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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mercredi 22 septembre 2004 - Vol. 38 N° 51

Consultations particulières sur le projet de loi n° 195 - Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

 

M. Alain Paquet, président

M. Henri-François Gautrin

Mme Denise Beaudoin

M. Marc Picard

M. Raymond Bernier

M. Normand Jutras

M. Roch Cholette

Mme Nancy Charest

M. Jean Rioux

M. Jean-Pierre Paquin

* Mme Hélène Wavroch, Conseil des aînés

* M. Maurice Boucher, idem

* M. Michel Méthot, ACARR

* M. Jacques Légaré, Le Pont entre les générations

* M. Étienne Tittley, Force jeunesse

* M. Steeve Demers, FCCQ

* M. Claude Paradis, idem

* M. André Goulet, AAR

* M. Jean Des Trois Maisons, idem

* M. Marcel Rivest, idem

* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-six minutes)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, au nom de la Commission des finances publiques, il me fait plaisir d'ouvrir, ce matin, cette session pour procéder à la continuation de la consultation particulière et des auditions publiques sur le projet de loi n° 195, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Avant de commencer, j'aimerais rappeler à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir s'assurer d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, s'il vous plaît, pour ne pas gêner nos travaux.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Lelièvre (Gaspé) est remplacé par M. Jutras (Drummond).

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, je veux d'abord commencer par faire lecture de l'ordre du jour pour cette journée du 22 septembre 2004. Donc, nous recevons, ce matin, d'abord à 9 h 30, les représentants du Conseil des aînés ? bonjour, je vous souhaite la bienvenue ? qui sera suivi par la suite des représentants de l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite, ensuite de Force Jeunesse et Le Pont entre les générations, suivis par la suite de la Fédération des chambres de commerce du Québec; et enfin nous recevrons l'Alliance des associations de retraités avant d'ajourner nos travaux.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, je souhaite donc la bienvenue aux représentants du Conseil des aînés. Alors, madame... Excusez-moi, pardon.

Une voix: Mme Wavroch.

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch. Je ne voulais pas mal prononcer votre nom. Je vous souhaite la bienvenue. Si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent.

Conseil des aînés

Mme Wavroch (Hélène): Oui, avec plaisir, M. le Président. Alors, tout d'abord, j'aimerais vous présenter M. Maurice Boucher, membre du Conseil des aînés, ainsi que Mme Monique des Rivières, qui travaille au sein du Conseil des aînés et qui a été responsable de la rédaction du mémoire qu'on présente ce matin. Pour vos besoins, j'aimerais tout simplement vous rappeler que mon nom est Hélène ? «wave», comme une vague, roche ? Wavroch. Alors, j'ai toujours dit que, pour les besoins de la province, j'étais pour changer mon nom à soit Tremblay ou Vague de la Roche, mais je n'ai pas eu le temps de m'en occuper.

À titre de représentant des aînés du Québec, le Conseil des aînés, comme vous savez, a le mandat de promouvoir les droits des aînés, leurs intérêts et leur participation à la vie collective ainsi que de conseiller le ministre responsable et le gouvernement sur toute question qui touche et qui concerne les personnes âgées. C'est dans le cadre de ce mandat que le conseil aimerait émettre son avis sur le projet de loi n° 195, qui concerne directement les retraités.

Déjà en 2000, lors du dépôt et des discussions entourant l'adoption du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et d'autres dispositions législatives, le conseil avait fait connaître son opinion et déposé un mémoire compte tenu du fait qu'un grand nombre de retraités actuels et futurs étaient concernés. Le projet de loi n° 195, présenté par le député de Verdun ? qui, entre parenthèses, est mon arrondissement ? M. Henri-François Gautrin, s'inscrit dans la même perspective. Je voulais le ploguer pour le saluer.

M. Gautrin: Ah! C'est bien. Mais, s'il vous plaît, M. le Président, le monde se sépare en deux pour chaque député: les gens qui sont ses électeurs et les autres.

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch, vous pouvez continuer.

Mme Wavroch (Hélène): Le conseil a examiné le projet de loi qui apporte de nouveaux changements à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, laquelle avait été modifiée en 2000 par le projet de loi n° 102. Ces modifications touchent toutefois exclusivement les modalités selon lesquelles un employeur peut affecter l'excédent d'actif d'un régime de retraite à l'acquittement de ses cotisations au régime.

n (9 h 40) n

Les régimes complémentaires de retraite, comme vous savez, jouent un rôle important pour assurer la sécurité financière des travailleurs à la retraite, et ce rôle s'accroît avec le revenu d'emploi. Globalement, 45 % des salariés québécois participent à des régimes complémentaires de retraite, comparativement à 41 % en Ontario. La couverture est très élevée dans le secteur public québécois. Cependant, à peine un travailleur sur quatre du secteur privé est couvert par ce type de régime. Plus de 2 500 régimes de retraite sont sous la surveillance de la Régie des rentes du Québec. Ces régimes comprennent en moyenne 53 % de participants actifs et 47 % de bénéficiaires retraités. Le poids des bénéficiaires dépasse même celui des participants actifs dans de nombreux régimes du secteur public.

Malgré cette forte représentativité, les retraités n'ont pas le droit à une participation équitable à la gestion des régimes et aux surplus. En effet, le projet de loi n° 102, adopté en 2000, en confirmant le droit pour un employeur de prendre des congés de cotisation après entente avec la partie syndicale, est venu nier le droit des retraités à la gestion des surplus de leur régime de retraite. Le projet de loi n° 102, présenté devant l'Assemblée nationale le 16 mars 2000 par le ministre de la Solidarité sociale, a apporté des modifications à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Ces changements visaient trois objectifs principaux dont, vous le savez, la simplification de l'administration des régimes de retraite, l'adaptation des régimes aux nouvelles réalités du marché du travail et la clarification du droit des employeurs aux congés de cotisation.

C'est le troisième volet, qui accorde aux employeurs le droit aux congés de cotisation, qui a soulevé des tollés de protestations de la part des retraités. Les rendements élevés des caisses de retraite des années quatre-vingt-dix ont amené la création d'excédents d'actif, à savoir des situations où les actifs deviennent supérieurs aux obligations du régime, c'est-à-dire son passif. Le comité de gestion du régime peut alors décider de l'utilisation des excédents. Ces derniers peuvent être utilisés pour l'amélioration des prestations, un congé de cotisation salariale, un congé de cotisation patronale ou un remboursement des sommes aux participants. Le manque de précision et de clarté de la loi ainsi que les batailles juridiques qui en ont résulté ont amené le dépôt du projet de loi n° 102, lequel avait notamment pour objectif de clarifier la situation au regard des excédents d'actif.

La Régie des rentes du Québec estimait alors que 60 % des excédents d'actif utilisés jusqu'à maintenant l'avaient été pour améliorer les prestations des participants, alors que 40 % l'avaient été sous forme de congé de cotisation de l'employeur. Néanmoins, le congé de cotisation a été un phénomène important. Entre 1984 et 1997, les excédents pris en congés de cotisation patronale ont totalisé 2,4 milliards de dollars, et ce, uniquement pour ce qui est des régimes sous la surveillance de la RRQ. De plus, selon les calculs de l'Alliance des associations de retraités ? que vous allez voir plus tard aujourd'hui ? la suspension de la cotisation patronale a touché un régime sur six et a atteint, bon an, mal an, entre 130 et 180 millions par année depuis 1987.

Avant l'adoption du projet de loi n° 102, le congé de cotisation n'était pas un droit reconnu à l'employeur en vertu de la loi, mais il n'était pas non plus une pratique interdite. Ce sont principalement les dispositions des textes des régimes qui accordaient ou restreignaient le droit de l'employeur de prendre un congé de cotisation, la jurisprudence sur cette question n'étant pas déterminante.

Le projet de loi n° 102, au chapitre X.1, Affectation de l'excédent d'actif à l'acquittement de cotisations patronales, a précisé les conditions dans lesquelles un excédent d'actif d'un régime de retraite peut être affecté à l'acquittement des cotisations patronales. Les conditions exigées stipulent, entre autres, qu'une modification au régime doit être adoptée et que celle-ci doit avoir l'assentiment, premièrement, de chaque association accréditée au sens du Code du travail qui représente les participants actifs appartenant à une catégorie de travailleurs en faveur de laquelle le régime est établi; deuxièmement, de toute partie avec laquelle l'employeur est lié par un contrat écrit, autre que le régime de retraite, qui se rapporte à l'utilisation, avant la terminaison du régime, de la partie de la caisse de retraite qui constitue un excédent d'actif; et, troisièmement, dans le cas d'un régime interentreprises, même non considéré comme tel en vertu de l'article 11, de tous les employeurs parties au régime à la date où la proposition est faite.

À l'époque de l'adoption de cet article, de nombreux organismes représentant, entre autres, les aînés et les retraités, et parmi lesquels le Conseil des aînés, s'étaient opposés à sa formulation puisqu'elle accordait à l'employeur la possibilité d'obtenir un congé de cotisation avec l'assentiment de seulement une partie des personnes ayant contribué à l'accumulation des excédents d'actif, c'est-à-dire les employés syndiqués. En effet, l'article 146.5 ne faisait pas mention des autres participants, à savoir les travailleurs non syndiqués, ni des retraités ou des autres bénéficiaires du régime.

Le projet de loi n° 195 vient corriger l'iniquité créée par le projet de loi n° 102 en rajoutant qu'une modification au régime permettant l'affectation d'excédents d'actif à un congé de cotisation patronale doit recevoir l'assentiment des personnes et groupes actuellement mentionnés dans la loi de même que celui des participants actifs non visés par les paragraphes 1° et 2° et des participants non actifs et des bénéficiaires. Par «participants actifs non visés par les paragraphes 1° et 2°», on entend les participants actifs qui ne font pas partie d'une unité syndicale. En effet, à la suite de l'adoption du projet de loi n° 102, la loi limite aux participants syndiqués le droit de discuter avec l'employeur des possibilités de congé de cotisation patronale. Elle exclut non seulement les bénéficiaires et les retraités, mais également les participants actifs non syndiqués.

Le Conseil des aînés est en accord avec la modification proposée, puisqu'elle corrige une situation créée par l'adoption du projet de loi n° 102. Cette modification rendra obligatoire la prise en compte de l'avis de tous les participants au régime, actifs ou non, bref de toutes les personnes ayant contribué à la constitution de l'excédent d'actif. De plus, elle accrédite l'idée que l'utilisation des surplus ou excédents d'actif, dans un régime de retraite, concerne tous ceux qui en ont permis la constitution, soit tous les participants, y compris ceux qui ne font pas partie de l'unité d'accréditation syndicale, et tous les bénéficiaires.

Le projet de loi n° 102 avait également introduit la possibilité de recourir à un arbitre dans le cas de mésentente entre les parties au sujet de l'utilisation des excédents d'actif pour un congé de cotisation patronale. Cet article de loi, qui indique que la décision de l'arbitre lie les parties intéressées, prévoit donc une solution en cas de blocage sur le plan des discussions.

Le projet de loi n° 195 apporte une autre modification à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite pour prévoir qu'un changement proposé à un régime de retraite permettant l'affectation d'excédents d'actif à un congé de cotisation patronale ne peut recevoir l'assentiment des groupes mentionnés que lors d'une assemblée annuelle ou lors d'une assemblée spéciale convoquée par le comité de retraite.

Dans son mémoire sur le projet de loi n° 102, le conseil s'était opposé à ce que les employeurs puissent obtenir des congés de cotisation, arguant que les excédents d'actif sont uniquement la propriété des salariés actifs et des bénéficiaires retraités. Les modifications apportées par le projet de loi n° 195, en encadrant mieux le droit de l'employeur de prendre un congé de cotisation et surtout en exigeant que soient consultés tous les participants au régime et tous les bénéficiaires, diminuent les craintes du conseil au regard d'éventuels congés de cotisation d'un employeur.

Les surplus des caisses de retraite ont été amassés grâce aux 10 % à 14 % de rendement au lieu des 5 % prévus initialement. Par contre, les rendements anémiques, voire négatifs, des dernières années devraient inciter les gestionnaires des caisses de retraite à une certaine prudence en présence d'éventuels excédents d'actif.

Dans cette perspective, le conseil estime qu'il demeure préférable que les excédents d'actif, s'il y a lieu, soient conservés pour faire face à de possibles difficultés financières ou encore pour améliorer les prestations des bénéficiaires, par exemple en indexant les rentes versées ou à être versées.

Le projet de loi n° 195 vient modifier les modalités par lesquelles un employeur peut utiliser les excédents d'actif de régimes de retraite à un congé de cotisation. Ces modifications sont positives puisqu'elles obligent maintenant à consulter tous les participants au régime ainsi que tous les bénéficiaires, contrairement à ce que prévoyait la loi suite à l'adoption du projet de loi n° 102.

Toutefois, les nombreux excédents d'actif générés par les taux de rendement élevés des années quatre-vingt-dix ont déjà été utilisés. Certains régimes commencent même à éprouver des difficultés à la suite des rendements actuels des marchés. Dans cette perspective, les changements apportés par le projet de loi n° 195, s'ils sont intéressants, risquent pour le moment de demeurer théoriques puisque les excédents d'actif n'existent plus. Mais les dispositions adoptées pourront s'avérer utiles pour le futur.

En terminant, le Conseil des aînés tient à remercier la Commission des finances publiques pour son invitation à participer à ces consultations particulières sur le projet de loi n° 195. Merci.

n (9 h 50) n

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme Wavroch. Alors, j'inviterais maintenant le député de Verdun et adjoint parlementaire du premier ministre à débuter la période d'échange.

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la présidente du conseil. C'est toujours un plaisir de vous rencontrer. J'ai un certain nombre de questions qui dépassent en quelque sorte un peu votre mémoire. Et vous comprenez bien où on en est actuellement comme parlementaires. On essaie de tester avec certains groupes ce qui a été présenté par d'autres groupes. Vous avez très justement signalé dans votre mémoire que la consultation, qui me semble une des bases du projet de loi, la consultation des retraités ? ce qu'on appelle des participants non actifs ou les participants non syndiqués ? doit se faire, lors d'une assemblée annuelle, dans un mécanisme qui est prévu aux articles 2 et 3 du projet de loi n° 195.

Est-ce qu'il y aurait... Certaines personnes ont fait valoir qu'il existe déjà, dans certaines associations d'employés, des moyens de consulter et les retraités et parfois les personnels non actifs dans le cas des régimes de retraite. Et est-ce qu'il y aurait une ouverture... Si on allait en ayant une plus grande souplesse, une plus grande ouverture dans la manière de consulter et le groupe des retraités et le groupe des personnels non syndiqués, est-ce qu'il y aurait une ouverture de votre part de ce côté? Comment vous réagissez à un élément dans cette direction-là?

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Merci. Si vous permettez, M. le Président, peut-être que vous pourriez me donner des exemples d'autres méthodes de consultation.

M. Gautrin: Il existe, sans vouloir les nommer, parce que je pense que ce serait... Il existe des associations de salariés qui prévoient formellement dans leurs statuts, lorsqu'on touche les questions touchant les régimes de retraite, une consultation formelle des retraités. Quand je dis «association de salariés», souvent c'est une forme de syndicat, qu'il soit affilié réellement à une centrale ou non. Alors, c'est cet élément-là que je voudrais aborder avec vous. C'est-à-dire que la loi actuellement formalise, par le biais d'une assemblée annuelle... Là, c'est d'avoir plus de souplesse, en maintenant bien sûr le principe que chaque groupe doit pouvoir donner son accord.

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Ma première réaction, M. le Président, ce serait tout simplement de vous dire qu'il serait souhaitable, qu'importe le moyen qu'on utilise de consultation, qu'elle soit pareille partout. C'est afin d'éviter qu'il puisse y avoir des imbroglios de toutes sortes, parce que des méthodes qui pourraient être, exemple, des méthodes référendaires, des méthodes par la poste, des méthodes de consultation de tout ordre... Idéalement, ce qu'on souhaiterait voir dans la loi, ce serait une méthode de consultation, mais qui serait la même pour tout le monde et tous les régimes qui sont interpellés, pour éviter, si vous voulez, des inégalités à ce niveau-là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Deuxième question. Et, toujours, je rentre sur les choses qui ont été abordées, donc ce n'est pas vraiment sur la base de la loi, mais sur des modifications qui ont été suggérées, puisque votre mémoire est très clair en ce qui en est de l'analyse de la loi. Vous savez, à l'heure actuelle, que l'arbitrage qui, en cas de blocage lorsqu'il y a une proposition de l'employeur pour venir confirmer son droit au congé de cotisation... et le résultat est facultatif, c'est-à-dire est le résultat d'une entente entre les parties. On nous a fait valoir que de facto, puisqu'on augmente le nombre des parties à être consultées, virtuellement le recours à l'arbitrage va perdre complètement son sens. D'aucuns, certains groupes ? je ne dirai pas tous, parce qu'il y a des gens qui sont vraiment contre ce que je vais proposer, ce que je vais vous suggérer ? ont dit: Bien, pour éviter un droit de veto à un groupe face à une proposition, il serait souhaitable d'avoir un arbitrage qui soit un arbitrage obligatoire. Comment vous réagissez à cette question-là?

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Vous savez, j'hésite, M. le Président. Je suis une ancienne syndicaliste, hein, et l'arbitrage obligatoire a toujours été un point contentieux. Je dirais qu'idéalement là aussi ? puis là, que Dieu me bénisse, que je ne me fasse pas assommer par mes anciens collègues syndicaux...

M. Gautrin: Dieu vous protège!

Mme Wavroch (Hélène): Merci. Je dirais que l'arbitrage obligatoire, là encore, serait une méthode à favoriser tout simplement parce qu'on ne peut pas se permettre... Si on veut respecter, en fin de compte, les consignes de cette loi, on ne peut pas se permettre d'avoir plusieurs méthodes de fonctionnement, et il faut que ce soit une méthode qui réponde à l'ensemble des besoins des différents régimes. Donc, au risque de m'avancer sans avoir discuté avec les membres de mon conseil ? puis j'ai un ancien syndicaliste à ma gauche aussi ? je dirais que ce serait une méthode que je conseillerais.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je m'excuse de vous poser les questions comme ça, en rafale. Après, mes collègues vont vous en poser d'autres.

Troisième élément. Il y a des gens qui nous ont fait valoir que, si jamais un régime avait été en déficit et que la partie patronale avait été obligée de combler avec des versements excédentaires les cotisations, il y aurait lieu de lui donner quasiment un droit acquis à des compléments venant des surplus actuariels, lorsqu'ils se généreront, ce qui, dans le langage qui vient s'instaurer, s'appelle la clause banquier, comme tel, c'est-à-dire une espèce de... d'uniformiser, sur une longue période de temps, les cotisions. Comment vous réagissez face à ça?

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Merci, M. le Président. Je dirais dans un premier temps ? corrigez-moi si j'ai tort ? ...c'est que je pense qu'au niveau des employeurs on continue à faire ce que j'appelle des cotisations papier, c'est-à-dire où il y a l'engagement, si vous voulez, actuariel par rapport à un régime. Par contre, les cotisants, eux autres, ils mettent des vrais sous, hein, de la vraie argent. Donc, vous comprendrez que, dans votre question, vous dites: Bon, si un employeur a été obligé de soutenir un régime déficitaire... Il l'a soutenu avec du papier, hein? Ça fait que vous voyez là où je me dirige avec ma réponse, c'est de dire: Bon, bien, à partir du moment où est-ce qu'il n'y a pas eu de dépôt de fonds réel dans un régime, il m'apparaît difficile d'évaluer, si vous voulez, l'apport réel que peut apporter un employeur sur un régime déficitaire par rapport à l'ensemble du régime comme tel. Je trouve ça difficile de répondre à cette question-là tout simplement parce que je trouve que c'est ce que j'appelle la balance papier versus argent réel.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun, il reste 2 min 30 s sur ce bloc.

M. Gautrin: Merci. Dernière question, parce que le temps file et mes collègues de Saint-Jean et de Montmorency veulent vous poser des questions. Vous comprenez bien que vous avez, vous, le Conseil des aînés, un énorme rôle dans les années qui vont venir. C'est le début en quelque sorte de l'émergence du pouvoir gris, comme on l'a dit, et de voir comment les aînés ou les retraités vont avoir leur mot à dire à l'intérieur des régimes de retraite. La loi n° 195 actuellement n'est qu'une toute petite partie. Le débat est plus large. Je ne sais pas comment il va se régler. Mais le conseil et les avis que le Conseil des aînés pourrait donner sur ces questions vont être éminemment importants, et je vous invite à continuer votre réflexion sur ces questions-là. Je vous remercie. Je pense que ma collègue a des...

Le Président (M. Paquet): Mme la députée, vous pouvez revenir. On a 15 minutes par bloc, mais...

M. Gautrin: On fait 10-10, 5-5.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Excusez-moi.

Le Président (M. Paquet): Alors donc, Mme la députée de Mirabel...

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): ...et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Alors, Mme Wavroch ? je le prononce comme il faut? ? M. Boucher, Mme des Rivières, bienvenue et merci pour votre participation à cette commission. En tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite, j'ai redit et je redis à chaque fois que nous abordons ce débat-là avec beaucoup d'ouverture.

Ce qui vous démarque, dans votre mémoire, c'est surtout concernant la question des surplus. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là. Vous dites... D'abord, vous êtes l'un des premiers groupes à suggérer que les surplus devraient être conservés pour faire face à de possibles difficultés financières. D'abord, j'aimerais avoir des explications à ce sujet-là, et puis, si vous avez des exemples, ce serait apprécié.

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Merci, M. le Président. Tout d'abord, on a osé ? parce que dans le fond ça ne nous regarde pas, on ne siège nullement sur des comités de gestion de régimes de retraite ? on a osé tout simplement indiquer aux parties prenantes des régimes: Écoutez, des excédents, là, ça fait partie... des surplus, ça fait partie presque d'un passé; on se dirige de plus en plus vers moins d'argent, ça fait que, si vous avez des surplus actuellement, au moment où on se parle, à toutes fins pratiques, ce qu'on dit, c'est: Gardez-le donc et essayez d'être prévoyants pour... j'étais pour dire des excédents négatifs, mais des déficits potentiels qui pourraient arriver, au niveau des calculs actuariels pour les régimes de retraite. On s'est permis tout simplement ? je dis «on s'est permis» dans le sens qu'on n'a pas un droit de regard ou de pouvoir à ce niveau-là ? ...mais tout simplement pour sensibiliser l'ensemble des participants actifs, non actifs, les employeurs, les syndicats, comme de quoi qu'il y a une inégalité qui s'en vient, et ça, c'est une augmentation importante de personnes qui vont être mises à la retraite dans les cinq, huit, 10 années qui s'en viennent.

n (10 heures) n

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Vous avez mentionné tantôt ? et je pense que vous vous démarquez également ? que vous êtes deux syndicalistes sur trois.

Mme Wavroch (Hélène): Oui.

Mme Beaudoin: Alors, ma question est la suivante: Comment se fait-il que vous n'arrivez pas à vous entendre avec les syndicats? Parce qu'on a entendu la position des syndicats. Eux, évidemment, ils ne prônent pas l'adoption du projet de loi n° 195. Souvent, dans vos associations, vous aviez une bonne entente avec la partie syndicale. Est-ce que vous pensez vraiment que le projet de loi n° 195 va régler la situation? Il y aurait peut-être une autre solution: les discussions. Est-ce que vous avez tenté d'arriver à une entente possible?

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Merci, M. le Président. Tout d'abord, on est des anciens syndicalistes, on est des retraités du monde syndical. Je vous dis ça un petit peu pour vous mettre en situation. Au niveau des discours syndicaux, il est sûr qu'il y a des historiques et une culture, qu'on ne peut pas nier, dans certains développements de régimes de retraite, parce qu'on se souvient qu'avant même ? surtout dans l'appareil gouvernemental ? avant même l'arrivée du RREGOP, souvent les syndicats ont géré, ont créé, avec des compagnies d'assurance, des régimes de retraite qui d'ailleurs se sont avérés très fructueux, dans les années soixante-dix à quatre-vingt, avant l'arrivée du RREGOP. Donc, il y a tout un historique, toute une culture qui fait en sorte que la gestion au niveau des comités de retraite, ça fait longtemps que le monde syndical, il s'y connaît.

Leurs revendications, c'est-à-dire, tu sais, leur hésitation afin d'appuyer la loi n° 195, je dirais, probablement vient du fait qu'ils ne voient pas la nécessité d'avoir une loi qui vient finalement dicter aux différents comités de gestion comment ils doivent fonctionner, que probablement ? puis là je me permets de dire ce que je pense que les syndicats pourraient faire valoir ? ...c'est probablement de dire que chaque... il y a beaucoup de cas d'espèce, on ne peut pas réglementer par une loi comment tout le monde devrait fonctionner, et d'où la résistance.

Nous, notre intérêt en tant que Conseil des aînés, c'est qu'on est là pour protéger l'ensemble des aînés qui sont couverts par ces régimes-là, qu'il y en a qui sont retraités. Vous savez, on a presque 3 millions d'aînés, et on entend, par «aînés» ? restez bien assis ? 50 ans et plus. Je dis ça parce qu'il y en a ici qui sont des aînés, et ils viennent de l'apprendre. Alors, la réalité, c'est qu'on va être de plus en plus importants au niveau... et ça va être important d'avoir la participation de ces retraités-là dans les discussions qui vont les toucher et d'avoir un certain encadrement.

Peut-être que M. Boucher, qui m'a écrit une note de 15 pages, pourrait peut-être intervenir plutôt que je lise sa note. Alors, si vous permettez, M. le Président...

Le Président (M. Paquet): Certainement. M. Boucher.

