenir compte qu'en fin de compte ça coûte moins cher que prévu.

Si on peut faire un parallèle, beaucoup d'employeurs procurent de l'assurance vie à leurs employés. Est-ce que la promesse, c'est le montant que l'employeur va verser à chaque année à l'assureur pour procurer cette assurance vie là? Non. La promesse, ce n'est pas ça. La promesse, c'est: si tu décèdes, toi, mon employé, tu vas recevoir, par exemple, une fois ou deux fois ton salaire. Alors, les employés ne sont pas préoccupés, à ce moment-là, par combien ça coûte mais plutôt combien je vais recevoir.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Oui. Alors, monsieur, vous parlez, dans votre mémoire, d'une façon dont vous provisionnez, dont les employeurs provisionnent les régimes: normalement, avec conservatisme, favorablement avec conservatisme. Est-ce que vous croyez qu'une loi qui permettrait... ou qui établirait des paramètres pour justement voir ce qu'est le conservatisme aux fins de l'évaluation des déficits ou de l'utilisation des surplus pourrait être une solution qui permettrait d'une part aux retraités qui déjà bénéficient des prestations d'être plus sécures dans l'avenir et également de donner une certaine flexibilité à l'employeur?

Le Président (M. Paquet): M. Simard.

M. Simard (Louis-Georges): Non. En fait, je ne crois pas. La vraie problématique un peu, c'est que, à cause de toute la diminution des taux d'intérêt, essentiellement c'est qu'on peut moins amasser d'argent sur une caisse de retraite. Donc, la même prestation à la retraite, là, elle coûte plus cher aujourd'hui qu'elle coûtait comme ça il y a quelques années. Et, dans les projections actuarielles qu'on fait, c'est qu'il faut reconnaître l'évolution comme ça des facteurs économiques, et on a certaines marges pour le conservatisme, mais c'est impossible de créer un environnement où on va cotiser assez, de façon à dire: Bon, bien la caisse est assez grosse, et qu'il n'y aura jamais, comme ça, de situation plus difficile. Si on faisait ça, ça deviendrait extrêmement prohibitif de faire ça. Il y a une certaine marge que l'employeur peut décider pour aller au-delà d'un minimum de conservatisme, là, et, dans la mesure où est-ce qu'on règle le problème des congés de cotisation, comme j'ai mentionné, c'est qu'on aurait beaucoup plus de chances que les employeurs seraient prêts à ajouter à cette marge-là. Mais, de la légiférer, je ne vois pas ça du tout. Je pense que, si ça arrivait, ce serait un gros, gros, gros, gros boulet pour les régimes de retraite au Québec.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. M. le député de Hull.

M. Cholette: M. le Président, chers collègues, MM. nos invités, moi, je ne suis pas expert dans ce domaine-là, mais je dois vous dire qu'il y a bien des gens qui nous en parlent et puis qui sont préoccupés. Alors, je vais tenter de faire ça vite, là, mais je vais me faire le porte-parole des gens qui sont à la retraite puis je vais tenter d'avoir votre écho par rapport à ça.

Si on parle très clairement, là, puisque les deux parties contribuent dans un pot, dans une tirelire, et l'employé et l'employeur, après 10 ans, cet employé-là prend sa retraite et l'employé, une fois à la retraite... ou cette situation donc après 10 ans... On constate qu'il y a surplus. Ce surplus est occasionné par la fluctuation, si vous voulez, de la tirelire qui a été composée, d'une part, des employés, d'une autre part, évidemment des employeurs. Ce que les employés nous demandent une fois à la retraite, c'est de dire: Si les congés de cotisation sont permis, pourquoi est-ce qu'on ne peut pas aussi avoir notre mot à dire? Parce que, nous autres aussi, on a contribué à cette valeur accrue 10 ans plus tard. Je veux dire, c'est assez simple comme question, mais j'essaie de comprendre pourquoi vous vous opposez, dans votre mémoire, au fait que les employés qui ont contribué à cette plus-value n'aient pas leur mot à dire sur l'utilisation de ces surplus. Parce que je pense personnellement, là, que, que ce soit un congé de cotisation ou une augmentation de prestations, c'est, dans le fond, une utilisation de ce surplus. Pourquoi l'utilisation de ce surplus, une des parties, un des joueurs qui y a contribué ne devrait pas avoir droit au chapitre?

n(11 h 50)n

Le Président (M. Paquet): M. Simard.

M. Simard (Louis-Georges): La contrepartie de ça, c'est qu'aujourd'hui les régimes ont des déficits significatifs. Pourquoi on ne va pas rechercher de l'argent chez les retraités pour pouvoir combler ces déficits-là? Essentiellement, la problématique, c'est la compréhension des différents types de promesses. Et il y a deux types de promesses de retraite, il y a deux types de régime de retraite, il y a un régime qui est exactement celui que vous avez décrit au début, là, qui est une accumulation de capital et qui procure à la retraite ce que les rendements auront été entre-temps, et ça, c'est clair, ce régime-là, c'est qu'on ne parle jamais de congés de cotisation, c'est un régime à cotisation définie qui est encadré également dans la loi.

Ce dont on parle aujourd'hui essentiellement, c'est des régimes à prestations déterminées. Déficit, surplus. Déficit, c'est que c'est l'employeur qui paie. On ne va pas rechercher l'argent au niveau des retraités. Le retraité, il a sa promesse de pension. Donc, c'est ça, la problématique. S'il y avait une dynamique comme ça où est-ce qu'on voulait faire un partage puis aller rechercher l'argent des retraités, réduire les prestations si les rendements ne sont pas bons, on parlerait d'une chose qui est différente. Mais, dans le contexte qu'on a aujourd'hui, ces régimes-là, et c'est clair dans la loi, c'est que la loi dit que, les prestations, on ne peut pas les réduire.

Le seul moyen de réduire les prestations, c'est quand un régime brise, casse, termine parce que cet employeur ne peut plus... et, à ce moment-là, c'est qu'il y a un déficit, on réduit les prestations parce qu'il n'y a pas d'argent pour les payer. Mais la loi empêche de réduire les prestations accumulées des actifs et des retraités.