M. Boucher (Maurice): Si vous me permettez, je voudrais affirmer que je crois comprendre que les centrales syndicales sont extrêmement jalouses de leur droit à la négociation du régime de retraite et de leur participation à l'administration du régime, aussi, sur les comités de régimes de retraite. Ils sont tellement jaloux de ce droit-là qu'ils considèrent que la loi n° 195, qui donne un droit à un tiers parti, soit les retraités, les participants retraités, un droit de regard sur le régime de retraite, constitue une brèche dans leurs prérogatives de la négociation avec l'employeur de l'ensemble des conditions qui déterminent la retraite. Alors, je pense que c'est... la position des centrales syndicales est plutôt prudente vis-à-vis l'ensemble de leurs droits qu'un parti pris contre les retraités. C'est plutôt de protéger ce qu'ils ont déjà comme droit à la négo.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: ...permettre à mes collègues de poser des questions.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Alors, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Mme Wavroch, Mme des Rivières et M. Boucher, merci pour votre mémoire. À la conclusion, vous parlez, et avec raison, que pour l'instant le projet de loi va avoir une application théorique, mais vous dites aussi que ça va s'appliquer dans le futur.

Tout à l'heure, mes collègues expliquaient... Actuellement, les groupes qu'on reçoit... Il y a les associations patronales, syndicales qui sont contre, les associations de retraités qui sont pour, grosso modo, là, si on fait l'analyse rapide, mais il y a aussi des représentants que je vais déterminer comme neutres, les actuaires, certaines compagnies de consultants en régimes de retraite et aussi la Régie des rentes, qui est venue, qui nous a présenté son mémoire. Puis on nous dit qu'un des dangers peut-être qui guettent la société québécoise avec ce projet de loi là, c'est peut-être l'extinction des régimes à prestations déterminées.

En Angleterre, dans le document de la Régie des rentes, on nous indique que 55 % des régimes à prestations déterminées ne prennent plus de nouveaux clients, de nouveaux bénéficiaires, parce que c'est un danger aussi. Parce que, si on s'en va sur les régimes à cotisation déterminée, c'est moins avantageux pour les gens.

Donc, je voudrais vous entendre là-dessus. Est-ce qu'il y a un danger ou si c'est que certaines associations patronales ou dites neutres nous montrent un épouvantail qu'il ne faut peut-être pas tenir compte, là?

Le Président (M. Paquet): M. Boucher.

M. Boucher (Maurice): Il est évident que les régimes à prestations déterminées sont plus rigides, sont moins souples que les régimes à cotisation déterminée, qu'on peut ajuster en cours de route.

Cependant, c'est encore là l'objet de négociations. Si le syndicat, dans ses revendications, tient à avoir un régime à prestations déterminées, alors c'est une question d'orientation des centrales syndicales ou des syndicats autonomes. Quand vient le temps de négocier leur régime de retraite, c'est là-dessus qu'ils...

Je pense que l'ensemble des travailleurs syndiqués, membres des syndicats, préfèrent les régimes à prestations déterminées; il y a plus de garanties de ce que seront les revenus de retraite, quand viendra le temps de leur retraite, mais c'est encore l'objet de négociations. Alors, je ne crois pas que d'accorder plus de pouvoirs des participants retraités sur les surplus de régimes de retraite entraîne une diminution des régimes à prestations déterminées, ce n'est pas mon avis.

Le Président (M. Paquet): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: O.K. Je comprends, oui. Je comprends votre argument. Oui, c'est normal que les employés préfèrent ce type de régime, parce qu'on nous a dit que c'était la Cadillac, et, je pense, avec raison. Mais il faut comprendre aussi que, dans le processus de négociation, l'employeur fait valoir ses points de vue aussi, là. Je comprends que les employés, c'est ça qu'ils préfèrent. Mais est-ce qu'il peut avoir... Ou je vais plutôt reprendre: Comment expliquez-vous qu'il y a une diminution, que certains régimes actuels commencent à refuser des gens? Donc, il y a quand même une tangente, là. Puis je ne dis pas que... Je m'interroge, là, tout simplement, à haute voix. Je n'ai pas de point de vue précis là-dessus. J'essaie de comprendre, de voir le plus possible les implications possibles de ce projet de loi là.

Le Président (M. Paquet): M. Boucher, peut-être en un peu moins d'une minute, s'il vous plaît.

n (10 h 10) n

M. Boucher (Maurice): Je dois revenir aux enjeux de la négociation, bien sûr. Alors donc, la négociation, pour un employeur, d'un régime de retraite à prestations déterminées, ça fait partie de l'ensemble des risques qu'il prend quand il investit dans l'entreprise. Qu'il investisse dans le personnel, qu'il investisse dans l'équipement, qu'il investisse dans le développement de son entreprise, ça fait partie de l'ensemble des risques, et c'est un risque qui est inhérent au fonctionnement d'une entreprise, à l'administration d'une entreprise.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Merci beaucoup. Alors, bienvenue, Mme Wavroch. Donc, je suis heureux d'apprendre que je peux faire partie de votre association, de votre conseil, et j'en suis heureux. J'en suis fort heureux.

Mme Wavroch, vous représentez le Conseil des aînés, et, sur ça, on sait qu'au niveau des fonds de retraite ce n'est quand même pas l'ensemble de la population qui bénéficie d'une bonne qualité de fonds de retraite. O.K. En ce qui regarde vos membres, vous avez certainement des représentations qui vous sont faites pour essayer d'améliorer leur qualité de vie, essayer d'améliorer leur niveau de vie. Est-ce que vous avez des recommandations? Est-ce que vous avez des actions? Est-ce que vous avez des données qui nous permettent justement de voir l'impact? Parce que, nous, dans le cadre des mémoires qu'on a reçus, on a eu des gens du patronat qui nous ont parlé bien sûr de leurs appréhensions par rapport au projet de loi versus leur contribution au fonds de retraite, on a eu également les actuaires qui ont quand même eu une approche négative par rapport au projet de loi. Donc, j'aimerais ça voir, de votre côté, là, vu que vous êtes une personne qui regroupe des gens qui sont sur le terrain, là, qu'est-ce que c'est, l'impact. Avez-vous des éléments à nous faire valoir, à nous démontrer?

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Merci, M. le Président. Tout d'abord, juste pour clarifier un petit peu qui est le Conseil des aînés. Le Conseil des aînés, comme tel, n'a pas de membres, représente l'ensemble des aînés au Québec via la loi législative qui l'a constitué. Et donc le conseil agit, si vous voulez, comme intermédiaire entre le peuple, si vous permettez l'expression, et le gouvernement du Québec. Donc, effectivement, vous avez tout à fait raison, il y a de plus en plus de personnes qui vont être appelées à devenir des retraités. Le conseil a, de par ses travaux, produit un document qui devient la bible, et que je vous invite tous à lire avant de vous coucher, à soir ? vous l'avez dans la bibliothèque, je suis sûre, ici ? qui est La réalité des aînés québécois, et qui donne un aperçu, si vous voulez, de ce qui guette les personnes qui s'en viennent à la retraite, alors que, au moment où on se parle, il y a deux considérations très importantes quand on parle de régimes de retraite, c'est que tout d'abord il y a plus de 60 % de la population actuellement âgée de 65 ans et plus qui ont un revenu de moins de 15 000 $ par année. Ça, c'est ceux qui travaillent et ceux qui sont évidemment à leur retraite, qui, eux, reçoivent normalement juste les trois régimes. Quand je dis les trois régimes, je veux dire, ils reçoivent du fédéral, ils reçoivent de la Régie des rentes du Québec puis ils reçoivent souvent, parce qu'ils sont en bas du seuil, le supplément. Alors, il y a cette réalité-là, tout d'abord.

Il y a une autre réalité qui fait que, pour les nouveaux, les baby-boomers qui s'en viennent, eux, normalement, ont eu des meilleurs régimes de retraite. On pense qu'ils devraient normalement être mieux nantis que les gens actuels. C'est une réalité, mais très limitative, c'est-à-dire... C'est comme n'importe quoi. On vit plus longtemps, les régimes de retraite sont souvent basés sur des estimations actuarielles qui nous donnent x nombre d'années à vivre après avoir atteint l'âge de 65 ans, mais il y en a qui vivent beaucoup plus longtemps, comme, par exemple, M. Boucher qui est ici ? il a l'air plus jeune, mais il est vieux. Alors, conséquemment, son régime de retraite doit durer plus longtemps, et c'est là où on doit être préoccupés par cette réalité-là dans un autre tantôt.

Au moment où on se parle, on est censés vivre jusqu'à 82, 85 ans, nous tous, mais plus qu'on va améliorer la technologie médicale, plus qu'on va améliorer des situations de qualité de vie, bien, plus qu'on va vivre longtemps, 90, 95, 100 ans. On a d'ailleurs beaucoup de centenaires au Québec, ça fait qu'il faut que nos régimes de retraite s'étirent jusque-là, puis c'est là où ils deviennent une préoccupation importante pour l'appareil gouvernemental.

M. Bernier: Un dernier élément.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Oui, une dernière question en ce qui me concerne. En ce qui regarde l'application du projet de loi n° 195, on sait que plusieurs associations nous ont parlé de la problématique en ce qui regarde l'indexation du coût de la vie, au niveau des retraités. Est-ce que vous croyez que l'adoption de la loi n° 195 peut faciliter ou aider l'indexation du coût de la vie pour les retraités qui, comme ils nous l'ont mentionné, dans plusieurs cas doivent voir à chaque année se dégrader la capacité financière à faire face aux obligations de la vie? Croyez-vous que c'est une partie de solution, là, à cette problématique-là?

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

Mme Wavroch (Hélène): Je vais référer la question à M. Boucher. Pour répondre à votre question, ma première réaction, c'est que je n'ai pas vu rien de bien excitant qui me permettrait de dire, oui, que ça va aider. Il y a quelque chose de rare, là, mais là... M. Boucher.

Le Président (M. Paquet): M. Boucher.

M. Boucher (Maurice): Bien sûr qu'on favorise l'indexation intégrale des rentes de retraite pour l'ensemble des personnes retraitées, puis je ne pense pas que l'adoption de cette loi n° 195 puisse changer quoi que ce soit à l'instauration d'une indexation intégrale pour l'ensemble. Les salariés du secteur public et parapublic, par exemple, ont besoin d'une révision de leur indexation parce qu'ils subissent une perte de pouvoir d'achat depuis plusieurs années. Mais je ne pense pas que ce projet de loi là vienne à avoir une influence considérable sur les problèmes d'indexation des retraites.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Drummond.

M. Jutras: Bonjour. C'était intéressant de voir, dans votre mémoire, là, l'appel à la prudence que vous faites quant aux surplus, parce qu'effectivement le contexte, au cours des dernières années, a énormément changé. On parlait de surplus en l'an 2000, mais là on s'est aperçu que ce n'est plus le cas, et les surplus se sont amenuisés énormément. Alors, je peux comprendre cet appel à la prudence que vous faites, là, quant à la gestion de ces surplus.

Mais effectivement on voit qu'au cours des quatre dernières années le contexte a énormément changé, puis on peut penser aussi qu'il est appelé à changer également, parce que, bon, on dit constamment que présentement, bon, c'est cinq travailleurs pour un retraité, puis tantôt on aura deux travailleurs pour un retraité.

Je voudrais savoir jusqu'où vous avez poussé la réflexion quant à l'utilisation des surplus. Là, vous faites un appel à la prudence, mais êtes-vous allés plus loin dans votre réflexion et avez-vous planché peut-être sur certaines recommandations à ce chapitre, là, tenant compte de l'évolution du contexte, là, d'une année à l'autre? Et, quand on regarde même la perspective d'avenir, là, le contexte peut présenter des conditions tout à fait différentes encore dans quelques années.

Le Président (M. Paquet): Mme Wavroch.

n (10 h 20) n

Mme Wavroch (Hélène): Tout d'abord, quand vous parlez de prudence, effectivement on parle de prudence, mais, pour nous autres, dans le cadre de notre présentation à vous aujourd'hui, c'était aussi surtout au niveau de la prudence au niveau des congés qu'on veut donner aux cotisations patronales justement parce qu'il y a des excédents. Notre réflexion porte sur la réalité qu'on connaît aujourd'hui et la réalité, comme j'expliquais tout à l'heure, qui s'en vient au niveau d'une nouvelle population, si vous voulez, de retraités. Et, vous le dites si bien, il va y avoir, dans un autre tantôt, deux travailleurs pour un retraité, ce qui inquiète, si vous voulez, l'ensemble de la population. Malgré que je dois vous dire: Il y a toujours un mythe ou un... Oui, je dirais que c'est un mythe qui existe dans la population, c'est que souvent on dit: Ah! on n'aura pas d'argent pour payer tous les gens qui vont être à leur retraite. On oublie que ces gens-là ont payé leur propre régime de retraite, là, hein? On a tendance à penser que tout le poids des régimes de retraite va reposer sur ceux qui travaillent, oubliant que ceux qui y ont droit, normalement, ont travaillé et ont cotisé au fil des 20, 25, 30 ans qu'ils ont travaillé.

Donc, peut-être pour pointer davantage, notre réflexion a été basée sur ce qu'on appelle l'équité, et elle est basée sur le fait qu'on oublie que les gens qui ont cotisé, ce sont des personnes qui ont aidé, lorsqu'elles étaient au travail, à bâtir un régime de retraite. Et, pour nous, c'est important que, lorsqu'ils sont à leur retraite, ils puissent avoir leur mot à dire quant à soit des excédents ou, dans un autre tantôt peut-être, malheureusement des déficits, comment le tout devrait se gérer pour être équitable pour l'ensemble des participants actifs et non actifs.

Le Président (M. Paquet): Alors, je vous remercie beaucoup. Ça épuise le temps dont nous disposions ce matin. Alors, ça me fait plaisir de vous remercier, au nom de la commission, pour votre participation. Mme Wavroch, M. Boucher, Mme des Rivières, au nom du Conseil des aînés, merci beaucoup de votre participation.

Je suspends les travaux pour quelques instants pour permettre aux prochains invités de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 10 h 21)

 

(Reprise à 10 h 25)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît. Alors, la Commission des finances publiques maintenant entendra M. Michel Méthot, président du conseil du Québec de l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Si vous voulez bien débuter votre présentation, s'il vous plaît.

Association canadienne des administrateurs
de régimes de retraite, section du Québec
(ACARR
, section du Québec)

M. Méthot (Michel): Merci, M. le Président. Alors, au nom de l'association, je remercie en premier lieu la Commission des finances publiques de son invitation à faire valoir nos représentations sur le projet de loi n° 195.

L'association, l'ACARR, est le porte-parole national du secteur des régimes de retraite au Canada. Elle s'est engagée à promouvoir des politiques et des activités qui favorisent la santé et la croissance du système de revenu de retraite au Canada en défendant trois principes: la clarté de la législation, des règlements et des ententes relatifs aux régimes de retraite; la bonne gestion et la saine administration des régimes; et enfin la prise en compte équilibrée des intérêts de chacune des parties en cause.

En résumé, l'ACARR recommande de ne pas adopter le projet de loi. À notre avis, le projet de loi ne répond pas aux attentes des associations, qui demandent un droit de regard sur l'utilisation des surplus, entrave la clarification des règlements des régimes de retraite, nuit aux relations de travail, est inéquitable pour les employeurs, décourage le sain provisionnement des caisses de retraite et enfin aggrave le flou juridique qui encadre les régimes de retraite multiprovinciaux.

Rappelons d'abord quelques concepts fondamentaux en matière de financement des régimes de retraite à prestations définies. En premier lieu, comme son nom le décrit, ce type de régime définit plutôt la prestation qui doit être versée. Une fiducie est créée afin de mettre de côté les sommes nécessaires au paiement des prestations au moment dû; ce faisant, on protège le participant contre les infortunes de son employeur. Alors, en somme, la prestation est le principal, la caisse de retraite est l'accessoire.

Une longue période de temps s'écoule entre le moment où l'argent est investi et celui où la prestation est versée. Qui plus est, le montant de la prestation variera selon plusieurs facteurs qui ne seront connus qu'à la retraite, par exemple: l'âge du participant, ses états de service, son salaire de fin de carrière. D'autres impondérables restent même après la retraite, puisqu'il s'agit de rentes viagères. Les montants qui doivent être versés dans la caisse devront donc être évalués régulièrement, au moins une fois à tous les trois ans.

Troisième point. Le principal objectif de cette évaluation est d'examiner la situation de la caisse et de déterminer la cotisation requise pour financer les prestations à verser prévues. Ce rapport comprend une section Opinion, je dis bien, Opinion actuarielle, qui résume les conclusions de l'actuaire. L'opinion doit se conformer à des normes de pratique de l'Institut canadien des actuaires qui requièrent de l'actuaire certaines déclarations, chacune commençant par les mots «à mon avis» ou «à notre avis». Comme faisant partie de cette opinion, on y trouvera le surplus ou le déficit à la date de l'évaluation qui sera utilisée pour la détermination de la cotisation. En somme, le point important ici à retenir est qu'un surplus en cours d'existence d'un régime de retraite est une opinion, ce n'est pas un fait. Et ce ne sera pas un fait aussi longtemps que le régime continue. Seule une liquidation du régime crée un véritable surplus ou déficit.

Quatrième point. Ce surplus ou le déficit est calculé en utilisant des hypothèses sur les événements futurs. Les normes exigent qu'il y ait cohérence pour que les gains et les pertes s'équilibrent à long terme. Évidemment, l'actuaire, après discussion avec le promoteur du régime, peut ajouter des marges pour protéger la caisse, des écarts favorables, auquel cas la probabilité d'être en surplus sera plus élevée que celle d'être en déficit. Mais, dans tous les cas, il n'y a aucune garantie et les hypothèses peuvent être en dessous de la réalité, auquel cas l'opinion subséquente devra faire rapport de l'obligation d'augmenter la cotisation.

n (10 h 30) n

Cinquième point. Un régime est à tout moment soit en surplus soit en déficit. C'est presque une vérité de La Palice. Compte tenu de la volatilité des marchés financiers et de l'incertitude des hypothèses, par définition, un régime en équilibre est une pure fiction de l'esprit.

Enfin, rappelons que l'encadrement législatif prévoit que, peu importent les dispositions du régime concernant le partage des coûts, l'employeur est le seul responsable du déficit. En cas de liquidation du régime, le déficit devient une dette de l'employeur, et l'employeur ne peut invoquer les clauses de partage de coûts pour se soustraire à cette obligation.

Retenons maintenant ces concepts et revenons au projet de loi. Pour donner suite à des représentations faites par certaines associations de retraités qui dénoncent l'injustice dont ils sont victimes en ne participant pas aux décisions sur la façon dont on dispose des surplus de caisses de retraite, le projet de loi permettrait aux groupes d'employés non représentés et aux retraités de donner leur assentiment à une modification au régime, à une modification au régime confirmant le droit de l'employeur d'affecter l'excédent d'actif à l'acquittement de ses cotisations.

Le projet de loi, à première vue, est très limité. Le projet de loi n'a pas pour effet de requérir l'assentiment de quelque groupe que ce soit lorsqu'un employeur prendra un congé de cotisation ou lorsqu'il modifiera le régime pour améliorer les prestations d'un groupe en particulier en utilisant le surplus. En fait, le projet de loi se limite à donner un droit d'assentiment ou de veto dans le cours d'un processus de confirmation du droit de l'employeur de prendre un congé de cotisation.

Ce processus a été adopté en 2000 à la suite de jugements des tribunaux qui laissaient planer un doute sur le droit des employeurs de prendre un congé de cotisation. La confirmation de ce droit selon un processus prescrit permet au promoteur d'un régime de se prévaloir d'une protection légale en cas d'une contestation subséquente devant les tribunaux, de prendre un congé de cotisation. Il s'agit d'un processus facultatif. Très peu d'employeurs s'en sont prévalus. Soit qu'ils jugent les dispositions de leur régime suffisamment claires, soit qu'ils estiment qu'un tel processus mettrait en doute leur bonne foi dans le passé, soit qu'ils jugent le processus inutilement laborieux et susceptible de créer plus de problèmes que d'en résoudre.

Donc, à notre avis, le projet de loi ne répond pas aux attentes et entrave la clarification des contrats. À moins d'une décision d'un tribunal supérieur qui remettrait en cause la pratique existante, le processus de confirmation continuera d'être rarement utilisé. L'adoption du projet de loi aurait pour effet de suspendre ceux en cours et de le rendre pratiquement inopérant dans le futur. En somme, le projet de loi ne répond que marginalement aux représentations faites par ces associations en limitant leur intervention à un type de modification qui ne sera plus effectuée. Ceux qui avaient cru que ce projet de loi leur donnerait le droit de participer aux décisions sur la façon dont on dispose des surplus de caisses de retraite se sentiront trompés. Avec ce projet de loi, le législateur ne règle rien et crée de nouveaux problèmes.

Deuxième point, le projet de loi entrave les relations de travail. Et ici nous répétons un point qui a été fait par des groupes syndicaux auparavant. Dans le cas où le régime de retraite était effectivement lié à une convention collective de travail, le projet de loi vient modifier un processus de négociation des conditions de travail en limitant les droits de contracter. Il ajoute une tierce partie dans le processus d'une entente sur une convention collective, qui aura droit d'y faire opposition selon un processus et des enjeux complètement différents. Ce n'est rien pour améliorer les relations de travail au Québec.

Dans les cas où le régime de retraite a été adopté par l'employeur pour le bénéfice de salariés qui ne sont pas régis par une convention collective de travail, règle générale sur une base facultative, le projet de loi a pour effet plutôt incongru de limiter le droit de l'employeur d'adopter une modification particulière d'un avantage qu'il a librement choisi d'offrir à ses salariés, qu'il peut librement modifier à tout autre égard, en autant qu'il protège les droits acquis, et qu'il peut tout simplement terminer.

Enfin, en modifiant les clauses d'un contrat de travail selon des modalités qui sont en contravention des termes prévus au contrat, le projet de loi, à cause de son effet rétroactif, ébranle les fondements de la pérennité du droit, sur lequel reposent les contrats à long terme tels les régimes de retraite, de même que la confiance des promoteurs des régimes.

Autre point. Du point de vue de l'employeur, le projet de loi est foncièrement inéquitable. L'adoption du projet de loi aurait pour effet de suspendre le processus de confirmation en cours et de le rendre pratiquement inopérant dans le futur. C'est d'abord brimer le droit de modifier un contrat conformément à ses propres clauses.

Tout en reconnaissant que l'intrusion de leur droit est limitée dans l'immédiat, les employeurs y verront surtout le précédent que créera le projet de loi. Le précédent accorde un droit de regard à des groupes de participants sur un type de modification ayant trait à l'utilisation des surplus, tout en maintenant l'obligation exclusive du promoteur de régime de financer les déficits. En somme, le projet de loi introduit un déséquilibre des intérêts des parties en cause. Du point de vue du promoteur, il s'agit d'une injustice.

Examinons un peu plus en détail comment sera perçu par les employeurs le précédent créé par le projet de loi en se rappelant les concepts énoncés au début. Puisqu'un régime de retraite est à tout moment en déficit ou en surplus, en vertu de ce précédent, l'employeur devra verser des cotisations aussi longtemps que le régime est en déficit et devra éventuellement obtenir l'assentiment de tous les groupes de participants pour diminuer ou suspendre sa cotisation lorsque le régime sera en surplus. Selon toute vraisemblance, cet assentiment sera obtenu en contrepartie d'améliorations que l'employeur devra adopter aussi longtemps que le régime sera en surplus, c'est-à-dire aussi longtemps qu'il ne sera pas en déficit. Le déficit, à ce moment-là, à combler sera d'autant plus élevé que des améliorations auront été accordées alors qu'il était en surplus. C'est vraiment placer l'employeur dans une situation constante de perdant.

Qui plus est, le projet de loi a un caractère rétroactif. Il vise particulièrement les promoteurs de régimes qui ont adopté une politique de provisionnement prudente dans le passé et qui ont aujourd'hui des caisses de retraite bien provisionnées. Pourquoi devraient-ils soudainement demander la permission de prendre un congé de cotisation ou de tout simplement clarifier leur droit d'en prendre un?

Enfin, le projet de loi va à l'encontre de l'objectif de la loi d'assurer un sain provisionnement des régimes de retraite. En effet, en favorisant des politiques de provisionnement des régimes visant à minimiser les risques d'un surplus dont l'utilisation pourrait faire l'objet de contestations, le projet de loi aurait pour effet secondaire d'aggraver la santé financière des régimes de retraite. Au moment où 80 % des caisses sont sous-provisionnées, le projet envoie plutôt un message clair qu'au Québec, en matière de régimes de retraite, mieux vaut être pauvre et malade que riche et en santé.

Enfin, dernier point, le projet de loi aggrave le flou juridique qui encadre les régimes de retraite au Canada. Plusieurs milliers sinon dizaines de milliers de travailleurs québécois participent à des régimes de retraite multiprovinciaux. La Loi sur les régimes complémentaires de retraite et le projet de loi ne s'appliquent qu'aux travailleurs québécois de ces régimes. Par ailleurs, la loi, dans les autres provinces, est très claire sur le droit d'un employeur de prendre un congé de cotisation et ne requiert aucun processus de confirmation, donc aucun assentiment de groupes de participants, sauf si le contrat prévoit déjà clairement la nécessité d'obtenir l'approbation d'une autre partie.

n (10 h 40) n

En se démarquant davantage des lois équivalentes dans les autres provinces, le projet de loi complique davantage l'administration des régimes de retraite qui comptent des participants au Québec et qui sont nationaux et ne peut s'avérer que d'être au détriment des travailleurs au Québec. De plus, il ouvre non seulement la porte à de nouvelles contestations judiciaires en créant des expectatives qui ne seront pas satisfaites, il contribue davantage au bourbier juridique dans lequel sont plongés actuellement les régimes multiprovinciaux. Les différentes législatures ici ont un droit, même un devoir, d'y mettre de l'ordre.

En conclusion, le projet de loi aura un effet néfaste sur la viabilité des régimes de retraite au Québec. Mesuré à l'aune des objectifs de l'ACARR, le projet de loi va à l'encontre de la clarification des ententes relatives aux régimes de retraite, il nuit à la bonne gestion et saine administration des régimes et augmente encore une fois les frais d'administration. Il ne fait pas compte des intérêts de chacune des parties en cause.

Plusieurs intervenants dans le domaine des régimes de retraite qui se préoccupent de la dérive de leur encadrement juridique, dont l'ACARR, se sont concertés afin de développer un consensus sur une loi type sur les régimes de retraite. L'Association canadienne des organismes de réglementation des régimes de retraite, dont fait partie la Régie des rentes, participe activement à son élaboration. Nous croyons que la commission devrait porter ses efforts à la recherche d'un consensus canadien sur la réglementation des régimes de retraite.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie de votre présentation. Je vais vous poser un certain nombre de questions parce que j'ai du mal à comprendre vos conclusions à partir de l'analyse que vous faites du projet de loi.

Très justement, vous avez rappelé que ce projet de loi ne touche pas l'attribution des surplus actuariels, il touche simplement la confirmation du droit de l'employeur de pouvoir ou ne pas pouvoir prendre un congé de cotisation. C'est essentiellement ça qui est l'objectif qui est devant nous. Il faut lire cette confirmation de ce droit actuellement en fonction de l'article 146.7, que vous connaissez certainement très bien. L'article 146.7 lie les parties au contrat, c'est-à-dire au régime de retraite, indépendamment qu'ils aient donné ou non leur accord à la modification du contrat. Et ce que vient faire actuellement la loi n° 193 devant nous, c'est, au contraire, de venir clarifier cette question et faire en sorte que, si on modifie un contrat qui lie différentes parties ? l'employeur, les participants syndiqués, les participants en retraite, les participants non actifs ? si on modifie un contrat, les parties au contrat doivent pouvoir être consultées. Et c'est ça, je crois, la portée de 195. Je ne comprends pas comment ceci a des effets sur les provisionnements des régimes, etc., qui est un élément qui peut arriver, bien sûr, lorsqu'on discuterait sur l'attribution des surplus. Et on ne discute pas à l'intérieur, ici, de l'attribution des surplus.

Le Président (M. Paquet): Oui, M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Oui. J'écoutais les représentations précédentes, et, à les écouter, il semble clair... et, selon les prétentions d'autres parties, leur vision des choses, c'est que ce projet de loi leur donnera un droit de regard sur les surplus et non pas un droit de regard si et lorsqu'il y aura un processus de confirmation. Il y a actuellement, à mon avis et l'avis de tous, une incompréhension de la portée du projet de loi. C'est cette incompréhension qui, dans un premier temps, va créer les premiers problèmes lorsqu'un tel projet sera adopté. On aura des parties qui, d'une part, s'attendent à ce que dorénavant ils auront un droit à toute décision sur l'utilisation d'un surplus, quand en fait cette intervention sera limitée seulement si et lorsqu'un employeur décidera de confirmer un droit de prendre un congé.

M. Gautrin: On s'entend, monsieur, et je comprends donc qu'il puisse avoir une mauvaise interprétation. C'est le rôle des parlementaires et de nous de mieux l'expliquer. Je pense qu'on essaie... on a la responsabilité de mieux l'expliquer. Mais, le phénomène de confirmer le droit a pour effet d'empêcher une tierce partie de pouvoir avoir recours aux tribunaux si jamais elle considère qu'il y a un congé de cotisation inapproprié pris par un employeur. C'est essentiellement ça, la conclusion. Et l'effet du projet de loi n° 195 redonne en quelque sorte ce qui est la pratique dans un régime démocratique et un régime de droit, lorsqu'on est en désaccord quant à l'application d'un contrat, de pouvoir avoir recours aux tribunaux pour trancher sur le droit ou le non-droit d'une partie au contrat.

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Le contrat, qui est le régime de retraite, a ses propres dispositions concernant la façon dont une modification peut être apportée au régime. Le projet de loi vient modifier cette particularité du contrat. Si le contrat dit: Le régime de retraite peut être modifié par l'employeur, ou si le contrat dit: Le régime de retraite peut être modifié après entente avec le syndicat et l'employeur, le projet de loi vient modifier cette clause en disant: Non, il faut également le consentement de d'autres parties au contrat.

M. Gautrin: Pour introduire ? vous me permettez ? pour introduire à l'heure actuelle des dispositions qui sont différentes au contrat.

M. Méthot (Michel): Exact.

M. Gautrin: Et, faites attention, tout ce que ça vient faire actuellement, c'est, en cas de mésentente, ça permet simplement de retourner devant un juge. Et tout ce qu'on ouvre ici avec la loi, c'est la possibilité d'avoir le recours aux tribunaux.

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Non. Là, si le contrat dit: Je peux... Prenons cette situation-ci, simple: je, l'employeur, peux modifier le régime de retraite après avis de... conformément à la loi. Donc, demain matin, l'employeur actuellement peut modifier sa clause qui touche à la cotisation requise au régime de retraite. C'est le régime comme il existe actuellement, c'est le contrat.

M. Gautrin: Si le contrat...

Le Président (M. Paquet): M. le député.

M. Gautrin: ...si le contrat ? monsieur, regardez la situation ? si le contrat prévoit justement d'autres choses qui protègent justement les retraités, la loi n° 102, telle qu'elle est actuellement, permet uniquement à deux parties au contrat de modifier le contrat sans l'accord d'une tierce partie, de la tierce partie. Et il existe des contrats justement, des régimes de retraite ? et vous le savez aussi bien que moi ? qui justement précisent et protègent un certain nombre... la manière dont sont affectés les surplus actuariels lorsqu'ils se génèrent. Et, voyez-vous, si on suivait la loi n° 102 telle qu'elle est, on pourrait modifier le contrat au détriment d'une tierce partie sans que cette tierce partie ait pu s'exprimer. L'effet miroir de ce que vous soulevez est aussi présent, et je pense que vous devez le convenir avec moi.

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Je ne suis pas d'accord, M. Gautrin. D'abord, une clause qui touche la cotisation de l'employeur, ça touche toute la caisse. Ça ne touche pas un cas en particulier, puisque tout argent dans la caisse cesse... est utilisé, une fois qu'il est dans la caisse, à sécuriser les bénéfices qui sont prévus au contrat. Il y a des obligations légales de cotiser un montant minimum pour rencontrer les obligations du régime. Dans certains cas, il peut ne pas être clair que l'employeur puisse prendre un congé de cotisation lorsqu'il y a suffisamment d'argent dans la caisse pour rencontrer les obligations du régime. L'employeur peut actuellement néanmoins prendre un congé de cotisation. Il peut être poursuivi, mais il peut prendre un congé de cotisation, son obligation étant de s'assurer qu'il y a suffisamment d'argent dans la caisse. Il peut modifier pour clarifier ce droit... En vertu du contrat, actuellement c'est en vertu des dispositions du régime qui régissent la façon dont un contrat peut être modifié. Peu importe ce que dit la loi, il y a des dispositions en vertu du contrat qui régissent la façon de modifier le régime. Le point qui est fait ici, c'est que la loi n° 195 vient modifier ces dispositions du contrat.

M. Gautrin: La loi n° 102 venait modifier aussi les dispositions du contrat, mais à la manière...

M. Méthot (Michel): La loi n° 102 venait... Non, la loi n° 102 apportait un processus de clarification qui assurait une protection légale par la suite.

M. Gautrin: Si vous me permettez, actuellement, la même chose, on a un processus de clarification différent, mais qui assure aussi une protection légale par la suite.

M. Méthot (Michel): Oui...

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Gautrin: Je pense que mes collègues ont d'autres questions, peut-être.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull, 2 min 30 s environ.

M. Cholette: 2 min 30 s? O.K. Merci, M. le Président. M. Méthot, merci. Je trouve intéressant, là, la lecture de votre mémoire puis de vous entendre. Je trouve que vous n'y allez pas, par exemple, avec le dos de la cuiller, vous êtes assez sévère avec le projet de loi. Lorsque je lis... Vous avez un, deux, trois, quatre, cinq, six critiques sévères, je trouve, là, lorsqu'on lit votre résumé. Donc, je vais baser mes choses... Je trouve intéressante la discussion qu'on a présentement, mais je vais aborder autre chose. Premièrement, votre association, vous représentez qui? Est-ce que vous représentez que des employeurs ou est-ce que vous... Qui représentez-vous?

n (10 h 50) n

M. Méthot (Michel): Notre association compte environ 800 membres au Canada, qui viennent des promoteurs des régimes de retraite, des administrateurs des régimes de retraite, particulièrement dans les cas où des régimes de retraite sont administrés par des tiers, et également... Mettons ça sous le grand parapluie des fournisseurs de services, c'est-à-dire des firmes-conseils en actuariat ou des firmes de gestionnaires d'actif de caisses de retraite.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull.

M. Cholette: Mais est-ce qu'on est membre chez vous?

M. Méthot (Michel): Oui.

M. Cholette: Oui. Est-ce qu'il y a des syndicats qui sont membres chez vous?

M. Méthot (Michel): Des syndicats comme tels, non, mais il y a des régimes de retraite paritaires.

M. Cholette: D'accord. Est-ce qu'il y a des associations de retraités qui sont membres?

M. Méthot (Michel): Non.

M. Cholette: Non. O.K. Moi, je veux parler de la comparaison avec le reste du Canada. Pour être clair, moi, ce que je comprends, c'est que la loi actuellement dit: Pas de problème, tu peux prendre un congé de cotisation en matière de... lorsqu'il y a surplus, sauf que c'est contestable possiblement devant les tribunaux. Il y a une modification à la loi qui a dit: En passant, il existe un mécanisme de confirmation de ce droit. 195, à ma compréhension, ne vient modifier que dans ce cas-là. Lorsqu'il y aura utilisation de cette confirmation, 195 dit: Vous devrez dorénavant obtenir l'assentiment des retraités. Si je le simplifie, là, à outrance, là, c'est ça, ma compréhension, c'est seulement lorsqu'il y aura confirmation de ce droit.

Comment ça se passe ailleurs au Canada? Comment est-ce qu'on traite, lors de questions touchant les congés de cotisation lors de surplus... comment est-ce qu'on traite ça ailleurs au Canada?

Le Président (M. Paquet): En moins d'une minute, M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Oui. La Cour suprême a rendu un jugement qui a clarifié la situation, et essentiellement c'est: à moins de disposition contraire et précise dans le règlement, un employeur peut prendre un congé de cotisation lorsqu'il y a suffisamment d'argent dans le fonds pour rencontrer les obligations du régime. Toute contestation d'une clause particulière d'un régime en particulier ne pourra se faire que par un tribunal à la lumière de la décision de la Cour suprême.

M. Cholette: Donc, ailleurs...

Le Président (M. Paquet): Très rapidement.

M. Cholette: ... ? oui ? ailleurs au Canada, le genre de clause que nous sommes en train de mettre de l'avant, ça n'existe pas?

M. Méthot (Michel): Ça n'existe pas et ce n'est pas nécessaire non plus.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. M. Méthot, merci pour votre participation à cette commission. Et, en tant que porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite, je redis toujours que nous abordons ce débat-là avec beaucoup d'ouverture.

Pour faire suite à la question de mon collègue d'en face ? on parle de ce qui se passe ailleurs au Canada ? est-ce que vous pourriez expliciter, parce que ce n'est vraiment pas clair, la position du Canada par rapport à ici?

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): En fait, la position principale, c'est que c'est la primauté du contrat et c'est l'obligation... En fait, la Cour suprême a dit qu'il n'y a aucun lien entre l'obligation de cotiser et la clause qui... dans un contrat de régime de retraite et la clause qui décrit le droit au surplus en cas de terminaison de régime. La Cour suprême a dissocié ces deux problèmes. Vous pouvez avoir un régime qui dit: En cas de terminaison de régime, le surplus appartient aux employés, et néanmoins, en cours d'existence, s'il y a un surplus dans la caisse et que l'article concernant la cotisation de l'employeur le permet, l'employeur peut prendre un congé de cotisation. Disons que c'est la toile de fond.

Et l'autre toile de fond, c'est que, lorsqu'il y a lieu de déterminer quelle est l'obligation de l'employeur de cotiser dans la caisse, il faut lire l'article en question et qui touche sur la cotisation de l'employeur. Et, lorsque cet article dit que l'employeur doit verser les montants nécessaires pour rencontrer les obligations du régime, il est entendu que, à moins de stipulation contraire ou restrictive, cela doit s'interpréter comme étant pouvoir prendre des congés lorsqu'il y a suffisamment d'argent dans la caisse. C'est essentiellement l'encadrement juridique des cotisations de l'employeur au Canada.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Alors, ma question est simple, si le dispositif n'est pas nécessaire, alors pourquoi le garder?

M. Méthot (Michel): Le dispositif au Québec?

Mme Beaudoin: Oui.

M. Méthot (Michel): Parce que c'est la loi, et la loi...

Mme Beaudoin: Ailleurs, on ne l'a pas.

M. Méthot (Michel): On ne l'a pas, parce que le jugement de la Cour suprême a été donné dans le cadre du common law. Donc, il n'avait pas une portée automatique à tout ce qui est encadré par le droit civil, d'où notre compréhension, c'est... d'où la loi n° 102 qui a introduit le processus de confirmation qui permet d'avoir la même assurance légale qu'ailleurs au Canada.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci. Alors, je comprends bien, parce qu'on fête aussi le Code civil ici aujourd'hui. Alors, on comprend votre position.

Vous avez entendu les gens qui ont parlé précédemment, le Conseil des aînés. Évidemment, ce conseil-là, ils sont d'accord avec les modifications. Ils disent que ces modifications-là sont positives puisqu'elles obligent maintenant à consulter tous les participants au régime ainsi que tous les bénéficiaires. Ils ont dit également que les retraités s'appauvrissent. Alors, vous ne trouvez pas ça légitime que les retraités puissent revendiquer un accès aux surplus, puisque la majorité des régimes ne disposent pas de mécanisme comme tel d'indexation?

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Il serait peut-être bon, pour répondre à votre question, d'abord de tracer une toile de fond: 75 % des travailleurs québécois n'ont pas de régime de retraite dans le secteur privé. La majorité des gens du secteur public et parapublic, des travailleurs, sont couverts, par contre, par un régime de retraite. Alors, la situation qu'on a aujourd'hui, c'est une situation où une minorité, en partant, bénéficie d'un régime de retraite, et, entendons-nous, un régime de retraite soit à cotisation déterminée soit à prestations. Une plus petite... à prestations déterminées. Donc, une plus petite portion encore bénéficie d'un régime à prestations déterminées. De ce sous-ensemble, on a une grande partie de ces régimes qui sont sous-capitalisés actuellement. Donc, la question des surplus n'est pas la question pertinente, c'est plutôt à savoir: est-ce que leur prestation va leur être livrée à un moment donné, compte tenu de la précarité de leur caisse de retraite?

Alors, en somme, on parle ici d'un problème qui est limité à une minorité, la minorité de ceux qui bénéficient d'un régime à prestations déterminées et, qui plus est, qui bénéficient d'un régime à prestations déterminées en surplus. Et, de mon expérience, il y a une très étroite corrélation entre les régimes en surplus et les régimes qui sont généreux. Les régimes qui sont généreux et en surplus, en pratique, il faut reconnaître que ce sont des employeurs qui ont à coeur la sécurité de leurs retraités après avoir passé un pleine carrière chez eux. On fait affaire avec finalement un groupe d'employeurs qui ont, sur une base facultative ou négociée, implanté un régime de retraite, qui l'ont soigneusement provisionné, qui se trouve en surplus aujourd'hui, qui, règle générale, est généreux.

Est-ce qu'il y a lieu ? et c'est à notre sens la question qui doit être posée ? est-ce qu'il y a lieu de faire intervenir le législateur dans ces situations? Mon expérience, c'est que, quand tout le monde s'assoit et s'écoute, dans ces questions-là, on en arrive à une entente. On n'a pas entendu... et les gens qui ont eu une entente ne viennent pas témoigner, règle générale, lors des commissions parlementaires. Et il y a eu beaucoup d'ententes sur une base négociée ou sur une base de discussion.

n (11 heures) n

N'oubliez pas que, dans les régimes non négociés, les retraités d'aujourd'hui étaient des cadres d'hier, et les cadres d'aujourd'hui seront des retraités de demain, et que, règle générale, ils font partie du même régime. Alors, tout le monde a un intérêt commun à s'entendre. Et, à partir du moment où le débat vient sur la table publique, tout le monde reste dans leur position. Et c'est actuellement le cas dans bien des cas... excusez-moi, c'est actuellement le cas dans plusieurs situations, où certaines associations ayant mis le débat sur la place publique ont... cessé de discuter. La solution dans ces cas-là, c'est beaucoup plus de laisser les parties faire leurs devoirs et de se rasseoir, et à la lumière du contrat et des circonstances qui ont amené le surplus aujourd'hui.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Vous savez que la Régie des rentes amorce une réflexion. Est-ce que vous pensez qu'on devrait attendre le fruit de ses travaux?

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Faisant partie de cette réflexion, on touche la capitalisation, le provisionnement des régimes de retraite et la gestion, en somme, des surplus. La question du provisionnement est un débat qui est maintenant national. Il faut comprendre que la question principale aujourd'hui, ce n'est pas les caisses de retraite en surplus, c'est la précarité de la grande majorité des caisses de retraite, qui sont sous-capitalisées. La question se pose: Est-ce que les règles de provisionnement ont été adéquates? Beaucoup de ces régimes ont été en surplus à un moment donné, ils sont en déficit aujourd'hui. Comment ça se fait? Et est-ce que les clauses de provisionnement doivent être révisées? Le débat est national, il implique plusieurs associations, incluant et des associations professionnelles et également notre association. Oui, c'est un débat qui doit avoir lieu et qui doit se faire au niveau national, sur le provisionnement des régimes de retraite.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel. Il reste 1 min 30 s sur ce bloc.

Mme Beaudoin: Vous dites, à la page 6 de votre mémoire, là, que finalement la régie fait partie de l'Association canadienne des organismes de réglementation des régimes de retraite. Vous savez que la régie, lors de son passage la semaine dernière, ne se souciait pas beaucoup des impacts que vous soulevez dans votre mémoire. Est-ce que vous avez des commentaires à ce sujet-là?

Le Président (M. Paquet): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Quant à la portée de la loi? Quant à la portée du projet de loi?

Mme Beaudoin: Oui.

M. Méthot (Michel): Je ne suis pas au fait de cette opinion. Quant à moi et quant à notre organisation, oui, il y a un problème. Si vous faites intervenir... si vous donnez un droit à un régime national qui compte plusieurs milliers de retraités partout au Canada, dont certains au Québec, et que vous introduisez un processus de confirmation qui donne un droit à un sous-groupe en particulier pour clarifier un droit qui est clair à l'extérieur du Québec, vous introduisez un processus qui est conflictuel. Pourquoi un employeur qui a un droit très clair à l'extérieur du Québec et qui parraine un régime pancanadien, un droit très clair de prendre un congé, devrait-il, pour clarifier ce droit-là, particulièrement pour ses employés au Québec, passer par un processus qui requiert le consentement d'un sous-groupe de retraités au Québec qui pourrait y opposer veto, quand en fait ce processus n'existe pas à l'extérieur du Québec, pour les retraités à l'extérieur du Québec? Et, de toute façon, il n'est pas nécessaire, puisque le droit est très clair. Comment réglez-vous cette situation?

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Matane. Trois minutes.

Mme Charest (Matane): Alors, si nous nous basons sur la prémisse que normalement un régime de retraite, c'est institué, M. Méthot, pour assurer un revenu aux employés à leur retraite, comment vous pouvez, dans cette optique, baser vos fondements pour privilégier, comme vous l'avez fait dans votre rapport, l'aspect des relations contractuelles entre l'employé et l'employeur au détriment d'une possibilité d'adopter une position très conservatrice pour les bénéficiaires du régime qui sont les employés actifs et non actifs? Dans le projet de loi et, je pense, qu'est-ce qui existe actuellement dans la loi, l'employé a un droit de veto, selon les règles actuelles ? l'employé actif ? lorsque l'employeur veut utiliser des surplus pour appliquer contre... pour se donner un congé de cotisation. Quand on sait aussi ? puis comme vous l'avez très bien dit dans votre rapport ? que les surplus dans des régimes, c'est souvent plus virtuel que réel, parce qu'on sait vraiment s'il y a un état de surplus ou de déficit au moment de la terminaison du régime, comment pouvez-vous tout... avoir autant d'arguments contre le projet de loi à l'heure actuelle, dans cette ligne de pensée?

Et ma deuxième question ? j'ai une deuxième question...

Le Président (M. Paquet): ...

Mme Charest (Matane): ... ? vous avez très bien explicité l'aspect très limité des articles qu'on modifie avec le projet de loi n° 195. Vous nous avez dit ? et c'est vrai: Les régimes à prestations déterminées sont des régimes qui sont déjà beaucoup moins populaires ou en beaucoup moins grand nombre que les régimes à cotisation définie et vous avez dit également que le processus dans la loi actuelle ne confère pas de droit nécessairement aux bénéficiaires non actifs ou actifs, il leur permet tout simplement d'être impliqués dans un processus de confirmation d'un droit que l'employeur a par ailleurs de pouvoir appliquer les surplus pour des congés de cotisation.

Donc, dans tout ça, là, je me dis: Quelle est ? étant donné tous ces éléments qu'on a mis sur la table ? quelle est votre insistance à vouloir ne pas voir le projet de loi n° 195 prendre forme?

Le Président (M. Paquet): 1 min 30 s environ. M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Le projet de loi donne un droit à... D'abord, actuellement, le processus de confirmation ne donne le droit de veto à personne. C'est un processus qui est unilatéral, conformément aux règles du régime, et qui décrit comment est-ce que les parties peuvent modifier le régime. Il ne crée pas un nouveau... le processus actuel ne crée pas de nouveau droit pour qui que ce soit. Le projet de loi, par contre, en crée un.

Ce qui préoccupe principalement dans ce projet de loi, c'est qu'il ne règle rien, puisqu'il n'y aura plus de processus de confirmation. Donc, aux yeux du public, le législateur apparaît comme donnant un droit à des groupes de retraités sur comment est-ce que les surplus vont être utilisés dans le futur, et, nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'il n'y en aura plus, de processus de confirmation. Donc, ça sera inopérant. Tout ce projet de loi là va tout simplement résulter en un processus de confirmation qui ne sera plus utilisé. Donc, il y aura un grand quiproquo, une complète incompréhension, complète distorsion entre ce que les gens qui ont demandé ce projet de loi s'attendent et ce qu'ils vont avoir. Il n'y en aura pas, de groupes, d'associations de retraités qui pourront dire lors d'une assemblée annuelle: On veut un droit à l'utilisation du surplus.

Le Président (M. Paquet): ...Drummond.

M. Méthot (Michel): C'est qu'il n'y aura pas de processus de confirmation.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Drummond.

M. Méthot (Michel): Pourquoi il n'y aura pas...

Le Président (M. Paquet): Trois minutes... 3 min 40 s.

M. Jutras: Pourquoi vous dites ça, là?

M. Méthot (Michel): Parce que, depuis que le processus de confirmation a été mis en place jusqu'à aujourd'hui, il y a une faible minorité d'employeurs qui l'ont passé, qui l'ont adopté, ce processus, malgré le fait que ça n'exigeait qu'une déclaration et une communication. D'accord? Et, si vous n'avez pas les statistiques, sûrement que la Régie des rentes pourra vous donner des statistiques sur le nombre de promoteurs de régimes qui ont confirmé leur droit. Voilà que vous venez ajouter une contrainte additionnelle. Quelle est la probabilité qu'il va y en avoir encore plus dans le futur? Elle est zéro. Quelle est la probabilité qu'il va y en avoir encore moins? Elle est très élevée. Donc, votre projet de loi ne résulte en rien.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Drummond.

M. Jutras: ...nous dit que la situation ne pourrait pas évoluer autrement, là, tu sais, vous vous prononcez...

M. Méthot (Michel): Oui, la situation pourrait évoluer autrement s'il arrivait un jugement d'une cour qui viendrait en somme porter un jugement ? et une cour supérieure ? porter un jugement qui viendrait à l'encontre de la compréhension générale de l'ensemble des promoteurs des régimes quant à leur obligation, vis-à-vis leurs cotisations, qui ferait en sorte que tout le monde devrait se... appelons ça se ruer vers un processus de confirmation pour clarifier. Mais, en l'absence d'un jugement qui viendrait contredire la perception et... oui, la perception qu'ont les promoteurs de régimes actuellement de leurs obligations vis-à-vis la caisse, il n'y aura pas de... il n'y aura pas... il y en a eu peu et il y en aura encore moins, de processus de confirmation.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Bien, on pourrait continuer sur cette question-là, mais, moi, je veux vous poser une autre question. Et je pense que vous étiez présent dans la salle lorsqu'il y a eu la présentation du mémoire du Conseil des aînés.

M. Méthot (Michel): Oui.

n (11 h 10) n

M. Jutras: Vous étiez là, hein? Vous, vous semblez inquiet pour l'avenir, là, quant à... étant donné que les régimes sont sous-capitalisés, là, puis sous-provisionnés, vous semblez inquiet quant à l'avenir. Par contre, le Conseil des aînés, lorsque je leur ai posé la question, là, de l'évolution du contexte puis du fait de cinq travailleurs maintenant pour un retraité et éventuellement de deux travailleurs pour un retraité, Mme Wavroch me répondait, me disait: C'est un mythe que de penser qu'il n'y aura pas d'argent pour payer les retraités, parce que l'argent est là. Il est supposé... en tout cas, il est supposé être là. C'est ce qu'elle nous disait. Mais, vous, en tout cas de ce que je comprends de votre discours, là, vous n'êtes pas aussi rassuré que Mme Wavroch pouvait l'être. Au contraire, vous m'apparaissez plutôt inquiet.

Le Président (M. Paquet): 40 secondes, M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Oui. Oui, en fait, c'est une opinion que je ne partage pas du tout. Le débat public actuel, que ce soit au Canada, aux États-Unis, en Angleterre, est la sous-capitalisation des caisses de retraite des employeurs, surtout du secteur privé, qui est à la une de tous les débats, de toutes les conférences qui se tiennent partout en Amérique du Nord. Lorsque ? et je parle d'un point particulier ? lorsque notre directeur financier rencontre les analystes, les questions, les premières questions qui sont posées ne sont pas sur les résultats de la compagnie, c'est sur les engagements de la compagnie vis-à-vis ses caisses de retraite. C'est le débat actuel. Et les caisses de retraite sont sous-capitalisées, surtout dans des... Excusez-moi, je reprends ma phrase, le problème est plutôt aigu dans le cas où on a de grandes caisses de retraite, avec un grand nombre de retraités, sous-capitalisées, qui doivent être supportées par des cotisations supplémentaires d'employeurs qui vont drainer leur cash-flow.