Le Président (M. Paquet): Alors, merci beaucoup. Au nom des membres de la commission, j'aimerais, en tant que président, remercier l'Institut canadien des actuaires pour leur participation à nos travaux. Je suspends les travaux pour une minute.

(Suspension de la séance à 11 h 52)

 

(Reprise à 11 h 54)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors donc, au nom de la commission, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants du Conseil du patronat: M. Gilles Taillon, président; Mme Diane Bellemare, vice-présidente à la recherche; et Mme Anne Lebel, qui est directrice générale du Conseil du patronat.

Alors, M. Taillon, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

M. Taillon (Gilles): Merci beaucoup, M. le Président. Merci à la Commission des finances publiques de nous recevoir pour discuter du projet de loi n° 195.

Je vais vous présenter les gens qui m'accompagnent très rapidement: Diane Bellemare, qui est vice-présidente à la recherche; Anne Lebel, qui est vice-présidente Communications et relations publiques. Et, comme le mémoire est court, je vais le lire plutôt que de le résumer, je pense bien qu'on va entrer dans le temps qui nous est imparti.

Donc, d'entrée de jeu nous sommes contre le projet de loi n° 195. Ça va régler le problème. On va essayer de vous expliquer pourquoi. Le projet de loi n° 195 vise à modifier les règles d'utilisation des excédents d'actif des régimes complémentaires de retraite. Plus spécifiquement, il vise à modifier les règles de confirmation du droit de l'employeur d'affecter l'excédent d'actif du régime à l'acquittement de ses cotisations. Rappelons qu'avec la loi n° 102 modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite les employeurs du Québec ont la possibilité, depuis le 1er janvier 2001, de se prévaloir d'un processus formel qui confirme leur droit à des congés de cotisation. Le projet de loi n° 195 vise à rendre plus difficile ce processus de confirmation. Depuis le 1er janvier 2001, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite prévoit des règles de confirmation du droit à des congés de cotisation qui nécessitent une consultation auprès des associations accréditées représentant les participants actifs ainsi que toute partie avec laquelle l'employeur est lié par un contrat autre que le régime de retraite. Le projet de loi n° 195 vise à ouvrir cette consultation aux participants actifs non couverts par la loi ainsi qu'aux participants non actifs, soit les retraités.

En pratique, il appert que très peu d'entreprises se prévalent de cette disposition, à savoir confirmer son droit d'affecter l'excédent de l'actif du régime à l'acquittement de ses cotisations. Toutefois, lorsqu'elles prennent des congés de cotisation, elles se rendent alors vulnérables à une contestation de leur droit par leurs employés. Évidemment, la loi n° 102 a été adoptée dans un contexte où il y avait d'énormes surplus dans les caisses, mais, peu de temps après, on a vu fondre cela. On n'est pas très, très surpris de voir qu'il n'y a pas eu d'utilisation des dispositions.

En apparence, le projet de loi n° 195 a l'air inoffensif et ne devrait changer en rien la pratique. Toutefois, en ouvrant les règles de confirmation du droit de l'employeur notamment aux retraités, le projet de loi pourrait donner un fondement juridique à la prétention de certains groupes de retraités et de leurs associations quant à leur droit à l'utilisation des surplus de la caisse de retraite, et c'est véritablement cela qui nous inquiète et qui nous amène à vous recommander ? on le verra ultérieurement ? de ne pas toucher à la loi n° 102.

Dans le dossier d'Hydro-Québec, par exemple, pour illustrer la situation...

Le Président (M. Paquet): M. le président du Conseil du patronat, juste pour rappeler, parce que je vois.. Je visais un peu d'avance que vous alliez nous le mentionner. Je voudrais rappeler aux membres de la commission et aux intervenants qu'il y a une cause présentement en cour, en appel, une cause sub judice. Donc, je vous invite à la prudence dans l'interprétation qui pourrait être faite, parce que la cour doit statuer là-dessus.

M. Taillon (Gilles): Tout à fait. Mais on a déjà un jugement. On ne parlera pas de celui qui est en appel, on va parler de celui qui est rendu. O.K.?

Donc, dans le cas du dossier d'Hydro-Québec, la Cour supérieure du Québec, appelée à statuer sur un recours présenté par un groupe d'ex-employés maintenant retraités, a rejeté la cause notamment parce qu'il n'y avait aucun fondement juridique imposant une consultation des retraités. En adoptant le projet de loi n° 195, le gouvernement pourrait ainsi donner un argument juridique ? c'est là notre prétention ? aux retraités qui prétendent à l'utilisation des surplus actuariels. Le Conseil du patronat du Québec, au nom de ses entreprises membres, s'oppose farouchement à une telle prétention, laquelle, si reconnue, nuirait au développement des régimes de retraite à prestations déterminées ainsi qu'à la sécurité financière des retraités.

Le projet de loi, il faut bien le comprendre ? et les experts actuaires vous l'ont, je pense, bien précisé tantôt, ceux qui nous précédaient ? a une incidence sur les régimes de retraite à prestations déterminées seulement, hein? Ce sont les régimes donc qui assurent une promesse de rente, une fois la retraite arrivée. La question de l'utilisation des surplus de la caisse ne se pose que dans ces régimes-là. On ne parle pas des régimes à cotisation déterminée, ceux-là qui n'entraînent aucune obligation, aucun engagement de la part de l'employeur, sauf de remettre ce qui est cumulé et le fruit du cumul, les intérêts que ça apporte. Ces régimes sont les mieux à même de protéger la sécurité financière des travailleurs et des travailleuses. Ce sont, pour parler en québécois, les Cadillac des régimes de retraite, les régimes à prestations déterminées. Ce sont les régimes qu'on voudrait que 100 % des travailleurs aient à leur disposition. On se comprend bien? Ce sont des Cadillac. On envie ceux qui en bénéficient, car ils prévoient, ces régimes-là, de façon assurée, un montant de prestation qui est lié au parcours professionnel des employés d'entreprise, donc en fonction de la durée du service et de la rémunération gagnée.

n(12 heures)n

Ces régimes sont le plus souvent contributifs, et ce sont les entreprises qui assument les risques financiers quant à la livraison des promesses ou des prestations futures. Donc, c'est clair, le fardeau d'assumer les obligations contractées par convention collective est à la charge des entreprises.

Deuxièmement, ces régimes sont capitalisés pour protéger la sécurité financière des employés au moment de leur retraite, notamment en cas de fermeture d'entreprise. Donc, pour s'assurer que les engagements seront tenus, on doit capitaliser ces régimes-là. Mais ce ne sont pas des régimes d'épargne comme le sont les REER, par exemple, évidemment. Donc, il y a des différences fondamentales quant à la nature de ces régimes-là.

En fait, on le répète, c'est l'entreprise qui assume les risques financiers liés aux régimes à prestations déterminées. Lorsqu'à une date précise les rendements de la caisse sont supérieurs à ce qui est prévu lors du moment de la détermination des conditions spécifiques du régime, l'entreprise en bénéficie théoriquement. Mais, lorsqu'à une date ultérieure la caisse est en déficit parce que les rendements sont plus faibles que prévu ? ce qui est arrivé au cours des dernières années ? c'est l'entreprise qui doit renflouer la caisse et non pas les participants actifs et non actifs. On renfloue la caisse selon les mécanismes qu'on vous a expliqués, que les spécialistes vous ont expliqués tantôt, par suite de prévisions actuarielles, etc., puis on a une période de temps pour provisionner le déficit.

Les retraités qui prétendent que l'argent de la caisse est leur argent oublient que dans ce cas ils doivent accepter l'idée que, si la caisse a un déficit, leurs prestations doivent alors aussi diminuer. Cette question ne se pose pas pour les REER et les régimes à cotisation déterminée, car la prestation varie justement en fonction du rendement.

Les surplus de ces caisses-là sont toujours théoriques. Ils se cristallisent évidemment seulement lors de la cessation du régime. Comme le précise la firme Morneau Sobeco, le droit au surplus ainsi que le montant de celui-ci ne sont cristallisés que lorsqu'un surplus devient véritable à la cessation du régime de retraite. Par contre, entre-temps l'employeur s'est acquitté, à l'égard de ce retraité, des obligations, qu'il avait convenues par contrat, d'une pension déterminée précise. Alors, dans cette perspective, il n'est pas exact de prétendre qu'actuellement les retraités ont un mot à dire dans l'utilisation des excédents d'actif des régimes complémentaires de retraite, qui sont en définitive des excédents théoriques. Et là j'ajoute: quand un employeur prend un congé de cotisation, il n'utilise pas les excédents d'actif, c'est tout simplement qu'il ne cotise pas pour une période de temps, compte tenu qu'il n'a pas besoin de provisions plus grandes dans la caisse du régime, tel qu'établi par les actuaires, pour assurer les obligations auxquelles il s'est engagé.

Les surplus actuariels, on le sait, sont très sensibles aux hypothèses sous-jacentes privilégiées. À cet égard, le jugement en Cour supérieure du Québec dans le litige opposant Hydro-Québec et ses retraités constatait que la réclamation des retraités avait quadruplé en quatre ans et ne tenait pas compte d'événements pertinents survenus depuis la dernière évaluation des surplus, comme ceux après le 11 septembre, comme les événements du 11 septembre et qui ont entraîné la perte des rentes.

Ces régimes de retraite font partie des conditions de travail des employés et ils sont négociés en fonction des conditions économiques qui ont cours au moment de la négociation des conditions de travail. On négocie en fonction de la santé économique de l'entreprise. Les employés peuvent faire des sacrifices de rémunération pour avoir un meilleur régime, et l'entreprise tient compte de sa capacité générale de payer. Ainsi, le régime de retraite fait partie des conditions de travail liées à un emploi à un temps x. Selon ce principe de base, il est erroné de prétendre que les retraités ont droit de négocier au temps y leurs conditions de travail liées à leur emploi au temps x. C'est pour ça d'ailleurs qu'il y a droit à une obligation de consultation des participants actifs, parce qu'on parle d'une négociation en temps réel.

Il se peut que les conditions économiques soient meilleures au temps y et permettent aux employés de meilleures conditions de travail au temps y que celles des employés au temps x. Mais alors l'inverse devrait aussi être vrai. Devrait-on alors réduire les prestations de retraite versées au temps y des employés actifs au temps x parce que les conditions économiques se sont détériorées au temps y? En effet, selon cette logique, si les conditions économiques sont meilleures au temps x qu'au temps y, il faudra alors revoir à la baisse les conditions des retraités, ce qui n'est jamais le cas et ce qui est impossible dans la réalité, avec l'engagement que prend un employeur qui cotise à un régime à cotisation déterminée. Si tel est le cas, les conditions de travail négociées au temps présent ne seraient jamais déterminées, aucun travailleur n'accepterait des conditions de travail qui pourraient être redéfinies à son détriment dans l'avenir.

Adopter le projet de loi n° 195 nuirait à l'adoption future de régimes de retraite à prestations déterminées, augmentant encore les questions d'équité intergénérationnelle, et nous allons essayer rapidement de le préciser dans le paragraphe qui suit. En conséquence, nous rejetons les dispositions du projet de loi n° 195 et nous invitons le gouvernement à préserver la loi telle qu'elle existe.