Le Président (M. Paquet): Je vous remercie beaucoup. Alors, au nom de la Commission des finances publiques, je remercie M. Méthot, pour l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite, pour sa présentation à nos travaux. Je suspends les travaux pour quelques instants afin de permettre aux prochains invités de se joindre à la table.

(Suspension de la séance à 11 h 12)

 

(Reprise à 11 h 13)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue, au nom de la commission, à M. Jacques Légaré, président du Pont entre les générations, et M. Étienne Tittley, membre du Pont entre les générations et ancien président de Force Jeunesse, qui représentent aujourd'hui Force Jeunesse et Le Pont entre les générations. Alors, je vous inviterais ? je ne sais pas si c'est M. Légaré ? à commencer la présentation.

Le Pont entre les générations
et Force Jeunesse

M. Légaré (Jacques): Merci. D'abord, au nom de Force Jeunesse et du Pont entre les générations, j'aimerais remercier la Commission des finances publiques de nous avoir invités à participer à ces consultations. Comme très souvent, Le Pont entre les générations collabore avec Force Jeunesse pour prendre des prises de position publiques, et ce fut le cas lors des discussions autour du projet de loi n° 102 et c'est de nouveau le cas autour du projet de loi n° 195.

Il faut être très clair que nous ne sommes pas dans la même position que l'orateur précédent. Nous ne sommes pas là pour défendre ni des retraités... D'abord, pas nos membres d'abord, on n'est pas là pour défendre nos membres. On n'est pas là pour défendre des retraités, des syndicats, des employeurs, on est là pour défendre des principes d'éthique intergénérationnelle. Et l'éthique intergénérationnelle, c'est de mettre une bonne dose d'équité intergénérationnelle, dont on aime beaucoup parler en général, et de solidarité intergénérationnelle. Et donc, si l'on oublie l'un par rapport à l'autre, on risque d'avoir des très gros problèmes dans la société étant donné l'évolution démographique en cours. Donc, éthique implique équité et solidarité dans un dosage adéquat. Bon.

Vous avez vu, par notre mémoire, que nous appuyons à fond le projet de loi. Nous avions bien montré, dans le mémoire présenté lors des auditions, des consultations pour le projet de loi n° 102, que nous déplorions le fait que cet élément-là de la participation des retraités à cette phase de la gestion des caisses complémentaires de retraite n'ait pas été pris en compte, et nous saluons, nous apprécions qu'aujourd'hui ce projet soit devant le Parlement, et surtout qu'on espère que ce sera adopté. Mais donc, au-delà de notre appui au projet de loi, qui quand même est assez restreint, tout le monde en convient, nous aimerions inviter nos dirigeants politiques à peut-être aller un peu plus loin, c'est-à-dire que, étant donné les déboires qu'ont vécus les régimes complémentaires de retraite récemment, après leurs énormes surplus que nous considérons qu'ils ont dilapidés, nous croyons qu'il faudrait revoir tous ces modes de gestion pour tenir compte d'une réalité très fluctuante dans le temps et qui fait qu'on devrait essayer, par des moyens concrets, d'éviter les sauts que l'on a eus au cours... entre la fin du siècle dernier et le début du présent siècle.

Donc, voilà en gros, si vous voulez, pourquoi nous sommes là: pour s'assurer qu'il n'y aura pas de gens qui vont être pénalisés par tout simplement un élément de la gestion des caisses complémentaires de retraite. Et mon collègue Étienne Tittley peut ajouter d'autres éléments.

Le Président (M. Paquet): M. Tittley.

M. Tittley (Étienne): Oui. Bonjour. Merci. Merci de nous accueillir ici aujourd'hui. Quant à moi, j'émettrai deux considérations. À titre d'ancien président de Force Jeunesse, je ne peux pas m'empêcher de faire une analogie et... de regarder le débat aller et de faire une analogie avec le débat sur les clauses orphelin, parce que, dans le fond du débat, il y a la même question: Comment inclure des groupes qui ne sont pas représentés dans les relations de travail mais qui sont intéressés... qui ne sont pas représentés suffisamment? Et je dois dire chapeau! aux associations de retraités qui mènent ce combat-là de haute lutte depuis déjà, là, six ans au moins, mais j'ai un peu peur que le résultat soit le même que celui, là, avec la loi sur les clauses orphelin, dans la mesure où on a adopté une belle loi, en 1998, sur les clauses orphelin, qui en principe était très bien. En pratique, il y avait plein de trous, et on se rend compte, avec les dernières études que Force Jeunesse a faites, qu'il y a encore une clause orphelin présente dans six conventions collectives... une forme de mesure discriminatoire dans les conventions collectives à l'égard des jeunes, dans une convention collective sur six.

Et j'ai un peu peur que, avec le libellé présenté dans ce projet de loi là, ça ait très peu de portée pratique et que les représentants des retraités, qui ont travaillé fort pour obtenir de telles dispositions à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, se voient un peu déçus du résultat. C'est une belle avancée, mais mon analyse me laisse croire que ça n'aura peut-être pas toute la portée qu'ils souhaitent que ça ait.

D'autre part, pour renchérir sur les propos de M. Méthot, je dois dire que, quand il fait allusion au fait que c'est une question qui est peu ou pas probante parce que la large majorité des régimes complémentaires de retraite à prestations déterminées sont sous-capitalisés à l'heure actuelle, pour moi, c'est justement très significatif, là, au contraire. Puis il a bien fait de mentionner le fait qu'il y a un débat national à cet égard-là, parce que, si on a pu mesurer des surplus en 1998, 1999 et 2000, comment se fait-il que, quatre ans plus tard, alors que la vaste majorité des régimes complémentaires de retraite étaient largement excédentaires en 1998, 1999, 2000, aujourd'hui ils sont déficitaires? Alors, s'il y a un débat pancanadien, un débat national sur la question, à mon avis, j'imagine que le législateur ou le gouvernement, dans ce cas-ci québécois, a une position à défendre ou va développer une position qu'il va défendre dans un débat qui, en somme toute, nous concerne.

n (11 h 20) n

Et, pour ma part, je constate que les règles qui servent à déterminer la solvabilité ne tiennent pas compte, à ma connaissance, d'un facteur qui est le niveau d'exposition au risque du capital qui est investi dans les régimes de retraite. Or, en 1998, quand on a mesuré la solvabilité des régimes de retraite, effectivement les régimes semblaient excédentaires, mais ils étaient souvent surpondérés en actions, donc surexposés au risque par rapport à une pondération moyenne, et, ce faisant, deux ans, trois ans plus tard, après qu'on se soit octroyé des congés de cotisation, autant patronaux que du côté des employés, le marché boursier avait fait ses effets et on se retrouvait avec des déficits. Et j'ose espérer, comme je vous disais, que le gouvernement, dans ce cas-là, va développer une position qui vise à revoir la notion de solvabilité. On comprend que c'est de niveau fédéral, que c'est de juridiction fédérale, mais ça m'apparaît beaucoup plus important de s'entendre sur ce qu'est un vrai surplus avant de s'entendre sur qui a le droit de se le partager. Voilà.

Donc, s'il plaît aux députés, on est prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Écoutez, je vous remercie de votre présentation. Je dois dire que, de la part du législateur, je suis assez d'accord avec la présentation que vous venez de faire. La loi n° 195 qui est devant nous est une loi à portée limitée qui vient corriger en quelque sorte ce qui a été perçu comme une inéquité dans la loi n° 102, et dans les articles 146.5 à 146.7 de la loi n° 102 qui privaient du droit de recours en justice des retraités lorsqu'ils percevaient ou qu'ils pensaient qu'il y avait une prise de congé de cotisation inappropriée par l'employeur. Donc, vous avez parfaitement raison, on est parfaitement conscient aussi, de ce côté-ci du moins, de la portée limitée de la loi. Néanmoins, elle vient corriger une inéquité, d'après nous, quelque chose qui était à corriger.

Vous soulevez ? et avec raison d'après moi ? les vraies questions qu'on a à réfléchir devant nous qui sont: Est-ce que la loi fiscale, actuellement, qui oblige en quelque sorte d'utiliser les surplus excédentaires devrait être modifiée ou non modifiée? Est-ce que la manière dont on oblige à la fois les régimes d'avoir... d'être à la fois solvables et capitalisés n'est pas à réfléchir, en particulier dans le secteur municipal, où il y a pérennité en quelque sorte du régime? Est-ce qu'on n'a pas non plus à concevoir un régime qui soit plus multipatronal? C'est-à-dire, dans une situation où, peut-être il y a une trentaine d'années, les gens restaient employés du même employeur toute leur carrière et, dans le fond, un régime de retraite était un moyen de fidéliser en quelque sorte ces employés, à l'heure actuelle, la modification du marché du travail fait que bien souvent les gens vont passer d'un employeur à un autre et même avoir une situation de travailleur autonome. Donc, il y a toute une réflexion qu'on doit faire.

Et l'utilité que je vois, moi, ici dans le fait que vous veniez témoigner et que d'autres personnes viennent témoigner, c'est qu'implicitement on commence un autre débat. On commence un débat qui n'est pas celui de la loi n° 195, qui, comme vous le dites avec raison, est une loi à portée limitée mais qui est la part que les retraités vont avoir dans la gestion de leur caisse de retraite, qui n'est pas le projet de loi mais qui est une réflexion qu'il va falloir qu'on fasse collectivement, la part aussi... et, vous le soulevez parfaitement, faire en sorte qu'on ne fasse pas peser aux générations qui nous suivent le poids des régimes de retraite qui seraient insuffisamment capitalisés ou qui seraient non solvables, avec le phénomène que les générations qui suivent auraient à en porter le poids. C'est tout le phénomène des régimes, particulièrement des régimes publics, qui n'ont peut-être pas été capitalisés comme on aurait pu penser qu'ils auraient pu l'être.

Alors, moi, je vous remercie beaucoup de soulever ces questions-là. Vous êtes un organisme qui a lancé le débat, un peu comme le Conseil des aînés, et vous nous rappelez que notre projet de loi, qui est celui pour lequel on fait les auditions, est relativement à portée limitée mais vient quand même corriger une inéquité. Il vient corriger la possibilité, lorsqu'il y avait eu confirmation du droit, de pouvoir recourir aux tribunaux.

Alors, moi, je vous remercie de votre présentation. Je ne vous poserai pas les questions que j'aurais pu poser, qui sont très techniques pour les gens qui sont directement concernés, à savoir, bon: Est-ce que vous pensez qu'il faut que l'arbitrage soit obligatoire ou non? Est-ce qu'on pourrait avoir une clause banquier? Enfin, des éléments comme ça. Je pense qu'au contraire vous venez ici nous signaler à quel point cette question des régimes de retraite est importante, particulièrement... et je vois mon collègue démographe ici, autour de la table, à quel point l'évolution de la démographie va poser aux Québécois et aux Québécoises de demain toute la question des régimes de retraite.

Alors, moi, je vous remercie de votre témoignage. Mes questions ne sont pas... C'est plus vous dire que je comprends, à l'heure actuelle, pleinement le message que vous nous envoyez.

Le Président (M. Paquet): M. Tittley, je pense que vous aviez un commentaire.

M. Tittley (Étienne): Je vais émettre un bref commentaire. Effectivement, c'est un débat qui est important. Par ailleurs, la question des surplus actuariels va prendre de plus en plus d'importance parce que les erreurs dues à une mauvaise utilisation des surplus actuariels vont peser beaucoup plus longtemps dans l'avenir, dans un contexte de décroissance de la population active. Donc, une erreur sur le plan des calculs et un choix de congé de cotisation ou de redistribution des bénéfices, dans l'avenir, au moment où les organisations utilisent de moins en moins de personnel puis au moment où, de toute façon, la population active diminue et va diminuer à partir de 2011, ça va faire porter effectivement ces erreurs-là sur un beaucoup plus petit nombre de travailleurs. Donc, il faut être très vigilants, et c'est pour ça que, moi, j'interpelle tous les membres de l'Assemblée et le gouvernement en particulier à être vigilants sur ce débat national là, sur les règles de définition d'un surplus actuariel.

M. Gautrin: Je partage votre point de vue à cet effet-là. Et remarquez que, ici, le projet de loi, si je reviens maintenant sur le projet de loi n° 195, il rend plus difficile en quelque sorte l'utilisation des surplus actuariels, et dans la mesure où les congés de cotisation ont pour effet de diminuer les surplus actuariels. La question qui est devant nous ? et vous la connaissez aussi bien ? c'est la question de la loi fiscale qui oblige, en cas de surplus excédentaire, à pouvoir réduire le surplus actuariel. Je sais que ce n'est pas le débat de l'heure, mais ça a été le débat dans le passé, et avec l'effet que ça a eu sur les régimes qui aujourd'hui sont en situation de déficit. Donc, il y a une réflexion à poser aussi à cet effet-là.

Le Président (M. Paquet): M. Légaré.

M. Légaré (Jacques): Oui. Bien, en fait, tout au moins pour Le Pont, le message, nous, qu'on aimerait bien que l'Assemblée lance dans la population, c'est que la loi n° 195, qui est purement technique, dans sa présentation tout au moins, ça a des dimensions autres dans son application, mais justement que c'est le début de cette réflexion sur une remise en question non seulement des lois qui dépendent de l'Assemblée nationale, mais aussi de la loi fiscale qui dépend... mais qui touche les Québécois comme les autres. Donc, que ce gouvernement et ce Parlement fassent en sorte qu'on revienne là-dessus, parce que, si on dit: Bien, la loi est là, que voulez-vous, on n'y peut rien, c'est la loi fédérale, etc., on doit vivre avec, eh bien je crois que, là, on a un très gros problème. Et, si on peut être à l'avant-garde là-dedans, bien, moi, je pense que, si on peut pousser sur le train, eh bien je crois que c'est le rôle...

Étant donné que, là, M. Méthot dit: La question que vous soulevez dans la loi n° 195 n'est applicable nulle part ailleurs au Canada, bien c'est peut-être le temps que le reste du Canada s'ouvre à cette dimension-là de la part des retraités dans la gestion des caisses de retraite. Eh bien, ça pourrait être la même chose pour la loi fiscale. Je crois qu'il faut que le gouvernement du Québec ait des initiatives qui mènent vers une réforme dans ces domaines-là, sinon, bien, je pense que vous en... tout le monde en est conscient, qu'on s'en va vers des problèmes qui risquent d'être graves. Et il ne s'agit pas, là, de dire qu'il faut sauver les très vieux ou sauver les très jeunes, il faut justement qu'il y ait tout cet équilibre entre les générations.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. M. Légaré, M. Tittley, merci pour votre participation qui est très, je pourrais dire, primordiale, d'autant plus que nous, de l'opposition officielle, nous trouvons cela très rassurant et même rafraîchissant que Force Jeunesse et Le Pont entre les générations présentent un mémoire commun. Et je vais dans le sens de mon collègue d'en face, on n'ira pas dans des questions techniques, c'est plutôt une réflexion.

J'aimerais quand même vous entendre sur votre concept du test de l'équité. Est-ce que vous pourriez expliciter?

Le Président (M. Paquet): M. Légaré.

n (11 h 30) n

M. Légaré (Jacques): Bien, moi, la façon dont je le vois, c'est que le test de l'équité, c'est de s'assurer que personne n'est perdant, si vous voulez, dans une gestion de surplus ou de caisses en général. Je pense qu'il faut s'assurer que les retraités, lorsqu'ils ne participent pas à la gestion, eh bien, risquent d'être pénalisés, et je crois que ça devient une gestion bipartite qui risque d'être à leur détriment. Donc, c'est ça, le test d'équité, c'est-à-dire qu'à chaque fois qu'on pose un geste, bien c'est de s'assurer qu'il n'y aura pas de problème intergénérationnel dans le système. Si vous voulez, c'est un peu pour éviter les effets pervers, c'est-à-dire que très souvent, malheureusement, le législateur, avec de bonnes intentions, passe une loi qui a un certain nombre d'effets pervers, et qu'on n'a pas évalués, parce que ce n'était pas dans l'esprit, on voulait régler un problème, et la loi, telle que conçue, est en train de régler ce problème-là mais en même temps elle en crée d'autres. Donc, le test d'équité, je crois que c'est ça que ça veut dire, c'est de s'assurer à chaque fois ? nous, on est sur les retraits et les caisses de retraite, mais on pourrait être dans d'autres domaines aussi ? le test d'équité, étant donné la façon dont évolue la démographie, devra s'assurer toujours qu'il n'y aura pas, si vous voulez, de grands perdants. On ne peut pas être parfaits, mais je crois qu'il faut avoir cette préoccupation et, si on n'a pas la préoccupation, je crois qu'on risque de passer complètement à côté des vrais problèmes.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Vous savez que la Régie des rentes amorce une réflexion. Est-ce que vous pensez que nous devons attendre le fruit de ces réflexions?

M. Légaré (Jacques): Bien, moi, je suis très heureux qu'elle ait...

Le Président (M. Paquet): M. Légaré.

M. Légaré (Jacques): ...qu'elle ait commencé cette réflexion-là, et si on peut participer, nous, au Pont entre les générations, à aider à alimenter, si vous voulez, cette réflexion, on va être les premiers contents, parce que c'est vraiment là notre raison d'être, si vous voulez. Donc, maintenant, est-ce qu'il faut attendre les résultats? Moi, je crois que c'est peut-être eux qui sont les mieux placés présentement pour faire une étude de ce niveau-là.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: O.K. Bon, je vais laisser à mon collègue...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Oui. Ma question s'adresse surtout à M. Tittley, parce que c'est vous qui avez soulevé ce problème-là. Vous faisiez la comparaison avec la loi sur les clauses orphelin et vous disiez... vous faisiez une comparaison puis vous disiez que vous craigniez qu'il survienne un peu le même problème, c'est-à-dire que, bien, il y a encore des clauses orphelin, puis vous nous dites que, dans une convention collective sur six, on retrouve encore ce genre de clause là, et vous nous dites, partant de là, qu'il nous faudrait aller plus loin dans notre législation. Est-ce que je dois comprendre que, quand vous nous dites d'aller plus loin, la solution que vous nous proposez, c'est qu'on ait une meilleure définition des surplus? C'est ça que...

M. Tittley (Étienne): Notamment, d'une part...

Le Président (M. Paquet): M. Tittley.

M. Tittley (Étienne): D'autre part, le concept de test de l'équité, pour moi, est à développer, est à opérationaliser. Évidemment, on n'a pas les ressources pour vous proposer une formule magique, là. Donc, pour moi, ça se situe à ces deux niveaux-là. Et aussi peut-être définir un peu plus le processus, parce que là, de ce que je comprends du libellé, on prévoit un processus de consultation pour les bénéficiaires ou les participants non actifs, c'est à peu près tout, là. Donc, on ne sait pas quelle forme de processus, quelle forme de consultation, hein, bon, puis que... donc c'est très sommaire comme rédaction, comme libellé, donc il y aurait peut-être lieu, un, de définir le processus; deux, de définir un petit peu ou d'approfondir la question des surplus, de revoir la définition des surplus; et, troisièmement, d'opérationaliser ou d'aller plus loin dans le test de l'équité, dans la question du test de l'équité.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Et, sur la question des surplus, avez-vous assisté à la présentation du Conseil des aînés?

M. Tittley (Étienne): Non, on est arrivés un peu trop tard pour ça.

M. Jutras: Non. Et puis, après ça, il y a eu la présentation de M. Méthot. Est-ce que, M. Tittley, vous partagez l'inquiétude de M. Méthot sur l'avenir, là, du paiement des retraites, là, parce que lui nous disait que les régimes sont sous-capitalisés, sont sous-provisionnés, et là il dit: Bien, qu'est-ce qu'il va arriver plus tard? Puis par ailleurs on entendait Mme Wavroch, du Conseil des aînés, qui disait, elle: Ça, c'est un mythe, même s'il va y avoir moins de travailleurs pour le nombre de retraités éventuellement, l'argent est là. En fait, on devrait dire: L'argent est supposé être là, hein, je pense que ce serait plus exact. Mais ce qu'elle a dit, c'est que l'argent est là, et donc il n'y a pas d'inquiétude à y avoir pour le futur. Où vous logez, vous, dans cette argumentation-là, là, qui s'est développée devant nous ce matin?

M. Tittley (Étienne): Probablement en plein centre.

Le Président (M. Paquet): M. Tittley.

M. Tittley (Étienne): Oui. Écoutez, la valeur d'un régime de retraite en situation de sous-capitalisation dépend de la solidité de la garantie, donc la solidité de l'entreprise qui ultimement assume ce déficit-là ou remplit les engagements. Donc, les retraités d'Hydro-Québec ne devraient pas être très inquiets.

Les retraités d'une PME qui est dans le domaine manufacturier, qui a la concurrence chinoise à tous les jours dans le dos, devraient peut-être l'être un peu plus. Donc, il n'y a pas... ce n'est ni noir ni blanc, c'est plusieurs cas d'espèce, à mon point de vue.

Donc, pour solutionner le problème, il faut tout simplement prendre les dispositions nécessaires pour ne pas en arriver à faire... à avoir une situation déficitaire ou à avoir un déficit actuariel, ce qui nous ramène aux surplus, à la question de la définition des surplus. Inévitablement.

M. Jutras: Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. M. Tittley, M. Légaré, merci pour, je vais dire, la fraîcheur de vos propos. Parce que, depuis le début de la commission, il y a des gens qui sont pour, il y a des gens qui sont contre. Vous, vous dites: Parlez-vous. Parlez-vous. Puis, qu'est-ce qui se dégage de votre document? Surtout que les personnes sortent gagnantes du discours. Les gens, les retraités, les employés, des employeurs, il faut qu'il se crée une solidarité entre les générations pour que, oui, la personne retraitée, elle va dire: Moi, O.K., j'ai eu les montants que je devais avoir, puis j'ai eu les bonifications que je devais avoir, puis je ne me suis pas fait avoir, tout simplement. Puis les jeunes, eux autres, c'est la même chose.

Parce qu'on vit, dans la société, certains écarts disant... Bien, je vais dire, le pont entre les générations est difficile à faire dans certains domaines. Mais, de voir votre mémoire, c'est rafraîchissant. Quand vous parlez du test d'équité, là ? O.K., vous lancez l'idée, c'est bon, c'est excellent, même ? est-ce qu'il devrait être défini par le législateur ou c'est une philosophie pour entraîner les mouvements, les mouvements de syndicats, les employeurs puis les gestionnaires, dire: Regardez, là, on a un problème de compréhension, d'application pour que les gens... les gens n'ont pas l'impression de toujours en avoir pour leur argent.

Donc, qu'est-ce que je comprends? Vous dites: C'est peut-être une gestion du gros bon sens qu'on devrait véhiculer dans la population, dans tous les dossiers, là, pas seulement ce dossier-là. Tantôt, on parlait des clauses orphelin, c'est le même principe. Donc, j'aimerais vous entendre un peu là-dessus. Merci.

Le Président (M. Paquet): M. Légaré.

M. Légaré (Jacques): Oui. Moi, je pense qu'il faut bien voir que tout le monde ne peut peut-être pas toujours être gagnant à 100 %, si vous voulez, mais je crois que, dans la société ? et, nous, au Pont, on est bien placés pour le savoir ? les jeunes sont prêts à faire certains sacrifices pour les aînés, en disant: Ah! ce n'est pas nécessairement... tout doit venir à nous, etc., on est toujours mal pris, etc. Ils sont prêts à être généreux, si vous voulez, de même que les aînés sont prêts à être très généreux pour les jeunes, donc, en général.

Donc, dans cette histoire-là, c'est qu'il faut faire en sorte qu'on ne se retrouve pas en situation où on a l'impression qu'il y en a qui ont pigé dans la caisse. Moi, je pense que c'est ça qui est l'élément de base. Et je crois qu'il faut que l'on rende les gens qui vont éventuellement redistribuer, parce qu'on va être pris avec la loi, s'il y en a, des surplus, pour les redistribuer... puissent aller sur la place publique vraiment à face découverte et pouvoir dire: On a bien agi.

Or, je ne suis pas sûr, moi, que la façon dont ça s'est passé à la fin du siècle dernier, tant les employeurs que les syndicats pouvaient aller sur la place publique à face découverte puis dire: On a fait ça dans la plus belle équité qu'on pouvait trouver. Moi, je ne crois pas, en tout cas personnellement. Et donc je pense que c'est cet esprit-là qu'il faut changer, et c'est ça qu'on veut faire.

Maintenant, je ne crois pas... est-ce que le législateur peut mettre un test d'équité dans une loi, etc., ça dépasse, là, mes compétences, mais il faut qu'il y ait l'esprit. Et à mon avis l'esprit, c'est qu'il ne faudrait jamais dans le futur que, après une redistribution des surplus, un surplus actuariel, que les gens puissent se présenter sur la place publique et devoir un peu se voiler la face.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. Tittley.

n (11 h 40) n

M. Tittley (Étienne): Oui. Par ailleurs, vous posiez la question: Est-ce que c'est une philosophie à promouvoir ou si le législateur devrait prendre un peu plus de leadership là-dedans? Moi, je vais vous dire, l'inertie, les forces d'inertie nous amènent inévitablement vers une iniquité, d'une certaine façon. Donc, c'est le rôle du législateur de baliser ces relations-là pour faire en sorte que tout le monde y trouve un peu son compte. Et, à mon avis... En fait, j'en veux pour preuve l'équité hommes-femmes en matière de salaires. Pendant 20 ans, on a promu une philosophie, mais il a toujours bien fallu la Loi sur l'équité salariale et l'analyse différenciée selon les sexes pour parvenir à une certaine forme de résultat qui, on me le dira, n'est probablement pas encore atteint à 100 %. Donc, une analyse différenciée selon les sexes, ça a une certaine valeur, c'est reconnu par tous. Une analyse différenciée selon les âges, selon les générations, ça aurait peut-être lieu de faire l'objet d'une législation ou d'un leadership de la part du législateur.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci, M. le Président. M. Légaré, M. Tittley, merci de votre présentation. J'ai deux questions. Tout en reconnaissant que vous nous interpellez, à savoir qu'il faut avoir une réflexion beaucoup plus large, là, sur l'ensemble de ces questions de régimes de retraite, parce que dans le fond ce qu'on discute aujourd'hui avec 195, c'est un peu l'accessoire, hein, c'est un petit peu la queue qui branle le chien. On reconnaît bien ça, et d'ailleurs, comme ma collègue le disait, je pense que la Régie des rentes commence cette réflexion-là. Je pense que la commission devra aussi se pencher.

Maintenant, mes deux questions. Je vais commencer par la première. Concernant votre parallèle que vous avez fait avec les clauses orphelin, ce que j'ai compris de votre propos, c'est que vous craignez que les attentes des retraités ne soient pas comblées et qu'il y ait une différence entre la réalité de la loi telle que modifiée par 195 et ce qu'on souhaite, ce qu'on s'attend sur le terrain, donc un peu de laisser les retraités sur leur appétit en matière, là, justement de participation aux décisions de l'utilisation des surplus. Moi, j'aimerais ça avoir plus de détails sur votre vision à cela, puis surtout quelle est votre solution? Ça, c'est ma première question.

Le Président (M. Paquet): M. Tittley.

M. Tittley (Étienne): Bien, en fait, ma vision des choses est largement basée sur mon expérience avec la loi sur les clauses orphelin, comme j'en faisais mention tantôt. Tout le monde a eu l'impression, en 1998, parce qu'on adoptait une loi, qu'on venait de régler le problème, que l'équité venait d'être rétablie et que tout le monde retrouverait un milieu de travail exempt d'iniquité intergénérationnelle entre travailleurs. Je dois vous dire que, dans le concret, le libellé étant tellement explicite et tellement restrictif, l'effet net était que... Bon, il y avait une ligne à ne pas suivre et toutes les autres lignes qui menaient au même effet n'étaient pas proscrites, étaient même, jusqu'à un certain point, encouragées, du moins les juristes ont su trouver les failles dans cette loi-là, ce qui fait en sorte que, bien qu'aujourd'hui on ait une loi qui en principe donne un message clair sur... est supposée donner un message clair, plutôt, sur le fait qu'une convention collective ne doit pas se... ou la signature d'une convention collective ne doit pas se faire au détriment d'une génération par rapport à une autre, quelle que soit la génération en cause, là, dans les faits, on a des... le monde du travail est parsemé de gens qui sont créatifs et imaginatifs pour parvenir à leurs fins. Et je ne lance pas la pierre à qui que ce soit là-dessus.

Donc, en fait, le problème par rapport à l'article qui nous concerne aujourd'hui est probablement l'opposé. C'est-à-dire qu'on a un beau principe, on n'a pas de processus de prévu, on n'a pas de conséquences, on a juste un article de principe sur le fait qu'il faut consulter les participants non actifs. Du moins, c'est la compréhension que j'en ai, je peux me tromper, là. Donc, on aurait avantage à être plus explicite sur le processus, d'une part, à être plus explicite sur les conséquences de ne pas suivre cet article de la loi là, sans nécessairement être coercitif à outrance, là, et il y a tous les débats corollaires aussi, là, la définition des surplus et le test de l'équité, là, à mettre en place, à opérationnaliser. Voilà.

Le Président (M. Paquet): M. Légaré.

M. Légaré (Jacques): Oui, je crois que, comme il a été bien dit par mon collègue ? on en est, dans la loi, sur les principes ? je pense que la procédure ici, c'est qu'il y ait des règlements après, éventuellement. Bon, à mon avis, c'est là qu'il faudra s'assurer que l'équité va être conservée. Je crois que, dans le mémoire de l'Hydro-Québec, on a bien montré que les retraités en général sont souvent parfois très vieux, etc., qu'ils sont peut-être plus difficiles à mobiliser, que l'association qui va les représenter, il va falloir qu'elle soit représentative, mais comment on va le juger, etc. Donc, c'est sûr que c'est plus complexe de faire affaire avec un groupe de retraités qu'avec un groupe, comme le dit le mémoire d'Hydro-Québec, qui sont partout, plutôt que de faire affaire avec les gens qui sont dans une entreprise bien localisée. Mais ce n'est pas tout de l'Hydro-Québec non plus, c'est-à-dire qu'il y a d'autres entreprises où les associations de retraités ne sont pas structurées comme celle de l'Hydro-Québec, même, elles n'existent pas, très souvent. Donc, il va falloir prévoir comment on va tout mettre ça, là, en branle pour s'assurer que ça ne sera pas une coquille vide, tout simplement qu'il y a des beaux principes, etc., mais qu'il n'y a pas de processus là. Et la question des conséquences, bien, moi, je crois que, au-delà des conséquences d'être honni sur la place publique ? parce qu'à mon avis c'est ce genre de mouvement qu'il faudrait éventuellement développer si jamais on n'appliquait pas bien la loi ? eh bien, il faudrait qu'il y ait peut-être d'autres conséquences. Mais ça, je laisse ça au législateur, je pense, de prévoir ce genre de chose là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci. Pour reprendre l'expression que vous venez d'utiliser, «équité», sur l'autel de l'équité, est-ce que vous croyez que, puisque vous êtes assez... vous êtes d'accord avec le projet de loi... concernant le congé de cotisation eu égard aux surplus actuariels, surplus excédentaires actuariels, donc, sur l'autel de l'équité, que pensez-vous de la participation des retraités au déficit actuariel des différentes caisses de retraite?

Le Président (M. Paquet): M. Légaré, en une minute environ.

M. Légaré (Jacques): Bon, d'abord, moi, je pense qu'il faut être clair là-dessus, l'équité demande que l'on fasse... que chacun ait un peu sa quote-part. Le déficit, c'est évident qu'il peut arriver, mais je pense que ce n'est pas sûr que c'est uniquement l'employeur qui va le partager, entre guillemets, avec lui-même, c'est-à-dire que ça va avoir des répercussions automatiquement sur une remise en question de la gestion de la caisse de retraite, tant sur les cotisations des participants actifs qu'éventuellement sur ce que vont recevoir les retraités. Donc, moi, je pense que, là, gérer le déficit est sûrement plus difficile que gérer des surplus. Moi, je crois que ce qu'il faut, c'est... Le malheur de cette loi-là, c'est d'être uniquement sur les absences de cotisation, ce n'est pas sur ? si je l'ai bien compris en tout cas ? ce n'est pas sur la gérance des surplus, c'est sur le droit de l'employeur d'arriver à une absence de cotisation. Et là c'est encore plus focussé, si vous voulez.

Moi, je crois que ? bon, on ne va pas refaire le projet de loi peut-être aujourd'hui, mais... ? l'élément de base, c'est qu'il faudrait s'entendre tout au moins, là, au niveau des principes. C'est peut-être ça qu'on devrait vendre, c'est comment on va gérer les surplus éventuellement, s'il y en a, et les déficits aussi, mais pas uniquement de tout focusser sur l'absence de cotisation, parce que c'est évident qu'à ce moment là les retraités risquent de s'y opposer dans... lorsqu'ils travailleront en comité à trois. Ça, je pense que c'est évident.

Le Président (M. Paquet): Le temps est écoulé pour ce bloc. M. Tittley m'avait demandé la parole. En 30 secondes peut-être, brièvement.

M. Tittley (Étienne): Ça va être très bref. C'est une question importante puis c'est une autre forme de débat. Néanmoins, moi, j'avancerais juste une piste... Demander aux retraités de participer aux déficits sans leur permettre de participer à la gestion quotidienne, à la gestion des politiques de placement, au comité de retraite, ça m'apparaît un peu inconséquent. Donc, si on participe à la gestion, là on a un vrai beau débat. Si on fait juste parler des déficits puis qu'ils n'ont pas eu leur voix au chapitre dans les politiques de placement, pour moi, ça soulève un problème, personnellement. Merci.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel. En une minute, question-réponse.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Doit-on comprendre de votre position qu'il faudrait prévoir dans la loi, pour accorder un droit de regard aux retraités, la constitution d'associations de retraités formelles?

Le Président (M. Paquet): M. Tittley.

M. Tittley (Étienne): Oui. Le défi qu'on a dans beaucoup d'organisations, ça va être de faire vivre concrètement ces organisations-là. C'est souhaitable, c'est très clair, je veux dire, quand on ne s'occupe pas de ses affaires, il y a des gens qui s'en occupent pour nous, pas nécessairement à notre avantage ou à notre bénéfice. Néanmoins, dans certaines organisations, ça risque d'être difficile de concrètement faire vivre une association de retraités. Je ne veux pas parler pour les retraités, là, mais, à brûle-pourpoint, c'est ma réaction, là.

Mme Beaudoin: Merci.

Le Président (M. Paquet): Alors, je vous remercie beaucoup. Au nom de la Commission des finances publiques, je remercie M. Légaré et M. Tittley, de Force Jeunesse et Le Pont entre les générations, pour leur participation à nos travaux. Je suspends très brièvement pour permettre au prochain intervenant de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 11 h 50)

 

(Reprise à 11 h 52)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des finances publiques reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant des représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Personnellement, je me permets de saluer... c'est un ancien étudiant que je vois qui poursuit une belle carrière comme économiste. Alors, bienvenue à nos travaux, M. Demers. Si vous voulez présenter M. Paradis, je crois, qui vous accompagne, et vous pourrez commencer la présentation de vos travaux, de votre participation.

Fédération des chambres de commerce
du Québec (FCCQ)

M. Demers (Steeve): D'accord. Donc, Steeve Demers, économiste à la Fédération des chambres de commerce. Je suis accompagné de M. Claude Paradis, de Mercer Ressources... Mon Dieu! Consultation en ressources humaines, pardonnez, qui m'accompagne aujourd'hui.

Tout d'abord, en mon nom et au nom de la présidente qui ne peut malheureusement pas se joindre à nous en raison de préparation de congrès ? beaucoup d'activités cet automne ? donc en son nom, en mon nom, au nom de la Fédération des chambres de commerce du Québec, j'aimerais remercier le président, les membres de la commission, le gouvernement de nous permettre de réagir vis-à-vis du projet de loi et de faire état de nos préoccupations et de notre opposition, disons, à ce projet de loi là.

Nous croyons en effet que le projet de loi, plutôt que d'améliorer l'environnement propice au développement des régimes de retraite complémentaires, vient augmenter les contraintes et accroître l'incertitude pour l'employeur vis-à-vis de ces régimes. Pour ces raisons, la Fédération des chambres de commerce du Québec ne peut que s'opposer vigoureusement à l'adoption du projet de loi n° 195.

Rappelons que la Fédération des chambres de commerce avait appuyé les modifications apportées à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite en 2000, projet de loi n° 102, notamment les changements touchant les congés de cotisation, parce que ces changements constituaient une solution équilibrée et concertée à plusieurs problèmes. En 2000, la fédération était d'opinion que le projet de loi n° 102 établissait un cadre équitable et préservait un équilibre délicat entre les intérêts divergents des employeurs et des employés, rendant ainsi les régimes de retraite plus attrayants à la fois pour les participants et pour les entreprises.

Sans l'ombre d'un doute, l'adoption du projet de loi n° 195, à notre avis, romprait cet équilibre et cette équité et nuirait à la mise en place de régimes de retraite sur lesquels plusieurs citoyens comptent pour assurer financièrement une retraite bien méritée.

La fédération est un organisme fondé déjà depuis 1909. Un important réseau de gens d'affaires, puisque nous regroupons environ 2 000 entreprises qui emploient plus de 700 000 personnes et nous représentons également 170 chambres de commerce, et ce, réparties à travers chacune des régions du Québec.

Fort de cet important réseau d'hommes et de femmes d'affaires, la Fédération des chambres de commerce consacre toute son énergie à sa mission première qui est de contribuer au développement économique du Québec et de ses régions, en se portant notamment à la défense de la liberté d'entreprendre. Pour ce faire, la Fédération des chambres de commerce du Québec exerce son leadership auprès de chacune des collectivités et de ses représentants afin d'améliorer le climat d'affaires et de favoriser la création d'emplois et la création d'entreprises.

Notre rôle d'intermédiaire entre les besoins des entreprises et la volonté du gouvernement de les satisfaire tire son origine d'une vision économique du développement québécois qui s'articule autour de quatre thèmes: l'entrepreneurship, la liberté d'entreprendre, la relève et la pérennité des entreprises.

Bon. Le projet de loi n° 195. Le projet de loi n° 195 propose essentiellement de modifier, bon, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite de manière à obliger l'employeur à obtenir le consentement de la majorité des retraités réunis en assemblée ainsi que le consentement de la majorité des participants actifs non syndiqués réunis en assemblée pour confirmer son droit d'affecter l'excédent d'actif à l'acquittement de la cotisation patronale.

Ces mesures seraient obligatoires dans le cas d'une modification apportée à un régime de retraite mis en place depuis le 1er janvier 2001 et à un régime dont le droit au congé de cotisation a été confirmé entre le 1er janvier 2001 et la date de la sanction du projet de loi. Elles seront toutefois facultatives à l'égard d'un régime de retraite dont le promoteur veut préciser, après la date de sanction du projet de loi, le droit au congé de cotisation.

Un régime de retraite à prestations déterminées est un régime qui, comme son nom l'indique, procure un niveau déterminé de prestations de retraite. Dans ce cadre, le congé de cotisation correspond pour l'employeur à l'action de suspendre le versement de sa cotisation lorsque le régime de retraite à prestations déterminées enregistre un excédent d'actif plus que suffisant, selon l'analyse actuarielle, pour assurer le versement des prestations du régime.

La situation financière d'un régime de retraite à prestations déterminées subit des hauts et des bas durant son existence notamment parce que son provisionnement est établi en fonction d'estimations retenues par l'actuaire quant à des événements futurs et incertains.

Selon la loi, en cas de détérioration, soit un déficit, l'employeur doit hausser le niveau de ses cotisations afin de combler le déficit. Ce sont donc les entreprises qui assument en quelque sorte les risques financiers des engagements liés au versement des prestations. Dans ce contexte et en cas d'une situation favorable, soit d'un surplus, il est normal de permettre la baisse du niveau des cotisations de celui qui assume les risques, soit l'employeur.

Nos préoccupations, c'est-à-dire qu'en raison du vieillissement de la population et de la difficulté qu'auront les gouvernements probablement à maintenir les régimes d'État à leur niveau actuel, il ne fait aucun doute que les régimes de retraite privés auront et ont déjà une importance croissante sur les conditions de vie des personnes et des retraités. Pour ces raisons, nous sommes d'avis que le gouvernement a la responsabilité de promouvoir la mise en place et le maintien de régimes de retraite complémentaires au régime public.

Or, le consentement des retraités exigé par le projet de loi n° 195 ferait en sorte d'augmenter l'incertitude et constitue une contrainte additionnelle qui selon nous restreint l'exercice du droit de l'employeur à des congés de cotisation. À notre avis, ceci pourrait décourager la création de ce type de régime, ce qui d'une certaine manière affaiblirait la sécurité financière des futurs retraités. Nous ne croyons pas que ce soit l'un des objectifs visés par le projet de loi.

Les modifications proposées par le projet de loi n° 195 ne font en effet qu'augmenter l'incertitude juridique entourant les congés de cotisation, entraînant donc une remise en question accrue de la part des employeurs, pouvant même les inciter à mettre fin aux régimes de retraite qui servent à assurer la sécurité financière de leurs employés. Cette remise en question se produit à un moment où la plupart de ces employeurs versent des cotisations importantes afin de renflouer les déficits de leurs régimes que nous connaissons ces dernières années.

Un cadre législatif plus simple et plus clair, et comportant des normes raisonnables, contribuerait énormément à créer un environnement favorable à la mise en place de régimes de retraite. En ce sens, des changements à la loi qui accorderaient davantage de certitude quant au droit de l'employeur de prendre des congés de cotisation seraient à notre avis plus souhaitables que des changements qui ajoutent des obstacles.

Le projet de loi ajoute un certain nombre de contraintes au droit des employeurs de prendre des congés de cotisation et favorise le maintien de l'incertitude. Ces contraintes et incertitude auront des répercussions négatives en ce qu'elles amèneront les employeurs à être moins conservateurs dans leur politique de provisionnement, ce qui augmentera la probabilité de déficits futurs et entraînera ainsi une sécurité moindre des rentes promises. Par ailleurs, on peut penser que les employeurs seront moins enclins à mettre sur pied ou à maintenir des régimes à prestations déterminées, qui, devons-nous le rappeler, sont des régimes dont la mise en place est facultative.

n (12 heures) n

L'abandon des régimes à prestations déterminées au profit des instruments à cotisation déterminée ne serait pas nécessairement dans l'intérêt de la société québécoise. Non pas qu'un régime est mauvais et l'autre est parfaitement bon. Certes, un instrument à cotisation déterminée est plus simple à comprendre et à gérer, mais les risques sont assumés par les participants. Et ces instruments ne garantissent pas le niveau de revenu à la retraite.

Par conséquent, il est d'intérêt public de mettre en place un contexte propice au maintien des régimes à prestations déterminées, car ces derniers sont vus par plusieurs employeurs et leurs salariés comme le moyen le plus adéquat pour procurer des prestations de retraite. Ils comportent l'avantage de fournir un revenu sûr à la retraite, diminuant ainsi les pressions sur notre système de sécurité sociale qui risque d'être mis rudement à l'épreuve en raison de perspectives démographiques défavorables.

Pour ces raisons, il nous apparaît nécessaire de chercher à accroître la santé de ces régimes de retraite par de meilleures règles de capitalisation notamment plutôt que d'en alourdir les modalités et de les rendre plus risqués pour les entreprises.

Conclusion. Le vieillissement de la population québécoise se traduira par un nombre important de travailleurs à la retraite, et, pour une majorité d'entre eux, les régimes complémentaires de retraite constitueront l'essentiel des sources de revenus. Dans ce contexte et compte tenu que le projet de loi ne concerne que le régime à prestations déterminées, la Fédération des chambres de commerce du Québec croit qu'il serait mal avisé d'adopter le projet de loi n° 195 et de procéder ainsi à des changements qui auraient pour effets d'accroître les contraintes et de décourager la création des régimes complémentaires de retraite de ce type.

Puisque la Régie des rentes du Québec a annoncé qu'elle entreprendra vers la fin de 2004 une consultation sur les règles de provisionnement applicables aux régimes de retraite, dont font partie les dispositions régissant les congés de cotisation, nous croyons qu'il serait davantage approprié d'analyser le bien-fondé de changements à ces dispositions après que la consultation entreprise par la régie soit achevée. Nous enjoignons par conséquent le gouvernement à ne pas adopter le projet de loi n° 195. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Demers. Alors, je vais, après discussion avec mes collègues, je vais commencer, débuter tout de suite la période d'échange avec vous, puis ensuite je céderai la parole à mon collègue député de Verdun.

Il me semble qu'il y a deux enjeux qui apparaissent un peu. Il y a plusieurs enjeux, mais il y a deux enjeux, entre autres, qui reviennent dans la discussion. On a eu les représentants du groupe Mercer, d'ailleurs qui ont témoigné eux-mêmes, là, la semaine dernière, puis il y a des complémentarités dans vos présentations, là, il y a la même ligne de pensée, je crois. Mais un des éléments qu'on entend, on dit: Écoutez, il y a l'aspect d'équité, d'une part, par rapport à la participation, dans le cas d'un contexte où il y a un surplus excédentaire, et là que l'employeur, et parfois avec les participants actifs, décide de partager un congé de cotisation, et à la question des régimes de retraite et le type de régime de retraite existant. Et une des lignes qui a été avancée dans votre mémoire ainsi que par d'autre groupes qui s'opposent au projet de loi, c'est de dire: Attention! vous êtes en train peut-être de menacer les régimes à prestations déterminées.

Or, quand on regarde l'évidence ? je n'ai pas les chiffres exacts, là, mais la perception que j'ai de l'évidence, et vous pouvez me corriger si vous avez des chiffres contraires à cet effet ? c'est que ce type de régime là était très populaire, qui ont certains avantages effectivement parce qu'on sait quelle est la prestation qu'on va recevoir à la retraite une fois que c'est le régime qui est désigné, qui a été choisi par convention collective ou autrement. Ces régimes-là ont été souvent en baisse, pas seulement ici, au Québec, ailleurs aussi dans le monde, et ça, avant même la loi n° 195.

Et un des éléments quand on parle de régimes à prestations déterminées, on s'entend bien que ce sont des régimes à prestations déterminées qui sont non indexés, la plupart du temps, en tout cas sauf exception, s'il y a lieu. Donc, une des choses qu'on constate et que l'ensemble des retraités constatent aujourd'hui, qui étaient sous ce régime-là, c'est qu'à l'époque ? et je ne blâme pas personne, c'est la réalité ? on n'a pas prévu, ni du côté patronal, ni du côté syndical, ni du côté des non-syndiqués, des travailleurs, que l'inflation ? même, Dieu merci! si l'inflation est sous contrôle maintenant, autour de 2 % par année, c'est la cible en tout cas officielle de la Banque du Canada, qui le maintient relativement bien ? que 2 % par année, bien ça se cumule. Et si on parle, dans certains cas, qu'il y a eu des décrets au niveau du secteur public par les gouvernements... au milieu des années quatre-vingt, au début des années quatre-vingt, en 1982, que là on a dit, on décrète qu'il n'y a plus d'indexation, bien tout ça a fini par gruger de façon importante effectivement le pouvoir d'achat, en termes réels, des retraités.

Et donc, dans ce contexte-là, comment voyez-vous... Parce que, là, on dit: 195, attention! vous risquez de menacer la création de régimes qui de toute façon sont en train de changer. D'une part, il y en a de moins en moins. Ça ne veut pas dire, cela dit, que les objectifs d'avoir des régimes qui protègent les retraités, qu'il soit clair qu'ils ne sont pas importants. Et on peut imaginer qu'il va y avoir de nouveaux types de formules de régime de retraite, qui sont en train de se développer, qui devront se développer davantage, d'autant plus dans un contexte de vieillissement de la population où il y aura de moins en moins de personnes en population active ? je veux dire, au travail, pardon ? officiellement par rapport au nombre de retraités, qui vont être actifs mais autrement.

Alors, dans un contexte comme celui-là, il me semble que les conclusions sont un peu rapides, du point de vue scientifique, là. Et vous n'êtes pas le premier groupe qui me faites ces conclusions-là. J'aimerais que vous élaboriez, que vous adressiez cette question-là.

M. Demers (Steeve): Bien, tout d'abord, la notion d'équité, pour nous, est très importante. L'équité se manifeste de différentes manières. J'entendais, tout à l'heure, l'équité en termes de qui va, mon Dieu, combler les déficits et à qui va l'utilisation des surplus. Donc, il y a une forme d'équité, en tout cas, du moins il y a une réflexion sur l'équité à faire de ce côté-là. L'équité, bon, donc on peut l'exposer de différentes manières.

Nous, ce qu'on dit, c'est que de rendre... d'ajouter des contraintes et d'augmenter l'incertitude pour l'employeur, ce n'est pas quelque chose qui va favoriser le développement et le maintien des régimes de retraite. Ils vont évoluer certainement, mais, à chaque fois qu'on va revenir avec des contraintes et qu'on va créer de l'incertitude, ça va à l'encontre de l'objectif qui, pour nous... on pense que l'objectif devrait être de solidifier les régimes de retraite, d'en créer davantage, les solidifier et de faire en sorte que tout le monde s'y retrouve: l'employeur, les participants, et que ce soit bien de s'y retrouver. Et, dans ce sens-là, nous, l'idée d'avoir des règles claires, faciles à comprendre et avec le moins d'incertitude possible... Pour l'entreprise, l'incertitude, c'est de dire: Il y a des déficits, je dois les combler, c'est parfait; il y a des surplus, je peux cesser de cotiser dans la mesure où il y a un surplus actuariel, dans la mesure où les régimes sont viables, et tout ça. Donc, il y a un certain nombre d'hypothèses.

Mais nous, ce que nous disons, c'est que, de façon à atteindre les différents objectifs que l'État peut avoir, c'est-à-dire les objectifs de satisfaire les retraités, de satisfaire les participants, satisfaire les entreprises, la meilleure manière de le faire, c'est d'avoir des règles claires, précises et avec le moins d'incertitudes possible, de façon à avoir des régimes qui soient bien approvisionnés, qui soient performants, et qu'il y en ait un certain nombre aussi, un plus grand nombre.

Le Président (M. Paquet): Vous permettrez en terminant effectivement, mais, ces incertitudes et risques, on ne fera pas le débat entre économistes là-dessus. Mais on parle de partage de risques et partage d'incertitudes aussi. Présentement, l'incertitude, c'est que, lorsqu'il y a eu des surplus, l'incertitude est tombée finalement sur les retraités qui ont vu, woups!... On change... en tout cas, il y a une iniquité certainement relative, là, qui existe à cet égard-là. Cette... du projet de loi n° 195 nous semble aller dans un cas où on n'augmente pas de façon significative l'incertitude, il me semble, pour les employeurs et les travailleurs, en quelque sorte, c'est une question d'équité. C'est là-dessus qu'il y a peut-être une différence d'appréciation. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. J'ai aussi, moi, un peu de difficulté à vous suivre. Je vous explique pourquoi. Dans la création de nouveaux régimes, l'employeur ou les personne qui... et souvent c'est l'employeur qui constitue un nouveau régime, il est parfaitement libre d'avoir un régime où il n'y a pas d'incertitude quant à l'utilisation des surplus, puisque dans le fond il crée un nouveau régime.

Tout ce que la loi vient faire, c'est dans un régime où le congé de cotisation n'est pas clairement défini, elle vient préciser comment on peut clarifier ce congé de cotisation. Mais j'imagine que dans les nouveaux régimes que vous avez constitués et que, vos membres, vous constituez ? et si j'avais un conseil à leur donner, c'est de le faire ? c'est réellement de clarifier clairement dans le contrat comment on prend des congés de cotisation, donc de manière qu'on n'ait pas besoin d'utiliser les clauses 145, 146.5 et 146.7 qui viennent confirmer ou pas. Si le contrat au départ est très clair, on n'en aurait pas besoin.