Il est utile de se rappeler que la motivation principale de l'adoption du projet de loi n° 102, supportée par le ministre André Boisclair, à l'époque, dans un geste de vision et de courage, hein, donc la motivation principale de l'adoption du projet de loi était d'assurer une sécurité juridique aux employeurs pour inciter davantage d'entre eux à opter pour ce modèle à l'intention de leurs employés. N'oublions pas que seulement 25 % des travailleurs du Québec bénéficient d'un régime à prestations déterminées, 75 % n'ont pas ce type de régime là que j'ai décrit tantôt comme la Cadillac des régimes de retraite. L'objectif lors de 102 ? et c'est pour cela que nous avons suggéré cela et c'est pour ça que nous avons concédé la possibilité de négocier avec les syndicats ces questions-là ? c'était pour faire en sorte de promouvoir la sécurité juridique qui allait permettre à plus d'entreprises d'embarquer dans ce régime-là. Ouvrir la porte aux amendements prévus par le projet de loi n° 195 ne fera que convaincre les employeurs de se tenir loin de ces régimes à risque, encore plus aujourd'hui, dans un contexte de fragilité des marchés boursiers.

Et ceux qui en souffriront le plus seront les travailleurs qui suivront ainsi que les régimes de sécurité publique de la vieillesse qui devront compenser lourdement l'absence de régimes privés de pension de qualité. Rappelons-nous que la Régie des rentes supportait 102 et supportait le ministre Boisclair parce qu'elle voulait faire en sorte d'assurer la pérennité du régime public qu'elle gère, tout cela, si on faisait les amendements, pour préserver les conditions souvent exceptionnelles d'une minorité de privilégiés, pas au sens péjoratif du terme, de privilégiés que l'on envie, où on voudrait que 75 % de ceux qui n'ont pas le privilège d'avoir des régimes à cotisation déterminée l'aient désormais.

En somme, nous sommes bien conscients que c'est là un projet très sympathique, très sympathique pour les politiciens, en apparence, mais qui mettrait ? là, ce n'est pas écrit, là, O.K.? ? mais qui mettrait en péril la possibilité, pour les 75 % des travailleurs qui ne disposent pas de ce régime-là, de ne jamais avoir l'avantage d'en bénéficier. Avec l'évolution démographique anticipée ? je pense que le gouvernement actuellement accorde beaucoup d'importance à l'évolution démographique anticipée; ce n'est pas très, très jojo pour le Québec ? avec cette évolution-là, si le gouvernement adoptait ce projet, il accentuerait davantage la pression sur les régimes publics de pension. Bref, à notre avis il se tirerait dans le pied.

Dans le contexte actuel, la situation financière des régimes de retraite à prestations déterminées est précaire, surtout en raison du comportement des marchés. Ne vaudrait-il pas mieux se pencher sur les véritables enjeux de l'ensemble de la question, un peu comme vous y invitaient les spécialistes qui nous ont précédés, attendre ce qui va se discuter au niveau de la Régie des rentes pour s'assurer qu'on a des mécanismes de capitalisation des RCR, des régimes complémentaires à prestations déterminées, qui sont davantage susceptibles d'encourager les entreprises à se doter de tels régimes plutôt qu'à en sortir?

Une voix: ...

M. Taillon (Gilles): 15 minutes?

Le Président (M. Paquet): 15 minutes. Merci beaucoup, M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): M. le Président, merci beaucoup.

n(12 h 10)n

Le Président (M. Paquet): Alors, avant de céder la parole à M. le député de Verdun, juste pour rappeler aux membres de la commission que, lorsqu'une cause est sub judice, comme celle d'Hydro-Québec, l'Association provinciale des retraités d'Hydro-Québec avec Hydro-Québec, il faut faire attention à nos interventions à cet égard. Et il ne faut pas oublier qu'un jugement même qui est cité, passé, qui est en appel, peut être renversé ou confirmé, et on ne peut en présumer. Donc, il faut faire attention dans nos argumentations. Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je suis d'accord avec vous qu'il faut généraliser l'utilisation des régimes complémentaires de retraite à prestations déterminées. Je ne crois pas par contre que la loi n° 102, telle qu'elle existe aujourd'hui, a augmenté statistiquement le nombre de régimes de retraite à prestations déterminées et que probablement les problèmes sont ailleurs. C'est-à-dire que souvent les régimes de retraite à prestations déterminées sont liés aux grandes entreprises et qu'il y a fractionnement actuellement du marché du travail. Mais ça, c'est une autre question, et il faut penser à d'autres mécanismes pour avoir l'équivalent des régimes à prestations déterminées mais qui sont peut-être adaptés ou multientreprises. Enfin, il y a quelque chose auquel on doit réfléchir autour de cela.

Vous conviendrez avec moi qu'un régime de retraite, c'est aussi une fiducie d'appropriation. C'est quelque chose qui n'appartient ni à l'employeur ni aux employés. C'est une fiducie à part qui a objectif de donner des retraites.

J'ai deux questions à vous poser. Première question... Je les donnerai toutes les deux au départ. La première question, c'est: vous conviendrez avec moi qu'en cas de fin de régime c'est là qu'apparaît réellement le surplus, si le surplus doit apparaître. En fin de régime, la loi est claire quant au droit qu'elle donne aux participants de se partager ce surplus-là. S'il y a congé de cotisation avant la fin de régime, ça peut rendre ce droit vraiment fictif s'il n'y a plus de surplus au moment de... si on met fin au régime, d'où nécessité éventuellement de protéger en quelque sorte l'existence des surplus. Parce que ce que fait la loi n° 195, si vous me permettez ? elle est relativement mineure ? elle ne fait seulement que conditionner le droit au congé de cotisation. En fait, c'est ma première question au niveau des liens entre les fins de régime.

Deuxième question. Après, je me tairai. La deuxième question, elle est... Et je veux voir comment vous réagissez. Vous avez soulevé le principe ? et qui est exact ? que le risque, à l'intérieur d'un régime de retraite, est inégal entre, d'un côté, les employeurs et, de l'autre côté, les employés puisque le risque est assumé principalement par l'employeur. Ça, je pense que c'est la loi telle qu'elle est. S'il existe, à la fin d'une évaluation actuarielle, un déficit actuariel, seul l'employeur est alors en déficit soit de capitalisation, soit de solvabilité ? je ne rentrerai pas dans les détails entre les deux ? soit sur une période de temps, et après on peut discuter cette période de temps, mais il doit augmenter ces cotisations qui sont à rétablir la solvabilité et la capitalisation du régime.