D'ailleurs, c'est pour ça que j'ai de la difficulté à vous suivre, en disant: cette cour-là va venir créer de l'incertitude pour la création de nouveaux régimes. Je ne sais pas si vous pouvez m'expliquer ou...

Le Président (M. Paquet): M. Demers.

M. Demers (Steeve): Bien, je vais peut-être passer la parole à mon voisin qui...

Le Président (M. Paquet): M. Paradis.

M. Paradis (Claude): Juste pour bien, bien comprendre, je vais vous expliquer. Si je n'ai pas répondu à la question, vous m'interromprez. Le fait de l'incertitude qui est ajoutée est du fait qu'on a créé un cadre législatif avec la loi n° 102 qui nous a permis de pouvoir dire: bien, écoute, comme ce n'est pas clair qui a droit au congé de cotisation quand c'est écrit, bien on va demander... on écrit un processus. Et ça a créé... et ce qui a fait que, après analyse de la loi n° 102, on s'est aperçu, il y a eu un constat qui a été fait que c'était préférable de ne pas comme demander une confirmation, parce qu'on ouvrait, comme on dit, une canne de vers. En ajoutant au processus l'assentiment des retraités, c'est qu'on ajoute encore plus cette incertitude-là de personnes qui vont pouvoir le faire.

n (12 h 10) n

M. Gautrin: Monsieur, je comprends, mais ça n'a aucun effet pour la constitution d'un nouveau régime. Parce que, dans un nouveau régime que vous allez constituer, et j'imagine que si vous êtes conseil ou si j'étais conseil à la création d'un nouveau régime, je dirais: Bon Dieu! précisez clairement et dans les articles les termes de la possibilité de prendre un congé de cotisation. Donc, je n'aurais pas besoin de venir utiliser l'article 146.5 qui vient modifier le régime pour confirmer le droit à un congé de cotisation, ça aurait été clair dès le départ, et je crois que c'est la voie donc que vous allez prendre à l'heure actuelle.

J'ai une deuxième question, si vous me permettez. Enfin, vous pourrez répondre là-dessus, mais ça, je peux...

M. Paradis (Claude): ...vous laisser poser la deuxième.

M. Gautrin: La deuxième question. J'ai une interprétation différente de vous des articles de la loi n° 195. Vous pensez que les articles de la loi n° 195 ont un effet rétroactif. Je regarde à la page 3, deuxième paragraphe: «Ces mesures seraient obligatoires dans le cas d'une modification apportée à un régime de retraite mis en place depuis le 1er janvier 2001 et à un régime dont le droit au congé de cotisation a été confirmé entre le 1er janvier 2001 et la date de la sanction du projet de loi.» J'ai la... je me pose la question, puisque tout ce que l'on vient faire, c'est donner de nouveaux éléments pour confirmer un droit. Si le droit... si le contrat du régime de rentes a dans le passé déjà été modifié, il n'a pas besoin d'être modifié à nouveau, et je ne comprends pas comment vous avez cette... à la lecture du projet de loi, vous arrivez à cette conclusion.

Le Président (M. Paquet): Allez-y.

M. Paradis (Claude): À la lumière de... ce qu'on comprend de la loi, c'est que, indépendamment de qu'est-ce qui est écrit dans le texte du régime ? c'est qu'est-ce qui est arrivé avec la loi n° 102 ? on devait quand même, pour s'assurer qu'il n'y ait aucune incertitude, confirmer notre droit à un congé de cotisation, malgré le fait que le texte veut être clair, et il y a une procédure qui a été mise en place à ce sujet-là, et c'est la raison pour laquelle il y a très peu de régimes de retraite qui ont décidé de confirmer leur droit, étant donné le flou que ça créait, cette incertitude que ça créait. En ajoutant un droit aux retraités, à ce moment-là, c'est qu'on ajoute encore là à cette incertitude, on rajoute un élément: davantage de personnes pour pouvoir dire: mais, écoute, vous allez avoir donné le consentement.

Sur la question de l'effet rétroactif, notre compréhension, c'est que ce sont des régimes qui sont actuellement en vigueur et dans lesquels souvent les textes de régimes ont déjà été écrits clairement, mais, à cause du processus, on doit quand même... une confirmation du droit au congé.

M. Gautrin: Bien, je m'excuse...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun, en moins d'une minute.

M. Gautrin: J'ai de la difficulté à comprendre. Vous dites: Si le droit au congé a été confirmé, donc si vous avez déjà confirmé le droit au congé entre le 1er juin 2001 et la date de sanction du projet de loi. Donc, on a un régime de retraite dont le droit au congé a été confirmé. Si le droit au congé a été confirmé, suivant les modalités actuelles du projet de loi... de la Loi sur les RCR, c'est-à-dire en fonction du projet de loi n° 102, le droit au congé a été confirmé, il n'a pas besoin, d'après moi, à être reconfirmé, puisque vous avez donc fait la modification au régime en confirmant ce droit. Et je ne comprends pas pourquoi vous dites que... bien sûr, la loi n° 195 va changer les modalités de confirmation, mais tout régime qui a choisi déjà la possibilité de confirmer son droit, où l'employeur a choisi de confirmer son droit, d'après moi, n'a pas à reconfirmer un droit qui a déjà été confirmé. Donc, à mon sens, la loi n° 195 n'a pas l'effet rétroactif que vous semblez lui donner actuellement, à moins que vous puissiez m'expliquer pourquoi, parce que je ne le comprends pas.

Le Président (M. Paquet): M. Demers, brièvement.

M. Demers (Steeve): Pardon. Bien, c'est peut-être un des éléments de clarté et d'incertitude dont on parlait. Nous, ce n'était pas notre compréhension de la loi... du projet de loi et de ses effets sur la loi. On avait l'impression, nous, qu'il y avait un élément rétroactif; si ce n'est pas le cas, on s'en réjouit.

M. Gautrin: Je vous dis très franchement: ce n'est ni l'intention du législateur d'avoir un élément rétroactif... L'intention était de dire: Bien sûr, mais acceptons. Parce que, vous comprenez bien, le libellé de 146.5 ? je m'excuse de devenir très technique, mais on a à échanger aussi sur des questions de fond ? le libellé de 146.5 dit: Pour confirmer un droit, c'est-à-dire une modification au régime de rentes qui a pour effet de confirmer un droit. Donc, si vous avez déjà, vous, employeur ou ces gens que vous représentez, utilisé 146 ? il y en a une vingtaine qui l'ont fait ? utilisé 146.5 pour modifier votre régime et avoir conclusion de confirmer le droit de l'employeur à la prise de cotisation, à mon sens, le régime a donc été modifié. Donc, le droit à la prise de cotisation a été confirmé et n'a pas à être reconfirmé.

Par contre, il est bien clair qu'une fois que, si le législateur accepte la loi n° 195, dans le futur il y aura un processus pour les autres, différent quant à la confirmation du droit. Mais un droit qui a été confirmé n'a pas besoin d'être reconfirmé, d'après moi, et la loi n° 195 n'a pas... et je crois, et je pourrais le faire vérifier par les légistes, mais je crois que ceux qui ont confirmé, dans le travail, disons, d'écriture des lois, n'avaient pas comme objectif un effet rétroactif. Et ça, je pourrais vous le confirmer, en termes de l'objectif du législateur au moment où la loi a été créée.

Si vous voyez ? mais c'est important, ce que vous nous dites ? si vos services juridiques voient une imprécision ou un élément qui fait en sorte que l'utilisation de certains mots... puissent penser qu'il y ait un effet rétroactif, je vous demanderais de nous le signaler assez rapidement, parce que, moi, je ne le vois pas. Et si jamais c'est le cas, ce n'est pas notre intention et ce n'est pas l'intention d'arriver, d'avoir une loi qui a un effet rétroactif. Vous savez à quel point c'est pernicieux, les lois à effets rétroactifs, etc. Ce n'était pas notre intention d'aller dans cette direction-là, et je ne penserais pas que ça l'est. Mais, si votre contentieux ou le contentieux de la chambre y voit un, je vous demanderais de prendre contact avec nous, et soyez sûrs qu'on tâchera, au minimum sur cette base-là ? je comprends qu'on a d'autres points de divergence ? mais, sur cette base-là, d'éviter qu'il y ait un effet rétroactif.

Le Président (M. Paquet): Il reste une minute sur le bloc de 15, environ. M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Oui. Donc, ça va être une courte question. Merci de votre présence. Moi, il me semble que vous avez une prémisse qui semble confirmer que les surplus lors de congés appartiennent à l'employeur. Et si on va dans un jugement, Singer, qui, lui, confirme que lors de cessation finalement de la caisse de retraite les surplus sont attribués finalement aux bénéficiaires, je me demande pourquoi vous avez une autre hypothèse quand il s'agit de congés, finalement, de cotisation. Parce que l'employeur finalement se trouve à être le fiduciaire, celui finalement qui gère les sommes; et ce qu'on a entendu ici beaucoup, c'est que finalement ces sommes d'argent là, c'est de la rémunération que les employés, au lieu de la prendre en salaire, ont assuré leur fonds. Donc, si effectivement c'est le cas, pourquoi lors de congés les bénéficiaires non actifs n'auraient pas leur mot à dire, parce qu'il y a quand même eu des rendements qui devraient normalement leur être retournés?

Le Président (M. Paquet): Alors, la minute étant écoulée, je vous demanderais, peut-être très, très, très brièvement, avec un peu de clémence de la présidence, pour en 20 secondes, s'il vous plaît. M. Demers.

M. Demers (Steeve): D'accord. Bien, en fait, très rapidement, on ne présume pas de la propriété des surplus; je veux faire attention. Par contre, on fait des relations, par exemple. Nous, on souhaite une asymétrie, par exemple, au niveau de qui va combler les déficits et qui va jouer dans les surplus, disons, là. On souhaite qu'il y ait une asymétrie, d'une chose. Et puis, bon, on est conscients que ça va être le fruit aussi d'une collaboration, d'une concertation de tous les partenaires dans ce régime-là. Bon, ça, on est conscients de ça.

Il y a aussi le fait que, outre cette asymétrie-là, il faut que les règles soient claires. Un des éléments qui blessent dans ce projet de loi, c'est l'incertitude. C'est-à-dire que, si l'employeur déjà avait la certitude qu'il n'y aurait aucun congé de cotisation, ce serait déjà un pas de plus, il y aurait une certitude. Il y aurait d'autres effets négatifs, on le comprend très bien. Mais il y a une incertitude, c'est que non seulement il y a une asymétrie, mais en plus il y a une incertitude quant à savoir: Est-ce qu'il va être en mesure d'avoir une cessation de cotisation dans un contexte particulier?

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. M. Demers, M. Paradis, merci pour votre participation, d'autant plus que votre fédération a été fondée en 1909, alors c'est assez rare au Québec, et vous regroupez quand même 2 000 entreprises, qui emploient près de 720 000 personnes. Alors, c'est très important de savoir votre point de vue.

Vous êtes quand même un organisme qui travaille à favoriser le climat d'affaires, la création d'entreprises et la création d'emplois. Alors, vos positions évidemment doivent trouver écho auprès du gouvernement. Je sais que le ministre du Développement économique partage aussi les mêmes objectifs, du moins je l'espère.

n (12 h 20) n

Ma question est simple: Est-ce que vous avez eu des échanges avec lui? Parce que ? bien, toujours au sujet de la loi n° 195 ? parce que, dans une autre vie, et je cite, il disait que l'appui de votre fédération au projet de loi n° 102 était «conditionnel à ce que le gouvernement précédent ne cède pas à l'argument du Parti libéral». J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet-là.

Le Président (M. Paquet): M. Demers.

M. Demers (Steeve): Oui. Mon Dieu! vous me placez dans une... Écoutez, le projet de loi n° 102, pour y revenir, nous, on a trouvé que c'était un bel équilibre. Il y a eu des concessions. Je ne dis pas qu'on était en harmonie et qu'on était sur les nuages, là, avec ce projet de loi là, mais je pense que ce projet de loi là a été le résultat d'un bel équilibre, et le message que l'on a aujourd'hui, c'est que le projet de loi n° 195 ne vient pas à notre avis régler beaucoup, beaucoup de problèmes, il vient en créer probablement beaucoup plus qu'il souhaite en résoudre.

Donc, il y a eu un équilibre avec 102; 195, d'après nous, va dans la mauvaise direction. Et de par notre nature ? et vous l'avez bien précisé, on représente les gens d'affaires, et tout ça, puis la liberté d'entreprendre et le développement économique du Québec ? et en ce sens, nous, on est prêts à collaborer pour explorer des moyens de solidifier encore ces régimes-là. Je pense qu'on a tout intérêt, non seulement les entreprises, les employeurs, les travailleurs, mais aussi les retraités ont intérêt à avoir des régimes qui soient solides, efficaces et en mesure de livrer ? ça, je pense qu'on a moins... on n'a pas tellement de doute ? mais en mesure de livrer la marchandise, de respecter leurs promesses. Et, nous, on est prêts à collaborer pour aller en ce sens-là et pas l'inverse.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Mais est-ce que vous savez vraiment ce que le ministre pense? Est-ce que vous avez tenté de le sensibiliser?

M. Demers (Steeve): On n'a pas eu de discussion précise avec le ministre sur ce projet de loi là. Non. Est-ce qu'on a essayé de le sensibiliser? On tente de sensibiliser les élus, le gouvernement, sur cette question-là, pas précisément le ministre de l'industrie.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Certains groupes de retraités soutiennent que, s'il y a présence de surplus, c'est que les cotisations faites par les bénéficiaires du régime dans le passé étaient trop élevées et c'est pour cette raison que les surplus doivent revenir aux retraités. Comment réagissez-vous à ce sujet?

Le Président (M. Paquet): M. Paradis ou M. Demers.

M. Demers (Steeve): M. Paradis.

Le Président (M. Paquet): M. Paradis.

M. Paradis (Claude): Il y a eu ce débat-là qui a été fait lorsqu'il y a eu le projet de loi n° 102, à savoir qui des participants ou de l'employeur avaient le plus contribué dans les régimes pour créer l'émergence des surplus.

À ce stade-ci, on ne peut pas dire de façon très, très... dire: C'est x % d'un bord, y % de l'autre. Savoir, oui, il y a eu une émergence des surplus dans le passé qui a été en partie par les cotisations de l'employeur... de l'employé, pardonnez-moi, et aussi par des cotisations de l'employeur. Dans quelles proportions? C'est très difficile parce que ça varie beaucoup d'un régime à un autre. Ce que la loi n° 102 a voulu corriger, c'est de permettre, par exemple, sur les cotisations des employés, de dire: Écoutez, une des raisons que les surplus émergent, c'est parce qu'il y a des rendements qui sont... dans la caisse qui sont supérieurs à ceux qu'on a anticipés. À ce moment-là, c'est qu'on a dit: On va permettre aux participants d'avoir un rendement sur leurs cotisations qui va être équivalent au rendement de la caisse. Ça fait que c'est un des éléments qui a été corrigé.

Est-ce qu'on pourrait dire, historiquement, que... Il y a eu un deuxième mécanisme qui a été mis en place, en 1990, quand la Loi sur les régimes complémentaires de retraite a été mise en vigueur, qui permettait de dire qu'un employé ne financerait pas plus que 50 % du coût d'une rente, et, à ce moment-là... Ça fait que c'est pour ça que, depuis au moins les 14 dernières années, il y a eu des correctifs qui ont été apportés pour permettre de pouvoir rétablir l'équilibre.

Est-ce que le... et on ne parle pas aussi... quand on parle de... On dit: Est-ce que c'est sur le dos des anciens cotisants? C'est qu'il y a eu quand même au fil des ans, si on parle depuis 1966 que les régimes... la loi a été mise en place, il y a eu quand même des améliorations. Il y a eu des promesses qui ont été établies au départ par les employeurs et il y a des améliorations qui ont été apportées au fil des ans par les employeurs auprès de leur régime, dans lequel ces participants-là en ont bénéficié. Ça fait que c'est pour ça que c'est très, très difficile de dire que seules les cotisations des participants ont généré les surplus, c'est qu'il faudrait le voir dans un contexte beaucoup plus large.

Et mon impression et mon expérience, c'est que ça s'est fait d'une façon, je dirais, pour les régimes dans lesquels les participants cotisaient, ça s'est fait en général de façon, je dirais, pas mal égale au fil des ans. Mais, avec le temps, c'est que, quand on arrive à la retraite, à ce moment-là, c'est qu'on a tout mis nos argents dans le même panier, et c'est à ce moment-là qu'on commence à payer des rentes, et c'est sur cette base-là que la notion de dire, de définir un surplus, c'est... ? peut-être avant, si vous me permettez... La priorité, d'après moi, pour les retraités actuellement devrait être une priorité de sécurité des prestations. O.K.? On parle depuis... le projet de loi n° 195 élabore beaucoup sur la question des surplus des caisses de retraite, mais, pour les retraités, d'après moi, ça devrait être la sécurité des prestations. Et la sécurité des prestations passe, entre autres, par un encadrement législatif qui est clair, qui n'a pas d'incertitude, ce qui va faire que, s'il n'y a pas d'incertitude et c'est clair, c'est qu'à ce moment-là le financement et la capitalisation de ces prestations-là, de ces promesses-là vont se faire de façon beaucoup plus adéquate.

Ce qu'on dit actuellement, le débat qu'on a actuellement, c'est qu'il nous amène dans la direction opposée en créant une incertitude. Quand on parle d'incertitude ? j'essaie de mettre ça d'une façon concrète ? quand on parle d'incertitude, c'est de dire, pour l'employeur qui verse les cotisations dans le régime, on doit verser des cotisations, on va verser le minimum possible, parce qu'on ne sait pas ce qui va se passer. Quand il y a des déficits... parce qu'on a déterminé des cotisations basées sur qu'est-ce qu'on pense que l'avenir nous réserve. Et vous savez qu'il y a toujours des fluctuations par rapport à ça, et, selon les hypothèses qu'on a établies, il y a des surplus qui se créent, il peut y avoir des déficits qui se créent.

Actuellement, les déficits sont générés par... sont payés par l'employeur et les surplus, théoriquement, si on dit: c'est qu'ils devraient être... Si l'employeur prend le risque de payer davantage, il devrait avoir la récompense d'avoir les surplus. C'est ce qu'on parle quand on parle de symétrie dans un régime de retraite. Je n'aborde pas ici la question d'équité. Est-ce que, dans les cas où est-ce qu'il y a une cotisation de l'employé aussi, il faudrait peut-être... c'est un autre débat, mais il faudrait débattre de ce point-là par la suite. Ça fait que, en créant un environnement qui est... un encadrement légal clair, dans lequel on peut verser, on peut cotiser adéquatement, à ce moment-là c'est la priorité, ça devrait être la priorité des retraités à ce niveau-là.

Le Président (M. Paquet): M. Demers.

M. Demers (Steeve): 30 secondes. Sur ça, je voudrais rajouter. En fait, ce qu'il faut se poser comme question, c'est: Quel est l'impact de cette asymétrie-là? Qu'est-ce que ça va engendrer d'amener les employeurs à combler les déficits mais à avoir une incertitude quant à utiliser le surplus pour cesser leurs cotisations? Quel va être l'impact de ça? Nous, on pense qu'on est plutôt pessimistes quant à cet impact-là. On pense que ça aura un impact négatif sur les régimes, probablement la création de régimes, mais on a de la difficulté à croire qu'une asymétrie de ce type-là, une iniquité, si on revient sur le terme «équité», une iniquité aurait un impact positif sur le développement, le maintien et la stabilité, la solidité de ces régimes de retraite là. En fait, c'est la question, nous, qui... C'est l'élément de base à inclure.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Drummond.

M. Jutras: Vous nous avez dit et répété à plusieurs reprises qu'il fallait que ce soit plus clair et mettre fin à l'incertitude et vous nous avez parlé, entre autres, de meilleures règles de capitalisation. Et, monsieur, depuis le début que je vous écoute que j'ai la même question en tête, de savoir: Quand vous dites qu'il faut qu'on soit plus clair, il faut qu'on soit plus clair comment? Là, vous avez répondu, M. Paradis, quelque peu, là. Mais est-ce que, pour vous autres, le fait d'être clair, quand vous dites: Il faut que les règles soient plus claires, est-ce que ça veut dire, entre autres, que, bon, bien, la formation d'un comité de retraite où siégeraient les retraités puis qu'ils auraient leur mot à dire sur les surplus, être clair, pour vous, est-ce que ça veut dire que les retraités n'ont pas d'affaire là?

Le Président (M. Paquet): M. Demers.

M. Demers (Steeve): Pas du tout. Même, que le fait qu'on sache qu'il y a des retraités sur les comités de retraite, ça ne peut pas être plus clair que ça.

M. Jutras: Alors donc, ce...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Oui, mais...

M. Demers (Steeves): Si, par exemple, un projet de loi proposait que peut-être il pourrait y avoir... Vous savez, c'est un peu dans ce sens-là, l'incertitude. Par contre, bon, l'incertitude, ce n'est qu'un des éléments, mais l'incertitude, à savoir: Est-ce que l'employeur... pour l'employeur, de se dire: Est-ce que je pourrai, moi, utiliser les surplus pour cesser ma cotisation? Cette incertitude-là, elle est préoccupante pour l'entreprise, parce qu'il sait qu'il va devoir éponger le déficit; ça, c'est une certitude. Mais il a l'incertitude quant à l'utilisation des surplus, et ça, c'est une asymétrie qui est préoccupante, là. Elle n'est pas... D'après nous, elle est contreproductive dans un objectif de stimuler le développement de ces régimes de retraite là. Disons-le, c'est de la prestation déterminée encore.

n (12 h 30) n

M. Jutras: Mais est-ce que je dois comprendre à ce moment-là que ce que vous nous dites, c'est que, oui, les retraités peuvent être là, mais, d'un autre côté, les balises auront été tellement bien fixées et les principes auront été tellement bien établis que ces comités-là où siégeront les retraités, bien, auront peu de pouvoir décisionnel, parce qu'en fait tout sera déjà déterminé. Est-ce que c'est ça que vous nous dites? Non?

M. Demers (Steeve): Nous, on souhaite que...

Le Président (M. Paquet): M. Demers.

M. Demers (Steeve): Pardon. Bien, nous, on souhaite que ce débat-là s'inscrive dans un débat beaucoup plus large. La réflexion de la Régie, pour nous, est primordiale; il y aura des choses qui vont se dire. Donc, il faut regarder ça dans un contexte plus large.

Moi, je me ramène au projet de loi n° 195 et je ne peux pas, on ne peut pas appuyer le projet de loi n° 195 sur des bases plus larges, qui débordent le cadre de ce projet de loi là.

Ce projet de loi là, à notre avis, va dans la mauvaise direction. Maintenant, étudions cette question-là dans un contexte beaucoup plus large, avec les impacts sur les employeurs, les régimes, et tout ça; nous, on est prêts à y participer. Mais, si je me ramène à 195, d'après nous, il va dans la mauvaise direction.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Drummond.

M. Jutras: D'accord. C'est ça que vous nous dites, que 195 va dans la mauvaise direction, et vous nous dites constamment qu'il faut des règles plus claires, puis moi, c'est ça que j'aurais aimé que vous nous disiez davantage. Mais là on reste, comme on dit, une jambe en l'air, là.

Le Président (M. Paquet): M. Paradis.

M. Paradis (Claude): Regardez, dans un contexte... Quant on dit, on parle de règles plus claires, je vais vous donner des exemples. Dans la loi du Québec, il n'y a rien dans la loi actuellement qui spécifie exactement qu'on peut prendre un congé de cotisation. Il y a eu... Quand la loi n° 102 est arrivée, il y a un article de loi qui est tombé, qui permettait ça.

Dans les lois, par exemple, par comparaison, dans la loi de l'Ontario, c'est très clair que l'employeur peut prendre un congé de cotisation s'il y a un surplus. Il n'y a pas cette règle-là au Québec, ce qui est une des recommandations qu'un autre groupe a déjà faite.

Deuxièmement, sur la question de la clarté, vous parliez tantôt des retraités. Je crois qu'actuellement il y a un forum dans lequel les retraités peuvent participer, qui s'appelle le comité de retraite. Actuellement, le comité de retraite est composé d'au moins un participant des retraités votant, et il peut y avoir un deuxième participant retraité non votant. Le forum en tant que tel... le comité de retraite est là pour administrer les régimes de retraite, et c'est là que se discute, et c'est là que toute l'information liée au régime de retraite est donnée, dans lequel le retraité peut avoir son mot à dire.

Deuxièmement, au niveau de la loi n° 102, la loi n° 102 a introduit l'aspect de permettre à un comité de retraite de faire des recommandations à l'employeur sur des modifications potentielles à faire au régime de retraite. Le forum, actuellement, il est là.

Ce qui manque, d'après nous, c'est peut-être de permettre, par exemple, aux retraités ou à tout autre membre de comité de retraite d'avoir peut-être une meilleure formation pour mieux connaître ce dont ils devraient parler, parce que les régimes de retraite demeurent quand même un sujet relativement technique et complexe, et à ce moment-là c'est de permettre à ces gens-là de pouvoir... une meilleure formation, de pouvoir mieux articuler, de mieux comprendre les mécanismes liés à un régime de retraite.

Comment, par exemple ? juste un exemple concret: Comment émerge un surplus et comment peut disparaître un surplus? J'ai écouté dans ma carrière beaucoup de personnes qui, pour eux, un surplus, c'est de l'argent comptant. Un surplus, ce n'est pas ça. Un surplus... il faut aussi définir que c'est un surplus actuariel et non un surplus comme on voit... voire actuariellement. À ce moment-là, c'est que... juste de bien comprendre ce que signifie un surplus actuariel et de permettre à ces gens-là de mieux comprendre le mécanisme, et de mieux articuler leurs demandes, et de permettre à ces gens-là de faire des recommandations nécessaires à l'employeur... De mettre ça dans un cadre législatif, d'obliger les gens dans un cadre législatif, je ne crois pas que ce serait la meilleure solution, autant pour les employeurs que pour les retraités.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, au nom de la Commission des finances publiques... Alors, très rapidement, Mme la députée de Mirabel. Si c'est très, très, très bref, je peux vous donner...