Est-ce que, de votre point de vue... Et, moi, je trouve qu'il y a deux questions. Est-ce que le droit de l'employeur à prendre un congé de cotisation peut être concevable si, dans le passé, il a dû verser des cotisations excédentaires? Si on est dans un régime et si on prend sur une très longue période, puisque, à ce moment-là, ici, par exemple, il avait dû payer des cotisations excédentaires, qu'il puisse avoir un droit à prendre un congé de cotisation s'il se trouve dans une situation où le régime devient, à ce moment-là, en excédent d'actif, on peut concevoir facilement qu'il puisse avoir droit à un congé de cotisation. Si la loi allait dans cette direction-là ? puis je ne l'ai pas encore précisé ? c'est quelque chose qui, disons, rétablirait en quelque sorte l'équilibre entre le partage du risque. Comment vous réagissez à cette question-là?

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): Merci beaucoup. Dans les commentaires de M. Gautrin, je pense que 102, d'abord c'est une loi jeune et c'est une loi qui est arrivée au moment où il y avait un bouleversement important du marché financier. Donc, je pense qu'on ne peut pas juger de sa performance. Elle était là pour assurer une plus grande sécurité. Laissons-la vivre. Ce n'est certainement pas en adoptant 195 puis en fragilisant 102 qu'on va certainement améliorer sa performance.

Quant à votre question, moi, je pense que, si on voulait tenir compte de l'historique dans le fond avant la prise d'un congé de cotisation, il faudrait avoir un projet de loi qui précise comment cela va se faire. On remonte-u à 10 ans en avant? Donc, ce n'est pas là, l'objet du débat. Mais ça pourrait être un aspect intéressant de voir historiquement quelle a été la performance de l'entreprise X, en supposant bien sûr qu'il y a un historique passé. Ce serait à voir. Maintenant, je n'ai pas vu ça dans le texte. Mais vous pouvez y réfléchir, c'est peut-être une bonne idée. Merci.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Une question qui... une première question. Vous parlez que la législation devrait améliorer les règles et le mécanisme de capitalisation des RCR. J'aimerais que vous précisiez un peu davantage de façon concrète ce que vous voyez comme étant des éléments d'amélioration.

Et ma deuxième question est la suivante. On sait que, comme mon collègue député de Verdun l'a précisé, le véritable temps où on peut évaluer un déficit dans un régime de retraite, c'est à la fin de ce régime-là, où on a vraiment cristallisé la perte ou les surplus. Avant cette période, tout est une question de détermination aléatoire, tout peut changer d'une année à l'autre. Donc, lorsqu'un employeur décide de demander une réduction de ses cotisations en raison de surplus, on sait qu'il se base sur un élément de risque autant pour lui que pour les employés.

Est-ce que vous verriez d'un bon augure une loi qui prévoirait, par exemple, la possibilité de congé de cotisation dans la mesure où l'employeur a au préalable comblé des déficits du régime dans le passé, alors une certaine priorité de congé pour ces événements-là? Et par ailleurs, dans les autres cas, prenons un cas où un régime n'a aucun déficit, où on a comblé le déficit et il reste encore des surplus, une répartition des surplus de façon équitable entre l'employeur, jusqu'à concurrence d'un certain montant, et les participants actifs et non actifs... c'est-à-dire les participants actifs dans le régime.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): D'abord, première réaction, là, puis ça rejoint un peu la préoccupation qu'avait M. Gautrin tantôt, on ne négocie pas un régime de retraite à prestations déterminées, dans l'entreprise, pour le voir disparaître; on le négocie pour offrir des bénéfices aux employés. C'est ça qui est important. Donc, c'est durant la vie du régime qu'il faut se donner les conditions pour que ce régime-là vive et survive. Donc, moi, là, je n'aborde absolument pas la question que vous posez en présumant que l'entreprise va disparaître, que le régime va être dissous, moi, je veux regarder les conditions pour permettre que le régime vive et surtout qu'on en crée d'autres, et ça, c'est dans notre intérêt de citoyens à tous, parce que plus il va y avoir de régimes complémentaires, moins il va y avoir de pression sur les régimes publics, dans un contexte où, demain matin, dans peu de temps, au Québec, il va y en avoir deux qui vont travailler pour un à la retraite. Donc, c'est ça, notre préoccupation fondamentale.

Quant aux conditions que pourrait imposer le législateur pour baliser l'exercice du droit, moi, je vous dis: C'est déjà assez complexe comme ça, on a juste 25 % des grands employeurs qui se donnent ces régimes-là. Puis, si on enlevait les employeurs du secteur public, parapublic, on ne serait pas à 25 %. Ne compliquons pas les choses davantage. Faisons une réflexion avec la Régie des rentes à savoir: l'objectif, c'est bien sûr d'assurer la sécurité financière des retraités mais aussi de promouvoir la mise en place de tel type de régime. C'est ça qui devrait être le débat.

Mais quel devrait être... Est-ce que, dans un contexte difficile, par exemple, la période de cotisation après demande de... la période de recapitalisation ou de comblement des déficits pourrait être de plus de cinq ans? C'est peut-être à regarder. C'est dans ce contexte-là qu'il faudrait discuter l'ensemble du système, mais avec des principes de base avant d'entrer dans des modalités, et surtout pas essayer de contraindre l'organisation de ces régimes-là. C'est déjà assez complexe comme ça.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Taillon, Mme Bellemare, Mme Lebel, bienvenue. Merci pour votre participation. Comme je l'ai mentionné dans mes notes préliminaires, je suis porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite et j'ai rencontré plusieurs gens, et puis ces retraités-là se sentaient lésés. Alors, ma question est simple: Que répondez-vous aux retraités qui se disent lésés et qui réclament un droit de regard quant aux surplus? Vous leur répondez quoi exactement? Qu'ils n'ont pas le droit ou...

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

n(12 h 20)n

M. Taillon (Gilles): Bien, on leur répond qu'ils ont d'abord des mécanismes de surveillance de l'évolution de la situation, ils sont présents dans les comités de retraite. Quant à leur donner ? c'est ce que fait 195 ? un veto sur la possibilité pour l'entreprise de prendre un congé de cotisation alors que le régime est parfaitement fondé, je pense que ce n'est pas une question qui regarde les retraités, ce n'est pas leur affaire, parce que le régime s'est engagé envers eux à des obligations claires et ces obligations-là sont respectées.

Maintenant, il faut regarder l'évolution de ce régime-là à la lumière des conditions économiques de l'entreprise au moment où ça se vit. Les employés qui sont dans l'entreprise, qui peuvent tenir compte de la situation économique, qui sont appelés à faire des choix en négociation, peut-être renoncer un peu à des bénéfices de retraite pour... Ça ne touche pas les bénéfices déjà accordés, mais les modifications au régime font partie de la négociation d'ensemble. Ces gens-là ont le droit de dire quelque chose, mais pas ceux qui ont déjà négocié des conditions dans un contexte où ils les ont négociées, qui étaient x. On ne peut pas maintenant leur appliquer des bénéfices de condition y. Si oui, je répondrais aux retraités: Si vous êtes prêts à cela, si on s'en va vers cela, quand ça va mal, on change la nature de votre régime. On n'a plus d'argent, donc on baisse la pension. Je suis persuadé qu'ils vont dire: On ne veut rien savoir.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Vous êtes membre du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. Alors, est-ce que vous avez discuté de ce projet de loi là? Avez-vous abordé ce projet-là de quelque façon que ce soit? Et puis est-ce que vous croyez que le gouvernement devrait aussi profiter de l'occasion et donner suite aux travaux du conseil et aux avis que vous avez transmis au ministre du Travail et qui semblent demeurer sans réponse, là?

M. Taillon (Gilles): D'abord, 195...

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): Oui. Oui. Merci. 195 n'a pas été regardé au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, qui est composé paritairement de syndicats et de patrons. Donc, on n'a pas regardé celui-là, mais on avait regardé 102. Et vous vous rappelez que nous étions d'accord, à l'époque. C'est rare que vous avez l'unanimité syndicale-patronale sur un dossier. On était favorables à 102, on a supporté le ministre et votre gouvernement.

Quant aux autres dossiers qui sont sur la table du CCTM et qui concernent la retraite, notamment la possibilité de retraite progressive, nous sommes en attente de décisions gouvernementales et nous commençons à être impatients. C'est simple, c'est facile, ce serait très avantageux pour l'ensemble de la société québécoise de dire oui à cela. Nous attendons des réponses du ministre du Travail.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Est-ce que vous pouvez nous expliquer davantage lorsque vous dites que les modifications proposées par le projet de loi n° 195, là, pourraient entraîner une insécurité financière des retraités? Vous semblez soulever ce point de vue là.

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): C'est qu'à partir du moment où on fragilise le régime vous allez avoir ? les actuaires vous l'ont expliqué tantôt ? vous allez avoir des prises de position par les entreprises avec une capitalisation du régime, des décisions qui vont être très, très conservatrices, et, en étant conservateur, bien, s'il y a quelque chose qui va mal un jour, les retraités peuvent en écoper. C'est ça qu'il faut surtout éviter, là. Il faut s'assurer que les bénéfices promis se réalisent. Donnons la chance aux entreprises qui s'engagent à affecter une bonne partie de leur masse salariale là-dessus, quand ça va bien, de pouvoir profiter d'un congé. Elles ne vont pas chercher des actifs, là, elles ne cotisent tout simplement pas parce qu'il y a suffisamment d'argent, selon l'évaluation actuarielle, pour remplir les obligations demandées. Si on resserre trop ça, vous aurez un impact en situation difficile, un impact qui pourrait être néfaste éventuellement aux retraités.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée.

Mme Beaudoin: Merci. Alors, je laisse la parole à mon confrère.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, monsieur. M. Taillon, je vous écoute depuis tout à l'heure et j'avais lu le mémoire. Je pense que vous vous faites un peu l'apôtre de la peur à l'égard des gens quand vous dites que, bon, ça va fragiliser, insécuriser, que, les personnes qui sont prestataires, bon, on pourrait leur enlever leur droit, leurs prestations déterminées puis les mettre à cotisation déterminée. Moi, je me dis: Il y a une bataille idéologique qui se mène entre deux groupes, dans le fond. Est-ce que les retraités ont un droit de regard sur la gestion des fonds de pension ou non? Pourquoi on ne veut pas les voir? Il y a une question fondamentale qui se pose là-dedans. Les gens disent: Nous, on a travaillé, on a constitué le fonds. Ceux qui sont arrivés après nous ont pris la relève et ils ont contribué également. Et ce qu'ils demandent, c'est, quand il y a des surplus, qu'ils puissent en bénéficier. Ça a été une autre de leurs revendications.

Et j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que dans le fond ce n'est pas une question pour fragiliser le système, qu'ils veulent fragiliser le système; au contraire, ils veulent qu'il continue, le système, pour qu'ils aient plus d'argent pour être en mesure de mieux vivre à la retraite. C'est ça qu'ils disent. Alors, si vous nous dites: Non, il n'y a aucune mesure qu'on peut mettre en place, aucune entente qui pourrait être conclue avec les retraités, et le syndicat, et l'employeur, à ce moment-là pourquoi ça fonctionne avec le syndicat puis ça fonctionne avec l'employeur et qu'on peut exclure sans nuance les retraités qui ont participé à ce régime-là? J'essaie de comprendre pour l'expliquer au monde chez nous. Mais vous semblez prêts, campés, branchés, catégoriques dans vos positions, ça, c'est clair. C'est que les employeurs, parce qu'ils mettent de l'argent puis ils en mettent plus, pourront décider ce qu'ils veulent, notamment ne pas permettre à ceux qui en bénéficient, qui sont retraités, de participer aux décisions.