Mme Beaudoin: Oui, oui, c'est bref. Non, mais je voulais simplement dire que vous comprenez que les retraités ne veulent pas seulement un droit de regard, mais un droit de veto, parce qu'ils considèrent qu'il y a une injustice. Avez-vous un bref commentaire à faire sur ça?

M. Demers (Steeve): On ne partage pas ce point de vue là.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, au nom de la Commission des finances publiques, je remercie M. Steeve Demers et M. Claude Paradis, pour la Fédération des chambres de commerce du Québec, pour leur participation à nos travaux.

Je suspends brièvement et j'inviterais les prochains intervenants à s'approcher de la table.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

 

(Reprise à 12 h 37)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des finances publiques reprend ses travaux. J'ai oublié de demander formellement, malgré que c'était implicite parce qu'on en avait déjà discuté, qu'il y ait consentement pour qu'on puisse poursuivre après 12 h 30.

M. Gautrin: Il y a consentement.

Le Président (M. Paquet): Il y a consentement. Merci, cher collègue. Alors donc, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à l'Alliance des associations de retraités. Alors, M. André Goulet, président, si vous voulez présenter, s'il vous plaît, les gens qui vous accompagnent.

Alliance des associations de retraités (AAR)

M. Goulet (André): Merci, M. le Président. D'abord, mon prédécesseur, qui reste président ex officio, M. Jean Des Trois Maisons, qui a travaillé beaucoup à l'élaboration, la mise sur pied de l'alliance, comme il va même vous l'expliquer; et M. Marcel Rivest, conseiller juridique, qui est avec nous pour donner des appuis encore plus solides que ce que nous avions déjà.

Alors, pour tout de suite, je donne la parole à M. Jean Des Trois Maisons.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. Des Trois Maisons.

M. Des Trois Maisons (Jean): Bonjour à tous. Bon dîner.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Des Trois Maisons (Jean): Bien, en fait, ma présentation implique un résumé du mémoire. Vous avez... tous les membres... D'abord, salutations au président et à tous les membres de la commission, députés, féminins et masculins, il me fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui. Et nous souhaitons, naturellement, bien vous convaincre de nos orientations et nos prises de position. D'ailleurs, je vois des gens en cette salle, ici, derrière moi, tous des gens qui ont effectivement travaillé très fort à cette démarche en regard de la loi n° 102 et de la présente loi. Je les remercie d'être là aujourd'hui et d'appuyer dans le fond une problématique assez importante pour l'ensemble des retraités du Québec.

Nous avons, depuis un certain nombre d'années, fait en tout cas de grandes démarches, comme vous le savez tous ? et certains ont été rencontrés personnellement ? à l'effet de donner un appui aux retraités en rapport à leur participation au régime de retraite et surtout au niveau des congés de cotisation.

Notre mémoire, c'est un résumé que je vous présente. Le mémoire que vous avez reçu comprend trois annexes. Annexe A, c'est Le concept de la rémunération globale; l'annexe B, Vers une réouverture de la loi RCR; c'est des commentaires plus élaborés sur l'ensemble de la Loi des régimes complémentaires et de retraite; et, l'annexe C, à la page 30, vous avez la liste des associations membres de l'Alliance des retraités.

n (12 h 40) n

Alors, vous savez, l'alliance comporte à peu près 80 000 membres répartis sur le territoire du Québec. L'alliance appuie le projet de loi n° 195 parce que celui-ci est une reconnaissance des principes de droit applicables et de justice à l'égard des retraités du Québec. L'Alliance des associations de retraités souhaite ardemment que le projet de loi soit approuvé par tous les partis politiques ? et je dis bien: par tous les partis politiques ? présents à l'Assemblée nationale. Notre mémoire contient en fait les trois parties que j'ai énumérées.

Il faut bien saisir la portée réelle de l'article 146.5 introduit par la loi n° 102. Cet article permet à un employeur de faire reconnaître son droit à des congés de cotisation par une entente avec un syndicat accrédité sans qu'il soit nécessaire d'obtenir également le consentement des participants actifs non syndiqués ou celui des retraités. En effet, l'article 146.7 de la loi RCR indique que le consentement du syndicat lie tous les autres participants au régime de retraite, même dans les cas où ceux-ci forment la grande majorité des participants d'un régime. C'est un peu étonnant de voir ça: tu as une majorité de retraités face aux actifs, et, en tout cas, ils ne décident rien.

En pratique, cela signifie que, si l'employeur doit obtenir le consentement du syndicat pour prendre des congés de cotisation, ce dernier donnera son accord à la condition que certains avantages soient accordés à ses membres à même les surplus. Et je pourrais vous dire, ma longue expérience de relations de travail ? je sors de mon texte pour vous le dire ? autant comme président du Syndicat des fonctionnaires, conciliateur au gouvernement du Québec, directeur du Service de conciliation et sous-ministre adjoint aux relations de travail, cette dynamique des négociations, c'est exactement ça: quand vous négociez, vous négociez une espèce de package, l'ensemble des avantages, et, l'employeur, même s'ils viennent vous dire ici: Bien, non, ce n'est pas important, c'est calculé, quand tu fais une proposition au syndicat, puis ça te coûte 6 millions... 6 % de la masse salariale, bien effectivement les avantages donnés dans un régime de retraite, ils sont là-dedans. Ça, c'est inévitable. Alors, c'est le contexte... c'est la définition dans le fond de la rémunération globale.

En réalité, on parle donc du partage du surplus entre un employeur et les participants actifs membres du syndicat au détriment des retraités, dont le consentement n'est pas actuellement requis par la loi RCR, puisqu'une telle entente lie tous les participants du régime. Sur le plan juridique, la conséquence, c'est que vous liez... quand vous prenez une décision, à ce moment-là la loi actuelle, ça lie tous les gens du régime. Alors, nous autres, l'Alliance, c'est bien sûr, nous appuyons le projet n° 195 pour des motifs juridiques et des motifs d'équité.

La théorie de la rémunération globale est une théorie économique d'application courante et concrète qui a été reconnue par les tribunaux. Le principe de la rémunération globale est à l'effet que la rémunération d'un employé en contrepartie de son travail est composée de divers éléments tels que le salaire de base, les vacances et le coût de l'employeur aux différents avantages sociaux, dont le régime de retraite, c'est bien sûr, selon la théorie des vases communicants. Afin d'obtenir les cotisations de l'employeur à la caisse de retraite, les employés ont renoncé à d'autres composantes de leur rémunération. C'est ce que je vous avais résumé préalablement.

Le législateur a prévu explicitement, à l'article 6 de la loi RCR, qu'un régime de retraite est un contrat. J'ai lu tous les procès-verbaux de l'Assemblée nationale qui touchaient en fait la présentation de 193, 102, et tout ça, et, naturellement, la notion de contrat a souvent été débattue par les députés là-dessus, et entre autres par M. Gautrin.

Une règle fondamentale prévue au Code civil est celle qui indique que la modification à un contrat exige le consentement de toutes les parties à ce contrat. La loi n° 102 a violé, a mis de côté ces règles non équivoques du Code civil au profit des participants actifs syndiqués et des employeurs. Par l'article 146.5 de la loi n° 102, on a écarté le principe de droit civil que la Cour d'appel, dans l'affaire Singer, avait pourtant bien établi et qui découle de l'article 6 de la loi RCR: Les retraités sont partie au contrat du régime de retraite et leur consentement est nécessaire.

Il est à noter qu'une rente achetée auprès d'un assureur est garantie par la SIAP jusqu'à concurrence de 2 000 $ par mois, alors qu'il n'y a aucune garantie lorsque la rente est payée par les caisses de retraite. Si les retraités ne peuvent pas participer à l'utilisation des surplus qui se dégagent sur le capital qui leur est réservé pour payer leurs rentes, il est alors préférable qu'il y ait un achat de rente auprès d'un assureur, car, autrement, ce sont les retraités qui prennent les risques de l'insolvabilité de leur employeur sans aucune contrepartie en retour. Il faut tenir ça de l'ensemble du contexte.

La notion de patrimoine d'affectation fiduciaire implique des obligations à l'égard des retraités lors des utilisations de surplus, puisque le Code civil exige le respect de la règle d'impartialité entre tous les bénéficiaires d'une fiducie, c'est-à-dire entre les participants actifs et les retraités.

Dans l'affaire Singer, la Cour d'appel a rejeté la prétention de l'employeur et a conclu que le pouvoir de modification de l'employeur n'était pas unilatéral et qu'un employeur ne pouvait pas utiliser ce pouvoir de modification d'un régime de retraite pour s'en approprier le surplus.

La loi n° 102, plus particulièrement l'article 146.5, a pour effet de mettre de côté les principes juridiques de la décision de la Cour d'appel dans l'affaire Singer, alors que le projet de loi n° 195 vient rétablir à juste titre l'application des principes de cette décision.

Les congés de cotisation ne sont pas automatiques lorsqu'il existe des surplus dans un régime. Le droit aux congés de cotisation n'est pas non plus une contrepartie, comme plusieurs prétendent, à l'obligation des employeurs de combler le déficit lorsqu'il existe. Ainsi, s'il n'y a pas de texte dans un régime de retraite qui permet un congé de cotisation, il faudra un amendement adopté conformément aux principes de droit civil applicables. Depuis la loi n° 102, l'article 146.5 constitue un accroc aux règles de droit civil et aux droits des retraités, puisque le seul consentement des syndicats est suffisant pour lier les retraités et les participants actifs non syndiqués.

Le projet de loi n° 195 est donc nécessaire pour rétablir la règle du droit civil, c'est-à-dire l'obtention du consentement de ceux qui sont partie au contrat, de même que de rétablir les règles de droit civil relativement à l'administration d'un patrimoine d'affectation fiduciaire, c'est-à-dire l'application du principe d'impartialité entre les différents bénéficiaires compte tenu de leurs droits lors de l'utilisation de surplus.

Motifs d'équité. Vous savez, il y a deux volets. On a parlé du plan juridique; maintenant, les motifs d'équité. Nous avons vu précédemment qu'en vertu du principe de la rémunération globale toutes les cotisations à la caisse de retraite sont en réalité des cotisations qui font partie du salaire des employés. En conséquence, les surplus qui se créent sur toutes ces cotisations devraient, en toute équité, revenir aux employés qui ont fait ces cotisations au fil des années, c'est-à-dire tous les participants qui ont contribué dans le passé.

En réalité, l'existence d'un surplus à un moment donné signifie tout simplement que les rentes accumulées à cette date, autant par les participants actifs que les retraités, ne sont pas suffisantes pour les cotisations payées dans le passé et que les cotisations payées dans le passé ont été trop élevées pour les rentes accumulées à cette date ? ou à ces dates.

En conséquence et en équité, il est raisonnable pour les retraités de prétendre que lorsqu'une décision est prise d'utiliser les surplus de la caisse ils ont droit à leur juste part parce qu'ils ont participé à la création des dits surplus et parce que la signification même de l'existence d'un surplus signifie généralement que la rente qu'ils reçoivent est insuffisante pour les cotisations qu'ils ont faites dans le passé.

Réponses à certaines questions. La protection des régimes à prestations déterminées. Ça a été un bon débat sur la loi n° 102, ces questions-là, les prétentions à l'effet qu'il n'y aurait plus de régime à prestations déterminées, puis tout ça. Bien, effectivement, depuis l'adoption de la loi n° 102, les employeurs continuent à modifier les régimes à prestations déterminées en régimes à cotisation déterminée ou en REER collectifs, et ils ne créent pas plus de régimes à prestations déterminées. Que doit-on en conclure? C'était un prétexte du temps, et maintenant on constate que ça n'a rien changé. En fait, l'article 146.5 n'avait aucune corrélation avec le désir ou non des employeurs d'éliminer les régimes à prestations déterminées, et le projet n° 195 non plus.

La représentation des retraités. J'ai entendu tout à l'heure des gens qui ont intervenu en disant qu'ils étaient bien représentés. Ma vaste expérience me permet de m'interroger à cet égard. Ça, personnellement, je parle, là.

La représentation des retraités. Dans la situation actuelle, il n'y a pas de mécanisme légal qui permet et encadre la représentation des retraités. Dans les faits, ceux-ci sont plus ou moins représentés. En effet, dans certains cas, les syndicats représentent les intérêts des retraités. On ne vous dit pas qu'il n'y en a pas, des gens qui représentent avec coeur et avec honneur les retraités qui sont d'anciens membres de l'organisation syndicale, puis ils négocient des clauses d'indexation pour améliorer leur sort; on convient qu'il y en a. Plus fréquemment toutefois, les syndicats ne représentent pas les retraités ou ne réussissent pas à négocier l'indexation des rentes. Tu sais, on est toujours bien servi par soi-même, hein? La vie est là.

Les questions d'intérêt... c'est simple, simple, simple. Si on vote dans une salle lors d'une convention collective, puis on a un choix à faire entre 2 % pour les retraités ou 1 % sur le salaire donné en convention collective, moi, je vais vous le dire, ce qu'il va arriver: Le vote va être clair, net, net. Que n'importe quel employeur vienne me dire ça à côté, ici, là, je vais vous dire: J'ai des preuves en masse là-dessus.

n (12 h 50) n

Dans d'autres cas, les associations de retraités représentent les intérêts de retraités. Finalement, dans plusieurs cas, les retraités sont laissés à eux-mêmes. C'est le cas dans plusieurs cas, dans plusieurs cas. Le projet de loi n° 195 aidera grandement les retraités qui ne sont pas représentés, et ce, sans nuire à ceux qui sont bien représentés.

L'intrusion dans la négociation patronale-syndicale. Comme les surplus n'appartiennent pas exclusivement aux participants actifs syndiqués, l'Alliance ne voit pas comment les syndicats pourraient prétendre être les seuls ? on ne dit pas qu'ils n'ont pas voix au chapitre ? être les seuls à avoir le droit d'en négocier leur utilisation sans que les autres participants qui ont les mêmes droits que les participants actifs syndiqués donnent leur consentement. Nous, on ne veut pas des droits pour en enlever à d'autres. On dit: Donnez-nous-en, vous en avez, puis gardez-les; puis on n'a rien contre ça, sauf qu'on a le droit aussi d'en avoir.

D'ailleurs, dans les cas où les syndicats représentent déjà les retraités, il n'y aura pas de difficulté à obtenir leur consentement. Il n'y aura pas de chicane, ils sont déjà favorables. Donc, pourquoi qu'il y aurait de la chicane à ce moment-là ? s'ils sont bien représentés, c'est bien sûr? Dans les cas où les syndicats ne représentent pas les retraités, le projet de loi n° 195...

Il me reste deux minutes?

Le Président (M. Paquet): Deux minutes, oui.

M. Des Trois Maisons (Jean): M. le Président, M. le Président, vous me tordez, là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Des Trois Maisons (Jean): Je termine. Donnez-moi un deux, trois minutes, ça va aller. O.K. Bon... D'ailleurs, dans les cas où les syndicats... Non.

Contenu de la promesse. Certains veulent rejeter la position des retraités en argumentant que la seule promesse d'un régime de retraite est la rente de retraite, de sorte que les retraités ont ce que le régime leur avait promis. Ça, j'ai toujours entendu: Tu as le droit à ta prestation; tu vas l'avoir, ton chèque. Achale-nous pas pour le reste. Ils ne peuvent pas exiger rien d'autre. Avec égard, cet argument est fallacieux: les tribunaux n'ont jamais retenu un tel argument. Au contraire, la Cour d'appel, dans l'affaire Singer, a indiqué que le contenu de la promesse pouvait viser non seulement la rente de base, mais aussi la propriété des surplus.

Lever l'incertitude ? je vais être dans le cadre de mes minutes, M. le Président ? lever l'incertitude quant aux congés de cotisations. La meilleure façon de lever l'incertitude tout en étant équitable, c'est d'interdire les congés de cotisation, à moins d'entente avec toutes les parties concernées. Comme chaque partie connaît son intérêt, il va en ressortir une solution acceptable pour tous. Malheureusement, 146.5 de la loi n'attribue ce droit seulement qu'à deux parties, de se partager le surplus qui appartient en partie à d'autres qui n'ont pas voix au chapitre. Le projet de loi n° 195... mérite... d'être... lever...

Conclusion. Vous voyez, on tient promesse, on tient promesse.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet): Absolument.

M. Des Trois Maisons (Jean): Conclusion. L'Alliance des associations de retraités appuie le projet de loi n° 195 et demande son adoption dès cet automne.

Et je souhaite, comme deuxième volet, je souhaite, avec beaucoup de respect pour tous les partis politiques en présence, je souhaite que le projet de loi... Je vous dis honnêtement, je trouverais ça tellement correct que le projet de loi soit approuvé par tous les partis politiques. Ce serait l'idéal dans le contexte, je pense, pour appuyer les retraités.

Alors, ceci termine ma présentation, M. le Président et Mmes, MM. les députés. Et vous pourrez adresser vos questions... Je pense que j'ai fait mon bout comme il faut, là, j'espère, et vous pourrez adresser vos questions à Me Rivest. Je pense que tout le monde va le qualifier de spécialiste, une grande expertise dans le milieu des régimes de retraite, et celui-ci va répondre aux questions.

Et j'aimerais également laisser... j'aimerais souhaiter que mon président puisse s'exprimer, juste deux, trois mots, pour effectivement remercier la table des députés. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Des Trois Maisons. M. Goulet.

M. Goulet (André): Merci. Confusion de mots: c'est peut-être «minutes», au lieu de «deux, trois mots». Je veux d'abord remercier M. Gautrin, qui a fait un travail génial et important dans ce dossier-là. Mais les bases juridiques qui ont servi à appuyer la demande et sur lesquelles vous aurez probablement des questions touchent en même temps des gens des secteurs public et parapublic: l'indexation par les surplus, la représentation dans les comités de retraite. Je ne veux pas faire dévier l'objectif principal de la commission, qui porte sur le projet de loi n° 195, mais il reste que les retraités actuellement dans le secteur public et parapublic font des démarches auprès des syndicats pour être capables d'aller chercher aussi leur place dans les comités de représentation et aussi dans l'appropriation d'argent, et on ne part pas en guerre contre les syndicats.

En 1999, les syndicats avaient mis les retraités dans la demande présentée à la table centrale. Ils étaient même prêts à demander ? ce qu'ils demandaient effectivement ? que le taux de cotisation reste à 7,95 alors que le taux de l'étude actuarielle était de 4,69. Et le gouvernement voulait baisser à 4,69, lui; ça lui faisait moins d'argent à mettre dans ses comptes à payer. Et ça s'est négocié, dans la «nuit des grands couteaux», à 5,35. Donc, c'est faux de dire que les actifs se sont payés une augmentation de salaire par une baisse de taux de cotisation. Nous étions, dans la demande, à 7,95, à condition que l'indexation ne coûte pas plus que 1,31. C'est important, ils étaient là.

Nous sommes encore, dans la prochaine demande qui va être déposée, avec harmonisation aux centrales, hein, la CSN, la FTQ et la CSQ. Hein, la demande est harmonisée, elle va en consultation auprès des syndiqués. Et je voulais tout simplement ouvrir cette porte-là pour dire que j'espère qu'on aura l'occasion de s'en reparler. Si ce n'est pas dans cette salle, ce sera sûrement ailleurs. Et je vous remercie.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Goulet. Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je voudrais remercier d'abord M. Doucet: je connais bien le problème que vous soulevez et je comprends qu'on aura probablement la chance de reparler de toutes les questions de l'indexation actuellement dans les régimes publics. Mais ce n'est pas l'objet actuellement de la loi, c'est le régime complémentaire de retraite.

Je sais que vous le compreniez, mais je voudrais quand même bien le préciser. La loi n° 195 a une portée relativement réduite: elle vient corriger une inéquité qui était présente dans la loi n° 102 en ce qui a trait qu'elle retirait, lorsque l'employeur s'était entendu avec son association accréditée, ses syndicats, la possibilité pour une tierce partie de contester la modification au contrat qui donnait droit à un congé de cotisation.

Là, on vient corriger en quelque sorte cette inéquité, mais je comprends... il faut être... c'est un pas dans une certaine direction, mais ce n'est pas encore probablement tout ce que vous demandez. Je pense qu'il faut quand même qu'on soit assez clair de part et d'autre, que je n'essaie pas de vous dire... mais je ne pense pas que vous croyez que ce n'est pas ce dont on parle.

J'aurai deux questions, une fois que ceci est clarifié. Je voudrais demander à Me Rivest, lui donner la chance... parce que vous n'avez pas eu la chance, avec votre éloquence habituelle, M. Des Trois Maisons, de pouvoir aborder un élément de votre mémoire qui touche le risque. Et souvent, autour de cette table, on a entendu les témoignages disant: Seul l'employeur a assumé le risque, dans les régimes de retraite. J'ai cru comprendre, à la lecture de votre mémoire, que vous avez un point de vue légèrement différent, et je demanderais peut-être que, pour le bénéfice des membres de la commission, vous puissiez exposer votre point de vue à cet effet-là.

Le Président (M. Paquet): Me Rivest.

M. Rivest (Marcel): Oui, merci. Bien, tout d'abord, avant de répondre à votre question, j'aimerais peut-être un peu reprendre l'élément que vous avez mentionné au début sur la portée de... appelons ça le projet de loi n° 195. Parce que, en réalité, le projet de loi n° 195 est assez restreint dans son aire, et ça, on comprend ça puis on accepte ça, malgré que c'est important sur le plan des principes. Mais, en fait, pour comprendre... Parce qu'on fait des grands débats, mais en réalité le projet de loi n° 195 s'appliquera uniquement dans les cas où, dans un régime de retraite, le surplus appartient aux participants.

Autrement dit, dans un régime de retraite, il y a un texte ou il n'y a pas de texte. S'il y a un texte, le texte peut dire que le surplus, à la terminaison du régime, appartient à l'employeur ou appartient aux participants. Si le surplus appartient à l'employeur ? puis ça arrive quand même assez souvent ? à ce moment-là l'employeur n'est pas empêché de prendre des congés de contribution, c'est son argent; donc, c'est impossible que l'article 146.5 vienne s'appliquer à ce moment-là.

Par ailleurs, dans les cas où le texte est silencieux ou dans les cas où le texte dit que le surplus appartient aux participants, à ce moment-là, si l'employeur veut prendre des congés de contribution avec le surplus des participants, bien c'est normal qu'il obtienne le consentement de ceux qui sont titulaires du surplus.

Actuellement, la loi ? appelons ça la loi n° 102 ? dit que seulement le consentement des syndicats qui représentent les participants actifs est suffisant; celui des non-syndiqués et celui des retraités n'est pas suffisant.

Donc, dans le fond, la question, c'est simplement ceci: Lorsqu'un régime de retraite indique que le surplus appartient aux participants, est-ce qu'il est normal, équitable, légitime que seul le consentement d'une partie du groupe à qui appartient le surplus puisse donner son consentement? Ce n'est rien que ça, la question que nous avons ici, devant vous, et c'est d'ailleurs pour ça qu'il y a eu peu de cas d'application de l'article 146.5 depuis son application, parce qu'en réalité on n'en a pas besoin souvent, sauf que, sur le plan des principes et de l'équité, c'est très important.

n (13 heures) n

Ceci étant dit, on arrive à la question du risque, que vous avez posée. Nous, on a cinq remarques sur la question du risque. La première, c'est que les risques dans un régime de retraite sont partagés, ils sont partagés entre l'employeur et les participants, autant actifs d'ailleurs que les participants retraités, dépendant comment on regarde la situation. Et cette question-là de risque a été soulevée, encore là, dans l'affaire Singer. On revient toujours avec l'affaire Singer, mais, qu'est-ce que vous voulez, c'est une décision de 200 pages, c'est la décision de base qui a vraiment établi les principes. Et, à la page 198, je ne veux pas rentrer dans le détail, mais la Cour d'appel dit que les risques sont partagés, dans un régime de retraite. Donc, voilà quelqu'un d'impartial. Je comprends que tout le monde ici peut venir dire: Les risques, on les a, non, on ne les a pas, ainsi de suite, mais là tout le monde a plaidé son affaire, et trois personnes impartiales ont dit: Les risques sont partagés, dans un régime de retraite.

Bon, comment ils sont partagés? Ça dépend de quel risque on parle. Si on parle d'un risque de déficit ou d'expérience, c'est vrai que la loi dit que ce déficit-là, sur un certain nombre d'années, doit être comblé par l'employeur. Par ailleurs, il faut comprendre que les risques d'un déficit dans un régime de retraite sont relativement modestes par rapport aux risques de surplus dans les régimes de retraite, et ce, pour une raison bien simple, c'est que les actuaires vont admettre qu'ils utilisent des hypothèses conservatrices. Donc, nécessairement, au niveau des principes, s'ils utilisent des hypothèses conservatrices, ça voudra dire que la réalité va battre les hypothèses.

Autrement dit, je vous donne un exemple. Dans l'histoire des régimes de retraite, disons depuis peut-être 40 ans, sans, disons, s'enfarger dans les virgules, les rendements des caisses de retraite en moyenne ont été, je crois, de 9,2 %, ordre de grandeur. Les hypothèses actuarielles sont moindres que 9,2 %; supposons qu'elles sont de 7 %. Ce que ça signifie, c'est que, en moyenne à chaque année, au titre de l'hypothèse de rendement, il y a 2,2 % de surplus qui se créent dans les régimes de retraite, et ainsi de suite pour les autres hypothèses actuarielles.

Je comprends qu'actuellement c'est vrai que la situation n'est pas intéressante: elle n'est pas intéressante pour les employeurs, elle n'est pas intéressante pour personne, autrement dit, parce qu'il y a une conjoncture qui est mauvaise, il y a eu les rendements boursiers qui, en 2001-2002, ont baissé. Je comprends qu'ils ont monté en 2003, mais c'est surtout la baisse des taux d'intérêt qui fait en sorte que les obligations du régime, le passif aura augmenté, ce qui fait baisser les surplus, avec comme résultat qu'on se retrouve aujourd'hui avec, grosso modo, là, peut-être le tiers ou 40 % des régimes en surplus puis les deux tiers en déficit. Mais il reste quand même que, à long terme, c'est des surplus qu'on devrait retrouver dans les régimes de retraite.