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): Alors, je vous remercie pour avoir reconnu que j'étais déterminé. Je ne peux pas faire autrement qu'être déterminé. Mais, par rapport aux constats que l'on fait, ce n'est pas une campagne de peur, au contraire, si on essaie de propager la bonne nouvelle. C'est qu'actuellement il y a de moins en moins d'employeurs qui recourent au régime à prestations déterminées. Il y en a de moins en moins. On s'en va plutôt à cotisation déterminée parce qu'il y a des impacts d'incertitude, parce que c'est une situation qui n'est pas sécurisée. L'objectif qu'on poursuit, c'est qu'il y en ait de plus en plus, parce que c'est le meilleur régime, meilleur régime pour les travailleurs puis pour les citoyens de demain. Je vous dis: C'est ça qu'on souhaite.

Maintenant, on ne dit pas que les retraités n'ont pas le droit de regard, on dit qu'ils n'ont pas le droit de veto. C'est la nuance. Ils sont présents, dans les comités de retraite, pas de droit de veto. La raison, c'est que les conditions du régime qui ont été négociées au moment où ils étaient actifs sont respectées. Sinon, si on leur donne un droit de regard sur des surplus fictifs ? lisez bien notre mémoire, là, c'est des surplus prévisibles ou des déficits prévisibles ? il faudrait, quand il y a un déficit, pouvoir remettre en question leurs conditions de retraite, et ça, on dit que, par sa nature même, le régime ne le permet pas, puis on est d'accord avec ça, là. Mais tu as déjà quelque chose d'assuré, d'acquis, puis les conditions changent. Les conditions qui changent ? elles peuvent avoir des impacts sur le régime ? ne t'affecteront pas quand tu as ta prestation mais peuvent affecter, par exemple, les successeurs dans l'entreprise. Elles peuvent peut-être affecter les nouveaux arrivants qui, eux autres, n'auront pas un régime à prestations déterminées mais peut-être un régime à cotisation déterminée. Donc, c'est tout cela que l'on veut préserver dans un objectif non pas d'être fermes, un objectif de dire: Il faut se donner les conditions pour arriver à cela.

Si votre gouvernement a présenté 102 ? je dis «votre» parce que vous étiez là à l'époque ? s'il a présenté 102, c'est pour ça, là. Ce n'est pas pour faire peur au monde puis ce n'est pas... Puis on n'a rien contre les retraités, là, au Conseil du patronat, au contraire. On dit qu'il faudrait qu'il y en ait plus qui bénéficient d'un régime avantageux. Avec 195, c'est l'effet contraire que vous allez atteindre. C'est notre prétention.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci. Premièrement, sur la diminution des gens dans la prestation déterminée, je crois qu'il y a un problème, c'est que le travail est de plus en plus fractionné. Il va falloir qu'on réfléchisse à un autre mode qui ne soit pas nécessairement celui d'un seul régime. On pourrait concevoir, commencer à penser à des régimes sectoriels, multipatronaux ou des choses comme ça. Ça, c'est une voie sur laquelle, je crois, il faut réfléchir. Et la raison pourquoi il y a de moins en moins de travailleurs qui puissent bénéficier de régimes à prestations déterminées, c'est beaucoup plus dû au fractionnement du travail, au développement de la petite et moyenne entreprise par rapport à la grosse entreprise traditionnelle qui, elle, pouvait se créer un régime à prestations déterminées pour s'assurer la fidélité de ses travailleurs. C'est l'objectif qu'il y avait. Donc, il va falloir qu'on pense à d'autres modes. Ça, c'est le premier élément d'affirmation.

Le deuxième élément...

Le Président (M. Paquet): Excusez-moi. Je m'excuse de vous interrompre. S'il y a consentement, on poursuit jusqu'à 12 h 40 environ pour permettre d'écouler le temps.

M. Gautrin: Oui, oui.

Le Président (M. Paquet): Il y a consentement.

n(12 h 30)n

M. Gautrin: Le deuxième élément, c'est qu'il faut bien comprendre. Un régime de retraite n'appartient pas à l'employeur, ça n'appartient pas aux participants actifs, ça n'appartient pas aux retraités non plus. Un régime de retraite, ça a sa vie en soi, c'est un fonds, c'est quelque chose. Et tout le débat qu'on a ici, autour de la table... On pourra discuter pour savoir comment en créer d'autres, mais c'est comment actuellement on balise en quelque sorte la vie du régime et, à l'intérieur du régime, qui peut prendre un congé de cotisation ou dans quelles conditions on peut prendre un congé de cotisation. C'est ça essentiellement, le débat qu'on a autour, sur un élément tiers qui n'appartient pas plus à l'employeur qu'aux employés syndiqués ou non syndiqués, qu'aux retraités. Et, faites bien attention, il n'y a pas seulement, dans les employés, que des employés syndiqués, il y a des employés non syndiqués qui, eux aussi, sont des employés actifs, qui actuellement n'ont pas la possibilité de donner leur point de vue sur le régime, et la loi actuellement 195 donne la possibilité de s'exprimer sur un tout petit morceau qui est seulement la possibilité des congés de cotisation. On n'est pas en train d'essayer de renverser tout le monde, on prend strictement la question des congés de cotisation qui assure en quelque sorte la pérennité du régime.

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): D'abord, on est tout à fait d'accord que c'est un projet qui vise à baliser la vie du régime, et nos remarques sont allées dans ce sens-là. Maintenant, tout à fait ouverts, M. le député, à une proposition qui pourrait nous venir pour mettre en place d'autres régimes de retraite. Je sais d'ailleurs que la Régie des rentes a, sur sa table à dessin, des régimes qui sont des combinaisons de cotisation déterminée et de prestations déterminées pour les PME. On a été consultés là-dessus, sur des projets. Certainement que, dans la réflexion que nous allons faire cet automne, avec des projets qui viendraient de la Régie des rentes, il faudra considérer cela aussi. C'est vrai que le régime à cotisation déterminée est difficilement appropriable par des petites entreprises...