Dans les risques partagés, vous avez... je vais parler pour les participants actifs, même si ce n'est pas vraiment eux qui sont ici, mais, eux, ils subissent des risques dans des régimes à prestations déterminées basées sur le salaire final. Parce que, s'ils ne font pas toute leur carrière auprès de l'employeur, lorsqu'ils quittent le régime de retraite, ils subissent une perte assez importante.

On pourrait en reparler dans un autre contexte, ne pas prendre du temps pour expliquer comment, mais c'est très important, cette question-là. Donc, pour les plus jeunes, les participants, aujourd'hui, avec la mobilité de la main-d'oeuvre, ce n'est pas intéressant, les régimes à prestations déterminées. À cet égard-là, il faudrait que ce soit corrigé d'une certaine façon, mais ce n'est pas le temps d'en parler.

Au niveau des risques, il y a les risques de l'inflation. À chaque année, tranquillement pas vite, il y a de l'inflation. Et qui sont ceux qui subissent les risques de l'inflation? Ce sont les retraités. Particulièrement dans le secteur privé, il y a peu de régimes de retraite qui sont indexés et il n'y en a à peu près pas qui sont pleinement indexés. Donc, ça, c'est un risque qui est assez important.

Vous avez également les risques de l'insolvabilité de l'employeur. Autrement dit, c'est bien beau de dire que l'employeur doit payer les déficits, c'est vrai, sauf que, lorsque l'employeur n'est pas capable de payer le déficit, fait faillite et que le régime est en déficit par le fait même, ce sont les participants qui doivent voir leur rente baisser. Et l'exemple de mine Jeffrey, c'est un bon exemple: les gens, les retraités comme les participants actifs d'ailleurs ont perdu 36 % de leur pension. C'est quelque chose, ça, 36 %. Ça fait que, à ces gens-là, ne venez pas leur parler que c'est l'employeur qui prend les risques, parce que c'est eux qui ont eu la grosse perte. Et il y en a beaucoup... bien, «beaucoup», relativement, si vous voulez. Autrement dit, tous les régimes où l'employeur fait faillite alors que le régime est en  déficit, il y a un problème pour les participants actifs.

Et, finalement, pour répondre à cette question-là, dans le débat présent, la question n'est pas vraiment pertinente. Elle n'est pas pertinente parce que la question n'est pas de savoir qui prend les risques ou pas. L'argument du risque de l'employeur, c'est de dire: Si je prends les risques, je devrai avoir le droit au surplus. Mais, actuellement, la question n'est pas là, parce qu'on a vu au début que le seul débat, c'est lorsque le surplus appartient aux participants. Donc, la question qui se pose, c'est pour modifier le régime pour que l'employeur puisse prendre des congés de contribution avec les surplus qui appartiennent aux participants: Est-ce que le seul consentement d'un groupe de participants est suffisant ou est-ce que le consentement de tous ceux qui sont concernés est suffisant? C'est ça donc qui est la question ici. Donc, cette question de risque là n'a pas vraiment d'affaire dans notre débat aujourd'hui.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le député. M. Goulet, M. Des Trois Maisons, M. Rivest, bienvenue, merci pour votre participation. Je tiens également à saluer tous les gens qui vous accompagnent, ils sont nombreux, pour les fins de l'enregistrement. En tant que porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régimes de rente et de retraite, je tiens à dire encore une fois que nous abordons ce débat-là avec beaucoup d'ouverture.

Ma première question s'adresse à M. Des Trois Maisons. M. Des Trois Maisons, avec votre expérience, puis tout ça, comment se fait-il que nous sommes rendus là? Parce qu'il reste quand même que les retraités, plusieurs retraités étaient des syndiqués, étaient membres de leur syndicat. Puis, vous avez de l'expérience, on voit que vous êtes très articulé, puis tout ça. Comment se fait-il qu'on n'arrive pas à une entente?

M. Des Trois Maisons (Jean): Bien, je vais vous dire: Dans la société, dans tous les secteurs d'activité, les gens ont le même réflexe, le réflexe bien simple de l'intérêt. Chacun de nous, on a des intérêts, dans chaque domaine, qui varient.

Moi, je peux vous dire que l'organisation syndicale, c'est une organisation qui dans sa démarche a un caractère politique, là, entre guillemets. «Politique», c'est-à-dire que j'ai déjà été président du Syndicat des fonctionnaires, j'avais 6 000 membres, bon, et je vous dis: Il y a une démarche politique là-dedans. Si quelqu'un veut faire une carrière honnête ? là, je ne suis pas en train de dire qu'il y a des choses malhonnêtes, ou quoi que ce soit ? quelqu'un dit: Moi, j'aime mon boulot, je veux être un bon président, je fais de bonnes choses, son intérêt a priori va porter envers ses membres. Je pense qu'il y a une logique là-dedans. Donc, moi, je vais satisfaire dans la mesure du possible les espérances, les besoins, les demandes de mes membres. Viendra en deuxième, en deuxième étape, si jamais j'ai la capacité de le faire, si je suis honnête puis je fais mon boulot, je vais dire: Peut-être qu'on devrait faire un effort pour les retraités. Mais, a priori, puis connaissant le système de négociation qu'on a, ce qui se passe en négo, c'est que vous admettez que les employeurs sont toujours en réserve de donner, il y a toujours des problèmes. On le voit au gouvernement, on le voit partout. En fait, tout le monde dit: Bon, bien, moi, je ne suis pas capable de donner plus. Donc, tu as à faire des choix quand tu négocies. Et la structure syndicale qui est confrontée à des choix douloureux, de choisir les bénéfices qui vont être agréés dans le cadre d'une convention collective, bien, les choix sont portés parce que les retraités ne sont plus là.

Je voudrais vous faire remarquer, je suis président également des retraités de la ville de Montréal, et je pourrais vous donner l'exemple d'une situation pourquoi 323 veuves de retraités de la ville de Montréal reçoivent 1 313 $, pas par semaine, pas par mois, par année, Mme la députée, par année. Donc, ça veut dire que ces gens-là sont vulnérables. Même si on a une association, on est vulnérables, on n'a pas de pouvoir juridique, on n'a pas de pouvoir de contestation.

Donc, les retraités, dans le fond, je comprends qu'ici il y a des retraités qui sont mieux organisés. On commence à s'organiser. C'est une question de temps aussi, hein? Vous savez que l'Alliance et la Fédération, toutes les organisations, l'AREQ, tout ça, ce n'est pas quand même un historique qui remonte à 50 ans, là, avec beaucoup d'argent puis des structures.

Donc, je vous dis: C'est toute cette situation-là qui a fait en sorte que les retraités n'ont pas eu voix au chapitre dans le passé. Et on s'est retrouvés, malheureusement ? je dis bien malheureusement ? avec la loi n° 102; même après des remarques de toutes ces associations-là qui étaient là, on n'a malheureusement pas retenu nos arguments. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question? Non, mais, écoutez...

Mme Beaudoin: Oui, un peu, oui.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Disons qu'il y a eu d'autres associations, là, syndicales qui sont venues ici, et puis, quand on leur posait la question à l'effet qu'ils avaient peut-être abandonné les retraités, ils ne semblaient pas dire qu'ils les ont abandonnés ? abandonnés.

M. Des Trois Maisons (Jean): Je ne dis pas que tout...

Le Président (M. Paquet): Me Rivest.

M. Rivest (Marcel): Permettez-moi juste de donner un exemple, l'exemple qui est sur la place publique présentement, puis on va voir que ça répond à votre question.

Parce que c'est sûr qu'il y a des syndicats qui représentent leurs retraités puis qui les représentent très bien; il y en a d'autres qui ne les représentent pas. Et l'exemple que je veux donner, c'est celui qui est sur la place publique, donc l'Association des retraités d'Hydro-Québec.

Autrement dit, pendant une période de six ans, les syndicats ont négocié avec l'employeur pour 1,2 milliard d'avantages, d'améliorations et de congés de contribution pour les participants actifs et l'employeur et un petit 25 millions pour les retraités alors que c'est 50-50 au niveau des passifs. Parce que c'est clair et net que dans ce cas-là on n'a pas représenté les retraités, puisqu'ils doivent aller à la Cour...

n (13 h 10) n

Le Président (M. Paquet): Me Rivest, si vous me permettez. Excusez-moi de vous interrompre, mais juste pour rappeler que c'est une cause sub judice. Donc, nous sommes appelés à y aller avec beaucoup de prudence. Il y a une cause en cour présentement, devant les tribunaux.

M. Rivest (Marcel): Ah! je comprends, je suis le procureur des retraités...

Le Président (M. Paquet): Non, non, je ne dis pas... C'est juste pour rappeler à tous les membres...

M. Rivest (Marcel): Je ne plaide pas la cause ici, je fais juste donner les faits. Les faits, ils ont été prouvés. Personne ne conteste ces faits-là. À savoir est-ce que c'est correct ou pas, c'est ça qui va être la décision. Mais les faits sont les faits.

Le Président (M. Paquet): Mais je vous avoue, c'est parce que c'est difficile pour les membres, il faut justement faire attention à cet égard-là.

M. Rivest (Marcel): Bon. D'accord.

Le Président (M. Paquet): Je sais que vous êtes avocat, là. Je ne mets pas en cause votre compétence là-dessus. C'est que je dois, comme président, moi, rappeler à tous les membres et tous les participants qu'on doit faire un petit peu attention. Sur les faits, c'est une chose, mais je vous invite juste à la prudence, comme tous les membres de la commission.

M. Rivest (Marcel): Et, pour terminer aussi, c'est que vous constaterez que dans le secteur privé il y a peu de régimes indexés puis à peu près aucun régime totalement indexé. Donc, ça donne un peu la réponse de... Puis, ce n'est pas tout le temps la faute des syndicats. Parfois, c'est les employeurs qui ne veulent pas reconnaître aux syndicats le droit de négocier pour eux, parce que le syndicat, lui, légalement ne peut représenter que ses membres, ne peut pas représenter les retraités. Donc, il y a des employeurs qui en profitent, si vous voulez, mais le résultat final, au bout du compte, c'est qu'il y a peu de régimes indexés dans le secteur privé.

Le Président (M. Paquet): M. Des Trois Maisons, vous vouliez ajouter quelque chose, ou M. Goulet?

M. Des Trois Maisons (Jean): M. Goulet.

Le Président (M. Paquet): M. Goulet, oui.

M. Goulet (André): Rapidement, parce que Mme Beaudoin a posé une question cette semaine à un autre groupe: Pourquoi que les gens qui étaient très actifs syndicalement quand ils étaient au travail, rendus à la retraite, ils ne sont plus du même sens?

La désindexation partielle s'est faite en 1982. Le taux, le taux d'inflation était de 12,3 %, il en restait 9,3. Alors, il y avait déjà quelque chose. Mais en même temps il y avait une coupure de salaire de 20 % et il y avait aussi une tâche qui était augmentée. Alors, les gens sont allés en priorité à d'autres dossiers. Et c'est allé en 1993 avant que le taux d'inflation baisse à 1,8 % et que là on soit véritablement perdant, en bas de 3 %.

Alors, c'est pour ça que le débat, les retraités se sont engagés beaucoup plus rapidement après, mais, au début, il y avait d'autres priorités qui se vivaient. Il y a eu la loi n° 111 qui est venue se mêler à ça en plus, là. Alors, il y a tous ces débats-là qui font que, s'ils ont dormi un peu, ils dormaient les yeux ouverts.

Le Président (M. Paquet): M. Des Trois Maisons.

M. Des Trois Maisons (Jean): M. le Président, je pense qu'on n'élaborera pas tous les cas qu'on pourrait citer, là. J'en aurais un autre juste que je viens de penser: la ville de Charlesbourg, c'est très près d'ici. Je ne sais pas s'il y a des gens qui représentent la ville de Charlesbourg derrière moi, là. Il y a eu un règlement, ils ont eu des amendements, des avantages donnés au régime: 4,7 millions pour les actifs, quelque 200 000 pour les retraités.

Je veux juste vous dire ? c'est un cheval, tu sais, un éléphant, un lapin, un cheval, un lapin ? c'est que les gens sont en poste pour prendre des décisions, contrairement à ceux qui ne sont pas à la table, qui ne sont pas là, qui n'ont pas de pouvoir. Ça se résume à ça. Ça n'exclut pas qu'il y a des bons syndicats qui font une belle job, je ne conteste pas ça du tout. Mais je peux vous dire que, en général, les retraités n'ont pas beaucoup de choses à dire. Ils ont des choses à dire, mais ils ne sont pas écoutés.

Le Président (M. Paquet): Me Rivest.

M. Rivest (Marcel): Juste pour terminer sur ça. Indépendamment des cas où les syndicats représentent bien ou moins bien ou pas, dans le fond, dans tous les cas où les syndicats représentent bien les retraités, ils n'auront pas de problème à obtenir le consentement parce qu'ils les représentent bien. Donc, dans le fond, la loi s'appliquera pour les cas où les syndicats soit ne les représentent pas ou peuvent pas bien les représenter. Donc, il n'y a pas de préjudice pour les syndicats dans ce cas-là.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Je ne sais pas si j'ai bien compris, mais vous auriez souhaité que le député de Verdun s'en tienne au projet de loi qu'il avait présenté en 2001, là, ce qu'on appelle le projet de loi n° 193. Pourquoi? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

Le Président (M. Paquet): Me Rivest.

M. Rivest (Marcel): C'est parce qu'il y avait un petit mécanisme, un mécanisme, là, au niveau de l'assemblée, pour les retraités. C'est simplement ça.

Mme Beaudoin: C'est simplement avec l'article 146.5, là, concernant l'arbitrage?

M. Rivest (Marcel): C'est ça.

Mme Beaudoin: Ça se limite à ça?

M. Rivest (Marcel): Oui, oui, ça se limite à ça.

Mme Beaudoin: Donc, c'est ça. Je veux laisser mon confrère aussi poser des questions. Non, ça va?

Moi, j'aimerais vous entendre davantage sur l'exemple ontarien, parce que vous en parlez beaucoup dans votre mémoire. D'ailleurs, je tiens à vous féliciter pour votre mémoire, il est très étoffé, la recherche est excellente. Félicitations!

M. Des Trois Maisons (Jean): Le mérite revient beaucoup à celui qui est à côté de moi.

Le Président (M. Paquet): M. Rivest.

M. Rivest (Marcel): Pour l'exemple ontarien, parce que je suis un petit peu arrivé avant, puis il y avait un monsieur qui disait: En Ontario, eux, ils ont le droit de prendre des congés de contribution; j'ai entendu ça. Ce n'est pas exact, ça, avec respect pour ce monsieur-là que je ne connais pas, mais... Bien, «ce n'est pas exact», c'est exact, mais pas dans le sens qu'il le disait.

Autant en Ontario qu'au Québec c'est possible de prendre des congés de contribution en vertu de la loi, mais ce n'est pas la bonne question à cet égard-là. La bonne question... parce que, encore là, la Cour d'appel a étudié l'affaire, elle a dit: C'est une analyse en deux étapes que vous devez faire. Première étape: Est-ce que la législation permet les congés de contribution? La réponse, c'est oui, au Québec. Deuxième étape, la cour dit: Ce n'est pas suffisant que la législation permette, c'est seulement facultatif, il faut que le texte du régime le permette soit expressément soit implicitement. Et là la cour a donné des exemples, si on veut, de ce qui est permis et de ce qui n'est pas permis.

De sorte que, quand j'entendais les gens dire que ce n'est pas clair, pour moi actuellement la situation est très claire sur les congés de contribution. C'est clair quand l'employeur peut en prendre, c'est clair quand l'employeur ne peut pas en prendre. Les exemples sont donnés, si on veut, bon.

Si on revient en Ontario, l'Ontario, c'est la même situation qu'au Québec, parce qu'il y a eu la décision de Air Products, de la Cour suprême ? en fait, ce n'était pas en Ontario, ils étaient dans l'Ouest, mais c'est la même chose ? et la Cour suprême avait fait la même analyse: il faut que la législation le permette. Ça le permet au Québec, ça le permet en Ontario. Et là il faut que le texte permette expressément ou implicitement à ce que l'employeur prenne des congés de contribution. Donc, dans ce sens-là, pour les congés de contribution, l'Ontario, Québec, c'est la même affaire.

Mais, par ailleurs, ce qu'il y a d'intéressant en Ontario, parce que ça m'arrive assez souvent de régler des dossiers où on doit... on partage les surplus. Mettons qu'il y a un surplus de 10 millions dans une entreprise, et là tout le monde pense ? l'employeur en particulier mais les participants aussi évidemment ? qu'on devrait partager les surplus. À ce moment-là, on rencontre l'employeur, on fait des ententes. Et là savez-vous que, pour que l'entente puisse avoir lieu, il faut obtenir 66 % des adhésions des participants actifs et 66 % d'adhésion des participants inactifs? Donc, en Ontario, eux, je ne le sais pas, ils acceptent que les retraités doivent donner leur appui si on veut faire une entente de partage de surplus, alors que, ici, au Québec, en cour de régime en tout cas ? parce que 146,5, ça finit par être un partage de surplus, quand on va au bout de l'affaire ? bien là ça a l'air que les retraités ici vont être traités différemment de l'Ontario. Par ailleurs, ici, si on termine un régime de retraite, à ce moment-là la règle, c'est: pas d'opposition de 30 %, ça inclut autant les retraités que les participants actifs.

Donc, c'est juste dans le cas de 146,5 où je crois qu'on a fait comme un genre d'accroc, un à la pratique... en tout cas un accroc aux droits civils, puis à l'équité, puis à la pratique, puis à ce qui se passe aussi ailleurs.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Oui. Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. Goulet, M. Des Trois Maisons, M. Rivest, merci d'être ici. Votre présentation est vraiment intéressante et passionnante; vraiment, je suis impressionné. Il y a eu beaucoup de présentations, toutes des très bonnes, mais vous en avez une vraiment particulière. Puis je me permets, M. le président, aussi de saluer votre dynamisme; vraiment, vous avez un dynamisme extraordinaire. Je pense que les retraités peuvent être fiers de vous. Vous faites vraiment un travail qui, on sent, est passionné de votre part.

Juste rapidement, parce que la question a été posée déjà par ma collègue de l'opposition au niveau des syndicats, puis on l'a posée, je l'ai posée à quelques reprises à d'autres intervenants ici et d'autres collègues l'ont posée aussi. On a une interrogation majeure, et vous avez très bien répondu, M. Des Trois Maisons, au niveau des syndicats. Mais je me permets de rajouter que j'ai un petit peu de difficulté, un peu mal à l'aise personnellement avec ça, parce que vous dites... pas avec votre réponse, mais avec leur action, avec leur action, parce que vous dites: Bien, oui, c'est sûr, vous l'expliquez bien, ils ont un intérêt d'un côté puis ils n'ont pas d'intérêt pour les retraités puis ils ont intérêt pour ceux qui sont là, qui sont déjà là. Mais vous avez été ? pour la plupart d'entre vous ou en grosse majorité ? là et vous avez participé, vous avez payé des cotisations. Vous êtes, et d'autres personnes qui se sont présentées aussi, vous avez été membres actifs de ces syndicats-là. J'ai un petit peu de difficulté avec ça. Je dis ça, là, sans vouloir ouvrir un débat, et je ne suis pas antisyndical, qu'on se comprenne très, très bien, je veux bien être perçu, mais j'ai beaucoup, beaucoup de difficultés avec ça.

Ma question à M. Rivest, parce que vous avez mentionné tantôt que les deux tiers des régimes de retraite étaient en déficit par les temps qui courent à cause de tous les problèmes que vous avez expliqués, et un tiers était en surplus. Comment expliquer ça? Est-ce que c'est parce que le tiers des régimes de retraite est géré différemment, mieux géré ou différemment, ou ils vont dans autre chose?

Le Président (M. Paquet): Il reste 3 min 30 s environ, puis je crois que Mme la députée de Matane aussi aimerait peut-être poser une question. Alors, M. Rivest, brièvement, s'il vous plaît.

M. Rivest (Marcel): J'ai l'impression qu'il y a plusieurs facteurs. Premièrement, il peut y avoir la politique de placement des différents régimes; ensuite, il peut y avoir d'où on partait; si on partait avec beaucoup, beaucoup de surplus, on a baissé à un petit peu de surplus, alors que, si on était juste sur la ligne, on a baissé en dessous.

Il y a également quelle hypothèse actuarielle l'actuaire prenait: est-ce qu'il était très agressif ou très, très conservateur ou plus ou moins conservateur? Donc, plus il était agressif, bien, plus il s'est fait ramasser, si je peux prendre l'expression, lorsque la tempête est arrivée. Donc, c'est ça qui explique que certains sont en surplus puis d'autres sont en déficit. Il y a peut-être d'autres facteurs aussi que j'oublie pour l'instant.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Matane.

n (13 h 20) n

Mme Charest (Matane): Oui. Alors, M. Rivest, ma question s'adresse à vous. Vous semblez dire que l'article 146.5 ouvrirait la porte également à l'utilisation de certains surplus. Moi, en lisant l'article, je vois qu'il semble autoriser une modification dans le cas où l'employeur veut affecter l'excédent du régime à l'acquittement de ses cotisations. Donc, j'aimerais que vous me précisiez ce point-là.

Et juste une autre petite question, et, dans cette optique-là, ça m'amène à la question fondamentale qui tourne, je pense, ou qui gravite autour de toute cette modification législative qu'on prévoit: Dans la mesure où la Loi sur les régimes complémentaires de retraite assure que... ou prend tous les moyens nécessaires pour assurer que le régime demeure solvable, donc qu'on respecte le paiement des prestations à échéance pour les retraités, on parle, là, d'une évaluation qui est fondée sur la valeur marchande des actifs du régime pour savoir s'il est solvable, en rapport avec les engagements qui sont prévus à la date d'évaluation pour le régime, ce qui veut dire que normalement, bon an, mal an, si l'actuaire est plus ou moins conservateur, on devrait arriver à assurer aux retraités le paiement de leurs prestations à leur retraite, suivant les tests de solvabilité.

Donc, si, ça, c'est le cas, est-ce à dire que la modification qu'on demanderait par le paragraphe 146.5 ? que nos retraités demandent ? serait simplement pour se donner encore plus d'assurance que les obligations que le régime a envers eux au moment de la retraite seront respectées, et, d'autre part, dans le cas où il y a une indexation de prévue, qu'on paiera leur indexation? Parce que, au-delà de ça, je ne vois pas que 146.5, sa modification permette aux retraités de pouvoir participer aux surplus d'un régime.

Le Président (M. Paquet): Merci. Me Rivest, en deux minutes, maximum.

M. Rivest (Marcel): O.K. Tout ça, ça finit par être comme indirectement... On a vu au début que 146.5 va s'appliquer uniquement dans les cas où le surplus appartient aux participants, parce que, si le surplus appartient à l'employeur, il va faire ce qu'il veut. Donc, si le surplus appartient aux participants, l'employeur, s'il veut utiliser le surplus des participants pour prendre des congés de contribution, bien il va falloir qu'il donne quelque chose, parce que sinon les participants, ni actifs ni retraités, vont dire: Très bien, il prend nos surplus pour prendre des congés de contribution, ils vont refuser.

Donc, à ce moment-là, il va y avoir une discussion qui va se faire, et là j'imagine que, si l'employeur veut des congés de contribution, il faudra que dans les surplus on en utilise une partie pour les participants actifs et une partie pour les retraités. Donc, c'est comme ça que finalement les surplus finiraient par être utilisés pour tous les groupes.

Parce que, s'il y a des surplus, il faut faire quelque chose avec: ou bien c'est l'employeur qui les prend, ou bien c'est les participants actifs, ou bien c'est les retraités. Moi, je pense que, si ces surplus-là appartiennent aux participants, pour ceux où ça appartient aux participants, bien là c'est sûr qu'ils peuvent négocier avec l'employeur des congés de contribution, mais il faudra que l'ensemble des participants donnent leur mot, soient d'accord puis qu'il y ait une pratique d'utilisation de surplus qui se développe au fil des années, comme ça se fait d'ailleurs dans certains régimes. Ce qu'on propose se fait volontairement par les syndicats, les retraités et les employeurs de certains régimes, mais ce n'est pas la norme générale, puis, nous, on veut aller vers une norme plus générale.

Le Président (M. Paquet): Merci. Il ne vous reste plus de temps, malheureusement. Alors, Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Vous dites, à la page 10 de votre mémoire: Ce qui importe, ce n'est pas vraiment le type de régime mais le montant de cotisation que les employeurs et les employés contribuent. Que voulez-vous dire exactement?

Le Président (M. Paquet): Me Rivest.

M. Rivest (Marcel): Bien, c'est qu'il y a tout un débat sur les régimes à prestations déterminées, bon. En principe, les régimes à prestations déterminées sont bons, mais ils ont des faiblesses. Je ne veux pas entrer dans le détail des faiblesses, mais ils en ont, des faiblesses, assez importantes. Et, pour moi... par opposition à un régime à cotisation déterminée ou des REER collectifs. Mais, en réalité, ce qui importe pour assurer les meilleures prestations possible aux employés éventuellement, c'est combien d'argent rentre dans le régime.

Autrement dit, moi, j'aime mieux un régime à cotisation déterminée où il y a 18 % qui rentrent à chaque année qu'un régime à prestations déterminées où il y a 6 % qui rentrent. C'est sûr que, au bout de la ligne, on va avoir plus avec le régime à cotisation qu'à prestations. Alors, c'est ça que je dis ici.

Autrement dit, c'est beau, se battre pour un régime à prestations déterminées, mais, une minute, là! L'important, c'est que, si l'employeur ne paie pas, qu'est-ce que ça vaut, un régime à prestations déterminées où l'employeur ne paie pas? Ça ne vaut pas cher. C'est ça qu'on dit.

Le Président (M. Paquet): Alors donc, au nom de la commission, je remercie sincèrement M. Goulet, M. Des Trois Maisons, Me Rivest, pour l'Alliance des associations de retraités.

Alors, nous poursuivrons les auditions publiques et les consultations particulières sur le projet de loi n° 195 mardi le 28 septembre, en soirée, mais nous nous retrouverons. Donc, j'ajourne les travaux de la commission au mardi 28 septembre, à 9 h 30 le matin, pour entreprendre un autre mandat.

(Fin de la séance à 13 h 25)


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