M. Gautrin: À prestations déterminées.

M. Taillon (Gilles): ...à prestations déterminées, je m'excuse, est difficilement appropriable par les petites entreprises. Donc, il faut trouver des alternatives. Mais, là où il y a des grandes entreprises et là où on en a, essayons de les conserver.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Montmorency.

M. Bernier: M. Taillon, merci d'être ici. Je ne vous appellerai pas «saint Gilles», même si on vous a parlé d'apôtre, mais, chose certaine, je pense que vous donnez un bon éclairage en ce qui regarde un type de régime. Par contre, vous avez mentionné l'aspect politique de la chose en ce qui nous concerne. Moi, sur ça, je veux simplement vous dire que je pense que c'est notre rôle, en tant que politiciens, de réfléchir à l'avenir.

En ce qui regarde les fluctuations économiques des marchés, aujourd'hui, c'est une réalité qui est encore plus forte, depuis 2001. En ce qui regarde le type et les catégories d'entreprises qu'on a aujourd'hui, qui sont plus petites ici, au Québec, qui ont une autre façon de faire les choses, de réaliser les choses, encore là ça ne veut pas dire que les catégories de régime qui existent présentement vont être les mêmes, puis ça, M. le député de Verdun l'a mentionné tout à l'heure, il y a une réflexion qui se fait à la Régie des rentes, et je pense que c'est davantage dans cette optique-là, nous, qu'on regarde la chose.

Ce qu'on dit puis ce sur quoi j'aimerais vous entendre, c'est dans une optique où on voit dans le futur puis que, là, on ne se ferme pas à une seule catégorie ou à un seul type de régime de retraite. Parce que, la réalité, on regarde dans les années où les taux d'intérêt étaient très bons, on regarde ce qui s'est passé au gouvernement du Québec, où il y a eu des congés de... ou des réductions de prestations de la part des employés comme de l'employeur. Ça, c'est une réalité. À ce moment-là, les retraités n'ont pas eu à se prononcer. Je veux dire, il y a eu une décision de part et d'autre, les fonctionnaires ont bénéficié d'une réduction de contribution, ainsi de suite. Mais, si on regarde, dans le futur, quelle sorte de relation, quelle sorte de participation de ces gens-là... Parce que les employés d'aujourd'hui sont les retraités de demain, et, à ce moment-là, si l'entreprise est plus petite, la fragilité financière est peut-être plus grande également. Moi, ce sur quoi j'aimerais vous entendre, c'est par rapport au futur.

Le Président (M. Paquet): Faites vite, M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): Oui. Merci beaucoup. D'abord, à l'époque où on a débattu la loi n° 102, je vous rappelle qu'on était dans une période de surplus actuariels faramineux et qu'on défendait les mêmes principes. Donc, les principes sont défendables en situation... Évidemment, c'est plus facile de tenir le discours aujourd'hui, quand ça va mal, qu'à l'époque où ça allait bien.

Ceci étant dit, quant aux régimes futurs, c'est évident qu'il faut améliorer l'entrée de régimes de retraite dans les entreprises pour assurer que les travailleurs ont autre chose que les régimes publics de pension, parce que sinon on va être en mauvaise posture, nous et vous, nous comme représentants d'entreprises, vous comme politiciens, parce qu'on va avoir une pression sur les régimes de sécurité de la vieillesse qui va être terrible dans un contexte de démographie en situation de diminution du nombre de gens puis d'augmentation du nombre de... Donc, il faut absolument se pencher là-dessus. Je sais qu'il y a des scénarios, je sais qu'il y a des scénarios là-dessus sur la table, on est prêts à les discuter avec vous, mais oubliez 195.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. Taillon, je vais faire ça rapidement. Quelle mécanique pourrait être mise en place pour faire en sorte que les retraités qui sont inactifs dans le fond puissent contribuer à la gestion? Parce que, là, vous venez nous dire: Dans le futur, on va être deux fois plus nombreux, il va y avoir un travailleur pour deux personnes retraitées. Alors, ne pensez-vous pas que ça va aller en augmentant, la pression pour qu'ils aient des droits de regard? Et, le droit de veto, vous disiez: Il n'est pas question qu'on leur donne un droit de veto. Il y a peut-être des éléments sur lesquels ils pourraient l'avoir. Ça se négocie. Tout se négocie. Il y a les ententes avec les syndicats, il va y avoir entente avec les associations. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, si vous écartez tout.

Le Président (M. Paquet): M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): Non. Moi, je réagis à ce que j'ai sur la table, là. Je suis ici pour parler du projet de loi n° 195. Si vous voulez mettre d'autres situations ou d'autres propositions, je veux dire, on est ouverts. Il faudrait en mettre, et on vous encourage à attendre que ces propositions-là arrivent avant de prendre une position figée sur un projet de loi qui pourrait être négatif. C'est ce qu'on vous passe comme message.

M. Lelièvre: Bien, faites-nous des suggestions positives, alors.

M. Taillon (Gilles): Ah! ça, on est capables d'en faire, pas de problème. On en a déjà mis sur la table.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Non, mais dans ce cas-ci, là, je parle. Dans ce cas-ci.

M. Taillon (Gilles): Ah, dans ce cas-ci? Dans ce cas-ci, je pense que, si on veut aider à la propagation de ces bons régimes, ces régimes avantageux là, laissons vivre la loi n° 102. Maintenant, regardons ce qu'on peut faire pour les plus petites entreprises et pour les travailleurs qui sont dans ces entreprises-là pour développer des régimes de retraite complémentaires à leur mesure. C'est là que j'aurais des propositions novatrices. Pour le reste, j'attendrais que 102 ait une plus longue vie, un plus long vécu avant de bouger.

Le Président (M. Paquet): D'autres interventions? Alors, au nom de la commission, j'aimerais remercier M. Taillon, Mme Bellemare et Mme Lebel pour leur participation à nos travaux en représentant le Conseil du patronat. Merci beaucoup. Alors, j'ajourne les travaux de la commission à demain matin, 9 h 30.

(Fin de la séance à 12 h 38)


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